Pour la seconde fois, le Conseil de sécurité n’adopte pas son ordre du jour prévoyant la tenue d’une réunion pour les 25 ans du bombardement de la Yougoslavie par l'OTAN
À l’issue d’un nouveau vote de procédure demandé par la France, le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure, cet après-midi, pour la seconde fois de la semaine, d’adopter son ordre du jour provisoire qui prévoyait la tenue d’une réunion afin de marquer le vingt-cinquième anniversaire de la campagne de frappes aériennes menée en 1999 par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) contre la République fédérale de Yougoslavie.
Les membres du Conseil se sont opposés, dans une proportion de 6 voix pour (Algérie, Chine, Fédération de Russie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone) et 9 abstentions (États-Unis, Équateur, France, Japon, Malte, République de Corée, Royaume-Uni, Slovénie et Suisse), à la tenue de cette réunion demandée par la Fédération de Russie. Lundi dernier, 12 membres s’étaient abstenus, contre 3 voix pour (Algérie, Chine et Fédération de Russie). Les décisions du Conseil de sécurité sur des questions de procédure sont prises par un vote affirmatif de neuf membres.
Dans sa demande de mise aux voix, la France a fait valoir les mêmes arguments que lundi dernier, estimant que le Conseil n’a pas vocation à débattre de faits historiques, a fortiori ceux appartenant au siècle passé. Le Conseil a vocation à débattre des crises du moment, a assené le délégué, jugeant légitime la tenue de toute réunion sur ces sujets. « Le Conseil n’est pas là pour se substituer aux historiens et aux juridictions », a-t-il tranché, appuyé par les États-Unis qui ont vu dans cette réunion un « caprice » de la Russie.
« La France essaye de bloquer une réunion que la Russie a demandée », a rétorqué le délégué russe. Il a qualifié de mensonges les dires de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis, selon lesquels les membres du Conseil, ainsi que la Serbie, n’auraient pas été consultés sur la tenue de cette réunion. Ces trois pays ne veulent pas parler d’un sujet qui les gêne au plus haut point, à savoir l’agression de l’OTAN contre un pays souverain, a tranché le délégué russe.
Réfutant l’argumentation de la France, le délégué russe a estimé que l’agression de l’OTAN est à l’origine de la situation actuelle au Kosovo, où la communauté serbe est agressée. Il a également évoqué le projet d’adhésion du Kosovo au Conseil de l’Europe, alors que le Kosovo fait, a-t-il dit, partie de la Serbie. « Cela relève-t-il du passé? » Ces trois membres sont prêts à tout pour ne pas discuter de cette question, a dénoncé le délégué, en rappelant les 2 000 civils tués lors des bombardements de l’OTAN en 1999.
Après le vote, la Sierra Leone a expliqué avoir voté en faveur de l’ordre du jour provisoire, au nom du droit des membres du Conseil à demander la tenue d’une réunion, tel que consacré à l’article 2 du Règlement intérieur provisoire de l’organe. Même son de cloche du côté de la Chine qui a jugé important de réfléchir à des faits majeurs de l’histoire. Compte tenu du programme chargé du Conseil, il est capital de préserver la coopération sur les questions de procédure, a dit le délégué chinois.
Le vote d’aujourd’hui vient confirmer notre thèse que les pays occidentaux sont surreprésentés au Conseil de sécurité, a déclaré la Russie, en se félicitant que davantage de membres aient décidé d’appuyer la tenue de la réunion. Elle a accusé la France, le Royaume-Uni et les États-Unis de sacrifier la réputation du Conseil afin de défendre leurs intérêts étriqués et de ne pas évoquer l’agression illégitime de l’OTAN contre un État souverain.
« Vous pourrez bloquer les réunions du Conseil, mais cela n’effacera pas vos actions destructrices », a lancé le délégué russe, en évoquant les territoires pollués à l’uranium et la propagation de pathologies oncologiques qui toucheront les prochaines générations dans les Balkans. « Vos actions dans les Balkans ont créé une poudrière qui risque d’exploser à tout moment. » Après la Yougoslavie, vos ingérences en Iraq, en Syrie, en Libye et en Afghanistan ont laissé des traînées de morts, a-t-il ajouté. « Si, pour le moment, vous avez réussi à éviter une discussion sur ce sujet au Conseil de sécurité, ne comptez pas sur le fait d’échapper à vos responsabilités pour vos actions. »