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Conseil de sécurité: le Chef de l’AIEA présente cinq principes pour garantir la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine

9334e séance, après-midi
CS/15300

Conseil de sécurité: le Chef de l’AIEA présente cinq principes pour garantir la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine

Cet après-midi, le Conseil de sécurité s’est réuni pour faire le point sur la situation de la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine, une réunion demandée par l’Équateur et la France.  Dans son exposé, le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), M. Rafael Mariano Grossi, a présenté sa dernière proposition en cinq points pour assurer la sûreté et la sécurité de la centrale, une proposition qui a été soutenue par les membres du Conseil même s’ils avaient des opinions divergentes quant à la responsabilité de chaque partie dans les attaques autour du site. 

Alors que la situation est « toujours extrêmement fragile et dangereuse », le Chef de l’AIEA a insisté sur l’urgence qu’il y a à tout faire pour éviter un incident nucléaire en Ukraine, comparant la situation actuelle à Zaporijia à la « roulette russe ».  À sept reprises depuis le début de l’agression russe, le site de Zaporijia a perdu toute alimentation électrique externe et a dû faire appel à des générateurs de secours, « dernière ligne de défense contre un accident nucléaire », pour assurer le refroidissement vital du réacteur et du combustible usé, a souligné M. Grossi, précisant que la dernière coupure électrique remonte à la semaine dernière. 

Soucieux d’éviter tout risque de « scénario catastrophe », M. Grossi a « solennellement et respectueusement » demandé aux parties d’éviter un accident nucléaire et de garantir l’intégrité de la centrale de Zaporijia en adhérant aux cinq principes de sécurité suivants: ne pas mener d’attaque de quelque nature que ce soit depuis ou contre la centrale, en particulier contre les réacteurs, le stockage du combustible usé, d’autres infrastructures critiques ou le personnel; ne pas utiliser la centrale comme lieu de stockage ou de base pour des armes lourdes ou du personnel militaire qui pourraient être utilisés pour une attaque depuis la centrale; ne pas mettre en péril l’alimentation électrique hors site de la centrale; protéger toutes les structures, tous les systèmes et tous les composants essentiels à l’exploitation sûre et sécurisée de la centrale nucléaire de Zaporijia contre des attaques ou des actes de sabotage; et en dernier lieu, ne mener aucune action qui porte atteinte à ces principes. 

La présence des experts de la Mission de soutien et d’assistance de l’AIEA à Zaporijia (ISAMZ) sera renforcé et ils feront rapport au Directeur général de l’AIEA sur le respect de ces principes, et ce dernier rendra publiquement compte de toute violation éventuelle, a précisé M. Grossi. 

Si ces principes ont été soutenus par l’ensemble des membres du Conseil, la Russie affirmant qu’ils sont conformes avec les mesures prises par elle-même au niveau national, le Royaume-Uni n’a pas manqué de l’accuser d’avoir violé l’ensemble des sept piliers de la sûreté et de la sécurité nucléaires de l’AIEA, arguant que le contrôle qu’elle exerce sur la centrale de Zaporijia est illégal et continue de représenter une menace sérieuse pour le fonctionnement sûr et sécurisé de l’installation. 

À son instar, plusieurs autres délégations, dont l’Ukraine, ont fait état de la présence de matériel militaires, d’armes lourdes et de forces russes sur place et à proximité de la centrale.  Cela indiquerait, selon elles, que la Russie utilise la plus grande centrale nucléaire d’Europe comme un élément de sa stratégie militaire.  Compte tenu de l’occupation de la centrale par un autre État, les cinq principes de l’AIEA devraient s’accompagner d’une « exigence de démilitarisation complète et de désoccupation » de l’installation, a estimé la délégation ukrainienne. 

La Russie a démenti ces allégations, affirmant qu’avec le concours de la direction de l’AIEA, elle a déployé tous les efforts nécessaires pour prévenir les menaces à la sécurité de la centrale de Zaporijjia qu’elle a imputées au régime Zelenskyy et ses parrains occidentaux.  Elle a notamment déploré que l’initiative visant à créer une zone de protection autour de la centrale n’ait toujours pas vu le jour « en raison de la réticence de Kiev à s’engager à ne pas bombarder la centrale nucléaire ». 

Il n’en reste pas moins que la plupart des membres du Conseil, dont la France, ont insisté sur le fait que pour éviter un accident « aux conséquences irréparables », il importe que la Russie rende à l’Ukraine le contrôle total de toutes les installations nucléaires et cesse d’exercer sur les personnels des pressions et des menaces qui aggravent le risque d’une erreur humaine. 

Les États-Unis ont par ailleurs fait savoir que Moscou aurait déconnecté les capteurs essentiels de surveillance des rayonnements de Zaporijia, ce qui signifie que les données de la centrale sont maintenant transmises à l’autorité de réglementation nucléaire russe.  La centrale de Zaporijia appartient à l’Ukraine et toutes les données nécessaires à son fonctionnement doivent être transmises à Kiev, a insisté la délégation.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. RAFAEL MARIANO GROSSI, Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a rappelé que c’est la première fois dans l’histoire qu’une guerre se déroule au milieu des installations d’un important programme de production d’énergie nucléaire.  En effet, plusieurs des cinq centrales nucléaires ukrainiennes ont été directement bombardées, toutes ces centrales ont été privées d’électricité à un moment ou à un autre, et la centrale de Zaporijia est passée sous contrôle militaire et opérationnel de la Russie.  Il a indiqué que depuis le début de la guerre, l’AIEA a dépêché pas moins de 12 missions d’experts en Ukraine et que depuis le 1er septembre 2022, une mission de soutien et d’assistance de l’AIEA est stationnée à la centrale nucléaire de Zaporijia, « littéralement sur la ligne de front ».  En outre, depuis janvier de cette année, d’autres experts de l’AIEA sont en poste sur tous les autres grands sites nucléaires ukrainiens- Rivne, Ukraine du Sud, Khmelnytskyy et Tchernobyl- et l’AIEA poursuit ses activités vitales de vérification des garanties dans toute l’Ukraine, en veillant à ce qu’il n’y ait pas de détournement de matières nucléaires à des fins militaires. 

Il a alerté que la situation est toujours extrêmement fragile et dangereuse à la centrale de Zaporijia en matière de sûreté et de sécurité nucléaires.  Les activités militaires se poursuivent dans la région et pourraient s’intensifier considérablement dans un avenir proche, a-t-il averti précisant que la centrale fonctionne avec un personnel considérablement réduit.  À sept reprises, le site a perdu toute alimentation électrique hors site et a dû faire appel à des générateurs diesel de secours, « dernière ligne de défense contre un accident nucléaire », pour assurer le refroidissement vital du réacteur et du combustible usé, a fait savoir M. Grossi, précisant que la dernière coupure électrique remonte à la semaine dernière.  Il a comparé la situation actuelle à la roulette russe et a appelé toutes les parties à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour réduire au minimum le risque d’accident et protéger la sûreté et la sécurité nucléaires de la centrale. 

Le Chef de l’AIEA a ensuite énuméré les sept piliers indispensables pour garantir la sûreté et la sécurité nucléaires lors d’un conflit armé qu’il avait présenté il y a un an: le maintien de l’intégrité physique des installations - qu’il s’agisse des réacteurs, des piscines de combustible ou des entrepôts de déchets radioactifs; tous les systèmes et équipements de sûreté et de sécurité doivent être pleinement fonctionnels à tout moment; le personnel d’exploitation doit être en mesure de s’acquitter de ses tâches en matière de sûreté et de sécurité et de prendre des décisions sans subir de pressions indues; tous les sites nucléaires doivent disposer d’une alimentation électrique sécurisée hors site à partir du réseau; les chaînes d’approvisionnement logistique et les transports vers et depuis les sites doivent être ininterrompus; et il doit y avoir des systèmes efficaces de surveillance des rayonnements sur site et hors site, ainsi que des mesures de préparation et d’intervention en cas d’urgence.  Enfin, il doit y avoir une communication fiable avec l’autorité de réglementation et les autres parties concernées. 

Jugeant le moment venu d’être plus précis sur ce qui est requis, il a expliqué avoir travaillé de manière intensive et en consultation avec les dirigeants de l’Ukraine et de la Russie pour définir des principes concrets pour contribuer à garantir la sûreté et la sécurité nucléaires de la centrale nucléaire de Zaporijia et éviter un accident nucléaire et de garantir l’intégrité de la centrale: ne pas mener d’attaque de quelque nature que ce soit depuis ou contre la centrale, en particulier contre les réacteurs, le stockage du combustible usé, d’autres infrastructures critiques ou le personnel; ne pas utiliser la centrale comme lieu de stockage ou de base pour des armes lourdes (lance-roquettes multiples, systèmes d’artillerie et munitions, chars) ou du personnel militaire qui pourraient être utilisés pour une attaque depuis la centrale; ne pas mettre en péril l’alimentation électrique hors site de la centrale à tout moment; protéger toutes les structures, tous les systèmes et tous les composants essentiels à l’exploitation sûre et sécurisée de la centrale nucléaire de Zaporijia contre des attaques ou des actes de sabotage et, en dernier lieu, ne mener aucune action qui porte atteinte à ces principes. 

Les experts de la Mission d’appui et d’assistance de l’AIEA à Zaporijia (ISAMZ) feront rapport sur le respect de ces principes au Directeur général qui rendra compte publiquement de toute violation de ces principes, a précisé M. Grossi qui a demandé « respectueusement et solennellement » aux deux parties de respecter ces cinq principes.

M. IGNAZIO CASSIS, Conseiller fédéral et Chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, a salué l’engagement continu de l’AIEA pour assurer la protection des installations nucléaires civiles en Ukraine, avant de réitérer l’appel à la Fédération de Russie à retirer ses troupes du territoire ukrainien, et de condamner toute attaque perpétrée contre des infrastructures civiles.  Il a estimé que les sept piliers élaborés par l’AIEA résument parfaitement ce qui doit être fait pour garantir la sureté nucléaire dans tous les conflits armés.  Aujourd’hui, a-t-il dit, nous avons l’occasion de soutenir cinq principes concrets pour protéger la centrale nucléaire de Zaporijia, prévenir un désastre nucléaire avec toutes ses conséquences pour la population et l’environnement, et donc, pour assurer la protection de la population civile.  Il a fait part de son plein soutien aux propositions de l’Agence, saluant une approche pragmatique et ciblée, et a invité la Fédération de Russie et l’Ukraine à pleinement mettre en œuvre ces cinq principes, et à s’engager pour protéger la centrale nucléaire de Zaporijia. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a rappelé que cette séance du Conseil de sécurité a lieu à la demande de la France et de son pays.  Il a salué le courage et le professionnalisme des équipes de l’AIEA déployées sur le terrain à Zaporijia, qui doivent pouvoir évaluer la situation.  Le délégué a appelé la Russie à cesser toute agression militaire, comme l’a ordonné la Cour internationale de Justice (CIJ), et à rétablir le plein contrôle du territoire et des infrastructures et installations au peuple ukrainien, y compris la centrale électrique de Zaporijia.  Selon le délégué, le monde est mis à l’épreuve simultanément par le risque d’accident nucléaire dans une usine à usage pacifique et par la menace posée par les armes nucléaires.  Dans les deux cas, cela entraînerait des conséquences humanitaires catastrophiques. Il a regretté qu’à ce jour, il n’ait pas été possible de créer une zone de sûreté nucléaire, raison de plus pour que le Conseil de sécurité exige le respect du Statut de l’AIEA, de la Charte des Nations Unies, de la Convention sur la sûreté nucléaire, et d’autres textes pertinents.  Il a également réitéré la nécessité de se conformer aux sept piliers de la sûreté nucléaire de l’AIEA.  Selon le représentant, un accord garantissant la sécurité et la protection nucléaires est essentiel pour réduire les risques et apaiser les tensions dans ce domaine. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé qu’il y a tout juste une semaine, la centrale nucléaire de Zaporijia a de nouveau été privée d’électricité pendant plusieurs heures.  Pour la septième fois depuis le début de l’agression russe, nous sommes passés près d’un accident nucléaire dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe, que la Russie a coupée de ses lignes d’alimentation électrique de secours, a dénoncé la représentante, qui s’est déclarée très préoccupée par la menace pesant sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires de l’Ukraine.  Elle a notamment jugé très inquiétante la dégradation des conditions d’accès qui n’ont pas permis à l’AIEA d’opérer ce week-end la rotation de l’équipe d’experts.  La Russie porte seule la responsabilité de cette situation puisque c’est elle qui a saisi de force cette centrale, a-t-elle martelé, avant de s’élever contre le minage des abords de la centrale et la consolidation de positions militaires sur le site. 

Pour éviter un accident « aux conséquences irréparables », il importe que la Russie rende à l’Ukraine le contrôle total de toutes les installations nucléaires et cesse d’exercer sur les personnels des pressions et des menaces qui aggravent le risque d’une erreur humaine, a plaidé la déléguée, appelant la Russie à ne plus utiliser la centrale de Zaporijia comme une base militaire. Elle a d’autre part jugé essentiel que les principes exposés par le Directeur général de l’AIEA, destinés à assurer la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, soient pleinement appliqués, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale ukrainiennes.  Il est enfin crucial de pérenniser l’accès des experts de l’AIEA à toutes les infrastructures nucléaires de l’Ukraine, a préconisé la représentante, ajoutant que, le 5 mai dernier, la France a signé avec l’AIEA et l’agence de l’énergie atomique ukrainienne un accord qui permettra de garantir le fonctionnement des générateurs de secours de la centrale nucléaire Ukraine du Sud. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que son pays, avec le concours de la direction de l’AIEA, a déployé tous les efforts nécessaires pour prévenir les menaces à la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia qu’il a imputées au « régime Zelenskyy » et à ses parrains occidentaux. Il a rappelé que suite à sa visite du 1er septembre 2022, le Directeur général de l’AIEA a proposé la création d’une zone de protection autour de Zaporijia dont la mise en œuvre, a affirmé le délégué, contribuerait à la cessation des attaques de l’Ukraine contre la centrale et à prévenir une catastrophe d’origine humaine aux conséquences imprévisibles.  Le représentant a regretté que cette initiative n’a pu être menée à bien en raison de la réticence de Kiev à s’engager à ne pas bombarder la centrale nucléaire. 

Il a affirmé que les propositions du Directeur général pour assurer la sécurité de la centrale sont conformes aux mesures prises par la Russie au niveau national.  Il a assuré qu’il n’y a jamais eu d’attaques depuis la centrale de Zaporijia et que ni armes ni munitions n’ont été placées à la centrale.  En outre, des mesures concrètes ont été prises pour protéger les structures et les matériels les plus sensibles de la centrale contre les attaques ou le sabotage. 

La Russie entend prendre toutes les mesures possibles pour renforcer la sécurité nucléaire et physique de la centrale conformément à la législation nationale et aux obligations découlant des instruments juridiques internationaux pertinents auxquels elle est partie, a assuré le délégué qui a promis que son gouvernement continuera de protéger la centrale de Zaporijia et d’empêcher Kiev et l’Occident collectif de la violer.  Il a également prévenu que la Russie répondra fermement à toute attaque de l’Ukraine contre la centrale, ses installations critiques, notamment les lignes d’alimentation électrique, ainsi que contre la ville d’Energodar, où vivent les employés de la centrale et leurs familles.  Il a ensuite appelé le Secrétariat de l’AIEA à faire montre d’impartialité et de condamner les actions de l’Ukraine qui ont amené à plusieurs reprises le monde au bord d’une catastrophe nucléaire. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a estimé que la situation actuelle en Ukraine est telle qu’une escalade du conflit en conflagration nucléaire, « par accident, intention ou erreur de calcul », est une « possibilité réelle ».  Rappelant que le conflit a déjà placé les sites des réacteurs nucléaires de Tchernobyl et de Zaporijia au centre d’une zone de guerre, il a observé que les postures doctrinales nucléaires sont ravivées et les accords de non-prolifération suspendus.  Alors que la théorie de la dissuasion a traditionnellement dominé les doctrines nucléaires, nous assistons à une évolution vers des doctrines mettant l’accent sur « l’utilisation limitée d’armes nucléaires tactiques » comme réponse possible à l’utilisation d’armes similaires par l’adversaire, s’est-il alarmé, assurant que son pays soutient toutes mesures visant à protéger et à prévenir tout incident ou accident nucléaire, y compris celles proposées par le Directeur général de l’AIEA.  Après avoir plaidé, à l’instar de l’AIEA, pour une approche rigoureuse et coordonnée à l’échelle mondiale en matière de sûreté nucléaire, le représentant a indiqué que l’approche africaine sur cette question plaide pour des responsabilités collectives renforcées, au regard desquelles une menace nucléaire, d’où qu’elle vienne, constitue une menace pour toute l’humanité, comme précisé dans le Traité de Pelindaba.  Il est donc de notre responsabilité collective d’éviter la répétition d’un incident ou d’un accident nucléaire en Ukraine, dans un contexte géopolitique déjà fragile, a-t-il affirmé, avant de répéter que mettre fin au conflit reste la solution la plus viable pour assurer la sûreté et la sécurité nucléaires.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a exhorté tous les membres du Conseil à appuyer les principes présentés aujourd’hui par M. Grossi et à œuvrer pour éviter une catastrophe à la centrale de Zaporijia.  Un pays membre permanent de ce Conseil continue de fouler aux pieds les principes de la sécurité nucléaire, a dénoncé la déléguée qui a indiqué que des images publiées en avril par le Royaume-Uni montrent que des emplacements militaires russes se trouvent au sommet des réacteurs de la centrale.  Pour aggraver les choses, des informations récentes indiquent que Moscou a déconnecté les capteurs essentiels de surveillance des rayonnements de Zaporijia, ce qui signifie que les données de la centrale sont maintenant transmises à l’autorité de réglementation nucléaire russe.  La centrale nucléaire de Zaporijia appartient à l’Ukraine et ses données doivent être transmises à l’Ukraine, pas à la Russie, a insisté la représentante. 

Elle a loué le comportement responsable de l’Ukraine en comparaison de celui de la Russie sur ce dossier nucléaire.  Les agissements de Moscou sont selon elle une atteinte à la paix et à la sécurité internationales et nous devons faire front commun afin de demander au Président Putin d’arrêter la folie qu’est cette guerre, a dit la déléguée, en appelant ce pays à cesser sa rhétorique irresponsable.  Enfin, elle s’est dite préoccupée par le déploiement d’armes tactiques au Bélarus. 

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a jugé très alarmant que la centrale nucléaire de Zaporijia ait à nouveau été déconnectée du réseau électrique national pendant plusieurs heures la semaine dernière.  Coupée de toute alimentation externe, le système de refroidissement de la centrale a dû se faire au moyen de générateurs de secours, a-t-elle rappelé. La représentante a dit partager l’avis du Directeur général de l’AIEA, à savoir que cette situation ne peut perdurer. Elle a condamné toute manipulation ou tentative de marchandage utilisant la menace nucléaire, en refusant également toute tentative de politisation de la question.  La représentante a souligné le rôle central et exclusif que l’AIEA doit continuer de jouer en matière de sécurité et de sûreté nucléaires.  Elle a exhorté les parties à coopérer en toute transparence avec l’AIEA, afin de parvenir à un accord qui permettrait la mise en place d’une zone de sécurité autour de la centrale nucléaire.  En outre, a-t-elle déclaré, les parties doivent s’engager à dialoguer pour mettre fin à la guerre.  La représentante s’est dite convaincue que cela est possible, notamment si les parties s’appuient sur le modèle de l’Initiative de la mer Noire. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a insisté sur le fait que le contrôle exercé par la Fédération de Russie sur la centrale nucléaire de Zaporijia est illégal et continue de représenter une menace sérieuse pour le fonctionnement sûr et sécurisé de l’installation.  Elle a rappelé à cet égard que le rapport de février de l’AIEA a confirmé la présence continue de personnel et d’activités militaires sur le site, décrivant une situation « dangereuse, précaire et difficile ».  La représentante a ainsi fait état de la présence de véhicules militaires et de stocks non autorisés dans les salles des turbines, ainsi que de mines terrestres à proximité de l’usine, ce qui met en danger le personnel d’exploitation ukrainien et retarde les travaux de maintenance.  De surcroît, les chaînes d’approvisionnement et la logistique associée continuent d’être gravement touchées par le conflit, tandis que les sources d’alimentation hors site restent vulnérables, a-t-elle dénoncé, ajoutant que de nouvelles images montrent que les forces russes ont établi des positions de combat sur les toits de plusieurs des six bâtiments du réacteur.  Cela indique qu’elles ont intégré les bâtiments du réacteur de la plus grande centrale nucléaire d’Europe dans la planification de leur défense tactique, a souligné la déléguée, selon laquelle, par ses actions, la Russie a violé l’ensemble des sept piliers de la sûreté et de la sécurité nucléaires.  Après avoir remercié le Directeur général de l’AIEA et ses collègues pour leurs efforts visant à assurer la sûreté et la sécurité nucléaires en Ukraine, la représentante a rendu hommage au courage, au professionnalisme et à la résilience du personnel ukrainien de la centrale de Zaporijia qui continue de travailler sans relâche sous la contrainte. Selon elle, la Russie peut résoudre cette situation à tout moment, en retirant ses troupes de la centrale et de toute l’Ukraine.  

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a réaffirmé d’emblée le soutien de son pays aux « sept piliers indispensables de la sûreté et de la sécurité nucléaires » de l’AIEA avant de souligner l’importance de garantir et de promouvoir la sûreté et la sécurité des installations nucléaires en toutes circonstances.  Elle a condamné avec la plus grande fermeté la violation manifeste de la Charte des Nations Unies par la Russie et son agression contre l’Ukraine, en lui demandant instamment de retirer immédiatement ses forces et son personnel.  La représentante a également condamné la signature par les ministres de la défense de la Russie et du Bélarus d’un accord établissant des procédures pour le déploiement d’armes nucléaires tactiques russes au Bélarus, ce qui attise, selon elle, encore davantage les tensions.  Elle a assuré le soutien continu du Japon pour les efforts déployés par l’AIEA en vue de renforcer la sûreté et la sécurité nucléaires et de faire appliquer des garanties aux matières et installations nucléaires en Ukraine.  La déléguée a salué la présence continue d’experts de l’AIEA à Zaporijia et l’attention qu’ils portent à la sûreté et à la sécurité nucléaires sur le site en cette période très difficile.  Avant de conclure, elle a précisé que le Japon avait apporté une contribution financière au Secrétariat pour faciliter les missions de l’Agence, notamment pour l’achat de véhicules spéciaux pour le système de rotation périodique du personnel de l’AIEA, portant sa contribution totale aux activités de l’AIEA à environ 12 millions d’euros. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a dénoncé l’occupation par la Russie de la centrale de Zaporijia, avant de souligner le risque d’escalade.  C’est une situation inédite dans l’histoire, jamais une centrale nucléaire n’avait été utilisée comme bouclier par un pays, a dit le délégué.  Il a demandé le déploiement des inspecteurs de l’AIEA dans la centrale, soulignant la nécessité d’en protéger les réacteurs.  La situation reste imprévisible, a poursuivi le délégué, avant de saluer les principes énoncés par M. Grossi.  Il a enfin déclaré que la situation perdurera tant que la Russie occupera la centrale. La Russie n’a rien à faire dans cette centrale ni en Ukraine, a conclu le délégué, en demandant qu’elle s’en retire. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a souhaité que l’AIEA poursuive son rôle de garant de la sécurité et de la sûreté nucléaires dans le monde.  Il a salué le fait que l’Agence ait pu continuer à assurer une présence à la centrale de Zaporijia.  Il a dit soutenir les sept piliers de sécurité, d’autant que la semaine dernière, la centrale a été coupée du réseau électrique local.  Il a invité les deux parties à adhérer aux principes de l’AIEA afin d’éviter une catastrophe et espéré que la prochaine fois que le Directeur général de l’AIEA viendra au Conseil de sécurité, il annoncera la bonne nouvelle de l’adhésion des parties aux cinq principes visant à éviter un accident à la centrale de Zaporijia.  Le représentant a ensuite attiré l’attention sur le rétablissement de la confiance entre son pays et l’Argentine qui coopèrent dans le domaine du nucléaire, notamment par le biais de l’Agence brasilo-argentine de comptabilité et de contrôle des matières nucléaires (ABACC), désormais trentenaire.  Pour éviter une catastrophe à la centrale nucléaire de Zaporijia, il faut que toutes les parties fassent montre de la volonté politique nécessaire, a-t-il conclu. 

M. GENG SHUANG (Chine) a dit espérer que les pourparlers de paix reprendront sous peu entre l’Ukraine et la Fédération de Russie.  Pour ce faire, ces deux pays doivent créer un terrain favorable à une solution politique, en rétablissant une confiance mutuelle qui permette d’écarter les menaces à la sécurité en Ukraine.  Le délégué a exhorté les parties à assurer la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia où des opérations militaires se poursuivent ainsi que dans les zones avoisinantes.  Plusieurs installations ayant été endommagées, le risque d’une catastrophe ne cesse de se préciser, a déploré le représentant.  Le Directeur général de l’AIEA, a-t-il rappelé, s’est concentré sur les préoccupations communes de toutes les parties et a proposé une initiative pour protéger la centrale sur la base de cinq principes fondamentaux.  Le représentant a donc exhorté les parties à « protéger l’humanité » dans un esprit de coopération et de coordination, sur la base de la Convention sur la sûreté nucléaire et d’autres instruments internationaux.  La question de la sécurité de la centrale de Zaporijia n’est que l’un des aspects de la guerre en Ukraine, a-t-il relevé, en appelant à une solution politique pour sortir de la crise et de régler les questions en suspens.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) s’est dite préoccupée par le rapport de l’AIEA. Elle a appelé à la mise en œuvre rapide des sept piliers pour sauver l’Ukraine et le monde, et s’est dite favorable à la création d’une zone de démarcation dénucléarisée autour de la centrale dont le caractère civil doit à tout prix être respecté.  La représentante a aussi appuyé l’idée de créer un groupe d’experts techniques, avant de souligner que cette réunion du Conseil est une occasion de revenir sur la question du désarmement nucléaire.  Prenons des mesures de désescalade et mettons fin à cette guerre pour éviter une catastrophe, a-t-elle plaidé, en rappelant qu’en ce mois de mai finissant, Kiev a vécu 15 bombardements.  Elle a demandé aux parties de respecter le droit international humanitaire et les droits humains, en gardant à l’esprit les Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels.  Il est urgent de mettre un terme aux hostilités pour mettre fin à la souffrance des Ukrainiens et retrouver la voie de la diplomatie.  Il est temps que la Russie se retire des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine, a insisté la représentante.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a qualifié d’alarmante la situation relative à la centrale de Zaporijia, en mettant en garde contre les conséquences catastrophiques qu’aurait un accident nucléaire pour le monde.  Elle a plaidé pour la désescalade et rappelé les protections spécifiques prévues par le droit international humanitaire pour les installations nucléaires, notamment l’obligation de protéger l’environnement de tout dommage.  Les récents développements montrent bien la nécessité d’une solution diplomatique au conflit, a-t-elle dit et comme nous l’avons dit à maintes reprises, la cessation des hostilités dans tout le pays est le seul moyen d’empêcher toute erreur de calcul nucléaire. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a rappelé que la cause du problème est la présence illégale du personnel militaire russe à la centrale de Zaporijia. Sans cette présence, la situation dont nous discutons aujourd’hui n’existerait pas.  La représentante a relevé que les informations font état du travail extrêmement difficile que le personnel ukrainien doit assumer, dans un contexte d’intimidation et de multiplication des interrogatoires voire des enlèvements. Elle a salué la livraison à l’Ukraine de 200 systèmes portables pour compenser les coupures fréquentes d’électricité.  Les risques qui pèsent actuellement sur la sûreté et la sécurité nucléaires de l’Ukraine mettent en danger le monde entier, a argué la déléguée, ajoutant que tout cela est la conséquence directe des activités illégales de la Fédération de Russie et de la guerre injustifiée et non provoquée qu’elle mène contre l’Ukraine. Les autorités ukrainiennes, a-t-elle martelé, doivent recouvrer le contrôle total et légitime d’une centrale qui doit être démilitarisée et débarrassée de tout personnel militaire étranger. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a salué le professionnalisme et l’engagement des experts de la mission de l’AIEA déployée à la centrale nucléaire de Zaporijia « temporairement occupée » par la Russie.  Il a également loué la bravoure du personnel ukrainien, qui travaille « dans des conditions d’intimidation constante et de menaces de détention et de torture par l’armée russe ».  Le représentant a indiqué que les forces russes ont non seulement miné le périmètre de la centrale et mais aussi bombardé le site et des zones adjacentes, ce qui porte gravement atteinte à la sûreté nucléaire de l’installation et pourrait entraîner un incident ou un accident nucléaire.  Il a rappelé à cet égard que le premier des sept piliers de la sûreté et de la sécurité nucléaires défendus par le Directeur général de l’AIEA prévoit que l’intégrité physique des installations nucléaires doit être maintenue, qu’il s’agisse des réacteurs, des bassins de combustible ou encore des entrepôts de déchets radioactifs.  Le délégué a ajouté que les activités militaires russes peuvent entraîner des coupures de l’alimentation électrique hors site, comme cela s’est produit à sept reprises depuis le début de l’invasion, obligeant la centrale à fonctionner avec des générateurs diesel.  Il a précisé que le cas le plus récent de ce type de « panne » a eu lieu le 22 mai, après qu’une attaque au missile russe a entraîné la déconnexion de la dernière ligne de transmission à haute tension alimentant la centrale de Zaporijia pour ses besoins internes.  Grâce au travail des ingénieurs électriciens ukrainiens, le fonctionnement de la ligne de transmission a cependant été rétabli le jour même et la centrale a été reconnectée au réseau électrique ukrainien, a-t-il relaté. 

Le représentant a ensuite signalé que la Russie continue d’utiliser activement la centrale nucléaire à des fins militaires, y déployant environ 500 militaires et 50 unités d’armes lourdes.  Des équipements, des munitions et des explosifs ont été entreposés dans les bâtiments des turbines des unités Nos 1, 2 et 4 de la centrale, a-t-il précisé, estimant que ces actions irresponsables font planer la menace d’un accident dangereux.  À cet égard, il a réaffirmé le soutien de l’Ukraine à l’action du Directeur général de l’AIEA visant à remédier à cette situation inappropriée et à rétablir la sûreté et la sécurité nucléaires à la centrale, dans le droit fil des sept piliers indispensables.  Il a également pris note des principes énoncés par M. Grossi pour aider à assurer la sûreté et la sécurité de la centrale de Zaporijia, tout en estimant que, compte tenu du caractère « unique » de la situation, à savoir l’occupation de la centrale par un autre État, ces principes devraient s’accompagner d’une « exigence de démilitarisation complète et de désoccupation » de l’installation.  Selon lui, en occupant illégalement cette centrale et en en faisant un élément de sa stratégie militaire, la Russie a enfreint tous les principes internationaux de sûreté et de sécurité nucléaires ainsi que la grande majorité de ses obligations découlant de traités internationaux. 

Pour sa part, a poursuivi le délégué, l’Ukraine réaffirme qu’elle n’a jamais eu recours et n’aura jamais recours à une action susceptible de conduire à un accident nucléaire dans la centrale.  Nous sommes conscients, a-t-il dit, des « conséquences catastrophiques » qu’aurait un tel incident pour l’Ukraine et les États voisins, et notre position en matière de sûreté et de sécurité nucléaires est claire: pour éliminer les menaces nucléaires découlant de la présence illégale russe dans la centrale, les troupes et les armes doivent être retirées, la centrale ne doit plus être occupée et son contrôle doit être rendu à l’Ukraine.  Pour le représentant, les principes visant à assurer la sûreté et la sécurité nucléaires à la centrale de Zaporijia devraient aussi prévoir des garanties d’alimentation électrique ininterrompue à partir du territoire sous contrôle du Gouvernement ukrainien et un couloir humanitaire pour assurer la rotation du personnel de gestion, d’exploitation et de réparation de la centrale.  Enfin, après avoir rappelé que la sûreté radiologique et nucléaire est le premier point avancé par la « formule de paix » du Président ukrainien, il a jugé impératif de rallier tous les efforts à cette initiative, dont la mise en œuvre assurera, selon lui, une paix juste et durable en Ukraine et empêchera la répétition de crimes similaires à l’avenir, « y compris dans le domaine nucléaire ». 

Reprenant la parole à la fin de la séance, le Directeur général de l’AIEA, M. GROSSI, a constaté qu’il existe des points de divergence, mais aussi de consensus quant au fait qu’il ne doit pas y avoir d’accident nucléaire.  Dans le contexte de ces circonstances inquiétantes et complexes, nous faisons un pas dans la bonne direction afin de garantir la sûreté et la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia, a-t-il estimé. Il s’est dit encouragé par le soutien en faveur des sept piliers et des cinq principes de l’AIEA, appelant à les rendre encore plus efficaces afin de protéger la centrale.  Il a indiqué que la Mission d’appui et d’assistance de l’AIEA maintiendra sa présence sur le site qui sera renforcée afin d’éviter les conséquences imprévisibles d’un accident nucléaire.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: malgré les dynamiques politiques et diplomatiques régionales, la crise humanitaire en Syrie continue de se détériorer

9333e séance – matin
CS/15298

Conseil de sécurité: malgré les dynamiques politiques et diplomatiques régionales, la crise humanitaire en Syrie continue de se détériorer

Devant l’aggravation des souffrances humanitaires en Syrie, l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Geir Pedersen, a déclaré, ce matin, au Conseil de sécurité, que l’accélération des efforts politiques et diplomatiques régionaux en vue de la normalisation des relations avec la Syrie devait s’accompagner d’une amélioration tangible des conditions de vie de la population. 

La participation du Président syrien Bashar Al-Assad au plus récent Sommet de la Ligue des États arabes, en Arabie saoudite, et la réunion du 10 mai dernier des Ministres des affaires étrangères de la Türkiye, de l’Iran, de la Fédération de Russie et de la Syrie, à Moscou, illustrent, selon M. Pedersen, une accélération des efforts diplomatiques régionaux afin de briser le statu quo.  Il a appelé à profiter de cette impulsion pour reprendre un processus intrasyrien « sérieux », s’appuyant notamment sur une nouvelle convocation de la Commission constitutionnelle et l’adoption d’un cessez-le-feu national.  « Le statu quo en Syrie n’est pas tenable », a-t-il prévenu, en soulignant la nécessité de stabiliser le pays et d’endiguer le commerce illégal de stupéfiants.

Ce sommet a permis, selon le représentant syrien, de mettre à l’honneur « la gloire d’une unité arabe restaurée » et le soutien régional à la préservation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie.  Or, réhabiliter le Président syrien sans condition ne permettra pas d’établir la paix durable à laquelle les Syriens aspirent, a considéré la France.

Toutefois, a fait valoir la Directrice adjointe du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), la crise humanitaire en Syrie doit rester une priorité mondiale.  Après douze années de conflit, quelque 15,3 millions de personnes, soit 70% de la population syrienne, continuent d’être confrontées à des défis quotidiens pour répondre à leurs besoins les plus élémentaires.  L’insécurité alimentaire affecte aujourd’hui quelque 12 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population, entraînant des taux sans précédent de retards de croissance et de malnutrition maternelle, s’est alarmée Mme Ghada Eltahir Mudawi. 

Les tremblements de terre qui ont frappé le nord du pays, en février dernier, ont aggravé une situation humanitaire déjà critique.  Aujourd’hui encore, plus de 330 000 personnes demeurent déplacées et des milliers d’autres ont perdu l’accès aux services de base et aux moyens de subsistance, a dit la Directrice adjointe.  Une situation intenable pour les familles contraintes de résider dans des abris collectifs, des camps et des établissements informels où prolifèrent les problèmes de protection, y compris la violence sexiste.  La saison chaude pourrait décupler les risques de choléra et d’autres maladies d’origine hydrique.

« Les souffrances humanitaires n’ont jamais été aussi aiguës qu’aujourd’hui », a confirmé l’Envoyé spécial.  Pour faire face à ces crises multiples, la Directrice adjointe de l’OCHA a salué la décision du Gouvernement syrien de proroger jusqu’au 13 août les mesures d’urgence mises en œuvre depuis les séismes afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, y compris via les postes frontière de Raaï et de Bab el-Salam.  Il s’agit selon elle d’un complément vital aux opérations transfrontalières de Bab el-Haoua, qui permet d’en élargir la portée tout en réduisant les coûts.  Ces trois points de passage ont ainsi permis d’intensifier la réponse transfrontalière alors que, depuis février, 2 330 camions chargés d’aide provenant de sept entités des Nations Unies ont traversé le nord-ouest de la Syrie. 

Faisant sien l’appel du Secrétaire général, Mme Mudawi a estimé qu’une prolongation de douze mois du mécanisme transfrontalier par le Conseil de sécurité est indispensable.  « Il s’agit d’une question de vie ou de mort pour des millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie », a-t-elle argué. Seul un accès durable et prévisible à l’aide humanitaire, au moyen du renouvellement de la résolution 2672 (2023) du Conseil de sécurité et de la réouverture des points de passage frontaliers en Syrie, permettra d’améliorer les mesures d’aide, de protection et de relèvement, a renchéri la Directrice de programme pour le Moyen-Orient au Norvegian Refugee Council (NRC), Mme Morgane Aveline, en prévenant que les perturbations de l’accès transfrontalier risquent de priver 4,5 millions de personnes de l’aide dont elles ont besoin. 

À l’opposé, la Fédération de Russie a dénoncé les partisans d’un mécanisme transfrontalier « obsolète » qui défendent sa prorogation d’un an en citant la nécessité d’une planification à long terme des opérations humanitaires de l’ONU, pendant que le Plan de réponse humanitaire demeure sous-financé.  Alors que le mécanisme doit expirer le 10 juillet prochain, « nous ne voyons aucune raison de le prolonger », a déclaré le délégué russe.  L’ONU ayant démontré selon lui sa capacité à organiser son travail avec le Gouvernement syrien sans résolution du Conseil, celle-ci devrait cesser d’exister, a-t-il ajouté.

« Nous devons dépolitiser les modalités d’accès et la réponse humanitaire en Syrie », a fait valoir Mme Aveline.  Dans ce contexte, seule une infime proportion des réfugiés pensent rentrer en Syrie dans les douze prochains mois, non seulement du fait des circonstances économiques et sécuritaires catastrophiques, mais aussi des risques de représailles, a relevé l’Envoyé spécial.  Les nombreux obstacles liés à l’accès aux services de base, aux droits de propriété et à la sécurité continuent de faire obstacle au retour sûr et durable des Syriens déplacés, a confirmé Mme Aveline, en s’alarmant des informations faisant état de rapatriements forcés et d’expulsions des pays d’accueil. 

Alors que davantage de personnes ont besoin d’une aide humanitaire qu’à tout autre moment du conflit, nous assistons à une diminution « dangereuse » des ressources destinées à la réponse humanitaire, s’est alarmée la Directrice adjointe.  Le Plan de réponse humanitaire révisé pour 2023, qui nécessite 5,4 milliards de dollars pour aider 14,2 millions de personnes dans toute la Syrie, est financé à moins de 10%, a-t-elle noté.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. GEIR PEDERSEN, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a noté une accélération des efforts diplomatiques, avec la récente tenue du Sommet de la Ligue des États arabes en Arabie saoudite, en présence du Président syrien, et la réunion du 10 mai à Moscou des Ministres des affaires étrangères de la Türkiye, de l’Iran, de la Russie et de la Syrie.  Il a noté les appels pour une remise sur pieds de la Commission constitutionnelle et indiqué qu’il s’est rendu en Türkiye et en Iran. Le statu quo en Syrie n’est pas tenable, a-t-il dit, en soulignant la nécessité de stabiliser le pays et de lutter contre le trafic de stupéfiants.  Il a loué l’intensification des consultations régionales, en précisant que son objectif est de mieux coordonner les efforts en cours.  Il a demandé des mesures concrètes en accompagnement de ces efforts, les Syriens n’ayant encore rien vu comme amélioration tangible dans leur vie. C’est à cette condition que l’opportunité qui se présente aujourd’hui pourra être considérée comme saisie, a-t-il dit. 

M. Pedersen s’est ensuite fait le relais des voix des réfugiés syriens, en indiquant que ceux-ci nourrissent l’espoir d’un retour dans leur pays.  Seule une infime proportion pensent néanmoins rentrer dans les douze prochains mois en raison des circonstances économiques et sécuritaires, mais aussi des risques de représailles, a-t-il dit.  Le haut fonctionnaire a encouragé le Gouvernement syrien à prendre en compte de manière plus systématique les préoccupations des déplacés et de tous les Syriens.  Il a aussi souhaité que les donateurs se montrent plus généreux afin de mieux remédier au sort des réfugiés.  L’Envoyé spécial a demandé à toutes les parties de prendre des mesures concrètes sur la question des personnes disparues, appuyant l’idée de créer une instance chargée de cette question.  Il a appelé à la reprise d’un « processus intrasyrien sérieux », en souhaitant une nouvelle convocation de la Commission constitutionnelle et l’adoption d’un cessez-le-feu national.  « Les souffrances humanitaires n’ont jamais été aussi aiguës qu’aujourd’hui », a-t-il ajouté.  De nombreux progrès sont possibles si les questions de fond sont abordées et si toutes les parties sont pleinement mobilisées, a conclu l’Envoyé spécial, en soulignant son engagement constant en faveur d’une solution politique répondant aux aspirations du peuple syrien.

Mme GHADA ELTAHIR MUDAWI, Directrice adjointe du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a fait valoir que la crise humanitaire en Syrie doit rester une priorité mondiale.  Après 12 années de conflit, quelque 15,3 millions de personnes, soit 70% de la population syrienne, continuent d’être confrontées à des défis quotidiens pour répondre à leurs besoins élémentaires en matière d’alimentation, de santé, d’assainissement et d’abris.  Aujourd’hui, pour la première fois, les habitants de tous les sous-districts du pays connaissent un certain degré de stress humanitaire, a-t-elle noté.  L’insécurité alimentaire affecte maintenant 12 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population, tandis que les taux de retard de croissance et de malnutrition maternelle atteignent des seuils sans précédent. 

À la suite des tremblements de terre qui ont assombri la situation humanitaire déjà grave, plus de 330 000 personnes sont toujours déplacées et des milliers d’autres ont perdu l’accès aux services de base et aux moyens de subsistance, a encore dit la Directrice adjointe.  Une situation qui demeure critique pour les familles contraintes de résider dans des abris collectifs, des camps et des établissements informels où prolifèrent les problèmes de protection, y compris la violence sexiste, et les besoins en santé mentale.  À l’approche de la saison chaude, les risques de choléra et d’autres maladies d’origine hydrique sont à la hausse.

Face à ces défis, l’ONU et ses partenaires poursuivent leurs efforts pour répondre aux besoins humanitaires les plus urgents, a poursuivi Mme Mudawi, en ajoutant que le soutien des donateurs et du Conseil de sécurité sera crucial.  Elle a salué la décision du Gouvernement syrien de proroger jusqu’au 13 août les mesures d’urgence mises en œuvre depuis les tremblements de terre afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, y compris via les postes frontière de Raaï et de Bab el-Salam.  Il s’agit selon elle d’un complément vital aux opérations transfrontalières de Bab el-Haoua, qui permet d’en élargir la portée tout en réduisant les coûts.  Ces trois points de passage ont permis d’intensifier la réponse transfrontalière, a-t-elle ajouté, alors que 2 330 camions chargés d’aide provenant de sept entités des Nations Unies ont traversé le nord-ouest de la Syrie depuis le tremblement de terre.  L’OCHA a pour objectif d’élargir la portée géographique des missions humanitaires à davantage de zones où les besoins sont importants et mal desservies, a-t-elle expliqué. 

Comme l’a dit le Secrétaire général, une prolongation de 12 mois du mécanisme transfrontalier par le Conseil de sécurité est indispensable.  « Il s’agit d’une question de vie ou de mort pour des millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie », a martelé la Directrice adjointe, en assurant que l’ONU s’efforce également de mettre en place des conditions favorables au renouvellement.  L’OCHA continue pour sa part de réaliser des progrès en matière de relèvement rapide et de programmes de subsistance, a assuré Mme Mudawi, avec une répartition égale du financement entre les zones contrôlées par le Gouvernement et le nord-ouest de la Syrie.  Alors que la mission transversale de Tell Abiad s’est achevée la semaine dernière, les efforts pour relancer les missions à travers les lignes de front continuent d’être retardés.  Conformément au droit international humanitaire, toutes les parties sont tenues de permettre et de faciliter le passage rapide et sans entrave de l’aide humanitaire, a-t-elle rappelé.  Mme Mudawi a exprimé son inquiétude à la suite de la fermeture récente des points de passage frontaliers entre l’Iraq et la Syrie.  Alors que davantage de personnes ont besoin d’aide en Syrie qu’à tout autre moment du conflit, nous assistons à une diminution « dangereuse » des ressources destinées à la réponse humanitaire, s’est alarmée la Directrice adjointe.  Le Plan de réponse humanitaire révisé pour 2023, qui nécessite 5,4 milliards de dollars pour aider 14,2 millions de personnes dans toute la Syrie, est financé à moins de 10%.  Elle a exprimé l’espoir que la septième Conférence de Bruxelles, qui se tiendra les 14 et 15 juin sous l’égide de l’Union européenne, permettra un décaissement rapide des fonds nécessaires pour soutenir le peuple syrien et les pays voisins qui accueillent des réfugiés. 

Mme MORGANE AVELINE, Directrice de programme pour le Moyen-Orient au Norvegian Refugee Council (NRC), a relayé les témoignages de Syriens qui, après plus de 12 années de crise, rêvent d’un avenir meilleur et d’une vie digne.  Elle a partagé l’incertitude ressentie par les familles et les enfants dans les camps de réfugiés, des personnes qui disent « vivre au jour le jour, sans penser au lendemain ».  Comme les plus de 15 millions de Syriens qui ont besoin d’aide, ces familles sont confrontées en permanence aux multiples crises auxquelles le pays fait face, a-t-elle souligné, avertissant que la réponse actuelle à ces défis humanitaires reste très insuffisante.  Alors que les tremblements de terre survenus il y a trois mois ont ajouté une « couche supplémentaire de souffrance », elle a appelé à davantage de soutien financier afin que les opérations de relèvement rapide soient étendues à toutes les communautés touchées par le conflit. Ce soutien doit être fourni à ceux qui souhaitent envoyer leurs enfants dans des écoles sûres et qui ont besoin d’électricité pour se réchauffer, d’un approvisionnement en eau propre et d’un abri digne, a-t-elle expliqué, avant de plaider pour un accès à long terme aux services essentiels et pour des solutions durables favorisant l’autosuffisance. 

Constatant que de nombreux obstacles liés aux services de base, aux droits de propriété et aux questions de sécurité continuent d’empêcher le retour sûr et durable des Syriens déplacés, notamment des femmes, Mme Aveline s’est alarmée des annonces récentes de rapatriements forcés et d’expulsions dans les pays d’accueil.  Cela renforce le besoin urgent d’un suivi systématique des mouvements de retour afin de mieux protéger les rapatriés, a-t-elle affirmé, appelant à la protection des réfugiés dans les pays d’accueil et au respect du principe de non-refoulement.  Selon elle, un meilleur financement de la part des donateurs ainsi que des approches politiques gouvernementales adéquates dans les pays hôtes et en Syrie fourniraient aux Syriens déplacés la résilience, les droits et la protection dont ils ont besoin. 

Dans ce contexte, a-t-elle poursuivi, il ne sera possible d’améliorer l’assistance, la protection et le relèvement qu’avec un accès durable et prévisible de l’aide, notamment via le renouvellement de la résolution 2672 (2023) du Conseil de sécurité et la réouverture des points de passage frontaliers en Syrie.  Ce dispositif doit, selon elle, être complété par la prorogation des exemptions humanitaires au régime de sanctions et par l’autorisation de la réponse transfrontalière de l’ONU en Syrie.  Ce mécanisme assure la continuité, la transparence et la surveillance de la réponse, ainsi que l’accès au financement pour les ONG syriennes, a-t-elle insisté, prévenant que les perturbations de l’accès transfrontalier risquent de priver d’aide 4,5 millions de personnes dans le nord-ouest du pays.  Il importe donc que le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière soit prolongé d’au moins 12 mois et que les accords d’accès bilatéraux soient maintenus et élargis, a-t-elle préconisé, jugeant également essentiel d’intensifier l’assistance à travers les lignes de front et de lever les obstacles administratifs qui freinent les livraisons.  « Nous devons dépolitiser les modalités d’accès et la réponse humanitaire en Syrie », a conclu Mme Aveline, souhaitant que les acteurs humanitaires puissent travailler « efficacement et selon des principes ». 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est également exprimé au nom de la Suisse, en tant que délégations porte-plume du dossier humanitaire syrien. Il a relevé que la situation humanitaire en Syrie reste désastreuse, l’accès inéquitable aux services de santé, couplé à la pression économique, augmentant considérablement le risque d’épidémies.  Il s’est félicité que l’ONU puisse continuer à fournir des services indispensables par les points de passage transfrontaliers de Bab el-Salam et Raaï, après l’autorisation donnée par le Gouvernement syrien de le faire pour une période supplémentaire de trois mois.  Il a rappelé que toutes les modalités d’aide, y compris transfrontalières et de part et d’autre des lignes de front, devraient être exploitées, exhortant les parties à éliminer les obstacles qui se posent à l’acheminement de l’aide.  En outre, les projets de relèvement rapide restent cruciaux pour le rétablissement des services de base, a-t-il encore souligné.  Le délégué a appelé à un financement adéquat pour le Plan de réponse humanitaire 2023 en Syrie.  Constatant que les séismes de février ont exacerbé les besoins de protection préexistants, il a jugé essentiel que ces préoccupations soient adéquatement prises en compte dans la réponse humanitaire, en gardant à l’esprit la vulnérabilité spécifique des femmes. 

Prenant ensuite la parole en sa qualité nationale, le délégué a indiqué que seul un processus politique mené par les Syriens eux-mêmes et facilité par l’ONU pourrait aboutir à une paix durable.  De même, la résolution 2254 (2015) reste essentielle, car elle fournit une feuille de route claire à cet égard.  La reprise d’un dialogue significatif visant à la réconciliation devrait être une priorité pour toutes les parties prenantes, a-t-il suggéré, avant d’appeler à une nouvelle convocation de la Commission constitutionnelle.  Le représentant a par ailleurs salué la récente réadmission de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes et sa participation au Sommet de Djedda. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a pris note de l’évolution des liens entre la Syrie et ses voisins, tout en notant qu’à l’intérieur du pays, la situation n’a pas fondamentalement changé en mieux, puisque que la crise humanitaire s’y est aggravée, et qu’il y a toujours 6,8 millions de personnes déplacées, outre les 5,3 millions de réfugiés dans les pays voisins.  Elle a reproché à la Syrie de rester un havre pour terroristes et d’exporter l’instabilité vers les États voisins.  Pour la déléguée, le « régime d’Assad » a cherché à tirer parti du tremblement de terre « avec cynisme » pour retrouver sa place sur la scène internationale, s’est-elle indignée, mais « le simple fait d’être à la même table que d’autres dirigeants régionaux ne change rien pour le peuple syrien ».  Elle s’est félicitée du maintien de l’ouverture des postes frontière de Bab el-Salam et Raaï jusqu’en août 2023, tout en assurant que les souffrances humaines ne sont pas atténuées par des délais de trois mois.  Aussi a-t-elle demandé au régime d’Assad de garder ouverts tous les postes frontière au moins jusqu’en août 2024, voire au-delà.  Les États-Unis vont œuvrer en ce sens, en préparant une résolution du Conseil de sécurité en juillet, en vue de maintenir les trois postes frontière ouverts pour un an, a-t-elle annoncé, en appelant les membres à soutenir ce texte.

Sur le plan politique, la représentante a noté que la récente déclaration du Sommet de la Ligue des États arabes de Djedda souligne que le régime syrien doit prendre des mesures efficaces et pratiques pour régler ce conflit.  Elle a fait savoir que son gouvernement attend de la Ligue des États arabes qu’elle exige de la Syrie qu’elle tienne ses engagements à ce titre, suggérant par exemple qu’elle remette en liberté plus de 130 000 personnes détenues dans « ses prisons et salles de torture » et fournissent des informations sur les personnes disparues et mortes.  Même si le « régime d’Assad » affirme être disposé à travailler avec des acteurs régionaux pour accueillir les réfugiés, la déléguée a dit ne voir aucun signe indiquant qu’il veuille mettre fin au harcèlement, aux détentions arbitraires et aux mauvais traitements visant les rapatriés.  Le régime syrien doit créer les conditions d’un retour en toute sécurité et dans la dignité des réfugiés syriens, a insisté la déléguée, en l’appelant aussi à relancer les travaux de la Commission constitutionnelle.  Tant qu’il n’y a pas de progrès politiques en Syrie, les États-Unis maintiendront leurs sanctions tout en continuant à fournir l’aide humanitaire dont les Syriens ont tant besoin, a conclu la représentante.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), au nom des A3 (Ghana, Mozambique, Gabon), a déclaré que l’acheminement de l’aide au travers des lignes de front demeure marginale.  Il a indiqué suivre de près l’engagement des Nations Unies avec les parties visant à inverser cette tendance, à la lumière des besoins urgents de la population qui sont en constante augmentation, dépassant largement les capacités de réponse actuelles.  Des mesures proactives doivent être prises pour éviter que 2,5 millions de personnes ne soient touchées par l’insécurité alimentaire d’ici à juillet 2023, a insisté le délégué. 

Il a estimé que l’unité nationale doit prévaloir en Syrie afin d’aboutir à une solution politique qui permettra au peuple syrien de retrouver la paix et la sécurité.  La solution politique comprend la cessation des hostilités, la restauration de l’autorité étatique sur l’ensemble du territoire syrien et un dialogue inclusif auxquels prendraient part de bonne foi toutes les fractions de la société syrienne, y compris les femmes, les jeunes ainsi que les groupes minoritaires, a-t-il détaillé.  Il s’est inquiété de la fragmentation de la classe politique syrienne et la crise de confiance entre les différents protagonistes qui annihilent toutes chances de donner corps à ce dialogue, exhortant toutes les parties à mettre de côté leurs divergences en cette période dans laquelle l’urgence humanitaire doit prévaloir.  Enfin, saluant le soutien des acteurs régionaux dans la quête de paix et de stabilité en Syrie, il s’est félicité de la participation de ce pays au Sommet de la Ligue des États arabes qui s’est tenu récemment à Djedda, en Arabie saoudite. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est félicité de la reprise du processus de régularisation politique en Syrie et du renforcement des liens avec les partenaires régionaux, notamment la décision de la Ligue des États arabes de rétablir la participation de la Syrie et de son Président Bashar Al-Assad.  Cette décision démontre selon lui la volonté du monde arabe de renforcer la coordination afin de résoudre les problèmes régionaux et internationaux, au moyen d’une politique étrangère indépendante.  Il a salué « l’évolution positive » du processus de normalisation entre la Syrie et la Türkiye, en vue notamment de favoriser le retour volontaire et sûr des réfugiés dans leur pays d’origine.  Au lieu de soutenir ces efforts, les pays occidentaux, les États-Unis au premier chef, continuent selon lui d’exercer des pressions sur les autorités syriennes et les pays de la région, tout en fournissant des armes aux groupes armés afin de déstabiliser le pays. Le délégué a de plus condamné l’intensification des frappes aériennes israéliennes sur le territoire de la Syrie, ainsi que la violation de l’espace aérien des pays voisins.  Selon lui, les mécanismes spéciaux « arbitraires » mis sur pied pour enquêter sur les incidents en Syrie et rechercher les personnes disparues n’ont « aucune valeur ajoutée » et ne font que repousser les perspectives d’un règlement politique.

Sur le plan politique, le représentant a exprimé son appui aux efforts de médiation menés par l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour faire avancer le processus de règlement syrien dans le strict respect de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Les récents tremblements de terre ont aggravé les besoins humanitaires existants qui affectaient déjà 15 millions de personnes, a-t-il noté, en faisant observer que le Plan humanitaire pour la Syrie destiné aux territoires contrôlés par Damas n’a été financé qu’à hauteur de 9% en 2023.  Il a dénoncé les partisans d’un mécanisme transfrontalier « obsolète » qui défendent sa prolongation d’un an en citant la nécessité d’une planification à long terme des opérations humanitaires de l’ONU, alors que le Plan de réponse humanitaire demeure sous-financé, « chantage flagrant » révélateur à ses yeux d’une politique de deux poids, deux mesures.  Le délégué a ainsi demandé au Coordonnateur résident en Syrie de soumettre sans délai un rapport sur l’impact des restrictions unilatérales sur la situation humanitaire. 

La décision du Gouvernement syrien de prolonger de trois mois les deux points de passage à la frontière avec la Türkiye, en plus de celui de Bab el-Haoua, ne reçoit pas l’appréciation qui lui est due, a estimé le représentant.  Depuis juillet 2021, seuls 10 convois ont pu entrer à Edleb par les lignes de contact, et aucun depuis le tremblement de terre dévastateur, alors que de février à avril 2023, 1 700 camions sont passés par les trois points de contrôle, et l’ONU a envoyé plus de 100 missions interagences dans l’enclave.  L’appel humanitaire d’urgence de l’ONU pour le nord-ouest non contrôlé par Damas, de 400 millions de dollars pour cinq millions de personnes, a déjà été entièrement financé, a-t-il noté.  Alors que le mécanisme transfrontalier d’aide humanitaire expire le 10 juillet prochain, « nous ne voyons aucune raison de le prolonger », a affirmé le représentant.  L’ONU ayant déjà prouvé sa capacité à organiser son travail avec le Gouvernement syrien sans résolution du Conseil, celle-ci devrait cesser d’exister, a-t-il ajouté.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a estimé que l’extension des deux points de passage frontaliers de Bab el-Salam et Raaï, jusqu’en août, est une reconnaissance claire de la nécessité absolue du libre accès de l’aide humanitaire à tous les Syriens. Il a exhorté le régime syrien à maintenir ces points de passage ouverts aussi longtemps que nécessaire.  Selon lui, il n’est nul besoin de convaincre quiconque de l’importance du point de passage transfrontalier de Bab el-Haoua pour assurer l’accès humanitaire et fournir une aide vitale à plus de quatre millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie. 

Le délégué a souligné que plus de 100 000 Syriens demeurent arbitrairement privés de liberté ou portés disparus.  Il a dit être favorable au projet de résolution de l’Assemblée générale de l’ONU visant à créer une nouvelle institution chargée de déterminer où se trouvent les disparus de Syrie.  Il a appelé tous les membres de l’ONU à reconnaître le caractère purement humanitaire de cette initiative et de s’abstenir de toute forme de politisation. 

Il a ensuite estimé que la cause profonde de toutes les souffrances en Syrie est politique, plaidant pour une solution politique juste et durable au conflit.  Il a déploré le blocage de la Commission constitutionnelle et le manque de bonne foi de la part du régime pour permettre une nécessaire transition politique en Syrie, conformément à la résolution 2254 (2015), laquelle reste inappliquée malgré les efforts inlassables de l’Envoyé spécial.  Il a invité le régime syrien à s’engager sérieusement dans des réformes, d’assumer la responsabilité des crimes de guerre, d’assurer le retour en toute sécurité d’environ six millions de réfugiés et de démanteler une filière de production et de contrebande de drogue qui a transformé la Syrie en un narco-État, avec de graves répercussions. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a pris acte de la décision de la Ligue des États arabes de réadmettre en son sein la Syrie dans un contexte de réduction des tensions au Moyen-Orient.  Elle a également salué les efforts déployés par les pays arabes pour améliorer la situation en Syrie, en particulier le Sommet arabe de Djedda et la réunion ministérielle qui s’est tenue début mai à Amman.  Il n’en demeure pas moins, selon elle, que le Gouvernement syrien se doit d’agir pour améliorer la situation humanitaire dans le pays et remplir ses obligations au titre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité.  Rappelant que les Syriens souffrent non seulement des ravages de la guerre mais aussi des dégâts causés par les tremblements de terre de février, la représentante s’est félicitée que le Gouvernement syrien ait prolongé de trois mois son approbation des points de passage supplémentaires de Bab el-Salam et de Raaï pour l’aide humanitaire d’urgence.  La déléguée a également souhaité que le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière soit prolongé à nouveau en juillet afin que toutes les modalités d’aide, y compris le relèvement rapide et l’assistance à travers les lignes de front, puissent se poursuivre.  Elle a enfin jugé que, « même dans le cadre de la nouvelle dynamique régionale », le Gouvernement syrien ne devrait pas bénéficier de l’immunité après ce qu’il a fait à son propre peuple.  À cet égard, elle a exprimé le soutien du Japon à la création d’une institution indépendante chargée de déterminer le sort des plus de 100 000 personnes disparues en Syrie. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a constaté que des millions d’hommes, de femmes et d’enfants syriens continuent de souffrir dans ce conflit brutal, tandis que l’ONU et ses partenaires tentent de répondre aux besoins humanitaires énormes, avec les modestes ressources qui leur sont allouées.  Pour la représentante, la population syrienne fait face à une crise de protection marquée par des taux de malnutrition en hausse, des camps de déplacés surpeuplés et sans accès aux soins d’urgence, et une violence sexiste qui menace des millions de femmes.  Faute de stratégie claire pour la réhabilitation, les rapatriements et les retours, ce sera une « génération perdue de femmes et d’enfants », a-t-elle averti, saluant toutefois l’accord obtenu par l’ONU auprès du régime syrien pour prolonger de deux mois supplémentaires les points de passage frontaliers humanitaires à Bab el-Salam et Raaï.  Tout en se félicitant également de la tenue, le 15 juin, de la septième Conférence de Bruxelles sur le soutien à l’avenir de la Syrie et de la région, elle a formé le vœu que le Conseil de sécurité parvienne en juillet à un accord sur l’extension du mécanisme transfrontalier à Bab el-Haoua. 

La déléguée a ensuite réaffirmé qu’un processus politique facilité par l’ONU, conformément à la résolution 2254 (2015), est la seule voie à suivre pour la Syrie. Demandant instamment la convocation de la Commission constitutionnelle à Genève, elle a souhaité que la société civile syrienne et les femmes artisanes de la paix prennent part à ces efforts.  De son côté, le Conseil ne doit pas oublier que des millions de vies syriennes ont été détruites ou changées à jamais par les actions du « régime d’Assad » au cours des douze dernières années, a-t-elle ajouté, avant d’appuyer la recommandation du Secrétaire général en faveur de la création d’une nouvelle institution chargée de lutter contre les détentions arbitraires, les personnes portées disparues et les disparitions forcées en Syrie.  Dans cette période de grands changements, le Conseil doit être résolu à soutenir le travail de l’Envoyé spécial et à « veiller à ce que l’avenir de la Syrie ne ressemble pas à son passé récent », a-t-elle conclu. 

M. GENG SHUANG (Chine) s’est félicité du retour, après douze ans, de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes.  Les pays extérieurs à la région doivent selon lui respecter pleinement la volonté des États de la région et cesser d’entraver les processus de règlement des différends en cours.  Il a ensuite salué la prolongation des points de passage transfrontières de Bab el-Salam et Raaï, et appelé les acteurs concernés à cesser leurs entraves aux opérations d’aide humanitaire.  Israël doit en outre cesser ses attaques contre les installations civiles syriennes, notamment les aéroports, a-t-il ajouté.  Estimant que les sanctions unilatérales illégales entravent gravement le processus de reprise syrien, il a exhorté à leur levée immédiate et sans condition. 

Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a déclaré que réhabiliter Bashar Al-Assad sans condition ne permettra pas d’établir la paix durable à laquelle les Syriens aspirent.  Son régime et ses alliés sont responsables d’une guerre aux conséquences sans précédent au XXIsiècle, a rappelé la représentante martelant qu’en plus d’être à la tête d’un système de corruption généralisé, le régime et les milices iraniennes sont désormais les premiers producteurs et exportateurs mondiaux de captagon, faisant de la Syrie le cœur d’un narcotrafic mondial représentant plusieurs milliards de bénéfices et qui pèse comme une source d’instabilité pour toute la région.  Elle a souligné que les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité doivent rendre compte de leurs actes, précisant que les sanctions européennes visent précisément à entraver les marges de manœuvre des auteurs de ces crimes ainsi que les sources de financement de l’appareil répressif syrien. Selon elle, fermer les yeux sur des crimes de cette nature ne permet pas de construire une paix durable. 

La représentante a rappelé que la résolution 2254 (2015) définit les bases d’une paix durable à laquelle les Syriens aspirent.  Cette feuille de route est pourtant ignorée par le régime qui refuse tout engagement sur le volet politique.  Dans ce contexte d’obstruction délibérée du régime, elle a exigé que le régime fasse des gestes tangibles afin qu’un véritable processus politique soit initié. 

S’agissant de la situation humanitaire catastrophique en Syrie, la déléguée a prévenu qu’il ne faut pas inverser les responsabilités, dénonçant le cynisme du régime qui, selon elle, a saisi l’occasion du séisme du 6 février dernier pour se découvrir des préoccupations humanitaires et chercher à détourner l’attention internationale de ses exactions.  Elle a jugé essentiel de garantir l’acheminement de l’aide par tous les moyens, appelant au renouvellement, en juillet, du point de passage de Bab el-Haoua, pour douze mois. La représentante a annoncé la tenue, le 21 juin prochain, de la septième Conférence de Bruxelles sur « l’aide à apporter pour l’avenir de la Syrie et des pays de la région ». Elle a ensuite dénoncé la politique active d’ingénierie démographique conduite par le régime et les obstacles politiques, économiques et sécuritaires nombreux qui continuent de se dresser et rendent tout retour digne, sûr et volontaire en Syrie impossible à ce jour. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a salué la volonté politique du Gouvernement syrien de maintenir ouverts les points de passage de Bab el-Salam et de Raaï, une décision qui permettra de poursuivre de manière plus durable la distribution de l’aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie, et a encouragé à en faire de même pour le point de passage de Bab el-Haoua.  Il s’est dit préoccupé par la persistance d’attaques violentes mettant en danger la vie et la sécurité des civils, de même que par la destruction d’infrastructures stratégiques essentielles aux moyens de subsistance.  L’Équateur déplore tout usage indiscriminé de la violence et insiste pour que les parties fassent taire les armes, a martelé son représentant qui a appelé à ne pas renoncer à trouver une solution politique inclusive et durable à la crise syrienne.  Pour cela, il a encouragé les pays voisins et la communauté internationale à œuvrer en ce sens, aux côtés de l’Envoyé spécial.  Le délégué a salué le travail des équipes des Nations Unies et des organisations partenaires sur le terrain, en particulier les résultats des projets de relèvement rapide, de soutien aux moyens de subsistance et les subventions en espèces qui ont contribué à améliorer les conditions de vie d’un million de personnes. Il n’en reste pas moins que les indicateurs humanitaires continuent de se détériorer, s’est-il inquiété, notant que 4,1 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie, que 3,3 millions de personnes sont gravement menacées par l’insécurité alimentaire et que plus d’un million d’enfants risquent de ne pas pouvoir réintégrer le système éducatif. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a évoqué les mesures importantes prises ces dernières semaines par les pays arabes pour mettre fin aux souffrances du peuple syrien, notamment le retour de la République arabe syrienne au sein de la Ligue des États arabes et sa participation au récent sommet arabe qui s’est tenu en Arabie saoudite.  Elle a affirmé qu’une solution politique est le seul moyen de mettre fin à la crise syrienne, ajoutant que le retour de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes est une étape importante vers la réalisation de la paix, grâce à l’initiative arabe qui est menée en étroite coordination avec l’Envoyé spécial et les Nations Unies.  La déléguée a appelé tous les acteurs à soutenir et renforcer les efforts des États arabes avec une approche réaliste visant principalement à mettre fin à la guerre. 

Elle a ensuite insisté sur l’importance de continuer à progresser dans la lutte contre Daech, se félicitant de la diminution des attentats ces derniers mois. Concernant la situation humanitaire, elle a appelé à se concentrer sur des projets de redressement, de reconstruction et de réhabilitation d’équipements publics, tout en examinant les moyens de relancer l’économie.  Elle a aussi salué les mesures prises par le Gouvernement syrien pour atténuer la crise humanitaire aiguë avec l’extension de l’acheminement de l’aide via les points de passage transfrontaliers de Bab el-Salam et Raaï pendant trois mois supplémentaires.  En ce qui concerne l’aide à travers les lignes de front, elle s’est inquiétée du fait que les convois d’aide destinés au nord-ouest de la Syrie n’ont pas pu passer en raison de l’obstruction de groupes terroristes.  Elle a enfin dit attendre avec intérêt l’extension du mécanisme transfrontalier en Syrie, lequel demeure une bouée de sauvetage essentielle pour des millions de Syriens. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a pris note des évolutions importantes du mois dernier au sujet de la Syrie tout en soulignant que le conflit doit prendre fin de manière inclusive et responsable pour que la Syrie cesse d’être une source d’instabilité dans la région.  Elle a également insisté sur l’importance pour les réfugiés syriens de rentrer chez eux en toute confiance, conformément au cadre fixé par la résolution 2254 (2015) du Conseil.  Elle s’est félicitée de la prorogation de l’accès humanitaire par les points de passage de Bab el-Salam et Raaï au début du mois, tout en estimant que des accords de dernière minute pour des périodes de courte durée ne sont pas acceptables.  Il faut un accès prévisible pour permettre aux humanitaires de planifier efficacement, et garantir que les besoins fondamentaux de ces personnes soient satisfaits, a-t-elle insisté.  La représentante a également jugé essentiel de faire lumière sur le sort des personnes portées disparues et de mener une action significative pour endiguer le commerce illégal de captagon.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a dit suivre avec intérêt les dynamiques régionales concernant la Syrie, en se félicitant de la volonté exprimée par la Ligue des États arabes de travailler conjointement à la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité, sur la base d’une approche « étape par étape ».  Dans ce contexte, la cohérence entre les différents efforts internationaux entrepris sous l’égide de l’ONU est à ses yeux essentielle.  La représentante a appelé les parties à mettre fin aux détentions arbitraires et aux disparitions forcées, tout en permettant l’accès aux organisations humanitaires à tous les lieux de détention.  Face aux violations répétées du droit international humanitaire et des droits humains, elle a réitéré son plein appui à la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme et au Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables afin de lutter contre l’impunité.  Après douze ans de conflit, la poursuite concertée d’un processus politique crédible fondé sur la résolution 2254 (2015) permettra selon elle de redonner espoir à la population syrienne, en particulier les femmes et les jeunes. 

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a salué la récente tenue du Sommet de la Ligue des États arabes en Arabie saoudite, qui a permis de souligner « la gloire d’une unité arabe restaurée ».  Ses États membres ont apporté leur soutien à la Syrie dans la préservation de sa souveraineté et de son intégrité territoriale, comme dans sa réponse aux circonstances difficiles qu’elle endure, s’est réjoui le délégué, en mentionnant la guerre qu’elle livre contre les groupes terroristes et les sanctions économiques qui lui sont imposées. Comme autre développement positif, il a noté la tenue le 10 mai d’une réunion à Moscou des Ministres des affaires étrangères de la Türkiye, de l’Iran, de la Fédération de Russie et de la Syrie. Le représentant a en revanche dénoncé les déclarations hostiles et les provocations émanant des États-Unis et de leurs alliés à l’endroit de son pays: « Les forces américaines illicitement présentes en Syrie continuent de violer sa souveraineté », s’est-il insurgé, fustigeant aussi les actes d’agression commis par Israël contre la Syrie.  « Le 1er mai, les forces d’occupation israéliennes ont de nouveau frappé l’aéroport d’Alep », a-t-il dit, en appelant le Conseil à « sortir de son silence » à ce sujet.

Sur le plan humanitaire, le délégué a indiqué que son pays facilite le travail humanitaire de l’ONU et de ses partenaires.  Il a souligné la nécessité que l’ONU et son personnel ne communiquent pas avec les organisations terroristes dans le nord-ouest de la Syrie, avant d’exhorter les donateurs à assurer le financement nécessaire pour les programmes onusiens.  Il a appelé à la levée des sanctions contre son pays, qualifiant les soi-disant exemptions annoncées par l’Union européenne et les États-Unis de « propagande à peu de frais ».  La Syrie ne normalisera pas ses relations avec ceux qui occupent son territoire, a assuré le délégué en conclusion.

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a déploré que le niveau actuel de financement alloué à la réponse humanitaire syrienne soit bien en deçà des besoins.  Elle y a vu une grave entrave aux efforts de l’ONU visant à fournir une assistance à ceux qui en ont besoin.  En outre, l’imposition persistante de sanctions unilatérales demeure un obstacle important à l’amélioration de la situation humanitaire et économique de la Syrie, a-t-elle ajouté, appelant à une approche globale du problème, qui garantisse un financement suffisant, assure une distribution impartiale de l’aide et supprime les sanctions contre-productives.  Elle a également jugé essentiel de donner la priorité aux projets de relèvement rapide et d’améliorer l’acheminement de l’aide humanitaire dans toute la Syrie, en particulier par-delà les lignes de front, comme prévu dans la résolution 2672 (2023).  Saluant le soutien apporté par Damas à l’ONU pour permettre la livraison de secours aux zones touchées par la crise, la représentante a félicité le Gouvernement syrien pour avoir prolongé de trois mois supplémentaires l’utilisation des points de passage frontaliers de Bab el-Salam et de Raaï, jusqu’au 13 août. Elle a par ailleurs dénoncé les activités terroristes dans les zones sous occupation, estimant que la lutte contre ce fléau doit être menée dans le plein respect de la souveraineté nationale, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de la Syrie.

Sur le plan politique, la représentante a salué la visite de l’Envoyé spécial à Téhéran le 15 mai.  Elle a assuré que l’Iran soutient la reprise rapide des réunions de la Commission constitutionnelle et continue d’œuvrer, aux côtés de ses partenaires du format Astana (Russie et Türkiye), pour une normalisation de la situation syrienne.  Dans ce contexte, elle s’est réjouie de la poursuite du dialogue syro-turc, rappelant que, le 10 mai, les Ministres des affaires étrangères de la Russie, de l’Iran, de la Syrie et de la Türkiye ont engagé à Moscou des discussions en vue du rétablissement des relations interétatiques entre la Syrie et la Türkiye.  La déléguée a également signalé la visite officielle de deux jours du Président iranien en Syrie, la première d’un chef d’État iranien en plus de treize ans, qui a débouché sur la signature à Damas d’un accord de coopération à long terme entre les deux pays.  Elle a d’autre part estimé que le retour de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes et la reprise de ses relations avec les pays arabes représentent des « avancées significatives » en faveur de la sécurité, de la stabilité et de la prospérité de la Syrie.  À cette aune, elle a invité les pays occidentaux à réexaminer et rectifier leur politique envers la Syrie, avant de dénoncer l’absence de réaction de la communauté internationale aux actes d’agression et aux attaques terroristes menés par le « régime israélien » contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Ces « crimes odieux » violent de manière flagrante le droit international humanitaire et les principes de la Charte des Nations Unies, a-t-elle souligné, appelant à ce que des comptes soient demandés à ce « régime anarchique ». Enfin, elle a rejeté les « allégations non fondées » proférées par la France, l’appelant à se comporter de manière plus responsable et à éviter d’étiqueter d’autres États Membres sans preuve aucune. 

Mme CEREN HANDE ÖZGÜR (Türkiye) a dit être préoccupée de la gravité de la situation humanitaire en Syrie, demandant donc au Conseil de sécurité de proroger le mécanisme d’aide transfrontalière pour une période de douze mois. Soulignant l’écart entre les objectifs affichés par le Plan de réponse humanitaire pour la Syrie et les moyens dont il dispose actuellement, la représentante a plaidé pour un financement durable et pérenne.  Elle a cependant mis en garde contre la dépendance à l’aide, en mettant l’accent sur l’importance des activités de relèvement rapide.  Pour ce qui est de la stabilité à long terme de la Syrie, la déléguée a rappelé les nombreuses initiatives lancées par son gouvernement, promettant de les poursuivre, notamment l’élimination des menaces terroristes et le retour sûr, digne et ordonné des réfugiés.  Elle a également salué la réunion récente de plusieurs ministres des affaires étrangères et de la défense de la région et au-delà en vue de l’élaboration d’une feuille de route pour la Syrie, sans conditions préalables et de bonne foi.  Appelant à sortir de l’impasse actuelle, la représentante a soutenu l’idée d’une nouvelle convocation de la Commission constitutionnelle.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Soudan du Sud: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 mai 2024 l’embargo sur les armes

9332e séance - matin
CS/15297

Soudan du Sud: le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 mai 2024 l’embargo sur les armes

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, de proroger jusqu’au 31 mai 2024 l’embargo sur les armes imposé au Soudan du Sud, de même que le gel des avoirs et l’interdiction de voyager. 

En adoptant par 10 voix pour, zéro voix contre et 5 abstentions (Chine, Fédération de Russie, Gabon, Ghana, Mozambique) la résolution 2683 (2023), il décide toutefois que les prescriptions en matière de notification ne s’appliqueront plus à la fourniture, à la vente ou au transfert de matériel militaire non létal, qui ne doivent servir qu’à appuyer la mise en œuvre des dispositions de l’accord de paix, ni à l’assistance technique ou la formation au matériel militaire non létal connexes. 

En outre, le Conseil se déclare à nouveau prêt à apprécier s’il convient de modifier, de suspendre ou de lever progressivement les mesures d’embargo sur les armes, à la lumière des progrès accomplis par rapport aux principaux critères énoncés dans la résolution 2577 (2021).  

S’agissant des sanctions ciblées, il souligne cependant que les activités ou les politiques visant à entraver la conduite ou la légitimité d’élections libres et régulières au Soudan du Sud, notamment en entravant ou en altérant les activités préélectorales préparatoires, constituent également un motif d’inscription. 

Par ce texte, le Conseil proroge également jusqu’au 1er juillet 2024 le mandat du Groupe d’experts qui apporte un appui au Comité des sanctions créé par la résolution 2206 (2015). 

À l’issue du vote, les cinq délégations qui se sont abstenues, de même que le Soudan du Sud, ont parlé d’une même voix pour dénoncer l’impact des sanctions, jugées contreproductives par le Gabon notamment qui a appelé à recalibrer les efforts de la communauté internationale en donnant la priorité à la consolidation de la paix et au renforcement de l’intégrité territoriale du pays. 

« Le Soudan du Sud a besoin non pas de sanctions mais d’un système d’appui bien géré de renforcement des capacités », a renchéri le Ghana qui a regretté que la proposition des A3 d’intégrer au texte un libellé inspiré d’une résolution récemment adoptée par l’Union africaine dans laquelle elle exprime ses préoccupations sur les répercussions socioéconomiques des sanctions, ait été ignorée. 

Le Mozambique a déploré que le texte ne reflète pas les progrès importants réalisés par le Soudan du Sud dans les domaines politique, économique et sécuritaire, jugeant en outre important de tenir compte les difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes pays en matière de consolidation de l’État.  Il faut veiller à ce que les décisions du Conseil n’aient pas de répercussions imprévues, a insisté la délégation. 

À son tour, la Chine a regretté que la délégation porte-plume, les États-Unis, ait fait fi des suggestions des A3 qui avaient notamment proposé une liste d’exceptions à l’embargo sur les armes, sapant ainsi l’unité du Conseil de sécurité.  Qui plus est, les entraves aux élections libres viennent d’être rajoutées à la liste, a-t-elle déploré, appelant le porte-plume à faire preuve d’objectivité et d’impartialité et condamnant l’utilisation des sanctions du Conseil de sécurité en guise d’outil diplomatique. 

« Une fois de plus, on a ignoré non seulement les positions des pays africains, mais également celles de membres du Conseil de sécurité, dont la Russie, qui considèrent que les jeunes forces armées sud-soudanaises doivent pouvoir régler les problèmes de violences intercommunautaires, afin notamment de garantir les élections prévues en décembre 2024 », a commenté la Fédération de Russie qui a regretté la « fixation » du porte-plume sur des mesures qui n’ont pas fait leurs preuves.  Plus largement, la délégation russe a considéré que le système de « lâchement archaïque » des sanctions du Conseil de sécurité sur le continent africain doit être complètement « revu et réorganisé », accusant elle aussi les pays occidentaux de l’instrumentaliser pour s’ingérer dans les affaires intérieures des États. 

Avec cette résolution, on est passé à côté d’une chance d’examiner la situation au Soudan du Sud de manière factuelle, a déploré le Soudan du Sud, qui a souligné que les difficultés mineures ne doivent pas être considérées comme un motif de violation.  Il a mis en avant l’intention des autorités de créer une commission vérité et réconciliation ainsi qu’un tribunal hybride, faisant en outre observer que 35% des postes dans la fonction publique sont attribués à des femmes et que des ministères sont entièrement consacrés à la cause des femmes et des jeunes. 

« Tout accord de paix est compliqué de nature.  Ce qui importe est la volonté politique des parties prenantes de mettre en œuvre leurs engagements », a-t-il insisté, invitant le Conseil de sécurité à faire preuve d’objectivité, à tenir compte des propositions de chacun et à éviter toute politisation qui attise les conflits. 

Regrettant que le consensus n’ait pas prévalu, les Émirats arabes unis ont expliqué de leur côté avoir voté en faveur du texte car celui-ci note que les autorités peuvent être réactives à ce qui se passe sur le terrain.  Le Japon a estimé pour sa part que les mesures imposées au Soudan du Sud doivent être levées le plus rapidement possible une fois les objectifs assignés à celles-ci atteints.

RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LA SITUATION AU SOUDAN DU SUD - S/2023/294S/2023/300

Texte du projet de résolution (S2023/379)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses précédentes résolutions, les déclarations de sa présidence et les déclarations à la presse concernant la situation au Soudan du Sud,

Affirmant son soutien à l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud (« l’Accord revitalisé ») de 2018, soulignant que la viabilité du processus de paix ne pourra être assurée sans l’adhésion totale de toutes les parties, demandant instamment la pleine application, sans plus tarder, de l’Accord revitalisé et de l’Accord relatif à la feuille de route pour une fin pacifique et démocratique de la période de transition, qui en est issu, et notant avec préoccupation le retard accusé dans l’application de l’Accord revitalisé, qui a nécessité une nouvelle prorogation de deux ans des arrangements politiques transitoires,

Se félicitant de l’évolution encourageante de l’application de dispositions de l’Accord revitalisé, notamment du bon déroulement de la première phase de formation et de promotion des Forces unifiées nécessaires, de l’élaboration des documents requis pendant la phase 1 de l’examen stratégique de la défense et de la sécurité et de la formation et de la sensibilisation à l’application du Plan d’action commun des forces armées sur la lutte contre la violence sexuelle liée aux conflits,

Constatant avec satisfaction que la dynamique impulsée par l’Autorité intergouvernementale pour le développement contribue à faire progresser le processus de paix au Soudan du Sud, se félicitant de la reprise de la médiation par la Communauté de Sant’Egidio pour encourager le dialogue politique entre les parties signataires et non signataires de l’Accord revitalisé, et demandant aux parties sud-soudanaises de faire preuve de la volonté politique nécessaire pour régler par des moyens pacifiques les divergences persistantes qui alimentent les violences constantes,

Notant avec inquiétude l’intensification persistante de la violence qui prolonge la crise sur les plans politique, économique, humanitaire et de la sécurité, dans la majeure partie du pays, condamnant la mobilisation de groupes armés par les parties au conflit et l’encouragement de défections, notamment de membres des forces gouvernementales et des groupes d’opposition armés, et constatant que les violences intercommunautaires au Soudan du Sud sont liées sur les plans politique et économique à la corruption et aux violences commises à l’échelle nationale,

Soulignant la nécessité pour les parties d’éviter un retour à un conflit généralisé et de respecter l’accord sur la structure de commandement, et insistant sur le fait qu’il importe de faire avancer rapidement les dispositions de sécurité énoncées au chapitre II de l’Accord revitalisé, notamment en veillant au versement régulier et suffisant des salaires des Forces unifiées nécessaires, en phase avec les crédits budgétaires alloués au Service national de sécurité et à la garde présidentielle sud-soudanaise, et en assignant des missions claires à ces forces, conformément au processus d’examen de la défense stratégique et de la sécurité prévu dans l’Accord revitalisé, 

Se déclarant vivement préoccupé par la poursuite des combats au Soudan du Sud, condamnant les violations répétées de l’Accord revitalisé et de l’Accord sur la cessation des hostilités, la protection des civils et l’accès humanitaire, condamnant fermement tous les combats, notamment la violence dans les États du Haut-Nil, de Jongleï et de l’Équatoria-Central, et exigeant que les parties qui violent l’Accord sur la cessation des hostilités soient tenues de rendre des comptes, conformément aux obligations que leur imposent l’Accord sur la cessation des hostilités et l’Accord revitalisé,

Condamnant énergiquement toutes les violations des droits humains, atteintes à ces droits et violations du droit international humanitaire qui ont été et continuent d’être commises par toutes les parties, y compris les groupes armés et les forces de sécurité nationale, ainsi que l’incitation à commettre de telles atteintes et violations, l’augmentation alarmante des violences sexuelles liées aux conflits, qui constituent un motif d’inscription sur la liste aux termes des dispositions de l’alinéa e) du paragraphe 15 de la résolution 2521 (2020), condamnant également le fait que des membres de la société civile, dont des journalistes, des défenseurs des droits humains, des humanitaires et des correspondants des médias sont harcelés, pris pour cible et soumis à la censure, soulignant que les personnes responsables de violations du droit international humanitaire, de violations des droits humains et d’atteintes à ces droits doivent répondre de leurs actes et qu’il incombe au premier chef au Gouvernement provisoire d’union nationale revitalisé de protéger sa population contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité, et notant avec préoccupation que, malgré la signature de l’Accord revitalisé, des violations et des atteintes, notamment des violences fondées sur le genre, continuent de se produire, qui pourraient être constitutifs de crimes internationaux, y compris des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité,

Se déclarant alarmé et vivement préoccupé par la poursuite de la violence armée contre le personnel et les installations humanitaires et les convois d’aide alimentaire qui a entraîné le décès d’au moins 20 agents humanitaires et volontaires et près de 50 atteintes à la sécurité depuis janvier 2023 ainsi que le pillage et la destruction de fournitures vitales, condamnant fermement tous les cas de violence perpétrée contre des agents humanitaires, se déclarant vivement préoccupé par l’imposition de taxes et de frais illégaux qui entravent l’acheminement de l’aide humanitaire sur l’ensemble du territoire, soulignant les conséquences néfastes de l’insécurité persistante sur les opérations humanitaires dans tout le pays, encourageant toutes les parties à permettre l’accès rapide, en toute sécurité et sans entrave des organismes humanitaires à toutes les personnes dans le besoin et demandant au Gouvernement provisoire revitalisé de protéger le personnel humanitaire et de créer un environnement sûr et propice à l’aide humanitaire, conformément au droit international humanitaire et à ses obligations au titre de l’Accord revitalisé,

Exprimant sa profonde inquiétude face à l’augmentation des violences entre groupes armés dans certaines régions du Soudan du Sud, qui ont fait des milliers de morts et de déplacés, et condamnant l’utilisation de ces groupes par des parties au conflit,

Constatant avec une vive inquiétude les retards pris dans l’application de l’Accord revitalisé, en particulier demandant l’utilisation d’un compte unique du Trésor et des audits, examens et outils supplémentaires requis pour un système de commercialisation du pétrole qui soit ouvert, transparent et concurrentiel comme précisé au chapitre IV de l’Accord revitalisé, invitant les parties à appliquer pleinement l’Accord revitalisé, notamment en allouant les ressources financières nécessaires, à mettre en place sans délai les institutions prévues par celui-ci et à assurer la participation pleine, égale et véritable des femmes et la participation des jeunes, des groupes d’inspiration religieuse et de la société civile à tous les efforts de règlement du conflit et de consolidation de la paix, et à faire avancer les réformes transitoires, notamment en ce qui concerne la création d’un espace civique libre et ouvert, un processus inclusif d’élaboration de la constitution, ainsi que la transparence économique et la réforme de la gestion des finances publiques, se déclarant profondément préoccupé que la corruption et le détournement de fonds publics nuisent à la capacité du Gouvernement provisoire revitalisé de fournir des services à la population, et soulignant que la gouvernance économique doit être améliorée de façon à garantir l’efficacité des structures nationales de perception des recettes et de lutte contre la corruption en vue de financer la mise en œuvre du cadre réglementaire essentiel à une transition politique, ainsi que les besoins humanitaires de la population,

Se félicitant que les États Membres continuent d’exprimer clairement leur intention de fournir une assistance technique et une aide au renforcement des capacités aux autorités sud-soudanaises compétentes, conformément aux dispositions de la résolution 2428 (2018), à l’appui de l’application de l’Accord revitalisé, et encourageant les États Membres à aider le Gouvernement provisoire revitalisé pour ce qui est du stockage des munitions et du contrôle des armureries, en vue de renforcer les capacités du Soudan du Sud compte tenu des critères de référence énoncés au paragraphe 2 de la résolution 2577 (2021),

Rappelant aux États Membres qu’ils doivent veiller à ce que toutes les mesures prises pour appliquer la présente résolution soient conformes aux obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit international des réfugiés, selon qu’il convient,

Soulignant que les mesures imposées par la présente résolution n’ont pas pour objet d’avoir des conséquences humanitaires négatives pour la population civile sud-soudanaise et rappelant le paragraphe 1 de la résolution 2664 (2022), qui dispose que la fourniture, le traitement ou le versement de fonds, d’autres avoirs financiers ou ressources économiques, ou la fourniture de biens et de services, par certaines entités ou organisations, nécessaires à l’acheminement en temps voulu de l’aide humanitaire ou à l’appui d’autres activités visant à répondre aux besoins essentiels sont autorisés et ne constituent pas une violation des mesures de gel des avoirs,

Se déclarant vivement préoccupé par les résultats et conclusions figurant dans le rapport final du Groupe d’experts sur le Soudan du Sud présenté en application de la résolution 2633 (2022) (S/2023/294) et soulignant que la violence armée, l’impunité et la mauvaise allocation des recettes peuvent avoir un effet dévastateur sur la société et les personnes, affaiblir les institutions démocratiques, nuire à l’état de droit, perpétuer des conflits violents, faciliter des activités illégales, détourner l’aide humanitaire ou en compliquer l’acheminement et fragiliser les marchés économiques,

Se déclarant vivement préoccupé par la menace que le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes légères et de petit calibre font peser sur la paix et la sécurité au Soudan du Sud, constatant avec inquiétude que le trafic illicite et le détournement d’armes et de matériels connexes de tous types portent atteinte à l’état de droit, qu’ils peuvent compromettre le respect du droit international humanitaire et entraver l’acheminement de l’aide humanitaire et qu’ils ont de nombreuses répercussions sur les plans humanitaire et socioéconomique, 

Donnant acte de la coopération des autorités sud-soudanaises avec le Groupe d’experts et encourageant fortement les autorités sud-soudanaises à poursuivre leur coopération avec le Groupe d’experts et à prévenir toute entrave à l’exécution de son mandat,

Prenant acte du rapport du Secrétaire général sur les critères d’évaluation de l’embargo sur les armes imposé au Soudan du Sud (S/2021/321),

Prenant acte du rapport du Secrétaire général en date du 28 avril 2023 (S/2023/300), soumis en application des dispositions du paragraphe 5 de sa résolution 2633 (2022) et qui fournit une évaluation des progrès accomplis concernant les principaux critères de référence,

Constatant que la situation au Soudan du Sud continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Embargo sur les armes et inspections

1.    Décide de reconduire jusqu’au 31 mai 2024 les mesures imposées par le paragraphe 4 de la résolution 2428 (2018) et réaffirme les dispositions du paragraphe 5 de la résolution 2428 (2018);

2.    Décide que les prescriptions en matière de notification énoncées au paragraphe 2 de la résolution 2633 (2022) ne s’appliqueront plus à la fourniture, à la vente ou au transfert de matériel militaire non létal qui ne doivent servir qu’à appuyer la mise en œuvre des dispositions de l’accord de paix, ni à l’assistance technique ou la formation au matériel militaire non létal connexes;

3.    Se déclare à nouveau prêt à réexaminer les mesures d’embargo sur les armes, notamment à apprécier s’il convient de les modifier, de les suspendre ou de les lever progressivement, à la lumière des progrès accomplis par rapport aux principaux critères énoncés au paragraphe 2 de la résolution 2577 (2021), et encourage les autorités sud-soudanaises à accomplir de nouveaux progrès à cet égard;

4.    Prie de nouveau instamment le Gouvernement provisoire revitalisé de faire avancer la mise en place des réformes de la gestion des finances publiques prévues dans l’Accord revitalisé, notamment en mettant à la disposition du public l’ensemble des recettes, dépenses, déficits et dettes du Gouvernement provisoire revitalisé, et demande de nouveau au Gouvernement provisoire revitalisé d’établir le Tribunal mixte pour le Soudan du Sud ainsi que la Commission vérité, réconciliation et apaisement et l’Autorité d’indemnisation et de réparation;

5.    Prie instamment le Secrétaire général, à cet égard, en étroite consultation avec la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et le Groupe d’experts, de procéder, au plus tard le 15 avril 2024, à une évaluation des progrès accomplis concernant les principaux critères de référence établis au paragraphe 2 de la résolution 2577 (2021);

6.    Prie instamment les autorités sud-soudanaises de rendre compte au Comité créé par la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud (« le Comité »), au plus tard le 15 avril 2024, des progrès accomplis concernant les principaux critères énoncés au paragraphe 2 de la résolution 2577 (2021) et invite les autorités sud-soudanaises à rendre compte des progrès accomplis concernant la mise en place des réformes énoncées au paragraphe 4;

7.    Souligne qu’il importe que les notifications ou demandes de dérogation présentées en application du paragraphe 5 de la résolution 2428 (2018) soient accompagnées de toutes les informations nécessaires, y compris l’utilisation à laquelle le matériel est destiné et l’utilisateur final, les caractéristiques techniques et le nombre d’articles à expédier ainsi que, le cas échéant, le fournisseur, la date envisagée de livraison, le mode de transport et l’itinéraire de transport;

8.    Souligne que les livraisons d’armes effectuées en violation de la présente résolution risquent d’alimenter le conflit et d’accroître davantage l’instabilité, et engage vivement tous les États Membres à prendre des mesures d’urgence pour les détecter et les empêcher sur leur territoire;

9.    Demande de nouveau à tous les États Membres, en particulier aux États voisins du Soudan du Sud, agissant conformément à leur jurisprudence et leur législation internes et au droit international, en particulier le droit de la mer et les accords pertinents sur l’aviation civile internationale, de faire inspecter sur leur territoire, y compris dans les ports maritimes et aéroports, tous les chargements à destination du Soudan du Sud, si les États concernés disposent d’informations leur donnant des motifs raisonnables de penser que ces chargements contiennent des articles dont la fourniture, la vente ou le transfert sont interdits par le paragraphe 4 de la résolution 2428 (2018), afin de garantir une stricte application de ces dispositions;

10.   Décide que tous les États Membres ont l’autorisation et l’obligation, lorsqu’ils découvrent des articles dont la fourniture, la vente ou le transfert sont interdits par le paragraphe 4 de la résolution 2428 (2018), de les saisir et de les éliminer (en les détruisant, en les mettant hors d’usage, en les entreposant ou en les transférant à un État autre que le pays d’origine ou de destination aux fins de leur élimination), et décide également que tous les États Membres sont tenus de coopérer à cet effort;

11.   Enjoint à tout État Membre effectuant une inspection en application du paragraphe 9 de la présente résolution de présenter au Comité, par écrit et sans délai, un rapport initial exposant en particulier les motifs de l’inspection et les résultats de celle-ci et faisant savoir s’il y a eu coopération ou non et si des articles dont la fourniture, la vente et le transfert sont interdits ont été découverts, enjoint également audit État Membre de présenter par écrit au Comité, dans les 30 jours, un autre rapport donnant des précisions sur l’inspection, la saisie et l’élimination, ainsi que sur le transfert, notamment une description des articles en question, leur origine et leur destination prévue, si ces informations ne figurent pas dans le rapport initial;

Sanctions ciblées

12.   Décide de reconduire jusqu’au 31 mai 2024 les mesures concernant les voyages et les mesures financières imposées par les paragraphes 9 et 12 de la résolution 2206 (2015), et réaffirme les dispositions des paragraphes 10, 11, 13, 14 et 15 de ladite résolution et des paragraphes 13, 14, 15 et 16 de la résolution 2428 (2018);

13.   Décide de garder constamment à l’étude les mesures reconduites au paragraphe 12 ci-dessus compte tenu des progrès qui auront été accomplis dans l’application de toutes les dispositions de l’Accord revitalisé et en fonction de l’évolution de la situation concernant les violations des droits humains et les atteintes à ces droits, y compris les violences sexuelles liées aux conflits, et se déclare prêt à envisager de les adapter, notamment en les modifiant, en les suspendant, en les levant ou en les renforçant, de manière à répondre à la situation;

14.   Souligne qu’il est prêt à imposer des sanctions ciblées afin d’appuyer la recherche d’une paix durable et inclusive au Soudan du Sud et note que le Comité peut examiner des demandes de radiation de personnes ou d’entités inscrites sur la Liste;

15.   Réaffirme que les mesures édictées au paragraphe 9 de la résolution 2206 (2015) s’appliquent à toutes les personnes, et celles édictées au paragraphe 12 à toutes les personnes et entités que le Comité aura désignées comme étant, directement ou indirectement, responsables ou complices d’activités ou de politiques faisant peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité au Soudan du Sud, et réaffirme également que les mesures édictées aux paragraphes 9 et 12 de la résolution 2206 (2015) s’appliquent aux personnes désignées par le Comité qui sont à la tête ou membres de toute entité, y compris une administration sud-soudanaise, un parti d’opposition, une milice ou tout autre groupe, s’étant livrée ou dont les membres se sont livrés à toute activité visée au présent paragraphe et au paragraphe 16;

16.   Réaffirme que les activités ou les politiques décrites au paragraphe 16 peuvent comprendre, sans s’y limiter, les critères décrits au paragraphe 15 de la résolution 2521 (2020), et souligne que les activités ou les politiques visant à entraver la conduite ou la légitimité d’élections libres et régulières au Soudan du Sud, notamment en entravant ou en altérant les activités préélectorales préparatoires, constituent également un motif d’inscription;

17.   Se déclare préoccupé par les informations faisant état de malversations et de détournements de fonds publics, qui compromettent la paix, la sécurité et la stabilité du Soudan du Sud, s’inquiète vivement des informations faisant état de malversations financières et d’un manque de transparence, de contrôles et de gouvernance financière, ce qui fait peser une menace sur la paix, la stabilité et la sécurité dans le pays, et contrevient au Chapitre IV de l’Accord revitalisé, et, dans ce contexte, souligne que les personnes menant des activités ou des politiques qui ont pour objet ou pour effet d’étendre ou de prolonger le conflit au Soudan du Sud pourraient se voir frappées d’une interdiction de voyager et de sanctions financières;

Comité des sanctions et Groupe d’experts

18.   Souligne qu’il importe de tenir des consultations régulières avec les États Membres concernés, les organisations internationales, régionales et sous-régionales, ainsi que la MINUSS, selon que de besoin, et en particulier avec les États voisins et les États de la région, afin de garantir l’application de toutes les mesures visées dans la présente résolution et, à cet égard, encourage le Comité à envisager que son président ou ses membres se rendent dans certains pays, selon qu’il conviendra;

19.   Décide de proroger jusqu’au 1er juillet 2024 le mandat qu’il a confié au Groupe d’experts, énoncé au paragraphe 19 de la résolution 2428 (2018), et décide que ce dernier devra lui présenter, après concertation avec le Comité, un rapport d’activité le 1er décembre 2023 au plus tard et un rapport final le 1er mai 2024 au plus tard, ainsi qu’un point de la situation tous les mois, sauf ceux où ces rapports doivent lui être remis et rappelle le paragraphe 6 de la résolution 2664 (2022), dans lequel il demande au Comité, avec l’aide du Groupe d’experts, de surveiller l’application des dispositions du paragraphe 1 de la résolution 2664 (2022), y compris tout risque de détournement;

20.   Demande au Secrétariat de doter le Groupe d’experts des compétences requises concernant les questions de genre, conformément au paragraphe 6 de la résolution 2242 (2015), et l’encourage à tenir systématiquement compte des questions de genre dans ses enquêtes et rapports;

21.   Demande à toutes les parties et à tous les États Membres, ainsi qu’aux organisations internationales, régionales et sous-régionales, de coopérer avec le Groupe d’experts, notamment en fournissant toute information sur les transferts illicites de biens sud-soudanais à des réseaux financiers, patrimoniaux ou commerciaux, et prie instamment tous les États Membres concernés de garantir la sécurité des membres du Groupe d’experts et de leur donner libre accès, en particulier aux personnes, documents et sites pour permettre à celui-ci de s’acquitter de son mandat;

22.   Prie la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés et la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit de communiquer au Comité toute information utile sur ces questions, conformément au paragraphe 7 de la résolution 1960 (2010) et au paragraphe 9 de la résolution 1998 (2011), et invite le Haut-Commissaire aux droits de l’homme à communiquer toute information utile au Comité, selon que de besoin;

23.   Encourage l’échange rapide d’informations entre la MINUSS et le Groupe d’experts, et prie la MINUSS de prêter assistance au Comité et au Groupe d’experts, dans les limites de son mandat et de ses capacités;

24.   Invite la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée à lui communiquer, selon que de besoin, des informations pertinentes sur son évaluation de l’application par les parties de l’Accord revitalisé, et sur le respect de l’Accord sur la cessation des hostilités, la protection des civils et l’accès humanitaire et la facilitation de l’accès humanitaire sans entrave et en toute sécurité;

25.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an, jusqu’au 31 mai 2024, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI)

9331e séance - matin
CS/15296

Le Conseil de sécurité proroge d’un an, jusqu’au 31 mai 2024, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI)

Le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé d’un an, jusqu’au 31 mai 2024, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), en adoptant la résolution 2682 à l’unanimité de ses 15 membres. 

Aux termes de ce texte présenté par les États-Unis, le Conseil prie instamment la MANUI d’accorder la priorité à la fourniture de conseils, d’un appui et d’une assistance au Gouvernement et au peuple iraquiens, de manière à favoriser un dialogue politique inclusif ainsi que la réconciliation dans le pays, en tenant compte de l’apport de la société civile et des jeunes, et avec la participation « entière, égale et véritable » des femmes. 

La Mission est également priée de continuer de conseiller, appuyer et aider le Gouvernement iraquien, la Haute Commission électorale indépendante et d’autres institutions iraquiennes dans leurs efforts pour garantir la tenue d’élections libres et régulières, notamment les élections provinciales et législatives dans la Région du Kurdistan.  La MANUI devra également aider le Gouvernement iraquien et la Chambre des députés dans le cadre de la révision de la Constitution, de l’application de ses dispositions et de l’élaboration de procédures de règlement des frontières intérieures contestées. 

Le Gouvernement iraquien, souligne la résolution, devra également bénéficier d’une assistance dans le cadre de la réforme du secteur de la sécurité, ainsi que de la promotion de la concertation et de la coopération régionales.  Coopération qui devra porter sur des domaines aussi divers que la sécurité des frontières; la neutralisation des mines terrestres, des engins explosifs improvisés et des restes explosifs de guerre; et les effets néfastes des changements climatiques, en particulier ceux contribuant à la désertification et à la sécheresse, précise le texte. 

Au nombre des autres tâches que le Conseil lui confie, la MANUI devra aider activement le Gouvernement iraquien et celui de la Région du Kurdistan à coopérer et à maintenir un dialogue afin de régler les questions en suspens, notamment les arrangements de sécurité, les dispositions budgétaires et la gestion de ses ressources en pétrole et en gaz, et à appliquer les accords existants, dont l’Accord de Sinjar de 2020. 

Le Secrétaire général de l’ONU est quant à lui prié de mener et de présenter au Conseil, au plus tard le 31 mars 2024, un examen indépendant stratégique de la MANUI, en consultation avec le Gouvernement iraquien, outre les organismes des Nations Unies, les États Membres, les organisations régionales, les experts indépendants et la société civile, et le Gouvernement koweïtien.  Cet examen comprendra une évaluation des menaces qui pèsent actuellement sur l’Iraq, et la formulation de recommandations visant à optimiser le mandat, la structure et les effectifs de la Mission afin d’aider le Gouvernement iraquien à régler les problèmes de paix et de sécurité.

LA SITUATION CONCERNANT L’IRAQ - S/2023/340S/2023/341

Texte du projet de résolution (S/2023/378)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures concernant l’Iraq, en particulier les résolutions 1500 (2003), 1546 (2004), 1557 (2004), 1619 (2005), 1700 (2006), 1770 (2007), 1830 (2008), 1883 (2009), 1936 (2010), 2001 (2011), 2061 (2012), 2110 (2013), 2169 (2014), 2233 (2015), 2299 (2016), 2379 (2017), 2421 (2018), 2470 (2019), 2522 (2020), 2576 (2021) et 2631 (2022), et réaffirmant les résolutions 2107 (2013) et 2621 (2022) sur la situation entre l’Iraq et le Koweït, et les valeurs affirmées dans la résolution 2367 (2017),

Réaffirmant l’indépendance, la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Iraq, et soulignant l’importance que revêtent la stabilité, la prospérité et la sécurité de l’Iraq pour le peuple iraquien, la région et la communauté internationale, en particulier compte tenu de la victoire de l’Iraq, sur son territoire, face à l’EIIL (Daech) et engageant la communauté internationale à continuer d’appuyer l’Iraq à cet égard,

Épaulant l’Iraq pour l’aider à surmonter les difficultés qu’il rencontre, alors qu’il poursuit ses efforts de stabilisation et lutte notamment contre le terrorisme, l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les éléments qui leur sont affiliés, conformément aux obligations que lui impose le droit international, y compris le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, et continue de s’atteler au relèvement, à la reconstruction, à la stabilisation et à la réconciliation, et à l’obligation de répondre aux besoins de tous les Iraquiens, en particulier les femmes, les jeunes, les enfants, les personnes déplacées et les membres des minorités ethniques et religieuses, constatant la menace que constituent les engins explosifs et les effets qu’ils ont sur les civils, notamment les enfants, et se félicitant des mesures prises pour déminer les secteurs touchés,

Se félicitant de la confirmation, par la Chambre des députés, du Gouvernement du Premier Ministre de l’Iraq, Mohammed Shia’ Al Sudani,

Encourageant le Gouvernement récemment formé à mettre en place des réformes visant à répondre aux aspirations légitimes du peuple iraquien et à lutter contre la corruption, à respecter et protéger les droits humains de toute personne en Iraq, à amener les auteurs de violations des droits humains et d’atteintes à ces droits à répondre de leurs actes, à assurer la fourniture de services essentiels, à diversifier l’économie, à créer des emplois, à améliorer la gouvernance, à s’attaquer aux changements climatiques et aux problèmes liés à l’environnement et à l’eau et à renforcer la viabilité et l’efficacité des institutions publiques, notamment du secteur de la sécurité,

Saluant l’action menée par le Gouvernement iraquien à cet égard et demandant aux institutions d’État de redoubler d’efforts pour amener à faire répondre de leurs actes les personnes qui ont commis des violations des droits humains et des atteintes à ces droits et qui ont notamment tué, blessé grièvement, enlevé ou fait disparaître des manifestants et des journalistes, y compris des femmes, et pour garantir et respecter l’état de droit et le droit à la liberté d’expression,

Se félicitant de l’action menée par le Gouvernement iraquien pour aider les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et les Iraquiens déplacés en République arabe syrienne à retourner dans leurs régions d’origine ou à s’installer ailleurs en Iraq, engageant de nouveau la communauté internationale à appuyer ces efforts et soulignant qu’il importe de parvenir à des solutions durables, permettant un retour dans la dignité et la sécurité, de plein gré et en pleine connaissance de cause,

Constatant les progrès accomplis par le Gouvernement iraquien dans l’application de la loi sur les rescapées yézidies par la création de la Direction générale des affaires relatives aux rescapées et le décaissement des premiers versements aux personnes survivantes et aux victimes, notant qu’il convient d’y inclure les enfants nés de violences sexuelles liées aux conflits et de lever en particulier tous les obstacles administratifs à l’enregistrement des naissances et à la délivrance d’actes d’état civil concernant ces enfants, constatant qu’il importe de garantir une approche axée sur les personnes survivantes qui prévoit le maintien des mesures de réparation et de recours et n’impose pas de normes de preuve et de prescriptions excessives, discriminatoires ou risquant de faire revivre des traumatismes, et demandant au Gouvernement iraquien d’amener les auteurs de violences sexuelles et fondées sur le genre à répondre de leurs actes et de fournir des services de santé mentale et d’aide psychosociale à toutes les personnes survivantes et victimes,

Constatant que les changements climatiques, les changements écologiques et les catastrophes naturelles, entre autres facteurs, ont des effets néfastes qui peuvent entraîner la désertification et la sécheresse, des tempêtes de sable et de poussière, une insécurité alimentaire, des pénuries d’eau, entraver les moyens de subsistance, accentuer la situation humanitaire et aggraver toute instabilité en cours, soulignant qu’il importe que le Gouvernement iraquien, avec l’appui de l’Organisation des Nations Unies s’il en fait la demande, procède à des évaluations globales des risques, prenne des mesures concrètes pour s’adapter aux problèmes que font peser les changements climatiques et les changements écologiques et pour en atténuer les effets, prenant note de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris, saluant l’action menée par le Gouvernement iraquien à cet effet, et notant en particulier l’adhésion du Gouvernement iraquien à la Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux et la tenue de la Conférence sur le climat en Iraq ainsi que de la troisième Conférence internationale de Bagdad sur l’eau en 2023,

Priant la communauté internationale d’accompagner des solutions durables et l’action de développement tandis que le Gouvernement iraquien assume la responsabilité de la fourniture de services humanitaires,

Prenant note de l’appui du Gouvernement iraquien à l’examen stratégique indépendant, communiqué dans la lettre datée du 18 mai 2023 adressée au Secrétaire général par le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République d’Iraq, Fouad Hussein,

1.    Décide de proroger le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI) jusqu’au 31 mai 2024;

2.    Prie instamment la Représentante spéciale du Secrétaire général et la MANUI, à la demande du Gouvernement iraquien, de s’attacher à:

a)    accorder la priorité à la fourniture de conseils, d’un appui et d’une assistance au Gouvernement et au peuple iraquiens de manière à favoriser un dialogue politique inclusif ainsi que la réconciliation aux niveaux national et local, en tenant compte de l’apport de la société civile et des jeunes, avec la participation entière, égale et véritable des femmes;

b)    continuer de conseiller, d’appuyer et d’aider:

i)    le Gouvernement iraquien, la Haute Commission électorale indépendante et d’autres institutions iraquiennes sur le plan du renforcement de la préparation et de l’organisation d’élections pour garantir la tenue d’élections libres et régulières, notamment des élections provinciales et des élections législatives dans la Région du Kurdistan d’Iraq, dans le cadre d’une procédure transparente, notamment en menant des examens techniques réguliers et en établissant des rapports détaillés sur la préparation des élections et les procédures électorales, dans le contexte du cycle ordinaire d’établissement des rapports du Secrétaire général;

ii)   le Gouvernement iraquien et la Chambre des députés dans le cadre de la révision de la Constitution, de l’application de ses dispositions et de l’élaboration de procédures de règlement des frontières intérieures contestées, qui soient acceptables pour le Gouvernement iraquien;

iii)  le Gouvernement iraquien dans le cadre de la progression de la réforme du secteur de la sécurité, en accordant notamment la priorité à la planification, au financement et à l’exécution des efforts visant à renforcer le contrôle de l’État ainsi qu’à des programmes de réintégration adaptés à chaque âge, qui tiennent compte des questions de genre, destinés aux anciens membres de groupes armés, selon qu’il convient, en coordination avec d’autres entités multinationales;

iv)   le Gouvernement iraquien dans le cadre de la promotion de la concertation et de la coopération régionales, notamment sur les questions portant sur la sécurité des frontières, la neutralisation des mines terrestres, des engins explosifs improvisés et des restes explosifs de guerre, l’énergie, le commerce, l’environnement, l’eau, les effets néfastes des changements climatiques, en particulier ceux contribuant à la désertification et à la sécheresse, le renforcement de la résilience, les infrastructures, la santé publique et les réfugiés;

c)    promouvoir, appuyer et faciliter, en coordination avec le Gouvernement iraquien:

i)    le retour rapide, sûr, dans l’ordre, de leur plein gré et dans la dignité, ou l’intégration locale, selon qu’il conviendra, des personnes déplacées dans leur propre pays et des Iraquiens réfugiés en République arabe syrienne, notamment par l’intermédiaire de l’équipe de pays des Nations Unies, et un accès rapide à une assistance juridique et à des documents d’état civil concernant les personnes déplacées et les Iraquiens déplacés en République arabe syrienne, y compris les personnes courant le risque d’apatridie, en particulier les enfants qui n’ont pas d’acte de naissance ou une autre pièce d’identité;

ii)   la coordination et l’exécution de programmes visant à renforcer la capacité de l’Iraq de fournir à la population des services publics et sociaux de base efficaces, notamment en matière de santé, y compris des services d’appui psychosocial, et d’éducation, et continuer d’appuyer la coordination des donateurs régionaux et internationaux de l’Iraq en vue du renforcement d’une prise en main nationale;

iii)  les efforts déployés par l’Iraq, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, en ce qui concerne la réforme économique, le renforcement des capacités et la création des conditions nécessaires au développement durable ainsi qu’au relèvement et à la reconstruction, en particulier dans les zones touchées par le terrorisme, au moyen d’une coordination avec les organisations nationales et régionales et, le cas échéant, la société civile, les donateurs et d’autres institutions internationales;

iv)   la contribution des institutions spécialisées, fonds et programmes des Nations Unies aux objectifs énoncés dans la présente résolution, sous la direction centrale du Secrétaire général agissant par l’entremise de la Représentante spéciale pour l’Iraq, avec l’appui de l’adjoint désigné;

d)    promouvoir l’application du principe de responsabilité, la protection des droits humains et la réforme judiciaire et juridique, dans le plein respect de la souveraineté de l’Iraq, afin de renforcer l’état de droit et d’améliorer la gouvernance dans le pays, tout en appuyant les activités de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes, qui a été créée par la résolution 2379 (2017);

e)    prendre en compte, dans tous les aspects de son mandat, les questions de genre, qui sont des questions transversales, notamment en consultant les divers groupes de femmes de la société civile, et conseiller et aider le Gouvernement iraquien à garantir la participation et la représentation pleine, égale et véritable des femmes à tous les niveaux de prise de décisions, y compris dans le cadre des élections et de la formation du Gouvernement, et la promotion de l’émancipation économique des femmes, en appuyant l’application du Plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité, conformément à la résolution 1325 (2000) et aux résolutions connexes, et le communiqué conjoint sur la prévention des violences sexuelles liées au conflit en Iraq et les mesures prises pour y faire face;

f)    noter l’importance de traiter les enfants touchés par le conflit armé principalement comme des victimes, et prie instamment le Gouvernement iraquien et l’équipe de pays des Nations Unies de renforcer la protection de l’enfance, notamment la réintégration des enfants conformément aux lois nationales et aux obligations imposées par le droit international, et de donner suite aux conclusions formulées par le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés;

g)    aider activement le Gouvernement iraquien et le Gouvernement de la Région du Kurdistan à coopérer et à maintenir un dialogue régulier et structuré afin de régler les questions en suspens, dans le respect de l’unité de l’Iraq et de sa Constitution, notamment les arrangements de sécurité, les dispositions budgétaires et la gestion de ses ressources en pétrole et en gaz, et à appliquer les accords existants, dont l’Accord de Sinjar de 2020;

3.    Prie le Secrétaire général de mener et de lui présenter, conformément aux meilleures pratiques, au plus tard le 31 mars 2024, un examen indépendant stratégique de la MANUI, en consultation avec le Gouvernement iraquien, outre les organismes des Nations Unies, les États Membres, les organisations régionales, les experts indépendants et la société civile, et le Gouvernement koweïtien, conformément au paragraphe 4 de la résolution 2107 (2013), notamment:

a)    une évaluation des menaces qui pèsent actuellement sur la paix et la sécurité de l’Iraq, et le fait de s’assurer que les tâches et les priorités confiées à la MANUI sont toujours pertinentes, et la formulation de recommandations visant à optimiser le mandat, la structure et les effectifs de la Mission afin d’aider le Gouvernement iraquien à régler les problèmes de paix et de sécurité;

b)    une évaluation plus approfondie des possibilités d’aider le Gouvernement iraquien à renforcer une coopération régionale efficace sur les questions décrites au paragraphe 2 b)     iv);

4.    Considère qu’il est indispensable que la sécurité du personnel des Nations Unies soit assurée pour que la MANUI puisse mener son action en faveur du peuple iraquien, et demande au Gouvernement iraquien de continuer à appuyer la présence des Nations Unies en Iraq dans le domaine de la sécurité et sur le plan logistique;

5.    Prie le Secrétaire général de lui rendre compte tous les quatre mois des progrès accomplis par la MANUI dans l’accomplissement de toutes les tâches dont elle est chargée;

6.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité adopte son rapport d’activités 2022 qui sera présenté ultérieurement à l’Assemblée générale

9330e séance – matin
CS/15295

Le Conseil de sécurité adopte son rapport d’activités 2022 qui sera présenté ultérieurement à l’Assemblée générale

Le Conseil de sécurité a, ce matin, adopté le rapport annuel couvrant ses activités du 1er janvier au 31 décembre 2022, avant sa présentation à l’Assemblée générale à une date ultérieure.

Préparé par le Brésil, avec l’aide du Secrétariat, ce document est le fruit d’un compromis entre les membres de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, ce qui a permis de parvenir à un texte équilibré et consensuel, a rappelé le représentant de ce pays, M. João Genésio de Almeida Filho.

L’année 2022 a été extrêmement difficile, a-t-il poursuivi, en pointant les incertitudes relatives à la pandémie de COVID-19 et la détérioration préoccupante de « l’environnement politique » au Conseil.  Le délégué s’est cependant réjoui des résultats importants obtenus à « chaque fois que les membres ont placé la nécessité de coopérer au-dessus des positions individuelles », se montrant alors à la hauteur des attentes et des responsabilités placées dans le Conseil.

M. de Almeida Filho s’est ainsi félicité de l’adoption, en juillet 2022, de la résolution 2642 (2022) portant sur la prorogation de six mois de l’autorisation de l’aide humanitaire transfrontière en Syrie, un mécanisme crucial pour atténuer la souffrance de la population civile qui dure depuis plus de douze ans.  En décembre dernier, a-t-il encore relevé, le Conseil a également adopté la résolution 2699 (2022), la toute première sur le Myanmar, le Conseil y exprimant son ferme appui à l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour que soient prises des mesures concrètes afin de mettre un terme à la violence dans ce pays.

Dans les deux cas, a poursuivi le délégué, de profonds désaccords sont apparus entre les membres sur la marche à suivre, empêchant un soutien unanime.  Malgré tout, a-t-il dit, la volonté de trouver des solutions pragmatiques pour atténuer la souffrance humaine dans l’une des deux plus graves crises de notre époque l’a emporté sur les divergences politiques.

Le Conseil s’est donc acquitté de son mandat avec succès, s’est réjoui M. de Almeida Filho, même s’il a reconnu qu’il ne sera pas toujours possible d’aplanir les différences.  Toutefois, a-t-il souhaité, l’idée selon laquelle la coopération est viable, même dans les périodes les plus difficiles de l’histoire du Conseil, doit renouveler notre foi dans la mission confiée à cet organe par la Charte des Nations Unies.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Décolonisation: le Séminaire régional pour le Pacifique appelle à des mesures novatrices pour ne pas réduire à néant les progrès accomplis vers les ODD

Séminaire régional pour le pacifique
AG/COL/3368

Décolonisation: le Séminaire régional pour le Pacifique appelle à des mesures novatrices pour ne pas réduire à néant les progrès accomplis vers les ODD

BALI, Indonésie (24-26 mai) -- Avec cette année pour thème « Mesures novatrices pour assurer la réalisation des objectifs de développement durable dans les territoires non autonomes », le Séminaire régional pour le Pacifique du Comité spécial de la décolonisation –communément appelé C-24–, s’est tenu les 24, 25 et 26 mai, à Bali, en Indonésie.  Son ambition?  Prioriser le règlement des nombreux problèmes auxquels sont confrontés les 17 territoires non autonomes restants dans le monde pour éviter de réduire à néant les progrès réalisés jusque-là par eux en matière de développement durable et d’autodétermination. 

Car comme l’a déclaré la Présidente en exercice du Comité spécial de la décolonisation, Mme Menissa Rambally, de Sainte-Lucie, de nouvelles voies sont indispensables pour permettre à ces territoires de se relever de l’impact de la pandémie de COVID-19, notamment sur les systèmes de santé et éducatifs et sur la génération de revenus. 

Dans un message vidéo, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a également appelé à se concentrer sur « les aspirations et les besoins des territoires » par le biais de mesures innovantes pour « garantir que les territoires disposent des ressources et du soutien dont ils ont besoin pour promouvoir les ODD, renforcer la résilience et investir dans leur avenir ».  De « nouvelles voies pour une coopération plus forte entre les territoires, les puissances administrantes et les principales parties prenantes » sont nécessaires pour relever les nombreux défis auxquels les territoires sont confrontés, selon le chef de l’ONU, notamment « les petites îles qui sont en première ligne de l’urgence climatique ». 

M. Tri Tharyat, Vice-Ministre de la coopération multilatérale de l’Indonésie, a rappelé que 15 ans s’étaient écoulés depuis 2008, date à laquelle son pays avait accueilli le Séminaire régional.  Depuis, , a-t-il dit, le paysage mondial a considérablement évolué, en particulier en termes d’accès à l’eau potable et d’assainissement, avec un impact profond sur toutes les régions, y compris les territoires non autonomes, a-t-il noté, en mettant en garde contre le fait la moitié du monde est laissée pour compte. 

Il a appelé à davantage d’action pour progresser sur les cibles des ODD dans ces territoires et au-delà, en notant que leur réalisation avait stagné, voire été inversée.  Dès lors, le thème du Séminaire de cette année lui a semblé d’autant plus opportun, M. Tharyat insistant sur la nécessité d’un « dialogue constructif » pour faire progresser le programme de décolonisation à l’approche du Sommet sur les ODD. 

Notant qu’il n’existe pas de solution unique, la Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, Mme Retno Lestari Priansari Marsudi, a détaillé certaines des mesures visant à renforcer le dialogue entre les territoires et les puissances administrantes par l’intermédiaire du C-24, l’élaboration d’approches novatrices grâce à une plus grande participation des organes et agences spécialisés des Nations Unies, et l’engagement en faveur des aspirations, des besoins et du bien-être de la population des territoires, au cas par cas.  « Chaque territoire non autonome est confronté à des problèmes de développement spécifiques, aggravés par la pandémie », a-t-elle rappelé. 

Organisé sous les auspices du C-24, le Séminaire a également été l’occasion d’examiner, cette année, les moyens de faire progresser la quatrième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme (2021-2030). 

Les discussions du Séminaire ont porté, entre autres, sur le rôle du Comité spécial dans le renforcement de la coopération et de l’engagement avec les puissances administrantes et les parties prenantes concernées, alors qu’il explore des mesures innovantes pour faire avancer l’ordre du jour de la décolonisation. 

Les perspectives des puissances administrantes -États-Unis, France, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni– de plusieurs territoires non autonomes et d’autres parties prenantes ont été analysées au cours des discussions.  Spécialiste de la décolonisation, M. Roch Wamytan a sollicité le soutien du C-24 dans l’affaire portée devant la Cour internationale de Justice (CIJ), afin de permettre au peuple de Nouvelle-Calédonie d’exercer son droit à l’autodétermination, même après le référendum de 2021.  Il a demandé à l’ONU de jouer un rôle de médiateur afin de garantir des négociations libres et équitables avec la France.  Plus généralement, l’expert a argué que la résilience des territoires est mise à rude épreuve, la cohésion sociale, l’égalité des sexes et le bien-être de la population étant essentiels à la pleine souveraineté des populations de ces territoires. 

Les participants se sont ensuite penchés sur les développements politiques des territoires non autonomes dans les Caraïbes.  Tout en reconnaissant que le cadre de décolonisation de l’ONU est toujours très pertinent pour cette région, où le processus est inachevé, le représentant des îles Vierges britanniques a présenté cinq demandes concrètes au C-24: une mission de visite du Comité sur place en 2023; une assistance renforcée des départements compétents de l’ONU pour aider le gouvernement territorial à mener une campagne d’éducation locale sur les options permettant d’atteindre une pleine autonomie ainsi que sur la mobilisation des ressources.  Il a également exhorté l’ONU à partager officiellement l’évaluation de l’autonomie réalisée par l’expert indépendant en gouvernance, M. Carlyle Corbin, avec les membres du C-24 avant la session de fond du Comité en juin à New York. 

Les situations au Sahara occidental, aux Îles Falkland (Malvinas) et à Gibraltar ont aussi occupé le devant de la scène au cours de cette édition du Séminaire. Pour M. Sidi Mohamed Omar, du Front POLISARIO, la seule option reste l’expression « démocratique, véritable et libre » du souhait du peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable et « non négociable » à l’autodétermination et à l’indépendance.  Mme Bahiya Ghalla, qui a pris la parole en tant que représentante de la population sahraouie et Vice-Présidente élue du Conseil régional, a réfuté les affirmations du Front POLISARIO selon lesquelles le territoire est occupé par des militaires marocains.  Elle a rétorqué que la souveraineté du Maroc sur ce territoire, qui a bénéficié du lancement du modèle de développement du Sahara marocain financé à hauteur de 8 milliards de dollars depuis 2015, contribue à la promotion du développement durable dans divers secteurs sur le continent africain. 

De son côté, le délégué de l’Espagne a noté l’impact négatif de la sortie du Royaume-Uni de l’UE, à laquelle s’est opposée une grande majorité des habitants de Gibraltar, affirmant que le Brexit fragilise les progrès du territoire dans la réalisation des ODD liés à l’environnement, à l’accès à l’eau et à l’assainissement, à la réduction des inégalités, sans compter l’impact sur les espaces non cédés et les zones voisines.  Il a jugé nécessaire d’atténuer ces conséquences, l’objectif ultime étant de créer une zone de prospérité partagée englobant toute la région de Campo de Gibraltar et de Gibraltar. 

Le Conseiller Karl Thrower a donné son point de vue sur le référendum retardé de Sainte-Hélène, déclarant que la principale préoccupation de l’île était sa dépendance financière à long terme vis-à-vis du Royaume-Uni, compte tenu des multiples défis auxquels le territoire est confronté, y compris son isolement géographique et une assiette fiscale qui se rétrécit. 

Les conclusions et recommandations du Séminaire, telles qu’oralement amendées, seront adoptées au mois de juin par le Comité spécial de la décolonisation. 

Les 17 territoires non autonomes inscrits à l’ordre du jour de l’ONU sont: Anguilla, les Bermudes, Gibraltar, Guam, les Îles Caïman, les Îles Turques et Caïques, les Îles Vierges américaines, les Îles Vierges britanniques, les Îles Falkland (Malvinas), Montserrat, la Nouvelle-Calédonie, Pitcairn, la Polynésie française, le Sahara occidental, les Samoa américaines, Sainte-Hélène et les Tokélaou. 

Le Venezuela a annoncé vouloir organiser le prochain Séminaire du C-24 à Caracas, au Venezuela, en 2024.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: appels convergents à un financement « au cas par cas » des opérations de paix de l’UA à partir des contributions fixées par l’ONU

9329e séance – matin
CS/15294

Conseil de sécurité: appels convergents à un financement « au cas par cas » des opérations de paix de l’UA à partir des contributions fixées par l’ONU

Comme il le fait depuis des années, le Conseil de sécurité s’est penché, ce matin, sur la question du financement des opérations de soutien à la paix de l’Union africaine (UA) qu’il a préalablement autorisées.  Si le principe d’un financement « prévisible, durable et souple » semble désormais faire l’unanimité au sein du Conseil, il reste à trouver un consensus sur celui d’un financement à partir des contributions fixées par l’ONU. À l’instar de la Secrétaire générale adjointe aux affaires politique et à la consolidation de la paix, qui a plaidé pour un tel financement « au cas par cas », l’ensemble des délégations ont appuyé ce modèle. 

Intervenant, en cette Journée de l’Afrique, sur la base du dernier rapport du Secrétaire général sur cette question, Mme Rosemary DiCarlo s’est tout d’abord félicitée de l’intensification de la coopération entre l’UA et l’ONU en matière de paix et de sécurité.  Elle a ainsi rappelé que les deux organisations ont récemment soutenu les efforts de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour rétablir l’ordre constitutionnel au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, et qu’aujourd’hui, l’ONU, l’UA et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) s’emploient à ramener la paix et un ordre dirigé par des civils au Soudan.

La Secrétaire générale adjointe a cependant noté que les missions de paix africaines restent confrontées à des problèmes récurrents, en raison notamment de leurs déficits de financement et de leur manque de capacités opérationnelles et logistiques. Bien que le Conseil ait déjà accepté, en 2009, de financer partiellement la Mission de l’UA en Somalie (AMISOM) -devenue depuis la Mission de transition de l’UA en Somalie (ATMIS)- à partir des contributions obligatoires de l’ONU, le besoin d’asseoir les opérations de paix de l’UA sur des bases solides se fait de plus en plus pressant, a-t-elle constaté. 

Après avoir rappelé que la résolution 2378 (2017) proposait d’examiner la création d’un mécanisme par lequel les opérations de paix de l’UA pourraient être partiellement financées par les contributions fixées par l’ONU, « au cas par cas », Mme DiCarlo a invité le Conseil à autoriser ce modèle afin d’aider l’UA à relever les défis de paix et de sécurité sur le continent.  À l’appui de cette demande, elle a fait valoir que l’UA s’est elle-même engagée à augmenter ses propres contributions financières, notamment en revitalisant son Fonds pour la paix. 

Le Commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l’UA a lui aussi insisté sur les efforts financiers consentis par son organisation, précisant que l’Assemblée de l’UA a également approuvé l’opérationnalisation de la facilité de réserve du Fonds pour la paix en 2023, ce qui a permis de soutenir l’ATMIS et la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) en République démocratique du Congo (RDC). M. Adeoye Bankole a aussi mis en avant le fait que l’UA progresse dans l’application des droits humains, du droit international humanitaire et des normes de conduite et de discipline. 

M. Bankole a ajouté que l’UA propose trois modèles de financement réalisables, dont certains recoupent les options avancées par le Secrétaire général: l’accès aux contributions fixées par l’ONU pour les missions hybrides; la mise en place d’un bureau d’appui de l’ONU financé au moyen des contributions de l’ONU ; et le soutien direct, par ce même biais, des opérations sous-régionales de soutien à la paix.  Alors que les crises africaines démontrent l’inadéquation de l’architecture actuelle de paix et de sécurité, « c’est le bon moment d’agir », a-t-il appuyé, rejoint dans cette analyse par Mme Bitania Tadesse, Directrice de programme d’Amani Africa Media & Research Services, pour qui l’adoption d’une résolution consacrant l’utilisation des contributions de l’ONU pour le financement des opérations de paix de l’UA aiderait à « restaurer la foi de l’Afrique dans le système multilatéral ».

Par la voix du Ghana, les trois membres africains du Conseil (Gabon, Ghana et Mozambique) se sont pour leur part félicités que, s’agissant du partage des charges, l’UA ait décidé d’affecter 25% de son budget à des activités de paix et de sécurité.  Selon eux, les deux modèles de financement présentés dans le rapport du Secrétaire général, à savoir l’établissement d’un bureau d’appui de l’ONU et le financement conjoint d’une mission hybride, fournissent des éléments utiles pour définir le meilleur cadre possible.

Cette position a été partagée par toutes les délégations, avec toutefois quelques nuances.  Les États-Unis ont souhaité que le Conseil de sécurité conserve son rôle de surveillance, après approbation au cas par cas des opérations de l’UA qu’il mandate, et que l’Assemblée générale veille au contrôle budgétaire de ces missions.  Ils ont en outre exhorté l’UA à mettre pleinement en œuvre son cadre de conformité, non sans rappeler que toute opération de paix doit viser une solution politique.  Le Royaume-Uni a, lui, invité le Conseil à discuter de la répartition du fardeau financier entre l’ONU et l’UA, en prévenant que toute interprétation erronée entraînerait le blocage de nouvelles initiatives. 

De son côté, la Chine a averti que le recours aux contributions fixées par l’ONU pour financer les opérations de paix de l’UA ne doit pas inciter les pays développés à « contourner » leur responsabilité historique vis-à-vis de l’Afrique.  Par ailleurs, sans écarter aucun des modèles proposés par le Secrétaire général, la délégation chinoise a suggéré de rationaliser le financement des opérations de maintien de la paix de l’ONU afin de réinjecter les économies réalisées dans l’appui aux missions de l’UA. 

Tout en défendant le principe des « solutions africaines aux problèmes africains », la Fédération de Russie s’est déclarée prête à se joindre aux négociations à venir sur une future résolution pertinente du Conseil.  La France a exprimé la même disposition, jugeant qu’un tel projet de résolution permettrait d’affirmer la valeur ajoutée des opérations africaines de paix conduites par les soldats africains eux-mêmes, d’avancer vers un mécanisme consultatif de planification et de décision, et de faire le point sur les efforts restant à déployer en matière de droits humains, de droit international humanitaire, de conduite et de discipline. 

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE - S/2023/303

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, s’est félicitée de l’intensification de la coopération entre l’Union africaine (UA) et l’ONU depuis la signature en 2017 du Cadre commun ONU-UA pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité.  Elle a rappelé que, récemment, les deux organisations avaient soutenu les efforts de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour rétablir l’ordre constitutionnel au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, et qu’aujourd’hui, l’ONU, l’UA et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) soutiennent les efforts visant à ramener la paix et un ordre dirigé par des civils au Soudan.  Au cours des 20 dernières années, a-t-elle poursuivi, l’UA a montré sa volonté de déployer rapidement des opérations de soutien à la paix en réponse aux conflits armés sur le continent.  Avec ses missions au Burundi, en République centrafricaine, aux Comores, au Mali, en Somalie et au Soudan, l’UA a contribué au maintien de la paix et de la sécurité continentales, conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, a relevé la haute fonctionnaire. 

Toutefois, a-t-elle noté, ces missions ont été confrontées à des problèmes récurrents, en raison notamment de leurs déficits de financement et de leur manque de capacités opérationnelles et logistiques.  Bien que le soutien fourni par l’ONU et d’autres partenaires ait été utile, il a aussi souvent été imprévisible, a-t-elle constaté, estimant à cet égard que la forme de coopération la plus novatrice entre les deux organisations a été le soutien de l’ONU aux missions d’imposition de la paix de l’UA en Somalie.  En 2007, a rappelé Mme DiCarlo, le Conseil de sécurité a approuvé la Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) puis, en 2009, a mandaté un soutien partiel à partir des contributions obligatoires de l’ONU pour s’assurer que l’AMISOM dispose d’un soutien durable et prévisible pour mener à bien son mandat.  L’année dernière, l’AMISOM est devenue la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS), dans le but de transférer les responsabilités de sécurité aux forces de sécurité somaliennes d’ici à la fin décembre 2024. 

De fait, a souligné la Secrétaire générale adjointe, le besoin d’asseoir les opérations de paix de l’UA sur des bases solides se fait de plus en plus pressant. Notant que l’UA et les mécanismes économiques régionaux se sont efforcés ces dernières années de répondre à la nature changeante des conflits en Afrique, du Sahel à la Somalie, du Mozambique à l’est de la République démocratique du Congo, elle a reconnu que l’impératif de fournir un financement prévisible, flexible et durable aux opérations de soutien à la paix dirigées par l’UA est bien connu du Conseil de sécurité. En 2015, par exemple, le rapport du Groupe indépendant de haut niveau sur les opérations de paix a conclu que l’absence de mécanismes de financement durables, prévisibles et flexibles pour soutenir les opérations de paix de l’UA compromet leur durabilité et leur efficacité. Sur cette base, a-t-elle rappelé, le Conseil de sécurité a exprimé, dans la résolution 2378 (2017), son intention d’examiner plus avant des mesures pratiques pour établir un mécanisme par lequel les opérations de paix de l’UA pourraient être partiellement financées par les contributions fixées par l’ONU, au cas par cas.

Mme DiCarlo a indiqué que le Conseil est saisi aujourd’hui d’un rapport du Secrétaire général contenant des recommandations sur l’obtention d’un tel soutien pour les opérations dirigées par l’UA mandatées par le Conseil de sécurité. Elle a salué le fait que l’UA ait fait des progrès significatifs pour remplir les engagements énoncés dans les résolutions 2320 (2016) et 2378 (2017), et ainsi relever le défi financier de ses opérations.  L’Union africaine, a-t-elle observé, s’est notamment engagée à augmenter ses propres contributions financières en revitalisant le Fonds pour la paix de l’UA. Pour la Secrétaire générale adjointe, les opérations de paix de l’UA doivent être considérées comme faisant partie de l’éventail des réponses aux crises en Afrique, aux côtés des mécanismes établis des Nations Unies.  Le rapport décrit à ce sujet un processus de planification consultatif, dans le cadre duquel l’ONU, l’UA et les configurations sous-régionales peuvent évaluer ensemble la réponse requise à une crise émergente.  Ce processus, a-t-elle fait valoir, peut rassurer le Conseil sur le fait qu’une situation donnée a été systématiquement examinée par toutes les entités concernées.  Il peut aussi l’aider à décider si les contributions fixées peuvent être imposées. Le rapport présente le modèle de mission conjointe et les programmes de soutien fournis par l’ONU comme les deux options les plus pratiques, le soutien étant autorisé au cas par cas, a ajouté Mme DiCarlo, formant le vœu que le Conseil acceptera d’apporter son soutien, notamment en autorisant l’accès aux contributions fixées par l’ONU.  Une action concrète sur ce problème de longue date permettra de combler une lacune critique dans l’architecture internationale de paix et de sécurité et de renforcer les efforts de l’UA pour relever les défis de paix et de sécurité sur le continent. 

M. ADEOYE BANKOLE, Commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, a appelé, face aux foyers d’insécurité persistants en Afrique, à un « changement de paradigme » au sujet des opérations de soutien à la paix sur le continent.  Qu’elles soient financées ou autorisées par l’UA, leur financement actuel ne peut en effet répondre aux besoins impérieux de durabilité, d’efficacité ainsi qu’aux besoins de financement innovant qui constituent l’objectif fondamental de l’UA.  Sa proposition d’aujourd’hui, à l’occasion de la Journée de l’Afrique, est que seule la contribution de l’ONU aux opérations dirigées, mandatées ou autorisées par l’UA répond aux critères de financement prévisible, adéquat et durable.  Bien heureusement, en réponse aux directives antérieures du Conseil, l’Assemblée de l’UA a adopté un document de consensus sur le financement prévisible, adéquat et durable des opérations de l’Union africaine, document proposant trois modèles de financement réalisables. Premièrement, la contribution au budget de l’ONU pour les missions hybrides; deuxièmement, la contribution au budget de l’ONU selon le modèle du Bureau d’appui; et enfin, celle évaluée au budget de l’ONU pour soutenir les opérations de soutien à la paix sous-régionales.

Pour le Commissaire, c’est le bon moment d’agir.  Les crises actuelles en Somalie, dans le bassin du lac Tchad, au Sahel, dans la région des Grands Lacs et au Mozambique fournissent des enseignements précieux sur l’inadéquation de l’architecture internationale actuelle de paix et de sécurité: la nature ad hoc des modèles en vigueur n’est pas viable, selon lui.  Demeurant attachée aux principes inébranlables d’une solution africaine aux problèmes africains, par le biais du partage des charges et des responsabilités, l’UA a doté son Fonds pour la paix de plus de 340 millions de dollars. Il est pertinent de souligner que l’Assemblée de l’UA a encore illustré ces principes en approuvant l’opérationnalisation de la facilité de réserve pour les crises du Fonds pour la paix en 2023, à partir de laquelle l’UA a soutenu la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) ainsi que la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est en RDC, avec 2 millions de dollars.  Il a félicité les États membres de l’UA pour cette démonstration de panafricanisme, ajoutant que la communauté internationale représentée au sein du Conseil devrait également « jouer son rôle ».

Mettant aussi en avant le fait que la Commission continue à faire des progrès significatifs dans l’intégration et la mise en œuvre des droits humains, du droit international humanitaire (DIH) et des normes de conduite et de discipline dans la planification, la conduite, la gestion et la liquidation des missions, M. Bankole s’est déclaré convaincu que les éléments du document de consensus sur le financement prévisible, adéquat et durable des opérations de soutien à la paix de l’UA, ainsi que le rapport du Secrétaire général, permettront au Conseil de décider des modalités essentielles à inclure dans un projet de résolution sur l’accès par l’UA aux contributions au budget de l’ONU.

Mme BITANIA TADESSE, Directrice de programmes à Amani Africa Media and Research Services, a souhaité que la discussion d’aujourd’hui se focalise sur le type d’arrangements qui permettent de préserver les générations futures du fléau de la guerre à un moment où ceux prévus par la Charte des Nations Unies semblent insuffisants.  Rappelant que les défis en matière de paix et de sécurité auxquels l’Afrique est confrontée représentent 60% des décisions du Conseil, elle a exhorté cet organe à soutenir la demande du Secrétaire général pour que les opérations de paix de l’Union africaine soient financées de manière prévisible et durable par le biais des contributions au budget de l’ONU.  La Directrice a suggéré de revitaliser le Fonds de l’UA pour la paix, pour une meilleure répartition des coûts.  Dans cette équation, il faut aussi prendre en compte le sacrifice énorme, parfois ultime, que consentent les personnels de l’UA, a-t-elle dit.  Pour l’intervenante, les conflits dans diverses parties du continent exigent des outils pour restaurer la paix, la stabilité et la consolidation de la paix, sans lesquels les missions en RCA, en RDC et au Mali ont été confrontées à d’énormes défis.  À l’inverse, a-t-elle estimé, de la Somalie, dans le cadre de l’AMISOM qui a disposé des ressources adéquates pour s’acquitter de son mandat.

Pour elle, l’adoption de la résolution relative aux contributions mises en recouvrement des Nations Unies pour les opérations de paix de l’UA contribuerait à restaurer la foi de l’Afrique dans le système multilatéral. Consacré par un accord institutionnel élaboré conjointement par l’UA et l’ONU, elle offrirait un cadre idoine pour que le rôle de l’UA dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales réponde aux attentes de la Charte.  « Tout semble indiquer que les opérations sous conduite africaine et financées par les quotes-parts des États Membres sont rentables », a ajouté la Directrice.  Il ne s’agit pas de signer un chèque en blanc ni de faire preuve de charité, a souligné Mme Tadesse, mais pour ce Conseil d’élaborer le cadre qui lui permettra d’assumer sa part de responsabilité dans le bien public mondial partagé que constitue le maintien de la paix et de la sécurité en Afrique.

Mme VIOLA AMHERD, Vice-Présidente de la Confédération suisse, a indiqué que pour remplir leurs mandats, les missions de paix doivent pouvoir s’appuyer sur un financement prévisible, durable et flexible.  Cela vaut également pour les missions régionales autorisées par ce Conseil, a-t-elle estimé.  Elle a affirmé que toutes les forces de sécurité doivent respecter la Charte, le droit international humanitaire, les droits de l’homme et le droit des réfugiés. Ce respect doit être une condition préalable à l’octroi de fonds par les Nations Unies, a souligné la représentante.

Poursuivant, la déléguée a appelé à favoriser et faciliter des solutions durables. En ce sens, a-t-elle indiqué, l’appropriation régionale des opérations de paix est centrale: les organisations régionales doivent pouvoir planifier, déployer, gérer, soutenir et financer leurs opérations de manière autonome.  Elle s’est déclarée encouragée par le Papier consensuel de l’Union africaine adopté cette année, et a estimé qu’il sera dès lors important de trouver un partage des charges ambitieux et réalisable pour les opérations de soutien à la paix.  Elle a ensuite appelé à promouvoir l’efficacité, le leadership ainsi qu’une bonne division des tâches dans la coopération entre les Nations Unies et l’Union africaine.  Les processus budgétaires établis, y compris les mécanismes de supervision doivent s’appliquer sans exception à tout financement des Nations Unies, a-t-elle souligné.

Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a indiqué que l’évolution du contexte sécuritaire en Afrique exige une adaptation, que le Conseil doit concevoir par le biais d’approches plus « proactives » et audacieuses.  À cet égard, il a soutenu le rapport du Secrétaire général, dans lequel est mentionné la nécessité d’une nouvelle génération de missions de soutien à la paix et d’opérations de lutte contre le terrorisme, menées par des forces régionales, avec un financement garanti et prévisible.  Pour les A3, il est évident que si le Conseil entend demeurer efficace pour faire face aux situations de conflit complexes et persistantes sur le continent africain, il doit conserver sa capacité à tirer parti des partenariats existants de l’ONU avec les organisations régionales et sous-régionales.  L’adoption des résolutions 2320 (2016) et 2378 (2017) constitue une très bonne base pour libérer le potentiel des opérations de soutien à la paix de l’UA, a-t-il relevé. 

Le représentant a salué les efforts déployés par l’UA pour renforcer ses mécanismes de respect des droits humains et du droit international humanitaire. Concernant les normes prudentielles et fiduciaires, il a affirmé que l’UA a constamment progressé, en renforçant ses règles et dispositions financières, afin d’assurer la transparence dans l’utilisation des fonds.  Le renforcement de la structure et des dispositions du Fonds pour la paix de l’UA, ainsi que celles de sa facilité de réserve pour les crises, permettent également d’exercer un contrôle financier rigoureux sur les fonds engagés, en permettant de rendre des comptes à leur sujet. 

Sur la question du partage des charges, le délégué s’est félicité de la clarification apportée par l’UA concernant l’affectation de 25% de son budget à des activités plus larges en matière de paix et de sécurité, à partir de son Fonds pour la paix.  Il a jugé essentiel d’entamer les discussions sur la base du consensus, se félicitant ensuite de la pleine opérationnalisation du Fonds pour la paix, dont le solde s’élevait à 337 millions de dollars en février 2023. Attendant avec intérêt la mise en œuvre de la récente décision du Conseil de paix et de sécurité de l’UA d’augmenter le plafond de la facilité de réserve pour les crises de 5 millions de dollars à 10 millions de dollars pour 2023 et 2024, il a aussi pris note de la demande adressée à la Commission de l’UA d’utiliser le Fonds pour la paix pour contribuer à combler les déficits financiers des missions en cours, telles que la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS). Les deux modèles de financement présentés dans le rapport du Secrétaire général –celui du Bureau d’appui et celui du financement conjoint d’une mission hybride- fournissent des éléments utiles pour définir le meilleur cadre possible, a observé le représentant. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déclaré que le soutien aux efforts des pays africains pour régler les crises doit se traduire par une contribution plus importante de l’ONU à l’Union africaine.  Toutefois, a relativisé le représentant, ces opérations de paix ainsi financées doivent être soumises au contrôle du Conseil de sécurité.  La décision de soutenir ou non une opération donnée, et dans quelle mesure, doit être prise au cas par cas, toujours en fonction des caractéristiques politiques, sécuritaires et humanitaires propres à chaque situation.  Pour le délégué, il est nécessaire de disposer d’un ensemble adéquat de cadres relatifs aux droits humains, au droit international humanitaire, au déploiement des troupes et au respect de la discipline pour guider ces forces. 

Il a fait valoir que ces normes deviennent encore plus importantes lorsque les opérations de l’UA doivent s’acquitter de tâches présentant des risques plus élevés, ce qui est souvent le cas lorsqu’elles dépassent le maintien de la paix.  À cet égard, le représentant a appelé à mener à leur terme les travaux sur les directives conjointes pour la planification opérationnelle, le déploiement, l’évaluation et la transition des opérations de soutien de la paix de l’Union africaine. Il faut en outre englober d’autres domaines notamment la communication stratégique afin de doter les missions des outils leur permettant de relever des défis tels que les discours de haine et la désinformation.  Il faut aussi procéder à une évaluation approfondie des capacités d’appui opérationnel disponibles, a encore préconisé le délégué.

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a rendu hommage au personnel des opérations de paix dirigées par l’Union africaine (UA) et d’autres organisations sous-régionales pour son action en faveur d’une Afrique stable et prospère. Il a souligné l’avantage comparatif de l’UA dans ce domaine, compte tenu de sa compréhension des circonstances uniques de chaque situation en Afrique.  Pour relever efficacement les défis de plus en plus complexes en Afrique, l’ONU et l’UA doivent selon lui continuer à renforcer leur partenariat afin de maximiser leurs capacités combinées, tout en gardant à l’esprit que la mission de l’UA finira par soutenir seule sa capacité.  À cet égard, le représentant a soutenu la mise en place d’un mécanisme par lequel les opérations de soutien à la paix de l’UA autorisées par le Conseil de sécurité en vertu du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies seraient partiellement financées par des contributions de l’ONU, après examen au cas par cas. 

Assurant que le Japon est déterminé à poursuivre les consultations avec toutes les parties prenantes sur une éventuelle assistance aux opérations de soutien à la paix de l’UA, le représentant a plaidé pour que ces opérations aident et complètent les efforts des gouvernements nationaux, avec le soutien de la Commission de consolidation de la paix.  Il a par ailleurs préconisé une coordination étroite entre l’ONU et l’UA, considérant toutefois que le rôle central de l’ONU en matière de maintien de la paix et de la sécurité doit rester inchangé.  Une coopération efficace en matière de planification conjointe, de mandat et de partage mutuel des charges est la clef de l’éventail complet des activités de soutien de la paix tout au long de leur cycle de vie, a-t-il affirmé.  Il a enfin souhaité que toutes les opérations, qu’elles soient dirigées par l’ONU ou par l’UA, garantissent le strict respect des principes onusiens, notamment les droits humains, et a appelé de ses vœux la mise en place de systèmes de suivi, pendant et après les opérations, en vue d’une amélioration continue. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) s’est déclarée déterminée à ce que le Conseil puisse garantir un financement durable et prévisible des opérations africaines de paix.  Ces dernières disposent en effet d’un mandat clair et peuvent obtenir des effets rapides, à des coûts « maîtrisés ».  Il est donc indispensable, selon elle, que le Conseil avance concrètement sur un projet de financement durable et prévisible, qui leur a fait défaut jusqu’à présent. 

Rappelant la position historique de la France en faveur des opérations africaines de paix et de leur financement sur contributions obligatoires de l’ONU, elle s’est dite prête à soutenir le Ghana, le Gabon et le Mozambique pour relancer les discussions au Conseil de sécurité, y compris à travers un projet de résolution, sur la base du mandat confié par l’Union africaine.  Elle a appelé à franchir un cap supplémentaire vers le principe du financement au cas par cas des opérations africaines de paix sur les « contributions obligatoires de l’ONU », afin de compléter l’engagement de l’Union africaine à financer une part de ses efforts de paix et de sécurité.  Un projet de résolution, selon elle, devrait permettre d’affirmer la valeur ajoutée des opérations africaines de paix conduites par les soldats africains eux-mêmes, d’avancer vers un mécanisme consultatif de planification et de décision, ainsi que de faire le point sur les efforts restant à déployer en matière de droits de l’homme, de droit international humanitaire (DIH), de conduite et de discipline. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dit que pour prévenir, atténuer et répondre aux défis en matière de paix et de sécurité en Afrique, il faut combler les déficits de financement et de capacités des opérations qui y sont déployées, suggérant trois axes.  Tout d’abord, il faut que le Secrétariat appuie les efforts visant à déterminer les options pour chaque opération et que le Conseil joue un rôle pour déterminer la portée de la planification conjointe ONU-UA.  En outre, a poursuivi le délégué, il faut accompagner les progrès considérables de l’UA en matière de respect du droit international humanitaire, des droits humains, de déontologie et de discipline, une mise en conformité qui doit prévaloir pour toute nouvelle opération.  Il a aussi invité le Conseil à discuter de la manière de répartir le fardeau financier de ces opérations entre l’ONU et l’Union africaine, en prévenant toutefois que toute interprétation erronée entraînera le blocage de nouvelles initiatives.  Reconnaissant les avantages comparatifs que les opérations sous conduite de l’UA et d’autres opérations dirigées par l’Afrique peuvent offrir, notamment s’agissant d’une capacité de déploiement plus rapide face à certaines menaces émergentes, le représentant a souligné que celle des opérations de maintien de la paix de l’ONU était parfois inadéquate. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a estimé que les opérations de soutien à la paix de l’Union africaine (UA) sont des outils pour répondre aux crises et aux conflits sur le continent.  Elle a cependant constaté que l’absence de financement souple, durable et prévisible entrave ces opérations, avant d’affirmer que son pays soutient le principe d’une utilisation des contributions de l’ONU pour les opérations de l’UA autorisées préalablement par le Conseil de sécurité.  La représentante a observé qu’en matière d’opérations de soutien à la paix, l’UA a fait montre de sa volonté politique, tout en démontrant son expertise régionale, ses compétences linguistiques et sa capacité de déploiement rapide pour réagir aux conflits sur le continent.  De fait, a-t-elle souligné, l’UA est la mieux à même de répondre aux défis sécuritaires sur le continent.  Cela étant, a poursuivi la déléguée, nous reconnaissons les exigences de contrôle associées à l’utilisation des contributions de l’ONU pour ces opérations l’UA.  Il importe selon elle que des mécanismes soient mis en place pour atténuer les risques, notamment en garantissant les normes d’autorisation adéquates.  À cet égard, elle a salué les progrès accomplis par l’UA dans ce domaine, notamment par le biais de son cadre de conformité. 

De l’avis de la représentante, il est essentiel, pour progresser sur la question du financement des opérations de paix de l’UA, de réaffirmer l’importance attachée à l’autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU.  Il faut veiller à ce que le Conseil autorise les opérations de soutien à la paix de l’UA au cas par cas, tout en maintenant son rôle de surveillance, comme c’est le cas ailleurs.  S’agissant du contrôle financier, elle a souhaité que, comme pour toutes les missions de l’ONU, l’Assemblée générale joue un rôle de surveillance budgétaire et d’approbation.  Elle s’est par ailleurs réjouie de voir que l’UA a fait des progrès significatifs en matière de droits humains et de conformité, appelant l’organisation régionale à les mettre pleinement en œuvre.  Toute opération de paix doit viser une solution politique, comme précisé dans les doctrines des opérations de soutien à la paix de l’UA, a-t-elle insisté. Enfin la déléguée a indiqué que les États-Unis s’engagent à un partage des coûts, comme prévu par la résolution 2320 (2016).  En œuvrant dans ces domaines, nous pourrons nous acheminer vers l’objectif commun d’une Afrique pacifique et prospère, conformément à l’Agenda 2063 de l’UA, a-t-elle conclu. 

M. ZHANG JUN (Chine), évoquant le document de consensus adopté par l’UA en février, a jugé nécessaire de doter les opérations de soutien à la paix de l’UA d’un financement prévisible, durable et souple, avec le soutien de l’ONU.  Ce sont là des « aspirations légitimes et raisonnables », a-t-il déclaré. Soulignant le principe fondamental d’une solution africaine aux problèmes africains, le représentant a souligné qu’une fois ces opérations financées par l’ONU, elles seront dirigées par l’UA: il ne s’agit, en aucun cas, d’en faire de nouvelles missions de maintien de la paix des Nations Unies.

Concernant la protection des droits humains, elle fait partie intégrante de leur mandat, « mais cette question doit occuper la place qui lui revient », a-t-il tempéré.  Les pays africains ont déjà consenti à des efforts « considérables » sur cette question, a rappelé le représentant.  Personne n’a de bilans parfaits en matière de droits humains et certaines forces des Nations Unies déployées sur le terrain ont eu des « problèmes de comportement » par le passé.  Le délégué chinois a donc mis en garde contre les « préjugés »: certains cas isolés ne doivent pas conditionner l’octroi de contributions à venir.  Surtout, les dispositions en matière de principe de responsabilité ne peuvent servir de prétexte pour reporter les financements.

Troisièmement, l’appui financier doit venir compléter le financement de l’Union africaine par les pays développés, contributeurs historiques. Ces derniers ne doivent pas en profiter pour réduire leur soutien et contourner ainsi leur responsabilité historique face à l’Afrique.  D’autre part, l’Afrique étant confrontée à des difficultés diverses, il ne saurait y avoir de modèle de financement unique.  Aucun des quatre modèles proposés dans le rapport du Secrétaire général ne doit être écarté: reste à voir lequel fera l’objet d’un consensus. Aujourd’hui, de nombreuses opérations de maintien de la paix en Afrique sont confrontées à des difficultés complexes, rendant difficile de dresser un bilan financier, a souligné le délégué. Il a suggéré de rationaliser leur financement et de réinjecter les économies ainsi réalisées dans l’appui aux missions de l’Union africaine.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a appelé à mettre en œuvre les résolutions du Conseil qui reconnaissent les efforts de l’UA, des organisations sous-régionales et régionales en matière de paix.  Il s’est inquiété des obstacles que rencontrent les opérations autorisées par le Conseil pour obtenir des ressources prévisibles, durables et souples, alors que l’UA a réalisé des progrès considérables en matière de droits humains, de conformité, de déontologie et de discipline.  L’UA a aussi progressé s’agissant du Fonds pour la paix et de la reddition de comptes financière, a ajouté le représentant.  Il a appelé à examiner l’utilisation des ressources au cas par cas, en tenant compte des circonstances particulières de chaque opération de paix, tout en donnant la priorité aux solutions politiques.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré soutenir la position des pays africains quant à la nécessité d’accroître la prévisibilité, la fiabilité et la flexibilité du financement des opérations de paix africaines menées sous l’égide du Conseil de sécurité de l’ONU.  Il a fait valoir que les Africains connaissent mieux que quiconque la nature et les causes profondes de l’instabilité dans leur région et disposent aujourd’hui de mécanismes qui tiennent compte des spécificités locales et complètent harmonieusement les efforts de l’ONU.  Le représentant a ainsi noté que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) travaille efficacement et peut compter sur le soutien de la Commission africaine, du Groupe des sages, du Système continental d’alerte rapide et de la Force africaine prépositionnée, tandis que le Fonds pour la paix de l’UA est en train d’être abondé.  De plus, l’initiative de l’UA pour mettre fin aux conflits armés, prolongée jusqu’en 2030, est en cours de mise en œuvre et des progrès significatifs ont été accomplis dans le domaine des droits de l’homme, de la transparence et de la responsabilité des contingents militaires des pays africains.

Le délégué a rappelé que l’ONU a fourni à plusieurs reprises une assistance matérielle et financière aux efforts africains dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales, notamment par le biais des contributions obligatoires des États Membres.  Il a cité comme exemples de cette aide le soutien logistique du Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie aux Casques bleus africains déployés dans ce pays, la mission de maintien de la paix hybride ONU-UA au Darfour et l’assistance à la Force conjointe du G5 Sahel.  Selon lui, la nécessité d’une discussion approfondie sur la question de la garantie d’un financement prévisible et durable est dictée par la croissance incessante des situations de crise et des conflits armés en Afrique, le manque d’accès aux ressources nécessaires conduisant inévitablement à la perte d’efficacité des efforts entrepris et à la propagation de l’instabilité. 

Observant que les pays africains sont capables de prendre leurs responsabilités pour assurer la paix et la sécurité dans leur région, il en a voulu pour preuve les décisions prises par l’UA sur l’utilisation de son Fonds pour la paix et de son fonds de réserve pour la résolution des crises.  Il a également salué la volonté des dirigeants africains de parrainer 25% des dépenses totales pour les activités de paix et de sécurité menées sur le continent, y compris les opérations de paix, y voyant une confirmation du principe des « solutions africaines aux problèmes africains ».  Sur la base des recommandation formulées dans le rapport du Secrétaire général sur un éventuel processus de planification et de prise de décisions conjointe sur les missions de paix sur le continent, il a assuré que la Fédération de Russie est prête à se joindre aux discussions de fond, dans le cadre du processus de négociation à venir sur une future résolution pertinente du Conseil de sécurité. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a recommandé de mettre à profit les relations renforcées entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA pour développer et améliorer la gestion des crises sur le continent africain.  Favorable à des opérations de paix de l’UA correctement financées, la représentante a dit attendre avec intérêt les discussions à venir pour mieux définir leur opérationnalisation.  Un véritable engagement en vue de résoudre les questions en suspens, telles que le partage des coûts liés à ces opérations, est toujours nécessaire, a-t-elle ensuite souligné.  L’Union européenne, a rappelé la déléguée, a versé 600 millions d’euros pour 2022-2024 afin de soutenir les aspects militaires des opérations de paix dirigées par l’Afrique.  Elle est prête à poursuivre sa coopération avec l’UA, notamment en participant au projet tripartite ONU-UA-UE visant à renforcer et à rendre opérationnel le cadre de conformité de l’UA en matière de droits humains, afin de mettre en pratique les politiques de l’UA en matière de droits humains et de diligence raisonnable. Elle a également plaidé en faveur d’un financement supplémentaire provenant d’une base de donateurs élargie afin de garantir véritablement la viabilité de ces opérations.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a salué la détermination de l’Union africaine à assumer un plus grand rôle dans le maintien de la paix et de la sécurité en Afrique, en partenariat avec l’ONU.  Ce partenariat doit garantir un soutien financier stable et prévisible aux missions de maintien et de soutien de la paix en Afrique.  Selon lui, les défis sécuritaires auxquels l’Afrique est confrontée nécessitent une stratégie à long terme et durable qui permette la mobilisation d’un soutien à la fois financier et politique pour éradiquer la violence et les menaces à la paix et à la sécurité.  Cette stratégie, a-t-il ajouté, doit être centrée sur l’humain, sensible au genre et faire progresser la réalisation de tous les droits de chacun.

Le représentant a par ailleurs relevé que les missions de maintien de la paix sont confrontées à des menaces provenant des extrémistes armés, de la criminalité transnationale organisée et du rôle croissant des sociétés militaires privées.  Ces menaces doivent être prises très au sérieux dans les efforts visant à renforcer le partenariat UA-ONU, en plus de régler le financement complexe à long terme des opérations de paix, a-t-il estimé.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a estimé que, grâce à l’architecture de paix et de sécurité qu’elle a développée, l’Union africaine (UA) est la mieux placée pour déployer des opérations de paix en Afrique, conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.  En effet, a-t-elle souligné, sa connaissance de l’environnement local et de ses dynamiques est inégalée, ce qui justifie la confiance internationale dans son expertise. À ce titre, les exercices conjoints d’évaluation et de planification sont essentiels pour réagir efficacement lorsqu’une crise survient, a ajouté la représentante, pour qui les opérations de soutien à la paix de l’UA doivent être dotées des ressources nécessaires. Elle a rappelé à cet égard que, depuis 2018, le Conseil de sécurité a adopté des résolutions et des déclarations présidentielles reconnaissant la nécessité d’un financement « adéquat, durable et prévisible ».  Saluant le fait que l’UA continue de mettre en œuvre son cadre de conformité au droit international humanitaire, aux droits de l’homme, à la conduite et à la discipline, comme demandé par le Conseil de sécurité, l’intervenante s’est également félicitée de la décision du Conseil de paix et de sécurité de l’UA d’augmenter le plafond de sa réserve de crise.  Cette décision, et les contributions supplémentaires au Fonds pour la paix de l’UA, illustrent selon elle l’engagement de l’Afrique à partager la charge financière et à s’approprier la résolution des conflits sur tout le continent. 

Pour la représentante, l’appui aux opérations de soutien à la paix de l’UA doit être adapté à chaque situation et la même logique devrait s’appliquer au financement qui les soutient.  Elle a également jugé nécessaire de s’assurer que les opérations de paix soient capables d’atteindre leurs objectifs grâce à des partenariats pertinents et à des ressources adéquates et durables.  Par conséquent, il importe que le Conseil envisage de soutenir le financement des opérations de soutien à la paix de l’UA qu’il autorise, par le biais des contributions fixées par l’ONU, et ce, au cas par cas, a-t-elle plaidé.  À ses yeux, les différents modèles présentés par le Secrétaire général, y compris une mission hybride et un bureau d’appui, ont le potentiel de faire une réelle différence sur le terrain et doivent être sérieusement pris en considération par le Conseil, en concertation avec l’UA. Un accord sur cette question servirait de « représentation tangible de l’approfondissement du partenariat entre nos deux organisations », a fait valoir la déléguée en conclusion.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC conclut son débat sur les activités opérationnelles de développement sur des appels à soutenir les pays tout en gardant le cap sur la réalisation des ODD

Session de 2023
23e & 24e séances, Matin & après-midi
ECOSOC/7129

L’ECOSOC conclut son débat sur les activités opérationnelles de développement sur des appels à soutenir les pays tout en gardant le cap sur la réalisation des ODD

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a achevé, cet après-midi, son débat annuel sur les activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies sur des appels à intensifier les efforts afin d’aider les États Membres à répondre aux crises actuelles tout en mettant l’accent sur la nécessité d’ancrer la réalisation des objectifs de développement dans la durée. 

« Nous avons entendu votre message haut et fort: il nous faut continuer de faire fond sur les réformes pour renforcer notre appui », a déclaré la Vice-Secrétaire générale de l’ONU et Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement durable, Mme Amina J. Mohammed, à la clôture du débat.  Ce segment des travaux de l’ECOSOC constitue à ses yeux un jalon « dans un voyage au long cours » qui nous mènera au Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD) en septembre de cette année. 

Un pacte de financement sera cependant essentiel, a ajouté la Vice-Secrétaire générale, afin de permettre au système des Nations Unies pour le développement d’apporter un appui personnalisé aux États. Un processus transparent sera également lancé afin d’assurer un financement durable et prévisible du système des coordonnateurs résidents, « point d’ancrage » du système onusien, selon les mots de M. Albert Ranganai Chimbindi, du Zimbabwe, Vice-Président de l’ECOSOC. 

Afin de veiller à ce que la réforme du système des Nations Unies pour le développement porte ses fruits et contribue à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et des ODD, la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a indiqué en matinée que l’organisme qu’elle dirige travaille de manière cohérente avec les coordonnateurs résidents pour favoriser la réalisation des priorités établies par les gouvernements des pays hôtes. 

À cet égard, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe a plaidé pour que des politiques de résilience et de réduction des risques soient intégrées à l’ensemble des programmes de l’Organisation.  Des structures de réduction des risques de catastrophe et des systèmes d’alerte précoce sont déjà en place dans les bureaux régionaux, a-t-elle noté, alors que la présence des coordonnateurs résidents sur le terrain a permis aux États de prendre en charge certaines responsabilités à cet égard.  Pour appuyer ces efforts, l’ONU a concentré son action sur les 30 pays les plus exposés aux catastrophes naturelles afin d’identifier leurs lacunes et de prévoir l’aide appropriée pour y répondre. 

Les délégations se sont ensuite penchées sur les ressources régionales qu’apporte le système des Nations Unies pour le développement aux États Membres afin de les aider à répondre aux crises transfrontalières.  En Amérique latine et dans les Caraïbes, où la question des migrations transfrontalières se pose avec une acuité particulière alors que près de 43 millions de personnes vivent à l’extérieur de leur pays de naissance, le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) a indiqué que plusieurs pays de la région ont mis en place des plans migratoires quinquennaux. 

Une situation similaire à celle qui prévaut dans plusieurs États africains, qui sont aussi confrontés au paiement du service de la dette d’un montant global de 23 milliards de dollars.  La mise en place d’une zone de libre-échange continentale africaine pourrait cependant changer la donne, a considéré la Directrice régionale pour l’Afrique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), en invitant le système onusien pour le développement à cesser de traiter l’Afrique en « élève » pour la laisser trouver les solutions les mieux adaptées aux défis qui lui sont propres. 

Toutefois, a rétorqué le Coordonnateur spécial pour le développement au Sahel, le déficit de gouvernance constitue le principal obstacle dans les zones transfrontalières du Sahel.  Un problème auquel la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, et sa forte dimension transfrontalière, a pour objectif de remédier, grâce à des programmes de développement renforcés, à une augmentation des ressources financières et à des engagements pluriannuels de la part des donateurs. 

En après-midi, les délégations ont discuté du soutien apporté par le système des Nations Unies pour le développement afin d’assurer une transition équitable vers les ODD au niveau national dans les domaines de l’énergie, de l’alimentation et de l’éducation.  La dernière table ronde de la journée portait quant à elle sur l’obligation de rendre compte des performances et des résultats à l’échelle du système onusien pour le développement.

ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES DU SYSTÈME DES NATIONS UNIES AU SERVICE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE POUR LE DÉVELOPPEMENT

Déploiement des actifs du système des Nations Unies pour le développement en appui des pays confrontés à des défis transfrontaliers

Cette table ronde a permis de couvrir un large éventail de situations, avec des interventions ayant trait aux défis qui se posent au Sahel, en Amérique latine ou bien encore à trois pays d’Asie, le Bangladesh, le Népal et la République démocratique populaire lao. 

M. JOSE MANUEL SALAZAR-XIRINACHS, Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a évoqué la question des migrations transfrontalières, qui est pressante en Amérique latine et dans les Caraïbes, région où 43 millions de personnes vivent à l’extérieur de leur pays de naissance.  Il a mentionné le plan migratoire quinquennal mis en place par plusieurs pays de la région, le Guatemala étant le chef de file.  « Ce projet va bon train. »  Alors que seules 25% des cibles des objectifs de développement durable (ODD) devraient être atteintes, il a détaillé la coopération régionale mise en place pour combler ce retard et mentionné la création d’un fonds de résilience pour les Caraïbes pour faire face aux conséquences des changements climatiques.  Enfin, il a rappelé la création en 2022 d’un forum sur le lithium entre la Bolivie, l’Argentine et le Chili, véritable « triangle du lithium », qui abrite, avec l’Afrique, la très grande partie des ressources mondiales de ce minerai. 

De son côté, Mme AHUNNA EZIAKONWA, Directrice régionale pour l’Afrique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a rappelé l’acuité des défis que les pays africains doivent relever, en particulier le paiement du service de la dette, qui représente quelque 23 milliards de dollars.  Elle a aussi fustigé ces agences de notation qui présentent les pays africains comme étant systématiquement à risque.  Des tels avis négatifs ont coûté 75 milliards de dollars d’investissements aux pays africains, s’est-elle désolée.  Elle a insisté sur l’importance de la création, en cours, d’une zone de libre-échange en Afrique qui pourrait véritablement changer la donne.  L’accélération de ce processus est la priorité des décideurs économiques africains en 2023, a-t-elle dit.  Enfin, et plus globalement, elle a déclaré que le système onusien pour le développement ne doit plus traiter l’Afrique « comme un élève » en lui proposant des solutions.  Ces solutions doivent venir de l’intérieur du continent, a-t-elle tranché. 

Pour sa part, M. ABDOULAYE MAR DIEYE, Coordonnateur spécial pour le développement au Sahel, a indiqué que le manque de gouvernance est le principal défi qui se pose dans les zones transfrontalières du Sahel.  La stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel vise précisément à y remédier, a-t-il dit, en rappelant que 44% des actions prévues par cette stratégie ont une dimension transfrontalière.  Il a surtout insisté sur le nécessaire renforcement des programmes de développement, grâce à un accroissement des ressources financières et à des engagements pluriannuels.  Les donateurs sont une partie du problème car ils ont leurs agences de prédilection et des plans bien souvent arrêtés, a-t-il analysé.  Enfin, il a détaillé plusieurs projets en cours, dont le renforcement des mécanismes d’alerte rapide entre le Burkina Faso, le Bénin et le Togo, avant d’indiquer que les équipes de pays déployées dans la région sont des équipes transfrontalières. 

Enfin, Mme SARA SEKKENES, Coordonnatrice résidente en République démocratique populaire lao, a souligné les difficultés qui accompagnent la sortie de la liste des pays les moins avancés (PMA) vers celle des pays à revenu intermédiaire.  Le Bangladesh, la République démocratique populaire lao et le Népal ont cinq ans pour préparer cette transition et doivent être accompagnés, a-t-elle souligné. Ces pays passent en effet d’une dépendance à des financements externes à la nécessité de mobiliser des financements internes, a-t-elle expliqué, en mentionnant l’appui crucial fourni par les équipes de pays de l’ONU. 

Dans le très court débat interactif qui a suivi, le délégué de la République démocratique populaire lao a rebondi sur les propos de Mme Sekkenes en indiquant que les pays qui effectuent cette sortie de la liste des PMA vers celle des pays à revenu intermédiaire ne doivent pas être « punis » mais bel et bien soutenus.  En écho aux propos de Mme Eziakonwa, le Vice-Président de l’ECOSOC, qui vient du Zimbabwe, a insisté sur les promesses considérables que représente l’Afrique et plaidé pour un changement des mentalités des Africains et de leurs interlocuteurs.  Nous nous présentons comme des pays pauvres alors que nous sommes riches, a-t-il dit. 

Dialogue avec les chefs de secrétariat: travailler de concert pour aider les pays à relever les défis actuels

La session, présidée par le Représentant permanent du Zimbabwe auprès des Nations Unies et Vice-Président de l’ECOSOC, a permis de discuter de l’impact de la réforme du système des Nations Unies pour le développement sur sa capacité à aider les pays à répondre aux crises actuelles, tout en gardant l’attention braquée sur les objectifs de développement à long terme.  M. ALBERT RANGANAI CHIMBINDI a lancé le débat en invitant les participants à examiner la façon dont ce système se prépare à aider les pays à débloquer des voies de transformation et à renforcer la résilience, y compris dans la perspective du Sommet sur les ODD de septembre prochain. 

La réforme du système semble porter ses fruits et contribue à la mise en œuvre des ODD, a d’emblée reconnu le modérateur, M. BOB RAE, Représentant permanent du Canada auprès des Nations Unies.  Mme CATHERINE RUSSELL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a acquiescé, faisant valoir que le travail de ce système tient compte des ODD et des priorités établies par les gouvernements. Pour ce qui concerne l’UNICEF, elle a affirmé qu’il évalue régulièrement ses programmes afin de s’assurer qu’ils tiennent bien compte de l’intérêt suprême des enfants.  La Directrice exécutive a en outre indiqué qu’au niveau des pays, son agence travaille de manière cohérente avec les coordonnateurs résidents.  En outre, sachant que près de 70% des humains vivront en ville d’ici à 2035, l’UNICEF collabore avec ONU-Habitat et d’autres partenaires pour établir des plans de prise en charge des enfants en ville. 

M. JORGE MOREIRA DA SILVA, Directeur exécutif du Bureau des Nations Unies pour l’appui aux projets (UNOPS), a déclaré que le mandat de son bureau est de soutenir les partenaires onusiens dans la mise en œuvre des ODD.  Il a assuré que l’UNOPS n’entend pas marcher sur les platebandes d’autres agences onusiennes.  Il a aussi fait valoir qu’il veille à ne point s’engager dans des projets qui ne cadrent pas avec les ODD ou qui ne sont pas écologiquement viables.  Le Directeur exécutif a rappelé que son agence est chargée de la mise en œuvre de projets et qu’elle n’a pas elle-même de mandat programmatique: l’UNOPS appuie les programmes d’autres agences sur le terrain. Au Ghana par exemple, l’UNOPS appuie les efforts du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour accompagner le pays à s’adapter aux changements climatiques.  M. Moreira da Silva a aussi évoqué le cas du Bangladesh où son bureau travaille avec le PNUD et ONU-Femmes pour accompagner leurs activités opérationnelles. 

Examinant ces activités de terrain, le Danemark a décrié un déclin des programmes nationaux en faveur du genre, ainsi qu’une baisse d’intérêt sur la question climatique.  C’est pourquoi il faut intégrer les questions des droits humains et du genre dans les politiques climatiques, a suggéré le Mexique. La délégation mexicaine a aussi insisté sur l’importance de tenir compte des droits des peuples autochtones.  La Suède a fait remarquer que la réforme du système onusien œuvrant en faveur du développement a été engagée il y a plusieurs années, regrettant que certaines entités onusiennes ne l’aient pas encore mise en route, ce qui est préjudiciable pour les résultats du système dans son ensemble.  La Directrice exécutive de l’UNICEF a partagé ce constat, promettant que son agence poursuivrait son travail en faveur des enfants tout en soutenant l’action des coordonnateurs résidents. 

Alors que le Royaume-Uni a rappelé que le rapport du Secrétaire général de l’ONU laisse voir que la coordination au niveau des pays n’est pas encore optimale, le Canada a demandé d’examiner comment les équipes de pays pourraient éviter les doublons et renforcer la coordination.  Une préoccupation partagée par les Pays-Bas et les États-Unis qui ont insisté sur une bonne relation au sein des équipes de pays, notamment entre les coordonnateurs résidents et les chefs d’agences.  La Directrice de l’UNICEF a donné l’exemple de son agence qui mène des programmes conjoints avec d’autres agences au sein des pays, tout en prévenant que l’efficacité de telles initiatives doit être bien étudiée pour en mesurer l’impact.  Interpelée également sur la question du genre, elle a répondu en rappelant que son agence est focalisée sur la question, une bonne partie de son travail ciblant d’ailleurs les jeunes filles.  À cet égard, l’UNICEF collabore avec des agences telles qu’ONU-Femmes et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour la question du mariage précoce chez les femmes.  L’UNOPS a assuré pour sa part suivre une « approche genre » tout au long de la mise en œuvre des projets.  Il a souligné l’importance de tenir compte du genre dans les processus d’achats notamment, afin de cibler les entreprises dirigées par les femmes. 

Intervenant par message vidéo, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe, Mme MAMI MIZUTORI, a plaidé pour que la réduction des risques de catastrophe soit intégrée dans tous les programmes onusiens.  Déjà, a-t-elle estimé, la plupart des structures de réduction des catastrophes sont déjà en place, ainsi que les systèmes d’alerte précoce, notamment au Siège des Nations Unies et dans les bureaux régionaux.  Mais avec le travail sur le terrain des coordonnateurs résidents, la réduction des risques de catastrophe est de plus en plus prise en charge au niveau des pays.  Elle a souligné que tous ces efforts sont menés en collaboration avec le bureau qu’elle dirige.  Elle a appelé l’ensemble du système des Nations Unies à appuyer la mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe.  Selon elle, les alertes précoces sont les meilleurs outils pour sauver des vies.  À peu près la moitié des États en sont dotés, mais ils ne sont pas répartis également sur leur territoire.  L’ONU a de ce fait sélectionné les 30 pays les plus exposés aux catastrophes naturelles afin de se focaliser sur leurs carences et sur l’aide appropriée pour répondre aux risques qui se réalisent. 

Le Vice-Président de l’ECOSOC a tenu à saluer le rôle de l’UNICEF pour faire face à une situation de catastrophe dans son pays, le Zimbabwe, pendant les moments les plus dramatiques de la pandémie de COVID-19. 

Répondant à la Suisse qui s’interrogeait sur le partage des connaissances au sein du système onusien, le Directeur exécutif de l’UNOPS a estimé que cela passe par une évaluation sincère du travail des agences.  Pas seulement une évaluation traditionnelle en fin d’année, mais un vrai exercice de remise en question en examinant les projets réalisés afin de tirer les leçons qui s’imposent.  Pour le Kazakhstan, enfin, il est aussi question de partir du niveau national pour renforcer la coordination au niveau régional. 

Soutenir les transitions équitables vers les ODD au niveau national

Une transition « juste » dans les domaines de l’énergie, des systèmes alimentaires, des emplois verts et de la connectivité numérique peut avoir des effets multiplicateurs sur la réalisation du Programme 2030 et des ODD, a estimé le Vice-Président de l’ECOSOC, M. MAURIZIO MASSARI, à l’ouverture des débats.  Un avis partagé par la modératrice et membre du Groupe consultatif de la jeunesse du Secrétaire général sur les changements climatiques, Mme EDUARDA ZOGHBI, laquelle a considéré que le développement durable est tributaire de la création d’emplois verts et de la satisfaction des besoins locaux. 

Le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), M. QU DONGYU, a indiqué que la FAO travaille avec de nombreux pays et avec les collectivités locales afin de contribuer au « verdissement » des systèmes agroalimentaires malgré les obstacles à la coordination et les goulots d’étranglement.  Il est à ses yeux essentiel de trouver la voie vers une transition juste en créant des synergies dans les domaines scientifique et technologique, dans le cadre d’une approche fondée sur la coopération.  La FAO, en collaboration avec le (PNUD) et les coordonnateurs résidents, appuie les plans de transition adoptés au niveau des pays ainsi que l’élaboration de programmes conjoints.  Selon lui, la communauté internationale doit néanmoins s’efforcer de « décarboner » l’économie en faisant les compromis nécessaires pour attirer les investissements requis pour maintenir le réchauffement en-deçà de 1,5 degré Celsius. 

L’équipe de pays des Nations Unies joue en effet un rôle essentiel pour permettre aux États Membres d’emprunter la voie d’une transition juste, a confirmé M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal), en évoquant le plan de développement 2018-2022 de son pays qui reposait sur une croissance inclusive et durable, l’action climatique et la réduction des risques de catastrophe, le développement social, les droits humains de même que l’état de droit. Pour maintenir cet élan, les ressources financières et institutionnelles devront toutefois être renforcées, a-t-il reconnu. 

M. LEONARDO GARNIER, Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sommet 2022 sur la transformation de l’éducation, a expliqué qu’en préparation de ce sommet, les équipes de pays des Nations Unies et les représentants des ministères de l’éducation de 130 États avaient tenu des consultations dans le but de préparer des déclarations d’engagement au niveau national. Comme d’autres intervenants, M. Garnier a évoqué, au nombre des obstacles qu’ont rencontrés les organisateurs de cet événement, l’insuffisance des ressources financières, alors que seulement 3% des investissements sont consacrés à l’éducation, ainsi que le « gaspillage de capacité » des entités onusiennes dont la coordination doit selon lui être resserrée. 

Dans le contexte du Zimbabwe, une transition juste s’articule autour de deux questions qui se renforcent mutuellement, a expliqué le Coordonnateur résident au Zimbabwe, à savoir la lutte contre les changements climatiques et la production d’énergie renouvelable.  Le cadre opérationnel pour la période 2022-2026 met l’accent sur les priorités que constituent la planification, la population, la prospérité et la paix, a expliqué M. EDWARD KALLON. 

Concernant les efforts déployés par le secteur privé pour assurer une transition jute, M. ANKIT TODI, Directeur général adjoint du Groupe Mahindra, a prôné la mise en œuvre de stratégies de réduction à zéro des émissions de gaz à effet de serre ainsi que la création d’emplois verts au sein des communautés afin d’attirer des investissements, mesures qui bénéficient également à la croissance des entreprises. 

De son côté, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a rappelé que les droits humains constituent une garantie importante en temps de crise et la clef pour assurer des investissements continus ainsi qu’une transition juste dans les pays en vue de la réalisation des ODD.  

Les Nations Unies possèdent les connaissances requises pour mettre en œuvre des programmes transformateurs mais ne disposent pas nécessairement des ressources nécessaires pour y parvenir, a déploré le Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sommet 2022 sur la transformation de l’éducation.  À l’heure actuelle, le financement des coordonnateurs résidents est « en difficulté », a reconnu le Coordonnateur résident au Zimbabwe, en réclamant la mise en place d’une structure fonctionnelle et d’un appui technique adéquat permettant de forger des partenariats efficaces et d’appuyer pleinement les États, ceux-ci devant néanmoins s’acquitter des responsabilités qui leur incombe à cet égard. 

La transition énergétique est une priorité de développement de l’Indonésie, qui a cependant besoin d’un appui en termes de transferts énergétiques et techniques afin d’assurer sa transition vers des sources d’énergie renouvelables et un État neutre sur le plan du carbone.  Un système des Nations Unies pour le développement misant davantage sur l’énergie est en effet indispensable à des transitions justes, qui se concrétiseront en faisant participer les parties prenantes, la société civile et les gouvernements, y compris le secteur privé, a estimé pour sa part le Portugal. Son délégué a vu dans le Fonds conjoint des ODD l’instrument idoine pour mener à bien la réforme du système de l’ONU pour le développement dans les secteurs de l’éducation et de l’emploi en vue d’établir une économie durable et inclusive. 

Selon l’Accélérateur mondial sur l’emploi et la protection sociale pour une transition juste, 400 millions d’emplois seront créés d’ici à 2030, un objectif « vraiment ambitieux » qui revient à créer 500 000 emplois par année, a fait observer Madagascar, en se demandant si l’Organisation internationale du Travail (OIT) dispose d’une vision « réaliste » permettant de parvenir à de tels résultats. 

Reprenant la parole, le Conseiller spécial du Secrétaire général pour le Sommet 2022 sur la transformation de l’éducation a considéré que les transitions justes passent par la justice, qui dépend elle-même de l’égalité.  Il a illustré son propos en mettant en exergue les disparités criantes qui existent dans le domaine de l’éducation alors que dans les pays à revenus élevés, où se trouve 10% de la population d’âge scolaire, se concentrent 63% des investissements mondiaux en éducation.  De même, les pays riches investissent 8 000 dollars par élève, contre 300 dollars dans ceux à revenus intermédiaires et 50 dollars dans les pays pauvres. 

En bout de ligne, le sous-financement des entités des Nations Unies œuvrant en faveur des transitions justes combiné à l’absence de capacités institutionnelles dans les pays en développement et aux investissements anémiques dans des domaines tels que l’éducation et l’emploi revêtent un coût plus important que d’y consacrer les ressources nécessaires, a conclu la modératrice et membre du Groupe consultatif de la jeunesse du Secrétaire général sur les changements climatiques

Table ronde sur le renforcement de la reddition des comptes s’agissant des performances et des résultats à l’échelle du système

Les intervenants de cette table ronde se sont attelés à examiner par quels moyens améliorer la reddition de comptes lors de la conduite des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies. 

Mme LACHEZARA STOEVA, Présidente de l’ECOSOC, a proposé quelques pistes de réflexion, plaidant notamment pour un renforcement du rôle de l’ECOSOC et une prise de décisions plus éclairée et mieux informée, grâce à de meilleures données.  Le prochain examen quadriennal complet des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies en 2024 sera une bonne occasion pour ce faire, a-t-elle indiqué.  Elle a aussi insisté sur le caractère très technique des documents mis à disposition s’agissant de l’évaluation des performances et souligné la nécessité pour les délégations de disposer de l’expertise nécessaire. 

De son côté, Mme SIMA SAMI BAHOUS, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a dit que son organisation travaille en étroite collaboration avec les coordonnatrices et coordonnateurs résidents pour combler toute lacune en ce qui concerne la reddition de comptes.  Elle a souligné l’importance du Sommet sur les ODD prévu en septembre et de réaliser l’objectif d’égalité entre les sexes.  À titre d’exemple, elle a indiqué qu’au Liban, le PNUD, ONU-Femmes et l’équipe de pays ont œuvré avec les autorités du pays afin d’augmenter le nombre de femmes parlementaires.  Elle a aussi rappelé que 31% des programmes d’ONU-Femmes sont des programmes conjoints. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE, Représentante permanente du Costa Rica, a souhaité que les acteurs du développement s’approprient davantage le système des Nations Unies pour le développement, tel que récemment repositionné.  Il faut garantir le principe de responsabilité dans tout le système, a insisté la déléguée, en ajoutant que cela concerne aussi les coordonnatrices et coordonnateurs résidents.  « Nous sommes à un tournant de la réforme du système. »  Enfin, elle a souligné l’importance de la question en suspens du financement et appelé à l’intégration des enjeux climatiques à tous les niveaux des stratégies de développement. 

Lors du débat interactif, les Pays-Bas ont exhorté les entités onusiennes à améliorer leurs rapports de présentation en se basant sur les performances obtenues sur le terrain, qui est le critère essentiel.  Ces dernières doivent aussi respecter la liste de vérification afin de contribuer à la réalisation des ODD.  L’Ukraine a souligné l’importance de réaliser l’égalité entre les genres.  Appuyé par la Colombie, le délégué ukrainien s’est en outre opposé à toute restriction du mandat d’ONU-Femmes, louant le travail remarquable abattu par l’entité, comme il a pu le constater de visu lors d’un déplacement en Équateur l’an dernier.  La Suède a proposé que les agences onusiennes, lorsque cela est pertinent, présentent conjointement les résultats qu’elles ont contribué à obtenir sur le terrain.  Enfin, le Danemark a rappelé que l’amélioration des performances dépend également de la volonté d’apprendre et de s’améliorer des parties prenantes.

à suivre...

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: des cas typiques de pays où se déploient le système des Nations Unies pour le développement présentés au débat sur les activités opérationnelles

Session de 2023
21e & 22e séances, Matin & après-midi
ECOSOC/7128

ECOSOC: des cas typiques de pays où se déploient le système des Nations Unies pour le développement présentés au débat sur les activités opérationnelles

Des exemples concrets d’intervention de terrain et les besoins des pays connaissant des situations particulières étaient au menu de cette seconde journée du débat du Conseil économique et social (ECOSOC) consacré aux activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies, avec en toile de fond l’ambition renouvelée d’honorer la promesse de ne laisser personne de côté. 

Entre la République de Moldova et le Viet Nam en matinée et les groupes spécifiques de pays dans l’après-midi, avec pour finir une discussion sur les moyens de financer les activités de terrain, l’ECOSOC a permis aux délégations de détailler, au cours de sessions en présentiel et en visioconférence, les succès et les blocages de la coopération entre les Nations Unies et les pays qui reçoivent le soutien onusien dans l’optique de leur développement durable. 

Cette coopération requiert des actions coordonnées, a relevé le Ministre moldove du travail et de la protection sociale, M. Alexei Buzu, qui a invité à sortir des sentiers battus et à innover en ces temps marqués par des crises multiples.  C’est d’ailleurs ce qu’a fait son pays avec un projet pilote d’accompagnement par le système des Nations Unies: ce projet avait pour but d’aider les populations les plus vulnérables à payer les factures d’électricité alors que les coûts de l’énergie connaissaient une inflation record.     

Ce succès a été possible grâce au Fonds de vulnérabilité créé en peu de temps, a expliqué la Représentante résidente du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en République de Moldova. Elle a indiqué qu’après cette initiative menée sur un semestre, le long terme est maintenant envisagé pour parvenir à une transition énergétique douce.  Le Coordonnateur résident dans le pays a relevé pour sa part que ce projet a été mis en œuvre alors même que le pays était submergé par 800 000 réfugiés ukrainiens fuyant le conflit dans leur pays.  Plusieurs délégations, dont l’Australie et la Lettonie, ont particulièrement salué cette magnanimité du peuple moldove envers ses voisins. 

À son tour, le Représentant permanent du Viet Nam auprès des Nations Unies n’a pas hésité à saluer le soutien que le système onusien apporte à son gouvernement.  M. Dang Hoang Giang a expliqué que cet appui a permis de faire augmenter le nombre de bénéficiaires de l’assistance sociale, une augmentation chiffrée à 22% au cours des 10 dernières années. Le représentant a toutefois estimé que la coordination entre le Gouvernement vietnamien et l’ONU peut encore faire l’objet d’améliorations. L’un des défis à relever reste les priorités concurrentes de différentes agences onusiennes, a d’ailleurs reconnu la Directrice du Bureau de pays de l’Organisation internationale du Travail (OIT). 

La Coordonnatrice résidente au Viet Nam a quant à elle fait valoir que l’intervention du système onusien dans le pays a permis de rendre possible ce qui semblait ne pas l’être auparavant.  Elle s’est d’ailleurs réjouie que le Viet Nam ait reçu l’an dernier le certificat Platinum qui atteste de son engagement en faveur de la durabilité. 

Dans l’après-midi, une table ronde a également tablé sur les mesures à prendre afin de rendre le système des Nations Unies pour le développement plus adapté aux contextes et besoins des pays.  La session a examiné comment le repositionnement de ce système conduit à un soutien adapté aux besoins des pays les moins avancés (PMA), des pays en développement sans littoral et des petits États insulaires en développement (PEID), ainsi que des pays à revenu intermédiaire.  Enfin, une dernière session a permis d’examiner les moyens de financer le système des Nations Unies pour le développement. 

Le débat de l’ECOSOC sur les activités opérationnelles de développement se poursuivra encore demain, jeudi 25 mai. Les participants se retrouveront dès 10 heures pour échanger sur les atouts régionaux. 

ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES DU SYSTÈME DES NATIONS UNIES AU SERVICE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE POUR LE DÉVELOPPEMENT

Dialogue avec les gouvernements hôtes, les coordonnateurs résidents et les équipes de pays des Nations Unies: soutenir des politiques transformatrices et intégrées pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD) 

Cette session, présidée par M. ALBERT RANGANAI CHIMBINDI, Représentant permanent du Zimbabwe et Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a permis de toucher du doigt le fonctionnement du système des Nations Unies pour le développement dans les pays.  À travers deux études de cas, la République de Moldova et le Viet Nam, les intervenants ont évoqué les succès et les blocages de la coopération entre les Nations Unies et les pays qui reçoivent son soutien dans l’optique de leur développement durable. 

République de Moldova  

Cette coopération requiert des actions coordonnées, a d’emblée préconisé le Ministre moldove du travail et de la protection sociale, M. ALEXEI BUZU, en invitant à sortir des sentiers battus et à innover en ces temps marqués par des crises multiples.  Il a donné l’exemple de son pays où un projet pilote a permis au système des Nations Unies d’accompagner les efforts du Gouvernement pour aider les populations les plus vulnérables à payer les factures d’électricité alors que les coûts de l’énergie ont connu une inflation record.  Ainsi, de novembre 2022 à avril 2023, a expliqué le Ministre, un système d’aide a été mis en route, qui a permis de couvrir 50% des dépenses d’énergie de plus de 65% des ménages.  Il salué cette solution trouvée en peu de temps. 

Ce succès a été possible grâce au Fonds de vulnérabilité créé en peu de temps, a expliqué Mme DANIELA GASPARIKOVA, Représentante résidente du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en République de Moldova.  Elle a indiqué qu’après cette initiative d’un semestre, il est désormais question de tabler sur le long terme en misant sur une transition énergétique douce.  C’est pourquoi elle a appelé à soutenir le Gouvernement qui vise la diversification des sources d’énergie et une coopération renforcée avec les distributeurs d’énergie, essentielle pour toucher les plus vulnérables. De plus, le Fonds de vulnérabilité devrait aller au-delà des questions d’énergie pour aider dans la lutte contre la pauvreté et renforcer l’équité sociale, a-t-elle espéré.  Le Coordonnateur résident en République de Moldova, M. SIMON SPRINGETT, a relevé que la coordination entre le gouvernement local et l’équipe de pays est centrale pour la suite de cette initiative.  Il a aussi relevé que ce projet a été mis en œuvre alors même que le pays était submergé par 800 000 réfugiés ukrainiens fuyant le conflit dans leur pays. 

Plusieurs délégations, dont l’Australie et la Lettonie, ont particulièrement salué cette magnanimité du peuple moldove envers ses voisins.  Le Japon a indiqué soutenir les efforts de la République de Moldova pour la prise en charge des réfugiés mais aussi pour réaliser son ambition d’adhésion à l’Union européenne.  L’Allemagne a, pour sa part, souligné apporter un appui au Fonds de vulnérabilité. Le délégué des États-Unis a aussi salué le rôle du Coordonnateur résident qui collabore étroitement avec l’ambassade américaine sur place.  Il a souhaité que ce qui est fait dans le pays soit partagé et répliqué ailleurs dans le monde.  De même, le Coordonnateur résident a salué ces États qui appuient le pays, arguant que cela permet d’attirer d’autres partenaires capables de contribuer au financement des différents fonds ouverts par l’équipe de pays et son bureau pour mener à bien leurs missions.  Le Ministre moldove a ensuite remercié ces différents partenaires, avant que la Représentante du PNUD ne précise qu’en juin prochain, une conférence nationale évaluera le travail de ce fonds de vulnérabilité énergétique, afin d’envisager comment l’améliorer. 

Viet Nam 

M. DANG HOANG GIANG, Représentant permanent du Viet Nam auprès des Nations Unies, n’a pas hésité à saluer le soutien que le système onusien apporte à son gouvernement.  Il a expliqué que cet appui a permis de faire augmenter le nombre de bénéficiaires de l’assistance sociale, une augmentation chiffrée à 22% au cours des 10 dernières années, avec également une augmentation de plus de 60% du nombre de travailleurs bénéficiant de programmes de protection sociale.  Le représentant a toutefois estimé que la coordination entre le Gouvernement et les Nations Unies peut encore faire l’objet d’améliorations. Il a ainsi plaidé pour une meilleure coordination entre les différentes institutions onusiennes sur le terrain et le Gouvernement, afin d’éviter l’approche « sapin de Noël ».  L’un des défis à relever reste les priorités concurrentes de différentes agences onusiennes, a reconnu Mme INGRID CHRISTENSEN, Directrice du Bureau de pays de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  « Lorsque les agences travaillent ensemble, alors les résultats sont plus probants que si une seule agence le fait. » 

Les crises nous donnent l’occasion de nous transformer et le leadership du Gouvernement est crucial pour parvenir à des réformes, a poursuivi Mme PAULINE TAMESIS, Coordonnatrice résidente au Viet Nam.  L’intervention du système onusien dans le pays a permis de rendre possible ce qui semblait ne pas l’être auparavant, s’est-elle enorgueillie, avant d’évoquer l’assistance cruciale apportée au pays pendant la pandémie pour éviter que des pans entiers de population ne tombent dans la pauvreté.  Elle a estimé qu’un investissement de 1 milliard de dollars dans les politiques sociales permettrait d’accroître le produit intérieur brut (PIB) du pays de 3,2 milliards. 

Le Canada a rappelé qu’il est l’un des partenaires du Viet Nam, tandis que la Thaïlande a souhaité connaître les principaux défis rencontrés par son voisin dans la mise en place des programmes onusiens.  La République démocratique populaire lao a demandé des précisions sur le soutien en matière de protection sociale apporté par l’ONU pendant et après la pandémie.  De même, la Norvège a demandé d’expliquer comment fonctionne l’équipe de pays des Nations Unies au Viet Nam, et notamment si le problème de concurrence pour l’accès aux fonds a été résolu. 

Selon la Coordonnatrice résidente, le fait que les 15 institutions onusiennes œuvrant dans le pays soient logées dans le même bâtiment les oblige à coopérer, par exemple dans le cadre de la gestion des équipements informatiques.  Il y a donc eu un passage de 30 à 3 serveurs et un gain de 1 million de dollars, ce qui a du coup diminué l’empreinte carbone de l’équipe de pays.  L’an dernier, l’ONU au Viet Nam a reçu le certificat Platinum qui atteste de son engagement en faveur de la durabilité, s’est-elle réjouie.  Ce nouveau local commun, « La Maison verte des Nations Unies », a permis de réaliser d’importantes économies, a-t-elle insisté. 

Le Viet Nam a répondu à certaines préoccupations des délégations en expliquant que la confiance de son pays envers les Nations Unies venait de son histoire: le Viet Nam a vu l’ONU le soutenir au moment où il sortait de la guerre et faisait face à un embargo économique.  Il a expliqué que l’une des difficultés est due à la différence entre les ambitions du pays et les ressources disponibles.  Le pays compte donc sur l’assistance des Nations Unies pour l’accompagner dans la mobilisation des fonds, ainsi que sur les partenaires internationaux.  En effet, a précisé la Coordonnatrice résidente, le Viet Nam ne peut plus recevoir l’aide publique au développement (APD) du fait de son statut de pays à revenu intermédiaire.  Elle a estimé que si les financements privés ne sont pas à négliger dans ce contexte, il faut tenir compte du cadre juridique national et des options de politique intérieure. 

Enfin, la Directrice du Bureau de pays de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a rappelé que son bureau travaille spécifiquement sur la formalisation des emplois dans le pays, avec un accent sur la protection sociale.  L’appropriation nationale est cruciale pour avancer au niveau national, a conclu la modératrice des deux panels, Mme CAROLYN RODRIGUES-BIRKETT, Représentante permanente de Guyana auprès des Nations Unies.  Elle s’est félicitée que, à travers ces deux études de cas, les délégations aient pu aborder des situations réelles et évoquer des solutions concrètes. 

Renforcer les réponses adaptées des Nations Unies aux différents contextes nationaux 

La Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement a ouvert le second débat de la journée en indiquant que la cinquième Conférence des Nations Unies pour les pays les moins avancés (PMA), qui s’est tenue en mars de cette année au Qatar, a été l’occasion de réitérer notre attachement commun à l’accélération de la mise en œuvre du Programme d’action de Doha pour les PMA.  Cette rencontre a en effet permis d’obtenir des promesses financières revues à la hausse de la part des partenaires au développement et du secteur privé, de consolider les accords de coopération existants et de forger de nouveaux partenariats, a rappelé Mme RABAB FATIMA.  La Conférence a également permis aux coordonnateurs résidents des PMA d’échanger avec les points de contact nationaux et d’autres partenaires afin de combler le fossé qui subsiste entre les niveaux de mise en œuvre mondial et national du Programme d’action, a-t-elle encore expliqué.  À son avis, il nous faut désormais agir à tous les niveaux afin de veiller à ce que les engagements formulés à l’appui des PMA se transposent dans les programmes nationaux, avec l’appui des coordonnateurs résidents et des équipes de pays.  Mme Fatima a d’ailleurs annoncé que son bureau lancera sous peu une feuille de route attribuant des responsabilités spécifiques à chaque entité pertinente. 

S’agissant de la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral (PDSL) et de la quatrième Conférence sur les petits États insulaires en développement (PEID), qui se tiendront toutes deux en 2024, la Haute-Représentante a estimé que le système des Nations Unies pour le développement doit jouer un rôle central dans le processus préparatoire, notamment au moyen d’évaluations régionales menées en partenariat avec les commissions régionales.  À cet égard, elle a rappelé que le rapport du Secrétaire général indique que les PDSL et les PMA considèrent que le système des Nations Unies pour le développement satisfait à leurs besoins et priorités. 

Le modérateur du débat, M. TEBURORO TITO (Kiribati), a ajouté qu’une bonne partie du travail de mise en œuvre du Programme d’action de Doha doit se faire sur le terrain, par les pays et les peuples concernés eux-mêmes, en veillant à ce que les mesures proposées soient en adéquation avec leurs priorités nationales.  Si le système des Nations Unies s’engage à soutenir ces trois groupes de pays dans la réalisation des objectifs du Programme d’action de Doha, il est tout aussi important que les pays et les partenaires de développement soient eux-mêmes investis dans sa mise en œuvre, a renchéri la Haute-Représentante

Le Programme d’action de Doha se veut un plan de transformation socioéconomique structurelle des PMA tenant compte de leurs besoins spécifiques et offrant un cadre au système de l’ONU pour mobiliser les partenaires au développement et les donateurs présents dans le pays, a expliqué M. OZONNIA OJIELO, Coordonnateur résident au Rwanda.  Il s’agit selon lui d’un complément à la réforme du système des Nations Unies pour le développement qui vient renforcer le rôle des équipes de pays afin d’aider les pays hôte à définir des programmes stratégiques plutôt qu’à mettre en œuvre des projets, tout en offrant un soutien au financement de leur développement national.  Il offre ainsi au système onusien pour le développement un cadre normatif additionnel permettant d’ancrer son soutien dans les pays hôtes, a-t-il noté. 

Mme INKA MATTILA, Représentante résidente du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en République dominicaine, a décrit les mesures mises en place dans la foulée de la pandémie de COVID-19 afin d’optimiser la riposte collective du système des Nations Unies. Ce système a apporté un soutien au Gouvernement dominicain par le biais d’une analyse intégrée afin d’identifier un « nouveau type » de politiques publiques fondées sur l’évaluation des besoins, sous l’égide des coordonnateurs résidents et avec le soutien du PNUD et de partenaires financiers multilatéraux.  Le cadre de coopération des Nations Unies 2023-2027 pour la République dominicaine a été selon elle l’occasion pour le système des Nations Unies pour le développement de renouveler son offre à l’appui des priorités nationales conformément au Programme 2030 et aux ODD, en mettant les priorités nationales au cœur du développement. 

Malgré le tableau très sombre des prévisions concernant la réalisation des ODD, le Népal a jugé que le Programme d’action de Doha pour les PMA représente une lueur d’espoir, en fixant des cibles et des engagements ambitieux permettant d’apporter des changements porteurs de transformation pour les 1,2 milliard de personnes vivant dans les PMA.  Nous devons toutefois redoubler d’efforts afin d’honorer les engagements pris en faveur d’une transition fluide permettant aux États tels que le Laos de sortir du statut de pays moins avancé de façon « irréversible », a suggéré ce pays, soucieux d’avoir pour cela un système de coordonnateurs résidents « robuste » et centré sur les priorités nationales. 

Pour y parvenir, il est essentiel que le système des Nations Unies pour le développement intègre les orientations fournies par le Programme d’action de Doha, sous la houlette des coordonnateurs résidents, a dit le Portugal.  Selon la délégation, le système des coordonnateurs résidents et le système de développement doivent établir un mécanisme d’appui durable et sur mesure à la sortie de ce statut. 

Au nom de la Communauté des Caraïbes, la Barbade a souligné l’importance de tirer parti du système onusien de manière concertée afin de trouver des solutions aux défis auxquels sont confrontés les PEID, en renforçant les données et les capacités statistiques des bureaux multipays par le biais de partenariats « sincères et durables ». 

Après avoir écouté les voix sur le terrain et celles des entités des Nations Unies évoquer une embellie alors que la pauvreté est à la hausse et qu’à peine 12% des ODD sont en voie d’être réalisés, le Vice-Président du Conseil économique et social et responsable du débat sur les activités opérationnelles pour le développement s’est demandé si nous ne trouvons pas dans « deux univers parallèles ».  Il nous faut donc rappeler ce lien direct qui existe entre la réalisation des ODD et la réalisation des Programmes d’action de Doha et de Vienne ainsi que des Orientations de Samoa, a prôné M. ALBERT RANGANAI CHIMBINDI, tout en mettant fin aux visions cloisonnées. 

Reprenant la parole pour répondre aux questions des délégations, la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement a mentionné que 16 PMA, à savoir 12 en Asie-Pacifique et 4 en Afrique, se trouvent actuellement à un stade de reclassement, un nombre plus élevé que jamais.  Elle s’est en outre réjouie de la mise en place d’un centre d’aide au reclassement permettant d’aider ces pays, qui sont confrontés à des défis communs, à sortir de cette catégorie et à réaliser leurs aspirations.

Table ronde sur le financement du système des Nations Unies pour le développement

L’insuffisante mise en œuvre des engagements pris dans le cadre du pacte de financement, adopté il y a quatre ans, a été au cœur de cette table ronde.  Les intervenants se sont notamment inquiétés du sous-financement chronique du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents. 

M. OSCAR FERNANDEZ-TARANCO, Sous-Secrétaire général à la coordination des activités de développement, a centré sa présentation sur la mise en œuvre de ce pacte, dont l’objectif est d’améliorer la qualité et la quantité des ressources financières au profit des activités de développement.  Il a rappelé que 88% des pays hôtes sont d’avis que les coordonnatrices et coordonnateurs résidents apportent un appui efficace à leurs priorités nationales de développement, signalant par la suite que la mise en œuvre de ce pacte est mitigée.  Selon lui, la promesse, contenue dans ce pacte, de disposer d’un financement prévisible et pérenne n’a pas été honorée. Il a également avancé que 68% seulement des équipes pays des Nations Unies disposent d’un cadre budgétaire actualisé.  Près de 50% du financement de base provient de cinq donateurs, a-t-il précisé, en citant l’Allemagne, la Suède, les États-Unis, la Norvège et le Royaume-Uni. 

Le Sous-Secrétaire général a en outre qualifié la tendance en ce qui concerne les contributions volontaires de préoccupante, celles-ci étant passées de 9,6% en 2010 à 7,7% en 2020.  Le fonds de financement des ODD accuse également un lourd déficit.  Il a ainsi précisé que 279 millions de dollars ont été reçus en 5 ans alors que le pacte visait à la mobilisation de 290 millions par an.  Le financement nécessaire du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents, estimé à 281 millions de dollars, n’a jamais été apporté, a-t-il déploré, précisant que le déficit de 85 millions de dollars en 2022 est le plus important des dernières années. Ce pacte n’a jamais fait l’objet de débats parmi les États Membres, a-t-il regretté. 

De son côté, Mme ANNA-KARIN ENESTROM, Représentante permanente de la Suède, s’est dite également préoccupée par ce déséquilibre financier, en notant que seule une poignée de pays, dont le sien, porte le fardeau du financement des activités de développement.  Depuis 2020, la Suède a apporté 6 millions de dollars pour financer le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents.  Pointant les attentes qui entourent le pacte, elle a insisté sur la nécessité de la transparence et du bon établissement des responsabilités, plaidant en outre pour que les engagements pris dans le cadre de ce pacte soient honorés. 

« Nous avons besoin de débloquer des flux de financement et c’est ce que ce que nous essayons de faire au Kenya », a déclaré M. STEPHEN JACKSON, Coordonnateur résident au Kenya.  Il a expliqué que le pacte est peu connu des parties prenantes au niveau national et que ces dernières peuvent également être rebutées par les lourdeurs bureaucratiques.  Il a noté avec inquiétude la baisse des financements de base et s’est interrogé sur la possibilité de réaliser les aspirations de pays comme le Kenya.  Enfin, il a souligné l’importance des fonds communs, tel que le fonds de financement des ODD.  Il a d’ailleurs indiqué être actuellement à Rome, à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), pour le lancement d’un nouveau fond. 

Lors du débat interactif qui a suivi, l’Afrique du Sud, au nom des pays africains, s’est dit gravement préoccupée par le déficit s’agissant du financement du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents.  Notant que les ressources se raréfient alors que les crises se multiplient, il a plaidé pour un « financement hybride » de ce système.  Même son de cloche du côté de la déléguée de l’Uruguay qui a loué le travail abattu par le Coordonnateur résident dans son pays, avant de dire sa « tristesse » devant le manque de ressources financières. S’adressant aux donateurs, elle a assuré que les ressources sont bien utilisées. 

« Nous constatons une fonte des financements de base », a appuyé le Zimbabwe, tandis que le Brésil a pointé les incohérences dans le financement des différentes entités onusiennes et la fonte de l’aide publique au développement (APD).  « Cette tendance baissière est globale. »  De son côté, la déléguée du Danemark a indiqué que son pays, huitième contributeur aux activités de développement, a atteint l’objectif de consacrer 0,7% de son PIB à l’APD.  Elle a plaidé pour une souplesse dans l’apport de ressources financières, en soulignant l’importance de ressources non affectées.  Le Royaume-Uni a insisté sur l’apport de ressources provenant du secteur privé pour répondre aux besoins en financement, tandis que la Norvège a indiqué que des instructions ont été données à ses ambassades afin de mieux faire connaître le pacte de financement.  Enfin, les États-Unis ont précisé avoir contribué 23 millions de dollars par an au système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: inquiétudes face à une possible suspension des aides de l’ONU aux Palestiniens et à l’escalade des violences au Moyen-Orient

9328e séance – matin 
CS/15293

Conseil de sécurité: inquiétudes face à une possible suspension des aides de l’ONU aux Palestiniens et à l’escalade des violences au Moyen-Orient

Le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient et de nombreux membres du Conseil de sécurité ont exprimé ce matin leur inquiétude à la perspective de voir des aides essentielles à la population palestinienne des territoires occupés suspendues, faute de financement.  Les délégations ont également exprimé leurs préoccupations quant à l’escalade des violences dans la bande de Gaza au cours du mois de mai, appelant les parties à mettre en œuvre les engagements pris lors des pourparlers d’Aqaba et Charm el-Cheikh.

Dans un premier temps, M. Tor Wennesland s’est dit particulièrement alarmé par la crise de financement des agences des Nations Unies qui soutiennent les services de base pour les Palestiniens.  Il a rappelé que le Programme alimentaire mondial (PAM) suspendra la semaine prochaine l’aide en espèces à quelque 200 000 Palestiniens s’il ne reçoit pas de fonds supplémentaires, et que l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) devra renoncer à fournir des services de base en septembre.  Face à cette situation, le Coordonnateur spécial a encouragé les États Membres à accroître leur soutien aux Palestiniens, afin d’éviter de graves problèmes humanitaires et, potentiellement, sécuritaires. 

La récente escalade de la violence a d’ailleurs préoccupé de nombreuses délégations, dont la Fédération de Russie et le Royaume-Uni qui s’est inquiété du « taux alarmant de victimes » en Cisjordanie occupée.  L’attention s’est aussi concentrée sur les affrontements du début du mois entre les factions palestiniennes de Gaza et l’armée israélienne, qui d’après les chiffres évoqués par le Coordonnateur spécial, ont fait 33 morts, dont 12 civils, et 190 blessés côté palestinien, et 95 blessés côté israélien.  Le travail de l’Égypte, du Qatar et des États-Unis pour obtenir un cessez-le-feu, qui, à l’exception d’un incident, tient depuis le 14 mai, a été salué à de nombreuses reprises. 

Tout en notant que les efforts déployés, ces dernières semaines, par l’ONU et ses partenaires pour mettre fin aux hostilités sont cruciaux pour sauver des vies palestiniennes et israéliennes, M. Wennesland a appelé à maintenir au premier plan les questions fondamentales pour créer les conditions d’une paix durable.  Selon lui, la priorité immédiate doit être de soutenir les mesures visant à renforcer l’Autorité palestinienne et à préserver la fourniture de services essentiels au peuple palestinien. 

« Nous devons agir, non seulement pour assurer le bien-être et la gouvernance des Palestiniens, mais aussi pour mettre fin à l’occupation et rétablir un horizon politique vers une solution viable à deux États », a-t-il dit. 

Plusieurs délégations, dont les Émirats arabes unis, ont condamné la décision des autorités israéliennes autorisant notamment l’établissement de colonies de peuplement à Homesh, dans le nord de la Cisjordanie occupée.  Cette décision, comme toutes les annonces d’expansion ou de création de colonies, est contraire au droit international et contrevient par ailleurs aux engagements pris par Israël à l’occasion des réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh, a indiqué la France, les États-Unis rappelant pour leur part que l’avancée des colonies en Cisjordanie sape toute perspective de paix.  Outre qu’elles attisent la violence et la haine, les activités de peuplement se dressent sur la voie de la paix, en compromettant la contiguïté d’un État palestinien, a renchéri le Brésil.

Venue témoigner des conditions de vie dans la bande de Gaza, la Directrice exécutive de l’ONG israélienne Gisha a appelé à laisser les espoirs des jeunes gazaouis guider les diplomates dans leurs réflexions sur les mesures audacieuses que les gouvernements pourraient prendre.  Il n’y a en effet aucune raison de ne pas faciliter la liberté de mouvement dont les femmes et les jeunes ont besoin pour réaliser leurs rêves, a estimé Mme Tania Hary, selon qui 80% des enfants de Gaza souffriraient de troubles émotionnels.  « N’attendez pas qu’une nouvelle attaque militaire remette Gaza et la Palestine à l’ordre du jour », a-t-elle exhorté.

À l’instar des États-Unis, de nombreux membres du Conseil ont par ailleurs dénoncé la visite du Ministre de la sécurité nationale israélien, Itamar Ben-Qvir sur l’esplanade des Mosquées le 21 mai et les propos incendiaires qu’il y a tenus, ainsi que les slogans racistes comme « Mort aux Arabes! » proférés lors de la marche des drapeaux organisée par la droite israélienne dans la vieille ville de Jérusalem le 18 mai.  Les États-Unis et le Royaume-Uni ont en outre fustigé la déclaration du Président Abbas, qui, le 15 mai dernier, a établi un lien entre Israël et le propagandiste nazi Joseph Goebbels, les premiers parlant d’affront inacceptable aux victimes de l’Holocauste. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. TOR WENNESLAND, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, s’est dit particulièrement alarmé par la crise de financement à laquelle sont confrontées les agences des Nations Unies qui soutiennent les services de base pour les Palestiniens.  Il a rappelé que le Programme alimentaire mondial (PAM) suspendra la semaine prochaine l’aide en espèces à quelque 200 000 Palestiniens s’il ne reçoit pas de fonds supplémentaires, et que l’UNRWA devra renoncer à fournir des services de base en septembre.  Rappelant que cette situation s’ajoute à la baisse du soutien des donateurs à l’Autorité palestinienne, il a encouragé les États Membres à accroître leur soutien aux Palestiniens, notamment à travers l’UNRWA et le PAM, afin d’éviter de graves problèmes humanitaires et, potentiellement, sécuritaires. 

Le Coordonnateur a indiqué que les tensions entre Israël et les factions armées palestiniennes dans la bande de Gaza s’étaient aggravées suite au décès en prison le 2 mai dernier, d’un des dirigeants du Jihad islamique palestinien, Khader Adnan, qui a succombé à une grève de la faim de 86 jours.  En réponse, le Jihad islamique palestinien a lancé plus de 100 roquettes en direction d’Israël et l’armée de l’air israélienne a mené des frappes aériennes en représailles.  Il a souligné que grâce aux efforts intensifs de l’Égypte, du Qatar et des Nations Unies, les hostilités avaient pris fin le 3 mai avant de reprendre le 9 mai, avec des raids aériens israéliens.  Il a expliqué qu’en cinq jours, Israël avait mené 323 frappes aériennes, tandis que les militants palestiniens avaient lancé plus de 1 200 roquettes et 250 mortiers en direction d’Israël. Au total 33 Palestiniens, dont au moins 12 civils ont été tués et 190 autres blessés, tandis que six Israéliens ont été modérément blessés et 89 légèrement, a-t-il détaillé. Il s’est dit particulièrement préoccupé par les souffrances des civils et consterné par le fait que les enfants continuent d’être victimes des hostilités.  Il a insisté sur l’importance d’un usage proportionnel de la force et sur la prise de toutes les mesures possibles pour épargner les civils.  Il a aussi condamné les tirs aveugles de roquettes depuis Gaza en direction d’Israël, notamment depuis des zones résidentielles densément peuplées, ce qui constitue une violation du droit international humanitaire. 

Évoquant la situation en Cisjordanie occupée, M. Wennesland a fait savoir que 17 Palestiniens, dont 2 enfants, ont été tués et que 138 autres ont été blessés par les forces de sécurité israéliennes, tandis que 33 civils israéliens et 4 membres des forces de sécurité ont été blessés par des Palestiniens.  En outre, d’importantes restrictions de mouvement ont été imposées à Jéricho, Naplouse et Hébron.  Il a rappelé que des milliers de militants israéliens de droite, dont des ministres de haut rang, avaient participé à la Marche des drapeaux dans la vieille ville de Jérusalem.  Il l’a qualifiée de « hautement provocatrice », dénonçant les slogans racistes, dont « Mort aux Arabes! », et les échauffourées qui l’ont émaillé. 

Regrettant que les plans de colonisation se poursuivent, avec la publication d’appels d’offres pour quelque 310 logements dans la zone C, M. Wennesland a rappelé que toutes les colonies sont illégales au regard du droit international.  Il a aussi déploré la démolition ou la saisie de 33 structures appartenant à des Palestiniens dans la zone C, dont une école à l’est de Bethléem, et 17 à Jérusalem-Est, déplaçant 89 Palestiniens, dont 45 enfants.  Il a appelé les autorités israéliennes à mettre fin à l’expulsion des Palestiniens et leur permettre de construire légalement pour répondre à leur besoin de développement. 

Ces dernières semaines, l’ONU, en collaboration avec des partenaires régionaux et internationaux, s’est à nouveau mobilisée pour mettre fin aux hostilités entre les factions armées à Gaza et en Israël.  Ces efforts sont cruciaux pour sauver des vies palestiniennes et israéliennes, mais il faut également maintenir au premier plan les questions fondamentales pour créer les conditions d’une paix durable, a-t-il estimé.  Selon lui, la priorité immédiate doit être de soutenir les mesures visant à renforcer l’Autorité palestinienne et à préserver la fourniture de services essentiels au peuple palestinien.  Ces étapes doivent être mises en œuvre de manière à encourager les parties à dialoguer, y compris sur les questions politiques sous-jacentes, a précisé le Coordonnateur spécial.  Et cela nécessite des actions de la part des dirigeants israéliens et palestiniens, ainsi qu’un soutien et une attention accrus de la part de la communauté internationale.  Nous devons agir, non seulement pour assurer le bien-être et la gouvernance des Palestiniens, mais aussi pour mettre fin à l’occupation et rétablir un horizon politique vers une solution viable à deux États, a-t-il conclu.

Mme TANIA HARY, Directrice exécutive de Gisha, a indiqué que cette organisation israélienne promeut la liberté de circulation et d’autres droits qui en dépendent, en particulier à Gaza.  Gisha, qui signifie « accès » en hébreu, a été fondée en 2005, en réponse au retrait par Israël de ses colonies et installations militaires de la bande de Gaza, parce que, a expliqué Mme Hary, « nous avions la certitude que l’occupation de Gaza par Israël ne prendrait pas vraiment fin ». Dix-huit ans plus tard, a-t-elle poursuivi, le contrôle exercé par Israël persiste, en particulier sur les déplacements dans, depuis et vers Gaza; sur le registre de la population palestinienne qui détermine où les gens peuvent vivre; sur l’approvisionnement en électricité de Gaza; sur ses réseaux de communication ainsi que sur ses espaces aériens et maritimes. 

Tel-Aviv et Jérusalem sont revenus à la normale, de même que Gaza.  Mais pour ses habitants, cela signifie que « les drones israéliens bourdonnent au-dessus de leur tête à toute heure », ainsi que le retour du cycle familier de la destruction, de la reconstruction, du deuil et du traumatisme.  Décrivant le quotidien entravé des habitants de Gaza, Mme Hary a notamment expliqué que si votre mère en Cisjordanie est malade, il faut prouver à l’armée israélienne qu’elle est en danger de mort pour espérer obtenir un permis, qui ne sera valable que 3 à 5 jours au maximum.  Pour créer une entreprise, l’obtention des équipements, machines et matières premières peut prendre des mois, voire des années; lorsque ce n’est pas tout simplement impossible.  De centaines d’autres manières, les décisions d’Israël continuent d’avoir un impact profond sur la vie quotidienne à Gaza, a déploré la Directrice exécutive de Gisha qui a aussi évoqué les mots cruels d’un ancien ministre de la défense israélien, qui a comparé le bombardement régulier de Gaza à « tondre la pelouse ». 

Aujourd’hui, a-t-elle repris, 2,2 millions de personnes vivent dans la bande de Gaza.  La moitié d’entre elles sont des enfants et près de 70% ont moins de 30 ans.  Les jeunes de Gaza ne connaissent pas d’autre réalité que la fermeture et la guerre.  La plupart des habitants n’ont jamais quitté la bande de Gaza où le taux de chômage est de 46%, et de 68% chez les jeunes.  Quelque 80% des enfants de Gaza souffriraient de troubles émotionnels.  Les blessures invisibles -le traumatisme, le désespoir et l’impuissance- sont les plus difficiles à guérir, a-t-elle poursuivi. 

Mme Hary a appelé à laisser les espoirs des jeunes de Gaza guider les diplomates dans les réflexions sur les mesures audacieuses que les gouvernements pourraient prendre.  Il n’y a en effet aucune raison, selon elle, de ne pas faciliter la liberté de mouvement dont les femmes et les jeunes ont besoin pour réaliser leurs rêves.  Elle a également appelé à protéger l’espace dédié au travail humanitaire et aux droits de l’homme en Israël et en Palestine, notant que dans une situation de montée de l’extrémisme, la société civile est essentielle.  Il faut aussi remédier au manque de justice: les Palestiniens sont quotidiennement punis pour des actes échappant à leur contrôle.  La communauté internationale a un rôle particulièrement important à jouer pour mettre fin à une injustice pernicieuse qui a pris une forme de « punition collective ». 

« N’attendez pas qu’une nouvelle attaque militaire remette Gaza et la Palestine à l’ordre du jour.  Mettez-les directement à l’ordre du jour, c’est la bonne chose à faire et vous le savez », a-t-elle conclu. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a qualifié le mois écoulé de « difficile pour la région ».  Elle a une nouvelle fois condamné les attaques perpétrées contre Israël et a appelé les parties à la retenue « dans les actions et les discours ». La représentante s’est cependant félicitée que, grâce à l’entremise de l’Égypte et du Qatar, les parties aient convenu d’un cessez-le-feu qui, à l’exception d’un incident, tient encore à ce jour.  Pour enrayer ce nouveau cycle de violence, la diplomatie et les négociations directes doivent être au centre des efforts de paix, a-t-elle plaidé, rappelant que les pourparlers d’Aqaba et Charm el-Cheikh ont débouché sur des engagements importants.  Il faut maintenant les mettre en œuvre et éviter toute escalade verbale, a poursuivi la déléguée, avant de dénoncer la déclaration du Président Abbas, qui, le 15 mai dernier, a établi un lien entre Israël et le propagandiste nazi Joseph Goebbels.  Il s’agit d’un affront aux victimes de l’Holocauste et c’est inacceptable à une époque où l’on constate une montée de la violence antisémite dans le monde entier, s’est-elle indignée.  Elle s’est également élevée contre les propos de M. Abbas selon lesquels les États-Unis souhaiteraient se débarrasser des juifs et tirer parti de leur présence en Palestine, les jugeant « infondés et offensants pour le peuple américain ». 

Réaffirmant son appui à tous les efforts visant à atteindre une paix complète sur la base de la solution des deux États, la représentante s’est dite préoccupée par la visite d’un ministre israélien sur l’esplanade des Mosquées, le 21 mai, et par le discours incendiaire qu’il y a prononcé.  Elle a appelé les parties à respecter le caractère sacré de ce lieu et a réitéré son soutien au statut historique dans tous les Lieux saints à Jérusalem.  La déléguée s’est par ailleurs alarmée de la décision d’Israël de permettre à des citoyens israéliens d’établir une présence permanente dans des avant-postes du nord-ouest de la Cisjordanie construits de manière illégale sur des terres palestiniennes. Cet ordre n’est pas conforme aux engagements du Gouvernement israélien actuel pris dans le cadre du processus d’Aqaba et de Charm el-Cheikh, a-t-elle tranché, avant de rappeler que l’avancée des colonies en Cisjordanie sape toute perspective de paix.  Enfin, après avoir condamné les discours racistes qui ont émaillé la marche des drapeaux en Israël, elle a appelé à venir en aide à l’Autorité palestinienne et à l’UNRWA, qui traversent tous deux une grave crise financière. 

Mme MITSUKO SHINO (Japon) a félicité l’Égypte, ainsi que le Qatar, le Liban et les États-Unis, pour leur rôle dans la négociation du cessez-le-feu qui a mis fin, la semaine dernière, aux hostilités meurtrières entre Israël et Gaza.  Notant que cet accord est globalement respecté, elle a demandé au Conseil de sécurité d’appeler toutes les parties à s’y conformer et de poursuivre ses efforts en vue d’une amélioration durable de la paix et de la sécurité régionales.  La représentante a également exhorté toutes les parties à mettre en œuvre les engagements énoncés dans les communiqués issus des pourparlers d’Aqaba et de Charm el-Cheikh, souhaitant que le Gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne s’abstiennent de toute provocation et travaillent ensemble de manière constructive.  Rappelant d’autre part que cette année marque le soixante-dixième anniversaire du partenariat du Japon avec l’UNRWA, la déléguée a déploré le grave déficit de financement auquel fait face l’Office et a souligné l’importance de la conférence des donateurs qui aura lieu le 2 juin prochain. Enfin, après avoir condamné les actions unilatérales inacceptables des deux parties, elle a répété que ce conflit ne pourra être résolu que par des négociations directes pour parvenir à une solution à deux États, avec Israël et la Palestine vivant côte à côte dans la paix, la sécurité et le respect mutuel.

M. MOHAMED ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a dénoncé des « actions provocatrices récurrentes » à l’origine d’une escalade continue qui n’est dans l’intérêt d’aucune des parties.  Il a appelé à ce que cessent toutes les hostilités et les pratiques illégales afin d’éviter une confrontation à grande échelle.  Le délégué a condamné les raids israéliens qui ont visé la bande de Gaza, de même que les discours incendiaires prononcés lors de la marche des drapeaux, ainsi que la « prise d’assaut répétée » de la mosquée Al-Aqsa par des extrémistes, dont des membres de la Knesset et le Ministre Itamar Ben-Gvir.  Il a réitéré la position ferme de son pays s’agissant de protéger la mosquée Al-Aqsa et de respecter le rôle du Royaume hachémite de Jordanie en tant que gardien des Lieux saints à Jérusalem, conformément au droit international.  Le représentant a appelé à l’arrêt des activités de colonisation, des démolitions, des déplacements de population et des restrictions à la circulation des personnes et des biens, dénonçant des violations du droit international.  Il a condamné l’ordre du Gouvernement israélien d’établir une présence permanente dans un avant-poste du nord de la Cisjordanie et toute tentative de légitimer de tels avant-postes.  Se faisant écho de l’appel lancé dans le communiqué final du sommet de la Ligue arabe qui s’est tenu à Djedda la semaine dernière, le représentant a appelé à intensifier les efforts en vue de parvenir à un règlement global et juste de la question palestinienne. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est dit profondément préoccupé par la perte de vies humaines, y compris d’enfants, à la suite de frappes aériennes israéliennes, ainsi que par les tirs aveugles de roquettes contre Israël au cours d’un mois sans répit.  Félicitant l’Égypte pour son rôle central dans la facilitation de la cessation des hostilités, il a appelé les parties à respecter l’accord et à intensifier leurs efforts de retenue.  Malheureusement, a-t-il poursuivi, peu de temps après l’annonce du cessez-le-feu, des incidents pénibles se sont produits dans la vieille ville de Jérusalem lors d’une marche aux drapeaux où étaient présentes des personnalités israéliennes de haut rang.  Il a approuvé M. Wennesland, selon qui les dirigeants ont la responsabilité de prendre des mesures contre l’extrémisme ainsi que de condamner les actes de violence et d’incitation à la violence, sans équivoque.

Réaffirmant l’engagement de longue date du Brésil en faveur de la solution des deux États, l’orateur a critiqué l’expansion des colonies israéliennes, en violation flagrante du droit international.  Outre qu’elles attisent la violence et la haine, les activités de peuplement se dressent sur la voie de la paix, en compromettant la contiguïté d’un État palestinien, a-t-il déclaré, en s’appuyant sur des informations récentes faisant état de l’intention d’étendre encore les colonies israéliennes en Cisjordanie en grand nombre.  Il a aussi appelé Israël à mettre fin aux démolitions et aux saisies continues de structures palestiniennes, ainsi qu’au déplacement de familles palestiniennes, condamnant fermement la démolition d’une école financée par l’Union européenne dans la zone C, le 7 mai.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté que la semaine écoulée a été lourde de conséquences pour les populations civiles.  Il s’est cependant félicité du cessez-le-feu conclu par les parties au conflit, remerciant les médiateurs de leurs efforts.  Appelant à la mise en œuvre de cet accord et au maintien du calme, il a jugé que la population israélienne ne mérite pas de vivre sous la menace de tirs de roquettes de groupes terroristes et a une nouvelle fois appuyé le droit légitime d’Israël à se défendre, mais de « manière proportionnée ».  À cet égard, il s’est dit préoccupé du nombre élevé de victimes palestiniennes, rappelant que « les vies israéliennes et palestiniennes ont la même valeur ». Le représentant a ensuite dénoncé la montée d’une rhétorique de l’antisémitisme et du racisme, ainsi que la prise pour cible de journalistes, notamment lors de la marche des drapeaux en Israël.  De même, il a réaffirmé son soutien à la liberté de culte et salué le rôle du Royaume de Jordanie en tant que gardien des Lieux saints à Jérusalem, avant d’appeler les parties à faire preuve de retenue et à respecter les engagements pris lors de la réunion d’Aqaba.  Le délégué a d’autre part fait valoir que l’utilisation d’avant-postes et l’expansion des colonies par Israël sont illégales au regard du droit international.  Il a enfin salué les efforts déployés par la France, l’Allemagne, l’Égypte et la Jordanie pour rétablir un horizon politique et appelé à la reprise d’un dialogue direct en vue de parvenir à la solution des deux États, dans les frontières de 1967. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a réitéré l’appel de son pays à la cessation de l’occupation illégale et de l’agression israélienne dans les territoires palestiniens, demandant également la reprise immédiate des négociations et la revitalisation du processus de paix entre les parties au conflit.  « Sur fond de signes prometteurs de normalisation et de détente au Moyen-Orient, le sort des Palestiniens et l’érosion de toute perspective de solution à deux États sont profondément inquiétantes », a déploré le représentant.  Il a salué les efforts diplomatiques déployés récemment dans la région pour relancer le processus de paix et lever les principaux obstacles à la paix entre Israéliens et Palestiniens.  Le délégué a instamment demandé à Israël de mettre fin à l’expansion des colonies et à l’occupation des terres, des actes qui contreviennent à l’objectif d’une solution à deux États.  Puis il s’est tourné vers le Conseil pour que celui-ci exerce son influence auprès des Israéliens et des Palestiniens afin qu’ils respectent ses décisions et l’ensemble des résolutions des Nations Unies, les principes de Madrid et l’Initiative de paix arabe. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur), tout en reconnaissant le droit à la légitime défense, a rappelé que le respect des règles du droit international et du droit international humanitaire n’était pas facultatif.  Appréciant les efforts déployés pour mettre fin à la confrontation, il a instamment demandé que soit respectée la cessation des hostilités, et que le Conseil contribue par tous les moyens possibles à éviter une nouvelle escalade.  Le délégué a aussi appelé une nouvelle fois les parties à s’abstenir de toute incitation à la violence et de tout acte de provocation, les positions, discours, actions extrémistes et fanatiques étant le principal carburant de la violence.  S’opposant fermement à toutes les mesures unilatérales entravant la paix, telles que la construction et l’expansion des colonies, la confiscation de terres palestiniennes et la « légalisation » des avant-postes, la démolition de maisons palestiniennes et le déplacement de civils, l’orateur a aussi condamné la destruction d’une école en Cisjordanie, près de Bethlehem, le 7 mai.  Cette action porte atteinte au droit des enfants à l’éducation et ne contribue en rien à la création d’un climat de détente et de dialogue, a-t-il déclaré.  Abordant enfin la situation humanitaire et, en particulier, le travail de l’UNRWA et sa situation financière précaire, le délégué équatorien a appelé tous ceux qui le peuvent à contribuer à son financement.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est inquiétée de la détérioration de la situation sécuritaire en Israël et dans les territoires palestiniens occupés. Elle a condamné sans équivoque les tirs aveugles de roquettes contre les civils, se félicitant ensuite de l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et les factions de Gaza.  Elle a exhorté toutes les parties à le respecter et à éviter la perte de nouvelles vies civiles. 

Tout en rappelant le soutien du Royaume-Uni au droit d’Israël à l’autodéfense, la représentante s’est dite alarmée par les informations faisant état d’au moins 12 décès de civils, dont 6 enfants, lors de frappes israéliennes à Gaza. Elle s’est aussi inquiétée d’un « taux alarmant de victimes » en Cisjordanie, qui, s’il se maintient, fera de 2023 l’année la plus meurtrière pour les Palestiniens de Cisjordanie depuis que les Nations Unies ont commencé à tenir des registres en 2004.  Elle a appelé les Forces de sécurité israéliennes à faire preuve de retenue dans leur usage de la force et à enquêter sur les victimes civiles.  Elle a également appelé l’Autorité palestinienne à réaffirmer son contrôle sur la zone A et à prendre des mesures pour lutter contre le terrorisme, relevant que 19 Israéliens, résidents et touristes en ont été victimes cette année.

La déléguée a appelé les deux parties à s’abstenir de toute rhétorique incendiaire, regrettant que la semaine dernière, le Président Abbas ait assimilé Israël au propagandiste nazi Joseph Goebbels et que trois jours plus tard les participants israéliens à la marche des drapeaux à Jérusalem aient scandé des slogans racistes et appelé à brûler des villages palestiniens.  Elle a appelé Israël à s’attaquer à la violence croissante des colons qui, lundi, ont entraîné le transfert forcé de la population palestinienne d’Ein Samiya et à renoncer à l’expansion des colonies, illégale en vertu du droit international.  Elle a par ailleurs appelé la communauté internationale à fournir un financement durable à l’UNRWA, exhortant ensuite les parties à honorer les engagements pris à Aqaba et Charm el-Cheikh.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a constaté une escalade sans précédent de la violence dans la zone du conflit arabo-israélien.  Il a noté que depuis le début de l’année, les raids militaires israéliens en Cisjordanie, les affrontements sur fond de violations du statu quo des Lieux saints de Jérusalem et les violences dans la bande de Gaza ont déjà tué plus de 100 Palestiniens et fait des milliers de blessés.  Il a également relevé que le nombre de victimes israéliennes augmente lui aussi, avant de s’alarmer des frappes aériennes arbitraires qu’Israël continue de mener en Syrie et des incidents sur la Ligne bleue avec le Liban, qui ont donné lieu aux plus violents échanges depuis 2006.  Pour le représentant, la dégradation de la situation est le résultat d’actions unilatérales destinées à créer des faits irréversibles et à bloquer toute perspective de relance du processus de paix.  Il a ainsi dénoncé le rythme record de la construction de colonies israéliennes, avec l’approbation donnée cette année à 7 157 nouveaux logements, soit le double des chiffres de 2021 et 2022, et la légalisation rétroactive d’avant-postes, accompagnée d’expropriations et de démolition de maisons palestiniennes. Le délégué a aussi condamné l’augmentation des arrestations arbitraires de Palestiniens et le recours disproportionné à la force par Israël.  Il a regretté à ce sujet que ni les réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh, ni l’adoption de la déclaration du Conseil de sécurité contre de telles actions unilatérales, n’aient eu d’effets sur le terrain. 

Dans de telles conditions, a poursuivi le représentant, les Palestiniens comptent de plus en plus sur la résistance et intensifient leurs efforts pour protéger leurs droits légitimes dans les instances internationales, que ce soit à la Cour internationale de Justice et à la Cour pénale internationale, ainsi qu’au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale de l’ONU.  Dans le même temps, les États-Unis continuent, selon lui, de tenter à eux seuls d’inverser cette dégradation en « remplaçant le monde politique réel par celui de l’économie ».  Après avoir bloqué le travail du Quatuor pour le Moyen-Orient (Russie, États-Unis, Union européenne et ONU), ils promeuvent la normalisation arabo-israélienne, contournant ainsi une « solution juste » au problème palestinien, a-t-il dénoncé. Or, à ses yeux, Washington a perdu depuis longtemps la neutralité et l’impartialité indispensables à toute médiation honnête. Il en a voulu pour preuve les décisions de l’Administration américaine précédente de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël et la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan.  À cet égard, le délégué a salué la décision « tant attendue » de la Ligue des États arabes de rétablir la Syrie au sein de la famille arabe, se disant convaincu qu’elle contribuera à améliorer l’atmosphère dans la région.  Il a enfin estimé que seule une véritable reprise du processus de paix israélo-palestinien, avec la solution des deux États en son cœur, contribuera à réduire la violence et la radicalisation au Moyen-Orient. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France), préoccupé par la poursuite des mesures unilatérales, a condamné la décision des autorités israéliennes autorisant l’établissement de colons israéliens à Homesh, dans le nord de la Cisjordanie occupée.  Cette décision, comme toutes les annonces d’expansion ou de création de colonies, est contraire au droit international, a-t-il rappelé, ajoutant qu’elle contrevient par ailleurs aux engagements pris par Israël à l’occasion des réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh.  Appelant le Gouvernement israélien à revenir sur cette décision, il a ajouté que la France ne reconnaîtra jamais l’annexion illégale de territoires, ni la légalisation de « colonies sauvages ».  Il a aussi exprimé sa préoccupation après la deuxième visite du Ministre israélien de la sécurité nationale sur l’esplanade des Mosquées, le 21 mai.  « Il s’agit là d’une provocation », a-t-il déclaré, rappelant la nécessité de préserver le statu quo historique sur les Lieux saints à Jérusalem et soulignant l’importance du rôle spécifique de la Jordanie à cet égard.  Saluant le cessez-le-feu entré en vigueur le 13 mai au soir grâce aux efforts de médiation de l’Égypte, avec le soutien des Nations Unies et du Qatar, le délégué de la France a appelé à une ouverture durable des accès à Gaza et à une levée du blocus, assortie de garanties de sécurité crédibles pour Israël. 

Préoccupé du fait que les agences, fonds et programmes des Nations Unies n’ont plus les moyens financiers de fonctionner normalement dans les territoires occupés, l’orateur a rappelé que le Conseil a la responsabilité de défendre la solution des deux États et de faire respecter ses résolutions.  Saluant les efforts des États-Unis, de l’Égypte et de la Jordanie pour permettre aux parties de renouer le dialogue, il les a appelées à respecter leurs engagements, en particulier en matière de colonisation, mais aussi s’agissant du respect des prérogatives sécuritaires de l’Autorité palestinienne en zone A.

M. GENG SHUANG (Chine) a appelé au respect du statu quo historique des Lieux saints à Jérusalem.  Il a déploré la visite, le 21 mai, d’un haut fonctionnaire de la sécurité israélienne, dans la mosquée Al-Aqsa pour la deuxième fois cette année, provoquant un regain de tensions.  Israël doit mettre un terme à ces provocations, garantir le droit de culte des fidèles musulmans et respecter le rôle de gardien que joue la Jordanie, a-t-il martelé.  Le représentant a ensuite appelé à mettre un terme à l’extension illégale des colonies de peuplement dans les territoires occupés.  Depuis le début de cette année, Israël a continué à mener des actions unilatérales en construisant de nouvelles colonies, a-t-il dénoncé. 

Le délégué a insisté sur le respect du droit international humanitaire, rappelant qu’une centaine de Palestiniens, y compris des enfants, ont perdu la vie, au début de cette année.  Il a également mentionné les décès de civils, côté israélien, avant d’exhorter les parties à mettre un terme à la violence contre les civils et cesser de cibler écoles, hôpitaux et autres infrastructures publiques.  De même, il a appelé à atténuer les souffrances des réfugiés palestiniens, et à satisfaire les besoins économiques et de subsistance des Palestiniens, pressant en outre Israël à lever le blocus imposé à Gaza le plus rapidement possible.  Ce sont là des exigences essentielles pour éviter toute nouvelle escalade des tensions, a-t-il estimé.

Mme ALLEGRA BONGO (Gabon) a déploré l’escalade de violences particulièrement meurtrières en ce mois de mai 2023, en dépit des nombreux appels à la retenue lancés par la communauté internationale.  L’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu le 14 mai, après une dizaine de jours de combats, est de fait un réel soulagement, a-t-elle déclaré.  Elle s’est dite consciente de la fragilité de cette accalmie, à la lumière des derniers développements qui font état de trois combattants Palestiniens tués dans le nord de la Cisjordanie occupée, dans la nuit du dimanche 21 au lundi 22 mai, lors d’un raid de l’armée israélienne. Aussi la déléguée a-t-elle exhortée chacune des parties à s’abstenir de toutes rhétoriques belliqueuses ou autres provocations qui pourraient raviver les tensions, avant de saluer le rôle clef joué par l’Égypte dans la cessation des hostilités, ainsi que les efforts déployés par les États-Unis, le Liban et le Qatar pour parvenir à un cessez-le-feu. Toutes les initiatives visant la paix et une issue politique négociée doivent aboutir à la concrétisation de la solution des deux États qui est gage de coprospérité et de stabilité pour l’ensemble de la région, a ajouté la représentante.

M. FELIX OSEI BOATENG (Ghana) a regretté l’escalade de la violence entre les forces de sécurité israéliennes et des groupes palestiniens, à la suite d’opérations militaires israéliennes de perquisition et d’arrestation.  Bien que ces opérations aient permis de saisir un certain nombre d’armes, elles ont aussi exacerbé les crises humanitaires dans les territoires palestiniens occupés et aggravé la situation déjà instable sur le terrain, en raison de l’arrestation massive de centaines de jeunes Palestiniens, de la démolition de bâtiments et du déplacement de familles, a-t-il remarqué. Prenant note des « préoccupations légitimes » d’Israël en matière de sécurité, il a demandé au Gouvernement israélien de toujours soupeser l’avantage militaire escompté et les dommages collatéraux attendus, afin de s’assurer que l’attaque n’est pas excessive ou disproportionnée.  Il s’est aussi dit profondément préoccupé par les projets récents de l’actuel Gouvernement israélien visant à poursuivre l’expansion des colonies de peuplement en Cisjordanie. 

Encourageant les hauts fonctionnaires israéliens et palestiniens à mener une politique de modération afin de préserver la viabilité de la solution des deux États, le délégué ghanéen a regretté que l’aspiration collective de ce Conseil et de la communauté internationale à ce qu’Israël et la Palestine vivent pacifiquement, en tant que deux États souverains, continue d’être obscurcie par l’environnement hautement toxique de ces dernières semaines. Il a appelé les hauts responsables politiques des deux parties de s’abstenir de toute action ou rhétorique incendiaire et à renouveler leur engagement à mettre en œuvre des mesures de confiance. 

Mme FRANCESCA GATT (Malte) a réitéré sa ferme opposition aux mesures unilatérales qui font obstacle à la paix, dont l’expansion des colonies israéliennes, qui sont illégales au regard du droit international, la légalisation rétroactive des avant-postes des colonies, la démolition de logements palestiniens et la poursuite du déplacement de civils palestiniens.  Elle a également condamné les démolitions de projets financés par l’UE, notamment l’école Jubbet Adh Dhib.  La représentante a ensuite dénoncé la « marche du drapeau », la semaine dernière à Jérusalem, au cours de laquelle des milliers de colons ont défilé dans le quartier musulman de la vieille ville et pris d’assaut la mosquée Al-Aqsa, sous la protection d’un important dispositif sécuritaire.  Tout en réaffirmant le droit d’Israël à se défendre, elle a rappelé que les principes de proportionnalité doivent être respectés. Profondément préoccupée en outre par la situation financière désastreuse de l’UNRWA, la déléguée a lancé un appel pour un financement durable et prévisible de ses services.  Malte, a-t-elle ajouté en conclusion, reste attachée à la réalisation de la solution des deux État.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a estimé que le risque d’engrenage de la violence reste très élevé après les incidents de la semaine dernière.  Demandant aux parties de s’abstenir de toute provocation, elle a souhaité que tout soit entrepris en vue d’une désescalade durable, notamment en mettant en œuvre les engagements pris à Aqaba et à Charm el-Cheikh, qui ont suivi la Déclaration présidentielle adoptée par le Conseil de sécurité.  À cet égard, la représentante a appelé Israël à révoquer l’ordre permettant à ses ressortissants de s’établir à Homesh, un avant-poste qui est illégal au regard du droit international humanitaire.  Elle a ensuite condamné tout à la fois les frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza, les opérations militaires meurtrières en Cisjordanie et les tirs aveugles de roquettes sur Israël depuis Gaza, exhortant les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.  Après avoir appelé à la levée du bouclage de Gaza et à la réouverture des points de passage avec Israël, la représentante s’est déclarée préoccupée par la situation financière de l’UNRWA, qui ne permet plus de couvrir les opérations essentielles à la survie de ses bénéficiaires.  Elle a formé l’espoir que la conférence annuelle des donateurs, début juin à New York, permettra d’alléger le fardeau financier qui pèse sur l’Office.  Enfin, elle a une nouvelle fois souligné la nécessité d’une reprise d’un dialogue crédible en vue d’une solution négociée à deux États, conformément au droit international et aux paramètres convenus au niveau international.

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