Le Conseil de sécurité examine les conséquences du refus de l’accès humanitaire aux enfants

9594E SÉANCE - MATIN
CS/15651

Le Conseil de sécurité examine les conséquences du refus de l’accès humanitaire aux enfants

Le Conseil de sécurité s’est réuni ce matin pour réfléchir aux moyens de remédier aux conséquences du refus de l’accès humanitaire aux enfants dans les situations de conflit armé.  Alors que des milliers d’enfants à travers le monde souffrent des conséquences de ces restrictions, comme l’ont souligné tour à tour la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, le Directeur général adjoint de l’UNICEF et les membres du Conseil, c’est le sort des enfants de la bande de Gaza, depuis l’attaque du 7 octobre dernier, qui a dominé les échanges. 

En effet, depuis six mois, les enfants de Gaza ne peuvent pas accéder à des aliments nutritifs ou des services médicaux ni à suffisamment d’eau chaque jour, a confirmé M. Ted Chaiban de l’UNICEF.  Dans le nord de l’enclave, un enfant de moins de 2 ans sur trois souffrait de malnutrition aiguë en mars, et des dizaines d’enfants seraient morts de malnutrition et de déshydratation ces dernières semaines. 

Cette situation risque de s’étendre au reste de l’enclave si rien ne change, a mis en garde la Fédération de Russie qui a demandé à la Représentants spéciale, Mme Virginia Gamba, de s’y rendre en priorité pour y évaluer la situation.  Il s’agit d’une « urgence absolue », a souligné la France qui a demandé de garantir « partout et sans délai » un accès rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire à grande échelle. 

Dans son exposé, Mme Gamba a indiqué que près de 4 000 cas de refus de l’accès humanitaire ont été vérifiés en 2022, faisant état d’une tendance à la hausse. S’attendant à des données « choquantes » pour 2024, elle a imputé cela aux lois restrictives, aux règles administratives, au contrôle accru des opérations humanitaires, en parlant même dans certaines situations « d’obstacles arbitraires érigés » comme dans le Territoire palestinien occupé ou en Haïti. 

Le refus de l’accès humanitaire, a-t-elle expliqué, a des effets à long terme sur le bien-être des enfants et peut conduire à la violation de leurs droits fondamentaux.  Pourtant, les Conventions de Genève et la Convention sur les droits de l’enfant contiennent des dispositions claires sur la facilitation de l’aide aux enfants dans le besoin, a souligné la Représentante spéciale, un point repris par de nombreux membres du Conseil qui ont souligné que toutes les parties aux conflits ont l’obligation d’autoriser l’accès humanitaire, à temps et sans entrave, et d’assurer la sûreté et la sécurité du personnel et des biens humanitaires. 

Les efforts de l’ONU auprès des parties à un conflit pour mettre fin ou prévenir le refus de l’accès humanitaire sont cruciaux, a insisté Mme Gamba, et à cette fin, il est essentiel de pouvoir disposer d’informations et de données fiables sur la nature et l’ampleur de ce phénomène, ainsi que sur l’identité des responsables de la violence contre les enfants. 

Elle a indiqué que son bureau travaille en ce moment, en collaboration avec d’autres entités de l’ONU, sur les directives demandées par le Conseil de sécurité pour améliorer la surveillance du refus de l’accès humanitaire.  « Surveiller, comprendre, vérifier et s’impliquer dans la mise en œuvre de la résolution 1612 (2005) du Conseil de sécurité est un moyen sûr de renforcer la protection des enfants », a-t-elle déclaré. 

Partageant cette opinion, Malte a appelé à un effort concerté pour mesurer l’impact du refus d’accès humanitaire sur les enfants et à renforcer la surveillance et l’analyse ventilées par âge et par sexe de cette grave violation.  Les actions nécessaires pour prévenir ces répercussions sont intrinsèquement politiques, a argué la présidence maltaise du Conseil. 

Insistant sur la responsabilité juridique et morale des parties aux conflits de garantir l’accès des enfants aux services humanitaires, M. Chaiban a argué que la capacité de l’UNICEF à maintenir l’accès humanitaire pourrait être grandement améliorée avec l’appui du Conseil de sécurité, sollicitant de celui-ci qu’il mette pleinement en œuvre sa résolution 2664 (2022).  Concrètement, le Fonds attend du Conseil qu’il renforce les exceptions destinées à protéger l’accès humanitaire, qu’il permette aux agences humanitaires de dialoguer avec tous les groupes armés aux fins de l’accès humanitaire aux populations affectées, et ce, sans crainte de conséquences, et qu’il use de son influence pour faire pression sur les États et les groupes non étatiques pour prévenir et mettre fin au refus d’accès humanitaire aux enfants. 

Le Conseil de sécurité, par le biais de son Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés, porte une responsabilité particulière dans le sort des enfants touchés par la guerre, a rappelé l’Algérie qui a conseillé d’ajouter le refus de l’accès humanitaire au nombre des violations graves qui déclenchent l’inscription d’une partie à un conflit dans l’annexe I du rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés.  Cet appel a été appuyé par la Sierre Leone qui a par ailleurs encouragé les États Membres à veiller à ce que les mesures antiterroristes n’empêchent pas les organisations humanitaires d’intervenir auprès des enfants. 

Les États-Unis ont appelé les gouvernements à intégrer des dérogations humanitaires dans tous les régimes de sanctions adoptés à l’échelle nationale, tandis que le Mozambique a conseillé de renforcer la coopération transfrontalière afin d’assurer un passage sûr de l’aide humanitaire.

Apportant un éclairage « terrain », la Directrice exécutive d’Authentique Memorial Empowerment Foundation, une organisation de la société civile basée au Cameroun, a expliqué que les négociateurs pour faciliter l’accès de première ligne et les humanitaires sont aux prises à la fois avec les autorités gouvernementales et les groupes armés non étatiques, qui les perçoivent comme étant alliés avec leurs adversaires respectifs, « alors qu’en réalité nous nous efforçons de rester neutres et impartiaux ».

LES ENFANTS ET LES CONFLITS ARMÉS

Remédier aux conséquences du refus de l’accès humanitaire aux enfants (S/2024/265)

Déclarations

Mme VIRGINIA GAMBA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, a indiqué que selon le dernier rapport annuel du Secrétaire général, l’ONU a confirmé, en 2022, 3 941 cas de refus de l’accès humanitaire.  Les données qui seront présentées pour l’année 2024, a-t-elle prévenu, vont montrer une confirmation « choquante » de cette tendance à la hausse.  Elle a imputé ces faits aux lois restrictives, aux décrets et règles administratives et à un contrôle accru des agents humanitaires. Dans certaines situations, des obstacles arbitraires sont érigés comme dans le Territoire palestinien occupé ou en Haïti. 

Le refus de l’accès humanitaire, a-t-elle expliqué, a des effets à long terme sur le bien-être des enfants et peut conduire à la violation de leurs droits fondamentaux.  Elle a ajouté que les garçons et les filles ne le vivent pas de la même manière.  Pour les filles, les restrictions peuvent leur barrer l’accès aux points de distribution de l’aide, alors que les garçons, en particulier les adolescents, peuvent être privés d’aide parce qu’ils sont perçus comme appartenant à l’autre partie au conflit.  Mme Gamba n’a pas oublié de parler des restrictions imposées au personnel humanitaire féminin en Afghanistan et au Yémen.

Elle a insisté sur le fait que les Conventions de Genève et la Convention sur les droits de l’enfant contiennent des dispositions claires sur la facilitation de l’aide aux enfants dans le besoin.  Elle a appelé toutes les parties à autoriser l’accès humanitaire, à temps et sans entrave, et à assurer la sûreté et la sécurité du personnel et des biens humanitaires.  Les personnes et infrastructures civiles, dont les hôpitaux, les écoles et leur personnel, doivent être protégées, conformément au droit international humanitaire.  Mme Gamba a aussi appelé les parties à s’abstenir d’utiliser ces hôpitaux et écoles à des fins militaires. 

Les efforts de l’ONU auprès des parties à un conflit pour mettre fin ou prévenir le refus de l’accès humanitaire sont cruciaux, a poursuivi Mme Gamba.  À cette fin, il est essentiel de pouvoir disposer d’informations fiables sur la nature et l’ampleur du phénomène, et l’identité des responsables de la violence contre les enfants.  Nous devons, a-t-elle expliqué, comprendre que les données sur le refus de l’accès humanitaire sont d’une importance capitale pour pouvoir placer sur une base solide le dialogue avec les parties à un conflit, leur rappeler leurs obligations juridiques et les encourager à changer de comportement. 

Mon bureau, a-t-elle annoncé, travaille en ce moment sur les directives qu’a demandées le Conseil de sécurité pour améliorer la surveillance de la violation grave qu’est le refus de l’accès humanitaire.  Le Bureau le fait en collaboration avec l’UNICEF, le Département des opérations de paix et celui des affaires politiques et de la consolidation de la paix, mais aussi en consultation avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). 

Un tel instrument offrira au personnel des directives concrètes sur les nombreuses composantes et les différentes interprétations du refus de l’accès humanitaire comme violation grave des droits de l’homme.  Surveiller, comprendre, vérifier et s’impliquer dans la mise en œuvre de la résolution 1612 (2005) du Conseil de sécurité est un moyen sûr de renforcer la protection des enfants.  Il faut aussi espérer, a ajouté Mme Gamba, que les directives permettront aux agents humanitaires et autres de mieux planifier leurs programmes, identifier les zones où les parties à un conflit peuvent lever les obstacles à l’accès humanitaire et définir avec précision les éléments de responsabilité applicables à cette violation grave.  Nous ne pouvons prévenir le refus de l’accès humanitaire aux enfants que si nous comprenons ce phénomène et améliorons notre faculté de le surveiller.  « Mettons-nous au travail », a conclu Mme Gamba.

M. TED CHAIBAN, Directeur général adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a déclaré que partout dans le monde, alors que les conflits prolifèrent, de graves violations contre les enfants se poursuivent.  Le refus d’accès humanitaire est une violation grave particulièrement répandue, multiforme et complexe, a-t-il précisé citant la suspension des services essentiels, les restrictions de la circulation des civils pour obtenir assistance et protection, les obstacles bureaucratiques et administratifs, les attaques directes contre les usines d’approvisionnement en eau et d’assainissement, ou encore les attaques contre le personnel humanitaire et médical.  Il en a déploré les conséquences humanitaires dévastatrices pour les enfants.

À Gaza, depuis octobre, les enfants ne peuvent pas accéder à des aliments nutritifs ou des services médicaux ni à suffisamment d’eau chaque jour, a décrit M. Chaiban.  Dans le nord de la bande de Gaza, a-t-il ajouté, un enfant de moins de 2 ans sur trois souffrait de malnutrition aiguë en mars, et des dizaines d’enfants seraient morts de malnutrition et de déshydratation ces dernières semaines.  Venant à la situation au Soudan, où se déroule la pire crise de déplacement d’enfants au monde, il a parlé de « niveaux records » d’admission pour le traitement de la malnutrition aiguë sévère, tout en indiquant que l’insécurité empêche les patients et les agents de santé de se rendre dans les hôpitaux et autres établissements de santé.  Au Myanmar, 6 millions d’enfants ont besoin d’une aide humanitaire, a-t-il encore déploré avant de rappeler que les parties à un conflit ont la responsabilité légale et morale de garantir l’accès des enfants aux services humanitaires.  L’UNICEF a augmenté ses investissements afin de mieux aider les enfants en Haïti, en Éthiopie et au Soudan, a-t-il encore déclaré. 

M. Chaiban a indiqué que la capacité du Fonds à maintenir l’accès humanitaire peut être grandement améliorée avec l’appui du Conseil de sécurité, sollicitant de celui-ci qu’il mette pleinement en œuvre sa résolution 2664 (2022).  Il a demandé de renforcer les exceptions destinées à protéger l’accès humanitaire.  De plus, il a souhaité que les agences humanitaires puissent dialoguer avec tous les groupes armés aux fins de l’accès humanitaire aux populations affectées, et ce, sans crainte de conséquences.  Le Conseil doit aussi user de son influence pour faire pression sur les États et les groupes non étatiques pour prévenir et mettre fin au refus d’accès humanitaire aux enfants, a-t-il demandé.  Enfin, il a dit compter sur l’appui du Conseil pour soutenir financièrement les efforts de suivi et de plaidoyer des Nations Unies sur le terrain pour protéger l’accès humanitaire aux enfants. 

Mme ATIM NIGER-THOMAS, Directrice exécutive d’Authentique Memorial Empowerment Foundation, une organisation de la société civile basée au Cameroun, a expliqué que les négociateurs pour faciliter l’accès de première ligne et les humanitaires sont aux prises à la fois avec les autorités gouvernementales et les groupes armés non étatiques, qui les perçoivent comme étant alliés avec leurs adversaires respectifs, « alors qu’en réalité nous nous efforçons de rester neutres et impartiaux ».  Les conséquences à long terme du refus de ménager un accès humanitaire sont particulièrement dévastatrices pour les enfants, qui subissent le poids de conflits qu’ils n’ont pas choisis, a souligné l’intervenante.  Elle a appelé à une approche plus harmonisée en matière de délivrance et de reconnaissance des autorisations administratives pour les opérations humanitaires sur le terrain.  Les obstacles bureaucratiques entravent involontairement le bon fonctionnement des ONG, car les documents obtenus auprès des autorités gouvernementales sont souvent contestés aux points de contrôle par les forces de sécurité de l’État, a-t-elle expliqué, précisant que de nombreuses organisations sont confrontées à ce problème dans le monde. 

L’oratrice a recommandé de renforcer la collecte de données locales.  « Sept ans après le début de la crise au Cameroun, je peux affirmer sans hésitation que l’utilisation des informations locales et des données issues de la société civile garantit une action en temps réel qui peut être prise pour éviter certains des impacts négatifs du refus de l’aide humanitaire sur les enfants », a-t-elle précisé.  Le Conseil de sécurité devrait selon elle veiller à ce qu’il existe des systèmes de surveillance et de signalement solides et bien financés dans le monde entier pour sensibiliser l’opinion publique, demander des comptes aux auteurs de violations et plaider en faveur d’une action. 

Elle a également appelé à mettre la pression sur le plan diplomatique, exhortant les États Membres à user de leur pouvoir aux plus hauts niveaux gouvernementaux et dans les enceintes internationales pour garantir un accès sans entrave aux acteurs humanitaires afin de soutenir les enfants.  Pour que le Conseil soit informé et engagé sur cette question, il faudrait inviter davantage de dirigeants d’organisations de la société civile locale, ainsi qu’intégrer les données de surveillance et de signalement relatives aux enfants et aux conflits armés sur le refus d’accès humanitaire dans les délibérations et produits du Conseil de sécurité.   

Enfin, Mme Niger-Thomas a plaidé pour le renforcement des capacités de financement locales afin de fournir une aide efficace dans des environnements complexes. Il s’agit d’offrir aux organisations de la société civile des opportunités d’apprendre et de devenir autonomes et cela doit s’accompagner d’un engagement à inclure de manière significative les organisations locales à tous les niveaux du processus décisionnel humanitaire, y compris les décisions du Conseil de sécurité, afin que les acteurs locaux puissent aider à identifier et à proposer des solutions réalistes, a-t-elle détaillé. 

La représentante de Malte a tout d’abord rendu hommage aux membres du personnel de World Central Kitchen tués par une frappe israéliennes à Gaza.  Elle a signalé que le déni d’accès des enfants à l’aide humanitaire augmente chaque année, avec 4 000 violations vérifiées en 2022.  Elle a évoqué la situation dans plusieurs pays, dont le Soudan où les obstacles bureaucratiques, l’incapacité des parties aux conflits à garantir la sécurité des travailleurs humanitaires et les nombreuses attaques contre des convois humanitaires entravent l’accès des enfants à la nourriture et à l’aide médicale.  Elle s’est également inquiétée de la situation à Gaza, notant que la poursuite du conflit et l’absence quasi totale d’accès humanitaire ont été catastrophiques pour les enfants.  Le refus d’accès aux enfants qui ont été détenus ou enlevés et qui auraient été soumis à des traitements inhumains et dégradants est également alarmant. La représentante s’est aussi préoccupée de la situation en Haïti, en République démocratique du Congo, au Yémen, en Ukraine et en Afghanistan.

Elle a ensuite appelé à un effort concerté pour mesurer l’impact du refus d’accès humanitaire sur les enfants et renforcer la surveillance et l’analyse ventilées par âge et par sexe de cette grave violation.  Les actions nécessaires pour prévenir ces répercussions sont intrinsèquement politiques, a-t-elle souligné.

Le représentant du Mozambique a dit être préoccupé face à l’impact dévastateur des restrictions de l’accès humanitaire aux enfants dans les situations de conflit. Il a appelé les parties aux conflits à respecter le droit international des droits de l’homme, en garantissant l’accès humanitaire aux enfants dans le besoin.  Refuser aux enfants l’accès humanitaire est inacceptable et viole leurs droits, a-t-il souligné.

Il a appelé les parties à créer les conditions nécessaires à l’accès humanitaire aux enfants touchés par les conflits, exigeant en outre la mise en œuvre de la résolution 2664 (2022) et des recommandations du Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés.  Il faut aussi renforcer la coopération transfrontalière afin d’assurer un passage sûr de l’aide humanitaire.  Le représentant a également appelé les donateurs et les partenaires de développement à intensifier leur soutien financier afin d’accroître la réponse humanitaire et de répondre aux besoins de développement, en particulier au niveau communautaire.  S’attaquer aux causes profondes des conflits est une approche plus durable pour lutter contre les violations graves commises contre les enfants, a-t-il ajouté.

La représentante des États-Unis a appelé les gouvernements à intégrer des dérogations humanitaires dans tous les régimes de sanctions adoptés à l’échelle nationale. Rappelant que les États-Unis sont le principal bailleur de fonds de l’UNICEF et du Programme alimentaire mondial (PAM), elle a exhorté le monde à faire davantage pour répondre aux besoins des enfants en temps de conflit armé.  La déléguée a ainsi recommandé de renforcer le suivi et de mieux documenter les incidents de refus d’accès à l’aide humanitaire.  Elle a aussi appelé à protéger ceux qui travaillent dans des zones de conflit dangereuses et à donner aux travailleurs humanitaires et aux soldats de la paix davantage de moyens logistiques.  Dans ce contexte, il faut prendre en considération le risque disproportionné que subissent les jeunes filles dans les conflits, notamment du fait des violences sexuelles, a relevé la représentante, en invitant notamment à répondre à leurs besoins en matière de santé mentale.  Tous les rescapés devraient d’ailleurs en bénéficier, a-t-elle plaidé en soulignant que les personnes handicapées ont également des besoins particuliers, qui doivent être intégrés dans le cadre d’une approche inclusive.

Le représentant de l’Équateur, préoccupé de la persistance des six violations graves commises à l’encontre des enfants dans les conflits, a recommandé d’identifier des stratégies visant à prévenir ces violations et à remédier à leurs conséquences sur la santé physique et mentale des victimes.  Il a insisté sur les cas où des forces étatiques et non étatiques ont entravé l’accès de l’aide humanitaire, saboté des campagnes de vaccination préventive et détruit des écoles et des hôpitaux, en violation du droit humanitaire international et des principes énoncés dans la Convention relative aux droits de l’enfant.  Il a noté que l’augmentation exponentielle du nombre d’enfants dépendant de l’aide humanitaire est liée à plusieurs facteurs: l’escalade de la violence associée aux conflits, en particulier en Ukraine et dans la bande de Gaza; l’augmentation des catastrophes naturelles résultant des changements climatiques; et la crise du financement des opérations d’aide humanitaire, qui a atteint un niveau record.

Le délégué a relevé que le déni d’accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave à la population civile, y compris aux enfants, se traduit par le refus d’accès et des restrictions imposées aux opérateurs humanitaires, ainsi que par la résistance à parvenir à des alternatives diplomatiques et politiques pour désamorcer la violence et s’attaquer à ses causes profondes.  Dans ce contexte, il a exprimé le soutien sans réserve de l’Équateur au travail « complexe » du Bureau de la Représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés, des équipes de l’UNICEF et du HCR, du Mécanisme de surveillance et de communication de l’information et de toutes les équipes spéciales sur le terrain.  En tant que membre du Groupe de travail, l’Équateur a appelé la communauté internationale à assurer son financement et les États à garantir l’accès et la sécurité de ses équipes pour qu’elles puissent continuer à produire leurs rapports, conformément au mandat de la résolution 1612 (2005).

Le représentant de la République de Corée a noté que 468 millions d’enfants vivaient dans des zones de conflit en 2023, soit le double depuis le milieu des années 90.  Parmi les six violations graves commises contre les enfants, le refus d’accès humanitaire mérite selon lui une attention particulière, en raison non seulement de ses effets immédiats sur eux, mais aussi de ses conséquences durables sur leur développement et leur santé physique et mentale.  Le délégué a souhaité que le Conseil de sécurité reste ferme sur sa politique de tolérance zéro à l’égard de ce déni d’accès humanitaire aux enfants, estimant qu’il ne peut y avoir de place pour des considération géopolitiques.  Dans le même temps, il faut améliorer l’utilisation des outils normatifs et opérationnels existants, a-t-il recommandé.

Le délégué a suggéré de renforcer les capacités de protection de l’enfance, sur le terrain notamment, en assurant des ressources humaines et financières adéquates pour le mécanisme de surveillance et d’établissement de rapports établi par la résolution 1612 (2005).  Il a soutenu l’idée de désigner des conseillers en protection de l’enfance dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  En outre, il a prôné l’élaboration de directives sur la surveillance et le signalement du refus d’accès humanitaire.  Le représentant a également suggéré de mettre en œuvre des outils comme le plan d’action global signé entre l’ONU et le Soudan du Sud en 2020 dans d’autres régions, car le refus de l’accès humanitaire augmente considérablement la probabilité de recrutement et d’utilisation d’enfants, ainsi que la violence sexuelle à l’égard des enfants.  Enfin, il a attiré l’attention du Conseil sur la situation des enfants en République populaire démocratique de Corée, alors que ce pays a signé la Convention relative aux droits de l’enfant. 

La représentante du Guyana s’est désolée que de plus en plus d’enfants dans des situations de conflit se retrouvent privés de nourriture et de médicaments, risquant de mourir de faim et de maladie, une situation encore aggravée par le manque d’accès aux services essentiels tels que l’eau, l’assainissement, l’électricité, les soins de santé et l’éducation.  Le Conseil de sécurité doit utiliser efficacement les outils dont il dispose pour lutter contre ces graves violations, a demandé la déléguée, en jugeant important que le Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés publie ses conclusions en temps opportun, compte tenu de leur valeur pour promouvoir l’établissement des responsabilités et encourager les parties aux conflits à prendre des mesures spécifiques pour prévenir et mettre fin aux violations contre les enfants.  Elle a dit également attendre avec intérêt que le Bureau de la Représentante spéciale élabore une note d’orientation sur le refus de l’accès humanitaire. 

Le représentant de la France s’est dit profondément préoccupé par les 150 millions d’enfants dans le monde qui avaient besoin en 2023 d’une aide humanitaire vitale, parlant de « déni d’accès à l’aide humanitaire » qui peut, dans certaines conditions, constituer un crime de guerre et un crime contre l’humanité. Il est interdit d’utiliser la famine comme méthode de guerre contre les populations civiles, a-t-il martelé: « ce n’est pas négociable ».  Notant que ces entraves apportées à l’assistance humanitaire des enfants se produisent dans de nombreuses zones de conflit dans le monde –« Birmanie, Yémen, Soudan, Burkina Faso, et ailleurs »-, il a insisté sur la situation humanitaire catastrophique à Gaza et demandé de garantir « partout et sans délai » un accès rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire à grande échelle. Il faut pour cela lever tous les obstacles, autoriser l’utilisation de tous les points de passage terrestres et augmenter leurs capacités en vue d’un accès humanitaire complet et d’une aide massive conformément aux résolutions pertinentes de ce Conseil.  Il s’agit d’une « urgence absolue ».  Le représentant a également réitéré l’appel de la France à un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza, en incitant le Conseil à agir pour que le droit international soit respecté et que ces exactions cessent.

La France appelle instamment tous les États à ratifier et à mettre en œuvre la Convention relative aux droits de l’enfant et ses protocoles facultatifs, a-t-il déclaré, ainsi que le Statut de Rome, qui sont des outils essentiels de lutte contre l’impunité.  Il a encouragé les membres du Conseil à continuer d’appuyer le mécanisme de surveillance et de communication mis en place en 2005 qui doit, selon lui, bénéficier des moyens nécessaires pour permettre au Secrétaire général d’établir une liste d’infamie complète et objective.  Il a souhaité que le Groupe de travail adopte rapidement des conclusions qui devront être mises en œuvre sur le terrain. 

Le représentant du Japon s’est inquiété de l’augmentation des cas de déni d’accès humanitaire depuis 2019, et de leurs conséquences sur les enfants, comme la perturbation de l’éducation, le recrutement d’enfants, la malnutrition et les problèmes de santé mentale.  Face à cette situation, il a jugé impératif de lever les obstacles aux opérations humanitaires, et d’assurer la sécurité de l’acheminement humanitaire, notamment en retirant les armes explosives et les mines terrestres.  La facilitation des procédures administratives, telles que l’approbation rapide des visas et le dédouanement, ne doit pas être négligée.

Le représentant a également appelé la communauté internationale à intensifier ses efforts pour soutenir le droit des enfants à l’éducation et leur développement dans le contexte des conflits armés.  Aucun effort ne doit être épargné pour assurer la sécurité et la qualité de l’éducation, notamment pour les filles qui sont affectées de manière disproportionnée par l’interruption de leur éducation, ce qui les rend vulnérables à d’autres violations graves, notamment la violence sexuelle. 

En dernier lieu, il a insisté sur l’impératif de faire respecter le droit international, y compris le droit international humanitaire.  Notant que Save the Children décrit l’augmentation des violations à l’encontre d’enfants comme une « crise de conformité », il a argué que le problème n’est pas tant l’absence d’instruments juridiques pour protéger les enfants, mais plutôt la tendance croissante à les ignorer.  Il a également souligné que le renforcement de l’état de droit passe par la mise en place d’une gouvernance et d’institutions juridiques solides. 

Le représentant de la Chine a demandé de lever les obstacles humanitaires pour que les enfants puissent vivre normalement.  Il a rappelé que des millions d’entre eux sont privés d’aide à cause du déni d’accès humanitaire.  « C’est une honte pour l’humanité. »  À Gaza, la résolution du Conseil de sécurité demandant un cessez-le-feu immédiat doit être mise en œuvre pour que les enfants de la bande puissent vivre en paix et que l’UNRWA puisse apporter l’aide sans entrave, a réclamé le délégué.  Il a exigé que les auteurs des violations du droit des enfants rendent des comptes et que la justice internationale soit rendue. 

En Afghanistan, il a appelé à accroître l’aide humanitaire tandis qu’en Syrie et ailleurs, les sanctions unilatérales doivent à son avis être levées.  Toutes les opérations humanitaires doivent se dérouler sans heurt, a exhorté le délégué en se désolant que les six résolutions du Conseil sur la question soient « méprisées ».  En ce qui concerne Haïti, il a demandé d’appliquer l’embargo sur les armes.  Pour ce qui est du Sahel, il a plaidé pour que la communauté internationale œuvre à la réalisation du développement socioéconomique afin de vaincre la pauvreté.  Misant sur le futur Sommet de l’avenir, il a espéré que ce serait l’occasion de prendre des initiatives pratiques et claires pour les enfants et de bâtir un avenir commun pour l’humanité. 

La représentante du Royaume-Uni a noté que près de la moitié de tous les incidents vérifiés de refus d’accès humanitaire en 2022 se sont produits en Israël et dans les territoires palestiniens occupés.  « Aujourd’hui, les enfants palestiniens sont confrontés à des souffrances insondables », s’est-elle alarmée.  Elle a également dit avoir été horrifiée d’apprendre le meurtre de sept membres du personnel de World Central Kitchen le 1er avril et a fait part de sa profonde préoccupation au sujet des informations selon lesquelles Israël continue de bloquer l’accès de l’UNRWA dans le nord de Gaza.  Elle a appelé Israël à garantir la protection des travailleurs humanitaires et à faciliter un accès rapide et sans entrave aux organisations humanitaires pour fournir de l’aide aux enfants les plus exposés, notamment aux enfants du nord de Gaza, qui sont « au bord de la famine ». 

La déléguée britannique a ensuite appelé toutes les parties à un conflit à respecter le droit international humanitaire applicable, notamment en autorisant et en facilitant un accès humanitaire rapide et sans entrave aux civils dans le besoin, dont beaucoup sont des enfants.  Elle a enfin plaidé pour la mise en œuvre intégrale de la résolution 2664 (2022), pour aider les humanitaires et leurs prestataires de services à continuer de soutenir les plus vulnérables.

Le représentant de la Sierra Leone a noté que le déni d’accès à l’aide humanitaire augmente la vulnérabilité des enfants à d’autres violations de leurs droits et des abus, tels que l’enlèvement, le recrutement par des forces armées ou des groupes armés, le viol et d’autres formes de violence sexuelle, y compris le mariage précoce.  Il a également signalé que les lois et politiques de lutte contre le terrorisme limitent, voire empêchent, les enfants vivant dans des zones contrôlées par des groupes armés désignés comme terroristes d’accéder à une aide vitale. 

Il a exhorté toutes les parties à un conflit à autoriser et à faciliter l’accès sans entrave, rapide et sûr de l’aide humanitaire aux populations touchées, en particulier aux enfants, et à respecter et protéger le personnel, les biens et les infrastructures humanitaires.  Il a également encouragé les États Membres à veiller à ce que les mesures antiterroristes et les régimes de sanctions soient pleinement conformes au droit international applicable et n’empêchent pas les organisations humanitaires d’intervenir auprès des enfants. 

Le représentant a aussi souhaité que le déni d’accès humanitaire justifie une inscription sur la liste qui figure en annexe du rapport du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés.  De même, il est impératif de renforcer les mécanismes de responsabilisation, notamment en prenant des mesures concrètes contre ceux qui attaquent les écoles et les hôpitaux, refusent l’accès humanitaire et commettent des violences sexuelles contre les enfants dans les situations de conflit armé.

La représentante de la Slovénie a appelé les parties à un conflit à respecter le droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits humains. Chaque partie au conflit armé est responsable des besoins fondamentaux des enfants, a-t-elle dit, estimant que le refus d’accès humanitaire pour les enfants est « cruel et inhumain » et les rend vulnérables à d’autres violations des droits humains, à la violence sexuelle et sexiste, au recrutement, à la maladie et à la malnutrition. Cela doit cesser, a martelé la déléguée exigeant un acheminement rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire à tout moment.  Les États Membres doivent harmoniser leurs lois par rapport aux régimes de sanctions du Conseil de sécurité à cet égard, a-t-elle souligné.  Aux parties aux conflits, elle a demandé de faire taire les armes et de cesser les hostilités.  Elle les a aussi appelées à coopérer pleinement avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), les agences, fonds et programmes des Nations Unies et d’autres acteurs humanitaires.

Rappelant que des millions d’enfants pourraient mourir de malnutrition à Gaza, au Yémen, en Afghanistan, en Haïti et au Myanmar, la représentante a rappelé que la communauté humanitaire internationale a pour mission de fournir de la nourriture, des services de base, une aide humanitaire essentielle et un soutien psychosocial.  Les efforts visant à protéger les droits des enfants doivent être axés sur la prévention, la redevabilité, la réhabilitation et le soutien psychosocial aux enfants traumatisés par les conflits armés, a-t-elle ajouté.  Elle a prôné la collaboration entre les gouvernements, les organisations humanitaires, les communautés locales et les individus pour assurer un avenir où chaque enfant est à l’abri des horreurs de la guerre. 

Le représentant de l’Algérie a indiqué que la crise humanitaire très grave à Gaza est un exemple flagrant des conséquences terribles que le refus de l’accès humanitaire peut avoir sur les enfants, avant d’accuser la Puissance occupante d’être responsable de cette situation.  Selon l’UNRWA, plus d’enfants ont été tués à Gaza ces derniers mois qu’en quatre ans de conflit dans le monde, a-t-il déploré.  Le Conseil de sécurité, a poursuivi le délégué, par le biais de son Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés, et en coopération avec le Bureau de la Représentante spéciale, porte une responsabilité particulière dans le sort des enfants touchés par la guerre.  Aussi a-t-il recommandé d’autonomiser davantage les mécanismes de surveillance pertinents, s’agissant notamment de la collecte des données; de plaider pour un accès sûr et sans entrave des travailleurs et biens humanitaires, sans conditions préalables; et d’ajouter le refus de l’accès humanitaire au nombre des violations graves qui déclenchent l’inscription d’une partie à un conflit dans l’annexe I du rapport annuel du Secrétaire général.  « Faisons de cette séance un catalyseur de l’action », a lancé le délégué. 

Le représentant de la Fédération de Russie a parlé de l’impact extrêmement négatif des mesures coercitives unilatérales sur l’accès humanitaire, en arguant que de telles mesures infligent des dégâts incalculables aux enfants dans les pays en conflit où elles affectent l’ensemble de la sphère sociale.  En Syrie, en dépit des « prétendues » dérogations des humanitaires, les mesures coercitives unilatérales constituent désormais une forme de refus de l’accès humanitaire et doivent être évaluées en tant que telles.

Passant à la « situation humanitaire catastrophique » à Gaza, où Israël, en violation de ses obligations internationales, a quasiment bloqué l’accès humanitaire depuis l’attaque du 7 octobre, le représentant a dénoncé le refus d’octroyer des visas aux ONG humanitaires, les tracasseries administratives et les inspections sans fin des fournitures humanitaires.  Il a également dénoncé la guerre médiatique contre l’UNRWA qui a provoqué la crise financière de « la plus grande agence humanitaire sur le terrain », après les allégations israéliennes dont la véracité n’a pas encore été vérifiée par l’ONU.  Une enquête est-elle en cours sur les 196 agents que l’UNRWA a perdus depuis le mois d’octobre? a demandé le représentant.  Que fait l’ONU aujourd’hui pour protéger son personnel?

N’oubliant pas de condamner le refus d’Israël de laisser les convois de l’UNRWA entrer dans le nord de Gaza où des enfants meurent de faim, le représentant a dit craindre une situation similaire dans le reste de l’enclave.  Le volume des approvisionnements actuels, y compris par voie aérienne et maritime, n’a tout simplement pas encore permis d’améliorer cette situation « épouvantable », a-t-il constaté.  Rappelant que depuis le début de l’escalade, plus de 13 000 enfants ont été tués à Gaza, que des milliers d’autres sont portés disparus et que la plupart des écoles et des hôpitaux sont détruits, le délégué a demandé à Mme Gamba de se rendre en priorité dans la bande de Gaza pour évaluer la situation et a exhorté le Gouvernement israélien à garantir à cette dernière un accès immédiat. 

Le représentant de la Suisse a déclaré que partout où l’accès humanitaire est limité, les premiers à en souffrir sont les enfants.  Ces dernières années, les cas « vérifiés » du refus de l’accès humanitaire ont fortement augmenté.  Selon le délégué, « vérifiés » signifie qu’il s’agit de l’une des six violations graves à l’encontre des enfants suivies par le mécanisme de surveillance et de communication de l’information mandaté par ce Conseil.  Les parties à un conflit armé ont l’obligation d’autoriser et de faciliter un accès humanitaire rapide et sans entrave.  Pour Gaza comme pour le Soudan, le délégué a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à l’acheminement immédiat de l’aide et autres services humanitaires.  Il a aussi parlé de la situation en Afghanistan, au Myanmar, en Haïti et en Ukraine où l’absence d’accès humanitaire aux territoires sous contrôle militaire russe reste très préoccupante.

Face à cette « triste liste non exhaustive », le représentant a exhorté au respect de l’obligation de protéger le personnel humanitaire et les enfants dans les conflits armés, l’interdiction d’utiliser la famine comme méthode de guerre et l’obligation de protéger les infrastructures indispensables à la survie de la population. La Convention relative aux droits de l’enfant reconnaît les droits à la vie, à la jouissance du meilleur état de santé possible et à l’éducation, a souligné le représentant, avant de réclamer le financement adéquat et prévisible de l’aide humanitaire.  La résolution 2664 (2022) sur l’exemption humanitaire dans tous les régimes de sanctions doit être pleinement mise en œuvre.  Citant Mme Catherine Russell, le représentant a dit: « toute guerre est une guerre contre les enfants ».  Il est de notre responsabilité collective de veiller à ce que les droits de tous les enfants soient protégés, a-t-il insisté. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Diamants de guerre: l’Assemblée générale encourage le renforcement du Processus de Kimberley

Soixante-dix-huitième session,
65e séance plénière – matin
AG/12590

Diamants de guerre: l’Assemblée générale encourage le renforcement du Processus de Kimberley

Constatant que le commerce des diamants de la guerre demeure un sujet de grave préoccupation à l’échelle internationale, l’Assemblée générale a encouragé, ce matin, la poursuite du renforcement du Processus de Kimberley afin de le rendre mieux à même de résoudre les problèmes auxquels font face l’industrie diamantaire et les populations qui en dépendent, y compris les problèmes découlant de l’instabilité et des conflits. 

En adoptant par consensus sa résolution annuelle sur les diamants, facteurs de conflits, l’Assemblée générale entend également faire en sorte que le Processus de Kimberley garde toute son utilité à l’avenir et continue de contribuer à la paix et à la sécurité internationales et à la mise en œuvre du Programme 2030. 

Le Processus de Kimberley est une initiative tripartite unique qui rassemble des parties prenantes issues des gouvernements, des milieux industriels et de la société civile dans le but de prévenir l’entrée des diamants de la guerre sur le marché. Entré en vigueur le 1er janvier 2003, le Système de certification du Processus de Kimberley a pour ultime objectif d’exclure les diamants de la guerre de la chaîne de production, d’exportation et d’importation de diamants bruts. 

Le texte adopté a été présenté par le Zimbabwe, Président sortant du Processus de Kimberley. Faisant le point sur son mandat, il a relevé que la production totale de diamants en 2022 était d’un peu plus de 121 millions de carats et d’une valeur de plus de 16 milliards de dollars. Cette année-là, un total de 45 648 certificats d’importation ont été délivrés, ainsi que 46 089 certificats d’exportation, ce qui montre que le mécanisme fonctionne, s’est félicitée la délégation.  L’industrie du diamant continue de soutenir les moyens de subsistance de plus de 10 millions de personnes dans le monde et a le potentiel de résoudre certains des défis de développement, a-t-elle ajouté. 

Le Président sortant s’est également félicité de la décision prise en 2023 de créer un Secrétariat permanent du Processus à Gaborone, au Botswana.  Il a également évoqué la tenue, durant son mandat, des réunions intersessions et plénières du Processus qui se sont déroulées à Victoria Falls, respectivement du 5 au 10 mai 2023 et du 6 au 11 novembre 2023.  Lors de la 19e séance plénière du Processus, les participants se sont mis d’accord sur 98 des 99 recommandations, et par conséquent, aucun document final n’a été adopté, a-t-il rapporté. 

Pour la première fois dans son histoire, la plénière n’a pas réussi à produire un communiqué de consensus, a déploré l’Union européenne qui a appelé le Processus à s’engager dans un dialogue ouvert afin d’intégrer son mandat principal de prévention des conflits à la réforme en cours de son ordre du jour. 

Le Royaume-Uni a regretté que la dernière session n’ait pas permis de discuter du rôle des diamants exploités par la Fédération de Russie pour financer le conflit en Ukraine, tandis que les États-Unis ont exhorté à la réforme du Processus afin de rompre tout lien entre l’exploitation des diamants et les conflits armés. 

Regrettant elle aussi que le communiqué final de la session de novembre dernier n’ait pas été adopté, la Fédération de Russie a accusé les pays occidentaux de chercher à transformer le Processus en un instrument de pression sur les États souverains, en vue de le remplacer par un mécanisme discriminatoire et unilatéral émaillant du G7.  Tout cela ne fera que compliquer la lutte contre les diamants de la guerre, a prévenu la délégation qui a récusé toute politisation du Processus de Kimberley. 

Le Botswana a souligné pour sa part que le Processus a connu des progrès significatifs depuis sa création il y a plus de deux décennies.  Aujourd’hui, environ 99,8% de la production mondiale de diamants bruts est exempte de conflits, a relevé la délégation qui s’est félicitée des préparatifs en cours pour assurer le fonctionnement du Secrétariat permanent à Gaborone.  La République-Unie de Tanzanie a rappelé son engagement en faveur du Processus de Kimberley, notant que le continent africain est le plus touché par les conflits du fait de l’appât que suscitent ses innombrables ressources naturelles, y compris les diamants. 

Les Émirats arabes unis, qui prennent le relais du Zimbabwe à la présidence du Processus en 2024, ont présenté leurs trois objectifs principaux: rendre opérationnel le Secrétariat permanent à Gaborone; assurer l’examen et la réforme du Processus d’ici à la fin de l’année; et identifier des opportunités pour renforcer le Processus par le biais des technologies numériques. 

Au cours de cette séance, l’Assemblée générale a par ailleurs nommé la Barbade comme membre du Conseil du Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durables.  Son mandat qui prend effet ce jour arrivera à terme au 20 mars 2026.  La nomination de deux autres membres du Groupe Asie-Pacifique et un membre du Groupe des États d’Europe orientale se fera lorsque le Secrétariat recevra les candidatures desdits groupes. 

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission débat de la définition des crimes contre l’humanité et se divise sur la référence faite à celle figurant dans le Statut de Rome

Soixante-dix-huitième session,
40e & 41e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3709

La Sixième Commission débat de la définition des crimes contre l’humanité et se divise sur la référence faite à celle figurant dans le Statut de Rome

Au deuxième jour de sa seconde reprise de session consacrée à l’examen du « projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité » devant mener à une future convention, la Sixième Commission, en charge des question juridiques, a poursuivi sa discussion du groupe thématique 2 relatif aux projets d’articles 2, 3 et 4, exposant à cette occasion ses divisions quant à la définition retenue à ce stade.  La Commission a ensuite entamé son débat du groupe thématique 3, centré sur les projets d’articles 6, 7, 8, 9 et 10. 

S’agissant du projet d’article 2, dédié exclusivement à la définition des crimes contre l’humanité, un grand nombre d’États se sont félicités qu’il prenne pour base la définition figurant dans le Statut de Rome, laquelle définit les crimes internationaux sur lesquels la Cour pénale internationale (CPI) a une compétence juridictionnelle.  Les Pays-Bas ont jugé que cette définition, fruit d’années de pratique des États et de larges négociations, « reflète largement le droit international coutumier ».  À l’instar de l’Autriche, qui y a vu un « point de départ raisonnable » pour de futures négociations, des pays tels que l’Argentine, l’Australie, la Colombie, la France, la Hongrie, le Japon, la Jordanie, Malte, la Roumanie ou encore la Slovaquie ont estimé que cette définition était consacrée par la jurisprudence et l’évolution du droit pénal international concernant les crimes contre l’humanité. 

Bien que n’étant pas partie au Statut de Rome, les États-Unis ont approuvé cette définition calquée sur celle de l’article 7 du Statut de Rome.  « L’accepter ne signifie pas que l’on souscrit au Statut ou que l’on reconnaît la compétence de la CPI », ont-ils souligné, avant de relever que la définition retenue pour le projet d’article 2 contient la liste la plus complète des crimes contre l’humanité en comparaison avec tous les instruments multilatéraux qui en ont une.  La Suisse a, elle, souhaité que l’on ne s’écarte pas de la définition figurant dans le Statut de Rome, dans la mesure où la CPI est appelée à jouer un rôle central dans la poursuite des crimes contre l’humanité.   

À l’inverse, le Cameroun, la Chine, l’Inde et le Pakistan se sont opposés à la reproduction de la définition du Statut de Rome au motif qu’elle n’est pas acceptée de façon universelle, plus d’un tiers des États Membres n’étant pas parties au Statut de la CPI.  La délégation chinoise a aussi rappelé qu’il existe différentes définitions des crimes contre l’humanité dans la pratique internationale et qu’au moins 11 instruments et traités contiennent des définitions disparates, en particulier sur le fait de savoir si ces crimes ne sont commis qu’en temps de guerre.  L’Inde a par ailleurs dénoncé l’exclusion d’actes constitutifs de crimes contre l’humanité, tels que le terrorisme et le recours aux armes nucléaire, tandis que la République islamique d’Iran a appelé de ses vœux une définition faisant référence aux conséquences des mesures coercitives unilatérales sur les populations civiles.  Il conviendrait aussi de se pencher sur « le néonazisme et les changements anticonstitutionnels de régime », a ajouté la Fédération de Russie. 

La République arabe syrienne a quant à elle regretté que le projet d’article 2 ne tienne pas compte des crimes commis de manière systématique par certains États à l’encontre d’autres, en particulier le blocus, l’utilisation de la famine et les sanctions unilatérales.  Elle a recommandé d’ajouter de telles actions dans la liste de crimes contre l’humanité au motif qu’elles sont conformes à la définition du crime de persécution figurant à l’alinéa g) du paragraphe 2 du projet d’article.  Elle a d’autre part appelé à préciser la notion de « population civile » afin d’éviter des pratiques contradictoires concernant les poursuites, rejointe à cet égard par Cuba et l’État observateur de Palestine, ce dernier insistant d’autre part sur la nécessité de prendre en compte la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les crimes contre l’humanité.    

Parmi les pays favorables à la définition proposée, l’Afrique du Sud, le Mexique et le Royaume-Uni, entre autres, ont plaidé à leur tour pour que d’autres crimes soient ajoutés à la liste des crimes contre l’humanité énumérés dans le projet d’article 2, notamment le mariage forcé, l’apartheid de genre et la traite négrière.  À propos de ce dernier crime, le Nigéria a rappelé que le Groupe des États d’Afrique appuie de longue date son inclusion.  Notant que ces crimes, « y compris le colonialisme et l’exploitation des ressources naturelles », ne sont reflétés dans aucune convention sur les crimes de guerre ou le crime de génocide, il a jugé que « l’histoire ne nous pardonnera jamais si nous ne les incluons pas dans une convention sur les crimes contre l’humanité », avec la garantie de réparations pour les victimes. Un point de vue soutenu par la Sierra Leone et El Salvador, tant pour ceux qui ont souffert directement des crimes contre l’humanité que pour les générations suivantes qui vivent avec les conséquences de ces crimes. 

Plusieurs États ont également appuyé la suppression de la définition du genre dans ce projet d’article.  De l’avis du Brésil, il est préférable de laisser aux États Membres le soin d’interpréter le sens de ce terme conformément à leur législation nationale afin d’éviter des préoccupations susceptibles d’empêcher la ratification d’une future convention.  Un avis partagé par le Canada, selon lequel cela permettait de « combler le fossé » entre les pays.  En revanche, le Saint-Siège a déploré l’omission d’une définition du genre dans le texte examiné, alors qu’elle figure dans le Statut de Rome. 

Autre proposition notable, celle du Liechtenstein en faveur d’un amendement au premier paragraphe du projet d’article 2 pour y incorporer une référence aux crimes de guerre, au génocide et au crime d’agression liés à la persécution.  En effet, a fait remarquer la délégation, en vertu de l’article 7 du Statut de Rome, la persécution peut constituer l’acte fondateur d’un crime contre l’humanité lorsqu’elle est liée à l’un des autres actes susceptibles de constituer un tel crime ou à un crime relevant de la compétence de la CPI. 

Pour ce qui est du projet d’article 3, qui traite des obligations générales, l’Italie, la Nouvelle-Zélande et la Roumanie se sont réjouies qu’il précise que les crimes contre l’humanité constituent des crimes au titre du droit international, qu’ils soient commis ou non en temps de conflit armé. Elles ont d’autre part appuyé, au paragraphe 3 du projet d’article 3, la disposition prévoyant qu’aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier de tels crimes.  Les États-Unis ont, pour leur part, applaudi le fait que ce projet d’article s’inspire de l’article 1 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, tout en souhaitant que son deuxième paragraphe soit étoffé pour préciser que les crimes contre l’humanité peuvent être commis par des acteurs étatiques comme non étatiques.  

À propos du projet d’article 4, relatif à l’obligation de prévention, le Mexique a qualifié d’appropriées les références faites à l’adoption de mesures législatives, administratives et judiciaires.  Globalement d’accord, les États-Unis ont jugé utile de préciser que cet article ne doit pas être considéré comme autorisant une utilisation ou un recours à la force qui ne serait pas conforme à la Charte des Nations Unies.  Prudent, Singapour a dit comprendre ce projet d’article comme établissant « une obligation de conduite, non pas de résultat ».  De son côté, le Portugal a fait valoir que les obligations de prévention et de sanction vont « main dans la main » et se renforcent mutuellement. 

Après plusieurs « mini-débats » sur les contours des articles à l’examen, la Commission a ouvert en fin de journée la discussion du groupe thématique 3 concernant les projets d’articles 6 (incrimination en droit interne), 7 (établissement de la compétence nationale), 8 (enquête), 9 (mesures préliminaires lorsque l’auteur présumé de l’infraction se trouve sur le territoire) et 10 (obligation d’extrader ou de poursuivre). 

L’Union européenne (UE) a d’emblée souligné l’importance des deux premiers paragraphes du projet d’article 6, dont l’idée maîtresse est d’obliger les États à adopter des lois criminalisant les crimes contre l’humanité dans leur système juridique national afin d’éviter les failles de l’impunité.  Concernant les paragraphes 4, 5 et 6, elle a noté que l’immunité procédurale dont un représentant d’un État étranger peut bénéficier devant une juridiction pénale nationale continue d’être régie par les conventions et le droit coutumier.  S’agissant du projet d’article 7, l’UE a salué le fait qu’il garantisse que les individus responsables de crimes aussi odieux subissent les conséquences de leurs actes, où qu’ils se trouvent.  Enfin après avoir appuyé les projets d’articles 8 et 9, elle a jugé que le projet d’article 10 est un « incontournable » de toute convention combattant les crimes internationaux, car elle oblige les États, s’ils n’extradent pas l’auteur de l’infraction, à soumettre l’affaire aux autorités compétentes pour examiner si des poursuites seraient appropriées. 

La Sixième Commission poursuivra ses débats demain, mercredi 3 avril, à partir de 10 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Attaque contre les locaux diplomatiques de l’Iran en Syrie: le Conseil de sécurité appelé à éviter une escalade des tensions au Moyen-Orient

9593E SÉANCE - APRÈS-MIDI
CS/15650

Attaque contre les locaux diplomatiques de l’Iran en Syrie: le Conseil de sécurité appelé à éviter une escalade des tensions au Moyen-Orient

Le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, pour faire le point sur l’évolution de la situation au Moyen-Orient au lendemain de l’attaque contre les locaux diplomatiques de l’Iran en Syrie.  À cette occasion, le Sous-Secrétaire général a appelé l’organe à travailler avec les parties pour éviter une escalade des tensions, alertant que toute erreur de calcul pourrait mener à un élargissement du conflit dans une région déjà instable, avec des conséquences dévastatrices pour les civils.

M. Khaled Khiari a précisé que dans une lettre, l’Iran avait informé que plusieurs membres de son personnel, y compris des conseillers militaires de haut rang, avaient été tués, hier, lors d’une attaque des Forces de défense israéliennes contre son consulat à Damas, en Syrie.

Des attaques de plus en plus meurtrières visant des cibles liées à l’Iran en Syrie ont été attribuées à Israël, notamment depuis le début du conflit avec le Hamas à Gaza, le 7 octobre, a signalé le haut fonctionnaire qui a précisé qu’au moins 12 attaques de ce type ont eu lieu cette année.  Israël a rarement revendiqué ces incidents même si ses responsables ont reconnu que des opérations militaires ont lieu en Syrie et suggèrent que ces attaques se poursuivraient à l’avenir, a-t-il ajouté. 

Ces attaques ont été condamnées par la quasi-totalité des délégations qui ont appelé au respect de l’inviolabilité des installations et du personnel diplomatiques et consulaires. 

Les actes aveugles du 1er avril menés par Israël ont entraîné la « destruction totale » du consulat iranien à Damas avec un nombre considérable de morts et de blessés, a déploré la Fédération de Russie qui a accusé Israël de faire fi des résolutions du Conseil de sécurité et des principes fondamentaux des Conventions de Vienne de 1961 et 1963 sur les relations diplomatiques et consulaires.  Ces attaques provocatrices visant à attiser les tensions peuvent être lourdes de conséquences pour la région, a prévenu la délégation.

Une condamnation relayée par la Chine, ainsi que par l’Algérie selon qui le « timing » de cette attaque, au regard du vote de la résolution 2728 (2024), serait le signe d’un mépris délibéré des appels à la cessation des hostilités réclamés par l’ensemble de la communauté internationale.  Le Conseil de sécurité doit réagir de manière ferme et décisive, a plaidé le représentant. 

Exhortant les acteurs de la région à faire preuve de retenue, la France a constaté, de son côté, que les frappes d’hier s’inscrivent dans un continuum de tensions dans la région. Selon elle, l’Iran porterait une « lourde responsabilité » dans cette escalade.  Un point de vue partagé par le Royaume-Uni qui a pointé le soutien militaire, financier et politique apporté par l’Iran à des groupes qui ont mené et menacé d’attaquer Israël, citant notamment le Hamas, le Jihad islamique palestinien, le Hezbollah, les milices en Syrie et en Iraq et les houthistes.

Tous les membres du Conseil de sécurité devraient s’accorder sur le fait que l’Iran et la Syrie devraient cesser toute escalade ou tout appui d’un groupe contribuant à l’instabilité dans la région, ont appuyé les États-Unis qui se sont inquiétés de la présence de « groupes terroristes » dans les locaux visés. Alors que la lumière est à peine en train de se faire sur les faits, l’Iran et ses partenaires doivent éviter d’enflammer la situation, a prévenu la délégation qui a par ailleurs assuré ne pas avoir été informée au préalable de l’incident du 1er avril.

Ces accusations ont été rejetées avec force par la représentante de l’Iran qui a prévenu que les attaques dont ont été la cible les locaux diplomatiques iraniens représentent une menace réelle pour la région, ainsi que pour la paix et la sécurité internationales.  Israël veut attiser les tensions et prolonger le conflit.  L’Iran a su faire preuve de retenue, « mais il y a une limite à ce que l’on peut supporter », a averti la représentante qui a prévenu qu’« Israël devra faire face aux conséquences de ces actes ». 

« Israël et les États-Unis sont responsables de l’escalade régionale », a dénoncé à son tour le représentant de la Syrie qui a énuméré les attaques que son pays aurait subi ces dernières semaines, les attribuant à Israël et à d’autres groupes terroristes supplétifs.  Ces attaques n’auraient pu être menées sans l’appui des États-Unis, a-t-il assuré.

La situation est « intenable », s’est alarmée la représentante de Malte.  La désescalade doit être la priorité absolue et cela démarre par la mise en œuvre de la résolution 2728 (2024), ce qui signifie un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et le retour des otages israéliens dans leur pays.  Il faut éteindre l’incendie de la guerre avant qu’il ne soit trop tard, a-t-elle exhorté. 

L’Équateur, le Guyana, le Japon, le Mozambique, la République de Corée, la Sierra Leone, la Slovénie et la Suisse ont exprimé des positions similaires. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Exposé

M. KHALED KHIARI, Sous-Secrétaire général pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, a indiqué que l’Iran avait informé le Conseil de sécurité hier qu’Israël avait lancé des frappes contre ses locaux diplomatiques à Damas, en Syrie. Cinq membres du personnel iranien ont trouvé la mort, y compris des conseillers militaires de haut rang, et les informations font à présent état de 13 victimes en tout dont 6 citoyens syriens, a-t-il détaillé.  Après avoir indiqué que cette attaque a été condamnée par le Secrétaire général, le haut fonctionnaire a appelé au respect de l’inviolabilité des installations et du personnel diplomatiques et consulaires.  La souveraineté et l’intégrité territoriale des États Membres doivent aussi être respectées. 

M. Khiari a ensuite indiqué que six armées étrangères opèrent sur le territoire syrien, faisant reculer de plus en plus un règlement pacifique du conflit.  Des attaques de plus en plus meurtrières visant des cibles liées à l’Iran en Syrie ont été attribuées à Israël, notamment depuis le début du conflit avec le Hamas à Gaza, le 7 octobre, a-t-il fait savoir, précisant qu’au moins 12 attaques de ce type ont eu lieu cette année.  Et si Israël a rarement revendiqué ces incidents, ses responsables ont reconnu que des opérations militaires ont lieu en Syrie et suggèrent que ces attaques se poursuivraient à l’avenir. 

Le Sous-Secrétaire général a appelé le Conseil à travailler avec les parties pour éviter une escalade des tensions, exhortant en outre les parties à faire preuve de la plus grande retenue.  Toute erreur de calcul pourrait mener à un élargissement du conflit dans une région déjà instable, avec des conséquences dévastatrices pour les civils. 

 

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse 
est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Commission du désarmement: la Haute-Représentante exhorte à renforcer l’architecture de désarmement et de non-prolifération

Session de 2024,
390e, 391e & 392e séances plénières – matin & après-midi
CD/3872

Commission du désarmement: la Haute-Représentante exhorte à renforcer l’architecture de désarmement et de non-prolifération

Alertant que le risque d’utilisation d’une arme nucléaire est plus élevé que jamais, la Haute-Représentante des Nations Unies pour les affaires de désarmement a exhorté, ce matin, à renforcer et à préserver l’architecture de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération « pour sauvegarder l’humanité tout entière ».

Dans une déclaration prononcée à l’occasion de l’ouverture de la session de 2024 de la Commission du désarmement, Mme Izumi Nakamitsu a constaté que celle-ci reprend une fois de plus ses travaux dans un environnement géopolitique difficile, marqué par une concurrence accrue en matière d’armes stratégiques et une déliquescence de la confiance entre les États dotés d’armes nucléaires, s’inquiétant en outre de la précarité grandissante de l’architecture conçue pour empêcher l’utilisation des armes nucléaires.

Préoccupée par les risques d’erreurs et d’erreurs de calcul, elle a recommandé à la Commission de se concentrer sur l’élaboration de mesures visant à empêcher tout recours à l’arme nucléaire, appelant en outre à parvenir à une compréhension commune des implications des technologies émergentes et de l’intersection entre les armes nucléaires, le cyberespace et l’espace extra-atmosphérique. 

De même, la Haute-Représentante a jugé urgent d’examiner les synergies complexes des technologies émergentes, telles que l’interaction de l’intelligence artificielle (IA) avec la biotechnologie, conseillant en outre à la Commission d’examiner les lacunes des discussions multilatérales en cours, s’agissant notamment de l’intelligence artificielle dans le domaine militaire et des véhicules aériens armés sans équipage.

« Il faut utiliser cette plateforme et faire vivre le multilatéralisme, la diplomatie et le dialogue », a plaidé à son tour le Président nouvellement élu de la Commission.  Reconnaissant que ses membres « pataugent dans l’impasse depuis six ans », M. Muhammad Usman Iqbal Jadoon, du Pakistan, a appelé à privilégier les solutions inclusives. 

Au cours de la discussion générale qui a suivi, le Qatar, qui s’exprimait au nom du Conseil de la coopération du Golfe (CCG), et l’Arabie saoudite, qui parlait au nom du Groupe des États arabes, ont insisté sur la nécessité d’établir une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, dénonçant la menace proférée par un ministre du Gouvernement israélien « de bombarder avec une arme atomique la bande de Gaza ».  À cet égard, le Mouvement des pays non alignés a souligné l’importance de la décision 73/546 de l’Assemblée générale sur la convocation d’une conférence sur la création d’une telle zone. 

De même, l’Arabie saoudite a appelé à mettre fin à la coopération dans le domaine nucléaire avec tout État qui n’est pas partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et qui ne soumet pas ses installations et activités nucléaires au régime de garanties complètes de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). 

Le veto de la Fédération de Russie au renouvellement du mandat du Groupe d’experts assistant le Comité des sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC), le 28 mars dernier au Conseil de sécurité, a suscité l’indignation des États baltes (Estonie, Lituanie et Lettonie), l’Union européenne (UE) dénonçant pour sa part « un vote visant à dissimuler des transferts d’armes illégaux entre la RPDC et la Russie ».  La suspension par la Russie de la mise en œuvre du traité New START, la révocation de sa ratification du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), et sa rhétorique nucléaire irresponsable en lien avec sa guerre d’agression en Ukraine sont d’autres exemples flagrants de cette tendance inquiétante, s’est inquiétée la délégation.  La Fédération de Russie, dans deux motions d’ordre, a demandé à ces délégations de ne pas sortir des points à l’ordre du jour de cette session de la Commission, appelant à s’abstenir de toute discussion politisée. 

Les États-Unis ont affirmé par la suite avoir pris contact avec la Russie en vue de la création d’un nouveau cadre de désarmement en attendant la mise en œuvre du traité New START.  Mais la Russie refuse le dialogue, ont-ils regretté, dénonçant par ailleurs le caractère opaque de l’arsenal nucléaire chinois ainsi que l’escalade nucléaire de la République populaire démocratique de Corée et de l’Iran. 

L’Angola, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Afrique, a fait valoir pour sa part sa profonde préoccupation quant au manque d’engagement des pays dotés de l’arme nucléaire dans la mise en œuvre de leurs obligations en matière de désarmement nucléaire et d’élimination de leurs arsenaux nucléaires, rappelant les responsabilités qui leur incombe en vertu du TNP.  Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), la République démocratique populaire lao a exhorté à une adhésion universelle audit traité, tandis que le Groupe africain a appelé les États dotés à rendre compte de la mise en œuvre de leurs obligations lors de la prochaine conférence d’examen du TNP.

Par ailleurs, plusieurs délégations ont demandé la conclusion rapide d’un instrument universel, inconditionnel, non discriminatoire et juridiquement contraignant pour assurer efficacement tous les États non dotés d’armes nucléaires contre l’utilisation ou la menace d’utilisation d’armes nucléaires, en toutes circonstances. Cet appel est urgent, ont-elles dit, tout en soulignant que l’élimination totale des armes nucléaires reste la seule garantie absolue contre leur utilisation ou menace de leur utilisation. 

De nombreuses préoccupations ont également été soulevées au sujet des conséquences sécuritaires négatives de la mise en place de systèmes de défense de missiles stratégiques, ou de tout dispositif similaire qui pourrait déclencher une ou plusieurs courses aux armements dans l’espace.  Ces actions pourraient conduire au développement de systèmes de missiles avancés et à une augmentation du nombre d’armes nucléaires, ont constaté certains délégués. 

Des groupes régionaux ont en outre accueilli favorablement l’adoption du sujet du groupe de travail II qui attire l’attention sur les aspects éthiques, moraux, techniques et juridiques de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le contexte de la sécurité internationale, y compris les systèmes d’armes connexes.  Cela souligne l’importance de l’intelligence artificielle dans les discussions sur la sécurité internationale et le désarmement, ont fait valoir les délégations concernées.  L’intelligence artificielle dans le domaine militaire est à la fois une opportunité et une menace qu’il faut encadrer de manière consensuelle.  Leur importation par les pays en développement ne doit pas faire l’objet de limitations, a plaidé l’Arabie saoudite. 

En début de séance, outre son Président, la Commission a élu par acclamation M. Mahmud Mohammed Lawal du Nigéria, M. Amr Essam de l’Égypte et Mme Viviana Sanabria du Paraguay à la vice-présidence de son bureau. 

La session de 2024 de la Commission du désarmement se déroulera du 1er au 19 avril 2024. 

DÉCLARATION D’OUVERTURE DE LA SESSION DE FOND DE 2024

Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante des Nations Unies pour les affaires de désarmement, a constaté que la Commission du désarmement reprend une fois de plus ses travaux dans un environnement géopolitique difficile, marqué par des tensions mondiales et une concurrence accrue en matière d’armes stratégiques, ainsi que par une déliquescence de la confiance entre les États dotés d’armes nucléaires.  Elle a alerté que le risque d’utilisation d’une arme nucléaire est plus élevé que jamais depuis le plus fort de la guerre froide, alors que l’architecture conçue pour empêcher son utilisation est de plus en plus précaire.

Il est essentiel de renforcer et de préserver l’architecture de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération pour sauvegarder l’humanité tout entière, a-t-elle souligné, exhortant les États à renouer avec le dialogue.  Elle a également jugé essentiel qu’en tant que détenteurs d’environ 90% du stock nucléaire mondial, les États-Unis et la Fédération de Russie reviennent à la pleine mise en œuvre du traité New START et entament un dialogue sur sa suite.  Les États dotés d’armes nucléaires doivent également convenir qu’aucun ne sera le premier à ouvrir la boîte de Pandore en étant le premier à utiliser ces armes.  Mme Nakamitsu a aussi appelé au renforcement du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et à progresser dans la mise en œuvre des engagements existants en matière de désarmement.  Les États dotés d’armes nucléaires ont la responsabilité de montrer l’exemple, a-t-elle ajouté.

Préoccupée par les risques d’erreurs et d’erreurs de calcul, elle a recommandé à la Commission de se concentrer sur l’élaboration de mesures visant à empêcher tout recours à l’arme nucléaire, appelant en outre à parvenir à une compréhension commune des implications des technologies émergentes et de l’intersection entre les armes nucléaires, le cyberespace et l’espace extra-atmosphérique.  La Commission devrait également être un forum propice à un dialogue constructif entre les critiques et les partisans du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et réfléchir à la manière d’accélérer les efforts en vue de l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires.

De même, la Haute-Représentante a jugé urgent d’examiner les synergies complexes des technologies émergentes, telles que l’interaction de l’intelligence artificielle (IA) avec la biotechnologie, relevant que leurs convergences peuvent générer des opportunités et des défis pour la paix et la sécurité internationales.  Les progrès technologiques dépassent souvent la gouvernance et la réglementation internationales, ce qui pose des défis potentiels à la paix et à la sécurité internationales, y compris de graves conséquences pour la garantie du respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, a-t-elle indiqué.  La Commission du désarmement peut jouer un rôle important à cet égard en examinant les éventuelles lacunes des discussions multilatérales en cours, s’agissant notamment de l’intelligence artificielle dans le domaine militaire et des véhicules aériens armés sans équipage.

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse 
est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission entame sa reprise de session sur les crimes contre l’humanité en vue de l’élaboration d’une convention internationale

Soixante-dix-huitième session,
38e & 39e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3708

La Sixième Commission entame sa reprise de session sur les crimes contre l’humanité en vue de l’élaboration d’une convention internationale

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a amorcé aujourd’hui sa seconde reprise de session consacrée à l’examen du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, adopté en 2019 par la Commission du droit international (CDI), ainsi qu’à la possibilité d’élaborer une convention universelle sur cette question.  Elle se réunira toute la semaine et de nouveau le 11 avril prochain.

Le Président de la Commission, M. Suriya Chindawongse, de la Thaïlande, a indiqué que celle-ci aborderait ses délibérations sur la base de cinq groupes thématiques (clusters) regroupant l’ensemble des projets d’articles, à savoir les groupes 1 et 2, consacrés à la définition et aux obligations générales, le groupe 3 concernant les mesures nationales, le groupe 4 portant sur les mesures internationales, ainsi que le groupe 5, sur les garanties.

La Commission a tenu son premier cycle de délibérations sur ce point à son ordre du jour en avril 2023, lors de sa première reprise de session.

L’Assemblée générale avait décidé en décembre 2022 que la Sixième Commission reprendrait sa session à deux reprises afin d’échanger des opinions de fond, « notamment de façon interactive », sur tous les aspects du projet d’articles de la CDI.  L’Assemblée a également demandé à la Commission d’examiner plus avant la recommandation formulée par la CDI concernant l’élaboration, par elle ou par une conférence internationale de plénipotentiaires, d’une convention fondée sur ledit projet.

 S’agissant du premier groupe thématique, qui comprend le préambule et le projet d’article premier, l’Union européenne a constaté la persistance d’une lacune dans le cadre conventionnel international concernant les crimes contre l’humanité, lacune qu’un tel instrument permettrait de combler.  « Bien que les crimes de guerre et le crime de génocide soient inscrits dans des conventions universellement acceptées, les crimes contre l’humanité demeurent les seuls crimes internationaux majeurs qui ne disposent pas de leur propre traité », a-t-elle expliqué.

Néanmoins, a poursuivi la délégation européenne, rejointe par plusieurs délégations, dont celles de l’Afrique du Sud, l’Australie, le Mexique et les Pays-Bas, comme le rappelle le quatrième alinéa du préambule, l’interdiction des crimes contre l’humanité constitue déjà une norme impérative du droit international (jus cogens) applicable à tous les États, et à laquelle aucune dérogation n’est permise.  Une réalité reconnue non seulement par la CDI, mais aussi par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et plusieurs cours régionales des droits humains, a observé l’Autriche, contrairement à l’Inde, qui a jugé cette référence « insuffisante », et à la France, qui l’a considérée « prématurée ».

Au nom du Groupe arabe, l’Arabie saoudite a mis en relief ce qu’elle considère comme une application « sélective » du droit international et des « normes morales » internationales concernant les « crimes » perpétrés par l’occupation israélienne à l’encontre du peuple palestinien, en dénonçant, comme le Liban et la Syrie, les politiques de deux poids, deux mesures qui entravent l’universalité des règles du droit international.  Après l’attaque du 7 octobre dernier, « véritable crime contre l’humanité », Israël a appelé de son côté à poursuivre les discussions sur les projets d’articles.

Si les crimes contre l’humanité sont d’ores et déjà interdits au titre du droit international, l’absence de traité sur cette question porte préjudice à la prévention et la répression de ces crimes « abjects », a fait valoir la Suède, au nom des pays nordiques.  Cette « double portée » du projet d’article premier, qui vise à prévenir et à punir de tels crimes, a rencontré l’aval de la Lettonie, qui s’exprimait au nom des États baltes.  Un avis également partagé par l’Union européenne, qui a toutefois plaidé en faveur de l’inclusion d’une disposition précisant le champ d’application de la future convention.  En tout état de cause, a noté l’Autriche, toute question qui ne serait pas couverte par la convention resterait, dans une large mesure, régie par le droit international coutumier.

Tout en se félicitant de la décision de la Commission d’utiliser la définition du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) en tant que base matérielle de la définition des crimes contre l’humanité, la délégation suédoise a précisé, comme la Jordanie, qu’aucun État ne serait contraint de devenir un État partie à ce statut pour adhérer à la convention.  État hôte de la CPI, les Pays-Bas se sont félicités de la référence, au septième alinéa du préambule, à l’article 7 du Statut de Rome, lequel a servi de modèle pour la définition des crimes contre l’humanité.  Qui plus est, a relevé la République de Corée, les termes employés dans le préambule se retrouvent également dans les traités multilatéraux portant sur les crimes les plus graves, tels que la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.

Bien que la future convention ne soit liée ni à la CPI ni au Statut de Rome, la Suisse a jugé essentiel qu’elle s’intègre correctement au droit international existant.  Dans la même veine, le Canada a souligné l’importance d’inclure une référence au droit international coutumier dans le projet d’alinéa 7 du préambule, car il constitue la principale source de droit concernant les crimes contre l’humanité, tout en conservant la référence existante au Statut.

Évoquant les préoccupations légitimes soulevées par certaines délégations lors de la partie principale de la session de la Sixième Commission, qui s’est tenue à l’automne 2023, le Groupe des États d’Afrique a réitéré, par l’entremise de l’Ouganda, ses préoccupations concernant la décision de la CDI de « réviser » certaines dispositions découlant d’autres instruments juridiquement contraignants, ainsi que la nécessité de tenir compte des conséquences des « drames antérieurs », tels que l’esclavage, sur les personnes d’ascendance africaine.  Face à de tels crimes, la solution ne devrait pas être une nouvelle fragmentation du droit international, a fait valoir la République islamique d’Iran, avant de rappeler, comme la Chine, l’absence de consensus sur l’identification du jus cogens.

Pour sa part, l’Inde a rappelé que 43 États Membres de l’Organisation ne sont parties ni au Statut de Rome ni à la Convention sur le génocide.  Par conséquent, toute nouvelle convention qui en découlerait ne saurait faire l’objet d’une adhésion universelle, a-t-elle argué, en mettant en garde contre l’imposition « de théories ou de définitions juridiques » dérivées de tels accords.  De plus, les acquittements prononcés récemment ont jeté selon elle une « ombre sur la crédibilité de la CPI » et semblent corroborer l’idée selon laquelle des situations lui sont soumises « pour des raisons politiques ».  De même, le Cameroun, l’Éthiopie et la Fédération de Russie ont rejeté toute référence au Statut de Rome.

Selon le Brésil, l’inclusion, dans le préambule, de dispositions concernant les principes de la Charte des Nations Unies relatifs à l’interdiction du recours à la force et à la non-intervention dans les affaires intérieures des États permettrait de répondre aux préoccupations exprimées par certaines délégations, tout en renforçant l’adhésion universelle à une éventuelle convention. Une idée à laquelle a souscrit le Mexique, qui a aussi proposé d’inclure une référence au principe de complémentarité, lequel s’inscrit pleinement dans l’approche adoptée par la communauté internationale en matière de lutte contre l’impunité par le biais de la justice pénale.  Plusieurs délégations, dont l’Algérie, la Nouvelle-Zélande, les Philippines et la Roumanie, ont rappelé à ce sujet qu’il incombe au premier chef à chaque État d’exercer sa juridiction pénale à l’égard de tels crimes.

En fin de journée, la Sixième Commission a entrepris son examen du groupe thématique 2 concernant les projets d’articles 2, 3 et 4.  L’Union européenne a reconnu d’emblée que le projet d’article 2, qui s’inspire de l’article 7 du Statut de Rome de la CPI, a été au cœur des discussions lors de la reprise de session d’avril 2023, certaines délégations estimant que la définition qui y est énoncée n’avait pas été universellement acceptée et ne reflétait pas le droit international coutumier.  Or, a-t-elle ajouté, le fait est que cette définition, adoptée en 1998 dans le cadre de négociations multilatérales auxquelles ont participé plus de 160 États, jouit d’un large soutien, repose sur quelque 75 années de pratique, et reflète bel et bien le droit international coutumier.

Comme l’a noté la CDI, la définition des crimes contre l’humanité figurant à l’article 7 du Statut de Rome est utilisée par de nombreux États dans leur législation nationale, a relevé la Finlande, au nom des pays nordiques, y compris des États qui ne sont pas parties au Statut de Rome.  Tout en estimant que la définition proposée dans le projet d’article reflète le droit international coutumier, elle a noté que celui-ci n’est pas une condition préalable aux futures négociations sur cette définition.

Enfin, au paragraphe 2 de l’article 2, la délégation européenne, comme celle des pays nordiques, s’est dite d’avis qu’une « attaque lancée contre une population civile » doit être « généralisée » ou « systématique », sans considération de « conditions cumulatives », une interprétation conforme selon elle à la pratique des tribunaux internationaux.  La Fédération de Russie s’est cependant interrogée sur les conséquences de la reconnaissance de la nature impérative de l’interdiction des crimes contre l’humanité pour des actes qui ne figurent pas à cet article, mais qui sont définis dans des traités bilatéraux ou encore dans la législation nationale des États.

La Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 2 avril, à partir de 10 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Pour la seconde fois, le Conseil de sécurité n’adopte pas son ordre du jour prévoyant la tenue d’une réunion pour les 25 ans du bombardement de la Yougoslavie par l'OTAN

9592e séance, après-midi
CS/15649

Pour la seconde fois, le Conseil de sécurité n’adopte pas son ordre du jour prévoyant la tenue d’une réunion pour les 25 ans du bombardement de la Yougoslavie par l'OTAN

À l’issue d’un nouveau vote de procédure demandé par la France, le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure, cet après-midi, pour la seconde fois de la semaine, d’adopter son ordre du jour provisoire qui prévoyait la tenue d’une réunion afin de marquer le vingt-cinquième anniversaire de la campagne de frappes aériennes menée en 1999 par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) contre la République fédérale de Yougoslavie. 

Les membres du Conseil se sont opposés, dans une proportion de 6 voix pour (Algérie, Chine, Fédération de Russie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone) et 9 abstentions (États-Unis, Équateur, France, Japon, Malte, République de Corée, Royaume-Uni, Slovénie et Suisse), à la tenue de cette réunion demandée par la Fédération de Russie.  Lundi dernier, 12 membres s’étaient abstenus, contre 3 voix pour (Algérie, Chine et Fédération de Russie). Les décisions du Conseil de sécurité sur des questions de procédure sont prises par un vote affirmatif de neuf membres. 

Dans sa demande de mise aux voix, la France a fait valoir les mêmes arguments que lundi dernier, estimant que le Conseil n’a pas vocation à débattre de faits historiques, a fortiori ceux appartenant au siècle passé.  Le Conseil a vocation à débattre des crises du moment, a assené le délégué, jugeant légitime la tenue de toute réunion sur ces sujets.  « Le Conseil n’est pas là pour se substituer aux historiens et aux juridictions », a-t-il tranché, appuyé par les États-Unis qui ont vu dans cette réunion un « caprice » de la Russie. 

« La France essaye de bloquer une réunion que la Russie a demandée », a rétorqué le délégué russe.  Il a qualifié de mensonges les dires de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis, selon lesquels les membres du Conseil, ainsi que la Serbie, n’auraient pas été consultés sur la tenue de cette réunion.  Ces trois pays ne veulent pas parler d’un sujet qui les gêne au plus haut point, à savoir l’agression de l’OTAN contre un pays souverain, a tranché le délégué russe. 

Réfutant l’argumentation de la France, le délégué russe a estimé que l’agression de l’OTAN est à l’origine de la situation actuelle au Kosovo, où la communauté serbe est agressée.  Il a également évoqué le projet d’adhésion du Kosovo au Conseil de l’Europe, alors que le Kosovo fait, a-t-il dit, partie de la Serbie.  « Cela relève-t-il du passé? »  Ces trois membres sont prêts à tout pour ne pas discuter de cette question, a dénoncé le délégué, en rappelant les 2 000 civils tués lors des bombardements de l’OTAN en 1999. 

Après le vote, la Sierra Leone a expliqué avoir voté en faveur de l’ordre du jour provisoire, au nom du droit des membres du Conseil à demander la tenue d’une réunion, tel que consacré à l’article 2 du Règlement intérieur provisoire de l’organe. Même son de cloche du côté de la Chine qui a jugé important de réfléchir à des faits majeurs de l’histoire.  Compte tenu du programme chargé du Conseil, il est capital de préserver la coopération sur les questions de procédure, a dit le délégué chinois. 

Le vote d’aujourd’hui vient confirmer notre thèse que les pays occidentaux sont surreprésentés au Conseil de sécurité, a déclaré la Russie, en se félicitant que davantage de membres aient décidé d’appuyer la tenue de la réunion.  Elle a accusé la France, le Royaume-Uni et les États-Unis de sacrifier la réputation du Conseil afin de défendre leurs intérêts étriqués et de ne pas évoquer l’agression illégitime de l’OTAN contre un État souverain. 

« Vous pourrez bloquer les réunions du Conseil, mais cela n’effacera pas vos actions destructrices », a lancé le délégué russe, en évoquant les territoires pollués à l’uranium et la propagation de pathologies oncologiques qui toucheront les prochaines générations dans les Balkans.  « Vos actions dans les Balkans ont créé une poudrière qui risque d’exploser à tout moment. »  Après la Yougoslavie, vos ingérences en Iraq, en Syrie, en Libye et en Afghanistan ont laissé des traînées de morts, a-t-il ajouté.  « Si, pour le moment, vous avez réussi à éviter une discussion sur ce sujet au Conseil de sécurité, ne comptez pas sur le fait d’échapper à vos responsabilités pour vos actions. » 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: report des décisions sur le financement du système des coordonnateurs résidents et l’accès du personnel des services généraux à la catégorie des administrateurs

Soixante-dix-huitième session,
34e séance plénière - matin
AG/AB/4458

Cinquième Commission: report des décisions sur le financement du système des coordonnateurs résidents et l’accès du personnel des services généraux à la catégorie des administrateurs

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a achevé aujourd’hui la session qu’elle a entamée le 26 février sur une gestion des ressources humaines compliquée, cette année, par l’« état lamentable » de la trésorerie de l’ONU, comme s’alarmait Singapour, au nom de l’ASEAN, dès le début des travaux. 

Pressée par le temps, la Commission a reporté à sa prochaine reprise de session du mois de mai, sa décision sur deux propositions novatrices du Secrétaire général: la levée des obstacles au passage des fonctionnaires de la catégorie des services généraux à celle des administrateurs, et la création d’une ligne budgétaire de 145,2 millions de dollars pour le système redynamisé des coordonnateurs résidents, financé jusqu’ici presque totalement par les contributions volontaires des États Membres (A/C.5/78/L.36). 

Ce sont donc quatre projets de résolution de fond que la Cinquième Commission soumet à l’Assemblée générale pour adoption.  Nous avons réussi ce que nous devions faire et conclu notre session à temps, s’est félicité le Président d’une Commission connue pour sa propension à dépasser largement la date fixée pour la fin de ses travaux.  Les négociations, a tout de même avoué M. Osama Mahmoud Abdelkhalek Mahmoud, de l’Égypte, se sont achevées à minuit. 

« À chaque fois que ma femme me demandait ce que je faisais si tard à l’ONU, je lui répondais: femme, laisse-moi vivre ma vie, je lis une résolution sur le budget », s’est amusé M. Johannes Huisman qui, sous les rires et les applaudissements, quitte aujourd’hui-même la tête de la Division de la planification du programme et du budget.  Ce trait d’humour n’a pas empêché l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, de rappeler le nombre de fois où il a trouvé des collègues hagards, cherchant à sortir du Siège de l’ONU après 23 heures.  Ceci n’est tout simplement plus acceptable.  La Commission peut faire mieux. 

C’est la Syrie qui a lancé la salve des adoptions, avec son projet de décision (A/C.5/78/L.29visant à priver d’une ponction du budget ordinaire, la toute nouvelle Institution indépendante chargée de la question des personnes disparues sur son territoire et ses 28 postes prévus, dont celui d’un sous-secrétaire général qui travaillera avec son équipe à Genève.  La Syrie a dénoncé une entité politisée qui la cible, dans ce qui est une ingérence flagrante dans ses affaires intérieures.  La création de cette nouvelle institution ne fait l’objet d’aucun consensus puisque nous n’avons jamais demandé l’appui technique de l’ONU, sans oublier le fait que nous n’avons même pas été consultés. 

Cette institution vient s’ajouter à d’autres mécanismes également non consensuels que nous ne reconnaissons pas, parce que nous voyons en elle une manipulation de la Charte des Nations Unies pour servir des intérêts qui n’ont rien à voir avec ceux de notre peuple.  Il est temps, s’est agacée la Syrie, d’abandonner la politiques de deux poids, deux mesures et la politisation de la question des droits de l’homme. 

Au nom de l’Union européenne, la Belgique a demandé un vote car il est essentiel de financer l’Institution, conformément au mandat de la Cinquième Commission et tant pis si les coauteurs du projet de décision ont refusé de participer aux négociations.  À l’issue du vote, le texte de la Syrie a été rejeté par 70 voix contre, 13 voix pour et 43 abstentions. 

Dans son projet contraire (A/C.5/78/L.30), l’Albanie a insisté sur l’importance de la résolution de l’Assemblée générale portant création de l’Institution, un symbole de la justice que méritent les personnes disparues et leurs familles.  Il est de notre responsabilité de dire à ces familles ce qu’il est advenu de leurs proches et cela ne peut se faire que si l’Institution a les moyens financiers d’exécuter son mandat. 

La Belgique, qui a salué cette initiative, a affirmé que les membres de l’Union européenne n’ont ménagé aucun effort pour parvenir à un consensus, une valeur essentielle qui sous-tend tout le travail de la Cinquième Commission.  Il est donc regrettable que certains États viennent nous contraindre au vote.  Demandé par la Syrie, ledit vote s’est conclu par l’adoption du texte avec 71 voix pour, 12 voix contre et 46 abstentions. 

À sa suite, le projet de résolution sur les questions spéciales relatives au budget (A/C.5/78/L.32) a donc pu être adopté, sans vote.  L’Institution indépendante hérite d’une enveloppe de 2,4 millions de dollars pour 2024.  Il n’y a pas de plus grande dépense inutile que celle-ci, a tranché la Fédération de Russie. Nous allons payer notre contribution au budget ordinaire de l’ONU mais le financement de cette institution ne regarde que ceux qui l’ont créée, a prévenu la Syrie. 

Les coauteurs du projet de décision syrien, à savoir le Nicaragua, le Venezuela, Cuba, la République populaire démocratique de Corée (RPDC), l’Érythrée, la Chine, le Bélarus et une nouvelle fois, la Fédération de Russie, ont avancé les mêmes arguments, dénonçant « les attaques des pays occidentaux » pour atteindre leurs objectifs en Syrie et rejetant une ligne budgétaire qui pourrait aggraver la crise de liquidités que traverse l’ONU. 

Le même projet de résolution sur les questions spéciales relatives au budget prévoit aussi une enveloppe de 22,1 millions de dollars pour la transition et la liquidation de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (UNITAMS). 

La Cinquième Commission s’est ensuite penchée sur le projet de résolution relatif aux modifications du Statut et du Règlement du personnel (A/C.5/78/L.35) qui propose à l’Assemblée générale d’approuver la recommandation du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) lequel dit ne pas voir le lien entre le langage inclusif proposé, à savoir « parité des genres », et la résolution 72/147 de l’Assemblée générale. Il rappelle qu’ONU-Femmes a été créée pour promouvoir « l’égalité des sexes » et l’autonomisation des femmes et que le préambule de la Charte des Nations Unies consacre « l’égalité de droits des hommes et des femmes ». 

Pour le CCQAB, le langage inclusif proposé dépasse le cadre du Statut et du Règlement du personnel.  La position de ce dernier ayant été incluse dans le projet de texte, la Fédération de Russie a retiré le sien (A/C.5/78/L.31).  Le cadre de l’ONU ne saurait promouvoir des valeurs sociales qui prêtent à controverse, a confirmé l’Éthiopie, au nom du Groupe des États d’Afrique. 

Une enveloppe de 79 600 dollars a été approuvée en 2024 pour les réunions de la Commission préparatoire chargée de préparer l’entrée en vigueur de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, et de procéder aux préparatifs de la première réunion de la Conférence des Parties.  Les réunions du Comité spécial chargé d’élaborer une convention internationale générale sur la lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles reçoivent une somme de 815 500 dollars (A/C.5/78/L.33).  La Commission a enfin recommandé un projet de résolution sur le Corps commun d’inspection (A/C.5/78/L.34). 

Tout comme les États-Unis et la Chine, l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a regretté que la Commission n’ait pu se prononcer sur la chaîne d’approvisionnement.  Cela fait « trop longtemps », s’est-il agacé, que nous n’avons fait aucune recommandation sur les achats.  Au nom de l’Union européenne, la Belgique a jugé regrettable qu’aucune décision n’ait été prise sur l’application du principe de responsabilité au Secrétariat de l’ONU ni sur le financement du système redynamisé des coordonnateurs résidents, dont le rapport a été présenté trop tard.  Tous les documents pertinents, a-t-elle insisté, doivent être soumis dès le début de la session. 

Nous n’avons rien non plus, a embrayé le Japon, sur la gestion des ressources humaines, alors que le monde est confronté à de multiples crises qui se sont aggravées, ont ajouté les États-Unis.  Face à tant d’adversité, l’ONU est la seule organisation capable de relever les défis pour autant qu’on lui en donne les moyens, dont des ressources humaines bien gérées.  La Cinquième Commission doit se voir comme le conseil d’administration d’une grande entreprise qui, comme toutes les autres, doit adapter à la réalité la gestion de sa main-d’œuvre, au moins une fois par an.  L’on nous dit que nous avons déjà soumis un projet de résolution à l’Assemblée générale, l’année dernière, mais n’oublions pas, ont rappelé les États-Unis, que c’était le premier texte depuis 2016.  Les mois à venir, nous allons nous atteler à l’élaboration d’un « pacte pour l’avenir », dont l’application nécessitera de bonnes ressources humaines. 

Il faut bien l’avouer, ont-ils tranché, nos résultats ont été « catastrophiques »: aucune recommandation sur la compensation du personnel, le détachement du personnel militaire, avec un impact négatif sur les opérations de paix, ou encore la santé mentale.  Nos résultats, a poursuivi le Royaume-Uni, dressent le tableau d’une commission inefficace mais coûteuse, si l’on réalise que les salaires et les autres dépenses représentent 4 millions de dollars pour une seule session.  Nous ne sommes pas à la hauteur pour servir aux mieux les populations de notre monde. 

Cette session a été exceptionnelle à un seul égard, elle a duré cinq semaines au lieu de quatre et ce, tout à fait inutilement, ont taclé les États-Unis. Pendant les deux premières semaines, nous n’avons pu rien faire, a confirmé la Belgique, au nom de l’Union européenne.  Ce n’est pas le temps qui nous manque mais un engagement plus actif de la part de tous. Nous devons être plus efficaces dans l’utilisation du temps alloué. 

Cette commission est un paradoxe frappant: elle est connue pour sa piètre gestion du temps et ses négociations en pleine nuit mais elle est également exemplaire dans l’attachement qu’elle a au consensus.  À la prochaine reprise de session, nous achèverons nos travaux le 31 mai quoi qu’il arrive, a promis un Président pour le moins optimiste. 

Mais compte tenu de l’« état lamentable » de la trésorerie de l’ONU, comme s’alarmait Singapour, au premier jour des travaux, la Belgique n’a pas oublié de lancer un appel à tous les États Membres pour qu’ils s’acquittent de leurs contributions en temps et en heure.  Nous devons, a-t-elle dit, également réfléchir aux mesures qu’il faut pour que le Secrétariat de l’ONU puisse gérer au mieux ses problèmes de liquidités.  Si nous souhaitons que l’ONU fonctionne avec efficacité, nous devons nous acquitter en temps voulu de nos obligations financières, a tranché la Chine. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Non-prolifération: la Fédération de Russie met son veto au renouvellement du mandat du Groupe d’experts assistant le Comité des sanctions contre la RPDC

9591e séance – matin
CS/15648

Non-prolifération: la Fédération de Russie met son veto au renouvellement du mandat du Groupe d’experts assistant le Comité des sanctions contre la RPDC

En dépit d’une prolongation d’une semaine des négociations entre les membres du Conseil de sécurité, la Fédération de Russie a, ce matin, mis son veto à un projet de résolution qui prévoyait de proroger jusqu’au 30 avril 2025 le mandat du Groupe d’experts chargé d’assister le Comité des sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  La Chine s’est quant à elle abstenue, tandis que les 13 autres membres ont voté en faveur du texte.  Ce veto prive l’ensemble des États Membres d’une source d’informations cruciale, infligeant un nouveau revers à l’architecture de non-prolifération, selon la France, qui a résumé le point de vue d’une majorité de délégations. 

Soumis par les États-Unis, délégation porte-plume sur ce dossier, le projet de texte demandait au Groupe d’experts de présenter au Comité, le 23 août 2024 au plus tard, un « rapport de mi-mandat confidentiel » et de faire un exposé oral sur ce document à l’intention de tous les États Membres de l’ONU d’ici au 20 septembre 2024. Il lui demandait également de remettre au Comité, le 14 février 2025 au plus tard, un rapport final contenant ses conclusions et recommandations, en vue de sa présentation au Conseil, le 21 mars 2025 au plus tard. 

Le texte engageait d’autre part le Groupe d’experts à établir les cas de non-respect par la RPDC des mesures imposées dans ses diverses résolutions pertinentes, à recueillir des informations à ce sujet et à en tenir le Comité informé.  Il précisait en outre que le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1718 (2006) devrait adresser au Conseil au moins tous les 120 jours, contre 90 jours précédemment, un rapport sur ses travaux. 

Avant le vote, les États-Unis ont rappelé la pertinence du travail du Groupe d’experts alors que, la semaine dernière, la RPDC a tiré à nouveau des missiles balistiques, au mépris du régime de non-prolifération en faveur duquel les membres du Conseil se sont tous prononcés lors d’une récente séance convoquée par la présidence japonaise.  Affirmant avoir négocié de bonne foi, des semaines durant, la délégation américaine a rappelé que la mise aux voix du texte a été remise à plus tard pour poursuivre les efforts en cours.  En appui, la République de Corée a averti que le rejet de ce texte, qu’elle a qualifié de « meilleur compromis possible », conduirait à la dissolution pure et simple du Groupe d’experts. 

Ces arguments n’ont pas infléchi la position de la Fédération de Russie, pour qui le régime de sanctions contre la RPDC perd aujourd’hui de sa pertinence, compte tenu des mesures prises par la coalition occidentale dirigée par les États-Unis pour « asphyxier Pyongyang ».  À cela s’ajoute, selon elle, la militarisation active de la péninsule coréenne avec la participation directe de Washington et d’autres membres de l’OTAN à proximité de la RPDC, assortie d’une menace d’utilisation du potentiel nucléaire américain.  Cette évolution dangereuse porte atteinte aux intérêts fondamentaux de la Fédération de Russie dans le domaine de la sécurité nationale, a-t-elle fait valoir.

Constatant, dans ce contexte, que le Groupe d’experts se contente de « faire le jeu des Occidentaux » et se montre incapable d’analyser de façon objective l’état du régime de sanctions, la délégation russe a expliqué avoir demandé au Conseil de réexaminer chaque année les restrictions imposées à la RPDC afin de les adapter à l’évolution de la situation.  À son avis, cela aurait aussi le mérite d’inciter Pyongyang au dialogue. Hélas, a-t-elle regretté, les États-Unis et leurs alliés n’ont pas inclus ces idées dans le projet de résolution soumis au vote ce jour. 

Après la mise aux voix, les États-Unis ont accusé la Fédération de Russie de vouloir « museler » les enquêtes du Groupe d’experts sur les sanctions appliquées à la RPDC.  Après avoir rappelé que le renouvellement du mandat de cet organe subsidiaire du Conseil s’est fait de manière unanime ces 14 dernières années, la délégation américaine a relevé que, ces derniers mois, le Groupe d’experts a présenté des informations sur les violations par la Fédération de Russie des résolutions concernant la RPDC et sur le contournement des sanctions par le régime de Pyongyang, avec l’aide de Moscou.  Par son veto, la Fédération de Russie a réussi à « réduire au silence » le Groupe d’experts mais pas les membres qui se dressent contre les attaques portées au régime de non-prolifération, a-t-elle affirmé, ajoutant que les sanctions restent en vigueur et qu’il incombe aux États Membres de respecter strictement les obligations qui sont les leurs à cet égard.

Sur la même ligne, le Royaume-Uni a observé que « ce veto n’est pas animé de pensées pour la population nord-coréenne, mais motivé par des considérations relatives aux seuls intérêts de la Russie ».  Il a rappelé à cet égard les accords de vente d’armes entre la RPDC et la Russie, notamment le transfert de missiles balistiques que Moscou a ensuite utilisés dans le cadre de son agression militaire en Ukraine.  « Le Conseil est pris en otage par l’un de ses membres permanents », a renchéri la République de Corée, selon laquelle il n’y a pas de justification possible au démantèlement du Groupe d’experts.  « C’est comme si l’on détruisait des caméras de surveillance pour éviter d’être pris sur le fait », a-t-elle résumé, tandis que le Japon appelait, en conséquence, à engager des discussions sur la manière de lutter contre la prolifération des armes de destruction massive et des missiles balistiques dans le monde, « alors qu’un membre permanent a nié le rôle du Conseil de sécurité sur cette question ».

À l’instar de la France, Malte, la Slovénie et la Sierra Leone ont regretté que le veto russe prive le Conseil d’un outil d’information précieux pour lui permettre de s’acquitter de son mandat s’agissant de la mise en œuvre du régime de sanctions contre la RPDC. En l’absence des rapports du Groupe d’experts, le contournement des sanctions par la RPDC va continuer de s’accentuer « de manière incontrôlée », a averti la délégation maltaise.  La décision de la Fédération de Russie sape les efforts déployés par la communauté internationale et affaiblit la capacité de réponse du Conseil, ce qui ne peut qu’exacerber les tensions dans la région, a abondé l’Équateur. 

Sur une note moins alarmiste, le Guyana a émis l’espoir que les difficultés ayant empêché l’adoption de la résolution sous sa forme actuelle seront bientôt résolues et que le mandat du Groupe d’experts pourra être renouvelé le plus tôt possible.  L’Algérie a également souhaité que les dissensions sur cette question soient surmontées grâce à un dialogue constructif afin de répondre aux préoccupations légitimes de toutes les parties. 

De son côté, la Chine a estimé que les sanctions ne devraient jamais être une fin en soi, mais un moyen de parvenir à un règlement politique.  Il est dès lors décourageant, à ses yeux, que les mesures draconiennes imposées à la RPDC n’aient pas permis d’atteindre un tel objectif, se traduisant en outre par de lourdes conséquences humanitaires.  Elle a rappelé l’existence d’un projet sino-russe visant à améliorer le régime de sanctions, avant de regretter que la proposition russe d’assortir les sanctions d’un calendrier comportant des révisions régulières n’ait pas été prise en compte. 

La Fédération de Russie s’est, pour sa part, déclarée confortée dans sa « décision juste » par les explications de vote des membres occidentaux du Conseil. « Les pays membres de l’OTAN ont fait tomber les masques », a-t-elle lancé.  En effet, il ressort de leurs déclarations que « cette prorogation est liée à une démarche partiale à l’endroit de la Russie », a constaté la délégation.  Elle a ajouté qu’elle ne se laissera pas leurrer par les États-Unis, qui ont mis leur veto à plusieurs reprises ces cinq derniers mois pour « permettre à Israël de tuer des Palestiniens innocents » et ont « osé dire dans cette salle que les résolutions du Conseil de sécurité ne sont pas contraignantes ». 

En début de réunion, la Fédération de Russie a demandé à la présidence japonaise du Conseil de mettre aux voix sa décision de tenir cette séance, comme elle le fait désormais systématiquement depuis celle, avortée, du 25 mars dernier sur le « vingt-cinquième anniversaire de l’agression de l’OTAN contre la Yougoslavie ».  Les 15 membres se sont prononcés en faveur de l’adoption de l’ordre du jour provisoire.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Représentante spéciale pour la RDC s’alarme de « la catastrophe humanitaire » dans l’est du pays, causée par les violences armées

9590e séance – matin     
CS/15646

Conseil de sécurité: la Représentante spéciale pour la RDC s’alarme de « la catastrophe humanitaire » dans l’est du pays, causée par les violences armées

Devant « la catastrophe humanitaire » suscitée par les agissements du M23 au Nord-Kivu, mais aussi par les violences armées qui se poursuivent en Ituri et au Sud-Kivu, la Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo (RDC) a, ce matin, lancé un cri d’alarme au Conseil de sécurité.  Mme Bintou Keita, qui est également la Cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MONUSCO), a appelé les bailleurs de fonds à fournir les ressources nécessaires à la fourniture d’une aide humanitaire adéquate aux nécessiteux.  Simultanément, plusieurs voix se sont élevées pour appeler les acteurs extérieurs à mettre fin au soutien qu’ils prêtent aux groupes armés opérant en RDC.

Selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a signalé la haute fonctionnaire, plus de 7,1 millions de personnes sont déplacées, soit 800 000 au cours des trois derniers mois.  Et l’insécurité alimentaire touche 23,4 millions de personnes, soit un Congolais sur quatre, faisant de leur pays le plus affecté au monde par ce problème.  Par ailleurs, pour le seul mois de janvier 2024, 10 400 cas de violences sexistes ont été signalés à travers tout le pays, une hausse beaucoup plus importante que les années précédentes.  Une catastrophe humanitaire qui exige de la communauté internationale des réponses adéquates, a plaidé la Représentante spéciale. 

La situation sécuritaire dans l’est de la RDC, a poursuivi Mme Keita, s’est encore détériorée depuis la fin des élections, le M23 réalisant des gains territoriaux sans précédent, avec pour conséquence d’aggraver la crise humanitaire et d’entraîner des déplacements de populations sans précédent. Pendant ce temps, la médiation angolaise s’est efforcée d’atténuer les tensions entre la RDC et le Rwanda, tandis que la mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe en RDC (SAMIDRC) a entamé son déploiement au Nord-Kivu.  Le représentant congolais a rappelé qu’à la suite de la création de cette mission en mai 2023, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a approuvé son déploiement dans l’est de la RDC le 4 mars dernier.  À ses yeux, cette démarche s’inscrit dans la droite ligne du principe de subsidiarité et de celui prônant « des solutions africaines aux problèmes africains ».

Pour sa part, la Fédération de Russie s’est dite prête à discuter des paramètres d’une éventuelle assistance aux forces régionales par la Mission dès qu’elle aura reçu le rapport pertinent du Secrétariat de l’ONU.  En outre, alors qu’approche la date butoir du 30 avril 2024 pour l’achèvement de la première phase du retrait de la MONUSCO, le groupe des A3+1 (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone), a souligné l’importance d’établir une forte présence de l’État dans toutes les zones d’où la Mission s’est retirée.  À cet égard, ils ont souligné la nécessité de disposer de forces de défense et de sécurité nationales bien entraînées et équipées préalablement à leur déploiement.

La Cheffe de la MONUSCO, qui a fermement condamné les attaques visant son personnel, a précisé que l’engagement militaire doit aller de pair avec un investissement continu des autorités congolaises dans les processus de paix aux niveaux régional, national et local, et être complété par une réforme du secteur de la sécurité et la mise en œuvre du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation que le système des Nations Unies envisage de soutenir.  Elle a également relevé que le Président Tshisekedi Tshilombo, fraîchement réélu pour un second mandat, a annoncé qu’une telle réforme de l’appareil de sécurité et de défense constituerait l’une de ses principales priorités.

Le Rwanda, qui a été vivement critiqué par plusieurs délégations, a de son côté dénoncé les déclarations des dirigeants de la RDC et du Burundi, qui ont menacé le Rwanda d’un « changement de régime », fustigeant aussi l’appui des Forces armées congolaises (FAC) aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  Ce soutien doit cesser, a-t-il tranché, affirmant que ces éléments doivent être désarmés, démobilisés et renvoyés au Rwanda.

Mme Jacquie-Anna, du STN 2250, a demandé combien de temps la situation actuelle devra durer avant que la communauté internationale dise « non, trop c’est trop ».  Elle a évoqué la situation de jeunes Congolais qui n’ont connu que la guerre et sont exposés à tous les abus possibles dans les camps de réfugiés ou de déplacés, accusant l’armée « d’occupation » rwandaise de recourir aux viols et aux violences sexuelles comme « armes de guerre ». C’est pourquoi le Conseil de sécurité doit franchir le « Rubicon de l’impunité » et imposer à Kigali des sanctions à la hauteur de son « récidivisme criminel », a acquiescé le délégué congolais. 

Si le Rwanda persiste dans son appui à ce groupe armé, il faudra « réévaluer » son rôle en tant que participant constructif aux opérations de paix, ont menacé les États-Unis, avant d’inviter les pays fournisseurs de contingents à ne pas créer d’instabilité au sein du pays hôte.  La France a aussi condamné avec la plus grande fermeté la reprise des offensives du M23 ainsi que le soutien prêté par le Rwanda à ce groupe. Pour cette délégation, le déploiement et l’utilisation par ce pays sur le territoire congolais de systèmes antiaériens marque le franchissement d’un nouveau seuil, raison pour laquelle le Burundi a exhorté le Rwanda à opter pour un choix qui le placera du « bon côté de l’histoire ». 

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO S/2024/251

Déclarations

Mme BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo et Cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MONUSCO), qui s’est exprimée par visioconférence depuis Kinshasa, a indiqué que depuis la réunion d’information sur le renouvellement du mandat du 11 décembre 2023, la dynamique politique nationale s’est concentrée principalement autour du processus électoral.  Ainsi, malgré d’importantes difficultés logistiques, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a organisé les élections le 20 décembre comme prévu, mais a dû prolonger la période de vote sur plusieurs jours.  La Cour constitutionnelle a maintenant rendu son arrêt final sur la validation des résultats, ouvrant la voie à la confirmation de la majorité au Parlement, au début de sa session de printemps et à la formation du nouveau gouvernement.  Mme Keita a salué l’adoption par le Ministère du genre d’une feuille de route pour lutter contre la violence électorale à l’égard des femmes. 

Mme Keita a déclaré que la situation sécuritaire dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) s’est encore détériorée depuis la fin des élections, le M23 marquant des avancées significatives et étendant son territoire à des niveaux sans précédent.  Cette situation a abouti à une situation humanitaire encore plus désastreuse, avec des déplacements internes atteignant un nombre sans précédent. Pendant ce temps, les tensions régionales entre la RDC et le Rwanda ont fait l’objet de la médiation angolaise, tandis que la mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe en RDC (SAMIDRC) a commencé son déploiement au Nord-Kivu. 

Sur le plan politique, le Président Tshisekedi Tshilombo a été réélu pour un second mandat et a annoncé que la réforme de l’appareil de sécurité et de défense constituerait l’une de ses principales priorités.  Il n’existe pas de solution militaire durable au conflit, a insisté la Représentante spéciale, soulignant que la solution doit être ancrée dans un processus politique durable qui prend en compte les causes profondes de la violence. Dans ce contexte, elle a dit soutenir le processus de Luanda et salué les efforts actuellement entrepris par le Président angolais João Lourenço.  Alors que la crise du M23 suscite une grande attention, nous devons également souligner les atrocités commises par les Forces démocratiques alliées (ADF) et leurs conséquences désastreuses sur les populations civiles, notamment à la frontière entre le Nord-Kivu et l’Ituri, a-t-elle poursuivi.  Presque 200 personnes y ont été tuées depuis le début de l’année, a-t-elle déploré.  Dans le même temps, en Ituri, l’insécurité reste dramatique, alimentée, notamment par les exactions des milices CODECO, Zaïre, la Force de résistance patriotique d’Ituri (FRPI), le Front patriotique et intégrationniste du Congo (FPIC), de même que les ADF.  Au Sud-Kivu, malgré des progrès importants, on a assisté ces derniers mois à une résurgence des tensions, alimentées par des groupes armés et les rivalités intercommunautaires, a fait encore observé la haute fonctionnaire.

Pour protéger les civils, la MONUSCO et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) ont continué à mener des opérations conjointes en Ituri et au Nord-Kivu, a poursuivi la Cheffe de la MONUSCO, qui a fermement condamné les attaques visant les personnels de la Mission.  Elle a précisé que l’engagement militaire doit aller de pair avec un investissement continu des autorités congolaises dans les processus de paix régionaux, nationaux et locaux, et cela doit être complété par une réforme en profondeur du secteur de la sécurité et la mise en œuvre du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation (P-DDRCS) que le système des Nations Unies envisage de soutenir à travers un programme commun. 

Sur le plan humanitaire, Mme Keita a lancé un cri d’alarme face à « la catastrophe qui se déroule sous nos yeux », notamment en raison de l’escalade de la crise du M23 au Nord-Kivu mais aussi des violences armées prolongées en Ituri et au Sud-Kivu.  Selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), plus de 7,1 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur du pays, soit 800 000 de plus en trois mois.  De même, 23,4 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire, ce qui signifie qu’un Congolais sur quatre est confronté à la faim et à la malnutrition, faisant de la RDC le pays le plus touché par l’insécurité alimentaire au monde.  Par ailleurs, pour le seul mois de janvier 2024, 10 400 cas de violences basées sur le genre ont été signalés à travers tout le pays, une augmentation beaucoup plus élevée que pendant les années précédentes. Cette catastrophe humanitaire exige de la communauté internationale des réponses adéquates, a-t-elle plaidé. Pourtant, en février, le Plan de réponse humanitaire du pays pour 2023 restait considérablement sous-financé, avec seulement 40% des 2,25 milliards de dollars requis jusqu’à présent.  Cela représente une forte baisse par rapport aux 53,2% de 2022 et n’augure rien de bon pour le Plan de réponse humanitaire de 2024, lancé avec l’objectif de lever 2,6 milliards de dollars et dont le financement n’a atteint que 14,2% aujourd’hui.  Elle a appelé les donateurs à fournir les ressources nécessaires pour garantir qu’une aide humanitaire adéquate parvienne à ceux qui en ont dramatiquement besoin. 

La Cheffe de la MONUSCO a indiqué que la Mission avance dans la mise en œuvre de la phase 1 du plan de désengagement, et les enseignements tirés de la phase 1 seront également appliqués aux phases suivantes.  Le désengagement et la transition sont traités de manière concomitante, a-t-elle précisé, ajoutant que cela permettra à l’équipe de pays des Nations Unies d’aider le Gouvernement congolais à maintenir et à consolider les acquis de la MONUSCO.  La Mission a continué de faire face à des campagnes de désinformation sophistiquées au cours de la période considérée, a déploré la Représentante spéciale.  Cela a sapé nos efforts et mis la vie de nos soldats de la paix en danger, a-t-elle encore dit.  Pour contrer ces tactiques, nous avons renforcé notre collaboration avec des dizaines de journalistes et de membres de la société civile à Goma et ailleurs pour aider à contrer la désinformation et clarifier le sens de notre mandat, a indiqué Mme Keita. 

Mme JACQUIE-ANNA, STN 2250, a indiqué que ce mécanisme gouvernemental créé en 2020 a œuvré à l’élaboration d’un plan d’action national sur la participation des jeunes aux processus de décision, qui a été lancé officiellement en août 2022.  La RDC est ainsi devenue le troisième pays au monde après la Finlande et le Nigéria à se doter d’un plan d’action national sur ce thème, a-t-elle précisé, ajoutant que ce dispositif doit encore être approuvé par le Parlement congolais pour entrer dans l’arsenal juridique du pays.  Rappelant que, dans son pays, les jeunes sont le groupe de population le plus vulnérable aux conséquences des conflits armés « en tant que victimes de choix », l’intervenante a expliqué que le Secrétariat technique national a pour mission de renforcer et valoriser la participation de la jeunesse aux décisions et aux négociations, tout en faisant rapport de ses activités en lien avec le programme sur les jeunes et la paix et la sécurité. 

« Dans un pays à forte proportion de jeunes, ignorer et écarter ceux-ci de la sphère décisionnelle constituerait une attitude suicidaire pour la nation », a-t-elle souligné, avant de rappeler que, depuis deux décennies, l’agression de la RDC par le Rwanda, via le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) ou le M23, « détruit tout sur son passage ». Il en ressort une précarité généralisée et une perte de repères et d’espoir pour la jeunesse congolaise qui devient un vivier d’enfants soldats et une « proie facile » de l’extrémisme violent, a dénoncé Mme Jacquie-Anna.  Beaucoup de ces jeunes, qui n’ont connu que la guerre, sont en outre exposés à tous les abus dans des camps de réfugiés ou de déplacés, a-t-elle alerté, accusant l’armée d’occupation rwandaise de recourir aux viols et aux violences sexuelles comme « armes de guerre ».  Selon elle, plusieurs centaines de milliers de femmes dans l’est de la RDC vivent avec le « dilemme moral de garder un enfant issu d’un viol ou de le tuer ».  Toutes savent ce que signifie d’être victime de violences sexuelles, a-t-elle insisté, avant de demander combien de temps cette situation devra durer avant que la communauté internationale dise « non, trop c’est trop ».  Pour Mme Jacquie-Anna, la jeunesse congolaise ne veut rien d’autre que la paix.  La « proportion résiliente » de cette jeunesse veut, elle, se retrouver sur la table des décisions et des négociations pour travailler « main dans la main » avec les autorités et agir dans les cinq axes de la résolution 2250 (2015), mais aussi dans la prise en compte de la participation des femmes sans discrimination, a-t-elle souligné, invitant les bailleurs de fonds à investir dans la jeunesse congolaise pour accompagner ce mouvement.

Le représentant de la France a condamné avec la plus grande fermeté la reprise des offensives du M23 ainsi que le soutien qu’apporte le Rwanda à ce groupe et la présence de ses forces sur le territoire congolais.  Kigali doit y mettre un terme sans tarder, a-t-il exigé, notant que le déploiement et l’utilisation en territoire congolais de systèmes antiaériens marquent le franchissement d’un nouveau seuil.  Il s’est inquiété des graves conséquences de cette escalade sur la situation humanitaire et les violations des droits de l’homme, notamment au Nord-Kivu, et a condamné les discours de haine ciblant certaines communautés, notamment les Tutsis.  Pour mettre un terme à l’escalade, le dialogue doit reprendre de toute urgence, a-t-il souligné, encourageant les parties à continuer de renouer le fil du dialogue, sur la base des engagements de la feuille de route de Luanda et du processus de Nairobi.  Il a également salué la proposition congolaise d’un plan pour démobiliser et désarmer les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), groupe issu des milices ayant commis le génocide contre les Tutsis, y voyant une réponse concrète à la principale menace identifiée par le Rwanda lors de la réunion du Conseil le mois dernier.  Sa concrétisation serait de nature à rétablir la confiance entre les deux pays, a-t-il estimé. 

Après avoir vigoureusement dénoncé les attaques contre la MONUSCO, le représentant a argué que les récents combats ont démontré que la coordination de la MONUSCO avec la force de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) en cours de déploiement est essentielle et doit être renforcée.  Les termes d’un soutien des Nations Unies ont été définis clairement dans la résolution 2717 (2023) de décembre dernier, a rappelé le représentant, et c’est sur cette base que le Conseil de sécurité devra se prononcer.

La représentante de Malte a déploré l’inquiétante escalade dans l’est de la RDC.  La région entière se rapproche davantage encore du précipice, s’est alarmée la déléguée. Elle a exhorté les groupes armés à déposer les armes, tout en demandant la « cessation immédiate de tout soutien étatique » afin d’ouvrir la voie à un désarmement.  Les armes sophistiquées dont disposent le M23 doivent attirer l’attention du Conseil, a-t-elle ajouté.  Elle a souligné que le dialogue est capital pour répondre aux motifs de discorde sous-jacents, y compris par le biais de la feuille de route de Luanda et du processus de Nairobi.  Elle s’est aussi inquiétée de la récente levée d’un moratoire sur la peine de mort en réponse au conflit dans le Nord-Kivu.  Enfin, elle a rappelé que tout retrait de la MONUSCO doit aller de pair avec le renforcement des forces armées nationales.

Le représentant de l’Équateur a noté que l’utilisation d’armes et d’équipements sophistiqués prouve que le M23 bénéficie d’un soutien militaire extérieur. Il a condamné l’utilisation de ces armes contre des soldats de la paix de l’ONU, de même que les menaces publiques proférées par le M23 à l’encontre de la MONUSCO et la diffusion de fausses informations visant à la discréditer.  Il s’est rallié à l’appel du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine au 4 mars pour la cessation immédiate et inconditionnelle des hostilités, ainsi que le cantonnement et le désarmement du M23 et de tous les autres groupes armés actifs dans l’est de la RDC. 

Il a souligné la nécessité de mettre en place des corridors humanitaires pour venir en aide aux 7 millions de personnes déplacées en RDC, dont 6 millions se trouvent dans le nord-est du pays.  Les responsables des possibles crimes de guerre, violations des droits humains et violences sexuelles et sexistes ne doivent pas rester impunis, a-t-il exigé.  Il a ensuite appelé la communauté internationale à soutenir les efforts régionaux, en particulier la feuille de route de Luanda et le processus de Nairobi. Les initiatives régionales, bilatérales et internationales doivent être coordonnées en faveur de la paix, du dialogue et de la stabilité politique, en reconnaissant et en poursuivant le travail accompli par la MONUSCO, a fait valoir le délégué.

Le représentant de la Sierra Leone, qui a pris la parole au nom des A3+1 (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), ont pris note des résultats des élections et du verdict de la Cour constitutionnelle le 12 mars 2024 sur les recours relatifs aux législatives du 20 décembre 2023.  Compte tenu des conséquences des élections, le groupe encourage les autorités de la RDC à faciliter un processus de réconciliation et à maintenir un système de gouvernance qui reflète les aspirations nationales.

Au vu de la situation humanitaire dans le pays, les A3+1 ont appelé tous les États Membres de l’ONU et les acteurs du développement à intensifier de toute urgence leur soutien au plan de réponse humanitaire d’un montant de 2,6 milliards de dollars lancé par le Gouvernement de la RDC et les partenaires humanitaires pour financer la réponse humanitaire en 2024.  En outre, alors qu’approche la date butoir du 30 avril 2024 pour l’achèvement de la première phase du retrait de la MONUSCO, les A3+1 soulignent l’importance d’établir une forte présence de l’État dans toutes les zones où la Mission s’est retirée.  À cet égard, ils ont souligné la nécessité de disposer de forces de défense et de sécurité nationales bien entraînées et équipées qui seront déployées dans les zones actuellement couvertes par la MONUSCO.  Les A3+1 ont appelé tous les groupes armés, y compris le M23, les ADF, la CODECO, les factions Nyatura et les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), à cesser immédiatement les hostilités et à se retirer de toutes les zones occupées de la RDC.  Ils ont condamné tout soutien de parties extérieures à des groupes armés en RDC.  De plus, ils ont exhorté toutes les parties à s’engager pleinement et à se conformer aux initiatives de Nairobi dirigées et de Luanda.  Le groupa a enfin dit espérer que le soutien de la force de la Communauté de développement de l'Afrique australe aux Congolais contribuera à stabiliser la situation et empêcher la progression des groupes armés dans la région.

Le représentant de la Chine a jugé préoccupante la situation dans l’est de la RDC et exhorté les parties concernées à privilégier le dialogue afin de désamorcer les tensions.  Il a également appelé la communauté internationale à renforcer sa réponse humanitaire.  Il a estimé que les pays de la région bénéficieraient d’une RDC stable.  L’ONU doit suivre le principe de solutions africaines à des défis africains et promouvoir la feuille de route de Luanda et le processus de Nairobi, a déclaré le délégué.  Il a appuyé la mise en œuvre du plan de désengagement de la MONUSCO. La Mission doit travailler en étroite coopération avec les autorités congolaises afin d’éviter tout vide sécuritaire.  Enfin, il a souligné l’urgence de renforcer la sécurité des Casques bleus après les récentes attaques qui les ont visés.

Le représentant des États-Unis a constaté que les incursions du M23 et des forces armées rwandaises dans l’est de la RDC ont mis en péril les Casques bleus de la MONUSCO.  Réaffirmant le soutien de son pays aux efforts de l’opération de maintien de la paix des Nations Unies en RDC, il a dénoncé le soutien apporté par certains au M23 et le silence de la communauté internationale à ce sujet.  Si le Rwanda persiste dans son appui à ce groupe armé, il faudra le « réévaluer » en tant que participant constructif aux opérations de paix, a déclaré le délégué, avant d’inviter les pays fournisseurs de contingents à ne pas créer d’instabilité dans le pays hôte.  Alors que la MONUSCO met en œuvre son plan de désengagement du Sud-Kivu, les États-Unis restent préoccupés par la capacité des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) à combler le vide sécuritaire créé par ce retrait, a-t-il ajouté, souhaitant que le dispositif soit adapté en conséquence.  Il faut selon lui réfléchir au calendrier et à la vitesse de mise en œuvre des phases ultérieures.  Évoquant par ailleurs la proposition du Gouvernement congolais en faveur d’un mécanisme d’identification des anciens membres de groupes armés, il a invité le Conseil à l’examiner de près, compte tenu de la menace que représentent ces groupes pour la RDC comme pour le Rwanda.  Il a ajouté que toute violation de l’embargo sur les armes doit être prise au sérieux et entraîner une intervention du Comité des sanctions.  Le délégué a enfin réitéré l’appui des États-Unis à la reprise des processus de Luanda et de Nairobi, invitant les dirigeants congolais et rwandais à agir pour la paix « dans l’intérêt de la région et du monde ».

Le représentant de la République de Corée a exhorté tous les groupes armés, en particulier le M23, à cesser immédiatement leur offensive dans l’est de la RDC.  Dans le même temps, toutes les parties au conflit doivent s’engager de manière constructive dans un dialogue diplomatique pour trouver une solution négociée, a-t-il enjoint.  Condamnant fermement les attaques visant les positions et les moyens de la MONUSCO, en particulier au moyen de systèmes d’armes sophistiqués, le délégué a estimé que cela compromet la capacité de la MONUSCO à remplir efficacement son mandat, en particulier pour assurer la protection des civils, dans le cadre du retrait en cours de la Mission du Sud-Kivu.  L’escalade des crises humanitaires et des droits humains exige une attention urgente, a souligné le représentant, en exhortant toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, et à garantir un accès humanitaire sans entrave à ceux qui en ont besoin.  Enfin, il a salué le rôle de la MONUSCO dans la facilitation du dialogue, la promotion de la participation inclusive des femmes et des jeunes et le soutien au processus électoral, notamment par la fourniture de matériel électoral.  L’aboutissement rapide et transparent des enquêtes sur les irrégularités électorales sera vital, a ajouté le délégué.

Le représentant de la Fédération de Russie s’est dit très préoccupé par l’escalade du conflit en RDC impliquant le groupe armé illégal M23. Les actions offensives de ce groupe doivent cesser, a-t-il exigé, avant de demander le déblocage des voies d’approvisionnement terrestres de Goma.  Gravement préoccupé par l’utilisation de systèmes d’armes avancés dans la zone des combats, y compris contre la MONUSCO, il a insisté sur la nécessité de revenir à la pleine mise en œuvre des accords de la feuille de route de Luanda.  Le délégué a mis en garde contre l’impact de la poursuite du conflit militaire dans l’est du Congo sur la situation humanitaire, l’aggravation des souffrances de la population civile, mais également sur la situation dans l’ensemble de la région des Grands Lacs et sur les relations interétatiques et la stabilité régionale.

Il ne fait aucun doute selon lui qu’un règlement rapide de la crise, en particulier dans la perspective du début du retrait de la MONUSCO, est dans l’intérêt, avant tout, des pays de la région des Grands Lacs eux-mêmes, et seules des décisions politiques conduiront à une cessation globale des hostilités et à la création de conditions réelles pour une stabilisation durable.  Pour cela, il lui a paru fondamental d’intensifier la médiation régionale afin de surmonter les tensions entre Kinshasa et Kigali, et de veiller à ce que tous les groupes armés illégaux déposent les armes et participent au programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration sans conditions préalables.  Tout engagement de l’État avec le Front patriotique rwandais doit également cesser, a estimé le délégué avant de réaffirmer le soutien de la Fédération de Russie aux activités de la MONUSCO.  Lors du retrait de la Mission, il faudra, selon lui, prendre en compte l’évolution de la situation sur le terrain et agir de manière progressive et responsable. Appelant à veiller à ce qu’il n’y ait pas de vide sécuritaire, le délégué a argué que cela passe par le respect du calendrier de retrait établi dans la résolution 2717 (2023). 

Il a pris note de la récente décision de l’Union africaine d’accorder ses auspices aux forces de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), ainsi que du soutien que cette dernière apporte à Kinshasa pour faire face à la crise, conformément au principe « aux problèmes africains, des solutions africaines ».  Il est important, selon le représentant, d’assurer le niveau nécessaire de coordination avec la MONUSCO et de définir des modalités efficaces de travail en commun.  Pour sa part, la Fédération de Russie est prête à discuter des paramètres d’une éventuelle assistance aux forces régionales par la Mission dès qu’elle aura reçu le rapport pertinent du Secrétariat de l’ONU, a assuré le représentant.

Le représentant du Royaume-Uni a exhorté toutes les parties à mettre immédiatement fin aux attaques contre les troupes de maintien de la paix et à privilégier des activités de déconfliction pour permettre à la MONUSCO de remplir son mandat.  Le retrait de la MONUSCO du Sud-Kivu risque de laisser un vide sécuritaire, a-t-il averti, appelant le Gouvernement de la RDC à assumer ses responsabilités en matière de protection de la population civile.  Il a appelé les acteurs externes à mettre fin à leur soutien aux groupes armés en RDC, notamment le M23, dont les activités ont poussé au déplacement massif de civils.  Le Royaume-Uni a promis 126 millions de dollars dans le cadre d’un programme humanitaire de trois ans en RDC, a-t-il rappelé.  Il a ensuite pris note de l’arrivée de la force régionale de la SADC et a souligné l’importance de son ancrage dans un processus politique régional comme celui de Luanda. 

La représentante de la Suisse a souligné que seule une solution politique peut mener à un apaisement durable en RDC.  Elle a appelé les parties à reprendre les négociations, et à s’engager dans un processus politique crédible et inclusif.  Elle a salué les efforts réalisés dans le cadre de la feuille de route de Luanda, avant d’encourager les Présidents Tshisekedi Tshilombo et Kagame à entamer un dialogue sincère et apaisé, dans les meilleurs délais.  Et c’est pourquoi nous réitérons encore une fois notre appel au Rwanda à cesser immédiatement tout soutien au M23 et à retirer ses soldats présents sur le territoire de la RDC, a-t-elle déclaré. 

Évoquant le désengagement de la MONUSCO du Sud-Kivu, elle a appelé les Forces de défense et de sécurité congolaises à se déployer rapidement en priorisant la protection des civils.  De même, si la RDC a la responsabilité première de protéger les civils, elle a également la responsabilité de protéger le personnel humanitaire et onusien, a-t-elle affirmé, déplorant que les positions des soldats de la paix continuent d’être la cible de nombreuses attaques. 

Le représentant de la Slovénie a appelé le M23 à cesser immédiatement les hostilités et à se retirer des territoires occupés, conformément à la feuille de route de Luanda.  Il a condamné tout soutien apporté aux FDLR et au M23 ainsi que toute présence militaire non autorisée en RDC.  Il faut renforcer les efforts coordonnés visant à s’attaquer aux causes profondes du conflit et de l’instabilité régionale, a estimé le délégué pour lequel le processus de Nairobi et la feuille de route de Luanda restent au cœur de ces efforts. 

Compte tenu de l’escalade sécuritaire, en particulier dans le Nord-Kivu, le retrait de la MONUSCO nécessite une planification stratégique, a-t-il fait valoir en plaidant pour un retrait sûr, ordonné, responsable, progressif et durable.  Ce retrait doit aussi tenir compte de la capacité des forces nationales à assurer la protection des civils, en particulier des femmes et des enfants. La mise en place d’une coordination efficace entre la MONUSCO et les autres forces régionales déployées dans la même zone reste importante à cet égard.

La représentante du Japon a exprimé son inquiétude face à la poursuite des combats entre le M23 et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC).  Le récent incident, au cours duquel huit soldats de la MONUSCO ont été blessés, est une conséquence regrettable de ces hostilités, a-t-elle noté.  Constatant que d’autres groupes armés exploitent le vide sécuritaire provoqué par la focalisation actuelle sur le M23 pour étendre leurs activités, elle s’est également alarmée de l’introduction de grandes quantités d’armes sophistiquées sur ce théâtre, avant d’évoquer la présence présumée de « troupes étrangères déguisées ».  Tout soutien, de la part de quelque État que ce soit, au M23 et à tout autre groupe armé doit cesser, a plaidé la déléguée, pour qui rompre le cycle de violence dans la région nécessite une solution politique. Les initiatives régionales à cette fin devraient être guidées par une stratégie commune et coordonnées jusqu’au niveau des opérations sur le terrain, notamment la MONUSCO et la Mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe en RDC (SAMIDRC). 

De l’avis de la représentante, la détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire dans l’est de la RDC rend plus difficile la conduite d’un retrait progressif, responsable et durable de la MONUSCO.  Appelant à la mise en place simultanée d’une présence efficace des autorités étatiques et de forces de sécurité suffisantes pour éviter tout vide sécuritaire, elle a estimé que la réforme de la police nationale reste une priorité absolue.

Le représentant de la République démocratique du Congo (RDC) a indiqué que, ces trois derniers mois, la situation de son pays a été principalement dominée par la tenue des élections générales et par la poursuite des efforts régionaux et internationaux visant à inverser la spirale d’insécurité dans l’est de la RDC.  S’agissant des élections, il a remercié le Conseil de sécurité, la MONUSCO et les pays partenaires pour leur appui logistique et matériel, avant de rappeler que le scrutin s’est déroulé dans le calme et dans les délais constitutionnels. Le Président réélu, M. Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, a été investi le 20 janvier dernier et l’installation des « institutions restantes » est dans sa phase de finalisation, a-t-il précisé, avant d’aborder la situation sécuritaire. Reprenant à son compte la condamnation par le Secrétaire général des attaques récemment perpétrées contre les positions de la MONUSCO à Goma et à Sake, il a estimé que ce « blâme » s’adresse exclusivement aux forces armées du Gouvernement rwandais et aux terroristes du M23 qui leur sont associés.  En effet, a-t-il relevé, le rapport du Secrétaire général établit que le Rwanda ne nie plus la présence de son armée sur le territoire de la RDC et constate que les troupes rwandaises participent activement aux combats. L’armée rwandaise a ainsi testé la performance de ses nouveaux missiles sol-air sur des hélicoptères de la MONUSCO et sur des avions civils garés sur le parking de l’aéroport de Goma, a-t-il affirmé. 

Pour le représentant, le Conseil de sécurité doit franchir le « Rubicon de l’impunité » et imposer au Rwanda des sanctions à la hauteur de son « récidivisme criminel ».  Face à cette situation, a-t-il ajouté, les Forces armées de la République démocratiques du Congo (FARDC) et les jeunes patriotes résistants Wazalendo restent mobilisés pour défendre l’intégrité territoriale du pays jusqu’à la restauration totale de l’autorité de l’État.  Il a ensuite fait le point sur les efforts politiques et diplomatiques menés sous la médiation du Président angolais, évoquant notamment le mini-sommet d’Addis-Abeba en février dernier, en marge du trente-septième sommet de l’Union africaine, et la tenue, le 21 mars, d’une réunion ministérielle tripartite à Luanda entre les Ministres des affaires étrangères de l’Angola, de la RDC et du Rwanda.  Une deuxième réunion ministérielle se tiendra prochainement pour préparer la rencontre des chefs des trois États en avril, a-t-il indiqué, avertissant que son pays n’acceptera pas des « arrangements de façade » destinés à perpétuer l’insécurité et la confusion qui encouragent la coalition entre le Rwanda et le M23 à poursuivre l’exploitation de ses minerais stratégiques.  À court terme, la réaffirmation des processus de Luanda et de Nairobi reste selon lui la seule voie de sortie, ce qui implique la cessation des hostilités, le retrait sans conditions des troupes rwandaises du territoire de la RDC et le retrait du M23 des positions occupées. 

Au chapitre des efforts régionaux, le représentant a évoqué le déploiement de la Mission de la Communauté de développement de l’Afrique australe en RDC (SAMIDRC).  Il a rappelé qu’à la suite de la création de cette mission lors du sommet de la SADC en mai 2023, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a approuvé son déploiement dans l’est de la RDC le 4 mars dernier.  À ses yeux, cette démarche s’inscrit dans la droite ligne du principe de subsidiarité et de celui prônant « des solutions africaines aux problèmes africains ».  Enfin, concernant le plan de désengagement de la MONUSCO prévu par la résolution 2717 (2023), il a assuré que son gouvernement est pleinement engagé dans la mise en œuvre de la première phase de ce retrait au Sud-Kivu et qu’il assumera ses responsabilités dans l’exécution de la feuille de route arrêtée de commun accord avec l’ONU. 

Le représentant du Rwanda a rappelé que l’ONU, en juin 2023, a consacré 24,3 milliards de dollars à sa mission de maintien de la paix en RDC. Malgré ces ressources importantes, la situation dans l’est de la RDC s’est détériorée.  Le chaos provoqué par les groupes armés illégaux a aggravé la situation des droits humains, a poursuivi le délégué.  « Les discours de haine, les persécutions et le nettoyage ethnique visant la communauté tutsie congolaise ont atteint des niveaux sans précédent sous les yeux de la communauté internationale », a-t-il déploré.  La communauté internationale continue d’échouer à répondre aux causes profondes du conflit et ne saisit pas la complexité de la région, a-t-il tranché. Il a estimé que tout progrès de la MONUSCO est rendu caduc par le manque de courage politique des autorités congolaises. « Nous ne pouvons pas continuer d’appliquer la même mauvaise recette et espérer un résultat différent. »  Il a exhorté le Conseil à rejeter tout appui à une solution militaire de nature à galvaniser le Gouvernement congolais et sa coalition de groupes armés illégaux, certains d’ailleurs étant frappés de sanctions de la part de ce même Conseil. Le départ de la MONUSCO ne doit pas justifier un appui aux forces partisanes qui préfèrent continuer le combat, indépendamment de la coopération entre les forces armées congolaises et les forces génocidaires des FDLR, a assené le délégué.

Il a déclaré qu’il n’a pas encore été remédié aux deux préoccupations du Rwanda, à savoir la présence de forces génocidaires et les récentes déclarations publiques de responsables de la région.  Il a en effet dénoncé l’appui des forces armées congolaises aux FDLR. Ce soutien doit cesser et les éléments des FDLR doivent être désarmés, démobilisés et renvoyés au Rwanda.  Il a aussi dénoncé les déclarations des Présidents de la RDC et du Burundi qui ont menacé le Rwanda d’un « changement de régime ».  Selon le Groupe d’experts sur la RDC, ces deux pays combattraient aux côtés de la milice génocidaire des FDLR contre le M23, a affirmé le délégué.  « Le Rwanda prend ces menaces très au sérieux et demande que ces questions sécuritaires soient tranchées politiquement par les Congolais », a-t-il dit.  Enfin, il a exhorté le Conseil à faire cesser les discours de haine contre les Congolais tutsis en raison des risques d’un nouveau génocide 30 ans après celui commis au Rwanda.

Le représentant du Burundi s’est félicité de la bonne coopération de son pays avec la RDC, à travers le cadre de coopération bilatérale en matière de défense pour lutter contre les groupes armés et terroristes locaux et étrangers qui pullulent dans l’est de la RDC.  Il a salué le déploiement de la force régionale de la SADC (SAMIDRC) qui devrait tout faire pour réoccuper toutes les anciennes positions de la force régionale de la communauté est-africaine tombées entre les mains du M23.  Devant la gravité de la situation humanitaire, le représentant a fait siennes les observations du Secrétaire général, en particulier celles relative à l’engagement d’apporter un soutien logistique et opérationnel à la force régionale de la SADC présente en RDC. Les relations de bon voisinage occupent une place de choix dans le document de politique étrangère du Burundi, a-t-il expliqué en précisant que les relations entre son pays et les autres pays de la région sont au bon fixe à l’exception du Rwanda, son voisin du nord, à qui le Burundi réclame toujours la remise des putschistes de 2015 qui sont aujourd’hui le cerveau pensant du groupe criminel et terroriste RED Tabara. Le Rwanda a le choix entre les bonnes relations avec le Burundi ou le maintien de ce groupe de criminels sans avenir politique sur son territoire, a expliqué le délégué pour lequel « ce choix devrait être clair et facile ».  Il a exhorté le Rwanda à opter pour un choix qui le placera du bon côté de l’histoire.  Pour le Burundi, le respect des engagements pris par le leadership rwandais de livrer ce groupe de criminels en cavale hébergés à Kigali contribuerait sensiblement à la lutte contre l’impunité dans la région et au respect des instruments juridiques régionaux en matière de paix et de sécurité, a-t-il fait valoir.  Pour ce qui est des efforts régionaux de restauration de la paix en RDC et dans la région, il s’est dit profondément préoccupé par la résurgence des attaques du M23 dans l’est de la RDC avant d’exhorter ce mouvement à se conformer aux décisions prises par les chefs d’État de la région dans le cadre de la feuille de route de Luanda et le processus de Nairobi afin de donner la chance à la paix dans cette partie de la RDC qui a tant souffert.  Dans le même ordre d’idées, il s’est dit préoccupé par l’expansion du terrorisme dans la région au risque de voir des liens avec d’autres groupes terroristes au Sahel, du Moyen-Orient et au nord du Mozambique.  Des efforts supplémentaires sur ce front sont plus que nécessaires pour étouffer dans l’œuf toute expansion du terrorisme sur le continent avant qu’il ne soit trop tard, a insisté le représentant, pour lequel les conflits en cours dans d’autres régions du monde ne devraient pas éclipser ceux du continent africain. 

Le représentant de la République démocratique du Congo (RDC) a repris la parole pour relever que « l’ambiance dans la salle du Conseil prévaut aussi sur le terrain ».  Dans la sous-région, un seul pays « nargue tous ses voisins », a-t-il accusé, estimant que la déclaration du Burundi en apporte une claire illustration.  « Le Rwanda affirme être en RDC pour assurer la sécurité des Tutsis, mais n’y a-t-il pas des Tutsis au Burundi? » a-t-il demandé, s’interrogeant par ailleurs sur la volonté affichée par le Rwanda de ne pas externaliser le conflit congolais.  « Alors que venez-vous faire en RDC? » a lancé le délégué au Rwanda. Il a d’autre part rappelé que les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) sont des Rwandais qui ont commis le génocide de 1994 et ont ensuite fui en RDC.  Mais ce groupe armé a fait l’objet d’une « éradication » de la part des troupes congolaises et rwandaises dans le passé, a-t-il assuré, ajoutant que, dans une vidéo circulant sur les réseaux sociaux, l’ancien ambassadeur du Rwanda en RDC déclarait en 2018 que les FDLR ne constituaient plus une menace pour le Rwanda.  « Cela a été dit. »  Le Rwanda n’est là que pour exploiter les richesses minières de la RDC, a-t-il poursuivi, avant de relever que, selon le dernier rapport du Groupe d’experts, il y a des membres du FDLR dans le contingent rwandais présent en RDC. Ces individus ont été rapatriés au Rwanda, qui les a ensuite recyclés pour les envoyer se battre contre la RDC, a-t-il expliqué.  « Je ne voudrais pas que le Conseil de sécurité soit dupe de ce jeu », a conclu le représentant.

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