En cours au Siège de l'ONU

La Commission du développement social lance ses travaux avec pour mot d’ordre une reprise post-COVID-19 ouvrant la voie à un recul de la faim et de la pauvreté

Soixantième session,
2e séance plénière – matin & séance virtuelle - après-midi
SOC/4898

La Commission du développement social lance ses travaux avec pour mot d’ordre une reprise post-COVID-19 ouvrant la voie à un recul de la faim et de la pauvreté

Éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes aux fins de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, en assurant un « relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité ».  Avec ce thème prioritaire comme fil rouge de ses travaux, la Commission du développement social a ouvert, aujourd’hui, sa soixantième session, qui se déroulera en mode hybride jusqu’au 16 février prochain, date à laquelle seront adoptées les recommandations de cet organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC).  

Aux commandes de cette session, après avoir déjà présidé celle de l’an dernier, la Représentante permanente de l’Argentine a d’emblée appelé de ses vœux une reprise qui ne soit pas « une simple relance de nos inégalités prépandémiques », mais « une transformation juste et équitable ».   Pour l’heure, le monde connaît une reprise « à deux vitesses », dont les conséquences pourraient se révéler « catastrophiques » dans une ère post-COVID-19, a noté Mme Maria del Carmen Squeff, en s’alarmant du creusement des inégalités et de l’iniquité vaccinale entre pays riches et en développement.

Face à la « crise systémique » engendrée par la COVID-19, l’action publique est, selon elle, essentielle pour guider une « reprise transformatrice » comprenant des objectifs à long terme.  Elle a donc souhaité que ces huit jours de débats et d’échanges permettent d’apporter des réponses efficaces aux problèmes structurels qui se sont aggravés depuis un an et demi, à commencer par la faim et la pauvreté.    

Alors que 600 millions de personnes sont aujourd’hui proches de l’extrême pauvreté et que trois milliards d’individus n’ont pas les moyens de se payer une alimentation saine, il importe d’être à la fois « ambitieux dans nos intentions et généreux dans nos actions », a renchéri le Président de l’Assemblée générale.  Appelant la communauté internationale à investir dans le partage des technologies, des ressources et des capacités, mais aussi à accorder la priorité à l’éducation, à la nutrition et aux soins de santé, M. Abdulla Shahid a souhaité que l’histoire se souvienne de la pandémie comme du moment où l’humanité « s’est tournée vers la durabilité ».  

Pour faire avancer le Programme 2030, il convient d’agir dans un esprit de solidarité pour que nos systèmes économiques, sociaux et financiers favorisent l’égalité, l’inclusion et la durabilité, a exhorté à son tour le Président de l’ECOSOC, selon lequel la Commission a un rôle essentiel à jouer en tant que « foyer » de la réalisation de l’ODD 10 sur la réduction des inégalités.  M. Colleen Vixen Kelapile a regretté à cet égard que bon nombre des mesures de protection sociale prises au plus fort de la crise aient été retirées, alors qu’elles auraient pu servir de « rampe de lancement » vers une protection sociale universelle à long terme.  

La pandémie a mis en évidence le rôle protecteur des politiques sociales, a abondé le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, saluant le fait qu’entre décembre 2020 et mai 2021, les dépenses de protection sociale aient bondi de 270%.  Mais ces mesures d’urgence doivent devenir permanentes si l’on veut garantir un relèvement inclusif et résilient, a lui aussi soutenu M. Liu Zhenmin, rejoint par la Vice-Secrétaire générale, pour qui le renouvellement du « contrat social » passe par l’égalité des chances et la sécurité économique.  À cette aune, Mme Amina Mohammed a estimé que les délibérations de la Commission peuvent servir de « tremplin » pour le prochain sommet social mondial dont le Secrétaire général a proposé la tenue en 2025 pour « redynamiser » la réalisation des ODD. 

Un « contrat social renouvelé » devrait se traduire par des investissements dans les systèmes nationaux de protection sociale et un renforcement de l’accès aux soins de santé essentiels et au revenu de base, a pour sa part plaidé Mme Maria-Laura Fornella-Oehninger, Coprésidente du Comité des ONG pour le développement social.  Aujourd’hui plus que jamais, la solidarité sociale doit être un élément crucial des solutions politiques, a ajouté Mme Monica Jahangir-Chowghury, autre Coprésidente de ce Comité, appelant à écouter les « voix inaudibles » et à les inclure dans les décisions qui affectent leurs vies.      

Lors du débat interactif de haut niveau de l’après-midi, consacré au thème prioritaire de cette session, le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) s’est prononcé pour une transformation des systèmes agroalimentaires, au cœur des moyens de subsistance de 4,5 milliards de personnes dans le monde, pour les rendre plus efficaces, plus inclusifs, plus résilients et plus durables.  Alors que plus de 80% des populations rurales sont des travailleurs indépendants du secteur informel, M. Qu Dongyu a préconisé d’accroître la productivité des petits producteurs grâce à des investissements dans le capital humain, les systèmes de protection sociale et les infrastructures rurales.  

De son côté, la Codirectrice de la recherche sur les aspects multidimensionnels de la pauvreté au sein d’ATD Quart Monde a insisté sur la notion de dignité, souhaitant qu’elle soit retenue dans le document final adopté par la Commission.  « La dignité reconnaît le choix personnel, c’est-à-dire les aliments que vous voulez manger, et pas seulement ceux auxquels vous avez accès, que vous pouvez vous permettre ou que les autres jugent dignes de vous », a notamment souligné Mme Maryann Broxton.

En début de séance, la Commission a élu par acclamation Mme Hellen M. Chifwaila (Zambie), M. Jiakun Guo (Chine) et Mme Iwona Lula (Pologne) à la vice-présidence de son bureau, Mme Chifwaila devant également remplir les fonctions de rapporteur.  Elle a également adopté son ordre du jour provisoire et son projet d’organisation des travaux.  

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, mardi 8 février, à partir de 10 heures. 

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Déclarations liminaires

Mme MARIA DEL CARMEN SQUEFF, Présidente de la soixantième session de la Commission du développement social, a tout d’abord appelé les membres de la Commission à réfléchir sur un dessin de l’artiste argentin Quino, créateur du personnage de Mafalda.  Sur cette planche, la petite fille demande à son père si la faim et la pauvreté ont été éradiquées et si les armes nucléaires ont été supprimées dans le monde.  Son père lui répondant que non, elle se demande avec tristesse pourquoi changer d’année alors que les problèmes de la communauté internationale ne sont toujours pas résolus.  Cette réflexion de Mafalda nous montre à quel point les questions dont nous débattons aujourd’hui au sein de la Commission sont d’actualité, a souligné Mme Squeff, avant de mettre l’accent sur les graves effets de la COVID-19 sur la vie des gens, notamment l’augmentation des niveaux de pauvreté et de faim.  Elle a ainsi relevé que le rapport de la FAO et d’autres agences des Nations Unies sur l’état de l’insécurité alimentaire dans le monde met en garde contre un nouveau scénario « nettement plus difficile »: 811 millions de personnes ne savent pas ce qu’elles mangeront aujourd’hui.  

Pour Mme Squeff, il est indubitable que la pandémie a provoqué une « crise systémique ».  Les gouvernements ont été appelés à agir avec la plus grande urgence pour protéger la santé de la population et éviter l’effondrement total de l’économie avec ses graves conséquences sociales et politiques.  L’action publique est donc essentielle pour guider une « reprise transformatrice », combinant l’intensité de la réponse à court terme avec des objectifs à plus long terme, a-t-elle soutenu, ajoutant que les débats à venir au sein de la Commission permettront d’échanger sur les stratégies de relance face à cette crise, qui nécessite d’adopter des approches de genre, de diversité et de droits humains pour apporter une réponse efficace aux problèmes structurels qui se sont aggravés depuis un an et demi, à commencer par la faim et la pauvreté.  

Constatant que le monde connaît déjà une « reprise à deux vitesses », la Présidente de la Commission s’est alarmée des « conséquences catastrophiques » que cet écart va générer dans un monde postpandémique.  Elle a noté avec préoccupation que les inégalités se creusent et que le taux de vaccination dans les pays à revenu élevé est sept fois plus élevé que dans les pays des autres régions du monde.  Il faut donc profiter de cette crise pour en sortir « transformés », a-t-elle plaidé, appelant à « promouvoir, imaginer et construire pour nos pays des voies originales mais efficaces », qui permettent d’établir des sociétés justes, égalitaires et dignes.  

Ceux qui vivent dans la pauvreté et ceux qui n’ont pas accès à la nourriture voient clairement que la jouissance de leurs droits humains fondamentaux est affectée, a-t-elle fait valoir, jugeant impératif que la communauté internationale accorde la priorité au traitement de ces problèmes et à leurs solutions.  À cet égard, elle a indiqué que son pays, l’Argentine, s’est employé à remédier à la situation des plus démunis.  À cette fin, plusieurs actions nationales ont été menées, l’une des plus significatives étant le lancement du Revenu familial d’urgence pour les travailleurs qui ne percevaient ni pensions ni subventions d’aucune sorte et qui n’avaient pas d’autres revenus.  De plus, une aide extraordinaire a été accordée aux détenteurs de cartes alimentaires afin de maintenir les revenus et de renforcer le droit des familles à l’alimentation. 

Avant de conclure, Mme Squeff a admis qu’il n’est pas aisé de négocier le projet de résolution lié à cette session.  Mon objectif est de parvenir à un document dans lequel nous pouvons apporter des contributions concrètes aux besoins de notre peuple, a-t-elle simplement confié, non sans ajouter qu’en sa qualité de Présidente, et dans le cadre de l’héritage et de l’empreinte que son pays souhaite laisser à la Commission, elle a présenté un projet de décision lié au renforcement et à la responsabilisation des travaux de cet organe subsidiaire de l’ECOSOC chargé de s’attaquer aux problèmes de la pauvreté, de l’emploi et de l’inclusion sociale.  Le projet vise à permettre, dans le cadre de la révision des méthodes de travail de la Commission du développement social, d’envisager la possibilité d’organiser une activité intersessions liée au thème prioritaire chaque année avant sa session ordinaire, a-t-elle précisé.  Enfin, elle a souhaité que le « nouveau contrat social » dont nous avons besoin soit basé sur la solidarité, soulignant que le relèvement ne doit pas être « une simple relance de nos inégalités prépandémiques », mais « une transformation juste et équitable ».  

« Après trois ans de pandémie, à quoi ressemblera le monde »? a lancé d’emblée M. ABDULLA SHAHID, Président de l’Assemblée générale.  La COVID-19 a freiné le développement durable: 600 millions de personnes sont proches de l’extrême pauvreté et trois milliards d’individus n’ont pas les moyens de se payer une alimentation saine.  Ce sont des chiffres incroyables, a constaté le Président.  Selon lui, pourtant, la réponse et les mesures de relèvement offrent des signes d’encouragement: les mesures de protection sociale ont été largement renforcées au cours des deux dernières années bien que la mise en œuvre ait été profondément inégale entre les pays développés et les pays en développement.  

Pour M. Shahid, la pandémie de COVID-19 doit être considérée à la fois une crise et une opportunité.  Il faut donc intégrer la résilience et la durabilité, être audacieux et ambitieux dans nos intentions, et généreux dans nos actions.  Nous devons investir dans le partage des technologies, des ressources et des capacités pour veiller à ce que nos efforts de relèvement atteignent toutes les personnes, dans tous les pays, en particulier ceux qui se trouvent dans des situations spéciales, comme les PMA, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement (PEID).  

Il a également appelé à donner la priorité à l’accès universel à l’éducation, la nutrition et soins de santé.  La période de relèvement doit garantir que personne ne soit laissé de côté, a-t-il insisté.  Elle doit être inclusive et équitable et autonomiser les femmes et les filles, les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées.  Nous devons investir dans la formation, l’éducation et les compétences vertes, a ajouté le Président qui a rappelé les risques des changements climatiques, entre autres.  Selon lui, investir dans une reprise verte et bleue permettra un rebond économique qui renforcera la main-d’œuvre et la résilience, atténuera les émissions de carbone, et protégera les écosystèmes. 

Il faut aussi investir dans des systèmes universels de protection sociale qui nous préparent aux crises futures, a préconisé M. Shahid selon lequel la période de relèvement post-COVID doit par ailleurs veiller à ce que la protection sociale et l’accès à tous les services soient sensibles au genre.  Pour le Président de l’Assemblée générale, l’histoire doit se souvenir la pandémie comme le moment où l’humanité a embrassé un avenir meilleur, s’est tournée vers la durabilité, a abandonné les échappatoires faciles et a poursuivi une voie qui a responsabilisé tous les peuples, protégé notre planète, construit la prospérité et insufflé l’espoir à une nouvelle génération.

M. COLLEN VIXEN KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a constaté que nous nous réunissons, « une fois de plus », dans l’ombre de la pandémie de COVID-19, qui a entravé, voire inversé, les progrès accomplis dans la réalisation de nombreux objectifs de développement durable (ODD), en particulier ceux visant à éradiquer la pauvreté et la faim d’ici à 2030.  Selon certaines estimations, les impacts sociaux et économiques de cette pandémie ont été quatre fois plus prononcés que ceux de la crise de 2008-2009, a fait observer le haut fonctionnaire.  Selon lui, les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement sont ceux qui supportent le fardeau le plus lourd en ces temps difficiles.  Aussi devons-nous agir dans un esprit de solidarité mondiale si nous voulons faire avancer le Programme 2030, en privilégiant des politiques transformatrices et en promouvant les changements structurels dont nous avons besoin pour que nos systèmes économiques, sociaux et financiers favorisent l’égalité, l’inclusion et la durabilité, a exhorté le Président. 

Dans ce contexte, la Commission du développement social a un rôle essentiel à jouer dans l’élaboration d’orientations politiques visant à atteindre cet objectif, une commission que M. Kelapile considère comme le « foyer » de la réalisation de l’ODD 10 sur la réduction des inégalités.  « Nous avons vu le rôle crucial que jouent des systèmes de protection sociale plus forts et résilients pour protéger les gens des impacts de la crise et les empêcher de s’enfoncer plus profondément dans la pauvreté, la faim et l’insécurité alimentaire », a encore déclaré le Président. 

Or, a-t-il relevé, selon des études, bon nombre des mesures de protection sociale d’urgence mises en œuvre au plus fort de la perturbation économique ont déjà été retirées, alors qu’elles auraient plutôt dû être mises à profit comme « rampe de lancement » vers une protection sociale universelle à long terme.  Le chemin à parcourir est encore long, a-t-il prévenu, notant qu’en 2020, seuls 46,9% de la population mondiale bénéficiaient d’une couverture sociale, laissant quatre milliards de personnes non protégées.

Le Président de l’ECOSOC a appelé à adopter des plans de redressement à long terme, tenant compte des risques et axés sur la prévention, pour améliorer les capacités et le bien-être des populations.  Il a donc exhorté la Commission du développement social à formuler des recommandations à cette fin. 

Dans un message vidéo, Mme AMINA MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a déclaré qu’en plus des millions de vies perdues, la COVID-19 a également entraîné une progression de l’extrême pauvreté « pour la première fois en une génération », aggravant la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition.  Parmi les autres conséquences figurent l’augmentation des violences liées au genre, de la maltraitance des mineurs et des cas de mariage et de travail d’enfants.  Face à cette situation, a poursuivi Mme Mohammed, nous devons renforcer la solidarité mondiale, le multilatéralisme et mobiliser des actions collectives pour faire face aux impacts de la pandémie de COVID-19, en particulier sur les plus pauvres et les plus vulnérables.  À cette fin, a-t-elle détaillé, nous avons besoin de stratégies de relance pour lutter contre les inégalités, la pauvreté, la faim, l’insécurité alimentaire et améliorer la résilience, les moyens de subsistance durables et le bien-être de tous. 

Pour la Vice-Secrétaire générale, « les politiques sociales sont au cœur de ces stratégies ».  Comme l’a souligné le rapport sur « Notre Programme commun », nous devons renouveler le contrat social pour assurer l’égalité des chances, la sécurité économique et le bien-être de tous, a-t-elle plaidé, en rappelant que le Secrétaire général a proposé à cet égard la tenue, en 2025, d’un sommet social mondial, qui ferait fond sur le Sommet mondial pour le développement social de 1995, lequel appelait à un développement centré sur les personnes.  Dans cette perspective, a-t-elle avancé, les délibérations de la Commission du développement social peuvent servir de « tremplin » pour ce nouveau sommet social, appelé à redynamiser les efforts pour la réalisation des ODD.  Cette Commission, qui se concentre sur les situations des personnes en situation de vulnérabilité, « joue un rôle essentiel pour assurer que notre engagement de ne laisser personne de côté est accompli », a conclu Mme Mohammed.

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a admis que le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre l’ODD « le plus fondamental », à savoir l’éradication de l’extrême pauvreté.  Sans action décisive, le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté devrait atteindre 600 millions, soit 7% de la population mondiale, d’ici à 2030.  La pandémie a mis en évidence le rôle essentiel des politiques sociales pour protéger les personnes dans le besoin.  

Selon le haut fonctionnaire, l’une des principales leçons est l’importance de l’accès universel à la protection sociale, pour renforcer la sécurité économique et alimentaire, en temps de crise.  De décembre 2020 à mai 2021, le montant total des dépenses en protection sociale a augmenté de près de 270%, atteignant 2,9 milliards de dollars.  Bon nombre de ces mesures doivent devenir permanentes, alors que les pays s’efforcent d’assurer un relèvement inclusif et résilient afin de revenir sur la bonne voie pour mettre en œuvre le Programme 2030.  

Pour se relever de cette crise, M. Liu a jugé essentiel d’investir dans les gens, la santé, l’éducation et le logement abordable pour renforcer la résilience et reconstruire les moyens de subsistance.  La fourniture et la prestation de services doivent être universelles et il est essentiel d’accorder une attention particulière aux besoins des groupes et des communautés les plus vulnérables et les plus défavorisés.  Il a également appelé à s’attaquer aux multiples causes de la pauvreté, de la faim et des inégalités, en créant des emplois décents et d’autres possibilités de générer des revenus.  Selon lui, les marchés publics et d’autres programmes peuvent être utilisés pour soutenir la production locale, les petits producteurs et les agriculteurs familiaux.  

De même, M. Liu a exhorté à mettre en place des systèmes de protection sociale universels et adaptés au niveau national, qui soient adéquats, complets et durables, y compris des socles de protection sociale définis au niveau national qui tiennent compte des besoins des plus vulnérables.  Les régimes de protection sociale doivent en outre être sensibles au genre et conçus en tenant compte des besoins des plus vulnérables.  Enfin, les systèmes alimentaires doivent devenir plus efficaces, inclusifs, résilients et durables pour assurer des régimes alimentaires sains capables de mettre un terme à la faim.  

Mme MONICA JAHANGIR-CHOWDHURY, Coprésidente du Comité des ONG pour le développement social, a déclaré que, il y a quelques semaines, un membre d’une ONG avait fait part du désespoir que les effets conjugués de la pauvreté et de la pandémie ont eu chez les jeunes femmes des pays en développement, qui n’ont parfois pas d’autre choix que de traverser la frontière dans l’espoir d’une vie meilleure.  « La plupart d’entre elles deviennent alors la proie des trafiquants d’êtres humains », a déploré l’intervenante qui a en outre indiqué qu’à New York, la pandémie a entraîné une hausse de 36% de la faim et de l’insécurité alimentaire, en particulier parmi les minorités ethniques.  Des exemples comme celui-ci, que ce soit dans le Nord ou dans le Sud, montrent clairement la relation entre discrimination et manque d’accès aux services de base, ce qui conduit souvent à la déshumanisation, a-t-elle expliqué.  À l’échelle mondiale, pour des centaines de millions de personnes qui luttent déjà pour se maintenir à flot, la pauvreté, la faim et la pandémie ont restreint les options et les libertés, créant un sentiment d’abandon et de déresponsabilisation.  Aujourd’hui plus que jamais, a déclaré Mme Jahangir-Chowdury, la solidarité sociale doit donc être un élément crucial des solutions politiques: il s’agit d’écouter et d’apprendre des voix inaudibles et de les inclure dans les décisions qui affectent leurs vies, afin d’assurer une reprise post-COVID « sans faim, verte et juste ».   

Un « contrat social renouvelé » devrait donc donner la priorité aux actions suivantes, a enchaîné Mme MARIA-LAURA FORNELLA-OEHNINGER, autre Coprésidente du Comité des ONG pour le développement social.  Tout d’abord, investir dans les systèmes nationaux de protection sociale, assurer l’accès aux soins de santé essentiels et au revenu de base et créer un fonds mondial pour la protection sociale afin de renforcer les capacités des pays les moins avancés.  Ensuite, veiller à ce que les personnes vivant dans la pauvreté soient égales devant la loi et prendre des mesures pour éliminer la discrimination et la stigmatisation sociale, notamment dans les domaines de l’accès à l’éducation, au travail et au logement.  Par ailleurs, a-t-elle poursuivi, il faut sanctuariser le monde du travail, pour le rendre à la fois exempt de violences et de harcèlement et respectueux des droits de la personne, y compris les travailleurs du secteur informel et du secteur des soins non rémunérés, et promouvoir le dialogue social et la représentation des travailleurs dans la prise de décisions.  Mme Fornella-Oehninger a également appelé au renforcement de la « résilience climatique » des systèmes alimentaires, en prenant en compte le savoir-faire et les pratiques agricoles des peuples autochtones et la promotion des pratiques alimentaires durables.  Elle a aussi mentionné la promotion de l’éducation tout au long de la vie, l’accès aux technologies numériques et l’amélioration des compétences, afin de garantir des moyens de subsistance durables pour tous.  

Dans une intervention préenregistrée, Mme LYNROSE JANE D. GENON, représentante de la jeunesse des Philippines et membre du Conseil exécutif de Young Women Leaders for Peace, a mis l’accent sur les répercussions de la pandémie de COVID-19 dans son pays, où les mesures de confinement ont entraîné un fort déclin du marché de l’emploi et, par voie de conséquence, de la pauvreté.  Citant les statistiques nationales, elle a précisé que le taux de chômage, qui s’établissait à 5% de la population active avant la crise, a bondi depuis à 17,6% et pourrait encore progresser alors que des confinements sont maintenus.  Selon la représentante, la situation est particulièrement préoccupante pour les jeunes ainsi que pour les personnes cumulant les handicaps de l’âge, de la géographie et des conflits.  

Dans ce contexte, il importe à ses yeux que la reconstruction post-COVID-19 tienne compte de l’accès de tous à l’enseignement afin de faciliter la progression du développement social.  Dans ce cadre, a souligné la représentante, il est essentiel de permettre aux écoliers et aux étudiants d’acquérir des compétences numériques et de bénéficier de connexions stables.  Faute de moyens, plus de cinq millions d’enfants et de jeunes n’ont pu s’inscrire à des cours en ligne l’année dernière et cela pourrait être à nouveau le cas en 2022, a-t-elle regretté, avant d’en appeler, plus généralement, à une réduction de la fracture numérique, singulièrement pour les zones rurales et les ménages pauvres.  Faute d’une telle politique d’intégration et de formation numériques, la situation pourrait encore s’aggraver, principalement pour les jeunes, a prévenu Mme Genon, avant d’évoquer le sort des femmes et des filles, premières victimes des mesures de confinement, comme en témoignent les ruptures scolaires et l’augmentation du nombre de grossesses précoces.

Mme Daniela Bas, Directrice de la Division du développement social inclusif au sein du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a ensuite présenté les cinq rapports* à l’ordre du jour des travaux de cette session.  

* E/CN.5/2022/2, E/CN.5/2022/3, E/CN.5/2022/4, A/77/61–E/2022/4 et E/CN.5/2022/5

Débat de haut niveau sur le thème prioritaire: Assurer un relèvement inclusif et résilient après la COVID-19 pour garantir à chaque personne des moyens de subsistance, le bien-être et la dignité: éliminer la pauvreté et la faim sous toutes leurs formes et dans toutes leurs dimensions aux fins de la réalisation du Programme 2030

Intervention liminaire

M. QU DONGYU, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), a constaté une « nette inversion » des progrès dans la réalisation des ODD du fait de la pandémie, tout en faisant observer que bon nombre des facteurs clefs de la pauvreté et de la faim « étaient déjà là avant » la COVID-19.  Il a ainsi relevé que la fréquence et l’intensité des impacts de la crise climatique, des conflits et autres urgences humanitaires, ainsi que les ralentissements et récessions économiques ont augmenté au cours des 12 dernières années, depuis la crise financière de 2009.  Bien que chacun de ces facteurs soit unique, leur interaction crée des effets multiples, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, a-t-il observé.  De plus, la majorité des personnes sous-alimentées vivent dans des pays touchés par plusieurs facteurs, dont l’impact négatif sur la sécurité alimentaire est aggravé par les inégalités de revenus, qui se sont accrues pendant la crise.  Dans ce contexte, a souligné M. Qu, les plus durement touchés sont les travailleurs de l’économie informelle, dont les revenus ont été les plus affectés par les mesures de confinement.  

De l’avis du Directeur général de la FAO, une reprise inclusive et résiliente dépend avant tout de la garantie d’un accès égal aux vaccins dans tous des pays.  Sinon, les pays pauvres ayant de faibles taux de vaccination continueront de lutter et la reprise postpandémique restera inégale et incertaine pour des millions de ménages dans le monde.  Dans le même temps, il faut apporter des solutions aux quelque trois milliards de personnes qui n’ont pas les moyens de se nourrir sainement.  La FAO estime qu’un milliard de personnes supplémentaires pourraient ne pas avoir accès à une alimentation saine si un choc supplémentaire venait à réduire leurs revenus d’un tiers.  « Ces risques sont inacceptables dans un monde qui produit suffisamment de nourriture pour l’ensemble de la population », s’est indigné M. Qu, avant d’appeler à ne pas négliger les zones rurales où habitent 80% des personnes les plus pauvres du monde.  

Notant que le relèvement post-COVID-19 nécessitera des investissements accrus et ciblés dans le développement, M. Qu a plaidé pour que les systèmes agroalimentaires, au cœur des moyens de subsistance de 4,5 milliards de personnes dans le monde, soient transformés pour être plus efficaces, plus inclusifs, plus résilients et plus durables.  Alors que plus de 80% des populations rurales sont des travailleurs indépendants du secteur informel, investir dans l’agriculture -en particulier dans l’agriculture familiale et la production alimentaire à petite échelle- permettrait aux ruraux de bénéficier de la terre et de la main-d’œuvre, tout en réduisant la pauvreté.  Il faut donc, selon lui, accroître la productivité des petits producteurs grâce à des investissements dans le capital humain, les systèmes de protection sociale et les infrastructures rurales.  

S’agissant des régimes de protection sociale, M. Qu s’est félicité qu’ils aient été renforcés, créés ou maintenus dans plus de 200 économies, avec notamment des distributions alimentaires à grande échelle et des programmes de bons, l’expansion des services de développement aux agriculteurs familiaux et des programmes alimentaires et d’adaptation scolaire pour les enfants.  Tout cela a contribué à prévenir une aggravation de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire, a-t-il souligné, avant d’appeler à produire plus avec moins de ressources et moins d’impacts sur l’environnement.  Pour cela, a-t-il dit, nous devons stimuler les investissements publics et privés ainsi que les services de financement afin de soutenir la transformation des systèmes agroalimentaires et du développement rural.  La FAO y travaille de concert avec les États Membres pour atteindre « une meilleure production, une meilleure nutrition, un meilleur environnement et une vie meilleure pour tous, sans laisser personne de côté, a-t-il indiqué.

Panélistes

Mme MARÍA JULIANA RUÍZ SANDOVAL, Première Dame de Colombie, a d’emblée souligné la coopération excellente entre le Programme alimentaire mondiale (PAM) et la Colombie dans les domaines de l’entrepreneuriat, l’innovation et l’industrie agroalimentaire.  Après la pandémie de COVID-19 et ses impacts, il faut donner la priorité à des solutions qui aident à la réalisation du Programme 2030, y compris l’éradication de la malnutrition, a-t-elle estimé.  À ses yeux, cela nécessite d’intégrer à l’ODD 2 sur la lutte contre la faim, les notions d’inclusivité, de durabilité et de dignité.  Le but, a insisté la Première Dame, est d’éradiquer la pauvreté.  Pour elle, ces défis sont des motivations à faire plus.  

Exhortant à redoubler d’efforts pour faire face aux défis, Mme Ruíz Sandoval a récusé toute forme de complaisance, « d’autant plus que nous savons ce qu’il faut faire ».  Elle a ensuite donné un aperçu de la campagne de nutrition et de lutte contre la faim mise en œuvre en Colombie.  Un million de paniers alimentaires pour quatre millions de personnes, ou l’équivalent de 68 millions d’assiettes, ont été distribués en trois mois, y compris dans les régions les plus reculées.  Ce plan permet notamment d’atteindre les enfants de moins de 5 ans, y compris dans les zones isolées, et a permis d’enregistrer une diminution de 39% des décès dus à la malnutrition par rapport à 2018, s’est-elle félicitée, précisant en outre que 13 centres de nutrition ont été créés dans le pays.  

M. MATÍAS LESTANI, Vice-Ministre de l’agriculture, du bétail et des pêcheries de l’Argentine, a souligné le rôle clef joué par les systèmes alimentaires mondiaux pendant les moments les plus difficiles de la pandémie, relevant que ceux-ci ont fonctionné efficacement, faisant preuve d’une grande résilience pour s’adapter rapidement à un scénario très complexe.  Le monde postpandémique présente de grands défis, notamment dans le secteur agro-bio-industriel, en raison de la hausse de la demande alimentaire et de l’urbanisation, des nouveaux modes de consommation liés aux aspects nutritionnels et environnementaux, et de la menace des changements climatiques. 

Au niveau multilatéral, M. Lestani a jugé essentiel de se diriger vers un système commercial international plus juste, plus transparent, plus équitable et plus prévisible, en tant qu’élément clef du Programme 2030.  Il a également souhaité que le programme de réforme de l’agriculture de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) s’attaque en priorité aux questions convenues il y a 20 ans, lors du lancement du cycle de Doha, à savoir l’amélioration substantielle de l’accès aux marchés et la réduction notable du soutien interne ayant des effets de distorsion des échanges.  Le Vice-Ministre a estimé impératif de produire durablement des aliments plus nombreux et de meilleure qualité et, dans le même temps, de générer des mécanismes qui garantissent l’accès physique, social et économique à ces mêmes aliments.  Dans ce contexte, il est essentiel que les négociations multilatérales progressent fermement, en respectant le principe de responsabilité commune mais différenciée, la transition juste, la coopération et la priorité accordée à l’adaptation.  

Au niveau national, a poursuivi M. Lestani, l’Argentine a mis en œuvre une grande variété de politiques visant à un renforcement durable et inclusif de la production.  Il a cité le projet de loi pour la promotion du secteur agro-bio-industriel, qui vise à augmenter la production alimentaire de manière durable avec une plus grande inclusivité, en mettant l’accent sur l’augmentation de la valeur ajoutée à la source et le renforcement des économies régionales.  Le Vice-Ministre a également fait valoir le programme « Entre nos mains », qui entend améliorer les conditions de production, de valorisation et de commercialisation des projets de développement rural des femmes dans l’agriculture familiale ainsi que la pêche autochtone et artisanale.  En outre, le « Plan argentin contre la faim », qui bénéficie du soutien de la FAO, vise à garantir la sécurité alimentaire de tous les Argentins, en particulier des plus vulnérables.  Le Plan argentin pour l’élevage 2022-2023 prévoit pour sa part, entre autres outils, une ligne de crédit d’un montant de 100 milliards de pesos pour stimuler l’élevage argentin. 

M. ABDULLAH HADDA, Directeur de la planification et du développement social au Ministère de la solidarité nationale, de la famille et de la condition de la femme de l’Algérie, a déclaré que son gouvernement avait prévu des rubriques budgétaires importantes pour les segments les plus vulnérables de la population, se félicitant que le seuil de pauvreté ait reculé de 8% en 2019.  Mais la pandémie de COVID-19 a entraîné des reculs alarmants et ce, dans tous les secteurs, et les plus vulnérables ont sans doute été les plus touchés, a observé l’intervenant.  Il a expliqué que, soucieux d’identifier toutes les personnes susceptibles de contribuer à la réalisation du Programme 2030, l’Algérie avait créé une « base de données citoyennes » axée sur la dimension sociale.  M. Hadda a également souligné que le Ministère de la santé avait rendu possible l’accès gratuit aux vaccins et aux soins relatifs à la COVID-19, et que des mesures avaient été prises pour que les personnes éligibles puissent bénéficier d’une aide financière.

Mme MIKIKO OTANI, Présidente du Comité des droits de l’enfant, a jugé impératif de faire face à l’impact grave et à long terme sur les enfants de la fermeture des écoles dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Elle a relevé que pour atténuer l’impact négatif de la fermeture des écoles, l’éducation en ligne a souvent été utilisée comme alternative à l’apprentissage en présentiel.  Cependant, le manque d’accès à Internet, aux équipements numériques et au soutien nécessaire à l’éducation en ligne a exacerbé les inégalités existantes pour les enfants en situation défavorisée ou vulnérable, notamment dans les pays en développement.  Ces enfants courent un risque accru d’être victimes de mariages d’enfants, de travail des enfants, de traite et de recrutement par des groupes armés, ce qui entraînera un abandon permanent même lorsque les écoles rouvriront, a-t-elle prévenu.  Soulignant que l’accès à l’éducation nécessite des ressources financières, humaines et techniques, qui font souvent défaut dans les pays en développement, la Présidente a appelé à faire de la coopération internationale une obligation juridique découlant de la Convention relative aux droits de l’enfant.  

Mme Otani a également conseillé d’utiliser les examens de pays pour répondre à l’obligation des pays développés de fournir une coopération internationale, à la lumière de la cible 17.2 des ODD sur la mise en œuvre des engagements pris en matière d’aide au développement.  En outre, les besoins des pays en développement en matière de coopération internationale pour garantir les droits de l’enfant devraient être intégrés non seulement dans l’assistance des organismes des Nations Unies, mais aussi dans l’assistance bilatérale des pays partenaires donateurs.  Enfin, elle a proposé de faire de l’intégration des droits de l’enfant une « politique claire » de l’ONU avec pour objectif d’accorder une attention et un soutien particuliers aux enfants en tant que groupe distinct dans l’ensemble du système des Nations Unies.  

Que signifie réellement l’expression « dignité pour tous »? a lancé Mme MARYANN BROXTON, Codirectrice de la recherche sur les aspects multidimensionnels de la pauvreté au sein d’ATD Quart Monde, qui a souligné que les gens méritent d’être traités avec dignité pour la simple raison qu’ils sont humains, « et c’est un droit ».  Mais nous perdons trop souvent cela de vue, a-t-elle fait observer.  « La dignité signifie des droits pour tous, sans discrimination, indépendamment de votre statut socioéconomique ou de votre reconnaissance juridique en tant que personne », a expliqué Mme Broxton, en se félicitant que cette mention figure dans un des rapports du Secrétaire général et en souhaitant qu’elle soit retenue dans le document final adopté par la Commission.  

La dignité doit être la mesure de chaque action que nous entreprenons, a insisté l’oratrice, qui a souligné que, dans une telle optique, la nourriture est considérée tout à la fois comme un élément culturel, ayant des liens religieux, social et communautaire, un plaisir, un souvenir et une tradition.  « La dignité reconnaît le choix personnel, c’est-à-dire les aliments que vous voulez manger, et pas seulement ceux auxquels vous avez accès, que vous pouvez vous permettre ou que les autres jugent dignes de vous », a précisé la Codirectrice.  Actuellement, les personnes qui s’identifient comme transgenres sont trois fois plus susceptibles de souffrir de la faim, car elles sont moins susceptibles de demander de l’aide par crainte de la discrimination, a-t-elle précisé.   

Lorsque nous utilisons le prisme de la dignité, nous allons au-delà de la macroéconomie pour nous intéresser à la personne.  La dignité élimine la mentalité du « pauvre méritant/non méritant », la conviction que certaines personnes ou certains groupes sont le problème, et non les systèmes eux-mêmes, et que l’humanité n’est accordée qu’à des personnes spécifiques.  Selon Mme Broxton, l’optique de la dignité donne la direction à suivre pour mettre fin à la pauvreté et à la discrimination: « nous ne nous contentons pas de garantir, mais exigeons la participation équitable et l’inclusion totale des personnes directement touchées par la pauvreté », a-t-elle plaidé.  Ces personnes ne sont alors plus considérées uniquement comme des bénéficiaires de la charité, mais comme des égaux dans le processus de prise de décisions que permet la participation, rejetant ainsi la honte, la stigmatisation et la discrimination liées à la pauvreté.  La dignité ne peut pas être seulement le dernier « mot en vogue », a insisté la panéliste qui a jugé impératif de travailler à partir d’un concept plus développé, y compris dans les documents et résolutions des Nations Unies.  « Et cela commence en suivant l’exemple des personnes les plus directement touchées par l’expérience de la pauvreté. »   

Débat interactif

À l’issue de la présentation des panélistes, la Présidente de la Commission et modératrice de la discussion a encouragé les délégations à faire part de leurs plans et programmes de lutte contre la malnutrition.  

Ce fut ainsi l’occasion pour le Brésil d’expliquer avoir mis en place, au début de la pandémie et « en moins d’une semaine », un programme de transferts de revenus qui ont été versés directement à ceux qui en avaient le plus besoin.  Entre 2020 et 2021, 50 milliards de dollars ont par ailleurs été investis pour aider 130 millions de personnes grâce au programme Bolsa Famiglia qui est aussi une manière de préparer la suite après la pandémie.  Plus de 17 millions de familles ont également pu bénéficier d’un d’aide à la production inclusive de 24 mois qui vise à soutenir le secteur informel, et en décembre 2021, le Gouvernement a lancé un nouveau programme d’aide pour l’accès au gaz afin de contribuer à la sécurité alimentaire des familles vulnérables.   

De son côté, la Bolivie a indiqué avoir mis l’accent, dans le contexte de la COVID-19, sur la protection sociale et l’accès à une nourriture saine.  Une attention particulière est également placée sur l’agriculture familiale, a ajouté la délégation en insistant sur des mesures d’accompagnement comme la coopération Sud-Sud, l’allègement de la dette des pays en développement, l’investissement dans l’éducation et une nouvelle politique universelle de redistribution et de solidarité.    

« À l’heure de l’interconnexion de l’humanité, ne serait-il pas temps de réfléchir à de nouvelles mesures susceptibles de bénéficier du savoir-faire de tous »? s’est demandé la représentante d’une ONG.  Répondant à cette question, la Première Dame de la Colombie a plaidé en faveur d’un partenariat avec les organisations de la société civile, tel que préconisé par le Secrétaire général dans son rapport, car celles-ci peuvent aider à suivre de près les besoins des populations vulnérables et attirer l’attention sur les laissés-pour-compte.  

De son côté, la Présidente du Comité des droits de l’enfant a souligné qu’en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant, les enfants doivent être entendus sur toute question les concernant au premier chef, notant que le sujet de ce débat les concerne dans une grande mesure.  Dans ses propres travaux, le Comité des droits de l’enfant a accordé un espace plus significatif aux enfants, a assuré Mme Otani.  Relevant que les jeunes sont souvent considérés comme des participants informels, elle a souligné qu’ils doivent avoir accès à un soutien financier et prendre activement part à tous ces processus. 

La couverture de ce débat a été entravée par une série de problèmes d’ordre technique.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité débat des moyens d’améliorer ses régimes de sanctions en réduisant leurs effets indésirables

8962e séance – matin
CS/14788

Le Conseil de sécurité débat des moyens d’améliorer ses régimes de sanctions en réduisant leurs effets indésirables

À l’initiative de la Fédération de Russie, qui préside ce mois de février le Conseil de sécurité, les questions relatives aux sanctions onusiennes ont été examinées ce matin sous l’angle de leurs effets indésirables, en se basant non seulement sur les 14 régimes actuellement en vigueur, mais aussi sur les progrès entrepris pour les améliorer.  Les membres du Conseil ont rappelé toutes les règles qu’ils jugent nécessaires pour l’imposition optimale de sanctions, certains saisissant l’occasion pour alerter également des graves conséquences des mesures coercitives unilatérales. 

Dans son exposé, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, a commencé par rappeler l’utilité de cet « outil essentiel », basé sur la Charte des Nations Unies, qui est à la disposition du Conseil pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Les sanctions ne sont toutefois pas une fin en soi, a-t-elle mis en garde: pour être efficaces, elles doivent faire partie d’une stratégie politique globale, œuvrant en tandem avec le dialogue politique, la médiation, le maintien de la paix et les missions politiques spéciales. 

Les sanctions onusiennes ne sont plus l’instrument coercitif qu’elles étaient autrefois, a poursuivi Mme DiCarlo, en rappelant les changements considérables apportés depuis les années 1990 pour minimiser leurs éventuelles conséquences néfastes sur les populations civiles.  Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Martin Griffiths, qui est également le Coordonnateur des secours d’urgence, a noté que le Conseil était passé de sanctions larges sur le plan économique à des sanctions plus ciblées.  Le Mexique a rappelé à cet égard avoir fait avancer le débat grâce à des initiatives menées avec l’Union européenne il y a quelques années.  Un pays touché par des sanctions, le Mali, partisan d’un « juste milieu », a toutefois jugé que les sanctions du Conseil devaient encore être améliorées.  C’est « un moyen qui est dur », a témoigné lui aussi le Soudan du Sud. 

Mme DiCarlo a fait valoir la normalisation des exonérations humanitaires qui, dans le cas des embargos sur les armes, sont systématiquement accordées aux acteurs humanitaires.  Elle a aussi parlé des dérogations aux interdictions de voyager, pour raisons médicales ou religieuses ou pour participer à des processus de paix, et des exemptions au gel des avoirs afin de payer la nourriture, les services publics ou les médicaments.  Il existe un « statut d’exemptions humanitaires » dans les régimes somalien et afghan et des « systèmes d’exemption humanitaire » accordés au cas par cas en Libye, au Yémen et en République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Ainsi, le Comité 1718, qui supervise les sanctions contre la RPDC, a approuvé 85% des demandes d’exemption reçues depuis l’année 2017. 

La Secrétaire générale adjointe a précisé que le Conseil et ses comités des sanctions cherchent de plus en plus à obtenir des informations de première main sur d’éventuelles conséquences pour les populations civiles et les États tiers, afin de procéder à des ajustements, comme en Érythrée ou en République centrafricaine (RCA).  Elle a fait remarquer qu’au cours de la dernière décennie, un seul État Membre a déclaré être confronté à des problèmes économiques particuliers résultant des sanctions du Conseil. 

Les membres du Conseil ont salué la résolution 2615 (2021) de décembre 2021 qui consacre des exemptions humanitaires au régime de sanctions contre l’Afghanistan.  La France a rappelé qu’à son initiative, le Conseil avait introduit des dispositions visant à mieux préserver l’espace humanitaire dans les régimes de sanctions relatifs à la République démocratique du Congo, à la RCA et au Mali.  La délégation russe a proposé d’améliorer la boîte à outils prévue par les résolutions du Conseil et suggéré, par exemple, que ces exemptions soient accordées de manière continue pour des organisations humanitaires.   Elle a aussi proposé d’établir des listes de marchandises ne devant en aucun cas figurer sur la liste d’interdiction. 

Au cours de leur application, les sanctions doivent faire régulièrement l’objet d’examens et de modifications, jusqu’à leur annulation complète, a-t-on encore entendu.  La délégation russe a jugé nécessaire, à cet égard, d’écouter plus attentivement l’avis des autorités des États sanctionnés.   La délégation chinoise a souhaité que l’on écoute aussi le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et les missions déployées par l’ONU dans les pays visés, qui peuvent signaler les effets négatifs des sanctions au Conseil de sécurité en vue d’ajustements.  Parmi les autres exigences, il a été demandé que les sanctions du Conseil ne soient pas imposées pour une durée illimitée et que des critères clairs soient prévus pour leur levée. 

La Chine a demandé de remettre sur pied le groupe informel sur la question des sanctions qui, de 2002 à 2006, faisait un travail utile pour les affiner, avant de plaider pour que le Conseil produise des rapports d’évaluation complets. Mme DiCarlo a mentionné l’existence du groupe de travail interagences des Nations Unies créé en 2014, qui a contribué à promouvoir une approche systémique des sanctions, parlant aussi du Médiateur créé en 2009, qui a introduit une structure plus robuste dans les mécanismes de procédure régulière à la disposition des individus ou des entités cherchant à être retirés de la Liste des sanctions contre Al-Qaida et Daech. 

Mme DiCarlo a reconnu les limites qu’ont encore les sanctions lorsqu’elles poussent des acteurs financiers et des fournisseurs de services, par peur de violer les sanctions, à imposer des conditions supplémentaires, augmenter leurs frais, ou simplement refuser de fournir les biens et services demandés, entravant ainsi l’acheminement de l’aide humanitaire.  Pour pallier le problème de la « surconformité des banques », la France a dit avoir mis en place un canal de communication direct entre les banques et les ONG. 

Le débat n’aurait pas été complet sans évoquer les mesures coercitives unilatérales imposées par certains pays, qui entraînent des conséquences humanitaires graves, déstabilisent les relations internationales et affectent même le paiement des contributions au budget de l’ONU, selon la Russie qui a parlé notamment de « guerre des sanctions » contre la Syrie.   Ces mesures ont sapé la foi dans le multilatéralisme, selon le Kenya.  Le Mexique s’est dit opposé à toute sanction unilatérale en dehors du système des Nations Unies et notamment à l’embargo contre Cuba.  Parmi les pays touchés par de telles mesures, le Venezuela n’y a vu rien d’autre qu’une « cruauté » assumée.  Certains pays semblent être dépendants de telles mesures, comme d’une drogue », a renchéri la Chine.  Les États-Unis ont précisé pour leur part préférer « de loin » les sanctions multilatérales aux sanctions prises unilatéralement, tout en insistant sur la licéité de ces dernières. 

QUESTIONS D’ORDRE GÉNÉRAL RELATIVES AUX SANCTIONS

PRÉVENTION DES CONSÉQUENCES HUMANITAIRES ET DES CONSÉQUENCES INVOLONTAIRES (S/2022/86)

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué que les sanctions restent un outil essentiel basé sur la Charte des Nations Unies à la disposition du Conseil pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Elles ne sont pas une fin en soi, et pour être efficaces, elles doivent faire partie d’une stratégie politique globale, œuvrant en tandem avec le dialogue politique, la médiation, le maintien de la paix et les missions politiques spéciales.  Elle a relevé qu’il existe actuellement 14 régimes de sanctions du Conseil.  Mais, ces sanctions onusiennes ne sont plus l’instrument coercitif qu’elles étaient autrefois.  En effet, depuis les années 1990, elles ont subi des changements considérables pour minimiser leurs éventuelles conséquences néfastes sur les populations civiles.  Elle a évoqué à cet égard la normalisation des exonérations humanitaires, et dans le cas des embargos sur les armes, des exemptions systématiquement accordées pour l’importation d’équipements nécessaires aux acteurs humanitaires pour opérer dans les zones de conflit.  En cas d’interdiction de voyager, des dérogations sont systématiquement prévues pour des raisons médicales ou religieuses ou pour participer à des processus de paix, tandis que les exemptions au gel des avoirs permettent de payer la nourriture, les services publics ou des médicaments.  De plus, le Conseil de sécurité a institué le statut d’exemptions humanitaires dans les régimes somalien et afghan, et des systèmes d’exemption humanitaire au cas par cas en Libye, au Yémen et en République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Ainsi, le Comité 1718, qui supervise les sanctions contre la RPDC, a approuvé 85% des demandes d’exemption reçues depuis l’année 2017, a témoigné Mme DiCarlo. 

Ces dernières années, le Conseil et ses comités des sanctions ont cherché de plus en plus à obtenir des informations de première main sur d’éventuelles conséquences pour les populations civiles et les États tiers, a expliqué Mme DiCarlo.  Les sanctions sont continuellement ajustées en fonction des changements survenus sur le terrain, compte tenu de leur impact sur les populations civiles, a-t-elle expliqué.  C’est ainsi que le Conseil avait mis fin aux sanctions contre l’Érythrée et réduit considérablement la portée de l’embargo sur les armes imposé à la République centrafricaine.  De même, face à une nouvelle menace grave contre la paix et la sécurité en Somalie, le Conseil a imposé en 2019 une interdiction d’importation ciblant certains composants d’engins explosifs improvisés.  Elle a ajouté qu’au cours de la dernière décennie, un seul État Membre a déclaré être confronté à des problèmes économiques particuliers résultant des sanctions du Conseil.  Selon elle, c’est là une preuve que les mesures ciblées actuelles du Conseil ont des conséquences négatives limitées sur les États tiers. 

Mme DiCarlo a noté que presque tous les régimes de sanctions incluent désormais la désignation ou l’inscription de mesures destinées à faire respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme.  De telles mesures ont servi de levier pour obtenir des résultats positifs pour des personnes à risque, a-t-elle dit en soulignant que la perspective de sanctions a été un facteur dans la libération des femmes et des enfants enlevés en début 2020 au Soudan du Sud.  De même, la perspective de sanctions a ouvert l’espace pour négocier la libération des enfants détenus par les groupes armés en République démocratique du Congo.  Elle a déclaré que plus de 50 personnes et entités ont été inscrites sur des Listes de sanctions par le Conseil ou ses comités pour leur implication dans des violences sexuelles liées au conflit, l’utilisation d’enfants dans les conflits armés, le trafic de migrants, les attaques contre les travailleurs humanitaires et des entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire, entre autres critères du droit international humanitaire.  Elle a noté que l’imposition de sanctions uniquement pour de tels actes est relativement récente et bienvenue.  Son utilisation envoie un signal sans équivoque sur l’engagement du Conseil à assurer la responsabilité des violations du droit international humanitaire ou des droits de l’homme, a—t-elle justifié. 

La Secrétaire générale adjointe a affirmé que l’évolution des sanctions globales vers des sanctions ciblées a marqué un changement radical dans ce domaine de travail du Conseil.  Mais il y a encore quelques préoccupations concernant les conséquences imprévues ou les effets néfastes de ces sanctions.  Des acteurs financiers et d’autres fournisseurs de services peuvent imposer des conditions supplémentaires, augmenter leurs frais, ou simplement refuser de fournir les biens et services demandés, entravant ainsi l’acheminement de l’aide humanitaire, a—t-elle expliqué.  Selon elle, la difficulté persistante à relancer le canal bancaire pour les transferts humanitaires vers la RPDC, depuis son effondrement en 2017, est un excellent exemple de tels défis.  Et ces difficultés peuvent être aggravées lorsque les acteurs financiers et les autres prestataires de services sont tenus de se conformer à de multiples régimes de sanctions, ainsi que le besoin de respecter les réglementations de la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent à travers le monde.  En essayant de respecter un large éventail de mesures applicables, ces acteurs adoptent parfois une interprétation trop large de ce qui est exigé par les régimes de sanctions, souvent en contradiction avec l’interprétation des acteurs humanitaires, a-t-elle relevé. 

Mme DiCarlo a affirmé que la communauté humanitaire et une grande partie du monde ont chaleureusement salué la résolution 2615 (2021) qui consacre des exemptions au régime de sanctions contre l’Afghanistan.  Elle a dit que des exemptions similaires dans d’autres régimes de sanctions pourraient grandement contribuer à répondre aux besoins critiques des populations civiles.  De même, elle a recommandé aux États Membres de réduire davantage la charge des exigences supplémentaires imposées aux acteurs humanitaires en veillant à ce que leur législation nationale soit aussi proche que possible des exigences du Conseil de sécurité.  En outre, la surveillance continue par les comités des sanctions de l’éventuel impact humanitaire des sanctions est vitale, a jugé la Secrétaire générale adjointe qui a également estimé essentiel de renforcer la coopération entre les acteurs humanitaires et le secteur privé.  Le groupe de travail interagences des Nations Unies créé en 2014 a contribué à promouvoir une meilleure compréhension et une approche systémique des sanctions, a-t-elle expliqué.  Enfin, elle a indiqué que depuis sa création en 2009, le rôle de médiateur a introduit une structure plus robuste dans les mécanismes de procédure régulière à la disposition des individus ou des entités cherchant à être retirés de la Liste des sanctions contre Al-Qaida et Daech.  De ce fait, elle a conseillé d’établir des procédures justes et claires pour toutes les autres entités et individus désignés, ce qui rendra l’outil de sanctions encore plus efficace selon elle. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a indiqué que les sanctions sont un élément à prendre en compte dans nombre d’opérations humanitaires.  Aussi ciblées et intelligentes soient-elles, ces sanctions ont des conséquences sur la logistique, le financement et l’exécution des opérations humanitaires, a-t-il reconnu.  « Elles peuvent conduire à des retards ou à l’arrêt d’opérations humanitaires. »  Il a admis que certaines sanctions peuvent menacer le bien-être de larges secteurs de la société civile. 

Il a rappelé que les sanctions onusiennes et nombre de sanctions adoptées par les États Membres ne sont pas des instruments brutaux appartenant au passé. Le Conseil est passé de sanctions larges sur le plan économique à des sanctions plus ciblées.  « Nous avons vu des cas où les sanctions ont eu une incidence heureuse s’agissant du respect du droit international humanitaire et des droits humains. » Il a ainsi estimé que la menace de sanctions a pu contraindre un certain nombre de groupes armés non-étatiques en République démocratique du Congo (RDC) à libérer des enfants enrôlés dans leurs rangs.  Les sanctions onusiennes sont élaborées dans le but de limiter les conséquences non-prévues, a-t-il rappelé. Le Secrétaire général adjoint a salué les signaux clairs envoyés par ce Conseil visant à limiter de telles conséquences, ainsi que la volonté de ce dernier de faire en sorte que la mise en œuvre des sanctions respecte le droit. Il a souligné la nécessité que les sanctions n’entravent pas les activités exclusivement humanitaires, conduites par des acteurs humanitaires impartiaux. 

M. Griffiths a dit que les régimes de sanctions en Somalie et en Afghanistan ont ménagé un espace pour que les activités humanitaires se poursuivent. Les sanctions onusiennes peuvent néanmoins avoir des conséquences négatives pour les opérations civiles et humanitaires, a-t-il reconnu. Il a estimé que les sanctions prises par les États ont des conséquences similaires et ont souvent une portée plus grande que les sanctions onusiennes. 

Le Coordonnateur a estimé que les principes humanitaires peuvent être mis à mal par la demande de sanctions.  Ces sanctions peuvent rendre plus difficile pour les agences humanitaires d’engager des individus ou entités inscrits sur la Liste des sanctions mais qui exercent un pouvoir significatif sur une population civile, a-t-il donné comme exemple.  Il a aussi noté que les principes d’indépendance, de neutralité et d’impartialité peuvent être sapés par les demandes d’exclure des récipiendaires potentiels de ladite aide. Il a ajouté que les banques et acteurs commerciaux peuvent refuser des prestations à des acteurs humanitaires pour éviter toute punition.  En conséquence, il a relevé que des transactions routinières peuvent devenir extrêmement bureaucratiques et lourdes.  Il a néanmoins estimé que des exemptions larges, comme celles prévues en Afghanistan, sont de nature à « rassurer » les organisations humanitaires. 

M. Griffiths a déclaré que l’hésitation des acteurs commerciaux assurant la distribution de nourritures ou d’essence peut conduire à des pénuries et à une hausse des prix, ce qui peut être désastreux pour des économies fragiles.  Les exemptions humanitaires, si elles permettent la poursuite des programmes, ne peuvent se substituer à la fourniture de services de base, a-t-il prévenu. 

Le Secrétaire général adjoint a suggéré quelques pistes pour atténuer ces conséquences négatives. Il a ainsi exhorté le Conseil et les États Membres à faire en sorte que les sanctions applicables dans les conflits armés n’entravent pas l’assistance humanitaire au profit des personnes non-belligérantes et ce, indépendamment de leur allégeance.  « Les sanctions ne doivent pas restreindre la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit à la nourriture, à l’eau, à un abri ou à la santé. »  Les sanctions ne doivent pas entraîner des conséquences secondaires en cascade qui excéderaient leur champ d’application, a martelé M. Griffiths.  Il a invité le Conseil à prévoir des exemptions humanitaires larges d’emblée plutôt que de procéder par des autorisations au cas par cas qui peuvent être lourdes et inefficaces. Ces exemptions doivent être transposées en droit national pour atténuer les préoccupations des acteurs humanitaires, des entreprises privées et des organisations non-gouvernementales, a-t-il aussi conseillé.  M. Griffiths a relevé que la mise en œuvre est parfois aussi importante que l’élaboration des sanctions. 

Il a salué les efforts visant à renforcer la confiance comme ceux de l’Union européenne qui cherchent à « rassurer » les institutions financières et le secteur privé.  Il a rappelé que les opérations dans le nord-ouest de la Syrie font l’objet d’une surveillance rigoureuse, ce qui permet de garantir que les ressources humanitaires sont bien fournies à celles et ceux qui en ont besoin, et pas pour d’autre but.  C’est l’essence même de l’action humanitaire basée sur des principes, a dit le Coordonnateur.  Pour M. Griffiths, s’assurer que les sanctions n’aient pas de conséquences non-prévues pour les civils relève de la « responsabilité collective. » 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a affirmé que les sanctions du Conseil de sécurité sont un outil important de mise en œuvre des fonctions assignées au Conseil pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il a toutefois souhaité qu’elles soient appliquées avec une extrême prudence, qu’elles soient justifiées et ne soient pas utilisées comme une « arme punitive ».  De plus, les sanctions internationales devraient refléter la situation sur le terrain et servir le processus politique, a souligné le délégué, précisant qu’elles doivent faire régulièrement l’objet d’examens et de modifications, jusqu’à leur annulation complète.  Il a également jugé nécessaire d’écouter plus attentivement l’avis des autorités des États sanctionnés. 

Selon la Fédération de Russie, bon nombre des sanctions actuelles ne correspondent plus à la situation réelle, et elles interfèrent sur les plans adoptés par les gouvernements nationaux dans le domaine de la construction, ainsi que pour le développement socioéconomique.  Il a évoqué les cas de la République centrafricaine (RCA) et du Soudan avant de dénoncer les sanctions qui perdurent et qui constituent un anachronisme absolu.  Le délégué a appelé à prendre au sérieux les dommages collatéraux des sanctions, parlant des effets destructeurs sur l’économie nationale comme sur la vie et le bien-être de la population.  Un problème qui s’est encore aggravé dans le contexte de la pandémie, a-t-il ajouté.  À cet égard, il a jugé nécessaire d’améliorer la boîte à outils prévue par les résolutions du Conseil dans le cadre des exemptions humanitaires.  Il a suggéré, par exemple, que de telles exceptions soient accordées de manière continue pour des organisations humanitaires.  Il a aussi proposé d’établir des listes de marchandises qui ne doivent en aucun cas figurer sur la liste d’interdiction. 

M. Polyanskiy a indiqué qu’un obstacle sérieux au plein fonctionnement des exemptions humanitaires sont les soi-disant « restrictions secondaires unilatérales » introduites en plus des sanctions du Conseil de sécurité.  Ces restrictions sont mises en place en vertu de réglementations nationales et ont parfois une portée extraterritoriale sévère, a—t-il expliqué.  En notant que de telles mesures ont des effets pervers sur l’économie des pays ciblés, il a relevé que ces problèmes sont clairement visibles dans le cas de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Ces « sanctions secondaires » des grands pays occidentaux, a-t-il dit, créent une « atmosphère toxique » autour de Pyongyang et conduisent à la réticence à coopérer avec le pays dans des secteurs qui ne sont pas soumis à des restrictions internationales.  « Ce n’est donc pas un hasard si la Fédération de Russie et la Chine proposent des mesures spécifiques visant à contrer cette tendance pernicieuse. »  

Le délégué s’est insurgé contre de telles mesures touchant le Yémen, pourtant taxé de « plus grande catastrophe humanitaire  des temps modernes ».  Il a aussi jugé inacceptable que les systèmes bancaires des pays tiers aient « encaissé » les avoirs gelés de la Libye, alors que ces fonds devraient être préservés pour les générations futures de ce pays dans l’ère post-crise.  Au sujet de l’Afghanistan, il a estimé que la résolution 2615 (2021) a pour objectif de « bien faire comprendre que l’aide humanitaire n’est pas une violation du régime de sanctions de 1988 ».  Au vu de ces exemples, le représentant a argué que le dispositif de sanctions du Conseil de sécurité a besoin d’une bonne dose d’humanisation.  Il a suggéré une évaluation complète et impartiale de l’impact humanitaire des mesures restrictives internationales.  Il a également proposé que des structures du Secrétariat comme le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) fassent des rapports au Conseil de sécurité sur les conséquences des sanctions. 

Selon M. Polyanskiy, les sanctions du Conseil de sécurité sont les seules légitimes.  Il s’est inquiété de la pratique croissante de certains pays et leurs alliés qui adoptent des mesures coercitives unilatérales.  Pour lui, il s’agit là d’une intrusion dans les prérogatives du Conseil, d’une violation de la souveraineté des États et d’une ingérence dans leurs affaires intérieures.  Il a estimé que cette tendance sape les normes et les institutions du droit international.  Il a jugé particulièrement intolérable que certains pays exigent le respect de leurs propres restrictions aux opérateurs économiques des pays tiers.  Une telle application extraterritoriale des sanctions est contraire aux principes élémentaires du droit international, a-t-il dénoncé.  Il a cité comme exemples la « guerre des sanctions » déclenchée contre la Syrie et qui a un impact extrêmement négatif sur la situation intérieure du pays. 

Le représentant russe a aussi évoqué les « larges restrictions sectorielles » à l’encontre du Bélarus et qui visent à détruire ses entreprises compétitives et à déstabiliser la situation sociopolitique.  Un excellent exemple de politique discriminatoire d’application unilatérale de mesures coercitives est Cuba, a poursuivi le délégué en rappelant que le pays subi un blocus de son voisin du nord depuis plus de 60 ans.  De même, une véritable terreur économique était, il y a quelques années, déchaînée contre le Venezuela et son gouvernement légitime, a-t-il encore cité en se désolant que ces mesures aient conduit le pays à cesser de payer sa contribution au budget ordinaire de l’ONU et à être de ce fait privé de son droit de vote à l’Assemblée générale. 

Le représentant russe a également cité les cas de l’Iran et de l’Afghanistan, avant de considérer comme insoutenables les tentatives de certains acteurs internationaux de « jouer avec les sanctions pour faire pression sur les dirigeants du Myanmar et du Mali ».  Il a relevé le besoin croissant de coopération multilatérale pour trouver des approches collectives pour limiter ces sanctions unilatérales et éviter une perte totale de confiance dans les institutions internationales.  Il a salué le fait que la discussion de ce jour, dans sa phase de préparation, ait provoqué un vif intérêt des États Membres de l’ONU.  Le représentant a appelé le Secrétaire général et les hauts dirigeants de l’Organisation à parler ouvertement en faveur d’une politique de sanctions qui soit centrée sur l’individu et qui garantisse ses droits fondamentaux. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume Uni) a déclaré que les sanctions ciblées sont des outils qui, conformément à la Charte, peuvent jouer un rôle important aux côtés de la diplomatie, de la consolidation de la paix et du maintien de la paix.  Illustrant son propos, il a indiqué que les sanctions ont contribué à mettre fin au conflit et à soutenir la transition vers la paix et la démocratie en Angola, en Côte d'Ivoire, au Libéria et au Sierra Leone.   « En République centrafricaine, elles ont permis d’améliorer les pratiques d’une société minière et en Somalie, l’embargo sur les armes a permis la saisie de milliers de cartouches, de missiles guidés antichars et de fusils de sniper destinés aux Chabab », a-t-il précisé avant de citer en exemple les nouvelles sanctions mises en place en se basant sur la résolution 1267(1999) pour limiter les activités terroristes. 

Pour s’assurer que le recours aux sanctions tienne compte des facteurs humanitaires, le délégué du Royaume-Uni a préconisé des sanctions soigneusement ciblées, visant des objectifs spécifiques, dans le cadre d’une approche globale du règlement des conflits.  Il a ensuite appuyé le principe de l’exception humanitaire dans l’application des sanctions, en expliquant que celle prévue par les Nations Unies pour l’Afghanistan est « une bonne démonstration de la manière dont les régimes de sanctions peuvent être adaptés pour garantir qu’ils n’entravent pas la fourniture d’aide humanitaire d’urgence ».  Enfin, il a cité un dialogue avec les banques et les acteurs humanitaires au sein d’un groupe trisectoriel pour trouver des moyens légaux, sûrs et transparents de garantir que l’aide humanitaire parvienne aux bénéficiaires prévus et ne soit pas entravée par des sanctions. 

M. JUN ZHANG (Chine) s’est félicité de l’initiative de cette réunion en rappelant que les sanctions sont un outil spécial dont dispose le Conseil de sécurité en vertu de la Charte, que les États Membres doivent mettre en œuvre de bonne foi et selon une approche prudente.  Il a toutefois noté une tendance à élargir les sanctions ce qui entraîne des perturbations économiques et sociales touchant aussi les populations civiles des pays tiers.  Le Conseil doit donc se saisir avec sérieux de cette question, a-t-il lancé en plaidant pour la réduction des effets néfastes.  Il a fait plusieurs recommandations à cet égard, la première étant d’utiliser les sanctions comme moyen pour créer un environnement propice à la recherche de solutions politiques, mais sans chercher à se substituer au processus politique.  La menace de l’emploi des sanctions ne doit donc pas être utilisée systématiquement, a-t-il dit en conseillant de passer aussi par la médiation et les bons offices, entre autres.  Il a aussi jugé important de cibler avec précision l’intensité et l’ampleur des sanctions décidées.  Les États Membres doivent respecter et appliquer fidèlement les sanctions du Conseil et ne devraient pas contourner celles-ci ou, à l’inverse, les interpréter de manière excessive, a aussi souhaité le délégué chinois.  « Toute coercition à l’encontre d’un pays devrait être évitée car il faut respecter la souveraineté des pays. »

Il faut également procéder à un examen régulier des régimes de sanctions, a-t-il encore recommandé, souhaitant qu’OCHA et les missions déployées par l’ONU dans les pays visés surveillent les effets des sanctions afin de les signaler au Conseil de sécurité pour que celui-ci puisse proposer des ajustements.  Le représentant a ensuite demandé que les dérogations soient prévues dans le cadre du régime de sanctions, avec des critères humanitaires clairs. Certaines agences humanitaires souffrent beaucoup de ces sanctions, a-t-il rappelé avant de plaider pour que le Conseil envisage leur suspension ou leur allègement pour contribuer à l’atténuation des effets de la pandémie.  En outre, les sanctions du Conseil de sécurité ne devraient pas être imposées pour une durée illimitée et des critère clairs devraient être prévus pour leur levée, a-t-il martelé. Il a demandé que les normes les plus rigoureuses soient appliquées aux sanctions conformément aux principes de diversité et de répartition géographique équitable.  Les experts des comités des sanctions doivent s’acquitter de leurs responsabilités de manière impartiale, a-t-il aussi exigé en demandant que toute rupture de confidentialité soit examinée par le Comité des sanctions. 

Le représentant a rappelé que, de 2002 à 2006, un groupe informel sur la question des sanctions faisait un travail utile pour améliorer et affiner les sanctions.  Il a proposé la mise en place d’un tel groupe à nouveau, pour se pencher sur des recommandations à adresser au Conseil.  Il a également plaidé pour que le Conseil produise des rapports d’évaluation complets.  La Chine espère que la présente réunion lui permettra d’avancer sur ces questions, a-t-il dit. 

S’agissant des effets négatifs, il a parlé de la RPDC qui connaît des conséquences humanitaires graves résultant des sanctions (pénurie alimentaire, conséquences médicales).  Il a rappelé que la Chine et la Fédération de Russie s’étaient portées coauteurs d’un projet de résolution le mois dernier pour éviter ces effets sur ce pays, mais que certains membres du Conseil avaient refusé d’examiner le texte.  Il a donc demandé de reprendre ces consultations pour examiner ces questions de manière responsable. 

Passant aux mesures unilatérales, le délégué chinois a déploré qu’elles aient semé des catastrophes dans de nombreux pays.  Il a cité la crise humanitaire en Afghanistan d’août dernier, qui avait donné lieu à l'adoption d’une résolution sur les sanctions et leurs effets humanitaires.  II a toutefois noté que cela n’a pas amélioré la situation car ce sont en réalité les sanctions unilatérales coercitives qui provoquent une crise dans ce pays. Le délégué s’est donc vivement inquiété de ces mesures.  « Certains pays semblent être dépendants de telles mesures, comme d’une drogue », a-t-il dit, alors qu’elles entraînent des conséquences humanitaires graves, déstabilisent les relations internationales et affectent même le paiement des contributions au budget de l’ONU.  « Ces mesures ont aussi une incidence très négative sur les échanges technologiques commerciaux de par le monde. »  Ces sanctions vont à l’encontre de la Charte, a-t-il aussi dénoncé en appelant « ces pays » à renoncer aux mesures unilatérales pour enrayer les effets néfastes sur les pays visés. 

Mme  GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a indiqué que les sanctions ont un rôle crucial à jouer pour promouvoir l’établissement des responsabilités et prévenir des comportements répréhensibles, tels que la répression violente et les violations des droits humains.  Les sanctions sont un instrument vital pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a dit la déléguée, en ajoutant qu’elles peuvent venir appuyer des transitions pacifiques.  Elle a rappelé que les sanctions sont un élément de stratégies politiques, de maintien et de consolidation de la paix, avant de noter qu’elles peuvent avoir des conséquences non voulues.  «  Les organisations humanitaires ont clairement dit combien ces sanctions peuvent entraver leur travail. »  À cette aune, elle a jugé crucial que ces sanctions soient soigneusement ciblées pour avoir une portée maximale pour les acteurs visés tout en minimisant les conséquences humanitaires.

La déléguée a rappelé que son pays a, au sein de ce Conseil, appuyé l’inclusion d’éléments de langage humanitaire dans les régimes de sanctions en République démocratique du Congo, en République centrafricaine ou encore au Mali.  Elle a assuré que l’Irlande continuera d’appuyer l’adoption de mesures adéquates d’atténuation.  Il est important, dans ce contexte, que le Conseil entende les voix des populations civiles et des acteurs humanitaires, a déclaré Mme  Byrne Nason.  Enfin, elle a dit que l’Irlande œuvre au sein de l’Union européenne à l’adoption de sanctions préventives, ciblées et proportionnées. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes Unis) a estimé que les sanctions sont un outil précieux et utile pour pouvoir maintenir la paix et la sécurité internationales, sans recourir à la force.  Il a néanmoins jugé indispensable d’en atténuer les conséquences humanitaires potentielles, en prévoyant des exemptions.  Nous devrions voir ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné, et insérer des clauses explicites pour minimiser l’impact imprévu des sanctions sur les populations civiles.  Le représentant a plaidé pour des régimes de sanctions adaptés à chaque contexte spécifique.  Il a aussi estimé nécessaire de tenir compte, lors de l’élaboration des sanctions, des risques de détournement ou de pillage de l’aide humanitaire par des groupes et acteurs non étatiques pour financer leurs efforts de guerre ou leurs activités terroristes illégales. 

Le représentant a souligné l’importance d’une évaluation régulière, indépendante et transparente de l’effet des sanctions sur les populations concernées.  Il a exhorté le Conseil à résoudre les problèmes au fur et à mesure qu’ils surviennent, et les Comités de sanctions, à partager leur expérience pour mieux comprendre l’impact humanitaire.  Nous devons, a insisté le représentant, être prêts à réajuster, suspendre ou supprimer les mesures que nous imposons pour pouvoir constamment les adapter et protéger les populations civiles des effets néfastes involontaires. 

M. T.S. TIRUMURTI (Inde) a insisté sur le caractère « provisoire et non permanent » des sanctions, conformément à l’Article 41 de la Charte des Nations Unies.  Les régimes de sanctions ne sauraient être une fin en soi et surtout se garder d’aggraver les souffrances des populations.  Ces régimes doivent être suivis étroitement, adaptés à l’évolution de la situation sur le terrain et dénués de toute politisation.  Pour les améliorer le délégué a fait six propositions.  Les sanctions, a-t-il dit, doivent rester un instrument de dernier recours et respectueux des principes du droit international.  Elles doivent viser un objectif « clair » et ne pas s’éterniser.  Elles doivent, a poursuivi le représentant, être assorties d’efforts pour réduire leur impact négatif sur les populations, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19, et pour ne pas compromettre les activités commerciales et économiques légitimes de l’État concerné et de ses partenaires régionaux. 

S’agissant de leur levée, elle doit se fonder sur des critères réalistes et réalisables.  Il est tout aussi important que les sanctions n’entravent pas l’action humanitaire, a ajouté le représentant, en mettant tout de même en garde contre l’exploitation des exemptions par des groupes terroristes.  Enfin, a-t-il dit, les Comités des sanctions, en particulier leurs Présidents, doivent être plus proactifs pour s’attaquer à des questions telles que les violations techniques des embargos sur les armes, les objections des partenaires humanitaires, le fonctionnement du Groupe d’experts et, dans certains cas, la non-coopération des États Membres.  Il est donc impératif que les méthodes de travail « archaïques et opaques » des organes subsidiaires du Conseil deviennent « ouvertes, transparentes et crédibles ». 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a fait remarquer que les sanctions peuvent prévenir des violations du droit humanitaire et des droits humains.  Des sanctions ciblées peuvent contribuer à la protection des civils et prévenir la violence sexuelle, ainsi que l’enrôlement d’enfants dans les conflits armés, a-t-elle précisé.  Elle a néanmoins souligné la nécessité que ces sanctions soient soigneusement élaborées et mises en œuvre de manière efficace.  Elles doivent être « ajustées » et tenir compte de la situation sur le terrain, a-t-elle recommandé. La déléguée a salué le fait que le Conseil ait adopté l’année écoulée des éléments de langage explicites, selon lesquels l’application des sanctions doit respecter le droit.  Elle a invité le Conseil et les États Membres à dialoguer avec les acteurs humanitaires afin de faire en sorte que les sanctions n’aient pas de conséquences négatives.  Les exemptions humanitaires doivent être rédigées d’une manière qui apporte la clarté nécessaire à tous les acteurs, a encore suggéré la déléguée.  Nous ne pouvons pas accepter les allégations fallacieuses qui présentent les sanctions comme une explication alternative des défis qui sont en réalité nourris par d’autres facteurs, comme les conflits, a-t-elle poursuivi. Enfin, elle a estimé que les personnes visées par les sanctions doivent bénéficier d’un recours juridictionnel. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a noté qu’une trentaine de régimes de sanctions ont été adoptés depuis 1966 se sont révélés des outils politiques peu coûteux, au regard du prix de la guerre.  Il s’est félicité de la tendance aux sanctions ciblées contre des personnes en particulier.  Les sanctions qui menacent les recettes budgétaires des États ont forcément des incidences sur le bien-être des populations, a-t-il insisté.  Espérer que les populations touchées par des sanctions finiront par se retourner contre leur gouvernement est un pari « risqué et illusoire », a estimé le représentant.  Il a noté les 14 régimes de sanctions en cours, dont huit concernent directement des pays africains, avant d’avouer que le cas de l’embargo sur les armes en République centrafricaine est « particulièrement interpellant ».  Les autorités démocratiquement élues de ce pays sont, a-t-il souligné, amputées de leur pleine capacité d’acquérir des équipements pour lutter efficacement contre les bandes armées qui elles, ont souvent des armements plus sophistiqués pour saborder l’autorité de l’État sur une bonne partie du territoire national. 

Le représentant a estimé que cette situation est « intenable » pour le peuple centrafricain et « insoutenable » pour les voisins immédiats de la République centrafricaine, comme le Gabon, qui partage avec ce pays une communauté de libre circulation des biens et des personnes. Il a donc a appelé le Conseil à lever sans condition l’embargo sur les armes, ce qui contribuerait d’ailleurs à atténuer l’ampleur des conséquences humanitaires sur la population civile.  Il a aussi exhorté le Conseil à agir avec la plus grande circonspection lorsqu’il s’agit d’adopter un régime de sanctions contre un État Membre des Nations Unies, en intégrant chaque fois le risque de victimiser les populations.  Enfin, le représentant a rappelé que la résolution 59/45 adoptée par l’Assemblée générale révèle le degré de préoccupation de la communauté internationale sur les effets néfastes des sanctions internationales. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit qu’avec 14 régimes de sanctions en vigueur et près de 1500 inscriptions sur les listes, on peut se demander si une mesure qui devrait être de dernier ressort, est devenue le choix de prédilection pour faire face aux crises insolubles.  Les sanctions peuvent être légitimes et efficaces lorsqu’elles sont créées multilatéralement, stratégiquement ciblées et conçues pour avoir un impact minimal sur les populations civiles.  Mesure de dernier recours, elles doivent intervenir quand toutes les voies diplomatiques ont été épuisées et faire partie d’une stratégie globale contre une crise.  Le représentant a reconnu que le Conseil de sécurité a fait beaucoup de chemin pour améliorer ses régimes de sanctions, avec le passage à des sanctions ciblées, la création des exemptions humanitaires et la mise en place des mécanismes de suivi que sont les groupes d’experts. 

Il a encouragé le Conseil à ajuster encore le cadre des sanctions pour minimiser les souffrances humaines plutôt que de les aggraver.  Les sanctions, a préconisé le représentant, doivent être limitées dans leur portée et dans le temps et préférence, prévoir d’emblée des clauses d’extinction.  Les régimes de sanctions qui s’étalent sur des années sont le signe de leur inefficacité ou de l’absence d’autres outils pour régler une crise.  À son tour, le représentant a plaidé, lors de la conception ou du renouvellement des régimes de sanctions, pour qu’il y ait une évaluation sur leur impact humanitaire potentiel.  Il faut aussi que les critères d’inscription sur les listes et de levée de sanctions soient clairement établies.  Tout en reconnaissant la spécificité de chaque régime de sanctions, le délégué a conclu, en appelant à une plus grande cohérence dans les exemptions humanitaires. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que les sanctions peuvent jouer un rôle vital pour prévenir les menaces à la paix.  Elles compliquent la levée des fonds de la part des terroristes, freinent le renforcement des capacités en armes de destruction massive, comme c’est le cas en RPDC, et accélèrent les processus de paix.  Comme tout outil, les sanctions peuvent être mal utilisées, a-t-elle reconnu, en appelant à améliorer leur application.  Elle a souligné la nécessité d’élaborer des sanctions « efficaces » et « ciblées » en réitérant l’attachement de son pays à un tel objectif.  La déléguée a aussi rappelé que son pays souhaite que des dérogations humanitaires soient prévues dans les régimes de sanctions.  Elle a fait remarquer à cet égard que l’exemption humanitaire adoptée par le Conseil au sujet de l’Afghanistan a facilité l’acheminement de l’aide.  La déléguée a aussi appelé à un dialogue accru entre les groupes d’experts des régimes de sanctions et les organisations humanitaires. 

Les victimes nous demandent régulièrement d’adopter des sanctions contre les personnes qui violent leurs droits, a déclaré la déléguée.  Elle a souhaité l’adoption de sanctions contre des groupes paramilitaires comme le groupe Wagner qui entrave la livraison d’aide et exacerbe les tensions.  La déléguée a aussi fustigé « ces membres du Conseil qui s’opposent à l’inscription des noms de ‘fauteurs de troubles’ sur les listes des personnes frappées de sanctions », entravant l’efficacité desdites sanctions.  Elle a précisé que son pays préfère « de loin » les sanctions multilatérales aux sanctions prises unilatéralement, tout en insistant sur la licéité de ces dernières.  Elle s’est aussi dite favorable aux sanctions prises par des organisations régionales telles que l’UE ou bien encore la CEDEAO.  Abordant le cas particulier de la RPDC, elle a rappelé que le premier obstacle à la livraison de l’aide dans ce pays est la fermeture des frontières, non pas les sanctions.  En conclusion, la représentante a appelé à redynamiser les groupes d’experts des régimes de sanctions. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé que la Charte des Nations Unies est très claire sur la nécessité d’imposer des sanctions pour prévenir de nouvelles violences et faire face aux menaces à la paix.  En tant que telles, les sanctions ciblées sont un élément important de la boîte à outils du Conseil, un élément qui doit être utilisé avec le plus grand soin et la plus grande précision.  Les sanctions, a insisté le représentant, doivent être mesurées et proportionnelles pour être efficaces et éviter les dommages collatéraux ou les conséquences imprévues.  Ces sanctions doivent donc faire l’objet d’un suivi régulier, à tous les stades: élaboration, application et évaluation.  Le représentant a invité le Conseil de sécurité à renforcer l’efficacité des sanctions, mais aussi à autoriser des exemptions si nécessaire.  C’est précisément, a-t-il fait observer, ce que la résolution 2615 sur l’Afghanistan a fait.  

Le représentant s’est opposé à l’idée de suspendre les sanctions en cas d’urgence, au risque de compromettre l’objectif poursuivi et de porter atteinte à la notion même de leur inviolabilité.  Mais, a-t-il conclu, le Conseil doit être plus attentif et soutenir les Comités des sanctions et les groupes d’experts pour atténuer les conséquences néfastes, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19. 

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a rappelé qu’en 2018, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’impact négatif des mesures coercitives unilatérales, M. Idriss Jazairy, avait fait valoir que les sanctions économiques peuvent dégénérer en blocus qui « exposent les gens aux ravages de la guerre économique en temps de paix ».  Nous devons tenir compte de l’éthique et de la légalité des sanctions au-delà de leur impact humanitaire, a—t-il préconisé.  Quand elles sont appliquées unilatéralement, leur légitimité est sapée, a-t-il dit en parlant de ces sanctions.  « La fréquence et la portée des sanctions unilatérales ont conduit à une opinion croissante selon laquelle elles sont les armes du fort contre le vulnérable ou le faible. »  Le délégué a jugé qu’à ce titre, ces mesures ont sapé la foi dans le multilatéralisme.  Reconnaissant que les groupes terroristes doivent être sanctionnés et que leurs finances, leur recrutement et leurs déplacements sont perturbés dans le monde entier, il a fait remarquer qu’il y a pourtant aujourd’hui une filiale d’Al-Qaida en Somalie, qui a assassiné des dizaines de milliers de gens dans plusieurs pays mais qui est considérée par le Conseil de sécurité comme « un simple saboteur politique interne ». 

« Nous ne pouvons pas avoir une lutte antiterroriste à deux vitesses.  « M. Kiboino a également constaté que les groupes terroristes prélèvent parfois des frais sur l’accès humanitaire et utilisent ces finances pour perpétrer des attaques contre des civils.  Il a demandé que les normes de la logistique de l’aide humanitaire soient combinées à des mesures fortes pour limiter le financement du terrorisme.  Il faut intégrer dans les régimes de sanctions l’exigence automatique d’examens périodiques pour s’assurer qu’à toutes les étapes, ils remplissent encore leurs buts, a-t-il également recommandé. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a rappelé que le Conseil a adopté son premier régime de sanctions en 1968 face à la prise de pouvoir illégale dans ce qui était alors la Rhodésie du Sud.  Les sanctions continuent d’être un instrument important pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a dit le délégué, mais elles doivent être ciblées pour éviter des conséquences négatives pour les populations.  Les sanctions, a-t-il plaidé, doivent être une mesure de dernier recours et suivre des lignes directrices, s’agissant notamment des demandes d’exemption au gel des avoirs qui peuvent avoir une incidence humanitaire directe. Les groupes d’experts désignés dans les régimes de sanctions doivent renforcer leur engagement avec les organisations humanitaires afin de collecter des données fiables. 

Le délégué a insisté sur la nécessité de renforcer les mécanismes d’exemption humanitaires, en estimant que ceux qui existent ne permettent pas de remédier aux difficultés.  S’il incombe au Conseil d’atténuer les conséquences humanitaires des sanctions, les autorités nationales doivent aussi veiller à un accès humanitaire sans entraves, a déclaré M. Agyeman.  Il a par ailleurs qualifié d’inacceptables les sanctions unilatérales, compte tenu de leurs graves conséquences pour les populations.  Il a attiré l’attention sur l’exemple des organisations régionales, comme la Communauté économique des pays d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont les régimes de sanctions sont souvent efficaces et d’une durée limitée. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé que les sanctions s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie politique visant à la prévention et à la résolution des conflits, à la lutte contre la prolifération des armes nucléaires, contre le terrorisme et contre les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Pour tenir compte des potentiels effets négatifs de certaines d’entre elles sur l’acheminement de l’aide humanitaire et médicale, la représentante a dit la nécessité de sanctions ciblées et proportionnées, flexibles et réversibles, et levées lorsque les objectifs sont atteints.  S’agissant du suivi des sanctions, elle a salué le travail des comités de sanctions et des panels d’experts avant de souligner la responsabilité du Conseil de s’assurer que l’aide humanitaire sera acheminée à l’ensemble des personnes dans le besoin, dans le plein respect des principes humanitaires.  

Par ailleurs, la représentante de la France a rappelé que le Conseil a introduit des exemptions humanitaires pour garantir que les sanctions onusiennes relatives aux Taliban (régime 1988), à la Somalie, à la Corée du Nord et au Yémen n’entravent pas la réponse humanitaire. « Nous devons continuer à adopter une approche au cas par cas, tenant compte de la spécificité de chaque contexte » a insisté Mme Broadhurst avant de préciser que le Conseil de sécurité a introduit, à l’initiative de la France, des dispositions visant à mieux préserver l’espace humanitaire dans les régimes de sanctions relatifs à la RDC, à la RCA et au Mali. En outre, la représentant de la France a rappelé que l’Union européenne (UE) a toujours pris ses responsabilités pour s’assurer que les sanctions qu’elle adopte n’entravent pas l’action humanitaire.  « Les mesures restrictives de l’UE, conformes au droit international, sont ciblées, afin d’éviter ou d’atténuer leurs potentiels effets négatifs », a-t-elle assuré avant d’ajouter que l’UE a mis en place des dérogations et exemptions pour préserver l’acheminement de l’aide humanitaire et médicale. 

Mme Broadhurst Estival a précisé que la France a mis en place un canal de communication direct entre les banques et les ONG, pour lutter contre le phénomène de surconformité des banques et de contribuer ainsi à préserver à la fois les enjeux de lutte contre le financement du terrorisme et l’espace humanitaire.  Appelant à ne pas politiser la question des sanctions, le représentant de la France a cité la tenue, du 21 au 23 mars 2022, d’un Forum humanitaire européen qu’elle organise avec l’UE dans le but de protéger l’espace humanitaire et répondre aux besoins des populations. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a rappelé qu’il y a quelque temps, son pays a mis sur la table la nécessité de sauvegarder l’espace humanitaire, à travers une initiative conjointe avec l’Allemagne et la Suisse.  Et plus récemment, le Mexique a coparrainé avec l’Union européenne une série de discussions sur la protection et la sécurité du personnel humanitaire dans les conflits, et la question de l’impact négatif et imprévu des sanctions y est également abordée.  Il a estimé que ces initiatives ont porté leurs fruits, puisque « nous sommes passés du débat sur la question de savoir si les sanctions produisent ou non des conséquences humanitaires indésirables, à un stade où on parle d’action pour essayer de prévenir ou d’atténuer ces impacts ». 

Le représentant mexicain a évoqué le cas de la Somalie et le renforcement récent du langage humanitaire dans le régime de sanctions en République démocratique du Congo, ainsi que l’adoption de la résolution 2615 (2021) du Conseil de sécurité créant une exception humanitaire en Afghanistan.  Cependant, il reste encore un long chemin à parcourir, a-t-il dit.  Il a noté que les sanctions imposent de sérieuses restrictions aux donateurs pour fournir des fonds et du matériel aux acteurs humanitaires.  Parfois, elles entraînent également des poursuites pénales contre le personnel humanitaire, et elles peuvent générer une onde de choc qui dissuade de participer ou de coopérer à des programmes de nature humanitaire et finissent par affecter la population qui précisément aurait dû en profiter.  Par conséquent, le Mexique s’oppose à l’imposition de sanctions unilatérales en dehors du système des Nations Unies, comme c’est le cas de l’embargo contre Cuba, a conclu le délégué. 

M. AMMAR MOHAMMED MAHMOUD MOHAMMED (Soudan) a déclaré que les sanctions soulèvent de nombreuses questions s’agissant de leur efficacité et de leurs effets délétères.  Il s’est dit préoccupé par le recours du Conseil de sécurité aux sanctions, qu’elles soient ciblées ou non.  Il y a une suspicion de politisation de ces sanctions, a-t-il dit, en doutant de leur légitimité.  Il a rappelé que son pays est frappé par un régime de sanctions qui a eu un effet négatif pour « l’image » du Soudan.  Les flux d’investissements étrangers ont été entravés, tandis qu’un climat de défiance à l’égard du Soudan s’est instauré, a-t-il témoigné.  Fort de cette expérience, le délégué du Soudan a demandé que les régimes de sanctions soient réalistes, non-politisés et aient une durée limitée.  Les sanctions doivent être levées dès que les conditions sur le terrain ont changé, a conclu le délégué. 

M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a exprimé sa satisfaction quant à la convocation de cette réunion sur les questions générales relatives aux sanctions. Soulignant qu’il n’y a pas de sanctions imposées directement à son pays par l’ONU ou bilatéralement par les États Membres, il a néanmoins cité « les sanctions ciblées imposées injustement aux fonctionnaires et aux entités et l’embargo sur les armes » qui ont eu un impact négatif sur le peuple du Soudan du Sud.  Il a attiré l’attention sur la « perception qu’il a créée », faisant observer que le monde des affaires a été confronté à des difficultés dans les transactions commerciales, en particulier avec les banques.  Il en a expliqué les conséquences sur le coût du commerce et donc sur les consommateurs.  Par conséquent, a-t-il regretté, ces sanctions rendent la vie et les moyens de subsistance plus difficiles pour les Sud-Soudanais. 

En tant que pays devenu indépendant après une guerre civile de plus de 50 ans et qui a été ébranlé par un conflit interne, le Soudan du Sud aurait préféré que Conseil de sécurité utilise d’autres mécanismes de règlement des conflits que des sanctions comme moyen de résoudre les problèmes politiques, a déclaré M. Malwal. I l n’a pas jugé bon que le Conseil utilise les sanctions « comme la meilleure méthode pour atteindre son objectif », sans nécessairement épuiser de meilleures options.  Cela a aggravé la situation, a-t-il estimé, expliquant que les sanctions ou la peur de celles-ci ont polarisé les parties et creusé un fossé dans la recherche d’une paix et d’une sécurité durables.  Et ces sanctions ont aggravé la situation humanitaire, plus particulièrement pendant la pandémie, a-t-il ajouté.  En conclusion, le délégué a réaffirmé que le Soudan du Sud n’appuie pas les sanctions sous quelque forme que ce soit, en particulier lorsqu’elles n’atteignent pas l’objectif visé.  Le Conseil de sécurité et le système des Nations Unies en général devraient rechercher un monde pacifique par d’autres moyens que des sanctions, a-t-il plaidé.  « Vous ne pouvez pas rechercher ou maintenir la paix mondiale en utilisant un moyen qui est dur. »

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a jugé que les régimes de sanctions du Conseil de sécurité doivent être améliorés, afin de trouver un juste milieu entre l’efficacité nécessaire pour obtenir le résultat voulu et les conséquences néfastes éventuelles, notamment sur les plans socioéconomique et humanitaire, pour les populations ».  Le délégué a souligné la nécessité d’engager une réflexion approfondie pour évaluer l’efficacité du régime de sanctions individuelles imposé dans son pays, Le Mali, quatre ans après sa mise en place.  La recherche du « juste milieu » doit également inspirer les organisations régionales et sous régionales, a-t-il dit.  Les sanctions politiques, économiques et financières imposées au Mali par la CEDEAO et l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), le 9 janvier 2022, engendrent des conséquences humanitaires désastreuses pour les populations maliennes, s’est expliqué le représentant, en jugeant qu’elles non aucune base juridique, étant donné qu’elles ont été prises en violation flagrante des textes fondateurs de ces organisations, des principes de solidarité et de l’idéal panafricain. 

Le délégué a dénoncé la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Mali, ainsi que le gel des avoirs de l’État malien et des entreprises publiques et parapubliques dans les banques commerciales des pays de la CEDEAO.  Certes la CEDEAO s’emploie à expliquer, « sans convaincre », que ces sanctions ne visent pas les populations maliennes et que les produits de premières nécessités sont épargnés « mais la réalité est tout autre », a martelé le représentant.  Les sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA, a-t-il tranché, visent essentiellement les populations du Mali, qui avaient plutôt besoin de solidarité régionale.  C’est avec les ressources aujourd’hui gelées que le Gouvernement du Mali fait fonctionner les hôpitaux, les centres de santé, les écoles, et assure le paiement des fonctionnaires, l’eau, l’électricité et autres services sociaux de base.  Malgré le caractère « illégal, illégitime et inhumain » de ces sanctions, le Mali, a conclu le représentant, reste ouvert au dialogue avec la CEDEAO. 

M. SARHAD SARDAR ABDULRAHMAN FATAH (Iraq) a appelé à la prudence dans l’élaboration des régimes de sanction afin de prévenir tout impact négatif sur les populations civiles et l’aide humanitaire.  Insistant sur la nécessité d’assurer le suivi des sanctions contre Al-Qaida, Daech et les personnes affiliées, le représentant a estimé que l’idéal serait que les sanctions soient « ciblées et intelligentes », sans conséquence humanitaire.  Évoquant la résolution 1518 du Conseil de sécurité sur le gel des avoirs imposé dans son pays, il a plaidé pour leur restitution pour pouvoir faire avancer les objectifs de développement durable. 

M. SAMUEL MONCADA (Venezuela), qui s’exprimait aussi au nom du Groupe des amis de la Charte, a indiqué que les mesures prévues au Chapitre VII de la Charte ne doivent être prises qu’en dernier recours et conformément aux buts et principes énoncés dans la Charte, en mettant en garde contre leurs conséquences négatives pour les civils et les agents humanitaires.  La population de l’État soumis à de telles mesures ne doit pas être privée de ses moyens de subsistance et de développement, a-t-il expliqué.  Le délégué a rejeté la politisation de l’aide humanitaire.  « L’aide humanitaire constitue une composante fondamentale de la protection des civils en période de conflit armé et doit être assurée conformément aux principes directeurs établis dans la résolution 46/182 de l’Assemblée générale. »

Le représentant a fustigé les sanctions unilatérales illégales prises par un groupe de pays.  C’est un unilatéralisme de groupe qui vise à faire plier des nations souveraines et à infliger délibérément des souffrances, a accusé le délégué.  Il a indiqué que ces sanctions sont une « cruauté » assumée.  Par ces sanctions unilatérales, c’est la population civile qui est attaquée, a insisté le délégué, en les qualifiant de crimes contre l’humanité.  Le délégué a invité le Conseil à condamner sans équivoque ces sanctions unilatérales, qui sont des facteurs de crise.  « N’ignorez pas les appels en faveur de l’élimination des sanctions unilatérales. » 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Développement durable: l’ECOSOC conclut son tout premier débat consacré aux questions de coordination par des appels aux synergies à l’échelle du système des Nations Unies

Session de 2022,
7e et 8e séances plénières – matin & après-midi
ECOSOC/7071

Développement durable: l’ECOSOC conclut son tout premier débat consacré aux questions de coordination par des appels aux synergies à l’échelle du système des Nations Unies

Pour sa seconde journée de débats consacrée à la coordination, le Conseil économique et social (ECOSOC) a continué de mettre l’accent sur les moyens d’assurer le relèvement postpandémie tout en accélérant la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, les progrès à cet égard ayant été ralentis par les efforts considérables déployés au niveau international pour lutter contre la COVID-19. 

« Il sera important de tendre vers la convergence dans nos efforts pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, collectivement et de manière holistique », a déclaré le Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) qui a appelé l’organe à s’appuyer plus systématiquement sur l’expertise des institutions spécialisées de l’ONU et de ses commissions fonctionnelles pour fournir aux États Membres des données et des orientations politiques fondées sur des éléments concrets. 

Convaincu que le relèvement post-COVID offre l’opportunité d’une transition vers des sociétés plus équitables, durables et inclusives, M. Suriya Chindawongse a appelé à se concentrer sur les pays et les personnes les plus vulnérables et les changements structurels à apporter aux systèmes économiques, financiers et sociaux, soulignant en outre que l’équité vaccinale reste une priorité absolue, tout comme l’ accès équitable aux ressources financières. 

« Si l’on réussissait à faire des progrès rapides vers les ODD dans les pays en situation particulière et dans les pays en conflit ce serait une des grandes victoires de l’humanité », a déclaré le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales qui a souligné qu’une reprise juste, équitable et durable qui ne laisse personne de côté nécessite des institutions de gouvernance efficaces, inclusives et responsables  ainsi que des institutions publiques et des financements privés.  Le changement transformationnel nécessaire exigera notamment que nous redoublions d’efforts pour parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, a encore précisé M. Liu Zhenmin qui, parmi les autres domaines qui requièrent une action urgente, a cité les changements climatiques, la déforestation, la pollution et les déchets, et la perte de biodiversité. 

Exhortant à mobiliser la volonté politique nécessaire pour construire et maintenir la paix, mobiliser des ressources adéquates et renforcer les capacités, le Chef du Département des affaires économiques et sociales (DESA) a estimé en outre que pour mieux reconstruire, il va falloir suivre des voies de croissance qui donnent la priorité à la création d’emplois et promeuvent une croissance durable sur le plan environnemental. 

Le débat consacré aux questions de coordination de l’ECOSOC a été créé par l’Assemblée générale en juin 2021 pour permettre au Conseil de mieux remplir le rôle que lui confère la Charte, à savoir coordonner le système onusien et ses organes subsidiaires pertinents dans les domaines économique, social, sanitaire, environnemental et connexes. 

Aujourd’hui, les présidentes et présidents de pas moins de 23 différents organes subsidiaires de l’ECOSOC ont donc fait le point sur leurs efforts de coordination dans des domaines aussi différents que les forêts et les populations autochtones, la coopération internationale en matière de fiscalité, les politiques de développement, mais aussi les normes internationales de comptabilité et de publication, ou encore les stupéfiants et la classification et l’étiquetage des produits chimiques. 

D’ailleurs, cette coordination dépasse le système des Nations Unies pour s’étendre aux organisations régionales, comme c’est le cas de l’Union africaine (UA), avec laquelle collabore la Commission économique pour l’Afrique (CEA), dont la Secrétaire exécutive, Mme Vera Songwe, a expliqué qu’elles avaient fait de la promotion de l’équité vaccinale sur le continent un cheval de bataille.  

De son côté, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE) a appelé à privilégier des approches intégrées qui exploitent les synergies du Programme  2030 et conduisent à des politiques plus efficaces et percutantes.  Pour cela, les aspects transfrontaliers doivent être pris en compte, a affirmé Mme Olga Algayerova, citant en exemple les cadres normatifs mis en place par la CEE dans des domaines tels que le transport ou l’environnement, qui facilitent la coopération transfrontalière et la gestion des ressources communes. 

D’une intervention à l’autre, plusieurs thèmes ont émergé, en particulier celui de l’autonomisation des femmes et des filles, qui, a indiqué la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Sima Bahous, ont été les plus durement touchées par la pandémie, pas seulement sur le plan sanitaire, mais aussi sur celui de la perte des opportunités économiques, qui les a lésées lourdement.  

Faute d’être protégées par l’école, 10 millions de filles pourraient être mariées de force d’ici à 2030, a prévenu à son tour la Directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) qui a expliqué que l’UNESCO avait rassemblé plus de 170 partenaires dans le cadre d’une coalition mondiale pour assurer la continuité éducative et rouvrir les écoles dans 110 pays.  Mme Audrey Azoulay a également estimé que le premier Sommet sur la transformation de l’éducation, qui se tiendra à l’UNESCO en septembre 2022, pourra s’appuyer sur les réflexions que mènera en juillet le forum politique de haut niveau de l’ECOSOC au sujet du rôle catalyseur de l’éducation sur l’ensemble du Programme 2030.  

Parmi les États Membres à s’être exprimés aujourd’hui, les États-Unis ont mis en garde contre la multiplication des sessions, des réunions, des mandats et des documents de travail.   L’ECOSOC doit apprendre à rationaliser et hiérarchiser l’utilisation de ses mandats et de ses ressources déjà limitées, a fait observer la délégation américaine.   À l’inverse, l’Argentine a suggéré d’intercaler des réunions de suivi entre les sessions et les forums annuels de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires, pour enrichir de données pertinentes les sessions à venir. 

DÉBAT CONSACRÉ AUX QUESTIONS DE COORDINATION

Discussion sur le thème « Tirer parti des perspectives régionales pour une reprise inclusive et résiliente guidée par le Programme 2030 »

Mme OLGA ALGAYEROVA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), a souligné l’importance, pour sa région, du Forum régional sur la réalisation du développement durable, plateforme incitant de multiples acteurs à accélérer la mise en œuvre des ODD.  Ce Forum, a-t-elle détaillé, est le fruit de l’étroite collaboration du système onusien régional, qui s’emploie à refléter les besoins et préoccupations de la région.  En 2022, il se tiendra parallèlement au deuxième Forum des maires de la CEE et explorera la façon de lier les actions locales et nationales en faveur de la réalisation des ODD, a encore indiqué Mme  Algayerova, en insistant sur la nécessité d’agir « à tous les niveaux ».  Elle a ajouté que le Forum fera aussi le point sur les ravages de la crise liée à la COVID-19, tout en réfléchissant à l’avenir. 

En effet, a-t-elle relevé, si la pandémie a affecté le développement durable en aggravant les inégalités existantes, elle a également suscité de nouvelles impulsions politiques pour façonner une reprise transformatrice qui s’attaque à des défis tels que les changements climatiques et la dégradation de l’environnement.  De fait, il convient, selon elle, de promouvoir des solutions sur la base d’approches intégrées qui exploitent les synergies du Programme 2030 et conduisent à des politiques plus efficaces et percutantes.  Pour cela, les aspects transfrontaliers doivent être pris en compte, a-t-elle affirmé, citant en exemple les cadres normatifs de la CEE dans des domaines tels que le transport ou l’environnement, qui facilitent la coopération transfrontalière et la gestion des ressources communes. 

Selon sa Secrétaire exécutive, la CEE s’attache également à mettre l’environnement bâti en conformité avec les exigences du développement durable, notamment en matière d’atténuation des changements climatiques.  Tout en aidant les pays à accroître l’efficacité énergétique des bâtiments, par le biais d’activités de conseil et de renforcement des capacités, elle exploite le potentiel des technologies en vue de meilleurs services publics dans les villes.  De plus, la Commission mobilise des financements pour rendre possibles les projets transformateurs.  Consciente de l’importance des modes de consommation et de production durables, la CEE mène aussi des travaux sur l’économie circulaire et l’utilisation durable des ressources naturelles, avec un accent particulier sur la traçabilité, le traitement des déchets et l’innovation qui font l’objet de projets de coopération technique. 

Mme ARMIDA SALSIAH ALISJAHBANA, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a mis l’accent sur les possibilités offertes par le Forum Asie-Pacifique pour le développement durable, dont 2022 marquera la huitième session.  Il s’agit d’une plateforme qui propose des perspectives régionales sur l’accélération des progrès dans la réalisation des ODD.  Outre le suivi des progrès, la CESAP met régulièrement en exergue des politiques et solutions pour qu’aucun pays ne soit laissé pour compte, notamment le renforcement de la protection sociale dans plusieurs États de la région et les systèmes de santé universels afin que chacun soit vacciné.  La Commission, a indiqué la haute fonctionnaire, œuvre aussi à établir des liens entre climat et développement et à promouvoir « un relèvement bleu », axé sur une gestion viable des océans.  Mme Alisjahbana a également souligné les mérites du programme d’action pour le développement des transports régionaux, qui s’efforce de prioriser les « échanges intelligents » pour que biens et services continuent de circuler pendant la pandémie. 

Mme ROLA DASHTI, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a fait remarquer que la région arabe a l’un des taux d’inégalité les plus élevés au monde, une situation qui est allée en s’aggravant pendant la pandémie.  Fin 2020, a-t-elle précisé, les 1% les plus riches détenaient près de 45% de la richesse totale et les 10% les plus riches en contrôlaient 81%.  Cela étant, 27% de la population de la région vit sous le seuil de pauvreté, selon les statistiques nationales.  Dans ce contexte, la CESAO estime que la région arabe, qui a également la plus forte concentration de réfugiés et de personnes déplacées, a besoin de 462 milliards de dollars supplémentaires pour une reprise rapide et plus inclusive. 

Notant que la COVID-19 a poussé la dette publique brute de la région arabe à 1 400 milliards de dollars, un niveau « historique », Mme Dashti a fait état du lancement par la CESAO d’un mécanisme de financement innovant qui offre des résultats « gagnant-gagnant » pour les pays débiteurs et créanciers qui s’engagent à respecter les ODD et les dispositions de l’Accord de Paris, tout en faisant progresser les coopérations Nord-Sud et triangulaire.  Elle a d’autre part indiqué qu’alors que seulement 35% des habitants de la région bénéficient d’une couverture sociale, la CESAO réunit des ministres et leurs équipes techniques pour contribuer à la réforme des programmes de protection sociale et ainsi réduire les inégalités.  La CESAO aide en outre les gouvernements à optimiser leurs dépenses sociales, a ajouté la Secrétaire exécutive, affirmant attendre des débats constructifs sur ces questions lors du Forum arabe pour le développement durable qui se tient le mois prochain. 

Mme VERA SONGWE, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a mis en avant le partenariat existant entre la CEA et l’Union africaine (UA), avec qui des échanges ont eu lieu pas plus tard que cette semaine sur la meilleure manière de promouvoir l’équité vaccinale.  Ces efforts conjoints ont abouti à la mise à disposition de dizaines de millions de doses de vaccin Janssen à ce jour.  Or, nous savons que ce sont les femmes qui ont été les durement plus touchées par la pandémie, laquelle leur a fait perdre leurs emplois et porter un fardeau très lourd sur le plan économique, a souligné Mme Songwe.  C’est la raison pour laquelle la CEA forme des jeunes femmes pour les aider à s’autonomiser en créant leurs propres entreprises.  « Mais, comme nous le savons, le financement est très compliqué », a-t-elle reconnu.  Elle a expliqué que dans le cas de quatre pays de la région qui sont en situation « de très grand risque », une initiative de suspension de la dette avait été lancée, assortie de la création de fonds souverains.  Considérant qu’il faut maintenant « passer de Glasgow à Charm el-Cheikh », la Secrétaire exécutive a déclaré qu’il était temps de trouver les moyens de lever des financements pour décarboniser les économies en dehors des mécanismes de marché. 

Mme ALICIA BÁRCENA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a déclaré que l’intégration régionale et la solidarité sont impératives pour lutter contre les disparités croissantes entre pays développés et pays en développement, en particulier pour ce qui est de l’accès aux vaccins contre la COVID-19.  La région Amérique latine et Caraïbes est l’une des plus endettées au monde, avec des taux de croissance très faibles cette année, un chômage considérable et une économie informelle qui ne l’est pas moins.  Elle a insisté sur l’impératif de rouvrir les écoles, indiquant ensuite que la CEPALC cherche aussi à mettre l’accent sur la fourniture de soins et l’accès aux vaccins.  Il s’agit de moteurs du relèvement, a insisté Mme Bárcena, en évoquant le plan d’autosuffisance vaccinale présenté par la CEPALC pour stimuler la production et la distribution de vaccins dans la région. 

Exposés des présidentes et présidents des organes subsidiaires du Conseil économique et social

Mme GABRIELLA VUKOVICH, Vice-Présidente de la cinquante-deuxième session de la Commission de statistique, a précisé que la Commission répond à la demande accrue en statistiques, lesquelles sont cruciales pour les politiques publiques.  « La communauté statistique internationale a répondu de manière innovante et agile à la demande accrue de données désagrégées dans le contexte de la pandémie. »  Elle a précisé les sujets que la Commission abordera lors de sa cinquante-troisième session, citant notamment les indicateurs des ODD ou bien les statistiques liées aux changements climatiques.  Enfin, elle a assuré de la détermination de la Commission à travailler étroitement avec l’ECOSOC, en indiquant que la question statistique est de nature transversale.

M. ENRIQUE A. MANALO (Philippines), Président de la cinquante-cinquième session de la Commission de la population et du développement, a rappelé qu’en avril 2021, cette dernière a adopté par consensus une résolution axée sur la sécurité alimentaire et la nutrition, qui appelait à maintenir le fonctionnement, pendant la pandémie, des chaînes d’approvisionnement alimentaires et agricoles, ainsi que des systèmes de santé et de couverture sanitaire universelle.  La Commission, a souligné le délégué, a également exhorté les États Membres à permettre un accès à des vaccins contre la COVID-19 sûrs et efficaces, y compris par le biais du Mécanisme COVAX.  Plus largement, a-t-il précisé, la Commission cherche à mettre pleinement en œuvre le programme d’action de la Conférence internationale de 1994 sur la population et le développement, indispensable pour réalisation des ODD. 

Le représentant a ajouté que, lors de sa cinquante-cinquième session, qui se tiendra en avril 2022 sur le thème « Population et développement durable en vue d’une croissance économique soutenue et inclusive », la Commission examinera les implications des grandes tendances démographiques pour éradiquer la pauvreté et la faim, et pour promouvoir la santé, l’éducation, l’égalité des sexes et la production et consommation.  Il a souhaité à cette occasion que la Commission bénéficie d’une plus grande collaboration avec la Commission de statistique sur les données démographiques et avec la Commission du développement social sur les stratégies visant à atteindre un développement inclusif et durable. 

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a pris la parole en tant que Présidente de la soixantième session de la Commission du développement social.  Elle a rappelé que, l’an dernier, la Commission avait abordé le rôle des technologies numériques en faveur du développement social et avait formulé des recommandations politiques pour réduire les fractures numériques et promouvoir l’inclusion numérique.  La prochaine session de la Commission, qui commence la semaine prochaine et se tiendra du 7 au 16 février, portera sur l’éradication de la pauvreté et de la faim, étant donné que la pandémie de COVID-19 a touché des millions de personnes qui se retrouvent dans l’extrême pauvreté et l’insécurité alimentaire.  Mme Squeff a invité à « travailler ensemble sur un nouveau contrat social » dans lequel tous les individus ont les mêmes opportunités.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud), Présidente de la soixante-sixième session de la Commission de la condition de la femme, a souligné l’importance que revêt pour cette Commission la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.  Elle a d’autre part indiqué que, depuis 2016, la Commission a adopté des conclusions négociées sur des thèmes prioritaires en lien direct avec la réalisation du Programme 2030.  Parmi ces thèmes figurent la pleine participation des femmes et leur leadership décisionnel, ainsi que la lutte contre toutes les discriminations et violences liées au genre.  Mme Joyini a rappelé que la Commission tiendra sa soixante-sixième session du 14 au 25 mars prochains, avec pour fil rouge les efforts visant à parvenir à l’égalité des sexes dans le contexte des changements climatiques et la promotion d’un avenir durable.  Elle a souhaité que les conclusions de cette session contribuent aux travaux de l’ECOSOC et du forum politique de 2022. 

M. GHISLAIN D’HOOP, Président de la soixante-cinquième session de la Commission des stupéfiants, a invité, lorsqu’on parle de reconstruire en mieux, à reconnaître les effets dévastateurs que la pandémie de COVID-19 a sur les efforts de lutte contre le problème mondial de la drogue.  Il a donc attiré l’attention sur la question des stupéfiants qui n’est « pas souvent mentionnée dans les discussions à New York », y compris au sein de l’ECOSOC.  Il a appelé à mettre en œuvre des efforts multidisciplinaires coordonnés pour garantir que personne ne soit laissé pour compte.  Cette volonté est bien reflétée dans la déclaration conjointe de la Commission des stupéfiants sur l’impact de la COVID-19, adoptée lors de la soixante-quatrième session en 2021, a précisé M. D’Hoop en assurant que la Commission accompagne les États Membres dans sa mise en œuvre.  Il a aussi expliqué que la Commission favorise l’échange de bonnes pratiques et d’enseignements tirés lors de ses discussions thématiques annuelles et dans les réunions de ses organes subsidiaires.  Lors de ses réunions régionales, les praticiens nationaux échangent des connaissances concernant l’impact régional de la COVID-19 sur la situation mondiale en matière de drogue, a-t-il ajouté.  La Commission souhaite travailler davantage sur l’amélioration de la disponibilité et de l’accès aux substances contrôlées à des fins médicales et scientifiques.  Ce sera une priorité essentielle dans les mois à venir, a indiqué son Président.

M. TAKESHI HIKIHARA (Japon), Président de la trente et unième session de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, a expliqué que cette Commission mène une action concertée pour aider les États Membres à prévenir et combattre la criminalité, en rendant les systèmes de justice pénale plus efficaces, responsables et inclusifs, et en renforçant la coopération internationale dans ce domaine.  Par ces activités, la Commission contribue à la réalisation des ODD, dont l’objectif no 16 - Promouvoir des sociétés pacifiques et inclusives.  En mars dernier, le quatorzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale a adopté la Déclaration de Kyoto sur le thème « Faire progresser la prévention du crime, la justice pénale et l’état de droit: vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », a rappelé M. Hikihara.  En effet, la pandémie de COVID-19 a eu de graves ramifications dans ce contexte, a-t-il regretté en soulignant les nouvelles opportunités qu’elle a créées pour les criminels et les sérieux défis qu’elle a posés aux systèmes de justice pénale.  En novembre dernier, consciente de la nécessité de reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19, la Commission a organisé le premier cycle de 12 discussions thématiques axées sur la prévention de la criminalité, pour favoriser la mise en œuvre de la Déclaration de Kyoto, a indiqué le Président de la Commission.

M. PETER MAJOR, Président de la vingt-quatrième session et Vice-Président de la vingt-cinquième session de la Commission de la science et de la technologie au service du développement, a indiqué que la pandémie a accéléré la numérisation en de nombreux domaines, tout en soulignant la persistance d’un fossé numérique.  Il a invité les pays à remédier à ces inégalités numériques et à promouvoir la solidarité internationale.  Le transfert des connaissances et la révision des droits de propriété pour assurer un accès inclusif aux nouvelles technologies sont des pistes à explorer, a dit M. Major.  Il a aussi souligné la nécessité de remédier aux inégalités de genre.  Il a précisé que la prochaine session de la Commission se tiendra du 28 mars au 1er avril 2022, en ajoutant que les discussions seront axées sur le rôle des technologies numériques dans le relèvement postpandémie. 

M. MANSOUR AL-QURASHI, Président de la Commission de la science et de la technologie pour le développement à sa vingt-cinquième session, a parlé du rôle des sciences, de la technologie et de l’innovation dans la relève post-COVID-19 et de l’action de la Commission dans ce domaine ainsi que dans le suivi de l’application de la déclaration du forum politique de haut niveau de 2021 et du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI).

Mme MIRIAM MAC INTOSH, Secrétaire permanente du Ministère des affaires étrangères, du commerce international et de la coopération internationale du Suriname et Présidente désignée de la dix-septième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF), a indiqué que cet organe aborde toutes les questions liées aux types de forêts de manière intégrée et holistique.  Il supervise également la mise en œuvre du plan stratégique des Nations Unies sur les forêts (2017-2030) et œuvre en faveur d’une collaboration renforcée au sein du système des Nations Unies pour promouvoir un programme cohérent de forêts et de développement durable.  Lors de sa dernière session en avril 2021, a-t-elle rappelé, le Forum a examiné les impacts de la pandémie de COVID-19 sur les forêts et le secteur forestier, ainsi que les moyens d’y faire face.  À cette occasion, il a aussi adopté son plan de travail pour 2022-2024 et publié son premier rapport sur les objectifs forestiers mondiaux. 

Selon Mme Mac Intosh, les débats de la seizième session ont souligné le besoin crucial de gérer durablement les forêts et de stopper la déforestation.  Ces efforts sont considérés comme essentiels pour compenser les impacts économiques, sociaux et environnementaux de la pandémie et pour relever d’autres défis planétaires, a assuré la Présidente désignée du FNUF, estimant à cet égard que le plan stratégique des Nations Unies sur les forêts et ses six objectifs forestiers mondiaux fournissent un cadre d’action pour la mise en œuvre du Programme 2030, de l’Accord de Paris et du cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020.  Elle a indiqué que la prochaine session du Forum, en mai prochain, examinera l’efficacité à mi-parcours de l’arrangement international sur les forêts dans la réalisation de ses objectifs. 

Mme MAUREEN RUSKIN, Présidente du Comité d’experts de l’ECOSOC sur le transport des marchandises dangereuses et de la dixième session du Système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques, a mis en exergue les recommandations élaborées sous ses auspices et décrit les travaux de deux organismes.  Elle a indiqué que les pays peuvent utiliser des recommandations comme modèle pour leurs instruments réglementaires nationaux afin d’assurer l’harmonisation avec les règles déjà applicables au niveau international, et les mettre en œuvre en fournissant aux travailleurs et aux consommateurs des informations cohérentes sur les dangers des produits chimiques qu’ils importent, produisent, manipulent, transportent ou utilisent. 

Mme Ruskin a, d’autre part, précisé que, pour faciliter la chaîne d’approvisionnement mondiale des vaccins contre la COVID-19 et aider à l’atténuation de la propagation de la pandémie, le Comité sur le transport des marchandises dangereuses a confirmé que les vaccins dont l’utilisation est autorisée, y compris ceux en cours d’essais cliniques, ne sont pas soumis au règlement type des Nations Unies tel qu’il est actuellement rédigé.  Elle a ajouté que le Comité examinera d’autres recommandations de ce type lors de sa prochaine session en décembre prochain.  Les recommandations approuvées par le Comité, a-t-elle encore relevé, sont intégrées tous les deux ans dans les nouvelles éditions révisées des trois instruments sous sa responsabilité pour mise en œuvre et utilisation dans le monde entier. 

Mme ELSA BEATRIZ GARCIA BOJORGES, Présidente du Groupe de travail intergouvernemental d’experts des normes internationales de comptabilité et de publication, a précisé que son Groupe aide les pays dans l’application des meilleures pratiques dans le domaine de la comptabilité.  « Le but est de promouvoir la stabilité financière, les investissements nationaux et internationaux et les progrès socioéconomiques. »  Ce Groupe a été créé par l’ECOSOC en 1982, a-t-elle rappelé avant de préciser que, depuis l’adoption du Programme 2030, il s’est concentré sur la façon de mesurer l’apport du secteur privé à la mise en œuvre des ODD.  Il aide aussi les pays dans la préparation de leur examen national volontaire, a dit la Présidente avant d’annoncer que le programme de travail du Groupe pour cette année est pleinement aligné avec le thème du forum politique de haut niveau pour le développement durable. 

M. PIERRE JAILLARD, Président de la Commission nationale de toponymie de France et Président de la deuxième session du Groupe d’experts des Nations Unies pour les noms géographiques, a évoqué certaines activités clefs du Groupe d’experts et les initiatives de collaboration en cours avec d’autres organes subsidiaires.  Il a rappelé que les sessions durent cinq jours tous les deux ans et que la dernière a été convoquée en mai 2021 en mode virtuel.  Il a indiqué que le Groupe a élaboré un programme pour examiner les liens actuels et potentiels entre la normalisation des noms géographiques et l’environnement en faveur du développement.  En ce qui concerne les initiatives de collaboration avec d’autres organes subsidiaires, il a cité l’adoption, lors de la dernière session, d’une décision qui énumère les organes et agences des Nations Unies et de la communauté internationale avec lesquelles le Groupe d’experts entend renforcer les relations existantes ou créer de nouvelles. 

Mme INGRID VANDEN BERGHE, Vice-Présidente de l’Initiative des Nations Unies sur la gestion de l’information géospatiale à l’échelle mondiale, a indiqué que la priorité est l’application du cadre intégré sur l’information géospatiale.  Ce cadre vient en appui des priorités nationales de développement et des stratégies de relèvement postpandémie, a-t-elle précisé en ajoutant qu’il participe aussi à la riposte aux changements climatiques.  Mme Vanden Berghe a souhaité la pleine mise en œuvre de la résolution 2016/27 par laquelle les États Membres se sont engagés à renforcer l’information géospatiale à l’échelle mondiale. 

Mme PALOMA MERODIO GÓMEZ, Coprésidente de la onzième session du Comité d’experts sur la gestion de l’information géospatiale à l’échelle mondiale, a expliqué que le Comité d’experts se concentre sur la mise en œuvre du Cadre intégré de l’information géospatiale, un cadre global qui recense les cadres stratégiques, guides, méthodes et normes adoptés à l’échelle mondiale et développés par le Comité d’experts au cours de la dernière décennie, plusieurs d’entre eux en coordination avec la Commission de statistique et le Groupe d’experts des Nations Unies pour les noms géographiques.  Étant mis en œuvre dans de nombreux pays, le Cadre intégré trace la voie pour répondre aux priorités nationales de développement, mettre en œuvre le Programme 2030, répondre et se remettre de la pandémie de COVID-19 et d’autres problèmes complexes, tels que les changements climatiques et la résilience aux catastrophes naturelles. 

Pour contribuer à la demande croissante en connaissances géospatiales, innovation et développement des capacités, le Comité supervise en outre la création d’un centre mondial du savoir géospatial et de l’innovation à Deqing, en Chine, ainsi que le Centre d’excellence géodésique mondial des Nations Unies à Bonn, en Allemagne.  Mme Gómez a ajouté que ses États membres souhaitent renforcer le Comité d’experts et poursuivre leur appui actif au mandat de l’ECOSOC pour combler la fracture numérique et veiller à ce qu’il n’y ait pas de laissés pour compte. 

M. JOSE ANTONIO OCAMPO, professeur de la School of International and Public Affairs, de Columbia University, et Président de la vingt-troisième session du Comité des politiques de développement, a commencé par rappeler que le Comité prône depuis longtemps la centralité des capacités de production dans les efforts mondiaux en faveur du développement durable, tant dans les pays les moins avancés que dans d’autres pays en voie de développement.  Il a ajouté qu’avant même de connaître l’ampleur des effets liés à la pandémie de COVID-19, le Comité avait averti que les changements climatiques et les inégalités faisaient reculer le Programme 2030.  Il convient donc, à ses yeux, d’utiliser la situation actuelle comme une opportunité unique de transformation vers un développement équitable et durable. 

Selon M. Ocampo, cela peut se faire par le biais de politiques du secteur de la production et d’autres stratégies visant à créer des capacités qui prennent en compte, « à la base et non à la marge », les ODD sur l’éducation, le genre et l’environnement, ainsi que sur les changements climatiques et les inégalités.  Cela implique non seulement d’essayer d’atténuer les impacts sociaux et environnementaux négatifs des activités productives, mais aussi de mobiliser la capacité de production pour répondre aux besoins environnementaux et sociaux, a-t-il expliqué, avant d’appeler à un partage d’expériences nationales et infranationales sur ces questions.  Enfin, il a souhaité qu’un dialogue ouvert et inclusif s’ouvre sous l’égide de l’ECOSOC sur ce qui doit changer dans le système multilatéral pour soutenir des actions de développement équitables et durables via la transformation structurelle. 

Mme GERALDINE FRASER-MOLEKETI, Présidente de la vingtième session du Comité des experts de l’administration publique, a indiqué que « les 11 principes » constituent un cadre d’évaluation des capacités institutionnelles et visent à assister les pays dans l’édification des institutions efficaces, redevables et inclusives en vue de réaliser les ODD. 

La Coprésidente des vingt-troisième et vingt-quatrième sessions du Comité d’experts sur la coopération internationale en matière fiscale, Mme LISELOTT KANA, qui est Chef du Département de la fiscalité internationale au Service des recettes intérieures du Chili, a pris la parole pour insister sur l’ODD  17 relatif aux partenariats.  Elle a fait valoir que renforcer la coopération fiscale internationale permettra de soutenir les pays en développement dans la mobilisation des recettes intérieures.  Le Comité a en outre produit des orientations détaillées sur des thématiques telles que: la fiscalité du carbone; le traitement fiscal de l’aide de gouvernement à gouvernement; la taxation des industries extractives, y compris la restauration de l’environnement à la fin de la vie productive des sites ou des installations minières; la lutte contre le transfert international de bénéfices sous couvert de prix de transfert des produits exportés; et un modèle de convention fiscale bilatérale axé sur les pays en développement.  Pour Mme Kana, les travaux du Comité s’alignent bien sur les domaines prioritaires actuels de l’ECOSOC et le Comité envisage de travailler avec d’autres organes subsidiaires pour l’avènement de systèmes fiscaux efficaces, efficients, et équitables pour le développement durable. 

Le Coprésident des vingt-troisième et vingt-quatrième sessions du Comité d’experts sur la coopération internationale en matière fiscale, M.  MATHEW GBONJUBOLA, qui est Directeur du Département de politique et de conseils fiscaux du Service fédéral des recettes intérieures du Nigéria, a insisté sur l’action du Comité pour la promotion de la mise en œuvre des ODD, en particulier au moment où les pays s’efforcent de se relever des perturbations liées à la pandémie de COVID-19.  Il a indiqué que le Comité d’experts appuie pleinement le rôle de la fiscalité non seulement pour mobiliser des ressources pour le développement durable, mais aussi pour lutter contre la dégradation de l’environnement et garantir l’égalité.  À cette fin, le Comité a produit des orientations détaillées sur des questions telles que la taxation du carbone, le traitement fiscal des aides intergouvernementales et la taxation des industries extractives.  Selon son coprésident, le Comité concentre ses travaux sur l’imposition de la santé et de la richesse ainsi que sur la relation entre la fiscalité, le commerce et l’investissement, tout en explorant les possibilités de travailler avec d’autres organes subsidiaires pour faire progresser des systèmes fiscaux efficaces, efficients et équitables pour le développement durable. 

Mme ANNE NUORGAM, Présidente de la vingtième session de l’Instance permanente sur les questions autochtones, a indiqué que la pandémie a mis en exergue le manque de données statistiques désagrégées sur les peuples autochtones. Elle a appelé les États Membres à y remédier afin d’appuyer les politiques publiques.  Elle a aussi insisté sur la valeur des savoirs traditionnels des peuples autochtones s’agissant de la conservation de l’environnement.  Enfin, elle a invité l’ECOSOC à renforcer la coordination avec les organes subsidiaires sur des questions relatives aux femmes autochtones et à la collecte de données statistiques désagrégées. 

Réflexions sur les travaux des organes subsidiaires du Conseil économique et social

L’accès aux financements et aux vaccins, le relèvement après la pandémie de COVID-19 et l’accélération de la réalisation des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ont dominé les interventions de la vingtaine d’États Membres qui ont participé au dialogue interactif modéré par le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Suriya Chindawongse (Thaïlande), qui préside le débat consacré aux questions de coordination.  Les États Membres étaient invités à baser leur réflexion sur les présentations des organes subsidiaires de l’ECOSOC et sur la note informelle préparée par le Secrétariat, pour fournir des orientations politiques tournées vers l’action et en faveur de la cohérence des politiques et travaux des organes subsidiaires et des entités des Nations Unies. 

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, le Pakistan a d’emblée demandé une réforme du système financier international pour aider les pays en développement à avoir accès aux financements qui leur permettraient de se relever après la pandémie.  Cela devrait être accompagné de la lutte contre les évasions fiscales au niveau international, a ajouté le représentant.  

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), Antigua-et-Barbuda a voulu que l’ECOSOC accorde la priorité à la lutte contre l’endettement des pays en développement, en particulier des petits États insulaires en développement (PEID).  Il a demandé aux commissions économiques régionales d’accompagner ces pays dans leur quête d’une réforme du système financier international.  De l’avis de l’Iraq, ces commissions économiques doivent aussi servir de tremplin aux pays pour trouver des financements. 

L’Indonésie, au nom du Groupe des amis de la prévention des catastrophes, a insisté en particulier sur la nécessité du financement de la prévention.  La Bolivie a exigé des solutions innovantes dans les domaines du financement et de la technologie pour réaliser le Programme 2030.  El Salvador a insisté sur l’importance de l’inclusion financière, en particulier des groupes vulnérables. 

Le Maroc a souligné l’importance du financement de l’action climatique et a plaidé pour que les pays africains puissent avoir un « espace budgétaire plus sain ».  Son homologue de l’Inde a appelé à faire attention à bien sélectionner les projets qui alourdissent la charge de la dette des pays en développement.  Les communautés doivent être accompagnées pour qu’elles puissent gérer les projets à long terme, a ajouté le représentant. 

Réagissant à ces questions de financement, la Présidente du Comité d’experts sur la coopération internationale en matière fiscale a mis en avant l’importance des systèmes fiscaux pour réaliser les ODD.  Elle a demandé la participation des États Membres aux travaux du Comité. 

La question du relèvement après la pandémie de COVID-19 a aussi été largement abordée par les délégations qui ont toutes mis l’accent sur la nécessité de l’équité vaccinale, de la couverture sociale universelle et de la protection sociale comme l’a rappelé le Pakistan, au nom du G77 et de la Chine.  Le Maroc a abondé dans ce sens tout comme le Pérou qui réclamait le lancement d’une campagne mondiale sur la vaccination et le transfert des technologies pour permettre la fabrication des vaccins dans les pays en développement. 

Le Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels a signalé à ce sujet que cet organe a élaboré trois documents sur l’accès aux vaccins et sur les retombées de la pandémie de COVID-19 sur les droits économiques et sociaux ainsi que les droits à la santé de personnes vulnérables et marginalisées. 

Si toutes les délégations ont tenu à souligner l’importance de la coordination du travail de l’ECOSOC, de ses organes subsidiaires et des commissions économiques régionales dans la réalisation du Programme 2030, la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba et de l’Accord de Paris sur le climat, la République dominicaine a jugé qu’il est important de faire une évaluation annuelle des réalisations de l’année précédente y compris le travail des coordonnateurs et coordonnatrices résidents. 

L’Argentine a suggéré d’intercaler des réunions de suivi entre les sessions et les forums annuels de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  Cela enrichira par des données pertinentes les sessions à venir, a expliqué la représentante argentine.  La France, au nom de l’Union européenne, a estimé que la « note informelle du Secrétariat » fournit une base pour redynamiser le travail de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires, en rendant le « système ECOSOC » plus adapté à ses objectifs, en vue de contribuer à la réalisation des ODD. 

Les États-Unis ont en revanche mis en garde contre la multiplication des sessions, des réunions, des mandats et des documents de travail.  De l’avis de la délégation, l’ECOSOC doit apprendre à rationaliser et hiérarchiser l’utilisation de ses mandats et de ses ressources déjà limitées.  Il faut savoir en tirer parti, a dit le représentant américain qui a conseillé à l’ECOSOC d’augmenter la transparence, la place des lanceurs d’alerte, ainsi que les partenariats avec le secteur privé. 

Antigua-et-Barbuda, au nom de l’AOSIS, a fait remarquer qu’il avait fallu cinq jours avant que la première aide de l’ONU n’arrive aux îles Tonga après l’éruption volcanique du mois dernier.  C’est inacceptable, a brocardé le représentant qui a prié l’ECOSOC de faire le tri dans ses priorités.  La France a regretté que le domaine essentiel que constituent les changement climatiques ne soit abordé que de façon imparfaite dans les 10  domaines prioritaires de la « Note informelle du Secrétariat ».  « Nous pensons que chaque organe subsidiaire doit contribuer à la mise en œuvre de l’Accord de Paris et du Pacte de Glasgow pour le climat, sur lesquels nous nous sommes tous mis d'accord en novembre dernier », a déclaré la France rejointe par l’Égypte qui a promis de faire de la COP-26 à Charm-el-Cheikh, une occasion de se pencher sur les besoins des pays africains.  

Pour la Fédération de Russie, comme les discussions intergouvernementales ne sont qu’à leur début, il ne faut pas que les méthodes de travail en virtuel actuel remplacent d’autres modalités.  La délégation russe a attiré l’attention sur des concepts qui n’ont pas été agréés entre les États Membres.  Enfin, le Brésil a dénoncé l’influence de textes qui ne font pas référence au Programme 2030 et au Programme d’action d’Addis-Abeba, comme l’initiative du Canada et de la Jamaïque sur le relèvement après la pandémie de COVID-19.  Cela aura des conséquences sur le travail de l’ONU, a prévenu le représentant. 

La Bulgarie a demandé que les organes subsidiaires et les Commissions régionales de l’ECOSOC s’alignent sur le Programme 2030.  L’ECOSOC doit contribuer à réaliser les ODD, a renchéri le Mexique.  L’ECOSOC a été invité par l’Autriche à tirer parti du dernier forum des partenariats et à se focaliser sur la mise en œuvre de l’ODD  5 sur l’égalité entre les sexes.  La France y a ajouté les ODD  14 et 15, respectivement sur l’utilisation durable des mers et des océans, et des écosystèmes terrestres.  Pour l’Arménie, il est urgent de mettre l’accent sur les populations vivant dans les conflits et sur lutte contre la pandémie. Le Liban a lancé à l’ECOSOC un appel en faveur des pays à revenu intermédiaire.   

Discussion sur le thème « La reprise après la pandémie à travers le prisme des objectifs de développement durable nos 4, 5, 14, 15 et 17 »

M. QU DONGYU, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a jugé essentiel de construire des systèmes agroalimentaires plus verts, plus résilients et plus durables pour reconstruire en mieux après la pandémie et atteindre les ODD d’ici à 2030.  Il a indiqué que les programmes de la FAO accordent une priorité à l’implication des femmes dans les milieux ruraux et les systèmes agroalimentaires.  Il a cité en exemple l’initiative Main dans la main, qui vise à éradiquer la pauvreté et la faim, ainsi que le projet « 1 000 villages numériques » dont l’objectif est de convertir 1 000 villages aux quatre coins du monde en villages numériques afin d’en faire des moteurs de résilience en implantant le commerce électronique dans les zones rurales.  Cette démarche vise également à favoriser l’accès des agriculteurs aux marchés et leur permettre de diversifier leurs revenus, compte tenu des restrictions imposées dans le cadre de la riposte à la pandémie de COVID-19. 

M. Qu a par ailleurs prévenu que la reconstruction après la pandémie sera vaine si on ne s’attaque pas aux causes de la dégradation naturelle, à l’érosion des sols et des milieux marins, insistant en outre sur l’impératif d’une relance inclusive.

Dans un message vidéo préenregistré, Mme AUDREY AZOULAY, Directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a expliqué que l’UNESCO a rassemblé plus de 170 partenaires dans le cadre d’une coalition mondiale pour assurer la continuité éducative et rouvrir les écoles dans 110 pays.  Car faute d’être protégées par l’école, 10 millions de filles pourraient être mariées de force d’ici à 2030, a-t-elle prévenue.  Elle a insisté sur l’importance du partage des connaissances, précisant que la recommandation sur la science ouverte, adoptée en novembre 2021 par la Conférence générale de l’UNESCO, vise à rendre la science plus multidisciplinaire, plus équitable et plus accessible à tous et notamment aux pays du Sud.  Elle a aussi cité la recommandation de novembre 2021 sur l’éthique de l’intelligence artificielle dont l’enjeu est de donner un premier cadre normatif mondial pour que cette technologie se développe au service de l’humain et de ses valeurs. 

Affirmant que l’éducation peut contribuer à relever ces défis, Mme Azoulay a indiqué que par le biais de la Déclaration de Paris, les États membres de l’UNESCO se sont engagés à consacrer au moins 4% de leur PIB ou 15% des dépenses publiques à l’éducation.  Le premier Sommet sur la transformation de l’éducation, qui se tiendra en septembre 2022, pourra s’appuyer sur les réflexions que mènera en juillet le forum politique de haut niveau au sujet du rôle catalyseur de l’éducation sur l’ensemble du Programme 2030.  Dans ce contexte, a-t-elle ajouté, l’UNESCO est honorée de diriger un nouveau mécanisme mondial de coopération pour l’éducation, lancé en 2021 pour mieux aligner les priorités stratégiques et le financement international. 

Mme SIMA BAHOUS, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a déclaré que la pandémie a agi comme un « grand révélateur » qui a en outre aggravé les inégalités existantes, notamment entre les sexes.  Les femmes, qui effectuaient déjà la grande majorité du travail de soins non rémunéré, en ont assumé encore plus pendant la pandémie alors que la violence à l’égard des femmes et des filles, déjà la plus répandue des violations des droits humains, a monté en flèche pendant la crise.  Relevant que jusqu’à présent, la réponse politique à la COVID-19 n’a pas souvent tenu compte de la voix des femmes, Mme Bahous a espéré que la reprise sera l’occasion de faire les choses autrement et de relever ces défis de longue date, tout en assurant la résilience face aux autres grandes crises, dont la dégradation de l’environnement et les changements climatiques. 

Arguant qu’une reprise axée sur les soins de santé est nécessaire, Mme Bahous a souligné que les investissements dans ce secteur pourraient créer de 40% à 60% d’emplois de plus que les mêmes investissements dans la construction.  Dès lors, elle a demandé des mesures ciblées pour garantir que les femmes ne soient pas laissées pour compte dans la reprise et retrouvent les emplois qu’elles ont perdus.  Il faut également améliorer la qualité de l’emploi pour les 740 millions de femmes qui ont des emplois informels dans le monde et investir dans des systèmes de protection sociale sensibles au genre.  Mme Bahous a également jugé essentiel que les femmes reçoivent la formation et le soutien nécessaires pour accéder aux 24 millions de nouveaux emplois que les secteurs verts ont le potentiel de créer. 

Pour ce qui est de l’action climatique, la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a exhorté à passer d’un modèle économique dépendant des combustibles fossiles à un système qui privilégie la durabilité environnementale.  Pour les petits États insulaires en développement, une action mondiale dans ce domaine est une question de vie ou de mort, a-t-elle souligné.  Or, les femmes leaders des communautés locales sont à la tête d’approches innovantes pour promouvoir des transitions énergétiques durables et l’agroécologie tout en s’appuyant sur les savoirs autochtones.  Il faut soutenir leurs efforts pour que ces modèles puissent se multiplier, a souhaité Mme Bahous.  Consciente que le financement de ces politiques ne sera pas facile, elle a appelé à respecter les engagements de longue date en matière de financement climatique envers les pays en développement.  Nous avons besoin d’un niveau de solidarité mondiale sans précédent pour nous en sortir, parce que ce n’est que grâce à une telle solidarité, à l’appui d’un plan de relance COVID-19 sensible au genre, que nous pourrons remettre les ODD sur la bonne voie, a-t-elle affirmé.

M. JOSE ANTONIO OCAMPO, professeur de la School of International and Public Affairs, de Columbia University, et Président de la vingt-troisième session du Comité des politiques de développement, a insisté sur le rôle central que jouent les capacités de production dans le développement durable.  Il a également indiqué que le Comité avait alerté, bien avant la pandémie de COVID-19, à quel point les changements climatiques et les inégalités faisaient reculer le Programme 2030.  Il a appelé à saisir l’opportunité de cette crise sanitaire pour renforcer les capacités productives qui prennent en compte les ODD sur l’éducation, le genre et l’environnement, ainsi que les changements climatiques et les inégalités.  Il a estimé que le partage d’expériences nationales et même infranationales sur ces questions est inestimable avant de souligner l’importance des enseignements tirés à la fois des succès et des échecs des examens nationaux volontaires. 

Il a prévenu que sans développement des capacités productives et un mouvement significatif vers la transformation structurelle, la mobilisation des ressources intérieures visée à la cible 17.1 restera marginale par rapport aux besoins des PMA et de nombreux autres pays en développement.  Dans le même temps, il a noté que l’incapacité des pays développés à atteindre les objectifs d’aide publique au développement (APD) limitera considérablement la capacité des pays les plus pauvres à concevoir les capacités de production dont ils ont besoin.  Enfin, il a rappelé que son Comité a invité à deux reprises l’ECOSOC à organiser un débat ouvert et inclusif sur ce qui doit changer dans le système multilatéral pour soutenir et le développement durable par la transformation structurelle. 

Dialogue interactif

L’accès à l’éducation, la parité entre les genres, les capacités productives des pays en développement et la protection de l’environnement et des ressources maritimes en particulier ont été au cœur des préoccupations de la dizaine d’intervenants qui ont souligné l’importance de la synergie de mise en œuvre des ODD 4, 5, 14, 15 et 17 après la pandémie. 

Afin de permettre un développement durable après le relèvement de la pandémie de COVID-19, la Bolivie a souligné que la situation exige des décisions plus rapides pour réduire les inégalités.  Alors que 635 millions d’enfants ont vu leur éducation malmenée en raison des confinements, la délégation a notamment souhaité que l’accès à Internet devienne un droit. 

S’inquiétant particulièrement des retards de mise en œuvre de l’ODD 4, le Portugal a souligné l’importance de la Conférence sur les océans qui se tiendra à Lisbonne fin juin, alors que le Qatar a dit sa volonté de promouvoir l’éducation des filles dans l’intérêt du développement durable.  Après avoir déclaré que la question de la protection de l’environnement est une question majeure la Fédération Russie a jugé indispensable une mise en œuvre équilibrée des trois piliers du développement durable. 

Notant que la pandémie a contribué à une recrudescence de la violence conjugale, la Grèce a expliqué avoir mis en place des programmes sans précédent en matière d’assistance aux femmes.  Elle a aussi souligné l’importance de l’ODD-15 pour parvenir à une économie circulaire à faibles émissions de carbone et économe en ressources. 

Panama a mis l’accent sur l’importance de la coopération internationale pour aider les pays les plus démunis à combler le fossé numérique afin de promouvoir à la fois l’éducation et la parité entre les genres.  Mettant l’accent sur l’ODD 14, l’Afrique du Sud a expliqué qu’elle mise sur le potentiel de ses ressources maritimes pour éliminer la pauvreté d’ici à 2030 et redouble d’efforts pour débloquer le potentiel économique de sa zone économique exclusive (ZEE).  La délégation a aussi cité des initiatives sans précédent en matière de conservation et de gestion durable des ressources halieutiques et de la diversité biologique en général. 

Le Bangladesh a appelé la communauté internationale à mieux aider les pays en développement à diversifier leurs produits et services afin qu’ils puissent être plus complétifs sur les marché régionaux et mondiaux, des propos qui ont notamment été appuyés par le Président du Comité des politiques de développement qui s’est accordé sur la nécessité de développer les capacités de production des PMA.  Le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes a estimé pour sa part que la mise en œuvre de l’ODD 4 imposait d’intégrer la prévention des risques dans les programmes scolaires. 

Commentant ces interventions la Directrice exécutive d’ONU-Femmes a cité l’insuffisance des politiques inclusives avant de regretter que les femmes n’occupent que 24% des postes dans les équipes spéciales de lutte contre la pandémie.  Soulignant pour sa part le caractère contreproductif d’une mise en œuvre des ODD de manière cloisonnée, le Vice-président de l’ECOSOC a invité à se pencher sur des démarches qui permettront d’exploiter et stimuler les synergies entre les ODD 4, 5, 14, 15 et notamment 17 relatifs à la coopération. 

Synthèse des discussions, voie à suivre et clôture du débat

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a noté que cette réunion inaugurale du débat de l’ECOSOC consacré aux questions de coordination a réuni avec succès les organes subsidiaires du Conseil et les entités du système des Nations Unies pour se préparer aux travaux à venir, partager l’analyse des politiques et chercher conseil sur les domaines nécessitant leur plus grande attention ou une coordination renforcée.  Le système de l’ECOSOC, a-t-il assuré, s’appuiera sur ces discussions lors de ses prochaines sessions pour faire des évaluations et des recommandations ciblées dans le but d’éclairer la déclaration ministérielle et accélérer la mise en œuvre du Programme 2030. 

M. Liu a indiqué que, en préparation de ce nouveau débat sur les questions de coordination, le Département des affaires économiques et sociales (DESA) a mené une enquête sur les politiques innovantes et les initiatives à fort impact menées par des entités du système des Nations Unies, liées au thème annuel.  Plus de 60 initiatives de ce type ont été mises en évidence, dont plus de la moitié impliquent une collaboration interinstitutions, et toutes abordent les liens entre les ODD.  Les commissions régionales ont également partagé leur travail impressionnant entrepris au niveau régional alors que les entités du système des Nations Unies ont mis en exergue d’importants outils disponibles pour aider les États Membres à reconstruire en mieux, guidés par le Programme 2030.  M. Liu a annoncé que son Département mettra prochainement des informations détaillées à disposition en ligne sur ces initiatives, travaux analytiques et boîtes à outils. Il en a profité pour inviter à consulter les résultats de l’enquête sur le site Internet dédié à la base de données sur la mise en œuvre des ODD du système des Nations Unies. 

Avec pour feuille de route le Programme 2030, le Chef du DESA a estimé que pour mieux reconstruire, il va falloir suivre des voies de croissance qui donnent la priorité à la création d’emplois et promeuvent une croissance durable sur le plan environnemental.  Une reprise juste, équitable et durable qui ne laisse personne de côté nécessite des institutions de gouvernance efficaces, inclusives et responsables ainsi que des institutions publiques et des financements privés, a-t-il fait valoir.  Le changement transformationnel nécessaire exigera que nous redoublions d’efforts pour parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, a encore précisé M. Liu. 

Pour le Secrétaire général adjoint, si l’on réussissait à faire des progrès rapides vers les ODD dans les pays en situation particulière et dans les pays en conflit, ce serait une des grandes victoires de l’humanité.  Mais, a-t-il remarqué, cela va dépendre de la volonté politique de construire et de maintenir la paix, la solidarité internationale, des ressources adéquates et le renforcement des capacités.  Parmi les autres domaines qui requièrent une action urgente, il a cité les changements climatiques, la déforestation, la pollution et les déchets, et la perte de biodiversité. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande),Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) et responsable du débat consacré aux questions de coordination, a procédé à une synthèse des débats des deux derniers jours.  « Il sera important de tendre vers la convergence dans nos efforts pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, collectivement et de manière holistique », a-t-il dit, en soulignant le sentiment général que les inégalités et les lacunes qui existaient avant la pandémie ont été mises en évidence et accentuées par celle-ci. Le haut fonctionnaire s’est félicité des réponses novatrices et ambitieuses qui ont déjà été apportées, le relèvement post-COVID offrant l’opportunité d’une transition vers des sociétés plus équitables, durables et inclusives.  Pour cela, a poursuivi M. Chindawongse, nous devons nous concentrer sur les pays et les personnes les plus vulnérables et les changements structurels à apporter à nos systèmes économiques, financiers et sociaux.  L’équité en matière de vaccins reste une priorité absolue pour les membres de l’ECOSOC, a-t-il dit, tout comme les actions visant à garantir un accès équitable aux ressources financières dont les pays en développement ont besoin pour soutenir leur réponse et leur redressement.  Sans une action proactive pour assurer l’équité dans ces domaines, nous nous embarquerons dans un monde de divergence et de privation croissantes, a prévenu le Vice-Président. 

Des efforts supplémentaires doivent être déployés en faveur de la couverture sanitaire universelle, de la mise en place de systèmes de protection sociale et de systèmes alimentaires intégrés, durables et résilients, ainsi que du renforcement des capacités productives et budgétaires, du développement des infrastructures et de l’investissement dans les ODD pour une reprise résiliente, a encore relevé M. Chindawongse.  En outre, les stratégies et les politiques de relèvement post-COVID doivent tenir compte de la dimension de genre afin de garantir que personne ne soit laissée pour compte et de favoriser l’égalité des sexes ainsi que l’autonomisation et la promotion des femmes.  Par ailleurs, la relance doit faire la part belle aux actions de lutte contre les changements climatiques, la perte de biodiversité et la pollution.  Dans ce contexte, a-t-il recommandé, nous devons nous appuyer sur les résultats de la COP26 et œuvrer dans tous les secteurs -économiques, sociaux et environnementaux- pour faire en sorte que des avancées majeures soient réalisées lors de la COP27, sous la présidence de l’Égypte.  Et pour faciliter ce processus, l’ECOSOC doit s’appuyer plus systématiquement sur l’expertise des institutions spécialisées de l’ONU et de ses commissions fonctionnelles pour fournir aux États Membres des données et des orientations politiques fondées sur des éléments concrets, a conclu le Vice-Président. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Débat de l’ECOSOC sur la coordination: les discussions du premier jour illustrent les efforts conjoints des acteurs du développement durable, l’ONU au centre

Session de 2022,
5e et 6e séances plénières – matin & après-midi
ECOSOC/7070

Débat de l’ECOSOC sur la coordination: les discussions du premier jour illustrent les efforts conjoints des acteurs du développement durable, l’ONU au centre

Alors que le monde reconnaît l’ampleur de la tâche pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19, qui va coûter 13 800 milliards de dollar à l’économie mondiale d’ici à 2024, et atteindre les objectifs de développement durable pour 2030, les membres du Conseil économique et social (ECOSOC) ont discuté avec des nombreux experts, aujourd’hui, sur les moyens de « tirer parti de l’ECOSOC pour une reprise inclusive et résiliente guidée par le Programme 2030 », selon le thème fixé pour les deux jours de débats de la session de coordination. 

Maximiser l’impact du système des Nations Unies pour le développement est le but du nouveau débat consacré aux questions de coordination (créé en juin 2021), a expliqué le Président de l’ECOSOC, en rappelant le rôle crucial de cet organe pour soutenir les efforts déployés en vue de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, du Programme d’action d’Addis-Abeba et de l’Accord de Paris.  M. Collen Kelapile a précisé qu’en offrant une orientation politique et en promouvant la coopération multilatérale, l’ECOSOC insuffle une direction et accroît la coordination au sein de l’ONU. 

M. Kelapile a demandé aux participants de s’appuyer sur les idées « audacieuses » discutées hier, lors du forum des partenariats de l’ECOSOC, pour élaborer des recommandations novatrices.  Les deux priorités pour l’amélioration de la coordination sont l’assistance prêtée aux populations les plus défavorisées et le domaine de l’autonomisation des femmes, a déclaré M. Suriya Chindawongse, le Vice-Président de l’ECOSOC chargé de ce débat. 

Les gains en matière d’égalité entre les sexes sont en péril, a reconnu la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, se disant particulièrement inquiète des indicateurs sur la pauvreté, la faim, l’éducation et l’emploi qui « évoluent tous dans le mauvais sens ».  Mme Amina Mohammed n’a pas oublié la « triple crise planétaire » des changements climatiques, de la perte de biodiversité et de la pollution, qui menacent partout des vies et des moyens de subsistance. 

« Nous ne sommes ni désespérés, ni impuissants », a-t-elle cependant lancé aux participants en les appelant à se baser sur le rapport du Secrétaire général « Notre Programme commun » pour remédier à des problèmes créés par l’Homme.  Adoptant les mots d’ordre « ambition et accélération de l’action », la Vice-Secrétaire générale a misé sur le nouveau système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents qui permet de transformer les orientations de l’ECOSOC en des résultats tangibles sur le terrain. 

« Relèvement inclusif et centré sur les personnes après la pandémie, notamment par le renforcement de la protection sociale » était le thème de la première table ronde de la journée, qui a été lancée par le Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  M. Guy Ryder a avancé à la fois des chiffres alarmants et des motifs d’espoir.  Il a signalé que la pandémie de COVID-19 a fait perdre l’équivalent de 258  millions d’emplois à temps plein en 2020, mais a parié sur les 100  millions de nouveaux emplois qui pourraient être créés grâce à une transition vers des économies sobres en carbone et circulaires d’ici à  2030.  Il a invité à répondre à l’appel du Secrétaire général, lancé en septembre 2021, en faveur d’un accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale, qui vise à accroître le niveau et la coordination des efforts du système multilatéral pour aider les pays à créer 400 millions d’emplois décents. 

De même que M. Ryder a souligné le rôle crucial de la protection sociale, mis en évidence par la pandémie, la Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a plaidé pour des socles de protection sociale « complets » et la Présidente de la Commission de la condition de la femme pour une « protection sociale universelle ».  La représentante de l’Argentine, qui présidera la semaine prochaine la Commission du développement social, a apprécié à ce sujet les importantes mesures de protection sociale prises pendant la pandémie: plus de 3 000 au total à travers le monde entre le 20 mars 2020 et le 14  mai 2021. Les États Membres participant à cette discussion n’ont pas manqué de défendre en particulier la cause de l’équité vaccinale, le Liban appelant à faire du vaccin contre la pandémie de COVID-19 un « bien public mondial ».  L’Union européenne a, pour sa part, annoncé la construction en  2022 d’une usine de production de vaccins ARN afin de cibler d’autres maladies telles que la tuberculose et le VIH. 

« Une seule santé », qui intègre santés humaine, animale et planétaire, a été ensuite demandée lors de la discussion visant à « Protéger la planète ».  La Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a évoqué à cet égard la mise en place de nouvelles structures au sein du système des Nations Unies, tels que le Groupe d’experts de haut niveau pour l’approche Une seule santé (OHHLEP) et le Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens.  Le PNUE collabore avec l’OMS, la FAO et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), entre autres, pour promouvoir des solutions qui feront progresser plusieurs ODD en même temps, a-t-elle fait valoir. 

De son côté, l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) a souligné l’importance de l’Alliance mondiale pour une économie circulaire et une utilisation efficace des ressources (GACERE), qui travaille avec des alliances régionales et des partenaires stratégiques du savoir, et qui bénéficie d’un appui du PNUE et de l’ONUDI.  La Présidente du Forum des Nations Unies pour les forêts (FNUF) a, quant à elle, appelé les gouvernements, l’ONU et les autres partenaires à prendre des mesures décisives pour intégrer des solutions basées sur les forêts dans leurs réponses immédiates et à long terme. 

Les deux autres discussions, tenues dans l’après-midi, ont exploré les « voies à suivre pour une reprise économique résiliente et inclusive », ainsi que les « moyens d’exploiter la science, la technologie et l’innovation, y compris les technologies numériques ».  L’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a encensé les différentes composantes de l’ONU qui sont à pied d’œuvre dans 170 pays - du déploiement d’équipements médicaux et de vaccins en passant par le soutien aux transferts d’argent numériques, à l’aide aux petites entreprises et à l’assistance fournie aux gouvernements pour qu’ils adoptent des politiques sensibles au genre dans leurs réponses à la pandémie.  L’aide technique « revigorée » de la CNUCED a été évoquée, tandis que le FMI a vanté son futur fonds « résilience et durabilité » qui aidera les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire à relever les défis structurels à plus long terme. 

Le débat consacré aux questions de coordination de l’ECOSOC se poursuivra demain, vendredi 4 février, à partir de 10 heures, toujours en format hybride. 

DÉBAT CONSACRÉ AUX QUESTIONS DE COORDINATION

Déclarations d’ouverture

Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC), M.  COLLEN VIXEN KELAPILE (Botswana), a relevé que la tâche de reconstruire en mieux après la COVID-19 est ardue, d’où l’importance pour l’ECOSOC de jouer son rôle en fournissant l’orientation politique et en promouvant le renforcement de la coopération multilatérale et la mobilisation de la solidarité internationale pour soutenir la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, ainsi que le Programme d’action d’Addis-Abeba et l’Accord de Paris.  Le Président a rappelé que l’ECOSOC est la seule et unique plateforme capable de fournir une vue d’ensemble du travail des organes et organisations du système des Nations Unies sur la question du développement durable.  C’est donc le lieu où les entités du système des Nations Unies, les présidents des commissions fonctionnelles et des organes d’experts, et les parties prenantes se réunissent avec les États Membres pour discuter des questions politiques majeures qui ressortent de leurs délibérations, analyses et expérience. 

L’ECOSOC, a-t-il souligné, est donc l’organisme qui peut insuffler une direction, créer des synergies et accroître la coopération et la coordination au sein du système des Nations Unies dans son ensemble.  Et c’est ce pour quoi le nouveau débat consacré aux questions de coordination a été conçu: améliorer le rôle de leadership, de supervision et de coordination de l’ECOSOC afin de maximiser l’impact du système des Nations Unies dans son ensemble.  Il a relevé que le forum des partenariats qui s’est achevé hier avait fourni un riche ensemble d’idées et de nouvelles actions sur lesquelles les délibérations de ce jour peuvent s’appuyer. 

Pour ce débat consacré aux questions de coordination, M. Kelapile a demandé aux participants de s’appuyer sur les idées « audacieuses » discutées la veille et d’élaborer des recommandations novatrices sur des questions qui devraient être examinées par l’ECOSOC, ses organes subsidiaires et le système des Nations Unies.  Il a demandé également de tenir compte de l’impact des solutions coordonnées du système des Nations Unies pour faire progresser les ODD, tout en favorisant la reprise.  Il a insisté sur les aspects du Programme  2030 qui reçoivent peu d’attention, tels que les ODD et les cibles orphelins.  Et surtout, il faut raviver un esprit de solidarité entre les peuples et les pays, a-t-il dit. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande), Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) et responsable de son débat consacré aux questions de coordination, a déclaré que la coordination permet de faire fond sur les atouts des uns et des autres et de créer des synergies au sein même de l’ECOSOC, mais aussi du système des Nations Unies et des institutions financières internationales.  Selon lui, les deux priorités à examiner sont l’amélioration de la coordination dans le cadre de l’assistance prêtée aux populations les plus défavorisées et dans le domaine de l’autonomisation des femmes. 

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a noté que le thème des échanges des deux jours à venir répond à l’ambition nécessaire pour « reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19 tout en faisant progresser la mise en œuvre intégrale du Programme 2030 ».  Alors qu’il reste moins de neuf ans pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD), « nous sommes loin d’être là où nous devrions être » et la pandémie nous a poussés « encore plus loin », a-t-elle admis, constatant que les indicateurs sur la pauvreté, la faim, l’éducation et l’emploi « évoluent tous dans le mauvais sens ».  Parallèlement, la « triple crise planétaire » des changements climatiques, de la perte de biodiversité et de la pollution s’aggrave, ce qui menace des vies et des moyens de subsistance partout.  Dans ce contexte, les plus vulnérables et les plus marginalisés souffrent le plus et les gains en matière d’égalité entre les sexes sont également en péril. 

Pourtant, a assuré Mme Mohammed, « nous ne sommes ni désespérés ni impuissants ».  Les défis auxquels nous sommes confrontés ayant été créés par l’humanité, celle-ci « peut les résoudre », a-t-elle affirmé, y voyant finalement « des échecs de la gouvernance mondiale ».  À ses yeux, le rapport du Secrétaire général sur « Notre Programme commun » peut aider à tracer la voie à suivre pour accélérer l’action vers les ODD et le nouveau débat consacré aux questions de coordination de l’ECOSOC peut contribuer à cet effort en vue du forum politique de haut niveau qui se tiendra en juillet prochain. 

Pour la Vice-Secrétaire générale, réaliser une reprise inclusive et atteindre les ODD requiert ambition et accélération de l’action.  Cela nécessite tout d’abord de calibrer soigneusement les synergies politiques et de porter les partenariats à une échelle sans précédent dans la réponse mondiale à la COVID-19. Cela nécessite aussi des institutions renforcées capables de faire face efficacement aux « défis croisés », de faire participer le public et d’adopter une vision à long terme.  Dans ce cadre, a-t-elle poursuivi, il convient de faire renaître le système financier mondial pour s’assurer que tous les pays, pas seulement les économies avancées, disposent de ressources budgétaires suffisantes pour investir dans les personnes et la résilience.  Il faut également renforcer l’allégement de la dette et concevoir une nouvelle restructuration du mécanisme de la dette; réorienter les droits de tirage spéciaux (DTS) et renforcer les ressources des banques multilatérales de développement; revoir le rôle des agences de notation de crédit; assurer un système fiscal mondial plus juste et lutter contre les flux financiers illicites; et, enfin, aller au-delà du PIB pour inclure d’autres indicateurs de vulnérabilité. 

En travaillant ensemble, les commissions, les forums et les organes subsidiaires de l’ECOSOC peuvent accélérer la mise en œuvre des ODD, a soutenu Mme Mohammed, avant de reconnaître que cela demandera un effort collectif pour s’assurer que nous maximisons les synergies entre les organismes et que « nous visons haut ».  Il importe pour cela d’identifier les domaines où les commissions fonctionnelles peuvent déclencher et soutenir de manière constructive une reprise durable et équitable guidée par le Programme 2030, a-t-elle précisé.  Il faut en outre aller plus loin dans l’intégration des changements climatiques, de l’égalité des sexes et des préoccupations des pays en situation particulière dans les travaux des organes subsidiaires de l’ECOSOC. 

Faisant état d’un « nouvel élan » pour faire avancer les transitions économiques critiques de manière « plus intégrée », la Vice-Secrétaire générale a relevé que le nouveau système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents offre de nombreuses opportunités pour garantir que le travail et les orientations de l’ECOSOC se traduisent par des résultats tangibles sur le terrain.  En rassemblant les dirigeants des agences spécialisées, y compris les institutions financières internationales, ce débat consacré aux questions de coordination peut donner plus d’impulsion à nos efforts pour assurer une réponse onusienne « intégrée et percutante » dans les pays, a conclu Mme Mohammed. 

Discussions

Reprise inclusive et centrée sur les personnes après la pandémie, notamment par le renforcement de la protection sociale

Animée par le Vice-Président de l’ECOSOC, M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande), cette première discussion a permis aux intervenants de mettre l’accent sur le besoin d’une reconstruction post-COVID tenant compte des principes du développement durable et soucieuse de ne laisser personne de côté. 

Selon M. GUY RYDER, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui intervenait par visioconférence, la COVID-19 a fait perdre l’équivalent de 258  millions d’emplois à temps plein en  2020 et 125  millions en  2021.  La reprise de l’emploi a été inégale, a affirmé M.  Ryder qui a évoqué une reprise beaucoup plus rapide dans les économies avancées que dans les pays en développement, et des progrès inégaux au sein des pays, ce qui affecte particulièrement les personnes qui étaient déjà défavorisées comme les femmes, les jeunes et les travailleurs informels.  De nombreuses économies à revenu faible et intermédiaire en particulier ont du mal à revenir à la situation d’avant la pandémie, a-t-il noté en s’inquiétant que ces inégalités accrues entravent la reprise économique et sociale, dont les perspectives restent faibles et incertaines en  2022 et au-delà.  Il a expliqué que la réalisation d’une reprise inclusive et riche en emplois nécessite de placer des emplois décents au centre des efforts de relèvement, avec des liens étroits avec la protection sociale et un investissement accru dans les domaines ayant un potentiel particulier de création d’emplois comme les économies vertes, le numérique et le secteur des soins. 

Selon le Directeur général de l’OIT, l’un des « points lumineux » de la pandémie a été le rôle crucial que la protection sociale a joué dans une réponse politique sans précédent dans le monde entier.  En effet, les pays qui disposaient déjà de solides systèmes de protection sociale ont pu les utiliser pour garantir l’accès aux soins de santé, assurer la sécurité des revenus et protéger les emplois.  Cependant, les pays dépourvus de systèmes aussi solides ont dû adopter des mesures rapidement, mais manquaient souvent de gouvernance et de ressources nécessaires pour assurer un déploiement rapide et étendu, et donc une réponse protectrice adéquate.  Il a rappelé la situation précaire dans laquelle se trouvent 4,1  milliards de personnes qui n’ont aucune protection sociale.  La COVID-19 a été une crise terrible, mais elle nous a également donné une fenêtre politique unique pour suivre un chemin tout à fait différent, a-t-il toutefois reconnu.  Il a recommandé de bâtir des systèmes de protection sociale universels pour pouvoir emprunter la « voie royale » vers une approche centrée sur l’humain. 

M. Ryder a constaté que pas moins de 1,2 milliard d’emplois, soit 40%  de la main-d’œuvre mondiale, dépendent d’écosystèmes sains et d’un environnement stable.  « De ce fait, la réponse à la COVID-19 et la réponse à la crise climatique ne peuvent être dissociées. »  Il a souligné qu’il peut y avoir 100  millions de nouveaux emplois grâce à une transition vers des économies sobres en carbone et circulaires d’ici à  2030.  De même, il a misé sur l’appel du Secrétaire général en faveur d’un accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale, lancée en septembre  2021, qui vise à accroître le niveau et la coordination des efforts du système multilatéral pour aider les pays à créer 400  millions d’emplois décents, y compris dans les secteurs de l’économie verte, du numérique et des soins.  Il a fait valoir que cela permettrait aussi d’étendre la couverture de la protection sociale aux quatre  milliards de personnes qui en sont actuellement exclues, tout en accélérant les progrès vers une économie neutre en carbone.  C’est dans cette optique que l’OIT convoque un forum mondial du 22 au 24  février pour développer des propositions concrètes pour un multilatéralisme plus réseauté, inclusif et efficace, dans le cadre d’une reprise centrée sur l’humain. 

Pour la Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le docteur ZSUZSANNA JAKAB, la pandémie a mis en évidence plus que jamais à quel point la santé et le développement économique et social sont interdépendants.  Le docteur Jakab, qui intervenait également par visioconférence, a déploré le fait que plus de la moitié de la population mondiale n’a toujours pas accès aux services de santé essentiels.  Chaque année, 930  millions de personnes risquent la pauvreté en raison des dépenses personnelles en soins de santé, a-t-elle alerté, en soulignant que la COVID-19 a gravement perturbé la fourniture de nombreux services de santé essentiels alors que les systèmes de santé continuent d’être débordés. 

Même s’il y a des signes d’augmentation des dépenses publiques pour la santé pendant la COVID-19, c’est encore inégal, a-t-elle constaté.  Pour étayer cette propension inégalitaire, elle a relevé qu’en décembre 2021, sur les huit  milliards de doses de vaccin COVID-19 administrées à l’échelle mondiale, les 9%  de la population mondiale se trouvant dans les pays à faible revenu n’avaient reçu que 0,6% de ces vaccins.  Elle a souligné que la pandémie a également mis à rude épreuve la gestion des déchets médicaux à travers le monde, menaçant la santé humaine et environnementale. 

Une reprise inclusive après la pandémie nécessite de redynamiser nos engagements pris dans les objectifs de développement durable (ODD) pour des socles de protection sociale complets, a plaidé la Directrice générale adjointe de l’OMS.  Elle a dit que son organisation insiste sur la couverture sanitaire universelle tout en souscrivant à l’appel de l’OIT en faveur d’une protection sociale universelle pour tous. 

À sa suite, la Représentante permanente de l’Argentine, Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF, a pris la parole en tant que Présidente de la Commission du développement social qui entame sa soixantième session le 7  février prochain.  Elle a également insisté sur les mesures de protection sociale prises pendant la pandémie, plus de 3 000 au total à travers le monde entre le 20  mars 2020 et le 14  mai 2021.  Selon elle, la crise actuelle et la perspective de relèvement est l’occasion de faire mieux en matière de protection sociale.  Il faut surtout mettre l’accent sur un relèvement respectueux de l’égalité des sexes, a—t-elle plaidé.  Dans ce cadre, des mesures contre la violence contre les femmes, la promotion de l’emploi féminin et l’autonomisation économique des femmes sont prioritaires. 

Débat interactif

Au cours de la séance interactive qui a suivi les déclarations des panélistes, la Colombie, s’exprimant au nom du Groupe des pays à revenu intermédiaire, a jugé crucial, en ce moment précis, de parvenir à l’équité vaccinale en appuyant les initiatives visant à faciliter l’accès des pays en développement aux vaccins contre la COVID-19.  La Chine a souscrit à cet appel, tout en promettant de continuer à fournir des vaccins contre la COVID-19 aux pays en développement.  Même son de cloche du côté des États-Unis qui ont dit avoir, globalement, consacré 4  milliards de dollars à des initiatives similaires.  Le pays entend d’ailleurs fournir 500 millions de doses de vaccin au Mécanisme COVAX en 2022.  L’observateur de l’Union européenne (UE) a rappelé que c’est grâce au travail des chercheurs européens qu’on a pu produire des vaccins à ARN contre la COVID-19.  Il a dit qu’en 2022, l’UE envisage de construire une usine de production de ce type de vaccins afin de cibler d’autres maladies telles que la tuberculose et le VIH. 

Pour reconstruire en mieux, il faut tenir compte de la sécurité humaine, a insisté le Japon qui a promis de rester l’un des chefs de file de la protection sanitaire universelle.  Pour mieux se préparer aux urgences sanitaires, il serait de bon ton d’investir dans la couverture sanitaire universelle, a acquiescé l’OMS en soulignant que la moitié de l’humanité n’a pas accès aux services de santé essentiels.  C’est pourquoi le Guatemala a mis l’accent sur l’amélioration de la protection sociale des familles.  Pour la délégation, il est tout aussi important d’encourager les investissements étrangers directs et de continuer de travailler ensemble, dans un esprit de coopération.  C’est pour magnifier cet esprit de coopération que le Liban a appelé à faire du vaccin contre la COVID-19 un « bien public mondial » afin de vacciner tout le monde, y compris par le biais de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire.  Le Saint-Siège a également plaidé en faveur de l’équité vaccinale. 

Selon le Mexique, les défis pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 requièrent de nouveaux engagements.  C’est pour cette raison que les organes onusiens comme l’ECOSOC doivent offrir des données de haute qualité aux pays afin que ces derniers prennent des mesures appropriées pour un relèvement efficace.  Le Maroc a parié sur l’esprit de coordination qui doit être présent dans tous les travaux de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  M.  Ryder, de l’OIT, a dit qu’il faut davantage de coordination d’action au niveau international.  C’est aussi le vœu du Malawi qui a parlé au nom des pays les moins avancés (PMA).  La délégation a relevé que la pandémie a exacerbé les problèmes des PMA en raison des vulnérabilités préexistantes.  La délégation a souhaité que la pauvreté et la faim soient au cœur des travaux de l’ECOSOC, et il en va de même pour la question de la dette.  Dans le même temps, les pays en développement sont appelés à respecter leur promesse de consacrer 0,7% de leur revenu national brut à l’aide publique au développement (APD), a-t-il ajouté. 

Protéger la planète

Mme INGER ANDERSEN, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a considéré que les impacts sanitaires de la triple crise que traverse la planète –changements climatiques, perte de biodiversité, pollution et déchets– sont évidents, relevant notamment que la perte de biodiversité dégrade les services écosystémiques essentiels à la santé humaine, tels que l’eau douce, les aliments sains et les médicaments.  Des particules de plastique chargées de produits chimiques nocifs tourbillonnent dans nos océans, tandis que les changements climatiques, la pollution et la consommation non viable favorisent la propagation des maladies qui sont transmises des animaux aux humains.  Et la pollution atmosphérique tue des millions de personnes chaque année, s’est inquiétée la haute fonctionnaire. 

Dans ce contexte, elle a attiré l’attention sur l’importance de l’approche « Une seule santé », qui intègre santés humaine, animale et planétaire, évoquant la mise en place de nouvelles structures au sein du système des Nations Unies, tels que le Groupe d’experts de haut niveau pour l’approche Une seule santé (OHHLEP) et le Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens.  Dans le cadre de ces initiatives, a-t-elle indiqué, nous pouvons mettre en œuvre des actions visant à créer des systèmes coordonnés de surveillance et d’alerte rapide sur les zoonoses, la résistance aux antimicrobiens et autres menaces sanitaires émergentes.  « Des actions qui améliorent la science pour des interventions plus coordonnées.  Des actions qui créent des incitations à améliorer les pratiques agricoles durables et le commerce viable des animaux domestiques et sauvages.  Des actions qui garantissent une bonne gestion de la nature et de la biodiversité à l’échelle mondiale », a-t-elle ajouté, exhortant en outre à veiller à ce que le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 soit bien conçu. 

Elle a également expliqué que le PNUE collabore avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et d’autres organisations afin de déterminer comment intégrer les données environnementales dans les processus existants d’alerte précoce dans le secteur de la santé.  Ces efforts s’accompagnent d’un renforcement conjoint des capacités et d’une formation afin que les professionnels de la santé publique, les vétérinaires et les praticiens de l’environnement puissent mieux comprendre et élaborer des réponses multisectorielles coordonnées qui s’attaquent véritablement aux problèmes.  Ce sont les types de solutions qui feront progresser plusieurs ODD en même temps, a-t-elle assuré. 

Pour réussir, cependant, nous avons besoin d’un soutien financier solide pour Une seule santé, a-t-elle fait savoir.  Or, seuls 220  millions de dollars ont été engagés pour financer les activités dans 13  pays en 2020.  « Pourtant, les investissements à prévenir les futures pandémies sont estimés à environ 3,4  milliards de dollars par an.  Cela peut sembler beaucoup d’argent.  Mais comparez cet investissement au coût de la pandémie de COVID-19, qui pourrait coûter plus de 18 000 milliards de dollars à l’économie mondiale », a fait observer la Secrétaire générale adjointe, en encourageant la communauté des donateurs à se mobiliser. 

M. STEPHAN SICARS, Chef de la Direction générale de l’environnement et de l’énergie de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), a souligné l’importance de l’Alliance mondiale pour une économie circulaire et une utilisation efficace des ressources (GACERE) pour promouvoir une transition juste vers une économie circulaire économe en ressources.  Mettant l’accent sur les effets positifs d’une utilisation plus efficace des ressources, il a cité la possibilité de freiner l’augmentation de la consommation et de réduire l’impact de la production et du gaspillage des ressources sur le climat, la pollution et la biodiversité.  M. Sicars a expliqué que cette démarche est liée à l’ODD 9 sur l’industrialisation inclusive et durable, les infrastructures résilientes et l’innovation, et l’ODD 12 sur la consommation et la production durables. 

Il a indiqué que GACERE est une alliance de gouvernements lancée le 22 février 2021 pour promouvoir une transition juste vers une économie circulaire économe en ressources en s’appuyant sur des alliances régionales et des partenaires stratégiques du savoir.  « Actuellement, les membres de GACERE se composent de 15 pays, plus la Commission européenne qui représentent les 27 États membres de l’Union européenne », a-t-il précisé avant d’ajouter que le PNUE et l’ONUDI fournissent un soutien opérationnel à cette alliance.  Notant que la croissance démographique mondiale et l’objectif d’un niveau minimum de développement pour tous ont rendu le modèle économique linéaire actuel insoutenable, le représentant d’ONUDI a jugé indispensable une transition vers des économies circulaires, garantissant une croissance économique durable inclusive et respectueuse de l’environnement. 

Enfin, il a précisé que les membres du GACERE ont produit un certain nombre de documents de travail pour faire progresser l’économie circulaire, en phase avec les priorités actuelles du financement de la relance.  Ces réflexions soulignent que les initiatives d’économie circulaire peuvent créer de nouveaux emplois décents et de nouvelles opportunités d’investissements dans une reprise verte.  Et si les interventions de l’économie circulaire peuvent cibler des secteurs déjà inclus dans les plans de relance, tels que l’énergie, l’efficacité énergétique pour le logement, la mobilité et les infrastructures, elles peuvent également apporter des avantages significatifs dans d’autres secteurs tels que les TIC, les textiles, les plastiques, l’assainissement et la construction. 

Mme MIRIAM MAC INTOSH, Présidente du Forum des Nations Unies pour les forêts (FNUF), a indiqué que la COP26 a effectivement placé les forêts et d’autres solutions fondées sur la nature au centre des discussions sur la sauvegarde de la planète, le Pacte de Glasgow pour le climat reconnaissant la nécessité d’exploiter le potentiel des forêts pour atténuer les changements climatiques et s’y adapter plus efficacement.  Elle a également relevé que la déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres a été signée par plus de 142 pays, représentant plus de 90% des forêts de la planète, afin de stopper et d’inverser leur perte et la dégradation des terres d’ici à  2030. 

En inversant la déforestation et en gérant durablement ce patrimoine -qui inclut le boisement, le reboisement et la restauration des paysages forestiers-, les écosystèmes forestiers peuvent soutenir et aider à sortir des millions de personnes supplémentaires de l’extrême pauvreté, ainsi qu’à bâtir des économies et des sociétés résilientes, à sauvegarder la biodiversité et à lutter contre les changements climatiques.  Ils constituent également un tampon naturel contre la transmission des maladies zoonotiques et réduisent le risque de futures pandémies, a ajouté Mme  Mac Intosh. 

« Aussi, pour se remettre pleinement de la pandémie et faire face aux crises climatiques et naturelles, nous devons inverser la tendance négative actuelle en plaçant des écosystèmes sains et des communautés résilientes au centre de nos efforts pour nous relever mieux et plus vert », a-t-elle plaidé.  Pour cela, il est essentiel que les gouvernements, le système des Nations Unies et les autres partenaires prennent des mesures décisives pour intégrer des solutions basées sur les forêts dans leurs réponses immédiates et à long terme, et profitent de cette occasion pour accélérer les actions visant à réaliser le Programme 2030 et le plan stratégique des Nations Unies sur les forêts. 

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud), Présidente de la Commission de la condition de la femme, a commencé par rappeler que les crises et les catastrophes climatiques et environnementales affectent de manière disproportionnée les moyens de subsistance des femmes et des filles.  Elles rendent nécessaires pour elles de fournir des soins et d’assumer des tâches domestiques supplémentaires, rémunérés ou non, et réduisent ainsi leur capacité à agir sur l’orientation politique et économique de leur propre pays, a constaté la panéliste.  « Il est donc important de faciliter l’accès des femmes à des emplois décents, verts et bleus dans le cadre de la relance économique de COVID-19 », a-t-elle noté, en soulignant que cela devrait se faire dans des secteurs tels que l’énergie durable, l’agriculture, la sylviculture et la pêche.  Cela permettra, selon elle, de faire progresser à la fois l’égalité des sexes et la viabilité environnementale. 

Il faut également se concentrer sur la protection sociale universelle et les systèmes et politiques de soins afin de permettre aux femmes et aux filles de participer et de diriger les actions en matière de climat, d’environnement et de catastrophes.  Soulignant que l’ECOSOC a l’obligation d’intégrer une perspective de genre dans tous les aspects de son travail, Mme  Joyini a précisé que cela signifie que toutes les discussions doivent tenir compte de l’impact des politiques sur les femmes et les filles, les hommes et les garçons.  « La documentation destinée à nos organes doit donc inclure une analyse de genre et fournir des recommandations pour faire progresser l’égalité des sexes », a-t-elle préconisé.  Et tous les panels et événements interactifs doivent inclure un mélange d’intervenants et experts – femmes et hommes.  Si le Conseil et tous ses organes subsidiaires intègrent systématiquement une perspective de genre dans leurs travaux, il sera possible de surmonter l’inégalité systémique entre les sexes et d’obtenir des résultats tangibles pour toutes les femmes et les filles.  

Débat interactif

« Protéger notre planète n’est pas une option, mais une nécessité », a indiqué le Kenya, dont le Gouvernement a entrepris de rétablir l’intégralité écologique des écosystèmes dégradés et adopté des mesures de reboisement « agressives ».  La République de Corée a convenu que le système des Nations Unies devrait tenir compte des distorsions provoquées par les pandémies, en faisant observer que 130 milliards de masques chirurgicaux se trouvent « éparpillés dans la nature » et que nous utilisons beaucoup de plastique pour la nourriture, « y compris ici à l’ONU ».  Dans ce contexte, l’ECOSOC doit prendre des mesures concrètes pour promouvoir la biodiversité marine, a poursuivi le Pérou, pour qui cela est indispensable pour des États côtiers comme le sien.  Cette délégation a également considéré que la protection des terres, de la biodiversité et des forêts doit devenir plus importante à l’avenir. 

Le plus grand défi qui se pose au développement durable sont les changements climatiques, ont affirmé les États-Unis, qui ont fait valoir un projet de coopération lancé par Washington visant à quadrupler les moyens alloués à l’action climatique au cours de la décennie à venir.  Si la Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUCC) est l’organe majeur en la matière, la délégation américaine a souhaité cependant que l’ECOSOC assure la coordination avec elle pour tirer pleinement parti de leurs synergies.  De son côté, la Chine a déclaré qu’il faut respecter les principes de l’Accord de Paris et de l’aide différenciée entre pays en développement et pays développés. 

La Colombie a souligné l’importance de renforcer la transition énergétique, et de promouvoir les énergies renouvelables pour qu’elles représentant au moins 60% des bouquets énergétiques.  Elle a également insisté sur la promotion de modèles de consommation et de production efficaces et durables.  Il faut replacer l’homme au cœur de notre système, a exhorté le Sénégal, qui s’est posé la question de savoir comment passer d’une transition juste à une transition soutenable et durable, en rappelant les besoins différenciés qu’ont pays en développement et pays développés.  Pour la Bolivie, une approche intégrée axée sur la personne, « en harmonie avec la nature », et assortie de modes de production et de consommation durables doit être privilégiée, si nous voulons relever tous les défis environnementaux. 

Mesures pour une reprise économique résiliente et inclusive

Au cours de cette troisième table ronde consacrée aux « mesures pour une reprise économique résiliente et inclusive », il a été question des efforts requis pour garantir un relèvement durable et inclusif des économies, créer les conditions de travail décent pour tous, promouvoir l’égalité, y compris l'égalité des sexes, réduire les risques et renforcer la résilience aux chocs futurs, et accroître la capacité de production par la diversification, l’innovation technologique et les investissements dans les ODD.  Autant de questions qui donnent suite aux échanges de la matinée, a noté, en ouverture, M. SURIYA CHINDAWONGSE, Vice-Président de l’ECOSOC et responsable du débat consacré aux questions de coordination

Premier intervenant à s’exprimer, M. ACHIM STEINER, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a tout d’abord constaté que la pandémie ne fait pas de pause et qu’il reste « une montagne à gravir » avant de passer au « statut endémique » à travers le monde. Déplorant que seulement 11% des personnes vivant dans les pays à faible revenu aient reçu au moins une dose de vaccin, il s’est dit préoccupé par le fait que plus de vaccins aient été administrés sous forme de rappels dans les pays les plus riches que de premières doses dans les pays pauvres au cours des six derniers mois. Multiplier les rappels dans un petit nombre de régions ne mettra pas fin à une pandémie alors que des milliards des personnes ne sont absolument pas protégées, a-t-il averti.  

L’Administrateur du PNUD a ensuite relevé que de nombreux pays en développement ont des difficultés à accéder aux financements nécessaires pour alimenter la reprise, tandis que d'autres sont surendettés. Selon ses calculs, 82 pays en développement sont « fiscalement vulnérables » et il devient de plus en plus difficile pour leurs gouvernements de fournir aux populations le soutien dont elles ont besoin.  Si on ajoute les « défis croissants », tels que la hausse des prix de l’énergie et des aliments, la hausse des taux d’intérêt et les problèmes de chaîne d'approvisionnement, les conditions sont réunies pour plonger encore plus de personnes dans la pauvreté et creuser les inégalités.  De fait, a-t-il souligné, nous devons faire face à la menace d'une « divergence mondiale » en termes de reprise économique, avec d’un côté les pays en développement et de l’autre les pays développés, ce qui met en péril les promesses du Programme 2030. 

Pour M. Steiner, tout n’est pourtant « pas si sombre ».  En premier lieu, la réponse à la COVID-19 a démontré que le système de développement des Nations Unies est « plus que la somme de ses parties ».  Rappelant que les différentes composantes de l’ONU sont à pied d’œuvre dans 170 pays - de l'approvisionnement au déploiement d’équipements médicaux vitaux et de vaccins en passant par le soutien aux transferts d'argent numériques, à l’aide aux petites entreprises, qui représentent 70% du l’emploi dans le monde, et à l’assistance fournie aux gouvernements pour qu’ils adoptent des politiques sensibles au genre dans leurs réponses à la pandémie-, il a estimé que ce qui manque à l'Organisation en termes de puissance budgétaire est compensé par un « soutien efficace et opportun » sur le terrain.  Il a d’autre part relevé que les réponses qui fonctionnent sont adaptées aux divers contextes nationaux.  L’ONU, a-t-il ajouté, est en mesure d’offrir cette attention politique, institutionnelle et budgétaire pour répondre aux besoins différents des petits États insulaires en développement (PEID), des pays les moins avancés (PMA), des pays à revenu intermédiaire ainsi qu’aux contextes de crise et de fragilité. 

Avant de conclure, il a cité trois priorités clefs pour mieux construire après la COVID-19. Il convient, premièrement, de « terminer la course » pour vacciner la population mondiale rapidement. Deuxièmement, le système multilatéral doit élargir l'espace budgétaire et stimuler les flux financiers alignés sur les ODD en 2022. Selon lui, cela doit également impliquer une action multilatérale sur l'allégement de la dette, le financement concessionnel, les droits de tirage spéciaux (DTS) et des investissements concertés pour les ODD.  Enfin, il faut aussi penser à l’avenir.  Malgré la hausse des prix de l’énergie et des taux d'intérêt, nous ne devons pas laisser tomber l’accès à l'énergie, ni relâcher les transferts technologiques et financiers nécessaires pour faire avancer la transition vers un monde de l’économie verte, a-t-il affirmé, souhaitant qu’on ne parle plus d’une flambée de COVID-19 en 2023. 

Intervenant depuis Genève, Mme REBECA GRYNSPAN, Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a relevé que, l'année dernière, le PIB mondial a rebondi, sans que cette reprise soit inclusive ni qu’elle renforce la résilience. « Une reprise comme celle-ci, dans un monde plus inégalitaire, est une voie vers la fragilité et ne mérite pas d'être appelée reprise », a-t-elle martelé, avant de préciser que la CNUCED estime le coût total de cette pandémie pour les pays en développement à 13 000 milliards de dollars. Étonnamment, a-t-elle constaté, dans de nombreux pays avancés, l’impact sur le taux de croissance à long terme est presque négligeable. On prévoit ainsi que le PIB américain en 2025 sera plus important que celui prévu en 2019 avant la pandémie. 

Dans le même temps, des risques supplémentaires se profilent à l'horizon, a noté Mme Grynspan, selon laquelle la hausse de l'inflation et le resserrement monétaire dans le monde riche pourraient entraîner une fuite des capitaux et une volatilité financière dans les pays du Sud, rendant la gestion de la dette encore plus difficile. De plus, les perturbations sans précédent des chaînes d'approvisionnement mondiales devraient se poursuivre et accroître encore l'inflation, en particulier dans les PEID, où la CNUCED évalue cet effet à 7,5% de leur niveau de prix.  Et même si ces risques ne se matérialisent pas, il y aura encore 50 millions de personnes extrêmement pauvres en plus en 2023 par rapport à 2019, a-t-elle averti, mettant en garde contre une « autre décennie perdue » pour de nombreux pays en développement. 

Face à ces risques, la réponse de la communauté internationale va, selon elle, « dans le bon sens », la plus grande émission jamais enregistrée de DTS en étant un « exemple clair ». Toutefois, a-t-elle jugé, il manque l'élan et l'ampleur appropriés. Si nous n'augmentons pas le soutien financier, si nous ne trouvons pas de vraies solutions pour l'allègement de la dette, si on ne recapitalise pas les banques multilatérales de développement, l'élan positif actuel finira par être à nouveau trop faible et trop tardif, a prévenu Mme Grynspan. Dans ce contexte, le « Pacte de Bridgetown », adopté lors de la quinzième session de la CNUCED en octobre dernier à La Barbade, traduit la volonté des États Membres de voir la capacité de recherche et l’aide technique de la CNUCED revigorées, a-t-elle souligné, notant que de nombreux problèmes liés au commerce et au développement doivent être abordés dans le cadre de cette pandémie. Parmi eux, elle a cité l’équité vaccinale ; l’investissement pour le commerce et la résilience des infrastructures ; le financement de la durabilité dans les pays en développement, notamment en luttant contre les flux financiers illicites ; et la gestion de la dette et le financement du redressement, y compris par le recyclage des DTS. Le Pacte, a-t-elle ajouté, reconnaît également que les effets combinés de la pandémie et des changements climatiques entraînent des défis mondiaux qui nécessitent des solutions globales et coordonnées et que l'ONU est le forum de dialogue multilatéral idoine pour y répondre. 

La reprise mondiale à cette « crise pas comme les autres » se poursuit mais elle est perturbée, a observé depuis Washington M. BO LI, Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI).  En effet, a-t-il expliqué, la dynamique tend à ralentir.  Les décideurs sont confrontés à un « parcours d’obstacles » dus au variant Omicron mais aussi aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, à la progression de l’inflation et à l’endettement record. En conséquence, notre mise à jour des perspectives de l’économie mondiale prévoit une croissance mondiale de 4,4% en 2022, soit un demi-point de moins que ce que nous avions prévu en octobre dernier. Et l'inflation est révisée à la hausse, avec des pressions sur les prix qui sont plus généralisées et qui devraient durer plus longtemps. 

De fait, a indiqué M. Li, la pandémie devrait coûter à l’économie mondiale 13 800 milliards de dollars d’ici à 2024.  Même si la reprise se poursuit, la divergence inquiétante des perspectives d’un pays à l’autre persiste.  À ses yeux, la communauté internationale peut néanmoins agir pour favoriser la reprise et veiller à ce que celle-ci soit résiliente et inclusive sur le long terme. Pour cela, il faut tout d’abord accélérer la vaccination.  À l’heure actuelle, a-t-il constaté, seulement 4% de la population des pays à faible revenu est entièrement vaccinée, contre 70% dans les pays à revenu élevé. Il convient ensuite d’ouvrir la voie à une reprise transformationnelle.  Le FMI s’y emploie en développant un nouveau fonds « résilience et durabilité » pour aider les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire à faire face aux défis structurels à plus long terme.  Enfin, il importe d’assurer une transition juste qui favorise une croissance inclusive, a plaidé M. Li.  À cette fin, le FMI collabore avec des partenaires pour améliorer ses conseils, notamment sur le climat et la protection sociale, et œuvre de concert avec l'OIT et les États fragiles et touchés par des conflits, où les partenariats avec l'ONU seront essentiels pour mettre en œuvre sa nouvelle stratégie. 

Dans une liaison depuis Budapest, Mme GABRIELLA VUKOVICH, Présidente de l'Office central hongrois des statistiques et Vice-Présidente de la cinquante-deuxième session de la Commission de statistique, a rappelé que cette session a permis l’adoption du Système de comptabilité environnementale et économique intégrée - comptabilité écosystémique (SEEA EA).  Le SEEA EA, a-t-elle précisé, est un cadre intégré sur le lien économie-environnement qui soutient un large éventail d’ODD et permet aux utilisateurs de données d’aller « au-delà du PIB ».  Il traite les données sur les habitats et les paysages, mesure les services écosystémiques, suit les changements dans les actifs écosystémiques et relie ces informations aux facteurs économiques et aux autres activités humaines. Il complète en outre le PIB en tenant compte du capital naturel, ce qui permet de comprendre les immenses contributions de la nature à notre prospérité et notre bien-être, et l’importance de la nature pour la reprise économique.  

La Vice-Présidente de la Commission de statistique a indiqué que le SEEA EA s’appuie sur cinq comptes principaux qui analysent l’étendue des écosystèmes ; l’état des actifs écosystémiques; les flux de services écosystémiques et l’utilisation de ces services par les unités économiques, y compris les ménages ; et les changements dans les stocks d’actifs écosystémiques.  Le Système prend également en charge la « comptabilité thématique », qui organise les données autour de thèmes environnementaux spécifiques pertinents pour les politiques, tels que la biodiversité, les changements climatiques, les océans et les zones urbaines. Plus de 35 pays compilent les comptes écosystémiques du SEEA et leur nombre devrait croître dans les années à venir, a-t-elle ajouté, notant que, dans le rapport sur « Notre Programme commun », le Secrétaire général exhorte les États Membres à commencer la mise en œuvre de la comptabilité des écosystèmes du SEEA en permettant aux systèmes comptables nationaux et mondiaux d'utiliser les statistiques officielles au-delà du PIB. 

En outre, a poursuivi Mme Vukovich, le SEEA EA fournit une norme statistique qui sous-tend plusieurs initiatives internationales. Grâce à ses capacités d’analyse intégrées, il devrait figurer en bonne place dans le cadre de suivi de la biodiversité mondiale post-2020 et contribuer à la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes, a-t-elle affirmé. L’experte a d’autre part relevé que plusieurs ODD, notamment l’ODD 6 sur l’eau propre et l’assainissement, l’ODD 11 sur les villes durables et l’ODD 15 sur la vie terrestre, sont associés à des indicateurs dérivés directement du SEEA EA.  Selon elle, la connaissance des services fournis par les écosystèmes est essentielle pour atteindre les cibles des ODD 1 sur l’absence de pauvreté, 2 sur l’éradication de la faim, 7 sur une énergie abordable et propre, et 12 sur une consommation et une production responsables. 

Pour Mme Vukovich, la mise en place de programmes transversaux tels que le SEEA EA nécessite une coordination et une collaboration avec les ministères de tutelle et d’autres fournisseurs de données, ce qui s’est révélé difficile pendant la pandémie de COVID-19. Une plus grande collaboration interinstitutionnelle et des partenariats seront donc essentiels pour créer des politiques efficaces pour une reprise économique résiliente et inclusive, a conclu la responsable. 

Débat interactif

Au cours du débat interactif qui a suivi, l’Indonésie a souhaité que les efforts de reprise permettent de renforcer le dispositif économique et social mondial afin que la communauté internationale dans son ensemble puisse mieux faire face aux crises futures.  À cette fin, elle a appelé à renforcer les infrastructures sanitaires mondiales pour mieux se préparer à la prochaine crise et faciliter la réalisation des ODD. Elle a aussi jugé crucial d’investir dans les compétences numériques et de mettre en œuvre une transition énergétique juste, avec des technologies propres et intelligentes, notamment dans les pays n’ayant pas de capacités de développement des énergies durables.  Enfin, la délégation s’est engagée à tout faire pour renforcer les synergies entre l’ECOSOC et le G20. 

La représentante de la Grenade a, elle, estimé qu’avec le soutien des États Membres, le forum de l’ECOSOC sur le suivi du financement du développement de cette année peut contribuer à une reprise équilibrée et permettre d’avancer sur certains problèmes cruciaux, notamment les questions de dette et de liquidité, la numérisation, le financement climatique, la fiscalité, le commerce et l'investissement.  Elle a ajouté que son pays, en tant que cofacilitateur, exhorte les États Membres à participer à ce processus et à soumettre avant le 18 mars leurs contributions écrites à l’avant-projet de document final, celui-ci devant être adopté le dernier jour du forum prévu du 25 au 28 avril. 

Le Nigéria a confirmé la nécessité de prendre au sérieux le financement durable pour les pays en développement. Il n’y aura pas de reprise résiliente si ces pays sont étouffés par la dette, a-t-il averti, estimant que la règle doit être la même pour tous. Pour ce faire, les pays les plus pauvres doivent pouvoir profiter du commerce et du développement alors qu’il se relèvent de la pandémie. 

À une autre échelle, les États-Unis ont dit voir dans la croissance inclusive un « catalyseur du développement ».  Rappelant leur appui aux pays à revenu faible ou intermédiaire confrontés à des problèmes de liquidités, ils ont indiqué qu’ils mobilisent des financements du secteur privé dans les économies en développement, notamment en renforçant la confiance dans les marchés et en apportant des garanties contre les risques politiques. Pour la délégation, l’un des grands défis est d’édifier des partenariats durables avec le secteur privé tout en protégeant l’environnement et les droits humains.  Il faut aussi que les efforts soient exempts de corruption et promeuvent une déontologie économique.  

« Au-delà de la crise liée à la pandémie, nous continuons à livrer bataille contre les changements climatiques », a signalé le Belize, non sans préciser que son statut de pays à revenu intermédiaire la prive en outre d’un accès aux financements concessionnels. Se disant favorable à l’adoption d’un indice multidimensionnel de vulnérabilité pour l’octroi de tels financements, elle a jugé que cela lui permettrait de garantir une utilisation efficace de ses ressources. Sur le même sujet, le Pérou a appelé de ses vœux l’abandon du PIB comme seul « baromètre » et a souhaité savoir comment la Commission de statistique soutient le principe d’un indice de vulnérabilité pour les pays fragiles. 

Soulignant le rôle central joué par l’ONU pour aider les pays en développement à se relever de manière résiliente, le Kazakhstan a demandé à la Secrétaire générale de la CNUCED de préciser le contenu du « Pacte de Bridgetown » et sa contribution à la réalisation des ODD. 

Après avoir réitéré son appel à la vaccination universelle contre la COVID-19, le Bangladesh a estimé que les technologies devraient être transférées de toute urgence dans les pays en développement pour que la production monte en puissance.  Il a également soutenu que les mesures de relance doivent aller de pair avec l’action climatiques pour faire face aux chocs futurs. Pour cela, les partenaires technologiques et les donateurs privés doivent faire de leur mieux pour renforcer les capacités des pays en développement, a-t-il plaidé, avant d’exprimer l’espoir que le futur programme d’action de Doha pour les PMA soit suivi d’effets. 

La répartition équitable des richesses n’est pas prise en compte par le système financier mondial, a déploré le Costa Rica, appelant à son tour à l’adoption d’un indice de vulnérabilité pour mesurer les besoins en développement, à l’image de l’indice de développement ajusté du PNUD.  À cette fin, il a souhaité que l’ECOSOC se fasse le « fer de lance » d’un système de développement progressif, où personne ne serait laissé pour compte.

En réponse à ces commentaires et questions, l’Administrateur du PNUD a salué le « degré d’unanimité » sur le caractère urgent du défi et l’ampleur de la relance. Pour que celle-ci soit envisagée de manière synchrone, il importe avant tout, selon lui, que les efforts portent sur l’accès aux vaccins contre la COVID-19.  Il faut ensuite que la riposte à cette crise sans précédent soit à la hauteur de la tâche, faute de quoi les conséquences seront lourdes et nous devrons y faire face pendant des années.  Aujourd’hui, a souligné M. Steiner, « nous n’en sommes pas encore à reconstruire en mieux ».  De plus, les outils de relance sont très inadéquats et les mesures mises en place ignorent, par exemple, les effets profonds de la crise pour le secteur informel.  Il est donc urgent de « changer de paradigme » pour tenir compte des vulnérabilités des pays fragiles, de leur manque d’accès à l’énergie et de leurs besoins en investissements pour sortir de la crise, tout en substituant à l’approche « réactive » actuelle une approche « proactive ». 

La Secrétaire générale de la CNUCED est pour sa part revenue sur le « Pacte de Bridgetown », qui appelle à envisager le défi du développement et de prendre cette problématique « très au sérieux ». En ce qui concerne l’investissement, la question est de savoir comment en faire profiter les PMA, notamment en augmentant leurs capacités à attirer des fonds publics et privés.  Elle a ajouté que la CNUCED s’emploie également à répondre à des questions urgentes comme la dette, le financement climatique et la lutte contre les flux illicites.  Mais l’un de ses principaux objectifs est de rendre ses programmes véritablement transformateurs dans les PMA, les PEID et les pays sans littoral. 

De son côté, le Directeur général adjoint du FMI a insisté sur la coopération entre le Fonds et l’ONU. Il a indiqué à cet égard qu’un groupe de membres de l’ECOSCOC rencontrera des responsables du FMI le 10 février prochain pour approfondir le débat et travailler à une économie plus juste et durable. Ces échanges se poursuivront en avril lors du forum sur le suivi du financement du développement, a-t-il ajouté. Il a d’autre part relevé que le FMI travaille à la création d’un fonds de résilience dont l’objet est de faire en sorte que les pays vulnérables soient associés à des projets de transformation au service du climat, de la numérisation et de la riposte à la pandémie. 

La Présidente de lOffice central hongrois des statistiques a, quant à elle, souligné la nature transversale des statistiques, qui servent à la fois à la surveillance et à la gestion de la crise mais aussi à la planification des efforts de riposte. À ses yeux, un élément essentiel est la qualité des données. Il faut notamment collecter des données sur les personnes les plus vulnérables afin qu’elles ne soient plus invisibles, a-t-elle préconisé, avant d’appeler les États Membres à investir dans ce domaine pour « y voir plus clair et améliorer les vies ».

En conclusion de cette table ronde, le Vice-Président de l’ECOSOC s’est félicité de la convergence de vues des intervenants sur le diagnostic.  Selon lui, il convient désormais de travailler à la convergence des moyens permettant d’agir pour la relance économique et le relèvement durable. 

Tirer parti de la science, de la technologie et de l’innovation, y compris des technologies numériques

M. HOULIN ZHAO, Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications (UIT), a expliqué que pour l’UIT, l’impératif de ne laisser personne de côté signifie avant tout ne laisser personne hors ligne.  Les chiffres de l’UIT montrent une forte croissance mondiale de l’utilisation d’Internet depuis le début de la pandémie, alors même que 96% des 2,9  milliards de personnes qui sont toujours hors ligne vivent dans les pays en voie de développement.  De larges écarts entre les sexes subsistent dans les pays les moins avancés et enclavés en termes d’accès et d’utilisation de l’Internet et à l’échelle mondiale, les habitants des zones urbaines sont deux fois plus susceptibles d’utiliser l’Internet que ceux des zones rurales.  « En bref, il sera très difficile d’atteindre les ODD tant que la capacité de se connecter restera profondément inégale au sein des pays et entre eux », a concédé M.  Zhao.  Il a ensuite parlé du projet Giga, une initiative mondiale UIT-UNICEF visant à connecter chaque école à Internet.  Giga a déjà cartographié plus d’un million d’écoles dans 41  pays, et ce n’est que le début, a-t-il affirmé, avant d’indiquer que l’UIT et l’UNICEF proposent de lancer une obligation de connectivité de 5  milliards de dollars pour accélérer les investissements dans les infrastructures. 

S’agissant des changements climatiques, M. Zhao a expliqué que l’UIT cherche à s’aligner sur la trajectoire d’une réduction de 45% des émissions de gaz à effet de serre du secteur des TIC.  Pour y arriver, il est important de s’engager dans de nouvelles formes de collaboration, a-t-il dit.  Dans cet esprit, l’UIT a lancé plusieurs projets communs avec des agences sœurs des Nations Unies, notamment l’UNESCO pour l’apprentissage en ligne et l’OIT pour les compétences numériques des jeunes en Afrique.  L’Union a aussi mobilisé ses États membres, certains secteurs de l’industrie et le milieu universitaire autour de projets TIC mondiaux, régionaux et nationaux qui impliquent des agences régulatrices et administratives.  Le Secrétaire général a précisé que les efforts de l’UIT pour accélérer les progrès vers la réalisation des ODD s’inscrivent dans le cadre d’un engagement plus large visant à faire progresser les technologies nouvelles et émergentes pour tous, qu’il s’agisse d’aider à développer des réseaux 5G ou des partenariats avec l’OMS pour exploiter la puissance de l’intelligence artificielle au service de la santé. 

Mme CATHERINE M. RUSSEL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a déclaré que plus de 600 millions d’enfants sont touchés par la fermeture totale ou partielle des écoles deux ans après le début de la pandémie.  Face à cette situation, elle a appelé à aider les pays à maintenir les écoles ouvertes, en vaccinant en priorité les enseignants et personnels scolaires.  Elle a également souligné la nécessité d’aider les enfants à retrouver leur éducation, de réduire le risque de décrochage et de combler le déficit d’apprentissage et de compétences.  Il faut aussi investir dans le rétablissement du bien-être physique et émotionnel des enfants gravement touchés pendant la pandémie, a-t-elle insisté en soulignant la valeur ajoutée des programmes de nutrition, WASH, de protection sociale et de soutien psychosocial.  La panéliste a également appelé à redoubler d’efforts pour atteindre les enfants les plus marginalisés, notamment les filles, les enfants qui grandissent dans la pauvreté, les enfants pris dans des crises humanitaires, les enfants handicapés, ou membres de minorités ethniques. 

Mme Russel a alerté que les perturbations de l’éducation dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ont laissé jusqu’à 70% des enfants de 10 ans incapables de lire.  Illustrant les efforts de l’UNICEF en matière de programmes de rattrapage, Mme  Russel a cité le lancement en étroite collaboration avec le Gouvernement du Pakistan, de Teleschool, une chaîne de télévision éducative qui dispense une éducation à des millions d’enfants.  Et en Afghanistan, nous avons uni nos forces avec le Partenariat mondial pour l’éducation, Education Cannot Wait et la Fondation Gates pour étendre l’apprentissage communautaire dans les zones difficiles d’accès, en particulier pour les filles, dont l’accès à l’éducation continue d’être compromis, a-t-elle indiqué. 

La Cheffe de l’UNICEF a ensuite relevé que la pandémie a suscité la plus grande « réponse numérique » de l’histoire.  Elle a cité un partenariat entre l’UNICEF et l’Union internationale des télécommunications (UIT) et d’autres partenaires sur l’initiative Giga, qui vise à connecter toutes les écoles du monde à Internet et a permis de cartographier plus d’un million d’écoles dans 41 pays pour suivre la connectivité en temps réel.  Elle a aussi cité l’exemple du Learning Passport, une plateforme d’apprentissage numérique développée par l’UNICEF avec Microsoft qui permet à 227  millions d’enfants d’accéder à des programmes scolaires en ligne dans leur langue nationale.  La collaboration avec le secteur privé pour développer des produits basés sur l’intelligence artificielle peut aussi améliorer l’éducation d’étudiants marginalisés, dont les enfants handicapés. 

En sa qualité de Président de la Commission de la science et de la technique au service du développement (CSTD), M.  MANSOUR AL-QURASHI (Arabie saoudite) a appelé à assurer un accès égal aux avantages offerts par la science, la technologie et l’innovation dans les soins de santé pour une récupération durable après la pandémie de COVID-19 et des futures crises sanitaires.  Conformément à l’ambition de « ne laisser personne de côté », il a exhorté les décideurs politiques à tenir compte du potentiel des innovations pour répondre aux besoins de la diversité des communautés, en particulier des groupes vulnérables, tels que les peuples autochtones, les minorités et les personnes extrêmement pauvres.  

Notant que l’intégration de la perspective de genre est essentielle pour construire des sociétés équitables, M. Al-Qurashi a appelé à éviter les préjugés sexistes dans le domaine des nouvelles technologies.  Pour ce faire, il faut développer des capacités institutionnelles, des plans d’action et des outils pratiques pour élargir l’accent mis sur le genre et la participation et la consultation des femmes et des groupes de femmes concernant les changements climatiques. 

Le panéliste a ensuite appelé à renforcer la coopération aux niveaux mondial, régional et national dans le domaine de la science, la technologie et l’innovation pour assurer une « mondialisation à visage humain » inclusive et durable dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Alors que les communautés du monde entier, en particulier dans les pays les moins avancés (PMA), les pays en développement sans littoral (PDSL), les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays à revenu intermédiaire sont aux prises avec l’impact de la crise sanitaire, il a dit l’urgence de « formes améliorées de coopération internationale au développement et de nouveaux modèles de partage des connaissances ».  La réponse mondiale à la pandémie nous a offert une liste d’exemples significatifs de la manière dont le partage international des connaissances sur la science, la technologie et l’innovation peut faire la différence entre la vie et la mort, a-t-il relevé. 

M. TAKESHI HIKIHARA, Président de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, a souligné d’emblée que l’innovation technologique, y compris les technologies numériques, est une épée à double tranchant dans la lutte contre la criminalité.  Elle fournit des outils efficaces pour prévenir les crimes et renforcer les systèmes de justice pénale, mais elle offre également de nouvelles opportunités et de nouveaux moyens aux criminels.  La pandémie de COVID-19 n’a aiguisé qu’un seul tranchant de l’épée, « malheureusement ce dernier », a-t-il dit.  Il a indiqué que la Commission cherche à relever ce défi en jouant un rôle actif dans l’élaboration d’orientations politiques pour lutter contre les crimes nouveaux et émergents, et en promouvant l’utilisation de l’innovation technologique, y compris les technologies numériques. 

L’un des plus grands accomplissements à cet égard a été l’adoption, en mars dernier, lors du quatorzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, de la Déclaration de Kyoto qui, a affirmé M.  Hikihara, marque un jalon pour la communauté internationale dans ses efforts collectifs de prévention du crime et de justice pénale.  Elle démontre clairement la reconnaissance partagée des États Membres que les systèmes de justice pénale doivent être améliorés en promouvant une utilisation appropriée de la technologie, y compris la numérisation, en tenant dûment compte de l’expérience actuelle de la pandémie, a-t-il ajouté.  Il a cité les engagements pris pour renforcer la coordination et la coopération en vue de prévenir et combattre efficacement la cybercriminalité, notant que la promotion des partenariats public-privé avec l’industrie numérique est particulièrement efficace à cet égard.  Les États Membres ont aussi convenu d’intégrer la perspective de genre dans la prévention du crime et les systèmes de justice pénale, s’engageant en outre à répondre aux besoins sexospécifiques et à promouvoir l’autonomisation des femmes dans ce domaine.  Avant de conclure, M.  Hikihara n’a pas manqué de rappeler que la Commission a également préparé une résolution consacrée au renforcement des systèmes de justice pénale pendant et après la pandémie de coronavirus qui a été adoptée par l’Assemblée générale en décembre dernier. 

Débat interactif

Si tout le monde s’est accordé à dire que la pandémie de COVID-19 a forcé beaucoup de personnes à se mettre en ligne, les intervenants ont aussi insisté sur l’impératif et l’urgence de veiller à ce que les 3,7 milliards de personnes qui ne sont toujours pas connectées ne soient pas laissées pour compte.  Il faut combler la fracture numérique afin de réduire les inégalités croissantes, a insisté Singapour alors que le Chili a plaidé pour plus de coopération pour renforcer les infrastructures numériques et donner à tous accès à l’Internet.  La Lettonie a souligné qu’il y va de la résilience de nos sociétés, tandis que la Slovénie a appelé à prendre conscience des disparités dans le développement de l’intelligence artificielle entre les pays, insistant en outre sur l’impératif de veiller à ce qu’elle soit mise au service des ODD. 

Les intervenants se sont également accordés à dire que les sciences, technologies et innovations sont des outils incontournables pour relever les défis actuels et réussir le pari du développement durable, mais que leur accès demeure trop inégalitaire, un état de fait amplifié par la pandémie.  Pourtant, a dit la Chine, le succès et la durabilité de la relance post-COVID-19 vont en dépendre. Dès lors, il importe que l’ONU joue un rôle de coordination dans ce domaine et facilite la promotion d’un environnement non discriminatoire et juste pour les sciences, technologies et innovations.  La proposition d’un pacte numérique mondial avancée par le Secrétaire général a d’ailleurs été appuyée à plusieurs reprises. 

L’éducation en ligne, privilège des pays développés pendant la pandémie a, elle aussi, souvent été évoquée, la Directrice exécutive d’UNICEF notant que 616 millions d’enfants ont subi les effets de la fermeture des écoles pendant la pandémie COVID-19, et que seuls les pays développés ont pu passer à l’éducation numérique.  Aujourd’hui, toutes les nations se doivent de réduire l’analphabétisme numérique, mais ce pari ne pourra être relevé que collectivement, a estimé le Guatemala.  Pour le Secrétaire général de l’UIT, l’une des voies à explorer à cette fin est l’appui aux PME dans les pays en développement car, « dans ces pays, les ingénieurs sont parfaitement au fait de la 4G et de la 5G ».  Il a également insisté sur l’importance de réduire la fracture numérique entre les genres en encourageant des initiatives pour orienter les filles et les femmes vers les sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM) car, comme il l’a constaté, même à l’UIT les déléguées femmes sont toujours sous-représentées. 

Comme l’a noté le Vice-Président de l’ECOSOC, alors que l’ambiance était à l’optimisme à l’aune de la quatrième révolution industrielle, la pandémie a mis en lumière la fracture numérique et les inégalités dans ce domaine.  Étant donné ces inégalités incontestables et l’immense potentiel des sciences et des technologies pour la relève post-COVID-19, que faut-il faire pour surmonter les difficultés à court et long terme et réaliser les ODD sans laisser certains pour compte?  Voilà la grande question d’aujourd’hui.  Autrement dit, a renchéri le Secrétaire général de l’UIT, comment connecter plus de trois milliards de personnes? 

M. CHINDAWONGSE (Thaïlande),Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) et responsable du débat consacré aux questions de coordination, a, en fin de séance, fait une synthèse des discussions et des différentes tables rondes qui se sont tenues aujourd’hui.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Forum des partenariats de l’ECOSOC: appels à une mobilisation multipartite et à une volonté politique pour surmonter les obstacles vers un monde durable

Session de 2022,
Forum des partenariats, matin & après-midi
ECOSOC/7069

Forum des partenariats de l’ECOSOC: appels à une mobilisation multipartite et à une volonté politique pour surmonter les obstacles vers un monde durable

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, a appelé, ce matin, à « une mobilisation multilatérale et multipartite sans précédent », ancrée dans les 17 objectifs de développement durable (ODD) pour surmonter les conséquences de la pandémie en cours et accélérer les transitions socioéconomiques essentielles qui feront de ces objectifs une réalité.  À la séance plénière du forum des partenariats du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), qui se tenait ce jour en format hybride, les États et les autres parties prenantes -aux niveaux mondial, régional, national et local- ont réitéré leur engagement au titre de l’ODD 17 qui promeut des partenariats efficaces et inclusifs entre les gouvernements, le secteur privé et la société civile.

Rappelant qu’aucun pays ou secteur ne peut à lui seul relever les défis, Mme Mohammed a invité le forum à utiliser les ODD comme cadre holistique alors que la pandémie en cours a poussé 100 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté et que les chocs climatiques ont forcé 30 millions de personnes à fuir leur foyer en 2020.  Le Président de l’ECOSOC, M. Collen Vixen Kelapile, a souhaité que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 guide les efforts de relance des gouvernements et acteurs, dont les organisations internationales, le système des Nations Unies, les institutions financières internationales, les parlementaires , les gouvernements locaux, les organisations non gouvernementales, le secteur privé, la société civile, les scientifiques, les universitaires, les femmes, les jeunes et les autres parties prenantes. 

Le Président de l’ECOSOC a vu dans ce forum une occasion unique d’échanger des idées transformatrices et de formuler des recommandations politiques sur les actions nécessaires pour mettre en œuvre les ODD d’ici à 2030.  Après avoir noté que le forum des partenariats marque le début d’un cycle qui se conclura avec le forum politique de haut niveau pour le développement durable en juillet 2022, il a remercié les parties provenant de 56 pays qui ont partagé 250 contributions par le biais d’une consultation mondiale en ligne organisée fin 2021.

Alors que les deux hauts responsables se sont inquiétés des conséquences désastreuses de la pandémie de COVID-19 sur les pays en développement et les groupes les plus vulnérables, le Groupe des 77 et de la Chine a prévenu que la reprise restera fragile tant que les vaccins ne seront pas équitablement mis à la disposition de tous.

Sur le même ton, la Directrice exécutive d’Oxfam, Mme Gabriela Bucher, a appelé à mettre fin à un « apartheid vaccinal » qui tue des millions de personnes.  La pandémie de COVID-19 a transformé des « failles » d’inégalités en « gouffres », a-t-elle alerté.  Elle s’est d’autant plus inquiétée en comparant cette situation avec la hausse des richesses chez les plus riches: les 10 hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune doubler depuis le début de la pandémie tandis qu’un nouveau milliardaire est créé toutes les 26 heures, selon le dernier rapport d’Oxfam sur l’état des inégalités dans le monde.   

Réagissant aux accusations d’apartheid vaccinal, la France, qui parlait au nom de l’Union européenne (UE), a indiqué que l’accès mondial aux vaccins et le renforcement des systèmes de santé seront au cœur du prochain « sommet Union européenne-Union africaine » à Bruxelles les 17 et 18 février.  Afin de tenir notre promesse collective de « ne laisser personne de côté », le système multilatéral doit avant tout répondre aux besoins des pays les moins avancés, qui ont souffert de manière disproportionnée de la pandémie et sont les plus éloignés des ODD, a-t-il insisté avant d’annoncer que le nouveau programme d’action de Doha, qui doit être approuvé sous peu, sera une étape importante dans la concrétisation de l’engagement de la communauté internationale.

« Le Programme 2030 ne peut pas être entre les seules mains des gouvernements », a résumé l’Égypte en faisant remarquer que, avant même la pandémie, les pays en développement avaient du mal à atteindre les ODD.  L’ensemble des délégations qui sont intervenues, dont les grands groupes des « jeunes » et des « femmes », ont misé sur les discussions d’aujourd’hui pour que les partenariats entre toutes les parties prenantes répondent aux besoins spécifiques des pays les moins avancés (PMA), des petits États insulaires en développement (PEID) et des pays en développement sans littoral. 

L’avis des experts en provenance de pays en développement doit être pris en compte, a conseillé à cet égard la Fédération de Russie après avoir mis en garde contre le « ODD Washing » qui exige d’adopter des approches méthodologiques communes autour de la question du financement.  Le Groupe des 77 et de la Chine a reconnu que de nouveaux mécanismes de financement sont nécessaires et a appelé à alléger la dette des pays les plus vulnérables.  Un avis partagé par la Directrice exécutive d’Oxfam qui a regretté l’austérité budgétaire prônée par le FMI.

Outre la lutte pour la vaccination contre la COVID-19 et la poursuite des ODD, les partenariats ont été réclamés pour combattre les changements climatiques et, pour cela, atteindre l’objectif de mobiliser 100 milliards de dollars par an, dans le contexte des engagements du Pacte de Glasgow pour le climat.  Car quelle que soit l’ampleur de la crise de COVID-19, cela n’est rien en comparaison à la crise climatique à nos portes, a noté Mme Bucher en soulignant ce débat profondément « politique ». 

La journée était divisée en de multiples sessions informelles, « coup de projecteur » ou « échange de partenariats », dont une sur le rôle vital des administrations locales et régionales.  Le matin, le Gouvernement autonome basque avait souligné à ce propos la valeur ajoutée décisive des collectivités régionales et locales pour accélérer la mise en œuvre des ODD, tandis que la Directrice générale de Bioregional, intervenue en fin de journée, a témoigné au nom d’un réseau mondial de 1 000 entrepreneurs sociaux (Catalyst 2030) de leurs actions en faveur d’un développement économique local durable.  De nombreux intervenants ont insisté en particulier sur le rôle des villes pour relever le défi de la pandémie.

À la séance de clôture, Mme Maria-Francesca Spatolisano, Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, a salué le message clair des différents secteurs, notamment sur la nécessité d’une volonté politique forte.  L’ECOSOC se réunira demain, jeudi 3 février, pour entamer sa session de deux jours sur les questions de coordination.

FORUM DES PARTENARIATS

« Reconstruire en mieux après la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 »

Déclarations liminaires

Ouvrant le forum des partenariats du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) qui marque le début du cycle annuel des travaux dudit conseil, son Président, M. COLLEN VIXEN KELAPILE (Botswana), a souhaité que ces discussions viennent enrichir les travaux de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires dans les mois qui conduiront à l’édition 2022 du forum politique de haut niveau pour le développement durable (HLPF), en juillet.  Il s’est inquiété des conséquences de la pandémie de COVID-19 qui, depuis deux ans, a mis à nu les déséquilibres structurels du système financier mondial avec des conséquences désastreuses sur les pays en développement et les groupes les plus vulnérables dont les personnes handicapées, les autochtones, les personnes âgées, les migrants, les réfugiés et les personnes ayant des responsabilités familiales.  

Notant que l’inégalité d’accès aux vaccins continue de ralentir la reprise, le représentant du Groupe des 77 et de la Chine a prévenu que le reprise restera fragile, tant que les vaccins ne seront pas équitablement mis à la disposition de tous, dans tous les pays. 

M. Kelapile a souligné que le monde est confronté à trois crises planétaires en citant les changements climatiques, la perte de biodiversité et la pollution, et un nombre croissant de conflits qui nécessitent une action urgente de la communauté mondiale.  Pour garantir que nos sociétés se rétablissent de manière plus juste et plus durable, le Président de l’ECOSOC a souhaité que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ses 17 objectifs de développement durable (ODD) guident les efforts de relance de tous les gouvernements et acteurs, dont les organisations internationales, le système des Nations Unies, les institutions financières internationales, les parlementaires , les gouvernements locaux, les organisations non gouvernementales, le secteur privé, la société civile, les scientifiques, les universitaires, les femmes, les jeunes et les autres parties prenantes. 

Dans ce contexte, il s’est dit persuadé que le forum des partenariats de l’ECOSOC -dont le mandat a été réorienté par la résolution 75/290A de l’Assemblée générale- offrira aux gouvernements et aux parties prenantes une occasion unique d’échanger des idées transformatrices et de formuler des recommandations politiques sur les actions nécessaires pour relancer la mise en œuvre des ODD d’ici à 2030.  Il a remercié les parties prenantes qui ont partagé leurs points de vue, par le biais du processus de consultation mondiale en ligne organisé fin 2021 qui a permis de recueillir plus de 250 contributions des parties prenantes de 56 pays. 

Mettant l’accent l’interconnectivité et la nature transversale des ODD, le Président de l’ECOSOC a appelé à examiner comment mieux soutenir les groupes vulnérables, en particulier ceux qui ne sont pas joignables par les moyens de communication modernes, et comment garantir l’égalité des sexes, une éducation de qualité et l’équité en matière d’accès aux vaccins.

Notant que la pandémie a mis en évidence la nécessité de changer notre façon de vivre, de produire, de consommer, d’interagir les uns avec les autres et avec la nature, M. Kelapile a appelé à mobiliser la science et la technologie pour partager et exploiter les idées les plus audacieuses et innovantes pour faire progresser les ODD et combler les inégalités entre et au sein des pays. 

Mais avant tout, il a appelé à raviver un véritable esprit de multilatéralisme et de coopération internationale, ancré dans la solidarité entre les pays et entre les peuples.  C’est pourquoi il a espéré que les discussions d’aujourd’hui traceront une meilleure voie en direction de véritables partenariats entre toutes les parties prenantes, pour un impact plus important là où des actions sont nécessaires de toute urgence pour relever efficacement les défis communs.

Mme AMINA MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a déclaré que deux ans après le début de la pandémie, la souffrance humaine et les pertes de toutes sortes se poursuivent.  La pandémie de COVID-19 a ajouté de la complexité à ce qui était déjà un paysage sombre dans nos efforts pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), a-t-elle relevé.  Elle a souligné que la pandémie a contribué à creuser les inégalités entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci, poussant quelque 100 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté et inversant les progrès en matière d’éducation des jeunes et d’égalité des sexes. 

Dans le même temps, a poursuivi Mme Mohammed, les chocs climatiques ont forcé 30 millions de personnes à fuir leur foyer en 2020.  La conséquence des engagements climatiques insuffisants est que nous nous dirigeons vers une augmentation de près de 14% des émissions mondiales au cours de la décennie actuelle, alors que nous avons besoin d’une réduction de 45%, s’est-elle alarmée.    

La Vice-Secrétaire générale a appelé à renverser la situation, faisant remarquer que le concept de partenariat mondial est né en temps de crise.  Il repose sur la prise de conscience qu’aucun pays ou secteur ne peut à lui seul relever les défis mondiaux, a-t-elle rappelé en faisant appel à « une mobilisation multilatérale et multipartite sans précédent », ancrée dans les 17 ODD pour surmonter les conséquences de la pandémie de COVID-19 et accélérer les transitions socioéconomiques essentielles qui feront des objectifs une réalité.  

Dans Notre Programme commun, a-t-elle rappelé, le Secrétaire général a appelé à renforcer les partenariats à travers un engagement plus fort et plus systémique de tous les acteurs.  Cela signifie qu’il faut créer un espace plus large et un engagement réel pour les jeunes, la société civile, les entreprises, les autorités locales et d’autres afin de mieux éclairer notre travail aux Nations Unies et de mieux soutenir les progrès de nos cadres intergouvernementaux, a expliqué Mme Mohammed. 

Selon elle, ces efforts de partenariat peuvent contribuer à renforcer la confiance et la cohésion, à tirer parti du potentiel de tous les acteurs du développement et à créer des effets positifs au profit de tous, en particulier des pays et des peuples les plus vulnérables et marginalisés.  En utilisant les ODD comme cadre holistique, le forum des partenariats de l’ECOSOC peut nous aider à progresser vers une meilleure reprise et une accélération des progrès vers les ODD au cours du reste de la Décennie d’action, a conclu la Vice-Secrétaire générale. 

Mme GABRIELA BUCHER, Directrice exécutive d’Oxfam, a rappelé que même avant la pandémie, 3,4 milliards de personnes vivaient avec moins de 5,50 dollars par jour tandis que les milliardaires ont amassé des richesses incroyables; 10 000 personnes mouraient chaque jour en raison d’un accès inégal aux soins de santé et des dizaines de millions de filles n’étaient pas scolarisées.  La pandémie de COVID-19 a transformé ces fissures d’inégalités en gouffres, et les inégalités elles-mêmes n’ont fait que renforcer les effets de la pandémie, a-t-elle constaté.  Pas plus tard que la semaine dernière, Oxfam a publié son rapport annuel sur l’état des inégalités dans le monde, a-t-elle signalé.  Les titres de ce rapport révèlent que depuis le début de la pandémie, un nouveau milliardaire est créé toutes les 26 heures; les 10 hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune doubler; l’augmentation de la richesse des milliardaires pendant la COVID-19 est la plus importante de l’histoire alors que dans le même temps les revenus de 99% de l’humanité ont baissé et l’écart entre les nations riches et pauvres est à nouveau en hausse pour la première fois depuis une génération.  La pauvreté a également augmenté pour la première fois en des décennies, et tout indique que les inégalités sont susceptibles d’augmenter dans presque tous les pays pour la première fois dans l’histoire.  En collaboration avec Oxfam, la Banque mondiale a estimé qu’à moins que les inégalités ne soient traitées, il est tout à fait possible qu’il y ait plus de personnes vivant dans la pauvreté en 2030 qu’à la veille de la pandémie, ce qui signifie qu’on aura perdu une décennie, s’est alarmée Mme Bucher. 

La COVID-19 a également provoqué une augmentation de la violence sexiste, poussé les femmes hors du marché du travail et augmenté le nombre de mariages précoces forcés pour les filles, a poursuivi l’intervenante.  Elle a souligné que cette pandémie a mis en évidence à quel point les femmes sont essentielles pour relever les défis collectifs, même si elles sont souvent laissées pour compte dans les solutions.

C’est la raison pour laquelle le rapport d’Oxfam s’intitule « L’inégalité tue », a expliqué sa représentante.  Selon les calculs de l’organisation, l’inégalité contribue à la mort d’une personne toutes les quatre secondes, par exemple lorsque la lutte contre la violence sexiste est sous-financée et non priorisée ou lorsque l’accès aux soins de santé de qualité est un privilège pour les riches et non un droit pour tous.  L’apartheid vaccinal est peut-être l’exemple le plus clair de la façon dont l’inégalité tue des millions à l’heure où nous parlons, s’est emportée Mme Bucher.  Elle a accusé les pays riches de thésauriser les vaccins et de protéger le monopole des sociétés pharmaceutiques, ce qui limite l’offre mondiale de vaccins.  « Le résultat?  Moins de 3% des habitants des pays à faible revenu sont pleinement vaccinés. »  Par conséquent, nous sommes tous moins en sécurité à cause des nouveaux variants qui surgissent inévitablement, a-t-elle prévenu. 

Il est illusoire, selon elle, de penser qu’il est possible de commencer le travail vital de la reconstruction en mieux tant que les fondations ne sont pas les mêmes pour tous.  Il faut que les vaccins deviennent des biens publics pour tous, et non des opportunités de profit privé pour quelques-uns, a-t-elle exigé.  Les nations riches doivent assurer la distribution équitable des doses de vaccin et insister sur le fait que la propriété intellectuelle et la technologie doivent être partagées ouvertement, par exemple en partageant la composition du vaccin de Moderna avec les 100 producteurs qualifiés dans le monde qui pourraient fabriquer des vaccins à ARNm en ce moment.  Mais au-delà de la fin de l’apartheid vaccinal et de cette maladie cruelle, Mme Bucher est d’avis qu’il y a d’autres mesures claires à prendre.  

Elle a parlé des moyens nécessaires pour récupérer les énormes gains réalisés « au sommet de l’économie » et utiliser ces ressources pour sauver des vies et réduire les inégalités.  Par exemple, a proposé Mme Bucher, il y a un énorme potentiel avec un impôt de solidarité unique sur les plus riches qui, une fois en place, devrait évoluer en impôt permanent sur le capital et la richesse, comme l’a fait valoir le Fonds monétaire international (FMI).  Mettons l’argent des milliardaires à profit pour financer la course pour atteindre les ODD et la réduction radicale des inégalités, a proposé l’intervenante en mettant l’accent sur le financement de la santé universelle, la protection sociale et la lutte contre la violence, mais aussi la transition des combustibles fossiles et des communautés pour qu’elles puissent s’adapter aux changements climatiques.

Ces mesures et bien d’autres peuvent être prises pour réduire les inégalités et atteindre les ODD, a martelé l’intervenante mais au lieu de cela, de façon inquiétante et sous la pression du FMI, de nombreux pays sont contraints de réduire leurs dépenses, ce qui aggrave les dégâts causés par la pandémie.  Le FMI encourage l’austérité dans plus de 70 pays alors que le fardeau de la dette des pays en développement continue de grimper et détourne les ressources vitales des écoles et des hôpitaux pour payer les riches créanciers étrangers, s’est indignée Mme Bucher.  Mais il n’est pas trop tard, a-t-elle affirmé.  « Nous pouvons apprendre de la manière épouvantable avec laquelle nous avons géré la pandémie en 2021 et agir différemment à partir de maintenant. »  Elle a espéré que le monde apprendra des maux documentés de l’austérité pour ne plus forcer les pays à emprunter cette route.  Nous pouvons apprendre de l’incroyable impact que les augmentations de salaire et les dépenses consacrées aux services publics et à la protection sociale ont eu d’un pays à l’autre, a-t-elle espéré, voulant aussi apprendre de l’annulation des dettes dans le passé, et comment cela a donné aux gouvernements la liberté d’investir dans un avenir meilleur.  

C’est impératif, selon Oxfam, parce que quel que soit l’ampleur de la crise de COVID-19, ce n’est rien en comparaison à la crise climatique qui est à nos portes, a mis en garde sa représentante.  Elle a espéré que rien de tout cela n’arrivera si nous nous battons pour cela.  Il ne s’agit pas d’un débat technique mais bien d’un débat profondément politique, a martelé Mme Bucher.  Elle a assuré qu’Oxfam, avec ses alliés, est déterminé à mener ce combat pour prévenir l’explosion des inégalités et construire un monde plus juste et plus égalitaire.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a fait observer que nous sommes face à trois défis, en citant la pandémie de COVID-19, la lutte contre les changements climatiques et la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Il a jugé indispensable d’appuyer la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en gardant à l’esprit que les pays en développement ont été touchés de manière disproportionnée par la crise sanitaire.  Face à cette réalité, il a jugé indispensable de garantir un accès équitable aux vaccins et de permettre aux pays en développement de disposer de la marge fiscale nécessaire pour reconstruire.  Pour ce faire, il a appelé à alléger la dette et à mettre en place de nouveaux mécanismes de financement afin de protéger les plus vulnérables des effets de la crise.  

Par ailleurs, il a souligné l’importance de faire des investissements pour lutter contre les changements climatiques en phase avec les engagements de l’Accord de Paris et les engagements renforcés pris à la COP26 et dans le « Pacte de Glasgow pour le climat », avant de rappeler l’engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an.  En outre, il a demandé de bien prendre en compte les besoins spécifiques des pays les moins avancés (PMA), des petits États insulaires en développement (PEID) et des pays en développement sans littoral.  Il a souligné la nécessité de relancer les partenariats internationaux au profit du développement dans un esprit de solidarité conforme à l’ODD 17, qui vise justement de tels partenariats.  

Mme MCDOWELL (Nouvelle-Zélande) a dit que le partenariat se trouve dans l’ADN de sa délégation.  Pour la Nouvelle-Zélande, il est clair que le relèvement après la pandémie exige un partenariat efficace et innovant.  Il faut le mettre au cœur de nos engagements à réaliser les ODD, a recommandé la représentante.  Pour agir efficacement et créer une résilience sur le long terme, elle a conseillé de s’appuyer sur les atouts de chaque participant, en particulier ceux qui interviennent dans les domaines prioritaires comme la santé et l’éducation.  Mme McDowell a promis de continuer à agir en ce sens en partenariat avec les États Membres, la société civile, les jeunes et les populations autochtones.

M. MMUSI KGAFELA, Ministre de l’investissement, du commerce et de l’industrie du Botswana, a fait remarquer que la réunion d’aujourd’hui intervient à un moment critique alors que les pays continuent de lutter contre l’impact de la pandémie de COVID-19 tout en essayant de progresser sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable.  Décrivant le forum des partenariats comme une plateforme d’idées pour le partage d’expériences et l’apprentissage par les pairs, il a souligné les graves conséquences qu’entraîne la pandémie sur l’économie du Botswana, qui menacent également les progrès réalisés dans l’éradication de la pauvreté.  Le plan gouvernemental de relance et de transformation économiques vise à soutenir la reprise, à renforcer la résilience et à introduire un soutien vital, a-t-il expliqué.  Notant que 72,6% de la population du Botswana est désormais entièrement vaccinée contre la COVID-19 et que de nombreuses personnes ont également reçu une dose de rappel, il a poursuivi en décrivant les efforts de son pays pour « reconstruire en mieux », de manière plus verte et plus durable.  « Les choix politiques que nous faisons maintenant façonneront profondément l’avenir de nos communautés et de nos peuples. »  Le Ministre a, enfin, souligné la nécessité pour tous les pays du monde de mieux se coordonner dans des domaines tels que la finance et le commerce.

Au nom du groupe « Jeunes femmes et leaders pour la paix », Mme LYNROSE JANE GENON, des Philippines, a estimé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 devait être au cœur de toutes les priorités.  Elle a appelé à entendre la voix des jeunes qui font partie des groupes les plus touchés par les conséquences économiques et sociales de la pandémie.  Elle a aussi rappelé que les jeunes femmes sont en première ligne de la réponse à nos défis avant de regretter que leurs efforts ne soient pas reconnus.  Enfin, elle a estimé que la pandémie de COVID-19 nous rappelle qu’il est indispensable d’intégrer les femmes à tous les processus de développement économique et social.

M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili) a déclaré que la participation de différents partenaires permet d’avoir différents engagements pour faire face aux problèmes d’aujourd’hui.  Il a été d’avis que le partenariat doit être une politique d’État parce qu’il aide à faire converger le travail des parties prenantes pour lutter contre la pauvreté.  Le Gouvernement du Chili a créé le Bureau de lutte contre la COVID-19 rassemblant tous les acteurs de la santé publique, a-t-il donné en exemple en expliquant que cela ouvre un espace de dialogue en vue d’élaborer des recommandations au Gouvernement.  Il a mentionné également qu’un partenariat entre des universités et l’industrie pharmaceutique a vu le jour en 2020 pour lutter contre la COVID-19.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a appelé à réfléchir à la manière de définir une nouvelle voie politique et sociale pour parvenir à la réalisation des objectifs de développement durable dans le monde.  Le travail de l’ECOSOC doit être guidé par le principe de ne laisser personne de côté, a-t-il rappelé.  Notant que la pandémie a creusé les écarts entre les riches et les pauvres, le représentant a exhorté à mieux protéger les groupes les plus vulnérables qui sont aussi les plus frappés par la pandémie.  Le représentant a aussi défendu le principe de la cohérence politique alors que la pandémie a sapé l’ensemble des objectifs de développement durable en soulignant que le développement durable est un concept et que l’ensemble des objectifs fixés doivent être atteints.  Il a souligné le rôle des partenariats pour y arriver et plaidé pour plus de solidarité.

Le représentant de l’Égypte a rappelé qu’avant même la pandémie, les pays en développement avaient du mal à atteindre les objectifs de développement durable, et qu’aujourd’hui « c’est devenu une tâche impossible dans les délais imposés ».  Il faut par conséquent promouvoir les partenariats et mettre l’accent sur l’idée que le Programme 2030 ne peut pas être entre les seules mains des gouvernements.  Le monde ensemble doit œuvrer à créer des synergies et éviter les doublons, a-t-il recommandé.  Il a dit que l’Égypte a engagé des partenariats dans ses efforts de développement en misant notamment sur la protection sociale et l’attraction de financements privés à travers le Fonds pour le développement ou encore la coopération Sud-Sud. 

Au nom du grand groupe des femmes, Mme ELENA MARMO, des États-Unis, a jugé urgent de renforcer de manière systémique le secteur public afin de remettre en cause un système qui favorise les grandes entreprises.  « Il est temps pour les États Membres de récupérer leur pouvoir de régulation sur les grandes entreprises qui menacent les droits des personnes, a dit la représentant avant d’appeler à privilégier une gouvernance multilatérale plutôt que des partenariats. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a appelé à surmonter les conséquences de la pandémie de COVID-19 et à assurer la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) en collaborant avec un vaste panel d’acteurs nationaux et internationaux.  Il a souligné la nécessité d’encourager une action collective à travers un dialogue de fond avec la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Mettant l’accent sur le rôle de l’ECOSOC pour promouvoir la stabilité et la résilience, le représentant a appelé à l’organisation d’une manifestation consacrée aux mesures structurelles pour prévenir les activités criminelles.  Enfin, il a jugé prioritaire de promouvoir les liens entre l’ECOSOC et la société civile qui a été particulièrement affectée par la pandémie.  

M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA (Guatemala) a jugé nécessaire, après deux ans de pandémie, de participer aux efforts de reconstruction des systèmes de santé nationaux pour aider les populations à se relever.  Selon lui, il faut maintenant promouvoir des mesures plus concrètes et stratégiques pour réaliser les ODD et être mieux préparés à de futures crises humanitaires.  Il a également plaidé pour un investissement dans l’accès aux technologies en s’appuyant sur la coopération Sud-Sud.  Dans ce contexte, il a appelé à renforcer les efforts internationaux du secteur privé, des gouvernements et de la société civile pour accélérer le rythme des efforts, effacer les revers et aller de l’avant.

M. BORIS A. MESCHCHANOV (Fédération de Russie) a demandé de se mettre d’accord sur des approches méthodologiques communes autour de la question du financement pour éviter le « ODD Washing ».  Dans ce contexte, l’avis des experts en provenance de pays en développement doit être pris en compte, a-t-il recommandé.  Il a rappelé qu’en Deuxième Commission, sa délégation avait proposé d’étendre la participation des ONG à la question des sanctions.  Il a regretté que cette proposition n’ait pas été retenue.

M. JONAN FERNÁNDEZ, représentant du Gouvernement basque et du grand groupe des autorités locales, a estimé que les partenariats sont essentiels pour répondre aux crises, notamment à celle liée à la pandémie actuelle.  Il a toutefois constaté que leur mise en œuvre n’est pas suffisamment rapide pour être efficace.  À ses yeux, la participation des villes et des régions est indispensable pour appliquer une approche territoriale en matière de développement durable.  C’est pourquoi, a-t-il dit, le groupe appelle à une participation équitable des autorités locales aux discussions onusiennes, qui, selon lui, se doivent désormais d’associer les villes et les réseaux de régions.  En conclusion, le représentant a souhaité que la communauté internationale s’appuie sur l’expérience des villes et des régions pour faire avancer la réalisation du Programme 2030.

M. JONIBEK HIKMAT (Tadjikistan) a tout d’abord constaté que la pandémie de COVID-19 a effacé des années de progrès en matière de développement durable.  À cette aune, appliquer le Programme 2030 à tous les niveaux passe par des partenariats mondiaux revitalisés, a-t-il souligné, jugeant que cela doit notamment prendre la forme d’une assistance aux pays en développement, via un renforcement de leurs capacités et une aide au financement.  Dans ce cadre, le délégué a jugé essentiel d’accroître l’implication du secteur privé et de renforcer le rôle des Nations Unies dans le système des partenariats.  À cet égard, il a rappelé que l’un des objectifs de la Décennie internationale d’action sur le thème « L’eau et le développement durable » (2018-2028), instaurée à l’initiative de son pays, est de renforcer les partenariats dans ce domaine.  Il a ajouté qu’en 2023 se tiendra la première conférence des Nations Unies sur l’eau depuis 50 ans et qu’à cette occasion, il importera d’améliorer la coopération internationale et d’augmenter la capacité des pays en butte à des problèmes hydriques.  Avant de conclure, il a plaidé pour la création de partenariats réciproques, pour le renforcement général de la confiance et aussi pour la conclusion d’accords convenant à toutes les parties concernées. 

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a rappelé que le format renforcé du forum des partenariats figurait parmi les propositions visant à rassembler tous les acteurs de l’ECOSOC et à faire en sorte que l’ensemble du système de l’ECOSOC fonctionne à l’unisson dans les préparatifs du forum politique de haut niveau.  « Nous avons besoin que tout le monde soit dans la même barque et tienne ses promesses de réaliser le Programme 2030. »  Le représentant a salué l’engagement actif de groupes différents et nombreux à ce forum.  Il y a vu une chance de donner une impulsion pour que de nouveaux partenariats se forment au cours de l’année.  Le représentant a salué le fait que les recommandations des parties prenantes concernant l’orientation thématique du forum aient été prises en compte et soient reflétées dans des sessions se tenant aujourd’hui sur les thèmes « Promotion de l’équité vaccinale » et « Réduction de la fracture numérique ». 

M. INCARNATO (Italie) a fait valoir que les efforts menés en vue de renforcer les partenariats peuvent aider à réaliser l’objectif principal de ne laisser personne de côté.  Ils peuvent aussi renforcer le travail des institutions internationales avec le secteur privé et la société civile, a-t-il ajouté.  Le partenariat est au cœur de la coopération en faveur du développement de l’Italie, a témoigné le représentant.  Il a fait la promotion du multilatéralisme et du partenariat à l’ONU, en soulignant qu’ils ont notamment aboutit à la création du Mécanisme COVAX.  Le représentant a également souligné que partenariat et multilatéralisme contribuent à la promotion de la durabilité et de la pratique responsable des entreprises dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.  Le délégué a terminé en faisant observer que la participation de la société civile élève la qualité des travaux de l’ECOSOC et contribue à la transparence. 

Mme ALEJANDRA CASTRO, au nom du grand groupe des entreprises et de l’industrie, a salué la tenue du forum des partenariats et souligné l’importance du Programme 2030, qui est accessible pour les entreprises de toutes nationalités, de toutes tailles et de tous secteurs.  Le secteur privé a été en première ligne dans la lutte contre la pandémie, a-t-elle fait observer, en soulignant son rôle dans la recherche d’un vaccin et la formation des employés du secteur sanitaire.  Elle s’est dite préoccupée par les retards pris dans la mise en œuvre des ODD et par la remise en cause des gains de développement à cause de la pandémie.  Le secteur privé est prêt à travailler main dans la main avec la communauté internationale pour se relever en mieux, a assuré Mme Castro.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), s’exprimant au nom de l’Union européenne, a soutenu fermement une participation accrue, dans toutes les sphères d’activité de l’ECOSOC, de toutes les parties prenantes, notamment les groupes de femmes et les représentants des droits de l’homme, le secteur privé et le monde universitaire.  La crise multidimensionnelle provoquée par la pandémie de COVID-19 se poursuit, plus de deux ans après son déclenchement, a poursuivi le délégué en faisant remarquer son impact considérable, qui touche les trois dimensions du développement durable, a exacerbé les vulnérabilités dans le monde entier et menace les gains durement acquis dans la mise en œuvre des ODD.  Il a jugé ces graves revers « très préoccupants » pour la communauté internationale, en ajoutant qu’ils mettent clairement en évidence la nécessité d’un système multilatéral plus fort, capable de s’attaquer aux problèmes mondiaux de manière efficace et coordonnée.  En cette période cruciale, le Programme 2030 est plus que jamais notre feuille de route collective pour parvenir à une relance mondiale durable, inclusive, résiliente et juste, a estimé M. de Rivière.  Pour lui, le plus urgent est de mettre fin à la fracture vaccinale mondiale et de garantir un accès équitable à des vaccins de qualité, sûrs et abordables dans le monde entier.  « Personne n’est en sécurité tant que tout le monde ne l’est pas. » 

M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) a rappelé que la résolution 75/290 de l’Assemblée générale demande des mesures pour créer des partenariats en vue de parvenir à réaliser les objectifs de développement durable.  Pour 2022, on s’attend à un ralentissement de la croissance au niveau mondiale, a-t-il souligné ajoutant que la pandémie n’a fait que révéler les inégalités croissantes entre nations.  Il a donc misé sur le forum des partenariats pour relancer ces partenariats multipartites et pour permettre le partage des technologies et des ressources financières au service de la réalisation des objectifs de développement durable.  Cela doit commencer par des partenariats pour que tous aient un accès équitable aux vaccins, a martelé le représentant en appelant aussi à les utiliser pour réduire le fossé numérique.  Il faut également développer des partenariats multisectoriels directs et garantir une meilleure participation des femmes et des filles à la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il conclu.

M. EMERSON CORAIOLA YINDE KLOSS (Brésil) a regretté que la Décennie d’action pour atteindre les objectifs mondiaux du Programme 2030 ait coïncidé avec la pandémie de COVID-19, qui a inversé les progrès dans un grand nombre de domaines.  La pandémie a montré que les partenariats étaient plus nécessaires que jamais, a-t-il fait valoir en appelant à trouver des voies non seulement pour mobiliser les ressources et les compétences entrepreneuriales, mais aussi pour s’appuyer sur le secteur privé, le monde universitaire et la société civile dans la réalisation des ODD.  Le forum des partenariats peut contribuer à donner l’élan nécessaire à cela, a-t-il conclu.

Intervenant au nom du grand groupe de la communauté scientifique et technique, M. PATRICK PAUL WALSH, représentant de l’Université de Dublin, a formulé trois recommandations pour renforcer le rôle de la science dans la réalisation des cibles de l’ODD 17.  Tout d’abord, notant que la connaissance n’est pas toujours libre d’accès ou orientée vers le bien public, il a appelé à intégrer la « science ouverte » pour les ODD dans les Interventions en cas d’urgence sanitaire (HEI) en tant que norme.  Ensuite, a-t-il poursuivi, les HEI doivent être incitées à renforcer les capacités des institutions des pays du Sud, et les connaissances relatives aux HEI diffusées et partagées à grande vitesse, comme nous l’avons constaté pendant la crise du COVID-19.  « Les universités doivent se servir de mécanismes efficaces, y compris l’innovation numérique, pour fournir des interfaces de politique scientifique efficaces à tous les niveaux de gouvernement », a conclu l’intervenant. 

Mme MERIEM EL HILALI (Maroc) a déclaré que la tenue de ce forum est une excellente idée pour susciter les idées au sein de l’ECOSOC et accélérer la mise en œuvre des ODD.  Il a fait état de l’initiative lancée par son pays, appelée « Le Maroc, maintenant », dont l’un des objectifs est de générer des investissements et de progresser intelligemment dans le cadre de partenariats qui, a-t-il expliqué, seront mis en œuvre sur le terrain, pour faire la différence dans les vies de nos concitoyens.

M. LIQUN LIU (Chine) a noté que le monde connaît des changements profonds, alors que l’époque actuelle est marquée par une pandémie aux conséquences désastreuses.  Dans ce contexte, la polarisation s’accroît et le fossé se creuse en matière de relèvement, a-t-il ajouté, observant que la crise liée à la COVID-19 a plongé les pays en développement dans des difficultés incommensurables, qui empêchent les populations de se remettre pour atteindre le développement durable.  Il a donc appelé à une mobilisation collective des moyens et des ressources pour contribuer à une reconstruction durable et inclusive des pays les plus touchés.  La communauté internationale doit les soutenir et les aider à se relever, a insisté le délégué, avant de souligner les efforts déployés par son pays en matière vaccinale.  La Chine a ainsi fourni plus de deux milliards de doses de vaccin à des pays en difficulté, a-t-il indiqué, ajoutant qu’elle prévoit en outre de faire don cette année de 100 millions de doses aux pays de l’ASEAN et de 600 millions de doses aux pays africains.  Le reste de l’aide chinoise prendra la forme de vaccins coproduits, a encore précisé le représentant, avant de réitérer l’appel de son gouvernement à la communauté internationale pour qu’elle travaille « main dans la main » pour construire un développement plus vert et plus inclusif, avec l’appui du monde de l’entreprise et de la société civile.

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh) a rappelé que le Programme 2030 a défini une « feuille de route » pour les États, avec la participation de toutes les parties prenantes et des populations.  Alors que la pandémie a mis les économies et les systèmes de santé à l’épreuve, nous voulons reconstruire en mieux et il nous faut pour cela des partenariats « plus forts », en premier lieu pour permettre de « vacciner tout le monde partout », a-t-il plaidé.  Qualifiant à cet égard le Mécanisme COVAX de « bon partenariat », il a appelé la communauté mondiale à tout faire pour qu’il ne se transforme pas en échec.  Pour le représentant, il faut aussi renforcer la coopération internationale pour permettre des transferts de technologie, une levée des brevets sur les vaccins et une augmentation des capacités de production dans les pays en développement.  Il convient en outre de faire montre de plus d’ambitions sur le plan climatique en vue de la COP27, qui se tiendra en Égypte en novembre prochain, a poursuivi le délégué, avant de constater que la pandémie a aussi révélé le fossé numérique grandissant entre les pays développés et le monde en développement, ainsi que les « occasions manquées » en matière de connectivité.  Notant avec satisfaction que l’initiative onusienne « Notre Programme commun » formule l’ambition d’un « pacte numérique » mondial, il a appelé à plus d’investissements et de partenariats pour permettre l’accès de tous à la technologie.  Enfin, il a souhaité que des mesures spécifiques soient prises pour venir en aide aux pays les moins avancés (PMA), ajoutant que la mise en œuvre du futur programme d’action de Doha pour les PMA nécessitera davantage de partenariats pour que les promesses deviennent réalité.

M. KHALED EMAM, représentant du grand groupe des enfants et des jeunes, a dit que durant la pandémie de COVID-19, les jeunes artisans de la paix et les organisations dirigées par des jeunes continuent d’aider les communautés locales à se remettre de la pandémie et à réduire la fragilité aux niveaux local et national.  Cependant, ces jeunes et leurs organisations, en particulier dans la région du Moyen-Orient, sont confrontés à de multiples défis tels que les limitations de l’espace civique et les attaques des autorités contre la société civile qui entravent la mise en œuvre des ODD, s’est-il inquiété.  Il a lancé un appel pour que les organisations dirigées par des jeunes soient protégées et soutenues par tous les moyens possibles.  M. Emam a appelé les États Membres, l’ONU et les parties prenantes internationales à soutenir les efforts menés par les jeunes et à garantir des environnements sûrs pour un partenariat significatif et efficace.  Un tel partenariat, a-t-il fait valoir, peut aider à accélérer les progrès vers la réalisation du Programme 2030, à fournir un soutien financier durable et flexible aux approches participatives des organisations dirigées par les jeunes, à améliorer l’espace permettant à la société civile et aux groupes de jeunes de travailler ensemble à la réalisation des ODD et à reconstruire en mieux. 

Mme VIDISHA MAITRA (Inde) a alerté sur le fait que la pandémie de COVID-19 a eu un effet catastrophique sur les populations défavorisées et vulnérables des pays en développement.  Pour mieux se remettre de cette situation, elle a suggéré de renforcer l’infrastructure de santé publique locale et de répartir de manière équitable les services de santé.  En Inde, a-t-elle indiqué, tous les soins en lien avec la pandémie sont fournis gratuitement.  Selon la représentante, les partenariats sont le ciment qui maintient les ODD ensemble.  Elle a averti des conséquences négatives des dettes sur les efforts menés pas les pays en développement pour le relèvement.  Elle a aussi souligné l’importance de la coopération Sud-Sud pour les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement.  

M. TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a salué le choix du thème cette année et reconnu que les pays en développement vont devoir consentir à des investissements conséquents pour se relever de la pandémie et réaliser les ODD.  Or, beaucoup de ces pays sont écrasés par le fardeau de la dette, a-t-il rappelé, avant de fustiger « l’indifférence » de la communauté internationale et de prévenir que « nous ne pourrons pas reconstruire en mieux tant que nous serons dans cette situation ».  Le délégué a appelé un système commercial multilatéral auquel tous les pays puissent participer sur un pied d’égalité et plaidé pour que les droits de tirage spéciaux (DTS) soient affectés aux pays qui en ont le plus grand besoin.  Il n’a pas oublié de réclamer plus d’efforts contre les flux financiers illicites et pour un accès équitable aux vaccins. 

M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a attiré l’attention sur l’impact « monumental » de la crise déclenchée par la pandémie de COVID-19.  Les conséquences sont « dévastatrices », a-t-il insisté, en jugeant que l’année 2022 sera décisive pour la faculté des États à promouvoir les changements nécessaires à l’objectif de reconstruire en mieux.  L’Angola, a-t-il aussi rappelé, a été particulièrement touché par la crise, compte tenu, entre autres, de la chute du prix du pétrole.  Aujourd’hui, le pays doit relever trois défis: la stabilisation de l’économie et le retour à l’équilibre budgétaire; la lutte contre la pauvreté; et l’amélioration de l’éducation et de la formation des jeunes.  La prochaine décennie sera cruciale pour la réalisation du Programme 2030, a-t-il prévenu. 

M. AHMED DAWOOD ALI AL ZADJALI (Oman) a déclaré que les partenariats qui sont essentiels pour le développement intégral et pérenne ne se limitent pas au financement.  Ce sont notamment des développements de compétences et de transferts de technologies en vue d’accélérer la réalisation du Programme 2030.  Les partenariats doivent se traduire en des solutions tangibles pour venir à bout des difficultés actuelles, a-t-il prôné.  Le représentant a présenté l’approche unique des partenariats adoptée dans le cadre de la Vision 2040 pour le développement d’Oman.  Cette Vision repose sur l’éducation, la science, la recherche, la lutte contre les changements climatiques, l’inclusion financière, la création d’emplois, le soutien aux PME, a-t-il précisé.  Il a conclu en encourageant à combler le fossé entre pays en développement et les pays développés.

M. JOYKER NAYECK (Maurice) a dit que son pays continue de lutter pour que les écoles et les entreprises restent ouvertes durant la pandémie de COVID-19.  Il a ensuite souligné les vulnérabilités des petits États insulaires en développement (PEID) comme Maurice dont l’économie dépend en grande partie du tourisme.  Ce secteur a été réduit à néant à cause de la pandémie, s’est-il plaint avant de demander d’inclure l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle dans l’évaluation du niveau de développement des PEID, afin de trouver des solutions.  Enfin, le représentant de Maurice a demandé d’utiliser les droits de tirage spéciaux (DTS) pour combler le manque de financement du développement durable et soulager l’endettement.  

M. MOHAMED LOUTFY, de l’Organisation mondiale des personnes handicapées, a mis l’accent sur l’impact disproportionné de la pandémie de COVID-19 et des politiques subséquentes sur les personnes handicapées.  En réponse à la pandémie, l’organisation a fait des recherches qualitatives pour recueillir des informations sur les expériences des personnes handicapées aux niveaux mondial et national.  Les résultats indiquent que les obstacles les plus importants, et donc les domaines prioritaires pour les changements de politique recommandés pour l’inclusion des personnes handicapées comprennent: le manque d’emploi et de protection sociale; l’inaccessibilité des structures de santé; le manque d’accès aux informations et données sur la COVID-19 et le manque d’accessibilité en termes d’infrastructure, de transport, de communication, de numérique et autres ainsi que la fracture numérique croissante et le manque accru de sécurité et de sûreté, sans oublier que les personnes handicapées n’ont pas bénéficié en priorité des vaccins.

Compte tenu de cela, le représentant a recommandé, entre autres, d’impliquer les personnes handicapées et leurs organisations représentatives dans le processus de reconstruction à tous les niveaux; de reconnaître les normes d’accessibilité tout au long du processus de reconstruction comme principe stratégique clef et de veiller à ce que les données communautaires soient utilisées par les décideurs, l’ONU, les banques multilatérales de développement et les organisations internationales. 

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a mis l’accent sur l’importance de la prochaine réunion de haut niveau sur le nouveau programme urbain en se disant persuadé qu’elle saura mettre les villes au cœur des discussions sur le développement durable.  « Bien que les villes n’occupent que 2% du territoire mondial, elles produisent 70% du produit national brut, 70% de la pollution et 70% de la consommation d’énergie », a expliqué le représentant de la Slovaquie avant d’ajouter que la question des villes doit dépasser l’ODD 11, car les villes seront la clef de l’effondrement ou du relèvement.  Il a jugé indispensable de bien gérer l’urbanisation grandissante.  

Mme LEILA CASTILLON LORA-SANTOS (Philippines) a appelé l’ECOSOC à renforcer les partenariats pour garantir l’équité dans l’accès aux vaccins dans l’intérêt des pays en développement.  Elle a estimé qu’il s’agit de la plus grande priorité.  « Il faut améliorer le multilatéralisme et l’inclusivité », a-t-elle aussi insisté avant d’appeler à prendre en compte les difficultés particulières des pays à revenus intermédiaires.  Elle a indiqué que les Philippines font partie des 46 pays qui présenteront cette année leurs examens nationaux volontaires à l’ECOSOC.   

M. JORGE ADRIÁN MURILLO FERRER (Colombie) a mis l’accent sur l’importance de la production locale de vaccins et de tests et de la distribution équitable de la science et de la technologie à travers le monde.  Il a insisté sur la nécessité de décarboner l’économie et d’appliquer des solutions fondées sur la nature.  Il a salué la valeur ajoutée d’initiatives telles que le Pacte des dirigeants pour la nature ou l’Alliance mondiale pour les océans, qui permettent d’accroître les niveaux d’ambition notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de l’Accord de Paris.  Il a jugé nécessaire de mieux protéger les petites et micro-entreprises en Amérique latine avant de saluer l’impact positif du Pacte mondial des Nations Unies.

M. FERNANDO GRAY, de MERCOCIUDADES, a précisé que son organisation représente des villes d’Amérique latine.  Il a noté que la crise sanitaire a aggravé l’endettement et les inégalités sur ce continent.  Nous devons poursuivre nos efforts de relèvement, a-t-il dit, avant de souligner l’importance de la coopération Sud-Sud.  Enfin, il a salué le fait que de nombreux États Membres aient insisté sur le rôle des villes pour relever le défi de la pandémie.

M. EDUARDO MANUEL DA FONSECA FERNANDES RAMOS (Portugal) a relevé que l’esprit des ODD résonne dans ce concept de partenariats mondiaux.  De tels partenariats sont la pierre angulaire de la politique de développement portugaise, a-t-il dit, en ajoutant que son pays veille à la diversification desdits partenariats.  Le délégué a souligné la nécessité de partenariats inclusifs en vue d’une gestion durable des migrations.  Les partenariats sont cruciaux pour le développement durable, a conclu le délégué portugais.

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a fait remarquer que la pandémie a mis en lumière certaines vulnérabilités.  Nous devons mener des discussions approfondies afin d’identifier les moyens de remédier à ces vulnérabilités, a dit le délégué, en soulignant l’importance de l’égalité vaccinale.  Il a rappelé que l’économie numérique est un catalyseur du changement, avant de souligner l’importance d’une diversification énergétique aux fins de plus grande durabilité.  Nous devons redoubler d’efforts pour réaliser les ODD, a conclu le délégué indonésien.

Mme CINDY NOVELO (Belize) a observé que la pandémie actuelle et ses graves effets socioéconomiques ont mis en évidence l’importance des partenariats pour accélérer la reprise.  Saluant ce type de coopération entre pays développés et en développement, elle a particulièrement applaudi le Mécanisme COVAX qui vise à permettre un large accès aux vaccins contre la COVID-19.  Cette initiative a contribué à la vaccination de près de 55% de notre population et a aidé au relèvement touristique de notre pays, s’est-elle félicitée, avant de former le souhait que les forums de partenariat soient un moyen de rebâtir en mieux et de façon globale.  Outre la lutte contre le coronavirus et ses variants, nous devons être vigilants face à la menace climatique, qui peut faire sombrer dans la pauvreté tout un pan de l’humanité, a ajouté la déléguée, pour qui un système multilatéral robuste est indispensable pour aller de l’avant sur ces questions.  Dans ce contexte, elle a dit attendre avec impatience la tenue du prochain forum politique de haut niveau pour le développement durable, assurant que Belize contribuera à ces travaux par le biais de son nouveau mandat à l’ECOSOC.

Mme IRIS MILLENAAR, de World Benchmarking Alliance, a expliqué qu’avec près de 300 organisations multipartites, son organisation construit un mouvement pour encourager l’action des entreprises sur les ODD.  Les entreprises ont un rôle essentiel à jouer dans la réalisation du Programme 2030, a-t-elle souligné en notant que les plus grandes entreprises du monde deviennent de plus en plus puissantes et concentrées et que certaines se mobilisent.  Nous avons vu un nombre sans précédent d’engagements pris lors de la COP26, dont 130 000 milliards de dollars américains promis par GFANZ, un consortium d’institutions financières, a-t-elle rappelé.  Si nous voulons réussir la transformation systémique et mettre notre planète et notre société sur une voie véritablement durable, des changements substantiels doivent être apportés à la façon dont les entreprises fonctionnent, a fait valoir le représentant.  Elle a noté que les entreprises ne travaillent pas de manière isolée et que toutes les parties prenantes doivent travailler ensemble dans le cadre d’un écosystème pour faire avancer les entreprises dans cette direction grâce aux bonnes incitations et politiques. 

Reconstruire en mieux signifie que les entreprises doivent aller au-delà des engagements, vers l’action, et que leurs partenaires doivent savoir comment les tenir pour responsables.  Des informations transparentes sur les performances de l’entreprise sont nécessaires pour créer des informations cohérentes, comparables et exploitables pour pouvoir mesurer leur impact, a souligné la représentante « parce que sans responsabilité, parler ne coûte rien ».

Mme PREETI SINHA, du Fonds spécial des Nations Unies pour le développement économique, qui travaille surtout pour les PMA afin de renforcer les mécanismes de ces pays pour un changement de fonds, a expliqué que le Fonds a pour objectif de combler certaines lacunes de financement qui ne sont pas couvertes par l’aide publique au développement (APD).  Le représentant a présenté quelques exemples et recommandations pour aller de l’avant et aider les PMA à financer la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier avec des capitaux provenant du secteur privé.  Le Fonds a monté par exemple un système de financement des PME avec Bamboo Capital à hauteur de 250 millions de dollars.  Le représentant a appelé à se concentrer sur une coopération avec le secteur privé pour lever des fonds en faveur du développement.

M. UZODINMA ADIRIEJE, de « Afri-health Optonet Association », a souligné que ne laisser personne de côté et réaliser les ODD exige l’implication des exclus et des marginalisés dans les processus de prise de décisions sur la répartition des richesses.  Il a insisté sur une idée de reconstruire en mieux qui tienne compte de la mise en œuvre des ODD.

M. PAUL DARREL O. MENESES, de la Fédération internationale des étudiants en pharmacie (IPSF), qui représente plus de 500 000 étudiants en pharmacie et de jeunes diplômés de ce secteur de plus de 100 pays, a expliqué que la Fédération veille constamment à la promotion de la santé physique et mentale et au bien-être des personnes grâce dans ses campagnes de santé publique et qu’elle défend la couverture sanitaire et l’accès à des soins de santé de qualité pour tous.  L’IPSF, a-t-il ajouté, appelle à une collaboration mondiale entre les gouvernements et les parties prenantes pour établir des feuilles de route et des cadres afin de reconstruire en mieux après le coronavirus et pour reconnaître le rôle clef des jeunes dans l’avenir de la santé en tant que participants à la mise en œuvre du Programme 2030.  Le représentant a félicité l’ONU pour l’établissement du Programme 2030 et a appelé à encourager en permanence l’implication des jeunes dans toutes les initiatives pertinentes.

M. DAVID STYERS, Coordonnateur de la Volunteer Groups Alliance, coalition mondiale de 70 groupes de bénévoles œuvrant pour le développement durable, a estimé que l’un des rares côtés positifs de la pandémie de COVID-19 a été l’élan apporté par les volontaires pour aider leurs communautés à relever les défis liés à la crise et soutenir ceux qui en ont le plus besoin.  Créer un environnement propice au bénévolat peut aider à mieux reconstruire tout en progressant dans la mise en œuvre intégrale du Programme 2030, a-t-il assuré, ajoutant qu’impliquer les populations dans la résolution des problèmes accroît la faisabilité et la durabilité des solutions.  Il est donc crucial d’intégrer des bénévoles et l’esprit du volontariat dans les stratégies nationales et mondiales, et de construire un monde inclusif, a plaidé le Coordonnateur, avant d’appeler les États Membres à s’inspirer de ces valeurs dans la décennie d’action pour la réalisation des ODD.

Mme SUE RIDDLESTONE, Directrice générale de Bioregional, une organisation accréditée par l’ECOSOC, a dit intervenir en tant membre du Conseil d’administration de Catalyst 2030, réseau mondial de 1 000 entrepreneurs sociaux qui participent à la mise en œuvre de solutions contribuant à la réalisation du Programme 2030.  Nous faisons partie de l’économie sociale et solidaire, a-t-elle expliqué, ajoutant que l’objectif de ce réseau est de partager son savoir-faire et ses modèles économiques pour favoriser un développement économique local durable.  Il compte pour cela sur les partenariats avec les principales parties prenantes, y compris les Nations Unies et les agences multilatérales, les gouvernements et les entreprises, afin d’aider la société mondiale à reconstruire en mieux et à progresser vers la pleine mise en œuvre des ODD d’ici à 2030.  Pour illustrer son propos, Mme Riddlestone a cité trois organisations en exemple: Riders for Health, qui fournit à la communauté médicale des moyens de transport fiables et économiques, notamment en Afrique; Industree, qui relie les producteurs indiens aux marchés et augmente les revenus des artisans en les intégrant dans l’économie; et Bioregional, sa propre ONG, qui travaille avec des partenaires pour bâtir des maisons et des localités « zéro carbone ».  Si ces approches étaient plus largement adoptées, l’impact serait considérable, a-t-elle conclu.  

Pour Mme ROSARIO DEL PILAR DIAZ GARAVITO de « The Millennials Movement », un regroupement de jeunes soucieux d’agir ensemble face aux défis de l’humanité, la Décennie d’action en cours est mal engagée du fait des crises sociopolitiques et des conflits à travers le monde.  Étant donné que le relèvement post-COVID-19 est un tournant dans la mise en œuvre des ODD, il convient donc de mobiliser toutes les ressources et les partenariats et de veiller à impliquer les jeunes générations pour concrétiser la promesse de ne laisser personne de côté.   

Mme Alessandra Nilo, de « GESTOS – HIV, Communication and Gender », a souligné la nécessité urgente des partenariats.  Elle a souligné la responsabilité première des gouvernements dans le développement, puisque les multinationales n’y contribuent pas assez alors qu’elles influencent les décisions des organisations internationales.  Elle a appelé à lever tous les obstacles systémiques et à garantir la cohérence à tous les niveaux, notamment pour protéger les droits de la personne.  Elle a également appelé à l’implication des groupes de femmes et filles afin d’assurer l’égalité entre les sexes partout. 

Mme KEHKASHAN BASU, de la Green Hope Foundation, une entreprise mondiale d’innovation sociale dirigée par des jeunes, qui travaille dans 26 pays avec plus de 225 000 personnes, a expliqué que la fondation veille à ce que les communautés les plus vulnérables du monde ne soient pas laissées pour compte.  En tant qu’acteurs de terrain, nous avons constaté des tendances très préoccupantes au cours de cette pandémie, a souligné la représentante, la première étant que nous vivons dans un monde où les dividendes numériques coexistent avec les fractures numériques.  L’une des plus grandes manifestations de cette fracture a été de pousser des millions de personnes hors du système éducatif, en particulier les filles, simplement à cause de la barrière technologique qui les empêche de se reconnecter numériquement à un système d’enseignement à distance, s’est désolée Mme Basu.

Elle a appelé à tenir compte des lacunes dans les données, qui peuvent conduire à l’oubli de ces mêmes communautés vulnérables et à l’amplification des inégalités existantes.  Lors de la collecte et de la communication des données, nous avons tendance à adopter une vision généralisée, le plus souvent basée sur le monde développé, puis à l’extrapoler pour le reste du monde, a fait remarquer Mme Basu.  Illustrant son propos, elle a expliqué que depuis le début de la pandémie, son équipe et elle travaillent avec des communautés touchées par la COVID-19 dans plusieurs des PMA, qui sont complètement isolées.  « C’est comme si elles n’existaient pas - non seulement elles n’ont pas accès aux vaccins, mais elles sont complètement exclues de tout type de données sur les impacts de la pandémie », s’est-elle alarmée.

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a préconisé une approche fondée sur le partenariat pour toute la planète.  Le développement durable doit être au centre des préoccupations, et la Thaïlande mise sur l’économie verte et la bioéconomie, a-t-il indiqué.

Dans ses remarques de clôture, Mme MARIA-FRANCESCA SPATOLISANO, Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, a d’abord relevé que la pandémie de COVID-19 en cours a mis à l’épreuve la résilience des sociétés avec d’innombrables répercussions sur la vie quotidienne.  Citant le rapport sur la situation et les perspectives de l’économie mondiale 2022, que vient de publier le Département des affaires économiques et sociales, elle a prévenu qu’après une contraction mondiale de 3,4% en 2020 et après une expansion de 5,5% en 2021, la production mondiale ne devrait augmenter que de 4% en 2022 et 3,5% en 2023.  Elle a aussi indiqué que des emprunts supplémentaires et l’augmentation des coûts du service de la dette ont placé un nombre croissant de pays au bord d’une crise de la dette.  

Notant que le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté dans le monde est bien supérieur aux niveaux d’avant la pandémie, Mme Spatolisano a estimé que la pandémie souligne clairement la nécessité d’une prise de décision participative et d’institutions inclusives, comme le demande le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle a rappelé que le Secrétaire général a présenté sa vision pour le renforcement du système multilatéral mondial dans son récent rapport sur « Notre Programme commun », pour faire face aux nombreuses menaces mondiales partagées, notamment grâce à un engagement plus fort de toutes les parties prenantes concernées.  Elle a estimé que le forum des partenariats de l’ECOSOC d’aujourd’hui et ses préparatifs inclusifs ont été inspirés par cet appel, ainsi que par la vision que l’Assemblée générale a donnée dans sa résolution 75/290A sur le renforcement de l’ECOSOC.  

Elle a salué le message clair des parties prenantes de différents secteurs sur la nécessité d’une volonté politique forte, d’une coopération internationale et d’une action multipartite pour contribuer à une reprise durable après la pandémie, et relever les multiples autres défis mondiaux.  Rappelant qu’un monde en crise a besoin de partenariats qui fonctionnent, pour ne laisser personne de côté, Mme Spatolisano a appelé à un engagement plus inclusif de tous, y compris au niveau des pays, en particulier des femmes et des personnes en situation de vulnérabilité et de fragilité.  Enfin, elle a relevé que de nombreux orateurs ont souligné l’importance de rendre les mécanismes de consultation et de retour d’information plus inclusifs, transparents et créatifs afin de garantir que l’engagement se traduise réellement par des changements de politiques et de réalités. 

« Revigoré par le débat général », le Président de l’ECOSOC en a tiré deux conclusions.  En premier lieu, le forum des partenariats a constitué un excellent démarrage inclusif des travaux de l’ECOSOC en 2022, avec de nombreuses recommandations, propositions et points de vue partagés tout au long de la journée.  Le résumé qui en sera fait reflètera les discussions et les propositions stratégiques qui seront évoquées au nouveau segment de coordination du Conseil, qui débutera demain, a annoncé M. Kelapile, en assurant également de l’utilité du résumé pour alimenter et éclairer les travaux à venir, y compris le forum politique de haut niveau pour le développement durable, en juillet. 

Le Président a, en second lieu, conclu que les participants doivent rester activement engagés dans les travaux de l’ECOSOC, y compris dans les nombreuses commissions techniques et autres organes subsidiaires qui vont se réunir dans les mois à venir.  Le segment de coordination du Conseil, qui rassemblera durant deux jours les commissions régionales, les commissions techniques, les agences spécialisées et les organes d’experts du système des Nations Unies, fera le point des enseignements tirés de la réponse à la COVID-19.  Ce sera aussi l’occasion d’accélérer l’action en faveur des ODD, a ajouté le Président.  Le segment s’appuiera sur les travaux de l’ECOSOC pour élaborer des orientations et des politiques pour guider les travaux des mois à venir, dans la perspective du segment de haut niveau de l’ECOSOC et du forum politique de haut niveau.  Le Président s’est réjoui que le débat d’aujourd’hui ait été l’occasion de partager des solutions novatrices, de forger de nouveaux partenariats et de renouveler un sentiment d’urgence. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Bangladesh prend les rênes de la Commission de consolidation de la paix en 2022 et compte renforcer son rôle fédérateur

Soixante-seizième session,
1re séance plénière – matin
CCP/141

Le Bangladesh prend les rênes de la Commission de consolidation de la paix en 2022 et compte renforcer son rôle fédérateur

Le Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix a élu, ce matin à l’unanimité, la Représentante permanente du Bangladesh à la présidence de la Commission.  Première femme à occuper cette fonction, Mme Fatima Rabab prend les rênes d’une Commission encouragée par ses membres à présenter des recommandations efficaces à la première réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix prévue plus tard cette année.  En présentant ses priorités, la nouvelle Présidente a dit vouloir améliorer les rôles fédérateurs et de conseil de la Commission et promouvoir la solidarité pour atténuer l’impact de la pandémie de COVID-19 sur le développement et la consolidation de paix grâce notamment à une collaboration plus étroite avec le Conseil économique et social (ECOSOC).

Après avoir adopté le rapport de sa quinzième session, le Comité a élu par acclamation l’Égypte et la République dominicaine à la vice-présidence de la Commission jusqu’au 31 décembre 2022.  Il a également réélu le Brésil, le Maroc, la Suède et la Suisse à la tête des formations de pays qu’ils président à savoir, respectivement, la Guinée-Bissau, la République centrafricaine, le Libéria et le Burundi.

De nombreux États Membres sont également intervenus, notamment pour déplorer qu’après avoir été invitée pour la première fois à informer le Conseil des droits de l’homme, la Commission ne soit pas parvenue à s’entendre sur la manière de répondre à cette demande d’information particulière.  « Pour la première fois, la Commission n’a pas informé un organe de l’ONU, ce qui constitue une situation sans précédent », a regretté le Costa Rica qui a appelé à ne pas confondre consensus et unanimité.   

Dans sa déclaration de Présidente élue, Mme Rabab a appelé à renforcer les liens entre la Commission et le Fonds pour la consolidation de la paix, ainsi que le rôle essentiel de la Commission dans la convocation des parties prenantes du maintien de la paix, la fourniture de conseils au Conseil de sécurité concernant la définition du mandat des opérations de paix et le soutien à la mise en œuvre des dimensions de consolidation de la paix dans le contexte de l’initiative « Action pour le maintien de la paix ».  Elle a également fait part de sa volonté d’établir des partenariats plus solides avec des organisations régionales et sous-régionales, ainsi qu’avec des institutions financières internationales et régionales.  Il y a aussi beaucoup à faire en termes de coopération Sud-Sud et triangulaire, en particulier pour mobiliser des ressources critiques et créer des plateformes de partage d’idées et de bonnes pratiques, a-t-elle estimé.  

Jugeant par ailleurs impératif d’avoir une liaison plus étroite avec l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et l’ECOSOC, Mme Rabab a par ailleurs annoncé qu’il y aura cette année un coordonnateur informel pour assurer la liaison avec l’ECOSOC en plus des deux autres organes.

Parmi les priorités qu’elle souhaite faire avancer dans le cadre de sa vice-présidence, la République dominicaine a cité pour sa part le renforcement du rôle des jeunes dans la consolidation de la paix et la construction de sociétés plus justes et plus inclusives, insistant en outre sur l’importance d’un financement prévisible et adéquat de la Commission et du renforcement de son rôle de conseil auprès des principaux organes de l’ONU et des États Membres. 

Dressant le bilan des travaux de la quinzième session, le Président sortant de la Commission, M. Mohamed Edrees (Égypte), a indiqué qu’en 2021, la Commission a examiné pour la première fois la situation dans le golfe de Guinée et la transition au Tchad, amenant à 23 le nombre de pays à l’ordre du jour de la Commission.  Près de 40% des séances étaient consacrées à des débats thématiques portant sur les liens entre la consolidation et le maintien de la paix, le programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) et le soutien psychosociologique, entre autres. 

En 2021, a-t-il poursuivi, la Commission a fourni à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité ses premiers rapports et conseils sur la région des Grands Lacs et sur la question du développement durable en Afrique.   La Commission est également intervenue pour la première fois auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le but de faciliter l’accession des pays sortant d’un conflit à l’OMC.   La Commission a en outre participé au Forum politique de haut niveau de l’ECOSOC et élargi ses partenariats avec 64 participants non onusiens y compris des organisations sous-régionales et régionales.

Entre autres statistiques, le Président sortant a par ailleurs fait savoir que la participation des femmes à de véritables processus de consultation a atteint 74% en 2021.   La Commission a aussi enregistré une meilleure participation des jeunes qui a atteint 44% en 2021 contre 24% en 2020, s’est félicité M. Edress pour qui le financement de la consolidation de la paix reste le défi principal de la Commission. 

Vice-Présidente sortante, la Slovaquie a ajouté qu’en 2021, la grande majorité des travaux de la Commission s’était déroulée sur des plateformes virtuelles, ce qui avait permis d’augmenter la participation de la société civile, de représentants de gouvernements et d’autres parties prenantes qui n’auraient autrement pas pu prendre part à ses travaux.  Il convient néanmoins de renforcer l’engagement de la Commission auprès des jeunes qui doivent figurer au cœur de son travail, a-t-elle estimé.

« L’année 2022 apporte de nouvelles opportunités mais aussi des défis pour le travail de la Commission », a déclaré pour sa part la responsable du Bureau d’appui à la consolidation de la paix qui a relevé que l’augmentation des attaques de militants extrémistes et l’instabilité politique observées dans différentes parties de la région du Sahel risquent d’inverser les gains acquis par la Commission depuis des années.   Dans le même temps, les répercussions économiques de la COVID-19 exacerbent les inégalités et accroissent la polarisation dans la plupart des contextes où la Commission travaille.  Pour Mme Awa Dabo, cette situation exige donc une action rééquilibrée et un soutien plus efficace.    

La responsable a également identifié plusieurs points de convergence entre le travail du Bureau et celui de la Commission, appelant notamment à mettre davantage l’accent sur l’impact et sur l’inclusion; soutenir la cohérence à l’ONU; établir des partenariats plus efficaces; mener des plaidoyers plus efficaces pour le financement de la consolidation de la paix; améliorer le rôle consultatif; et enfin, renforcer le principe de responsabilité.   

Les présidents de formations pays, qui ont tous été réélus à cette fonction, ont ensuite décrit la situation dans les pays à leur examen.  La Suisse, qui est à la tête de la formation Burundi, a cité la tenue, en 2021, de trois réunions sur la mobilisation d’un soutien international continu et cohérent à la consolidation de la paix et au développement au Burundi.  Elle a également souhaité que 2022 soit l’occasion d’établir une feuille de route pour identifier des moyens de mobiliser les bailleurs autour de priorités communes de pérennisation de la paix au Burundi, notant en outre que la séance de haut niveau prévue au printemps et consacrée aux recommandations pour un financement de la consolidation de la paix adéquat, durable et prévisible sera une opportunité d’atteindre des résultats concrets.  

Après avoir mis l’accent sur l’importance d’un dialogue avec les mécanismes de droits humains et l’octroi de ressources suffisantes en qualité et quantité à la Commission, la Suède, qui préside la formation Libéria, a mis l’accent sur le soutien à l’organisation, en 2023, d’élections inclusives et transparentes, la mise en œuvre du programme sur les femmes et la paix et la sécurité, ou encore l’examen des liens entre les changements climatiques, la paix et la sécurité au Libéria.   

Le Brésil, Président de la formation Guinée-Bissau, a dit sa détermination à appuyer le processus de stabilisation politique en Guinée-Bissau en mettant l’accent sur les huit priorités de consolidation de la paix inscrits dans le plan de développement de la Guinée-Bissau présenté en 2021.  Il a particulièrement mis l’accent sur l’appui à la réforme institutionnelle et au développement économique et social.   

Pour le Maroc qui préside la formation République centrafricaine, les élections législatives qui ont eu lieu en mars 2021 ont posé les jalons d’une sécurité durable.  Il a estimé que la déclaration d’un cessez-le-feu en octobre 2021 a été un « acte courageux » qui a permis le lancement de la phase opérationnelle de la feuille de route adoptée en marge la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs en septembre 2021.  Tout en reconnaissant un environnement peu propice au dialogue républicain en 2021, le Maroc s’est dit confiant de pouvoir se rendre à la cérémonie de lancement de ce dialogue en 2022.  Il a également cité des avancées importantes en matière de lutte contre l’impunité et de justice transitionnelle, avant de saluer la création d’une commission d’enquête sur les crimes commis par les forces de sécurité. 

De nombreuses délégations sont également intervenues pour appeler, à l’instar du Japon, à tout faire pour que la pandémie et ses impacts socioéconomiques ainsi que les conséquences des changements climatiques ne nuisent pas aux efforts de consolidation et de maintien de la paix.  Le Japon a en outre jugé nécessaire de surveiller de près la situation liée à la vaccination contre la pandémie de COVID-19, en appelant à se recentrer sur le lien développement-paix-humanitaire.  « La Commission est la mieux placée pour un tel travail ».  Pour assurer le succès de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale, le Japon a par ailleurs appelé la Commission à fournir des contributions sur les moyens d’assurer un financement adéquat, prévisible et durable de la consolidation de la paix et à utiliser son pouvoir de mobilisation, en renforçant la coordination avec d’autres entités des Nations Unies et au-delà.

Le Pakistan a appelé la Commission à envisager davantage d’interactions officieuses avec le Conseil de sécurité, en particulier en amont des prorogations de mandats ou des visites du Conseil de sécurité dans les pays.  Il a également plaidé en faveur d’un financement adéquat et durable, notamment à travers des projets à long terme financés par le Fonds pour la consolidation de la paix.  La Commission pourrait en outre jouer un rôle crucial pour s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits « qui ne sont pas toujours pleinement prises en compte au Conseil de sécurité pour diverses raisons ».  Notant la nature changeante des conflits, et les interventions étrangères de plus en plus nombreuses dans les conflits locaux, le représentant a souligné qu’il y a souvent des intérêts financiers en jeux liés à la course aux ressources naturelles notamment.  Il a même proposé comme nouvelle maxime de l’analyse des sources de conflits « suivez l’argent ». 

La Colombie a déclaré que la Commission est devenue incontournable pour les mécanismes de consolidation de la paix, saluant l’importance de sa valeur ajoutée pour le système onusien.  Elle a souligné que le sujet du financement des activités de la Commission reste crucial, pour ensuite appeler à renforcer les ponts entre la Commission et le Conseil de sécurité. 

Notant qu’une grande partie du monde en développement n’a pas encore été vaccinée, et que la reprise et la relève en dépendent, l’Inde a estimé que la Commission a un rôle essentiel à jouer pour garantir que le monde n’oublie pas les « plus nécessiteux » dans les campagnes de vaccination et les programmes de sensibilisation mondiaux du Mécanisme COVAX.  Elle a relevé que les terroristes profitent des écarts de mandat entre le maintien de la paix et la consolidation de la paix, les États en proie à des conflits étant incapables de combattre le fléau faute de moyens.  Cela devient de plus en plus évident au Sahel et dans d’autres parties de l’Afrique, a remarqué la délégation.  Si nous ne sommes pas en mesure de renforcer la capacité de l’État à lutter contre le terrorisme, nous ne pouvons pas combler ce fossé entre les deux mandats et assurer une reprise durable après un conflit ou la COVID-19, a expliqué la délégation qui a également appelé à accorder une attention adéquate au renforcement des institutions, constatant qu’aujourd’hui une grande partie de l’aide destinée à la consolidation de la paix est consacrée à des activités humanitaires.  

Pour accroître la pertinence de la Commission, le Kenya a appelé à investir dans la résilience nationale après les conflits, stimuler la croissance économique et l’emploi des jeunes, ainsi que la protection de l’environnement, les pratiques commerciales pérennes et l’adaptation aux changements climatiques.  Il a appelé à un financement prévisible et durable de la Commission, en Afrique notamment, regrettant que les résultats des débats sur le financement aient été litigieux.

La Lettonie a déclaré que durant son mandat à la Commission, elle plaidera pour le renforcement des institutions après les conflits, la compétence numérique, la participation des femmes et des jeunes, et l’État de droit.  Pour y parvenir, il faut privilégier une approche inclusive, tant pour les communautés touchées que pour la communauté internationale, a ajouté la délégation qui a plaidé pour un financement prévisible et durable de la Commission.  La Commission doit en outre développer des relations avec d’autres organes de l’ONU y compris le Conseil des droits de l’homme.  

La Thaïlande a indiqué que sa priorité à la Commission sera de militer pour un financement pérenne de la Commission dans le cadre de la coopération entre les différentes parties prenantes.  Il est également important d’assurer la coopération sud et sud et triangulaire.  Et les Casques bleus doivent jouer le rôle de bâtisseurs de paix dès que possible.  Les efforts de développement sont liés aux efforts de consolidation de la paix, a souligné la délégation.

Évoquant l’approche du vingtième anniversaire de la conception de la Commission, le Costa Rica a exhorté la Commission à traiter des problèmes transversaux qui affectent des régions entières et constituent une menace pour la paix et la sécurité, notamment la crise climatique.  Tout en se félicitant que la Commission ait été invité pour la première fois, en 2021, à informer le Conseil des droits de l’homme, il a regretté que la Commission n’ait pu s’entendre sur la manière de répondre à cette demande d’information particulière.  « Pour la première fois, la Commission n’a pas informé un organe de l’ONU, ce qui constitue une situation sans précédent », a regretté la délégation qui a appelé à ne pas confondre consensus et unanimité.   

Le Canada a tout d’abord souligné que la consolidation de la paix nécessite des ressources et repose sur la volonté d’écoute et rappelé que la Commission a mis l’inclusivité au cœur de ses travaux, insistant notamment sur le rôle des femmes et des jeunes dans la consolidation de la paix. 

Regrettant que la Commission n’ait pas pu pleinement exercer son mandat fédérateur et accepter l’invitation du Conseil des droits de l’homme, le représentant a souligné que la force de la Commission est de travailler avec les pays « et pas par-dessus leur tête ».  Elle est mandatée pour jouer un rôle intermédiaire entre les organes principaux et devrait donc pouvoir accepter les invitations de ces organes, a souligné la délégation qui a appelé à travailler ensemble pour faire en sorte que les efforts de consolidation de la paix de l’ONU soient cohérents et financés.

Le Nigéria a souligné l’importance de la Commission pour aider les pays sortant de conflit en situation de fragilité à créer une résilience.  Il a dit l’importance d’un dialogue soutenue entre la Commission et les institutions régionales et sous-régionales, avant d’appeler la Commission à convoquer des réunions sur la restauration de la démocratie, notamment en Afrique de l’Ouest où plusieurs pays ont été victimes récemment de coups d’État.   

« Pour assurer le succès de la consolidation de la paix, il faut un financement durable et prévisible », a insisté la délégation de l’Afrique du Sud, avant d’indiquer que son pays a initié un dialogue sur le rôle du secteur privé en appui à la consolidation de la paix.  

Les Pays-Bas ont mis l’accent sur la valeur ajoutée de l’inclusion de la société civile aux travaux de consolidation de la paix, insistant notamment sur la pleine participation des femmes et des jeunes.  Après avoir souligné l’importance du sommet d’avril 2022 sur le financement de la consolidation de la paix, la délégation a salué le rôle consultatif croissant de la Commission auprès de l’Assemblée générale, du Conseil de sécurité et de l’ECOSOC ainsi que du Conseil des droits de l’homme.   

Après avoir salué le travail précieux mené par les configurations pays de la Commission ainsi que leurs recommandations, la France a estimé que les travaux de la Commission sur des sujets thématiques ont montré toute leur importance, notamment pour ce qui est de la participation des femmes et des jeunes aux efforts de consolidation de la paix.  Elle a appelé à poursuivre les efforts pour rendre la Commission encore plus efficace et a souhaité qu’elle fasse des recommandations au Conseil de sécurité bien en amont lors de la prorogation de mandats.  

L’Allemagne a déclaré que les délibérations sur « Notre Programme commun » ont marqué un tournant pour les efforts de consolidation de la paix de l’ONU.  Elle a ensuite regretté que la Commission n’ait pas encore accepté l’invitation du Conseil des droits de l’homme, en soulignant son rôle consultatif et fédérateur.  L’Allemagne a également insisté sur l’impératif d’un financement adéquat et prévisible de la consolidation de la paix en espérant que la réunion de haut niveau sur cette question de l’Assemblée générale sera couronnée de succès. 

La Chine a salué les efforts de la Commission pour lutter contre la COVID-19 et faciliter la relève dans les pays frappés par un confit.  En tant qu’organe créé par une résolution jumelle du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale, elle a espéré que ces organes sauront tirer parti des avantages de la Commission dans son rôle consultatif. 

À son tour, la Fédération de Russie a déclaré qu’il revient aux gouvernements de déterminer leurs besoins en matière de consolidation de la paix et à la communauté internationale de les accompagner.  C’est la condition d’une paix robuste et pérenne.  Ajoutant que chaque conflit a ses propres causes, la représentante a invité à s’appuyer sur les organisations régionales, notamment en Afrique.  Elle a encouragé la Commission à présenter des recommandations efficaces à la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix, tout en notant que le Fonds pour la consolidation de la paix « a fait ses preuves ».  La délégation a par ailleurs estimé que la question de genre et d’autres questions transversales n’ont un sens que si des liens ont été établis avec un pays.  Il faut également éviter les amalgames et les doublons avec d’autres organes de l’ONU, a-t-elle ajouté, soulignant que chaque organe doit rester dans les limites de ses mandats.  Elle a terminé en réitérant l’importance du principe de prise de décisions par consensus à l’ONU. 

La République de Corée, qui a demandé un financement prévisible, adéquat et pérenne pour la consolidation de la paix, a appelé à affecter une partie des contributions au budget ordinaire au Fonds pour la consolidation de la paix.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: le Conseil de sécurité proroge de trois mois le mandat de la MANUL

8961e séance – après-midi
CS/14784

Libye: le Conseil de sécurité proroge de trois mois le mandat de la MANUL

Le Conseil de sécurité a procédé, cet après-midi, à une nouvelle reconduction technique du mandat de la MANUL en adoptant à l’unanimité la résolution 2619 (2022) qui proroge de trois mois, jusqu’au 30 avril prochain, le mandat de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye comme « mission politique spéciale intégrée ». 

Soumise par le Royaume-Uni, porte-plume sur la Libye, cette résolution constitue le troisième renouvellement technique consécutif, en l’espace de seulement quatre mois et demi, du mandat de la MANUL, tel que défini dans la résolution 2542 (2020) et au paragraphe 16 de la résolution 2570 (2021)

Fruit de difficiles négociations, le texte adopté aujourd’hui contient comme seule nouvelle disposition le rappel par le Conseil que la Mission devrait être dirigée par « un(e) envoyé(e) spécial(e) », étant entendu que c’est au Secrétaire général qu’incombe la responsabilité de nommer cette personne. 

En septembre 2021, le Conseil avait échoué par deux fois à adopter un texte comportant des modifications de fond sur la base des recommandations contenues dans le rapport d’examen stratégique de la MANUL, présenté le mois précédent par le Secrétaire général.  Ce rapport recommandait, entre autres mesures, de remplacer l’Envoyé spécial basé à Genève par un Représentant spécial basé à Tripoli, appuyé par deux Représentants spéciaux adjoints. 

Après le vote sur cette reconduction technique, 13 des 15 membres du Conseil ont pris la parole, la plupart pour regretter, à l’instar du Royaume-Uni, que le Conseil n’ait pu tomber d’accord sur un renouvellement de fond du mandat de la Mission.  Pour la France, cette absence de consensus est d’autant plus regrettable qu’après le report du premier tour de l’élection présidentielle prévu le 24 décembre dernier, la Libye est à un « moment critique » de sa transition politique.  Une résolution de fond aurait conféré à la MANUL un « impact optimal », notamment grâce à la mise en œuvre des recommandations de l’examen stratégique, a renchéri l’Irlande.  Cela aurait permis à la  Mission de s’acquitter de son mandat en suivant les recommandations du Secrétaire général, ont relevé les Émirats arabes unis. 

Même sentiment mitigé de la part des États-Unis, selon lesquels le vote d’aujourd’hui « laisse à désirer pour le peuple libyen » et « ne donne pas une bonne image du Conseil », alors que le « texte solide » présenté initialement par le Royaume-Uni aurait contribué à restructurer la MANUL à la veille d’élections cruciales pour la Libye.  « L’objectif du porte-plume n’a pas été atteint », a constaté la Norvège, non sans préciser que le projet de résolution initial comportait des éléments importants sur le processus de paix, la protection des civils et la coopération régionale. 

Un renouvellement substantiel du mandat de la MANUL aurait été « le moyen idéal d’insuffler les besoins émergents du processus de paix dans le soutien à la Mission », a regretté à son tour le Kenya, pour qui le Conseil « manque une autre occasion importante de soutenir fermement la nation libyenne » dans ses efforts de dialogue et de réconciliation.  L’Albanie a, elle, formé l’espoir que l’unité du Conseil prévaudra à l’avenir pour renouveler le mandat de la Mission, « dans le droit fil de l’examen stratégique ».  Un avis partagé par le Brésil, qui a souhaité que l’on tienne compte des intérêts du peuple libyen et de la « position des membres élus ». 

Il faut « transcender les différences et trouver un accord sur le fond », qui prenne en compte l’avis des « élites africaines », via le Groupe des Sages de l’Union africaine, afin qu’un envoyé spécial soit désigné dans les meilleurs délais, a pour sa part soutenu le Gabon, rejoint par le Mexique et la Chine, lesquels ont tous deux appelé le Secrétaire général à entendre la requête des pays africains. 

Tout en rappelant, elle aussi, au Secrétaire général qu’il importe de nommer sous peu un « chef de mission », afin de relancer l’action de la MANUL, la Fédération de Russie s’est, de son côté, déclarée convaincue que cette prorogation technique permettra à la Mission de gérer au mieux la situation préélectorale.  À cette fin, elle a exhorté tous les acteurs libyens à surmonter leurs différends avec l’aide de la MANUL, notamment pour définir la date des élections  présidentielle et parlementaires. 

LA SITUATION EN LIBYE (S/2022/31)

Texte du projet de résolution (S/2022/69)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant sa résolution 1970 (2011) et toutes ses résolutions ultérieures sur la Libye, notamment les résolutions 2259 (2015), 2510 (2020), 2542 (2020) et 2570 (2021),

Rappelant qu’il a constaté, dans sa résolution 2213 (2015), que la situation en Libye continuait de menacer la paix et la sécurité internationales,

1.    Décide de proroger jusqu’au 30 avril 2022 le mandat de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), mission politique spéciale intégrée, afin que celle-ci puisse s’acquitter de son mandat, tel que défini dans la résolution 2542 (2020) et au paragraphe 16 de la résolution 2570 (2021);

2.    Rappelle que la MANUL devrait être dirigée par un(e) envoyé(e) spécial(e) et que la nomination d’un(e) envoyé(e) spécial(e) dans les termes prévus par la résolution 2542 (2020) est de la responsabilité du Secrétaire général;

3.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les États-Unis et la Fédération de Russie se rejettent mutuellement la responsabilité des tensions actuelles autour de l’Ukraine

8960e séance – matin
CS/14783

Conseil de sécurité: les États-Unis et la Fédération de Russie se rejettent mutuellement la responsabilité des tensions actuelles autour de l’Ukraine

Pour le Secrétaire général de l’ONU, « il n’existe pas d’alternative à la diplomatie et au dialogue pour résoudre [les] questions et perceptions de menaces sécuritaires complexes et de longue date » qui se posent en Ukraine.  C’est ainsi que la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, a, ce matin, résumé la position de l’Organisation sur cette crise, devant un Conseil de sécurité qui s’est réuni à la demande des États-Unis, alarmés par le déploiement de troupes russes près de la frontière avec l’Ukraine. 

Opposée à cette initiative américaine, la Fédération de Russie a commencé par demander un vote de procédure, dont le résultat n’a pas permis de faire annuler la séance: l’ordre du jour provisoire du Conseil a été adopté par 10 voix pour, 2  contre (Chine et Fédération de Russie) et 3  abstentions (Gabon, Inde et Kenya).  La Russie –qui assumera dès demain la présidence du Conseil pour le mois de février–, a assimilé la volonté des États-Unis d’examiner le déploiement de ses forces sur son propre territoire à de l’ingérence et à une « tromperie » de la communauté internationale sur la nature des tensions actuelles.  Plus tard au cours de cette réunion, la Chine regrettera qu’une diplomatie « discrète » n’ait été préférée à celle « du micro », peu propice selon elle à désamorcer les tensions et à faciliter des progrès. 

Mme DiCarlo a relevé que 100 000 soldats russes et des armements lourds seraient stationnés le long de la frontière avec l’Ukraine, alors qu’un nombre inconnu de troupes supplémentaires a été déployé par Moscou au Bélarus dans le cadre de manœuvres prévues le long de la frontière avec l’Ukraine, la Pologne et les États baltes.  Parallèlement, a précisé la haute fonctionnaire, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) a placé 8 500 soldats en état d’« alerte maximale » et envisage d’en déployer davantage chez ses États membres d’Europe orientale. 

Les accusations et griefs soulevés par les différents acteurs concernés ont laissé accroire la possibilité imminente d’un affrontement militaire, a relaté la Secrétaire générale adjointe, qui a assuré que l’ONU suit les efforts diplomatiques en cours entre la Fédération de Russie, les États-Unis, l’Union européenne, l’OTAN et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur l’architecture de paix et de sécurité en Europe. 

« Si vous aviez 100 000 soldats massés à votre frontière, ne seriez-vous pas mal à l’aise »? » a demandé la représentante des États-Unis aux membres du Conseil.  Son homologue russe a exigé de sa délégation qu’elle fournisse des preuves pour étayer ses accusations, au sujet desquelles il a dressé un parallèle avec les allégations discréditées de l’ex-Secrétaire d’État américain, Colin Powell, qui avait tenté, en  2003, de convaincre ce même Conseil de la présence d’armes de destruction massive dans l’Iraq de Saddam Hussein. 

Des mouvements de troupes similaires par le passé sur notre propre territoire n’ont jamais suscité pareille hystérie, a ironisé le délégué russe.  « Nos collègues occidentaux veulent la désescalade, mais ce sont eux qui nourrissent les tensions avec leurs discours et provocations », s’est-il défendu, en arguant que la Fédération de Russie n’a « jamais » exprimé l’intention d’envahir son voisin. 

Le délégué russe a ensuite accusé ses collègues occidentaux d’avoir semé le trouble entre Russes et Ukrainiens en appuyant le « coup d’État » de 2014, qui a permis d’installer à Kiev un « pouvoir russophobe, raciste et nazi ».  Dénonçant le « lavage de cerveaux », le représentant a regretté que la langue russe, « qui est celle d’une grande partie, si ce n’est de la majorité des Ukrainiens », soit interdite, avant de résumer les exigences de sa capitale: pas d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ni de déploiement de troupes étrangères sur le sol ukrainien. 

« Nous serons déterminés et unis et réagirons » en cas d’invasion par la Fédération de Russie, ont rétorqué les États-Unis.  Si Moscou s’inquiète de sa sécurité, nous sommes prêts à en discuter, a nuancé la représentante américaine, avant d’avertir qu’en cas de refus, « le monde saura pertinemment qui est responsable ». 

Pour le Royaume-Uni, ce déploiement de forces russes, loin d’être un « exercice de routine », constitue « la mobilisation militaire la plus importante en Europe depuis des décennies »: dans le meilleur des cas, il s’agit d’« une manœuvre profondément déstabilisatrice »; « dans le pire », des préparatifs d’une invasion d’un pays souverain.  Le renforcement des capacités offensives des forces d’occupation russes dans le Donbass, région orientale frontalière de la Russie, qui comptent jusqu’à 35 000 combattants, est une autre tendance inquiétante, a confirmé de son côté l’Ukraine. 

Si Kiev ne lancera pas d’offensive militaire ni dans le Donbass, ni en Crimée, ni ailleurs, le délégué ukrainien a revendiqué le droit souverain de son pays de choisir ses propres arrangements sécuritaires, y compris les traités d’alliance, lesquels ne peuvent être remis en question par la Russie.  Les voies diplomatiques avec cet État voisin restent ouvertes, a cependant indiqué le représentant. 

Prenant la parole au nom des États baltes, la Lituanie a rappelé leur appui infaillible à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, avant de dépeindre la Fédération de Russie en « agresseur », rappelant ses agissements en Ossétie du Sud, en Abkhazie, en Transnistrie et en Crimée. 

Nombreux ont été les orateurs à plaider pour le dialogue, notamment la France, pour qui « les notions de sphères d’influence n’ont pas leur place au XXIe siècle ».  Mais toute nouvelle atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Russie aura des « conséquences massives et un coût sévère », a averti la délégation.  L’Irlande a rappelé que l’Acte final d’Helsinki, l’un des documents fondateurs de l’OSCE, confirme le droit de chaque État à l’égalité juridique, à la liberté et à l’indépendance politique.  Pour la Pologne, l’OSCE, que ce pays préside actuellement, est le cadre idéal de pourparlers, en raison de son format régional élargi. 

Alors que la majorité des situations de conflit dont est saisi le Conseil de sécurité se trouvent en Afrique, « nous ne voulons pas qu’elles servent de substituts à une nouvelle guerre froide », a averti le Kenya.  Et s’il doit y avoir une série de nouvelles guerres froides, il est urgent que la structure et la culture du Conseil de sécurité changent significativement pour que celui-ci demeure adapté à son objectif, a tranché la délégation. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations avant le vote de procédure

Ayant demandé la parole avant l’adoption de l’ordre du jour, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est opposé à la tenue de la réunion en arguant qu’elle était motivée par le désir des États-Unis d’examiner le déploiement des forces russes sur le propre territoire de la Russie.  Il y a vu « une ingérence dans les affaires intérieures russes » et « une tentative de tromper la communauté internationale » sur la nature des tensions internationales.  Il a accusé les États-Unis de proférer des accusations infondées, précisant que son pays les a réfutées à maintes reprises.  Au lieu d’organiser une réunion du Conseil, les États-Unis auraient dû utiliser la diplomatie, a-t-il dit.  Il a accusé les États-Unis de vouloir créer « une hystérie » au sujet d’une potentielle invasion russe en plaçant les membres du Conseil de sécurité dans une situation inconfortable.  Il n’y a pas besoin de paniquer, a lancé le représentant russe en faisant valoir que le Président Ukrainien et son Ministre de la défense avaient eux-mêmes estimé que leur pays ne faisait pas face à une telle menace.  Soulignant que l’examen de la question ukrainienne est programmée pour la séance du 17 février, lors de la présidence russe du Conseil de sécurité, il a fait remarquer que cette séance pouvait permettre aux États-Unis de passer ses messages publics sur la question ukrainienne.  M. Nebenzia a conclu en appelant les membres du Conseil à rejeter l’ordre du jour proposé pour la présente séance. 

À la suite de son collègue russe, Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que sa délégation a demandé la tenue de cette réunion en raison de « ce dont nous avons été témoins ces derniers mois à la frontière avec l’Ukraine ».  La Fédération de Russie nous a dit que ces événements se sont produits sur son territoire, alors que des mouvements ont aussi eu lieu sur le territoire ukrainien « en partie envahi », a-t-elle fait valoir, avant de préciser que ces faits ont donné lieu à plus d’une centaine de réunions avec des responsables russes, en présence de représentants européens et ukrainiens, pour la plupart à huis clos.  Pour la déléguée américaine, « le moment est venu d’avoir une réunion publique » sur cette crise.  Elle a ajouté que les États-Unis ont travaillé avec l’Ukraine à sa demande pour lui fournir une assistance et la préparer à une éventuelle agression.  Quelque 200 millions de dollars ont ainsi été versés à l’Ukraine au titre de cette assistance ces dernières semaines, a-t-elle indiqué, ajoutant, en réponse à son homologue russe, que la situation actuelle a effectivement de quoi « mettre mal à l’aise ».  « Si vous aviez 100 000 soldats massés à votre frontière, ne seriez-vous pas mal à l’aise? » a lancé Mme Thomas-Greenfield aux membres du Conseil.  Ce qui est en jeu au sein de cet organe, a-t-elle ajouté, c’est d’honorer la Charte des Nations Unies qui nous oblige à garantir la paix et la sécurité internationales.  Il ne s’agit pas, pour les États-Unis, de « faire de l’esbroufe ou de rhétorique », mais de protéger la paix et la sécurité dans le monde. 

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a affirmé que l’ONU suit les efforts diplomatiques en cours entre les représentants russes, américains, de l’Union européenne, de l’OTAN et de l’OSCE sur l’architecture de paix et de sécurité en Europe.  Des efforts que le Secrétaire général de l’ONU soutient, même sans y prendre part directement.  Mme DiCarlo a relevé que 100 000 soldats russes et des armements lourds seraient stationnés le long de la frontière avec l’Ukraine, alors qu’un nombre inconnu de troupes a été déployé par Moscou au Bélarus dans le cadre de manœuvres prévues à la frontière avec l’Ukraine, la Pologne et les États baltes.  De même, 8 500 soldats de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) sont en état d’alerte maximale et l’OTAN envisage d’en déployer davantage chez ses États membres d’Europe orientale.  Les accusations et griefs soulevés par les différents acteurs concernés ont laissé croire à la possibilité imminente d’un affrontement militaire, a constaté la haute fonctionnaire des Nations Unies, précisant que, pour le Secrétaire général, « il n’existe pas d’alternative à la diplomatie et au dialogue pour résoudre ces questions et perceptions de menaces sécuritaires complexes de longue date ».  Toute intervention militaire d’un pays contre un autre serait contraire aux principes mêmes de la Charte des Nations Unies, a rappelé la Secrétaire générale adjointe, avant de saluer les mesures prises par tous les acteurs en vue de privilégier la voie du dialogue.  Elle les a également exhortés à s’abstenir de toute déclaration incendiaire pour favoriser un arrangement acceptable par tous. 

Selon Mme DiCarlo, l’ONU s’est engagée à soutenir la souveraineté, l’indépendance politique, l’unité et l’intégrité territoriales de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues par des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  Elle a salué la réunion des quatre conseillers du format Normandie à Paris, ainsi que l’annonce de leur réunion prochaine à Berlin.  La Secrétaire générale adjointe a également salué la mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine, avant de promettre que l’ONU continuerait d’apporter sa contribution à la paix dans ce pays, toujours dans le respect de son principe de neutralité.  Elle a d’ailleurs appelé les États Membres à contribuer au plan de réponse humanitaire lancé en faveur de l’Ukraine.  En outre, la mission de surveillance des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine continuera de comptabiliser le nombre des victimes civiles que le conflit a fait dans l’est de ce pays, a-t-elle assuré en conclusion. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a tout d’abord estimé que la situation actuelle à la frontière avec l’Ukraine est « dangereuse » et que l’enjeu est « des plus élevés ».  En effet, a-t-elle souligné, l’action de la Fédération de Russie porte atteinte à la Charte de l’ONU et pose une « menace claire pour la sécurité mondiale ».  La représentante a rappelé à ce sujet qu’en vertu de l’Article 39 de la Charte, il revient au Conseil de sécurité de déterminer toute menace à la paix et à la sécurité internationales.  Notre objectif au sein de cet organe n’est pas seulement de traiter des conflits mais de les prévenir, a fait valoir Mme Thomas-Greenfield, soulignant l’importance à ce titre de la réunion convoquée ce jour.  À ses yeux, l’agression potentielle de la Fédération de Russie menace non seulement l’Ukraine mais aussi l’Europe.  Or, selon les principes sur lesquels est fondé le travail du Conseil de sécurité, aucun pays ne peut unilatéralement redessiner les frontières ou imposer sa volonté à un autre peuple.  De fait, a insisté la déléguée, il est fondamental de traiter le risque de cette action déstabilisatrice de la Fédération de Russie « au niveau international ». 

Constatant que la Fédération de Russie a massé plus de 100 000 soldats le long de la frontière avec l’Ukraine, Mme Thomas-Greenfield a précisé qu’il s’agit d’unités de combat prêtes à passer l’offensive.  Pour ce qui constitue la « plus grande mobilisation de troupes depuis des décennies », la Fédération de Russie a déjà utilisé plus de 2 000 wagons pour acheminer hommes et équipements, a détaillé la représentante, faisant état de l’envoi sur place d’unités spéciales, de batteries antimissiles et de missiles sol-air, et ce, « à seulement deux heures de Kiev ».  De surcroît, a-t-elle poursuivi, l’Ukraine a été la cible d’attaques cybernétiques russes ces dernières semaines.  Les services de renseignement russes se servent de sites Internet pour diffuser leur désinformation et faire passer l’Ukraine comme l’agresseur, a accusé la déléguée, avant de dénoncer les discours belliqueux et la série d’exigences qui accompagnent ces actions.  Selon elle, Moscou se comporte d’une façon qui a déjà été observée en 2014 en Crimée et en 2008 en Géorgie.  Simultanément, les séparatistes russes du Donbass continuent d’ignorer les demandes de l’Ukraine dans un conflit qui a déjà coûté la vie à 14 000 Ukrainiens.  Déjà préoccupante, la situation humanitaire en Ukraine pourrait encore s’aggraver « si une invasion avait lieu », a-t-elle encore averti. 

Ces dernières années, a ajouté la représentante, la Fédération de Russie a nié à l’Ukraine son statut même de nation et remis en cause l’autodétermination du peuple ukrainien.  Or l’Ukraine, qui vient de célébrer 30 ans d’indépendance, est un pays souverain qui a le droit de décider de son avenir.  Il s’agit d’un droit consacré par la Charte, que la Fédération de Russie et tout autre État Membre se sont engagés à respecter.  « Si les anciens empires avaient le droit de reprendre leurs anciens territoires par la force, cela nous engagerait sur une voie dangereuse », a prévenu la déléguée, selon laquelle il serait préférable pour la Fédération de Russie d’opter pour « la voie de la diplomatie ».  Affirmant que son pays œuvre avec les Européens au règlement de cette crise de façon pacifique, Mme Thomas-Greenfield a assuré que son pays veut la paix et le dialogue, « pas l’affrontement ou le conflit ».  « Mais nous serons déterminés et unis et nous réagirons si la Fédération de Russie envahit l’Ukraine », a-t-elle prévenu, se disant convaincue que la diplomatie ne pourra triompher en cas d’action militaire: « C’est pourquoi la réunion d’aujourd’hui est si importante ».  Si la Fédération de Russie est « inquiète pour sa sécurité », nous sommes prêts à en discuter avec elle, a assuré l’Ambassadrice américaine, avant d’avertir qu’en cas de refus de Moscou, « le monde saura pertinemment qui est responsable ».  En conclusion, elle a exhorté le Conseil à réfléchir à « ce que dit et fait la Russie » et à évaluer le risque que cela suppose « non seulement pour l’Ukraine, mais aussi pour nous tous ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est dit profondément préoccupé par l’accumulation de troupes et d’armements russes le long de la frontière ukrainienne ces derniers mois ainsi que par le déploiement de 30 000 troupes russes au Bélarus.  Il a rappelé qu’en 1994, l’Ukraine recevait des garanties de sécurité via le Mémorandum de Budapest, où la Fédération de Russie, les États-Unis et le Royaume-Uni s’engageaient à respecter « l’indépendance, la souveraineté et les frontières existantes de l’Ukraine en échange de son renoncement à son arsenal nucléaire ».  Les signataires s’étaient également engagés à solliciter le Conseil de sécurité si l’Ukraine était victime d’une agression, a-t-il rappelé avant d’exhorter la Fédération de Russie et le Conseil de sécurité à confirmer expressément le respect de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et sa souveraineté. 

La situation actuelle n’est pas une nouvelle crise entre la Russie et l’Occident, a poursuivi M. Hoxha, mais bien une menace pour l’ordre sécuritaire européen et pour l’architecture de la sécurité internationale.  C’est un camouflet à l’Acte final d’Helsinki, s’est-il emporté.  Évoquant les évènements qui se sont déroulés en Géorgie en 2008 et de « manière répétée » en Ukraine depuis 2014, le représentant a affirmé que la Russie a recours à la « violence militaire » pour réaliser ses objectifs politiques et géopolitiques, lui reprochant en outre d’utiliser des tactiques qui sont des relaps de la guerre froide. 

Les pays sont et doivent être libres de devenir membres des organisations qu’ils souhaitent, que ce soit l’OTAN, l’UE ou l’OTSC, a martelé le représentant, soulignant que les États souverains prennent des décisions de leur plein gré et non sous la menace des armes.  Il a ensuite appelé à résoudre cette crise à travers le dialogue.  Des mesures concrètes permettant une désescalade doivent être prises afin de trouver une solution conforme aux Accords de Minsk, a fait valoir M. Hoxha qui a salué la reprise des discussions, la semaine dernière, dans le format Normandie. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a souligné la mobilisation par la Russie de 100 000 hommes à la frontière ukrainienne.  « Ce n’est pas un exercice de routine, mais la mobilisation militaire la plus importante en Europe depuis des décennies », s’est alarmé le délégué, en estimant qu’elle constitue dans le meilleur des cas une manœuvre profondément déstabilisatrice et, « dans le pire », la préparation d’une invasion militaire d’un pays souverain.  Il a rappelé l’invasion russe de la Géorgie en 2008, alors que Moscou avait argué auprès du Conseil qu’elle y avait envoyé des soldats de la paix.  Moscou a aussi annexé la Crimée qui fait partie de l’Ukraine, a poursuivi le délégué, pour qui la réunion d’aujourd’hui fait partie des tractations diplomatiques intenses en vue d’une désescalade de la crise.  « Nous sommes prêts à répondre aux préoccupations sécuritaires mutuelles sur la base des engagements et des structures de sécurité européenne existants », a assuré la délégation britannique.  Notre Conseil doit appuyer ces efforts, a-t-il ajouté, en estimant que toute agression russe de l’Ukraine constituerait une violation grave du droit international et se solderait par un « bain de sang » : selon le Royaume-Uni, « il n’y a aura pas de vainqueurs, uniquement des victimes ».  En conclusion, il a exhorté la Fédération de Russie à s’engager devant ce Conseil en faveur des principes de la Charte, à ne pas envahir l’Ukraine ni à saper davantage la souveraineté et l’intégrité territoriale de ce pays. 

Pour M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), l’accumulation de capacités militaires importantes à la frontière d’un État souverain voisin constitue un comportement menaçant et soulève des interrogations légitimes sur les intentions de la Russie.  Ce pays, qui a déjà porté atteinte à l’intégrité territoriale de l’Ukraine par le passé, doit s’engager dans une désescalade rapide de la situation actuelle, respecter le droit international et participer de manière constructive au dialogue dans le cadre des mécanismes internationaux établis, a préconisé le représentant. 

Cette réunion du Conseil de sécurité doit également s’inscrire dans cet objectif, a poursuivi M. de Rivière, en réitérant le soutien de sa délégation aux efforts en cours dans les différents formats existants.  Dans celui dit de Normandie, qui rassemble l’Allemagne, la France, la Russie et l’Ukraine, ces efforts ont permis, lors de la réunion du 26 janvier à Paris, de s’accorder sur une déclaration de soutien au respect inconditionnel du cessez-le-feu et à la mise en œuvre des Accords de Minsk.  Nous poursuivrons les efforts en ce sens lors de la prochaine réunion prévue à brève échéance à Berlin, a annoncé le délégué, pour qui le dialogue doit respecter les principes fondamentaux sur lesquels repose la sécurité européenne, tels qu’établis dans la Charte des Nations Unies et les documents fondateurs de l’OSCE, y compris l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris. 

Ces principes comprennent notamment la liberté des États de choisir ou de modifier leurs propres dispositifs de sécurité, a rappelé M. de Rivière, en soulignant qu’ils ne sont ni négociables ni sujets à révision ou à réinterprétation.  « Les notions de sphères d’influence n’ont pas leur place au XXIe siècle », a-t-il tranché, avertissant la Russie que si elle ne choisit pas la voie du dialogue et du respect du droit international, « la réponse sera forte et unie ».  Toute nouvelle atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine de la part de la Russie aura des « conséquences massives et un coût sévère ».  Les Européens travaillent à des « mesures restrictives coordonnées » et se tiennent prêts, conjointement avec leurs partenaires, à réagir, a encore prévenu le représentant.  Si la voie du dialogue et de la coopération est choisie, l’Union est prête à s’engager à développer ses relations avec la Russie sur la base d’une « approche unie, à long terme et stratégique », selon les cinq principes directeurs de 2016.  Il a réaffirmé la solidarité́ de la France avec le peuple et le Gouvernement ukrainiens.  « Avec nos partenaires européens, nous continuerons à nous mobiliser en soutien à l’Ukraine, notamment par la voie du soutien aux réformes nécessaires au renforcement de la résilience extérieure et intérieure du pays », a conclu la délégation. 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a appelé à la promotion d’un dialogue qui tienne compte des intérêts sécuritaires légitimes de chaque pays.  Convaincu que la diplomatie demeure la seule solution à ce différend, le représentant a salué les progrès réalisés dans la mise en œuvre des Accords de Minsk et les négociations sous le format Normandie entre l’Ukraine, la Russie, la France et l’Allemagne.  Il a insisté sur l’impératif de respecter le cessez-le-feu et de faire avancer la mise en œuvre des Accords de Minsk.  Le délégué s’est ensuite félicité de la volonté affichée par les acteurs de se retrouver à Berlin dans deux semaines avant de les inviter à tout mettre en œuvre pour préserver la paix et la sécurité internationales. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a relevé que la mobilisation des troupes russes à la frontière avec l’Ukraine inquiète certaines délégations.  Saluant les pourparlers engagés entre divers acteurs impliqués dans cette crise, le représentant a recommandé de promouvoir un retour à la normale pour la population ukrainienne.  Selon lui, il faut respecter les principes de la Charte des Nations Unies et mettre l’accent sur un règlement pacifique de la crise. 

Mme GERLADINE BYRNE NASON (Irlande) a souligné que son pays, en tant que membre de l’Union européenne, est un fervent partisan de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, dans ses frontières internationalement reconnues.  En cette période de montée des tensions aux frontières ukrainiennes, elle a appelé au calme, à la désescalade et à la poursuite de la diplomatie.  Elle a également souhaité que des échanges constructifs aient lieu par toutes les voies de dialogue, dont le format Normandie et l’OSCE.  Après avoir souligné l’attachement de l’Irlande aux principes consacrés dans la Charte des Nations Unies, la représentante a rappelé que la sécurité européenne repose sur une série d’engagements et d’obligations, en vertu desquels un État souverain et indépendant a le droit de tracer sa propre voie, de choisir sa propre politique étrangère et de prendre des dispositions pour sa sécurité et la défense de son territoire. 

À cet égard, a ajouté Mme Byrne Nason, l’Acte final d’Helsinki, qui est l’un des documents fondateurs de l’OSCE, confirme le droit de chaque État à l’égalité juridique, à la liberté et à l’indépendance politique.  Les accords ultérieurs, parmi lesquels la Charte de Paris et la Charte de sécurité européenne convenue à Istanbul en 1999, réaffirment les principes fondamentaux qui sous-tendent la sécurité collective européenne, a précisé la représentante.  Notant à ce sujet que l’Irlande a célébré en janvier les 100 ans de son indépendance, elle a jugé qu’en tant que pays indépendant lui aussi, l’Ukraine a le droit souverain de choisir ses propres politiques.  Enfin, après avoir évoqué les conséquences humanitaires de ce conflit violent, où la diplomatie et le dialogue ont échoué, la déléguée a appelé de ses vœux une solution diplomatique qui renforce la sécurité collective en Europe.  « Nous avons les institutions et les mécanismes qui permettent cette solution, utilisons-les », a-t-elle conclu. 

M. JUN ZHANG (Chine) a déclaré que son pays s’opposait à la tenue de cette séance publique, ne pouvant s’aligner sur le point de vue des États-Unis qui l’a convoquée.  Il a reconnu des tensions liées au déploiement de troupes russes, cependant, l’affirmation américaine selon laquelle cela conduirait à la guerre est infondée, étant donné l’assurance donnée par la Fédération de Russie qu’elle n’a pas l’intention de lancer d’action militaire.  Sans compter, a ajouté le représentant, la propre position de l’Ukraine selon laquelle elle « n’a pas besoin d’une guerre ».  « Sur quoi se fondent certains pour dire qu’il y aura une guerre? » a demandé le représentant. 

Toutes les parties doivent continuer à résoudre leurs différends par le dialogue, a-t-il dit, ajoutant que plusieurs membres du Conseil ont convenu que la situation appelait à « une diplomatie discrète, pas une diplomatie du micro ».  Il a regretté que les États-Unis n’aient pas accepté une proposition aussi constructive, ajoutant que la tenue d’une séance publique n’est pas propice à désamorcer les tensions, ni à faciliter des progrès concrets sur la question.  Il a appelé toutes les parties concernées à rester calmes, à ne pas aggraver ou « exagérer » la crise et à résoudre leurs différends pacifiquement.  Réitérant sa position, la Chine a expliqué être en faveur de la mise en œuvre du nouvel accord de Minsk, entériné par le Conseil de sécurité dans la résolution 2202 (2015), « un document contraignant reconnu par toutes les parties ».  Abordant ensuite l’expansion de l’OTAN, qui « incarne la politique de groupe » et prolonge une « mentalité de guerre froide », la délégation a appelé toutes les parties à trouver une approche équilibrée de la question par le biais de négociations, tout en tenant compte des préoccupations sécuritaires légitimes de la Fédération de Russie. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que la demande faite ce matin d’un vote de procédure a pu donner l’impression que la Russie craint de discuter de la situation en Ukraine.  Nous ne comprenons simplement pas ce dont nous discutons et pourquoi nous nous retrouvons ici, alors qu’une séance était planifiée pour le 17 février pendant notre présidence du Conseil de sécurité, s’est-il justifié.  « Nous nous heurtons à une situation sans précédent », a estimé le représentant.  Nos forces sont déployées sur notre propre territoire et des mouvements de troupes similaires par le passé n’ont jamais suscité pareille hystérie, a-t-il fustigé.  Le délégué a dénoncé ceux qui voient dans ces mouvements de troupes sur le territoire russe la confirmation d’une volonté d’agression et ce, sans la moindre preuve.  « Nos collègues occidentaux veulent la désescalade, mais ce sont eux qui alimentent les tensions avec leurs discours et provocations », s’est-il défendu.  Vous parlez de guerre comme si elle devait avoir lieu, alors que la Russie n’a jamais exprimé l’intention d’envahir l’Ukraine, a assuré M. Nebenzia, en réfutant catégoriquement ces accusations: « ceux qui prétendent le contraire veulent vous induire en erreur ». 

Le délégué russe a ensuite accusé ses collègues occidentaux d’avoir appuyé le coup d’État en Ukraine en 2014 et installé un « pouvoir russophobe, raciste et nazi ».  Si cela n’avait pas été le cas, nous aurions pu vivre en bonne entente, a-t-il regretté.  « Mais cela déplaisait à tous ceux qui veulent semer le trouble dans les relations entre Moscou et Kiev », a-t-il analysé.  Il a accusé ces acteurs de « laver » les cerveaux des Ukrainiens, incités à se radicaliser, tandis que la langue russe, « qui est celle d’une grande partie si ce n’est de la majorité des Ukrainiens », est interdite.  L’objectif est de brouiller l’entente entre ces deux nations sœurs pour affaiblir la Russie et créer une « sphère d’instabilité » à ses portes.  Le représentant a accusé les États-Unis de vouloir donner l’impression que c’est la Russie qui est à l’origine des tensions, avant de rappeler les exigences de son pays: pas d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ni de déploiement de troupes étrangères sur le sol ukrainien. 

M. Nebenzia a demandé aux États-Unis de fournir des preuves pour étayer leurs accusations selon lesquelles 100 000 soldats russes seraient massés à la frontière avec l’Ukraine.  « D’où vient ce chiffre ? » a-t-il souhaité savoir.  Il a rappelé les affirmations de Colin Powell au sujet de la présence d’armes de destruction massive en Iraq, « des armes qui n’ont jamais été trouvées et nous savons tous ce qui est arrivé à ce pays », a rappelé M. Nebenzia.  Il a ensuite accusé Washington de vouloir sacrifier l’Ukraine à ses propres intérêts sans tenir compte des appels à ne pas céder à la panique lancés par Kiev.  La délégation russe a aussi souligné l’hypocrisie de l’Ukraine, en rappelant que les États-Unis ont plus de 750 bases militaires et 175 000 soldats déployés à l’étranger.  En conclusion, le délégué russe a souligné la volonté de son gouvernement de régler la crise en Ukraine, tout en indiquant qu’il s’agit d’une crise interne à ce pays.  Il l’a invitée à mettre en œuvre les Accords de Minsk, ce qui passe par un dialogue direct avec Donetsk et Lougansk, a précisé M. Nebenzia.  Si ce n’est pas le cas, ce sera néfaste, non pas parce que l’Ukraine sera détruite, mais parce qu’elle se détruira elle-même, a-t-il ajouté en conclusion. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit avoir pris connaissance d’informations relatives à une importante mobilisation de la Russie aux frontières de l’Ukraine laissant présager l’imminence d’une action militaire.  Il a également dit avoir observé une véritable effervescence des partenaires de l’Ukraine avec un déploiement de moyens financiers importants et d’équipements militaires.  Il a noté l’escalade verbale et la tension qui en découlent ainsi que l’importante activité diplomatique qui se traduit par différentes initiatives dont le format de Normandie.  Face à une tension particulièrement préoccupante, M. Biang a appelé les parties prenantes à la retenue et à privilégier les voies du dialogue et de la négociation en vue de préserver la stabilité et la paix dans la région. 

C’est le moment pour la communauté internationale et ses membres d’activer les canaux de la diplomatie préventive, tels que prévu par le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies consacrée au règlement pacifique des différends, a rappelé le représentant pour qui l’efficacité de la diplomatie préventive est tributaire non seulement de la bonne foi des protagonistes mais surtout du tact, de la sérénité et du cadre de sa mise en œuvre.  La « dualité rhétorique » sur l’imminence d’une action militaire en Ukraine, d’une part, et celle du démenti qui est juxtaposé, d’autre part, amplifient la fragmentation de ce Conseil au moment où les peuples du monde attendent de lui un consensus et une action résolue, à la mesure des dévastations causées par les guerres et crises qui ensanglantent plusieurs régions de la planète, a plaidé M. Biang.  La force du Conseil réside dans son unité, et non dans la fragmentation, a clos le représentant en réitérant l’appel du Président ukrainien qui a exhorté à « garder le sens de la mesure et à ne pas amplifier la panique ». 

Rappelant que la priorité du Conseil de sécurité est de prévenir la guerre. M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a exhorté toutes les parties à participer de manière constructive aux pourparlers visant à résoudre leurs différends.  Il a rappelé que l’interdiction du recours à la force, le règlement pacifique des différends et les principes du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale et de la protection des droits de l’homme sont les piliers du système de sécurité collective.  C’est pourquoi, il a encouragé les parties à poursuivre de véritables pourparlers sur la mise en œuvre des Accords de Minsk.  Il a souligné que la résolution 2202 (2015) du Conseil de sécurité fournit des directives utiles pour faire face à la situation dans l’est de l’Ukraine, avant de saluer la reprise des pourparlers en format Normandie et l’engagement renouvelé en faveur du cessez-le-feu dans l’est de l’Ukraine.  Concluant sur une note d’espoir, le représentant du Brésil s’est dit persuadé que tous les acteurs sont aujourd’hui conscients qu’il n’y a pas de solution militaire à la situation russo-ukrainienne. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a expliqué s’être abstenu lors du vote procédural sur la tenue cette réunion car il estime que l’impasse entre l’OTAN et la Fédération de Russie peut être résolue de manière imminente et que les démarches diplomatiques en cours sont déjà prometteuses.  En cas de litiges territoriaux, la diplomatie est l’option à choisir, a souligné le représentant qui, appelant au compromis, a estimé que les États-Unis, l’OTAN et la Fédération de Russie ont l’occasion d’établir une relation diplomatique qui leur permettra de résoudre leurs différends.  Le compromis n’est pas une capitulation, a-t-il ajouté. 

M. Kimani a rappelé que le refus du compromis et la recherche de la victoire totale, qui ont conduit à la guerre froide, se sont fait ressentir en  Afrique par une série de guerres chaudes et d’interventions qui ont profondément endommagé « nos rêves de paix, de développement et de gouvernement compétent et inclusif ».  Nos divisions et nos fragilités internes ont été militarisées sur l’autel de la rivalité géopolitique , a-t-il déploré. 

Étant donné que la majorité des situations de conflit dont traite le Conseil de sécurité est en Afrique, nous ne voulons pas qu’elles servent de substituts d’une nouvelle guerre froide, a averti le représentant.  Et s’il doit avoir une série de nouvelles guerres froides, il est urgent que la structure et la culture du Conseil de sécurité changent substantiellement pour qu’il demeure adapté à son objectif.  « Nous ne pouvons plus refuser aux autres le pouvoir d’être membre permanent du Conseil et le droit de veto si les cinq membres permanents actuels s’avèrent incapables de remplir le mandat du Conseil », a—t-il mis en garde, décriant en outre un système de porte-plume utilisé pour faire avancer les rivalités géopolitiques et non pas des solutions.  M. Kimani s’est ensuite déclaré convaincu que les pourparlers menés dans le cadre du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral, ainsi que les négociations directes entre les États-Unis et la Fédération de Russie ont encore une chance d’aboutir. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a estimé que l’escalade des tensions en Ukraine représente une menace pour la paix et la sécurité internationales et est, par conséquent, de la compétence du Conseil de sécurité, conformément à l’Article 39 de la Charte de l’ONU.  Il a toutefois jugé important d’éviter tout type d’action qui pourrait être considéré comme hostile.  À l’instar du Secrétaire général, le représentant a fait valoir qu’il n’existe pas de solution militaire à cette situation.  Au contraire, a-t-il dit, il convient de privilégier la diplomatie préventive et le dialogue comme moyens de désamorcer les tensions et il existe pour cela différents canaux, notamment les pourparlers de Genève, le Groupe de contact trilatéral et le format Normandie. 

Le délégué a ensuite réitéré l’importance du respect de la souveraineté, de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, dans le respect du droit international, de la Charte de l’ONU et de la résolution  2625 de l’Assemblée générale.  De même, a-t-il ajouté, il appartient au Conseil de sécurité de déterminer, le cas échéant, l’existence d’un acte d’agression, conformément à la résolution 3314 de l’Assemblée générale.  Il a d’autre part rappelé que les États ont le devoir de résoudre leurs différends par des moyens pacifiques, avant d’assurer que le Mexique prône et continuera de prôner la diplomatie plutôt que la force.  Soulignant enfin qu’il est de la responsabilité du Conseil d’être à la hauteur de ce que les circonstances exigent de lui, il a invité tous ses membres à « assumer pleinement notre mandat, c’est-à-dire sans excès ni omissions ». 

Pour Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis), le différend en Europe exige que divers pays de la région s’engagent dans un dialogue sérieux fondé sur les valeurs de la stabilité, de la coexistence et de la paix.  Soulignant l’importance de parvenir à une solution négociée par le biais des mécanismes disponibles et avec le soutien des organisations régionales, elle a fait référence aux pourparlers dans le format Normandie et à l’initiative du Président de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qui vise à engager un dialogue de fond sur la sécurité européenne.  Les Émirats arabes unis saluent en outre l’appel au calme du Président ukrainien, M.  Volodymyr Zelensky, a dit la représentante.  Elle a également dit que son pays se félicite de l’annonce faite lors de la réunion du format Normandie le 26 janvier, au cours de laquelle la Fédération de Russie et l’Ukraine ont confirmé leur intention de mettre en œuvre un cessez-le-feu inconditionnel dans l’est de l’Ukraine. 

Mme Nusseibeh a dit compter sur les différentes initiatives en cours pour permettre le dialogue, y compris entre les États-Unis et la Fédération de Russie.  Elle a appelé à soutenir ces efforts diplomatiques pour atteindre les résultats souhaités, avant de souligner également l’importance du maintien de la sécurité et de la stabilité ainsi que l’importance centrale de la mise en œuvre des Accords de Minsk.  Elle a espéré que cela contribue à parvenir à un accord régional global qui préserve la sécurité et la stabilité des pays concernés et réponde à toutes leurs préoccupations légitimes.  La déléguée a appelé toutes les parties concernées à la désescalade, en invoquant l’impact négatif potentiel sur les civils et la situation humanitaire déjà difficile.  Mme Nusseibeh a conclu en mettant en avant le rôle du Conseil de sécurité, en tant qu’organe responsable du maintien de la paix et de la sécurité internationales, pour fournir une plateforme diplomatique permettant aux États de présenter et de résoudre pacifiquement leurs différends. 

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite profondément préoccupée par les actions agressives et les menaces continues de la Russie à l’encontre de l’Ukraine.  La mobilisation militaire massive de la Russie près de la frontière ukrainienne et en Crimée occupée ne répond à aucune provocation et est injustifiée, a-t-elle estimé. La déléguée a prévenu qu’une escalade aurait des conséquences humanitaires dévastatrices, avant de fustiger les « demandes irréalistes » de la Russie qui menacent toute l’architecture sécuritaire européenne.  Cette crise représente clairement une menace pour la paix et la sécurité internationales, s’est alarmée Mme Juul. 

Alors que la Russie accuse l’OTAN d’alimenter les tensions, la déléguée a souligné la nature défensive et la base volontaire de cette alliance.  « Nous ne cherchons pas l’affrontement », a-t-elle assuré.  Mais, simultanément, nous ne renoncerons pas aux principes sécuritaires sur lesquels s’appuie l’Europe, a poursuivi la déléguée.  Nous sommes prêts à discuter des préoccupations sécuritaires, a poursuivi Mme Juul, tout en ajoutant que chaque pays a le droit de choisir ses propres alliances.  Enfin, rappelant que la Russie invoque souvent devant ce Conseil les principes de souveraineté et d’intégrité territoriale, la représentante norvégienne l’a exhortée à respecter lesdits principes relativement à l’Ukraine. 

Reprenant la parole, Mme THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a confié ne pas avoir été surprise par les propos de la Fédération de Russie.  « En revanche, je suis quelque peu déçue et m’en voudrais de ne pas reprendre la parole », a-t-elle ajouté, assurant que les États-Unis ne veulent aucunement « affaiblir » la Fédération de Russie.  Toutefois, force est de constater que son comportement n’est « pas responsable ».  Pour la représentante américaine, la reconnaissance des faits sur le terrain n’est « pas une provocation », contrairement à l’accumulation de troupes à la frontière avec l’Ukraine.  Dans ce contexte, nous sommes engagés au service de la diplomatie et espérons que la Fédération de Russie s’y engagera également, a-t-elle souhaité.  « Ce sont vos actions qui parleront d’elles-mêmes », a conclu Mme Thomas-Greenfield, avant d’encourager la Russie à « prendre la bonne décision ». 

M. Nebenzia (Fédération de Russie) a dit que la réunion n’était pas un dialogue entre son pays et les États-Unis.  Je n’ai pas entendu les États-Unis faire une seule référence à l’accord de Minsk ou à la résolution du 2202 (2015), a-t-il ajouté.  Voilà ce dont nous devons discuter s’agissant de la situation en Ukraine.  Les États-Unis parlent de tout à fait autre chose. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a déclaré que le Conseil de sécurité doit être informé de ce qui se passe le long de la frontière de l’Ukraine avec la Fédération de Russie.  Aujourd’hui, a lancé le représentant, environ 112 000 soldats russes ont été déployés autour des frontières de l’Ukraine et en Crimée.  Avec les composantes maritimes et aéronautiques, leur nombre atteint environ 130 000.  Les troupes russes sont également déployées au Bélarus pour les exercices conjoints « Union Resolve 2022 » qui se tiendront les 10 et 20  février.  M.  Kyslytsya a poursuivi que le 26  janvier, la flotte russe a commencé un autre exercice en mer Noire menaçant ainsi l’Ukraine et tous les États riverains et la région. 

Le renforcement des capacités de combat des forces d’occupation russes dans le Donbass, qui comptent jusqu’à 35 000 combattants, est une autre tendance inquiétante, a poursuivi le représentant.  Les passages frontaliers illégaux de trains de marchandises et de convois de camions, la livraison d’armes aux formations séparatistes dans le Donbass, sont une pratique courante, a-t-il accusé, en prenant à témoin les rapports de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE qui a fourni de nombreuses preuves de diverses activités illégales dans les zones frontalières.  Les restrictions à la liberté de circulation de la Mission d’observation sont en hausse dans les zones non contrôlées par le Gouvernement près de la frontière entre l’Ukraine et la Russie. 

Le 22 décembre 2021, a continué le représentant, si le Groupe de contact trilatéral était parvenu à un autre accord sur la reprise du cessez-le-feu, les bombardements, les tirs de snipers sur les positions ukrainiennes et l’utilisation systématique de drones d’attaque contre les troupes ukrainiennes n’ont pas cessé.  Douze militaires ukrainiens ont été tués et 14  autres blessés.  Le 25  janvier, a informé M.  Kyslytsya, les forces russes ont de nouveau attaqué les positions ukrainiennes dans la région de Pyshchevyk, près de Donetsk, à l’aide d’un drone larguant des grenades à fragmentation VOG-17 provoquant de graves blessures à deux militaires ukrainiens. 

Il a déploré l’impasse actuelle dans le processus de consultation dans le cadre du Groupe de contact trilatéral et la non-application des décisions des dirigeants du format Normandie lors de leur sommet de décembre 2019 à Paris.  M.  Kyslytsya a aussi protesté contre les efforts de la partie russe pour entraver les activités du Groupe de contact afin d’empêcher la finalisation des arrangements sécuritaires et humanitaires.  Le représentant a également pointé du doigt le déni obstiné de la Russie d’être partie au conflit armé qui fait rage depuis huit ans dans le Donbass en Ukraine, et les tentatives d’imposer un soi-disant « dialogue direct » avec ses administrations d’occupation fantoches ainsi que le refus de s’engager dans une discussion de fond sur le règlement politique du conflit. 

« Pourquoi toutes ces forces russes sont-elles là? » a demandé M.  Kyslytsya, en assurant que l’Ukraine ne lancera pas d’offensive militaire ni dans le Donbass, ni en Crimée, ni ailleurs.  Il n’y a pas d’alternative au règlement pacifique du conflit en cours et au rétablissement de sa souveraineté et de son intégrité territoriale.  Il a en outre contesté les fausses accusations russes selon lesquelles l’Ukraine aurait planifié une attaque militaire.  « Cela n’arrivera pas », a dit M.  Kyslytsya dénonçant la réticence de la Russie à désamorcer la situation et à se préparer à justifier une éventuelle nouvelle agression.  Nous ferons tout notre possible pour empêcher une autre provocation par la Russie.  Le représentant a réitéré l’absence de toute intention agressive ainsi que le ferme engagement de l’Ukraine en faveur de la paix. 

M. Kyslytsya a martelé le droit souverain de son gouvernement de choisir ses propres arrangements sécuritaires, y compris les traités d’alliance, qui ne peuvent être remis en question par la Russie.  Ce droit est inscrit dans de nombreux instruments juridiques internationaux auxquels la Russie est également partie, a rappelé le représentant, pour qui l’Ukraine ne cédera pas aux menaces visant à l’affaiblir, à saper sa stabilité économique et financière et à inciter à la frustration du peuple.  Cela n’arrivera pas et le Kremlin doit se rappeler que l’Ukraine est prête à se défendre, a clamé le représentant. 

Les voies diplomatiques avec la Russie restent ouvertes, a indiqué M.  Kyslytsya, en annonçant que le Président ukrainien a rencontré son homologue russe.  Si la Russie a des questions à poser à l’Ukraine, il est préférable de se rencontrer et de parler, pas d’amener des troupes aux frontières ukrainiennes et d’intimider le peuple ukrainien.  La priorité pour l’Ukraine est de parvenir à un cessez-le-feu durable et inconditionnel dans le Donbass.  L’intensification du travail du format Normandie est une condition préalable importante pour les prochaines étapes vers une paix durable dans le Donbass, a indiqué M.  Kyslytsya, qui a dit attendre avec impatience une véritable désescalade, le retrait des troupes russes de la frontière avec l’Ukraine et la normalisation de la situation actuelle. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a rappelé sa position de principe qu’il est inacceptable de régler un conflit par la force.  Il a dit que son pays a fait des efforts pour régler le conflit en Ukraine et qu’il est prêt à faire tout son possible pour restaurer le dialogue dans la région.  Il a estimé qu’il n’y a pas d’alternative aux Accords de Minsk, qui ont joué un rôle clef dans le règlement pacifique de la crise.  Pour faire avancer le processus de paix, il a misé sur des négociations dans le cadre du groupe de contact trilatéral et de la mise en œuvre pratique des accords dans la zone du conflit domestique ukrainien.  Pour le délégué, la convocation de la séance de ce jour par la délégation des États-Unis est une nouvelle tentative d’escalade artificielle de la tension dans la région, comme instrument d’accusation politique. 

Le représentant a ensuite indiqué que, malgré les inquiétudes exprimées fréquemment par les représentants du Bélarus sur des plateformes internationales de négociation et au cours des contacts bilatéraux, « le renforcement des puissances militaires sur les frontières ouest et sud de notre pays ne s’arrête pas ».  « Cela devient même menaçant », a-t-il dénoncé en constatant de plus en plus de pression exercée sur son pays par « des pays individuel ».  Il a regretté que les propositions de revenir aux négociations n’entendent aucune réponse du côté des partenaires occidentaux.  Il a appelé à lire le Mémorandum de Budapest concernant le Bélarus, qui contient la promesse de ne pas exercer de mesure coercitive économique sur le pays, en évoquant « les mesures de sanctions individuelles imposées contre nous ». 

Compte tenu de la situation difficile actuelle, a-t-il poursuivi, les autorités du Bélarus et de la Fédération de Russie ont décidé d’organiser conjointement des événements pour évaluer l’état de préparation des forces armées des deux États afin de garantir la sécurité militaire des pays alliés.  Il a donc été décidé, en février, de conduire une inspection des forces de réaction de ces pays, notamment entre le 10 et le 20 du mois.  Le représentant a précisé que ces exercices, qui sont régulièrement pratiqués, ont une nature exclusivement défensive et ne constituent pas une menace pour les partenaires européens ni pour les pays voisins.  Le Bélarus respecte toutes ses obligations en vertu des traités internationaux et régionaux en matière de contrôle des armes, a assuré le représentant avant de signaler que toutes les informations sur les prochains exercices sont disponibles sur le site du Ministère de la défense du Bélarus. 

Il a rappelé que le 28 janvier dernier, le Président du Bélarus, Alexander Loukashenko, a déclaré que « la guerre n’est possible que dans deux cas: si une attaque est menée contre le Bélarus ou contre son allié, la Fédération de Russie ».  Enfin, le représentant a rappelé que le Bélarus est prêt à continuer à fournir tout l’appui nécessaire au règlement du conflit en Ukraine, y compris en créant les conditions nécessaires aux travaux du Groupe de contact trilatéral et des négociations dans tout autre format possible.  Il a enfin rappelé qu’une initiative sur un dialogue élargi sur des questions de sécurité internationale avait été proposée par le Président Loukashenko il y a quelques années, sous le nom de Helsinki II, mais que cette idée n’a jamais été suivie. 

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) s’est alarmé du renforcement militaire continu de la Russie à la frontière avec l’Ukraine, y voyant une menace sérieuse à la paix et à la sécurité internationales.  Il a pointé la responsabilité de Fédération de Russie, cet « acteur déstabilisateur » en Europe orientale depuis la guerre de Géorgie en 2008 et l’annexion illégale de la Crimée en 2014.  Le représentant a déclaré que « les conflits gelés » dans l’est de l’Ukraine, dans les régions sécessionnistes géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie et dans la région transnistrienne de la République de Moldova compromettent la stabilité et la sécurité régionales.  Pour lui, ce qui se joue sur place est une violation des principes fondamentaux inscrits dans la Charte des Nations Unies, dont le respect de la souveraineté et l’intégrité territoriale des États, l’inviolabilité des frontières et le non-recours à la force ou la menace de l’exercer.  C’est pourquoi la Pologne a appelé tous les États Membres à protéger les principes du droit international, à condamner fermement toute menace de recours à la force et à travailler ensemble au maintien de la paix.  La délégation, qui a rappelé que son pays préside actuellement l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a souligné sa détermination à faciliter des pourparlers sur la sécurité européenne, avant d’estimer que l’OSCE est le cadre idéal à cette fin, en raison de son format régional élargi. 

S’exprimant au nom des États baltes, M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a rappelé l’appui infaillible de son pays à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, dans le cadre de ses frontières internationalement reconnues.  À cet égard, il a condamné les violations de ces principes à la suite de l’invasion par la Fédération de Russie d’une partie de l’Ukraine et de l’annexion illégale de la Crimée et de la ville de Sébastopol.  Se disant préoccupé par la situation des droits humains dans la péninsule, il a salué le lancement de la Plateforme de Crimée, initiative ukrainienne destinée à coordonner les actions diplomatiques internationales contre l’occupation de ce territoire.  Rappelant que le conflit en Ukraine a déjà fait près de 14 000 morts, entraîné le déplacement de millions de personnes et provoqué des souffrances indicibles, le délégué a réaffirmé son plein appui à la voie d’un règlement pacifique, par le biais du format Normandie, du Groupe de contact trilatéral et de l’OSCE. 

Constatant toutefois que « l’approche constructive » de Kiev reste « lettre morte » de la part de la Fédération de Russie, le représentant a appelé cette dernière à promouvoir la désescalade, à mettre fin à son soutien des formations armées dans l’est de l’Ukraine et à retirer ses troupes de la frontière.  Dénonçant le déploiement de troupes russes dans ce secteur ainsi qu’au Bélarus, il a accusé le Kremlin de « prétendre le contraire de la vérité » en disant se défendre contre une menace.  « Or, c’est la Russie qui menace l’Ukraine et pas l’inverse », a-t-il tranché.  À ses yeux, la Fédération de Russie n’est « pas une victime mais un agresseur », comme cela s’est déjà vérifié en Ossétie du Sud, en Abkhazie, en Transnistrie et en Crimée.  Réaffirmant les principes de la Charte des Nations Unies, de l’Acte final d’Helsinki et de la Charte de Paris en faveur de la souveraineté des États, de l’inviolabilité des frontières et de l’absence de recours à la force, il a averti que la menace russe constitue une « menace pour la stabilité du continent » et que toute agression militaire contre l’Ukraine aura des « conséquences graves », avec notamment des mesures de restriction prises entre partenaires transatlantiques. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: suite à l’attaque de la prison de Hassaké, le Chef du BLT appelle à résoudre d’urgence le problème des prisons et des camps dans le nord-est de la Syrie

8958e séance – après-midi
CS/14780

Conseil de sécurité: suite à l’attaque de la prison de Hassaké, le Chef du BLT appelle à résoudre d’urgence le problème des prisons et des camps dans le nord-est de la Syrie

Cet après-midi, à la demande de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité a tenu sa troisième séance en deux jours sur la Syrie, avec pour axe cette fois-ci le terrorisme, à la suite de l’attaque menée le 20 janvier par Daech contre le centre de détention de Hassaké, dans le nord-est syrien.  Comme l’a expliqué le Secrétaire général adjoint et Chef du Bureau de lutte contre le terrorisme (BLT), cette attaque a entraîné l’évasion d’un nombre indéterminé de prisonniers de Daech d’un établissement qui abriterait environ 3 000 combattants de ce groupe mais aussi 700  enfants, selon les informations de l’UNICEF. 

Cet incident était pourtant prévisible, a affirmé M.  Vladimir Voronkov, Daech ayant appelé à des évasions de prison et l’équipe de surveillance des sanctions de l’EIIL (Daech) et d’Al-Qaida ayant régulièrement mis en garde contre la précarité des dispositifs de détention dans le nord-est de la Syrie.  Selon le Chef du BLT, ce dernier incident illustre la nécessité urgente de déployer des efforts internationaux concertés pour résoudre de manière efficace et durable le problème des prisons et des camps dans le nord-est de la Syrie où sont détenus des combattants présumés de Daech et des individus ayant des liens présumés avec le groupe, y compris des enfants. 

La plupart de ces personnes n’ont jamais été inculpées d’un crime, mais restent en détention prolongée, incertaines de leur sort.  Et les tentatives de Daech de libérer ses combattants de prison ne font que souligner la nécessité de les traduire en justice dès que possible et d’assurer la reddition de comptes pour briser le cycle de la violence, a souligné M.  Voronkov qui a notamment appelé le Conseil à prêter attention à la situation dans les camps et centres de détention de Hol et de Roj. 

Rappelant qu’en représailles à l’attaque du 20 janvier, des groupes armés locaux, appuyés par les forces des États-Unis, ont mené d’importantes frappes aériennes qui ont endommagé des infrastructures civiles et tués un nombre encore inconnu de Syriens, la Fédération de Russie a appelé l’ONU et ses partenaires humanitaires à maintenir la situation à Hassaké sous contrôle afin d’éviter une tragédie humanitaire.  « Une fois de plus, la rhétorique des États-Unis diffère on ne peut plus de leurs actions sur le terrain », a constaté la délégation russe, accusant les forces américaines d’ignorer les mesures de protection des civils.  

Déplorant l’« exercice de désinformation perpétuel » de la Russie, les États-Unis ont rétorqué que les forces armées américaines sont présentes en Syrie dans le cadre de l’action collective dirigée contre l’État islamique, ce qui n’a pas empêché la République arabe syrienne d’accuser Washington d’avoir formé une « coalition illégitime » sans l’accord préalable des autorités syriennes et de dénoncer le soutien de « certains membres » de cette coalition à des organisations terroristes.  C’est cela qui empêche le Conseil de sécurité d’assurer la mise en œuvre pleine et entière de ses résolutions pertinentes qui auraient pu prévenir l’expansion du terrorisme en Syrie, a argué la délégation syrienne. 

L’Iran a vu dans l’attaque de la prison de Hassaké la conséquence de l’occupation illégale de certaines parties de la Syrie par des forces étrangères, alertant en outre que la présence de combattants terroristes étrangers et de leurs familles dans les zones de conflit demeure une source croissante d’insécurité et d’instabilité pour l’ensemble de région. 

« Il faut empêcher que les prisons et les camps ne deviennent des incubateurs d’une nouvelle génération de terroristes », a insisté à son tour l’Iraq qui a dit craindre une augmentation des risques d’évasion des centres de détention en Syrie et dans d’autres pays de la région, appelant par ailleurs à intensifier le processus de rapatriement des combattants étrangers et des membres de leur famille. 

À cet appel, qui a également été relayé par les États-Unis, la France a toutefois répondu que la question que pose l’attaque de Hassaké est celle de la protection des lieux de détention de manière générale et non celle du rapatriement de quelques occidentaux « qui ne représentent qu’une petite minorité des personnes concernées sur place ».  

Rappelant la position de la France, la délégation a déclaré que tous les djihadistes, qui ont fait le choix délibéré de rejoindre Daech, doivent, indépendamment de leur nationalité, rendre des comptes devant la justice, au plus près du lieu de leurs crimes, « là où se trouvent les victimes, là où se trouvent les preuves ».  C’est la raison de notre position vis-à-vis des quelques Français détenus dans les lieux de détention du nord-est syrien, a expliqué la France qui a appelé à ne pas perdre de vue que la très large majorité des personnes qui y sont détenues sont de nationalité iraquienne et syrienne, puis dans une moindre mesure centre-asiatique.  

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (SYRIE)

Déclarations

M. VLADIMIR VORONKOV, Secrétaire général adjoint et Chef du Bureau de lutte contre le terrorisme (BLT), a dit être profondément préoccupé par l’attaque que Daech a lancée la semaine dernière contre la prison de Sinaa dans la ville de Hassaké, dans le nord-est de la Syrie, et par les combats en cours qui ont également touché la population civile.  L’attaque a entraîné l’évasion d’un nombre indéterminé de prisonniers de Daech d’un établissement qui abriterait environ 3 000 combattants de groupe, a-t-il précisé ajoutant que selon l’UNICEF, près de 700 enfants étaient également détenus dans cette prison.  Consterné par les informations selon lesquelles Daech aurait utilisé ces enfants comme boucliers humains, M.  Voronkov a exhorté les membres du Conseil à soutenir l’appel de la Directrice générale de l’UNICEF, Mme  Henrietta Fore, selon laquelle ces enfants n’auraient jamais dû être placés en détention militaire. 

Selon lui, cet incident était pourtant prévisible, Daech ayant appelé à des évasions de prison et l’équipe de surveillance des sanctions de l’EIIL (Daech) et d’Al-Qaida ayant régulièrement mis en garde contre la précarité des dispositifs de détention dans le nord-est de la Syrie.  Pour l’instant, la capacité de Daech à exploiter stratégiquement les évasions de prison est limitée, a cependant estimé M.  Voronkov expliquant que le groupe ne peut pas facilement absorber ou exfiltrer des fugitifs en grand nombre.  Il n’est donc pas surprenant que de nombreux évadés de prison aient été tués ou repris, mais cela ne signifie pas que la menace puisse être négligée.  Ce dernier incident témoigne selon lui de la nécessité urgente de déployer des efforts internationaux concertés pour résoudre de manière efficace et durable le problème des prisons et des camps dans le nord-est de la Syrie où sont détenus des combattants présumés de Daech et des individus ayant des liens présumés avec le groupe, y compris des enfants.  La plupart de ces personnes n’ont jamais été inculpées d’un crime, mais restent en détention prolongée, incertaines de leur sort, a souligné M. Voronkov. 

Les défis à la stabilisation en Iraq et la lenteur des progrès sur la voie politique en Syrie font de cette région une arène privilégiée pour Daech et d’autres groupes terroristes.  C’est une tragédie non seulement pour le peuple syrien, mais aussi pour les pays voisins, a fait valoir le Secrétaire général adjoint, faisant état d’une autre attaque, quelques heures à peine après celle de Hassaké, contre une caserne de l’armée iraquienne située au nord de Bagdad, tuant au moins 11 soldats.  Il ne s’agit pas d’incidents isolés, a-t-il martelé.  Depuis l’effondrement territorial de Daech, le groupe s’est concentré sur la reconstitution de ses capacités, a maintenu des cellules clandestines et poursuivi une insurrection terroriste.  Le groupe est organisé en petites cellules cachées dans des zones désertiques et rurales, alors que les terroristes traversent la frontière entre l’Iraq et la Syrie pour éviter d’être capturés.  Cela met également en évidence la nature transfrontalière du noyau de Daech dans cette région, a poursuivi le Chef du BLT qui a dit craindre que ces attaques n’encouragent les affiliés de Daech au Sahel et en Afrique centrale et orientale à monter des attaques violentes. 

Soulignant que les civils, en particulier les femmes et les enfants, paient le prix fort de cette détérioration de la situation sécuritaire, il a appelé le Conseil à prêter attention à la situation dans les camps et centres de détention de Hol et de Roj dans le nord-est de la Syrie.  Dans le seul camp de Hol, plus de 56 000 personnes sont détenues, pour la plupart des femmes et des enfants, dans des conditions humanitaires désastreuses.  Le Secrétaire général n’a cessé de souligner l’urgence d’une réponse internationale adéquate à la situation humanitaire, des droits de l’homme et de la sécurité désastreuse, en particulier pour les enfants dans ces camps, a-t-il fait valoir.  Lui-même a mis en garde le Conseil en 2020 contre la menace posée par Daech et noté l’urgence de mettre les enfants de ces camps hors de danger.  Certains de ces enfants pourraient faire partie de ceux que Daech utilise désormais comme boucliers humains, a regretté M.  Voronkov estimant que ce ne serait pas arrivé s’ils avaient été rapatriés en 2019, 2020 ou 2021.  Les tentatives de Daech de libérer ses combattants de prison ne font que souligner la nécessité de les traduire en justice dès que possible et d’assurer la reddition de comptes pour briser le cycle de la violence, a tranché le Chef du BLT. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que le 20 janvier, des combattants de Daech ont lancé une attaque bien planifiée contre une prison de Hassaké où se trouvaient environ 500  détenus affiliés au groupe.  Avec l’aide d’explosifs, environ 100  membres de Daech ont réussi à pénétrer dans son enceinte et ont commencé à se rendre dans les dortoirs.  Des groupes armés locaux, appuyés par les forces des États-Unis ont alors mené d’importantes frappes aériennes qui ont endommagé les infrastructures civiles et tué un nombre encore inconnu de Syriens.  On ne peut que constater, une fois de plus, que la rhétorique des États-Unis diffère on ne peut plus de leurs actions sur le terrain, a lancé le représentant qui a accusé les forces américaines d’ignorer les mesures de protection des civils.  Selon les informations, a-t-il ajouté, près de 850  enfants demeurent pris au piège dans la zone et 45 000 personnes ont été déplacées, certaines ayant cherché refuge dans le territoire contrôlé par le Gouvernement. 

Le représentant russe a appelé l’ONU et ses partenaires humanitaires à maintenir la situation à Hassaké sous contrôle afin d’éviter une tragédie humanitaire.  Il convient aussi d’exiger un rapport complet des États-Unis sur le nombre de victimes civiles provoqué par l’incident, a-t-il ajouté, soulignant que les responsables de crimes à l’encontre de Syriens innocents doivent être traduits en justice.  Il a fait part de sa gratitude envers Damas pour avoir ouvert ses postes de contrôle aux civils en fuite, ainsi qu’au Croissant-Rouge arabe syrien et à tous les groupes humanitaires qui soutiennent les civils sur le terrain.  Dans le contexte de ces événements, les forces syriennes, avec l’appui de la Fédération de Russie, continueront de rechercher et de cibler les groupes terroristes en Syrie, a fait savoir M. Polyanskiy qui a déploré que les États occidentaux continuent de privilégier le deux poids, deux mesures.  Ces états accordent plus d’importance aux objectifs politiques qu’à l’objectif de mettre fin au terrorisme en Syrie, s’est-il indigné, notant que des individus associés aux groupes terroristes sont autorisés à vivre librement dans les zones de la Syrie qui ne sont pas contrôlées par le Gouvernement. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde)a dit que l’attaque de Daech la semaine dernière à Hassaké illustre les dangers que représentent les groupes terroristes qui reprennent des forces en Syrie.  Notant que l’Iraq a été victime d’attaques similaires ces derniers mois, le représentant a insisté sur l’impératif d’une lutte mondiale contre le terrorisme.  « La réapparition de l’EIIL/Daech en Syrie et en Iraq appelle à une action urgente de la part de la communauté internationale », a insisté le délégué avant de prévenir que les approches biaisées représentent une menace pour les efforts collectifs.  À cet égard, il a appelé à soutenir les efforts des États de la région pour lutter contre des groupes terroristes identifiés comme tels par l’ONU, notant que l’expansion des activités terroristes en Syrie et dans la région est un sujet de préoccupation qui mérite une introspection sérieuse et une action concertée de la part de la communauté internationale.  En tant que président du Comité contre le terrorisme (CCT), l’Inde continuera d’aborder cette question avec toutes les parties prenantes afin de promouvoir une approche de tolérance zéro à l’égard du terrorisme et de ses auteurs », a promis le représentant. 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a tout d’abord noté que l’attaque perpétrée par Daech contre la prison d’Hassaké, en Syrie, est la plus grande opération de ce groupe terroriste depuis qu’il a été déclaré vaincu en 2019.  Cela montre, selon lui, que Daech est en train de reprendre des forces dans cette région et au Sahel.  Le représentant a ensuite dit partager les préoccupations de Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme face aux conditions scandaleuses qui règnent dans les prisons syriennes.  Il s’est notamment élevé contre la présence de quelque 700  mineurs dans la prison de Sinaa d’Hassaké, qui y sont confrontés à des conditions d’insécurité extrême.  « C’est de la barbarie », a-t-il dénoncé, avant de se faire l’écho de l’appel lancé par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste en faveur du rapatriement des enfants de combattants étrangers en Syrie.  Ces enfants sont victimes du terrorisme et doivent pouvoir rentrer dans leur pays d’origine, « faute de quoi, en plus de leur causer des traumatismes physiques et émotionnels, nous allons semer chez eux la haine et alimenter la spirale de la violence », a averti M. Gómez-Robledo.  À ses yeux, tout acte terroriste doit être condamné, mais agir contre ce fléau ne doit pas faire oublier le respect des droits humains.  « Sinon nous couperons les têtes de l’hydre sans effet et nous continuerons de nous accuser les uns les autres. » 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a condamné avec la plus grande fermeté l’attaque menée le 20 janvier par Daech contre un centre de détention de Hassaké. Cette attaque caractérise la résurgence de Daech sur l’ensemble du territoire syrien, ce qui n’est malheureusement pas une surprise, cette menace n’ayant en réalité jamais disparu, a constaté la représentante. 

Rappelant la position de la France, elle a déclaré que tous les djihadistes, qui ont fait le choix délibéré de rejoindre Daech, doivent, indépendamment de leur nationalité, rendre des comptes devant la justice, au plus près du lieu de leurs crimes, là où se trouvent les victimes, là où se trouvent les preuves.  C’est la raison de notre position vis-à-vis des quelques Français détenus dans les lieux de détention du nord-est syrien, a expliqué la représentante.  Elle a appelé à ne pas perdre de vue une évidence, à savoir que la très large majorité des personnes qui y sont détenues sont de nationalités iraquienne et syrienne puis dans une moindre mesure centre-asiatique.  La question que pose l’attaque de Hassaké, selon Mme Boradhurst Estival, est donc celle de la protection des lieux de détention de manière générale et non celle du rapatriement de quelques occidentaux « qui ne représentent qu’une petite minorité des personnes concernées sur place ».  Pour éradiquer le terrorisme dans la région, une solution à la crise syrienne est indispensable, a-t-elle martelé, ajoutant que cette solution ne peut être que politique. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a déclaré que la coalition n’était pas encore venue à bout de l’EIIL, comme en témoignent ses attaques récentes dans le nord de la Syrie, et qu’elle œuvre aussi à garantir que les prisonniers faits au sein de cette organisation terroriste soient détenus dans des conditions de sûreté et de dignité acceptables.  Les forces armées américaines sont présentes dans le cadre de l’action collective dirigée contre l’État islamique, a rappelé le représentant, en encourageant tous les États Membres à envisager le rapatriement de leurs ressortissants qui se trouvent détenus dans le nord du pays.  Répondant à la Fédération de Russie, qui a fait de cette « plateforme » un « exercice de désinformation » perpétuel, il a souligné que les États-Unis sont engagés à respecter les principes qui gouvernent l’action militaire de son pays, à la suite des enquêtes menées par certains médias indépendants américains.  Ce type de situation ne pourrait jamais exister en Russie, où les médias ne sont pas libres, a accusé le représentant américain qui a regretté que l’examen de la situation dans le nord de la Syrie n’ait pu être mené dans le cadre des volets politique ou humanitaire du dossier syrien. 

M. BING DAI (Chine) a prédit que l’attaque de la prison d’Hassaké par les terroristes aura des conséquences encore plus graves que les échanges de tirs entre les différents belligérants en Syrie.  Selon lui la communauté internationale doit adopter une position unifiée dans la lutte contre le terrorisme en ciblant toutes les organisations qui sont répertoriées dans les listes du Conseil de sécurité.  Il a précisé que cette lutte doit se faire en Syrie dans le respect de la souveraineté nationale.  La lutte contre le terrorisme ne peut servir de prétexte pour stationner des troupes étrangères en Syrie, a-t-il argué.  Il a aussi rappelé que la Syrie et l’Iraq comptent sur leur territoire des milliers de combattants étrangers.  Le représentant a donc appelé toutes les parties, notamment les pays ayant leurs ressortissants dans ces pays, à veiller à les rapatrier.  Il a aussi souligné que nombre de détenus de la prison attaquée à Hassaké sont des combattants étrangers. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a fermement condamné la récente attaque de Daech dans la ville de Hassaké, se déclarant en outre consternée par les informations faisant état de victimes civiles.  L’ampleur de cette attaque montre que, malgré leur défaite territoriale, la menace de Daech en Syrie est grave, a constaté la représentante qui a appelé la communauté internationale à rester déterminée à assurer la défaite durable du groupe.  Mme Byrne Nason s’est inquiétée de l’ampleur des déplacements de la population civile, ainsi que de la situation des enfants qui, a-t-elle souligné doivent être traités avant tout comme des victimes.  Elle a aussi souligné l’impératif d’un plein accès pour les acteurs humanitaires.  Préoccupée par les implications plus larges pour la situation sécuritaire dans le nord-est de la Syrie, la déléguée a appelé à la reddition de compte pour cette attaque et pour tous les crimes commis en Syrie.  Ces événements, a-t-elle ajouté, soulignent une fois de plus la nécessité de progrès substantiels et significatifs vers une solution politique inclusive en Syrie. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a condamné la dernière attaque de Daech à Hassaké, un attentat qui démontre la menace constante que représente le terrorisme pour la population syrienne et pour les autres populations dans la région.  Pour lui, il n’y a pas de bon ou de mauvais terroristes: ils sont tous des assassins et des meurtriers qui doivent être traités en tant que tels, c’est-à-dire traînés devant les tribunaux.  Selon lui, tous les moyens possibles doivent être utilisés pour lutter contre les terroristes et les vaincre.  Il a invité à lutter contre ses sources - politiques ou sociales- qui permettent d’attirer des personnes dans cette entreprise de mort. 

Le processus politique doit progresser afin de donner des perspectives d’avenir meilleur, a-t-il ajouté en conseillant de travailler de manière collective afin de redonner l’espoir aux populations.  Il a demandé de faire tout ce qui est possible pour libérer la Syrie du fléau du terrorisme.  Son gouvernement, a-t-il indiqué, a rapatrié depuis  2020 quelque 24  femmes et enfants d’origine albanaise qui se sont retrouvés dans des camps de réfugiés en Syrie et en Iraq.  Cette question n’est pas un sujet facile à traiter mais c’est nécessaire, a reconnu le représentant. 

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a condamné l’attentat terroriste de janvier sur la prison de Hassaké qui a fait plusieurs morts et de nombreux blessés.  Elle a insisté sur la nécessité urgente de faire face à la menace posée par les groupes terroristes et leurs affiliés de manière exhaustive, qu’ils soient inscrits ou non sur la liste du Conseil de sécurité.  Ces actes terroristes continuent de mettre en péril le processus de paix en Syrie, et ont des répercussions négatives sur la sécurité régionale et internationale, a souligné la représentante.  Elle a appelé à renforcer les mesures de lutte contre le terrorisme pour s’assurer que les terroristes et leurs affiliés soient tenus responsables de leurs actes odieux et se voient refuser la possibilité et les ressources pour poursuivre leurs activités.  Il faut donc identifier sans tarder les mesures concrètes que le Conseil devrait prendre pour faire face à la menace croissante du terrorisme en Syrie, a-t-elle estimé. 

M. ECKERSLEY (Royaume-Uni) s’est inquiété de la menace que continue de représenter Daech et a estimé que cette situation appelle la communauté internationale à faire preuve de fermeté et de détermination pour lutter contre le terrorisme.  Il s’est dit heureux de constater que les Forces démocratiques syriennes (FDS) aient repris le contrôle de la prison d’Hassaké, attaquée par le groupe terroriste.  Il a jugé urgent de mieux coordonner les interventions des acteurs de la communauté internationale pour répondre à ce défi terroriste.  Le représentant a également réclamé des mesures d’urgence pour venir en aide aux femmes et filles présentes dans les camps de réfugiés, exprimant par ailleurs l’appui du Royaume-Uni aux FDS dans leur lutte contre Daech. 

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a vivement condamné l’attaque perpétrée par Daech contre la prison de Hassaké, dans le nord-est de la Syrie, y voyant une violation flagrante du droit international et une mise en danger insupportable des 800 enfants détenus dans ce centre pénitentiaire.  Pour la représentante, cette situation prouve qu’il y a urgence à rapatrier dans leur pays d’origine tous les enfants de combattants étrangers qui croupissent dans des prisons ou des camps en Syrie.  La déléguée a d’autre part observé que l’évolution du conflit dans le nord-est du pays vient rappeler la menace que les groupes terroristes font peser sur la paix dans la région et dans le monde.  Enfin, elle a appelé les parties au conflit syrien à tout faire pour protéger les populations civiles, respecter leurs obligations au regard du droit international et appuyer les avancées du volet politique, conformément aux dispositions de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a condamné les attentats terroristes perpétrés par l’État islamique, qui confirment un regain de sa capacité de nuisance dans la région où cette organisation avait été vaincue en 2019.  Le nombre de ses victimes doit nous rappeler la nécessité d’agir contre Daech en proposant davantage qu’une réponse militaire, a souligné le délégué qui a appelé à prendre en compte les causes profondes du terrorisme. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a condamné fermement les attentats terroristes perpétrés par Daech contre la prison de Hassaké.  Il a fait part de son inquiétude face aux informations indiquant que des enfants auraient été utilisés comme boucliers humains par Daech, une violation flagrante du droit international, a-t-il rappelé.  Il a souligné l’impératif de couper les sources de financement de Daech, d’épuiser ses capacités militaires et de mettre fin à son processus de recrutement de combattants, ainsi qu’à la diffusion d’une rhétorique extrémiste. 

Le représentant a noté que les menaces terroristes ont atteint des niveaux très dangereux dans la région, notamment en termes d’utilisation par des groupes terroristes de technologies et d’armes de pointe pour cibler des civils et des infrastructures civiles.  Les Émirats arabes unis ont d’ailleurs eux-mêmes été récemment ciblés, a-t-il indiqué.  Il a enfin appelé à une stabilité durable en Syrie, d’une manière qui répondrait aux aspirations du peuple syrien et lui permettrait d’avoir une patrie sûre et stable, exempte d’extrémisme et de terrorisme. 

Mme MELINA ESPESCHIT MAIA (Brésil) a dit être très préoccupée par la situation des enfants syriens en particulier dans le nord-est de la Syrie.  La représentante a prié les parties en Syrie de faire en sorte que les enfants soient toujours protégés.  Elle a souligné l’importance de la question du rapatriement des enfants vers leur pays d’origine.  Par ailleurs, elle a estimé que le processus politique demeure la seule possibilité de sortir du conflit en Syrie.  Appelant à combattre le terrorisme, Mme Espeschit Maia a ajouté que la lutte contre ce fléau doit être cohérente avec le droit international.  Les décisions du Conseil ne doivent pas gêner l’acheminement de l’aide humanitaire, a-t-elle conclu. 

Mme MONA JUUL (Norvège), présidente du Conseil de sécurité en ce mois de janvier, parlant en sa capacité nationale, a condamné la récente violence et plaidé pour que les enfants ne soient pas détenus en prison.  La récente attaque contre la prison de Hassaké démontre que l’EIIL continue de poser une grave menace et que la lutte contre le terrorisme doit se poursuivre, a-t-elle plaidé.  Elle a exhorté toutes les parties à respecter le droit international dans leurs efforts de lutte antiterroriste.

M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a repris brièvement la parole pour regretter les propos critiques des États-Unis concernant la supposée absence de liberté de la presse dans son pays.  Nous aurions nous aussi beaucoup à dire à ce sujet, a-t-il réagi, avant de constater que peu de choses ont été dites sur le fond lors de l’intervention de la délégation américaine.  Il a conclu son propos en espérant que les questions posées par la Fédération de Russie continueront d’être l’objet de l’attention du Conseil. 

Après avoir rappelé les détails de l’attaque terroriste commise par l’EIIL, M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a accusé les États-Unis d’avoir formé une « coalition illégitime qui leur est propre, » sans l’accord préalable des autorités syriennes. Il a dénoncé le soutien de « certains membres » de cette coalition à des organisations terroristes et d’avoir également empêché le Conseil de permettre la mise en œuvre pleine et entière de ses résolutions pertinentes qui auraient pu prévenir l’expansion du terrorisme. Le représentant a ensuite accusé les forces d’occupation américaines d’avoir transféré des éléments de Daech vers des « sites de détention illégitimes », considérant que la récente attaque à l’origine de cette séance en était la conséquence.  Il a également fustigé les États-Unis pour avoir pillé les ressources nationales de son pays, tué des civils innocents et appuyé des forces « séparatistes » pour qu’elles servent leurs intérêts géopolitiques.  Le délégué a en outre dénoncé les conditions de vie dans les camps administrés par les États-Unis, où se trouvent retenues de nombreux femmes et enfants, déplorant certaines approches consistant à assurer le retour d’enfants dans le pays d’origine de leurs parents, dont ils sont alors séparés.  La Syrie a réclamé en conclusion le retrait des forces américaines et turques illégitimes de son territoire. 

Pour M. ÖNCÜ KEÇELI (Turquie) a estimé que pour être efficace, la lutte contre le terrorisme doit passer par le partage des informations.  De même, il est crucial de procéder au rapatriement des combattants étrangers, car cela va affaiblir Daech et aura des répercussions partout dans le monde, a-t-il argué.  Il a ensuite affirmé que si le terrorisme en Syrie a connu un essor, c’est parce que les terroristes y ont trouvé un terrain fertile, le régime ayant été très dur vis-à-vis de sa propre population.  Le représentant a dénoncé tous ceux qui utilisent le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK/YPG) pour lutter contre Daech.  C’est une erreur, car l’objectif du parti est de procéder à une épuration ethnique, a-t-il prévenu.  Il a étayé son propos en demandant comment les éléments de Daech ont pu parvenir au site sensible de la prison de Hassaké avec des voitures piégées malgré la multiplication des postes de contrôle.  « On a déroulé un tapis rouge aux terroristes », a-t-il dénoncé, avant d’affirmer que la lutte de la Turquie contre le terrorisme est résolue. 

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a dénoncé l’attaque terroriste menée par l’EIIL contre la prison de Hassaké qui aurait notamment permis à des dirigeants de Daech de s’enfuir.  Il a indiqué que cet incident a coïncidé avec d’autres attaques dangereuses en Iraq qui ont coûté la vie de dizaines de membres des forces iraquiennes.  L’Iraq, a-t-il affirmé, a été un des pays les plus durement frappé par le terrorisme 

Le représentant a indiqué que son Gouvernement s’est engagé à rapatrier les Iraquiens qui se trouvent dans le camp de Hol en Syrie, rappelant que deux groupes de civils sont déjà rentrés au pays, dont 578 familles totalisant 10 796 personnes.  Il a demandé à ceux qui contrôlent les camps de remettre tous les combattants iraquiens afin qu’ils puissent être poursuivis et comparaître devant la justice, y compris les dirigeants de l’EIIL qui sont en détention en Syrie.  Il a dit craindre une augmentation des risques d’évasion des centres de détention en Syrie et dans d’autres pays de la région.  À cet égard, l’Iraq déploiera tous les efforts nécessaires pour protéger et sécuriser ses frontières et empêcher les terroristes d’entrer sur son territoire. Le délégué a par ailleurs appelé à intensifier le processus de rapatriement des combattants étrangers et des membres de leur famille.  Il faut, a-t-il insisté, empêcher que les prisons et les camps ne deviennent des incubateurs d’une nouvelle génération de terroristes. 

Mme ZAHRA ERSHADI (Iran) a estimé que l’attaque de la prison de Hassaké n’est que la conséquence de l’occupation illégale continue de certaines parties de la Syrie par des forces étrangères, dont celles des États-Unis.  Cet incident montre clairement que la force d’occupation et ses alliés ont été incapables de rétablir la sécurité et l’ordre dans les zones occupées, permettant ainsi à l’État islamique d’étendre son influence dans la région, mettant ainsi en péril la vie des civils qui y vivent, s’est-elle inquiétée.  De même, la présence de combattants terroristes étrangers et de leurs familles dans les zones de conflit demeure une source croissante d’insécurité et d’instabilité pour l’ensemble de la région, a dit la représentante avant de noter que les pays qui se réclament « pionniers des droits humains » s’abstiennent de rapatrier leurs propres nationaux, dont des femmes et des enfants, piégés dans des conditions déplorables dans les zones de conflit.  Soulignant que la lutte contre le terrorisme ne doit pas servir de prétexte pour violer la souveraineté et l’intégrité territoriales de la Syrie, elle a appelé à permettre au Gouvernement syrien de lutter contre les activités terroristes sur son territoire.  L’Iran, a-t-elle assuré, continuera de soutenir les efforts de la Syrie pour contrer les menaces posées par les groupes terroristes, garantissant ainsi son unité et son intégrité territoriales. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: pour le Coordonnateur des secours d’urgence, les opérations humanitaires au travers des lignes de front ne peuvent remplacer l’aide transfrontalière

8957e séance – après-midi     
CS/14779

Syrie: pour le Coordonnateur des secours d’urgence, les opérations humanitaires au travers des lignes de front ne peuvent remplacer l’aide transfrontalière

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M.  Martin Griffiths, a déclaré, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, que les opérations humanitaires au travers des lignes de front en Syrie ne peuvent remplacer les volumes d’aides permis par les opérations humanitaires transfrontalières, dont l’autorisation annuelle arrive bientôt à terme.  Certaines délégations ont fait valoir un point de vue divergent, à l’instar de la Fédération de Russie ou encore de l’Inde qui a indiqué que ces opérations ne peuvent durer « indéfiniment ». 

À l’entame de son propos, M. Griffiths a déclaré que la communauté internationale a « abandonné » le peuple syrien, qui est entré dans une seconde décennie de conflit.  « Le minimum vital ne lui est même pas apporté », a-t-il dit, en précisant que l’aide d’urgence n’atteint que la moitié des plus de quatre millions de Syriens qui en ont besoin.  « L’aide alimentaire que nous fournissons chaque mois n’est pas suffisante. »  Même son de cloche du côté du Secrétaire général du Conseil norvégien pour les réfugiés, M. Jan Egeland, qui a affirmé que la situation a empiré, alors que le pays ne fait plus la une des médias internationaux.  « Nous sommes passés de la guerre à l’enfer. » 

Le Secrétaire général adjoint a néanmoins jugé possible d’améliorer la situation grâce à un « financement intelligent et des efforts humanitaires créatifs ».  Il s’est aussi félicité qu’une aide continue d’être apportée dans le nord-ouest de la Syrie au moyen de livraisons au travers des lignes de front.  « Deux opérations de cette nature ont ainsi été achevées et une troisième devrait l’être prochainement, conformément à notre plan sur six mois. »  M. Griffiths a précisé que l’aide alimentaire au travers des lignes de front a bénéficié à plus de 40 000 personnes ce mois-ci, en qualifiant ces développements de « positifs ». 

Toutefois, il a appelé à utiliser « toutes les options disponibles pour aider ceux qui sont dans le besoin », en soulignant l’importance de l’assistance humanitaire transfrontalière.  « Tous les mois, l’ONU fournit de la nourriture et de l’aide à des millions de personnes dans le nord-ouest. »  Le Coordonnateur des secours d’urgence a tenu à préciser que cette opération fait l’objet d’un suivi parmi les plus rigoureux au monde.  « Nous savons où sont les besoins, quelle aide est fournie et l’endroit où elle est dispensée. » 

M. Egeland a lui aussi souhaité que les opérations transfrontalières dirigées par l’ONU vers le nord-ouest se poursuivent au-delà du mois de juillet.  « C’est une bouée de sauvetage essentielle pour des millions de Syriens », a-t-il dit.  Il a donc exhorté le Conseil à assurer « une réponse transfrontalière continue », dirigée et gérée par l’ONU depuis la Turquie.  « Restons lucides: le mécanisme transfrontalier sera nécessaire aussi longtemps que l’aide ne parviendra pas à toutes les populations dans le besoin sur l’ensemble du territoire », a appuyé la France. 

La Turquie a, elle, déclaré qu’il n’y a tout simplement pas d’alternative disponible en termes d’échelle ou de portée qui puisse répondre aux besoins croissants dans le nord-ouest.  La vie de millions de personnes vulnérables dépend de l’aide acheminée par l’unique point de passage transfrontalier de Bab el-Haoua, a-t-elle indiqué, en précisant que celui-ci est doté du système de surveillance le plus efficace au monde.  Les États-Unis ont jugé « indispensable » de renouveler l’autorisation de cette aide et demandé aux membres du Conseil de travailler à l’unisson. 

« Si les opérations transfrontalières sont importantes, elles ne peuvent durer indéfiniment », a tempéré l’Inde qui a donc encouragé les agences onusiennes à accroître leurs efforts en vue de renforcer les opérations au travers des lignes de front.  De son côté, l’Iran a appelé à veiller à ce que l’aide humanitaire transfrontalière parvienne aux véritables bénéficiaires et ne tombe pas entre les mains de groupes terroristes. 

« L’aide humanitaire ne remplacera jamais le fonctionnement des usines et des hôpitaux, des écoles et des centrales électriques », a, pour sa part, réagi la Fédération de Russie.  La délégation a estimé que la normalisation de la situation rendra l’aide humanitaire « moins chère », en invitant les autres membres du Conseil à redoubler d’efforts dans ce domaine.  La Syrie a, quant à elle, déclaré que le mécanisme d’aide transfrontalière viole l’indépendance et l’intégrité territoriale de son pays. 

« Les groupes terroristes et les milices séparatistes empêchent l’accès pour l’acheminement de l’aide humanitaire », a dénoncé le représentant syrien.  Enfin, à l’instar de son homologue russe, le délégué a dénoncé les sanctions unilatérales et les mesures coercitives de certains États Membres à l’encontre de son pays.  « Celles-ci sont responsables des souffrances de la population syrienne. »  Le Mexique a, quant à lui, regretté que la santé mentale des enfants et des victimes de ce conflit soit rarement évoquée au Conseil de sécurité. 

Cette séance a aussi été l’occasion d’attirer l’attention sur l’accès à l’eau, après le bombardement d’une station hydrique le 2  janvier.  M. Egeland a invité à conclure un accord autour des cours d’eau du nord et a demandé aux forces aériennes syriennes et russes et aux autres parties de ne pas attaquer les infrastructures d’eau ni de les utiliser comme monnaie d’échange politique.  

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (SYRIE)

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, s’est dit extrêmement préoccupé par les centaines d’enfants qui ont été pris au piège lors du « terrifiant siège » de la prison d’Hassaké.  Il est crucial que tous les enfants soient évacués en toute sécurité, a dit M. Griffiths, en ajoutant que ces enfants n’auraient jamais dû être emprisonnés.  Il a indiqué que de nombreux garçons et filles syriens sont en train de grelotter de froid sous des tentes, dans la neige, dans des camps, sans aucune perspective d’en sortir.  Alors que le pays entre dans sa seconde décennie de conflit, le Secrétaire général adjoint a estimé que « nous avons abandonné le peuple syrien », le minimum vital ne leur étant même pas apporté.  Un tel abandon ne peut servir de stratégie, a-t-il martelé, en soulignant la nécessité pour l’ONU d’adopter de nouvelles approches. 

M. Griffiths a déclaré que l’attaque contre la prison précitée atteste de la volatilité de la situation en Syrie et de la menace que Daech continue de faire peser.  Il a déploré la violence qui se poursuit sans interruption dans le camp de Hol, signalant que le 11 janvier un travailleur humanitaire syrien a été tué.  Il a souligné la nécessité de trouver des solutions durables pour les personnes qui vivent dans les camps, y compris le rapatriement de tous les ressortissants de pays tiers, en particulier les enfants.  Il a réitéré son message que les civils, notamment les enfants, et les infrastructures civiles doivent être protégés. 

Mentionnant l’hiver rigoureux en Syrie, il a déclaré que certains Syriens en sont réduits à brûler des déchets pour rester au chaud, au risque d’être asphyxiés sous leurs tentes.  « Le mois dernier, au moins 24 personnes ont été blessées et deux sont mortes dans l’incendie de leur tente. »  M. Griffiths a précisé que les ressources financières à disposition ne permettront d’aider que la moitié des plus de 4 millions de Syriens dans le besoin.  Pendant ce temps, la crise économique s’aggrave et le prix des aliments s’est envolé.  « L’aide alimentaire que nous fournissons chaque mois n’est tout simplement pas suffisante. »  

Malgré ces circonstances défavorables, nous pouvons améliorer les choses grâce à un financement intelligent et des efforts humanitaires créatifs, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.  Il a ainsi mentionné l’expansion par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) de projets d’irrigation le long de l’Euphrate.  Il a indiqué qu’une aide continue d’être apportée dans le nord-ouest de la Syrie au moyen de livraisons au travers des lignes de front.  « Deux opérations de cette nature ont ainsi été achevées et une troisième devrait l’être prochainement, conformément à notre plan sur six mois. »  M. Griffiths a donc appelé à appuyer ce plan afin d’aboutir à des livraisons d’aide prévisibles.  L’aide alimentaire au travers des lignes de front a bénéficié à plus de 40 000 personnes à nouveau ce mois-ci, a-t-il dit, en qualifiant ces développements de « positifs ».  Nous devons utiliser toutes les options disponibles pour aider ceux qui sont dans le besoin, a-t-il plaidé. 

M. Griffiths a néanmoins tenu à rappeler que les opérations au travers des lignes de front ne sauraient remplacer les volumes d’aide permis par l’opération humanitaire transfrontalière.  Tous les mois, les Nations Unies fournissent de la nourriture et de l’aide à des millions de personnes dans le nord-ouest, a-t-il rappelé en précisant que cette opération fait l’objet d’un suivi parmi les plus rigoureux au monde.  « Nous savons où sont les besoins, quelle aide est fournie et l’endroit où elle est dispensée. » 

En conclusion, le Secrétaire général adjoint a souligné la nécessité d’élargir l’accès humanitaire et de mettre à disposition des ressources pour financer les opérations humanitaires.  « Votre responsabilité ne s’arrête pas là », a-t-il lancé aux membres du Conseil en rappelant la nécessité de renforcer les programmes de relèvement précoce afin d’assurer un accès aux services de base et de restaurer « l’espoir ». 

M. JAN EGELAND, Secrétaire général du Conseil norvégien pour les réfugiés, a indiqué s’être rendu de nombreuses fois, depuis le début de « cette guerre cruelle qui dure depuis une décennie », sur le terrain en Syrie et auprès des réfugiés syriens vivant dans les pays voisins.  Alors que la Syrie a disparu des gros titres des médias internationaux, la situation sur le terrain a considérablement empiré, a-t-il déploré en signalant que le conflit armé continue de faire des morts et cause des destructions et des déplacements de civils, « comme nous l’avons vu ces derniers jours dans le nord-est ».  Dans le même temps, la crise socioéconomique, aggravée par la sécheresse, est maintenant si profonde que les familles ont exprimé un message récurrent lorsqu’il les a rencontrées: « Nous sommes passés de la guerre à l’enfer. »  Nous avons besoin d’aide pour sortir les Syriens de cette paralysie étouffante, a-t-il plaidé, précisant que cette demande d’aide est faite par la Norvège en tant que membre du Conseil de sécurité. 

M. Egeland a d’abord demandé de l’aide pour mettre fin aux restrictions d’accès de tous les côtés des lignes de conflit.  Il a constaté que l’action humanitaire est encore trop souvent freinée par des contraintes administratives, logistiques, juridiques et des barrières physiques.  La Fédération de Russie et d’autres États peuvent aider du côté gouvernemental, a-t-il estimé, expliquant que le Conseil norvégien pour les réfugiés est toujours incapable de fournir une aide juridique aux personnes déplacées et aux rapatriés.  De leur côté, la Turquie et les États-Unis peuvent aider les autorités de facto dans les zones contrôlées par l’opposition, a-t-il ajouté avant d’appeler à redoubler d’efforts de toutes parts pour parvenir à un règlement négocié et pacifique du conflit dans le nord-ouest du pays.  Il a rappelé à cet égard que trois millions de civils vivent dans des zones contrôlées par l’opposition, la plupart n’ayant pas le strict minimum pour vivre.  Il a rappelé que de nombreux combattants et leurs familles y avaient été envoyés dans des bus depuis les villes assiégées dans d’autres régions du pays dans le cadre d’accords de cessez-le-feu. 

Aux pays voisins, notamment la Turquie qui accueille déjà généreusement des millions de personnes, il a dit que ce n’est pas le moment de fermer les frontières.  L’heure est maintenant au partage international des responsabilités pour veiller à ce que les civils syriens bénéficient de leur droit à la protection et à l’asile, conformément à la Convention sur les réfugiés, a plaidé le Secrétaire général du Conseil norvégien pour les réfugiés.  Il a également appelé à relancer le système de déconfliction géré par l’ONU pour la Syrie, avec la participation de toutes les parties concernées, y compris la Fédération de Russie.  Pour être efficace, le système nécessite une surveillance continue des aspects purement civils des sites déconfinés, le suivi et le signalement de toutes les attaques, a recommandé M. Egeland en demandant aussi de lancer immédiatement des enquêtes sur les attaques afin d’établir les responsabilités pour les crimes de guerre potentiels. 

M. Egeland a ensuite demandé que les efforts visant à accroître l’aide humanitaire transfrontalière se poursuive en Syrie, y compris les opérations transfrontalières dirigées par l’ONU vers le nord-ouest qui, a-t-il souhaité, doivent se poursuivre au-delà du mois de juillet.  C’est à son avis une bouée de sauvetage essentielle pour des millions de Syriens et une garantie de protection de milliers de travailleurs humanitaires.  Il a appelé le Conseil à assurer « une réponse transfrontalière continue », dirigée et gérée par l’ONU depuis la Turquie.  Il a aussi appelé à la sécurisation de l’accès à l’eau et à la conclusion d’un accord autour des cours d’eau du nord.  Le bombardement d’une station d’eau le 2 janvier a aggravé l’accès critique à l’eau pour les habitants de la ville d’Edleb, a-t-il souligné avant d’appeler les forces aériennes syriennes et russes et les autres parties au conflit à s’assurer que les infrastructures d’eau ne soient pas attaquées.  Il a demandé à tous les acteurs de respecter les accords de partage de l’eau et de veiller à ce que l’eau ne soit pas utilisée comme monnaie d’échange politique. 

Il a par ailleurs dit soutenir la remise en état des infrastructures et des services civils touchés par la guerre, indépendamment de qui contrôle le territoire.  Sans un soutien financier accru pluriannuel à long terme pour la réhabilitation et la reconstruction, des millions d’enfants resteront sans accès à l’éducation, à l’eau, à l’électricité et la santé, a-t-il mis en garde.  Il a salué les récents amendements du Gouvernement américain portant sur les mesures humanitaires dans le cadre des sanctions frappant la Syrie.  Il a demandé de réduire l’impact des sanctions sur le carburant, l’électricité et les secteurs public et privé.  De plus, M. Egeland a appelé à des solutions durables pour les réfugiés: relocalisation, intégration ou retour volontaire en toute sécurité sont les options disponibles.  Il a fait observer que les premiers bébés réfugiés syriens nés dans la vallée de la Bekaa, au Liban, ou dans le camp de Zaatari, en Jordanie, ont maintenant 10 ans et qu’ils n’ont jamais vu le pays de leurs ancêtres.  Selon lui, la Syrie n’est toujours pas propice à un retour massif de ces réfugiés.  Il a, à cet égard, cité les preuves recueillies par des groupes de défense des droits de l’homme sur certains rapatriés qui ont été détenus et torturés.  Il n’y a pas de système pour surveiller, assister, protéger et soutenir ceux qui reviennent, a-t-il regretté. 

Enfin, M. Egeland a demandé de combler le déficit de financement des opérations humanitaires qui a été constaté en 2021.  Il a exhorté les donateurs à ne pas tourner le dos aux Syriens en 2022 et à continuer à fournir un soutien à la réponse humanitaire, pour s’assurer notamment que les Syriens reçoivent le financement promis l’année dernière.  Un financement à plus long terme et un soutien au relèvement rapide sont essentiels pour nous permettre d’ajuster notre réponse aux besoins sur le terrain, a-t-il fait valoir. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a plaidé pour que les besoins humanitaires de la population syrienne soient au cœur des préoccupations du Conseil de sécurité.  Elle a rappelé que la résolution 2585 (2021) autorise les Nations Unies et leurs partenaires à continuer d’acheminer une aide transfrontalière à la Syrie en provenance de Turquie.  Elle a précisé que plus de 10 000 camions ont déjà apporté une aide à travers cette frontière pour répondre aux besoins vitaux des populations.  « Notre seul objectif est de garantir que l’aide humanitaire atteigne les personnes qui en ont besoin », a insisté la représentante avant de se féliciter aussi que des camions du Programme alimentaire mondial (PAM) et d’autres agences de l’ONU aient pu traverser les lignes de front dans le nord-ouest.  Alors que l’hiver cause des tempêtes et des inondations et que les enfants meurent de froid, Mme Juul a condamné une frappe aérienne le 2 janvier qui a endommagé une centrale hydrique, privant 270 000 personnes d’eau courante.  Elle a aussi déploré des incidents visant des travailleurs humanitaires dans le nord-ouest de la Syrie et les récentes attaques contre la prison d’Hassaké.  Enfin, elle a exhorté toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et à tout mettre en œuvre pour minimiser les dommages aux civils et aux infrastructures civiles. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a jugé « équilibrée » l’évaluation de la situation humanitaire en Syrie faite par le Secrétaire général du « Norwegian Refugee Council ».  Rappelant que le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontalière a été prorogé jusqu’au 10 juillet 2022, il a estimé que de nombreux problèmes doivent être résolus au cours des cinq prochains mois afin d’équilibrer les efforts humanitaires en Syrie.  Tout en notant que l’acheminement de l’aide a rapidement augmenté en Syrie, il a accusé de sabotage et de menace à la vie des Syriens tout blocage de convois humanitaires, y compris à Edleb.  Le plan élaboré en octobre 2021 qui vise à mieux équiper le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) doit être lancé d’urgence, a-t-il recommandé. 

Aujourd’hui, a poursuivi M. Polyanskiy, il est indispensable d’assurer la présence des Nations Unies dans le nord-ouest de la Syrie pour assurer un meilleur contrôle.  Il a jugé également important de rétablir certaines infrastructures pour instaurer les conditions qui permettront aux Syriens de vivre.  Toutefois, a tempéré le représentant, aussi efficace soit-elle, l’aide humanitaire ne remplacera jamais le fonctionnement des usines et des hôpitaux, des écoles et des centrales électriques.  La normalisation de la situation rendra l’aide humanitaire moins chère, a-t-il fait valoir en invitant les autres membres du Conseil à redoubler d’effort dans ce domaine.  Il a rappelé au passage le problème que posent les sanctions unilatérales et les mesures coercitives pour la vie des citoyens syriens.  M. Polyanskiy a terminé en disant que le début de l’année a été marqué par la catastrophe et la tragédie, ainsi que des questions pressantes qu’il faudra aborder dans une autre réunion.  Ce sera l’occasion de faire connaître nos évaluations et de comprendre ce qui se passe dans les zones illégalement occupées par les États-Unis, a-t-il annoncé. 

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a réitéré sa condamnation sans réserve de l’attaque terroriste contre la prison d’Hassaké et du terrorisme sous toutes ses formes et manifestation.  Après 10 années de conflit, la situation en Syrie est définie maintenant par une escalade de la violence sur fond de situations économique et humanitaire difficiles, a constaté la représentante, qui a appelé à redoubler d’efforts pour apporter l’aide nécessaire aux Syriens dans le besoin.  Une solution politique est la condition sine qua non pour mettre fin à la crise syrienne, a-t-elle martelé ajoutant que cela suppose un cessez-le-feu national et le retour au dialogue pour assurer la mise en œuvre de la résolution 2254. 

S’agissant des points de passage transfrontaliers, la représentante a estimé que celui de Bab el-Haoua représente une ligne de survie et a exhorté les parties au conflit à faciliter un accès sans entraves de l’assistance humanitaire sur tout le territoire syrien.  Elle a également engagé les parties à assurer la protection des enfants syriens et des infrastructures civiles. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a dit soutenir pleinement les efforts déployés par l’ONU et les organisations de la société civile pour sauver des vies en Syrie.  Dans ce pays en proie à une crise humanitaire « catastrophique » après 11 années de guerre, les chiffres parlent d’eux-mêmes, a constaté le représentant, en rappelant que 14 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire pour vivre et que plus de 90% d’entre eux se trouvent désormais sous le seuil de pauvreté, en majorité des femmes, des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées.  De plus, plus 12 millions de Syriens ont été déplacés, dans leur pays ou à l’étranger, et sont à présent confrontés à des conditions hivernales très dures.  Au regard de ces circonstances, « sauver des vies doit être la priorité des priorités », a martelé le délégué.  À ses yeux, cela va bien au-delà de fournir de l’alimentation et des médicaments.  Les Syriens ont aussi besoin de liberté et d’espoir, a-t-il souligné, appelant de ses vœux une solution politique pour enfin mettre un terme à ce conflit. 

Dans l’immédiat, il importe selon lui de maintenir l’acheminement de l’aide humanitaire par tous les canaux possibles.  Observant à cet égard que l’assistance transfrontalière continue de sauver des vies en Syrie, il a salué l’action du Conseil de sécurité, qui, lorsqu’il est uni, « peut faire une différence pour des millions de personnes ».  C’est pourquoi, a-t-il dit, il faut rouvrir les points de passages de Yaroubiyé et de Bab el-Salam, en plus de celui de Bab el-Haoua.  Avant de conclure, le délégué a appelé l’ensemble des parties au conflit à permettre le passage de l’aide afin que tous les civils qui en ont besoin puissent en bénéficier.  

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a déclaré que la Syrie est le symbole de l’incapacité du Conseil à trouver un compromis, alors que les populations syriennes sont victimes du conflit.  Elle a condamné les attaques contre les infrastructures civiles, ainsi que celles ciblant les camps de réfugiés, notamment celui de Hol, appelant par ailleurs les pays à rapatrier leurs ressortissants qui se trouvent dans ces camps en Syrie.  Elle a également demandé la levée des mesures coercitives à l’encontre de la Syrie, au motif que celles-ci entravent l’aide.  Elle a appelé à poursuivre l’acheminement de fournitures essentielles, y compris des doses de vaccins.  Il faut également garantir que les fournitures médicales soient intégrées aux prochains cycles d’assistance, a-t-elle ajouté.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déploré le fait que 14 millions de Syriens dépendent de l’aide humanitaire, jugeant urgent de mettre fin au conflit qui paupérise la population entière d’un pays.  La hausse des besoins sur les plans humanitaire et médical rend plus que jamais indispensable la garantie d’un accès humanitaire sûr et sans entraves, a-t-elle fait observer, en soulignant la nécessité pour l’ensemble des parties, en particulier les autorités syriennes, de respecter leurs obligations au regard du droit international humanitaire.  

La représentante a regretté de constater que ces principes ne sont toujours pas respectés par Damas.  Après avoir rappelé que l’Union européenne a consacré 25 milliards d’euros à la réponse à la crise syrienne depuis 2011, la délégation a considéré qu’en l’absence de solution politique, la paix ne serait pas possible en Syrie.  « Mais restons lucides: le mécanisme transfrontalier sera nécessaire aussi longtemps que l’aide ne parviendra pas à toutes les populations dans le besoin sur l’ensemble du territoire », a-t-elle ajouté.  Notant que les réfugiés syriens ne pourront pas prendre le chemin du retour dans les conditions actuelles, elle a affirmé en conclusion que la France continuerait à apporter son soutien au mécanisme de lutte contre l’impunité. 

M. XING JISHENG (Chine), a déclaré que les conditions en Syrie sont « profondément préoccupantes », notamment en raison de la baisse des revenus, la flambée du prix des denrées alimentaires, la pandémie de COVID-19 et une pénurie d’approvisionnement en eau et d’hivernage.  Alors que le Gouvernement syrien a pris des mesures utiles pour faire face à la situation économique, la guerre civile, le terrorisme et les sanctions continuent d’avoir un impact sérieux, s’est inquiété le représentant.  Il a appelé la communauté internationale à engager des projets de reconstruction d’une façon intégrée, et à appuyer l’aide humanitaire d’urgence, ainsi que la fourniture de vaccin, de nourriture et d’eau.  Il faut également renforcer les projets menés par le PAM et l’UNICEF, a-t-il ajouté, saluant en outre la coopération du Gouvernement syrien dans l’acheminement de l’aide. 

M. Xing a demandé la levée des sanctions unilatérales et la création de conditions favorables à la reconstruction du pays, récusant la politisation de l’aide humanitaire en Syrie.  Il a appelé á l’élaboration d’un mécanisme de surveillance pour assurer le bon déroulement des opérations transfrontalières, alertant notamment des risques de détournement de l’aide. 

Alors que le conflit syrien entre dans sa douzième année, M. ECKERSLEY (Royaume-Uni) a rappelé que 13,4 millions de personnes dans le pays ont un besoin désespéré d’aide humanitaire.  Il a noté que, dans le nord-ouest, les besoins de 3,4 millions de personnes sont pourvus uniquement grâce à l’aide transfrontalière onusienne.  Le délégué s’est dit particulièrement préoccupé par l’affamement utilisé comme tactique de guerre.  Il a ensuite commenté le travail publié hier par le Groupe consultatif indépendant de haut niveau sur la déconfliction humanitaire en Syrie, en jugeant essentiel que l’ONU mette en œuvre ses recommandations.  L’établissement des faits, les enquêtes et une reddition de comptes pour les violations commises sont cruciales, a-t-il dit.  « Tout mécanisme ayant pour but de protéger les civils et de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire dépend du sérieux avec lequel les acteurs armés s’acquittent de leurs obligations, y compris par le biais du mécanisme de déconfliction, comme le préconise le Groupe. »  Sans cela, il ne peut y avoir de relation de confiance entre acteurs armés et acteurs humanitaires, a argué le délégué.  Il a estimé que le « régime Assad » et la Russie ont fait montre de peu d’égards pour le droit international humanitaire en ciblant des écoles, des hôpitaux et ceux qui fournissent les premiers secours.  « Nous rappelons l’obligation qui incombe à chaque partie de tout faire pour éviter des victimes civiles, y compris en ne faisant pas un usage aveugle d’armes en zone urbaine. » 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a condamné l’escalade de la violence à Hassaké et exprimé sa préoccupation quant aux conséquences humanitaires de cette nouvelle vague de violence dans le Nord-Est de la Syrie.  « Nous faisons écho à l’appel de l’UNICEF pour assurer la protection et l’évacuation des enfants qui se trouvent à l’intérieur de la prison », a-t-il dit.  Plus de 45 000 personnes ont été déplacées à cause de ces affrontements, a constaté le représentant, en citant aussi les 14 millions de personnes qui dépendent de l’aide humanitaire.  Il a jugé urgent que l’accès humanitaire soit maintenu sans restriction pour répondre aux besoins de la population en général, mais aussi pour répondre aux déplacements nouveaux et constants.  D’autre part, il a souligné la nécessité de donner la priorité à la situation des filles et des garçons résidant dans le camp de Hol, en insistant sur le fait que l’une des mesures pour remédier à cette situation est le rapatriement digne des enfants dans leur pays d’origine.  Il a regretté que la santé mentale des enfants et des victimes de ce conflit ait rarement été évoquée au Conseil de sécurité. 

Venant à la situation dans le nord-ouest de la Syrie, le représentant a salué l’état d’avancement du plan semestriel des points de passages de l’aide humanitaire entre les lignes de front, tout en rappelant le caractère essentiel des points de passage transfrontaliers alors que les besoins ne cessent d’augmenter.  L’hiver a déjà entraîné des conséquences fatales, notamment pour la population déplacée du nord-ouest, a rappelé le représentant en appelant à faciliter une réponse humanitaire efficace qui garantisse des solutions à long terme.  Le plan semestriel y contribue, a-t-il concédé, mais il faut un plan de reconstruction bien plus global qui ne soit pas à court terme.  M. Gómez Robledo Verduzco a conclu en plaidant pour une solution politique qui ne laisse aucune place à l’impunité. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a indiqué que la raison fondamentale de l’aggravation de la situation humanitaire en Syrie est le manque de progrès sur le front politique.  Il a souligné la nécessité pour toutes les parties, en particulier les acteurs extérieurs, de s’engager en faveur d’un processus politique dirigé et contrôlé par les Syriens sous les auspices de l’ONU.  Si les opérations transfrontières sont importantes, elles ne peuvent durer indéfiniment, a poursuivi le délégué.  Il a donc encouragé le Bureau de la coordination des affaires humanitaires et les agences onusiennes à accroître leurs efforts en vue de renforcer les opérations au travers des lignes de front, avant de prendre note des récents développements positifs à ce sujet.  « Des efforts concertés sont néanmoins requis alors que nous nous rapprochons de la fin de l’autorisation d’une année de l’assistance humanitaire transfrontalière. »

Le délégué indien a estimé qu’il n’est pas possible de discuter de la situation humanitaire en Syrie sans parler du rôle grandissant joué par les groupes terroristes tels que Daech.  « L’attaque perpétrée contre la prison d’Hassaké par Daech la semaine dernière montre l’ampleur de ce problème. »  Notant le rôle joué par les acteurs extérieurs dans le renforcement des groupes terroristes en Syrie, le représentant a prévenu que continuer de négliger cette question ne pourra que causer un dommage irréparable à la lutte contre le terrorisme. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a estimé que l’acheminement de l’aide aux civils syriens demeure une priorité, en particulier dans le nord-ouest et le sud de la Syrie.  Cela s’applique également au nord-est du pays où la récente offensive de Daech à Hassaké a entraîné une vague de déplacés et entravé l’acheminement de l’aide humanitaire.  Pour améliorer la situation sur le terrain, il a dit soutenir le développement et la mise en œuvre du plan semestriel des Nations Unies pour livrer et distribuer régulièrement l’aide humanitaire à travers les lignes de front dans le nord-ouest de la Syrie.  Il a aussi souhaité que la livraison de fournitures médicales au peuple syrien reste une priorité, y compris pour les vaccins contre la COVID-19.  Étant donné que moins de 5% de personnes sont entièrement vaccinées contre la COVID-19 en Syrie, il a souhaité que la communauté internationale y accorde une plus grande attention, en particulier pour la population vivant dans les camps. 

Les Émirats arabes unis ont envoyé plus de 97 tonnes d’aide médicale à la Syrie, en plus de plus de 200 000 doses de vaccins, a fait savoir le représentant en signalant avoir mené un programme de vaccination bénéficiant à 12 000 réfugiés syriens dans des camps situés en Jordanie.  M. Abushahab a encouragé les membres de l’ONU et du Conseil de sécurité à déployer davantage d’efforts pour soutenir le relèvement rapide des infrastructures civiles et des secteurs vitaux, y compris les secteurs de l’éducation et de la santé qui ont été touchés par le conflit.  En conclusion, il a affirmé que le seul moyen de mettre fin aux souffrances infligées au peuple syrien est de progresser sur la voie politique. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a souligné l’importance des opérations humanitaires transfrontalières de l’ONU en Syrie, autorisées par la résolution 2585 (2021) pour répondre aux besoins vitaux des populations.  Il a plaidé pour le maintien de ces opérations humanitaires, sous une surveillance détaillée et étroite, et pour la recherche des moyens de faciliter l’augmentation des opérations humanitaires à travers les lignes de front de manière régulière et prévisible.  Il a exhorté toutes les parties à respecter le droit international humanitaire en rappelant leur obligation d’assurer un accès humanitaire libre et sans entrave qui respecte les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.  « Le Brésil réitère l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu national pour alléger les souffrances de la population syrienne », a dit le représentant avant de condamner les attaques aveugles contre des populations et infrastructures civiles. 

Par ailleurs, M. Costa Filho s’est particulièrement inquiété de la présence croissante de groupes terroristes en Syrie.  Il s’est dit alarmé par les rapports de l’UNICEF citant 850 enfants détenus à Hassaké, dont certains n’ont que 12 ans. Après avoir appelé à protéger les enfants, le représentant du Brésil a attiré l’attention sur les conséquences délétères potentielles des sanctions unilatérales sur la population civile dans un scénario de crise économique aiguë et d’aggravation de la faim.  Il s’est dit convaincu que seul un processus politique dirigé par les Syriens et facilité par l’ONU, préservant l’intégrité territoriale de la Syrie, apportera une paix durable et soulagera les souffrances de la population syrienne. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a noté que les exposés de MM. Griffiths et Egeland ont dressé un « constat accablant » de l’ampleur des besoins humanitaires en Syrie.  Depuis une dizaine d’années, ce pays en guerre est le théâtre de la « plus grande crise de déplacés et de réfugiés de notre époque ».  En dépit de ces souffrances, a-t-il observé, des opérations militaires se poursuivent dans le pays, qui est soumis à des sanctions, à des frappes aériennes et à l’effondrement de son économie.  Dans ce contexte, le fossé de défiance entre les belligérants est tel qu’aucune perspective politique fiable ne semble se dessiner, a déploré le représentant, constatant dans le même temps une nette diminution des flux humanitaires pour la Syrie.  Les promesses de la Conférence de Bruxelles sont en effet « très en retrait des espérances », alors que la population en est réduite à vivre sous le seuil de pauvreté, ce qui est « moralement insoutenable ». 

Enjoignant à la communauté internationale de se mobiliser davantage, le délégué a rappelé que les résolutions 2504 et 2533 adoptées en 2020 par le Conseil visaient à garantir que l’aide humanitaire parvienne aux personnes qui en ont besoin en Syrie.  Il a déclaré que l’aide doit « s’affranchir de toute politisation » et a réitéré son appui à l’action menée par le Secrétaire général en faveur de l’assistance transfrontalière.  Il a également jugé important de mettre en place un dispositif assurant la rationalité et la traçabilité de l’aide dans le contexte syrien et améliorant le maillage du système d’acheminement.  Selon lui, le consensus entre les parties sur la poursuite des opérations transversales autorisées par le Gouvernement syrien donne plus d’espoir aux Syriens dans le besoin.  Ce canal d’acheminement est d’autant plus crucial qu’il permet de réduire la dépendance des communautés à l’assistance, a-t-il conclu, avant de rendre un hommage appuyé aux différentes organisations humanitaires qui s’emploient à « donner un visage à l’espoir ». 

M. LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a rappelé que la population syrienne est confrontée aux rigueurs de l’hiver, cette année encore plus redoutable que les précédentes en raison de la pandémie et la crise économique qui touche le pays. C’est la raison pour laquelle chacun doit revoir à la hausse son niveau d’assistance financière pour venir en aide aux Syriens et en faire davantage sur le plan humanitaire.  La délégation a déclaré qu’elle soutenait toutes les modalités de cette assistance, qu’il s’agisse des convois transfrontaliers ou de ceux qui arrivent depuis le nord-est de la Syrie ou à travers les lignes de front. À la lumière de cette situation, elle a considéré comme indispensable de renouveler les autorisations données à l’acheminement de cette aide, demandant aux membres du Conseil de sécurité de travailler à l’unisson pour permettre le passage de l’aide humanitaire aux frontières.  Nous pourrions apporter du matériel médical, a fait ainsi remarquer la représentante, en soulignant que la Syrie est le pays qui a le taux de vaccination contre la COVID-19 le plus faible au monde. Dans ce contexte sanitaire très grave, la délégation américaine a salué les pays qui contribuent à la stabilité régionale en protégeant les réfugiés installés chez eux et ceux qui ne peuvent pas encore prendre le chemin du retour.  Tout retour doit être sûr, volontaire, informé et digne, a-t-elle insisté en conclusion. 

En réponse à la déclaration du Royaume-Uni, le représentant de la Fédération de Russie, M. POLYANSKIY, a avoué son étonnement à propos des commentaires de cette délégation sur les violations du droit international humanitaire, alors que « c’est la Grande-Bretagne qui a effectué plus 4 500 frappes en Syrie et en Iraq depuis août 2017, faisant des dizaines de victimes ».  La Fédération de Russie respecte le principe de désescalade, a assuré le représentant en précisant que les risques de tuer par hasard des civils ne peuvent pas complètement être exclus, surtout face à l’utilisation de boucliers humains.  Il a estimé que les questions de la protection des objectifs civils et de l’acheminement de l’aide humanitaire doivent être réglées par les Nations Unies en contact direct avec le Gouvernement légal de la République arabe syrienne.  Sur la question de la protection accordée à certains objectifs à Edleb, le représentant russe a fait valoir qu’il n’est pas garanti que ces objectifs soient comme ils sont réellement décrits et qu’ils peuvent être des camps militaires. 

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a fait part de la souffrance de la population qu’il a mise sur le compte des sanctions unilatérales et des mesures coercitives de certains États Membres.  Il a ensuite rappelé que les forces américaines ont détruit des écoles, une boulangerie et également d’autres installations civiles dans le nord-est du pays.  « Ce sont les crimes des forces d’occupation américaines que viennent compléter les crimes des forces du régime turc et de leurs alliés terroristes. »  Réitérant sa requête au Conseil de sécurité pour une intervention contre ces groupes terroristes, le représentant a regretté le fait que cet organe n’assume pas ses responsabilités, parce que certains pays occidentaux continuent selon lui de se plier au souhait du « régime Erdoğan ».  Ces pays protègent ce « régime » qui ne va donc pas devoir répondre aux crimes de confiscation de territoire syrien, aux meurtres et aux assassinats, à l’utilisation de l’eau comme arme et encore bien d’autres souffrances imposées aux réfugiés et aux personnes déplacées, a alerté le délégué syrien.  « Ce sont des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. »

M. Sabbagh a aussi rejeté le mécanisme d’aide transfrontalière qui, à ses yeux, viole l’indépendance et l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne et qui permet aux groupes terroristes contrôlant Edleb d’utiliser ses habitants comme boucliers humains.  Les groupes terroristes et les milices séparatistes empêchent l’accès pour l’acheminement de l’aide humanitaire, a dénoncé le représentant qui a aussi déploré les souffrances des Syriens dans le Golan syrien occupé « à cause des pratiques des autorités d’occupation israéliennes qui y sèment une véritable terreur par la confiscation des territoires ».  Il a demandé au Conseil de condamner la réunion organisée par Israël au mois de décembre dans le Golan et la déclaration de création de deux nouvelles colonies dans le Golan syrien occupé.  « Nous voulons qu’il y ait des actions urgentes du Conseil de sécurité afin de mettre fin aux attaques israéliennes contre la souveraineté syrienne. »  Il faut garantir le retrait d’Israël du Golan syrien, a martelé le représentant syrien. 

M. ÖNCÜ KEÇELI (Turquie) a indiqué que la Turquie dispose de son propre projet national pour répondre aux besoins en abris à Edleb en cette période d’hiver et a encouragé les donateurs internationaux à accorder la priorité au financement de tels projets.  Il a souligné que le mécanisme transfrontalier des Nations Unies est une bouée de sauvetage pour 3,4 millions de personnes dans le nord-ouest, arguant qu’il n’y a tout simplement pas d’alternative disponible en termes d’échelle ou de portée qui pourrait répondre aux besoins croissants dans le nord-ouest.  La vie de millions de personnes vulnérables dépend de l’aide acheminée par l’unique point de passage transfrontalier de Bab el-Haoua, a-t-il indiqué, précisant que celui-ci est doté du système de surveillance le plus efficace au monde. 

Le représentant a souligné que la Turquie s’est pleinement engagée à contribuer à la mise en œuvre de la résolution 2585 (2021) et a jugé important que les projets de relèvement rapide prévus par ce texte soient mis en œuvre sans aucune discrimination dans toute la Syrie, sur la base de l’évaluation des besoins faite par l’ONU.  L’aide humanitaire n’est qu’un pansement avec lequel nous essayons de traiter un cancer, a lancé le délégué qui a estimé que l’ONU est devenue un « service d’intervention après coup », que ce soit en Syrie, en Afghanistan, au Yémen, ou au Soudan du Sud.  « La communauté internationale jette de l’argent pour éloigner les problèmes devant leurs portes ».  Il a appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notant que dans le cas de la Syrie, il s’agit de la restriction des libertés et droits fondamentaux par le régime syrien.  De ce fait, la crise humanitaire se poursuivra si nous ne nous attaquons pas aux problèmes politiques et si la communauté internationale ne parvient pas à un règlement politique conformément à la résolution 2254 (2015). 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a appelé à accélérer l’acheminement de l’aide humanitaire autorisée par la résolution 2585 (2021) notamment en ce qui concerne l’eau, l’assainissement, la santé, l’éducation et les abris.  Elle a indiqué que lors de leur réunion de décembre dernier, les garants d’Astana ont exhorté la communauté internationale, les Nations Unies et ses agences humanitaires, à renforcer leur assistance à l’ensemble de la Syrie grâce à des « projets de relèvement et de résilience ».  Des efforts sérieux sont également nécessaires pour lever les sanctions unilatérales imposées à la Syrie et qui ont exacerbé les souffrances, a-t-elle ajouté.  Estimant que l’aide humanitaire était moins efficace dans les zones non contrôlées par le Gouvernement, la représentante a appelé à veiller à ce que l’aide humanitaire transfrontalière parvienne aux véritables bénéficiaires et ne tombe pas entre les mains de groupes terroristes.  

Mme Ershadi a par ailleurs salué la libération, en 2021, de 10 détenus syriens, facilitée par le groupe de travail sur la libération des détenus établie par le format d’Astana, appelant à poursuivre cette évolution positive en 2022 à plus grande échelle.  Elle a aussi appelé à faciliter le retour sûr, volontaire et digne des réfugiés syriens et des personnes déplacées, avant de mettre en garde ceux qui tentent de les décourager de rentrer chez eux, notamment en diffusant des informations inexactes sur les conditions actuelles en Syrie. 

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