Conseil de sécurité: la Somalie dénonce une « déconnexion croissante » entre le régime de sanctions la visant et l’évolution de sa lutte contre les Chabab
Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, le Président du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 751 (1992) concernant la Somalie lui présenter les activités de cet organe depuis le 20 octobre 2022. Réagissant à cet exposé, le représentant de la Somalie a réitéré la position de son gouvernement en faveur d’une levée totale de l’embargo sur les armes, avant de dénoncer une « déconnexion croissante » entre le régime de sanctions appliqué à son pays et la situation sur le terrain, notamment s’agissant de la lutte contre les Chabab.
À l’entame de sa présentation, le Président du Comité 751 a rappelé que, par sa résolution 2662 (2022) adoptée le 17 novembre dernier, le Conseil de sécurité a encore assoupli l’embargo sur les armes déjà partiellement levé afin de soutenir le développement des institutions somaliennes de sécurité et de police. M. Kimihiro Ishikane, du Japon, a également rappelé que cette résolution a modifié le nom du Comité, désormais dénommé « Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution (1992) concernant les Chabab », ce qui illustre, selon lui, l’accent mis par le régime de sanctions.
M. Ishikane a d’autre part indiqué que, le 17 février de cette année, le Comité s’est réuni pour entendre un exposé du Groupe d’experts reconstitué sur la Somalie relatif à son programme de travail pour 2023. À cette occasion, a-t-il indiqué, le Coordonnateur du Groupe a informé le Comité de la poursuite de ses enquêtes sur les sources de financement des Chabab, notamment les opérations portuaires en Somalie susceptibles de générer des revenus pour ce groupe terroriste, ainsi que sur les violations potentielles de l’embargo sur les armes et l’interdiction du charbon de bois.
Le Coordonnateur du Groupe d’experts a en outre évoqué les efforts du Gouvernement fédéral somalien à l’appui des critères définis dans le rapport du Secrétaire général visant à guider le Conseil dans son examen plus approfondi de l’embargo sur les armes, a ajouté le Président du Comité.
Ces critères de référence « ne semblent ni mesurables ni réalistes », lui a répondu le représentant de la Somalie, pour qui l’embargo sur les armes, initialement destiné à freiner l’afflux d’armes et à consolider la sécurité, est devenu un « obstacle » entravant les efforts déployés par le Gouvernement fédéral pour contrer la menace évolutive d’« Al-Khawarij » -nom donné aux Chabab par les autorités somaliennes- et pour mettre en œuvre le Plan de transition.
Pour le représentant, les sanctions devraient cibler ceux qui constituent une menace pour la paix et la sécurité en Somalie tout en soutenant les politiques de sécurité du Gouvernement fédéral. Il est donc essentiel, selon lui, d’adapter les sanctions à la stratégie du Président somalien, M. Hassan Sheikh Mohamud, qui prévoit de combattre le groupe terroriste par le biais d’un partenariat régional et international, en vue de le vaincre militairement, de le priver de ressources et de contrer son idéologie d’extrémisme violent.
Pour ce qui est de l’embargo sur le charbon de bois somalien, M. Ishikane a fait savoir que le Comité a récemment reçu deux lettres de la Somalie à ce sujet, l’une concernant le charbon de bois qui se trouvait à bord du navire MV Fox, la seconde portant sur les stocks de charbon de bois existants. Sur ce dernier point, le représentant de la Somalie a assuré que son gouvernement se conforme aux dispositions de la résolution 2662 (2022), tout en étant conscient qu’une stratégie de réduction des stocks exige de prendre en compte la lutte contre la pauvreté.
À propos de « l’affaire MV Fox », le représentant a salué la saisie par les autorités d’Oman du charbon de bois somalien présent à bord du navire dans le port de Salalah, mais s’est dit préoccupé par la vente signalée de la cargaison confisquée par les autorités omanaises. À ses yeux, la distribution du produit de cette revente au Gouvernement somalien « garantirait le retour dudit produit à son propriétaire initial, le peuple somalien », conformément aux objectifs des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.
Enfin, après avoir réaffirmé que les sanctions imposées de longue date à la Somalie « ne sont pas propices à l’accès des forces de sécurité somaliennes à l’équipement militaire nécessaire pour mener à bien le mandat de protection de la population et de l’intégrité territoriale du pays », il a assuré que le Gouvernement fédéral somalien assumera l’entière responsabilité de la sécurité de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) d’ici à 2024 et collaborera étroitement avec les membres du Conseil sur la levée totale de l’embargo sur les armes, afin de faciliter la paix pour le pays et pour la région.
Pour sa part, le Président du Comité a indiqué que, lors de sa prochaine communication au Conseil, il lui fera rapport des statistiques concernant l’embargo sur les armes et les notifications de dérogation sur les engins explosifs improvisés.