En cours au Siège de l'ONU

Journée de clôture historique à la Sixième Commission avec l’adoption d’un projet de résolution pour l’élaboration d’une convention sur les crimes contre l’humanité

Soixante-dix-neuvième session
38e & 39e séances plénières – matin & après-midi
AG/J/3738

Journée de clôture historique à la Sixième Commission avec l’adoption d’un projet de résolution pour l’élaboration d’une convention sur les crimes contre l’humanité

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Au terme de sa soixante-dix-neuvième session, et à l’issue de 39 séances plénières, la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a adopté aujourd’hui -sans vote, conformément à la pratique du consensus qui a résisté en son sein – 15 projets de résolution et un projet de décision qui seront transmis à l’Assemblée générale.  Elle était présidée par M. Rui Vinhas, Représentant permanent du Portugal.

Le texte le plus controversé, puisque son examen a justifié plusieurs suspensions informelles de séance et qu’il a été révisé oralement, porte sur la convocation d’une « Conférence de plénipotentiaires des Nations Unies sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité », sur la base du projet d’articles adopté en 2019 par la Commission du droit international.

Par ce projet de résolution (A/79/740), l’Assemblée générale déciderait que la Conférence de plénipotentiaires se réunirait au Siège de l’ONU à New York pendant trois semaines consécutives début 2028 et pendant trois semaines consécutives début 2029, en vue d’élaborer et de conclure un instrument juridiquement contraignant sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  « Ne perdons pas de vue l’importance de cette décision historique », a dit le délégué de la Gambie en introduisant ce texte âprement débattu qui a finalement été adopté sans mise aux voix, et sous les applaudissements, en fin d’après-midi. Son homologue du Mexique a lu les révisions, notamment le report d’un an des dates initialement prévues et la suppression de la référence à la participation de la société civile.

C’est la Fédération de Russie qui a demandé « plus de temps » ce matin pour « parvenir à une solution acceptable pour tous » sur ledit projet.  La déléguée russe a contesté la méthode employée, notamment l’instauration de « lignes rouges incessantes », et déploré que certains acteurs aient voulu tirer des dividendes politiques de cette question, entravant la recherche d’un « vrai consensus ».  Nous avons néanmoins négocié jusqu’au dernier moment pour qu’il n’y ait pas de vote, a-t-elle assuré.  Tout en retirant l’amendement qu’elle avait préparé avec la République populaire démocratique de Corée et le Nicaragua, elle a indiqué que son pays se « distançait » du consensus final. 

Autre moment historique, selon l’expression de la Colombie qui s’exprimait au nom de plusieurs pays, l’adoption sans mise aux voix d’un projet de résolution relatif à la protection des personnes en cas de catastrophe présenté par la Jamaïque.  Avec ce texte, l’Assemblée proposerait d’élaborer et de conclure un instrument juridiquement contraignant sur cette question, « au plus tard à la fin de 2027 ».  « C’est un engagement que nous prenons pour combler une lacune juridique et protéger les plus vulnérables », a dit la Colombie, appuyée par El Salvador, alors que les catastrophes climatiques sont de plus en plus fréquentes et intenses.

La déception était en revanche palpable dans la voix de la déléguée de la Suède, qui a présenté le projet sur l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés, par lequel l’Assemblée engagerait les États Membres à participer activement aux travaux de la trente-cinquième Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, qui se tiendra à Genève en 2028.  « Deux délégations ont brisé la procédure d’approbation tacite », a regretté la déléguée suédoise.  « Ce texte n’est malheureusement qu’une mise à jour technique et ce n’est pas ce nous souhaitions, mais nous voulions préserver la tradition du consensus. » 

Si le projet a été adopté sans mise aux voix, les délégations n’ont pas ménagé leurs critiques, à l’instar de la Russie qui s’est dissociée des deux paragraphes du préambule faisant référence à la Cour pénale internationale (CPI).  « Cette pseudo-Cour n’a aucun lien avec la lutte contre l’impunité et lesdits Protocoles », a déclaré la Russie.  Le Burundi s’en est également dissocié puisqu’il a quitté le Statut de Rome en 2017.  La Suisse a regretté la demande de suppression par une délégation d’un libellé relatif à la CPI préalablement agréé, tandis qu’Andorre a regretté ne pas avoir pu se porter co-auteur de ce texte. 

Israël s’est aussi dissocié du libellé sur la CPI, laquelle est un « outil politique, comme l’a montré la décision scandaleuse d’hier de viser les dirigeants d’un pays qui ne cherche qu’à se défendre ».  Selon le délégué israélien, la Cour a perdu toute légitimité. En revanche, l’État de Palestine, au nom d’un groupe de pays, a dénoncé l’engagement d’Israël, non pas à respecter le droit international humanitaire, mais à le violer dans la poursuite de ses objectifs militaires. 

Maurice a présenté le projet de résolution intitulé « Portée et application du principe de compétence universelle » par lequel l’Assemblée déciderait de créer, à sa quatre-vingt-unième session, un groupe de travail de la Sixième Commission pour poursuivre l’examen approfondi de cette question. 

La République tchèque, au nom d’un groupe d’États, a déploré l’impasse des débats sur cette question.  « Se contenter de répéter les points de vue sans discussion de fond n’est pas productif. »  Elle a rappelé que ce groupe d’États était prêt au compromis.  Malheureusement des délégations n’ont pas fait de concessions, a-t-elle noté, en rappelant que le consensus n’est pas un droit de veto.

Le Pakistan a présenté le projet de résolution sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies.  L’Assemblée prierait le Secrétaire général de continuer de veiller à ce que sa politique de tolérance zéro à l’égard des comportements criminels tels que l’exploitation et les atteintes sexuelles, la fraude et la corruption soit connue de tous les fonctionnaires et experts de l’ONU.  L’Argentine est intervenue pour préciser que le mot genre doit être entendu au sens du Statut de Rome, à savoir que « genre veut dire homme et femme ».

S’agissant des travaux de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), la Sixième Commission a commencé par entériner le traditionnel projet de résolution sur le rapport de la CNUDCI, introduit par l’Autriche. Cette année, l’Assemblée générale féliciterait la CNUDCI d’avoir finalisé et adopté: la Loi type CNUDCI-UNIDROIT sur les récépissés d’entrepôt; les Clauses types sur le règlement express spécialisé des différends; et la Loi type sur les contrats automatisés.  Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 contient des obligations qui sont juridiquement non contraignantes, a rappelé l’Argentine.

Dans deux textes séparés, présentés par l’Autriche et par le Viet Nam, l’Assemblée remercierait spécifiquement la CNUDCI d’avoir établi et adopté, en étroite collaboration avec l’Institut international pour l’unification du droit privé (UNIDROIT), la Loi type sur les récépissés d’entrepôt UNIDROIT–CNUDCI; et d’avoir achevé et adopté la Loi type sur les contrats automatisés.

Le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international a fait lui aussi l’objet d’un projet de résolution, présenté par le Ghana.  Le Secrétaire général serait prié de continuer à prévoir, dans le projet de budget-programme pour 2026, des ressources pour le Programme de bourses de perfectionnement en droit international, les cours régionaux de droit international pour l’Afrique, pour l’Asie et le Pacifique et pour l’Amérique latine et les Caraïbes, et le maintien et l’enrichissement de la Médiathèque de droit international des Nations Unies.

La Sixième Commission a ensuite adopté le projet de résolution consacré au rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de de sa soixante-quinzième session, présenté par la Colombie.  Par ce texte, l’Assemblée générale rappellerait aux États de faire parvenir à la CDI leurs observations sur les divers aspects des sujets inscrits à l’ordre du jour de celle-ci, en ce qui concerne notamment l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international et les accords internationaux juridiquement non contraignants; et leurs commentaires et observations sur le projet de conclusions sur les principes généraux du droit, ainsi que tous commentaires et observations complémentaires sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.

La CDI tiendrait sa prochaine session à l’Office des Nations Unies à Genève du 14 avril au 30 mai 2025 et du 30 juin au 31 juillet 2025, et l’Assemblée soulignerait qu’il importe que cette session puisse durer douze semaines.  Elle recommanderait en outre que, à sa quatre-vingtième session, l’examen du rapport de la CDI commence le 27 octobre 2025.  El Salvador a rappelé que ce texte appelle à un plus grand nombre de candidates femmes pour rejoindre la CDI. 

Avec son texte sur l’examen de mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires, présenté par la Finlande, l’Assemblée prierait instamment les États d’observer, d’appliquer et de faire respecter strictement, y compris en période de conflit armé, tous les principes et règles du droit international régissant les relations diplomatiques et consulaires, notamment ceux qui concernent l’inviolabilité.

Par le projet relatif au rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, présenté par l’Égypte, l’Assemblée déciderait que le Comité spécial tiendrait sa prochaine session du 18 au 26 février 2025.  Elle inviterait le Comité spécial à continuer de recenser, à la session de 2025, les sujets nouveaux dont il pourrait entreprendre l’étude pour concourir à la revitalisation des travaux de l’Organisation.

Le Mexique a présenté le projet de résolution relatif à l’état de droit dans l’ordre interne et international, par lequel l’Assemblée, « prenant note de sa résolution 79/1 du 22 septembre 2024 par laquelle elle a adopté le Pacte pour l’avenir, qui réaffirme qu’il est impératif de faire respecter et promouvoir l’état de droit, conformément aux principes consacrés par la Charte des Nations Unies », rappellerait l’importance de la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États.  La République arabe syrienne s’est dissociée du paragraphe du dispositif qui renvoie au rapport du Secrétaire général sur la question et, en particulier, au Mécanisme international, impartial et indépendant.  Quant à l’Argentine, elle s’est dissociée du paragraphe du préambule qui fait référence au Pacte pour l’avenir.

La Commission a repris pour l’essentiel les dispositions de ses projets de résolution précédents concernant les mesures visant à éliminer le terrorisme international, et le rapport du Comité des relations avec le pays hôte, présentés respectivement par le Canada et par Chypre.

Elle a par ailleurs décidé de recommander à l’Assemblée de renvoyer à sa prochaine session la question de l’octroi du statut d’observateur à l’Initiative régionale contre la corruption.  La Roumanie a souligné que la Russie s’est opposée à cette demande lors de la présente session pour « des raisons politiques ». 

La Hongrie a introduit un projet de lettre que le Président de la Sixième Commission adressera au Président de l’Assemblée générale et dont l’objectif est d’attirer l’attention sur certaines questions spécifiques liées aux aspects juridiques des rapports examinés par la Sixième Commission sur l’administration de la justice à l’ONU. 

Enfin, la Commission a adopté un projet de décision contenant son programme de travail provisoire pour la quatre-vingtième session, qui se déroulera du 6 octobre au 21 novembre 2025.

La Sixième Commission se réunira à nouveau au cours de la présente session de l’Assemblée générale, courant 2025, pour élire le Bureau de la quatre-vingtième session.  Le prochain Président sera issu du Groupe des États d’Asie et du Pacifique.

Après l’adoption du texte consacré aux crimes contre l’humanité, les délégations ont réitéré leur attachement à la tradition du consensus.  C’est un « véritable tremplin » vers l’adoption d’une convention, un « jalon » dans le travail de la Commission, un « moment historique » pour la prévention des crimes contre l’humanité, ont salué la Sierra Leone, la Jordanie et le Royaume-Uni. Ce projet de résolution a « un poids moral, diplomatique et juridique » qui sera historique pour les générations à venir, a estimé la déléguée palestinienne, se félicitant, « le cœur lourd », de son adoption. 

Néanmoins, le délégué tchèque a regretté d’avoir dû faire des concessions « immenses » pour préserver la tradition du consensus, jugeant cela « indigne » de la Sixième Commission.  « Nous nous sommes retrouvés dans une situation où nous étions otages », a-t-il déploré, reprochant à la Russie d’avoir fait preuve de « mauvaise foi » pendant les négociations.  Se disant honoré d’avoir pu mener ce projet à bien, le Mexique a espéré des négociations « plus transparentes et inclusives » lors de l’élaboration de la convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité. 

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Fin des travaux de la cinquième session de la Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes de destruction massive

Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires, Cinquième
10e séance – après-midi
CD/3891

Fin des travaux de la cinquième session de la Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes de destruction massive

La cinquième session de la Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive s’est achevée aujourd’hui au Siège des Nations Unies, à New York, par l’adoption d’un rapport.  Au terme des débats, le Président de la session, M. Sidi Mohamed Laghdaf, Ambassadeur de Mauritanie, a donné la parole à son successeur, M. Omar Hilale, Ambassadeur du Maroc, qui dirigera les travaux de la sixième session. 

M. Hilale, qui s’exprimait depuis Genève, a voulu voir dans la Conférence une lueur d’espoir dans un contexte marqué par les divergences, les confrontations de blocs et l’incapacité persistante de la communauté internationale à honorer ses engagements en matière de désarmement. Saluant une nouvelle opportunité de poursuivre les discussions sur les piliers susceptibles d’accélérer l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, il a lancé un appel en faveur d’actes de bonne foi, à même d’accroître la confiance et de contribuer à résoudre les défis techniques communs. 

« La possibilité du dialogue et du renforcement de la confiance au Moyen-Orient existe toujours », a déclaré M. Hilale.  Il a souhaité que la Conférence reste ouverte à la participation de tous les États Membres et d’acteurs divers –jeunes, experts et universitaires.  Il s’est dit certain du potentiel d’innovation de l’inclusivité, à l’image de son prédécesseur et Président de la cinquième session, qui avait convié cette année six nouvelles organisations non gouvernementales à assister aux séances publiques. 

La cinquième session de la Conférence, à laquelle Israël a, comme chaque année, refusé de participer, s’est déroulée dans l’ombre du conflit à Gaza et au Liban.  Dans le message qu’il lui a adressé lundi à l’ouverture, le Secrétaire général, M. António Guterres, a dit craindre que le « cauchemar incessant » de Gaza ne finisse par engloutir la région.  « Les conflits régionaux en cours qui font rage et les tensions qui atteignent un point d’ébullition » rendent la réalisation de l’objectif de la zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient de plus en plus urgent, avait-il ajouté. 

La session a donné lieu à une semaine d’échanges.  Le débat général de trois jours, lors duquel s’est exprimé le Président de l’Assemblée générale, a vu la participation de 20 États membres de la Conférence –pays arabes et Iran-, de la Ligue des États arabes, de quatre des cinq puissances nucléaires officielles -Chine, Fédération de Russie, France et Royaume-Uni- invitées en tant qu’observatrices, ainsi que des représentants de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et de l’Unité d’appui à l’application de la Convention sur les armes biologiques. 

Les participants ont discuté des trois questions clefs à l’ordre du jour, à savoir les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire, la vérification et la coopération technique dans ces deux domaines. 

La Conférence se tient en application de la décision 73/546 adoptée en 2018 par l’Assemblée générale et tire son mandat de la résolution sur le Moyen-Orient adoptée par la Conférence de 1995 des Parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires chargée d'examiner le Traité et la question de sa prorogation.  Elle a tenu sa première session en 2019 au Siège, comme les trois suivantes, en 2021, 2022 et 2023, la pandémie de COVID-19 ayant empêché la tenue de toute conférence en 2020. 

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La Deuxième Commission adopte trois projets de résolution sur le développement durable et l’ordre économique international

Soixante-dix-neuvième session,
22e séance plénière - matin
AG/EF/3611

La Deuxième Commission adopte trois projets de résolution sur le développement durable et l’ordre économique international

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Ce matin, la Deuxième Commission (questions économiques et financières) a adopté trois projets de résolution, dont deux à l’issue d’un vote.  Le développement durable, pilier des travaux de la Deuxième Commission et du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a fait l’objet de deux textes, parmi les premiers d’une longue série qui seront adoptés la semaine prochaine.  Le premier, consacré à l’entrepreneuriat, a été vivement critiqué, non pas en raison de son contenu, mais pour disqualifier son auteur principal, Israël.

Entrepreneuriat et développement durable

En début de séance, Israël a en effet présenté un projet de résolution intitulé « L’entrepreneuriat au service du développement durable » (A/C.2/79/L.10/Rev.1), qui a été adopté par 136 voix pour, 28 contre et 11 abstentions.  Ce texte insiste sur le rôle crucial que joue la création d’entreprises dans la concrétisation des trois dimensions (économique, sociale et environnementale) du développement durable.

Soulignant que l’entrepreneuriat permet d’offrir de nouveaux emplois, de réduire les inégalités et de créer des débouchés pour tous, notamment les femmes et les jeunes, les personnes handicapées, les personnes âgées, les peuples autochtones et les personnes en situation de vulnérabilité, l’Assemblée générale encouragerait les gouvernements, en adoptant ce texte, à promouvoir la création d’entreprises.

Lors de sa présentation, le délégué d’Israël a demandé aux délégations de ne pas politiser ce projet de résolution et de s’attacher à son contenu, non à son porte-plume.

De fait, le Liban a expliqué avoir demandé un vote sur ce texte, au nom du Groupe des États arabes, parce qu’il s’oppose non pas au contenu du projet de résolution, mais à son auteur principal, Israël.  Le Groupe a d’abord fait remarquer que la « Puissance occupante israélienne » n’a que faire des résolutions des Nations Unies.  Le délégué a aussi souligné le paradoxe de présenter une résolution abordant l’exploitation du potentiel économique de chaque pays alors qu’Israël continue de détruire celui de l’économie palestinienne, notamment son agriculture.

Au Liban également, « l’agression israélienne » depuis octobre 2023 a entraîné la destruction d’infrastructures et de secteurs clefs de l’économie.  Et en Syrie, les attaques israéliennes ont causé des dommages importants à des infrastructures de transport.  Le Groupe des États arabes a dès lors estimé qu’Israël n’est pas qualifié pour présenter un tel texte puisque, dans les faits, il s’oppose à ce qu’il préconise.

Après le vote, la déléguée de l’État de Palestine a remercié toutes les délégations qui ont décidé de ne pas souscrire à ce texte, parce qu’Israël n’a pas respecté la moindre résolution concernant le conflit israélo-palestinien et qu’il mène une « attaque génocidaire contre le peuple palestinien ».  Israël ne devrait plus être un État Membre des Nations Unies, a tranché la déléguée.

Alors qu’elle a coutume de s’abstenir sur ce sujet, l’Afrique du Sud a expliqué son vote contre, cette année, en raison de la situation à Gaza.  « Nous ne pouvons pas détourner le regard et prétendre que tout va bien. »

Pour sa part, la Fédération de Russie a relevé les efforts de la délégation israélienne pour parvenir à un texte de résolution acceptable.  Si la délégation a voté pour le texte, elle s’est dissociée du consensus sur l’alinéa 5 du préambule, estimant que la terminologie relative au Pacte pour l’avenir est floue.

Dans la même veine, l’Argentine, expliquant avoir « adopté une nouvelle politique », s’est dissociée du Pacte pour l’avenir et du Programme pour le développement durable à l’horizon 2030, ceux-ci étant non contraignants à son avis.  Elle a émis des réserves sur tous les paragraphes du projet de résolution qui y font référence, de même que sur tous les termes susceptibles d’écorner le principe de la propriété privée.

Parmi les pays ayant voté pour le projet de résolution, les États-Unis ont regretté que certaines délégations insistent sur la politisation de ce sujet.

L’Union européenne s’est félicitée que le texte s’appuie sur le Pacte pour l’avenir, ainsi que sur l’Accord de Paris et le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe.  La délégation a également souligné la nécessité de renforcer l’autonomisation des femmes par le biais de l’entrepreneuriat.

Petits États insulaires en développement

La Commission s’est ensuite penchée sur la situation des petits États insulaires en développement (PEID).  Elle a adopté par consensus le projet de résolution intitulé « Suivi et application des Modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations de Samoa) et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement » (A/C.2/79/L.41), présenté le 13 novembre par le Groupe des 77 et la Chine.  Le texte s’appuie sur le Programme d’Antigua-et-Barbuda adopté lors de la quatrième Conférence internationale sur les PEID, tenue en mai 2024, et appelle à sa mise en œuvre intégrale, rapide et effective.

En adoptant ce texte, l’Assemblée générale constaterait qu’il convient de prendre de toute urgence des mesures pour faire face aux effets néfastes des changements climatiques, qui présentent des risques considérables pour les PEID et constituent pour beaucoup d’entre eux le principal risque pesant sur leur survie et leur viabilité.

Elle appellerait à prendre d’urgence des mesures concrètes pour réduire la vulnérabilité des PEID et attendrait avec intérêt la mise en fonctionnement du Centre d’excellence pour le développement durable des PEID établi par le Gouvernement d’Antigua-et-Barbuda.  Par ailleurs, elle inviterait les États Membres à tirer parti de la Conférence des Nations Unies sur l’océan de 2025 pour renforcer les capacités des PEID en matière de conservation et d’utilisation durable des océans.

Si le projet de résolution a été adopté par consensus, plusieurs délégations ont toutefois émis des réserves et des critiques.

Remarquant qu’il s’agit de la première résolution de la Deuxième Commission depuis la quatrième Conférence internationale sur les PEID, la délégation du Samoa, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a tenu à rappeler que l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques ne doit pas remettre en cause l’existence et le statut d’État des PEID ni leur souveraineté ou leur adhésion aux Nations Unies.  Dans le futur, le groupe s’efforcera de clarifier le libellé à ce sujet.

Dans la même veine, la Nouvelle-Zélande, au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a regretté que le libellé relatif à l’action climatique ait été largement vidé de sa substance et ne reflète pas les nécessités réelles des PEID. Observant un « manque de cohérence » du libellé relatif à leurs problèmes existentiels, le délégué a réitéré son soutien à l’Accord de Paris, à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ainsi qu’à l’égalité de genre et à l’éducation.  « Les PEID sont les gardiens des océans », a-t-il formulé, ajoutant qu’un libellé « plus musclé » aurait été préférable et que la voix des PEID devrait davantage être entendue.

La France aurait également souhaité un libellé plus ambitieux sur le climat.  Elle a regretté qu’aucun consensus n’ait été trouvé sur la référence au « consensus de Dubaï » de la COP28, ou encore sur la référence à l’Accord de Paris.  La France a aussi appelé à une meilleure prise en compte de la vulnérabilité multidimensionnelle (environnementale, mais aussi économique et sociale) dans le financement du développement, ainsi que dans les instruments d’analyse de la dette, et a préconisé des clauses de suspension du service de la dette en cas de catastrophes climatiques.

Comme la France, l’Union européenne a regretté que le lien entre climat et sécurité ne figure pas dans le libellé.  Elle aurait aussi aimé que le texte salue le Sommet de l’avenir et le Pacte pour l’avenir et ses annexes, pourtant adoptés par consensus.

Rappelant la tenue prochaine (juin 2025), à Nice, de la troisième Conférence des Nations Unies sur l’océan, la délégation française a salué le paragraphe du texte qui appelle les États Membres à en tirer profit pour renforcer les capacités des PEID en matière de conservation et d’utilisation durables des océans.

Pour sa part, l’Argentine s’est dissociée de tous les paragraphes non conformes à la politique étrangère de son pays, aujourd’hui réorientée vers une politique de marché ouvert et d’exportations.  Comme après l’adoption du texte sur l’entrepreneuriat, le délégué a insisté sur le fait que l’Argentine ne se sent pas contrainte par les paragraphes relatifs au développement durable, au Pacte pour l’avenir et aux changements climatiques.  Ses réserves s’étendent aux paragraphes mentionnant la question du genre et à ceux contrevenant au respect du principe de la propriété privée.

Mondialisation et interdépendance 

En venant au sujet de la mondialisation et de l’interdépendance, la Deuxième Commission a adopté par 126 voix pour, 51 voix contre et 3 abstentions (Arménie, Tonga et Türkiye) le projet de résolution intitulé « Vers un nouvel ordre économique international » (A/C.2/79/L.30), présenté par le Groupe des 77 et la Chine le 13 novembre.

Comme dans sa dernière résolution sur le même sujet adoptée en 2022, l’Assemblée réaffirmerait, par ce texte, qu’il faut continuer de s’employer à instaurer un nouvel ordre économique international fondé sur les principes d’équité, d’égalité souveraine, d’interdépendance, d’intérêt commun, de coopération et de solidarité entre tous les États.  La mouture 2024 du texte souligne qu’il faut procéder de toute urgence à des réformes dans le système financier international pour régler les problèmes causés par la détérioration des finances publiques, les contraintes budgétaires, la dette, les risques pour la stabilité monétaire et financière et la pénurie d’investissements productifs et durables.

Autre nouveauté cette année, l’Assemblée constaterait avec préoccupation que le déficit de financement du commerce mondial, estimé à 2 500 milliards de dollars, a fortement augmenté ces dernières années.  Enfin, elle réaffirmerait la souveraineté permanente intégrale de chaque État sur ses ressources naturelles et sur toutes les activités économiques, et demanderait que la coopération internationale soit renforcée pour établir des chaînes de valeur des minéraux, entre autres ressources naturelles, aux fins de la diversification de l’économie, de la création de valeur à la source, de l’industrialisation et du développement durable.

La Hongrie, qui a demandé un vote sur ce texte au nom de l’Union européenne, a estimé que l’avant-projet n’était pas une bonne base de travail, notamment en ce qui concerne la gouvernance économique mondiale.  Elle a critiqué le nouveau libellé par rapport à la précédente résolution sur le même sujet.  Il est important, selon elle, d’avoir des « libellés constructifs », notamment sur la gouvernance économique mondiale et le Pacte pour l’avenir.  La délégation a réaffirmé l’engagement de l’UE à promouvoir des solutions multilatérales à des problèmes communs au niveau international.

Après le vote, les États-Unis ont indiqué s’être opposés au projet de résolution, comme à tous les textes qui cherchent à prescrire des actions pour des institutions indépendantes de l’ONU, comme le Fonds monétaire international, la Banque mondiale ou l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Le délégué a également jugé problématiques la mention des mesures unilatérales et l’appel au transfert de technologies non volontaire, ainsi que des « références inacceptables » à l’occupation étrangère.

La Deuxième Commission se prononcera sur d’autres projets de résolution lundi 25 novembre, à partir de 15 heures.

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La Troisième Commission a clôturé ses travaux en adoptant huit projets de résolution, se divisant sur la Déclaration de Durban, la diversité des structures familiales et ses méthodes de travail

Soixante-dix-neuvième session,
56e et 57e séances plénières – matin et après-midi
AG/SHC/4433

La Troisième Commission a clôturé ses travaux en adoptant huit projets de résolution, se divisant sur la Déclaration de Durban, la diversité des structures familiales et ses méthodes de travail

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles a terminé l’examen des 50 projets de résolution et de décision qu’elle soumettra à l’Assemblée générale cette année.  Huit textes ont été entérinés aujourd’hui dont un seul a été mis aux voix, concernant la Déclaration et le Programme d’action de Durban sur l’élimination du racisme.  La question de la diversité des structures familiales et des méthodes de travail de la Commission ont elles aussi polarisé les délégations, sans toutefois entraîner de vote. 

Accusations d’antisémitisme concernant le suivi de la Déclaration de Durban

Première pomme de discorde, le texte intitulé « Appel mondial à une action concrète pour l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et pour l’application intégrale et le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban » (A/C.3/79/L.48/Rev.1), présenté par l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et la Chine, a été adopté par 128 voix pour, 19 contre et 37 abstentions, à l’issue d’un vote demandé par Israël. 

Accusant la Conférence de Durban d’avoir promu le racisme et la haine en ciblant Israël et les Juifs, la délégation israélienne a affirmé qu’elle cesserait de demander la mise aux voix de cette résolution lorsque sa position sur la question serait reconnue.  Les États-Unis ont indiqué ne pouvoir soutenir le texte en raison de la persistance de formulations restreignant la liberté d’expression, ainsi que d’un deux poids, deux mesures à caractère antisémite appliqué à Israël. 

Au nom de l’Union européenne, la Hongrie a expliqué que le texte contenait des éléments qui ne font pas consensus, poussant ses États membres à s’abstenir ou à voter contre. 

Dénonçant les « récits biaisés » sur la Conférence de Durban, l’Afrique du Sud a regretté qu’Israël, « seul État à mener une politique d’apartheid et de génocide contre un autre peuple », cherche à saper les efforts de la communauté internationale, insistant sur l’importance du projet de résolution.  À l’issue de l’examen du projet, Israël, l’Afrique du Sud, et l’Iran ont fait usage de leur droit de réponse. 

En vertu de ce texte, la Commission regrette notamment que le programme d’activités relatives à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine n’ait pas été intégralement appliqué en ce qui concerne les questions de reconnaissance, de justice et de développement.

Dissensus sur la diversité des structures familiales 

Le texte intitulé « Célébration du trentième anniversaire de l’Année internationale de la famille en 2024 » (A/C.3/79/L.12/Rev.1), présenté par l’Ouganda au nom du Groupe des 77 et de la Chine a été adopté par consensus.  Il invite notamment les États Membres à adopter des politiques axées sur la famille pour faire face aux changements démographiques qui la concernent, et à accroître les investissements à cet égard afin de garantir l’instauration d’une couverture sanitaire universelle et l’accès égal et équitable de tout le monde à une éducation de qualité.

Les États Membres sont également invités à investir dans la sécurité sociale ainsi que dans les systèmes de protection sociale, les systèmes de pension et les systèmes de soins pour tous, et à adopter une perspective multigénérationnelle dans les politiques sociales inclusives.

Pointant les mêmes carences, l’Union européenne, par la voix de la Hongrie, et le Canada au nom d’un groupe de pays, ont déploré que le texte ne reconnaisse pas les droits fondamentaux des familles monoparentales, la diversité des structures familiales et que le concept de santé sexuelle et procréative en ait été supprimé.  Le Mexique, le Royaume-Uni et les États-Unis se sont positionnés sur la même ligne, ces derniers accusant « certains États » d’utiliser l’ONU pour s’en prendre aux personnes LGBTQI+ . 

Le Saint-Siège s’est félicité de l’ajout de nouveaux paragraphes, notamment celui sur la réduction de la mortalité maternelle et infantile.  Il a salué le Groupe des 77 et de la Chine pour avoir évité l’utilisation de termes non consensuels, favorisant une adoption par consensus.  La Russie, le Bélarus, le Nigéria et l’Égypte ont eux aussi salué le texte.  Cette dernière a estimé que le concept de santé sexuelle et procréative mettait en danger l’approche globale nécessaire pour que l’appui voulu soit fourni aux familles. 

L’Argentine a fait valoir que les soins au sein de la famille ne sont pas un travail.  Elle a par ailleurs appelé à se concentrer sur la baisse du taux de fécondité, passé de 3,3 enfants par femme en 1960 à 1,5 enfant par femme aujourd’hui au sein des pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), compromettant les générations futures et la viabilité de la famille. 

Lutte globale contre la drogue

Également adopté par consensus, le projet de résolution intitulé « Aborder et combattre le problème mondial de la drogue dans le cadre d’une stratégie globale, intégrée et équilibrée » (A/C.3/79/L.6/Rev.1), présenté par le Mexique, demande aux États Membres de promouvoir la coopération bilatérale, régionale et internationale avec les États les plus directement concernés par la culture illicite de plantes servant à fabriquer des drogues et par la production, la fabrication, le transit, le trafic, la distribution et la consommation illicites et l’abus de stupéfiants et de substances psychotropes. 

Les États Membres sont également appelés à adopter des mesures exhaustives pour mettre fin à la consommation excessive, au détournement et à l’usage impropre de médicaments délivrés sur ordonnance, et à intensifier l’action menée aux niveaux national et international face au problème de l’apparition de nouvelles substances psychoactives et à la menace évolutive que représentent les stimulants de type amphétamine, dont les méthamphétamines. 

Saluant un « instrument utile » ne banalisant pas la consommation de drogue, la Fédération de Russie s’est félicitée, comme le Saint-Siège, que ce projet promeuve un mode de vie sain.  Elle s’est cependant dissociée des alinéas 11 et 31 du préambule qui renvoient à des documents non adoptés par les Nations Unies, tout comme l’Égypte, qui a notamment fait allusion à celui sur la lutte contre le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). 

Bien qu’évoquant un texte équilibré sur la question de l’offre et de la demande, la Chine, Cuba et Singapour ont regretté qu’il reste loin des ambitions, notamment car il n’intègre pas les passages consensuels des résolutions de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale.  L’Algérie a estimé que le projet aurait dû inclure les questions relatives à la culture, la transformation, le transport de la drogue, ainsi que les liens avec le financement du terrorisme. 

De leur côté, la Suisse, le Brésil et le Canada ont regretté que la réduction des risques ne soit pas incluse dans le texte, espérant qu’elle le serait dans les prochaines moutures. 

Les technologies numériques comme outils de développement

Présenté par l’Ouganda, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, et adopté par consensus le texte sur la « Suite donnée au Sommet mondial pour le développement social et à la vingt-quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale » (A/C.3/79/L.13/Rev.1), exhorte les États Membres à mobiliser davantage de financements internationaux pour développer les capacités numériques des pays en développement.

Les États-Unis se sont inquiétés des transferts de technologies « non volontaires » pouvant entraver l’innovation.  Concernant les aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle, ils ont regretté que le texte ne prenne en compte que de manière « incomplète et déséquilibrée » les formulations de la déclaration de Doha (2001) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  À l’instar d’Israël, ils se sont dissociés du libellé « occupation étrangère » du paragraphe 31 du préambule. 

Calendrier d’examen prévisible, harmonisation et numérisation des organes de traités

S’agissant des « Organes conventionnels des droits de l’homme » (A/C.3/79/L.38/Rev.1), la Commission a insisté sur l’importance de la coordination et du caractère prévisible du processus d’établissement de rapports, en vue de parvenir à l’élaboration d’un calendrier clair et régulier pour l’établissement des rapports des États parties.

Présenté par l’Islande, au nom de la Belgique, de la Slovénie et des pays nordiques, et adopté par consensus, ce texte invite en outre les organes conventionnels à redoubler d’efforts pour favoriser l’utilisation des technologies numériques dans leur travail, notamment dans le cadre de l’examen des rapports périodiques et des communications émanant de particuliers.

Rappelant qu’elle était l’État hôte des organes de traité, la Suisse a affirmé qu’elle aurait souhaité un langage plus fort, tout en saluant les compromis trouvés concernant un calendrier d’examen prévisible, l’harmonisation des méthodes de travail et la poursuite de la numérisation.  Sur des positions similaires, El Salvador et le Pérou ont appelé les États Membres à garantir un financement adéquat. 

Estimant de son côté que les avis des organes de traité n’acquièrent de force obligatoire que lorsqu’ils sont intégrés dans les systèmes juridiques nationaux, le Niger a dénoncé les « approches purement philosophiques » tentant de remettre en cause la « nature humaine pourtant immuable ». 

Liberté de religion et liberté d’expression 

La Troisième Commission a adopté par consensus et sans modifications cette année le texte intitulé « Lutte contre l’intolérance, les stéréotypes négatifs, la stigmatisation, la discrimination, l’incitation à la violence et la violence fondés sur la religion ou la conviction » (A/C.3/79/L.39), présenté par l’Égypte, au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI).

Après l’adoption, les États-Unis ont souligné que la lutte contre ce fléau doit être menée sans limiter la liberté d’expression.  Appuyant cet argument, l’Argentine a estimé que le terme « intolérance » devrait avoir une définition claire pour ne pas être utilisé de façon abusive contre la liberté d’expression.  Elle a également souhaité que les efforts de défense de la liberté religieuse concernent l’ensemble des religions, et pas uniquement l’islam. 

Alléger la charge de travail

À la suite d’un examen long et houleux, la Troisième Commission a adopté par consensus et tel qu’oralement révisé le texte intitulé « Méthodes de travail de la Troisième Commission » (A/C.3/79/L.67).  « L’intention de ce projet est simple: alléger la charge de travail de la Troisième commission qui a augmenté de façon spectaculaire au cours de la dernière décennie », a indiqué la Côte d’Ivoire, au nom du Groupe des États d’Afrique, en le présentant.  À l’instar du Nigéria, nombre de délégués ont d’ailleurs fait état de leur très grande lassitude, avouant ouvertement être épuisés après huit semaines de travaux ininterrompus.

Par ce texte, l’Assemblée générale demanderait de ramener progressivement à un nombre raisonnable le nombre de dialogues interactifs organisés lors de chaque session annuelle, notamment en envisageant d’y fixer un plafond.

Le Japon, appuyé par la Hongrie qui intervenait au nom de l’Union européenne, a toutefois estimé que l’examen de la situation d’un pays en particulier ne doit pas se faire lors de séances combinées, surtout si cette situation représente une menace.  Les États-Unis se sont eux aussi opposés au plafonnement des débats interactifs, en particulier pour les situations de pays.

Avant l’adoption du texte, El Salvador, au nom du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a présenté une proposition d’amendement oral demandant la suppression du paragraphe 13, qui prévoit que la Troisième Commission réexamine ses méthodes de travail en 2031.

La délégation a expliqué que son objectif principal est de garantir la consultation avec tous les États Membres, afin de permettre à toutes les régions et tous les pays, en particulier les petits États comme le sien, de ne pas perdre le droit de décider d’une question aussi importante que les méthodes de travail d’une grande commission de l’Assemblée générale.  Cette position a été appuyée par l’Union européenne, par la voix de la Hongrie.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, le Burundi a estimé au contraire que cette proposition n’ajoute rien au texte mais pourrait affecter la révision future des méthodes de travail en supprimant le pouvoir de décision des États Membres et en le déléguant au Bureau de la Troisième Commission.

Le projet d’amendement a été rejetée par 80 voix pour, 87 voix contre et 12 abstentions.  Le vote a été demandé par le Cameroun, au nom du Groupe des États d’Afrique.

La République de Corée a ensuite demandé un vote sur le paragraphe 4 qui a été maintenu par 103 voix pour, 69 contre, et 7 abstentions. 

L’Égypte a rappelé que ce paragraphe, selon les termes duquel les dialogues interactifs pourraient être combinés chaque fois que possible, notamment sur une base régionale, a fait l’objet de consultations approfondies, regrettant la décision d’appeler à un vote après qu’un consensus a été trouvé.  A contrario, le Pérou a estimé que tous les efforts n’ont pas été déployés pour parvenir à un consensus. 

Malheureusement, ce projet de résolution est devenu l’otage des divisions entre États. L’incapacité à s’entendre sur un texte aussi court et technique est de mauvais augure, s’est lamenté le Bélarus.

1 321 déclarations dans le cadre des dialogues 

La Troisième Commission a terminé ses travaux en adoptant le texte « Projet de programme de travail de la Troisième Commission pour la quatre-vingtième session de l’Assemblée générale » (A/C.3/79/L.75).

Le Président a clôturé cette session en se félicitant du travail accompli.  « Ce fut un grand honneur pour mon beau pays, le Burundi, et pour moi-même », a déclaré M. Zéphyrin Maniratanga, précisant qu’au cours des huit dernières semaines, la Commission a engagé des dialogues interactifs avec 77 titulaires de mandat, présidents d’organes conventionnels et experts.  Au total, nous avons enregistré 1 321 déclarations dans le cadre des dialogues et 634 lors des discussions générales, a-t-il indiqué.  Nous avons aussi entendu 598 déclarations en lien avec les propositions de projet et adopté 49 projets de résolution.  Ces réalisations sont le fruit d’un engagement collectif et témoignent de notre détermination à faire avancer les priorités mondiales en matière de justice sociale et d’équité, s’est-il félicité. 

La traditionnelle déclamation des poèmes de clôture a cette année été assurée par les délégués du Royaume-Uni, de la Tunisie, du Koweït, de Sri Lanka, du Bélarus, de la Jordanie et de l’Égypte, sans oublier Cuba pour la résolution sur le « droit à la fête », amendée par l’Afrique du Sud.

Se distinguant par sa brièveté, le poème de la Jordanie semblait résumer un certain état d’esprit: « What the heck? »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: le Conseil de sécurité reste préoccupé par les conséquences humanitaires et sécuritaires de l’embrasement régional

9793e séance – matin
CS/15909

Syrie: le Conseil de sécurité reste préoccupé par les conséquences humanitaires et sécuritaires de l’embrasement régional

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Les répercussions pour les civils du conflit à Gaza et au Liban, l’insécurité et la corruption du « régime Assad » qui minent leur pays de l’intérieur, et la situation humanitaire dramatique découlant d’un conflit qui dure depuis près de 15 ans ont été au cœur de la séance d’information mensuelle sur la Syrie qu’a tenue, ce matin, le Conseil de sécurité. 

Le rôle de la société civile pour que soient traduits en justice les responsables de l’emploi d’armes chimiques contre les Syriens et pour sortir politiquement de la crise a également marqué une séance à laquelle ont participé l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie ainsi que les représentantes du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et d’une plateforme regroupant des centaines d’organisations non gouvernementales (ONG) syriennes. 

Comme l’avait fait en septembre dernier l’Envoyé spécial Geir Otto Pedersen, son adjointe Najat Rochdi a déclaré que la priorité immédiate pour la Syrie est la désescalade, le pays étant frappé par « les tempêtes du conflit régional » et des vagues d’insécurité à l’intérieur de ses propres frontières.  Ainsi l’année 2024 pourrait-elle être l’année la plus violente depuis 2020. 

À l’appui de ce cri d’alarme, Mme Rochdi a signalé que, pas plus tard qu’hier, des frappes –peut-être les plus meurtrières en Syrie à ce jour– ont entraîné la mort de dizaines de personnes près de Palmyre.  Elle a noté qu’alors qu’Israël affirme que ses frappes visent des cibles liées à l’Iran, au Hezbollah ou au Jihad islamique palestinien, l’ONU ne peut que constater « une fois de plus » qu’elles ont fait de nombreuses victimes civiles, y compris au cœur de Damas. 

Dans son exposé, Mme Rochdi a indiqué que le nord-est de la Syrie est pris pour cible par des tirs de drones américains contre des bases militaires appartenant à l’Iran mais aussi, après l’attentat d’Ankara du 23 octobre, par des tirs de l’aviation turque contre des positions du PKK/YPG, tandis que la région du désert central connaît une multiplication d’attaques de l’EIIL/Daech. 

Dans ce contexte périlleux, et pour ramener la région vers un semblant de calme, L’Envoyée spéciale adjointe a réitéré l’appel du Secrétaire général à l’instauration immédiate d’un cessez-le-feu à Gaza et au Liban et à faire respecter la souveraineté, l’unité, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie.

Afflux massif en Syrie de réfugiés fuyant les bombardements au Liban

La Syrie étant en proie aux circonstances rappelées par Mme Rochdi, Mme Edem Wosornu, Directrice de la Division des opérations et de la communication de l’OCHA, n’a pu que dresser un tableau sombre de la situation humanitaire dans le pays, le plan international piloté par l’OCHA pour venir en aide à ses populations n’étant, à ce stade, financé qu’à hauteur de 28%. 

L’intensification des hostilités au Liban a entraîné un afflux massif de réfugiés vers la Syrie, avec plus de 540 000 personnes qui ont traversé la frontière depuis fin septembre.  Parmi elles, a-t-elle détaillé, deux tiers sont des Syriens, la moitié sont des enfants, plus de 7 000 sont des femmes enceintes, et 40% des ménages arrivant dans le pays sont dirigés par des femmes. 

Si l’afflux de réfugiés aggrave une crise humanitaire qui frappait déjà près de 17 millions de Syriens, un début d’épidémie de choléra dans le camp surpeuplé de Hol menace en outre de plonger dans l’insécurité sanitaire les dizaines de milliers de personnes qui y vivent et au-delà.  Mme Wosornu a également mis l’accent sur les 1,4 million de déplacés qui, au nord-ouest de la Syrie, attendent la fourniture d’une aide d’autant plus urgente que se profilent les rigueurs de l’hiver.

Avant d’aborder le volet politique de la situation en Syrie, l’Envoyée spéciale adjointe a salué la décision du Gouvernement syrien de prolonger de trois mois supplémentaires l’autorisation accordée à l’ONU d’utiliser les postes frontière de Bab el-Salam et de Raaï, qui restent essentiels pour acheminer l’aide aux millions de personnes dans le besoin. 

Mais à ce même Gouvernement, Mme Rochdi a surtout demandé que la Commission constitutionnelle reprenne ses réunions, notamment avec les membres de la Commission syrienne de négociation de l’opposition.  Selon elle, cela enverrait le message clair que le cadre du processus politique est toujours vivant et opérationnel, qu’il existe un Gouvernement syrien et une opposition dont les membres sont capables de s’asseoir autour de la table pour traiter les questions cruciales au cœur du conflit intrasyrien.  Et parce qu’il existe un fort désir de réconciliation et de paix véritables au sein des communautés syriennes, elle a insisté sur le fait que « la société civile doit avoir voix au chapitre dans ce processus ». 

Vives accusations d’une représentante de la société civile syrienne contre la Russie…

S’exprimant au nom de « Madaniya », une plateforme réunissant une centaine d’ONG de la société civile syrienne, Mme Sawsan Abou Zainedin n’a pas mâché ses mots contre la Russie, dont les vetos répétés ont forcé les victimes, les survivants et les défenseurs des droits humains syriens à surmonter par leurs propres moyens la paralysie du Conseil.  Ainsi, a-t-elle affirmé, la communauté internationale doit à la société civile que des auteurs de crimes les plus abominables soient aujourd’hui jugés devant des tribunaux en Allemagne, en Suède, en France, aux États-Unis et au Royaume-Uni ou encore qu’ait été établi le « Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011 », le premier du genre porté par l’ONU. 

« Madaniya est née pour dire “non” à l’impunité et proposer des solutions politiques pour sortir de la crise, ce que le Conseil de sécurité n’est toujours pas en mesure de faire », a encore lancé Mme Zainedin. 

Le représentant de la Fédération de Russie, qui a pris la parole après cette intervention fervente, a reproché sèchement à la présidence britannique d’avoir politisé la séance en invitant une représentante de la société civile « qui ne représente en rien ses concitoyens ».  Le Conseil de sécurité n’est pas un organe que l’on peut s’approprier pour y défendre le colonialisme anglosaxon, a-t-il accusé, avant de s’en prendre sur plusieurs fronts aux États-Unis. 

…Et réquisitoire russe contre « l’occupation » américaine en Syrie 

Selon la Fédération de Russie, ces derniers seraient coupables de l’occupation de zones entières du territoire syrien au prétexte fallacieux d’y lutter contre le terrorisme, terrorisme que les États-Unis -soutenus par les services secrets occidentaux et ukrainiens- appuieraient pour relancer des plans d’attaque contre Damas.  Washington ne s’en tient pas là, son occupation visant l’exploitation des riches ressources agricoles, en pétrole et en gaz de la Syrie, a encore affirmé le représentant, les sanctions « unilatérales et illégales » des États-Unis achevant de maintenir le peuple syrien dans la souffrance. 

Après avoir salué les efforts de la Syrie pour améliorer les conditions de vie des populations, y compris des personnes ayant fui le Liban pour trouver refuge à Damas, « où règne un ordre que refusent d’admettre les Occidentaux », le représentant russe s’est borné à rappeler que seuls le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie et la mise en œuvre de solutions politiques par les Syriens eux-mêmes permettront, comme l’envisage la résolution 2254 du Conseil, de régler la crise syrienne. 

Avant de réagir aux propos à charge de la Russie, les États-Unis ont salué le témoignage « précis » de Mme Zainedin, confirmant qu’existent des allégations très documentées de cas de détention arbitraire et de torture frappant les personnes ayant fui le Liban.  Ces énièmes violations des droits humains démontrent que le régime d’Assad reste un régime d’oppresseurs, a déclaré le représentant. 

Après avoir souligné que les sanctions des États-Unis contre ce régime comprennent de nombreuses dérogations pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, la résolution 2264 du Conseil prévoyant des dérogations du même type, le représentant américain a répondu à la Russie que le quotidien terrible des Syriens n’est que l’effet d’un régime corrompu qui soutire aux forces économiques syriennes des pots-de-vin et préfère discuter avec ses parrains iraniens, lesquels cherchent toujours à utiliser la Syrie comme tremplin à leurs méfaits au Moyen-Orient. 

« Les États-Unis ont alloué et continuent d’allouer des millions de dollars aux communautés du nord-ouest de la Syrie pour les aider à bâtir des entreprises et à disposer de moyens propres de subsistances » et « c’est bien le régime syrien, qui s’apparente aussi à un narco-État à travers la production et le commerce du captagon, qui met la main sur les fruits de leur travail », a avancé le représentant. 

Le Conseil de sécurité accusé d’ingratitude par le représentant de la Syrie

De son côté, le représentant de la Syrie a accusé les États-Unis et Israël et, dans une moindre mesure, la Türkiye de semer le chaos dans plusieurs régions en y déchaînant leurs activités terroristes et destructrices et en foulant au pied tous les principes de la Charte des Nations Unies, cela « dans le silence coupable du Conseil de sécurité ».  Le délégué a fait part de sa profonde incompréhension, le Gouvernement syrien accueillant du mieux qu’il peut les milliers de personnes ayant fui le Liban bombardé par Israël, facilitant le travail humanitaire des agences de l’ONU et des ONG et cherchant par la voie législative à organiser le retour dans leur foyer des réfugiés syriens.  « Ce que saluent et reconnaissent les sommets organisés par l’Arabie saoudite et les rencontres tenues dans le cadre du processus d’Astana, ce Conseil ne parvient pas à le faire », a déploré le représentant. 

Partie prenante à ce processus, l’Iran a attribué la dégradation de la situation en Syrie avant tout aux actions d’Israël, accusé de mener une politique systématique de destruction des infrastructures du pays.  Dénonçant le feu vert donné par les États-Unis à Israël, notamment à travers leur récent veto au Conseil de sécurité, le représentant iranien a exhorté ses membres à mettre un terme à l’impunité d’Israël. 

La représentante de la Türkiye, également partie au processus d’Astana, a assuré le Conseil de l’engagement de son pays à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale syrienne, défendant toutefois son droit à la légitime défense.  « La stabilité et la paix dans la région nécessitent de se débarrasser des terroristes, notamment Daech et le PKK », a ainsi argué la déléguée. 

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LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Exposés

Mme NAJAT ROCHDI, Envoyée spéciale adjointe du Secrétaire général pour la Syrie, a souligné, comme l’avait fait en septembre dernier M. Geir Otto Pedersen, que la priorité immédiate pour la Syrie est la désescalade.  Le pays est frappé par les tempêtes incessantes du conflit régional et par les vagues croissantes de conflits à l’intérieur de ses propres frontières, a-t-elle ainsi indiqué, ajoutant que 2024 pourrait être l’année la plus violente depuis 2020.

Mme Rochdi a insisté sur le fait que, dans ce contexte d’extrême tension, la communauté internationale doit agir pour empêcher à tout prix la Syrie d’être entraînée dans une conflagration plus vaste et plus dure.

À l’appui de ce véritable cri d’alarme, l’Envoyée spéciale adjointe a constaté que les frappes aériennes israéliennes contre la Syrie continuent d’augmenter, tant en fréquence qu’en intensité.  Elle en a voulu pour preuve que, pas plus tard qu’hier, des frappes ont entraîné la mort de dizaines de personnes près de Palmyre.  C’est probablement la frappe israélienne la plus meurtrière en Syrie à ce jour, a-t-elle dit.

Mme Rochdi a noté que, si Israël affirme que ses frappes visent des cibles liées à l’Iran, au Hezbollah ou au Jihad islamique palestinien, l’ONU ne peut que constater « une fois de plus » que ces frappes, y compris au cœur même de Damas, font des victimes civiles.  Des infrastructures civiles ont également été touchées, des ponts, des routes, des passages frontaliers civils, tant officiels qu’informels, dans certains cas pour la troisième fois, a ajouté l’Envoyée spéciale adjointe. 

Cette situation rend toujours aussi périlleux le passage en Syrie des civils fuyant la violence au Liban et provoque, de plus, de graves perturbations dans les importations et les exportations de biens essentiels, qui ont chuté de 40 à 50%, a poursuivi Mme Rochdi.  Les prix de l’essence et des produits de première nécessité ont augmenté de manière vertigineuse, laissant les plus vulnérables dans une situation précaire, a-t-elle encore relevé.

L’Envoyée spéciale adjointe a ensuite attiré l’attention sur la situation particulière du nord-est de la Syrie, région prise pour cible par des tirs de drones américains contre des bases militaires qui appartiendraient à l’Iran, mais aussi, après l’attentat d’Ankara du 23 octobre, par des tirs de l’aviation turque contre des positions du PKK/YPG.  Après avoir signalé une multiplication d’attaques de l’État islamique d’Iraq et du Levant/Daech dans la région du désert central, elle a jugé urgent, pour ramener la région vers un semblant de calme, l’instauration immédiate d’un cessez-le-feu à Gaza et au Liban et de faire respecter la souveraineté, l’unité, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie et de tous les États de la région.

Après avoir rappelé que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), plus d’un demi-million de personnes, majoritairement des femmes et des enfants, ont fui les frappes aériennes israéliennes au Liban et ont traversé la frontière vers la Syrie depuis fin septembre -et réitéré l’appel du Secrétaire général à toutes les parties prenantes d’agir sur le plan humanitaire de manière responsable-, Mme Rochdi a abordé le volet politique de son intervention.  Elle a d’abord salué la décision du Gouvernement syrien de prolonger de trois mois supplémentaires l’autorisation accordée à l’ONU d’utiliser les postes frontière de Bab el-Salam et de Raaï, qui restent essentiels pour acheminer l’aide aux personnes dans le besoin dans le nord-ouest du pays.

À ce même Gouvernement, Mme Rochdi a surtout demandé de s’impliquer réellement dans les processus politiques en cours, ce qui signifie en premier lieu que la Commission constitutionnelle reprenne ses réunions, notamment avec les membres de la Commission syrienne de négociation de l’opposition.  Cela enverrait un message clair, a-t-elle dit, à savoir que le cadre du processus politique est toujours vivant et opérationnel, qu’il existe un Gouvernement syrien et une opposition dont les membres sont capables de s’asseoir autour de la table pour traiter les questions cruciales au cœur du conflit intrasyrien, mais aussi de celles relatives à la protection, à la souveraineté, à la sécurité, à l’économie, aux sanctions, aux détenus, aux disparus et aux réfugiés.

Et parce qu’il existe un fort désir de réconciliation et de paix véritables au sein des communautés syriennes, « la société civile doit avoir voix au chapitre dans ce processus », a conclu Mme Rochdi. 

Mme EDEM WOSORNU, Directrice de la Division des opérations et de la communication au Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), a présenté une mise à jour sur la situation humanitaire en Syrie, abordant trois points essentiels: l’impact des conflits régionaux sur les civils, l’aggravation des besoins humanitaires et le besoin urgent de financement accru pour maximiser l’efficacité des ressources.

Mme Wosornu a d’abord constaté que l’intensification des hostilités au Liban a entraîné un afflux massif de réfugiés vers la Syrie, avec plus de 540 000 personnes ayant traversé la frontière depuis fin septembre.  Parmi elles, deux tiers sont des Syriens, la moitié sont des enfants, plus de 7 000 sont des femmes enceintes, et 40% des ménages arrivant dans le pays sont dirigés par des femmes, a-t-elle détaillé.

La responsable de l’OCHA a salué le maintien de l’ouverture des frontières par le Gouvernement syrien, tout en regrettant que les frappes aériennes à proximité des points de passage aient rendu ces itinéraires dangereux et impraticables pour les véhicules, contraints de prendre des chemins plus longs et plus risqués.  Ces frappes ont également endommagé un poste frontalier du HCR à Joussié ainsi qu’une route reliant Damas à Homs, compliquant davantage l’acheminement de l’aide.

L’afflux de réfugiés aggrave une crise humanitaire déjà profonde dans un pays où 16,7 millions de personnes –soit plus de 70% de la population– dépendent d’une assistance vitale, a observé Mme Wosornu.  Elle a souligné que les hostilités dans le nord-est, outre les pertes humaines qu’elles ont causées, ont détruit des infrastructures essentielles, privant des milliers de personnes d’eau, d’électricité et de carburant.  Par ailleurs, une épidémie de choléra émerge avec 270 cas suspectés, principalement dans le camp surpeuplé de Hol, où des dizaines de milliers de personnes vivent dans des conditions sanitaires précaires.

La situation est tout aussi alarmante dans le nord-ouest, où 1,4 million de déplacés nécessitent une aide d’urgence, dont 730 000 vivent encore sous des tentes, exposés à un hiver imminent, s’est inquiétée Mme Wosornu.  Dans certaines communautés, les écoles sont surchargées, accueillant parfois jusqu’à 70 enfants dans des classes conçues pour 45.  Les infections respiratoires y augmentent également, en raison de la réduction des services de santé.

Or, seuls 28% des fonds nécessaires pour le Plan de réponse humanitaire ont été reçus, contraignant le Programme alimentaire mondial à réduire son aide de 80% en deux ans.  En conséquence, 13 millions de personnes sont en insécurité alimentaire aiguë, plaçant la Syrie parmi les cinq pays les plus touchés dans le monde.  Le dernier rapport des « Hunger Hotspots » classe la Syrie parmi les 12 pays où les conditions risquent de se détériorer encore.

Mme Wosornu a insisté sur le besoin urgent de financements supplémentaires pour répondre aux besoins hivernaux de 2,5 millions de personnes. Elle a salué la prolongation, jusqu’en février 2025, de l’autorisation d’utiliser les passages transfrontaliers de Bab el-Salam et Raaï, indispensables pour acheminer une aide vitale à des millions de personnes, mais elle a également souligné l’importance d’un accès direct et efficace pour ces opérations.

Enfin, Mme Wosornu a souligné l’urgence d’investir dans des initiatives de relèvement précoce, citant la réhabilitation des systèmes d’irrigation comme un exemple clef pour améliorer la production agricole.  Cette année, la récolte de blé est estimée à 50% en dessous des niveaux d’avant le conflit.  Elle a également mis en avant la nécessité d’interventions similaires dans les secteurs de la santé, de l’eau, de l’éducation et de l’énergie, tous gravement affectés par des années de conflit.

Mme SAWSAN ABOU ZAINEDIN, qui s’exprimait au nom de « Madaniya », une plateforme réunissant une centaine d’organisations non gouvernementales de la société civile syrienne, a rappelé avec passion que c’est grâce aux efforts inlassables des victimes, des survivants et des défenseurs des droits humains syriens que des auteurs de crimes les plus abominables sont aujourd’hui jugés devant des tribunaux en Allemagne, en Suède, en France, aux États-Unis et au Royaume-Uni.

En effet, les vetos de la Russie et de la Chine en 2014, qui à l’époque ont empêché que la Syrie de Bashar Al-Assad soit déférée à la Cour pénale internationale (CPI), nous ont poussés à trouver des solutions de contournement pour que la justice puisse être rendue un jour, a indiqué l’intervenante.  Elle a également soutenu que la société civile était à l’origine de l’établissement du « Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011 », le premier du genre porté par l’ONU.

En ce qui concerne les armes chimiques, Mme Zainedin a indiqué que, malgré les vetos répétés de la Russie, la détermination de la société civile à obtenir justice ne faiblit pas.  Dès demain, à La Haye, elle accueillera des membres de la communauté internationale pour leur deuxième conférence sur l’emploi de ces armes en Syrie, a-t-elle fait savoir. C’est bien à la société civile, a ajouté Mme Zainedin, que revient aussi le mérite d’avoir obtenu que des mandats d’arrêt internationaux soient lancés contre Bashar Al-Assad et d’autres figures du régime, les obligeant à rendre des comptes pour leur rôle dans l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.

Madaniya est née pour dire « non » à l’impunité et proposer des solutions politiques pour sortir de la crise, ce que le Conseil de sécurité n’est toujours pas en mesure de faire, a poursuivi Mme Zainedin. 

Concernant la situation humanitaire, elle a déploré l’impuissance du Conseil à imposer au régime syrien un accès pérenne aux travailleurs humanitaires vers le nord-ouest du pays. 

Après des années de paralysie, le Conseil doit rompre avec l’inaction qui sape sa propre autorité et la mise en œuvre de ses résolutions, une inaction qui ne fait que donner du pouvoir aux criminels de guerre et aggraver la situation internationale en matière de sécurité, a-t-elle dit.

« Travaillez avec nous, nous sommes vos homologues et l’avenir de la Syrie! » s’est exclamée Mme Zainedin, concluant son intervention en soulignant que tout règlement de la crise niant les droits et la dignité des Syriennes et des Syriens échouera inévitablement: « nous n’aurons de repos que lorsque nous aurons récupéré notre citoyenneté et un État démocratique ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Russie et la Chine s’opposent au projet d’opération de maintien de la paix en Haïti promu par les États-Unis

9792e séance - après-midi
CS/15908

Conseil de sécurité: la Russie et la Chine s’opposent au projet d’opération de maintien de la paix en Haïti promu par les États-Unis

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Le Conseil de sécurité se réunissait aujourd’hui à propos de la situation en Haïti, à la demande de la Chine et de la Fédération de Russie.  Ces deux pays ont ainsi tenu à manifester leur opposition au projet de transformation de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en opération de maintien de la paix.  Une initiative promue par les États-Unis et l’Équateur, les délégations porte-plume sur ce dossier, alors que plusieurs voix se sont fait entendre en sa faveur, à la fois en Haïti –avec notamment une requête adressée en ce sens au Conseil de sécurité par le président du Conseil présidentiel de transition– et dans les pays membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et de l’Organisation des États américains (OEA).

Les débats se sont ouverts avec une intervention de M. Miroslav Jenča, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques aux Départements des affaires politiques et de la consolidation de la paix et des opérations de paix.  Évoquant l’avancée spectaculaire des gangs armés à Port-au-Prince, qui ont provoqué la fermeture de l’aéroport international, il a alerté sur le fait qu’ils contrôlent 85% du territoire de la capitale.  « Ce n’est pas une énième vague d’insécurité à laquelle le pays fait face, mais une spectaculaire escalade », s’est-il inquiété. 

Face à l’urgence de la situation et à l’insuffisance des moyens alloués à la MMAS, M. Jenča a appuyé le projet de transformation de la Mission en opération de maintien de la paix de l’ONU.  À ce jour, a-t-il précisé, la Mission n’a reçu que 43% de son budget de 674 millions de dollars et n’a intégré que 400 personnes sur les 2 500 prévues. Une inquiétude formulée également par Mme Monica Juma, Conseillère à la sécurité nationale auprès du Président du Kenya, le pays qui a pris la tête de la MMAS.  « Il est urgent d’envoyer davantage d’effectifs sur le terrain », a-t-elle reconnu avant d’appeler les donateurs à financer ce déploiement, tout en se disant également favorable à la transformation de la Mission. 

S’appuyant sur ces mêmes chiffres, le représentant d’Haïti a estimé que la transformation de la MMAS garantirait une meilleure mobilisation des ressources – en plus d’assurer un mandat plus robuste et une meilleure coordination internationale.  S’appuyant eux aussi sur l’argument de financements prévisibles et durables, les États-Unis ont assuré avoir entendu les dirigeants de la MMAS et du pays hôte dans le cadre de l’élaboration du projet.  D’autres partisans du projet, comme la France, ont évoqué le soutien opérationnel et l’expertise dont pourraient disposer les forces de terrain à travers un plus grand engagement des Nations Unies. 

Pour sa part, l’Équateur a souligné le soutien dont le projet bénéficie non seulement parmi les États de la région –notamment à travers l’appui de la CARICOM et de l’OEA– mais aussi au sein des autorités haïtiennes elles-mêmes, puisqu’elles ont appelé de leurs vœux la transformation de la MMAS.  Un argument qui n’a pas convaincu la Russie.  Elle a considéré qu’on ne pouvait parler d’une véritable demande d’Haïti en l’absence d’autorités légitimes et au vu des dissensions qui frappent l’exécutif intérimaire.  En outre, elle a mis en question la bonne foi des États-Unis, évoquant leurs ingérences dans les affaires d’Haïti, qu’ils auraient toujours considéré comme leur « arrière-cour ».

La Russie a de même qualifié d’irresponsables les discussions quant à une transformation de la Mission, alors même que l’on n’aurait pas débattu des problèmes auxquels elle se heurte et des manières de les régler.  Son représentant y a vu une illustration du peu de cohérence de la démarche des États-Unis. « Il y a quelques années, ils souhaitaient le retrait de l’opération de maintien de la paix, il y a un an, ils avaient promis de garantir le déploiement d’une mission non onusienne, et maintenant ils nous disent qu’il faut y envoyer des Casques bleus », s’est-il atterré. 

Le représentant russe, invoquant les conclusions du Secrétaire général, a de même considéré que la situation du terrain, assimilable à une guérilla urbaine, ne convient pas à une mission de maintien de la paix des Nations Unies.  La Chine a appuyé ce dernier argument, précisant que le contexte actuel en Haïti ne remplit pas les conditions de paix nécessaires au déploiement d’une opération de maintien de la paix.  Face à des gangs « armés jusqu’aux dents », une telle opération ne ferait que placer les soldats de l’ONU sur la ligne de front, a estimé son représentant.  Poursuivant, il a tiré un bilan sévère des nombreuses missions onusiennes déployées en Haïti, relevant leur coût élevé et la mort de nombreux soldats, avec pour seul résultat « le chaos total et le ressentiment du peuple haïtien ».

La Chine a en outre souligné que les travaux du Conseil mettent actuellement l’accent sur le développement rapide de la MMAS.  À ce titre, toute discussion sur sa transformation en opération de maintien de la paix « ne ferait qu’interférer avec sa capacité à s’acquitter de son mandat et rendrait son déploiement encore plus difficile », a-t-il estimé.  Rappelant avoir soutenu la prorogation de la MMAS décidée par le Conseil de sécurité, le représentant s’est étonné qu’un mois plus tard, certaines délégations demandent sa transformation en opération onusienne. Il s’est demandé si la résolution adoptée « ne valait rien » et pouvait « être modifiée d’un claquement de doigts ». 

Au contraire, Mme Juma a estimé que cette transformation était tout à fait possible « puisque le Conseil a adopté trois résolutions sur Haïti en trois mois », même si la transition devra se faire progressivement.  L’Équateur a expliqué qu’il s’agit, pour l’heure et en pratique, de demander au Secrétaire général un rapport à propos de l’éventuelle transformation de la MMAS en une mission durable. 

Si la réunion a mis au jour de profondes dissensions sur la manière de soutenir Haïti, les membres du Conseil ont unanimement reconnu l’urgence de la crise, les difficultés de la MMAS et la nécessité d’engager des moyens supplémentaires. « Quelle que soit notre décision quant au format du soutien humanitaire dans le pays, c’est maintenant que les Haïtiens ont besoin d’aide », a insisté le délégué russe, avant de lancer un appel pour appuyer financièrement la MMAS.  Pour sa part, la déléguée des États-Unis, se disant consciente des importantes divergences entre les membres du Conseil, a exhorté ses collègues à ne pas faire obstacle à une demande de rapport au Secrétaire général. 

Les pays de la région étaient représentés à cette réunion, comme la Jamaïque, qui a attiré l’attention sur la situation humanitaire catastrophique et sur l’insécurité croissante.  Les médias font notamment état de viols, de recrutement d’enfants et de l’incapacité des forces armées à protéger les populations, s’est-elle alarmée.  De plus, la crise haïtienne a des répercussions sur la sécurité dans la zone des Caraïbes à cause du renforcement des réseaux transnationaux de trafics d’armes qui exploitent le vide sécuritaire, a fait remarquer la délégation avant de demander un soutien accru à la MMAS et d’appuyer la demande de transformation de la MMAS en mission de la paix, « la prochaine étape logique » selon elle. 

Enfin, le délégué haïtien a lancé un appel à la réflexion face aux échecs des précédentes missions de l’ONU dans son pays.  « Il faut tirer les leçons du passé et ne pas répéter les erreurs de la MINUSTAH », a-t-il averti.  Ne pas répéter les erreurs du passé et ne pas abandonner Haïti, a renchéri la Grenade, au nom de la CARICOM, car « l’histoire d’Haïti mérite un nouveau chapitre d’espoir ». 

 

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LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

Exposés

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques aux Départements des affaires politiques et de consolidation de la paix et des opérations de paix, a souligné la situation de violence extrême dans laquelle se trouve aujourd’hui Haïti.  Il a rappelé que le 11 novembre, alors qu’était élu un nouveau premier ministre –le quatrième en trois ans de transition politique, suite à l’assassinat en 2021 du Président Jovenel Moïse– des gangs armés ont attaqué l’aéroport international de Port-au-Prince.  Depuis, de nombreux transporteurs internationaux ont suspendu leurs vols. Une situation qui limite notamment l’accès du personnel international à la capitale, a-t-il déploré. 

C’est la deuxième fois que des groupes armés tirent parti de l’instabilité politique et s’attaquent à l’aéroport pour renforcer leur emprise sur Port-au-Prince, a-t-il relevé, s’alarmant des récentes avancées stratégiques des gangs qui contrôleraient désormais 85% du territoire de la capitale.  Il a rappelé que, le 18 novembre dernier, des coalitions de gangs armés ont lancé l’assaut sur Pétion-Ville, où se trouve notamment le personnel international, onusien et diplomatique. Plusieurs douzaines de personnes seraient mortes dans les affrontements.

Selon M. Jenča, il ne s’agit pas d’une vague d’insécurité comme les autres, mais d’une spectaculaire escalade.  Dans ce cadre, il a fait part de ses préoccupations concernant les graves conséquences humanitaires de la crise, et notamment les violations des droits humains.  Les groupes armés usent de violences extrêmes contre les populations, dont des violences sexuelles, s’est-il ému.  En outre, environ 20 000 personnes auraient été déplacées en quatre jours seulement ce mois de novembre, lesquelles s’ajoutent au total de 700 000 déplacés comptabilisés en septembre.

Le Sous-Secrétaire général a relevé que les Nations Unies ont besoin de davantage de ressources en Haïti.  Seuls 43% des 674 millions de dollars requis sont assurés, s’est-il inquiété. S’il a salué le Conseil de sécurité pour avoir autorisé le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) et l’engagement de nombreux pays pour venir en aide à Haïti, il a fait remarquer que seules 400 personnes ont été déployées sur les 2 500 prévues.  À ce titre, il a lancé un appel aux donateurs internationaux et privés, estimant leurs contributions indispensables pour soutenir le travail de la Police nationale d’Haïti.  Toute lacune opérationnelle et tout retard supplémentaire risque d’entraîner un effondrement des institutions chargées de la sécurité et, partant, de l’autorité de l’État, a-t-il averti.

Enfin, il a appuyé la requête de transformer la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en opération de maintien de la paix de l’ONU, rappelant que l’ancien président du Conseil présidentiel de transition en a fait la demande à l’Assemblée générale en septembre, tandis que son successeur l’a réitérée auprès du Conseil de sécurité en octobre.  De même, il a tenu à souligner que le Conseil permanent de l’Organisation des États américains a prié le Conseil de sécurité de donner suite à ces demandes en novembre.

Mme MONICA JUMA, Conseillère à la sécurité nationale auprès du Président du Kenya, a estimé que les défis interconnectés auxquels Haïti fait face requièrent une approche multiple qui s’attaque aux causes profondes de la prolifération des gangs et de la criminalité. 

Mme Juma a salué les efforts menés par la CARICOM, le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) et les partenaires locaux afin d’apporter un soutien sous forme d’aide humanitaire et au développement.  Elle a également salué les efforts du Conseil de sécurité à trouver des solutions novatrices, telles que le régime de sanctions établi par la résolution 2653 (2022), et s’est réjouie de la récente décision d’étendre ces sanctions. 

Mme Juma a également félicité pour son courage la Police nationale d’Haïti, qui a participé aux opérations conjointes de lutte antigang avec la MMAS. Ces opérations ont permis de récupérer des infrastructures cruciales et d’acheminer l’aide humanitaire, a-t-elle souligné.  Ces succès « si fragiles » montrent toutefois que la MMAS fonctionne, a-t-elle assuré. 

Mme Juma a néanmoins regretté que le déploiement de la MMAS n’atteigne que 16%, ce qui est « trop peu ».  Il est urgent d’envoyer davantage d’effectifs sur le terrain, a-t-elle exhorté, saluant la volonté de certains pays de participer à la Mission et espérant voir les contributions arriver au plus tôt.

Le risque de l’extension des gangs est bien présent, a poursuivi la Conseillère à la sécurité nationale du Kenya.  Transformer la MMAS en opération de maintien de la paix est donc un appel d’Haïti que le Kenya soutient.  Elle a estimé que cette transformation était tout à fait possible « puisque le Conseil a adopté trois résolutions sur Haïti en trois mois », même si la transition devra se faire progressivement. 

Le Kenya est prêt à faire part de ses perspectives sur la transformation de la MMAS en mission de la paix, a assuré Mme Juma, qui a aussi lancé un appel aux contributions afin que la MNAS puisse s’acquitter de sa mission avant sa transformation en opération de paix. 

M. JEAN WILLIAMS (BILL) PAPE, Directeur du Centre Gheskio à Port-au-Prince et professeur de médecine à Weill Cornell Medical College à New York, a expliqué ses travaux en Haïti depuis la fin des années 1970 et les succès qui en ont découlé, avant de décrire la situation actuelle sur place dans son domaine de compétence.

Dans les années 1970, le médecin avait pu réduire drastiquement et en moins d’un an la mortalité infantile dans l’hôpital où il travaillait.  Le programme a ensuite été élargi au niveau national, réduisant la mortalité infantile de 50%.  Le docteur Pape a expliqué avoir également traité les premiers cas de sida en Haïti dans les années 1980.  Le sida, qui était la première cause de mortalité en Haïti, est maintenant la septième.  Il a également contribué à faire diminuer les maladies cardiovasculaires.  En 2010, il a vacciné de nombreuses personnes lors de l’épidémie de choléra, ce qui a donné lieu à la modification des directives de l’Organisation mondiale de la Santé concernant l’utilisation de la vaccination contre le choléra pendant une épidémie.

« Maintenant que la capitale est entièrement coupée du pays, elle fait face à une fuite des cerveaux sans précédent et une fermeture des hôpitaux », s’est alarmé le médecin.  Il a dit avoir vu 70% du personnel de son hôpital démissionner.  « Certains ont dû quitter leur maison dans l’urgence, d’autres ont été kidnappés, y compris mon fils pendant trois mois et demi », s’est-il ému.  Il a également déploré les viols collectifs et les meurtres.  Toutefois, son équipe a mis en place un plan d’urgence qu’elle peaufine petit à petit au moyen de formations et de renforcement des liens avec la population locale. 

« Combien de temps pouvons-nous encore continuer à travailler dans ces conditions? » s’est toutefois demandé le médecin, estimant que, sans le soutien international, les progrès médicaux réalisés en Haïti seront réduits à néant. 

« Je suis là pour vous dire que la MMAS ne fonctionne pas », a finalement lancé le docteur Pape, expliquant qu’il y a trop peu d’effectifs et que la situation est différente du passé.  C’est une « tâche difficile pour les Haïtiens de demander des troupes étrangères sur leur territoire », a-t-il affirmé, mais c’est « la seule solution ».  Si rien n’est fait, nous serons face à un « génocide massif », a-t-il conclu. 

M. DAN COHEN, journaliste d’investigation, a tiré un sombre bilan de la présence des forces des Nations Unies en Haïti ces trois dernières décennies.  Il les a notamment accusées d’avoir, sous couvert de lutte contre les gangs, tué les résidents d’un bidonville, introduit le choléra ou s’être rendues responsables de viols d’enfants. 

Le journaliste a accusé les États-Unis de chercher à imposer leur volonté à Haïti en cherchant une fois de plus à laisser l’ONU « occuper » le pays. 

Évoquant le vote de la Chine et de la Fédération de Russie pour limiter à neuf mois –au lieu de 12– le mandat du Conseil de sécurité pour les formateurs de la Police nationale d’Haïti, il a estimé que la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) n’était qu’un moyen pour les États-Unis de contourner le Conseil de sécurité, lequel aurait entravé leurs objectifs interventionnistes. 

M. Cohen a également rappelé la promulgation du Global Fragility Act par l’Administration Trump en 2019, laquelle chercherait essentiellement à contenir l’influence croissante de la Chine et de la Russie dans des États dits « fragiles ».  Cette intervention suppose que le peuple haïtien est incapable de résoudre ses propres problèmes, s’est-il insurgé, dénonçant « une notion insultante ». À ses yeux, cette loi représenterait avant tout une violation de la souveraineté haïtienne en plus que de perpétuer les violences. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: débat annuel sur l’exercice du droit de veto, « un symbole du paradoxe de l’ONU »

Soixante-dix-neuvième session
40e & 41e séances – matin & après-midi
AG/12658

Assemblée générale: débat annuel sur l’exercice du droit de veto, « un symbole du paradoxe de l’ONU »

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Après avoir finalisé l’élection de membres de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), l’Assemblée générale a tenu, aujourd’hui, son troisième débat annuel sur l’exercice du droit de veto. Exaspérées par la paralysie du Conseil de sécurité face à la multiplication des conflits, près d’une cinquantaine de délégations ont décrié le veto, présenté par Sri Lanka comme « le symbole du paradoxe de l’ONU », un instrument conçu pour maintenir la paix mais qui y fait souvent obstacle.

L’Assemblée générale s’est réunie pour donner suite à l’adoption par consensus de la résolution 76/262 du 26 avril 2022.  Cette résolution, connue comme l’initiative relative au droit de veto, permet à l’Assemblée de tenir un débat dans les 10 jours ouvrables suivant l’exercice du droit de veto par un ou plusieurs membres permanents du Conseil de sécurité. 

Ce fut encore le cas ce matin au Conseil de sécurité quand les États-Unis ont rejeté un projet de résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza et à la libération de tous les otages, présenté par le Guyana et les neuf autres membres élus de l’organe.  Il s’agissait du second veto de la semaine, puisque la Fédération de Russie s’est opposée lundi à l’adoption d’un texte appelant également à un cessez-le-feu au Soudan.

Depuis la résolution de 2022, l’Assemblée générale a tenu 10 débats, démontrant à chaque fois comment l’initiative relative au droit de veto contribue à une transparence et une responsabilité accrues, a souligné le Président de l’Assemblée générale.  L’existence même de cette initiative souligne la réalité troublante selon laquelle les divisions au sein du Conseil de sécurité empêchent cet organe vital de l’ONU d’agir, a reconnu M. Philémon Yang.  Mais dans de telles circonstances, a-t-il déclaré, « l’Assemblée générale peut intervenir pour agir » .  Ainsi, lorsque le Conseil de sécurité n’est pas en mesure de s’acquitter de ses responsabilités, cette Assemblée doit faire valoir sa propre autorité pour agir, a ajouté M. Yang.

Au nom d’un groupe de 60 États déterminés à mettre en œuvre la résolution A/RES/76/262, le délégué du Liechtenstein a estimé que l’Assemblée générale doit combler le vide laissé par le recours au veto en adoptant des recommandations conformément à ses pouvoirs décrits au Chapitre IV de la Charte des Nations Unies.  Bien qu’il existe des mesures que l’Assemblée elle-même ne peut clairement pas prendre, comme l’exercice des pouvoirs prévus au Chapitre VII, nous devons, au moins chaque fois qu’un veto est exprimé ou menacé, considérer nos options pour agir avant ou après une réunion en vertu de ce point de l’ordre du jour, a-t-il indiqué.

L’initiative sur le veto, largement inspirée par le Lichtenstein, a commencé à remodeler la relation entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, ainsi que l’approche collective de l’ONU sur les questions de paix et de sécurité, ont salué les délégations.  Elle a renforcé la responsabilité du Conseil envers l’ensemble des membres de l’ONU, en particulier lorsque son action est bloquée par le veto.  « Il est clair que le veto n’est plus la fin du débat. »

Il a en outre été rappelé que dans le Pacte pour l’avenir adopté par l’Assemblée en septembre dernier, les États Membres sont convenus de « redoubler d’efforts pour parvenir à un accord sur cette question, notamment en examinant s’il faut limiter le champ d’application du droit de veto et son utilisation ».

Selon la Türkiye, le recours au droit de veto démontre que le Conseil de sécurité n’est pas à la hauteur de son mandat, notamment au regard des deux vetos de cette semaine.  Grâce à l’initiative de 2022, a apprécié le Royaume-Uni, l’Assemblée peut veiller à ce que les membres dotés du droit de veto rendent compte de leurs actes. 

Cependant, l’Inde a fait remarquer que la décision d’organiser un débat dans les 10 jours suivant l’exercice du droit de veto « n’a pas empêché les membres permanents de brandir leur veto ».  Un constat similaire a été fait par le Brésil qui a regretté que ces réunions que l’Assemblée générale convoque, servent de « plateformes d’accusations mutuelles » et provoquent « davantage de divisions ».

De l’avis du Mexique, la paralysie du Conseil de sécurité n’est pas seulement le résultat de l’utilisation et de l’abus du droit de veto, elle découle également de la menace d’exercer ce droit.  Dans ce cas, il s’agit, a relevé la délégation, d’un aspect aussi important que celui du recours réel au veto.  En effet, des projets de résolution dilués qui arrivent au Conseil pour être votés sont « souvent le résultat d’ajustements menés face à un veto imminent ».  On en parle peu, soit à cause de l’inconfort généré chez les membres permanents, ou du fait de l’opacité qui persiste dans certaines négociations, a-t-elle avancé.

Pour les 106 signataires de l’initiative franco-mexicaine visant à encadrer le veto en cas d’atrocités de masse, « le droit de veto n’est pas un privilège discrétionnaire mais une responsabilité particulière », a déclaré la France.  C’est pourquoi ce membre permanent a fait le choix de ne pas l’utiliser depuis 1989. 

À son tour, la Suisse a encouragé tous les États à adhérer à l’initiative franco-mexicaine et à signer le Code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre soutenu par le Groupe ACT (Responsabilité, Cohérence, Transparence). 

Le droit de veto est l’une des questions essentielles de la réforme du Conseil de sécurité, ont tenu à rappeler l’Allemagne et le Japon.  « La force de l’ONU ne réside pas dans la domination d’une minorité, mais dans la volonté collective du plus grand nombre », a tonné le délégué allemand, tandis que son homologue japonais a vu dans le veto « un autre exemple de l’iniquité qui existe au sein du Conseil de sécurité », en plus du manque de représentation équitable de ses membres permanents et non permanents.

La Belgique, au nom du Benelux, a en outre estimé que tous les membres du Conseil doivent agir dans l’esprit de l’Article 27.3 de la Charte des Nations Unies selon lequel « une partie à un différend s’abstient de voter ».  À cet égard, la Géorgie a condamné le fait que la Fédération de Russie ait fait usage du veto alors qu’elle était partie au conflit dans les régions d’Abkhazie et de Tskhinvali en Géorgie, et aujourd’hui en Ukraine.  Dans le même esprit, la République de Corée a évoqué une « question morale » quand un membre permanent est partie à un vote le concernant. 

Quant à la Finlande, au nom des pays nordiques, elle a appelé l’Assemblée à jouer un rôle éminent en matière de résolution des conflits, surtout lorsque le Conseil est incapable d’agir comme ce fut le cas lundi et ce matin.  Selon le Guatemala, les intérêts d’une poignée de pays ne doivent pas prévaloir sur l’intérêt général.  Au vu de tous ces constats, la Nouvelle-Zélande a recommandé de mettre en œuvre les mesures préconisées par le Pacte pour l’avenir en lien avec la réforme du Conseil de sécurité. 

Outrée par le veto américain sur un texte « qui aurait pu donner une lueur d’espoir au peuple palestinien », l’Algérie a appelé à la réforme du Conseil de sécurité, un processus indispensable et inéluctable selon elle, quelles que soient les pierres d’achoppement, afin de rectifier « les carences fonctionnelles dont pâtit l’ordre onusien ».  Pour l’Arabie saoudite, c’est l’abus du droit de veto qui a « enhardi » Israël, lui permettant de poursuivre ses « pratiques abjectes » contre le peuple palestinien, et maintenant contre le Liban.  De même, Cuba a estimé que le mandat de l’Assemblée est miné par les actions du Conseil et la Barbade a dit être favorable à l’abolition du droit de veto, ou alors à son extension à de nouveaux membres permanents. 

Pour la Fédération de Russie, ce n’est pas le veto en soi qu’il faut critiquer, mais bien « le manque de volonté » de certains membres du Conseil de sécurité pour écouter et prendre en compte les opinions des autres et trouver des solutions de compromis.  Selon cette délégation, la réforme du Conseil ne doit en aucun cas toucher au droit de veto qui est la pierre angulaire de l’architecture de paix et de sécurité de l’ONU.  « Sans le veto, le Conseil de sécurité deviendrait un organe qui estampillerait des résolutions douteuses, imposées par une majorité conditionnelle, dont la mise en œuvre serait impossible. » 

En début de séance, l’Assemblée générale a procédé à un vote à bulletin secret pour élire de nouveaux membres à la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI).  En dépit du fait que le nombre de candidats correspondait ou était inférieur aux 30 sièges à pourvoir, l’Assemblée avait consenti, le 13 novembre dernier, à suivre la demande de l’Ukraine et de la Fédération de Russie qui appelaient à un scrutin. 

Les États suivant ont été élus pour un mandat de six ans à compter du 7 juillet 2025: Afrique du Sud (168 voix), Allemagne (164), Belgique (164), Burundi (172), Canada (163), Chine (174), Congo (171), Côte d’Ivoire (175), El Salvador (175), État plurinational de Bolivie (172), Fédération de Russie (129), France (157), Ghana (175), Hongrie (172), Japon (172), Malaisie (179), Mauritanie (174), Mexique (173), Pérou (174), Philippines (177), République dominicaine (177), République de Corée (169), Royaume-Uni (155), Sierra Leone (174), Singapour (175), Sri Lanka (177), Suède (163), Suisse (168), Uruguay (172), Viet Nam (175) et Zambie (176). 

L’Assemblée se penchera ultérieurement sur l’élection de trois autres membres issus du Groupe des États d’Europe orientale et d’un membre du Groupe des États d’Europe occidental et autres États.

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La Troisième Commission adopte 5 projets de résolution sur la situation des droits humains dans des pays précis dont 3 après des votes serrés

Soixante-dix-neuvième session,
54e et 55e séances plénières – matin et après-midi
AG/SHC/4432

La Troisième Commission adopte 5 projets de résolution sur la situation des droits humains dans des pays précis dont 3 après des votes serrés

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Troisième Commission, chargée des question sociales, humanitaires et culturelles a poursuivi aujourd’hui son examen des projets de résolution à soumettre à l’Assemblée générale.  Elle a adopté en tout cinq textes, portant sur la situation des droits humains en République arabe syrienne, République islamique d’Iran, République populaire démocratique de Corée (RPDC) et au Myanmar, ainsi que dans les territoires ukrainiens temporairement occupés, y compris la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol. 

Accusés par certaines délégations d’être des textes « politisés » et « mensongers », les projets sur les territoires ukrainiens, l’Iran et la Syrie ont été sujets à une demande de mise aux voix.  Beaucoup de délégations se sont par ailleurs dissociées du consensus sur les deux autres textes.

Donnant le ton d’une bonne partie de la séance, l’Ouganda, au nom du Mouvement des pays non alignés qui regroupe 120 des 193 États Membres de l’ONU, a rejeté l’adoption sélective de résolutions de pays au sein de la Troisième Commission et du Conseil des droits de l’homme.  Selon lui, cette pratique, non seulement violerait les principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité et de non-sélectivité dans le traitement des questions relatives aux droits humains, mais porterait aussi atteinte à la coopération en tant que principe essentiel pour promouvoir et protéger efficacement tous les droits de l’homme universellement reconnus. 

Les questions des droits humains doivent être abordées de manière constructive, non conflictuelle, non politisée et non sélective, a souligné la délégation, selon qui seul l’Examen périodique universel, mécanisme d’examen par les pairs, permet cette approche. 

Votes serrés pour l’Iran, la Syrie et les territoires ukrainiens temporairement occupés

Adopté par 77 voix pour, 28 contre et 66 abstentions le projet sur la situation des droits humains en République islamique d’Iran (A/C.3/79/L.41) fait état d’une « intensification alarmante » de l’application de la peine de mort dans ce pays et de la poursuite des exécutions de femmes, dont le nombre n’a jamais été aussi élevé depuis 2013. 

Ce texte actualisé pointe également l’application renforcée des lois et politiques qui imposent le port du voile, notamment à travers l’arrestation arbitraire, la détention et la persécution des femmes et des filles dont on estime, à juste titre ou non, qu’elles ne se conforment pas aux lois et aux politiques discriminatoires de l’État.

Autre motif de préoccupation: le harcèlement et l’intimidation dont font l’objet les victimes, les personnes rescapées et les membres de leur famille qui s’emploient à faire en sorte que les responsables de violations des droits humains répondent de leurs actes, notamment en ce qui concerne les violations perpétrées dans le contexte des manifestations de 2022.

La délégation iranienne, qui a demandé le vote, a dénoncé un texte « inique », « hypocrite » et « biaisé », rédigé « à partir d’une position d’arrogance » par le Canada, « qui s’est lui-même rendu coupable d’un génocide contre sa population autochtone ».  Le  deux poids, deux mesures ne semble pas avoir de limite, a dénoncé à son tour le Venezuela, au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies.

Les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni qui ont voté en faveur du texte ont rétorqué qu’au vu de la situation « désastreuse » des droits humains, le « régime iranien » devrait cesser la persécution des femmes et des filles; l’oppression des minorités ethniques et religieuses; la détention arbitraire de journalistes, la répression contre des opposants politiques à l’étranger et le recours massif et persistant à la peine de mort.  Il devrait aussi garantir les libertés d’expression, d’opinion, de rassemblement et d’association.

Autre texte adopté avec un résultat encore plus serré, celui sur la « situation relative aux droits humains dans les territoires ukrainiens temporairement occupés, y compris la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol » (A/C.3/79/L.44) a été entériné avec 78 voix en sa faveur, autant d’abstentions (78) et 16 voix contre.

Présenté par l’Ukraine elle-même, ce projet condamne le fait que la Fédération de Russie n’a donné suite ni aux demandes répétées de l’Assemblée générale, ni aux ordonnances prises par la Cour internationale de Justice.  La Russie est également appelée à fournir des informations fiables sur les lieux de détention où se trouvent les Ukrainiens placés en détention, y compris les prisonniers de guerre; à libérer les détenus se trouvant dans un état de santé critique; à assurer des conditions de détention appropriées aux prisonniers de guerre ukrainiens, « y compris en mettant en place une commission médicale mixte »; et, enfin, à assurer l’échange complet des prisonniers de guerre.

La Fédération de Russie a vu dans ce texte, un « document politique mensonger », contenant des « accusations fallacieuses » sur les discriminations que subiraient les Tatars de Crimée, alors même que le « régime de Kiev » attaque les « républiques russes de Zaporojie, de Donetsk et de Lougansk » avec des armes déployées par les coauteurs de la résolution, tuant des milliers de civils. 

S’exprimant au nom de l’Union européenne, la Belgique, appuyée par les États-Unis et le Royaume-Uni, a dénoncé des « violations des droits humains bien documentées ».  Parmi les abstentionnistes, le Pérou a expliqué n’avoir pas pu voter pour car le texte ne demande pas à toutes les parties de respecter le droit international et le droit international des droits de l’homme. 

Dernier cas de division manifeste, l’examen de la situation relative aux droits humains en République arabe syrienne (A/C.3/79/L.45).  La version actualisée du texte, présenté par les États-Unis et adopté par 85 voix pour, 17 contre et 71 abstentions, demanderait au « régime syrien » de retirer la loi n°19 de 2024 et de mettre fin aux violations du droit aux libertés d’opinion et d’expression, en ligne et hors ligne et aux perturbations d’Internet telles que la fermeture des réseaux, le ralentissement de l’accès à Internet et la surveillance de masse des activités en ligne. 

L’Assemblée générale lui demanderait aussi de se conformer aux mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de Justice pour empêcher des actes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et d’assurer la préservation des éléments de preuve en rapport avec des allégations d’actes entrant dans le champ d’application de la Convention contre la torture. 

La Syrie a demandé la mise aux voix de ce texte « politisé », « élaboré de manière opaque » par un pays « qui n’est pas sincèrement intéressé par les droits humains », comme le prouve, a-t-elle dit, son appui complice à l’occupation israélienne des territoires palestiniens et à l’agression israélienne contre la Syrie et le Liban.  Le Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies et le Nicaragua ont exprimé des positions similaires, de même que la Russie et Cuba qui a dénoncé un « exercice sélectif et punitif » contre un pays en développement. 

Abstentionniste, le Brésil a émis le souhait de voir les prochaines moutures être plus impartiales et plus objectives, rappelant à cet égard que nombre d’acteurs sont responsables des violations des droits humains en Syrie.

Parmi les pays ayant voté en faveur du texte, Israël s’est réjoui que, comme chaque année, cette résolution rappelle que les activités des groupes alliés à l’Iran ont des effets délétères sur la situation des droits humains dans la région.  Le Pérou s’est dissocié du paragraphe 15 du dispositif, qui contient selon lui un jugement de valeur sur l’utilisation du veto par un membre permanent du Conseil de sécurité.  Il faut se concentrer sur des solutions structurelles et s’abstenir de politiser les questions humanitaires, a-t-il souligné. 

Consensus autour du Myanmar et de la République populaire démocratique de Corée

Passés ces trois scrutins, la Commission s’est aussi déchirée, mais sans vote cette fois, au sujet la situation relative aux droits humains en République populaire démocratique de Corée (A/C.3/79/L.34).  La dernière version de cette résolution a vu de nombreuses délégations se dissocier du consensus, y voyant un objet de « propagande » occidental. 

En toute logique, le pays concerné a rejeté « fermement et catégoriquement » ce texte basé selon lui, sur des éléments « mensongers » et qui ne vise pas la promotion et protection des droits humains, mais à bafouer la réputation de la RPDC et de son système politique et social. 

La Fédération de Russie, Cuba, l’Iran, le Venezuela, le Nicaragua ou encore l’Érythrée, ont vu dans ce texte un « narratif occidental » et une tentative d’immixtion dans les affaires intérieures de la RPDC.  La politique de crucifixion à coup de mesures coercitives unilatérales, de provocation et de haine n’a mené nulle part et ne sert pas les droits de l’homme, a jugé le Bélarus. 

Pour la République de Corée au contraire, la communauté internationale, par ce consensus, a fait preuve de son « unité ».  Il ne tient plus qu’à la RPDC d’entendre l’appel de la communauté internationale, en particulier en ce qui concerne la question des réunifications des familles.

Par ce texte, l’Assemblée générale se déclarerait très préoccupée par l’existence d’un vaste système pénitentiaire, ainsi que par les représailles exercées contre les citoyens de la RPDC qui ont été rapatriés, notamment les avortements forcés imposés aux femmes rapatriées et les infanticides commis sur leurs enfants. À cet égard, les États Membres sont appelés à prendre des mesures pour lutter contre les actes de répression transnationale de la RPDC. 

Le projet évoque également des « restrictions généralisées et draconiennes », dont un monopole absolu sur l’information et un contrôle total de la vie sociale organisée, durcies encore par les lois nouvellement promulguées sur le rejet de la pensée et de la culture réactionnaires; la garantie d’éducation des jeunes; et la protection de la langue culturelle de Pyongyang. 

Le consensus a également prévalu en ce qui concerne la situation relative aux droits humains des musulmans rohingya et des autres minorités au Myanmar (A/C.3/79/L.46 Rev.1).

En vertu dudit texte, l’Assemblée générale engagerait le Myanmar ou l’armée du Myanmar, s’il y a lieu, d’autoriser la conduite de visites volontaires de reconnaissance effectuées dans l’État rakhine par des représentants des Rohingya; à cesser de bloquer l’accès à Internet et aux services de télécommunication dans toutes les régions du pays, y compris dans l’État rakhine; et à renouer le dialogue avec l’ONU pour que puisse être pleinement appliqué le plan d’action conjoint de 2012 sur le recrutement et l’utilisation d’enfants. 

Dénonçant « un texte qui ne reflète pas la situation actuelle », le représentant du Myanmar a regretté n’avoir eu que très peu de marge de manœuvre lors du processus de négociation.  Il aussi regretté que le texte n’inclue pas de libellés plus robustes sur la fin du transfert d’armes et de carburant vers la junte militaire.  L’Union européenne, par la voix de la Hongrie, a regretté que le texte ne reprenne pas les formulations adoptées par consensus dans la résolution 55/20 du Conseil des droits de l’homme, notamment sur les flux d’armes et le transfert de technologies destinées aux militaires, leur permettant de commettre plus de violations des droits humains fondamentaux. Le Liechtenstein a exprimé une position similaire. 

La Chine, la Russie et le Bélarus se sont dissociés du consensus.

Le Bangladesh a indiqué pour sa part qu’il avait récemment reçu 45 000 nouvelles arrivées de réfugiés rohingya sur son territoire, appelant à un financement adéquat de l’aide humanitaire.  Il a également déploré l’absence de progrès vers l’élimination des causes profondes de cette crise, affirmant que pas un seul réfugié rohingya n’est rentré au Myanmar.

En fin de séance, le Liban, Israël, la République islamique d’Iran et la République arabe syrienne ont exercé leur droit de réponse. 

Le Troisième Commission se réunira demain, jeudi 21 novembre, à partir de 10 heures, pour se prononcer sur les derniers textes soumis à son examen.

 

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La Quatrième Commission conclut ses travaux en adoptant quatre textes sur les réfugiés palestiniens et les pratiques israéliennes dans les territoires occupés

Soixante-dix-huitième session,
29e séance plénière - après-midi
CPSD/828

La Quatrième Commission conclut ses travaux en adoptant quatre textes sur les réfugiés palestiniens et les pratiques israéliennes dans les territoires occupés

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

C’est au terme de débats tendus sur les conflits qui déchirent le Moyen-Orient que la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a achevé cet après-midi les travaux de sa soixante-dix-neuvième session en adoptant quatre projets de résolution sur les réfugiés de Palestine ainsi que les colonies de peuplement israéliennes dans le Territoire palestinien occupé et le Golan syrien occupé, outre son programme de travail pour la session 2025.

La Commission a d’abord adopté le projet de résolution intitulé « Aide aux réfugiés de Palestine », par 165 voix pour, 3 voix contre (Argentine, Israël et Tonga) et 9 abstentions (Cameroun, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Palaos, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Nauru et Libéria), texte par lequel l’Assemblée générale soulignerait la nécessité de poursuivre l’œuvre de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNWRA), ainsi que l’importance de ses opérations, lesquelles doivent être menées sans entrave.  Elle exhorterait les donateurs à continuer d’intensifier leurs efforts afin de répondre aux besoins prévus de l’Office, notamment ceux résultant de l’augmentation des dépenses ou découlant des conflits, de l’instabilité dans la région et de la gravité de la situation socioéconomique et humanitaire, en particulier dans le Territoire palestinien occupé, ainsi qu’aux besoins dont il est fait état dans les récents appels de contributions relatifs à la bande de Gaza aux fins des secours d’urgence et de la reconstruction, tout comme dans les plans régionaux mis en place pour faire face à la situation des réfugiés de Palestine au Liban et en République arabe syrienne.

Le projet de résolution intitulé « Biens appartenant à des réfugiés de Palestine et produit de ces biens » a été adopté par 162 voix pour, 6 voix contre (Argentine, Israël, États-Unis, États fédérés de Micronésie, Nauru et Tonga) et 10 abstentions (Cameroun, Fidji, Libéria, Madagascar, Palaos, Panama, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Togo et Tuvalu).  En vertu de ses dispositions, l’Assemblée générale réaffirmerait que les réfugiés de Palestine ont droit à la jouissance de leurs biens et au produit de ces biens.  Elle prierait le Secrétaire général de prendre, en consultation avec la Commission de conciliation des Nations Unies pour la Palestine, toutes les mesures nécessaires afin de protéger les biens et les avoirs des Arabes et leurs droits de propriété en Israël, et demanderait une fois de plus à ce pays de fournir au Secrétaire général toutes formes d’assistance pour l’application de la présente résolution.  Elle engagerait instamment les parties palestinienne et israélienne à examiner la question des biens des réfugiés de Palestine et du produit de ces biens, dans le cadre des négociations de paix liées au statut final.

Venue présenter ces projets de texte conjointement avec l’Indonésie, l’Afrique du Sud a prévenu que la menace « d’effondrement » de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) constituait une menace pour la population comme pour la stabilité de la région, en plus de l’intégrité du système multilatéral.  Tout au long des travaux de la Commission sur cette question, les États hôtes, les pays donateurs et la communauté internationale dans son ensemble ont considéré les programmes éducatifs, sanitaires et humanitaires de l’UNRWA « indispensables et irremplaçables », a rappelé l’Indonésie.

Avant le vote, les États-Unis ont considéré que des résolutions « biaisées » ne permettront pas d’arriver à une paix durable, mais serviront plutôt à perpétuer des divisions de longue date.  Si l’UNRWA joue un rôle indispensable, il doit en revanche respecter les principes « d’humanité, d’indépendance et d’impartialité », comme le souligne ce projet de résolution.  La délégation américaine a donc appelé le Secrétaire général à intervenir pour favoriser la neutralité de l’Office, tout en maintenant une aide vitale aux Palestiniens dans le besoin.

Israël a dénoncé à son tour des textes biaisés à son encontre, qui ne servent ni la cause de la paix ni celle de la justice.  Qui plus est, aucune de ces résolutions ne fait état des souffrances endurées par les otages israéliens, ni de l’infiltration de terroristes au sein de l’UNRWA.  Les déclarations entendues à la Commission continuent, selon la délégation israélienne, à ignorer la réalité pour se concentrer de manière « obsessionnelle » sur la diabolisation d’Israël, qui demeure pourtant confronté à des menaces multiples.

À l’opposé, l’État de Palestine s’est félicité du résultat de ces votes qui réaffirme à ses yeux le consensus mondial sur la question, en dépit des tentatives d’Israël de le miner.  Néanmoins, a-t-il noté, Tel-Aviv continue d’ignorer ces résolutions et de violer le droit international en toute impunité, « au détriment du passé, du présent et de l’avenir du peuple palestinien et de toute la région ».

Contrairement aux années passées, le Canada a voté en faveur du texte consacré aux biens des Palestiniens afin d’exprimer sa profonde inquiétude face aux attaques directes menées contre l’UNRWA, son mandat et son personnel au cours de la dernière année, ainsi que son soutien aux réfugiés palestiniens.  Toutefois, a ajouté son représentant, le Canada continue d’estimer que les dispositions de cette résolution pourraient être perçues comme préjugeant de l’issue des négociations sur le statut final.

La Commission a ensuite tourné son attention vers les pratiques et activités d’implantation israéliennes affectant les droits du peuple palestinien et des autres Arabes des territoires occupés.  Elle a adopté le projet de résolution relatif au Golan syrien occupé, par 152  voix pour, 5 contre (Argentine, Israël, Tonga, Papouasie-Nouvelle-Guinée et États-Unis) et 23 abstentions, par lequel l’Assemblée générale demanderait à Israël, Puissance occupante, de se conformer aux résolutions concernant le Golan syrien occupé, en particulier la résolution 497 (1981) du Conseil de sécurité, dans laquelle celui-ci a décidé que la décision prise par Israël d’imposer ses lois, sa juridiction et son administration sur ce territoire était nulle et non avenue et sans effet juridique sur le plan international.  L’Assemblée demanderait également à Israël de renoncer à modifier le caractère physique, la composition démographique, la structure institutionnelle et le statut juridique du Golan syrien occupé, et de renoncer à y établir des implantations.  En outre, elle demanderait à Israël de ne pas imposer aux citoyens syriens du Golan syrien occupé la nationalité ainsi que des cartes d’identité israéliennes, et de renoncer à ses mesures de répression à l’égard de la population.  L’Assemblée demanderait une fois de plus aux États Membres de ne reconnaître aucune des mesures ou décisions législatives et administratives susmentionnées.

S’agissant du projet de résolution portant sur les colonies de peuplement israéliennes dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé, adopté par152  voix pour, 9  voix contre (Argentine, Israël, Hongrie, Fidji, Tonga, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Palaos et Nauru) et 15 abstentions, l’Assemblée générale réaffirmerait que les implantations israéliennes dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé, sont illégales et constituent un obstacle à la paix et au développement économique et social.  Elle exigerait d’Israël qu’il s’acquitte de toutes les obligations que lui impose le droit international et qu’il mette fin immédiatement à toute action entraînant la modification du caractère, du statut ou de la composition démographique du Territoire palestinien occupé et du Golan syrien occupé.  Elle exigerait une fois de plus l’arrêt immédiat et complet des activités de peuplement israéliennes dans l’ensemble du Territoire palestinien occupé, et soulignerait qu’un arrêt complet des activités israéliennes d’implantation est indispensable pour sauvegarder la solution des deux États sur la base des frontières d’avant  1967.

En adoptant ce texte, l’Assemblée générale rappellerait que la Cour internationale de Justice a déterminé, dans son avis consultatif rendu le 19 juillet 2024, que les politiques et pratiques d’Israël équivalaient à une annexion de vastes parties du Territoire palestinien occupé.  Elle condamnerait les activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, de même que les activités entraînant la confiscation de terres, la perturbation des moyens d’existence de personnes protégées, le transfert forcé de civils et l’annexion de territoire, de fait ou par l’adoption d’une loi nationale.  Comme le prescrit le droit international, l’Assemblée générale demanderait encore que soient envisagées des mesures de reddition de comptes, y compris des mesures ciblées contre les colons extrémistes ainsi que les entités et organisations qui les soutiennent.

La Namibie, qui a présenté ces deux projets de résolution conjointement avec Cuba, a jugé que les politique et pratiques illégales de l’État hébreu ont non seulement persisté, mais elles ont fait l’objet d’une escalade au mépris des demandes de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité pour que cessent ces violations graves du droit international. Après plus d’un an de siège militaire et de « massacre » de la population civile palestinienne, la situation dans la bande de Gaza atteint, selon elle, des niveaux « apocalyptiques ».

Le soutien mondial à ces résolutions est d’autant plus important à la suite de l’avis de la CIJ concernant l’illégalité des pratiques israéliennes dans les territoires palestiniens occupés et de la présence continue d’Israël dans ces territoires, y compris les activités de colonisation, s’est félicité l’État de Palestine. 

Une solution des deux États négociée et durable est plus indispensable que jamais pour assurer la sécurité d’Israël et des territoires palestiniens occupés, ont fait valoir les Pays-Bas.  Néanmoins, pour y parvenir, il est essentiel que cessent les colonies de peuplement israéliennes dans ces territoires.

Un sentiment partagé par le Canada, qui a voté en faveur de cette résolution pour faire part de ses profondes préoccupations quant à l’évolution du conflit israélo-palestinien, de l’expansion effrénée des colonies israéliennes et de l’impunité qui caractérise la violence des colons extrémistes.  L’Australie a jugé les actions d’Israël illégales au regard du droit international, appelant ce pays à répondre à l’avis consultatif de la CIJ et à appliquer le principe de responsabilité s’agissant de la violence des colons.

Ces colonies sont en effet illégales, a renchéri le Royaume-Uni, en dénonçant le harcèlement, l’intimidation et la violence dont sont victimes les communautés palestiniennes afin qu’elles quittent leurs terres.  La seule façon de mettre fin à ce « cauchemar de longue date » est de rétablir le droit à l’autodétermination des Palestiniens au moyen d’un référendum comprenant la diaspora, a insisté la République islamique d’Iran.

Enfin, la Commission a procédé à l’adoption, sans vote, de son projet de programme de travail et de calendrier en vue de la quatre-vingtième session de l’Assemblée générale, en vertu desquels elle mènerait ses travaux du 3 octobre au 19 novembre 2025.  Elle a en outre abordé le point à son ordre du jour consacré à la planification des programmes.

Lors de sa session 2024, la Quatrième Commission a adopté un total de 33 projets de résolution et 5 projets de décision, a indiqué sa Présidente, lors de 29 réunions officielles, dont une table ronde conjointe avec la Première Commission.  Mme Sanita Pavļuta-Deslandes, de la Lettonie, a estimé que l’examen des points à l’ordre du jour a été l’occasion pour les délégations d’examiner en profondeur les questions concernées, avec l’apport de nombreux hauts responsables de l’Organisation.  Tout au long de la session, celles-ci ont démontré, selon la Présidente, un vif intérêt à ce que la communauté internationale reste saisie des importantes questions politiques et de décolonisation qui sont le portefeuille de la Commission.

En 2025, la Commission se réunira pour examiner le rapport du Comité spécial des opérations de maintien de la paix et pour élire son Bureau pour la quatre-vingtième session de l’Assemblée générale.

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Gaza: les États-Unis mettent une nouvelle fois leur veto à un projet de résolution, préparé par les membres élus du Conseil de sécurité

9790e séance - matin
CS/15907

Gaza: les États-Unis mettent une nouvelle fois leur veto à un projet de résolution, préparé par les membres élus du Conseil de sécurité

Un nouveau projet de résolution concernant la guerre à Gaza –le douzième depuis les attentats du 7 octobre 2023– a échoué aujourd’hui devant le Conseil de sécurité, du fait, cette fois encore, d’un veto des États-Unis.  C’est la quatrième fois que les États-Unis mettent leur veto à un projet de résolution sur la question.  Les 14 autres membres du Conseil ont voté en sa faveur.

Les États-Unis ont justifié leur vote en invoquant le « cynisme » de certains membres du Conseil ayant préféré provoquer leur veto plutôt que de rechercher une formulation de compromis, notamment sur la question des otages « irrémédiablement liée » à celle du cessez-le-feu.

C’était la première fois, depuis le 10 juin dernier et l’adoption de la résolution 2735 (2024) par 14 voix pour et l’abstention de la Fédération de Russie, que le Conseil était appelé à se prononcer sur un texte concernant la guerre à Gaza.  Comme l’a dit le représentant de l’Algérie après le vote, le projet de résolution présenté visait uniquement à interrompre le « silence écrasant » qui régnait depuis cinq mois.  Le texte, a-t-il ajouté, « était loin d’être parfait, mais il représentait le minimum minimorum de ce qui aurait dû nous unir ».

Un texte minimal

Présenté par le Guyana au nom des 10 membres élus du Conseil, le texte entendait répondre à la crise humanitaire à Gaza.  La représentante du Guyana a d’abord présenté les points clefs du projet de résolution, « fruit de plusieurs semaines de négociations intensives entre les membres du Conseil » et à même, selon elle, de traduire « une approche inclusive et constructive ». 

Le texte exigeait un « cessez-le-feu immédiat, inconditionnel, permanent et respecté par toutes les parties ».  Il soulignait l’importance de « la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages ».  Il rappelait aux parties leur devoir de respecter pleinement le droit international et de se conformer aux résolutions précédentes du Conseil, en particulier la résolution 2735 adoptée en juin.

Sur le plan humanitaire, le projet de résolution visait à garantir un « accès immédiat aux services de base et à l’aide humanitaire essentielle », et réprouvait « tout effort visant à affamer les Palestiniens ». Il demandait en outre une entrée rapide et sans entrave de l’aide humanitaire à travers Gaza, en insistant sur sa distribution équitable à tous les civils, « y compris les civils de Gaza-Nord assiégée », et ce, « sous la coordination de l’Organisation des Nations Unies ».  Le texte reconnaissait le rôle central de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient), « épine dorsale de la réponse humanitaire à Gaza », et demandait à toutes les parties de permettre à l’organisation de remplir son mandat dans toute la région, sans entrave.

Les États-Unis: pas d’appui à un cessez-le-feu sans condition n’aboutissant pas à la libération des otages

« Nous avons dit très clairement que nous ne pourrions pas appuyer un cessez-le-feu sans condition n’aboutissant pas à la libération des otages », a déclaré le représentant des États-Unis, pour qui ces deux objectifs sont « irrémédiablement liés ».  Selon lui, la résolution aurait envoyé un « message dangereux au Hamas », leur signalant qu’il n’est plus nécessaire de négocier, alors que plus de 100 otages, dont des citoyens américains, restent détenus.

Critiquant la difficulté de certains membres du Conseil à condamner sans réserve les attaques du 7 octobre, les États-Unis ont rejeté sur le Hamas la responsabilité de la mise en danger de millions de civils palestiniens ainsi que de l’escalade régionale.  En outre, ils ont souligné leur collaboration avec Israël pour renforcer l’acheminement de l’aide humanitaire et minimiser les souffrances civiles.  « Un cessez-le-feu sans condition avec le Hamas signifierait l’acceptation de leur mainmise sur Gaza.  Nous ne l’accepterons jamais », a asséné leur représentant, avant de réitérer l’engagement de son pays à poursuivre ses efforts diplomatiques.

La Fédération de Russie a accusé les États-Unis de signer un nouvel arrêt de mort de dizaines de milliers de Palestiniens . Le représentant russe a ainsi qualifié la position américaine d’agissement « inhumain et irresponsable », qui pourrait même aller à l’encontre des intérêts des Israéliens. Il a vu dans le blocage la manifestation de la propension des États-Unis à attiser des conflits et à violer la souveraineté des pays dans les affaires desquelles ils s’ingèrent. 

Le veto américain « incompréhensible » pour la Fédération de Russie 

Si le texte du Guyana avait été adopté, tout ce que les États-Unis demandent aurait pu être fait, a fait valoir le représentant russe, qui a pointé du doigt les raisons « incompréhensibles » données par ce membre permanent pour justifier ses obstructions répétées.  La délégation américaine a, par exemple, exercé son droit de veto le 18 octobre 2023 pour bloquer un texte qui condamnait « noir sur blanc » les attaques du 7 octobre, a-t-il rappelé.  Or, les causes des atrocités commises depuis cette date sont ancrées dans le fait historique que des pays occidentaux ont laissé se créer un État aux dépens d’un autre au Moyen-Orient, a-t-il encore accusé. « Nous ne laisserons pas les Américains faire taire le Conseil et la voix des Palestiniens », a-t-il enfin promis, moquant la tendance des États-Unis à faire vivre « un jour sans fin » en répétant toujours les mêmes arguments.

La Chine a également fait part de sa déception, le veto américain ayant, selon son représentant, « balayé tous les espoirs du peuple de Gaza ». « L’histoire sera juge de nos actes comme de nos inactions, et les générations futures sauront qu’après chaque veto américain le tribut du conflit à Gaza n’a cessé d’augmenter », a-t-il affirmé.  Pour la Chine, mettre son veto à un tel texte revient à donner carte blanche à Israël pour qu’il poursuive sa tuerie de masse.  Une accusation déjà formulée par l’Algérie, dont le représentant s’est dit désolé qu’un membre permanent envoie le message « insensé » que la « Puissance occupante israélienne » peut continuer à « punir collectivement le peuple palestinien et à poursuivre son génocide en toute impunité ».  Les États-Unis doivent cesser d’être passifs et permettre au Conseil de sécurité d’imposer sans délais un cessez-le-feu, a encore souligné le représentant chinois.

La France, qui a rappelé que deux de ses ressortissants font toujours partie des otages du Hamas, et le Royaume-Uni ont regretté que le texte, dont ils ont dit partager la vision et les objectifs humanitaires, n’ait pas pu être adopté. Ils ont réitéré leur engagement de continuer à œuvrer, aux côtés de leurs partenaires, pour mettre un terme à cette guerre, pour obtenir la libération de tous les otages, pour protéger les civils et pour garantir l’acheminement de la quantité d’aide humanitaire requise. 

Les 10 membres non permanents du Conseil, coauteurs du texte, ont fait part de leur profonde déception.  L’Algérie a parlé d’un « jour triste pour le Conseil de sécurité, l’ONU et la communauté internationale ».  « Gaza, la ville des enfants, est devenue la ville des orphelins », s’est-elle lamentée. 

« Plus de cinq mois après l’adoption de la résolution 2735, ce projet réaffirmait notre engagement pour un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent, pour la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages et pour l’acheminement sûr, rapide et sans entrave de l’aide humanitaire aux populations civiles », a indiqué la Suisse, Malte lui emboîtant le pas pour déplorer que le Conseil n’ait pas été en mesure d’adopter un projet de résolution, qui représentait pourtant le minimum pour commencer à remédier à une situation catastrophique devenue indicible. 

Pour sa part, le représentant du Japon a considéré que cette non-adoption ne devait pas être l’occasion d’échanger des accusations vaines et a tenu à rappeler que le membre permanent du Conseil qui n’a pas pu soutenir le projet de résolution travaille sans relâche pour mettre fin au « cauchemar de Gaza ». 

« Précédent abominable » évité de peu selon Israël, une « impuissance auto-infligée » pour l’État de Palestine

Prenant la parole après un nouvel échange entre les États-Unis et la Fédération de Russie s’accusant mutuellement d’actes de « barbarie » au Moyen-Orient et en Ukraine, le représentant de l’État de Palestine a dénoncé une « tentative d’annihilation » orchestrée par Israël, affirmant qu’il n’existe aucun droit justifiant les massacres, les déplacements forcés ou l’affamement des civils.

Le représentant palestinien a rappelé que des milliers de Palestiniens, y compris des enfants, ont péri sous les décombres à Gaza et que la famine s’y propage, décrivant une « réalité quotidienne insupportable ». S’indignant du traitement infligé à son peuple, il a lancé, en tapant du poing sur la table: « Nous avons la mauvaise nationalité, la mauvaise religion, la mauvaise couleur de peau, mais nous sommes des humains avant tout et devons être traités comme tels! » 

Le représentant palestinien a vu dans le veto américain un « message dangereux » encourageant Israël à poursuivre ses actions en toute impunité. Il a accusé ce dernier pays de rejeter toute offre de cessez-le-feu et de chercher à annexer davantage encore de terres palestiniennes.  En appelant l’Assemblée générale à agir là où le Conseil a échoué, le représentant a plaidé pour un avenir libéré de l’occupation et des violences, concluant: « Ce monde peut exister aujourd’hui si nous décidons d’agir. »

En revanche, le représentant d’Israël a fermement condamné le projet de résolution, affirmant qu’il ignorait les souffrances des otages et légitimait la brutalité du Hamas.  Accusant « la plupart des membres du Conseil » d’avoir « trahi leurs propres principes, leur devoir de défendre la justice », il a estimé qu’en adoptant le texte, le Conseil « aurait envoyé un message au monde disant que les terroristes peuvent agir en toute impunité, que l’ONU protégera ces assassins ces violeurs, plutôt que de les traduire en justice ». 

Le représentant israélien a donc « remercié les États-Unis d’être restés du côté de la morale et de la justice, d’avoir refusé d’abandonner les otages et leurs familles », rappelant que 101 otages restent détenus dans des conditions inhumaines.  Attribuant au Hamas la responsabilité du conflit et des pertes civiles, il a rappelé que le groupe utilise les Palestiniens comme boucliers humains et ignore les résolutions du Conseil. 

Israël a affirmé que sa priorité était de protéger ses citoyens et de libérer les otages.  « Nous ne cesserons jamais de combattre pour obtenir leur libération », a insisté le délégué, rejetant tout cessez-le-feu tant que le Hamas ne déposera pas les armes.  Israël a conclu en affirmant que « l’histoire se souviendra de ceux qui ont défendu les principes de paix et de ceux qui les ont trahis ».

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