En cours au Siège de l'ONU

Au Conseil de sécurité, des voix se font entendre pour que la Colombie poursuive ses efforts de consolidation de la paix, jugés encore fragiles

9749e séance – après-midi
CS/15853

Au Conseil de sécurité, des voix se font entendre pour que la Colombie poursuive ses efforts de consolidation de la paix, jugés encore fragiles

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

« La Colombie est scrutée, elle a valeur d’exemple », a résumé la France au Conseil de sécurité, après que le Représentant spécial et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies dans ce pays, M. Carlos Ruiz Massieu, a présenté cet après-midi son rapport trimestriel aux membres du Conseil. Également présent à cette réunion, le Ministre des affaires étrangères de la Colombie, M. Luis Gilberto Murillo, a réaffirmé l’engagement de son gouvernement à mettre en œuvre l’accord de paix de 2016, tout en reconnaissant un certain nombre d’obstacles, notamment la faiblesse des structures institutionnelles et la persistance de la violence dans les régions historiquement touchées par le conflit.

M. Massieu a confirmé la vulnérabilité de ces régions visées par des groupes armés qui cherchent à s’emparer de territoires et de routes stratégiques liés aux économies illicites, en s’en prenant aux leaders communautaires, aux signataires de l’accord de paix et aux anciens combattants.  Il a également évoqué, de la part de ces mêmes groupes armés, des pressions exercées à l’égard des femmes et des jeunes filles pour réglementer leur apparence et leur comportement. 

Une situation « alarmante » pour l’activiste féministe Beatriz Quintero, qui est intervenue au nom de la Red Nacional de Mujeres.  Selon elle, les défenseurs des droits humains ont ainsi subi 124 attaques durant le premier semestre de l’année 2024 dans le département du Cauca, soit une hausse de 34% par rapport à l’année précédente. Dans le Chocó, département majoritairement afro-colombien, la guerre pour le contrôle territorial entre groupes armés s’est intensifiée dans presque toutes les municipalités, a-t-elle observé – des actes qui « terrorisent les populations et sapent la stabilité du pays », selon les États-Unis.

Évoquant le difficile processus de paix, le Représentant spécial a regretté l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN).  La fin du cessez-le-feu bilatéral en août a entraîné une hausse notable des morts et des blessés des deux côtés, a-t-il noté, avant d’exprimer l’espoir qu’une reprise des pourparlers permette de rétablir la confiance entre les parties et de relancer un processus plein de promesses.  La prorogation de six mois du cessez-le-feu avec l’État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP) a en revanche été accueilli comme une bonne nouvelle.  La Russie s’est quant à elle réjouie des avancées avec le groupe Segunda Marquetalia.

Pour Mme Quintero, la politique actuelle de « paix totale », qui vise à la fois à appliquer l’accord de paix de 2016 et à dialoguer avec les groupes armés illégaux, demeure, de fait, insuffisante.  Le Ministre des affaires étrangères de la Colombie, s’il a reconnu certaines faiblesses, a mis en avant les réalisations de son gouvernement.  Notamment le « Plan de choc », centré sur la réforme agraire et effectué sous la direction du Ministre de l’intérieur colombien Juan Fernando Cristo, d’ailleurs présent à la réunion.  Salué entre autres par le groupe des A3+, représenté par le Guyana, ce plan a permis la « formalisation » de plus de 3 millions d’hectares de terres rurales, bénéficiant à des milliers de « familles paysannes et ethniques ».  Dans un pays à 94% rural, la justice agraire est « indispensable », a estimé la France, tandis que l’Équateur s’est réjoui d’une plus grande présence de l’État dans les zones vulnérables où les populations expriment un besoin urgent de projets de développement et de services publics.  Le Représentant spécial a toutefois tempéré les résultats de cette réforme, encore trop « modestes par rapport aux attentes », s’inquiétant par ailleurs des menaces reçues par les organisations paysannes qui s’y sont engagées.  La militante féministe Mme Quintero a, pour sa part, insisté pour que les terres soient distribuées équitablement entre hommes et femmes. 

Évoquant le Plan national d’action « Femmes, paix et sécurité », elle a en outre rappelé qu’en 2023, plus de 1 500 femmes ont participé à des forums visant à son élaboration, mais qu’il n’a toujours pas été adopté.  Or, selon elle, ce document est essentiel pour garantir la participation des femmes à la construction de la paix et instaurer une perspective de « sécurité humaine et féministe ». 

Face à cette situation, Mme Quintero a formulé plusieurs recommandations au Gouvernement colombien, insistant sur la nécessité d’inclure systématiquement une perspective de genre dans toutes les négociations de paix.  Elle a exhorté les autorités à exclure l’utilisation du corps des femmes et des filles dans le cadre des conflits, à garantir la participation pleine et égale des femmes et des personnes LGBTIQ+ aux processus de paix, et à tracer des « lignes rouges » non négociables dans les pourparlers, telles que l’interdiction du recrutement de mineurs et la violence contre les femmes.  Le Royaume-Uni et la Suisse ont exprimé leur soutien au lancement d’un tel plan.

Autre point à améliorer, selon plusieurs intervenants: la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’accord de paix de 2016, qui vise à corriger les impacts disproportionnés du conflit sur les communautés afro-colombiennes et autochtones. Même s’il s’est félicité de la promulgation récente d’un décret destiné à renforcer le rôle de la Vice-Présidente de Colombie, Mme Francia Márquez, dans la supervision de ces initiatives, le Représentant spécial a estimé qu’il restait « beaucoup à faire » pour que les populations concernées puissent véritablement bénéficier des promesses de l’accord.  La Colombie a reconnu son retard en la matière et promis de prioriser la création de pactes territoriaux avec les communautés les plus affectées.  Les États-Unis ont quant à eux annoncé une aide d’un montant de 50 millions de dollars pour soutenir des opérations de déminage et de réparation pour les communautés autochtones.

La réintégration des anciens combattants a également été évoquée par plusieurs membres du Conseil de sécurité, à commencer par la Fédération de Russie, qui l’a jugée insuffisante, soulignant l’importance de leur participation accrue à la mise en œuvre des mesures gouvernementales.  À ce jour, a admis la Colombie, seuls 723 anciens combattants se sont inscrits au Programme global de réintégration.  Les États-Unis ont donc appelé à des mesures concrètes pour protéger ces populations et garantir leur réinsertion durable.

Concernant la justice transitionnelle, le Représentant spécial a salué le travail « pionnier » de la Juridiction spéciale pour la paix. Tandis que la Colombie « attend avec impatience les premières sentences contre les responsables de crimes graves », il est important de garantir l’indépendance et l’autonomie de la Juridiction face aux critiques, a-t-il insisté.  La France a souligné que, sur ce point, la Colombie avait fait des progrès notables, notamment dans la lutte contre l’impunité pour les violences sexuelles et fondées sur le genre.

Enfin, concernant les défis budgétaires auxquels la Colombie est confrontée, le Représentant spécial a exhorté Bogota à ne pas « sacrifier la paix » sur l’autel des contraintes fiscales, appelant la communauté internationale à continuer d’apporter son soutien financier pour combler les lacunes. Alors que le mandat de la Mission de vérification des Nations Unies expire le 31 octobre 2024, la Suisse, qui présidait la séance, a préconisé de préserver les ressources actuelles de la Mission et de mettre davantage l’accent sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, comptant sur l’unité et le soutien continu du Conseil à cette fin.

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53)

Rapport du Secrétaire général sur la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie (S/2024/694)

Exposés

M. CARLOS RUIZ MASSIEU, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a fait état de de progrès importants accomplis depuis la dernière séance du Conseil de sécurité à laquelle il a participé, tout en soulignant que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour atteindre les objectifs fixés par l’accord de paix de 2016. Il a d’abord fait savoir que le Gouvernement colombien avait introduit un plan d’intervention rapide, connu sous le nom de « Plan de choc » (« Plan de Choque »), centré sur la réforme rurale et le renforcement des garanties sécuritaires dans les régions touchées par le conflit.  Ce plan a été élaboré avec la contribution des autorités et des communautés locales dans le cadre de la Commission de suivi, de promotion et de vérification de l’Accord final.  Le Représentant spécial a précisé qu’il avait accompagné le Ministre de l’intérieur lors de visites dans des régions affectées, où les populations locales expriment un besoin urgent de projets de développement et de services publics.

M. Massieu a observé que la réforme rurale, une composante clef de l’Accord, progresse lentement.  Bien que des terres soient redistribuées aux paysans qui n’en ont pas et aux personnes déplacées, les résultats restent modestes par rapport aux attentes.  Il a par ailleurs exprimé son inquiétude quant aux menaces reçues par les organisations paysannes engagées dans cette réforme.  En outre, il a souligné la nécessité de renforcer la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’Accord, qui vise à corriger les impacts disproportionnés du conflit sur les communautés afro-colombiennes et autochtones.  À ce sujet, M. Massieu a salué la promulgation récente d’un décret destiné à renforcer le rôle de la Vice-Présidente, Mme Francia Márquez, dans la supervision de ces initiatives.  Cependant, il a reconnu que les progrès dans ce domaine ont jusqu’à présent été limités et qu’il reste beaucoup à faire pour que les populations concernées puissent véritablement bénéficier des promesses de l’Accord.

Concernant les garanties sécuritaires, le haut fonctionnaire a signalé que cinq secteurs territoriaux de formation et de réintégration des anciens combattants ont dû être relocalisés en raison de l’insécurité croissante.  Ces régions restent la cible de violences et de menaces de la part de groupes armés cherchant à prendre le contrôle et de routes stratégiques pour les économies illicites.  M. Massieu a particulièrement déploré le fait que les leaders sociaux, les signataires de l’Accord et les anciens combattants continuent d’être des cibles privilégiées de cette violence.  Il a également évoqué des phénomènes inquiétants de contrôle social dans certaines régions, notamment à l’égard des femmes et des jeunes filles, à qui des groupes armés imposent des règles sur leur apparence et leur comportement. Le Représentant spécial a appelé à une présence accrue de l’État dans ces zones vulnérables.

Concernant la Juridiction spéciale pour la paix, il a affirmé que cette institution poursuit son travail pionnier, qui reste central dans la transition de la Colombie vers une paix durable.  Le pays, a-t-il noté, attend avec impatience que soient prononcées les premières peines contre les responsables de crimes graves, tout en insistant sur l’importance de garantir l’indépendance et l’autonomie de la Juridiction face aux critiques.  Le Représentant spécial s’est également penché sur les défis budgétaires auxquels la Colombie est confrontée.  « La paix ne doit pas être sacrifiée » sur l’autel du budget, a-t-il mis en garde, exhortant la communauté internationale à continuer d’apporter son soutien financier pour combler les lacunes.

Enfin, M. Massieu a abordé les différents dialogues de paix en cours avec divers groupes armés.  Il s’est dit préoccupé par l’impasse dans les négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), marquée par la fin du cessez-le-feu bilatéral en août, ce qui a entraîné une recrudescence des violences.  Cependant, il a exprimé l’espoir qu’une reprise des pourparlers permette de rétablir la confiance entre les parties et de relancer un processus qui avait initialement montré des progrès prometteurs.  Il a toutefois salué la prolongation pour six mois du cessez-le-feu avec l’État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP), espérant que cela soulagerait les communautés affectées par la violence.

Mme BEATRIZ HELENA QUINTERO GARCIA, Cofondatrice de l’organisation Red Nacional de Mujeres en Colombie, a rappelé que la politique de paix totale du gouvernement actuel, « une initiative précieuse et ambitieuse pour mettre fin à la guerre en Colombie », n’a pas été complétée par des garanties suffisantes pour les communautés vivant à proximité de la zone d’influence des acteurs armés illégaux.  Les mesures de l’accord de paix relatives à l’égalité entre hommes et femmes n’ont guère progressé, a-t-elle par ailleurs regretté, puisque moins de 13% d’entre elles ont été pleinement mises en œuvre et que plus de 50% n’ont été que peu développées ou n’ont pas démarré.  Les défenseurs des droits humains sont confrontés à une violence généralisée, avec 124 attaques rien qu’au cours du premier semestre de l’année dans la plupart des régions de Colombie.  Dans le Cauca, les attaques ont augmenté de 34% par rapport aux années précédentes et dans le Chocó, l’un des départements où la population afro-colombienne est la plus nombreuse, la guerre pour le contrôle territorial entre les groupes armés s’est intensifiée dans presque toutes les municipalités. Les organisations colombiennes de recherche sur les conflits s’accordent à dire que les cessez-le-feu instaurés dans le cadre de la politique de paix totale ont permis aux groupes criminels d’intensifier leurs conflits internes et de renforcer leurs économies criminelles. En 2023, plus de 1 500 femmes ont participé à des forums visant à formuler le premier plan d’action national pour la résolution 1325, promis en 2022, mais pas encore promulgué, a encore précisé l’intervenante.  Ce plan est fondamental pour concrétiser la politique de paix totale, a insisté Mme Quintero Garcia, ajoutant qu’il doit garantir la participation des femmes et des filles dans toute leur diversité. 

Pour toutes ces raisons, elle a recommandé au Gouvernement colombien d’inclure une perspective de genre dans toutes les négociations de paix, en veillant à ce que les corps des femmes et des filles soient exclus du conflit et en incluant une perspective de genre dans tous les accords de paix.  Selon elle également, les autorités colombiennes doivent reconnaître le mouvement des femmes et l’inclure dans toutes les négociations de paix, en garantissant la participation totale, égale et sûre des femmes et des personnes LGBTIQ+.  L’intervenante a aussi exhorté le Gouvernement à réactiver les cessez-le-feu bilatéraux dans le strict respect du droit international humanitaire et des droits humains, en mettant l’accent sur la protection des femmes, des filles et des personnes LGBTIQ+, et de les accompagner d’une politique de sécurité citoyenne.  Mme Quintero Garcia a également insisté sur l’importance de renforcer la présence de l’État localement pour lutter contre l’extorsion, l’enlèvement, la séquestration et la violence à l’égard des femmes.

S’adressant aux membres du Conseil de sécurité, elle leur a recommandé de mettre davantage l’accent, dans les rapports périodiques, sur la violence à l’égard des femmes dans le cadre du conflit armé, comme le non-respect des cessez-le-feu et les lacunes dans l’accès à leurs droits.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: la Russie et l’Ukraine s’opposent; la France et l’Inde affichent leur volonté de « comportement responsable »

Soixante-dix-neuvième session
7e séance plénière – après-midi
AG/DSI/3741

Première Commission: la Russie et l’Ukraine s’opposent; la France et l’Inde affichent leur volonté de « comportement responsable »

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Au sixième jour de son débat général, la Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entendu notamment, cet après-midi, les points de vue très divergents de la Fédération de Russie et de l’Ukraine en matière de sécurité internationale sur le fond du conflit qui les oppose depuis plus de deux ans. La France, l’autre État doté officiellement d’armes nucléaires à avoir pris aujourd’hui la parole, a souligné l’importance de sortir de la crise de la non-prolifération nucléaire actuelle par la seule voie diplomatique, et fait des propositions dans le domaine spatial. L’Inde, « État doté responsable », et l’Arménie ont justifié leur politique de défense dans un contexte régional marqué, entre autres, par une circulation excessive et l’emploi illicite d’armes classiques. 

La Russie a relevé que, depuis un an, la situation en matière de sécurité internationale et de stabilité stratégique, loin de s’arranger, continue de se détériorer à un rythme « frustrant ».  Sa représentante a expliqué cette tendance par le manque de volonté politique et diplomatique des Occidentaux qui refusent de régler les conflits interétatiques sur la base du respect mutuel des intérêts des parties et du principe de sécurité indivisible.  Selon la Russie, dans un tel contexte causé par les États-Unis et leurs alliés, incapables de renoncer à leurs ambitions hégémoniques, toute perspective de règlement global et durable du conflit « autour de l’Ukraine » est bloquée. 

La déléguée a aussi vu dans le budget militaire total des pays de l’OTAN, qui représente cette année encore la moitié des dépenses mondiales en la matière, la preuve que l’Occident cherche à s’assurer une supériorité militaire incontestée.  À ce sujet, elle a également pointé du doigt le déploiement de systèmes américains de missiles en Europe et dans la région Asie/Pacifique, « ce qui pourrait nécessiter des contre-mesures de la part de la Russie ». 

La représentante russe a affirmé que toutes les initiatives de désarmement se heurtent à ces réalités politico-militaires et stratégiques dictées par le camp occidental.  Elle a ainsi estimé que les efforts menés pour accélérer les processus de désarmement nucléaire « sans tenir compte du principe fondamental de la sécurité non diminuée pour tous » sont voués à l’échec. 

Face aux perturbations occidentales qui affectent le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), la Russie considère qu’assurer la pérennité du Traité doit être une priorité pour maintenir la stabilité mondiale. 

Concernant les autres armes de destruction massive, la déléguée a jugé inacceptable la politisation proaméricaine de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), et elle a appelé le Secrétariat de la Convention sur les armes biologiques à répondre aux questions qu’a posées la Russie sur les activités préoccupantes que mènent conjointement les États-Unis et l’Ukraine sur le territoire ukrainien dans le domaine biologique. 

Enfin, après avoir demandé aux délégations de la Commission de soutenir ses projets de résolution sur la prévention de la militarisation de l’espace, la Russie a exigé des États-Unis que soient délivrés « sans délais » les visas demandés pour chacun des membres de sa délégation.  Faute de quoi, a dit la représentante, la Première Commission ne pourra pas fonctionner normalement. 

L’Ukraine, qui s’est exprimée juste après la Russie, a donné sa version des faits, sans manquer d’abord de condamner la rhétorique nucléaire « irresponsable » de la partie russe au cours de sa guerre d’agression contre elle.  L’annonce par la Russie d’une révision de sa doctrine nucléaire, de retraits éventuels des traités de contrôle des armements et de non-prolifération les plus importants, ainsi que son occupation de la centrale nucléaire de Zaporizhzhia, constituent de graves menaces pour la sûreté et la sécurité nucléaires de l’Ukraine, a poursuivi la représentante.  Elle a affirmé que, selon les services de renseignement ukrainiens, la Russie prévoit des attaques contre ses centrales nucléaires et leurs infrastructures, dans le but de les déconnecter du réseau électrique. 

Aussi l’Ukraine appelle-t-elle les États Membres à faire pression sur la Russie pour qu’elle tienne compte des résolutions de l’ONU mais aussi du Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Elle a de plus demandé aux États Membres de renforcer la pression sur Moscou, Pyongyang et Téhéran, afin qu’il soit mis fin au flux illégal d’armes de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) vers la Russie et à la coopération militaire irano-russe qui affectent son pays. 

Pour ce qui est des autres armes de destruction massive que les armes nucléaires, l’Ukraine a réagi aux propos de la Russie en se contentant de réitérer ses propres accusations, à savoir que Moscou a déjà utilisé des armes chimiques contre des opposants politiques, dont Alexeï Navalny, et fourni une assistance militaire à la Syrie.  « Nous appelons les États Membres à condamner le non-respect de la Convention sur les armes chimiques par la Russie », a poursuivi la représentante ukrainienne. 

La représentante a aussi tenu à souligner, qu’à ce jour, près d’un tiers du territoire ukrainien est pollué par des mines et des restes explosifs de guerre. Le déminage humanitaire est donc l’une priorités les plus urgentes pour mon pays, a-t-elle insisté, se disant convaincue de l’utilité de la conférence sur la lutte antimines en Ukraine qui sera organisée, par la Suisse et l’Ukraine, à Lausanne les 17 et 18 octobre 2024. 

Après ces allocutions tendues, la France, qui a considéré que des perspectives de progrès se dégagent en vue de la Conférence d’examen de 2026 du TNP, notamment en matière de transparence, a assuré qu’elle reste pleinement mobilisée pour trouver une solution diplomatique aux crises de prolifération nucléaire.  Ainsi l’Iran, dont le programme nucléaire est désormais dépourvu de justification civile crédible, doit coopérer pleinement et de bonne foi avec l’AIEA, tandis que la RPDC doit abandonner immédiatement tous ses programmes proliférants de manière complète, vérifiable et irréversible, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et à ses engagements internationaux. 

Dans le domaine spatial, la déléguée française a plaidé comme elle le fait depuis ces dernières années pour une prévention d’une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects, y compris par l’élaboration de normes, règles et principes de comportement responsable.  Cette approche par les comportements devant être incluse dans le mandat d’un éventuel groupe de travail fusionné, la France présentera en ce sens un projet de résolution. 

Sur l’espace, l’Inde, qui a rappelé son soutien à la négociation d’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, s’est, elle aussi, dite favorable à l’approche « responsable » préconisée par la France. 

L’inde, confrontée à la menace terroriste, a fait part de ses préoccupations quant à l’intensification, y compris sur le plan régional, du trafic illicite d’armes légères et de petit calibre (ALPC).  À ce titre, le représentant indien a salué le document final adopté en juin dernier par consensus à la Quatrième Conférence d'examen sur les armes légères. 

L’Arménie, pour sa part, a accusé l’Azerbaïdjan d’avoir foulé au pied le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe lors de ses coups de force au Haut-Karabakh, que le représentant a qualifiés d’attaques armées contre la souveraineté et l’intégrité territoriales de l’Arménie.  À cette aune, il a préconisé la mise en place de mécanismes robustes de maîtrise des armements, « sans lesquels les agresseurs s’enhardissent ». 

La Norvège a souligné l’importance d’améliorer les dispositifs de vérification du désarmement nucléaire, se félicitant de l’adoption consensuelle de rapports au sein de deux Groupes d’experts gouvernementaux dédiés à la question, en 2019 et 2023.  Ce pays et le Brésil présenteront un nouveau projet de résolution qui s’inscrit dans la continuité de ce travail, le texte proposant la mise en place d’un groupe d’experts chargés de réfléchir à des mesures innovantes de vérification. 

Enfin, le Népal a appelé les États Membres à soutenir les Centres régionaux des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement, qui, à l’instar de celui situé à Katmandou, apportent aux pays qui en font la demande une contribution technique précieuse dans la mise en œuvre des mesures de désarmement et sont un outil efficace de sensibilisation aux enjeux de la coopération pacifique.  La délégation népalaise présentera cette année encore un projet de résolution sur ces centres. 

En fin de séance, plusieurs pays ont exercé leur droit de réponse.  Les États-Unis ont réagi face à plusieurs allégations russes à leur encontre.  Israël a répondu aux allégations de certaines délégations sur la situation à Gaza et les accusations d’attaques délibérées contre la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  La RPDC a contesté les critiques de son programme nucléaire.  La Syrie a rejeté les accusations de la France concernant son emploi présumé d’armes chimiques.  L’Iran a contesté l’emploi du qualificatif de « terroriste » par Israël et plusieurs pays occidentaux pour désigner certains groupes actifs au Moyen-Orient. La Mauritanie, au nom du Groupe arabe, ainsi que la Jordanie, a réagi vivement au droit de réponse israélien. 

La Première Commission se réunira demain, mercredi 16 octobre, à 10 heures, afin d’achever son débat général. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: adhésion sans réserve des délégations à la politique de tolérance zéro et à une culture de responsabilité à l’ONU

Soixante-dix-neuvième session
13e & 14e séances plénières – matin & après-midi
AG/J/3722

Sixième Commission: adhésion sans réserve des délégations à la politique de tolérance zéro et à une culture de responsabilité à l’ONU

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a achevé aujourd’hui son débat sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies en entendant les délégations prôner une politique de « tolérance zéro » pour les infractions commises par ces derniers.  Lors du débat sur l’administration de la justice à l’ONU qui a suivi, les délégations se sont exprimées en faveur d’une « solide » culture de responsabilité au sein de l’Organisation.  La Commission a également entamé, cet après-midi, sa discussion sur la portée et l’application du principe de compétence universelle.

Lors du premier débat de la journée, une vingtaine de délégations se sont engagées en faveur de la politique de « tolérance zéro », en particulier pour les actes d’exploitation et d’atteinte sexuelle.  L’adhésion est générale à cette politique, a déclaré le Cameroun.  Ce pays a rappelé que l’ONU doit inspirer de « l’exemplarité aux peuples qu’elle sert », tandis que la République islamique d’Iran, l’Indonésie et l’Éthiopie, entre autres, ont estimé que cette politique permet de préserver « l’intégrité » de l’ONU.

« Le personnel onusien doit respecter les règles du pays hôte et comprendre que les immunités et privilèges ne visent pas à les soustraire à toute poursuite », a résumé le Cameroun.  Le Burkina Faso n’a pas dit autre chose en rappelant que les privilèges ne sont accordés que dans le but de faciliter le travail de l’Organisation.  « De ce fait, ils ne doivent pas être considérés comme une prime à l’impunité. »

La Chine a rappelé que le Secrétaire général a le devoir de lever ces immunités si elles entravent la justice.  Les auteurs d’infractions doivent faire l’objet de poursuites dans les plus brefs délais, a indiqué l’Éthiopie, ajoutant que les immunités ne peuvent servir de prétexte à la commission d’infractions.  « L’impunité ne fait qu’exacerber les souffrances des victimes », a abondé le Sénégal. 

Plusieurs pistes ont été explorées pour lutter contre ce phénomène, en particulier la nécessité de mesures de prévention.  Les efforts de prévention doivent être consolidés, a dit le Cameroun, en insistant sur l’importance d’une bonne coopération afin de vérifier les antécédents judiciaires des candidats.  « Les formations existantes sur les codes de conduite des Nations Unies doivent être adaptées et mises régulièrement à jour », a appuyé le Burkina Faso.

Ce pays a estimé que les États doivent faire en sorte que les personnels qu’ils déploient prennent connaissance de « l’obligation primordiale de respecter les lois et règlements de l’État hôte ainsi que les us et coutumes qui y prévalent ».  Le Royaume-Uni a demandé que la lutte contre l’impunité informe tous les programmes et organisations du système onusien.  « Les politiques doivent être intégrées dans la culture de l’administration pour prévenir les abus et harcèlement et assurer l’établissement de responsabilités. »

Une plus grande protection des victimes et des témoins a été souhaitée par les délégations.  Sur le plan juridictionnel, nombre d’entre elles ont rappelé qu’il revient à l’État de nationalité d’exercer sa compétence en ce qui concerne les infractions commises par ses ressortissants.  Les tribunaux les plus à mêmes de traiter ces affaires sont ceux de l’État de nationalité, a déclaré l’Iran, appuyé par le Maroc.  « La Colombie sait le rôle clef de l’État de nationalité dans la lutte contre l’impunité », a déclaré la déléguée de ce pays, tandis que le Sénégal a rappelé que les États de nationalité sont responsables de poursuites envers « les agents incriminés ».

La Chine a indiqué que l’État de nationalité peut prendre toutes les mesures judiciaires pour remédier aux infractions commises, y compris en coopérant avec les autres pays.  L’extradition peut être envisagée au cas par cas, a déclaré la Chine. « Le soutien et l’assistance doivent être mis en œuvre si des lacunes existent dans les systèmes juridiques nationaux et pour les États qui n’appliquent pas la compétence extraterritoriale », a déclaré l’Inde.  Le Maroc a souligné l’importance d’une justice équitable, y compris lorsque les allégations se sont avérées sans fondement.

Ce débat a été marqué par la déclaration d’Haïti, pays qui a connu une dizaine de missions onusiennes en 30 ans.  Son délégué a regretté le « manque de transparence totale » sur 19 cas d’allégations contre des Casques bleus déployés en Haïti.  Les victimes n’ont reçu aucune réparation adéquate, a-t-il dit, en regrettant également l’abandon de poursuites pénales dans certains cas.  Sur un sujet aussi préoccupant, il est crucial de combler les « lacunes » dans la réponse onusienne, a tranché le délégué.

Le délégué d’Haïti s’est également dit en faveur d’une convention internationale afin de combler les lacunes juridictionnelles. La Fédération de Russie a, au contraire, jugé qu’il n’est pas nécessaire d’élaborer un instrument distinct.  « Il convient plutôt de renforcer la coopération entre l’ONU et les États concernés, ainsi que fournir de l’aide au renforcement des capacités aux États qui en font la demande. »

Plusieurs droits de réponse ont été exercés après la déclaration d’Israël d’hier ciblant l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  Le Koweït a, au nom d’une liste interrégionale de pays, dénoncé les accusations proférées contre l’UNRWA et exhorté Israël à mettre fin à ses attaques « infondées », lesquelles violent le droit international.  De l’UNRWA à l’Unesco, toutes les institutions de l’ONU ont été attaquées par Israël, y compris le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, a déploré l’État de Palestine.  L’Iran a rappelé que 200 employés de l’UNRWA ont été tués depuis le début de la guerre à Gaza.

Les contraintes budgétaires que connaît actuellement l’ONU ont été soulevées lors du débat sur l’administration de la justice en son sein.  La Suisse s’est dite préoccupée par les problèmes de recrutement de personnel auxquels les greffes sont confrontés depuis la mi-juillet 2023.  « Nous tenons à souligner que le bon fonctionnement de l’administration de la justice dépend de la mise à disposition de ressources adéquates. »

Un point de vue partagé par l’Ouganda, pour le Groupe des États d’Afrique, et le Mozambique qui ont dénoncé la situation financière difficile.  Les composantes de ce système sont néanmoins fonctionnelles, a déclaré le Mozambique. L’Ouganda a ainsi appuyé les mesures prises par le Secrétaire général pour renforcer le travail du Bureau de l’aide juridique au personnel, en particulier le personnel travaillant sur le terrain.

L’Union européenne a également salué les progrès engrangés nonobstant lesdites contraintes.  « Il est crucial d’accélérer cette tendance positive afin de réduire davantage encore le fossé entre nos aspirations et la réalité. »  Elle a demandé que l’anonymat des victimes et des témoins puisse être accordé lorsque les circonstances l’exigent, afin de lutter contre les représailles.  « Le personnel doit pouvoir prendre la parole sans peur. »  Le système de lanceurs d’alerte est capital pour promouvoir la transparence, l’établissement des responsabilités et l’intégrité au sein de l’ONU, a tranché cette délégation.

Si les États-Unis ont reconnu le défi de la crise de liquidité et du gel des embauches, ils ont salué la réussite en matière de médiation des différends.  « Nous demandons au Secrétaire général de continuer à promouvoir une solide culture de la responsabilité au sein de l’Organisation et de veiller à ce que toutes les catégories de personnel aient accès à des voies de recours efficaces », a encore déclaré la Suisse.

En début d’après-midi, la Commission a débattu de l’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale à l’Initiative régionale contre la corruption, une demande présentée par la Roumanie, avant de renvoyer la discussion à une séance ultérieure.  Elle a également débattu de l’octroi d’un tel statut à l’Organisation internationale du café, boisson dont les bienfaits stimulants ont été soulignés par plusieurs délégations, à commencer par le Brésil.  Une décision sera également prise ultérieurement.

Les divergences ont en revanche été de mises lors du débat sur la portée et l’application du principe de compétence universelle.  D’un côté, des délégations, telles que la Suède, au nom des pays nordiques, ou encore la Lituanie, au nom des pays baltes, ont vu dans ce principe une contribution essentielle à la lutte contre l’impunité et à la justice. Ce principe trouve son fondement dans les normes impératives du droit international, a déclaré la Lituanie.

La Suède a indiqué qu’il s’agit d’un principe « bien établi » et rappelé que des auteurs d’atrocités commises en Iraq et en Syrie ont pu être poursuivis devant des tribunaux européens sur la base de ce principe.  La compétence universelle est un outil supplémentaire lorsque l’État ne peut ou ne veut pas exercer sa compétence, a déclaré la Nouvelle-Zélande, au nom également du Canada et de l’Australie. 

Alors que la fréquence des crimes internationaux les plus graves continue d’augmenter, de nombreux États ont introduit et appliqué la notion de compétence universelle dans leur droit interne, a salué le délégué de l’Union européenne.  Il est essentiel, a-t-il estimé, de poursuivre la réflexion sur les conditions, critères et règles nécessaires pour garantir la sécurité juridique dans l’exercice de cette compétence et de favoriser la coopération internationale en tant qu’élément clef pour la mise en œuvre efficace du principe de compétence universelle, par exemple en matière d’accès aux preuves. 

De l’autre côté, l’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, s’est dit préoccupé par l’utilisation « abusive » ou « erronée » de ce principe et l’incertitude qui demeure sur sa portée.  Nos inquiétudes n’ont toujours pas été dissipées, a déclaré le délégué ougandais, en rappelant que ce principe doit respecter la souveraineté des États. L’Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, n’a pas dit autre chose en indiquant que l’application ce principe reste « incertaine. »

« L’exercice de la compétence pénale sur des hauts représentants qui bénéficient de l’immunité violent l’un des principes fondamentaux du droit international », a tranché l’Iran. Tout en saluant l’utilité des travaux sur ce sujet, il a appelé à la prudence face à un élargissement « injustifié » des crimes tombant sous la compétence universelle.  Le délégué iranien a appelé à élaborer un mécanisme afin d’éviter toute « dérive » à l’avenir. 

Reconnaissant que les discussions « sont au point mort », l’Autriche, au nom également de la Slovaquie et de la Tchéquie, a estimé que la seule solution pour sortir de cette impasse est de renvoyer cette question à la Commission du droit international.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 16 octobre, à partir de 15 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC et la Deuxième Commission joignent leurs forces pour pousser à financer la protection sociale en cette période d’incertitudes

Soixante-dix-neuvième session,
Réunion conjointe avec l’ECOSOC, 12e & 3e et 13e séances plénières, matin & après-midi
AG/EF/3605-ECOSOC/7187

L’ECOSOC et la Deuxième Commission joignent leurs forces pour pousser à financer la protection sociale en cette période d’incertitudes

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Investir 1 dollar dans la résilience peut en rapporter 15.  C’est le rendement sans égal qui a été vanté, ce matin, par le Président de la Deuxième Commission (questions économiques et financières) lors du débat conjoint avec le Conseil économique et social (ECOSOC) sur les moyens de « favoriser des sociétés durables et résilientes en période d’incertitudes ».  « Pour chaque dollar investi dans la réduction des risques, jusqu’à 15 dollars peuvent être économisés en coûts de relèvement après une catastrophe », a ainsi promis Muhammad Abdul Muhith.

Les vertus de l’investissement dans la protection sociale universelle -qui s’apparente en beaucoup de points au concept, beaucoup entendu aujourd’hui, de « résilience sociale »- ont été démontrées par Mme Isabel Ortiz, de l’organisation non gouvernementale (ONG) Global Justice Network. « Elle permet d’atténuer les chocs. Mais ce que l’on sait moins, c’est que cette protection sociale contribue à la croissance, en augmentant la productivité des travailleurs et en dopant la consommation.  C’est, enfin, une source de stabilité politique », a-t-elle expliqué dans sa déclaration liminaire. 

Pour peu qu’ils soient correctement conçus, mis en place et financés, les systèmes de protection sociale peuvent contribuer à l’égalité entre femmes et hommes, à l’élimination de la pauvreté, à la résilience aux crises et aux processus plus larges de transformation économique et sociale, a confirmé le Président de l’ECOSOC, M. Bob Rae. 

Même en période d’austérité budgétaire -et peu importe la catégorie d’un pays donné- il est possible d’établir un système de protection sociale universelle, a promis Mme Ortiz aux délégations: il suffit de « combiner un plancher d’assistance sociale et une affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale ».  Un système redistributif qui est crucial pour les femmes, dont la carrière peut être perturbée par la naissance d’un enfant, a ajouté l’experte. 

Des pistes pour trouver l’argent

Des pistes appuyées par des recherches de l’ONU ont été données pour trouver l’argent dans les budgets nationaux, en premier lieu la hausse des recettes fiscales: taxer les bénéfices des entreprises; taxer la richesse, « comme cela a été annoncé en Espagne et en Irlande »; taxer les bénéfices sur l’énergie, « comme en Australie ».  Autre possibilité: taxer les services numériques, « comme en France, au Kenya ou en Belgique »; taxer les transactions financières, « comme en Argentine et au Brésil il y a un temps ».  Les secteurs minier et gazier peuvent également être mis à contribution. 

« On peut aussi jouer sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), accroître la contribution des employeurs à la protection sociale, en sortant les travailleurs du secteur informel pour financer l’État. »  Mme Ortiz a encore cité d’autres options au niveau de l’État: lutter contre les flux financiers illicites, restructurer la dette, redéployer les dépenses publiques en réduisant les dépenses de la défense au profit de la santé. 

Deux tables rondes ont essayé de dénouer les fils de ce « monde incertain », encore miné par les inégalités.  La première, la plus longue et la plus animée, a examiné le rôle de la protection sociale pour aider les femmes à résister aux chocs.  Près de 2 milliards de femmes et de filles n’ont toujours pas de protection sociale, selon les statistiques d’ONU-Femmes, et les écarts de genre en matière de protection sociale se sont creusés dans les pays les moins développés. 

Une travailleuse à domicile de Miami témoigne 

Les pays développés ne sont pas non plus des pays de cocagne en matière de protection sociale, notamment pour les travailleuses et travailleurs non qualifiés. En l’occurrence, l’intervention de ce matin la plus remarquée –et applaudie– est à mettre au crédit d’une travailleuse domestique de Miami.  Mme June Barrett, Vice-Présidente de la Fédération internationale des travailleurs domestiques, a fait part de son manque de perspective économique devant les hauts fonctionnaires, alors qu’elle travaille depuis l’âge de 14 ans. Aujourd’hui, à plus de 60 ans, Mme Barrett n’imagine pas pouvoir s’arrêter de travailler, faute de droits à la retraite.

Mme Barrett a aussi témoigné de l’absence de congés maladie qui l’a mise dans la gêne lors de la pandémie de COVID-19.  « Si un travailleur attrapait la COVID-19 au travail, il devait rester à domicile pendant deux semaines, sans être payé.  Or, ces travailleurs ont une famille à nourrir », a lancé l’aide à domicile.  Elle a fait remarquer qu’au niveau mondial, les travailleurs manquent de protection sociale légale: la Convention sur le travail décent de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a été adoptée par une cinquantaine de pays, mais sa mise en œuvre fait défaut. 

Assise à sa droite, la Directrice de la Division des politiques à ONU-Femmes Mme Sarah Hendriks, a mis en contexte la longue histoire de la lutte pour la protection sociale des auxiliaires de vie, qui a commencé dans les années 1800.  Elle a suggéré aux États Membres de changer de stratégie concernant le financement des soins à domicile, pour que d’un côté, chaque famille ait accès à ces soins et que de l’autre, tous les emplois soient des emplois de qualité. 

Les femmes mieux couvertes qu’avant, mais toujours fortement désavantagées

Mme Hendriks a ensuite partagé une bonne nouvelle: selon une étude d’ONU-Femmes, la protection sociale n’a cessé de s’accroître depuis 10 ans. Davantage de femmes et de filles ont accès à un minimum de sécurité financière, notamment lorsqu’elles deviennent mère, perdent leur emploi et vieillissent.  Les femmes sont néanmoins les plus touchées dans les ménages lorsqu’une crise survient.  D’où l’importance d’une protection sociale pouvant leur éviter, pour survivre, de devoir vendre leurs biens, déscolariser leurs enfants ou souffrir de la faim. C’est pourquoi ONU-Femmes préconise l’élargissement de la protection sociale à près de 700 millions de femmes employées dans le secteur informel.

Même diagnostic pour la Directrice adjointe du Chronic Poverty Advisory Network (CPAN), Mme Vidya Diwakar: les crises affectent davantage les femmes et ces dernières mettent davantage de temps à s’en remettre que les hommes. « Au Pérou, en Tanzanie ou au Bangladesh, les ménages pauvres dirigés par des femmes sont plus durement touchés », selon son étude. 

Au cours du dialogue interactif, plusieurs pays ont fait valoir leurs efforts. Le Mexique s’est illustré en relayant des nouvelles mesures prises par la nouvelle Présidente, comme un programme de protection sociale destiné aux femmes âgées de 60 à 64 ans, dans l’objectif de réduire les inégalités.  La Mongolie, elle, a été citée en exemple par deux fois durant la réunion conjointe: « en taxant les exportations de cuivre, elle est parvenue à donner une protection sociale à tous ses enfants », s’est enthousiasmée Mme Ortiz.  Autres avancées: au Cameroun, au Malawi, au Soudan du Sud, les gouvernements ont combiné les transferts en espèces avec des emplois et des formations en matière d’agriculture résiliente face aux changements climatiques pour les agricultrices. 

« Nous sommes tous vulnérables. Y compris les entreprises »

La deuxième table ronde a tenté d’offrir une « plongée en profondeur » dans le financement des systèmes de protection sociale, de la réduction des risques de catastrophe, de l’adaptation et de la résilience, autant de facteurs nécessaires à une croissance inclusive et durable.  Il a été question, là aussi, de la résilience des infrastructures, autant que de celle des hommes et des femmes.

Le représentant de la Pologne a remarqué que pour financer la résilience, il fallait des partenariats: avec les milieux d’affaires, le monde scientifique ou encore les gouvernements locaux.  « Nous sommes tous vulnérables.  Y compris les entreprises.  La perturbation des chaînes d’approvisionnements causée par la pandémie nous l’a confirmé », a-t-il lancé comme pour pousser du coude les milieux d’affaires pour qu’ils accroissent leurs contributions au financement de la résilience et à la protection sociale.

Lors du dialogue interactif, le Groupe de 77 et la Chine (G77) ont appelé à créer à la fois un environnement international plus propice et à augmenter les efforts nationaux en matière de financement.  Aux institutions internationales, le Groupe a demandé d’intégrer les stratégies de réduction des risques dans les politiques de développement à tous les niveaux. 

Les objectifs de développement durable, toujours au cœur des débats

Dans l’après-midi, la Deuxième Commission a repris son débat consacré aux objectifs de développement durable (ODD), entamé lundi.  Comme l’ont rappelé plusieurs délégations, à l’instar de l’Arménie, les multiples crises mondiales imposent de consolider les efforts internationaux afin d’accélérer la réalisation du Programme 2030 et de veiller à ce que tous les peuples vivent en paix et en sécurité.  Ces peuples doivent avoir accès à la justice, au développement durable et aux droits humains. 

Les pays en développement ont rappelé leurs difficultés de financement à cet égard et appelé au renforcement de la coopération, comme la Sierra Leone. De l’avis du Burundi, « le développement durable est le meilleur investissement pour un avenir prospère et équitable ».  Raison pour laquelle la délégation burundaise a invité à « repenser notre façon de vivre ».

L’action climatique est un autre sujet de préoccupation à la Deuxième Commission, quelques semaines avant la COP 29, qui aura lieu à Bakou, en Azerbaïdjan, au mois de novembre.  Les Émirats arabes unis, qui ont accueilli la COP 28, ont prôné des solutions novatrices, un renforcement des partenariats et un accès garanti aux innovations technologiques, notamment aux systèmes d’alerte météorologique rapide. Pour leur part, les Maldives ont mis l’accent sur le programme ambitieux d’Antigua-et-Barbuda adopté cette année pour les petits États insulaires en développement (PEID), qui sont particulièrement vulnérables aux changements climatiques, comme l’ont aussi expliqué les États fédérés de Micronésie. 

La Colombie, hôte de la COP 16 sur la biodiversité dans quelques jours, a attiré l’attention sur les droits humains, qui doivent être au cœur des processus de transition écologique.  Les pays du Sud mondial ne doivent pas avoir à choisir entre l’élimination de la pauvreté et la protection de la nature, a argumenté la délégation. 

En fin de séance, outre l’exercice de leur droit de réponse par l’Égypte, l’Éthiopie, Israël, la République arabe syrienne et le Liban, la Deuxième Commission a repris son débat général entamé le 7 octobre.

La Deuxième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 16 octobre, à partir de 10 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: un Rapporteur spécial alerte du risque de disparition des peuples autochtones transfrontaliers mobiles

Soixante-dix-neuvième session,
15e séance plénière – matin
AG/SHC/4411

Troisième Commission: un Rapporteur spécial alerte du risque de disparition des peuples autochtones transfrontaliers mobiles

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a examiné ce matin, la question des droits des peuples autochtones, à travers la présentation du rapport du Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, consacré cette année, à la situation des peuples autochtones transfrontaliers mobiles.

Au cours du dialogue interactif et de la discussion générale qui ont suivi, les délégations ont été nombreuses à se préoccuper des moyens de protéger leur droit et à appeler à garantir leur participation dans différentes instances, tout en restant divisées sur la définition même des peuples autochtones.

Risque de disparition des peuples autochtones mobiles

Dans un premier temps, M. José Francisco Calí Tzay, dont c’était le dernier rapport en tant que titulaire du mandat, a attiré l’attention sur les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones transfrontaliers mobiles, tels que les pasteurs, les éleveurs, les chasseurs-cueilleurs, ou les marins, ainsi que de nombreux peuples autochtones vivant dans un isolement volontaire et en situation de premier contact. Ces peuples se déplacent de façon saisonnière au sein de vastes territoires ancestraux qui s’étendent sur plusieurs pays et occupent généralement des écosystèmes fragiles, à haute valeur écologique. 

Or, bien que protégés par un cadre juridique international spécifique, -différent des droits des minorités, des paysans et des communautés locales-, ils font face à la discrimination, au déplacement forcé, au manque de reconnaissance, et à un accès limité aux services de base. 

De même, a noté le Rapporteur spécial, les idées dominantes de propriété privée et de résidence permanente ne prennent pas suffisamment en compte l’utilisation superposée, partagée et saisonnière des ressources des peuples autochtones mobiles, et nient la gouvernance foncière communautaire.  Une telle approche a entraîné des restrictions à la circulation des peuples autochtones mobiles qui continuent d’avoir un impact sur leur vie aujourd’hui, a-t-il déploré.

« Restreindre leur mobilité, c’est comme construire un barrage sur une rivière, perturbant un équilibre délicat », a illustré le Rapporteur spécial, expliquant que leur survie est fortement liée à ces territoires, à tel point qu’ils risquent de disparaître si leurs terres ne sont pas protégées. 

Garantir la pleine participation des peuples autochtones

Le Rapporteur spécial a exhorté aux États Membres de prendre des mesures urgentes et ciblées, d’autant que d’autres menaces existentielles pèsent sur ces populations mobiles, notamment les changements climatiques, l’extraction des ressources, les déplacements forcés ou encore l’absence de jouissance de leurs droits économiques et sociaux.  Mais, alors que la priorité doit être la protection de leurs terres, certains États refusent à ces populations le statut de peuples autochtones alors qu’eux-mêmes s’identifient comme tels.  Ils sont qualifiés de groupes marginalisés, sur la base d’un racisme structurel, d’une discrimination raciale et d’exclusion sociale, a-t-il déploré. 

La participation des peuples autochtones - un impératif moral, difficile à mettre en œuvre 

Au cours du dialogue interactif qui a suivi l’exposé du Rapporteur spécial, les délégations ont été nombreuses à s’accorder sur la nécessité de garantir aux peuples autochtones une pleine participation aux instances et débats aux Nations Unies, mais aussi plus localement dans les affaires qui les concernent. 

Pour le Guatemala, cette pleine participation n’est pas seulement une nécessité ou un impératif moral, mais un investissement dans l’avenir commun.  Les pratiques traditionnelles et connaissances ancestrales et scientifiques des peuples autochtones contribuent quotidiennement à la préservation de l’environnement et à la prévention des conflits, a encore affirmé la délégation, soutenue en ce sens par la Colombie qui a salué la contribution des communautés autochtones à son propre processus de paix. 

Avec l’élévation du niveau de la mer, les phénomènes météorologiques extrêmes et la perte de biodiversité, chaque stratégie de conservation, d’adaptation et d’atténuation des changements climatiques doit être conçue et mise en œuvre en partenariat avec les communautés autochtones et ne pas leur être imposée, a appuyé la Dominique.  C’est bien pourquoi, il faut continuer d’améliorer leur représentativité au sein des instances des Nations Unies, a acquiescé le Mexique, qui a appelé les délégations à contribuer à faciliter l’adoption d’une résolution sur le sujet. 

S’accordant elle aussi sur l’importance d’accroître cette participation, la Fédération de Russie a estimé approprié de maintenir le système d’octroi du statut consultatif auprès de l’ECOSOC aux organisations des peuples autochtones.

Le Canada a appelé pour sa part à la création d’un nouveau statut pour les peuples autochtones à l’ONU, soulignant que l’importance de cette démarche se fait particulièrement ressentir à la lumière de la crise de liquidités que connaît actuellement l’ONU. Les contraintes financières ont un impact négatif encore plus marqué sur les peuples autochtones que sur les États Membres, compte tenu de leur manque relatif de ressources et des difficultés qu’ils rencontrent déjà pour simplement participer à l’ONU, a noté la délégation qui a appelé à contribuer au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones.

Absence de consensus sur la définition des peuples autochtones

Si un léger consensus est bien apparu sur la nécessité de garantir leur participation, des délégations ont toutefois exprimé des réserves quant au concept même de peuples autochtones, estimant qu’il ne s’applique pas à tous les contextes.

Ce fut notamment le cas de la République-Unie de Tanzanie qui n’a pas souscrit pas à ce concept, notamment en ce qui concerne le droit à la terre, précisant qu’aucune de ses 135 tribus ne peut prétendre être propriétaire de ses terres qui sont la propriété de l’État tanzanien.  Le concept ne s’applique pas non plus à l’histoire civilisationnelle de l’Inde, caractérisée par divers groupes ethniques et culturels coexistant depuis des millénaires.

« La question fondamentale » de la définition des peuples autochtones doit être abordée d’une manière convenue au niveau international et adaptée aux divers contextes nationaux, a plaidé la délégation indienne, appelant à la prudence, la distinction et la nuance, au risque d’entraîner des conséquences imprévues susceptibles de nuire aux intérêts de communautés plus larges. 

Le Cameroun a noté que lors des négociations de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, une définition n’a pas été considérée souhaitable ou nécessaire, « étant donné qu’une définition unique serait inévitablement trop ou pas assez inclusive, ayant du sens dans certaines sociétés mais pas dans d’autres ». 

L’absence de définition des peuples autochtones est une indication claire de la divergence dans la compréhension et l’identification des peuples autochtones, a commenté la délégation qui a par ailleurs prévenu que l’auto-identification pourrait déboucher sur la création d’une catégorie artificielle de populations dites autochtones, et favoriser une approche de confrontation entre les États et les populations autochtones si elles ne sont pas reconnues comme telles par ces derniers.

La responsabilité des États coloniaux 

Par ailleurs, plusieurs délégations ont rattaché les discriminations subies par les peuples autochtones au colonialisme, à l’instar de la République islamique d’Iran qui a rappelé qu’au Canada, les Inuits n’ont pas le contrôle de leurs propres terres, pas plus que les Palestiniens autochtones déplacés de force en raison de l’occupation militaire israélienne.  Les pays coloniaux devraient reconnaître et réparer leurs responsabilités historiques, a renchéri la Chine.  L’Ukraine a accusé de son côté la Fédération de Russie de violer les droits des Tatars de Crimée depuis l’occupation de ce territoire en 2014.

La Troisième Commission de réunira à nouveau demain, mercredi 16 octobre, à partir de 10 heures pour examiner le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission poursuit son débat général en portant son attention sur les processus de décolonisation dans les territoires insulaires

Soixante-dix-neuvième session
8e séance plénière – matin
CPSD/808

La Quatrième Commission poursuit son débat général en portant son attention sur les processus de décolonisation dans les territoires insulaires

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Les délégations qui se sont exprimées, ce matin, à l’occasion du débat général sur la décolonisation de la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, ont centré leurs interventions sur la poursuite des processus de décolonisation dans les territoires insulaires, lesquels forment la vaste majorité des territoires non autonomes toujours inscrits à l’ordre du jour de la Commission. 

Au nom du Groupe des États mélanésiens, les Fidji ont exprimé leur satisfaction envers les références à la Nouvelle-Calédonie contenues dans le rapport du Comité spécial de la décolonisation, tout en soulignant l’importance que l’archipel demeure sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU afin que le peuple kanak puisse réaliser ses aspirations à l’indépendance. Le Forum des îles du Pacifique mènera d’ailleurs une mission de haut niveau en Nouvelle-Calédonie, du 27 au 29 octobre, avec l’appui de ce territoire et de la France, Puissance administrante, afin de favoriser la compréhension et la paix.  « Les troubles qui ont éclaté en mai de cette année ont été un tournant pour la région et ne doivent pas se répéter », a mis en garde le représentant fidjien.

Sainte-Lucie a exprimé sa préoccupation devant le fait que la « promesse de décolonisation » n’ait pas été tenue dans les petits États insulaires en développement (PEID) qui figurent toujours sur la liste des territoires non autonomes.  Après avoir relevé que 7 de ces 17 territoires se trouvent dans la région des Caraïbes, Saint-Kitts-et-Nevis a salué la « marche vers l’autonomie de ceux qui, partout dans le monde, la désirent », en espérant que ses voisins des Îles Vierges britanniques sauront bientôt réaliser leurs aspirations à l’autodétermination.

« Indiscutablement anticolonialiste » et fermement engagée dans les efforts multilatéraux de décolonisation sous les auspices de l’ONU, Saint-Vincent-et-les Grenadines a salué, à ce sujet, la récente mission de visite menée par le Comité spécial de la décolonisation aux Îles Vierges britanniques, et exhorté les parties à parvenir à un accord à même de répondre à la quête d’autodétermination du peuple de l’archipel.

En tant qu’État en développement ayant accédé à l’indépendance en 1978, la Dominique a estimé que les territoires non autonomes doivent toujours prioriser la voie diplomatique dans leur quête d’indépendance.  Pour mettre fin au « fléau » du colonialisme qui reste en vigueur, « sous nos latitudes », dans ses manifestations économiques, politiques, culturelles et territoriales, le Honduras a incité l’ONU à poursuive de manière exhaustive les processus d’autodétermination afin de faire de l’Amérique latine et des Caraïbes un territoire affranchi du colonialisme.

À la veille du bicentenaire de son indépendance, Haïti a annoncé la création d’un comité national pour la restitution et la réparation, en collaboration avec la Communauté des Caraïbes (CARICOM), afin de documenter « l’injustice » de l’indemnité « astronomique » qui lui a été imposée en 1825 pour prix de la reconnaissance de son indépendance.  « La restitution de cette dette, bien plus qu’une question financière, est avant tout un acte de justice morale », a dit son représentant.

En Afrique, les Comores ont salué la récupération des Chagos par Maurice, un moment historique pour le peuple de l’archipel et tous ceux qui luttent pour la justice et le respect des droits souverains dans le cadre du processus de décolonisation.  Cet événement, a relevé son représentant, s’inscrit dans la vision de l’Agenda 2063 de l’Union africaine d’un continent libéré des vestiges de la colonisation et engagé dans l’intégration de ses peuples.

Évoquant le « fardeau du passé » que constitue le colonialisme et les menaces qu’il fait peser sur l’intégrité territoriale de nombreux États, l’Espagne s’est dite victime d’un « anachronisme historique » impliquant le transfert, il y a trois siècles, d’une place commerciale stratégique à l’empire britannique, laquelle s’est étendue depuis par « la force et la mauvaise foi ».  Néanmoins, Madrid demeure prêt à reprendre les négociations avec le Royaume-Uni en vue de mettre fin à la situation coloniale de Gibraltar, comme le prévoient les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Au cœur de ce différend se trouve la présence militaire britannique sur le Rocher, en violation des résolutions de l’ONU qui enjoignent les puissances administrantes à éliminer leurs bases militaires dans les territoires non autonomes.  Or, « la Puissance administrante de Gibraltar semble ignorer ce cadre juridique », a déploré l’Espagne.  Cette situation continue de produire des effets indésirables allant au-delà de la « violation de l’intégrité territoriale et de l’occupation illégitime » de l’Espagne, a poursuivi son représentant, pointant le régime fiscal exceptionnel du territoire qui génère de « graves distorsions » dans l’économie régionale.

Pour le représentant, le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne a permis d’ouvrir une « fenêtre d’opportunité ».  La conclusion, en 2020, d’un accord concernant Gibraltar devant servir de base à un futur accord entre Bruxelles et Londres a, selon lui, pour objectif ultime de créer un « espace de prospérité partagée ».  Toutefois, a-t-il précisé, aucune disposition de cet accord n’implique une modification de la position juridique de l’Espagne sur cette question.

Réagissant à ces propos, le Royaume-Uni a indiqué qu’il n’accepterait pas de modalités allant à l’encontre des souhaits exprimés démocratiquement par la population de Gibraltar, pas plus qu’il ne participera à des négociations de souveraineté ne répondant pas à ses besoins.  Londres, a-t-il poursuivi, entretient des relations « modernes » avec ses territoires d’outre-mer, sur la base du partenariat, des valeurs partagées et du droit de chaque territoire à faire le choix de demeurer britannique ou non.  Les relations bilatérales avec ces territoires « autonomes » s’incarnent notamment sous la forme de conseils ministériels conjoints permettant d’assurer le suivi des priorités locales.

Le représentant britannique a ensuite abordé la question des Îles Falkland, qui ont manifesté, selon lui, le désir de demeurer un territoire d’outre-mer.  Il a indiqué n’entretenir aucun doute quant à la souveraineté de son pays sur ces îles, pas plus que sur l’exercice du droit à l’autodétermination de ses habitants, tel qu’exprimé lors du référendum de 2013.  La population ne souhaite pas de dialogue sur la souveraineté, a-t-il insisté, un souhait « exprimé librement qui doit être respecté ».  La délégation a néanmoins espéré établir des relations « plus constructives » avec l’Argentine, à l’exemple de l’accord sur la coopération pratique dans l’Atlantique.

Pour sa part, le Chili a réaffirmé son soutien aux droits légitimes de son voisin sur les îles Malvinas, les Îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, tout en soulignant la nécessité pour Buenos Aires et Londres de reprendre les négociations dans les meilleurs délais afin de trouver une solution définitive à ce différend de souveraineté.  Les 10 résolutions adoptées par l’Assemblée générale en la matière reconnaissent toutes l’existence d’un différend de souveraineté sur ces territoires, a rappelé l’Argentine.

S’agissant de la question du Sahara occidental, la Guinée-Bissau a jugé essentiel que les parties restent engagées dans un dialogue politique sous les auspices de l’ONU, conformément à la résolution 2703 (2023) du Conseil de sécurité.  Un avis partagé par la Gambie qui a exprimé sa conviction que la question, essentiellement politique, du Sahara ne peut être résolue que par le dialogue et une coopération approfondie entre les parties prenantes, ancrés dans le principe de l’autodétermination en tant que droit humain inaliénable.

Pour le Bénin, une résolution consensuelle de cette question, par le biais de négociations quadripartites entre le Maroc, l’Algérie, la Mauritanie et le Front POLISARIO, permettrait d’asseoir la stabilité au Maghreb dans la durée.  Le Cameroun a considéré à son tour qu’une solution politique à ce différend à caractère régional contribuerait à la sécurité et la stabilité du Sahel.

En fin de séance, le Pakistan, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Argentine ont exercé leur droit de réponse.

La Quatrième Commission conclura son débat général sur la décolonisation demain, mercredi 16 octobre 2024, à partir de 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: « malgré le conflit régional, la paix au Yémen est toujours possible, et il faut se concentrer pour la matérialiser », plaide l’Envoyé spécial

9748e séance – matin
CS/15852

Conseil de sécurité: « malgré le conflit régional, la paix au Yémen est toujours possible, et il faut se concentrer pour la matérialiser », plaide l’Envoyé spécial

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Le Yémen est aujourd’hui pris dans un engrenage régional qui menace de détruire les espoirs de paix et de stabilité, a déclaré ce matin l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour ce pays devant le Conseil de sécurité, à l’occasion de l’examen mensuel que ce dernier consacre à la situation au Yémen. M. Hans Grundberg a toutefois ajouté que la paix restait possible estimant que les différents « outils » étaient en place à cette fin mais qu’il fallait faire preuve de volonté politique.

Comme l’ont rappelé tant l’Envoyé spécial que plusieurs membres du Conseil, la séance intervient dans un contexte régional particulièrement inflammable.  M. Grundberg a notamment évoqué la poursuite d’attaques des houthistes d’Ansar Allah contre des navires et leurs tirs de missiles et de drones contre Israël.  Ces attaques ont provoqué des représailles américaines par le biais de frappes conduites sur quatre provinces, tandis que des frappes israéliennes ont également touché Hodeïda, causant des dommages sur des infrastructures civiles critiques.  Les infrastructures civiles ne doivent pas être prises pour cibles, ont rappelé plusieurs membres du Conseil, dont la Suisse, qui a relevé l’importance du port de Hodeïda, qui reste le point d’entrée principal de l’aide humanitaire pour une grande partie du Yémen. 

Mais les houthistes n’agissent pas seuls, ont fait observer les États-Unis. Leur représentant a mentionné des preuves selon lesquelles ils auraient reçu des armes de l’Iran, mais aussi un rapport selon lequel « un membre permanent du Conseil de sécurité » envisagerait de leur fournir des missiles supersoniques.  C’est pourquoi les États-Unis ont appelé le Conseil à prendre des mesures pour renforcer le mécanisme de vérification de l’ONU, affaibli par un manque de financements et de personnel, ce qui permettrait de juguler les flux d’armement vers les houthistes. 

De son côté, le représentant du Gouvernement yéménite a invité le Conseil à assumer ses responsabilités en mettant en œuvre l’embargo sur les armes concernant le pays et en appuyant les efforts pour juguler la crise humanitaire. La Chine a, pour sa part, exhorté les houthistes à respecter le droit de navigation des navires commerciaux et à préserver la sécurité des voies maritimes. 

Dans le même temps, il est important d’éviter les deux poids, deux mesures, a dénoncé la Fédération de Russie qui a souligné que les représentants de pays occidentaux tirent la sonnette d’alarme sur les problèmes du personnel de l’ONU au Yémen, en contraste avec leur réaction, ou leur absence de réaction, face à la mort de dizaines de membres du personnel onusiens à Gaza, ou encore face aux attaques régulières de l’armée israélienne contre les soldats de maintien de la paix de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban.

L’Envoyé spécial a également relevé qu’Ansar Allah continue de détenir arbitrairement du personnel onusien, des travailleurs de la société civile et des membres du personnel diplomatique.  Une situation condamnée par tous les orateurs ayant pris la parole, en premier lieu par la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires par intérim et Coordonnatrice des secours d’urgence.  Mme Joyce Msuya a ainsi commencé son intervention en exigeant leur libération immédiate et inconditionnelle.  Elle s’est faite l’écho des préoccupations des organisations concernées à propos d’une déclaration faite le 12 octobre par les houthistes, qui mentionne des poursuites pénales contre des personnes détenues, dont trois fonctionnaires des Nations Unies.  Ces détentions reflètent une tendance inacceptable à l’attaque des travailleurs humanitaires dans la région, a-t-elle déclaré. 

Le personnel humanitaire et diplomatique de l’ONU ne doit pas faire l’objet de menaces, a souligné le Royaume-Uni, avant de rappeler que la détention du personnel des Nations Unies dure depuis 130 jours.  Le représentant du Yémen a même évoqué des tortures auxquelles certains de ces détenus seraient soumis, dans des prisons secrètes.  Il a appelé l’ONU à agir de manière décisive pour protéger son personnel.  Il a lancé un appel pour que les quartiers de l’ONU soient déplacés dans la capitale temporaire Aden, afin que le personnel bénéficie d’un environnement de travail propice.  Dans un élan similaire, les États-Unis ont appelé l’ONU à « réadapter » sa programmation en conséquence. 

Sur le plan interne, le processus de paix semble bloqué.  Pourtant, a rappelé M. Grundberg, les lignes de front sont globalement calmes. La paix au Yémen est toujours possible et il faut se concentrer à la matérialiser, a insisté l’Envoyé spécial, qui a indiqué avoir engagé des discussions constructives avec des parties prenantes yéménites et internationales au cours de ses récentes visites à New York, Téhéran et Moscou.  Ses services ont également engagé des pourparlers avec des représentants de partis politiques yéménites, ainsi que de la société civile, avec une participation importante de femmes et de jeunes. 

Plusieurs membres du Conseil, dont la France, ont souligné l’importance d’avoir des négociations inclusives, qui garantissent la participation de la société civile et des femmes yéménites.  Une intervenante de la société civile yéménite, Mme Najat Jumaan, a plaidé devant le Conseil la cause des femmes yéménites, tout en mettant l’accent sur l’impact incommensurable de la guerre sur le secteur privé du pays, notamment l’augmentation des tarifs douaniers, la rupture de la coopération bancaire internationale et la fuite des capitaux et des cerveaux, sans oublier la destruction d’infrastructures civiles. 

Sur le plan humanitaire, Mme Msuya a rappelé que le plan annuel des Nations Unies n’est pour l’heure financé qu’à hauteur de 41%.  Le secteur de la sécurité alimentaire nécessiterait ainsi 870 millions de dollars supplémentaires, a-t-elle déclaré, faute de quoi 9 millions de Yéménites pourraient être privés d’aide alimentaire d’urgence au cours du dernier trimestre de cette année.  Dans cette crise, les personnes les plus touchées sont les femmes, les enfants et certains groupes marginalisés, a-t-elle fait valoir. À ce titre, elle a jugé essentiel de financer des programmes de lutte contre les violences sexistes, en faisant observer le sous-financement chronique de ce secteur. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Exposés

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a relevé qu’Ansar Allah continue de détenir arbitrairement du personnel onusien, des travailleurs de la société civile et des membres du personnel diplomatique. 

Le Yémen et sa population souffrent déjà de l’impact de l’escalade régionale, a indiqué l’Envoyé spécial, avant d’affirmer qu’Ansar Allah poursuit ses attaques sur des navires et a essayé plusieurs fois de cibler Israël avec des missiles et des drones.  Il a jugé inacceptable les attaques sur des navires civils.  En réponse à ces attaques, des frappes conduites par les États-Unis ont eu lieu sur quatre provinces, alors que des frappes israéliennes ont également touché Hodeïda.  Des rapports sur des victimes de ces frappes contre Hodeïda, ainsi que des dommages sur des infrastructures civiles critiques sont préoccupants, a-t-il déploré. 

L’Envoyé spécial a souligné que ce cycle de représailles entraîne le Yémen plus profondément dans le conflit régional, détruisant ainsi les espoirs de paix et de stabilité.  De plus, cela distrait du besoin urgent de discuter de la crise interne au Yémen.

Face aux détentions arbitraires de travailleurs humanitaires, M. Grundberg a rappelé que la société civile et les défenseurs des droits continuent de jouer un rôle critique pour faire face aux besoins humanitaires urgents, et qu’ils méritent une protection appropriée et le soutien international afin de poursuivre leur mission. 

Sur le plan politique, l’Envoyé spécial a indiqué avoir engagé des discussions constructives avec des parties prenantes yéménites et internationales au cours de ses récentes visites à New York, Téhéran et Moscou.  Il a rappelé que la résolution pacifique du conflit au Yémen est possible, et que le peuple yéménite a besoin d’un soutien international unifié.  Il a indiqué que, durant le mois écoulé, son Bureau avait engagé des pourparlers avec des représentants de partis politiques yéménites ainsi qu’avec la société civile, avec une participation importante de femmes et de jeunes.

Sur le plan militaire, l’Envoyé spécial a évoqué des lignes de front globalement calmes, tandis que sur le plan économique, son Bureau œuvre à favoriser la collaboration entre les parties pour atteindre la stabilité économique. 

Par ailleurs, avec ONU-Femmes, le Bureau de l’Envoyé spécial a mené des consultations avec plus de 400 femmes et hommes afin de permettre une plus grande implication des femmes dans le processus de paix yéménite. 

Enfin, l’Envoyé spécial a estimé que, malgré le conflit régional, la paix au Yémen est toujours possible, ajoutant qu’il fallait se concentrer pour la matérialiser. 

Mme JOYCE MSUYA, Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires par intérim et Coordonnatrice des secours d’urgence, a commencé son intervention en exigeant la libération immédiate et inconditionnelle du personnel de l’ONU, du personnel des ONG et des membres de la société civile détenus arbitrairement par les houthistes.  Elle s’est faite l’écho des préoccupations des organisations concernées à propos d’une déclaration houthiste émise le 12 octobre, laquelle mentionne des poursuites pénales contre des personnes détenues, dont trois fonctionnaires des Nations Unies.  Ces détentions reflètent une tendance inacceptable à l’attaque des travailleurs humanitaires dans la région, a-t-elle déclaré. 

Évoquant les efforts diplomatiques de l’ONU avec les autorités de facto houthistes pour obtenir la libération de ces détenus, Mme Msuya a remercié les pays clefs de la région pour leur soutien.  Une majorité des membres du personnel de l’ONU détenus ont eu des contacts avec leur famille et des soins de santé ont été prodigués à ceux qui en avaient besoin, a-t-elle précisé.

La Secrétaire générale adjointe par intérim a fait part de ses préoccupations quant à la situation humanitaire au Yémen, soulignant le danger que représentent les attaques lancées depuis et contre le pays, lesquelles ont endommagé des infrastructures critiques dans les domaines énergétique et portuaire.  Si les ports de Hodeïda et Ras Issa sont encore opérationnels, les infrastructures énergétiques du premier tournent au ralenti, a-t-elle relevé. 

Rappelant le rôle d’artère vitale des ports yéménites de la mer Rouge pour des millions de personnes dans le pays, Mme Msuya a lancé un appel à leur protection.  Elle a également évoqué la faim qui frappe le Yémen, notant qu’en août dernier, le nombre de personnes dépourvues de ressources alimentaires avait atteint des niveaux sans précédents.  Elle a aussi mentionné la propagation du choléra, précisant que depuis mars 2024, la maladie a entraîné le décès de plus de 720 personnes.  On s’attend à un doublement des cas d’ici à mars 2025, s’est-elle alarmée, alors même que les partenaires dans le domaine de la santé ont été contraints de fermer 21 des 75 centres de traitement de la diarrhée.  Le financement de la lutte contre le choléra est déjà épuisé, a-t-elle ajouté.

Remerciant les États Membres et autres donateurs pour leur soutien à la réponse humanitaire au Yémen, Mme Msuya a rappelé que cette dernière n’est pour l’heure financée qu’à hauteur de 41%.  Le secteur de la sécurité alimentaire nécessiterait ainsi 870 millions de dollars supplémentaires, a-t-elle déclaré, faute de quoi 9 millions de Yéménites pourraient être privés d’aide alimentaire d’urgence au cours du dernier trimestre de cette année.  Dans cette crise, les personnes les plus touchées sont les femmes, les enfants et certains groupes marginalisés, a-t-elle fait valoir.  À ce titre, elle a jugé essentiel de financer des programmes de lutte contre les violences sexistes, en faisant observer le sous-financement chronique de ce secteur.

Mme NAJAT JUMAAN, professeure et membre du Conseil d’administration de « Jumaan Trading and Investment Company », a évoqué l’impact incommensurable de la guerre sur le secteur privé yéménite.  Doublement des tarifs de douane, rupture de la coopération bancaire internationale et fuite des capitaux et des cerveaux sont quelques conséquences de la guerre, ainsi que la destruction d’infrastructures civiles, a-t-elle détaillé.  Une autre, qui affecte la vie des populations, est la flambée des prix du fait de l’insécurité autour de la mer Rouge et les prix exorbitants du transport maritime qui en découlent.

Mme Jumaan a exhorté l’Envoyé spécial et les parrains de la paix à poursuivre leurs efforts pour impliquer toutes les parties prenantes yéménites dans le processus de paix.  Elle a appelé la communauté internationale à veiller à ce que les salaires soient payés et la reconstruction du pays soit engagée, en veillant à impliquer le secteur privé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: accablée par une mauvaise santé financière, l’ONU risque d’épuiser toutes ses réserves d’ici à la fin de l’année

Soixante-dix-neuvième session
4e séance plénière – matin
AG/AB/4468

Cinquième Commission: accablée par une mauvaise santé financière, l’ONU risque d’épuiser toutes ses réserves d’ici à la fin de l’année

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Secrétaire générale adjointe chargée des stratégies et politiques de gestion et de la conformité a présenté ce matin à la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, une situation financière qui ne s’est pas améliorée, risquant de contraindre l’ONU à épuiser toutes ses réserves d’ici à la fin de l’année 2024. 

Mme Catherine Pollard a indiqué que le Secrétaire général continue d’alerter les États Membres de la crise de trésorerie de l’Organisation, touchant en particulier le budget ordinaire.  Le versement des contributions fluctue considérablement chaque année, rendant difficiles la planification et l’exécution efficace des programmes.

Budget ordinaire 

Pourtant au premier trimestre, les paiements ont dépassé les prévisions de 134 millions de dollars et au deuxième trimestre, de 178 millions de dollars, parce que certains États Membres ont payé plus tôt que prévu.  Pour ce dernier trimestre, l’Organisation a reçu 58 millions de dollars de plus que prévu.

Comment s’explique alors la crise de trésorerie?  Le versement des contributions pendant ce dernier trimestre reste incertain et les prévisions pointent vers un déficit qui empêchera la pleine mise en œuvre des programmes.  Au mois de septembre, le Secrétariat a dû siphonner le Fonds de roulement et il sera peut-être nécessaire de ponctionner le Compte spécial ce mois-ci. 

La Secrétaire générale adjointe a souligné, une nouvelle fois, l’importance d’avoir un certain degré de prévisibilité dans le versement des contributions.  Elle a lancé un appel aux États Membres pour qu’ils s’engagent à payer le plus tôt possible et, au moins, à communiquer tout aussi vite leurs plans de paiement.

Pour pouvoir exécuter le budget dans son intégralité et ne pas se retrouver dans une situation pire qu’au début de cette année, il faut recouvrer 105% des quotes-parts, y compris les arriérés, a prévenu Mme Pollard, et pour reconstituer les réserves, il faudra un taux de 115% des recouvrements.  En attendant, l’ONU risque d’épuiser des réserves d’environ 350 millions de dollars, d’ici à la fin de l’année, ne gardant que les 130 millions de dollars des tribunaux internationaux fermés. 

Sur un budget ordinaire de 3,2 milliards de dollars, 2,6 milliards avaient été perçus au 30 septembre, dont 569 millions d’arriérés.  Une somme de 1,5 milliard de dollars est toujours attendue.  À ce jour, 142 États Membres ont versé intégralement leur quote-part au budget ordinaire et 52 autres sont toujours sur la liste des mauvais payeurs.  L’Ukraine ayant donné une avance pour l’année prochaine, la Secrétaire générale adjointe a encouragé les États Membres à envisager des paiements anticipés. 

Budget des opérations de paix

Avec un cycle allant du 1er juillet d’une année au 30 juin de l’année suivante, les sommes versées pour l’exercice 2024-2025 s’élèvent à 2,5 milliards de dollars sur un budget total de 5,6 milliards de dollars.  Les problèmes de liquidités, a averti la Secrétaire générale adjointe, pourraient avoir une incidence sur le remboursement des pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police.  Au 15 octobre 2024, 64 États Membres seulement s’étaient acquittés de l’intégralité de leurs contributions. 

Manquent toujours à l’appel 487 millions de dollars pour les opérations clôturées et 1,3 milliard pour les opérations actives, dont 835 millions de contributions pour l’exercice 2024-2025 et 510 millions pour les exercices précédents. 

Mme Pollard a rappelé que dans sa résolution 73/307, l’Assemblée générale a décidé que le Secrétaire général doit mettre en recouvrement l’intégralité des contributions aux opérations de maintien de la paix pour lesquelles des barèmes sont disponibles, même si le Conseil de sécurité n’a pas encore prorogé les mandats. 

En conséquence, pour la période allant de juillet à décembre 2024, 634 millions de dollars ont été mis en recouvrement pour des opérations « non encore mandatées ».  Dans l’attente de l’approbation par l’Assemblée générale du barème des quotes-parts pour 2025-2027, des États Membres ont déjà versé des avances d’un montant total de 123 millions de dollars pour la période allant de janvier à juin 2025. 

Tribunaux internationaux

Au 30 septembre, les arriérés s’élevaient à 55 millions de dollars, y compris pour le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles de ces tribunaux. 

En conclusion, la Secrétaire générale adjointe a insisté sur le fait que la santé financière de l’Organisation dépend du versement à temps et en totalité des contributions.  La pleine mise en œuvre intégrale des programmes en est tributaire.  Elle a appelé les États Membres à adopter un budget ordinaire réaliste que le Secrétariat s’engage à utiliser de manière responsable, efficace et transparente.

Dès demain, mercredi 16 octobre, la Cinquième Commission tiendra une autre séance publique pour examiner le projet de budget-programme pour 2025.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: les Îles Falkland (Malvinas) et le Sahara occidental dominent les échanges entre États Membres sur les questions de décolonisation

Soixante-dix-neuvième session
7e séance plénière - matin
CPSD/807

Quatrième Commission: les Îles Falkland (Malvinas) et le Sahara occidental dominent les échanges entre États Membres sur les questions de décolonisation

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

« La décolonisation est un processus continu, un impératif moral et une question de droit international », a soutenu ce matin la Zambie, lors de la reprise du débat général de la Quatrième Commission sur les questions relatives à la décolonisation.  Un point de vue auquel ont fait écho de nombreuses délégations, alors que l’actuelle Décennie internationale pour l’élimination du colonialisme doit s’achever en 2030.

Or, l’année prochaine marquera aussi le soixante-cinquième anniversaire de l’adoption de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale, qui proclame la nécessité de mettre fin rapidement et inconditionnellement au colonialisme et déclare que tous les territoires non autonomes ont droit à l’autodétermination.  Raison pour laquelle la trentaine de délégations ayant pris la parole ce matin ont convenu de l’importance de venir à bout des processus de décolonisation de manière pacifique.

Mais « pour négocier, il faut d’abord dialoguer », a relevé l’Argentine, l’une des deux parties au conflit de souveraineté sur les Îles Malvinas, les îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud et les zones maritimes environnantes.  Pour elle, elle diffère des autres questions coloniales dans la mesure où elle repose sur le principe d’intégrité territoriale, que Buenos Aires considère comme ayant été violé par l’occupation britannique d’une partie du territoire argentin.

Une particularité reflétée dans la résolution 2065 de 1965, par laquelle l’Assemblée générale a établi la voie à suivre au moyen d’une négociation bilatérale destinée à résoudre pacifiquement ce différend.  « C’est le fil conducteur qui doit orienter la question des Îles Malvinas », a insisté le représentant argentin, dont le pays revendique la souveraineté sur cet archipel, une position également défendue par les pays d’Amérique latine et des Caraïbes qui se sont exprimés aujourd’hui.

Il a regretté que, depuis quelques années, le Royaume-Uni affirme qu’il n’engagera de négociations avec l’Argentine que si les habitants du territoire le souhaitent, un raisonnement qui ne trouve « aucun appui en droit international », selon cette dernière.  Or, aucune résolution de l’Assemblée générale n’a considéré que le principe de l’autodétermination des peuples était applicable à la situation des Îles Malvinas, a argué la délégation.  Le Royaume-Uni, Puissance occupante, a catégoriquement réfuté cette position dans un droit de réponse.

Pourtant, « la composition actuelle de la population des îles est le résultat d’une colonisation initiée par le Royaume-Uni en 1833 », a observé l’Argentine.  Selon elle, cette population établie par le Royaume-Uni ne saurait être considérée comme un peuple soumis, dominé ou assujetti: il s’agit d’« une situation coloniale, mais pas d’un peuple colonisé », et donc il n’y a pas de sujet actif pouvant exercer son droit à l’autodétermination.

La Colombie, qui s’exprimait au nom du consensus de Brasilia, a assuré que ses États membres étaient alignés sur la position de l’Argentine.  La République dominicaine, Cuba, le Mexique, l’Équateur, la Bolivie, El Salvador ou encore le Pérou lui ont apporté leur soutien à Buenos Aires.  Ces pays ont argué tour à tour que la seule façon de mettre fin à cette situation est de parvenir à un accord négocié entre l’Argentine et le Royaume-Uni, en saluant les bons offices du Secrétaire général en vue de faciliter la reprise des négociations.

La question du Sahara occidental a également suscité de nombreuses prises de position.  La grande majorité de la trentaine d’intervenants du jour a salué les efforts inlassables de M. Staffan de Mistura, Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU sur ce dossier, visant à faciliter la relance du processus politique sous les auspices exclusifs de l’ONU.  Les délégations ont encouragé les parties à ce différend régional -le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie– à s’engager davantage pour parvenir à une solution politique réaliste et durable, conformément au droit international et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale.

Pour les défenseurs du droit à l’autodétermination des peuples, dont le Venezuela, Cuba et la Zambie, la MINURSO doit pouvoir s’acquitter de son mandat et organiser un référendum d’autodétermination pour permettre aux Sahraouis d’exercer leur droit.  D’autres délégations ont invité les parties prenantes à s’engager dans le processus politique en vue de parvenir à un règlement pacifique, mutuellement acceptable et durable, fondé sur le compromis de ce différend de longue date.  Le Bénin, le Sénégal, le Qatar, la Guinée équatoriale, la Jordanie et d’autres ont ainsi invité les protagonistes à faire montre de réalisme et d’esprit de compromis, appuyant l’initiative marocaine d’autonomie pour le Sahara occidental.  Cette initiative contribue de manière significative à la qualité de vie des populations de cette région, a argué le Burkina Faso, là où le Sénégal a rappelé qu’elle avait obtenu le soutien d’une centaine d’États Membres de l’ONU.  Signalant la présence de nombreux consulats généraux dans les villes de Laayoune et de Dakhla, y compris celui du Gabon, le représentant de ce pays a confirmé le dynamisme de développement du « Sahara Marocain », appuyant sa marocanité.

Pour le Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, au nom duquel s’exprimait le Venezuela, c’était l’occasion de rappeler qu’il a présenté une résolution sur « l’élimination du colonialisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations », qui sera soumise à la Quatrième Commission dans les prochains jours.  Ce texte vise notamment à faire progresser les consultations en vue de proclamer le 14 décembre Journée internationale contre le colonialisme, a expliqué le délégué vénézuélien.  La Commission demanderait également au Secrétaire général d’élaborer un programme de sensibilisation mémorielle en vue de mobiliser les établissements éducatifs et la société civile pour développer des activités destinées à entretenir la mémoire du colonialisme.

Les États-Unis, seule Puissance administrante à prendre la parole aujourd’hui, ont reconnu les difficultés rencontrées par les Îles Vierges américaines, Guam et les Samoa américains s’agissant de l’exploitation de leurs ressources naturelles, ainsi que des conséquences d’années de colonialisme et d’esclavage pour les peuples autochtones et les résidents.

Le Gouvernement américain a toutefois contribué à élever le développement économique et social de ces peuples au sein de la société américaine, a cependant nuancé la délégation.  L’administration Biden s’est efforcée de remédier aux injustices, consciente aussi de ses obligations de promouvoir certains aspects de l’autodétermination sur ces îles.  La délégation a en outre tenu à souligner que malgré leur statut onusien de territoires non autonomes, ils sont autonomes localement et dotés d’institutions politiques, en plus de jouir d’une représentation politique à l’échelon fédéral, notamment au Congrès.

L’Inde, Israël, la République islamique d’Iran, le Royaume-Uni et l’Argentine ont exercé leur droit de réponse en fin de séance.

La Commission reprendra son débat général sur la décolonisation demain, 15 octobre, à 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission salue l’adoption par la CNUDCI de quatre textes législatifs renforçant le commerce international

Soixante-dix-neuvième session
11e & 12e séances plénières – matin & après-midi
AG/J/3721

La Sixième Commission salue l’adoption par la CNUDCI de quatre textes législatifs renforçant le commerce international

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, s’est penchée aujourd’hui sur le rapport annuel de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), présenté par sa Présidente, Mme Vilawan Mangklatanakul (Thaïlande).  La Sixième Commission a, auparavant, clos son débat sur les crimes contre l’humanité avec l’intervention du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  En fin de journée, elle a entamé sa discussion sur la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies. 

Lors de sa « très productive » cinquante-septième session, qui a eu lieu entre le 24 juin et le 12 juillet 2024, la CNUDCI a parachevé quatre textes législatifs: Loi type CNUDCI-UNIDROIT sur les récépissés d’entrepôt; Clauses types de la CNUDCI sur le règlement express spécialisé des différends; Statut du Centre consultatif sur le règlement des différends relatifs à des investissements internationaux (adopté en principe); Loi type de la CNUDCI sur les contrats automatisés.

À l’entame de son propos, la Présidente de la CNUDCI s’est félicitée de la session qui a permis de « démontrer l’unité de tous afin de bâtir un cadre juridique plus efficace ».  Les textes législatifs présentés aujourd’hui sont « la preuve des capacités de production de la CNUDCI et de sa flexibilité », a notamment loué la Finlande, au nom des pays nordiques.  Outre ces textes, la Commission a confirmé le programme des activités législatives en cours menées par ses groupes de travail.

Concernant les futurs travaux de la CNUDCI, la Présidente a attiré l’attention sur la nécessité de procéder à un inventaire de tous les textes de la Commission qui traitent des aspects électroniques, et notamment à une enquête sur la manière dont les États ont incorporé ces textes dans leur droit interne et dont ils sont pris en compte dans les engagements pris à l’échelle internationale au sujet du commerce sans papier.  Des travaux seront également engagés concernant la reconnaissance des sentences arbitrales électroniques, une initiative saluée par la France.  Afin que la CNUDCI puisse rester pertinente, le Canada lui a demandé de se concentrer sur des projets qui posent des problèmes juridiques bien définis. 

S’exprimant après la Présidente, une quarantaine de délégations ont, dans l’ensemble, salué les avancées réalisées par la CNUDCI.  Plusieurs pays, dont Cuba et l’Afrique du Sud, ont néanmoins rappelé que ses travaux doivent bénéficier au développement de toutes les économies et « soutenir la participation de tous les pays afin de garantir une acceptation universelle ».  Tout en tenant compte des spécificités régionales, l’élimination des obstacles juridiques au droit commercial constitue un pas important afin que tous les pays puissent profiter du commerce international, a insisté le Bélarus. 

Les délégations ont applaudi la finalisation de la Loi type sur les récépissés d’entrepôt, « un effort réussi de coordination et de coopération entre la CNUDCI et UNIDROIT », ont remarqué Les États-Unis.  Ces récépissés permettront l’échange des marchandises entreposées dans les entrepôts et leur utilisation comme gages, tout en garantissant la sécurité juridique pour les créanciers et la réduction des coûts financiers pour les petits producteurs, a expliqué la Présidente de la CNUDCI.  Pour la déléguée américaine, cette loi type est « nécessaire pour garantir le bon fonctionnement du système et l’accès aux financements, particulièrement pour les petits agriculteurs ». 

S’agissant des Clauses types de la CNUDCI sur le règlement express spécialisé des différends, elles fourniront aux entreprises des moyens rapides de règlement des différends afin de réduire les délais et les dépenses, a encore assuré la Présidente.  Elles permettront d’adopter des procédures spécialisées qui s’inspirent des règles d’arbitrage accélérées de la CNUDCI afin d’éviter les retards ou les pertes financières dans les projets, ont également apprécié quelques délégations.

Le Royaume-Uni, à l’instar de plusieurs autres pays, a témoigné de sa volonté de respecter les normes internationales en matière de règlement des différends en rappelant son adhésion à la Convention de Singapour sur la médiation, « une pratique qui n’est pas assez répandue aujourd’hui » selon le Japon.  Appuyée par l’Arabie saoudite et la Chine, l’Union européenne a rappelé l’importance de la Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires qui apporte une protection aux acquéreurs tout en préservant les intérêts des parties dans le respect des règles nationales.  Elle a également attiré l’attention sur la Convention de Maurice sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et États, démontrant ainsi « l’engagement politique de l’Union européenne envers les efforts menés par la CNUDCI ».

Nombre de délégations, dont celles du Mexique et de la Chine, ont également salué l’adoption de la Loi type de la CNUDCI sur les contrats automatisés, portant notamment sur les contrats utilisant l’intelligence artificielle et des traductions automatisées.  Dans une économie numérique en constante évolution, cette loi type renforcera la confiance et permettra aux économies de mieux se préparer pour faire face aux changements, ont estimé plusieurs intervenants.  Il s’agit aussi d’un instrument supplémentaire pour promouvoir le commerce électronique, a noté Singapour. 

Néanmoins, certaines délégations, dont la Sierra Leone et la République islamique d’Iran, ont insisté sur le nécessaire renforcement des capacités dans les pays en développement afin que ceux-ci puissent également bénéficier des avancées en droit commercial international.  Les États-Unis ont, en outre, insisté sur l’importance d’adapter les modalités aux préférences des parties prenantes afin de préserver leurs relations mutuelles.

Enfin, la CNUDCI a été félicitée pour l’adoption « en principe » du Statut du Centre consultatif sur le règlement des différends relatifs à des investissements internationaux.  Pour la Présidente, ledit Centre représente « un jalon important dans les efforts de réforme » afin d’aider les États à accélérer le règlement de leurs différends.  Certaines délégations ont, par ailleurs, appelé à ce que les solutions élaborées par le Centre soient adaptées au États et à leurs spécificités.  D’autres, comme la Malaisie, ont souhaité qu’il développe des activités de renforcement des capacités en matière de règlement des différends pour les États.  Favorable également à ce Centre, l’Iran a toutefois posé comme condition de garantir son indépendance, notamment vis-à-vis de ses bailleurs de fonds.

Le choix du siège du Centre restant à définir, plusieurs États se sont portés candidats.  Si la Thaïlande a proposé de l’accueillir à Bangkok, la France a informé que Paris refléterait parfaitement « l’approche multipolaire de partenariat Nord-Sud adoptée depuis le début des travaux ».  De son côté, l’Afrique du Sud, appuyée par la Sierra Leone, a tenu à souligner que l’augmentation constante des procédures d’arbitrage lancées par des pays d’Afrique sub-saharienne et leur coût « exorbitant » justifieraient que le siège revienne à l’Afrique.  La Côte d’Ivoire, le Ghana et l’Arménie ont également souhaité endosser cette responsabilité.  Le délégué du Panama a, quant à lui, estimé qu’il faudrait créer des bureaux régionaux en sus du siège central.

À l’issue de son examen du rapport de la CNUDCI, la Sixième Commission a entamé son débat sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies.  Une quinzaine de délégations se sont exprimées sur les deux rapports* du Secrétaire général: l’un décrit les politiques et procédures adoptées par le Secrétariat de l’ONU, les fonds et programmes ainsi que d’autres entités des Nations Unies pour le traitement des allégations crédibles d’infraction imputable à un fonctionnaire ou expert en mission des Nations Unies; l’autre résume des informations communiquées par divers États Membres à ce sujet. 

Les rapports contiennent également des recommandations visant à garantir la cohérence, la systématisation et la coordination de ces politiques et procédures, un point apprécié par les délégations.  Celles-ci ont unanimement réaffirmé leur engagement en faveur de la politique de « tolérance zéro », en particulier pour les actes d’exploitation et d’atteinte sexuelle.  À ce sujet, l’Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, a salué la stratégie d’assistance et de soutien aux victimes qui permettra de fournir des soins médicaux et des conseils juridiques.

S’il est « crucial de sauvegarder la confiance en l’ONU », a estimé l’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, il reste néanmoins des lacunes et des disparités dans les juridictions qui empêchent la poursuite pénale de manière systématique.  Appuyé par l’Iran et l’Australie, au nom également du Canada et de la Nouvelle-Zélande, l’Ouganda a rappelé que les États de nationalité ont ici le devoir d’exercer leur compétence en ce qui concerne les infractions commises par leurs ressortissants, appelant à renforcer les capacités des États en matière d’enquête, de poursuite et d’extradition. 

Les États doivent prendre les mesures législatives nécessaires, en toute transparence, pour que leurs ressortissants qui se sont rendus coupables d’une infraction grave puissent être poursuivis, a dit la Norvège, au nom des pays nordiques.  À cette fin, il est important que les États coopèrent avec les Nations Unies afin de faciliter l’échange d’informations sur des allégations d’infractions imputables au personnel onusien. 

Abondant en ce sens, l’Union européenne a mis l’accent sur la nécessité de mettre fin à l’impunité des fonctionnaires et experts coupables d’infractions alors qu’ils sont « le visage de l’ONU sur le terrain ».  Les privilèges et immunités doivent être levés dans ce cas, a plaidé le délégué, insistant sur l’importance de la protection des victimes et des lanceurs d’alerte contre les représailles et de la coopération pour permettre les poursuites.  « Personne n’est au-dessus de la loi. »

Accusant l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) d’avoir été infiltré par le Hamas avant les attaques du 7 octobre 2023, Israël a battu en brèche la réponse de l’ONU, estimant « choquant » que l’Organisation n’ait pas enquêté officiellement et qu’aucune poursuite n’ait été lancée.  « C’est la sombre réalité de l’ONU aujourd’hui », a-t-il asséné. 

La Sixième Commission se réunira demain, mardi 15 octobre, à partir de 10 heures, afin de poursuivre le débat en cours. 

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