Soixante-dix-huitième session,
34e séance plénière - matin
AG/AB/4458

Cinquième Commission: report des décisions sur le financement du système des coordonnateurs résidents et l’accès du personnel des services généraux à la catégorie des administrateurs

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a achevé aujourd’hui la session qu’elle a entamée le 26 février sur une gestion des ressources humaines compliquée, cette année, par l’« état lamentable » de la trésorerie de l’ONU, comme s’alarmait Singapour, au nom de l’ASEAN, dès le début des travaux. 

Pressée par le temps, la Commission a reporté à sa prochaine reprise de session du mois de mai, sa décision sur deux propositions novatrices du Secrétaire général: la levée des obstacles au passage des fonctionnaires de la catégorie des services généraux à celle des administrateurs, et la création d’une ligne budgétaire de 145,2 millions de dollars pour le système redynamisé des coordonnateurs résidents, financé jusqu’ici presque totalement par les contributions volontaires des États Membres (A/C.5/78/L.36). 

Ce sont donc quatre projets de résolution de fond que la Cinquième Commission soumet à l’Assemblée générale pour adoption.  Nous avons réussi ce que nous devions faire et conclu notre session à temps, s’est félicité le Président d’une Commission connue pour sa propension à dépasser largement la date fixée pour la fin de ses travaux.  Les négociations, a tout de même avoué M. Osama Mahmoud Abdelkhalek Mahmoud, de l’Égypte, se sont achevées à minuit. 

« À chaque fois que ma femme me demandait ce que je faisais si tard à l’ONU, je lui répondais: femme, laisse-moi vivre ma vie, je lis une résolution sur le budget », s’est amusé M. Johannes Huisman qui, sous les rires et les applaudissements, quitte aujourd’hui-même la tête de la Division de la planification du programme et du budget.  Ce trait d’humour n’a pas empêché l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, de rappeler le nombre de fois où il a trouvé des collègues hagards, cherchant à sortir du Siège de l’ONU après 23 heures.  Ceci n’est tout simplement plus acceptable.  La Commission peut faire mieux. 

C’est la Syrie qui a lancé la salve des adoptions, avec son projet de décision (A/C.5/78/L.29visant à priver d’une ponction du budget ordinaire, la toute nouvelle Institution indépendante chargée de la question des personnes disparues sur son territoire et ses 28 postes prévus, dont celui d’un sous-secrétaire général qui travaillera avec son équipe à Genève.  La Syrie a dénoncé une entité politisée qui la cible, dans ce qui est une ingérence flagrante dans ses affaires intérieures.  La création de cette nouvelle institution ne fait l’objet d’aucun consensus puisque nous n’avons jamais demandé l’appui technique de l’ONU, sans oublier le fait que nous n’avons même pas été consultés. 

Cette institution vient s’ajouter à d’autres mécanismes également non consensuels que nous ne reconnaissons pas, parce que nous voyons en elle une manipulation de la Charte des Nations Unies pour servir des intérêts qui n’ont rien à voir avec ceux de notre peuple.  Il est temps, s’est agacée la Syrie, d’abandonner la politiques de deux poids, deux mesures et la politisation de la question des droits de l’homme. 

Au nom de l’Union européenne, la Belgique a demandé un vote car il est essentiel de financer l’Institution, conformément au mandat de la Cinquième Commission et tant pis si les coauteurs du projet de décision ont refusé de participer aux négociations.  À l’issue du vote, le texte de la Syrie a été rejeté par 70 voix contre, 13 voix pour et 43 abstentions. 

Dans son projet contraire (A/C.5/78/L.30), l’Albanie a insisté sur l’importance de la résolution de l’Assemblée générale portant création de l’Institution, un symbole de la justice que méritent les personnes disparues et leurs familles.  Il est de notre responsabilité de dire à ces familles ce qu’il est advenu de leurs proches et cela ne peut se faire que si l’Institution a les moyens financiers d’exécuter son mandat. 

La Belgique, qui a salué cette initiative, a affirmé que les membres de l’Union européenne n’ont ménagé aucun effort pour parvenir à un consensus, une valeur essentielle qui sous-tend tout le travail de la Cinquième Commission.  Il est donc regrettable que certains États viennent nous contraindre au vote.  Demandé par la Syrie, ledit vote s’est conclu par l’adoption du texte avec 71 voix pour, 12 voix contre et 46 abstentions. 

À sa suite, le projet de résolution sur les questions spéciales relatives au budget (A/C.5/78/L.32) a donc pu être adopté, sans vote.  L’Institution indépendante hérite d’une enveloppe de 2,4 millions de dollars pour 2024.  Il n’y a pas de plus grande dépense inutile que celle-ci, a tranché la Fédération de Russie. Nous allons payer notre contribution au budget ordinaire de l’ONU mais le financement de cette institution ne regarde que ceux qui l’ont créée, a prévenu la Syrie. 

Les coauteurs du projet de décision syrien, à savoir le Nicaragua, le Venezuela, Cuba, la République populaire démocratique de Corée (RPDC), l’Érythrée, la Chine, le Bélarus et une nouvelle fois, la Fédération de Russie, ont avancé les mêmes arguments, dénonçant « les attaques des pays occidentaux » pour atteindre leurs objectifs en Syrie et rejetant une ligne budgétaire qui pourrait aggraver la crise de liquidités que traverse l’ONU. 

Le même projet de résolution sur les questions spéciales relatives au budget prévoit aussi une enveloppe de 22,1 millions de dollars pour la transition et la liquidation de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (UNITAMS). 

La Cinquième Commission s’est ensuite penchée sur le projet de résolution relatif aux modifications du Statut et du Règlement du personnel (A/C.5/78/L.35) qui propose à l’Assemblée générale d’approuver la recommandation du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) lequel dit ne pas voir le lien entre le langage inclusif proposé, à savoir « parité des genres », et la résolution 72/147 de l’Assemblée générale. Il rappelle qu’ONU-Femmes a été créée pour promouvoir « l’égalité des sexes » et l’autonomisation des femmes et que le préambule de la Charte des Nations Unies consacre « l’égalité de droits des hommes et des femmes ». 

Pour le CCQAB, le langage inclusif proposé dépasse le cadre du Statut et du Règlement du personnel.  La position de ce dernier ayant été incluse dans le projet de texte, la Fédération de Russie a retiré le sien (A/C.5/78/L.31).  Le cadre de l’ONU ne saurait promouvoir des valeurs sociales qui prêtent à controverse, a confirmé l’Éthiopie, au nom du Groupe des États d’Afrique. 

Une enveloppe de 79 600 dollars a été approuvée en 2024 pour les réunions de la Commission préparatoire chargée de préparer l’entrée en vigueur de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, et de procéder aux préparatifs de la première réunion de la Conférence des Parties.  Les réunions du Comité spécial chargé d’élaborer une convention internationale générale sur la lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles reçoivent une somme de 815 500 dollars (A/C.5/78/L.33).  La Commission a enfin recommandé un projet de résolution sur le Corps commun d’inspection (A/C.5/78/L.34). 

Tout comme les États-Unis et la Chine, l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a regretté que la Commission n’ait pu se prononcer sur la chaîne d’approvisionnement.  Cela fait « trop longtemps », s’est-il agacé, que nous n’avons fait aucune recommandation sur les achats.  Au nom de l’Union européenne, la Belgique a jugé regrettable qu’aucune décision n’ait été prise sur l’application du principe de responsabilité au Secrétariat de l’ONU ni sur le financement du système redynamisé des coordonnateurs résidents, dont le rapport a été présenté trop tard.  Tous les documents pertinents, a-t-elle insisté, doivent être soumis dès le début de la session. 

Nous n’avons rien non plus, a embrayé le Japon, sur la gestion des ressources humaines, alors que le monde est confronté à de multiples crises qui se sont aggravées, ont ajouté les États-Unis.  Face à tant d’adversité, l’ONU est la seule organisation capable de relever les défis pour autant qu’on lui en donne les moyens, dont des ressources humaines bien gérées.  La Cinquième Commission doit se voir comme le conseil d’administration d’une grande entreprise qui, comme toutes les autres, doit adapter à la réalité la gestion de sa main-d’œuvre, au moins une fois par an.  L’on nous dit que nous avons déjà soumis un projet de résolution à l’Assemblée générale, l’année dernière, mais n’oublions pas, ont rappelé les États-Unis, que c’était le premier texte depuis 2016.  Les mois à venir, nous allons nous atteler à l’élaboration d’un « pacte pour l’avenir », dont l’application nécessitera de bonnes ressources humaines. 

Il faut bien l’avouer, ont-ils tranché, nos résultats ont été « catastrophiques »: aucune recommandation sur la compensation du personnel, le détachement du personnel militaire, avec un impact négatif sur les opérations de paix, ou encore la santé mentale.  Nos résultats, a poursuivi le Royaume-Uni, dressent le tableau d’une commission inefficace mais coûteuse, si l’on réalise que les salaires et les autres dépenses représentent 4 millions de dollars pour une seule session.  Nous ne sommes pas à la hauteur pour servir aux mieux les populations de notre monde. 

Cette session a été exceptionnelle à un seul égard, elle a duré cinq semaines au lieu de quatre et ce, tout à fait inutilement, ont taclé les États-Unis. Pendant les deux premières semaines, nous n’avons pu rien faire, a confirmé la Belgique, au nom de l’Union européenne.  Ce n’est pas le temps qui nous manque mais un engagement plus actif de la part de tous. Nous devons être plus efficaces dans l’utilisation du temps alloué. 

Cette commission est un paradoxe frappant: elle est connue pour sa piètre gestion du temps et ses négociations en pleine nuit mais elle est également exemplaire dans l’attachement qu’elle a au consensus.  À la prochaine reprise de session, nous achèverons nos travaux le 31 mai quoi qu’il arrive, a promis un Président pour le moins optimiste. 

Mais compte tenu de l’« état lamentable » de la trésorerie de l’ONU, comme s’alarmait Singapour, au premier jour des travaux, la Belgique n’a pas oublié de lancer un appel à tous les États Membres pour qu’ils s’acquittent de leurs contributions en temps et en heure.  Nous devons, a-t-elle dit, également réfléchir aux mesures qu’il faut pour que le Secrétariat de l’ONU puisse gérer au mieux ses problèmes de liquidités.  Si nous souhaitons que l’ONU fonctionne avec efficacité, nous devons nous acquitter en temps voulu de nos obligations financières, a tranché la Chine. 

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