En cours au Siège de l'ONU

Première Commission: appel à l’interdiction des systèmes d’armes létaux autonomes en l’absence de cadre normatif limitant leur impact humanitaire

Soixante-dix-septième session,
17e séance plénière – matin
AG/DSI/3695

Première Commission: appel à l’interdiction des systèmes d’armes létaux autonomes en l’absence de cadre normatif limitant leur impact humanitaire

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a poursuivi aujourd’hui le volet de son débat thématique consacré aux armes classiques.  Au milieu des appels à la lutte contre le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre, des réflexions sur la neutralité du Traité sur le commerce des armes, des appels à l’universalisation de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel ou encore de la dénonciation du recours par la Russie à des armes à sous-munitions interdites en Ukraine, de nombreuses délégations sont aussi préoccupées d’une part du manque d’encadrement actuel des systèmes d’armes létaux autonomes (SALA). 

Intervenant au nom de 69 États Membres, le représentant de l’Autriche a ainsi appelé à « l’interdiction des systèmes d’armes létaux autonomes (SALA) non conformes au droit international humanitaire », tant qu’il n’y aura pas d’accord sur un cadre normatif et opérationnel et des règles acceptables par tous pour limiter leur impact humanitaire.  Après avoir indiqué que « l’humain doit rester au cœur du processus de décision de recours à la force », il a souhaité que la prochaine conférence internationale sur l’utilisation de l’intelligence artificielle sur les théâtres d’opérations prévue aux Pays-Bas et la prochaine conférence régionale sur l’impact humanitaire des armes autonomes annoncée par le Costa Rica, permettront d’avancer vers un cadre normatif. 

Partageant les inquiétudes sur les risques que représentent les nouvelles technologies militaires sur le droit international humanitaire, plusieurs délégations ont dit l’importance des 11 principes directeurs définis dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur certaines armes classiques (CCAC), qui offrent aux États des orientations concrètes face aux défis posés par le développement de nouveaux systèmes d’armement, dont les SALA, parfois dits « robots tueurs ».  L’Espagne a estimé que la CCAC est l’enceinte la plus appropriée pour aborder le cadre normatif du recours aux SALA.  Le Brésil, qui préside le Groupe d’experts sur les SALA, a lui aussi estimé que cette question mérite l’attention de toutes les parties de la CCAC, et de la communauté internationale dans son ensemble.  Quant à la Suisse, elle estime que les SALA ne devraient être ni employés, ni développés, et qu’en tout état de cause, ils doivent faire l’objet d’un encadrement, afin de garantir une utilisation et des effets respectant le droit international humanitaire.

Mettant l’accent sur d’autres armes classiques aux impacts humanitaires dévastateurs sur les personnes non combattantes, la plupart des délégations ont appelé à l’universalisation de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, ou « Convention d’Ottawa » entrée en vigueur en 1999, et la Convention sur les armes à sous-munitions, entrée en vigueur en 2010.  Outre les terribles conséquences économiques et sociales de ces armes, il a aussi été rappelé que 94% des victimes des armes à sous-munitions sont des personnes non combattantes, hommes, femmes et enfants. 

La mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel demeure une urgence humanitaire, a affirmé l’Azerbaïdjan, qui a aussi mis en avant la question des restes explosifs de guerre.  L’Iraq, qui s’est présenté comme « le pays le plus touché au monde » par le problème des restes explosifs de guerre, a indiqué qu’il présidera la onzième Assemblée des États parties de la Convention sur les armes à sous-munitions, à Genève du 11 au 14 septembre 2023, avec l’optique de promouvoir le Plan d’action de Lausanne et l’universalisation de la Convention.  Les armes à sous-munitions contribuent beaucoup aux restes explosifs de guerre, même si tout engin non explosé entre dans cette catégorie. 

Plusieurs pays sont venus rappeler une nouvelle fois, à l’image du Ghana, que les armes classiques peuvent faire autant de dommage que les armes de destruction massives « lorsqu’elle tombent entre les mauvaises mains ».  Parce que la transparence sur les transferts d’armes est la clef de la lutte contre leur prolifération illégale, de nombreuses délégations ont réaffirmé leur attachement à la mise en œuvre et à l’universalisation du Traité sur le commerce des armes (TCA) -entré en vigueur le 24 décembre 2014- en tant qu’instrument fondamental pour encadrer le commerce des armes classiques et prévenir leurs trafics illicites à destination de pays où l’on sait qu’elles serviraient à commettre des atteintes graves aux droits humains.

Le trafic illicite d’armes concernant notamment les armes légères et de petit calibre (ALPC), le Sénégal a souhaité que celles-ci soient, au sein du TCA, considérées comme une « huitième catégorie à part entière » d’armes classiques à côté des sept autres, pour améliorer la transparence sur leur circulation et la pertinence du Registre sur les armes classiques, lequel pourrait être amélioré pour être plus transparent.  À cet égard, la Lituanie a rappelé que ni le Bélarus ni la Fédération de Russie n’avaient à ce jour fourni la moindre information sur les transferts d’armes et exercices militaires conjoints organisés le long de la frontière ukrainienne durant les mois précédant l’invasion du 24 février 2022. 

Au-delà des armes, certaines délégations ont posé la question des munitions, dont El Salvador a rappelé que ce sont elles qui rendent les armes létales.  Or, s’est indigné le Pérou, alors que le monde fabrique chaque année assez de balles pour tuer presque deux fois toute la population de la planète, certains États bloquent ouvertement les efforts visant à traiter la question que ce « carburant pour la violence ».  Sri Lanka a lui aussi appelé à combler les lacunes mondiales en matière de gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie.

Enfin, plusieurs pays ont jugé nécessaire de s’attaquer aux conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées.  Royaume-Uni et Suisse ont annoncé leur intention de signer en ce sens la Déclaration de Dublin qui leur sera officiellement présentée le mois prochain.  Hier, l’Allemagne et l’Autriche avaient déjà rendu hommage au travail effectué sur cette question depuis trois ans par l’Irlande, qui devrait s’exprimer lundi.

La Première Commission poursuivra son débat thématique, notamment sur le volet des armes classiques, lundi 24 octobre à partir de 10 heures. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Armes conventionnelles (suite)

Intervenant au nom de 69 États Membres, M. ALEXANDER KMENTT (Autriche) a mis l’accent sur les risques que représentent les nouvelles technologies militaires sur le droit international humanitaire.  Il a souligné l’importance de la réflexion qui a mené à l’adoption de 11 principes directeurs définis dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur certaines armes classiques.  Ces principes, a-t-il argué, offrent pour la première fois aux États des orientations concrètes face aux défis posés par le développement de nouveaux systèmes d’armement tels que les systèmes d’armes létaux autonomes, ou « robots tueurs ». 

Au nom de 69 États Membres de l’ONU, le représentant de l’Autriche a appelé à « l’interdiction des systèmes d’armes létaux autonomes non conformes au droit international humanitaire », en rappelant que l’élément humain doit rester au cœur du processus de décision du recours à la force.  Il a jugé urgent de mettre en œuvre le cadre normatif et opérationnel et les règles acceptables par tous pour limiter l’impact de ces armes sur le droit international humanitaire.  Il a souligné que les Pays-Bas doivent organiser une conférence internationale sur le déploiement et l’utilisation de l’intelligence artificielle sur les théâtres d’opérations, et que le Costa Rica a annoncé une conférence régionale sur l’impact humanitaire de ces armes. 

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) a indiqué que le ciblage délibéré d’infrastructures civiles vitales constitue un crime de guerre.  Or, a accusé le représentant, la Fédération de Russie frappe des centrales électriques en Ukraine, qui n’ont aucun intérêt militaire, afin de priver la population civile de ses besoins de base -chaleur, électricité et eau– cela en pleine période de chute des températures.  Il a souligné que la Russie assumera l’entière responsabilité de ses atrocités contre le peuple ukrainien.

Rappelant qu’en fournissant des armes à la Russie pour mener une guerre d’agression en Ukraine et tuer des citoyens ukrainiens, l’Iran se rend complice de crime d’agression, de crimes de guerre et d’actes terroristes, M. Zlenko a exhorté ce pays à cesser immédiatement de fournir toute arme à la Russie.  À défaut, l’Iran portera la responsabilité la plus stricte, y compris dans le cadre de procédures judiciaires internationales concernant les crimes de la Russie contre l’Ukraine.  L’Ukraine souligne l’importance de l’imposition de sanctions sévères contre l’Iran, a ajouté le représentant, qui a accusé l’Iran de vouloir transférer des missiles sol-sol balistiques à la Russie pour son utilisation dans la guerre contre l’Ukraine. 

Après avoir réitéré l’appui de l’Ukraine au Programme d’action de l’ONU relatif aux armes légères et de petit calibre et à la Convention sur certaines armes classiques, M. Zlenko a attiré l’attention sur la question des mines antipersonnel.  Alors que le monde civilisé tout entier abandonne et interdit les mines terrestres antipersonnel, la Russie augmente leur utilisation en Ukraine et teste même de nouveaux types de mines antipersonnel telles que les POM-3, a-t-il dit.  À ce propos, il a estimé que l’après-guerre nécessitera un effort international immense pour débrasser le territoire ukrainien de ces armes.

Pour M. NICHOLAS CLUTTERBUCK (Nouvelle-Zélande) le développement rapide des systèmes d’armes létaux autonomes pose de graves problèmes juridiques, éthiques et de sécurité: répondre à ces préoccupations par de nouvelles règles et limites juridiquement contraignantes est l’un des points les plus urgents de l’agenda du désarmement.  Une majorité d’États souhaite que des progrès réels soient accomplis sur cette question par le biais de nouvelles interdictions, règles et limites, a poursuivi le représentant.  Malgré les efforts de quelques-uns pour faire échouer les progrès multilatéraux au sein de la CCAC, les États ont commencé à se rassembler autour de plusieurs domaines de convergence, comme le montre la déclaration conjointe présentée aujourd’hui par l’Autriche au nom de plusieurs États, dont la Nouvelle-Zélande, a-t-il ajouté.  Pour la Nouvelle-Zélande, il appartient maintenant aux parties contractantes de la CCAC de prouver qu’elles peuvent traduire de manière significative le développement d’accords de fond en progrès formels et convenus.

Mme NANA AMA BIMAH QUASHIE (Ghana)a déclaré que l’impact du flux illicite d’armes légères et de petit calibre en Afrique de l’Ouest a conduit à environ 346 attaques terroristes au cours du seul premier trimestre 2022, dont 49% ont eu lieu dans la sous-région ouest-africaine et ont provoqué le déplacement interne de plusieurs milliers de personnes.  Pour la représentante, la situation en Afrique de l’Ouest et au Sahel appelle de toute urgence une action concertée pour traiter de manière décisive de la sécurité des armes classiques afin d’empêcher les terroristes et les groupes extrémistes d’y avoir accès pour les utiliser dans leurs activités de déstabilisation dans la région et dans d’autres parties du monde.  À cet égard, elle a souligné la nécessité d’une pleine mise en œuvre du Programme d’action de l’ONU relatif aux armes légères et de petit calibre, de son Instrument international de traçage et de toutes les conventions pertinentes, comme du Traité sur le commerce des armes. 

M. ILGAR GURBANOV (Azerbaïdjan) a expliqué que son pays était l’un des plus touchés au monde par la prolifération de mines antipersonnel, ayant été « envahi » par ces engins pendant plus de 30 ans.  Dans les territoires libérés par l’Azerbaïdjan, c’est un enjeu humanitaire, a-t-il ajouté.  Plus de 5 000 engins ont été désactivés et retirés du terrain.  L’Arménie doit assumer ses responsabilités et envoyer à l’Azerbaïdjan ses plans de déploiement de mines antipersonnel, a insisté le représentant.

L’an dernier, plus de 3 000 citoyens azerbaidjanais ont été blessés et handicapés par l’explosion de mines, qu’ils soient civils ou exerçant dans l’armée.  Les forces armées arméniennes continuent de déployer des mines antipersonnel en territoire azerbaïdjanais et le long de la frontière, même après la signature de l’accord trilatéral, s’est-il indigné. 

Dans les territoires libérés de l’Azerbaïdjan, les efforts de reconstruction battent leur plein malgré les opérations de déminage à grande échelle, a poursuivi le représentant, qui a réclamé à la communauté internationale un financement stable, prévisible, afin que les opérations de déminage soient couronnées de succès et que les citoyens azerbaidjanais puissent rentrer chez eux.

Mme SARA ALVARADO (Pérou) a fait remarquer que le monde dépense annuellement 15 milliards de dollars en munitions, fabriquant assez de balles pour tuer presque deux fois le nombre d’habitants de la planète.  C’est un carburant pour la violence dans le monde entier, a-t-elle fait observer.  Et pourtant, ces arguments semblent tomber dans l’oreille d’un sourd lorsque certains États bloquent ouvertement les efforts visant à traiter la question, tandis que d’autres bloquent les efforts visant à endiguer le commerce des armes légères et de petit calibre, a déploré la représentante.  Selon la représentante, comme pour le désarmement nucléaire, lorsqu’il s’agit de traiter du désarmement des armes conventionnelles, certains États s’efforcent plutôt de perpétuer leur pouvoir, en dépit du fait que l’utilisation de ces armes conventionnelles cause le plus grand nombre de victimes dans le monde. 

Mme Alvarado a fait valoir que son pays honore son engagement d’être un pays exempt de mines terrestres et qu’il contribue au déminage dans d’autres États.  Condamnant en outre l’utilisation des armes à sous-munitions par tout acteur et en toutes circonstances, le Pérou appelle tous les pays à adhérer à la convention pertinente.  Par ailleurs, la représentante a estimé que les systèmes d’armes létaux autonomes appellent une réponse juridique et politique urgente de la part de la communauté internationale. 

M. PAPA SAMBA DIACK (Sénégal), qualifiant les armes classiques d’« armes de destruction massive » en raison de leur grande dissémination, facilitée en partie par les lacunes des régimes de contrôle, a souligné l’urgence de préserver le Traité sur le commerce des armes, le Programme d’action des Nations Unies en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) sous tous ses aspects et son Instrument international de traçage, le Protocole contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, ainsi que les divers instruments régionaux et sous-régionaux pertinents. 

Le représentant a par ailleurs jugé impératif que le Registre des armes classiques inclut les ALPC, à côté des sept catégories traditionnelles, « car il s’agit bien du « Registre des armes classiques » et non du « Registre de certaines catégories d’armes classiques ».  Il a expliqué, une fois les ALPC prises en compte en tant que catégorie à part entière, le Registre pourrait alors vraiment concerner « les types d’armes classiques qui constituent la principale menace pour la sécurité de nombreux pays ».  Cela pourrait encourager les pays à soumettre des rapports, contribuant ainsi à rehausser le niveau de participation au Registre, laquelle est en baisse constante depuis plusieurs années, a aussi noté le délégué. 

Mme ERIKA CAMPOS (Brésil) a indiqué qu’en tant que président du Groupe d’experts sur les systèmes d’armes létaux autonomes, le Brésil, à la lumière des travaux réalisés sur cette question stratégique en 2022, estime qu’elle mérite l’attention de toutes les parties de la Convention sur certaines armes classiques et de la communauté internationale dans son ensemble.  Il existe une aspiration de la part des États, des ONG, des groupes de réflexion et du secteur académique, au développement d’un cadre mondial concernant ces systèmes d’armes, a déclaré la représentante.  Le Brésil partage la conviction de la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement que les États doivent régler leurs divergences et intensifier leurs travaux pour ouvrir la voie menant à un instrument international efficace sur cette question. 

M. NAZIM KHALDI (Algérie) a pris note avec satisfaction du rapport du Secrétaire général sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects et l’assistance aux États pour la répression de ce trafic et la collecte des ALPC.  L’Algérie, a dit le représentant, contribue de manière active à l’amélioration du Programme d’action des Nations Unies relatif aux ALPC et de l’Instrument international de traçage.  Après avoir souligné, qu’au niveau régional, l’Algérie travaille sans relâche pour mettre en œuvre la stratégie de l’Union africaine de 2011 sur le contrôle de la prolifération, de la circulation et du trafic illicites d’ALPC et reste pleinement engagée dans la réalisation de l’initiative de l’Union africaine « Faire taire les armes en Afrique », M. Khaldi a souligné les efforts de son pays pour renforcer la sécurité à ses frontières, y compris dans la région du Sahel.  En ce qui concerne la dimension humanitaire des armes classiques, il a appuyé les travaux menés par le Groupe d’experts gouvernementaux sur les systèmes d’armes létaux autonomes dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques.  Il a enfin rappelé qu’il y a cinq ans, l’Algérie s’est acquittée avec succès de ses obligations de déminage en vertu de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel.

M. ROBERTAS ROSINAS (Lituanie) a rappelé que le Bélarus et la Fédération de Russie n’avaient jamais répondu aux demandes d’explications de janvier et février 2022 sur les motifs de concentrations inédites de forces à la frontière de l’Ukraine et n’ont jamais, contrairement à leurs obligations au regard des conventions pertinentes, répondu aux demandes et questions sur les prétendus exercices militaires conjoints lancés aux frontières ukrainiennes avant l’invasion du 24 février 2022.  Pour améliorer la transparence sur les transferts d’armes, le représentant de la Lituanie a dit l’importance du Traité sur le commerce des armes dans le contexte de la maîtrise des armes avant d’appeler à universaliser la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques (CCAC).  Il a exhorté tous les États à utiliser les occasions de traiter la question des systèmes d’armes létaux autonomes dans le plein respect du droit international humanitaire.

Mme VICTORIA LIETA LIOLOCHA (République démocratique du Congo) a constaté que la prolifération des armes légères et petit calibre renforce les activités des groupes armés à l’Est de la RDC.  En effet, a-t-elle dit, ces groupes tirent leurs sources de revenus et d’approvisionnement en armes et munitions de l’exploitation illicite et du pillage de nos ressources naturelles.  C’est pourquoi, sa délégation est d’avis que le processus de réduction et de contrôle de ces armes doit se poursuivre afin de mener des consultations pour limiter les transferts internationaux des armes.  La RDC salue les initiatives déjà prises dans ce domaine et en même temps soutient l’approche globale du Secrétaire général pour le désarmement, a-t-elle ajouté.  Après avoir rappelé l’attachement de la RDC à la mise en œuvre de la Convention sur certaines armes classiques, elle a assuré la Commission de la détermination de son pays à atteindre la libération totale de son territoire des mines antipersonnel.  Elle a indiqué à ce propos que le Centre congolais de lutte antimines, « conformément aux dispositions de l’article 5 de la Convention d’interdiction des mines antipersonnel », a soumis une autre demande de prolongation du délai pour nettoyer les 33 zones dangereuses restantes.  « Ce travail de nettoyage requiert une somme d’environ 3,4 millions de dollars américains », a-t-elle fait savoir. 

Mme ELEONORA SAGGESE (Royaume-Uni) s’est dite profondément préoccupée par l’utilisation « extensive et bien documentée » de munitions à fragmentation et de mines en Ukraine, où elles ont fait des centaines de victimes civiles.  Des rapports constants sur l’utilisation par la Fédération de Russie de mines antipersonnel et de pièges activés par les victimes, notamment placés sur des cadavres, remettent en question le respect de ses obligations par la Russie au titre du Protocole II modifié de la CCAC.  La brutalité de cette guerre pose de sérieuses questions auxquelles la Russie doit répondre quant à son respect du droit international humanitaire, a ajouté la représentante. 

Ces développements soulignent l’importance de l’accord sur le projet de déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, a souligné la représentante.  Le Royaume-Uni signera ladite déclaration lors de la cérémonie d’adoption qui se tiendra à Dublin le mois prochain.  Le Royaume-Uni se félicite aussi des discussions en cours au sein du Groupe d’experts gouvernementaux de la CCAC sur les systèmes d’armes létaux autonomes, « malgré les efforts d’un État pour les entraver ». 

M. AHMED KAMIL RHAIF ALBU-MOHAMMED (Iraq) a dit la nécessité de mieux contrôler les mouvements transfrontaliers des armes légères et de petit calibre en raison de l’impact désastreux de la prolifération illicite de ces armes sur la stabilité de son pays.  Dans ce contexte, il s’est particulièrement félicité de l’adoption par consensus du document final de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères.  Parmi les décisions adoptées il a particulièrement salué la prolongation du programme de bourses des Nations Unies pour le renforcement des capacités des pays en développement en matière de armes légères et de petit calibre. 

Par ailleurs, le représentant a mis l’accent sur les dangers et conséquences économiques et sociales néfastes des restes explosifs de guerre en estimant que l’Iraq est le pays le plus touché au monde par ce problème.  Il a rappelé que son pays assumera la présidence de la onzième Assemblée des États parties de la Convention sur les armes à sous-munitions, qui se tiendra à Genève du 11 au 14 septembre 2023, avec pour objectif de promouvoir le Plan d’action de Lausanne et d’obtenir l’universalisation de la Convention. 

M. DOFINI AUBIN TIAHOUN (Burkina Faso) a dressé le même constat que ces homologues de la région, les engins explosifs improvisés, outre les armes classiques, étant de plus en plus utilisés par les groupes terroristes.  Ces engins explosifs improvisés affectent plusieurs pays, a-t-il dit, ajoutant que son pays attache une importance à l’examen de cette thématique dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques.  Quant aux armes à sous-munitions, elles continuent, comme les mines antipersonnel, d’interdire l’accès et l’exploitation de vastes surfaces exploitables dans plusieurs régions du monde, retardant ainsi l’atteinte des objectifs de développement durable relatifs à la sécurité alimentaire, à l’éducation, à l’autonomisation des femmes, a expliqué M. Tiahoun, qui a appelé à l’universalisation de la Convention d’Oslo.  Après s’être félicité de la décision d’établir un programme permanent de formation spécialisée sur les ALPC pour renforcer les connaissances techniques et l’expertise dans les domaines liés à la mise en œuvre du Programme d’action et de l’Instrument international de traçage, le représentant -tout en soulignant la nécessité de promouvoir l’utilisation légitime et responsable de ces armes-, a réaffirmé l’engagement du Burkina Faso à œuvrer à l’avènement d’un monde exempt de périls liés aux armements classiques de tout type.

Mme NIRMALA INDUMATHIE DIAS PARANAVITANA (Sri Lanka) a constaté que, dans une grande majorité de conflits, la fabrication et la circulation illicites d’armes légères et de petit calibre (ALPC) continuaient de jouer un rôle de premier plan dans la perpétuation et l’exacerbation desdits conflits.  La représentante a donc rappelé la nécessité d’une mise en œuvre équilibrée et complète du Programme d’action pour prévenir et éradiquer le commerce illicite des ALPC.  En outre, l’Instrument international de traçage constitue un outil vital pour la mise en œuvre du Programme d’action.

La représentante s’est félicitée du consensus atteint lors de la huitième Réunion biennale des États sur les armes légères et souligné la nécessité de renforcer les capacités nationales en matière de marquage, d’identification et de traçage des armes.  Le Sri Lanka soutient à cette fin la proposition d’établir un groupe d’experts techniques à composition non limitée axé sur la réalisation de la coopération internationale et la mise en œuvre intégrale de l’Instrument international de traçage et du programme d’action, en mettant l’accent sur les récents développements technologiques dans la fabrication et la conception des armes légères et de petit calibre, les armes modulaires et en polymère et l’impression 3D.  Elle se félicite également de la décision d’établir un programme de formation permanent et spécialisé sur les ALPC, en particulier pour les pays en développement.  Il faut combler les lacunes mondiales en matière de gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie, a poursuivi la représentante, qui a demandé, là aussi que soit fourni aux États un soutien pour qu’ils puissent renforcer leurs capacités. 

La représentante a dit apprécié le cadre offert par la Convention sur certaines armes classiques (CCAC), à laquelle elle est partie, ainsi qu’aux différents protocoles, à l’exception du Protocole V, relatif aux restes explosifs de guerre.  Elle a notamment salué la souplesse qu’offre sa structure unique, qui lui permet de s’adapter à l’évolution technologique des armes classiques comme des conflits.  Elle a mis l’accent sur l’impact du développement rapide des nouvelles technologies, notamment et certains défis qui en résultent, comme l’autonomie croissante des systèmes d’armes, et a souligné la nécessité de prendre des mesures urgentes pour des réglementations et des limitations convenues au niveau international. 

La représentante a rappelé que son pays était devenu en 2017 partie à la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et avait détruit en août 2021 son dernier stock de mines terrestres, « presque un an avant la date limite fixée par la Convention ».  Elle a souhaité l’universalisation de la Convention et le renforcement de la coopération afin de développer des méthodes de déminage et favoriser des cadres réglementaires garantissant les droits des victimes de mines. 

La représentante a également réaffirmé le droit souverain des États d’acquérir, de fabriquer, d’exporter, d’importer et de conserver des armes conventionnelles et leurs munitions à des fins de sécurité nationale.  Pour le Sri Lanka, le problème inhérent aux armes conventionnelles « n’est pas le commerce régulier mais le flux illicite d’armes conventionnelles vers des acteurs non étatiques », et c’est pour arrêter celui-ci que la Communauté des nations doit coopérer.

M. FÉLIX BAUMANN (Suisse) s’est dit profondément préoccupé par les allégations, nombreuses et crédibles, selon lesquelles des armes à sous-munitions et des mines antipersonnel ont été utilisées en Ukraine, essentiellement par les forces russes.  Il a fermement condamné toute utilisation de mines antipersonnel et d’armes à sous-munitions. 

S’attaquer aux conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées est une priorité de la Suisse.  Les conflits armés récents comme actuels démontrent l’impérieuse nécessité d’améliorer la protection des civils dans les conflits armés en milieu urbain, a déclaré le représentant.  Il a sur ce point remercié l’Irlande pour avoir dirigé les travaux pour l’élaboration d’une déclaration politique à ce sujet, que la Suisse adoptera.  Il a également salué le retour du consensus concernant l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre. 

Enfin, les systèmes d’armes létaux autonomes ne pouvant respecter le droit international humanitaire ne devraient être ni développés, ni employés, a affirmé le représentant, pour qui ce type d’armes devrait faire l’objet d’un encadrement, afin de garantir une utilisation et des effets respectant le droit international humanitaire.

M. ALBERTO MIRANDA DE LA PEÑA (Espagne) a mis l’accent les terribles conséquences des mines et armes à sous-munitions.  Il a indiqué que son pays accompagne de nombreuses opérations de déminage à travers le monde en multipliant les cours et formations et en mettant ses forces armées spécialisées dans le déminage à la disposition de missions de maintien de la paix.

S’inquiétant des conséquences du détournement des armes légères et de petit calibre sur la stabilité de nombreux pays, le représentant de l’Espagne a jugé indispensable de mettre en œuvre le Programme d’action relatif aux armes légères et son Instrument internationale de traçage afin de mieux prévenir le trafic illicite des armes légères et de petit calibre et éviter qu’elles tombent entre les mains de groupes terroristes et autres groupes non autorisés.  Il a expliqué que l’Espagne participait aussi au Mécanisme américain de communication transfrontalier sur les transferts licites des armes légères et de petit calibre. 

Notant que le développement rapide des nouvelles technologies militaires offre de nouvelles opportunités mais présente aussi des risques, le représentant a estimé que la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques (CCAC) est l’enceinte la plus appropriée pour aborder le cadre normatif de l’utilisation des systèmes d’armes létaux autonomes (SALA).

Mme NOHRA MARIA QUINTERO CORREA (Colombie), qui a appelé à la pleine participation des femmes aux efforts de désarmement des armes classiques, a indiqué que sa délégation présenterait cette année le projet de résolution annuelle que son pays porte depuis plusieurs années sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects.  Par ailleurs, la représentante, consciente de l’impact que les mines antipersonnel ont sur la vie des personnes, des communautés et sur le développement durable, s’est dit fermement attachée à la pleine mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel.  « L’État colombien a rendu aux communautés 484 municipalités exemptes de mines antipersonnel, soit 79% du territoire couverts par les opérations nationales et humanitaires de déminage », a-t-elle indiqué.  Elle a souligné que, pour son pays, l’action mondiale contre les mines antipersonnel constitue un élément essentiel pour la promotion de la restitution des terres, le retour des populations déplacées sur leurs territoires, de la protection des populations autochtones et du développement rural.

M. ABD-EL KADER YASMIN TCHALARE (Togo) a réaffirmé l’attachement de son pays à l’Instrument internationale de traçage pour éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects.  Le Togo s’est doté d’un plan national pour consolider les bases de données nationales concernant les ALPC, et dispose d’une réglementation exigeante concernant le marquage et la gestion de leurs stocks, a ajouté le représentant.  Il s’est réjoui par ailleurs de l’accompagnement des pays en développement concernant leur renforcement des capacités dans le domaine et a particulièrement salué le rôle du Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique (UNREC), sis à Lomé.

M. JAROSLAV ŠTĚPÁNEK (République tchèque) a notamment réaffirmé le soutien de son pays aux objectifs de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et de la Convention sur les armes à sous-munitions.  Jusqu’à présent, la République tchèque a accordé son aide pour des actions internationales antimines en Afghanistan, en Jordanie, en Iraq, en Bosnie-Herzégovine, en Serbie et en Ukraine.  Le représentant a souligné que les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions causent d’immenses souffrances, en particulier depuis février dernier et la guerre déclenchée par la Russie contre l’Ukraine.  Il a ainsi appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts dans les domaines de l’assistance aux victimes, de la sensibilisation aux risques, de la destruction des stocks de mines, des restes explosifs de guerre et du déminage des armes à sous-munitions dans les zones de conflit, « à commencer par celles qui présentent, actuellement, un danger sur le territoire ukrainien ». 

Mme SUBHASHINI NARAYANAN (Inde), après avoir souligné l’importance de la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques () et des principes humanitaires qui la sous-tendent, a indiqué que son pays présidera en 2023 l’Arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations d’armes classiques et de biens et technologies à double usage mis en place en 1996 par 33 États afin de coordonner leurs politiques en matière d’exportations.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a appelé à une amélioration du fonctionnement de l’Instrument de traçage, à l’heure où les nouvelles technologies permettent la fabrication d’armes classiques dans la sphère privée.  Elle a en outre souligné l’importance d’une participation accrue des femmes à la mise en œuvre des activités et actions prévues au titre de cet instrument et du Programme d’action de l’ONU sur les armes légères et de petit calibre.  Concernant les munitions, qui rendent les armes classiques létales, la représentante a estimé qu’elles devaient avoir elles aussi leur place dans le Programme d’action, plaidant pour une approche intégrale afin d’appréhender au mieux « ce fléau ». 

Mme MIN-JEONG CHO (République de Corée) a déclaré qu’en tant que fervent défenseur du Traité sur le commerce des armes, son pays avait participé activement au forum et assumé récemment la présidence de sa neuvième Conférence des États parties.  Dans le cadre des efforts visant à renforcer la mise en œuvre et l’universalisation du Traité, la République de Corée a également apporté des contributions financières au Fonds d’affectation spéciale volontaire et au Programme de parrainage pour aider les États à le mettre en œuvre efficacement.  La représentante a réaffirmé l’engagement total de la République de Corée en faveur du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre et en faveur de l’Instrument international de traçage. 

La question des technologies émergentes dans le domaine des systèmes d’armes létaux autonomes a été l’un des axes de nos discussions dans le cadre de la CCAC au cours des dernières années, a rappelé la représentante, qui s’en est félicitée.  Elle a appelé de ses vœux un consensus sur les cadres normatifs et opérationnels relatifs aux technologies émergentes dans ce domaine. 

M. MEMET MEVLÜT YAKUT (Türkiye) s’est dit particulièrement préoccupé par le lien entre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre et le terrorisme et le crime organisé.  C’est pourquoi la Türkiye reste résolue à renforcer la coopération internationale pour combattre et éradiquer le commerce illicite des ALPC et de leurs munitions.  Dans ce contexte, le représentant a soutenu fermement la mise en œuvre solide, efficace et complète du Programme d’action des Nations Unies pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des ALPC sous tous ses aspects.

Mme MARÍA DEL ROSARIO ESTRADA GIRÓN (Guatemala) a qualifié le Traité sur le commerce des armes de « jalon fondamental » et dénoncé son détournement.  Il faut que tous les États Membres fassent preuve de bonne foi et en assument chacune de ses dispositions, at-elle déclaré et ce, pour les pays producteurs et importateurs. 

Concernant les munitions classiques, un programme de renforcement des capacités doit être mis sur pied pour que les connaissances techniques soient disponibles aux pays qui le souhaitent, a plaidé la représentante.  Elle s’est félicitée que le groupe de travail consacré à la question des munitions classiques ait privilégié une approche holistique, jugeant essentiel que soit prises en compte dans le document final les particularités de chaque pays.

Mme NANA NAGAI (Japon) a noté les nombreuses tragédies qui surviennent dans le monde dues aux armes classiques utilisées en temps de conflit.  Elle a plaidé pour une maîtrise de ces armes, un désarmement et une non-prolifération des armes classiques, demandant d’universaliser les traités pertinents.  Elle a félicité notamment les Philippines et la Gabon qui ont adhéré au Traité sur le commerce des armes, avant de demander à tous les États Membres d’adhérer et mettre en œuvre toutes les conventions sur le désarmement et la maîtrise des armes classiques.

 Le Japon promeut une coopération internationale contre les mines, soutenant aussi les mesures contre les mines et pour la collecte et la destruction des ALPC dans le monde, y ayant consacré 10 millions de dollars l’an dernier.  La représentante a annoncé avoir soumis un projet de résolution sur le commerce illicite des APLC sous tous ses aspects, disant espérer une adoption par consensus pour montrer notre résolution commune de nous attaquer à ce problème.

M. ABDULRAHMAN ALHASHEM (Koweït) a réitéré la position constante de son pays sur la lutte contre le commerce et la fourniture illicites des armes légères et de petit calibre afin d’assurer la paix sans porter atteinte aux droits des États de défendre leur souveraineté et leur intégrité territoriale.  Il a rappelé son attachement à la pleine mise en œuvre du Programme d’action des Nations Unies sur cette question afin de renforcer la confiance et la coopération entre les États Membres et d’empêcher que de telles armes tombent entre les mains d’acteurs non étatiques. 

Le représentant s’est félicité de l’entrée en vigueur du Traité sur le commerce des armes et a appelé les États à le mettre en œuvre.  Les avancées technologiques sont une arme à double tranchant à cet égard, a-t-il noté, en appelant les États à partager leur expertise et à renforcer leur coopération en la matière. 

M. CHRISTIAN PADILLA (Cuba) s’est inquiété que les armes classiques se retrouvent souvent entre les mains de groupes non étatiques qui les revendent sur le marché noir.  Il s’est félicité de l’adoption par consensus du document final de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères, en citant notamment le programme des bourses des Nations Unies, qui doit permettre de renforcer les capacités des pays en développement dans la mise en œuvre du Programme d’action.  Il faut que les systèmes d’armes létaux autonomes soient interdits au plus vite, en particulier les drones militaires d’attaques », a par ailleurs insisté le représentant.

Mme TRAN THI THANH HAI (Viet Nam) a souligné que son pays continue donc de soutenir les objectifs humanitaires de la Convention sur les armes à sous-munitions et de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et leur destruction, ainsi que les efforts communs de la communauté internationale contre l’utilisation aveugle des mines.  En tant que membre du Conseil de sécurité l’année dernière, le Viet Nam a initié l’adoption d’une déclaration présidentielle du Conseil réaffirmant la nécessité de poursuivre les actions antimines dans toutes les régions et reconnaissant les efforts internationaux à cet égard, a ajouté la représentante.  Elle a souligné que le Viet Nam, en tant que l’un des pays les plus touchés par les restes explosifs de guerre, n’a ménagé aucun effort pour résoudre les problèmes liés à ces « armes » pour préserver les chances de développement des populations rurales.  Elle a conclu en indiquant que le Plan national d’action contre les mines pour la période 2010-2025 était mis en œuvre grâce au soutien inestimable des partenaires internationaux impliqués de longue date dans la lutte contre les munitions non explosées au Viet Nam.

Droits de réponse

Le représentant de l’Union européenne a répondu à un commentaire de la Fédération de Russie fait hier.  Il a cité des rapports de l’ONU faisant état de crimes de guerre commis par la Russie en Ukraine contre des civils non armés, des tortures, des violences sexuelles et sexistes, entre autres.  Il a aussi condamné l’usage de drones iraniens par l’armée russe en Ukraine, et toute aide à la Russie en général dans le cadre de cette guerre.

Le représentant de l’Arménie a réagi à une déclaration de l’Azerbaïdjan.  Il a condamné une campagne de désinformation, une course à l’armement, une rhétorique agressive et l’usage d’armes non conventionnelles, contenant du phosphore blanc, notamment.  Il a aussi accusé l’Azerbaïdjan d’entraver les opérations de déminage en Arménie.

Le représentant de la République islamique d’Iran, réagissant aux accusations « irresponsables » formulées par l’Ukraine et l’Union européenne selon lesquelles des drones iraniens illégaux auraient été fournis à la Russie en Ukraine, a regretté que ces allégations infondées continuent d’être proférées alors que l’Iran a adopté une opposition neutre dans ce conflit.  Pour le représentant, il s’agit d’une tentative de tromper les instances internationales.  Il a appelé à une résolution pacifique de ce conflit. 

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté catégoriquement les accusations « incohérentes » portées par les États occidentaux, en considérant que l’OTAN préfère éluder sa responsabilité dans la guerre en Ukraine, notamment en fournissant des armes au régime de Kiev.  « Les États-Unis tirent le plus grand parti de bains de sang », a continué le représentant, en considérant que ce conflit alimente leur marché militaire tandis que des armes se retrouvent sur le marché noir.  Selon lui, les armes fournies par les pays occidentaux servent à mener des attaques sur le territoire de la Fédération de Russie et font de ceux-ci des complices de l’Ukraine. 

Le représentant du Bélarus a répondu à la Lituanie que ses accusations sont infondées, les forces armées bélarussiennes ne prenant pas part au conflit armé en Ukraine. 

Le représentant de l’Ukraine a rejeté les allégations et insinuations de la Russie, « qui attaque le territoire ukrainien en utilisant nombre d’armes classiques et détruit des villes et villages ukrainiens », ces destructions étant accompagnées d’atrocités qui ont été constatées après le départ des forces occupantes.  Toutes les attaques de la Russie sont perpétrées de manière indiscriminées et la Russie utilise les populations en tant que boucliers humains, a-t-il ajouté.  Le représentant a condamné les violations répétées du droit international humanitaire et des Conventions de Genève par la Russie.  À l’Iran, il a répondu que jamais l’Ukraine n’avait imaginé que ce pays aurait pu être un tel allié de la Russie dans son agression contre son pays. 

Le représentant de l’Azerbaïdjan a répondu à l’Arménie, qu’il a accusée de vouloir détourner le regard de la communauté internationale quant à ses crimes, notamment l’usage de mines antipersonnel en Azerbaïdjan.  Il accusé l’Arménie d’avoir adopté une politique « terroriste » et contraire au droit international humanitaire, qui empêche la reconstruction de son pays, ainsi que le retour de personnes déplacées depuis plus de 30 ans. 

Le représentant des États-Unis a réagi aux commentaires de la Russie, dont il a jugé « l’obstination inversement proportionnelle à la crédibilité ».  L’inventaire dressé par la Russie quant à l’aide apportée par les États-Unis à l’Ukraine est très précis, a-t-il constaté en s’en réjouissant, car a-t-il ajouté, car c’est le signe de la transparence des États Membres qui viennent en aide à l’Ukraine, transparence contrastant fortement avec les actions russes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Cinquième Commission recommande une autre enveloppe de 3,2 millions de dollars pour atténuer l’insécurité alimentaire et ses conséquences humanitaires

Soixante-dix-septième session,
8e séance plénière - matin
AG/AB/4396

La Cinquième Commission recommande une autre enveloppe de 3,2 millions de dollars pour atténuer l’insécurité alimentaire et ses conséquences humanitaires

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, qui a examiné, aujourd’hui, les moyens d’améliorer la situation financière de l’ONU, a recommandé à l’Assemblée générale d’autoriser le Secrétaire général à engager, cette année, des dépenses supplémentaires d’un montant maximum de 3,2 millions de dollars pour atténuer l’insécurité alimentaire mondiale et ses conséquences humanitaires. 

Le montant exact de 3 524 600 dollars est à partager entre la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) qui reçoit ainsi une somme supplémentaire de 2 481 700 dollars.*  À ce jour, le nombre total des États qui ont payé l’intégralité de leurs contributions au budget ordinaire de l’ONU est passé à 134; 40 pays s’étant acquittés de leur dû au budget ordinaire et à ceux des opérations de paix et des tribunaux pénaux internationaux, a précisé la Secrétaire générale adjointe chargée du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, Mme Catherine Pollard. 

Comme s’en félicite le Secrétaire général dans son rapport, au mois de juin dernier, les États Membres ont décidé d’affecter une partie des crédits non dépensés, soit 100 millions de dollars, à l’augmentation du Fonds de roulement, « à titre exceptionnel et sans créer de précédent ».  Cette décision d’augmenter les réserves de liquidités donne à l’Organisation davantage de moyens pour limiter à l’avenir l’impact des crises financières sur ses opérations, mais il reste impératif de s’attaquer aux retards de paiement et au non-paiement des contributions pour remédier de manière plus durable aux problèmes de liquidités.  

L’obligation « juridique et morale » des États Membres de payer leur contribution dans l’intégralité, à temps et sans condition, a été soulignée aujourd’hui, entre autres, par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), d’autant plus que le Secrétariat a dû ponctionner le Fonds de roulement, au mois de septembre, pour payer les salaires de ses fonctionnaires.  

Deuxième plus gros contributeur de l’ONU, « malgré ses difficultés économiques », la Chine a dénoncé un autre grand contributeur qui accumule les arriérés, alors qu’il bénéficie d’un plafond « artificiel » de sa quote-part, a ajouté le Groupe des 77.  Cuba s’est montrée plus précise: les États-Unis doivent plus de 900 millions de dollars au titre du budget ordinaire, ce qui représente 78% du total des arriérés.  

C’est tout simplement inacceptable pour la stabilité de l’Organisation, a tranché Cuba, devant cette volonté délibérée de retenir les paiements pour exercer une pression sur l’Organisation.  Nous avons réduit nos arriérés de 639 millions de dollars à 323 millions de dollars et prévoyons une autre réduction de 100 millions, cette année, ont assuré les États-Unis qui se sont inquiétés que d’autres grands contributeurs aient modifié leur calendrier de paiement, rendant très difficile la planification budgétaire par l’ONU. 

Tenant compte des préoccupations du Secrétariat face à l’impact des paiements « imprévisibles et tardifs », le Royaume-Uni a appelé les États Membres à suivre son exemple et à aligner leur cycle budgétaire avec celui de l’ONU.  Félicitant l’Organisation pour avoir établi soigneusement des priorités et mis clairement l’accent sur les activités qui donnent les meilleurs résultats, le Royaume-Uni a insisté: chaque dollar dépensé par les Nations Unies doit avoir le plus grand impact possible sur le terrain.   

À cet égard, le Japon a dit attendre avec impatience des avancées réelles dans l’exécution du budget.  Les États, a-t-il souligné, ont des ressources limitées, il est donc de la responsabilité partagée des États Membres et du Secrétariat de viser la plus grande efficacité.  Nous demandons la discipline budgétaire, indispensable au bon fonctionnement de l’ONU et à l’exécution des mandats. 

En début de séance, le Président de la Commission, M. Philippe Kridelka de la Belgique, s’est dit préoccupé par l’absence d’accord sur le budget de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).  Il a exhorté les délégations à parvenir à s’entendre dès aujourd’hui, ou au plus tard lundi prochain, sur un texte à examiner, mardi 25 octobre, au cours d’une séance publique prévue à partir de 10 heures. 

*A/C.5/77/L.3  

BUDGET-PROGRAMME DE 2022

Vingtième rapport annuel du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) sur l’état d’avancement de l’exécution du plan-cadre d’équipement (A/77/526)

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif a étudié celui du Secrétaire général (A/77/299) qui indique que tous les travaux de construction et toutes les activités de liquidation administrative se rapportant au plan-cadre d’équipement ont été menés à bien, à l’exception des activités liées à une procédure d’arbitrage.  L’Organisation reste partie à cette procédure, engagée contre Skanska par son sous-traitant chargé des travaux d’électricité, qui affirme que le maître d’œuvre lui doit des dizaines de millions de dollars.  Skanska affirme, pour sa part, que s’il était jugé redevable de toute somme supplémentaire à son sous-traitant, la responsabilité du versement de ces montants devrait retomber sur l’ONU.  Celle-ci contestant l’allégation de Skanska, le litige est actuellement soumis à un tribunal d’arbitrage dont la procédure d’arbitrage est divisée en trois phases consécutives distinctes: a le sous-projet du Secrétariat ; le sous-projet du bâtiment des conférences; et le sous-projet relatif aux autres infrastructures (alarme incendie, distribution de l’électricité au sous-sol, etc.). 

En juin 2020, le tribunal arbitral a rendu une décision définitive pour la première phase, qui a donné lieu au paiement par l’ONU d’une somme nette à Skanska et au versement des retenues de garantie aux sous-traitants, soit un total de 3 607 800 dollars.  Le Comité consultatif compte que des informations plus détaillées sur les deuxième et, le cas échéant, troisième phases de la procédure seront communiquées à l’Assemblée générale lorsqu’elle examinera le présent rapport et dans le prochain rapport sur l’état d’avancement de l’exécution du plan-cadre d’équipement, en 2023.  En attendant, le Comité consultatif recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de continuer de prendre les mesures nécessaires pour limiter la responsabilité et protéger les droits de l’Organisation en ce qui concerne les projets d’équipement.

Le montant total du financement approuvé au titre du plan-cadre d’équipement, soit 2 150,4 millions de dollars qui ont été intégralement engagés.  Tous les contrats ont été clôturés et toutes les factures ont été réglées, à l’exception de celles liées aux instances d’arbitrage en cours et aux frais de procédure connexes.  Le montant total des frais de justice engagés s’élève à ce jour à 8 006 000 dollars.  D’après les estimations du Bureau des affaires juridiques, un montant supplémentaire de 750 000 dollars est nécessaire de juillet à décembre 2022, à retenir sur les crédits engagés en attendant l’issue de l’instance, ce qui porterait à 8 756 000 dollars le total des dépenses.  Le Comité consultatif note avec préoccupation l’augmentation des frais de justice et réaffirme que le Secrétaire général devrait continuer de s’efforcer de limiter, dans toute la mesure du possible, la responsabilité financière de l’Organisation.

PLAN-CADRE D'ÉQUIPEMENT A/77/299A/77/526

Discussion générale

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. JIBRAN KHAN DURRANI (Pakistan) s’est dit préoccupé par le fait qu’une fois de plus, la clôture des comptes du plan-cadre soit retardée par l’affaire d’arbitrage en cours.  Il a souscrit à la recommandation du CCQAB d’obtenir du Secrétaire général une évaluation du coût des procédures en cours et une réduction maximale de la responsabilité financière de l’ONU.  Prenant également note de l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations du Comité des commissaires aux comptes, il a constaté que sept des neuf recommandations en suspens ont été mises en œuvre, les deux autres attendant la fin de la procédure d’arbitrage et l’achèvement du projet lié à l’accessibilité. 

AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Rapport du Secrétaire général sur la situation financière de l’ONU (A/77/530)

Dans ce rapport, le Secrétaire général présente un bilan de la situation financière de l’ONU au 30 septembre 2022.  La situation au regard du budget ordinaire, du budget des opérations de maintien de la paix et de celui des tribunaux pénaux internationaux y est examinée à l’aune de quatre grands indicateurs financiers, à savoir le montant des contributions mises en recouvrement, le montant des contributions non acquittées, la situation de trésorerie et le total des montants dus aux États Membres qui fournissent des contingents ou du personnel de police pour les opérations de paix.

La restriction des dépenses imposée ces dernières années a certes permis d’éviter une crise de trésorerie et la perturbation des opérations, mais elle a aussi entravé l’exécution du budget et des mandats.  Plusieurs activités et produits ont été reportés ou annulés.  En 2021, malgré l’assouplissement des restrictions en matière de recrutement et de dépenses intervenu au mois de mai, l’Organisation a enregistré son plus faible taux d’exécution du budget depuis 2010, ce qui, ajouté à l’annulation des engagements de l’année précédente, aurait conduit à porter au crédit des États Membres et donc à déduire de leurs contributions pour 2023 un montant de 279 millions de dollars. 

Cela aurait déclenché une autre crise de liquidités, qui aurait abouti à une sous-performance systématique dans l’exécution des mandats.  Heureusement, en juin 2022, les États Membres ont décidé d’affecter une partie des crédits non dépensés, soit 100 millions de dollars, à l’augmentation du Fonds de roulement, « à titre exceptionnel et sans créer de précédent ».  La décision d’augmenter les réserves de liquidités donnera à l’Organisation davantage de moyens pour limiter à l’avenir l’impact des crises financières sur ses opérations, mais il reste impératif de s’attaquer aux retards de paiement et au non-paiement des contributions pour remédier de manière plus durable aux problèmes de liquidités.

En ce qui concerne les opérations de maintien de la paix, la décision prise par l’Assemblée générale de souscrire à l’envoi d’avis de mise en recouvrement des contributions pour l’intégralité de l’exercice budgétaire et à la levée de la restriction appliquée au prélèvement d’avances internes sur les comptes des missions en cours a amélioré la situation de trésorerie des opérations de paix et facilité le règlement de sommes dues aux pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police.  En outre, dans sa résolution 76/272, l’Assemblée a demandé d’utiliser en premier lieu le Fonds, à titre de mécanisme visant à atténuer les problèmes de trésorerie, pour emprunter des liquidités pour les opérations de paix en cours, en conservant 40 millions de dollars pour soutenir de nouvelles missions et l’élargissement de missions existantes, fin initialement prévue pour le Fonds.  Elle a également décidé que la trésorerie des missions en cours continuerait d’être gérée en commun pendant encore cinq ans.

La situation de trésorerie des tribunaux pénaux internationaux en fin de mois est positive depuis trois ans.  L’Assemblée générale a noté la possibilité d’employer les excédents inscrits aux comptes des tribunaux internationaux fermés en dernier recours pour pallier les manques de liquidités temporaires au titre du budget ordinaire.

La santé financière de l’Organisation, insiste le Secrétaire général, est tributaire du versement en temps voulu par les États Membres de la totalité des sommes dont ils sont redevables.  En outre, si l’on veut rendre les paiements plus prévisibles et donc améliorer l’efficacité de la gestion financière de l’Organisation, il est essentiel que les États Membres communiquent les dates auxquelles ils comptent s’acquitter de leurs contributions ou s’engagent à effectuer des versements à une date donnée.

Discussion générale

Dans sa mise à jour, Mme CATHERINE POLLARD, Secrétaire générale adjointe chargée du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, a déclaré qu’en ce qui concerne le budget ordinaire, le nombre total d’États Membres ayant versé l’intégralité de leurs contributions est passé à 134, grâce aux paiements de la Croatie et des États fédérés de Micronésie.  S’agissant des opérations de maintien de la paix (OMP), le Bhoutan a payé de ses contributions, ce qui porte à 48 le nombre total des États Membres qui ont payé l’intégralité de leurs contributions.  Pour les tribunaux, le Guyana et la Zambie ont payé l’intégralité de leurs contributions, ce qui porte le nombre total des États Membres à l’avoir fait à 110.  Le Bhoutan et la Zambie se sont acquittés de leur dû dans toutes les trois catégories, avec 38 autres États.

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. JIBRAN KHAN DURRANI (Pakistan) a insisté sur les problèmes socioéconomiques des pays en développement, des pays les moins avancés et des petits États insulaires en développement.  Compte tenu de leur vulnérabilité spécifique et leurs efforts de relèvement, les Nations Unies doivent être dotées du financement nécessaire pour les aider.  La gestion de budget, a insisté le représentant, doit se faire en fonction non pas de la trésorerie mais des besoins.  Il a pointé le doigt sur les arriérés importants dus par un seul État Membre qui bénéficie pourtant d’un plafond artificiel.  Le cycle budgétaire national, s’est impatienté le représentant, ne saurait être invoqué comme justifier cette situation alors que les prévisions budgétaires sont mises à mal.  Il faut absolument que les États Membres en mesure de le faire s’acquittent de leurs obligations financières le plus tôt possible, a martelé le représentant, tout en appelant à la compassion vis-à-vis des États Membres qui ne peuvent le faire pour des raisons indépendantes de leur volonté. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. MARK SEAH (Singapour) a noté que les difficultés financières de l’Organisation sont dues à des retards de paiement et a réitéré la nécessité pour tous les États Membres d’honorer leurs obligations juridiques et financières et de verser leur dû en totalité, en temps voulu et sans condition.  Malgré l’augmentation du Fonds de roulement décidée par l’Assemblée générale pour faire face à la crise de liquidités, le représentant s’est dit déçu que le Secrétariat ait dû emprunter 150 millions de dollars à ce Fonds, au mois de septembre dernier, faute de contributions suffisantes.  Ces arriérés, s’est-il impatienté, sapent l’efficacité de l’Organisation.  Il a noté que, pour les opérations de paix, le solde trimestriel de trésorerie enregistre une tendance à la baisse.  À l’heure où le multilatéralisme est absolument nécessaire, il faut redoubler d’efforts pour que l’ONU dispose des ressources nécessaires, a conclu le représentant.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MEDARD AINOMUHISHA (Ouganda) a réitéré sa position de principe selon laquelle la santé financière de l’ONU dépend des États Membres qui doivent s’acquitter de leurs obligations pleinement, à temps et sans condition.  Il a salué ceux qui, en dépit de leurs difficultés économiques, ont consenti à d’énormes sacrifices pour régler leurs contributions.  Se félicitant des dérogations accordées par l’Assemblée générale aux pays qui n’ont pu honorer leurs obligations pour des raisons indépendantes de leur volonté, le représentant s’est tout de même dit préoccupé par le fait que le Secrétariat ait dû recourir à un emprunt pour verser les salaires des fonctionnaires à la fin du mois de septembre.  L’imprévisibilité des contributions et leur versement tardif compromettent la bonne exécution des mandats, s’est-il impatienté, en n’oubliant pas de demander au Secrétaire général de rembourser dans les temps les pays contributeurs de troupes, de personnel de police et de matériels aux opérations de paix.

M. JI HAOJUN (Chine) a rappelé que son pays est devenu le deuxième plus gros contributeur des Nations Unies, en dépit de ses difficultés économiques.  Il n’a donc pas manqué de dénoncer cet autre grand contributeur qui doit encore 80% de ses contributions.  Il faut améliorer la prévisibilité de ces contributions pour éviter les problèmes de liquidités, a dit le représentant, avant de souligner qu’au fur et à mesure que des défis tels que la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, la crise énergétique ou encore les conflits s’accumulent, le monde attend de l’ONU un appui substantiel.  Il a d’ailleurs appelé le Secrétaire général à une meilleure discipline budgétaire, à savoir la réduction des dépenses et l’amélioration de l’efficacité, ajoutant que le Secrétariat doit garantir une bonne utilisation de tous les fonds.

M. ISMAIL MARHOUN MOHAMMED AL ABRI (Oman) a appelé les États Membres qui n’ont pas versé leurs contributions à le faire dès que possible.  Attirant l’attention sur la situation financière des pays en développement et des pays les moins avancés, le représentant a estimé qu’il faut réexaminer avec réalisme le barème des quotes-parts et en même temps rationaliser les dépenses du Secrétariat.

Mme HIND JERBOUI (Maroc) s’est dite convaincue que l’amélioration de la situation financière demeure indispensable pour remplir les objectifs stratégiques de l’ONU.  La mise en œuvre efficace du programme de travail dépend de la capacité financière, notamment du versement des contributions en temps voulu.  La représentante s’est prononcée en faveur d’une augmentation des liquidités pour éviter de recourir à des solutions alternatives, comme puiser dans les réserves des opérations de paix.

M. JAMES STAPLES (Royaume-Uni) s’est réjoui de ce que la situation financière des Nations Unies s’améliore, mais in fine tout dépend du paiement intégral et à temps des contributions par tous les États Membres.  Tenant compte des préoccupations du Secrétariat face à l’impact des paiements imprévisibles et tardifs, le Royaume-Uni, a souligné le représentant, a désormais aligné son cycle budgétaire avec celui de l’ONU.  Tous les États Membres devraient suivre cet exemple, a-t-il dit.  Il a félicité le Contrôleur des Nations Unies et le reste de l’Organisation pour avoir établi soigneusement des priorités dans l’utilisation des ressources disponibles, en mettant clairement l’accent sur les activités qui donnent les meilleurs résultats.  Il est essentiel que chaque dollar dépensé par les Nations Unies ait le plus grand impact possible sur le terrain, a-t-il conclu. 

Mme ABO AI (Japon) a salué la Commission pour avoir convenu de mesures pour l’amélioration de la situation financière de l’ONU.  Elle a dit attendre avec impatience des avancées réelles dans l’exécution du budget.  En attendant, elle a rappelé la responsabilité de chaque État Membre de verser ses contributions en totalité et en temps voulu, mais elle a souligné l’importance de fixer des niveaux de contributions réalistes qui soient à la fois nécessaires et suffisants pour l’exécution des mandats.  Réitérant le fait que les États Membres ont des ressources limitées, elle a insisté sur la responsabilité partagée des États Membres et du Secrétariat de viser la plus grande efficacité dans l’utilisation des ressources.  Elle a salué les efforts continus du Secrétariat pour fournir les informations nécessaires sur la situation financière de l’ONU, avant d’insister une nouvelle fois sur la discipline budgétaire, indispensable au bon fonctionnement de l’ONU et à l’exécution des mandats. 

Mme JÉVANAH RAYDON LA ROSE (Guyana) a pris note de l’appel lancé aux États Membres pour qu’ils versent leurs contributions en totalité et en temps voulu afin de faciliter la planification budgétaire.  Guyana reste déterminé à le faire, a-t-elle dit, avant d’inviter ceux qui éprouvent des difficultés à payer leurs contributions à informer le Secrétariat de leur plan de paiement.  Bien que préoccupée par les problèmes de liquidités auxquels l’Organisation est confrontée, notamment en ce qui concerne le budget ordinaire, elle s’est réjouie de ce que les perspectives s’améliorent.  Elle a toutefois regretté que l’imprévisibilité des recouvrements ait contraint l’Organisation à emprunter au Fonds de roulement, au mois de septembre, pour faire face à ses obligations salariales. 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a appelé les États Membres qui éprouvent des difficultés à payer à temps et en totalité leurs contributions à recourir aux plans pluriannuels de paiement pour permettre à l’ONU d’améliorer sa planification budgétaire.  L’imprévisibilité des paiements est un fléau qui ne peut être éliminé que si les États Membres versent leurs contributions dans les délais, et intégralement.  L’ONU pourrait ainsi se concentrer sur l’exécution de ses programmes plutôt que sur la gestion des liquidités.  Le représentant a salué les efforts de transparence et l’engagement du Secrétariat à utiliser les ressources de manière efficace. 

M. AL KANDARI (Koweït) a mis l’accent sur la nécessité de parvenir à la stabilité financière de l’Organisation afin de lui permettre de s’acquitter de ses mandats dans les différentes régions du monde.  Le Koweït, a-t-il dit, apprécie au plus haut point les efforts du Secrétaire général qui restent tributaires du paiement par les États Membres de leur quote-part.  Le représentant a assuré que le Koweït a toujours honoré ses engagements financiers, sans condition préalable et dans les délais prévus.  Il a appelé les États Membres à faire de même.

Mme REGINA CHAMA BOMA (Zambie) a estimé qu’alors que le monde sort de la pandémie, il est confronté à des difficultés qui impactent les économies nationales.  La représentante s’est prononcée pour le maintien de la méthode de paiement actuelle et du niveau des contributions, compte tenu de la lenteur à laquelle les économies se relèvent.  Elle s’est d’ailleurs réjouie de la possibilité offerte aux États Membres de présenter des échéanciers de paiement pluriannuels.

Mme ELIZABETH STETTER (États-Unis) a déclaré que son pays a considérablement réduit ses arriérés, les faisant passer de 639 millions de dollars à 323 millions.  Nous prévoyons, a-t-elle promis, de les réduire encore de 100 millions de dollars cette année.  Nous continuerons, a-t-elle aussi promis, de verser nos contributions de façon prévisible, au premier trimestre de notre exercice budgétaire.  Se félicitant, une nouvelle fois, que le Fonds de roulement ait été augmenté d’une somme de 100 millions de dollars, la représentante s’est dite préoccupée par le fait que d’autres grands contributeurs aient largement modifié leur échéancier de paiement, ce qui rend très difficile la planification des dépenses.  Elle a exhorté ces États Membres à communiquer au plus tôt au Secrétariat leur plan de paiement. 

M. RICHARD TUR DE LA CONCEPCIÓN (Cuba) s’est dit soulagé de l’amélioration de la situation financière de l’ONU et de la suspension des restrictions budgétaires.  Toutefois, les arriérés correspondant au seul budget ordinaire dépassent déjà 1,1 milliard de dollars à ce jour, ce qui est tout simplement inacceptable pour la stabilité de l’Organisation.  Il s’est insurgé contre le pays hôte qui, une fois de plus, doit un montant exorbitant.  En effet, a-t-il précisé, les États-Unis doivent plus de 900 millions de dollars au titre du budget ordinaire, ce qui représente 78% du total des arriérés.  Pour M. Tur de la Concepción, il s’agit d’une volonté délibérée de retenir les paiements pour exercer une pression sur l’Organisation.  Pour sa part, a fait savoir M. Tur de la Concepción, Cuba a payé son dû au prix de grands efforts, et malgré les dégâts causés par le blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis depuis plus de 60 ans.

Reprenant la parole, la Secrétaire générale adjointe chargée du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, a dit aux délégations: je puis vous assurer que nous dépenserons vos contributions de façon responsable, conformément aux règles de gestion financière.  Pour éviter que le Secrétariat multiplie les dépenses à la fin d’un cycle budgétaire, il faut, a-t-elle souligné, que les États Membres versent leur paiement plutôt dans toute l’année, ce qui permettrait une planification budgétaire précise.  Elle a remercié les États Membres de leur soutien et les a assurés de la détermination de son équipe et du Contrôleur de rester à leur écoute. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Haïti: Le Conseil de sécurité adopte un régime de sanctions ciblées visant Jimmy Cherizier et ceux qui menacent la paix, la sécurité ou la stabilité

9159e séance - matin
CS/15073

Haïti: Le Conseil de sécurité adopte un régime de sanctions ciblées visant Jimmy Cherizier et ceux qui menacent la paix, la sécurité ou la stabilité

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, à l’unanimité de ses membres, la résolution 2653 (2022), par laquelle il crée un régime de sanctions concernant Haïti (interdiction de voyager, gel des avoirs et embargo sur les armes ciblé) ainsi qu’un comité et un groupe d’experts pour en assurer l’application.  Un texte qui envoie un message clair que les violences doivent cesser et que la communauté internationale n’abandonne pas le peuple haïtien, ont souligné les délégations. 

Le préambule de ce texte rappelle la résolution 2645 (2022) du 15 juillet 2022, qui a prorogé d’un an le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) et exigé la cessation immédiate de la violence en bande organisée et des activités criminelles.  Le Conseil s’était alors déclaré disposé à prendre des mesures appropriées contre quiconque participerait à la violence en bande organisée et à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains ou appuierait de tels actes ou agirait de manière à compromettre la paix, la stabilité et la sécurité d’Haïti et de la région. 

La résolution adoptée aujourd’hui met à exécution cette volonté du Conseil qui constate « la dégradation des crises prolongées qui frappent Haïti sur les plans politique, institutionnel, économique, humanitaire, de la sécurité, des droits humains et de la sécurité alimentaire ».  Le texte commence par exiger, une nouvelle fois, la cessation immédiate de la violence, des activités criminelles et des atteintes aux droits humains et par exhorter tous les acteurs politiques à engager de réelles négociations constructives pour sortir de l’impasse politique actuelle afin que puissent se tenir des élections législatives et présidentielle inclusives, libres et régulières, dès que les conditions de sécurité le permettront. 

Le Conseil s’adresse ensuite aux États Membres en leur demandant de prendre des « mesures » pour une période initiale d’un an.  Ils devront ainsi empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des personnes ou entités visées à l’annexe de la résolution ou désignées par le Comité qu’il crée par la même résolution.  Ils devront aussi geler immédiatement tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire qui sont en la possession ou sous le contrôle, direct ou indirect, de ces mêmes personnes ou entités.  Enfin, les États Membres sont priés d’empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à des personnes ou entités désignées par le Comité, d’armements et de matériels connexes de tous types. 

La seule personne figurant en annexe de la résolution est Jimmy Cherizier (alias « Barbecue »), l’un des chefs de bande les plus influents d’Haïti qui dirige une fédération de bandes organisées connue sous le nom de « Famille G9 et alliés ».  Il est désigné notamment pour avoir « commis des actes menaçant la paix, la sécurité et la stabilité d’Haïti ». 

Les mesures s’appliqueront à d’autres personnes et entités si elles sont désignées par le Comité comme étant responsables ou complices d’activités faisant peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité en Haïti, ou parce qu’elles ont pris part, directement ou indirectement, à de telles activités.  Le texte enjoint les États Membres de prendre des mesures dans le respect du droit international.  Le Secrétaire général est prié quant à lui de procéder, en étroite consultation avec le Groupe d’experts, à une évaluation des progrès au plus tard le 15 septembre 2023. 

La résolution, qui, selon les délégations, a pris en compte les points de vue de tous après des négociations fortes, a été saluée comme une preuve que le Conseil de sécurité peut trouver un consensus, même dans des circonstances difficiles et polémiques.  Elle envoie un « message clair » aux mauvais acteurs, c’est-à-dire, aux chefs de gangs, à ceux qui les soutiennent et les financent, aux partis politiques haïtiens: la violence doit cesser.  La communauté internationale ne restera pas sans rien faire pendant que vous semez le chaos, ont expliqué les États-Unis et le Mexique, porte-plumes du texte adopté.  Avec cette résolution qui montre le sérieux du Conseil sur la question d’Haïti, c’est aussi un message envoyé à son peuple: la communauté internationale ne les abandonne pas, a ajouté la Chine.  

La résolution a également été qualifiée de « pas important franchi » dans la bonne direction.  Il ne fait aucun doute, s’est réjoui le pays concerné, que ces sanctions contribueront à mettre un frein aux activités violentes et meurtrières des groupes armés qui prolifèrent dans le pays.  Elles pourront atténuer les souffrances que subit Haïti, a renchéri le Brésil.  Il s’agit dès lors, de mettre en œuvre ces mesures, immédiatement et dans la lettre et l’esprit de la résolution, a demandé le Gabon.   

Mais, a nuancé le Kenya, le succès dépendra du niveau de coopération de la communauté internationale, en particulier des États de la région, d’autant que le problème du flux des armes illégales aux Caraïbes n’est pas directement lié à Port-au-Prince: d’autres acteurs sont concernés et ne doivent pas être écartés du régime de sanctions ni du mandat du Groupe d’experts, a insisté la Fédération de Russie. 

Si les sanctions ont été bien accueillies, certains membres du Conseil ont mis en garde qu’elles ne pourront éradiquer, à elles seules, les problèmes politiques, ni le niveau élevé de violence qui rongent Haïti.  Si la résolution ne cible que les gangs, il ne s’agit que d’un volet du travail du Conseil, ont par exemple relevé la Norvège, le Ghana et la Fédération de Russie.  Une solution à long terme devra prendre en considération la nécessité d’un processus politique inclusif, du développement socioéconomique, de l’élimination de la pauvreté et des inégalités.   

Dans ce contexte, le représentant d’Haïti a redit que la Police nationale d’Haïti ne dispose pas d’une capacité à la hauteur de la menace que font peser les groupes armés.   Il a réitéré la requête de son gouvernement pour obtenir une force spécialisée qui viendrait en aide à la police.   À cet égard, les États-Unis et le Mexique préparent un autre projet de résolution visant à autoriser une mission d’assistance non onusienne pour contribuer à la sécurité et à l’aide humanitaire, lui ont répondu les États-Unis. 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI S/2022/747S/2022/761

Texte du projet de résolution S/2022/765

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité d’Haïti,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures concernant Haïti, en particulier sa résolution  2645  (2022), dans laquelle il a notamment prorogé d’un an le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), exigé la cessation immédiate de la violence en bande organisée et des activités criminelles, et s’est déclaré disposé à prendre des mesures appropriées, selon qu’il conviendrait, contre quiconque participerait à la violence en bande organisée et à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains ou appuierait de tels actes ou agirait de manière à compromettre la paix, la stabilité et la sécurité d’Haïti et de la région,

Notant avec une profonde inquiétude la dégradation des crises prolongées qui frappent Haïti sur les plans politique, institutionnel, économique, humanitaire, de la sécurité, des droits humains et de la sécurité alimentaire et réaffirmant la volonté de la communauté internationale de continuer d’épauler le peuple haïtien,

Sachant que l’exclusion et les inégalités peuvent aggraver la situation concernant Haïti,

Soulignant qu’il incombe en premier lieu au Gouvernement haïtien de s’attaquer aux facteurs persistants d’instabilité et d’inégalité,

Réaffirmant la nécessité de parvenir à un accord urgent sur un cadre pérenne, assorti de délais et communément accepté, en vue d’un processus politique dirigé par les Haïtiens qui permette d’organiser des élections présidentielle et législatives inclusives, libres et régulières qui soient menées en toute transparence, dès que les conditions de sécurité seront réunies et que la préparation logistique le permettra, avec la participation pleine, égale et réelle des femmes et la participation des jeunes, de la société civile et des autres parties prenantes concernées, et rappelant qu’il a prié le Gouvernement haïtien de faire le point sur le processus politique,

Constatant avec une vive préoccupation l’extrême violence en bande organisée et d’autres activités criminelles, notamment les enlèvements, la traite de personnes et le trafic de migrants, les homicides et les violences sexuelles et fondées sur le genre, dont les viols et l’esclavage sexuel, ainsi que l’impunité des auteurs de tels actes, la corruption et le recrutement d’enfants par les bandes organisées, et les conséquences de la situation d’Haïti sur la région,

Craignant que le commerce et le détournement illicites d’armes et de matériels connexes de tous types contribuent à porter atteinte à l’état de droit et au respect des droits humains, et entravent l’acheminement de l’aide humanitaire et aient de nombreuses répercussions sur les plans humanitaire et socioéconomique,

Notant qu’il faut interdire le transfert d’armes de petit calibre, d’armes légères et de munitions aux acteurs non étatiques qui participent à la violence en bande organisée, à des activités criminelles ou à des atteintes aux droits humains en Haïti ou qui appuient de tels actes, et prévenir le commerce et le détournement illicites de telles armes,

Encourageant les États Membres à coopérer entre eux pour prévenir le commerce et le détournement illicites d’armes, notamment en communiquant et en échangeant des informations actualisées en temps utile afin de répertorier les sources et les chaînes d’approvisionnement du trafic illicite et de s’y attaquer,

Sachant qu’il importe de toute urgence de bloquer les flux financiers illicites à destination d’Haïti, qui permettent aux bandes armées d’opérer et menacent de plus en plus la stabilité du pays, notamment en rompant en priorité les liens entre les acteurs politiques et économiques et les bandes,

Se déclarant préoccupé par le fait que la Police nationale d’Haïti n’a pas accès aux ports vitaux, qui sont largement sous le contrôle des bandes organisées, et demandant qu’il soit mis fin à l’occupation illégale des ports et des terminaux pétroliers par ces bandes,

Se félicitant du lancement de programmes techniques par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) visant à aider les autorités nationales à promouvoir le contrôle des frontières et des ports, à repérer les flux financiers illicites, à collaborer à travers la frontière pour combattre la criminalité transnationale, la corruption et le trafic de drogues et d’armes, notamment au moyen du Programme de contrôle des conteneurs mené par l’ONUDC et l’Organisation mondiale des douanes en Haïti et des programmes de gestion des frontières, et saluant la feuille de route régionale de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) visant à lutter contre le trafic des armes à feu,

Conscient du rôle important que jouent les pays voisins, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales telles que la CARICOM et d’autres partenaires internationaux,

Se déclarant profondément préoccupé par les activités criminelles déstabilisantes que continuent de mener les bandes armées en Haïti et par le transfert persistant d’armes de petit calibre, d’armes légères et de munitions à des acteurs participant à la violence en bande organisée ou la soutenant,

Condamnant les attaques et les enlèvements visant le personnel des Nations Unies, ainsi que les violences perpétrées contre des locaux diplomatiques et le pillage de matériel humanitaire, et rappelant que c’est à l’État hôte au premier chef qu’il appartient d’assurer la sûreté et de la sécurité du personnel et des biens des Nations Unies,

Demandant à tous les acteurs en Haïti d’interdire expressément toutes violations des droits humains et atteintes à ces droits, et soulignant qu’il est nécessaire que tous les acteurs garantissent un accès immédiat, sûr et sans entrave aux organisations humanitaires,

Soulignant que les mesures imposées par la présente résolution n’ont pas pour objet d’avoir des conséquences humanitaires négatives pour la population civile d’Haïti,

Considérant qu’il faut s’assurer que des procédures équitables et claires sont en place pour radier des listes relatives aux sanctions des personnes, des groupes, des entreprises et des entités visées dans la présente résolution, et exprimant son intention d’envisager d’habiliter le Médiateur à recevoir ces demandes de radiation,

Affirmant que la situation en Haïti continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Exige la cessation immédiate de la violence, des activités criminelles et des atteintes aux droits humains, qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité d’Haïti et de la région, notamment les enlèvements, les violences sexuelles et fondées sur le genre, la traite des personnes et le trafic de migrants, ainsi que les homicides, les exécutions extrajudiciaires et le recrutement d’enfants par les groupes armés et les réseaux criminels;

2.    Exhorte tous les acteurs politiques à engager de réelles négociations constructives pour sortir de l’impasse politique actuelle afin que puissent se tenir des élections législatives et présidentielle inclusives, libres et régulières, dès que les conditions de sécurité le permettront;

Interdiction de voyager

3.    Décide que tous les États Membres doivent, pour une période initiale d’un an à compter de l’adoption de la présente résolution, prendre les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des personnes désignées par le Comité créé au paragraphe 19 ci-dessous, étant entendu que rien dans les dispositions du présent paragraphe n’oblige un État à refuser l’entrée sur son territoire à ses propres nationaux;

4.    Note qu’il est possible qu’une personne désignée ait plusieurs nationalités ou passeports, se déclare préoccupé par le fait que, dans cette éventualité, les déplacements entre les deux États concernés risquent de porter atteinte aux objectifs visés par l’interdiction de voyager imposée au paragraphe 3 et prie le Groupe d’experts créé en application du paragraphe 21 de la présente résolution (ci-après « le Groupe d’experts ») de signaler au Comité de tels déplacements;

5.    Décide que les mesures imposées par le paragraphe 3 ci-dessus ne s’appliquent pas dans les cas suivants:

a)    lorsque le Comité établit que tel ou tel voyage se justifie par des raisons humanitaires, y compris un devoir religieux;

b)    lorsque l’entrée ou le passage en transit est nécessaire aux fins d’une procédure judiciaire; et

c)    lorsque le Comité conclut que telle ou telle dérogation favoriserait la réalisation des objectifs de paix et de stabilité en Haïti;

Gel des avoirs

6.    Décide que tous les États Membres doivent, pour une période initiale d’un an à compter de la date de l’adoption de la présente résolution, geler immédiatement tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire qui sont en la possession ou sous le contrôle, direct ou indirect, des personnes ou entités visées à l’annexe de la présente résolution ou désignées par le Comité ou de toute personne ou entité agissant pour leur compte ou sur leurs instructions, ou de toute entité en leur possession ou sous leur contrôle, et décide également que tous les États Membres doivent veiller à ce que ni ces fonds, ni d’autres fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ne soient mis à la disposition, directement ou indirectement, de ces personnes ou entités par leurs ressortissants ou par des personnes établies sur leur territoire;

7.    Décide que les mesures visées au paragraphe 6 ci-dessus ne s’appliquent pas aux fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques dont les États Membres concernés auront déterminé:

a)    qu’ils sont nécessaires pour régler des dépenses ordinaires – denrées alimentaires, loyers, mensualités de prêts hypothécaires, médicaments, soins médicaux, impôts, primes d’assurance, factures de services collectifs de distribution – ou pour régler ou rembourser des dépenses engagées dans le cadre de la prestation de services juridiques, notamment des honoraires, conformément à la législation nationale, ou des frais ou commissions liés au maintien en dépôt de fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques gelés, conformément à la législation nationale, après que l’État Membre concerné a informé le Comité de son intention d’autoriser, dans les cas où cela serait justifié, l’accès à ces fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques et en l’absence de décision contraire du Comité dans les cinq jours ouvrables suivant cette notification;

b)    qu’ils sont nécessaires pour régler des dépenses extraordinaires, à condition que le ou les États Membres concernés en aient avisé le Comité et que celui-ci ait donné son accord;

c)    qu’ils font l’objet d’un privilège ou d’une décision judiciaire, administrative ou arbitrale, auquel cas ils peuvent être utilisés à cette fin, à condition que le privilège ou la décision soient antérieurs à la date de la présente résolution, que le créancier privilégié ou le bénéficiaire de la décision judiciaire, administrative ou arbitrale ne soit pas une personne ou une entité désignée par le Comité et que le privilège ou la décision judiciaire, administrative ou arbitrale aient été portés à la connaissance du Comité par l’État ou les États Membres concernés;

8.    Décide que les États Membres pourront autoriser le versement, aux comptes gelés en vertu des dispositions du paragraphe 6 ci-dessus, des intérêts et autres rémunérations revenant à ces comptes ou des paiements dus au titre de marchés, d’accords ou d’obligations souscrits avant la date à laquelle ces comptes ont été assujettis aux dispositions de la présente résolution, étant entendu que ces intérêts, rémunérations et paiements resteront assujettis auxdites dispositions et resteront gelés;

9.    Décide que les mesures visées au paragraphe 6 ci-dessus n’interdisent à aucune personne ou entité désignée d’effectuer des paiements au titre d’un contrat passé avant son inscription sur la liste, dès lors que les États concernés se sont assurés que le paiement n’est pas reçu directement ou indirectement par une personne ou entité visée au paragraphe 6 ci-dessus et qu’ils ont signifié au Comité avec un préavis de 10 jours leur intention d’effectuer ou de recevoir de tels paiements ou d’autoriser, selon qu’il conviendrait, le déblocage à cette fin de fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques;

10.   Décide également, sans préjudice des programmes d’aide humanitaire menés ailleurs, que les mesures imposées au paragraphe 6 de la présente résolution ne s’appliquent pas aux fonds, autres avoirs financiers ou ressources économiques nécessaires à l’acheminement en temps voulu, par l’Organisation des Nations Unies, les institutions spécialisées ou programmes des Nations Unies, les organisations humanitaires dotées du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale qui fournissent une aide humanitaire et leurs partenaires d’exécution, y compris les organisations non gouvernementales bénéficiant d’un financement bilatéral ou multilatéral qui participent au Plan d’aide humanitaire pour Haïti mis en place par les Nations Unies, de l’aide humanitaire dont Haïti a besoin d’urgence ou à l’appui d’autres activités visant à répondre aux besoins essentiels des personnes en Haïti;

Embargo sur les armes ciblé

11.   Décide que, pour une période d’un an à compter de l’adoption de la présente résolution, tous les États Membres devront prendre immédiatement les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à des personnes ou entités désignées par le Comité, ou à leur profit, à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires ou d’aéronefs battant leur pavillon, d’armements et de matériels connexes de tous types, y compris les armes et les munitions, les véhicules et les matériels militaires, les équipements paramilitaires et les pièces détachées correspondantes, ainsi que toute assistance technique ou formation et toute aide financière ou autre en rapport avec les activités militaires ou la fourniture, l’entretien ou l’utilisation de tous armements et matériels connexes, y compris la mise à disposition de mercenaires armés venant ou non de leur territoire;

12.   Encourage les États Membres à veiller à ce que des mesures adéquates de marquage et d’enregistrement soient en place et permettent de garantir la traçabilité des armes, en particulier des armes légères et de petit calibre, conformément aux instruments régionaux et internationaux auxquels ils sont parties, et à réfléchir aux meilleurs moyens d’aider les pays voisins, s’il y a lieu et à la demande de ces pays, à prévenir et détecter tout trafic ou détournement en violation des mesures imposées au paragraphe 11 de la présente résolution;

13.   Demande à tous les États Membres, en particulier aux États de la région, agissant conformément à leur jurisprudence et leur législation internes et au droit international, de faire inspecter sur leur territoire, y compris dans les ports maritimes et aéroports, tous les chargements à destination d’Haïti, si les États concernés disposent d’informations leur donnant des motifs raisonnables de penser que ces chargements contiennent des articles dont la fourniture, la vente ou le transfert sont interdits par le paragraphe 11 de la résolution, afin de garantir une stricte application de ces dispositions;

14.   Encourage la coopération régionale terrestre, aérienne et maritime, selon les besoins, visant à repérer et à prévenir les violations des mesures imposées au paragraphe 11 de la présente résolution, et à les signaler en temps voulu au Comité créé en application des dispositions du paragraphe 19 plus bas;

Critères de désignation

15.   Réaffirme que les mesures édictées au paragraphe 3 s’appliquent à toutes les personnes, et celles édictées aux paragraphes 6 et 11 à toutes les personnes et entités, que le Comité créé en application du paragraphe 19 de la présente résolution aura désignées comme étant responsables ou complices d’activités faisant peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité en Haïti, ou comme ayant pris part, directement ou indirectement, à de telles activités;

16.   Décide que les actes décrits au paragraphe 15 ci-dessus peuvent comprendre, sans s’y limiter:

a)    Le fait de prendre part, directement ou indirectement, à des activités criminelles et à des actes de violence impliquant des groupes armés et des réseaux criminels qui encouragent la violence, notamment le recrutement forcé d’enfants par ces groupes et réseaux, les enlèvements, la traite des personnes et le trafic de migrants ainsi que les homicides et la violence sexuelle et fondée sur le genre, ou de soutenir ces activités;

b)    Le fait de soutenir le trafic et le détournement d’armements et de matériels connexes ou les flux financiers illicites qui y sont liés;

c)    Le fait d’agir pour le compte d’une personne ou entité se livrant aux activités visées aux alinéas a) et b) ci-dessus, ou en son nom ou sur ses instructions, ou de lui fournir toute autre forme d’appui ou de financement, notamment en utilisant directement ou indirectement le produit de la criminalité organisée, dont la production et le commerce illicites de stupéfiants et de leurs précurseurs en provenance d’Haïti ou en transit dans le pays, la traite d’êtres humains et le trafic de migrants en provenance d’Haïti, ou la contrebande et le trafic d’armes à destination ou en provenance d’Haïti;

d)    Le fait d’agir en violation de l’embargo sur les armes imposé au paragraphe 11 de la présente résolution, ou de fournir, vendre ou transférer directement ou indirectement à des groupes armés ou à des réseaux criminels opérant en Haïti des armes ou du matériel connexe, ou des conseils techniques, une formation ou une assistance, y compris un financement ou une assistance financière, en lien avec les activités violentes de groupes armés ou de réseaux criminels en Haïti, ou d’en être les destinataires;

e)    Le fait de préparer, donner l’ordre de commettre ou commettre en Haïti des actes contraires au droit international des droits de l’homme ou au droit international humanitaire ou constituant des atteintes aux droits humains ou des violations de ces droits, notamment des exécutions extrajudiciaires, y compris de femmes et d’enfants, des actes de violence, des enlèvements, des disparations forcées ou des enlèvements contre rançon;

f)    Le fait de préparer, de donner l’ordre de commettre ou de commettre en Haïti des actes de violence sexuelle ou fondée sur le genre, y compris le viol et l’esclavage sexuel;

g)    Le fait de faire obstacle à l’acheminement de l’aide humanitaire destinée à Haïti, à l’accès à cette aide ou à sa distribution dans le pays;

h)    Le fait d’attaquer le personnel ou les locaux des missions et opérations des Nations Unies en Haïti ou d’apporter un appui à ces attaques;

17.   Enjoint aux États Membres de faire en sorte que toutes les mesures prises pour appliquer la présente résolution soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, selon qu’il convient;

18.   Décide que les personnes visées à l’annexe de la présente résolution seront soumises aux mesures imposées aux paragraphes 3, 6 et 11 plus haut;

Comité des sanctions

19.   Décide de créer, conformément à l’article 28 de son règlement intérieur provisoire, un comité du Conseil de sécurité composé de tous ses membres (ci-après « le Comité »), qui s’acquittera des tâches suivantes:

a)    Suivre l’application des mesures prévues aux paragraphes 3, 6 et 11 plus haut en vue de renforcer, de faciliter et d’améliorer leur mise en œuvre par les États Membres, et examiner les demande de dérogation aux mesures imposées par les paragraphes 5 et 7 de la présente résolution et se prononcer à leur sujet;

b)    Chercher à obtenir des informations concernant les personnes et entités qui se livreraient aux actes décrits aux paragraphe 15 et 16 plus haut et les passer en revue;

c)    Désigner les personnes et entités visées par les mesures imposées aux paragraphes 3, 6 et 11 plus haut;

d)    Arrêter et promulguer les directives qui pourraient être nécessaires pour faciliter la mise en œuvre des mesures imposées ci-dessus;

e)    Lui adresser dans un délai de 60 jours un rapport sur ses travaux, accompagné de ses observations et recommandations, en particulier sur les moyens de renforcer l’efficacité des mesures imposées par les paragraphes 3, 6 et 11 de la présente résolution, puis lui faire rapport chaque année;

f)    Favoriser le dialogue entre le Comité et les États Membres intéressés, en particulier ceux de la région, notamment en invitant leurs représentants à le rencontrer afin d’examiner la question de l’application des mesures;

g)    Solliciter de tous les États toutes informations qu’il jugerait utiles concernant les actions que ceux-ci ont engagées pour appliquer les mesures de façon effective;

h)    Examiner les informations faisant état de violations ou du non-respect des mesures imposées aux paragraphes 3, 6 et 11 et y donner la suite qui convient;

20.   Charge le Comité de coopérer avec les autres comités des sanctions du Conseil de sécurité;

Présentation de rapports

21.   Prie le Secrétaire général de créer, en consultation avec le Comité et pour une période initiale de treize mois, un groupe composé de 4 experts (le « Groupe d’experts »), qui sera placé sous l’autorité du Comité, et de prendre les dispositions voulues sur le plan financier et en matière de sécurité pour épauler le Groupe dans ses activités, et décide que le Groupe sera chargé des tâches suivantes:

a)    Aider le Comité à s’acquitter de son mandat, défini dans la présente résolution, notamment en lui fournissant à tout moment des informations pouvant servir à désigner éventuellement par la suite des personnes et entités qui se livreraient aux activités décrites aux paragraphes 15 et 16 plus haut;

b)    Réunir, examiner et analyser toutes informations provenant des États, des organismes des Nations Unies compétents, d’organisations régionales et d’autres parties intéressées concernant l’application des mesures édictées dans la présente résolution, en particulier celles qui portent sur la source ou les itinéraires du trafic d’armes en Haïti ou des faits entravant la transition politique;

c)    Lui présenter, après concertation avec le Comité, un rapport d’activité le 15 mars 2023 au plus tard, un rapport final le 15 septembre 2023 au plus tard, et lui adresser d’autres rapports périodiques dans l’intervalle;

d)    Aider le Comité à préciser et à actualiser les informations concernant la liste des personnes et entités visées par les mesures imposées aux paragraphes 3, 6 et 11 de la présente résolution, notamment en fournissant des renseignements concernant leur identité et d’autres renseignements pouvant servir à établir le résumé des motifs présidant à leur inscription sur la liste, qui est mis à la disposition du public;

22.   Charge le Groupe d’experts de coopérer avec le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, la Communauté des Caraïbes et les autres groupes d’experts qu’il a créés pour épauler ses comités des sanctions, selon qu’il convient;

23.   Demande instamment à toutes les parties et à tous les États Membres, ainsi qu’aux organisations internationales, régionales et sous-régionales, de coopérer avec le Groupe d’experts, et prie instamment tous les États Membres concernés de garantir la sécurité des membres du Groupe d’experts et de leur donner libre accès, notamment aux personnes, documents et lieux pertinents pour l’exécution de leur mandat;

24.   Note que la procédure de sélection des experts devrait favoriser la nomination des personnes les mieux qualifiées pour exercer les fonctions décrites ci-dessus, compte dûment tenu de l’importance de la représentation régionale et de l’égalité des sexes dans le processus de recrutement;

Réexamen de la situation

25.   Affirme qu’il suivra en permanence la situation en Haïti et se tiendra prêt à examiner l’opportunité des mesures énoncées dans la présente résolution, y compris de leur renforcement, de leur modification, de leur suspension ou de leur levée, à la lumière des progrès accomplis par rapport aux principaux objectifs suivants:

a)    Une fois mises en place les capacités requises dans les domaines judiciaire et de l’état de droit permettant de lutter contre les groupes armés et les activités criminelles 

b)    Réduction progressive des niveaux de la violence commise par les groupes armés et les réseaux criminels, y compris les homicides volontaires, les enlèvements et les cas de violence sexuelle et fondée sur le genre, mesurée annuellement, à compter de la période initiale de 12 mois suivant l’adoption de la présente résolution;

c)    Progrès dans la réalisation des objectifs 2, 3 et 4 et des cibles connexes, tels que décrits dans le rapport du Secrétaire général du 13 juin 2022 (S/2022/481);

d)    Réduction progressive du nombre d’affaires de trafic et de détournement d’armes ainsi que des flux financiers illicites qui en découlent, notamment en augmentant le nombre et le volume de saisies d’armes, mesurée annuellement, à compter de la période initiale de 12 mois suivant l’adoption de la présente résolution;

26.   Prie le Secrétaire général à cet égard, en étroite consultation avec le Groupe d’experts, de procéder, au plus tard le 15 septembre 2023, à une évaluation des progrès accomplis concernant les principaux objectifs établis au paragraphe ci-dessus;

27.   Invite l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime à collaborer avec le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti et le Groupe d’experts, selon qu’il convient, et de présenter au Comité des recommandations visant à mettre fin aux flux financiers illicites et au trafic ainsi qu’au détournement de matériel d’armement en Haïti;

28.   Décide de rester activement saisi de la question.

Annexe

Jimmy Cherizier (alias « Barbecue ») a commis des actes menaçant la paix, la sécurité et la stabilité d’Haïti et a planifié, dirigé ou commis des actes qui constituent des atteintes graves aux droits humains.

Jimmy Cherizier est l’un des chefs de bande les plus influents d’Haïti et dirige une fédération de bandes organisées connue sous le nom de « Famille G9 et alliés ».

Alors qu’il était agent de la Police nationale d’Haïti, Jimmy Cherizier a planifié et participé à l’attaque meurtrière, lancée en novembre 2018, contre des civils dans un quartier de Port-au-Prince appelé La Saline.  Au moins 71 personnes ont été tuées, plus de 400 maisons détruites et au moins sept femmes violées par des bandes armées.  En 2018 et 2019, Jimmy Cherizier a dirigé des groupes armés qui ont lancé des attaques coordonnées et brutales dans des quartiers de Port-au-Prince.  En mai 2020, Jimmy Cherizier a dirigé des bandes organisées armées qui ont attaqué pendant cinq jours plusieurs quartiers de Port-au-Prince, tuant des civils et incendiant des maisons.  Depuis le 11 octobre 2022, Jimmy Cherizier et le G9, sa fédération de bandes organisées armées, bloquent totalement la libre circulation du carburant à partir du terminal pétrolier de Varreux, le plus grand d’Haïti.  Les actes de Jimmy Cherizier ont directement contribué à la paralysie économique et à la crise humanitaire en Haïti.

Déclarations après adoption

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a voulu, conjointement avec le Mexique, en tant que coporte-plumes de cette résolution, remercier les membres du Conseil pour l’examen et l’adoption de ce texte.  Après des négociations fortes, et malgré un laps de temps très bref, elle s’est félicitée de l’adoption à l’unanimité de la résolution et du fait qu’elle intègre les points de vue de toutes les délégations, y compris la sienne. 

Elle a souligné que le texte invite à prendre des mesures contre des acteurs criminels, dont des membres de gangs et leurs soutiens financiers, ainsi que leurs dirigeants, qui ont contribué à la crise humanitaire causant tant de souffrances.  Nous envoyons un message clair aux mauvais acteurs, a-t-elle expliqué: la communauté internationales ne restera pas sans rien faire pendant que vous semez le chaos parmi le peuple haïtien.  Les sanctions sont les plus efficaces quand elles sont ciblées sur des acteurs mauvais et quand elles permettent à l’aide humanitaire d’atteindre la population, a fait remarquer la représentante en se félicitant que la résolution adoptée, aujourd’hui, atteigne ces deux objectifs.  Elle a aussi salué les mesures claires, mesurables et bien définies qui ont été prévues pour l’examen et le suivi des sanctions. 

C’est un pas important qui a été franchi pour aider le peuple haïtien et un message très clair à l’endroit de ceux qui ont pris le pays en otage, a fait observer la représentante, tout en prévenant que cette résolution n’est qu’une première étape.  Il nous reste beaucoup de travail, a-t-elle dit, en appelant à aider à restaurer la sécurité et à alléger les souffrances en fournissant une aide humanitaire au peuple haïtien.  Les États-Unis et le Mexique préparent un autre projet de résolution visant à autoriser une mission d’assistance non onusienne pour contribuer à la sécurité et à l’aide humanitaire, pour répondre à ces deux objectifs, a indiqué Mme Thomas-Greenfield.  C’est non seulement une demande du pays mais aussi une des options que le Secrétaire général a soumises au Conseil, a-t-elle précisé. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a remercié les membres du Conseil pour leur participation au processus de consultation et leurs observations constructives qui ont permis de rédiger le texte adopté.  « Cela prouve l’unité du Conseil sur une question difficile et polémique. »  Le Conseil, a dit le délégué, a envoyé un message très clair: la violence doit cesser et il importe de mettre en place un embargo sur les armes.  Le trafic d’armes représente pour beaucoup de pays un fléau contre lequel il convient de lutter avec fermeté.  De même, la résolution signale clairement que le Conseil continuera à agir contre ceux qui protègent, soutiennent et financent les bandes organisées.  En conclusion, le délégué a insisté sur la nécessité de favoriser l’avènement d’un gouvernement démocratique en Haïti.

M. GENG SHUANG (Chine) a rappelé que son pays avait été le premier à demander un régime de sanctions à l’encontre des chefs de gangs qui sévissent en Haïti, compte tenu de la situation sur le terrain.  Il a espéré que la résolution leur enverra un message très clair, non seulement à eux, mais aussi aux acteurs politiques, afin qu’ils cessent d’être les complices de ces gangs et répondent aux besoins et intérêts du peuple haïtien.  La résolution est aussi un message envoyé à ce peuple, pour qu’il comprenne que la communauté internationale ne les abandonne pas, a fait valoir le délégué.  Il a également remercié les auteurs de la résolution pour avoir tenu compte des avis d’autres délégations.

Mme MONA JUUL (Norvège) a noté que la situation alarmante en Haïti exige une réponse de la communauté internationale.  Le régime de sanctions mis en place permettra de limiter la capacité des acteurs criminels et des gangs à poursuivre leurs activités illégales et leurs violences, y compris les violences sexistes et sexuelles, ainsi que les autres violations des droits humains, s’est-elle félicitée.  Elle a également salué l’inclusion d’une exception humanitaire robuste, la mise en place de procédures claires et justes, ainsi que le rôle de l’Ombudsman.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a appuyé la résolution introduisant des sanctions à l’encontre des bandes criminelles.  Elle a admis qu’il n’a pas été facile de s’accorder sur le texte adopté mais constaté que les auteurs ont changé d’attitude et pris en considération les préoccupations de la Russie liées à une « hâte excessive », et à l’imposition de « dates butoirs artificielles ».  Le consensus a montré que, même dans les circonstances difficiles actuelles, le Conseil peut s’entendre grâce au dialogue et au sens de la responsabilité.  Le représentant a ajouté que la Russie souhaitait que les États-Unis et le Mexique tiennent davantage compte des opinions des acteurs régionaux, qui subissent également la pression des groupes terroristes autant qu’Haïti.  « Les États-Unis n’appartiennent pas à une « liste blanche » à cet égard. »  

Malgré l’appui apporté au document par la Russie, le délégué a dit ne pas être convaincu que les mesures internationales seront tout à fait adéquates pour régler la situation et les problèmes politiques dans le pays.  Une solution à long terme devra prendre en considération la nécessité d’un processus politique inclusif, du développement socioéconomique, de l’élimination de la pauvreté et des inégalités.  Le délégué a, de plus, constaté que le problème du flux des armes illégales aux Caraïbes n’est pas directement lié à Port-au-Prince: d’autres acteurs sont concernés et ne doivent pas être écartés du régime de sanctions ni du mandat du Groupe d’experts, a-t-il recommandé.  Il convient donc, à son avis, de favoriser la réforme institutionnelle sans influence de l’étranger.  Les sanctions du Conseil ne sont pas une punition mais le reflet d’une position ferme de la communauté internationale, a-t-il commenté.  À terme, il conviendra de réviser, d’alléger ou de lever les mesures de restriction internationales, a conclu le délégué. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a salué l’adoption de cette résolution qui crée un nouveau régime de sanctions, le premier depuis 2017.  S’il a toutefois reconnu que ce régime ne pourra pas, à lui seul, résoudre les problèmes que rencontre le peuple haïtien, le délégué a souligné que le Conseil a montré son sérieux sur la question d’Haïti. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a estimé que cette résolution est l’une des mesures les plus concrètes adoptée par le Conseil de sécurité ces derniers temps et la première véritable mesure visant à résoudre la crise en Haïti.  Il s’est félicité de la mise en place de critères pour mesurer l’efficacité du régime de sanctions afin de l’ajuster en fonction de l’amélioration de la situation.  Le succès de la mise en œuvre de cette résolution dépendra du niveau de coopération de la communauté internationale, en particulier des États de la région, a-t-il affirmé, soulignant en particulier l’importance du partage d’informations.  Le renforcement des institutions reste essentiel, selon le représentant.  À ce titre, il a soutenu les efforts de la CARICOM et a rappelé la nécessité d’une solution contrôlée et dirigée par Haïti. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEIH (Émirats arabes unis) a réitéré l’appui de son pays aux efforts tendant à lutter contre la criminalité organisée en imposant des sanctions.  L’embargo sur les armes est important pour endiguer le trafic d’armes, a-t-elle dit.  Évoquant les pénuries d’eau et d’électricité qui ont des effets dévastateurs sur la population, la déléguée s’est réjouie que la proposition de son pays à ce sujet ait été intégrée dans le projet de résolution.  Elle a salué les efforts des organisations régionales, notamment de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  En conclusion, elle a toutefois encouragé à l’établissement de « seuils clairs et réalisables » pour la levée des sanctions au moment opportun, appelant toutes les parties en Haïti à trouver des compromis pour résoudre les différends politiques. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déclaré que cette résolution pourra atténuer les souffrances que subit Haïti, d’autant plus que le régime de sanctions ainsi créé comporte des « exceptions humanitaires ».  Cette pratique devrait, selon lui, être plus étendue au Conseil de sécurité.  Le Brésil aurait toutefois souhaité un processus de négociation « interactif et transparent » afin d’approfondir d’autres questions, a ajouté le représentant. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a espéré que la résolution permettra de faire face aux difficultés en Haïti et d’indiquer aux auteurs de crimes et de violences « qu’ils devront rendre des comptes ».  Si ce régime de sanctions cible les gangs, il ne s’agit toutefois que d’un volet du travail du Conseil, a-t-elle noté.  L’adoption de seuils pour évaluer l’utilité et la proportionnalité des sanctions est souhaitable, a estimé la représentante, de même que les mesures permettant d’éviter toute retombée humanitaire négative sur la population.  Elle a rappelé que le Conseil ne doit « en aucun cas » exacerber les difficultés de la population.  Enfin, elle a souligné que la mise en œuvre de la résolution nécessite l’appui et la coopération de toutes les États Membres, en particulier les acteurs de la région.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a fait part de sa profonde préoccupation pour la situation de la population haïtienne et pour les souffrances qu’elle endure.  Elle s’est félicitée de l’esprit constructif qui a présidé aux discussions autour du projet de résolution, formant le vœu que le Conseil de sécurité poursuive dans cette voie.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) s’est réjoui que cette résolution ait été adoptée à l’unanimité.  Il a expliqué avoir voté en faveur de ce texte parce qu’il est de « notre responsabilité de mettre le peuple haïtien à l’abri du chaos », évoquant les espoirs assombris de ce peuple à cause de l’insécurité et de la détresse.  Ce texte vise notamment à neutraliser les gangs et à assécher leurs financement et approvisionnement, ainsi qu’à protéger la population civile et activer une riposte contre le choléra, a-t-il noté.  Espérons que le texte adopté sera mis en œuvre immédiatement dans la lettre et l’esprit, a-t-il dit, en soulignant que le Conseil de sécurité a envoyé le message fort que « nous sommes du côté du peuple haïtien ».  Le délégué a conclu en rappelant son attachement à la souveraineté et à l’intégrité du pays.

M. ANTONIO RODRIGUE (Haïti) a salué l’adoption de la résolution dont les mesures sont basées sur des critères bien définis.  Il ne fait aucun doute que ces sanctions contribueront à mettre un frein aux activités violentes et meurtrières des groupes armés qui prolifèrent dans le pays, s’est-il réjoui.  Il a également estimé que s’il s’agit d’un pas dans la bonne direction, il faut continuer sur cette lancée pour un résultat durable.  En effet, les sanctions, à elles seules, ne pourront éradiquer ce niveau de violence élevé qui ronge Haïti, selon le représentant qui a fait remarquer que la police haïtienne ne dispose pas d’une capacité à la hauteur de la menace que font peser les groupes armés.  Dans ce contexte, le représentant a plaidé pour que la requête de son gouvernement visant à obtenir « un appui robuste », sous la forme d’une force spécialisée qui viendrait en aide à la Police nationale d’Haïti, fasse l’objet d’une considération attentive de la part des membres du Conseil de sécurité. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: prudence autour d’une convention sur les aquifères transfrontières et satisfaction autour du programme pour la diffusion du droit international

Soixante-dix-septième session,
19e séance plénière, Matin
AG/J/3667

Sixième Commission: prudence autour d’une convention sur les aquifères transfrontières et satisfaction autour du programme pour la diffusion du droit international

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a conclu, ce matin, son débat sur le droit des aquifères transfrontières et entendu plus d’une vingtaine de délégations redire leur attachement au Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.

Comme pour les points de l’ordre du jour antérieurement examinés par la Commission, l’opportunité d’élaborer une convention sur la base du projet d’articles de la Commission de droit international (CDI) a été au cœur des dernières interventions prononcées au sujet des aquifères transfrontières.  « Mon pays n’est pas convaincu par l’idée d’une convention », a d’emblée déclaré la déléguée de la Fédération de Russie.

« Si une convention devait être élaborée, alors ses liens avec la Convention de New York sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation et la Convention d’Helsinki sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontaliers et des lacs internationaux devront être précisés », a néanmoins nuancé la déléguée russe.

De son côté, le délégué des Pays-Bas s’est prononcé pour l’élaboration d’une convention après l’achèvement des travaux de la Commission sur la question des ressources partagées comme les réserves gazières et pétrolières.  « Il est urgent d’adopter des mesures. » Son homologue du Chili a, lui aussi, souligné l’importance de parvenir à un accord-cadre multilatéral, dans un contexte de « crise climatique », tandis que le Japon a dénoncé la « surexploitation » de ces aquifères.

Le délégué de l’Algérie a, de son côté, souhaité que ce projet fasse l’objet de l’adoption de lignes directrices afin de guider les États sur ces questions.  Le projet doit continuer à servir d’orientation volontaire pour la pratique des États, « dans sa forme actuelle non contraignante », a appuyé la représentante de la Türkiye.

L’unanimité a en revanche été de mise s’agissant du Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.  Les délégations ont en effet exprimé leur attachement à ce Programme qui, depuis sa création en 1965, a contribué à la formation de générations de praticiens du droit international.

Avant de s’exprimer, les délégations ont entendu des présentations du Président du Comité consultatif pour le Programme d’assistance, M. Harold Agyeman, du Secrétaire par intérim du Comité, M. Huw Llewellyn, du Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, M. Miguel de Serpa Soares, et de l’Administratrice générale jurisconsulte de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer, Mme Alice Hicuburundi.

Ces orateurs ont souligné la pertinence du Programme d’assistance, avant de détailler les incidences de la pandémie de COVID-19 sur sa mise en œuvre et d’annoncer le retour de formations en présentiel.  « Le programme de bourses en droit international a pu se tenir dans des conditions normales à La Haye pendant l’été et les cours régionaux pourront être organisés en présentiel dans les mois à venir », s’est ainsi félicité M. Soares.

Les délégations ont été nombreuses à saluer un retour à des formations en présentiel, à l’instar de la République islamique d’Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, et de l’Union européenne.  « La présence en personne reste le meilleur moyen de renforcer les capacités », a fait valoir la déléguée du Maroc, au nom du Groupe des États d’Afrique, avant de demander un financement assurant une prévisibilité et un élargissement du Programme d’assistance.

Dans ce droit fil, de nombreux intervenants, dont le Cambodge, qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)), et Cuba, ont plaidé pour un financement par le budget ordinaire de l’ONU.  « Afin d’atteindre le potentiel véritable du Programme, des contributions volontaires demeurent également indispensables », a précisé M. Llewellyn.

La Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 21 octobre, à 15 heures. 

LE DROIT DES AQUIFÈRES TRANSFRONTIÈRES

Mme ANNA V. ANTONOVA (Fédération de Russie) a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur le droit des aquifères transfrontières.  Ce projet d’articles est un document subsidiaire utile pour les pays ayant l’intention de conclure des accords sur lesdits aquifères.  Elle a salué le fait que le projet reconnaisse la souveraineté des États sur l’aquifère traversant leur territoire.  La déléguée a toutefois demandé certaines clarifications, notamment autour de l’article 5.  Elle a trouvé le projet « équilibré », avant d’ajouter que son pays n’est pas convaincu par l’utilité d’élaborer une convention sur la base dudit projet.  Si une convention devait être élaborée, alors ses liens avec la Convention de New York sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation et la Convention d’Helsinki sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontaliers et des lacs internationaux devront être précisés, a conclu la déléguée.

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili), saluant le projet d’articles préparé par la Commission du droit international (CDI) sur le droit des aquifères transfrontières, a reconnu que le principe de la souveraineté des États de l’aquifère s’applique eu égard à la formation géologique faisant partie de l’aquifère, telle que définie à l’article 2 a) du projet.  Les États de l’aquifère doivent aussi veiller au respect des principes relatifs à l’utilisation partagée des eaux, notamment en ce qui concerne l’utilisation « équitable et raisonnable », l’obligation de ne pas causer de dommages et l’obligation générale de coopération.  Le principe de l’utilisation équitable et raisonnable exige de prendre en considération tous les facteurs pertinents identifiés à l’article 5 du projet d’articles, en fonction du contexte propre à chaque aquifère, compte tenu des besoins humains vitaux et sans qu’aucun facteur spécifique ne l’emporte prima facie sur d’autres, a précisé le délégué.  Il a appelé à élargir les connaissances scientifiques et l’échange d’information sur les aquifères transfrontières.  Les eaux souterraines, a-t-il rappelé, constituent la plus grande partie des eaux douces du monde mais « elles restent mal connues, ce qui les expose à la surexploitation et à la pollution ».  Dans un contexte de crise climatique, le délégué a souligné l’importance de parvenir à un accord-cadre multilatéral sur le droit des aquifères transfrontières.

M. GENSAKU MAEDA (Japon), soulignant qu’une grande partie de l’eau douce du monde se trouve dans des aquifères souterrains, a constaté qu’un certain nombre d’entre eux étaient fortement « surexploités », épuisés et endommagés par la pollution.  Par conséquent, l’élaboration d’instruments juridiques pour réglementer l’utilisation des aquifères transfrontières est une tâche importante, a-t-il estimé.  Le délégué a qualifié le projet d’articles de la CDI sur le droit des aquifères transfrontières de « plateforme précieuse » pour les pays qui souhaitent établir des cadres juridiques bilatéraux ou régionaux pour gérer leurs systèmes aquifères.  Selon lui, le projet d’articles reflète de manière adéquate un large éventail de pratiques étatiques établies.  Il est étayé par des preuves scientifiques grâce à la coopération avec l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et présente les éléments essentiels d’un éventuel cadre juridique, permettant de servir de base commune pour des accords bilatéraux ou régionaux.  Le délégué a salué l’Accord relatif à la gestion du système aquifère Guarani (GAS), entré en vigueur le 26 novembre 2020 et basé sur le projet d’articles de la CDI, comme un exemple pour de futures négociations. 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a déclaré que la question du droit des aquifères transfrontières est importante pour l’Algérie qui, en raison de son climat aride, souffre de la sécheresse et des changements climatiques.  L’eau souterraine est donc considérée comme une ressource importante et un « bien public » protégé comme tel, a-t-il ajouté.  À ce titre, le délégué a exprimé son soutien au projet d’articles de la CDI.  Ce projet met en place des mécanismes pour le renforcement de la coopération internationale pour éviter les conflits, a-t-il noté.  Il a également souligné que le projet confirme la souveraineté des États sur la partie des aquifères transfrontières qui sont sur leur territoire, sans préjudice du principe de coopération.  Ces États doivent donc s’engager à ne pas causer de dommages aux États riverains et à protéger les ressources, a insisté le délégué.  Il a également rappelé l’importance du renforcement de la coopération scientifique et technique et des capacités.  En conclusion, il a espéré que ce projet pourra faire l’objet de l’adoption de lignes directrices afin de guider les États sur ces questions.

M. AYDIN GUCCIARDO (Türkiye) a réaffirmé que chaque aquifère transfrontière avait ses propres caractéristiques et particularités, et qu’il ne serait pas approprié d’appliquer un cadre unique à tous.  Il a estimé que les travaux sur le droit des aquifères transfrontières devraient se concentrer sur les principes généraux, et que le projet d’articles de la CDI devrait continuer à servir d’orientation volontaire pour la pratique des États, « dans sa forme actuelle non contraignante ».  Le délégué s’est référé à la résolution 74/193, adoptée en 2019, par laquelle l’Assemblée générale recommande aux gouvernements d’utiliser ledit projet comme un « guide » pour les accords bilatéraux ou régionaux sur la bonne gestion des aquifères transfrontières.  Il a affirmé que la Türkiye suivrait l’évolution des pratiques des États, y compris régionales, au cours des années à venir.

M. DOGAN (Pays-Bas) a salué le projet d’articles de la CDI sur le droit des aquifères transfrontières, projet qui reflète le droit existant.  Il a souligné l’importance de cette question pour son pays qui partage des ressources naturelles avec d’autres pays, comme des puits gaziers.  Les aquifères sont sous pression dans le monde, avec des sécheresses plus fréquentes et des réserves en eau souterraine menacées.  Le délégué a jugé urgent d’adopter des mesures et souhaité l’élaboration d’une convention après l’achèvement des travaux de la Commission sur la question des ressources partagées comme les réserves gazières et pétrolières.  Dans son format actuel, le projet d’articles constitue un ensemble de principes directeurs utiles pour les États participant à des accords-cadres sur les aquifères, a conclu le délégué.

PROGRAMME D’ASSISTANCE DES NATIONS UNIES AUX FINS DE L’ENSEIGNEMENT, DE L’ÉTUDE, DE LA DIFFUSION ET D’UNE COMPRÉHENSION PLUS LARGE DU DROIT INTERNATIONAL - A/77/515

Présentations

M. HAROLD AGYEMAN (Ghana), Président du Comité consultatif sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international, a présenté le rapport annuel du Secrétaire général sur la question.  Il a noté que le Programme d’assistance continue de profiter de l’appui des membres de la Commission et souligné l’importance de poursuivre la formation du droit international dans le contexte des « vents mauvais de l’unilatéralisme », qui mettent en danger les règles établies. 

Le Président a rappelé l’importance des programmes en présentiel et pris note des difficultés liées à la pandémie de COVID-19.  Il a mis l’accent sur la diversité des langues et traditions juridiques ainsi que sur l’équilibre des sexes.  M. Agyeman a également souligné l’importance de l’utilisation des nouvelles technologies et des réseaux sociaux pour remplir les objectifs du Programme d’assistance.  Il a enfin remercié les contributions des États Membres, essentielles au fonctionnement des activités du programme.

M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, a rappelé que lorsque le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international avait connu des difficultés budgétaires, il avait apporté tout son soutien à l’initiative visant à financier ses activités à travers le budget ordinaire de l’Organisation.  Il a tenu à assurer la Sixième Commission de son appui aux activités du Programme et à leur élargissement. 

M. Soares a indiqué que son bureau avait organisé des événements virtuels pendant la pandémie de COVID-19, que le programme de bourses en droit international avait pu se tenir dans des conditions normales à La Haye pendant l’été et que les cours régionaux pourraient être organisés en présentiel dans les mois à venir.  Remerciant les États Membres ayant apporté une contribution volontaire au Programme, il a expliqué qu’en concentrant ses activités sous sa supervision directe, il visait à améliorer le soutien que les unités du Bureau des affaires juridiques fournissent aux États Membres. 

M. HUW LLEWELLYN, Secrétaire intérimaire du Comité consultatif du Programme d’assistance, a donné un aperçu de la mise en œuvre du Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international, plus particulièrement en ce qui concerne les programmes de formation et la Médiathèque de droit international des Nations Unies.  Les programmes de formation offrent aux professionnels des pays en développement l’accès à une formation complète en droit international, dispensée par des spécialistes de régions et de systèmes juridiques divers.  Ces programmes se sont déroulés de nouveau en présentiel. 

La Médiathèque de droit international des Nations Unies offre une formation en ligne gratuite et de qualité à un nombre illimité de personnes du monde entier, a poursuivi le Secrétaire par intérim.  Avec plus de 600 conférences en ligne, la Médiathèque a été consultée par près de 2,7 millions d’utilisateurs.  « Depuis septembre 2021, nous avons enregistré 41 nouvelles conférences en tenant compte notamment de la parité hommes/femmes des conférenciers, ainsi que de la diversité linguistique et géographique du contenu proposé. »   Nous avons réalisé une mission d’enregistrement pour la première fois depuis 2019, au cours de laquelle 14 conférences ont été enregistrées au Palais des Nations à Genève, notamment en français, espagnol et anglais.  Il a précisé que 11 d’entre elles ont été prononcées par des conférencières.  « Dix de ces conférences constituaient trois « mini-séries » sur les thèmes « Droit pénal international », « Règlement pacifique des différends internationaux » et « Relations diplomatiques et consulaires ». 

En matière de publications, au cours de la période considérée, M. Llewellyn a précisé que le volume 34 du Recueil des sentences arbitrales et l’Annuaire juridique des Nations Unies 2016 ont été publiés.  La Division a également avancé dans la préparation de la 10e édition des Travaux de la Commission du droit international, de l’Annuaire juridique des Nations Unies 2017 et 2018, et des éditions révisées des volumes 25 et 26 de la Série législative des Nations Unies, qui contiendra des documents sur la « Responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite » et sur « L’application à titre provisoire des traités ».  Le Secrétaire par intérim s’est dit très reconnaissant à l’Assemblée générale d’avoir inscrit le Programme d’assistance au budget régulier, ce qui permet l’organisation de plusieurs activités de façon continue.  Néanmoins, afin d’atteindre le potentiel véritable du Programme, des contributions volontaires demeurent indispensables, a-t-il conclu.

Mme ALICE HICUBURUNDI, Administratrice générale jurisconsulte de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer, a présenté la mise en œuvre de la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer.  Elle a rappelé que cette dotation, établie en 1981, a pour objectif d’aider les fonctionnaires et autres professionnels des États en développement à acquérir une connaissance approfondie de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et des affaires maritimes.  Elle a indiqué que la dotation a bénéficié à 33 personnes issues de 30 pays en développement.  Elle a souligné l’importance pour ces États de participer aux processus ayant trait aux océans.  Sur ce point, « les besoins sont nombreux et les défis abondants », a-t-elle déclaré.  Elle a donc exhorté les États soutenir la mise en œuvre de la dotation et à fournir les fonds nécessaires, regrettant qu’à de multiples reprises, aucune bourse n’ait pu être accordée faute de financement.

Débat général

Mme RABIA IJAZ (Pakistan), au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a réitéré son soutien au Programme d’assistance.  Plus de 50 ans après sa création, il reste toujours aussi pertinent.  La déléguée a appelé à un financement continu pour le Programme dans les années à venir, notamment pour les cours régionaux, les bourses, la Médiathèque de droit international des Nations Unies et Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer.  Elle a regretté que les cours régionaux n’aient pu se tenir en raison de la pandémie de COVID-19 tout en saluant la mise en place de cours virtuels.  Elle s’est félicitée de l’enregistrement de 41 cours supplémentaires, ainsi que de la création de podcasts permettant d’accéder aux conférences, même avec une connexion Internet limitée, ou à partir de téléphones portables. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a indiqué que le Programme d’assistance est un instrument clef pour de bonnes relations internationales et pour la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 16.  Il a regretté l’annulation de nombreux programmes en raison de la pandémie de COVID-19, « les cours virtuels ne pouvant remplacer les cours en présentiel ».  Le délégué a salué les formations de la Médiathèque de droit international des Nations Unies, tout en soulignant l’importance de veiller à une bonne représentation géographique parmi les conférenciers.  Il est essentiel d’assurer le bon financement de ce Programme, a-t-il conclu.

Mme AAHDE LAHMIRI (Maroc), au nom du Groupe des États d’Afrique, a réitéré le rôle fondamental du Programme d’assistance, outil indispensable pour renforcer la capacité des États Membres, mais également pour la mise en œuvre des programmes et des activités de l’ONU dans le monde.  Elle s’est félicitée des différentes activités du secrétariat du Comité consultatif pour le Programme visant à diffuser la connaissance du droit international, notamment en Afrique.  Les mesures innovantes prises pour garantir la continuité des formations en ligne sont louables, mais « la présence en personne reste le meilleur moyen de renforcer les capacités », a fait valoir la déléguée.  Elle a appelé à financer le Programme afin d’en garantir la prévisibilité et d’élargir ses activités.

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, au nom d’un groupe de pays, a souligné que le lancement des bourses et des cours régionaux avait considérablement renforcé les capacités nationales en matière de droit international.  Elle a soutenu le projet de reprendre les cours régionaux en personne, en 2023, tout en espérant que les activités éducatives et les sessions interactives en ligne continueront d’être organisées.  Elle a félicité le Programme d’avoir enregistré 41 nouvelles conférences pour la Médiathèque de droit international des Nations Unies au cours de la dernière période de référence, et souligné la croissance exponentielle du nombre de nouveaux utilisateurs depuis 2008, qui a atteint trois millions en 2022.  La déléguée a toutefois appelé de ses vœux une plateforme « plus moderne et conviviale », reflétant une plus grande diversité géographique, linguistique et de genre des universitaires et des participants aux conférences.  Elle a également appuyé la suggestion faite par le Secrétaire général dans le dernier rapport de transférer un poste de juriste principal (D-1) de la Division de la codification au Bureau du Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, afin de faciliter la supervision de la gestion. 

M. SOVANN KE (Cambodge), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a fait remarquer que la fourniture d’outils d’apprentissage à distance avait été une alternative appropriée à court terme durant la pandémie de COVID-19.  Cependant, un programme d’assistance pour la diffusion du droit à distance ne doit pas devenir un « substitut de facto aux formations en personne », a mis en garde le délégué, en demandant la reprise des formations et la tenue des cours régionaux de droit international en « présentiel ».  L’ASEAN, qui soutient fermement le financement du Programme par le biais du budget ordinaire des Nations Unies, encourage aussi les contributions volontaires. 

Mme VIRPI LAUKKANEN (Finlande), au nom du Groupe des pays nordiques, a appelé à redoubler d’efforts pour faire respecter le droit international, qui fournit non seulement un cadre pour la coopération des États, mais exprime également les « attentes légitimes de la communauté internationale ».  Elle a estimé que l’ordre international fondé sur les règles dépend largement du professionnalisme et de l’engagement des personnes agissant au nom des États, d’où l’importance du Programme d’assistance.  La déléguée a également rappelé le rôle clef de la Médiathèque de droit international des Nations Unies dans la diffusion des formations en ligne.

Le représentant de Singapour a souligné l’importance du Programme d’assistance, dans la mesure où le droit international est le socle d’un ordre international fondé sur des règles, et compte tenu du contexte actuel.  Évoquant le rôle de la Médiathèque de droit international des Nations Unies, il a proposé de mettre en place un moteur de recherche et encouragé les enseignants à poster davantage de ressources visuelles en ligne pour améliorer l’accessibilité et la convivialité de la plateforme.  Le délégué a rappelé que Singapour avait récemment accueilli plusieurs conférences liées à la diffusion du droit international. 

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a salué le rôle de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques dans la mise en œuvre du Programme d’assistance.  Elle a insisté sur l’importance du cours régional pour l’Amérique latine, de nombreux juristes colombiens ayant été formés grâce à ce cours.  La déléguée a en outre demandé à la Médiathèque de droit international des Nations Unies davantage de publications en espagnol qui est l’une des langues les plus parlées au monde.

Mme ELIZABETH GROSSO (États-Unis) a rappelé que, depuis sa création en 1965, le Programme d’assistance apporte des contributions indispensables à la formation des étudiants et des praticiens du droit international, soulignant que cette connaissance est « un élément clef de la promotion de l’état de droit ».  Les États-Unis sont heureux de participer au Comité consultatif du Programme, a-t-elle affirmé, en appelant au soutien de tous les États Membres afin qu’il puisse prospérer.  La déléguée a salué les progrès réalisés aux niveaux de l’accessibilité et du contenu de la Médiathèque de droit international des Nations Unies. 

Mme NOR AIZAM AIZA ZAMRAN (Malaisie) s’est félicitée du travail de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Elle a notamment évoqué l’organisation des cours régionaux en présentiel, qui permettent d’offrir aux participants « des échanges irremplaçables et des liens à long terme ».  Elle a également salué l’enrichissement de la Médiathèque de droit international des Nations Unies avec la prise en compte de la diversité linguistique et les efforts visant à faciliter l’accès des personnes disposant d’une connexion Internet limitée.  Elle s’est enfin félicitée des efforts de la Division pour augmenter le nombre de bourses afin de répondre à la demande de formation en droit international.

M. BOLIO (Mexique) a souligné le travail exemplaire de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques, malgré les contraintes posées par la pandémie de COVID-19.  Le Programme d’assistance a continué de toucher un nombre croissant de personnes.  Il a détaillé les formations en droit international organisées par son pays.  Les cours à distance sont un « complément » aux cours en présentiel, a déclaré le délégué.  Enfin, il a insisté sur une meilleure représentation géographique au sein des conférenciers et sur l’importance du multilinguisme.

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a salué le travail du Programme d’assistance et les nouvelles idées qui permettraient d’accroître le nombre de participants.  Il a souhaité que les cours régionaux en personne reprennent au plus vite, car cela est indispensables à la réalisation de leurs objectifs. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a salué les activités « essentielles » de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques.  Le renforcement des capacités des pays est un élément clef du développement durable et les trois cours régionaux permettent d’aller dans ce sens, a-t-elle souligné.  La déléguée a déploré qu’en raison de la pandémie de COVID-19, le déroulement des cours ait été entravé.  Elle a espéré la reprise d’une formation en présentiel à partir de 2023.  Dans ce cadre, elle s’est dite favorable à l’équilibre des genres et à une représentation géographique équitable.  Elle a également demandé à continuer d’appliquer des critères comparables lors de la sélection de l’équipe enseignante.  Appuyant le renforcement de la Médiathèque qui contribue aussi à la formation, la déléguée a rappelé le caractère fondamental du multilinguisme.

M. MORA FONSECA (Cuba) a salué l’importance du Programme d’assistance pour la promotion de l’état de droit aux niveaux national et international.  Les cours régionaux sont essentiels pour les pays en développement, a déclaré le délégué, en soulignant la qualité desdits cours.  À ce sujet, il a insisté sur les entraves que représente le blocus de Cuba par les États-Unis à une bonne participation.  Enfin, il a appuyé le financement du Programme par le biais du budget ordinaire de l’ONU.

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a souligné les progrès réalisés pour la reprise des activités en présentiel après la pandémie de COVID-19.  Il a incité à sensibiliser davantage le grand public au Programme d’assistance, et appelé les États Membres à diffuser des informations à son sujet dans leurs universités et dans le cadre de leur fonctions publiques respectives.  Le délégué a en outre salué le rôle de la Médiathèque de droit international des Nations Unies et soutenu la possibilité de conduire des formations dans d’autres langues que les six langues officielles de l’ONU.  Enfin, il a proposé de réfléchir à des modes de financement créatifs pour assurer la continuité et l’élargissement des activités du Programme. 

Mme CHEARBHAILL (Irlande) a encouragé les États Membres à apporter un soutien financier au Programme d’assistance.  Elle a estimé qu’une meilleure connaissance du droit international contribue à atteindre les objectifs de l’ONU.  La déléguée a souligné l’importance des cours régionaux, qui permettent aux jeunes professionnels de renforcer leurs compétences et de créer un réseau de contacts.  Quant à la Médiathèque de droit international des Nations Unies, elle constitue une ressource précieuse, a-t-elle estimé.  Prenant note de son contenu et des efforts visant à représenter la diversité linguistique, elle a encouragé à la création d’un site Internet « moderne et convivial ». 

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a salué la mise en place de cours virtuels dans le contexte de la pandémie de COVID-19, tout en s’inquiétant de la disparité du nombre de candidatures reçues pour le cours régional africain, avec 146 hommes pour seulement 46 femmes.  Il a invité la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques, le Comité consultatif et les États Membres à examiner les moyens de réduire cette disparité.  A contrario, il s’est félicité de l’équilibre des genres des participants au programme de bourses de droit international à La Haye, à l’été de 2022, avec 11 femmes et 10 hommes et s’est dit aussi satisfait de la répartition régionale.  Il a demandé à la Division de la codification d’examiner la question de la diversité dans le choix des enseignants. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a salué les efforts faits par le Programme d’assistance qui, pour relever ses défis, s’appuie sur des structures compétentes rompues à la tâche à l’instar du Comité consultatif.  Il a salué aussi la prise en compte des pays en développement en général et d’Afrique en particulier, notamment dans l’organisation des cours régionaux de droit international qui permet d’élargir les possibilités de perfectionnement offertes aux pays de cette région.  Le délégué a fait part de la disponibilité de l’Institut des relations internationales du Cameroun, centre d’excellence en diplomatie et en droit international, à accueillir des sessions de formation dans « son mythique campus d’Obili ».  Enfin, il a rappelé que le nombre de places jusque-là alloué à l’Afrique dans les différentes activités du Programme demeure très bas.  « Ma délégation plaide donc pour une discrimination positive de l’Afrique à cet égard et fait siennes les propositions du Comité consultatif relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les personnes participant aux programmes de formation. »  Pour aller plus loin, le délégué a suggéré d’établir une formule de « quotas » pour les femmes en général et les femmes africaines en particulier.

M. YOUSSEF HITTI (Liban) a salué la reprise des formations en présentiel, soulignant les bénéfices offerts par ce format.  Il a félicité la Division de la codification pour les mesures mises en place pour s’adapter aux contraintes de la pandémie de COVID-19 et assurer la continuité du renforcement des capacités, notamment les formations en ligne.  Le délégué a également salué les mises à jour de la Médiathèque du droit international des Nations Unies, qui fournit des cours de haute qualité à un faible coût.  Il a plaidé pour une diffusion plus large du Programme d’assistance, notamment au sein des universités, des ONG et à travers les réseaux sociaux.  Il a également rappelé l’importance d’assurer l’équilibre des genres et de la diversité linguistique et géographique des enseignants et participants.

Mme ZHAO YANRUI (Chine) a salué le travail accompli par le Programme d’assistance depuis sa création en 1965 et rappelé que son pays avait régulièrement pris des mesures concrètes pour l’appuyer, avec par exemple une contribution de 27 000 dollars cette année.  La déléguée s’est félicitée de l’augmentation de la fréquentation de la Médiathèque de droit international des Nations Unies.  Enfin, elle a appelé la Division de la codification à travailler de manière « impartiale », en évitant « toute polémique ». 

Mme ESTELA MERCEDES NZE MANSOGO (Guinée équatoriale) a loué l’apport du Programme d’assistance au renforcement des capacités des pays en développement dans le domaine du droit international.  Elle a salué « l’excellent travail » de la Division de la codification, avant de souhaiter la reprise rapide des cours régionaux de droit international.  En conclusion, elle a appuyé le financement dudit Programme par le biais du budget ordinaire de l’ONU et souhaité davantage de publications dans les six langues officielles de l’Organisation.

M. BAE JONGIN (République de Corée) a appelé les États Membres à promouvoir la connaissance du Programme d’assistance au sein de leurs fonctions publiques, diplomatiques et universitaires respectives.  Il a expliqué que son pays organisait des concours blancs de plaidoirie en droit international.  Le délégué a suggéré d’élargir les contenus de la Médiathèque au grand public avec notamment la création de « mini-séries ».  Selon lui, ces contenus devraient aussi être offerts dans davantage de langues et mieux tenir compte de la diversité des traditions juridiques. 

Mme TSION MENGESHA (Éthiopie) a souligné que les programmes de formation jouent un rôle important pour le renforcement des capacités.  L’Éthiopie est heureuse de continuer à accueillir le cours régional en Afrique, a-t-elle indiqué, se disant prête à le renforcer et à l’étendre.  Face aux difficultés liées à la pandémie de COVID-19, les mesures temporaires mises en place sont bienvenues, mais la formation en présentiel reste la priorité, a indiqué la déléguée.  Elle a également salué le travail de la Médiathèque de droit international des Nations Unies qui fournit aux États Membres des ressources indispensables. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Femmes, paix et sécurité: le cinquième débat de l’année remet le Conseil de sécurité face aux appels à l’action pour renforcer le leadership des femmes

9158e séance
CS/15071

Femmes, paix et sécurité: le cinquième débat de l’année remet le Conseil de sécurité face aux appels à l’action pour renforcer le leadership des femmes

Lorsque l’on ouvre la porte à la participation des femmes, on fait « un pas de géant » vers la prévention des conflits et la consolidation de la paix, a déclaré, ce matin, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, à la séance du Conseil de sécurité consacrée à la résilience et au leadership des femmes en faveur de la paix dans les régions en conflit.  Pour ce cinquième débat de l’année sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, les 80 orateurs ont rivalisé de conseils pour faire progresser les objectifs maintes fois énoncés: garantir aux femmes un siège à la table des négociations de paix, renforcer leur leadership pour la consolider, protéger les défenseuses des droits humains de plus en plus attaquées et mobiliser le financement nécessaire à ces actions.

Maintes études ont démontré que, lorsque l’on renforce la résilience et le leadership des femmes, tout le monde en tire profit, a souligné Mme Amina Mohammed.  Elle a expliqué que les femmes sont plus à même que les hommes de recourir à des modes de gouvernance et de coexistence inclusifs, de bâtir la paix et de faire taire les armes.  Forte de ce constat, elle a recommandé de s’orienter vers une parité totale dans la participation aux efforts de consolidation de la paix, en particulier dans le suivi électoral, la réforme du secteur de la sécurité, le désarmement, la démobilisation et la justice.

Les femmes doivent tout autant participer en amont, en tant que médiatrices et négociatrices, a poursuivi Mme Mohammed, en faisant état de progrès encore lents dans ce domaine: entre 1995 et 2019, en moyenne, les femmes constituaient à peine 13% des négociateurs, 6% des médiateurs et 6% des signataires des principaux processus de paix.  Mme Mohammed a fait remarquer en outre que le rôle accru des femmes dans ces processus permettrait d’inclure davantage de dispositions liées à l’égalité des sexes dans les accords de paix, car au cours de la même période, le pourcentage d’accords incluant de telles dispositions a peu augmenté, passant de 14 à 22%.

L’approche préconisée nécessite bien évidemment des actions plus franches et des financements plus substantiels et prévisibles, selon la haute responsable.  Ce à quoi les intervenants d’aujourd’hui ont répondu en présentant leurs efforts nationaux, comme la Ministre des affaires étrangères de la République centrafricaine, de la Francophonie et des Centrafricains de l’étranger, Mme Sylvie Valérie Baïpo-Temon, qui a confirmé la tendance de son pays à faire appel aux femmes à des postes à responsabilité: « cela remonte à loin dans l’histoire de la Centrafrique, jusqu’à l’ère de Jean-Bédel Bokassa ».  D’autres pays du continent, comme le Kenya, qui ont adopté des plans d’action nationaux pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), ont témoigné de leurs actions dans ce sens.  Le Ghana, pays qui pourvoie le plus de Casques bleus femmes, a par exemple un Institut pour la paix et la sécurité qui forme des femmes au rôle de médiatrice.

La Ministre du genre, de la famille et des enfants de la République démocratique du Congo, Mme Gisèle Ndaya Luseba, a quant à elle assuré que les compétences des Congolaises sont renforcées sur les techniques de médiation, annonçant qu’un réseau national des femmes pour la paix est en gestation.  L’Envoyée spéciale de l’Union africaine (UA) pour les femmes, la paix et la sécurité, Mme Bineta Diop, a confirmé l’engagement des pays africains en faveur du leadership des femmes dans les efforts de paix et de gouvernance.  Le Réseau des dirigeantes africaines et l’organisation FemWise-Africa, qui forme les femmes et participe aux processus électoraux, en sont des exemples.

Aux États-Unis, cet engagement en faveur de la participation des femmes dans les processus de paix et de sécurité a tout simplement fait l’objet d’une codification.  Pour la Fédération de Russie toutefois, l’adoption de plans d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 ne doit pas uniquement consister à « cocher des cases »: il faut avant tout investir dans l’éducation, la science et d’autres domaines.  La délégation russe a de plus critiqué le travail du Groupe d’experts sur la mise en œuvre du programme, le jugeant « inabouti » à cause d’une politisation et du manque de transparence.

Autre préoccupation majeure des intervenants, les attaques dont sont victimes les défenseuses des droits humains n’ont pas manqué d’attirer les foudres des orateurs, la Directrice-exécutive d’ONU-Femmes la première, déplorant que ces femmes, « qui mériteraient d’être adulées », risquent leur vie chaque jour au nom de la paix et des droits humains.  Les exemples sont tragiquement nombreux, de l’Iran au Tigré, en passant par l’Ukraine, a alerté Mme Sima Bahous, en citant les cas d’une autochtone colombienne blessée par balle et d’une infirmière militante soudanaise tuée pendant une manifestation.  Une autre voix forte s’est élevée à ce sujet: Mme Zahra Nader, rédactrice en chef du Zan Times, une organisation multimédia dirigée par des femmes qui couvre la situation des droits humains en Afghanistan.  Elle a rapporté notamment que des femmes ont été battues, enlevées, torturées, emprisonnées et tuées pour leur rôle dans des manifestations pacifiques anti-Taliban, citant le cas de Frozan Safi, une militante de 29 ans.

Le comble a semblé venir des cas où les représentantes de la société civile, invitées à parler devant le Conseil de sécurité, subissent par la suite des représailles, ce qui concerne un tiers d’entre elles.  Mme Bahous s’en est dite choquée, avant de citer également les chiffres donnés par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme: 60% des personnes ayant subi des intimidations ou des représailles pour avoir coopéré avec l’ONU, l’an dernier, étaient des femmes.  Ces différents exemples ont fait réagir les délégations, à l’instar de la Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Finlande, Mme Johanna Sumuvuori, qui a lancé un appel aux États Membres pour qu’ils appliquent une politique de « tolérance zéro » face aux représailles.

« Lorsqu’il s’agit des femmes, de la paix et de la sécurité, il y a un écart important, ici à l’ONU, entre les paroles et les actes.  Et, les Taliban n’ont aucun respect pour les mots », a mis en garde Mme Nader.  La Cheffe d’ONU-Femmes en a conclu qu’il fallait prendre une décision intelligente pour le financement de ce programme, car « les engagements déclarés sont bien loin de là où va l’argent à l’heure actuelle ».  La France a proposé de rejoindre le Pacte sur les femmes et la paix et la sécurité et l’action humanitaire, lancé en juin 2021, sous l’égide d’ONU-Femmes, qui a déjà mobilisé plus de 40 milliards de dollars.  Les Émirats arabes unis ont recommandé une « approche systématique » d’allocations de fonds aux organisations de femmes, invitant la Cinquième Commission à se saisir de cette question. 

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ (S/2022/740)

Déclarations

« Nous ne pouvons séparer l’état périlleux de la paix dans notre monde des effets destructeurs du patriarcat et de la réduction au silence des voix des femmes », a déclaré à l’entame de son propos la Vice-Secrétaire générale de l’ONU.  Mme AMINA J. MOHAMMED, qui a expliqué ne pas porter de rose aujourd’hui, mais du noir en signe de dénonciation du destin tragique des femmes, a fait remarquer que les défis actuels, depuis la prolifération des conflits jusqu’à l’intensification des atteintes aux droits humains, sont connectés au piétinement des droits des femmes et à la misogynie, profondément ancrée partout dans le monde.  Il nous faut en finir avec cette misogynie sous ses différentes manifestations -dans la rue, au foyer, au travail et en ligne-, a-t-elle réclamé, ajoutant qu’il importe également de lever les obstacles posés par les structures et normes d’ordre social, politique et économique qui les maintiennent.  Nous devons nous ériger fermement contre les groupes armés qui se servent de la violence comme arme de guerre, de la misogynie comme propagande, et des tactiques de recrutement et de levée des fonds, a-t-elle déclaré sur un ton impératif.  Et de préciser que les femmes et les filles sont souvent les premières cibles de la violence et des abus dans des situations de conflit armé: elles doivent donc figurer en tête de notre riposte.

Maintes études ont démontré que lorsqu’on renforce la résilience et le leadership des femmes, tout le monde en tire profit, y compris les hommes et les garçons, a souligné Mme Mohammed.  Elle a expliqué que les femmes sont plus à même de recourir à des modes de gouvernance et de coexistence inclusifs, de bâtir la paix et de faire taire les armes, et plus à même d’investir dans le développement durable, pierre angulaire de communautés et de sociétés pacifiques et prospères.  La participation des femmes à tous les niveaux, depuis les communautés locales et jusqu’aux parlements nationaux, a-t-elle poursuivi, a joué un rôle central dans le changement d’approche de la paix et la sécurité au cours des 20 dernières années.  Mme Mohammed a noté néanmoins que les progrès sont lents.  Ainsi, entre 1995 et 2019, le pourcentage d’accords de paix incluant des dispositions liées à l’égalité des sexes est passé de 14 à 22%.  Par ailleurs, 4 accords de paix sur 5 ignorent encore cette égalité, tandis qu’au niveau de la prise de décisions, il existe encore une disjonction.  Au cours de la même période, a-t-elle indiqué, les femmes ont constitué en moyenne à peine 13% des négociateurs, 6% des médiateurs et 6% des signataires des principaux processus de paix.  De la même façon, 7 processus de paix sur 10 n’ont tout simplement pas intégré une femme médiatrice ou signataire.

Alors que la participation de femmes dans les processus de paix influent sur des décisions qui touchent leurs vies, ce rôle n’est toujours pas une réalité, ce qui constitue un véritable obstacle pour jeter les bases d’une paix inclusive, et durable, a regretté Mme Mohammed en appelant à mieux faire.  Partant, la Vice-Secrétaire générale a exhorté au démantèlement des normes patriarcales de pouvoir excluant les femmes et à ouvrir la voie pour davantage de médiatrices et négociatrices, en établissant des échanges formels et plus réguliers avec les médiatrices de sorte à, sans cesse, améliorer notre approche.  Pour ce faire, elle a requis des financement plus substantiels et plus prévisibles.

D’un autre côté, le Women’s Peace and Humanitarian Fund, qui a déjà appuyé plus de 600 organisations féminines locales dans des situations de crise, a ouvert une fenêtre spéciale pour épauler les militantes en danger, a-t-elle rapporté.  Parmi d’autres actions, elle a mentionné l’appui partout dans le monde en faveur d’une représentation et d’une participation active des femmes dans les efforts de paix, qui ont recueilli un certain succès.  Ainsi, au Soudan, la stratégie de la Mission des Nations Unies en faveur d’un processus sensible à l’égalité des sexes a inclus une cible de 40% de femmes dans les délégations aux pourparlers de paix.  Et cette année, la Mission a facilité la formation du Groupe des droits des femmes, lequel participe à la prochaine phase des pourparlers politiques.  Mme Mohammed a également mentionné des exemples en République centrafricaine et au Mali, avant de féliciter par ailleurs l’Union africaine (UA) qui redouble d’efforts sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, en invitant les membres du Conseil à user de leur influence pour faire avancer ledit programme qui n’est pas uniquement une réponse aux torts et à la marginalisation historique des femmes, a-t-elle affirmé, mais l’occasion de faire les choses autrement.

Lorsqu’on ouvre la porte à l’inclusion et à la participation, on fait un pas de géant vers la prévention des conflits et de la consolidation de la paix, a-t-elle encore fait valoir, en réclamant une parité entière/totale, y compris à travers des quotas pour accélérer l’inclusion des femmes, dans le suivi électoral, la réforme du secteur de la sécurité, le désarmement, la démobilisation et les systèmes de justice.  En ces temps de dangers, conflits et crises, il nous faut appliquer des stratégies avérées pour la paix et la stabilité et la protection des droits des femmes ainsi que la promotion de leur inclusion.  La Vice-Secrétaire générale a appelé à mettre la participation des femmes au cœur de tout ce que l’on fait, partout.

Mme SIMA SAMI BAHOUS, Secrétaire générale adjointe, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a déclaré d’emblée que c’est un moment fondamental pour le programme « pour les femmes et la paix et la sécurité », faisant allusion au risque de réduire à néant les acquis dans le domaine des droits des femmes avec les menaces à la sécurité, les conflits violents, les répercussions de la pandémie mondiale et l’urgence climatique croissante, pour lesquels les femmes et les filles paient un lourd tribut.  La Vice-Secrétaire générale de l’ONU a, d’ores et déjà, démontré les corrélations évidentes entre les défis à relever, aggravés par les reculs contre les droits des femmes et des filles, a-t-elle rappelé, avant d’expliquer que le rapport du Secrétaire général (S/2022/740) décrit la manière dont l’agenda pour les femmes et la paix et la sécurité a été relégué, ainsi que les lacunes spécifiques dans sa mise en œuvre.  Cette tâche exige une attention collective urgente, a-t-elle affirmé, exhortant tous les acteurs de la paix et la sécurité à lire le rapport en entier.

La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a présenté trois axes transversaux dégagés dans le rapport: protection et appui aux défenseuses des droits de l’homme en tant que force avec laquelle il faut compter en faveur de la paix; garantie d’un siège à la table pour les femmes lorsque l’on bâtit la paix; et l’assurance que ce que l’on dit sur les priorités dans le cadre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, soient reflétées en termes de financement.  Nous sommes bien loin d’où nous aurions dû être au sujet des trois, a-t-elle constaté.

Concernant les défenseuses des droits de l’homme, elle a signalé que de l’Iran au Tigré, en passant par l’Ukraine, et ailleurs, celles-ci risquent leurs vies chaque jour au nom de la paix, des droits humains et pour leurs communautés et notre planète.  « Elle mériteraient d’être adulées par tout un chacun.  Au lieu de cela, elles sont de plus en plus attaquées », a commenté Mme Bahous, ajoutant que « les exemples sont tragiquement nombreux ».

À titre d’exemple, Mme Bahous a indiqué que Daniela Soto, une défenseuse autochtone des droits de l’homme en Colombie, qui plaide en faveur de ces droits depuis son adolescence, a été blessée par deux balles à l’abdomen tirées par des civils armés.  Elle a néanmoins survécu à cette attaque et est intervenue, cinq mois plus tard, devant le Conseil de sécurité pour attirer l’attention sur les meurtres des dirigeantes autochtones en Colombie.  Autre exemple: Siti Alnfor Ahmed Bakr, une infirmière militante soudanaise âgée de 24 ans, qui a été tuée, en novembre dernier, par les Forces de sécurité alors qu’elle participait à une manifestation pacifique à Bahry.

Mme Bahous a annoncé que nous entendrons bientôt Mme Zahra Nader, qui partagera les risques énormes et le prix que les défenseuses des droits humains paient en Afghanistan.  Elle a souligné que celles-ci continuent à manifester pour leurs droits face aux politiques et à la répression systématique des Taliban à l’encontre des femmes.  Pour cette raison, elles sont harcelées, détenues et torturées, a-t-elle déploré.

Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a récemment indiqué que 60% des 350 cas individuels d’intimidation ou de représailles pour avoir coopéré avec l’ONU au cours de l’année dernière concernaient des femmes, a précisé Mme Bahous, ajoutant que les sondages d’ONU-Femmes ont révélé qu’environ le tiers des représentantes de la société civile ayant fait un exposé devant le Conseil de sécurité avaient aussi subi des représailles.  « Savoir que le fait d’informer le Conseil engendre des représailles devrait être choquant et obliger à l’action », a-t-elle affirmé, en synthétisant les mesures prises par l’ONU: condamnations publiques de ces représailles, visites aux défenseuses des droits humains en danger, facilitation de l’établissement de réseaux des défenseuses et appui à l’élaboration de politiques et de lois améliorant la protection.  Elle a fourni, à cet égard, des exemples en Libye et en Colombie.

La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a ensuite renvoyé au rapport du Secrétaire général et aux recommandations pour le renforcement des rapports et de la coordination au sein de l’ONU et de nouveaux partenariats avec les États Membres, les organisations régionales et celles de la société civile.  Elle s’est ensuite érigée contre la marginalisation des femmes qui ne peut que déboucher à l’effet inverse.  Nier aux femmes l’espace, l’accès ou le financement pour des raisons de sûreté ne fait qu’aguerrir les auteurs d’exactions à l’endroit des femmes, a-t-elle insisté, invitant à mettre les défenseuses des droits humains en première ligne et au cœur du travail à venir.

Elle s’est demandée pourquoi la représentation des femmes dans les processus de paix s’élève à 19% seulement, soit un pourcentage inférieur à celui de 2020, et pourquoi la représentation est encore inférieure dans les processus sous la houlette de l’ONU, ou encore pourquoi la proportion de femmes dans les équipes spéciales pour la COVID-19 dans les zones de conflit n’est que de 16% alors que celles-ci jouent un rôle prépondérant dans la réponse au nouveau coronavirus.  Mme Bahous a été d’avis que les quotas et les mesures temporaires spéciales restent le meilleur outil pour redresser ces déséquilibres et promouvoir l’égalité dans la prise de décisions.  À ce propos, elle a relevé que le Conseil de sécurité a utilisé un langage plus fort pour exiger une participation sur un pied d’égalité dans les processus de paix, comme à Chypre et au Yémen.

Mme Bahous s’est félicitée du fait qu’ONU-Femmes a rejoint le Comité directeur inter-institutions, en remerciant les membres du Conseil pour leur appui, car cela illustre la reconnaissance par les autres institutions du système des Nations Unies non seulement du rôle et de la contribution d’ONU-Femmes dans l’espace humanitaire mais également du caractère central de l’égalité des sexes pour une action humanitaire efficace.   En conclusion, Mme Bahous a invité à prendre une décision intelligente pour ce qui a trait au financement et à la priorisation des ressources pour l’agenda pour les femmes et la paix et la sécurité.  Les engagements déclarés sont bien loin de là où va l’argent à l’heure actuelle, a-t-elle signalé: « Cela doit changer ».

Mme BINETA DIOP, Envoyée spéciale de l’Union africaine pour les femmes et la paix et la sécurité, a déclaré que 22 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) les femmes continuent d’être menacées, violentées, discriminées et sous-représentées.  Cela montre l’urgence de mobiliser les ressources et mécanismes pour répondre à leurs besoins et demandes, notamment investir davantage afin de renforcer leur résilience.  Pour l’Union africaine (UA), le programme pour les femmes et la paix et la sécurité est une priorité et elle dispose de plusieurs mécanismes de mise en œuvre, dont le réseau des dirigeantes africaines, très actif sur le continent.  Ce dernier a notamment été actif lors des négociations entre le Mali et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), en vue de parvenir à la levée de l’embargo imposé par l’organisation régionale sur le pays.  Le continent africain dispose aussi de l’organisation FemWise-Africa, qui forme les femmes et participe aux processus électoraux.  C’est un modèle que l’Union africaine essaie de faire adopter par d’autres continent, a-t-elle dit.

Poursuivant, l’Envoyée spéciale a déclaré que pour accroître la résilience des femmes, il faut veiller à ce que les organisations des femmes aient accès à des financements.  Il faut également des mesures délibérées pour accroître la présence de femmes dans les processus de paix, notamment pour qu’elles occupent des postes et rôles de négociatrice.  Il faut par ailleurs protéger les ex-combattantes démobilisées afin de les préserver des discriminations et les insérer dans les sociétés, a plaidé Mme Diop.

Mme ZAHRA NADER, rédactrice en chef du Zan Times, une organisation multimédia dirigée par des femmes qui couvre la situation des droits humains en Afghanistan, a rappelé qu’il y a quelques semaines, l’attentat suicide contre le centre éducatif de Kaaj a tué 51 filles et femmes de la communauté hazara.  Elle a estimé que 20 millions de femmes et de filles sont privées de leurs droits fondamentaux sous les Taliban: elles doivent rester à la maison, ne peuvent aller à l’école au-delà de la classe de sixième, ne peuvent voyager seules, tandis que les mariages forcés et précoces ont augmenté.  Elle a affirmé que des femmes ont été battues, enlevées, torturées, emprisonnées et tuées pour leur rôle dans des manifestations pacifiques anti-Taliban, citant le cas de Frozan Safi, une militante de 29 ans, dont le corps en décomposition a été retrouvé quelques jours après une manifestation.  Si les femmes sont persécutées par les Taliban, c’est parce qu’elles sont l’opposition la plus constante et la plus pacifique à leurs politiques, a-t-elle déclaré.  Elle a exigé pour les femmes afghanes l’indépendance, le droit de travailler, de participer équitablement à la société et de prendre le contrôle de leurs propres vies.

Passant à la question des groupes ethniques et religieux et des personnes LGBTQI, Mme Nader a mis en garde contre le risque de génocide des Hazara.  De plus, les dirigeants pachtounes sunnites des Taliban mettent en péril les droits des musulmans chiites d’Afghanistan, mais aussi des soufis, des ahmadis, des hindous et des sikhs, a-t-elle alerté.  Elle a aussi attiré l’attention sur les personnes LGBTQI en Afghanistan qui sont attaquées, tuées, agressées sexuellement par les Taliban en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre.  « La communauté internationale doit agir maintenant », a-t-elle plaidé.  Elle a rappelé que depuis la prise du pouvoir des Taliban, le Conseil de sécurité s’est réuni 11 fois au sujet de l’Afghanistan, a publié deux déclarations publiques et adopté trois résolutions réaffirmant l’importance des droits des femmes, sans résultat sur les Taliban.  Au contraire, dès le renouvellement du mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), ils ont mis en œuvre leurs politiques les plus restrictives, a déploré la militante en déduisant que le Conseil de sécurité ne semble pas disposé à utiliser les outils dont il dispose pour faire comprendre aux Taliban que la violation des droits des femmes est inacceptable.  « Lorsqu’il s’agit des femmes, de la paix et de la sécurité, il y a un écart important ici à l’ONU entre les paroles et les actes.  Et les Taliban n’ont aucun respect pour les mots. »

Mme Nader a demandé au Conseil d’appeler les Taliban à respecter les droits humains de tous les Afghans, y compris les femmes, les filles, les personnes LGBTQI et les autres personnes marginalisées en raison de leur religion ou de leur appartenance ethnique et de mettre fin à toutes les restrictions des droits des femmes.  Elle a demandé au Conseil d’exiger des Taliban qu’ils remplissent les obligations et les normes en matière de droits humains.  Elle a demandé expressément à ne pas accorder de reconnaissance officielle aux Taliban et a proposé de ne pas renouveler les exemptions aux interdictions de voyager existantes pour leurs dirigeants et d’ajouter à la liste des sanctions de l’ONU les dirigeants coupables de violations des droits.  En outre, la rédactrice en chef du Zan Times a demandé au Secrétaire général et à son représentant spécial en Afghanistan de faire pression sur les Taliban pour qu’ils respectent les droits de toutes les femmes, des filles et des autres groupes marginalisés.  « Si vous n’agissez pas en Afghanistan, les femmes d’Éthiopie, du Myanmar, du Soudan et du Yémen sauront qu’entre les mains du Conseil de sécurité de l’ONU, les femmes et la paix et la sécurité ne sont rien de plus que des promesses en l’air », a-t-elle conclu.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souhaité que les femmes ne payent plus le lourd tribut dans les contextes de conflits armés, plaidant pour qu’elles participent à toutes les étapes du processus de prévention et de résolution des conflits.  Il a saisi l’occasion de ce débat pour réaffirmer la ferme volonté du Gabon de faire taire les armes, en particulier en Afrique, et ainsi éviter qu’elles attisent les conflits armés et favorisent la recrudescence des violences sexuelles et sexistes.  La mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes en vue de prévenir les conflits est impérative, a asséné la représentante.  La boussole sociopolitique du Gabon demeure de réduire les inégalités femmes-hommes et de promouvoir la participation des femmes dans tous les processus de décision, avec comme outil le Programme de mentoring politique pour les jeunes femmes dont l’objectif est de les inciter à s’engager en politique.  En outre, le Gabon reste engagé en faveur de la reddition de comptes pour les auteurs de violences sexuelles en période de conflit, a dit le représentant, qui a invité le Conseil à plaider unanimement en faveur de l’accès des victimes à la justice internationale.  Enfin, il a appelé à l’intensification des efforts consentis à l’échelle nationale, régionale et internationale en faveur d’une mise en œuvre globale, inclusive et efficiente de la résolution 1325 (2000) et de ses résolutions connexes, ainsi qu’à un renforcement de la « dimension genre » dans toutes les étapes des processus de paix et dans les efforts de prévention, de maintien et de consolidation de la paix.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que les États-Unis ont pris la décision importante de codifier leur engagement en faveur de la participation et de la sécurité des femmes dans les processus de paix et de sécurité.  Ils appellent les autres pays à faire de même, à un moment où partout dans le monde, les femmes et les filles sont menacées par les conflits et les régimes répressifs, a dit la représentante.  Prenant exemple des situations en Éthiopie, Ukraine, Afghanistan, Haïti, Myanmar et République islamique d’Iran, elle a affirmé que les femmes de ce pays se tournent vers le Conseil de sécurité pour les soutenir dans leur bravoure.  Nous devons veiller, a poursuivi Mme Thomas-Greenfield, à ce que le langage sur le programme les femmes et la paix et la sécurité soit délibérément et stratégiquement intégré dans les résolutions par pays du Conseil de sécurité.  Nous devons promouvoir le leadership des femmes et profiter de ce moment critique pour nous unir en tant que communauté mondiale, non seulement pour porter du rose aujourd’hui en signe de notre soutien, mais aussi pour faire entendre notre voix, a-t-elle dit.

Mme MEGI FINO, Ministre adjointe de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, s’est inquiétée du recul des droits des femmes en raison de conflits ou de prises de pouvoir violentes dans de nombreux pays, évoquant notamment la situation en Afghanistan, en Éthiopie et au Myanmar, ainsi qu’en Ukraine et en République islamique d’Iran.  Elle a appelé à prendre des mesures concrètes pour octroyer des conditions propices à la protection des femmes consolidatrices de la paix, à l’abri de toute représailles.  Il convient de passer des paroles aux actes et de garantir leur place à la table des négociations, a-t-elle exigé.  Pour ce faire, la représentante a appelé à donner des ressources adéquates au Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) et à protéger les personnes qui sont en danger après avoir témoigné au Conseil de sécurité ou aux Nations Unies.  Il convient aussi de développer les partenariats avec la société civile pour aider les activistes, a ajouté la déléguée qui par ailleurs fait savoir que 70% du Gouvernement albanais est composé de femmes.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) s’est demandée si, à force de discrimination, on pouvait contraindre les femmes et les filles à « se retirer » dans l’espace virtuel.  Elle a dénoncé les groupes armés qui exacerbent les conflits dans le monde, abusent et détiennent les femmes, pour saluer ensuite les idéaux du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Elle a souligné que les réseaux et organisations de femmes sont la clef lorsque les violences font rage au sein des sociétés et dans les situations de crise et de conflit.  Cependant, ces réseaux font face à des obstacles de taille à l’heure des financements, a relevé la représentante qui a recommandé une « approche systématique » d’allocations de fonds aux organisations de femmes, invitant en outre la Cinquième Commission à se saisir de cette question.  Elle a indiqué que son pays avait lancé une initiative d’appui aux cadettes des opérations de la paix, ainsi que des mesures de renforcement des capacités dans plusieurs régions, au Moyen-Orient notamment, afin de changer la donne face aux menaces des groupes armés.  La communauté internationale et le Conseil de sécurité doivent faire preuve de plus de volonté, a-t-elle ajouté, invitant à cesser de parler de l’autonomisation des femmes et d’agir plus concrètement.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a indiqué que le 28 et 29 novembre, le Royaume-Uni accueillera une conférence internationale sur les violences sexuelles faites aux femmes.  À cette occasion, une déclaration politique sera soumise aux États afin qu’ils réaffirment leurs engagements à lutter contre cette violence et s’engagent à prendre des mesures nationales pour y remédier.  Il a appuyé la pleine participation des femmes dans les processus de paix, déplorant que malgré les discours, le nombre de femmes participant à ces processus n’a pas augmenté.  Il a également soutenu la participation des femmes aux travaux du Conseil de sécurité, dénonçant le fait que depuis 2018, un tiers des femmes ayant pris la parole au Conseil de sécurité ont été victimes de représailles.  Cela n’est pas acceptable, a-t-il dit.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a déclaré que pour commencer à inverser la tendance décriée, chaque État Membre doit mettre en œuvre ce qu’il a convenu de faire dans le cadre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Cela implique l’autonomisation et le renforcement du leadership des femmes.  Et pour y parvenir, il faut commencer par protéger ceux qui défendent les droits des femmes dans un contexte où des acteurs étatiques ou non s’attaquent à eux.  Le représentant a également appelé à faire pression pour que les femmes soient présentes à toutes les tables de prise de décision, y compris au sein du Conseil de sécurité.  Il faut en outre prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles, a-t-il ajouté, relevant que les violences sexuelles liées aux conflits ont augmenté de 40%.  Enfin, il faut joindre l’argent à la parole, dans le contexte où, les dépenses militaires mondiales représentent plus de quatre fois le montant dépensé pour l’aide bilatérale.

M. GENG SHUANG (Chine) a estimé que si l’on veut renforcer la résilience des femmes, il importe d’établir un cap et des mesures de justice.  Prenant exemple sur le conflit palestinien, il a estimé que si l’on veut rendre justice aux femmes palestiniennes, en particulier celles vivant à Gaza, il faut avant tout régler la question palestinienne.  Le représentant a aussi dit espérer que les femmes afghanes pourront s’insérer dans la société et jouir de leurs droits, à travers la participation politique.  Enfin, le Conseil de sécurité devrait se concentrer sur l’Afrique et concourir à régler les conflits qui y sont actifs.  Il devrait aussi se pencher sur Haïti et garantir la sécurité aux femmes haïtiennes.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a réitéré son soutien à toutes les femmes défenseuses de l’égalité entre les sexes dans le monde.  En Afghanistan, des violences atroces sont commises contre des femmes et filles depuis le retour des Taliban; au Myanmar, en République démocratique du Congo, en Éthiopie et dans bien d’autres pays, le manque d’accès des femmes victimes à la justice continue d’être la norme, a-t-elle déploré.  Cependant, leur résilience est une source d’inspiration, a indiqué la représentante qui a assuré qu’elle continuera à soutenir la participation des femmes aux processus de paix.  La formation d’un gouvernement paritaire en Colombie est encourageant à cet égard, a-t-elle déclaré.  Dans un monde où la misogynie et les dépenses militaires ont provoqué un retour en arrière, les droits des femmes ne sont pas négociables, a-t-elle insisté.  La représentante a par ailleurs affirmé que les femmes doivent avoir le droit d’accéder à des systèmes de santé afin de pouvoir disposer de leur corps et avorter si besoin.  De plus, garantir l’impunité aux groupes armés qui se rendent coupables de violence à l’encontre des femmes doit être non négociable.

Mme MELINA ESPESCHIT MAIA (Brésil) a indiqué que le concept de résilience est un concept scientifique qui décrit la capacité d’un matériau à reprendre sa forme initiale après déformation.  Aujourd’hui, c’est un concept qui décrit la capacité des femmes à résister à l’adversité.  À cet égard, il faut reconnaître que la résilience dont font preuve les groupes de femmes est présente partout, à l’image des réseaux de femmes qui utilisent les technologies modernes pour se mobiliser.  S’agissant des viols et autres formes de violence sexuelles dans les conflits, elle a appelé le Conseil de sécurité à transmettre un message sans équivoque condamnant les violences sexuelles, insistant sur l’importance de la communication stratégique.  Elle a également appelé à protéger les femmes qui veulent avoir accès à l’éducation, notant que leur protection permettra de promouvoir le développement économique durable.

Mme MONA JUUL (Norvège) a constaté que le quotidien des femmes, des filles et des défenseurs des droits humains s’est rapidement détérioré dans de nombreux pays.  Elle a plaidé pour l’inclusion formelle des femmes dans les processus de paix, notant que dans les contextes informels de négociation, au Yémen notamment, les femmes ont tout leur rôle à jouer.  Elle a aussi rappelé que des femmes afghanes demandent à la communauté internationale de leur permettre de créer une plateforme leur permettant de dialoguer avec les Taliban.  Elle a évoqué l’appui accordé par la Norvège aux organisations de femmes de Colombie dans la mise en œuvre des dispositions relatives au genre de l’accord de paix.  Elle a déploré la situation en Somalie, où les femmes et les filles restent largement sous-représentées dans les organes de décision formels et informels.  Elle a également indiqué que son gouvernement soutient le Conseil consultatif des femmes syriennes, ainsi que le travail des femmes au sein du comité de suivi de l’Accord de paix au Mali.  La représentante a soutenu la mise en œuvre de plans d’action nationaux sur la paix et la sécurité des femmes, insistant sur l’importance de l’engagement des États.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que son pays est mobilisé pour la pleine mise en œuvre de l’ensemble des résolutions du programme pour les femmes et la paix et la sécurité dans toutes leurs composantes.  Elle a appelé à mettre en place des mandats et des ressources robustes en matière de protection et de participation des femmes dans les missions et les opérations des Nations Unies.  Elle a également estimé que le Conseil de sécurité doit mettre plus systématiquement sous sanctions les auteurs de violences sexuelles commises en temps de conflit.  La représentante a ensuite engagé le Secrétaire général à intégrer le programme pour les femmes et la paix et la sécurité de façon transversale dans l’ensemble du système des Nations Unies.  Elle a aussi appelé tous les États à rejoindre le Pacte sur les femmes et la paix et la sécurité et l’action humanitaire, lancé en juin 2021 sous l’égide d’ONU-Femmes, lors le Forum Génération Égalité au cours duquel plus de 40 milliards de dollars de financements inédits ont été mobilisés.

Mme EVA NTHOKI (Kenya) a appuyé les initiatives menées par les points focaux de l’Union africaine sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité en Afrique.  Le plan d’action national à ce sujet a été appuyé par les électeurs kényans, a-t-elle fait savoir, en soulignant les progrès accomplis au Kenya dans le domaine politique, avec 30 femmes élues au Parlement et 7 occupant des postes de gouverneurs.  Il reste beaucoup à faire dans le secteur privé et au sein des entreprises, a-t-elle cependant relevé, tout en faisant remarquer que les femmes représentent 48% des dirigeants dans les micro-entreprises.  Le Kenya s’est également engagé à reconnaître les retombées « disproportionnées » des conflits sur les femmes et les filles et veillera à l’intensification de ses efforts dans toutes les étapes, notamment la transition postconflit, par exemple.  Étant donné que les femmes œuvrent « silencieusement » à la reconstruction des communautés détruites et luttent contre les violences sexuelles et sexistes dans le monde, elle a recommandé de faire entendre leur voix et de renforcer la résilience.  Il faut également garantir la gestion des conflits en employant des femmes et pour comprendre les causes et les accélérateurs des conflits.  S’agissant des groupes armés et des terroristes, « nous faisons trop peu pour les contrer », a-t-elle constaté, appelant à inclure les femmes pour jouer le rôle de médiatrice et d’alerte précoce contre les risques de radicalisation.  Un appui spécial aux violences sexistes et sexuelles est impératif, a-t-elle insisté, appelant à des financements garantis.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a rappelé que le Conseil de sécurité a pour tâche principale de protéger les femmes contre les violences, notant que beaucoup reste à faire dans ce domaine.  Le délégué a appelé à pleinement prendre en considération les situations spécifiques.  Il a tenu à rappeler que la responsabilité première de cette protection incombe aux gouvernements nationaux.  Il a signalé que d’autres organes onusiens, comme l’Assemblée générale, le Conseil des droits de l’homme et la Commission de consolidation de la paix traitent de cette problématique, prévenant qu’il ne faut pas amener au Conseil des concepts contradictoires ne relevant pas de son mandat.  L’adoption de plans d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) ne doit pas uniquement consister à « cocher des cases », a-t-il insisté, mettant l’accent sur l’importance d’investir dans l’éducation, la science et d’autres domaines.  Il a estimé « inabouti » le travail du Groupe d’experts sur la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, situation qu’il a en particulier attribuée à une politisation de ses travaux et à un manque de transparence.  D’autre part, le travail du Secrétariat dans le domaine de l’égalité des sexes devrait prendre plus en compte le rejet des sanctions unilatérales qui empêchent les femmes d’élever leurs enfants dans des conditions et les privent de services vitaux parfois, a-t-il commenté.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a déclaré qu’en dépit du recul par rapport aux acquis des dernières décennies, la résolution 1325 n’en reste pas moins un outil solide dans l’approche visant à comprendre et à reconnaître le rôle unique des femmes dans tous les domaines.  Le Ghana a adopté son deuxième rapport national, imprégné d’une dimension plus locale, notamment par l’emploi de langues vernaculaires.  L’Institut pour la paix et la sécurité du Centre international Kofi Annan continue de former des femmes au maintien de la paix, au rôle de médiatrice et en faveur de l’avènement de sociétés plus démocratiques et résilientes.  D’autre part, la politique de l’égalité des sexes a créé un organisme pour divulguer les informations sur la place des femmes dans tous les secteurs.  Le Ghana est convaincu que les femmes apportent un « point de vue unique » qu’il ne faut pas négliger, a-t-elle affirmé, annonçant qu’il présidera le groupe africain sur les femmes et la paix et la sécurité à New York.  La déléguée s’est enorgueillie que son pays soit celui qui pourvoit le nombre le plus élevé de Casques bleus femmes.  Elle a appelé les Nations Unies, les États et les décideurs à renforcer leurs efforts devant les exactions commises par les groupes armés à l’encontre des femmes et des filles, en particulier dans les situations de conflit.

Une paix durable ne sera possible qu’avec la participation des femmes, a affirmé M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) insistant pour que le cadre pour les femmes, paix et la sécurité soit maintenu.  L’Inde a toujours appelé au renforcement du cadre démocratique et de l’état de droit, ce qu’elle a démontré dans son modèle de développement.  En tant que principale démocratie du monde, l’Inde a donné plus de pouvoir politique aux femmes, en mettant la technologie numérique à leur portée, avec l’ouverture de comptes bancaires à plus de 445 millions de femmes, près de 70% des propriétaires d’entreprises sont désormais des femmes, et un nombre de filles qui dépasse celui des garçons dans l’enseignement supérieur.  Au plan international, l’appui de l’Inde a permis à plus de 15 000 femmes d’origine rurale de bénéficier d’une formation pour l’utilisation de l’énergie solaire.  Le représentant a dit que son pays partage l’appel du Secrétaire général en faveur de l’action pour le maintien de la paix, la stratégie du personnel en tenue des Nations Unies et la participation accrue des femmes aux opérations de maintien de la paix.  L’extrémisme violent et le terrorisme supposent une approche de tolérance zéro et l’inclusion sur la liste des sanctions des individus et entités violant les droits des femmes, a-t-il ajouté, avant de relever les tentatives en Afghanistan de « gommer » les femmes des espaces publics.

Mme SYLVIE VALERIE BAÏPO-TEMON, Ministre des affaires étrangères de la République centrafricaine, de la Francophonie et des Centrafricains de l’étranger, a jugé important pour les pays en conflit d’œuvrer à renforcer le leadership des femmes afin qu’elles participent au processus de paix.  Il est regrettable et inacceptable qu’en 2022 les femmes demeurent autant exposées à la barbarie, a-t-elle déclaré, en ajoutant que faire taire les armes, notamment en Afrique, mais aussi partout dans le monde, doit être la priorité de tous.

La Ministre a de plus appelé à travailler davantage à la paix pour protéger celles qui donnent la vie.  Elle a critiqué « la volonté de domination », de « soumission de l’autre ».  Dans son pays, qui a connu un nombre impressionnant de crises, les conflits ont été d’une violence inouïe, particulièrement vis-à-vis des femmes et des enfants, a témoigné la Ministre, en évoquant, dans les années 2000, les exactions des « milices de Jean-Pierre Bemba venues de la République démocratique du Congo » et, en 2013, les « milices Seleka ».  La Ministre a décrit en détail des violences sexuelles et sexistes systématiques, leurs auteurs pratiquant le porte-à-porte pour tuer les hommes et violer les femmes sous les yeux de leurs enfants, avec les fils obligés d’avoir des rapports avec leur propre mère ou leur grand-mère.

La Ministre a poursuivi en saluant la « remarquable résilience des femmes centrafricaines », qui restent debout sans chercher la vengeance mais une issue pour se reconstruire.  Face à l’explosion du nombre des orphelins, les femmes centrafricaines se sont organisées sur le tas, parant à l’urgence.  Avec le temps, elles se sont organisées pour offrir des soins appropriés avec l’aide d’ONG plus organisées, a expliqué la Ministre, en saluant la société civile centrafricaine qui compte des femmes juristes, notaires et dirigeantes.  « Leur leadership et leur capacité à résister à la pression est remarquable. »  Sur le plan du leadership, la tendance à faire appel aux femmes à des postes à responsabilité remonte à loin dans l’histoire de la Centrafrique, jusqu’à l’ère de Jean-Bédel Bokassa, s’est félicitée la Ministre, en assurant que cela se poursuit aujourd’hui.

Mme GISELE NDAYA LUSEBA, Ministre du genre, de la famille et des enfants de la République démocratique du Congo, a assuré que son pays ne ménage aucun effort pour garantir la résilience et le leadership des femmes, mais a regretté que les investissements pour l’amélioration de la condition de la femme aient produit peu d’effets en raison de la recrudescence des groupes armés dans l’est du pays.  Toutefois, la République démocratique du Congo (RDC) dispose depuis 2020 d’un plan d’action de deuxième génération pour la mise en œuvre de la résolution 1325, par lequel elle pense pouvoir veiller à la sécurité des femmes et lutter contre les violences, notamment sexuelles, contre les femmes et les filles.  Les compétences des femmes congolaises sont renforcées sur les techniques de médiation et le réseau des femmes pour la paix est en gestation, a fait savoir Mme Ndaya Luseba.

La RDC a un cadre normatif de plus en plus favorable à la promotion de la femme et 27% des postes importants au Gouvernement sont occupés par des femmes, s’est enorgueillie la Ministre.  Elle a notamment indiqué qu’un fonds de réparation pour les survivantes de violences sexuelles liées au conflit armé a été mis en place.  Par ailleurs, la RDC assure la présidence du mécanisme régional de suivi de l’accord-cadre d’Addis-Abeba, dans lequel la promotion de la participation des femmes aux processus politiques et de consolidation de la paix est une priorité.  En conclusion, la Ministre a reconnu que plusieurs défis restent à relever pour la mise en œuvre de la résolution 1325 dans son pays et a appelé au soutien de tous au plan d’action afin d’atteindre les résultats escomptés.

Mme JOHANNA SUMUVUORI, Secrétaire d’État au Ministère des affaires étrangères de la Finlande, a déclaré que les menaces, les violences et les discours haineux déployés face aux militants des droits de la personne sont inacceptables et peuvent entraver les efforts déployés pour mettre fin aux conflits.  La communauté internationale porte ici une lourde responsabilité, celle de les aider à faire face à de telles menaces et à de telles violences, a-t-elle rappelé.  Concernant les femmes, « le lien entre protection et participation est inextricable », a pointé la représentante.  Elle a appelé les États Membres à appliquer une politique de « tolérance zéro » face aux représailles, ainsi qu’une politique de reddition de comptes rigoureuse.  De même, l’augmentation des violences sexuelles et sexistes est une stratégie visant à ruiner la crédibilité des femmes et à les réduire au silence, a-t-elle fait remarquer avant de réclamer un appui constant aux organisations des droits des femmes.  La représentante finlandaise a conclu en rappelant que la lutte contre la fragilité des États Membres est aussi un instrument pour l’égalité des sexes.  Cela passe par un financement adéquat de l’aide publique au développement (APD), a-t-elle dit en lançant un appel clair aux délégations afin qu’elles respectent leurs engagements sur ce point.

Mme JACQUELINE O´NEILL (Canada), intervenant au nom du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, a rappelé les sept engagements pris par les 64 États membres de ce groupe, dont celui de défendre et soutenir la participation et le leadership des femmes, à toutes les étapes et à tous les niveaux des processus politiques et de paix.  Nous assistons à une inversion des gains générationnels, s’est ensuite alarmé la représentante qui a exhorté la communauté internationale à agir pour combler le fossé entre les engagements énoncés dans les 10 résolutions du Conseil sur les femmes et la paix et la sécurité, et leur réalisation.

Intervenant ensuite en sa capacité nationale, la déléguée a indiqué que le Canada est en train de préparer son prochain Plan d’action nationale avec l’appui de Women, Peace and Security Network–Canada, un partenaire de la société civile.  En outre, le Ministère de la défense nationale a entrepris une évaluation indépendante des obstacles à la participation significative des femmes des Forces armées canadiennes aux opérations de paix en utilisant la méthodologie développée par l’Initiative Elsie pour la participation des femmes aux opérations de paix.

M. FERIDUN HADI SINIRLIOGLU (Türkiye) a fait référence à la résolution 1325 (2000) qui affirme qu’il ne pourra y avoir de paix durable sans la participation des femmes.  La pandémie de COVID-19 a intensifié la violence à leur encontre, a-t-il noté, et malgré l’existence d’un cadre normatif solide, la convergence des crises fait que les acquis risquent d’être balayés.  La violence sexuelle dans les situations de conflit est utilisée comme arme de guerre, d’où l’impératif de rendre des comptes.  Le délégué a recommandé d’apporter des services de conseil en matière de santé génésique et reproductive aux rescapées.  Il a considéré que l’autonomisation économique et politique des femmes est essentielle pour la paix et la sécurité.  Les soldates de la paix et d’autres femmes jouent un rôle fondamental pour la consolidation de la paix, a-t-il ajouté.  Le délégué a réitéré l’appui de son pays à la stratégie de parité des sexes au sein de l’ONU et des opérations de maintien de la paix.

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a souscrit à la déclaration du Groupe des Amis du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et à celle de l’Union européenne.  La paix peut être fragile comme le montre la situation actuelle en Ukraine, a-t-elle témoigné.  « La résilience en Ukraine a essentiellement un visage féminin. »  Les femmes s’activent à la fois sur le front militaire et au sein de leurs communautés, où elles s’occupent de leurs enfants et de leurs proches âgés.  Environ 50 000 femmes sont engagées dans l’armée et plus de 38 000 d’entre elles sont des soldates.  La déléguée a évoqué l’initiative de la Première Dame de l’Ukraine qui consiste à organiser des « sommets des premières dames et premiers messieurs ».  En outre, l’Ukraine est devenue le premier État Membre de l’ONU à adopter un plan national sur les femmes en situation de guerre, mettant l’accent sur les viols et les exactions sexuelles utilisés comme armes de guerre.  Elle a appelé à poursuivre en justice tous les auteurs de tels crimes.  Maintenant, le moins que nous puissions faire c’est agir pour que cela ne se répète pas, a tranché la déléguée.

Nous nous réunissons, a souligné Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) dans un contexte mondial où les dépenses militaires augmentent au détriment des dépenses sociales, et où le financement des organisations féminines diminuent tout comme la participation des femmes aux négociations de paix, sans compter que les opérations de paix de l’ONU ne sont pas du tout sur la bonne voie pour réaliser la parité à tous les niveaux d’ici à 2028.  Ces tendances sont alarmantes puisque l’on sait que la pleine participation des femmes aux opérations de paix améliore l’exécution des mandats, que leur implication dans les pourparlers de paix s’est avérée indispensable à la viabilité des accords de paix et que leur contribution, comme médiatrices, journalistes ou défenseuses des droits de l’homme a été cruciale pour les changements politiques.

La représentante s’est dite concernée par la violence accrue contre ces femmes, citant le meurtre de Mahsa Amini en Iran et la situation au Myanmar et appelant le Conseil de sécurité à intégrer le programme pour les femmes et la paix et la sécurité dans tout son travail.  Également préoccupée par l’augmentation des cas de violences sexuelles dans les situations de conflit, comme en Afghanistan et en Syrie, et par les risques d’exploitation sexuelle en Ukraine, compte tenu de l’agression russe, la représentante a attiré l’attention sur l’initiative « Finance against Slavery and Trafficking (FAST) » que son pays a lancée il y a trois ans.  Elle s’est félicitée de ce que dans ce cadre, les trois plus grandes banques du Liechtenstein aient ouvert gratuitement des comptes pour les réfugiés ukrainiens.  Voilà, a-t-elle dit, un bon exemple de l’impact que le secteur bancaire peut avoir sur la prévention de la traite des êtres humains.  La prévention ayant comme instrument la lutte contre l’impunité, la représentante s’est réjouie de ce que le Mécanisme d’enquête pour la Syrie ait lancé une nouvelle stratégie genre.

M. ANTONIO LAGDAMEO(Philippines) a estimé que la paix est possible avec la participation significative des femmes.  Les Philippines en sont la preuve, a-t-il affirmé.  Un processus de paix dirigé par des femmes, avec un dialogue inclusif incluant toutes les parties prenantes, a montré la voie à ce qui est aujourd’hui la région autonome du Bangsamoro dans le Mindanao musulman, a cité en exemple le délégué.  Une des premières lois adoptées par le Parlement du Bangsamoro a créé la Commission des femmes Bangsamoro.  Mandatée pour faire progresser les droits et le bien-être des femmes, la Commission a lancé un plan d’action régional sur les femmes, la paix et la sécurité, en coopération avec les institutions de l’ONU aux Philippines.

L’année dernière, le Gouvernement s’est associé à ONU-Femmes pour offrir des ateliers de leadership aux anciennes combattantes, l’idée étant de discuter de la justice et de la réconciliation et de renforcer les capacités des participantes en tant que bâtisseuses de paix dans leurs communautés.

M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a estimé que les femmes mettent leur vie en danger alors qu’elles s’efforcent d’agir sur le terrain pour assurer la paix et la prospérité de leurs communautés.  Considérant que les femmes et les filles sont exposées à des risques de violences sexuelles et sexistes, l’accès sûr des femmes et des filles à la justice doit être garanti.  Il a salué la recommandation du Secrétaire général de renforcer l’appui aux défenseuses des droits humains et la reddition des comptes pour les auteurs de violence sexuelle en situation de conflit.  Le représentant s’est inquiété des actes de violence sexuelle et sexiste commis par les Forces armées russes dans le cadre de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine.  « Il ne saurait y avoir d’impunité pour ces crimes. »  M. Maes a jugé crucial de travailler la main dans la main avec les partenaires régionaux et nationaux afin de promouvoir les droits des femmes et des filles.  Ainsi, dans le Territoire palestinien occupé, une fonctionnaire de la Police luxembourgeoise déployée au sein de la mission civile de l’Union européenne a contribué au lancement, en mai dernier, d’un réseau de femmes membres du personnel de la police civile palestinienne.  L’appui du Luxembourg au renforcement du rôle des femmes en tant qu’agentes de la paix s’inscrit dans le cadre de sa politique étrangère féministe et de son plan d’action national « Femmes et paix et sécurité ».

Mme FRANCESCA GATT (Malte) a parlé de la situation des femmes en Ukraine, compte tenu de la guerre russe, au Myanmar, en Afghanistan, en Syrie, en Éthiopie, en République démocratique du Congo (RDC), au Soudan et au Yémen.  Elle a insisté sur l’établissement des responsabilités et souligné que l’éducation est un élément essentiel du renforcement de la résilience et du leadership des femmes.  Les Plans d’action nationaux, a-t-elle dit, sont des instruments fondamentaux.  Malte a lancé le sien en 2020, réaffirmant, ce faisant, son engagement à renforcer la paix et la sécurité.  Élu au Conseil de sécurité pour la période 2023-2024, Malte entend, a dit la représentante, défendre la participation régulière d’une société civile indépendante au travail du Conseil.  À ce propos, Malte est fier d’avoir adhéré à la « Déclaration sur les engagements communs » et espère que cela conduira à une plus grande visibilité du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et plus largement, des questions liées au genre.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a affirmé que son pays s’efforce d’élargir et d’approfondir les partenariats afin de soutenir le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, notamment entre les Nations Unies et l’Union africaine.  L’Égypte a ainsi accueilli la troisième édition du Forum d’Assouan pour la paix et le développement durables en juin dernier.  Le délégué a réaffirmé la nécessité d’un financement flexible et durable pour les initiatives dirigées par les femmes et les jeunes afin de faire face aux risques liés à la paix, à la sécurité et aux changements climatiques.  Il a ajouté que l’Égypte était fière de défendre les résolutions de l’Assemblée générale sur « l’action des Nations Unies contre l’exploitation et les abus sexuels » depuis sa soixante-et-onzième session, la dernière étant la résolution 76/303 adoptée en août dernier.  Le Président égyptien a été l’un des premiers à rejoindre l’initiative du Cercle des dirigeants pour prévenir l’exploitation et les abus sexuels dans les opérations des Nations Unies, a enfin rappelé le délégué.

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a appelé les États Membres à renforcer la coopération entre les organisations régionales ainsi que les systèmes de reddition de comptes en cas de violences sexuelles et sexistes au niveau national.  Il a réaffirmé que les Taliban devraient autoriser les filles à suivre une éducation secondaire en Afghanistan.

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a affirmé que le nouveau Gouvernement du Président Gustavo Petro Urrego donne la priorité à une approche intersectorielle des genres, en tenant compte des besoins et des intérêts de toutes les femmes dans les contextes de conflit, en particulier ceux des femmes autochtones, rurales et d’origine africaine qui subissent de manière disproportionnée toutes les formes de violence.  La représentante a réaffirmé que les droits génésiques et sexuels des femmes devaient être défendus.  Avec la Vice-Présidente Francia Márquez, une femme afro-colombienne et indigène du peuple Arhuaco, le Gouvernement contribuera à garantir l’accès au pouvoir des femmes qui appartiennent à des minorités non seulement ethniques mais aussi en termes d’orientation sexuelle.  La représentante a ajouté que le Gouvernement progressait rapidement dans l’élaboration du plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) avec le soutien méthodologique et logistique d’ONU-Femmes.  Elle a souligné que le cabinet était d’ores et déjà paritaire et rappelé que le rapport de la Commission de la vérité comprend un chapitre consacré aux femmes et aux personnes LGBTI.

Mme MALEFANE (Afrique du Sud) a jugé essentiel que les femmes participent aux processus décisionnels.  Hélas, les progrès sur le terrain sont peu nombreux, a-t-elle constaté.  La multiplication des conflits violents, les activités des groupes terroristes et paramilitaires, ainsi que les renversements de gouvernement entravent le programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Les violences sexuelles et sexistes entravent les activités des femmes dans la vie publique, « ces femmes qui n’ont pas encore obtenu la place qui leur est due dans les processus de paix », a déploré la déléguée.  Il est difficile également de traduire les groupes responsables en justice.  La déléguée a appelé à lutter contre les causes sous-jacentes des problèmes dans les pays touchés par les actions de groupes armés.  Il faut davantage demander leur avis aux femmes, et y protéger les femmes journalistes et militantes.  L’autonomisation des femmes, de même que leur santé sexuelle et génésique, sont des priorités.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a parlé de l’auteure afghane Homeira Qaderi qui, sous le régime des Taliban, a réussi clandestinement à enseigner à des jeunes filles, pour montrer qu’un tel cas n’est pas une exception.  Les femmes, s’est expliquée la représentante, sont très souvent en première ligne pour construire la paix dans leurs communautés, non seulement en Afghanistan, mais aussi au Myanmar, au Sahel ou en Ukraine.  Elles s’engagent avec courage pour la prévention et la résolution des conflits, la reconstruction, l’aide humanitaire et la justice.  Dans de nombreux pays, elles sont à l’avant-garde des mouvements contre les régimes autoritaires et refusent d’accepter des propositions politiques qui ne garantissent pas leurs droits.

Et pourtant, a regretté la représentante, le fossé entre le cadre normatif et la réalité continue à s’élargir, et s’appuyer principalement sur la résilience des femmes n’est ni durable ni juste.  En tant que membre élu du Conseil, a annoncé la représentante, la Suisse tentera de poursuivre une approche systématique, innovatrice et orientée vers l’action, cherchera à intégrer le programme pour les femmes et la paix et la sécurité dans toutes les questions à l’ordre du jour et rejoindra la déclaration sur les « Shared Commitments ».

En ce qui concerne l’action sur le terrain, a poursuivi la représentante, la Suisse continuera à appuyer la création de réseaux de femmes médiatrices et bâtisseuses de paix, comme par exemple au Liban, où elle soutient des efforts de réseautage entre des femmes de différents horizons politiques.  Elle se concentrera aussi sur la participation des femmes aux processus de paix et restera à l’écoute des voix de la société civile.  Le succès de tous ces efforts, a souligné la représentante, dépend de la garantie d’un environnement sûr pour la participation des femmes.  Quand le droit international humanitaire n’est pas respecté, le Conseil doit utiliser les instruments à sa disposition pour s’assurer que les responsables rendent des comptes et l’inclusion de critères de désignation axés sur la violence sexuelle et sexiste dans les régimes de sanctions en fait partie.  Il est crucial, a conclu la représentante, que le Conseil ne compte pas uniquement sur la résilience des femmes, mais qu’il agisse sur la mise en œuvre intégrale du cadre normatif du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a indiqué que son pays a placé la résilience au cœur de son programme pour les femmes et la paix et la sécurité qui se reflète sur le terrain et dans son appui à l’échelle internationale.  Le Japon contribue ainsi à des formations pour l’acquisition de compétences et pour garantir aux bénéficiaires des moyens de subsistance, a expliqué le délégué.  Il a par exemple appuyé un projet de formation à l’agriculture pour des femmes victimes de Boko Haram au Tchad, au Niger et dans d’autres pays de la région.  Le Japon a également organisé cinq éditions de l’Assemblée mondiale des femmes à Tokyo.  Après la pause due à la pandémie de COVID-19, la sixième édition examinera comment accélérer les mesures d’appui à la participation des femmes et au développement durable.

Malheureusement, a avoué M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne), l’anniversaire de la résolution 1325 n’est pas cette année un moment de célébration, compte tenu de la violence des conflits et du recul des gains générationnels en matière de droits des femmes. Il a illustré ses propos par les actes des Taliban en Afghanistan et l’impact dévastateur de l’agression russe en Ukraine.  Mais dans ces pays comme dans d’autres parties du monde en proie aux conflits, les femmes continuent de travailler à la paix, montrant que la force brutale ne triomphera jamais du besoin humain de dignité et de liberté.  Le cadre normatif actuel du programme pour les femmes et la paix et la sécurité est robuste mais les stratégies et mécanismes d’appui et de mise en œuvre sont toujours insuffisants.

Nous devons nous montrer plus décisifs, plus ciblés et mieux coordonnés.  Nous devons, a ajouté le représentant, traiter le programme pour les femmes et la paix et la sécurité comme une partie indispensable des stratégies de l’ONU, en particulier celles liées à la paix, à la sécurité et au développement.  N’oublions pas, a-t-il conclu, d’impliquer la jeune génération dans l’édification d’une culture d’égalité entre femmes et hommes, et d’une culture de paix et de sécurité durables.  Offrir aux jeunes l’éduction et les compétences, c’est jeter les bases d’une paix, d’une sécurité et d’un développement durables.

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a indiqué que son pays a consacré des efforts et des ressources considérables à la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  En effet, il est de notoriété publique que les femmes recueillent des succès retentissants dans la protection des civils, l’accès aux communautés et l’établissement de relations de confiance avec les populations civiles, avec les plus vulnérables en particulier, a-t-il observé.  Et il a également été démontré qu’un accord de paix est plus susceptible de durer plus longtemps si les femmes sont inclues dans le processus de paix.

Le représentant a indiqué que l’Italie a établi son quatrième Plan d’action pour les femmes et la paix et la sécurité qui couvre la période 2020-2024 et est fière d’appuyer le Réseau des femmes médiatrices de la Méditerranée lancé en octobre 2017.  Au niveau international, l’Italie a renforcé son partenariat avec le système onusien en faveur des femmes et des filles, et accru sa contribution à ONU-Femmes.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a observé que la guerre illégale de la Russie contre l’Ukraine illustre de manière dramatique les effets dévastateurs des conflits armés sur les femmes et les filles, dénonçant la violence sexuelle et fondée sur le genre utilisée comme arme de guerre.  Il a dit soutenir la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine et les enquêtes en cours de la CPI.  Pour sa part, l’Autriche a affecté cette année 15 millions d’euros du Fonds autrichien de secours d’urgence international à des projets de soutien aux femmes et aux enfants ukrainiens en Ukraine et dans les pays voisins.  Elle a par ailleurs donné 5 millions d’euros à ONU-Femmes pour l’aide d’urgence en Afghanistan, pour des projets tels que la mise en place du groupe consultatif des femmes afghanes afin de les impliquer dans les processus de coordination et les discussions stratégiques.  Le pays continue de soutenir les efforts d’ONU-Femmes et le Fonds pour les femmes et la paix et l’action humanitaire.  Le représentant s’est aussi inquiété pour les femmes journalistes, avant d’indiquer que son pays accueillera une conférence internationale à ce sujet les 3 et 4 novembre, qui mettra l’accent sur les femmes.

Pour Mme MARIA THEOFILI (Grèce), renforcer la résilience et le leadership des femmes en zones de conflit exige une politique cohérente visant à garantir la protection effective des droits et de la sécurité des femmes et des filles, à prévenir et à répondre à la violence et à la discrimination à leur encontre, et à augmenter leur participation dans les efforts de paix.

Elle a attiré l’attention sur les menaces auxquelles font face les correspondantes de guerre et les travailleurs des médias, et sur le meurtre de défenseuses des droits humains et de femmes journalistes.  Elle a estimé que ce n’était que la pointe émergée de l’iceberg, notant que les femmes journalistes sont souvent victimes de violences sexuelles liées aux conflits, ainsi que de discrimination et de harcèlement.  Face à cette situation, le silence n’est pas une option, a-t-elle asséné, appelant à lutter contre l’impunité pour de tels crimes.  À cet égard, la Grèce, ainsi qu’un groupe de pays partageant les mêmes idées –l’Argentine, l’Autriche, le Costa Rica, la France et la Tunisie- ont déjà souligné l’importance d’une approche tenant compte des questions de genre pour assurer la sécurité des journalistes dans les situations de conflit.  En outre, la Grèce a récemment lancé un groupe spécial pour garantir la protection, la sécurité et l’élargissement du statut des journalistes et des professionnels des médias.

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a indiqué que son gouvernement avait récemment alloué deux millions de dollars de fonds d’urgence pour soutenir les activités du Fonds des Nations Unies pour les activités en matière de population (FNUAP) en faveur des survivants de la violence sexiste en Ukraine et au Moldova, ainsi qu’en soutien à un programme dans les régions du nord de l’Iraq.  Il a affirmé que son pays était déterminé à atteindre la parité femmes-hommes au sein des forces de maintien de la paix des Nations Unies et avait fait sa première contribution de 500 000 dollars au Fonds de l’Initiative Elsie pour les femmes en uniforme dans les opérations de paix.  Il a indiqué que la République de Corée accueillerait également le cours pour femmes officiers militaires, en collaboration avec ONU-Femmes, afin d’encourager le déploiement de femmes officiers militaires pour les opérations de maintien de la paix.

Le représentant a ensuite indiqué que les femmes représentent 72% des quelque 34 000 transfuges nord-coréens arrivés en République de Corée depuis les années 1990, rappelant aux pays voisins que le principe de non-refoulement doit être appliqué aux transfuges de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a déploré le recul en Afghanistan et l’impact disproportionné de la guerre russe sur les femmes et les filles en Ukraine.  Dans d’autres situations de conflit, a-t-il rappelé, nous voyons que les défenseuses des droits de l’homme et les femmes politiques sont persécutées, harcelées voire tuées.  Nous savons aussi que les femmes et les filles qui vivent dans les régions où pullulent les groupes armés sont souvent victimes de violence sexuelle et de violence fondée sur le sexe, dont la traite ou la migration forcée.  C’est la raison pour laquelle, a expliqué le représentant, l’Union européenne soutient l’idée de renforcer la résilience des réseaux de la société civile et d’élargir l’accès aux services de santé fondés sur les droits de l’homme, dont les services de santé sexuelle et reproductive.

L’Union européenne a lancé des actions ciblées et s’est engagée à verser d’importantes sommes pour la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité et les efforts des Nations Unies pour intégrer ce programme à tous les niveaux.  Par exemple, a dit le représentant, l’Union européenne met en place des mécanismes consultatifs avec les femmes activistes dans toutes les situations de conflit et mène des programmes de renforcement des capacités et de mentoring au profit du leadership féminin pour faire en sorte que davantage de processus de paix profitent des connaissances des médiatrices et des négociatrices.  En 2021, plus de 70% des activités de l’Union européenne sur la réponse aux nouvelles et la prévention des conflits avaient l’égalité des sexes et la participation des femmes aux processus de paix comme principal objectif ou élément essentiel.

En Ukraine, l’Union européenne est impliquée dans les efforts du Gouvernement pour intégrer la perspective genre dans la relance et dans l’établissement des responsabilités pour violence liée au conflit, y compris par un appui aux organisations féminines et des droits des femmes locales.  L’Union européenne compte aussi poursuivre son travail pour veiller à ce que les Afghanes contribuent aux dialogues politiques, en particulier grâce au Forum afghan des femmes leaders.  Le représentant s’est réjoui de ce que Zarifa Ghafari, une défenseuse afghane des droits des femmes, ait reçu cette semaine le Prix Nord-Sud du Conseil de l’Europe.

M. NEVILLE GERTZE (Namibie) a déclaré que la résilience des Namibiennes pendant les 30 années de lutte pour arracher l’indépendance au régime d’apartheid sud-africain explique pourquoi son pays a si rapidement adhéré à la résolution 1325.  Les Namibiennes ne s’occupent pas seulement des repas, du ménage et de l’appui moral, elles mènent aussi des initiatives politiques, dont la saisine dès 1970 des organisations internationales pour contester les vieilles croyances et les stéréotypes binaires hommes actifs/ femmes passives. Grâce à la création du Centre international des femmes pour la paix, la Namibie, a expliqué le représentant, compte conceptualiser et opérationnaliser le concept de l’influence des femmes dans les processus de paix.  Le représentant a d’ailleurs jugé judicieux de mieux intégrer la problématique des armes légères et de petit calibre dans le programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Il a aussi prévenu que l’implication des femmes dans les institutions traditionnelles de sécurité ne fera rien pour accélérer la mise en œuvre dudit programme. Ce qu’il faut, c’est une approche globale qui tienne compte de la sécurité, certes, mais aussi de la nécessité de supprimer les inégalités structurelles dans les sociétés.

Mme JEANNE MRAD (Liban) a rappelé que selon ONU-Femmes il faudrait 300 ans pour atteindre la parité, ce qui n’était pas acceptable.  Elle a rappelé que le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité avait visité le Liban en juin et que, pour la première fois dans l’histoire du pays, 50% des nouvelles recrues de l’armée libanaise étaient des femmes, dont les trois majors de promotion.  Elle a toutefois déploré que les femmes étaient encore peu nombreuses au sein de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).

Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a indiqué que son pays a élaboré un plan national 2018-2021 pour opérationnaliser la résolution 1325 (2000) et souhaite atteindre les objectifs de la résolution qui recouvrent la participation des femmes dans la prévention de l’extrémisme et des violences, ainsi que dans les services humanitaires.  Elle a rappelé le premier objectif stratégique de la résolution qui est d’augmenter le nombre de femmes travaillant dans le secteur militaire et de sécurité.  Dans l’armée, la proportion de femmes recrues est passé de 6,8% en 2017 à 9,6% en 2021, a indiqué la représentante, avant de rappeler que les femmes jordaniennes figuraient parmi les toutes premières à participer aux opérations de maintien de la paix, en 2007.  À ce jour, 146 femmes jordaniennes ont participé aux efforts de maintien de la paix à Chypre, au Soudan du Sud et aux Fidji, entre autres.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a estimé, que 22 ans après l’adoption de la résolution 1325, il faut reconnaître que la participation des femmes aux processus de paix, à l’action humanitaire et à la prise de décisions stratégiques reste minimale.  Nous voyons même comment les engagements liés aux femmes, à la paix et à la sécurité et à l’égalité des sexes, sont mis à l’écart alors que l’expérience montre que cette égalité est la voie vers une paix durable et la prévention des conflits.  La représentante s’est dite préoccupée par le recul des droits des femmes, dont les droits sexuels et reproductifs.  Pour être franc, a-t-elle dit, trop nombreux sont ceux qui s’opposent toujours à une pleine égalité des sexes.  Nous devons inverser les tendances révélées dans le rapport du Secrétaire général et exploiter le potentiel d’une plus grande participation de tous les genres et des groupes marginalisés, a encouragé la représentante.

L’Allemagne reste une fervente défenseuse du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, a souligné la représentante.  Nous continuerons de soutenir les artisanes de la paix, les femmes soldats de la paix et les organisations féminines.  Nous continuerons de soutenir le développement des réseaux régionaux où les femmes activistes et leaders se réunissent en toute sécurité pour échanger leur expérience.  Nous continuerons, a conclu la représentante, à lutter pour l’égalité des droits et c’est la raison pour laquelle l’Allemagne met en œuvre une politique étrangère et une politique du développement « féministes », fondation indispensable de la paix, de la stabilité et de la prospérité pour tous.  Notre engagement en faveur du programme pour les femmes et la paix et la sécurité est le pilier de ces politiques « féministes ».

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a indiqué que, depuis l’indépendance de son pays, il y a 30 ans, les femmes politiques ont fait beaucoup.  Pour la première fois, le pays a élevé une femme à la présidence de l’Assemblée nationale et un nombre record de femmes ont été élues au Parlement.  Après avoir eu des femmes premier ministre, ministre de la défense et ministre de l’intérieur, chef d’état-major, directrice de la police et pour la toute première fois, ministre des affaires étrangères, la Slovénie a prouvé son engagement jamais démenti en faveur de la pleine et égale participation des femmes à la société, faisant d’elle le septième pays le plus pacifique au monde, selon l’Indice 2022 de la paix internationale.  L’émancipation des femmes, a poursuivi le représentant, est une priorité bien ancrée dans la politique étrangère slovène.  Le Centre national de formation aux opérations de paix offre une formation sur l’égalité des sexes et l’intégration de la perspective sexospécifique dans les missions et opérations internationales.

Qu’il s’agisse de la formation des Vénézuéliennes à la négociation, à la médiation et au règlement des conflits, de l’organisation d’ateliers pour les réfugiées afghanes en Iran, de la facilitation du travail des femmes médecins en Afghanistan ou de l’aide médicale aux réfugiés syriennes au Liban, les projets humanitaires et de développement de la Slovénie contiennent tous un élément fort d’émancipation des femmes.  Le pays entend d’ailleurs augmenter la part de ses efforts pour l’égalité des sexes dans le monde de 39 à 60% d’ici à la fin de la décennie.  Le représentant a jugé important que les rapports des opérations de paix contiennent des données ventilées par sexe sur les attaques meurtrières ou par contre des défenseuses des droits de l’homme.  Il a aussi salué l’appel que le Secrétaire général a lancé aux responsables des opérations de paix et des équipes de pays des Nations Unies pour qu’ils actualisent, tous les ans, les mesures contribuant à la création d’un environnement favorable à ces défenseuses et aux organisations féminines.

Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a estimé que se dessine un retournement des acquis générationnels en matière de droits des femmes, et que c’est à ce Conseil qu’il appartient d’inverser ce retournement.  Il faut redoubler d’efforts pour lutter contre la violence sexuelle et sexiste, mettre fin à la traite des êtres humains, protéger les femmes migrantes et garantir les droits fondamentaux des femmes à l’éducation et à la santé dans une optique intersectionnelle et multi-niveaux, a-t-elle déclaré.

Elle a encouragé la création de passerelles avec des institutions telles que ONU-Femmes ou le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, mais aussi avec les organisations de la société civile.  Toutefois, le travail au niveau local reste essentiel, a-t-elle estimé, du fait que les petites organisations locales de femmes sont souvent les premières à réagir et celles qui ont le plus d’impact sur le terrain.  C’est particulièrement urgent dans les zones touchées par les groupes armés.  Elle a appelé à garantir la participation pleine, égale et significative des femmes à toutes les étapes des processus de paix et de mettre fin aux intimidations et aux représailles contre les femmes qui construisent la paix.  Le droit des femmes défenseuses des droits humains à participer aux processus de paix n’est pas négociable, a-t-elle affirmé.

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a déclaré qu’il est indispensable d’examiner les causes sous-jacentes des conflits et de trouver des solutions par le dialogue et la diplomatie.  Elle a indiqué que son pays a toujours considéré la promotion des femmes comme une priorité.  À présent, 49% des médecins sont des femmes; et la politique nationale a permis d’augmenter le pourcentage de femmes aux postes de décisions, qui est passé de 13% en 2017 à plus de 25% en 2021.  La représentante a ensuite exigé la levée des mesures coercitives unilatérales, notant que les femmes sont les premières à payer le prix de leurs conséquences humaines et économiques catastrophiques.

La déléguée a en outre dénoncé les allégations de certains pays occidentaux qui ont critiqué l’Iran pour ses politiques à l’égard des femmes.  La mort récente d’une jeune iranienne a fendu le cœur du pays, a commenté l’intervenante, en assurant qu’une enquête est diligentée pour faire la lumière sur cet incident.  Elle a prié les États occidentaux de respecter les principes de souveraineté nationale et de non-ingérence dans les affaires intérieures d’autres pays.

Mme MARITZA CHAN (Costa Rica) a relevé que les résolutions pour les femmes et la paix et la sécurité ne mentionnent pas explicitement les veuves ou le veuvage alors que 50% de la population féminine dans des situations post-conflit sont des veuves.  Elle a indiqué que selon les estimations du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en 2017, plus de 30% des enfants recrutés par des groupes armés et des extrémistes proviennent d’une famille de veuve ou monoparentale, la mère étant chef de famille.  Après plus de deux décennies et dix résolutions, le rôle du secteur privé dans le programme pour les femmes et la paix et la sécurité n’a toujours pas encore été exploré, a-t-elle par ailleurs noté, ajoutant que les associations public-privé ont aussi un rôle à jouer pour promouvoir le relèvement des communautés locales au sortir d’un conflit, notamment en employant les veuves et en encourageant leur participation politique.

La représentante a aussi mis l’accent sur l’amélioration des financements actuels en faveur des défenseuses des droits humains et sur la création de nouveaux moyens de financement au profit d’organisations de la société civile dirigées par des femmes et par des personnes LGBTI travaillant dans des zones affectées par un conflit.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité et toutes les instances comme la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI) à reconnaître les délits de persécution fondés sur le sexe, notamment la violence sexuelle et d’autres formes de persécutions en raison de l’orientation et de l’identité sexuelles, ou des caractéristiques physiques.

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a recommandé les initiatives suivantes pour renforcer le leadership et la résilience des femmes dans les situations de conflit, sur la base de leur propre expérience: en premier lieu de prendre des mesures concrètes pour éliminer les obstacles de longue date au leadership des femmes et redoubler d’efforts pour renforcer la résilience.  La délégation a également recommandé d’écouter les voix des femmes de la société civile aujourd’hui, afin de faire progresser la participation des femmes aux processus de paix.  Elle a exhorté tous les États Membres à accorder la priorité à la création d’environnements sûrs et propices pour toutes les femmes artisanes de la paix, les femmes défenseuses des droits humains et les femmes leaders de la société civile.  Il est grand temps de veiller à ce que nos actions correspondent à nos paroles, a conclu l’oratrice.

M. PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) s’est alarmé de la dégradation de la situation des femmes et des filles dans les conflits, alors que la communauté internationale dispose de tant d’outils à sa disposition.  Nous ne parviendrons pas à paver le chemin vers la paix à long terme si nous n’adoptons pas des mesures pour non seulement prévenir et condamner la violence sexuelle et de genre, en particulier comme arme de guerre, mais aussi pour garantir l’accès des survivantes à la justice et la reddition de comptes, a lancé le représentant.  Pour le Chili, trois éléments sont porteurs de changement: l’autonomisation économique des femmes, la collecte et l’analyse de données ventilées, et l’importance de l’accès à l’éducation à l’abri de la violence.

Mme ANA JIMÉNEZ DE LA HOZ (Espagne) a fait savoir que le programme pour les femmes et la paix et la sécurité est l’une des priorités de la politique extérieure de l’Espagne, qui a adopté son premier plan d’action en la matière dès 2007.  Depuis 2017, l’Espagne a participé à plus de 26 dialogues politiques bilatéraux et visites à des pays en conflit ou en situation de post-conflit, lors desquels ont été abordés des sujets sur l’égalité de genre et sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  L’Espagne fournit par ailleurs un soutien technique et financier dans le cadre de ce plan à la Colombie, la Jordanie, le Mali et le Tchad.  Mme de la Hoz a préconisé de renforcer les relations avec la société civile et de faciliter un environnement qui permette aux organisations de femmes et aux défenseuses des droits de l’homme de réaliser leur travail avec toutes les garanties de sécurité.

Mme de la Hoz a souhaité souligner que l’Espagne est engagée dans la protection des droits des femmes et des filles afghanes et qu’elle lancera à cette fin en février, à Madrid, la plateforme « Hear Us », avec le soutien de l’Union européenne, qui permettra aux Afghanes en exil de dénoncer les violations des droits en Afghanistan et d’avoir une influence sur le programme humanitaire, de développement et de sécurité dans le pays.

Parlant « avec tristesse », 22 ans après l’adoption de la résolution 1325, Mme IRENE FELLIN, Représentante spéciale de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) pour les femmes et la paix et la sécurité, a déploré que les droits des femmes soient remis en question chaque fois qu’elles se lèvent comme en Iran et en Afghanistan.  Elle a aussi évoqué les effets désastreux des conflits sur elles comme en Ukraine.  La guerre de la Russie, a-t-elle dit, a ébranlé la paix en Europe et secoué l’ordre international et nous savons de quelle manière disproportionnée, les femmes et les filles en souffrent.

La Représentante spéciale a attiré l’attention sur le nouveau Concept stratégique de l’OTAN qui pour la toute première fois reconnaît explicitement que les femmes et la paix et la sécurité, et l’égalité des sexes sont une partie intégrante des valeurs et de l’action de l’Organisation.  Quand cette dernière a commencé à mettre en œuvre la résolution 1325, elle avait tendance à la limiter à ses opérations.  Aujourd’hui, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité est intégré dans toutes les activités essentielles, mais il faut faire plus et insérer la perspective genre dans le travail sur les problèmes émergents comme les changements climatiques ou les nouvelles technologies.  L’OTAN explore aussi les synergies entre ce programme et celui sur les jeunes, la paix et la sécurité.  L’Ukraine, a conclu la Représentante spéciale, est un exemple de résilience comme pays, partenaire de l’OTAN, peuple et individus dont les valeurs sont partagées par la plupart des États.  La résilience, c’est épouser, sentir et matérialiser ces valeurs.  La résilience nous unit et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité est notre ciment.

M. RAZALI (Malaisie) a déclaré que son pays reste engagé en faveur de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Le pays a augmenté le nombre de femmes en uniforme dans les opérations de paix, et ce, à tous les niveaux et en particulier dans les postes-clefs.  Actuellement, 849 soldats de la paix malaisiens sont déployés dans cinq opérations de paix des Nations Unies et 85 d’entre eux sont des femmes, déployées au Liban, en République démocratique du Congo (RDC) et au Sahara occidental.  La Malaisie prépare également son plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité.  Au niveau régional, avec les membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) elle continuera d’appliquer une approche basée sur le genre.  L’adoption du plan d’action régional est programmée pour le quarantième Sommet de l’ASEAN, le mois prochain, a annoncé le représentant.

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) a déclaré qu’en février, les Ukrainiens s’étaient réveillés sous les bombardements de l’armée russe, qui a entamé une conquête impériale « semblable aux sinistres pratiques des siècles passés ».  En conséquence, plus de 12 millions de personnes, principalement des femmes et des enfants, ont été contraintes de fuir leurs foyers.  Outre celles qui ont été tuées ou ont dû se réfugier à l’étranger, les femmes et les filles en Ukraine ont été « victimes de violences sexuelles et physiques, de déportations, d’exploitation et d’abus », a accusé le représentant.  Pourtant, au milieu de ces horreurs, les femmes ukrainiennes ont fait preuve d’un leadership incroyable en s’affirmant dans les sphères politique, militaire et humanitaire, pour résister aux ambitions coloniales de la Russie, a affirmé le représentant en leur rendant hommage.

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a affirmé qu’en raison de la guerre non provoquée et injustifiée que la Fédération de Russie a choisi de mener contre son voisin, l’Ukraine, les femmes et les filles subissent d’immenses souffrances, y compris des violences sexuelles.  Il a estimé que la Russie doit être tenue responsable de ses actes, notamment par le biais d’un tribunal spécial pour crime d’agression.  Il a rappelé que la Lettonie a accueilli plus de 35 000 réfugiés ukrainiens et alloué des fonds à leur réhabilitation physique et émotionnelle, en particulier les femmes et les filles qui ont souffert de violences sexuelles aux mains des soldats russes.  Le représentant a aussi indiqué que la Lettonie soutient la création d’un centre de réhabilitation en Ukraine pour aider les victimes des crimes de guerre et qu’elle aidera l’Ukraine à élaborer son plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité.  Il a également rappelé que son pays soutient le programme consacré par la résolution 1325, en tant que membre de la Commission de consolidation de la paix, de la Commission de la condition de la femme et, à partir de janvier, du Conseil d’administration d’ONU-Femmes

Mme FIONA WEBSTER (Australie) a estimé que le thème d’aujourd’hui ne prête pas à discussion.  Les preuves sont claires: la paix dépend de la résilience et du leadership des femmes.  Dans le monde entier, les femmes veulent être entendues, défendent les droits humains, font de la médiation dans les conflits et négocient la paix.  Là où elles sont écartées par les normes et structures discriminatoires, là où les défenseuses des droits de l’homme sont persécutées et là où le savoir et les réseaux féminins sont ignorés, la paix ne peut prévaloir.

La représentante s’est dite préoccupée par l’hostilité accrue à l’égard des femmes.  Elle a condamné la répression des manifestantes en Iran, un autre exemple de l’importance du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Toutes les femmes et toutes les filles, a poursuivi la représentante, doivent participer sur un pied d’égalité aux opérations et aux négociations de paix, et aux processus politiques.  Nous avons besoin de leurs compétences, vision, force et leadership transformateur pour réaliser une paix durable.  L’Australie, a indiqué la représentante, appuie le Fonds pour les femmes et la paix et l’action humanitaire, les réseaux régionaux des femmes négociatrices et médiatrices et les initiatives de justice soucieuse de la dimension sexospécifique.

Mme TRA PHUONG NGUYEN (Viet Nam) a constaté que 20 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000), les femmes sont encore aux prises avec les inégalités entre les sexes, l’exclusion et différentes formes de discrimination.  Pourtant, a-t-elle rappelé, deux femmes ont été les principales protagonistes de la révolution vietnamienne.  Partout, les femmes jouent un rôle prépondérant dans l’éducation des enfants et dans la construction d’une paix durable.  En conséquence, il convient d’intégrer leurs droits, intérêts et besoins dans toutes les politiques.  Il faut aussi inclure davantage de femmes Casques bleus dans tous les aspects des opérations de maintien de la paix.  La déléguée a enfin demandé d’allouer, au minimum, 15% de l’aide publique au développement (APD) à des programmes en faveur des femmes affectées par les conflits.

Nous sommes confrontés, a déclaré M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie), à des menaces inédites à la paix et à la sécurité en Europe qui découlent de l’agression russe contre l’Ukraine laquelle a un lourd impact sur les femmes.  La Roumanie, a-t-il affirmé, a une approche proactive de l’émancipation des femmes, tant comme objectif des droits de l’homme que comme condition préalable à la justice sociale, au développement et à la paix.  Le pays a adopté son tout premier Plan d’action sur les femmes et la paix et la sécurité qui couvre la période 2020-2023 et qui promeut la présence des femmes dans les secteurs de la sécurité, de la défense et de l’ordre public et de manière plus globale, à la vie socioéconomique.  Le processus interinstitutions devrait commencer bientôt pour élaborer le deuxième Plan d’action.  En attendant, 37,5% des soldats et policiers roumains déployés dans les missions internationales sont des femmes.  Elles sont particulièrement à même de comprendre et de répondre aux situations de crise, compte tenu de leur faculté à nouer des contacts avec les groupes les plus vulnérables.  Nouvellement élue au Conseil des droits de l’homme, la Roumanie, a conclu le représentant, considère ces droits comme un pilier fondamental de sa politique étrangère.

Mme KRASSILIRA BESHKOVA (Bulgarie) a fait observer que les groupes armés sont habituellement composés d’hommes.  Ces derniers sont souvent impliqués dans des actes de violences sexuelles contre les femmes et les filles, qu’il s’agisse de groupes terroristes ou de mercenaires au service de la machine de guerre russe en Ukraine, a ajouté la représentante, qui a ensuite mis en avant le sort des femmes victimes de l’agression injustifiée de la Russie contre l’Ukraine.  Elle a souligné l’importance d’une pleine participation des femmes à tous les aspects de la vie sociale en vue de l’avènement de sociétés pacifiques et prospères.  Le Conseil de sécurité a, à cet égard, un rôle à jouer puisqu’il décide de la manière dont les opérations de paix sont conduites, a conclu Mme Beshkova.

M. MICHAL MLYNAR (Slovaquie) a pris note du rapport du Secrétaire général, avant de déplorer qu’il n’y soit pas fait davantage mention de la situation en Ukraine en raison de la guerre injustifiée livrée par la Russie.  La guerre a infligé des souffrances sans précédent aux femmes et aux filles, a dit le délégué.  Les attaques contre les écoles compromettent gravement l’éducation des filles, ce qui sape leurs chances de participer pleinement à la vie économique, sociale et politique, a regretté le représentant, en appelant tous les États à rejoindre la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  Enfin, le délégué s’est dit particulièrement alarmé par la situation des femmes et des filles en Afghanistan.  Leur droit à une éducation et à un travail est désormais remis en question, a-t-il conclu avec inquiétude.

Mme FEDA ABDELHADY-NASSER, observatrice de l’État de Palestine, a noté que les réseaux de femmes sont essentiels au maintien de la cohésion sociale, la résilience et la stabilité « contre vents et marées ».  Les femmes doivent, pour cette raison, être protégées et soutenues, a-t-elle déclaré.  Elle a réitéré l’engagement de la Palestine pour la promotion de leur participation à la prise de décisions à tous les niveaux, y compris dans le maintien de la paix, la résolution des conflits et le dialogue de réconciliation.  Leur contribution collective au redressement national et au développement doit également être promue, a-t-elle ajouté.  Elle a, sur ce point, déclaré que les expériences palestiniennes constituent des exemples de bonnes pratiques.  L’observatrice a néanmoins regretté que les femmes continuent de payer le plus grand prix des injustices dont est victime le peuple palestinien.  Elle a accusé Israël de cibler les défenseurs des droits humains, y compris les femmes, et déclaré que l’occupation israélienne constitue le principal obstacle pour les droits des femmes en Palestine occupée.

M. KARL LAGATIE (Belgique) a estimé que le mouvement mondial anti-genre est particulièrement inquiétant, inversant les gains générationnels.  Nous avons besoin d’une mise en œuvre concrète du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, a poursuivi le délégué.  Dans cet esprit, son pays met déjà en œuvre son quatrième plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité, pour la période 2022-2026, a-t-il dit.  Il a appelé à soutenir les femmes bâtisseuses de paix, les femmes défenseuses des droits humains et les organisations de défense des droits des femmes.  Il a dit sa fierté du soutien de la Belgique au Women’s Peace and Humanitarian Fund, en République démocratique du Congo, au Mali et maintenant aussi en Ukraine.  Le Fonds aide les organisations dirigées par des femmes et les organisations de défense des droits des femmes à participer à la prise de décision, à prévenir les conflits et à répondre aux crises, telles que engendrées par la guerre d’agression de la Fédération de Russie en Ukraine, a expliqué le délégué.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a cité quelques actions et réalisations de son pays en matière de promotion de la femme.  Ainsi, un plan d’action a été adopté pour la mise en œuvre des dispositions de la résolution 1325, comprenant des projets nationaux pour atteindre les quatre objectifs stratégiques de protection, participation, prévention et secours.  La mise en pratique de ce plan, qui se fait avec la participation de la société civile, est conduite par des décideurs et des responsables politiques de divers ministères, y compris des organisations et agences de sécurité.  Les femmes, les jeunes, le milieu universitaire et le secteur privé sont également associés à la mise en œuvre de ce plan d’action national sur la base du principe de partenariat.  Des femmes yéménites ont également participé, de manière qualitative, au comité de rédaction de la Constitution et étaient présentes aux négociations de paix au Koweït, à Genève et à Stockholm, a encore précisé le représentant avant de signaler leur participation aux négociations avec les houthistes.  Le représentant a, enfin, appelé la communauté internationale à apporter son soutien au Gouvernement yéménite pour qu’il soit en mesure de remplir ses engagements envers la réalisation du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a appelé à considérer les femmes comme des agents actifs pour la paix et des changements transformateurs.  Il faut donc promouvoir leur rôle et le leadership dans les processus de paix et dans la prise de décision politique à tous les niveaux.  Selon lui, quand les femmes sont autonomisées, elles deviennent plus résilientes, ce qui leur permet de participer efficacement aux pourparlers de paix, aux discussions politiques et au renforcement des institutions.  Le délégué a appelé à augmenter le personnel féminin dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Pour sa part, la Thaïlande entend y accroître la représentation des femmes: des formations spécialisées sont en cours et des soldates de la paix ont été déployées sur le terrain, notamment au Soudan du Sud.

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie), au nom du Groupe des amis de la responsabilité de protéger (55 États et Union européenne), conjointement présidé par le Botswana, le Costa Rica et la Croatie, a mis l’accent sur le rôle pivot de l’agenda « pour les femmes et la paix et la sécurité » pour favoriser la pleine participation et le leadership des femmes dans toutes les étapes des processus politique, de consolidation de la paix et de la prévention des conflits, de façon à les rendre plus efficaces et inclusifs.  L’inclusion des femmes est également importante dans la prévention de la commission d’atrocités et pour l’efficacité et la durabilité des processus de paix, a-t-elle indiqué.  Elle a recommandé d’aborder, selon une perspective genre, les crimes de génocide, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et le nettoyage ethnique.  Elle a souligné la complémentarité de la responsabilité de protéger et des mécanismes axés sur les crimes sexistes et sexuels.  Les analyses de situation impliquant un risque de commission d’atrocités ne comportent pas souvent l’intersection entre les inégalités et le genre, a-t-elle regretté, soulignant en plus que l’analyse amalgame souvent les femmes et les enfants en tant que groupe vulnérable.

La représentante a ensuite mis l’accent sur le rôle des organisations féminines dans l’apport d’informations d’alerte précoce, en temps voulu et sensibles au genre, ainsi que dans la résolution des tensions entre les communautés par un dialogue intercommunautaire et la lutte contre le discours de haine et l’incitation à la violence.  Avant de conclure, elle a lancé un appel pour que tous les États accroissent leur appui à l’agenda « pour les femmes et la paix et la sécurité », à la résolution 1325 (2000) et à toutes les résolutions suivantes, et qu’ils veillent à leur rapide mise en œuvre.  Elle les a aussi exhortés à respecter et à honorer leurs obligations au regard du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits de l’homme; et à prévenir et répondre à toutes les formes de violence sexiste et de discrimination ciblant les femmes et les filles.  Cela inclue la fin de l’impunité pour les crimes graves contre celles-ci, et de veiller à ce que tous les incidents de violences sexuelles fassent l’objet d’une enquête, de poursuites et de procès devant un tribunal compétent conforme aux normes internationales, en améliorant notamment la compréhension de ce qui constitue la dynamique des crimes atroces et leurs risques.

Mme MARÍA DEL ROSARIO ESTRADA GIRÓN (Guatemala) a estimé que le renforcement de la résilience des femmes dans les régions en proie aux groupes armés est une question fondamentale.  Le Guatemala accorde une priorité à leur participation dans les opérations de maintien de la paix, a-t-il déclaré, notant que 300 femmes ont été déployées en tant que personnel militaire et civil.  Elles ont démontré qu’elles pouvaient fournir des performances adéquates « dans les mêmes conditions difficiles que leurs homologues masculins » et qu’elles avaient un impact positif dans ces environnements, a souligné le représentant.  Il a également insisté sur le rôle des organisations régionales et des plans d’action nationaux pour la mise en œuvre de ces engagements.

M. DAVID BAKRADZE (Géorgie) a expliqué que son gouvernement achevait actuellement la préparation de son quatrième plan d’action national sur les femmes et la paix pour 2022-2024, qui vise à intégrer les perspectives de genre dans le secteur de la sécurité et dans les processus de prise de décisions.  Il s’agit, a-t-il expliqué, d’utiliser une « lentille de genre » dans les négociations de paix et de promouvoir une participation significative des femmes et des filles dans la prévention et la résolution des conflits.

Le représentant a ensuite affirmé que les femmes et les filles vivant dans les régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali, occupées par la Russie, continuent de subir des violations persistantes de leurs droits fondamentaux et ne peuvent bénéficier du cadre de protection des droits de l’homme du Gouvernement géorgien.  Il a assuré que, à chaque cycle des négociations de Genève relatives à cette crise, la délégation géorgienne soulève activement les besoins et les priorités des femmes déplacées ou touchées par le conflit.  De même, avec le soutien d’ONU-Femmes Géorgie, les participants aux négociations tiennent des réunions régulières avec des représentants de la société civile, y compris des femmes déplacées de force et affectées par le conflit, ainsi que des ONG de défense des droits des femmes.

Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a déploré les obstacles structurels et les pratiques qui empêchent la participation des femmes aux processus de paix et de consolidation de la paix ainsi que le peu d’investissements pour les lever, alors même que les budgets militaires au niveau mondial ne cessent d’augmenter.  Selon la délégation, le seul investissement viable est celui qui est destiné, et accompagné d’une volonté politique, à la solution pacifique des conflits et à la participation pleine et entière des femmes avec leurs perspectives uniques et inclusives, comme leur demande de faire taire les armes en Afrique, de garantir l’accès à l’éducation en Afghanistan, ou encore de recueillir des informations sur les disparus en République arabe syrienne.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a déclaré que son pays a connu, durant la guerre de 1971, ses propres problèmes de violences sexuelles et les auteurs de ces crimes ont dûment répondu de leurs actes.  Le représentant a ensuite estimé que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité n’est pas glorieuse.  On peut faire plus et, par exemple, obtenir de tous les États qu’ils adoptent des plans nationaux assortis de budgets conséquents et avec pour objectif de rendre les responsables des violences faites aux femmes comptables de leurs actes.

M. MOHAMMAD K. KOBA (Indonésie) a déclaré qu’une contribution significative des femmes devrait être garantie à toutes les étapes des processus de paix.  À ce titre, il a appelé à un soutien politique fort pour protéger les femmes dans les situations de conflit, prenant l’exemple de la législation indonésienne qui promeut leur participation aux programmes relatifs à la paix et à la sécurité.  Il a également appelé à la mise en place d’instances dédiées à ces questions.  À cet égard, il a mentionné la création du Réseau d’Asie du Sud-Est des femmes médiatrices et négociatrices de paix.  Il a néanmoins noté que toute assistance doit s’articuler autour des besoins spécifiques des pays concernés.  Il faut, enfin, a-t-il conclu, permettre aux femmes leaders de faire entendre leur voix, car elles sont encore sous-représentées dans la plupart des postes de direction des opérations de paix de l’ONU, a-t-il fait observer, avant de plaider pour qu’une attention soutenue et ciblée soit accordée à l’autonomisation et à la protection des femmes afghanes.

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a rappelé que son pays traverse depuis janvier 2012 une crise profonde et multidimensionnelle, dont les premières victimes innocentes restent malheureusement les femmes, les enfants et les personnes âgées.  Mais, a dit le représentant, notre expérience de pays en conflit montre bien que les femmes, par-delà leur statut de victimes, ont une forte capacité de résilience.  Depuis le déclenchement de la crise, les Maliennes restent fortement mobilisées, à travers des associations, des ONG et des coopératives.  Elles continuent leur lutte contre les violences basées sur le genre, tout en poursuivant des activités génératrices de revenus dans les régions les plus reculées du pays.  Véritables médiatrices locales, les Maliennes continuent de s’atteler à promouvoir le vivre ensemble entre nos communautés, en dépit d’un environnement hostile, fait d’insécurité et de pesanteurs socioculturelles.

Pour promouvoir et conforter le rôle des femmes et le leadership féminin, le Gouvernement du Mali, a indiqué le représentant, a adopté la politique nationale genre et plusieurs mesures législatives et réglementaires.  En outre, au sein du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du processus d’Alger, le nombre de femmes est passé de 8 à 12, sans oublier que cet accord contient des dispositions relatives à la protection des femmes et à la lutte contre l’impunité, y compris l’autonomie économique de la femme à travers notamment les activités génératrices de revenus.

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a indiqué que malgré le fait reconnu que les femmes sont cruciales pour la paix et la sécurité et que leur leadership est à l’avant-garde des manifestations contre les pouvoirs autoritaires, elles et les filles sont toujours réprimées dans le monde entier.  Les femmes sont attaquées et largement sous-représentées dans la vie publique.  Le représentant a donné l’exemple de l’Iran plongé dans de graves troubles publics, avec les manifestations déclenchées par la mort tragique de Mahsa Amini.  Il s’est également dit préoccupé par la façon dont le Bélarus nie aux femmes leurs droits et libertés garantis pourtant par le droit international.  Il a parlé des militantes emprisonnées, comme Maria Rabkova et Maria Kalesnikova qui dirigent des mouvements populaires contre la fraude électorale lors de l’élection présidentielle.  Il s’est par ailleurs dit consterné par la répression systématique des femmes et des filles en Afghanistan et a aussi dénoncé le triste sort des femmes en Haïti et en Ukraine où le nombre réel de victimes est probablement beaucoup plus élevé.  Il a conclu en encourageant tous les États à créer un environnement favorable à tous ceux qui œuvrent pour la promotion de l’égalité des sexes, y compris les artisanes de la paix.

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a regretté que les progrès en faveur des droits des femmes et des filles s’inversent dans un contexte d’accroissement des conflits violents et des violations des droits humains par les groupes armés.  La représentante a insisté sur la participation « entière, égale et significative » des femmes en se concentrant sur l’inclusivité et l’intersectionnalité.  Elle a également appelé à lutter contre les stéréotypes de genre et les normes sociales à l’origine des discriminations et égalités de genre comme outil de prévention.  À ce titre, elle a pris en exemple la réussite des efforts communautaires.  Elle a ensuite mis l’accent sur l’importance de la protection des dirigeantes, défenseuses de la paix et des droits humains face aux violences auxquelles elles font face et qui les empêchent d’accomplir leur travail, dans les zones de conflit et aussi ailleurs.

Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a déclaré que son pays a adopté récemment son plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000).  Ce plan se base sur trois piliers fondamentaux, dont l’implication des femmes dans les opérations de prévention, de médiation et de maintien de paix, ainsi que l’autonomisation économique des femmes, a-t-elle expliqué.

M. SAMADOU OUSMAN (Niger) a noté que le plan d’action national du Niger met l’accent sur la levée des obstacles à l’implication active des groupes de femmes et des organisations de la société civile dirigées par les femmes dans les processus de paix et dans les transitions politiques.  Il a également évoqué l’instauration d’un système de quota dans les fonctions électives.  Le représentant a encouragé la prise en compte de la dimension genre dans le cadre du maintien de la paix et des opérations de paix.  Il a en outre estimé que la mise en œuvre du Programme pour les femmes et la paix et la sécurité est indissociable des politiques gouvernementales de lutte contre les changements climatiques prenant en compte la dimension genre.  Il a fait part des mesures prises par son pays dans ce sens.

M. FAHAD M. E. H. A. MOHAMMAD (Koweït) a déclaré que la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité exige un engagement plus ferme, y compris au sein du Conseil de sécurité, d’autant que, selon les études, la participation des femmes dans les processus de paix est garante de leur durabilité.  Il a indiqué qu’au plan national, la femme koweïtienne occupe des postes politique et diplomatique.  Récemment, deux femmes ont remporté des sièges au Parlement, et deux autres font partie du nouveau Gouvernement, s’est réjoui le représentant.

Mme CAROLYN RODRIGUES BIRKETT (Guyana) a prévenu que pour renforcer la résilience et le leadership des femmes, il faut d’abord et avant tout lever tous les obstacles existants.  Mon pays, a-t-elle indiqué, s’efforce de renforcer la présence des femmes à tous les niveaux du gouvernement.  Au niveau international, le pays continue de défendre l’inclusion et l’autonomie des femmes tout en contribuant aux efforts humanitaires visant à les protéger, y compris de la traite des êtres humains.  Le Gouvernement a aussi créé des mécanismes de mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  Mais il nous faut, a dit la représentante, une approche multisectorielle du genre pour booster l’implication des femmes dans les efforts de paix et de sécurité.  Nous devons, a-t-elle précisé, travailler ensemble pour honorer nos obligations en vertu du Programme d’action de Beijing, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Mme REUT SHAPIR BEN NAFTALY (Israël) a attiré l’attention sur l’importance des groupes multiconfessionnels de femmes en Israël, qui permettent de renforcer les communautés en cas d’urgence et de fournir des canaux de communication lorsqu’ils sont nécessaires.  La représentante a appelé au renforcement des programmes visant à renforcer la participation des femmes, la lutte contre les inégalités et la promotion de la résilience.  La participation des femmes dans les domaines de la paix et la sécurité est vitale, a-t-elle souligné.  Elle a conclu, en regrettant que le régime iranien se livre à des violations des droits des femmes et a insisté sur la corrélation entre l’inclusivité et la viabilité de la paix.

Mme ALEXANDRA BOIVIN, du Comité international de la Croix-Rouge, a rappelé que les inégalités de genre exacerbent les conséquences des conflits sur les femmes.  Elle a donc appelé les parties aux conflits armés à mieux prendre en compte cette inégalité dans le cadre des combats.  Elle a estimé que l’incorporation d’une perspective de genre dans l’application et l’interprétation du droit international humanitaire est nécessaire pour progresser sur ces questions.  La représentante a souligné qu’en temps de guerre, les femmes deviennent les principaux soutiens de famille et assurent des fonctions de dirigeantes et d’activistes, tout en continuant à assumer des tâches traditionnelles sous-évaluées ou non reconnues.  Il convient donc de les protéger, a-t-elle estimé.  Elle a en outre appelé à davantage d’efforts pour garantir que l’interdiction claire de la violence sexuelle en vertu du droit international humanitaire soit incorporée dans le droit national, la doctrine militaire et la formation.

Mme ERSHADI (République islamique d’Iran) a repris la parole en réponse à la déclaration de la délégation d’Israël.  Elle a accusé cet État de commettre des atrocités à l’encontre des femmes et des filles palestiniennes ainsi que des crimes de guerre et d’agression contre la Palestine et d’autres pays de la région.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à assumer ses responsabilités et à faire cesser ce « régime d’apartheid ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission appelle à prendre en compte les droits humains délaissés et examine les disparités en termes d’accès à la santé

Soixante-dix-septième session
27e & 28e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4356

La Troisième Commission appelle à prendre en compte les droits humains délaissés et examine les disparités en termes d’accès à la santé

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi, aujourd’hui, ses échanges sur la promotion et la protection des droits de l’homme en dialoguant avec six rapporteurs et experts qui ont appelé à prendre en compte des droits oubliés, tels que les droits des minorités ou les droits culturels des populations locales.  Plusieurs d’entre eux ont également alerté les États Membres sur de nombreuses disparités en matière d’accès à la santé.  La Commission a ensuite poursuivi sa discussion générale sur ce point de l’ordre du jour. 

Premier titulaire de mandat à s’exprimer, le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités a fait le constat d’un « échec presque complet » de l’intégration des droits des minorités aux Nations Unies.  Parlant d’inaction et de négligence flagrante dans la protection des droits des minorités, M. Fernand de Varennes a tenu à rappeler que ces populations sont aujourd’hui confrontées, à une échelle massive, à des menaces d’exclusion et de discrimination, voire à des appels au génocide.  Dans ce contexte, il a déploré une incapacité à répondre aux allégations extrêmement troublantes soulevées dans les organes de l’ONU au cours de l’année, y compris les allégations de crimes contre l’humanité contre les Ouïghours en Chine. 

Soucieux de répondre à l’absence d’initiatives institutionnelles pour protéger les droits des minorités, le Rapporteur spécial a avancé plusieurs pistes, recommandant notamment la mise en place d’un plan d’action pour intégrer ces droits aux trois piliers de l’ONU, la tenue de réunions dans le cadre du Forum permanent sur les questions relatives aux minorités ou encore une réflexion en vue de l’élaboration d’un traité sur cette question. 

Autres grands absents, cette fois des programmes et discussions sur le développement, les droits culturels ont été défendus par la Rapporteuse spéciale en charge de ce domaine.  Mme Alexandra Xanthaki a déploré que les projets de développement intègrent rarement les valeurs et les visions des populations locales et ce, alors qu’elles devraient être les premières bénéficiaires du processus de développement durable.  Selon la Rapporteuse, le développement culturel doit obtenir sa place en tant que pilier du développement durable aux côtés des piliers social, économique et environnemental.  Elle a donc appelé à inclure les droits culturels dans les discussions sur le développement, mais de façon adaptée aux cultures et philosophies des populations concernées. 

N’oublions pas les droits humains des personnes atteintes d’albinisme, notamment des migrants, réfugiés, demandeurs d’asile ou déplacés, a pour sa part plaidé l’experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes de cette maladie génétique. 

Mme  Muluka-Anne Miti-Drummond a rappelé que ces personnes, considérées comme handicapées en raison de leur déficience visuelle et de leur grande vulnérabilité au cancer de la peau, font souvent face à des traitements cruels, inhumains et dégradants.  Elle a notamment évoqué la situation des personnes atteintes d’albinisme dans les camps de réfugiés, où elles ne bénéficient que rarement de services et de produits de santé essentiels, tels que les écrans solaires et autres services dermatologiques et ophtalmiques. 

Le difficile accès aux soins de santé pour les migrants et les réfugiés a également été pointé par la Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible.  Mme Tlaleng Mofokeng s’est concentrée sur l’impact du racisme sur la dignité humaine, notamment sur le droit à la protection de la santé.  Constatant que les effets du racisme visent particulièrement les Noirs, les personnes d’ascendance africaine, les migrants et les peuples et minorités autochtones, elle a relevé que les migrants et réfugiés n’ont droit qu’aux soins de santé d’urgence, et pas aux soins de santé classiques et préventifs.  Elle a par ailleurs fait état d’une ségrégation résidentielle, puissant facteur prédictif de la santé et du bien-être, les communautés majoritairement composées de personnes d’ascendance africaine étant plus exposées aux toxines environnementales, aux polluants atmosphériques et aux agents cancérigènes.

Mme Mofokeng a en outre noté que, même dans les pays où les indicateurs de progrès globaux sont bons, les données au niveau national masquent souvent les disparités extrêmes entre les groupes de population au sein de ces pays.  Elle a ainsi relevé un impact disproportionné de la pandémie de COVID-19 sur les groupes victimes de racisme et de discrimination.  Cette pandémie a aussi mis en lumière les nombreuses disparités qui existent entre les régions et pays du monde, a observé l’expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale.  M.Obiora Okafor s’est penché sur les inégalités d’accès aux vaccins contre la COVID-19 entre pays du Sud et du Nord, constatant qu’un écart énorme subsiste entre la quantité de vaccins devant être distribués dans le monde et le nombre de ceux qui ont été alloués aux pays du Sud. 

L’expert indépendant a aussi fait état de disparités dans l’acquisition des vaccins.  En effet, a-t-il dit, les États à revenu élevé ont pour la plupart choisi de s’adresser directement aux fabricants, sans passer par le Mécanisme COVAX, tandis que les États principalement du Sud accusaient de longs retards d’approvisionnement.  De fait, M. Okafor a dit craindre que la pleine jouissance de certains droits humains à l’échelle mondiale continue de ne pas se réaliser, en grande partie à cause de la disparité entre régions du monde dotées ou non de vaccins. 

Enfin, les États Membres se sont entretenus avec le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, qui a centré son intervention sur les problèmes d’eau et d’assainissement dont souffrent les communautés rurales.  M. Pedro Arrojo-Agudo s’est notamment déclaré préoccupé par l’accaparement des terres des peuples autochtones par les grands producteurs d’agro-élevage ou les compagnies minières, une situation qui laisse de nombreuses communautés sans eau ni ressources. 

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 21 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

M. FERNAND DE VARENNES, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités, a indiqué se concentrer sur les recommandations et conclusions du rapport au sujet de la protection des droits des minorités dans les institutions, structures et initiatives de l’ONU.  Trente ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, nous avons affaire à une inaction et à une négligence flagrantes dans la protection des droits des minorités, a-t-il déploré.  Le Rapporteur spécial a donc appelé les Nations Unies et la communauté internationale à faire preuve de leadership dans ce domaine.

Il y a un échec presque complet de l’intégration des droits des minorités aux Nations Unies, a-t-il pointé, et ce, malgré une note d’orientation publiée il y a presque 10 ans par le Secrétaire général de l’époque.  Selon M. de Varennes, les minorités sont aujourd’hui confrontées, à une échelle massive et sans précédent, à des menaces d’exclusion et de discrimination, et même à des appels au génocide et aux crimes contre l’humanité.

Il n’est pas exagéré de dire qu’il y a eu une régression dans le niveau de reconnaissance et de protection des droits de l’homme des minorités, a poursuivi le Rapporteur spécial, dénonçant une incapacité à répondre aux allégations extrêmement troublantes qui ont été soulevées dans les communications adressées aux procédures spéciales et à d’autres organes des Nations unies au cours de l’année.  Il a, par exemple, mentionné le refus de la citoyenneté opposé à des millions de personne en Inde, les restrictions au droit de vote aux États-Unis ou encore les allégations de crimes contre l’humanité contre les Ouïghours et d’autres minorités principalement turques du Xinjiang, en Chine.

En outre, il a regretté l’absence d’initiatives institutionnelles majeures pour la protection des droits des minorités, allant jusqu’à parler de « négligence institutionnelle ».  Parallèlement, il a relevé une augmentation des niveaux de discours de haine, d’incitation à la violence, de désignation de boucs émissaires et de sectarisme conduisant à un monde plus injuste.  Les minorités représentent plus de trois quarts des apatrides dans le monde, a-t-il par ailleurs constaté, relevant que les minorités ne sont pas toujours protégées par l’état de droit.  Pire, les défenseurs des droits humains eux-mêmes sont persécutés, a-t-il dénoncé.  Si nous ne nous attaquons pas aux violations massives des droits de l’homme des minorités, le monde continuera à être confronté à des risques d’instabilité croissants et à une période de rupture de la paix et de la stabilité, a mis en garde le Rapporteur spécial. 

Pour remédier à cette situation, M. de Varennes a recommandé la mise en place d’un plan d’action pour renforcer la protection des droits des minorités et intégrer leurs droits à tous les piliers de l’ONU.  Il est évident, a-t-il conclu, qu’en raison du climat actuel, nous devons mieux protéger les minorités, en particulier dans le cadre du Forum des Nations Unies sur les questions relatives aux minorités.

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne s’est interrogée sur les moyens de lutter contre les discours de haine en ligne.  Comment veiller à ce que les réseaux sociaux ne soient pas utilisés à mauvais escient pour attiser les conflits ? a voulu savoir la délégation.  Les États-Unis ont souhaité en savoir plus sur les membres des groupes minoritaires qui sont confrontés à des problématiques trans-sectionnelles.  Que peuvent faire les États Membres pour mieux prévenir les conflits ayant trait aux droits des minorités, s’est enquis le Liechtenstein, tandis que la Suisse se demandait s’il est possible de revaloriser la nécessité de protéger les droits des minorités.  Comment renforcer le rôle des femmes des minorités dans la prévention des conflits ethniques et le maintien de la paix, a demandé à son tour la Slovénie.  De son côté, le Cameroun s’est demandé ce qui explique le désintérêt progressif pour les minorités aux Nations Unies, l’Ordre souverain de Malte s’interrogeant plutôt sur les actions concrètes qui peuvent être prises pour mieux intégrer les groupes marginalisés dans les processus de décision.

Le Bélarus a dénoncé une ingérence dans les affaires des États, indiquant comprendre que la Chine cherche à protéger sa souveraineté.  Ce dialogue important avec les minorités doit être mené au niveau national, a insisté la délégation.  Un message repris par la République islamique d’Iran, qui a appelé au respect du principe de non-ingérence, tout en se demandant comment s’attaquer aux discriminations raciales, en particulier contre les musulmans dans l’Union européenne.  La Chine a, elle, noté que les États-Unis n’ont toujours pas de mécanisme de protection juridique pour les minorités et a exprimé sa préoccupation à cet égard.  Les questions des droits humains aux Nations Unies doivent être menées de façon transparente et non politisée, a mis en garde la République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui a déploré des tentatives d’ingérence visant à détruire l’indépendance de certains États.  Affirmant elle aussi soutenir la position de la Chine, la République arabe syrienne est également revenue sur la situation aux États-Unis, demandant au Rapporteur spécial dans quelle mesure il peut agir pour prévenir les discriminations contre les minorités dans ce pays et s’il compte travailler avec l’administration américaine qui se sent supérieure à tous et continue de donner des leçons sur les droits humains.

Pour sa part, la Fédération de Russie a déploré que les minorités nationales soient pratiquement ignorées par les fonctionnaires des Nations Unies, dénonçant également une approche partisane et sélective des droits des minorités.  À cette aune, la délégation a jugé très intéressante la proposition de mettre en place un instrument juridiquement contraignant.  La Pologne a quant à elle dénoncé les discriminations dont est victime la minorité polonaise au Bélarus.  Après des prises de parole de l’Autriche et des Maldives, le Pakistan a sollicité l’avis du Rapporteur spécial sur « l’appel au génocide » contre la communauté musulmane en Inde. Est-il possible d’établir un instrument international qui protège les droits des minorités, a voulu savoir la délégation, s’interrogeant également sur la faisabilité d’un mécanisme de prévention des conflits afin d’agir plus rapidement.  Les déclarations du Pakistan à son égard ont été condamnées par l’Inde, qui a accusé ce pays de « décimer » les minorités.

Dans sa réponse aux délégations, le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités a donné plusieurs pistes pour rectifier la situation actuelle.  D’abord, il importe selon lui de développer des outils mieux adaptés pour combattre certains défis, y compris les discours de haine.  Ensuite, a-t-il ajouté, il convient de commencer la discussion sur un nouveau traité afin de qualifier la nature des droits des minorités.  L’un des plus grands défis est de préciser clairement quels sont ces droits, a souligné M. de Varennes.  Il a par ailleurs insisté sur le besoin de remettre en place le Plan d’action de 2013 au sein des Nations Unies, qui a été délaissé et oublié.  Enfin, il est revenu sur la question du forum permanent pour les minorités, prenant note des interrogations à son sujet.  Rappelant à cet égard qu’un tel forum existe déjà pour les peuples autochtones, il a averti que, tant que les Nations Unies ne donneront pas aux minorités l’attention qu’elles méritent, de plus en plus de cas d’apatridie ciblant les minorités seront enregistrés.  Ce forum permanent est le minimum que nous pourrions faire, a-t-il insisté, citant enfin des cas de bonnes pratiques dans le Tyrol du Sud en Italie, à Singapour, au Canada et en Bolivie.

Mme ALEXANDRA XANTHAKI, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, a présenté son premier rapport consacré au développement et aux droits culturels.  Elle a noté à cet égard que 150 États ont adopté une Déclaration énumérant l’ensemble des droits culturels qui doivent être pris en compte dans les politiques publiques de développement.  Ces droits, a-t-elle fait valoir, sont indispensables à tout développement si l’on veut qu'il soit durable.  Or la réalité des faits est bien différente, a déploré Mme Xanthaki, dont le rapport confirme que les droits culturels sont les grands absents des priorités, programmes et discussions sur le développement.  Qu’il s’agisse de populations locales aux Bahamas, en Malaisie, au Canada et en Türkiye, du peuple Masaï en Tanzanie ou de migrants latino-américains au Royaume-Uni, la Rapporteuse spéciale dresse le même constat: rarement menés par les communautés, les projets de développement intègrent aussi rarement les valeurs, les philosophies et les visions des populations locales.  Les droits de ces populations sont violés, alors qu’elles devraient être les premières bénéficiaires des processus de développement durable, a-t-elle regretté.  

Le rapport, a poursuivi Mme Xanthaki, rappelle aux États les obligations légales qu’ils ont contractées pour respecter et protéger les droits culturels des individus et des communautés, y compris dans les processus de développement, et répond à des questions concrètes, notamment à celle de savoir comment les droits culturels peuvent servir de base à un développement plus inclusif et plus durable.  La feuille de route proposée est claire: le développement culturel doit obtenir sa place en tant que pilier du développement durable aux côtés des piliers social, économique et environnemental.  

La théorie selon laquelle la culture traverse tous les objectifs et n’aurait donc pas besoin d’être un objectif en particulier a échoué, a constaté la Rapporteuse spéciale, dont le mandat soutient l’inclusion de la culture en tant qu’objectif autonome dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  En attendant, nous devons tous commencer à inclure les droits culturels dans les discussions sur le développement, a préconisé Mme Xanthaki.  Mais de façon adaptée aux cultures et philosophies des populations concernées, a-t-elle ajouté, se disant opposée à une approche unique.  Elle s’est dite consciente que cette approche ciblée remet en question ou conteste le modèle de développement économique défendu par les États, les organisations intergouvernementales et les institutions financières internationales.  

La Rapporteuse spéciale a également observé que le cadre de la coopération internationale au développement est encore très axé sur un modèle économique dominant et ne tient pas compte des valeurs et des modes de vie des populations locales.  Elle a toutefois relevé les prémisses d’un changement dans le fonctionnement des organismes mondiaux d’investissement et de commerce, avec de nouvelles directives et de nouvelles méthodes de travail.  Ce sera l’objet de son prochain rapport à l’Assemblée générale, a-t-elle précisé, affirmant en conclusion que si le développement durable a besoin des droits culturels, « les droits culturels ne peuvent être violés au nom du développement durable ».

Dialogue interactif

Après cette présentation, la Tanzanie a contesté les allégations d’expulsion de populations Masaï dans la région de Ngorongoro, assurant que son gouvernement travaille à l’équilibre entre protection de la nature et préservation des droits humains, et continuera sur cette voie.  À sa suite, l’Union européenne s’est interrogée sur le rôle que peut jouer le secteur de la culture dans les situations de postconflit.  Elle a aussi voulu savoir dans quelle mesure la préservation des droits culturels contribue aux objectifs de développement durable.  Comment pourrait-on mieux lier les industries de la création aux indicateurs et programmes de développement, et en quoi la création d’un forum permanent des minorités permettra un réel exercice de leurs droits culturels dans le monde, s’est pour sa part enquis le Portugal.  Comment peut-on protéger les droits culturels des minorités victimes des conflits armés, a souhaité savoir la Pologne en s’émouvant que l’identité de certaines populations soit effacée de façon intentionnelle lors de conflits armés, notamment en Ukraine.  Elle s’est aussi inquiétée de voir les droits culturels de minorités violés au Bélarus, en particulier ceux de la minorité polonaise.

Que pouvez-vous faire dans le cadre de votre mandat pour protéger les droits culturels menacés par des politiques étatiques, ont demandé les États-Unis, qui se sont aussi inquiétés des menaces que fait peser l’agression russe sur le patrimoine culturel ukrainien, avant de dénoncer la répression des groupes minoritaires en Chine, mais aussi en Afghanistan et au Myanmar.

La Chine a déploré que les États-Unis et d’autres pays occidentaux « abusent de ce dialogue interactif » en évoquant un rapport du HCDH sur la situation des droits humains au Xinjiang.  Celui-ci n’est plus d’actualité et sa légalité est remise en question, a fait valoir la délégation, pour qui ce document n’est qu’un « argument fallacieux pour s’ingérer dans notre politique interne ».  De son côté, Cuba a regretté que ses efforts en termes de droits culturels soient entravés par l’embargo économique et financier imposé depuis plus de 60 ans par les États-Unis, avant d’appeler à une réflexion sur l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les droits culturels.  Le Cameroun s’est, lui, réjoui que le rapport de la Rapporteuse spéciale rappelle l’impossibilité d’imposer des programmes culturels depuis l’extérieur d’un pays sans prendre en compte les besoins des populations locales.  À ce titre, il a souhaité connaître la place octroyée aux droits culturels dans le projet de convention sur le droit au développement en cours d’élaboration. 

L’Algérie a, pour sa part, demandé comment mesurer l’impact de la culture sur la transformation des sociétés en termes de patrimoine immatériel, et éviter que le développement économique continue de faire fi du développement culturel.  Le Nigéria s’est, quant à lui, félicité d’être la patrie de 250 ethnies aux langues multiples et a dénoncé les « nouvelles notions imposées depuis l’étranger à nos cultures ancestrales ».  Il a voulu savoir comment les Nations Unies pourraient lutter contre ce type d’ingérence culturelle.  La Türkiye a ensuite regretté que ses efforts de protection du patrimoine culturel national ne soient pas assez exposés dans le rapport. 

Le Pakistan a constaté que les droits des minorités sont souvent bafoués pour des raisons politiques, citant le sort réservé par « un certain pays de la région » à ses 200 millions de musulmans et à ceux des territoires qu’il occupe.  De quelles options disposons-nous pour protéger les droits des minorités quand ils sont écrasés par une machine étatique au nom du développement économique, a-t-il demandé.  En écho, l’Inde a assuré que le respect des droits culturels est assuré sur son territoire, notamment au Jammu-et-Cachemire, et a condamné la « propagande » de la délégation pakistanaise à ce sujet.  Elle s’est par ailleurs interrogée sur l’impact de la COVID-19 sur les industries de la création.  Enfin, la représente de l’UNESCO est revenue sur le travail de son agence en faveur des droits culturels des peuples autochtones.  Elle s’est interrogée sur les modalités d’une plus profonde collaboration dans ce domaine. 

Répondant à ces questions et remarques, la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels s’est élevée contre la position selon laquelle certaines questions intérieures ne devaient pas faire l’objet d’un examen extérieur.  Le rôle des Nations Unies est de faire un suivi de tous les droits humains, a-t-elle objecté, affirmant que cela permet d’avancer dans le mandat qui est le sien.  La politisation du dialogue ne nous aide pas à accomplir notre travail, a-t-elle encore fait valoir.  Il n’y a toutefois pas d’approche unique, chacun peut et doit exprimer sa vision concernant le développement, a souligné Mme Xanthaki.

Aux délégations qui évoquaient la recherche de nouveaux outils, la Rapporteuse spéciale a dit ne pas en voir la nécessité, arguant qu’il existe déjà des documents juridiquement contraignants forts.  Reste à s’assurer de leur mise en œuvre, a-t-elle relevé, constatant que, « malheureusement, dès que l’on parle de droits culturels, la volonté n’est pas au rendez-vous ».  À ses yeux, ni les États ni les organisations internationales ne se penchent suffisamment sur cette question.  À la question de savoir si un forum permanent sur les minorités pourrait y aider, elle a répondu par l’affirmative, estimant que les minorités se feront ainsi mieux entendre au sein de la structure des Nations Unies. 

Elle s’est ensuite félicitée du travail de l’UNESCO, puis a décrit l’art comme une manière de réinsuffler de la créativité dans nos sociétés, singulièrement dans le contexte postpandémique.  Le secteur culturel est souvent considéré comme un simple bien économique, alors que nous devrions nous enrichir de sa vision alternative des choses, a-t-elle affirmé.  Enfin, après avoir exprimé son appui au rapport du HCDH sur le Xinjiang, elle a exhorté la Tanzanie et la Türkiye à l’inviter et à s’impliquer davantage dans un dialogue constructif.

Mme MULUKA-ANNE MITI-DRUMMOND, experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme, a dit avoir consacré son rapport aux défis en matière de droits de l’homme auxquels sont confrontées les personnes atteintes d’albinisme en déplacement.  Qu’elles soient migrantes, réfugiées, demandeuses d’asile, travailleuses migrantes ou déplacées à l’intérieur de leur pays, ces personnes fuient la stigmatisation et la discrimination, en particulier lorsqu’elles se manifestent par des traitements cruels, inhumains et dégradants, a-t-elle expliqué.  Notant que ces personnes font partie des près de 89,3 millions de personnes déplacées de force, elle a rappelé qu’elles sont également considérées comme des personnes handicapées en raison de leur déficience visuelle et de leur grande vulnérabilité au cancer de la peau.  Elle a regretté à cet égard que les données et les statistiques relatives aux personnes handicapées en déplacement ne soient pas ventilées pour mieux refléter la situation des personnes atteintes d’albinisme.

Selon Mme Miti-Drummond, les personnes atteintes d’albinisme se déplacent souvent vers des zones offrant de meilleurs services pour elles, tels que la santé, l’éducation inclusive et les transports accessibles.  Mais les changements climatiques sont devenus pour ces personnes un autre facteur de déplacement, a-t-elle relevé.  Bien qu’un nombre croissant d’entre elles réussissent à demander l’asile, beaucoup ont encore du mal à faire face au processus administratif, a constaté l’experte indépendante, imputant ce problème au manque de connaissances des autorités sur l’albinisme.  Au cours d’enquêtes sur le terrain, elle a aussi noté que les personnes atteintes d’albinisme dans des camps de réfugiés bénéficient rarement de services et de produits de santé essentiels, tels que les écrans solaires et autres services dermatologiques et ophtalmologiques.  De plus, le manque de soutien psychosocial signifie que de nombreuses personnes ayant subi des traumatismes dans leur pays d’origine n’ont pas accès au soutien dont elles ont besoin, a-t-elle ajouté.

Si la stigmatisation et la discrimination des personnes atteintes d’albinisme sont courantes dans les camps de réfugiés, l’insécurité persistante est également préoccupante, en particulier pour les enfants, les femmes et les filles, s’est inquiétée l’experte indépendante, qui a fait état d’attaques et de brimades à l’intérieur des camps, y compris de la part d’enseignants et d’élèves pour ceux qui ont accès à des écoles.  Même en dehors des camps, ces personnes ont du mal à s’intégrer dans leurs nouvelles communautés et à comprendre comment accéder aux services sociaux et aux prestations auxquels elles ont droit, a-t-elle déploré.  De même, dans les camps de réfugiés comme dans les communautés d’accueil, l’emploi et les moyens d’obtenir une subsistance durable constituent un défi énorme.

Mme Miti-Drummond a cependant mentionné de bonnes pratiques, notamment la référence faite aux personnes atteintes d’albinisme dans le cadre qui guide l’Agence européenne pour l’asile.  La politique du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur l’âge, le genre et la diversité constituent également, à ses yeux, un outil important, tout comme le Plan d’action 2021-2031 de l’Union africaine pour mettre fin aux attaques et autres violations des droits de l’homme contre les personnes atteintes d’albinisme.  Elle a également relevé le « bon travail » de l’Ouganda, qui a récemment adopté un plan d’action national contenant une section sur les réfugiés atteints d’albinisme, et de l’Office français de protection des réfugiés apatrides (OFPRA), qui tient compte de cette spécificité dans l’examen des demandes.

Pour finir, l’experte indépendante a souligné les initiatives en faveur des personnes atteintes d’albinisme en déplacement, prises par des organisations de la société civile en Ouganda, aux États-Unis et en France, saluant également les organisations nationales et internationales, telles que « Standing Voice » et la Fondation Pierre Fabre, qui apportent un soutien humanitaire aux personnes atteintes d’albinisme dans les camps de réfugiés et d’hébergement.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, la Tanzanie a regretté que, dans son rapport, l’experte indépendante s’appuie sur un article paru en 2017. Depuis lors, beaucoup de choses ont changé, a-t-elle assuré, se disant prête à travailler à l’avenir avec elle pour la production d’un document qui reflète la réalité. Le Nigéria s’est pour sa part enorgueilli d’avoir intégré la question de l’albinisme dans tous ses secteurs.  À sa suite, l’Afrique du Sud a souhaité savoir de quelle façon, en l’absence de données ventilées, les États peuvent s’assurer que la situation des personnes atteintes d’albinisme est prise en compte.  Comment approfondir le dialogue avec les parties prenantes concernées, notamment les représentants de la société civile, afin de répondre aux principales préoccupations en matière de droits de l’homme des personnes atteintes d’albinisme, s’est interrogée l’Union européenne?  La Chine a quant à elle, indiqué qu’elle intensifie ses recherches scientifiques sur la maladie rare qu’est l’albinisme.

Répondant aux questions et observations des États Membres, l’experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme a tout d’abord reconnu s’être basée sur un article de 2017 dans ses données sur la Tanzanie. Elle a cependant insisté sur le fait que 10 000 personnes ont été déplacées dans ce pays en raison de leur albinisme, assurant que ce chiffre reste d’actualité. Elle a par ailleurs jugé essentiel d’associer la société civile dans l’élaboration de politiques d’asile et migratoire concernant les personnes atteintes d’albinisme.  Elle a aussi recommandé de renforcer les capacités des fonctionnaires en charge des processus de demande d’asile.

L’experte indépendante a ensuite fait part de sa préoccupation face à l’invisibilité des personnes atteintes d’albinisme, regrettant l’absence de données ventilées les concernant.  Pour y remédier, elle a recommandé de veiller à ce que les recensements soient conduits de façon précise pour garantir une meilleure visibilité.  Trop souvent, a-t-elle fait observer, les estimations sont floues.  Il faut donc, selon elle, une compilation précise des indices humains s’agissant de ce groupe de personnes.  Elle a d’autre part signalé qu’outre la discrimination et la stigmatisation, ces personnes sont victime de la traite et de l’utilisation de parties de leur corps dans le cadre de rituels.

À l’Afrique du Sud, Mme Miti-Drummond a recommandé l’élaboration d’un plan national couvrant les raisons des déplacements, citant en exemple l’expérience de l’Ouganda. 

Pour finir, elle s’est à nouveau déclarée inquiète face aux lacunes en matière de données tenant compte du nombre de personnes en déplacement atteintes d’albinisme.  Sur la base de ses déplacements sur le terrain, et notamment dans les camps de réfugiés, elle a estimé que leur nombre est bien plus élevé que ce qui est évalué, ce qui rend encore plus inacceptable l’invisibilité de ces personnes.

Suite de la discussion générale

M. KIM NAM HYOK (République de Corée) a tout d’abord relevé que l’aide publique au développement de son pays a augmenté de 15% par rapport à l’an dernier.  Il a ensuite déploré la dégradation des droits humains dans plusieurs pays ravagés par le conflit, notamment le Myanmar, l’Afghanistan et l’Ukraine.  Le délégué est également revenu sur la situation des droits humains en République populaire démocratique de Corée (RPDC), marquée par l’insécurité alimentaire et un difficile accès au système de santé, tandis que les rares ressources sont allouées à un programme de missiles balistiques.  L’aide humanitaire doit se poursuivre, a plaidé le représentant, selon lequel la situation en RPDC nécessite un renvoi devant la Cour pénale internationale (CPI).

M. PATRICIA CHAND (Fidji) a rappelé l’importance qu’accorde son pays à la défense des droits des groupes vulnérables, parmi lesquels il a souhaité ajouter les réfugiés climatiques et les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays.  Selon lui, les changements climatiques exacerbent le déclin de la protection des droits de l’homme et des libertés individuelles des individus et des communautés déplacés ou vivant dans des situations de détresse climatique extrême.  Ils sont aussi à l'origine d’une inégalité croissante entre le Nord et le Sud global, a-t-il constaté, formant le vœu que des décisions seront prises à ce sujet lors de la COP27 à Charm al-Cheikh.

M. MUHAMMAD RASHID (Pakistan) a souligné les efforts entrepris par son pays dans la lutte contre la désinformation et sa coopération internationale en la matière, notamment dans le cadre du Groupe des Amis pour la lutte contre la désinformation.  Parmi les dernières manifestations de désinformation dans le monde, il a fustigé la campagne étatique menée par le Gouvernement indien « pour servir ses objectifs stratégiques ».  Citant les données du journal en ligne IFLA, qui a fait état de 9 000 cas de désinformation dans le monde entre janvier et mars 2021, il a accusé l’Inde d’être « la championne des ‘fake news’ sur les réseaux sociaux ».  Le Pakistan en est la cible numéro un, a-t-il dit, ajoutant que New Delhi présente les activistes de paix au Jammu-et-Cachemire comme des terroristes.  Selon le délégué, le Gouvernement indien, mu par un « hindouisme extrémiste », oppresse en outre 200 millions d’Indiens musulmans, ciblés par des appels au génocide.

M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a rappelé l’adoption par son pays d’une réforme d’ampleur il y a quatre ans, qui vise à garantir une plus grande transparence de l’action publique pour les droits humains des Éthiopiens, mais aussi des migrants et des réfugiés.  Mais ces efforts sont rendus difficiles par les actions brutales menées par le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) dans le nord du pays.  Ce groupe, a-t-il dit, se livre aussi à des assassinats aveugles, à des pillages et à des violences contre les femmes et les filles.  Le représentant s’est par ailleurs inquiété de la politisation des enjeux relatifs aux droits humains, en particulier au niveau du Conseil des droits de l’homme.  Établir une « liste de la honte » d’États souverains est contreproductif, a-t-il estimé, tout comme l’imposition de mesures coercitives unilatérales.

Mme QAMBAR (Bahreïn) a mentionné le plan d’action pour les droits humains 2022-2026 adopté par son pays, avant de s’enorgueillir de la nette hausse de la participation des femmes dans le secteur public.  Après avoir détaillé les aides fournies à la population pendant la pandémie, la déléguée a rappelé que Bahreïn coopère avec les mécanismes du Conseil des droits de l’homme.  Elle a également signalé la tenue prochaine d’élections parlementaires, y voyant une étape importante pour l’établissement de la démocratie dans le pays.

M. CARLOS ERNESTO MORALES DÁVILA (Nicaragua) s’est enorgueilli des mesures prises par son pays pour faire progresser les droits humains, citant entre autres l’accès gratuit à la santé et aux soins primaires.  La stratégie nationale a été saluée et reconnue au niveau international, s’est-il félicité, avant de préciser que l’enveloppe allouée au secteur de la santé a augmenté de 476% entre 2006 et 2020.  Notant par ailleurs que le Nicaragua est aujourd’hui en situation de souveraineté alimentaire, il a assuré que son gouvernement s’emploie à prendre en compte les besoins des populations autochtones et afro-descendantes.  Les effets des changements climatiques sont également couverts par un plan national, a-t-il indiqué, ajoutant que son pays participe à toutes les initiatives climatiques au plan international.  Pour finir, il s’est élevé contre les mesures coercitives unilatérales et leur impact sur la réalisation des objectifs de développement durable. 

Mme LISA A. CARTY (États-Unis) a condamné à son tour la guerre injustifiée menée par la Fédération de Russie en Ukraine, accusant ce pays de se livrer à des crimes de guerre, des déportations forcées et des meurtres de civils.  Elle a d’autre part dénoncé la situation des droits humains en Chine, notamment au Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong, estimant que ce dossier met le système des Nations Unies à rude épreuve.  La représentante s’est également alarmée de la situation des droits humains en Syrie, soutenant à cet égard l’appel pour la mise en place d’un nouveau mécanisme des Nations Unies pour clarifier la situation des personnes disparues.  Elle a par ailleurs condamné l’usage de la violence contre des manifestations pacifiques en Iran et appelé à la cessation des violations des droits humains au Venezuela.  Enfin, la déléguée s’est dite préoccupée par les restrictions et les intimidations auxquelles font face les défenseurs des droits humains en Afghanistan, au Myanmar, à Cuba, en République populaire démocratique de Corée et au Soudan du Sud.

Mme FATEMEH ARAB BAFRANI (République islamique d’Iran) a d’abord dénoncé « l’apartheid israélien », qui se poursuit avec le soutien des États-Unis et d’autres pays occidentaux.  Elle a ensuite dénoncé les violations des droits humains aux États Unis, où l’incarcération disproportionnée des personnes issues des minorités prouve selon elle l’inégalité de tous devant la loi.  Washington multiplie en outre les tentatives en vue de déstabiliser des gouvernements souverains via des sanctions « inhumaines », a-t-elle accusé.  Aux États-Unis et au Canada, les droits des musulmans sont bafoués, tandis que les populations autochtones sont surreprésentées dans les prisons, s’est encore alarmée la déléguée.  De son côté, l’Iran s’enrichit de la diversité religieuse de sa société, a-t-elle affirmé, avant de souligner les impacts négatifs des mesures coercitives unilatérales imposées à son pays et à son peuple.  Il faut en finir avec le « deux poids, deux mesures », a-t-elle conclu en rejetant les fausses allégations concernant l’Iran.

Mme ELAINE CRISTINA PEREIRA GOMES (Brésil) a mis en avant les garanties offertes par son pays en matière de droits de la personne, notant par exemple que les dispositions de la Convention sur les droits des personnes handicapées sont inscrites dans la Constitution brésilienne.  Elle a également relevé que le Brésil a amélioré ses bases de données sur cette question en se dotant cette année d’un registre en ligne qui facilite l’accès des personnes handicapées aux aides étatiques.  La liberté de conviction fait aussi partie intégrante du marbre constitutionnel brésilien, a-t-elle ajouté, avant de s’émouvoir de la montée de l’antisémitisme et de la négation de l’Holocauste dans le monde.

M. ALI MABKHOT SALEM BALOBAID (Yémen) a salué le travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) dans son pays, plaidant pour une augmentation des contributions à cette agence spécialisée de l’ONU pour qu’elle intensifie son action.  Il a ensuite fait état de rapports montrant que les milices houthistes ne respectent ni les droits humains ni certaines valeurs musulmanes.  De plus, les houthistes s’attaquent aux journalistes internationaux, aux employés des Nations Unies et aux défenseurs des droits de l’homme, a-t-il accusé. 

M. MAGOSAKI KAORU (Japon) s’est dit préoccupé par l’agression russe en Ukraine, qu’il a qualifiée d’inacceptable, ainsi que par la situation au Myanmar, à la suite du coup d’État militaire de 2021.  Après avoir appelé la junte militaire au pouvoir dans ce pays à libérer les prisonniers politiques, il a salué la publication par le HCDH d’un rapport sur la situation des droits humains dans le Xinjiang.  Il a par ailleurs rappelé que les actions irresponsables de la République populaire démocratique de Corée continuent de mettre la population du Japon en danger.  Enfin, s’agissant des droits des femmes, il s’est dit préoccupé de la situation en Iran et a appelé la communauté internationale à davantage œuvrer pour l’égalité des sexes. 

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) a regretté que la vie de millions d’Ukrainiens ait été détruite pour toujours lorsque la Russie s’est engagée dans une guerre d’ampleur dans ce pays, semant le désespoir et la destruction.  Faisant état de « traces de crimes de guerre » en Ukraine, il a également estimé que les fosses communes découvertes dans ce pays rappellent les atrocités commises par les régimes nazi et soviétique à l’encontre de civils innocents au cours du XXe siècle.  Le délégué a également accusé la Russie de profiter de la tribune de la Troisième Commission pour justifier son agression xénophobe et non provoquée contre le peuple ukrainien.  Il a par ailleurs accusé le Bélarus de manquements graves en matière des droits de l’homme.

M. KOUADJO MICHEL KOUAKOU (Côte d’Ivoire) a indiqué que son pays a ratifié tous les principaux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l’homme et s’emploie à s’acquitter de ses obligations conventionnelles.  À cette fin, a-t-il dit, le Gouvernement ivoirien a créé en 2018 le Conseil national des droits de l’homme, organe indépendant qui permet d’évaluer la situation sur le terrain et de procéder au réexamen du cadre législatif.  Le délégué a également rappelé qu’une loi relative à la protection des défenseurs des droits de l’homme a été adoptée en 2014 afin de garantir à ces personnes un environnement sûr et propice à l’exercice de leurs activités.  Il a ajouté que son pays travaille au renforcement des systèmes de prévention, notamment des mécanismes d’alerte précoce.

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

M. OBIORA CHINEDU OKAFOR, expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, a indiqué s’être intéressé à la solidarité mondiale en termes de vaccins, dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  La nature de la réponse mondiale au cours de ces deux dernières années a servi à mettre en lumière des problèmes systémiques préexistants, tels que la grande disparité entre le Nord et le Sud, a-t-il dit, dénonçant à cet égard l’écart énorme qui subsiste entre la quantité de vaccins devant être distribués dans le monde et le nombre de ceux qui ont été fournis ou distribués au pays du Sud, en réponse à la pandémie.

En outre, l’acquisition par certains États de quantités suffisantes de vaccins pour vacciner plusieurs fois leur population a eu des répercussions négatives sur l’accès et l’accessibilité financière dans le monde entier, a-t-il relevé.  L’expert indépendant a fait état de la surfacturation de leurs vaccins par certaines sociétés pharmaceutiques, entre 6 et 24 fois le coût de production.  En comparaison, le Mécanisme COVAX paie en moyenne jusqu’à cinq fois le coût de production des doses de vaccins, a-t-il précisé.  De plus, pour obtenir leurs propres doses, les États à revenu élevé ont pour la plupart choisi de s’adresser directement aux fabricants, sans passer par le Mécanisme.  M. Okafor a donc déploré que plusieurs États, principalement du Sud, n’aient eu d’autres choix que d’attendre que le Mécanisme COVAX leur fournisse des doses de vaccin, ce qui s’est traduit par de longs retards d’approvisionnement.

L’expert indépendant a d’autre part indiqué qu’en raison du coût global élevé des vaccins contre la COVID-19, les États pauvres ont dû détourner des ressources nationales d’autres lignes budgétaires très importantes pour répondre à la pandémie, et particulièrement au besoin urgent de vaccination de leur population.  Pour beaucoup trop d’États du Sud, a-t-il constaté, ce sont des ressources prévues pour des besoins socioéconomiques essentiels qui ont été détournées.  Dénonçant en outre le nationalisme vaccinal de certains pays, il a estimé que de nombreux États riches, qui ont contribué financièrement au Mécanisme COVAX, ont également sapé son efficacité.  Parmi les autres facteurs qui ont limité l’accès aux vaccins, M. Okafor a mentionné les problèmes administratifs ou encore les perturbations logistiques.  Selon lui, la pleine jouissance de certains droits humains à l’échelle mondiale continuera à ne pas être réalisée, en grande partie à cause de la disparité entre régions du monde dotées ou non de vaccins.  Enfin, il a estimé que la désinformation et mésinformation sur la COVID-19 ont considérablement entravé la lutte contre la pandémie.

Dialogue interactif

Au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a promis l’aide du Mouvement aux pays qui en font la demande en cas de pandémie ou autres catastrophes.  Il a également dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui privent les populations des moyens de subsistance, à l’instar de Cuba qui a enjoint les États-Unis à lever leur blocus à son encontre.  Quelle est l’analyse de M. Okafor sur les conséquences du blocus et sur les actions de certains pays contre la coopération Sud-Sud? a demandé la délégation cubaine.  Le Venezuela, l’Algérie, la République islamique d’Iran, le Cameroun et la Chine ont demandé de faire les vaccins un « bien public universel », avant d’appeler à contrer les mesures coercitives unilatérales qui privent certains pays non seulement de vaccins mais aussi d’autres médicaments pour la santé publique.  Le Venezuela a exigé plus de transparence sur les prix des médicaments.  Comment appliquer les « aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce » (ADPIC), s’est pour sa part interrogée l’Algérie?  Le Costa Rica a, lui, souhaité savoir quelles démarches sont entreprises pour atteindre l’objectif de 70% de vaccination de la population mondiale.  Quelles doivent-être les mesures à prendre pour se préparer aux prochaines pandémies, s’est-il encore enquis?

En réponse aux délégations, l’expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale s’est réjoui que tous les intervenants se soient dits favorables à la solidarité vaccinale.  Il les a invités à se préparer à la prochaine pandémie car, a-t-il dit, l’apparition des maladies ne ralentit pas au fil des ans.  De plus, les virus font fi des frontières, quel que soit le niveau de vaccination, comme l’a montré le variant Omicron.  S’agissant des mesures coercitives unilatérales, il a reconnu leurs effets négatifs tout en constatant qu’ils sont ressentis différemment selon les pays et les régions.  Pour ce qui est des ADPIC, M. Okafor a souligné l’importance de sortir d’une conception « en vase clos » et de renforcer les cadres existants pour qu’ils soient plus efficaces.  En réponse à la question du Venezuela sur la transparence des prix des médicaments, l’Expert indépendant a appelé à améliorer la coopération avec les producteurs de vaccins.  Quant à l’accès aux vaccins, il a encouragé les productions locales sur la base de la coopération Sud-Sud et l’assouplissement des règles des droits de propriété intellectuelle.  Il a enfin insisté sur l’importance de se préparer pour éviter la répétition de la pandémie, rappelant à cet égard que des négociations sont en cours pour élaborer un traité international sur les pandémies.

Mme TLALENG MOFOKENG, Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible, a jugé important, en tant que femme noire d’Afrique du Sud ayant elle-même connu l’apartheid et continuant de vivre sous le poids écrasant du racisme et de l’héritage du colonialisme, de produire un rapport qui se concentre sur l’impact du racisme sur la dignité humaine, notamment sur le droit à un système de protection de la santé.  Ce rapport, a-t-elle précisé, met en évidence l’impact mondial sur la santé des personnes racialisées, en particulier les effets du racisme et de la discrimination sur les Noirs, les personnes d’ascendance africaine, les migrants et les peuples et minorités autochtones.  Il met aussi l’accent sur la ségrégation résidentielle, qui est un puissant facteur prédictif de la santé et du bien-être.  Par rapport aux quartiers à prédominance blanche, les communautés majoritairement composées de personnes d’ascendance africaine sont plus exposées aux toxines environnementales, aux polluants atmosphériques et aux agents cancérigènes, ce qui contribue à des taux plus élevés de maladies pulmonaires et de poids de naissance plus faibles, a-t-elle fait observer.

Pour la Rapporteuse spéciale, être migrant ou avoir le statut de réfugié est aussi un obstacle à la réalisation du droit à la santé, car, dans certains cas, ces personnes n’ont pas accès aux soins de santé classiques et préventifs, n’ayant droit qu’aux soins de santé d’urgence.  Relevant que ce système est inefficace à long terme, notamment en raison des coûts induits, Mme Mofokeng a indiqué que son rapport identifie les bonnes pratiques en matière de droit à un système de protection de la santé, tout en fournissant des exemples sur la manière de mettre fin au racisme et à la discrimination fondés sur la race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique en ce qui concerne l’accès aux déterminants sous-jacents de la santé.

À ses yeux, l’impact du racisme sur le droit à la santé ne peut être pleinement discerné en raison d’un certain nombre d’autres effets, qui sont difficiles à mesurer en raison de lacunes généralisées dans la collecte de données.  Pour y remédier, la Rapporteuse spéciale a appelé toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour contribuer à combler cet écart en collectant des données ventilées par race, origine ethnique, sexe, âge, orientation sexuelle, identité de genre, handicap et situation rurale ou urbaine.  

Le rapport fournit aussi des exemples de réparations pour discrimination raciale liée à des violations et abus du droit à la santé, a poursuivi Mme Ofokeng.  Déplorant à ce propos le nombre limité de données sur les réparations pour discrimination raciale liée aux violations et abus du droit à la santé, elle a exhorté les parties prenantes à relever les défis qui empêchent de faire justice aux victimes.  Elle a ensuite présenté brièvement le concept d’« injustice épistémique », ou liée au savoir, qui s’applique de plus en plus dans le contexte des soins de santé.  Même dans les pays où les indicateurs de progrès globaux sont bons, les données au niveau national masquent souvent les disparités extrêmes qui existent entre les groupes de population au sein de ces pays.  Selon elle, ces statistiques illustrent l’intersectionnalité entre la race et le sexe, ainsi que les fortes disparités raciales dans les résultats des naissances.  Pour finir, la Rapporteuse spéciale a tenu à rappeler que les conséquences du racisme et de la discrimination sur la santé sont persistantes et se transmettent d’une génération à l’autre par le biais de la « mémoire biologique » des expériences néfastes du corps.  Le droit à la santé ne peut être réalisé dans un monde raciste, a-t-elle conclu

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, les États-Unis se sont enorgueillis d’être le plus grand bailleur de fond pour la santé mondiale, soulignant qu’en 2022, plus 12 milliards ont été alloués pour des programmes de santé dans le monde.  Le Portugal a voulu savoir comment les institutions financières internationales peuvent adopter une approche des droits humains s’agissant des maladies tropicales négligées.  Quels sont les principaux obstacles à l’accès aux soins de santé pour les personnes issues d’une minorité raciale ou ethnique, a demandé l’Union européenne, tandis que le Brésil s’interrogeait sur les mesures à prendre pour garantir à tous de meilleurs niveaux de santé physique et mentale.

Cuba a invité la Rapporteuse spéciale à analyser les effets des mesures coercitives unilatérales sur le droit à la santé.  À sa suite, l’Égypte a regretté que le rapport de la Rapporteuse spéciale ne mette pas en évidence l’importance de la coopération internationale et des transferts de technologies pour soutenir les pays en voie de développement.  Évoquant la fuite des cerveaux, l’Algérie a, elle, souhaité savoir comment faire en sorte que les pays gardent leurs spécialistes de la santé.

De son côté, la Chine s’est dite très préoccupée par le racisme profondément ancré aux États- Unis, pointant notamment les violations des droits des personnes d’ascendance africaine.  Le racisme est une menace très grave pour les droits humains des minorités dans ce pays, a-t-elle ajouté, avant de relever que les populations hispaniques et afro-américaines y ont trois fois plus de risque que la majorité blanche de tomber malades et de décéder.  Dernier intervenant, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a souhaité savoir si des programmes de lutte contre le VIH/sida sont empreints de racisme.

Dans sa réponse aux délégations, la Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible est revenue sur la question du financement des maladies tropicales et non contagieuses, indiquant que, ces deux dernières années, les systèmes de santé n’ont pas été assez résistants pour aider à lutter contre d’autres maladies que la COVID-19.  Soulignant par ailleurs le besoin d’informations fiables pour prendre des décisions éclairées, elle a dénoncé la désinformation et la discrimination qui, selon elle, ont entravé l’accès aux solutions.  Mme Mofokeng s’est d’autre part interrogée sur la capacité du monde à reconstruire en mieux après la pandémie, étant donné que les personnes affectées sont toujours des laissés pour compte.  S’agissant des mesures coercitives unilatérales, elle a indiqué que, dans le cadre de son mandat, elle est intervenue de différentes façons durant la pandémie pour évoquer leur impact sur la santé des populations.  Pour finir, la Rapporteuse spéciale a invité les États Membres à lire ses différents rapports, non pas isolément mais comme un tout.  Il y est précisé que la pandémie a eu un impact disproportionné sur les soins de santé physique et mentale et que le racisme détermine les questions de santé, a-t-elle souligné, ajoutant que l’accès à la santé est un droit humain et pas une action caritative.

M. PEDRO ARROJO-AGUDO, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a présenté un rapport visant à identifier les problèmes d’eau et d’assainissement dont souffrent les communautés rurales et à mettre en évidence les leçons qu’offrent les cultures paysannes traditionnelles.  Il a rappelé que 44 % de la population mondiale demeure rurale, et que la ruralité représente 80 % des 2 milliards de personnes qui n’ont pas d’eau potable.  Dans le même temps, la production paysanne et celle des petits agriculteurs nourrissent 70% de la population mondiale.

En l’absence d’investissements publics dans les infrastructures de base, ces communautés sont souvent approvisionnées en eau non traitée par des sources publiques, a expliqué le Rapporteur.  En outre, la présence d’entreprises minières, hydroélectriques, agricoles et industrielles sur leurs territoires contamine leurs sources hydriques, tandis que le manque d’infrastructures oblige les femmes et les filles à aller chercher de l’eau à des sources éloignées, parfois dans un contexte d’extrême pauvreté, s’est ému le Rapporteur.  Pourtant essentiel à la santé de ces communautés, l’assainissement est aussi entravé par des défis tels que le manque de priorité dans les politiques publiques, l’absence d’information ou les tabous.

La gestion communautaire de l’eau, typique des cultures paysannes, offre pourtant des exemples positifs à suivre, a indiqué le Rapporteur, pour qui les 80 000 aqueducs communautaires d’Amérique latine, qui desservent quelque 70 millions de personnes dans des zones rurales appauvries, constituent une référence.  Cependant, les cultures paysannes sont souvent affaiblies par l’influence croissante de la propriété privée, a-t-il déploré, jugeant nécessaire d’adopter une législation nouvelle et de prendre des engagements budgétaires pour renforcer les systèmes d’eau et d’assainissement des communautés rurales.

Face aux risques croissants qu’entraînent les changements climatiques, il est également urgent de promouvoir des stratégies d’adaptation rurale, a ajouté le Rapporteur, mentionnant l’exemple du Sertao brésilien, ou ASA, un réseau de quelque 700 organisations qui a relevé le défi de construire un million de citernes d'eau de pluie pour 5 millions de personnes, grâce à des financements publics, au travail communautaire et à l'éducation.   

Le Rapporteur spécial s’est également préoccupé de l’accaparement des terres des peuples autochtones par les grands producteurs d’agro-élevage ou compagnies minières, laissant de nombreuses communautés sans eau ni ressources.  De plus, l’opposition des populations à ces projets conduit souvent à la criminalisation, à la répression et même au meurtre de dirigeants communautaires, s’est-il indigné, rapportant que Global Witness a enregistré près de 2 000 cas de ce type au cours de la dernière décennie.  L’obligation des gouvernements de garantir des communautés rurales à l’eau potable et à l’assainissement ne peut être minimisée en arguant de problèmes de pénurie, a-t-il ajouté, s’indignant que les intérêts productifs des plus puissants, dont l’industrie de l’armement, qui eux ne manquent pas d’eau, demeurent toujours privilégiés. 

Dialogue interactif

Donnant le coup d’envoi des échanges, l’Espagne a voulu savoir comment faire figurer le droit à l’eau potable et à l’assainissement lors de la Conférence sur l’eau en 2023, appelant par ailleurs à assurer la participation des femmes aux institutions communautaires de gestion des eaux.  Dans quels domaines allouer des fonds pour garantir l’accès des populations rurales à l’eau? a demandé l’Union Européenne.  Et que peut-on faire pour garantir que les femmes qui vivent en zone rurale se trouvent à la table des décisions? a questionné l’Islande.

Le Brésil a voulu connaître des exemples de pratiques optimales permettant de garantir un meilleur accès à l’eau potable et à l’assainissement en Amérique Latine et dans les Caraïbes.  L’Algérie a appelé à une gestion de l’eau en harmonie avec la nature, suivie des États-Unis qui ont mis en avant leur engagement à relier plus de 2 millions de personnes à l’eau potable et plus de 20 millions à l’assainissement.  De son côté, l’Égypte a rappelé les maigres ressources en eaux auxquelles elle a accès.

La République arabe syrienne a déploré les barrages et centres de traitement des eaux détruits par des terroristes dans le pays, alertant en outre que 3 millions de Syriens n’ont plus accès à l’eau potable et que des barrages sont sur le point de s’effondrer.  La République unie de Tanzanie a ensuite reproché au rapport de mentionner des faits datant de 2012 la concernant, précisant que 75% de la population rurale est approvisionnée en eau. 

Répondant à ces remarques et questions, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement a souligné que l’eau est une question de démocratie et non de profit.  Il a affirmé qu’il incombe à la communauté internationale de trouver une solution pour les 2 milliards d’individus privés d’eau potable et d’assainissement, en privilégiant une nouvelle approche qui considère l’eau comme un bien commun et non comme une marchandise. 

Le Rapporteur a indiqué que certaines femmes passent quatre heures par jour à chercher de l’eau, mais sont souvent marginalisées dans les procès de décisions aquifères.  Cette marginalisation peut être surmontée en incluant les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes à tous les niveaux.  Il a également souligné que l’hygiène menstruelle doit être considérée comme partie intégrante du droit à l’assainissement. 

Poursuivant, le Rapporteur a indiqué que les communautés autochtones doivent obtenir de leurs gouvernements des titres fonciers pour jouir pleinement de leurs terres ancestrales.  Notant en outre que certains territoires deviennent inhabitables à cause des changements climatiques, il a appelé à établir des accords internationaux permettant de relocaliser et assister les populations concernées.  Il a également relevé que la promotion de l’eau potable est politiquement plus rentable que l’assainissement des eaux sales, pourtant des plus essentielles.  Le Rapporteur a ensuite estimé que la Conférence mondiale sur l’eau qui se tiendra en mars à New York, devrait être perçue comme le début d’un chemin » vers un monde plus juste en termes d’accès à une eau potable et assainie. 

Suite et fin de la discussion générale

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a fait état de trois priorités nationales en matière de droits humains, la première étant de répondre à la menace des changements climatiques.  Pour ce faire, a-t-il dit, le Gouvernement a formulé une politique de gestion des catastrophes destinée à sauvegarder les droits humains dans le contexte de ces changements, en accordant une attention particulière à la protection des femmes, des enfants, des séniors et des personnes âgées.  La deuxième priorité du pays, a-t-il poursuivi, est de répondre aux besoins des plus vulnérables de la société, notamment aux migrants.  Le Bangladesh, a souligné le délégué, promeut les droits des travailleurs migrants et de leurs familles tout au long du cycle migratoire.  Enfin, la troisième priorité est la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  À cet égard, il a indiqué son pays s’oppose à toutes les formes de racisme et d’intolérance contre les Rohingyas à qui il a ouvert ses frontières.  Le Gouvernement s’efforce de garantir les droits humains de ces personnes, à commencer par leur droit à un retour sûr et digne.

M. DANIEL ZAVALA PORRAS (Costa Rica) s’est dit fermement convaincu que les droits humains restent le seul moyen d’éradiquer la pauvreté, les inégalités, la discrimination et l’exclusion.  Soulignant par ailleurs l’importance du lien entre les droits humains et l’environnement, il a indiqué que son pays soutient l’initiative de Vanuatu, qui vise à demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les obligations en matière de changements climatiques.  Le représentant a également plaidé en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles, avant de saluer l’initiative « UNMute » destinée à accroître la participation des organisations de la société civile aux travaux de l’ONU.  Enfin, après avoir appelé que le Costa Rica ouvre ses portes aux migrants et est devenu le quatrième pays au monde en nombre de réfugiés par habitant, il a rappelé que son pays est candidat à un siège au Conseil des droits de l’homme pour la période 2023-2025. 

Mme HELEN INGA S VON ERNST (Islande) a constaté que de nombreux droits fondamentaux ont été remis en cause.  Pour inverser cette tendance, elle a appelé à combattre la méfiance à l’égard des valeurs de la démocratie, de la liberté et des droits de l’homme et à défendre un système où la dissidence fait partie intégrante du discours public.  Elle a d’autre part indiqué que, soucieux de renforcer la promotion et le respect des droits humains, son gouvernement a décidé de créer en 2023 une institution nationale des droits de l’homme, qui sera pleinement conforme aux Principes de Paris.  La représentante a également appelé à faire progresser l’égalité des sexes, rappelant à cet égard que, depuis 2009, l’Islande se trouve en tête de l’indice d’écart entre les sexes établi par le Forum économique mondial.  Nous allons poursuivre sur cette voie, a-t-elle promis, avant d’indiquer que la prochaine étape sera la budgétisation de l’égalité des sexes. 

M. PRIMASTO (Indonésie) a mis l’accent sur plusieurs priorités de son pays en matière de promotion des droits humains, citant en particulier la protection des communautés vulnérables vivant dans des zones reculées.  Le délégué a également souligné que le Gouvernement indonésien veille à ce que les lois et les politiques soient en mesure de créer une vie harmonieuse pour les différentes communautés religieuses.  Enfin, il a appelé à protéger et préserver les langues ancestrales, en permettant aux enfants de les apprendre et en leur donnant les moyens de le faire.  Avant de conclure, le représentant a estimé que le respect de tous les droits, y compris ceux des minorités, n’est pas seulement une reconnaissance de leurs droits fondamentaux, mais aussi une condition préalable à la stabilité politique et sociale et à la paix.

Mme BILLUR AHMADOVA (Azerbaïdjan) a rappelé l’attachement de son pays à la Charte des Nations Unies et aux instruments juridiques internationaux auxquels il fait partie.  Elle est ensuite revenue sur les réformes en cours sur le front des droits humains, avant de dénoncer les tentatives d’instrumentalisation du passé qui, selon elle, alimentent l’intolérance.  La déléguée a ainsi vivement fustigé la déclaration faite la veille par l’Arménie.  Celle-ci, a-t-elle souligné, continue de nier sa responsabilité dans les nombreux crimes de guerre commis par ses forces et refuse de poursuivre et de punir les auteurs et d’offrir un recours ou une réparation appropriée pour ses violations.  L’Arménie, selon la représentante, n’a jamais respecté ses obligations humanitaires internationales et a commis de nombreux crimes de guerre contre le personnel militaire et les civils d’Azerbaïdjan.  Contrairement à l’Arménie, l’Azerbaïdjan prend ses obligations internationales au sérieux et les plaintes relatives à des crimes commis lors d’opérations militaires font l’objet d’enquêtes par les institutions publiques compétentes, a-t-elle affirmé.  Elle a ajouté que la communauté internationale, y compris les organes compétents des Nations Unies, a exprimé à plusieurs reprises sa vive inquiétude face à la politique étrangère et l’intolérance de l’Arménie, dénonçant en particulier ses discours de haine raciste et ses déclarations discriminatoires. 

Mme JOSEPHINE MOOTE (Kiribati) a déploré l’impact des changements climatiques sur les enfants des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a aussi dénoncé « l’héritage nucléaire » des enfants de ces îles, dont le lieu de vie a été le site d’explosions atomiques plus puissantes que les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki.  Pour la déléguée, les conflits et la violence trouvent leurs origines dans l’état d’esprit des personnes qui exercent une influence ou un pouvoir sur la vie des autres.  C’est pourquoi, a-t-elle souligné, Kiribati concentre ses efforts sur le fait de cultiver un bon état d’esprit chez ses citoyens, en promouvant le rôle des institutions et des systèmes traditionnels et modernes, y compris les institutions religieuses et les diverses organisations non gouvernementales.

Mme HEBA MOSTAFA MOSTAFA RIZK (Égypte) a assuré que son pays respecte les droits humains, en dépit de la crise mondiale actuelle, qui nuit à ces mêmes droits.  Elle s’est ensuite inquiétée des discours haineux, que l’ère digitale propage avec plus de célérité, avant d’exprimer ses préoccupations au sujet des discriminations dont souffrent les Américains d’origine latino-américaine ou africaine et de qualifier la prison de Guantanamo de « symbole des atteintes massives aux droits humains ».  Pour la représentante, la fragmentation des droits humains conduit au non-respect du multilatéralisme culturel.  À cet égard, elle a dénoncé le fait que nombre de pays soient encore exclus du droit au développement, ce qui représente un recul pour les Nations Unies.  Elle est ensuite revenue sur la préparation de la COP27 qui se tiendra du 7 au 18 novembre à Charm el-Cheikh, précisant que les ONG égyptiennes et africaines y participeront dans une approche libre de toute politisation. 

M. ENIAN LAMCE (Albanie) s’est dit fermement convaincu qu’il faut revoir les systèmes de santé en veillant à bannir toutes les formes de discrimination.  Il a d’autre part indiqué que son pays a mis en place une approche contre les représailles visant les défenseurs des droits de l’homme, en particulier ceux des femmes et des filles.  Il a également appelé à protéger les droits des enfants et des minorités.  Enfin, le délégué a attiré l’attention sur le rapport concernant la situation des droit humains en Serbie du Sud, notamment s’agissant de la minorité albanaise. 

M. ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a dénoncé l’agression de la Russie contre l’Ukraine et la situation des droits humains dans les territoires ukrainiens occupés et illégalement annexés, exprimant son soutien au travail de la Commission d'enquête sur l’Ukraine et de la Mission de surveillance des droits de l’homme en Ukraine.  De même, il a appuyé l’action des mécanismes de lutte contre l’impunité en Syrie, tels que le Mécanisme international, impartial et indépendant et la Commission d'enquête.  Il a ensuite appelé à reconnaître l’impact des changements climatiques sur pratiquement tous les droits de l’homme, avant d’indiquer que, cette année, son pays facilite avec le Brésil la résolution sur le droit à la vie privée à l'ère numérique.  Enfin, il a annoncé que l’Allemagne accueillera le huitième Congrès mondial contre la peine de mort du 15 au 18 novembre à Berlin.

M. KENNEDY GODFREY GASTORN (Tanzanie) a déclaré que pour promouvoir les droits humains, son gouvernement a créé d’une équipe spéciale chargée des droits de l’homme qui recueille l’opinion de la population sur la gouvernance.  La société civile et les partis politiques y sont invités à faire valoir leurs avis sur la question.  Le Gouvernement tanzanien a aussi facilité l’accès à la justice en faisant adopter une loi sur l’aide juridique, a indiqué le représentant.  Cette loi a permis à nombre de femmes et de jeunes d’accéder à la justice, s’est-il félicité.  Enfin, après avoir signalé que plus de 6 000 ONG sont actives dans le pays grâce à l’environnement propice que leur offre la Vision 2025 du Gouvernement, il s’est plu à rappeler que la Présidente de la Tanzanie, Mme Samia Suluhu Hassan, a reçu une récompense pour son action en tant que défenseuse des droits de l’homme. 

Mme ANA PAULA BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) a souligné la nécessité de faire le point sur ce qui a été réalisé jusqu’à présent et sur ce qui reste à faire face à l’escalade des conflits et aux agressions barbares, aux violations persistantes des droits de l’homme et au recul des droits des femmes dans le monde.  Elle a estimé que l’une des réalisations majeures de la communauté internationale en la matière a été la création du Conseil des droits de l’homme (CDH), qui est un organe crédible, capable de réagir en temps réel aux violations des droits de l’homme et aux abus.  La déléguée a par ailleurs attiré l’attention de la Commission sur des questions d’avant-garde telles que les liens entre les droits de l’homme et l’environnement, la santé mentale et la cyberintimidation.  En conclusion, elle a souligné que l’Examen périodique universel (EPU), instrument créé par le CDH, démontre qu’aucun pays n’est à l’abri d’un examen minutieux, qu’aucun pays n’a un bilan parfait en matière de droits de l’homme et que les États doivent apprendre les uns des autres.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse en réaction aux propos de son homologue des États-Unis, le représentant de l’Arabie saoudite a souligné que la liberté d’expression est garantie dans le Royaume saoudien, conformément aux dispositions du droit international des droits de l’homme et conformément à la vision de son pays pour 2030.  Il a invité son homologue américain à se baser à l’avenir sur des sources crédibles.

Le représentant de Cuba a rejeté les déclarations faites par les États-Unis, dénonçant une campagne de déstabilisation financée et fomentée par Washington.  Observant que les États-Unis n’ont ni un mandat moral ni un mandat international pour juger un pays tiers, il a accusé ce pays d’être responsable des violations des droits humains les plus brutales, y compris sur son territoire.  Après avoir rappelé les coups d’État fomentés par Washington en Amérique latine, il a affirmé que les États-Unis sont à l’origine de centaines de milliers de morts dans le monde et se livrent à des exécutions extrajudiciaires, à la torture et à d’autres violations.  Il a également rappelé que 39 personnes sont détenues de manière arbitraire à Guantanamo, avant de déplorer les mesures coercitives unilatérales des États-Unis et leurs effets délétères sur la jouissance des droits humains dans les pays ciblés.  Le délégué a ensuite fait état de plus de 1 000 personnes mortes aux mains de la police américaine en 2021 et de 35 000 tués par balles dans le pays en 2022.  Le pays le plus riche du monde n’a pas résolu le problème du racisme systémique, a-t-il ajouté, jugeant que les États-Unis n’ont « rien à apprendre à Cuba en matière de droits humains ».  Si ces droits préoccupent autant les États-Unis qu’ils le prétendent, ils n’ont qu’à lever le blocus qu’ils imposent à Cuba depuis des décennies, a-t-il conclu. 

Le représentant de la Chine a souhaité répondre aux accusations sans fondement proférées par les États-Unis et d’autres pays contre la Chine pour s’ingérer dans ses affaires intérieures, notamment en ce qui concerne le Xinjiang, où « tous les groupes ethniques sont unis et vivent en harmonie ».  Il a affirmé que la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a dû rendre public son rapport sur sa visite dans la région 15 minutes avant la fin de son mandat, « sous la pression des États-Unis ».  Il a accusé les États-Unis de cibler d’autres pays sans se soucier de leurs propres crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis en Afghanistan, en Iraq et ailleurs, ou contre leurs populations autochtones, et sans tenir compte de leur propre racisme systémique.  Il a condamné leur arrogance et a prédit aux États-Unis et au Royaume-Uni un « hiver glacial ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: Pour les États Membres, le DCG doit continuer à promouvoir le multilinguisme et la lutte contre la désinformation

Soixante-dix-septième session,
12e séance plénière – après-midi
CPSD/758

Quatrième Commission: Pour les États Membres, le DCG doit continuer à promouvoir le multilinguisme et la lutte contre la désinformation

Au deuxième jour de son débat général sur les questions relatives à l’information, la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de décolonisation) a, cet après-midi, entendu plusieurs délégations plaider pour le respect du multilinguisme dans les activités du Département de la communication globale (DCG), notamment pour mieux contribuer à la réussite des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Les appels à renforcer la lutte contre la désinformation ont donné lieu à un échange animé autour de la situation en Ukraine. 

Les disparités importantes qui existent entre l’usage de l’anglais et les cinq autres langues officielles de l’ONU persistent, en particulier sur les plateformes numériques, ont constaté un certain nombre de délégations.  C’est aussi le cas pour les communiqués de presse, dont le Paraguay et El Salvador ont regretté qu’ils ne soient disponibles que dans les deux langues de travail de l’Organisation –français et anglais– au lieu de l’être dans les six langues officielles.  Un plaidoyer en faveur de l’« égalité linguistique » repris à son compte par la Tunisie ou la Côte d’Ivoire, pour laquelle ce principe doit s’étendre au recrutement des fonctionnaires internationaux. 

Si la quasi-totalité des États Membres à avoir pris aujourd’hui la parole se sont accordés sur l’importance de prioriser le multilinguisme, certains ont demandé que l’on aille au-delà des seules langues officielles, comme c’est le cas du Portugal, qui a rappelé la « portée mondiale et l’universalité » du portugais.  S’exprimant au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), l’Angola a rappelé qu’il s’agit de la cinquième langue la plus parlée au monde, un rang qui justifie à ses yeux de lui accorder toute la place qui lui revient dans les publications et activités de l’ONU, y compris sur les réseaux sociaux et plateformes numériques où l’Organisation est présente. 

Pour le Brésil, la promotion du portugais pour mieux desservir la communauté lusophone, forte de 260 millions de locuteurs et la plus importante communauté linguistique de l’hémisphère Sud, doit aussi être assurée par les relais que sont les Centres d’information des Nations Unies (UNIC) de Rio de Janeiro et de Bruxelles.  Celui de Luanda, en Angola, sera opérationnel prochainement, s’est félicité le représentant brésilien. 

Car c’est aussi en dehors du Siège de l’ONU que se joue la bataille du multilinguisme, ont estimé plusieurs délégations.  Le succès des opérations de maintien de la paix en dépend, que ce soit pendant les phases de planification, de déploiement et de transition, a observé le Portugal, pour qui une stratégie de communication globale contribue à la bonne exécution des mandats.  Sentiment partagé par le Népal, l’un des plus importants pays contributeurs de troupes de l’ONU, qui a encouragé le Département à poursuivre sa collaboration avec celui des opérations de maintien de la paix pour mettre à l’honneur aussi bien les succès que rencontrent les Casques bleus que les défis auxquels ils font face.  Autre fournisseur de contingents d’importance, la Thaïlande a salué les initiatives de l’ONU pour mieux faire connaître l’action des soldats de la paix thaïlandais déployés au sein de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS). 

Mais pour que le message de l’Organisation soit entendu sur le terrain, a considéré le Sénégal, encore faut-il que le « poids du facteur linguistique » soit pris en considération, en veillant au « principe d’équilibre » entre les langues des documents officiels et le choix des différents acteurs appelés à servir.  Cette délégation a donc réitéré son appel au Secrétariat pour qu’il continue à développer une stratégie de communication visant à renforcer la confiance entre missions et communautés d’accueil, mais aussi pour contrer la désinformation et les discours de haine qui exposent davantage les Casques bleus dans des environnements déjà hostiles. 

Estimant que l’ONU est la « source d’information la plus fiable » dans le monde, l’Algérie a considéré, à ce titre, que les informations diffusées par le DCG sur ses différentes plateformes doivent être en permanence « précises, impartiales et sans préjugés », notamment pour ce qui est des communiqués de presse, lesquels doivent refléter fidèlement et de manière exhaustive les positions des États Membres et leurs échanges.  La délégation l’a donc invité à accorder davantage d’attention à la lutte contre les informations ou interprétations erronées. 

Certaines délégations, comme la Slovaquie ou le Royaume-Uni, ont encouragé le DCG à redoubler d’efforts pour fournir des informations complètes et précises sur des questions telles que la « guerre d’agression » menée par la Fédération de Russie en Ukraine.  Depuis le lancement de cette opération par le Kremlin, a dénoncé le représentant britannique, la « propagande d’État » « tourne à plein régime », le système des Nations Unies devant se montrer cohérent face à cette « offensive contre la vérité ». 

Des affirmations avec lesquelles la Fédération de Russie s’est inscrite en faux, fustigeant des « institutions multilatérales de protection des droits humains » « biaisées » et l’« Occident collectif » et sa « guerre de l’information ».  Le délégué russe a attiré l’attention des dirigeants du DCG sur la nécessité d’assurer une couverture « impartiale » de tous les événements internationaux, y compris de la situation en Ukraine, comme l’exigent les documents fondamentaux qui régissent son travail, « sous peine d’induire en erreur son public ». 

Pour l’Ukraine en revanche, la guerre de l’information a été lancée par l’« État agresseur » pour appuyer ses opérations militaires sur le terrain, afin de justifier son agression illégale.  Le représentant ukrainien a exprimé les préoccupations que lui inspirent les tentatives de s’abstenir d’utiliser le libellé officiel des résolutions de l’Assemblée générale, qui doivent être la source exclusive des éléments de langage utilisés dans les communications officielles de l’ONU.  L’Ukraine a salué le Secrétariat de l’ONU d’avoir pris actes de « divergences », ainsi que de disparités dans les traductions, espérant que ces incidents ne se reproduiront plus.  Pour lui, toute « spéculation » sur le contenu des documents pourrait être évitée grâce à une « approche globale et systémique » vis-à-vis des tentatives de falsifier les informations et de leur instrumentalisation. 

En fin de séance, les délégations de la République de Corée, de la Fédération de Russie, d’Israël, de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et de l’Ukraine ont exercé leur droit de réponse. 

La Quatrième Commission conclura son débat général sur les questions relatives à l’information et adoptera les résolutions y afférentes demain, vendredi 21 octobre, à partir de 15 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les délégations étudient le lien entre plusieurs types d’armes classiques et le droit international humanitaire

Soixante-dix-septième session,
16e séance plénière – matin
AG/DSI/3694

Première Commission: les délégations étudient le lien entre plusieurs types d’armes classiques et le droit international humanitaire

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) s’est penchée, ce matin, sur le lien entre le droit international humanitaire et l’utilisation de certaines armes classiques.  La vingtaine de délégations qui sont intervenues à l’occasion du volet du débat thématique consacré à ces armes ont réaffirmé leur attachement à la réalisation des objectifs de la Convention sur certaines armes classiques (CCAC).  Parfois surnommée « Convention contre les armes inhumaines », cet instrument a pour but d’interdire ou de limiter l’emploi d’armes infligeant des souffrances injustifiables aux combattants ou frappant sans discrimination les civils. 

Les propos sur la lutte contre la prolifération d’armes légères et de petit calibre (ALPC), qui entrave le développement des États d’Amérique du Sud et des pays africains, et les déclarations sur les programmes de lutte antimines de l’ONU ont complété la discussion. 

La France, les États-Unis, l’Autriche et l’Allemagne ont condamné d’une même voix le fait qu’en Ukraine, la Russie viole ses obligations en vertu du droit international humanitaire en menant des attaques qui visent délibérément la population civile, y compris à l’aide de mines antipersonnel et d’armes à sous-munitions.  La représentante française, ayant rappelé que la CCAC relève du droit international humanitaire et vise à établir un équilibre entre nécessité militaire et principes humanitaires, a annoncé que sa délégation présenterait cette année le projet de résolution la concernant.  C’est encore au nom du lien entre les armes classiques et le droit international humanitaire que les pays ont appelé au respect des principes cardinaux dudit droit dans les situations de conflits armés. 

À cet égard, les États-Unis ont annoncé qu’ils signeront, le 18 novembre 2022 à Dublin, la Déclaration contre l’utilisation des armes explosives en zones peuplées, laquelle, a dit le représentant américain, engage les États à renforcer la protection des civils contre ces armes et à aider les victimes à faire face aux conséquences à long terme des dommages et de la destruction des infrastructures civiles.  De son côté, l’Autriche a rappelé que la Déclaration était l’aboutissement d’un processus que l’Autriche « est fière d’avoir initié par le biais d’une conférence internationale en 2019 », un processus « dirigé de main de maître par l’Irlande au cours des trois dernières années ».  Se disant consternée par l’impact humanitaire dévastateur sur les civils de l’utilisation aveugle d’armes explosives dans les zones peuplées de Syrie, de Libye et du Yémen, l’Allemagne a elle aussi salué la finalisation du texte de la Déclaration politique.  Pour la Fédération de Russie, les problèmes liés à l’utilisation d’armes explosives ne peuvent être résolus que par la mise en œuvre de bonne foi du droit international humanitaire. 

Les pays de la Communauté des Caraïbes et du Groupe africain ont souligné combien la prolifération illicite d’armes légères et de petit calibre –les ALPC- sape leur développement, alimente la criminalité organisée et déstabilise des territoires entiers.  « Ces armes sont à l’origine de 70% des homicides dans notre région », a ainsi expliqué le représentant du Belize, qui a marqué que cette situation est « d’autant plus insupportable que les pays de la CARICOM ne produisent pas d’armes ».  « L’Afrique continue d’être au premier rang des régions qui souffrent le plus des effets du commerce et du trafic illicite d’ALPC, principalement produites en dehors du continent, mais acquises et utilisées dans nos pays par des destinataires non autorisés », a ajouté le représentant du Nigéria. 

Considérant qu’une lutte plus efficace contre le fléau des ALPC facilitera la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, le Groupe africain a exhorté les États à s’acquitter de leurs obligations en vertu du Programme d’action de l’ONU relatif aux ALPC et de son Instrument de traçage.  Il a aussi exigé de la part des développés une « assistance technique et financière inconditionnelle et accrue aux pays en développement ». 

Concernant les mines antipersonnel, l’Italie a indiqué que depuis 2001 et la création d’un fonds volontaire liant les efforts humanitaires et de déminage, son pays avait contribué à hauteur de 71 millions d’euros aux programmes de lutte antimines de l’ONU.  Les pays ont également souligné l’importance de parvenir à l’universalité de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel -dite Convention d’Ottawa-, certains pays producteurs et/ou utilisateurs de mines antipersonnel continuant de refuser d’adhérer au texte. 

La séance avait démarré avec des déclarations liminaires du Président de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères et de la Présidente du Groupe d’experts gouvernementaux de 2022 sur le Registre des armes classiques de l’Organisation des Nations Unies.  Le premier a notamment souligné la nécessité d’une participation pleine, égale et significative des femmes à la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux ALPC et de l’Instrument de traçage.  Les Pays-Bas, la Thaïlande et le Costa Rica ont aussi évoqué ce thème de la féminisation de la diplomatie du désarmement, un thème cher au Secrétaire général de l’ONU. 

La Commission poursuivra son débat thématique sur les armes classiques demain, vendredi 21 octobre, à partir de 10 heures. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Exposés

M. ENRIQUE MANALO, Président la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères (BMS8), revenant sur cette réunion tenue du 27 juin au 1er juillet de cette année, a indiqué que les États avaient élaboré des actions pour améliorer les modalités et procédures de coopération et d’assistance internationales.  Cela concerne notamment le renforcement de la coopération existante et des mécanismes d’assistance, pour faire correspondre les besoins avec l’expertise et les ressources, la promotion du renforcement durable des capacités par le développement de cadres nationaux, de structures dédiées, de procédures et capacités ainsi que par le biais d’un financement pluriannuel et d’une coopération multipartite, y compris avec la société civile. 

M. Manolo a ajouté que de nombreux États avaient soutenu l’inclusion d’un libellé progressiste lié au genre, y compris pour porter la reconnaissance de la nécessité d’une participation pleine, égale, significative et effective des femmes à la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères et de petit calibre (ALPC) et de l’Instrument de traçage. 

Le document final a également souligné les avantages d’un lien entre la mise en œuvre du Programme d’action et d’autres cadres mondiaux tels que le Programme de développement durable à l’horizon 2030, le programme de désarmement du Secrétaire général et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, a encore indiqué M. Manolo. 

L’Ambassadeur a en outre déclaré que les États avaient réaffirmé leurs engagements au titre du Programme d’action et de l’Instrument international de traçage en ce qui concerne le transfert international d’ALPC et ce, en veillant à ce que le droit international humanitaire et les droits de l’homme soient pris en considération dans les décisions nationales de transfert de ces armes. 

Enfin, M. Manolo, a noté que, malgré les divergences de vues persistantes entre les États sur l’inclusion des munitions dans le cadre du Programme d’action, la réunion a convenu d’inclure dans le paragraphe du préambule du document final une reconnaissance de l’utilité de la création du groupe de travail à composition non limitée sur cette question pour élaborer un ensemble d’engagements politiques pour un nouveau cadre mondial qui comblerait les lacunes existantes dans la gestion de la durée de vie des munitions.

Mme MUANPUII SAIAWI, Présidente du Groupe d’experts gouvernementaux de 2022 sur le Registre des armes classiques de l’Organisation des Nations Unies, a présenté les réflexions menées par son groupe pour promouvoir la meilleure participation des États au fonctionnement de ce registre, dont le but est de permettre la transparence des transferts internationaux des armes classiques.  Elle a expliqué que le Groupe d’experts a rendu cet été son rapport annuel 2022, qui contient des recommandations pour favoriser la participation de tous les États en tenant compte des circonstances régionales qui influent cette participation.  Parmi les recommandations faites, elle a cité l’ajout à la liste des armes des « drones aériens à ailes rotatives ».  Elle a aussi cité la création d’un groupe des amis officieux du Registre, qui vient de se réunir pour la première fois dans le but d’apporter sa contribution au suivi des achats et productions des armes classiques. 

Armes conventionnelles (suite)

Au nom du Mouvement des pays non alignés, Mme MARIA BENEDICTA DIAH KRISTANTI (Indonésie) a réaffirmé le droit souverain des États d’acquérir, de fabriquer, d’exporter, d’importer et de stoker des armes classiques pour leur défense et leur sécurité.  Le Mouvement reste préoccupé par les conséquences sécuritaires, humanitaires et socioéconomiques découlant du transfert, de la fabrication et de la circulation illicites d’armes légères et de petit calibre (ALPC).  La représentante a appelé à fournir l’assistance financière, technique et humanitaire nécessaire aux opérations de déminage des armes à sous-munitions non explosées, à la réhabilitation sociale et économique des victimes ainsi qu’à garantir le plein accès des pays touchés aux ressources matérielles, équipements, technologiques et financières pour le déminage des armes à sous-munitions non explosées.  Elle a déploré l’utilisation, en violation du droit international humanitaire, de mines antipersonnel dans des situations de conflit, pour mutiler, tuer et terroriser des civils innocents. 

La représentante a exhorté tous les États en mesure de le faire à fournir l’assistance financière, technique et humanitaire nécessaire aux États parties à la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques.  Le Mouvement, a poursuivi la représentante, a pris note de l’adoption par consensus du rapport 2019 du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies émergentes dans le domaine des systèmes d’armes létaux autonomes et juge urgent de rechercher un instrument juridiquement contraignant dans ce domaine. 

Mme Kristanti a appelé à une réduction drastique de la production, de la possession et du commerce d’armes conventionnelles par les États industrialisés en vue de renforcer la paix et la sécurité internationales et régionales.  La représentante a souligné en outre l’importance de la réduction des dépenses militaires.  Elle a demandé à tous les États de consacrer les ressources ainsi dégagées au développement économique et social, notamment à la lutte contre la pauvreté.

Au nom du Groupe africain, M. MUHAMMAD ZAYYANU BANDIYA (Nigéria) a rappelé que l’Afrique continue d’être au premier rang des régions qui souffrent le plus des effets du commerce et du transfert illicites d’armes légères et de petit calibre (ALPC), « principalement produites en dehors du continent, mais acquises et utilisées dans nos pays par des destinataires non autorisés ».  Le représentant a souhaité que les travaux de la Commission soient l’occasion pour la communauté internationale de renouveler ses efforts pour endiguer la vague d’ALPC, « qui alimentent les conflits et l’instabilité », cela en vue de créer un environnement propice à la paix, à la sécurité et au développement socioéconomique. 

Il est important de reconnaître que la promotion d’une participation pacifique, sans entrave et inclusive des nations aux actions mondiales visant à lutter contre le flux d’armes illicites, en particulier en Afrique, facilitera la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, a souligné le représentant.  Il a en outre souhaité que tous les États s’acquittent de leurs obligations en vertu du Programme d’action de l’ONU relatif aux ALPC et de son Instrument de traçage, les pays développés devant fournir une assistance technique et financière « inconditionnelle et accrue » aux pays en développement. 

Au nom des 14 États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. CARLOS FULLER (Belize), a déclaré que la CARICOM accordait une priorité urgente à la lutte contre le commerce illicite des armes légères, qui sont responsables de 70% des homicides dans la région.  Il a expliqué que cette situation était d’autant plus insupportable que les pays de la CARICOM ne produisent pas d’armes.  Il s’est notamment inquiété du développement des capacités d’impression en 3D, qui présentent de nouveaux défis en matière de traçabilité et de lutte contre la prolifération illicite des armes. 

Le commerce des armes à feu constitue la plus grande menace à la stabilité des pays de la CARICOM, a poursuivi le représentant.  Il a souligné l’importance de la coopération internationale aux fins du traçage des armes.  Il a vanté la création en 2006 du programme CARICOM IMPACS, un programme d’action de la CARICOM sur la criminalité et la sécurité qui rend compte de ses travaux au Conseil des ministres de la sécurité nationale et de l’application de la loi de la CARICOM. 

Au nom du Groupe des États arabes, M. SARMAD MUWAFAQ MOHAMMED AL-TAIE (Iraq) a souligné son engagement à combattre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, compte tenu de leur impact sur les questions humanitaires, sécuritaires et économiques.  Il a attiré l’attention sur l’augmentation sans précédent de leur trafic illicite dans la région arabe.  Il semble que certains gouvernements fournissent de telles armes à des groupes armés illicites et à des groupes terroristes, afin d’atteindre des objectifs politiques insidieux et de porter atteinte au droit international, aux résolutions pertinentes du Conseil et à la Charte, a déclaré le représentant.  Il a appelé à renforcer la confiance dans le Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre et à le promouvoir, car il s’agit d’un outil multilatéral et objectif pour renforcer la confiance et promouvoir la coopération des États.  Il ne doit toutefois pas être contraire au droit légitime des États à la légitime défense, a modéré le représentant, pour qui il convient de faire la distinction entre le trafic illicite des ALPC et l’imposition de restrictions politisées et de mesures discriminatoires. 

Pour le Groupe arabe, il faut éviter toute interférence d’autres instruments internationaux avec le Programme d’action sur les ALPC, afin d’éviter les questions controversées.  Le Groupe arabe encourage la coopération internationale et le soutien technique du Programme, notamment en matière de sécurité des stocks et de contrôle des frontières, sans ingérence dans les affaires intérieures des États.  L’assistance aux pays en la matière ne doit pas non plus se répercuter sur l’aide publique au développement, ni établir des liens inutiles entre la lutte contre le trafic illicite et la mise en œuvre des objectifs du développement durable.  Le Groupe arabe estime en outre qu’il faut d’abord combler les lacunes qui entravent les efforts internationaux dans la mise en œuvre des textes existants avant de s’attaquer à la question des munitions.  Il a salué le programme de bourses visant à renforcer les capacités des pays en développement. 

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne, a appelé tous les États à s’abstenir de tout transfert d’armes vers la Russie, condamnant fermement l’utilisation par ce pays de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions, ainsi que de roquettes et d’obus d’artillerie ou d’engins explosifs improvisés contre des civils « dans sa guerre d’agression contre l’Ukraine ». 

L’Union européenne souligne que la Convention sur certaines armes classiques est un instrument international unique rassemblant des compétences diplomatiques, juridiques et militaires, pour répondre aux nouveaux développements dans les technologies d’armement, a ajouté le représentant.  Après s’être félicité des travaux menés ces dernières années par le groupe d’experts gouvernementaux sur les systèmes d’armes létaux autonomes, il a souligné l’impact humanitaire et les lourdes conséquences sur le développement social et économique de l’utilisation aveugle et disproportionnée des mines autres que les mines antipersonnel.  S’il a reconnu que ces armes sont des armes légales, il a rappelé que leurs utilisateurs sont tenus de veiller à ce qu’elles soient utilisées conformément au droit international humanitaire, notamment en prenant toutes les précautions possibles pour protéger les civils de leurs effets. 

Par ailleurs, compte tenu des nombreuses violations flagrantes par la Russie des Conventions de Genève, l’intervenant a fait observer que les transferts d’armes vers la Russie ne seraient pas autorisés en vertu du Traité sur le commerce des armes.  Il a en outre rappelé que l’Union européenne a mis en place un embargo sur les armes à l’encontre de la Russie, « à la suite de l’annexion illégale de la Crimée 2014 ». 

Enfin, le représentant s’est dit profondément préoccupé par l’impact sur les populations civiles de l’utilisation d’armes à sous-munitions, y compris l’utilisation aveugle de telles armes en Syrie, au Yémen, en Libye, dans le conflit du Haut-Karabakh et en Ukraine.  « L’Union européenne appelle tous les acteurs à s’abstenir d’une telle utilisation et à se conformer pleinement au droit international humanitaire », a-t-il dit. 

M. DANURDORO PARNOHADININGRAT (Indonésie) a mis l’accent sur plusieurs recommandations pour éviter que les armes classiques ne tombent entre les mains de groupes non autorisés.  Après avoir vanté le lancement d’un programme de bourses pour renforcer les capacités en matière de gestion des armes légères, le représentant a rappelé le droit souverain des pays à produire les armes légères nécessaires à leur autodéfense.  Il a souligné l’importance du renforcement des capacités de contrôle aux frontières pour lutter contre la prolifération de ces armes. 

Mme CAMILLE PETIT (France) a déclaré que, chaque jour en Ukraine, la Fédération de Russie, viole l’Article 2 de la Charte des Nations unies et méconnaît ses obligations en vertu du droit international humanitaire, en menant des attaques qui visent délibérément la population civile, y compris à l’aide de mines antipersonnel et d’armes à sous-munitions.  La France ne saurait tolérer l’impunité et les auteurs de ces actes intolérables devront rendre des comptes devant la justice internationale, a ajouté la représentante.  Rappelant que la France est et demeure pleinement engagée en vue de la défense du respect de l’intégrité de nos règles internationales, de la préservation du droit international humanitaire, de l’universalisation et du renforcement des instruments de désarmement et de maîtrise des armements conventionnels, Mme Petit a souligné que son pays reste préoccupé par l’impact sur les populations civiles de l’utilisation des armes à sous-munition et des mines.  C’est pourquoi, la France poursuit ses efforts en faveur de la mise en œuvre et de l’universalisation de la Convention sur les armes à sous-munitions et la Convention d’Ottawa. 

La représentante a également salué les travaux menés au sein du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre et de son Instrument international de traçage, ainsi que ceux du Groupe d’experts gouvernementaux présidé par l’Allemagne sur la gestion des stocks de munitions conventionnelles.  Le commerce illicite des ALPC et de leurs munitions constitue une grave menace à la paix et à la sécurité internationales, a-t-elle poursuivi, avant de souligner que les engins explosifs improvisés représentent aussi un enjeu majeur en termes de sécurité.  La France portera conjointement avec l’Australie la résolution dédiée à ceux-ci nous espérons que tous les États pourront s’y associer, a indiqué la représentante. 

Après avoir signalé que la France apporte un appui aux États non européens qui en font la demande pour la mise en conformité de leur législation nationale de contrôle des transferts d’armements avec le Traité sur le commerce des armes, la représentante a de nouveau insisté sur le respect des principes cardinaux du droit international humanitaire dans les situations de conflits armés, en premier lieu « la protection des civils face aux conséquences d’un usage indiscriminé et disproportionné des armes conventionnelles ».  La France appelle chacun, à cet égard, à s’associer à la déclaration politique sur la protection des civils contre les conséquences humanitaires de l’emploi d’armes explosives en zones peuplées négociée sous la conduite de l’Irlande, dont la représentante a salué le travail. 

Par ailleurs, Mme Petit a annoncé que, la France ayant présidé la Conférence d’examen de la Convention sur certaines armes classiques en décembre dernier, elle portera, cette année, la résolution afférente à cette Convention.  La Convention est un instrument essentiel pour nourrir un dialogue informé entre États, se nourrissant d’expertises politiques, juridiques, militaires et diplomatiques, sur les enjeux relatifs au droit humanitaire international, a précisé la représentante.  Elle a aussi assuré que la France continuera à contribuer activement aux travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur les systèmes d’armes létaux autonomes menés au sein de la Convention sur certaines armes classiques.  C’est sur la base des buts et objectifs de cette Convention, qui relève du droit international humanitaire et qui vise à établir un équilibre entre nécessité militaire et principes humanitaires, que nous devons collectivement bâtir le cadre opérationnel et normatif applicable aux technologies émergentes dans le domaine des SALA, a-t-elle estimé. 

M. MICHAEL BUTERA (États-Unis) a dit la détermination du Président Biden de lutter contre les mines antipersonnel et les restes explosifs de guerre avant de rappeler que son pays à consacré 4,7 milliards de dollars depuis 1993 à cette question pour aider plus de 100 pays à se débarrasser de ces mines et restes explosifs de guerre.  Il a indiqué que les États-Unis signeront le 18 novembre 2022 à Dublin la Déclaration contre l’utilisation des armes explosives en zones peuplées, qui engage les États à imposer des limites à l’utilisation de telles armes dans les zones peuplées afin de prévenir les dommages aux civils, ainsi qu’à aider les victimes et à faire face aux conséquences à long terme des dommages et de la destruction des infrastructures civiles.

Le représentant aussi estimé que les bonnes pratiques américaines en matière de lutte contre les mines et les restes explosifs de guerre étaient à l’opposé des agissements de la Fédération de Russie, dont les forces ont contaminé le territoire ukrainien avec des mines et des restes explosifs de guerre qui causent de nombreux dommages aux civils et infrastructures civiles.  Il a prévenu que ces restes explosifs russes continueront de causer une menace pour la population ukrainienne longtemps après la fin de la guerre.  En outre, le représentant des États-Unis a dit qu’il s’associait à la démarche de l’Autriche sur les systèmes d’armes létaux autonomes pour renforcer la conformité de ce type d’armes au droit international humanitaire (DIH).

M. MATTHEW ZHI LIANG WONG (Singapour) a jugé vital que les États s’acquittent de leurs obligations juridiques et internationales en matière de transfert d’armes.  Un équilibre doit également être trouvé entre les préoccupations légitimes de sécurité et le droit à la légitime défense de tout État, a-t-il ajouté, notant que Singapour réaffirme ainsi le droit souverain des États d’acquérir des armes à des fins de légitime défense et de maintien « responsable » de l’ordre.  Le représentant a réitéré l’engagement de son pays à travailler avec la communauté internationale pour empêcher le détournement non autorisé et le commerce illicite d’armes classiques.  Nous nous tenons prêts à travailler de manière constructive avec les autres États Membres vers notre

M. THOMAS UNDERWOOD (Australie) a dit la volonté de son pays de règlementer le commerce des armes classiques pour maîtriser les conséquences humanitaires de ces armes.  Il s’est félicité du « consensus arraché » à la conclusion de la Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action de l’ONU sur les armes légères (ALPC).  Il a rappelé que l’Australie avait participé au mois d’août à la Conférence des États parties au Traité sur le commerce des armes, dont il a souhaité l’universalisation.  L’Australie signera le 18 novembre 2022 à Dublin la Déclaration contre l’utilisation des armes explosives en zones peuplées, qui engage les États à imposer des limites à l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées.  Il a vanté la participation de l’Australie à l’élimination des restes explosifs de la Deuxième Guerre mondiale dans le Pacifique, y compris 22 sites identifiés autour de Tuvalu.

M. KHALIL HASHMI (Pakistan) a dénoncé l’échec de la lutte contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre à cause notamment de l’utilisation de technologies avancées par certains acteurs.  Le représentant a dit être préoccupé par les ressources financières consacrées à la fabrication des armes conventionnelles et à la course aux armements.  Il a pointé du doigt les vendeurs d’armes qui visent en particulier les pays en développement et les pays en conflit, notamment en Asie du Sud, où les dépenses en armements d’un pays dépassent celles de tous les autres pays de la région.  Le Pakistan n’a jamais participé à la course aux armements, a affirmé le représentant, qui s’est dit préoccupé par l’acquisition d’ALPC par des groupes non étatiques.

M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas) a exhorté tous les États Membres à adhérer au Traité sur le commerce des armes (TCA), car il s’agit du seul instrument international juridiquement contraignant pour réglementer le commerce des armes conventionnelles.  Il a demandé aux principaux exportateurs d’armes à rendre publics leurs exportations d’armes.  Il a ajouté que tous les États Membres doivent s’abstenir de fournir des armes à la Fédération de Russie car il existe un risque qu’elles soient utilisées dans le cadre de l’invasion illégale de l’Ukraine par ce pays.  La fourniture d’armes par les Pays-Bas est pleinement conforme au TCA, a affirmé le représentant, qui a promis que sa délégation poursuivra ses efforts à mettre en œuvre le Programme d’action des Nations Unies pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre. 

Selon le représentant, les systèmes d’armes létaux autonomes doivent être explicitement interdits.  Il a exhorté pour l’universalisation de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel afin d’atteindre l’objectif d’un monde exempt de mines terrestres.  Le représentant a dit être préoccupé par l’utilisation continue des armes à sous-munitions dans des attaques aveugles par les forces armées russes en Ukraine, avant d’estimer que le Plan d’action de Lausanne fournit une base solide pour réaliser des progrès significatifs et durables vers l’universalisation et la mise en œuvre de la Convention sur les armes à sous-munitions.  Il a enfin souligné l’importance du genre dans la diplomatie du désarmement. 

M. TANCREDI FRANCESE (Italie) a indiqué que depuis 2001 et la création d’un fonds volontaire liant efforts humanitaires et de déminage, son pays avait contribué à hauteur de 71 millions d’euros aux programmes de lutte antimines de l’ONU.  Le représentant a souligné l’importance de la Convention sur certaines armes classiques, qui relève autant du désarmement que du droit humanitaire, en soulignant l’importance que sa mise en œuvre soit inclusive, afin de mieux l’adapter aux normes en vigueur dans les deux domaines que recouvre sa portée.  À cet égard, il a soutenu les travaux, menés dans le cadre de la Convention du Groupe d’experts gouvernementaux sur les technologies émergentes dans le domaine des systèmes d’armes létaux autonomes. 

Après avoir apporté le soutien de son pays à l’initiative irlandaise sur la protection des civils contre les conséquences humanitaires de l’emploi d’armes explosives en zones peuplées, M. Francese a conclu en soulignant l’importance de lutter contre les transferts illicites d’armes, en appelant notamment à l’universalisation du Traité sur le commerce des armes et à la pleine mise en œuvre de toutes ses dispositions. 

M. MUHAMMAD ZAYYANU BANDIYA (Nigéria) a dit que le commerce et le transfert illicite des armes légères à de terribles conséquences sur la population du Nigéria.  C’est pourquoi, il a demandé aux États producteurs de s’assurer que les armes qu’ils vendent soient destinées exclusivement aux États ou groupes autorisés.  Le Nigeria reste engagé à soutenir le Programme des Nations Unies sur les armes légères.  Le représentant a souligné les efforts de son pays pour améliorer le marquage des armes, développer une base de données sur les ALPC et maintenir un cadre de collaboration avec la société civile sur ces questions.  Il a dit la pertinence de la Déclaration sur la position commune africaine concernant la prolifération, la circulation et le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, adoptée au cours de la Conférence ministérielle de l’Organisation de l’unité africaine tenue du 30 novembre au 1er décembre 2000 à BamakoIl a dit l’importance du Programme de bourses des Nations Unies pour développer les capacités africaines face à la prolifération des armes légères. 

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a réitéré la détermination de sa délégation à lutter contre le fléau des armes classiques, y compris les armes légères et de petit calibre et les engins explosifs improvisés.  Les actions sont centrées sur les victimes et la nécessité pour l’État de se doter de capacités de défense, a-t-il expliqué.  Le Gouvernement des Philippines a cette année ratifié du Protocole V à la Convention sur les armes classiques et le Traité sur le commerce des armes. 

Le représentant a condamné l’utilisation de tous les engins explosifs improvisés, mines terrestres, armes à sous-munitions et armes incendiaires par la Nouvelle Armée populaire aux Philippines.  Il a rappelé l’adoption d’un document final à l’issue de la huitième Réunion biennale des États chargée d’examiner la mise en œuvre du Programme d’action pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, et la décision d’établir le programme de bourses dédié aux armes légères et de petit calibre. 

Il faudrait toutefois faire davantage afin que davantage d’États puissent bénéficier d’un programme national d’élimination, a affirmé le représentant, qui a estimé qu’une gestion complète des munitions tout au long de leur vie est l’étape la plus logique et la plus pratique pour résoudre les problèmes résultant de l’accumulation de stocks de munitions conventionnelles en surplus.  Il a appelé à une action concertée pour contrer la menace posée par les engins explosifs improvisés, en particulier par des acteurs non étatiques armés.  Il a terminé en faisant écho à l’appel urgent pour élaborer des règles juridiques qui empêcheront la militarisation de l’intelligence artificielle. 

M. KURT OLIVER DAVIS (Jamaïque) a souligné les efforts très ciblés déployés dans la région de son pays pour perturber l’activité des gangs et autres entreprises criminelles qui sont fortement impliqués dans l’importation d’armes illicites.  Cela comprend le renforcement de la gestion des frontières et des capacités de surveiller nos eaux territoriales afin d’y interdire l’accès aux trafiquants d’armes et responsables de traite d’êtres humains, a expliqué le représentant.  À cet égard, il a salué le soutien et la coopération des organisations régionales et mondiales, comme l’Office des Nations Unies contre la drogue et « CARICOM IMPACS ».  Grâce au fonds « Saving Lives Entity », nous renforçons les capacités d’interception et de destruction des armes à feu illicite et de lutte contre la traite, tout en développant des actions de sensibilisation aux enjeux du désarmement auprès des jeunes dans les écoles, a également expliqué M. Davis. 

Mme NICHABOON ANGKERDCHOK (Thaïlande) a appelé au renforcement des efforts internationaux pour veiller à ce que toutes les questions pertinentes liées aux armes classiques soient traitées conformément aux instruments et obligations juridiques internationaux pertinents.  Elle a dit soutenir la mise en place d’un programme de bourses de formation pour renforcer les connaissances techniques et renforcer les capacités dans des domaines connexes.  Elle s’est dite encouragée par le fait que le Programme d’action aborde également des questions telles que les technologies émergentes, les perspectives de genre et la participation des jeunes.  Soulignant le lien étroit entre la préservation de la paix et la promotion du développement durable, la représentante a rappelé que le trafic illicite d’armes conventionnelles et l’existence de restes explosifs de guerre non seulement tuent mais entravent également le développement économique et les efforts pour atteindre les objectifs de développement durable. 

La représentante a encouragé les États Membres à travailler ensemble à la mise en œuvre effective de leurs obligations.  La Thaïlande reste ainsi déterminée à renforcer les coopérations régionales et internationales dans le cadre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel.  Elle a précisé que son gouvernement avait demandé une prorogation du délai prévu à l’article 5 de la Convention avec la détermination de rendre la Thaïlande exempte de mines.  La représentante a estimé que les nouvelles technologies pouvaient fournir des moyens innovants et efficaces pour contrôler le commerce illicite et le détournement d’armes.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a précisé que la feuille de route de l’Union africaine sur les armes légères a été prolongée pour la période 2021-2030.  Le représentant a rappelé que son pays avait participé aux travaux du Groupes d’experts à composition non limitée sur la sûreté et la sécurité des munitions.  Il a jugé indispensable d’améliorer la réglementation sur le commerce des armes classiques pour empêcher tout détournement.  Il a rappelé que l’Afrique du Sud a adhéré à la Convention sur les armes à sous-munitions, la Convention sur les mines antipersonnel et la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques. 

Le représentant s’est félicité que le document final de la huitième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères ait mis l’accent sur le renforcement des capacités.  Il sera en effet difficile de parvenir à une mise en œuvre de toutes les conventions pertinentes sur les armes classiques sans une assistance idoine aux pays en développement, a-t-il prévenu. 

M. HUGO EMMANUEL GUERRA (Argentine) a rappelé l’importance du Traité sur le commerce des armes, du Programme d’action relatif aux ALPC, de l’Instrument international de traçage et du Protocole relatif aux armes à feu.  Elle a soulevé le problème posé par les armes polymères et modulaires, et les armes à feu produites par impression tridimensionnelle. 

La représentante a souligné l’importance des travaux du Groupe de travail à composition non limitée sur les munitions conventionnelles et la nécessité d’adopter une approche globale pour aborder la gestion pendant la durée de vie utile de ce type de munitions.  Il est crucial que les besoins et la situation de chaque pays et région soient pris en compte lors de la préparation du document final, afin de développer un cadre d’engagements politiques efficace et efficient, a estimé la représentante.  Elle a ajouté que son Gouvernement entendait réaliser la destruction de près de 60 000 armes à feu avant 2023.  Le Plan d’action national pour la prévention de la violence avec usage des armes à feu 2022-2023, vise à prévenir et à réduire les actes de violence, les accidents et les crimes commis avec des armes à feu, a-t-elle ajouté. 

M. ALEXANDER KMENTT (Autriche) a déclaré qu’en 2022, nulle part ailleurs plus qu’en Ukraine la force destructrice des armes classiques n’a été à l’œuvre.  En agressant brutalement l’Ukraine, la Fédération de Russie s’est rendue coupable de violations flagrantes du droit international humanitaire, a-t-il ajouté, condamnant l’utilisation d’armes à sous-munitions et l’utilisation aveugle d’armes explosives dans les zones peuplées ukrainiennes.  Nous sommes également consternés par le fait que des mines antipersonnel sont nouvellement déployées sur le territoire d’un État partie à la Convention d’Ottawa, a ajouté M. Kmentt. 

Le représentant a ensuite appuyé la déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires de l’emploi d’armes explosives en zones peuplées.  Se disant convaincu que cette initiative fera la différence sur le terrain, il a rappelé que la déclaration était l’aboutissement d’un processus que l’Autriche est fière d’avoir initié par le biais d’une conférence internationale en 2019, processus « qui a été dirigé de main de maître par l’Irlande au cours des trois dernières années ». 

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) a appelé à renforcer la mise en œuvre de la Convention sur certaines armes classiques et à garantir une adhésion universelle et à ses protocoles.  Le Gouvernement russe a adopté en juillet son Concept sur l’élaboration et l’application des systèmes d’armes avec l’utilisation de technologies basées sur l’intelligence artificielle dans les Forces armées de la Fédération de Russie, a annoncé le représentant, qui a estimé que le droit international humanitaire est suffisant et applicable à ces systèmes d’armes.  Il a ajouté que les problèmes liés à l’utilisation d’armes explosives ne pouvaient être résolus que par la mise en œuvre de bonne foi du droit international humanitaire.  Quant aux problèmes posés par les engins explosifs improvisés, il a souligné la nécessité de discuter de cette question au niveau des experts.

Pour ce qui est de la Convention sur les « armes inhumaines », le représentant a prié la communauté internationale de condamner les actions criminelles du régime de Kiev contre le peuple du Donbass et de prendre des mesures.  La Fédération de Russie, a-t-il ajouté, attache une grande importance à la question du trafic illicite des armes classiques et plaide pour une mise en œuvre du Programme d’action des Nations unies en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects visant à bloquer le détournement d’armes vers les marchés illicites.  À cet égard, la communauté internationale doit coordonner ses efforts, tout en préservant le rôle central de l’ONU. 

M. Vorontsov a dénoncé les tentatives de certains États d’étendre le champ d’application du Registre des armes classiques, y compris lors de la définition des critères d’embargo sur les armes introduits sous le Conseil de sécurité de l’ONU.  Il a estimé que le Traité sur le commerce des armes reste, dans sa forme actuelle, incomplet, et a ajouté les normes du Traité sont bien inférieures aux normes russes. 

M. THOMAS GÖBEL (Allemagne) a déclaré que la protection des civils dans les conflits armés reste d’une importance capitale pour l’Allemagne.  C’est pourquoi, il a condamné dans les termes les plus fermes l’utilisation par la Russie de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions dans sa guerre d’agression contre l’Ukraine, « ainsi que l’utilisation aveugle d’autres types d’armes explosives ».  L’Allemagne demande à la Russie de cesser immédiatement son agression et de cesser l’utilisation de ces armes, a lancé le représentant. 

Se disant consterné par l’impact humanitaire dévastateur sur les civils de l’utilisation aveugle d’armes explosives à large spectre d’action dans les zones peuplées de Syrie, de Libye et du Yémen, le représentant a souligné combien les dispositions du droit humanitaire international relatives à la protection des civils doivent être pleinement respectées par toutes les parties à un conflit armé.  Ainsi a-t-il salué la finalisation du texte de la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, un texte découlant du processus « inclusif » dirigé par l’Irlande ces trois dernières années. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a noté qu’il a fallu attendre la troisième Réunion biennale des États pour l’examen de la mise en œuvre du Programme d’action relatif aux armes légères en 2008 pour aborder cette question sous l’angle de la perspective de genre et la diversité.  Elle a vivement encouragé l’inclusion dans le Traité sur le commerce des armes de la dimension de la violence liée au genre.  Elle a indiqué que le Costa Rica signera le 18 novembre 2022 à Dublin l’Accord contre l’utilisation des armes explosives en zones peuplées avant de se féliciter que la déclaration politique agréée en juin ait mis l’accent sur la pertinence d’une approche genrée de cette question.  Elle a salué l’initiative de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement sur l’équilibre du genre dans la lutte contre la prolifération des armes. 

M. SHAMSURI BIN NOORDIN (Malaisie) s’est déclaré préoccupé par la circulation illicite des armes légères et de petit calibre et a appelé à mettre en œuvre le Programme d’action visant à en empêcher la circulation illicite.  Il a appelé à combattre le commerce d’armes classiques tout en rappelant le droit des États à acquérir des armes pour leur sécurité et leur défense.  Il faut lutter contre l’utilisation par les acteurs non étatiques d’armes explosives, y compris dans les zones peuplées, a ajouté le représentant réaffirmant à son attachement à parvenir au contrôle des armes classiques et de leur utilisation. 

M. LAI HAIYANG (Chine) a dit que la Chine n’avait cessé, depuis son adhésion au Traité sur le commerce des armes, de plaider de manière systématique en faveur d’un commerce des armes responsable, pour éviter que ces armes tombent entre les mains de groupes non étatiques.  Le représentant a ainsi indiqué que la Chine avait consacré 100 millions de yens à des efforts de déminage et d’élimination de restes explosifs de guerre dans 40 pays, notamment au Cambodge et à la République démocratique populaire Lao. 

Le représentant s’est inquiété de l’augmentation des conflits régionaux et de tensions, responsables de l’extension du transfert illégal d’armes classiques.  Face à cette situation et à la « subsistance d’une mentalité de Guerre froide », il a vanté l’initiative de sécurité mondiale présentée en avril par le Président Xi Jinping, qui appelle notamment à redoubler d’efforts dans le domaine du contrôle des armes classiques.  Le représentant a notamment mis l’accent sur la nécessité d’améliorer les législations nationales pour empêcher le transfert illégal d’armes.  Il a aussi juger pertinent que certains pays cessent de s’immiscer dans les affaires internes d’autres pays.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a demandé à mettre l’accent sur la promotion de la transparence dans le commerce des armes.  Il faut en outre consolider le Programme d’action visant à éliminer les armes légères et de petit calibre.  À cet égard, il faut renforcer la coopération sur le renforcement de capacités des États qui en font la demande.  Le représentant a également demandé un engagement accru contre les engins explosifs improvisés et pour améliorer la coopération douanière et la lutte contre le terrorisme transfrontalier.  Il a appelé à éliminer les mines antipersonnel et à mettre en œuvre les instruments internationaux pertinents.

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh) a déclaré que la paix et la sécurité internationales continuent d’être menacées par le non-respect des obligations juridiques internationales, notamment en ce qui concerne les armes classiques, véritables armes de destruction massive selon lui.  Dans le cadre de notre engagement commun à faire progresser la maîtrise des armes classiques pour la paix et la prospérité, le Bangladesh reste déterminé à remplir ses obligations en vertu de divers instruments internationaux, notamment la Convention sur certaines armes classiques et ses protocoles auxquels nous sommes parties, a-t-il ajouté. 

Le Bangladesh s’inquiète du nombre croissant de morts innocentes dues à l’utilisation non autorisée d’une variété d’armes classiques à travers le monde.  Le représentant a donc appelé à l’universalisation et à la mise en œuvre effective des lois et normes internationales relatives aux armes classiques sur lesquelles nous nous sommes mis d’accord.  Les armes légères et de petit calibre, en particulier, restent des vecteurs majeurs de violences et de délits, a-t-il conclu. 

Droit de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé les accusations fallacieuses des États occidentaux au sujet des armes classiques utilisées lors de l’opération militaire spéciale en Ukraine, accusant en revanche l’Ukraine de multiplier chaque jour les violations du droit international humanitaire.  Il a notamment accusé l’Ukraine de viser des centrales nucléaires et d’utiliser des civils comme boucliers humains.  Il a regretté que les Occidentaux soutiennent les « méthodes terroristes ukrainiennes » avant d’accuser les forces ukrainiennes de miner systématiquement les ponts, les routes et infrastructures civiles des territoires qu’elles occupent.  Il s’est dit particulièrement choqué de constater que des responsables de l’OTAN se soient félicités de l’attaque terroriste ayant endommagé le principal pont de la Crimée. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Face aux défis socioéconomiques et environnementaux urgents, les mandats confiés à l’ECOSOC sont plus importants que jamais, assure son Président devant l’Assemblée générale

Soixante-dix-septième session,
19e séance, Matin
AG/12460

Face aux défis socioéconomiques et environnementaux urgents, les mandats confiés à l’ECOSOC sont plus importants que jamais, assure son Président devant l’Assemblée générale

Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC) a déclaré ce matin, devant l’Assemblée générale, que face aux défis économiques, sociaux et environnementaux urgents, les mandats confiés par la Charte des Nations Unies à l’organe qu’il dirige sont plus importants que jamais. 

Venu présenter le rapport de l’ECOSOC, M. Collen Vixen Kelapile a souligné que durant la période à l’examen, le Conseil a continué de fournir une plateforme unique pour identifier des solutions politiques alors que les États Membres poursuivaient leurs efforts pour se remettre de la pandémie, tout en s’attaquant aux autres crises croisées dans le monde.  Dans ce contexte, le message du forum politique de haut niveau sur le développement durable, réuni cette année en personne sous l’égide de l’ECOSOC, était clair: les impacts de la COVID-19, du conflit en Ukraine et des changements climatiques inversent les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).   

Avec ces crises comme signal d’alarme et le Programme 2030 comme phare, nous pouvons encore nous lancer vers les transitions nécessaires pour atteindre les ODD, notamment ceux en rapport avec la protection sociale et l’éducation, les systèmes alimentaires, l’énergie et la connectivité numérique, a toutefois estimé M. Kelapile qui a appelé à des politiques transformatrices et à accorder une véritable attention aux questions de financement.  Des appels énergiques ont été également lancés pour mobiliser des ressources financières, résoudre la crise de la dette et faire de la vulnérabilité un critère d’accès aux ressources concessionnelles, a-t-il rapporté.  Félicitant les 44 pays qui ont présenté leurs examens nationaux volontaires cette année, le Président de l’ECOSOC a appelé à mettre en place des réformes urgentes dans les domaines de la finance internationale, de la dette et de l’architecture de la fiscalité. 

M. Kelapile a par ailleurs qualifié de grande réussite l’adoption par consensus de la Déclaration ministérielle à la clôture du forum politique.  Il a aussi fait savoir que le Conseil a lancé son nouveau segment de coordination en février dernier pour identifier les domaines clefs où le système ECOSOC pourrait approfondir la réflexion politique, identifier une solution ou travailler pour faire avancer la mise en œuvre du Programme 2030. 

Le Président de l’ECOSOC a ensuite indiqué que le débat consacré aux activités opérationnelles de développement a laissé voir qu’un renforcement des efforts de réforme serait nécessaire pour maximiser l’impact du travail du système des Nations Unies pour le développement, en aidant notamment les pays à faire face aux crises pandémiques, alimentaires, énergétiques et climatiques ainsi qu’aux conflits. 

De son côté, le débat consacré aux affaires humanitaires de 2022 a été l’occasion de souligner la nécessité de renforcer le respect du droit international humanitaire, ainsi que la compréhension et la préparation aux impacts humanitaires de la crise climatique.  Il a été aussi question de promouvoir des partenariats significatifs avec des acteurs locaux de l’action humanitaire, en particulier des organisations de terrain dirigées par des femmes.  Pour sa part, la réunion inaugurale sur le passage de la phase des secours aux activités de développement, qui a mis l’accent sur Haïti, le Soudan du Sud et la région du Sahel, a mis en avant la nécessité de traiter d’urgence les impacts immédiats de l’insécurité alimentaire et des déplacements, de promouvoir des solutions à long terme aux crises prolongées, et de prévenir de nouvelles crises grâce à des approches d’alerte précoce.   

Le Président de l’ECOSOC a également parlé des activités du forum sur les partenariats dont le format hybride a permis l’engagement direct de plus de 4 000 participants, ainsi que du forum de la jeunesse qui a attiré plus de 22 000 participants sous un format virtuel.  Le Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour les ODD a de son côté permis d’identifier des solutions pour un certain nombre de défis qui se chevauchent, dont la COVID-19, les changements climatiques, la crise économique mondiale et les conséquences de la guerre en Ukraine. 

Quant au rapport 2022 sur le financement du développement durable, il a identifié une « grande fracture financière » qui a considérablement réduit la capacité de nombreux pays en développement à se remettre de la pandémie et à investir pour la reprise.  De ce fait, les risques d’une crise systémique de la dette ont encore augmenté, a alerté M. Kelapile.  À cet égard, il a été proposé, lors du Forum sur le financement du développement, tenu en avril 2022, d’utiliser l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle pour déterminer l’éligibilité aux financements concessionnels et pour l’allégement de la dette des petits États insulaires en développement (PEID).   

Au cours de cette période, a poursuivi le Président de l’ECOSOC, nous avons également continué à forger des relations plus solides avec l’Assemblée générale et la Commission de consolidation de la paix.  C’est dans ce sens que s’est tenue une réunion conjointe sur les travaux de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC, ou encore la réunion spéciale de haut niveau sur l’Afrique, pour reconfirmer le développement de l’Afrique comme une priorité pour le système des Nations Unies.  Au cours du Segment de la gestion, le Conseil a examiné les rapports de ses organes subsidiaires et des entités des Nations Unies qui œuvrent dans les domaines connexes à son ordre du jour.    

Commentant le rapport, la Bolivie, qui fut l’un des Vice-Présidents de l’ECOSOC, a souhaité que soit renforcée l’assistance humanitaire fondée sur le respect des principes du droit international humanitaire et des droits de l’homme, soit l’absence de parti pris et de discrimination.  En tant que pays hôte du Forum urbain mondial de 2022, la Pologne a insisté sur l’importance de la transformation des villes pour la réalisation des ODD, évoquant en outre sa candidature à un siège de l’ECOSOC pour la période 2024-2026.   

Réagissant à la note du Secrétaire général relative au Prix des Nations Unies en matière de population pour 2022, l’Indonésie, qui a plébiscité dans la catégorie des institutions, a salué le travail du Conseil national de la population et de la planification familiale de l’Indonésie.  Le délégué a rappelé que l’institution créée en 1970 a su initier des politiques avant-gardistes qui ont permis de gérer harmonieusement les programmes de planification familiale du quatrième pays le plus peuplé du monde.  Le Conseil national de la population contribue également à renforcer les capacités d’autres agences de pays en développement, notamment sur la question de la planification familiale et des retards de croissance.   

Après que l’Assemblé générale a pris note du rapport de l’ECOSOC, aucun État n’a pris la parole sur le point « Suite donnée aux textes issus du Sommet du Millénaire ».   

L’Assemblée générale se réunira de nouveau jeudi 27 octobre à partir de 10 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’avenir des projets d’articles et de principes relatifs à la prévention et à la réparation des dommages transfrontières divise la Sixième Commission

Soixante-dix-septième session,
18e séance - après-midi
AG/J/3666

L’avenir des projets d’articles et de principes relatifs à la prévention et à la réparation des dommages transfrontières divise la Sixième Commission

Après avoir terminé, cet après-midi, l’examen de mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires, la Sixième Commission (questions juridiques) a abordé les questions de la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et de la répartition des pertes consécutives à de tels dommages. 

Lors du débat sur ces question, qui a lieu tous les trois ans, les délégations se sont référées au projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et à son projet de principes sur la répartition des pertes consécutives à de tels dommages.  Ces deux textes, respectivement adoptés en 2001 et 2006, constituent « les deux faces d’une même médaille », a estimé le représentant du Chili.  Si les 17 intervenants sur ce point de l’ordre du jour ont salué le travail de la CDI, notant, à l’instar de la Fédération de Russie, qu’ils fournissent un guide pour les États, ils se sont en revanche montrés divisés quant à leur avenir.

Antigua-et-Barbuda, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), les États fédérés de Micronésie, El Salvador ou la Sierra Leone ont noté que des parties importantes des projets reflètent le droit coutumier et sont déjà largement utilisées par les juridictions nationales et internationales.  L’Australie, au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande, la Türkiye et les États-Unis ont dit préféré les conserver sous leur forme actuelle.  Le délégué américain a estimé que les deux projets ont été conçus comme « des ressources pour encourager l’action nationale et internationale dans des contextes spécifiques », plutôt que pour former la base d’un traité.  La Fédération de Russie a relevé l’absence de consensus à leur sujet. 

Les petits États insulaires en développement sont particulièrement affectés par ces dommages transfrontières, a toutefois tenu à souligner la déléguée d’Antigua-et-Barbuda en évoquant les changements climatiques.  Rappelant qu’ils sont responsables de moins de 1% des émissions de CO2 et de 1,3% de la pollution plastique, elle a jugé « inéquitable et franchement injuste » d’attendre de ces États qu’ils utilisent leurs modestes ressources pour répondre et remédier aux effets des dommages transfrontières créés par d’autres.  Il est nécessaire d’accorder une attention particulière à la situation et aux besoins des pays en développement qui sont plus vulnérables sur le plan de l’environnement, a renchéri le Cameroun. 

Mettant en garde contre le « coût de l’inertie », la Sierra Leone s’est en revanche dite favorable à l’élaboration d’une convention sur la base des deux projets.  Cet avis a été partagé par le Portugal et le Chili, qui a souligné l’importance de combiner les projets d’articles et de principes au sein d’un même texte.  Prenant acte des divergences, El Salvador a proposé la création d’un groupe de travail en vue de la mise au point d’une loi type, qui pourrait attirer le soutien d’un plus grand nombre d’États.

Des participants ont en outre fait état de difficultés vis-à-vis de certaines dispositions contenues dans les projets de la CDI.  Le Cameroun et la Malaisie ont ainsi souligné la nécessité de clarifier l’expression « atteinte significative à l’environnement ».  D’autres ont voulu mettre en relief le principe « pollueur-payeur ».

Enfin, la Sixième Commission a commencé à étudier le point consacré au droit des aquifères transfrontières.  Le Brésil, au nom de l’Argentine, du Paraguay et de l’Uruguay, s’est félicité du projet d’articles « équilibré » adopté par la CDI en 2008 sur cette question.  La prochaine étape doit convenir à l’ensemble des délégations, a déclaré le délégué, en souhaitant l’adoption dudit projet sous la forme d’une déclaration de principe.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain matin, à partir de 10 heures. 

EXAMEN DE MESURES PROPRES À RENFORCER LA PROTECTION ET LA SÉCURITÉ DES MISSIONS ET DES REPRÉSENTANTS DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES - A/77/208

Suite et fin du débat général

Mme ANNA V. ANTONOVA (Fédération de Russie) a noté qu’au niveau interne, la Russie prend toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des missions diplomatiques et consulaires des États étrangers.  Elle s’est inquiétée de l’augmentation des menaces et des attaques de plus en plus fréquentes contre ses missions à l’étranger.  La représentante a rappelé qu’il appartient au pays hôte de prévenir ces attaques et de garantir la sécurité et la dignité des missions et des représentants.  Elle a fait état de plus de 150 cas d’actes dirigés contre des missions diplomatiques et consulaires de la Fédération de Russie à l’étranger, dont récemment de la peinture rouge lancée contre la façade de son consulat à New York.  Ces missions et les représentants russes reçoivent quotidiennement des menaces et font l’objet d’attaques et d’actes de vandalisme.  La déléguée a également déploré la saisie de locaux servant au bon fonctionnement de la mission diplomatique et consulaire russe par les États-Unis, ce qui « réduit à néant le principe des privilèges et immunités ».  Elle a exhorté au respect des Conventions de Vienne de 1961 et de 1963.  La déléguée a par ailleurs jugé inadmissible de « politiser » la Sixième Commission pour l’utiliser comme « plateforme contre les activités de la Russie en Ukraine ».

Mme ESTELA MERCEDES N. MANSOGO (Guinée équatoriale) a condamné les violations des locaux des missions diplomatiques et consulaires rapportées par plusieurs États dans le rapport du Secrétaire général.  Elle a demandé aux États de prendre des mesures préventives pour protéger les missions et les représentants diplomatiques et consulaires, afin qu’ils puissent mener à bien leurs fonctions.  Seules des relations pacifiques sont à même d’assurer la promotion du multilatéralisme et de la diplomatie, a fait valoir la déléguée, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies.  Parallèlement, les représentants diplomatiques et consulaires accrédités dans un État ont l’obligation de respecter les lois et règlements de celui-ci, en s’abstenant de toute ingérence dans ses affaires intérieures ou d’utiliser leurs locaux à des fins autres que celles de leurs fonctions.

Mme BEATRICE EFFAH (Ghana) a noté que l’augmentation des atteintes à la sécurité et à la sûreté des missions et des représentants diplomatiques et consulaires porte atteinte à la diplomatie et aux relations amicales entre États.  Elle a donc appelé à approfondir la coopération aux niveaux national et international pour renforcer les mesures préventives et protectrices.  Face au terrorisme, aux cyberattaques et à l’impact de la pandémie de COVID-19, face aux menaces émergentes, elle a appelé à repenser les mesures de protection.  La représentante a également rappelé le devoir des représentants diplomatiques et consulaires de se conformer au droit du pays hôte.  Elle a encouragé les représentations diplomatiques à communiquer avec les pays hôtes afin de garantir leurs privilèges et immunités. 

M. SHUNSUKE NAGANO (Japon) a déclaré que les actes de violence contre les missions et le personnel diplomatiques et consulaires ne devraient pas être tolérés.  À cet égard, il a souligné les obligations du pays hôte conformément aux Conventions de Vienne.  Le délégué a insisté sur le fait que les atteintes aux privilèges et immunités des diplomates et agents consulaires ne peuvent jamais être justifiées et que leur inviolabilité est au cœur du principe des immunités.

M. ELISA DE RAES (Belgique) a déploré et condamné les actes de violence commis à l’encontre des missions et des représentants diplomatiques et consulaires.  Il a encouragé les États qui ne l’auraient pas encore fait à ratifier les instruments internationaux en la matière « dès que possible ».  Il s’est par ailleurs dit préoccupé par les mesures prises à l’égard du personnel diplomatique par certains États dans le cadre de la pandémie de COVID-19, qui sont « disproportionnées » au regard des exigences de santé publique et manifestement « incompatibles » avec les Conventions de Vienne.  À ce titre, il a appelé à trouver un juste équilibre entre le respect du droit du pays hôte et le devoir d’accorder les facilités pour l’accomplissement des fonctions des missions.

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a rappelé l’importance de la protection des missions diplomatiques et consulaires conformément aux Conventions de Vienne.  La sécurité desdites missions est la priorité de mon pays, a dit le délégué.  Les personnes jouissant des immunités diplomatiques doivent respecter les lois du pays d’accréditation et adhérer à des normes de comportement « assez élevées », a-t-il dit.  Il a indiqué qu’aucun incident n’a eu lieu en Algérie, avant de prendre note de la croissance des actes de violence visant les représentations.  Enfin, le délégué a jugé de tels actes inacceptables et souligné de nouveau l’attachement de son pays à la bonne protection des représentations diplomatiques et consulaires.

M. VICTOR SILVEIRA BRAOIOS (Brésil) a relevé que les archives et documents diplomatiques ont un caractère inviolable partout où ils se trouvent, comme cela a été reconnu par des tribunaux.  Rappelant que les traités internationaux reconnaissant que les missions consulaires peuvent utiliser tous les moyens appropriés de communication, il a constaté que, depuis les années 60, les moyens de communication ont énormément évolué.  Malgré cela, a-t-il noté, les Conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires restent de mise.  Il a aussi insisté sur l’inviolabilité des correspondances des missions diplomatiques tant dans le monde réel que virtuel. 

M. AMANUEL GIORGIO (Érythrée) a déploré les violations graves du droit international qui se produisent à travers le monde, mettant en danger la sûreté et la sécurité des représentants diplomatiques et consulaires.  Il a appelé au strict respect des règles du droit international protégeant l’inviolabilité des locaux diplomatiques et consulaires ainsi que des organisations internationales accréditées.  Le délégué a dénoncé les « obstacles créés par les mesures coercitives unilatérales », y compris les restrictions aux services bancaires, qui affectent les fonctions diplomatiques et consulaires des États concernés.  Ces mesures sont contraires au droit international et doivent être immédiatement levées, a-t-il insisté.

M. ANIL KAYALAR (Türkiye) s’est inquiété de la persistance des attaques et des menaces contre les missions consulaires et diplomatiques et leurs représentants, y compris celles de la Türkiye.  Il a souligné le devoir des États de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer la protection des missions diplomatiques et consulaires et de leurs représentants, notant que la responsabilité à cet égard incombe principalement au pays hôte ou à l’État auprès duquel les représentants sont accrédités.  Cela implique également la mise en place de mesures préventives efficaces, en tenant dûment compte des évaluations des menaces transmises par les missions concernées, a-t-il ajouté.  Le représentant a également jugé impératif que les locaux diplomatiques et consulaires ne soient pas utilisés d’une manière incompatible avec les fonctions de ces missions et que ceux qui jouissent des privilèges et immunités respectent les lois et règlements de l’État de résidence.  Il a ensuite rappelé que la Türkiye a perdu de nombreux diplomates lors d’assassinats commis par des organisations terroristes dans des pays tiers.

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a dénoncé les actes « haineux et racistes » ayant visé les missions azerbaïdjanaises dans plusieurs pays.  Il a imputé ces actes à des personnes arméniennes « radicalisées » vivant dans les pays concernés.  La réponse apportée par les pays hôtes a été insuffisante, voire inexistante.  À notre connaissance, aucun auteur n’a été traduit en justice, a-t-il regretté.  Il a cité un État qui a indiqué qu’il n’y avait pas d’éléments de preuve susceptibles de déclencher des poursuites judiciaires.  « Cela ne fait qu’encourager ces communautés arméniennes radicalisées qui, sous couvert d’activités caritatives, se livrent au transfert de combattants étrangers et au blanchiment d’argent afin d’agresser mon pays », a déploré le délégué.  Enfin, il a rappelé l’obligation de protection qui incombe aux pays hôtes, en soulignant l’importance que les auteurs d’actes violents soient traduits en justice.

Mme WIETEKE ELISABETH CHRISTINA THEEUWEN (Pays-Bas) a indiqué que, même dans le monde virtuel, l’inviolabilité des correspondances consulaires doit être respectée.  Les locaux doivent donc être protégés contre les menaces cybernétiques, même si, a-t-elle reconnu, la protection des missions consulaires dans le monde virtuel est plus compliquée.

Mme TAMUNO (Nigéria), préoccupée par le fait que les représentants diplomatiques et consulaires font face à des menaces dans l’exercice de leurs fonctions, a appelé les États à respecter les règles des Conventions de Vienne de 1961 et de 1963.  Ces Conventions, que le Nigéria s’est lui-même engagé à respecter, imposent aux pays hôtes le devoir de garantir l’inviolabilité.  La déléguée a noté la création d’une unité dédiée, dans son pays, pour répondre aux appels urgents sur ces questions et fait référence aux mesures visant à assurer la sécurité des représentants qui se déplacent hors de la capitale, ainsi que de ceux qui arrivent en poste.  Elle a, enfin, exhorté les États Membres à s’abstenir de prendre des mesures contre les représentants diplomatiques et consulaires, notamment les fouilles.

EXAMEN DES QUESTIONS DE LA PRÉVENTION DES DOMMAGES TRANSFRONTIÈRES RÉSULTANT D’ACTIVITÉS DANGEREUSES ET DE LA RÉPARTITION DES PERTES CONSÉCUTIVES À DE TELS DOMMAGES - A/77/148

Débat général

Mme ASHA CECILY CHALLENGER (Antigua-et-Barbuda), au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a noté que certaines parties du projet d’articles relatives à la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et du projet de principes relatifs à la répartition des pertes en cas de dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses de la Commission du droit international (CDI) reflètent le droit international, notamment la prévention des dommages transfrontières et la nécessité de réparation.  Le projet est particulièrement utile pour fournir un cadre concret pour ces questions, a-t-elle estimé. 

Les petits États insulaires en développement sont particulièrement affectés par ces dommages transfrontières, a souligné la représentante.  Elle a évoqué, entre autres, la montée des eaux, l’augmentation du sel dans les eaux fraîches, les menaces à la biodiversité et d’autres crises, qui présentent de vraies menaces pour l’infrastructure, la sécurité ou encore la santé des petits États insulaires en développement.  Ces pays sont responsables de moins de 1% des émissions de CO2 et de 1,3% de la pollution plastique, mais ils subissent l’impact disproportionné de ces pollutions, a-t-elle déploré.  Elle a donc jugé « inéquitable et franchement injuste » d’attendre de ces îles qu’elles utilisent leurs modestes ressources pour répondre et remédier aux effets des dommages transfrontières créés par d’autres.  La représentante a estimé que les projets d’articles et de principes de la CDI codifient des principes clefs du droit international environnemental, qui sont déjà reflétés dans le droit coutumier.  Les États doivent donc travailler ensemble pour préciser et clarifier les devoirs existants, prévenir les dommages transfrontières et assurer une répartition égale des pertes, a déclaré la représentante.

Mme ZOE RUSSELL (Nouvelle-Zélande), au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), a indiqué que les juridictions nationales comme internationales font référence au projet d’articles et de principes de la Commission du droit international (CDI) sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses, et la répartition des pertes consécutives à de tels dommages.  Nous pensons que la meilleure façon d’assurer le développement progressif du droit international dans ce domaine est de conserver ces articles et principes sous leur format actuel, a déclaré la déléguée.  « Il y aurait peu à gagner d’essayer d’élaborer une convention. »  En conclusion, elle a rappelé que le projet jouit, dans sa forme actuelle, d’un large appui des États Membres.

M. MOHAMMDA SADEGH TALEBIZADEH SARDARI (République islamique d’Iran) a estimé que les projets d’articles et de principes de la Commission du droit international (CDI) portant sur la question de la responsabilité internationale pour les dommages résultant d’activités non interdites par le droit international, font partie de la lex lata et représentent un développement progressif du droit international.  Selon lui, cette caractéristique empêche, à ce stade, l’élaboration de normes globales que tous les États pourraient suivre.  Alertant que les dommages transfrontières risquent d’augmenter, notamment en raison des changements climatiques et de la dégradation de l’environnement, le représentant a appelé les États Membres à agir de manière cohérente sur la base des paramètres et pratiques internationalement reconnus et des principes généraux applicables.  Cela permettrait d’harmoniser les réponses juridiques, en particulier dans la prévention des activités dangereuses, a-t-il soutenu.  Le représentant a estimé qu’en l’absence de règles spécifiques du droit international conventionnel ou coutumier, les États ont le devoir d’exercer la diligence requise afin de prévenir ou minimiser les dommages transfrontières.  Il a appuyé la proposition visant à améliorer la coopération internationale afin de renforcer les capacités scientifiques et techniques des pays en développement pour les aider à prévenir de tels dommages. 

M. DAVID BIGGE (États-Unis) a noté que le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et son projet de principes sur la répartition des pertes consécutives à de tels dommages ont été conçus comme « des ressources pour encourager l’action nationale et internationale dans des contextes spécifiques », plutôt que pour former la base d’un traité mondial.  Il a donc appelé à les maintenir dans leur forme actuelle.

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique), saluant les travaux de la CDI, a jugé important d’intégrer des principes de base liés à la question des dommages transfrontières comme le principe de développement durable.  À ce sujet, elle a souhaité avoir une définition claire de l’expression « atteinte sensible à l’environnement », ce qui permettrait de définir le périmètre de la demande d’indemnisation.  Elle a aussi réaffirmé la nécessité de reformuler l’expression « répartition des pertes », puisqu’il semble qu’elle laisse de côté la considération du régime juridique de réparation des dommages causés, notamment le principe du « pollueur payeur ».  La déléguée a également mentionné la nécessité de codifier les activités dans des zones situées au-delà de la juridiction nationale, en particulier dans le contexte des activités menées dans les fonds marins.  En ce sens, « les activités minières sous-marines doivent être considérées comme des activités dangereuses pouvant causer des dommages ».

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a noté l’acceptation croissante dont jouit le projet d’articles et de principes de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et la répartition des pertes consécutives à de tels dommages.  L’obligation d’agir pour atténuer de tels dommages reflète le droit coutumier, a-t-il souligné.  Le délégué s’est dit en faveur de l’élaboration d’une convention dans ce domaine.  « Nous avons en effet besoin d’un cadre juridique sur de tels dommages. »  Il a toutefois estimé que certaines notions du projet doivent être clarifiées, comme la notion de dommages graves.

M. LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a souligné que protéger l’environnement revient à protéger d’autres garanties comme la liberté, l’égalité et le bien-être humain.  Le droit à un environnement sain a d’ailleurs été reconnu comme un droit humain dans la Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement de 1972 et par la Cour américaine des droits de l’homme.  D’après le délégué, le contexte actuel appelle à davantage d’engagements des acteurs de la communauté internationale pour renforcer les mesures de protection des écosystèmes et des ressources transfrontières.  Il s’agit là d’une priorité dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il ajouté.  À ce titre, il a souligné la nécessité de mettre en œuvre les règles conventionnelles et le droit coutumier applicables, notamment le principe de prévention des dommages transfrontières ainsi que le principe d’équité intergénérationnelle.  Le résultat des travaux de la CDI donne des orientations importantes, a-t-il estimé.  Le délégué a espéré un engagement international contraignant pour clarifier les obligations et apporter une certitude juridique sur les concepts.  Il a encouragé à la création d’un groupe de travail pour la création d’une loi type si cela peut attirer le soutien des États.

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a rappelé que la CDI avait recommandé l’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses.  « Malheureusement, ce vœu est resté lettre morte. »  Le délégué a considéré que ledit projet d’articles ainsi que le projet de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses peuvent servir de point de départ pour le développement progressif du droit international de l’environnement et l’interprétation de ses normes.  Le Portugal garde espoir qu’un jour il sera possible d’avoir une convention unique sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses. 

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a rappelé la nécessité d’indemniser les victimes de dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses.  Il a soutenu le projet d’articles et de principes de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et la réparation des pertes consécutives à de tels dommages.  Le délégué a pris note de la recommandation d’élaborer une convention sur la base dudit projet.  La nécessité de ne pas affaiblir les travaux de la Commission est un argument souvent avancé sur cette question, a-t-il noté, tout en insistant sur « le coût de l’inertie ».  Il a estimé que le maintien du statu quo est porteur d’un risque de fragmentation.  La Commission a intérêt à structurer le débat et à agir pour faire suite aux recommandations de la CDI.  Enfin, le délégué s’est interrogé sur la fréquence des débats de ce sujet, avant de conclure que le projet est une bonne base pour l’élaboration d’une convention.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a estimé que la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses devrait être analysée à la lumière de la Déclaration de Rio.  Il est nécessaire d’accorder une attention particulière à la situation et aux besoins des pays en développement, qui sont plus vulnérables sur le plan de l’environnement, a-t-il argué.  Le délégué a appelé à un examen minutieux du projet d’articles.  Il a ainsi proposé de « recalibrer » le champ d’application, trop étendu, de l’article 1, afin de le faire reposer sur des critères plus concrets.  L’alinéa 2 de l’article 2 donne lieu à des différences d’interprétation et devrait être plus clair, a-t-il analysé.  Le délégué a également noté que le sens et la portée du terme « dommage significatif » est équivoque et peut exclure des dommages de certaine nature.  Il a plaidé pour le développement de la dimension préventive dans le projet de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses.  Il a également jugé souhaitable que le projet d’articles comporte un guide de mesures à prendre pour réduire les dommages.  Il a enfin noté que le principe de responsabilité objective suscite encore des débats.  Sur ce point, il a jugé souhaitable de s’en tenir au projet de principes soumis en 2006. 

Mme ANNA V. ANTONOVA (Fédération de Russie) a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur les articles relatifs à la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses.  En l’absence de consensus sur le sort desdits articles, elle a estimé qu’ils peuvent être utilisés par les États.  Selon la déléguée, il faut continuer à réfléchir à la façon pratique d’utiliser les articles élaborés par la CDI. 

Mme YAHAYA (Malaisie) a pris note du projet d’articles et de principes de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et la répartition des pertes consécutives à de tels dommages.  La position de mon pays est inchangée, a-t-elle signalé, en rappelant les précédentes déclarations de sa délégation sur le sujet.  Elle a demandé une définition de la notion de « dommages significatifs » contenue dans ledit projet.  Le terme de dommages transfrontières est également très général, a noté la déléguée.  Elle a estimé que le projet adopte une approche « monolithique » de toutes les catégories de dommages.  Enfin, elle a rappelé que l’État d’origine peut refuser de fournir une étude d’impact.

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili) a noté que le projet d’articles de la CDI reprend le droit coutumier ainsi que des éléments de droit progressif et met l’accent sur l’obligation de prévention.  Ce texte, a-t-il noté, a gagné en importance avec le passage du temps et son utilisation par la jurisprudence.  Quant au projet de principes, il permet aux États d’adopter des mesures importantes de prévention, aboutissant à un « cercle vertueux ».  Le délégué a déclaré que ces textes visent à une amélioration des principes environnementaux et favorisent la prévention et la réparation.  Il s’agit de références importantes pour les États, qui peuvent les mettre en œuvre dans leur législation et les invoquer devant les tribunaux internationaux et nationaux, a-t-il affirmé.  Pour le délégué, les deux projets représentent « les deux faces d’une même médaille » et doivent être intégrés dans le même instrument.  Il a jugé nécessaire de créer un groupe de travail pour analyser leur mise en œuvre à l’échelle nationale et internationale.

M. JEEM LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a estimé que le projet d’articles de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses reflète pour la majorité les principes du droit international coutumier.  Il a dit que son pays s’est associé à un groupe de pays qui demande un « moratoire sur l’exploitation minière sous-marine ».  Le délégué a souhaité qu’il y ait une exigence d’étude d’impact sur l’environnement quand un projet est susceptible d’avoir un effet transfrontière.  C’est d’ailleurs l’un des principes clefs des négociations en cours sur un accord international juridiquement contraignant portant sur les ressources marines se trouvant au-delà de la juridiction nationale, a-t-il souligné. 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a souligné l’importance du point à l’ordre du jour pour le bon voisinage entre États.  Il a pris note du projet d’articles de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses.  C’est une étape positive sur la voie de la préparation d’une convention, a dit le délégué.  Il a estimé que ce projet est une réponse adéquate aux préoccupations environnementales de la communauté internationale, en notant que le projet contient le principe « pollueur-payeur ».  Il a rappelé le droit souverain de chaque État d’exploiter ses ressources naturelles, tout en indiquant que cela ne doit pas occasionner de dommages pour les autres États.  En conclusion, le délégué a souhaité que la Commission reste saisie de cette question.

M. ANIL KAYALAR (Türkiye) a estimé que projet d’articles de la CDI sur la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et son projet de principes sur la répartition des pertes consécutives à de tels dommages rempliraient mieux leur fonction en tant que documents d’orientation pour les États.  Il a donc appelé à les conserver dans leur forme non contraignante.  Le délégué a également noté que le rapport du Secrétaire général contient des explications sur les principales préoccupations de son pays concernant le fond des deux projets.  La Türkiye, a-t-il noté, n’a invoqué aucun des deux textes devant un tribunal ou autre organe international.

Mme WIETEKE ELISABETH CHRISTINA THEEUWEN (Pays-Bas) a commenté les projets d’articles et de principes préparés par la CDI, estimant qu’il ne faut pas faire de différence entre les travaux relatifs à la prévention des dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses et ceux portant sur la question des compensations.  D’après elle, il faut poursuivre le débat sur ces sujets. 

LE DROIT DES AQUIFÈRES TRANSFRONTIÈRES

Débat général

M. VINÍCIUS FOX DRUMMOND CANÇADO TRINDADE (Brésil), au nom de l’Argentine, du Paraguay et de l’Uruguay, a salué le travail de la CDI sur le droit des aquifères transfrontières, en pointant notamment le travail du Rapporteur spécial, qui a fait appel à des experts en hydrogéologie.  Il a estimé que le projet d’articles sur le sujet est équilibré.  Il a ensuite détaillé l’Accord sur l’aquifère Guarani signé en 2010 par les quatre pays précités.  C’est un instrument précieux pour l’intégration de nos pays, a poursuivi le délégué.  Cet Accord est une contribution importante de l’Amérique latine à ce droit des aquifères transfrontières puisqu’il s’agit du premier accord multilatéral sur les activités liées à ces aquifères, a-t-il dit.  La prochaine étape doit convenir à l’ensemble des délégations, a déclaré le délégué, en souhaitant l’adoption dudit projet sous la forme d’une déclaration de principe.

M. DAVID BIGGE (États-Unis) a relevé que les travaux de la Commission du droit international (CDI) sur les aquifères transfrontières ont constitué une avancée importante en fournissant un cadre possible pour l’utilisation raisonnable et la protection des aquifères souterrains, lesquels jouent un rôle de plus en plus important en tant que source d’eau pour les populations.  Les pratiques des États varient considérablement en la matière, a-t-il constaté.  Pour les États-Unis, il vaut mieux avoir des arrangements adaptés au contexte pour faire face aux pressions exercées sur les aquifères transfrontières, plutôt que de transformer le projet d’articles de la CDI en un traité ou en principes.  Les États concernés devraient tenir compte des dispositions de ces textes lors de la négociation d’arrangements bilatéraux ou régionaux appropriés pour la bonne gestion des aquifères transfrontières, a conclu le délégué.

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique) a apprécié que le projet d’articles présenté par la Commission du droit international (CDI) sur les aquifères transfrontières établisse un équilibre entre les besoins humains essentiels, les intérêts des États et la protection des écosystèmes.  Saluant une approche moderne de la gestion des ressources naturelles, elle a souligné l’importance de prendre en compte la pratiques des États, que ce soit au niveau bilatéral ou régional, notamment en vue d’élaborer un traité contraignant sur le sujet. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a considéré que l’utilisation du projet d’articles de la CDI pourrait assurer une meilleure conservation et une meilleure gestion des aquifères transfrontières.  Elle a suggéré que ces articles soient intégrés dans un projet de convention en la matière avec des règles contraignantes pour les États Membres.  En attendant, ces textes fournissent des directives pour la signature d’accords et d’arrangements bilatéraux ou régionaux, a dit la déléguée.  Elle a noté que l’approche centrée sur le bassin hydrographique est importante au vu de l’interaction étroite entre les eaux de surface et les eaux souterraines. 

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a affirmé que la question du droit des aquifères transfrontières était extrêmement importante, car source de conflits potentiels.  Selon lui, les dispositions des articles de la CDI sont bien équilibrées et reflètent le droit international contemporain, notamment par leur ressemblance avec des articles de la Convention sur le droit de la mer.  Elles sont en outre compatibles avec la législation de l’Union européenne, a noté le délégué.  Il a appelé à élaborer une convention-cadre sur le droit applicable aux aquifères transfrontières. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a salué le projet d’articles de la CDI sur le sujet, en rappelant que les aquifères transfrontières constituent une richesse naturelle « vitale » pour les générations présentes et futures.  Il a salué la pertinence des projets d’articles qui visent à structurer la gouvernance et les cadres institutionnels pour les aquifères transfrontières.  « Ma délégation note avec satisfaction que le projet d’article 3 réaffirme le principe fondamental selon lequel les États conservent la souveraineté sur un aquifère, ou des portions d’un aquifère, situé sur leur territoire. »  Les projets d’articles de la CDI offrent une piste crédible à explorer patiemment, et le recours à ces articles devant la Cour internationale de Justice (CIJ) par certains États est une avancée considérable qui donne espoir, à charge pour la Sixième Commission de débattre de manière sereine et de « surmonter les divergences qui émergent entre les délégations qui préconisent l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant, et celles qui sont plus favorables à un instrument non contraignant », a conclu le délégué.

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