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Myanmar: le Conseil de sécurité exige l’arrêt immédiat de toutes les formes de violence dans le pays

9231e séance – après-midi
CS/15159

Myanmar: le Conseil de sécurité exige l’arrêt immédiat de toutes les formes de violence dans le pays

Le Conseil de sécurité a exigé, cet après-midi, l’arrêt immédiat de toutes les formes de violence dans l’ensemble du Myanmar et demandé instamment à l’armée du pays de libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement, notamment le Président Win Myint et la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi.

En adoptant par 12 voix pour et 3 abstentions (Chine, Fédération Russie et Inde) sa première résolution sur la situation au Myanmar, le Conseil demande de nouveau que les institutions et les processus démocratiques soient préservés et qu’un dialogue constructif et la réconciliation soient recherchés.  Il encourage notamment la communauté internationale à soutenir la mise en œuvre du consensus en cinq points établi le 24 avril 2021 par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et prie le Secrétaire général, en coordination avec l’Envoyé spécial de l’ASEAN, de lui rendre compte oralement, le 15 mars 2023 au plus tard, de l’appui apporté par l’ONU à la mise en œuvre du consensus en cinq points. 

La résolution 2669 (2022) souligne en outre qu’il faut s’attaquer aux causes profondes de la crise dans l’État rakhine et créer les conditions nécessaires au retour librement consenti, durable, en toute sécurité et dans la dignité des réfugiés rohingya et des personnes déplacées. 

Le Royaume-Uni, qui présentait le texte, a rappelé que le coup d’État militaire de février 2021 avait plongé ce pays de 55 millions d’habitants dans une vague de crises, humanitaire, économique et politique, déstabilisant la région, notamment en aggravant le sort des Rohingya. 

À l’issue du vote, la France, la Norvège et les États-Unis ont dénoncé les violations graves commises par la junte à l’encontre des populations civiles, la France s’inquiétant notamment de la situation des Rohingya. 

Les États-Unis, la Norvège et l’Irlande ont regretté le manque d’ambition du texte, notamment en ce qui concerne le sort des femmes, des enfants, des journalistes et des opposants.  Ces délégations ont souhaité des actions plus fortes pour prévenir l’afflux d’armes dans le pays, les États-Unis se prononçant carrément en faveur d’un embargo, « seul moyen de stopper l’effusion de sang au Myanmar ».  La Norvège a préconisé l’adoption à l’avenir de résolutions plus substantielles, incluant des dispositions du chapitre VII, si la situation le justifie. 

A contrario, la Chine et la Russie ont jugé la résolution déséquilibrée et appelé à respecter l’indépendance et la souveraineté du pays.  La Russie a notamment estimé que la situation au Myanmar ne constituait pas une menace pour la paix et la sécurité internationales et a fait observer que le contenu de la résolution portait surtout sur les droits humains.  Cette situation devrait plutôt être évoquée devant la Troisième Commission de l’Assemblée générale, qu’au Conseil de sécurité, a estimé la délégation russe qui a appelé à ne pas utiliser les droits humains comme un élément de lutte contre les gouvernements « indésirables ». 

La Chine a appelé à respecter la direction de l’ASEAN afin de réunir les conditions d’un consensus, jugeant par ailleurs que l’imposition de sanctions ne fera que renforcer les antagonismes et prolonger la crise.

De son côté, l’Inde a estimé que cette situation complexe exige une diplomatie de coulisse, prévenant qu’une résolution du Conseil de sécurité, à ce stade, risque d’amener les parties à camper sur leurs positions. 

LA SITUATION AU MYANMAR

Texte du projet de résolution (S/2022/980)

Le Conseil de sécurité,

      Se déclarant profondément préoccupé par l’état d’urgence que l’armée impose au Myanmar depuis le 1er février 2021 et ses lourdes conséquences pour la population du Myanmar,

      Rappelant ses déclarations à la presse SC/14986 du 27 juillet 2022, SC/14785 du 2 février 2022, SC/14430 du 4 février 2021 et les déclarations de sa présidence S/PRST/2021/5 du 10 mars 2021 et S/PRST/2017/22 du 7 novembre 2017,

      Se déclarant profondément préoccupé par toutes les formes de violence dans l’ensemble du pays ainsi que par les attaques contre les civils et les infrastructures civiles, dont des équipements dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de l’énergie, et par les attaques contre des entreprises et des biens publics,

      Rappelant qu’il a condamné l’exécution de militants en juillet 2022 et se déclarant de nouveau profondément préoccupé par le maintien en détention arbitraire de la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi et du Président Win Myint, entre autres,

      Insistant sur la nécessité de faire prévaloir l’état de droit et de respecter pleinement les droits humains, soulignant en particulier la nécessité de protéger pleinement les droits des femmes et des enfants, soulignant l’importance du principe de responsabilité et exprimant sa profonde préoccupation face aux restrictions imposées au personnel médical, à la société civile, aux syndicalistes, aux journalistes et aux professionnels des médias,

      Se déclarant profondément préoccupé par le nombre de plus en plus grand de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et par l’énorme augmentation des besoins humanitaires, en particulier parmi les femmes, les enfants et les personnes en situation de vulnérabilité, soulignant qu’il faut protéger les groupes minoritaires, notant l’augmentation de l’extrême pauvreté et soulignant qu’il faut d’urgence mobiliser des ressources suffisantes pour répondre aux besoins humanitaires dans le pays,

      Réaffirmant la nécessité de garantir un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave à toutes les personnes qui sont dans le besoin et soulignant la nécessité de garantir la pleine protection, sécurité et sûreté du personnel humanitaire et médical,

      Soulignant la nécessité de préserver les institutions et les processus démocratiques conformément à la volonté et aux intérêts du peuple du Myanmar,

      Soulignant qu’un processus pacifique, réel et inclusif est nécessaire pour désamorcer la violence et parvenir à un règlement politique durable et soulignant que tout processus politique doit prévoir la participation pleine, égale et véritable des femmes et de représentants très divers de toutes les composantes de la société et de tous les groupes politiques,

      Réaffirmant son plein appui au rôle central joué par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) dans la facilitation d’une solution pacifique qui tienne compte des intérêts et des moyens de subsistance du peuple du Myanmar, saluant les efforts que font la présidence de l’ASEAN et l’Envoyé spécial de l’ASEAN pour le Myanmar en vue notamment de faciliter un dialogue constructif entre toutes les parties ainsi que la fourniture d’une aide humanitaire,

      Se déclarant profondément préoccupé de constater que peu de progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre du consensus en cinq points de l’ASEAN, et demandant de nouveau que des mesures concrètes soient prises en faveur de la mise en œuvre effective et intégrale du consensus en cinq points,

      Accueillant avec satisfaction l’examen par les dirigeants de l’ASEAN de la mise en œuvre du consensus en cinq points et la décision y relative, dans laquelle ils ont réaffirmé que ce consensus restait le point de référence et devait être mis en œuvre dans son intégralité, et notant que l’ASEAN a invité ses partenaires extérieurs et l’Organisation des Nations Unies à soutenir l’action qu’elle mène afin que le consensus en cinq points soit mis en œuvre,

      Réaffirmant son appui aux bons offices de l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar et soulignant qu’une étroite coordination doit être assurée avec l’Envoyé spécial de l’ASEAN, et les encourageant à maintenir la communication et un dialogue intensif avec toutes les parties et réaffirmant qu’ils doivent s’entretenir avec toutes les parties concernées,

      Se déclarant préoccupé par le fait que l’évolution de la situation au Myanmar rend particulièrement difficile le retour librement consenti et durable, en toute sécurité et dans la dignité des réfugiés rohingya et des personnes déplacées à l’intérieur du pays, et soulignant les risques que la situation des Rohingya représente pour l’ensemble de la région,

      Prenant note avec satisfaction de la récente libération de détenus par l’armée et de la déclaration publiée par l’Envoyé spécial de la présidence de l’ASEAN et demandant de nouveau la libération immédiate de toutes les personnes toujours détenues arbitrairement,

      Saluant l’action menée par le Gouvernement bangladais, avec l’aide des entités des Nations Unies, de leurs partenaires et d’autres organisations non gouvernementales, afin d’assurer la sécurité de ceux qui ont fui la violence au Myanmar et de leur fournir un abri et une aide humanitaire,

      Réaffirmant son soutien au peuple du Myanmar et son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance politique, à l’intégrité territoriale et à l’unité du pays,

      1.    Exige l’arrêt immédiat de toutes les formes de violence dans l’ensemble du pays et appelle à la retenue et à l’apaisement des tensions ;

      2.    Demande instamment à l’armée du Myanmar de libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement, notamment le Président Win Myint et la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi ;

      3.    Demande de nouveau que les institutions et les processus démocratiques soient préservés et qu’un dialogue constructif et la réconciliation soient recherchés conformément à la volonté et aux intérêts du peuple du Myanmar ;

      4.    Demande instamment à toutes les parties de respecter les droits humains, les libertés fondamentales et l’état de droit ;

      5.    Salue le rôle central que l’ASEAN joue en facilitant la recherche d’une solution pacifique à la crise au Myanmar dans l’intérêt du peuple du Myanmar et encourage la communauté internationale à soutenir le mécanisme et le processus menés par l’ASEAN à cet égard, notamment les efforts faits en vue de la mise en œuvre du consensus en cinq points ;

      6.    Demande que des mesures concrètes et immédiates soient prises, en notant que l’armée s’était engagée auprès des dirigeants de l’ASEAN à mettre en œuvre effectivement et intégralement le consensus en cinq points établi le 24 avril 2021 par tous les membres de l’ASEAN, et prie le Secrétaire général, ou son envoyée spéciale, en coordination avec l’Envoyé spécial de l’ASEAN, de lui rendre compte oralement, le 15 mars 2023 au plus tard, de l’appui apporté par l’Organisation des Nations Unies à la mise en œuvre du consensus en cinq points ;

      7.    Réaffirme qu’il soutient les efforts faits par l’Envoyé spécial de l’ASEAN en vue d’avoir des échanges nourris avec l’ensemble des parties intéressées au Myanmar, en mettant l’accent sur la promotion d’un dialogue pleinement inclusif et représentatif visant à mettre un terme à la violence et à favoriser la démocratie, et encourage une coordination étroite avec l’Envoyée spéciale du Secrétaire général à cet effet ;

      8.    Demande instamment à toutes les parties au Myanmar de travailler de manière constructive avec l’Envoyé spécial de l’ASEAN et l’Envoyée spéciale du Secrétaire général afin d’amorcer un dialogue visant à trouver une solution pacifique qui soit dans l’intérêt du peuple du Myanmar ;

      9.    Réaffirme qu’un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave est indispensable et souligne qu’il faut étendre l’aide humanitaire à toutes les personnes dans le besoin au Myanmar et garantir la pleine protection, sécurité et sûreté du personnel humanitaire et médical ;

      10. Souligne qu’il faut s’attaquer aux causes profondes de la crise dans l’État rakhine et créer les conditions nécessaires au retour librement consenti, durable, en toute sécurité et dans la dignité des réfugiés rohingya et des personnes déplacées, encourage l’action diplomatique entre les parties concernées visant à contribuer au règlement des questions concernant les Rohingya et souligne qu’il importe d’apporter en permanence une protection et une assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées ;

      11.   Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

M. BARABARA WOODWARD (Royaume-Uni), qui a présenté le texte, a rappelé que la résolution 2669 était la première adoptée par le Conseil de sécurité sur la situation au Myanmar.  Elle a rappelé que le coup d’État militaire de février 2021 avait plongé ce pays de 55 millions d’habitants dans une vague de crises, humanitaire, économique et politique, déstabilisant la région, notamment en aggravant le sort des Rohingya.  Elle a rappelé les points principaux de la résolution, y compris la demande d’un accès humanitaire plein et sans entraves aux personnes dans le besoin.  Elle a estimé que la résolution constituait un message ferme aux militaires qui doivent appliquer intégralement le texte et un message clair au peuple du Myanmar pour soutenir ses droits et ses aspirations. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé que cette résolution appelle à la cessation immédiate des violences et à la désescalade avant de juger essentiel que les civils, en particulier les femmes et les enfants, cessent de subir les violences commises par les forces de sécurité « birmanes ».  Notant que la résolution appelle à la libération immédiate, par la junte, de tous les prisonniers arbitrairement détenus, y compris du Président Win Myint et de la Conseillère d’État Aung San Suu Kyi, la représentante a dénoncé les violations graves commises par la junte à l’encontre des populations civiles, notamment des enfants, durement touchés par la répression menée par le régime issu du coup d’État.  Soulignant que la résolution rappelle les exigences du Conseil pour un accès humanitaire sûr et sans entrave, elle s’est inquiétée de la situation des Rohingya, qui reste très préoccupante.  Elle a dit que la France s’est mobilisée en réponse à cette crise par des contributions volontaires au Haut-Commissariat pour les réfugiés et au Comité international de la Croix-Rouge.  « Ceci s’ajoute à l’aide de l’Union européenne en faveur des Rohingya réfugiés au Bangladesh, et des personnes déplacées en Birmanie », a-t-elle précisé avant de conclure sur la centralité du consensus en cinq point de l’ASEAN comme cadre incontournable de règlement du conflit. 

M. ZHANG JUN (Chine) a exprimé sa préoccupation face à la résolution, estimant qu’il aurait été plus judicieux d’adopter une déclaration présidentielle.  Même modifiée, cette résolution reste déséquilibrée, a dit le représentant pour expliquer son abstention.  Il n’existe pas de solution rapide ou externe à cette crise, dont le règlement ne dépend que de la volonté du Myanmar lui-même, a-t-il souligné.  De même, aucune transition démocratique ou réconciliation nationale ne pourra avoir lieu du jour au lendemain.  Le représentant a invité les parties au conflit à agir dans l’intérêt du Myanmar et de son peuple, et ce, dans le cadre constitutionnel existant.  Qualifiant la libération de prisonniers, en novembre dernier, de pas dans la bonne direction, il a appelé la communauté internationale à encourager les pourparlers de paix, tout en respectant l’indépendance, l’unité et intégrité territoriale du pays. 

Il a ensuite rappelé que le Myanmar est membre de l’ASEAN, laquelle a une excellente connaissance du dossier et démontre sa sagesse par le biais de sa médiation et de son aide humanitaire.  Il faut écouter l’ASEAN et respecter sa direction afin de réunir les conditions d’un consensus, a plaidé le délégué.  Il a également souhaité que le Conseil fasse montre d’efficacité sur cette question et tienne des réunions pour d’abord et avant tout régler les problèmes.  Il a en effet jugé que l’imposition de sanctions ne fera que renforcer les antagonismes et prolonger la crise, comme le Conseil l’a constaté dans d’autres situations, en particulier en Libye.  En conclusion, il a appelé ce Conseil à appuyer la mise en œuvre du Consensus en cinq points de l’ASEAN pour contribuer au règlement de ce conflit et remettre le Myanmar sur la voie de la prospérité. 

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a condamné le coup d’État brutal des militaires en 2021, les appelant à cesser leurs attaques contre les civils et à revenir à un régime démocratique.  Elle a salué la collaboration plus étroite entre l’ONU et l’ASEAN dans la mise en œuvre du consensus en cinq points.  Se réjouissant de l’adoption de la résolution, elle a regretté qu’il ait fallu tant de temps pour y arriver et qu’il n’ait pas été possible de se mettre d’accord sur un projet plus ambitieux pour faire face à une situation catastrophique.  La représentante a indiqué que son pays avait plaidé pour un langage plus fort, notamment sur la protection des enfants et l’éducation dans les conflits armés, la lutte contre la violence sexuelle et sexiste et la fin de l’impunité, ainsi que pour des mentions sur la prévention de l’afflux d’armes et sur les actifs financiers de l’armée.  Espérant que cette résolution ne soit qu’un premier pas, elle a souhaité l’adoption à l’avenir d’une résolution plus substantielle, incluant des dispositions du chapitre VII si la situation le justifie.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a déclaré que ce texte montre la nécessité de relever le défi posé par la situation des Rohingya, l’intérêt international pour ces derniers s’essoufflant.  Il convient de remédier à leur épouvantable situation humanitaire et d’œuvrer pour leur retour dans la paix et la sécurité, a-t-elle dit.  Elle s’est félicitée que le Conseil ait répondu à l’appel de l’ASEAN.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a salué l’adoption d’un texte permettant au Conseil de sécurité de faire face aux actes odieux commis par la junte militaire.  Le libellé, a-t-il fait observer, souligne que le régime doit respecter les droits humains, garantir un accès humanitaire sans entrave aux populations dans le besoin et protéger les minorités vulnérables.  Après avoir salué le fait que la résolution reflète le haut degré de coopération entre l’ONU et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et dit attendre avec impatience le prochain exposé de l’Envoyé spécial pour le Myanmar, le représentant a tout même regretté le manque d’ambition d’un texte qui passe sous silence les crimes perpétrés contre des écoles et les brimades qu’inflige la junte à l’opposition et aux journalistes.  Nous voulons, a-t-il conclu, l’imposition d’un embargo sur les armes, car c’est le seul moyen de stopper l’effusion de sang au Myanmar. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a affirmé avoir répondu à l’appel de l’ASEAN en vue de l’application du processus en cinq points.  Il a appelé le « régime du Myanmar » à revenir sur ses politiques discriminatoires et à respecter les droits humains, les libertés fondamentales et les aspirations politiques de toute la population. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a salué les initiatives du Royaume-Uni qui ont permis l’adoption de la résolution 2669, reflet de la détermination du Conseil de sécurité à mettre fin aux souffrances du peuple du Myanmar face aux exactions du régime.  Il a néanmoins regretté que le Conseil n’ait pas été en mesure de se réunir plus tôt pour dénoncer ces actes.  C’est pour briser ce cycle de violence et d’impunité que nous avons voté pour le texte mais nous estimons qu’il aurait pu être plus audacieux et dénoncer les flux d’armes et la violence à l’égard des femmes, a avoué le représentant.  Il a invité l’ONU, l’ASEAN et la communauté internationale dans son ensemble à saisir l’opportunité de cette résolution pour continuer de dénoncer les agissements du régime. 

M.  RONALDO COSTA FILHO (Brésil) s’est félicité de l’adoption de cette résolution, qui intervient au terme d’une année où la situation au Myanmar n’a pas donné lieu à suffisamment d’actions de la part du Conseil de sécurité.  Il a également remercié le Royaume-Uni, en tant que Porte-plume sur le Myanmar, pour la tenue des consultations qui ont permis d’adopter ce texte.  Enfin, le représentant s’est réjoui que l’ASEAN ait été associée à ces consultations, compte tenu de son rôle de chef de file dans le règlement de cette crise. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est félicité de l’adoption de la résolution, en disant attendre avec intérêt le rapport du Secrétaire général au mois de mars prochain.  Il a salué l’accent mis sur l’établissement des responsabilités pour les crimes commis au Myanmar et a affirmé que la pleine application de cette résolution est un préalable au règlement de la crise politique.

M. LUIS GERARDO ELIZONDO BELDEN (Mexique) a déclaré que ce texte rappelle l’urgence de mettre fin à la violence et insiste sur l’importance d’un accès humanitaire sans entraves.  Il a appuyé les efforts de l’ASEAN et plaidé pour un retour sûr et durable des Rohingya.  Le Conseil ne doit pas rester pas inactif face à la situation au Myanmar, a-t-il conclu.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a expliqué que son vote en faveur de la résolution était un « message de solidarité » en faveur du Myanmar, un appel à mettre fin à la crise des Rohingya « qui a assez duré » et à mettre en œuvre le consensus en cinq points de l’ASEAN. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a expliqué s’être abstenu, estimant que la situation au Myanmar ne constituait pas une menace pour la paix et la sécurité internationales.  Cette conclusion se reflète dans le contenu de la résolution, qui porte surtout sur les droits humains, a-t-il ajouté.  Favorable à la division du travail entre les organes de l’ONU, conformément à leurs mandats, il a estimé que cette situation devrait plutôt être évoquée devant la Troisième Commission de l’Assemblée générale, qu’au Conseil de sécurité.  Il a également appelé à ne pas politiser les droits humains ou à les utiliser comme un élément de lutte contre les gouvernements « indésirables ».  Le représentant a accusé les auteurs de la résolution d’avoir produit un texte déséquilibré ne prenant pas en compte les intérêts de tous les membres du Conseil de sécurité, avec pour objectif de répandre un sentiment anti-Myanmar au sein de l’organe.  Il a regretté que la proposition de dénoncer les effets délétères des mesures coercitives unilatérales dans la résolution n’ait pas été retenue et déploré un texte final politisé.  Le Conseil de sécurité ne devrait pas déstabiliser la situation interne ni saper les efforts de négociation de l’ASEAN, a-t-il estimé avant d’accuser les Occidentaux d’essayer d’envenimer la situation dans le pays.  Selon lui, les élections législatives prévues en 2023 pourraient stabiliser la situation sur le terrain. 

Rappelant que son pays partage 1 700 kilomètres de frontières communes avec le Myanmar, Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a souligné l’intérêt particulier de l’Inde pour promouvoir la paix et la prospérité au Myanmar.  Elle a estimé que cette situation complexe exige une diplomatie de coulisse, prévenant qu’une résolution du Conseil de sécurité, à ce stade, risque d’amener les parties à camper sur leurs positions plutôt que de les encourager à poursuivre un dialogue politique inclusif.  Dans ce contexte, la représentante de l’Inde a demandé aux parties d’abandonner leurs positions les plus extrémistes et d’entamer un dialogue.  Elle a également jugé important que les pays de la région prennent l’initiative en raison de l’impact de la situation du Myanmar sur la région.  C’est pour toutes ces raisons que l’Inde s’est abstenue, a-t-elle expliqué.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Haïti: sur fond de violence accrue des gangs armés, malgré les sanctions, le Conseil de sécurité reporte ses espoirs sur la conclusion d’un accord politique

9233e séance - après-midi
CS/15161

Haïti: sur fond de violence accrue des gangs armés, malgré les sanctions, le Conseil de sécurité reporte ses espoirs sur la conclusion d’un accord politique

Réuni cet après-midi à la demande de la Fédération de Russie pour faire le point sur la situation en Haïti, deux mois après l’imposition d’un régime de sanctions contre ce pays, le Conseil de sécurité a résonné d’appels à la solidarité internationale et à la conclusion d’un accord politique inter-haïtien.  Le Conseil a toutefois affiché ses divisions sur le bien-fondé du déploiement d’une force de sécurité internationale appelée à suppléer la Police nationale d’Haïti (PNH) face aux gangs armés, comme le réclame Port-au-Prince.

Présentant les derniers développements, « dans un contexte où la violence des gangs atteint des niveaux alarmants », la Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) s’est tout d’abord félicitée que le siège du principal terminal pétrolier du pays ait pris fin, début novembre, grâce à un effort concerté de la PNH.  Mme Helen La Lime a cependant ajouté que l’espoir suscité par cette opération s’est rapidement dissipé en raison de la montée en puissance de l’activité des gangs, marquée par des pics d’enlèvements, de meurtres et de viols.

Cette violence a alimenté la résurgence du choléra, accru l’insécurité alimentaire à des niveaux inimaginables, entraîné le déplacement de 155 000 personnes et perturbé l’éducation de milliers d’enfants, a déploré la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, réaffirmant la solidarité de l’Organisation avec le peuple haïtien « en ces temps extrêmement difficiles ».

Alors que l’état catastrophique de l’économie haïtienne ne fait qu’aggraver le sort des millions de personnes qui vivent au milieu de cette violence, Mme La Lime a encore noté que l’adoption, le 21 octobre dernier, de la résolution 2653 (2022), qui prévoit un régime de sanctions ciblant les fauteurs de troubles, a été largement saluée par les Haïtiens.  En tant que Président du Comité du Conseil de sécurité établi par cette résolution, l’Ambassadeur du Gabon, M. Michel Xavier Biang, a précisé que lesdites sanctions prévoient une interdiction de voyager, un gel des avoirs et un embargo sur les armes ciblé.

Ces sanctions ont semblé créer un « nouveau sentiment d’urgence » quant aux moyens de restaurer les institutions démocratiquement élues, a relevé Mme La Lime, en indiquant que le BINUH a activement soutenu les efforts visant à faire avancer le dialogue politique.  Le processus a débouché sur l’élaboration d’un document de « consensus national » qui détaille les étapes devant conduire à la tenue d’élections dans un délai de 18 mois.  Une avancée confirmée par le Ministre des affaires étrangère d’Haïti, qui a annoncé la signature, dans la matinée, de ce document par le Premier Ministre haïtien, M. Ariel Henry, à l’issue d’une réunion avec les représentants de la société civile, des partis politiques et du secteur privé.  M. Jean Victor Généus a également fait état de la formation prochaine d’un Haut Conseil de la transition en vue d’organiser des élections dans le courant de 2023.

Contributeur au journal « Haïti Liberté », M. Kim Ives a émis un avis discordant sur les sanctions.  Il a reproché au Conseil de vouloir « couper à la racine » la tentative d’autodéfense de comités civils créés pour combattre la criminalité en sanctionnant une seule personne, Jimmy Chérizier, connu sous le nom de « Barbecue » et porte-parole d’une fédération de quartiers, le « G9 ».  Cet opposant au Gouvernement haïtien a été appuyé sur ce point par la Fédération de Russie, selon laquelle les sanctions voulues par les États-Unis et le Canada pourraient viser « non pas que des bandits et des chefs de gangs, mais aussi des personnalités politiques de l’opposition susceptibles de gêner les ambitions de ces deux pays ».

Mme La Lime a, quant à elle, soutenu que les sanctions seront plus efficaces dans le cadre d’une approche globale comprenant à la fois le dialogue politique en cours et un soutien opérationnel renforcé à la PNH.  Cette dernière a besoin d’une assistance « sous la forme d’une force spécialisée », comme indiqué dans la lettre du Secrétaire général du 8 octobre et comme réclamé par le Gouvernement et la société civile d’Haïti.  La Représentante spéciale a été rejointe par plusieurs délégations, à commencer par celle des États-Unis, co-porte-plume sur ce dossier, qui a insisté sur l’importance d’une « force multinationale non onusienne » pour appuyer la PNH et rétablir l’ordre.

Voisine d’Haïti, la République dominicaine, représentée par son Ministre des affaires étrangères, M. Roberto Álvarez Gil, a abondé dans le même sens, soulignant la nécessité, en sus de la formation de la PNH, d’une « force robuste, capable de rétablir la paix et de mettre fin à la violence déchaînée par des gangs armés ».  Une position partagée par la Norvège et le Ghana, qui ont tous deux souhaité que soient élargies les consultations sur les propositions de déploiement d’une « mission internationale d’assistance à la sécurité » en Haïti.  Plus mesurée, la France a appelé à soutenir plus efficacement la PNH avec des équipements, des financements et de la formation.

Favorable elle aussi aux sanctions, la Chine a, de son côté, rappelé qu’elle avait été la première à proposer ce train de mesures contre les gangs et leurs parrains et qu’elle avait demandé au Secrétaire général de formuler des recommandations sur la façon d’aider la PNH à les combattre.  De l’avis de la Fédération de Russie, il n’existe pas de formule toute faite pour remettre le pays sur la voie du développement durable.  « Nous doutons, comme d’ailleurs la majorité des Haïtiens, que le déploiement d’une force internationale de sécurité pourra changer fondamentalement la situation dans ce domaine », a souligné la délégation russe, pour qui l’état de délitement avancé des institutions haïtiennes est le résultat de « l’ingérence au long cours des États-Unis et des effets néfastes de la colonisation française ».

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU a, pour sa part, exhorté tous les pays ayant la capacité de le faire à accorder une attention urgente à la demande d’une « force armée internationale spécialisée » soumise par le Gouvernement haïtien en vue de rétablir la sécurité et d’atténuer la crise humanitaire.  « C’est absolument essentiel pour que Haïti retrouve la stabilité institutionnelle et reprenne le chemin de la paix et du développement durable », a plaidé Mme Mohammed, tandis que le Canada, au nom du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC, insistait sur la nécessité d’un « très fort consensus » avant tout déploiement d’une « mission de paix ». 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

Déclarations

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a indiqué que, lors de sa dernière visite en Haïti en février dernier, elle a constaté de gros efforts de reconstruction consécutifs au tremblement de terre qui a frappé la péninsule méridionale en 2021.  Elle a dit avoir été encouragé par les efforts nationaux de redressement et par la solidarité des partenaires internationaux d’Haïti.  Beaucoup espéraient alors que les négociations politiques traceraient une nouvelle voie vers la stabilité et le développement durable, mais, en cette fin d’année, le pays est plongé dans une crise d’une ampleur et d’une complexité sans précédent, a-t-elle déploré.  Les efforts pour engager le dialogue n’ont pas réussi à créer un consensus sur la voie à suivre, a observé Mme Mohammed, avant de dénoncer la violence des gangs, qui paralyse le pays et entrave la libre circulation des personnes, des biens et de l’aide humanitaire.  Cette violence a alimenté la résurgence du choléra, accru l’insécurité alimentaire à des niveaux inimaginables, entraîné le déplacement de 155 000 personnes et perturbé l’éducation de milliers d’enfants, s’est-elle émue, réaffirmant la solidarité de l’ensemble de l’Organisation avec le peuple haïtien « en ces temps extrêmement difficiles ».

« Comme toujours, ce sont les communautés vulnérables qui souffrent le plus », a souligné la Vice-Secrétaire générale, selon laquelle 90% des cas de choléra se trouvent dans des zones souffrant déjà de taux élevés de malnutrition aiguë sévère.  Mme Mohammed s’est également alarmée des informations faisant état de violences sexuelles généralisées par des gangs armés, assurant que « l’ONU continuera de donner une voix aux femmes et aux filles vivant dans des communautés contrôlées par ces bandes », tout en s’employant à réduire leur vulnérabilité à la violence et à demander que des comptes soient rendus pour ces crimes odieux.  Dans ce contexte, elle a appelé à davantage de solidarité de la part de la communauté internationale.  Saluant les mesures déjà prises, notamment les sanctions ciblées destinées à soutenir la stabilité d’Haïti, elle a estimé qu’il est temps de transformer la crise actuelle en une opportunité pour permettre au pays de « rebondir plus fort ».

Mme Mohammed a ainsi exhorté tous les pays ayant la capacité de le faire à accorder une attention urgente à la demande d’une force armée internationale spécialisée soumise par le Gouvernement haïtien en vue de rétablir la sécurité et d’atténuer la crise humanitaire.  « C’est absolument essentiel pour que Haïti retrouve la stabilité institutionnelle et reprenne le chemin de la paix et du développement durable », a-t-elle soutenu, réitérant l’appel lancé en octobre par le Secrétaire général en faveur d’un soutien international à la Police nationale d’Haïti.  Malgré la fin du siège du terminal pétrolier de Varreux, la solidarité et l’action de la communauté internationale restent nécessaires, a insisté la Vice-Secrétaire générale, pour qui cette crise est « un test de notre solidarité avec des personnes en profonde souffrance ».  Au-delà de l’urgence immédiate, Haïti aura également besoin d’un soutien international pour s’attaquer aux causes structurelles de cette crise et briser les cycles qui ont entravé son développement pendant si longtemps, a ajouté la haute fonctionnaire, en affirmant que le développement inclusif et durable est « l’outil ultime de prévention des crises de l’humanité ».

Mme HELEN LA LIME, Représentante spéciale du Secrétaire général en Haïti et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a présenté les derniers développements sur les plans politique, sécuritaire et des droits humains en Haïti, « dans un contexte où la violence des gangs atteint des niveaux alarmants ».  Le siège du principal terminal pétrolier d’Haïti, qui avait coïncidé avec des mois de protestations, de perturbations « orchestrées » et de barrages routiers armés à travers le pays, a pris fin début novembre grâce à un effort concerté de la Police nationale d’Haïti.  Le carburant a commencé à circuler dans un certain nombre de quartiers de la région de Port-au-Prince, ce qui a permis aux hôpitaux et aux entreprises de rouvrir, créant ainsi « l’apparence d’un possible retour à la normale », a précisé la haute fonctionnaire.

Cet espoir a cependant été rapidement dissipé, car un nouveau niveau d’activité des gangs s’est immédiatement fait sentir dans la capitale, marqué par des pics d’enlèvements, de meurtres et de viols.  Le mois de novembre a été marqué par 280 homicides volontaires, « le chiffre le plus élevé jamais enregistré » et le nombre d’enlèvements avec demande de rançon est tout aussi inquiétant, s’est alarmée la Représentante spéciale.  Les enlèvements signalés en 2022 ont jusqu’à présent dépassé les 1 200 cas –le double du nombre enregistré en 2021– faisant de chaque déplacement pour les Haïtiens une véritable « épreuve ».  La hausse des viols enregistrés reflète un mode opératoire horrible de la part des gangs qui se servent de la violence sexuelle pour intimider et soumettre des communautés entières.  La brutalité avec laquelle ces violences sont commises est devenue un signe de notoriété pour leurs auteurs, s’est indignée Mme La Lime.

La situation économique catastrophique en Haïti ne fait qu’aggraver le sort des millions de personnes qui vivent au milieu de cette violence.  « Toutes les routes principales d’entrée et de sortie de la capitale sont contrôlées par les gangs, ce qui entrave le commerce », a expliqué la Représentante spéciale.  Près de la moitié de la population souffre d’insécurité alimentaire, et quelque 20 000 personnes sont confrontées à des conditions proches de la famine.  Outre l’ampleur des déplacements, 34% des écoles restent fermées.  Et tandis que les autorités haïtiennes font de leur mieux, avec le soutien des Nations Unies, pour gérer le choléra, les cas suspects ont atteint 15 000, dans les 10 départements du pays.

L’annonce de l’adoption de la résolution 2653 (2022), le 21 octobre dernier, a été largement saluée par les Haïtiens, a poursuivi la haute fonctionnaire.  Les sanctions bilatérales qui ont suivi ont semblé susciter un nouveau sentiment d’urgence quant aux moyens de restaurer les institutions démocratiquement élues.  Certains membres de la société civile, a expliqué Mme La Lime, ont appelé les personnes visées à quitter leurs fonctions.  Alors que le débat s’intensifiait, le BINUH a poursuivi ses efforts pour faire avancer le dialogue politique.  En octobre et novembre, des organisations de la société civile ont lancé un nouveau cycle de consultations inclusives sur une feuille de route transitoire, avec des membres de l’accord de Montana, des associations du secteur privé, des syndicats et des organisations religieuses.  Un document de « consensus national » a été élaboré à l’issue de ce processus.  Il comprend, a précisé Mme La Lime, des étapes pour amener le pays à tenir des élections dans un délai de 18 mois, avec un conseil de transition et un mécanisme de surveillance.

« Au moment où j’informe le Conseil, des consultations intensives, associées à des efforts pour élargir le soutien au document de ‘ consensus national ’, sont en cours », a informé la Représentante spéciale, qui a encouragé tous les secteurs de la société à mettre de côté leurs différences et à forger une voie commune pour faire avancer le pays.  Alors que le Gouvernement continue à investir dans la Police nationale d’Haïti, avec six nouveaux véhicules blindés reçus en octobre et une douzaine d’autres attendus pour 2023, celle-ci continue à manquer de ressources et n’est pas suffisamment équipée pour faire face à « l’énormité de la tâche » à accomplir.  Les défis posés par les gangs sont encore aggravés par le fait que la Police nationale continue de se réduire, son effectif opérationnel étant passé à moins de 13 000 personnes, dont moins de 9 000 sont disponibles en tant qu’officiers en service actif, a relevé la Représentante spéciale.  Certes, quelques opérations efficaces contre les gangs de Port-au-Prince ont été montées, mais maintenir ces gains de sécurité reste un défi.

« La Police nationale d’Haïti a besoin d’une assistance sous la forme d’une force spécialisée, comme indiqué dans la lettre du Secrétaire général du 8 octobre », a fait valoir la Représentante spéciale.  Les groupes de la société civile, les organisations politiques, les chambres de commerce et les groupes religieux demandent de plus en plus un soutien opérationnel international à la police -avec des paramètres clairs sur les termes de l’engagement et une approche intégrée- qui travaillerait aux côtés de la Police nationale, et ne se substituerait pas à elle.

Un nombre important d’interlocuteurs haïtiens soutiennent l’adoption de sanctions comme un outil crucial dans la lutte contre la corruption et l’impunité, a poursuivi Mme La Lime.  Néanmoins, les sanctions seront plus efficaces dans le cadre d’une approche globale, qui comprend à la fois le dialogue politique en cours et un soutien opérationnel renforcé à la PNH, comme indiqué dans la lettre du Secrétaire général.  Ces trois approches en parallèle seront essentielles pour rétablir l’ordre, la confiance du public et l’espoir d’un avenir meilleur pour le pays.  Les Haïtiens ne méritent rien de moins, a-t-elle conclu.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), s’exprimant en tant que Président du Comité du Conseil de sécurité établi par la résolution 2653 (2022) concernant Haïti, a rappelé que cette résolution exige la cessation immédiate de la violence, des activités criminelles et des atteintes aux droits humains, qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité d’Haïti et de la région, notamment les enlèvements, les violences sexuelles et fondées sur le genre, la traite des personnes et le trafic de migrants, ainsi que les homicides, les exécutions extrajudiciaires et le recrutement d’enfants par les groupes armés et les réseaux criminels.  Le représentant a précisé que ladite résolution a pris trois mesures de sanctions portant respectivement sur l’interdiction de voyager, un gel des avoirs et un embargo sur les armes ciblé.  Il a expliqué que le Conseil de sécurité a décidé que le Comité allait promulguer les directives nécessaires pour favoriser la mise en œuvre des mesures de sanctions susmentionnées.

En ce qui concerne la nomination des membres du groupe de quatre experts, M. Biang a indiqué avoir fait circuler le 12 décembre dernier une liste de quatre candidats spécialisés dans les réseaux criminels.  Ce groupe d’experts, créé pour une période initiale de 13 mois, est placé sous l’autorité du Comité.  Il sera chargé de présenter au Conseil de sécurité, après concertation avec le Comité, un rapport d’activité le 15 mars 2023 au plus tard, un rapport final le 15 septembre 2023 au plus tard, et d’autres rapports périodiques dans l’intervalle.

M. KIM IVES, du journal Haïti Liberté, a estimé que ce Conseil n’a que des « demi-vérités » en sa possession concernant la situation en Haïti.  « On vous a dit que les gangs ont mis le pays en coupe réglée et que le pouvoir de ce Conseil est nécessaire pour y mettre un terme. »  L’autre moitié de vérité, celle que vous ignorez, est que les deux interventions militaires de l’ONU ont, par le passé, tellement fragilisé l’État que les gangs se sont engouffrés dans le vide créé, a-t-il tranché.  Il a aussi mis en garde contre la confusion entre ces gangs et les comités civils d’autodéfense qui se sont formés pour combattre la criminalité.  « Les bons et les mauvais sont mis dans le même panier des gangs. »

M. Ives a reproché au Conseil de vouloir désormais couper à la racine cette tentative d’autodéfense en sanctionnant une seule personne, laquelle est accusée d’avoir commis des violations.  Cet homme est Jimmy Cherizier, connu sous le nom de « Barbecue », porte-parole d’une fédération de quartiers, le G9, et qui était à ses débuts un policier exemplaire, a-t-il expliqué.  Le G9 a essayé de faire baisser la violence et établi une trêve en juillet 2020, a dit l’intervenant, avant de dénoncer les efforts de désinformation de l’oligarchie haïtienne visant à faire croire que Mme La Lime contrôlait le G9.  Un élément de fiction, à force d’être répété, peut devenir un fait, « ce qui a poussé l’ONU à sanctionner un combattant engagé dans la lutte contre la criminalité ».  Une erreur de cette ampleur s’explique par les informations erronées reçues par ce Conseil, a-t-il avancé.  « Les sanctions doivent être étayées par des éléments de preuve et ne doivent pas résulter de machinations politiques. »

M. Ives a critiqué Mme La Lime pour avoir dit à ce Conseil que le Premier Ministre, M. Ariel Henry, veut le dialogue alors qu’il n’a quasiment aucune légitimité.  « Pourquoi Mme La Lime parle de gangs criminels et ne qualifie pas M. Henry de criminel? »  Il a estimé que ces éléments ont ouvert la voie à l’appel lancé par M. Henry à ce Conseil pour une intervention militaire en Haïti, malgré l’opposition de la population.  « La situation ne pourra pas être réglée par une énième intervention étrangère ou par des sanctions », a-t-il argué.  Selon lui, le peuple haïtien doit résoudre ses problèmes de lui-même, l’ONU devant, pour sa part, lui fournir une aide économique désintéressée.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a jugé utile d’inviter des experts capables, comme M. Kim Ives, de communiquer des informations complémentaires pour que le Conseil de sécurité puisse examiner les questions dont il est saisi sous différents angles.  Selon le représentant, il n’existe pas de formule toute faite et de solution rapide pour remettre le pays sur la voie du développement durable.  « Nous doutons, comme d’ailleurs la majorité des Haïtiens, que le déploiement d’une force internationale de sécurité pourra changer fondamentalement la situation dans ce domaine », a-t-il ajouté, affirmant que les institutions politiques et du droit sont dans un état avancé de délitement en raison de l’ingérence au long cours des États-Unis en Haïti et des effets néfastes de la colonisation française.  Sur ce dernier point, il s’est dit effaré que, récemment, les descendants des opprimés d’hier aient dû payer des sommes exorbitantes aux banques parisiennes des anciens oppresseurs.  Les élites haïtiennes ont le sentiment d’être dépendants de leurs protecteurs et parrains extérieurs, a-t-il dit, jugeant que, dans ce contexte, la première responsabilité de la communauté internationale est d’organiser un dialogue pan-national pour qu’émerge une classe politique « capable de faire le ménage dans sa maison ».  Nous savons comment opère Washington quand les États-Unis souhaitent soumettre un pays: ils mettent en place un régime de sanctions ciblant des entités qui lui font de l’ombre, a-t-il ensuite lancé, avertissant que les sanctions voulues par les États-Unis et le Canada pourraient viser non pas que des bandits et des chefs de gangs, mais aussi des personnalités politiques de l’opposition susceptibles de gêner les ambitions de ces deux pays.  Le représentant a assuré que la Russie reste prête à continuer de veiller à ce que les Haïtiens jouissent de l’ordre du droit et qu’ils puissent exprimer leurs aspirations dans le cadre de processus souverains et démocratiques.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a rappelé que l’assassinat du Président Moïse, qui n’est toujours pas résolu, avait précipité les niveaux de violence qui entravent la tenue des élections en Haïti, tandis que des gangs ont pris le contrôle de lieux stratégiques et entravent l’acheminement de l’aide humanitaire et des biens essentiels.  Une situation qui a incité le Mexique et les États-Unis à promouvoir une résolution visant à sanctionner ces criminels, a rappelé le représentant.  Après l’adoption de la résolution 2653 (2022), le nouveau régime de sanctions a commencé à avoir un impact sur la situation sur le terrain, a-t-il dit.  Nous sommes convaincus qu’avec le début des travaux du Comité des sanctions, soutenu par un groupe d’experts nouvellement nommé, des mesures continueront d’être prises contre les responsables de la violence et de l’instabilité, y compris ceux impliqués dans le trafic d’armes.  Dans le même temps, les principaux acteurs politiques doivent parvenir à un consensus minimum sur l’avenir de leur propre pays, a préconisé le représentant.  Il est également nécessaire de mettre fin à la corruption, principale cause de l’inégalité, de la pauvreté, de la frustration, de la violence, de la migration et de graves conflits sociaux.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a déclaré que son pays continue d’essayer de remédier à la dégradation de la situation humanitaire et à l’insécurité en Haïti.  Il s’est dit encouragé par la volonté affichée par le Premier Ministre haïtien de parvenir à un accord d’ici à la fin de l’année, tout en faisant part de son « optimisme prudent » malgré l’implication de la société civile et du secteur privé.  Le représentant a également salué l’action du Gabon, qui, à la tête du nouveau comité de sanctions, a élaboré des directives de travail.  Avec le Mexique, qui est l’autre porte-plume sur ce dossier, nous avons présenté la résolution sur le régime de sanctions qui est une étape importante pour le peuple haïtien, a expliqué le représentant.  Selon lui, ces mesures auront une incidence pour les dirigeants des gangs armés à l’origine de la crise. « Nous continuerons à cibler ces criminels ainsi que ceux qui les financent », a-t-il promis.  Tout en se réjouissant que la Police nationale d’Haïti ait réussi à lever le blocage du terminal de Varreux, le représentant a constaté que les enlèvements, les violences sexuelles, les affrontements entre bandes rivales et les barrages routiers continuent de poser de grandes difficultés.  Dans ce contexte, il a insisté sur le soutien de la communauté internationale, y compris au sujet de la force multinationale non onusienne demandée par le Gouvernement haïtien.  Les États-Unis, a-t-il assuré, continueront à fournir une aide bilatérale à Haïti, notamment pour répondre aux situations de quasi-famine et au choléra.  Dans l’immédiat, ils appellent les donateurs à accroître leur soutien dans cette période cruciale.  Le représentant a rappellé également la nécessité de trouver des solutions inclusives pour faire avancer un accord politique et de mener des réformes dans les secteurs de la sécurité et de l’économie.

Mme SIOBHÁN MILEY (Irlande), si elle s’est félicitée de la fin du blocus du terminal de Varreux, qui a réactivé l’approvisionnement en carburant en Haïti, a considéré que le peuple d’Haïti ne connaîtra la paix que lorsque l’État reprendra le contrôle du territoire national.  Elle a donc salué les efforts déployés pour apporter un soutien à la Police nationale d’Haïti à cet égard.  Pour la représentante, alors qu’une catastrophe humanitaire est en train de se produire dans le pays, les souffrances prolongées du peuple haïtien persisteront sans une résolution immédiate et durable de la crise politique.  Aussi a-t-elle réitéré son appel urgent à tous les acteurs politiques en Haïti pour qu’ils mettent de côté leurs intérêts particuliers dans l’intérêt supérieur du peuple haïtien afin de trouver une solution qui conduira au rétablissement d’un gouvernement, d’un corps législatif et d’un système judiciaire opérationnels.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a salué les progrès réalisés sur le terrain depuis la dernière réunion d’octobre, notamment avec la libération de la gare routière de Varreux responsable de 70% de l’approvisionnement en carburant d’Haïti.  Cela montre la capacité et l’engagement de la Police nationale d’Haïti, a estimé le représentant tout en reconnaissant une situation générale difficile et inquiétante, car les gangs continuent d’être une force perturbatrice au sein de la société, rendant presque impossible la reprise de la normalité institutionnelle et le bon fonctionnement des services publics.  De plus, il a souligné que l’épidémie actuelle de choléra pose des risques importants pour la population haïtienne, si elle n’est pas contrôlée de manière adéquate.  Alors qu’Haïti reste profondément plongé dans une crise multidimensionnelle, l'absence de progrès sur le front politique au cours des derniers mois est stupéfiante, a déploré le représentant, en notant que l’impasse politique actuelle et les crises humanitaire et sécuritaire en Haïti se renforcent mutuellement.  Face à ce constat, il a jugé qu’un accord politique entre les principaux groupes politiques en Haïti est essentiel pour que le pays entame un processus de guérison et rétablisse une gouvernance institutionnelle et démocratique.

Par ailleurs, le représentant du Brésil a espéré que le régime de sanctions adopté à l’unanimité en octobre dernier établira des sanctions ciblées contre ceux qui se livrent à la violence ou la soutiennent, qu’ils soient puissants ou non.  Prenant note des options communiquées par le Secrétaire général dans sa lettre du 9 octobre pour renforcer la sécurité en Haïti et de l’appel du Gouvernement haïtien à recevoir un soutien armé spécialisé pour aider à contrôler la crise humanitaire dans le pays, il a dit attendre avec intérêt de discuter avec les membres du Conseil d’une résolution sur la question.  Il a ensuite exhorté tous les acteurs politiques haïtiens à approfondir le dialogue actuel et à s’accorder d’urgence sur une voie politique à suivre.  Le Brésil croit aux solutions dirigées par les Haïtiens, qui ne se concrétiseront que si les parties prenantes haïtiennes acceptent de parler et de faire des compromis, ouvrant la voie à des élections équitables et à la reprise du fonctionnement normal de l’institution haïtienne, a-t-il conclu

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a estimé que les gangs peuvent être vaincus grâce à un processus politique crédible, des forces de maintien de l’ordre robustes et un soutien institutionnel.  Une nouvelle intervention de ce Conseil devra éviter les erreurs désastreuses du passé et être assortie d’un concept d’opérations et d’une stratégie de sortie clairs, a-t-il estimé.  Pour gagner la confiance de la population, a-t-il ajouté, des contributions africaines et caribéennes seront cruciales.  Il a aussi plaidé pour une enquête transparente et neutre sur les dimensions internationale et historique des crises affectant le pays.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a jugé que tant que les activités des gangs violents d’Haïti ne seront pas freinées, il ne pourra y avoir de sécurité et de stabilité dans le pays.  Bien que ces dernières semaines les forces de sécurité haïtiennes aient réussi à reprendre le contrôle du terminal pétrolier de Varreux, et que la distribution de carburant ait repris dans la capitale, des gangs contrôlent toujours les principales routes vers le nord et le sud, obstruant l’approvisionnement d’autres régions, a-t-il constaté.  Dans ce contexte, il a dit attendre avec impatience la constitution du groupe d’experts dont le travail devrait contribuer à la mise en œuvre de sanctions ciblées contre les chefs de gangs et leurs parrains à l’intérieur comme à l’extérieur d’Haïti.  Le représentant a préconisé que soient renforcées les consultations régionales sur les propositions en suspens concernant le déploiement d’une mission internationale d’assistance à la sécurité en Haïti, déploiement que le Conseil de sécurité pourrait appuyer.  Selon lui, un tel déploiement, s’il voit le jour, devra être accompagné d’un soutien au renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti et des institutions de l’État, y compris le système de justice pénale.  Enfin, le représentant a appelé tous les acteurs politiques à redoubler d’efforts pour parvenir à un consensus sur un processus politique dirigé par les Haïtiens et conduisant à la tenue d’élections nationales.

M. GENG SHUANG (Chine) a rappelé qu’en 2022, Haïti avait dû affronter des gangs toujours actifs, une résurgence du choléra, des pénuries alimentaires, énergétiques et des violences croissantes contre des femmes et des enfants.  Estimant que le peuple haïtien connaissait une « agonie sans bornes », le représentant a affirmé que son pays avait été le premier à proposer des sanctions contre les gangs et leurs parrains et qu’il avait demandé au Secrétaire général de formuler des recommandations sur la façon d’aider la Police nationale d’Haïti à les combattre.  Il s’est félicité de l’adoption de la résolution 2653 (2022) en octobre qui impose des sanctions, notamment le gel d’avoirs financiers et des interdictions de voyager.  Enfin, le représentant a demandé au Gouvernement de fournir des mises à jour sur son processus politique et a réitéré qu’il était essentiel d’empêcher les gangs d’acquérir illégalement des armes.  À cet égard, il a encouragé les pouvoirs politiques et les parties prenantes concernées à s’engager dans un large dialogue et des consultations, et a exprimé son soutien à la Communauté des Caraïbes (CARICOM) dans la résolution de la crise.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis), après s’être félicitée de la fin du blocus du terminal pétrolier de Varreux le mois dernier, a souligné que tout progrès politique contribuerait positivement à l’amélioration de la situation économique, sécuritaire et humanitaire en Haïti.  Aussi faut-il donner la priorité à un dialogue inclusif, dirigé par les Haïtiens eux-mêmes, avec l’engagement constructif de la communauté internationale, pour ouvrir la voie à un environnement propice à des élections pacifiques dès que la situation sécuritaire le permettra.  Dans le cadre de ces efforts, d’autres acteurs tels que la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC doivent jouer leur rôle, a estimé la représentante.  Les Émirats arabes unis, pour leur part, sont prêts à travailler au sein de ce Conseil, du Comité des sanctions contre Haïti et d’autres instances pertinentes pour faire face aux différents défis et crises qui frappent Haïti.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) s’est félicitée des mesures prises pour rendre opérationnel le comité des sanctions établi par la résolution 2653 (2022), invitant toutefois ce dernier à cibler davantage les auteurs de violences sexuelles et sexistes.  Face à la situation humanitaire en Haïti, elle a dit craindre une nouvelle détérioration alors que les gangs continuent de contrôler de nombreux territoires.  Après avoir appelé à ce qu’un accès sûr et sans entrave aux personnes dans le besoin soit garanti à l’ONU et aux travailleurs humanitaires locaux et internationaux, la représentante a souhaité que soient examinés les « échecs systématiques » d’Haïti, notamment l'effondrement du secteur de la sécurité et de la justice, et la faible résilience aux catastrophes, laquelle conduit les personnes vulnérables des zones rurales à quitter leurs foyers pour les villes où la violence sévit.  Regrettant qu’une solution politique reste insaisissable, la représentante a encouragé les acteurs politiques du pays à trouver une solution durable dirigée par les Haïtiens.  « Il faudra plus que la simple organisation de nouvelles élections pour résoudre cette crise », a-t-elle admis, plaidant pour des efforts multiples et combinés dans les secteurs de la sécurité, de l’humanitaire et de la politique pour ouvrir la voie à un avenir meilleur.  À cet égard, la représentante a applaudi le soutien fourni par des pays et acteurs de la région pour aider la Police nationale d’Haïti à faire face à la situation sécuritaire.  En conclusion, elle a invité les porte-plume sur le dossier haïtien à élargir leurs discussions sur le projet de résolution relatif à une force multinationale dans le pays.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a reconnu que « Haïti est au bord du gouffre ».  Il s’est félicité de l’adoption de la résolution 2653 (2022) du Conseil de sécurité qui a envoyé un message fort non seulement à la population haïtienne qui a besoin d’aide, mais aussi aux gangs pour leur rappeler qu’ils auront des comptes à rendre.  Il s’est particulièrement inquiété de l’effondrement du secteur de la justice en citant une insécurité qui a poussé des milliers de personnes à fuir le pays.  « Si l’aide doit venir de l’extérieur, les solutions ne peuvent venir que de l’intérieur », a résumé le représentant.  Il a prévenu que si les dirigeants haïtiens continuent sur cette voie, il ne restera rien de leur pays et ils n’auront plus rien à partager.

Mme ALICE JACOBS (Royaume-Uni) a dénoncé l’insécurité chronique en Haïti et les agissements des gangs armés.  Ces derniers doivent rendre des comptes, sous peine de voir l’instabilité se propager, a dit la déléguée.  Elle a salué les progrès accomplis sur le dossier des sanctions, celles-ci étant un outil nécessaire pour briser le cycle de la violence.  Mais ces sanctions ne suffiront pas, c’est pourquoi il convient d’envisager un soutien international au Gouvernement et au peuple haïtiens, a-t-elle estimé.  Enfin, la déléguée a appelé à des efforts accrus en vue de sortir de l’impasse politique dans laquelle le pays est plongé.

Intervenant en sa capacité nationale, M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a déclaré que le Conseil doit agir rapidement pour faire face à la situation en Haïti, le peuple haïtien ayant plus que jamais besoin de la solidarité internationale et en particulier de ses voisins les plus proches.  Lorsque le feu consume la maison du voisin, a-t-il ajouté, l’on aura beau fermer ses portes et ses fenêtres, il restera l’odeur entêtante et obsédante de la fumée venant des ruines de sa maison.  « La solidarité en pareille situation est une exigence morale », a-t-il insisté.  Saluant l’action de l’ Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) pour soutenir la Police nationale d’Haïti aussi bien par la formation que par le renforcement des capacités en vue d’améliorer le contrôle aux frontières, le représentant a souligné que, sans la sécurité, l’économie haïtienne pourra difficilement se relever de l’effet conjugué des crises multiples, des épidémies, « et encore moins pourra-t-elle retenir les cerveaux et les bras dont elle a besoin pour son développement ».

Après avoir noté que les sanctions visant les personnes ayant des liens avec le crime organisé commencent à produire leurs effets, le délégué a abordé la situation humanitaire dans le pays, rappelant que près de 5 millions d’Haïtiens font face à une crise alimentaire déclarée et de nombreux autres milliers sont au bord de la famine.  Il a souhaité que se poursuive la reprise de la distribution du carburant pour redonner du souffle à l’économie haïtienne, avant d’encourager les acteurs politiques haïtiens à maintenir le dialogue en vue d’un accord permettant de mettre en place les conditions d’organisation d’élections qui soient acceptées par tous.  Concernant l’envoi d’une force multinationale qui permettra de renforcer la police pour combattre les gangs, il a estimé que cela ne pourra se faire que si cette proposition remporte la plus large adhésion possible au sein des populations.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré: « Haïti ne peut plus attendre ».  Elle a exhorté la communauté internationale à redoubler ses efforts pour mettre un terme à la spirale de violence et de misère qui frappe ce pays.  Mettant l’accent sur quatre points, elle a d’abord noté que la situation sécuritaire appelle une réponse collective plus vigoureuse.  Face aux gangs qui multiplient les enlèvements, les violences sexuelles et les homicides, « dans l’impunité la plus totale », il faut soutenir beaucoup plus efficacement la Police nationale d’Haïti avec des équipements, des financements et de la formation.  Deuxièmement, la France salue le régime de sanctions qui a été constitué pour les personnalités qui menacent la paix et la sécurité en Haïti, a ajouté la représentante, avant de souligner l’importance de reconstruire la justice en Haïti.  Troisièmement, la France continuera d’exhorter les acteurs politiques à trouver un compromis en rappelant que le dialogue politique doit déboucher sur l’organisation d’élections démocratiques lorsque les conditions sécuritaires seront réunies.  Pour ce faire, la représentante a appelé la classe politique à « faire preuve de responsabilité » afin de sortir de l’impasse actuelle.  Enfin, notant que la crise en Haïti est multidimensionnelle, elle a indiqué que son pays est engagé pour faciliter l’aide humanitaire en particulier face à l’épidémie de choléra qui frappe le pays depuis le mois d’octobre.  La France a également augmenté son aide alimentaire.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a exprimé son inquiétude face à la situation sécuritaire et humanitaire en Haïti, qui n’a pas enregistré de progrès significatif depuis l’adoption de la résolution 2653 (2022), constatant même qu’elle empire à cause de l’impunité dont bénéficient les groupes armés et les réseaux criminels.  Dénonçant les meurtres, enlèvements et autres violences aux civils, et regrettant le manque d’accès aux services et ressources essentiels, elle a aussi mentionné l’épidémie de choléra qui aggrave la situation.  Elle a donc recommandé que la communauté internationale et les agences de l’ONU renforcent leur aide humanitaire, avant de demander au Conseil d’accorder une attention plus grande à cette situation.  Énonçant la priorité qui est de faire face aux gangs criminels et d’apporter un semblant d’ordre, elle a salué l’aide en matière de sécurité apportée par les pays de la région.  Elle a espéré que la Police nationale serait ainsi renforcée pour gérer les activités criminelles déstabilisatrices menées par les gangs.

Mme Kamboj a invité à examiner avec attention la question lorsqu’une décision sera prise pour le déploiement d’un mécanisme régional de sécurité, en tenant compte des expériences passées dont celles des missions onusiennes.  La représentante a aussi souhaité que tous les acteurs haïtiens s’engagent dans de véritables négociations, afin de parvenir à un consensus sur la feuille de route politique visant à tenir les élections tant attendues.  Les partis devront garantir un processus inclusif et légitime, a-t-elle précisé.  Elle a salué le rôle de la Représentant spéciale et du BINUH dans le soutien aux efforts pour atteindre la stabilité institutionnelle, la bonne gouvernance et l’état de droit.  Elle a conclu en rappelant que l’Inde a toujours contribué au renforcement des capacités et aux initiatives de formation en Haïti, désirant poursuivre cet appui.

M. JEAN VICTOR GÉNÉUS, Ministre des affaires étrangères d’Haïti, s’est félicité de la convocation de cette réunion d’information à la demande de la Fédération de Russie.  Il a salué le travail du Comité des sanctions et pris note de la formation du groupe d’experts devant accompagner celui-ci dans sa tâche.  Dans ce cadre, il a appelé à l’établissement de la liste des principaux acteurs liés à la violence des gangs et au blanchiment des avoirs.  De son côté, a précisé le Ministre, la justice haïtienne s’emploie à trouver la meilleure formule pour donner plein effet à la résolution 2653 (2022) dans le système juridique du pays.  Si l’on assiste à une reprise « timide » des activités depuis l’adoption de cette résolution en octobre, il convient de ne pas se méprendre sur cette évolution, a-t-il prévenu.  Bien qu’elle ait permis d’atténuer la pression qui s’exerçait sur la population et sur les activités économiques, la libération de l’accès au principal terminal pétrolier de Varreux est loin d’avoir résolu le problème structurel posé par l’action des gangs armés qui continuent à entraver les actions du Gouvernement, a-t-il averti.  « Les assassinats, viols, enlèvements et détournements de camions de marchandises continuent. »  De plus, a informé M. Généus, le Directeur de l’Académie de police a récemment été abattu par des bandits armés et près d’une soixantaine d’agents de police ont subi le même sort depuis le début de l’année, de même qu’un chef de parti politique activement impliqué dans la recherche d’un accord politique inclusif.  Il a trouvé étonnant que l’on puisse dans cette enceinte faire la promotion de de gangs armés.

Selon le Ministre, la crise humanitaire qui plonge la moitié de la population dans l’insécurité alimentaire est due à des causes structurelles qui ont été aggravées par les blocages de routes, les vols et les détournements de camions par les gangs armés.  Ces actions entraînent une inflation galopante qui rend les quelques denrées disponibles inabordables pour les populations, a-t-il déploré, ajoutant que ce phénomène est amplifié par la « prise en otage » de l’entrée nord de la capitale, qui rend inaccessible le port à conteneurs de Lafito où sont bloqués des produits alimentaires et pharmaceutiques, ainsi que des matières premières pour des usines d’assemblage.  L’unique usine de fabrication de farine de blé est à l’arrêt depuis plusieurs mois après avoir été sabotée par les gangs et il y va de même de la Cimenterie nationale.  Parallèlement, la résurgence du choléra fait un nombre élevé de victimes et représente une véritable menace de santé publique pour le pays et la région, a alerté M. Généus, faisant état de 17 629 cas suspects, 14 972 hospitalisations et 316 décès au 18 décembre.  Selon le Ministre, cette maladie, qui s’est déclarée dans deux quartiers défavorisés de la capitale, touche actuellement tous les départements à l’exception du Nord-Est.

M. Généus a salué la décision unanime du Conseil de sécurité de sanctionner certains acteurs importants qui alimentaient l’instabilité politique à travers leur soutien aux gangs armés.  Ceci devrait contribuer à faciliter le dialogue inter-haïtien et l’adhésion à un compromis national susceptible de nous conduire vers des élections générales en 2023, a-t-il estimé.  Selon lui, l’application des sanctions permettra d’éviter l’injection de l’argent sale dans le processus électoral et de réduire la capacité des promoteurs de la violence à s’approvisionner en armes et munitions.  Dans ce contexte d’insécurité généralisée, les données qui ont conduit le Gouvernement haïtien à solliciter l’assistance d’une force spécialisée pour accompagner la Police nationale d’Haïti et restaurer l’ordre « n’ont pas beaucoup changé », a poursuivi le Ministre.  Il est urgent que les amis d’Haïti apportent cette assistance qui, si elle est suffisamment robuste, peut aider la Police nationale à venir à bout du phénomène des gangs armés.

Sur le plan politique, M. Généus a souligné la volonté de dialogue du Premier Ministre, M. Ariel Henry, qui a permis de conclure l’Accord du 11 septembre 2021.  Loin de s’en contenter, M. Henry a mis tout en œuvre pour élargir le consensus, a fait valoir le Ministre.  Si certains ont reproché au Premier Ministre d’avoir perdu trop de temps à chercher à ramener les récalcitrants à la table de négociation, il ne regrette pas d’avoir essayé, a-t-il confié, jugeant que c’est dans l’unité que sera trouvé le moyen de mettre un terme à cette crise.  À cet égard, il a annoncé que M. Henry s’est réuni dans la matinée avec des représentants de la société civile, des partis politiques et du secteur privé pour finaliser et signer un consensus national pour une transition inclusive et former un Haut Conseil de la transition en vue d’organiser des élections dans le courant de l’année 2023.

M. ROBERTO ÁLVAREZ GIL, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a rappelé que les gangs criminels contrôlent une grande partie d’Haïti, dont 60% de Port-au-Prince.  Selon lui, les efforts considérables du Gouvernement haïtien et de la Police Nationale d’Haïti pour reprendre le contrôle de leur pays requièrent la coopération de tous les États représentés ici.  La solution à la crise haïtienne ne pourra venir que du peuple haïtien et de ses dirigeants, à travers un dialogue soutenu et la coopération politique, a estimé le Ministre, jugeant essentiel de créer les conditions pratiques sur le terrain à cette fin.  C’est pourquoi il a exprimé son soutien le plus ferme à la position du Secrétaire général qui a souligné la nécessité, en sus de la formation de la police, d’une force robuste, capable de rétablir la paix et de mettre fin à la violence déchaînée par des gangs armés.

M. Álvarez Gil a estimé que les résolutions 2645 (2022) et 2653 (2022) ont porté leurs premiers fruits en initiant des sanctions bilatérales contre ceux qui financent les gangs.  Dans ce contexte, il a espéré que le Comité des sanctions et le groupe d’experts créé par ces résolutions commenceront leurs travaux en janvier, afin d’avoir une plus grande latitude dans la poursuite des criminels.  « Ce Conseil est instamment prié de mettre en œuvre la proposition contenue dans la résolution 2645 (2022) dans les meilleurs délais, en créant une force multinationale en appui à la Police Nationale d’Haïti, car c’est le seul moyen viable à court terme de sauver le peuple haïtien de son épouvantable situation actuelle, a déclaré en conclusion le Ministre.

M. ROBERT KEITH RAE (Canada), au nom du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC, a indiqué s’être rendu, il y a deux semaines, à Port-au-Prince, et avoir été frappé par le calme qui régnait dans les rues.  Malheureusement, ce n’était pas parce que la situation sécuritaire s’était améliorée, mais parce que les gens ne peuvent pas quitter leur maison en toute sécurité ou qu’ils ont déjà fui, a-t-il expliqué.  Des gangs lourdement armés contrôlent désormais la majorité de la capitale haïtienne, ce qui a un impact considérable sur la circulation du carburant et de la nourriture, de même que sur la vie quotidienne de la population, a dit le délégué.  Il a indiqué que de nombreuses écoles sont encore fermées et que les agriculteurs ne peuvent ni semer ni récolter de nourriture.  La situation humanitaire est très grave, tandis que l’impasse politique sur la voie à suivre pour Haïti perdure, s’est inquiété le représentant qui a souligné qu’il n’y a pas de solution miracle en Haïti.  Si une action immédiate est nécessaire pour aider le pays face à l’insécurité et à l’épidémie de choléra, il a plaidé pour un soutien sur le long terme.  Enfin, il a rappelé la nécessité d’un très fort consensus avant le déploiement de toute mission de paix.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité prolonge son autorisation à la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), dont le retrait commencera dans six mois

9233e séance – après-midi
CS/15160

Le Conseil de sécurité prolonge son autorisation à la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), dont le retrait commencera dans six mois

Le Conseil de sécurité a adopté, cet après-midi, une résolution par laquelle il renouvelle jusqu’au 30 juin 2023 son autorisation à la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), date à laquelle la Mission devrait entamer son retrait par une réduction de 2 000 membres de son personnel en tenue sur les 19 626 autorisés.  Ce retrait doit être mené avant le 31 décembre 2024 en suivant une « démarche stratégique, graduelle et secteur par secteur ».

La résolution 2670 (2022), adoptée à l’unanimité, réaffirme, avec certains aménagements, les décisions que le Conseil de sécurité a prises le 31 mars 2022 dans sa résolution 2628 (2022).  Ce texte avait approuvé la décision du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) de reconfigurer l’AMISOM, l’ancienne Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie, qui est ainsi devenue l’ATMIS.

Le mandat de l’ATMIS consiste à réduire la menace posée par les Chabab; soutenir le renforcement des capacités des forces de sécurité et de police somaliennes intégrées; procéder au transfert progressif des responsabilités en matière de sécurité à la Somalie; et soutenir les efforts déployés par la Somalie en faveur de la paix et de la réconciliation, conformément au Plan de transition et au dispositif national de sécurité, afin d’appuyer l’édification d’un État somalien stable, fédéral, souverain et unifié.

D’ici au 30 avril 2023, le Conseil attend des évaluations techniques conjointes régulières des progrès réalisés: un rapport du Secrétaire général, élaboré conjointement avec l’UA et en consultation avec la Somalie et les donateurs; un rapport de l’UA contenant une évaluation secteur par secteur des conditions de sécurité et des performances de l’ATMIS; et un rapport de la Somalie avec un plan de constitution des forces à jour.

Le Conseil insiste également sur la nécessité pour les autorités somaliennes de mettre en œuvre un plan stratégique visant à créer de nouvelles forces de sécurité et d’intégrer les forces régionales.  Il prie le Secrétaire général de continuer de fournir un appui logistique et, en consultation avec l’UA et le Gouvernement fédéral somalien, de mettre au point un plan d’appui logistique approprié, par l’intermédiaire du Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS).

Le soutien de l’ATMIS reste vital pour la Somalie, a commenté le Royaume-Uni, délégation rédactrice de ce texte, qui a misé sur la poursuite de la transition, « composante essentielle de l’instauration de la paix » dans le pays.  Le représentant s’est dit heureux que le Conseil soutienne l’UA dans cet effort, la prorogation de la phase I donnant plus de temps à la Mission et à la Somalie pour travailler de concert dans tous les domaines, sécuritaire et politique notamment.

Les États-Unis ont salué les efforts du Royaume-Uni pour amener le Conseil de sécurité à s’entendre sur cette prorogation, nécessaire pour continuer de réduire la menace représentée par les Chabab et avancer vers la transition et le déploiement de forces de sécurité somaliennes.  Le représentant a salué une résolution qui montre les progrès réalisés dans l’élaboration d’un secteur de sécurité en Somalie, cela dans le cadre de la transition, laquelle prendra fin en décembre 2024.

Une transition sans heurts est possible en Somalie, a enchaîné la déléguée de la France, en exhortant les acteurs pertinents à œuvrer pour le prouver.  Cela est crucial pour maintenir la confiance de la communauté internationale, a dit la représentante, qui a rappelé le soutien de l’Union européenne à la Somalie.  C’est aussi le soutien ferme exprimé avec ce vote par le Conseil qu’a salué son homologue de la Norvège espérant que la Somalie avancera sur la voie du dialogue.

Le représentant de l’Irlande a déclaré qu’il faut absolument maintenir l’élan pour mettre en œuvre le plan de transition en Somalie et assurer le transfert des responsabilités de sécurité aux autorités fédérales.  Il s’est félicité de la décision d’organiser une réunion du Conseil en mars pour évaluer les progrès accomplis dans ce cadre.  Le Conseil a en effet décidé de tenir, au plus tard le 31 mars 2023, une séance officielle sur la transition en Somalie, avec la participation de la Somalie, de l’Union africaine, de l’Union européenne et des pays fournissant des contingents à l’ATMIS.

Enfin, le délégué de la Chine a tenu à souligner que la responsabilité d’assurer la sécurité et la paix en Somalie incombe au Gouvernement fédéral, dont il a espéré qu’il combattrait le trafic illicite et la prolifération d’armes légères et de petit calibre, tout en améliorant la gouvernance et la lutte contre la corruption, entre autres.

LA SITUATION EN SOMALIE

Texte du projet de résolution (S/2022/983)

      Le Conseil de sécurité,

      Rappelant ses résolutions et les déclarations de sa présidence sur la situation en Somalie, notamment la décision qu’il a prise dans sa résolution 2628 (2022) d’autoriser la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS),

      Notant que l’Union africaine a demandé, au paragraphe 2 du communiqué de son Conseil de paix et de sécurité adopté à sa 1121e réunion, tenue le 11 novembre 2022, de proroger jusqu’au 30 juin 2023 la phase 1 de la Mission aux fins du retrait de 2 000 membres de son personnel,

      Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

      1.    Réaffirme les décisions qu’il a prises dans sa résolution 2628 (2022), sous réserve de ce qui suit :

      a)    Rappelle les paragraphes 22, 23, 24 et 26 de ladite résolution et proroge exceptionnellement les autorisations qu’il y a données jusqu’au 30 juin 2023, affirme que le paragraphe 27 de ladite résolution est annulé, rappelle également la révision apportée au calendrier opérationnel à la demande de la Somalie et avec le soutien du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine et visant à ce que le retrait de 2 000 membres du personnel de l’ATMIS soit effectué au plus tard le 30 juin 2023, et affirme la détermination de l’Union africaine et de la Somalie à adopter une démarche stratégique, graduelle et secteur par secteur pour le retrait des 2 000 personnes concernées au cours de la période de six mois ;

      b)    Rappelle également le paragraphe 28 et note que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, au paragraphe 2 de son communiqué adopté à sa 1121e réunion, tenue le 11 novembre 2022, a reconfirmé son engagement à maintenir la date de retrait de l’ATMIS au 31 décembre 2024 ;

      c)    Rappelle qu’il a, au paragraphe 51, demandé à l’Organisation des Nations Unies, agissant de concert avec l’Union africaine, la Somalie, l’Union européenne et les autres donateurs, d’effectuer des évaluations techniques conjointes régulières des progrès réalisés à partir des objectifs de référence arrêtés par l’Organisation, l’Union africaine, la Somalie et l’Union européenne et détaillés dans la lettre que le Secrétaire général a adressée au Conseil de sécurité le 30 septembre 2022, prie le Secrétaire général de présenter son prochain rapport élaboré conjointement avec l’Union africaine et en consultation avec la Somalie et les donateurs d’ici au 30 avril 2023, et non au 15 février 2023 comme demandé initialement ;

      d)    Rappelle la demande qu’il a formulée au paragraphe 53 et demande qu’il lui soit présenté d’ici au 30 avril 2023 un autre rapport dans lequel figurera une évaluation secteur par secteur des conditions de sécurité et des performances de l’ATMIS ;

      2.    Rappelle les paragraphes 7, 8 et 38 de la résolution 2628 (2022), réaffirme le paragraphe 37 de la même résolution, rappelle également le paragraphe 52, et demande à la Somalie de présenter un autre rapport d’ici au 30 avril 2023 et d’y faire figurer un plan de constitution des forces à jour ;

      3.    Décide d’organiser une séance officielle du Conseil sur la transition en Somalie, qui se tiendra au plus tard le 31 mars 2023, avec la participation de la Somalie, de l’Union africaine, de l’Union européenne et des pays fournissant des contingents à l’ATMIS ;

      4.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: en Syrie, le processus politique est dans l’impasse, sur fond de crise humanitaire plus aiguë que jamais, prévient l’Envoyé spécial

9230e séance - matin
CS/15158

Conseil de sécurité: en Syrie, le processus politique est dans l’impasse, sur fond de crise humanitaire plus aiguë que jamais, prévient l’Envoyé spécial

Alors que l’année 2022 touche à sa fin, l’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie a déclaré, ce matin au Conseil de sécurité, que jamais les besoins de ses habitants n’ont été plus aigus depuis le début du conflit il y a presque 12 ans, dans un contexte d’effondrement économique, de violence continue et d’absence de progrès tangible du processus politique.  Raison de plus pour le Conseil de renouveler le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière qui expire le 10 janvier, a exhorté le haut fonctionnaire.

« Le tableau est sombre », a concédé M. Geir O. Pedersen, deux semaines après un déplacement à Damas où il a repris ses discussions avec le Gouvernement syrien sur la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015), qui appelle à un cessez-le-feu et à une résolution politique du conflit en Syrie.  Or, la situation sur le terrain prend « une tournure inquiétante », a constaté le haut fonctionnaire, le pays s’enfonçant dans une crise humanitaire et économique, précipitée par un contexte géopolitique mondial extrêmement défavorable.

Sur le plan militaire, a précisé l’Envoyé spécial, des frappes aériennes progouvernementales sporadiques ont pris pour cible le nord-ouest de la Syrie au cours du mois écoulé, de même que des frappes aériennes turques dans le nord et d’autres à Damas et dans le sud-ouest attribuées à Israël.  En outre, des bombardements, des tirs de roquettes et des affrontements intermittents sur les lignes de contact ont été perpétrés par l’ensemble des parties au conflit –le Gouvernement syrien, l’opposition armée, les Forces démocratiques syriennes (FDS) et le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham–, sans compter Daech.

Face à « cette dynamique inquiétante », la priorité est de consolider le « patchwork » d’accords et d’arrangements fragiles conclus bilatéralement ces dernières années entre certains acteurs clefs –Russie, Türkiye, États-Unis– pour en faire un cessez-le-feu à l’échelle nationale tout en privilégiant une approche coopérative de la lutte contre les groupes terroristes figurant sur la liste du Conseil de sécurité.  C’est à cette fin que M. Pedersen a indiqué avoir convoqué une réunion plénière du Groupe de travail sur le cessez-le-feu à Genève vendredi dernier.

Une autre priorité, c’est de garantir un accès humanitaire sans entrave à tous les Syriens dans le besoin dans l’ensemble du pays, et dans ce cadre, a-t-il souligné, l’aide transfrontière autorisée par le Conseil de sécurité reste indispensable.  « C’est le message essentiel que je vous adresse aujourd’hui: continuez à soutenir ce mécanisme; des millions de Syriens en dépendent », a plaidé M. Pedersen, rejoint par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Martin Griffiths, et de nombreux membres du Conseil, du Mexique au Gabon, en passant par l’Albanie, la France et l’Irlande, pour qui ce mécanisme est une « bouée de sauvetage ».  Il n’existe tout simplement pas de substitut, ont insisté les États-Unis.

De « tristes records » ont été battus en 2022 en Syrie, a relevé M. Griffiths, qui est également le Coordonnateur des secours d’urgence.  Rien que dans le nord-ouest du pays, le nombre de nécessiteux a augmenté cette année pour atteindre les 14,6 millions de personnes, alors qu’il devrait se chiffrer à 15,3 millions en 2023.  À cela s’ajoute le fait que près de six millions de personnes ont besoin d’aide pour faire face aux températures glaciales de l’hiver, soit un bond de 33% par rapport à l’an dernier.  Or, le financement du plan de réponse humanitaire de l’ONU pour la Syrie en 2022 n’aura été financé qu’à hauteur de 43% à peine, s’est désolé le Secrétaire général adjoint, appuyé par plusieurs membres du Conseil.

Pour la Fédération de Russie, ses « collègues occidentaux » passent plus de temps à présenter le mécanisme transfrontière au lieu de s’assurer que l’aide est bien acheminée à tous les Syriens par-delà les lignes de front.  Affirmant que « ce mécanisme est tout sauf transparent », la délégation s’est notamment élevée contre le fait que le déploiement de projets de relèvement rapide soit marqué par des déséquilibres géographiques frappants, 35% seulement d’entre eux se déroulant dans les zones contrôlées par Damas, « là où pourtant les besoins sont les plus criants ».  Tant que l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Syrie seront compromis par les Occidentaux, nous ne pourrons pas croire à leurs propositions au sujet du mécanisme transfrontière, a-t-il mis en garde.

La République arabe syrienne a d’ailleurs dénoncé la présence militaire illicite de forces étrangères des États-Unis et de la Türkiye, de même que les attaques israéliennes contre ses infrastructures vitales et l’imposition de sanctions unilatérales illicites.  Un « siège immoral et inhumain » qu’elle a imputé aux États-Unis et à l’Union européenne, qui paradoxalement demandent la prorogation d’un mécanisme « temporaire » par nature et « discriminatoire » dans les faits selon la délégation, puisqu’il ne profiterait qu’à une partie des Syriens « au détriment des autres ».

Sur le plan politique, l’Envoyé spécial a indiqué que le mois écoulé a été marqué une fois de plus par une absence de progrès des travaux de la Commission constitutionnelle, qui ne s’est pas réunie, en raison de l’opposition de la Fédération de Russie à le faire à Genève.  La délégation russe a justifié sa position en pointant l’absence de garanties sérieuses et appropriées pour les personnes qui devaient participer à ces travaux au nom du pays hôte.

Autre sujet contentieux dont dépend une reprise du processus politique: la question des détenus et des personnes disparues, plus de 130 000 selon les États-Unis, dont M. Pedersen a plaidé la cause lors de son déplacement à Damas.  Il a d’ailleurs émis l’espoir que 2023 verra la création d’une institution pour les personnes disparues mandatée par l’Assemblée générale, comme le recommande le Secrétaire général.

Pour le haut fonctionnaire, il faut également poursuivre le dialogue en vue d’identifier et de mettre en œuvre des mesures initiales de renforcement de la confiance, étape par étape.  L’Envoyé spécial a déclaré qu’il continuerait à s’appuyer sur les idées et les conseils du Conseil consultatif des femmes, le rôle de la société civile syrienne pour aider à reconstruire la cohésion sociale de son pays étant plus impératif que jamais. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. GEIR O. PEDERSEN, Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie, a indiqué s’être rendu il y a deux semaines à Damas pour poursuivre ses discussions avec le Gouvernement syrien sur l’état d’avancement du processus politique visant à mettre en œuvre la résolution 2254 (2015), alors que la situation sur le terrain prend « une tournure inquiétante ».  En effet, les Syriens sont confrontés à une crise humanitaire et économique de plus en plus profonde, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, dans les zones contrôlées par le Gouvernement comme dans celles qui ne le sont pas, où la situation reste la plus grave, notamment dans les camps de personnes déplacées.  Cette situation est le fruit de plus d’une décennie de guerre et de conflit, de corruption et de mauvaise gestion, sans compter la crise financière que traverse le Liban voisin, la pandémie de COVID-19, les sanctions et les retombées de la guerre en Ukraine.  Dans un tel contexte, a-t-il signalé, même les Syriens qui n’auraient normalement pas besoin d’aide –les salariés, par exemple– sont en proie à des difficultés, étant donné la dépréciation de la devise syrienne, une situation qui ne fera que s’aggraver à mesure que l’hiver s’installe.

Le haut fonctionnaire a ensuite fait état d’informations selon lesquelles des frappes aériennes progouvernementales sporadiques ont pris pour cible le nord-ouest du pays au cours du mois écoulé, de même que des frappes aériennes turques dans le nord et des frappes à Damas et dans le sud-ouest attribuées à Israël.  Il a également signalé des bombardements, des tirs de roquettes et des affrontements intermittents sur les lignes de contact impliquant l’ensemble des parties au conflit –le Gouvernement syrien, l’opposition armée, les Forces démocratiques syriennes (FDS) et le groupe terroriste Hay’at Tahrir el-Cham–, ainsi que la poursuite des attaques de Daech.

Pour l’Envoyé spécial, cette dynamique inquiétante doit être infléchie en dégageant un certain nombre de priorités.  La première, c’est de rétablir un calme relatif sur le terrain, en s’inspirant du « patchwork » d’accords et d’arrangements conclus bilatéralement entre certains acteurs clefs, qui a permis une réduction relative de la violence au cours des dernières années - notamment entre la Russie et la Türkiye à Edleb en 2020, ainsi que la déconfliction entre la Russie et les États-Unis.  Mais de tels accords et arrangements, fragiles par nature, ne constituent pas un cessez-le-feu complet à l’échelle nationale.  Aussi avons-nous convoqué une réunion plénière du Groupe de travail sur le cessez-le-feu à Genève vendredi dernier afin de transmettre un message commun à tous les États Membres ayant une influence sur le terrain, a expliqué l’Envoyé spécial: faire preuve de retenue, protéger les civils, œuvrer à la consolidation de cet éventail d’accords et d’arrangements pour en faire un cessez-le-feu à l’échelle nationale, et privilégier une approche coopérative de la lutte contre les groupes terroristes figurant sur la liste du Conseil de sécurité.

Une autre priorité, c’est de garantir un accès humanitaire sans entrave à tous les Syriens dans le besoin dans l’ensemble du pays, et dans ce cadre, a-t-il souligné, l’aide transfrontière autorisée par le Conseil de sécurité reste indispensable.  « C’est le message essentiel que je vous adresse aujourd’hui: continuez à soutenir ce cadre; des millions de Syriens en dépendent », a plaidé M. Pedersen.  Il a appelé à la reprise des réunions de la Commission constitutionnelle à Genève et à les rendre plus substantielles, même si pour l’instant, la Fédération de Russie maintient sa position s’agissant de la tenue de ces réunions à Genève.

Autre priorité de l’Envoyé spécial, la question des détenus et des personnes disparues, dont il a plaidé la cause lors de son déplacement à Damas.  M. Pedersen a d’ailleurs émis l’espoir que 2023 verra la création d’une institution pour les personnes disparues mandatée par l’Assemblée générale, comme le recommande le Secrétaire général.  Il faut également poursuivre le dialogue en vue d’identifier et de mettre en œuvre des mesures initiales de renforcement de la confiance, étape par étape.  L’Envoyé spécial a enfin déclaré qu’il continuerait à s’appuyer sur les idées et les conseils du Conseil consultatif des femmes, en s’efforçant d’intégrer la dimension genre dans tous ses travaux et de garantir une participation élargie.  Le rôle de la société civile pour aider à reconstruire la cohésion sociale de la Syrie est plus impératif que jamais, a-t-il estimé.  Les femmes syriennes ont fait preuve d’une résilience admirable, notamment en tant que chefs de famille.  Leur autonomisation et leur inclusion sont essentielles ».

Alors que l’année 2022 touche à sa fin, le haut fonctionnaire a alerté que les besoins du peuple syrien ont atteint les pires niveaux depuis le début du conflit, dans un contexte d’effondrement économique supplémentaire et de violence continue.  Aucun progrès tangible n’a été réalisé pour faire avancer le processus politique.  Et la géopolitique mondiale a rendu une situation difficile encore plus compliquée.  « Le tableau est sombre », a concédé l’Envoyé spécial.  Mais une prise de conscience croissante à tous les niveaux est palpable, selon laquelle le statu quo ne peut se poursuivre.  C’est la raison pour laquelle M. Pedersen a appelé les membres du Conseil à soutenir ses priorités en faisant preuve d’unité, en particulier sur le front humanitaire.

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a indiqué que de tristes records ont été battus en 2022 en Syrie.  Dans le seul nord-ouest syrien, au moins 138 civils ont été tués entre janvier et novembre.  Le nombre de personnes ayant besoin d’une aide a augmenté en 2022 pour atteindre les 14, 6 millions de personnes et devrait passer à 15,3 millions en 2023.  Nous n’avions pas vu de tels chiffres depuis le début de la crise en Syrie en 2011, a-t-il signalé.  Il a indiqué que les conditions socioéconomiques ne cessent de se détériorer, avec une inflation galopante et une insécurité alimentaire qui touche plus de 3 millions de personnes.  Cette dégradation économique est la plus grave depuis le début de la crise.  Néanmoins, a-t-il ajouté, 7,8 millions de personnes ont pu bénéficier chaque mois d’une aide humanitaire en Syrie.  M. Griffiths a indiqué que 2022 a aussi été l’année qui a vu la résurgence du choléra, 62 000 cas présumés ayant été recensés au 18 décembre et 100 personnes ayant succombé à la maladie.  « Nous avons urgemment besoin de ressources supplémentaires pour répondre à l’épidémie. »

Le Coordonnateur a ensuite évoqué le défi de l’hiver, près de 6 millions de personnes ayant besoin d’une aide pour faire face aux températures glaciales, soit une augmentation de 33% par rapport à l’année dernière.  Notre réponse face à ce défi n’est financée qu’à hauteur de 21%, a déploré M. Griffiths.  Plus globalement, il a indiqué que le plan de réponse humanitaire 2022 pour la Syrie n’est financé qu’à 43% alors que la fin de l’année est dans quelques jours seulement.  Ce faible niveau de financement est sans précédent, a-t-il déploré.  Il a aussi rappelé que la résolution autorisant l’acheminement de l’aide transfrontalière expire dans moins de trois semaines.  Le Coordonnateur a appelé à appuyer un tel acheminement qui est vital pour des millions de personnes dans le nord-ouest.  S’il a appelé à davantage de convois au travers des lignes de front, M. Griffiths a estimé que ceux-ci ne peuvent remplacer les opérations transfrontalières qui sont d’une toute autre échelle.  « Faisons en sorte que 2023 ne soit pas l’année de la fin de l’aide transfrontalière », a-t-il plaidé.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que son pays a toujours plaidé pour un processus politique conduit par les Syriens et placé sous les auspices des Nations Unies.  Il a salué les efforts entrepris par M. Pedersen pour dépolitiser la Commission constitutionnelle en maintenant des contacts avec les Syriens.  Les modalités des discussions inter-syriennes doivent elles-aussi être adoptées par les Syriens, sans interventions extérieures, a-t-il ajouté.  Le représentant a ensuite condamné les frappes aériennes israéliennes visant l’est du pays et celles effectuées depuis la mer Méditerranée.  Il a souligné que la priorité demeure de rétablir la stabilité et la sécurité en Syrie tout en évitant que les présences étrangères transforment le pays en un théâtre de règlements de compte géopolitiques.

Le panier alimentaire en Syrie est très élevé en raison de l’inflation et du dévissage de la livre syrienne, a-t-il poursuivi, déplorant qu’en 2023 15 millions de personnes auront besoin d’aide humanitaire.  S’il a salué le fait que la moitié du stock mondial de vaccins contre le choléra sera envoyée en Syrie, ou encore que le plan d’aide humanitaire soit déjà financé à hauteur de 43%, le représentant russe a adressé plusieurs reproches aux Occidentaux relatifs au mécanisme transfrontière.  Nos collègues passent plus de temps à expliquer que ce mécanisme est indispensable qu’à s’assurer que l’aide est bien acheminée à tous les Syriens par-delà les ligne de front, a-t-il lancé.  La situation autour du mécanisme est loin d’être transparente, a-t-il affirmé, notant que le déploiement des projets de relèvement rapide est marqué par des déséquilibres géographiques frappants: « 35% seulement concernent les zones contrôlées par Damas, là où pourtant les besoins sont les plus criants », a-t-il affirmé.

Selon lui, les Occidentaux font fi des résolutions du Conseil de sécurité sur la situation humanitaire en Syrie, les populations dans le besoin ayant, en outre, le couteau sous la gorge en raison des sanctions visant le régime.  Le représentant a aussi accusé des pays d’empêcher les réfugiés syriens qui le souhaitent de rentrer chez eux, les Occidentaux estimant, selon lui, que ce retour massif profiterait au régime syrien en place.  « Tant que l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Syrie seront compromis par les Occidentaux, nous ne pourrons pas croire à leurs propositions au sujet du mécanisme transfrontière », a-t-il indiqué.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a noté que le renouvèlement du mécanisme d’aide transfrontière doit se faire avant le 10 janvier et a appelé le Conseil à le proroger.  Il a souligné l’importance de ce mécanisme alors que la situation humanitaire s’est dégradée en Syrie avec 15,3 millions de Syriens qui auront besoin d’aide en 2023, dont 2,4 millions dans nord-ouest du pays.   Il a qualifié l’opération transfrontière dans cette région « d’une des plus sécurisée et transparentes au monde », et pour laquelle il n’y a pas de substitut.

Le représentant a salué le fait que quatre convois d’aide humanitaire à travers les lignes de front avaient pu être organisés depuis le renouvellement du mécanisme en juillet 2022, soit près du double de ce qui avait pu être acheminé depuis la création de ces missions en août 2021.  Il a affirmé que les États-Unis ont fait leur part pour assurer la mise en œuvre de la résolution 2642 (2022), notamment en finançant des projets de relèvement précoce dans les 14 gouvernorats de la Syrie et en encourageant la fourniture d’une aide à travers les lignes de front.

Poursuivant, le représentant a signalé que la présence de milliers de ressortissants étrangers dans les camps de déplacés et les centres de détention complique la situation humanitaire dans le pays.  Il s’est préoccupé de la prévalence de la violence dans les camps et du sort des milliers d’enfants qui y grandissent sans éducation, sans papiers et sans aucun service de base, appelant ensuite les États à rapatrier leurs citoyens.

Le délégué a par ailleurs fait savoir qu’hier, conformément à la résolution 2644 (2022), le Département du Trésor des États-Unis avait émis des autorisations facilitant les dérogations humanitaires dans le cadre des programmes de sanctions, y compris en Syrie.  Il a ensuite déploré le peu de progrès réalisé par la Commission constitutionnelle, accusant la Russie de bloquer le processus avec ses demandes arbitraires.  Il a appelé le « régime d’Assad » à coopérer avec l’Envoyé spécial pour réunir à nouveau ladite Commission, à accepter et mettre en œuvre un cessez-le-feu national complet et à libérer les plus de 130 000 personnes disparues et détenues arbitrairement.

M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) s’est tout d’abord exprimé au nom de son pays et de la Norvège, en tant que co-porte-plume sur le dossier syrien, en constatant que la situation humanitaire continue de se détériorer dans ce pays où 15,3 millions de personnes auront besoin d’une protection et d’une assistance en 2023, contre 14,6 millions cette année.  Les souffrances résultant de ce conflit prolongé ont été exacerbées par l’insécurité alimentaire, la pandémie de COVID-19, une situation économique désastreuse, une crise de l’eau et une épidémie de choléra, a-t-il déploré, ajoutant que, du 1er janvier au 30 septembre de cette année, 450 civils, dont 123 enfants, ont été tués du fait des hostilités et de la violence.  Appelant les parties à épargner les personnes et les biens civils, le représentant a estimé que, dans ce contexte, « l’aide au relèvement rapide est vitale ».  Entre janvier et septembre, environ 10,8 millions de Syriens ont profité directement et indirectement des projets visant à accroître la résilience, s’est-il félicité, avant de souhaiter que cette avancée soutenue par la résolution 2642 (2022) se poursuive.  Il a également encouragé la poursuite des envois de convois d’aide à travers les lignes de front dans le nord-ouest de la Syrie, notant toutefois que, malgré des progrès notables, ces livraisons restent pour l’heure incapables de remplacer l’opération transfrontalière massive de l’ONU.  Ce mécanisme transfrontalier hautement surveillé continue d’être une « bouée de sauvetage » pour des millions de Syriens, a-t-il insisté.

À titre national, le représentant s’est dit préoccupé par l’escalade signalée dans le nord de la Syrie ces dernières semaines.  Dénonçant le fait que des zones résidentielles et des camps de personnes déplacées densément peuplées soient pris pour cibles, il a rappelé à toutes les parties au conflit qu’elles sont tenues de protéger les civils et les infrastructures civiles.  Il les a également appelées à faire preuve d’un maximum de retenue et a réitéré la nécessité d’un cessez-le-feu national, conformément à la résolution 2254 (2015).  Le représentant s’est aussi alarmé de la situation sécuritaire désastreuse dans le camp de Hol, avant d’enjoindre les autorités locales à respecter leurs obligations en vertu du droit international.  Il a par ailleurs dit son inquiétude quant au sort des personnes détenues et portées disparues en Syrie, demandant au Gouvernement syrien et aux groupes non étatiques de rendre compte du sort de ces personnes et de leur lieu de détention.  Enfin, il a réitéré son soutien aux efforts déployés par l’Envoyé spécial pour obtenir que la Commission constitutionnelle se réunisse à nouveau à Genève.  À ses yeux, la stabilité et la sécurité ne pourront se réaliser que par le dialogue et un accord sur une solution politique durable.

M. GENG SHUANG (Chine) s’est inquiété des atteintes à la souveraineté syrienne en citant des bombardements turcs dans le nord de la Syrie et la menace d’une opération terrestre par la Türkiye, alors qu’Israël vise régulièrement des cibles en Syrie.  « Toute opération militaire menée sur le territoire syrien sans l’aval du Gouvernement représente une violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie » a estimé le représentant, avant d’exhorter Israël et la Türkiye à cesser toute attaque transfrontalière.  Il a aussi demandé que prenne fin la présence des troupes étrangères sur le territoire syrien.  Soulignant l’urgence d’une solution politique, il a espéré que la Commission constitutionnelle pourra se réunir à nouveau aussi vite que possible« Plus tôt nous trouverons un règlement politique, plus tôt la population cessera de souffrir. »

Notant que la résolution 2642  (2022) du Conseil expirera en janvier 2023, le représentant a rappelé que l’aide transfrontalière était un arrangement « provisoire » qui devrait maintenant évoluer vers une aide à travers les lignes de front.  C’est pourquoi il a espéré que la communauté internationale appuiera cette formule avec la même vigueur.  Par ailleurs, il a regretté le financement encore insuffisant des projets de relèvement rapide, avant de demander que des programmes de déminage y soient inclus.  Le représentant a appelé tous les donateurs à fournir un soutien financier sans conditions, avant de déclarer que les sanctions unilatérales et leur application excessive vont à l’encontre des efforts du Conseil et de la communauté internationale pour atténuer les souffrances du peuple syrien.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a considéré qu’il faut « éviter de politiser la réponse humanitaire apportée en Syrie », affirmant que la livraison de l’aide humanitaire doit y être impartiale, non-discriminatoire, et parvenir à tous les nécessiteux, indépendamment de leurs affiliations politiques.  Pour l’heure, le mécanisme transfrontière, qui expire dans un mois, reste un composant vital de cette réponse.  Le représentant a pris note de certain progrès, bien que limités, dans la livraison de cette aide depuis l’adoption de la résolution 2642 (2022) en juillet dernier.  Dans le respect de la souveraineté nationale de la Syrie, nous devrions redoubler d’efforts pour lever les obstacles à un élargissement de l’assistance, a-t-il recommandé.  Selon lui, des projets de relèvement rapide seraient aussi de nature à atténuer la crise dans le pays.  Il a salué le fait que la résolution 2664 (2022), adoptée ce mois-ci pour permettre des exemptions humanitaires aux régimes de sanctions en vigueur, puisse se traduire par le renforcement de la capacité des acteurs humanitaires à livrer l’aide dans les zones qui échappent au contrôle du Gouvernement, dans lesquelles Daech et Al-Qaida sont actifs.  D’où l’importance de renforcer la surveillance pour éviter tout détournement, a mis en garde le représentant.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a déploré l’intensification des hostilités dans le nord de la Syrie, le recours à la force contre les manifestants dans le sud et la poursuite des frappes aériennes.  Il a fermement condamné les attaques contre les populations civiles, ainsi que les actes de terrorisme qui se poursuivent dans le pays.  « Nous appelons donc à des efforts concertés pour combattre les groupes terroristes inscrits sur la liste du Conseil de sécurité. »  Après une décennie de conflit, la Syrie connaît aujourd’hui une augmentation spectaculaire des besoins humanitaires et le nombre de personnes ayant besoin d’une aide internationale pour survivre continue d’augmenter chaque année, a constaté M. Biang.  Concernant la situation des femmes en Syrie, il a exhorté le Gouvernement syrien à élaborer des mesures législatives et politiques visant à éliminer les discriminations à l’égard des femmes et des filles dans toutes les sphères de la société.  Enfin, le délégué a estimé que le renouvellement du mécanisme d’aide transfrontalière est nécessaire et urgent, avant d’appeler à un cessez-le-feu facilité à l’échelle nationale, conformément à la résolution 2254 (2015).

Mme MONA JULL (Norvège) a réaffirmé qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit syrien, un cessez-le-feu à l’échelle nationale devant être une priorité.  Nous continuerons d’appeler toutes les parties à faire preuve d’un maximum de retenue et à respecter leur obligation de protéger les civils et les infrastructures vitales, a-t-elle indiqué.  La représentante a réitéré l’appui de son pays à l’approche progressive de l’Envoyé spécial pour initier une nouvelle dynamique vers une solution en Syrie.  Elle a ainsi exhorté toutes les parties prenantes dans la Commission constitutionnelle à travailler de bonne foi avec l’Envoyé spécial à un rapprochement de leurs positions.  Par ailleurs, elle a souligné combien est essentielle la participation des femmes et de la société civile pour construire une paix et une stabilité durables.  Il est crucial de les impliquer véritablement dans les efforts visant à faire avancer le processus politique, a insisté la représentante.  Enfin, elle a appelé les autorités syriennes à accélérer la libération de prisonniers jetés en prison pour des faits présumés de terrorisme.

M. BARABARA WOODWARD (Royaume-Uni) a déploré l’aggravation de la situation humanitaire en Syrie et souligné qu’environ 12 millions de personnes sont menacées par une insécurité alimentaire aiguë.  Elle a rappelé que l’ONU avait clairement expliqué que les opérations à travers les lignes de front complétaient, mais ne pouvaient se substituer au mécanisme transfrontière.  Face à un hiver qui s’annonce rigoureux, il est urgent de renouveler le mandat du mécanisme transfrontière en janvier, a estimé la représentante.  Elle a appelé à un règlement politique par la mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité qui comprend un cessez-le-feu national, un retour sûr et volontaire des réfugiés, l’organisation d’élections libres et régulières conformément à la nouvelle constitution et la libération des milliers de victimes de détention arbitraire.  La représentante a souhaité la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle à Genève.  Notant que l’opposition était prête à se concentrer sur la transition politique de bonne foi, elle a appelé la Russie et le régime à lui emboîter le pas.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est déclarée préoccupée par la sombre réalité de la situation syrienne et par le peu de progrès réalisés pour mettre fin au conflit.  Elle s’est néanmoins félicitée des efforts en cours pour faire progresser les travaux de la Commission constitutionnelle dans le cadre d’une approche progressive.  Il n’y a pas d’autre solution que cette voie constitutionnelle si l’on veut remettre la Syrie sur des rails, a-t-elle affirmé.  La représentante s’est par ailleurs prononcée pour le renouvellement du mécanisme d’aide transfrontière, qui se révèle « vital pour des millions de Syriens ».  À cet égard, a-t-elle ajouté, les rapports du Secrétaire général soulignent que les opérations par-delà les lignes de front, bien qu’importantes, ne sauraient se substituer au dispositif transfrontière, du fait de sa taille et de sa portée.  Selon elle, « le Conseil de sécurité perdra toute crédibilité aux yeux des Syriens et de la communauté internationale s’il ne répond pas à ses obligations humanitaires élémentaires ».  La représentante a estimé que le régime syrien a donné de « faux espoirs » au monde concernant le sort des personnes détenues arbitrairement et disparues.  Il faut que les autorités syriennes fournissent des informations sur ces personnes, a-t-elle plaidé, souhaitant également que les Syriens puissent bénéficier d’une aide en matière d’infrastructures afin de retrouver une vie tolérable.  Enfin, après avoir réitéré son appel à lutter contre l’impunité, elle a encouragé l’Envoyé spécial à continuer de travailler avec le Conseil consultatif des femmes syriennes, jugeant que la Syrie a besoin d’un processus politique inclusif, avec la pleine participation des femmes et de la société civile.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a regretté que le régime syrien refuse de s’engager dans un processus politique tel que défini par la résolution 2254 (2015).  « Le comité constitutionnel ne se réunit plus.  Le régime refuse de travailler avec les Nations Unies sur le sort de plus de 100 000 personnes disparues. »  Le régime ne veut pas s’engager dans le cadre de l’approche step for step promue par l’Envoyé Spécial, a regretté la représentante avant de préciser que c’est sur la base des rapports onusiens et des témoignages de Syriens que l’Union européenne a adopté des sanctions ciblées qui visent les auteurs de crimes de guerre et crimes contre l’humanité en Syrie.  Ces sanctions comportent de nombreuses exemptions humanitaires pour permettre une aide très largement financée par l’Union européenne et ses États membres qui ont mobilisé plus de 27,4 milliards de dollars depuis 2011.  C’est pourquoi, a informé la représentante, « les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions, la normalisation et la reconstruction demeureront inchangées en l’absence de tout progrès sur le processus politique ».

Rappelant la responsabilité du régime dans le drame humanitaire qui se déroule en Syrie, la représentante a fustigé « la brutalité de la répression qui a causé le plus grand mouvement de déplacement de population du XXIe siècle, avec 12 millions de personnes déplacées ou réfugié ».  Elle a cité de nombreux cas de torture, de disparitions forcées et d’exécutions dans le contexte d’une « politique délibérée d’ingénierie démographique ».  Face à des perspectives humanitaires très préoccupantes pour 2023, la représentante a jugé essentiel le mécanisme transfrontalier, tant en termes de volumes d’aide déployés que pour le nombre de bénéficiaires.  Elle a déclaré que cette aide est le seul moyen de survie de plus de deux millions de Syriens.  « L’aide déployée à travers les lignes de front, en complément, est importante mais elle ne saurait se substituer à l’aide transfrontalière », a insisté Mme Broadhurst Estival.  « Renouveler le mécanisme est un impératif moral. »

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a déclaré que toutes les modalités d’accès humanitaire en Syrie doivent être préservées, se félicitant des neuf livraisons de part et d’autre des lignes de front qui ont pu être récemment effectuées dans le nord-ouest du pays.  Il a appelé à redoubler d’efforts pour surmonter les problèmes sécuritaires et administratifs afin de poursuivre et d’accroître ces livraisons transfrontières, même si rien ne peut remplacer l’aide transitant par le passage humanitaire de Bab el-Haoua.  D’autre part, les projets de relèvement rapide sont essentiels pour la remise en état des infrastructures de base, de même que les efforts de déminage contribuent à la réhabilitation des terres arables, a encore relevé le représentant.  Il s’est dit consterné par la recrudescence des hostilités, en particulier à la frontière turco-syrienne, rappelant que le seul moyen de parvenir à une paix durable en Syrie est un processus politique inclusif, conformément à la résolution 2254 (2015).  Aussi est-il urgent que la communauté internationale encourage les parties à participer à la prochaine réunion de la Commission constitutionnelle.  Le représentant a en outre demandé aux autorités syriennes de remettre en liberté les détenus et de clarifier le statut des personnes disparues, et d’autoriser les agences humanitaires à accéder aux centres de détention.  Après 12 ans de guerre, chaque jour qui passe voit notre dette envers le peuple syrien augmenter, s’est-il désolé.  « Le moins que l’on puisse faire pour atténuer cette tendance est de confirmer le renouvellement de l’autorisation de passage au poste frontière de Bab el-Haoua. »

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a souligné la dégradation sans précédent de la crise syrienne, les divisions ne faisant que se creuser, y compris au sein de ce Conseil.  Évoquant le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière, il a appelé à ne pas politiser ce dossier, en jugeant un tel mécanisme d’une importance élémentaire.  Le délégué a donc apporté le soutien sans réserve de son pays au renouvellement dudit mécanisme qui bénéficie à l’ensemble des Syriens.  Toutes les parties doivent éviter toute ingérence dans les opérations humanitaires, a-t-il toutefois mis en garde.  Quant à l’aide au travers des lignes de front, elle doit, selon lui, être accrue.  Enfin, le délégué a souligné la nécessité de mettre l’accent sur les efforts politiques de règlement de la crise, puisque sans un tel règlement, la situation humanitaire ne pourra durablement s’améliorer.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a insisté sur la nécessité d’ouvrir sans délai un processus politique piloté par les Syriens eux-mêmes.  Selon elle, avancer sur ce volet politique de manière décisive est urgent « si nous voulons soulager les souffrances du peuple syrien ».  La représentante a également salué les efforts consentis par l’Envoyé spécial pour permettre la tenue de discussions intrasyriennes, efforts qui ont reçu le concours diplomatique de pays voisins de la Syrie.  Après avoir condamné les violations de l’intégrité territoriale de ce pays, elle a appelé au retrait de toutes les forces étrangères présentes sur le territoire afin que puisse être mis en place un cessez-le-feu.  La représentante s’est émue qu’en 2023, plus de 15 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire pour vivre, déplorant en outre les difficultés auxquelles se heurtent les agences humanitaires pour acheminer cette aide et financer de façon pérenne leurs actions.  Toutefois, des progrès ont été réalisés dans le déploiement des projets de relèvement rapide, a-t-elle salué.  Mais, pour la représentante, le mécanisme transfrontalier intervenant au-delà de la ligne de front doit s’appuyer sur les besoins réels et ne pas être détourné à des fins politiques.  De même, la lutte contre le terrorisme en Syrie ne saurait être compromise par la poursuite d’intérêts politiques étroits, a-t-elle averti.  Enfin, Mme Kamboj a rappelé que son pays apporte depuis des années à la Syrie, « un pays ami », une aide humanitaire et en matière de développement par le biais de canaux unilatéraux et multilatéraux.

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a expliqué que son pays avait de sérieuses raisons de suspendre les réunions de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, pointant l’absence de garanties sérieuses et appropriées pour les personnes qui devaient participer à ces travaux au nom du pays hôte.  Il a appelé à ne pas exagérer la signification d’une telle pause dans les délibérations de la Commission, évoquant la longue stagnation du processus israélo-palestinien, en raison du blocage par Washington des travaux du Quatuor pour le Moyen-Orient et toutes les autres initiatives et plateformes internationales, y compris le Conseil.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a rappelé les défis auxquels la Syrie était confrontée, notamment le terrorisme, la présence militaire illicite de forces étrangères de pays comme les États-Unis et la Türkiye, et l’augmentation des attaques israéliennes contre des infrastructures vitales.  Il a également cité l’aggravation de la crise humanitaire et l’imposition de sanctions unilatérales illicites qui constituent une forme de punition collective.  Il a appelé le Conseil de sécurité à condamner ces violations de la souveraineté syrienne et exigé qu’il y soit mis fin sans condition et immédiatement.  Il a affirmé que le Gouvernent syrien avait pu libérer de larges territoires de l’emprise des groupes terroristes et réalisé des avancées en matière de réconciliation nationale, évoquant notamment le décret d’amnistie de 2022.  Ces progrès ont permis le retour de nombreux Syriens chez eux, et ont renforcé l’unité nationale et la cohésion sociale, a-t-il estimé.

Le représentant a noté que depuis l’adoption de la résolution 2642 (2022), en juillet dernier, il y avait eu trois sessions du dialogue interactif informel au cours desquels la Syrie avait décrit les manquements dans la mise en œuvre de cette résolution, pointant notamment le non-respect des engagements humanitaires pris par certains membres du Conseil de sécurité.  Soulignant le caractère temporaire du mécanisme d’aide transfrontière, il a estimé que les circonstances particulières qui avaient entraîné sa création n’existaient plus.  Il a jugé que le mécanisme était discriminatoire, sélectionnant une partie des Syriens qui pouvaient en profiter au détriment des autres.  Selon lui, l’insistance des États-Unis et de l’Union européenne à proroger ce mécanisme humanitaire contredit le « siège immoral et inhumain » qu’ils imposent au peuple syrien.  Il a aussi affirmé que certains cherchent à empêcher tout progrès des opérations d’aide humanitaire à travers les lignes de front.

Déplorant le sous-financement du plan d’aide humanitaire pour la Syrie, le représentant a imputé cette situation au non-respect de leurs engagements par certains bailleurs de fonds occidentaux.  Il a aussi dénoncé le « pillage systématique » du pétrole, du gaz et du blé syrien du fait de la présence des troupes américaines et d’autres groupes, estimant le préjudice à plus de 100 milliards de dollars.  Accusant le « régime de la Türkiye » et ses affidés d’organiser des coupures d’eau systématiques, affectant notamment un million de Syriens dans la région de Hassaké, il a indiqué que cette pratique avait provoqué des épidémies, notamment celle de choléra, l’assimilant à un crime de guerre au regard du droit international.  Selon lui, la crise humanitaire ne pourra pas être réglée si le Conseil de sécurité demeure silencieux face à la politisation des dossiers de l’aide humanitaire et du retour des réfugiés.

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a estimé qu’après plus d’une décennie de conflit, seul un processus politique dirigé et pris en charge par les Syriens et facilité par l’ONU peut mettre fin à la crise en Syrie.  Saluant à cet égard les efforts de l’Envoyé spécial visant à sortir la Commission constitutionnelle de son impasse actuelle, il s’est réjoui de la récente visite de M. Pedersen à Damas.  Pour le représentant, les travaux de la Commission doivent être menés dans le strict respect de son mandat et de son règlement intérieur, sans ingérence ni pression extérieure et sans recours à des délais artificiels.  Dans ce cadre, le rôle de l’ONU devrait se limiter à la facilitation, a-t-il souligné, avant de se dire convaincu que la fin de l’occupation et le plein rétablissement de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie sont des conditions préalables à tout règlement politique.  Il en va de même pour la paix et la sécurité, a-t-il ajouté, considérant que toute action militaire dans ce pays ne ferait qu’aggraver la situation humanitaire.  Après avoir condamné le pillage des ressources naturelles syriennes dans les zones occupées par les forces étrangères, il a averti que le terrorisme continue de représenter une grave menace pour la Syrie et toute la région.  Toutefois, la guerre contre ce fléau ne doit pas être utilisée pour saper la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il argué, demandant à ce que cesse immédiatement la présence illégale de forces étrangères, laquelle crée « des conditions idéales pour les activités terroristes ».

Le délégué a ensuite relevé que l’accès à l’électricité figure parmi les trois principaux besoins non satisfaits et a soutenu l’appel à multiplier les projets de relèvement rapide, y compris en matière d’électricité.  Ceux-ci sont essentiels pour rétablir l’accès aux services de base et ne doivent pas être entravés par des sanctions unilatérales, a-t-il souligné.  Selon lui, tout doit être fait pour mettre un terme aux mesures coercitives unilatérales qui restent l’une des principales causes de l’aggravation de la situation humanitaire en Syrie.  Reconnaissant l’importance du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière pour porter assistance aux populations, il a cependant estimé que ce dispositif n’est qu’un « arrangement temporaire » et que les préoccupations légitimes de la Syrie doivent être pleinement respectées.  Il a également jugé que l’absence de progrès significatifs dans les livraisons à travers les lignes de front, ainsi que la répartition inéquitable et discriminatoire de l’aide, sont des défis à relever de toute urgence.

Le représentant iranien a d’autre part dénoncé le « silence assourdissant » maintenu par le Conseil de sécurité sur les attaques terroristes continues du « régime israélien » contre la Syrie.  Israël a ainsi été encouragé à poursuivre ses violations de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie, ainsi que son ciblage systématique et intentionnel de civils et d’infrastructures civiles, en violation flagrante du droit international, du droit international humanitaire et de la Charte des Nations Unies, s’est-il indigné.  En conclusion, le délégué a réitéré le soutien de l’Iran à la position régionale de la Syrie et a assuré que son pays entend renforcer ses relations bilatérales avec Damas « plus que par le passé ».

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Türkiye) s’est inquiété de l’ampleur de la crise humanitaire en notant que le nombre de personnes dans le besoin a atteint 15,3 millions, soit le nombre le plus élevé depuis le début du conflit en 2011.  Après s’être inquiété de l’impact de l’hiver sur les femmes, les enfants, les personnes âgées et autres groupes vulnérables, le représentant a estimé que l’aide humanitaire transfrontière est plus importante que jamais, précisant que celle-ci permet d’aider 2,7 millions de Syriens chaque mois dans le nord-ouest de la Syrie grâce à des opérations strictement contrôlées par les Nations Unies.  Il a averti que la suspension de cette aide menacerait la vie de millions de personnes, et a appelé les délégations à ne pas politiser cette situation, avant d’exhorter le Conseil de sécurité à continuer de soutenir ce mécanisme à partir de janvier 2023.  Le représentant s’est en outre inquiété de l’insuffisance du financement des programmes humanitaires destinés à la Syrie, notant que l’appel humanitaire pour 2022 n’a été financé qu’à 43%.

Par ailleurs, le représentant turc a fustigé les « crimes » du PKK/YPG (Parti des travailleurs du Kurdistan et Unités de protection du peuple kurde) qu’il a accusé d’être responsable de la mort de 500 Syriens dans le nord de la Syrie.  Il a ajouté que le soutien accordé à cette organisation terroriste au prétexte de la lutte contre Daech va à l’encontre de la résolution appelant à respecter la souveraineté de la Syrie.  « Soutenir le PKK/YPG constitue aussi une menace pour l’intégrité de la Türkiye » a-t-il aussi ajouté, avant de signaler qu’aucun pays ne peut donner à la Türkiye des leçons en matière de lutte contre le terrorisme.  Pour mettre fin au conflit syrien, il a jugé essentiel que le processus politique ne reste pas dans l’impasse et a espéré que la neuvième réunion de la Commission constitutionnelle aura lieu sans délai.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité engage les États Membres et le Secrétariat à fournir des services de santé mentale au personnel de maintien de la paix de l’ONU

9229e séance – matin   
CS/15157

Le Conseil de sécurité engage les États Membres et le Secrétariat à fournir des services de santé mentale au personnel de maintien de la paix de l’ONU

Le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité, ce matin, une résolution relative à la santé mentale du personnel déployé dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, en se basant notamment sur une enquête sur le bien-être du personnel de l’ONU de 2017 et sur les travaux actuellement menés sur ces questions par le Secrétariat et les experts du Comité consultatif, composé d’États Membres, de l’Organisation mondiale de la Santé et d’organisations non gouvernementales.

La résolution 2668 (2022), présentée par le Mexique, exprime une grande préoccupation quant au bien-être général du personnel de maintien de la paix des Nations Unies, qui fait face à des « difficultés multiples » et opère dans des « environnements complexes ».  Le texte prend également en compte l’incidence de la santé mentale de ce personnel sur l’efficacité des opérations.  Il considère dès lors qu’il faut sensibiliser le personnel en question à l’importance de la santé mentale et du soutien psychosocial et continuer de favoriser une culture du bien-être et de la prévenance pendant le déploiement, ce qui échoit au Secrétariat de l’ONU, aux pays fournisseurs et aux autres États Membres.

Comme mesure concrète prévue par ce texte, le Conseil engage les pays fournisseurs de contingents ou de personnels de police, ainsi que les autres États Membres et le Secrétariat de l’ONU, à fournir des services de santé mentale pendant la formation préalable au déploiement ainsi qu’après le déploiement, en tenant compte des questions de genre.  En outre, le Secrétaire général devra inclure, dans les exposés complets qu’il lui a été demandés, des informations sur l’exécution de certains aspects de la stratégie pour la santé mentale et le bien être dans le système des Nations Unies de 2018.

Après le vote et l’adoption à l’unanimité de la résolution, le représentant de la Fédération de Russie a dit soutenir le texte mais a expliqué ne pas pouvoir être favorable à la violation du principe de répartition du travail au Conseil de sécurité, un « thème extrêmement spécifique », a-t-il estimé.  Plaidant pour le respect de la Charte et des principaux organes des Nations Unies, il a fait valoir que c’est le Comité spécial du maintien de la paix, appelé « C34 », qui devrait se charger de ces questions car il passe en revue tous les aspects des missions de maintien de la paix.  Les pays fournisseurs de contingents doivent donner leur avis à ce sujet car ils ont connaissance de la situation sur le terrain, a-t-il argué.  Pour ce qui est des missions politiques spéciales, le délégué russe a rappelé que les questions relevant de ces missions sont du ressort du Secrétariat.  Ces missions ainsi que les bureaux d’envoyés spéciaux sont parfois créés sans la participation du Conseil de sécurité, a-t-il fait remarquer.

Le représentant de la Fédération de Russie a également souligné l’absence de compétences au sein du Conseil de sécurité pour examiner des questions aussi spécifiques que la santé mentale des soldats de la paix ainsi que le manque d’outils sur ce sujet, ce qui rend difficile, à son avis, l’examen de ces questions par le Conseil.  Il en a conclu que la résolution perd de sa valeur ajoutée.  De plus, le Conseil de sécurité est souvent critiqué parce qu’il empiète sur les prérogatives et les mandats d’autres organes des Nations Unies, a-t-il rappelé en jugeant ce problème préoccupant.  Enfin, il a estimé que les sujets thématiques doivent être examinés par des organes qui en ont la compétence.

S’exprimant à son tour sur le texte adopté, dont il a assuré la rédaction, le représentant du Mexique a rappelé que le Conseil de sécurité est habilité à déployer des missions de maintien de la paix et à mettre sur pied des missions politiques spéciales, dont le personnel travaille bien souvent dans des contextes violents et sous pression.  La complexité et l’intensité des tâches qu’accomplissent le personnel en tenue et le personnel civil peuvent avoir des conséquences sur leur santé mentale, a-t-il reconnu, expliquant pourquoi le Conseil de sécurité doit accorder toute l’attention nécessaire à la santé physique comme à la santé psychique.  Si la question de la santé mentale est encore taboue, il a rappelé qu’il a été prouvé que les problèmes de santé mentale, comme le stress post-traumatique, sont plus courants chez le personnel de ces missions que dans la population générale.  La résolution permet donc d’accorder toute l’attention à cette question avant, pendant et après le déploiement du personnel concerné, s’est-il félicité.  Le représentant a remercié les membres du Conseil qui ont approuvé ce texte et les 50 États Membres de l’ONU qui s’en sont portés coauteurs.

Troisième et dernier membre du Conseil à intervenir à cette séance, la représentante de l’Inde, qui préside le Conseil ce mois de décembre, a rappelé que son pays figure parmi les principaux fournisseurs de contingents et de personnels de police des opérations de maintien de la paix de l’ONU.  L’Inde accorde ainsi une grande importance à la santé mentale de ces effectifs, considérant qu’il s’agit d’un élément essentiel de leur santé d’ensemble, a-t-elle déclaré.  Se disant consciente des circonstances difficiles dans lesquelles opèrent les personnels de maintien de la paix, elle a souligné que leur bien-être mérite l’attention de l’ensemble des États Membres.

À cette aune, la représentante de l’Inde a estimé que toute délibération sérieuse devrait faire fond sur les études menées en consultation avec les pays fournisseurs.  Elle a aussi fait valoir que le C34 est l’organe habilité pour traiter de ces questions.  Ce comité, composé de 137 États Membres, a examiné dûment la question de la santé mentale dans les opérations de paix et des progrès se sont fait jour, a-t-elle salué, citant notamment les progrès dans l’évacuation des blessés.  La déléguée indienne a, dès lors, appelé à ce que toute recommandation en la matière soit formulée après analyse des données et avis de tous les fournisseurs de contingents et de personnels de police.  Avant de conclure, elle a espéré que les délibérations futures se feront de façon globale et systématique au sein des organes compétents des Nation Unies. 

OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Texte du projet de résolution (S/2022/977)

      Le Conseil de sécurité,

      Rappelant les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et réaffirmant qu’il a pour responsabilité principale, en vertu de la Charte, le maintien de la paix et de la sécurité internationales,

      Condamnant avec la plus grande fermeté les meurtres et tous les actes de violence dirigés contre les membres du personnel des Nations Unies servant dans les opérations de maintien de la paix, notamment mais non exclusivement leur détention et leur enlèvement, et rappelant que ces actes perpétrés contre les Casques bleus pourraient constituer des crimes de guerre,

      Rendant hommage à l’ensemble des membres du personnel des Nations Unies servant dans les opérations de maintien de la paix, notamment ceux qui ont fait le sacrifice ultime, dans l’exercice de leurs fonctions, au service de la paix,

      Soulignant l’importance du maintien de la paix comme l’un des outils les plus efficaces dont dispose l’Organisation des Nations Unies pour assurer la promotion et le maintien de la paix et de la sécurité internationales, et réaffirmant qu’une paix durable ne peut être réalisée ni maintenue uniquement au moyen d’interventions militaires et techniques, mais nécessite des solutions politiques, et fermement convaincu que de telles solutions devraient éclairer la conception et le déploiement d’opérations de paix des Nations Unies, et entendant par opérations de paix des Nations Unies des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales,

      Se déclarant particulièrement préoccupé par le bien-être général du personnel de maintien de la paix des Nations Unies, qui fait face à des difficultés multiples et opère dans des environnements complexes,

      Notant que le personnel des Nations Unies servant dans les opérations de maintien de la paix est déployé dans des conditions politiques et de sécurité complexes qui se dégradent, et se déclarant profondément préoccupé par les menaces à la sécurité et les attaques dirigées contre les membres du personnel des Nations Unies, qui compliquent considérablement ces opérations,

      Exprimant sa profonde reconnaissance à tous les membres du personnel des Nations Unies engagés dans les opérations de maintien de la paix pour les efforts prodigieux qu’ils déploient face à la pandémie de COVID-19 et à ses conséquences,

      Conscient des effets néfastes que les campagnes de mésinformation et de désinformation dirigées contre l’Organisation des Nations Unies peuvent avoir sur la sûreté et la sécurité du personnel de maintien de la paix, sur leur santé mentale et sur leur capacité de protéger les civils et de mener à bien leur mission,

      Sachant l’importance de la formation préalable au déploiement pour les pays qui fournissent des contingents ou du personnel de police aux opérations de maintien de la paix, et souhaitant qu’elle soit maintenue afin de dépister et de préparer mentalement le personnel avant son déploiement dans des environnements opérationnels de plus en plus difficiles et dangereux, notamment au moyen de procédures nationales d’évaluation, de prévention, d’atténuation et de traitement des problèmes de santé mentale et des facteurs de risque associés,

      Notant que la santé mentale du personnel de maintien de la paix des Nations Unies a une incidence sur l’efficacité des opérations,

      Soulignant qu’il importe que le personnel de maintien de la paix des Nations Unies ait accès en temps voulu à des services de santé mentale et de soutien psychosocial adéquats et encourageant les États Membres, les donateurs et les parties concernées à intégrer des services de santé mentale et de soutien psychosocial dans toutes les interventions humanitaires,

      Rappelant le rapport sur les données issues de l’enquête sur le bien-être du personnel de l’Organisation des Nations Unies de 2017, et notant les efforts entrepris par le Secrétariat, dans le cadre de la Stratégie pour la santé mentale et le bien être dans le système des Nations Unies de 2018, pour répondre aux besoins des membres du personnel et améliorer les capacités de l’Organisation en matière d’évaluation, de prévention, d’atténuation et de traitement des problèmes de santé mentale et des facteurs de risque associés,

      Prenant note des travaux actuellement menés sur les questions touchant la santé mentale du personnel en tenue par le Secrétariat et les experts du Comité consultatif, composé d’États Membres, de l’Organisation mondiale de la Santé et d’organisations non gouvernementales,

      1.    Considère qu’il faut sensibiliser le personnel de maintien de la paix des Nations Unies à l’importance de la santé mentale et du soutien psychosocial ;

      2.    Engage les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, ainsi que les autres États Membres et le Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies, le cas échéant, à fournir des services de santé mentale pour accompagner les membres du personnel pendant la formation préalable au déploiement, afin qu’ils soient mieux aptes à repérer les signes et symptômes de souffrance psychique ;

      3.    Engage le Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies et les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, ainsi que les autres États Membres, le cas échéant, à continuer de favoriser une culture du bien-être et de la prévenance pendant le déploiement ;

      4.    Engage les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police, ainsi que les États Membres et le Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies, le cas échéant, à continuer de fournir au personnel de maintien de la paix, après le déploiement, des services de santé mentale et de soutien psychosocial adéquats permettant d’apporter une réponse adaptée aux besoins et aux expériences des personnes qui les sollicitent, en tenant compte des questions de genre, selon le cas ;

      5.    Prie le Secrétaire général de faire figurer, dans les exposés complets qu’il lui a demandé de présenter dans sa résolution 2378 (2017), les informations que celui-ci jugera utiles sur l’exécution de certains aspects de la Stratégie pour la santé mentale et le bien être dans le système des Nations Unies de 2018.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité se penche sur la situation dans le corridor de Latchine, qui cristallise les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

9228e séance – après-midi
CS/15154

Le Conseil de sécurité se penche sur la situation dans le corridor de Latchine, qui cristallise les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Le Conseil de sécurité s’est, aujourd’hui, pour la première fois depuis le 15 septembre dernier, penché sur le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et tout particulièrement sur la situation dans le corridor de Latchine, le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques se disant préoccupé par les récents développements sur le terrain.

M. Miroslav Jenča a certes relevé des progrès diplomatiques après la tenue de plusieurs réunions de haut niveau ainsi que d’échanges ministériels, rappelant notamment qu’à la suite d’un accord entre les deux belligérants, l’Union européenne a déployé une mission de contrôle en Arménie.  En outre, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) ont également dépêché des missions en Arménie, les équipes de l’ONU continuant d’évaluer les besoins dans les zones auxquelles elles ont accès, a précisé le haut fonctionnaire.

En dépit de ces progrès, M. Jenča a souligné la persistance de tensions, faisant référence aux manifestations organisées le 12 décembre dernier dans le corridor de Latchine, liées à l’incidence environnementale supposée d’exploitations minières sur place.  L’ONU n’étant pas présente dans cette zone, où le sont en revanche les forces russes de maintien de la paix, le Sous-Secrétaire général a indiqué ne pas être en mesure de confirmer ces allégations.

L’Azerbaïdjan et l’Arménie, a-t-il indiqué, ont tous deux écrit à l’ONU et au Conseil de sécurité pour s’accuser mutuellement d’avoir violé la déclaration trilatérale en date du 9 novembre 2020.  Le haut fonctionnaire s’est toutefois félicité de l’engagement pris par les forces russes de faciliter le passage des biens, notant que, d’après elles et les médias présents sur place, un acheminement a été possible.

Les entraves à la circulation dans le corridor sont « inacceptables », a tranché la France, suivie par plusieurs membres du Conseil de sécurité, qui ont appelé à garantir la libre circulation des biens et des marchandises, l’un des piliers de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020 selon le Brésil, ainsi que le droit de passage dans cette zone qualifiée par M. Jenča d’ « artère vitale ».  La Fédération de Russie a, pour sa part, exhorté les parties à respecter les obligations contenues dans cette déclaration ainsi que dans celles adoptées les 11 janvier et 26 novembre 2021, et le 31 octobre 2022.

L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont brossé des tableaux pour le moins contrastés de la situation dans le corridor de Latchine, la première affirmant que le passage y était empêché, la faute à l’Azerbaïdjan qui aurait lancé des manifestations massives pour isoler la population du Haut-Karabakh, dans un « siège médiéval » sur fonds d’opérations de nettoyage ethnique.

Rejetant ces accusations, l’Azerbaïdjan a soutenu que ces manifestations ne constituent pas une entrave et sont sans conséquences humanitaires ni restrictions pour la population locale.  Les manifestations, s’est justifiée la délégation, ont été causées par le refus de permettre à une équipe azerbaïdjanaise de mener une enquête dans les territoires occupés où l’Arménie se livre à l’exploitation de mines en l’absence de contrôle environnemental approprié, en violation des normes techniques requises.  Ces activités, qui polluent les zones limitrophes et détruisent des écosystèmes fragiles, constituent « une source légitime de graves préoccupations », a assuré l’Azerbaïdjan.

Le Gabon a pour sa part demandé l’ouverture d’une enquête indépendante pour établir les faits et éclairer le Conseil sur la réalité de la situation le long de cette voie d’accès indispensable.  Le Ghana a estimé que « tout blocus réel, ou perçu comme tel » du corridor de Latchine doit être levé de toute urgence pour permettre le mouvement fluide, continu et sûr des personnes.

Les membres du Conseil ont unanimement exhorté les parties à négocier en vue d’établir une paix pérenne.  Les Émirats arabes unis, la Russie, le Kenya, la Norvège ou encore l’Irlande ont, à cet égard, appelé les parties à la retenue.  « Il ne saurait y avoir de solution militaire à ce conflit », ont de leur côté estimé les États-Unis.

LETTRE DATÉE DU 13 SEPTEMBRE 2022, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’ARMÉNIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Déclarations

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a indiqué que, depuis son dernier exposé en date, la situation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est restée précaire.  Il a relevé des progrès diplomatiques à la suite de la tenue de plusieurs réunions de haut niveau.  Il a notamment évoqué la rencontre entre les chefs d’État des deux pays à Prague, qui a abouti à un accord concernant une mission de contrôle de l’Union européenne en Arménie, dont le mandat a expiré hier.  Les deux chefs d’État se sont également réunis à Sotchi à la fin du mois d’octobre et ont convenu de s’abstenir de recourir à la force ou la menace du recours à la force.  Le haut fonctionnaire a également évoqué plusieurs réunions ministérielles ces derniers mois ainsi que des discussions sur un format pour la négociation d’un règlement général du différend, notamment sur la question frontalière.  En sus de la mission de l’UE, acceptée par les deux parties, le Sous-Secrétaire général a indiqué que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Organisation du Traité de sécurité collective ont déployé des missions en Arménie.  À l’invitation des gouvernements hôtes, les équipes de l’ONU ont continué d’entreprendre des évaluations des besoins, y compris dans les zones accessibles frappées par les conflits, a-t-il indiqué.

En dépit de ces progrès diplomatiques, les tensions ne se sont pas atténuées et plusieurs incidents ont été communiqués, a indiqué M. Jenča.  Le 12 septembre, des informations ont fait état de manifestations dans le corridor de Latchine, qui constitue une artère vitale dans la zone.  Ces manifestations porteraient sur l’exploitation des ressources minières et sur son incidence environnementale sur les zones voisines.  L’ONU, qui n’est présente ni dans ce corridor, ni dans les zones relevant du mandat de maintien de la paix russe, n’est pas en mesure de confirmer ces allégations, a-t-il ajouté.  Il a noté que les deux pays ont écrit à l’ONU et au Conseil de sécurité pour dénoncer ces évènements et se sont accusés mutuellement d’avoir violé la déclaration trilatérale en date du 9 novembre 2020.  Notant que les médias et les informations russes dans la zone indiquent que des fournitures et des biens ont pu y être acheminés, il s’est félicité de l’engagement pris par les forces russes de maintien de la paix pour faciliter le passage des biens dans le corridor.  L’équipe de paix des Nations Unies continue d’entretenir des canaux de négociation avec les autorités, a-t-il ajouté.

Le coût humain lié à la reprise éventuelle du conflit pourrait être considérable pour la région, a mis en garde le Sous-Secrétaire général, ajoutant que la communauté internationale ne peut se le permettre.  Il a exhorté les parties à respecter leurs obligations prises le 9 novembre 2020 et à redoubler d’efforts pour une issue pacifique à la crise avant qu’il ne soit trop tard.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a qualifié d’inacceptables les entraves mises à la circulation sur le corridor d’accès reliant l’Arménie et le Haut-Karabakh depuis le 12 décembre.  Le blocage du corridor de Latchine a pour conséquence directe d’isoler la population du Haut-Karabakh et entraîne des conséquences humanitaires qui s’aggravent chaque jour davantage.  La représentante a appelé au rétablissement sans conditions de la circulation le long du corridor et des approvisionnements au Haut-Karabakh, ainsi qu’à la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020.  Elle a également demandé l’accès immédiat, libre et sans entrave des organisations humanitaires et des agences des Nations Unies, notamment le HCR, aux populations concernées, y compris par le corridor de Latchine.  La représentante a ensuite appelé l’Arménie et l’Azerbaïdjan à créer un climat propice à l’aboutissement des négociations en cours et à progresser, exclusivement par la voie du dialogue et en excluant tout recours à la force, vers le règlement de l’ensemble des questions en suspens, y compris celles des droits et garanties pour la population du Haut-Karabakh.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a déploré l’escalade des tensions entre les deux pays, avant d’appeler à la retenue.  Toute provocation doit être évitée, a dit le délégué, jugeant crucial d’assurer la liberté de circulation dans le corridor de Latchine.  Il a plaidé pour une solution pérenne, car, a-t-il dit, il ne saurait y avoir de solution militaire.  Il a donc appelé au renforcement des efforts de médiation et exhorté le Conseil à faire tout son possible pour promouvoir une coexistence pacifique.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a insisté sur l’importance de respecter la liberté de circulation sur le corridor d’accès reliant l’Arménie et le Haut-Karabakh.  Il a également exhorté les parties à trouver un accord mutuellement acceptable en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles.  Il a appuyé l’idée de l’envoi d’une mission d’observateurs de l’Union européenne le long de la frontière entre les deux pays.  Il s’est félicité que les deux parties se sont engagées à signer un traité de paix aussi rapidement que possible, soulignant qu’il n’y aura pas d’autre solution que la diplomatie. 

M. GENG SHUANG (Chine) s’est dit préoccupé par les répercussions de la situation actuelle dans le corridor de Latchine.  Il a invité les parties à régler ce différend par le biais des négociations, arguant qu’une sécurité partagée sert leurs intérêts.  Le représentant a rappelé les trois déclarations trilatérales des deux pays et de la Fédération de Russie et a encouragé les parties à trouver un compromis pour régler les questions en suspens, sur la base desdites déclarations et du droit international.  La Chine, a-t-il conclu, soutiendra tout effort diplomatique qui contribuerait à atteindre cet objectif et jouera également un rôle actif en ce sens.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a dénoncé les restrictions imposées à la circulation dans le corridor de Latchine, en estimant qu’elles sapent la confiance dans un processus de paix et pourraient avoir de graves conséquences humanitaires.  Il a exhorté l’Azerbaïdjan à rétablir ladite circulation, avant de dénoncer toute interruption dans la fourniture des services de base pour les peuples de la région.  Le représentant a appelé les parties à s’abstenir de tout acte de nature à saper les efforts de paix, en insistant sur la nécessité d’un règlement par le biais de négociations.  Il ne saurait y avoir de solution militaire, a dit le délégué, en rappelant l’implication de son pays pour un retour au dialogue.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) s’est particulièrement inquiétée du blocage du corridor de Latchine qui a pour conséquence directe d’isoler la population du Haut-Karabakh.  Elle a exigé le respect de tous les accords sur le cessez-le-feu et le non-recours à la force, conclus sous la médiation russe.  Il a appelé l’Azerbaïdjan et l’Arménie à faire preuve de retenue, à s’abstenir de toute action susceptible d’accroître les tensions et à honorer les accords conclus dans le cadre des Déclarations tripartites des dirigeants de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan et de la Fédération de Russie, le 9 novembre 2020, les 11 janvier et 26 novembre 2021, et le 31 octobre 2022.  La représentante s’est dite convaincue que la mise en œuvre intégrale de ces Déclarations est la formule la plus durable pour de bonnes relations entre Bakou et Erevan.  Elle a indiqué que son pays s’est engagé à continuer de fournir à Bakou et à Erevan toute l’assistance nécessaire pour mettre en œuvre les accords.

Le Groupe de travail trilatéral sur le déblocage dans les domaines économique et du transport poursuit ses travaux, sous la coprésidence, des Vice-Premiers Ministres russe, arménien et azerbaïdjanais, a ajouté la représentante, avant de préciser que son pays travaille à l’élaboration d’un traité de paix avec les deux parties.  Elle a estimé que tous les différends entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan doivent être résolus exclusivement par des moyens politiques et diplomatiques.  Les questions frontalières doivent l’être au sein de la Commission bilatérale sur la délimitation de la frontière, avec l’assistance consultative de la Fédération de Russie.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est dit gravement préoccupé de la clôture du corridor de Latchine, avec les conséquences humanitaires graves qu’une telle décision pourrait avoir, particulièrement en hiver.  Il a en effet rappelé qu’il s’agit de la seule voie d’approvisionnement des besoins essentiels dans la région.  Ce n’est que grâce à la diplomatie qu’une paix pérenne pourra être atteinte, a ajouté le représentant.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) s’est dit préoccupé par les informations faisant état de restrictions à la liberté de mouvement dans le corridor de Latchine.  Le droit de passage est l’un des piliers de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, a-t-il rappelé, arguant que toute entrave à ce droit, quel qu’en soit le prétexte, compromet le bien-être du peuple du Haut-Karabakh et menace le processus de réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, après un conflit qui a déjà coûté des milliers de vies humaines.  Constatant que fort heureusement, les tensions de ces derniers jours ne se sont pas traduites par des actes de violence, il a encouragé les parties à faire preuve de la même retenue dans leur rhétorique, afin que leurs propos ne soient pas interprétés comme une incitation à de nouvelles hostilités. 

Il est essentiel de maintenir ouvertes les voies de dialogue et d’adopter des mesures de confiance, afin de clarifier objectivement les faits et de trouver des solutions pragmatiques, a estimé le représentant.  Prenant note des efforts de médiation de la Fédération de Russie, qui ont contribué à la reprise de l’approvisionnement en gaz de la région, il a encouragé les autres États Membres à agir de manière tout aussi constructive pour prévenir l’aggravation de la crise et de la situation humanitaire. 

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a dénoncé le blocus du corridor de Latchine et les conséquences humanitaires de cette situation.  La représentante a demandé le rétablissement de la liberté de circulation, avant d’exhorter les deux parties à faire montre de la plus grande retenue.  Les parties doivent tout particulièrement éviter toute désinformation, notamment sur les réseaux sociaux, sous peine de déclencher un mouvement de panique au sein des populations et de fragiliser les efforts d’apaisement des tensions, a-t-elle plaidé.  Il ne saurait y avoir de solution militaire à ce conflit, a conclu la déléguée, en appelant à recourir à la négociation pour parvenir à un règlement pérenne.

M. JUAN MANUEL GÓMEZ ROBLEDO (Mexique) a déclaré que son pays suit avec inquiétude les tensions dans le corridor de Latchine.  Il s’est dit préoccupé par les conséquences humanitaires des restrictions à la liberté de mouvement, en cette saison hivernale.  Il a rappelé, à cet égard, l’accord du 9 novembre 2020 et exhorté au respect du droit international humanitaire.  Le représentant a réitéré son appel aux parties pour qu’elles résolvent leurs différends par le dialogue.  Il a invité les membres concernés de la communauté internationale à user de leur influence pour obtenir des parties qu’elles évitent toute action susceptible de faire monter les tensions ou de déclencher une escalade.  Rappelant le coût humain des crises passées, il a voulu que le maintien de la sécurité et de la stabilité dans le Caucase soit la priorité.

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite préoccupée par les développements dans le corridor de Latchine et par le risque supplémentaire de déstabilisation de la région.  Le blocage du couloir a déjà eu de graves conséquences humanitaires, a-t-elle relevé en regrettant que les fournitures de soins médicaux et les évacuations sanitaires aient été interrompues.  Toute interruption de l’approvisionnement en biens et services essentiels nuit en premier aux groupes les plus vulnérables, a souligné la déléguée ajoutant que « cela peut et doit être évité ».  La Norvège, a-t-elle déclaré, appelle les parties à respecter les accords prévus dans la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020.  « En particulier, nous appelons l’Azerbaïdjan à garantir la sécurité des déplacements le long du corridor de Latchine. »  La représentante a fait valoir qu’il n’est dans l’intérêt de personne de déclencher une situation humanitaire évitable au Haut-Karabakh.  Elle a appelé à rechercher des solutions par le dialogue et des initiatives diplomatiques.  En outre, la représentante a exhorté les parties à faire preuve d’un maximum de retenue, à prendre des mesures pour désamorcer la situation et à revenir à la table des négociations de bonne foi et sans conditions préalables.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a déclaré qu’en tant qu’ami de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, son pays est préoccupé par les tensions qui affectent les deux pays depuis des siècles et qui ont par intermittence dégénéré en conflit armé, faisant des victimes civiles et militaires et provoquant la destruction d’infrastructures vitales.  La représentante a estimé que la communauté internationale doit continuer de travailler avec les deux parties pour trouver les voies d’une coexistence pacifique.  Concernant le différend relatif au Haut-Karabakh, elle a exhorté les dirigeants et la société civile à soutenir les efforts de paix, en facilitant le discours intercommunautaire et en évitant les actions susceptibles d’attiser les tensions.

Nous réitérons notre appel aux parties pour qu’elles restent attachées à la pleine mise en œuvre de la Déclaration trilatérale de 2022, laquelle constitue une étape importante vers la cessation complète des hostilités, le règlement progressif du conflit et la normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.  Compte tenu des tensions en cours sur le continent européen et la crise en Ukraine, la représentante a estimé que des mesures de confiance contribueraient à renforcer la paix fragile qui règne actuellement entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.  S’agissant du volet humanitaire, elle a jugé que tout blocus réel, ou perçu comme tel, du corridor de Latchine doit être levé de toute urgence afin d’assurer la circulation fluide, continue et sûre des personnes.

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) s’est déclaré gravement préoccupé par l’obstruction continue du corridor de Latchine, qui a débuté le 12 décembre et a de graves répercussions sur la population locale.  Sans la libre circulation des personnes, des biens, de la nourriture et des fournitures médicales à travers ce couloir vital, les habitants du Haut-Karabakh feront sûrement face à une crise humanitaire cet hiver, a-t-il averti, exhortant les membres du Conseil à empêcher qu’une autre catastrophe ne se produise sous leurs yeux.  Il a également appelé les autorités azerbaïdjanaises à rétablir immédiatement et sans condition la liberté et la sécurité de circulation le long du corridor de Latchine, conformément à l’accord trilatéral du 9 novembre 2020.

Notant que le mois dernier a marqué le deuxième anniversaire de la fin de la guerre de 44 jours entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, le représentant a appelé à la retenue et à la désescalade.  Il est temps de modérer la rhétorique, de s’abstenir de menaces et de provocations et de poursuivre d’importants efforts de réconciliation afin d’éviter de nouvelles pertes de vie inutiles, a-t-il demandé aux parties.  De même, il a appuyé un règlement négocié, global et durable du conflit, y compris sur le statut à long terme du Haut-Karabakh et a fait part de son plein soutien au format international du Groupe de Minsk de l’OSCE pour poursuivre cet objectif. 

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a dénoncé le blocus du corridor de Latchine qui pourrait déclencher une crise humanitaire.  Les parties doivent s’en tenir à l’accord de cessez-le-feu du 10 septembre 2020, a-t-elle dit.  Prenant note des explications de l’Azerbaïdjan, elle a demandé une enquête indépendante pour établir les faits et éclairer le Conseil sur la réalité de la situation le long de cette route indispensable.  Enfin, la représentante a réitéré la nécessité de poursuivre les négociations, sur la base du cadre tracé par l’accord tripartite, en vue de trouver un accord sur les questions en suspens, notamment la signature d’un traité de paix et de délimitation des frontières.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est inquiété de la situation dans le corridor de Latchine dont le blocage empêche l’acheminement vers les populations du Haut-Karabakh de vivres et de médicaments.  Estimant que cette situation risque d’entraîner une crise humanitaire, il a appelé les parties à respecter les accords précédemment conclus.  Il a appuyé les efforts de médiation en cours dans la région, avant d’exhorter les deux parties à user de tous les moyens diplomatiques à leur disposition pour garantir une paix durable.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a déclaré que, depuis le 12 décembre, le passage en toute sécurité des personnes, de la nourriture et des médicaments à la population du Haut-Karabakh a été empêché alors même que l’Azerbaïdjan lançait une campagne massive de manifestations le long du corridor de Latchine, bloquant la seule et unique voie d’approvisionnement dans et hors du Haut-Karabakh.  Pour le représentant, les agissements de l’Azerbaïdjan constituent une violation directe de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, y compris de son paragraphe 6 qui stipule que le corridor de Latchine, sous le contrôle des forces de maintien de la paix de la Fédération de Russie, doit continuer de relier le Haut-Karabakh et l’Arménie.  À ce titre, a-t-il ajouté, l’Azerbaïdjan doit garantir la circulation en toute sécurité des citoyens, des véhicules et des marchandises circulant le long du corridor de Latchine dans les deux sens.  Le représentant a estimé que le « blocus illégal orchestré par l’Azerbaïdjan » vise à isoler quelques 120 000 personnes et à les plonger, en plein hiver, dans une situation humanitaire précaire. 

Depuis le 12 décembre, un seul transfert d’un patient devant subir une opération a pu avoir lieu, nécessitant la coopération de multiples parties prenantes, dont les soldats de la paix et le CICR, a poursuivi M. Margaryan.  Selon son pays, cela indique clairement que le couloir reste fermé à la population, contrairement à ce que suggère la partie azerbaïdjanaise.  Le représentant a en outre évoqué une pénurie de vivres et d’autres biens essentiels, 4 000 tonnes de fournitures diverses n’ayant par exemple pas pu être livrées à destination.  « Le siège médiéval de la population du Haut-Karabakh a été exacerbé par la perturbation de l’approvisionnement en gaz pendant trois jours consécutifs dans des conditions hivernales rigoureuses », a encore lancé le délégué arménien, qui a affirmé que la région est au bord de la catastrophe humanitaire.  « Le manque de chauffage a en outre perturbé le quotidien des élèves, les privant même de leur droit fondamental à l’éducation », a-t-il aussi dit.  M. Margaryan a estimé que le caractère coordonné des actions de l’Azerbaïdjan, y compris les incidents ciblant la population civile et les infrastructures vitales, apporte la preuve supplémentaire que la fermeture du corridor de Latchine est bien une opération planifiée mise en œuvre par les autorités azerbaïdjanaises dans l’unique but de porter atteinte à la population civile et de créer une crise humanitaire de grande ampleur dans le Haut-Karabakh. 

Poursuivant sa déclaration à charge, le représentant a accusé l’Azerbaïdjan de se livrer à des opérations de nettoyage ethnique dans des villages du Haut-Karabakh et d’entraver des activités agricoles au motif fallacieux qu’elles porteraient atteintes à l’environnement.  Si l’Azerbaïdjan est intéressé par une évaluation indépendante de la situation environnementale, non pourrions envisager de déployer une mission d’enquête de l’ONU pour examiner la question, a-t-il ironisé.  Concernant l’utilisation de mines terrestres, M. Margaryan a souligné que celle-ci était limitée au territoire de l’Arménie, et ce « strictement à des fins défensives ». 

L’Azerbaïdjan non seulement menace régulièrement de recourir à la force contre l’Arménie, mais continue également de maintenir sous occupation illégale plus de 140 kilomètres carrés du territoire souverain de mon pays, s’est-il ensuite défendu.  Pour le délégué arménien, l’essentiel est qu’une population de 120 000 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, est prise en otage par l’Azerbaïdjan, pays dont le représentant est ici aujourd’hui pour proférer mensonges et accusations destinés à dissimuler des violations flagrantes et massives des droits de l’homme. 

Selon M. Margaryan, le recours massif à la force, l’abolition de tous les droits collectifs du peuple du Haut-Karabakh et l’élimination même du nom de cette terre peuplée d’Arméniens depuis des millénaires constituent des signes avant-coureurs clairs d’une politique génocidaire.  Dans ces circonstances, il a exhorté le Conseil de sécurité des Nations Unies à prendre des mesures pour obtenir de l’Azerbaïdjan son plein respect les dispositions de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, l’ouverture immédiate et sans condition du corridor de Latchine, et le déploiement d’une mission d’enquête pour évaluer la situation humanitaire sur le terrain. 

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a commencé par rappeler que seule la terminologie géographique établie par les autorités nationales compétentes doit être utilisée et reconnue par les Nations Unies.  À ce titre, il a regretté que l’Arménie et certains membres du Conseil de sécurité aient employé l’expression de « Haut-Karabakh » pour désigner un territoire azerbaïdjanais occupé dont le titre légal est la région économique du Karabakh (région du Karabakh).

Il a déclaré que le régime du corridor de Latchine demeure inchangé et que les mouvements ne sont pas entravés.  Les allégations relatives aux conséquences humanitaires sont fausses et aucune restriction n’est imposée à la population locale, a-t-il assuré.  Il a noté qu’en violation de l’accord du 10 novembre 2020, l’Arménie refuse de retirer ses forces armées illégales du territoire azerbaïdjanais où sont temporairement déployées des forces de maintien de la paix russes.  Il a également accusé l’Arménie de ne pas avoir fourni de carte des mines disséminées sur le territoire azerbaïdjanais et d’en avoir déposé de nouvelles, en utilisant la route de Latchine pour les transporter.  À cet égard, il a déclaré que, depuis la signature de la déclaration trilatérale, 276 Azerbaïdjanais ont été victimes des mines. 

En outre, il a déclaré que la route de Latchine a été utilisée pour le trafic illicite de minerais et d’autres ressources depuis le territoire azerbaïdjanais occupé où les forces russes sont déployées.  Ces opérations minières et d’extraction ont été menées sans contrôle environnemental approprié, en violation des normes techniques en matière d’environnement, a affirmé le représentant, qui a souligné que l’impact environnemental de ces activités constitue une source légitime de graves préoccupations.  En effet, ces activités illégales polluent les zones limitrophes et détruisent des écosystèmes fragiles, a-t-il indiqué.  Le représentant a regretté qu’une équipe azerbaïdjanaise ait été empêchée de mener une enquête dans la zone, ayant indigné le public et conduit à une manifestation sur la route de Latchine-Shusha.

L’Azerbaïdjan, a-t-il dit, est disposé à garantir les droits et libertés des citoyens d’origine arménienne conformément à son droit interne et à ses obligations internationales.  Il a regretté que l’Arménie et des pays tiers tentent de saper le fragile processus de normalisation.  La création de relations de bon voisinage entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est essentielle, a-t-il estimé.  Le délégué a donc réitéré son appel à la communauté internationale pour persuader l’Arménie d’accepter l’offre de paix de l’Azerbaïdjan afin de négocier en vue de trouver des solutions pacifiques.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité renouvelle pour un an le mandat de la MONUSCO et lève l’obligation de notifier les achats d’armes par la RDC

9226e séance – matin    
CS/15152

Le Conseil de sécurité renouvelle pour un an le mandat de la MONUSCO et lève l’obligation de notifier les achats d’armes par la RDC

Le Conseil a, ce matin, renouvelé pour un an le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et supprimé l’obligation de notification prévue par le régime de sanctions applicables en République démocratique du Congo (RDC) s’agissant de l’envoi d’armes et de matériel militaire.

Par la résolution 2666 (2022), adoptée à l’unanimité de ses 15 membres, le Conseil a décidé de proroger d’un an, jusqu’au 20 décembre 2023, le mandat de la Mission, rappelant que sa priorité « est accordée à la protection des populations civiles » menacées de violences physiques, une « protection efficace, rapide, dynamique et intégrée » qui doit être assurée par « toutes les mesures nécessaires ».

Plus spécifiquement, la MONUSCO doit prévenir, dissuader et empêcher les groupes armés et les milices locales de se livrer à des violences contre la population et mener des offensives « ciblées et énergiques » en vue de les neutraliser.  Elle devra maintenir un déploiement préventif et une présence « mobile, flexible, robuste et efficace », notamment en organisant des patrouilles actives, « pédestres et motorisées », en particulier dans les zones à haut risque.

Un autre volet important du mandat est la protection des droits humains.  La Mission devra ainsi offrir ses bons offices, ses conseils et son appui au Gouvernement congolais en vue de promouvoir les droits, en particulier civils et politiques, et de lutter contre l’impunité.  Elle doit aussi aider les autorités congolaises à enquêter sur tous les auteurs présumés de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Les délégations, à l’instar des États-Unis et de la Norvège, se sont félicitées de l’accent mis par le mandat de la MONUSCO sur la protection des civils et la promotion des droits humains.  Le mandat robuste de la Mission lui permettra de gagner la confiance de la population, a souhaité le délégué du Kenya.  De son côté, la Fédération de Russie a estimé que la surveillance des droits humains ne doit pas détourner la Mission des tâches urgentes de maintien de la paix et de la sécurité dans le pays.

En adoptant également à l’unanimité la résolution 2667 (2022), le Conseil de sécurité a décidé de lever l’obligation de notification préalable prévue par le régime de sanctions applicables en RDC.  Jusqu’à présent, tous les États Membres devaient notifier au « Comité 1533 », chargé de surveiller la mise en œuvre des mesures de sanctions, « tout envoi d’armes ou de matériel connexe » dans le pays et « toute fourniture d’assistance ou de services de conseil ou de formation ayant un rapport avec la conduite d’activités militaires dans le pays ».

La levée aujourd’hui de l’obligation de notification préalable a été saluée par plusieurs délégations, dont le Gabon, pour qui cette décision permettra de supprimer les entraves à la capacité de riposte de la RDC face aux groupes armés qui n’ont aucune contrainte et ne respectent aucun embargo, s’est félicité le Gabon, pour qui ce Conseil a fini par comprendre que restreindre la marge de manœuvre d’un Gouvernement démocratiquement élu, qui fait face à des défis sécuritaires de grande ampleur, n’est pas une bonne chose.

Une décision également saluée par la Russie, la Chine et le Ghana, ce dernier pays ayant estimé que le Gouvernement congolais doit pouvoir s’acquitter de ses lourdes responsabilités.  S’il a estimé que la levée de l’obligation de notification sera de nature à aider le Gouvernement congolais à rétablir l’autorité de l’État dans l’est du pays pour y mettre fin au cycle de violence, le Royaume-Uni a également encouragé la RDC à réformer le secteur de la sécurité afin de se doter de forces « responsables et professionnelles ».

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Texte du projet de résolution (S/2022/960)

      Le Conseil de sécurité,

      Rappelant ses résolutions antérieures et les déclarations de sa présidence sur la République démocratique du Congo, en particulier ses résolutions précédentes concernant le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et le régime de sanctions établi par les résolutions 1493 (2003) et 1807 (2008),

      Réaffirmant les principes fondamentaux du maintien de la paix, tels que le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat,

      Réaffirmant également son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo et de tous les États de la région, et soulignant qu’il faut de toute urgence que les principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale soient pleinement respectés,

      Rappelant que c’est au Gouvernement congolais qu’il incombe au premier chef de protéger les populations civiles se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction, y compris contre les crimes internationaux, conscient que la persistance des problèmes de sécurité constitue une menace pour les populations civiles, et soulignant l’importance des efforts déployés à l’échelle nationale pour rétablir l’autorité de l’État dans tout le pays et surmonter ainsi les menaces que représentent les groupes armés,

      Notant que la République démocratique du Congo reste en proie à des cycles récurrents et évolutifs de conflits et de violence permanente causés par des groupes armés étrangers et nationaux, qui exacerbent une crise très inquiétante de la sécurité, de la situation humanitaire et des droits humains, ainsi qu’à la violence intercommunautaire et à la violence des milices dans certaines régions du pays,

      Se déclarant préoccupé par les liens signalés entre les Forces démocratiques alliées et des réseaux terroristes dans l’est de la République démocratique du Congo, soulignant que de tels liens peuvent exacerber davantage les conflits et contribuer à saper l’autorité de l’État et insistant sur le fait que la solution à ces problèmes ne saurait être purement militaire et qu’il importe d’envisager la lutte contre le terrorisme de façon globale, dans le respect du droit international applicable,

      Prenant acte des efforts que le Gouvernement et le peuple congolais déploient en faveur de la réalisation de la paix et du développement national ainsi que de l’appui et de la mobilisation à l’échelon régional, conscient de l’action que mènent les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et la MONUSCO afin de lutter contre la menace que représentent les groupes armés dans le pays,

      Demeurant profondément préoccupé par les multiples cas de violation des droits humains et d’atteinte à ces droits ainsi que de violation du droit international humanitaire dans certaines zones commises par toutes les parties et en particulier par des groupes armés, ainsi que par le fait que les violences intercommunautaires se sont intensifiées sous l’effet des discours de haine, de la mésinformation et de la désinformation, notamment dans les médias sociaux,

      Réaffirmant que les femmes et les jeunes jouent un rôle important dans la prévention, la gestion et le règlement des conflits, ainsi que dans la consolidation de la paix et les processus électoraux et soulignant qu’il importe d’assurer leur participation pleine, égale, effective, véritable et en toute sécurité à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité en République démocratique du Congo,

      Se déclarant gravement préoccupé par la situation humanitaire, quelque 27 millions de Congolais ayant besoin d’une aide humanitaire, et l’augmentation du nombre de personnes déplacées dans le pays, 5,7 millions selon les dernières estimations, les 523 000 personnes réfugiées vivant en République démocratique du Congo et les autres personnes réfugiées, plus de 1 million, ayant fui le pays pour d’autres pays d’Afrique en raison de la poursuite des hostilités, encourageant les États Membres à s’attacher à une répartition plus équitable des charges et de la responsabilité d’héberger et d’aider les personnes réfugiées en République démocratique du Congo, conformément au cadre d’action global pour les réfugiés, engageant la République démocratique du Congo et tous les États de la région à s’employer à créer un environnement pacifique propice à la mise en place de solutions durables pour les personnes réfugiées et déplacées, et notamment à leur rapatriement volontaire et à leur réintégration à terme en République démocratique du Congo, en toute sécurité et dans la dignité, avec le concours de l’équipe de pays des Nations Unies, et soulignant que toute solution de ce type devrait être conforme aux obligations découlant du droit international des réfugiés, du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme,

      Rappelant les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence,

      Rappelant également ses résolutions 2532 (2020) et 2565 (2021), dans lesquelles il a exigé la cessation générale et immédiate des hostilités dans toutes les situations dont il était saisi et demandé à toutes les parties à des conflits armés de prendre part immédiatement à une pause humanitaire pérenne, de façon à permettre l’acheminement rapide, sûr, sans entrave et durable de l’aide humanitaire, conformément aux principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance,

      Notant l’importance de la vente commerciale d’aliments, de combustible et d’autres produits essentiels afin de répondre aux besoins de survie de base de la population civile,

      Rappelant en outre toutes ses résolutions sur les femmes et la paix et la sécurité, sur les jeunes et la paix et la sécurité, sur les enfants et les conflits armés et sur la protection des civils en période de conflit armé, saluant l’action menée par le Gouvernement congolais à cet égard et les mesures qu’il a prises pour appliquer la résolution 1325 (2000), rappelant les conclusions sur la question des enfants et du conflit armé en République démocratique du Congo qu’a adoptées son groupe de travail sur les enfants et les conflits armés le 10 décembre 2020 et qui concernent les parties aux conflits armés se déroulant dans ce pays, se déclarant gravement préoccupé par le grand nombre de violations perpétrées contre les enfants, en particulier les violences sexuelles et fondées sur le genre commises par les forces de sécurité, et demandant à tous les acteurs de contribuer à la réadaptation et à la réintégration des enfants auparavant associés à des forces et groupes armés,

      Conscient des effets néfastes que les changements climatiques, les changements écologiques, les catastrophes naturelles et le manque d’accès à l’énergie, entre autres facteurs, ont sur la stabilité de la République démocratique du Congo, se félicitant du rôle moteur que joue la République démocratique du Congo dans l’élaboration de stratégies nationales visant à remédier à ces problèmes et dans la préservation du bassin forestier du Congo, préoccupé par les activités des groupes armés dans les zones protégées entraînant des dommages écologiques et prenant note de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris,

      Réaffirme qu’il est nécessaire que la MONUSCO puisse s’acquitter pleinement de son mandat conformément à ses résolutions applicables, en utilisant toutes les mesures disponibles pour lutter efficacement contre la menace posée par les groupes armés et d’autres menaces pour la sécurité, compte tenu de la multiplication des conflits dans le pays,

      Demandant de nouveau à toutes les parties de coopérer pleinement avec la MONUSCO et de continuer à œuvrer à l’exécution intégrale et objective du mandat de la Mission, rappelant qu’il importe de continuer à respecter l’accord sur le statut des forces et qu’il condamne toutes les attaques dirigées contre les soldats de la paix, qui pourraient constituer des crimes de guerre, et soulignant que les auteurs de ces attaques doivent répondre de leurs actes,

      Réaffirmant l’importance de doter les opérations de paix des Nations Unies de ressources suffisantes, notamment pendant les phases de transition des missions, et rappelant la résolution 2594 (2021) sur les transitions en matière d’opérations de la paix des Nations Unies à cet égard,

      Souligne l’importance des activités de communication stratégique pour l’exécution du mandat de la MONUSCO et la sûreté et la sécurité de ses Casques bleus,

      Constatant que la situation en République démocratique du Congo demeure une menace pour la paix et la sécurité internationales dans la région,

      Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Situation politique

      1.    Se félicite des mesures prises par le Gouvernement congolais pour répondre aux besoins de son peuple et prie instamment tous les acteurs politiques congolais de ne ménager aucun effort pour mettre en place les réformes indispensables sur les plans de la gouvernance, de la sécurité et de l’économie figurant dans le programme d’action du Gouvernement pour 2021-2023, réaffirme qu’il importe de mettre en œuvre les engagements pris par le Président, Félix-Antoine Tshisekedi, et son gouvernement afin de réaliser l’unité nationale, de renforcer l’état de droit et le respect des droits humains, notamment le respect de la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de la presse et le droit de réunion pacifique, de lutter contre la corruption, de lancer des programmes nationaux de développement visant à réduire sensiblement la pauvreté et de favoriser l’inclusion politique et la consolidation de la paix, et encourage la MONUSCO à continuer de faciliter, par ses bons offices, des processus politiques pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles ;

      2.    Se réjouit de l’action menée par le Président Tshisekedi et son gouvernement pour favoriser la réconciliation, la paix et la stabilité en République démocratique du Congo, l’encourage dans l’action qu’il continue de mener auprès des États de la région pour nouer de bonnes relations avec les pays voisins et faire avancer la paix, la sécurité et l’intégration régionale, note que la stabilité politique et la sécurité ainsi que le renforcement de la présence de l’État dans les zones de conflit, essentiellement dans l’est de la République démocratique du Congo, sont des conditions indispensables pour une paix durable dans le pays, invite les autorités congolaises à œuvrer en faveur de la stabilisation et du renforcement des capacités des institutions de l’État, notamment dans les zones de conflit, avec l’appui de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies, afin de défendre les droits et de répondre aux besoins de l’ensemble de la population congolaise, demande à tous les acteurs politiques de continuer à s’employer, avec l’appui de la MONUSCO, à mettre en place, sur l’ensemble du territoire, un processus pacifique, transparent, inclusif et crédible en vue de la tenue des élections présidentielle et législatives prévues en 2023, dans le respect de la Constitution et de la loi électorale, et de garantir la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes à toutes les étapes de ce processus, et salue la présentation par le Gouvernement congolais d’un budget solide qui vise à répondre aux besoins du peuple congolais et à garantir le financement du processus électoral ainsi qu’à faciliter des élections libres et régulières ;

      3.    Prie le Secrétaire général et demande aux organisations régionales de fournir un appui politique au renforcement des institutions de l’État en République démocratique du Congo et au rétablissement de la confiance entre les différentes parties, notamment par leurs bons offices, en vue de consolider la paix et la sécurité, de s’attaquer aux causes profondes des conflits dans les zones prioritaires ainsi que de susciter un large consensus national autour des principales réformes de la gouvernance et de la sécurité, de lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles et d’appuyer les réformes et les processus électoraux en cours, conformément aux priorités nationales du Gouvernement de la République démocratique du Congo ;

Droits humains

      4.    Se félicite des mesures et des engagements pris par le Président Tshisekedi pour veiller à ce que le Gouvernement congolais protège et respecte les droits humains et les libertés fondamentales, ainsi que pour combattre l’impunité dans tous les domaines, salue les mesures prises par le Gouvernement congolais en vue de l’instauration d’une stratégie nationale de justice transitionnelle, y compris le lancement de consultations dans plusieurs régions, demande au Gouvernement congolais de respecter ses engagements et de veiller à ce que l’état de siège décrété en Ituri et dans le Nord-Kivu, dans le cadre de ses efforts futurs visant à éliminer la menace des groupes armés et à rétablir l’autorité de l’État, soit évalué régulièrement, modulé en fonction des progrès accomplis par rapport à des objectifs clairement définis et appliqué dans le plein respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire ;

      5.    Engage instamment le Gouvernement congolais à faire répondre de leurs actes les auteurs de violations du droit international humanitaire ou de violations des droits humains ou d’atteintes à ces droits, en particulier celles qui peuvent constituer un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, et souligne l’importance à cet égard de la coopération régionale et de la coopération avec la Cour pénale internationale depuis le renvoi par la République démocratique du Congo devant la Cour de la situation dans le pays en 2004, ainsi que de la coopération avec la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples ;

      6.    Encourage l’adoption de nouvelles mesures par le Gouvernement congolais pour que les forces de sécurité répondent des violations des droits humains qu’il soit mis fin à l’impunité dans leurs rangs, et demande aux autorités congolaises de traduire les responsables de ces faits en justice, prie le Gouvernement congolais de faire en sorte, conformément aux accords déjà passés, que les membres du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo aient pleinement et librement accès aux centres de détention, aux hôpitaux et aux morgues et à tous autres locaux, s’il y a lieu, pour recueillir des informations sur les violations des droits humains, souligne que le Gouvernement congolais doit continuer de faire en sorte que ses forces de sécurité gagnent en professionnalisme, notamment en vérifiant leurs antécédents, en les formant et en renforçant leurs capacités, afin d’assurer le strict respect du droit national et international des droits de l’homme ainsi que du droit international humanitaire, et souligne qu’il importe de respecter l’état de droit ;

      7.    Condamne fermement toutes les violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit en République démocratique du Congo, et particulièrement par les groupes armés, se félicite de l’action menée par le Gouvernement congolais pour prévenir et combattre les violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit, et notamment des progrès enregistrés dans la lutte contre l’impunité par l’arrestation, la poursuite et la condamnation de membres des FARDC et de la Police nationale congolaise, et dans la création d’un fonds national de réparations en faveur des victimes et des personnes rescapées de violences sexuelles et d’autres crimes, prie instamment le Gouvernement de continuer à intensifier ses efforts pour lutter contre l’impunité des violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit, notamment celles commises par des membres des FARDC et de la Police nationale congolaise, et de fournir aux personnes rescapées, aux victimes et aux témoins tous les services nécessaires, tels que des services médicaux, liés à la santé sexuelle et reproductive, au soutien psychosocial, à la santé mentale, d’ordre juridique et socioéconomique, et d’assurer leur protection, encourage le Gouvernement à renforcer son application du Communiqué conjoint sur la lutte contre les violences sexuelles commises en période de conflit adopté en 2013 et son additif signé en 2019, et à consacrer les fonds suffisants à la mise en œuvre de ces engagements, salue les nouveaux progrès des FARDC et de la Police nationale congolaise concernant l’application de leurs plans d’action respectifs contre la violence sexuelle, et rappelle l’importance de coopérer avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit ;

      8.    Se félicite des progrès accomplis par le Gouvernement congolais pour consolider les acquis du plan d’action visant à faire cesser et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants et en accélérer la mise en œuvre afin de faire cesser et de prévenir les violations commises sur la personne d’enfants et de veiller à ce que les enfants ne soient pas détenus pour association supposée avec des groupes armés et qu’ils soient remis aux acteurs de la protection de l’enfance, demande au Gouvernement congolais de continuer ses efforts, en veillant à ce que les auteurs de toutes violations et atteintes, y compris les membres des forces de sécurité, répondent de leurs actes, et rappelle qu’il importe de coopérer avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé ;

Groupes armés

      9.    Condamne fermement tous les groupes armés opérant en République démocratique du Congo, notamment le M23, la Coopérative pour le développement du Congo, les Forces démocratiques alliées, les Forces démocratiques de libération du Rwanda, la Résistance pour un état de droit (RED Tabara), les groupes Maï-Maï et plusieurs autres groupes armés nationaux et étrangers, et les violations du droit international humanitaire et d’autres normes applicables du droit international ainsi que les atteintes aux droits humains qu’ils commettent, réaffirme sa condamnation des actes de violence contre la population civile, le personnel des Nations Unies, le personnel associé et les travailleurs humanitaires, ainsi que le personnel médical et les installations médicales, les exécutions sommaires et les atteintes à l’intégrité physique, les violences sexuelles et fondées sur le genre, le recrutement et l’utilisation d’enfants, l’enlèvement d’enfants et de membres du personnel humanitaire, ainsi que les attaques visant des écoles et des personnes civiles liées aux écoles, notamment des enfants et des enseignants, et des hôpitaux, que commettent les groupes armés et les milices, en violation du droit international applicable, ainsi que l’utilisation de personnes civiles comme boucliers humains, les déplacements forcés et massifs de personnes civiles, les exécutions extrajudiciaires et les arrestations arbitraires, l’emploi indiscriminé d’engins explosifs improvisés, et réaffirme également que les auteurs de tels actes doivent être amenés à en répondre ;

      10.   Exige de tous les groupes armés qu’ils mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et aux autres activités déstabilisatrices, à l’exploitation et au commerce illégaux des ressources naturelles, exige également le retrait immédiat du M23 de toutes les zones occupées, conformément au processus de Luanda approuvé par l’Union africaine, et que tous les membres des groupes armés soient immédiatement et définitivement démobilisés, déposent les armes, renoncent à la violence, préviennent et fassent cesser les violations commises contre les enfants et libèrent les enfants qui se trouvent dans leurs rangs, demande instamment à tous les groupes armés congolais de participer sans condition au processus de Nairobi dirigé par la Communauté d’Afrique de l’Est pour rechercher des solutions politiques en vue du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, et aux groupes armés étrangers de retourner dans leur pays d’origine, et demande au Gouvernement congolais de prendre de nouvelles mesures, militaires et non militaires, pour lutter contre la menace que représentent les groupes armés, dans le respect du droit international, y compris du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme ;

      11.   Demande instamment au Gouvernement congolais et à ses partenaires, et notamment aux institutions financières internationales, d’apporter d’urgence un soutien adéquat en temps voulu en faveur d’une mise en œuvre rapide et effective du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants remplissant les conditions requises, sous la coordination du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, au moyen d’initiatives locales spécialement conçues et adaptées au contexte, offrant des possibilités et des solutions économiques de remplacement durables, et en veillant à ce que fassent partie intégrante de ces processus la lutte contre l’impunité des violations des droits humains, des atteintes à ces droits et des crimes internationaux, les initiatives de justice transitionnelle et la protection des droits des enfants ;

      12.   Condamne la poursuite de l’exploitation et du commerce illégaux des ressources naturelles, notamment des minerais dits de « conflit » comme l’étain, le tantale, le tungstène, l’or, les diamants, le cobalt et le coltan, ainsi que du cacao, du charbon de bois, du bois d’œuvre et des espèces sauvages, auxquels se livrent les groupes armés et les réseaux criminels qui les soutiennent, ainsi que les conséquences néfastes des conflits armés sur les zones naturelles protégées, qui font obstacle à l’instauration d’une paix durable et au développement de la République démocratique du Congo, engage le Gouvernement à redoubler d’efforts pour préserver ces zones, demande aux États membres de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et des communautés économiques régionales de lutter ensemble contre l’exploitation et le commerce illégaux des ressources naturelles par l’amélioration et le renforcement de la sécurité autour des secteurs miniers et par la recherche d’un rapprochement entre les collectivités minières, les autorités locales et les acteurs chargés de la sécurité pour régler les conflits et promouvoir les droits des membres des communautés vivant autour des secteurs miniers, les encourage à promouvoir la gestion transparente et légale des ressources naturelles, notamment l’adoption d’objectifs de recettes publiques, afin de financer le développement, la création de cadres réglementaires et douaniers durables et la mise en place d’une diligence raisonnable dans le cadre de l’approvisionnement en minerais, et rappelle à cet égard ses résolutions 2457 (2019) et 2389 (2017) ainsi que la déclaration de son président S/PRST/2021/19 ;

      13.   Se réjouit des engagements et des mesures pris par le Président Tshisekedi et son gouvernement pour faire avancer la réforme du secteur de la sécurité et promouvoir la consolidation de l’autorité de l’État, la réconciliation, la tolérance et la démocratie, relève que ces mesures préliminaires créent des possibilités nouvelles de collaboration et de coordination entre la MONUSCO et les forces de sécurité congolaises, encourage les autorités congolaises à les respecter et à accélérer la relève des contingents annoncée par le Président Tshisekedi, engage le Gouvernement congolais à demeurer pleinement résolu à protéger la population civile, en se dotant rapidement de forces de sécurité professionnelles, responsables et pérennes, qui respectent le droit international humanitaire et le droit national et international des droits de l’homme, en mettant en place une administration civile congolaise responsable, en particulier dans les secteurs de la police, de la justice, de l’administration pénitentiaire et de l’administration territoriale, et en renforçant l’état de droit ainsi que la promotion et la protection des droits humains, notamment en y allouant les ressources financières nécessaires et en favorisant la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes et leur sécurité, et invite les partenaires internationaux à augmenter leur appui à cet égard ;

      14.   Demande que se poursuivent les mesures prises sur le plan national pour contrer la menace que représentent le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes légères et de petit calibre ainsi que le détournement d’armes au profit des groupes armés dans le pays, notamment les mesures tendant à organiser en toute sûreté et efficacité la gestion, l’entreposage, la surveillance et la sécurité des stocks d’armes et de munitions et la lutte contre le trafic et le détournement des armes, comme le renforcement des capacités et la lutte contre l’impunité, avec l’appui renouvelé de la MONUSCO, selon qu’il conviendra et dans les limites des ressources existantes, prie le Gouvernement congolais d’accroître son appui à la Commission nationale de contrôle des armes légères et de petit calibre et de réduction de la violence armée et encourage l’Organisation des Nations Unies et les partenaires internationaux à aider davantage le Gouvernement congolais à améliorer la gestion des armes et des munitions ;

Appui régional

      15.   Rappelle que l’élimination de la menace posée par les groupes armés doit passer par une stratégie régionale intégrée et un engagement politique fort de la part du Gouvernement congolais, de l’Union africaine, de la Communauté d’Afrique de l’Est, de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, de la Communauté de développement de l’Afrique australe, réaffirme qu’il appuie les efforts nationaux et régionaux visant à promouvoir la paix et la stabilité en République démocratique du Congo et dans la région, partant des engagements pris par les pays de la région au titre du Cadre de paix, de sécurité et de coopération pour la République démocratique du Congo et la région, qui reste un mécanisme essentiel pour la paix et la stabilité durables, souligne les engagements pris par la région au titre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région de ne pas tolérer les groupes armés ni de leur fournir d’assistance ou d’appui de quelque nature que ce soit, condamne fermement tout soutien extérieur aux acteurs armés non étatiques, y compris le M23, et demande qu’il y soit mis fin immédiatement ;

      16.   Salue le processus de Nairobi dirigé par la Communauté d’Afrique de l’Est, se félicite de son approche à deux volets, salue la médiation de l’Union africaine sous l’égide de l’Angola et des mesures complémentaires qui ont été prises pour que ces initiatives se renforcent mutuellement, comme l’appui de la MONUSCO et du Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour les Grands Lacs, encourage la poursuite des efforts visant à mettre en œuvre la feuille de route de la CIRGL sur le processus de pacification dans la région orientale de la République démocratique du Congo et le communiqué final du mini-sommet sur la paix et la sécurité dans la région orientale de la république démocratique du Congo et à résoudre les différends par le dialogue, et prend note des efforts du Mécanisme conjoint de vérification élargi de la CIRGL et du Mécanisme de vérification conjoint ad hoc dirigé par l’Angola, et demande la participation pleine, égale et effective des femmes à ces processus ;

      17.   Encourage le soutien à la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est, comme il convient, et souligne qu’il importe de protéger la population civile, de mettre en place une coordination étroite et le partage d’informations entre la force de la Communauté d’Afrique de l’Est, les FARDC, la Force de défense nationale du Burundi, les Forces de défense populaires de l’Ouganda et la MONUSCO, notamment pour dé-conflictualiser les opérations et assurer l’exécution du mandat de la MONUSCO, et souligne que ces opérations, unilatérales ou conjointes, doivent toutes être conduites dans le strict respect du droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il conviendra, et le cadre de conformité de l’Union africaine ;

      18.   Encourage les États signataires de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région à s’approprier la Stratégie des Nations Unies pour la consolidation de la paix et la prévention et le règlement des conflits dans la région des Grands Lacs ainsi que son plan d’action et à faire preuve de volonté politique en vue de la mettre effectivement en œuvre, appuie pleinement l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs dans l’exécution de son mandat consistant à remédier aux derniers problèmes faisant obstacle à l’application de l’Accord-cadre et à promouvoir la paix et la stabilité dans la région, demande à l’Envoyé spécial de poursuivre son action à l’échelle régionale et internationale en faveur de la pleine application de l’Accord-cadre, y compris par ses bons offices, en coordonnant les stratégies et en partageant l’information avec la MONUSCO, le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale et d’autres entités des Nations Unies, et exhorte la MONUSCO à collaborer avec le Bureau de l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs afin de rechercher des solutions politiques en vue de mettre fin aux flux transfrontaliers de combattants armés, d’armes et de ressources naturelles qui menacent la paix et la stabilité en République démocratique du Congo, en harmonisant les stratégies, en procédant à des échanges d’informations et en coordonnant l’établissement de leurs rapports ;

Mandat de la MONUSCO

      19.   Décide de proroger jusqu’au 20 décembre 2023 le mandat de la MONUSCO en République démocratique du Congo et, à titre exceptionnel et sans créer de précédent ni remettre en cause les principes convenus régissant les opérations de maintien de la paix, de sa brigade d’intervention ;

      20.   Décide que la MONUSCO maintiendra un effectif maximum autorisé de 13 500 militaires, 660 observateurs militaires et officiers d’état-major, 591 policiers et 1 410 membres d’unités de police constituées, et invite le Secrétariat à envisager de réduire encore les effectifs militaires de la MONUSCO, conformément à la stratégie conjointe de retrait progressif et échelonné de la MONUSCO (S/2020/1041) ;

      21.   Décide que les priorités stratégiques de la MONUSCO sont les suivantes : i) contribuer à la protection des populations civiles et ii) appuyer la stabilisation et le renforcement des institutions de l’État en République démocratique du Congo ainsi que les principales réformes de la gouvernance et de la sécurité ;

      22.   Autorise la MONUSCO, en vue d’accomplir les tâches prescrites par son mandat, à prendre toutes les mesures nécessaires pour s’en acquitter ;

      23.   Souligne que ces opérations, unilatérales ou conjointes, doivent toutes être conduites dans le strict respect du droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il conviendra, prie la MONUSCO de veiller à ce que l’appui fourni aux opérations menées par les forces de sécurité nationales, notamment sous la forme de rations ou de carburant, ne le soit que dans le cadre d’opérations conjointes, planifiées et exécutées en commun et fasse l’objet d’un contrôle et d’un examen minutieux, notamment par l’équipe de pays des Nations Unies, et soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies, faute de quoi cet appui sera suspendu ;

Tâches par ordre de priorité

      24.   Décide que le mandat de la MONUSCO comportera les tâches ci-après classées par ordre de priorité du paragraphe 24 au paragraphe 34, souligne que toutes les tâches de la MONUSCO doivent être exécutées dans le respect des droits humains et des libertés fondamentales et insiste sur le fait que la priorité doit être accordée à la protection des populations civiles dans les décisions concernant l’utilisation des capacités et ressources disponibles :

i)    Protéger les populations civiles menacées de violences physiques en prenant toutes les mesures nécessaires pour assurer une protection efficace, rapide, dynamique et intégrée

      a)    Prévenir, dissuader et empêcher les groupes armés et les milices locales de commettre des violences contre la population, notamment en les empêchant d’envahir, d’attaquer ou d’encercler de grosses agglomérations, y compris en complément des autorités congolaises, en les désarmant, en recourant aux bons offices, en appuyant ou en entreprenant des initiatives de médiation locale et de plaidoyer au niveau national pour empêcher l’intensification de la violence et contrer les discours de haine, la désinformation et la mésinformation, en prêtant une attention particulière aux civils regroupés dans les camps de déplacés et de réfugiés, aux manifestants pacifiques, au personnel humanitaire et aux défenseurs des droits humains, conformément aux principes fondamentaux du maintien de la paix, tout en veillant à atténuer les risques auxquels sont exposés les civils avant, pendant et après toute opération militaire ou policière ;

      b)    Mener des offensives ciblées et énergiques en République démocratique du Congo en vue de neutraliser les groupes armés, au moyen d’une brigade d’intervention de la force efficace, sous la pleine autorité du commandant de la force, afin de contribuer à réduire la menace que constituent les groupes armés pour l’autorité de l’État et la sécurité des civils dans le pays et à préparer le terrain pour les activités de stabilisation, unilatéralement ou conjointement avec les forces de sécurité congolaises ;

      c)    Mener des opérations conjointes plus fréquentes et effectives avec les forces de sécurité congolaises, qui soient le fruit d’activités de planification conjointes et de coopération tactique, conformément au mandat de la MONUSCO et de manière strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits humains, afin de veiller à ce que tous les efforts possibles soient faits pour dissuader et empêcher les groupes armés d’agir ou intervenir pour mettre fin à leurs actes ;

      d)    Maintenir un déploiement préventif et une présence mobile, flexible, robuste et efficace, notamment en organisant des patrouilles actives, pédestres et motorisées, en particulier dans les zones à haut risque ;

      e)    Travailler de concert avec le Gouvernement congolais et avec les travailleurs humanitaires afin de déceler les menaces qui pèsent sur les civils, appliquer les plans de prévention et d’intervention communs et renforcer la coopération civilo-militaire, pour protéger les civils contre les violations des droits humains et les atteintes à ces droits et contre les violations du droit international humanitaire, y compris toutes les formes de violence sexuelle et de violence fondée sur le genre ainsi que les violations et exactions commises contre les enfants et les personnes handicapées ;

      f)    Renforcer sa mobilisation auprès des civils et sa communication stratégique, notamment par des communications conjointes avec le Gouvernement congolais, afin de mieux faire connaître et comprendre son mandat et ses activités de protection des civils, de renforcer son mécanisme d’alerte rapide, y compris de prévenir les campagnes de désinformation et de mésinformation visant à saper la crédibilité de la mission et à entraver l’exécution de son mandat ;

ii)   Désarmement, démobilisation, réintégration et stabilisation

      g)    Offrir ses bons offices, ses conseils et son appui au Gouvernement congolais, en étroite coopération avec les partenaires locaux et internationaux, à l’appui du processus de Nairobi dirigé par la Communauté d’Afrique de l’Est et de l’application du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation, conformément à la loi no 21/038 du 5 juillet 2021 et en vue du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des combattants congolais et étrangers qui ne sont pas soupçonnés de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou d’atteintes aux droits humains, et du retour de ces combattants à une vie civile pacifique, l’accent étant particulièrement mis sur les besoins des femmes et des enfants qui ont été associés à des forces et groupes armés ;

      h)    Offrir un appui au désarmement, à la démobilisation, au rapatriement, à la réinstallation et à la réintégration des combattants étrangers non soupçonnés de crimes internationaux ou de violations des droits humains, et au retour de ces combattants et des personnes à leur charge à une vie civile pacifique dans leur pays d’origine ou dans un pays tiers d’accueil, l’accent étant particulièrement mis sur les besoins des femmes et des enfants qui ont été associés à des forces et groupes armés ;

      i)    Conseiller et aider les autorités congolaises en ce qui concerne l’élimination des armes et des munitions des combattants congolais et étrangers désarmés en application des dispositions de ses résolutions et des traités applicables relatifs à la maîtrise des armements ;

      j)    Offrir une assistance technique au Gouvernement congolais pour l’aider à procéder à la consolidation d’une structure nationale civile efficace qui contrôle les principales activités minières et gère équitablement et de manière productive l’extraction, l’ajout de la valeur, le transport et le commerce des ressources naturelles dans l’est de la République démocratique du Congo, en coordination avec l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs ;

      k)    Continuer de collaborer avec le Gouvernement congolais en vue de consolider les acquis du plan d’action visant à faire cesser et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants et d’en accélérer l’application, et poursuivre le dialogue avec toutes les parties figurant sur la liste afin d’obtenir qu’elles s’engagent de nouveau et de prévenir et faire cesser les violations et les violences contre les enfants ;

iii)  Réforme du secteur de la sécurité

      l)    Offrir ses bons offices et des conseils stratégiques et techniques au Gouvernement congolais, selon qu’il convient, et jouer un rôle moteur dans la coordination de l’appui fourni par les partenaires internationaux et bilatéraux et les organismes des Nations Unies, en consultation avec le Gouvernement, pour :

      –     accélérer l’appropriation nationale de la réforme du secteur de la sécurité, qui garantisse la sécurité et la justice pour tous par l’intermédiaire d’institutions chargées de la justice et de la sécurité qui soient indépendantes, responsables et opérationnelles et tiennent compte de la participation pleine, égale et véritable et de la sécurité des femmes ;

      –     favoriser et faciliter des réformes des secteurs militaire, policier, judiciaire et pénitentiaire afin de renforcer la responsabilité et l’efficacité dans l’appareil judiciaire et le secteur de la sécurité, en luttant contre l’impunité et en assurant une efficacité et une efficience opérationnelles, y compris grâce à une formation aux droits humains ;

      –     Aider, par l’entremise du Service de la lutte antimines de l’ONU, le Gouvernement congolais à renforcer les moyens des forces de sécurité congolaises, notamment en renforçant les capacités de gestion des armes et des munitions, de lutte contre les engins explosifs improvisés et de neutralisation des explosifs et des munitions ainsi que d’enquêtes et d’exploitation scientifique de base liées aux engins explosifs improvisés ;

      25.   Autorise la MONUSCO à surveiller les violations des droits humains et les atteintes à ces droits ainsi que les violations du droit international humanitaire et tout rétrécissement de l’espace politique et tout acte de violence, notamment dans le cadre des élections, à lui en rendre compte immédiatement et à en assurer le suivi ;

      26.   Autorise également la MONUSCO à utiliser ses capacités existantes afin de concourir à l’exécution des tâches énumérées ci-après exclusivement en coopération avec l’équipe de pays des Nations Unies, d’une manière simplifiée et échelonnée, étant entendu que cela ne doit pas empiéter sur sa capacité à exécuter les tâches prioritaires et sachant que toutes les tâches se renforcent mutuellement :

      Appui au processus électoral de 2023

      a)    Fournir, si les autorités congolaises le demandent officiellement, une assistance au processus électoral de 2023 dans les trois régions où la MONUSCO se trouve encore, y compris un appui logistique limité sans préjudice de la capacité de la Mission à s’acquitter de ses tâches prioritaires, selon qu’il conviendra et en coordination avec les autorités congolaises, l’équipe de pays des Nations Unies et les acteurs régionaux et internationaux, afin de faciliter le déroulement du cycle électoral, en particulier en engageant un dialogue régulier avec la Commission électorale nationale indépendante ;

      Appui au système judiciaire et lutte contre l’impunité

      b)    Travailler de concert avec les autorités congolaises, en tirant parti des capacités et des compétences du système des Nations Unies, afin de renforcer et d’appuyer le système judiciaire congolais, d’enquêter sur tous ceux qui pourraient avoir commis un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, des violations du droit international humanitaire et des violations des droits humains ou des atteintes à ces droits dans le pays, et de traduire les intéressés en justice, notamment en coopérant avec les États de la région et avec la Cour pénale internationale ;

      c)    Offrir ses bons offices, ses conseils et son appui au Gouvernement congolais en vue de promouvoir les droits humains, en particulier les droits civils et politiques, et de lutter contre l’impunité, notamment par l’application de la « politique de tolérance zéro » du Gouvernement à l’égard des infractions à la discipline et des violations des droits humains et du droit international humanitaire commises par les éléments des forces de sécurité, et engager et faciliter des initiatives de médiation au niveau local afin de faire progresser l’instauration d’une paix durable ;

      Protection du personnel des Nations Unies

      27.   Assurer la protection du personnel, des installations et du matériel des Nations Unies et la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé ;

      Protection de l’enfance

      28.   Prie la MONUSCO de tenir pleinement compte de la question transversale de la protection de l’enfance dans toutes les activités prévues par son mandat, notamment dans le cadre des programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration et de la réforme du secteur de la sécurité, ainsi que dans celui des interventions conduisant à la séparation d’enfants des groupes armés, de façon à faire cesser et à prévenir les violations et les violences dont sont victimes les enfants, et de continuer de veiller à l’efficacité des mécanismes de surveillance et de communication de l’information sur les enfants et les conflits armés, et mesure le rôle crucial que jouent à cet égard les conseillers pour la protection de l’enfance déployés à la MONUSCO ;

      Genre, violence sexuelle

      29.   Prie la MONUSCO de tenir pleinement compte dans toutes les activités prévues par son mandat de la question transversale du genre et d’aider le Gouvernement congolais et les autres parties prenantes concernées à créer un environnement juridique, politique et socioéconomique propice à assurer la pleine représentation et la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes à tous les niveaux, notamment des personnes rescapées de violences sexuelles et fondées sur le genre, dans le cadre du maintien et de la promotion de la paix et de la sécurité, de la protection des civils, notamment en faisant des réseaux de femmes des partenaires de la protection, de l’appui aux activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration et de réforme du secteur de la sécurité, et de l’appui aux activités de stabilisation, demande à la MONUSCO d’aider le Gouvernement à promouvoir la participation politique pleine, égale, effective et véritable des femmes, notamment en respectant le quota de 30 % fixé par la Constitution, et mesure le rôle crucial des conseillers pour la protection des femmes de l’Organisation des Nations Unies déployés à la MONUSCO ;

      30.   Réaffirme qu’il faut d’urgence traduire en justice tous les auteurs de violations du droit international humanitaire et demande à la MONUSCO d’accélérer la mise en œuvre coordonnée des dispositifs de suivi, d’analyse et de communication de l’information sur les violences sexuelles dans les situations de conflit et d’après conflit ;

Accès et appel humanitaires

      31.   Rappelle toutes ses résolutions sur la protection du personnel humanitaire et du personnel médical, notamment les résolutions 2439 (2018) et 2286 (2016), et enjoint à toutes les parties d’autoriser et de faciliter, conformément aux dispositions du droit international applicables et aux principes humanitaires, la libre circulation du personnel, du matériel et des fournitures humanitaires, dans de bonnes conditions de sécurité et sans entrave et sans délai, et l’acheminement rapide de l’aide humanitaire vers les populations qui en ont besoin, en particulier les réfugiés et les déplacés, sur l’ensemble du territoire congolais ;

      32.   Demande aux États Membres et aux organisations internationales et régionales de répondre rapidement aux besoins humanitaires définis dans le plan de réponse humanitaire en augmentant leurs contributions et en veillant à ce que tous les engagements pris soient pleinement honorés dans les délais prescrits ;

      33.   Souligne qu’il importe de maintenir un appui et un engagement internationaux, sur les plans financier et technique et des dons en nature, afin d’endiguer rapidement les épidémies de maladies infectieuses et demande à toutes les entités compétentes du système des Nations Unies de coordonner efficacement leurs interventions face aux épidémies d’Ebola, de COVID-19 et autres, conformément à leurs responsabilités et leurs mandats respectifs ;

Régime de sanctions

      34.   Demande à la MONUSCO de surveiller l’application de l’embargo sur les armes visé au paragraphe 1 de la résolution 2293 (2016), en coopération avec le Groupe d’experts créé par la résolution 1533 (2004), et en particulier d’observer et de signaler les mouvements de personnel militaire, d’armes ou de matériel connexe à travers la frontière orientale de la République démocratique du Congo, en recourant notamment, comme indiqué dans la lettre du Président du Conseil en date du 22 janvier 2013 (S/2013/44), à des moyens de surveillance tels que des systèmes de drones aériens, saisir, collecter, enregistrer et détruire les armes ou le matériel connexe introduits dans le pays en violation des mesures imposées par le paragraphe 1 de la résolution 2293 (2016), et d’aider le Groupe d’experts et d’échanger tous renseignements utiles avec lui ;

Efficacité de la mission et sûreté et sécurité des soldats de la paix

      35.   Prie le Secrétaire général de doter la MONUSCO des moyens d’action dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat dans des conditions de sécurité complexes marquées notamment par des menaces asymétriques contre son personnel, et de faire en sorte que tous les soldats de la paix sur le terrain aient la motivation, les capacités et le matériel nécessaires pour remplir efficacement leur mission en toute sécurité, prie en outre le Secrétaire général, les États Membres et le Gouvernement congolais de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir au personnel de la MONUSCO un niveau optimal de sûreté et de sécurité, conformément à la résolution 2518 (2020) et dans le respect des principes relatifs à la vaccination contre la COVID‑19 du personnel en tenue sur le théâtre des opérations et avant le déploiement, conformément aux directives et aux meilleures pratiques de l’Organisation des Nations Unies, afin d’améliorer la sécurité des soldats de la paix, note avec préoccupation les risques graves que les violations de l’Accord sur le statut des forces peuvent représenter pour la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies affecté à des opérations de maintien de la paix, rappelle qu’il incombe au premier chef à l’État hôte d’assurer la sûreté et la sécurité du personnel et des biens des Nations Unies, souligne qu’il importe d’avoir une bonne communication entre les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et le gouvernement hôte afin d’établir la confiance et la compréhension mutuelles et prie le Secrétaire général d’appliquer les dispositions de la résolution 2589 (2021), aux fins de l’établissement des responsabilités en ce qui concerne les crimes commis contre les soldats de la paix ;

      36.   Prie également le Secrétaire général de mettre en œuvre les activités suivantes dans la planification et la conduite des opérations de la MONUSCO, dans les limites de son mandat et de sa zone d’opérations et conformément aux directives et réglementations existantes de l’ONU ainsi qu’au paragraphe 44 de la résolution 2612 (2021), prie en outre la MONUSCO d’appliquer les dispositions du paragraphe 45 de la résolution 2612 (2021) et les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police d’appliquer les dispositions des paragraphes 46 et 47 de la résolution 2612 (2021), et prend note de la stratégie environnementale pour les opérations de paix du Département de l’appui opérationnel (phase II), qui met l’accent sur une bonne gestion des ressources et un héritage positif de la Mission, et fixe pour objectif une utilisation accrue des énergies renouvelables dans les missions afin de renforcer la sûreté et la sécurité, de réaliser des économies, d’offrir des gains d’efficacité et de profiter à la Mission ;

      37.   Prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de continuer à prendre des mesures appropriées pour prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles, notamment la vérification des antécédents de tous les membres du personnel et l’organisation d’une formation de sensibilisation avant et pendant le déploiement, de faire en sorte que les membres de leurs contingents qui se livreraient à de tels actes aient à en répondre pleinement, y compris par l’ouverture rapide d’enquêtes sur toutes les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles, par les pays fournissant des contingents ou du personnel de police, pour en poursuivre les auteurs, rapatrier leurs unités lorsqu’il existe des preuves crédibles qu’elles ont commis des actes d’exploitation et d’atteintes sexuelles de manière généralisée ou systématique et pour informer rapidement et intégralement l’Organisation des Nations des mesures prises ;

Stratégie de retrait

      38.   Prend note de l’appel lancé par le Gouvernement congolais de revoir le plan de transition de la MONUSCO et encourage l’ONU et le Gouvernement congolais, de concert avec la société civile, d’établir les mesures concrètes et réalistes à prendre, en priorité, pour créer les conditions de sécurité minimales permettant le retrait responsable et durable de la MONUSCO ;

      39.   Demande à la MONUSCO, à l’équipe de pays des Nations Unies et à d’autres entités des Nations Unies présentes en République démocratique du Congo de renforcer l’intégration et la coopération en vue de prendre les mesures concertées prioritaires recensées dans le plan de transition et de permettre à l’équipe de pays des Nations Unies d’intensifier les programmes en prévision du retrait de la MONUSCO, notamment par l’élaboration d’une stratégie cohérente de mobilisation des ressources, et engage la communauté internationale et les donateurs à appuyer le renforcement des activités et des programmes de l’équipe de pays des Nations Unies et des autres entités des Nations Unies présentes en République démocratique du Congo, y compris les activités de consolidation de la paix ;

      40.   Demande également à la MONUSCO de collaborer étroitement avec l’équipe de pays des Nations Unies pour recenser les moyens de combler les éventuels déficits de capacités afin de préparer le retrait de la MONUSCO et de préciser les rôles et responsabilités de toutes les parties prenantes du système des Nations Unies en application de la résolution 2594 (2021), souligne qu’il importe de transférer progressivement les tâches de la MONUSCO au Gouvernement congolais, à l’équipe de pays des Nations Unies et aux autres parties prenantes concernées, selon que de besoin et dans les limites des mandats et des ressources disponibles, afin de permettre le retrait responsable et durable de la MONUSCO et prie le Secrétaire général, selon qu’il conviendra, de mettre un terme aux tâches liées à l’appui à la stabilisation et au renforcement des institutions de l’État en République démocratique du Congo et aux réformes de la gouvernance et de la sécurité clés, qui peuvent être assumées de manière responsable et durable par les autres parties prenantes, et de rationnaliser la MONUSCO en conséquence ;

      41.   Souligne que, dans les contextes de transition, une communication stratégique en amont, y compris des activités de communication conjointes entre la MONUSCO et les autorités congolaises, peut contribuer à créer des conditions propices à la reconfiguration en douceur de la présence de l’ONU et demande à la MONUSCO et aux partenaires concernés de continuer d’envisager comment accompagner les programmes de Radio Okapi dans le contexte de la transition de la MONUSCO ;

      42.   Souligne également que les activités de la MONUSCO devraient viser à ramener la menace posée par les groupes armés nationaux et étrangers à un niveau qui puisse être géré par les forces de sécurité congolaises et qui permette à la MONUSCO de se retirer de manière progressive, responsable et durable, en tenant compte des progrès accomplis concernant les jalons à atteindre et les indicateurs énoncés dans le plan de transition, ainsi que de la situation sur le terrain;

Rapports du Secrétaire général

      43.   Prie le Secrétaire général de lui présenter tous les trois mois un rapport comportant :

      –     des informations sur la situation en République démocratique du Congo, notamment les progrès accomplis dans le renforcement des institutions de l’État et dans la mise en œuvre des principales réformes en matière de gouvernance et de sécurité ;

      –     des informations, comprenant des indicateurs de performance qualitatifs, sur l’exécution du mandat de la MONUSCO, y compris sa mission de protection des civils, la coopération entre les forces de sécurité de la région, la performance de la MONUSCO, notamment les opérations de sa brigade d’intervention, la constitution de la police et de la force, et la contribution des activités de la Mission à la réalisation de ses tâches prioritaires visées au paragraphe 24, les problèmes et obstacles rencontrés par la Mission dans cette entreprise, sur la base des données recueillies et analysées au moyen du Système complet de planification et d’évaluation de la performance, l’application par la Mission du cadre intégré de responsabilité et de gestion de la performance dans les missions de maintien de la paix et d’autres outils de planification stratégique et de mesure des résultats permettant de présenter l’impact et la performance globale de la Mission, y compris des informations sur les avertissements non déclarés, le refus de participer à des patrouilles ou d’organiser des patrouilles et les effets de ces actes sur la Mission, et le traitement des cas déclarés de mauvaise performance ;

      –     des informations sur les mesures prises par la MONUSCO en matière de communication stratégique concernant les activités prescrites ;

      –     des informations sur les efforts visant à trouver des ressources suffisantes et la progression de l’application par les organismes spécialisés, fonds et programmes des Nations Unies des mesures concertées prioritaires énumérées dans le plan de transition ;

      –     des informations sur le transfert progressif des tâches de la MONUSCO au Gouvernement congolais, à l’équipe de pays des Nations Unies et aux autres parties prenantes, notamment, le cas échéant, la suppression des tâches, comme demandé au paragraphe 40 ;

      –     des informations tous les six mois sur les progrès accomplis dans la réalisation des jalons et indicateurs énoncés par le Gouvernement et l’Organisation des Nations Unies dans le plan de transition ;

et prie également le Secrétaire général de faire figurer une analyse des questions de genre dans tous les rapports qui lui sont destinés ;

      44.   Prie le Secrétaire général de lui présenter, une fois que l’examen conjoint du plan de transition pour la MONUSCO sera achevé et au plus tard en juillet 2023, des options pour adapter la future configuration des composantes civile, policière et militaire de la MONUSCO et concernant la configuration future des entités des Nations Unies dans le pays, au-delà du mandat actuel de la MONUSCO, en tenant compte du rôle de la MONUSCO par rapport à la Force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est et d’autres initiatives internationales, régionales et bilatérales existantes à l’appui de la République démocratique du Congo ;

      45.   Prie également le Secrétaire général de lui présenter, tous les six mois, en coordination avec son envoyé spécial pour la région des Grands Lacs et sa représentante spéciale pour la République démocratique du Congo, un rapport sur le respect des engagements pris dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région et sur ses liens avec la situation en matière de sécurité dans la région des Grands Lacs ;

      46.   Décide de rester activement saisi de la question.

Texte du projet de résolution (S/2022/964)

      Le Conseil de sécurité,

      Rappelant ses précédentes résolutions et les déclarations de sa présidence concernant la République démocratique du Congo,

      Constatant que la situation en République démocratique du Congo demeure une menace pour la paix et la sécurité internationales dans la région,

      Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

      1.    Redit que les mesures énoncées au paragraphe 1 de la résolution 1807 (2008) continuent de s’appliquer à toutes les personnes et entités non gouvernementales menant des activités sur le territoire de la République démocratique du Congo ;

      2.    Décide que l’obligation de notification visée au paragraphe 5 de la résolution 1807 (2008) ne s’appliquera plus ;

      3.    Prie le Gouvernement de la République démocratique du Congo de lui présenter, le 31 mai 2023 au plus tard, un rapport confidentiel faisant état des mesures qu’il aura prises pour assurer en toute sûreté et efficacité la gestion, l’entreposage, le marquage, la surveillance et la sécurité des stocks nationaux d’armes et de munitions et pour lutter contre le trafic et le détournement des armes ;

      4.    Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a indiqué avoir voté pour le renouvellement de la MONUSCO, en rappelant que son pays est le premier contributeur de la Mission.  Le texte rappelle que la protection des droits humains demeure une composante du mandat de la MONUSCO, a-t-il relevé, en soulignant l’importance de lutter contre la désinformation dans le pays.  Le représentant a aussi rappelé que le texte souligne l’importance pour la Mission de protéger la ville de Goma.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a déclaré que la MONUSCO, qui évolue dans un environnement difficile, est un élément clef des efforts de stabilisation dans le pays.  La protection des droits de l’homme demeure une composante essentielle du mandat de la Mission, a-t-elle ajouté.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a indiqué avoir appuyé la prorogation du mandat de la MONUSCO avant de saluer un texte concis se concentrant sur les problèmes existants.  « Il s’agit d’un moment décisif pour la RDC qui fait face à des difficultés dans l’est », a-t-elle déclaré.  Cette dernière a cependant regretté les lacunes de ce texte, en dénonçant la pratique consistant à confier des tâches d’ordre secondaire de maintien de la paix alors que nous sommes face à des situations de conflit armé.  Illustrant son propos, elle a estimé que la surveillance des droits humains ou les analyses fondées sur le genre, certes importantes, ne doivent pas édulcorer les tâches urgentes de maintien de la paix et de la sécurité.  La représentante a aussi appuyé la résolution sur la levée des exigences de notification, en rappelant que la Fédération de Russie n’a cessé de plaider en faveur de cette clause parce qu’elle estime que les sanctions ne doivent pas être contreproductives. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a dit avoir appuyé la résolution sur la levée des exigences de notification tout en regrettant que ce thème ait été découplé d’un débat sur la pertinence du régime de sanctions.  Il a rappelé que le régime de sanctions est un outil fondamental des efforts du Conseil pour parvenir à la paix et à la sécurité en République démocratique du Congo (RDC).  Le délégué a salué la clarté de la République démocratique du Congo (RDC) quant aux motivations de la levée des exigences de notification.

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé qu’au fil des ans, la MONUSCO s’est acquittée de son mandat en RDC et que, dans les circonstances sécuritaires actuelles dans l’est de la RDC, le renouvellement de son mandat est propice pour garantir la paix et la sécurité.  Il a toutefois estimé qu’il est possible d’améliorer le fonctionnement des opérations de maintien de la paix de l’ONU en Afrique, qui ont des mandats trop vastes à son avis, en leur allouant des ressources suffisantes.  Le délégué s’est donc déclaré favorable à un examen complet de ces mandats pour que les tâches dépassant les capacités des missions relèvent de nouveau de la responsabilité des gouvernements et des équipes de pays.  Il a en conclusion salué la levée des exigences de notification pour l’importation d’armes par le Gouvernement congolais.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a voté en faveur des deux résolutions en tant que marque de soutien à la MONUSCO et expression du plaidoyer pour une réelle adéquation entre l’action du Conseil et les aspirations légitimes du peuple congolais à la sécurité.  La levée des exigences de notification préalable permettra de démanteler les entraves à la capacité de la RDC à répondre aux groupes armés « qui n’ont aucune contrainte et ne respectent aucun embargo », a-t-il dénoncé.  Ce Conseil a fini par comprendre que restreindre la marge de manœuvre d’un Gouvernement démocratiquement élu, qui fait face à des défis sécuritaires de grande ampleur, n’est pas une bonne chose, s’est félicité le délégué.  Il a encouragé les membres du Conseil à continuer à dépasser leurs différences et leurs intérêts afin de soutenir les dynamiques et le processus de paix en cours et à préserver l’intégrité territoriale et la souveraineté de la RDC. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a espéré que la résolution sur le mandat de la MONUSCO permettra d’établir un dialogue solide avec la République démocratique du Congo.  Face à la situation dans l’est du pays, elle a estimé que la levée de l’exigence de notification contenue dans la résolution 2667 permettra d’aider le Gouvernement à restaurer l’autorité dans l’est du pays pour mettre fin au cycle de violence.  La représentante a, enfin, encouragé la RDC à réformer le secteur de la sécurité afin d’établir des forces de sécurité « responsables et professionnelles ».

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a estimé que la MONUSCO joue un rôle vital pour la protection des civils, l’acheminement humanitaire et le soutien au Gouvernement de la RDC.  Elle a noté que le mandat de la MONUSCO évoque le besoin de faciliter le commerce de premières nécessités et la lutte contre les groupes armés.  Face aux inondations qui ont frappé la RDC la semaine dernière, les pires depuis 2019, la représentante a encouragé le Conseil de sécurité à se pencher sur les conséquences néfastes des changements climatiques, notamment en recueillant des données de qualité et obtenant des informations précises.  Elle a, à cet égard, regretté que le mandat actuel de la MONUSCO ne contienne pas de mesures sur ce point.  Elle s’est, enfin, félicitée de la levée de l’exigence de notification pour que le Gouvernement puisse relever les défis auxquels il est confronté.

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a indiqué que le mandat robuste de la Mission en ce qui concerne la protection des civils permettra de gagner la confiance de la population.  Il a mentionné les autres éléments du mandat, dont l’appui au processus de désarmement, démobilisation et réintégration.  Ce mandat, s’il est mis en œuvre, permettra d’aider à stabiliser le pays.  Il a aussi espéré que cette résolution permettra une meilleure coordination entre le Conseil, la RDC et les acteurs régionaux au service de la stabilisation du pays.

M. SOLOMON KORBIEH (Ghana) a souligné l’importance de ce renouvellement, tout en notant que certaines demandes, notamment un appui renforcé à la Communauté d’Afrique de l’Est, n’ont pas été satisfaites.  Il a appelé à la pleine mise en œuvre du mandat de la MONUSCO, en espérant que les décisions futures du Conseil sur ce sujet seront empreintes de « sagesse ».  Il a noté le consensus autour de la levée de l’obligation de notification, en rappelant que le Gouvernement congolais doit être libéré de toute entrave l’empêchant de s’acquitter de ses lourdes responsabilités en matière de promotion des droits humains et de défense des civils.  Nous espérons que les groupes armés comprendront la détermination de la communauté internationale, a conclu le délégué.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: « tant que les filles afghanes seront exclues de l’école, nous resterons dans l’impasse », déclare la Cheffe de la MANUA au Conseil de sécurité

9227e séance – matin
CS/15153

Afghanistan: « tant que les filles afghanes seront exclues de l’école, nous resterons dans l’impasse », déclare la Cheffe de la MANUA au Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité a tenu, aujourd’hui, une réunion d’information sur la situation en Afghanistan, situation marquée par un déni du droit à l’éducation des filles.  Cette interdiction, promulguée progressivement avec d’autres par les Taliban depuis leur prise du pouvoir en août 2021, a été unanimement condamnée par la vingtaine d’intervenants -dont la Ministre norvégienne des affaires étrangères- qui se sont exprimés après avoir entendu les exposés de la Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), Mme Roza Otunbayeva, d’une activiste afghane et du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence.  Si la crise humanitaire frappant près de 30 millions d’Afghans a été largement évoquée par M. Martin Griffiths, et si les délégués se sont inquiétés de la sécurité de la population et des diplomates, c’est bien le sort des femmes qui a été au cœur de la discussion ainsi que la nécessité de maintenir un dialogue « réel » et « pragmatique » avec les autorités de facto, « même si elles ont pris le pouvoir par la force ».

Il a été répété que la communauté internationale doit maintenir ce dialogue notamment pour que les autorités de facto comprennent que la marginalisation des femmes et des filles prive le pays d’indispensables forces vives économiques et sociales.  Les préoccupations ont été réitérées en fin de séance par les États-Unis et le Royaume-Uni qui ont repris la parole pour condamner la décision des autorités de facto, tout juste annoncée, d’interdire aux filles l’accès à l’université.  Les Émirats arabes unis ont demandé à Mme Otunbayeva de tenir plus amplement informés les membres du Conseil de cette décision « inquiétante ». 

S’appuyant sur le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la question à l’examen, Mme Otunbayeva a indiqué qu’en raison de la prise de décrets toujours plus préjudiciables aux femmes, ces dernières ne peuvent plus, depuis le 9 novembre, se rendre dans la plupart des parcs publics ni dans les bains publics ou les gymnases.  « Leur espace social se restreint désormais autant que leur espace politique », a-t-elle déploré.  La Représentante spéciale a noté que ces décisions, qui ont été critiquées par l’ensemble du monde musulman, sont impopulaires parmi les Afghans et même au sein des dirigeants Taliban.  Selon elle, tant que les filles afghanes seront exclues de l’école « nous resterons dans une sorte d’impasse ».  Se disant convaincue que les échanges avec les Taliban devront se poursuivre « sous une forme ou une autre », Mme Otunbayeva a rappelé aux membres du Conseil que les Afghanes demandent un soutien accru de la communauté internationale et « pensent à juste titre que ce n’est qu’en discutant avec les autorités de facto qu’un changement positif pourra advenir ». 

Au nom de la société civile, Mme Mahbouba Seraj, de l’organisation « Afghan women’s rights activist », a témoigné de la dégradation de la situation des femmes afghanes depuis sa dernière intervention devant le Conseil il y a un an.  Les filles ne sont toujours pas autorisées à se rendre à l’école et les Taliban ont rétabli l’obligation pour les femmes de couvrir leur visage en public et l’interdiction de sortir sans un gardien masculin, a-t-elle relaté.  Parlant d’un effacement des femmes de la vie publique afghane, Mme Seraj s’est alarmée de ce recul complet en matière d’autonomisation et d’émancipation.  Assurant avoir entendu le message de la société civile, Mme Anniken Huitfeldt, Ministre norvégienne des affaires étrangères, s’est émue de ce que l’Afghanistan soit le seul pays au monde où les filles se voient refuser l’accès à l’éducation.  Pour elle, le Conseil de sécurité doit s’appuyer sur la condamnation unanime de cette privation pour exhorter les Taliban à faire machine arrière.  « Ensemble, nous devons communiquer clairement nos attentes aux Taliban », a-t-elle plaidé.  Elle aussi a recommandé le maintien du dialogue avec eux, « même s’ils ont pris le pouvoir par la force », car il est nécessaire de parler à ceux qui sont au pouvoir « à notre manière et en nous gardant d’octroyer une once de légitimité aux Taliban ». 

De son côté, le représentant ouzbek a signalé que le Président Mirziyoyev a récemment proposé de créer, sous les auspices de l’ONU et dans le cadre de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie, un groupe de négociation international de haut niveau sur le règlement de la question afghane.  À l’appui de cette initiative, il a indiqué que grâce au dialogue avec les Taliban, son pays avait réussi à faire ouvrir des écoles pour filles dans les provinces du nord.  « Nous devons maintenir le dialogue et la coopération en faisant preuve de patience car ce n’est qu’en collaborant avec le Gouvernement par intérim que nous pourrons exercer une influence louable », a déclaré, de son côté, la Chine, qui a plaidé pour la levée des sanctions afin de faciliter la distribution de l’aide humanitaire.  L’Iran, dans le même sens, a demandé que les avoirs gelés soient réinjectés dans l’économie afghane pour relancer la croissance. 

Sur ce volet économique, la Représentante spéciale a noté la réduction de la corruption de l’État, laquelle peut expliquer que les autorités de facto aient annoncé la collecte de plus de revenus au cours des 10 premiers mois de 2022 que « la République » n’en a collectés en 2021 et 2020.  Mme Otunbayeva a souligné que les Taliban ont également réussi à maintenir la stabilité macroéconomique, puisqu’après une forte détérioration de la monnaie il y a un an, « les exportations ont atteint un niveau historique d’environ 1,7 milliard de dollars cette année, contre environ 700 millions de dollars sous le régime précédent ».  La MANUA, a-t-elle dit, est en contact régulier avec des acteurs et des organisations du secteur privé, notamment des chambres de commerce féminines, pour tenter d’accroître les investissements.  Comme l’a reconnu M. Griffiths, ces progrès économiques ne rendent pas moins aigüe la crise humanitaire.  « Nous sommes confrontés à un défi financier de taille à l’aune de 2023, avec un besoin de 4,6 milliards de dollars pour répondre de manière adéquate aux besoins humanitaires du pays », a-t-il notamment indiqué par visioconférence aux membres du Conseil. 

Pour ce qui est de la situation en matière de sécurité, les intervenants ont condamné les attentats perpétrés contre les ambassades russe et pakistanaise, en pointant du doigt les agissements de l’État islamique au Khorassan, le « pire groupe terroriste opérant dans la région » d’après le représentant du Pakistan.  De manière générale, les autorités de facto, désireuses d’obtenir une reconnaissance internationale, ont été sommées d’assurer la sécurité de la population afghane et la stabilité à travers tout le pays.  S’agissant de la lutte contre les stupéfiants, le rapport du Secrétaire général note que le programme de développement alternatif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a permis de venir en aide à 10 601 agriculteurs -dont 30% de femmes- dans les provinces du Helmand et de Kandahar. 

LA SITUATION EN AFGHANISTAN

Déclarations

Mme ROZA OTUNBAYEVA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a déploré l’absence d’opposition politique visible significative aux Taliban, ceux-ci pouvant considérer cet état de fait comme un soutien.  Les politiciens exilés sont bien sûr des critiques virulents, mais leurs prises de position sont de moins en moins entendues par la population afghane, a-t-elle ajouté, les Taliban rejetant toute forme de dialogue intra-afghan en affirmant que leur gouvernement est suffisamment représentatif.  La représentante spéciale a assuré que, dans ce contexte, la Mission s’efforce de faire pression à tous les niveaux afin qu’une consultation ait lieu sur cette question de la représentativité des autorités de facto.  Nous continuons également à interagir avec de nombreux acteurs de la société civile non talibane, a-t-elle dit, et avec des personnalités politiques en Afghanistan, et ce, « parce que nous pensons que la seule voie à suivre pour le pays passe par une politique plus pluraliste, où tous les Afghans, en particulier les femmes et les minorités, se verraient représentés et auraient un véritable poids dans la prise de décision, ce qui n’est clairement pas le cas actuellement ».

Mme Otunbayeva a ensuite déploré la répression des voix de l’opposition, une situation d’autant plus regrettable que la politique sociale des Taliban est de plus en plus dure.  Nous avons vu paraître une multitude de décrets particulièrement préjudiciables aux femmes, a-t-elle poursuivi, ces dernières ne pouvant plus, depuis le 9 novembre, se rendre dans la plupart des parcs publics, les bains publics et les gymnases.  Leur espace social se restreint désormais autant que leur espace politique, a-t-elle signalé, ajoutant que la situation est telle dans l’enseignement secondaire « que dans deux ans il n’y aura plus de filles susceptibles d’entrer à l’université ».  Mme Otunbayeva a indiqué que ces décisions sont extrêmement impopulaires parmi les Afghans et même au sein des dirigeants talibans, décisions qui ont été d’ailleurs critiquées par l’ensemble du monde musulman.

La Représentante spéciale a également signalé que, le 13 novembre, les Taliban ont fait savoir que le chef taliban Haibatullah Akhunzada avait ordonné que les juges appliquent la peine capitale et les châtiments corporels, connus sous le nom de hudūd et qisās, « si les conditions sont remplies et conformément à la charia ».  La MANUA peut attester que ces châtiments ont commencé d’être infligés dès la prise de pouvoir des Taliban et que, depuis l’annonce de l’instruction du chef taliban, « ils sont devenus de plus en plus publics ».  Elle a ainsi indiqué que, le 7 décembre, la première exécution publique autorisée par la justice, apparemment en application de la peine de qisās, a eu lieu pour un meurtre commis en 2017.  « L’ONU critique uniformément tous les pays qui appliquent la peine de mort et les châtiments corporels », a déclaré Mme Otunbayeva, avant d’aborder la situation économique en Afghanistan.

Sur ce front, elle a noté avec satisfaction que si le niveau de corruption a baissé au plan général, à l’échelle local elle augmente de manière insidieuse.  Cependant, la réduction significative de la corruption de l’État peut expliquer que les autorités de facto aient annoncé la collecte de plus de revenus au cours des  10 premiers mois de 2022 que « la République » n’en a collectés en 2021 et 2020, malgré une contraction économique de 20% en 2021, a-t-elle encore expliqué.  Selon elle, grâce à ces revenus, et en réduisant les coûts du gouvernement, les Taliban ont réussi à financer leur budget de fonctionnement et ont indiqué qu’ils disposent de ressources pour lancer leurs projets de développement.  Mme Otunbayeva a en outre souligné que les Taliban ont également réussi à maintenir la stabilité macroéconomique, puisqu’après une forte détérioration de la monnaie il y a un an, « les exportations ont atteint un niveau historique d’environ 1,7 milliard de dollars cette année, contre environ 700 millions de dollars sous le régime précédent ».

La Représentante spéciale a ensuite précisé que les autorités afghanes de facto mettent en œuvre une stratégie économique axée sur l’autosuffisance, en investissant dans des secteurs tels que l’agriculture, l’irrigation, les infrastructures, la gestion de l’eau, l’exploitation minière et les industries, « qui constituent la base de la croissance économique ».  La MANUA est en contact régulier avec des acteurs et des organisations du secteur privé, notamment des chambres de commerce féminines, a ajouté Mme Otunbayev, le principal obstacle à un accroissement des investissements étant le coût élevé des transactions financières internationales compte tenu de la réticence des banques internationales à faire des affaires avec l’Afghanistan, « ainsi que l’incertitude politique ».

Sur le volet humanitaire, la Représentante spéciale a noté que, si la gestion économique des Taliban a été plus efficace que prévu, il faut aussi reconnaître que les donateurs internationaux continuent de nourrir plus de la moitié de la population ».  À cet égard, elle a fait remarquer que les versements en espèces nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire, « qui seront mentionnés par M. Griffiths », injectent indirectement des liquidités dans l’économie.  « Sans cette aide, le tableau en Afghanistan pourrait être bien plus sombre », a-t-elle reconnu.  Par ailleurs, elle a relevé qu’il est prouvé que les Taliban appliquent leur interdiction de la culture de l’opium et d’autres stupéfiants annoncés en avril, notamment en détruisant des champs.

Pour Mme Otunbayeva, ces évolutions économiques positives pourraient ne pas durer si les véritables préoccupations des Afghans ne sont pas prises en compte.  C’est pourquoi, entre le 11 octobre et le 8 novembre, la MANUA a mené des consultations dans 12 provinces qui ont été sélectionnées pour assurer une représentation de toutes les communautés et de tous les secteurs clefs de la société afghane, a-t-elle dit.  Nous nous sommes entretenus avec 519 participants, dont 189 femmes et 83 représentants des autorités de facto, les préoccupations exprimées par la population concernant l’interdiction de l’éducation des filles, le manque d’infrastructures sanitaires, les problèmes de prise en charge de la santé mentale, la pauvreté et l’insécurité économique ainsi que la discrimination des minorités ethniques, a-t-elle indiqué.  Poursuivant, la Représentante spéciale a signalé que les Afghans sont également frustrés par la communauté internationale, dont ils attendent qu’elle s’investisse davantage à travers des projets pérennes de développement plutôt que des dons.

Concluant son intervention, Mme Otunbayeva a considéré que tant que les filles seront exclues de l’école et que les autorités de facto continueront à ignorer les préoccupations fondamentales de la communauté internationale, « nous resterons dans une sorte d’impasse ».  Elle a indiqué que la MANUA va continuer de réfléchir en interne sur ce qui s’est avéré efficace dans la mise en œuvre de son mandat « et sur ce qui n’a pas marché ».  Cela débouchera, a-t-elle annoncé, sur des recommandations concernant son futur mandat.  « Nous sommes en tout cas déjà convaincus que les échanges avec les autorités de facto devront se poursuivre sous une forme ou une autre. »  Les Afghanes, en effet, demandent un soutien continu de la part de la communauté internationale et pensent à juste titre que ce n’est qu’en discutant avec les autorités de facto qu’un changement positif pourra advenir », a déclaré Mme Otunbayeva.

Illustrant l’ampleur des privations et souffrances de la population afghane, M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a rappelé que 97% des Afghans vivent dans la pauvreté, deux tiers de la population ont besoin d’aide humanitaire pour survivre, 20 millions de personnes sont confrontées à une faim aiguë, la moitié de la population a un besoin urgent d’accès à l’eau potable et à l’assainissement et 1,1 million d’adolescentes restent interdites d’école.  Près de 7 millions de ressortissants afghans restent dans les pays voisins, y compris en tant que réfugiés, et plus de 3,4 millions de personnes déplacées à cause du conflit doivent encore trouver des solutions, a ajouté M. Griffiths avant de rappeler que l’Afghanistan doit également faire face à une aggravation de la crise climatique.  Néanmoins, il s’est félicité des progrès réalisés grâce à trois facteurs principaux, en citant d’abord une augmentation massive de la réponse rapide et généreuse des donateurs, qui a permis d’offrir une assistance à 25 millions de personnes dans les 34 provinces.  Les autres progrès sont liés à la facilité de trésorerie de l’ONU, qui a rapporté au moins 1,8 milliard de dollars cette année pour soutenir les opérations humanitaires, et à l’exception humanitaire adoptée par le Conseil de sécurité en décembre 2021 dans la résolution 2615. 

M. Griffiths a expliqué que l’élément clef de l’exception humanitaire réside dans le fait que la fourniture de fonds ou d’actifs à des personnes ou entités désignées est autorisée lorsque cela est nécessaire pour la programmation humanitaire et les besoins humains fondamentaux.  Il a témoigné que cette couverture juridique a été essentielle pour permettre aux humanitaires de travailler et aux partenaires commerciaux de traiter et verser des fonds aux ministères de tutelle.  Il a aussi précisé que les agences des Nations Unies en Afghanistan continuent d’identifier des moyens de renforcer les interventions d’une manière responsable qui préserve l’espace humanitaire.  Il a félicité le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour son récent accord de partenariat avec le Ministère des réfugiés et du rapatriement en faveur des populations touchées, en expliquant que cet accord doit permettre de garantir que les autorités de facto n’interfèrent pas dans les activités humanitaires du HCR ou de ses partenaires.  Il a assuré que l’exception humanitaire n’est en aucun cas une carte blanche pour permettre aux humanitaires d’opérer sans contrôle. 

Citant trois défis que doivent relever les humanitaires sur le terrain, le Chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a cité en premier lieu les ingérences et restrictions de routine, dont la détention de personnel humanitaire, les tentations d’influencer ou de contrôler la réponse humanitaire et la restriction à la liberté de mouvement et à la participation des femmes à l’action humanitaire.  Il s’est particulièrement inquiété de ce dernier problème, qui a des conséquences sur l’accès des femmes aux services.  Il a cité à cet égard des informations inquiétantes relatives à la province de Helmand, selon lesquelles des femmes ont été empêchées d’entrer dans des établissements de santé.  Or, la qualité de l’aide humanitaire efficace repose sur la participation significative des femmes, a-t-il rappelé.

Le deuxième défi qu’il a cité est la poursuite de la réduction des risques bancaires.  M. Griffiths a précisé que l’exception humanitaire a été une condition nécessaire mais insuffisante pour que les banques reprennent complètement les transactions internationales à destination et en provenance de l’Afghanistan, compte tenu de l’éventail de facteurs non liés aux sanctions qu’elles prennent en compte pour déterminer si elles doivent faciliter une transaction.  Tout en notant qu’il y a moins de problèmes de transfert de fonds vers l’Afghanistan qu’avant l’obtention de l’exception, M. Griffiths a regretté que ce problème sérieux demeure. 

Troisièmement, a-t-il enfin expliqué, « nous sommes confrontés à un défi financier de taille à l’aune de 2023, avec un besoin de 4,6 milliards de dollars pour répondre de manière adéquate aux besoins humanitaires du pays ».  Il s’est de ce fait inquiété des conséquences de la diminution du financement des opérations en Afghanistan et, parallèlement, a regretté l’insuffisance de progrès dans le redémarrage des initiatives de développement nécessaires de toute urgence, sans lesquelles la situation humanitaire risque de se détériorer davantage.  Il a rappelé que l’action humanitaire ne suffit pas pour sauver des vies si les partenaires au développement ne sont pas présents. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde), en tant que Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1988 (2011), a indiqué que, selon le dernier rapport de l’Équipe de surveillance du Comité, 41 personnes sanctionnées occupent des postes ministériels et des postes de direction dans la nouvelle Administration talibane, un nombre qui s’élève à ce jour à plus de 60.  L’Équipe de surveillance a également souligné que les relations entre les Taliban et Al-Qaida sont restées étroites et marquées par la présence, tant en Afghanistan que dans la région, des principaux dirigeants d’Al-Qaida et de groupes affiliés.  Le 1er août, les États-Unis ont annoncé que le chef d’Al-Qaïda avait été tué fin juillet dans un complexe à Kaboul, mais cela n’a pas encore été confirmé par les Taliban et Al-Qaida, a précisé Mme Kamboj.  L’Administration de Kaboul reste à une écrasante majorité talibane, a-t-elle noté.  Elle a aussi noté les inquiétudes exprimées parce que ce gouvernement est revenu sur les engagements pris avant sa prise de pouvoir et parce que l’on constate une érosion des droits humains, y compris des droits des femmes et des filles, et l’absence de progrès en matière de gouvernance inclusive.

En ce qui concerne la production de stupéfiants en Afghanistan, le rapport de l’Équipe de surveillance indique que la culture du pavot à opium s’est accompagnée d’un boom de la production et du trafic de méthamphétamine.  Il relève aussi que cette culture reste la principale activité économique illicite en Afghanistan.  Malgré un décret publié par les Taliban en avril 2022, interdisant la culture, l’utilisation et le trafic de stupéfiants, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a signalé une augmentation de 32% en 2021 de la culture de l’opium alors qu’en 2022, les prix de l’opium ont grimpé en flèche en raison de l’annonce de l’interdiction de sa culture.

L’Équipe de surveillance a également signalé que l’EILL Khorasan (Daech) demeure la principale menace en Afghanistan et dans la région, comme en témoignent ses attaques régulières contre les États voisins, contre les communautés ethniques et religieuses minoritaires dans le pays ou encore contre des ambassades et le personnel diplomatique.  En outre, l’EIIL (Daech) conserve le potentiel d’attirer dans ses rangs des Taliban et des combattants étrangers désabusés, renforçant ainsi sa capacité à mener des attaques et à s’emparer de territoires dans le pays, ainsi que le potentiel de créer un soi-disant califat islamique dans la région, a mis en garde Mme Kamboj.

Elle a rappelé que l’objectif visé par le Comité 1988, via les sanctions, est d’appuyer un Afghanistan pacifique, stable et prospère en dissuadant le soutien aux entités terroristes et en appuyant les discussions sur la paix et la stabilité.  Une exemption d’interdiction de voyage accordée en avril 2019 à un groupe de Taliban inscrits sur la liste en vue de leur permettre d’engager des discussions sur la paix et la stabilité dans une série de pays a expiré en août 2022, a-t-elle précisé, en expliquant qu’elle n’a pas été prolongée parce que le Comité 1988 n’a pas été en mesure de parvenir à un consensus.  Cependant, le Comité est prêt à envisager des dérogations au cas par cas sur la base des résolutions pertinentes et directives du Comité, a assuré la représentante.

Nous continuons d’espérer que le travail du Comité de 1988 pourra aider à créer un environnement propice à la formation d’un Afghanistan pacifique et stable, libéré de l’emprise du terrorisme et de la drogue, a déclaré la Présidente sortante, en soulignant que les travaux du Comité et de l’Équipe de surveillance sont devenus encore plus essentiels pour contribuer à un tel changement en Afghanistan.  À l’avenir, elle a souligné la nécessité pour les États Membres de soutenir et d’aider davantage les travaux du Comité et de l’Équipe, comme indiqué au paragraphe 1 de la résolution 2255 (2015) et à l’annexe de la résolution 2611 (2021).  Mme Kamboj a salué la décision du Conseil de proroger le mandat des deux organes pour qu’ils continuent à superviser l’application des mesures de sanctions et à soutenir le processus de paix et de réconciliation en Afghanistan.

Mme MAHBOUBA SERAJ, de l’organisation Afghan women’s rights activist, représentante de la société civile, a indiqué que la situation des femmes afghanes avait empiré depuis sa dernière intervention devant le Conseil de sécurité il y a un an.  Elle a relevé que les filles ne sont toujours pas autorisées à se rendre à l’école.  Les Taliban ont également rétabli l’obligation pour les femmes de couvrir leur visage en public et l’interdiction de sortir sans un gardien masculin.  Les femmes « ne peuvent plus se rendre au bureau ou sur leur lieu de travail », a-t-elle informé.  Les mesures prises par les Taliban contre les femmes constituent, à son avis, « un renversement complet de l’autonomisation dont ont bénéficié les femmes afghanes au cours des 20 dernières années ».  Mme Seraj a également attiré l’attention sur la situation des minorités, qui ont été « bannies de la vie publique et sociale en Afghanistan ».

La militante a par ailleurs dénoncé l’impunité avec laquelle les groupes terroristes agissent dans la région.  De l’aveu même de l’ONU, ces entités jouissent d’une plus grande liberté de mouvement en Afghanistan, a-t-elle noté.  Elle a insisté sur les dangers de ces développements pour la société internationale dans son ensemble, faisant un parallèle avec la situation à la fin des années 90.  À ce titre, elle a condamné le silence gardé et la complaisance de la société internationale.

L’oratrice a, enfin, rappelé la gravité de la situation économique et humanitaire.  Notant que 20 millions de personnes sont confrontées à la faim, que 3 millions d’enfants vont être affectés par la malnutrition et que la dette des ménages afghans a été multipliée par 6, elle a estimé que « la majorité de l’Afghanistan vit dans la pauvreté ».  Face à cette situation, elle a exhorté le Conseil de sécurité à continuer de fournir une aide vitale à son peuple.  La communauté internationale doit en outre faire en sorte que l’aide humanitaire ne soit pas détournée, a-t-elle insisté.  Si elle a encouragé les États à discuter avec les Taliban, elle les a implorés de garder à l’esprit les intérêts du peuple afghan.

Mme ANNIKEN HUITFELDT, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, s’est émue de ce que l’Afghanistan soit le seul pays au monde où les filles se voient refuser l’accès à l’éducation.  Pour elle, le Conseil de sécurité doit s’appuyer sur la condamnation unanime de cette privation et ce déni de droit fondamental pour exhorter les Taliban à faire machine arrière.  Ensemble, nous devons communiquer clairement nos attentes aux Taliban, a-t-elle plaidé.  La Ministre a été d’avis qu’il faut maintenir le dialogue avec les Taliban, même s’ils ont pris le pouvoir par la force, car il est nécessaire de parler à ceux qui sont au pouvoir, en le faisant « à notre manière et en nous gardant d’octroyer une once de légitimité aux Taliban ».  Elle a rappelé qu’en début d’année, la Norvège a invité les Taliban à se rendre à Oslo et que « beaucoup ont été surpris et ont même réagi avec colère ».  Elle a dit rester pourtant convaincue que les enjeux en Afghanistan sont trop importants pour que nous fermions les yeux.  Selon Mme Huitfeldt, l’histoire enseigne que personne ne profite d’un pays qui sombre dans la guerre civile ou devient un lieu où prospèrent des groupes terroristes.  Aujourd’hui, l’État islamique représente une menace croissante en Afghanistan, a-t-elle ajouté à ce propos, estimant que si cette menace n’est pas contenue elle se propagera plus largement dans la région et au niveau international.

Ainsi, a-t-elle dit, les Taliban doivent veiller à ce que le territoire afghan ne soit pas utilisé pour planifier ou financer des actes terroristes, ou pour abriter ou entraîner des terroristes.  La Ministre norvégienne a jugé essentiel que le Conseil de sécurité reste uni pour soutenir le peuple afghan et sache se montrer pragmatique et efficace.  Au cours des deux dernières années, la Norvège a été porte-plume sur le dossier afghan au Conseil, a-t-elle rappelé, en soulignant son objectif principal qui était de doter la MANUA d’un mandat couvrant réellement tous les piliers de la Charte des Nations Unies.  Mme Huitfeldt a insisté sur le fait que la MANUA doit à présent traduire en actes internationaux conjoints le mandat fort dont elle est désormais dotée.  Le Conseil doit également continuer d’écouter les voix afghanes, a-t-elle encore demandé.  Enfin, la Ministre a rappelé que l’Afghanistan fait face à un nouvel hiver rigoureux, plus des deux tiers de la population afghane ayant besoin d’une aide humanitaire à court et moyens termes.  « Les Taliban imposent des restrictions aux droits humains en violation des obligations internationales de l’Afghanistan et l’espoir que de nombreux Afghans puissent vivre bientôt dans un pays stable et sûr s’estompe », a-t-elle reconnu.  Elle a conclu en déclarant que si le peuple afghan n’a pas encore perdu tout espoir, le Conseil de sécurité leur doit de ne pas baisser les bras.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté qu’en dépit des engagements pris par les autorités afghanes de facto, le manque de représentativité de la diversité du peuple afghan dans le paysage politique persiste, tant ethnique que sociale, l’inclusion des femmes dans les structures de gouvernance n’évoluant pas.  À son tour, M. Biang a souligné le caractère crucial de l’éducation des filles afghanes et leur accès à l’enseignement secondaire, appelant les autorités de facto à prendre des mesures « quant à l’effectivité du respect de ce droit à l’éducation, en permettant la fréquentation scolaire des filles à tous les échelons ».

Des générations de jeunes garçons afghans, appelés à être les adultes de demain, ne doivent pas grandir en pensant qu’il est normal de mettre les femmes en marge de la société, a-t-il ajouté.  Le représentant gabonais a plaidé pour que la communauté internationale poursuive ses efforts pour faire comprendre aux Taliban que la marginalisation des femmes et des filles, qui représentent une frange importante de la population afghane, prive le pays de véritables acteurs économiques, capables de jouer un rôle moteur dans la croissance.  À cet égard, il a salué les efforts de la MANUA, d’OCHA, de l’équipe de pays des Nations Unies et des organisations non gouvernementales afghanes et internationales, visant la promotion des droits des femmes et leur insertion dans la société.

Après avoir appelé les autorités de facto à intensifier leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme et dans la protection des populations, « qui relèvent de leur responsabilité », M. Biang a invité les donateurs à poursuivre leurs efforts en faveur du relèvement de l’économie afghane.  « Le Fonds d’affectation spéciale, géré par le PNUD, reste une plateforme de financement essentielle pour le Cadre transitoire de coopération des Nations Unies pour l’Afghanistan de 2022 », a-t-il encore souligné.  Il a également condamné tout entrave à l’accès de l’aide et les harcèlements à l’encontre du personnel humanitaire; concluant son intervention en réitérant l’exigence d’un dialogue entre les forces vives afghanes: « un Afghanistan stable, prospère ne peut se construire sans les femmes, ainsi que toutes les autres franges de la société », a-t-il dit.

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que l’Afghanistan est à la croisée des chemins s’agissant de l’édification de la nation afghane.  Il a exhorté les Taliban et la communauté internationale à coopérer pour combattre résolument le terrorisme et éviter que des groupes terroristes reviennent dans le pays.  Son pays étant voisin de l’Afghanistan, le représentant chinois a exhorté la communauté internationale à faire un front uni, à rejeter le deux poids, deux mesures et à éviter la politisation pour que ce pays ne redevienne pas une plaque tournante des mouvements et groupes terroristes.  Il a exhorté les Afghans à se débarrasser de toutes les forces terroristes et à assurer la sécurité des populations et des diplomates.  Il a appelé à faire montre de la plus grande vigilance face à la prolifération des armes et munitions avant d’espérer que la MANUA pourra renforcer sa coopération avec l’Afghanistan pour faire face à ce problème. 

Rappelant que 23,8 millions d’Afghans auront besoin d’aide humanitaire en 2023, soit une hausse de 4 millions par rapport à 2022, le représentant a salué la résolution instaurant une exception humanitaire aux sanctions imposées.  Néanmoins, il a regretté que les obstacles à la distribution de l’aide humanitaire en raison des sanctions unilatérales soient toujours réels en dépit de l’adoption de la résolution 2615.  Le représentant a exhorté les Taliban à entendre les légitimes requêtes de la communauté internationale s’agissant de l’accès aux emplois et à l’éducation pour les femmes en précisant que les Taliban doivent comprendre que cela est essentiel pour la stabilité et les progrès de l’Afghanistan.  « Nous devons maintenir le dialogue et la coopération en faisant preuve de patience car ce n’est qu’en collaborant avec le Gouvernement par intérim que nous pourrons exercer une influence louable » a encore ajouté le représentant chinois.  C’est pourquoi il a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pu trouver un accord sur des dérogations permanentes au régime de sanctions.

Mme AMIERA ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a concédé que, face aux derniers développements et à l’absence de réponse des autorités afghanes de facto aux appels du Conseil, il serait tentant pour la communauté internationale de mettre fin à son engagement et de chercher à isoler le pouvoir afghan.  Cependant, les Émirats arabes unis persistent à penser qu’il n’y a pas d’alternative à un dialogue pragmatique avec les autorités de facto.  L’isolement ne fera que renforcer leurs positions, voire pousser les Taliban à adopter des positions encore plus extrêmes, a-t-elle mis en garde.  Elle a aussi appelé à se concentrer sur les domaines où il est possible d’obtenir des résultats concrets, citant la récente Conférence internationale sur l’éducation des femmes afghanes, qui s’est tenue à Bali, comme exemple de recherche de moyens permettant aux acteurs internationaux d’opérer un réel changement.  À cet égard, elle a salué l’activation du Fonds afghan annoncée en septembre dernier.

Le renouvellement du mandat de la MANUA sera l’occasion pour la communauté internationale de parler d’une seule voix et d’adresser un message clair et ferme aux parties prenantes afghanes, a-t-elle souligné.  Malgré des circonstances sans précédent, la MANUA s’est acquittée sur le terrain de tous les aspects de son mandat, a relevé Mme Alhefeiti, en émettant l’espoir que le Conseil pourra utiliser l’occasion de ce renouvellement pour examiner les forces et faiblesses du mandat, évaluer ce dont la Mission a besoin et éviter la création de fausses dichotomies entre les priorités liées au travail de la Mission.  La représentante a également remarqué que l’Afghanistan est une étude de cas qui démontre à quel point les effets des changements climatiques peuvent exacerber la fragilité et semer les graines de l’insécurité.  Le mandat de la MANUA inclut la surveillance des effets délétères de la sécheresse pour permettre à la communauté humanitaire d’adapter ses interventions en vue d’accroître la résilience des communautés afghanes, a-t-elle rappelé à cet égard dans l’attente du rapport de la Mission sur cette question.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a souligné la situation critique du peuple afghan et sa « remarquable force et résistance » face aux crises multiples auxquelles il est confronté dans tous les secteurs de la société.  Il a noté que, 15 mois après la prise de pouvoir des Taliban, l’activité économique s’est contractée d’environ 30% et que le système bancaire s’est effondré tandis que le chômage et l’inflation ont augmenté.  Il a dénoncé les politiques discriminatoires qui ont écarté les femmes et les filles de la vie publique.  La population, a-t-il indiqué, est plongée dans la pauvreté et devient de plus en plus dépendante de l’assistance humanitaire, qui est déjà confrontée à des difficultés d’acheminement.  Compte tenu des informations reçues depuis aout 2021, le représentant a estimé que l’isolement de l’autorité de facto ne produira aucun résultat positif.  Il a donc estimé important de maintenir des canaux de communications et d’échanger avec les dirigeants de facto, même en l’absence de reconnaissance formelle, tout en continuant à insister sur l’inclusion et sur les droits et libertés des femmes et des filles.  À cette fin, il a appelé à réévaluer les interdictions de voyage actuellement en vigueur.  Des solutions « créatives » sont également nécessaires pour reconstruire le système bancaire de l’Afghanistan, a-t-il en outre déclaré, évoquant à ce titre le besoin de reconsidérer la situation des actifs afghans détenus à l’étranger.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a souligné la menace croissante du terrorisme sur le sol afghan.  Il a salué le travail de la MANUA, malgré les circonstances difficiles dans lesquelles elle opère.  Rappelant que les Taliban piétinent les droits des femmes et des filles et que de nombreux médias indépendants ont mis la clef sous la porte, le représentant a également parlé de l’interprétation stricte de la charia qui passe par des flagellations, des amputations et des exécutions.  Les Afghans continuent de condamner ces décisions des Taliban, a-t-il noté, en estimant que ces derniers s’éloignent de la reconnaissance à laquelle ils aspirent par la communauté internationale.  Il a appelé à un réel dialogue avec eux sur toute une série de questions et a demandé à toutes les parties prenantes de respecter les droits humains, comme le fait la MANUA.  Il a estimé que la Mission est en bonne posture pour convoquer les acteurs clefs aux niveaux local et national, y compris les femmes et les minorités, pour promouvoir le dialogue sur les questions importantes.  Les États-Unis étant le principal bailleur de fonds humanitaire en Afghanistan, le délégué a assuré que cette aide sera toujours impartiale et conforme aux principes humanitaires.  Il a noté que la résolution pertinente du Conseil préserve un mécanisme de surveillance pour atténuer le détournement de l’aide humanitaire vers des individus sanctionnés.  Saluant le dialogue intra-afghan en cours, le représentant a insisté sur le fait que la reconnaissance des Taliban par la communauté internationale doit commencer par une légitimité aux yeux du peuple afghan.

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a déploré que l’Afghanistan continue d’être un refuge pour les groupes terroristes, y compris Al-Qaida et certaines de ses entités affiliées tels que les Chabab.  Sur ce dernier point, il a assuré que la façon dont le monde réagit à la situation sécuritaire en Afghanistan a des ramifications directes « sur notre propre sécurité, dans la Corne de l’Afrique ».  Ainsi, a-t-il jugé important que les Taliban comprennent que, s’ils espèrent obtenir une reconnaissance internationale, ils doivent assurer une paix et une sécurité durables en Afghanistan et veiller à ce que le territoire afghan ne devienne le sanctuaire ou la base arrière d’aucun groupe terroriste.  D’autre part, M. Kiboino a demandé à tous les donateurs d’intensifier leur aide, en particulier pendant la saison hivernale qui est habituellement marquée par un accroissement net des besoins humanitaires.  Il a souhaité que l’acheminement de l’aide humanitaire en 2023 soit plus pragmatique et efficace, en particulier à l’échelle des communautés.  Après avoir préconisé que des solutions soient trouvées pour que les avoirs gelés afghans soient injectés dans l’économie réelle, le représentant a exhorté les Taliban à mettre fin aux pratiques rétrogrades qui barrent l’accès des filles à l’éducation et empêchent les femmes de participer aux activités économiques du pays ou de travailler.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a dit que les Taliban n’ont tenu aucun engagement depuis août 2021 et qu’ils ont ainsi trahi le peuple afghan.  Il les a aussi accusés de s’employer à inverser systématiquement tous les progrès sociaux obtenus ces dernières années.  Illustrant ses propos, il a précisé que les filles n’ont toujours pas accès à l’éducation secondaire et font face à des mariages forcés.  « Les artistes et le patrimoine culturel sont menacés », a encore fustigé le représentant, avant de citer l’absence d’État de droit et un mépris du cadre constitutionnel qui aggrave le sentiment d’impunité.  Il s’est aussi inquiété des activités du groupe terroriste ISIS Khorasan.  Il a demandé aux Taliban à quelles fins sont utilisées les taxes prélevées et comment elles bénéficient aux nécessiteux.  Le délégué a exhorté le personnel de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) à ne pas se laisser décourager par les difficultés.  Il a exhorté le régime Taliban à lutter contre le terrorisme.  « Nous ne pouvons pas rester les bras croisés alors que 38 millions d’Afghans sont privés de leurs droits », a encore insisté le représentant.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a noté l’aggravation de la situation en Afghanistan en demandant que cessent la répression, les abus des droits des Afghans et les tentatives d’effacer les femmes et les filles de la vie publique.  La mission première du Conseil est de maintenir la paix, or il n’y a pas de paix pour le peuple en Afghanistan, ni pour les acteurs humanitaires ou les pays voisins en prise avec le terrorisme transfrontalier et le trafic de stupéfiants, a-t-il fait remarquer.  Nous avons échoué à faire rendre des comptes aux Taliban et à défendre les droits et la dignité du peuple afghan, s’est indigné le représentant en martelant que le Conseil de sécurité a la responsabilité de dénoncer les actes condamnables des Taliban « qui doivent mettre fin à leur règne de terreur contre le peuple afghan ». 

Les graves violations des droits humains interviennent dans une situation humanitaire grave, a poursuivi le délégué.  En effet, les deux tiers de la population afghane ont besoin d’aide humanitaire, a-t-il rappelé avant de dénoncer les entraves à l’acheminement de cette aide et son détournement.  Insistant sur les droits inaliénables des femmes afghanes, il a appelé à un processus de dialogue et à l’ouverture de canaux par la communauté internationale pour leur prêter main forte directement.  Le mandat de ce Conseil est clair et sa riposte doit l’être aussi, sans aucune ambiguïté à l’égard des Taliban, a conclu le représentant.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a noté que l’Afghanistan témoigne de la fragilité qui caractérise le processus de consolidation de la paix.  Il a regretté la détérioration actuelle de la situation et l’échec des appels de la communauté internationale à mettre en place un gouvernement incluant femmes et minorités.  Il a reconnu la nécessité d’un engagement direct avec les Taliban au titre de la diplomatie préventive.  Il a néanmoins noté qu’à mesure que le temps passe, « les perspectives et les aspirations de très nombreuses personnes s’évaporent ».  Le représentant s’est inquiété de la réforme du système judiciaire, qui « ne semble pas être propice au progrès ».  Il a par ailleurs condamné les attaques terroristes en Afghanistan, soulignant l’importance de la coopération entre les pays de la région et la communauté internationale pour mettre fin à ce fléau.  Le représentant a également jugé « inacceptable » la campagne de limitation des droits des femmes et des filles, qui visent à les effacer de la vie publique.  Face à la crise humanitaire sans précédent à laquelle est confrontée l’Afghanistan, il a enfin réitéré que l’aide humanitaire ne peut être subordonnée à des considérations politiques.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a réitéré son soutien au peuple afghan, notant l’apport du Royaume-Uni pour l’aide humanitaire dans le pays.  Elle a rappelé qu’alors que 97% des Afghans vivent dans la pauvreté, la priorité est d’atteindre les personnes dans le besoin.  À ce titre, elle a exhorté les Taliban à cesser de s’immiscer dans les activités humanitaires.  Elle a également constaté qu’ils n’ont toujours pas honoré leurs engagements en matière de droits humains.  Elle a condamné les violations des droits et des libertés des femmes et des filles, qui visent à les évincer de la vie publique et économique.  La représentante s’est, enfin, inquiétée de la détérioration de la situation s’agissant du terrorisme et constaté que le nombre de Taliban inscrits sur la liste des sanctions est croissant.  Lorsque les Taliban n’honorent pas leurs engagements de lutte contre le terrorisme, ils ne peuvent pas s’attendre à être perçus comme légitimes et à ce que les sanctions soient levées, a-t-elle estimé.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a assuré Mahbouba Seraj d’avoir pleinement entendu son message, un message clair et sans équivoque qui rappelle que les femmes ne peuvent être écartées du progrès et de l’avenir de l’Afghanistan.  Parce que le règlement de la situation en Afghanistan est de ceux qui exigent le soutien de tous, et afin que le peuple afghan puisse envisager l’avenir avec un quelconque degré d’optimisme ou de confiance, ce Conseil doit accorder la priorité à la sécurité et à la réponse aux défis économiques auxquels l’Afghanistan est confronté, a poursuivi le représentant.  En raison de la détérioration de la situation sécuritaire et économique dans ce pays, il a en effet appelé à la mobilisation de ses dirigeants, des puissances régionales et la communauté internationale autour d’une action collective, cohérente et coordonnée en faveur du processus de paix national et du développement économique du pays.  À cet égard, il a salué les résultats du sixième Sommet de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie, qui a eu lieu le 13 octobre à Astana, au Kazakhstan, notant en particulier la proposition du Président ouzbek de former un groupe international de négociateurs de haut niveau impliquant des représentants des autorités afghanes de facto.  À son tour, il a exhorté les Taliban à respecter les droits de toutes les filles et femmes à l’éducation, à l’emploi et à la participation à la vie publique et culturelle.  Sur les plans humanitaire et économique, le représentant a salué le rôle actif de la MANUA dans le maintien de sa présence sur le terrain aux niveaux existants pour protéger les liens vitaux entre les acteurs internationaux et locaux, créer des compétences locales et faciliter l’accès des organisations humanitaires aux populations dans le besoin.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est inquiété de la détérioration de la situation en Afghanistan après 20 ans de guerre, l’arrivée au pouvoir des Taliban et la fuite précipitée des troupes étrangères.  Après avoir fustigé « les tristes résultats de la campagne internationale », marquée par de « nombreux crimes de guerre commis par les militaires américains et de l’OTAN soigneusement étouffés », le représentant russe a indiqué que le Ministère russe des affaires étrangères a préparé un livre blanc sur la question, qui peut être consulté sur son site Web.  Par ailleurs, le représentant russe a fustigé l’attitude des collègues occidentaux, menés par les États-Unis, qui consiste à blâmer les Taliban pour la situation actuelle dans le pays alors que ces derniers n’ont pas eu les moyens depuis le 15 août 2021 de résoudre les problèmes de l’Afghanistan.  Au-delà de la situation politique intérieure compliquée, le représentant russe s’est inquiété des risques de sécurité préoccupants posés par l’émergence du groupe terroriste EIIL-Khorassan, qui commet de plus en plus d’attentats terroristes visant des représentants de minorités religieuses et ethniques, dont des femmes et des enfants.  Il s’est aussi dit préoccupé par la nouvelle tendance des attaques contre les ambassades et leurs employés et la menace pour la sécurité du personnel de la MANUA.

Tout en se félicitant de l’adoption de la résolution 2615, visant à faciliter la fourniture de l’aide humanitaire à l’Afghanistan sans conditions préalables, le représentant russe a dit regretter que les donateurs occidentaux ne semblent pas être intéressés à étendre l’aide au-delà des besoins de relèvement de base.  Il a souligné les contradictions des Occidentaux qui prétendent vouloir aider le peuple afghan, revendiquer des droits pour les femmes et les filles, tout en rejetant catégoriquement la moindre opportunité de contribuer au développement du pays, à la restauration des écoles et des hôpitaux, à la construction de routes reliant les provinces ou les villes avec les zones agricoles.  Il a aussi fustigé « les tentatives des États-Unis et d’autres grands donateurs de s’approprier les avoirs afghans ».  C’est pourquoi, le représentant a demandé la restitution immédiate des « fonds volés au peuple afghan », y compris ceux des femmes et des filles qu’ils prétendent vouloir aider.  Le représentant a exhorté les États-Unis et leurs partenaires à comprendre que leurs méthodes d’influence sur des régimes qu’ils détestent, par le biais de sanctions unilatérales, de pressions politiques et économiques et d’ultimatums sans fin, ont perdu de leur efficacité.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a indiqué que la situation des droits humains ne cesse de se détériorer en Afghanistan, où « les femmes et les filles continuent d’être privées de leurs droits les plus fondamentaux et sont systématiquement exclues de l’espace public ».  Les dernières mesures édictées, telles que l’exclusion des femmes des parcs de Kaboul, des bains publics et des stades, restreignent encore un peu plus leur liberté de mouvement.  Elle s’est dite également très préoccupée des informations relatives à la possible exclusion des femmes de l’Université.  « Les scènes de flagellations, lapidations et autres châtiments publics réitérés, ainsi que l’exécution publique d’un homme dans la ville de Farah, le 7 décembre, au mépris des droits les plus élémentaires, sont particulièrement choquantes. »  Nous ne pouvons pas nous habituer à ces violations quotidiennes, dont les Taliban sont et doivent être tenus responsables, a-t-elle tranché.  Enfin, la déléguée a dit que la France reste mobilisée pour soutenir la MANUA dans la réalisation de l’ensemble de son mandat et pour soutenir les femmes et les hommes qui travaillent aux côtés du peuple afghan.

M. SANJAY VERMA (Inde) a expliqué que l’Inde a un intérêt direct à assurer le retour de la paix et de la stabilité en Afghanistan, en tant que pays voisin et partenaire de longue date.  Parmi les principales priorités de l’Inde en Afghanistan, il a cité la fourniture d’une aide humanitaire immédiate au peuple afghan, la formation d’un gouvernement véritablement inclusif et représentatif, la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue et la préservation des droits des femmes, des enfants et des minorités.  Ces critères ont également été définis par la résolution 2593 (2021) du Conseil de sécurité qui guide l’approche de la communauté internationale à l’égard de l’Afghanistan, a souligné le représentant.

L’Inde surveille de près la situation en matière de sécurité en Afghanistan et collabore activement avec la communauté internationale sur les questions liées à l’Afghanistan, a assuré le représentant, qui a fait part de son inquiétude face aux attentats terroristes ayant ciblé des espaces publics tels que des lieux de culte et des établissements d’enseignement, en particulier pour les minorités, ainsi que des locaux diplomatiques.  Invoquant les dispositions de la résolution 2593, il a rappelé que ce texte exige sans équivoque que le territoire de l’Afghanistan ne soit pas utilisé pour abriter, entraîner, planifier ou financer des actes terroristes, en particulier des individus et des entités terroristes proscrits par le Conseil de sécurité de l’ONU, y compris Lashkar-e-Tayyiba et Jaish-e-Mohammed.  La menace du trafic de drogue est étroitement liée à la question du terrorisme, a-t-il souligné en appelant à renforcer la coopération internationale pour démanteler les réseaux de trafic

Le représentant des États-Unis a repris la parole pour condamner la décision visant à interdire l’accès à l’université pour les femmes afghanes.

Son homologue du Royaume-Uni a également repris la parole pour condamner, à son tour, la décision des Taliban d’interdire l’accès des femmes aux universités.  Elle a également regretté les déclarations de ceux qui blâment l’Occident pour la situation en Afghanistan au lieu de contribuer aux efforts de l’ONU dans le pays.

M. NASEER AHMAD FAIQ (Afghanistan) a condamné la décision des Taliban d’interdire l’accès des femmes à l’université, qui constitue la violation d’un droit humain fondamental.  Il a constaté l’absence de progrès quant à la situation sociale, économique, sécuritaire et politique en Afghanistan en raison de l’échec des Taliban à répondre à la crise actuelle.  Le délégué a également regretté que les autorités de facto aient rétabli leurs pratiques draconiennes, cruelles et inhumaines du passé.  Le système judiciaire manque de transparence, a-t-il déploré, avant de condamner la suppression de la liberté d’expression, la privation de l’accès des filles à l’enseignement et les atteintes aux droits fondamentaux des femmes.  Il s’est également inquiété de la modification des programmes scolaires pour promouvoir l’idéologie religieuse qui donnera lieu à la radicalisation et à l’extrémisme des générations futures.  Il a par ailleurs noté l’impossibilité des Taliban de recruter les personnes disposant de compétences techniques à des postes gouvernementaux.  Le représentant a ensuite constaté la détérioration de la situation sécuritaire en Afghanistan, notant que les Taliban n’ont rien fait pour lutter contre ce phénomène.  C’est pourquoi il a exhorté à lutter contre l’impunité, soulignant la responsabilité de l’Envoyé spécial et de la MANUA.  La crise économique continue également d’être difficile, a-t-il noté, avant d’appeler à mettre en place des mécanismes de rapport et de suivi pour garantir que l’assistance humanitaire parvienne aux nécessiteux.  Si elle est nécessaire à court terme, il ne saurait s’agir d’une solution pérenne qui puisse être substituée à un système légitime de gouvernance, a estimé M. Faiq.  Le représentant a appelé en conclusion à reprendre le dialogue en faveur d’une paix durable en tenant compte des intérêts de la société afghane.

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a réitéré la position de son pays, en soulignant que les avoirs gelés « appartiennent au peuple et doivent être restitués sans condition pour aider l’économie afghane ».  Le représentant a accusé les États-Unis d’invoquer des motifs infondés « pour justifier leurs actes illégaux, y compris le blocage continu d’actifs essentiels à la relance économique » de l’Afghanistan.  Les régimes de sanctions ne doivent pas entraver les tentatives de reconstruction de l’économie afghane, a insisté le représentant iranien, qui a ensuite salué les efforts menés par la MANUA pour, avec les autorités de facto, aider le peuple afghan, notamment en travaillant à l’intensification de la réponse humanitaire.  Dans le même temps, a ajouté M. Iravani, les autorités de facto doivent respecter leurs obligations internationales, en particulier en veillant à ce que les femmes et les filles ont accès à l’éducation.  Selon lui, il est un fait que si la communauté internationale ne continue pas à soutenir la reprise économique de l’Afghanistan, la situation actuelle continuera de créer un environnement favorable à l’essor des groupes terroristes et des trafiquants de drogue, lesquels pourront exploiter et recruter des personnes vulnérables afin de poursuivre leurs objectifs destructeurs sur le plan régional et international.  Enfin, le représentant a tenu à rappeler que son pays offre une éducation et une formation gratuites à tous les étudiants afghans vivant en Iran.  Selon les estimations, a-t-il indiqué, l’Iran fournit un milliard de dollars de subventions annuelles pour accueillir et abriter 5 millions d’Afghans.  En conclusion, M. Iravani a estimé qu’en vertu du principe de responsabilité partagée, « d’autres pays, en particulier ceux qui affirment soutenir les droits humains des Afghans, en particulier des femmes et des filles, devraient accepter des réfugiés ». 

M. NURILLA ABDULLAYEV (Ouzbékistan) a appelé à intensifier le dialogue avec le gouvernement intérimaire et en même temps à continuer à exiger des autorités afghanes le respect de ses engagements clefs.  À cette fin, il a proposé de créer, sous les auspices de l’ONU, un groupe de négociation international de haut niveau sur le règlement de la question afghane (ING) en précisant que cette initiative a été lancée par le Président ouzbek Shavkat Mirziyoyev lors du sixième sommet de la Conférence sur l’interaction et les mesures de confiance en Asie, qui s’est tenue à Astana le 18 octobre 2022.  Il a expliqué que cette initiative s’appuie sur l’expérience de l’Ouzbékistan d’engagement avec les Taliban depuis leur arrivée au pouvoir.  « Grâce au dialogue avec eux, nous avons réussi à faire ouvrir des écoles pour filles dans les provinces du Nord », s’est félicité le représentant, avant de noter que pour la première fois au cours des 25 dernières années, a été ouverte une route terrestre pour le transit des marchandises vers les ports maritimes du Pakistan et retour par l’Afghanistan. 

« Au cours des 10 derniers mois, 600 000 tonnes de marchandises ont été transportées dans les deux sens le long de cette route de transit, sans aucun incident de sécurité », a encore illustré le représentant, avant de citer aussi la mise en œuvre d’un partenariat dans la lutte contre le terrorisme.  Il a expliqué que les Taliban participent à ce partenariat en partageant des informations relatives aux risques sécuritaires, aux menaces et aux attaques terroristes.  Il a aussi cité la création d’une plateforme logistique dans la ville frontalière de Termez pour acheminer l’aide humanitaire non seulement en Afghanistan, mais aussi dans d’autres pays de la région, laquelle est maintenant activement empruntée par diverses agences de l’ONU.

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a jugé important de maintenir une étroite coopération avec les autorités de facto de l’Afghanistan, malgré l’absence d’une reconnaissance officielle et ce, pour le bien du peuple afghan.  Eu égard à la nature et à la spécificité desdites autorités, la MANUA devrait se concentrer sur les éléments de son mandat les moins à même de les irriter, tels que l’acheminement de l’aide humanitaire ou l’aide au développement.  Il sera temps plus tard, dans un environnement plus propice, de se pencher sur les autres aspects dudit mandat, a tranché le délégué.  Enfin, il a indiqué que son pays participera à la mise en œuvre d’un programme visant à fournir une formation universitaire aux Afghanes.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a rappelé que la paix et la stabilité en Afghanistan sont essentielles pour le Pakistan.  Il a estimé que l’engagement avec les autorités intérimaires constitue la meilleure alternative pour atteindre la paix et la sécurité ainsi que les différents objectifs de la région, notant que l’isolement et les mesures coercitives n’ont pas fait leurs preuves.  L’effondrement de l’économie afghane est lié au fait qu’il n’existe plus d’aide extérieure, a-t-il estimé.  La priorité doit donc être de résoudre la crise humanitaire afghane.  Le représentant s’est félicité de la résolution 2615 du Conseil de sécurité qui vise à créer des exceptions humanitaires pour le régime des sanctions.  Le plan d’action de 4 milliards de dollars de l’ONU doit être pleinement financé, a-t-il ajouté en misant aussi sur l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour renforcer l’activité économique du pays.  Il a également évoqué la question du système bancaire et a proposé d’injecter les avoirs afghans détenus à l’étranger dans le système économique afghan.  Le représentant a souhaité que reprenne la reconstruction des infrastructures ainsi que la mise en œuvre des projets de connectivité, ce qui peut constituer une partie essentielle de la reprise économique en Afghanistan.  Il a noté que les pays voisins sont prêts à cette reprise, estimant que les organisations internationales et les banques ne devraient pas être dissuadées d’y participer.

Le délégué du Pakistan a assuré que son pays continuera de contribuer à l’assistance humanitaire, sans concession sur le droit des femmes et l’accès à l’éducation.  Il s’est dit préoccupé, à cet égard, par l’annonce concernant l’accès des femmes à l’enseignement supérieur.  Il a en outre relevé que, si les autorités intérimaires ne souhaitent pas partager le pouvoir, elle pourrait néanmoins bénéficier d’une meilleure gouvernance en acceptant la participation des experts.  Le représentant a, enfin, exprimé la préoccupation de la communauté internationale face à la hausse de la violence terroriste en Afghanistan et depuis le territoire de ce pays.  La principale menace découle du Tehrik-eTaliban Pakistan (TPP) et de Daech, a-t-il estimé, exhortant la communauté internationale à travailler avec le Gouvernement intérimaire pour éliminer ces groupes.  Il a également appelé la MANUA à coopérer avec le Gouvernement intérimaire, notamment pour mettre en œuvre le programme de collecte des armes.  Il a, enfin, estimé essentiel de maintenir une approche régionale unifiée. 

La représentante des Émirats arabes unis a repris la parole pour s’inquiéter de la décision « injuste » d’interdire l’accès des femmes à l’université.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à parler en détail de ce sujet.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale proclame le 12 février Journée internationale pour la prévention de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme

Soixante-dix-septième session,
56e séances plénière - matin
AG/12485

L’Assemblée générale proclame le 12 février Journée internationale pour la prévention de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme

L’Assemblée générale a entériné, ce matin, deux résolutions, dont une proclame le 12 février Journée internationale pour la prévention de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme.  Elle a d’autre part procédé au remplacement d’un membre du Corps commun d’inspection et à l’élection des cinq membres du Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix, avant d’échouer une nouvelle fois à pourvoir le siège du Conseil économique et social que se disputent la Fédération de Russie et la Macédoine du Nord.

Présenté par l’Iraq, le texte faisant du 12 février la Journée internationale pour la prévention de l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme a été adopté par 154 voix pour, zéro contre et 4 abstentions (Bélarus, Fédération de Russie, Madagascar, République du Congo).  Par cette initiative, l’Assemblée générale entend mieux faire connaître les menaces liées à l’extrémisme violent pouvant conduire au terrorisme et renforcer la coopération internationale à cet égard.

À l’origine de la mise aux voix, la Fédération de Russie a constaté, avant le vote, que ce texte ne fait pas l’objet d’un consensus, faute d’accord au niveau international sur la définition de l’extrémisme violent.  Les tentatives dans ce sens ont, selon elle, favorisé un « deux poids, deux mesures » qui se caractérise par la création de deux catégories de terroristes, « les mauvais et les moins mauvais ».  De plus, a-t-elle relevé, il est question dans ce projet d’« éléments radicaux » qui, eux non plus, ne font pas l’objet d’une définition agréée.

La délégation russe a également déploré que le texte mentionne le Plan d’action du Secrétaire général de l’ONU pour la prévention de l’extrémisme violent, lancé en 2015 par M. Ban Ki-moon, alors même que ce dispositif reste contesté par de nombreux États Membres, lesquels considèrent qu’il ne prend pas en compte la « tolérance » observée dans l’utilisation de groupes terroristes à des fins politiques.  Après avoir regretté que la prévention du terrorisme ne soit pas abordée dans ce texte, elle a estimé qu’il aurait été plus logique de continuer de débattre de ces questions en vue du prochain examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies prévu en 2023.

À l’issue du vote, Cuba, qui s’est prononcée en faveur du texte, a souhaité que la question de la prévention de l’extrémisme violent et du terrorisme ne soit pas utilisée pour violer la Charte des Nations Unies en tentant de modifier la structure d’États souverains.  Elle a également réitéré son appui à l’élaboration d’une convention globale sur le terrorisme, y voyant un impératif pour pallier les insuffisances du cadre juridique existant.  Elle aussi favorable à cette résolution, l’Égypte a déploré, à son tour, l’absence de définition convenue internationalement de l’extrémisme violent, avant de dénoncer la « tendance généralisée » qui veut que ce phénomène soit évoqué pour décrire des attentats commis par des groupes criminels « non islamistes ».  L’Iraq a, lui, jugé regrettable qu’une délégation ait demandé un vote sur ce texte qui tient compte des différents avis sur la question.

Le consensus a, en revanche, prévalu pour avaliser la résolution intitulée « Conférence des Nations Unies de 2025 visant à appuyer la réalisation de l’objectif de développement durable no 14: conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable » et qui prévoit la tenue de cette conférence en France en juin 2025.  Présenté par le Costa Rica, le texte précise que tous les coûts afférents à l’organisation de cet événement seront financés aux moyens de ressources extrabudgétaires.

Après avoir élu l’Égypte, le Kenya, Qatar, Saint-Vincent-et-les Grenadines et l’Afrique du Sud en tant que membres du Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix pour un mandat de deux ans débutant le 1er janvier 2022, l’Assemblée générale a décidé d’accréditer la Banque européenne d’investissement et de l’inviter à participer aux travaux de la Conférence des Nations Unies consacrée à l’examen approfondi à mi-parcours de la réalisation des objectifs de la Décennie internationale d’action sur le thème « L’eau et le développement durable » (2018-2028) en tant qu’organisation intergouvernementale ayant statut d’observateur.  La Fédération de Russie a cependant souhaité, après l’adoption, se dissocier du consensus au motif que l’Union européenne et ses structures « politisent les questions de coopération climatique et écologique ».

L’Assemblée générale a par ailleurs nommé M. Toshiya Hoshino (Japon) en tant que membre du Corps commun d’inspection pour un mandat de 5 ans prenant effet le 1er avril 2023 et arrivant à échéance le 31 décembre 2027.  Il remplacera Mme Keiko Kamioka (Japon), qui a fait part de son intention de quitter ses fonctions le 31 décembre prochain.

Enfin, l’Assemblée générale a repris le processus visant à pourvoir le siège du groupe des États d’Europe orientale au sein du Conseil économique et social (ECOSOC), qui avait été interrompu le 2 septembre dernier après neuf tours de scrutin restreints aux deux candidats, la Fédération de Russie et la Macédoine du Nord.  Ni l’un ni l’autre n’ayant obtenu, aujourd’hui, la majorité des deux tiers requise après trois nouveaux tours de scrutin, le Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi, a annoncé que le prochain vote se tiendra à une date ultérieure.  Il a ensuite suspendu la séance jusqu’à ce que les rapports de la Cinquième Commission soient à la disposition de l’Assemblée pour examen.

La date de la poursuite de cette séance de l’Assemblée générale sera annoncée ultérieurement.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial prévient que l’expansion des colonies israéliennes érode « systématiquement » la solution des deux États

9224e séance - matin
CS/15146

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial prévient que l’expansion des colonies israéliennes érode « systématiquement » la solution des deux États

Le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient a prévenu, ce matin, les membres du Conseil de sécurité que la violence et l’expansion continue des colonies de peuplement israéliennes dans les territoires occupés compromettent la solution des deux États, en érodant la possibilité d’établir un État palestinien viable et indépendant.

S’exprimant par visioconférence, M. Tor Wennesland a exprimé sa profonde inquiétude face aux niveaux élevés de violence observés au cours des derniers mois en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est.  Ainsi, en 2022, plus de 150 Palestiniens et 20 Israéliens ont été tués, ce qui représente le nombre le plus élevé de décès depuis plusieurs années.  « La violence doit cesser et tous les auteurs de ces actes doivent être tenus pour responsables », a martelé le Coordonnateur spécial.

Il a jugé particulièrement préoccupante l’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, qui compromettent à ses yeux la perspective d’une solution à deux États en érodant « systématiquement » la possibilité d’établir un État palestinien contigu, indépendant, viable et souverain.  Ainsi, quelque 4 800 unités de logement ont été construites en 2022 dans la seule zone C, contre 5 400 en 2021.  Toutefois, à Jérusalem-Est occupée, le nombre d’unités de logement avancées a plus que triplé par rapport à l’année précédente, passant de 900 unités en 2021 à environ 3 100 en 2022, a précisé M. Wennesland.  La poursuite des démolitions et des saisies de structures palestiniennes demeure alarmante, a encore dit le haut fonctionnaire, en déplorant notamment la démolition d’une école financée par des bailleurs de fonds à Masafer Yatta.

Rejoint par l’Irlande, le Kenya ou encore le Royaume-Uni, le Coordonnateur spécial a exhorté le Gouvernement israélien à cesser immédiatement les activités de colonisation, la démolition de propriétés palestiniennes et les expulsions, tout en permettant aux Palestiniens de construire légalement des habitations conformément à leurs besoins de développement.  Pour sa part, la France a assuré qu’elle ne reconnaîtrait jamais l’annexion illégale de territoires qui éloignent chaque jour un peu plus la perspective de pourparlers directs entre les parties et, à terme, la perspective d’une solution à deux États.

La fragilité de la dynamique politique et sécuritaire actuelle en Cisjordanie occupée, exacerbée par l’aggravation de l’occupation, l’augmentation de la violence, y compris du terrorisme, et l’absence d’horizon politique clair ont pour effet de renforcer les extrémistes et d’éroder l’espoir des Palestiniens et des Israéliens d’une résolution du conflit, a encore dit M. Wennesland.

Un constat partagé par les États-Unis, pour qui les extrémistes des deux côtés, israéliens comme palestiniens, doivent être traités de la même façon, avec des sanctions et des peines comparables.  Les Émirats arabes unis ont quant à eux mis en garde contre « la spirale de violence » qui pourrait embraser la région si la situation continuait de se détériorer.  Pour le Kenya, les rapports du Secrétaire général devraient s’appuyer sur le paragraphe 11 de la résolution 2334 (2016) du Conseil, qui prévoit l’énoncé d’objectifs clairs, d’échéanciers et de solutions réalisables pour régler l’ensemble des questions en suspens.

Simultanément, l’Autorité palestinienne demeure confrontée à des défis économiques et institutionnels croissants, aggravés par l’occupation et l’absence de réformes sérieuses, notamment à Gaza, où la situation reste fragile malgré les efforts déployés par l’ONU et les partenaires régionaux et internationaux tels que l’Égypte et le Qatar, a noté M. Wennesland.  Dans ce contexte, la Fédération de Russie a rejeté les « divers prétextes » avancés par les États-Unis pour s’abstenir de participer aux travaux du Quatuor, pourtant entériné par une résolution du Conseil de sécurité.  La Chine a de son côté jugé prioritaire le renforcement de l’Autorité palestinienne et la réconciliation intrapalestinienne, tout en souhaitant la tenue d’une conférence de paix globale permettant de réaliser le droit légitime des Palestiniens à un État indépendant.  « Chaque journée d’inaction est une atteinte à la justice », a estimé son représentant.

« Chercher à geler ce conflit ou le gérer à perpétuité ne sont pas des options viables », a répété M. Wennesland, en considérant que seul un processus politique légitime permettra de résoudre les problèmes fondamentaux.  Il a incité les États de la région et la communauté internationale dans son ensemble à prendre des mesures concrètes pour infléchir la « trajectoire négative » sur le terrain et améliorer la vie des Palestiniens et des Israéliens, tout en faisant avancer la création de deux États.

Malgré la persistance de ces défis, le haut fonctionnaire a salué les mesures prises par Israël pour assouplir certaines restrictions et faciliter l’activité économique, notamment l’octroi de plus de 18 000 permis permettant aux résidents palestiniens de Gaza de travailler en Israël, soit le nombre le plus élevé depuis 2007.  Le volume de marchandises sortant de Gaza par le point de passage de Kerem Shalom a ainsi augmenté de près de 50% en 2022, bien que les restrictions continuent de restreindre les efforts humanitaires et de développement.  Pour résoudre les problèmes de ce territoire, il faudra trouver des solutions politiques, a prévenu M. Wennesland, assurant le retour du Gouvernement palestinien légitime et la levée complète des bouclages israéliens, conformément à la résolution 1860 (2009) du Conseil.

Ces progrès fragiles sont toutefois menacés par la flambée des prix des produits de base et des coûts humanitaires dans les territoires occupés, a déploré le Coordonnateur spécial, avec pour effet de mettre en péril la fourniture de services essentiels aux réfugiés par le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINENNE

S’exprimant par visioconférence, M. TOR WENNESLAND, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, a exprimé sa profonde préoccupation face aux niveaux élevés de violence observés au cours des derniers mois en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est.  Les affrontements, les opérations de sécurité israéliennes ainsi que la violence liée aux colons se sont poursuivis au cours de la période considérée dans son rapport, du 21 septembre au 7 décembre 2022.  Cette année, plus de 150 Palestiniens et 20 Israéliens ont été tués en Cisjordanie et en Israël, ce qui représente le nombre le plus élevé de décès depuis plusieurs années, a expliqué M. Wennesland.  En outre, depuis le 8 décembre, 6 Palestiniens ont été tués par les forces de sécurité israéliennes.

L’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie occupée demeure profondément préoccupante, a poursuivi le Coordonnateur spécial, en ajoutant que celles-ci compromettent la perspective de parvenir à une solution à deux États en érodant systématiquement la possibilité d’établir un État palestinien contigu, indépendant, viable et souverain.  Malgré l’absence de nouvelles unités de logement en Cisjordanie occupée, il a jugé élevé le nombre total d’unités de logement des colonies alors que dans la zone C, quelque 4 800 unités de logement ont été construites en 2022, contre 5 400 en 2021.  Toutefois, à Jérusalem-Est occupée, le nombre d’unités de logement avancées a plus que triplé par rapport à l’année précédente, passant de 900 unités en 2021 à environ 3 100 en 2022, a précisé M. Wennesland.

La poursuite des démolitions et des saisies de structures palestiniennes demeure alarmante, a encore dit le Coordonnateur spécial, particulièrement la démolition d’une école à Masafer Yatta.  Il a exhorté le Gouvernement israélien de cesser immédiatement les activités de colonisation, la démolition de propriétés palestiniennes et les expulsions, tout en permettant aux Palestiniens de construire des habitations légalement et de répondre à leurs besoins de développement.  « La violence doit cesser et tous les auteurs de ces actes doivent être tenus pour responsables », a martelé le Coordonnateur spécial.

M. Wennesland a trouvé particulièrement inquiétante la fragilité de la dynamique politique et sécuritaire actuelle, en particulier en Cisjordanie occupée.  L’aggravation de l’occupation, l’augmentation de la violence, y compris du terrorisme, et l’absence d’horizon politique clair ont, selon lui, pour effet de renforcer les extrémistes et d’éroder l’espoir des Palestiniens et des Israéliens d’une résolution du conflit.  Simultanément, l’Autorité palestinienne est confrontée à des défis économiques et institutionnels croissants, aggravés par l’occupation et l’absence de réformes sérieuses, notamment à Gaza, où la situation reste fragile malgré les efforts déployés par l’ONU et les partenaires régionaux et internationaux, y compris l’Égypte et le Qatar.  Il a toutefois salué les mesures prises par Israël pour assouplir certaines restrictions et faciliter l’activité économique, en notant l’émission de plus de 18 000 permis permettant aux résidents palestiniens de Gaza de travailler en Israël, soit le nombre le plus élevé depuis 2007.  Le volume de marchandises sortant de Gaza par le point de passage de Kerem Shalom avec Israël a ainsi augmenté de près de 50% en 2022, a-t-il noté, bien que les restrictions continuent d’avoir un impact négatif sur les efforts humanitaires et le développement.  Pour résoudre les problèmes de Gaza, il faudra trouver des solutions politiques, a prévenu M. Wennesland, notamment garantir le retour du Gouvernement palestinien légitime et la levée complète des bouclages israéliens, conformément à la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité.

Tandis que la flambée des prix des produits de base, les besoins et les coûts humanitaires augmentent dans les territoires occupés, le Programme alimentaire mondial (PAM) a besoin de 35 millions de dollars pour pouvoir continuer à apporter son soutien, a expliqué le Coordonnateur spécial.  La situation financière de l’UNRWA continue, quant à elle, de mettre en péril la fourniture de services essentiels aux réfugiés dans le Territoire palestinien occupé.  « Chercher à geler ce conflit ou à le gérer à perpétuité ne sont pas des options viables », a répété M. Wennesland, en considérant que seul un processus politique légitime permettra de résoudre les problèmes fondamentaux.  Il a incité les États de la région et la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour changer la « trajectoire négative » sur le terrain et améliorer la vie des Palestiniens et des Israéliens, tout en faisant avancer la création de deux États.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a fait part de sa préoccupation vis-à-vis des violences en Cisjordanie et la mort récente d’une jeune fille âgée de 16 ans est un autre rappel tragique du coût humain de ce conflit et de l’importance pour les parties d’œuvrer à y mettre fin.  À cet égard, il a jugé fondamental que les parties prennent des mesures de toute urgence pour apaiser la situation.  Tous les extrémistes, israéliens comme palestiniens, doivent être traités de la même façon et les arrestations, les sanctions et les peines prononcées être comparables.  De même, le représentant a exhorté les dirigeants à condamner toute forme de violence, quelle que soit l’identité de leurs auteurs.

Les actes unilatéraux et discours incendiaires ne font qu’ajouter de l’huile sur le feu et fragiliser toute perspective de solution négociée à deux États, a-t-il mis en garde.  Le représentant s’est ensuite dit profondément préoccupé par l’initiative lancée par la Palestine à l’Assemblée générale pour demander un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) contre Israël, la jugeant « contreproductive » et de nature à éloigner davantage les parties d’une solution négociée.  Il a de même souligné le caractère impératif du maintien du statu quo historique des Lieux saints de Jérusalem, rejetant les discours incendiaires.

Dans cette situation marquée par des tensions, nous devons garder les yeux rivés vers l’avenir, a dit le délégué, rappelant s’être rendu récemment aux Émirats arabes unis et en Israël, où il a pu constater le potentiel offert par la normalisation entre les nations arabes et Israël.  Les Accords d’Abraham peuvent offrir, à son avis, des avantages colossaux pour la région.  Cette normalisation des relations donne, selon lui, de nouvelles clefs pour explorer les solutions afin de contribuer à un Moyen-Orient plus prospère, stable et sûr.

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) a qualifié d’extrêmement inquiétants les derniers développements sur le terrain.  Au vu du nombre élevé de victimes palestiniennes ces derniers mois, il a réitéré son appel aux autorités israéliennes à faire un usage proportionné de la force, rappelant que la protection des civils est une obligation au titre du droit international humanitaire.  Le représentant a également dénoncé la violence des colons qui, selon lui, ne fait qu’augmenter le risque d’une spirale de provocations et de représailles, tout en condamnant de la même façon les attaques terroristes perpétrées contre des Israéliens.  Pour le délégué, la priorité aujourd’hui est l’arrêt urgent de la politique de colonisation israélienne dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est, alors que les démolitions de structures palestiniennes s’intensifient en Cisjordanie, de même que les évictions de Palestiniens.

Appelant le prochain Gouvernement israélien à renoncer à la construction de colonies sauvages et à leur légalisation, il a assuré que la France ne reconnaîtra jamais l’annexion illégale de territoires qui éloignent chaque jour un peu plus la perspective de pourparlers directs entre les parties et, à long terme, la perspective d’une solution à deux États.  Pour préserver cette possibilité, il a jugé nécessaire de poursuivre la mise en œuvre de la politique de différenciation, conformément à la résolution 2334 (2016) qui vise à matérialiser juridiquement la distinction entre le territoire d’Israël et les territoires palestiniens occupés depuis 1967.  À l’heure où les violations des Accords d’Oslo se multiplient, le Conseil de sécurité a une responsabilité vis-à-vis des parties, a conclu le représentant, pour qui il importe de veiller au respect des accords passés et à ce que, dans les prochains mois, la « politique du fait accompli » ne mine pas la solution de deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité et ayant l’un et l’autre Jérusalem pour capitale.

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dit préoccupée par le niveau toujours élevé de violence en Cisjordanie.  Le meurtre d’une adolescente de 16 ans la semaine dernière lors d’une opération militaire israélienne à Jénine est un autre exemple tragique des souffrances endurées par les Palestiniens, a déclaré la déléguée qui a appelé les forces de sécurité israéliennes à faire montre de la plus grande retenue s’agissant de l’usage de la force.  Elle a estimé que la situation actuelle n’est pas tenable et n’est dans l’intérêt d’aucune des parties.  La poursuite des activités de colonisation sape la solution des deux États et nourrit la défiance, a-t-elle averti.

Réitérant l’importance de ladite solution, elle a plaidé pour la reprise de négociations directes entre Palestiniens et Israéliens le plus rapidement possible.  À court terme, il est crucial de consolider le cessez-le-feu à Gaza et de renforcer l’Autorité palestinienne, ses institutions, ainsi que l’économie palestinienne, a-t-elle affirmé.  Enfin, elle a estimé que la division politique entre Gaza et la Cisjordanie entrave les efforts pour un règlement pacifique.  Un leadership palestinien fort et unifié, jouissant d’une légitimité démocratique renouvelée, est nécessaire, a-t-elle insisté.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) s’est inquiété du tableau brossé par le Coordonnateur spécial, qui reflète une situation délicate sur le terrain caractérisée par des tensions croissantes et une impasse politique.  Il a regretté les « nombreuses actions contraires » à la mise en œuvre de la résolution 2334, notamment l’expansion des colonies illégales, les 1 800 démolitions de propriétés palestiniennes, les attaques contre les civils et la poursuite des tirs de roquettes depuis Gaza.  Au cours des deux dernières années, 517 Palestiniens et 30 Israéliens ont été tués et environ 30 000 personnes ont été blessées, a-t-il relevé, sans pour autant démanteler les capacités des terroristes ni faire cesser la violence des colons.  M. de la Fuente Ramírez a par ailleurs dénoncé les tentatives répétées de modifier le statut des Lieux saints à Jérusalem, qui sapent le rôle de la Jordanie en tant que gardienne de ces sites.  Le représentant a toutefois salué l’assouplissement des restrictions imposées à la circulation des personnes et des biens à Gaza, l’augmentation du nombre de permis de travail pour les Palestiniens et la poursuite de la coopération fiscale et sécuritaire entre Israël et l’Autorité palestinienne.  Reconnaissant qu’il n’a pas été possible de « briser les cycles de violence » au cours des dernières années, le représentant a estimé que la responsabilité « inéluctable » de la reprise du processus de paix incombe aux parties, avec l’appui de la communauté internationale et du Conseil de sécurité.

M. ZHANG JUN (Chine) a rappelé que lors du dernier sommet sino-arabe, le Président Xi Jinping a réaffirmé le soutien de la Chine à la « juste cause du peuple palestinien » et soutenu son droit à un État indépendant pour que la Palestine devienne membre à part entière des Nations Unies.  Il s’est dit favorable à la solution des deux États, estimant que les droits légitimes des Palestiniens ne peuvent être oubliés ni bafoués plus longtemps.  La Chine souhaite voir le renforcement de l’Autorité palestinienne et une plus grande unité entre factions, a indiqué le représentant, avant d’appeler aussi à la réconciliation intrapalestinienne.  Ces questions sont prioritaires et il faut tout faire pour que la négociation reprenne, a-t-il estimé, en suggérant qu’il faudrait organiser une conférence de paix globale sur la question palestinienne.

Le délégué s’est opposé à tout usage excessif de la force, exigeant que les responsabilités soient établies pour tous les incidents et que la Puissance occupante respecte ses obligations vis-à-vis des civils dans les territoires occupés.  Soulignant que la sécurité des Palestiniens et des Israéliens reste indivisible, il a appelé la communauté internationale à accorder une attention identique à leurs préoccupations et à encourager les pourparlers de paix et la coopération.  Il faut mettre fin à la violence et rompre le cercle vicieux actuel, a-t-il insisté, en appuyant aussi sur l’importance de faire appliquer les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2334.

Le représentant a par ailleurs annoncé que la Chine a l’intention d’accroître sa contribution à l’UNRWA.  Notant le large soutien international à la cause palestinienne et à la solution des deux États, il a posé la question de savoir quelles sont les raisons qui expliquent l’impossibilité pour les Palestiniens de réaliser leur droit légitime à un État indépendant.  Chaque journée d’inaction est une atteinte à la justice, a-t-il tranché, en exhortant la communauté internationale et l’ONU à prendre des mesures concrètes pour permettre au peuple palestinien d’exercer ce droit inaliénable pour que « Juifs et Arabes puissent vivre en harmonie, côte à côte et dans la paix ».

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a constaté que le dernier rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) dresse un tableau inquiétant pour ceux qui aspirent à la concrétisation de la solution des deux États et à une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens.  Observant que la poursuite des activités de colonisation ne contribue pas aux efforts de paix dans la région, il s’est dit consterné par la montée de la violence à l’encontre des civils, en particulier des enfants, avant d’appeler les parties à faire montre de la plus grande retenue et à éviter toute action susceptible d’exacerber les tensions et les souffrances.  Toutes les obligations découlant du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme doivent être respectées, a-t-il insisté, tout en appelant à ce que les auteurs de violence de part et d’autre soient tenus responsables de leurs actes.

Alors que l’absence d’horizon politique tend à renforcer les extrémistes et érode l’espoir d’un règlement entre Israéliens et Palestiniens, il est urgent que nous progressions dans le traitement des forces motrices de ce conflit afin de rendre possible une solution politique juste et durable, a plaidé le représentant.  Il convient donc, selon lui, que le Conseil de sécurité renouvelle sa détermination collective à rechercher un engagement des autorités israéliennes et palestiniennes en faveur de la paix.  Enfin, après avoir exprimé sa préoccupation face au manque de financement dont pâtissent l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et le Programme alimentaire mondial (PAM), le délégué a exhorté les bailleurs de fonds à répondre aux appels des deux agences onusiennes afin de soutenir leurs activités vitales.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a jugé « accablante » la situation décrite par le Coordonnateur spécial, avec notamment la recrudescence des actes de violence et la poursuite des activités de colonisation.  Il a rappelé que 2022 est l’année la plus violente depuis l’Intifada de 2005.  Le Conseil doit « oser » en faire davantage sur ce dossier, a-t-il dit, avant d’évoquer la situation à Gaza.  Il a appelé les parties à faire montre de retenue et à s’engager dans un dialogue franc et constructif.  Le délégué a plaidé pour la solution des deux États, avant d’appeler à doter l’UNRWA des ressources nécessaires.  Enfin, s’agissant de la question sensible du rapatriement des dépouilles, le délégué du Gabon a exhorté les parties à s’accorder sur une solution à même de favoriser le dialogue.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est dit alarmé par la régularité des flambées de violence dans les territoires palestiniens occupés, y compris en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.  Il s’est dit convaincu que la situation restera explosive tant que les parties n’auront pas trouvé un accord mutuellement acceptable sur toutes les questions relatives au statut final avec comme élément central une solution prévoyant deux États.  Dans le contexte des informations fournies par le Coordonnateur spécial sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016), le représentant a réitéré sa position de principe selon laquelle la création de colonies israéliennes dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, constitue une violation du droit international et demeure l’un des principaux obstacles au règlement.  Il a regretté les arrestations et détentions arbitraires de Palestiniens qui ont lieu tous les jours.  En Cisjordanie, les Israéliens continuent à mener des raids militaires « disproportionnés et sanglants », a-t-il déploré, s’élevant aussi contre les flambées de violence qui ont lieu régulièrement autour de la bande de Gaza.  Depuis le début de l’année, 158 personnes ont été tuées en Cisjordanie et 52 à Gaza, a-t-il dénombré.  Parallèlement, il a dénoncé, la poursuite des expropriations de biens palestiniens, la démolition de maisons et la violation systématique du statu quo des Lieux saints de Jérusalem.

Le représentant a aussi dénoncé le fait que ces actions arbitraires et illégales d’Israël vont au-delà de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, touchant les pays arabes voisins avec de nombreuses violations de leur souveraineté, notamment dans le cadre d’attaques menées en territoires syrien et libanais.  Dans ce contexte, il a rejeté les « divers prétextes » avancés par les États-Unis pour s’abstenir de participer au travail du Quatuor, ce qui bloque l’action de ce mécanisme multilatéral pourtant entériné par une résolution du Conseil de sécurité.  Pour sa part, la Russie reste attachée au règlement du conflit conformément aux dispositions du droit international et plaide en faveur de la reprise rapide des travaux du Quatuor dans les meilleurs délais, a déclaré le délégué.  C’est pourquoi, a-t-il conclu, les tentatives de monopolisation du processus de règlement de ce conflit sont incohérentes et vouées à l’échec.

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a appelé à intensifier les efforts visant à créer des conditions propices à la tenue de négociations sur l’ensemble des questions relatives au statut final en tenant compte des préoccupations légitimes palestinienne et israélienne.  En l’absence de progrès significatifs dans la mise en œuvre de la résolution 2334, le représentant a insisté pour que les rapports soient étayés par le paragraphe 11 de la résolution, qui demande la présentation d’objectifs clairs, d’échéanciers et de solutions réalisables pour régler les questions en suspens.  Face aux incidents violents, aux arrestations et aux décès touchant des enfants, il a appelé à redoubler d’efforts pour assurer leur protection.  Il a dénoncé la poursuite des violences et du terrorisme, notamment les tirs de roquettes effectués à partir de Gaza ainsi que les expulsions et démolitions de propriétés palestiniennes.  M. Kimani a demandé aux parties, y compris les dirigeants politiques et religieux, de mettre fin à la rhétorique incendiaire dans l’intérêt de la paix et de la sécurité.

M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) a tiré la sonnette d’alarme sur les violences en cours qui font de 2022 l’année la plus meurtrière pour les Palestiniens depuis la violence de 2005 en Cisjordanie.  Face à la situation, le représentant a demandé en premier lieu de faire cesser les activités de peuplement que mène Israël.  Il faut ensuite protéger les civils et veiller à assurer la reddition de la justice, a-t-il poursuivi.  Il a aussi jugé nécessaire de redonner de l’espoir grâce, d’une part, à la désescalade et, d’autre part, au rétablissement de l’horizon politique et à l’appui donné à la société civile et aux acteurs humanitaires.  Le représentant s’est particulièrement inquiété de la souffrance infligée aux enfants: 42 enfants palestiniens et un enfant israélien ont été tués en 2022, ce qui représente le double des chiffres de l’année dernière, s’est-il inquiété.  De même, le représentant s’est alarmé de la détention administrative généralisée de mineurs aux mains d’Israéliens.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté à son tour que la situation sur le terrain reste caractérisée par un risque d’escalade majeure en Cisjordanie et Jérusalem-Est.  Les actions unilatérales menées des deux côtés nourrissent des tensions et débouchent souvent sur des violences aux conséquences malheureuses, a-t-il déploré, observant que ceux qui souffrent le plus sont les civils, en particulier les enfants et les jeunes, ainsi que le processus de paix.  Appelant les parties à diligenter des enquêtes sur tous les actes ayant débouché sur des meurtres de civils et à traduire en justice les responsables, le représentant a aussi demandé la pleine mise en œuvre de la résolution 2601 (2021) sur la préservation du droit à l’éducation en période de conflit.  Les enfants ne doivent pas être utilisés comme boucliers humains, a insisté le représentant.  Il a ensuite fait valoir que le terrorisme n’a pas de justification et doit être condamné de toutes parts, avant de rappeler qu’Israël a le droit à la légitime défense via des actions proportionnées.  De même, le droit international et le droit international humanitaire ne sont pas facultatifs et doivent être respectés, a-t-il ajouté, dénonçant les destructions de biens palestiniens et la poursuite des activités de peuplement israéliennes, lesquelles ne créent pas de conditions propices à un règlement de paix.  Alors que les fêtes de fin d’année approchent et que des milliers de personnes vont arriver à Jérusalem pour célébrer Noël, le délégué a souligné l’importance de préserver le statu quo des Lieux saints et la cohabitation religieuse pacifique.  Enfin, il a réitéré son appel à la restauration d’un horizon politique pour une solution juste et négociée à deux États dans le cadre des frontières de 1967.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) s’est dit préoccupé devant les évolutions de la situation en Cisjordanie et à Gaza.  L’année qui s’achève a été l’une des plus meurtrières en Cisjordanie au cours des deux dernières décennies, a noté le représentant, qui a déploré la nouvelle spirale de violence qui a ravagé Gaza en août, 17 enfants ayant été tués.  Le Conseil doit redoubler d’efforts afin d’encourager les parties à revenir à la table des négociations.  Le délégué a mis en garde contre « la spirale de violence » qui pourrait envelopper la région, si rien n’était fait.

Israël doit cesser ses activités de colonisation, a tranché le délégué, en rappelant leur illicéité au regard du droit international.  Il a aussi estimé que la solution des deux États pourrait rapidement perdre toute viabilité.  Le délégué a appelé à mettre un terme aux violences perpétrées par les colons et aux démolitions d’habitations palestiniennes.  Il faut intensifier les contacts internationaux auprès des deux parties en vue de favoriser le dialogue, a déclaré le délégué, en appelant également à la « sagesse » des parties.  Enfin, le délégué a appelé à respecter le rôle de gardien des Lieux saints qui revient à la Jordanie.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est dit préoccupé par les informations selon lesquelles la période considérée a connu une nouvelle détérioration de la situation humanitaire et sécuritaire sur le terrain et une augmentation du nombre d’activités de colonisation israéliennes.  Il s’est dit peiné de constater que 2022 a été l’année la plus meurtrière pour les Palestiniens en Cisjordanie depuis 2005, et que le nombre d’attaques de colons israéliens en Cisjordanie occupée a augmenté.  Il a dénoncé les raids fréquents et les arrestations arbitraires menés par les Forces de défense israéliennes (FDI) dans les territoires palestiniens occupés, avant de condamner les attaques aveugles visant les Casques bleus et tout le personnel civil qui continue de travailler dans des conditions difficiles pour maintenir la paix.  Le Ghana condamne également tous les actes de terreur et de violence perpétrés contre les civils ainsi que les actes de provocation et d’incitation, a poursuivi le représentant, en appelant à des mesures immédiates pour prévenir la violence, y compris les actes de terreur, contre les civils non armés, les enfants et les personnes âgées.  Il a exhorté les deux parties à s’abstenir de toute provocation, incitation et rhétorique incendiaire.

S’adressant au Gouvernement israélien, le délégué lui a demandé de ne pas poursuivre ses projets de création ou d’expansion de colonies, en particulier à l’intérieur et autour de Jérusalem-Est, et de ne pas procéder à la légalisation des colonies non autorisées, y compris les mesures potentielles qui soutiendraient les colons et les activités de colonisation dans la région.  À cet égard, il a rappelé l’impact des activités de peuplement sur le processus de paix au Moyen-Orient.  En attendant la formation d’un nouveau gouvernement israélien, la priorité pour tous doit être de parvenir à un horizon politique pour le règlement pacifique du conflit, a-t-il recommandé.  Pour cela, il a exhorté les parties à s’abstenir de prendre toute mesure unilatérale qui compromettrait la viabilité de la solution des deux États et saperait la confiance mutuelle nécessaire et urgente pour stabiliser la situation, inverser les tendances négatives sur le terrain, et créer les conditions propices à des négociations ultérieures en vue d’avancer vers la solution des deux États.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a d’entrée plaidé pour un dialogue véritable afin de mettre fin à ce cycle de violences qui continue de ravager la population civile en Israël et dans les territoires palestiniens occupés.  La mort de la jeune Jana Zakaran à Jénine, au cours d’une arrestation par les forces israéliennes, est un autre rappel tragique du coût humain de ce conflit, a-t-elle déploré.  À cet égard, la représentante a appelé Israël à faire preuve de la plus « haute retenue ».  Poursuivant, elle a exhorté les deux parties à travailler la main dans la main pour engendrer une désescalade, poursuivre leur coopération cruciale sur le plan sécuritaire et mettre fin aux actes de violence.  Elle a ensuite dénoncé la démolition, le mois dernier, d’une école financée par les bailleurs de fonds dans le sud d’Hébron.  Une deuxième, financée en partie par le Royaume-Uni, est menacée de démolition, s’est-elle alarmée.  Des actes qu’elle condamne, tout comme la démolition de structures dans les territoires palestiniens occupés, y compris dans la zone C, se référant aux accords d’Oslo, qui, a-t-elle rappelé, sont limpides et stipulent que cette zone doit passer petit à petit sous juridiction palestinienne.  Pour finir, elle a exhorté les bailleurs de fonds à appuyer l’UNRWA et combler les lacunes très graves de financement ce mois, rappelant le rôle crucial de l’UNRWA pour la stabilité régionale.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a rappelé que la résolution 2334 a été adoptée pour réaffirmer le ferme engagement de la communauté internationale à empêcher l’érosion de la solution des deux États.  De plus, cette résolution exhorte les parties à éviter tout acte de violence contre les civils, appelle à la cessation des activités de peuplement et souligne la nécessité de déployer des efforts collectifs pour lancer des négociations crédibles, a poursuivi la représentante, avant d’exprimer sa préoccupation face aux développements en Cisjordanie, à Jérusalem et à Gaza.  Condamnant les attaques violentes et les meurtres de civils de part et d’autre, elle a aussi dénoncé la poursuite des destructions et des actes de provocation.  La déléguée a réitéré son appel à l’arrêt de toute violence, tout en souhaitant que le Conseil de sécurité envoie un signal fort contre toutes les mesures qui empêchent de se concrétiser la possibilité d’une paix durable entre Israël et la Palestine.

Ce n’est qu’en réalisant la vision de deux États vivant côte à côte dans la paix, la sécurité et la reconnaissance mutuelle, et en résolvant de manière permanente toutes les questions relatives au statut final par des négociations directes, que les aspirations légitimes des deux peuples seront réalisées, a-t-elle fait valoir.  Enfin, après avoir invité les membres du Conseil à ne pas ignorer les conséquences du statu quo, la représentante a relevé que les attentats terroristes, les faits de violence et l’incitation à la haine continuent de susciter la peur et la suspicion mutuelles entre les parties.  Cela pourrait conduire à faire perdurer le conflit, ce qui ne ferait qu’augmenter le nombre de victimes des deux côtés, a-t-elle averti.

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