En cours au Siège de l'ONU

Le Conseil de sécurité débat des bienfaits des politiques de développement pour la paix en Afrique, dans l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030

9299e séance, matin & après-midi
CS/15249

Le Conseil de sécurité débat des bienfaits des politiques de développement pour la paix en Afrique, dans l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030

L’effet des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes en Afrique », tel était le thème du débat public du Conseil de sécurité tenu aujourd’hui, auquel ont participé une cinquantaine de délégués.  Cette réunion leur a donné l’occasion de rappeler qu’il faut s’appuyer sur des politiques de développement « inclusives, transparentes et efficaces » pour prévenir ou régler les conflits ainsi que pour garantir une paix et une sécurité à long terme.  Une séance qui a permis de mettre en avant l’expérience fructueuse du Mozambique, dont le Chef d’État présidait le Conseil, et de promouvoir l’axe humanitaire-développement-paix tant dans les politiques nationales que dans l’aide extérieure. 

« Nous, les Africains, voulons la paix sur notre continent », a déclaré le Président Filipe Jacinto Nyusi du Mozambique, en invitant les dirigeants africains à croire qu’il est possible d’avoir un continent où les armes sont silencieuses.  Il a cité l’ancien Secrétaire général Kofi Annan selon lequel il ne saurait y avoir de paix sans développement, de développement sans paix, et de paix et développement sans droits humains.  « Faire taire les armes » nécessite une vision à long terme du développement du pays, qui implique la promotion de la justice sociale d’une manière durable et inclusive, a plaidé M. Nyusi.  Il a parlé de son pays qui a par exemple misé sur une réintégration durable des bénéficiaires du programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR): même s’ils n’ont pas cotisé, des pensions leur sont versées parce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de travailler. 

Le Mozambique, dont « le cheminement vers la paix et la démocratisation a été tortueux », comme l’explique la note de cadrage distribuée aux délégations, a mené un processus de paix qui est « un exemple de mise en œuvre intelligente et efficace des politiques de développement à l’appui d’un objectif de paix et de sécurité », a estimé la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique.  Mme Cristina Duarte a souligné que cette efficacité est liée à la double approche de l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo, qui combine la démilitarisation et la réintégration avec la décentralisation et le transfert des responsabilités. 

Revenant sur les conditions qui ont permis cette évolution, l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Mozambique, M. Mirko Manzoni, a partagé son expérience précédente de médiateur, en 2016, en tant qu’Ambassadeur de Suisse à Maputo.  Il a présenté quatre éléments qui ont conduit au succès de la mise en œuvre de l’accord de paix signé avec la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO): l’appropriation nationale; la promotion de la confiance entre les parties; la flexibilité du processus de paix; et l’approche centrée sur l’humain. 

M. Mohamed bin Chambas, Haut-Représentant de l’Union africaine pour l’initiative « Faire taire les armes », a lui aussi exhorté l’Afrique à miser sur une transformation dont le cœur serait le développement du capital humain, avec la mobilisation des ressources correspondantes.  Il a demandé en particulier de s’atteler à la lutte contre les flux financiers illicites, qui privent le continent d’environ 900 milliards de dollars par an, avant de solliciter les organisations sous-régionales, les gouvernements, ainsi que la société civile, pour qu’ils s’approprient l’initiative « Faire taire les armes ». 

Le Président Nyusi a également insisté sur la nécessaire « appropriation nationale », qui permet d’agir le plus efficacement possible dans l’axe humanitaire-développement-paix.  Cela implique la participation pleine, égale et significative des femmes, a-t-il précisé, comme c’est le cas au Mozambique où les femmes ont pu prendre part au processus de paix.  Les femmes, mais aussi les jeunes et les chefs traditionnels et religieux, ont rajouté certains intervenants au débat en mettant en avant les valeurs morales de ces derniers et la sagesse autochtone.  L’inclusion des femmes a été soutenue par de nombreux intervenants, comme l’Espagne qui a organisé, en collaboration avec ONU-Femmes, un séminaire au Niger sur le rôle des femmes médiatrices.  Les États-Unis ont, quant à eux, l’intention de consacrer 1 milliard de dollars à des initiatives d’autonomisation économique des femmes en Afrique, comme l’a signalé la Sous-Secrétaire d’État à la sécurité civile, à la démocratie et aux droits humains. 

De manière générale, la Croatie, qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, a invité à écouter les acteurs de la société civile parce qu’ils jouent un rôle clef dans l’identification des signes précoces lorsqu’il y a un risque de voir perpétrer des atrocités.  Ces signes sont notamment l’accès inégal à la justice et au marché de l’emploi, et donc des produits du manque de développement, ou encore le rétrécissement de l’espace démocratique.  Dans la même ligne, le Liechtenstein a conseillé à l’ONU, et au Conseil de sécurité en particulier, d’encourager au respect des droits humains des minorités.  Nombre de situations dont le Conseil est saisi puisent leur origine dans l’exclusion de ces communautés réprimées, a-t-il fait remarquer avant de faire la promotion de son « Manuel sur l’autodétermination dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits ». 

Les progrès en matière de développement portant sur le secteur de l’éducation sont également indispensables à la paix, a fait valoir l’Équateur, car en plus d’être un instrument de développement, l’enseignement est un vecteur de civisme.  C’est pour cela que le Ghana a demandé un soutien international renforcé et durable pour le « développement générationnel » qu’apporte le pouvoir de l’éducation.  La Suisse a d’ailleurs fait valoir qu’elle soutient un projet de planification de l’éducation au Niger. 

Pour mieux répondre aux enjeux de long terme tels que les défis environnementaux et de développement, la France a recommandé aux États Membres d’établir des partenariats d’égal à égal avec les pays africains.  Elle a notamment évoqué l’organisation, début mars par la France et le Gabon, du One Forest Summit pour lutter contre le dérèglement climatique et préserver la biodiversité.  Plusieurs délégations ont aussi tenu à souligner que certains risques sécuritaires en Afrique sont liés au climat, invitant à intégrer l’action climatique dans les efforts de développement, et donc de paix.  La Pologne a appelé le Conseil de sécurité à reconnaître et à évaluer correctement les implications des changements climatiques sur la sécurité.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

L’effet des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative Faire taire les armes (S/2023/148/Rev.1)

Déclarations

Mme CRISTINA DUARTE, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour lAfrique, a indiqué que le Plan directeur de l’Union africaine sur les mesures concrètes à prendre pour faire taire les armes en Afrique d’ici à 2020, le Plan directeur de Lusaka, a identifié cinq domaines d’action pour faire avancer ce programme, dont un qui concerne les aspects économiques, sociaux, environnementaux et juridiques.  La « feuille de route de Lusaka » fait une référence directe au Programme de développement durable à l’horizon 2030 et à l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA), a-t-elle précisé, avant de regretter que les perspectives africaines n’aient pas été assez intégrées jusqu’à présent dans les discussions mondiales sur la paix et la sécurité sur le continent.  De son avis, les politiques de développement jouent un rôle important dans la prévention et le règlement des conflits, à condition qu’elles soient inclusives, transparentes, équitables et efficaces. 

La Conseillère a souligné que pour mettre fin aux conflits, il faut tenir compte des facteurs externes et internes.  Or, a-t-elle remarqué, les politiques de développement sont mieux à même de s’attaquer aux facteurs internes.  Elle a regretté qu’en Afrique, la réponse traditionnelle n’ait pas été de s’attaquer aux conflits, mais seulement à leurs symptômes.  Mme Duarte a aussi observé que le colonialisme a souvent été blâmé pour l’exploitation économique du continent africain, alors que son impact sur les lacunes actuelles de la gouvernance a rarement été discuté.  Elle a cité le rapport 2022 du Secrétaire général sur la promotion du développement durable et de la paix durable, selon lequel les pays africains ont accédé à l’indépendance en héritant de structures de gouvernance qui n’ont pas été conçues pour gérer avec succès des États indépendants.  De plus, d’un point de vue économique, les administrations coloniales ne se sont pas concentrées sur la promotion du développement économique, mais plutôt sur l’extraction des ressources et la collecte des impôts. 

Mme Duarte a rappelé ces facteurs historiques pour démontrer que, du point de vue de la gouvernance, les pays africains sont encore confrontés aujourd’hui à « trois géographies » qui entrent en relation avec les conditions gouvernementales d’un pays, leur territoire et leur population.  Elle a expliqué que les chevauchements entre la première et la deuxième géographie (le territoire administratif d’un pays et la géographie socioculturelle) ont conduit à la présence de deux ou plusieurs groupes socioculturels historiques à l’intérieur des frontières administratives des pays, et à des situations dans lesquelles une communauté historique est répartie dans deux pays ou plus.  Ce chevauchement entraîne des conséquences sur la gouvernance, a-t-elle noté en insistant sur la réalité socioéconomique qui transcende les frontières d’un pays. 

Afin de réduire la menace des acteurs non étatiques prenant le contrôle du Sahel et de la Corne de l’Afrique, la Conseillère spéciale a recommandé que les solutions militaires soient complétées par des politiques de développement actives.  Celles-ci doivent contribuer à assurer une fourniture efficace des services publics sur l’ensemble du territoire.  Elle a salué à cet égard le processus de paix du Mozambique, « un exemple de mise en œuvre intelligente et efficace des politiques de développement à l’appui d’un objectif de paix et de sécurité ».  Elle a souligné la double approche de l’accord de Maputo, qui combine la démilitarisation et la réintégration avec la décentralisation et le transfert des responsabilités.  Elle a aussi salué la récente décision du Gouvernement du Mozambique d’inclure les bénéficiaires démobilisés dans le système de retraite.  Le processus de paix et de réconciliation du Mozambique montre que les politiques de développement, lorsqu’elles sont appliquées en complément des efforts de rétablissement de la paix, contribuent à mettre fin aux hostilités et jettent des bases solides pour une paix durable, a conclu Mme Duarte. 

M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Haut-Représentant de lUnion africaine pour l’initiative « Faire taire les armes », a indiqué que l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030 est compromis en raison de multiples défis, dont les changements climatiques, le fossé qui se creuse entre pays riches et pauvres et les conséquences de la pandémie.  Plus de 15 pays africains endurent également une crise de la dette, l’Afrique étant endettée à hauteur de 600 milliards de dollars, a-t-il rappelé.  Il a fait plusieurs recommandations afin de réduire les inégalités et les vulnérabilités de l’Afrique et ainsi se rapprocher de l’objectif de faire taire les armes.  Il a exhorté l’Afrique à miser sur une transformation dont le cœur serait le développement du capital humain, avec la mobilisation des ressources correspondantes.  Il a demandé à lutter contre les flux financiers illicites qui privent le continent d’environ 900 milliards de dollars par an. 

M. Chambas a déclaré que le processus de « démondialisation » a commencé en Afrique, puisque sa part dans le commerce mondial est passée de 6% dans les années 70 à 2,7% aujourd’hui.  Il a par ailleurs fait remarquer que, bien que l’Afrique soit le continent le moins émetteur d’émissions, elle est engagée à jouer son rôle dans l’avènement de la transition verte.  Or, a-t-il précisé, l’Afrique aura besoin d’entre 1,18 et 1,45 milliard de dollars par an pour mettre en œuvre ses engagements climatiques.  Il a donc demandé que les fonds adéquats soient déboursés afin que l’Afrique remédie à ses lacunes en termes de financement climatique.  Il a aussi appelé à remédier aux changements anticonstitutionnels de gouvernement et aux coups d’État.  Les organisations sous-régionales, les gouvernements, ainsi que la société civile, doivent s’approprier l’initiative « faire taire les armes », a-t-il conclu, en soulignant la nécessité d’un soutien international. 

M. MIRKO MANZONI, Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Mozambique, a rappelé qu’il exerce cette fonction depuis près de quatre ans et qu’il a ainsi pu accompagner la mise en œuvre de l’accord de Maputo pour la paix et la réconciliation nationale entre le Gouvernement du Mozambique et la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO).  Il a précisé que son implication dans ce processus a commencé en 2016, en tant qu’ambassadeur de Suisse au Mozambique, lorsqu’il a fait partie d’une petite équipe de médiation chargée d’établir la confiance entre les deux parties.  Le succès de cette médiation a reposé selon lui sur plusieurs facteurs, à commencer par l’appropriation nationale, « catalyseur du progrès », qui a encouragé l’adhésion des parties prenantes.  Dans le contexte mozambicain, a-t-il expliqué, l’équipe de médiation a joué un rôle important de facilitation, tandis que le Gouvernement défendait des solutions nationales aux problèmes nationaux en écoutant et en créant une culture de dialogue avec la RENAMO.  L’appropriation nationale implique aussi d’assurer la participation pleine, égale et significative des femmes, a-t-il ajouté, précisant qu’au Mozambique, le processus de paix a fait participer des femmes aux négociations et aux structures de mise en œuvre, conformément aux cadres nationaux et internationaux pertinents sur les femmes, la paix et la sécurité. 

Pour M. Manzoni, une autre raison du succès du processus de paix au Mozambique a été la promotion de la confiance entre les parties.  À la suite du cessez-le-feu annoncé un mois seulement après la reprise des pourparlers entre les dirigeants des deux parties, la confiance mutuelle a encore été renforcée par la mise en œuvre d’accords partiels supplémentaires, alors que les négociations étaient en cours, a-t-il relaté, estimant que cette approche progressive a contribué à donner à chacun un sens de l’objectif à atteindre.  À ses yeux, une troisième raison de cette réussite réside dans la flexibilité du processus de paix.  Tous les obstacles rencontrés en cours de route ont été surmontés par un dialogue direct et ouvert entre les parties et en utilisant une prise de décision et une action « agiles », a fait valoir l’Envoyé personnel, selon lequel la pandémie de COVID-19 aurait pu faire dérailler ce processus si la souplesse nécessaire n’avait pas été apportée par les parties, les médiateurs, les donateurs et la communauté internationale.  « Dans tout processus politique, il y a de nombreuses parties mobiles, et il doit y avoir de la place pour les revers, les délais modifiés et les changements de direction », a-t-il souligné. 

En dernier lieu, M. Manzoni a souligné l’importance de maintenir une approche centrée sur l’humain, citant le cas du Mozambique où les personnes ont été placées au cœur du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  « Donner la priorité aux personnes est payant en dividendes de la paix », a-t-il dit en expliquant les efforts d’inclusion déployés.  Outre l’installation de 4 800 bénéficiaires du processus de DDR dans les communautés, il a mentionné l’adoption récente d’un décret étendant les pensions aux personnes démobilisées ; une mesure selon « historique », qui résout non seulement les problèmes en suspens du passé, mais investit aussi dans la durabilité du processus de paix.  « Faire taire les armes et embrasser le dialogue devient une façon mozambicaine de faire les choses, et c’est essentiel pour une paix durable », a-t-il applaudi, assurant que, près de quatre ans après sa mise en œuvre, l’accord de Maputo s’enracine de plus en plus profondément.

« Nous, les Africains, voulons la paix sur notre continent », a déclaré le Président du Mozambique, M. FILIPE JACINTO NYUSI, en se disant conscient de la nécessité pour les dirigeants africains de croire qu’il est possible d’avoir un continent où les armes sont silencieuses.  Faisant siennes les paroles de l’ancien Secrétaire général Kofi Annan, le Président a martelé qu’il ne saurait y avoir de paix sans développement, il ne saurait y avoir de développement sans paix, et il ne saurait y avoir de paix et de développement sans droits humains.  C’est cette triade paix-développement-droits humains qui guide le programme de l’UA visant à faire taire les armes d’ici à 2030, a-t-il expliqué.  Il a fait part de l’expérience de son pays, estimant qu’elle peut servir de référence pour le règlement des conflits armés sous d’autres latitudes, sur le continent africain ou ailleurs.  Après avoir rappelé l’histoire du Mozambique, de la lutte armée pour l’indépendance au conflit avec la Rhodésie et l’Afrique du Sud, ainsi que les différents accords conclus pour y mettre fin, il a assuré avoir fait de la question du maintien de la paix et de la réconciliation nationale la priorité de la gouvernance. 

Le Président Nyusi a pris l’engagement de rester implacable « tant qu’un frère continuera à prendre les armes pour tuer un autre frère, quel qu’en soit le prétexte ».  C’est ainsi qu’il avait entamé un dialogue direct avec le Chef de la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO), feu Afonso Dhlakama, qui a conduit à l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo en août 2019.  Le Président a expliqué que, grâce à l’engagement de son gouvernement dans le processus de dialogue, il avait été possible d’identifier les aspects clefs devant être abordés dans la décentralisation, d’une part, et dans le processus de DDR des hommes armés de la RENAMO, d’autre part.  Le Chef d’État a ainsi indiqué que, grâce à un accord politique, un amendement de la Constitution nationale a été proposé et un modèle de décentralisation a été mis en place dans lequel les gouverneurs des 10 provinces du pays sont élus démocratiquement depuis 2019.  Le deuxième point de l’accord de Maputo était la composante militaire qui impliquait le DDR et qui avait une relation directe avec « Faire taire les armes »: cela a permis la fermeture de 15 des 16 bases de la RENAMO. 

Conscient du fait que « Faire taire les armes » nécessite une vision à long terme du développement du pays, qui implique la promotion de la justice sociale d’une manière durable et inclusive, garantissant le bien-être de tous, le Mozambique a misé sur une réintégration durable des bénéficiaires du programme de DDR, a signalé le Président.  Ainsi, grâce à un nouveau décret, le paiement de pensions a été étendu aux bénéficiaires du programme de DDR, même s’ils n’ont pas cotisé, parce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de travailler, a-t-il notamment expliqué. 

Le processus de paix en cours et la mise en œuvre de l’accord de paix au Mozambique sont uniques, s’est enorgueilli le Président en faisant valoir qu’ils reposent sur une approche innovante, encouragent la tolérance, soulignent l’importance de l’appropriation nationale, de la confiance et du respect mutuel et placent le dialogue comme première option.  Il a également mis l’accent sur le fait que les interlocuteurs du dialogue, à savoir lui-même et le leader de la RENAMO, M. Afonso Dhlakama, avaient opté pour la supervision directe du processus de mise en œuvre du consensus, une expérience qui a été poursuivie par l’actuel Président de la RENAMO, M. Ossufo Momade.  Il a également salué le soutien significatif à ce processus de paix du Secrétaire général de l’ONU et de son envoyé personnel sur le terrain. 

Si les Mozambicains reconnaissent et apprécient le soutien des partenaires de développement et des experts internationaux, le Président a tenu à rappeler que le processus continue d’être mené par les Mozambicains et que les solutions continuent d’être trouvées par les nationaux.  Il a insisté sur l’importance de l’instauration d’une confiance mutuelle entre les parties prenantes, dès les premières étapes des négociations, ce qui a été un facteur décisif dans le cas du Mozambique et peut servir d’exemple.  Il a parlé d’échanges téléphoniques fréquents avec le Chef de l’opposition, mais aussi de la discrétion dont ils ont fait preuve tout au long des négociations sur les principaux aspects du dialogue, jusqu’à ce qu’un consensus soit atteint sur une question particulière. 

Le Président Nyusi a poursuivi son allocution en soulignant que les Mozambicaines jouent un rôle de premier plan en politique, notamment parce que le pays a atteint la parité hommes-femmes au Conseil des ministres.  Il a aussi reconnu l’importance de la communication avec les chefs religieux et communautaires et de la participation de la jeunesse, pour que la paix que nous construisons soit durable pour les générations à venir.  Enfin, il a parlé des effets néfastes des changements climatiques et du terrorisme sur son pays.  Il ne sera pas possible de faire taire les armes complètement tant que l’extrémisme violent prévaudra sur le continent africain et dans le monde, a-t-il reconnu.  Il a rappelé que les actions de combat se poursuivent à Cabo Delgado, avec l’engagement direct des forces de défense et de sécurité mozambicaines, soutenues par les forces de défense rwandaises et la force d’intervention de la Communauté de développement de l’Afrique australe et indirectement par d’autres pays et organisations tels que l’UA, l’ONU et l’UE.  Mais le Mozambique cherche des moyens complémentaires pour faire face à ce problème, a-t-il dit en précisant chercher à instaurer la stabilité sociale par la création d’opportunités pour le développement du capital humain.  Il a signalé à cet égard la création de programmes innovants et d’adaptation sociale pour s’assurer que les communautés sont impliquées dans les projets en cours dans leurs régions et en bénéficient. 

M. CARLOS MÁRCIO COZENDEY, Secrétaire dÉtat pour les affaires politiques multilatérales du Ministère des relations extérieures du Brésil, a déclaré que la dernière fois que ce Conseil s’est réuni pour discuter du thème « Faire taire les armes en Afrique », deux années plus tôt, l’ambiance était à un optimisme prudent.  Aujourd’hui, la situation au Sahel continue d’exiger l’attention.  Dans la partie est de la République démocratique du Congo, la réémergence du M23 a contribué à la détérioration de la sécurité et de la situation humanitaire.  Des signes positifs existent cependant, illustrant la détermination des gouvernements africains à parvenir à une paix et une sécurité durables sur le continent comme le mécanisme de suivi et d’évaluation de l’Union africaine.  Le Ministre a aussi cité les efforts diplomatiques des pays des Grands Lacs et du G5 Sahel.  L’appui de la communauté internationale est indispensable au succès de ces efforts en commençant par le respect du principe de non-ingérence dans les affaires des États. 

Une Afrique unie, intégrée et prospère fondée sur la bonne gouvernance, la démocratie, l’inclusion sociale et le respect des droits humains, la justice et l’état de droit sont les conditions nécessaires préalables pour un continent exempt de conflit, a poursuivi le dignitaire.  Il a souligné que la sécurité et le développement sont liés et se renforcent mutuellement, ajoutant que bien qu’importante, l’APD demeure une solution temporaire.  L’Afrique a besoin d’une architecture économique, commerciale et financière qui libère son potentiel, a-t-il insisté.  Dans ce contexte, la Commission de consolidation de la paix est bien placée pour mobiliser l’appui international en fonction des priorités nationales en matière de maintien de la paix, de financement et d’expertise.

Mme UZRA ZEYA, Sous-Secrétaire dÉtat à la sécurité civile, à la démocratie et aux droits humains des États-Unis, a annoncé l’intention de son administration de consacrer 1 milliard de dollars à des initiatives d’autonomisation économique des femmes en Afrique.  Comme la Vice-Présidente Harris l’a clairement indiqué lors de sa visite au Ghana cette semaine, les États-Unis sont déterminés à investir dans l’ingéniosité et la créativité africaines afin de stimuler une croissance économique solide et de créer des opportunités en Afrique et au-delà.  La dignitaire a relevé que les sociétés prospèrent davantage lorsqu’elles associent une démocratie solide au développement.  Or le Président Biden a déclaré à plusieurs reprises que nous nous trouvons à un point d’inflexion en ce qui concerne l’avenir de la démocratie, qui a subi de graves revers dans de nombreuses régions d’Afrique, sept transitions non démocratiques du pouvoir ayant eu lieu au cours des deux dernières années en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.  Cependant, les événements survenus ces dernières années au Nigéria, au Kenya, en Zambie, au Malawi et en Gambie ont montré que la démocratie pouvait encore triompher par la voie des urnes, a nuancé la Sous-Secrétaire d’État. 

Après avoir reconnu le rôle essentiel que jouent les embargos sur les armes décrétés par les Nations Unies dans la limitation des flux d’armes destinées aux zones de conflit, la Sous-Secrétaire d’État a estimé que l’action collective au niveau mondial ne fonctionnera pas sans l’autonomisation au niveau local.  Je l’ai constaté à maintes reprises au cours de mes voyages, notamment lors de ma visite au Mozambique l’an dernier et au début de ce mois en Gambie, en Mauritanie et au Sénégal, a-t-elle indiqué.  De l’Afrique australe à l’Afrique de l’Ouest, les dirigeants locaux et la société civile m’ont dit qu’il était impératif qu’ils aient la capacité de définir leurs propres programmes, d’élaborer des solutions et de recevoir des ressources et un soutien au renforcement des capacités pour ancrer la paix et la sécurité chez eux, a-t-elle témoigné.  Elle a fait savoir que dans le cadre de leur nouvelle stratégie décennale de prévention des conflits et de promotion de la stabilité, les États-Unis travaillent activement avec leurs partenaires pour veiller à ce que des points de vue divers soient pris en compte dans les décisions relatives à la paix et à la sécurité et à ce que les voix et les solutions locales, fondées sur la confiance mutuelle et la responsabilité à long terme, soient au premier plan de la construction d’une résilience inclusive.  Cette stratégie vise à renforcer la sécurité civile à long terme, en particulier au Mozambique et dans les États côtiers d’Afrique de l’Ouest, qui sont confrontés à des menaces extrémistes croissantes à leurs frontières, a ajouté la haute fonctionnaire d’État.

M. SHAKHBOOT NAHYAN AL NAHYAN, Ministre d’État au sein du Ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale des Émirats arabes unis, a appelé à utiliser pleinement les outils de résolution des conflits et de consolidation de la paix en Afrique.  Le Conseil doit encourager les efforts de médiation chaque fois que cela est possible et coopérer étroitement avec les organisations régionales.  Il a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » doit viser à remédier aux causes profondes des conflits, en luttant notamment contre les idéologies extrêmes.  Il a souligné la nécessité d’identifier précocement les menaces émergentes et complexes qui requièrent des réponses complexes.  Nous ne pouvons pas avoir la paix si nous n’investissons pas dans la paix, a insisté le Ministre, en rappelant que les investissements directs étrangers en Afrique ont atteint le niveau record de 83 milliards de dollars en 2021, tout en ne représentant que 5,2% des investissements mondiaux. 

M. LIU YUXI, Représentant spécial pour les affaires africaines de la Chine, a jugé essentiel de respecter le principe de solutions africaines aux problèmes africains et d’appuyer les choix de développement et de gouvernance des pays africains plutôt que de les critiquer constamment.  Il a appelé à miser sur le renforcement des forces de sécurité africaines, notant que les sanctions imposées à certains pays africains les entravent dans cet effort.  Le développement durable étant essentiel à la paix, il faut également renforcer les infrastructures africaines de développement.  Le représentant a ensuite dénoncé « l’ordre international injuste », en exhortant à régler le problème de l’endettement excessif de l’Afrique.  Il a souhaité voir l’Afrique jouer un plus grand rôle dans la gouvernance internationale. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que 10 ans après le lancement de l’initiative « Faire taire les armes », l’Union africaine joue aujourd’hui un rôle crucial dans la prévention et la résolution des crises sur le continent et fait preuve de hardiesse dans la capacité d’apporter des perspectives africaines en matière de paix et de sécurité.  L’UA qui a été au centre des accords de paix au Soudan et en Éthiopie, de la restauration de l’État en Somalie, continue d’accompagner le processus de réconciliation en Libye et contribue très largement à apporter des solutions concrètes au Sahel, a-t-il rappelé. 

Toutefois, en dépit de ces progrès, les conflits et crises persistent en Afrique et impactent le quotidien des populations africaines, a noté le représentant pour qui la montée des conflits et leurs relations avec les crises socioéconomiques, rend indispensable une réflexion approfondie sur le nexus sécurité́ et développement.  La mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes » et les actions à engager doivent donc s’inscrire dans cette perspective.  Il a exhorté la Banque mondiale et le FMI à soutenir la reconstruction en Somalie, au Soudan du Sud, au Mali et dans la région du Sahel.  Ne pas soutenir ces pays fragilisés notamment par le terrorisme, c’est ignorer la menace à l’égard de la paix et la sécurité́ internationales, a-t-il prévenu.  Il a dénoncé les facteurs qui attisent les crises et entravent le développement de l’Afrique, comme la corruption et les flux financiers illicites dont la perte annuelle se chiffre à plus de 88 milliards de dollars.  Le représentant a insisté sur l’impérieuse nécessité de lutter contre ces fléaux afin d’endiguer les conflits et de faire taire les armes.  L’adoption de la Déclaration de Yaoundé montre tout l’intérêt que les pays africains portent sur ces questions, a-t-il ajouté. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a indiqué que la cause des conflits en Afrique est à chercher dans son histoire marquée par l’esclavage et le colonialisme.  Aujourd’hui, ces maux ont été remplacés par des pratiques néocoloniales, a tranché le délégué, en dénonçant les sanctions qui frappent les pays africains.  Il a souligné la nécessité pour les pays africains de disposer des moyens nécessaires pour protéger leurs populations.  Le délégué a reconnu qu’il existe un lien entre efforts sécuritaires et efforts de développement durable, mais a estimé que ce lien est indirect.  Il a accusé les pays occidentaux de piller les ressources naturelles de l’Afrique et de ne pas avoir honoré leurs engagements de consacrer 0,7% de leur revenu national brut (RNB) à l’aide publique au développement (APD).  Il a rejeté la pratique consistant à conditionner l’octroi d’aides à des critères politiques.  Enfin, il a rappelé l’aide précieuse apportée par l’URSS aux pays africains dans la lutte contre le colonialisme, avant de détailler l’aide militaire et économique apportée par la Russie aujourd’hui.  La Russie a ainsi effacé 20 milliards de la dette des pays africains, a-t-il précisé. 

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a souligné l’importance des politiques de développement dans la mise en œuvre de la campagne « Faire taire les armes » en Afrique.  Dans cet esprit, il a constaté que la vulnérabilité des institutions étatiques et locales est une des causes fondamentales des conflits et du terrorisme.  Jugeant indispensable d’empêcher la création d’un environnement dans lequel les jeunes sont attirés par l’extrémisme, le représentant a rappelé que son pays promeut le renforcement des institutions, de la gouvernance et de la démocratie, qu’il considère indispensables pour la paix, la stabilité et le développement durable en Afrique.  À cet égard, a-t-il dit, une participation publique large, inclusive et démocratique, y compris des femmes et des jeunes, à la gouvernance nationale et locale est essentielle.  Il a ensuite souligné la nécessité de renforcer l’autonomie et la résilience des communautés, y voyant l’un des meilleurs moyens de s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Une collaboration entre les communautés et les gouvernements centraux et locaux basée sur la confiance mutuelle est également nécessaire, tout comme il importe de protéger les personnes déplacées de force en aidant les communautés locales à trouver des solutions durables. 

Le délégué a par ailleurs insisté sur l’importance cruciale de l’appropriation par l’Afrique des partenariats internationaux.  Assurant que le Japon aspire à être « un partenaire qui grandit avec l’Afrique », il a fait état du soutien de son pays aux efforts africains en matière de prévention des conflits et de maintien de la paix.  Nous aidons par le biais du renforcement des capacités des opérations de maintien de la paix de l’ONU, tout en appuyant le Fonds pour la paix de l’Union africaine (UA), qui vise à former des ressources humaines pour la paix, la médiation et la réconciliation, a-t-il indiqué.  Après avoir salué les consultations entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, il a exprimé son appréciation du travail de la Commission de consolidation de la paix, notamment son rôle unique de conseil, de liaison et de convocation.  La stabilité, a-t-il dit en conclusion, est une condition préalable si l’Afrique veut libérer le potentiel de son peuple et réaliser le développement qui fera taire les armes.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a dit être profondément attachée à la protection et à la promotion de l’éducation et de l’alphabétisation pour tous les enfants, pierre angulaire pour construire des sociétés plus résilientes, plus inclusives et plus durables.  L’Afrique étant un continent jeune, elle a estimé qu’en tant qu’acteurs du changement, les contributions des jeunes femmes et hommes aux processus de prise de décisions et de paix doivent être soutenues.  En veillant à ce que les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion soient adaptés à l’âge et au sexe des participants, et qu’ils bénéficient d’un soutien physique et psychosocial complet, nous pourrons offrir aux jeunes des solutions alternatives à la violence, a fait valoir la déléguée.  Elle a également estimé que les politiques de développement doivent être conçues de manière à promouvoir une approche de proximité lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux causes profondes des conflits.  La réalisation de l’agenda « Faire taire les armes » nécessite l’engagement et la coopération de toutes les parties prenantes en Afrique, avec le soutien de la communauté internationale, a martelé la représentante.  Lorsque les gouvernements, les organisations régionales, les partenaires internationaux, la société civile et le secteur privé travaillent ensemble, il sera possible de faire un pas de plus vers une Afrique pacifique et prospère pour tous, a-t-elle affirmé. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a salué la détermination de l’Union africaine à « Faire taire les armes en Afrique » et a exhorté la communauté internationale à accompagner cet objectif, notamment en s’attaquant aux trafics d’armes avec l’appui de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.  Il a également souligné le rôle important des opérations de maintien de la paix et des autres entités de lutte contre le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre.  Le représentant a ensuite appelé à renforcer la lutte contre le crime organisé, la désinformation et la violence sexuelle et sexiste à l’encontre les femmes et les filles.  Il a insisté sur l’importance de la participation politique des femmes à la prévention des crises et des conflits afin de parvenir à des accords de paix durables.  La participation des jeunes aux efforts d’inclusion et de promotion de l’identité nationale est tout aussi essentielle.  Le respect et la promotion de la diversité et de la tolérance ethnique et religieuse doivent être encouragés, a estimé le représentant pour qui l’éducation, en plus d’être un instrument de développement, est un vecteur de civisme nécessaire à la paix.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a indiqué que son pays est en faveur de partenariats équitables et sur le long terme avec l’Afrique, en précisant que se tiendra à Londres en 2024 un sommet africain-britannique sur les investissements.  Il a plaidé pour des liens plus étroits entre efforts de développement et efforts de paix et sécurité au sein de l’ONU.  Il a aussi souhaité des partenariats renforcés entre l’ONU, l’UA et la Banque mondiale notamment.  Mon pays demeurera un fervent partisan de l’initiative « Faire taire les armes », a ajouté le délégué. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a considéré que, pour faire taire les armes, il est important de renforcer les politiques de développement qui cherchent à s’attaquer aux causes profondes des conflits.  L’Afrique, a-t-il observé, est un continent jeune et les dividendes de la jeunesse ne peuvent être effectivement perçus que si celle-ci est correctement éduquée et mobilisée dans l’innovation bénéfique et la création de valeur, a préconisé M. Agyeman.  Aussi a-t-il demandé un soutien international renforcé et durable pour le « développement générationnel » qu’apporte le pouvoir de l’éducation.  C’est pour cette raison que le continent a établi, dans le cadre de son programme de développement 2063, la Zone de libre-échange continentale africaine afin d’améliorer l’intégration économique et de libérer les potentiels de développement pour les populations du continent, s’est enthousiasmé le délégué. 

Il a ensuite salué le rôle crucial des chefs traditionnels et religieux dans le renforcement de la paix en Afrique, estimant que les valeurs morales et la sagesse autochtone qu’ils défendent leur ont valu d’occuper dans de nombreux pays africains une place qui leur permet d’influer positivement sur le paysage politique, la sécurité et le développement.  Au Ghana, par exemple, la Chambre nationale des chefs, le Conseil national pour la paix, le Conseil d’État et le Conseil chrétien du Ghana, qui comptent tous parmi leurs membres des chefs traditionnels et religieux, ont contribué de manière positive à la paix et à la stabilité de notre pays, a-t-il expliqué.  « Grâce à leurs efforts, le pacte de paix signé par tous les candidats à la présidence depuis les élections nationales de 2012 a renforcé la cohésion sociale et contribué à amplifier l’importance des processus pacifiques et légaux dans le traitement des griefs électoraux. » 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a signalé que l’Afrique est aux prises avec la pression du changement climatique, la persistance du terrorisme, et les chocs économique, sanitaire et géopolitique, sans compter le défi de la gouvernance et de la consolidation des États et l’impératif de traiter les causes profondes des conflits pour mettre en œuvre une paix durable.  Ces enjeux ne sont pas ceux de l’Afrique seule, ce sont des défis communs, a concédé le représentant prônant des réponses globales, coordonnées et solidaires.  Il a appuyé les solutions promues par l’Union africaine pour résoudre les conflits, se félicitant notamment de l’opérationnalisation du Fonds africain pour la paix avant de réitérer son plein soutien à la montée en puissance des opérations africaines de paix.  Il a indiqué que la France est prête à reprendre les discussions au Conseil de sécurité pour assurer un financement durable et prévisible de ces opérations, y compris sur contributions obligatoires. 

Au-delà des menaces sécuritaires, le représentant a appelé à établir des partenariats d’égal à égal avec les pays africains afin de mieux répondre aux enjeux de long terme, en particulier aux défis environnementaux et de développement.  Il a évoqué l’organisation, début mars par la France et le Gabon, du One Forest Summit pour lutter contre le dérèglement climatique et préserver la biodiversité.  Et pour financer des infrastructures durables, l’Union européenne a lancé il y a un an la stratégie Global Gateway.  Il a précisé que la moitié des 300 milliards d’euros mobilisés dans le cadre de cette stratégie sera dédiée à l’Afrique et plus d’un tiers de ses projets sera déployé en Afrique subsaharienne.  Le sommet que la France organisera les 22 et 23 juin à Paris permettra en outre de renforcer l’architecture financière internationale afin de lutter contre les inégalités et financer la transition climatique, a ajouté le représentant.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a appelé à prioriser la lutte contre le trafic d’armes légères et de petit calibre et de leurs munitions.  Pour que cela soit un succès, il faut que tous les partenaires africains signent et deviennent partie au Traité sur le commerce des armes.  Elle s’est inquiétée de l’absence d’institution de gouvernance, y voyant un grave obstacle à la capacité des États africains à faire avancer le développement durable mettant ainsi en danger la paix et la sécurité.  L’absence de gouvernance donne du pouvoir aux terroristes, aux groupes armés, accentuant la violence et l’instabilité, a noté la représentante qui a appelé les États à renforcer leur présence, y compris le long des itinéraires transfrontaliers des trafics. 

La déléguée a encouragé une démarche englobant l’ensemble de la société et la création de réseaux multipartites pour rétablir l’état de droit et renforcer la confiance dans les institutions dans les zones marginalisées et touchées par les conflits.  Pour ce faire, il faut travailler étroitement avec les dirigeants traditionnels et religieux, la société civile, les travailleurs humanitaires et les représentants des femmes et des jeunes.  L’action en faveur des familles et des jeunes grâce à l’éducation, entre autres, est particulièrement importante, a-t-elle ajouté.  La représentante a également appelé les États à investir davantage dans la promotion de la culture de paix et du respect des différences culturelles afin de contrer l’intolérance et toute forme d’extrémisme violent.  De même, elle a exhorté à lutter contre la corruption, et à renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que les efforts visant à instaurer une paix durable en Afrique doivent s’attaquer aux causes profondes des conflits (pauvreté, prolifération illicite des armes légères et de petit calibre et de leurs munitions).  Il a appelé à mettre l’accent sur la prévention de la violence, en considérant l’ensemble des facteurs politiques, économiques et sociaux des conflits.  Le cycle de la violence ne peut être rompu que si celui de l’impunité l’est aussi, a-t-il ajouté, plaidant pour que la réduction de la violence armée et la reddition de comptes soient intégrées plus systématiquement dans les efforts de consolidation de la paix et de développement.  Il importe aussi, selon lui, de renforcer la capacité des gouvernements locaux à fournir des services publics équitables et durables, en particulier dans les régions périphériques et les zones de conflit, afin d’améliorer la confiance de la population et de restaurer la présence de l’État.  C’est ce que fait la Suisse en soutenant un projet de planification de l’éducation au Niger, notamment dans les situations d’urgence. 

Parallèlement, il faut également que les efforts humanitaires, de consolidation de la paix et de développement soient sensibles aux liens entre les changements climatiques et les conflits, a poursuivi le délégué, avant de souligner l’importance du dialogue pour désamorcer les tensions avant qu’elles n’éclatent en conflit et pour résoudre les conflits déjà existants.  Ce dialogue doit systématiquement inclure les femmes et la jeunesse et, selon le contexte, d’autres acteurs comme les chefs traditionnels et religieux, a-t-il préconisé, évoquant le soutien de son pays à des plateformes de dialogue régionales, telles que le processus de Nairobi, qui vise à faire avancer la paix dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).  À ses yeux, les bureaux régionaux des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et pour l’Afrique centrale jouent aussi un rôle clef dans ce domaine en favorisant la création d’espaces de dialogue en collaboration avec l’Union africaine et les organisations sous-régionales. 

M. AMERY BROWNE, Ministre des affaires étrangères et de la CARICOM de Trinité-et-Tobago, a souligné que la nécessité de freiner le transfert illicite et l’utilisation abusive d’armes légères et de petit calibre et de munitions est une priorité de la politique étrangère de Trinité-et-Tobago et un objectif stratégique clef de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Par conséquent, a indiqué le Chef de la diplomatie trinidadienne, notre gouvernement a pris un certain nombre de mesures aux niveaux régional et continental pour renforcer le cadre de prévention, de lutte et d’éradication du commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  De fait, Trinité-et-Tobago et certains États de la CARICOM ont soutenu une action en justice intentée contre des fabricants d’armes privés américains, dans le but de les tenir responsables dans la facilitation de la libre circulation des armes et munitions illicites dans toute la région, a encore précisé le Ministre. 

Mme KATJA KEUL, Ministre fédérale des affaires étrangères de lAllemagne, a salué les efforts accrus que déploient l’Union africaine (UA) et ses États membres pour s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Elle a indiqué qu’en soutien de cet objectif, le Ministère allemand de la coopération économique et du développement a présenté en janvier une nouvelle stratégie pour l’Afrique, centrée sur une transformation sociale et environnementale juste, la création d’emplois pour la jeunesse et l’égalité des sexes.  La Ministre a ensuite estimé que, face à la menace transnationale posée par la prolifération des armes légères et de petit calibre, la réponse de la communauté internationale doit également être transnationale.  Elle a salué à cet égard les approches régionales, telles que le plan d’action de la CEDEAO, avant de préciser que son pays soutient les efforts nationaux et régionaux de renforcement des capacités en Afrique.  Ces mesures visent à lutter contre les flux financiers illicites liés au financement du terrorisme, mais aussi à améliorer la gestion et les capacités nationales de détection et de répression des frontières, a-t-elle relevé, ajoutant que pour la seule année 2022, l’Allemagne a consacré plus de 10 millions d’euros à des projets comme l’Africa Amnesty Month Project

De l’avis de la Ministre, une architecture de paix et de sécurité solide en Afrique est également essentielle pour lutter contre l’utilisation abusive des armes légères et de petit calibre ainsi que pour soutenir les efforts africains visant à résoudre les causes profondes sous-jacentes.  C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, l’Allemagne assiste les institutions de l’UA dans la mise en œuvre des instruments économiques régionaux de l’Architecture africaine de paix et de sécurité.  Notre objectif commun est de prévenir les crises, gérer les conflits et construire une paix durable, a-t-elle résumé.  L’Allemagne soutient aussi l’appel au financement durable et prévisible des missions de paix dirigées par l’UA, a poursuivi la Ministre, qui s’est félicitée que l’organisation panafricaine ait trouvé une position commune sur cette question lors du récent sommet d’Addis-Abeba.  Sur un sujet connexe, elle a appelé tous les États Membres de l’ONU à se joindre à la proposition élaborée par le Groupe des États d’Afrique et l’Union européenne en faveur d’un financement adéquat et durable des opérations onusiennes de maintien, y compris par le biais de contributions obligatoires. 

Le Secrétaire dÉtat aux affaires étrangères et à la coopération du Portugal, M. FRANCISCO ANDRÉ, a constaté que l’Afrique connaît des obstacles sociaux, économiques, à la sécurité et au développement en suggérant qu’ils doivent être abordés par le biais d’une appropriation nationale et régionale d’une part, et d’une coopération internationale d’autre part.  Pour cela, le Secrétaire d’État a recommandé une approche multidimensionnelle pour répondre aux causes profondes des conflits, ainsi que des formes concertées de coopération pour lutter contre les menaces transnationales, telles que le terrorisme, l’extrémisme religieux, la piraterie et d’autres formes de criminalité organisée et de trafic illicite.  Les solutions purement militaires ne suffiront pas, a tranché le représentant appelant plutôt à œuvrer à un développement durable et inclusif et, à court terme, garantir une aide humanitaire à ceux qui en ont besoin.  En tant que fervent défenseur d’une relation plus profonde et plus large avec l’Afrique, dans le respect des programmes et priorités de développement du continent, l’approche de longue date du Portugal a toujours été de s’engager « avec » l’Afrique, et non de développer des politiques « sur » l’Afrique. 

Le Portugal a récemment approuvé la stratégie portugaise de coopération au développement à l’horizon 2030, a expliqué M. André, ajoutant qu’elle accorde une attention particulière aux pays en situation de fragilité et qu’elle mise sur des réponses intégrées, en particulier par le biais de l’axe humanitaire-développement-paix.  La stratégie reposant sur trois axes qui se renforcent mutuellement à savoir un soutien à l’intégration économique de l’Afrique, par le biais de la Zone de libre-échange continentale africaine, des organisations économiques régionales et du développement de chaînes de valeur régionales et locales; un soutien aux efforts de stabilisation, et de prévention et de gestion des crises régionales, sur la base du principe de l’appropriation africaine, en intégrant la sécurité au développement économique et la coopération humanitaire; et, en dernier lieu, un soutien au développement de corridors et d’infrastructures stratégiques (routes, chemins de fer, ports, énergie, numérique) pour relier les pays africains entre eux et pour relier l’Afrique au reste du monde, notamment par le biais des océans Atlantique et Indien.  C’est dans cette optique que le Portugal a participé activement aux efforts de coopération entre l’Afrique et l’Europe, a-t-il dit en citant le cas du Mozambique où il a déployé une mission militaire à Cabo Delgado pour renforcer la formation des troupes spéciales mozambicaines. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a considéré que l’imposition artificielle de frontières est l’un des legs les plus problématiques et complexes du colonialisme, l’établissement de celles-ci ayant été motivées par des intérêts géostratégiques qui ne tenaient pas compte des identités et aspirations des peuples autochtones.  En outre, les mécanismes centralisés de gouvernance créés pour faciliter l’exploitation des colonies ont compliqué la tâche des États postcoloniaux désireux d’instaurer des formes durables d’autogouvernance, a encore analysé le délégué. 

« Au milieu des décombres de l’empire », la décision de l’Union africaine d’inscrire dans son acte constitutif le principe du « respect des frontières existant au moment de l’accession à l’indépendance » a sans aucun doute épargné au continent des conflits sécessionnistes, a poursuivi le représentant.  Avec cependant pour conséquence que les États nouvellement indépendants ont été confrontés à des questions complexes sur la relation, « peu étudiée », entre diversité sociale, paix et stabilité.  Un lien peu étudié, a noté le représentant, alors qu’il est essentiel pour garantir une paix durable.  En abordant cette question, l’ONU et le Conseil en particulier, devraient encourager les États à faire respecter les droits humains des minorités afin de renforcer la prévention des conflits, a estimé le représentant.  Il a relevé que nombre de situations dont le Conseil est saisi puisent leur origine dans l’exclusion de ces communautés réprimées de l’accès au pouvoir, aux opportunités, aux services et à la sécurité, « des inégalités qui ont pris racine dans l’État colonial ».  En faisant respecter les droits des minorités, il est possible à la fois de stimuler le développement et de prévenir les conflits, a argué le représentant. 

Le Liechtenstein, a révélé le représentant, a pour sa part rédigé un « Manuel sur l’autodétermination dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits », un ouvrage qui souligne l’importance des structures de gouvernance respectueuses des droits humains des minorités et examine comment le pouvoir peut être exercé le plus localement possible, à la fois comme mesure de prévention des conflits et pour mettre fin à ceux qui existent de manière durable. 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a insisté sur les bonnes perspectives économiques de l’Afrique pour les années 2023-2024, malgré le resserrement des ressources financières mondiales.  Il a estimé que la réalisation de l’objectif « un continent africain exempt de conflits » est entre les mains de l’UA, des pays africains et de leurs populations.  Il a reconnu l’appui important de l’ONU aux efforts de médiation et de paix de l’UA, notamment au Mali ou encore au Soudan.  Enfin, il a rappelé que des Casques bleus philippins sont déployés en Afrique depuis 1963.  Aujourd’hui, un petit contingent philippin est déployé au Soudan du Sud et un autre en République centrafricaine, a indiqué le délégué. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a souligné que l’initiative « Faire taire les armes d’ici à 2030 » appartient à l’Afrique, est dirigée par l’Afrique et poursuit une approche globale dans la recherche d’une paix et d’une sécurité durables en Afrique, pour les Africains.  Il a plaidé pour une meilleure compréhension du lien entre la paix, le développement durable et la sécurité humaine pour surmonter les défis du continent africain.  Sans progrès dans la lutte contre la faim, la pauvreté et la maladie, il y a moins de chance pour une paix durable et pour que les armes se taisent, a fait valoir le représentant.  Il a ensuite estimé que l’autonomisation des personnes rend plus probable la pérennité des processus interdépendants de paix, de développement durable et de sécurité humaine, que ce soit au niveau communautaire ou national.  C’est pour cette raison, a-t-il dit, que la Thaïlande, soit par l’intermédiaire de l’agence thaïlandaise de coopération internationale, soit par le biais de ses forces de maintien de la paix dans des missions des Nations Unies, intègre la coopération technique et le renforcement des capacités centrés sur les personnes dans ses programmes avec les pays africains.  Le délégué a enfin souligné l’importance d’une « interface régionale-multilatérale », en complément des efforts nationaux en faveur de la paix et de la sécurité, qualifiant à cet égard de réussites le partenariat UA-ONU, la coopération internationale en appui au Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et les partenariats internationaux avec les organisations sous-régionales en Afrique.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a noté que selon une étude présentée au sommet de l’UA le mois dernier, l’Afrique doit maintenir un taux de croissance annuel d’au moins 7 à 10% pour parvenir à un développement durable.  Cela signifie que nous devons de toute urgence trouver de nouvelles approches pour doubler les chiffres actuels, a-t-il souligné.  Il a aussi appelé à renforcer la résilience, arguant que l’un des moyens d’apporter plus de stabilité au continent est de renforcer la connectivité et de rétablir la confiance dans le multilatéralisme et les partenariats internationaux.  Afin d’assurer une meilleure réponse aux chocs potentiels futurs, il est crucial d’investir dans des infrastructures de qualité et résilientes et de soutenir le renforcement des capacités des pays en développement, a fait valoir le délégué, en soulignant la nécessité d’un soutien à long terme pour réduire leurs vulnérabilités aux crises extérieures, telles que les crises alimentaire, énergétique et climatique. 

Passant aux risques sécuritaires liés au climat, le représentant a souligné qu’il ne peut y avoir de réalisation d’une Afrique sans conflit sans reconnaître le lien indéniable entre le climat, la paix et la sécurité, notant que la concurrence pour des ressources naturelles rares, comme l’eau, est un moteur de conflits, de violences intercommunautaires et d’insécurité alimentaire.  Il a appelé le Conseil de sécurité à reconnaître et à évaluer correctement les implications des changements climatiques sur la sécurité arguant que ce n’est qu’à cette condition qu’il sera véritablement possible d’aborder le problème de la rareté des ressources dans une perspective de prévention des conflits.  Il a également souligné l’importance de renforcer les institutions de l’État et les structures de gouvernance, de faire respecter l’état de droit et de promouvoir le dialogue entre les communautés locales.  Des institutions étatiques fortes, capables de fournir des services sociaux de base, de protéger les frontières nationales, de rendre justice et de contrôler les flux d’armes, devraient être considérées comme une condition préalable au retour de la stabilité et à la sauvegarde du développement à long terme.

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a appelé le Conseil de sécurité à examiner les effets négatifs du trafic et du détournement des armes légères et de petit calibre.  Il a regretté que l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes souffrent de ce fléau alors que les principaux producteurs ne se trouvent pas dans ces régions et ne semblent pas être disposés à assumer leur responsabilité.  Le représentant a salué les progrès enregistrés grâce à l’initiative « Faire taire les armes », tout en appelant à davantage de réglementations pour empêcher leur trafic illégal.  Il a rappelé l’adoption des résolutions 2220 (2015) et 2616 (2021) du Conseil de sécurité, la dernière appelant au respect des embargos sur les armes imposées par le Conseil.  Le représentant a aussi attiré l’attention sur la situation qui prévaut aujourd’hui en Haïti informant que son pays a coparrainé la résolution 2653 (2022) pour empêcher la fourniture d’armes aux acteurs responsables de la violence dans ce pays.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a détaillé les efforts de son pays pour soutenir l’initiative « Faire taire les armes », en mentionnant la création d’une unité de médiation au sein de l’UA.  L’Égypte veille à sauvegarder les efforts de stabilisation en Afrique et accueille le centre pour la consolidation de la paix en Afrique, a-t-il aussi rappelé.  Il a indiqué que son pays veille à renforcer le rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix auprès du Conseil.  Il a par ailleurs souligné les répercussions de la guerre en Ukraine pour la sécurité alimentaire des pays africains.  La stabilité du financement des opérations de paix africaines doit être étudiée de très près, a conclu le délégué égyptien. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » représente un cadre stratégique pour le règlement pacifique des différends et le développement du continent africain.  Se disant convaincu qu’il ne peut y avoir de sécurité sans développement, ni de développement sans sécurité, il a indiqué que son pays a précisément inscrit son action autour du triptyque paix, sécurité et développement.  Dans ce cadre, a-t-il précisé, le Maroc a abrité la première conférence politique de l’Union africaine (UA) sur la promotion du « nexus paix, sécurité et développement » en octobre dernier à Tanger.  L’an dernier, le pays a également organisé, avec le Département des affaires politiques de l’UA, le premier atelier de formation spécialisé pour les observateurs électoraux africains.  Il a indiqué que le Royaume a fait du développement du continent une priorité de sa politique étrangère.  L’Institut Mohammed VI de formation des imams propose en outre des enseignements destinés à contrer la pensée obscurantiste et l’extrémisme violent, a encore relevé le délégué.  Pour faire taire les armes efficacement sur le continent, il est selon lui nécessaire de régler les causes profondes des conflits, notamment la pauvreté, et de mettre en place des mécanismes de contrôle de la prolifération des armes légères et de petit calibre.  Il faut aussi démanteler les structures de recrutement, de financement et d’endoctrinement des terroristes, a-t-il plaidé, avant de saluer la création de la Zone de libre-échange continentale africaine, « cadre idéal pour renforcer le développement en Afrique ».  Enfin, il a appelé à prendre en compte les changements climatiques dans toutes les stratégies nationales, régionales et continentales pour le maintien et la consolidation de la paix.

M.  MAURIZIO MASSARI (Italie) a salué l’initiative « Faire taire les armes » en ce qu’elle se concentre sur les moteurs du conflit en Afrique et reconnaît l’urgence qu’il y a à les supprimer.  Mon pays, a-t-il dit, est prêt à apporter sa contribution, étant donné que l’appui international ne doit pas seulement traiter des urgences mais aussi s’attaquer aux problèmes structurels et aux causes sous-jacentes des conflits, telles que l’insécurité alimentaire, l’exclusion sociale, l’absence d’état de droit et l’extrémisme violent.  Attirant l’attention sur trois questions qui pourraient bénéficier d’une action plus concertée, le représentant s’est d’abord attardé sur le potentiel de la Zone de libre-échange continentale africaine, avant d’annoncer qu’avec les Nations Unies, son pays va organiser une manifestation sur l’évaluation du Sommet sur les systèmes alimentaires, au mois de juillet de cette année. 

Il a ensuite parlé de la nécessité de promouvoir la participation de tous aux processus de prise de décisions, la transparence, la redevabilité et la confiance dans les institutions publiques.  Ici aussi, a-t-il dit, l’Italie déploiera des efforts dans le cadre de la Conférence annuelle sur le seizième objectif de développement durable, à Rome.  S’agissant de la lutte contre l’extrémisme violent, le représentant a indiqué qu’avec le Maroc, le Niger et les États-Unis, son pays préside le groupe de réflexion de la coalition anti-Daech.  L’Italie appuie aussi les liaisons régionales du Bureau de la lutte contre le terrorisme. 

M. KIM SANGJIN (République de Corée) a déclaré que pour que l’Afrique fasse taire les armes, mettre simplement fin aux guerres ou aux conflits ne suffira pas, insistant sur l’importance de mettre en place des institutions résilientes et renforcer la gouvernance.  La réforme du secteur de la sécurité est l’une des mesures essentielles pour renforcer et consolider la paix dans les situations de postconflit, de même que les initiatives de justice transitionnelle qui traitent de la reddition de comptes.  À cet égard, le rôle crucial de la Commission de consolidation de la paix et du Fonds pour la consolidation de la paix ne saurait être surestimé, a-t-il estimé, soulignant l’importance d’utiliser les quotes-parts pour financer ce dernier, ainsi que les opérations de la paix de l’UA autorisées par le Conseil de sécurité.  La République de Corée contribue régulièrement à ce fonds depuis 2006, dont 4,3 millions de dollars cette année.  Nous avons également contribué plus de 17 millions de dollars aux activités de paix et de sécurité de l’Union africaine, a-t-il fait savoir.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a indiqué que son pays coopère avec l’IGAD en vue de renforcer les systèmes d’alerte précoce dans la Corne de l’Afrique face aux menaces sécuritaires transnationales.  L’Autriche contribue aussi, par le biais du programme DELPAZ, à l’amélioration des conditions de vie des communautés rurales dans les zones touchées par le conflit au Mozambique, ainsi qu’à la restauration de la sécurité dans la région de Cabo Delgado, toujours au Mozambique, par le biais de la mission de l’UE.  Il a indiqué que l’éradication des armes légères et de petit calibre dans le cadre de l’initiative « Faire taire les armes » exige une coopération internationale.  L’Autriche et le Sénégal participent à un projet de ce type, a fait savoir le délégué. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a observé que, compte tenu de sa richesse en ressources naturelles et humaines, le continent africain possède un énorme potentiel de croissance économique et de développement.  Cependant, se concentrer uniquement sur le développement économique sans s’attaquer aux causes profondes des conflits et de la violence ne suffira pas.  Une approche globale et intégrée est, à ses yeux, essentielle et doit s’appuyer sur la construction de sociétés résilientes.  En favorisant la croissance économique, en créant des emplois et en améliorant l’accès à une éducation de qualité, aux soins de santé et à l’eau potable, les politiques de développement contribuent à bâtir des sociétés inclusives et résilientes, a affirmé le représentant, pour qui il importe aussi d’investir dans le dialogue interculturel, l’éducation aux droits humains et la société civile.  Cette approche doit par ailleurs s’appuyer sur l’inclusivité, a-t-il poursuivi, soutenant que le sentiment d’appartenance et d’appropriation nationale ne peut être atteint que lorsque tous les segments de la société ont une voix dans les processus de développement.  Dans ce cadre, les femmes et les jeunes doivent jouer un rôle essentiel dans la promotion du développement durable et de la paix, a plaidé le délégué, avant d’appeler à intégrer les changements climatiques dans cette réflexion.  Face à ce phénomène, facteur de pauvreté, d’insécurité alimentaire, de rareté de l’eau, de déplacements et de conflit, les politiques de développement doivent donner la priorité à l’action, a-t-il dit, en appelant à promouvoir les énergies renouvelables, l’utilisation durable des terres et la gestion des ressources naturelles.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne (UE), a voulu que l’on se concentre sur le Programme 2030, soulignant l’importance qu’il y a à investir dans le développement durable pour traiter des causes sous-jacentes des conflits et la nécessité de promouvoir une connectivité et une intégration plus grandes dans tout le continent africain pour améliorer l’accès aux services sociaux de base et aux opportunités économiques.  Dans ces deux domaines, a dit le représentant, l’UE concrétise ses engagements, en collaboration étroite avec l’Union africaine et appuie la réalisation de l’Agenda 2063.  Il a donné l’exemple du Mozambique où l’UE, réunie avec le PNUD, le FNUAP et les autorités locales autour du projet « ResiNorte – Resilience for the North », renforce la cohésion sociale, la paix et la stabilité, dans le cadre du nexus humanitaire-développement-paix. 

Le représentant a aussi donné l’exemple de la stratégie actualisée pour le Sahel qui se concentre sur la nécessité de renforcer la gouvernance et de fournir des services sociaux de base, comme facteurs cruciaux de la stabilisation de la région.  L’UE appuie également les efforts de médiation entre les communautés et les forces de sécurité du Kenya, et offre une formation aux de forces de sécurité du Nigéria dans la protection des civils et l’engagement avec les communautés locales. 

Le représentant s’est félicité du consensus qu’a su dégager la Cinquième Commission sur le financement de la consolidation de la paix.  Il a rappelé, dans son cadre, que l’UE appuie toujours les opérations d’appui à la paix de l’Afrique.  Il a aussi rappelé que l’UE vient d’adopter une stratégie renouvelée pour les Grands Lacs, le but étant de passer des tensions à la confiance, et du trafic des ressources naturelles au commerce et au développement durable.  L’UE va donc contribuer à l’amélioration de la gestion des ressources naturelles ainsi que de la coopération et des infrastructures transfrontalières.  L’UE, a encore rappelé le représentant, est la pourvoyeuse la plus importante d’aide publique au développement (APD) et le premier partenaire commercial de l’Afrique. 

Elle mobilise une somme minimum de 150 milliards d’euros d’ici à 2027 pour les secteurs du transport, de l’éducation, de la santé, de l’énergie et de la numérisation, tout en poursuivant ses efforts pour l’adaptation aux changements climatiques.  Il ne faut pas perdre de vue, a conclu le représentant, que le Programme 2030 est indivisible: la paix et la sécurité vont de pair avec le développement durable, les droits de l’homme et l’égalité des sexes. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a raconté une histoire qui s’est déroulée dans les régions de Turkana et de Pokot, au Kenya, où des différends de longue date sur les terres agricoles ont dégénéré en conflit violent lorsque l’industrie sucrière locale, le principal employeur, s’est effondrée en raison de la corruption et du détournement de fonds.  Les changements climatiques et l’extraction des ressources réduisant le stock de terres arables, les choses semblaient devoir empirer.  Les perspectives d’emploi étant limitées, les jeunes hommes ont abandonné l’école et se sont tournés vers le vol de bétail pour payer les dots et fonder des familles.  De plus en plus disponibles, les armes à feu ont remplacé les lances et les flèches, et le vol de bétail est devenu une activité de plus en plus meurtrière.  Depuis, de nombreux jeunes hommes sont morts en essayant de voler du bétail, et de nombreuses jeunes épouses sont devenues veuves.  En réaction, le forum des femmes de POTUMA a été créé en 2016.  Bien que traditionnellement exclues de la prise de décisions politiques, les femmes ont commencé à remettre en question les normes de genre.  Elles ont notamment boycotté les cérémonies qui célébraient les voleurs de bétail et franchi les frontières de leur communauté pour créer des espaces de dialogue.  Bien que l’instabilité persiste, le forum des femmes de POTUMA a résolu des conflits à plusieurs reprises.  

Pour faire taire les armes, a poursuivi la représentante, il faut prévenir et éradiquer le commerce illicite et le détournement des armes classiques par la mise en œuvre effective des instruments internationaux et régionaux de contrôle des armements.  Elle a également insisté sur le besoin de fournir des ressources humaines et financières au niveau local pour atténuer la violence armée, mettre fin aux conflits et parvenir à la paix et au développement durable.  Elle a donc appelé à travailler plus aux niveaux régional et national avec les organisations de la société civile dans la mesure du possible.  Il faut impliquer les jeunes et adopter une perspective à long terme pour faire face aux menaces qui pèsent sur la sécurité, a-t-elle ajouté.  Relevant que l’âge moyen d’un citoyen africain est inférieur à 20 ans en Afrique, il a jugé nécessaire de faire participer les jeunes aux processus de prise de décisions et à la mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes ».  Il a aussi appelé à garantir la participation pleine, égale et significative des femmes au règlement des conflits et à la consolidation de la paix, arguant que les femmes sont des agents du changement et de la paix dans leurs communautés et au-delà.

M. ANTÓNIO VITORINO, Directeur général de lOrganisation internationale pour les migrations (OIM), a souligné que les conflits et la violence sont les forces motrices du déplacement massif des populations.  À la fin de 2021, on comptait en effet 53,2 millions de personnes, ce qui est un record historique.  Ces déplacés peuvent devenir un facteur de violence puisqu’ils viennent se disputer les ressources, les terres, les services voire la gouvernance dans les pays d’accueil.  Dans ce cadre, le Directeur général a attiré l’attention sur la cruelle ironie selon laquelle ceux qui fuient le terrorisme et les conflits armés sont souvent vus comme des terroristes et des criminels, en raison des politiques et d’un sentiment anti-migrants généralisés.  Or une migration bien gérée, a poursuivi le Directeur général, peut être un moteur pour atténuer les effets combinés des conflits, des changements climatiques et du manque de développement.  Autonomisés, les migrants et les déplacés peuvent contribuer à la stabilité et à la prospérité économiques des pays d’accueil. 

Le Directeur général a plaidé pour l’inclusion des données sur la mobilité humaine dans les analyses des conflits.  Savoir pourquoi les gens partent, les solutions qu’ils proposent à la question des déplacements et les obstacles à leur intégration ou réintégration est essentiel pour la paix et la préservation des gains réalisés dans les objectifs de développement durable.  Les capacités nationales et régionales de prévenir et de trouver des solutions aux déplacements forcés doivent être renforcées pour identifier les causes sous-jacentes et les tendances des conflits.  L’OIM est prête à contribuer au Mécanisme humanitaire africain ainsi qu’au Système africain d’alerte et d’action rapides, a assuré le Directeur général. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie), s’exprimant au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, a souligné la nécessité, pour prévenir et remédier aux atrocités, de mieux comprendre les signes d’alerte précoce.  Un accès inégal à la justice et au marché de l’emploi, ainsi qu’un rétrécissement de l’espace démocratique peuvent contribuer à l’instauration d’un environnement propice à la commission d’atrocités, a-t-il fait remarquer.  Il a rappelé la responsabilité de protéger de tous les États, qui passe par l’adoption de mesures effectives visant à remédier aux causes profondes des conflits.  Les acteurs de la société civile jouent un rôle clef dans l’identification des signes précoces de la commission d’atrocités, a-t-il observé.  Enfin, le délégué a souhaité la pleine mise en œuvre du programme femmes et paix et sécurité dans le cadre de l’initiative « Faire taire les armes ». 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a jugé essentiel de reconnaître les liens entre toutes les menaces à la paix et à la sécurité en Afrique, citant notamment des défis socioéconomiques et climatiques, combinés aux flux financiers illicites et aux activités criminelles qui alimentent les conflits et l’instabilité sur le continent.  Les flux financiers illicites facilitent les trafics illicites d’armes, en particulier d’armes légères et de petit calibre, vers des acteurs non étatiques, tels que les groupes armés rebelles, les terroristes et les criminels, a-t-il fait valoir en soulignant que l’endiguement des flux financiers illicites rendra plus difficile l’acquisition illicite d’armes légères.  Il a regretté qu’à ce jour, la circulation et le détournement illicites d’armes se poursuivent sur le continent, au mépris des mesures prises par l’UA et les régions, ainsi que des résolutions du Conseil de sécurité.  Cela représente une menace pour le redressement, la reconstruction et le développement à long terme, a insisté le représentant en arguant qu’une plus grande transparence faciliterait la détection et permettrait d’interrompre les flux d’armes illicites.  Il a également demandé à la communauté internationale de s’engager activement dans un partenariat avec l’Afrique en fournissant une assistance dans le domaine de la prévention des conflits et de la consolidation de la paix, y compris leur financement adéquat.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a salué les progrès enregistrés depuis le lancement de l’initiative « Faire taire des armes » grâce aux efforts de l’UA et des gouvernements africains, avec la participation de partenaires régionaux et internationaux.  Elle a souligné les impacts des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative, lorsque les efforts s’attaquent aux causes des conflits et promeuvent le développement socioéconomique, en contribuant ainsi à la paix, à la sécurité et au développement durable sur le continent.  Tel est l’objectif principal de l’État du Qatar dans ses partenariats bilatéraux et régionaux qui visent à promouvoir la croissance économique inclusive, la réduction de la pauvreté et des inégalités ainsi que l’accès accru aux soins de santé et à l’éducation, a fait savoir la déléguée.  Elle a aussi parlé du soutien apporté par son pays au renforcement de la résilience et des capacités des communautés. 

Selon la déléguée, l’objectif de faire taire les armes et de faire cesser les guerres en Afrique et dans le monde entier relève de la responsabilité de l’ensemble de la communauté internationale et donc du Qatar.  La déléguée a encouragé l’ONU et les États africains à poursuivre cette initiative pour atteindre ses objectifs d’ici à 2030.  Elle a souligné à cet égard l’importance de la diplomatie préventive, de la médiation et du règlement pacifique des conflits.  Alors que son pays a une longue expérience en matière de règlement de plusieurs conflits régionaux et internationaux, la représentante a souligné la nécessité de s’attaquer aux causes des conflits en mettant l’accent sur la consolidation de la paix, la médiation, le dialogue ainsi que la participation des femmes et des jeunes et des personnes vulnérables touchées par les conflits.

S’exprimant au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège), M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a fait part de son appui de longue date à l’UA et à ses communautés économiques régionales et de son soutien à la mise en œuvre de l’architecture africaine de paix et de sécurité.  Il a estimé que l’opérationnalisation du lien entre l’humanitaire, le développement et la paix est essentielle pour définir l’approche globale nécessaire pour faire taire les armes, un objectif que les politiques de développement doivent pleinement intégrer.  Enfin, il a appelé à veiller à ce que les femmes et les autres parties prenantes participent pleinement, sur un pied d’égalité et de manière significative, aux processus de prise de décisions et de consolidation de la paix, afin de tirer parti des connaissances et des solutions locales pour faire taire les armes dans les communautés.

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a appelé à remédier aux causes profondes des conflits, en plaidant pour une approche inclusive.  Soulignant la nécessité d’améliorer tangiblement la vie des Africains, il a appelé à l’élaboration de politiques de développement « positives », avant de prendre l’exemple de son pays.  Depuis la fin de la guerre civile, la Sierra Leone a mis en œuvre trois stratégies de réduction de la pauvreté qui ont permis de consolider la paix.  Enfin, il a appelé à la mobilisation des ressources nécessaires en appui des politiques de développement. 

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » nécessite de regarder au-delà des questions de paix et de sécurité, en se concentrant sur la transformation structurelle de la sphère socioéconomique et en veillant à ce que tous les Africains bénéficient d’économies intégrées et inclusives.  Malgré les défis, le représentant s’est dit optimiste pour l’avenir de l’Afrique: sa population jeune, son abondance de ressources et sa diversité ont le potentiel de transformer le continent en un immense moteur de paix et de prospérité mondiales, a-t-il affirmé, voyant dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine un « modèle utile » à cette fin.  Invitant l’Afrique à créer ses propres institutions, politiques et stratégies pour prévenir les conflits, il a plaidé pour que l’accent soit mis sur le développement humain, notamment dans les services de base, tels que la santé et l’éducation.  Il s’est également prononcé pour une approche sur mesure du financement mixte et des investissements, qui tienne compte des besoins spécifiques et des vulnérabilités des pays africains.  Le délégué a d’autre part jugé essentiel d’assurer des systèmes de prestation de services publics efficaces, afin de garantir que l’État est perçu comme une présence légitime et active, même dans les zones les plus reculées.  Enfin, il s’est dit convaincu que la mise en œuvre efficace de la Zone de libre-échange continentale africaine facilitera le commerce intra-africain pour les microentreprises et petites et moyennes entreprises, élargira l’accès aux marchés et créera de nouvelles opportunités pour améliorer les moyens de subsistance des Africains.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a estimé qu’il faut embrasser les engagements liés à la paix contenus dans le Programme 2030.  Les progrès enregistrés dans les 36 cibles relatives à la paix, à la justice et à l’inclusion doivent être soulignés dans tous les rapports sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable, pour insister sur le rôle de la paix comme condition indispensable du développement.  Il faut aussi, a poursuivi le représentant, réaffirmer l’engagement en faveur des droits humains.  Le moment est venu pour tous les États Membres de reconnaître clairement l’importance égale des trois piliers de l’ONU, à savoir le développement, les droits de l’homme, et la paix et la sécurité.  Il faut « penser localement et agir mondialement », a martelé le représentant, expliquant que 40% des cibles de l’objectif de développement durable no 16 exige une mise en œuvre aux niveaux régional et international. 

Mme NIAMH MARY KELLY (Irlande) a reconnu la nécessité de s’attaquer aux facteurs socioéconomiques sous-jacents qui peuvent alimenter les tensions et contribuer au conflit.  « C’était vrai en Irlande du Nord.  Cela reste vrai dans de nombreuses régions d’Afrique aujourd’hui, où les facteurs de conflit sont aggravés par l’héritage de l’esclavage, de la colonisation, de l’imposition de frontières artificielles et de l’exploitation injuste des ressources naturelles », a-t-elle dit.  La représentante a vu dans le Mozambique un exemple de réussite émergente.  Il est remarquable de penser que le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration prévu par l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo est sur le point de s’achever, s’est-elle félicitée.  Mais ailleurs, sur le continent, la multiplication des changements anticonstitutionnels de gouvernement est une source d’inquiétude, a remarqué la déléguée.  Dans d’autres contextes, les progrès sont freinés par des lacunes dans la gouvernance et par une convergence de vulnérabilités et de problèmes sécuritaires tels que le terrorisme et l’extrémisme violent, l’afflux de combattants étrangers et de mercenaires, la corruption, la criminalité transnationale organisée et les effets des changements climatiques.  Dans ce contexte, la communauté internationale a un rôle essentiel à jouer, en coordination avec l’Union africaine et les initiatives sous-régionales, a-t-elle estimé. 

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a dit que son pays a organisé un programme de formation à la stabilisation et à la reconstruction postconflit dont les quatre dernières sessions ont été consacrées à l’Afrique.  Ce programme s’est tenu en 2019 en Éthiopie en coopération avec l’UA, a-t-il précisé.  Il a déclaré que son pays connaît bien les défis que le continent africain doit relever: fuite des cerveaux, prise en compte des coûts de l’économie verte, défi des nouvelles technologies.  Enfin, il a dit que la Roumanie est prête à partager les leçons qu’elle a apprises de l’instauration de la démocratie au cours des 30 dernières années. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) a appelé à diversifier l’agriculture afin de la rendre plus résistance aux effets adverses des changements climatiques, notant que ce secteur représente l’épine dorsale de l’économie africaine.  Il faut aussi soutenir les petits et moyens producteurs et veiller à ce que les agriculteurs jouissent d’un meilleur accès aux services financiers.  Le représentant a également appelé à prêter attention aux jeunes, et à l’autonomisation économique des femmes et des filles des zones rurales, sans oublier les efforts à déployer pour aider le continent à répondre aux répercussions des changements climatiques.  Avec l’adaptation climatique, il sera possible de renforcer la stabilité dans son ensemble, a-t-il relevé.  L’Afrique ne sera stable et résiliente aux conflits que si elle peut dépendre d’une agriculture efficace et résiliente aux changements climatiques et s’avère encore mieux préparée à faire face aux catastrophes naturelles. 

M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie) a relevé que l’initiative « Faire taire les armes » stipule clairement que la paix, la sécurité et le développement socioéconomique doivent être poursuivis simultanément.  Cette approche régionale du développement et de la paix repose sur le principe selon lequel la sécurité, la stabilité et le développement de chaque pays africain sont indissociablement liés à ceux des autres pays africains, a-t-il souligné.  Pour que l’Afrique libère son potentiel de développement et récolte le dividende démographique dont elle jouit en raison de la jeunesse de sa population, elle doit être le moteur de son propre développement, grâce à une gestion durable de ses ressources, a affirmé le délégué qui a revendiqué le droit souverain inaliénable des pays africains d’utiliser et de gérer leurs ressources naturelles et de répondre aux besoins de la population africaine.  Pour sa part, l’Éthiopie a intégré cette approche dans ses politiques nationales, a-t-il expliqué, en optant notamment pour une économie verte et la résilience climatique. 

Conscients du fait que le développement économique doit être complété par d’autres efforts, le représentant a appelé à mettre en place des systèmes de gouvernance efficaces et démocratiques adaptés au contexte, ce qui passe, a-t-il précisé, par la bonne gouvernance, l’inclusion sociale et le respect des droits humains, de la justice et de l’état de droit.  Il faut également veiller à ce que les causes profondes de l’extrémisme et de la violence soient traitées de manière concertée et au moyen d’interventions multidimensionnelles, a poursuivi le délégué.  Pour cela, il est indispensable de renforcer la coopération et les partenariats afin d’endiguer les menaces à la paix et à la sécurité émanant non seulement de causes internes mais aussi de sources externes, a-t-il déclaré. 

Promouvoir un agenda du développement est essentiel pour l’appropriation nationale du Programme 2030, a déclaré M. THOMAS NWANKWO CHUKWU (Nigéria) qui a insisté sur des stratégies de relance et de résilience traitant des causes sous-jacentes des conflits.  Il faut aussi, a-t-il poursuivi, garantir un financement adéquat, prévisible et durable des activités de paix et de sécurité, ce qui demeure un défi pour l’Union africaine et ses États membres.  Le représentant a, par exemple, jugé utile de prévoir dans le budget ordinaire de l’ONU un appui financier aux opérations de paix conduites par l’Union africaine.  Il a ensuite plaidé pour le renforcement des capacités de recherche sur les flux illicites d’armes dans sa région.  Le Nigéria, a-t-il indiqué, a créé un centre national de contrôle des armes légères et de petit calibre qui offre des directives et qui suit tous les aspects de la question dans le pays.  L’initiative « Faire taire les armes », a prévenu le représentant, ne se concrétisera jamais si le terrorisme persiste.  Le Nigéria, a-t-il annoncé, va accueillir un sommet régional sur le contreterrorisme cette année à Abuja, pour identifier les moyens de renforcer la riposte régionale.  En l’occurrence, l’appui du Conseil de sécurité serait important pour le succès de cette manifestation, a conclu le représentant. 

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a indiqué que, parmi les défis que l’Afrique doit relever, celui des mercenaires doit recevoir une attention particulière.  Elle s’est inquiétée de la présence accrue en Afrique du groupe Wagner, qui est une organisation internationale criminelle.  Nous disposons d’allégations crédibles faisant état d’atrocités commises par ce groupe, y compris la torture et les meurtres systématiques de civils, a dit la déléguée.  Elle a précisé que ce groupe participe aux combats contre les forces armées ukrainiennes, en recrutant notamment dans les prisons russes des milliers d’hommes, y compris d’ascendance africaine, lesquels sont cyniquement exploités dans cette guerre. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a estimé que la communauté internationale devrait s’unir pour soutenir les efforts africains visant à faire taire les armes d’ici à la fin de cette décennie.  Alors que les pays du continent font face à des facteurs internes comme externes de conflit, il importe tout d’abord de reconnaître la primauté des autorités nationales dans la conduite des priorités et des stratégies pour soutenir la paix, le développement, et ainsi éviter de retomber dans le conflit, a souligné la représentante.  Il faut aussi, selon elle, accepter que des solutions africaines soient apportées aux problèmes de l’Afrique, car « essayer une solution externe unique est l’échec assuré ».  Il revient, dans ce contexte, au Conseil de sécurité de tirer parti de l’avantage comparatif des organisations régionales et sous-régionales africaines pour résoudre les conflits prolongés, a-t-elle avancé, observant que la collaboration entre l’ONU et l’UA a toujours donné des résultats positifs, de même que les partenariats entre l’ONU et les organisations sous-régionales telles que la CEDEAO, la CEEAC, la SADC et l’IGAD. 

La représentante a par ailleurs jugé essentiel de renforcer les capacités des réponses nationales, régionales et sous-régionales au terrorisme en Afrique, via la formation, l’équipement et un soutien financier durable.  Des initiatives telles que l’AMISOM, la Force conjointe du G5 Sahel et la Force multinationale mixte ont besoin d’un soutien plus solide de la part du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, a-t-elle affirmé, avant d’appeler à une intensification des efforts de consolidation de la paix en Afrique.  À cette fin, les principaux donateurs, en particulier les pays développés et les institutions financières internationales, devraient accroître leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD) et éliminer les obstacles au financement concessionnel des économies africaines, a-t-elle plaidé.  Enfin, elle a estimé que pour garantir la crédibilité du Conseil, l’Afrique devrait bénéficier d’une représentation permanente dans sa prise de décisions. 

Mme ANA JIMÉNEZ DE LA HOZ (Espagne) a déclaré que son pays est attaché à la primauté du lien entre sécurité et développement, qui a inspiré les deux présidences successives de l’Espagne à l’Assemblée générale de l’Alliance du Sahel.  Notre coopération a été particulièrement axée sur le soutien au pilier paix et sécurité, visant à promouvoir la paix et la stabilité, la bonne gouvernance, les droits humains et la prévention du terrorisme, a-t-elle poursuivi, en mentionnant l’attention particulière portée à la promotion de l’égalité des sexes et à la participation des femmes dans le domaine de la gouvernance, de la paix et de la sécurité.  Récemment, en collaboration avec ONU-Femmes, l’Espagne a organisé un séminaire au Niger sur le rôle des femmes médiatrices.  En outre, elle a contribué à hauteur de 400 000 euros au programme de la CEDEAO pour les femmes, la paix et la sécurité, et à hauteur de 20 millions d’euros à l’autonomisation des femmes africaines par l’intermédiaire du Fonds Espagne-NEPAD, a encore précisé la représentante. 

M. HARI PRABOWO (Indonésie) a souligné la nécessité au niveau national d’assurer l’autonomisation des communautés locales, y compris les femmes et les jeunes, pour suivre une approche de bas en haut dans la mise en œuvre d’un processus de paix.  L’ONU et le Conseil de sécurité doivent soutenir ces mécanismes centrés sur les populations, a-t-il demandé.  Le représentant a également appelé, au niveau régional, à renforcer les partenariats au nom du principe que les régions savent ce qu’il faut faire en termes de prévention, pour répondre aux défis sécuritaires ainsi que pour mener efficacement les efforts de maintien de la paix.  À cet égard, a-t-il recommandé, l’UA et les organisations régionales doivent améliorer la synergie entre les initiatives sécuritaires comme « Faire taire les armes » et les projets de développement.  Les partenariats entre l’ONU et les entités régionales sont aussi nécessaires pour amorcer un dialogue stratégique et créer des plateformes de collaboration, a ajouté le délégué avant de plaider pour le renforcement des partenariats internationaux en matière de bonne gouvernance, notamment à travers la coopération Sud-Sud.  En outre, il a conseillé de miser sur une stratégie intégrée de maintien de la paix.  La Commission de consolidation de la paix doit renforcer son rôle en apportant un volet sécurité et développement dans les contextes postconflit, a-t-il encore suggéré.  Enfin, le représentant a souhaité voir élargir les sources de financement du développement et des efforts de paix, en partenariat avec les institutions financières internationales et le secteur privé.

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a fait observer que l’initiative « Faire taire les armes » représente un effort majeur visant à mettre fin aux conflits sur le continent africain et qu’elle pourrait jouer un rôle important dans la réduction de ces conflits en limitant la disponibilité des armes illicites.  Au cours des deux dernières décennies, l’UA et ses mécanismes régionaux ont démontré leur capacité à faire face aux situations de conflit et de crise sur le continent, a-t-il relevé en soulignant le soutien et la collaboration des Nations Unies avec l’UA, notamment dans le cadre du partenariat pour la paix et la sécurité, signé le 19 avril 2022.  Cet accord a cimenté la relation entre les deux organisations et leur poursuite commune de la paix et de la sécurité en Afrique, a salué le représentant.  Notant par ailleurs que le terrorisme constitue un obstacle au développement des pays africains, il a jugé essentiel que les complexités de ce phénomène soient abordées dans le cadre d’un effort conjoint multilatéral global entre les agences et les unités compétentes de l’ONU et de l’UA, fondé sur la coordination et la coopération, afin de le prévenir et de le combattre efficacement.  De plus, une action coordonnée est nécessaire entre les États de la région, les organisations sous-régionales et les Nations Unies afin de lutter contre les activités des groupes terroristes tout en s’attaquant au trafic illicite de drogues et d’armes légères et de petit calibre, a insisté le représentant. 

M. BERNARD MABEBA (Afrique du Sud) a vu dans l’initiative « Faire taire les armes » une manifestation de la volonté des peuples africains de mettre fin au fléau des conflits violents sur le continent dans la poursuite d’une prospérité partagée et d’un développement socioéconomique.  Cette initiative est du reste l’un des principaux projets de l’Agenda 2063, le plan directeur du développement socioéconomique de l’Afrique, a-t-il rappelé, en insistant sur le lien étroit entre paix et développement.  Malgré les efforts consentis par l’Union africaine (UA) et les communautés économiques régionales pour aider les pays du continent à atteindre leurs objectifs de développement respectifs, des obstacles subsistent pour faire taire les armes, a cependant constaté le représentant.  Face à la récurrence des conflits dans certaines parties de l’Afrique, il a jugé essentiel de renforcer la résilience des institutions chargées de promouvoir une croissance économique et un développement inclusifs. 

Relevant d’autre part que les politiques de développement nécessitent un financement à long terme, le représentant a exhorté les banques multilatérales de développement, les institutions de financement du développement et le secteur privé à aider les pays africains à mettre en œuvre leurs aspirations de développement en vue d’accélérer la réalisation de l’Agenda 2063 de l’UA et du Programme 2030 de l’ONU.  Il a cependant averti que les sanctions unilatérales et autres mesures économiques coercitives ainsi que les flux financiers illicites se révèlent être des obstacles au développement socioéconomique des pays du continent.  « Ces obstacles doivent être levés efficacement si le continent africain veut réaliser son plein potentiel de développement, de paix et de stabilité », a-t-il lancé, appelant de ses vœux une poursuite de l’évaluation des activités associées à l’initiative « Faire taire les armes », par le biais de la mise en œuvre de la résolution 2457 (2019) du Conseil de sécurité, mais aussi de la feuille de route principale sur les étapes pratiques à franchir.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur les obligations des États à l’égard des changements climatiques

Soixante-dix-septième session,
64e et 65e séances plénières – matin & après-midi
AG/12497

L’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur les obligations des États à l’égard des changements climatiques

L’Assemblée générale a adopté par consensus, ce matin, une résolution par laquelle elle fait part de son intention de demander à la Cour internationale de Justice (CIJ) un avis consultatif sur les obligations des États à l’égard des changements climatiques.

Le libellé de cette résolution, qui a été présentée par le Premier Ministre de Vanuatu, précise que cet avis vise à définir les obligations qui incombent aux États en ce qui concerne la protection du système climatique et d’autres composantes de l’environnement contre les émissions anthropiques de gaz à effet de serre.  De même, il permettrait de définir les conséquences juridiques pour les États qui, par leurs actions ou omissions, ont causé des dommages significatifs au système climatique et à d’autres composantes de l’environnement, notamment à l’égard des petits États insulaires en développement et des peuples et individus des générations présentes et futures atteints par les effets néfastes des changements climatiques.

Selon le Secrétaire général, une fois rendu, cet avis pourra aider l’Assemblée générale, les Nations Unies et les États Membres à prendre les mesures climatiques audacieuses et robustes dont notre monde a tant besoin.  Cet avis pourra également orienter les actions et le comportement des États dans leur relation entre eux, mais aussi vis-à-vis de leurs citoyens, a indiqué M. António Guterres qui a souligné que la justice climatique est aussi bien un impératif moral qu’une condition sine qua non pour une action climatique mondiale efficace. 

Bien qu’il ne représente pas une solution miracle, le texte peut catalyser une ambition plus élevée, a déclaré de son côté le Premier Ministre vanuatais, M. Alatoi Ishmael Kalsakau, notant que même s’il n’est pas juridiquement contraignant, un avis consultatif de la CIJ représente un poids juridique et une autorité morale notables.

L’adoption « historique » de ce texte a été saluée par la grande majorité des délégations, à l’instar des 12 petits États insulaires en développement (PEID) qui, par la voix des États fédérés de Micronésie, ont insisté sur l’importance de la justice climatique.  L’avis de la CIJ ne peut qu’avoir un impact positif sur les processus en cours dans le cadre de la Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUCC), y compris la galvanisation des mesures d’atténuation, le financement climatique et la volonté politique pour une ambition climatique accrue afin d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, a renchéri Singapour. 

Selon le Costa Rica, une fois rendu, l’avis consultatif de la CIJ permettra non seulement aux États d’intensifier leurs efforts, notamment en mettant fin à la dépendance aux combustibles fossiles, mais aussi de clarifier ce qui se passe dans le cas de l’éventuelle « mort d’un État » suite à la perte de territoire due aux changements climatiques. 

Les États-Unis ont cependant estimé que la résolution risque de compliquer les efforts collectifs, un processus judiciaire ne pouvant, selon eux, qu’accentuer les désaccords, au détriment des négociations en cours.  Convaincue que les efforts diplomatiques sont le meilleur moyen d’affronter la crise climatique, la délégation a fait observer que l’Accord de Paris énonce déjà des obligations et de nombreuses dispositions non juridiquement contraignantes. 

L’Assemblée générale a ensuite entériné sa résolution sur les diamants, facteur de conflit, par laquelle elle prend note de l’adoption, lors de la réunion plénière de 2022 du Processus de Kimberley, de la décision administrative portant création du Comité spécial d’examen et de réforme, lequel est notamment chargé d’examiner et de proposer, pour adoption en plénière, une définition du terme « diamants de la guerre » qui tienne compte de la nature évolutive des conflits et des réalités sur le terrain.

Selon les termes de ce texte, présenté par le Botswana, l’Assemblée générale se félicite par ailleurs de la décision prise d’établir le secrétariat du Processus à Gaborone et encourage les États Membres à soutenir volontairement son fonctionnement.

À l’issue de l’adoption du texte, la délégation ukrainienne a signalé que l’agression russe contre l’Ukraine a entraîné des conséquences incalculables sur le commerce de diamants.  La notion du commerce de diamants utilisé comme source de financements par des groupes rebelles est totalement dépassée: aujourd’hui, on les utilise pour financer la guerre comme le fait la Russie, a dénoncé la délégation. 

La politisation du Processus de Kimberley a été déplorée par l’Afrique du Sud, de même que par la Fédération de Russie.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE: PROJET DE RÉSOLUTION (A/77/L.58)

Déclaration liminaire

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, s’appuyant sur les conclusions du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a déclaré que maintenir l’augmentation des températures à 1,5°degré Celsius est possible mais que la fenêtre de tir se renferme rapidement pour éviter les conséquences de la crise climatique.  La décennie actuelle est la plus critique pour l’action climatique, a-t-il affirmé, notant que pour certains pays, la menace climatique est une condamnation à mort. 

Il a relevé que les avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) peuvent apporter des éclaircissements nécessaires sur les obligations juridiques internationales existantes.  Une fois rendu, cet avis pourra aider l’Assemblée générale, les Nations Unies et les États Membres à prendre les mesures climatiques audacieuses et robustes dont notre monde a tant besoin.  Cet avis pourra également orienter les actions et le comportement des États dans leur relation entre eux, mais aussi vis-à-vis de leurs citoyens, a ajouté le Secrétaire général avant de souligner que la justice climatique est aussi bien un impératif moral qu’une condition sine qua non pour une action climatique mondiale efficace. 

M. Guterres a également signalé que la crise climatique ne peut être surmontée sans coopération.  Or l’injustice climatique rampante alimente les divisions et menace de paralyser l’action climatique mondiale, s’est-il inquiété.  Il a indiqué avoir déjà présenté un programme d’accélération pour combler les écarts en matière d’émissions et accélérer l’action climatique dans chaque pays et dans tous les secteurs.  Nous n’avons jamais été mieux équipés pour résoudre la crise climatique, a-t-il affirmé.

Explications de position

À l’issue de l’adoption de la résolution, le délégué de l’Arabie saoudite, intervenant également au nom de l’Iraq, a souligné l’importance de la question des changements climatiques.  Tous les États doivent s’acquitter de leurs obligations, même s’ils sont tributaires de leurs conjonctures nationales, a dit le délégué qui a appelé à la mise en œuvre de l’Accord de Paris et au respect du principe de responsabilité commune mais partagée.

La Jordanie a souligné l’importance de faire face aux changements climatiques et a exhorté la Cour internationale de Justice (CIJ) à envisager les conséquences juridiques pour les États Membres dont les actions ont porté préjudice au système climatique, entraînant des conséquences pour d’autres États Membres, particulièrement les pays en développement. 

Déclarations après adoption

M. ABDUL MOMEN, Vice-Ministre du Bangladesh, a salué cette adoption historique, y voyant un message fort d’unité dans la lutte contre les changements climatiques.  Il a insisté sur la vulnérabilité de son pays face à ces changements, alors que son empreinte carbone est négligeable.  Il a mentionné le dernier rapport du GIEC et insisté sur l’importance de limiter le réchauffement et de prévenir ainsi « un enfer climatique ».  Il a détaillé l’action climatique de son pays, avant de regretter le manque d’ambition s’agissant de l’appui aux mesures d’atténuation des pays en développement.  Il y a un manque de fonds, a noté le Vice-Ministre, en rappelant l’acuité de la menace climatique. 

Au nom des douze petits États insulaires en développement (PEID), M. JEEM LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a souligné les points saillants de la résolution, à savoir la justice climatique et l’équité notamment en ce qui concerne les conséquences juridiques pour les pertes et dommages causés par les changements climatiques.  Il a également cité le consensus scientifique autour de la question des changements climatiques, de même que le besoin de clarté quant à l’application des instruments multilatéraux outre la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).  Le représentant a de plus insisté sur les liens entre changements climatiques et droits humains, y compris les peuples autochtones et les communautés locales. 

Il a réclamé une action urgente et ambitieuse, y compris celle de limiter le réchauffement aux niveaux préindustriels.  Il a aussi demandé à la CIJ de traiter ces éléments dans son avis consultatif.  Il s’est dit très satisfait du consensus ayant prévalu.  Cette résolution montre que le multilatéralisme est encore l’instrument le plus efficace et envoie un message puissant et sans équivoque pour lutter contre les changements climatiques, s’est-il félicité.  Cette résolution n’est qu’un premier pas, a-t-il ajouté avant d’inviter tous les États Membres à se préparer à la prochaine étape. 

M. OLOF SKOOG, Chef de la délégation de l’Union européenne, a relevé que bien que juridiquement non contraignant, l’avis consultatif demandé à la CIJ a le potentiel d’apporter une contribution significative à la clarification de l’état actuel du droit international.  Il a dit attendre de l’avis consultatif qu’il réponde aux questions juridiques sur la base de l’état actuel du droit international et à l’égard de tous les États.  Cet avis doit également identifier et, dans la mesure du possible, clarifier les obligations des États en vertu du droit international applicable, et les conséquences juridiques pour tous les États de la violation de ces obligations.  La résolution ne préjuge pas de savoir si des violations se sont produites, se produisent ou se produiront à l’avenir, mais se concentre plutôt sur les conséquences de celles-ci pour tous les États, a-t-il ajouté.

Mme VAEA (Tonga), au nom du Forum des îles du Pacifique, a salué cette adoption historique, qui nourrit son optimisme, avant d’insister sur l’importance de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius.  Elle a souligné l’importance d’une pleine association des femmes, des jeunes et des peuples autochtones dans la lutte contre les changements climatiques.  Cette résolution témoigne de notre esprit de responsabilité, a-t-elle dit, en rappelant l’engagement du Forum de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050.

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a salué l’adoption historique de cette résolution, affirmant que le droit international représente la première ligne de défense face aux changements climatiques.  Elle a dénoncé l’insuffisance des actions et des engagements au niveau mondial pour atteindre les objectifs climatiques.  Selon elle, ce sont paradoxalement les pays les plus vulnérables qui intensifient les efforts d’adaptation et d’atténuation, tandis que les plus gros émetteurs de carbone et les responsables de la catastrophe climatique continuent de reproduire un statu quo dont on sait scientifiquement qu’il est insoutenable.  L’adoption de la résolution de ce matin constitue un pas de géant dans la clarification des obligations juridiques des États face aux changements climatiques, s’est-elle félicitée. 

Selon elle, la demande d’avis consultatif donnera à la CIJ l’occasion d’examiner, à travers le prisme des droits humains, l’expérience des personnes les plus touchées par les changements climatiques, ainsi que les obligations des gouvernements pour protéger ces droits.  La compréhension de ces conséquences juridiques aidera les États à intensifier leurs efforts, notamment pour mettre fin à la dépendance aux combustibles fossiles qui ont causé et continuent d’aggraver l’urgence climatique.  L’avis consultatif de la Cour peut aider à guider d’autres tribunaux qui cherchent à déterminer si les engagements des nations en vertu de l’Accord de Paris sont suffisamment forts.  L’oratrice a noté que les questions posées à la Cour dans cette résolution sont complémentaires et globales, avec le potentiel d’établir un langage commun pour faciliter des engagements plus ambitieux des États dans les futures négociations sur le climat.  De même, l’avis consultatif de la CIJ pourrait clarifier ce qui se passe dans le cas de l’éventuelle « mort d’un État » en raison de la perte de territoire due aux changements climatiques. 

M. AMERY BROWNE, Ministre des affaires étrangères de Trinité-et-Tobago, a indiqué que les changements climatiques menacent les aspirations au développement durable et les moyens de subsistance de son pays.  Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ne trompe pas.  Sans réduction rapide des émissions, le réchauffement climatique entraînera des conséquences catastrophiques pour les populations les plus vulnérables, a-t-il averti.  Il est donc urgent de financer efficacement le renforcement des capacités et l’adaptation dans les pays en développement.  La viabilité des États insulaires en dépend, a-t-il insisté.  Bien que l’avis de la Cour soit non contraignant, il représente un grand pas en avant et permettra d’aider les pays en première ligne qui pâtissent le plus des changements climatiques alors qu’ils y ont le moins contribué. 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a dit que son pays pâtissait des changements climatiques de multiples manières et devenait vulnérable à la raréfaction des ressources hydriques, ainsi qu’à la multiplication des tempêtes de sable et de poussière.  Une politique générale a été imaginée par le Guide suprême de l’Iran, en conformité avec les exigences de l’Accord de Paris.  Dans certaines circonstances, certains États Membres ne peuvent s’acquitter de leurs obligations, a-t-elle cependant pointé.  Elle a estimé qu’il appartient à la CIJ d’examiner le principe de responsabilité commune mais différenciée, et a regretté que la résolution ne demande pas à la Cour de se pencher sur l’identification des raisons précises empêchant tel ou tel État d’agir ou de recevoir des financements, notamment l’existence de mesures coercitives unilatérales.  L’Iran n’a pas pu recevoir de financement du fonds mondial en raison des pressions exercées sur celui-ci, a regretté la déléguée iranienne qui a donc demandé à la CIJ de tenir compte du fait que des moyens de mise en œuvre ne sont pas disponibles pour certains pays. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a salué cette adoption historique, en rappelant l’acuité de la menace posée par les changements climatiques.  « Nous nous battons pour nos vies », a-t-il déclaré, en citant les mots du Secrétaire général.  Il a dit sa fierté de faire partie du groupe restreint de Vanuatu sur ce sujet.  Ce groupe était suffisamment restreint pour être efficace tout en étant représentatif.  L’avis de la CIJ nous donnera le cap à suivre, a-t-il conclu. 

M. JUSTIN PETER FEPULEAI (Nouvelle-Zélande) a indiqué que son pays fait partie du groupe restreint, avant de rappeler la gravité de la crise climatique.  Il a précisé que la Nouvelle-Zélande a récemment déclaré l’état d’urgence pour la troisième fois de son histoire, en raison d’une catastrophe naturelle.  L’avis de la CIJ peut permettre de clarifier le droit international, a conclu le délégué. 

M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a salué la demande d’avis consultatif de la CIJ au moment où Vanuatu se relève des conséquences de deux cyclones de catégorie 4 qui l’ont frappé ce mois-ci.  Cette demande peut représenter un tremplin dans les efforts visant à respecter les objectifs de limiter le réchauffement climatique à 1,5°degré Celsius, a-t-il estimé, rappelant qu’en février dernier sa délégation avait lancé l’idée de faire une demande d’avis consultatif auprès de la CIJ.  Le nombre de coauteurs pour cette résolution illustre que tous les États portent la responsabilité d’agir sur le front des changements climatiques.  Il a salué l’accent mis dans la résolution sur les PIED et les PMA étant donné leur vulnérabilité accrue aux conséquences des changements climatiques. 

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a indiqué que son gouvernement a toujours plaidé en faveur de solutions fondées sur le droit international pour relever le défi des changements climatiques.  L’avis de la CIJ devrait donner une impulsion à la poursuite de l’action climatique, a-t-elle espéré.  La représentante a de plus estimé que la demande d’avis consultatif permettra de clarifier les obligations juridiques des États et permettra de compléter le régime juridique climatique existant, citant notamment la CCNUCC et l’Accord de Paris.  L’avis de la CIJ ne peut qu’avoir un impact positif sur les processus en cours dans le cadre de la CCNUCC, y compris la galvanisation des mesures d’atténuation, le financement climatique et la volonté politique pour une ambition climatique accrue afin d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, a-t-il dit. 

Mme THI MINH THOA (Viet Nam) a remarqué que jamais une résolution relative à un avis de la CIJ n’avait reçu un tel appui unanime.  Le dernier rapport du GIEC indique très clairement que les risques ont augmenté dans les zones côtières et dans les petits États insulaires.  Il y a urgence, a-t-elle déclaré, car la situation empire.  Les attentes de la communauté internationale et le poids moral et juridique de la CIJ, font que cette résolution fera date.  Un tel avis imprimerait un plus grand élan à l’action climatique mondiale et soulignerait le rôle critique du droit international pour régler les grandes questions de notre époque, a-t-elle souligné, en insistant sur le fait que cette résolution n’est que le début d’un long processus.

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a attiré l’attention sur l’avis des scientifiques selon lesquels les gaz à effet de serre contribuent au réchauffement climatique.  La Sierra Leone, a-t-il fait observer, est le troisième pays du monde le plus vulnérable aux changements climatiques avec une population rurale particulièrement sensible.  Or le pays n’est en rien responsable de cette situation, le niveau de ses émissions étant négligeable.  Les inondations, les pluies torrentielles, les glissements de terrain sont appelés à être plus fréquents dans le pays.  Dans ce contexte, la CIJ, si on lui en donne les moyens, contribuera à clarifier et encourager un ordre juridique multilatéral, ce dont il faut se réjouir.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a rappelé la gravité de la crise climatique, qui revêt une dimension existentielle.  Elle a rappelé l’engagement de son pays de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2045.  Elle a salué l’adoption de la résolution, avant d’insister sur l’importance de limiter le réchauffement climatique.  Elle a exprimé sa gratitude à Vanuatu pour son leadership sur ce dossier.  Cette adoption est une avancée à mettre à crédit du multilatéralisme, a conclu la déléguée. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda) a rappelé la vulnérabilité du continent africain face aux changements climatiques, alors qu’il contribue très peu aux émissions.  Il a insisté sur la pertinence de cet avis consultatif, qui permettra d’aiguiller les États.  Il est capital de donner à la justice climatique l’importance qu’elle mérite, a conclu le délégué, en rappelant l’attachement de son pays au multilatéralisme. 

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a salué l’initiative historique de Vanuatu de demander un avis consultatif sur les changements climatiques à la CIJ qui, a-t-il ajouté, a fait des contributions importantes au développement du droit international.  Il a notamment rappelé qu’en 1996, dans un avis consultatif sur les armes nucléaires, la Cour a reconnu que l’environnement n’est pas une abstraction mais représente un espace vivant.  L’obligation générale des États d’assurer que les activités au sein de leurs juridictions respectent l’environnement des autres États, au-delà des frontières nationales, est à présent intégré au corpus du droit international lié à l’environnement.  Le fait de demander un avis sur les changements climatiques à la CIJ apportera plus de clarté, a estimé le représentant qui a appelé à agir de concert pour créer un monde résistant et durable pour tous, grands et petits. 

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a déclaré que l’adoption de cette résolution est une avancée majeure qui reflète l’importance de lutter contre les changements climatiques et de défendre les pays et les populations les plus vulnérables.  Aujourd’hui, a noté le délégué, l’Assemblée générale ajoute un chaînon manquant en confiant à la CIJ le soin de clarifier les obligations existantes des États face aux changements climatiques.  Il y a vu le signe de la confiance qu’accorde la communauté internationale à la compétence consultative de la Cour.  Il a informé que sa délégation a présenté une initiative visant à promouvoir une reconnaissance plus large de la compétence de la CIJ, en s’appuyant sur les efforts antérieurs dans ce domaine.  Avec un groupe de pays, la Roumanie a élaboré et publié une déclaration qui recense les principaux arguments en faveur de la compétence de la Cour.  Ce document réaffirme en outre l’importante contribution de la CIJ au règlement pacifique des différends et à la promotion de l’état de droit dans le monde, et invite les États à mieux utiliser ce potentiel.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a expliqué que son pays a organisé des réunions ministérielles sur le climat et le développement afin de se concentrer sur les priorités des États vulnérables.  Avec les Fidji, nous coprésidons le Groupe de travail sur l’accès au financement climatique en faveur des PEID et autres États vulnérables.  Le Royaume-Uni joue également un rôle déterminant dans la conclusion d’accords et l’obtention de fonds pour mettre en place et développer le Réseau de Santiago, afin de fournir une assistance technique, a encore souligné le représentant.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a dit reconnaître la valeur du pouvoir consultatif de la CIJ et sa capacité de prévenir ou de régler les différends.  Sa fonction consultative, bien qu’elle n’ait été sollicitée que 29 fois dans toute son histoire, peut jouer un rôle important pour faire avancer certaines causes urgentes et pour éviter de nouvelles confrontations en renforçant l’état de droit.  C’est pourquoi, comme il l’a répété à maintes reprises, le Mexique estime nécessaire que le Secrétaire général ait le pouvoir de demander des avis consultatifs à la Cour.  Cette possibilité, a insisté le représentant, est essentielle pour renforcer la diplomatie préventive.  Il s’agit également d’une priorité pour accroître la capacité de la Cour de statuer sur les différends.  Le représentant a donc invité les États, qui ne l’ont pas encore fait, à reconnaître la juridiction obligatoire de la Cour, à retirer leurs réserves, à négocier et à accepter les clauses de compétence dans les traités internationaux, et à adhérer, en somme, à la Déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour, qui compte déjà 33 signataires.

M DONG KYU MOON (République de Corée) a salué l’adoption de la résolution, avant de mentionner les conclusions du dernier rapport du GIEC.  Il faut, a-t-il dit, agir avec plus d’ambition et de coordination.  Il a rappelé que l’avis de la CIJ devra se fonder sur le droit international et la nature consultative dudit avis, et non juridiquement contraignante.  La Cour doit parvenir à un avis fondé sur les informations à sa disposition.  Aucun organe ne dispose d’un mandat exclusif sur cette question, a martelé le délégué.

M. OMAR HILALE (Maroc) a réaffirmé l’engagement de son pays à réduire ses émissions et à développer les énergies renouvelables.  Nous avons le devoir de soutenir cette résolution, a dit le délégué, en se félicitant qu’elle ait été le fruit de négociations de pays géographiquement très divers.  Le droit international a un rôle à jouer pour corriger la trajectoire actuelle, a-t-il insisté, en soulignant l’importance pour les pays en développement de la notion de « pertes et dommages » consacrée à la COP 27.

M. JÖRUNDUR VALTYSSON (Islande) a salué un processus qui a suscité l’espoir d’une poussée collective vers une plus grande action climatique.  Mon gouvernement, a-t-il affirmé, s’est fixé un objectif ambitieux de réduction des émissions, ainsi qu’un objectif national de neutralité carbone au plus tard en 2040.  Le Gouvernement a aussi décidé de ne plus délivrer de licence pour l’exploration pétrolière dans sa zone économique exclusive.  Au niveau international, a poursuivi le représentant, nous avons augmenté nos contributions au financement climatique, en doublant notre engagement en faveur du Fonds vert pour le climat au cours des deux dernières années et en adhérant au Fonds pour l’adaptation.  La coopération multilatérale au développement est également de plus en plus axée sur le financement climatique.

En ce qui concerne la résolution, le représentant a indiqué que son pays attend de la Cour qu’elle réponde aux questions juridiques sur la base de l’obligation de tous les États d’assurer la protection des systèmes climatiques et environnementaux contre les émissions de gaz à effet de serre.  Les questions posées à la CIJ et la résolution dans son ensemble ne préjugent ni de la nature de cette obligation, ni de la question de savoir si des manquements se sont produits, se produisent ou se produiront.  Le représentant a aussi estimé que le préambule du texte fait référence à certaines questions qui ne sont pas liées aux obligations juridiques et, qu’en tant que telles, elles ne devraient pas avoir d’incidence sur l’avis consultatif.  Le fait que l’Islande se soit portée coauteur ne change rien à sa position et à son interprétation des obligations, instruments et concepts auxquels la résolution fait référence.  Il n’influence non plus en rien la saisine éventuelle de la CIJ et d’autres cours et tribunaux, a prévenu le délégué. 

Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a reconnu la capacité de la CIJ à soutenir la lutte contre les changements climatiques et la promotion de la justice climatique.  En contribuant à la clarification et au développement du droit international, la compétence consultative de la Cour est un outil qui peut encourager de nouvelles actions pour lutter contre les changements climatiques et rendre justice à ses victimes, a-t-elle estimé.  Cette adoption historique est un témoignage du rôle crucial que la communauté internationale attribue à la CIJ et illustre l’urgence qu’il y a à prendre des mesures supplémentaires et accélérées pour lutter contre les changements climatiques pour les générations présentes et futures. 

Mme VERONIQUE JOSETTE MOREL (Seychelles) a estimé que l’avis consultatif mettra en lumière l’obligation des États de veiller à ce que chacun de nous puisse avoir droit à un environnement propre, sain et durable.  Le processus proposé aujourd’hui par cette résolution rappelle le lien inextricable entre changements climatiques et droits humains, et que les États ont l’obligation de protéger notre précieuse planète, a-t-elle noté. 

Pour M. RENÉ ALFONSO RUIDÍAZ PÉREZ (Chili) il existe un lien très clair entre les droits humains et les obligations des États en matière de lutte contre les changements climatiques.  Il a donc soutenu les références du texte à un environnement propre, sain et durable.  À cet égard, il a signalé que le Chili et la Colombie ont demandé un avis consultatif sur l’urgence climatique et les droits humains à la Cour interaméricaine des droits de l’homme, le 9 janvier, lequel sera transmis à la CIJ pour examen.  Il a jugé important que la CIJ éclaire l’opinion sur les obligations des États.  Outre plusieurs traités identifiés dans la résolution, la Cour peut examiner la valeur juridique et le contenu d’autres sources de droit international, y compris les principes généraux et les normes du droit international coutumier tels que la responsabilité internationale des États, le devoir de diligence raisonnable et le devoir de coopération, dont découlent des obligations générales et spécifiques pour les États, dans le contexte de l’urgence climatique.  La Cour doit également garder à l’esprit d’autres principes pertinents tels que l’équité, le principe du pollueur-payeur, ainsi que celui de l’intégrité territoriale, entre autres, a ajouté le représentant.

Mme MONA JUUL (Norvège) a noté les changements juridiques en raison des changements climatiques et de l’élévation du niveau de la mer et son corollaire, la perte de territoire.  Il faut une plus grande prévisibilité juridique dans ce domaine, a dit la déléguée, en souhaitant une clarification des obligations des États.  Elle a enfin appelé au renforcement de l’action climatique.

M KEVIN TIMOTHY MEAD (Canada) a souligné l’importance du futur avis consultatif.  Le fait que le Canada se soit porté coauteur de la résolution n’influence en rien son interprétation des différents instruments juridiques, a précisé le représentant qui a espéré que l’avis permettra un renforcement des engagements des États dans la lutte contre les changements climatiques.

Pour M. NICHOLAS HILL (États-Unis) la diplomatie est la meilleure voie pour atteindre les objectifs climatiques communs.  Après avoir énuméré les efforts nationaux et internationaux de son gouvernement, dans le cadre de l’Accord de Paris, le représentant a réitéré l’ambition de son pays de respecter la limite de 1,5°C.  Les États-Unis se focalisent également sur la minimisation des risques d’élévation du niveau de la mer pour les petits États insulaires et les États de faible altitude.  Toutefois, a-t-il dit, la résolution risque de compliquer nos efforts collectifs et nous éloigner de la réalisation de nos objectifs climatiques.  Un processus judiciaire, s’est-il expliqué, ne peut qu’accentuer les désaccords, au détriment des négociations en cours.  Les efforts diplomatiques, a-t-il insisté, sont le meilleur moyen d’affronter la crise climatique, y compris les efforts multilatéraux dans le cadre de l’Accord de Paris et autres fora internationaux.  L’Accord de Paris, a estimé le représentant, énonce déjà des obligations et de nombreuses dispositions non juridiquement contraignantes.  La référence à d’autres traités, dans la résolution, ne doit en aucun cas impliquer que ces textes contiennent des obligations en matière de protection du système climatique.  Ce n’est pas parce que des principes et devoirs sont mentionnés dans la résolution qu’ils seront forcément appliqués en totalité ou en partie à la question des changements climatiques. 

Le représentant a poursuivi, en soulignant que la question posée à la CIJ ne préjuge pas de la nature des obligations des États ou des conséquences juridiques de tout manquement à ces obligations.  Elle ne présuppose pas non plus que d’éventuelles violations se sont produites ou se produisent.  S’agissant du préambule, il a noté que plusieurs paragraphes traitent de questions qui ne sont pas liées à des obligations juridiques.  Les questions abordées dans ce préambule ne devraient donc pas être vues comme ayant une incidence sur l’avis consultatif de la CIJ.

M. FATUMANAVA-O-UPOLU III PA’OLELEI LUTERU (Samoa) a apporté son appui total à la résolution qui est aussi un appel urgent à l’action.  Le droit à l’environnement est aujourd’hui accepté comme un droit humain et cette résolution est une question de justice climatique et de droits humains qui touche les générations actuelles et futures.  Le représentant a dénoncé le fait que le fardeau financier des changements climatiques repose davantage sur les victimes que sur les responsables.  Le fait de demander un avis consultatif de la CIJ pour clarifier les droits et les obligations des États est moralement la bonne démarche.  Samoa s’appuie sur l’état de droit pour protéger son peuple, a déclaré le délégué qui a demandé aux États Membres de faire le suivi de la prochaine étape et de partager leurs idées et commentaires avec la CIJ au moment opportun. 

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) s’est félicité que la résolution renforce le multilatéralisme et le droit international.  Il a aussi dit vouloir défendre le caractère obligatoire du droit international.  L’avis juridique de la CIJ aidera à clarifier les obligations juridiques de tous les États en matière de changements climatiques, a-t-il espéré. 

M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a relevé que les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas contraignants et que la Cour n’a pas de pouvoir d’exécution, mais qu’ils peuvent néanmoins avoir un impact important.  Le rôle important de la CIJ est particulièrement crucial pour les questions juridiques liées à la menace existentielle des changements climatiques, pour laquelle les PEID du Pacifique, y compris la Papouasie-Nouvelle-Guinée, sont particulièrement concernés.  Un avis consultatif de la CIJ sur les changements climatiques pourrait constituer l’énoncé le plus clair à ce jour quant aux obligations que le droit international impose aux États concernant les émissions de gaz à effet de serre, a-t-il aussi relevé, et les États qui se soucient du droit international et de l’opinion internationale prendraient cet avis très au sérieux.  Il a aussi constaté qu’un nombre croissant de tribunaux nationaux dans le monde entier se penchent sur la question des changements climatiques et se réfèrent aux accords internationaux et aux décisions des tribunaux d’autres pays.  Un avis consultatif de la CIJ pourrait devenir l’autorité de référence vers laquelle ces tribunaux nationaux se tourneraient pour élaborer leurs propres décisions, a-t-il analysé. 

Mme AMATLAIN ELIZABETH KABUA (Îles Marshall) a salué l’adoption de cette résolution ainsi que le large soutien dont elle bénéficie.  Laissons derrière nous les divisions du passé, a-t-elle déclaré.  Elle a souligné l’attachement de son pays aux lignes maritimes actuelles, nonobstant l’élévation du niveau de la mer qui risque de submerger les Îles Marshall.  Il est temps pour l’Assemblée d’amorcer une action forte, l’inertie ne saurant être de mise, a conclu la déléguée. 

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a déclaré que cette résolution est un jalon important, avant d’insister sur la vulnérabilité de son pays aux changements climatiques.  Elle a plaidé pour le renforcement des capacités des pays.  Elle a espéré que la CIJ prendra en compte, lors de son avis, le principe de bonne foi en droit des traités. 

Mme LARUE (République dominicaine) a souhaité que l’avis consultatif de la CIJ soit rendu le plus rapidement possible, avant d’insister sur la pertinence du droit à un environnement sûr.  Elle a assuré de la détermination de son pays à imprimer un élan fort dans ce dossier crucial.

M. NOEL MARTIN MATEA (Îles Salomon) a appelé à davantage d’ambition sur le sujet.  La résolution adoptée aujourd’hui dit que les changements climatiques sont un défi sans précédent, à l’échelle de toute une civilisation, et les gouvernements ainsi que la CIJ doivent continuer à échafauder des ripostes juridiques, a-t-il indiqué.  D’autre part, le fait d’accepter l’Accord de Paris ne change en rien la responsabilité des États historiquement émetteurs.  L’avis consultatif devrait se concentrer avant tout sur les intérêts des populations de demain, a-t-il souligné.

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) a souhaité que la CIJ donne à la communauté internationale un avis faisant autorité concernant les obligations des États Membres découlant des accords internationaux en vigueur et du droit international en général face aux conséquences négatives des changements climatiques.  Il a relevé que la Commission des petits États insulaires sur les changements climatiques et le droit international a également adressé une demande d’avis consultatif au Tribunal international du droit de la mer concernant les obligations des États parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer dans le but de protéger l’environnement marin face aux changements climatiques.  Le représentant a estimé que la CIJ est en bonne place pour se prononcer de façon exhaustive sur les différentes obligations juridiques internationales en matière de changements climatiques.  L’avis consultatif de la CIJ sera une boussole faisant autorité pour les États en ce qui concerne les questions juridiques fondamentales liées aux changements climatiques. 

M. DONALD KENNEALLY (Irlande) a appuyé l’initiative prise par le biais de cette résolution arguant que les changements climatiques ont d’ores et déjà des conséquences catastrophiques.  Il faut se pencher sur les vulnérabilités particulières des PEID, a-t-il martelé avant de réaffirmer le rôle primordial de l’Accord de Paris, de la CCNUCC et de ses conférences pour y parvenir.  Le représentant a ensuite appelé le Conseil de sécurité à se prononcer sur les risques climatiques. 

Mme ZSUZSANNA HORVÁTH (Hongrie) a salué l’adoption de cette résolution et a dit attendre avec intérêt l’avis consultatif de la CIJ.  Reconnaissant que les changements climatiques provoqués par l’homme ont de graves conséquences, la représentante a plaidé pour le respect de l’équité intergénérationnelle dans ce contexte.  Elle a espéré que la Cour répondra de façon précise à la demande qui lui a été faite, soulignant que l’environnement mérite d’être protégé en tant que tel et non en tant qu’intérêt économique.  L’avis consultatif pourrait être une grande contribution aux efforts collectifs des États pour relever les défis des changements climatiques, a-t-elle estimé.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a espéré que l’avis de la CIJ permettra de rallier les États autour d’ambitions renouvelées pour le climat.  Il a rappelé le principe de responsabilités communes mais différenciées, en exhortant les pays développés à renforcer les capacités des pays en développement.  Les pays développés n’ont jamais exécuté leurs obligations, a-t-il déploré, avant de dénoncer le climat de confrontation qui règne dans ce domaine.  « Il s’agit de coopérer et de partager les ressources, » a-t-il insisté.

M. FRANCISCO JAVIER GUTIÉRREZ PLATA (Colombie) a salué l’adoption de cette résolution qui représente une avancée majeure pour la poursuite du développement du droit environnemental international.  Il s’est dit convaincu du bienfondé des tribunaux internationaux pour interpréter le droit international.  Il a fait savoir que la Colombie a déjà présenté deux avis consultatifs à la Cour interaméricaine des droits de l’homme, le premier a confirmé le droit à un environnement en bonne santé en tant que droit humain fondamental.  L’autre, toujours en examen, traite sur la portée de l’obligation des États en réponse à l’urgence climatique dans le cadre des droits humains.  Cette dernière complète la demande d’avis consultatif formulée aujourd’hui, a-t-il indiqué.

M. HARI PRABOWO (Indonésie) a estimé que l’avis de la Cour sera un compas moral qui permettra de clarifier les obligations juridiques des États face aux changements climatiques.  Comme les attentes sont très élevées, cette saisine devra mener à un meilleur respect, et à plus de transparence et de coopération.  Il a espéré que la CIJ examinera avec sérieux la question du principe de responsabilité commune mais différenciée, ainsi que l’importance cruciale des partenariats mondiaux, y compris les engagements en matière de financement.  L’avis consultatif de la CIJ doit contribuer à de nouveaux engagements des pays face aux changements climatiques, avec une nouvelle solidarité climatique entre pays développés et en développement autour d’une stratégie et des capacités communes pour toute l’humanité, a-t-il affirmé. 

M. TAPUGAO FALEFOU (Tuvalu) a déclaré que l’avis de la CIJ permettra de fournir un appui moral à la lutte climatique.  Il a demandé à tous les États de prendre les mesures nécessaires pour un avenir durable.  Cette résolution est un pas positif, s’est félicité le délégué. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie), a estimé que la CIJ est en mesure de fournir la clarté requise aux États quant à leurs obligations juridiques face aux changements climatiques.  Les avis consultatifs pourraient encourager les États Membres à améliorer leurs politiques environnementales nationales.  L’avis consultatif de la CIJ, bien que non contraignant, sera une contribution précieuse pour promouvoir l’action climatique partout dans le monde, a assuré le délégué slovène. 

M. WALTON ALFONSO WEBSON (Antigua-et-Barbuda) a expliqué que même si son pays reste déterminé à s’attaquer aux problèmes liés aux changements climatiques par le biais des différents forums internationaux existants, il soutient la position de Vanuatu de demander un avis consultatif.  L’adoption de cette résolution aujourd’hui donnera à la CIJ le mandat de rendre un avis consultatif sur la question des changements climatiques et de leurs interactions sur plusieurs fronts, a-t-il relevé, ajoutant que ces avis jouissent d’une autorité juridique et politique considérable.  Étant donné que les ramifications des changements climatiques affectent de nombreux aspects de la vie humaine, en particulier dans les PEID, Antigua-et-Barbuda, et tous les pays du monde, bénéficieraient grandement d’un avis faisant autorité sur les implications juridiques des changements climatiques, a-t-il fait valoir.  Cette initiative vient compléter les régimes juridiques internationaux déjà en place et contribuera à faire avancer l’ensemble des ambitions climatiques dans la bonne direction, a-t-il estimé.

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a relevé que l’Accord de Paris précise, entre autres, les obligations des États parties à communiquer des objectifs ambitieux et à mettre en œuvre des politiques domestiques en matière de réduction d’émission: ces obligations auraient mérité d’être mises en exergue dans la résolution, a-t-elle estimé.  Le texte de la résolution semble aussi suggérer que la CIJ ne doit examiner que les conséquences juridiques des actions et omissions passées qui ont causé des dommages significatifs au système climatique et à l’environnement.  Or, les actions et omissions présentes et futures auront des conséquences supplémentaires sur le système climatique, et entraîneront des dommages additionnels.  Il est donc important que la Cour examine également les conséquences juridiques des actions et omissions présentes et futures.  En outre, sous l’Accord de Paris, les pays sont tenus d’annoncer des objectifs de réduction d’émissions, et l’on dispose ainsi de projections.  Cela fournirait une base de données suffisante pour que la Cour en tienne compte.  Enfin, alors que le dispositif fait référence au « principe de prévention des dommages significatifs à l’environnement », la déléguée suisse a souligné que le droit coutumier international crée une obligation de prévenir les dommages significatifs à l’environnement.

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a d’abord salué l’adoption historique par consensus de cette résolution qui reflète des principes fondamentaux, à savoir un ordre international fondé sur des règles, de justice climatique, de responsabilité commune mais différenciée et du principe de précaution.  Il y a une urgence à agir de façon plus robuste et de revoir à la hausse l’appui financier, le renforcement des capacités, de même que les transferts de technologie afin d’améliorer les capacités à riposter aux effets néfastes des changements climatiques dans les pays en développement.  Le représentant a espéré que cette demande d’avis consultatif de la CIJ fera lumière sur les obligations juridiques des États à garantir la protection du système climatique et permettra de renforcer la coopération internationale, avec notamment un accès amélioré à des ressources financières suffisantes pour les régions, les secteurs et les groupes les plus vulnérables. 

M. SERGEI A. LEONIDCHENKO (Fédération de Russie) a espéré que la CIJ rendra son avis dans le strict respect de son mandat et sur la base du droit existant. 

M. JHON GUERRA SANSONETTI (Venezuela) a déclaré que son pays, fermement engagé dans la mise en application pleine et entière des accords internationaux, s’est joint au consensus.  Cela étant, si se tourner vers la CIJ pour obtenir davantage de clarté sur le plan juridique représente une prérogative honorable de l’Assemblée générale en vertu de l’Article 96 de la Charte des Nations Unies, il ne suffira pas, au vu de l’urgence, de garantir le respect de l’adhésion aux obligations émanant des traités.  Il faudra aussi, une bonne fois pour toutes, accepter la nécessité de changer le système dans son ensemble, a-t-il déclaré.  Le modèle de prédation actuel, dont les conséquences sont de plus en plus tangibles, doit être changé, car il est néfaste aux pays les plus vulnérables.  Il a mis en avant le principe de responsabilité commune, mais différenciée afin que les pays historiquement émetteurs s’acquittent de leur dette, et rendent opérationnel le fonds historique pour les pertes et dommages.  L’heure est venue de changer les choses radicalement, a insisté le représentant.  Il a ensuite formulé des réserves quant à la mention dans le texte d’instruments internationaux auxquels le Venezuela n’est pas partie, en l’occurrence la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. KAI LI (Chine) a appelé à consolider les mécanismes de mise en œuvre de la CCNUCC et de l’Accord de Paris afin de promouvoir la gouvernance mondiale de façon plus approfondie et plus efficace en matière climatique.  Il a fait part de la réserve de la Chine sur le texte adopté aujourd’hui, regrettant que les principes d’équité et des responsabilités communes mais différenciées ne figurent pas dans son dispositif.  La CIJ devra chercher à promouvoir l’application de la CCNUCC et non pas chercher à s’immiscer dans le processus de gouvernance actuel, a-t-il estimé.  Il faut insister sur la responsabilité historique des pays développés et exiger de leur part qu’ils s’acquittent de bonne foi de leurs engagements et continuent à réduire leurs émissions tout en aidant les pays en développement, y compris sous forme d’assistance technique, a martelé le représentant.  Il a assuré que la Chine est à pied d’œuvre pour parvenir à la neutralité carbone, et qu’elle promeut la coopération Sud-Sud en matière climatique.

M. NOAM CAPPON (Israël) a rappelé que la résolution 52/50 adoptée en 1998 stipule que « les Palestiniens » ont le droit d’être coauteurs des projets de résolution qui traitent de la Palestine et du Moyen-Orient.  Selon lui, la résolution adoptée aujourd’hui ne répond pas aux paramètres décrits dans la résolution 52/50.

M. MOHAMMAD YOUSUF ABDULLA MOHAMMAD BASTAKI, (Émirats arabes unis), a espéré que l’avis de la CIJ permettra à la communauté internationale de se montrer plus ambitieuse, notant que les obligations des États s’enracinent dans le droit international applicable.  Il a par ailleurs encouragé la CIJ à garder à l’esprit les conséquences des changements climatiques pour les femmes et les enfants.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) aurait préféré que les questions posées à la CIJ aient pour point de départ la responsabilité historique des États Membres ayant contribué le plus aux changements climatiques, et le principe de responsabilité différenciée qui en découle.  Déterminé à contribuer par tous les moyens à la lutte contre les changements climatiques, l’action de l’Afrique du Sud est basée sur la CCNUCC et son droit inaliénable au développement.  Le délégué sudafricain a en outre partagé sa frustration quant au fait que les pays développés n’ont pas honoré leurs engagements en matière de financement et de transfert des technologies.

Mme PATRICIA CHAND (Fidji) a appelé à se montrer audacieux et adopter des mesures pour réduire, voire éliminer notre empreinte carbone.  Dans le même temps, nos aspirations en matière de développement doivent être durables afin qu’ensemble, nous puissions atteindre l’objectif de 1,5 degré Celsius.  La représentante a réaffirmé la détermination de sa délégation à parvenir à une réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050.  À cet égard, le Parlement a adopté en 2021 une loi qui constitue le socle juridique qui permettra d’étayer nos ambitions sur le long terme en matière climatique et d’atteindre la cible de zéro émission. 

M. RIYAD MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a déclaré que ce que vivent aujourd’hui les pays en première ligne face aux conséquences des changements climatiques, l’humanité dans son ensemble le vivra demain si elle ne prend pas les décisions indispensables à sa propre survie.  Nous serions responsables de notre propre extinction et de l’extinction de toute vie sur notre planète si nous n’agissons pas de manière décisive sur la base de nos obligations et des engagements que nous avons pris, a-t-il affirmé.  L’adoption de cette résolution aujourd’hui incarne, selon lui, la conviction que l’humanité relèvera le défi en clarifiant les obligations qui nous incombent aujourd’hui et en veillant à ce que nous les respections à partir d’aujourd’hui.  Le droit international a été conçu pour nous protéger tous, a-t-il relevé, à commencer par les plus vulnérables d’entre nous, se réjouissant de voir que l’Assemblée générale a défendu cet esprit aujourd’hui.  Le représentant a fait valoir que l’adhésion aux conclusions de la Cour sera nécessaire pour garantir une réponse multilatérale et collective aux changements climatiques, ainsi que pour faire progresser le système multilatéral et l’ordre international fondé sur les règles sur cette question vitale.

M. O’CONNOR, de l’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN), a dit soutenir la demande d’avis consultatif faite à la CIJ sur les obligations des États d’assurer la protection du système climatique et de l’environnement contre les émissions de gaz à effet de serre.  Le représentant a aussi appuyé la demande de clarification des conséquences juridiques lorsqu’un préjudice important a été causé au système climatique et à l’environnement, en particulier dans les petits États insulaires en développement.  La science fournit des preuves de plus en plus solides des effets néfastes des changements climatiques sur les personnes, les systèmes naturels et la biodiversité, ainsi que sur la disponibilité de l’eau et de la nourriture, a relevé l’intervenant qui a rappelé que bon nombre des obligations juridiques des États en matière de protection du système climatique sont déjà incluses dans des accords multilatéraux sur l’environnement.  Il a informé que de nombreuses questions restent ouvertes sur des obligations spécifiques, par exemple sur les droits des générations futures ou la protection des États, peuples et communautés particulièrement vulnérables aux atteintes au climat et à la nature. 

LES DIAMANTS,FACTEUR DE CONFLITS: PROJET DE RÉSOLUTION (A/77/L.61)

Débat sur la question et décision sur le projet de résolution

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a indiqué que le Processus de Kimberley est d’une grande priorité pour les 54 membres du Groupe, évoquant les défis que doivent relever les pays producteurs de diamants.  Il a noté que la résolution demande que les avantages du commerce éthique des diamants bénéficient aux pays membres, insistant en outre sur l’importance du renforcement des capacités, ainsi que le respect des normes, des règles, des procédures et de certification que les États ont toujours demandé au sein du Processus de Kimberley.  Le représentant a salué la décision d’établir le secrétariat du Processus à Gaborone, au Botswana.  Il a par ailleurs relevé que les diamants représentent une industrie d’une valeur de 81,4 milliards de dollars par an dont l’essentiel provient de l’Afrique, d’où l’importance des diamants pour le développement de l’Afrique. 

M. AXEL DE LA MAISONNEUVE, de l’Union européenne, a souligné la pertinence du Processus de Kimberley, qui a permis notamment de diminuer les risques de conflit.  Il a estimé néanmoins que le processus de certification n’est plus aussi efficace qu’avant.  Il a notamment demandé un élargissement de la définition des diamants visée par ce processus.  Il a condamné la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, avant de saluer la création du secrétariat du processus. 

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) s’est joint au consensus, reconnaissant l’importance du Processus de Kimberley, une plateforme unique.  Longtemps, celui-ci a été un outil multilatéral, mais la situation a beaucoup changé depuis le 24 février 2022 et l’agression russe contre l’Ukraine - une guerre totale, avec la complicité du Bélarus, ayant entraîné des conséquences incalculables sur le commerce de diamants.  Ces deux pays ne partagent pas les valeurs du processus et sapent le dispositif, s’est indigné le délégué ukrainien.  Il a affirmé que la Russie a notamment violé les décisions administratives sur la présentation de statistiques trimestrielles concernant le processus.  Le représentant s’est également farouchement opposé à la candidature du Bélarus à la vice-présidence du Processus en 2023.  La notion du commerce de diamants utilisé comme source de financements par des groupes rebelles est totalement dépassée: aujourd’hui, on les utilise pour financer la guerre comme le fait la Russie, a tonné le délégué.  Il a regretté que la résolution ne contienne pas d’éléments condamnant l’agression russe contre l’Ukraine, tout en saluant la mention dans le texte du respect de la souveraineté des États. 

Mme KEEN (Australie) a salué les efforts de toutes les parties prenantes qui ont contribué aux résultats du Processus de Kimberley en 2022 et qui continuent à travailler avec diligence pour faire en sorte que ce processus reste adapté à son objectif.  À cette fin, l’Australie se réjouit tout particulièrement de collaborer avec le Comité spécial d’examen et de réforme afin de veiller à ce que le Processus de Kimberley continue à remplir son mandat, qui est de prévenir les conflits alimentés par les diamants et d’éliminer les diamants de la guerre du commerce légitime, a précisé la représentante.  L’efficacité du Processus de Kimberley dépendra de sa capacité à rester pertinent dans l’environnement international dans lequel il opère, et son mandat de prévention des conflits doit rester au cœur de ses délibérations et de ses activités, a-t-elle insisté.  Elle a réitéré l’appel lancé par l’Australie lors des réunions du Processus de Kimberley en 2022 pour que les participants examinent les implications de l’invasion de l’Ukraine par la Russie dans ce contexte.  L’agression ne peut être normalisée et elle ne peut être minimisée, a tranché la déléguée dont la délégation continuera à plaider dans tous les forums pertinents, y compris le Processus de Kimberley, pour que la Russie soit tenue de rendre compte de son invasion illégale et immorale. 

M. REPKIN (Fédération de Russie) a indiqué que le texte initialement proposé était équilibré et objectif, mais qu’un petit groupe de pays a remis en question l’efficacité du Processus de Kimberley et tenté de modifier le libellé de la résolution.  C’est cela que visait l’essentiel des amendements proposés par les pays occidentaux contre des pays comme la Russie qui ont dû faire preuve d’une très grande souplesse en vue de parvenir à un dominateur commun acceptable, a-t-il affirmé.  Pour le délégué, le texte adopté aujourd’hui est en fait un compromis né de la contrainte qui vise à maintenir l’efficacité du Processus de Kimberley et empêcher qu’il soit utilisé à des fins géopolitiques par un petit groupe de pays qui rejette les intérêts de l’ensemble de l’industrie et des pays producteurs de diamants. 

M. DINESH SETIA (Inde) a dit que le Processus de Kimberley a valeur de modèle.  L’Inde est un centre mondial pour la taille des diamants et a rejoint le Processus, a-t-il signalé.  Le représentant a salué notamment la numérisation des certificats délivrés dans le cadre de ce processus.  L’Inde continuera de participer aux efforts pour que le processus demeure inclusif et à la hauteur de l’enjeu, qui est d’éliminer les « diamants de sang », a conclu le délégué.  Il a conclu son intervention en appelant à protéger le commerce légitime de diamants.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), déterminé à défendre l’intégrité du Processus de Kimberley, a regretté la politisation de la situation.  Depuis 20 ans, les pays producteurs ont mis en place des garde-fous pour endiguer le commerce des « diamants de sang » sans pour autant endiguer leur commerce légal.  Les retombées positives du processus doivent être reconnues, y compris la contribution de l’industrie diamantaire au Programme 2030, notamment en matière de réduction de la pauvreté.  Le processus est une initiative tripartite qui a contribué à améliorer la situation des populations vivant de l’industrie diamantaire, a-t-il soutenu. 

Mme MCNAMARA (États-Unis) a salué l’adoption de cette résolution et la collaboration dans le cadre du Processus de Kimberley.  Elle a appelé à parvenir à une définition plus vaste des diamants du sang pour faire évoluer ce processus sans quoi, a-t-elle prévenu, il risque de perdre sa pertinence.  La représentante a ensuite regretté que la résolution ne mentionne pas « le participant au Processus de Kimberley qui continue d’envahir un autre pays ». 

M. SIARHEI MAKAREVICH (Bélarus) a dénoncé les pays qui ont essayé de politiser le projet de résolution en lançant des accusations sans aucune justification.  Ces pays avançaient des prétentions qui n’avaient rien à voir avec le document.  Le Bélarus était, est et continuera d’adopter une attitude positive à l’égard des résolutions de l’Assemblée générale dans le respect mutuel de tous les États Membres, a-t-il affirmé. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil de sécurité adopte une déclaration condamnant les attaques du M23 et enjoignant aux « parties extérieures » de cesser leur appui à ce groupe armé

9298e séance - matin
CS/15248

RDC: le Conseil de sécurité adopte une déclaration condamnant les attaques du M23 et enjoignant aux « parties extérieures » de cesser leur appui à ce groupe armé

Dans le prolongement de sa visite en République démocratique du Congo (RDC), du 9 au 12 mars, le Conseil de sécurité a adopté, ce matin, une déclaration présidentielle dans laquelle il condamne fermement l’augmentation des attaques perpétrées par le Mouvement du 23 mars (M23) au Nord-Kivu et appelle ce groupe armé à cesser les hostilités et à se retirer des zones qu’il occupe.  Préoccupé par la montée des tensions entre la RDC et le Rwanda, le Conseil enjoint également à « toutes les parties extérieures à la RDC » de cesser immédiatement d’appuyer le M23, dans un appel repris par la Représentante spéciale du Secrétaire général en RDC et Cheffe de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO).  Mme Bintou Keita a mis en garde contre un « risque d’escalade régionale ». 

Dans la déclaration présidentielle, proposée initialement par la France, porte-plume sur le dossier de la RDC, le Conseil exige « la fin de toute nouvelle avancée du M23 et son retrait de tous les secteurs occupés », comme convenu dans le processus de Luanda approuvé par l’Union africaine.  Sans faire directement mention du soutien présumé du Rwanda à ce groupe armé visé par des sanctions, il encourage Kinshasa et Kigali à « accorder la priorité aux moyens pacifiques de régler les problèmes qui les opposent » et réaffirme l’importance de renforcer la confiance dans la région, conformément à l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région.

Le Conseil condamne également la recrudescence des attaques menées par les Forces démocratiques alliées (ADF) et la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) contre des civils en Ituri et au Nord-Kivu ainsi que les activités des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  Il réaffirme par ailleurs son appui à l’action régionale menée par la voie du processus de Nairobi conduit par la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et du processus de Luanda visant à rétablir la confiance.  Tout en prenant note de l’intention de l’Angola d’envoyer des forces armées dans l’est de la RDC, après consultation avec le Gouvernement congolais, il salue le déploiement de la force régionale de la CAE et exprime le souhait que ces initiatives se renforcent mutuellement, avec le soutien de la MONUSCO.

Le Conseil souligne par ailleurs l’importance de parvenir à un règlement politique de la crise actuelle, demandant à tous les groupes armés de participer sans conditions au processus de Nairobi pour rechercher des solutions politiques en prévision du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation.  La mise en œuvre de ce programme constitue une priorité du mandat de la MONUSCO, en plus de la protection des civils, a insisté la Cheffe de la MONUSCO depuis 2021.  Au moment où cette mission aide à développer des mécanismes de vérification des ex-combattants, elle a encouragé le Gouvernement congolais à interdire l’amnistie et la réintégration dans l’armée des responsables de graves violations des droits humains.  Elle a par ailleurs estimé que des réformes du secteur de la sécurité sont nécessaires pour permettre la stratégie de sortie de la MONUSCO et la transition vers un nouveau partenariat avec les Nations Unies. 

Après avoir rappelé que demain est le dernier jour accordé par les initiatives régionales pour que le M23 se replie dans les environs du mont Sabinyo, à la frontière avec le Rwanda et l’Ouganda, la Cheffe de la MONUSCO a salué l’engagement des autorités congolaises et de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à maintenir, malgré l’insécurité, la tenue d’élections générales le 20 décembre prochain.  Elle a assuré que la Mission apporte non seulement un soutien logistique au processus électoral mais appuie aussi l’inclusion des femmes et de la société civile. 

En écho aux appels des membres du Conseil en faveur de la tenue d’élections libres, transparentes et inclusives, la RDC a fait état de la poursuite de la procédure d’inscription sur les listes électorales.  Elle s’est cependant concentrée sur sa situation sécuritaire, invitant le Conseil à exercer une forte pression sur le Rwanda, ses troupes et « son M23 » jusqu’à leur retrait total et inconditionnel et à exiger du même Rwanda la réparation des préjudices causés aux populations congolaises. 

La crise dans l’est de la RDC a été déclenchée par le Gouvernement congolais, qui en est « le premier responsable », a répondu le Rwanda, selon lequel Kinshasa « instrumentalise » le conflit pour obtenir un soutien national et museler l’opposition à l’approche des élections.  La RDC « réalimente le conflit et veille à ce que les progrès accomplis soient rapidement anéantis », a-t-il renchéri, accusant ce pays voisin d’encourager les discours de haine et de recruter des groupes armés locaux et des mercenaires pour combattre aux côtés de ses forces armées.  Il s’est ainsi alarmé des agissements des FDLR, « milice génocidaire » sous sanctions de l’ONU, qui a les « coudées franches » en RDC.

Il existe encore une « opportunité pour la paix » entre Kinshasa et Kigali, qui doit être facilitée par les initiatives régionales en cours, a voulu croire le Gabon, au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), tandis que les États-Unis réitéraient leur appel au Rwanda pour qu’il mette fin à son soutien au M23, exhortant le Conseil à examiner comment ce type de soutien va à l’encontre des régimes de sanctions existants.  « Cela ne veut pas dire que le Rwanda est le seul responsable du conflit », ont toutefois nuancé les États-Unis, selon lesquels les actions du M23 et du Rwanda ont aggravé une situation humanitaire et sécuritaire « déjà préoccupante ». 

Lui aussi invité par le Conseil, le Burundi s’est déclaré convaincu que la présence de la force régionale de la CAE dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, aux côtés de la MONUSCO et des FARDC, contribuera considérablement à y rétablir la paix et la sécurité.  Même si un grand nombre de défis entravent encore la mise en œuvre du processus de Luanda, il s’est réjoui de la relance du dialogue intercongolais et du déploiement de militaires angolais en RDC.

Quant à la mise en œuvre, dans ce contexte difficile, du plan de transition conjoint pour une réduction progressive des effectifs de la MONUSCO et son retrait du pays, la Fédération de Russie a plaidé pour une progression « pas à pas », tenant compte de l’évolution de la situation sur le terrain.  La Chine a, elle, indiqué qu’en vue du rapport que doit soumettre en juillet le Secrétaire général sur la reconfiguration du personnel en uniforme de la MONUSCO, elle souhaite entendre l’avis des pays concernés pour que le retrait soit mené « de manière responsable ». 

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO - S/2023/208

Texte de la déclaration du Président du Conseil de sécurité S/PRST/2023/3

Le Conseil de sécurité rappelle la mission qu’il a effectuée à Kinshasa et à Goma en République démocratique du Congo du 9 au 12 mars 2023. 

Le Conseil réaffirme son fort attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo, souligne qu’il importe de respecter pleinement les principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale et encourage le Gouvernement congolais à poursuivre l’action qui lui incombe au premier chef d’assurer la responsabilité de protéger les civils se trouvant sur son territoire ainsi que la sûreté et la sécurité du personnel et des biens des Nations Unies.  Il se félicite des mesures de stabilisation prises par la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), demande une fois de plus aux parties de continuer de s’attacher à coopérer pleinement avec la Mission et prie le Secrétaire général de la doter des moyens d’action dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat.

Le Conseil condamne fermement l’augmentation du nombre d’attaques commises par le Mouvement du 23 mars (M23) au Nord-Kivu ces récents mois et les avancées réalisées par ce dernier sur le terrain, qui concourent à la dégradation de la sécurité et de la stabilité dans la région et exacerbent davantage une situation humanitaire extrême.  Il prend note des indications de mesures initiales en vue d’un désengagement.  Il exige la mise en œuvre pleine et immédiate des engagements pris en faveur de la cessation des hostilités, la fin de toute nouvelle avancée du M23 et son retrait de tous les secteurs occupés, comme convenu dans le processus de Luanda qui a été approuvé par l’Union africaine.  Il enjoint à toutes les parties extérieures à la République démocratique du Congo de cesser immédiatement d’appuyer le M23, qui est visé par des sanctions du Conseil, et de se retirer du pays.

Le Conseil se dit préoccupé par les tensions qui règnent entre la République démocratique du Congo et le Rwanda et lance à cet égard un appel au calme et à un dialogue accru entre les deux pays pour faire avancer une paix durable dans la région.  Il encourage les deux pays à accorder la priorité aux moyens pacifiques de régler les problèmes qui les opposent et réaffirme l’importance de renforcer la confiance dans la région, conformément aux objectifs et aux engagements énoncés dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région.  Il demande aux parties prenantes de veiller à une atmosphère propice à un débat et à un dialogue constructifs.

Le Conseil condamne fermement la recrudescence des attaques menées par les Forces démocratiques alliées et la Coopérative pour le Développement du Congo contre des civils en Ituri et au Nord-Kivu ainsi que les activités des Forces démocratiques de libération du Rwanda.  Il exige de tous les groupes armés que leurs membres se démobilisent immédiatement et définitivement, déposent les armes, renoncent à la violence, préviennent et fassent cesser les violations commises contre des femmes et des enfants et libèrent les enfants enrôlés dans leurs rangs.  Il souligne que les personnes responsables de violations du droit international humanitaire ou de violations des droits humains et d’atteintes à ces droits doivent répondre de leurs actes.

Le Conseil réaffirme son appui à l’action régionale menée par la voie du processus de Nairobi conduit par la Communauté d’Afrique de l’Est et du processus de Luanda visant à rétablir la confiance, à régler les différends par le dialogue et à continuer de mettre à profit les mécanismes et organisations sous-régionaux existants.  Il préconise la mise en œuvre prompte des décisions émanant des processus de Luanda et de Nairobi, ainsi que du communiqué du mini-sommet de Luanda du 23 novembre 2022.  Il prend note de l’intention de l’Angola de déployer des Forces armées angolaises dans l’est de la République démocratique du Congo, à l’issue de consultations avec le Gouvernement congolais.

Le Conseil se félicite des efforts visant à faire avancer l’approche en deux volets issue du processus de Nairobi, dirigé par la Communauté d’Afrique de l’Est.  Il prend note du déploiement de la force régionale de la Communauté dans l’est de la République démocratique du Congo et rend hommage aux efforts faits par les pays fournissant des contingents à cette force régionale.  Il encourage l’appui à cette force, selon que de besoin, afin qu’elle puisse promouvoir la paix et la sécurité régionales.  Il demande des mesures complémentaires pour veiller à ce que ces initiatives se renforcent mutuellement, notamment avec l’appui du Secrétaire général, de la MONUSCO et du bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs. 

Le Conseil souligne l’importance de parvenir à un règlement politique de la crise actuelle.  Il demande instamment à tous les groupes armés congolais de participer sans conditions au processus de Nairobi dirigé par la Communauté d’Afrique de l’Est pour rechercher des solutions politiques en prévision du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, en vue d’un retour à la vie civile, et aux groupes armés étrangers de retourner dans leur pays d’origine.

Le Conseil souligne qu’il est prêt à désigner des personnes ou des entités qui se livrent ou concourent à des actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité de la République démocratique du Congo, notamment qui fournissent à toute personne ou entité désignée un quelconque appui financier, matériel ou technologique ou des biens ou services. 

Le Conseil exprime sa grave préoccupation devant la crise humanitaire et demande aux États Membres et aux organisations internationales et régionales de répondre rapidement aux besoins recensés en la matière dans le Plan d’aide humanitaire au moyen d’une augmentation des contributions et de veiller à ce que tous les engagements pris soient pleinement honorés dans les délais prescrits.

Le Conseil condamne fermement la poursuite de la violence et les atteintes aux droits humains commis par tous les groupes armés, notamment les exécutions sommaires, les violences sexuelles et fondées sur le genre et le recrutement et l’utilisation d’enfants à grande échelle auxquels se livrent tous les groupes armés, et demeure profondément préoccupé par l’intensification de la mésinformation et de la désinformation.  Il demande à tous les acteurs de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, et d’amener les auteurs de violations, notamment de violence sexuelle, à répondre de leurs actes, dans les situations de conflit et d’après-conflit.  Il se félicite de toute nouvelle mesure prise par le Gouvernement congolais en vue de la mise en place d’un processus national de justice transitionnelle.

Le Conseil encourage les autorités congolaises à continuer de mettre en place, avec l’appui de la MONUSCO, des processus pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles en vue de la tenue des élections présidentielle et législatives prévues en 2023, dans le respect de la Constitution et de la loi électorale, dans l’ensemble de la République démocratique du Congo, pour faciliter des élections libres et régulières et garantir la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes, à toutes les étapes de ce processus, tant des électrices que des candidates, et réaffirme le rôle important des jeunes dans les processus électoraux.

Déclarations

Mme BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo et Cheffe de la Mission de lOrganisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a indiqué que, depuis sa dernière intervention devant le Conseil, la situation sécuritaire dans l’est de la RDC s’est à nouveau dégradée.  L’intensification du conflit avec le M23 et l’activisme persistant d’autres groupes armés, notamment les Forces démocratiques alliées (ADF), les milices Zaïre et la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO), continuent d’infliger des souffrances intolérables aux populations civiles et d’aggraver la situation humanitaire.  Elle a fait état de la fuite de centaines de milliers de personnes au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en Ituri.  Constatant à ce propos que cette crise humanitaire reste « l’une des plus négligées au monde », Mme Keita a plaidé pour la mobilisation des ressources nécessaires au Plan de réponse humanitaire 2023 cherchant à mobiliser une somme de 2,25 milliards de dollars. 

La Représentante spéciale a condamné les entraves persistantes à l’accès humanitaire, notamment l’attaque d’un hélicoptère du Service aérien d’aide humanitaire des Nations Unies (UNHAS) au mois de février dernier, laquelle a contraint le Programme alimentaire mondial (PAM) à suspendre ses vols dans les zones de conflit.  Elle a appelé au financement du Plan d’action national de prévention de l’exploitation et des abus sexuels 2023 afin d’assurer la protection des femmes déplacées. 

Face à ces « immenses défis » sécuritaires et humanitaires, la MONUSCO, a-t-elle dit, est restée fermement engagée aux côtés des forces armées congolaises pour accomplir sa principale priorité stratégique qui est la protection des civils.  Dans ce cadre, la Mission a adopté une posture « agile » permettant le redéploiement rapide des troupes en réponse aux alertes précoces et aux flambées de violence, notamment en Ituri, où les groupes armés CODECO, ADF et Zaïre ont profité de la réorientation des forces armées congolaises vers Masisi et Rutshuru pour contrer le M23.  De son côté, a expliqué la Représentante spéciale, la MONUSCO a mis en place des unités de combat statiques à Kambala et Bokuku pour faire face à la montée de l’insécurité dans le territoire de Djugu, faciliter la circulation des personnes déplacées et sécuriser les couloirs humanitaires. 

La Mission a également répondu rapidement aux attaques terroristes à l’engin explosif improvisé des ADF dans le territoire de Beni, en fournissant un soutien au déminage et en assurant l’évacuation sanitaire des blessés parmi les civils.  Au Sud-Kivu, la MONUSCO a fourni une protection aux populations déplacées à Bijombo et Mikenge; l’efficacité de ces opérations dépendant dans une large mesure d’une collaboration étroite avec les forces armées congolaises et étrangères déployées sur le terrain. 

Rappelant d’autre part que 2022 a été l’une des années les plus meurtrières jamais enregistrées pour les soldats de la paix de la MONUSCO, la Cheffe de la Mission a averti que les opérations militaires ne suffiront pas à elles seules à assurer la stabilité dans l’est de la RDC.  Après avoir salué les efforts régionaux en cours, tels que les consultations de Nairobi III, les mini-sommets du processus de Luanda et la tenue successive de réunions au sommet de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, Mme Keita a appelé le Conseil de sécurité à appuyer ces initiatives.  À cet égard, elle a rappelé que demain est le dernier jour accordé par les initiatives régionales pour que le M23 se replie dans les environs du mont Sabinyo, à la frontière avec le Rwanda et l’Ouganda.  Elle a une nouvelle fois enjoint ce groupe armé à se conformer pleinement au communiqué de Luanda, ajoutant que les incidents transfrontaliers entre la RDC et le Rwanda continuent de représenter un risque d’escalade régionale. 

Alors que la RDC prépare ses élections générales prévues pour le 20 décembre prochain, Mme Keita a salué l’engagement des autorités congolaises et de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour leur détermination à tenir les délais malgré l’insécurité.  Dans l’est du pays, a-t-elle noté, les violences, les déplacements de population et le contrôle de zones par le M23 constituent de sérieux obstacles au travail d’enregistrement des électeurs.  Dans l’ouest, les violences intercommunautaires dans la province du Maï-Ndombe font aussi obstacle au processus.  Cela n’empêche toutefois pas la MONUSCO de répondre présent, a souligné sa cheffe, qui a fait état du transport de 126 tonnes de matériel électoral pour la CENI au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en Ituri.  La MONUSCO soutient également l’inclusivité et la bonne conduite du processus électoral via des engagements ciblés avec les futures candidates et la société civile, a-t-elle ajouté, avant de réitérer son appel à toutes les parties prenantes congolaises pour qu’elles travaillent ensemble en vue d’assurer un processus électoral apaisé, transparent, crédible et inclusif dans le respect de la Constitution et de la loi électorale. 

En plus de soutenir la protection des civils, a poursuivi la Représentante spéciale, la MONUSCO appuie aussi les efforts du Gouvernement en matière de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) et de réforme du secteur de la sécurité.  Le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation reste l’initiative phare en la matière et une priorité.  La Mission aide à développer des mécanismes de sélection et de vérification des ex-combattants, a précisé la Représentante spéciale qui a encouragé le Gouvernement congolais à interdire l’amnistie et la réintégration dans l’armée des responsables de graves violations des droits humains.  Elle a par ailleurs estimé qu’un succès dans le secteur de la sécurité est crucial pour permettre la stratégie de sortie de la MONUSCO et la transition vers un nouveau partenariat avec les Nations Unies.  Un tel succès permettra le déploiement nécessaire des forces de sécurité congolaises et des ressources adéquates pour rétablir l’autorité de l’État et assurer la mise en œuvre rapide des programmes de développement ainsi que la promotion de la réconciliation communautaire. 

Aux yeux de la Représentante spéciale, le départ de la MONUSCO du Tanganyika illustre ce qui peut être réalisé avec la volonté nécessaire.  Mais si la Mission a appuyé le déploiement de 174 policiers pour assurer le succès dans le transfert du camp de Bendera à la Police nationale, au mois de février dernier, une présence plus forte des forces de sécurité congolaises est nécessaire pour éviter les lacunes en matière de protection, a soutenu Mme Keita.  Dans ce contexte difficile, la Cheffe de la MONUSCO s’est félicitée de la visite du Conseil de sécurité en RDC du 9 au 13 mars, suivie de celle du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, lesquelles avaient été précédées de la visite du pape à Kinshasa du 31 janvier au 3 février.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a souhaité que les efforts convergent pour garantir l’intégrité et la souveraineté de la RDC.  Depuis plus d’un an, les actions du M23, groupe armé sanctionné par le Conseil de sécurité et par l’Union européenne (UE), déstabilisent l’est du pays, a-t-il rappelé en se référant à ce qui a été agréé par tous, à savoir le respect du cessez-le-feu, la vérification sous supervision angolaise, le cantonnement du M23, le processus de désengagement, le désarmement et la réinsertion, ainsi que le déploiement de forces régionales.  « Tout soutien extérieur au M23 et aux autres groupes armés actifs sur le territoire congolais doit cesser immédiatement. »  Le représentant a salué les efforts de la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), dont le déploiement doit se poursuivre dans les zones libérées par le M23, ainsi que l’envoi prochain d’un contingent angolais pour sécuriser les zones de cantonnement du M23 et protéger le mécanisme ad hoc de vérification.  L’ensemble des acteurs sur le terrain doivent unir leurs efforts pour protéger les civils et les personnes les plus vulnérables, a demandé le délégué. 

En ce qui concerne la MONUSCO et les forces armées congolaises, elles doivent œuvrer conjointement pour protéger les civils, de manière cohérente et coordonnée avec les forces régionales, a plaidé le représentant qui a donc appelé le Secrétaire général et les États Membres à mettre à disposition de la mission les moyens nécessaires à la mise en œuvre de son mandat.  Celle-ci doit notamment pouvoir soutenir le déploiement de la force régionale de la CAE, a-t-il précisé.  En outre, il a plaidé pour que le soutien aux autorités congolaises se poursuive afin que celles-ci puissent assumer leur responsabilité première de protection des civils.  Ce même esprit de partenariat doit prévaloir dans la réponse humanitaire et davantage de sites doivent être mis à disposition par les autorités congolaises pour accueillir les réfugiés et les personnes déplacées, a-t-il encore recommandé en assurant que, pour sa part, la France est mobilisée face à l’urgence humanitaire autour de Goma: elle apportera une aide de 34 millions d’euros pour répondre aux besoins des populations les plus vulnérables.  Il a aussi parlé de l’aide apportée par l’UE: dans le cadre du pont humanitaire aérien de l’UE, trois vols ont permis d’acheminer 100 tonnes de fret, comprenant des abris d’urgence, des kits d’hygiène et des médicaments; et une aide humanitaire de 50 millions d’euros à la RDC est prévue en 2023. 

En dernier lieu, le représentant a appelé à poursuivre les avancées en matière de justice, y compris transitionnelle, et pour préparer les élections prévues en décembre prochain, tout en prenant note des progrès en termes de lutte contre l’impunité.  Il a cité notamment la loi promulguée en décembre dernier pour la protection et la réparation des victimes de violences sexuelles.  Il a assuré du soutien de la France au Gouvernement congolais dans l’organisation d’élections transparentes, libres et inclusives, dans les délais prévus par la Constitution, en saluant les efforts majeurs déployés pour initier l’enregistrement des électeurs et l’appui logistique apporté par la MONUSCO.  La RDC ne doit pas être un butin de guerre, a conclu M. de Rivière, pour lequel un chemin vers la paix est possible si chacun se montre à la hauteur de ses responsabilités. 

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) s’est déclaré préoccupé par la poursuite et l’intensification de la violence, ainsi que par la détérioration de la situation humanitaire, dans l’est de la RDC, condamnant l’avancée du groupe armé illégal M23 dans la province du Nord-Kivu.  La reprise de la violence y a causé d’importantes souffrances humaines et entraîné le déplacement de plus de 800 000 personnes depuis mars 2022, s’est-il alarmé.  Tout soutien aux groupes armés doit cesser,3 »y compris celui externe fourni au M23 », a-t-il lancé en appelant toutes les parties à exercer toute l’influence dont elles disposent en ce sens.  Le délégué a aussi encouragé les membres du Conseil à user de leur influence pour inciter les pays de la région des Grands Lacs à prendre les mesures nécessaires pour désamorcer la situation.  La violence doit cesser de tous côtés pour que le dialogue régional ait une chance d’aboutir, a-t-il insisté, affirmant que c’est le seul moyen de renforcer la confiance et d’apporter une solution durable à la crise actuelle.  Il a conclu en souhaitant que les forces régionales et bilatérales déployées en RDC s’engagent de manière substantielle les unes avec les autres et avec la MONUSCO sur la déconfliction des opérations afin d’assurer la protection des civils, la sûreté et la sécurité des soldats de la paix ainsi que la mise en œuvre efficace du mandat de la MONUSCO.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a tout d’abord remercié la France et le Gabon pour leur leadership dans l’organisation de la mission effectuée par le Conseil à Kinshasa et Goma, entre le 9 et le 12 mars.  Cette visite reflète l’engagement du Conseil à poursuivre ses efforts pour surmonter les défis que présente la situation en RDC, a-t-il dit, y voyant également une occasion précieuse pour voir de manière objective et transparente les besoins de ce pays.  Le représentant a par ailleurs salué le travail réalisé par la Commission électorale nationale indépendante dans la phase d’enregistrement des électeurs pour les élections de cette année.  Il s’est dit encouragé par les efforts visant à augmenter la participation des femmes, avant d’appeler tous les acteurs impliqués à œuvrer pour des élections libres, transparentes et inclusives, seul mécanisme susceptible de permettre la transition vers un processus de paix durable.  Il a ensuite condamné les attaques perpétrées contre la population civile par différents groupes armés, notamment la CODECO et le M23, avant de rendre hommage au travail de suivi et d’information accompli par la MONUSCO dans les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.  Il est essentiel, selon lui, que la Mission dispose des ressources nécessaires pour garantir l’accès humanitaire et d’une assistance pour la protection des civils.  Pour le délégué, il importe aussi que le Conseil ne reste pas indifférent au niveau élevé de violations et d’abus des droits humains en RDC.  De même, a-t-il ajouté, le Conseil doit tenir compte du fait qu’il existe des facteurs originaires du Rwanda qui pourraient exacerber les tensions.  Il a souhaité à cet égard que tout différend existant soit résolu par le dialogue et les mécanismes de règlement des conflits établis.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a estimé que la visite du Conseil en RDC a permis aux Émirats arabes unis de renforcer leur coopération avec ce pays et de voir le travail réalisé par les Casques bleus de la MONUSCO dans un contexte complexe et périlleux.  Il a évoqué notamment la menace que représentent le M23 et d’autres groupes armés, pour la RDC et la région au sens large.  Il a condamné les violations du cessez-le-feu par le M23, en arguant que la priorité du Conseil devrait être la sécurité des civils, et en particulier celle des femmes et des enfants.  Le représentant a invité à miser sur le dialogue régional pour concrétiser les aspirations de paix et de sécurité du peuple congolais, en saluant les processus de Luanda et Nairobi dans ce contexte.  Il est essentiel de désamorcer les tensions, a-t-il fait valoir, en appelant à la bonne mise en œuvre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba par ses signataires. 

Le délégué a aussi plaidé pour la protection des femmes, notamment contre la violence sexuelle et sexiste, et pour que soit permise leur pleine participation aux efforts de paix.  La MONUSCO devrait en outre faire face aux discours de haine et à la désinformation, a demandé le représentant en exhortant le Conseil à appuyer ces efforts.  À l’approche des élections, il a demandé que les groupes armés cessent les hostilités et la violence, en appelant à soutenir les politiques de désarmement, démobilisation et réinsertion.  Revenant sur la situation humanitaire « épouvantable » dans l’est du pays, le délégué a dénoncé le non-respect du droit international humanitaire par les groupes armés, ce qui entrave l’acheminement de l’aide humanitaire et la sécurité du personnel humanitaire.  La paix en RDC dépend d’une plus grande coopération entre toutes les parties prenantes, a-t-il conclu. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a salué l’initiative et l’engagement des partenaires régionaux, en particulier ceux qui participent au processus de Nairobi dirigé par la CAE et au processus de Luanda, et reconnu les progrès modestes accomplis à ce jour dans la mise en œuvre des engagements convenus dans les communiqués précédents.  Aussi a-t-il appelé toutes les parties à agir rapidement pour respecter pleinement ces engagements.  Le délégué a réitéré l’appel de Washington au Rwanda pour qu’il mette fin à son soutien au M23, exhortant les membres du Conseil à examiner comment ce type de soutien va à l’encontre des régimes de sanctions existants.  « Cela ne veut pas dire que le Rwanda est le seul responsable du conflit.  Au contraire, les actions du M23 et du Rwanda ont aggravé une situation humanitaire et sécuritaire déjà préoccupante », a nuancé le représentant.  Les États-Unis, a-t-il poursuivi, s’inquiètent depuis longtemps de la collaboration des FARDC avec les groupes armés de l’est, en particulier les FDLR.  Comme nous l’avons déjà dit à maintes reprises, nous réitérons notre appel au Gouvernement de la RDC pour qu’il professionnalise entièrement ses forces de sécurité et mette immédiatement fin à sa coopération avec les groupes armés. 

Il est devenu très clair que le niveau de désinformation et de rhétorique haineuse à l’égard du Rwanda, des groupes minoritaires et de la MONUSCO met de plus en plus en péril les civils et les Casques bleus, s’est alarmé le représentant.  Il s’est également dit profondément troublé par le nombre croissant d’attaques menées contre des civils par l’État islamique en RDC, connu sous le nom de Forces démocratiques alliées, et la CODECO.  Dans cet environnement difficile, la MONUSCO s’est efforcée de remplir son mandat, y compris en fournissant un soutien logistique limité à la commission électorale de la RDC, comme cela a été officiellement demandé.  « J’ai été encouragé d’apprendre que la CENI a travaillé en étroite coordination avec la MONUSCO.  Ce partenariat contribuera à la mise en place d’un processus d’inscription des électeurs complet et opportun en vue des élections qui se tiendront plus tard cette année.  Le Gouvernement de la RDC devrait garantir des élections libres et équitables dans le respect des délais constitutionnels », a encore demandé le représentant américain. 

S’agissant du plan de transition de la mission, fondé sur des critères de référence, il a rappelé aux autorités de la RDC qu’il leur incombe de travailler en étroite collaboration avec l’ONU pour remplir ces critères afin que la MONUSCO puisse se retirer en toute sécurité et de manière responsable au moment opportun.  Il a saisi l’occasion pour rappeler au Gouvernement de la RDC qu’il a été demandé un rapport confidentiel sur les efforts de gestion des armes et des munitions à la suite de l’assouplissement des sanctions par le Conseil en décembre de l’année dernière.  « Ce rapport fournira des informations précieuses sur les capacités du Gouvernement et permettra à la communauté internationale de contribuer à la prévention du trafic et du détournement des armes légères », a précisé M. Wood en conclusion. 

Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) s’est dit préoccupé par la dégradation de la situation sécuritaire en RDC provoquée par la récurrence des attaques de groupes armés.  Condamnant cette « spirale de massacres », dont sont victimes un grand nombre de femmes et d’enfants, il a particulièrement dénoncé les agissements de groupes rebelles tels que le M23, les ADF et la CODECO qui instaurent un climat de terreur dans l’est du pays.  Le représentant a constaté à cet égard que l’occupation d’une partie du territoire de la RDC par le M23 et le regain des violences dans l’est du pays ont entraîné une mobilisation des ressources congolaises, cristallisant notamment les efforts des Forces armées de la RDC.  Les groupes armés ont multiplié les attaques contre les populations civiles et intensifié leurs pillages en utilisant des engins explosifs de plus en plus sophistiqués, a-t-il relevé, avant d’appeler au retrait de tous les groupes armés, à l’adhésion des groupes locaux au processus de Nairobi et au Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation ainsi qu’à la cessation immédiate de tout soutien extérieur.  Il a également encouragé la RDC à poursuivre sa réforme du secteur de la sécurité, ajoutant que l’appui de la MONUSCO est essentiel, en particulier pour assurer une meilleure protection des civils.  Le délégué a, en outre, insisté sur la nécessité de doter la Mission des moyens nécessaires et de faire en sorte que son mandat soit mieux appréhendé par la RDC et les pays contributeurs en vue d’une meilleure coordination sur le terrain.  Après avoir dénoncé les campagnes de désinformation menées contre la MONUSCO et la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est, il a évoqué la transition de la mission onusienne, se prononçant à nouveau pour un retrait progressif et ordonné, en concertation avec autorités de la RDC. 

Le représentant a ensuite estimé que, sur le plan régional, les processus de Nairobi et de Luanda méritent d’être appuyés par toute la communauté internationale.  Saluant la récente visite dans le pays du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, à la suite de celle effectuée par les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, il a redit sa conviction que la solution politique doit primer et s’appuyer sur les processus régionaux.  À ce sujet, il a jugé qu’il existe encore une « opportunité pour la paix » entre la RDC et le Rwanda, et qu’elle peut être facilitée par les initiatives régionales en cours.  Les partenaires internationaux doivent, de leur côté, continuer à soutenir les efforts de rétablissement de la paix en fournissant une expertise technique et matérielle au pays, a-t-il encore plaidé.  Le délégué a d’autre part salué la poursuite de la procédure d’inscription sur les listes électorales, constatant avec satisfaction que le taux élevé d’inscrits démontre l’intérêt suscité par le processus électoral.  Dans ce contexte, il a invité les autorités à tout mettre en œuvre pour organiser des élections libres, transparentes et inclusives.  Pour finir, il a dénoncé avec force le pillage des ressources naturelles de la RDC, y voyant la principale source de déstabilisation et la cause des exactions.  Soulignant l’importance de sanctionner tous les individus et toutes les entités impliquées dans ces trafics qui alimentent les groupes armés, il a réitéré le soutien des A3 à la MONUSCO et leur attachement à la souveraineté et à l’intégrité territoriale du pays. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé qu’il était grand temps de rediscuter de la situation en RDC au Conseil, saluant d’ailleurs la récente visite sur place.  Le conflit sape les moyens de subsistance et coûte la vie à trop de personne, a-t-il déploré en se désolant qu’il fasse aussi main basse sur les ressources naturelles du pays.  Il a accusé les groupes armés, en particulier le M23, avant de les appeler à déposer les armes.  Tout soutien externe dont ils bénéficient doit cesser, a aussi martelé le représentant.  Passant à la visite du Conseil, il a estimé qu’elle avait permis de comprendre comment travaille la MONUSCO et de témoigner de son professionnalisme.  Le représentant a ensuite exhorté les parties prenantes à mettre un terme aux campagnes de désinformation qui mettent en péril le travail des Casques bleus.  La crise dans l’est du pays ne saurait être abordée par le Conseil comme une « situation routinière », a-t-il recommandé en prenant note de l’arrivée de nouveaux contingents des forces régionales de la CAE et en apportant son soutien aux processus de Nairobi et de Luanda.  Appelant à ne pas minimiser le regain de tension, il a exhorté le Rwanda et la RDC à faire preuve de retenue et à reprendre le dialogue, grâce notamment au processus de Luanda.  Le représentant a conclu en espérant que les élections en RDC auront lieu dans de bonnes conditions et dans les temps impartis et qu’elles paveront la voie vers un avenir du pays plus stable et plus prospère. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a estimé que la réalisation d’une paix et d’une stabilité durables dans la partie orientale de la République démocratique du Congo (RDC) est essentielle pour la prospérité de la région des Grands Lacs et l’ensemble du continent africain.  La récente visite du Conseil de sécurité en RDC a été l’occasion de réaffirmer cette conviction, a-t-il dit, avant de souligner le rôle vital que joue la MONUSCO pour atténuer les souffrances des populations et faciliter le processus de stabilisation.  L’une des conditions de cette stabilisation est la cessation des hostilités et de toute nouvelle avancée du M23, ainsi que son retrait des zones occupées, a souligné le représentant, pour qui il importe à présent que les forces de la MONUSCO et de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) se coordonnent et surveillent la mise en œuvre des accords régionaux.  Il a d’autre part plaidé pour une accélération de la réforme du secteur de la sécurité sous l’égide de l’État, non sans rappeler que les forces de sécurité nationales ont la responsabilité première de protéger les civils et d’assurer l’ordre social, et ce, indépendamment de l’évolution future de la MONUSCO.  Le délégué a indiqué à cet égard que l’Agence japonaise de coopération internationale travaille aux côtés de la police nationale congolaise pour l’aider à établir des systèmes de police communautaire crédibles.  Enfin, après avoir appelé au renforcement de la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles du pays, il a encouragé les autorités de la RDC à poursuivre le processus électoral en cours et la MONUSCO à leur fournir le soutien nécessaire.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) s’est félicité de la récente visite du Conseil de sécurité en RDC, qui a selon lui permis de fixer les priorités dans l’est du pays.  Il a également salué la déclaration présidentielle du Conseil à ce sujet, y voyant un pas dans la bonne direction.  Le représentant s’est ensuite associé à l’appel du Secrétaire général en faveur d’un arrêt des violences et à sa condamnation des groupes armés en exhortant toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international.  Il a également enjoint tous les acteurs impliqués dans ce conflit à ne plus aider les groupes armés, avant d’insister sur le respect de l’intégrité territoriale de la RDC.  Alors que les groupes armés font main basse sur les ressources naturelles de la RDC, il est urgent, à ses yeux, d’aborder cette cause profonde du conflit, singulièrement dans l’est du pays.  Pour le délégué, la réforme du secteur de la sécurité, la reconstruction et la protection des civils sont des préalables à une amélioration de la situation sur le terrain.  Il s’est par ailleurs réjoui des initiatives prises au niveau régional, appelant à une meilleure coordination entre les différents acteurs de région et à une participation accrue des femmes à ces processus.  Il a ensuite condamné les violences visant les femmes et a exhorté le Gouvernement congolais à mettre en place un fonds de réparations pour les victimes de violences sexuelles.  Il s’est aussi prononcé pour une réouverture des ponts aériens pour venir en aide aux populations, notamment à celles qui fuient depuis mars 2022 les violences du M23 autour de Goma.  Enfin, après avoir salué l’action de la MONUSCO et appelé les autorités à tenir compte des référentiels envisagés dans le cadre de la transition de la Mission, il a jugé essentiel que des élections puissent se tenir en RDC à la fin de cette année.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a souligné l’importance de la récente visite du Conseil en RDC, en particulier dans l’est du pays, dans la capitale de la province du Nord-Kivu.  Assurant que la Russie suit de près l’évolution de la situation dans les régions orientales de la RDC, elle a dénoncé les offensives du groupe M23, qui ont accentué la détérioration de la situation humanitaire et conduit à une augmentation du nombre de déplacés et de réfugiés, ainsi que des violations des droits humains et des souffrances quotidiennes subies par la population civile.  La représentante a noté avec préoccupation que les forces gouvernementales, la MONUSCO et les forces régionales de la CAE sont forcées de se concentrer sur la lutte contre le M23, alors que d’autres groupes armés en profitent pour renforcer leurs positions dans l’est du pays.  Préoccupée en outre par la menace d’une escalade des tensions entre la RDC et le Rwanda, elle a estimé que la tâche prioritaire aujourd’hui est de parvenir à une cessation des hostilités et d’engager un dialogue inclusif entre toutes les parties au conflit.  À cet égard, la Russie compte sur l’efficacité des nouvelles mesures prises par les pays voisins de la RDC dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi, et la représentante a salué l’engagement du Gouvernement congolais dans les négociations avec les groupes armés dans le cadre du volet politique du processus de Nairobi.  Il est important d’articuler et de coordonner efficacement les processus de Nairobi et de Luanda afin de créer les conditions d’un dialogue intercongolais, a-t-elle fait valoir, et de restaurer les relations entre Kinshasa et Kigali.  Seules des solutions politiques permettront de parvenir à une cessation complète des hostilités et à la création des conditions réelles d’une stabilisation durable, a-t-elle souligné en encourageant Kinshasa à redoubler d’efforts pour réformer le secteur de la sécurité du pays. 

La déléguée a réaffirmé le soutien de principe de la Russie aux efforts de la MONUSCO avant de condamner toutes les attaques et provocations contre les Casques bleus et le personnel civil de l’ONU.  Elle a espéré que toutes les questions d’appui aux ressources de la Mission trouveront une solution rapide et de qualité avant d’encourager le renforcement de la coordination entre les forces armées congolaises et la Mission, ainsi qu’avec les autres structures régionales et nationales impliquées dans le règlement du conflit, afin de mieux organiser le travail de protection de la population congolaise.  En ce qui concerne la mise en œuvre du « plan de transition » conjoint pour une réduction progressive des effectifs de la Mission et son retrait du pays, jusqu’en 2024, la déléguée a estimé qu’il faut, en premier lieu, tenir compte de l’évolution de la situation « sur le terrain », pour agir pas à pas et de manière responsable. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a regretté que les progrès économiques en RDC soient pris en otage par la détérioration de la situation sécuritaire, à l’origine d’une crise humanitaire extrêmement grave dans l’est du pays.  Il a condamné les actions du M23, principal responsable de la récente spirale de violences, exhortant ses forces à se retirer du territoire et à cesser de piller les ressources minérales qui doivent bénéficier aux Congolais eux-mêmes.  Lors de la visite dans le pays, a indiqué le délégué, il a été frappant de constater l’écart grandissant entre les attentes des autorités congolaises et du public vis-à-vis de la MONUSCO et le mandat réel de celle-ci.  Les discours de haine doivent cesser, car ils compromettent la capacité de la MONUSCO à s’acquitter pleinement de son mandat, et en particulier de sa mission principale, qui est de protéger les civils.  Dans ce contexte, nous attendons avec intérêt le déploiement complet de la force de la Communauté d’Afrique de l’Est, de même que la réévaluation rapide du plan de transition de la MONUSCO, en étroite coopération avec les autorités congolaises, a ajouté le représentant.

M. DAI BING (Chine) s’est félicité que le Gouvernement de la RDC s’emploie à réformer le secteur de la sécurité, lutte contre les groupes armés et prépare des élections.  Il a cependant constaté que la dégradation de la situation sécuritaire exacerbe la crise humanitaire dans le pays.  Remerciant les autorités congolaises d’avoir accueilli une mission du Conseil et réaffirmant son appui à la publication d’une déclaration présidentielle, le représentant a estimé que la cessation des violences constitue une priorité absolue.  Il a noté à cet égard qu’avec l’aide de l’UA et de pays de la région, le M23 a dit accepter un cessez-le-feu et vouloir entamer un dialogue début mars.  À cette aune, le délégué a exhorté le M23 et les autres groupes armés à respecter leurs engagements et à se retirer des zones qu’ils occupent.  De même, alors que le Gouvernement congolais a annoncé la mise en œuvre d’un programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation dans trois provinces, il a souhaité que les groupes armés participent à ce processus. 

Au niveau régional, le représentant s’est réjoui des efforts de médiation déployés par le Kenya, l’Angola et le Burundi pour atténuer les tensions en RDC et a émis l’espoir que les processus de Nairobi et Luanda continueront de jouer un rôle de premier plan.  Rappelant que cette année marque le dixième anniversaire de la signature de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région des Grands Lacs, il a invité les pays de cette zone à revitaliser ce processus pour façonner un avenir commun.  Il a également encouragé le Bureau de l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs à appuyer les efforts de médiation et les bons offices de l’UA et de la CAE, avant d’appeler à la fourniture d’une assistance ciblée à la MONUSCO.  Dans la situation actuelle, a-t-il dit, la Mission devrait s’acquitter de son mandat en protégeant les civils, en appuyant l’édification d’institutions étatiques et en soutenant le processus de DDR dans le pays.  Il a ajouté qu’en vue du rapport que doit soumettre en juillet le Secrétaire général sur la reconfiguration du personnel en tenue de la MONUSCO, la Chine souhaite entendre l’avis des pays concernés pour mener de manière responsable le retrait de la Mission.  Il a enfin invité la communauté internationale à augmenter son aide humanitaire à la RDC et à aider le pays à renforcer ses capacités pour qu’il se développe de manière indépendante et en fonction de ses propres besoins. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) s’est alarmé de la détérioration de la situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains dans l’est de la RDC.  Elle a noté que, depuis novembre 2021, le regain d’offensive du M23 a provoqué le déplacement de centaines de milliers de personnes, intensifiant la crise humanitaire.  Il s’est également déclaré préoccupé par le recrutement massif d’enfants par divers groupes armés, avant d’appeler toutes les parties à respecter le droit international et à garantir un accès humanitaire sans entrave aux populations.  La responsabilité première de protection des civils appartient au Gouvernement congolais, a-t-il souligné, engageant la RDC à poursuivre sa collaboration avec la MONUSCO.  Convaincu que seule une solution politique coordonnée peut contribuer à la consolidation de la paix, le représentant a salué les efforts diplomatiques aux niveaux national et régional pour traiter les causes profondes du conflit, notamment les processus de Nairobi et de Luanda.  Selon lui, toute action militaire, y compris le déploiement de la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est, doit s’inscrire dans le cadre des processus politiques en cours et amener les groupes armés à déposer les armes. 

Après avoir invité le Gouvernement congolais à rendre opérationnel le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation, le représentant a appelé le Rwanda à cesser tout soutien au M23 et a souhaité que l’appui apporté aux groupes armés par certains éléments des Forces armées de la RDC s’arrête également.  Face au nombre élevé de violences sexuelles liées au conflit, à la montée des violences intercommunautaires et à la propagation de discours de haine, notamment contre les populations rwandophones, il a jugé essentiel que le Gouvernement assure une reddition des comptes et rétablisse la confiance entre les communautés et avec l’État.  Enfin, à l’approche des élections, il a encouragé les autorités à protéger l’espace civique et à garantir des processus démocratiques inclusifs, y compris avec l’opposition.

M. GEORGES NZONGOLA-NTALAJA (République démocratique du Congo) a expliqué que la situation politique de son pays est dominée par la poursuite des opérations d’enrôlement en vue des échéances électorales de 2023 et par les efforts régionaux et internationaux visant à inverser la spirale d’insécurité dans l’est du pays.  Alors qu’au niveau régional, les efforts politiques, sécuritaires et diplomatiques se cristallisent autour des processus de Nairobi et de Luanda, le représentant a expliqué que Nairobi IV, qui devrait débuter en mai, servira à aider les groupes armés ayant répondu à l’appel à déposer les armes et à entamer leur démobilisation et leur réinsertion.  Passant à la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, il a affirmé qu’elle demeure clairement prédominée par l’activisme des terroristes des Forces démocratiques alliées affiliées à Daech, de la CODECO et du M23, « proxy » du Rwanda.  Il a soutenu que le M23 se confond facilement avec l’armée rwandaise, en rappelant le nombre de cessez-le feu déjà violés.  En appelant à la vigilance le Conseil, le délégué a souhaité que les pressions bilatérales et multilatérales ne s’arrêtent qu’à la reddition complète de ce mouvement et au retrait total des troupes rwandaises de la Force de défense rwandaise (FDR) du territoire congolais. 

Face à la situation humanitaire « insoutenable » des personnes déplacées, le délégué a demandé aux partenaires de financer le Plan d’aide humanitaire d’urgence 2023/2024 lancé à Kinshasa.  Si la MONUSCO demeure un partenaire important de la RDC, il a toutefois jugé nécessaire de revisiter le plan de transition et de l’ajuster, en demandant au Conseil de prendre réellement en compte les préoccupations de son gouvernement contenues dans le mémorandum du 10 mars 2023.  En outre, la RDC suggère une mutation de la MONUSCO pour qu’elle devienne une force de consolidation de la paix, ou, « à la limite », une force d’appui aux forces armées congolaises. 

Tenant à clarifier deux points sur lesquels son pays est souvent « attaqué sans preuves », le représentant est revenu sur les prétendus discours de haine ethnique contre les personnes d’expression « rwandophone ».  Les positions du Président de la RDC, des autorités congolaises, de la société civile, incluant les grandes églises chrétiennes sont claires et sans ambiguïté, a-t-il affirmé: personne ne tolère ces discours, qui sont régulièrement dénoncés.  Les démagogues qui apparaissent de temps à autre sur les réseaux sociaux, représentent une minorité de la population et si les violences intercommunales se manifestent parfois sur fond de querelles liées aux terres ou à l’accès aux cours d’eau, la RDC n’a pas connu de violences meurtrières motivées par la xénophobie et la haine ethnique depuis 1994, a soutenu le délégué congolais.  Il a au contraire reproché au régime rwandais d’avoir maintenu les FDLR « comme menace militaire » pour envahir la RDC et piller ses ressources comme le coltan, l’or et d’autres ressources minières, animales et forestières. 

Le délégué a donc demandé au Conseil de sécurité de prendre en compte les recommandations du Mémorandum du 10 mars 2023 que lui a adressé le Gouvernement de la RDC et d’œuvrer en faveur de la transition de la MONUSCO vers une véritable force de consolidation de la paix.  Il lui a en outre demandé d’appuyer les processus de Luanda et de Nairobi, de renforcer les sanctions contre les terroristes des groupes ADF/MTM, CODECO, M23 et leurs animateurs, et d’exiger d’eux qu’ils déposent les armes pour rejoindre le P-DDRCS.  En outre, le Conseil devrait, selon le représentant, continuer à exercer une forte pression sur le Rwanda, ses troupes (RDF) et « son M23 » jusqu’ à leur retrait total et inconditionnel du territoire congolais.  La RDC demande en outre aux membres du Conseil « qui continuent à hésiter » de condamner sans ambiguïté le Rwanda et d’exiger la réparation des préjudices causés aux populations congolaises.  En dernier lieu, le représentant a demandé aux États qui appuient militairement le Rwanda de cesser cette coopération, étant donné que ces armes servent à renforcer le M23.  S’adressant aussi aux multinationales qui continuent à coopérer avec le Rwanda, il leur a demandé d’arrêter et de passer « par la grande porte » ,qu’est la RDC. 

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a affirmé que la crise dans l’est de la République démocratique du Congo a été déclenchée par le Gouvernement congolais et « qu’il en est le premier responsable ».  Malheureusement, la situation continue de se détériorer en raison du manque de volonté politique et de l’inaction des dirigeants congolais, s’est-il lamenté.  Pour lui, il est devenu évident que même si ce conflit continue d’infliger de terribles souffrances aux populations civiles, le Gouvernement congolais l’instrumentalise pour obtenir un soutien national et museler l’opposition à l’approche des élections. 

Le représentant a ensuite tenu à brosser un tableau des principales préoccupations du Rwanda concernant la situation en RDC.  Tout d’abord, a-t-il argué, le Gouvernement congolais a refusé d’adhérer à « tous les plans de paix issus des processus régionaux ».  En lieu et place, il alimente le conflit en encourageant les discours de haine et en recrutant des groupes armés locaux et des mercenaires pour combattre aux côtés des FARDC.  Ce faisant, « la RDC réalimente le conflit et veille à ce que les progrès accomplis soient rapidement anéantis », a soutenu M. Gatete.  Ainsi, là où le retrait unilatéral du M23 a été effectué en l’absence des troupes de la force régionale de la CAE, les FARDC et les milices alliées ont violé à plusieurs reprises les termes de la feuille de route de Luanda.  Elles ont réoccupé les positions libérées par le M23, déclenchant une reprise prévisible des hostilités aux dépens des populations locales.  « Pour couronner le tout, le Gouvernement de la RDC a également encouragé l’hostilité envers la force régionale de la CAE et la MONUSCO elle-même », a-t-il encore accusé.  Que veut réellement la RDC? s’est demandé le représentant.  De toute évidence selon lui, ni la paix ni la sécurité pour son peuple et la région. 

Le Rwanda est préoccupé par les agissements des FDLR, la « milice génocidaire » sous sanctions de l’ONU, qui a les « coudées franches » en RDC.  Bien que la MONUSCO et le Conseil de sécurité sachent parfaitement que le Gouvernement congolais fournit en armes les FDLR et leur permet de combattre aux côtés des FARDC, aucune mesure n’a été prise à cet égard.  Résultat de l’alliance entre les FARDC et les FDLR, l’intégrité territoriale du Rwanda a été violée à de multiples reprises au fil des ans.  « Comme tous les États, le Rwanda se réserve le droit de défendre ses frontières et ses citoyens contre les attaques transfrontalières », a mis en garde le délégué.  Il a enfin réitéré l’inquiétude de son gouvernement quant au fait que les communautés tutsies congolaises sont toujours prises pour cible, sachant fort bien que « la persécution et la discrimination durables d’un peuple sont des signes avant-coureurs de crimes atroces et de génocide ». 

Compte tenu de tous les rapports exprimant des inquiétudes quant à l’escalade des discours de haine, quelle sera la voie à suivre pour le Conseil de sécurité?  Une enquête va-t-elle être menée? s’est demandé le délégué, pour qui les rapports ne doivent pas être une fin en soi, mais un appel à prendre des mesures appropriées.  Le représentant a, en conclusion, vigoureusement rejeté la campagne menée actuellement par la RDC pour présenter le Rwanda comme la cause de son instabilité.  « Le fait que la RDC sape les efforts de paix, refuse de rapatrier les réfugiés congolais, engage des mercenaires, recrute des groupes armés et s’allie aux FDLR montre qu’elle exploite cette crise pour obtenir des gains politiques à courte vue, au détriment des populations civiles et des relations diplomatiques. » 

M. ZÉPHYRIN MANIRATANGA (Burundi) a déclaré que, depuis plus de deux décennies et demie, les règles élémentaires du droit international, du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme sont peu observées dans l’est de la RDC à la suite d’une situation sécuritaire précaire consécutive à la présence de groupes armés terroristes et de forces négatives.  Malgré le déploiement de plusieurs missions en RDC, c’est une évidence que les préoccupations sécuritaires subsistent, a-t-il estimé.  Toutefois, à son avis, la présence de la force régionale de la CAE dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu aux côtés des forces de la MONUSCO et des FARDC contribuera considérablement à rétablir la paix et la sécurité.  Pour lui, même s’il y a encore beaucoup de défis qui empêchent d’arrêter les hostilités et les attaques du M23 et qui entravent la mise en œuvre effective des décisions de Luanda, quelques résultats positifs sont à signaler.  Il a notamment mentionné le tour de dialogue intercongolais initié dans le cadre de la médiation de la CAE, qui devrait se poursuivre avec le soutien de la communauté internationale, ainsi que l’annonce du déploiement de 500 militaires angolais en RDC. 

Pour sa délégation, il est maintenant urgent de réactiver « avec fermeté » toutes les décisions antérieures prises lors des sommets de Nairobi, Luanda et Bujumbura, « mais qui n’ont pas été respectées », et de veiller à la bonne collaboration des forces régionales, de la MONUSCO, des Forces Armées de la RDC avec le nouveau contingent angolais, « pour éviter plusieurs pôles de commandement ».  Le représentant a également souligné l’impérieuse nécessité pour l’ONU d’appuyer financièrement et logistiquement la force régionale de la CAE et de renforcer le mécanisme de coordination institué par les réunions de Bujumbura entre les chefs d’état-major des armées de la force régionale auxquelles participe la MONUSCO, ainsi que les systèmes de communication et d’information entre toutes les forces se trouvant dans l’est de la RDC.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil de sécurité entend le rapport de visite de sa mission sur le terrain qui a conclu à un besoin de soutien régional et international coordonné

9297e séance - matin
CS/15247

RDC: le Conseil de sécurité entend le rapport de visite de sa mission sur le terrain qui a conclu à un besoin de soutien régional et international coordonné

Avant de tenir sa séance sur la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), le Conseil a entendu des exposés des représentants de la France et du Gabon, qui ont conduit, avec le Président du Conseil (Mozambique), une mission de visite dans ce pays du 9 au 12 mars.  Une mission qui a permis de prendre la mesure de la situation sur le terrain et de porter le message du Conseil, que le délégué gabonais a résumé ainsi: la RDC n’est pas seule; sa souveraineté, son indépendance, son unité et son intégrité doivent être respectées; et les partenaires internationaux, les Nations Unies et les organisations régionales doivent agir ensemble au soutien et à la stabilisation de la région des Grands Lacs. 

Ce déplacement sur le terrain a été l’occasion de réaffirmer le ferme attachement du Conseil à la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité de la RDC, a déclaré le représentant de la France, M. Nicolas de Rivière.  À Kinshasa, a-t-il dit, les échanges avec le Président de la République et les membres de son gouvernement, ainsi qu’avec le Président de l’Assemblée nationale et le Vice-Président du Sénat, ont été riches d’enseignements.  Alors que la situation dans l’est du pays se dégrade, avec une multiplication des attaques des groupes armés, les échanges ont porté en particulier sur les attaques du M23, qui aggravent les conditions de sécurité et la situation humanitaire, en portant également atteinte à la stabilité de la région. 

Le Conseil de sécurité a émis des demandes claires, a dit le délégué français: la cessation immédiate des hostilités; que le M23 arrête toute nouvelle avancée et se retire de toutes les zones occupées, conformément au processus de Luanda; que les groupes armés congolais participent au processus de Nairobi en vue de leur démobilisation; et que les groupes armés étrangers retournent dans leurs pays d’origine. 

Notre visite a aussi permis de rendre hommage au personnel de la MONUSCO et de rendre hommage aux Casques bleus qui ont perdu la vie, a dit le représentant en appelant à renforcer les moyens de la Mission « qui accomplit un travail essentiel ».  Le dialogue doit se poursuivre entre les autorités congolaises et la Mission pour faire avancer la transition, a-t-il recommandé.  Il a redit le soutien du Conseil à Mme Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général, qui est à la tête de la MONUSCO, et à l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, M. Huang Xia.    

La mission du Conseil a également rencontré, à Kinshasa, des représentants de la société civile et des différentes formations politiques, sachant que le pays s’avance vers des élections prévues à la fin de l’année.  Le Conseil a encouragé tous les acteurs politiques à continuer d’œuvrer en faveur de processus pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles pour la tenue de ces élections dans tout le pays, conformément à la Constitution et à la loi électorale. 

Le représentant du Gabon est, lui, revenu sur les entretiens que la délégation du Conseil a eus à Goma avec le Gouverneur militaire du Nord-Kivu, le Ministre de la défense et le Ministre des affaires sociales et de l’action humanitaire, et qui ont porté sur les points suivants: la situation gravement détériorée dans la région du fait de la multiplication des attaques de groupes armés et terroristes, la mise en œuvre du mandat de la MONUSCSO, la situation humanitaire et encore les causes profondes du conflit.  La situation régionale a été au cœur des discussions avec les représentants des processus de Nairobi et de Luanda, a ajouté M. Michel Xavier Biang, ainsi qu’avec les chefs des mécanismes de vérification.  Des processus qui doivent aboutir à des résultats concrets en bonne coordination avec l’action des Nations Unies.  Il a cité en particulier les synergies entre la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et la MONUSCO. 

Le délégué du Gabon a aussi relaté la visite de la mission du Conseil au camp de déplacés de Buchagara, où les besoins sont immenses.  Il salué la réponse humanitaire de l’ONU et a demandé un soutien plus grand de la part de la communauté internationale, pour financer le plan de réponse humanitaire et protéger réfugiés et déplacés. 

À Goma, la délégation du Conseil a rencontré les femmes de la société civile, avec qui elle a parlé de la lutte contre les violences sexuelles et de la résurgence des groupes armés.  Les membres de la délégation ont condamné fermement ces violences et jugé impératif de poursuivre et juger les auteurs de ces crimes, de protéger les victimes et de créer un fonds de réparation, a dit M. Biang. 

Enfin, le Conseil de sécurité a pu faire le point avec plusieurs experts sur la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles qui continue de financer les activités des groupes armés et terroristes.  Plusieurs initiatives des autorités congolaises sont en cours pour s’assurer que cette exploitation bénéfice au peuple congolais, a dit le représentant gabonais en demandant qu’elles soient soutenues ainsi que les efforts de la région, déployés pour mettre en œuvre les outils de régulation internationaux. 

Le représentant du Gabon a, en conclusion, rappelé que la RDC n’est pas seule et que sa souveraineté, son indépendance, son unité et son intégrité doivent être respectées.  Il a rappelé que le Conseil attend des partenaires internationaux, des Nations Unies et des organisations régionales qu’ils agissent ensemble au soutien et à la stabilisation de la région des Grands Lacs.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la lutte antiterroriste examinée comme un défi commun devant donner la priorité aux initiatives régionales et sous-régionales

9296e séance – matin
CS/15245

Conseil de sécurité: la lutte antiterroriste examinée comme un défi commun devant donner la priorité aux initiatives régionales et sous-régionales

Ce matin, le premier débat phare organisé par la présidence mozambicaine du Conseil de sécurité a porté sur la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent par le renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations et mécanismes régionaux.  Les membres du Conseil ont misé sur cette coopération, qui fait fructifier les initiatives régionales en la matière, en particulier sur le continent africain.

Si le Secrétaire général de l’ONU a assuré du soutien de l’Organisation aux efforts de lutte contre le terrorisme en Afrique, il a plaidé pour une nouvelle génération de missions d’imposition de la paix et d’opérations de lutte antiterroriste qui soient dirigées par l’Union africaine (UA) tout en étant dotées d’un mandat du Conseil de sécurité et d’un financement « garanti et prévisible », au moyen des contributions statutaires.  M. António Guterres a exhorté tous les États Membres à soutenir ce travail essentiel. 

Abondant en ce sens, le Président des Comores, M. Azali Assoumani, qui s’exprimait en tant que Président de l’UA, a mis en avant l’appui que son organisation apporte d’ores et déjà aux efforts antiterroristes de tous les pays africains, notamment par le biais de sa coopération avec l’ONU.  Lui aussi a plaidé pour un financement « pérenne et prévisible » des opérations de paix africaines.  En outre, M. Assoumani a souhaité une mise en œuvre plus décentralisée du Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent arguant que « le temps n’est pas avec nous ».

En attendant que cette question du financement des opérations africaines soit réglée au sein du Conseil, une discussion que la France a appelé à reprendre en se basant sur la position commune adoptée à Addis Abeba, le Secrétaire général a rappelé que l’ONU se tient déjà aux côtés de l’Afrique pour mettre fin au fléau du terrorisme sur le continent: que ce soit par les orientations politiques que fournit le Conseil, par son assistance technique et par son soutien aux régimes de sanctions, ou dans le cadre des 65 visites d’évaluation du Comité contre le terrorisme qui ont donné lieu à des milliers de recommandations concrètes destinées aux États Membres.  Le Secrétaire général a également mentionné le travail accompli dans le cadre du Pacte mondial de coordination contre le terrorisme, ainsi que l’étroite collaboration dans ce domaine entre l’ONU, l’UA et les organisations régionales et sous-régionales africaines.  Quant à l’assistance sur mesure apportée par l’ONU aux États africains, il a cité la prévention, l’assistance juridique, les enquêtes, les poursuites, la réinsertion et la réadaptation, ainsi que la protection des droits humains.  Il a donné rendez-vous au prochain sommet africain sur la lutte contre le terrorisme, coorganisé avec le Nigéria en juillet, et au huitième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies, qui aura lieu auparavant en juin.

Concrètement, l’Afrique a fait de grands pas en avant pour relever les défis sécuritaires, s’est enorgueilli le Président de l’UA en citant notamment le succès des missions de l’UA en Somalie, notamment celle pour la transition, l’ATMIS, qui s’efforce de réduire les capacités des Chabab.  Il a également signalé que le récent déploiement de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) au Mozambique a été largement encouragé par l’UA.  Se félicitant lui aussi de cette mission de lutte contre le terrorisme dans la province de Cabo Delgado, le Président mozambicain, M. Filipe Jacinto Nyusi, a estimé qu’elle témoigne de l’approche « solutions africaines aux problèmes africains », qui cherche à faire fond sur les spécificités locales.  Pour le Président Nyusi, la valeur ajoutée de cette expérience réside dans le fait qu’elle combine la lutte nationale contre le terrorisme aux efforts multilatéraux régionaux de la SADC et à ceux, bilatéraux, entre le Mozambique et le Rwanda.  « Ensemble, nous luttons avec succès contre le terrorisme. »  Il a donc appelé à privilégier ce modèle plutôt que les lourds investissements faits à l’échelle internationale pour certains pays, y compris des pays africains, pendant de nombreuses années.

À l’instar des membres de l’UA, le Secrétaire d’État brésilien Carlos Márcio Cozendey a salué l’Initiative d’Accra, un autre mécanisme régional qui peut aider à contenir la propagation du terrorisme du Sahel aux régions voisines.

S’alignant sur la vision de M. Guterres -qui a appelé à agir par la prévention, par l’inclusion et en mettant les droits humains et l’état de droit au centre de toute action de lutte antiterroriste-, le Président de la Confédération suisse, M. Alain Berset, a appelé à éviter d’utiliser les opérations antiterroristes comme prétexte pour violer les règles protégeant les populations civiles ou pour écarter des opposants politiques.  Sur le volet de l’inclusion, le Ministre d’État des Émirats arabes unis, M. Shakhboot Nahyan Al Nayhan, a encouragé des stratégies allant de la base vers le sommet pour permettre aux communautés, aux acteurs et aux chefs religieux, aux femmes et aux jeunes, d’avoir voix au chapitre. 

La communauté internationale doit être plus déterminée et plus solidaire face au terrorisme, s’est impatientée pour sa part la Vice-Présidente du Gabon, Mme Rose Christiane Raponda, de même que le Président du Ghana, M. Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, a plaidé pour un « partenariat à tous les niveaux », faisant valoir que l’efficacité de l’ONU en Afrique repose plus que jamais sur une coopération solide avec les organisations régionales.  Notant qu’afin de combattre les insurrections dans leurs régions respectives, la SADC et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont développé des opérations qui comprennent à la fois des initiatives militaires et diplomatiques, le Chef d’État a déploré, à son tour, le manque de ressources financières pour lutter contre le terrorisme. 

Pour le Japon, les États-Unis ou encore le Royaume-Uni, cette réunion a été l’occasion de mettre en avant leurs contributions à la coopération régionale en matière de sécurité et de renseignement sur le continent africain.  Enfin, la Fédération de Russie a assuré fournir une assistance pratique dans la formation des forces de l’ordre et du personnel judiciaire à la lutte contre les menaces contemporaines, après avoir dénoncé l’origine selon elle du terrorisme au Sahel, à savoir l’intervention militaire de l’Occident en Libye, qui a déstabilisé toute la région et s’est répercutée sur les États côtiers d’Afrique de l’Ouest.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES RÉSULTANT D’ACTES DE TERRORISME

Lutte contre le terrorisme et prévention de l’extrémisme violent conduisant au terrorisme par le renforcement de la coopération entre l’Organisation des Nations Unies et les organisations et mécanismes régionaux (S/2023/147)

Déclarations

Constatant que le terrorisme est la cause et la conséquence d’un grand nombre des problèmes examinés par le Conseil de sécurité, le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, a dit qu’aucun âge, aucune culture, aucune religion, aucune nationalité et aucune région n’échappe au terrorisme, soulignant que la situation en Afrique est particulièrement préoccupante.  Le désespoir, la pauvreté, la faim, le manque de services de base, le chômage et les changements anticonstitutionnels de gouvernement constituent toujours un terrain fertile pour la propagation insidieuse des groupes terroristes qui infestent de nouvelles parties du continent, a relevé le Secrétaire général qui est profondément préoccupé par la progression des groupes terroristes au Sahel et ailleurs.  « Communauté par communauté, ils étendent leur champ d’action. »   La terreur creuse toujours plus largement son sillon, à mesure qu’affluent les combattants, les fonds et les armes d’une région à l’autre et d’un bord à l’autre du continent, et que de nouvelles alliances sont nouées avec la criminalité organisée et les bandes de pirates, a noté le Chef de l’ONU.  Il a aussi relevé que l’univers numérique offre une plateforme mondiale à la diffusion plus large encore des idéologies violentes. 

Alors que le terrorisme divise les peuples, la lutte contre ce fléau peut rapprocher les pays, a-t-il affirmé, en prenant comme exemple l’Afrique, où sont nées plusieurs initiatives régionales de lutte contre le terrorisme comme les efforts conjoints déployés au Sahel, dans le bassin du lac Tchad, au Mozambique et au-delà.  M. Guterres a salué la résolution renouvelée avec laquelle les dirigeants africains s’attaquent à cette menace évolutive, comme l’a démontré le récent Sommet extraordinaire de l’Union africaine (UA) sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels de gouvernement.  L’ONU se tient aux côtés de l’Afrique pour mettre fin à ce fléau, a assuré le Secrétaire général, et ce, non seulement par les orientations politiques que fournit le Conseil, par son assistance technique et par son soutien aux régimes de sanctions, mais également dans le cadre des 65 visites d’évaluation que le Comité contre le terrorisme a effectuées pour s’assurer que les demandes du Conseil de sécurité étaient respectées, et qui ont donné lieu à des milliers de recommandations concrètes visant à aider les États Membres à améliorer leur riposte.  L’ONU est également aux côtés de l’Afrique par le travail que l’Organisation accomplit dans le cadre du Pacte mondial de coordination contre le terrorisme, qui rassemble organismes des Nations Unies, États Membres, parlements régionaux et société civile en soutien aux efforts déployés de concert sur l’ensemble du continent.  Et, surtout, par son étroite et constante collaboration avec l’UA et les organisations régionales et sous-régionales africaines. 

M. Guterres a expliqué que l’ONU apporte une assistance sur mesure aux États Membres d’Afrique, notamment dans les domaines de la prévention, de l’assistance juridique, des enquêtes, des poursuites, de la réinsertion et de la réadaptation, ainsi que de la protection des droits humains.  L’ONU organise avec le Nigéria le prochain sommet africain sur la lutte contre le terrorisme, a-t-il rappelé, et elle renforce sa collaboration dans le cadre d’initiatives de paix majeures, telle que le Groupe indépendant de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel.  En outre, l’ONU plaide sans relâche pour une nouvelle génération de missions d’imposition de la paix robustes et d’opérations de lutte contre le terrorisme qui soient dirigées par l’UA et dotées d’un mandat du Conseil de sécurité établi en vertu du Chapitre VII ainsi que d’un financement garanti et prévisible, au moyen des contributions statutaires, a martelé M. Guterres en exhortant tous les États Membres à soutenir ce travail essentiel. 

Le Secrétaire général a donné rendez-vous au huitième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale, qui aura lieu en juin et sera coanimé par le Canada et la Tunisie, qui sera une occasion cruciale de renforcer l’action commune en la matière et de trouver de nouveaux moyens de s’attaquer plus efficacement aux conditions structurelles qui font le lit du terrorisme.  Cet examen sera également une occasion de rappeler que les droits humains doivent être au cœur de nos efforts, a-t-il souligné arguant que si le terrorisme, c’est la négation et la destruction même des droits humains, on ne peut remporter la lutte contre ce fléau en perpétuant cette négation et cette destruction.  Il est prouvé que les efforts de lutte antiterroriste qui sont uniquement axés sur la sécurité aux dépens des droits humains peuvent involontairement mener à la marginalisation et l’exclusion et, partant, aggraver davantage la situation, a-t-il fait valoir. 

Rappelant que le Nouvel Agenda pour la paix propose d’agir de façon intégrée et globale afin de bâtir des sociétés plus pacifiques et plus stables dans lesquelles le terrorisme et l’extrémisme violent n’auront pas leur place, M. Guterres a appelé à agir par la prévention, en s’attaquant aux conditions socioéconomiques qui peuvent mener au terrorisme; par l’inclusion, en veillant à ce que les stratégies de lutte antiterroriste tiennent compte du vécu de l’ensemble des communautés et des publics, et tout particulièrement des minorités, des femmes et des jeunes; et en mettant les droits humains et l’état de droit au centre de toute notre action.  C’est au nom des victimes du terrorisme qu’il faut poursuivre notre travail pour mettre fin à ce fléau, une fois pour toutes, a insisté le Secrétaire général en appelant le Conseil et tous les États Membres à soutenir l’ONU dans cet effort essentiel en Afrique et au-delà.

M. AZALI ASSOUMANI, Président des Comores et Président de l’Union africaine (UA), a relevé que le terrorisme et l’extrémisme violent semblent se nourrir l’un l’autre.  Il a daté de la crise libyenne l’accroissement des activités terroristes en Afrique, avec l’afflux de combattants étrangers.  Il a rappelé l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030 en Afrique et redit l’engagement de l’UA d’y parvenir.  Il a ensuite fait le lien entre extrémisme violent et terrorisme d’une part et changement anticonstitutionnel de régime d’autre part, avant de détailler les efforts de l’UA dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  L’Afrique a fait de grands pas en avant pour relever les défis sécuritaires, a dit le Président, en citant le succès des missions de l’UA en Somalie, l’AMISOM puis l’ATMIS.  Il a aussi signalé que le récent déploiement de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) au Mozambique a été largement encouragé par l’UA.  Il a appelé à des efforts renouvelés au sein des cadres régionaux en vue de la stabilité du continent, avant d’insister sur la pertinence de l’Initiative d’Accra.  L’ONU et l’UA peuvent tirer profit de ces outils pour combattre le terrorisme, a-t-il fait remarquer. 

Le Président a insisté sur l’importance d’une approche préventive, celle-ci étant négligée, en appelant à la mobilisation des ressources nécessaires.  L’UA appuie les efforts antiterroristes de tous les pays africains, par le biais notamment de sa coopération avec l’ONU, a-t-il rappelé.  Il a plaidé pour un financement pérenne et prévisible des opérations de paix africaines, avant de souhaiter une mise en œuvre plus décentralisée du Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent.  « Le temps n’est pas avec nous. »  Il nous faut lutter contre la pauvreté et la marginalisation des jeunes, a dit le Président, en appelant également à tarir les sources de financement des groupes terroristes.  Enfin, le Président a appelé à des actions internationales plus solidaires et durables contre le terrorisme. 

M. FILIPE JACINTO NYUSI, Président du Mozambique, a déclaré que la lutte contre le terrorisme constitue toujours un défi, en raison de la nature transnationale du terrorisme et de son imprévisibilité; et que son association avec la criminalité transnationale organisée a contribué à la survie et à la propagation des groupes terroristes.  Sur le continent africain, les terroristes ont généralement recours aux trafics de minerais, de pierres précieuses et de stupéfiants pour financer leurs activités, par le biais du blanchiment d’argent, a fait observer le Chef d’État.  Il s’est d’ailleurs alarmé de voir que le Sahel est le nouvel épicentre de leurs activités.  Le Président a ensuite fait observer que les pays africains, l’UA et les organisations régionales telles que la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) ont, au fil des ans, accumulé une expérience pertinente en matière de résolution des conflits.  M. Nyusi a souligné à cet égard que la SADC a établi une mission au Mozambique avec une composante militaire importante qui, depuis juillet 2021, est engagée dans la lutte contre le terrorisme dans la province de Cabo Delgado.  Cette mission témoigne selon lui de l’approche des « solutions africaines aux problèmes africains », qui cherche à faire fructifier les expériences et les spécificités locales dans la recherche de solutions. 

Pour le Président, cette expérience est assortie d’une valeur ajoutée, car cette lutte contre le terrorisme est combinée aux efforts multilatéraux régionaux de la SADC et à ceux, bilatéraux, entre le Mozambique et le Rwanda.  « Ensemble, nous luttons avec succès contre le terrorisme. »  Il a suggéré de privilégier ce modèle aux lourds investissements qui ont été réalisés à l’échelle internationale pour certains pays, y compris des Africains, pendant de nombreuses années.  Par ailleurs, M. Nyusi a souhaité que le huitième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies, envisagé pour juillet 2023, prenne en considération la nécessité d’établir un mécanisme commun pour la résilience des communautés, afin de prévenir l’extrémisme violent.  Cela pourrait se traduire par la création d’un fonds pour renforcer les initiatives locales de développement durable, qui pourrait promouvoir des projets créateurs d’emplois pour les jeunes, en particulier en Afrique et au Moyen-Orient.  Par ailleurs, le Président a proposé de renforcer la coopération entre le Conseil de sécurité, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA et les blocs régionaux afin d’arrêter la propagation et la consolidation du terrorisme sur le continent africain.  Il a également plaidé pour que soit donnée la priorité au soutien aux solutions régionales découlant des mécanismes bilatéraux dûment examinés et pour renforcer les capacités de protection des infrastructures cruciales dans les domaines où les intérêts sont communs, comme les frontières interétatiques, grâce au partage de l’information et de la technologie.  Le Chef d’État s’est en outre prononcé pour une approche holistique qui combine les dimensions de la sécurité, de la justice et des interventions socioéconomiques afin d’éradiquer les causes profondes du terrorisme.

Il a en conclusion souligné que le surendettement de nombreux pays en développement à revenu faible ou intermédiaire ne réduit pas à leur capacité à financer les services essentiels et leurs économies, dont la réponse aux impacts des divers chocs découlant des changements climatiques et des crises provoquées par l’homme.  Cette situation de surendettement, a mis en garde le Président, rend ces pays de plus en plus vulnérables à l’extrémisme, au terrorisme et à d’autres conflits violents.  Dans une étude récente, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a estimé que 52 pays de ce groupe, qui représentent près de 40% des populations pauvres dans le monde, sont confrontés à cette situation: « Pour que ces pays sortent de la crise actuelle, nous demandons à la communauté internationale de restructurer la dette et de faciliter l’accès de ces pays à haut risque à des financements abordables.  Pour cela, il faut transformer le système financier international en réformant les institutions financières multilatérales. »

M. ALAIN BERSET, Président de la Confédération suisse, a noté que si aucun pays n’est à l’abri du terrorisme, y compris le sien, cette tendance se manifeste de manière alarmante sur le continent africain où de nouveaux groupes terroristes émergent, et des groupes armés existants prêtent allégeance à des organisations désignées comme terroristes par les Nations Unies.  Il est plus urgent que jamais de briser ce cycle de violence, a-t-il estimé et, pour y parvenir, il a cité certains éléments nécessaires comme l’état de droit, la prévention, les partenariats et l’inclusion.  Le Président a appelé à veiller au plein respect du droit international, en particulier du droit international humanitaire, des droits de l’homme et du droit des réfugiés.  Respecter l’état de droit signifie que les opérations antiterroristes ne peuvent pas servir de prétexte pour violer les règles protégeant les populations civiles, ni pour écarter des opposants politiques, mais cela signifie aussi de considérer les enfants associés à des groupes terroristes comme des victimes, a-t-il estimé. 

Arguant que la paix, la sécurité et la prospérité sont les meilleurs antidotes aux idéologies incitant à la violence terroriste ou extrémiste, M. Berset a appelé à relever sans attendre les défis mondiaux actuels et futurs, dont les changements climatiques, qui sont une potentielle source de flux migratoires, souvent incontrôlés, et peuvent aggraver les conflits et être exploités par des groupes terroristes et extrémistes violents, a-t-il fait valoir.  Plaidant pour une approche globale et holistique, le chef d’État, a estimé que la stratégie antiterroriste des Nations Unies –et ses quatre piliers– fournit un ensemble complet de mesures qui, si elles sont mises en œuvre de manière équilibrée, sont un excellent outil de lutte contre le terrorisme.  Cette stratégie est également le symbole de l’unité de la communauté internationale dans la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme, a-t-il souligné, en relevant que chaque révision de cette stratégie s’est faite par consensus.  Ce consensus est notre meilleure réponse face à ceux qui cherchent à nous diviser, a martelé M. Berset, en appelant à le consolider lors de l’actuelle huitième révision. 

Il a reconnu les atouts des organisations régionales et sous-régionales qui sont en première ligne pour comprendre les dynamiques sur le terrain, en appelant à collaborer plus étroitement avec elles et à favoriser une meilleure coordination des initiatives de la lutte contre l’extrémisme violent.  Tel était l’objectif du « Grand rendez-vous pour la prévention de l’extrémisme violent en Afrique de l’Ouest et du Centre », organisé récemment par la Suisse, le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel ainsi que le Centre des hautes études de défense et de sécurité du Sénégal, a rappelé M. Berset. 

Mme ROSE CHRISTIANE RAPONDA, Vice-Présidente du Gabon, a déclaré que 2022 a été une année meurtrière en Afrique en raison notamment des attaques terroristes.  Elle a indiqué que la capacité de Daech reste préoccupante, notant la corrélation entre les difficultés éprouvées par les pays sur les plans sécuritaire et économique et la progression du groupe.  Elle a appelé à une coopération internationale renforcée face aux groupes terroristes qui tirent profit de l’absence de l’autorité de l’État.  Les gouvernements sont sous la pression accrue des populations en raison de l’insécurité, a-t-elle signalé, ajoutant que la guerre contre le terrorisme met au défi des États aux ressources limitées.  Elle a jugé fondamental d’empêcher que la polarisation actuelle du monde ne sape le multilatéralisme, ce qui ne pourrait que profiter aux groupes terroristes. 

La Vice-Présidente a ensuite prôné une approche tridimensionnelle, articulée autour d’une tolérance zéro pour l’extrémisme violent, du respect scrupuleux du droit international et d’une action dénuée de toute politisation.  Notre réponse face au terrorisme doit être cohérente et holistique, a-t-elle souligné, en mentionnant les autres défis à relever que sont les crises humanitaires et les conséquences des changements climatiques.  Elle a appelé à tarir les sources de financement des groupes terroristes et exhorté l’ONU à appuyer les opérations de l’UA.  La communauté internationale doit être plus déterminée et plus solidaire face au terrorisme, a-t-elle estimé. 

M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, s’est déclaré gravement préoccupé par la transformation constante de l’Afrique en une arène pour l’extrémisme violent et le terrorisme.  Il a notamment relevé qu’au Sahel, les groupes affiliés à l’État islamique renforcent leur présence, tandis qu’en Somalie, les Chabab sont sous pression, mais pas vaincus.  Il a également évoqué la situation à Cabo Delgado, au Mozambique, ainsi que dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), où les Forces démocratiques alliées (ADF) affiliées à l’État islamique continuent de déstabiliser les populations.  La lutte contre le terrorisme nécessite un partenariat à tous les niveaux, a souligné le Chef d’État pour lequel l’efficacité de l’ONU repose plus que jamais sur une coopération solide avec les organisations régionales.  Selon lui, la montée de l’extrémisme violent et du terrorisme souligne l’urgence d’une réponse collective. 

En Afrique, a-t-il poursuivi, il faut combler les limites des efforts de maintien de la paix des Nations Unies et des capacités nationales face aux menaces terroristes transnationales.  Afin de combattre les insurrections dans leurs régions respectives, la SADC et la CEDEAO ont développé des opérations qui comprennent à la fois des initiatives militaires et diplomatiques.  Il a également cité l’Initiative d’Accra, l’un de ces mécanismes régionaux d’auto-assistance en matière de sécurité et de renseignement, conçu pour aider à lutter contre le terrorisme.  Le Président a toutefois déploré les capacités limitées et le manque de ressources financières pour lutter contre le terrorisme.  Vaincre les organisations terroristes et les groupes armés devrait être l’objectif principal du Conseil lorsqu’il aborde les défis sécuritaires auxquels l’Afrique est actuellement confrontée, a-t-il estimé.

Le Président du Ghana a aussi plaidé pour des efforts de prévention des conflits et de médiation pour apaiser les tensions.  Il a souligné que les partenariats avec les organisations régionales doivent se baser sur le respect mutuel et tenir compte des circonstances régionales uniques.  Il a appelé à renforcer la capacité des organisations régionales en matière d’alerte précoce et de prévention des conflits, de renseignement, de logistique, de formation et de déploiement ainsi que de financement. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD, membre du Cabinet du Président des États-Unis, a rappelé à quel point la lutte antiterroriste était inscrite au cœur des priorités américaines, le Secrétaire d’État Antony Blinken ayant tout récemment coprésidé un forum sur la paix et la sécurité au cours duquel le Niger, la Somalie et le Mozambique ont évoqué la bonne gouvernance, le maintien de la paix, les partenariats internationaux, ainsi que le développement inclusif, autant d’éléments qui vont dans l’intérêt de la paix et de la sécurité.  Les efforts que nous consentons dans ce domaine en Afrique sont « sans précédent », près de 8 milliards de dollars ayant été versés par Washington au secteur de la sécurité depuis février 2019 en Afrique, s’est enorgueillie la déléguée.  Vendredi dernier, a-t-elle indiqué, le Président Joseph Biden a fait part au Congrès de son intention de mettre sur pied un plan décennal destiné à lutter contre le terrorisme en promouvant des partenariats avec le Mozambique et la Libye, mais aussi avec des pays tels que le Ghana, le Bénin, la Côte d’Ivoire, la Guinée et le Togo.  Dans ce contexte, Mme Thomas-Greenfield a souligné l’importance que jouent la société civile, les femmes, les jeunes, les leaders communautaires, ainsi que le secteur privé.  Les États-Unis restent, pour leur part, attachés à soutenir davantage les opérations de paix en Afrique et nous sommes impatients de prendre connaissance des recommandations du Secrétaire général dans son prochain rapport, a dit la déléguée.  Elle a, enfin, tenu à souligner que la protection et la promotion des droits humains et de l’état de droit sont des conditions préalables à la lutte contre le terrorisme.

M. SHAKHBOOT NAHYAN AL NAHYAN, Ministre d’État des Émirats arabes unis, a cité les statistiques de 2022 sur le terrorisme pour dire que la situation est pire que jamais.  Il a estimé que les initiatives de lutte contre le terrorisme à l’échelon régional font partie intégrante des efforts déployés à l’échelon mondial pour lutter contre ce fléau.  Pour sa part, le Conseil doit en faire encore davantage, a exhorté le Ministre proposant à cet égard d’éviter de travailler en silo et en recommandant de soutenir les initiatives prises sur le continent africain, pour qu’elles portent davantage de fruits.  Une meilleure coordination permet d’améliorer les politiques et d’être plus cohérent, a-t-il argumenté.  Il a souhaité que le sommet sur le terrorisme, organisé par le Nigéria et le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations Unies, trouvera des solutions pour venir à bout de ce fléau en abordant les causes du terrorisme et de l’extrémisme violent, la bonne gouvernance, le développement, les prestations de services de base et la protection contre l’intolérance. 

Le Ministre a aussi demandé à mettre sur pied des stratégies allant de la base au sommet, qui permettraient aux communautés, aux acteurs et aux chefs religieux, aux femmes et aux jeunes d’avoir voix au chapitre.  La communauté internationale doit aider les pays à créer des institutions fortes et compétentes pour lutter contre ce phénomène, a-t-il ajouté avant de demander d’expulser les groupes terroristes des territoires sur lesquels ils opèrent et bien au-delà.  « Les États doivent conjuguer leurs efforts pour récupérer et conserver les zones sur lesquelles les terroristes avaient fait main basse. »  Il a encore conseillé de protéger les sociétés contre les vulnérabilités avant que les terroristes ne profitent de ceux qui se trouvent dans la précarité.  En outre, le Ministre a réitéré l’importance de créer des communautés résilientes en donnant place aux jeunes d’Afrique et du Moyen-Orient.  Il a enfin demandé au Conseil d’écouter le message de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU concernant les initiatives à prendre sur le continent africain: elle avait insisté sur l’importance pour la communauté internationale de faire front commun et de s’engager véritablement. 

M. CARLOS MÁRCIO COZENDEY, Secrétaire d’État aux affaires politiques multilatérales au Ministère des affaires étrangères du Brésil, a rappelé que la Charte des Nations Unies accorde une importance particulière au rôle que les organisations régionales et sous-régionales peuvent jouer dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales et dans le règlement pacifique des différends et qu’elle permet au Conseil de sécurité de recourir à des arrangements régionaux pour prendre des mesures d’exécution sous son autorité.  Cette option favorise, selon lui, la mise en place de solutions sur mesure qui tiennent compte des réalités locales, ce qui est d’autant plus pertinent que le terrorisme ne peut être combattu par une approche unique sans tenir compte des réalités ethniques, religieuses, politiques et socioéconomiques des pays concernés.  Face à la montée inquiétante du terrorisme sur le continent africain, M. Cozendey a fait valoir que l’Afrique a donné des exemples remarquables de la manière avec laquelle les mécanismes régionaux et sous-régionaux peuvent répondre à la menace posée par les groupes terroristes.  Il a notamment cité la mission de la SADC au Mozambique qui a obtenu des résultats significatifs dans la lutte contre le terrorisme dans la province de Cabo Delgado ou encore la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS) qui s’efforce de réduire les capacités des Chabab.  Le Secrétaire d’État a encore salué l’Initiative d’Accra, qui pourrait contribuer à contenir la propagation du terrorisme du Sahel aux régions voisines, ainsi que les opérations antiterroristes de la Force multinationale mixte, une contribution importante à la paix et à la sécurité dans la région du bassin du lac Tchad.  Quant à la Force conjointe du G5 Sahel, il a espéré qu’elle pourra surmonter les difficultés qu’elle rencontre actuellement, pour continuer de lutter contre le terrorisme dans la région et empêcher qu’il ne s’étende aux pays voisins.

Il ne fait pas de doute pour M. Cozendey que les efforts conjoints de lutte contre le terrorisme ne seront jamais suffisants si l’on ne s’attaque pas aux causes profondes du terrorisme et de l’extrémisme violent (conflits prolongés, incapacité à faire respecter l’état de droit, violations des droits humains, discrimination ethnique, nationale et religieuse, exclusion politique, marginalisation socioéconomique et chômage).  Dans ce contexte, il a souligné l’importance du travail des organes compétents des Nations Unies pour soutenir les activités visant à favoriser le développement économique et la justice sociale, dans le plein respect des souverainetés nationales, en appelant à s’éloigner des réponses exclusivement axées sur la sécurité et à adopter des approches fondées sur le développement.  Enfin, il a plaidé en faveur de la prévention des conflits, en soulignant que pour chaque dollar investi dans la consolidation de la paix, 16 dollars pourraient être économisés en termes de coût des conflits et de l’extrémisme violent qui alimentent le terrorisme.  Il a estimé que la Commission de consolidation de la paix (CCP) est bien placée pour promouvoir la cohérence entre les acteurs concernés du système des Nations Unies, mobiliser les organisations régionales et les institutions financières internationales et favoriser les accords de coopération Sud-Sud et triangulaire à l’appui des capacités nationales, ce qui peut aider les États Membres à lutter contre le terrorisme.  Il a conclu en rappelant la nécessité, pour cette lutte, de respecter strictement le droit international.

M. LIU YUXI, Représentant spécial pour les affaires africaines de la Chine, a demandé l’apport d’un appui urgent aux pays africains confrontés à la menace terroriste et exhorté l’ONU à jouer un rôle accru dans le domaine de la lutte antiterroriste.  Le prochain examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies doit être l’occasion de forger un front commun contre le terrorisme, a-t-il estimé.  Il a rappelé l’importance que les pays africains soient dotés des moyens nécessaires pour mener cette lutte et estimé, à ce titre, que les embargos sur les armes sapent leurs capacités.  Il a appelé à remédier aux causes profondes du terrorisme, en demandant notamment la réalisation du Programme 2030.  L’Afrique est un continent de promesses et sa voix doit être mieux entendue, a-t-il déclaré.  Le dignitaire a également plaidé pour un renforcement de la coopération entre l’ONU et l’UA.  La Chine et l’Afrique sont des partenaires et des sœurs, a-t-il conclu, en soutenant toutes les initiatives concourant au renforcement des capacités des pays africains.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a expliqué que la réponse de la communauté internationale au terrorisme doit tirer le meilleur parti de l’ensemble de notre expertise et de nos capacités, en les adaptant aux différents contextes régionaux.  Pour sa part, son pays s’est engagé dans la coopération régionale en matière de sécurité et de renseignement sur le continent africain et dans le monde entier.  Au Kenya, par exemple, le Royaume-Uni a financé la mise en place de l’Unité de lutte antiterroriste de la police à Mombasa, dans le cadre d’un investissement de 8,6 millions de dollars par an pour soutenir les efforts du Kenya, a indiqué le délégué, qui a dit que Londres avait également œuvré à réduire la vulnérabilité de 800 Kényans à risque face à la radicalisation.  Il a par ailleurs affirmé qu’au Mali et en République centrafricaine, le groupe Wagner fait partie du problème, et non de la solution.  Nous ne pouvons ignorer le rôle déstabilisateur de cette organisation qui exploite les conflits et les déficits de gouvernance pour aspirer les ressources de l’Afrique là où elles sont cruellement nécessaires, contribuant ainsi à créer des environnements propices au développement du terrorisme, a dénoncé le représentant.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a souligné l’importance de promouvoir les efforts de lutte contre le terrorisme menés par les Africains.  Pour être efficaces, ces efforts nécessitent une assistance de la communauté internationale, notamment en matière de renforcement des capacités des autorités chargées de l’application de la loi et de la sécurité.  Le Japon s’est engagé à soutenir les efforts menés par l’Afrique dans le cadre de la nouvelle approche pour la paix et la stabilité en Afrique, notamment en renforçant les capacités de l’administration locale dans le G5 Sahel.  Il a appelé la communauté internationale à s’unir dans la lutte contre le financement du terrorisme, en pointant du doigt les revenus tirés du commerce illicite des ressources naturelles, y compris la faune, ainsi que l’utilisation des technologies nouvelles et émergentes par les groupes terroristes. 

Le délégué a également conseillé de s’attaquer à la pauvreté et aux inégalités, notamment en privilégiant une approche de sécurité humaine afin de protéger et autonomiser les personnes.  Tous nos efforts dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’environnement, ainsi que l’investissement dans les personnes, doivent construire une société résiliente et durable où la sécurité humaine est assurée, a-t-il insisté, appelant à réduire la vulnérabilité face au terrorisme et à l’extrémisme violent.  Il a enfin souligné la nécessité de promouvoir l’état de droit, les droits humains, l’intégration de la dimension de genre, la sécurité maritime et une approche pangouvernementale et pansociétale.  L’état de droit est un principe fondamental pour la mise en œuvre de mesures antiterroristes efficaces, a-t-il souligné. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que les groupes terroristes tels que Daech et Al-Qaida et leurs affiliés demeurent la menace la plus aiguë en matière de terrorisme, en particulier sur le continent africain, où ils s’étendent, tant en Afrique de l’Ouest qu’en Afrique centrale ou australe.  Cette menace continue de se reconfigurer, de faire preuve de résilience et de croître, par exemple au Sahel, où les groupes terroristes poursuivent leur projet d’extension en direction du golfe de Guinée, a-t-il constaté.  Par conséquent, il a appelé à poursuivre les efforts communs pour répondre à ce fléau, en commençant par les moyens à mobiliser.  Faisant valoir que le terrorisme en Afrique est une menace non seulement pour la région, mais aussi pour la paix et la sécurité internationales, il a appelé le Conseil à reprendre ses discussions sur le financement des opérations africaines de paix, sur la base de la position commune adoptée à Addis Abeba.  De plus, la France et l’Union européenne (UE) sont déterminées à poursuivre et renforcer leurs partenariats avec les États africains et les organisations régionales africaines, a assuré le représentant en affirmant que son pays continue de se mobiliser contre le terrorisme, aux côtés de ses partenaires, à leur demande et selon leurs besoins, selon une approche globale et renouvelée. 

Le représentant a aussi plaidé pour une approche résolument multilatérale, notant à cet égard que les instruments des Nations Unies sont essentiels, qu’il s’agisse des panels d’experts, de sanctions ou du travail du Bureau de lutte contre le terrorisme dont l’UE est le troisième contributeur.  Le délégué a aussi appelé à renforcer la résilience des communautés en lien avec les États de la région.  Il s’agit de prendre en compte les facteurs socioéconomiques qui contribuent au recrutement terroriste, a-t-il expliqué en recommandant aussi de répondre aux défis climatiques et de tenir compte des liens entre terrorisme et trafic des ressources, ou de la propagande terroriste sur Internet.  Enfin, pour être pleinement efficace, la lutte contre le terrorisme doit s’inscrire dans une réponse globale qui doit inclure des initiatives conjointes pour le développement, le renforcement de la gouvernance, de l’état de droit et la lutte contre la corruption, a estimé le délégué.  Il a tenu à souligner que les « pseudo-offres sécuritaires proposées par certaines sociétés militaires privées et leur parrain étatique » sont à rebours de l’approche respectueuse des partenaires et des droits humains qu’il promeut.

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est dit préoccupé par la persistance de la menace terroriste en Afrique.  Le terrorisme est un défi mondial qui exige une réponse mondiale, a-t-il déclaré.  Il a dénoncé le déploiement de mercenaires en Afrique, qui ne peut qu’aggraver la situation des pays concernés.  Le délégué a insisté sur l’importance de respecter le droit international et de protéger les droits des minorités, dans le cadre de la lutte antiterroriste.  On ne peut dire que l’on appuie l’Afrique lorsque l’on pille ses ressources, a-t-il fait observer.  Il a, en outre, appelé à traiter les causes profondes du terrorisme et demandé que la lutte antiterroriste soit menée en conformité avec le droit.  Enfin, il a espéré que le huitième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies sera couronné de succès.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que son pays soutient pleinement les pays africains dans leur lutte contre le terrorisme international.  S’il a convenu qu’il faut accorder une attention accrue à l’identification et au traitement des causes profondes du terrorisme, celles-ci ne se réduisent pas à son avis aux problèmes socioéconomiques et à la corruption, et les sources traditionnelles de radicalisation ne décrivent pas toujours la réalité.  « Le terrorisme au Sahel s’est enraciné depuis l’intervention militaire de l’Occident en Libye, qui a déstabilisé toute la région, une situation qui a des conséquences jusqu’aux États côtiers d’Afrique de l’Ouest », a souligné le représentant.  Non seulement les contingents étrangers présents sur le territoire de plusieurs pays du Sahel n’ont pas réussi à redresser la situation, mais leur présence a entraîné une forte détérioration de la situation, a–t-il soutenu.  Selon lui, les tentatives de justification de ces développements par des motifs religieux, ethniques ou sociaux ont été instrumentalisés par les puissances coloniales pendant des décennies.  Dès lors, il a estimé qu’on ne peut que se féliciter de la prise de conscience par les États africains de la source réelle des menaces et de la recherche de mécanismes régionaux efficaces pour les contrer. 

« Nous avons vu des forces extérieures tenter de diviser les États de la région, arguant que certains pays méritent d’être aidés dans la lutte contre le terrorisme et d’autres non », a-t-il poursuivi en dénonçant ces « tactiques inacceptables ».  Le délégué a donc plaidé pour le renforcement du potentiel des organisations régionales, en particulier de l’UA, qui sont capables de mettre en œuvre des stratégies globales de lutte contre le terrorisme et de servir de plateforme pour l’échange d’informations, d’expériences et de pratiques optimales.  La priorité devrait également être accordée à l’éducation et à la formation des forces de l’ordre et du personnel judiciaire à la lutte contre les défis et les menaces contemporains, tant sur une base multilatérale que bilatérale, a recommandé le délégué indiquant que la Russie continuera à fournir activement une assistance pratique dans ce domaine.  Il a, en conclusion, tenu à souligner le potentiel du Comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité, qui devrait à son avis accorder une plus grande attention aux États africains et donner la priorité aux visites d’évaluation. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) s’est inquiétée de l’augmentation du terrorisme et de la violence en Afrique, y compris au Sahel qui recense 43% des décès dus au terrorisme dans le monde en 2022.  Elle a souligné l’importance de la coopération et des organisations régionales qui apportent des connaissances et des perspectives uniques.  Pour que les efforts de l’ONU soient vraiment efficaces, ils doivent s’attaquer aux menaces transnationales de manière plus holistique, notamment en travaillant avec l’UA et les organisations sous-régionales africaines, a-t-elle estimé.  Elle a aussi insisté sur l’importance d’un financement prévisible et durable pour les opérations de paix autorisées par l’ONU et dirigées par l’UA. 

Elle a mis en garde contre les réponses uniquement axées sur la sécurité suggérant des approches qui répondent aux besoins humanitaires, de développement et sociaux pour prévenir le recrutement parmi les populations vulnérables, y compris les jeunes.  Il faut en outre s’attaquer aux racines du terrorisme que sont les déficits de gouvernance et de reddition de compte, le manque de développement, la pauvreté, le manque d’accès à l’éducation, les changements climatiques et les violations des droits humains.  Les mesures de lutte contre le terrorisme doivent être sensibles au genre, garantir la participation des femmes et des jeunes et inclure la société civile et les communautés locales, a-t-elle également souligné. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a rappelé l’importance fondamentale de la coopération dans la lutte antiterroriste, avant de saluer le récent déploiement de la SADC au Mozambique.  Il faut tarir les sources de financement des groupes terroristes, a-t-il dit, en rappelant leurs liens avec les groupes criminels.  Il a plaidé pour des solutions adaptées face au défi de l’utilisation des nouvelles technologies à des fins terroristes.  Le délégué a ensuite plaidé pour l’élaboration de stratégies régionales et sous-régionales face au terrorisme.  Le prochain examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies doit être l’occasion d’apporter un appui renforcé aux organisations régionales, a estimé le délégué.

M. VINCENT BIRUTA, Ministre des affaires étrangères du Rwanda, a estimé que les missions traditionnelles de maintien de la paix, « à elles seules », ne se sont pas révélées suffisamment efficaces pour relever le défi du terrorisme et de l’extrémisme violent.  Avec le soutien du Conseil de sécurité, nous avons besoin d’approches plus robustes et pragmatiques, adaptées aux contextes locaux, a-t-il préconisé.  Ainsi, dans le cadre d’un mécanisme bilatéral et à la demande des deux gouvernements, le Rwanda a déployé des troupes au Mozambique et en République centrafricaine.  Cette approche rapide et efficace nécessite cependant un financement durable, afin de créer une base solide à partir de laquelle les forces multilatérales pourront prendre le relais, a demandé le représentant.

La mesure d’assistance récemment prise dans le cadre de la Facilité européenne pour la paix pour soutenir le déploiement des forces de défense rwandaises au Mozambique est une étape essentielle pour garantir que de telles interventions bilatérales puissent être viables financièrement, a-t-il insisté.  Selon lui, un cadre de coopération efficace entre l’ONU et les mécanismes régionaux devrait également prioriser la reconstruction postconflit, en coopération avec les communautés locales.  « En fin de compte, l’unité nationale et la bonne gouvernance créent des conditions durables pour la paix.  L’histoire tragique de notre pays nous l’a appris », a ajouté le représentant.  Il a ajouté que la représentation des pays africains au sein du Conseil de sécurité est également essentielle et que l’Afrique ne doit pas être exclue des processus de prise de décisions.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale commémore l’abolition de l’esclavage et de la traite transatlantique, « un crime contre l’humanité qui n’a pas été sans auteur »

Soixante-dix-septième session,
63e séance plénière – matin
AG/12496

L’Assemblée générale commémore l’abolition de l’esclavage et de la traite transatlantique, « un crime contre l’humanité qui n’a pas été sans auteur »

Les appels à une offre éducative transformatrice et à des politiques de réparation ont dominé, aujourd’hui, la séance commémorative consacrée par l’Assemblée générale à l’occasion de la Journée internationale de commémoration des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves, « chapitre sombre et abject » de l’histoire du monde, et véritable « insulte » faite à l’humanité.

« La traite transatlantique de plus de 15 millions de femmes, d’hommes et d’enfants a été un crime contre l’humanité qui n’a pas été sans auteur », a, d’emblée rappelé le Président de l’Assemblée générale en évoquant tous les acteurs -États, banques, compagnies d’assurances- qui ont tiré profit de ce crime. 

M. Csaba Kőrösi, a parlé de l’émotion ressentie au Ghana lorsqu’il a visité les prisons où étaient détenus les esclaves avant leur déportation, avant de souligner la nécessité d’enseigner cette histoire afin d’éliminer les vestiges du racisme.  « Il faut enseigner la traite mais aussi le soulèvement de 1791 à Saint Domingue, l’histoire de Palmares au Brésil et l’apport des grandes figures, telles que Frederick Douglass et Harriet Tubman », a-t-il déclaré. 

Même son de cloche du côté du Secrétaire général, M. António Guterres, qui a rappelé que « cette injustice colossale » a duré plus de 400 ans, avant de faire le lien entre l’exploitation coloniale et les inégalités mondiales actuelles.  L’ombre de l’esclavage plane sur les peuples africains traumatisés par leur passé, a-t-il dit, en demandant une amélioration des programmes scolaires.  « Il faut raconter cette histoire pour que les fantômes ne nous hantent plus », a appuyé Mme Djamila Ribeiro. 

Cette philosophe brésilienne et lauréate du prix littéraire Jabuti a en effet indiqué que cette histoire a été mise délibérément sous le boisseau au Brésil, qui a été, comme elle l’a rappelé, le dernier pays des Amériques à avoir abolir l’esclavage.  Mme Taylor Cassidy, représentante de la jeunesse, a également signalé que l’histoire de l’esclavage a longtemps été une « note de bas de page » de l’histoire des États-Unis. 

« Je me tiens devant vous en tant que diplomate représentant fièrement mon pays mais aussi en tant que descendante d’esclave », a déclaré à son tour la représentante des États-Unis qui a fait savoir que trois générations seulement la séparent de son ancêtre esclave.  Elle a assuré de la détermination de l’Administration Biden à améliorer les conditions de vie des communautés noires et de protéger leurs droits. 

À son tour, le représentant du Brésil a fait savoir que le droit fédéral brésilien prévoit l’enseignement de l’histoire de l’esclavage, indiquant en outre qu’un mémorial a été construit à Valongo où ont débarqué plus de 900 000 esclaves africains.  Le Secrétaire général a insisté dans son discours sur l’importance de tels mémoriaux, en mentionnant l’Arche du retour érigée au Siège des Nations Unies. 

Mais ce sont bien les appels à une justice réparatrice qui ont dominé la réunion.  Mme Ribeiro en a souligné la nécessité, en rappelant que les « différents gouvernements de droite » au Brésil ont longtemps entravé une telle justice.  Les États concernés ne devraient pas avoir peur d’accepter leurs responsabilités et de prendre des mesures de réparation, a appuyé la Sierra Leone, au nom du Groupe des États d’Afrique. 

À l’instar de la Chine, le délégué des Bahamas, au nom du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes, s’est appuyé sur la Déclaration de Durban pour demander de telles mesures, en espérant que l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine, qui doit se réunir à New York fin mai, aboutira à une déclaration en ce sens. 

« Chaque fois qu’il y a eu dommage, il faut une réparation », a insisté la Barbade, au nom de la Communauté des Caraïbes, en se référant également à ladite Déclaration.  Dans ce droit fil, le délégué du Cameroun a estimé que seule la réparation permettra de « parachever la réconciliation des cœurs » et « d’exorciser le mal ».  Or les propriétaires d’esclaves ont été indemnisés lors de l’abolition de l’esclavage, mais pas les esclaves et leurs descendants qui « attendent toujours l’hirondelle qui annonce le printemps », qui est en réalité « un serpent de mer », a-t-il regretté.

Le monde entier a une dette morale envers Haïti qui a obtenu son indépendance le 1er janvier 1804 après une lutte acharnée contre les Français, a appuyé pour sa part le délégué haïtien, en louant « l’histoire glorieuse » de son pays à rebours « des clichés misérabilistes » véhiculés par les médias occidentaux à l’endroit d’Haïti. 

« Nous allons prendre des mesures concrètes pour éradiquer les discriminations raciales et éliminer le racisme », a promis le délégué du Luxembourg, au nom du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États, en appelant à lutter contre les causes profondes de ce fléau.  À l’instar des États-Unis, le délégué a exhorté tous les pays à rejoindre la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité rejette un projet de résolution russe demandant la création d’une commission d’enquête sur le sabotage des gazoducs Nord Stream

9295e séance - après-midi
CS/15243

Le Conseil de sécurité rejette un projet de résolution russe demandant la création d’une commission d’enquête sur le sabotage des gazoducs Nord Stream

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, rejeté un projet de résolution présenté par la Fédération de Russie, dans lequel le Secrétaire général de l’ONU était prié de créer une commission d’enquête internationale indépendante pour faire la lumière sur le sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2 et en identifier les « auteurs, commanditaires, organisateurs et complices ». 

Le texte mis aux voix n’a réuni que 3 voix favorables (Brésil, Chine et Fédération de Russie), les 12 autres membres du Conseil s’étant abstenus.  Pour qu’un projet de résolution soit adopté, 9 voix au moins sont nécessaires, sans qu’un membre permanent n’exerce son droit de veto. 

Formé de deux gazoducs reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique, Nord Stream est destiné à faciliter l’acheminement du gaz russe en Europe. Perpétré le 26 septembre 2022, le sabotage a entraîné d’importantes fuites de gaz. 

La Fédération de Russie a regretté l’issue du vote, qui montre clairement « dans quel monde nous vivons et vers quel monde nous nous acheminons », à l’opposé de celui dans lequel elle a dit aspirer à vivre, un monde « où le droit international est respecté et où les responsables de tels actes doivent en rendre compte ».  La commission d’enquête qu’il était proposé de créer aurait été composée d’experts « confirmés et impartiaux de renommée mondiale », choisis par le Secrétaire général. 

La délégation russe a expliqué qu’elle avait pris l’initiative de préparer ce projet de résolution en raison de ses doutes sérieux « et très légitimes » quant à « l’objectivité » et à « la transparence » des enquêtes menées au niveau national par l’Allemagne, le Danemark et la Suède.  Malheureusement, ces pays n’ont manifesté aucune intention de coopérer avec le sien, l’un des plus touchés par ce sabotage, a déploré la Russie. 

Elle a rejeté l’objection principale des membres du Conseil défavorables à ce texte, selon lesquels les enquêtes nationales en cours doivent être menées à leur terme, quand bien même cela signifie qu’elles peuvent s’éterniser et s’avérer inefficaces.  Le temps passe, a poursuivi la Russie, soupçonnant qu’en lieu et place de faire la lumière sur les circonstances du crime, on cherche en réalité à « nettoyer » la scène du crime en dissimulant les preuves. 

Les États-Unis ont au contraire vu dans l’initiative russe, animée selon eux d’une « présomption de culpabilité », une tentative de discréditer ces enquêtes en préjugeant à dessein de leurs conclusions.  La délégation américaine a en outre catégoriquement rejeté les allégations de la Russie, en révélant que la première mouture de son texte déformait les propos tenus par des responsables gouvernementaux américains.  Les États-Unis, comme du reste le Royaume-Uni et l’Albanie, se sont par ailleurs étonnés de l’intérêt porté par la Fédération de Russie à la protection d’infrastructures essentielles, compte tenu de son acharnement à détruire celles de l’Ukraine.  

Regrettant lui aussi que le texte ait été rejeté, en dépit de ses efforts pour rapprocher les points de vue, le Brésil a dès lors encouragé les autorités responsables des enquêtes en cours à partager leurs conclusions avec le Conseil « dans les meilleurs délais ».  Or, les informations préliminaires transmises par des pays européens indiquent qu’il s’agit d’un acte de sabotage commis avec la complicité possible « d’un acteur étatique », s’est inquiétée cette délégation.  Pour la Chine, une commission d’enquête internationale indépendante aurait pu se porter garante du traitement des éléments de preuve par les enquêtes nationales.  Si les pays concernés n’en veulent pas, comment ne pas penser qu’ils cherchent à cacher quelque chose, s’est demandé la délégation chinoise. 

Si le Ghana a jugé bon lui aussi d’attendre la fin des enquêtes en cours, il n’en reste pas moins selon lui que celles-ci doivent être accélérées et limitées dans le temps, en tenant les autorités et les opérateurs russes informés et en sollicitant leur coopération au besoin.  Il est tout aussi important, a ajouté le Ghana, que le Conseil de sécurité soit régulièrement informé.   

« Un requiem »: voilà ce que le Gabon a vu dans le vote d’aujourd’hui, ou encore « le glas » de l’établissement des responsabilités, car comment faire accepter désormais à un État une enquête internationale susceptible d’aller à l’encontre de ses intérêts?  « Nous, les Africains, nous ne savons pas s’il faut nous réjouir ou nous attrister de ce revirement et de cette confusion », a déclaré le représentant de ce pays pour expliquer son abstention.  Une page d’incertitudes s’ouvre aujourd’hui pour les peuples du monde qui risquent « plus que jamais » de se retrouver à la merci des intérêts nationaux.  « C’est tant mieux pour la souveraineté nationale et tant pis pour l’impartialité, la transparence et l’indépendance », a résumé la délégation gabonaise. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Explications de vote

Le représentant de la Fédération de Russie a rappelé avoir pris l’initiative de préparer un projet de résolution sur le sabotage des gazoducs Nord Stream en raison de ses doutes sérieux « et très légitimes » quant à l’objectivité et à la transparence des enquêtes nationales menées par certains États européens.  « Malheureusement, ces derniers n’ont manifesté aucune intention de coopérer avec les parties concernées, en particulier avec mon pays, l’un des plus touchés par cet acte, pour faire toute la lumière sur ce crime qui a mis en péril divers aspects de la paix et de la sécurité internationales », a déploré le délégué. 

C’est pourquoi la Russie propose au Conseil d’adopter une résolution demandant au Secrétaire général de former une commission internationale indépendante chargée de mener une enquête exhaustive, transparente et impartiale sur les circonstances du sabotage des gazoducs, a expliqué le délégué.  Dans la phase finale des négociations du texte, il a noté n’avoir entendu comme seul argument, de la part des collègues qui doutaient de l’opportunité d’une telle enquête, qu’il fallait d’abord attendre que celles menées au niveau national soient achevées.  « Nous aimerions répondre que ces dernières peuvent durer des années et être inefficaces et non transparentes », a-t-il rétorqué. 

Le représentant s’est inquiété qu’un temps précieux s’écoule.  On soupçonne de plus en plus que ces enquêtes ne visent pas à clarifier les circonstances du sabotage, mais bien à dissimuler des preuves et à « nettoyer » la scène du crime, a-t-il commenté, estimant que le Conseil a la responsabilité de répondre à ces actes.  Il a fait valoir que l’initiative de son pays ne limite en rien les enquêtes conduites au niveau national.  Nous appelons donc le Conseil à soutenir le projet, a demandé le délégué, qui a estimé que son adoption adresserait un signal clair que de tels sabotages sont inacceptables et que leurs auteurs doivent être tenus pour responsables.  « Nous sommes convaincus qu’il en va de l’intérêt de tous les États et de la communauté internationale dans son ensemble. » 

Le représentant des États-Unis a réfuté catégoriquement « les allégations infondées portées à l’encontre de son pays par la Fédération de Russie ».  Les États-Unis n’ont pas participé à cet acte de sabotage, « point final », a-t-il martelé.  Réaffirmant que la communauté internationale ne peut tolérer que des actes endommagent des infrastructures essentielles, il a vu dans le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie une tentative de discréditer les enquêtes nationales actuellement menées et de préjuger de leurs conclusions, lesquelles pourraient aller à l’encontre des accusations formulées par la Fédération de Russie.  Selon lui, les enquêtes en cours en Allemagne, au Danemark et en Norvège se déroulent normalement et doivent pouvoir aller à leur terme.  Le représentant s’est ensuite demandé pourquoi la Fédération de Russie a choisi de mettre aux voix ce projet de texte.  Il a relevé que si ce pays prétend vouloir mettre en place une enquête impartiale et objective, la première mouture de son projet de résolution impliquait les États-Unis en déformant les propos de responsables américains.  Au cours des négociations sur le texte, a-t-il ajouté, la Fédération de Russie n’a pas réussi à justifier le bien-fondé d’une enquête des Nations Unies, d’autant plus qu’elle continue de s’appuyer sur une présomption de culpabilité.  Pour le délégué, on ne peut pas laisser ces allégations infondées détourner des ressources de l’ONU.  Si la Fédération de Russie voulait vraiment protéger les infrastructures civiles, elle le démontrerait dans ses actes; or elle cible des villes entières en touchant des infrastructures civiles et médicales, a-t-il rappelé, jugeant par conséquent que les mots de la délégation russe « sonnent creux ». 

Le représentant du Gabon a estimé que le vote d’aujourd’hui est un moment « sombre » pour les enquêtes internationales.  C’est « un requiem » ou tout au moins, un tunnel ténébreux pour un établissement indépendant et impartial les responsabilités pour des faits illicites aux conséquences internationales.  Avec ce vote, il sera difficile de faire accepter à un État une enquête internationale qui irait à l’encontre de ses intérêts.  Nous les Africains, nous ne savons pas s’il faut nous réjouir ou nous attrister de ce revirement et de cette confusion, a avoué le représentant.  C’est précisément cette confusion qui sous-tend notre abstention, a-t-il expliqué.  Il va de soi, a-t-il poursuivi, que personne n’acceptera plus de personne « des leçons de morale » face à des faits repréhensibles et menaçant la sécurité internationale.  De façon évidente, « le glas » de la responsabilité internationale, qui sonne aujourd’hui, ouvre fatalement une page d’incertitudes pour les peuples du monde qui, dans la détresse, subissent actes ou faits illicites menaçant la sécurité internationale.  Ces peuples, a prévenu le représentant, risquent plus que jamais de se retrouver à la merci des intérêts nationaux.  C’est tant mieux pour la souveraineté nationale et tant pis pour l’impartialité, la transparence et l’indépendance.

La représentante du Ghana a expliqué qu’elle s’est abstenue non pas en raison d’une opposition aux enquêtes internationales, mais bien du fait qu’à ce stade, trois enquêtes sont déjà menées par les autorités nationales compétentes qui se sont engagées en faveur d’un processus équitable et impartial pour établir la vérité sur cet acte délibéré de sabotage.  Notant un certain mécontentement face à la conduite de ces enquêtes, la représentante a néanmoins estimé qu’il est sans doute prématuré de lancer ou de préconiser des investigations internationales parallèles, sous les auspices d’une Organisation qui n’a pas les moyens requis.  Lors des deux réunions précédentes, le Ghana, a-t-elle rappelé, a exhorté toutes les parties à faire preuve de retenue et à coopérer, de bonne foi, aux enquêtes nationales en cours.  Cet appel est toujours de mise aujourd’hui, a-t-elle dit.  Nous exhortons ces parties à favoriser la confiance et à éviter toute action unilatérale susceptible de saper les efforts d’établissement des faits et des responsabilités. 

Soulignant toutefois la responsabilité du Conseil de sécurité, la représentante a insisté sur le fait que les enquêtes nationales en cours doivent être accélérées, limitées dans le temps, en tenant les autorités et les opérateurs russes informés et en sollicitant leur coopération si nécessaire.  Il est tout aussi important, a-t-elle poursuivi, que le Conseil de sécurité soit régulièrement informé.  Elle a appelé au respect de la résolution 2341 (2017) sur la protection des infrastructures critiques, en particulier de type transnational.  En tant que Conseil, ce Conseil, a conclu la représentante, doit travailler, de manière constructive et d’une voix unifiée, condamner fermement les attaques actuelles, afin d’envoyer un message fort sur le fait que des attaques contre des infrastructures critiques comme les gazoducs ne seront pas tolérées par la communauté internationale.

Le représentant de l’Équateur a expliqué que les améliorations apportées au texte par la Fédération de Russie demeurent insuffisantes pour justifier de voter en faveur, d’autant plus que des accusations sont portées contre l’impartialité des enquêtes menées au niveau national par certains des pays concernés.  Il a affirmé faire pleinement confiance aux autorités chargées de ces enquêtes, qui, a-t-il souligné, doivent être poursuivies et menées à leur terme. 

La représentante de Malte a constaté que les informations présentées à l’appui du projet de résolution ne sont pas corroborées par des éléments de preuve crédibles.  De plus, a-t-elle ajouté, il est important que les processus nationaux puissent se poursuivre sans ingérence.  C’est pourquoi nous nous sommes abstenus lors du vote, convaincus que toute enquête menée par les Nations Unies à ce stade serait prématurée et saperait l’intégrité de celles qui sont en cours, s’est expliquée la représentante. 

La représentante de la Suisse a indiqué s’être abstenue, au motif que mandater une enquête supplémentaire alors que de multiples investigations sont en cours « n’apporterait pas d’avantages à ce stade ».  La Suisse préfère attendre les résultats des enquêtes nationales actuellement menées par le Danemark, l’Allemagne et la Suède pour faire la lumière sur les faits, a-t-elle précisé. 

La représentante du Japon, qui a expliqué s’être abstenue lors du vote, a estimé que le Conseil devrait d’abord permettre aux enquêtes nationales de s’achever, puis examiner les moyens d’aller de l’avant sur la base de leurs résultats. 

Le représentant du Royaume-Uni a témoigné son soutien aux enquêtes menées par l’Allemagne, le Danemark et la Suède, estimant qu’il n’est pas nécessaire à ce stade d’ouvrir une enquête internationale, d’autant que la Russie semble avoir déjà conclu aux responsabilités du sabotage.  Il a jugé difficile par ailleurs de prendre au sérieux les accusations de la Fédération de Russie selon lesquelles des attaques viseraient des infrastructures, « à la lumière de celles qu’elle lance de manière répétée en Ukraine ». 

La représentante de la France a rappelé que les informations disponibles indiquent que les explosions qui ont frappé les gazoducs Nord Stream sont le résultat d’un acte délibéré et ont une origine humaine.  Ces événements sont sans précédent et doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies, a-t-elle dit, avant de justifier l’abstention de sa délégation par le fait que des enquêtes sont précisément en cours.  Elles ont été diligentées par l’Allemagne, le Danemark et la Suède et nous n’avons aucune raison de douter de leur sérieux et de leur impartialité, a-t-elle insisté, plaidant pour que ces enquêtes aillent à leur terme.  La France regrette que la Russie ait fait le choix de demander un vote qu’elle savait « perdu d’avance », a ajouté la représentante, en s’étonnant du zèle avec lequel la Russie demande aux Nations Unies de diligenter une enquête alors même qu’elle a d’ores et déjà attribué les responsabilités dans cette affaire.  « On ne peut que douter, dès lors, de la sincérité de sa démarche », a-t-elle conclu. 

Le représentant de l’Albanie a déclaré être préoccupé face aux sabotages des gazoducs Nord Stream.  Le représentant a dit qu’il soutient le lancement et le bon déroulement des enquêtes nationales par l’Allemagne, la Suède et le Danemark.  L’Albanie appuie les commissions d’enquête de l’ONU lorsqu’elles ont reçu leur mandat mais pour le moment il ne semble pas intéressant de mener des enquêtes parallèles.  Toute tentative de discréditer ou de politiser ces enquêtes en cours y compris en accusant délibérément des États ou se reposant sur des éléments de la presse, va dans la mauvaise direction et ne peut compter sur notre appui.  Le représentant a questionné la crédibilité de la Russie qui détruit de façon intentionnelle les infrastructures civiles en Ukraine avec des conséquences mortelles.  Il a aussi dénoncé le comportement cynique de la Russie en expliquant son abstention.

Le représentant de la Chine, qui a voté en faveur de ce projet de résolution, a fait part de la préoccupation de sa délégation face aux conséquences sur les plans énergétique, environnemental et de la navigation des actes de sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2 en septembre dernier.  Il a estimé que tous les pays ont intérêt à diligenter des enquêtes impartiales et sérieuses dont les résultats doivent être rendus publics le plus rapidement possible, pour que les responsables aient à rendre des comptes.  Par conséquent, il s’est dit favorable à autoriser l’ONU à créer une commission d’enquête internationale indépendante et a regretté le résultat du vote.  S’adressant aux membres qui ne jugent pas nécessaire que le Conseil autorise une telle commission, parce que des enquêtes nationales sont déjà en cours, il a fait remarquer que les enquêtes nationales et internationales ne sont pas contradictoires, au contraire.  Une commission d’enquête internationale indépendante pourrait être favorable au bon déroulement des enquêtes en cours, notamment en étant la garante du bon traitement des éléments de preuve, et renforcer la crédibilité des enquêtes nationales, a-t-il argumenté.  S’adressant aussi à ceux qui ont parlé de spéculation aujourd’hui, il leur a retorqué qu’une telle commission serait la meilleure façon de réagir aux allégations sans fondements.  Si les pays concernés accueillaient à bras ouvert cette commission, ils pourraient avoir la conscience tranquille, mais s’ils ne souhaitent pas qu’une telle enquête ait lieu, on peut penser qu’ils cherchent à cacher quelque chose, a-t-il supputé.  Dans tous les cas de figure, il a exigé que les auteurs de ces actes aient des comptes à rendre, en espérant que les pays qui mènent actuellement des enquêtes nationales travailleront en toute transparence et feront, en temps voulu, des exposés au Conseil de sécurité. 

Regrettant le résultat du vote, le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé les « informations contradictoires » et les « thèses absurdes » qui ont circulé dans les médias vis-à-vis des auteurs présumés de ces actes de sabotage.  Il a aussi regretté que les tentatives de la Fédération de Russie, « en tant que pays concerné », de participer à ces enquêtes se soient heurtées à un refus catégorique.  Il a donc posé une question aux États-Unis: « Qu’ont-ils trouvé dans notre projet de résolution qui soit prédéterminé? »  Il n’y a pas un mot sur l’Ukraine dans ce projet de résolution, a fait par ailleurs observer le délégué.  Il a affirmé que Washington et ses alliés tentent aujourd’hui d’effacer les traces de ce sabotage en propageant des « versions fantaisistes » et en essayant de dissimuler des faits qui risquent de contredire les versions qu’ils ont promues jusqu’à présent.  « Si les États-Unis souhaitaient vraiment établir des responsabilités, eh bien, ils agiraient différemment aujourd’hui », a tranché le représentant, pour qui ce vote montre clairement « dans quel monde nous vivons et vers quel monde nous nous acheminons ».  Quant à nous, a dit le délégué russe, nous souhaitons vivre dans un monde où le droit international est respecté, un monde où les responsables d’actes comme celui-ci doivent en rendre compte. 

La représentante des Émirats arabes unis a reconnu l’importance des enquêtes nationales menées par le Danemark, l’Allemagne et la Suède, tout en estimant que la communauté internationale doit diligenter des enquêtes supplémentaires et collaborer, en particulier en termes de partage des éléments de preuve.  À ce sujet, elle a salué l’invitation lancée par les autorités du Danemark en vue d’une collaboration ultérieure entre les différentes parties prenantes pertinentes.  Elle a indiqué s’être abstenue parce que des enquêtes nationales sont encore en cours. 

Le représentant du Brésil a tout d’abord fait valoir que toute proposition d’un membre du Conseil de sécurité doit être examinée de façon « respectueuse et objective ».  Il a ensuite indiqué que, lors des négociations, son pays a fait des propositions d’amendement au projet de résolution pour rapprocher les points de vue et parvenir à un consensus: c’est pourquoi il a voté pour.  Le représentant a également rappelé que, lors de sa séance du 30 septembre 2022, le Conseil a qualifié ces actes de menace contre la paix et la sécurité internationales.  Les informations préliminaires transmises par des pays européens indiquent qu’il s’agit d’un acte de sabotage avec l’implication possible d’un acteur étatique, a-t-il souligné, avant de constater que, six mois après les faits, on ne sait pas encore qui l’a causé.  Jugeant que la prudence des pays menant des enquêtes nationales est justifiée, il a plaidé pour que des efforts supplémentaires « plus globaux » soient menés par l’ONU.  La création d’une commission d’enquête par le Secrétaire général permettrait, selon lui, d’aider le Conseil dans ses prises de décision.  Comme le projet de texte n’a pas été adopté, le représentant a encouragé les autorités responsables d’enquêtes en cours à partager leurs conclusions avec le Conseil dans les meilleurs délais.  La gravité de la question exige une réponse rapide et transparente à toutes les préoccupations des États Membres, a-t-il conclu.

Le représentant des États-Unis a repris la parole pour réagir aux propos de son homologue russe.  Depuis que les actes de sabotage contre les gazoducs Nord Stream ont eu lieu, la Fédération de Russie a pointé du doigt les États-Unis, a-t-il dénoncé, avant de juger que les commentaires du représentant russe confirment que son pays n’entend pas diligenter une enquête impartiale puisqu’il a déjà décidé qui était coupable.  Accusant la Fédération de Russie de jouer là un « jeu politique », il a souligné que les trois pays qui ont lancé une enquête sur les faits s’inquiètent, eux, du sort des infrastructures essentielles dans le monde.  Il faut que ces enquêtes aillent à leur terme, a-t-il répété.  Pour lui, le fait que la Fédération de Russie se préoccupe du sort de ces infrastructures est un « bon signe ».  Il l’a toutefois invitée à faire preuve de la même préoccupation pour les infrastructures essentielles ukrainiennes.

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a dit que les révélations de M. Hersh ne désignaient pas les États-Unis comme coupable.  Puis il a demandé à son homologue américain quelle avait été sa réaction aux propos qu’il a attribués au Président des États-Unis, M. Joe Biden, qui aurait dit que « les États-Unis allaient détruire ces gazoducs ». 

Typiquement, la Russie pose une question sans intention réelle d’obtenir une réponse, a commenté le représentant des États-Unis, en reprenant, une nouvelle fois, la parole.  Je n’ai pas lu, a-t-il reconnu, l’article de M. Simon Hersh qu’a mentionné le représentant russe parce que notre politique étrangère ne se base pas sur ce qu’écrit un journaliste dans son coin.  Le représentant a réfuté les accusations de la Russie qui n’a de toute manière aucune crédibilité sur le dossier de la protection des infrastructures essentielles.  Il suffit de voir ce qu’elle fait en Ukraine et plutôt que de poser des questions sur la position américaine, elle ferait mieux de s’interroger sur les actes qu’elle commet dans le territoire ukrainien.  La Russie doit aussi se demander si son comportement traduit vraiment une réelle préoccupation face à la vulnérabilité des infrastructures. 

Le représentant de la Fédération de Russie a réitéré sa question à son homologue des États-Unis se référant à des propos du Président américain qui a dit « nous allons détruire Nord Stream »: « Qu’en pensez-vous? »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Conférence de l’ONU sur l’eau s’engage à donner vie à un programme d’action pour l’eau au service de notre avenir commun

Conférence des Nations Unies sur l’eau
5e & 6e séances plénières, matin & après-midi
ENV/DEV/2057

La Conférence de l’ONU sur l’eau s’engage à donner vie à un programme d’action pour l’eau au service de notre avenir commun

La Conférence des Nations Unies sur l’eau -la première du genre depuis une génération-, qui s’est tenue au Siège de l’ONU à New York du 22 au 24 mars 2023, a été saluée comme une occasion unique d’accélérer les progrès vers l’accès universel à l’eau potable et à l’assainissement d’ici à 2030.  Les engagements pris à cette occasion mettront l’humanité « sur la voie d’un avenir où la sécurité hydrique sera assurée pour chacun et chacune d’entre nous », s’est félicité le Secrétaire général de l’ONU lors de la clôture. 

M. António Guterres a souligné que tous les espoirs de l’humanité reposent, d’une manière ou d’une autre, sur notre capacité à fixer un nouveau cap fondé sur la science pour donner vie au Programme d’action pour l’eau.  L’un des principaux résultats de la Conférence sera en effet le Programme d’action pour l’eau qui recensera tous les engagements volontaires liés à l’eau et suivra leurs progrès.  Le Secrétariat de la Conférence a annoncé en avoir déjà compté 689. 

Le résultat de cette conférence n’est pas un document juridiquement contraignant, mais il tourne la page de l’histoire, a déclaré le Président de l’Assemblée générale.  M. Csaba Kőrösi s’est dit inspiré par « la détermination qui nous unit tous » pour arrêter le gaspillage de l’eau et favoriser le développement durable et le bien-être de l’humanité.  « Nous avons entendu la voix de la science », a-t-il ajouté.  « C’est l’avenir qui vous parle », a salué le Mouvement des jeunes pour le climat.

La Conférence des Nations Unies consacrée à l’examen approfondi à mi-parcours de la réalisation des objectifs de la Décennie internationale d’action sur le thème « L’eau et le développement durable » (2018-2028) a réuni des chefs d’État et de gouvernement, des ministres et des parties prenantes de tous les secteurs pour atteindre ensemble des objectifs convenus au niveau international, notamment l’objectif de développement durable no 6 du Programme 2030 pour un avenir plus juste qui vise à assurer l’accès à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène pour tous.

Au nom des Pays-Bas, Mme Evelyn Wever-Croes, Première Ministre d’Aruba, en sa qualité de coprésidente de la Conférence, a fait savoir que l’enregistrement des engagements relatifs au Programme d’action pour l’eau sera prolongé jusqu’au 1er mai 2023.  Il en sera rendu compte lors de l’examen global de l’ODD 6 qui aura lieu en juillet 2023, à l’occasion du forum politique de haut niveau de l’ECOSOC.

Priant les délégations d’accélérer « considérablement » leurs investissements à cette fin, le Secrétaire général a informé que d’autres mesures de suivi sont à l’étude, notamment la nomination d’un envoyé spécial pour l’eau, qu’une majorité d’intervenants ont appelé de leurs vœux pendant le débat général.  Il s’agit, a dit M. Guterres, de mettre en avant l’eau dans la perspective du Sommet sur les objectifs de développement durable, qui se tiendra au mois de septembre prochain, ainsi que du Sommet de l’avenir en 2024.  En attendant, a-t-il assuré, « je me réjouis de faire le point sur nos progrès lors des réunions politiques de haut niveau de juillet ».

Le Président du Tadjikistan et coprésident de la Conférence, M. Emonali Rahmon, a invité les délégations à « porter la parole de l’action sur l’eau dans le monde entier ».

Pendant trois jours, les pays, rappelant qu’ils sont tous plus ou moins confrontés à une crise hydrique, aggravée par les changements climatiques, ont convenu de l’urgence d’agir de concert pour relever les grands défis liés à l’eau.  Des milliards de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à l’eau.  Or, elle est au cœur du développement durable, ont scandé les délégations.  Elle soutient tous les aspects de la vie sur Terre, et l’accès à une eau salubre et propre est un droit humain fondamental.  Les délégations ont aussi dénoncé des décennies de mauvaise gestion et d’utilisation abusive qui ont intensifié le stress hydrique et menacent la biodiversité.  Cinq dialogues interactifs de haut niveau, organisés en parallèle, leur ont permis de présenter leur expérience et d’échanger des idées.

La Conférence a été marquée par la publication, la même semaine, du rapport de synthèse du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et du Rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau 2023.

Il ne peut y avoir de développement durable sans eau, a résumé le Secrétaire général.  « À l’heure où cette conférence historique touche à sa fin, réaffirmons notre engagement au service de notre avenir commun. »

Le Président de l’Assemblée générale a, sous les applaudissements de la salle, appuyé symboliquement sur un gros bouton bleu, au nom de tous les États Membres, pour donner le coup d’envoi de l’action sur l’eau. 

 

CONFERENCE CONSACRÉE À L’EXAMEN APPROFONDI À MI-PARCOURS DE LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE LA DÉCENNIE INTERNATIONALE D’ACTION SUR LE THÈME « L’EAU ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE » (2018-2028)

Suite du débat général

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a souligné que 70% des décès à déplorer dans les catastrophes naturelles sont liés à l’eau puisque 1,2 milliards de personnes vivent aujourd’hui dans des territoires menacés de crues.  Il a appelé la communauté internationale à agir avec détermination, notant que d’ici à 2050, cinq milliards de personnes connaîtront une situation de stress hydrique au moins un mois par an.  Déjà, un millier d’enfants meurent chaque jour en raison de la consommation d’eau insalubre.  « Ces données préoccupantes montrent que l’eau sera un risque sécuritaire demain et pourra être à l’origine de conflits et de flux migratoires massifs », a averti le Ministre.  Rappelant la mauvaise expérience de son pays qui a dû consentir « des efforts massifs pour se protéger contre des migrants illégaux qui sont agressifs et ne respectent ni nos règles, ni nos lois », il a revendiqué le droit souverain de la Hongrie de décider comment sa société va évoluer et « qui peut vivre avec qui ».  Il faut, a insisté le Ministre, s’attaquer aux causes profondes des phénomènes migratoires, dont les problématiques de l’eau.  La Hongrie a beaucoup investi dans des technologies hydriques et elle est prête à assumer sa part de responsabilité en partageant ces technologies, notamment à travers son aide publique au développement.  C’est ainsi que 800 millions d’euros ont déjà été consentis à des investissements liés á la sécurité hydrique dans plusieurs pays.  Le Ministre a appelé la communauté internationale à prendre au sérieux ces défis liés à l’eau, estimant que l’ONU est l’enceinte privilégiée pour avancer sur ces questions et vérifier que chacun honore les promesses qu’il a faites. 

M. MOHAMED BIN AWAD AL HASSAN (Oman), qui s’exprimait au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), s’est félicité que les États du CCG aient été en mesure d’atteindre 100% de l’objectif de développement durable relatif à l’accès de tous les résidents à l’eau potable et aux services d’assainissement, dans une des régions les plus touchées par le stress hydrique.  En outre, les États du CCG représentent 40% de la capacité mondiale de dessalement et sont classés parmi les meilleurs au monde en termes d’approvisionnement en eau –une eau potable sûre et propre- et de services d’assainissement.  Compte tenu de l’importance que les États du CCG attachent aux ressources en eau, le représentant a cité diverses stratégies pour l’eau lancées par les pays du Golfe, comme l’initiative saoudienne King Abdul Aziz City for Science and Technology visant à utiliser l’énergie solaire pour dessaler l’eau de mer, l’initiative Masdar pour le dessalement de l’eau de mer via des énergies renouvelables, le projet d’eau « Nasser Wells » lancé à Aden et financé par le Koweït, les initiatives Kahramaa au Qatar concernant le développement durable, et les initiatives Water Valorization et Mulhamoon de Bahreïn.  Toute ces initiatives, a expliqué le représentant, ont pour objectif de renforcer les écosystèmes environnementaux, de répondre à la demande croissante en eau, d’assurer un approvisionnement et une utilisation efficaces de l’eau, de recycler et réutiliser l’eau, de réduire les fuites dans les réseaux d’eau et de sensibiliser la société à l’importance de l’eau.  Pour finir, les États du CCG soutiennent les idées et les initiatives visant à renforcer la coopération et les échanges scientifiques et techniques dans le domaine de l’eau, y compris l’appel du Secrétaire général de l’ONU à intensifier et à stimuler la coopération internationale en fournissant des technologies de l’eau aux pays en développement, « sans restriction et à des prix préférentiels ». 

M. ARDUEN KARAGJOZI, Directeur de l’Agence de gestion des ressources en eau de l’Albanie, dont le pays partage des cours d’eau avec quatre pays voisins, est venu annoncer aujourd’hui une excellente nouvelle: la création, ce mois-ci, d’un parc national hydrique qui protège la dernière rivière sauvage d’Europe, la Vjosa.  Il a espéré que cette initiative, la première du genre, puisse servir d’exemple sur le continent.  Le Gouvernement albanais a fait preuve de sa volonté de contribuer concrètement aux efforts internationaux et d’améliorer la gestion des ressources en eau pour le pays et la région des Balkans, a assuré l’intervenant. 

M. PHILIP KARIMU LANSANA, Ministre des ressources hydriques de la Sierra Leone, a expliqué que son pays était déterminé à réaliser l’ODD 6.  Un plan directeur a mis en lumière la nécessité de construire trois nouveaux barrages pour alimenter Libreville, la capitale, en eau potable.  L’infrastructure de Libreville a été réhabilitée avec des partenaires et le Gouvernement a entrepris des projets similaires dans trois capitales régionales.  Le pays, a assuré le Ministre, est déterminé à prévenir les déboisements pour protéger les nappes phréatiques.  Le premier fonds pour l’eau d’Afrique de l’Ouest a été créé en Sierra Leone afin de faciliter les investissements et de préserver les réserves forestières de l’ouest du pays.  Concernant l’accès au financement, le Ministre a appelé l’ONU à encourager les bailleurs de fonds et les pays développés à revoir les prêts à la hausse et à annuler la dette des pays les moins avancés (PMA).  Les déséquilibres commerciaux entre pays développés et pays en développement sont une source de préoccupation, a-t-il conclu

M. NACIM GAOUAOUI (Algérie) a espéré que la Conférence permettra de faire un pas de géant dans la réalisation des ODD.  Parler d’une crise hydrique n’est pas exagéré, c’est plutôt décrire de manière objective le phénomène auquel l’humanité fait face dans son ensemble, a déclaré le représentant, en ajoutant que l’Algérie fait de cette question une priorité.  Son gouvernement a d’ailleurs adopté des stratégies et politiques qui ont poussé à la hausse l’indice de développement et élargi l’accès à l’eau pour un grand nombre de personnes.  En 2022, plus de 97% de la population a eu accès à l’eau et 95% sont reliés aux réseaux d’assainissement.  L’utilisation quotidienne moyenne d’eau potable a augmenté pour atteindre environ 200 litres par jour dans 80% du pays, s’est encore félicité le représentant.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a expliqué que les ressources hydriques de son pays font l’objet de pressions, notamment sous l’effet de la croissance démographique et agricole, de l’urbanisation rapide et de l’industrialisation.  Il s’est félicité que ses partenaires, dont le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), appuient son gouvernement afin de pouvoir élargir les services en matière d’eau et d’assainissement en coopération avec les autorités locales.  Cependant, a-t-il fait remarquer, les lacunes de financement continuent de remettre en cause les progrès dans ce domaine, et ce, malgré une récente augmentation du budget de ce secteur.  Les ressources sont insuffisantes pour répondre à la demande, a déploré le diplomate.

Il a estimé à 324 millions de francs le montant nécessaire pour que son pays assure une couverture à 100% des services de base et à environ un million le montant de l’enveloppe pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD) relatifs à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène.  Par ailleurs, la topographie du Rwanda crée une grande dépendance vis-à-vis des pompes à eau, a-t-il indiqué.  De plus, la pollution, la déforestation et la dégradation des terres sont autant de facteurs qui nuisent au secteur.  En outre, l’absence de service dans les zones rurales et le manque de données relatives aux consommateurs est une autre source de préoccupation pour son gouvernement.  Pour finir, le représentant a annoncé que le Rwanda est en train de mener une étude sur les cours d’eau transfrontaliers avec le concours des pays voisins.

M. TEBURORO TITO (Kiribati) a fait remarquer que le remplacement de la collecte manuelle de l’eau de puits par des pompes électriques administrées par le Gouvernement a donné naissance à une nouvelle mentalité, qui s’est traduite par une mauvaise gestion des ressources hydriques par l’ensemble de la population.  En tant qu’atoll, Kiribati est l’un des pays les plus vulnérables aux pénuries d’eau, a alerté le représentant, qui s’est inquiété parallèlement des grandes marées et tempêtes qui inondent les zones côtières et contaminent l’eau potable.  Il a également évoqué les sécheresses prolongées dues au phénomène météorologique La Niña, conduisant le Gouvernement à déclarer, en juin 2022, l’état de catastrophe en raison d’une sécheresse prolongée.  À cela s’ajoute l’urbanisation de la capitale de Tarawa-Sud, où la croissance et la densité démographiques augmentent à un rythme insoutenable.  Mener une guerre sur deux fronts simultanément, pour résoudre les problèmes liés à l’eau et aux changements climatiques, n’est pas une mince affaire, surtout pour une petite nation insulaire comme Kiribati qui ne dispose que de ressources très limitées pour faire face aux catastrophes naturelles, a expliqué son représentant.  S’il a jugé « louables » les promesses et programmes d’aide importants d’ores et déjà mis en œuvre pour améliorer l’accès à l’eau potable, en particulier pour les PEID, le délégué a admis que l’arsenal existant pour lutter contre les pénuries reste insuffisant.

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie), dont le pays est l’un des plus riches en eau de surface et en eau souterraine au monde, a indiqué que les ressources hydriques disponibles par habitant dépassent largement la consommation.  De fait, a détaillé le représentant, la Lettonie compte plus de 2 000 lacs, plus de 12 000 rivières et près de 500 kilomètres de littoral sur la mer Baltique.  Dans son pays, les sécheresses régulières et de longue durée ou les problèmes de pénurie d’eau ne sont pas typiques, s’est-il réjoui.  Toutefois, a-t-il nuancé, en raison des changements climatiques, les épisodes météorologiques extrêmes deviennent plus fréquents et plus longs, avec des répercussions négatives sur la qualité et la disponibilité de l’eau.  Cet hiver, par exemple, des inondations anormalement précoces ont mis à rude épreuve les infrastructures locales.  En outre, l’état de l’environnement de la mer Baltique reste préoccupant, s’est inquiété le diplomate.  C’est pourquoi son pays, tout en s’estimant « chanceux » de disposer de ressources en eau, partage l’inquiétude que suscite le stress hydrique dans le monde.  Pour finir, il a évoqué la stratégie de politique environnementale récemment adoptée pour 2022-2027, qui comprend des dizaines d’actions et de mesures liées à l’eau, allant de la prévention de la pollution et de la réduction des risques d’inondation à l’utilisation efficace des ressources en eau et à l’amélioration des eaux marines.

M. ANDREAS HADJICHRYSANTHOU (Chypre) s’est prononcé pour une gouvernance de l’eau plus inclusive et globale, avec un fort accent sur les droits humains.  Nous devons accroître notre niveau de conscience sur les interdépendances des défis de l’eau et trouver des moyens d’intégrer le droit à un environnement sain, ainsi que le droit à l’eau et à l’assainissement, a plaidé le représentant, pour qui l’ONU a un rôle central à jouer dans ce cadre.  Appelant à la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau, il a souligné l’importance de la sécurité et de la conservation de l’eau pour son pays, qui fait partie des États membres de l’Union européenne avec le moins d’eau disponible par habitant.  Alors que la région de la Méditerranée orientale et du Moyen-Orient a été classée comme point chaud des changements climatiques mondiaux, Chypre connaît déjà une diminution significative des précipitations et une augmentation de la température moyenne.  Afin de résoudre le problème, le délégué a encouragé l’utilisation de ressources en eau non conventionnelles, telles que le dessalement et la réutilisation de l’eau.  Cette dernière option offre une protection significative contre la sécheresse et réduit la dépendance de l’approvisionnement en eau vis-à-vis des précipitations, a-t-il expliqué, avant d’insister sur la nécessité de garantir les ressources nécessaires, en particulier pour la construction, l’exploitation et l’entretien d’infrastructures robustes pour la fourniture de services d’eau et d’assainissement, d’une manière résiliente au climat.

M. CARLOS FULLER (Belize) a indiqué que son pays est directement touché par les problèmes soulevés dans le dernier rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui décrit les graves implications des changements climatiques pour le secteur de l’eau.  Pour répondre à la demande quotidienne en eau du secteur touristique, des systèmes d’osmose inverse de l’eau salée ont dû être installés pour fournir de l’eau potable à deux des destinations touristiques les plus populaires, et dans la troisième, l’eau doit être apportée quotidiennement par appel d’offres jusqu’à ce qu’un système de distribution d’eau soit finalisé.  Le système municipal d’approvisionnement en eau de Belize City, le plus grand centre urbain, est mis à rude épreuve et la compagnie des eaux a du mal à répondre à la demande de cette ville en pleine expansion.  Le Gouvernement, a expliqué le représentant, prend des mesures avec le soutien du Fonds vert pour le climat:  utilisation de la géophysique pour l’étude des aquifères avec le soutien de la Banque interaméricaine de développement; conception du premier réseau de surveillance des eaux souterraines du pays dans le district d’Orange Walk avec l’aide du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE); extension du réseau de surveillance des eaux de surface sur la New River avec le soutien du projet MesoAmerican Ridge to Reef du Fonds pour l’environnement mondial (FEM); élaboration d’un protocole de surveillance de la qualité de l’eau avec le soutien du Partenariat Japon-Caraïbes sur les changements climatiques.  Le représentant a également cité la mise en place de systèmes d’irrigation dans certaines zones afin d’atténuer les épisodes de sécheresse. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a craint qu’en dépit des engagements communs, le monde ne parvienne pas à atteindre les objectifs liés à l’eau.  En effet des milliards de personnes n’ont pas accès à une eau potable et à des installations sanitaires sûres, propres et abordables, et les estimations suggèrent que 700 millions de personnes pourraient être déplacées en raison de la pénurie d’eau potable d’ici à 2030.  Constatant en outre une augmentation alarmante des catastrophes liées à l’eau, il a averti que la crise mondiale de l’eau a des implications majeures non seulement sur le développement durable, mais aussi sur le respect des droits humains et sur la paix et la sécurité.  Face à ces défis, le représentant a indiqué que son pays soutient depuis 2017 un partenariat multipartite appelé « Waterfootprint Liechtenstein », dont le principe est d’encourager l’utilisation de l’eau du robinet plutôt que l’achat d’eau en bouteille et de reverser l’argent économisé à des organisations partenaires qui investissent dans des projets d’eau potable à travers le monde.  Ce projet a déjà permis à plus de 184 000 personnes d’avoir accès à de l’eau potable.  Par ailleurs, le Liechtenstein fait partie du groupe restreint qui a rédigé une résolution pour demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les changements climatiques.  Il continue d’appuyer les efforts déployés par la Commission du droit international (CDI) pour clarifier les aspects du droit international relatifs à l’élévation du niveau de la mer, y compris sur les questions liées au statut d’État. 

M. IAN MADELEINE (Seychelles) a expliqué que les Seychelles, en tant que petit État insulaire en développement (PEID), ne disposent pas de grandes réserves d’eau douce.  Liées aux changements climatiques, les graves sécheresses et les catastrophes liées à l’eau aggravent la pénurie d’eau douce.  Aux Seychelles, la hausse des températures et l’élévation du niveau de la mer entraîneront la disparition des agglomérations côtières et de faible élévation, tandis que les réserves d’eau douce seront contaminées, a prévenu le représentant.  En outre, la pollution des océans et des sources d’eau douce a des effets néfastes sur la santé de la faune et des écosystèmes.  Il n’a donc jamais été aussi nécessaire de trouver un juste équilibre entre le développement et la protection de notre environnement naturel, a-t-il souligné.  Les Seychelles s’engagent à investir dans des solutions durables et dans la conservation des écosystèmes: le pays a placé 50% du peu de terres qu’il possède et plus de 30% de son espace océanique sous protection.  La communauté internationale doit renforcer les collaborations et combler les lacunes qui empêchent une action efficace, a exhorté le représentant. 

M. DENNIS FRANCIS (Trinité-et-Tobago) a rappelé que les petits États insulaires en développement (PEID) souffrent de pénuries d’eau car les changements climatiques ont exacerbé des vulnérabilités structurelles préexistantes.  La sécheresse et la réduction des pluies ont exercé une pression importante sur les économies, les communautés et les moyens de subsistance.  Dans le cadre de sa stratégie de développement Vision 2030, le Gouvernement entreprend une transformation massive du secteur de l’eau pour la gestion durable des ressources, a indiqué le représentant.  Trinité-et-Tobago a accueilli la Conférence sur la perte hydrique dans les Caraïbes et s’est également associée à la Banque interaméricaine de développement pour des projets d’investissement visant à améliorer l’efficacité et la qualité de l’approvisionnement en eau, notamment dans les communautés mal desservies, et à développer les capacités institutionnelles du Ministère des services publics et de l’Autorité de l’eau et de l’assainissement.  Un tel soutien, cependant, est « une goutte d’eau dans l’océan par rapport au niveau de financement requis pour atteindre les cibles et les objectifs liés à l’eau », a noté le représentant, rappelant que de 100 milliards de dollars sont nécessaires chaque année pour atteindre l’ODD 6 d’ici 2030. 

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a assuré que son pays travaille en étroite collaboration avec ses partenaires du Pacifique pour améliorer la résilience hydrique et les systèmes d’assainissement.  Reconnaissant que la région est confrontée à des niveaux d’accès à l’eau et à l’assainissement sûrs et fiables parmi les plus bas du monde, la représentante a souligné l’urgence d’œuvrer pour atteindre les communautés les plus vulnérables du Pacifique, en particulier celles qui vivent dans des communautés rurales, isolées et informelles.  La résolution des problèmes cruciaux liés à l’eau, tels que l’intrusion d’eau salée, doit être une priorité, a-t-elle martelé.

Elle a rappelé, à cet égard, la série de cyclones tropicaux qui ont frappé le Pacifique bleu, l’éruption du volcan Hunga Tonga Hunga Ha’apai et le tsunami associé, ainsi qu’une grave sécheresse dans les atolls de Kiribati et des Tuvalu.  À l’échelle nationale, a informé la représentante, des phénomènes météorologiques violents ont provoqué des inondations dévastatrices dans le nord et l’est du pays, déplaçant des communautés et détruisant leurs moyens de subsistance.  Pour finir, elle a recommandé d’écouter les personnes directement concernées, y compris les peuples autochtones, soulignant qu’en Nouvelle-Zélande « la perception du monde Māori nourrit notre approche de la gestion de l’environnement et de l’eau ».

M. STAN SMITH (Bahamas) a expliqué que sur l’archipel, l’eau douce est largement tributaire de précipitations irrégulières parce que les îles n’ont pas de lacs ni de rivières d’eau douce.  Les Bahamas disposent de quelques réserves d’eau souterraine, mais c’est un pays pauvre en eau, a-t-il tranché, rappelant que les communautés du nord reconstruisent encore leur vie après les ravages causés par l’ouragan Dorian en 2019, et sont confrontées « à la dure réalité de l’eau salée » qui coule de leurs robinets.  Face à ces pénuries, les Bahamas ont mis en œuvre, au cours des deux dernières décennies, des lois, règlementations, programmes, plans et politiques, dont le programme national de gestion intégrée des ressources en eau (NIWRM), établi en 2010; le programme national de conservation de l’eau, lancé en 2012; le plan directeur national de l’eau et de l’assainissement, élaboré en 2013 ou encore la loi sur la société de l’eau et de l’assainissement. 

Il a précisé que selon un rapport de la Banque mondiale, le coût annuel de l’accès aux services d’approvisionnement en eau de base aux Bahamas est estimé à environ 22 millions de dollars, et celui de l’accès aux services d’assainissement de base à environ 32 millions.  Alors que le Gouvernement est conscient du coût réel du cycle de production de l’eau, la majeure partie des recettes des services de l’eau est consacrée à l’achat de cette ressource, et une très faible partie à l’entretien des infrastructures, a concédé le représentant, et les pertes –y compris les pertes d’eau non comptabilisées– constituent toujours un défi majeur.  Il existe des innovations technologiques et scientifiques qui permettraient de résoudre la crise de l’eau, a-t-il remarqué, mais l’innovation à l’échelle appropriée pour le développement d’un pays nécessite un engagement financier soutenu et considérable, or c’est là l’un des défis permanent à relever pour les petits États insulaires en développement comme les Bahamas.  Il a remis en question l’indice international utilisé pour mesurer le profil économique des Bahamas, qui s’appuie sur le PIB, en plaidant en faveur d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle (IVM), lequel permettrait de saisir la dynamique économique invisible des Bahamas et d’autres PEID présentant de graves carences en matière de services de base tels que l’approvisionnement en eau. 

M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a témoigné que les villages et communautés rurales de son pays sont souvent affectés de manière disproportionnée par le manque d’eau potable et l’absence d’hygiène et d’installations sanitaires.  Environ 60% de la population n’a accès ni à l’eau potable ni à des services d’assainissement améliorés.  Dans les zones rurales, 39% de la population a accès à une forme d’eau potable et 15% à des installations sanitaires améliorées; des chiffres qui s’élèvent à 86% et 65%, respectivement, pour la population urbaine.  L’objectif du Gouvernement dans ce secteur, a indiqué le représentant, est de faire en sorte que 70% de la population ait accès à une eau potable propre, sûre et durable dans les zones rurales, et que 95% de la population ait accès à une eau potable propre et sûre et à des installations sanitaires adéquates dans les zones urbaines.  Le Gouvernement s’attaque au problème avec sa politique Eau, Assainissement et Hygiène pour tous (WASH) (2015-2030) et son quatrième plan de développement (2023-2027), en se concentrant sur des programmes répartis à l’échelon des provinces et des villes de district, et en mettant en place une autorité nationale dédiée.

Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a indiqué que son pays a mis en œuvre de nombreux projets et programmes relatifs à la gestion intégrée des ressources hydriques, dont la quatrième stratégie nationale pour l’eau qui couvre la période 2023-2040 et qui vise à renforcer la santé, la prospérité et la croissance, notamment en augmentant l’accès à l’eau potable.  Elle a expliqué que pour faire face à la croissance démographique accélérée, le Gouvernement a décidé de consacrer une part importante de l’eau à l’agriculture.  Un projet de désalinisation de l’eau a également été lancé.  L’offre en eau étant limitée, il faut réduire le gaspillage, a exhorté la déléguée.  Pour ce faire, le Gouvernement travaille avec les consommateurs et les partenaires pour renforcer l’efficience et préserver chaque mètre cube d’eau.  Elle a également indiqué que la stratégie nationale de la Jordanie renforce la gouvernance et la gestion du secteur de l’eau, tout en visant à moderniser les institutions.  De même, le Gouvernement travaille avec le milieu universitaire et le secteur privé pour faciliter l’accès aux données et améliorer la prise de décision.

M. LUIS FELIPE UGARELLI, (Pérou) a détaillé les différentes mesures adoptées par son pays pour assurer un accès universel à l’eau potable pour tous les citoyens et faire de cette ressource un patrimoine national.  Le Pérou a fait également des percées dans l’utilisation de la circularité appliquée à la gestion de l’eau et travaille sur la surveillance à distance du traitement de l’eau, améliorant ainsi la capacité à contrôler les activités de traitement et de distribution de l’eau potable.  Le représentant a ensuite informé que son pays partage 34 bassins avec cinq pays voisins et travaille dans un cadre de partenariat pour mettre en place des mécanismes de gestion intégrée des ressources en eau afin de réduire les pressions sur l’environnement et de préserver les écosystèmes riverains pour les générations futures.  

Mme JOSIEANN DONGOBIR (Nauru) a expliqué que la pénurie d’eau est une réalité quotidienne pour les habitants de Nauru, qui connaissent d’importantes sécheresses depuis 20 ans, une situation qui ne fera qu’empirer à l’avenir.  En raison de l’absence de réservoirs d’eau douce et de l’irrégularité des précipitations, son pays est fortement tributaire de son unique usine d’osmose inverse pour son approvisionnement en eau douce, mais celle-ci est gourmande en énergie et coûteuse, a précisé la représentante, en affirmant les sources d’eau douce de Nauru sont limitées et non viables à long terme, malgré les multiples stratégies visant à assurer un stockage adéquat des eaux de pluie, des eaux souterraines et de l’eau dessalée et optimiser la consommation des ménages et des entreprises.  Soulignant le lien indéniable entre l’eau et les changements climatiques, la déléguée a souligné l’importance pour la communauté internationale de s’attaquer d’urgence à la crise climatique qui ne cesse de s’aggraver afin de relever les défis auxquels nous sommes confrontés dans le domaine hydrique.  Dans cette optique, Nauru appelle le Secrétaire général à nommer un envoyé spécial pour le climat et la sécurité et à entreprendre immédiatement une évaluation de la capacité de l’ONU à répondre aux catastrophes causées par le climat et les pénuries d’eau.  L’accès au financement du développement reste un défi majeur pour répondre aux besoins de Nauru, a reconnu la déléguée, en demandant l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle (IVM) et une optimisation des financements.  Pour les PEID, le développement durable passe par une prise en compte de leurs situations et vulnérabilités particulières, a-t-elle argué.

M. KARLITO NUNES (Timor Leste) a dit que son gouvernement avait intégré la coutume du Tara Bandu, un code social ancestral, dans sa législation nationale afin de fixer les paramètres de l’interaction humaine avec l’environnement.  Une approche qui sert également à renforcer l’engagement et l’implication des communautés locales dans les efforts de résilience, a fait valoir le représentant.  Le délégué a ensuite détaillé les défis environnementaux les plus urgents qui se posent au Timor Leste, similaires à ceux d’autres PEID, avant de mettre en valeur les efforts déployés afin d’améliorer les systèmes d’approvisionnement en eau à travers le pays.  Il s’est ensuite prononcé en faveur de partenariats et d’une coopération internationale de nature à accroître la capacité institutionnelle de son gouvernement à pleinement réaliser l’ODD 6, a assuré le représentant. 

Mme SARAH SAFYN FYNEAH (Libéria) a développé la vision du Libéria, résumée dans son plan quinquennal de développement pour la prospérité et le développement qui met l’accent sur les systèmes d’eau et d’assainissement.  Il s’agit de garantir l’accès à l’eau pour tous et d’améliorer l’hygiène.  Le Libéria, a dit la représentante, s’est engagé à traiter en priorité les ODD liés à l’eau, et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 fait partie intégrante de la politique gouvernementale.  La Commission nationale sur l’eau et l’assainissement s’est ainsi lancée cette année dans une évaluation conjointe des systèmes, en rassemblant toutes les parties prenantes.  Renforcer la coopération et les partenariats, partager les savoirs et les technologies, bénéficier d’un meilleur financement: telles sont les actions entreprises pour que le Libéria progresse dans sa réalisation de l’ODD 6.  Les enjeux liés à l’eau doivent sans cesse être mis en avant au sein du système des Nations Unies.  « Nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre 50 années supplémentaires », a conclu la représentante. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a informé que depuis que le Gouvernement gère ses ressources en eau, en 1884, le pays est en mesure de garantir un accès quasi universel à l’eau potable.  Mais malheureusement, depuis 2018, en raison de la croissance démographique et de l’urbanisation galopante du pays, l’eau a commencé à manquer.  Un phénomène encore exacerbé par les sécheresses et le phénomène El Niño, tous deux accélérés par les changements climatiques.  Cette réalité menace l’efficacité du bouquet énergétique, qui repose beaucoup sur les énergies renouvelables, a fait observer le représentant.  Au Costa Rica, en effet, 70% de notre énergie est d’origine hydroélectrique.  Comme elle est finie et précieuse, le Gouvernement a mis en place une gestion intégrée et holistique des ressources hydriques. 

Grâce aux impôts que chaque ressortissant du Costa Rica paye, l’État a été en mesure de générer plus de 18 millions de dollars de recettes fiscales qui ont permis de faire évoluer les comportements, mais aussi d’investir dans cette gestion intégrée des ressources hydriques.  Soucieux de les optimiser, le Gouvernement costaricain a déclaré qu’il faut absolument renforcer la coopération transfrontalière et internationale en privilégiant cinq axes d’action: un appui financier et logistique accru; le développement de cadres, d’infrastructures hydriques et d’assainissement; une garantie d’accès à l’eau; la lutte contre la pollution; les changements climatiques; et l’équité.  Il faut également investir dans le renforcement des connaissances relatives aux ressources hydriques souterraines, a encore préconisé le représentant.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a déploré le coup d’État militaire illégal de février 2021 qui a mis un frein au développement prometteur engagé par le Gouvernement démocratiquement élu, notamment en matière d’objectifs de développement durable (ODD).  L’impact de ce coup d’État a été dévastateur pour les populations, a dénoncé le représentant: plus de 1,6 million de personnes ont été déplacées de force à l’intérieur du pays et plus de 17,6 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire.  La plupart des personnes déplacées rencontrent ainsi des difficultés pour accéder à la nourriture, à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène.  Certains enfants souffrent de divers problèmes de santé liés au manque d’eau potable.  Aujourd’hui, le Myanmar est en retard dans tous les secteurs, en particulier sur le plan socioéconomique.  Il ne fait aucun doute, pour le représentant, que la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier l’ODD 6, ne sera pas possible tant que la dictature militaire n’aura pas pris fin.

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a appelé à des financements internationaux afin de garantir l’accès à l’eau partout à travers le monde.  Au Nicaragua, 10% du territoire est recouvert d’eau, notamment de lacs et de fleuves.  Le Gouvernement entend garantir un accès sûr à une eau de qualité à toutes les familles du pays, a assuré le représentant.  La couverture d’eau potable dans les zones urbaines est déjà de 93% et les autorités veulent la porter à 95%.  Le pays s’efforce également d’étendre les systèmes d’assainissement avec notamment l’extension des égouts dans les centres urbains.  Malgré ces efforts, a déploré le représentant, le pays connaît des obstacles sur la voie du développement durable à cause des mesures coercitives mises en place par certains pays.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a insisté sur la nécessité d’une gestion durable des eaux et plaidé pour l’adoption d’une approche « écosystémique » à cette fin.  Il a demandé une accélération des efforts en vue de la réalisation de l’ODD 6, la société civile devant être pleinement associée auxdits efforts.  Il a souhaité que le programme sur l’eau soit au cœur de l’action de toutes les entités onusiennes.  Ce programme devrait faire l’objet de réunions intergouvernementales plus fréquentes.  Le délégué s’est également dit en faveur de la nomination d’un envoyé spécial sur l’eau.  « Œuvrons au succès du Sommet de septembre sur les objectifs de développement durable », a-t-il ajouté.

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a estimé que la réalisation des objectifs communs exige de défendre le multilatéralisme et de renforcer la solidarité et la coopération internationales.  Il a indiqué que l’Iran, pays semi-aride aux ressources en eau limitées, subit l’impact des changements climatiques, avec pour conséquences une modification des régimes de précipitations, des sécheresses persistantes, un stress thermique, des tempêtes de sable, une pollution de l’air et de l’eau, une érosion des sols et une perte de biodiversité.  Dans ce contexte, a-t-il dit, l’Iran poursuit ses efforts pour garantir à chacun l’accès à une eau propre, sûre et fiable ainsi qu’à des installations sanitaires.  Après avoir élaboré son plan et sa stratégie nationaux de gestion de l’eau, le pays s’est ainsi fixé cinq priorités pour réaliser ses objectifs de développement durable: l’amélioration de la gouvernance de l’eau, la collecte et le traitement des données, la mobilisation des ressources financières nationales, le développement du renforcement des capacités et enfin l’innovation.  Ce plan, a précisé le délégué, vise à promouvoir une utilisation et une gestion durables de l’eau, à lutter contre la pénurie d’eau et la pollution, à réduire le gaspillage d’eau, à promouvoir les technologies économes en eau, à améliorer les systèmes d’irrigation et à accroître la résilience climatique.  Il a ajouté qu’afin de combler le fossé entre les villages et les villes, son gouvernement a mis en place une campagne d’approvisionnement en eau, de sorte que le réseau d’eau en milieu rural puisse desservir 100% des régions rurales d’ici à 2030.  Enfin, après avoir dénoncé l’impact des mesures coercitives unilatérales sur l’accès des populations à la nourriture, à l’eau et aux soins de santé, il a rappelé que son pays accueille plus de 5 millions de réfugiés afghans.  Une assistance internationale immédiate est nécessaire pour répondre à leurs besoins, a-t-il conclu. 

Mme VANDANA SEGOBIN MAULLOO (Maurice) a exprimé sa préoccupation face aux problèmes d’accès à l’eau et à l’assainissement dans le monde, en insistant sur l’urgence d’agir pour que personne ne soit laissé de côté.  L’eau est en effet une ressource naturelle essentielle dont dépend l’ensemble des activités sociales et économiques des États.  En tant que petit État insulaire en développement (PEID), Maurice fait face à de nombreux défis liés aux changements climatiques, qui sont la cause de phénomènes météorologiques violents ayant un impact important sur la disponibilité des ressources en eau douce, a-t-elle expliqué.  Si rien n’est fait, les risques pour la biodiversité, la sécurité hydrique, la production alimentaire, la stabilité des infrastructures et la santé continueront de croître.  Parmi les mesures prises par Maurice pour y faire face, la représentante a cité l’aménagement d’infrastructures assurant l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, le contrôle de la qualité de l’eau et le reboisement.  Au cours des cinq années restantes de la Décennie d’action sur l’eau, Maurice continuera de mettre davantage l’accent sur le développement durable et la gestion intégrée des ressources hydriques afin de favoriser la réalisation de ses objectifs sociaux, économiques et environnementaux, a assuré la déléguée.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a réitéré l’engagement de son pays en faveur de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), y compris celui lié à la disponibilité et à la gestion durable de l’eau et de l’assainissement pour tous.  Il a également insisté sur l’importance de la pleine mise en œuvre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)et de l’Accord de Paris, dans le respect du principe de responsabilités communes, mais différenciées.  Le moment est venu de comprendre qu’il faut changer une fois pour toutes le système et non le climat, étant donné que c’est le « modèle prédateur actuel », avec ses modes de consommation et de production non durables, qui a conduit à des effets de plus en plus dévastateurs, en particulier dans les pays les plus vulnérables.  Le Venezuela, a dit le représentant, reconnaît le droit à l’eau comme un droit humain inaliénable et essentiel pour la jouissance d’un niveau de vie suffisant, l’eau étant considérée comme un « bien public » et non une marchandise.  Il a cependant ajouté que, bien qu’il possède des réserves d’eau parmi les plus grandes de la planète, son pays aura du mal à atteindre l’ODD 6 en raison de l’impact du blocus que lui imposent les États-Unis.  Malgré ce dispositif « criminel », le Venezuela s’emploie à garantir à sa population un accès complet à l’eau, a-t-il assuré, avant de plaider pour davantage de coopération internationale et de transferts de technologie. 

Mme REGINA CHAMA BOMA (Zambie) a rappelé que son pays aspire à devenir un pays prospère à revenu intermédiaire d’ici à 2030.  Il met ainsi en œuvre un plan de développement national, pierre angulaire de la réalisation de sa Vision 2030, pour atteindre l’accès universel à l’eau propre et sûre et un accès à 90% aux services d’assainissement.  Dans le cadre de la transformation économique et de la création d’emplois, la priorité a été donnée à l’eau en tant que moteur économique de secteurs tels que l’agriculture, l’énergie, le tourisme, l’exploitation minière et l’industrie manufacturière, a expliqué la représentante.  Elle a souligné que les investissements dans ces secteurs économiques sont essentiels pour transformer et diversifier l’économie par rapport aux secteurs dominants traditionnels que sont le commerce de gros et de détail, l’exploitation minière, l’exploitation de carrières et la construction.  Si la Zambie veut atteindre la sécurité nationale en eau et réaliser son programme de transformation économique et de création d’emploi, l’investissement des principaux acteurs du pays dans des infrastructures de stockage de l’eau résistantes au climat est crucial, a-t-elle expliqué. 

La déléguée a aussi parlé du rôle de catalyseur de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement dans le domaine stratégique du développement humain et social, car ils sont essentiels dans la prévention de maladies d’origine hydrique et dans la promotion de la dignité humaine.  Cependant, les écosystèmes et les ressources en eau du pays sont menacés par les activités anthropogéniques aggravées par les changements climatiques.  Pour y faire face, la Vision 2030 de la Zambie met l’accent sur un développement ancré dans les principes de gestion durable de l’environnement, des écosystèmes et des ressources naturelles, en veillant à la restauration et à la gestion des zones humides, des sources et des cours d’eau, au boisement et au reboisement, ainsi qu’à la protection des zones de captage d’eau.  Pour la représentante, il ne fait pas de doute que les investissements dans le secteur de l’eau soutiennent la transformation économique, ce qui se traduira par une croissance économique, la création d’emplois, la réduction de la pauvreté et l’amélioration des moyens de subsistance des populations, sans compter les résultats en matière de santé.

M. TAREQ M. A.  M. ALBANAI (Koweït) a renouvelé la solidarité du Koweït avec les pays ayant connu des catastrophes naturelles.  De nombreux États arabes seront menacés d’inondations dans les années à venir, a-t-il averti, les exhortant à prendre des mesures en amont.  Il a rappelé que le Koweït a été classé en 2019 parmi les 20 meilleurs pays utilisant l’eau d’une manière efficiente.  Ainsi, 94% des ressources en eau y font l’objet d’une gestion intégrée.  Le pays entend poursuivre sur cette lancée et ambitionne également de réaliser les 17 ODD. 

Mme NASRIA ELARDJA FLITTI, de la Ligue des États arabes, a souligné la forte pression hydrique exerçant sur les pays arabes, laquelle pression est aggravée par les conflits et l’occupation.  Elle a rappelé que la sécurité hydrique et la réalisation de l’ODD 6 sont des priorités de la Ligue, car pour les pays arabes, ce sont des questions existentielles.  Elle a également insisté sur les difficultés liées au financement; les pays arabes n’étant pas des « puits de pétrole sans fond », contrairement à l’image que l’on pourrait en avoir.  Six pays arabes font partie des pays les moins avancés (PMA) et le PIB des 22 pays arabes est inférieur à celui de l’Espagne.  La représentante a précisé que les pays arabes exploitent d’autres ressources en eau, telles que les eaux souterraines et les précipitations.  Nous n’avons d’autre choix que d’aller de l’avant et réaliser l’ODD 6, a-t-elle conclu.

M. PETER DAVIDSON MC GUIRE, de l’Ordre souverain de Malte, s’est réjoui que cette conférence organisée à mi-parcours du Programme de développement durable à l’horizon 2030 mette l’accent sur la nécessité de renforcer l’action et la mobilisation autour de l’accès à l’eau et à l’assainissement.  Conscient que la menace d’une pénurie d’eau s’est aggravée sous l’effet des conflits et des changements climatiques, il a rappelé que son organisation veille depuis longtemps à répondre aux besoins des populations les plus vulnérables.  Depuis plus de 25 ans, par le biais de l’Agence maltaise de développement internationale, nous contribuons, a-t-il dit, à la recherche de solutions aux questions liées à l’eau, en particulier par le biais du Programme mondial pour l’assainissement et la santé, qui promeut de bonnes pratiques d’hygiène dans un grand nombre de pays.  Pour ce qui est l’ODD 6 et de sa cible 2, a poursuivi le représentant, l’Ordre prend en considération la problématique hommes-femmes, notamment via la fourniture de kits de dignité dans les pays en développement.  Afin de promouvoir le développement durable, l’Ordre contribue également à la mise en place de systèmes d’eau et d’assainissement, à l’image de ce qui est mis en œuvre pour les réfugiés du nord de l’Ouganda, a-t-il ajouté, précisant que l’organisation entend multiplier ces projets grâce au soutien des communautés locales. 

Mme PENA, de l’Union mondiale pour la conservation de la nature (UICN), a voulu que sorte de cette conférence un message de détermination et d’action.  Elle a appelé les décideurs à prendre les mesures qui s’imposent pour protéger et promouvoir les systèmes hydriques, facteur essentiel de la lutte contre les changements climatiques.  Agissons pour l’eau avec toute l’urgence nécessaire, a-t-elle conclu, rappelant que cela aura un impact sur tous les écosystèmes. 

Mme DANIELS,  de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a rappelé la gravité des pénuries d’eau dans le monde, prévenant que la crise de l’eau sera au cœur de la mobilité humaine.  Elle a dénoncé les discriminations dont souffrent les migrants, s’agissant de l’accès à l’eau et aux services d’assainissement.  Il faut y remédier et acter l’universalité du droit à l’eau et pour en assurer l’exercice, la représentante a appelé à des financements accrus, surtout au profit des plus vulnérables, dont les migrants.

M. FRANCESCO, de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a indiqué que ce réseau humanitaire et ses 192 sociétés nationales sont de plus en plus les témoins de catastrophes -sécheresses et inondations de grande ampleur– qui forcent des millions d’hommes et de femmes à vivre dans une eau stagnante, le plus souvent sans accès à l’eau potable et à l’assainissement.  L’eau est une question de survie et cela est particulièrement vrai pour les communautés vulnérables, a-t-il observé, avant de souligner le caractère essentiel des services d’assainissement pour faire face aux maladies et aux épidémies.  L’eau est aussi au cœur de la crise climatique, a-t-il poursuivi, évoquant notamment les récentes inondations au Pakistan.  Face à ces défis, notre responsabilité commune est d’accorder la priorité aux plus vulnérables et au renforcement de leur résilience, a plaidé le représentant.  Pour ce faire, notre société s’emploie à garantir un accès équitable et durable à l’eau, atteignant quelque 16 millions de personnes chaque année grâce à ses activités en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène pour tous (WASH), et se fixant pour objectif d’aider 10 millions de personnes dans 20 pays vulnérables au climat. 

M. GUILLAUME PIERREHUMBERT, du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a promis que le CICR allait continuer de veiller à ce que les communautés les plus vulnérables vivant dans des zones de conflit aient accès à l’eau et à l’assainissement.  Il appartient aux États de prévenir les conflits afin que l’on ne se retrouve pas dans des situations humanitaires déplorables.  Il a insisté sur l’importance de tenir compte de l’accès à l’eau en situation de conflit ou dans le cadre de l’assistance humanitaire.  Le délégué a appelé à ne pas cibler les civils, à éviter notamment d’utiliser des armes lourdes dans des zones densément peuplées pour ne pas faire de victimes indiscriminées.  Enfin, il a appelé à améliorer l’accès à l’eau pour les populations vivant dans les situations de conflit.  « Les services d’eau essentiels ne doivent pas faire partie des victimes de la guerre. »

M. NARINDER KUMAR KAKAR, de University for peace, a rappelé que « L’eau, c’est la vie ».  C’est également un droit humain.  Il a appelé à lutter contre le gaspillage et la destruction des écosystèmes.  Trois catastrophes naturelles sur quatre sont liées à l’eau.  Il a demandé le plein accès pour tous aux services d’assainissement et d’hygiène, l’insalubrité de l’eau étant source de maladies.  Renforçons notre action pour réaliser l’ODD 6, a-t-il conclu.

M. IOANNIS KATSOGIANNIS, Directeur à la European Public Law Organization (EPLO), a commencé par expliquer le champ d’action de cette ONG, qui peut accompagner gouvernements et organisations dans la mise en œuvre des pratiques optimales en matière de gestion durable de l’eau.  Il s’agit également de les aider à identifier ou créer le cadre juridique adéquat pour garantir une utilisation et une distribution viables de l’eau, a précisé l’intervenant.  Prévenant que les pénuries affecteront très bientôt des sociétés entières et pourraient poser des risques pour la survie même de pays, il a exhorté à agir, notamment en privilégiant la réutilisation des eaux.  À cet égard, il a relevé que certains n’ont pas encore commencé à se servir des technologies adéquates, que ce soit pour l’agriculture ou le renouvellement des nappes phréatiques.  Un autre problème « majeur », selon lui, est la menace à la biodiversité causée par la pollution de l’eau, notamment les plastiques agricoles à mi-sol et polluants organiques persistants.  Par conséquent, le Directeur s’est dit d’avis que les actions futures soient mieux coordonnées au niveau international, pour proposer des solutions holistiques jusqu’en 2050. 

Mme PATRICIA ANN TORSNEY, de l’Union interparlementaire (UIP), a relevé que la pénurie d’eau et la pollution de l’eau sont trop souvent traitées comme des problèmes marginaux alors qu’ils touchent au bien-être humain, à la préservation de l’environnement et aux moyens de subsistance.  Dans cette optique, l’Audition parlementaire UIP-ONU de cette année s’est tenue sur le thème « De l’eau pour les peuples et la planète: cessez le gaspillage, changez la donne, investissez dans l’avenir ».  La déléguée a estimé que toute action en faveur de l’eau et de l’assainissement doit être fondée sur la reconnaissance qu’il s’agit de « biens publics » et de « droits humains fondamentaux », et que l’approvisionnement en eau et en assainissement de milliards de personnes nécessitera d’énormes investissements dans les infrastructures.  Les gouvernements doivent donc consacrer davantage de ressources à la conservation et à l’approvisionnement en eau, a-t-elle ajouté, notamment au moyen de taxes et de subventions.  La collaboration du secteur privé en la matière doit en outre se fonder sur le fait que l’eau et l’assainissement ne sont pas de simples marchandises à vendre au plus offrant.  Enfin, les politiques relatives à l’eau et à l’assainissement doivent être inclusives et intégrées de manière plus cohérente dans tous les ministères - agriculture, énergie, santé, éducation, travaux publics et environnement. 

M. SULTON RAHIMZODA, du Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral, a appelé à utiliser des sources d’énergie renouvelables pour faire face à la situation du bassin économique de la mer d’Aral.  Il a affirmé que les pays de la région entendaient poursuivre des politiques de gestion intégrée des eaux, tout en assurant le reboisement de la zone de la mer d’Aral.  Ces États entendent aussi mener à bien une coopération bénéfique à tous, a-t-il dit.

M. DAVID COOPER, du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, a indiqué que la crise de l’eau et la crise de la diversité biologique sont étroitement liées.  La diversité biologique, c’est la vie, et dépend de l’eau, a-t-il dit, en déplorant la destruction de cette diversité.  Afin d’y remédier, il a plaidé pour une action transformatrice dans le droit fil du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal qui vise à inverser ces pertes en biodiversité et qui, a-t-il rappelé, est basé sur les droits humains. 

M. SIMON STIELL, Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), a déclaré que l’eau a le pouvoir de résoudre ou de faire obstacle à nos tentatives d’assurer un avenir durable et résilient pour tous.  L’eau constitue un puits de carbone important, en plus d’être à la base de solutions d’atténuation et d’adaptation à la crise climatique.  Toutefois, nous ne pourrons pas compter sur ces bienfaits si nous ne parvenons pas à protéger sa capacité à les fournir, a-t-il ajouté, notamment en réduisant les émissions polluantes.  Dans le cadre de cette décennie critique, il nous faut compter sur une feuille de route tangible jusqu’en 2030 pour faire en sorte que les engagements pris se traduisent en actions crédibles.  Pour sa part, le CCNUCC compte établir un « appel à l’action » s’articulant autour de trois piliers, à savoir la connaissance, l’innovation et l’action.  Il vise en outre à établir de nouveaux types de partenariats afin d’accélérer les actions d’adaptation eau-climat, notamment en comblant les lacunes en matière de connaissances, en favorisant l’innovation, tout en assurant la mise en œuvre du Programme d’action pour l’eau et de la Décennie d’action sur l’eau. 

Mme NAJAT MOKHTAR, Directrice exécutive de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a rappelé que les atomes sont les éléments qui permettent de construire la matière et l’univers.  Les scientifiques, a-t-elle relevé, ont su mobiliser ces atomes pour les mettre au service du combat contre les maladies, de la protection des ressources en eau, de la lutte contre la pollution environnementale et de la création de cultures plus résistantes.  À cette aune, l’AIEA a pour mandat de promouvoir l’accès à la science et à l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, mais aussi d’aider les États Membres à évaluer, comprendre et gérer leurs ressources en eau, a-t-elle indiqué, soulignant l’importance des données scientifiques dans ce cadre.  Des traceurs radio-isotopiques ont ainsi été utilisés dans des études hydrologiques d’ampleur comme outils visant à déterminer la quantité, la viabilité et l’origine des sources en eau, a précisé la représentante.  Ces instruments de cartographie sont essentiels pour garantir une gestion pérenne des ressources hydriques.  Dans le cadre de son programme de travail sur l’eau et afin d’aider les États Membres à atteindre l’ODD 6, l’AIEA a lancé un réseau de laboratoires d’analyse de l’eau au niveau mondial.  Ce réseau a pour but de renforcer les capacités techniques des pays en matière d’analyse de l’eau et d’aider les pays en développement à élaborer des données nationales, a expliqué la représentante.  Opéré en collaboration avec l’UNESCO, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), ce réseau fait fond sur plus de 60 ans d’expérience de l’AIEA. 

Mme ZORITSA UROSEVIC, Directrice exécutive de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), a reconnu que l’eau est essentielle pour les activités touristiques dans le monde, qui assurent la subsistance de millions de personnes.  L’industrie touristique peut toutefois affecter les écosystèmes marins et aquatiques, a-t-elle reconnu, et la gestion des déchets plastique et des matières résiduelles est donc fondamentale.  De nombreux hôtels ont ainsi pris des mesures pour économiser l’eau et l’énergie et financé la construction d’usines d’épuration, tandis que plusieurs touristes tiennent compte de la protection de l’environnement dans la planification de leurs activités.  Nous devons toutefois adopter une approche plus systématique en la matière, en réduisant le recours au plastique qui pénètre dans le cycle de l’eau.  « Le secteur du tourisme entre donc dans une phase de transformation », a encore dit la déléguée, pour qui un tourisme mieux géré a le potentiel de déboucher sur une eau plus propre.  L’OMT travaille actuellement à l’élaboration d’un cadre statistique qui permettra de mesurer la pérennité du tourisme. 

M.  LI LIFENG, Directeur de la Division des terres et des eaux de lOrganisation des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture (FAO), a rappelé que l’eau est au cœur du développement durable et devrait, de ce fait, être considérée comme un bien public mondial.  Il a relevé que l’agriculture utilise 70% de l’eau consommée par les hommes.  La FAO a présenté, au cours de la présente conférence, sept engagements pour préserver les ressources en eau, comme la création d’une plateforme mondiale sur la question des pénuries en eau.  Il a marqué la disponibilité de la FAO à coopérer avec les États pour une meilleure gestion de l’eau à travers le monde. 

M. DOMINIQUE BEROD, de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), a souligné que la crise de l’eau, aggravée par les effets des changements climatiques, est un des défis les plus urgents auquel le monde est confronté.  Si l’eau est au cœur des problèmes de sécheresse et d’inondations, elle peut aussi faire partie de la solution pour atténuer et s’adapter au réchauffement de la planète, a-t-il affirmé, faisant valoir qu’une gestion intelligente de l’eau peut réduire les émissions en gaz à effet de serre, augmenter la résilience des populations, protéger la biodiversité et garantir la sécurité alimentaire et énergétique.  Dans cet esprit, a indiqué le représentant, le Congrès météorologique mondial a approuvé la déclaration de l’OMM pour une accélération de la mise en œuvre de l’ODD 6.  En tant qu’institution spécialisée de l’ONU, l’OMM facilite les réseaux d’observation mondiaux en temps réel pour aider les pays à surveiller, prévoir et se préparer pour faire face aux changements climatiques, a-t-il poursuivi, avant d’avertir que plus de 60% des pays membres de l’OMM signalent des capacités insuffisantes dans ce domaine.  Pire encore, la moitié seulement utilisent un système d’alerte précoce, s’est ému le représentant pour qui cette situation est inacceptable et constitue une menace pour le Programme 2030.  Selon lui, une surveillance insuffisante ou en déclin aboutit à des lacunes en matière de connaissances et à la prise de mauvaises décisions.  En réponse, les 193 États membres et territoires de l’OMM se sont engagés à mettre en œuvre de meilleurs services pour tous les systèmes hydrologiques, a-t-il précisé, se disant convaincu que cette initiative, qui intègre les meilleures données disponibles sur l’observation de la Terre, changera la donne.  Cela améliorera la capacité des États à faire face à la demande accrue en eau et à gérer les retombées des changements climatiques tout en garantissant de écosystèmes durables, a-t-il assuré. 

Mme MADHVI CHITTOOR, de Madvi4EcoEthics, a demandé aux États Membres d’agir rapidement pour interdire les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS) et de protéger l’eau et les aquifères de ces polluants invisibles qui présentent des risques pour notre alimentation et notre santé. 

Mme HELGA FLORES TREJO, du Groupe Bayer, a relevé que 43% de l’eau d’irrigation pour l’agriculture est dédiée au riz.  Elle a rappelé que son entreprise s’est engagée au cours de cette conférence à faire passer à 25% la proportion d’eau utilisée pour irriguer les rizières.  Un programme dans ce sens a d’ailleurs été lancé en Inde et a permis de réduire de 40% l’utilisation de l’eau dans la culture du riz, s’est-elle félicitée.  Elle a déclaré que ce genre d’initiative sera bientôt étendue à d’autres pays du monde, appelant d’autres partenaires à les rejoindre dans cette mission de préservation des ressources en eau. 

Mme ANIEK MOONEN, du Mouvement des jeunes pour le climat, âgée aujourd’hui de 25 ans, s’est projetée à 52 ans en 2050 pour examiner les résultats de cette conférence.  « Les 25 dernières années ont été transformatrices grâce à cette conférence, les pays ayant lancé des projets concrets pour bleuir et verdir le monde », a extrapolé la déléguée, en se félicitant que la vision des jeunes ait triomphé.  Elle s’est félicitée que cette conférence ait marqué un tournant pour la gestion durable de l’eau.  « C’est l’avenir qui vous parle. »

Mme ANNE-SOPHIE STEVANCE, de l’International Science Council, organisation fédérant 203 académies de sciences et unions internationales de sciences naturelles, a souligné la nécessité d’un engagement ferme pour mettre en œuvre des politiques et programmes scientifiques en vue de relever les défis liés à l’eau grâce aux innovations.  À ses yeux, les objectifs de la communauté internationale en la matière imposent d’améliorer de manière radicale les installations liées à l’eau et l’assainissement pour endiguer les maladies transmises par l’eau, dépasser les obstacles institutionnels et élaborer des solutions pour et avec les communautés locales.  Mais au moment où les changements climatiques et les pertes de biodiversité intensifient la pression sur les ressources hydriques, les solutions technologiques ne suffiront pas pour y répondre, a-t-elle averti.  L’urgence est de remettre la nature au cœur du développement et de la réduction des risques tout en augmentant la résilience en matière hydrique, a appuyé la représentante, appelant à une transformation profonde et conforme aux ODD pour parvenir à la transition verte et à la décarbonation des économies.  Pour ce faire, a-t-elle conclu, il faut des données scientifiques robustes qui permettent d’anticiper les questions émergentes et d’aider les décideurs à élaborer des options. 

Mme HILDA FLAVIA NAKABUYE, de Girl Rising, a dit que son pays, l’Ouganda, subit les effets des changements climatiques bien qu’il ne contribue qu’à hauteur de 1% des gaz à effet de serre.  Sa communauté se bat contre le géant pétrolier français Total, qui souhaite construire un oléoduc qui passera par son village et le lac Victoria, l’un des plus importants ports d’eau douce du monde.  Il est donc essentiel à ses yeux de prendre en compte les expériences des femmes et des jeunes dans chaque programme lié à l’eau.  Selon elle, la justice climatique est impossible sans protéger nos ressources hydriques. 

M. CALIXTO, du groupe autochtone Pawanka, a exprimé son opposition à toute mercantilisation, privatisation, et contamination de l’eau, fustigeant les gouvernements qui pillent les peuples autochtones.  Il a recommandé de tirer profit de l’expérience de ces derniers en matière de gestion intégrée des ressources hydriques afin de contribuer au règlement des problèmes liés à l’eau sur le plan international.

Mme MUSONDA MUMBA, Secrétaire générale de la Convention de Ramsar sur les zones humides, a déploré que, trop souvent, l’eau soit considérée comme une marchandise, sans tenir compte des écosystèmes qui la fournissent.  Elle a également regretté que la quasi-totalité de l’eau utilisée pour la consommation humaine soit puisée directement ou indirectement dans les zones humides.  Ces zones contribuent à maintenir l’eau potable propre et salubre, fournissent de l’eau pour les cultures vivrières et aident à assurer la sécurité et le bien-être des personnes en atténuant les extrêmes hydriques, a-t-il fait valoir.  Elle a cependant averti que les zones humides, qui abritent une biodiversité exceptionnelle et favorisent la résilience et l’adaptation aux changements climatiques, se dégradent à un rythme alarmant.  Au cours des décennies qui ont suivi la dernière Conférence des Nations Unies sur l’eau à Mar del Plata en 1977, nous avons peut-être perdu un cinquième, voire un tiers de toutes les zones humides, a alerté la représentante.  Alors que de nombreuses régions du monde sont de plus en plus menacées par l’insécurité hydrique, nous ne pouvons pas répondre à nos besoins en eau sans zones humides, a-t-elle ajouté, souhaitant que la Conférence des Nations Unies sur l’eau 2023 soit une opportunité de changement.  Pour cela, il importe selon elle d’intensifier radicalement la protection et la restauration de la nature qui accompagne l’adoption du Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal, notamment en accordant la priorité aux zones humides dans l’établissement des objectifs de 2030.  Cela signifie assurer l’alignement des stratégies et des plans nationaux de développement durable, de biodiversité et des changements climatiques, en intégrant des actions ambitieuses pour les zones humides dans les contributions déterminées au niveau national ainsi que dans les plans nationaux d’adaptation, a plaidé la représentante.

Plus un pays est industrialisé, plus il consomme de l’eau, a déclaré le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), précisant en outre que l’industrie consomme 19% de l’eau au niveau mondial.  Il a relevé que la demande ne cesse d’augmenter et qu’elle dépassera bientôt la quantité des ressources disponibles.  Les pays en développement sont particulièrement menacés parce qu’ils dépendent très souvent de l’agroalimentaire, un secteur qui dépend lui-même énormément de l’eau. 

Il a indiqué que l’ONUDI essaie de montrer au secteur industriel que la protection de l’eau est dans son intérêt.  Adopter des approches prenant en considération l’eau est indispensable, a souligné le représentant selon qui le retour sur investissement serait de plus de 25%.  Il a exhorté les pays industrialisés à utiliser moins de ressources ou moins d’eaux et à privilégier des modes de production qui permettront de réduire les déchets.  Il faut aussi mettre l’accent sur l’économie circulaire, élément central d’un monde frugal en eau, a-t-il ajouté. 

Remarques de clôture

Au nom des Pays-Bas, Mme EVELYN WEVER-CROES, Première Ministre d’Aruba, en sa qualité de coprésidente de la Conférence, a appelé les délégations à changer radicalement la manière dont nous comprenons, valorisons et gérons l’eau, à la reconnaître comme un bien commun mondial, et comme catalyseur d’un développement durable et juste.  De même, elle a insisté sur l’importance du financement, de la bonne gouvernance, et d’établir des partenariats public-privé innovants, le tout dans une approche basée sur les droits humains.

Elle a indiqué que les résultats de la Conférence feront l’objet d’un suivi concret lors des trois sommets clefs à venir: le Sommet des ODD en 2023, le Sommet de l’avenir en 2024, et le Sommet mondial pour le développement social (SMDS) en 2025.  Elles transparaîtront également lors du forum politique de haut niveau des Nations Unies sur le développement durable ainsi qu’à la Conférence de Douchanbé sur l’eau.  Elle a fait savoir que l’enregistrement des engagements relatifs au Programme d’action pour l’eau sera prolongé jusqu’au 1er mai 2023.  Il en sera rendu compte lors de l’examen global de l’ODD 6 qui aura lieu en juillet 2023, à l’occasion du forum politique de haut niveau, a-t-elle précisé.

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que les engagements pris lors de cette conférence mettront l’humanité sur la voie d’un avenir où la sécurité hydrique sera assurée pour chacun et chacune d’entre nous.  Cette conférence, a-t-il dit, a mis en lumière une vérité essentielle.  « L’eau nous unit tous et toutes. »  De plus, elle est au centre de nombreux défis mondiaux.

« Qui dit eau dit santé, assainissement, hygiène et prévention des maladies.  Qui dit eau dit paix; dit développement durable, lutte contre la pauvreté, soutien aux systèmes alimentaires et création d’emplois et prospérité. »  L’eau est également une question de droits humains et d’égalité des genres, a fait valoir le Secrétaire général.  C’est pourquoi elle doit être au centre de l’agenda politique mondial. 

M. Guterres a souligné que tous les espoirs de l’humanité reposent, d’une manière ou d’une autre, sur notre capacité à fixer un nouveau cap fondé sur la science pour donner vie au Programme d’action pour l’eau.  Ils reposent sur la mise en œuvre des engagements décisifs, inclusifs et concrets pris par les États Membres et d’autres parties lors de cette conférence. 

Pour le Secrétaire général, cela signifie renforcer la place de l’eau en tant que droit humain fondamental.  Cela signifie réduire les pressions exercées sur notre système hydrologique et garantir une prise de décision judicieuse et des politiques intelligentes, a-t-il élaboré.  Cela signifie développer de nouveaux systèmes alimentaires alternatifs afin de limiter l’utilisation non viable de l’eau dans la production alimentaire et l’agriculture.  Cela signifie concevoir et déployer un nouveau système mondial d’information sur l’eau qui orientera les plans et les priorités d’ici à 2030.  Cela signifie unifier nos stratégies relatives à l’eau et au climat pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et donner aux populations davantage de moyens.  Cela inclut, a précisé le Chef de l’ONU, des infrastructures résilientes, des réseaux d’adduction d’eau ou des plans de traitement des eaux usées, et veiller à ce que, d’ici à 2027, chaque personne sur Terre soit protégée par des systèmes d’alerte rapide en cas de catastrophe naturelle.  Cela signifie, a-t-il poursuivi, qu’il faut continuer à pousser en faveur de la justice climatique et d’une action mondiale visant à limiter le réchauffement de la planète à une augmentation de 1,5 degré Celsius.  Et enfin cela signifie qu’il faut accélérer considérablement l’investissement pour que chaque pays puisse atteindre l’objectif de développement durable 6.

Le Secrétaire général a informé que d’autres mesures de suivi sont à l’étude, notamment la nomination d’un envoyé spécial pour l’eau afin de mettre en avant l’eau dans la perspective du Sommet sur les objectifs de développement durable, au mois de septembre, ainsi que du Sommet de l’avenir, qui se tiendra l’année prochaine.  « Je me réjouis de faire le point sur nos progrès lors des réunions politiques de haut niveau de juillet. »

Il ne peut y avoir de développement durable sans eau, a conclu M. Guterres.  « À l’heure où cette conférence historique touche à sa fin, réaffirmons notre engagement au service de notre avenir commun. »

M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, s’est dit inspiré par la détermination qui « nous unit tous » pour arrêter le gaspillage de l’eau et favoriser le développement durable et le bien-être humain.  Il a recommandé de s’éloigner de l’exploitation irresponsable de l’eau des aquifères, des lacs et des rivières et appelé à « cesser d’étancher la soif de nos économies » avec des conséquences catastrophiques pour nos écosystèmes.  Le Président a appuyé ce Programme d’action pour l’eau transfrontalier et transformateur pour le développement durable et la résilience.  Il a salué les promesses de plus de 300 milliards de dollars faites lors de cette conférence, avec le potentiel de débloquer 1 000 milliards de dollars de gains socioéconomiques et écosystémiques.

Le résultat de cette conférence n’est pas un document juridiquement contraignant, mais il tourne la page de l’histoire, s’est félicité M. Kőrösi. 

Si la Conférence a réitéré la promesse de mettre en œuvre le droit de l’homme à l’eau et à l’assainissement, cela signifie également qu’il faut atteindre « les millions de personnes qui ne savent même pas que nous sommes réunis » ici aujourd’hui.  « Nous avons entendu la voix de la science », a poursuivi le Président de l’Assemblée.  Elle donne à réfléchir, elle est orientée vers la recherche de solutions, a-t-il fait valoir, insistant pour garder « nos oreilles et nos esprits » ouverts aux preuves scientifiques pour aller de l’avant.

Saluant la société civile et le secteur privé qui sont ici à New York et au cœur de cette transformation, M. Kőrösi leur a dit qu’ils sont la clef du succès, c’est pourquoi ils doivent faire partie de partenariats et de solutions plus inclusifs.  Aujourd’hui, nous détenons entre les mains les éléments d’un monde plus pacifique et plus sûr en matière d’eau. 

Que faut-il faire pour réunir ce puzzle?  Tout simplement respecter les engagements pris dans le Programme d’action pour l’eau, a-t-il recommandé. 

M. Kőrösi a passé en revue les engagements mis en évidence ces derniers jours, notamment une politique intégrée de l’eau et du climat aux niveaux national et mondial d’ici à 2030.  Il a plaidé pour un réseau mondial d’éducation à l’eau et des accords transfrontaliers globaux et inclusifs.  Il a appuyé la requête formulée par les États Membres pour la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies sur l’eau.  Enfin, le Président de l’Assemblée a mentionné la nécessité de tenir une réunion intergouvernementale en 2025 pour évaluer la mise en œuvre desdits engagements.  « Je suis prêt à commencer à travailler avec vous sur toutes les actions de transformation », a-t-il lancé, avant d’appuyer sur une sonnette bleue, signal du nouveau chapitre de l’action.

M. GILBERT HOUNGBO, Président du mécanisme ONU-Eau et Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a dit croire, à l’issue de cet « événement historique », qu’un avenir radieux nous attend s’agissant de l’eau.  En effet, a-t-il souligné, à l’occasion de cette conférence, nous avons pu créer un programme audacieux assorti d’engagements volontaires clairs, ce qui permettra de relever les défis à l’horizon 2030 et au-delà.  En clôture de ces trois jours de débats, le Président d’ONU-Eau a souhaité souligner l’importance de la coopération entre les secteurs et les parties prenantes mais aussi à travers les frontières.  Il s’est ainsi déclaré encouragé de voir que tant de pays supplémentaires rejoignent la Convention sur l’eau.  M. Houngbo a également insisté sur le droit de tous à l’eau potable et à l’assainissement, qui est un droit humain et une « boussole » pour ne laisser personne de côté.  La nécessité de justice sociale exige d’agir sans condition, a-t-il affirmé, ajoutant que nous avons tous un rôle à jouer pour faire advenir ces changements.  Nous aurons pour cela besoin de tous, des jeunes, des femmes, des personnes autochtones et du secteur privé, et nous devrons tous travailler de concert et dans des conditions de droits égaux s’agissant de notre programme pour l’eau. 

De l’avis du Président d’ONU-Eau, cet examen à mi-parcours de la Décennie d’action sur l’eau a démontré que les Nations Unies peuvent « acheminer de l’eau de partout ».  Nous pouvons alimenter des consensus, faire des rapports sur les progrès réalisés et apprendre les uns des autres, ce qui permettra à l’eau de circuler librement et d’abreuver tous les processus intergouvernementaux, a-t-il expliqué de manière métaphorique.  À ses yeux, cette conférence est une « réussite », mais il faut à présent redoubler d’efforts pour qu’elle soit suivie d’effets.  M. Hongbo a assuré que la « famille » du mécanisme ONU-Eau sera là à chaque instant pour accompagner la mise en œuvre du Programme d’action pour l’eau.  La première étape, a-t-il précisé en conclusion, sera le forum politique de haut niveau, avec le rapport des entités de l’ODD 6. 

Nous venons de nous réunir pour la première fois en 46 ans en raison du caractère urgent de la situation de l’eau, a déclaré dans ses remarques de clôture le Président du Tadjikistan et Coprésident de la Conférence des Nations Unies sur l’eau, M. EMOMALI RAHMON.  L’eau est liée à l’alimentation, au climat, à la santé, à la culture ainsi qu’à nos économies.  Il y avait donc à ses yeux une « occasion à saisir » pour changer radicalement notre perception et notre utilisation de l’eau, « qui est la vie elle-même ».  Il nous faut, selon lui, une nouvelle vision de l’eau qui aura pour axe le développement de cette ressource après 2030.  Ces trois jours, a estimé le Président, ont été une véritable source d’inspiration.  Il a invité les délégations à « porter la parole de l’action sur l’eau dans le monde entier ».  Les défis liés à l’eau nous touchent tous, a poursuivi le Président qui a ajouté que les participants aux cinq dialogues interactifs et aux innombrables manifestations parallèles ont montré que la Conférence n’a pas été organisée en vain. 

L’eau douce est une ressource limitée qui doit être considérée comme un outil du développement durable et nous permettre d’intensifier la résilience et l’atténuation aux changements climatiques.  Nous devons pour ce faire renforcer nos capacités d’alerte rapide et révolutionner la manière dont les pays sont équipés pour faire face aux sécheresses et aux inondations, tout en tirant parti des partenariats.  Pour assurer le suivi de la Conférence, le Président a dit compter sur le Sommet sur les objectifs de développement durable de 2023, le Sommet de l’avenir de 2024 et le Sommet social mondial de 2025.  Les partenariats public-privé dans le domaine de l’eau permettront, à ses yeux, de déboucher sur des innovations sans reproduire les erreurs du passé, grâce à de meilleures données et au renforcement des capacités nationales.  La Décennie d’action sur l’eau n’est que le début, a-t-il lancé, avant d’inviter les délégations à participer au Sommet sur les objectifs de développement durable de Douchanbé en 2024.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le dernier dialogue interactif de la Conférence sur l’eau s’achève sur un appel écrasant en faveur de la désignation d’un envoyé spécial pour l’eau

Conférence des Nations Unies sur l’eau
Table ronde #5
ENV/DEV/2058

Le dernier dialogue interactif de la Conférence sur l’eau s’achève sur un appel écrasant en faveur de la désignation d’un envoyé spécial pour l’eau

Le cinquième et dernier dialogue interactif de la Conférence sur l’eau sur le thème « L’eau pour le climat, la résilience et l’environnement », a été marqué, ce matin, par la demande renouvelée des États Membres que le Secrétaire général de l’ONU nomme un envoyé spécial pour l’eau.  En effet, cette demande, exprimée selon l’Allemagne et la France par un total de 150 pays depuis le début de la Conférence, permettrait de renforcer la gouvernance mondiale de l’eau et, partant, d’accélérer la mise en œuvre de l’ODD 6 (Eau propre et assainissement) et du Plan d’action du Secrétaire général pour la Décennie d’action sur l’eau (2018-2028).  Les Coprésidents de la séance ont en outre souligné que cette gouvernance renforcée pourrait compter localement sur des coalitions multipartites engagées dans une protection et une gestion durable dûment financées de ce « bien commun mondial » que sont les ressources hydriques.

Lançant la discussion, le Ministre principal et Ministre chargé de la coordination des politiques sociales de Singapour, Tharman Shanmugaratnam, a souligné que l’eau ne concerne pas seulement l’ODD 6, qu’elle est plus largement « un catalyseur pour la réalisation de tous les ODD ».  Il a ajouté qu’il est du ressort des pays et de leurs partenaires du développement de protéger par des actions locales et régionales le cycle de l’eau.  À cet égard, il a plaidé pour la mobilisation des financements et d’investissements spécifiques à la gestion de l’eau, pour l’accroissement des subventions aux pays en développement, PMA et PEID notamment, et pour le rapprochement des flux de financement publics et privés afin de réduire le coût du capital pour les investissements dans le monde en développement.  La science la plus récente nous dit que nous devons gérer le cycle de l’eau comme un bien commun mondial, a-t-il aussi insisté, ajoutant l’importance de remodeler la gouvernance multilatérale liée à l’eau, en appuyant à cet égard la proposition défendue par le Secrétaire général de l’ONU que soit nommé un envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau et renforcée ONU-Eau.  En outre, le Ministre a mis l’accent sur l’importance d’établir des mécanismes mondiaux de collecte de données hydriques et d’analyse de celles-ci, qu’il s’agisse d’un système mondial d’information sur l’eau ou d’initiatives en réseau de diffusion et de partage libre des données.  Enfin, le Coprésident de la discussion a estimé nécessaire de multiplier les conférences intergouvernementales de l’ONU sur l’eau pour débattre des conditions d’établissement des sociétés inclusives, cela en profitant de l’élan et la prise de conscience actuels sur les enjeux liés à l’eau.  Nous pouvons transformer la crise de l’eau en une immense opportunité mondiale, a-t-il conclu avant de céder la parole à la Coprésidente.

De l’avis de la Secrétaire d’État adjointe aux océans, à l’environnement international et aux affaires scientifiques des États-Unis, Mme Monica Medina, un tel envoyé spécial chargé de l’eau, pourrait être la voix de l’ONU sur l’eau dans l’ensemble des instances de délibération internationales, y compris celles où cette question vitale n’est pas encore débattue en tant que priorité.  La responsable américaine a également mis l’accent sur le nécessaire renforcement des institutions de financement du développement, lesquelles doivent intégrer spécifiquement les questions de l’eau et du climat dans leurs stratégies.  Dans le même temps, les ministres des finances doivent reconnaître la valeur de l’eau et envisager en ce sens une gestion et une utilisation durables de cette ressource, a ajouté Mme Medina.  Revenant sur les enjeux de gouvernance de l’eau, elle a déclaré que les États-Unis souhaitent l’inclusion des groupes vulnérables et marginalisés dans la prise de décisions sur l’eau à tous les niveaux.  Nos projets, pour aboutir et être couronnés de succès, doivent être ouverts à la participation et prévoir la pleine implication des peuples autochtones, des jeunes, des communautés locales et des femmes, a-t-elle insisté.  Par ailleurs, elle a relevé l’importance de la délégation américaine à la présente conférence, une preuve selon elle qu’il existe un réel intérêt pour la gestion de l’eau au plus haut niveau du Gouvernement américain.  Mme Medina a ainsi précisé que la politique américaine de l’eau était orientée par deux documents clefs, le Plan d’action de la Maison Blanche sur la sécurité de l’eau et la Stratégie mondiale de l’eau.  Elle s’est dite aussi prête à partager avec les participants les résultats des nombreux projets WASH portés par son pays à travers le monde.

« L’eau est de la nourriture et la nourriture est de l’eau », a déclaré M. Qu Dongyu, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en soulignant l’importance cruciale de l’eau pour l’agriculture et la sécurité alimentaire, ainsi que pour l’atteinte des ODD.  Les sécheresses, les pénuries d’eau, les inondations et la pollution nous rappellent pourtant que nous sommes confrontés à de graves problèmes liés à l’eau, exacerbés par les changements climatiques.  L’agriculture représente 70% des prélèvements d’eau douce dans le monde et constitue à ce titre « la clef de la sécurité hydrique et alimentaire », a-t-il expliqué.  Pour cette raison, de nombreuses initiatives prioritaires de la FAO se concentrent sur les liens entre l’eau et l’agriculture dans les systèmes de production, y compris les cultures, l’élevage, la foresterie, ainsi que la pêche et l’aquaculture.  Le Directeur général a estimé que les stratégies de la FAO sur les changements climatiques, la science et l’innovation lui permettront d’aider les États, notamment les pays en développement, à trouver des moyens de « produire plus avec moins », tout en minimisant les impacts environnementaux.  La FAO soutient en outre les feuilles de route nationales présentées en 2022 lors du Dialogue de Rome sur l’eau, et a récemment tenu à cet effet un premier atelier régional en Afrique.  Signe de l’importance de cette question, la FAO a fait de l’eau le thème principal du débat général de sa prochaine conférence, qui aura lieu en juillet de cette année.

Mme Tanja Fajon, Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères et européennes de la Slovénie, a reconnu que malgré les progrès accomplis, nous devons encore « quadrupler nos efforts » pour parvenir à l’accès universel à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène.  À cette fin, un changement de culture est nécessaire afin que l’eau soit considérée comme un bien public mondial et un droit humain pour tous, a-t-elle insisté, relevant que l’eau a également le potentiel de favoriser une croissance inclusive et des moyens de subsistance durables, basés sur l’équité et la justice.  « Un monde sans eau est un monde sans paix », a poursuivi la Ministre en mettant en garde contre les risques de conflit et d’instabilité en cas d’exploitation improductive de l’eau et d’absence d’accords de coopération sur les eaux partagées, en particulier concernant les eaux souterraines.  Nous avons besoin de davantage de dialogues sur l’eau au sein du système des Nations Unies, a-t-elle ajouté, en exprimant son appui au renforcement de la fonction de coordination d’ONU-Eau et des commissions économiques régionales de l’ONU.  Nous devons également lier l’eau à d’autres processus intergouvernementaux sur le climat, la sécurité alimentaire, l’énergie, la santé et l’environnement, une tâche que pourrait selon elle remplir un envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau.  Afin de réaliser le changement transformateur nécessaire sur l’eau, Mme Fajon a appelé à assurer un suivi étroit de la Conférence des Nations Unies sur l’eau et du Programme d’action sur l’eau.

À son tour, le Ministre des travaux publics et du logement public d’Indonésie, M. Basuki Hadimuljono, a rappelé l’utilité du cadre instauré dans le contexte de la Décennie d’action sur l’eau pour relever les défis liés à l’eau potable.  L’importance des lacs pour maintenir un accès durable à l’eau potable, d’une gestion intégrée des ressources en eau et de la réhumidification, la revégétalisation et la restauration de l’écosystème des tourbières y est soulignée, a-t-il ajouté.  Pour réaliser ces objectifs, il a appelé à renforcer la sensibilisation aux enjeux de « l’eau durable », de l’assainissement, de l’intégration des infrastructures d’eau et d’assainissement dans les plans environnementaux nationaux et de stratégies de financement innovantes et créatives des projets WASH.  Nous devons fournir une technologie appropriée tirée de la recherche, œuvrant à des solutions assurant une disponibilité pérenne et partagée des ressources hydriques, a-t-il encore indiqué.  Le Ministre indonésien a également souhaité la tenue de davantage de dialogues et de réunions de haut niveau sur les ODD liés à l’eau, dans le cadre notamment de la Journée mondiale de l’eau et en vue de la tenue du prochain Forum mondial de l’eau, prévu à Bali en mai 2024.

La réalisation des ODD est impossible si nous ne centrons pas notre action sur l’eau, a déclaré Mme Zulfiya Suleimenova, Ministre de l’environnement et des ressources naturelles du Kazakhstan.  Toutefois, la pression hydrique et la pression sur les écosystèmes liés à l’eau ne cessent d’augmenter, tandis que les changements climatiques en multiplient les effets.  Il est donc indispensable de mener des actions concertées à l’échelle nationale et internationale pour préserver les ressources hydriques, a appuyé la Ministre, pour qui le plan de la Décennie d’action sur l’eau constitue l’un des moyens d’atteindre les résultats escomptés.  L’utilisation conjointe des ressources hydriques doit toutefois être fondée sur les principes du droit international de l’eau, y compris l’obligation de coopérer, a-t-elle noté, en demandant aux États Membres de ratifier la Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontaliers et des lacs internationaux.  « L’eau n’est pas une ressource, elle est un droit », a-t-elle ajouté, en demandant elle aussi la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies sur l’accès à l’eau.  Le Kazakhstan s’efforce pour sa part de réparer les dommages causés par la « tragédie de la mer Aral » en rétablissant l’eau dans sa partie nord.

Mme Usha Rao-Monari, Administratrice associée du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a fait valoir qu’un partenariat mondial pour l’eau équivaut à un partenariat pour le développement et l’équité sociale.  La transformation structurelle envisagée par le PNUD s’articule autour de trois objectifs cruciaux, soit l’accès à l’eau, la qualité de l’eau et la sécurité de l’eau, a-t-elle expliqué.  Le portefeuille de l’eau du PNUD des cinq dernières années comprend 581 projets d’une valeur de 3,8 milliards de dollars et portant sur la gouvernance, l’innovation stratégique et le financement du développement.  Face à l’urgence, Mme Rao-Monari a invité les États Membres à donner un élan à la mise en œuvre du Programme d’action sur l’eau, alors que 2 milliards de personnes dans le monde ne disposent pas de services d’eau potable et que 3,6 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à des services d’assainissement.  Pour « briser les silos » dans les politiques liées à l’eau, l’Administratrice associée a prôné la consolidation des approches multisectorielles et multipartites de la gouvernance de l’eau, la démocratisation des données hydriques, l’implication des communautés locales et la mise en place de partenariats.  Le PNUD travaille par ailleurs avec la Banque mondiale et d’autres partenaires multilatéraux afin d’établir de nouveaux mécanismes financiers permettant de combler le fossé entre les investissements publics et privés dans le domaine de l’eau.

Il est revenu à la société civile et au secteur privé de lancer la discussion, la Fondatrice et PDG de la Thirst Foundation prônant, dans un contexte de crise hydrique mondiale aigue, de passer des engagements aux actes en transformant les programmes agréés sur le plan international en actions concrètes.  La Fondatrice/PDG d’« Innovation: Afrique » s’est à cet égard voulue pragmatique, présentant la solution technologique d’utilisation de l’énergie du soleil pour alimenter les pompes à eau de milliers de villages africains lui ayant valu le prix de l’innovation des Nations Unies.  «  L’eau, il y en a, ce n’est pas cela le défi: ce qui manque, c’est l’énergie pour la pomper et la transférer là où elle est nécessaire  », a-t-elle défendu, appelant à une baisse des coûts de forage des aquifères profonds par la prise de mesures d’incitations fiscales et la baisse de la TVA pour les ONG africaines.b Pour le Directeur exécutif de l’Institut international de l’eau de Stockholm, la réalisation des ODD repose sur des actions conjointes des individus et des organisations, ces actions devant être ancrées dans les réalités locales des populations qui en ont le plus besoin.  « Donnons vie au Plan d’action de la Décennie en axant les financements sur l’amélioration de la gouvernance et la stimulation d’une utilisation plus durable et équitable de l’eau aux niveaux local et mondial », a-t-il préconisé.

La question de l’amélioration de la gouvernance mondiale de l’eau a été au cœur des interventions des États Membres et des agences onusiennes.  L’Allemagne, la France, la Finlande, la Slovaquie et la Suisse ont ainsi parlé d’une seule voix, soulignant que pour réaliser l’ODD 6 et le Plan d’action dans les temps et surmonter la crise hydrique, il faut répondre favorablement à la demande de 150 États Membres de nommer un envoyé spécial pour l’eau.  Selon ces pays, un tel envoyé spécial, doté d’un mandat fort, ferait en sorte que la question de l’eau soit prioritaire de manière permanente dans toutes les instances décisionnelles de l’ONU.  L’Allemagne a plaidé pour que soit nommé un Africain basé à New York et qu’une fois en fonction celui-ci s’attèle au renforcement d’une coopération plus étroite entre ONU-Eau et les commissions régionales des Nations Unies.  La France a souhaité quant à elle qu’il assure un traitement de la question de l’eau de manière visible et cohérente au plus haut niveau international et s’efforce de mobiliser des financements à la hauteur des enjeux.  Sur ce dernier point, la délégation a annoncé qu’en tant que cinquième bailleur international de la finance-climat, la France mobiliserait des ressources pour qu’une fois nommé il puisse s’atteler à sa tâche, les enjeux si pressants de l’eau n’autorisant aucune perte de temps.  L’Union européenne a ajouté aux propos de ces membres que le nouvel envoyé spécial devra réaliser rapidement un suivi de la présente conférence.  Elle a aussi souhaité que le Président de l’Assemblée générale organise des débats pour qu’il soit donné corps aux mesures préconisées dans les documents finaux.

Les pays africains ayant pris la parole ont soutenu ces propositions.  Le Kenya a en outre invité le système de l’ONU à diversifier ses sources de financement via les obligations vertes, tandis que l’Égypte a salué la réussite de l’initiative AWARE lancée avec l’Organisation météorologique mondiale (OMM) lors de la COP27 pour aborder la sécurité de l’eau dans le cadre de l’adaptation aux changements climatiques.  AWARE et les projets menés avec la FAO vont aider à la réalisation des ODD et permettre aux États Membres de faire face à la demande croissance en eau et de gérer l’impact des changements climatiques d’origine entropique tout en garantissant des écosystèmes et une sécurité alimentaire durable, a appuyé le représentant de l’Organisation météorologique mondiale.  Pour la Namibie et le Botswana, l’eau doit être hissée au même rang de préoccupation et recevoir le même attention foncière, scientifique et technologique que les changements climatiques.

De son côté, l’Ukraine a déclaré que l’agression russe de son pays avait entraîné une rupture brutale des équilibres naturels les plus vitaux.  « En violant notre sécurité hydrique, en bombardant et transformant en champs de bataille nos lacs et nos rivières, la Russie empêche les Ukrainiens de jouir de leurs droits humains les plus fondamentaux, à commencer par l’accès à l’eau potable et salubre », a-t-elle dit.  L’Ukraine a appelé instamment tous les pays à exercer la pression nécessaire à un retrait immédiat et inconditionnel des forces russes de son territoire, et à soutenir son plan de relance verte.

Enfin, des États comme la Colombie et l’Australie, qui ont défendu ardemment l’émergence d’une société inclusive autour du sujet de l’eau, ont souligné l’importance de privilégier des solutions fondées sur la nature, en milieu urbain et surtout rural, là où les organisations locales s’emploient à mettre leur énergie créatrice au servir des communautés.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conférence sur l’eau: affaiblies par les crises, des délégations appellent à davantage de coopération et de financements pour gérer la précieuse ressource

Conférence des Nations Unies sur l’eau
3e & 4e séances plénières, matin & après-midi
ENV/DEV/2054

Conférence sur l’eau: affaiblies par les crises, des délégations appellent à davantage de coopération et de financements pour gérer la précieuse ressource

Alors que le monde peine à garantir l’accès de tous à l’eau et à en assurer une gestion durable, le deuxième jour de la Conférence des Nations Unies sur l’eau a permis aux délégations de partager leur retour d’expérience dans leur difficile poursuite de cet objectif de développement durable (ODD).  Les pays de la bande sahélienne et de la Corne de l’Afrique se sont particulièrement illustrés, eux sur qui semblent se concentrer toutes les difficultés, à l’instar du Soudan qui les a énumérées: dégradation de l’environnement, sécheresses, inondations liées aux changements climatiques, et difficultés d’accès à l’eau potable.  Gravement touché par la baisse des précipitations, le Soudan a relevé qu’il n’était pourtant pas une exception, ce qu’ont confirmé le Tchad, la Mauritanie, le Soudan du Sud et de nombreux pays d’un monde en proie à un climat déréglé. 

Alors que les arbitrages entre pays partageant un même bassin d’eau douce se multiplient, il a également été question aujourd’hui de gestion transfrontalière, d’interdépendance et de coopération.  Cas d’école d’interdépendance écologique, la République démocratique du Congo (RDC) a expliqué que la préservation des forêts du bassin du Congo avait un impact hautement positif sur le renouvellement du cycle de l’eau, et que son écosystème hydrique régulait les pluies dans toute la partie est de l’Afrique et du Sahel.  La RDC a même avancé que sans ses forêts, il n’y aurait « aucune goutte d’eau » au Soudan, au Kenya, en Éthiopie, ou en Érythrée. 

« La gestion transfrontalière de l’eau est un sujet très technique », a relevé l’Éthiopie, mais peut se révéler un partenariat gagnant-gagnant tant que prévaut la « sagesse collective » dans un monde aux ressources limitées.  L’Éthiopie a profité de la Conférence pour s’engager sur la signature et la ratification d’un accord-cadre permettant la création d’une « commission sur le Nil » et de demander aux États riverains de le ratifier à leur tour.  Le Soudan a espéré en retour qu’un accord serait conclu avec l’Égypte et l’Éthiopie autour du tout nouveau Barrage de la Renaissance, sur le Nil Bleu. 

Au Proche-Orient, la Türkiye dit avoir toujours considéré les besoins de son voisin iraquien, en aval du fleuve Tigre.  Elle a cependant estimé que ces questions devaient être traitées sans médiation par des tiers et « uniquement entre pays riverains », car selon elle, les conventions des Nations Unies sur l’eau sont loin de refléter une compréhension commune au sein de la communauté internationale.  La France a estimé au contraire que la Convention sur l’eau offre un « cadre juridique et institutionnel », ainsi que des « outils précieux » pour établir des coopérations, appelant à la conciliation et à la coopération à l’échelle des bassins versants.

L’importance de l’accès à l’eau, l’assainissement et l’hygiène pour tous (WASH), cible principale de l’ODD 6, a été rappelé à plusieurs reprises aujourd’hui.  La Mauritanie a ainsi dit avoir accéléré́ l’exécution des programmes d’eau potable et d’assainissement pour 670 de ses localités, tandis que le Nigéria cartographie son réseau.  L’Arabie saoudite s’est présentée comme le leader mondial de la production d’eau non conventionnelle grâce au dessalement de l’eau de mer, et a indiqué qu’elle envisage d’étudier la faisabilité d’utiliser cette eau pour appuyer la sécurité alimentaire.  Le Yémen, où la part par habitant en eau ne dépasse pas les 80 m3 et où 40% des habitants n’ont pas accès à une eau sûre, a également pris des mesures pour passer à des ressources hydriques non traditionnelles, comme le recyclage des eaux usées, l’utilisation des eaux de pluie et l’irrigation par « submersion ».  Mais « faute de financement suffisant », le Yémen pare au plus pressé; la majorité des aides qu’il reçoit sont d’urgence.  « Nous n’atteindrons pas nos objectifs internationaux sans financement et sans transfert de technologies », a opiné le Tchad, suivi du Kenya, qui a souligné la nécessité d’augmenter son investissement annuel à 1,3 milliard de dollars par rapport à l’allocation actuelle de 600 millions de dollars. 

Productrice d’énergie via l’hydroélectricité, élément crucial des systèmes de refroidissement de centrales électriques: l’eau est également vitale pour l’énergie, un point souligné par l’Ukraine qui a indiqué que depuis l’agression russe, les vannes de la centrale hydrique du fleuve Dniepr ont été ouvertes par la Fédération de Russie, privant cinq millions d’Ukrainiens d’accès à l’eau potable, une situation qui pourrait toucher 70% de la population sous peu.  L’Ukraine, qui a estimé le montant des dégâts infligés par la Russie à ses infrastructures hydriques à près de 2,5 milliards de dollars, a exigé réparation et reddition de comptes.  La Fédération de Russie a fustigé pour sa part des décennies de négligence des intérêts de la population, ce qui aurait été donné à voir en 2014 dans la péninsule de Crimée, où la situation insatisfaisante de l’approvisionnent en eau aurait conduit à la perte de 60% de l’eau potable. 

Le retour d’expérience de la République de Corée indique en outre qu’un développement accéléré peut se payer cher.  Confronté à une grave pollution de l’eau et à une pénurie d’eau du fait de sa croissance industrielle rapide, le pays a eu recours à des « politiques scientifiques » pour lutter, ainsi qu’à la construction d’infrastructures hydrauliques pour atteindre un taux d’approvisionnement en eau potable de 99%.  L’Australie a procédé pour sa part à une autocritique, reconnaissant que l’expérience des peuples autochtones dans la gestion de l’eau a été trop longtemps négligée face aux priorités économiques.  L’Australie cherche aujourd’hui à « équilibrer les objectifs économiques, environnementaux, sociaux et culturels » grâce à des politiques de l’eau durables. 

La création d’un poste d’envoyé spécial de l’eau par l’ONU a de nouveau été soutenue par de nombreuses délégations, dont celles du Nigéria et de la RDC qui ont souhaité que celui-ci soit pourvu par une personnalité africaine, le continent étant le plus touché par les problématiques liées à l’eau potable, aux changements climatiques et à la gestion transfrontalière des ressources en eau. 

En raison de circonstances exceptionnelles, la couverture du dernier segment de la plénière n’a pas pu être assurée. 

La Conférence reprendra ses travaux demain, vendredi 24 mars, à partir de 10 heures. 

CONFERENCE CONSACRÉE À L’EXAMEN APPROFONDI À MI-PARCOURS DE LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE LA DÉCENNIE INTERNATIONALE D’ACTION SUR LE THÈME « L’EAU ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE » (2018-2028)

Suite du débat général

M. LÁSZLÓ BORBÉLY, Conseiller du Premier Ministre de Roumanie, a rappelé qu’il avait fallu attendre 46 ans avant d’avoir cette conférence.  Il a indiqué que son pays est très actif dans la région s’agissant de l’eau douce et de la coopération transfrontalière dans ce domaine, rappelant que le Danube est le cours d’eau le plus international d’Europe, mais aussi une des zones les plus touchées par les changements climatiques.  Le Gouvernement roumain va consacrer 9 milliards d’euros pour la gestion et l’approvisionnement en eau dans la région, a-t-il annoncé.  Il a rappelé que 2015 avait été une année essentielle pour l’humanité, avec les conférences de Sendai, Addis-Abeba et Paris.  À mi-parcours, nous avons besoin d’un envoyé spécial de l’ONU sur la gestion de l’eau pour la coordination des actions mondiales sur la question, a-t-il ajouté en encourageant tous les pays à élaborer un rapport national sur l’eau comme l’a fait le sien.  Ce genre de document aide à la prévisibilité, a-t-il insisté.  Il a aussi exhorté à se préparer au Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD) en septembre 2023 et au Sommet de l’avenir en 2024.  Alignons toutes les facettes de nos vies sur les ODD, a-t-il lancé en brandissant un Rubik’s Cube qui affiche les 17 ODD.  Paraphrasant le slogan des années 70, le Conseiller a appelé à « faire le développement durable, pas la guerre ». 

Mme MASUDI EVE BAZAIBA, Vice-Première Ministre et Ministre de l’environnement de la République démocratique du Congo (RDC), a souligné que la RDC, un pays stratégique d’Afrique par sa position géostratégique, constitue une charnière entre plusieurs grands ensembles hydrographiques sous-régionaux.  Elle a indiqué que son pays dispose de 52% des réserves des eaux douces sur la surface de l’Afrique; 23% des ressources hydriques renouvelables de ce continent; et 10% du potentiel mondial en eau douce.  Il doit ce potentiel à l’immensité de son territoire au cœur du bassin forestier tropical du Congo dont il détient 60% de la superficie forestière. 

Elle a expliqué que la préservation des forêts du bassin du Congo a un impact hautement positif sur le renouvellement du cycle de l’eau, et que ses écosystèmes hydriques régulent les pluies dans toute la partie est de l’Afrique et du Sahel.  De fait, sans les forêts de la RDC, il n’y aurait « aucune goutte d’eau » au Soudan, au Kenya, en Éthiopie, ou en Érythrée.  Même le Nil dont dépend la survie de l’Égypte est alimenté par les pluies provenant de de la RDC, a-t-elle fait valoir.  Le Centre de recherches forestières internationales confirme, lui-même, les rôles multiples joués par les forêts de la RDC, un argument de taille, selon elle, en faveur de la conservation de ces forêts, piliers stratégiques pour répondre aux problèmes des changements climatiques dans le monde. 

La dignitaire a ensuite averti que le danger de la pollution plastique et aux produits chimiques toxiques provenant des exploitations minières réduit la disponibilité d’eau douce.  La lutte contre ces fléaux devrait occuper une place de choix dans nos activités quotidiennes, a-t-elle estimé.  Elle s’est également inquiétée d’un projet qui vise à ponctionner les eaux de la rivière Oubangui en RDC vers le lac Tchad sans étude d’impact environnemental préalable et qui représente, selon elle, un risque de réel danger dans le bassin du Congo.  Elle a invité à privilégier d’autres alternatives au lieu de chercher à résoudre un problème dans le bassin du lac Tchad en créant un autre dans le bassin du Congo.  Pour finir, elle a demandé la nomination d’un envoyé spécial pour l’eau, poste qui doit être occupé par une personnalité de haut niveau provenant du continent africain, capable de porter la voix des pays les plus vulnérables, au regard des défis immenses pour la réalisation de l’ODD 6 pour les pays africains. 

Mme ALICE WAHOME, Secrétaire du Cabinet pour l’eau, l’assainissement et l’irrigation du Kenya, a expliqué que son pays a élaboré des réglementations visant à garantir une société intelligente en matière d’eau, grâce à sa collecte et son stockage.  Il existe des stratégies visant à donner accès à l’eau potable à 4,5 millions de ménages au cours des cinq prochaines années.  Ces stratégies seront complétées par un programme de collecte de l’eau pour la résistance à la sécheresse qui permettra de fournir de l’eau pour irriguer 500 000 acres.  Enfin, le Kenya a atteint une proportion de 70% d’accès à l’eau dans les zones urbaines et de 32% d’installations sanitaires gérées en toute sécurité, a-t-elle précisé, ajoutant que ces résultats sont le fruit de la finalisation de 91 projets d’eau d’une valeur de 450 millions de dollars au cours des deux dernières années.  Cependant, a concédé la représentante, plusieurs défis à la mise en œuvre complète de l’ODD 6 demeurent.  Il s’agit notamment des effets des changements climatiques qui ont augmenté la fréquence des inondations et des sécheresses; l’énorme déficit de financement du secteur; la faible utilisation de la technologie; la baisse des ressources en eau en raison de la croissance rapide de la population et des besoins concurrents en eau (industrie, agriculture, énergie); ainsi que l’empiètement et la dégradation des zones de captage d’eau. 

Pour pouvoir atteindre l’ODD 6, Mme Wahome a souligné la nécessité d’augmenter l’investissement annuel à 1,3 milliard de dollars par rapport à l’allocation actuelle de 600 millions de dollars, mettant en avant le rôle des partenariats public-privé et d’autres modèles de financement innovants pour combler le déficit de financement.  Le Kenya s’est donc engagé à créer un environnement propice aux investissements dans le secteur de l’eau, notamment en mettant en œuvre des politiques et des réglementations qui soutiennent les investissements du secteur privé, et facilitent les partenariats entre les entités publiques et privées afin de garantir une fourniture efficace et efficiente des services d’eau, d’assainissement et de sécurité alimentaire.

M. MATTHEW SAMUDA, Ministre sans portefeuille au Ministère de la croissance économique et de la création d’emplois de la Jamaïque, et Coprésident du Groupe des Amis des enfants et des objectifs de développement durable, a appelé les États Membres à saisir l’occasion de la Conférence sur l’eau pour atteindre l’ODD 6 et assurer un avenir meilleur à chaque enfant.  Il a indiqué que la « Vision Jamaïque 2030 » vise une gestion durable des ressources en eau afin de permettre un accès universel à l’eau potable et à un assainissement adéquat d’ici à 2030.  La crise de l’eau est exacerbée par la crise climatique, a ajouté le Ministre appelant les pays développés à honorer leurs engagements financiers pris dans le cadre de l’Accord de Paris.  Il a signalé que son pays s’est doté de nouvelles politiques sur les changements climatiques et les émissions, qui visent notamment à protéger ses bassins versants, à augmenter les aires protégées et à planter trois millions d’arbres en trois ans.  Plus de 2,5 millions ont déjà été plantés, s’est-il félicité. 

Le Ministre a aussi parlé de l’approche suivie par son pays pour la gestion intégrée des ressources en eau, grâce à la création d’un conseil de gestion.  Il a signalé que le coût élevé de l’énergie a eu un impact significatif sur la capacité de la Jamaïque à distribuer l’eau à tous, mais que le Gouvernement a pris des mesures pour réduire sa consommation d’énergie dans le processus de distribution, grâce à un équipement amélioré.  Le Gouvernement a également investi quelque 250 millions de dollars dans le programme d’irrigation de la vallée d’Essex et le projet d’irrigation de Pedro Plains, a-t-il ajouté, en précisant que ces projets sont une priorité nationale pour améliorer la sécurité alimentaire.

Mme SAIDA MIRZIYOYEVA, Cheffe du Département de l’Administration présidentielle de l’Ouzbékistan, a réaffirmé le ferme engagement de son pays dans la réalisation des 17 objectifs de développement durable (ODD) à travers, notamment, une initiative visant à revitaliser l’eau et les écosystèmes de la région de la mer d’Aral.  Elle a rappelé la visite, en 2017, du Secrétaire général de l’ONU à Muynak, au bord de la mer d’Aral, lors de laquelle il avait déclaré qu’il s’agissait « probablement de la plus grande catastrophe écologique de notre époque », déplorant que ce village portuaire autrefois prospère soit devenu un cimetière de bateaux.  Aujourd’hui, cette mer ne subsiste plus que dans les peintures d’artistes accrochées au musée de Noukous dans le Karakalpakstan, s’est-elle désolée. 

La crise de la mer d’Aral est, à ses yeux, un douloureux rappel des conséquences de la négligence environnementale de l’être humain.  Toutefois, s’est-elle réjouie, grâce aux efforts de personnes bienveillantes, elle devient aujourd’hui un symbole d’espoir et de renouveau.  Elle a rappelé l’adoption en 2021, à l’initiative de son pays, d’une résolution déclarant la région de la mer d’Aral zone d’innovations et de technologies écologiques, ainsi que la création en 2018, d’un fonds d’affectation spéciale multipartites pour la sécurité humaine dans la région de la mer d’Aral.  Aujourd’hui, grâce à son financement, nombre de projets ont été mis en place pour un montant total de plus de 14 millions de dollars, s’est félicité l’intervenante, qui a fait savoir que son pays s’est fixé pour « tâche ambitieuse » de transformer le fond asséché de la mer d’Aral en un jardin. 

M. JÁN BUDAJ, Ministre de l’environnement de la Slovaquie, a estimé que la pollution de l’eau et l’entrave de l’accès à l’eau ne devraient pas seulement être considérés comme un crime contre l’environnement, mais également être traités et punis comme un crime contre les droits humains, évoquant l’agression de la Russie contre l’Ukraine.  Il a relevé que la criminalité environnementale est la quatrième plus importante au monde, avec une croissance annuelle de 5 à 7%, mais que le nombre d’enquêtes demeure faible.  Le Ministre a évalué les dommages environnementaux causés par la Russie sur le territoire souverain de l’Ukraine, à des centaines de milliards d’euros.  Ces montants ne tiennent pas compte des dommages causés à la santé des personnes qui sont obligées d’utiliser de l’eau contaminée pour boire et cuisiner parce qu’elles n’ont tout simplement pas d’autre eau disponible, a-t-il signalé.  À cause de la guerre, plus de 6 millions d’Ukrainiens ont un accès limité ou inexistant à l’eau potable, et l’impact sur la santé de l’eau contaminée et de l’exposition aux toxines libérées par le conflit peut mettre des années à se manifester.  L’agresseur devra être tenu pour responsable des dommages qu’il a causés, a-t-il exigé. 

Passant à la situation dans son propre pays, le dignitaire a pointé du doigt l’héritage d’activités industrielles et agricoles irresponsables sur le plan environnemental, qui menacent encore aujourd’hui la qualité de l’eau et empêchent son utilisation pour la consommation humaine.  Pour éviter d’autres menaces, son gouvernement a mis en place un espace législatif pour affirmer la supériorité de l’intérêt public dans la protection de l’eau.  Il a indiqué que la Slovaquie et les Pays-Bas ont signé la semaine dernière une déclaration de coopération visant à éradiquer la dangereuse contamination des eaux souterraines qui menace la plus grande source d’eau potable d’Europe centrale. 

M. MAGNUS HEUNICKE, Ministre de l’environnement du Danemark, est revenu sur la promesse d’eau potable et d’assainissement pour tous faite il y a sept ans, ici à l’ONU, en constatant que pour y arriver il faut travailler à l’unisson.  Pendant des décennies, le Danemark s’est concentré sur des partenariats efficaces dans le secteur de l’eau, a expliqué le Ministre en évoquant les progrès énormes réalisés.  Il s’est félicité que son pays contribue à une série de mesures dans le cadre de sa coopération dans la gestion des ressources hydriques avec les autorités de l’Inde, la Chine, le Maroc et l’Éthiopie.  De plus, un pôle de l’UNICEF sur la gestion de l’eau sera créé à Copenhague, a-t-il annoncé en ajoutant que le Danemark participe à l’initiative sur la gestion des eaux transfrontalières en Afrique, sous la houlette de l’Union européenne.  Compte tenu de la crise de l’eau que traverse le monde, il a appelé à travailler ensemble et a soutenu la nomination d’un envoyé spécial de l’ONU pour l’eau.

M. VAHIT KIRISÇI, Ministre de l’agriculture et des forêts de la Türkiye, a rappelé que les tremblements de terre survenus le 6 février 2023 et a salué l’unité et la solidarité internationales qui ont suivi.  En tant que pays en situation de stress hydrique, la Türkiye a mis en place des systèmes de gestion par bassin versant afin de gérer les ressources en eau de manière rationnelle et intégrée.  Le Gouvernement a élaboré des plans de gestion des bassins fluviaux et des plans sectoriels d’allocation de l’eau, y compris la gestion des inondations et de la sécheresse.  La priorité est donnée au développement de réseaux hydrologiques et climatologiques d’observation de l’eau à l’échelle nationale.  Le Ministre a également indiqué que l’efficacité de la gestion de l’eau a été améliorée dans tous les secteurs, en particulier dans l’agriculture, évoquant la Water Efficiency Initiative lancé le 31 janvier 2023. 

Après avoir souligné l’importance de nommer un envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau, le dignitaire a indiqué que la Türkiye considère les eaux transfrontalières comme une source de coopération plutôt que de conflit entre les pays riverains.  Le Gouvernement a toujours considéré les besoins des pays en aval, et depuis la semaine dernière, plus d’eaux ont été envoyées en Iraq.  Relevant que chaque bassin fluvial transfrontalier a ses propres caractéristiques et dynamiques, il a estimé que les questions connexes doivent être traitées uniquement entre les pays riverains, s’opposant aux médiations par des tiers.  Les conventions des Nations Unies sur l’eau sont loin de refléter une compréhension commune au sein de la communauté internationale, a-t-il indiqué, notant que dans le cas des fleuves transfrontaliers, les pays en amont et les pays en aval ont des responsabilités communes.  Tous les pays riverains doivent utiliser l’eau de manière efficace et rationnelle, a exhorté le Ministre.

M. CARLOS ALBERTO FORTES MESQUITA, Ministre des travaux publics, du logement et des ressources en eau du Mozambique, a reconnu que le chemin qui mène à la couverture universelle pour l’accès à l’eau et aux services d’assainissement est encore long dans son pays.  Il a fait valoir que le Mozambique a investi dans ce secteur un total de 11,7 milliards de dollars depuis 2015 en se concentrant sur la construction d’infrastructures d’approvisionnement en eau et d’assainissement et sur la gestion de ces ressources.  Cependant, pour assurer la réalisation des objectifs fixés, il a dit que son pays a encore besoin de plus de 9,6 milliards de dollars, dont 4,1 milliards pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement, et 5,5 milliards pour la gestion des ressources en eau.  Par conséquent, le Mozambique continue de mobiliser des ressources internes et externes à cette fin, a-t-il expliqué.  Le Ministre a souhaité que les discussions et les débats sur le Programme d’action pour l’eau permettront de renforcer la coopération entre les pays et de trouver des solutions cohérentes, tant sur le plan technique que sur celui des modèles de financement, pour le développement d’infrastructures hydrauliques, d’approvisionnement en eau et d’assainissement, en tenant compte des aspects de durabilité.

Mme LAUREN, MOSS Ministre de l’environnement et des changements climatiques de l’Australie, a commencé par reconnaître les 65 000 ans d’expérience dans la gestion de ressources limitées, dans un climat changeant, « des gardiens de l’eau en Australie »: les peuples des Premières Nations d’Australie, qui comprennent parfaitement le lien entre l’eau et l’écologie, et qui ont un lien vivant et spirituel avec le pays.  Ces connaissances et cette expérience en tant que gardiens de l’eau à long terme n’ont pas été suffisamment reconnues ou valorisées en Australie, a-t-elle concédé, en affirmant que le Gouvernement est déterminé à mieux faire: cette année, l’Australie organisera un référendum visant à inscrire dans sa Constitution la voix des Premières Nations au Parlement.  Il s’agit de créer un organe indépendant et représentatif permettant aux communautés des Premières Nations d’informer le Gouvernement des décisions qui ont un impact sur leur vie, y compris en matière de politique de l’eau, a expliqué la représentante.  L’Australie va également prévoir, dans le cadre du Programme d’action pour l’eau, un engagement volontaire pour l’augmentation des droits à l’eau des aborigènes, avec pour cela un investissement de 150 millions de dollars dans les infrastructures hydrauliques.  Concédant aussi que l’Australie a une longue histoire de réformes difficiles dans le domaine de l’eau, motivées par la nécessité, la représentante a assuré qu’alors que son pays donnait autrefois la priorité aux résultats économiques, il cherche aujourd’hui à équilibrer les objectifs économiques, environnementaux, sociaux et culturels grâce à des politiques de l’eau durables à travers sa feuille de route nationale pour la réforme de l’eau. 

Passant à la crise climatique, la Ministre a expliqué que l’Australie travaille avec d’autres pays pour intensifier l’action mondiale afin d’assurer une transition mondiale ordonnée vers une réduction à zéro des émissions de carbone d’ici à 2050.  Mais nous savons qu’il faut faire preuve de plus d’ambition et d’une mise en œuvre rapide, a martelé la représentante, en précisant que l’eau doit faire partie de cette ambition.  L’eau peut soutenir nos efforts d’atténuation et d’adaptation, a-t-elle fait valoir, sachant que la science et les données sont des alliées incontournables dans ce domaine.  L’Australie est donc heureuse d’inclure dans le Programme d’action pour l’eau un engagement à déployer la mission de surveillance de la qualité de l’eau de son agence scientifique nationale, connue sous le nom d’ « Aquawatch ».

Mme WHA-JIN HAN, Ministre de l’environnement de la République de Corée, a indiqué que son pays a été confronté à la pollution de l’eau et à la pénurie d’eau au cours de sa croissance industrielle rapide.  C’est la raison pour laquelle son gouvernement a adopté des politiques scientifiques pour lutter contre la pollution de l’eau et construire des infrastructures hydrauliques, ce qui a permis d’atteindre un taux d’approvisionnement en eau potable de 99%.  Elle a insisté sur l’importance d’établir un système de gestion de l’eau résistant au climat, notamment à travers la mise en place d’infrastructures telles que des tunnels souterrains profonds ou des systèmes de drainage pour renforcer la résilience aux inondations urbaines.  Enfin, la Ministre a indiqué que son pays prévoit d’exploiter les technologies de l’information de pointe pour une gestion intelligente de l’eau. 

M. GAJENDRA SINGH SHEKHAWAT, Ministre de l’énergie hydrique de l’Inde, a détaillé les politiques et mesures prises par l’Inde pour atteindre l’ODD 6.  Un plan d’action a été lancé en 2019 et plus de 250 milliards de dollars en ressources gouvernementales ont été investis, en partenariat avec des start-ups et des associations d’usagers de l’eau, pour garantir l’accès à l’eau, l’assainissement et l’hygiène pour tous (WASH).  Un programme très ambitieux de 50 milliards de dollars place l’Inde en bonne voie pour assurer l’accès universel et équitable à l’eau potable, à un coût abordable.  Et 5 millions de latrines ont été construites dans le pays, s’est réjoui le Ministre qui a rappelé que la bonne gestion des déchets solides et liquides a été salué lors de la COP15 de Montréal.  L’Inde encourage en outre les pratiques durables en matière de gestion de l’eau avec les communautés locales et donne la priorité à la rénovation de ses barrages.  Elle compte aussi parmi les plus gros utilisateurs d’aquifères au monde, et prend des mesures pour réduire sa dépendance aux eaux souterraines et faire en sorte que les communautés partagent équitablement la ressource à l’échelon local.  Un appel à l’action a d’ailleurs été lancé par le Premier Ministre en 2019 s’agissant du captage de l’eau de pluie, et les communautés locales bénéficient d’un soutien en la matière.

M. NIK NAZMI NIK AHMAD, Ministre des ressources naturelles, de l’environnement et des changements climatiques de la Malaisie, a partagé quelques expériences concluantes de son pays comme le tunnel SMART qui sert non seulement à atténuer les risques d’inondation, mais aussi à réduire les embouteillages à Kuala Lumpur.  Le Ministre a également cité un mécanisme de financement créatif mis en place pour encourager l’investissement privé dans le secteur de l’eau ainsi que l’adoption d’une économie circulaire dans la gestion des déchets et des eaux usées afin de soutenir l’objectif national de zéro déchet net d’ici à 2050.  Aujourd’hui, la Malaisie est en mesure de partager avec le monde entier son expertise en matière d’élaboration de politiques, de capital humain et d’initiatives d’économie circulaire, s’est-il félicité en citant les domaines du recyclage de l’eau et de la réutilisation des boues traitées pour nourrir les sols.  D’ici à la fin de 2025, l’objectif du pays est d’atteindre une couverture de 98% pour l’eau potable dans les zones rurales et de 90% pour les services d’égouts.  Pour finir, le Ministre a exprimé sa reconnaissance au Royaume des Pays-Bas pour sa coopération dans le cadre du Dialogue Malaisie-Pays-Bas sur l’eau mené depuis 2018, axé sur les catastrophes liées à l’eau et la résilience aux changements climatiques.

M. SENZO MCHUNU, Ministre de l’eau et de l’assainissement de l’Afrique du Sud, a affirmé que depuis l’avènement de la démocratie, son pays a fait de grands progrès dans la fourniture des services d’eau et d’assainissement à sa population.  Il a également expliqué ces avancées par les efforts déployés par toute la société pour surmonter l’héritage du sous-développement, du colonialisme et de l’apartheid et sortir des millions de personnes de la pauvreté.  Cependant, le Ministre a reconnu que son pays est confronté à de sérieux défis liés à la détérioration de la fiabilité des services municipaux d’eau et d’assainissement, due en grande partie à une mauvaise gouvernance et à une gestion déficiente.  Les progrès dans ce domaine ne peuvent être réalisés que dans le cadre d’institutions gérées de manière professionnelle et bien gouvernées, a-t-il fait remarquer, en misant sur les partenaires essentiels, tels que le secteur privé, la société civile et les instituts de recherche qui travaillent ensemble pour relever ces défis.  De même, a poursuivi le Ministre, des efforts sont déployés en parallèle pour la promotion et l’intégration de la dimension de genre et l’autonomisation des jeunes et des personnes handicapées dans le secteur de l’eau.  Il a cité, en outre, des partenariats multipartites pour assurer la sécurité de l’eau d’ici à 2030. 

Le Gouvernement sud-africain s’attèle également à renforcer des relations de coopération transfrontalière en matière d’eau entre les pays voisins afin de protéger les ressources en eau communes, a poursuivi le Ministre.  Il a par ailleurs mentionné que l’Afrique du Sud a présenté un projet de résolution sur les eaux souterraines à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).  Une initiative qui s’inscrit, a-t-il précisé, dans le prolongement de la décision des Nations Unies de faire de 2022 l’année des eaux souterraines.  Pour finir, le dignitaire a annoncé que l’Afrique du Sud accueillera, du 18 au 22 septembre 2023, le cinquantième congrès de l’Association internationale des hydrogéologues.

Mme ROSSITSA KARAMFILOVA-BLAGOVA, Ministre intérimaire de l’environnement et des eaux de la Bulgarie, a réitéré le fait que parvenir aux ODD liés à l’eau est une priorité.  Elle a aussi rappelé que la gestion durable de l’eau doit tenir compte des liens intrinsèques entre la conservation de l’eau, son utilisation, les changements climatiques, la diversité biologique et les pertes de biodiversité, la dégradation des sols et la pollution.  La Ministre a ainsi souligné l’importance de la multidisciplinarité, de la coopération trans-sectorielle, des partenariats et de la résilience.  Le développement économique durable et la croissance sont les maîtres mots pour accélérer les progrès, a-t-elle souligné, en misant sur des partenariats plus solides pour partager les expériences techniques et réaliser les objectifs relatifs à l’eau, en coopération avec les régions.  Elle a aussi invité à investir dans les secteurs directement liés à l’utilisation de l’eau pour adapter le secteur de l’eau à la lutte contre les changements climatiques et pour réduire les pertes de biodiversité tout en éliminant les risques de catastrophe.

Par ailleurs, la Ministre a conseillé une approche souple et une identification précise et concise des mesures à prendre sur la base des enseignements tirés.  Elle a indiqué que la Bulgarie a adopté les cadres réglementaires internationaux dans ce domaine et que le pays met en œuvre des mesures de gestion durable des ressources intégrées de l’eau.  Ces processus sont nécessaires à l’adaptation face à la variabilité hydrologique accrue liée aux changements climatiques, a-t-elle justifié.  La priorité, dans le secteur de l’eau, est de continuer à moderniser les infrastructures hydriques tout en parvenant à un niveau suffisamment élevé de conservation de l’eau, a-t-elle analysé, en plaidant pour une utilisation durable de l’eau pour garantir que tout le monde ait accès à de l’eau de qualité, en quantité suffisante.  Enfin, elle a fait savoir que la Bulgarie a adopté en 2022 une stratégie d’économie circulaire, qui est la meilleure façon de parvenir à une consommation et à une production durables. 

M. CHRISTOPHE BÉCHU, Ministre de la transition écologique et de la cohésion territoriale de la France, a d’entrée fait remarquer qu’aucun pays n’est épargné, même des pays comme le sien, situé sous des latitudes tempérées, avec un territoire doté de nombreux cours d’eau, face à des sécheresses plus intenses, des incendies plus menaçants, et des conflits d’usages qui augmentent.  Notant que 80% des nappes sont en dessous de leurs niveaux moyens, le Ministre a appelé à agir pour optimiser la gestion sur le plan national et dans les territoires, dans chaque bassin versant, pour être plus sobres « dans tous nos usages », pour faciliter le réemploi des eaux usées et pour éviter le gaspillage.  C’est d’ailleurs, a dit le dignitaire, l’un des objectifs de la planification écologique de la France qui sera détaillé la semaine prochaine dans son pays. 

À l’échelle du monde, le Ministre a reconnu qu’on ne peut relever le défi systémique de l’eau sur le long terme sans une action plus vaste et plus concertée, car l’eau et les pressions qui l’affectent ne connaissent pas de frontières.  Il a appelé à continuer de promouvoir la gestion intégrée des ressources en eau et la coopération à l’échelle des bassins versants, en mettant à profit les bonnes pratiques sur les eaux transfrontalières.  C’est dans ce contexte, que « nous nous engageons » à accompagner le développement des organismes de bassins transfrontaliers, notamment en Afrique, et à poursuivre l’appui à la Convention des Nations Unies sur l’eau, qui offre un cadre juridique et institutionnel, ainsi que des outils précieux pour établir des coopérations. 

Pour finir, le dignitaire a plaidé pour que le sujet de l’eau soit au cœur du multilatéralisme, bénéficiant d’une vision partagée et d’une coordination efficace.  Cela passe, à son avis, par une gouvernance plus forte et des échanges intergouvernementaux plus fréquents pour améliorer l’efficacité de l’action de la communauté internationale.  Et la première étape, a-t-il préconisé, et la nomination d’un envoyé spécial doté d’un mandat fort, adapté et inclusif.

M. GUSTAVO MANRIQUE, Ministre de l’environnement, de l’eau et de la transition écologique de l’Équateur, a abordé la question à l’ordre du jour en estimant que c’est « une question de survie ».  Dans le cadre de la décennie d’action, son pays a franchi des étapes importantes, a-t-il témoigné en faisant part des efforts axés sur la protection, la récupération et la conservation des sources d’eau naturelle, pour garantir un accès équitable, permanent et universel à l’eau.  Il a vanté les mérites du páramo andin, qui constitue la réserve d’eau la plus importante du pays et qui est à la base des activités humaines, productives et écologiques.  C’est pour cela que l’Équateur s’est doté d’un plan d’action pour les páramos, a-t-il indiqué, en signalant aussi la création de 11 nouvelles zones de protection hydrique, sur un total désormais de 21 zones.  Le Ministre a aussi parlé de ce qui est fait en termes administratifs pour améliorer l’accès à l’eau pour la consommation humaine, l’alimentation et l’industrie.  Nous avons investi environ 900 millions de dollars pour des projets liés à l’eau, a-t-il ajouté, au profit des gouvernements autonomes municipaux et provinciaux du pays.  Le Ministre a détaillé les acquis découlant de la transition écologique du pays et du Plan national d’irrigation et de drainage ainsi que du Plan national pour l’eau potable et l’assainissement.  En Équateur, des fonds pour l’eau ont été créés en tant que mécanisme de financement pour la conservation, a-t-il aussi indiqué, en précisant que le Gouvernement ne néglige pas pour autant le droit au développement des communautés.

M. RUSLAN STRILETS, Ministre de l’écologie et des ressources naturelles de l’Ukraine, a expliqué que pendant les cinq premières années de la Décennie d’action sur l’eau 2018-2028, son pays a pris des mesures ambitieuses pour assurer la gestion durable des ressources hydriques à travers une stratégie nationale de l’eau.  Mais, depuis l’agression contre l’Ukraine, les vannes de la centrale hydrique du fleuve Dniepr ont été ouvertes par la Russie, et cinq millions d’Ukrainiens n’ont plus accès à l’eau potable.  Il a averti que cela pourrait toucher 70% de la population sous peu.  Le système de refroidissement de la centrale de Zaporijia est à risque et 35% des territoires contrôlés par le Gouvernement ont connu des effets négatifs des bombardements russes, alors même qu’ils sont essentiels à la sécurité alimentaire mondiale.  Le Ministre a estimé le montant des dégâts infligés par la Russie aux infrastructures hydriques de l’Ukraine à près de 2,5 milliards dollars, et a exigé réparation et reddition de comptes.  Il a regretté que dans la situation actuelle, les autorités ukrainiennes aient du mal à réparer ces infrastructures, et à avancer sur la voie de la réalisation de l’ODD 6.  Mais nous ne baissons pas pour autant les bras, a-t-il assuré, tout en disant que « nous comptons sur nos partenaires » pour pouvoir reconstruire ce qui a été détruit.

M. SULEIMAN HUSSEIN ADAMU, Ministre des ressources aquatiques du Nigéria, a déclaré que son pays détient de nombreuses ressources en eau douce, mais que leur répartition représente un énorme défi en matière de gestion.  Il a indiqué que les textes de loi sont évalués pour garantir l’accès de tous à l’eau potable et que des cadres juridiques ont été mis sur pied en ce qui concerne la gestion des bassins versants, avec la participation du secteur privé.  Le Nigéria s’efforce aussi de mettre en œuvre une nouvelle stratégie WASH, secteur pour lequel l’état d’urgence a été déclaré, notamment en zone rurale, où une campagne de fabrication de latrines a été lancée.  Un sommet sur l’assainissement dans les économies en développement a également été organisé au Nigéria l’an dernier. 

Le Nigéria cartographie actuellement son réseau d’eau et assainissement et a aussi créé, avec l’appui du milieu universitaire, une base de données WASH intégrée au système de ressources en eau.  Il s’agit de tirer parti de la créativité de la jeunesse pour progresser dans les objectifs WASH, a appuyé le Ministre, avant d’ajouter que le Nigéria a lancé le processus de ratification de la Convention sur l’eau.  Exhortant la communauté internationale à aider le Nigéria à « sauver le lac Tchad », le Ministre a appelé de ses vœux la création du poste d’envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau.  Il faudrait, selon lui, une personnalité de haut niveau originaire d’Afrique, ce continent étant le plus touché par les problématiques liées à l’eau potable, aux changements climatiques et à la gestion transfrontalière des ressources en eau.

M. ADAMOU MAHAMAN, Ministre de l’hydraulique et de l’assainissement du Niger, faisant lecture d’un message du Président du Niger, M. Mohamed Bazoum, a rappelé que le Gouvernement a adopté deux documents de programmation stratégique en 2017, pour l’horizon 2030, à savoir le Programme Sectoriel Eau, Hygiène et Assainissement (PROSEHA) et le Plan d’Action National de Gestion Intégrée des Ressources en Eau (PANGIRE).  Il a mis l’accent sur les améliorations des infrastructures d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement, qui privilégient l’accès à domicile, dans les écoles, les centres de santé et les lieux publics.  Il a dit que ces améliorations sont assorties d’actions de sensibilisation pour un changement de comportement en matière d’hygiène et d’assainissement.  Malgré́ les efforts consentis par l’État, la situation demeure préoccupante, a toutefois reconnu le Ministre en signalant que moins d’un Nigérien sur deux n’a pas encore accès à l’eau potable en milieu rural et que plus de 58% de la population ne bénéficie pas d’infrastructures d’assainissement décent.

C’est pourquoi, a-t-il poursuivi, le Chef de l’État a misé sur l’eau en tant que moteur de développement, en s’engageant à améliorer d’ici à 2025 les indicateurs d’accès à l’eau potable pour arriver à 100% dans les zones urbaines et à 55% dans les zones rurales, ainsi que pour arriver à un taux de défécation à l’air libre de 36%.  Il a également prévu une augmentation significative (de 3% à 7%) des investissements dans le secteur de l’eau et de l’assainissement, le renforcement de la gouvernance de ce secteur, la sécurité́ alimentaire et nutritionnelle par la promotion d’une agriculture durable, la neutralité en matière de la dégradation des terres et la prise de mesures urgentes pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.  À cet égard, le Gouvernement compte intensifier les investissements dans les infrastructures et aménager les bassins versants pour améliorer l’efficience de l’utilisation des ressources en eau sous-terraines comme transfrontalières.  Cette vision s’est traduite aujourd’hui par la réalisation du barrage de Kandadji et l’exécution du projet « plateforme intégrée pour la sécurité́ de l’eau au Niger », dont l’objectif est la mobilisation des ressources en eau à des fins d’alimentation en eau potable, de sécurité́ alimentaire et de préservation de l’environnement. 

Mme NOOR BINT ALI AL KHULAIF, Ministre du développement durable du Bahreïn, a remarqué que le ramadan rappelle à ceux qui jeunent l’importance de l’eau, cet élément qui est vital pour la vie comme pour le développement durable.  Notant que la demande d’eau douce ne cesse d’augmenter, la Ministre a expliqué que pour y répondre le Bahreïn a adopté une stratégie de l’eau visant à garantir un approvisionnement en eau avec des normes de qualité élevées.  Cette stratégie mise sur le dessalement de l’eau de mer et cherche à réduire au maximum l’extraction d’eau de source et d’eaux souterraines, a-t-elle détaillé, en parlant aussi des mesures de sensibilisation de la population à travers des campagnes de lutte contre le gaspillage.  Le Bahreïn se focalise sur la gestion de l’eau basée sur la demande, a expliqué la Ministre, en vue d’arriver à un système intégré et circulaire de gestion.  Fière du fait que son pays soit devenu un exemple à l’ONU, avec ses progrès sur le front de l’ODD 6, elle a souligné que le Bahreïn a diminué sa dépendance aux sources d’eau non renouvelables et a réduit d’environ 80% le stress hydrique, ce qui a été rendu possible grâce au dessalement et au traitement des eaux usées.

M. DAWELBEIT ABDELRAHMAN MANSOUR BASHER, Ministre de l’irrigation et des ressources en eau du Soudan, a énuméré tous les défis liés à l’eau auxquels sont confrontés son pays: dégradation de l’environnement, sécheresse, inondations, changements climatiques, graves pertes en infrastructures, risques liés aux migrations et à l’accès à l’eau propre.  Le Soudan, gravement touché par les changements climatiques et la baisse des précipitations, n’est pas une exception, a-t-il concédé, avant de parler des inondations destructrices qui ont eu lieu en 2022 et qui ont touché plus de 13 provinces, causant des préjudices considérables pour la vie humaine et les biens.  De graves sécheresses ont provoqué des conflits au niveau local, a-t-il ajouté.  Tout cela a conduit à des vagues de migrations, a relevé le Ministre, qui a également évoqué des défis liés à la gestion durable de l’eau, à la pollution de l’eau, à l’accès à cette ressource par toutes et tous, à la production agricole, ainsi que les défis liés à la pauvreté. 

Pour mettre en œuvre sa « stratégie de l’eau » lancée en 2021, le Soudan a réclamé le soutien de la communauté internationale dans le cadre de la coopération internationale et des mécanismes régionaux, a-t-il poursuivi, en expliquant vouloir mener à bien son plan de sécurité alimentaire.  Le Ministre a évoqué le projet « Soif zéro » et la mise en œuvre d’un éventail de programmes par le Conseil suprême de l’environnement afin que les structures nationales soient équipées pour s’adapter et lutter contre les changements climatiques.  Le Soudan tente aussi de procéder à des relevés de températures, à mesure que les pénuries dans l’agriculture et l’élevage se multiplient.  Le Ministre a ensuite parlé des projets de désalinisation qui sont en cours sur la côte de la mer Rouge.  Selon lui, la Conférence devrait envisager la création d’un centre régional de captage de l’eau de désalinisation, afin d’accroître les capacités techniques régionales et augmenter les capacités hydriques de plus de 45 millions de personnes.  Cela permettrait aussi de répondre aux besoins des éleveurs, a-t-il précisé.  Enfin, il a appelé à prendre en compte les droits de chacun, s’agissant de l’eau, de manière équitable.  Le Ministre a également espéré qu’un accord sera conclu entre l’Égypte, l’Éthiopie et le Soudan s’agissant du différend autour du Barrage de la Renaissance. 

M. TAWFIQ AL SHARJABI, Ministre de l’eau et de l’environnement du Yémen, a rappelé les pressions qui pèsent sur les ressources hydriques mondiales dues notamment à l’augmentation de la demande en eau pour différents usages et aux incidences des changements climatiques.  Malgré les efforts déployés par les États et les gouvernements, ainsi que les organisations internationales concernées par les questions de l’eau, la problématique continue et le stress hydrique persiste dans la plupart des États du monde, a-t-il noté, constatant que des millions de personnes sont incapables d’accéder à des ressources hydriques sûres et que la sécurité alimentaire est menacée par la pénurie d’eau.  Si les gouvernements ont injecté des milliards en termes d’investissement dans le secteur de l’eau, le Ministre leur a conseillé de revisiter les programmes et les politiques concernant la gestion de la demande en eau, et ce, par souci de cohésion entre l’eau, l’alimentation et l’énergie.  Il a aussi recommandé de le faire par le biais d’une coopération internationale et régionale. 

Au Yémen, a déclaré le Ministre, la part par habitant en eau ne dépasse pas les 80 m3, 40% des habitants n’ayant pas accès à l’eau sûre, notamment dans les zones rurales qui représentent 65% du territoire.  Bien que le Gouvernement soit incapable de répondre aux besoins des populations, il a pris des mesures pour passer à des ressources non traditionnelles, comme le recyclage des eaux usées, l’utilisation des eaux de pluie et l’irrigation par submersion, a informé le Ministre.  Il a également fait savoir que sont mises en œuvre des lois pour réglementer le forage des puits, fournir des subventions agricoles et promouvoir l’usage des énergies renouvelables.  Cependant, a nuancé le Ministre, le manque de financement entrave notre action en faveur d’un changement réel dans la gestion des ressources essentielles à cause de la guerre qui a une incidence sur tous les secteurs.  La capacité à mettre en œuvre la stratégie nationale concernant l’eau recule par le manque de financement, d’un côté, et parce que la majorité des aides sont à caractère urgent, de l’autre.  Les plans de riposte humanitaire et de secours sont devenus permanents alors que ce ne sont pas des projets de développement, a fait remarquer le Ministre qui a aussi dénoncé le recul de l’appui international.  Le Ministre a osé espérer que la Conférence sur l’eau débouchera sur des mesures pratiques en faveur de l’ODD 6, de façon intégrée et juste.  Le Yémen, a-t-il insisté, peine à progresser et à honorer ses engagements en faveur de l’ODD 6: il lui faut passer du programme de riposte au programme de développement et à la consolidation de la paix. 

M. SAMOU SEIDOU ADAMBI, Ministre de l’eau et des mines du Bénin, a détaillé le programme d’action de son gouvernement qui a fait de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement « la priorité des priorités ».  Il a indiqué que le taux de desserte en eau potable était à 42% en milieu rural et 54% en milieu urbain, mais moins de 20% pour ce qui concerne l’assainissement des eaux usées.  Quant à la gestion des ouvrages d’eau en milieu rural, domaine de compétence des collectivités locales décentralisées, tout est à repenser, a-t-il fait remarquer, précisant qu’il n’existait aucun ouvrage d’assainissement fonctionnel en 2016.  Grâce aux nombreuses réformes adoptées, a-t-il poursuivi, le Gouvernement a pu mobiliser d’importantes ressources pour la mise en œuvre de plusieurs projets devant desservir les populations non encore alimentées et estimées à environ 7 millions de personnes à l’horizon 2024, bien avant le terme fixé par les Nations Unies.  Ces projets phares s’articulent autour des actions clefs, à savoir la modernisation et le développement de l’exploitation responsable des ressources hydrologiques, l’accès à l’eau potable à l’ensemble des populations rurales et semi urbaines et enfin le renforcement des capacités de production et de distribution de l’eau potable en milieu urbain.  D’ores et déjà, a ajouté le Ministre, des progrès ont été enregistrés et permis d’accroître d’environ 20 points le taux de desserte en eau potable en milieu urbain passant de 54% en 2016 à 72% en 2022, soit une population totale impactée de 4 803 204 habitants.

M. DURDY GENJIYEV, Ministre et Président du comité de gestion de l’eau du Turkménistan, a relevé que son pays suit strictement les principes consacrés en matière de gestion de l’eau.  Garantir le droit à l’accès à l’eau doit devenir une obligation pour tous les États Membres, particulièrement après que la pandémie de COVID-19 a déstabilisé l’économie mondiale, a-t-il estimé, notant que la diplomatie de l’eau ouvre des possibilités pour un rétablissement systémique.  La lutte efficace contre les changements climatiques ne pourra pas se faire sans une coordination mondiale, a-t-il appuyé.  Il a ensuite fait savoir qu’un centre international pour les technologies liées aux changements climatiques a été ouvert à Achgabat et qu’un centre de recherches sur la mer d’Aral a aussi été créé.  Les ressources hydriques sont un élément crucial du développement des pays d’Asie centrale, a insisté le Ministre, c’est pourquoi il faut que l’eau fasse l’objet de toutes les attentions pour aujourd’hui et demain. 

M. JOÃO BAPTISTA BORGES, Ministre de l’énergie et de l’eau d’Angola, a indiqué que son pays s’est doté d’un plan national pour l’eau jusqu’en 2040 qui présente une vision globale des différentes actions à mener à court, moyen et long terme, dans les domaines juridique, institutionnel, technique, financier et de l’infrastructure.  Le volume des investissements dans le secteur de l’eau a atteint, au cours de la période 2017-2022, 1,937 milliards de dollars, avec un taux d’accès moyen de 60% pour les populations urbaines et rurales.  Pour le plan quinquennal 2023-2027, le Ministre a annoncé des investissements de 4 milliards de dollars, avec la mise en œuvre de nouveaux systèmes de collecte, de traitement et de distribution qui augmenteront la disponibilité de l’eau de près de 1 149 m 3 par jour, notamment à Luanda, et le raccordement de 1,6 million de familles au réseau.  Ces efforts financiers permettront à la consommation actuelle par habitant de passer de 40 litres/personne/jour à 70, s’est félicité le Ministre. 

Cependant, a-t-il reconnu, malgré l’abondance des ressources en eau en Angola, certaines régions du sud sont cycliquement touchées par des sécheresses prolongées, qui provoquent des vagues migratoires de personnes et de troupeaux.  C’est pourquoi, le Gouvernement a récemment décidé de développer un programme d’action qui consiste à construire des canaux et des connexions entre les bassins, ainsi que des barrages avec des réservoirs pour stocker l’eau de pluie.  Il compte également réhabiliter des dizaines de réservoirs dans les provinces de Cunene, Namibe et Huíla. 

M. KONRIS MAYNARD, Ministre des infrastructures publiques, de l’énergie et des services publics, des transports, de l’information, de la communication et de la technologie, et des postes de Saint-Kitts-et-Nevis, a rappelé que son pays est l’un des pays les plus pauvres en eau au monde, ne possédant ni rivière ni lac, et moins de 1 000 mètres cubes de ressources en eau douce par habitant.  À l’heure actuelle, toute l’eau douce de l’île de St.  Kitts est fournie par les précipitations.  Rien qu’au cours des 10 dernières années, les changements climatiques ont entraîné une diminution de près de 20% des précipitations annuelles, a-t-il précisé, ajoutant qu’avec la diminution des précipitations et l’expansion continue du tourisme, de l’agriculture et de l’urbanisation, en plus d’une infrastructure de l’eau qui a besoin d’être modernisée, la demande en eau de l’île dépasse sa capacité d’approvisionnement.  Nous ne sommes pas en mesure de fournir un service d’eau 24 heures sur 24 à tous les résidents, a-t-il expliqué, alertant que la demande en eau devrait doubler au cours des 10 prochaines années.  Nous ne pouvons donc pas nous permettre de laisser passer encore 46 ans avant de prendre des mesures décisives, a-t-il insisté, appelant à un engagement sincère en faveur du Programme d’action pour l’eau.  Il a ensuite indiqué qu’au cours des 5 à 10 prochaines années, l’île va investir plus de 200 millions d’euros dans des infrastructures d’eau durables et résistantes, notamment en forant des puits supplémentaires, en investissant dans l’eau dessalée, en modernisant les canalisations, en améliorant les réservoirs de stockage et en introduisant des technologies modernes afin d’optimiser l’utilisation de ses ressources.  Le Gouvernement misera également sur la formation du personnel afin d’accroître les capacités institutionnelles et techniques. 

M. GILBERTO CORREIA CARVALHO SILVA, Ministre de l’agriculture et de l’environnement de Cabo Verde, a indiqué que la disponibilité et l’accès à l’eau potable demeurent une des grandes priorités du pays qui fait face à un paradoxe:  état océanique, 99% du territoire de Cabo Verde se compose d’eau salée qui est une source d’eau inépuisable, mais qu’il faut dessaler.  Aujourd’hui, près de 70% de l’eau approvisionnée est désalinisé, processus qui coûte cependant énormément d’argent et bien plus d’efforts que dans d’autres pays, a-t-il fait savoir.  Pour assurer de la durabilité des services d’assainissement et d’approvisionnement en eau, le Gouvernement a également investi énormément dans le stockage, la distribution, l’équipement et les systèmes d’approvisionnement en eau.  Ces dernières années, a-t-il informé, l’accès au réseau public est passé de 53% à 86%.  L’objectif fixé par le Gouvernement est d’assurer un accès à 100% et de promouvoir une économie circulaire en matière d’eau.  Grâce à la réutilisation sûre des eaux usées du secteur de l’agriculture, nous allons bientôt aussi créer des centrales de désalinisation de l’eau à des fins d’irrigation, a-t-il indiqué.  Pour parvenir à l’ODD 6, il a appelé à raffermir les liens entre la sécurité alimentaire, l’eau, l’énergie et le développement et accélérer la mise en œuvre de politique liée à la santé, à la sécurité, à l’eau et à la réduction de pauvreté.  Il faut aussi améliorer les financements pour accélérer les investissements dans le secteur de l’eau, a ajouté le Ministre qui a plaidé en faveur des obligations vertes et de la restructuration de la dette publique des pays en développement.

Mme ZUHAL DEMIR, Ministre de la justice, de l’application de la loi, de l’environnement, de l’énergie et du tourisme de la Belgique, a parlé des problèmes auxquels son pays est confronté en rapport avec l’eau, notamment les inondations et pénuries d’eau, rappelant que pendant l’été 2021, la Belgique a connu des précipitations extrêmes qui ont frappé la Wallonie et la Flandre, occasionnant d’important dégâts et dommages humains.  De même, la sécheresse a porté un coup dur à l’industrie et au secteur agricole, a-t-elle signalé avant d’indiquer que le Gouvernement belge a lancé en 2020 le « pacte bleu » afin de réaliser un changement fondamental dans ses politiques pour mettre en œuvre un plan complet, avec des actions et investissements complets.  Ce pacte comprend des centaines de projets pour lutter contre la sécheresse et pour utiliser l’eau de façon plus intelligente, a-t-elle précisé.  La Ministre a également cité des mesures mises en place pour agir en faveur des côtes du pays.  Elle a affirmé par ailleurs travailler avec les pays voisins ainsi qu’avec les commissions de rivières internationales.

M. ABDUL KHAN, Ministre de l’approvisionnement en eau du Népal, a indiqué que la Constitution du Népal garantit l’accès à l’eau potable et à un environnement propre en tant que droits humains fondamentaux.  Au Népal, l’accès à l’approvisionnement en eau de base a atteint 95%, mais l’approvisionnement en eau gérée en toute sécurité n’est que de 19%, a-t-il concédé.  De même, l’accès aux services d’assainissement de base est de 100%, mais l’accès aux services d’assainissement gérés en toute sécurité n’est que de 61%.  Le Gouvernement du Népal s’est engagé à préparer le plan WASH pour l’ensemble des 753 niveaux locaux d’ici à 2023 et un portail a été développé pour assurer la gestion des données WASH.  Il a expliqué que bien que le Népal soit riche en ressources hydriques, il existe de nombreux obstacles à la réalisation des ODD d’ici à 2030, citant notamment le tarissement des sources dans la région des collines, la diminution des glaciers dans l’Himalaya, l’épuisement des eaux souterraines dans la région des plaines et les changements de pluviométrie.  Dans une large mesure, la crise climatique est une crise de l’eau, a commenté le Ministre pour qui les pays développés ont l’obligation d’assurer un financement facile de l’action climatique, et de traiter les pertes et les dommages tout en accordant une importance égale à l’atténuation et à l’adaptation. 

M. BRADLEY BILLY TOVOSIA, Ministre des mines, de l’énergie et de l’électrification rurale des Îles Salomon, a indiqué que dans son pays, la proportion de la population ayant accès à l’eau est passée de 69,3% en 2015 à 67,3% en 2020, un chiffre qui masque toutefois l’inégalité d’accès dans les zones urbaines et rurales où les taux sont de 91,4% et 59,4% respectivement.  Par ailleurs, l’accès à l’assainissement a été lent avec 44,8% de la population pratiquant la défécation à l’air libre en 2020.  Une politique nationale des ressources en eau et de l’assainissement a été formulée afin d’assurer la protection des sources hydriques.  De même, la Stratégie communautaire de gestion des ressources côtières et marines 2021-2025 comprend un ensemble d’activités visant à améliorer la qualité du soutien aux communautés. 

Le Ministre a également fait état d’une Stratégie de gestion des déchets et de contrôle de la pollution 2017-2026 qui met l’accent sur les ressources en eau.  Les Îles Salomon se sont en outre engagées à renforcer les cadres institutionnels favorables à l’eau, l’assainissement et l’hygiène et à mettre en œuvre, d’ici à 2024, un cadre juridique pour la gestion des ressources hydriques.  Enfin, le plan d’action de développement urbain du Grand Honiara, approuvé en 2018, accorde la priorité aux investissements visant à améliorer la qualité et la couverture des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement pour un développement urbain durable.

M. PAL MAI DENG, Ministre de l’irrigation du Soudan du Sud, a déploré que les gains engrangés au tout début de l’indépendance du pays aient été durement impactés au cours des cinq dernières années.  Rappelant les efforts ambitieux déployés en matière d’approvisionnement et de gestion durable de l’eau ainsi que dans les services d’assainissement, il a constaté que les progrès dans ces domaines ont été affectés par les changements climatiques, les conflits internes, la fragilité des institutions et la pandémie de COVID-19.  Le Ministre s’est inquiété que la part de la population sud-soudanaise ayant accès à de l’eau potable ait baissé.  Quatre millions de personnes ont été déplacées et plus de la moitié de la population du pays est touchée par le conflit, a-t-il rappelé, en soulignant combien cela impacte les ressources du Gouvernement.  C’est pourquoi celui-ci se concentre sur ses capacités de gouvernance et sur un environnement propice à la réalisation de l’ODD 6, a assuré le Ministre.

Actuellement, son pays est en train de réviser sa politique en matière d’eau pour tenir compte des défis liés aux changements climatiques, a-t-il dit en conclusion.

M. ABDULAZIZ AL SHIBANI, Vice-Ministre de l’eau de l’Arabie saoudite, a indiqué que le Gouvernement du Royaume a adopté, en 2018, la Stratégie nationale de l’eau 2030 qui vise notamment à développer les ressources en eau, et fournir un approvisionnement sûr et des services de haute qualité.  Il a expliqué que son pays est le leader mondial de la production d’eau non conventionnelle grâce au dessalement de l’eau de mer.  Des efforts sont déployés pour réduire l’impact environnemental du dessalement, processus qui, a-t-il ajouté, a un impact significatif sur l’amélioration de la qualité de l’eau propre ainsi que sur la protection des sources d’eau souterraine non renouvelables. 

Le Royaume envisage en outre d’étudier la faisabilité d’utiliser de l’eau de mer dessalée pour appuyer la sécurité alimentaire et fournir un soutien aux femmes grâce aux opportunités de développement offertes par les sources d’eau non traditionnelles.  De même, le Gouvernement a alloué 80 milliards de dollars à des centaines de projets visant à d’atteindre les objectifs de la Stratégie nationale de l’eau 2030.  Il a également créé le Centre national pour l’efficacité et la rationalisation de l’eau, et a lancé, dans le cadre du G20, le Dialogue sur l’eau, qui se tient cette année pour la quatrième fois sous la présidence indienne du Groupe.  Par ailleurs, le Fonds saoudien pour le développement a investi des milliards de dollars pour financer de nombreux projets d’infrastructures hydriques dans les pays en développement.

M. HABTAMU ITEFA GELETA, Ministre de l’énergie et de l’eau de l’Éthiopie, a expliqué que son pays faisait son possible malgré la sécheresse.  Son programme phare a permis de mutualiser les ressources et d’améliorer l’accès à l’eau et à l’assainissement – 4,9 millions de citoyens supplémentaires en ont bénéficié.  La gestion transfrontalière de l’eau est un sujet très technique, a admis le Ministre.  La coopération à cet égard présente de nombreux avantages mais n’est pas toujours parfaite.  C’est pourtant un partenariat gagnant-gagnant, a-t-il assuré, appelant à faire preuve de sagesse collective, de patience et de coopération dans un monde aux ressources limitées, en proie à une explosion démographique et aux changements climatiques.  La Conférence est l’occasion pour L’Éthiopie de s’engager sur la signature et la ratification d’accords-cadres permettant de donner naissance à la « Commission sur le Nil » attendue depuis si longtemps.  L’Éthiopie, dont 65% de la population vit dans le noir, a mis en place de multiples projets de barrage sur le Nil pour répondre à ses besoins en électricité, a rappelé M. Geleta.  Ces barrages permettront aussi de mieux gérer l’eau en cas d’inondation.  Le Ministre a demandé aux États riverains de ratifier eux aussi les accords permettant la création de la Commission sur le Nil. 

Mme JOHANNA SUMUVUORI, Secrétaire d’État auprès du Ministre des affaires étrangères de la Finlande, a appelé à adopter une approche sexospécifique pour accélérer l’action dans le domaine de l’eau, avec une participation adéquate des groupes de filles et de femmes, des défenseurs des droits humains et des populations autochtones.  À son avis, les services d’eau et d’assainissement doivent être conçus et mis en œuvre de manière à répondre aux besoins des groupes vulnérables tels que les populations autochtones, les minorités, les pauvres des zones rurales et les personnes handicapées.  Elle a également appelé à accélérer la coopération mondiale en matière d’eau transfrontalière, en particulier dans les régions du monde où les changements climatiques aggravent la pénurie en eau.  En outre, il faut travailler ensemble pour un environnement aquatique propre, sain et durable, a poursuivi la dignitaire, pour qui le protocole de la CEE-ONU sur l’eau et la santé est un instrument juridiquement contraignant puissant pour réaliser progressivement les droits à l’eau potable et à l’assainissement.  Elle a insisté sur l’importance de l’engagement des partenaires de développement, précisant que la Finlande, dans le cadre de sa coopération avec ses partenaires, s’engage à fournir un approvisionnement en eau de base à 1,35 millions de bénéficiaires d’ici à 2023-2025.  Afin de garantir un leadership et un engagement politiques continus envers le Programme mondial pour l’eau, la représentante a préconisé la tenue de réunions intergouvernementales annuelles sur l’eau dans le cadre du forum politique de haut niveau.

M. TERRY DUGUID, Secrétaire parlementaire auprès du Ministre de l’environnement du Canada, a déclaré que l’objectif collectif sur l’eau doit aller au-delà de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène.  Il faut réfléchir à la qualité et à la durabilité des ressources en eau et coopérer davantage sur ces enjeux aux niveaux bilatéral et multilatéral, a-t-il recommandé en conseillant aussi de nouer des partenariats pour que l’eau soit à la source du développement durable et de la paix.  Le Canada et les États-Unis partagent une longue histoire de gestion partagée des eaux, a-t-il rappelé, faisant référence à une dizaine de traités en ce sens pour les Grands Lacs en particulier, ainsi qu’un accord sur la qualité de l’eau qui a été signé il y a un demi-siècle.  Il s’agit là d’une success story de coopération et de dialogue, selon le représentant qui a encouragé une gestion intégrée des ressources en eau et des initiatives inclusives dans les pays en développement.  Il faut, a-t-il ajouté, des stratégies qui mettent les femmes et les populations autochtones au premier plan. 

Pour réaliser l’ODD 6, a noté l’orateur, le Gouvernement canadien a mis l’accent sur les difficultés d’accès à une eau propre et à l’assainissement pour les Premières Nations: le Canada a engagé 5,6 milliards de dollars d’ici à 2024 pour que les Premières Nations puissent moderniser leur réserve d’eau douce et leur système de retraitement des eaux usées.  Le Gouvernement s’est également engagé à introduire des projets de loi ayant trait à l’accès à l’eau potable pour les Premières Nations en étroite concertation avec leurs représentants.  Ce cadre juridique pérenne permettrait l’accès des générations futures à une eau propre.  L’orateur a encore précisé qu’une des priorités du Canada est la préservation des ressources en eau douce, expliquant ainsi pourquoi le Gouvernement canadien souhaite mettre sur pied une agence canadienne de l’eau qui devra élaborer un plan d’action pour l’eau douce.  L’exécutif s’engage également à moderniser la loi-cadre sur l’eau afin de refléter la réalité du terrain, a-t-il ajouté. 

Mme MARTHA DELGADO PERALTA, Sous-Secrétaire pour les affaires multilatérales et les droits humains du Mexique, a appelé à des solutions à long terme pour une gestion durable et intégrée des ressources en eau, « une approche qui repose sur les droits de la personne ».  Expliquant que partout au Mexique la sécheresse gagne du terrain, la représentante a appelé à une gestion holistique de l’eau.  Le développement économique ne peut se faire aux dépens des écosystèmes qui fournissent eau et nourriture, a-t-elle argué, en estimant qu’il faut revoir les politiques publiques pour réorienter l’action vers des solutions innovantes et efficaces pour la préservation de l’environnement, des fleuves et autres cours d’eau.  Elle a mis l’accent sur le rôle des femmes et des autochtones dans la gestion des ressources en eau, en insistant sur le fait que cela va de pair avec leur droit d’accès à l’eau et à la terre.  La représentante a annoncé la mise en place d’un système de données fiables, en temps réel, qui permettra une meilleure planification des actions en termes d’eau et d’assainissement.  Elle a soutenu l’appel à la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour l’eau.

M. MEELIS MÜNT, Ministre de l’environnement de l’Estonie, a rappelé que son pays qui préside actuellement la Convention sur l’eau, appuie l’élargissement de ce traité à l’échelle mondiale.  Il est prévu que d’ici à 2024, au moins cinq autres pays adhéreront à la Convention, alors que plus de 20 pays sont en cours d’adhésion, a-t-il indiqué, pressant tous les États Membres concernés à adhérer au texte pour bénéficier de son cadre juridique et de ses instruments.  En tant que petit pays côtier du nord-est de l’Europe, situé sur les rives de la mer Baltique, l’Estonie a procédé à une rénovation complète des systèmes de collecte et de traitement des eaux usées.  Ces dernières décennies, le Gouvernement a investi plus d’un milliard d’euros à cette fin, a dit le Ministre, reconnaissant, pour finir, que l’état des rivières, des lacs et de la côte estoniens exige d’autres solutions modernes en matière de gestion intelligente de l’eau et de coopération entre les différents secteurs économiques.

M. MAREK GRÓBARCZYK, Secrétaire d’État au Ministère de l’infrastructure du Gouvernement plénipotentiaire pour la gestion de l’eau et les investissements de la Pologne, a souligné l’importance d’une utilisation rationnelle de l’eau, de sa conservation, de son traitement et de sa réutilisation.  Si l’on ne relève pas le niveau de rétention d’eau, il ne sera pas possible de répondre aux besoins de tous les consommateurs, a averti le représentant.  Il a jugé nécessaire de planifier des mesures programmatiques et législatives sur la rétention d’eau.  Cela peut être réalisé grâce à des synergies visant à doubler le taux de cette rétention dans les 20 à 30 prochaines années.  Selon le représentant, si l’on veut atteindre l’objectif de cette Conférence, il faut faire plus.  L’être humain doit coopérer avec la nature et exploiter son potentiel.  Il faut des solutions naturelles et hybrides permettant d’améliorer l’efficacité de la gestion des barrages hydrographiques, a préconisé le représentant. 

M. GERARDO AMARILLA DE NICOLA, Vice-Ministre de l’environnement de l’Uruguay, M. GERARDO AMARILLA, a expliqué que son pays est doté d’abondantes ressources en eau, qu’il s’agisse d’eaux de surface ou d’eaux souterraines.  Ces ressources sont d’une grande importance pour le développement économique et social, a-t-il noté ajoutant que l’Uruguay est l’un des pays d’Amérique latine qui dispose de la plus grande quantité d’eau par habitant, soit une moyenne 15 000 m3 par personne et par an.  En 2004, la réforme constitutionnelle promue par la société civile a introduit des changements importants qui continuent de faire la différence puisque, désormais, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est reconnu comme un droit humain fondamental.  De même, la protection de l’environnement a été déclarée d’intérêt général.  L’eau est considérée comme un bien public et sa gestion comme un service public essentiel, a précisé le Vice-Ministre.  Cela a donné lieu à une politique nationale et à un plan national, a expliqué le Vice-Ministre, en soulignant la plus grande participation des citoyens aux processus de prise de décisions. 

Cependant, l’un des principaux défis auxquels son pays est confronté reste l’adaptation aux changements climatiques.  Ces dernières années, le pays a vécu une grave sécheresse sévère qui a mis en lumière la nécessité de mettre en place des mécanismes collectifs de prévention.  En attendant, l’Uruguay mise sur la circularité agricole, et le traitement et le recyclage des eaux usées.  Mais pour aller plus loin, tout comme les pays en développement, il a besoin de financements concessionnels, a précisé le Vice-Ministre qui a, à son tour, soutenu la nomination d’un envoyé spécial de l’ONU pour l’eau.

M. TOMÁŠ TESAŘ, Vice-Ministre de l’environnement de la République tchèque, a indiqué que ces dernières années son pays a fait face à des inondations dévastatrices, mais également à de longues périodes de sécheresse et de pénurie d’eau.  Il s’est également inquiété des problèmes liés à la pollution de l’eau et à une gestion non durable des ressources hydriques.  Des initiatives pour amélioration la qualité et la quantité de l’eau ont été lancées mais ne suffisent pas, a-t-il regretté.  Il a relevé que dans bien des cas, les solutions techniques du passé se sont avérées non durables sur le long terme, provoquant de nombreux problèmes imprévus.  Ainsi la réglementation des rivières qui était censée protéger les zones urbaines des inondations, a souvent aggravé la situation et même conduit à la destruction des rives.  Le représentant a appelé à tirer les enseignements de ces erreurs, et à savoir laisser la nature faire son travail. 

Le temps est venu d’agir, a pressé Mme GAYANE GABRIELYAN, Vice-Ministre de l’environnement de l’Arménie.  Mettant en avant les progrès enregistrés par son pays, elle a attiré l’attention sur la Stratégie nationale et l’Accord de partenariat renforcé avec l’Union européenne signé en 2017.  Elle a aussi attiré l’attention sur l’amendement de 2022 au Code de l’eau qui aligne la législation arménienne avec les meilleures pratiques internationales.  La Vice-Ministre a qualifié d’essentielle la coopération transfrontière pour un pays comme le sien.  Elle a tout de même admis qu’en dépit des progrès, les niveaux d’investissement dans le secteur de l’eau restent en dessous des besoins.  Elle a conclu en accusant l’Azerbaïdjan de profiter de cette question essentielle de l’eau pour attaquer son pays. 

M. DANIEL WESTLÉN, Vice-Ministre du climat et de l’environnement de la Suède, a déclaré que la réalisation du droit à l’eau potable et aux installations sanitaires est la pierre angulaire de l’éradication de la pauvreté.  Il s’est inquiété des inégalités en termes d’accès à l’eau potable et aux installations sanitaires entre les hommes et les femmes, insistant sur le fait qu’il est essentiel que chacun ait les mêmes possibilités d’accès, d’utilisation et de gestion des services et des ressources en eau.  Une plus grande égalité entre les sexes est la clé d’une gouvernance de l’eau plus efficace et plus durable, a tranché le Ministre.  Notant en outre que les changements climatiques affectent gravement les ressources en eau, il a appelé à réduire « sérieusement » les émissions au cours des prochaines années, précisant que la Suède vise à atteindre la neutralité carbone au plus tard en 2045, avec des émissions négatives au-delà.  Le Ministre a également insisté sur l’importance de la coopération transfrontalière dans le domaine de l’eau, la jugeant cruciale pour la gestion durable des ressources hydriques.  Pour favoriser cette coopération, la Suède s’est engagée à continuer à soutenir les travaux de la Convention sur l’eau.  Le Ministre s’est ensuite associé à l’appel en faveur de la nomination d’un envoyé spécial de l’ONU pour l’eau afin de renforcer la cohérence des efforts déployés dans ce domaine dans tous les secteurs, ainsi qu’au sein du système des Nations Unies. 

M. ABDULLA NASEER, Ministre dÉtat à lenvironnement, aux changements climatiques et à la technologie des Maldives, a indiqué que son pays souffre d’un manque d’eau douce exacerbé par la crise climatique et ses conséquences dramatiques.  Les seules ressources naturelles en eau disponibles dans son pays sont les eaux de pluie et les nappes phréatiques, toutes deux très vulnérables aux changements climatiques, s’est lamenté le Ministre. 

Il a, en outre, détaillé les risques météorologiques tels que les tempêtes, les pluies de mousson torrentielles, les houles de tempête et l’érosion côtière, auxquels son pays est confronté.  De plus, les changements dans le régime des précipitations ont provoqué des sécheresses dans un certain nombre des îles du pays qui dépend fortement de l’eau de pluie pour les besoins en eau potable.  Au-delà des effets des changements climatiques, le tsunami de 2004 dans l’océan Indien a compromis la nappe phréatique en raison de l’intrusion d’eau salée et de la contamination par des polluants, a-t-il alerté.  En conséquence, les Maldives ont été contraintes de recourir de plus en plus au dessalement de l’eau, une activité coûteuse, a indiqué le dignitaire qui a plaidé pour une amélioration du financement mondial, un renforcement des capacités et le transfert de technologies.

M. JOÃO PAULO CAPOBIANCO, Vice-Ministre de l’environnement et des changements climatiques du Brésil, a déclaré que le Brésil est prêt à reprendre sa participation active aux forums multilatéraux dans un esprit de coopération pour trouver des solutions aux défis liés à la protection des ressources naturelles et l’accès à l’eau et à l’assainissement.  Le renforcement de la démocratie et de ses institutions est primordial pour le Gouvernement brésilien car l’accès universel à l’eau et à l’assainissement nécessite un processus démocratique solide, a expliqué le Ministre qui a précisé que la loi brésilienne fait de l’eau un bien public. 

En 2020, a-t-il poursuivi, le Brésil s’est fixé pour objectifs que 99% de Brésiliens aient accès à l’eau et 90% à l’assainissement d’ici à 2033.  Pour les atteindre, le Gouvernement a adopté des politiques d’innovation dans ces secteurs et des systèmes décentralisés pour garantir l’accès à l’eau pour tous, en particulier pour les populations les plus vulnérables, les peuples autochtones et les communautés rurales.  Il a estimé que le contexte d’urgence climatique doit être au centre du débat sur l’eau, soulignant en outre le rôle que jouent la conservation, la protection et la restauration des forêts, de la biodiversité et des écosystèmes dans la gestion durable des ressources hydriques.  La production agricole et énergétique au Brésil dépend d’un régime pluviométrique stable et prévisible, et il est dans notre intérêt de lutter contre la déforestation et de promouvoir la restauration des forêts et des écosystèmes, a-t-il ajouté. 

Mme LESLIE LORENA SAMAYOA JEREZ, Vice-Ministre de la santé publique et de l’assistance sociale du Guatemala, a insisté sur l’importance de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour pouvoir contrôler les maladies, notamment hydriques.  Elle a souligné que les États restent souverains en termes de gestion de leurs ressources naturelles, tout en appelant à les gérer de manière durable et à les valoriser économiquement à travers le renforcement des capacités.  La Ministre a évoqué la politique nationale d’assainissement et d’accès à l’eau potable qui a été développée par plusieurs agences d’État en collaboration avec la société civile, le monde universitaire et le secteur privé, l’objectif étant de garantir un accès universel à l’eau potable et à l’assainissement à tous les citoyens.  Elle a terminé son propos par un appel aux transferts de technologie et au renforcement des capacités pour permettre au Guatemala d’atteindre les objectifs qu’il s’est fixé. 

M. MARIO ŠILJEG, Secrétaire d’État au Ministère de l’économie et du développement durable de la Croatie, a soutenu le Programme d’action pour l’eau et la création à l’ONU d’un poste d’envoyé spécial pour l’eau, qui veillera à ce que les questions liées à l’eau figurent toujours parmi les priorités de l’agenda international.  La pénurie d’eau menace la sécurité alimentaire et elle peut souvent provoquer ou amplifier des conflits, a-t-il relevé, assurant que la Croatie, qui préside cette année la Commission de consolidation de la paix, travaillera avec ses autres membres pour mettre l’eau au service de la consolidation de la paix.  Sur le plan national, avec une moyenne de 29 200 m3 d’eau par habitant, la Croatie possède, selon les données d’EUROSTAT, les réserves d’eau les plus importantes de tous les États membres de l’Union européenne (UE), a informé le Secrétaire d’État.  Afin d’accélérer la réalisation de l’ODD 6, la Croatie intensifie ses activités aux niveaux de la législation, de la planification, des programmes et des projets.  Au niveau législatif, par exemple, elle a harmonisé la législation nationale avec la directive de l’UE sur la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine. 

Le Secrétaire d’État a indiqué qu’à l’heure actuelle, 94% de la population croate a accès à de l’eau salubre provenant du système public d’approvisionnement, mais a reconnu que des difficultés persistent en ce qui concerne l’accès au système public de traitement des eaux usées, qui varie selon les provinces, en particulier celles dont la population vieillit et celles qui ont été frappées par un tremblement de terre.  Des améliorations sont donc possibles, a-t-il concédé.  Il s’est quand même enorgueilli que, grâce à son plan national de redressement et de résilience, 200 000 habitants supplémentaires bénéficieront d’un meilleur système de traitement des eaux usées urbaines et 45 000 habitants supplémentaires auront accès à un meilleur approvisionnement en eau.  La Croatie promeut des technologies et des solutions innovantes en matière d’eau potable, a encore signalé le haut responsable en citant notamment son projet phare, développé par la communauté scientifique croate, qui a permis d’éliminer l’arsenic présent dans la croûte terrestre qui affecte la qualité de l’eau potable dans la partie orientale de la Croatie.  L’arsenic étant présent dans toute l’Europe de l’Est, la Croatie est prête à partager cette innovation avec d’autres pays touchés par ce phénomène, a annoncé le Secrétaire d’État.  Soulignant toutefois que la ressource en eau la plus importante est la mer Adriatique, il a expliqué qu’en raison de ses fonds marins peu profonds et de son bassin semi-fermé, cette mer est sensible aux changements climatiques et à la pollution, en particulier aux microplastiques, vers lesquels la Croatie oriente la majorité de ses projets liés à la mer Adriatique.  Elle partage un nombre important de cours d’eau avec ses voisins et s’oriente vers une coopération dans le bassin, a expliqué le représentant en appuyant l’initiative de la Coalition pour la coopération dans le domaine des eaux transfrontalières. 

M. DMITRY KIRILLOV Chef de l’Agence fédérale de la Fédération de Russie pour les ressources hydriques, s’est inquiété de l’impact de l’urbanisation rapide, des modèles de consommation et production non durables et des effets négatifs des changements climatiques sur les ressources en eau.  Il a indiqué que dans le cadre du projet national « écologie », son pays se mobilise pour réduire la pollution et nettoyer les plans d’eau, en particulier dans le lac Baïkal et la Volga.  Pour la période allant jusqu’à 2030, son gouvernement prévoit également de nettoyer le fleuve Amour et le bassin de la mer Baltique.  Une Décennie d’action consacrée à l’eau et au développement durable est également prévue.

Poursuivant, le dignitaire a indiqué que pour améliorer la situation dans les territoires arides de la Russie, les autorités se sont données pour tâche de tripler les réserves d’eau souterraines d’ici à 2024.  Une action est également en cours pour établir un registre unique des ressources en eau, ainsi qu’une plateforme numérique pour réglementer la production et distribuer les eaux souterraines.  Sur le plan régional, la Russie privilégie une approche transfrontalière non politisée, a indiqué le représentant qui a regretté les tentatives de certains participants de politiser cette question qui dissimule, selon lui, des décennies de négligence des intérêts de la population et de la destruction d’infrastructures essentielles.  C’est ce qui a été donné à voir en 2014 dans la péninsule de Crimée, où, a-t-il déploré, la situation insatisfaisante de l’approvisionnent en eau a conduit à la perte de 60% de l’eau potable, sans parler de la pollution de la mer Noire. 

Mme ANGÉLICA LIZETH ÁLVAREZ MORALES, Vice-Ministre de la planification stratégique du Honduras, a déclaré que les problèmes liés à l’accès à l’eau et à l’assainissement trouvent racine dans le modèle capitaliste et néo-libéral dont le monde en développement fait les frais, notamment en subissant « leur pollution » et les répercussions délétères des changements climatiques.  Préoccupée par l’impact des changements climatiques sur les migrations, elle a souligné qu’aucun changement durable ne sera possible si le monde développé ne renonce pas à son mode de vie fondé sur l’opulence.  Le Honduras est prêt à coopérer afin de protéger la vie sur la planète, à condition qu’il n’y ait plus d’interventionnisme et que l’on collabore en tant que pairs.  Elle a rappelé les gouvernements « vendus » du Honduras des 12 dernières années, avant d’annoncer que la nouvelle administration a lancé des politiques de reforestation, de protection des lacs et d’inversion des effets des changements climatiques.  La Vice-Ministre a invité la communauté internationale à tout faire pour restaurer les forêts et protéger les sources d’eau, exhortant les grandes puissances à revoir leur mode de vie. 

M. ZAC GOLDSMITH, Ministre des territoires d’outre-mer, du Commonwealth, de l’énergie, du climat et de l’environnement du Royaume-Uni, a annoncé le lancement d’un nouveau programme destiné à soutenir les efforts des gouvernements de cinq pays en développement d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud afin de renforcer les systèmes nationaux en matière de ressources hydriques.  Il a jugé nécessaire d’attirer des investissements plus importants pour garantir un accès à des services d’eau, d’assainissement et d’hygiène plus fiables et plus résistants aux populations de ces pays.  Par ailleurs, il a appelé à s’appuyer sur les progrès réalisés dans le cadre de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP) qui s’est tenue à Glasgow et à Charm el-Cheikh, avant la réunion de la COP28 prévue aux Émirats arabes unis.  Il a applaudi l’initiative Water Tracker, et a encouragé son utilisation en prévision du bilan mondial qui aura lieu aux Émirats arabes unis. 

M. SURASRI KIDTIMONTON, Secrétaire général de l’Autorité nationale des ressources hydriques, Bureau du Premier Ministre de la Thaïlande, a indiqué que dans son pays, des investissements ont été faits pour améliorer la qualité de l’eau et l’approvisionnement.  Il a jugé important de prendre en compte les technologies appropriées d’innovation en même temps que les connaissances locales et traditionnelles.  À cet égard, la coopération internationale est cruciale, y compris pour le renforcement des capacités afin de combler le fossé technologique.  La bonne gouvernance est essentielle, a poursuivi le représentant, car la gestion et la conservation durable des ressources en eau exigent l’implication de toutes les parties prenantes.  Une application efficace de la loi est un bon départ, mais cela ne suffit pas.  C’est pourquoi la Thaïlande place l’accent sur l’inclusion des différents groupes, y compris les associations de consommateurs qui peuvent contribuer à mobiliser des fonds et à identifier de nouvelles techniques et méthodes innovantes.  La coopération transfrontière est également nécessaire, a souligné le représentant, avant d’appuyer la nomination d’un envoyé spécial de l’ONU pour l’eau. 

Mme YOKO KAMIKAWA, Envoyée spéciale du Premier Ministre du Japon, est venue témoigner de l’expérience de sa ville frappée par des inondations il y a plus de 50 ans.  La population locale a misé sur les réservoirs d’eau de pluie, les stations de pompage et les moyens de prévention.  La ville a ainsi pu faire face aux inondations de l’année dernière, a-t-elle expliqué, en estimant que cette expérience peut être répétée à l’échelle de la planète.  Face aux catastrophes naturelles, aux changements climatiques, à la dégradation de la qualité de l’eau et à la perte de la biodiversité, la représentante a insisté sur le travail d’anticipation.  Il faut, a-t-elle dit, travailler main dans la main dans des systèmes collectifs d’alerte rapide et d’échange d’informations.  Elle a indiqué que le Japon va allouer une enveloppe de 500 millions de yens à l’initiative de Kumamuto pour un cycle vertueux de l’eau.  Dans le cadre de cette initiative, l’accent sera mis sur des projets qui visent à la fois l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques.  La représentante a également insisté sur l’exploitation des données satellitaires. 

M. NESTOR FABIAN ALVAREZ, Administrateur de l’entité nationale chargée de l’eau et de l’assainissement en Argentine, a rappelé que la première Conférence des Nations Unies sur l’eau qui s’est tenue en Argentine en 1977, a donné lieu à au « Plan d’action de Mar del Plata », toujours d’actualité.  L’Argentine, a dit le représentant, est l’un des pays qui a intégré les recommandations de cette conférence dans sa politique de l’eau.  Il a indiqué que son pays dispose d’importantes réserves d’eau, principalement grâce au réseau hydrographique que constitue le bassin de la Plata, partagé avec la Bolivie, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay.  L’apport extérieur comprend également les eaux souterraines du système aquifère de Guarani, s’étendant à travers le Brésil, l’Uruguay, le Paraguay et l’Argentine et constituant la troisième plus grande réserve d’eau souterraine au monde.  En outre, à la frontière avec le Chili, il existe de nombreux bassins partagés avec notre pays, a détaillé le responsable.

Cependant, située en aval du bassin de la Plata, l’Argentine se trouve dans une position difficile vis-à-vis des pays en amont, car l’utilisation des ressources en eau dans la partie supérieure du bassin affecte la qualité de l’eau sur son territoire.  Cette situation a mis en évidence l’importance des processus de coopération entre pays frères et de la consolidation d’un programme transfrontalier sur l’eau.  Il est possible, a estimé le représentant, d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD), grâce à la promotion d’une gestion intégrée et participative, au niveau international, qui mette l’accent sur les questions du financement, a-t-il conclu.

M. MEBRAHTU MEHARI, Directeur général des ressources hydriques de l’Érythrée, a indiqué que son gouvernement travaille depuis 30 ans pour atténuer les effets des changements climatiques, de la sécheresse et de la dégradation de l’environnement.  Ce gouvernement a mis en place un contexte propice pour améliorer la gestion de l’eau et a adopté une loi visant à accroître l’efficacité de la consommation plutôt que d’accroître tout simplement l’offre.  Pour ce faire, le personnel a été formé à la gestion durable de l’eau et ce travail de préparation, de formation et de sensibilisation a permis d’accroître la qualité de l’eau potable.  Pour l’Érythrée, a encore dit le responsable, la priorité est de satisfaire les besoins de la population, en luttant notamment contre la dégradation des sols et la raréfaction de l’eau.  Pour ce faire, un système d’utilisation plus intelligent de l’eau a été mis en place, avec pour objectif de prévenir les inondations et de reconstituer la nappe phréatique.  Des races de bétail et des cultures plus résistantes et moins consommatrices d’eau ont été introduites, a encore expliqué le représentant.

Mme SILVIA FERRER, Directrice de l’environnement du Gouvernement de la Principauté d’Andorre, a expliqué que même si la situation de son pays, à la source de deux bassins hydrographiques, peut faire croire que l’approvisionnement en eau est garanti, les modèles climatiques scientifiques développés par l’Observatoire pyrénéen des changements climatiques prévoient une réduction du débit annuel moyen d’environ 7% d’ici à 2050.  S’adapter à ce scénario est un défi pour évoluer vers une nouvelle gestion de l’eau, a-t-elle noté, ajoutant que le pays y fera face de la même manière qu’il a relevé le défi de l’assainissement des eaux au cours des années 90.  À ce jour, le résultat est parlant: non seulement l’ensemble de la population résidente et des infrastructures touristiques sont raccordées à un système d’assainissement, mais les caractéristiques physicochimiques et biologiques de ses rivières ont aussi permis la récupération des habitats des espèces de faune bioindicatrices.

Convaincue que la contribution qu’un petit pays comme le sien peut apporter à la planète en ce moment crucial pour relever le défi d’une planification et d’une distribution rationnelle, équitable et durable des ressources en eau, Andorre travaille sur un projet de loi visant à atteindre l’ODD 6 et toutes ses cibles.  Ce texte sur l’eau doit garantir aussi bien la conservation de la biodiversité et des paysages que l’ensemble de ses utilisations domestiques, énergétiques, touristiques, agricoles et celles orientées aux loisirs, a expliqué la représentante.

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