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Le Conseil de sécurité constate une fois de plus l’absence de progrès dans le dossier de l’utilisation présumée d’armes chimiques en Syrie

9164e séance – après-midi
CS/15077

Le Conseil de sécurité constate une fois de plus l’absence de progrès dans le dossier de l’utilisation présumée d’armes chimiques en Syrie

Comme la plupart des délégations du Conseil de sécurité, la Haute-Représentante des Nations Unies pour les affaires de désarmement a, cet après-midi, constaté le manque de progrès sur la question de l’utilisation présumée d’armes chimiques en République arabe syrienne depuis le mois dernier, une question dont plusieurs membres aujourd’hui ont demandé le changement de la périodicité, qui est actuellement mensuelle. 

Mme Izumi Nakamitsu, qui présentait son exposé sur la mise en œuvre de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité relative à l’élimination du programme d’armes chimiques en Syrie, a indiqué que les efforts déployés par l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour clarifier les questions en suspens au sujet de la déclaration initiale et des déclarations ultérieures de la République arabe syrienne n’avaient pas progressé. 

Comme par le passé, le Secrétariat technique continue d’estimer qu’à ce stade, la déclaration soumise par la Syrie ne peut être considérée comme « exacte et complète », conformément aux dispositions de la Convention sur les armes chimiques.  En ce qui concerne l’invitation adressée par le Directeur général de l’OIAC au Ministre syrien des affaires étrangères et des expatriés pour un entretien en personne, elle est restée lettre morte, a précisé Mme Nakamitsu. 

Une impasse regrettée par plusieurs délégations, dont la France, pour qui Damas doit faire la lumière sur l’intégralité de ses stocks et respecter ses obligations internationales si elle veut rétablir ses droits et privilèges.  Il reste 20 questions en suspens relatives à la déclaration initiale de la Syrie, a noté de son côté la Norvège, en exhortant ce pays à fournir des informations et des explications techniques suffisantes pour y répondre.  Un appel repris à leur compte par les A3 qui, par la voix du Gabon, ont appelé les autorités syriennes à coopérer avec le Secrétariat technique de l’OIAC pour faciliter la résolution définitive des questions en souffrance, y compris l’organisation de la vingt-cinquième série de consultations. 

Cela fait maintenant un an que le Conseil attend une réunion entre l’Équipe de l’OIAC et la délégation syrienne, s’est impatientée l’Irlande, avant que les États-Unis n’appellent ceux qui exercent une influence sur le « régime d’Assad  » à l’encourager à autoriser immédiatement le retour de l’Équipe d’évaluation en Syrie. 

Le représentant syrien a pour sa part déploré qu’une fois de plus, le Conseil se réunisse pour une séance qui n’est qu’un prétexte pour certains pays « désormais bien connus », « avec à leur tête les États-Unis », de réitérer leurs accusations à l’encontre du sien, gaspillant temps et ressources.  Il a jugé qu’il serait plus pertinent pour ces États de rendre des comptes pour les crimes qu’ils ont commis contre le peuple syrien par l’entremise des groupes terroristes qu’ils ont armés, y compris avec des armes chimiques, d’autant plus que Damas, a-t-il assuré, a fourni des preuves que l’OIAC n’a jamais cherché à vérifier. 

Le délégué syrien a en conséquence mis en cause l’impartialité des membres de l’Équipe d’évaluation, considérant que le Secrétariat technique devrait reconnaître la bonne foi de la Syrie qui, à l’inverse d’autres pays, n’a pas refusé l’accès à son territoire, sauf à un seul expert.  Il a réaffirmé son attachement au principe d’une réunion avec l’OIAC au plus haut niveau pour résoudre les questions en suspens, qui devrait se tenir à Beyrouth. 

Damas s’acquitte de ses obligations au titre de la Convention et coopère de manière constructive avec l’OIAC, a argué l’Iran, avant de dénoncer un traitement politique du dossier qui relève du deux poids, deux mesures.  Consacrer une séance mensuelle du Conseil de sécurité à la répétition des mêmes positions et à des allégations infondées contre le Gouvernement syrien n’est guère efficace, a estimé la délégation. 

Pour les Émirats arabes unis, nous sommes tous responsables du temps et des ressources alloués par le Conseil de sécurité, et devrions à cet égard revoir le nombre de réunions que le Conseil tient sur ce volet du dossier syrien.  Même son de cloche du côté du Brésil, qui a constaté qu’une fois de plus, le Conseil se réunit pour pas grand-chose, puisque rien ou presque n’a changé dans les relations entre l’OIAC et la Syrie, d’où la nécessité de mener une réflexion sur la périodicité de telles réunions. 

Tant que le Directeur de l’OIAC refusera de s’exprimer devant le Conseil de sécurité, il sera inutile d’aborder le sujet des armes chimiques, a renchéri la Fédération de Russie, qui a également appelé à améliorer le calendrier de discussion sur la mise en œuvre de la résolution 2118. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/727)

Déclarations

La Haute-Représentante des Nations Unies pour les affaires de désarmement, Mme IZUMI NAKAMITSU, a indiqué que les efforts déployés par l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) afin de clarifier les questions en souffrance, relatives à la déclaration initiale et aux déclarations ultérieures de la République arabe syrienne, n’ont pas progressé depuis la dernière réunion du Conseil sur cette question.  Malheureusement, a-t-elle dit, tous les efforts déployés par le Secrétariat technique de l’OIAC pour organiser le vingt-cinquième cycle de consultations entre l’Équipe d’évaluation et l’Autorité nationale syrienne se sont soldés par un échec.  Le Secrétariat technique continue d’estimer qu’à ce stade, la déclaration soumise par la Syrie ne peut être considérée comme exacte et complète, conformément aux dispositions de la Convention sur les armes chimiques.  La Haute fonctionnaire a réitéré son soutien à l’intégrité, au professionnalisme, à l’impartialité, à l’objectivité et à l’indépendance des travaux de l’OIAC. 

Mme Nakamitsu a indiqué que les résultats de la neuvième série d’inspections des installations de Barzah et Jamrayah, conduites par le Secrétariat technique de l’OIAC du 11 au 18 septembre 2022, seront publiés en temps voulu.  En ce qui concerne la détection d’un produit chimique du tableau 2 sur ces installations en novembre 2018, la Haute-Représentante a signalé que la Syrie n’a pas encore fourni suffisamment d’informations techniques ou d’explications permettant au Secrétariat technique de l’OIAC de clore ce dossier.  En ce qui concerne l’invitation adressée par le Directeur général de l’OIAC au Ministre des affaires étrangères et des expatriés de la République arabe syrienne pour un entretien en personne, le Secrétariat technique de l’OIAC attend toujours une réponse de la part des autorités syriennes.  L’Équipe d’enquête et d’identification poursuit ses enquêtes sur certains incidents en République arabe syrienne et publiera d’autres rapports en temps voulu, a-t-elle déclaré.  Rien ne justifie l’utilisation d’armes chimiques quels qu’en soient les auteurs, les lieux ou les circonstances, a-t-elle souligné, ajoutant que « nous devons rester unis et déterminés pour empêcher leur utilisation ou la menace de leur utilisation ».  Et ceux qui ont utilisé des armes chimiques doivent être identifiés et tenus pour responsables de leurs actes, a-t-elle conclu. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a déclaré que le « régime d’Assad » n’a aucune honte.  Plutôt que de se conformer à ses obligations et de rendre le monde plus sûr, ce « régime » a jeté de la poudre aux yeux du Conseil, selon le délégué.  Il a aussi accusé ce « régime » de continuer d’empêcher le déploiement de l’Équipe d’évaluation de l’OIAC, avec le soutien de la Fédération de Russie, en violation flagrante de ses obligations au titre de la résolution 2118 (2013).  Bien que cette équipe ait maintenant proposé de traiter les questions en suspens par correspondance, un tel examen ne peut remplacer un déploiement sur le terrain, a estimé le délégué, appelant ceux qui ont de l’influence sur le « régime d’Assad » à encourager Damas à autoriser immédiatement le retour de l’Équipe d’évaluation en Syrie. 

M. VADIM S. KIRPICHENKO (Fédération de Russie) s’est interrogé sur l’opportunité de tenir une séance à partir d’un document obsolète.  Il a estimé que le Directeur de l’OIAC a une approche politisée car son rapport contient des informations biaisées.  Il convient d’améliorer le calendrier de discussion sur la résolution 2118, a poursuivi le délégué, et tant que M. Arias, le Directeur de l’OIAC, refusera de s’exprimer devant le Conseil de sécurité, il sera inutile d’aborder le sujet des armes chimiques. 

M. TAINÃ LEITE NOVAES (Brésil) a constaté qu’une fois de plus, le Conseil se réunit pour constater que pas grand-chose n’a changé dans les relations entre l’OIAC et la République arabe syrienne, avant de demander une réflexion sur la nécessité de telles réunions, surtout en l’absence de tout rapport.  Faute d’une évolution de la situation en ce qui concerne le volet armes chimiques du dossier, il a réitéré la position du Brésil qui veut que ce type d’armes soient considérées comme illégales et interdites, leur utilisation devant faire l’objet d’une enquête transparente. 

M. NICOLAS DE RIVIERE (France) a rappelé qu’en 2013, le régime syrien avait assassiné plusieurs milliers de civils dans la banlieue de Damas avec des armes proscrites par le droit international.  « La réalité de cette attaque odieuse n’a été contestée par personne et ce Conseil a adopté à l’unanimité la résolution 2118 », a-t-il souligné.  Une fois encore, sa délégation déplore l’absence de progrès, alors que le régime continue de faire obstruction au travail de l’OIAC.  Après avoir essuyé six refus de la part du régime, le Secrétariat technique a dû renoncer à déployer sur le terrain l’Équipe d’évaluation de la déclaration initiale syrienne.  La Syrie, a poursuivi M. de Rivière, doit faire la lumière sur l’intégralité de ses stocks et se mettre en conformité avec ses obligations internationales si elle veut rétablir ses droits et privilèges.  Le représentant a donc exhorté ce pays à répondre par écrit aux questions sur sa déclaration initiale, et à la proposition d’ordre du jour faite pour le Secrétariat technique il y a près d’un an afin que puisse se tenir la réunion prévue à Beyrouth entre les deux parties.  La France suivra très attentivement les conclusions des deux prochains rapports de l’Équipe d’enquête et d’identification sur les attaques de Douma et Marea, a assuré le délégué, en balayant les campagnes de discrédit menées à son encontre.  

Mme CARMEN ROBLEDO LÓPEZ (Mexique) a de nouveau lancé un appel au Gouvernement syrien afin qu’il fournisse les informations demandées à l’OIAC et qu’il coopère pleinement et en toute bonne foi avec ses équipes.  La représentante a dit espérer que la réunion entre le Ministre des affaires étrangères et des expatriés de la Syrie et le Directeur général de l’OIAC pourrait avoir lieu le plus vite possible, étant donné que l’ordre du jour a été établi et les équipes mises en place des deux côtés.  La délégation a réitéré son soutien au Secrétariat de l’OIAC et à ses Équipes techniques qui, malgré de nombreuses limitations, continuent de réaliser leur travail de manière professionnelle, indépendante et impartiale. 

Mme CAÍT MORAN (Irlande) a aussi regretté l’absence de progrès et rejeté les prétextes avancés par la Syrie au sujet de l’OIAC.  Cela fait maintenant un an environ que le Conseil attend une réunion entre l’Équipe de l’OIAC et la délégation syrienne, s’est-elle impatientée, ajoutant que celle-ci ne joint pas l’acte à la parole.  D’autre part, les correspondances de la Syrie, adressées tant à l’OIAC qu’au Conseil, ne comportent aucune information concrète, a-t-elle encore noté.  Nous ne pouvons permettre à la Syrie d’aller à l’encontre des décisions de la communauté internationale et de renflouer simultanément ses stocks d’armes chimiques, a-t-elle déclaré. 

M. ANDRIS STASTOLI (Albanie) a dit constater que la situation n’a guère évolué depuis la dernière réunion du Conseil: aucun progrès dans les discussions entre l’OIAC et le Gouvernement syrien, pas plus que sur la prochaine inspection en Syrie non plus.  Or, rien ne permet de penser que le programme d’armes chimiques de la Syrie est en train d’être détruit, a dit le représentant, jugeant qu’il est clair que la Syrie n’est pas disposée à coopérer avec l’OIAC et ses équipes du Secrétariat technique, dont certains membres du personnel se voient refuser l’accès dans le pays, et ce, en dépit de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité, qui oblige la Syrie à accepter le personnel désigné en lui assurant un accès immédiat et sans entrave.  Pour autant, le délégué s’est félicité de la neuvième série d’inspections des installations de Barzah et Jamrayah menées du 11 au 18 septembre 2022 par le Secrétariat.  Il a aussi salué la mission d’établissement des faits pour ses activités en cours visant à déterminer si des armes chimiques ont été utilisées en Syrie, ainsi que l’Équipe d’enquête et d’identification pour ses activités en cours visant à identifier les auteurs d’armes chimiques.  La délégation attend avec impatience la publication de leurs rapports, a conclu le représentant. 

Mme MEENA ASIYA SYED (Norvège) a souligné que beaucoup d’obstacles restent à surmonter pour mettre pleinement en œuvre la résolution 2118 du Conseil de sécurité et que certaines questions requièrent une attention immédiate.  Il est vital que la Syrie réponde aux demandes d’informations de l’OIAC et coopère pleinement avec l’Organisation, a ajouté la représentante.  De même, il reste 20 questions en suspens par rapport à la déclaration initiale de la Syrie, a noté la déléguée de la Norvège, qui a assuré qu’elle continuerait d’exhorter la Syrie à fournir des informations et des explications techniques suffisantes pour clore ces questions. 

Mme SHAHD JAMAL YOUSUF IBRAHIM MATAR (Émirats arabes unis) a réitéré son rejet et sa condamnation de l’utilisation d’armes chimiques, quels que soient leurs auteurs, leurs lieux ou leurs circonstances.  Elle a insisté sur la promotion d’un dialogue entre l’OIAC et la Syrie autrement que sous forme écrite et dit attendre que se tienne la réunion prévue à cet effet.  Nous sommes tous responsables du temps et des ressources alloués par le Conseil de sécurité, et devrions à cet égard revoir le nombre de réunions que le Conseil tient sur le dossier des armes chimiques, a souligné la représentante.  Tout progrès sur ce dossier pourrait notamment contribuer à nous rapprocher de la fin du conflit syrien, a-t-elle estimé en conclusion. 

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) a déploré que la République arabe syrienne continue de refuser de coopérer avec l’OIAC.  Les 20 questions restées en suspens sont substantielles, a lancé le représentant, rappelant que huit attaques à l’arme chimique sont attribuées au « régime d’Assad ».  Ce dernier doit être tenu responsable de ses actes et le Conseil doit y veiller, sous peine d’adresser un message légitimant l’impunité quant à l’utilisation d’armes chimiques, a conclu l’orateur. 

M. XING JISHENG (Chine) a réitéré que la Chine s’oppose de manière systématique à l’emploi d’armes chimiques.  Il a demandé aux parties de faire des efforts pour que la vingt-cinquième série de consultations puisse avoir lieu et que les enquêtes soient basées sur des preuves fiables.  Le Conseil de sécurité devrait réduire la fréquence des réunions sur la question, a conclu le délégué. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a dit noter l’absence constante de progrès sur la question à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Tout au long de notre mandat actuel au Conseil, nous avons encouragé un engagement soutenu entre la Syrie et le Secrétariat technique de l’OIAC pour résoudre tous les problèmes en suspens, a-t-il dit.  L’Inde attache une grande importance à la Convention sur les armes chimiques et insiste sur sa mise en œuvre intégrale, efficace et non discriminatoire, a encore indiqué le représentant.  Il a rappelé qu’elle a toujours soutenu que toute enquête sur l’utilisation d’armes chimiques doit être impartiale, crédible et objective.  Nous avons à plusieurs reprises mis en garde contre la possibilité que des entités terroristes aient accès aux armes chimiques, y compris dans notre région, a-t-il souligné, avant de relever que toute allégation d’utilisation d’armes chimiques doit être traitée avec la plus grande attention. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), qui s’est exprimé au nom des A3 (Gabon, Kenya et Ghana), a dit prendre note et acte du cent-huitième rapport de l’OIAC et du cent-sixième rapport mensuel sur le programme d’armes chimiques syrien.  Il a également salué la conduite de la neuvième série d’inspections des installations de Barzah et Jamrayah, disant attendre avec impatience la publication de ses résultats.  Toutefois, les A3 restent préoccupés par l’absence de progrès significatifs dans les tentatives de régler pleinement la question conformément à la Convention sur les armes chimiques.  M. Biang a ensuite réitéré son ferme soutien à la résolution 2118 (2013) du Conseil, plaidant pour des efforts mondiaux concertés en vue d’accélérer la destruction vérifiable des armes chimiques syriennes.  Dans ce contexte, les A3 appellent les autorités syriennes à coopérer de manière constructive avec le Secrétariat technique de l’OIAC pour aider à faciliter la résolution définitive de toutes les questions en suspens, y compris l’organisation de la vingt-cinquième série de consultations, a conclu le représentant. 

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a déploré qu’une fois de plus, le Conseil se réunisse autour de la question des armes chimiques, réunion qui n’est qu’un nouveau prétexte pour certains pays désormais bien connus, avec à leur tête les États-Unis, de réitérer leurs accusations à l’encontre de la Syrie, menant à un gaspillage de temps et de ressources.  Il a mis l’accent sur la nécessité pour ces États de rendre des comptes pour les crimes commis contre le peuple syrien par les groupes terroristes qu’ils ont armés, y compris avec des armes chimiques, au sujet desquelles la Syrie a fourni des preuves, que l’OIAC n’a jamais cherché à vérifier.  En revanche, la coopération de la Syrie et de l’OIAC est de notoriété publique depuis l’adhésion de la première à l’Accord de 2013.  Preuve en est la destruction de son stock d’armes chimiques en un temps record, a argué le représentant.  Il a fustigé que son pays soit, depuis 2011, la cible d’accusations fallacieuses et infondées, ainsi que d’une campagne de destructions.  En réalité, ce qu’il conviendrait de faire selon lui, ce serait d’empêcher lesdits pays de commettre des crimes contre le peuple syrien.  Le représentant des États-Unis aurait mieux fait d’encourager son Gouvernement à honorer ses obligations au titre de la Convention des Nations Unies sur les armes chimiques, a-t-il poursuivi. 

Le représentant syrien s’est demandé par ailleurs comment l’Équipe d’évaluation de l’OIAC effectue ses enquêtes en aboutissant systématiquement à des conclusions qui desservent les intérêts de ceux qui les ont demandées.  Il a en conséquence mis en cause l’impartialité de ses membres, considérant que le Secrétariat devrait reconnaître la bonne foi de la Syrie qui, à l’inverse d’autres pays, n’a pas refusé l’accès à son territoire, sauf pour un seul expert.  L’insistance de certains pays à ignorer les éclaircissements fournis est douteuse, a insisté le délégué.  Il a réaffirmé son attachement à une réunion avec l’OIAC pour résoudre les questions en souffrance.  Le Secrétariat, a-t-il fait savoir, a d’ores et déjà entériné l’idée de tenir une réunion de haut niveau à Beyrouth.  L’Équipe a obtenu un mandat illégal, ce qui témoigne d’un déséquilibre dans l’application de la Convention et de ses dispositions, a-t-il encore déclaré.  La nomination de l’Équipe d’enquête et d’identification sans l’accord de la Syrie a octroyé à celle-ci un mandat non stipulé dans la Convention, a-t-il argué, avant de réitérer sa non-reconnaissance par la Syrie.  M. Sabbagh a aussi répété l’importance de l’interdiction d’armes chimiques mais que la Syrie ne cherchait qu’à garantir le professionnalisme et la crédibilité de l’OIAC, que l’on cherche à instrumentaliser à des fins pernicieuses pour occulter, en particulier, les activités de groupes terroristes sur le territoire syrien. 

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (Iran) a fermement condamné le recours aux armes chimiques et appelé à la mise en œuvre pleine, effective et sans discrimination de la Convention sur les armes chimiques.  Politiser l’application de cet instrument et instrumentaliser l’OIAC mettent en danger la légitimité à la fois de cette organisation et de la Convention, a mis en garde le délégué.  L’OIAC doit être en mesure de s’acquitter de ses responsabilités de manière impartiale, professionnelle et objective, a-t-il souligné.  Le représentant a ensuite prié l’OIAC et la République arabe syrienne de garder contact, souhaitant que la réunion entre le Ministre des affaires étrangères syrien et le Directeur général de l’OIAC permette aux parties de régler les questions en suspens.  M. Jalil Iravani s’est par ailleurs félicité de la présentation du cent-septième rapport mensuel de la Syrie au Directeur de l’OIAC.  Estimant que Damas s’acquitte de ses obligations au titre de la Convention et qu’elle coopère de manière constructive avec l’OIAC, le représentant a dénoncé un traitement politique du dossier qui relève selon lui du deux poids, deux mesures.  Consacrer une séance mensuelle du Conseil de sécurité à la répétition des mêmes positions et à des allégations infondées contre le Gouvernement syrien n’est guère efficace, a-t-il estimé en conclusion. 

M. MEMET MEVLÜT YAKUT (Türkiye) a appelé le « régime syrien » à coopérer pleinement avec l’OIAC.  Il a cité des enquêtes indépendantes qui ont déterminé que le « régime d’Assad » a utilisé des armes chimiques contre sa propre population.  Nous avons la responsabilité collective de garantir la reddition des comptes quant à l’utilisation des armes chimiques en Syrie, a-t—il dit.  Selon le délégué, lutter contre l’impunité est essentielle pour honorer la mémoire des centaines de gens qui sont morts du fait de l’utilisation des armes chimiques en Syrie. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Cinquième Commission recommande des crédits supplémentaires de 131 millions de dollars pour la Mission de l’ONU en Afghanistan (MANUA)

Soixante-dix-septième session,
9e séance plénière - après-midi
AG/AB/4397

La Cinquième Commission recommande des crédits supplémentaires de 131 millions de dollars pour la Mission de l’ONU en Afghanistan (MANUA)

Aujourd’hui, la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a suivi son Comité consultatif (CCQAB) et recommandé à l’unanimité à l’Assemblée générale d’ouvrir, pour cette année, des crédits supplémentaires d’un montant exact de 131 345 300 dollars pour la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), dont le mandat s’achève le 17 mars 2023.*   

Dans son rapport sur les prévisions de dépenses révisées pour 2022, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) avait déjà recommandé de soustraire la somme de 2 264 500 dollars à l’enveloppe de 133 609 900 dollars demandée par le Secrétaire général pour la MANUA qui, dans son dernier rapport, insiste, désormais en vain, sur le même montant.  La Cinquième Commission s’est en effet tenue à la première recommandation de son Comité consultatif, et ceci, après que le 14 octobre dernier, ses délégations ont analysé l’enveloppe totale de 767 millions de dollars pour les 38 missions politiques spéciales en 2023. 

Ces délégations n’ont alors pas caché leur inquiétude face à une somme qui représenterait 23% du budget ordinaire.  La Chine a même pris l’exemple d’Haïti pour montrer qu’aussi importants soient-ils, les montants demandés ne produisent pas les résultats escomptés.  Elle a aussi insisté sur la nécessité de faire correspondre l’enveloppe préconisée pour la MANUA aux besoins réels. 

C’est ce qu’a semblé faire le CCQAB qui, invoquant les faibles dépenses engagées en 2021 et au cours des six premiers mois de 2022, a recommandé des coupes au titre des consultants, des voyages officiels, des installations et infrastructures ou encore des fournitures, services et matériel divers. 

La Cinquième Commission tiendra sa prochaine séance publique le mercredi 2 novembre à partir de 10 heures, pour examiner les conditions d’emploi et de rémunération des membres de la Cour internationale de Justice, et du Président et des juges du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux.  

A/C.5/77/L.4   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: L’accès humanitaire transfrontière, le choléra et le blocage autour de la Commission constitutionnelle au cœur de l’examen de la situation en Syrie

9163e séance – matin
CS/15076

Conseil de sécurité: L’accès humanitaire transfrontière, le choléra et le blocage autour de la Commission constitutionnelle au cœur de l’examen de la situation en Syrie

Les membres du Conseil de sécurité n’ont pu que constater, ce matin, à l’instar de l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen, l’impasse qui paralyse les travaux de la Commission constitutionnelle et l’ampleur des besoins humanitaires à l’approche de l’hiver dans un contexte marqué par la propagation du choléra et la recrudescence des activités de groupes terroristes. 

S’agissant de la reprise potentielle des travaux de la Commission constitutionnelle, l’Envoyé spécial pour la Syrie a rappelé que les représentants du Gouvernement syrien avait décidé de ne pas se rendre à Genève en attendant une solution relative aux questions soulevées par la Fédération de Russie au sujet du lieu des discussions. 

La délégation russe a en effet estimé que l’adhésion de la Suisse aux sanctions antirusses et antisyriennes n’en fait plus une « plateforme neutre », demandant qu’un site alternatif soit choisi ou que la Suisse fournisse des garanties appropriées aux délégués qui prendraient part aux négociations. 

C’est précisément l’intransigeance de la Russie et du « régime syrien » qui entrave le processus étape par étape de l’Envoyé spécial, a répliqué le Royaume-Uni, qui, comme d’autres membres du Conseil, a exhorté à une dépolitisation de la Commission constitutionnelle.  Pour la France, qui a demandé à la Russie de cesser de prendre ce processus en otage, les travaux de la Commission constitutionnelle doivent reprendre à Genève, comme agréé par les parties syriennes dans les termes de référence. 

M. Geir Pedersen a cependant prévenu que même si les sessions de la Commission constitutionnelle devaient reprendre à Genève, cela ne suffirait pas à rétablir la crédibilité de la Commission aux yeux de la plupart des Syriens et des acteurs internationaux.  Aussi cherche-t-il donc à travailler avec les parties et les coprésidents afin que la reprise des réunions soit marquée par la volonté politique de s’engager dans un esprit de compromis.  Il a aussi insisté sur la nécessité de parvenir à un règlement politique négocié, qui permettrait au peuple syrien de prendre les rênes de son destin aboutissant à la tenue d’élections libres et justes.

Dans le cadre des mesures de rétablissement de la confiance, la question des personnes portées disparues ou détenues arbitrairement a été soulevée à plusieurs reprises ce matin, la Norvège appelant notamment à l’application de l’amnistie par les autorités syriennes.  L’Envoyé spécial a cependant indiqué que des cas de détention arbitraires continuent d’être signalés et qu’aucune évolution n’a été constaté six mois après le décret présidentiel d’amnistie, déplorant l’absence d’information officielle et de suivi indépendant ainsi que le manque de transparence. 

Il a également exhorté toutes les parties prenantes à appuyer les mesures de renforcement de la confiance étape par étape pour progresser dans la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Cette confiance doit faire fond sur des mesures concrètes qui répondent aux préoccupations du peuple syrien.  Pour atteindre cet objectif, les mesures initiales doivent être précises, réciproques, vérifiables et mises en œuvre en parallèle, a-t-il détaillé. 

De son côté, la Directrice de la Division des opérations et de la communication du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a insisté sur l’importance de maintenir l’accès humanitaire transfrontière et d’augmenter l’accès par-delà les lignes de front.  Faute de renouvellement de l’accès transfrontière, en plein hiver et en pleine riposte contre le choléra, des millions de personnes risquent d’être coupées de l’accès dans le nord-ouest de la Syrie lorsqu’elles en ont le plus besoin, a averti Mme Reena Ghelani qui a indiqué que le nombre de personnes nécessitant une aide en matière d’hivérisation a augmenté de 30% en un an. 

Alors que la pandémie de choléra se propage dans le pays, elle a également jugé le moment venu pour les donateurs de convertir leurs promesses de dons en déboursements de fonds, attirant l’attention sur les répercussions des problèmes d’approvisionnement en eau.  Les récoltes étant au plus bas, et l’insécurité alimentaire, incontrôlable, les Syriens ne peuvent se permettre d’acheter que 15% de la nourriture qu’ils pouvaient se procurer il y a trois ans, a-t-elle signalé. 

Le mécanisme d’aide transfrontalière reste une bouée de sauvetage, a affirmé l’Irlande qui, au nom de la Norvège, les deux pays étant porte-plume du dossier humanitaire syrien, a également salué l’achèvement de la huitième livraison par-delà les lignes de front.  Dans le même esprit, le Mexique a mis l’accent sur l’urgence d’un renouvellement de l’autorisation de l’aide transfrontière dans le nord-ouest de la Syrie via le point de passage de Bab el-Haoua.  Une position également partagée par l’Albanie, le Gabon au nom des A3, ainsi que le Brésil qui a toutefois souligné que sans un cessez-le-feu, la durabilité des projets de relèvement rapide restera insaisissable. 

La pénurie d’eau potable a vivement interpellé les Émirats arabes unis, inquiets de la situation à cet égard dans les camps surpeuplés de personnes déplacées.  De son côté, la République arabe syrienne a alerté que si la communauté internationale ne condamne pas et n’arrête pas le détournement des sources hydriques, la population en pâtira, affirmant que l’eau est utilisée comme arme contre les civils.  Elle a également dénoncé les dommages résultant des « sanctions inhumaines » imposées par les États-Unis et la Türkiye.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/775)

Déclarations

M. GEIR PEDERSEN, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, évoquant le vingt-deuxième anniversaire de la résolution 1325 (2000), a déclaré que pendant près de 12 ans maintenant, « il n’y a aucune indignité » que les femmes et filles syriennes n’ont pas subie: pauvreté et malnutrition; détention; disparition et enlèvement; agressions sexuelles et viols; mariages forcés et précoces; violences en tout genre en portant des enfants et déni d’éducation et de moyens de subsistance, a-t-il débité.  Les militantes de la société civile sont trop souvent les cibles de violences lorsqu’elles s’engagent dans la vie publique, a dénoncé M. Pedersen, ajoutant que les dirigeantes pour les droits civils et politiques luttent quant à elles pour obtenir leur siège à la table des négociations.  Il a ensuite informé que lui et son adjointe, Mme Rochdi, continuaient à mettre sur pied des plateformes comme le Conseil consultatif des femmes syriennes et l’Espace d’appui à la société civile aux fins de garantir l’accès politique des femmes.  Ils continuent également de plaider en faveur d’un quota de 30% au moins au sein des organes politiques syriens. 

Hélas, le processus politique n’a pas donné les résultats escomptés et, alors que le conflit se poursuit, les civils continuent de payer un lourd tribut du fait de la violence, a poursuivi l’Envoyé spécial.  Il a rappelé qu’après les affrontements entre les groupes d’opposition armés ces dernières semaines, le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham a déployé des combattants à Afrin et jusqu’aux abords d’Azaz.  Ailleurs, le groupe terroriste Daech demeure une menace sérieuse, une des principales caches d’armes depuis la chute du califat ayant été récemment découverte dans le nord-est de la Syrie, ce qui démontre sa capacité de mener des attaques.  D’autre part, des frappes aériennes progouvernementales ont été alléguées dans le nord-ouest de la Syrie, notamment à Edleb et dans les environs d’Azaz.  Dans le nord-est, les violences se poursuivent, avec des allégations fréquentes d’attaques de drones, de tirs d’obus et des confrontations entre les Forces démocratiques syriennes, d’une part, et la Türkiye et les groupes armés de l’opposition, de l’autre.  Des frappes ont également été signalées à proximité des forces américaines à Deïr el-Zor, tandis que le sud-ouest est le théâtre d’une série d’incidents, en particulier des embuscades, assassinats et attaques avec des engins explosifs improvisés.  L’Envoyé spécial a aussi fait état de frappes aériennes imputées à Israël, ayant touché, une fois de plus, les aéroports internationaux de Damas et d’Alep.  M. Pedersen a appelé toutes les parties à protéger les civils et les infrastructures civiles et à œuvrer pour une réconciliation nationale.  Les parties sont aussi appelées à trouver des moyens de coopérer pour contrer les groupes terroristes figurant sur la liste du Conseil de sécurité d’une manière qui respecte le droit international humanitaire et préserve la stabilité, la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il ajouté. 

Abordant le volet économique, l’Envoyé spécial a indiqué que la livre syrienne a perdu encore de sa valeur au cours des dernières semaines et que le prix des denrées alimentaires et du carburant a augmenté, ce qui laisse présager une crise économique et alimentaire cet hiver.  Il a appelé à un accès humanitaire transfrontière et par-delà les lignes de front, insistant en outre sur l’importance de trouver une solution au problème de l’approvisionnement en eau.  M. Pedersen a ensuite indiqué que des cas de détention arbitraires continuent d’être signalés et qu’aucune évolution n’a été constaté six mois après le décret présidentiel d’amnistie, déplorant l’absence d’information officielle et de suivi indépendant ainsi que le manque de transparence.  Il a exhorté toutes les parties prenantes à appuyer des mesures de renforcement de la confiance étape par étape pour progresser dans la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Cette confiance doit faire fond sur des mesures concrètes qui répondent aux préoccupations du peuple syrien.  Pour atteindre cet objectif, les mesures initiales doivent être précises, réciproques, vérifiables et mises en œuvre en parallèle, a-t-il détaillé.

S’agissant de la reprise potentielle des travaux de la Commission constitutionnelle, il a rappelé que les représentants du Gouvernement syrien avaient décidé de ne pas se rendre à Genève en attendant une solution relative aux questions soulevées par la Russie au sujet du lieu des discussions.  Il a cependant prévenu que même si les sessions devaient reprendre à Genève, cela ne suffirait pas à rétablir la crédibilité de la Commission aux yeux de la plupart des Syriens et des acteurs internationaux.  Il a expliqué qu’il cherche donc à travailler avec les parties et les coprésidents afin que la reprise des réunions soit marquée par la volonté politique de s’engager dans un esprit de compromis.  Il a aussi évoqué la nécessité d’un règlement politique négocié, qui permettrait au peuple syrien de prendre les rênes de son destin aboutissant à la tenue d’élections libres et justes, en demandant au Conseil de soutenir ses efforts avec les parties. 

Mme REENA GHELANI, Directrice de la Division des opérations et de la communication du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), qui s’exprimait au nom du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaire et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré qu’en Syrie, les communautés sont prises dans l’étau des crises vertigineuses économiques, de santé publique et de la sécurité tandis que le conflit fait encore des morts et des blessés parmi les civils, sur les lignes de front plus particulièrement.  Ainsi, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, 92 civils au moins ont été tués et 80 autres blessés en août et septembre.  Parmi eux, 27 ont été tués par des restes d’engins explosifs de guerre; a-t-elle précisé, ajoutant que la Syrie affiche le nombre le plus élevé au monde de victimes d’engins explosifs, et que deux sur trois sont des enfants.  Par ailleurs, des opérations sécuritaires ont endommagés les refuges dans le camp de Hol et restreint temporairement l’accès aux services et à l’assistance humanitaire.  Beaucoup d’enfants ont été détenus et les partenaires humanitaires n’ont toujours pas accès à ces mineurs, s’est-elle inquiétée.   

Mme Ghelani a signalé, d’autre part, que l’épidémie du choléra se propageait rapidement dans toute la Syrie, une situation aggravée par la pénurie en eau.  Ainsi, plus de 20 000 cas suspectés de choléra ont été rapportés dans les 14 provinces et 75 personnes sont mortes des suites de la maladie.  « C’est une tragédie mais pas une surprise », a commenté Mme Ghelani, notant que des millions de Syriens n’ont pas accès à une eau saine et à suffisance, et que le système sanitaire a été dévasté par plus de 10 années de conflit, situation à laquelle s’ajoute une faible pluviosité.  À titre d’exemple, elle a expliqué qu’entre le 11 août et le 20 octobre, la station d’eau d’Alouk n’a pas pu approvisionner près d’un million de personnes dans la ville de Hassaké et les camps avoisinants; et qu’il en était de même à Bab où quelque 185 000 personnes sont en proie à des graves pénuries d’eau.  Depuis un an déjà, les Nations Unies et leurs partenaires n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme sur cette crise dans le nord de la Syrie, a rappelé l’oratrice qui a prévenu que cette crise risque d’empirer, les prévisions faisant état de précipitations en deçà de la normale. 

Elle a ensuite indiqué que le plan de trois mois de riposte au choléra, coordonné par l’ONU, requiert 34,4 millions de dollars pour permettre à 162 000 personnes d’accéder aux services de santé et fournir des services d’assainissement, de l’eau et une assistance hygiénique à cinq millions de personnes.  Le moment est venu, a-t-elle dit, pour que les donateurs convertissent leurs promesses pour la réponse au choléra par des avances de déboursements de fonds.  Mme Ghelani a également fait savoir que les récoltes sont au plus bas, et que l’insécurité alimentaire devient incontrôlable, les Syriens ne pouvant se permettre d’acheter que 15% de la nourriture qu’ils pouvaient se procurer il y a trois ans.  Par ailleurs, le nombre personnes nécessitant une aide en matière d’hivérisation a augmenté de 30% en un an.  Elle a exhorté à maintenir l’accès humanitaire transfrontière et à augmenter l’accès par-delà les lignes de front.  Faute de renouvellement de l’accès transfrontière, en plein hiver et en pleine riposte contre le choléra, des millions de personnes risquent d’être coupées de l’accès dans le nord-ouest de la Syrie lorsque qu’elles en ont le plus besoin, a-t-elle averti.  . 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a indiqué que les réunions de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle sont suspendues car Genève a perdu son statut de plateforme « véritablement neutre » depuis l’adhésion de la Suisse aux sanctions antirusses et antisyriennes.  Nous espérons que ce problème sera surmonté soit en choisissant un site alternatif, soit lorsque la Suisse aura fourni des garanties appropriées aux délégués qui arrivent pour ces négociations, a-t-il déclaré. 

Le représentant a ensuite qualifié la situation en Syrie de préoccupante, notamment en raison de l’effet déstabilisateur de la situation dans le nord du pays.  Le « patronage » des pays occidentaux envers les terroristes de Hay’at Tahrir el-Cham fait qu’ils ont récemment tenté d’étendre leur zone de contrôle au-delà d’Edleb.  Par ailleurs, les encouragements de Washington pour un séparatisme kurde, tout comme la poursuite de sa présence illégale dans les zones de l’Euphrate et de Tanf restent de vrais problèmes, a-t-il constaté. 

Un autre facteur de déstabilisation en Syrie sont les attaques aériennes israéliennes et les violations systématiques de son espace aérien, a poursuivi le représentant qui a signalé que les Syriens ont, à plusieurs reprises, interpellé le Secrétaire général et le Conseil de sécurité sur ces nombreuses violations de la Charte et des normes du droit international humanitaire.  Il est inacceptable que ces lettres restent sans réponses appropriées, d’autant que sur d’autres sujets, le Secrétaire général exprime ses appréciations beaucoup plus activement, parfois sans même attendre la position des pays membres de l’ONU, a tancé le représentant. 

Abordant la question humanitaire, le représentant a salué l’envoi d’un autre convoi humanitaire à Sarmada à travers les lignes de front.  Mais, soyons francs, a-t-il dit: ce n’est que le huitième convoi, et nous ne voyons pas beaucoup de zèle pour augmenter l’approvisionnement humanitaire.  Cette situation semble particulièrement cynique compte tenu du fait que Damas délivre régulièrement les permis nécessaires et que ceux qui prétendent que les conditions de sécurité sont insuffisantes dans la région recherchent activement et ostensiblement un accès transfrontalier alors que l’intensité des hostilités rend de telles opérations beaucoup plus risquées, a constaté le délégué. 

Il s’est aussi inquiété de la dégradation de la situation socioéconomique et humanitaire en Syrie, principalement dans les territoires gouvernementaux, où vit 67% de la population.  La raison principale n’est en aucun cas les actions des autorités syriennes, mais les conséquences des sanctions américaines et européennes, combinées à de nouveaux défis, notamment la pandémie, la crise alimentaire et un nombre croissant de cas de choléra.  Alors que le plan humanitaire n’est financé qu’à 25%, les donateurs occidentaux, États-Unis en tête, ne font que déclarer leurs généreuses contributions, mais en réalité ils sont occupés à piller les ressources naturelles syriennes, a-t-il accusé.  Citant les estimations du Ministère du pétrole et des ressources naturelles de la Syrie, le représentant russe a affirmé que les pertes du secteur énergétique du pays se sont élevées à plus de 107 milliards de dollars en raison des activités de la société américaine Delta Crescent Energy et des répercussions de la loi César. 

Après avoir cité les nombreuses opérations humanitaires de terrain menées par la Fédération de Russie en coopération avec la Syrie, le délégué a dit attacher une grande importance à l’examen régulier des activités humanitaires internationales en Syrie dans le cadre d’un dialogue interactif informel visant à mettre en œuvre de la résolution 2642 (2022).  Cela est important, non seulement pour prendre une décision consciente et éclairée de prolonger le point de passage de Bab el-Haoua en janvier 2023, mais aussi pour créer les conditions de base nécessaires pour le retour des réfugiés syriens.  Or, les « partenaires occidentaux » ne sont pas intéressés par une solution fondamentale au problème, tout comme ils n’offrent aucune alternative pour ramener les gens à une vie normale, a-t-il déploré. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a déclaré que l’épidémie de choléra en Syrie montre que la situation humanitaire ne cesse de se dégrader.  Il a indiqué que son gouvernement appuie la réhabilitation des systèmes hydriques afin de juguler l’épidémie, soulignant ensuite que le mécanisme d’aide transfrontière est le seul moyen d’acheminer une aide aux populations.  La décision de la Russie de bloquer cette opération a des conséquences sur le terrain, a-t-il déploré.  Il a exhorté à accorder la priorité aux besoins du peuple syrien et non aux calculs politiques, plaidant en outre pour le nouvellement du mécanisme en janvier prochain.

En plus des efforts humanitaires, il faut œuvrer à une solution politique, a poursuivi le délégué.  Il a appelé le régime Assad à fournir des informations sur le sort des 130 000 Syriens disparus ou emprisonnés et a engagé les belligérants à libérer tous ceux qui sont injustement détenus.  Il a recommandé la création d’une entité humanitaire spéciale pour la question des disparus en Syrie, notant que de nombreux acteurs œuvrent déjà en ce sens, mais qu’aucun d’eux n’a de mandat précis sur la question.  Il faut faire le nécessaire pour répondre aux attentes des familles et des victimes, a-t-il insisté. 

Réagissant au discours de la Fédération de Russie, le représentant a indiqué que les États-Unis sont présents sur le terrain avec l’objectif de vaincre Daech et Al-Qaida.  Le pays travaille à ce but avec l’aide des Forces démocratiques syriennes et d’autres forces locales.  Les États-Unis ne possèdent et ne gèrent aucune ressource pétrolière en Syrie et n’entendent pas le faire, a-t-il souligné.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande), s’exprimant au nom de la Norvège et de son pays, en tant que co-porte-plume du dossier humanitaire syrien, a salué les efforts de l’ONU et de ses partenaires pour répondre à l’épidémie de choléra qui se propage et qui fait ressortir les difficultés posées par les graves pénuries d’eau dans toute la Syrie.  Il a reconnu que les besoins humanitaires n’ont jamais été aussi élevés, alors que l’hiver se rapproche et que six millions de personnes, soit 30% de plus que l’année dernière, ont besoin d’une assistance.  Dans ce contexte, il a appuyé l’utilisation de toutes les modalités pour atteindre les nombreux Syriens dans le besoin à travers le pays.  Il a salué l’achèvement de la huitième livraison par-delà les lignes de front tout en soulignant que l’opération transfrontalière reste une bouée de sauvetage absolument essentielle, à laquelle il n’existe actuellement aucun substitut. 

S’exprimant en sa capacité nationale, le représentant irlandais a déclaré que seule une solution politique peut apporter la stabilité et la sécurité nécessaires au peuple syrien.  Il a dit appuyer les efforts de l’Envoyé spécial pour résoudre les problèmes qui empêchent la tenue d’une neuvième session de la Commission constitutionnelle à Genève.  Il a appelé à un engagement total et significatif de Damas et souligné que ladite commission devrait se réunir à Genève. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a souligné l’importance de sortir de l’impasse qui paralyse les travaux de la Commission constitutionnelle, seule plateforme au sein de laquelle les Syriens peuvent s’engager de manière constructive dans un dialogue national dirigé et contrôlé par les Syriens, sans ingérence étrangère.  Elle a conseillé d’établir un calendrier clair et un plan convenu pour les prochaines étapes, avant de réitérer son rejet des interventions étrangères dans les affaires syriennes. 

Préoccupée par la détérioration de la situation humanitaire, la représentante s’est inquiétée de la situation dans les camps surpeuplés de personnes déplacées, qui souffrent particulièrement du manque d’eau potable.  Elle a souligné l’importance de fournir les conditions de sécurité appropriées pour permettre le passage des convois humanitaires vers leurs destinations prévues et s’est félicitée du passage récent des septième et huitième convois dans le nord-ouest de la Syrie. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a appelé les parties à observer un cessez-le-feu national pour mettre fin aux souffrances de la population civile et créer un espace pour la reprise du processus politique.  Il a dit espérer que la neuvième réunion de la Commission constitutionnelle pourra se tenir avant la fin de l’année.  Il a exhorté les autorités syriennes à prendre des mesures concrètes pour appuyer la réconciliation nationale, notamment en clarifiant le sort des personnes disparues et en assurant l’accès sans entrave des agences humanitaires dans les centres de détention.  Il a déploré le fait que l’insécurité dans le camp de Hol a contraint certaines organisations humanitaires à suspendre temporairement les services d’éducation et de santé.  De même, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est nécessaire pour lutter contre des épidémies comme celle du choléra en cours en ce moment.  Il a enfin souligné l’urgence de renouveler l’autorisation de l’aide transfrontière dans le nord-ouest de la Syrie, notamment via le point de passage de Bab el-Haoua. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a jugé urgent de mettre en œuvre des mesures de rétablissement de la confiance pour faire avancer le processus politique, citant notamment la question des personnes portées disparues ou détenues arbitrairement.  Elle a noté que des progrès ont été réalisés depuis l’annonce d’une amnistie par les autorités syriennes, et a appelé à renforcer les efforts pour assurer sa mise en œuvre.  S’agissant de la Commission constitutionnelle, elle a exhorté les parties à revenir à la table des négociations.  La représentante s’est ensuite inquiétée du regain de violence dans le nord de la Syrie et a appelé à établir un cessez-le-feu national.  Elle a également salué les contributions du Conseil consultatif des femmes au processus politique.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) s’est inquiété du fait que plus de la moitié de la population syrienne a besoin d’une assistance vitale et qu’aucune solution politique ne se profile à l’horizon.  Aussi s’est-il félicité de l’augmentation des activités de relèvement rapide et que 151 des 350 projets ont contribué à la fourniture d’électricité pour soutenir les services de base et l’approvisionnement domestique.  Mais sans cessez-le-feu, la durabilité des projets de relèvement rapide restera insaisissable, a-t-il constaté. 

Le représentant a souligné que les opérations transfrontalières restent le pilier de l’aide humanitaire en cours en Syrie et a estimé que le prochain dialogue informel d’avoir des discussions plus transparentes sur les défis, y compris l’impact humanitaire des sanctions.  Il a ensuite appelé à la levée des sanctions susceptibles d’entraver l’accès aux fournitures médicales et alimentaires essentielles à la population syrienne. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a accusé le régime et ses alliés de jouer la carte cynique du pourrissement.  Elle a réitéré l’appel de la France à un cessez-le-feu national.  Les travaux de la Commission constitutionnelle doivent reprendre à Genève, comme agréé par les parties syriennes dans les termes de référence, a-t-elle dit, appelant la Fédération de Russie à cesser de prendre ce processus en otage.  C’est un leurre de croire que la force peut être un plan de paix.  Seules les conditions définies par la résolution 2254 (2015), adoptée à l’unanimité, permettront d’ouvrir la voie à une paix durable fondée sur un processus politique tangible, a-t-elle souligné. 

La représentante a jugé essentiel que le mécanisme transfrontalier puisse être renouvelé pour au moins 12 mois, arguant que l’incertitude qui pèse sur les acteurs humanitaires entrave leurs actions pour sauver des vies.  Elle a relevé que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), seul 1,7% des réfugiés de la région souhaitent rentrer en Syrie, faute de protection suffisante de leurs droits et de leur intégrité et ce en dépit des difficultés socioéconomiques qu’ils rencontrent dans leur pays d’accueil.  En maintenant les obstacles au retour, a-t-elle expliqué, le régime procède au tri de ses ressortissants, poursuivant ainsi sa politique d’ingénierie démographique soigneusement mise à l’œuvre depuis le début du conflit.  Enfin, en l’absence de tout progrès sur le processus politique en Syrie, les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions, la normalisation et la reconstruction demeureront inchangées, a indiqué la déléguée. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté que peu de choses ont changé depuis la dernière réunion du Conseil, en imputant cette brutalité et la déshumanisation des Syriens à un seul responsable.  Il ne reste pas grand-chose à fêter en Syrie a-t-il ajouté après avoir mentionné le vingt-deuxième anniversaire de la résolution 1325 (2000) du Conseil.  Saluant le courage des femmes, il a décrit leur rôle incontournable durant ce conflit et les souffrances indicibles subies, s’inquiétant ensuite que le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham étend ses attaques.  Il a jugé que le mécanisme transfrontière est absolument indispensable.  Cette question est d’ordre purement humanitaire et ne doit pas être objet de chantage, a-t-il souligné.  L’orateur a ensuite exprimé son scepticisme quant à la libération des détenus.  Il a par ailleurs attribué l’absence de reprise du processus politique au seul Gouvernement syrien, qui a recours à maints prétextes et fait montre de mauvaise foi.  Il a insisté sur la nécessité de sortir de cette impasse. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a déploré que l’intransigeance de la Russie et du régime syrien entrave le processus étape par étape de l’Envoyé spécial et les a exhortés à dépolitiser la Commission constitutionnelle.  Il a dit être consterné par la situation des droits humains en Syrie, évoquant notamment la prison Sednaya où des détenus sont torturés et tués au quotidien, et a appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015).  Le représentant s’est par ailleurs inquiété de la propagation du choléra dans un contexte humanitaire « horrifiant » et exigé une réponse soutenue de la part de la communauté humanitaire.

M. GENG SHUANG (Chine) a estimé que le processus politique doit être mené et dirigé par les Syriens.  Il a aussi appelé à lutter contre le terrorisme qui s’étend dans le nord-ouest de la Syrie, avant de demander des efforts sur le plan humanitaire.  Il a de ce fait exhorté l’ONU et la communauté internationale à accélérer la mise en œuvre des projets de relèvement rapide.  Le représentant a également souligné que l’assistance transfrontière a toujours eu une vocation provisoire et devrait être remplacée progressivement. 

Le délégué a ensuite plaidé pour le soutien du système de santé de la Syrie en ces temps de propagation du choléra, constatant en outre que les sanctions ont provoqué une nette détérioration de la situation humanitaire en Syrie.  Il a aussi estimé que l’ingérence étrangère en Syrie est la principale cause d’insécurité.  Il a noté qu’au fil des ans, certains pays ont mené des opérations militaires en Syrie sans l’aval du Gouvernement, évoquant le cas de la Türkiye qui a mené quatre opérations militaires en Syrie et entend le faire de nouveau.  Il a appelé à respecter l’intégrité territoriale de la Syrie. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est préoccupé de la persistance de l’impasse politique en Syrie, trois ans après la création de la Commission constitutionnelle.  Il a estimé que les voisins arabes de la Syrie ont un rôle important à jouer pour progresser sur la voie politique, évoquant la tenue prochaine, à Alger, de la réunion de la Ligue des États arabes.  Il a également souligné que la lutte contre le terrorisme ne doit pas être compromise par des intérêts politiques étroits, appelant ensuite à l’établissement d’un cessez-le-feu national.  Le représentant a aussi appelé à ne pas faire de l’aide humanitaire une question d’opportunisme politique.  Associer l’aide humanitaire et le développement aux progrès du processus politique ne fera qu’exacerber les souffrances humanitaires, a-t-il averti, appelant à mettre l’accent sur les projets de relèvement précoce et les opérations par-delà les lignes de front.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a demandé aux parties de créer un environnement sûr et d’accorder un accès humanitaire sans entrave, notant que le coût humain du conflit en Syrie est stupéfiant et que le pays reste l’une des urgences humanitaires les plus complexes au monde avec plus de la moitié de la population ayant besoin d’une aide vitale.  À cet égard, il a estimé que l’opération transfrontalière massive soutenue par les Nations Unies reste un élément indispensable pour atteindre de nombreuses personnes dans le besoin et qu’il n’existe actuellement aucun substitut en termes d’ampleur.  Il a donc dit être favorable à la prolongation du mandat du mécanisme transfrontalier qui doit expirer en janvier 2023. 

Le représentant s’est aussi félicité des récentes livraisons d’aide alimentaire par-delà les lignes de front.  Il a cependant dit être particulièrement préoccupé par les faibles niveaux de financement de la réponse humanitaire en Syrie, en particulier à l’approche de la saison hivernale où les besoins ont tendance à augmenter.  Il a appelé à une plus grande solidarité de la part de la communauté internationale et à un financement humanitaire accru, y compris pour les programmes de relèvement rapide et de moyens de subsistance. 

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a appelé au respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de son pays.  Il a rejeté l’annonce, le 12 octobre par la Maison Blanche, du renouvellement de ce qu’elle a qualifié d’état d’urgence nationale concernant la situation en Syrie, de même que la déclaration de la Türkiye du 13 octobre.  Il a jugé ces déclarations inacceptables, surtout de la part d’États présents illégalement sur son territoire. 

Il a évoqué la tenue, le 18 septembre dernier, des élections municipales et locales, avec quelque 59 000 candidats briguant 1 886 sièges et marquées par un large taux de participation.  Il a également cité toute une série de décrets présidentiels visant à appuyer la réconciliation nationale et la stabilité sociale, ce qui a abouti, entre autres, au retour de nombreux syriens qui ont pu reprendre une vie normale.  La Syrie a aussi répondu à tous les efforts en vue d’une solution politique, la dernière en date ayant été le Sommet de Téhéran, a-t-il ajouté.  Il a ensuite appelé au retrait des troupes étrangères du nord-est et nord-ouest de la Syrie, notamment celles des États-Unis et de la Türkiye, avant de faire savoir que le Gouvernement syrien a poursuivi ses contacts avec l’Envoyé spécial, y compris à l’occasion de sa visite récente dans le pays. 

Sur le plan humanitaire, le représentant a appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 2642 (2022), dénonçant le recours, par les pays occidentaux, aux mesures coercitives unilatérales, ainsi que l’imposition de formats, et usent de manœuvres inacceptables pour faire pression sur le Gouvernement syrien.  Il a évoqué les dommages résultant des « sanctions inhumaines » imposées par les États-Unis et la Türkiye, dénonçant ensuite la mainmise des États-Unis sur le pétrole et les céréales syriennes, notant que les principales bases américaines se trouvent dans le chantier pétrolier Omar.  Il a également alerté que si la communauté internationale ne condamne pas et n’arrête pas les pratiques relatives au détournement des sources hydriques, la population en pâtira puisque l’eau est utilisée comme arme contre les civils.  Le délégué a ensuite indiqué que le Gouvernement syrien fait d’immenses efforts pour endiguer la propagation du choléra en dispensant une formation sur les moyens de le détecter et de le prévenir.  Il coopère également avec les institutions spécialisées de l’ONU et facilite leur visite sur le terrain.  Cependant, tous les efforts ont échoué en raison d’obstacles posés par les pays occidentaux, a-t-il déploré. 

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (Iran) a appelé à la fin de l’agression étrangère et de l’occupation de la Syrie, et la levée des sanctions cruelles et illégales imposées au peuple syrien.  Il a mis l’accent sur le déploiement de projets de relèvement rapide essentiels pour les populations, notamment dans les secteurs de l’électricité, de l’eau, de l’assainissement, de la santé, de l’éducation et du logement.  Le délégué a également appelé à cesser de politiser les efforts humanitaires et de développement et à s’abstenir d’imposer unilatéralement des mesures coercitives à l’encontre du pays.  Il a de même mis en garde contre toute politisation du dialogue interactif sur la mise en œuvre de la résolution 2642 (2022).  Seule une solution politique permettra d’améliorer la situation en Syrie, et cela passe par un processus politique mené et dirigé par les Syriens et facilité par l’ONU, a-t-il déclaré.  À cette fin, il a dit appuyer la convocation de la prochaine réunion de la Commission constitutionnelle. 

Le délégué a ensuite relevé que la libre circulation des groupes terroristes sur le territoire syrien où des forces étrangères sont illégalement présentes met en danger la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi que la paix et la sécurité régionales.  La lutte contre le terrorisme ne doit pas servir de prétexte pour violer la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il souligné.  Il a noté que l’agression du régime israélien contre la Syrie se poursuit sans relâche, évoquant le « ciblage intentionnel » de civils et d’infrastructures vitales en Syrie.  Le Conseil de sécurité doit cesser d’utiliser les politiques de deux poids, deux mesures et condamner l’agression israélienne sans équivoque, a-t-il clamé. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Türkiye) a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour régler la crise politique en Syrie, au risque de le voir perdurer.  Les négociations politiques intersyriennes doivent reprendre au plus vite, a-t-il insisté.  Les partis politiques d’opposition ont fait montre de leur esprit d’ouverture à l’inverse du Gouvernement, qui ne montre que son intransigeance, a-t-il affirmé. 

Le représentant a ensuite rappelé que son Gouvernement considère le Parti des travailleurs du Kurdistan comme une organisation terroriste.  Il a affirmé que l’accord passé en octobre 2019 entre les États-Unis, la Türkiye et la Fédération de Russie n’a pas été respecté, à tel point que ces combattants n’ont pas été évacués de la zone située à 30 kilomètres des frontières turques.  De plus, cette organisation continue de mener des activités terroristes et s’en vante sur les réseaux sociaux.  La Türkiye entend donc continuer de lutter contre cette organisation, au nom de son droit à la légitime défense, a prévenu le représentant. 

S’exprimant sur la situation humanitaire en Syrie, le délégué a constaté que les projets humanitaires de l’ONU n’ont pas toujours été mis en œuvre à cause des entraves du Gouvernement syrien.  Il a relevé que la fourniture d’eau dans le nord de la Syrie dépend aussi de la fourniture en électricité.  Or le Parti des travailleurs du Kurdistan contrôle une station électrique, empêchant la fourniture d’eau potable dans les zones où les populations en ont besoin.  C’est une des sources de la propagation du choléra, a encore affirmé le représentant.  Il a ensuite appelé à préserver le mécanisme transfrontière au-delà de janvier 2023, tel que prévu par la résolution 2246 (2022). 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les délégations de la Deuxième Commission mettent en avant les atouts de l’échelon régional pour s’organiser et relancer la course aux ODD

Soixante-dix-septième session,
20e séance, Matin
AG/EF/3575

Les délégations de la Deuxième Commission mettent en avant les atouts de l’échelon régional pour s’organiser et relancer la course aux ODD

La Deuxième Commission (questions économiques et financières) s’est réunie, ce mardi, pour un dialogue entre les délégations et les secrétaires exécutifs des commissions régionales, dialogue intitulé « Du risque à la résilience: Accélérer les actions pour atteindre un avenir plus durable et équitable à travers la coopération régionale. »  L’occasion de préparer le prochain Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD) de 2023, a déclaré en début de séance la Présidente de la Deuxième Commission Lachezara Stoeva.  La Présidente a souligné les atouts de l’échelon régional au moment où les défis actuels font replonger des millions de personnes dans une pauvreté extrême: il permet une collaboration adéquate et d’élaborer des solutions innovantes pour relancer les économies, lutter contre les changements climatiques et réaliser les ODD.

Les dirigeants des différentes commissions régionales ont tous présenté un sombre état des lieux.  Outre l’inflation croissante et la hausse des prix de l’énergie dues à la guerre en Ukraine, les changements climatiques s’intensifient rapidement.  Les risques de catastrophes dépassant les capacités de résilience, les petits États insulaires en développement (PEID) sont à un « point de bascule », a prévenu Rmida Salsiah Alisjahbana, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP).  S’agissant de l’économie, la guerre en Ukraine a des conséquences économiques profondes sur toutes les régions, avant tout en Europe, en proie à une inflation grippant les économies même les plus développées.  La crise de l’énergie s’étend.

La Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), Olga Algayerova, a évoqué les difficiles arbitrages entre lutte contre les changements climatiques et mesures d’urgence pour maintenir les économies en état de marche.  Au-delà de l’Europe, la guerre devrait faire perdre 28 milliards de dollars en 2022 aux pays arabes importateurs de pétrole, tandis que les pays à revenu intermédiaire devront assumer un service de la dette d’environ un milliard de dollars cette année en raison de la hausse des taux d’intérêt, a relevé Rola Dashto de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO).  La région arabe est-elle-même touchée par des conflits en son sein, dans au moins sept pays, avec 28 millions de personnes soit réfugiées soit déplacées, et 65 millions de personnes dépendant de l’aide humanitaire.  En outre, la région arabe est extrêmement vulnérable aux ravages des changements climatiques, alors qu’elle ne contribue qu’à moins de 5% des émissions de gaz à effet de serre.  Même diagnostic pour l’Afrique, qui paie un lourd tribut alors qu’historiquement, elle n’a que très peu contribué aux émissions de carbone.  En outre, plus de 55 millions d’Africains basculent de nouveau dans l’extrême pauvreté.  La CESAO et la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) sont confrontées aux mêmes maux, ainsi qu’au retour de l’insécurité alimentaire.  Une faible productivité, de faibles niveaux d’investissements et un niveau élevé de travail dans le secteur informel sont des problèmes structurels régionaux qui s’aggravent, a fait observer García Buchaca, Secrétaire exécutive de la CEPALC.

Ce diagnostic posé, les Commissions régionales ont tâché, ce matin, de démontrer qu’elles ne restent pas les bras ballants.  Ainsi, la CESAP aide les pays, dont le Cambodge, les Maldives et la Mongolie, à développer une première ligne de défense, à savoir « une protection sociale complète et universelle », conformément au plan d’action pour le renforcement de la coopération régionale en matière de protection sociale.  Pour accélérer la décarbonation de l’économie, la Commission aide les pays de l’Asie et du Pacifique à accélérer et à soutenir une transition énergétique inclusive par l’élaboration de feuilles de route nationales, déjà en place dans 11 pays ainsi que dans trois villes d’Indonésie et de Thaïlande, et d’autres sont en cours.  Elle aide aussi à renforcer la connectivité dans les domaines des transports, du commerce, de l’énergie et des technologies de l’information et des communications (TIC), grâce à un accord-cadre pour faciliter le commerce transfrontalier informatisé, sans utilisation de papier.  Pour aligner les finances publiques et privées sur le développement durable et l’Accord de Paris, la CESAP a développé un outil de modélisation macroéconomique, afin d’aider les décideurs politiques en Indonésie et en Mongolie à simuler les différents scénarios de politiques économiques nationales relativement à leur dette publique.

La Commission économique pour l’Afrique (CEA) mise beaucoup sur l’Accord établissant la zone de libre-échange continentale africaine -une zone devenue une « solution cruciale » pour assurer le relèvement, selon le Secrétaire exécutif Antonio Pedro- tandis que la CEPALC a fait état d’un plan d’autosuffisance en matière de santé, qui vise à renforcer la recherche et les capacités de production de vaccins et de médicaments dans la région.  La CEPALC travaille également sur la proposition d’une « conversion de dette pour l’action climatique » qui, avec le Fonds de résilience des Caraïbes, pourrait ouvrir des possibilités de restructuration de la dette et d’amélioration des liquidités.  La CEE mise sur l’assistance technique pour la transformation numérique, tandis que la CESAO se focalisera sur la lutte contre l’évasion fiscale, en attendant l’organisation du Forum arabe annuel pour le développement durable.  Le Secrétaire exécutif de la CEA a également appelé à élargir la marge de manœuvre budgétaire grâce à un financement novateur.  Les marchés de crédit carbone, par exemple, pourraient générer jusqu’à 82 milliards de dollars par an au prix de 120 dollars par tonne d’équivalent carbone.

Dans une discussion interactive entre États Membres, la Pologne a pointé que les conséquences de la guerre en Ukraine touchent en premier lieu les pays limitrophes.  Le Bélarus a, lui, déploré une « politisation excessive » de la CEE.  Le Liban a estimé que la CESAO était bien placée pour traiter de l’ajustement de l’aide publique au développement (APD), en insistant sur les vulnérabilités multidimensionnelles et la résilience.  Dans le même esprit, la Colombie a demandé à dépasser la catégorisation des pays en fonction de leur niveau de revenus.  Quant au Chili, il a recommandé de renforcer la coopération internationale, en tenant compte de la situation des pays en transition, avec un processus « échelonné et souple ».

La Deuxième Commission se réunira de nouveau le jeudi 10 novembre, à 10 heures, pour introduire et se prononcer sur les premiers projets de résolution de cette soixante-dix-septième session. 

SOUVERAINETÉ PERMANENTE DU PEUPLE PALESTINIEN DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST, ET DE LA POPULATION ARABE DANS LE GOLAN SYRIEN OCCUPÉ SUR LEURS RESSOURCES NATURELLES A/77/90–E/2022/66

Fin de la discussion générale

M. EMIL BEN NAFTALY (Israël) a estimé que le rapport de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO) est biaisé lorsqu’il évoque les causes du conflit entre Israël et les Palestiniens, puisque ce conflit a été initié lorsque des groupes terroristes ont lancé des roquettes depuis Gaza vers des centres peuplés sur le territoire d’Israël.  Or le rapport ne mentionne pas ces tirs de roquettes, a déploré le représentant.  Il a ensuite donné des exemples d’initiatives lancées entre Israël et la Palestine pour accroître la coopération, comme la facilitation économique et l’indexation des droits du travail des Palestiniens sur ceux des Israéliens, ou encore l’amélioration des infrastructures hydrauliques et électriques en Cisjordanie.  Malheureusement ces exemples n’apparaissent pas dans le rapport de la CESAO, ce qui porte atteinte à sa nature professionnelle, a encore regretté le représentant.  Israël veut la stabilité et un avenir qui réponde aux desiderata des deux parties, a-t-il assuré.

Droits de réponse

L’observatrice de l’État de Palestine a dit que la Puissance occupante continue à déformer la réalité, qui est celle d’une occupation coloniale, et à nier ses crimes, dont celui d’apartheid.  Les droits de toute une population sont niés, comme le droit à l’autodétermination, le droit sur les ressources naturelles, a martelé la représentante.  Elle a estimé que le rapport de la CESAO n’est ni biaisé, ni partial et qu’il s’appuie sur des données et des faits bien concrets.  La Puissance occupante fait preuve d’un non-respect constant et intentionnel du droit international, mais il est grand temps qu’Israël se rende compte que les Palestiniens ne renonceront jamais à leurs droits humains, a asséné l’observatrice.  Elle a appelé la communauté internationale à continuer à appliquer le droit international et les résolutions et à demander des comptes.

Le représentant de la République arabe syrienne a estimé que le rapport de la CESAO est très équilibré et qu’il représente bien la réalité sur le terrain, comme l’occupation illégale du Golan syrien, qui empêche le développement de cette région.

Dialogue avec les commissions régionales

Mme ARMIDA SALSIAH ALISJAHBANA, Secrétaire générale adjointe des Nations Unies et Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a présenté les grandes tendances de la région.  En Asie-Pacifique, les risques en cascade et convergents liés aux maladies, aux catastrophes et aux changements climatiques ont accru la pauvreté et creusé les inégalités.  Les changements climatiques s’intensifient rapidement et comme les risques de catastrophes dépassent les capacités de résilience, nous sommes à un point de basculement, en particulier dans les petits États insulaires en développement (PEID), a prévenu la Secrétaire exécutive.  Les pays sont aussi aux prises avec les répercussions de la guerre en Ukraine et ses conséquences telles que l’inflation croissante, qui entraînent une crise du coût de la vie.  Pour mieux se préparer aux crises futures, la CESAP aide les pays, dont le Cambodge, les Maldives et la Mongolie, à développer une première ligne de défense, à savoir une protection sociale complète et universelle, conformément au plan d’action pour le renforcement de la coopération régionale en matière de protection sociale.  À l’heure actuelle, plus de la moitié de la population de la région Asie-Pacifique n’est encore couverte par aucun régime de protection sociale.

Grâce au développement de systèmes holistiques de réduction des risques, tels que le plan d’action régional de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour l’adaptation à la sécheresse, la CESAP aide les pays à s’adapter et à élaborer des stratégies pour contrer les risques émergents.  De plus, pour accélérer la décarbonation de l’économie, la CESAP aide les pays à accélérer et à soutenir une transition énergétique inclusive par l’élaboration de feuilles de route nationales.  Celles-ci ont déjà été réalisées dans 11 pays ainsi que dans 3 villes d’Indonésie et de Thaïlande, et d’autres sont en cours.  Pour aider les pays à refondre des actions ambitieuses en faveur du climat, la CESAP a renforcé son soutien pour réviser les contributions déterminées au niveau national, élaborer des stratégies pour une mobilité intelligente, et favoriser une lutte collective des pays contre la pollution atmosphérique.

Troisième axe de la CESAP, renforcer la connectivité dans les domaines des transports, du commerce, de l’énergie et des technologies de l’information et des communications (TIC) grâce à un accord-cadre pour faciliter le commerce transfrontalier informatisé, sans utilisation de papier.  Enfin, pour aligner les finances publiques et privées sur le développement durable et l’Accord de Paris, la CESAP a développé un outil de modélisation macroéconomique, afin d’aider les décideurs politiques en Indonésie et en Mongolie à simuler les effets socioéconomiques et environnementaux de différents scénarios de politiques économiques nationales relativement à leur dette publique.  En outre, la CESAP aide les pays à développer des financements innovants.  La Secrétaire exécutive a cité comme exemple un échange de dettes contre des mesures d’adaptation aux changements climatiques, promu par le Secrétariat du Forum des îles du Pacifique.  Elle a aussi signalé que la CESAP collabore avec le Cambodge pour émettre des obligations liées aux ODD.

Mme ROLA DASHTI, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a souhaité attirer l’attention sur les multiples problèmes de développement de la région arabe: une réalité socioéconomique structurelle moins qu’optimale, des conflits qui ont fait reculer certains des progrès au titre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, un nombre de réfugiés plus important que dans toute autre région, et les répercussions des crises qui frappent le reste du monde (climat, alimentation, énergie et finance).

S’agissant de l’économie, la guerre entre la Russie et l’Ukraine devrait faire perdre 28 milliards de dollars en 2022 aux pays arabes importateurs de pétrole et les pays à revenu intermédiaire doivent assumer un service de la dette d’environ un milliard de dollars cette année en raison de la hausse des taux d’intérêt.  Par ailleurs, au moins sept pays de la région font face à un conflit et 28 millions de personnes sont soit des réfugiés soit des déplacées tandis que 65 millions ont besoin d’aide humanitaire.  La situation alimentaire est particulièrement préoccupante dans les pays déchirés par la guerre comme le Yémen et la Somalie, a fait observer Mme Dashti.  En outre, la région arabe est extrêmement vulnérable aux ravages des changements climatiques, alors qu’elle ne contribue qu’à moins de 5% des émissions de gaz à effet de serre.

Tout au long de l’année 2022, la CESAO a aidé les États Membres à faire face aux crises par le biais de missions de conseil et de renforcement des capacités tout en encourageant l’intégration régionale.  Elle a formulé des recommandations stratégiques sur diverses questions telles que la sécurité alimentaire, la protection sociale, la gestion budgétaire durable et les inégalités.  L’année prochaine, a fait savoir Mme Dashti, la CESAO prendra en charge les deux propositions que le Secrétaire général lui a confiées: lutter contre l’évasion fiscale et l’aider à préparer une réunion annuelle avec les organisations régionales.  Elle continuera en outre à assumer son rôle de chef de file pour l’organisation du Forum arabe annuel pour le développement durable avec la participation de toutes les agences de l’ONU travaillant au niveau régional.

M. ANTONIO PEDRO, Secrétaire exécutif par intérim de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a rappelé que 55 millions d’Africains ont replongé dans la pauvreté extrême, mais que le continent a aussi trouvé des solutions novatrices pour renforcer la résilience.  Il a principalement loué l’Accord établissant la Zone de libre-échange continentale africaine, zone devenue une « solution cruciale » pour assurer le relèvement.  M. Pedro a également appelé à élargir la marge de manœuvre budgétaire grâce à un financement novateur: les marchés de crédit carbone, par exemple, pourraient générer jusqu’à 82 milliards de dollars par an au prix de 120 dollars par tonne d’équivalent carbone.  Reconnaissant que la crise mondiale a mis en péril les gains obtenus par l’Afrique, M. Pedro a indiqué que le ratio dette/PIB a fortement augmenté tout comme la dette extérieure.  De nombreux pays courent le risque de ne pas pouvoir rembourser leur dette, ou ont déjà du mal à le faire.  Le conflit en Ukraine et la COVID-19 ont accru la vulnérabilité des pays, a-t-il en plus rappelé.

Les coûts d’adaptation de l’Afrique aux changements climatiques sont évalués à entre 30 et 55 milliards de dollars par an d’ici à 2030 alors que le continent a historiquement très peu émis de carbone, a poursuivi M. Pedro, en chiffrant à 500 milliards de dollars les besoins de l’Afrique pour l’adaptation.  Sur le plan du commerce, il a indiqué que l’accord de libre-échange continental prévoit différentes stratégies qui sont mises en place, notamment l’une fondée sur « l’identification de produits prometteurs à l’exportation ».  L’accord de libre-échange a aussi permis plusieurs initiatives pharmaceutiques axées sur l’achat commun de médicaments.  L’orateur a aussi présenté quelques exemples de bonnes pratiques comme la facilitation d’émission d’obligations vertes en Afrique du Sud pour relancer le secteur électrique sudafricain, le registre commun de crédit d’émission de carbone qui concerne la région autour du bassin du Congo, ainsi qu’un camp d’apprentissage de langages de code informatique organisé par la CEA pour « plus de 15 000 jeunes filles ».

Mme OLGA ALGAYEROVA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), a déploré le retour de la guerre sur le sol européen et le resserrement de l’espace économique et financier, qui entravent le relèvement et la réalisation du développement durable, tout cela alors que le continent se remettait à peine de la pandémie.  Évoquant une crise à multiples facettes conjuguée aux effets des changements climatiques, elle a présenté un tableau représentant l’inflation historique de plusieurs pays de la zone, inflation risquant de demeurer élevée, avec des conséquences dramatiques pour les plus vulnérables, y compris dans les pays les plus développés d’Europe.  Le ralentissement économique sera important en 2023, particulièrement dans les pays touchés par les problèmes d’accès au gaz.  Les besoins de reconstruction en Ukraine s’élèvent à 350 milliards de dollars, tandis que les émissions de gaz à effet de serre créent des clivages dans la région.

Mme Algayerova a ensuite évoqué les difficiles arbitrages entre mesures de lutte contre les changements climatiques et mesures d’urgence pour maintenir les économies en état de marche et pallier le manque de ressources en énergie.  Dans ce contexte, la CEE agit en renforçant la coopération régionale et en développant l’assistance technique pour la transformation numérique en faveur du développement durable, entre autres.  Pour la transition énergétique, outre sa participation à de nombreux colloques, conférences ministérielles et forums, la CEE a élaboré des recommandations claires en matière de préservation de l’eau, d’économie circulaire, d’économie verte et d’infrastructures durables, de transformation numérique.  Ces transformations doivent impérativement être alliées à une transformation verte pour être bénéfiques et soutenables, a conclu Mme Algayerova.

M. RAÚL GARCÍA BUCHACA, Secrétaire exécutif adjoint pour la gestion et l’analyse des programmes de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), intervenant par visioconférence, a souligné que les effets combinés de la pandémie et de la guerre touchent une région confrontée à des lacunes structurelles croissantes et à une série de crises en cascade, qui se reflètent dans les secteurs de l’emploi, la santé, l’éducation, la sécurité alimentaire et énergétique ainsi que dans les systèmes de protection sociale.  En raison de la pandémie, la région de l’Amérique latine et des Caraïbes a malheureusement renoué avec la croissance faible observée entre 2014 et 2019.  Les projections de la CEPALC estiment que le PIB régional enregistrera une hausse de 3,2% en 2022 et de 1,4% en 2023.  Une faible productivité, de faibles niveaux d’investissements et un niveau élevé de travail dans le secteur informel sont des problèmes structurels régionaux qui s’aggravent, a fait observer M. García Buchaca.  En outre, la pauvreté augmente, atteignant 32% en 2021, et près de 14% pour l’extrême pauvreté, ce qui représente un recul de 27 années.  Les progrès pour éliminer la faim reculent également: en 2021, près de 41% de la population de la région a été confrontée à une insécurité alimentaire modérée ou grave, contre 29% de moyenne mondiale.

En outre, la dette publique atteint 52% du PIB en Amérique latine, et dépasse 90% dans six pays des Caraïbes.  La hausse des taux d’intérêt, la dépréciation des devises et de hauts niveaux de risque au niveau de la dette souveraine entament la capacité des pays à accéder aux financements et donc à investir dans des programmes porteurs de changement pour le développement durable.  Dans ce contexte, des solutions novatrices sont nécessaires, de même qu’une coopération régionale et internationale revitalisée, a conclu le Secrétaire exécutif.

Il a signalé que la CEPALC a mené des actions concrètes en ce sens, comme le plan d’autosuffisance en matière de santé, qui vise à renforcer la recherche et les capacités de production de vaccins et de médicaments dans la région.  M. García Buchaca a également cité l’exemple de la façon dont a été traitée la question urgente de la sécurité alimentaire, en coordination avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Programme alimentaire mondiale (PAM).  La CEPALC travaille également sur la proposition d’une conversion de dette pour l’action climatique qui, avec le Fonds de résilience des Caraïbes, ouvre des possibilités de restructuration de la dette et d’amélioration des liquidités.

Discussion interactive

Après avoir entendu ces exposés, Mme ROSA MALANGO, Directrice du Bureau de New York des commissions régionales et modératrice du dialogue, a donné la parole aux États Membres pour entendre leurs commentaires et entamer un dialogue interactif.  Ces derniers ont notamment salué le rôle joué par les commissions régionales dans le soutien aux pays face aux multiples crises en cours et pour encourager la coopération régionale afin d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.

À ce propos, la Mongolie s’est dit convaincue, au nom des pays en développement sans littoral (PDSL), que le rôle essentiel et de développement des commissions économiques régionales doit être préservé et renforcé.  Pour ce groupe de pays, ce rôle est particulièrement important deux ans avant le terme du Programme d’action de Vienne et pour se pencher sur les questions qui entravent le développement des PDSL.  À cet égard, l’Éthiopie a fait savoir que la CEA fait partie de ses partenaires de développement les plus fiables.  Le Kazakhstan a suggéré d’éviter les doublons au niveau régional et d’améliorer les synergies.  Le pays a proposé d’établir un centre régional pour le développement durable en Asie centrale, à Almaty.

Le représentant des États-Unis a assuré que les commissions régionales jouent un rôle vital pour accompagner le développement ancré dans les droits humains.  Les États-Unis mettent en place des partenariats pour relever les défis et versent des milliards de dollars en aide humanitaire et pour lutter contre l’insécurité alimentaire.  Ils soutiennent également l’Ukraine pour préserver son intégrité territoriale.

L’Union européenne a aussi évoqué l’agression de la Russie contre l’Ukraine, qui met à mal la population et les infrastructures locales, et a de graves conséquences économiques dans la région, ce qui complique la tâche de la CEE.  La Pologne a ajouté que les conséquences de la guerre touchent en premier lieu les pays limitrophes. C’est la raison pour laquelle le pays est mobilisé, avec 11 pays, pour l’Initiative des Trois Mers qui vise à renforcer les liens dans la région en termes d’énergie, de transport et de numérique.  La représentante polonaise a demandé à Mme Olga Algayerova comment la CEE soutiendra la reconstruction de l’Ukraine et les plans de développement à long terme.

La Fédération de Russie a réagi en disant qu’il n’y a pas de guerre avec l’Ukraine.  La Russie a été contrainte de lancer une opération militaire spéciale pour soutenir la population victime de génocide de la part des autorités de Kiev, a ajouté le représentant.  Le Bélarus a relevé que la coopération technique a toujours été très demandée dans le cadre de la CEE, mais a déploré sa politisation excessive.  La représentante a appelé à davantage de volonté politique pour cette coopération et à renoncer aux mesures coercitives unilatérales.

À propos des infrastructures ukrainiennes, Mme Algayerova, Secrétaire exécutive de la CEE, a indiqué que la CEE a déjà assuré la coordination avec d’autres instances et qu’elle dispose d’outils pour évaluer les dégâts environnementaux.  Nous devons reconstruire ensemble, a-t-elle souligné, ajoutant que la CEE a plusieurs projets.  Mme Algayerova a dit que la Russie a toujours été appréciée pour son soutien à la coopération pour le développement dans la région et que les programmes concernés ne devraient pas être victimes des dissensions.

Revenant à la question du développement durable et de la résilience, l’Afrique du Sud a demandé à M. Pedro ce que la CEA allait faire pour aider les États Membres à préparer le Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD).  Le représentant s’est également interrogé sur le financement de l’action climatique.  Après avoir remercié la CESAO et la CEA pour leur soutien, l’Égypte a demandé à M. Pedro si la CEA comptait prendre des mesures pour alléger la dette des pays africains.  Elle s’est aussi interrogée sur ce que la région peut faire au sujet de l’évasion fiscale.

En réponse, M. Pedro, Secrétaire exécutif de la CEA, a fait savoir que le soutien apporté aux commissions régionales est précieux pour leurs travaux.  Le Sommet sur les ODD est très important et correspond à l’examen décennal de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  Selon lui, il ne faut pas se contenter de la routine pour aller de l’avant.  L’exercice mené avec l’Union africaine va vraiment changer la donne, a assuré M. Pedro, donnant l’exemple de l’énergie. Par ailleurs, toutes les commissions régionales vont se présenter avec au moins 10 projets à la prochaine COP, comme la création d’un pôle pour l’accès à une dette moins chère en cas d’action climatique.

S’interrogeant sur la notion de relèvement résilient, la Thaïlande a espéré que la CESAP aidera mieux les pays à l’avenir pour ce qui concerne l’accès au financement pour le développement et l’action climatique.  La Chine a rappelé qu’il faut tenir compte des besoins et spécificités des États Membres et a salué l’action de la CESAP pour la mise en œuvre du Programme 2030, à laquelle la Chine est prête à apporter sa coopération technique.  L’Indonésie a suggéré d’agir plus vite et de mobiliser tous les efforts possibles pour parvenir aux ODD.

En réponse aux interrogations des pays, Mme Alisjahbana, Secrétaire exécutive de la CESAP, a fait savoir que l’action de la CESAP répond aux besoins des pays.

Pour sa part, le Liban a demandé à la CESAO de poursuivre ses efforts dans des domaines souvent négligés, compte tenu des difficultés économiques.  Le représentant a estimé qu’elle est bien placée pour traiter de l’ajustement de l’aide publique au développement (APD) en insistant sur les vulnérabilités multidimensionnelles et la résilience.  Le développement durable ne pourrait se faire sans une approche complémentaire aux niveaux local et régional, a souligné l’Iraq.  Elle nécessite que toutes les parties prenantes et le secteur privé puissent participer à la diversification de l’économie pour atteindre les ODD, ce en quoi la CESAO apporte son soutien.

Au sujet du financement, le Maroc s’est dit convaincu que la transition entre situation de risque et résilience ne pourra pas se faire si la situation de chaque région n’est pas prise en compte.  La représentante a salué le plan d’action dont la CESAO a fait part, avec des mesures ciblées qui répondent aux besoins de la région arabe.  Elle a demandé comment les commissions régionales contribuent aux discussions actuelles et au développement de mesures qui dépassent le critère du PIB pour accéder à des financements concessionnels.  L’observateur de la Palestine a remercié l’équipe de la CESAO pour ses efforts déployés dans la région arabe et dans l’État de Palestine occupé.

À propos du Sommet consacré aux ODD, Mme Dashti, Secrétaire exécutive de la CESAO, a assuré que la CESAO aidera les État Membres à y participer et à évoquer les sujets importants et les initiatives dans le domaine du développement durable.  S’agissant de l’évasion fiscale et des flux financiers illicites, elle a prévenu qu’ils sont bien supérieurs à l’APD et aux investissements étrangers dans la région arabe, constituant un véritable fléau.  La CESAO va aider les États Membres à mettre en place les réformes fiscales nécessaires et à passer au numérique pour être plus efficaces et mieux collecter les impôts.  Le développement est très différent aujourd’hui et une approche multidimensionnelle est nécessaire, a convenu Mme Dashti.  La CESAO travaille à la mise en place d’un indice multidimensionnel, afin que les pays vulnérables ne soient pas pénalisés parce que le seul critère pris en compte est le PIB.

La Colombie fait partie des pays qui ont plaidé pour des mesures de progrès qui aillent au-delà du PIB et permettent une orientation juste et efficace des flux financiers internationaux pour les pays en développement.  Les relations de coopération doivent également dépasser la catégorisation des pays en fonction de leur niveau de revenus.  La République dominicaine a évoqué la nécessité de nouveaux moteurs de croissance avec des résultats redistributifs pour surmonter les déficits de financement des pays à revenu intermédiaire, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID).  L’Union européenne a souligné l’importance de la coopération entre l’UE et l’Amérique latine et les Caraïbes, qui se matérialise notamment par un programme de numérisation.

L’Argentine, qui assume la présidence au prorata du temps de la CEPALC, va coopérer dans un contexte encore plus difficile en raison de la crise de la dette, des inégalités croissantes, des conflits et de la pauvreté.  La représentante a conseillé de repenser la coopération internationale et a insisté sur le rôle crucial d’instances comme la CEPALC pour surmonter les défis et parvenir au développement durable.  Le Costa Rica a remercié la CEPALC de son soutien pour ne laisser personne de côté dans la région.  Le Chili n’a pas dit autre chose et a recommandé de renforcer la coopération internationale, en tenant compte de la situation des pays en transition, avec un processus échelonné et souple.  La représentante a demandé à M. Buchaca quelles sont les mesures envisagées pour accompagner les pays en transition.

Le Brésil s’est dit préoccupé par les conséquences de la pandémie en Amérique latine et dans les Caraïbes, aggravées par la guerre en Ukraine.  Le représentant s’est félicité du soutien de la CEPALC pour essayer de répondre au problème d’accès aux médicaments, entre autres, et pour mettre en place des financements pour faire face aux changements climatiques.

M. Buchaca, Secrétaire exécutif adjoint de la CEPALC, a annoncé que la réunion de chefs d’État et de gouvernement de la CEPALC et de l’UE se tiendra en janvier.  Il a assuré la Colombie que la CEPALC continuera à soutenir les pays à revenu intermédiaire.  Pour répondre au Chili, il a précisé que la CEPALC allait travailler à combler les fossés structurels qui demeurent dans les pays reclassés.

En conclusion, Mme Malango s’est félicitée que 23 États Membres aient apporté leurs commentaires au cours de ce débat avec les commissions régionales, ce qui montre leur intérêt.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les délégations appellent à passer à l’action pour renforcer la cybersécurité dans le contexte actuel de tensions géostratégiques

Soixante-dix-septième session
18e & 19e séances plénières – matin & après-midi
AG/DSI/3696

Première Commission: les délégations appellent à passer à l’action pour renforcer la cybersécurité dans le contexte actuel de tensions géostratégiques

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a débattu, aujourd’hui, des voies à suivre pour renforcer la cybersécurité.  Deux projets de résolution concurrents, qui seront présentés prochainement, ont rallié d’un côté les pays occidentaux et leurs alliés, y compris l’Ukraine et la République de Corée, et, de l’autre, la Russie et de nombreux pays en développement.  La Commission a également entendu l’Irlande présenter la « Déclaration politique sur les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées », qui avait été largement évoquée vendredi. 

Les États-Unis et l’Union européenne ont condamné les cyber-opérations de la Russie contre l’Ukraine et des pays tiers.  Pour parvenir à un Internet sûr et à la cyber-stabilité globale, le représentant américain a attiré l’attention sur la nécessité de soutenir le Groupe de travail à composition non limitée chargé, « sur la base d’un consensus mis à mal par les agissements de la diplomatie russe à la Première Commission », de poursuivre l’élaboration des règles, normes et principes de comportement responsable des États.  À cet égard, il a appelé les délégués à appuyer la résolution qui sera présentée par la France sur les questions de cybersécurité.  La France, évoquant ce texte, a rappelé qu’elle promeut depuis 2020 une proposition de programme d’action des Nations unies pour la cybersécurité, lequel, après avoir pris le relais du Groupe d’experts en 2025, viserait à établir aux Nations unies « un mécanisme permanent, inclusif et tourné vers l’action ».  La représentante française a confirmé qu’elle présentait cette année à la Commission, « un projet de résolution intitulé Programme d’action visant à promouvoir un comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC dans le contexte de la sécurité internationale ».  À date, 54 États issus de divers groupes régionaux se sont portés coauteurs de ce texte. 

La Fédération de Russie a réagi en soulignant que la valeur ajoutée du Groupe d’experts est que tout un chacun peut participer à ses travaux, qui traite tant de considérations sécuritaires nationales qu’internationales.  Abordant le projet de résolution sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale que soumet chaque année sa délégation depuis 1998, le représentant russe l’a qualifié de document « consensuel et dépolitisé ».  Notre texte repose sur les dispositions de résolutions précédemment adoptées, son but principal étant de préserver le caractère ouvert du Groupe en évitant tout chevauchement dans les processus de délibérations sur les questions de cybersécurité, a-t-il dit.  Le représentant russe a jugé que le texte concurrent des « Occidentaux » contrevient à la volonté de la majorité écrasante des États Membres, qui appellent selon lui à la poursuite de négociations intergouvernementales en vue de renforcer concrètement la cybersécurité dans le cyberespace, et l’a dénoncé comme une tentative de « cybercolonialisme ». 

L’Arménie, l’Inde, la Türkiye ou encore Cuba ont souligné de leur côté l’importance de tenir compte des besoins sécuritaires légitimes, y compris préventifs, des États en matière de TIC utilisées de manière responsable et dans le respect du droit international. 

La Première Commission avait auparavant achevé l’examen du volet « armes classiques » de son débat thématique.  L’Irlande a présenté la « Déclaration politique sur les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées », qui devrait être officiellement soumise aux États pour adoption en novembre à Dublin.  Un texte, qui, a précisé la représentante, ne crée pas de nouvelles obligations juridiques puisque le droit international humanitaire existant fournit un cadre pour réglementer la conduite des parties pendant les conflits armés, mais cherche à réduire les dommages causés aux civils par les armes explosives en zones peuplées.  Pour l’Irlande, ce texte, fruit de trois ans d’une vaste collaboration interrégionale, représente une réalisation d’importance mondiale, résultat de la mobilisation des États, des organisations internationales et de la société civile. 

Les autres délégations qui ont pris la parole ont de nouveau abordé la question des armes à sous-munitions et des mines, mais c’est une fois encore le commerce, et plus encore le trafic illicite, des armes légères et de petit calibre (ALPC) qui a été le plus souvent évoqué, en raison des dégâts causés par la pullulation de ces armes, y compris dans des régions qui, comme la Caraïbe, ne connaissent pas de conflit mais dont les sociétés sont ébranlées par la violence. 

Plusieurs États se sont également souciés de la question des munitions, laissée de côté dans le Traité sur le commerce des armes.  Le Chili a jugé pertinent de progresser dans la traçabilité des armes, des composants « et surtout des munitions ».  Mais Israël a averti que l’élaboration d’un cadre international spécifique sur les munitions devrait se faire sur une base volontaire et ne pas être juridiquement contraignant.  En Afrique, la question est traitée au niveau sous-régional, en Afrique centrale par la Convention de Kinshasa pour le contrôle des armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et de toutes pièces et composantes pouvant servir à leur fabrication, réparation et assemblage, a rappelé le Gabon, alors que le Mozambique signalait son adhésion récente à un autre instrument sous-régional, le Protocole de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) sur les armes à feu et les munitions. 

En toute fin de séance, la Première Commission a entamé l’examen des « aspects régionaux du désarmement », examen qu’elle poursuivra demain, mardi 25 octobre, à partir de 10 heures. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Armes conventionnelles (suite)

M. KANISSON COULIBALY (Mali) a noté qu’en Afrique de l’Ouest, notamment au Sahel, les armes légères et de petit calibre (ALPC) constituent les instruments dominant des théâtres d’opérations, ajoutant que l’abondance des armes en circulation et l’existence de stocks de grande ampleur « provenant en grande partie de la Libye » facilitent l’accès des combattants et groupes terroristes à ce type d’armes.  Le contrôle de celles-ci représente un véritable défi pour les pays concernés et une menace pour la paix et la sécurité internationales « au même titre que les armes de destructions massives qui font, notamment ces temps-ci, l’objet d’une plus grande attention », a fait observer le représentant. 

La dissémination illicite des armes légères aux mains des groupes terroristes et autres entités non étatiques est à la base de la crise sécuritaire dans les régions du centre et du nord du Mali, a déclaré le représentant, et cette situation demeure un obstacle majeur à la réalisation des objectifs de développement du pays.  M. Coulibaly s’est donc félicité que, dans ses différentes résolutions relatives à son pays, le Conseil de sécurité demande à la communauté internationale d’aider le Mali à s’attaquer au problème de la prolifération et du trafic illicite des ALPC.  À cette fin, il a appelé la communauté internationale à contribuer au cantonnement des groupes armés et au processus de désarmement, démobilisation et réintégration.

Rappelant qu’une lutte efficace contre le commerce et la circulation illicites des ALPC exige une synergie et la coopération dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays affectés, M. Coulibaly a rappelé que les autorités maliennes avaient « d’abord déployé des efforts louables dans le renforcement des capacités de ses Forces de défense et de sécurité » puis lancé un appel, notamment à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), à « une coopération pleine et entière avec les Forces de défense et de sécurité maliennes pour pouvoir mieux exécuter son mandat ». 

Le représentant a également rappelé que son pays avait ratifié la quasi-totalité des Conventions et accords internationaux et régionaux sur le contrôle des armes conventionnelles.

M. MDUDUZI KIETH KENNETH MBINGO (Eswatini) a notamment exhorté les États Membres aux économies développées à fournir davantage d’assistance technique et financière aux pays en développement comme le sien, pour les aider à réaliser les objectifs généraux du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre et l’Instrument international de traçage de ces armes en vue d’éradiquer leur commerce illicite.  Eswatini pense que de tels efforts favoriseront les initiatives nationales et régionales de désarmement et de développement. 

M. MATÍAS ANDRÉS EUSTATHIOU DE LOS SANTOS (Uruguay) a rappelé que l’usage excessif et l’accumulation des armes légères et de petit calibre (ALPC) est un véritable fléau pour la paix et la sécurité dans le monde.  Pour pouvoir agir, il faut coopérer au niveau bilatéral, subrégional et régional, a-t-il déclaré.  Sur la scène multilatérale, le Traité sur le commerce des armes est un jalon important franchi sur le chemin de la régulation internationale des armes classiques, y compris de petit calibre, leurs composants et munitions. 

Le représentant a émis l’espoir que le travail du Groupe de travail à composition non limitée et le Programme cadre sauront prendre en compte les commentaires faits par plusieurs délégations.  En effet, le cadre régional étant insuffisant, il faut trouver un cadre plus universel pour entourer les APLC.  Il a rappelé que la réglementation de ces armes reste insuffisante, qu’elles ne sont pas suffisamment traçables et font l’objet d’un trafic important.  C’est pourquoi il faut trouver un cadre pour suivre ces armes tout au long de leur vie pour trouver un moyen de mettre en place leur surveillance.  Il a souligné l’importance de la coopération sur cette question, du fait qu’il existe des lacunes technologiques. 

Pour l’Uruguay, le Programme d’action des Nations Unies visant à prévenir et éradiquer le trafic d’APLC est un instrument de premier plan et de référence.  Le trafic de ces armes a des répercussions qui empêchent d’atteindre les objectifs V et XVI du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il relevé.  À cet égard, les femmes doivent jouer un rôle de premier plan dans le contrôle des armes, a ajouté le représentant, qui s’est félicité d’une approche de genre sur ces questions à la Première Commission. 

M. BENJAMIN SHARONI (Israël) a constaté que les missiles, roquettes et armes légères et de petit calibre prolifèrent partout dans le monde, y compris au Moyen-Orient où des États parrains du terrorisme en fabriquent, en détournent et en transfèrent à des groupes terroristes.  Il a plaidé pour une amélioration de la lutte contre cette prolifération par le biais d’un renforcement de la gestion des stocks, cela notamment à travers la mise en œuvre du Programme d’action de l’ONU relatif aux ALPC et de l’Instrument international de traçage de ces armes.  Le représentant a assuré qu’en vertu de ces deux outils, Israël s’acquitte de ses obligations en fournissant des rapports détaillés.  Il a ajouté que son pays avait prorogé de trois ans supplémentaires son moratoire sur le transfert de mines antipersonnel.  Par ailleurs, il a salué l’adoption du document final de la Huitième Réunion biennale des États parties au Programme d’action, en soulignant la participation active de sa délégation aux travaux sur la question des munitions.  La gestion des munitions doit, sur le plan national, se baser sur celle régulant les armes classiques, a-t-il indiqué, notant que l’élaboration de tout cadre international spécifique sur les munitions devra l’être sur une base volontaire et ne pas être juridiquement contraignant.  Après avoir rappelé l’appui de son pays à l’application du Traité sur le commerce des armes, il a considéré que le stockage d’armes classiques en zone urbaines et l’utilisation de civils comme boucliers humains devraient faire l’objet d’un examen international approfondi.  Enfin, il a réaffirmé l’attachement d’Israël à la spécificité de la Convention sur certaines armes classiques, qui a des effets pratiques sur le terrain et propose un équilibre entre considérations militaires et humanitaires. 

Mme CÁIT MORAN (Irlande) a rappelé que le Secrétaire général de l’ONU avait toujours appelé à une déclaration politique pour résoudre le problème des armes explosives en zones peuplées.  Le représentant s’est dit fier que la communauté internationale ait maintenant la possibilité de répondre à cet appel en approuvant la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de ces armes, à l’occasion de la conférence qui se tiendra le mois prochain à Dublin. 

La représentante a expliqué que l’objectif sous-jacent de la Déclaration est de réduire les dommages causés aux civils par les armes explosives en zones peuplées.  Elle n’établit pas d’interdiction d’utiliser une arme spécifique ni ne crée de nouvelles obligations juridiques, a-t-il précisé, ajoutant que le texte souligne que le droit international humanitaire existant fournit un cadre pour réglementer la conduite des parties pendant les conflits armés, en ce qui concerne donc l’utilisation de ces armes aux effets humanitaires dévastateurs et inacceptables. 

La Déclaration reconnaît les problèmes humanitaires importants associés aux armes explosives en zones peuplées et la nécessité de remédier à ce problème en élaborant un cadre spécifique et en veillant à ce que les militaires prennent explicitement en compte les effets de leurs actions sur les civils et les infrastructures civiles, cela en restreignant ou en s’abstenant d’utiliser de telles armes, a précisé la représentante.  Elle a vu dans la Déclaration politique une réalisation d’importance mondiale et l’a présentée comme le produit d’une vaste collaboration interrégionale, élaborée dans le plein respect des principes du multilinguisme et du multilatéralisme.  Elle a souligné que le processus dont elle découle, « dans le contexte de sécurité internationale le plus difficile que nous ayons connu depuis la fin de la guerre froide », est le résultat de la mobilisation des États, des organisations internationales et de la société civile. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a exprimé sa profonde préoccupation face à l’utilisation d’armes à sous-munitions contre la population civile en Syrie, au Yémen, en Libye et en Ukraine.  Il a appelé au respect de la Convention sur les armes à sous-munitions et tous les États à s’abstenir de tout transfert d’armes vers les pays qui violent la Convention, y compris la Fédération de Russie.  Nous condamnons fermement l’utilisation par la Russie de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions ainsi que son utilisation d’autres armes explosives, telles que des roquettes et des obus d’artillerie ou des engins explosifs improvisés contre des civils en Ukraine, a ajouté le représentant.  Il a rappelé l’engagement de son pays à la mise en œuvre du Programme d’action de l’ONU relatif aux armes légères et de petit calibre et de la Convention sur les mines antipersonnel.

Mme MARIA DE JESUS DOS REIS FERREIRA (Angola) a rappelé que suite à la ratification, en 2002, de la Convention d’Ottawa, l’Angola l’a transposée dans sa législation et s’est engagé à détruire d’ici à 2025 toutes les mines antipersonnel se trouvant sur son territoire.  Les mines représentent en effet une entrave au développement socioéconomique des États en situation postconflit, dont les deux tiers sont des pays en développement, a-t-elle relevé.  L’Angola a en outre créé une agence chargée de mettre en œuvre les engagements pris dans ce domaine au titre des accords internationaux, sur la base d’une stratégie nationale d’action contre les mines antipersonnel, en coopération avec les partenaires nationaux et internationaux.  Environ 1 092 champs de mines se trouvent toujours disséminés dans un espace très vaste, et il faudra 285 millions pour financer les opérations de déminage, a expliqué la représentante.  Pour « libérer nos terres » et mener à bien ces opérations, nous aurons besoin d’aide et d’une assistance technique, a-t-elle ajouté.  Dans ce contexte, la déléguée s’est associée au projet de résolution portant sur la mise en œuvre de la Convention.

Le représentant de la République démocratique populaire lao a apporté son soutien et la participation active de son pays aux travaux de la communauté internationale sur le contrôle des armes classiques et le désarmement.  Le pays a été un membre proactif de la Convention sur les armes à sous-munitions et a accueilli la première réunion des États parties en 2010, lorsqu’elles ont adopté la Déclaration de Vientiane et le Programme d’action de Vientiane pour 2011-2015, a rappelé le représentant.  Ces deux documents importants ont tracé la feuille de route des États parties pour poursuivre la mise en œuvre de la Convention.  De même, le Plan d’action de Lausanne, qui a été adopté lors de la deuxième Conférence d’examen du TNP en septembre 2021, guidera les États parties dans la réalisation de progrès tangibles et à long terme vers l’universalisation et la mise en œuvre de la Convention pour la période2021-2026, a souhaité le représentant.

Le représentant a expliqué que, pour surmonter les défis posés par les munitions non explosées dispersées à travers son pays comme héritage de la guerre, le Gouvernement lao avait adopté son objectif de développement national 18 intitulé « Des vies à l’abri des munitions non explosées ».  Il s’agit, a-t-il précisé, de supprimer les obstacles posés par ces engins non-explosés au développement national.  À cette fin, les obligations de la Convention ont été intégrées dans la Stratégie nationale pour les engins non explosées « Safe Path Forward 3 » pour 2021-2030.  Le représentant a demandé le soutien et la coopération continus de la communauté internationale pour aider son pays à mettre en œuvre cet objectif de développement durable spécifique.

La représentante de la République dominicaine a déploré les délits commis dans son pays du fait du trafic illicite d’armes légères et de petit calibre et de son impact sur la sécurité.  Pour y faire face, il a renforcé les mesures de contrôle à l’acquisition d’armes en misant sur le renforcement de ses capacités institutionnelles et en honorant les accords internationaux pertinents, y compris le Traité sur le commerce des armes.  Le Gouvernement a en outre mis en place la stratégie nationale intégrale de sécurité citoyenne « Mon pays sûr », qui comprend un plan de désarmement, a-t-elle noté.  À cette fin, un premier processus de destruction d’ampleur d’armes légères et de petit calibre a été organisé en août 2021. 

Malgré ces avancées, le contrôle de ces armes demeure ardu, a-t-elle ajouté, en soulignant l’importance de renforcer la coopération internationale, le transfert de technologies, le renforcement des capacités ainsi que l’échange d’expériences et de bonnes pratiques.  Il faut en outre intensifier les efforts en vue d’intégrer les dimensions de genre aux cadres internationaux de contrôle des armes, notamment au moyen d’une plus grande participation des femmes à ces initiatives, a fait valoir la représentante.  Les nouvelles méthodes de conception des armes classiques ainsi que les armes modulaires ou en polymère en trois dimensions représentent autant de défis que nous devons relever en établissant des normes appropriées, a-t-elle ajouté.

Le représentant du Paraguay a déclaré que son pays avait adopté l’ensemble des instruments régionaux et internationaux s’agissant du commerce des armes conventionnelles, et coopérait tant en matière de renforcement des capacités que dans l’élaboration d’un programme commun avec les pays de sa région.  Se félicitant de l’adoption sans vote du document final lors de la huitième Réunion biennale des États pour lutter et éradiquer le trafic des ALPC dans toutes ses dimensions, il a particulièrement loué son approche basée sur le genre, car « ce sont les femmes et les enfants qui sont les plus impactés par le trafic ». Il a également salué la mise en œuvre d’un programme de bourses destiné aux pays en développement.

M. ANTONIO CARLOS (Mozambique) a indiqué que son pays, dans le cadre de la mise en œuvre du programme d’action des Nations Unies pour la prévention, la lutte et l’élimination du trafic d’armes légères et de petit calibre (ALPC), avait mis en place divers instruments juridiques et lois afin d’améliorer la gestion, la possession et l’utilisation de ces armes par des civils, notamment à travers l’établissement de registres.  Des campagnes de sensibilisation sont aussi régulièrement menées ainsi que des ateliers pour faire connaître les mesures et stratégies sur cette question, a assuré le représentant.  En outre, il a rappelé que le Mozambique est membre de l’Organisation de coopération régionale des chefs de police d’Afrique australe qui coordonne toutes les mesures liées à la prévention et lutte contre le trafic d’ALPC. 

Par ailleurs, en août 2021, le Mozambique a signé un accord amendant le Protocole de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) sur les armes à feu et les munitions.  Cet amendement permet d’inclure les armes classiques de manière harmonisée et d’intégrer les menaces modernes liées à la prolifération d’ALPC, a précisé le délégué.  Évoquant ensuite la question du déminage, il a salué des résultats importants, le Mozambique ayant été déclaré exempt de mines antipersonnel en 2015.  En outre, le Gouvernement aide les rescapés des mines en fournissant une assistance sociale, des soins de santé et en mettant en place des mesures d’inclusion économique, a conclu le représentant.

M. JORGE VIDAL (Chili) a annoncé que le Chili établira un moratoire de deux ans sur l’entrée d’armes légères destinées à la vente et à l’utilisation par des civils, afin de réduire le nombre d’armes entre les mains de civils et d’interrompre le flux d’armes légales détournées vers des organisations criminelles.  Pour le représentant, il est pertinent de progresser dans la traçabilité des armes, des composants et surtout des munitions.  La traçabilité fait partie de l’ensemble du système d’échange de marchandises au niveau mondial et les munitions ne peuvent pas être laissées en dehors des mécanismes d’enregistrement et suivi des armes classiques, a-t-il dit, ajoutant que les producteurs d’armes et de munitions ont une responsabilité incontournable dans le renforcement technique et juridique du processus international de traçabilité.

Le représentant du Bélarus a estimé que la question de l’accumulation des armes légères et de petit calibre (ALPC) représente un grave problème pour la communauté internationale.  « Une mauvaise gestion des stocks de munitions peut entraîner des explosions sur le long terme », a-t-il déclaré.  Il a considéré qu’il faut mettre l’accent sur la sécurité de la gestion des APLC. 

Le représentant a déclaré que la préservation et la sécurité des stocks de munition est un problème important dont la solution doit porter sur la gestion des APLC sur tout leur cycle de vie, en prenant en compte tous les avis des États.  La conclusion logique de nos travaux sera l’élaboration d’un mécanisme global de gestion de stocks des APLC, a-t-il estimé, en considérant qu’il devait être possible de trouver, durant cette session, un accord sur la base d’un consensus. 

M. HEIDAR ALI BALOUJI (République islamique d’Iran) a rappelé le droit de tout État à importer et exporter des armes classiques.  Le représentant a demandé à préserver le consensus de la Convention sur certaines armes classiques et leur efficacité.  Préoccupé par l’accumulation d’armes dans certaines régions du monde et des dépenses militaires des États-Unis, le représentant a exigé une réduction des dépenses militaires, avant de dénoncer Israël et ses milliards de dollars de dépenses militaires.  Pour le représentant, les États-Unis sont les plus importants vendeurs d’armes aux pays du Moyen-Orient et l’arsenal militaire d’Israël est une menace pour la région. 

M. ALFRED MOUNGARA MOUSSOTSI (Gabon) a souligné qu’en Afrique le commerce des armes légères et de petit calibre par des organisations criminelles est souvent mis au service de l’utilisation d’enfants soldats et est associé au commerce des stupéfiants et à l’exploitation sexuelle des jeunes filles.  Devant l’ampleur du phénomène, le représentant a prôné une mise en œuvre plus stricte des mesures déjà adoptées, y compris les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

Pour le Gabon, il faut également renforcer la coopération, l’échange d’information et d’expériences pour une meilleure mise en œuvre des dispositions du Traité sur le commerce des armes adopté en avril 2013, et auquel il a tout récemment adhéré, le Programme d’action et l’Instrument international de traçage et le marquage des armes. 

Le représentant a expliqué qu’en Afrique centrale, les pays mettent en œuvre la Convention de Kinshasa pour le contrôle des armes légères et de petit calibre, de leurs munitions et de toutes pièces et composantes pouvant servir à leur fabrication, réparation et assemblage.  En outre, les sessions du Comité consultatif permanent pour les questions de sécurité en Afrique centrale consacrent des séances spéciales à la mise en œuvre par les États Membres de mesures édictées par ladite Convention, a-t-il précisé, notant que cet instrument fait partie intégrante de la stratégie sous-régionale contre le terrorisme et les flux illicites des ALPC.  Enfin, le représentant a rappelé que, pendant son précédent mandat au Conseil de sécurité, en 2010-2011, le Gabon avait organisé un débat public sur cette « lancinante question », les pistes de solutions contenues dans la Déclaration présidentielle adoptée à l’issue de ce débat méritant d’être mises en œuvre. 

M. QAIS Z. F. KASABRI, Observateur permanent de l’État de Palestine, a noté que les armes classiques, souvent « aveugles », sont celles qui font le plus de victimes parmi les civils.  À cet égard, l’État de Palestine, qui est un ferme partisan de l’élimination de certaines armes et d’une réglementation adéquate, a adhéré à tous les instruments relatifs à l’interdiction des armes de destruction massive de même qu’aux conventions sur les armes classiques.  L’État de Palestine étant également partie au Traité sur le commerce des armes, le représentant a rappelé aux États parties leurs obligations en vertu de ses articles 6 et 7, qui interdisent les transferts d’armes classiques pouvant être utilisées pour commettre un génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre.  L’État de Palestine, a-t-il ajouté, a pris ces engagements en raison de sa volonté de mettre un terme aux souffrances de son peuple à la suite de l’utilisation d’armes illicites par Israël et ses colons armés.  Il a appelé à l’élaboration d’une convention juridiquement contraignante sur les armes autonomes, qui représentent des défis moraux et techniques pour l’ensemble de l’humanité.  Il s’est félicité de la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils par rapport aux conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives en zone peuplées, et indiqué son intention d’y adhérer en novembre. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a jugé honteux de constater que certains accumulent de grandes richesses grâce au trafic d’instruments de mort.  Le devoir de faire face au problème du trafic illicite des APCL devrait préoccuper toute la communauté internationale et comme le pape François l’a affirmé à plusieurs reprises, il faut éliminer la violence à la racine, promouvoir une culture de paix et protéger le don le plus précieux de tous: la vie humaine.  Le représentant a paraphrasé le pape François, se demandant pourquoi on vendait des armes meurtrières à ceux qui projettent d’infliger des souffrances indicibles aux individus et à la société.  « Hélas la réponse, nous le savons tous, est tout simplement l’argent: de l’argent trempé dans le sang, souvent le sang des innocents. »

Droits de réponse

Le représentant de la Russie a répondu à la déclaration, hier, des États-Unis en accusant ce pays d’une propagande propice à la montée des tensions dans le Golfe persique.  Il s’en est ensuite pris à la France, au Royaume-Uni et aux États-Unis d’avoir politisé le fonctionnement de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques pour le détourner à leur profit. 

Le représentant d’Israël a rejeté les allégations de l’Iran, qu’il a accusé d’être le principal fournisseur d’armes classiques dans la région, cela « pour alimenter les hostilités au Moyen-Orient et déstabiliser l’ordre sécuritaire international ».  Quant à l’Autorité palestinienne, elle ferait mieux selon lui de proposer des solutions pour lutter contre le détournement d’armes classiques qui provoque chaque année des dizaines de morts israéliens. 

Le représentant de l’Iran a répondu en qualifiant Israël de principale entrave au désarmement et à la sécurité internationale. 

Autres mesures de désarmement

Mme MARIA BENEDICTA DIAH KRISTANTI (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a rejeté les tentatives d’utilisation malveillante des technologies de l’information et des communications (TIC), appelant à l’intensification des efforts pour éviter que le cyberespace soit un nouveau théâtre d’opération.  Il faut encourager à un usage pacifique des TIC afin que ces technologies puissent contribuer au développement économique, a-t-elle lancé.  Prenant note des conclusions du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale, la représentante a réaffirmé l’importance de veiller à ce que l’utilisation de ces technologies soit pleinement conforme aux buts et principes de la Charte des Nations Unies. 

Par ailleurs, elle a rappelé que le Groupe de travail à composition non limitée sur l’évolution de la situation dans le domaine de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale (GTCNL), créé par la résolution 73/27 de l’Assemblée générale, a été le premier mécanisme inclusif établi au sein des Nations Unies avec la participation de tous les États membres, agissant sur la base du consensus.  Au sujet du Groupe de travail sur la sécurité et l’utilisation des technologies de l’information et de la communication, créé par la résolution 75/240 de l’Assemblée générale, la représentante a fait savoir qu’il s’agissait actuellement du seul mécanisme ouvert à tous, qui tienne compte des préoccupations et des intérêts de tous les États.  Des pourparlers doivent être engagés sur la base des recommandations formulées dans le premier rapport d’étape du groupe, a suggéré la représentante.  Elle a précisé que la mise en place d’un cadre international permettant de réguler l’utilisation des TIC doit évidemment prendre en compte les besoins et particularités de chacun.  C’est le consensus qui doit être privilégié, a-t-elle appuyé, appelant ensuite également à ce que ce cadre n’entrave pas le droit inaliénable de chacun à utiliser des TIC à des fins pacifiques, notamment pour les pays en développement. 

En outre, elle a rappelé que les mesures de confiance et de renforcement des capacités sont fondamentales pour être plus efficace sur le cyberespace.  Confiant sa préoccupation face à des dépenses militaires en hausse, elle a estimé que ces sommes pourraient être utilisées à des fins de développement.  Enfin, la représentante a signalé la présentation de trois projets de résolution, espérant que les États Membres s’y associent : le respect des normes environnementales dans l’élaboration et mise en œuvre des accords de désarmement, la promotion du multilatéralisme dans le domaine du désarmement et la non-prolifération, l’effet de l’utilisation d’armements et de munitions contenant de l’uranium appauvri et la relation entre le désarmement et le développement.

Au nom des États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. CARLOS FULLER (Belize) a rappelé que la sécurité était le quatrième pilier du processus d’intégration régionale de la CARICOM.  L’ensemble complexe de crises à laquelle la communauté internationale est confrontée a renforcé la prise de conscience de la nécessité absolue de partenariats plus collaboratifs, a ajouté le représentant, aucun État n’étant capable de gérer la paix et la sécurité de manière indépendante.

La CARICOM estime que la prise en compte permanente des perspectives de genre ne peut que faire progresser la réalisation des objectifs de désarmement et cherche à passer d’une approche traditionnelle à une approche « multidimensionnelle et humanitaire », afin qu’aucune femme, aucun homme, aucun garçon ou aucune fille ne soit laissé pour compte, a expliqué M. Fuller.  En ce sens et comme tous les deux ans en Première Commission, Trinité-et-Tobago, membre de la CARICOM, présentera un projet de résolution pour promouvoir l’égalité des chances pour les femmes dans les processus de désarmement et de prise de décisions, et pour renforcer la participation effective des femmes dans le domaine du désarmement.  Sur le point précis de la cybersécurité.  Le représentant s’est félicité que la bourse « Women in Cybersecurity », parrainée par le Canada, l’Australie, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis, ait permis à des femmes des États membres de la CARICOM d’assister et de participer au groupe de travail des Nations Unies sur la cybersécurité.

Le représentant a déclaré que la stratégie antiterroriste de la CARICOM concrétise l’engagement de la sous-région dans la lutte mondiale contre ce fléau qui sape les valeurs et les principes fondamentaux de l’organisation régionale.  M. Fuller a souligné le rôle joué par l’Agence de mise en œuvre de la CARICOM pour la criminalité et la sécurité.

Aucun pays n’étant à l’abri des cybermenaces, M. Fuller a rappelé que le plan stratégique de la CARICOM souligne que la cybercriminalité constitue un obstacle et une menace pour le développement économique durable de la région.  Conscient que les développements scientifiques et technologiques continuent de transformer nos interactions quotidiennes, le représentant a appelé à la vigilance pour comprendre les technologies d’armement nouvelles et émergentes.  La CARICOM souhaite que les États mettent en œuvre les normes, règles et principes pour un comportement responsable dans le cyberespace et, à cette fin, poursuivra son engagement actif au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur les évolutions dans le domaine de l’information et des communications: 2021-2025.  Le représentant a toutefois fait observer que, pour contribuer efficacement au processus, il faudra s’attaquer à la fracture numérique.

Bien que la région CARICOM ne soit pas touchée par les conflits armés, ses membres sont confrontés à d’énormes défis liés à la violence armée, a fait observer M. Fuller.  Alors qu’aucun État membre de la CARICOM n’est producteur d’armes dans nos pays, le commerce des armes et leur prolifération contraint les pays de la région à détourner des ressources importantes qui pourraient autrement être consacrées au développement.  Le représentant a estimé que la sous-représentation des petits États insulaires en développement dans les forums internationaux sur le désarmement devrait être abordée, afin que les décisions qui y sont prises reflètent bien les préoccupations mondiales, donc les leurs.  En ce sens, la CARICOM se félicite de la résolution présentée par l’Indonésie au nom des membres du Mouvement des pays non alignés sur la « Relation entre le désarmement et le développement ».

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines), a mis l’accent sur la cybersécurité et souligné le rôle central de l’ONU dans les discussions sur la question.  L’ASEAN réaffirme la nécessité de renforcer la coopération pour construire un cyberespace ouvert, sûr, sécurisé, stable, accessible, interopérable, pacifique et résilient, et de minimiser le risque de mauvaise perception et de mauvais calcul en développant la confiance.  Le représentant a lancé un appel aux États Membres mettant l’accent sur l’importance de préserver le consensus sur la question. 

En ce sens, le représentant s’est félicité de la résolution consensuelle adoptée pour la première fois l’an dernier.  Il a en revanche regretté qu’il n’en soit pas de même cette année, souhaitant que cet échec soit « une aberration plutôt qu’un renversement des progrès réalisés jusqu’à présent ».  Pour l’ASEAN, il est essentiel que les États Membres continuent à travailler ensemble pour préserver l’efficacité et l’efficience du travail du Comité et évitent l’existence de mécanismes parallèles sur les mêmes questions.  L’ASEAN réaffirme en outre son soutien aux travaux du Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) sur la sécurité des technologies de l’information et de la communication (TIC) et de leur utilisation 2021-2025.  Elle y voit une mesure de confiance et un forum permettant d’établir et de rétablir un consensus sur cette question importante.  Elle se félicite de l’adoption par consensus du premier rapport d’activité annuel du groupe, en juillet dernier. 

Le représentant a ensuite mis l’accent sur la coopération en matière de cybersécurité au niveau de l’ASEAN, guidée par le plan directeur numérique 2025 de l’organisation régionale et sa stratégie de coopération en matière de cybersécurité 2021-2025, adoptée en janvier dernier.  Cette stratégie, a expliqué M.Peñaranda, a été élaborée en réponse à des développements cybernétiques récents et vise à renforcer les efforts collectifs de l’ASEAN pour fournir un environnement cybernétique sécurisé, afin que l’économie et la communauté numériques de la région puissent se développer.  L’ASEAN renforce également la coopération en matière de cybersécurité grâce à un comité de coordination.

Concernant les TIC, l’ASEAN souligne l’importance de la coopération internationale pour permettre à tous les États, en particulier aux pays en développement, de mettre effectivement en œuvre les 11 normes volontaires et non contraignantes de comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC.  L’ASEAN a adopté un Plan d’action régional en ce sens, qui doit permettre à ses membres d’identifier les domaines nécessitant un soutien supplémentaire pour la mise en œuvre des normes.  L’ASEAN espère aussi travailler en tandem avec les Nations Unie, notamment dans le cadre du partenariat global ASEAN-ONU. 

L’ASEAN réaffirme son engagement à être prête, pour l’avenir, à relever tous les défis en matière de sécurité et à renforcer sa coopération avec la communauté internationale pour faire avancer nos objectifs communs d’avoir un cyberespace pacifique, sûr et résilient. 

Au nom du Groupe des États arabes, M. SHAMRAN (Iraq) a déclaré que les solutions convenues dans le cadre multilatéral sont les seules façons de régler la question de désarmement.  Tous les États doivent respecter leurs engagements dans le désarmement et la non-prolifération.  Préoccupé par les dépenses militaires et les tensions dans le monde, le représentant a réaffirmé l’importance des mesures de suivi de la Conférence sur le désarmement. 

La modernisation des arsenaux nucléaires est une menace à la paix et la sécurité internationales, a poursuivi le représentant, pour qui tous les États doivent respecter les normes environnementales dans le cadre des accords internationaux de désarmement.  À cet effet, il encourage l’élaboration de règles juridiquement contraignantes pour encadrer le comportement des États dans ce domaine.

Le Groupe des États arabes est également préoccupé par l’utilisation des TIC par les groupes terroristes.  Il a demandé une coopération internationale renforcée à cet égard ainsi que le renforcement des capacités des États dans le domaine des technologies de l’information et de la communication pour faire face aux sabotages.  Il a terminé en soulignant le rôle que devrait avoir l’ONU dans le domaine des TIC. 

Mme MEIKE KORFF, de l’Union européenne, a rappelé que l’Union européenne et ses États membres promeuvent un cyberespace libre où les droits humains et les libertés fondamentales s’appliquent pleinement.  Elle a rappelé le travail important réalisé par la communauté internationale concernant la sécurité du cyberespace.  Par ailleurs, la représentante a condamné la guerre hybride et les cyberattaques en cours depuis février 2022, et en particulier « des cyberactivités mal intentionnées qui ont eu lieu une heure avant l’invasion non justifiée de l’Ukraine, ce qui a facilité l’agression militaire », a-t-elle souligné.  Des cyberattaques ont eu lieu le 24 février 2022, ce qui a perturbé plusieurs États de l’Union européenne, a-t-elle ajouté.  À cet égard, elle a condamné les attaques aveugles de hackeurs qui ont des retombées systémiques et font tache d’huile sur de nombreux pays.

Passant à la question du Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) sur les technologies de l’information et des communications (TIC), la représentante a confirmé que l’ONU est bien placée pour promouvoir le dialogue sur l’utilisation des TIC.  Elle s’est félicitée du consensus sur le rapport d’étapes annuel du GTCNL.  Les mesures de confiance et le renforcement des comportements responsables en matière de TIC sont un socle sur lequel se fonde le Groupe, a-t-elle rappelé.  Toutefois, elle a regretté que de nombreuses organisations non gouvernementales n’aient pas pu avoir accès aux travaux.  L’Union européenne reste prête à travailler avec les parties prenantes, de façon systématique, a-t-elle déclaré.  « Étant donné le contexte, la capacité à trouver un consensus enverrait un message », a-t-elle souligné. 

L’Union européenne appuie la proposition d’un Programme d’action pour promouvoir un comportement responsable dans le cyberespace.  Le projet de résolution présenté sur ce point vise à promouvoir un programme d’action de l’ONU et pour compléter les autres résolutions, pas à en faire un projet parallèle, a insisté la représentante. 

À la suite des déclarations de groupes de pays, une quarantaine de délégations ont pris la parole, pour partager notamment leurs vues sur les moyens multilatéraux de renforcer la cybersécurité mondiale. 

La Chine, l’Indonésie, l’Égypte, le Pakistan, les Philippines, la Thaïlande, Singapour, l’Afrique du Sud, la Malaisie, le Bangladesh, l’Algérie, l’Irak, le Sri Lanka, le Koweït, le Myanmar, qui ont soutenu les positions du Mouvement des non-alignés et de leur groupe régional respectif, ont appelé au renforcement des normes multilatérales sur la sécurisation des TIC en vue, en outre, de permettre l’utilisation à des fins pacifiques et de prospérité du cyberespace, qualifié par certains, comme la République islamique d’Iran, de « patrimoine commun de l’humanité ».  Comme l’a dit le Brésil, le cyber espace ne doit pas devenir un terrain de conflit Si ces pays ont regretté la présentation de projets concurrents sur les TIC, appelant de leur vœux la poursuite d’un processus de délibérations « unique » sous les auspices de l’ONU, ils ont apporté un soutien unanime aux travaux du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les progrès de l’informatique et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale.  Celui-ci, a-t-il été dit, doit poursuivre jusqu’en 2025 ses efforts, en dépit des tensions géostratégiques actuelles.  Ces pays ont en également demandé le renforcement, toujours dans le cadre multilatéral de l’ONU, des mesures de réduction des risques de déstabilisation et d’alimentation des conflits asymétriques associés à l’utilisation des systèmes d’armes létaux autonomes, y compris par des groupes non-étatiques.  L’appui de la Commission du droit international dans l’élaboration institutionnelle des politiques cyber-politiques de demain a par ailleurs été évoqué. 

La Fédération de Russie est intervenue pour souligner que la valeur ajoutée du Groupe d’experts est que tout un chacun peut participer à ses travaux, qui traite tant de considérations sécuritaires nationales qu’internationales.  Le rapport à mi-parcours de son mandat, adopté en juillet dernier, marque un progrès, a estimé le représentant russe, qui a présenté le projet de résolution sur les TIC dans le contexte de la sécurité internationale que soumet chaque année sa délégation depuis 1998.  À ce propos, il l’a qualifié de document consensuel et dépolitisé qui complète le projet de résolution de Singapour sur ledit rapportNotre texte repose sur les dispositions de résolutions précédemment adoptées, son but principal étant de préserver le caractère ouvert du Groupe en évitant tout chevauchement dans les processus de délibérations sur les questions de cybersécurité, a-t-il dit.  Le représentant russe a jugé que la présentation d’un projet de résolution concurrent par les « Occidentaux » contrevient à la volonté de la majorité écrasante des États Membres, qui appellent à la poursuite de négociations intergouvernementales en vue de renforcer concrètement la cybersécurité dans le cyberespace.  Il y a vu une tentative de création d’un mécanisme qui « arrangerait les Occidentaux », prendrait des décisions qui seraient ensuite imposés à tous, y voyant une forme de « cybercolonialisme ».

Pour leur part, les États-Unis ont repris les accusations et les condamnations de l’Union européenne visant la Russie en matière de cybermenaces.  Pour parvenir à un Internet sûr et à la cyber-stabilité, le représentant américain a attiré l’attention sur la nécessité de soutenir le Groupe de travail à composition non limitée chargé, « sur la base d’un consensus mis à mal par les agissements de la diplomatie russe à la Première Commission », de poursuivre l’élaboration des règles, normes et principes de comportement responsable des États.  À cet égard, il a appelé les délégués à appuyer la résolution pertinente qui sera présentée par la France sur les questions de cybersécurité.  La France, qui a souligné l’utilité de travailler à la mise en place d’un mécanisme permanent sur les questions cybernétiques, a rappelé qu’elle promeut depuis 2020 une proposition de programme d’action des Nations Unies pour la cybersécurité, qui, après avoir pris le relais du Groupe d’experts, viserait à établir aux Nations Unies un mécanisme permanent, inclusif et tourné vers l’action.  La représentante française a ensuite confirmé qu’elle présentait cette année à la Commission, « un projet de résolution intitulé Programme d’action visant à promouvoir un comportement responsable des États dans l’utilisation des TIC dans le contexte de la sécurité internationale ».  Ce projet de résolution, a noté la représentante française, est coparrainé à l’heure actuelle par 54 États issus de divers groupes régionaux. 

Les déclarations et annonces de l’Union européenne, de la France et des États-Unis ont été soutenues par l’Australie, les Pays-Bas, l’Autriche, l’Italie, l’Estonie, la République de Corée, le Japon, le Royaume-Uni, la Suisse, la Roumanie, mais aussi le Sénégal, El Salvador ou le Chili, qui ont appelé tous les États à tenir compte de manière transparente et constructive des rapports produits par le Groupe d’experts et le Groupe de travail.  Ils ont reconnu l’importance de mettre au point un mécanisme permanent sur la cybersécurité, sur le modèle du programme d’action envisagé par la France.  Ces pays ont également souligné l’importance du rôle de la société civile, de la communauté scientifique, du secteur privé et des organisations régionales pour mieux comprendre la nature des nouvelles menaces en matière de cybersécurité et agir efficacement et collectivement contre elle. 

Au vu des conséquences de l’agression brutale et intolérable de l’Ukraine par la Russie, dont les innombrables cyber-opérations ont altéré les télécommunications ukrainiennes et de pays tiers, il apparaît nécessaire de protéger les infrastructures numériques contre les ingérences malveillantes, cela en renforçant la cyber-résilience des États touchés par des cyberattaques, a-t-il été dit.  La défense du droit international humanitaire dans les mondes physique et virtuel a aussi été évoquée. 

L’Ukraine a pris la parole pour souligner combien les TIC peuvent être des armes redoutables quand elles sont détournées à des fins de guerre.  Depuis 2014, nous avons fait face à un nombre sans précédent de cyber-opérations menées par des hackers téléguidés par Moscou contre des infrastructures vitales de notre pays, a indiqué le représentant ukrainien.  Grâce à l’appui de partenaires occidentaux de confiance, une stratégie de protection du cyberespace nationale a été mise en place, permettant de renforcer notre cybersécurité, a-t-il dit.  Les cybercriminels qui ont mis à mal notre souveraineté devront rendre des comptes, a ajouté le représentant avant d’apporter le soutien de sa délégation au projet de résolution porté par la France. 

L’Arménie, l’Inde, la Türkiye ou encore Cuba ont souligné l’importance de tenir compte des besoins de sécurité légitimes, y compris préventifs, des États en matière de TIC utilisées de manière responsable et dans le respect du droit international.  Ces pays ont aussi plaidé pour une coopération technique accrue et pour le renforcement partagé des capacités sur toutes les questions relatives aux TIC.  Le Saint-Siège a lui aussi demandé une coopération en vue de renforcer les capacités de tous les États, sans condition, afin de combler le fossé numérique entre les États, source de vulnérabilités et d’inégalité.

Enfin, plusieurs intervenants, dont le Chili ou le Mexique, ont mis l’accent sur la participation des femmes dans les questions de désarmement et sur la prise en compte des questions de genre dans les discussions.  Ils ont apporté leur soutien au projet de résolution qui sera présenté par Trinité-et-Tobago « femmes, désarmement et contrôle des armements ».

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a critiqué les pays occidentaux à l’égard de l’attitude à adopter au sujet des groupes à composition limitée, la jugeant illogique, contradictoire et assimilable à du « cybercolonialisme ».  Il a également protesté contre ce qu’il a considéré comme une violation des engagements des États-Unis, pays hôte des Nations Unies, en matière de visas.  Il a enfin accusé certains États Membres de l’OTAN de diffamer la Russie et d’effectuer des cyberattaques sophistiquées, à partir d’une armée informatique opérant depuis les États-Unis et l’Union européenne. 

Le représentant de la République démocratique populaire de Corée, en réponse au Royaume-Uni, a formellement rejeté les « accusations sans preuve » dont son pays a fait l’objet.  C’est au contraire le Royaume-Uni qui fait acte d’ingérence dans le cyberespace, a répliqué l’orateur.
 

Le représentant de la Chine a dénoncé à son tour des accusations sans fondement de la part du Royaume-Uni.  Nous sommes fermement engagés à préserver la cybersécurité, a-t-il assuré, indiquant que la Chine était elle-même victime de cyberattaques.  Soulignant que la cybersécurité est un défi collectif mondial, il a estimé que l’ensemble des pays doivent mettre l’accent sur le respect mutuel.  Il faut promouvoir le dialogue pour répondre aux menaces à la cybersécurité, a-t-il insisté, appelant les États Membres à mettre un terme aux accusations sans fondement à l’encontre de la Chine.

Le délégué d’Israël a rejeté les allégations « fallacieuses » et « absurdes » de l’Iran, aux vues des cyberattaques menées par ce pays contre les opérations de paix des Nations Unies.  L’Iran travaille en permanence contre la communauté internationale pour venir à bout des mécanismes de contrôle des armes, a-t-il accusé, avec l’appui de groupes terroristes, en semant la peur et la destruction dans le monde entier. 

Réagissant aux propos de la Fédération de Russie sur le projet de résolution concernant le renforcement des capacités en matière cyber, la France a noté que des consultations sur ce projet avaient été menées de manière ouverte, transparente et inclusive, et que ce texte a été amélioré en tenant compte des propositions des délégations au cours de quatre séances de consultations.  Le Secrétaire général présentera l’an prochain un rapport précisant les modalités du Programme d’action, a encore indiqué la représentante. 

Le représentant de l’Iran a accusé son homologue Israël de mensonges, fustigeant ce pays pour avoir mené des cyberattaques contre des hôpitaux iraniens.  Il a appelé la communauté internationale à obliger Israël à adhérer au TNP et à aux autres résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale.  Les actions d’Israël sont condamnables et irresponsables, a-t-il insisté.

Désarmement régional

S’exprimant au nom du Groupe des pays non alignés, Mme KRISTANTI (Indonésie) a réaffirmé son appui total à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et de destruction massive au Moyen-Orient, conformément aux résolutions idoines du Conseil de sécurité.  Le Groupe a appelé toutes les parties prenantes à donner suite à la proposition de création d’une telle zone.  Les États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) sont déçus que la création d’une telle zone n’ait pas encore eu lieu, c’est « un obstacle à l’équilibre des trois piliers du désarmement », a jugé la représentante du Groupe.  Les zones exemptes d’armes nucléaires sont des mesures essentielles pour le désarmement et la non-prolifération au niveau mondial et il est essentiel que les États dotés de l’arme nucléaire fournissent des garanties quant à leur usage, quelles que soient les circonstances, a-t-elle pointé.  Le Groupe a également appelé à créer d’autres zones exemptes dans le monde, ainsi qu’à revitaliser les trois centres régionaux pour la non-prolifération.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. FULLER (Belize), a signalé la création d’un cadre institutionnel régional pour appuyer la coopération pour la mise en œuvre d’une Agence sur la criminalité et la sécurité.  Les flux illicites d’armes à feu et de munitions restent un défi majeur dans la région, a-t-il déploré.  Notant que 7 homicides sur 10 dans la région surviennent par armes légères ou de petit calibre, le représentant a également affirmé que plus d’un demi-million d’armes à feu illégales sont en circulation rien qu’à Haïti.  Aucun État de la CARICOM n’est fabriquant ou importateur majeur d’armes à feu, a-t-il en outre rappelé, jugeant donc essentiel de prévenir le passage transfrontalier d’armes et de munitions illégal. 

Malgré les différentes initiatives ou mécanismes, la violence par arme à feu reste importante dans la région, a poursuivi le représentant, rappelant que les effets des politiques en matière d’accès aux armes ne sont pas confinés aux frontières de chaque État.  Ainsi, la prévention du trafic illicite d’armes concerne les États de la CARICOM mais aussi les États d’origine de ces armes, a-t-il fait valoir.  Par ailleurs, le représentant a indiqué l’adoption en 2020 d’une feuille de route pour la mise en œuvre des actions prioritaires sur la prolifération illicite d’armes à feu et munitions dans la zone caraïbe.  Les mesures concrètes pour mettre en œuvre cette feuille de route incluent, entre autres, des contrôles aux frontières et un appui législatif, a-t-il indiqué. 

Pour la CARICOM, le Traité sur le commerce des armes et le Programme d’action des Nations Unies pour prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sont des instruments essentiels.  Mais un des principaux défis auquel se heurtent les petits États insulaires en développement pour mettre en place tient à l’absence de ressources adéquates et de capacités techniques, a déclaré le représentant.  La CARICOM manque aussi de transfert de technologies dans cette mise en œuvre, a-t-il enfin indiqué, appelant à redoubler d’effort pour remédier à ce déséquilibre.

 

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Conseil de sécurité: l’impasse politique prolongée en Libye continue de préoccuper les membres ainsi que le nouveau Représentant spécial

9162e seance - matin
CS/15075

Conseil de sécurité: l’impasse politique prolongée en Libye continue de préoccuper les membres ainsi que le nouveau Représentant spécial

Les membres du Conseil de sécurité ont été unanimes, ce matin, pour exprimer leurs préoccupations devant l’impasse politique prolongée qui paralyse la Libye, creuse les divisions au sein de la population et retarde la perspective de tenue d’élections inclusives, libres et régulières.

Cette impasse, causée par les difficultés à résoudre les questions en suspens, liée à la base constitutionnelle des élections, semble par ailleurs n’avoir « aucune issue claire en vue », notamment à cause des divergences importantes sur la manière d’en sortir, a regretté, avec eux, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL).

M. Abdoulaye Bathily, qui prenait la parole, pour la première fois, devant le Conseil depuis sa désignation à ce poste le 25 septembre dernier, a alors expliqué qu’il avait entamé une série de consultations avec toutes les parties libyennes, afin de concevoir une réponse à ce « défi politique de taille ».  Il a ainsi eu des échanges avec le Président du Conseil de la présidence, des membres du Gouvernement d’unité nationale dont le Premier Ministre Abdulhamid Dbeibah, ainsi qu´avec le maréchal Khalifa Haftar et le Premier Ministre désigné par la Chambre des représentants, M. Fathi Bashaga, entre autres.

Demandant l’appui du Conseil, le Représentant spécial lui a demandé d’insister auprès des acteurs libyens sur la nécessité de travailler ensemble, de manière sincère et engagée, en vue des élections.

Le représentant de la Libye a, lui aussi, mis en exergue la « grande priorité » qu’est la tenue des élections, étape importante pour en finir avec les confrontations et confirmer la légitimité des institutions.  Seule la réconciliation nationale « authentique et réelle » permettra de sortir de l’impasse et de tourner la page du passé, a dit le délégué, qui a qualifié de vital l’appui accordé à la Commission militaire conjointe 5+5.

Face à cette perspective, les délégations ont exprimé des positions similaires en ce qui concerne les élections et les ingérences extérieures, avec cependant quelques nuances sur le fond.

Sur la question des élections, l’accord a été unanime: les élections, au plus tôt, de manière libre, équitable, inclusive et crédible, sur une base constitutionnelle robuste, sont le seul moyen d’aller de l’avant et il est urgent de mettre la Libye sur cette voie.  Face aux divisions croissantes, il devient primordial, dans les meilleurs délais, d’œuvrer à une nouvelle feuille de route politique, avec comme objectif essentiel un Gouvernement libyen unifié, capable de gouverner partout en Libye et représentant tous les Libyens.

La MANUL doit, dans ce contexte, exercer des pressions sur les parties libyennes afin qu’elles parviennent à s’entendre sur la tenue d’élections, dans un calendrier réaliste, ont par exemple insisté les États-Unis, l’Inde, l’Albanie, le Brésil ou la France.

La tenue de ces élections ne doit pas être une stratégie de courte vue, avec des délais imposés de l’extérieur, mais au contraire un processus appartenant et contrôlé par le peuple libyen, et dépourvu de « dictats extérieurs », au risque d’aggraver la situation, ont mis en garde les A3, (Gabon, Kenya et Ghana), la Chine et la Fédération de Russie, rejoints par les Émirats arabes unis, qui plaident pour la poursuite des consultations et discussions en cours.

La question de l’ingérence étrangère a également été évoquée par les délégations, dans le contexte où, selon la France, le statu quo rend la Libye perméable aux ingérences étrangères et aux tentatives de déstabilisation, ainsi qu’aux divisions.  Les délégations ont alors jugé prioritaire, la mise en œuvre, ordonnée du Plan libyen de retrait des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires.  Tout aussi prioritaire est la mise en œuvre d’un processus de démobilisation, désarmement et réintégration des milices.

Constatant que la question des recettes pétrolières continue d’alimenter les tensions et les divisions, les États-Unis ont appelé, de leur côté, à trouver un accord sur un mécanisme de supervision et de reddition de comptes transparent qui permette une répartition équitable.  Les A3 ont, pour leur part, mis le Conseil en garde contre « la politisation et la manipulation » du secteur pétrolier libyen par des forces extérieures.

À quelques jours du renouvellement du mandat de la MANUL, toutes les délégations se sont dites favorables à une extension pour une année de plus, Chine et Fédération de Russie comprises.  Cette dernière a cependant dit souhaiter discuter du fond, maintenant que la situation a changé.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

M. ABDOULAYE BATHILY, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), qui s’exprimait pour la première fois devant le Conseil en tant que titulaire de ce mandat, a expliqué que l’impasse politique, en particulier l’impasse sur le pouvoir exécutif, persiste en Libye, sans qu’aucune issue claire ne soit en vue.  De plus, les efforts visant à résoudre les questions en suspens, liées à la base constitutionnelle des élections, ne semblent pas déboucher sur des actions concrètes de la part des acteurs concernés.  Cette situation retarde davantage les perspectives de tenue d’élections inclusives, libres et régulières afin de mettre fin à la transition et rétablir la légitimité des institutions.

Pour concevoir une réponse à ces défis politiques de taille, le Représentant spécial a indiqué donner la priorité aux consultations avec les acteurs libyens de tout le pays, y compris du Sud, de l’Est et de l’Ouest, afin de mieux comprendre les défis actuels, les solutions possibles et les aspirations du peuple libyen.  Il a donc eu des échanges de vues avec notamment, le Président du Conseil de la présidence, des membres du Gouvernement d’unité nationale, le Chef d’état-major général et les membres occidentaux de la Commission militaire conjointe.  Il a également consulté la Haute Commission électorale nationale, la National Oil Corporation, la Banque centrale de Libye, de même qu’avec le Président du Haut Conseil d’État et le Président de la Chambre des représentants.

M. Bathily s’est aussi rendu à Benghazi, où il a rencontré le maréchal Khalifa Haftar et le Premier Ministre désigné par la Chambre des représentants, M. Fathi Bashaga, ainsi que des représentants d’organisations de la société civile et des femmes candidates aux élections législatives.  De ces rencontres, il a constaté qu’il reste des divergences importantes sur la manière dont les Libyens veulent surmonter la crise actuelle.  Mais, il y a une condamnation quasi-unanime de la présence de mercenaires, de combattants étrangers et de forces étrangères en Libye, et à l’ingérence étrangère incessante dans les affaires du pays, a-t-il indiqué.

Dans un contexte marqué par le maintien du cessez-le-feu, le Représentant spécial a appelé à renforcer le volet sécurité qui a été compromis par l’impasse politique prolongée.  Les violents affrontements à Tripoli, le 27 août, ont entraîné une modification des rapports de force dans la capitale, ce qui a aggravé les tensions entre les acteurs de sécurité orientaux et occidentaux et conduit à une stabilité fragile, a-t-il indiqué.  Il a également signalé que, malgré une diminution notable de la mobilisation des groupes armés et des affrontements entre eux, des activités de recrutement à grande échelle seraient en cours.  Il a ensuite annoncé que la Commission militaire conjointe 5+5 a convenu de se réunir sous les auspices de l’ONU à Syrte, jeudi prochain, pour discuter de la reprise de ses activités afin de poursuivre la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu.

Le Représentant spécial a également abordé la situation des droits humains, qu’il a qualifiée de « préoccupante », dénonçant notamment les violations contre les migrants et les demandeurs d’asile, ainsi que les détentions arbitraires qui restent des pratiques courantes totalement impunies.  Le 7 octobre, à la suite d’affrontements entre gangs rivaux de trafiquants d’êtres humains dans la ville de Sabrata, 11 corps calcinés de personnes supposées être des migrants ont été découverts dans un bateau amarré, ainsi que 4 autres corps avec des traces de blessures à l’extérieur du bateau.  Les statistiques officielles montrent en outre que près de 11 000 personnes, dont 55 femmes, purgent des peines dans les prisons gérées par la police judiciaire.  Près de 6 000 personnes sont en détention provisoire, dont 113 femmes.  On compte également 135 mineurs derrière les barreaux.  Ces chiffres, qui représentent une hausse de 40% par rapport à 2021, n’incluent pas les quelque 3 243 migrants détenus arbitrairement dans des centres de détention gérés par des entités gouvernementales, a-t-il déploré.

Pour M. Bathily, la situation en Libye appelle à un processus consensuel de « relégitimation » de l’État.  Dans ce processus, la conduite des élections législatives et de la présidentielle est primordiale, a-t-il dit, ajoutant qu’il intensifierait les consultations avec les acteurs concernés pour progresser vers un accord sur les paramètres nécessaires pour atteindre cet objectif, y compris lors du prochain Sommet de la Ligue des États arabes.  Il est important, a-t-il souligné, que le Conseil de sécurité coordonne les messages et insiste auprès des acteurs libyens sur la nécessité de travailler ensemble, de manière sincère et engagée, en vue des élections.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a regretté que l’élite politique libyenne n’ait pu progresser pour convenir de la tenue d’élections parlementaires et présidentielle libres, équitables et inclusives.  Il a appelé toutes les parties libyennes, en particulier les dirigeants politiques, à travailler de manière constructive avec le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Abdoulaye Bathily, et à convenir d’une feuille de route pour la tenue d’élections dans les meilleurs délais, et ce, dans l’intérêt de tout le peuple libyen.  Le délégué s’est dit préoccupé par les signalements de restrictions accrues à l’espace civique, avec des obstacles administratifs et des contrôles de plus en plus fréquents et intenses.  Affirmant qu’une société civile dynamique est indispensable à la tenue des élections, il a demandé aux autorités libyennes de lui garantir un environnement sûr et sans entrave.  Le délégué a également appelé toutes les parties à protéger la neutralité, l’intégrité et la réunification des institutions publiques afin de faire en sorte que les richesses du pays soient utilisées pour le bien de tous ses citoyens.  Enfin, les rapports sur la mauvaise utilisation des fonds publics, exposés dans le récent rapport du bureau d’audit, portent atteinte à la crédibilité des institutions libyennes, a-t-il estimé.

Mme MONA JUUL (Norvège) a jugé crucial que l’ONU ait une présence forte et stable en Libye afin de soutenir le processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens.  Pour cela, les recommandations issues de l’examen stratégique doivent être mises en œuvre et la MANUL doit disposer des ressources nécessaires, a-t-elle souligné, plaidant pour une prolongation d’un an du mandat de la Mission.  Dans ce contexte, la déléguée a souhaité que le nouveau Représentant spécial puisse dialoguer avec les parties libyennes dès que possible afin de remettre le processus politique sur les rails.  La priorité devrait être de s’entendre sur un cadre constitutionnel et un calendrier pour la tenue d’élections, a-t-elle affirmé, avant d’exhorter toutes les parties libyennes à travailler de manière constructive avec M. Abdoulaye Bathily sur ces questions et à s’abstenir de toute action susceptible d’aggraver la situation.

La représentante s’est ensuite déclarée préoccupée par la détérioration de la situation des migrants en Libye.  Condamnant le meurtre de 15 d’entre eux à Sabrata, elle a appelé les autorités libyennes à enquêter sur ces décès.  Elle s’est également alarmée des informations faisant état de violations et d’abus du droit international, notamment de violences sexuelles en lien avec le conflit, d’arrestations arbitraires, d’enlèvements et des cas de torture.  Elle a notamment dénoncé les actes de violence signalés dans les centres de détention à l’encontre d’enfants migrants et réfugiés.  Enfin, après avoir appelé à la libération de toutes les personnes illégalement détenues, elle a réitéré son appel au retrait complet de tous les combattants étrangers, mercenaires et forces étrangères de Libye et à la mise en place d’un programme suffisant de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) en étroite collaboration avec les pays voisins.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que le maintien d’un pouvoir bicéphale en Libye n’annonce rien de bon et ne peut que conduire à la violence.  Il s’agit donc pour le Conseil de sécurité de faire cesser cette violence.  Or, certains cherchent à geler ce conflit, a-t-il dénoncé, déplorant une stratégie de courte vue.  La priorité doit rester la tenue d’élections inclusives, incluant les partisans de l’ancien régime et sans délais imposés de l’extérieur, au risque d’aggraver la situation, a prévenu le représentant.  De même le retour des combattants étrangers doit avoir lieu de manière planifiée et ordonnée.

Le représentant s’est également inquiété de l’ingérence extérieure et la manipulation des partis politiques libyens.  Toute ingérence étrangère ne fera qu’aggraver la situation et non la réguler, a-t-il mis en garde.  Constatant en outre que la situation avait évolué, il a dit être désormais favorable au renouvellement du mandat de la MANUL pour une « période prolongée » d’un an, au lieu des trois mois qu’il envisageait auparavant.  Il a également dit souhaiter discuter des questions de fond lors de ce renouvellement.  Le délégué a ensuite rappelé que c’est l’assassinat de l’ancien dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, suite à l’intervention de l’OTAN, qui est la cause de la situation en Libye aujourd’hui.  Pendant que certains dirigeants occidentaux s’en étaient réjouis, il faut aujourd’hui en tirer des leçons, a-t-il dit.

M. MARTIN KIMANI (Kenya), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana, et Kenya), s’est dit préoccupé par l’impasse politique qui se prolonge et creuse les divisions au sein de la population.  Il a réitéré l’appel des A3 aux dirigeants libyens pour qu’ils répondent au désir de paix, de stabilité et de prospérité du peuple libyen.  Il s’est également inquiété de la mobilisation continue des groupes armés à Tripoli et dans ses environs et de l’échange continu de déclarations incendiaires, affirmant qu’il n’y avait pas de solution militaire à la situation.  M. Kimani a appelé au dialogue et à la réconciliation dans le cadre d’un processus appartenant au peuple libyen et dépourvu de « dictats extérieurs ».  Rappelant les termes du communiqué conjoint de la seizième Réunion consultative conjointe annuelle entre les membres du Conseil de sécurité et du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine du 14 octobre 2022, il a souligné que la réconciliation nationale devait être « guidée par les principes de l’appropriation nationale et de partenariats significatifs avec les organisations sous-régionales et régionales ».

Le délégué a estimé que tout soutien international devrait être coordonné par les Nations Unies afin de garantir la cohérence des efforts et prévenir les ingérences extérieures négatives ayant caractérisé le conflit en Libye.  Condamnant la présence de forces étrangères, de combattants étrangers et de mercenaires en Libye, il a demandé à nouveau leur retrait immédiat.  À ce sujet, il a également exhorté la Commission militaire conjointe 5+5 à poursuivre la mise en œuvre du plan d’action d’octobre 2021 pour leur retrait, affirmant que ces efforts devaient s’accompagner d’une collaboration étroite entre la Libye, l’ONU, les pays voisins et l’Union africaine pour surveiller le retrait et éviter de fragiliser davantage la région du Sahel.  M. Kimani s’est aussi inquiété du sort des migrants et des réfugiés en Libye et en Méditerranée, estimant que le conflit continuait d’exposer « le pire de l’humanité » dans le traitement de ce groupe vulnérable de personnes à la recherche d’une vie meilleure.  Il a exigé un traitement humain des réfugiés, des migrants et des demandeurs d’asile, rappelant qu’il s’agissait d’un impératif fondamental du droit international et des conventions associées.  En conclusion, le délégué a mis le Conseil en garde contre « la politisation et la manipulation » du secteur pétrolier libyen par des forces extérieures et rappelé que les actifs gelés de la Libye appartenaient aux Libyens et que leur administration devrait se faire strictement en consultation avec les autorités libyennes.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a espéré que l’arrivée du nouveau Représentant spécial à Tripoli donnera une nouvelle dynamique au processus politique.  Il a salué le récent dialogue direct entre le Conseil d’État et la Chambre des députés, et souhaité un processus inclusif avec la pleine participation des femmes et des jeunes.  Selon le Mexique, la communauté internationale doit accroître son appui aux parties libyennes dans le processus d’organisation des élections et l’unification des institutions.  Le délégué s’est alarmé que des « acteurs étrangers » suscitent des divisions entre Libyens pour promouvoir leurs intérêts géostratégiques et économiques.  De telles manœuvres ne font que renforcer la polarisation des parties au conflit et compliquent les perspectives d’un processus politique mandaté par le Conseil, a-t-il déploré, ajoutant qu’elles mettent en péril la stabilité en méditerranée centrale et orientale.  « L’ingérence étrangère en Libye doit cesser. »  Le délégué a également confié son inquiétude face aux violations des droits de l’homme des migrants.  Il a précisé que la situation est particulièrement grave pour les migrants placés dans des centres de détention.  Le Mexique prie les autorités libyennes de coopérer avec les agences de l’ONU pour offrir des mécanismes de garantie des droits de l’homme pour tous, y compris le droit au refuge ou à un retour sûr et digne.  Enfin, le délégué a exhorté les parties au conflit à s’abstenir de toute action menant à une escalade, soulignant que les appels récents de certains acteurs à retourner au combat mettent en danger les acquis du cessez-le-feu.  Dans ce contexte, il a insisté sur le respect « scrupuleux » de l’embargo sur les armes, et espéré que le nouveau mandat de la MANUL consolidera les efforts de lutte contre les flux illicites d’armes légères et de petit calibre en Libye, conformément à la résolution 2616 (2021).

M. FERIT HOXHA (Albanie) a espéré que l’arrivée de M. Bathily donnera un nouvel élan au processus politique bloqué en Libye.  C’est ce dont a besoin le pays, a poursuivi le représentant: une énergie positive et une forte impulsion pour « trouver des solutions au lieu de créer de nouveaux problèmes et de nouvelles tensions qui ne peuvent conduire qu’à l’escalade ».

L’Albanie est convaincue que des élections sont le seul moyen d’aller de l’avant, d’édifier la démocratie et de préserver l’unité et l’intégrité du pays.  Il est donc impératif que les parties libyennes conviennent d’un accord sur une base constitutionnelle afin de créer les conditions d’élections inclusives, libres et équitables.  En ce sens, M. Hoxha s’est félicité de la reprise du dialogue entre le Président de la Chambre des députés et le Président du Conseil d’État.  Il a jugé essentiel que les efforts internationaux pour soutenir un processus de stabilisation dirigé par les Libyens restent fermement ancrés sous la direction des Nations Unies.  Par ailleurs, un processus de réconciliation nationale doit se fonder sur les principes de la justice transitionnelle.  Le délégué a salué l’arrestation de deux suspects liés à des crimes contre des victimes de la traite des personnes comme une « bonne approche ».  Selon lui, la MANUL devrait jouer un rôle plus important dans la lutte contre les violations des droits de l’homme et pour promouvoir le respect de l’état de droit et du droit humanitaire.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a réaffirmé un objectif essentiel: celui d’un Gouvernement libyen unifié, capable de gouverner partout en Libye et représentant tous les Libyens.  Il a indiqué que le statu quo rend la Libye perméable aux ingérences étrangères et aux tentatives de déstabilisations, ainsi qu’aux divisions.  Dans ce contexte, la mise en œuvre du plan de retrait libyen des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires et d’un processus de démobilisation, désarmement et réintégration des milices est prioritaire, a-t-il souligné.  Il a également appuyé le dialogue entre les acteurs sécuritaires de l’Est et de l’Ouest, porté notamment par la Commission militaire conjointe 5+5, afin de préserver l’unité du pays.  Le représentant a en outre appelé au plein respect de l’embargo sur les armes, engageant tous les pays agissant en Méditerranée à coopérer avec l’Opération IRINI.

Le délégué a également déclaré que face aux divisions croissantes, entretenues par les ingérences étrangères, il est primordial d’œuvrer à une nouvelle feuille de route politique.  Il y a donc urgence à remettre la Libye sur la voie d’élections présidentielle et parlementaires simultanées en Tripolitaine, en Cyrénaïque et au Fezzan, a-t-il insisté, notant que seul un vrai dialogue entre tous les Libyens rendra cela possible.  Ce dialogue doit aboutir à une base constitutionnelle, mais également à de vrais engagements sincères entre les acteurs pour des élections sures, transparentes et crédibles.  Jugeant plus important que jamais, que le Conseil et les Nations Unies aident la Libye et son peuple face aux défis menaçant sa souveraineté, sa sécurité et son unité, il a soutenu le renouvellement pour un an du mandat de la MANUL.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est félicité de la nomination du nouveau Représentant spécial pour la Libye et a souhaité que son arrivée à Tripoli soit l’occasion de revitaliser le processus politique libyen.  Il a appelé la MANUL à faire pression sur les parties libyennes pour qu’elles parviennent à s’entendre sur la tenue d’élections et sur l’attribution des recettes pétrolières.  S’agissant des élections, le représentant a invité les parties libyennes à appuyer les efforts de l’ONU afin d’établir des bases électorales stables.  Dans ce cadre, a-t-il ajouté, les critères d’éligibilité à l’élection présidentielle doivent être arrêtés et un calendrier réaliste doit être défini.  Il faudrait également savoir à quel moment les représentants qui cherchent à se faire élire doivent démissionner de leurs fonctions actuelles, a ajouté le délégué, qui a dénoncé tout recours à la violence pour servir des intérêts politiques.

Le délégué s’est ensuite déclaré inquiet des risques de reprise des combats après les violents affrontements d’août dernier.  Toutes les parties doivent décourager les actions susceptibles de dégrader encore la situation sécuritaire et de mettre à mal l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020, a-t-il plaidé.  De plus, alors que la question des recettes pétrolières continue d’alimenter les tensions et les divisions, nous devons travailler avec le Représentant spécial pour qu’un accord soit trouvé entre les parties libyennes sur un mécanisme de supervision et de reddition de comptes transparent qui permette une répartition équitable, a ajouté le représentant.  Enfin, après avoir appelé à tout faire pour que les Libyens puissent se faire entendre de leurs dirigeants politiques, il a souhaité que le mandat de la MANUL soit renouvelé et renforcé.

M. THIAGO BRAZ JARDIM OLIVEIRA (Brésil) a encouragé le nouveau Représentant spécial à s’engager d’urgence avec toutes les parties prenantes, afin de progresser sur la base des accords existants, y compris les principes agréés au cours du Forum de dialogue politique interlibyen, et à suivre les recommandations de l’examen stratégique indépendant de la MANUL, notamment l’utilisation de communications stratégiques d’appui aux activités de la Mission.  Le délégué a insisté sur l’organisation des élections sur une base constitutionnelle robuste.  Parallèlement, le désarmement, la démobilisation et la réhabilitation des groupes armés devraient être une priorité, la sécurité étant étroitement liée au développement et à la situation des droits de l’homme dans le pays.  Il a reconnu les contributions de la Commission militaire conjointe 5+5 et mis l’accent sur l’importance de la coordination régionale en vue du rapatriement des combattants étrangers vers leur pays d’origine.  Le Brésil se félicite de l’annonce, en juin dernier, par le Conseil présidentiel libyen, du lancement d’une stratégie nationale de réconciliation et espère que celle-ci prendra en considération l’offre de l’Union africaine.  Le Brésil reste néanmoins préoccupé par la persistance de l’impasse politique qui risque d’attiser un retour au conflit et à la violence, et réaffirme qu’il n’existe pas de solution militaire à la crise libyenne.  Le délégué a demandé des mécanismes de reddition de comptes, avant de s’inquiéter de l’accroissement de la fourniture de pétrole libyen pour répondre aux demandes sur le marché pétrolier.  En l’absence d’une politique gouvernementale unifiée, notamment pour ce qui a trait à la distribution juste et transparente des revenus, la gestion des ressources naturelles libyennes, qui relève de la souveraineté du pays, ne devrait pas répondre à des « intérêts et pressions dictés de l’extérieur », a-t-il dit.  Le délégué s’est également dit préoccupé par la gestion des avoirs libyens gelés à l’étranger.

M. DAI BING (Chine) a estimé que le processus politique est le seul moyen de régler la situation libyenne.  À cet égard, il a jugé préoccupante l’absence de progrès sur le volet politique, tout en se félicitant de la reprise du dialogue entre la Chambre des représentants et le Haut Conseil d’État sur la tenue d’élections.  Soutenant que l’ONU reste la principale filière de médiation, le délégué a salué la nomination du nouveau Représentant spécial pour la Libye.  Il a notamment souhaité qu’elle permette à la MANUL de renforcer le rôle de bons offices des Nations Unies dans le pays.  Dans ce contexte, a-t-il dit, la communauté internationale doit respecter le principe d’un processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens, sans intervention extérieure.

Les parties libyennes doivent, quant à elles, faire montre de retenue et éviter toute nouvelle flambée de violence, a poursuivi le représentant, avant de saluer le rôle clef joué par la Commission militaire conjointe 5+5 pour faire respecter le cessez-le-feu et permettre un retrait des forces étrangères et des mercenaires de la Libye.  Il a, d’autre part, applaudi le dialogue national pour la réconciliation, appelant toutes les parties à le promouvoir pour créer un environnement propice au processus politique et saluant les efforts consentis, dans ce sens, par l’Union africaine.  Il a également formé l’espoir que la reprise de la production pétrolière contribuera au développement économique du pays et améliorera le bien-être de la population.  Souhaitant enfin que le Conseil de sécurité adopte une résolution contenant des éléments de fond pour prolonger le mandat de la MANUL, il a exhorté cette dernière à se concentrer sur la réconciliation nationale et la tenue d’élections.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a souligné qu’il n’existe pas de solution militaire ou armée à la crise en Libye.  La priorité immédiate est de résoudre toutes les questions en souffrance afin de parvenir à une base constitutionnelle pour la tenue d’élections présidentielles et parlementaires.  La tenue d’élections, au plus tôt, de manière libre, équitable, inclusive et crédible, est une nécessité impérieuse, a insisté la représentante. 

Elle a constaté que les affrontements violents réguliers entre les groupes armés mettent une fois de plus en lumière la menace que représente la présence continue de forces étrangères et de mercenaires en Libye, en violation de l’accord de cessez-le-feu de 2020 et des résolutions du Conseil de sécurité, en particulier les dispositions relatives à l’embargo sur les armes.  Elle s’est inquiétée de la résurgence des activités terroristes dans le pays, qui ne manqueront pas d’avoir des retombées dans la région du Sahel.  Il est donc important que la communauté internationale s’y attaque afin d’éviter toute répercussion sur l’ensemble du continent africain, a lancé la représentante, se prononçant en outre pour un processus politique conduit totalement par les Libyens, sans ingérence extérieure.

Mme CAÍT MORAN (Irlande) a exhorté les parties à travailler avec le Représentant spécial de façon constructive et de bonne foi.  Elle s’est inquiétée des violences à Zawiya et à Tripoli et a appelé à protéger les civils, rappelant aux groupes armés qu’ils devraient rendre des comptes si tel n’était pas le cas.  La déléguée a appelé à la tenue d’élections libres dans les plus brefs délais afin qu’un gouvernement unifié puisse prendre la tête du pays.  Elle s’est aussi inquiétée de la réduction de l’espace de la société civile et des violations des droits humains, notamment d’un possible retour à la peine de mort et de l’augmentation des détentions arbitraires d’enfants, de migrants et de réfugiés.  Elle s’est prononcée en faveur d’un renouvèlement du mandat de la MANUL pour une durée de 12 mois et a réitéré son soutien indéfectible aux efforts internationaux, notamment au processus de Berlin, en vue d’une solution contrôlée et dirigée par les libyens.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a déclaré qu’il y a un besoin de poursuivre les consultations et les discussions dans la perspective de la tenue d’élections législatives et présidentielle.  Cette demande d’élections est légitime, a souligné la représentante qui a appuyé les efforts déployés par le Maroc et la conférence qu’entend organiser l’Union africaine à cette fin.  Elle a également appelé au départ des troupes et mercenaires étrangers de manière ordonnée.  La représentante a estimé, en outre, que la participation des femmes doit être garantie lors des élections afin que celles-ci puissent être réellement inclusives.

M. TAHER M. T. ELSONNI (Libye) s’est dit encouragé par le début du travail de M. Bathyli qui, dès son arrivée dans le pays, a fait figurer, parmi ses priorités, la mise en place d’une feuille de route en appui au processus politique.  Il lui a toutefois recommandé d’éviter les doublons et de faire fond sur ce que ses prédécesseurs avaient, d’ores et déjà, accompli.  Les Libyens attendent une sortie de cette crise, a-t-il souligné, espérant notamment une prolongation, par consensus, du mandat de la MANUL.  Il s’est félicité des efforts « sérieux » déployés par beaucoup de pays amis pour trouver une solution contrôlée et décidée par les Libyens.  Il a appelé à mettre un terme à toutes les phases de transition dont le pays a souffert depuis 10 ans, et mis en exergue la « grande priorité » qu’est la tenue des élections, étape importante pour en finir avec les confrontations et confirmer la légitimité des institutions.  Dans cet esprit, il a encouragé à la fourniture d’un appui financier et technique, ce qui prouvera le sérieux de la communauté internationale quant à l’organisation des scrutins.  L’appui à la Commission militaire conjointe 5+5 est également vital.

Poursuivant, le représentant libyen a condamné l’« acte cruel » à l’encontre de migrants à Sabrata, et a fait savoir qu’une enquête a été immédiatement ouverte.  Il a demandé au Conseil de mettre les réseaux de traite des êtres humains sur la liste des sanctions.  Il a ensuite souligné que seule une réconciliation nationale « authentique et réelle » permettra de sortir de l’impasse pour que tous les Libyens s’unissent et tournent la page du passé.  Il a annoncé la mise en place de la Commission suprême de réconciliation et la justice transitoire, ainsi que d’un conseil consultatif.  Le Conseil de la présidence a d’ailleurs tenu de nombreuses réunions avec différents représentants de la société civile de toutes les villes et régions du pays afin de préparer la Conférence de réconciliation nationale qui aura lieu l’année prochaine.  Il a loué l’appui de l’Union africaine, et espéré qu’avec l’ONU, celle-ci parviendra à appuyer la mise en œuvre des priorités libyennes.  La réconciliation nationale demeure la priorité, a insisté le délégué, qui s’est dit confiant que le peuple libyen finira par sortir de cette crise.  Mais, a-t-il ajouté, il ne faut toutefois pas l’abandonner à son sort.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission termine l’examen du Programme d’assistance pour la diffusion du droit international

Soixante-dix-septième session,
20e séance plénière - après-midi
AG/J/3668

La Sixième Commission termine l’examen du Programme d’assistance pour la diffusion du droit international

 

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé cet après-midi ses échanges sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.  Dans le droit fil de la séance précédente, les derniers orateurs ont souligné l’importance dudit Programme et de ses activités. 

« La complexification du droit international appelle des professionnels plus qualifiés », a noté le délégué de l’Érythrée.  Pour cette raison, les intervenants se sont tous félicités du retour des cours régionaux de droit international et autres formations en présentiel dans la mesure où ils permettent la création d’un réseau durable entre participants.  « Les enseignements à distance ne doivent pas remplacer les enseignements en présentiel », a clairement indiqué l’Ouganda, tandis que la Zambie a plaidé pour un équilibre entre les deux.  

Le Chili, appuyé par l’Algérie ou encore les Philippines, a souligné le travail « remarquable » de la Médiathèque de droit international des Nations Unies et appelé à son enrichissement.  Ces pays ont également rappelé l’importance du multilinguisme.  

Enfin, plusieurs États ont, à l’instar de la Fédération de Russie et du Nigéria, souligné l’importance du financement du Programme d’assistance par le biais du budget ordinaire de l’ONU, tout en rappelant l’importance des contributions volontaires. 

Le Président de la Commission, M. Pedro Afonso, a par ailleurs annoncé le report des décisions sur les projets de résolution relatifs à l’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale à l’Organisation de coopération numérique et à l’Organisation du traité de coopération amazonienne

La Sixième Commission se réunira à 10 heures, mardi 25 octobre, pour commencer l’étude du rapport de la Commission du droit international (CDI). 

PROGRAMME D’ASSISTANCE DES NATIONS UNIES AUX FINS DE L’ENSEIGNEMENT, DE L’ÉTUDE, DE LA DIFFUSION ET D’UNE COMPRÉHENSION PLUS LARGE DU DROIT INTERNATIONAL - A/77/515

Suite et fin du débat général

Mme LITO (Royaume-Uni) a déclaré que l’organisation de formations en présentiel serait souhaitable en 2023.  Elle a souligné que l’apprentissage du droit international favorise la promotion de l’état de droit, des relations amicales et de la paix et de la sécurité.  Le Royaume-Uni, a-t-elle indiqué, continuera d’appuyer le Programme d’assistance par le biais de contributions volontaires et appelle les autres États Membres à en faire de même.

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) a salué le retour du format en présentiel des formations du Programme d’assistance, en insistant sur l’importance d’une bonne représentation géographique au sein des conférenciers.  Il a souhaité que des versions papier des documents, notamment sur les décisions d’arbitrage, continuent d’être disponibles.  Enfin, le délégué a demandé le financement du Programme par le biais du budget ordinaire de l’ONU, avant d’insister sur l’importance des contributions volontaires.

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili) a encouragé la diffusion du droit international, en particulier pour les pays en développement, notant l’importance de disposer d’un programme d’assistance « solide et robuste ».  Dans ce sens, il s’est félicité du financement du Programme par le budget ordinaire.  Le délégué a regretté l’absence d’un cours régional en présentiel pendant la pandémie de COVID-19 et salué le retour des cours en présentiel en 2023.  Il a également souligné l’importance du réseau des anciens participants aux programmes de renforcement des capacités, qui permet de faciliter l’interaction entre professionnels.  Il a en outre souligné le travail « remarquable » de la Médiathèque de droit international des Nations Unies, appelant à l’enrichir et à donner d’avantage d’espace aux juristes.  Enfin, le Chili, en tant que membre du Groupe des Amis de la langue espagnole, insiste sur l’importance du multilinguisme et plaide pour la publication du Recueil de droit international en espagnol.

Mme SURAT SUWANNIKKHA (Thaïlande) a déclaré que « le savoir est le pouvoir », avant de souligner l’importance du Programme d’assistance pour les bonnes relations entre États.  Elle a indiqué que les formations en présentiel sont cruciales, en particulier pour les pays en développement.  La Thaïlande va accueillir le cours régional de droit international pour l’Asie-Pacifique du 14 novembre au 7 décembre prochain, a annoncé la déléguée.  Elle a salué les efforts de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques pour l’élargissement des ressources mises à la disposition des États dans le cadre du Programme.

M. LUKWASA (Zambie) a encouragé l’échange des pratiques optimales entre experts.  À ce titre, il a jugé « gratifiant » que la Division de la codification continue de transmettre des connaissances « essentielles » aux participants d’Afrique et d’autres régions.  Le représentant a encouragé l’ONU à augmenter la fréquence des formations en présentiel et à renforcer les réseaux de professionnels et la participation des experts, afin de faire évoluer le droit international.  Il convient de trouver un « équilibre » entre formation en présentiel et à distance, a-t-il insisté.  Le représentant a appelé les entités de formation à collaborer avec la Zambie par le biais de programmes d’échanges. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda) a salué les efforts de la Division de la codification pour la mise en œuvre du Programme d’assistance.  Il s’est félicité de la reprise des activités du Programme après les perturbations liées à la pandémie de COVID-19.  « Les enseignements à distance ne doivent pas remplacer les enseignements en présentiel. »  Le délégué a demandé le financement du Programme par le biais du budget ordinaire de l’ONU, avant d’insister sur l’importance des contributions volontaires.  Il a en outre salué les présentations plus « ludiques » de la Médiathèque de droit international des Nations Unies.

M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a souligné l’importance du Programme d’assistance, qui constitue une dimension importante de l’état de droit à l’ONU.  Le Programme permet de sensibiliser les universitaires et les États à l’importance du droit international pour parvenir à une « symbiose » entre le droit national et le droit international, a estimé le représentant.  Il a jugé encourageante la reprise des activités après la pandémie de COVID-19, et appelé à allouer davantage de ressources financières à l’organisation des cours régionaux pour maintenir la « qualité des services fournis ».  Il a, enfin, salué les États qui continuent d’apporter un soutien financier au Programme. 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a souligné l’importance de la formation de juristes et d’universitaires et insisté sur la centralité du Programme d’assistance à cette fin.  Se félicitant de la demande de plus en plus élevée pour les cours régionaux de droit international, il a souhaité un élargissement de cette offre, notamment sur le plan linguistique.  Le délégué a apprécié le retour des formations en présentiel.  Il a salué l’enrichissement des contenus de la Médiathèque de droit international, insistant là encore sur l’importance de préserver le multilinguisme.

M. AMANUEL GIORGIO (Érythrée) a réitéré l’importance fondamentale du Programme d’assistance pour mieux comprendre le droit international et contribuer à la paix et aux relations amicales entre les États.  Il s’est, à cet égard, félicité de l’organisation de cours régionaux de droit international.  « La complexification du droit international appelle des professionnels plus qualifiés », en particulier dans les institutions gouvernementales, a-t-il fait valoir.  Il a, enfin, salué l’inscription du Programme d’assistance au budget régulier de l’ONU.

Mme DAKWAK (Nigéria) a insisté sur l’importance du Programme d’assistance et des cours régionaux de droit international.  Elle a souhaité un accroissement de l’offre de tels cours en langue anglaise en Afrique.  En conclusion, la déléguée a demandé le financement du Programme par le biais du budget ordinaire de l’ONU, avant d’insister sur l’importance des contributions volontaires, « même si ces contributions sont complémentaires. »

Mme ARUMPAC MARTE (Philippines), notant les mesures novatrices « intérimaires » mises en œuvre pendant la pandémie de COVID-19, s’est réjouie que les formations aient repris en personne afin de permettre la création de réseaux entre les participants.  Elle a appelé la Médiathèque de droit international des Nations Unies à diversifier les cours et matériaux juridiques sur un large éventail de sujets.  La représentante a apporté son soutien à la diffusion des travaux de la Division de la codification auprès de la communauté internationale.  Elle a notamment évoqué la publication du Recueil des sentences arbitrales ou encore du Recueil de droit international.

Mme LOUREEN O. A. SAYEJ, observatrice de l’État de Palestine, a apporté son appui au Programme d’assistance, en insistant sur la pertinence des cours régionaux de droit international.  Des juristes palestiniens ont bénéficié de ce Programme, a précisé la déléguée.  En conclusion, elle a salué les contributions volontaires de certains États au Programme et invité les autres États à en faire de même.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: La destruction des infrastructures civiles fait peser le risque d’un hiver potentiellement mortel en Ukraine, avertit l’ONU

9161e séance - après-midi
CS/15074

Conseil de sécurité: La destruction des infrastructures civiles fait peser le risque d’un hiver potentiellement mortel en Ukraine, avertit l’ONU

La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a alerté, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, que les attaques lancées par la Fédération de Russie contre des infrastructures civiles en Ukraine risquent d’exposer les populations à un hiver potentiellement mortel. 

Intervenant dans le cadre d’une séance d’information demandée par la France et le Mexique, porte-plumes du dossier humanitaire en Ukraine, Mme Rosemary DiCarlo a indiqué que selon le Gouvernement ukrainien, 30% des installations énergétiques ont été touchées depuis le 10 octobre, notamment dans les régions de Kiev, Dnipropetrovsk, Lviv, Kharkiv et Soumy.  

La Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l’action humanitaire des Nations Unies en Ukraine a, elle aussi, prévenu du risque accru de décès encore plus nombreux dans les mois à venir en raison du manque d’accès des civils aux services essentiels pour survivre à l’approche de l’hiver, la destruction massive d’infrastructures entravant l’approvisionnement en eau, en électricité, ainsi que le chauffage, les télécommunications et les transports.   

Mme Denise Brown a également présenté les grandes lignes du plan élaboré par son bureau, en coordination avec les autorités, pour affronter l’hiver, précisant toutefois que l’un des défis majeurs reste l’accès à Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijia, où la situation des populations est très préoccupante.  Mais les demandes régulières pour que l’assistance humanitaire traverse la ligne de front n’ont pas recueilli l’accord nécessaire de toutes les parties, alors même que tout est prêt au niveau opérationnel, a déploré Mme Brown qui a alerté que la population ukrainienne est sous une pression énorme.  

Il faut agir immédiatement pour que la Russie ne soit plus en mesure de commettre un acte de terreur, a plaidé l’Ukraine, qui a aussi demandé de remédier à la situation des centrales électriques, informant que les « terroristes russes » auraient miné le barrage de la centrale électrique de Kakhovka, et que la centrale de Zaporijia risque de ne plus être alimentée en eau -qui provient de ce réservoir-, « ce qui serait une catastrophe ».     

De son côté, la délégation russe a critiqué Mme DiCarlo pour n’avoir aucunement mentionné les destructions d’infrastructures civiles subies par la Fédération de Russie, dont les ponts de Crimée et de Belgorod ; ni la souffrance des habitants du Donbass qui, depuis huit ans, voient leurs infrastructures civiles détruites par le « régime ukrainien ».  

Tour à tour, les membres du Conseil ont exigé la cessation de la guerre, le retrait des forces russes, et un accès sans entrave à l’assistance humanitaire alors que l’hiver approche, ainsi que le recours à la diplomatie préventive pour amorcer des négociations, la Chine recommandant de veiller à ce que cette crise ne fasse pas « tache d’huile ».   

À l’instar de la France, qui a affirmé que la Russie entend provoquer des pénuries d’électricité et de chauffage avec l’arrivée de l’hiver, de nombreuses délégations ont appelé au respect du droit international et de la Charte des Nations Unies, le Mexique alertant en outre que sans déminage urgent, le secteur agricole ukrainien sera également confronté à de graves difficultés pour la prochaine saison de plantation.  

Les États-Unis ont soulevé la question de savoir si la République islamique d’Iran avait transféré des drones à la Russie, ce qui constituerait une violation de la résolution 2231 (2015) sur le Plan d’action global commun sur le programme nucléaire iranien.  

Selon l’Allemagne, toutes les informations disponibles confirmeraient que des drones iraniens sont utilisés pour terroriser les civils et ont été livrés à la Russie sans l’approbation préalable du Conseil.  Des documents très nombreux, notamment des vidéos, le confirment, ont renchéri les États-Unis, qui ont rappelé qu’une enquête doit être diligentée par l’ONU.   

Accusant le « régime ukrainien » et ses « protecteurs occidentaux » de diffuser des « infox », la délégation russe a mis en garde le Secrétariat contre une cessation de coopération s’il venait à répondre à cette demande. 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE

Déclarations

Mme ROSEMARY A. DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a déclaré que la situation des civils en Ukraine reste désastreuse.  Au 18 octobre, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré 15 956 victimes civiles, dont 6 322 tués et 9 634 blessés depuis le 24 février 2022.  Au moins 397 enfants ont été tués depuis le 24 février.  Et, les chiffres réels sont sans doute bien plus élevés.  Mme DiCarlo a indiqué que, depuis le 10 octobre, la Fédération de Russie a lancé une série d’attaques préoccupantes contre des infrastructures civiles.  Au total, entre le 10 et le 18 octobre, au moins 38 civils ukrainiens auraient été tués et au moins 117 blessés par des attaques de missiles et de drones.  Selon le Gouvernement ukrainien, 30% des installations énergétiques ont été touchées depuis le 10 octobre, notamment dans les régions de Kiev, Dnipropetrovsk, Lviv, Kharkiv et Soumy.  Ces attaques risquent d’exposer les populations à un hiver potentiellement mortel, a-t-elle averti, avant de rappeler qu’en vertu du droit international humanitaire, les attaques visant des civils et des infrastructures civiles sont interdites.  De plus, selon le rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, il existe des motifs raisonnables de conclure que des crimes de guerre et des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire ont été commises en Ukraine depuis le 24 février 2022, en particulier par les troupes russes.  

La Secrétaire général adjointe a ensuite salué l’annonce faite, lundi, d’un nouvel échange de prisonniers de guerre entre l’Ukraine et la Fédération de Russie: 110 captifs russes ont été échangés contre 108 Ukrainiens.  Il s’agissait du premier échange au cours duquel tous les Ukrainiens libérés étaient des femmes, dont des civils, des militaires et des gardes nationaux et frontaliers.  Dans le même temps, elle a regretté que la Mission d’établissement des faits des Nations Unies chargée d’enquêter sur l’incident du 29 juillet à Olenivka n’ait pas encore pu se déployer.  Nos experts restent en attente pour se déplacer sur le site.  Nous attendons les assurances nécessaires de la Fédération de Russie, a-t-elle dit.  Mme DiCarlo a également alerté que toute suggestion d’utilisation possible d’armes nucléaires ou d’autres armes conventionnelles ne fait qu’aggraver les tensions et pourrait conduire à une spirale dangereuse.  De même, elle a averti que tout autre dommage à la centrale nucléaire de Zaporijia, qu’il soit intentionnel ou accidentel, pourrait avoir des conséquences catastrophiques.  Toute activité militaire contre, depuis ou à proximité du site doit cesser immédiatement, a-t-elle exigé. 

Mme DENISE BROWN, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de laction humanitaire des Nations Unies en Ukraine, a indiqué que la population ukrainienne est sous une pression énorme, s’inquiétant de l’émergence de graves problèmes de santé mentale.  De retour de Mykolaiv, Mme Brown a témoigné que le maire de cette ville lui avait confié que, depuis le 24 février, il n’y avait eu que 33 jours de silence, soit 33 jours sans explosions et sans sirènes d’alerte.   

L’ampleur de la catastrophe humanitaire est colossale, a-t-elle signalé.  Environ 18 millions de personnes, soit plus de 40% de la population ukrainienne, nécessitent une assistance humanitaire.  Quelque 14 millions de personnes ont été forcées à fuir leurs foyers, dont 6,2 millions de déplacés et près de 7,7 millions de réfugiés.  Depuis le début de la guerre, a-t-elle ajouté, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a répertorié plus de 15 900 victimes parmi les civils dont 6 300 morts, et les chiffres réels sont sûrement supérieurs.  L’UNICEF a indiqué, pour sa part, que 5,7 millions d’enfants en âge scolaire ont été affectés, y compris 3,6 millions en raison de la fermeture des écoles.  Quant à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), elle a répertorié plus de 630 attaques vérifiées contre des structures sanitaires, ce qui empêche les malades d’être soignés et d’obtenir des médicaments.  Les dimensions relatives au genre et à la protection sont également importantes. 

Poursuivant, la Coordonnatrice a indiqué que chaque jour qui passe apporte de nouvelles dimensions urgentes, notamment en raison de l’approche de l’hiver et la baisse des températures, et la destruction massive de l’infrastructure civile qui entrave l’approvisionnement en eau, en électricité, ainsi que le chauffage, les télécommunications et les transports.  Elle a prévenu qu’il y a un risque accru de décès encore plus nombreux dans les mois à venir en raison du manque d’accès des civils aux services essentiels pour survivre.  Or, a-t-elle souligné, le droit international humanitaire est, on ne peut plus être clair, à cet égard: les attaques ne doivent jamais être dirigées contre des civils ou des objets civils. 

La Coordonnatrice a ensuite présenté les grandes lignes du plan élaboré par son bureau, en coordination avec les autorités, pour affronter l’hiver.  Celui-ci est axé sur la réparation des domiciles et l’approvisionnement en couvertures, matelas, vêtements, nourriture, générateurs pour les écoles et chauffage thermique pour les hôpitaux.  Elle a précisé que plus de 590 partenaires humanitaires fournissent une assistance vitale et une protection dans tout le pays, ce qui a permis d’atteindre plus de 13 millions de personnes en Ukraine.  

Elle a également souligné qu’avec l’accès à de nouvelles régions, l’assistance humanitaire est en mesure d’atteindre plus de communautés.  Cependant, la menace posée par les mines terrestres et la contamination des engins non explosés entrave les opérations humanitaires dans les régions accessibles de Kharkiv, Kherson et Donetsk.  S’agissant de la santé, elle a signalé que 10 millions de personnes auraient besoin d’un soutien psychosocial à cause du traumatisme de la guerre, y compris des femmes et des filles ayant subi des violences sexuelles et autres formes de violences sexistes, des enfants qui entendent des sirènes au quotidien, des familles séparées, ou même des familles qui tentent de survivre au jour le jour.  

Mme Brown a précisé que l’un des défis majeurs reste l’accès à Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijia, où la situation des populations est très préoccupante.  À cet égard, elle a signalé qu’elle faisait régulièrement des demandes pour traverser la ligne de front, mais que l’accord nécessaire de toutes les parties n’avait pas été obtenu, alors même que tout est prêt au niveau opérationnel. 

La Coordonnatrice a ensuite fait savoir que l’Appel éclair avait vu un appui sans précédent des donateurs, avec plus de 2,9 milliards de dollars reçus pour 4,3 milliards de dollars requis pour cette année.  De son côté, le Fonds humanitaire pour l’Ukraine a perçu un nouveau financement substantiel, soit plus de 230 millions de dollars en contributions et promesses, dont 117 millions ont, d’ores et déjà, été déboursés, avec notamment 20 millions au profit d’organisations locales et bénévoles.  

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a rappelé l’impact de la guerre en Ukraine sur la population civile: 17,7 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire, 7,68 millions se trouvent dans d’autres pays d’Europe et 6,2 millions de personnes sont déplacées.  Les attaques aveugles de ces derniers jours contre des infrastructures civiles constituent une violation du droit humanitaire international, a-t-il déclaré.  C’est pourquoi, avec la France, nous avons convoqué cette réunion, a-t-il expliqué.  Le représentant a rappelé que le respect des règles du droit international humanitaire, y compris les Conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels, est une obligation qui n’admet aucune exception.  Les dispositions de ces instruments prévoient que les parties doivent faire une distinction claire entre les civils et les combattants.  Qui plus est, l’utilisation d’armes ou de méthodes de guerre susceptibles de causer des pertes inutiles est interdite.  Le représentant a également souligné que plus de 630 attaques contre le système de santé ont été enregistrées, alors que les attaques contre des hôpitaux constituent des crimes de guerre qui ne peuvent rester impunis.  Il a aussi jugé alarmants les rapports faisant état de violences sexuelles et fondées sur le genre.   

Le délégué a jugé impératif de garantir un accès humanitaire sans entrave, conformément aux principes fondamentaux d’humanité, d’autant que la vulnérabilité de la population civile risque de s’accroître avec l’arrivée de l’hiver et les graves perturbations des infrastructures énergétiques.  En outre, la présence de mines en Ukraine est très préoccupante, car en plus de leur impact sur la population civile, la présence de ces engins affecte la capacité de la communauté humanitaire à opérer.  Sans déminage urgent, le secteur agricole ukrainien sera également confronté à de graves difficultés pour la prochaine saison de plantation, a-t-il mis en garde.  En outre, le représentant a rejeté dans les termes les plus forts toute menace d’utilisation d’armes nucléaires.  Il a regretté qu’un périmètre démilitarisé n’ait pas été établi autour de la centrale nucléaire de Zaporijia, en dépit des appels de l’AIEA, du Secrétaire général et de la communauté internationale.  Il a demandé instamment aux parties de répondre à cet appel de toute urgence.  Il a conclu en appelant à trouver des voies de dialogue et de diplomatie pour mettre fin à cette guerre. 

Pour M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), huit  mois après le lancement de sa guerre d’agression, la Fédération de Russie a franchi un nouveau seuil en pilonnant depuis 10 jours des villes, des infrastructures civiles et énergétiques à Kiev, à Soumy, à Dniepro.  La Fédération de Russie ne cherche même plus à dissimuler les crimes dont elle se rend coupable et viole les principes fondateurs de la Charte des Nations Unies et les normes qui en découlent, a dénoncé le délégué en rappelant que l’Assemblée générale a voté à une écrasante majorité contre ces atteintes à la Charte.  « La Russie viole de manière décomplexée le droit international humanitaire et cherche vainement à briser le moral de la nation ukrainienne ».  Le représentant a ajouté que la Russie veut terroriser et entend provoquer des pénuries d’électricité et de chauffage avec l’arrivée de l’hiver, l’accusant de miser sur la souffrance des civils, y compris des enfants.   

M. de Rivière a ajouté que tous les partenaires de l’Ukraine sont solidaires pour déjouer cette stratégie sordide.  La France, en liaison avec les autorités ukrainiennes, a dès à présent mobilisé des moyens pour contribuer à la résilience de l’Ukraine agressée pendant l’hiver, a-t-il signalé.  Il a exhorté la Fédération de Russie à se conformer au droit international humanitaire et à permettre aux acteurs humanitaires d’atteindre les populations civiles qui se trouvent dans les territoires qu’elle prétend occuper, ainsi qu’aux prisonniers de guerre, y compris ceux placés en captivité en Russie.  Les exactions et les destructions peuvent être constitutives de crimes de guerre et leurs auteurs devront répondre de leurs actes, a prévenu le représentant.  « Il n’y aura pas d’impunité pour les criminels. »  Le délégué a souhaité que la CPI avance, vite, dans ses travaux, en remontant la chaîne de responsabilités aussi loin qu’elle le peut.   

Pour M. de Rivière, il est désormais solidement documenté que les forces armées russes emploient des drones iraniens en Ukraine, notamment pour bombarder de manière indiscriminée des infrastructures civiles, en violation de la résolution 2231 (2015).  L’Union européenne a adopté hier de nouvelles sanctions contre des entités et individus iraniens impliqués dans la production et le transfert de ces drones, a rappelé le représentant déclarant soutenir l’appel de l’Ukraine à ce que le Secrétariat enquête et rende compte.  Il a demandé à l’Iran de cesser immédiatement toute forme de soutien à la guerre d’agression lancée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  La Russie et l’Iran doivent cesser de violer la résolution 2231, a-t-il martelé.  Il a aussi condamné la complicité du Bélarus dont le territoire continue d’être utilisé pour lancer des frappes de missiles ou de drones visant l’Ukraine.  Avant de terminer, M. de Rivière a déclaré que la Fédération de Russie est seule et qu’elle est condamnée massivement par la communauté internationale, tandis que l’Ukraine est forte de la solidarité internationale.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) s’est alarmé que les civils et les installations indispensables à la survie de la population civile soient visés en permanence, en violation du droit international et en particulier du droit international humanitaire.  Les menaces persistantes de recours aux armes de destruction massive est tout aussi inquiétante, a poursuivi M. Kiboino, qui a appelé à protéger toutes les installations nucléaires, dont celle de Zaporijia.  L’intensification du conflit mine non seulement les perspectives d’une paix négociée à long terme, mais elle pourrait également donner lieu à un renforcement des alliances armées en vue d’une guerre prolongée, ce qui pourrait fragiliser des États actuellement stables en Europe et au-delà, a-t-il craint.   

M. Kiboino a rappelé en outre que la guerre en Ukraine aggrave l’insécurité alimentaire en Afrique, puisqu’elle bouleverse les chaînes d’approvisionnement, crée des pénuries et fait augmenter les prix.  Il a demandé le maintien de l’Initiative céréalière de la mer Noire.  Il est grand temps que tous les États s’impliquent directement ou indirectement dans ce conflit pour ouvrir des voies de communication, a plaidé le représentant.  Il leur a suggéré d’explorer les conditions permettant d’arriver à une cessation des hostilités, qui serait suivie de négociations mettant un terme à la guerre et stabilisant l’ordre sécuritaire européen.  En conclusion, M. Kiboino a réitéré le respect du Kenya pour la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance politique de l’Ukraine.   

M. GENG SHUANG (Chine) a appelé à éviter que la crise qui affecte déjà l’économie mondiale, fasse tache d’huile et provoque un choc.  Il a exhorté au respect du droit international humanitaire et à la facilitation de l’assistance humanitaire, insistant en outre sur l’importance de protéger les installations civiles.  Les belligérants doivent éviter que le conflit s’étende et s’aggrave, a insisté le représentant selon qui les difficultés d’accès à l’eau, l’électricité, le chauffage et les soins de santé devraient pousser la Russie à favoriser l’assistance humanitaire.  Il a également signalé que l’application de sanctions générales indiscriminées ne fera qu’approfondir la crise, alertant que tous les pays, développés et en développement, en subiront les conséquences.  Le représentant a ensuite encouragé à la stabilisation des produits agricoles sur le marché, et salué l’Initiative céréalière de la mer Noire.  Après avoir incité à ne « pas fermer la porte » à la voie diplomatique, le délégué a appelé la communauté internationale à trouver le moyen de persuader les parties impliquées à négocier.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a fait part de sa profonde préoccupation à propos des attaques contre les civils et les infrastructures civiles ces dernières semaines, rappelant que les parties au conflit doivent veiller à ne pas les cibler.  L’aide et l’assistance humanitaires doivent être guidées par les principes universels d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, et en aucun cas être politisées, a-t-il souligné. 

Par ailleurs, l’impact du conflit en Ukraine ne se limite pas à l’Europe, a fait observer le représentant, évoquant les inquiétudes au sujet de la sécurité alimentaire, des engrais et de l’énergie, en particulier dans les pays en développement.  Il a espéré que l’Initiative céréalière de la mer Noire sera mise en œuvre par toutes les parties avec sérieux, relevant toutefois que cela ne suffira pas pour faire face à l’insécurité alimentaire.  Pour sa part, a-t-il ajouté, l’Inde fournit une assistance humanitaire à l’Ukraine, pour laquelle elle demande des garanties d’acheminement sûr, et un soutien économique à certains de ses voisins du Sud en détresse économique.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a noté qu’en une semaine seulement, un tiers des centrales électriques ukrainiennes auraient été coupées du réseau électrique à l’approche de l’hiver.  La communauté internationale doit intensifier son soutien pour soulager les souffrances des civils, a-t-il plaidé.  À cette fin, il a annoncé que les Émirats arabes unis ont envoyé une aide humanitaire cette semaine à l’Ukraine d’un montant de 100 millions de dollars.  Cependant le reste du monde ne saurait être oublié, a-t-il souligné.  Le représentant s’est aussi inquiété des difficultés d’accès humanitaire, qui reste un obstacle majeur pour les organisations humanitaires, en particulier dans les zones où les combats sont les plus intenses.  Les personnes incapables d’échapper aux combats sont devenues vulnérables au gré des changements de lignes de combat, a-t-il observé.  Le représentant a salué les efforts des organisations humanitaires dans ce contexte et a demandé instamment aux parties de coopérer afin de permettre l’accès humanitaire.   

Le délégué a constaté une évolution entre les parties qui a conduit à des résultats comme les échanges de prisonniers ou les accords pour faciliter l’exportation de denrées alimentaires et d’engrais.  Il faut cependant qu’une mise en œuvre complète de ces accords reste pour lutter contre l’insécurité alimentaire mondiale, a-t-il fait valoir.  Le compromis, la diplomatie et le dialogue restent à son avis la seule marche à suivre pour éviter de nouvelles souffrances.  Il n’y a pas d’alternative à une cessation des hostilités dans toute l’Ukraine et à un règlement pacifique du conflit, a-t-il conclu. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a déploré qu’après près de huit mois de conflit en Ukraine, la population civile continue de souffrir.  Le représentant a dit que rien ne justifie les attaques contre des cibles civiles à Kiev et dans d’autres grandes villes ukrainiennes ces derniers jours.  Les dommages causés au secteur de l’énergie ont atteint 30% de sa capacité de production, a-t-il noté.  Selon lui, les rapports continus faisant état de victimes civiles et d’attaques contre des infrastructures civiles témoignent de l’urgence d’ouvrir des canaux de dialogue humanitaire entre les parties.  Les lancements de missiles et les frappes de drones doivent être stoppés, a aussi réclamé le représentant.   

Il a demandé le libre accès à l’aide humanitaire à ceux en ont besoin.  Le délégué a souligné l’importance de discuter d’une réponse collective au conflit prenant note de la frustration accrue face à ce qui est perçu comme des efforts insuffisants de la part du Conseil pour faciliter une solution pacifique.  Beaucoup sont déçus du fait que les divisions l’ont emporté sur ce que l’on attend du Conseil, c’est-à-dire la volonté d’engager le dialogue, a-t-il insisté.  Ce Conseil devrait contribuer activement à tous les efforts possibles vers un cessez-le-feu et aux négociations entre les parties, a-t-il recommandé réitérant les différentes idées émises par d’autres délégations pour faciliter les pourparlers directs entre les parties et suggérant au Conseil de les explorer.  Le Brésil est disposé à s’engager dans ces efforts et invite les autres membres du Conseil à envisager de nouvelles voies afin d’abréger les souffrances du peuple ukrainien, a terminé M. de Almeida Filho.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a souligné à quel point la Fédération de Russie méprise la Charte des Nations Unies et dénoncé son invasion de l’Ukraine.  Près de la moitié de la population a besoin d’aide humanitaire, s’est-il alarmé, et les Russes frappent les populations civiles alors que l’hiver approche.  Les organisations humanitaires accroissent leurs efforts mais les frappes de la Fédération de Russie représentent un risque majeur.  Depuis février, les États-Unis ont fourni plus de 1,5 milliard de dollars au titre de l’aide humanitaire et continuent à soutenir le peuple ukrainien, a fait valoir le représentant.   

Des violations de la résolution 2231 (2015) ont été enregistrées, a poursuivi le représentant, et l’Iran a récemment transféré des drones à la Fédération de Russie, qui ont été utilisés pour des attaques contre des infrastructures civiles.  Des documents très nombreux, notamment des vidéos, le confirment.  L’ONU doit enquêter sur toute violation d’une résolution du Conseil de sécurité, a plaidé le représentant, ajoutant que les obligations de la Fédération de Russie en tant que partie aux Conventions de Genève s’appliquent au traitement des individus pris dans un conflit.   

En venant au sujet de l’insécurité alimentaire, le représentant a défendu l’Initiative céréalière de la mer Noire, qui a aidé à apaiser les marchés et à limiter l’inflation des prix.  À ceux qui parlent de la situation en Ukraine sans nommer la Fédération de Russie, le représentant a lancé: Si vous vous préoccupez des femmes et des enfants, exhortez la Russie à faire taire les armes, si vous vous souciez de la Charte des Nations Unies, demandez-lui de respecter l’intégrité et l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Ukraine.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a mis l’accent sur la situation des civils ukrainiens, confrontés à des difficultés quotidiennes pour l’approvisionnement en eau et électricité, difficultés occasionnées par les assauts incessants de la Fédération de Russie contre les infrastructures civiles vitales.  Le représentant a dénoncé les attaques directes menées contre les hôpitaux et les structures de soins de santé où les personnes cherchent soins et refuge.  M. Mythen a aussi indiqué que ces attaques touchent des immeubles résidentiels et tuent des gens dans leur sommeil.  

Alors que le monde appelle à la cessation de cette « guerre insensée », la Fédération de Russie, elle, a choisi la voie de l’escalade, a poursuivi M. Mythen.  Le représentant a en outre signalé l’existence d’armes explosives à sous-munitions, y compris certaines armes dont l’utilisation est interdite dans les zones peuplées.  Parallèlement, les mines antipersonnel menacent les civils, la production agricole, la sécurité alimentaire et un accès humanitaire sûr, a-t-il souligné, en s’inquiétant également de l’utilisation d’aéronefs autoguidées ou de drones livrés par l’Iran, qui sèment la destruction et l’horreur dans les rues de Kiev et ailleurs.  Leur acquisition par la Russie serait contraire à la résolution 2231, a-t-il rappelé, estimant que de telles attaques n’ont qu’un objectif: intimider et terroriser la population civile, et constituent un déni flagrant de la vie humaine.  En conséquence, M. Mythen a exhorté la Fédération de Russie à s’abstenir de toute escalade, à prendre des mesures viables pour prévenir des victimes civiles et des dommages aux infrastructures, tout en octroyant un accès humanitaire.  

« Même pour la guerre, il existe des règles », a rappelé M. Mythen, qui a mis l’accent sur la reddition de comptes pour le ciblage des civils, la détention arbitraire, la traite humaine et la violence sexuelle liée au conflit.  Pour ce faire, il a exigé des enquêtes crédibles, la collecte rigoureuse de preuves et un appui pour les témoins, victimes et rescapés.  

Le représentant a rappelé, dans ce contexte, le message clair d’appui apporté, le 12 octobre, par l’Assemblée générale à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Il a dénoncé le fait que, depuis huit mois, la Fédération de Russie fait fi de la responsabilité du Conseil au titre de la Charte.  Il a lancé un appel aux membres de cet organe à assumer leurs responsabilités dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales, et de rester unis pour exiger de la Russie de cesser cette guerre et de se retirer de tout le territoire de l’Ukraine.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a demandé une cessation des hostilités, une désescalade des tensions et le début d’un processus de négociations politiques.  Il faut arrêter cette guerre maintenant, pas plus tard, a dit la représentante, ajoutant soutenir les efforts du Secrétaire général en ce sens.  Elle a également demandé un accès humanitaire facilité, en particulier, à la Fédération de Russie pour qu’elle permette l’acheminement de l’aide dans les régions sous son contrôle.  Le Ghana appelle aussi à l’ouverture d’enquêtes indépendantes et crédibles pour les crimes commis, en particulier les crimes sexuels.  Il soutient par ailleurs la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a déploré que la guerre en Ukraine ait tué, mutilé et brisé psychologiquement des milliers de personnes.  Des millions d’autres ont été contraintes de fuir, des villes ukrainiennes ont été réduites à l’état de ruines.  Les véritables objectifs de l’invasion sont de supprimer l’identité ukrainienne et d’annexer illégalement des terres ukrainiennes, a affirmé le représentant.  Il a dénoncé une campagne de frappes de drones et de missiles contre des zones fortement peuplées, loin des lignes de front ou d’installations militaires.  Des bombardements ont délibérément visé les infrastructures critiques, endommageant un tiers des centrales électriques, et ce, juste avant l’hiver, a-t-il accusé.  Pour le Royaume-Uni, il s’agit d’une violation manifeste du droit humanitaire international.  L’intention derrière ces attaques est de soumettre l’Ukraine en terrorisant les civils, a affirmé le représentant, qui a souligné que la Russie utilisait des armes obtenues en Iran, en violation de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité.  Les actions de la Russie sont illégales et immorales, et elles doivent prendre fin, a-t-il déclaré.   

M. Kariuki a demandé à la Russie de mettre un terme à sa désinformation ainsi qu’aux accusations, selon lesquelles l’Occident est responsable des atrocités commises par la Russie.  Il lui a demandé de tenir compte des appels de la communauté internationale, de respecter ses obligations en vertu du droit international, et de mettre fin aux attaques contre les civils, les infrastructures énergétiques, les hôpitaux et les établissements de santé, et de reprendre le chemin du dialogue.

Mme MONA JUUL (Norvège) a dit être préoccupée par la brutalité des attaques de missiles et de drones russes contre des civils et des infrastructures civiles, qui ont tué des civils et frappé plusieurs centrales électriques à travers l’Ukraine, entraînant un grand préjudice humanitaire et de nombreux morts.  Ces attaques peuvent constituer des crimes de guerre, a-t-elle estimé, en demandant que les responsables soient tenus personnellement responsables.  Elle s’est également dite préoccupée par la violence sexuelle et sexiste et la traite des êtres humains auxquelles les femmes et les enfants non accompagnés sont particulièrement exposés.  Il faut faciliter leur retour et atténuer les effets à long terme que la guerre de la Russie leur a imposés, a-t-elle recommandé.  Elle a rappelé que la Commission d’enquête internationale indépendante a conclu que des violations des droits humains et du droit international humanitaire ont été commises par les forces armées russes.  Les victimes méritent la justice et les survivants doivent être pris en charge, a-t-elle exhorté.  

La déléguée a plaidé pour que ces violations soient arrêtées et pour que cette guerre prenne fin: la Russie doit retirer ses troupes de l’Ukraine et arrêter la guerre.  Elle a dit être également préoccupée par le nombre de prisonniers de guerre portés disparus et d’autres personnes portées disparues en raison de ce conflit.  Elle a appelé les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.  Il faut soutenir le Comité international de la Croix-Rouge dans l’accomplissement de son mandat, a-t-elle recommandé à cet égard.  Les acteurs humanitaires doivent avoir un accès complet, sûr et sans entrave à tous ceux qui en ont besoin, en particulier des personnes âgées, handicapées et des enfants dans les zones touchées par le conflit, a exhorté la représentante, avant de conclure en soulignant l’importance de l’Initiative céréalière de la mer Noire visant à faire face à la famine dans le monde.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit sa « perplexité » devant le nombre d’orateurs inscrits à cette séance, en particulier les pays de l’Union européenne.  Il s’agit d’une séance d’information et non d’un débat général, a-t-il indiqué, soupçonnant ces délégations de vouloir passer à la télévision.  Il a aussi ironisé sur l’intérêt soudain de Mme DiCarlo pour la destruction des infrastructures civiles.  Et pourtant, son rapport ne fait nullement mention des destructions d’infrastructures civiles subies par la Fédération de Russie, dont les ponts de Crimée et de Belgorod, a-t-il dénoncé.  Il ne mentionne pas non plus la souffrance des habitants du Donbass qui, depuis huit ans, voient leurs infrastructures civiles détruites par le « régime ukrainien ».    

Le représentant a ensuite déclaré que la réalité est que le « régime ukrainien » et ses protecteurs occidentaux tentent de diffuser une « infox » et d’obtenir du Secrétariat des Nations Unies qu’il ouvre une enquête en faisant croire que la Fédération de Russie a acheté des drones de la République islamique d’Iran.  Cela est faux, a-t-il affirmé, mettant en garde le Secrétariat contre une cessation de coopération s’il venait à répondre à cette demande.   

Le délégué a également fait référence aux nombreuses livraisons d’armes envoyées par les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne vers l’Ukraine, dont des canons, des roquettes et des systèmes aériens.  Ces armes sont utilisées pour cibler des populations civiles en Fédération de Russie et ont visé et détruit des écoles, des aéroports, des usines, des barrages hydrauliques, ainsi que la centrale nucléaire de Zaporijia.   Kiev s’en vante et s’imagine que la Fédération de Russie va accepter cela, s’est-il indigné.  L’ONU est informée de tous ces incidents dangereux, mais jusqu’ici aucune réaction, a déploré le représentant.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a salué l’Ukraine et son peuple pour avoir reçu le Prix Sakharov décerné, la semaine dernière, par le Parlement européen pour leur lutte pour la démocratie, la liberté et l’état de droit.  Il a rappelé que, depuis huit mois, la Russie intensifie ses attaques et cible des infrastructures civiles, des installations énergétiques mais aussi des zones résidentielles, dans le but clair de terroriser la population, d’infliger de graves dégâts et de laisser des familles entières, des femmes et des enfants sans eau, électricité et chauffage à l’approche de l’hiver.  Il a appelé l’ONU à ne pas céder aux menaces et à mener une vérification adéquate des rapports selon lesquels des centaines de drones utilisés par les forces russes en Ukraine ont été illégalement importés d’Iran. 

Poursuivant, le délégué a dit que des milliers de militaires, d’équipements et d’avions russes inondent le Bélarus proférant des discours belliqueux.  La semaine dernière, a-t-il continué, après que le Conseil a été bloqué par le veto de la Russie, l’Assemblée générale a condamné par une écrasante majorité la dernière annexion russe d’une partie du territoire de l’Ukraine.  La réponse mondiale a été claire et retentissante, a-t-il salué, tout en faisant observer que la Russie est seule et se réfugie dans le déni.  Rappelant la loi martiale du Kremlin imposée dans les régions qui ont voté lors de simulacres de référendums, pour être gouvernées par la force d’occupation, le représentant a martelé que sa délégation ne reconnaît pas ces simulacres de référendums ni leurs « résultats tronqués ». 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a déclaré que le temps est venu d’orienter l’esprit des débats, des rhétoriques et de l’action en faveur d’une solution à la crise en Ukraine.  Près de huit mois après, nous en sommes encore à l’inventaire des peurs, des atrocités et de la détresse humanitaire, dans une logique d’un camp contre l’autre.  Dans cette terrible logique de blocs qui rejaillit des cendres, nous entendons les plus zélés de chaque camp brandir sans ambages que ceux qui ne sont pas avec eux sont contre eux, a regretté le représentant gabonais.  

Or, il est temps d’envisager une solution pour faire taire les armes en Ukraine, a estimé le représentant.  Faire taire les armes c’est l’aspiration de tout peuple en proie à l’insécurité générée par la guerre et c’est surtout la vocation de ce Conseil et de cette Organisation, a-t-il lancé, appelant les belligérants au respect du droit international humanitaire et de la résolution 2203 (2015).  Au seuil de la saison hivernale, le délégué a ensuite appelé à une trêve humanitaire afin de préserver l’accès à l’eau potable, à l’électricité, au chauffage, aux soins médicaux, et faciliter la distribution de l’aide humanitaire dont les populations sinistrées ont cruellement besoin. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine), notant que le représentant russe a quitté la salle du Conseil dès la fin de son intervention, a dit attendre le jour où il quittera carrément cet organe.  En réalité, depuis huit mois, celui-ci ne fait qu’empiler des mensonges, que ses maîtres lui ont dictés, a commenté le représentant ukrainien qui a paraphrasé son homologue russe niant, un à un, tous les faits qui se sont produits depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par son pays.  Or, il y a pour preuves des dizaines de charniers, des milliers de morts et des référendums illégaux dans quatre régions ukrainiennes, sans compter les dernières attaques tous azimut.  Depuis le 18 octobre, plus de 300 attaques par drones ont été massivement menées par la Russie dans 14 régions, a-t-il précisé.   

Le représentant a ensuite fait l’historique des résolutions du Conseil, dont celle, à l’initiative de l’Ukraine, sur la protection des infrastructures civiles contre les attaques terroristes.  Même la Russie s’était jointe au consensus autour de cette résolution, a-t-il rappelé, qui a insisté pour que les attaques fassent l’objet d’une condamnation et de poursuites pénales.  Il a informé que les « terroristes russes » ont miné le barrage de la centrale électrique de Kakhovka, et que l’approvisionnement en eau risque d’en souffrir.  Pis encore, la centrale de Zaporijia risque de ne plus être alimentée en eau -qui provient de ce réservoir-, ce qui serait une catastrophe.   

Il faut agir immédiatement pour que la Russie ne soit plus en mesure de commettre un acte de terreur, a-t-il exigé, en appelant à remédier à la situation des centrales électriques.  Chaque fois, la propagande russe a été démentie par des faits résultant d’enquêtes, comme celle effectuée par la Commission internationale indépendante sur la situation des droits de l’homme en Ukraine.  Le représentant s’est également alarmé de l’utilisation de drones et de missiles de longue portée iraniens, ce qui constitue une violation flagrante de la résolution 2231 (2015) du Conseil, en mentionnant en particulier l’Annexe B de ce texte.  En conséquence, des experts ont été invités en Ukraine pour inspecter des drones iraniens utilisés dans des attaques récentes.   

Sur le plan humanitaire et de l’acheminement des céréales vers d’autres pays, le délégué a indiqué que l’Ukraine continue à œuvrer avec le Programme alimentaire mondial (PAM) pour accroître le volume des céréales à destination de divers pays.  Il s’est dit favorable à une prorogation de l’Initiative céréalière de la mer Noire lorsque la période initiale aura expiré.  Chaque terroriste et criminel de guerre, y compris « ceux dans la salle du Conseil », paiera en actifs, a prévenu le représentant ukrainien, qui a voulu que le principe de diplomatie préventive devienne une réalité de la politique internationale.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a rendu hommage au peuple ukrainien qui a reçu cette semaine le prix Sakharov.  Il a estimé que cibler des civils, des écoles et des sources d’énergie, comme le fait la Fédération de Russie, ne peut jamais être légitime et constitue une violation grave du droit humanitaire.  Près d’un tiers des centrales électriques ukrainiennes ont été touchées, a-t-il relevé en constatant que les dommages subis par les infrastructures énergétiques ukrainiennes créent des défis majeurs en vue de l’hiver à venir.  Le délégué a souligné le financement humanitaire supplémentaire de 175 millions d’euros annoncé par l’Union européenne pour répondre aux besoins urgents et fournir de la nourriture, un accès à l’eau et une protection contre le froid de l’hiver.  Il a demandé à la Fédération de Russie de cesser ses attaques, de suspendre ses opérations militaires sur le territoire de l’Ukraine et de retirer toutes ses forces militaires, ses groupes armés et autres personnels non autorisés du territoire de l’Ukraine.   

Le délégué s’est dit anéanti par les découvertes d’atrocités dans les zones libérées et par les champs de mines qui rendent impossible l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a souligné l’importance de collecter les preuves de violations des droits humains et de violations du droit international humanitaire.  Il a plaidé pour des mesures de reddition des comptes, notamment les enquêtes menées par le Procureur de la CPI.  Par ailleurs, il a déclaré que la responsabilité s’étend à ceux qui soutiennent les crimes commis, citant le Bélarus et aussi l’Iran qui fournit des drones à la Fédération de Russie.  De plus, la destruction délibérée par la Russie des infrastructures agricoles et de transport de l’Ukraine met en danger la sécurité alimentaire de millions de personnes dans le monde, a déploré le représentant qui a salué à cet égard l’Initiative céréalière de la mer Noire et a soutenu l’appel du Secrétaire général à la prolonger au-delà du 19 novembre.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a, de nouveau, condamné fermement l’agression militaire non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine, et s’est dit gravement préoccupé par la situation humanitaire, qui continue de se détériorer progressivement.  Le représentant s’est dit consterné par le nombre de meurtres de civils innocents, les attaques contre les infrastructures essentielles, ainsi que par l’ampleur des violences sexuelles et sexistes commises par les soldats et les occupants russes.  Faisant référence à la récente série d’attaques de missiles et de drones iraniens contre des villes d’Ukraine, le représentant a déploré que « la Fédération de Russie ne comprenne manifestement pas l’expression ‘trop c’est trop’, déjà prononcée par le Secrétaire général ». 

Le représentant s’est également dit profondément préoccupés par les graves effets de l’invasion russe sur la sécurité alimentaire mondiale et a demandé à la Russie de permettre le passage libre et sûr des livraisons et expéditions agricoles à partir des ports ukrainiens.  « Nous pensons que l’initiative sur les céréales de la mer Noire sera prolongée », a-t-il ajouté.  

Souhaitant que cette « guerre insensée » prenne fin le plus tôt possible, M. Mlynár a toutefois ajouté que « ceux qui croient qu’en concluant la trêve et en faisant taire les armes, tout est fini, se trompent ».  Les auteurs des multiples exactions commises en Ukraine ne peuvent rester impunis et doivent être traduits en justice, a-t-il averti.  Le représentant a également rappelé que la Slovaquie considère tous les actes associés à l’acquisition forcée du territoire ukrainien par la Fédération de Russie comme « nuls, non avenus et illégitimes ».  La Slovaquie « ne reconnaîtra jamais » les territoires annexés comme autre chose qu’une partie de l’Ukraine.  Il a rappelé, à cet égard, que « la voix des Nations Unies de la semaine dernière était claire comme de l’eau de roche », et a demandé à la Fédération de Russie de mettre immédiatement et pleinement en œuvre la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies du 12 octobre. 

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a accusé la Russie de chercher délibérément à créer une catastrophe humanitaire, en Ukraine, en poursuivant sa guerre d’agression et en ayant clairement choisi la voie de l’escalade, avec des conséquences dramatiques « non seulement en Ukraine, mais aussi pour la sécurité mondiale et la stabilité économique ».  Pour la Pologne, les attaques aériennes russes contre des cibles civiles, menées depuis le 10 octobre, constituent « une nouvelle violation du droit international ».  Le représentant a accusé la Russie de vouloir « intimider la population civile et détruire l’infrastructure énergétique de l’Ukraine », essentielle en vue de la période hivernale, perspective sur laquelle il faut immédiatement se concentrer.  En raison des bombardements russes, plus de 3,5 millions de personnes n’ont plus de toit, a affirmé M. Szczerski.  

Le représentant a aussi attiré l’attention sur la « présence d’explosifs délibérément laissés par les Russes ».  Il faudra donc déminer des zones, y compris les terres agricoles, car ces mines et munitions non explosées représentent une menace pour les civils.  Il a jugé urgent de fournir des équipements adéquats. 

Les récentes attaques de missiles sur les villes ukrainiennes constituent des crimes de guerre, a répété M. Szczerski, qui a accusé la Russie d’avoir « fait preuve d’un manque total de respect pour le droit humanitaire international et les droits de l’homme », qui devront être punis.  La Pologne continuera à travailler avec les institutions internationales et l’Ukraine en ce sens.  

Face à ces exactions, le représentant a rappelé que son pays avait accueilli plus de 1,3 million de réfugiés, ainsi que ceux qui sont restés pour se battre pour leur pays ou qui ne peuvent pas partir, en fournissant une aide humanitaire gouvernementale.  « La seule réponse appropriée aux attaques russes est d’accroître l’ampleur de notre soutien à l’Ukraine », a-t-il ajouté.  

M. Szczerski a rappelé que l’énorme crise humanitaire en Ukraine est « purement d’origine humaine, il n’y a aucun élément à blâmer », mais seulement la Russie qui porte « l’entière responsabilité de toutes les destructions et pertes de vies ».  Exigeant une nouvelle fois le retrait total des Forces russes de l’Ukraine, le représentant a appelé l’ensemble de la communauté internationale à accroître la pression sur la Russie.  La fin de la guerre, a-t-il affirmé, « constituerait une solution immédiate, presque du jour au lendemain » à l’ensemble de la crise.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a jugé « choquante » la réaction de la Russie à sa nouvelle condamnation par 143 États à l’Assemblée générale dans le cadre de la résolution « unis pour la paix » puisqu’elle a intensifié ses attaques, ciblant « délibérément et systématiquement » les infrastructures civiles.  Pour l’Allemagne, l’objectif de la Russie est clair: soumettre l’Ukraine.  Le Président Putin veut « plonger l’Ukraine -littéralement- dans l’obscurité et faire geler les Ukrainiens, en privant des millions de civils d’électricité et de chauffage », a accusé la représentante.  Pour elle, ces attaques violent le droit humanitaire international et pourraient constituer des crimes de guerre.  Les responsables de ces violations flagrantes du droit international seront tenus pour responsables, a-t-elle averti.  

La représentante a ajouté que la Russie violait aussi la résolution 2231 (2015) du Conseil.  En effet, toutes les informations disponibles confirment que des drones iraniens sont utilisés pour terroriser les civils et ont été livrés à la Russie sans l’approbation préalable de ce Conseil, donc en violation flagrante de cette résolution 2231.  Mme Leendertse s’est dite choquée aussi par les informations faisant état de l’Iran de livrer des missiles balistiques à la Russie.  L’Allemagne « accueillerait favorablement » une enquête menée par l’équipe de l’ONU chargée de surveiller la mise en œuvre de la résolution 2231 et serait « prête à soutenir ses efforts techniques et impartiaux ». 

L’Allemagne continuera à défendre la Charte et à soutenir l’Ukraine, a poursuivi le représentant.  Elle accueillera, mardi, la « Conférence internationale d’experts sur le redressement, la reconstruction et la modernisation de l’Ukraine », visant à galvaniser le soutien international en faveur du pays.  La représentante a, en conclusion, demandé à la Russie de « changer de cap, respecter pleinement la lettre et l’esprit de la Charte, se retirer de l’Ukraine et se conformer à l’ordre juridiquement contraignant de la Cour internationale de Justice (CIJ) ».

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a rappelé que, pour la troisième fois depuis le début du conflit, le Ministre des affaires étrangères de son pays s’était rendu, mercredi, à Kiev pour exprimer « l’entière solidarité » du Gouvernement et du peuple grecs avec le Gouvernement et le peuple ukrainiens.  Elle a rappelé l’importance et l’ancienneté de la présence grecque dans certaines régions d’Ukraine.   

La Grèce condamne dans les termes les plus forts les récentes attaques menées notamment par des drones contre des infrastructures civiles vitales.  Parlant d’un « bombardement inhumain, continu et sans pitié, visant des vies innocentes », la représentante a rappelé l’assistance humanitaire apportée dès les premiers jours du conflit par son pays, qui est également engagé en faveur de la reconstruction de l’Ukraine.  Parmi les différents exemples d’assistance qu’elle a cités, la représentante a signalé l’expertise apportée par son pays aux pays voisins de l’Ukraine qui font face à un afflux de réfugiés, « compte tenu de notre expérience dans la gestion des flux migratoires ».   

La Grèce est également fortement engagée en faveur de la responsabilité des crimes de guerre, a affirmé la représentante, qui a rappelé que le Ministre des affaires étrangères s’était rendu à la Cour pénale internationale (CPI) à ce sujet.  Quels que soient les efforts de la communauté internationale, la seule véritable solution aux souffrances actuelles du peuple ukrainien est la cessation immédiate de l’agression non provoquée de la part de la Fédération de Russie, a conclu Mme Theofili. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission examine les droits humains au prisme des questions environnementales et de la condition des personnes handicapées

Soixante-dix-septième session
21e & 22e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4357

La Troisième Commission examine les droits humains au prisme des questions environnementales et de la condition des personnes handicapées

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi sa radiographie des différents droits humains en dialoguant, aujourd’hui, avec plusieurs titulaires de mandat en lien avec les droits de l’environnement et des personnes âgées, l’occasion de mesurer les progrès accomplis dans ces domaines mais aussi les lacunes des dispositifs existants.  La Commission s’est par ailleurs penchée sur les processus de justice transitionnelle centrés sur les personnes dans le cadre des efforts de réalisation des objectifs de développement durable (ODD). 

Les ODD ont du reste été le fil rouge de cette réunion, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’environnement n’hésitant pas à affirmer que le droit à un environnement sain, propre et durable, reconnu en juillet dernier par une résolution de l’Assemblée générale, est un bon moyen d’atteindre ces objectifs communs.  Regrettant à cet égard que les ODD soient perçus comme de « simples aspirations », M. David Boyd a rappelé qu’ils reposent sur un socle « juridiquement contraignant » des droits humains et de droit international de l’environnement. 

M. Boyd a ajouté que, même si les résolutions de l’Assemblée générale n’ont, elles, pas de valeur contraignante, 80% des États Membres reconnaissent déjà le droit à un environnement sain, propre et durable par le biais de constitutions, de lois, de décisions de justice et de traités régionaux.  Selon lui, ils pourraient aussi le faire à l’échelon planétaire grâce à un troisième pacte mondial ou à un traité international.  Le Rapporteur spécial a également formulé des recommandations pour surmonter les obstacles financiers à la réalisation des ODD, plaidant pour l’instauration d’un impôt mondial sur la fortune, la réaffectation des subventions préjudiciables à l’environnement et la création d’une taxe mondiale sur le carbone.

De son côté, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques a constaté que de nombreux droits humains sont violés du fait du dérèglement du climat, en particulier les droits à la vie, à la santé, au travail et à un logement adéquat.  M. Ian Fry a indiqué qu’à eux seuls, les États membres du G20 sont responsables de 78% des émissions de gaz à effet de serre de la dernière décennie.  Il a également souligné le coût énorme des catastrophes climatiques, relevant que les appels humanitaires des Nations Unies pour y répondre ont augmenté de plus de 800% entre 2000 et 2021. De plus, d’ici à 2030, les pertes économiques inévitables dues aux changements climatiques devraient atteindre 290 à 580 milliards de dollars.   

Fort de ce constat, M. Fry a appelé à l’arrêt des subventions accordées aux combustibles fossiles, lesquelles s’élèveraient encore à environ 500 milliards de dollars par an.  Il a aussi appelé de ses vœux l’organisation en 2023 d’un forum de haut niveau sur les engagements en matière d’atténuation, l’établissement d’un mécanisme de recours et de réclamation en matière de changements climatiques et l’élaboration par la Commission du droit international d’un instrument juridique qui assure une protection complète aux défenseurs des droits humains des populations autochtones et de l’environnement. 

Les violations des droits humains que subissent les peuples autochtones du fait de la contamination toxique de leurs corps, de leurs terres et de leurs territoires ont également alerté le Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits humains de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux.  L’exposition à des substances dangereuses est une forme de violence environnementale à l’encontre des peuples autochtones, a soutenu M. Marcos Orellana, précisant que 50 à 80% de toutes les ressources minérales destinées à être extraites par des sociétés minières se trouvent sur des terres autochtones. 

La Commission a par ailleurs échangé avec deux titulaires de mandat sur les droits des personnes handicapées, dont le Rapporteur spécial en charge de cette question.  M. Gerard Quinn a dit avoir examiné les moyens de mieux accorder le droit international humanitaire et la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées pour assurer la protection civile de ces personnes pendant les conflits armés.  Rappelant à ce propos que la quatrième Convention de Genève de 1949 inclut spécifiquement les personnes handicapées sous la description « malades et infirmes », il a regretté que ces normes restent largement inexploitées. 

Dans le cadre des conflits, M. Quinn a relevé d’importants problèmes dans la communication d’avertissements aux personnes handicapées, pointant également des processus d’évacuation non inclusifs, l’utilisation aveugle de munitions, l’absence de mesures de précaution réalisables et l’invisibilité des personnes handicapées dans la doctrine et les formations militaires.  L’objectif n’est pas de rendre la guerre plus inclusive, mais de réduire la létalité des conflits et d’aborder le sort des civils handicapés, a-t-il expliqué, indiquant que sa prochaine étude portera sur la voix collective des personnes handicapées dans les processus de consolidation de la paix. 

À sa suite, la Présidente du Comité des droits des personnes handicapées a présenté les travaux de son organe, évoquant l’adoption d’une observation générale sur le travail et l’emploi des personnes handicapées et de lignes directrices sur la désinstitutionalisation, y compris dans les situations d’urgence.  Ces deux adoptions contribueront à la mise en œuvre des principes et des normes de la Convention sur les droits des personnes handicapées, a précisé Mme Rosemary Kayess.  Parmi les autres actions du Comité, elle a fait état de réunions avec les États parties en vue de recevoir des informations sur l’impact de la guerre en Ukraine sur les personnes handicapées. 

Dernier intervenant du jour, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition s’est intéressé au rôle des processus de justice transitionnelle dans la réalisation des ODD. 

M. Fabian Salvioli s’est dit convaincu qu’une justice transitionnelle centrée sur les victimes peut influer sur la résolution des crises et des cycles de violence tels que ceux qui sont en cours actuellement. 

À ses yeux, le cadre des ODD est propice car il établit des liens entre la justice, le développement et la sécurité.  Soucieux de valoriser les expériences vécues dans ces domaines, M. Salvioli a recommandé d’adopter une approche basée sur la reconnaissance, qui place les victimes au centre des processus de justice.  Il a également mis l’accent sur les réparations, qui, selon lui, sont les mesures les plus susceptibles de faire une différence dans la vie des victimes. 

La Troisième Commission poursuivra son examen de la promotion et de la protection des droits humains mardi 25 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

M. DAVID BOYD, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’environnement, a rappelé que l’Assemblée générale a adopté une résolution « historique », le 28 juillet dernier, qui reconnaît, pour la première fois au niveau mondial, le droit de l’homme à un environnement propre, sain et durable (A/RES/76/300).  Il a jugé cette adoption opportune compte tenu du fait que plus de 80% des États Membres reconnaissent déjà ce droit par le biais de constitutions, de lois, de décisions de justice et de traités régionaux.  La résolution représente un mandat pour faire face à la triple crise environnementale de l’urgence climatique, de l’effondrement de la biodiversité et de la pollution généralisée, a-t-il précisé. 

M. Boyd a ensuite averti qu’à l’approche de la mi-parcours du Programme 2030, la probabilité d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) est « étonnamment faible », en particulier pour les ODD qui concernent l’environnement.  Rappelant qu’avant même la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine, le monde n’était pas sur la bonne voie, il a fait valoir que ces événements dévastateurs ne sont que des « distractions passagères » comparées à l’ampleur de l’extrême pauvreté, des inégalités et des catastrophes environnementales qui menacent notre avenir.  Le Rapporteur spécial a également regretté que les ODD soient perçus par les États comme de simples aspirations, insistant sur le fait qu’ils reposent sur un socle de droits de l’homme et de droit international de l’environnement « juridiquement contraignants et applicables ».  De plus, a-t-il ajouté, les obligations en matière de droits humains sous-tendent tous les ODD et 93% de leurs cibles. 

Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la réalisation des ODD d’ici à 2030 nécessiterait un investissement supplémentaire de 4 200 milliards de dollars par an, soit 33 600 milliards de dollars au cours des huit prochaines années, a poursuivi M. Boyd.  Parmi les obstacles structurels à la réalisation des ODD, il a cité les niveaux d’endettement et les coûts astronomiques du service de la dette, le manque de financement adéquat pour les pays à faible revenu, le manquement des États riches à leurs engagements en matière d’aide au développement, les subventions massives aux combustibles fossiles, la fraude fiscale, les traités commerciaux donnant la priorité aux profits plutôt qu’aux droits de l’homme et la non-application du principe « pollueur-payeur ».  En réponse, il a proposé sept mesures clefs pour contribuer à combler ce déficit: un impôt mondial sur la fortune, qui rapportait 2 500 milliards de dollars, la réaffectation des subventions préjudiciables à l’environnement (1 800 milliards de dollars), une taxe mondiale sur le carbone (1 000 milliards de dollars), la réduction de la fraude fiscale (600 milliards de dollars), des droits de tirage spéciaux pour l’action climatique (500 milliards de dollars), des allègements de dette (400 milliards de dollars) et le respect des engagements en matière d’aide publique au développement (200 milliards de dollars), le total représentant 7 000 milliards de dollars. 

M. Boyd a conclu en formulant quelques recommandations pour les États Membres en vue atteindre les ODD.  Il les a notamment appelés à reconnaître que les ODD constituent des obligations juridiquement contraignantes, à prendre des mesures urgentes sur la pollution de l’air et de l’eau et la crise climatique, à donner la priorité aux actions qui permettent d’atteindre simultanément plusieurs ODD comme la grande muraille verte en Afrique, à protéger les défenseurs des droits de l’homme en matière d’environnement et à négocier le retrait ou l’arrêt des mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États et des accords internationaux sur le commerce et l’investissement.  Il a aussi estimé que les États à haut revenu ont une responsabilité particulière en ce qui concerne la mise en œuvre et le financement des actions visant à atteindre les ODD et doivent aider les nations vulnérables à répondre à l’urgence climatique, y compris par des fonds pour les pertes et les dommages. 

Dialogue interactif

Après la présentation du rapport de M. Boyd, les États-Unis ont indiqué mettre l’accent au niveau international sur la protection des océans et la lutte contre la pollution plastique.  Au niveau national, la loi Biden contre l’inflation devrait permettre de réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 2005, ont-ils ajouté, avant de s’interroger sur les mesures urgentes à prendre en vue de garantir un environnement sain, propre et durable.  Comment peut-on aider les États Membres à adopter une approche des questions environnementales basées sur les droits humains et comment faire pour que les recommandations du rapport soient bien prises en compte par les principales parties prenantes, a pour sa part demandé l’Union européenne.  Après le Chili, qui a rappelé avoir fait de l’environnement sain et non pollué une priorité constitutionnelle et avoir adhéré cette année à l’Accord d’Escazú, le Luxembourg a regretté que l’ONU ne montre pas l’exemple en termes d’efficacité énergétique, demandant à cet égard si l’Organisation a déjà été évaluée concernant son respect d’un environnement propre, sain et durable.  Le Mexique a lui aussi salué l’Accord d’Escazú avant de s’enquérir des pratiques optimales pour garantir un environnement sain, propre et salubre.  Comment garantir ce droit face aux effets transfrontières des changements climatiques, de la perte de la biodiversité et de la pollution, a-t-il aussi voulu savoir. 

S’exprimant au nom du Groupe sur les droits humains et l’environnement, la Suisse a demandé quelles mesures devaient être mises en œuvre urgemment par les États et les entreprises.  À sa suite, la Slovénie a rappelé que le droit à un environnement sain, propre et durable est protégé dans sa constitution.  Elle a salué le vote de la résolution comme un pas historique et a appelé à inclure ce droit dans tout le système des Nations Unies.  Comment utiliser au mieux la reconnaissance du droit à un environnement propre, sain et durable comme un droit universel pour atteindre les ODD, a ensuite demandé la Malaisie.  La France a souhaité savoir comment le Rapporteur spécial envisage la coopération avec les deux autres titulaires de mandat traitant s’exprimant sur l’environnement devant la Commission, rappelant au passage que, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), un quart des décès peuvent être imputés à des facteurs environnementaux.  La République de Corée a souligné le caractère transfrontalier des questions de qualité de l’air et rappelé qu’elle avait proposé une journée internationale de la qualité de l’air.  Rappelant que les ODD ont un caractère contraignant en termes de droits humains, l’Allemagne a demandé comment renforcer le pilier prévention dans ce domaine, tandis que la Namibie s’interrogeait sur les politiques à adopter en vue de promouvoir le droit à un environnement propre, sain et durable, notamment en cas de conflit. 

L’Algérie a relevé à son tour que ce droit est protégé par sa constitution.  Elle a par ailleurs voulu savoir pourquoi le terme « sûr » a été supprimé de la résolution et quels nouveaux mécanismes pourraient être créés.  Dans quelle mesure le renforcement des capacités et les transferts de technologie peuvent-ils aider les pays en développement à donner effet au droit à un environnement propre, sain et durable, a demandé le Brésil.  S’enorgueillissant d’avoir été l’un des tout premiers pays à intégrer ce droit dans sa constitution, le Portugal a souhaité connaître l’avis du Rapporteur spécial sur l’instrument juridiquement contraignant pour les entreprises en cours d’élaboration à Genève.  La République arabe syrienne a demandé si les États agissent comme ils le doivent pour réaliser les ODD, l’Ordre souverain de Malte rappelant quant à lui ses réalisations en collaboration avec la Colombie en vue de protéger l’environnement. 

Répondant aux questions des délégations, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’environnement a insisté sur l’importance d’intégrer le droit à un environnement propre, sain et durable dans toutes les politiques comme un droit humain.  Il convient ensuite de mettre ce droit en pratique et d’adopter des mécanismes de suivi et de contrôle, a-t-il ajouté.  Sur le plan juridique, il a rappelé que les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale n’ont pas de valeur contraignante.  Toutefois, a-t-il relevé, les 156 États qui ont reconnu ce droit au niveau national peuvent aussi le faire à l’échelon mondial.  M. Boyd a ensuite évoqué la possibilité d’un troisième pacte mondial ou d’un traité international, notant à cet égard que plusieurs instruments existent déjà au niveau régional en Afrique ou en Amérique latine.  Il a également encouragé l’adoption d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, avant de mentionner les projets de traité sur la pollution plastique et sur les droits humains et les entreprises. 

Selon M. Boyd, le droit à un environnement propre, sain et durable devrait être intégré dans les procédures conventionnelles et être reconnu par l’alliance mondiale de l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH).  À ce propos, il a expliqué que, lors de ses visites dans différents pays, il a fourni des recommandations pour mieux intégrer le droit en question dans les législations nationales.  Il s’est dit prêt à en fournir à tout État qui n’aurait pas encore reconnu ce droit mais souhaiterait le faire.  S’agissant des bonnes pratiques, il a mis en avant celles de la Slovénie et du Portugal, actifs sur cette question depuis les années 1970, et a renvoyé à la résolution du Conseil des droits de l’homme qui liste plus de 500 bonnes pratiques appliquées par 150 États Membres. 

Concernant l’urgence climatique, le Rapporteur spécial a déploré le manque de réelle prise de conscience collective.  Il s’est cependant réjoui que l’Uruguay ait réussi à passer des énergies fossiles aux énergies renouvelables en 10 ans grâce à de très gros investissements ou que le Portugal ait augmenté de 5% à 60% la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique.  Il a aussi noté que la Norvège, le Costa Rica, le Paraguay ou encore l’Albanie sont proches de 100% d’énergies renouvelables.  Il a d’autre part souligné l’importance de traiter la question des pertes en dommages, qui font perdre des milliards de dollars chaque année.  Enfin, à la question sur l’absence du terme « sûr » dans la résolution, il a renvoyé à la responsabilité de chacun de venir en aide aux plus vulnérables. 

Exposé

M. MARCOS A. ORELLANA, Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux, a alerté sur les violations des droits humains et les abus que subissent les peuples autochtones du fait de la contamination toxique de leurs corps, de leurs terres et de leurs territoires.  L’exposition à des substances dangereuses est une forme de violence environnementale à l’encontre des peuples autochtones, a soutenu le Rapporteur spécial dans son nouveau rapport.

Il a indiqué que dans de nombreuses régions du monde, la capacité de l’État à réglementer efficacement les combustibles fossiles et les industries extractives est une illusion.  Cependant, les États utilisent le « principe fictif » qu’est leur contrôle effectif du territoire pour tenter de légitimer l’extraction des ressources naturelles présentes sur les territoires des peuples autochtones.  En outre, pour satisfaire l’expansion d’une économie mondiale attachée à l’extractivisme, les États et les entreprises pénètrent dans des régions de plus en plus éloignées, à la recherche de métaux, de minéraux et de combustibles fossiles, laissant derrière eux un héritage de pollution et de déversement de substances dangereuses, a dénoncé l’expert, précisant que 50 à 80 % de toutes les ressources minérales destinées à être extraites par des sociétés minières se trouvent sur des terres autochtones.

Les entreprises agroalimentaires empiètent elles aussi sur les terres des peuples autochtones, les exposant aux pesticides dangereux utilisés dans les monocultures, a-t-il poursuivi, évoquant notamment les répercussions de la fumigation aérienne qui répand sans discernement des substances toxiques qui dérivent sur les cultures et les eaux dont les peuples autochtones dépendent pour leur subsistance matérielle et spirituelle.  M. Orellana a également alerté que, le déversement de déchets dangereux provoque des traumatismes sanitaires et psychologiques chez les populations autochtones et rendent parfois leurs territoires inhabitables induisant à des déplacements forcés.  De fait, le résultat de la pollution toxique menace l’existence même des peuples autochtones, s’est alarmé le Rapporteur spécial. 

M. Orellana a ensuite relevé que la voix des peuples autochtones est trop souvent réduite au silence dans les processus de décision concernant les produits chimiques et les déchets, y voyant une forme de discrimination raciale qui aggrave les dommages disproportionnés que les peuples autochtones subissent du fait de la pollution toxique.  Il a également signalé que les peuples autochtones n’ont qu’un accès limité aux services de santé, et que leurs pratiques sanitaires traditionnelles ne peuvent pas faire face aux problèmes de santé nouveaux et inconnus qui émergent de l’exposition aux produits toxiques.  De plus, l’accès à la justice des peuples autochtones qui cherchent à obtenir réparation pour les effets néfastes des produits toxiques est limité, a-t-il ajouté, pointant du doigt la discrimination de l’État, la corruption et l’absence de lois protectrices qui accroissent leur marginalisation.

Face à cette situation, le Rapporteur spécial a exhorté les États à adopter des mesures immédiates pour arrêter l’afflux dans les territoires autochtones de produits chimiques industriels toxiques, de pesticides et de déchets dangereux, et à mettre fin au double standard consistant à autoriser la production et l’exportation de pesticides hautement dangereux dont ils interdisent l’utilisation sur leur propre territoire.  Il a également recommandé que les instruments internationaux sur les produits chimiques et les déchets, mettent en œuvre des programmes spécifiques pour défendre les droits des peuples autochtones.  De leur côté, les entreprises commerciales doivent obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones dont les droits, les terres et les moyens de subsistance seraient affectés par leurs activités.

Dialogue interactif

L’Union européenne a souhaité connaître les mesures et stratégies qui se sont avérées efficaces pour réduire les effets des produits dangereux.  Par ailleurs, comment renforcer le rôle de la société civile dans la promotion et de la gestion durable des déchets?  Quels sont les organes et organismes qui pourraient contribuer à mieux identifier les zones contaminées, se sont enquis, pour leur part, les Îles Marshall

Après le Nigéria, qui a réaffirmé son engagement à s’acquitter de ses obligations internationales pour un environnement durable propre et sain, l’Algérie a voulu savoir quelles étaient les voies de recours concernant les dépôts des déchets dangereux dans les pays en développement.  À ce sujet, la Chine a dit être très préoccupée par les décharges de produits dangereux provenant des États-Unis.  Il faut suivre de façon précise la provenance de déchets toxiques, a renchéri la République islamique d’Iran qui a accusé les multinationales d’être de nouveaux colons qui détruisent des environnements sains en complicité tacite des États.

Répondant à ces questions et observations, le Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux a mis en garde contre les fausses solutions pour la gestion des déchets, les qualifiant même de « mirages », notant que moins de 10% des produits plastiques ont été recyclés ces 10 dernières années.  De même, l’incinération mène à la production de dioxines très dangereuses, les plastiques contenant des milliers d’actifs néfastes.  Pour ce qui est des meilleurs pratiques, le Rapporteur spécial a cité l’économie circulaire, notamment pour la gestion des toxiques dans les plastiques.  Et c’est là que le droit à l’accès à l’information devient critique, car il faut connaître le contenu des plastiques, les volumes produits et autres, a-t-il indiqué.  C’est une pratique optimale qui devrait informer les négociations afin de parvenir à un nouvel instrument sur la pollution plastique. 

S’agissant des répercussions des activités militaires sur les peuples autochtones, M. Orellana a évoqué les problèmes liés aux bases abandonnées, expliquant que dans certains cas, les exercices ont provoqué des contaminations qui continuent d’avoir un impact sur les communautés autochtones.  Il a également évoqué la contamination de l’eau, et les risques découlant des produits chimiques éternels qui sont presque indestructibles. 

Selon lui, l’émergence de zones sacrifiées partout dans le monde découle non seulement d’un développement mal informé, mais aussi du fait que les priorités économiques sont privilégiées au détriment de celles des communautés touchées.  À ce propos, le Rapporteur spécial a jugé encourageant que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) se saisit de plus en plus de la question et collabore avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).  Bien évidemment, a-t-il confié, il existe d’autres entités des Nations Unies qui ont le savoir-faire technique, notamment sur la pollution aux hydrocarbures ou autres, et qui pourraient contribuer à la bonne gestion des zones sacrifiées.  Il a ensuite signalé que les zones contaminées par le mercure se multiplient à grande vitesse dans la région de l’Amazonie, en Afrique de l’Ouest et en Asie du Sud-Est en raison de la demande inextinguible en or de la joaillerie.

Exposé

IAN FRY, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques, a rappelé que de nombreux droits humains sont violés en raison des changements climatiques, citant par exemple les droits à la vie, à la santé, au travail et à un logement adéquat.  Dénonçant l’inaction des pays développés et des grandes entreprises, qui n’ont pas pris la responsabilité de réduire radicalement leurs émissions de gaz à effet de serre, il a expliqué que cela avait conduit à des demandes de « réparations climatiques » pour les pertes subies.  À eux seuls, a-t-il fait remarquer, les États membres du G20 sont responsables de 78% des émissions de la dernière décennie. 

Abordant la question de l’atténuation, le Rapporteur spécial a qualifié la réponse globale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre d’inadéquate.  Or cela crée une catastrophe en matière des droits humains et entraîne de graves violations, a-t-il mis en garde. Il aussi indiqué que les subventions accordées aux combustibles fossiles s’élèveraient à environ 500 milliards de dollars par an, soit bien au-delà des promesses faites par les pays en matière d’atténuation.  Il a par ailleurs appelé à mettre fin aux pratiques des producteurs de combustibles fossiles qui utilisent les règlements des différends entre investisseurs et États dans le cadre du traité sur la Charte de l’énergie pour poursuivre les États qui prennent des mesures contre les changements climatiques.

M. Fry a ensuite mentionné des catastrophes récentes dues aux changements climatiques, notamment au Zimbabwe ou au Mozambique.  En 2021, par exemple, le super typhon Rai a frappé les Philippines, entraînant des pertes de 336 millions de dollars en produits agricoles.  Les coûts de ces catastrophes sont énormes, a-t-il alerté, signalant que les appels humanitaires des Nations Unies pour des catastrophes climatiques extrêmes ont augmenté de plus de 800% entre 2000 et 2021.  De plus, d’ici 2030, les pertes économiques inévitables dues aux changements climatiques devraient atteindre 290 à 580 milliards de dollars.

Le Rapporteur spécial est également revenu sur ce qu’il appelle « l’impossibilité de participer », regrettant que les personnes les plus touchées soient les moins à mêmes de participer aux processus décisionnels actuels.  M. Fry a d’autre part alerté la Commission sur les risques qu’encourent les défenseurs des droits climatiques, persécutés par des gouvernements et des organisations de sécurité.  Pour tenter de remédier à ces problèmes, il a formulé quelques recommandations à l’Assemblée générale.  Il convient, selon lui, d’organiser un forum de haut niveau sur les engagements en matière d’atténuation en 2023, d’établir un mécanisme de recours et de réclamation en matière de changements climatiques et de charger la Commission du droit international d’élaborer un instrument juridique international afin d’assurer une protection complète et efficace aux défenseurs des droits humains des populations autochtones et de l’environnement.  Enfin, il a appelé les États Membres à envoyer des jeunes à la COP27, « parce leur avenir est en jeu. »

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne a souhaité en savoir plus sur les activités du Rapporteur spécial en matière de protection des droits de l’homme dans le contexte climatique, notamment en ce qui concerne la protection des défenseurs des droits de l’homme.  Mentionnant les six rapports publiés par les rapporteurs spéciaux de l’ONU sur des questions relatives aux droits humains et aux changements climatiques, elle a également demandé à M. Fry s’il juge souhaitable qu’une synthèse de leurs recommandations soit publiée.  Elle s’est enfin interrogée sur les leviers d’action concernant les droits de l’enfant dans le contexte des changements climatiques.  Évoquant l’impact négatif des changements climatiques sur le développement, l’Australie a demandé si des mesures pourraient être prises pour réduire le risque de catastrophes et minimiser leurs dommages. 

Comment les États peuvent-ils mieux travailler pour assurer la participation des groupes en situation de vulnérabilité à tous les niveaux, et existe-t-il des exemples de bonnes pratiques étatiques dont les autres peuvent s’inspirer, a voulu savoir l’Irlande.  La délégation a aussi demandé à M. Fry de développer ses recommandations sur le processus d’amélioration du plan d’action en faveur de l’égalité des sexes, ceci en vue d’un accord lors de la vingt-huitième session de la Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.  À sa suite, la Pologne a rappelé à quel point les risques d’apatridie et de perte de patrimoine culturel sont étroitement liés aux changements climatiques, et a demandé au Rapporteur spécial comment il aborde cette causalité. 

Le Luxembourg a demandé des précisions sur le groupe consultatif d’experts chargés d’examiner les pertes et dommages, souhaitant notamment savoir comment ses travaux pourraient-ils appuyer les différents mécanismes existants.  Selon lui, toute création de groupe d’experts indépendants doit être coordonnée avec les processus existants, tel que le dialogue de Glasgow sur le financement des pertes et dommages ou le Réseau de Santiago.  Dans quelle mesure le mandat du Rapporteur peut-il encourager la mise en place d’un mécanisme de pertes et dommages pour rappeler l’aspect multidimensionnel des changements climatiques, afin d’aider notamment les États de la région Pacifique face aux périls environnementaux qui les menacent, a ensuite demandé Fidji, plaidant pour l’inclusion d’un niveau de vulnérabilité variable selon les latitudes.  L’Algérie a quant à elle critiqué quelques points du rapport, appelant à une approche plus équilibrée.  S’agissant de la création encouragée par le rapport de tribunaux internationaux des droits humains pour engager la responsabilité des gouvernements et autres acteurs qui investissent dans les énergies fossiles, elle a voulu savoir si ces instances jugeront les pays développés qui n’ont pas suivi les engagements de l’Accord de Paris. 

Comment le Rapporteur spécial envisage-t-il l’avenir du financement de l’adaptation aux changements climatiques, s’est ensuite enquis le Brésil, tandis que la Fédération de Russie se réjouissait que le rapport montre que l’Administration américaine ne s’est pas acquittée de ses obligations environnementales.  La délégation a également déploré que les questions climatiques soient abordées par des enceintes qui ne sont pas concernées et ne disposent pas du savoir-faire nécessaire en la matière.  À la suite du Liechtenstein, qui s’est interrogé sur le caractère opportun de l’engagement de la responsabilité pénale des États en cas d’écocide, le Royaume-Uni a demandé comment l’on pourrait prendre davantage en considération les points de vue de ceux qui sont les plus touchés par les changements climatiques afin de les traduire en action dans les politiques publiques.

Le Pakistan a rappelé qu’il est l’un des pays les plus touché par les changements climatiques, 17 000 personnes étant récemment mortes dans des inondations.  Plaidant pour la mobilisation de financements climatiques pour les pays en développement en vertu du principe de responsabilité collective mais partagée, il a demandé au Rapporteur spécial s’il envisage des mesures d’allègement de la dette pour permettre à des pays comme le sien de mieux lutter contre le réchauffement climatique et de s’y adapter.  De son côté, l’Inde a regretté que le rapport fasse peu mention de la question de l’adaptation.  Elle s’est demandé comment faire appliquer le principe de responsabilité commune mais différenciée pour permettre aux pays en développement un accès aux financements climatiques et aux technologies adaptées.

La Chine a affirmé que les pays développés, premiers responsables du dérèglement climatique, devraient être en première ligne de son atténuation et fournir davantage aux pays en développement.  Réitérant sa volonté d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2060 et de ne pas construire de centrales à charbon supplémentaires, elle a souhaité que le Rapporteur spécial s’acquitte de ses fonctions « de manière objective ».  La République islamique d’Iran a, elle, déploré la « grande injustice » imposée par les économies développées envers celles qui sont les moins à même de réagir, ainsi que les mesures coercitives unilatérales qui empêchent l’accès aux technologies d’adaptation.  Ne politisons pas les questions climatiques, y compris l’Accord de Paris, a exhorté la délégation.  L’Islande a, pour sa part, souhaité connaître les mesures prises par les États pour incorporer les personnes les plus touchées par la crise climatique.  Enfin, le Bangladesh a rappelé sa vulnérabilité ainsi que ses efforts en vue de l’adaptation aux changements climatiques, invoquant à son tour la nécessité de financements internationaux.  Comment, dès lors, peut-on encourager les pays à établir un mécanisme de pertes et dommages, a-t-il demandé. 

Répondant à ces questions et observations, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques a tout d’abord rappelé que nombre de résolutions rédigées au sein du Conseil des droits de l’homme ont été reprises et synthétisées dans son travail, de même pour celles de la Commission sur les droits de l’enfant.  Il s’est ensuite alarmé des enlèvements et du harcèlement de défenseurs de l’environnement, qui nécessitent selon lui la mise en place de mécanismes de reddition de comptes pour les protéger.  Évoquant par ailleurs les pertes immenses que les changements climatiques ont causées à des pays tels le Pakistan, il a martelé l’importance d’une riposte internationale, ajoutant que la société civile, surtout celle qui est la plus touchée par ces drames, doit faire partie de la solution.  À ce titre, il s’est félicité d’initiatives telles que celle du Parlement de la jeunesse mis en place en Suède.

M. Fry est également revenu sur le programme d’action sur l’égalité de genre.  Face à l’exacerbation des violences faites aux femmes sous le poids des changements climatiques, notamment la traite et le harcèlement, il conviendrait selon lui de revoir ce programme en explorant des questions de genre beaucoup plus spécifiques.  Les droits humains sont intimement liés aux changements climatiques, mais ce lien demeure encore ignoré dans de nombreuses réunions environnementales, a-t-il déploré. 

En réponse à la question des Fidji sur le mécanisme de pertes et dommages et le niveau de vulnérabilité variable des États, il a estimé que l’obstacle principal est la prise en compte par l’Assemblée générale de la recommandation qu’il a formulée.  Sur le front climatique, nos combats avancent lentement, a constaté le Rapporteur spécial, évoquant des promesses non tenues datant de 2009.  À cet égard, il a fait valoir que les prêts ne doivent pas être confondus avec le financement climatique en tant que tel.  Le coût de l’inaction climatique dans des pays tels que la Somalie, le Venezuela et le Pakistan nous montre combien il est important de devenir plus ambitieux en termes de financement climatique, a-t-il insisté, avant d’avancer la piste d’un éventuel recours au Fonds monétaire international (FMI).  Nous devons changer la donne du tout au tout, a-t-il conclu.

Suite de la discussion générale

M. KENNETH WELLES (Micronésie) s’est réjoui que son pays ait été l’un des derniers à être touché par la pandémie de COVID-19.  Il a cependant rappelé que les blocages et restrictions de voyage ont eu un effet dévastateur sur le plan économique et social.  Après avoir exprimé sa solidarité avec les pays qui n’ont pas encore reçu les vaccins nécessaires pour immuniser leur population, il a souligné l’attachement de la Micronésie pour l’égalité femmes-hommes.  Signalant l’existence de bourses permettant aux femmes et aux filles de poursuivre leurs études, il s’est félicité que les femmes soient plus nombreuses que jamais à occuper des postes à responsabilité dans son pays.  Le représentant a d’autre part souligné que les populations de Micronésie et du Pacifique subissent déjà de plein fouet les effets néfastes des changements climatiques, qui, a-t-il dit, « seront bientôt irréversibles ».  Si rien n’est fait, les progrès et les réalisations n’auront servi à rien, a-t-il averti, appelant les États à respecter la trajectoire de 1,5 degré Celsius de l’Accord de Paris et mettre à jour leurs contributions au niveau national afin de s’aligner sur cet objectif. 

Mme DIARRA DIME-LABILLE (France) a commencé par condamner l’agression de la Russie contre l’Ukraine, assurant que son pays ne reconnaîtra jamais les annexions illégales de régions ukrainiennes.  Tout en appelant la Russie et ses alliés à mettre un terme aux violations massives des droits de l’homme dont ils se sont rendus coupables, elle s’est déclarée préoccupée par les actions du pouvoir russe visant à étouffer, en Russie même, toute voix dissidente contre cette guerre.  Dans ce contexte, elle s’est félicitée de la décision prise par le Conseil des droits de l’homme, d’établir un rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans ce pays.  

La représentante s’est par ailleurs alarmée de la répression des manifestations pacifiques en Iran, des violations massives des droits humains en Syrie, de la dégradation continue en Afghanistan de la situation humanitaire et sécuritaire et des violations des droits fondamentaux des femmes et des filles par le régime taliban, et de la multiplication des exactions envers les populations civiles au Mali, perpétrées par Daech mais aussi par les forces de défense et de sécurité maliennes accompagnées des mercenaires du groupe Wagner.  Elle a également regretté l’absence de débat sur le rapport de l’ex-Haute-Commissariat aux droits de l’homme faisant état de violations généralisées et systématiques au Xinjiang.  Enfin, après avoir exhorté les États Membres à redoubler d’efforts pour parvenir à une « Génération Égalité » qui ne laisse aucune femme ni aucune fille de côté, elle les a aussi encouragés à soutenir la résolution biennale de l’Assemblée générale, appelant à un moratoire universel sur l’application de la peine de mort.

M. NASEER AHMED FAIQ (Afghanistan) a évoqué une situation humanitaire alarmante dans son pays depuis la prise de pouvoir des Taliban.  Il a aussi fait état de violations graves des droits humains, telles que la torture ou les mauvais traitements.  Des informations crédibles font apparaître que les Taliban se rendent coupables de persécutions généralisées, a-t-il ajouté, parlant d’agissements potentiellement constitutifs de crimes de guerre.  Dénonçant les discriminations à l’égard des femmes et des filles, le représentant s’est également dit très préoccupé par les attentats terroristes qui ciblent en permanence des groupes ethniques et religieux.  Il a mentionné l’attentat perpétré contre la minorité hazara dans un centre éducatif de Kaboul, estimant que ces actes s’apparentent à des crimes de génocide.  Des mesures concrètes doivent être prises pour éviter tout crime supplémentaire contre cette communauté, a-t-il dit, avant de plaider pour la création d’une mission d’établissement des faits pour faire la lumière sur leur situation.  Enfin, le délégué a appelé la communauté internationale à adopter une position unifiée et continue à l’égard des Taliban.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a indiqué que son pays à entrepris de profondes réformes en faveur de l’égalité femmes-hommes, du pluralisme et de la coexistence pacifique.  Un plan d’action national pour la démocratie et les droits humains a également été mis en place, a-t-il signalé.  Rappelant l’élection de son pays au Conseil des droits de l’homme pour la période 2023-2025, le représentant a assuré que la délégation marocaine appuiera un multilatéralisme solidaire et pragmatique.  Après avoir relevé que 12 titulaires de mandat sur les droits humains ont été reçus au Maroc, il a rappelé que son pays a adhéré au Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  Enfin, concernant la participation des femmes, il a fait remarquer que son gouvernement compte six femmes ministres, dont la Ministre des finances, et que les femmes sont représentées dans le champ religieux. 

Mme NUSAIBA HASHIM MOHAMED ALI IDRES (Soudan) a rappelé que le document constitutionnel de 2019 consacre un chapitre entier aux droits humains.  Elle a indiqué que le Soudan était partie à la majorité des instruments relatifs aux droits humains et qu’il avait notamment ratifié la Conventions internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention contre la torture.  Il poursuit en outre ses efforts pour ratifier la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.  La représentante a aussi rappelé que le Soudan avait signé des accords avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HDCH) et la Cour pénale internationale.  Le Soudan vient également d’être réélu au Conseil des droits de l’homme, a-t-elle ajouté, appelant ensuite à éviter toute politisation de la question des droits humains. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a rappelé que, lorsque le gouvernement civil de son pays était au pouvoir, le Myanmar avait signé et ratifié plusieurs traités relatifs aux droits de l’homme.  Ces progrès se sont inversés avec le coup d’État militaire illégal de février 2021, a-t-il dénoncé.  Depuis cette date, le peuple du Myanmar subit des atrocités et des traitements inhumains de la part de la junte militaire, a déploré le représentant, faisant état de cas de torture, de violences sexuelles ou encore de meurtres.  Chaque jour, a-t-il ajouté, des frappes aériennes touchent des civils, tuant des innocents, y compris des femmes, des enfants et des personnes en situation de handicap mental.  Selon le HCR, plus d’un million de personnes ont été déplacées au Myanmar depuis le coup d’État, a poursuivi le délégué, mentionnant également le massacre du 24 décembre 2021, où 38 personnes ont été arrêtées, abattues et brulées dans leurs voitures dans l’État du Kayah.

Le représentant a également dénoncé des violations des libertés et droits des enfants par les militaires, ainsi que la restriction de la liberté d’expression et des coupures d’Internet.  Il a en outre rappelé que quatre prisonniers politiques ont été exécutés en juillet dernier.  S’il s’est réjoui des déclarations de la communauté internationale et des Nations Unies concernant la situation dans son pays, il a regretté que, malgré la pression internationale, la junte continue de jouir de l’impunité.  Appelant à ne pas oublier les victimes de cette junte, il a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des mesures rapides et décisives afin de mettre fin à la dictature militaire au Myanmar.

M. YOUSEF S. I. SALAH (Libye), a rappelé que son pays a adhéré à l’ensemble des instruments internationaux.  Il a regretté que ces obligations n’étaient pas toujours suivies d’effet, dénonçant notamment l’occupation par Israël de la Palestine.  Il a appelé à une réforme du système des Nations Unies, notant que le droit au développement était refusé à de trop nombreuses personnes, ce qui exacerbait les crises multiples que connaissait le monde.  Le représentant a également regretté que les droits humains soient « trop souvent un prétexte politique mis en avant au détriment de la dignité humaine ».

M. HERINIRINA RAVELONARIVO ANDRIAMASY (Madagascar) a salué les démarches du Gouvernement chinois en matière de droits humains et en faveur du développement de l’ensemble de sa population.  Le délégué s’est également félicité du dialogue initié avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), lequel a permis à la Haute-Commissaire sortante, Mme Michelle Bachelet, d’effectuer une mission sur invitation des autorités chinoises.  Il a insisté sur l’impératif d’une démarche objective, neutre et impartiale dans un respect total du mandat du HCDH. C’est une condition essentielle, selon lui, pour garantir la crédibilité de la Commission, a-t-il estimé.

Mme RIM KNANI (Tunisie) a invité la communauté internationale à s’acquitter de ses obligations pour protéger les droits humains partout sans exclusion, ni discrimination, appelant à éviter les politiques de « deux poids, deux mesures ».  Elle s’est élevée contre la politisation de ces questions dans les discussions de la Commission et a recommandé, en lieu et place, de réaffirmer l’importance de la collaboration et du renforcement des capacités pour aider les États qui en ont besoin. Pour finir, la déléguée a appelé à la cessation de l’occupation de la Palestine par Israël.

Mme RUXANDRA STANCIU (Roumanie) a indiqué que son gouvernement prend en compte les particularités de chaque société, en respectant les droits des minorités, au nombre de 20 en Roumanie, et dont les membres peuvent étudier dans leur langue maternelle, bénéficier de tous les services de l’État, et être représentés au Parlement.  Ainsi, 48 représentants des minorités ont obtenu des sièges au sein du Parlement, s’est-elle félicitée.  Elle a dit être très préoccupée par la résurgence d’agressions à motif religieux dans le monde.  La Roumanie met aussi un point d’honneur à pleinement intégrer les personnes handicapées au sein de sa société. 

M. MAC DONALD, du Comité international de la Croix-Rouge, s’est dit alarmé par l’augmentation constante du nombre de personnes disparues.  En effet, au cours des cinq dernières années, les cas enregistrés par le CICR ont augmenté de 80%, pour atteindre 180 000 cas, un chiffre qui ne représente que la partie émergée de l’iceberg.  En outre, les États ne sont pas suffisamment préparés pour empêcher les personnes de disparaître, clarifier leur sort et leur localisation et répondre aux besoins de leurs familles, a-t-il signalé.  

Devant ce constat, le délégué a appelé les États à respecter les règles du droit international humanitaire, afin d’empêcher notamment la séparation des familles et la disparition des personnes.  Il a également appelé les États à partager les informations pertinentes sur les prisonniers de guerre, les militaires blessés, malades et décédés et autres personnes qui se trouvent entre leurs mains.  En outre, le délégué a rappelé que le droit international humanitaire oblige les parties à accorder au CICR un accès immédiat et régulier à toutes les personnes privées de libertés.  Des mesures capitales, a-t-il insisté, pour éviter les disparitions et pour permettre aux familles de connaître le sort de leurs proches.  

Le représentant a aussi appelé les États à faciliter et à soutenir le mandat et le rôle du CICR et de son Agence centrale de recherches qui détient des données personnelles sur des centaines de milliers de personnes parmi les plus vulnérables dans le monde.  Ces données ont cependant été la cible d’une cyberopération sophistiquée au début de cette année, a-t-il rappelé, exhortant les États à respecter et protéger ces données et à veiller à ce qu’elles ne soient pas consultées, demandées ou utilisées à des fins incompatibles avec la nature humanitaire du travail du CICR.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, la Chine a affirmé que la France, les États-Unis et d’autres pays occidentaux continuent de multiplier des informations fallacieuses pour entacher la réputation de la Chine.  Hier, la délégation des États-Unis, en cinq minutes, a agressé 18 pays, tous des pays en développement, et n’a rien dit sur les mauvais résultats des droits humains dans son pays et chez ses alliés, a-t-il dénoncé. Il a rappelé que le 6 octobre, le Conseil des droits de l’homme a rejeté un projet de décision sur le Xinjiang proposé par les États- Unis et les pays occidentaux, déplorant que ces mêmes pays tentent à présent d’organiser une manifestation parallèle la semaine prochaine sur le Xinjiang.  Il a ainsi appelé les États Membres à ne pas se laisser duper.

La République arabe syrienne a récusé l’emploi du terme « régime » par la France pour la désigner et dénoncé le fait que ce pays ne rapatrie pas les enfants français enfermés dans des camps de détention pour djihadistes dans le nord de la Syrie.  Faisant siennes les accusations du Mali, elle a affirmé que la France fournissait depuis dix ans des armes aux djihadistes du Sahel qui ont ensuite été employées pour tuer des Casques bleus.  La délégation a aussi rappelé que l’entreprise française Lafarge avait plaidé coupable devant la justice étatsunienne et payé 778 millions de dollars pour éteindre les poursuites pour avoir versé de l’argent à Daech en Syrie. 

Reprise des déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

M. GERARD QUINN, Rapporteur spécial sur les droits des personnes handicapées, a expliqué que son rapport examine comment le droit international humanitaire (DIH) et la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) peuvent mieux travailler ensemble pour assurer la protection civile des personnes handicapées pendant les conflits armés. 

Il a rappelé que la quatrième Convention de Genève de 1949 inclut spécifiquement les personnes handicapées sous la description « malades et infirmes », mais que ces normes sont restées largement inexploitées, appelant à rendre ces protections visibles et à les appliquer efficacement. 

Il a relevé d’importants problèmes de communication d’avertissements efficaces aux personnes handicapées, pointant également des processus d’évacuation non inclusifs, l’utilisation aveugle de munitions ayant un effet traumatisant disproportionné, l’absence de mesures de précaution efficaces et réalisables, ainsi que l’invisibilité des personnes handicapées dans la doctrine et les formations militaires.  Ce qu’exige la Convention relative aux droits des personnes handicapées, c’est que ces problèmes -qui découlent tous de l’invisibilité- soient inversés, a estimé le Rapporteur qui a appelé à prendre en compte les désavantages cumulés auxquels sont confrontées les personnes handicapées tant dans la doctrine que dans la pratique. 

Après avoir précisé que l’objectif de son rapport n’était pas de rendre la guerre plus inclusive, mais de réduire la létalité des conflits et d’aborder le sort des civils handicapés, M. Quinn a indiqué que sa prochaine étude portera sur l’action morale positive et la voix collective des personnes handicapées dans les processus de consolidation de la paix.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, Israël a voulu en savoir plus sur les mesures à prendre pour que les services destinés aux personnes handicapées en temps de conflit soient à la fois accessibles et efficaces.  À sa suite, le Mexique s’est demandé comment renforcer les activités pour donner effet aux droits et aux besoins spécifiques des personnes handicapées dans des contextes d’opérations de maintien de la paix.  Comment s’assurer que les obligations dans le cadre du droit humanitaire international et les droits humains prennent en compte spécifiquement les personnes porteuses de handicap, a voulu savoir la Finlande.  Par ailleurs, l’Australie s’est interrogée sur ce que peuvent faire les États pour veiller à ce que les approches relatives au développement, aux droits humains et au droit humanitaire incluent pleinement les personnes handicapées.  Et que faire pour inclure au quotidien les personnes handicapées au processus décisionnel, a interrogé la Pologne

Le Luxembourg, au nom des pays du Benelux, a condamné les attaques illégales russes sur les bâtiments civils en Ukraine, notamment contre les domiciles et les écoles de personnes en situation de handicap.  Le Royaume-Uni s’est préoccupé de la situation humanitaire des personnes handicapées en Ukraine tandis que la Roumanie a voulu en savoir plus sur la situation des personnes handicapées suite à l’agression russe.  De leur côté, les États-Unis ont voulu savoir comment les leçons du rapport du Rapporteur spécial peuvent être appliquées à d’autres crises humanitaires. 

La Fédération de Russie a jugé qu’il n’était pas rationnel de consacrer à ce thème trois rapports détaillés.  Il vaut mieux accorder plus d’attention aux moyens d’améliorer leur qualité de vie et proposer des mesures concrètes, a estimé la délégation.  En outre, elle a jugé inacceptable la tentative de lier la question des personnes handicapées au droit international humanitaire alors que la Convention de Genève et ses protocoles divisent clairement les participants au conflit entre combattants et non-combattants.  De son côté, le Bélarus a attiré l’attention sur une violation flagrante à la Convention, à savoir la décision du Comité paralympique d’écarter le Bélarus et la Russie des Jeux paralympiques de Beijing.  Le Conseil des droits de l’homme n’a pas examiné cette question, a regretté la délégation qui a jugé inacceptable que des personnes handicapées soient discriminées pour des raisons politiques. 

Le Qatar a fait état des mesures prises dans le pays pour assurer la protection des enfants de handicap dans les conflits armés, tandis que la Hongrie a rappelé avoir ouvert ses frontières à toutes les personnes fuyant l’Ukraine, y compris les personnes handicapées.  La Nouvelle-Zélande a indiqué avoir établi son premier ministère pour les personnes handicapées cette année, suivie de la Chine qui a fait état de ses mesures pour intégrer les personnes handicapées.  Enfin, l’Union Européenne a appelé à accorder une place particulière aux enfants handicapés en situation de conflit n’ayant pas accès à l’école ou aux services de santé, tandis que le CICR a regretté que les obligations que les États doivent endosser restent trop souvent théoriques. 

À l’issue du dialogue, le Rapporteur spécial sur les droits des personnes handicapées, a rappelé que le moteur du changement est l’article 11 de la Convention ainsi que la résolution du Conseil de sécurité en la matière, bien que celle-ci soit dans son intitulé un peu plus limitative.  Il a indiqué que les personnes handicapées, plus que quiconque, dépendent du bon vouloir des services publics pour survivre durant les conflits.  Ce qui est essentiel dans ce contexte, c’est que les services continuent de proposer une aide et une prise en charge envers et contre tout, a-t-il affirmé, confiant être sensible à la question des violences basées sur le genre.  La question de l’évacuation et des transferts des personnes handicapées sera intégrée dans mon prochain rapport, a-t-il par ailleurs indiqué, signalant qu’il aura pour thème la consolidation et le maintien de la paix. 

Exposé

Mme ROSEMARY KAYESS, Présidente du Comité des droits des personnes handicapées, a indiqué que son organe a finalisé deux éléments importants de son programme de travail, d’abord en adoptant l’Observation générale n°8 sur l’article 27 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (travail et emploi), ensuite en entérinant des lignes directrices sur la désinstitutionalisation, y compris dans les situations d’urgence.  Ces deux adoptions contribueront à la mise en œuvre continue des principes et des normes de la Convention, a-t-elle précisé.  Elle a ajouté qu’une déclaration commune sur les droits des enfants handicapés a été adoptée avec le Comité des droits de l’enfant.  Le Comité a aussi entrepris une série de réunions avec les États parties concernés en vertu de l’article 36 (1) de la Convention afin de recevoir des informations sur l’impact de la guerre en Ukraine sur les personnes handicapées, a indiqué Mme Kayess. 

La Présidente a ensuite relevé que le Comité a publié une déclaration conjointe avec le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe, soulignant la nécessité de répondre aux situations de risque et d’urgence humanitaire.  Elle a reconnu qu’au cours des dernières années, une série de défis liés à l’article 11 de la Convention concernant les situations de risque et les urgences humanitaires sont apparus, notamment la pandémie de COVID-19, des conflits armés dans plusieurs régions et des catastrophes résultant des changements climatiques.  Le Comité s’est engagé à élaborer sa prochaine observation générale sur ce sujet, a-t-elle précisé. 

Après avoir rappelé qu’il y a actuellement 185 États parties à la Convention et 100 au Protocole facultatif, Mme Kayess a indiqué que le Comité reste confronté à des difficultés majeures.  La première tient au fait que le Comité des droits pour les personnes handicapées ne se réunit que 9 semaines sur 2 sessions, contre 12 semaines sur 3 sessions pour les autres organes de traité, ce qui occasionne un retard.  La Présidente du Comité s’est aussi inquiétée des ressources humaines du Secrétariat, stables depuis 2014, alors que les examens des États parties ont progressé de 30% et l’arriéré de 50%.  Elle a d’autre part déploré que le système des Nations Unies n’ait pas développé de politique et de protocoles d’aménagements raisonnables qui faciliteraient les demandes individuelles des personnes handicapées en ce sens.  Elle a enfin regretté des décisions se traduisant par un manque d’espaces de réunion accessibles et une fourniture limitée d’informations accessibles, notant que cette situation sera exacerbée à la fin de l’année, lorsque la « règle de continuité des activités » expirera et que les services de conférence ne pourront plus prendre en charge les réunions en ligne et hybrides. 

À cette aune, Mme Kayess a appelé les États Membres à s’engager pour renforcer les organes de traité grâce au calendrier prévisible des examens, à l’harmonisation des méthodes de travail et à la montée en puissance du numérique, comme indiqué dans la déclaration de résultats de la trente-quatrième réunion des présidents des organes de traité.  Elle a annoncé que des aménagements raisonnables permettant aux experts handicapés de participer sur un pied d’égalité avec les autres feraient partie intégrante des méthodes de travail harmonisées et de l’évolution numérique, tout en précisant que ces mesures nécessitent un financement durable du système des organes de traité. 

Dialogue interactif

À la suite de l’exposé de Mme Kayess, le Japon a demandé à la présidence du Comité de préciser comment son organe renforce sa coopération avec les États parties à la Convention.  La Côte d’Ivoire a ensuite voulu savoir si le Comité a pris des initiatives pour rendre plus accessible des équipements adaptés, conformément aux dispositions de la Convention.  Il a par ailleurs déploré que 80% des personnes handicapées dans le monde vivent dans les pays en développement.  Comment les États, mais aussi les organes et les opérations des Nations Unies, peuvent-ils améliorer leur engagement et leur dialogue avec la société civile afin d’intégrer toutes les voix, y compris celles des personnes handicapées, s’est enquise l’Union européenne, tandis que le Mexique a souhaité connaître les bonnes pratiques que le Comité a identifiées en matière de désinstitutionalisation des personnes handicapées, notamment dans les situations d’urgence, conformément à l’article 19 de la Convention relative au droit de vivre de manière indépendante. 

L’Islande a, pour sa part, demandé à la Présidente dans quels domaines la promotion des personnes handicapées est la plus urgente.  À sa suite, la Malaisie a souhaité savoir comment les États pourraient accélérer la mise en œuvre de leurs obligations dans le cadre de la Convention pour s’assurer que les droits des personnes handicapées sont protégés.  Le Portugal et le Mali se sont interrogés sur les défis les plus importants à relever en matière de technologies numériques, notant que ces dernières peuvent aider les personnes handicapées mais aussi renforcer leur vulnérabilité en l’absence de formation à une utilisation sûre. 

De son côté, la République arabe syrienne a rappelé l’impact du conflit dans son pays sur l’explosion du nombre de personnes handicapées.  Elle a aussi dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui lui sont imposées, avant de demander à la Présidente ce qui pourrait être envisagé pour réduire les effets destructeurs de ces mesures sur les personnes handicapées.  Le Bélarus a, lui, regretté qu’en mars dernier, le Comité international paralympique ait décidé de suspendre la participation des équipes russes et bélarusses aux Jeux paralympiques d’hiver de Beijing.  Il a demandé au Comité des droits des personnes handicapées de fournir une évaluation impartiale de cette décision.  La Fédération de Russie a appuyé la remarque du Bélarus, tout en regrettant que le Comité soit resté silencieux sur les crimes du « régime de Kiev » contre ses propres citoyens, qui ont été handicapés à la suite de la « soi-disant opération antiterroriste » menée par les forces ukrainiennes dans le sud-est de l’Ukraine.  La délégation russe a demandé au Comité de traiter les questions directement liées à son domaine d’activité, sans parti pris politique. 

Enfin, la Grèce et l’Ordre souverain de Malte ont détaillé leurs combats respectifs en faveur des droits des personnes handicapées.   

Répondant à ces remarques et observations, la Présidente du Comité des droits des personnes handicapées s’est tout d’abord réjouie du renforcement de son organe, qui lui a permis d’aider davantage les personnes handicapées pendant la période pandémique, notamment en leur donnant accès à des plateformes numériques.  Elle a ensuite réaffirmé que la désinstitutionalisation des personnes handicapées est le préalable de leur bien-être.  Revenant sur le fonctionnement de son comité, elle a fait état de l’élaboration d’observations générales sur l’éducation et l’autonomie, sur la base desquelles des orientations et un cadre juridique ont été proposés pour aider les État à mettre en œuvre la Convention et à s’acquitter des obligations induites. 

Puisque les situations d’urgence, telles que les pandémies, les conflits ou les catastrophes naturelles, surexposent les personnes handicapées déjà vulnérables, des structures doivent être en mesure de protéger ces personnes, a estimé la Présidente.  Si toutes les politiques publiques doivent inclure les personnes handicapées, il importe qu’elles le fassent dès les prémisses de leur élaboration, a-t-elle fait valoir, ajoutant que le principe de non-discrimination est la clef de voute de ces politiques.  L’éducation, a poursuivi Mme Kayess, doit évoluer et passer d’une éducation spécialisée, laquelle crée une forme de ségrégation, à une éducation inclusive, qui reflète la diversité de la condition humaine. 

Abordant les questions concernant la protection en situation d’urgence, la Présidente a annoncé que son comité a l’intention de proposer prochainement de nouvelles orientations aux États sur ce sujet.  S’agissant des avancées numériques, elle a plaidé pour que les technologies proposées aux personnes handicapées soient non seulement disponibles mais aussi financièrement abordables.  Le Comité travaille sur ces questions, a-t-elle assuré.  Elle a toutefois souhaité que l’ensemble du système des Nations Unies se saisisse du problème, estimant qu’il serait opportun que des personnes handicapées puissent travailler au sein de l’ONU et des mécanismes des droits humains.

Exposé

M. FABIAN SALVIOLI, Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, présentait son rapport sur le rôle significatif que les processus de justice transitionnelle centrés sur les personnes peuvent jouer pour guider les engagements des États dans le contexte du processus des ODD.  Il a indiqué que si la justice transitionnelle est conçue et mise en œuvre d’une manière véritablement centrée sur les victimes, elle peut jouer un rôle important dans la résolution des crises et des cycles de violence tels que ceux qui sont en cours actuellement.  Grâce à une approche qui relie le passé, le présent et l’avenir, la justice transitionnelle permet de mettre au jour des problèmes systémiques, tels que l’inégalité, la discrimination ou l’impunité.  Elle met également en lumière les structures abusives et leurs bénéficiaires, et examine les questions à long terme et intergénérationnelles, en se concentrant sur les racines du conflit et de la violence.  De même, a poursuivi le Rapporteur, elle peut offrir une perspective différente en se concentrant sur les personnes opprimées, à risque ou qui ont un intérêt dans l’avenir -comme les jeunes- en leur donnant la parole. 

Cependant, a-t-il nuancé, la justice transitionnelle ne peut à elle seule provoquer le changement.  En effet, d’autres interventions dans les domaines du développement et de la consolidation de la paix sont nécessaires pour compléter et poursuivre le travail sur le terrain.  Le cadre des ODD offre, à ses yeux, une opportunité car il établit des liens entre la justice, le développement et la sécurité, tout en fixant des politiques pour les années à venir.  À cet égard, il a recommandé des approches de la justice centrées sur les personnes afin de passer d’une vision institutionnelle à une perspective qui valorise les expériences vécues des personnes pour contribuer à un changement significatif. 

Dans cet objectif, M. Salvioli a recommandé quatre domaines d’intervention, citant, d’abord, l’approche basée sur la reconnaissance, qui place les victimes au centre de processus de justice.  Il a mis ensuite l’accent sur les réparations, qui sont, à son avis, les mesures les plus susceptibles de provoquer un changement et de faire une différence significative dans la vie des victimes.  Le rôle des mouvements et des coalitions, est un autre volet important à ses yeux, car il constitue un moteur du changement et parfois le changement lui-même.  Enfin, ce processus doit dépasser le niveau institutionnel, pour inclure les expériences individuelles et collectives des jeunes.  Les jeunes peuvent jouer un rôle important en tant qu’agents du changement et acteurs clefs de la prévention, a-t-il insisté.  Il s’agit aussi, a-t-il plaidé, de fournir des ressources flexibles pour soutenir le travail de la société civile, en préservant l’espace civique, et en assurant l’engagement proactif de la communauté internationale en termes de processus et pas seulement de projets. 

Dialogue interactif

Intervenant à l’issue de cet exposé, les États-Unis ont voulu savoir quelles étaient les recommandations du Rapporteur en vue de la création d’un mécanisme mondiale pour la collecte des informations sur les violations graves des droits humains.  L’Argentine a souhaité savoir par quel biais les réparations peuvent être le mieux appliquées, tandis que la Suisse s’est enquise des mesures pour améliorer l’accès des victimes aux organismes des Nations Unies à Genève et New York.  La Croatie a souhaité, pour sa part, savoir comment les États peuvent mieux prendre en compte les besoins des jeunes en termes de justice transitionnelle.  Pourriez-vous partager de bonnes pratiques, à cet égard, a enchaîné la Belgique

La Colombie s’est intéressée au partage et renforcement de l’échange des bonnes pratiques entre pays.  Quant à l’Union européenne, elle a souhaité savoir comment mieux surmonter les sensibilités et faire évoluer la pensée des parties aux conflits pour qu’elles acceptent une approche davantage fondée sur les victimes et les survivants.

La Fédération de Russie a estimé, pour sa part, que le lien entre justice transitionnelle et ODD semble, « assez artificiel ».  Elle a qualifié le Mécanisme international d’enquête en Syrie de « ridicule » et a déploré que les États-Unis aient échappé à la reddition des comptes pour les crimes commis en Afghanistan et en Iraq, affirmant que ce pays contribue en outre aux atrocités et meurtres commis actuellement par le régime de Kiev. 

Répondant à ces questions et remarques, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition s’est d’abord inscrit en faux contre la position de la Fédération de Russie: « non, le lien entre les ODD et la justice de transition n’est pas artificiel », a-t-il tranché.  Si le développement durable n’est pas inclus dans nos combats contre les violations du droit humanitaire ou autres droits humains, notre échec sera cuisant, a-t-il expliqué, invitant, au contraire, tous les acteurs à réfléchir à l’articulation entre ODD et justice de transition.  Il a regretté ensuite que des lois d’amnistie et autres mécanismes judiciaires blanchissent parfois les auteurs des pires atrocités.

Abordant la question des réparations, le Rapporteur spécial a estimé qu’outre l’indemnisation pécuniaire, les États ne sauraient omettre le soutien psychologique dont ont besoin les victimes, saluant les efforts déployés par la Colombie en ce sens.  C’est la voix des victimes qui doit être entendue prioritairement, indépendamment des agresseurs, et quelles que soient les victimes, a souligné le Rapporteur qui a déploré que certaines institutions ne les écoutent que d’une oreille pour ensuite justifier une absence de résultat.  Rappelant que les victimes sont les premières concernées par la question des réparations, il a estimé qu’elles doivent parler quand elles se sentent aptes à témoigner, et non pas lorsqu’elles s’y sentent contraintes.  Le Rapporteur a ensuite appelé à profiter de la tenue, l’an prochain, du forum sur les ODD pour discuter de leurs liens avec la justice de transition.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission achève son examen des questions relatives à l’information par l’adoption de deux projets de résolution

Soixante-dix-septième session,
13e séance plénière – après-midi
CPSD/759

La Quatrième Commission achève son examen des questions relatives à l’information par l’adoption de deux projets de résolution

La Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a terminé cet après-midi son examen des questions relatives à l’information et adopté, sans vote, deux projets de résolution portant sur l’information, les politiques et les activités des Nations Unies en matière de communication globale. 

Si elle venait à adopter le texte portant sur l’information au service de l’humanité, l’Assemblée générale demanderait notamment aux pays, organismes des Nations Unies et autres acteurs intéressés de coopérer et d’agir en vue de fournir une aide accrue afin de développer les infrastructures et les capacités de communication dans les pays en développement. 

Aux termes du second projet de résolution, consacré aux politiques et aux activités des Nations Unies en matière de communication globale, l’Assemblée se dirait une nouvelle fois préoccupée par la propagation et la prolifération exponentielles de la désinformation et de la mésinformation, ainsi que par leur impact sur les droits humains et les libertés fondamentales.  Tout en notant avec satisfaction les efforts entrepris par le Département de la communication globale (DCG) pour assurer la continuité de ses activités pendant la pandémie de COVID-19, l’Assemblée générale prierait celui-ci d’envisager sans délai les moyens de publier des communiqués de presse quotidiens dans les six langues officielles de l’Organisation, conformément à ses résolutions pertinentes. 

En dépit des supports de communication variés qui se déploient dans plusieurs langues et des efforts consentis par le DCG pour élargir la diversité linguistique de ses sites Internet, d’importantes disparités persistent entre l’usage de l’anglais et des cinq autres langues officielles, a relevé l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).  « Les supports visuels de plusieurs événements entretiennent le sentiment que l’ONU s’adresse aux locuteurs d’une seule langue », a fait remarquer sa représentante, pour qui la production de contenus dans les autres langues officielles, notamment le français, permet d’assurer l’intégrité du message diffusé ainsi que sa compatibilité avec le public auquel il s’adresse. 

Même constat de la part de la Ligue des États arabes, qui a insisté sur l’importance de traiter les six langues officielles de l’ONU sur un pied d’égalité dans l’ensemble du système onusien, y compris les pages Internet, qui ne sont disponibles que dans quatre des six langues officielles, ce qui limite les informations auxquelles ont accès les arabophones.  Son représentant a appelé le Département à corriger cette situation afin de démontrer son engagement en faveur d’un véritable multilinguisme au sein de l’Organisation. 

S’exprimant également au nom de l’Australie, le Canada, dont l’identité nationale repose sur la diversité linguistique, a quant à lui appelé au renforcement des initiatives visant à « rétablir l’équilibre » entre les six langues officielles de l’ONU dans ses produits de communication, tout en prenant acte des ressources limitées du DCG.  Les habitants de cette planète parlent, lisent et correspondent en plus de six langues, a renchéri l’Inde, en demandant au DCG d’adopter une approche « proactive » dans la diffusion d’informations dans d’autres langues.  Qui plus est, la traduction en arabe des communiqués de presse des réunions de l’Assemblée générale revêt la plus haute importance pour parvenir à la parité linguistique au sein de l’Organisation, a fait valoir le Soudan

L’ONU doit en effet continuer de diffuser des informations objectives tout en adaptant son message aux nouveaux outils de l’information et de la communication, sans laisser sur le côté les segments de la population qui n’y ont pas encore accès, a considéré l’Argentine.  Son représentant s’est en outre inquiété des effets délétères de la pandémie de COVID-19 et des effets économiques de la guerre, qui ont mené à la prolifération des discours extrémistes.  Il s’est toutefois félicité, comme l’Afrique du Sud et la Jamaïque, de l’Initiative « Verified » qui fait des Nations Unies une source d’informations multilingues fiable.  Pour appuyer ces actions, il a exhorté le DCG à passer d’une « culture de la traduction », prenant pour base l’anglais, à une authentique culture multilingue. 

La diffusion par le DCG d’informations « équilibrées et inclusives » sur les conflits dans le monde contribue en effet au renforcement du développement durable, des droits humains ainsi que de la paix et la sécurité, a considéré la Malaisie.  À cet égard, la formulation de stratégies de communication tenant compte des particularités locales est cruciale pour améliorer la protection des Casques bleus.  « C’est une bataille que nous devons gagner », a insisté son représentant.  Pour sa part, l’Arabie saoudite a ouvert le Centre mondial pour la lutte contre l’idéologie extrémiste, destiné à promouvoir la tolérance et la modération auprès des groupes extrémistes qui utilisent les réseaux sociaux pour promouvoir la violence et la haine. 

En Fédération de Russie, la répression de la société civile, des médias et de l’opposition politique est utilisée pour empêcher la vérité sur la guerre en Ukraine d’éclater au grand jour, ont dénoncé les États-Unis.  Son délégué a demandé au système des Nations Unies d’être cohérent dans tous les documents qu’il publie, qu’il s’agisse de résolutions, de rapports ou de documents politiques, afin de faire en sorte que l’agression russe y figure de manière précise, conformément au libellé employé par le Secrétaire général dans ses rapports et la résolution adoptée à une « majorité écrasante » par l’Assemblée générale.  Les États-Unis, a rétorqué la Fédération de Russie, utilise plutôt l’Ukraine comme un pion pour faire avancer ses propres intérêts. 

Après avoir salué le Programme de communication sur l'Holocauste et les Nations Unies afin de lutter contre la montée « sans précédent » de l’antisémitisme dans le monde, Israël a dénoncé le récit « biaisé et trompeur » présenté par le DCG dans le cadre de son Programme d’information spécial sur la question de la Palestine.  À l’opposé, l’État de Palestine a salué les efforts de sensibilisation du DCG auprès du public sur la question de la Palestine, dont le règlement « juste et pacifique » est seul à même de mener à une paix et une sécurité pérennes au Moyen-Orient. 

La Commission poursuivra ses travaux le mercredi 26 octobre 2022, à 10 heures, avec l’examen du point de l’ordre du jour relatif à la coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace. 

Droits de réponse

Le représentant de la République islamique d’Iran a rejeté les allégations des États-Unis et d’Israël, qu’il a jugées dénuées de tout fondement.  Il a parlé d’éléments montés de toutes pièces et de désinformation au sujet de la situation en Iran.  Les réseaux sociaux doivent être utilisés comme des instruments de liberté, pas comme des moyens de déstabiliser des sociétés, a-t-il affirmé, avant de condamner les mesures coercitives unilatérales dont son pays fait l’objet. 

Le représentant d’Israël a répondu à l’Afrique du Sud et à l’État de Palestine au sujet de la mort de la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh le 11 mai 2022.  Il a déclaré qu’une enquête indépendante avait conclu qu’il était impossible de déterminer avec certitude l’origine des coups de feu. 

Le représentant de la Fédération de Russie a accusé les États-Unis et leurs médias de mener une opération de désinformation au sujet de l’Ukraine avec le soutien du Département d’État américain.  L’Ukraine est utilisée comme un pion par Washington pour faire avancer ses propres intérêts, et les États-Unis ne s’en cachent même plus, a-t-il ironisé. 

Réagissant aux propos de l’Iran, Israël a condamné les cyberattaques récentes menés par le « régime iranien » contre les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. 

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE TEXTE CONCERNANT LES QUESTIONS RELATIVES À L’INFORMATION

Rapport du Comité de l’information (A/77/21)

Projet de résolution A: L’information au service de l’humanité

Aux termes de ce projet de résolution, adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait instamment que tous les pays, les organismes des Nations Unies et tous les autres acteurs intéressés coopèrent et agissent de manière concertée afin d’atténuer les disparités dans la façon dont l’information circule à tous les niveaux en fournissant une assistance accrue pour développer les infrastructures et les capacités de communication dans les pays en développement. 

Elle demanderait notamment qu’ils fassent en sorte que les journalistes puissent travailler librement et efficacement, et qu’ils renforcent les programmes de formation pratique destinés aux journalistes des organes de presse ainsi que l’action régionale et de la coopération entre pays en développement ainsi qu’entre pays développés et pays en développement en vue d’améliorer la capacité de communication, l’infrastructure des médias et les techniques de communication de ces derniers. 

L’Assemblée générale appellerait encore les pays, les organismes des Nations Unies et les acteurs intéressés à aider à créer des réseaux de télécommunication sous-régionaux, régionaux et interrégionaux, notamment entre pays en développement, et à faciliter, selon qu’il conviendra, l’accès des pays en développement aux techniques de communication de pointe disponibles sur le marché.

Projet de résolution B: Politiques et activités de l’Organisation des Nations Unies en matière de communication globale

Par ce projet de résolution, adopté sans vote, l’Assemblée générale soulignerait que la réforme du Département de la communication globale (DCG), qui vise à adapter ses capacités et son action aux tendances actuelles de la communication mondiale, doit prendre en compte les priorités énoncées par le Comité de l’information en tant que principal organe subsidiaire chargé de lui faire des recommandations.  Elle se dirait une nouvelle fois préoccupée par la propagation et la prolifération exponentielles de la désinformation et de la mésinformation, rendant d’autant plus nécessaire la diffusion en temps opportun et dans plusieurs langues d’informations factuelles, ciblées, claires, accessibles et fondées sur des données scientifiques, avec l’appui de tous les États Membres. 

L’Assemblée générale soulignerait en outre que la désinformation peut nuire à l’exercice des droits humains et des libertés fondamentales, ainsi qu’à la réalisation des objectifs de développement durable, et réitèrerait sa condamnation de toute forme de propagande, dans quelque pays que ce soit, qui aurait pour objet ou qui risquerait de provoquer ou d’encourager une menace à la paix, une rupture de la paix ou un acte d’agression. 

Par ce texte, l’Assemblée générale demanderait encore au DCG, compte tenu des priorités qu’elle a énoncées pour la période 2023-2024 dans sa résolution 76/84 B, d’accorder une attention particulière à la promotion d’une croissance économique soutenue et d’un développement durable, au maintien de la paix et de la sécurité internationales, au développement de l’Afrique, à la promotion des droits de l’homme, à l’égalité des genres, aux changements climatiques et à l’environnement, à l’efficacité de la coordination des opérations d’assistance humanitaire, à la défense du multilatéralisme, au désarmement, à la promotion de la justice et du droit international, à la lutte contre les informations erronées et la désinformation, ainsi qu’au contrôle des drogues, à la prévention du crime et à la lutte contre le terrorisme international. 

L’Assemblée prierait également le Département de poursuivre l’évaluation de ses produits et activités en vue d’en accroître l’efficacité, et de continuer à coopérer et à coordonner ses activités avec les États Membres et le Bureau des services de contrôle interne du Secrétariat.  Elle rappellerait le lancement de sa stratégie de communication globale de 2020, qui a non seulement pour objet d’informer la population de l’état du monde et de la manière dont l’ONU s’emploie à le rendre meilleur, mais aussi de motiver les gens et de leur donner les moyens d’agir.  Elle se féliciterait par ailleurs de la couverture par le DCG, actions et déclarations du Secrétaire général liées à la crise de la COVID-19 et appellerait à intensifier la coopération avec le système des Nations Unies afin de diffuser plus efficacement les connaissances scientifiques, les meilleures pratiques et les informations concernant, entre autres, les diagnostics, les médicaments et les vaccins contre la COVID-19, en vue de prévenir et de faire face à l’émergence de maladies, notamment les zoonoses, et de pandémies. 

Par cette résolution, l’Assemblée prendrait note avec satisfaction des efforts entrepris par le Département pour assurer la continuité de ses activités pendant la pandémie de COVID-19, et lui demanderait d’évaluer sa réponse à la pandémie, y compris ses incidences sur les activités génératrices de revenus, ainsi que son état de préparation général pour répondre aux besoins de communication de l’Organisation pour toute urgence mondiale future qui pourrait survenir. 

L’Assemblée encouragerait en outre le DCG et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) à poursuivre leur collaboration dans les domaines de la promotion de la culture, de l’éducation, de la communication et du multilinguisme, notamment grâce à l’éducation multilingue, comme moyens de parvenir au développement durable en utilisant les ressources disponibles, en vue de combler le fossé qui sépare actuellement les pays développés des pays en développement. 

L’Assemblée demanderait de nouveau au DCG et aux services auteurs du Secrétariat de faire en sorte que les publications des Nations Unies soient produites dans les six langues officielles, dans le respect de l’environnement et sans que cela ait d’incidences financières, et de continuer à agir en étroite coordination avec les autres entités, y compris tous les autres départements du Secrétariat et les fonds et programmes des Nations Unies, afin d’éviter, chacun pour ce qui concerne son mandat, les doubles emplois lors de la parution des publications des Nations Unies.  Elle engagerait, à cet égard, le DCG et le Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences du Secrétariat à mettre au point de nouveaux arrangements de collaboration permettant de promouvoir le multilinguisme dans d’autres produits, sans que cela ait d’incidences financières, et à présenter à ce sujet un rapport au Comité de l’information à sa quarante-cinquième session. 

Elle se déclarerait de nouveau de plus en plus inquiète de constater que, contrairement à la demande formulée dans ses résolutions antérieures et au principe de l’égalité des six langues officielles, les communiqués de presse quotidiens ne sont pas publiés dans toutes les langues officielles.  Elle rappellerait le rapport pertinent du Secrétaire général sur les activités du DCG et prierait ce dernier d’envisager sans attendre des moyens possibles de publier des communiqués de presse quotidiens dans les six langues officielles, conformément à ses résolutions pertinentes, au plus tard pour la quarante-cinquième session du Comité de l’information, et de faire rapport à ce dernier à ce sujet à cette même session. 

Elle prendrait note avec inquiétude des récentes tendances consistant à remettre en cause la crédibilité et la transparence des informations factuelles et encouragerait le DCG à continuer de promouvoir la diffusion d’informations objectives et impartiales au sujet de l’action de l’Organisation, à formuler des propositions précises à cet égard et à en rendre compte au Comité de l’information à sa quarante-cinquième session. 

L’Assemblée encouragerait aussi le DCG à continuer de promouvoir la diffusion d’informations objectives et impartiales au sujet de l’action de l’Organisation, et l’exhorterait à appuyer les efforts déployés par le système des Nations Unies pour éliminer toutes les formes de haine, d’intolérance et de discrimination, notamment en raison de la religion ou des convictions, ainsi que le harcèlement, le racisme, les discours de haine, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en particulier dans le cadre des crises mondiales provoquées par des pandémies telles que la COVID-19. 

L’Assemblée soulignerait qu’il importe de rationaliser le réseau de Centres d’information des Nations Unies et, à cet égard, prierait le Secrétaire général de continuer à faire des propositions dans ce sens, notamment en redéployant des ressources, si nécessaire, et de rendre compte au Comité de l’information à ses futures sessions. 

L’Assemblée prierait le Secrétariat de continuer de veiller à ce qu’un rôle actif soit dévolu au DCG auprès des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, à la faveur de consultations et d’activités de coordination avec les autres départements et bureaux du Secrétariat, en particulier le Département des opérations de paix, le Département de l’appui opérationnel, le Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix et le Bureau d’appui à la consolidation de la paix.  Elle soulignerait qu’il importe de renforcer la capacité du DCG d’informer le public sur les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales. 

S’agissant des services d’information, l’Assemblée apprécierait les mesures prises par le DCG pour inclure et regrouper des informations et des contenus multimédias sur le portail en ligne coordonné et centralisé ONU Info, qui propose des contenus aux formats classique ou numérique dans les six langues officielles et en hindi, portugais et swahili, et, à cet égard, prierait le Secrétariat de continuer d’appuyer ces efforts. 

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