En cours au Siège de l'ONU

Le Conseil de sécurité entend l’exposé annuel du Président en exercice de l’OSCE, organisation en crise mais saluée pour son concept unique de sécurité collective

9316e séance – matin
CS/15274

Le Conseil de sécurité entend l’exposé annuel du Président en exercice de l’OSCE, organisation en crise mais saluée pour son concept unique de sécurité collective

L’exposé annuel devant le Conseil de sécurité du Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a été l’occasion aujourd’hui de rappeler le « concept unique » de la plus grande organisation de sécurité régionale au monde, présentée par M. Bujar Osmani non seulement comme une plateforme de dialogue, mais aussi comme une communauté fondée sur la solidarité. 

En proie à une crise profonde du fait de la guerre en Ukraine, l’Organisation s’est vu reconnaître des qualités différentes, tant par les Occidentaux, qui ont mis en avant sa défense des droits humains et ses enquêtes sur les exactions russes, que par la Fédération de Russie, qui lui a reproché sa déférence envers « l’Occident global ».  La délégation russe lui a toutefois accordé une chance de jouer un rôle en développant une plateforme de dialogue et de coexistence pacifique, « tout comme les négociateurs soviétiques, américains et européens l’ont fait au milieu des années 1970 ».

Président en exercice de l’OSCE depuis le 1er janvier, M. Osmani a présenté au Conseil la vision politique, les priorités et les activités de sa présidence de l’OSCE pour l’année en cours.  À la tête d’une organisation qui comprend l’ensemble des pays européens, les États issus de l’ex-Union soviétique ainsi que le Canada et les États-Unis, et qui vise à accroître la stabilité et la coopération en renforçant la confiance et le dialogue « de Vancouver à Vladivostok », celui qui est par ailleurs Ministre des affaires étrangères de la Macédoine du Nord n’a pas omis de dénoncer la violation flagrante des principes du droit international commise par la Russie en envahissant l’Ukraine, mais il a surtout mis en avant le travail sur le terrain de son organisation. 

Déplorant que « le dialogue, lorsqu’il se fait entendre, soit de plus en plus empoisonné », M. Osmani a appelé à mettre de côté les questions géopolitiques et les gains personnels et à donner la priorité au bien-être des personnes, ajoutant que l’ONU et l’OSCE se devaient d’être côte à côte pour œuvrer en faveur de la paix.  Le Ministre des affaires étrangères de la Suisse a quant à lui rappelé que la protection des civils est l’essence même du partenariat de 30 ans entre l’OSCE et l’ONU. 

Lors du débat, les États-Unis et les membres européens du Conseil ont fortement insisté sur ce rôle de protection.  Tous ont mis en avant le rôle du Mécanisme de Moscou de l’OSCE pour dénoncer les violations et les abus du droit international humanitaire et des droits de l’homme commis par la Fédération de Russie et les atteintes aux droits humains perpétrés par son allié le Bélarus.

Le rôle de médiation et de prévention de l’OSCE a également été largement salué.  Les activités de l’Organisation sont toujours essentielles dans plusieurs situations de crise en Europe, a notamment relevé Malte, qui a cité les conflits du Caucase ainsi que la situation en Transnistrie.  D’autres ont mentionné son rôle pour apaiser les tensions dans les Balkans occidentaux, en premier lieu au Kosovo.  Au-delà de l’Europe, c’est souvent la bonne coopération entre l’OSCE et les agences des Nations Unies qui a été saluée, notamment par les membres africains du Conseil. Le Mozambique a ainsi dressé un parallèle entre le travail de l’OSCE et celui des organisations régionales et sous-régionales africaines pour « faire taire les armes ».

Considérant ce dernier objectif, le Ministre des affaires étrangères de la Suisse a reconnu franchement le « sérieux revers » que la guerre en Ukraine représente pour une organisation qui a été fondée pour assurer la sécurité en Europe. Ce qui ne l’a pas empêché de juger l’OSCE essentielle, en raison de la confiance qui doit lier ses États membres. 

Comme l’ont rappelé plusieurs délégations, dont les Émirats arabes unis, l’OSCE est en effet le produit du processus d’Helsinki, qui avait contribué à la baisse des tensions dans les années 1970.  Cet aspect historique a été mis en avant par la Chine, qui a rappelé le principe d’indivisibilité de la sécurité en Europe qu’avait consacré en 1975 l’Acte final d’Helsinki. 

La « noble idée » que la sécurité d’un État n’est véritablement atteinte que lorsque celle du voisin l’est aussi, comme l’a qualifiée le Gabon, a été présentée comme un concept « vraiment unique » par le représentant de la Fédération de Russie, qui a reconnu que l’OSCE avait su relever avec succès divers défis, citant en particulier la signature en 1999 à Istanbul de la Charte de sécurité européenne, rappelant en outre son rôle majeur dans la mise en œuvre des accords de Minsk de 2014.

Mais, pour la Russie, l’OSCE a non seulement échoué dans sa tâche, mais s’est progressivement laissée rendre « complice de la ligne occidentale » avant de prendre en 2022, « inconditionnellement et docilement », le parti de Kiev et de se transformer ainsi en une « plateforme d’abus russophobes et d’accusations hystériques » à son encontre. 

L’Organisation est aujourd’hui confrontée à « un choix de vie »: s’occuper de créer une architecture de sécurité européenne durable basée sur le principe de son indivisibilité, ou bien continuer à jouer le jeu du camp occidental, a affirmé le délégué russe.

Les caractéristiques de l’OSCE restent en tout cas une référence pour l’architecture commune de paix et de sécurité en Europe, a rappelé le Ministre des affaires étrangères de la Suisse, qui a souhaité que sa capacité d’action soit maintenue.  « Nous ne devons pas permettre que l’avenir de l’Europe soit décidé par la loi de la force », a-t-il rappelé.

EXPOSÉ DU PRÉSIDENT EN EXERCICE DE L’ORGANISATION POUR LA SÉCURITÉ ET LA COOPÉRATION EN EUROPE

Déclarations

M. BUJAR OSMANI, Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et Ministre des affaires étrangères de la Macédoine du Nord, a présenté au Conseil de sécurité la vision politique, les priorités et les activités de sa présidence de l’OSCE pour 2023.  Il a, en premier lieu, lancé un appel à l’action et à la recherche immédiate de la paix, alors qu’une « guerre indicible » et aux graves conséquences frappe l’Europe et toute la région de l’OSCE, menaçant la stabilité du monde entier.  L’OCSE, a-t-il rappelé, vise à renforcer la stabilité et la coopération en renforçant la confiance et le dialogue « de Vancouver à Vladivostok ».  Or, « le dialogue, lorsqu’il se fait entendre, est de plus en plus empoisonné », a-t-il déploré, se disant toutefois heureux que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU ait été discuté hier au Conseil.  L’ONU et l’OSCE doivent être côte à côte pour œuvrer en faveur de la paix car c’est en collaborant que nous pouvons créer un monde prospère pour tous et atteindre la paix pour les générations futures, a souligné M. Osmani, pour qui il importe cependant que ce partenariat évolue et se renforce. 

Rappelant qu’au cœur du conflit qui déchire l’Europe se trouvent des personnes « que nous avons la responsabilité de protéger », le Président en exercice de l’OSCE a appelé à des actions décisives pour faire cesser ces souffrances. Aujourd’hui, nous devons mettre de côté les questions géopolitiques et les gains personnels, et donner la priorité au bien-être des personnes, a-t-il plaidé, observant que les défis des dernières années se sont accélérés avec l’agression à grande échelle de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Ce faisant, la Russie viole de manière flagrante les principes du droit international convenus par tous, a-t-il dénoncé, avant d’appeler une nouvelle fois ce pays à retirer immédiatement ses troupes du territoire souverain de l’Ukraine. M. Osmani a déclaré avoir vu de près les souffrances des populations à Borodyanka, près de Kiev.  Il a dit avoir visité des camps et des logements de fortune où vivent des personnes déplacées.  Ces personnes ne méritent pas ce destin, elles méritent la justice et la reddition des comptes, a-t-il martelé, y voyant un « impératif moral ». 

M. Osmani a assuré que le travail sur le terrain est la priorité de l’OSCE.  Il a ainsi fait état de visites en République de Moldova, estimant que le processus actuel en Transnistrie mérite toute l’attention de la communauté internationale.  Évoquant ensuite ses visites dans le sud du Caucase, il a dit avoir agi pour faciliter le dialogue et la normalisation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, notamment au sujet du corridor de Latchine entre le Haut-Karabakh et l’Arménie.  Il a également salué le dernier cycle des discussions de Genève sur la Géorgie et a déclaré appuyer pleinement le dialogue engagé sous la direction conjointe de l’ONU, de l’OSCE et de l’Union européenne. Ces canaux doivent rester ouverts pour éviter une nouvelle aggravation mais aussi pour traiter les conséquences du conflit de 2008, a-t-il affirmé, avant de se féliciter que, s’agissant du Kosovo, Pristina et Belgrade aient accepté de mettre en œuvre l’annexe à l’accord atteint à Bruxelles le 27 février. 

Les autres priorités de l’OSCE dépendront de l’évolution sur le plan de la sécurité, a indiqué M. Osmani, pour qui le respect des droits humains et la promotion de la tolérance sont des préalables indispensables pour une « sécurité exhaustive ». Promettant de redoubler d’efforts pour assurer que l’OSCE soit opérationnelle et flexible, il s’est dit prêt à relever les défis, en particulier celui d’un financement adéquat de l’Organisation.  L’OSCE, a-t-il insisté, est non seulement une plateforme de dialogue, mais aussi une communauté fondée sur la solidarité.  À ses yeux, les vies humaines sont « la chose la plus précieuse ».  En tant que médecin, il a dit avoir vu des êtres humains se battre pour survivre.  « La guerre est une catastrophe provoquée par des êtres humains, ce n’est ni une nécessité ni un destin; c’est le pire choix », a-t-il conclu en appelant à « changer de cap » et à unir les forces pour retrouver la paix.   

M. IGNAZIO CASSIS, Conseiller fédéral et Ministre des affaires étrangères de la Suisse, a tout d’abord constaté que l’agression militaire russe contre l’Ukraine représente « le plus grand défi à notre sécurité coopérative en Europe et Asie centrale ».  Il a réitéré son appel à la Fédération de Russie pour qu’elle cesse son agression et retire immédiatement ses troupes du territoire ukrainien.  Le Ministre a rappelé que la protection des populations civiles est l’essence même du partenariat de 30 ans entre l’OSCE et l’ONU.  Sur les plans politique et militaire, a-t-il ajouté, l’OSCE est la plus grande organisation de sécurité régionale au monde et sa présence sur le terrain dans 13 pays a un effet stabilisateur dans des régions telles que les Balkans occidentaux, le Caucase et l’Asie centrale.  Grâce à ses missions, l’OSCE établit et entretient des partenariats solides avec les autorités et institutions locales et nationales, ainsi qu’avec la société civile et d’autres organisations internationales.  Ses activités de promotion des droits des minorités, d’observation des élections et de réformes institutionnelles sont donc directement basées sur les besoins des pays, a relevé M. Cassis. 

Dans sa dimension humaine, l’OSCE dispose de mécanismes qui documentent les violations des droits humains les plus graves, comme c’est le cas aujourd’hui en Ukraine, a poursuivi le chef de la diplomatie suisse, pour qui « la paix ne peut être gagnée sans justice pour les victimes et leurs familles ».  Sur les plans économique et environnemental, a-t-il encore précisé, l’OSCE mène un travail essentiel dans la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques, notamment la gestion durable des ressources en eau et la prévention des conflits.  Dans le contexte actuel, la guerre en Ukraine représente selon lui un « sérieux revers » pour l’OSCE, qui a été fondée pour assurer la sécurité en Europe.  Toutefois, compte tenu de son caractère inclusif, l’OSCE demeure essentielle en raison de la confiance qui doit lier ses États membres et des synergies fondamentales qu’elle crée avec l’ONU, a-t-il souligné, souhaitant qu’à l’approche du cinquantième anniversaire des Accords d’Helsinki, ces caractéristiques restent une référence pour l’architecture commune de paix et de sécurité en Europe et que la capacité d’action de l’OSCE soit maintenue.  « Nous ne devons pas permettre que l’avenir de l’Europe soit décidé par la loi de la force », a-t-il conclu. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est lancé dans un plaidoyer en faveur d’une OSCE « flexible et fonctionnelle ».  En tant que pilier important d’un ordre fondé sur des règles, l’Organisation joue un rôle important qui doit être renforcé dans le cadre d’une plus grande coordination avec l’ONU.  En dépit des efforts « cyniques » actuels pour réduire son périmètre d’action, l’OSCE a retrouvé toute sa pertinence face aux attaques perpétrées contre l’Ukraine et devant la décision de la Fédération de Russie d’installer des armes nucléaires tactiques au Bélarus, a souligné le représentant.  Seize mois plus tard, cette guerre se poursuit avec des effets catastrophiques sur la région et au-delà, a-t-il déploré.  Il s’est félicité que l’OSCE ait été en mesure de documenter des preuves de crimes graves par le biais du Mécanisme de Moscou. Mais cette organisation continue d’être confrontée à d’autres conflits, comme l’occupation de certaines parties du territoire de la Géorgie, a observé le délégué.  Pour le délégué, nous devons pouvoir compter sur une OSCE forte pour contrer toutes ces menaces, et répondre aux attentes en matière de désarmement, de prévention des conflits et de règlement des différends. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué la contribution vitale du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE, ainsi que ses efforts pour faciliter un règlement pacifique des conflits en Géorgie, en République de Moldova et au Haut-Karabakh.  Il a également salué le travail en cours de l’OSCE par le biais du Mécanisme de Moscou pour dénoncer les violations et les abus du droit international humanitaire et des droits de l’homme, notamment la répression brutale des libertés politiques et des médias au Bélarus.

Le représentant a ensuite indiqué que lorsque la Russie a lancé son invasion contre l’Ukraine en février 2022, elle a transgressé tous les principes fondamentaux de l’OSCE, à savoir la souveraineté; le respect de l’intégrité territoriale; l’inviolabilité des frontières; et le règlement pacifique des différends.  Il a également signalé que la publication aujourd’hui du rapport du Mécanisme de Moscou sur la déportation d’enfants ukrainiens décrit les graves violations des droits humains et les abus commis par la Russie et appuie les preuves de plus en plus nombreuses que plusieurs milliers d’enfants ukrainiens ont été retirés à leur famille et transférés de force hors du pays. 

En ces temps de crise, a-t-il enchaîné, nous avons besoin d’organisations régionales fonctionnelles et efficaces pour résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés et faire respecter les principes de la Charte des Nations Unies et de l’Acte final d’Helsinki.  Il a estimé que l’OSCE a un rôle important à jouer, déplorant que la Russie fasse obstruction à l’Organisation, notamment en retardant les décisions clefs sur son budget, en bloquant les nominations à la direction et en entravant le travail de ses institutions des droits de la personne.  Il a exhorté les 57 États participants de l’OSCE, y compris la Russie, à soutenir l’Organisation et à veiller à ce qu’elle soit pleinement fonctionnelle et financée de manière adéquate.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a rappelé le rôle de plateforme pour des discussions ouvertes sur la sécurité en Europe, joué par l’OSCE tout au long de son histoire, qui a contribué à apaiser de nombreuses tensions entre l’Est et l’Ouest et à prévenir le déclenchement d’affrontements armés.  Il a cité, pour les cas récents, le rôle important de l’organisation dans la surveillance des cessez-le-feu dans les Balkans, dans le Caucase et dans d’autres régions de l’espace post-soviétique.  Le délégué a également dit apprécier ses efforts pour lutter contre la criminalité transnationale organisée et renforcer l’état de droit.  Notant que l’OSCE n’a pas toujours réussi à éviter le recours aux armes, comme en témoigne l’effondrement des accords de Minsk, il n’en a pas moins souhaité que cette plateforme reste un forum de dialogue franc sur des questions d’intérêt commun.  « Nous déplorons l’incident survenu lors de la session parlementaire de février dernier et espérons que l’impasse concernant la présidence de l’organisation en 2024 pourra être surmontée », a-t-il dit en recommandant aux membres de l’OSCE de revenir à leur esprit traditionnel de coopération. 

Le représentant a dit saisir cette occasion pour exprimer sa préoccupation face à l’escalade des tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et aux signes d’une détérioration de la situation humanitaire dans le corridor de Latchine.  Il a craint que l’établissement d’un poste de contrôle n’exacerbe la complexité de la situation et entrave les perspectives d’un règlement pacifique.  Plaidant pour la libre circulation des personnes et des biens dans ce couloir, pour empêcher l’effondrement d’une situation humanitaire déjà précaire, il a encouragé les gouvernements des deux pays à éviter toute rhétorique propice à la violence et à engager un dialogue en vue d’un règlement pacifique de leurs différends.  Il a aussi estimé que l’OSCE pourrait jouer un rôle constructif dans le conflit en Ukraine, à condition que ses membres abandonnent la logique de l’isolement et s’engagent dans un effort sincère en faveur du dialogue.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a affirmé son plein appui à l’OSCE et réaffirmé l’importance du multilatéralisme, disant soutenir une coopération renforcée entre l’ONU et l’OSCE, qui permet de trouver des solutions plus efficaces et concrètes. Elle a apprécié le concept unique de l’OSCE qui est une démarche globale en matière de sécurité.  Elle a souligné son rôle pour les mesures de confiance, de prévention des conflits et de gestion des crises grâce à la diplomatie. Elle a aussi salué les mesures prises par l’Organisation pour traiter les questions liées à la coopération économique et environnementale, y compris les changements climatiques.  Les activités de l’OSCE sont toujours essentielles dans les situations internationales à l’ordre du jour en matière de paix et sécurité, a-t-elle relevé en citant le Haut-Karabakh, l’Ossétie du Sud, l’Abkhazie et la Transnistrie.  Elle a salué les bons offices de l’OSCE et notamment la récente visite du Président en exercice en Géorgie, en Azerbaïdjan et en Arménie.  Elle a dit rester pleinement attachée au dialogue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et à la paix et la sécurité dans le Caucase du Sud.  Elle a déploré les conséquences humanitaires découlant du blocus du corridor de Latchine, appelant les parties à cesser toute action entravant l’accès humanitaire.

La déléguée a rappelé que tous les États de l’OSCE ont réaffirmé leur engagement en matière de règlement pacifique de tout différend, mais a déploré les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme qui continuent dans la région, la Russie continuant à violer la Charte des Nations Unies et les principes fondateurs de l’OSCE consacrés dans l’Acte final d’Helsinki.  « Son agression non provoquée contre l’Ukraine sape l’architecture européenne de sécurité et menace la paix et la sécurité sur le continent et au-delà. »  Elle a appelé la Russie à cesser cette guerre, à retirer ses forces militaires de l’ensemble du territoire de l’Ukraine et à revenir au dialogue et à la diplomatie, lui demandant aussi de mettre en œuvre les recommandations du dernier rapport du Mécanisme de Moscou pour la dimension humaine et à prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre le retour des enfants déplacés de force. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a estimé que la situation actuelle sur le continent européen devrait encourager à tirer les enseignements de la Seconde Guerre mondiale et à se référer à la Charte des Nations Unies et à l’Acte final d’Helsinki.  Selon lui, le partenariat entre l’ONU et l’OSCE démontre que des organisations internationales peuvent tirer parti de leurs forces respectives pour prévenir les crises, promouvoir des solutions diplomatiques, surveiller les accords et éviter la répétition des conflits.  En Ukraine, a-t-il constaté, le conflit a pris de nombreuses vies et déraciné plus de huit millions de personnes.  Il a aussi aggravé l’insécurité alimentaire dans le monde, augmenté les risques nucléaires et intensifié la polarisation de la planète, tout en provoquant des divisions au sein même de l’OSCE.  Mais les défis auxquels est confrontée l’OSCE ne se limitent pas à l’Ukraine, a relevé le représentant. 

Dans les Balkans occidentaux, les dynamiques encourageantes qui avaient mené à un accord facilité par l’Union européenne entre le Kosovo et la Serbie doivent être renforcées, a-t-il plaidé, ajoutant que davantage doit être fait pour mettre en œuvre ces engagements. En Bosnie-Herzégovine, les discours de haine continuent de saper la coexistence pacifique et la tolérance, s’est-il alarmé, avant d’appeler à la coopération et au dialogue.  Rappelant que l’objectif des institutions multilatérales est de relever les défis communs de façon collective, le délégué a observé que, depuis sa création en 1990, l’OSCE a joué un rôle important de stabilité sur le continent européen grâce à l’action constructive de ses membres.  À ses yeux, les efforts de diplomatie et de désescalade de l’OSCE sont plus essentiels que jamais aujourd’hui.  À l’instar du processus d’Helsinki, qui avait contribué à la baisse des tensions dans les années 1970, il importe d’encourager cet esprit de dialogue et de confiance mutuelle pour promouvoir à la paix et à la stabilité en Europe, a-t-il conclu. 

Dans un contexte international « de plus en plus complexe et fragile », Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a estimé que l’ONU et l’OSCE doivent rechercher des moyens créatifs de renforcer leur coopération face aux menaces actuelles et futures qui pèsent sur la sécurité de l’Europe, citant la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Elle s’est dite ensuite alarmée par les conclusions récentes d’études indépendantes qui suggèrent que les dépenses militaires, en particulier en Europe, ont atteint les niveaux de la guerre froide, cependant que certains États dotés d’armes nucléaires s’éloignent des accords de non-prolifération qui ont servi de rempart contre une guerre nucléaire.  Compte tenu du soutien de l’OSCE à la mise en œuvre des accords de Minsk, elle a estimé que l’organisation doit se réaffirmer en tant qu’interlocuteur crédible dans la recherche d’une solution durable au conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine et dans une « conversation plus large » sur l’avenir de l’architecture sécuritaire de l’Europe. Ailleurs en Europe, les tensions persistent car les efforts de paix ont été soit « réduits à néant », soit bloqués par les actions des États en conflit, a-t-elle également noté.  Aussi la représentante a-t-elle salué les contacts de haut niveau établis par le Président en exercice de l’OSCE avec les autorités d’Arménie, d’Azerbaïdjan et de Géorgie afin d’offrir un soutien aux dialogues en cours et aux accords de règlement.  Pour avancer vers un avenir plus pacifique et plus stable, elle a recommandé que les États participants de l’OSCE renouvellent leurs engagements à l’égard des principes fondamentaux consacrés par les accords d’Helsinki et d’autres accords normatifs de l’Organisation. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a estimé que l’OSCE s’était révélée comme un véritable « levier au service de la paix » de ses 57 membres, même si son rôle et sa vocation stabilisatrice sont actuellement mis à rude épreuve.  Il a rappelé que l’Organisation était fondée sur la « noble idée » que la sécurité d’un État n’est véritablement atteinte que lorsque celle du voisin l’est aussi et y a vu un « modèle de coopération unique » qui consacre la solidarité entre États Membres comme pierre angulaire.

Pour le représentant, au cœur des défis qu’affronte aujourd’hui l’OSCE figure la crise de confiance entre ses membres, crise qui semble mettre en question la nature même et la portée du contrat au cœur de l’Organisation et les engagements consentis par ses membres. Il a cité parmi ces défis, outre la guerre en Ukraine, les tensions dans les Balkans occidentaux et « un contexte sociopolitique marqué par les nationalismes et autres menaces transnationales ». Pour le Gabon, ces défis sont « sans doute amplifiés » par la guerre en Ukraine, à cause de ses conséquences humanitaires et de sécurité, mais aussi, « de façon plus insidieuse », par la pression exercée sur les États membres, « appelés à choisir un camp contre l’autre ». 

Pour le Gabon, l’OSCE doit, plus que jamais, utiliser ses mécanismes de règlement pacifique des différends pour trouver une issue au différend frontalier entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et régler les conflits gelés à Chypre, en Bosnie-Herzégovine ou au Kosovo.  Mais pour le représentant, elle a aussi « une véritable carte à jouer » pour amener au dialogue les parties à la guerre en Ukraine.  À cette fin, l’OSCE devra « se résoudre à prévenir, à réconcilier et à favoriser la reconstruction et la coexistence pacifique ».  Pour conserver sa crédibilité, elle devra aussi adopter une position « équidistante des antagonismes de ses États membres », a estimé le représentant. 

Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a constaté que l’OSCE est aujourd’hui confrontée à une attaque sans précédent contre son essence même.  L’agression que mène la Russie contre l’Ukraine depuis le 24 février 2022 est en effet une violation flagrante de la Charte des Nations Unies comme de tous les principes et engagements issus des textes fondateurs de l’OSCE, l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris, sur lesquels repose la stabilité de l’Europe, a souligné la représentante.  Réaffirmant le soutien total de son pays à l’Ukraine, elle a salué le lancement par l’OSCE du Programme de soutien pour l’Ukraine en novembre dernier, auquel la France a contribué en 2022 à hauteur de 1,5 million d’euros.  Elle a par ailleurs exprimé sa reconnaissance à la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine, avant d’appeler à la libération immédiate et inconditionnelle des personnels de la Mission toujours détenus par la Russie et ses supplétifs. 

La représentante a également souligné la contribution des institutions et instruments de la dimension humaine de l’OSCE pour documenter les crimes commis par la Russie en Ukraine.  Les rapports publiés au titre de l’invocation du Mécanisme de Moscou dressent des constats sans appel, a-t-elle fait remarquer, faisant état de violations massives et systématiques des droits humains et du droit international humanitaire par la Russie, y compris contre les enfants.  Elle a d’autre part réitéré le soutien de la France au mécanisme d’établissement des faits mis en place par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme aux frontières de l’Ukraine, tout en exprimant son soutien à l’invocation, le 23 mars dernier par 38 États participants, du Mécanisme de Moscou à l’encontre du Bélarus, complice de Moscou dans cette guerre. 

Pour la représentante, l’OSCE doit pouvoir continuer de mettre ses ressources au service de la prévention et du règlement des conflits dans l’espace européen, malgré l’agression russe contre l’Ukraine.  Notant à cet égard que, dans son ordonnance du 22 février 2023, la Cour internationale de Justice (CIJ) a constaté que, depuis le 12 décembre 2022, la liaison entre le Haut-Karabakh et l’Arménie via le corridor de Latchine est sérieusement perturbée et a demandé à l’Azerbaïdjan de prendre toutes les mesures pour assurer la circulation sans entrave des personnes, des véhicules et des marchandises, la représentante a rappelé que les décisions de la CIJ ont « force obligatoire ».  Elle a également apporté son plein soutien aux pourparlers entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, souhaitant que l’ensemble des questions soient réglées par la voie de la négociation.  Selon elle, l’OSCE peut apporter une contribution utile aux processus en cours, notamment via la mise en œuvre de mesures de confiance. 

La représentante a, enfin, réitéré le soutien indéfectible de la France à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Géorgie et de la République de Moldova et au rôle de l’OSCE pour progresser dans le règlement des conflits qui s’y déroulent.  En cette année qui marque le trentième anniversaire de l’établissement du cadre de coopération et de coordination entre l’ONU et l’OSCE, « nous sommes déterminés à ne pas laisser la Russie entraîner dans sa fuite en avant les organisations multilatérales de sécurité collective », a-t-elle conclu.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a déclaré que l’agression de la Russie contre l’Ukraine a provoqué une déstabilisation dans le monde entier.  Dans ce contexte, il a exprimé son respect à l’OSCE pour le rôle important qu’elle a joué dans l’instauration de la confiance dans une région confrontée à des effets d’entraînement, comme au Kosovo.  Le Japon, a rappelé son représentant, est devenu le premier partenaire de coopération de l’OSCE il y a plus de 30 ans, en 1992.  Depuis lors, il a participé activement à tous les sommets et conseils ministériels de cette organisation.  Ainsi, Tokyo a envoyé des experts auprès de la mission spéciale de surveillance de l’OSCE en Ukraine et contribué financièrement à la prévention de la traite des êtres humains dans ce pays et dans les pays voisins, ainsi qu’au renforcement de la capacité de contrôle des frontières en Asie centrale et en Afghanistan. 

Confronté à une situation « impardonnable » dans laquelle un État membre de l’OSCE, qui est aussi un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, a envahi un autre État membre, le monde a plus que jamais besoin d’une sécurité globale par l’instauration d’une confiance fondée sur le dialogue, à laquelle l’OSCE travaille depuis sa création, a indiqué le délégué.  L’agression de la Russie contre l’Ukraine est un acte « scandaleux » qui ébranle les fondements mêmes de l’ordre international et la communauté internationale doit exprimer son opposition, indépendamment des frontières géographiques, à cette violation flagrante de la Charte des Nations Unies, a-t-il ajouté.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a rappelé que l’OSCE avait joué depuis près d’un demi-siècle un rôle déterminant dans la stabilité en Europe, notamment en participant activement à l’élaboration des transitions démocratiques qui ont jeté les bases de la prospérité de l’Europe de l’après-guerre froide.  Il a estimé que l’Organisation reste tout aussi pertinente aujourd’hui dans toutes les questions liées à la paix et à la sécurité en Europe.  Elle représente aussi un interlocuteur valable dans les organisations multilatérales, régionales et sous-régionales à travers le monde.

Dressant un parallèle entre les problèmes que traite l’OSCE et ceux auxquels sont confrontés le Mozambique et les organisations régionales et sous-régionales africaines, le représentant a dit affirmer avec confiance que « faire taire les armes » est un objectif au cœur du mandat de l’OSCE et qu’en ce sens, « il y a beaucoup à apprendre et à partager les uns des autres, malgré les spécificités contextuelles et historiques ».  Alors que l’architecture de sécurité internationale est soumise à d’immenses tensions, l’OSCE, comme l’ONU et d’autres, doit agir et rétablir les garanties nécessaires à un monde pacifique et prospère, en ravivant l’esprit qui a conduit à l’Acte final d’Helsinki en 1975 ou à la Déclaration du Sommet d’Istanbul en 1999, a-t-il ajouté.

Pour le représentant, l’OSCE a un rôle important à jouer au-delà de l’Europe, dans le renforcement de son partenariat avec l’ONU, en particulier dans les domaines de la prévention et du règlement des conflits.  Les deux organisations ont des mandats et des compétences complémentaires, et travailler ensemble peut renforcer l’efficacité de leurs efforts communs.  Les principes fondamentaux et les engagements inscrits dans l’Acte fondateur de l’OSCE -le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de l’indivisibilité de la sécurité- restent les pierres angulaires de la paix et de la sécurité internationales, a ajouté le représentant.  À ce titre, l’OSCE continuera d’être un partenaire essentiel dans les efforts visant à promouvoir la stabilité et la coopération en Europe et au-delà, a-t-il conclu.

M. GENG SHUANG (Chine) a rappelé la position de principe de son pays sur la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, qui doit être au service de la recherche de solutions pacifiques aux conflits.  Pour lui, l’OSCE devrait redoubler d’efforts pour renforcer les pourparlers de paix entre les parties au conflit en Ukraine et les encourager à renoncer à la mentalité de guerre froide. 

Le représentant a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre le principe d’indivisibilité de la sécurité en Europe, consacrée en 1975 par l’Acte final d’Helsinki. L’OSCE doit promouvoir le respect des préoccupations légitimes des États Membres et l’ordre international fondé sur le droit international et la Charte des Nations Unies, a-t-il encore précisé. 

La position de la Chine sur la crise en Ukraine reste la même, à savoir que l’intégrité territoriale de tous les États doit être respectée et leurs attentes sécuritaires prises en compte.  Le dialogue et la négociation sont les seules solutions, a insisté le représentant, qui a fait part de l’intention de la Chine de dépêcher un envoyé spécial en Ukraine et de continuer à contribuer à la cessation des hostilités et à la recherche de la paix.  Pour la Chine, la crise en Ukraine est le résultat de tensions accumulées en Europe « au fil des décennies ». 

Quant à l’Arménie et à l’Azerbaïdjan, ces deux pays doivent résoudre leur différend de manière pacifique et diplomatique et garantir ensemble la paix et la sécurité régionale, a encore estimé le représentant.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est félicité des efforts conjoints déployés par l’OSCE pour faire progresser la réconciliation dans les Balkans occidentaux et appuyer le cadre des discussions internationales de Genève sur la Géorgie, ainsi que la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies en Asie centrale.  Il a également évoqué les conflits concernant le Haut-Karabakh et la République de Moldova. Le représentant a reconnu le rôle important joué par cette organisation, avec sa mission spéciale d’observation en Ukraine et dans le cadre du Groupe de contact trilatéral, dans la promotion de la sécurité et la recherche d’une solution politique au milieu des défis ayant précédé l’invasion de l’Ukraine par la Russie.  « Si les efforts de l’OSCE dans le cadre de la mise en œuvre des accords de Minsk ont été dépassés par la force des choses, sa contribution reste centrale, y compris dans le contexte plus complexe d’aujourd’hui », a-t-il estimé.  Le représentant a en outre encouragé la présidence de l’OSCE à continuer de se concentrer sur d’autres questions sécuritaires, telles que la gestion de la sécurité des frontières, la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée, la cybersécurité et le lien entre changements climatiques et sécurité, entre autres.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a d’abord noté la profonde crise actuelle du système des relations internationales, qu’il a imputée aux « actions systématiques et cohérentes à long terme des États-Unis et de leurs alliés pour créer une entité nationaliste russophobe et néonazie à nos frontières ».  Cette crise, a-t-il ajouté, risque de nous faire basculer dans un tout nouveau système de coordonnées géopolitiques.  Jugeant ouverte la question de savoir à quoi ressemblera le système renouvelé des relations internationales, le représentant a estimé qu’une « chose est claire: le monde ne sera plus unipolaire et la domination occidentale ou ‘paix américaine’ est sur le déclin ».  Pour lui, la question de la place et du rôle des différentes organisations internationales dans ce processus reste également ouverte. 

Après avoir estimé que l’ONU, « bastion du multilatéralisme malgré la domination des Occidentaux dans ses structures » reste une plateforme reconnue de dialogue et de coopération internationale, et jugé que le Conseil de l’Europe avait de son côté « sombré dans l’inexistence politique », le représentant a noté que les attentes étaient nombreuses concernant l’OSCE.  En effet, a-t-il rappelé, cette organisation a succédé à un forum -la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE)- qui a joué un rôle clef dans l’établissement d’un dialogue entre l’Occident et l’Orient à l’époque de la guerre froide. 

Pour M. Nebenzia, l’OSCE traverse sa crise la plus aiguë en près d’un demi-siècle d’existence, du fait des « tentatives d’un groupe bien connu d’États » d’utiliser l’Organisation pour leurs propres intérêts politiques et d’en faire un instrument de la « guerre de croisade déclenchée par l’Occident contre la Russie ». 

Le représentant a fait un historique du système de sécurité régional construit dans le cadre de l’OSCE et fondé sur les principes de l’indivisibilité de la sécurité « de Vancouver à Vladivostok » , qu’il a qualifié de « vraiment unique ».  Il a reconnu à l’OSCE une capacité à relever avec succès divers défis, citant en particulier la signature en 1999 à Istanbul de la Charte de sécurité européenne. Tout en dénonçant des tentatives menées dès cette époque pour transformer l’OSCE en une « sorte d’organe de surveillance des politiques des États situés à l’est de Vienne », il a reconnu que les activités de l’organisation avaient continué de susciter des espoirs de progrès vers une coopération et un développement mutuellement bénéfiques.  Il a ainsi rappelé le rôle accordé à l’OSCE dans la mise en œuvre des accords de Minsk de 2014 et la mise en place, sous les auspices de l’OSCE, d’une « boîte à outils solide » aux parties au conflit pour leur permettre de dialoguer directement.

Mais le représentant a reproché à la direction de l’OSCE d’avoir été complètement absente face au sabotage occidental des accords.  Il l’a donc accusée non seulement d’avoir échoué dans sa tâche, mais de s’être laissée rendre « complice de la ligne occidentale ». Il a donc jugé logique « l’aggravation de la crise ukrainienne en février 2022 », l’OSCE ayant « inconditionnellement et docilement pris le parti de Kiev » et d’être devenue, au lieu d’une plateforme de dialogue, « une plateforme d’abus russophobes et d’accusations hystériques » contre la Russie.

M. Nebenzia a également déploré que le « remue-ménage artificiel autour du problème ukrainien » se fasse au détriment d’autres crises relevant de la compétence de l’OSCE. Il a notamment déploré un « manque de réaction équilibrée » de l’organisation face à la dégradation de la situation au Kosovo, une absence d’avancées dans le règlement du conflit en Transnistrie où il a accusé l’Ukraine de jouer un « rôle subversif », ainsi qu’une politisation des discussions internationales de Genève sur la sécurité et la stabilité en Transcaucasie.  Pour le représentant, l’actuelle présidence nord-macédonienne de l’OSCE n’a pas encore réussi à élaborer un programme unificateur et ne peut se permettre de poursuivre des approches neutres en termes de statut. Il a aussi qualifié de « honteux » le silence du Président et du Secrétariat de l’OSCE face à la « persécution politiquement motivée du régime de Kiev contre l’Église orthodoxe ukrainienne canonique »

Pour M. Nebenzia, la politique de confrontation à courte vue de l’alliance occidentale « place l’OSCE devant un choix de vie »: s’occuper de créer une architecture de sécurité européenne durable basée sur le principe de son indivisibilité, consacré dans de nombreux documents de l’OSCE, ou bien continuer à jouer le jeu du camp occidental.

Le représentant a néanmoins dit « rester confiant dans le potentiel de l’OSCE ». La Russie, a-t-il affirmé, n’abandonnera pas les tentatives de dialogue menées dans son cadre.  Il s’est en effet dit convaincu d’une différence fondamentale « entre les discours hystériques et insultants des délégations occidentales et les rapports vérifiés et factuels de nos collègues de Vienne ». Pour lui, l’OSCE a encore une chance de jouer un rôle en rassemblant des points de vue parfois polarisés et inconciliables et en développant une plateforme de dialogue et un cadre de coexistence pacifique, tout comme les négociateurs soviétiques, américains et européens l’ont fait en leur temps, du début au milieu des années 1970. 

Enfin, M. Nebenzia a rappelé que, s’il est bon d’avoir une interaction entre l’OSCE et l’ONU en application du Chapitre VIII de la Charte, la principale responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales incombe au Conseil de sécurité de l’ONU.  « Il semble que certains à Vienne aient commencé à l’oublier, emportés par des projets antirusses irréalisables », a-t-il assené, ajoutant en conclusion que « plus tôt l’OSCE reprendra la conversation calme et mutuellement respectueuse dont elle a tant besoin, plus l’Organisation aura de chances de s’intégrer dans l’ordre mondial renouvelé ».

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a condamné les tirs de missiles russes contre des civils ukrainiens et la déportation de force d’enfants ukrainiens par la Fédération de Russie.  Le coût humain de cette agression est incommensurable et les dommages causés aux infrastructures de l’Ukraine sont énormes, a-t-il dénoncé, avant de saluer le fait que l’OSCE a été aux avant-postes pour faire la lumière sur les agissements de la Russie, notamment grâce à la mission d’établissement des faits, qui a invoqué le Mécanisme de Moscou pour la dimension humaine à plusieurs reprises. Les rapporteurs de cette mission, qui sont des professionnels dans leur spécialité, ont établi scrupuleusement les faits, a souligné le représentant.  Celui-ci a aussi fait état des violences rapportées par la mission concernant le régime du Bélarus et sa répression contre la dissidence et toute opposition à sa politique.  Il a souhaité que chacun lise ces rapports « étant donné la grave crise au Bélarus et les actes terribles commis par la Russie ». 

Pour le représentant, la coopération des organisations régionales avec l’ONU est plus importante que jamais pour maintenir la paix et la sécurité internationales.  En tant que plus grande organisation de sécurité au monde, l’OSCE doit continuer de coopérer avec les Nations Unies pour que le Conseil de sécurité puisse s’acquitter de son mandat, a-t-il souligné, saluant à cet égard le partenariat étroit entre l’OSCE et les agences et missions de l’ONU sur le terrain, notamment au Kosovo.  L’OSCE permet un multilatéralisme efficace en contribuant à la protection et à la surveillance des droits humains, au contrôle des armements, à la stabilité régionale, à la prospérité économique, à la réconciliation postconflit et à des politiques respectueuses de l’environnement, a ajouté le représentant.  Il a donc formé le vœu que la poursuite de la coopération avec l’OSCE fera que l’ONU et l’ensemble de la communauté internationale pourront tirer parti de leurs forces respectives. 

Reprenant la parole, M. OSMANI, Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a réagi aux observations de la Fédération de Russie, soulignant que l’OSCE est une plateforme de dialogue entre États membres qui ne sont pas forcément du même avis.  Les principes et engagements pris par l’OSCE ne sont pas négociables, a-t-il assuré, la présidence se voyant comme un « honnête courtier » entre parties prenantes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité de l’information adopte par consensus sa résolution phare sur les activités de l’ONU en matière de communication globale

Quarante-cinquième session,
5e séance - matin
PI/2312

Le Comité de l’information adopte par consensus sa résolution phare sur les activités de l’ONU en matière de communication globale

Le Comité de l’information a clôturé, ce matin, les travaux de sa quarante-cinquième session en adoptant par consensus ses deux projets de résolution annuels, dont son texte phare sur les politiques et activités de l’ONU en matière de communication globale dans lequel il fait part de sa « grande inquiétude » face au volume croissant de la désinformation et de la mésinformation visant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. 

Cette adoption a notamment été saluée par le Président de cette session, M. Mohammad Aamir Khan, du Pakistan, qui y a vu le témoignage du fonctionnement du multilatéralisme dans la pratique, ainsi que du rôle de la diplomatie, meilleur moyen, selon lui, pour les délégations de surmonter leurs différences, de travailler ensemble et de relever conjointement leurs défis communs, tout en fournissant des orientations au Département de la communication globale (DCG). 

Ce consensus envoie un signal important.  Il témoigne d’une reconnaissance partagée du fait que pour relever les nombreux défis auxquels le monde est confronté, et par là même cette Organisation, une fonction de communication forte et dynamique est nécessaire, a souligné le représentant du Département de la communication globale, M. Maher Nasser, Directeur de la Division de la sensibilisation du public. 

Ce dernier a également relevé que la lutte contre la désinformation et la manipulation de l’information est au cœur des préoccupations des délégations, en profitant pour rappeler la publication, dans deux semaines, de la note d’orientation du Secrétaire général sur l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  Il s’agit d’un document de travail pour la discussion en cours sur cette question importante et le DCG continuera à consulter les États Membres et à recevoir leurs contributions et suggestions, a-t-il assuré. 

Doté d’un dispositif de 161 paragraphes, le texte consacré aux politiques et activités de l’ONU note avec une grande inquiétude le volume croissant de la désinformation et de la mésinformation visant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et demande au DCG d’appuyer, dans la limite des ressources existantes, les efforts déployés par les opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour fournir des contenus exacts, y compris dans les langues locales, afin d’aider à mieux faire comprendre leurs mandats, de gérer les attentes et de gagner la confiance et le soutien des parties prenantes concernées. 

Il invite également le DCG à recommander que le système des Nations Unies utilise systématiquement dans ses communications la terminologie des résolutions adoptées par l’Assemblée générale. 

Le Comité engage en outre les États Membres à envisager de meilleurs moyens de coopérer pour écarter les menaces que pose l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins terroristes. 

Le projet consacré à l’information au service de l’humanité demande pour sa part que tous les pays et organismes des Nations Unies coopèrent afin d’atténuer les disparités dans la façon dont l’information circule à tous les niveaux.  Il appelle également à ce que les journalistes puissent travailler librement et efficacement. 

Principal facilitateur des négociations, Cuba, au nom du G77 et la Chine, s’est félicité de l’engagement des délégations en faveur du multilinguisme, « valeur clef » de l’Organisation.  Celle-ci n’est pas négociable, a renchéri l’Union européenne qui a insisté sur l’importance de traduire les rapports dans les six langues officielles de l’ONU. 

De son côté, le Mexique a conseillé de raccourcir la résolution sur les politiques et activités de l’ONU, notant que les 161 paragraphes du dispositif ont pour effet de diluer l’impact du message du Comité.  « Tout ne peut pas être prioritaire », a-t-il indiqué. Les Philippines ont exhorté le DCG à redoubler d’efforts pour combattre la désinformation et la mésinformation, notamment face aux changements climatiques et les discours de haine.  La République islamique d’Iran s’est inquiétée pour sa part des répercussions du monopole sur les TIC ainsi que des mesures coercitives unilatérales qui entravent les transferts de technologie vers certains pays en développement. 

Après l’Italie, les États-Unis ont attiré l’attention sur le sort du journaliste du Wall Street Journal, Evan Gershkovich, emprisonné en Fédération de Russie « juste pour avoir fait son travail ».  « Le journalisme n’est pas un crime », a souligné la délégation, qui a exigé sa libération immédiate.  Elle a également dénoncé la campagne de désinformation de la Russie qui, a-t-elle affirmé, est le reflet de la politique étrangère du Kremlin, se félicitant du nouveau libellé sur les impacts négatifs de la désinformation et de la mésinformation. 

La délégation américaine vient d’ajouter un programme de confrontation à l’ordre du jour, a dénoncé la Fédération de Russie qui a rappelé avoir répondu à toutes les allégations injustifiées formulées à son encontre lors du débat général et dans le cadre de l’exercice du droit de réponse. 

Martelant qu’il est nécessaire pour tous de promouvoir un monde de l’information plus pacifique, plus transparent et plus ouvert à tous, le Président du Comité a appelé les États Membres à participer sans tarder et de manière constructive au processus en cours en vue de parvenir à un code de conduite sur l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques. 

Le rapport du Comité de l’information a été adopté, chapitre par chapitre* puis dans son intégralité, en vue de son renvoi à l’Assemblée générale pour qu’elle l’entérine lors de sa soixante-dix-huitième session.  Il a été présenté par la Rapporteuse du Comité, Mme Liliana Baños, d’El Salvador. 

* A/AC.198/2023/L.1; A/AC.198/2023/L.2; A/AC.198/2023/L.3; A/AC.198/2023/L.4

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: la science, la technologie et l’innovation offrent la base dont nous avons besoin pour avancer vers la réalisation des ODD

Session de 2023,
Forum sur la science, la technologie et l’innovation, matin & après-midi
ECOSOC/7125

ECOSOC: la science, la technologie et l’innovation offrent la base dont nous avons besoin pour avancer vers la réalisation des ODD

Le forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation (STI) au service de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) offre un espace permettant une collaboration plus étroite entre les décideurs politiques et la communauté scientifique, a déclaré ce matin la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme Lachareva Stoeva, alors que s’ouvrait sa huitième édition, sous la présidence des représentants permanents d’Afrique du Sud, Mme Mathu Joyini, et du Royaume-Uni, M. Thomas Woodroffe.  Se tenant sur deux jours, le forum STI a pour thème « La science, la technologie et l’innovation pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19 tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ».

Avec ce forum, l’ECOSOC est perçu comme « l’intermédiaire » facilitant le partage des connaissances et l’action coordonnée, pour un avenir plus équitable et durable, a noté Mme Stoeva.  C’est pourquoi elle a appelé à la collaboration permanente entre scientifiques, décideurs, société civile et organisations diverses, notamment en créant des connexions et coalitions pour mieux utiliser les STI en vue d’atteindre les ODD, dont la réalisation a été entravée par les multiples crises de ces trois dernières années, dont la pandémie de COVID-19. Le forum sur les STI est donc l’occasion de stimuler l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes, « ancrées dans la science », pour concevoir et mettre en œuvre des transformations en faveur du développement durable. 

La Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations a confirmé cet espoir placé en la science, la technologie et l’innovation.  Mme Maria Francesca Spatolisano, qui s’exprimait au nom du Secrétaire général de l’ONU, a constaté qu’à mi-chemin de l’échéance de 2030, nous ne sommes pas sur la bonne voie pour l’atteinte des ODD: sur les 146 cibles établies pour ces objectifs, à peine 12% sont sur la bonne voie et environ 30% n’ont pas progressé ou sont même en-deçà de leur niveau de 2015.  Elle a donc misé sur les STI pour avancer vers la réalisation des ODD.

Comme d’autres orateurs des discussions du jour, Mme Spatolisano a néanmoins appelé à la prudence avec les STI dont l’utilisation peut dévider du bien commun.  Il y a des risques inhérents à toutes les avancées humaines, a-t-elle noté, ajoutant que ces risques sont aujourd’hui amplifiés par l’ère du numérique.  Autre inquiétude exprimée aujourd’hui: la fracture entre les pays développés et ceux qui n’ont pas encore toute la capacité nécessaire pour en tirer parti au mieux.  La Sous-Secrétaire générale a donc appelé à renforcer la solidarité mondiale avant de souligner également l’importance de la pleine participation à ce secteur de la moitié de la population mondiale -les femmes et les filles- et des jeunes.

Face à l’éventualité de nouvelles pandémies, le Président de l’Assemblée générale a estimé qu’en intégrant l’innovation, la technologie et le numérique dans notre mode de pensée, il sera possible d’« être agile, au lieu d’être fragile ».  M. Csaba Kórösi a en outre plaidé pour des politiques d’innovation scientifiques et technologiques « ambitieuses ».  Il faudra aussi renforcer les interactions entre la science et la société, a ajouté le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, soucieux de voir transmettre aux décideurs des « connaissances essentielles » en matière scientifique.  M. Li Junhua a saisi cette occasion pour saluer le travail du Groupe des 10 hauts représentants chargés d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies. 

Le rapport du Groupe, qui a été présenté, laisse voir que l’accès à Internet est une nécessité absolue et non un luxe si nous voulons atteindre les ODD.  Une augmentation de 10% du taux de connectivité dans les pays en développement se traduirait par une augmentation d’un point et demi de leur produit intérieur brut (PIB), souligne le rapport qui comporte six propositions et 11 recommandations.  Parmi elles, l’augmentation des financements pour la science, la technologie et l’innovation; la création d’une banque mondiale de données sur l’innovation et la technologie; la démocratisation d’Internet 3.0 d’ici à 2027; le renforcement des capacités mondiales sur l’intelligence artificielle avec la création d’un centre de formation dédié; ou encore la création d’un programme onusien unique pour favoriser la coopération dans ces domaines. 

La session ministérielle a permis de souligner les atouts cruciaux des STI dans tous les domaines, notamment l’éducation et les énergies renouvelables, comme l’a indiqué le Ministre de l’éducation, des sciences et des sports de la Slovénie.  La Conseillère pour la science et la technologie auprès du Secrétaire d’État des États-Unis a confirmé que les chercheurs du monde n’avaient jamais eu autant d’outils et de données entre leurs mains, grâce au développement de l’industrie des données satellites notamment.  Elle a insisté sur l’importance d’une collaboration scientifique « de bonne foi », ouverte et diverse, équitable et « inclusive ». La Chine a pour sa part déploré la transformation des STI en « armes » par « certains pays » qui s’adonnent à des mesures coercitives unilatérales et au harcèlement. 

Mais ce sont des appels à la solidarité qui ont été surtout entendus, le Groupe des 77 et la Chine (G77), par la voix de Cuba, appelant ainsi la communauté internationale à renforcer le partage des fruits de l’innovation, ce qui nécessite « un système de gouvernance » et une augmentation de l’aide publique au développement (APD) dédiée au secteur des STI.  Des partenariats sont essentiels, a-t-on aussi entendu, notamment de la part du Ministre de l’enseignement supérieur, des sciences et de l’innovation d’Afrique du Sud, M. Bonginkosi Emmanuel Nzimande, qui a plaidé pour une transition technologique juste.

Le forum poursuivra ses travaux demain, jeudi 4 mai, à partir de 10 heures. 

HUITIÈME FORUM DE COLLABORATION MULTIPARTITE SUR LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION AU SERVICE DE LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Thème: « La science, la technologie et l’innovation pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19 tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 »

Déclarations d’ouverture

Mme LACHAREVA STOEVA, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a tout d’abord annoncé le thème de ce forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation (STI) au service de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD): « La science, la technologie et l’innovation pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19 tout en avançant sur la voie d’une mise en œuvre intégrale du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ».  Les multiples crises de ces trois dernières années ont porté un coup majeur aux efforts de mise en œuvre des ODD, a rappelé la Présidente en faisant valoir que, dans ce contexte, le forum sur les STI est l’occasion de stimuler l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes, « ancrées dans la science », pour concevoir et mettre en œuvre des transformations en faveur du développement durable.  Le forum offre également un espace permettant de favoriser une collaboration plus étroite entre les décideurs politiques et la communauté scientifique, a-t-elle ajouté, voyant l’ECOSOC comme « l’intermédiaire » destiné au partage des connaissances et à l’action coordonnée, pour un avenir plus équitable et durable. 

Le suivi et l’examen du Programme 2030 lors du forum politique de haut niveau annuel de l’ECOSOC est aussi l’un de ces espaces permettant d’embrasser l’interdépendance des trois dimensions du développement durable (environnementale, sociale et économique), notamment par le biais d’examens nationaux volontaires des progrès réalisés dans chaque ODD, a poursuivi la Présidente.  Elle a dit apprécier l’attention portée par les délégations aux ODD faisant l’objet d’un examen dans le cadre du forum politique de haut niveau cette année, à savoir l’ODD 6 (eau propre et assainissement), l’ODD 7 (énergie propre et abordable), l’ODD 9 (industrie, innovation et infrastructure), l’ODD 11 (villes et communautés durables) ainsi que l’ODD 17 (partenariat pour la réalisation des objectifs).  Des liens évidents entre ces ODD appellent à des actions transversales, a plaidé Mme Stoeva en citant à titre d’exemples le rôle d’un approvisionnement constant en énergie pour le développement des capacités de fabrication et l’augmentation de l’emploi dans le secteur manufacturier; le rôle de la capacité industrielle et d’une infrastructure solide pour l’eau propre et l’assainissement; ou encore, le rôle des partenariats pour une vie urbaine durable. 

Pour Mme Stoeva, les délibérations du présent forum serviront aussi de tremplin pour l’examen à mi-parcours lors du prochain Sommet sur les ODD, qui se tiendra en septembre.  Elle a misé sur ce forum, celui de juillet ainsi que d’autres événements de l’ECOSOC pour servir de plateformes afin d’identifier des actions concrètes et renforcer le multilatéralisme.  Le but est d’obtenir des résultats concrets en matière de développement durable et de résilience, résultats « dont le monde a tant besoin », a conclu la Présidente de l’ECOSOC. 

La Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, Mme MARIA FRANCESCA SPATOLISANO, s’est exprimée au nom de M. António Guterres, Secrétaire général de l’ONU. Elle a constaté que nous sommes à mi-chemin de l’échéance de 2030 et que nous ne sommes pas sur la bonne voie pour l’atteinte des ODD: sur les 146 cibles établies pour ces objectifs, à peine 12% sont sur la bonne voie et environ 30% n’ont pas progressé ou sont même en-deçà de leur niveau de 2015.  La science, la technologie et l’innovation offrent la base dont nous avons besoin pour avancer vers la réalisation des ODD, a-t-elle souligné.  Elle a cependant tenu à préciser que ces trois atouts peuvent aussi avoir des aspects négatifs quand ils ne sont pas utilisés pour le bien commun. Il y a des risques inhérents à toutes les avancées humaines, a-t-elle noté, ajoutant que ces risques sont aujourd’hui amplifiés par l’ère du numérique.  Il faut donc renforcer la solidarité mondiale pour s’assurer que tous les pays aient les capacités de se servir des innovations, a-t-elle plaidé. Et pour ce faire, il faut s’assurer que les écosystèmes technologiques soient inclusifs et plus représentatifs.  Les gens qui bénéficient le moins d’innovations, notamment au sein des pays en développement, doivent donc être soutenus par des initiatives multilatérales, y compris par le biais d’échanges entre pays et la mise en place de politiques fiscales appropriées, a-t-elle recommandé. 

Sans la pleine participation de la moitié de la population mondiale -les femmes et les filles- au secteur des STI, nous perdrons la moitié des créateurs potentiels, innovateurs et scientifiques, ains que leur contribution essentielle à la résolution des grands problèmes mondiaux, a prévenu Mme Spatolisano.  Elle a souhaité voir réduire la fracture entre les sexes dans ce domaine, en agissant tout au long du cycle de l’éducation, de l’emploi, de l’entrepreneuriat et en s’appuyant sur un leadership déterminé.  Il faut aussi puiser dans le talent des jeunes du monde entier qui travaillent dans leur communauté, a-t-elle encore invité.  Les innovations locales sont essentielles pour résoudre les problèmes locaux de la façon la plus efficace, a-t-elle relevé.  Elle a conclu en appelant à la collaboration permanente entre scientifiques, décideurs, société civile et organisations diverses, notamment en créant des connexions et coalitions pour mieux utiliser la science, la technologie et l’innovation pour atteindre les ODD. 

M. CSABA KŐRÖSI, Président de la soixante-dix-septième session de l’Assemblée générale, a souligné la nécessité de mobiliser la science, la technologie et l’innovation en vue de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Si nous voulons réussir la transition vers un monde plus durable, nous avons besoin de politiques d’innovation, scientifiques et technologiques ambitieuses, a dit le Président.  Il a estimé que ce forum peut participer à la création d’un mécanisme de validation scientifique permettant d’améliorer les engagements pris en vue de réaliser les objectifs de développement durable (ODD).  Il a insisté sur les vulnérabilités révélées par la pandémie de COVID-19, en rappelant qu’il y a une chance sur quatre qu’une maladie aussi sévère et pandémique que la COVID-19 n’émerge dans les 10 prochaines années.  « Pouvons-nous à l’ONU dire que nous serons prêts? »

Le Président a estimé qu’en intégrant l’innovation, la technologie et le numérique dans notre mode de pensée, il sera alors possible d’être agiles, au lieu d’être fragiles.  « Nous pouvons nous assurer que nos sociétés seront plus inclusives, nos systèmes plus intégrés et nos économies plus résilientes face aux chocs de demain. »  Alors que le Sommet sur les ODD se profile, faisons en sorte que ce forum et le forum politique de haut niveau en juillet soient les tremplins pour effectuer le « saut quantique » dont nous aurons besoin en septembre, a conclu le Président.

M. BONGINKOSI EMMANUEL NZIMANDE, Ministre de l’enseignement supérieur, des sciences et de l’innovation de l’Afrique du Sud, a rappelé que la COVID n’avait pas seulement tué des millions de personnes dans le monde, mais qu’elle avait aussi détruit de nombreux moyens de subsistance. Si la mise en œuvre des ODD était lente avant la pandémie, il faut être d’autant plus inquiet dans la course menée pour atteindre les ODD d’ici à 2030, a-t-il prévenu en regrettant de constater même un recul dans certains secteurs.  Dans ce contexte, à son avis, les STI font figure d’éclaircie: elles ont permis de trouver un vaccin, tandis que la « diplomatie scientifique » a bien fonctionné.  Cependant, le Ministre a rappelé que la croissance économique mondiale ralentit, présageant d’un impact certain sur les STI.  Il a recommandé à la communauté internationale de s’assurer que, même en temps de crise économique, la communauté scientifique et les STI soient soutenus.  Le Ministre a appelé à ne surtout pas réduire les ressources dans ce domaine.

Pour sa part, l’Afrique du Sud fait bon usage des STI pour atteindre les ODD, avec l’adoption d’un plan décennal débuté en 2021, qui coïncide avec son plan de développement national, a fait savoir le Ministre.  Il a précisé que le plan s’applique à certains domaines essentiels: la lutte contre les changements climatiques, avec un accent mis sur le développement des énergies renouvelables, et des investissements importants réalisés dans la production d’énergie à base l’hydrogène; la santé, avec la volonté d’établir un centre pluridisciplinaire consacré à l’étude des pandémies qui servirait à toute l’Afrique, un continent particulièrement touché.  Le Ministre a au passage insisté sur les efforts à fournir pour renforcer les capacités locales en matière de développement et de production de vaccins. Enfin, il a recommandé le développement de compétences pour l’avenir, la modernisation de l’industrie et l’utilisation des STI dans le domaine agricole, alors que la sècheresse menace l’Afrique. Il a enfin cité le rôle des nouvelles technologies dans l’extraction minière sudafricaine.  Dans tous ces domaines, les partenariats seront cruciaux, a insisté le Ministre en conclusion, appelant à atténuer les tensions entre pays développés et pays en développement pour une transition juste et un avenir meilleur.

Mme CHARLOTTE WATTS, professeure, Conseillère scientifique en chef et Directrice de la recherche et des preuves au Ministère des affaires étrangères du Commonwealth et du développement du Royaume-Uni, a rappelé que la plupart des grandes avancées de l’humanité ont été alimentées par les technologies et l’innovation.  Elle a souligné comment les recherches et le partage de celles-ci ont permis au monde scientifique de comprendre rapidement comment aborder la pandémie de COVID-19 et aider à la prise de décisions éclairée des politiques.  Même si dans le même temps, le monde a été confronté au défi de la désinformation et du doute.  La bonne nouvelle est que le monde connaît une révolution avec la bio-ingénierie qui pourrait transformer la planète, a-t-elle lancé.  Étant donné que les bénéfices du progrès ne sont pas tangibles pour tous, Mme Watts a demandé aux scientifiques de ne point se refermer sur eux et de miser sur la coopération afin de pouvoir atteindre les ODD. 

Présentation du rapport du Groupe des 10 hauts représentants chargés d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies

Mme QUARRAISHA ABDOOL KARIM, Ambassadrice d’ONUSIDA pour les adolescents et le HIV, a indiqué que le rapport est disponible sur le site du forum.  L’accès à Internet est une nécessité absolue et non un luxe si nous voulons atteindre les ODD, a-t-elle insisté.  Elle a indiqué qu’une augmentation de 10% du taux de connectivité dans les pays en développement se traduirait par une augmentation d’un point et demi de leur PIB.  La pandémie a montré combien nous sommes connectés mais aussi combien nous sommes fragiles, a -t-elle dit, en rappelant la « pandémie de désinformation » observée à ce sujet.  « Il faut se préparer à de nouvelles menaces sanitaires. ».  Elle a appelé à promouvoir la transition verte, le monde ayant pris du retard.  Enfin, elle a précisé que le rapport précité comprend 6 propositions et 11 recommandations.

Mme CHERRY MURRAY, de l’Université de l’Arizona (États-Unis), a détaillé ces propositions qui sont, de son propre aveu, complexes.  Elles visent à renforcer les efforts nationaux en vue de réaliser le Programme 2030, a-t-elle précisé.  Parmi celles-ci figurent l’augmentation des financements pour la science, la technologie et l’innovation; la création d’une banque mondiale de données sur l’innovation et la technologie; la démocratisation d’Internet 3.0 d’ici à 2027; la promotion de biens publics mondiaux; ou bien encore le renforcement des capacités mondiales sur l’intelligence artificielle avec la création d’un centre de formation dédié.  La création d’un programme onusien unique pour favoriser la coopération dans ces domaines est également avancée, a-t-elle dit.

Séance ministérielle

Le modérateur de la séance, M. TOM WOODROFFE (Royaume-Uni), a rappelé que le forum sur les STI rassemble non seulement les États Membres, mais aussi la société civile, les chercheurs, les start-ups, les multinationales, les populations autochtones et les ingénieurs.  Il a invité les délégations à « s’interpeller les uns les autres », mais aussi à « tendre la main à de nouveaux partenaires » avec lesquels elles n’auraient peut-être pas envisagé de collaborer. 

Le premier intervenant, M. LI JUNHUA, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a expliqué dans un message vidéo que si rien n’est fait, les ODD ne seront pas atteints en 2030.  Si rien n’est fait, plus de 700 millions de personnes demeureront dans la pauvreté extrême à cette date et que les énergies renouvelables ne constitueront qu’une infime partie du mix énergétique mondial.  Appelant à un « sursaut », comme demandé par le Secrétaire général António Guterres à tous les chefs d’État et de gouvernement, il a rappelé que « le potentiel des STI est immense » et a encouragé à renforcer les capacités numériques à tous les niveaux de la société, en éliminant les obstacles institutionnels.  Il faudra aussi, selon lui, renforcer les interactions entre la science et la société, et transmettre aux décideurs des « connaissances essentielles » en matière scientifique. À son avis, le travail du Groupe des 10 hauts représentants chargés d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies est un autre moyen d’atteindre ces objectifs.

Mme ANA CRISTINA AMOROSO DAS NEVES, Présidente de la Commission de la science et de la technique au service du développement (CSTD), a présenté quant à elle les grandes lignes des travaux menés par la Commission de la science et de la technique au service du développement (CSTD) pour avancer sur les politiques publiques en matière de STI.  Elle a souligné les capacités inégales entre région en matière de développement d’énergies renouvelables.  En matière d’eau propre et d’assainissement, la tâche est rendue compliquée par ces mêmes inégalités, mais aussi par les changements climatiques, a-t-elle relevé, en estimant elle aussi que les STI jouent un rôle essentiel pour atteindre les ODD. 

Face aux difficultés à se relever de la COVID-19, M. SAIDZODA RAHIM HAMRO, Ministre de l’éducation et de la science du Tadjikistan, a souligné le rôle des STI dans la réduction des conséquences de la pandémie, notamment dans le domaine de l’éducation.  Le Tadjikistan et ses partenaires ont ainsi mis en place des politiques pour soutenir ce secteur, avec des cours en ligne et plus de 2 000 cours de programmes scolaires enregistrés par vidéo.  Le pays a également développé, avec l’UNICEF, des outils pour réduire les conséquences négatives de la COVID-19.  Le potentiel énorme des STI pour s’adapter aux crises, démontré pendant la pandémie, a été ressenti également dans le commerce en ligne et le service public, a ajouté M. RENATO SOLIDUM, JR., Secrétaire à la science et à la technologie au Ministère de la science et de la technologie de la République des Philippines.  Il a cependant déploré les inégalités continuant d’augmenter entre pays et souligné le besoin de s’adapter au rythme rapide de l’évolution des STI.

Les STI sont en outre cruciales pour réduire la dépendance aux énergies fossiles et pour le développement des énergies renouvelables, a poursuivi M. IGOR PAPIČ, Ministre de l’éducation, des sciences et des sports de la Slovénie.  Pour lui, les États Membres ne s’en sortiront qu’avec une approche intégrée des STI à tous les pans de la société, et en mettant l’accent sur l’éducation.  Le Sultanat d’Oman travaille dur pour devenir un pays technologiquement avancé d’ici à 2040, a enchaîné M. SAIF BIN ABDULLAH AL HADDABI, Sous-secrétaire au Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation du Sultanat d’Oman, en parlant d’un « interventionnisme soutenu » vers les STI et l’éducation.  À cet égard, il a mis en avant un programme de coopération culturelle développé par Oman: 175 bourses ont été délivrées à des étudiants étrangers pour qu’ils viennent étudier dans le pays.

Mme ALLISON SCHWIER, Conseillère pour la science et la technologie auprès du Secrétaire d’État des États-Unis, a confirmé que les chercheurs du monde n’avaient jamais eu autant d’outils et de données entre leurs mains, grâce au développement de l’industrie des données satellites, notamment.  Appelant à un écosystème scientifique et environnemental doté d’« un accès aux données libre et sûr », elle a insisté sur l’importance d’une collaboration scientifique « de bonne foi », ouverte et diverse, équitable et « inclusive ». 

La Chine a pour sa part déploré la transformation de STI en « armes » par « certains pays » qui s’adonnent à des mesures coercitives unilatérales et à du harcèlement.  Elle a appelé à s’ériger contre ce genre d’actions.  La Chine s’évertue quant à elle à aider les autres pays en développement à renforcer leurs capacités, en créant diverses initiatives pour le transfert d’énergies renouvelables et pour partager le fruit des STI avec tous les États Membres.  Le Groupe des 77 et la Chine (G77), par la voix de Cuba, a d’ailleurs appelé la communauté internationale dans son ensemble à « absolument » renforcer la solidarité et le partage des fruits de l’innovation.  « Un système de gouvernance apparaît essentiel pour ce faire. »  Le G77 a aussi noté que la vitesse de connexion dans les pays en développement, insuffisante, renforce le fossé entre pays.  Louant la coopération Sud-Sud, le Groupe a interpellé les pays développés en leur demandant d’augmenter leur aide publique au développement (APD) en matière de technologie et d’innovation, et réclamé davantage de transfert de technologies. 

Dans ce même esprit, l’Algérie a dit continuer d’appuyer les pays en développement dans l’installation de la fibre optique pour promouvoir le développement numérique en Afrique.  Elle a en outre salué la proposition du Secrétaire général de mettre en place un Pacte numérique mondial d’ici à 2024.  Membre de la CSTD, l’Algérie est consciente du rôle des STI dans l’atténuation des conséquences de la pandémie et elle a appelé à agir pour renforcer les liens entre communauté scientifique et décideurs.  Le Brésil s’est pour sa part inquiété des conséquences préjudiciables qu’entraînerait un développement incontrôlé des nouvelles technologies pour les travailleurs, appelant à protéger ceux-ci.  Les STI doivent avoir une perspective d’équité sociale et de respect des cultures, a ensuite exigé la Bolivie, pays dont la politique est basée sur les énergies renouvelables et sur les connaissances ancestrales de peuples autochtones. 

Au Maroc, les STI sont considérées comme une valeur essentielle et le pays s’évertue à réduire la fracture numérique, avec des investissements dans l’enseignement supérieur, ainsi que dans les technologies de l’information et des communications (TIC), a témoigné la délégation. Elle a dit que le secteur privé prend les devants et que le Gouvernement marocain soutient ses entreprises, avec la construction de « technoparcs » dans les grandes villes du pays.  Enfin, la République dominicaine a confirmé que la numérisation est devenue une condition sine qua non de la croissance. Cette numérisation se veut en République dominicaine « large, fluide et intégrale », notamment dans le domaine de la santé.  Le but est de décongestionner le système sanitaire du pays, qui a vu la mise en place, depuis peu, d’un recueil de données numériques ventilées ciblant mieux les besoins de la population.

Session 1: Renforcer la confiance dans la science et la technologie

Cette session, présidée par Mme MATHU JOYINI, (Afrique du Sud), a abordé l’un des principaux mandats du forum STI, à savoir l’examen des rapports entre la science et la politique.  Les intervenants ont ainsi souligné la nécessité de s’appuyer sur des faits et sur une compréhension scientifique solide pour l’élaboration des politiques pour résoudre les défis interconnectés et complexes de notre temps.  Parmi ces défis, le dernier en date, la pandémie de COVID-19, a démontré l’importance et le potentiel de la science pour trouver des solutions, tout en instaurant la confiance en luttant contre la désinformation. 

Le problème est que les scientifiques et les politiques travaillent souvent en vase clos, a lancé d’emblée la Slovénie. Pourtant, la confiance entre ces deux groupes d’acteurs est essentielle, a indiqué la modératrice, Mme QUARRAISHA ABDOOL KARIM, qui est Directrice scientifique associée à CAPRISA d’Afrique du Sud, enseignante à l’Université de Columbia aux États-Unis, et coprésidente du Groupe des 10 hauts représentants chargés d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies.  Il faut donc amorcer des changements de paradigmes, par exemple en informant mieux la société, a argué le représentant de l’Union internationale des télécommunications (UIT).  C’est d’ailleurs l’un des chantiers de l’Union qui s’attèle à fédérer les initiatives des 193 États qui en sont membres.  Elle s’évertue ainsi à renforcer la confiance en les technologies de l’information et des communications (TIC) en prônant plus de dialogue et un système ouvert.

M. JOEL NETSHITENZHE, Directeur exécutif de Mapungubwe Institute for Strategic Reflection (MISTRA), a fait remarquer que les partenariats sociaux sont importants pour bâtir cette confiance.  Pour faire passer les messages de la science, il a recommandé de se servir des plateformes de communication modernes et des célébrités, au-delà des médias traditionnels.  De plus, il a demandé de réglementer à présent le domaine de l’intelligence artificielle, tandis que Mme CARY FUNK, Directrice de Science and society research, Pew Research Center, a redouté les risques de voir cette intelligence artificielle renforcer les inégalités entre et au sein des sociétés. La panéliste, qui intervenait par visioconférence, a dit que la vraie question reste celle-ci: « Comment communiquer en temps de crise? ».  Elle a pris l’exemple de la pandémie de COVID-19 pour expliquer comment même les moins sceptiques ont commencé à douter de la véracité des informations transmises par les décideurs. 

La science est affaiblie par la désinformation, les groupes d’intérêts et l’ignorance, a reconnu M. PETER GLUCKMAN, Président du Conseil international des sciences.  Dans son message vidéo, il a mis en avant la perte de confiance envers les élites et les experts.  Pour lui, la confiance doit être méritée, ce qui n’est pas facile dans un environnement de désinformation et de conspiration.  Le représentant de Global vision India Foundation a fait valoir que la science vient dissiper les doutes et ne prend pas partie dans sa quête de vérité. Il a expliqué comment son organisation avait mis en route une campagne de communication afin de convaincre le public d’adhérer à la vaccination contre la COVID-19.  La Fédération de Russie a aussi évoqué la baisse de confiance en la science au moment de la pandémie de COVID-19.  L’une des parades mises en œuvre par le Gouvernement russe fut de diffuser des informations en ligne et dans les réseaux sociaux par le biais d’experts de la santé.  Pour la Chine, la confiance s’acquiert par l’unité et la coopération et non par la confrontation.  Le délégué a insisté sur le multilatéralisme et a salué le rôle de chef de file des Nations Unies dans le domaine des STI. 

Nous parlons tous d’innovation, mais il faut commencer par mener des recherches pour mieux comprendre ce qui fait que l’humanité va de crise en crise, a suggéré Mme ANA-MARIA CETTO, professeure à l’Institut de Physique de la Faculté des Sciences de l’Université nationale autonome du Mexique.  Selon l’enseignante, il serait opportun de mener des recherches pluridisciplinaires, en impliquant les spécialistes de sciences sociales pour essayer de comprendre comment nos sociétés produisent des crises. Il faut aussi changer le système de pensée afin de mettre fin au système de domination et au colonialisme, a-t-elle souhaité.  Les pays les moins avancés (PMA) ont la possibilité de combler leur retard technologique en faisant un bond essentiel, mais il faut déjà mettre de côté la désinformation, a expliqué M. TAFFERE TESFACHEW, Directeur général par intérim de la Banque de technologies des Nations Unies pour les (PMA).  Selon l’expert, il est important de bien expliquer le bien-fondé des technologies aux bénéficiaires afin de faire tomber les doutes et renforcer la confiance.  En fin de compte, il est question de travailler avec des partenaires en qui on a pleinement confiance, a résumé M. SCOTT C. RATZAN, Directeur exécutif de Business Partners for Sustainable Development

Session 2: des solutions systémiques pour progresser dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable 6, 7 et 9

Les orateurs ont détaillé les solutions systémiques à mettre en œuvre pour progresser dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable 6, 7 et 9, relatifs, respectivement, à l’accès à l’eau, au recours aux énergies renouvelables et à l’innovation.  La nécessité d’un soutien technique et financier accru aux pays en développement a été abondamment mentionnée.

M. KEYWAN RIAHI, International Institute for Applied Systems Analysis, Autriche, a dit que le but de son organisation est de fournir des conseils sur la mise en œuvre des ODD 6, 7 et 9, laquelle est bien trop lente.  Deux milliards de personnes dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable, tandis que 800 millions n’ont pas accès à l’électricité.  Il faut des solutions systémiques et une coopération renforcée, a-t-il dit, en prenant l’exemple du bassin de l’Indus que partagent la Chine, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde.  « Il est crucial d’accroître les infrastructures de ce bassin et les investissements nécessaires doivent être considérablement augmentés. »  Enfin, il a présenté le réseau EDITS qui rassemble des scientifiques chargés d’appuyer l’élaboration des politiques environnementales et climatiques. 

De son côté, Mme MÓNICA GUTIÉRREZ, ingénieure en énergies renouvelables, Mott Macdonald, Colombie, a détaillé l’appui fourni aux peuples autochtones de la Colombie pour la désalinisation de l’eau. Il est crucial de comprendre les systèmes de pensée et les cosmogonies de ces peuples afin que l’appui apporté soit accepté, a-t-elle dit, en soulignant la nécessité d’une appropriation des solutions proposées.

M. RAO NARASIMHA, Yale University, États-Unis, a rappelé que le développement de la production agricole pour répondre à l’insécurité alimentaire n’est pas sans conséquence néfaste, comme l’émission de gaz à effet de serre et l’épuisement des nappes phréatiques.  La solution serait une diversification de la production. Il a rappelé que 2,5 milliards de personnes cuisinent à l’aide de l’énergie fossile, alors que l’électricité est plus propre.  Mais les besoins en électricité sont considérables et l’offre n’est pas suffisante face à une telle demande, a-t-il dit, en appelant, lui aussi, au développement des infrastructures nécessaires.

Mme CATARINA BAPTISTA, ingénieure hydraulique, Belgique, a rappelé les graves sécheresses qui ont frappé la Belgique l’an dernier, dans un contexte de réchauffement climatique.  Elle a passé en revue les politiques mises en place pour y remédier, en notant la création de jardins retenant les eaux de pluie et le recyclage des eaux usées.  Si le financement est crucial, la gouvernance dans ce domaine est tout aussi essentielle, a-t-elle dit, en soulignant l’importance d’associer les jeunes à la prise de décisions.

M. SHLOMI KOFMAN, de l’autorité chargée de l’innovation d’Israël, a, lui aussi, passé en revue les solutions systémiques mises en place dans son pays face aux défis énergétique, hydrique et climatique. Un milliard de dollars a ainsi été investi pour financer la recherche universitaire pour la période 2022-2027. Nous œuvrons aussi à l’avènement d’une « agriculture bio-résiliente », a-t-il dit.

Le recyclage du carbone est une solution face au défi climatique, a déclaré M. NOBUO FUKUDA, de Carbon Recycling Fund Institute, Japon.  Il a déclaré que 10 millions de yens ont été octroyés à 16 projets en vue d’un recyclage du carbone.  Les jeunes entrepreneurs dans ce domaine doivent voir leurs capacités renforcées et c’est précisément l’un des axes de notre politique, a-t-il dit.  Des puits à carbone vert et à carbone bleu ont également été créés.

Mme ISMAHANE ELOUAFI, de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a appelé à réfléchir aux synergies entre ODD. Elle a souligné l’importance d’une bonne gouvernance pour lutter contre le stress hydrique, en y impliquant notamment les petits agriculteurs.  Elle a aussi exhorté à remédier à la disparition d’espèces, de plantes et de bactéries et à faire le pari des énergies renouvelables.  Il est crucial de produire des denrées alimentaires qui soient véritablement nourrissantes, a-t-elle dit.

M. JEAN-PIERRE CAYOL, de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a rappelé que l’énergie nucléaire est « propre » en ce qui concerne les émissions carbone, avant de souligner la pertinence des techniques nucléaires.  L’AIEA et la FAO gèrent cinq laboratoires où des solutions technologiques sont élaborées et partagées avec les pays, a-t-il fait savoir.  Il a expliqué que les techniques nucléaires permettent d’identifier les nappes phréatiques, comme dans la région du Sahel, de garantir la sécurité des exportations comme celles de miel et d’huile d’olive, ou encore d’identifier les maladies, comme la COVID-19.

Dans le débat qui a suivi, les pays ont détaillé leur action, à l’instar de la Fédération de Russie, qui a mentionné le programme « megagrants » pour le financement de projets.  Il a noté l’apport des « jeunes scientifiques russes » à la recherche, notamment médicale.  Le Népal a demandé un soutien financier et technique accru pour aider les pays les moins avancés à améliorer l’accès à l’eau potable.  « Il est crucial de remédier aux inégalités entre les pays si nous voulons atteindre les ODD 6, 7 et 9 », a appuyé le délégué du Brésil.  L’Union internationale des communications (UIT) a enfin demandé une meilleure participation des pays en développement à l’élaboration des normes dans le domaine des communications.

Session 3: Penser à l’échelle globale, agir à l’échelle locale - l’innovation et les infrastructures technologiques pour des villes plus intelligentes et inclusives 

Cette session, présidée par Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud), a exploré l’innovation et les infrastructures technologiques destinées à l’espace urbain, alors que plus de 50% des humains vivent dans des villes, un pourcentage destiné à augmenter dans les décennies à venir.  Cette urbanisation rapide pourrait avoir le potentiel d’améliorer la vie de milliards de personnes dans le monde, en particulier si elle est associée aux avancées technologiques. 

La tension entre planification technologique et souci d’impliquer ces citoyens toujours plus nombreux a constitué le fil rouge de cette table ronde.  Le modérateur, M. TALIS JUHNA, Recteur pour la recherche, professeur et Président du conseil consultatif du Conseil letton des sciences à l’Université technique de Riga en Lettonie, a d’emblée posé les termes du débat en rappelant que les villes ne peuvent être résumées à des infrastructures.  Les villes sont peuplées d’humains qui devraient participer plus activement à leur aménagement.  Pour lui, le concept de « villes intelligentes » ne comprend pas seulement les nouvelles technologies, mais la manière dont elles améliorent vraiment la qualité de vie. 

Pour cela, les instituts de recherches et les universités doivent être mis à contribution, a appuyé M. AXEL GRAEL, maire de Niterói, banlieue de Rio de Janeiro (Brésil).  Avec l’arrivée des « emplois verts », de nombreuses opportunités vont se présenter, a-t-il observé tout en demandant de veiller à ce que ces évolutions soient inclusives et à ne pas négliger les petites et moyennes entreprises.  Pour sa part, le Gouvernement brésilien, avec des années de recul sur le plan environnemental, va désormais reboiser et lutter contre la déforestation.  Les STI seront cruciales dans cet effort, qui devra impliquer la société civile et les agriculteurs.  La durabilité et l’inclusion sociale sont l’avenir, a-t-il soutenu.  Dans le même esprit, Mme LOUISE BEDSWORTH, ancienne Présidente du Conseil pour la croissance stratégique, Directrice exécutive du Centre pour le droit, l’énergie et l’environnement de la faculté de droit de l’université de Californie, Berkeley (États-Unis), a appelé à bien concevoir les programmes basés sur les STI pour que ces dernières soient bel et bien accessibles aux citoyens.  Elle a donné un exemple concret avec un programme californien qui mobilise les citoyens à l’échelle locale via une loi de l’État, dont l’objectif est de maximiser la santé climatique et environnementale dans des quartiers paupérisés et marginalisés.  Dix communautés ont bénéficié de ces projets, dont l’une dans la ville de Fresno, en Californie centrale.  Une ville qui se situe en milieu agricole souffrant de pollution, où évoluent des communautés marginalisées.  Elle a cité l’établissement d’un jardin communautaire et d’un hub communautaire à Fresno mais aussi dans 17 autres localités californiennes.  L’accent y est mis sur les STI, avec le déploiement de panneaux photovoltaïques sur les toits, a-t-elle ajouté en soulignant que les partenaires communautaires font office de « messagers indispensables » pour appliquer ce programme.

Une autre expérience concrète a été signalée par Mme NZAMBI MATEE, fondatrice de l’entreprise Gjenge Makers au Kenya. Participant par vidéoconférence depuis Nairobi, elle a présenté son entreprise, une start-up, qui combat les déchets plastiques en les transformant en briques.  Sachant que chaque jour, Nairobi produit 500 tonnes de déchets, elle a expliqué que Gjenge Makers recycle deux sortes de déchets, ceux de l’industrie et les déchets ménagers.  Le plastique est un problème mondial, pas seulement kenyan, a-t-elle reconnu.  Elle a précisé que l’objectif de l’entreprise est de recycler en produisant de la valeur, ce qui montre en même temps que recycler peut-être profitable.  Gjenge signifie « Bâtis-toi toi-même » en swahili, a-t-elle indiqué avant d’annoncer que, forte de son succès, l’entreprise compte prochainement s’implanter au Cameroun, au Nigéria et en Ouganda.  L’intervention a été vivement applaudie et louée par le modérateur pour « sa mise en valeur de l’économie circulaire ».

La session s’est poursuivie par une discussion interactive, avec une première intervention de M. TAIKAN OKI, professeur à l’Université de Tokyo, Japon, qui a fait part de ses recherches sur une ville du futur où l’intelligence artificielle permettrait à la ville d’être multipolaire et de s’articuler autour de plusieurs « sphères cybernétiques », le tout au service des citoyens.  Mme SHULANG FEI, de l’Académie chinoise des sciences agricoles, a ensuite exprimé ses craintes face à la situation critique que connaissent les grandes villes du monde.  Elle a fait part de la collaboration entre le Gouvernement et les instituts de recherches, en Chine, pour développer une vision systémique de la planification urbaine basée sur les STI, ainsi que pour arriver à un approvisionnement alimentaire optimal de chaque ville, en partenariat avec les agriculteurs. 

Spécialisé dans les solutions pilotées par les communautés, M. JASON CHENG, urbaniste représentant le Réseau de solutions pour le développement durable, a apporté une sensibilité différente à la discussion, en appelant à la prudence vis-à-vis des STI.  Selon lui, les technologies sont trop perçues comme des solutions miracles et leurs effets délétères sont facilement ignorés.  Elles permettent parfois de détourner le regard des problèmes graves, fondamentaux, comme le sous-investissement chronique.  M. Cheng a formellement mis en garde que les nouvelles technologies ont une « approche condescendante », du haut vers le bas, étant initiée par les groupes de la société les plus puissants, et ne laissant pas souvent leur mot à dire aux communautés visées par les programmes.  « Amener des capteurs intelligents ne règlera pas le problème du sous-investissement », a-t-il prévenu. Plus enthousiaste, Mme GABRIELA ALVARADO, directrice nationale pour la République dominicaine, du Programme alimentaire mondial (PAM), a pris l’exemple de son pays pour prouver que les STI pouvaient efficacement placer les communautés au cœur des solutions tout en luttant contre les changements climatiques.  Lors du dernier cyclone ayant frappé l’île, des drones ont survolé les zones touchées, recueillant des informations et des données, aidant les premiers secours et permettant de bien cibler l’aide humanitaire.  Enfin, le Programme alimentaire mondial (PAM) s’est joint à l’appel de la communauté internationale pour réduire la fracture numérique, en engageant davantage d’investissements.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité examine de nouvelles approches pour restaurer la confiance « érodée » dans un système international « sous tension »

9315e séance - matin & après-midi
CS/15273

Le Conseil de sécurité examine de nouvelles approches pour restaurer la confiance « érodée » dans un système international « sous tension »

À l’initiative de sa présidence suisse, dont c’était le premier événement phare de ce mois de mai, le Conseil de sécurité a tenu aujourd’hui un débat public consacré aux moyens de « Renforcer la confiance pour établir une paix durable ».  Pour la Suisse, entrée à l’ONU il y a 20 ans et qui assume pour la première fois la présidence du Conseil, il s’agissait d’examiner et renforcer les approches du Conseil de sécurité en matière d’instauration de la confiance, afin de favoriser une paix durable.  Le débat intervenait aussi en prélude aux délibérations que devraient bientôt entamer les États Membres de l’ONU, sur la proposition du Secrétaire général relative à un « Nouvel Agenda pour la paix », qui s’appuiera sur les principes de confiance, d’universalité et de solidarité. 

Les quelque 70 délégations qui sont intervenues ont donc cherché à identifier des pistes de réflexion pour restaurer une confiance « mise à l’épreuve » entre les différents acteurs et institutions qui œuvrent pour la paix tout en s’accordant sur la nécessité d’un nouveau « contrat social » ancré sur les droits humains.  L’instauration de la confiance a été examinée sous trois angles: l’inclusion, les cadres normatifs et les faits. 

Les « droits humains sont essentiels à chaque étape des processus de paix », a plaidé le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Volker Türk, renvoyant à l’ histoire qui « nous met en garde, mais qui nous montre également la voie à suivre » .  Dans son intervention liminaire, le responsable onusien a mis en avant la résolution 2171 (2014) sur la prévention des conflits armés en vue d’initier des actions préventives ciblées, insistant sur la nécessité de restaurer la confiance, principe qu’il a eu l’occasion de vérifier sur le terrain aussi bien en Haïti, en Colombie et plus récemment au Soudan. 

 De fait, a reconnu Mme Funmi Olonisakin, Vice-Présidente du King’s College de Londres et professeure de sécurité, leadership et développement, l’avenir n’est pas linéaire, mais en comprenant la complexité de cadres temporels convergents, on conçoit la paix et la guerre comme deux éléments d’un même continuum , jugeant utile à ce propos de garder à l’esprit la « réalité empirique » des régions et des personnes situées en périphérie des processus décisionnels.   

Le Nouvel Agenda pour la paix a été souvent mentionné.  Pour les Philippines, il devrait être centré sur les personnes et renforcer l’inclusion des femmes, des jeunes et de la société civile dans le cadre du droit international.  L’Union africaine a, pour sa part, souligné l’importance d’optimiser la mise en œuvre des efforts d’intérêts mutuels de l’UA et de l’ONU, y compris dans le cadre du Nouvel Agenda.  En effet, a acquiescé l’Autriche, l’ONU doit s’appuyer beaucoup plus sur les organisations régionales et sous-régionales, notamment grâce au financement durable des actions des partenaires régionaux.  Plusieurs délégations ont aussi mis en avant, au sein du système des Nations Unies, la Commission de consolidation de la paix (CCP), et ont souhaité lui voir jouer un rôle plus important. 

C’est pourquoi ce débat arrive à point nommé, a estimé, Mme Cynthia Chigwenya, jeune ambassadrice de la paix pour l’Afrique australe, pour qui, avec la guerre en Ukraine et la reprise des combats entre factions au Soudan, le Conseil de sécurité est confronté à des difficultés de taille, mais a aussi la possibilité de changer de cap.  De nombreux intervenants ont mis en avant l’importance d’associer les jeunes, ainsi que les femmes et les populations locales, afin de rétablir la confiance de ces groupes dans les institutions, en particulier l’ONU et le Conseil de sécurité.   

Oui, a reconnu le Conseiller fédéral et Ministre des affaires étrangères de la Suisse, le système multilatéral est sous tension, « mais non, il n’est pas en faillite! ».  À ses yeux, c’est ne rien faire qui constituerait le véritable échec. 

Nombre d’intervenants ont insisté sur le fait que c’est d’abord aux États Membres de bâtir la confiance par des institutions et des processus inclusifs, mais aussi par le respect des engagements pris, comme l’ont rappelé tant la Suisse que la France, laquelle n’a pas manqué de dénoncer la violation de ces principes par la Russie à l’occasion de sa guerre d’agression contre l’Ukraine.  La Fédération de Russie a répliqué en se demandant comment parler de confiance dans les circonstances actuelles, face aux actes « perfides » de l’« Occident Global » et à « la guerre par procuration » que mène contre elle l’OTAN. 

La Chine a ainsi expliqué la « grave crise de confiance » que traverse le monde par le mépris pour la Charte des Nations Unies, les politiques de deux poids, deux mesures et l’application sélective du droit international, tous comportements qui nuisent à la confiance dans le système international.  L’Espagne a regretté cette méfiance croissante entre les États Membres, qui transparaît dans les débats et qui nuit à la crédibilité des Nations Unies lorsqu’elles cherchent à faire face aux défis auxquels se heurtent les sociétés actuelles.   

Le Conseil de sécurité a été le premier à être prié de respecter ses propres engagements en mettant en œuvre ses propres résolutions.  Que peuvent attendre du Conseil les populations de Palestine, du Sahara ou encore les Rohingya du Myanmar, se sont demandé certaines délégations.  Pour plusieurs délégations, dont le Portugal, l’Inde, le Liban et le Brésil, la meilleure façon de restaurer la confiance et l’efficacité du Conseil réside dans l’amélioration effective de sa représentativité et de sa transparence.  Pour la délégation brésilienne, une telle réforme globale doit être un élément essentiel du Nouvel Agenda pour la paix.   

Quant aux faits, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a appelé à contrer la désinformation et les récits mensongers, qui alimentent l’hostilité et la peur.  L’Union européenne a quant à elle mis en avant le lien « puissant » qui existe entre la paix durable et la protection de la liberté d’expression et s’est montrée extrêmement préoccupée par les menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et les journalistes, qui sont de plus en plus discrédités et menacés.

CONSOLIDATION ET PÉRENNISATION DE LA PAIX

RENFORCER LA CONFIANCE POUR ÉTABLIR UNE PAIX DURABLE (S/2023/283)

Déclarations

Mme CYNTHIA CHIGWENYA, jeune ambassadrice de la paix pour l’Afrique australe, figure parmi les cinq jeunes sélectionnés par l’Union africaine (UA) pour représenter les cinq régions géographiques du continent africain. 

La jeune ambassadrice a d’abord évoqué les différentes actions menées dans le cadre du programme africain « jeunes pour la paix », citant une étude sur les migrations des jeunes et la sécurité en Afrique qui a formulé plusieurs recommandations ensuite incluses dans le compte-rendu du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.  De même, elle a défendu l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action sur les « Jeunes, la paix et la sécurité » dans les différentes régions. 

Cependant, a nuancé Mme Chigwenya, malgré les progrès réalisés, notamment dans l’application d’instruments normatifs et de politique comme la résolution 2250 (2015), qui reconnaît le rôle des jeunes comme artisans de la paix, la Charte africaine pour la jeunesse de 2006 et le cadre continental sur les « Jeunes, la paix et la sécurité », la participation des jeunes dans la consolidation de la paix se heurte à plusieurs obstacles.  Elle a notamment cité l’insuffisance des ressources financières et un manque de coordination entre les acteurs.  De plus, a-t-elle regretté, les approches empiriques sont très limitées.  Se basant sur sa propre expérience, elle a déploré que les stéréotypes présentant les jeunes comme inexpérimentés limitent également leur participation aux processus de médiation en cas de conflit.  Pire, certains préjugés présentant les jeunes comme violents compliquent, voire empêchent, la collaboration entre les générations. 

Au regard de sa présidence suisse et du Nouvel Agenda pour la paix à venir, l’intervenante s’est néanmoins dite convaincue que le Conseil de sécurité a la possibilité de fixer un programme de travail qui permettra de revoir, amender et modifier les normes existantes.  Ce débat public lui est apparu de bon augure pour adopter de nouvelles orientations. 

Sans qu’il soit question de renoncer aux principes de base, la souplesse des politiques et pratiques qui seront adoptées sera un élément fondamental pour revoir notre approche en matière de pérennisation de la paix, a plaidé la jeune ambassadrice.  Certes, a-t-elle reconnu, avec la guerre en Ukraine et les conflits entre les différentes factions au Soudan, le Conseil de sécurité est confronté à des difficultés de taille, mais il a la possibilité de changer de cap. 

Enfin, Mme Chigwenya a préconisé la mise en œuvre du principe de l’inclusion, avec une participation plus significative basée sur des données scientifiques. Elle a insisté sur la nécessité d’investir dans la participation des jeunes au niveau des institutions et de la prise de décisions.  Sa présence ici le prouve, car, a-t-elle conclu, c’est par vos efforts que les jeunes, à travers le monde, doivent comprendre qu’ils ne sont pas uniquement inclus mais qu’ils doivent être des artisans du façonnement du programme de travail de la communauté internationale. 

M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a déclaré que « l’histoire nous met en garde, mais elle nous montre également la voie à suivre », avant d’estimer que les droits humains sont essentiels à chaque étape des processus de paix. Tout d’abord, comme l’a reconnu le Conseil de sécurité dans sa résolution 2171 (2014), ce prisme permet d’alerter rapidement sur la détérioration d’une situation donnée et d’initier des actions préventives ciblées.  Le Haut-Commissariat a développé à cet égard des indicateurs solides sur les meurtres et les violences perpétrés contre les défenseurs des droits humains, la société civile et les médias, ainsi que sur les décès liés aux conflits.  Ce travail s’appuie également sur l’accès et l’analyse d’informations en provenance de sources ouvertes, par exemple pour suivre les blocages d’Internet, a précisé le Haut-Commissaire. 

M. Türk a cité l’exemple d’Haïti, où les signaux d’alerte précoce ont mis en évidence de manière persistante l’impact profondément destructeur des inégalités, de la corruption et de la marginalisation sur la confiance et la stabilité.  L’an dernier, le Conseil a pris des mesures à l’égard d’Haïti, notamment un embargo sur les armes et des sanctions ciblées, a-t-il rappelé avant de juger urgent d’en prendre d’autres.  Le Haut-Commissaire a expliqué s’être rendu dans le pays en février et l’avoir trouvé « au bord du gouffre.  L’incapacité de l’État à respecter les droits humains a complètement érodé la confiance de la population.  Le contrat social s’est effondré.  L’anarchie actuelle est une situation d’urgence qui exige une réponse énergique ».  Pour lui, il est nécessaire de soutenir immédiatement les institutions haïtiennes en déployant une « force de soutien spécialisée » et respectueuse des droits, assortie d’un plan d’action complet et limitée dans le temps.  Le défi à plus long terme consiste à mettre en place des institutions solides qui respectent les humains, a-t-il insisté. 

La surveillance des droits humains, fondée sur des informations et des analyses fiables et objectives, permet également d’établir les faits et de contrer la désinformation et les récits mensongers qui alimentent l’hostilité et la peur, a poursuivi le Haut-Commissaire.  La valeur de la surveillance des droits et de l’établissement de rapports pendant et après les conflits est bien reconnue par ce Conseil, notamment par le biais des 11 composantes des droits humains des opérations de paix qu’il mandate. 

Le dernier pays en date à s’être engagé dans un conflit à part entière est le Soudan, où l’impact des combats actuels sur les droits humains est catastrophique, a poursuivi M. Türk.  « N’oublions pas qu’en 2019, le peuple soudanais s’est soulevé pour défendre ses droits et renverser la dictature, avant d’être à nouveau réprimé par le coup d’État militaire d’octobre 2021 », a-t-il relevé.  Le Haut-Commissaire a toutefois affirmé que l’espoir de la population soudanaise n’a pas été anéanti.  Il a dit avoir été ému par son courage lorsqu’il s’est rendu dans le pays le mois dernier, alors qu’elle s’efforçait une nouvelle fois d’assurer la transition vers une gouvernance civile. « Il n’était pas question que les droits humains soient un concept étranger ou élitiste: l’universalité et la puissance de l’appel à la liberté, à l’égalité et à la justice étaient palpables », a-t-il assuré. 

L’ensemble des normes relatives aux droits humains sont tout aussi cruciales pour mettre fin aux conflits et instaurer une paix durable, a affirmé le Haut-Commissaire, qui a rappelé que les principes fondamentaux des droits humains que sont la responsabilité, la non-discrimination et la participation à un espace civique permettent d’instaurer et de maintenir la confiance entre les citoyens et l’État.  La responsabilité permet de répondre aux griefs, à la fois par la justice et la lutte contre l’impunité, et par la promotion d’une gouvernance réactive et responsable, qui réponde aux besoins réels des populations. 

L’égalité et la non-discrimination s’attaquent aux inégalités persistantes, en veillant à ce que personne ne soit laissé de côté.  Le Conseil a pu constater que la lutte contre la discrimination à l’égard des minorités et des personnes privées de leurs droits peut contribuer à la réconciliation et à l’édification de sociétés plus résistantes, a fait observer M. Türk.  La participation à un espace civique ouvert –en particulier des femmes et des filles, des groupes minoritaires et de la jeunesse- permet quant à elle d’instaurer une confiance plus profonde et plus large dans les institutions.  Les femmes doivent également participer à la mise en œuvre des accords de paix, a-t-il ajouté.  En cette Journée mondiale de la liberté de la presse, il a insisté sur l’importance de la protection des journalistes dans la mise en place d’une gouvernance responsable. 

M. Türk a cité la Colombie comme un exemple du rôle essentiel de la participation et d’autres principes fondamentaux des droits humains pour instaurer la confiance, en rappelant que le processus de La Havane comportait de solides éléments de dialogue et d’inclusion.  Ces éléments ont permis de faire en sorte que les accords de 2016 ne soient pas simplement les termes d’un cessez-le-feu entre acteurs armés, mais qu’ils constituent un plan détaillé pour une paix durable.  M. Türk a dit avoir constaté les efforts continus déployés pour en faire une réalité, notamment en s’attaquant à des problèmes structurels profondément enracinés tels que la réforme agraire, la discrimination et les inégalités.  En Colombie, comme ailleurs, les droits humains et la justice, y compris la justice transitionnelle, seront les meilleurs guides sur le long chemin de la réconciliation et de la paix durable, a conclu le Haut-Commissaire. 

Mme FUNMI OLONISAKIN, Vice-Présidente du King’s College de Londres et professeure de sécurité, leadership et développement, a fait valoir que renforcer la confiance pour une paix durable implique d’adopter une approche inclusive et de disposer des connaissances et des cadres normatifs pour envisager la paix. Les normes doivent définir les conditions du vivre-ensemble et promouvoir l’accès à des connaissances transparentes, a-t-elle souligné, avant de faire état de plusieurs risques inhérents à la période actuelle et portant sur la perception du monde, à commencer par la déconnexion entre la science et la population. 

Pour la professeure, les avancées scientifiques, techniques et technologiques sont importantes pour la paix.  Elle a cependant reconnu que le développement de l’intelligence artificielle augmente davantage les capacités de différents systèmes que les capacités que nous avons à les contrôler.  Dans ce cadre, il est nécessaire selon elle d’envisager un avenir de guerre et de paix, de sorte à ne pas être dépasser par les changements. 

Faisant état d’un programme de recherches sur les perspectives de paix et les modifications apportées aux États d’ici à 2050, qu’elle dirige au King’s College en collaboration avec l’Université de Nairobi, Mme Olonisakin a affirmé que ces travaux permettent d’envisager l’avenir de manière progressive en vue de renforcer la confiance et de consolider la paix.  « L’avenir n’est pas linéaire, mais en comprenant la complexité de cadres temporels convergents, on conçoit la paix et la guerre comme deux éléments d’un même continuum », a-t-elle expliqué, jugeant utile à ce propos de garder à l’esprit la « réalité empirique » des régions et des personnes situées en périphérie des processus décisionnels. 

Dans certaines cultures qui représentent la majorité du monde, la direction des opinions dans les domaines de la paix et de la guerre ne sont pas directement aux mains des élites mais dans celles de dirigeants religieux ou culturels, a relevé la professeure, justifiant ainsi l’analyse de données pour mesurer la nature complexe de la paix et du conflit, de façon à mieux comprendre les changements et à s’y préparer.  À cette aune, la confiance entre la population et les institutions est essentielle pour assurer la consolidation de la paix, a poursuivi la Vice-Présidente du King’s College, selon laquelle les hiérarchies de pouvoir s’accompagnent souvent de risques car elles renforcent les inégalités entre les réels détenteurs de la paix et les titulaires distants. 

Mme Olonisakin a relevé que le rapport du Groupe consultatif de haut niveau sur un multilatéralisme efficace créé par le Secrétaire général des Nations Unies, contient des principes spécifiques en matière de renforcement de la confiance.  Il insiste notamment sur les mesures anticipatives et invite à plus de transparence dans le domaine de la paix, a-t-elle précisé, avant d’appeler les institutions pertinentes en matière de paix à envisager « différents avenirs » et à établir un lien entre la science et la population future.

M. IGNAZI CASSIS, Conseiller fédéral et Ministre des affaires étrangères de la Suisse, a dit être récemment retourné dans son ancienne école pour parler de politique étrangère.  Il a regretté que toutes les questions aient porté sur la guerre, rappelant que, quand il y était lui-même élève, à la fin des années 70, ses camarades et lui étaient convaincus qu’il n’y aurait plus jamais de guerre en Europe et que leurs parents et leurs professeurs, qui avaient vécu la Seconde Guerre mondiale, leur juraient que la communauté internationale avait compris la leçon.  « Comment en sommes-nous arrivés là?  Comment éviter que nous soyons ceux qui n’ont pas su réagir aux crises actuelles? » a-t-il demandé.  Rappelant qu’il y a 77 ans, des nations « unies », cimentées par la confiance et la volonté de se reconstruire avaient affirmé:« Plus jamais ça! » il s’est demandé si elles n’avaient pas pêché par prétention. 

« Oui le système multilatéral est sous tension, mais non il n’est pas en faillite! » a estimé le Ministre, ajoutant que le véritable échec consisterait à ne rien faire.  Rappelant que la Suisse avait organisé ce débat pour « reconstruire les ponts qui nous relient », il a appelé le Conseil de sécurité à se saisir de ses responsabilités et à consolider une paix durable.  Évoquant la règle Pacta sunt servanda -les conventions doivent être respectées- sur laquelle est fondée le droit international, M. Cassis a affirmé que ce principe incarne la confiance réciproque des parties qui engagent leur parole, et la respectent.  « Si nous parvenons à restaurer cette confiance, je suis convaincu que nous pourrons retrouver durablement le cap de la paix », a-t-il estimé. 

Tout en appelant à se concentrer sur les domaines dans lesquels le multilatéralisme apporte une véritable valeur ajoutée, le Ministre a insisté sur l’application d’un cadre normatif commun, basé sur les droits humains et le droit international.  « C’est la prédictibilité, et non l’arbitraire, qui est le terreau de la confiance », a-t-il insisté. 

Appelant de ses veux une « architecture de paix inclusive » intégrant celles et ceux que la population a désignés comme démocratiquement légitimes, M. Cassis a souligné la nécessité de respecter les différences culturelles.  « Une paix imposée n’est pas une paix durable », a-t-il résumé.  Le Conseiller fédéral a également appelé les participants à améliorer le système ensemble.  Il a salué l’initiative du Secrétaire général qui proposera, le mois prochain, un « Nouvel Agenda pour la Paix ».  Rappelant que le débat était une occasion de recueillir les idées des États Membres, il a conclu son intervention en affirmant:« La confiance se gagne dans les actions, pas dans les intentions. »

M. OMAR BIN SULTAN AL OLAMA, Ministre pour l’intelligence artificielle des Émirats arabes unis, a souligné que l’inclusion est un élément essentiel à la consolidation de la paix, celle-ci devant être envisagée à la fois pour tous et par tous.  À cet égard, il a ajouté que les décideurs politiques ne sont pas les seuls moteurs du progrès, plaidant pour la participation pleine, égale et significative des femmes et des jeunes aux processus de prise de décisions répondant aux besoins réels des populations.  L’intégration de leur vision contribue à établir et à consolider la confiance, a poursuivi le Ministre, qui a précisé que le déploiement des efforts de consolidation de la paix aux niveaux municipal, national, régional et international permet d’impliquer profondément les communautés à ces différentes échelles niveaux.  De surcroît, les acteurs de la société civile, les universitaires et le secteur privé apportent tout leur potentiel multiplicateur de solutions et d’innovation aux efforts de consolidation de la paix, a-t-il encore dit. 

Pour le Ministre, en renforçant l’architecture de consolidation de la paix, « nous nous donnons les moyens de relever un plus large éventail de défis à long terme, comme ceux liés aux changements climatiques, à l’extrémisme et aux urgences mondiales de santé publique ».  Cela implique aussi de lier plus efficacement le travail des institutions de consolidation de la paix et des institutions financières.  Il a notamment jugé crucial de s’attaquer au discours de haine, au racisme, à l’intolérance, à la désinformation et aux autres manifestations de l’extrémisme.  Ces forces sont des multiplicateurs de menaces, a-t-il formulé, qui sèment les graines de la division, érodent le tissu social des communautés, engendrent l’instabilité et sapent tous les efforts de consolidation de la paix. 

En revanche, la promotion de la tolérance et de la fraternité humaine renforce la confiance mutuelle et favorise la cohésion sociale, « qui sont des fondements essentiels de la paix », a poursuivi le Ministre. Il a donc plaidé pour une gouvernance éthique et communément organisée, encadrant l’usage des outils numériques susceptibles de renforcer la connexion entre communautés.  Il a insisté sur la nécessité d’exploiter ces outils et les technologies innovantes pour construire et maintenir la paix.  Les données, pourvoyeuses d’informations précieuses sur les causes profondes des conflits, sont par exemple essentielles à cette fin.  Bien utilisées, les données pourraient fonctionner comme de vrais catalyseurs de la paix en stoppant les conflits dans leur élan, par le biais de modèles prédictifs des flambées de violence ou de surveillance des cessez-le-feu, a-t-il expliqué.  Il a conclu son intervention en exhortant l’ONU à utiliser les systèmes d’alerte précoce à une plus grande échelle. 

M. AKIMOTO MASATOSHI, Secrétaire parlementaire du Ministère des affaires étrangères du Japon, a estimé que le Conseil de sécurité doit servir de modèle à la communauté internationale, l’exhortant à superviser la mise en œuvre de ses résolutions et à intégrer les divers agendas relatifs à la paix, les jeunes et la sécurité.  Il a également recommandé au Conseil d’approfondir les discussions sur l’état de droit, la sécurité humaine, la protection des droits humains et la prévention des conflits. De fait, a insisté le dignitaire, le Conseil devrait refléter les résultats de ces discussions dans les mandats des opérations de paix.  Le représentant a aussi recommandé au Conseil de renforcer ses interactions avec la CCP. En utilisant pleinement ses conseils, le Conseil renforcera le fonctionnement de l’ensemble des Nations Unies, a-t-il affirmé.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a déclaré que la consolidation de la paix est un élément crucial pour maintenir la paix et la stabilité pour les générations actuelles et futures.  Mais alors que nous nous efforçons de construire une paix durable, nos efforts doivent porter sur les causes profondes des conflits et de l’instabilité. L’instauration de la confiance est un autre facteur important pour le maintien de la paix et de la stabilité, qui nécessite une approche globale et inclusive, a poursuivi le représentant.  Selon lui, l’inclusion devrait orienter les actions collectives et coordonnées pour résoudre les défis multiples et complexes auxquels le monde est confronté aujourd’hui, tels que les guerres entre États, les conflits internes, le terrorisme international, la criminalité organisée, et les défis liés aux changements climatiques.  Dans ce contexte, a-t-il mis en garde, les approches unilatérales ne serviront pas la paix.  Aussi le délégué a-t-il plaidé pour une réforme du Conseil de sécurité, afin de rendre cet organe plus inclusif, équitable, juste et démocratique.  Il a également appelé de ses vœux une réforme des institutions financières internationales pour servir la cause de l’équité et de la justice entre les nations.  Si l’esprit d’entreprise privée est important, des gains économiques à courte vue aux dépens des pays les moins développés ne peuvent que perpétuer l’instabilité et les troubles au niveau mondial, a prévenu le délégué en conclusion. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé qu’aujourd’hui est célébrée la Journée internationale de la liberté de la presse, avant de rendre hommage aux journalistes qui sont souvent menacés, harcelés et attaqués en effectuant leur travail.  Il a également pensé aux centaines de millions de personnes qui vivent encore dans des pays où la liberté des médias reste un souhait et où la répression est la règle.  Face aux défis complexes auxquels fait face l’humanité, il importe selon lui de renforcer la confiance, qui est le ciment unissant les gens et les sociétés.  La confiance donne aux institutions une légitimité durable et aide les individus et les groupes à rester engagés dans le processus long et ardu de construction d’une paix durable, a fait valoir le représentant.  Son absence, en revanche, peut entraîner des perturbations, de la violence et des conflits, a-t-il ajouté, estimant que les récents événements au Soudan montrent où peut mener la rupture de la confiance.  De même, a poursuivi le délégué, le manque frustrant de progrès sur la voie politique en Libye est le résultat direct du manque de confiance entre les principaux acteurs, tandis que l’absence d’unité entre les parties prenantes en Haïti a mis le pays dans les griffes des gangs. 

Pour le représentant, le Conseil de sécurité ne sera pas en mesure de s’acquitter de ses responsabilités avec succès sans la confiance, sans un travail de bonne foi et une coopération continue entre ses membres.  « Ce n’est pas le cas lorsque le Conseil est, malheureusement, utilisé à des fins de propagande ou au profit d’intérêts étroits, comme nous le constatons sur un certain nombre de questions importantes, notamment la guerre d’agression en cours en Ukraine ».  Le Conseil ne contribue pas davantage à rendre le monde meilleur en refusant de reconnaître le lien entre les changements climatiques et la sécurité, en niant que des violations graves des droits humains conduisent à des conflits et en protégeant des régimes totalitaires qui oppriment leurs propres citoyens et sapent la paix, a renchéri le délégué, pour qui notre capacité à respecter ce que nous avons convenu d’un commun accord, dans le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies, déterminera la forme du monde à l’avenir. Il a enfin jugé qu’instaurer la confiance dans les situations de postconflit et les processus de consolidation de la paix nécessite des efforts et des investissements continus dans le capital humain par le biais de l’inclusion et de la participation, en particulier celle des femmes, des jeunes et de la société civile. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a rappelé que le nombre de conflits était le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale et que, selon les estimations, plus de deux milliards de personnes vivaient dans des zones de conflit, s’inquiétant en outre du risque élevé d’un conflit nucléaire.  Plaidant pour une « approche intersectorielle » pour améliorer la coordination entre les nombreux organes et instances du système multilatéral, elle a appelé le Conseil de sécurité à s’appuyer sur d’autres organes, tels que la CCP, l’ECOSOC et l’Assemblée générale, pour mieux comprendre les situations spécifiques.  Elle a demandé à mettre en œuvre en priorité les résolutions jumelles de 2016 du Conseil de sécurité (2282) et de l’Assemblée générale (70/262), qui ont élargi le concept de consolidation de la paix pour englober la prévention des conflits et les situations de postconflit.  Elle a également prôné le dialogue afin d’éviter les erreurs d’appréciation et la concurrence malsaine, notamment entre les grandes puissances militaires. 

La déléguée a aussi proposé au Conseil d’établir des partenariats stratégiques adossés à des accords régionaux au titre du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, afin de mieux prévoir les conflits et de renforcer les systèmes d’alerte rapide.  Cette approche permet de mieux répartir les ressources consacrées à la consolidation de la paix, a-t-elle estimé, saluant notamment le soutien apporté aux systèmes nationaux et régionaux d’alerte précoce, tels que le Système continental d’alerte rapide de l’Union africaine de 2002 et le Réseau d’alerte précoce et de réponse de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  Elle a aussi appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment en mettant en œuvre les programmes pour la paix et la sécurité dédiés aux jeunes et aux femmes.  Se prononçant en faveur d’investissements plus importants dans la prévention et la consolidation de la paix, elle a plaidé pour que le Fonds pour la consolidation de la paix bénéficie d’un financement cohérent par le biais de contributions recouvrées par les Nations Unies, saluant au passage l’aspiration du Secrétaire général à une affectation annuelle de 100 millions de dollars au Fonds du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a estimé que la CCP peut et doit assumer la responsabilité principale de superviser le processus de transition du conflit vers le développement, ce qui permettrait au Conseil de sécurité de consacrer toute son attention et ses ressources à l’examen des situations de menaces à la paix et la sécurité internationales.  Pour le représentant, la collaboration entre les deux organes ne peut toutefois prospérer que si le Conseil considère la Commission comme un partenaire à part entière, en qui il a confiance, qu’il apprécie et qu’il accompagne de manière constructive.  Ainsi le Conseil de sécurité devrait-il soutenir de façon plus franche les processus de consolidation de la paix en favorisant notamment une plus grande participation à ces processus des organisations sous-régionales.  Leur légitimité, leur connaissance de première main du terrain et leur compréhension culturelle des causes profondes des conflits sont des atouts importants pour créer les conditions propices au dialogue et à une paix durable, a fait observer le représentant.  Après avoir souligné l’importance de rendre plus inclusifs les processus de consolidation de la paix, cela en tenant compte des points de vue de toutes les parties prenantes à la résolution des conflits, le délégué brésilien a déclaré que la meilleure façon de restaurer la confiance et l’efficacité du Conseil de sécurité réside dans l’amélioration effective de sa représentativité et de sa transparence.  Une telle réforme globale doit être un élément essentiel du Nouvel Agenda pour la paix, a-t-il dit.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a estimé que le renforcement des synergies et l’élargissement de la coopération entre la CCP et le Conseil de sécurité rendront le travail de la communauté internationale plus efficace.  Elle a rappelé l’appel du Conseil pour une participation pleine, égale, significative et effective des femmes à tous les stades et à tous les niveaux de la prévention et du règlement des conflits, ainsi que dans les processus de paix et la mise en œuvre des accords de paix.  Cet appel doit être mis en œuvre et sauvegardé, a-t-elle souligné. 

La déléguée a appelé à s’attaquer à la rhétorique de la haine, qui précède souvent les conflits, et a recommandé d’investir dans des systèmes d’alerte précoce, qui permettent d’identifier les éléments qui fragilisent la stabilité et érodent la confiance au sein des communautés fragiles.  Il s’agit là d’un autre domaine dans lequel le Conseil peut renforcer sa coopération avec la CCP, a-t-elle estimé.  De même, les risques de sécurité liés au climat étant une réalité pour de nombreuses communautés, en particulier celles en situation de conflit, les efforts d’adaptation et d’atténuation devraient constituer des points d’entrée pour la consolidation de la paix, en contribuant à renforcer la confiance au sein de la société, a plaidé la déléguée.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est réjouie que le « pays de Rousseau » entame sa présidence du Conseil de sécurité par un événement sur l’importance de la confiance et du contrat social.  En effet, a-t-elle développé, la confiance dans les institutions nationales et internationales est aujourd’hui gravement mise à l’épreuve.  Alors que nous sommes confrontés à des défis complexes et interconnectés pour la paix, la sécurité et le développement, nous devons reconstruire cette confiance pour les surmonter, a plaidé la représentante, pour qui cela passe par davantage d’inclusion, de normes pour un ordre pacifique et de transparence. 

Dans cet esprit, il importe, selon la représentante, que le Conseil et le système des Nations Unies anticipent mieux les risques et mobilisent plus tôt l’aide multilatérale.  L’exploitation des nouvelles technologies révolutionnera la façon dont nous comprenons la dynamique des conflits, nous permettant d’anticiper les crises et d’atténuer les souffrances humaines, a-t-elle affirmé, souhaitant que l’on entretienne la confiance et la coopération nécessaires pour y parvenir. 

La représentante a également appelé à exploiter toute la gamme des outils de consolidation de la paix pour produire des réponses plus intégrées et cohérentes.  Ainsi, le Fonds pour la consolidation de la paix et la Commission de consolidation de la paix peuvent soutenir les stratégies de prévention menées au niveau national et donner aux pays les moyens d’établir la confiance et les partenariats nécessaires à leurs trajectoires de paix et de développement.  Elle a enfin jugé crucial de renforcer l’inclusion pleine et significative des femmes dans la prise de décisions et les processus de paix et de développement.

M. RICHARD M. MILLS, JR.  (États-Unis) a déclaré que les membres du Conseil devraient privilégier une collaboration plus ambitieuse avec la Commission de consolidation de la paix (CCP) et a exprimé un soutien vigoureux à l’expansion du rôle de cet organe dans les contextes régionaux et sur les questions transversales, y compris les droits humains et les risques que fait peser le réchauffement climatique.  Il s’agit notamment de tirer un meilleur parti du rôle consultatif de la CCP auprès du Conseil pour veiller à ce que les activités de consolidation de la paix soient intégrées, coordonnées et adaptées à la dynamique actuelle, a-t-il préconisé. 

Pour le représentant, les femmes, les jeunes, les acteurs locaux, les groupes marginalisés et la société civile dans son ensemble doivent participer activement aux processus de prise de décisions visant à instaurer la paix.  Les efforts de consolidation de la paix sont plus efficaces et ont beaucoup plus de chances d’aboutir à des résultats durables et inclusifs pour l’ensemble de la société lorsque les femmes y sont associées, a-t-il indiqué.  Il a également souligné l’importance de rétablir la confiance des jeunes dans les institutions, en particulier l’ONU et le Conseil de sécurité. 

« Le moment est particulièrement propice à une réflexion ambitieuse et originale, et le Nouvel Agenda pour la paix est l’occasion d’y répondre », a estimé le représentant.  La stratégie des États-Unis à cet égard comprend une dimension coopérative avec les nations partenaires pour prévenir la violence et promouvoir la stabilité dans les zones vulnérables aux conflits, a-t-il ajouté. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé que la confiance ne peut être durable que si l’application des solutions s’avère efficace, ce qui implique de garantir l’appropriation nationale lors de l’identification des causes fondamentales des conflits.  Selon lui, la promotion de la confiance entre les parties prenantes est indispensable pour prévenir l’intensification, la poursuite et la récurrence des conflits car un tissu social affaibli est plus vulnérable à la violence.  De même, a-t-il poursuivi, dans les contextes de postconflit, la paix durable trouve ses fondements dans le processus de réconciliation, lequel ouvre la voie au renforcement et à la pérennisation de la culture de paix et de la confiance. À cette aune, le représentant a jugé nécessaire d’approfondir les synergies en matière de missions de paix, dans la phase la plus précoce de planification intégrée et de coordination des transitions, avec tous les acteurs sur le terrain.  Il a aussi insisté sur l’importance de l’accès aux données vérifiées, saluant à cet égard le travail effectué par le HCR, qui fournit des statistiques sur les déplacements forcés dans le monde depuis 1951. 

Appelant d’autre part à la participation pleine, équitable et significative des femmes dans tous les domaines sociaux et politiques, le représentant a souhaité que le Conseil de sécurité et le système des Nations Unies mettent en œuvre la résolution 1325 (2000), notamment l’inclusion des femmes dans les mécanismes et processus de négociation.  Il importe aussi, selon lui, de faciliter la participation des jeunes à la prévention et à la résolution des conflits à tous les niveaux de décision, conformément à la résolution 2419 (2018).  Le délégué a aussi jugé essentiel que le Nouvel Agenda pour la paix tienne compte de l’importance d’inclure la relation entre la paix, la sécurité et la confiance comme base pour la consolidation de la paix.

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que, sans confiance, le monde serait régi par la loi du plus fort.  Constatant que « le monde traverse une grave crise de confiance », le représentant a affirmé que rien ne sapait plus la confiance dans le domaine de la sécurité que la création de « blocs militaires exclusifs » qui font monter les tensions régionales en recherchant une sécurité absolue au détriment de celle des autres.  Déplorant la création de « hauts remparts » nuisant à la confiance socioéconomique et la volonté d’aucuns « d’obtenir un monopole », il a dénoncé le mépris pour la Charte des Nations Unies, les politiques de deux poids, deux mesures et l’application sélective du droit international, tous comportements qui nuisent à la confiance dans le système international.  Fustigeant « l’état d’esprit de ceux qui refusent de se voir dépassés » et « l’arrogance de ceux qui se considèrent comme en position de force et s’appuient sur leurs intérêts nationaux », il a estimé que ces attitudes entravaient les efforts en vue de bâtir la confiance mutuelle, une paix pérenne et promouvoir le développement et les progrès mondiaux. 

Le représentant a estimé que « les ingérences externes inappropriées » dans les pays sortant d’un conflit ne faisaient que mettre de l’huile sur le feu.  Il a aussi dénoncé les ingérences de « certaines forces externes, sous prétexte de droits humains », dans les affaires internes d’autres États, en vue d’imposer leurs propres système et idéologie et de monter des factions les unes contre les autres. 

Constatant que l’interdépendance entre pays caractérise plus que jamais le monde actuel, le représentant a appelé à s’appuyer sur le concept de « communauté d’avenir partagé pour l’humanité », à mettre en œuvre un multilatéralisme réel et à promouvoir des partenariats mondiaux.  Il a également appelé « les grands acteurs mondiaux à faire office de chefs de file » en ce sens, à mener de vastes consultations et à être exemplaires afin de renforcer la confiance et d’établir une paix et une sécurité pérennes. 

Le représentant a aussi appelé à respecter les trajectoires et systèmes de développement choisis par les différents peuples du monde, à régler de manière pacifique tout différend et à s’abstenir d’appliquer des mesures coercitives unilatérales de manière indiscriminée.  Estimant que le développement durable était le fondement même d’une paix pérenne ainsi qu’un important outil de promotion des droits humains, le représentant a appelé la communauté internationale et les Nations Unies à mettre l’accent sur l’augmentation des investissements dans ce domaine. 

Avertissant du « grave déficit moral » dont souffrent selon lui les institutions internationales, le représentant s’est inquiété de les voir « perdre la confiance mondiale » et a souhaité la promotion d’un système multilatéral plus juste et plus inclusif, en particulier dans le domaine financier, qui bénéficie aux populations des pays en développement. 

Le représentant a également accusé certains pays d’utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment les réseaux sociaux, pour voler des données confidentielles d’autres pays, y compris des alliés et des responsables d’organisations internationales.  Il a appelé les gouvernements à réglementer ces technologies afin de défendre l’intérêt public, estimant que l’ONU devrait accompagner ces démarches et créer une plateforme intergouvernementale pour élaborer des règles et normes communes.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a considéré que pour que la paix soit durable, « il est fondamental que nous puissions reparamétrer le contrat social entre nations indépendamment de leur taille ou de leur envergure ». Ainsi, la force ou la puissance ne doivent-elles pas, selon lui, être les déterminants du vivre-ensemble de la communauté internationale.  Le représentant a ajouté que la confiance nécessaire pour parvenir à une paix durable passe par une véritable transformation structurelle de l’architecture de paix et de sécurité de l’ONU ainsi que par l’adaptation des mécanismes de promotion de la paix et de la sécurité à un contexte global de crises et de conflits en constante mutation.  Si les efforts fournis par les Nations Unies sont remarquables, force est de constater que les menaces à la paix et à la sécurité internationales sont de plus en plus nombreuses, et imparables, prenant très souvent des formes inédites, ce qui alimente parfois le sentiment de défiance à l’égard de notre volonté collective, de nos institutions internationales, de nos mécanismes, a-t-il relevé.  Dans ce contexte, le délégué a appelé à soutenir les mécanismes de prévention et de consolidation de la paix des Nations Unies par un financement adéquat et prévisible, à renforcer la synergie entre le pilier développement durable et le pilier paix et sécurité des Nations Unies et à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment les inégalités, la pauvreté et le chômage des jeunes.  Par ailleurs, le représentant a demandé que le financement adéquat de l’Agenda 2063 de l’Afrique et son premier plan décennal de mise en œuvre ainsi que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 soient perçus comme une nécessité pour consolider et pérenniser la paix. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé qu’à l’heure du profond schisme entre les positions des États Membres de l’ONU et afin de créer les efforts nécessaires pour une nouvelle architecture de sécurité internationale plus pérenne, la question du déficit de la confiance et de l’absence de programmes fédérateurs devient particulièrement pertinente. 

En parlant de confiance, le représentant a jugé important de mentionner les actes « perfides » de « nos ex-partenaires occidentaux » qui, au cours de ces 15 à 20 dernières années ont réussi à anéantir toutes les lueurs de compréhension mutuelle et de coopération qui avaient fait leur apparition à la fin de la guerre froide.  Il fait référence à la fois aux promesses non tenues de ne pas étendre l’OTAN vers l’est de l’Europe et la promotion des « soi-disant révolutions de couleur », ainsi qu’aux tentatives de destitution de régimes hostiles ou encore à celles d’imposer à tous un « ordre fondé sur des règles » plutôt que sur le droit international et le respect de la Charte des Nations Unies. 

Du fait de leur dessein, « nous vivons aujourd’hui dans un monde où la vérité a perdu tout son sens » et où les médias sous le contrôle de « l’Occident global », propagent des récits misanthropiques et complètement mensongers: le blanc devient noir et vice versa, a accusé le représentant.  Il a cité en exemple la situation en Ukraine, estimant qu’en raison des desseins des États-Unis et de leurs alliés, le rôle de ce pays avait été réduit à celui d’un pion dans un affrontement géopolitique avec la Russie.  Il a ensuite affirmé qu’il y a huit ans est apparue aux frontières de la Fédération de Russie une dictature néo-nazie et russophobe, qui a déclaré la guerre à tout ce qui est russe et à tout ce qui nous unissait objectivement. 

Le représentant y a vu une guerre par procuration menée par l’OTAN contre la Russie, ce qui, a-t-il averti, pourrait s’accompagner de conséquences néfastes pour toute l’humanité. 

Dès lors, comment parler de confiance dans ces circonstances? s’est interrogé le représentant.  Pour lui, il est également évident que les actes des pays occidentaux affectent directement les possibilités de coopération entre les grands acteurs mondiaux pour le règlement de crises régionales.  Pour les pays de l’Occident qui appliquent à ces crises le prisme de leur concurrence avec la Russie et la Chine, il s’agit d’un « jeu à somme nulle » et « nous sommes en plein désaccord avec cette approche », a-t-il martelé. 

Cette situation à l’échelle internationale affecte le travail du Conseil de sécurité et d’autres instances internationales, en plus des profondes différences s’agissant des nombreuses questions discutées à l’Assemblée générale, a poursuivi le représentant.  Tout cela met gravement à l’épreuve le système des Nations Unies et affecte sa capacité à bien s’acquitter de son mandat principal en matière de prévention des conflits et du maintien de la paix, a-t-il déploré. 

Cette crise de confiance affecte directement l’institution de la médiation, a poursuivi le représentant, qui en a voulu pour preuve la situation entourant les accords de Minsk sur l’Ukraine et le rôle de l’Allemagne et de la France dans leur adoption.  Non seulement Paris et Berlin n’ont pas réussi à faire en sorte que Kiev les respecte, mais ils ont reconnu plus tard que le but de leur signature était de permettre au régime ukrainien le temps de se préparer à la guerre, a-t-il accusé. 

Malheureusement, ces tendances ne se limitent pas aux États, mais se reflètent également dans le travail de l’ONU, a encore déploré le représentant, qui a mis en garde contre une dégradation considérable de la confiance à l’égard de l’organisation mondiale, censée représenter les intérêts de tous les États Membres, être un modèle d’impartialité et d’intégrité, et dont les représentants sont tenus d’agir dans le strict respect de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a estimé que c’est d’abord aux États Membres de bâtir la confiance par le respect des engagements et par des institutions et des processus inclusifs.  « Le respect du droit international, le non-recours à la force et le règlement pacifique des différends sont les conditions de la confiance et de la coopération entre les États.  La violation de ces principes, comme dans le cadre de la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine, sape l’ordre international fondé sur des règles communes », a-t-elle déclaré.  Considérant que le droit international doit être respecté partout, la France défend avec constance son application dans le cadre du conflit israélo-palestinien, a ajouté la représentante, en appelant les parties à restaurer un horizon politique, seul à même de recréer la confiance entre elles et de permettre la mise en œuvre de la solution des deux États. 

Pour la représentante, il appartient aussi aux États d’affermir la confiance dans leurs institutions, ce qui passe par le respect des droits humains et de l’état de droit, la lutte contre la corruption et la bonne gouvernance.  Mais la confiance doit reposer sur des partenariats fiables et prévisibles, a-t-elle estimé.  C’est pourquoi l’Union européenne et ses États membres sont mobilisés dans la réponse aux crises: « collectivement, nous déployons plus de 5 000 personnels dans le cadre des opérations de paix », s’est enorgueillie la représentante.  Elle a ainsi rappelé qu’au Moyen-Orient, ce sont 27 milliards d’euros d’aide humanitaire que l’Union européenne et ses États membres ont apportés depuis 2011 aux Syriens les plus vulnérables, en Syrie et dans la région.  La France soutient en outre l’opérationnalisation du Fonds africain pour la paix et la montée en puissance des opérations africaines de paix et est prête à reprendre les discussions au Conseil de sécurité pour assurer un financement durable et prévisible de ces opérations, y compris sur la base de contributions obligatoires. 

Paris a en outre soumis 20 propositions pour renforcer l’autorité du système de sécurité collective et moderniser ses moyens d’action, en repensant le rôle des Nations Unies pour garantir la paix et la sécurité internationales, a ajouté la représentante en conclusion. 

M. DIMITAR KOVACEVSKI, Premier Ministre de la Macédoine du Nord, s’est réjoui d’être le premier chef de gouvernement de son pays à s’adresser au Conseil de sécurité. Revenant au débat, il a estimé que la réussite du Nouvel Agenda pour la paix nécessite de tirer les enseignements de l’agenda de 1992 et de la mission préventive menée entre 1995 et 1999 par l’ONU dans son pays.  Il a rappelé à cet égard que le premier Président de la Macédoine du Nord, M. Kiro Gligorov, a permis à cette ancienne république yougoslave d’accéder à l’indépendance en 1991 et d’entrer dans le concert des nations en tant qu’État souverain. 

Alors que la guerre faisait rage dans notre voisinage le plus proche, nous avons élaboré notre propre agenda national pour la paix, tout en coopérant étroitement avec l’ONU et les organisations régionales, principalement l’OSCE et l’Union européenne (UE), a rappelé le Premier Ministre. Ce faisant, les conditions ont été réunies pour garantir le succès de la Force de déploiement préventif des Nations Unies , et la paix et la stabilité ont ainsi été préservées, a-t-il ajouté.  De cette manière, la confiance s’est instaurée et la culture du dialogue s’est lentement mais sûrement développée, faisant, 30 ans plus tard, de la Macédoine du Nord un exemple pour le règlement des conflits et une source de stabilité, s’est félicité le Premier Ministre, qui a rappelé que son pays est désormais membre de l’OTAN et candidat à l’adhésion à l’UE. 

Plaidant pour un renforcement de la confiance dans les institutions, dans l’ONU, dans la justice et dans les objectifs de développement durable afin de bâtir un monde plus pacifique, plus stable et plus juste pour tous, M. Kovacevski a reconnu que cette vision reste actuellement « hors d’atteinte », en raison notamment de la guerre en Ukraine.  Cette agression militaire russe a changé les relations mondiales à tel point qu’il est urgent de protéger la Charte des Nations Unies, qui est notre cadre juridique de référence, a-t-il ajouté, assurant que son pays se tient du côté du monde démocratique et libre. 

De l’avis du Premier Ministre, le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU est une chance qui doit être utilisée pour créer les conditions d’une action unie et consciente des risques croissants. « Demain nous interrogera sur ce que nous avons fait aujourd’hui, comme aujourd’hui nous nous demandons pourquoi nous n’avons rien fait hier », a-t-il conclu, en appelant à la paix « maintenant et immédiatement ».

Mme ANNA LÜHRMANN, Ministre adjointe chargée des affaires européennes et du climat de l’Allemagne, a estimé que partout dans le monde, les gens avaient confiance dans les Nations Unies, les considérant comme une lueur d’espoir dans les périodes d’obscurité.  Partant du constat que la confiance est essentielle à la construction de la paix, elle a appelé à appliquer le dispositif de consolidation de la paix élaboré conjointement par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale dans les résolutions jumelles de 2016.  Elle a rappelé le lien qu’il établit entre la sécurité, le développement et les droits humains.  Elle a appelé à s’attaquer aux causes et aux conséquences des conflits et à répondre aux besoins des communautés. 

Affirmant que les efforts de consolidation de la paix doivent respecter la dignité de toutes les personnes et de tous les groupes, la Ministre a pris l’exemple du Mozambique, où le processus de paix a finalement été couronné de succès grâce à sa nature inclusive et à la reconnaissance de la diversité du pays.  Elle a insisté sur l’intégration systématique des femmes, des enfants et des groupes marginalisés dans ces processus, rappelant notamment qu’il avait été prouvé que les femmes contribuaient à rendre les sociétés postconflit plus pacifiques.  Elle a rappelé que l’Allemagne soutenait l’initiative « Principes pour la paix » qui préconise l’établissement d’un cadre de référence partagé et de normes communes pour les acteurs de la consolidation de la paix. 

Mme Lührmann a également présenté des mesures concrètes pour renforcer la confiance.  Elle a affirmé que le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix devraient intensifier leurs échanges afin de mieux relever les défis existants.  La Ministre a appelé de ses vœux un accord sur l’introduction de contributions évaluées pour le Fonds de consolidation de la paix des Nations Unies.  En tant que vice-présidente de la Commission et principale contributrice volontaire au Fonds, l’Allemagne est déterminée à faire avancer le dispositif de consolidation de la paix, a-t-elle assuré. 

Insistant sur l’importance de l’alerte précoce et de l’action anticipée fondées sur des données, notamment concernant l’adaptation aux changements climatiques, la Ministre a cité certains des projets soutenus par son pays, dont le Fonds pour l’analyse des risques complexes des Nations Unies et les initiatives de l’Union africaine en la matière. En conclusion, elle a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, estimant qu’il offrait une excellente occasion d’élaborer des moyens de renforcer la confiance dans les efforts conjoints en vue d’une paix durable.  En tant que cofacilitatrice du Sommet de l’avenir avec la Namibie, l’Allemagne est prête à soutenir activement les discussions visant à définir une approche commune, a-t-elle assuré. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a notamment déclaré que pérenniser la paix et résoudre les crises nécessitent préalablement de pérenniser la confiance entre les pays et les peuples. Consolider la confiance est la meilleure manière de pérenniser la paix pour faire face aux conséquences multiples des crises alimentaire, énergétique ou encore climatique, a-t-il dit, ajoutant que contribuer à la reconstruction des pays sortant d’un conflit est une priorité pour l’Égypte, en particulier en Afrique. 

Le représentant a appelé le Conseil de sécurité à se concentrer davantage sur la situation dans les pays du continent africain, en tenant compte des besoins réels de ces pays et du point de vue de l’ensemble des acteurs de la paix et de leurs partenaires. Il a également plaidé pour que les États Membres s’attaquent ensemble à la consolidation de la paix « à la lumière des défis actuels », en se montrant inclusifs et en s’appuyant sur des financements pérennes et une meilleure gouvernance.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a plaidé en faveur de l’édification d’une large coalition pour la paix, notant que les règlements inclusifs sont plus durables et plus respectueux des droits et que les équipes de négociation et les médiateurs qui reflètent la société dans son ensemble sont plus susceptibles de produire des résultats durables.  Mais l’inclusion ne concerne pas seulement les personnes consultées, a-t-il fait remarquer, elle concerne aussi la manière dont ces contributions sont reflétées.  D’où la nécessité pour que la société dans son ensemble soit non seulement représentée à la table des négociations, mais également en mesure de voir son engagement reflété dans les documents, les processus et les missions qui en résultent. 

Selon le représentant, l’inclusion doit également refléter les groupes ethniques, religieux et linguistiques minoritaires, ainsi que les peuples autochtones, entre autres.  Le récent rapport du Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités mérite de faire l’objet d’une réflexion plus approfondie de la part des organes et acteurs concernés, a-t-il recommandé.  Le délégué a par ailleurs souligné que l’état de droit est un aspect essentiel d’une paix durable, relevant que c’est l’absence de responsabilité pour l’agression contre l’Ukraine, en 2014, qui a sans aucun doute été l’un des principaux moteurs de l’invasion à grande échelle en 2022.

Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a estimé que les communautés sont plus susceptibles d’avoir confiance dans un processus de paix si le conflit ou la situation qu’il vise à résoudre est identifié à temps comme menace émergente, y compris par le biais de l’alerte précoce et de la prévision stratégique.  En outre, les solutions élaborées pour y répondre doivent l’être en consultation avec ces communautés. 

À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, la représentante a rappelé que la confiance requiert un environnement social dans lequel les gens peuvent s’exprimer librement, les droits humains sont respectés et dans lequel des médias libres et indépendants contribuent à promouvoir la démocratie et à faire en sorte que les institutions soient responsables vis-à-vis des citoyens. 

Mais pour que le Conseil de sécurité contribue à favoriser cette inclusion et cette participation, il est important que lui-même devienne plus représentatif, en élargissant le nombre de pays qui y siègent, a affirmé la représentante.  Elle a ensuite souligné les avantages possibles d’une consultation du Conseil avec le monde universitaire et la communauté scientifique.  En effet, a-t-elle dit, le savoir-faire de ces derniers en matière de nouvelles technologies, de collecte et d’analyse de données peuvent aider à mieux comprendre les défis sécuritaires auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés, voire d’en anticiper de nouveaux.  Citant enfin la note conceptuelle portée à l’attention des participants à la réunion, la représentante a rappelé que « la confiance est une question d’attentes et de prévisibilité ». Dès lors, l’utilisation abusive du droit de veto au sein du Conseil de sécurité peut être très préjudiciable à la prévisibilité, a-t-elle estimé.

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a relevé qu’au-delà des coûts humains incalculables, les conflits ont des conséquences économiques « stupéfiantes ».  Un rapport de la Banque mondiale sur les « voies vers la paix » fait ainsi apparaître que les pays en proie à des conflits violents connaissent une perte de 2 à 8,4% de leur PIB, a-t-il pointé, ajoutant que, selon cette même étude, la prévention des conflits devrait générer des économies comprises entre 5 et 70 milliards de dollars.  Il a donc plaidé pour un investissement plus fort et plus soutenu dans la paix, en termes de ressources, de politiques et d’idées.  Dans ce cadre, le délégué a appelé à promouvoir les « multiplicateurs de paix », notamment en cultivant les conditions d’une paix durable.  Cela impose en premier lieu d’adopter une approche centrée sur l’individu, en veillant à ce que les intérêts et les droits, le bien-être et les opinions des personnes restent au premier plan, a-t-il souligné, jugeant à cet égard que les projets de développement menés localement doivent aller de pair avec des initiatives de paix, comme le pratiquent les Casques bleus thaïlandais au Soudan du Sud. 

Le représentant a ensuite fait valoir que l’inclusivité et la participation sont des catalyseurs importants pour une paix durable et l’instauration de la confiance.  Au niveau national, a-t-il préconisé, une approche à la fois inclusive et participative devrait être adoptée afin que toutes les parties prenantes, des femmes et des filles aux personnes handicapées en passant par les groupes vulnérables, soient consultées et activement engagées dans le maintien de la paix ainsi que dans l’élaboration des politiques.  À ses yeux, un autre « catalyseur » essentiel est l’engagement actif des acteurs régionaux, en particulier les organisations régionales.  Mais plutôt que de reposer sur des arrangements de sécurité collective rigides, une telle interface régionale-multilatérale devrait être plus souple et fondée sur les intérêts et le respect mutuels, a-t-il estimé, se prononçant également pour le renforcement des instruments de règlement pacifique, en particulier la diplomatie.  Enfin, il a appelé de ses vœux la promotion d’une culture de la paix, ancrée sur la tolérance et le respect constant du droit international, ce qui selon lui nécessite un système éducatif inculquant cet état d’esprit.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a d’abord rappelé que, comme la Suisse, son pays n’est membre d’aucune alliance militaire et a invoqué leur longue tradition de soutien à la prévention des conflits, au dialogue et à la consolidation de la paix.  Le représentant a ensuite insisté sur la nécessité d’établir des sociétés justes et inclusives comme condition préalable à la paix, la construction d’institutions multilatérales en réseau et l’état de droit comme garantie de la confiance.  Il a plaidé pour l’inclusion des groupes marginalisés et les personnes déplacées dans les processus de consolidation de la paix. 

Notant qu’il reste encore beaucoup à faire pour comprendre comment les changements climatiques affectent la paix et la sécurité, le représentant a appelé le Conseil de sécurité à faire avancer le dossier sur le climat, la paix et la sécurité.  Il a plaidé en faveur d’une ONU qui s’appuie beaucoup plus sur les organisations régionales et sous-régionales, notamment grâce au financement durable des actions des partenaires régionaux, les opérations de soutien à la paix de l’Union africaine mandatées par le Conseil de sécurité par exemple.  Il a aussi salué leur rôle en matière d’établissement de la confiance, prenant en exemple l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), rappelant qu’elle n’avait jamais été un club de pays partageant les mêmes idées, mais avait plutôt servi de plateforme au dialogue pour faire avancer la sécurité collective.  « En ces temps difficiles, nous ne devons pas abandonner cette idée fondamentale, même si le chemin est semé d’embûches », a-t-il ajouté. 

Abordant « l’éléphant dans la pièce », soit le manque de confiance au niveau international, le représentant a affirmé que le respect du droit international et de l’état de droit garantissait la prévisibilité et renforçait la confiance.  Il a également plaidé en faveur du désarmement comme un facteur important pour la construction de la confiance.  En conclusion, il a rappelé qu’on célébrait aujourd’hui le trentième anniversaire de la Journée mondiale de la liberté de la presse, et que les médias indépendants et pluralistes étaient des conditions préalables à la promotion de la paix et de la sécurité sur la base de faits et de preuves.

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a rappelé qu’en matière diplomatique, la confiance repose sur le respect des règles et des normes par tous ceux qui y ont adhéré.  L’ordre international fondé sur des règles a été établi pour empêcher que les pages les plus sombres de l’histoire du XXe siècle ne se répètent jamais, a-t-il ajouté, rappelant qu’à chaque fois qu’un État tente de s’écarter de cet ordre, la communauté internationale doit réagir. 

À ce propos, le représentant a évoqué « l’agression de la Russie contre l’Ukraine », qui constitue une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des autres principes clefs du droit international et du droit international humanitaire.  Jugeant impératif que tous les membres du Conseil de sécurité rejettent un tel comportement de la part de la Russie et poursuivent leurs efforts pour mettre fin à son agression afin de préserver la crédibilité du Conseil, il a également noté que la confiance « va de pair avec la confiance dans la capacité de la communauté internationale à gérer et à surmonter avec succès les crises et les défis ». 

Aussi le représentant a-t-il indiqué que le renforcement de la résilience doit être une priorité en vue d’améliorer la gouvernance aux niveaux local, régional et mondial, là où peuvent s’absorber les chocs et les perturbations initiaux. En outre, il a appelé au renforcement du rôle de l’ONU en tant que coordonnateur d’efforts de prévention et de consolidation de la paix dans les domaines en plein essor que sont la cybersécurité, l’énergie durable ou encore l’information et la science fondées sur les preuves.

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande), qui s’exprimait au nom des pays du groupe CANZ ( Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a constaté que la confiance dans la capacité du Conseil à s’acquitter efficacement de son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales est faible.  De fait, a-t-elle étayé, celle-ci a notamment été érodée par la guerre d’agression illégale de la Russie contre un État souverain, l’Ukraine.  Elle a encouragé au respect des engagements en faveur d’une participation et d’un leadership pleins, égaux et significatifs des femmes dans tous les aspects de la paix et de la sécurité.  Elle a également mis en avant les efforts continus des pays du groupe CANZ pour promouvoir la participation les Premières nations et des peuples autochtones à leurs propres processus politiques et de paix.  De même, elle a préconisé de renforcer l’engagement avec les organisations pertinentes, notamment l’Union africaine, l’Organisation des États américains (OEA), l’Organisation de la coopération islamique, (OCI), l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et le Forum des îles du Pacifique.  Alors que le Nouvel Agenda pour la paix prend forme, la déléguée a préconisé d’éviter tout « doublon » et à tirer les leçons des « faux pas » du passé.

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a déclaré que la construction d’une paix durable exige une approche holistique et inclusive qui va au-delà des simples efforts visant à mettre fin aux conflits.  Une consolidation de la paix réussie exige des efforts coordonnés et collectifs pour bâtir des sociétés résilientes.  Elle exige aussi de s’attaquer aux causes profondes et de promouvoir la bonne gouvernance et le développement durable, a-t-il affirmé, en soulignant l’importance de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité. 

La Slovénie soutient un financement prévisible et durable, y compris à partir des contributions fixées par l’ONU, pour les opérations dirigées par l’Union africaine et autorisées par le Conseil de sécurité de l’ONU, a déclaré le représentant. Il a estimé que davantage devait être fait pour soutenir le rôle crucial des femmes dans les processus de consolidation de la paix et de prise de décisions, rappelant que son propre pays est le septième le plus pacifique au monde, selon le Global Peace Index 2022. 

Après avoir souligné le rôle de la jeunesse comme agent essentiel du changement, le représentant a assuré que la Slovénie reste déterminée à continuer de travailler avec ses partenaires pour construire et favoriser un avenir plus sûr et pacifique pour tous. 

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a jugé que la première condition pour instaurer la confiance est la bonne foi, telle qu’établie à l’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Si les obligations internationales librement convenues ne sont pas remplies de bonne foi, l’échafaudage de règles que nous avons laborieusement construit ensemble « ne sert à rien », a-t-il fait valoir, appelant à un strict respect du droit international, qui reste « la langue commune laissée aux États pour rechercher une solution en recourant à des moyens pacifiques ». 

Pour le représentant, le Conseil de sécurité s’est vu confier un rôle privilégié dans la promotion de la confiance car c’est à lui de veiller au respect des obligations juridiques dans les matières relevant de sa compétence et d’exiger que les États s’y conforment de bonne foi.  En plus de s’assurer du bon respect de ses résolutions, le Conseil peut aussi faire usage des pouvoirs qui lui sont conférés par la Charte des Nations Unies, par exemple en faisant des recommandations en vue de l’exécution des arrêts de la Cour internationale de Justice (CIJ), lorsque l’une des parties ne respecte pas ses obligations.  À cet égard, le représentant a relevé que la compétence consultative de la CIJ peut contribuer à la prévention des conflits, comme en témoignent les demandes de plus en plus fréquentes d’avis consultatifs que lui adresse l’Assemblée générale.  Une relation étroite entre le Conseil de sécurité et la CIJ est donc nécessaire pour le règlement pacifique des différends, a-t-il souligné, avant de réitérer le soutien de son pays à un « Nouvel Agenda pour la paix » qui permette de mieux comprendre les facteurs structurels des conflits et de promouvoir le renforcement de l’état de droit. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a constaté que l’érosion de la confiance dans le système politique et économique international est généralisée.  Il a estimé qu’elle était due à l’évolution d’un environnement sécuritaire mondial toxique où les États en sont venus à croire que s’équiper pour la guerre est la meilleure garantie de préserver la sécurité, la souveraineté et l’indépendance nationales.  La confiance entre les États s’est érodée principalement parce que les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies ont été constamment violés par des États puissants et leurs alliés et parce qu’une attention insuffisante a été accordée à la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté.  Le délégué a appelé le Secrétaire général à préparer un examen annuel des situations inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité où les principes de la Charte sont violés et où les résolutions du Conseil restent inappliquées, suggérant au Conseil d’utiliser les Chapitres VI, VII et VIII de la Charte pour amener les États violant ces principes à s’y conformer.  Ce serait là le meilleur moyen de protéger l’avenir et le présent, a-t-il estimé. 

Il a appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment la pauvreté, la faim, l’occupation et l’oppression étrangères, l’injustice, les violations des droits humains et l’impact des changements climatiques, estimant que ces questions devraient occuper une place centrale dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.  En outre, la pandémie et la crise du développement qu’elle a entraînée ont érodé la confiance dans le système international en raison du large déficit de solidarité à l’égard de ceux qui ont le plus souffert sans qu’ils en soient responsables, a-t-il ajouté, critiquant les institutions de Bretton Woods qui poursuivent des politiques qui exacerbent directement les problèmes budgétaires des pays en développement.  Il a signalé que 54 États étaient en situation de surendettement et risquaient de se retrouver en défaut de paiement, que plus de 100 millions de personnes étaient retombées dans l’extrême pauvreté et que 300 millions de personnes avaient besoin d’une aide alimentaire.  Pour y faire face, il a appelé à fournir un financement de 4 200 milliards d’euros par an pour atteindre les ODD, par la création et la réaffectation de droits de tirage spéciaux (DTS), la recapitalisation des banques multilatérales de développement, ainsi que le respect des engagements en matière d’APD et de financement de la lutte contre les changements climatiques, entre autres mesures. 

M. GIANLUCA GRECO (Italie) a déclaré que, pour atteindre les objectifs de consolidation de la paix et « rétablir le cercle de confiance », le fossé entre les sociétés et les organes pertinents de l’ONU doit être comblé.  Il est essentiel de respecter les besoins, les aspirations et les propositions des pays et communautés, le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix ayant une responsabilité particulière à cet égard, a insisté le représentant.  C’est en ce sens qu’il a invité les deux organes à renforcer l’inclusivité de leur fonctionnement et processus de prise de décisions, à fonder leur action sur une connaissance approfondie des communautés et des peuples concernés, à promouvoir des sociétés pacifiques, justes et centrées sur les droits de l’homme et sur une relation solide entre les peuples et leurs territoires et à intégrer une perspective de genre dans toutes leurs politiques. 

Le représentant a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix devait être entendu comme un appel à l’action pour rétablir la confiance dans un multilatéralisme efficace, capable de prévenir les conflits et de maintenir une paix durable.  À cette fin, il a préconisé de relancer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 « en commençant par assurer la sécurité alimentaire de tous » et de soutenir les efforts régionaux de prévention.

M. JORGE VIDAL (Chili) a estimé que la confiance entre les différents acteurs qui œuvrent pour la paix assure la fluidité des communications et favorise l’institutionnalisation de la conduite de ces acteurs, ce qui permet de minimiser les risques de confrontation et d’incertitude.  Il faut donc créer cette confiance.  À cette fin, le représentant a conseillé d’analyser soigneusement les causes profondes des conflits, afin de comprendre les besoins différenciés et les vulnérabilités qui peuvent être à l’origine de la violence. 

De l’avis du représentant, la construction d’une paix durable n’est possible qu’avec la participation de la société civile à toutes les étapes de la résolution des conflits.  Dans cette optique, le Conseil de sécurité doit améliorer son engagement auprès des acteurs locaux, notamment les organisations de la société civile, les groupes de femmes et de jeunes, les universitaires, les journalistes et les activistes en général, afin d’assurer la prise en compte de leurs perspectives et expériences dans les processus décisionnels. 

Enfin, le représentant a recommandé l’inclusion globale de la société civile, qui peut aider les pays en conflit et en transition vers la paix à trouver des solutions innovantes en mettant en œuvre des politiques publiques qui font l’objet d’un large consensus et d’un grand soutien. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a déclaré que, compte tenu du faible niveau de confiance actuel au sein de la communauté internationale, des actions spécifiques étaient nécessaires de la part du Conseil de sécurité, « qui souffre du plus grand déficit de confiance ».  Tout d’abord, a-t-il préconisé, il convient que les délégations porte-plumes soient réparties entre membres permanents et non permanents et que les dossiers africains bénéficient de porte-plumes africains.  Ce changement pourrait être mis en œuvre en janvier 2024 et au-delà, a-t-il préconisé.  Dans la perspective d’une réforme plus profonde de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, la confiance sera également instaurée par les pays qui aspirent à devenir membres permanents et démontreront, « par des actes et pas seulement par des discours », qu’ils prendront leurs responsabilités au sérieux, a estimé le représentant .  Il a appelé ces derniers à montrer concrètement qu’ils écoutent les points de vue de l’Union africaine, des pays africains et des petits États insulaires en développement et qu’ils y répondent positivement .  Le Conseil doit en outre être plus accueillant et donner suite aux avis de la CCP, a ajouté le délégué, en plaidant pour la mise en place d’un Fonds de consolidation de la paix doté de ressources suffisantes.

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a estimé que le renforcement de la confiance pour pérenniser la paix nécessite une approche multiforme impliquant divers acteurs, notamment les gouvernements, les organisations internationales, la société civile et les communautés.  S’agissant du système des Nations Unies, le représentant a dit attendre de lui qu’il promeuve un dialogue et une participation inclusifs, éléments essentiels pour instaurer la confiance entre et au sein des différents pays.  De même, les États Membres de l’ONU et les autres parties prenantes devraient investir dans des programmes d’éducation et d’information qui favorisent la compréhension et la tolérance, et qui luttent contre les discours de haine et la désinformation, a préconisé le représentant. 

Selon le représentant, les gouvernements devraient également accorder la priorité aux politiques et programmes qui favorisent le développement économique, la création d’emplois et la protection sociale, tout en appuyant une réforme du système financier international.  Il convient d’autre part que les États Membres et les autres parties prenantes telles que les institutions financières internationales investissent dans des institutions qui promeuvent l’état de droit, les droits humains et la bonne gouvernance, et qui répondent aux besoins de la population, a poursuivi le délégué, pour qui il importe aussi de s’attaquer aux inégalités et aux discriminations.  Enfin, il a rappelé que la coopération internationale est essentielle pour instaurer la confiance et maintenir la paix, invitant les gouvernements à travailler ensemble pour relever les défis mondiaux, notamment les changements climatiques, la pauvreté, le terrorisme et les conflits.

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a appelé le Conseil de sécurité à réagir face aux défis multiples et corrélés que le monde affronte actuellement en traitant les causes profondes des conflits, notamment les violations des droits humains, les changements climatiques et les cybermenaces.  Pour rétablir la confiance de la communauté internationale dans son action, le Conseil devrait selon lui être plus vigilant sur les questions des droits humains et de l’état de droit, notant que les conflits étaient toujours liés à leur violation.  Il aussi souligné que la reddition de comptes pour ces violations au sortir d’un conflit était capitale pour éviter sa résurgence, estimant en outre que le Conseil de sécurité devrait être saisi des violations des droits humains dans le monde entier, notamment en République populaire et démocratiques de Corée (RPDC).  Il s’est aussi inquiété de la désinformation qui menace le socle même de la démocratie. 

Poursuivant, le représentant a plaidé en faveur de l’inclusivité dans les efforts de consolidation de la paix et appelé le Conseil à donner plus d’occasions aux femmes, aux jeunes et à la société civile de prendre part à ses débats afin qu’ils puissent apporter « des idées plus pragmatiques et pertinentes » pour la consolidation de la paix.  Après avoir exprimé sa préoccupation au sujet de la condition des femmes en Afghanistan, il a espéré que le Secrétaire général refléterait ces valeurs dans son Nouvel Agenda pour la paix.  Il a également appelé le Conseil à mettre en œuvre ses propres résolutions et à éviter les veto qui se contredisent comme dans le cas des questions de non-prolifération nucléaire en RPDC.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, de l’Union africaine (UA), a affirmé que l’inclusivité, des cadres normatifs clairs et une approche factuelle sont des principes clefs pour entourer le processus de paix durable de toute la confiance nécessaire.  À cet égard, elle a souligné qu’en matière de défense et de sécurité, le renforcement des mécanismes de démobilisation, de désarmement et de réintégration (DDR) et des réformes du secteur de la sécurité est crucial pour prévenir les conflits et l’instabilité.  Elle a indiqué que l’UA a déployé des équipes techniques dans plusieurs pays africains pour, « à leur demande », aider à la conduite des processus de DDR et de réforme de sécurité.  Selon elle, le Conseil de sécurité devrait envisager des moyens innovants d’appui complémentaire à ces processus de prévention des conflits, cela en accordant une importance accrue aux points de vue nationaux relatif à la leur conception.  Pour ce qui est de la gouvernance, l’intervenante a indiqué que l’UA continue d’œuvrer à la mise en place de cadres juridiques fermes pour mettre un terme « à l’ère des changements anticonstitutionnels de gouvernement ». Les chefs d’État et de gouvernement de l’UA ont ainsi expriméà Malabo l’année dernière leur détermination à renforcer encore l’efficacité et la durabilité de l’appui de l’UA aux États membres en situation de transition politique et postconflit, a-t-elle fait observer. 

La représentante a par ailleurs indiqué que la Commission de l’UA a récemment déployé des équipes techniques multidimensionnelles dans certains États membres, pour notamment y apporter une aide en matière de constitutionnalisme et de bonne gouvernance.  Des équipes techniques à long terme seront également déployées pour l’identification des pays en reconstruction postconflit, l’objectif étant de rétablir la relation de confiance perdue entre les citoyens et les autorités nationales, et ce en rapprochant les institutions locales et nationales du citoyen ordinaire, a-t-elle encore signalé.  Enfin, insistant sur le fait que l’établissement de la confiance est crucial pour le maintien de la paix, elle a souligné l’importance d’optimiser la mise en œuvre des efforts d’intérêts mutuels de l’UA et de l’ONU, y compris dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a souligné le lien « puissant » qui existe entre la paix durable et la protection de la liberté d’expression.  Il s’est dit extrêmement préoccupé par les menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et les journalistes, qui sont de plus en plus discrédités et menacés.  Selon lui, le Conseil de sécurité et les Nations Unies doivent s’engager plus activement pour protéger les journalistes et condamner le harcèlement ainsi que les représailles contre les représentants de la société civile qui collaborent avec l’ONU. 

Alors que les conventions internationales relatives aux droits humains sont systématiquement violées dans de nombreux pays tels que l’Afghanistan, le Myanmar et la Syrie, le Conseil de sécurité lui-même est devenu une « scène de diffusion de la désinformation », entre autres dans le contexte de l’agression russe contre l’Ukraine, a affirmé M. Skoog.  Des informateurs de la société civile ont en outre été intimidés au sein même du Conseil, et ensuite punis pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, a-t-il rappelé.  « Cela doit cesser », a déclaré le représentant, pour qui le Conseil, en tant qu’organe principal de protection de la paix et de la sécurité internationales, se doit d’incarner la Charte des Nations Unies, le droit international humanitaire et les droits humains. 

Les représentants spéciaux, les envoyés et les médiateurs du Secrétaire général peuvent avoir un impact réel sur la résolution des conflits, a poursuivi le représentant.  De même, le dialogue, la médiation et les bons offices devraient être inclus dans le Nouvel Agenda pour la paix en tant qu’outils de prévention des conflits.  L’Union européenne soutient les communautés libérées des Chabab en Somalie et aide la République centrafricaine à établir un cadre juridique permettant de restructurer l’organisation de la police.  Une grande partie de cet appui est acheminé par l’intermédiaire de l’ONU, par exemple au Yémen, où l’Union européenne joue un rôle de coordination de la médiation Track II et d’appui au cessez-le-feu.  Il est cependant crucial que ces instruments soient inclusifs, a insisté le représentant, en expliquant que les sociétés les plus égalitaires entre les sexes sont aussi les plus pacifiques. 

Enfin, a dit M. Skoog, l’ONU doit utiliser les données et les preuves les plus fiables pour façonner ses décisions.  À cet égard, les recherches du Fonds d’analyse des risques complexes devraient selon lui alimenter les travaux du Conseil.  Malgré toutes les preuves dont nous disposons sur les changements climatiques, certains membres du Conseil continuent de « nier les faits », a-t-il déploré.  Maintenir la vérité dans cet organe est essentiel pour conserver la confiance dans le système onusien, a-t-il ajouté. 

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a dit avoir assisté ces dernières années à des déficits de confiance croissants entre les personnes et les institutions, y compris les Nations Unies, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et des conflits en cours.  Il s’est alarmé de la mise à l’épreuve constante de la capacité du Conseil de sécurité à faire et maintenir la paix, alors que les défis à la paix se sont aggravés avec l’émergence de menaces nouvelles et non conventionnelles. 

Dans ce contexte, le représentant a appelé le Conseil à faire preuve d’unité et de détermination pour répondre efficacement aux menaces visibles à la paix et à la sécurité internationales et à utiliser ses outils existants pour protéger les plus vulnérables.  Il a rappelé à cet égard que près de six ans se sont écoulés depuis que les minorités rohingya ont été expulsées en masse de l’État rakhine, au Myanmar.  Constatant qu’aucune mesure efficace n’a été prise par le Conseil pour remédier à cette situation, il l’a invité à « revenir sur son inaction » pour restaurer la confiance.  Notant que les opérations de maintien de la paix restent l’un des outils les plus crédibles de l’ONU pour instaurer la confiance, il a souhaité que la contribution des soldats de la paix à la protection des civils et au renforcement des institutions des pays hôtes soit exploitée de manière adéquate.  Il est tout aussi important, selon lui, d’accroître les investissements dans les composantes de consolidation de la paix des missions de maintien de la paix. 

Pour le Bangladesh, la Commission de consolidation de la paix joue un rôle complémentaire important dans la pérennité du maintien de la paix.  En raison de sa structure et de sa méthode de travail, elle est la mieux placée pour contribuer au renforcement de la confiance, a soutenu le représentant, qui a rappelé qu’en tant que président de la Commission pendant deux mandats, son pays avait tenté de lui donner de nouvelles perspectives, notamment en renforçant son rôle consultatif, en élargissant sa portée géographique et en offrant un espace aux pays pour discuter de diverses questions de sécurité « non traditionnelles », telles que les changements climatiques.  Une approche similaire peut être adoptée pour faire face à d’autres menaces émergentes, y compris celles émanant des technologies numériques, a-t-il avancé, avant d’appeler à la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité dans des contextes plus larges, en particulier dans la lutte climatique, la réduction des risques de catastrophe et l’action humanitaire.  Enfin, à l’approche du Sommet de l’avenir de 2024, il a jugé que les consultations en cours sur le Nouvel Agenda pour la paix, le Pacte numérique mondial et la Déclaration pour les générations futures offrent des opportunités d’échange sur les mécanismes permettant d’anticiper et de prévenir les menaces à venir. 

M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a souligné l’importance de la confiance pour la paix et l’efficacité du multilatéralisme. Le déclin de la confiance dans le multilatéralisme peut donc être préjudiciable non seulement aux efforts de consolidation de la paix, mais aussi au maintien de la paix mondiale, a-t-il dit, appelant à faire de la promotion de la confiance une caractéristique importante du Nouvel Agenda pour la paix. 

Déclarant venir d’une région qui a transformé un profond déficit de confiance en « confiance stratégique », le représentant a rappelé que son pays a toujours prôné le dialogue, la coopération et la recherche d’un consensus au niveau régional.  Il a ajouté que les pères fondateurs de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) avaient choisi de se concentrer sur l’établissement de la confiance par le dialogue et la coopération pour promouvoir le développement économique et l’élimination de la pauvreté.  Parmi les cadres régionaux élaborés pour instaurer la confiance, faire progresser la coopération et renforcer l’architecture de paix régionale, il a cité le Traité d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est et le Traité de Bangkok créant la zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est, ainsi que les efforts de consolidation de la paix dans la région au sens large par le biais des différents mécanismes de l’ASEAN. 

Le représentant a d’autre part estimé qu’une collaboration étroite entre le Conseil de sécurité et d’autres mécanismes multilatéraux est cruciale pour instaurer la confiance et consolider la paix.  Le travail des mécanismes de développement des Nations Unies, par exemple, peut traduire les stratégies de consolidation de la paix adoptées par le Conseil de sécurité en actions sur le terrain, a-t-il fait valoir, avant d’appeler à un soutien adéquat et à des ressources prévisibles, y compris un financement durable, pour permettre à ces mécanismes de mener à bien leur travail.  Le représentant a par conséquent plaidé pour un élargissement des sources de financement, notamment par le biais de partenariats avec le secteur privé, ainsi que via la coopération Sud-Sud et triangulaire.  Enfin, après avoir souhaité que toutes les expériences disponibles soient prises en compte dans l’élaboration du Nouvel Agenda pour la paix, il s’est prononcé pour la création d’une plateforme qui permettrait au Conseil de procéder à des échanges d’expériences, y compris avec des entités régionales.

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a affirmé que les droits humains devraient être au cœur des actions en faveur de la paix et de la sécurité, et que la coopération avec la société civile, les médias, les femmes, les filles et les jeunes, était essentielle pour instaurer la confiance.  Rappelant que la Roumanie était membre actif du Conseil des droits de l’homme, le représentant a souligné l’importance qu’elle accorde à ces questions.  Il a aussi souligné le rôle crucial des programmes « paix et sécurité » pour les femmes et les jeunes et de la nécessité de les intégrer dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général. 

Aux côtés des États-Unis, la Roumanie assurera la coprésidence du réseau des points focaux pour la paix et la sécurité mondiales en 2023, a rappelé M. Feruta, qui a vivement encouragé le renforcement de la coopération entre les différentes parties prenantes au processus de consolidation de la paix, notamment les organisations régionales et les institutions nationales.  Il a estimé que l’instauration de la confiance passe par la création de partenariats qui se renforcent mutuellement, constituant un élément essentiel du système multilatéral. 

Rappelant que la Journée mondiale de la liberté de la presse était célébrée aujourd’hui, le représentant a salué le travail des journalistes qui s’efforcent de débusquer les fausses nouvelles afin que le public soit correctement informé, qualifiant leur activité de « tremplin pour l’instauration de la confiance » et estimant qu’il n’était pas exagéré de dire que « la paix commence avec le journalisme ». 

Pour M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie), le renforcement de la confiance mutuelle entre les différents acteurs de l’architecture de consolidation de la paix est essentiel pour améliorer la résilience et parvenir à une paix et une stabilité durables, en particulier dans les régions et les pays touchés par un conflit.  La confiance se développe à travers un processus d’engagement collectif qui aide les communautés et les sociétés à renforcer leurs institutions sociales et à construire la résilience et la cohésion sociale, a-t-il fait valoir, notant que l’inclusivité est essentielle dans ce processus.  Il a appelé la communauté internationale à continuer de développer et mettre en œuvre le cadre normatif international.  Cela est d’autant plus important à la lumière des développements technologiques rapides, des nouvelles menaces pour la sécurité, et de la propagation croissante de la désinformation et des informations fallacieuses, ce qui a un impact particulièrement négatif sur la confiance entre les acteurs. 

La prévisibilité et la reddition de comptes étant les pierres angulaires de tout ordre stable après un conflit, le représentant a souligné que le soutien international et local aux processus de consolidation de la paix dépend largement de la capacité des acteurs à démontrer de manière crédible leur respect de l’état de droit international. Il a appelé à inclure les questions liées aux crises énergétique et alimentaire, au soutien à apporter aux institutions efficaces, à la sécurité humaine et à la fracture numérique dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général. 

M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a reproché à la communauté internationale, représentée par les Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité, de n’avoir pas été en mesure de répondre de manière adéquate à l’érosion du système multilatéral et de la validité d’un ordre international fondé sur des règles, laissant ainsi libre cours à une crise de confiance entre les États Membres qui s’est répandue dans toutes les institutions multilatérales. Pour contrer cette tendance, le représentant a prôné la défense et la promotion du multilatéralisme, dans le cadre du strict respect des buts et principes de la Charte, dont le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale, l’égalité souveraine entre États et le non-recours à la force; les conditions de la légitime défense étant clairement définies au Chapitre VII.  Le respect du droit international, a-t-il souligné, sert la sécurité collective et de nombreux conflits auraient pu être évités si les États avaient respecté les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, en particulier le principe du règlement pacifique des différends.  En l’occurrence, les autres organes des Nations Unies doivent agir chaque fois que le Conseil de sécurité est paralysé.

M. JUAN ANTONIO BENARD ESTRADA (Guatemala) a estimé que le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure d’assumer sa responsabilité principale dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales après que l’un de ses membres permanents, la Fédération de Russie, a attaqué de manière injustifiée l’Ukraine.  De telles actions unilatérales ne font qu’affaiblir l’état de droit et violent les normes les plus fondamentales du droit international, s’est ému le représentant. Il a ensuite considéré que davantage de cohérence est nécessaire dans la compréhension des approches, des outils et des principes fondamentaux de la consolidation de la paix.  En outre, le Conseil peut et doit bénéficier d’une interaction accrue avec les États Membres qui n’y siègent pas et avec d’autres organes onusiens.  À cet égard, le délégué a reconnu la valeur ajoutée de la Commission de consolidation de la paix (CCP) en tant qu’organe consultatif du Conseil.  Il a également jugé nécessaire que le « Nouvel Agenda pour la paix » inclut une vision holistique des conflits, soit un « continuum » qui englobe la totalité du cycle des conflits –prévention, intervention immédiate, maintien de la paix, consolidation de la paix et développement durable–, afin que le Conseil de sécurité mette en œuvre son mandat, conformément aux besoins et aux réalités du XXIe siècle. 

M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a rappelé que l’établissement de la confiance fait partie des principes de la Charte, jugeant à cet égard que la confiance dans les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale et de non-ingérence est fondamentale.  Le représentant a également insisté sur le principe d’appropriation nationale car chaque État a le droit de choisir sa voie politique, économique et culturelle. L’appropriation nationale implique des choix politiques faits par les États eux-mêmes, a-t-il dit, avant de souligné que les prérogatives pour le financement de la consolidation de la paix ne sauraient aller à l’encontre de ces principes.  Le délégué a d’autre part jugé que la représentation de l’Afrique au sein du Conseil de sécurité est « injuste » et que le statu quo actuel sape sa crédibilité.  Après avoir dénoncé le caractère nuisible des mesures coercitives unilatérales, il s’est dit convaincu que les défis liés au renforcement de la confiance peuvent être surmontés par le biais de la solidarité, sous l’égide de l’ONU et dans le respect des normes internationales.

M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a estimé que le multilatéralisme traverse sa période la plus difficile depuis la création des Nations Unies, en raison de l’attaque menée par un membre permanent du Conseil de sécurité contre ses principes fondateurs.  Le représentant a dénoncé la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine et son occupation de 20% du territoire de la Géorgie.  Ce sont là, a-t-il dit, des violations flagrantes des principes fondamentaux du droit international qui portent un coup terrible à la sécurité européenne et à l’ensemble de l’ordre international.  Qualifiant l’agression russe contre l’Ukraine de « test décisif » de l’incapacité du Conseil à jouer efficacement son rôle, il a appelé à d’autres moyens de faire respecter la Charte, notamment contre les abus dans l’exercice du droit de veto.  Ce droit doit être limité lorsqu’un membre permanent du Conseil est partie à un conflit en question, conformément à l’Article 27 de la Charte, a-t-il rappelé. 

Il a aussi rappelé que la Géorgie a fait l’amère expérience d’une telle situation quand, suite à l’agression militaire massive de la Russie en août 2008, le mandat de la Mission d’observation des Nations Unies en Géorgie (MONUG) a été « effrontément annulé » par un veto russe, pourtant partie prenante au conflit. Cette décision a créé un vide total dans les territoires occupés par la Russie, au moment où l’on avait le plus besoin d’une implication internationale, a-t-il expliqué.  Regrettant que 15 ans plus tard, la Fédération de Russie ne respecte toujours pas ses obligations internationales et continue de violer l’accord de cessez-le-feu du 12 août 2008, conclu sous l’égide de l’Union européenne, il a dénoncé « l’occupation illégale des régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali » et les graves violations des droits humains qui y sont commises, « clairement attestées » par les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour pénale internationale (CPI).  Il a également rappelé l’arrêt du 7 mars 2023 de la Cour européenne, qui a confirmé que la région d’Abkhazie était sous le contrôle effectif de la Fédération de Russie, avant même l’agression d’août 2008.  La Cour a aussi établi la responsabilité pleine et entière de la Fédération de Russie dans les violations des droits de l’homme dans la région occupée, a conclu le représentant. 

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déclaré que le Conseil doit toujours insister sur le strict respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, demander des comptes et lutter contre l’impunité.  Les droits de l’homme sont un fondement essentiel du maintien de la paix et doivent être reconnus comme tels, a-t-il ajouté, avant de demander instamment aux membres du Conseil d’inviter plus régulièrement le Haut-Commissaire aux droits de l’homme à faire des exposés.  Il a également estimé qu’à l’ère des « fake news », le Conseil a la responsabilité de prendre des décisions fondées sur des preuves, qu’elles soient de nature scientifique ou liées aux informations qui lui sont transmises.  Le Conseil de sécurité doit aussi approfondir sa coopération avec la Commission de consolidation de la paix et accorder la priorité aux approches soucieuses de l’égalité des sexes et aux perspectives sensibles aux causes profondes des conflits.  Le représentant a d’autre part exhorté le Conseil à utiliser des données fiables, des expertises et des avancées technologiques susceptibles d’améliorer la transparence, l’exactitude et l’inclusion. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a considéré que pour assurer l’avenir, il faut avant tout tirer les bons enseignements de l’histoire.  Sous sa forme actuelle, le Conseil de sécurité nie une représentation permanente à l’Afrique, l’Amérique latine et à « la plus grande démocratie du monde », perpétuant ainsi les inégalités.  La réforme du Conseil est le premier pas vers l’établissement de la confiance nécessaire au maintien de la paix, a martelé la représentante.  Les institutions multilatérales doivent être plus responsables vis-à-vis de leurs membres, et plus ouvertes à la diversité des points de vue, notamment ceux du Sud et des pays en développement.  Le Conseil de sécurité ne pourra offrir de solutions efficaces que s’il donne une voix aux laissés-pour-compte.  Il doit collaborer davantage avec les organisations régionales, qui ont un rôle important à jouer dans la résolution des problèmes mondiaux et dans les efforts multilatéraux.  Une approche globale axée sur le développement durable, une croissance économique inclusive et les processus politiques est essentielle pour la consolidation et le maintien de la paix.  L’approche de l’Inde en la matière se fonde sur l’appropriation nationale et les priorités de développement des États Membres, a-t-elle noté, notamment grâce à ses partenariats avec les pays du Sud et aux forums bilatéraux et multilatéraux dans les situations d’après conflit.

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est dit fermement convaincu que le dialogue constitue une base solide sur laquelle le système multilatéral peut s’appuyer et que la confiance en est le socle.  Pour instaurer la confiance, nous devons reconnaître qu’elle ne peut être contrainte ou fabriquée.  Dès lors, tous les acteurs des relations internationales, en particulier les grandes puissances, doivent agir de bonne foi et faire preuve de responsabilité, tout en prenant pleinement en considération les intérêts légitimes de toutes les parties prenantes.  Il n’y a pas de meilleur moyen d’instaurer la confiance avec les pays hôtes et leur peuple que de s’engager dans un dialogue ouvert et des interactions franches avec toutes les parties prenantes, tout en respectant leur indépendance, leur souveraineté et leur intégrité territoriale.  Cette approche doit être intégrée dans les mandats de toutes les missions de maintien de la paix des Nations Unies, a insisté le délégué. 

M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a estimé que la confiance entre les États Membres est la pierre angulaire de l’Organisation des Nations Unies.  Les conditions de son existence sont, du reste, inscrites dans le préambule et au Chapitre I de la Charte, a-t-il rappelé, ajoutant que les Articles 2.2 et 4.1 établissent spécifiquement le principe de bonne foi comme condition d’admission des États dans l’Organisation.  Constatant toutefois qu’il existe une méfiance croissante entre les États Membres et que cette méfiance affecte la crédibilité de l’ONU dans sa réponse multilatérale aux défis de notre temps, le représentant s’est dit préoccupé par le non-respect des résolutions approuvées par le Conseil de sécurité et la paralysie de l’organe chargé de la paix et de la sécurité internationales. 

Concernant le travail des Nations Unies, le représentant a estimé que la méfiance s’y traduit par la perception de l’ONU, mentionnée dans le dernier rapport sur le développement humain, comme un système « excessivement bureaucratique », éloigné des réalités quotidiennes des peuples qu’elle essaie d’aider.  Le rapport du Secrétaire général sur l’état du Programme de développement durable à l’horizon 2030 corrobore ce sentiment, a-t-il relevé, jugeant impératif de reconstruire la confiance et de forger un « nouveau contrat social » multilatéral et au sein des États, fondé sur les valeurs partagées de démocratie, de solidarité et de droits humains. 

Pour le représentant, le préalable est d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité pour tous, dans le respect des résolutions du Conseil de sécurité.  En ce sens, a-t-il poursuivi, le Nouvel Agenda pour la paix est un plan de revitalisation de l’action multilatérale dans un monde en transition et en concurrence géostratégique.  Il importe donc qu’il prévoie une réforme du Conseil, afin de le rendre plus représentatif, et qu’il promeuve une nouvelle relation institutionnelle entre le Conseil et l’Assemblée générale, qui subordonne les intérêts particuliers au bien commun, a-t-il conclu.

Dans le contexte géostratégique actuel d’érosion de la confiance et de concurrence croissante, Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix offre la possibilité d’affirmer la transparence, l’instauration de la confiance et le dialogue pratique comme alternative à l’acquisition d’armes.  Ce nouvel agenda peut revitaliser les mesures de transparence et de confiance existantes et promouvoir l’élaboration de nouvelles mesures dans le domaine des armes de destruction massive, des armes conventionnelles, du cyberespace et de l’espace extra-atmosphérique, ainsi que des technologies émergentes.  Ces mesures, a-t-elle ajouté, doivent œuvrer à favoriser la compréhension mutuelle, réduire les perceptions et les calculs erronés, améliorer la clarté des intentions et, en fin de compte, réduire le risque de conflit armé.  La déléguée a également encouragé l’utilisation accrue du rapport des Nations Unies sur les dépenses militaires et du registre des Nations Unies sur les armes conventionnelles, qui sont essentiels pour promouvoir la transparence et la responsabilité en matière de dépenses militaires et de commerce des armes.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité à introduire dans les mandats les outils nécessaires pour mieux comprendre les risques posés par le détournement, le trafic illicite et la prolifération des armes et des munitions.  La déléguée a aussi mis l’accent sur l’importance de la collecte de données et de preuves crédibles, y compris l’impact perturbateur de l’intelligence artificielle sur les opérations militaires et les opportunités et les défis qui en découlent. 

Pour M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), la confiance comporte plusieurs facettes qui doivent être prises en compte dans le processus d’élaboration d’un nouvel agenda pour la paix.  À cet égard, il a noté que les causes de la méfiance et de la défiance sont diverses et diffèrent d’un pays à l’autre ou d’une région à l’autre, et qu’il faut donc éviter un diagnostic et des solutions uniques.  Les efforts visant à instaurer, restaurer et pérenniser la confiance doivent être guidés par des preuves empiriques basées sur chaque situation sur le terrain, a-t-il estimé. 

Alors que la confiance, en relation avec les conflits inter ou intraétatiques, reste un élément clef dans tout scénario de consolidation de la paix, le représentant a mis en exergue le fait qu’elle se développe souvent grâce à un dialogue continu, à l’inclusion politique, économique et sociale et à la reconnaissance ou à la compréhension de notre interconnexion et de notre interdépendance.  Les cadres normatifs et les institutions complémentaires peuvent également renforcer la confiance au sein des États et entre les États, a-t-il poursuivi, en citant notamment les institutions nationales visant à fournir les services attendus par la population, ainsi que les entités et accords régionaux qui favorisent la paix et le bon voisinage.  Toutefois, une mise en œuvre, a-t-il concédé, un suivi et une évaluation scrupuleux sont importants pour que ces mesures soient efficaces. 

Quant à la confiance dans le contexte des organisations intergouvernementales telles que les Nations Unies et les institutions financières, le représentant a rappelé que le Secrétaire général de l’ONU appelle à un multilatéralisme plus efficace dans la réalisation de ses promesses et, par conséquent, à un multilatéralisme plus fiable.  À cet égard, le Conseil de sécurité doit jouer son rôle en s’assurant qu’il est cohérent et efficace dans le traitement des questions de paix et de sécurité, afin que les personnes dans des situations de conflit de longue date, telles que la Palestine et le Sahara occidental, aient confiance que le système multilatéral traitera leur situation de la même manière équitable et basée sur le droit international que d’autres conflits à l’ordre du jour international. 

Enfin, le représentant a mis l’accent sur le rôle des partenariats entre différents acteurs sur des objectifs communs aux niveaux local, national, régional et international pour promouvoir la confiance entre les dirigeants, les institutions et le système des Nations Unies.

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a considéré que l’inclusion et un financement adéquat sont aussi indispensables à l’instauration de la confiance que celle-ci est nécessaire à une paix durable.  Elle a cité l’exemple des équipes de protection des femmes de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) qui jouent un rôle important dans l’action précoce au sein des communautés locales et des camps de personnes déplacées.  Considérant que 60% de la population du Soudan est composée de jeunes, et que la révolution de décembre a été menée au premier chef par les jeunes et les femmes, la nécessité d’inclure ces voix est une évidence qui n’est pas suffisamment prise en compte par le Conseil de sécurité, a-t-elle regretté.  De même, le Conseil devrait inviter plus souvent des femmes et des représentants des jeunes pour discuter des questions relatives à la paix et à la sécurité.  Il en va de même en ce qui concerne les consultations sur le Nouvel Agenda pour la paix. 

S’agissant du financement, la représentante a soutenu l’utilisation des contributions fixées pour le Fonds pour la consolidation de la paix, ce qui améliorerait selon elle la prévisibilité du financement tout en envoyant un signal fort indiquant que la consolidation de la paix est soutenue par l’ensemble des États Membres de l’ONU.  Elle a encouragé les délégations à soutenir ce principe dans le cadre des négociations en cours au sein de la Cinquième Commission.

M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a estimé que la consolidation de la paix exige d’accorder une priorité constante au développement afin de s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Fort de sa propre expérience en tant que pays émergeant d’un conflit, le Népal met l’accent sur les efforts de consolidation de la paix fondés sur un dialogue politique constant et des processus politiques inclusifs, a assuré son représentant.  À cet égard, la participation significative des femmes, des jeunes et des minorités est la pierre angulaire de l’instauration de la confiance au sein du système de gouvernance.  Le délégué a appelé à renforcer la coopération entre le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, l’ECOSOC et la CCP et de veiller aussi aux synergies entre les équipes de pays de l’ONU, les institutions financières internationales et les organisations régionales afin de rassembler des ressources adéquates pour les besoins de la consolidation de la paix.  L’instauration de la confiance au sein des nations ou entre elles passe par un dialogue permanent et des échanges francs qui leur permettent d’acquérir une compréhension commune, a-t-il plaidé en conclusion. 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a constaté que, dans la géopolitique actuelle, le déficit de confiance croissant entre et parmi les pays est devenu un défi pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il a donc vu dans l’appel du Secrétaire général en faveur d’un nouvel agenda pour la paix une entreprise importante pour pérenniser la confiance pour le maintien de la paix.  Ce nouvel agenda doit, selon lui, être centré sur les personnes et renforcer l’inclusion des femmes, des jeunes et de la société civile dans le cadre du droit international. 

De l’avis du représentant, l’expérience de la région de Bangsamoro, dans le sud des Philippines, est l’illustration d’un processus de paix centré sur les personnes.  Une grande importance y a été accordée à la manière dont les communautés peuvent atteindre la qualité de vie souhaitée et le processus de normalisation a favorisé une feuille de route pour la paix et le développement qui est à la fois inclusive, participative et sensible aux conflits, à la culture et au genre, a-t-il souligné. 

Sur la base de cette expérience, le représentant a souhaité que le Nouvel Agenda pour la paix donne voix au chapitre à tous les États Membres, en particulier aux pays et à la région concernés, dans la prise de décisions.  Il a également plaidé pour une plus grande collaboration entre les États Membres, les organisations de la société civile et les autres parties prenantes afin de renforcer la compréhension, d’identifier les objectifs communs et de faciliter la coopération.  Un effort est par ailleurs nécessaire en matière de prévention et de règlement des conflits, notamment le soutien aux négociations, la promotion du dialogue et la fourniture d’une médiation et d’autres formes d’assistance pour aider à prévenir ou à résoudre les conflits, a-t-il préconisé. 

Le représentant a d’autre part estimé que les mécanismes et programmes des droits de l’homme, tels que le Programme conjoint Philippines-ONU pour les droits de l’homme, constituent un bon modèle pour favoriser la confiance entre les États Membres, l’ONU et d’autres parties prenantes, tout en établissant des partenariats durables pour la démocratie, la justice et l’état de droit.  Enfin, après avoir appelé au renforcement des capacités et à l’utilisation de la technologie au service de la paix, il a jugé nécessaire de consolider les institutions pour la paix, en particulier la Commission de consolidation de la paix, en injectant les ressources nécessaires et en appuyant les processus participatifs.

Pour promouvoir la paix régionale et internationale, a indiqué M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan), mon pays a pris plusieurs initiatives dont la Conférence sur l’interaction et les mesures d’établissement de la confiance en Asie, le Processus d’Astana sur le Syrie ou encore la création du Centre pour les objectifs de développement durable en Asie et en Afghanistan.  Le représentant a jugé essentielles la collecte de données fiables sur tous les défis auxquels est confrontée l’ONU.  C’est essentiel, a-t-il expliqué, pour les projections, la réaction, l’alerte rapide, la gestion et le partages des informations. Les nouvelles technologies doivent être utilisées pour contrer la désinformation qui finit par alimenter le mécontentement et l’hostilité dans les sociétés. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a déclaré que les processus de justice transitionnelle, tels que les commissions vérité, peuvent jouer un rôle dans le renforcement de la confiance en encourageant la reddition de comptes pour les violations des droits humains, en reconnaissant la souffrance des victimes et en facilitant la réconciliation entre différents groupes.  D’autres approches du renforcement de la confiance dans le contexte du maintien de la paix comprennent des approches inclusives de la consolidation de la paix, la promotion de cadres normatifs internationaux et l’utilisation d’informations factuelles et de données de haute qualité pour éclairer la prise de décisions, a-t-il énuméré.  Le représentant a souligné que l’efficacité de ces approches dépend de facteurs tels que la légitimité, la participation des communautés et, surtout, de la volonté politique des dirigeants.  À son tour, il a mis l’accent sur la nécessité que les États Membres travaillent de concert à instaurer la confiance à partir des perspectives d’inclusion, de cadres normatifs agréés et de faits vérifiés.  Le Conseil de sécurité a un rôle vital à jouer dans cette entreprise, et nous appelons tous les États Membres à travailler ensemble pour construire un monde plus pacifique et plus prospère, a conclu le représentant.

S’exprimant au nom des pays nordiques, Mme MARIE-LOUISE KOCH WEGTER (Danemark) a commencé par dire que le renforcement de la prévention est un élément clef de l’instauration de la confiance.  Le Nouvel Agenda pour la paix offre une occasion opportune d’accroître l’efficacité de nos efforts collectifs pour maintenir la paix et rétablir la confiance dans nos systèmes, a-t-elle estimé.  À cette fin, il faut envisager de renforcer les capacités de prévention à tous les niveaux, en intégrant la dimension climatique et en rendant opérationnelle la relation étroite entre la prévention des conflits et la protection et la promotion des droits humains. 

Les partenariats équitables contribuent à instaurer la confiance entre parties prenantes et à maintenir la paix, a poursuivi la représentante, pour qui il faut inclure les organisations locales de la société civile, la jeunesse et les femmes. Mais, pour parvenir à de tels partenariats, nous devons disposer d’un financement adéquat, prévisible et durable pour la consolidation de la paix et soutenir en particulier les initiatives de paix menées au niveau local, a-t-elle souligné. 

Pour les pays nordiques, le renforcement de la confiance résultant d’une telle inclusion dans l’ensemble de l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU peut contribuer à renforcer la valeur de l’engagement du Conseil de sécurité auprès de la Commission de consolidation de la paix.  Le rôle de rassembleur de la CCP, qui met l’accent sur l’appropriation nationale et l’inclusivité, ainsi que sur les échanges entre pairs, peut être mis à profit pour prendre en compte un plus large éventail de voix au sein des travaux du Conseil, a estimé la représentante. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a jugé nécessaire de favoriser les approches inclusives dans le cadre des processus de consolidation de paix, afin de bâtir une paix pérenne capable de faire face aux défis actuels et émergents.  Les Nations Unies, et plus particulièrement le Conseil, a-t-il précisé, devraient continuer de faire usage de tous les moyens, instruments et règles mis à leur disposition par la Charte pour la prévention des conflits et le règlement pacifique des différends, notamment la promotion de la médiation et le dialogue en tant que mesures de confiance.  À cet égard, le recours aux bons offices du Secrétaire général demeure fondamental pour promouvoir le règlement pacifique des différends et amener les parties à s’engager dans les négociations, la médiation et d’autres méthodes pacifiques afin de régler leur différend. 

Pour le représentant, il est très important de poursuivre le renforcement de la collaboration entre le Conseil de sécurité et la CCP en vue d’assurer des stratégies plus cohérentes pour renforcer la résilience et l’efficacité des institutions et promouvoir des approches inclusives capables de soutenir des initiatives nationales de consolidation de la paix.  Par ailleurs, il a souligné la nécessité de respecter les principes de bon voisinage et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États.  Le Maroc, a-t-il ajouté, a officiellement lancé son premier plan d’action national pour la paix et la sécurité le 23 mars 2022, en soutien à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité.  Son pays, a dit le représentant, reconnaît également le rôle clef de la jeunesse dans la promotion de la paix et de la sécurité au sein de leurs communautés et partout dans le monde.

M. FAHAD M. E. H. A. MOHAMMAD (Koweït) a fait état d’un système multilatéral déséquilibré, divisé et marqué par des différences de plus en plus profondes entre États Membres.  Il est donc urgent de réexaminer les outils existants, notamment ceux prévus par la Charte, tout en étudiant des instruments modernes comme la technologie et la numérisation, a soutenu le représentant.  Compte tenu du coût élevé d’une crise, le Conseil ne peut se contenter de la gestion des conséquences mais doit aussi étudier des moyens de prévention plus efficaces.  En l’occurrence, les organisations régionales et sous-régionales doivent jouer un rôle plus important.  Par ailleurs, a poursuivi le délégué, les efforts de consolidation et de pérennisation de la paix doivent se baser sur la confiance et si nous voulons nous appuyer sur cette confiance comme pilier du succès des opération de paix, il faut mettre l’accent sur l’appropriation nationale et la participation effective des femmes et des jeunes.  Les efforts politiques doivent s’accompagner d’efforts dans le domaine du développement, a conclu le représentant, en apportant son soutien à « Notre Programme commun » du Secrétaire général qui appelle à la mise en place d’un « Nouvel Agenda pour la paix ». 

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a affirmé que les attentes et la prévisibilité étaient des éléments cruciaux en vue d’établir la confiance.  Étant donné que la guerre la plus sanglante des huit dernières décennies sur le sol européen a commencé au beau milieu d’une réunion du Conseil de sécurité, nous avons incontestablement des problèmes d’attentes et de prévisibilité, a-t-elle ironisé.  Appelant à s’attaquer aux violations en cours de la Charte des Nations Unies, elle a affirmé qu’actuellement, le Conseil n’était pas une référence crédible en la matière parce qu’il était incapable de faire ce pour quoi il avait été créé: maintenir la paix et de la sécurité internationales.  Dénonçant le « comportement irresponsable » d’un seul pays, elle s’est prononcée en faveur d’un rétablissement de la confiance, fondé sur l’équité et la justice, estimant que le langage utilisé dans les documents ne peut avoir d’importance si l’impunité prévaut. 

Elle a martelé qu’il n’y avait pas de demi-solutions au problème susmentionné et que rien ne serait possible si l’obligation de rendre des comptes n’était pas garantie et que des mesures coercitives à l’égard des contrevenants n’étaient pas appliquées.  « Lorsque votre maison est en feu, vous ne vous rendez pas à Home Depot pour acheter du papier peint; il faut d’abord éteindre l’incendie », a-t-elle résumé.  Elle a fustigé le fait que des criminels présumés ont récemment présidé le Conseil, rappelant les États Membres à leur devoir « d’éteindre le feu de l’agression russe ».  Invoquant le souvenir des tribunaux de Nuremberg, elle a espéré que « le futur procès des criminels de guerre russes » jouerait le même rôle, dans l’intérêt de la confiance, de la paix et de l’avenir des Nations Unies.

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a affirmé que le Conseil de sécurité peut contribuer efficacement au maintien de la paix et de la sécurité internationales, en s’attaquant aux causes profondes des conflits, en contribuant à la cessation des hostilités, en renforçant les efforts de prévention des conflits et de consolidation de la paix, en garantissant l’établissement des responsabilités pour les crimes les plus graves, en promouvant la justice et en garantissant la participation pleine, égale et significative de toutes les parties prenantes, y compris les femmes et les jeunes, tout au long des processus de paix.  À cet égard, il a souligné l’importance de mettre pleinement en œuvre les résolutions 1325 (2000) et 2250 (2015) du Conseil de sécurité et de formuler des politiques inclusives adaptées aux processus politiques et aux efforts de paix. Le représentant a prôné à cette fin le renforcement des partenariats du Conseil avec les organisations régionales, la société civile et les autres parties prenantes présentes sur le terrain. De tels partenariats devraient appuyer une approche fonctionnelle et cohérente du maintien de la paix, a-t-il dit. Par ailleurs, il a indiqué que son pays considère le « Nouvel agenda pour la paix » comme le point de départ d’un dialogue constructif entre les interlocuteurs gouvernementaux et non gouvernementaux sur une approche holistique et durable de la consolidation de la paix, tout en ne retirant pas aux États leur rôle primordial dans les domaines de la paix, de la sécurité et du développement. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a constaté que l’architecture mondiale de paix et de sécurité est confrontée à une méfiance croissante de l’opinion publique et que la coopération multilatérale se détériore du fait de l’aggravation des divisions entre États Membres.  Cela compromet la capacité collective à faire face aux menaces communes et à instaurer une paix durable aux niveaux régional et international, a-t-il regretté. 

Les approches des gouvernements et des Nations Unies visant à prévenir les conflits et à promouvoir des sociétés pacifiques et inclusives requièrent un niveau élevé de confiance de la part de leur peuple et entre les peuples, a souligné le représentant, qui a ajouté que la confiance entre les communautés et leur gouvernement est ancrée dans les institutions de l’état de droit, de la justice et de la démocratie.  Le rétablissement de l’état de droit et de la stabilité dans une société meurtrie par la violence va bien au-delà de la cessation de la violence et des accords politiques, a noté le représentant, qui a toutefois ajouté que favoriser la confiance du public et rétablir la confiance dans les institutions judiciaires et de sécurité est une condition préalable pour parvenir à une réconciliation nationale et à une paix durable. 

Il est néanmoins difficile d’y parvenir sans aborder les questions de la responsabilité et de l’impunité, a poursuivi le représentant, pour qui le Conseil de sécurité a un rôle significatif à jouer à cet égard.  En particulier, une réponse prévisible et cohérente du Conseil en cas de crimes atroces pourrait contribuer de manière significative au succès des processus de consolidation de la paix au niveau national, a-t-il estimé, en illustrant son argumentation par le cas de son pays.  Il a ainsi appelé que plus de 27 mois se sont écoulés depuis le coup d’État militaire illégal de février 2021 et que, pendant cette période, le Conseil de sécurité avait publié 7 déclarations à la presse et une déclaration présidentielle, et adopté une toute première résolution dans laquelle il exprime ses préoccupations et ses condamnations répétées des violences contre la population civile et à la mise en œuvre rapide et complète du consensus en cinq points de l’ASEAN.  Pourtant, s’est-il indigné, tous les appels du Conseil de sécurité ont été ignorés par la junte militaire.  Le représentant a donc demandé ce que le peuple du Myanmar pouvait attendre du Conseil de sécurité. Tout en disant comprendre qu’il puisse y avoir des divergences d’approches au sein du Conseil face à un conflit particulier, il a estimé que le Conseil devait dénoncer sans équivoque les meurtres délibérés de civils, en particulier lorsqu’ils sont étayés par des preuves, et prendre des mesures pour que les auteurs de ces meurtres répondent de leurs actes et pour empêcher que d’autres personnes ne perdent la vie. 

Créer la confiance implique montrer l’exemple, a déclaré M. YOUSSEF HITTI (Liban) en appelant le Conseil de sécurité à se montrer cohérent et juste dans le traitement de toutes les violations du droit international ainsi que dans l’application de toutes les résolutions qu’elle adopte.  Renforcer la confiance implique aussi une réforme du Conseil qui doit être plus représentatif et plus inclusif.  Trop souvent et trop longtemps, a poursuivi le représentant, la logique des soins palliatifs a prévalu dans le traitement des crises et des conflits.  Pour dépasser cette logique, il a préconisé la mobilisation d’une variété d’acteurs pour bâtir la paix, à savoir les acteurs locaux, les jeunes, les femmes et la société civile. 

Il a aussi préconisé des échanges plus réguliers entre le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix et appelé les Nations Unies à soutenir les efforts nationaux, avec des ressources financières adéquates, dont celles du Fonds pour la consolidation de la paix dont la prévisibilité et la pérennité doivent être garanties.  Le représentant a aussi attiré l’attention sur les dernières recommandations du Conseil consultatif de haut niveau sur un multilatéralisme efficace. S’attardant sur son pays, il a reconnu que le lien de confiance entre le peuple et ceux qui sont censés répondre à ses attentions, ne pourra être instauré ou restauré sans garantir un état de droit, avec des institutions nationales robustes et un respect des droits humains.  L’état de droit est le ciment de la stabilité, du développement et d’une paix durable. 

Mme AGNES MARY CHIMBIRI MOLANDE (Malawi) a réaffirmé l’attachement de son pays à un ordre mondial fondé sur des règles, insistant sur la transparence et la confiance dans les efforts de paix.  Gardons-nous, s’est-elle expliquée, d’un ordre de dominants et de dominés.  La réalisation d’une paix durable dépend d’un fonctionnement harmonieux et efficace du Conseil de sécurité dont le poids et l’influence doivent être exploités par tous ses membres pour faire respecter un ordre international fondé sur des règles.  Pleinement conscient du multiplicateur de risques que sont les changements climatiques, la déléguée a rappelé l’horrible cyclone qui vient de dévaster son pays.  Avec les milliers de déplacés qu’il a causés, c’est l’harmonie communautaire et la paix mêmes qui sont en jeu.  La situation des déplacés comme celle des migrants nécessitent des processus transparents de consolidation de la paix.  La représentante a conclu, en appelant les Nations Unies à mettre en place des mécanismes de responsabilité pour une bonne utilisation des nouvelles technologies.

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a jugé nécessaire de recourir à la coopération multilatérale pour régler les conflits de manière pacifique et lutter efficacement contre les conflits et les discours de haine.  Selon sa délégation, le respect des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies doit guider les processus de paix, en particulier pour le règlement par la voie diplomatique des différends avant qu’ils ne s’enveniment.  L’ONU et son Conseil de sécurité constituent les principaux moyens de promouvoir la coexistence pacifique, la solidarité, la stabilité et la protection des droits humains, a ajouté le délégué, pour qui toute approche inclusive doit être fondée sur le rôle accru des organisations régionales pour éviter l’escalade des tensions. Enfin, il a appuyé le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, appelant les États Membres à « être à l’unisson au service de l’humanité ».

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) s’est attardé sur trois points, à savoir les cadres normatifs, l’inclusion et la confiance.  S’agissant du premier, il a insisté sur la Charte des Nations Unies et appelé à un engagement renouvelé à ses principes de base.  Dans ce cadre, il a parlé de la sécurité maritime qui exige une approche intégrée, fondée sur la Convention sur le droit de la mer.  Poursuivant sur l’inclusion, il a jugé essentiel de tirer parti du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et en cette Journée mondiale de la liberté de la presse, le représentant a souligné le rôle crucial des médias au moment où l’on voit une désinformation alarmante, la polarisation des discours et des attaques féroces contre les faits, conduisant à l’érosion de la confiance et ouvrant la voie à une confusion qui alimente les crises. Coprésidente avec la France et la Lituanie, du Groupes des Amis de la protection des journalistes, la Grèce, a promis le représentant, est dévouée aux principes d’une presse libre, indépendante et plurielle. 

M. VADIM GUSMAN (Azerbaïdjan) a souhaité que les discussions informelles sur la proposition du Secrétaire général concernant un Nouvel Agenda pour la paix permettent d’aborder toutes les menaces et de réfléchir à l’engagement collectif envers la Charte des Nations Unies et le multilatéralisme.  À cet égard, il a noté que la sélectivité, le « deux poids, deux mesures » et le non-respect persistant des obligations internationales qui en résulte, ainsi que l’insuffisance des mécanismes internationaux de sécurité, continuent d’être parmi les principaux obstacles à la lutte contre les menaces actuelles et émergentes et à la promotion plus efficace de la confiance et de la consolidation de la paix.  S’agissant des cadres normatifs internationaux, le représentant a jugé essentiel de rejeter les interprétations erronées, de souligner qu’il n’y a pas de conflit entre les normes et les principes communément admis et de réaffirmer le devoir de mettre en œuvre les obligations internationales de bonne foi.  Soulignant que la pierre angulaire de tous ces efforts est et doit rester l’État, il a insisté sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, essentiel à tout progrès dans la prévention des conflits, le rétablissement et le maintien de la paix et l’établissement de liens pacifiques mutuellement bénéfiques entre les nations. 

Pour le délégué, la responsabilité est un outil préventif important et un élément essentiel à plus long terme.  En effet, la justice contribue à la consolidation de la paix, à une paix durable et à un ordre international pacifique, a-t-il affirmé, plaidant pour que l’ONU continue de mobiliser le monde contre le racisme, les discours de haine, la désinformation et l’incitation à la violence et à l’extrémisme.  Le dialogue interculturel et interreligieux aux niveaux national et international est, selon lui, une voie à suivre dans le cadre des objectifs plus larges de consolidation de la paix, de maintien de la paix et de réconciliation.  Saluant à ce sujet le rôle joué par l’Alliance des civilisations, il a appelé de ses vœux un renforcement de la solidarité mondiale.  À ses yeux, fournir un appui aux États touchés par un conflit et engagés dans la consolidation de la paix, la reconstruction et le relèvement postconflit doit rester un engagement essentiel de l’ensemble du système des Nations Unies.  Un tel soutien est essentiel pour l’Azerbaïdjan et pour de nombreux États dans le monde qui surmontent les conséquences de guerres dévastatrices, d’agressions, d’occupations et de nettoyages ethniques, a conclu le représentant.

Mme SOPHEA EAT (Cambodge) a constaté que les États Membres ont des interprétations différentes des principes qui soutiennent la paix et la coexistence pacifique.  La fragilité actuelle de la paix dans le monde montre également qu’il existe un énorme manque de confiance et que l’esprit de solidarité internationale est en train de s’éroder, a-t-il déploré.  Il a toutefois salué la tenue de ce débat public comme un signe de foi dans le multilatéralisme, « meilleure ligne de défense » des petites nations comme le Cambodge.  Il a appelé à une prise en compte équitable des préoccupations de tous les États Membres et souligné que son pays est un bon exemple de ce que la confiance et la méfiance peuvent faire à une nation.  Il a conclu en exprimant son soutien au Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF(Argentine) a notamment mis l’accent sur le fait que l’inclusion est un aspect essentiel de l’instauration d’une paix durable.  Les processus et efforts de prévention et de règlement des conflits et de consolidation de la paix doivent ainsi concerner tous les secteurs de la société, a-t-elle dit, mettant l’accent sur la part des femmes, qui doivent jouer un rôle actif à toutes les étapes d’un processus de paix.  La représentante a souligné que l’autonomisation des femmes et l’égalité des sexes sont associées à la paix et à la stabilité surtout lorsque les femmes participent aux décisions qui engagent le devenir socioéconomique et culturel de leurs communautés.  Au contraire, l’absence d’inclusion menace les processus de paix et de réconciliation ainsi que la stabilité de l’État lui-même, a-t-elle averti, répétant que la participation de tous les citoyens à la construction de la paix contribue de manière effective à la réalisation des accords inclusifs et à l’établissement d’une paix et une stabilité durables.

Mme ARLENE BETH TICKNER (Colombie) a estimé que l’inclusion constitue l’axe transversal du lien indissoluble entre développement et paix.  Selon elle, il est indispensable d’écouter les voix de la société dans son ensemble, ce qui signifie que les politiques nationales ne doivent être imposées depuis les capitales, mais être construites à partir des régions.  Cette participation élargie non seulement légitime les initiatives visant à renforcer l’état de droit, mais garantit également leur viabilité, a-t-elle estimé. Les voix des femmes, des jeunes, des personnes LGBTIQ+, des peuples autochtones et des populations d’origine africaine sont essentielles dans tout effort entrepris par l’ONU, a-t-elle ajouté. Par ailleurs, a annoncé la représentante, la Colombie est en train d’élaborer son premier plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, sous la forme d’un document concerté impliquant non seulement les institutions publiques, mais aussi la société civile, le milieu universitaire et les femmes elles-mêmes.  Enfin, comme l’a démontré le cas colombien, il est essentiel d’avoir le soutien politique, technique et financier de la communauté internationale et des banques régionales afin de financer des projets qui contribuent au développement durable, a relevé la déléguée. 

M. ARAM HAKOBYAN (Arménie) a considéré que le respect de l’état de droit dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales est essentiel à la réalisation du droit à la vérité, à la justice, à la réparation et aux garanties de non-répétition des abus de confiance.  Pour instaurer la confiance, les accords et engagements internationaux doivent être mis en œuvre de bonne foi et dans leur intégralité.  Les antécédents bien établis de l’Azerbaïdjan en matière de non-respect des traités internationaux, des accords et des régimes de contrôle des armements, ainsi que son refus de mettre en œuvre les mesures de confiance et de sécurité ont démontré une intention claire de déclencher de nouvelles hostilités dans la région, comme en atteste l’agression à grande échelle contre le Haut-Karabakh en 2020. 

Malheureusement, a poursuivi le représentant, l’absence d’une réaction adéquate de la part des structures internationales a permis à l’Azerbaïdjan de continuer son agression.  Cela fait presque cinq mois que ce pays a imposé un blocus au corridor de Latchine, le seul à relier le Haut-Karabakh à l’Arménie et au monde extérieur.  En outre, le 23 avril, l’Azerbaïdjan y a installé un point de contrôle, violant ainsi la Déclaration trilatérale sur le cessez-le-feu, du 9 novembre 2020, méprisant les mesures provisoires indiquées par la CIJ.  Les violations constantes du droit international et des engagements antérieurs, le bellicisme et le comportement agressif de ce pays ne devraient être tolérés ni par ce Conseil ni par la communauté internationale, a martelé le représentant. 

Reprenant la parole, M. GUSMAN (Azerbaïdjan) a fait part de la détermination de son pays à reconstruire et réintégrer les zones touchées par le conflit, à assurer le retour des déplacés et des réfugiés et à promouvoir la normalisation pour le bien-être et la stabilité de tous les peuples de la région. Il a indiqué que son gouvernement participe de bonne foi aux pourparlers qui se tiennent actuellement à Washington. Dans ce contexte, le délégué a rejeté toute tentative de l’Arménie d’imposer des discours erronés et de favoriser l’animosité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À l’approche du soixante-quinzième anniversaire de la Nakba, le Comité du peuple palestinien appelle à « agir autrement » pour mobiliser la communauté internationale

411e séance – matin
AG/PAL/1452

À l’approche du soixante-quinzième anniversaire de la Nakba, le Comité du peuple palestinien appelle à « agir autrement » pour mobiliser la communauté internationale

L’Observateur permanent de l’État de Palestine a déclaré ce matin, devant le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, que « l’heure est venue de demander un nouvel avis consultatif » à la Cour internationale de Justice (CIJ), fustigeant « l’attitude criminelle » du Gouvernement israélien.  À l’approche du soixante-quinzième anniversaire de la Nakba, le Président du Comité a appelé pour sa part à « agir autrement » pour mobiliser la communauté internationale et permettre la pleine réalisation des droits inaliénables du peuple palestinien.

Hier, la bande de Gaza a vécu un « enfer » alors que des bombardements israéliens ont fait un mort et cinq blessés parmi les Palestiniens, a rapporté l’Observateur permanent de l’État de Palestine qui a exprimé sa reconnaissance envers l’Égypte et l’ONU qui tentent de négocier un cessez-le-feu.  Depuis la formation du Gouvernement le plus « intransigeant » de l’histoire d’Israël, les forces israéliennes ont lancé des attaques sur Djénine, Naplouse, Bethléem et d’autres villes palestiniennes.  Des colons ont pris d’assaut la ville de Houara, et Jéricho demeure assiégée depuis 10 jours, a déploré M. Riyad Mansour. 

Condamné à une peine administrative en Israël, Khader Adnan est mort, hier, au terme d’une grève de la faim de 86 jours, a regretté l’Observateur, y voyant l’illustration du caractère « implacable » de l’occupation israélienne.  Même constat de la part du Président du Comité, M. Cheikh Niang, qui a considéré le décès de Khader Adnan symptomatique du caractère « implacable et féroce » de l’occupation.  Il a dénoncé « l’attitude criminelle » du Gouvernement israélien qui perdure du fait de l’inertie de la communauté internationale.  « Le statu quo ne fonctionne pas », a martelé le Président, en demandant à « agir autrement » pour mobiliser la communauté internationale et « sortir de l’ornière ». 

S’agissant du vote « historique » de la Quatrième Commission de l’Assemblée générale en faveur de la sollicitation d’un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur l’occupation israélienne, M. Mansour a dénoncé l’adoption de législations discriminatoires envers les Palestiniennes ainsi que les systèmes de droits spécifiques pour les colons et les populations palestiniennes.  Des rapports d’Amnesty international et Human Rights Watch et d’autres confirment que le peuple palestinien vit bel et bien dans un système d’apartheid, a déploré l’Observateur.  Après avoir saisi la CIJ une première fois lors de la construction du mur israélien, l’heure est venue de demander un nouvel avis consultatif, a-t-il estimé.  Comme l’Afrique du Sud et l’Indonésie, le Liban a indiqué préparer un dossier afin d’appuyer la demande d’avis consultatif. 

Signe que de nombreux États Membres s’associent au peuple palestinien et à la défense de ses droits inaliénables, l’Observateur a relevé en outre que le Conseil de sécurité a consacré huit réunions en quatre mois à la question palestinienne.  À ceux qui « essaient de faire tourner les Nations Unies autour d’un seul problème », soit la guerre en Ukraine, il a rétorqué que la question palestinienne demeure un point essentiel de l’ordre du jour de l’ONU qui ne peut être ignoré.  À ce propos, le Président du Comité a fait savoir que le 9 mai, le Bureau du Comité tiendra une réunion avec les membres élus du Conseil afin d’échanger des idées sur le moyen de reprendre les négociations de paix. 

L’Observateur de l’État de Palestine a par ailleurs annoncé que l’ONU commémorera, le 15 mai, le soixante-quinzième anniversaire de la Nakba en organisant une réunion spéciale et un événement commémoratif dans la salle de l’Assemblée générale, à New York, en présence du Président Abbas. 

La question palestinienne est centrale pour notre région, a affirmé la Ligue des États arabes, en espérant que cet événement saura donner un nouveau souffle à la question palestinienne et au droit du peuple palestinienne à l’autodétermination. À cette fin, l’Indonésie a appelé, comme la Namibie, à générer autant de publicité que possible autour de cet événement, notamment sur les réseaux sociaux. 

En début de séance, le Comité a procédé à l’élection de M. Ahmad Faisal Muhamad, de la Malaisie, au poste de rapporteur et vice-président.  L’examen des demandes d’accréditation d’organisations de la société civile a été reporté à une date ultérieure. 

La prochaine réunion du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien sera annoncée dans le Journal des Nations Unies

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: le Secrétaire général demande une enveloppe de 6,8 milliards de dollars pour les 11 opérations de paix

Soixante-dix-septième session,
29e séance plénière - matin
AG/AB/4418

Cinquième Commission: le Secrétaire général demande une enveloppe de 6,8 milliards de dollars pour les 11 opérations de paix

Les 11 opérations de paix, la Base de soutien logistique de Brindisi, le Centre de services régional d’Entebbe et le compte d’appui nécessiteront, pour la période allant du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024, une enveloppe exacte de 6 812 762 900 dollars*.  C’est ce qu’a appris aujourd’hui la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, à l’ouverture de sa deuxième reprise de session. 

Une nouvelle fois, ce sont les opérations en République centrafricaine, au Mali, en République démocratique du Congo et au Soudan du Sud qui s’avèrent les plus budgétivores, avec plus d’un milliard de dollars chacune.  En matière budgétaire, il faut une approche « mission par mission », a argué le Groupe des États d’Afrique dont le continent abrite 7 missions sur 11.  L’enveloppe totale, dont l’augmentation par rapport à l’exercice précédent a été imputée en partie à l’inflation et à l’augmentation des coûts opérationnels, devrait baisser si l’on se fie aux coupes que le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) préconise déjà pour les opérations à Chypre, au Kosovo, au Liban et au Sahara occidental ainsi que pour la Force chargée d’observer le désengagement (FNUOD). 

La Syrie a estimé que la responsabilité du financement de la FNUOD incombe à « l’agresseur », conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  Elle a dûment condamné les attaques israéliennes constantes menées sous de « faux prétextes », avant que la Serbie ne promette d’insister sur le maintien du niveau budgétaire de la Mission intérimaire des Nations Unies (MINUK) qui, a-t-elle affirmé, n’a pas encore atteint tous les objectifs clefs de la résolution 1244 du Conseil de sécurité comme la question du retour des 200 000 déplacés et celles de leurs droits de propriété. 

La Serbie a mis en garde contre la tentation de minimiser une situation manifestement instable, marquée par des tensions et des incidents fréquents, qui se sont d’ailleurs intensifiés à la fin de l’année dernière et au début de cette année.  Étant donné que la communauté serbe est confrontée à de nombreux problèmes et obstacles de nature essentiellement systémique et institutionnelle, il serait préférable, a-t-elle suggéré, que la Mission consulte cette communauté pour la sélection des projets. 

Nous n’entendons pas, a prévenu l’Union européenne, introduire une dimension politique dans des résolutions budgétaires.  Nous avons, a-t-elle plaidé, besoin de pragmatisme et de volonté politique pour pouvoir adopter les budgets qu’il faut et assurer une exécution efficace des mandats. Avec d’autres, elle a invité les délégations à poursuivre la réflexion sur les questions opérationnelles importantes concernant le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, la sûreté et la sécurité des Casques bleus, l’empreinte environnementale des missions, la lutte antimines, la parité des genres, les droits de l’homme et la lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles. 

Nous avons l’obligation de veiller, ont renchéri les États-Unis, à ce que les missions et bureaux des Nations Unies dans le monde soient véritablement inclusifs.  Chaque membre du personnel doit se sentir en sécurité sur son lieu de travail et être confiant que le système onusien veillera à ce que les responsables de violations répondent de leurs actes.  L’Union européenne s’est également réjouie du fait que la session va permettre de se pencher sur le calcul des montants à rembourser aux pays fournisseurs de matériel, avant que la Fédération de Russie ne juge important d’assurer un meilleur contrôle de l’allocation et de l’utilisation des versements au Fonds pour la consolidation de la paix qui, en 2022, a reçu un montant record de 231,5 millions de dollars et consacré 86 millions de dollars à l’autonomisation des femmes et des jeunes. 

La Cinquième Commission, qui tient la majeure partie de sa session à huis clos, a prévu une autre séance publique, jeudi 4 mai à partir de 10 heures, pour discuter de l’amélioration de la situation financière de l’ONU. 

*A/C.5/77/29

ORGANISATION DES TRAVAUX A/C.5/77/L.34

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. GERARDO PEÑALVER PORTAL (Cuba) a insisté sur la présentation en temps utile des rapports du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB).  Après avoir rendu hommage aux Casques bleus tombés au champ d’honneur, il a souligné la nécessité de conclure les débats à temps pour doter les opérations de maintien de la paix des ressources nécessaires.  Il a dit accorder une grande importance à la lutte contre l’exploitation et les abus sexuels et a assuré de la détermination de son groupe à coopérer de manière constructive avec tous les États membres de la Cinquième Commission.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MEDARD AINOMUHISHA (Ouganda) a insisté pour que les budgets des missions en Afrique soient adoptés en temps utile.  Il a prié le Secrétariat de fournir des informations complémentaires pour permettre des discussions approfondies et a préconisé un calendrier réaliste tout en s’opposant à l’idée de prolonger les négociations jusqu’au mois de juin.

M. THIBAULT CAMELLI, de l’Union européenne (UE), a estimé qu’au moment où l’on voit un nombre sans précédent de conflits et des environnements opérationnels de plus en plus complexes, l’UE reste une fervente partisane de la consolidation de la paix et des efforts de maintien de la paix des Nations Unies.  Le représentant a plaidé pour un financement plus prévisible et plus durable du Fonds pour la consolidation de la paix, d’autant plus qu’il y un an, l’Assemblée générale a approuvé l’idée de l’inscrire au budget ordinaire de l’ONU. En tant que deuxième plus grande contributrice aux budgets de maintien de la paix de l’ONU, l’UE, a affirmé le représentant, s’engage à veiller à ce que les opérations soient bien financées et adéquatement dotées en personnel et en matériel.  Le représentant a appelé tous les États Membres à payer leurs contributions intégralement, à temps et sans conditions. 

Il les a aussi invités à poursuivre la réflexion sur les questions opérationnelles importantes concernant le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, la sûreté et la sécurité des Casques bleus, l’empreinte environnementale des missions, la parité des genres, les droits de l’homme et la lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles, sans oublier la lutte antimines.  Il s’est également réjoui du fait que la session va permettre de se pencher sur le calcul des montants à rembourser aux pays fournisseurs de matériel. 

L’UE n’entend pas, a-t-il promis, introduire une dimension politique dans des résolutions budgétaires.  Nous avons, a-t-il souligné, besoin de pragmatisme et de volonté politique pour pouvoir adopter les budgets qu’il faut et assurer une exécution efficace des mandats.  Conclure la session à temps et autour d’un consensus, c’est envoyer un message positif au personnel militaire et civil des opérations de paix, a estimé le représentant. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. NOEL MANGAOANG NOVICIO (Philippines) s’est félicité des efforts considérables consentis par la Commission pour parvenir à un accord sur la résolution relatives aux questions transversales, après six années sans consensus.  Une telle résolution est d’autant plus importante que le paysage des opérations de maintien de la paix a changé au cours des dernières années, notamment du fait de la pandémie de COVID-19. Afin de maintenir cet élan, le représentant a insisté sur l’octroi de ressources adéquates aux opérations et promis d’examiner avec attention l’enveloppe demandée de 6,8 milliards de dollars et les recommandations du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB). 

Au nombre des autres priorités de l’ASEAN, le délégué a évoqué le renforcement du programme « paix et sécurité », y compris le renforcement de la parité entre les sexes, le remboursement aux pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police et le renforcement de la transparence, du principe de responsabilité et du soutien aux victimes de l’exploitation et d’abus sexuels.  Il a réaffirmé à cet égard son engagement en faveur de la politique de tolérance zéro.  L’ASEAN souhaite en outre, a-t-il poursuivi, actualiser la mise en œuvre du Service de la planification et du suivi des responsabilités (CPAS) et l’utilisation accrue des technologies numériques dans les opérations de maintien de la paix.  À ses yeux, les contributions au Fonds pour la consolidation de la paix doivent être fondées sur le barème des quotes-parts du maintien de la paix, et toute décision sur ce sujet doit être prise par consensus.  Dans l’attente des mises à jour concernant l’utilisation des 100 millions de dollars au titre des soldes non utilisés, le représentant a exhorté les États Membres à s’acquitter de leurs obligations financières dans les délais afin que l’Organisation dispose des ressources adéquates pour s’acquitter de ses mandats, « que les États Membres ont eux-mêmes créés ». 

Au nom du groupe CANZ (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), Mme MAY THI NGOC LUONG (Canada) a rendu hommage aux hommes et femmes qui servent dans les opérations de maintien de la paix dans le monde et s’est engagée à travailler de manière constructive pour trouver un consensus sur les questions budgétaires, saluant au passage le consensus sur la résolution relative aux questions transversales.  Elle a soulevé les questions de désinformation et mésinformation, de l’augmentation des risques dans le contexte du maintien de la paix, de la hausse du coût des ressources essentielles et des problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement.  Le groupe CANZ, a-t-elle promis, va continuer à plaider pour l’octroi de ressources adéquates aux opérations de maintien et insister sur l’application du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.  La représentante s’est également dite préoccupée par les allégations sur l’exploitation et les atteintes sexuelles et a appelé à plus d’efforts pour mettre en œuvre la politique de tolérance zéro du Secrétaire général.  Elle a par ailleurs regretté le report des questions sur le financement de la prévention et de la consolidation de la paix, en dépit des résultats « remarquables » obtenus par le Fonds pour la consolidation de la paix. 

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a exhorté les États Membres à payer leur contribution intégralement et à temps et le Secrétariat d’améliorer l’exécution budgétaire et le contrôle interne, en appliquant rigoureusement la discipline financière.  Il a aussi souligné l’importance d’appliquer les recommandations du Comité des commissaires aux comptes, en gardant à l’esprit que le budget d’une opération doit être fondé sur son mandat et sur la situation réelle sur le terrain.  Il a estimé qu’il faut réaligner les mandats sur les éléments de consolidation de la paix afin de renforcer la résilience et les capacités des institutions des pays hôtes.  Il a conclu, en encourageant la participation pleine, effective et significative des femmes aux opérations de maintien de la paix, à tous les niveaux, conformément à la résolution 2538 du Conseil de sécurité.

M. JESÚS VELÁZQUEZ CASTILLO (Mexique) a appelé les délégations à négocier de manière constructive pour doter les opérations de maintien de la paix d’un budget qui leur permette de s’acquitter de leur mandat de manière optimale.  Il est essentiel que la Commission prenne en compte les décaissements effectués l’an dernier, a-t-il aussi estimé

M. DAI BING (Chine) a appelé le Secrétariat à garantir l’efficacité des missions et a dit accorder de l’importance au remboursement en temps voulu des pays fournisseurs de contingents.  Il a invité les missions à utiliser les ressources qui leur sont allouées de manière efficiente.  En tant que plus grand fournisseur de contingents des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, la Chine, a-t-il dit, appelle à une allocation adéquate des ressources aux missions et insiste sur la sécurité et la sûreté des soldats de la paix.  Le représentant a regretté le report du débat sur le financement de la consolidation de la paix, appelant les États développés à ne pas se détourner de leurs obligations, en la matière. 

M. CHRISTOPHER P. LU (États-Unis) a promis d’examiner attentivement l’enveloppe budgétaire de 6,8 milliards de dollars, soit près de 360 millions de dollars de plus que le niveau approuvé pour 2022-2023.  En attendant, il a réaffirmé l’engagement de son pays envers une politique de tolérance zéro face à l’exploitation et aux abus sexuels, assortie d’une réponse centrée sur les survivants, la responsabilité, en particulier parmi les hauts responsables, et la prévention.  Nous avons l’obligation de veiller à ce que les missions et bureaux des Nations Unies dans le monde soient véritablement inclusifs.  Chaque membre du personnel doit se sentir en sécurité sur son lieu de travail et être confiant que le système onusien veillera à ce que les responsables de violations répondent de leurs actes.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a rappelé l’engagement de son pays de garantir le bon financement et la bonne dotation en personnel des opérations de maintien de la paix.  Nous devons, a-t-il insisté, offrir au Secrétariat un certain degré de certitude financière mais aussi exiger de lui de la discipline budgétaire.  Il a également souligné l’importance de poursuivre les efforts contre les abus sexuels et appelé à des améliorations dans la mise en œuvre du principe de responsabilité. 

M. VADIM N. LAPUTIN (Fédération de Russie) a voulu que l’on évite des coupes budgétaires qui pourraient nuire à une bonne exécution des mandats conférés par le Conseil de sécurité.  Il faut, a-t-il dit, tenir compte des activités particulières de chaque opération de maintien de la paix.  Par ailleurs, il a noté que le Fonds pour la consolidation de la paix a, en 2022, reçu un montant record de 231,5 millions de dollars.  Quelque 75 millions de dollars ont été dépensés pour soutenir les processus de transition et un montant record de 86 millions de dollars pour les questions relatives à l’autonomisation des femmes et des jeunes.  Pour la sixième année consécutive, le Fonds a reçu un financement important pour la promotion de l’égalité des sexes et a déjà dépassé son objectif en la matière de 17%.  Compte tenu de ces informations, le représentant a demandé que la Commission tienne dûment compte des observations de chaque délégation afin de parvenir à un texte équilibré sur la résolution concernant ledit Fonds.  Il s’agit d’assurer un meilleur contrôle de l’allocation et de l’utilisation des versements. 

M. YAMANAKA OSAMU (Japon) a appelé les délégations à négocier de manière constructive pour doter les opérations du budget adéquat.  L’une des responsabilités des États Membres est de donner des orientations à ces opérations, a dit le représentant, avant d’exprimer tout l’intérêt qu’il porte à la question du remboursement des pays contributeurs de matériel. 

M. ISHMAEL TSHOLOFELO DABUTHA (Botswana) s’est dit particulièrement intéressé par les questions transversales, l’appui apporté au personnel en uniforme et les procédures d’achat.  Nous devons également examiner, a-t-il estimé, le rôle joué par les acteurs régionaux et sous-régionaux dans le maintien de la paix et le niveau de leur coopération avec les Nations Unies.

M. YI MINHONG (République de Corée) a réitéré le soutien indéfectible de son pays aux opérations de maintien de la paix de l’Organisation et aux efforts déployés pour préserver la sécurité de ses Casques bleus.  Mon pays, a-t-il dit, cherche à promouvoir l’excellence de ces opérations et prendra part à toutes les discussions visant à s’assurer qu’elles sont financées de manière adéquate et qu’elles contribuent effectivement à renforcer la paix.  Nous ne ménagerons aucun effort pour garantir l’efficacité et la responsabilité des opérations, a promis le représentant, sans oublier de souligner l’importance qu’il accorde aux questions transversales et au financement de la consolidation de la paix.

M. FELIPE MACHADO MOURIÑO (Uruguay) a prévenu que le non-versement en temps voulu des contributions peut affecter l’exécution des mandats voire menacer la sécurité physique du personnel sur le terrain.  La Commission doit tout faire pour doter les opérations et le Fonds pour la consolidation de la paix des montants nécessaires.  Il a tout de même mis en garde contre la demande de ressources supplémentaires alors que les États sont aux prises avec des difficultés budgétaires. Les responsabilités différenciées dans le programme « paix et sécurité internationales » doivent être reflétées dans le calcul des contributions.  Par exemple, pour celles des missions politiques spéciales, il est temps qu’elles soient calquées sur le barème des quotes-parts des opérations de maintien de la paix.

RAPPORT FINANCIER ET ÉTATS FINANCIERS

Pour l’examen de cette question, la Commission est saisie des rapports du Comité des Commissaires aux comptes (A/77/5 (Vol.II), A/77/766 et A//77/802). 

Déclaration

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. RICHARD TUR DE LA CONCEPCIÓN (Cuba) a déploré les retards dans la mise en œuvre des recommandations du Comité des commissaires aux comptes, dont neuf d’entre elles n’étaient toujours pas finalisées, après trois ans.  Il a exhorté le Secrétariat à renforcer ses efforts par souci de transparence et d’efficacité.  Il faut, s’est impatienté le représentant, établir les responsabilités pour ces retards.  Notant par ailleurs que la question du non-versement des contributions est toujours d’actualité, il a demandé aux États Membres concernés de remédier au plus vite à cette situation.  Il a poursuivi en estimant que les questions de la fraude doivent recevoir une attention accrue et a conclu, en voulant en savoir plus sur le surplus de 115 millions de dollars enregistré au 30 juin 2022.  Pourquoi un montant si élevé? s’est-il demandé. 

ASPECTS ADMINISTRATIFS ET BUDGÉTAIRES DU FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) sur le résumé des conclusions et recommandations de l’analyse indépendante du modèle de prestation de services du Service de la lutte antimines de l’ONU (A/77/816) 

Après avoir examiné le rapport du Secrétaire général (A/77/747), le Comité consultatif conclut qu’il ne contient pas suffisamment de précisions et d’analyse.  Il recommande donc que le Secrétaire général présente, dans deux ans, un rapport complet et actualisé sur le rapport coût-efficacité et l’exécution rationnelle des activités de lutte antimines dans les opérations de maintien de la paix, les missions politiques spéciales et d’autres contextes.  Le Comité recommande également que le rapport passe en revue des options nouvelles et supplémentaires et mentionne les mesures à prendre et les ressources à prévoir pour renforcer les capacités du Service de la lutte antimines; les mécanismes de recouvrement des coûts, une analyse coûts-avantages, concernant l’acquisition et la gestion des biens par les missions et par l’UNOPS; ou encore les incidences que pourrait avoir le nouveau mémorandum d’accord, le cas échéant. 

Pour remédier aux lacunes actuelles dans la prestation de services de lutte antimines, le Comité consultatif recommande que le Secrétaire général présent aussi une structure de gouvernance et un dispositif d’application du principe de responsabilité bien défini, avec des indicateurs de résultats et des produits à exécuter clairement établis. 

Rapport du CCQAB sur les dispositions spéciales visant à prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles (A/77/831) 

Le Comité consultatif a étudié le rapport du Secrétaire général (A/77/748) qui met l’accent sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie au cours des cinq dernières années; la responsabilité des dirigeants et la formation; la priorité donnée aux droits et à la dignité des victimes; les progrès concernant les mécanismes de dépôt de plaintes et les enquêtes; la promotion de l’application du principe de responsabilité au niveau national; le dialogue avec les États Membres et la société civile; et l’amélioration de la transparence par le renforcement de la communication. 

Le Comité note d’emblée le manque de précision en ce qui concerne le rôle du Coordonnateur spécial dans le dispositif global de prévention de l’exploitation et des atteintes sexuelles, ainsi que les changements qui ont pu résulter du passage du poste à temps plein et de l’imputation de son financement sur le budget ordinaire.  Il recommande de nouveau que le Secrétaire général donne un aperçu complet des ressources humaines consacrées à ce dispositif, afin de déterminer les dispositions administratives et financières optimales. 

Le Comité réitère d’ailleurs sa préoccupation face à l’augmentation du nombre d’allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles mais se félicite qu’au cours de la période 2017-2022, la durée des enquêtes menées par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) se soit raccourcie pour deux catégories d’enquêtes sur trois et encourage le Secrétaire général à poursuivre ses efforts pour réduire encore le temps nécessaire pour mener à bien toutes les enquêtes sur les affaires d’exploitation et d’atteintes sexuelles, sans compromettre la qualité des procédures

Rapport du CCQAB sur l’examen triennal des taux et normes à appliquer pour le calcul des montants à rembourser aux États Membres au titre du matériel appartenant aux contingents (A/77/832)  

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/77/757) et ceux du Groupe de travail de 2023 sur le matériel appartenant aux contingents (A/77/736). 

Pour l’examen de cette question, la Cinquième Commission est également saisie du Rapport du Bureau des services de contrôle interne sur ses activités concernant les opérations de paix au cours de la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2022 (A/77/278 (Par.II)). 

La Commission est également saisie deux Notes du Secrétaire général présentant un tableau récapitulif des crédits approuvés au titre des opérations de maintien de la paix, de la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi (Italie), du Centre de services régional d’Entebbe (Ouganda) et du compte d’appui aux opérations de maintien de la paix pour l’exercice allant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023 (A/C.5/77/30) et d’un autre tableau sur les montants budgétaires prévus pour l’exercice allant du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024 (A/C.5/77/29). 

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. RICHARD TUR DE LA CONCEPCIÓN (Cuba) a réaffirmé le ferme engagement de son groupe en faveur de la politique de tolérance zéro.  Il a demandé à l’ONU de ne rester ni silencieuse ni passive, et de mette en place une approche centrée sur la protection et le soutien aux victimes.  Le Secrétaire général, a-t-il estimé, doit rationaliser et harmoniser la mise en œuvre de sa stratégie; l’un des défis persistants étant d’améliorer l’échange d’informations entre les entités du système des Nations Unies. S’agissant de l’examen triennal des taux et normes de remboursement aux États Membres pour le matériel appartenant aux contingents, le représentant a dit attendre avec impatience les discussions sur des éléments tels que l’introduction d’une nouvelle méthodologie de classification des véhicules blindés de transport de troupes ou encore l’appel à des professionnels de la santé mentale.  De même, le G77 souligne la nécessité de veiller à ce que les activités de déminage soient menées avec les moyens les plus efficaces possibles, en tirant parti de toutes les capacités existantes.  Le représentant a conclu en renouvelant la confiance de son groupe au Bureau des services de contrôle interne et à sa faculté de relever le défi posé par les retards dans la mise en œuvre des recommandations faites par les organes de contrôle. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MEDARD AINOMUHISHA (Ouganda) a noté que les Nations Unies soutiendront 11 opérations de maintien de la paix actives lors du prochain cycle budgétaire, pour des besoins budgétaires s’élevant à 6,8 milliards de dollars, soit 359,5 millions de plus que le niveau approuvé pour l’exercice 2023, et 366,8 millions de plus que le budget 2021-2022.  Cet écart provient notamment de l’augmentation de 125,8 millions de dollars du personnel militaire et de police, et de l’accroissement des coûts opérationnels de 234,8 millions de dollars.  Alors que 7 des 11 missions de maintien de la paix se trouvent sur le continent africain, le représentant a réitéré l’appel de l’Assemblée générale à une plus grande coordination avec les organisations régionales, en particulier en Afrique. Il a aussi réitéré l’importance d’un financement adéquat des mandats autorisés par le Conseil de sécurité, en mettant l’accent sur une approche « mission par mission » pour l’examen des besoins budgétaires. 

Le Groupe africain, a-t-il poursuivi, reconnaît le rôle important joué par les activités programmatiques et les projets à impact pour soutenir la mise en œuvre des mandats et renforcer la confiance des populations hôtes.  En ce qui concerne le personnel, le représentant a considéré que les ressources humaines sont les ressources les plus importantes de l’Organisation et que le personnel a le droit d’exercer ses fonctions dans un environnement de travail adéquat.  S’agissant des achats, il a estimé que les opérations de maintien de la paix doivent se tourner davantage vers l’expertise et le matériel des pays hôtes. 

Également au nom du Liechtenstein, M. GINA ANDREA SCHMIED (Suisse) a estimé que de nombreuses questions nécessitent toujours l’attention des États Membres à commencer par le nombre important de cas d’exploitation et d’abus sexuels.  Il reste encore beaucoup à faire pour atteindre un changement durable dans la culture, le comportement et les attitudes au sein de l’Organisation, a-t-il dit.  La mise en œuvre de la politique de tolérance zéro nécessite tout d’abord une connaissance par tout le personnel des normes applicables et un environnement permettant de signaler les violations sans crainte de représailles.  Les victimes doivent être au centre de l’action.  Le représentant a également parlé de la mise en œuvre du programme « femmes, paix et sécurité » et salué les progrès réalisés, ces dernières années, en ce qui concerne la représentation des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Toutefois, a-t-il reconnu, nous ne sommes toujours pas à l’égalité des genres et les chiffres restent très différents de mission en mission.  Concluant sur la question de l’empreinte environnementale des opérations de maintien de la paix, il a souligné qu’il faudra faire plus sur ce terrain et plaidé pour une mise en œuvre intégrale des recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI).

M. HUSSEIN KATTANGA (République-Unie de Tanzanie) a pris note des ressources demandées par le Secrétaire général pour les opérations de maintien de la paix et exhorté les États Membres à honorer leurs obligations financières afin de disposer d’une architecture de paix dotée de ressources suffisantes en équipement moderne et personnel compétent.  C’est le prix à payer pour que les opérations de maintien de la paix puissent avoir un impact positif significatif et durable sur le terrain, a martelé le représentant. 

Mme MARIVIL VILLA VALLES (Philippines) a rappelé que depuis 1963, son pays a déployé près de 15 000 soldats de la paix.  Elle a souligné l’importance d’assurer leur sécurité, en appelant à doter les missions des fonds nécessaires.  Insistant sur une bonne mise en œuvre de la politique de tolérance zéro, elle a affirmé que son pays est déterminé à accroître la participation des femmes dans les opérations de maintien de la paix, pour autant qu’il y ait une intégration effective de la perspective de genre dans tous les échelons du commandement. 

FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX

RAPPORTS DU CCQAB SUR L’EXÉCUTION DU BUDGET ALLANT DU 1ER JUILLET 2021 AU 30 JUIN 2022 ET LES PROJETS DE BUDGET POUR L’EXERCICE ALLANT DU 1ER JUILLET 2023 AU 30 JUIN 2024 DES OPÉRATIONS DE PAIX 

Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP) (A/77/767/Add.1) 

Le Comité consultatif note que le montant total des ressources nécessaires au titre de l’exercice 2023/24 s’élève à 57 444 700 dollars, en augmentation de 3 426 100 dollars (6,3%) par rapport à l’exercice 2022/23.  Il retire un montant de 1 219 400 dollars et recommande que le montant de 1 658 800 dollars représentant le solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 ainsi que le montant de 371 900 dollars correspondant aux autres produits et ajustements de l’exercice clos le 30 juin 2022, déduction faite des pertes liées aux placements (24 100 dollars), soient portés au crédit des États Membres. 

Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) (A/77/775) 

Après avoir pris connaissance du rapport du Secrétaire général (A/77/620), le Comité consultatif approuve la proposition tendant à ce que les fonds en caisse d’un montant de 7 730 000 dollars disponibles sur le compte spécial de la MINUSTAH et de la MINUJUSTH au 30 juin 2022 soient portés au crédit des États Membres. 

Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) (A/77/767/Add.4) 

Le montant total des ressources demandées pour l’exercice 2023/24 est de 40 701 500 dollars, ce qui représente une diminution de 1 245 800 dollars (3,0%) par rapport à l’exercice 2022/23, mais le CCQAB recommande une autre coupe de 35 000 dollars.  Il recommande aussi que le montant de 685 900 dollars représentant le solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 ainsi que le montant de 59 800 dollars correspondant aux autres produits de l’exercice clos le 30 juin 2022, déduction faite des pertes liées aux placements (16 200 dollars), soient portés au crédit des États Membres. 

Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) (A/77/767/Add.2) 

En plus d’un crédit supplémentaire de 2 067 000 dollars pour 2022/2023, que le CCQAB réduit à 1 033 900 dollars, le Secrétaire général demande pour le prochain exercice un montant de 70 875 800 dollars, soit une augmentation de 6 331 300 dollars (9,8%) par rapport aux crédits ouverts pour l’exercice 2022/23.  Le CCQAB recommande une coupe de 331 000 dollars et la restitution aux États Membres du montant de 20 500 dollars représentant le solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 ainsi que du montant de 555 200 dollars, déduction faite des pertes liées aux placements. 

Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) (A/77/767/Add.9) 

Le Secrétaire général demande un montant de 551 113 500 dollars, soit une augmentation de 48 193 000 dollars (9,6%) par rapport aux crédits pour 2022/23.  Le CCQAB propose une coupe de 6 546 500 dollars et recommande que le montant de 16 200 dollars représentant le solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 ainsi que le montant de 6 335 000 dollars, déduction faite des pertes liées aux placements (457 700 dollars)] soient portés au crédit des États Membres. 

Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (A/77/767/Add.3

Le montant total des ressources demandées pour l’exercice 2023/24 est de 65 182 000 dollars, ce qui représente une augmentation de 4 589 300 dollars (7,6%) par rapport au montant de 60 592 700 dollars approuvé pour l’exercice 2022/23.  Le CCQAB recommande que ce budget soit amputé d’une somme de 622 800 et que le montant de 686 800 dollars représentant le solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 ainsi que le montant de 914 600 dollars correspondant aux autres produits et ajustements de l’exercice clos le 30 juin 2022, soient portés au crédit des États Membres. 

Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour pour l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022 (MINUAD) (A/77/780) 

Compte tenu des caractéristiques particulières de la MINUAD et de son historique financier, notamment du niveau de son déficit net de trésorerie (18 743 300 dollars) et de l’incertitude planant quant aux délais de versement des arriérés de contributions (121 203 300 dollars), le Comité consultatif recommande que l’Assemblée générale prenne note du solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022, soit 13 974 200 dollars et des autres produits de l’exercice clos le 30 juin 2022, soit 40 131 600 dollars [produits divers ou accessoires (4 375 300 dollars) et annulation d’engagements d’exercices antérieurs (35 775 800 dollars), déduction faite des pertes liées aux placements (19 500 dollars)]. 

Pour le CCQAB, l’Assemblée devrait se prononcer sur l’affectation du montant total de 54 105 800 dollars après avoir examiné le rapport final sur la situation financière de l’Opération.  Mais elle devrait déjà autoriser exceptionnellement le Secrétaire général à engager les dépenses au titre du fonctionnement et de la liquidation de l’Opération, en utilisant le Fonds de réserve pour le maintien de la paix, selon que de besoin. 

Déclarations

M. ESSAM ALSHAHIN (République arabe syrienne) a estimé que la responsabilité du financement de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) incombe à « l’agresseur », conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.  L’Accord sur le désengagement des forces affirme que le Golan occupé fait partie intégrante de la Syrie, a-t-il rappelé, en réclamant un appui financier adéquat pour la FNUOD, dans le cadre de son redéploiement dans la zone de séparation et le long de la ligne de cessez-le-feu.  Le représentant a condamné les attaques israéliennes constantes menées sous de « faux prétextes » mais s’est néanmoins félicité de l’accroissement des forces de la FNUOD et de la remise en état de la position 17A, qui permettra de couvrir l’ensemble de la zone d’Alf Sal.  Considérant leur impact positif sur le plan des services, le délégué a souligné la nécessité d’augmenter le nombre des projets à impact rapide et leur financement. Il a pris note de la réaffectation des postes nationaux, notamment ceux de traducteurs, tout en appelant à la « nationalisation » plus marquée des postes.

Mme JELENA PLAKALOVIĆ (Serbie) s’est dite heureuse de noter que, dans le projet de budget à l’examen, il soit indiqué que la MINUK continuera de fournir un appui à la protection des droits de l’homme, à l’état de droit et à la mise en œuvre de la loi sur l’usage des langues pour toutes les communautés du Kosovo-Metohija.  Estimant que certains des objectifs clés de la résolution 1244 du Conseil de sécurité n’ont pas été atteints, elle a jugé crucial que la Mission reste engagée « avec la même portée et le même mandat ».  Elle s’est opposée à toutes les tentatives de minimiser une situation manifestement instable, marquée par des tensions et des incidents fréquents, qui se sont d’ailleurs intensifiés à la fin de l’année dernière et au début de cette année.  La MINUK est donc plus que jamais nécessaire, a insisté la représentante, jugeant inacceptables les attaques contre les biens de l’Église orthodoxe serbe et l’état général du patrimoine religieux et culturel serbe, dont quatre monuments sont inscrits dans la Liste du patrimoine mondial en péril de l’UNESCO. 

La représentante a aussi parlé du retour de plus de 200 000 déplacés qui, compte tenu des attaques, craignent de rentrer chez eux.  Étant donné que la communauté serbe est confrontée à de nombreux problèmes et obstacles de nature essentiellement systémique et institutionnelle, il serait préférable, a-t-elle suggéré, que la Mission consulte cette communauté pour la sélection des projets. Elle a d’ailleurs jugé regrettable que la proposition budgétaire ne mentionne pas la question irrésolue des droits de propriété des déplacés.  La Serbie, a annoncé la déléguée, continuera d’appeler, sinon à une hausse, du moins au maintien du niveau actuel du budget.  Elle a salué la proposition du Secrétaire général d’augmenter le montant du programme de renforcement de la confiance.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Instance permanente exhorte à placer les conceptions autochtones de la santé au cœur du Programme 2030

Vingt-deuxième session,
13e séance plénière – après-midi
DH/5479

L’Instance permanente exhorte à placer les conceptions autochtones de la santé au cœur du Programme 2030

L’Instance permanente sur les questions autochtones a achevé, cet après-midi, sa vingt-deuxième session en adoptant par consensus et tel qu’oralement amendés plusieurs projets de rapport par lesquels elle exhorte les États Membres et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) à reconnaître que les conceptions autochtones de la santé humaine et de la santé de la planète doivent se retrouver au cœur du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Point d’orgue de cette session consacrée aux « Peuples autochtones, santé humaine, santé de la planète et des territoires et changements climatiques: une démarche fondée sur les droits », le discours du Président de l’Instance a rendu un vibrant hommage aux peuples autochtones et à leur conception du monde, qui ignore notamment la séparation entre nature et culture. 

Parmi ses recommandations en lien avec la santé, l’Instance permanente appelle l’OMS à créer un organe consultatif de haut niveau composé de représentants des peuples autochtones afin de guider ses travaux sur la santé humaine et la santé de la planète.  De même, elle demande aux États Membres de mettre en place des plans spéciaux pour améliorer la santé des peuples autochtones, y compris la santé sexuelle et reproductive des femmes autochtones. 

En ce qui concerne la Décennie internationale des langues autochtones 2022-2032, l’Instance permanente demande aux États Membres de fournir d’urgence un soutien et des ressources suffisants et adaptés pour la promotion des langues autochtones, en mettant l’accent sur les initiatives dirigées par les peuples autochtones. 

Elle recommande également qu’ONU-Femmes réalise une étude sur les conséquences de la colonisation sur les droits des femmes et des filles autochtones dans l’objectif de recenser les domaines d’action pour faire progresser la mise en œuvre de la recommandation générale N°39 (2022) du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes sur les droits des femmes et des filles autochtones. 

De même, l’Instance permanente recommande que les États coloniaux, d’autrefois et d’aujourd’hui, offrent des voies de recours et des réparations aux peuples autochtones touchés.  Elle appelle également les États Membres, en tant que débiteurs d’obligations, à veiller à ce que les entités du secteur privé respectent les droits des peuples autochtones dans le cadre de leurs politiques de protection et de diligence raisonnable. 

Au titre de ses six domaines d’action (développement économique et social, culture, environnement, éducation, santé et droits humains), outre la garantie de l’accès des peuples autochtones aux médias, l’Instance demande à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle de garantir la participation pleine et effective des peuples autochtones aux réunions portant sur un instrument juridique international relatif à la propriété intellectuelle, aux ressources génétiques et aux savoirs traditionnels qui y sont associés. 

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’OMS sont appelées pour leur part à élaborer des notes d’orientation sur les risques liés à l’utilisation des pesticides dans les territoires des peuples autochtones, en consultation avec ces derniers. 

L’Instance exhorte en outre les États, les peuples autochtones et les entreprises à élaborer conjointement des normes nationales pour la prise en compte des droits des peuples autochtones dans le développement du secteur privé et à promouvoir les partenariats public-privé, le cas échéant. Elle demande par ailleurs que les débats du prochain sommet visant à renouveler l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, qui doit se tenir au Brésil en août 2023, associent pleinement les peuples autochtones de la région de l’Amazonie à l’élaboration d’un document d’orientation qui tienne compte de leur situation, notamment des activités illégales transfrontalières et de la criminalité organisée. 

Pour ce qui est de ses travaux futurs, l’Instance permanente recommande qu’en 2025, l’Assemblée générale convoque une réunion plénière de haut niveau dite « Conférence mondiale sur les peuples autochtones + 10 » afin d’évaluer les progrès accomplis dans la suite donnée aux engagements pris dans le document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones. 

Dans sa déclaration de clôture, le Président de l’Instance permanente, M. Darío José Mejía Montalvo (Colombie), a dénoncé les menaces qui pèsent à l’encontre des défenseurs des droits des peuples autochtones y compris les femmes.  Il a également regretté que certains États ne reconnaissent pas les peuples autochtones.  Ces derniers souffrent de discriminations persistantes, a-t-il dit, évoquant les « récits terrifiants » entendus lors de cette session sur les enfants autochtones incarcérés. 

De plus, il est inacceptable de dire, comme l’a fait le délégué d’un État, que parler de la situation des peuples autochtones pourrait avoir un effet aggravant, a encore dénoncé le Président qui a jugé fondamental d’assurer le suivi des actes de violence perpétrés contre les peuples autochtones.  Le Président a par ailleurs insisté sur la nécessité que les peuples autochtones ne soient pas mis sur le même pied d’égalité que les communautés locales, souhaitant en outre que davantage d’espaces de prise de décision soient ouverts à ces peuples. 

Dressant le bilan de ces deux semaines de travaux, marquées par des « interventions de très haut niveau », notamment celle du Président de la Colombie et des représentants des peuples autochtones de toutes les zones socioculturelles, il a déclaré que « dans cette grande maison du monde, nous avons montré ce qu’est l’espoir lorsqu’il se pare de couleurs ». 

La session s’est achevée par deux performances rituelles. 

Les recommandations de l’Instance, dont la vingt-troisième session devrait se tenir au Siège de l’ONU du 15°au 26°avril 2024, seront transmises au Conseil économique et social (ECOSOC) pour approbation finale.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: le Conseil de sécurité condamne unanimement l’interdiction faite par les Taliban aux femmes afghanes de travailler pour l’ONU dans le pays

9314e séance – après-midi
CS/15271

Afghanistan: le Conseil de sécurité condamne unanimement l’interdiction faite par les Taliban aux femmes afghanes de travailler pour l’ONU dans le pays

Le Conseil de sécurité a condamné aujourd’hui à l’unanimité la décision prise début avril par les Taliban d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour l’Organisation des Nations Unies en Afghanistan, ajoutant que cette mesure « compromet les droits humains et les principes humanitaires ».

Par sa résolution 2681 (2023), adoptée à l’initiative des Émirats arabes unis et du Japon, le Conseil demande en outre « la participation pleine, égale, véritable et en toute sécurité des femmes et des filles en Afghanistan ». Il lance un appel aux Taliban pour qu’ils « reviennent rapidement » sur les politiques et pratiques qui restreignent le plein exercice par les femmes et les filles de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales, « notamment pour ce qui est de leur accès à l’éducation et à l’emploi, leur liberté de circulation et la participation pleine, égale et véritable des femmes à la vie publique ».  Il exhorte en outre tous les États et toutes les organisations à user de leur influence pour obtenir rapidement l’annulation de ces politiques et pratiques.

Par ailleurs, le Conseil exige de nouveau de toutes les parties qu’elles permettent « un accès humanitaire plein, rapide, sûr et sans entrave » au personnel des organismes humanitaires des Nations Unies, à leurs partenaires, aux autres acteurs humanitaires et aux prestataires de services de base, « indépendamment du genre ».

Dans son préambule, la résolution réaffirme « le rôle indispensable que les femmes jouent dans la société afghane » et cite notamment « les interventions humanitaires ».  Elle rappelle en outre que l’aide humanitaire ne peut être effectivement acheminée que si tous les acteurs permettent un accès total, rapide, sûr et sans entrave à « tout le personnel humanitaire, y compris les femmes ».  Dès le 5 avril, le Secrétaire général avait fermement condamné l’interdiction, rappelant que le personnel féminin est essentiel pour les opérations des Nations Unies, y compris pour la fourniture d’une aide vitale.

Plus généralement, le Conseil insiste sur l’importance d’obtenir la participation « pleine, égale et véritable et en toute sécurité » des femmes à l’avenir et au développement à long terme de l’Afghanistan ainsi qu’aux efforts en faveur de la paix et la sécurité.

Par ailleurs, le Conseil, qui souligne l’urgence d’un remède à la situation économique et humanitaire « désastreuse » qui règne en Afghanistan, se dit conscient qu’il faut y contribuer « notamment en s’efforçant de permettre l’utilisation des actifs appartenant à la Banque centrale d’Afghanistan au profit du peuple afghan ». 

Le Conseil insiste enfin sur l’importance d’une « présence constante » de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) et des structures onusiennes « dans tout l’Afghanistan », réaffirme son appui sans réserve à la Mission et à la Représentante spéciale du Secrétaire général et souligne l’importance du dialogue entre toutes les parties prenantes afghanes, la région et la communauté internationale.

Avant le vote, la représentante des Émirats arabes unis, parlant au nom également du Japon, en tant que coauteurs du texte, avait insisté sur la gravité sans précédent des restrictions dans l’histoire des Nations Unies, ajoutant qu’elles mettaient en danger la présence même des Nations Unies dans le pays.  Elle a aussi fait valoir que le texte comptait désormais plus de 90 coauteurs, non seulement au sein du Conseil de sécurité, mais aussi parmi les voisins immédiats de l’Afghanistan, du monde musulman et du monde entierCe soutien interrégional donne plus d’importance au message d’aujourd’hui, a-t-elle estimé.  Elle a aussi mentionné les dispositions du texte en faveur de l’inclusion des femmes et des filles ainsi que celles relatives au dialogue et à la collaboration nécessaires entre toutes les parties prenantes afghanes, de la région et au-delà.  Le texte reflète aussi l’engagement en faveur du bien-être du peuple afghan, a ajouté la représentante, qui a particulièrement insisté sur le rôle essentiel que les travailleurs humanitaires et le personnel des Nations Unies jouent pour le bien-être de la population afghane, un objectif qui ne peut être atteint sans les femmes.

Plusieurs des délégations qui ont pris la parole après le vote –Japon, États-Unis et Royaume-Uni- ont insisté sur la force du message adressé aux Taliban et sur le caractère inacceptable de la discrimination qu’ils imposent aux femmes.  Le représentant des États-Unis a en outre rendu hommage au courage des femmes afghanes que son homologue britannique a promis de ne pas abandonner. 

Si ces pays se sont félicités de l’unanimité avec laquelle le Conseil a voté, la Chine et la Fédération de Russie ont apporté des explications de vote plus mitigées. 

Le représentant de la Chine a ainsi dit soutenir le « Gouvernement intérimaire de l’Afghanistan » mais aussi « partager les préoccupations » des autres pays concernant les femmes.  Il est ensuite revenu sur le « retrait irresponsable » des Occidentaux du pays en 2022, ajoutant qu’il avait encore aggravé une situation déjà catastrophique.  Il a toutefois salué le travail du Japon et des Émirats arabes unis et les a remerciés d’avoir intégré au texte les « propositions raisonnables » de son pays et d’autres membres.  Il a notamment fait valoir que le texte adopté reconnaît que l’Afghanistan est confronté à des défis multiples, humanitaires mais aussi économiques et de développement.  Pour la Chine, il faut donc apporter une aide plus importante et préserver le dialogue avec toutes les parties prenantes dans le pays.  Il a notamment rappelé que plus de sept milliards d’avoirs afghans avaient été gelés en août dernier et qu’à ce jour « pas un seul centime » n’avait été rendu au peuple afghan.  Il a donc exhorté les États-Unis à agir au plus vite pour répondre aux exigences que la résolution a fixées à cet égard. 

Le représentant de la Fédération de Russie a tenu un discours très proche, remerciant lui aussi les deux pays porte-plume pour leurs efforts, qui ont permis de trouver un accords à partir de positions initialement éloignées.  Il n’en a pas moins rappelé qu’en dehors de la résolution, il restait « d’autres éléments », comme la questions des conséquences des sanctions unilatérales, qu’il a dénoncées comme un nouvel exemple du « deux poids, deux mesures ».  Si vous vous inquiétez tant pour le peuple afghan, pourquoi ne pas rendre les avoirs gelés, lever les restrictions unilatérales et commencer de répondre aux problèmes que vous avez vous-mêmes créés, a-t-il lancé à l’intention de ses collègues occidentaux, avant de saluer le travail dévoué du personnel de l’ONU en Afghanistan sous la direction de la Représentante spéciale du Secrétaire général. 

LA SITUATION EN AFGHANISTAN

Texte du projet de résolution (S/2023/292)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions antérieures sur l’Afghanistan, 

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de l’Afghanistan, ainsi que son appui continu au peuple afghan, réaffirmant son soutien à la paix, à la stabilité, à la prospérité et à l’inclusion en Afghanistan, et exprimant son appui au principe selon lequel il appartient aux Afghans eux-mêmes de déterminer, de façon globale et inclusive, l’avenir politique et le mode de développement du pays, sous leur direction et sous leur contrôle,

Constatant qu’il importe de régler les problèmes complexes auxquels se heurte l’Afghanistan, notamment sur les plans humanitaire, économique et social, du développement, de la sécurité et du terrorisme, des stupéfiants, du dialogue et de la concertation, de la gouvernance et de l’état de droit, ainsi que des droits humains, particulièrement des droits des femmes et des filles et des minorités religieuses et ethniques, 

Réaffirmant le rôle indispensable que les femmes jouent dans la société afghane, notamment dans la prévention et le règlement des conflits, la consolidation de la paix et les interventions humanitaires, insistant sur l’importance d’obtenir leur participation pleine, égale et véritable et en toute sécurité à l’avenir et au développement à long terme de l’Afghanistan ainsi qu’à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité, et de les associer davantage à la prise des décisions relatives à la prévention et au règlement des conflits,

Constatant avec une vive préoccupation l’érosion croissante du respect des droits humains et des libertés fondamentales des femmes et des filles en Afghanistan par les Taliban et en particulier le fait que les femmes et les filles n’ont pas un accès égal à l’éducation, aux possibilités économiques, notamment un accès au travail, à la participation à la vie publique, à la liberté de circulation, à la justice et aux services de base, ce qui rend la paix, la stabilité et la prospérité dans le pays irréalisables,

Rappelant que l’aide humanitaire ne peut être effectivement acheminée que si tous les acteurs permettent un accès total, rapide, sûr et sans entrave, conformément au droit international, à tout le personnel humanitaire, y compris les femmes, les organismes des Nations Unies, les organisations non gouvernementales internationales et nationales et les autres acteurs humanitaires, et qu’il faut permettre aux femmes et aux filles d’accéder en toute sécurité à l’aide humanitaire et aux services de base,

Profondément préoccupé de ce que la décision récente des Taliban d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour l’Organisation des Nations Unies en Afghanistan, venant s’ajouter aux restrictions antérieures consistant à interdire aux femmes afghanes de travailler pour des organisations non gouvernementales internationales et nationales, ne nuise gravement aux opérations des Nations Unies dans le pays, notamment à la fourniture d’une assistance vitale et de services de base aux personnes les plus vulnérables et à la capacité de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) d’exécuter pleinement son mandat, et rappelant à cet égard l’Article 8 de la Charte des Nations Unies,

Soulignant que l’interdiction faite aux femmes afghanes de travailler pour l’Organisation des Nations Unies est inédite dans l’histoire de l’Organisation,

Se déclarant profondément préoccupé devant la situation économique et humanitaire désastreuse qui règne en Afghanistan, notamment le déficit de financement pour les opérations humanitaires, à un moment où le pays traverse une crise humanitaire, 6 millions de personnes se trouvant dans des conditions proches de la famine, et conscient qu’il faut contribuer à remédier aux problèmes considérables qui pèsent sur l’économie afghane, en s’efforçant de rétablir les systèmes bancaire et financier, et qu’il faut redoubler d’efforts pour apporter une aide humanitaire et mener d’autres activités visant à répondre aux besoins humains de base en Afghanistan,

1.    Condamne la décision prise par les Taliban d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour l’Organisation des Nations Unies en Afghanistan, ce qui compromet les droits humains et les principes humanitaires;

2.    Demande la participation pleine, égale, véritable et en toute sécurité des femmes et des filles en Afghanistan, lance un appel aux Taliban pour qu’ils reviennent rapidement sur les politiques et pratiques qui restreignent le plein exercice par les femmes et les filles de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales, notamment pour ce qui est de leur accès à l’éducation et à l’emploi, leur liberté de circulation et la participation pleine, égale et véritable des femmes à la vie publique, et exhorte tous les États et toutes les organisations à user de leur influence, en conformité avec la Charte des Nations Unies, pour promouvoir l’annulation urgente de ces politiques et pratiques;

3.    Exige de nouveau de toutes les parties qu’elles permettent un accès humanitaire plein, rapide, sûr et sans entrave au personnel des organismes humanitaires des Nations Unies, à leurs partenaires, aux autres acteurs humanitaires et aux prestataires de services de base, indépendamment du genre;

4.    Souligne qu’il faut d’urgence continuer de remédier à la situation économique et humanitaire désastreuse qui règne en Afghanistan et à l’absence de services de base pour la population afghane et d’examiner les conditions économiques et sociales qui peuvent mener à l’autonomie et à la stabilité en Afghanistan, et est conscient qu’il faut contribuer à remédier aux problèmes considérables qui pèsent sur l’économie afghane, notamment en s’efforçant de permettre l’utilisation des actifs appartenant à la Banque centrale d’Afghanistan au profit du peuple afghan;

5.    Souligne qu’il importe au plus haut point de pouvoir compter sur une présence constante de la MANUA et des autres organismes, fonds et programmes des Nations Unies dans tout l’Afghanistan, réaffirme son appui sans réserve aux activités de la MANUA et de la Représentante spéciale du Secrétaire général et demande à l’ensemble des acteurs politiques et des parties prenantes en Afghanistan, notamment aux autorités compétentes, le cas échéant, ainsi qu’aux acteurs internationaux de se coordonner avec la MANUA dans le cadre de l’exécution de son mandat et d’assurer la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé dans tout le pays;

6.    Souligne que le dialogue, la consultation et la concertation parmi toutes les parties prenantes afghanes concernées, la région et la communauté internationale sont essentiels en vue d’un règlement politique en Afghanistan, ainsi que pour la paix et la stabilité dans le pays, la région et au-delà, et à cet égard se félicite des efforts diplomatiques qui favoriseraient un tel règlement;

7.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: seul le concours de tous les acteurs concernés pourra sortir le processus politique syrien de l’impasse, assure l’Envoyé spécial

9313e séance - après-midi
CS/15270

Conseil de sécurité: seul le concours de tous les acteurs concernés pourra sortir le processus politique syrien de l’impasse, assure l’Envoyé spécial

Le processus politique en Syrie se trouve à un moment potentiellement crucial, a estimé cet après-midi l’Envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, en faisant état devant le Conseil de sécurité d’un regain d’attention diplomatique à l’égard de ce pays, près de trois mois après les séismes dévastateurs qui l’ont frappé ainsi que la Türkiye.  M. Geir Pedersen a toutefois estimé qu’aucun groupe d’acteurs existant ne peut à lui seul sortir de l’impasse ce processus dirigé par les Syriens eux-mêmes et qu’il est chargé de faciliter. 

En effet, ni les parties syriennes, ni celles du processus d’Astana –Fédération de Russie, Iran et Türkiye–, ni les pays occidentaux, ni les acteurs arabes ne peuvent séparément parvenir à une solution politique, a assuré le haut fonctionnaire.  Aucun ne peut à lui seul sortir de l’impasse militaire ou restaurer la souveraineté, l’indépendance ou l’intégrité territoriale de la Syrie, s’attaquer à ses problèmes structurels, redresser son économie et reconstruire le pays.  Aucun groupe d’acteurs ne peut résoudre à lui seul la menace terroriste, endiguer les sources d’instabilité régionale et répondre aux préoccupations sécuritaires légitimes, y compris aux frontières de la Syrie, a-t-il encore précisé. 

Et il en va de même pour la question des personnes détenues, enlevées et disparues dans ce pays, ainsi que pour le retour sûr, digne et volontaire des réfugiés syriens.  « En bref, pour résoudre chacun des innombrables problèmes de la Syrie, il faut plusieurs clefs, chacune détenue par un acteur différent, qui ne peut être ignoré et qui peut bloquer le processus s’il est exclu », a résumé l’Envoyé spécial.  Il a toutefois appelé les autorités syriennes à mettre fin aux « tendances négatives » à l’œuvre et à en initier de positives, jugeant cela d’autant plus nécessaire que le calme relatif sur le terrain a été de nouveau émaillé par des incidents sécuritaires multiples au cours du mois écoulé. 

« Même dans la longue et brutale histoire de la crise syrienne », l’ampleur actuelle des besoins humanitaires dans le pays est sans précédent, a de son côté déclaré la Directrice de la Division du financement de l’action humanitaire et de la mobilisation de ressources du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), ajoutant que presque trois mois après les tremblements de terre qui se sont produits à la frontière entre la Türkiye et la Syrie, « beaucoup reste à faire », malgré le déblaiement de plus de 470 000 mètres cubes de gravats.  

Décrivant une « terrible réalité » après 12 ans de conflit armé, Mme Lisa Doughten a rappelé qu’avant le tremblement de terre, 15,3 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population syrienne, avaient déjà besoin d’aide humanitaire et de protection.  « Un nombre, je le crains, qui ne fait que croître », a-t-elle alerté, expliquant que de nombreuses personnes ont trouvé refuge temporairement dans des écoles, des mosquées et chez des voisins, tandis que d’autres se sont tournées vers des espaces ouverts par peur des répliques. 

Dans ce contexte, Mme Doughten s’est félicitée que les mesures d’urgence mises en œuvre depuis les tremblements de terre, telles que la délivrance de visas, les permis de voyage accélérés et les approbations générales, aient permis d’intensifier les opérations dans les zones gouvernementales.  Dans le nord-ouest de la Syrie, les agences de l’ONU et leurs partenaires continuent d’emprunter les trois points de passage transfrontalier disponibles –Bab el-Haoua, Bab el-Salam et Raaï– pour atteindre des millions de personnes chaque mois. 

La Fédération de Russie a en revanche accusé les donateurs occidentaux de « politiser » l’aide en faveur des sinistrés et de l’utiliser comme « instrument de pression » sur Damas en ne la destinant qu’aux zones échappant à son contrôle: l’appel d’urgence de l’OCHA pour le tremblement de terre aurait été selon elle financé à hauteur de 97%, alors que le plan humanitaire traditionnel de l’ONU pour la Syrie, destiné à aider les territoires gouvernementaux, n’est financé qu’à hauteur de 8%. 

De son côté, la délégation américaine a rejeté toute suggestion selon laquelle l’aide humanitaire serait bloquée par les sanctions imposées par Washington, un point de vue soutenu par la République islamique d’Iran par exemple, faisant observer que des dérogations humanitaires avaient été mises en place.  De même, elle a contesté les affirmations de son homologue russe selon lequel Moscou soutiendrait un processus politique mené par les Syriens eux-mêmes, accusant la Russie d’avoir dressé des obstacles supplémentaires à la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle. 

La France a expliqué que les sanctions récemment imposées par l’Union européenne aux individus et entités impliqués dans le trafic de captagon étaient liées à la volonté d’empêcher la Syrie de continuer de déstabiliser la région.  Reconnaissant que cette perspective n’est acceptable ni pour le peuple syrien, ni pour les États de la région, ni pour la communauté internationale dans son ensemble, la délégation a exhorté le « régime d’Assad » à faire des gestes tangibles afin qu’un véritable processus politique soit initié. 

La République arabe syrienne a quant à elle dénoncé les attaques de l’armée israélienne contre les territoires syriens au cours des dernières semaines de même que le pillage de ses ressources naturelles par les forces américaines, qu’elle a accusées d’être présentes illégalement dans le nord-est de son territoire.  La délégation a de plus mis en garde Israël et ses soutiens contre les dangers de leurs politiques « irresponsables » qui poussent la région vers une escalade à grande échelle et une nouvelle phase d’insécurité et d’instabilité.  Le Conseil doit condamner ces attaques, les faire cesser et demander à Israël de rendre des comptes, a-t-elle exigé, enjoignant en outre les États-Unis à cesser de parrainer des organisations « terroristes et séparatistes » et de spolier les richesses naturelles de la Syrie.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. GEIR PEDERSEN, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a estimé que les efforts visant à faire avancer un processus politique en Syrie se trouvent à un moment potentiellement crucial.  « Dans le sillage tragique des tremblements de terre, nous avons constaté un regain d’attention diplomatique à l’égard de la Syrie », a-t-il indiqué, notant que les contacts se poursuivent entre les acteurs d’Astana et le Gouvernement syrien et que de nouveaux engagements ont été pris entre les pays arabes et le Gouvernement syrien.  Ce regain d’attention pourrait agir comme un coupe-circuit et permettre de débloquer des efforts longtemps dans l’impasse pour promouvoir le processus politique dirigé par les Syriens eux-mêmes, a-t-il estimé. 

Il a indiqué que l’ONU a besoin de l’appui de l’ensemble des parties prenantes, aucun groupe d’acteurs existant –ni les parties syriennes, ni les acteurs d’Astana, ni les acteurs occidentaux, ni les acteurs arabes– ne pouvant à lui seul parvenir à une solution politique, sortir de l’impasse militaire ou restaurer la souveraineté, l’indépendance ou l’intégrité territoriale de la Syrie .  Aucun groupe d’acteurs ne peut s’attaquer aux problèmes structurels de la Syrie, redresser son économie et reconstruire le pays, ni résoudre la menace terroriste, endiguer les sources d’instabilité régionale et répondre aux préoccupations légitimes sur le plan sécuritaire, a poursuivi le haut fonctionnaire.  Et aucun groupe d’acteurs ne peut assumer seul notre responsabilité collective de protéger les civils syriens, de traiter la question des personnes détenues, enlevées et disparues, et de garantir les conditions d’un retour sûr, digne et volontaire pour les réfugiés.  En bref, pour résoudre chacun des innombrables problèmes de la Syrie, il faut plusieurs clefs, chacune détenue par un acteur différent qui ne peut être ignoré et qui peut bloquer le processus si exclu. 

Les actions du Gouvernement syrien, associées à des actions extérieures, sur certaines de ces questions, pourraient mettre fin aux tendances négatives à l’œuvre et en initier de positives, a estimé M. Pedersen qui a plaidé pour des mesures substantielles permettant d’instaurer un climat de confiance, y compris parmi les civils à l’intérieur de la Syrie et ceux qui l’ont fuie.  « D’un autre côté, si cette opportunité n’est pas saisie, nous ne verrons pas de réels changements sur le terrain, ce qui engendrera de nouvelles frustrations et du désespoir », a mis en garde l’Envoyé spécial.  Quant à la Commission constitutionnelle, elle devrait reprendre ses travaux à Genève dans un esprit de compromis, de façon substantielle et à un rythme soutenu, a-t-il soutenu. 

Le haut fonctionnaire a ensuite exprimé son inquiétude quant au fait que le bref calme qui a suivi les tremblements de terre s’est encore érodé au cours du mois écoulé.  Les incidents violents se sont multipliés dans le nord-ouest, avec des tirs d’obus et de roquettes de plus en plus réguliers de part et d’autre des lignes de front, entre les forces progouvernementales, les forces d’opposition armées ainsi que le groupe terroriste Organisation de libération du Levant (HTS).  En outre, dans le nord-est, des attaques ont été perpétrées par des groupes d’opposition turcs armés contre des positions des Forces démocratiques syriennes (FDS), en réponse, d’après eux, aux tirs d’obus et de roquettes des FDS, y compris contre des soldats turcs.  De même, les frappes israéliennes sont de plus en plus fréquentes, et dans certaines régions, les attaques sporadiques de Daech semblent se multiplier, en particulier dans le désert central, alors que le Gouvernement syrien, la Fédération de Russie et la coalition dirigée par les États-Unis multiplient les frappes à leur encontre.  L’Envoyé spécial a demandé que soit imposé un cessez-le-feu à l’échelle nationale et que prévale une approche coordonnée pour lutter contre les groupes terroristes inscrits sur la liste, conformément au droit international. 

Pour l’Envoyé spécial, il n’existe aucun raccourci vers la stabilité si l’on ne s’attaque pas aux causes fondamentales du conflit.  Nous devons constamment garder à l’esprit que, même si nous commençons modestement et que nous progressons par étapes, la Syrie a toujours besoin d’une solution globale, comme le demande la résolution 2254 (2015), pour restaurer sa souveraineté, son indépendance, son unité et son intégrité territoriale et pour répondre aux aspirations légitimes du peuple syrien. 

Mme LISA DOUGHTEN, Directrice de la Division du financement de l’action humanitaire et de la mobilisation de ressources du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a averti que l’ampleur actuelle des besoins humanitaires en Syrie est sans précédent, « même dans la longue et brutale histoire de la crise syrienne ».  Elle a indiqué que, presque trois mois après les tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé la Türkiye et la Syrie, l’ONU et ses partenaires humanitaires continuent de soutenir les efforts de relèvement.  En Syrie, a-t-elle précisé, plus de 3 millions de personnes ont reçu des repas chauds et des rations, et quelque 1,1 million de personnes ont reçu une assistance sanitaire.  Plus de 470 000 mètres cubes de gravats ont été déblayés mais beaucoup reste à faire, a-t-elle reconnu, qualifiant les séismes du 6 février de « tout simplement catastrophiques ».  Ils ont non seulement apporté plus de morts et de destructions dans des parties du nord de la Syrie usées par plus d’une décennie de guerre, mais aussi souligné la « terrible réalité » à laquelle sont confrontés des millions de personnes dans tout le pays: 12 années de conflit armé, des pressions macroéconomiques croissantes, des services publics en déclin et des infrastructures essentielles en décomposition. 

La responsable de l’OCHA a rappelé qu’avant le tremblement de terre, 15,3 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population totale, avaient déjà besoin d’une aide humanitaire et d’un soutien en matière de protection. « Ce nombre, je le crains, ne fait que croître », a-t-elle alerté, expliquant que de nombreuses personnes ont trouvé refuge temporairement dans des écoles, des mosquées et des maisons de voisins, tandis que d’autres se sont tournées vers des espaces ouverts par peur des répliques.  De plus, les femmes, les hommes et les enfants vivent dans des environnements surpeuplés et stressants, ce qui aggrave la tension mentale de ceux qui font face à des années de traumatisme, a expliqué Mme Doughten, précisant que le pays compte plus de 6,9 millions de déplacés et qu’environ 80% de cette population a maintenant été déplacée de chez elle depuis au moins cinq ans.  Elle a ajouté qu’afin de trouver des moyens plus durables d’aide à ces personnes, près de 500 projets de relèvement rapide ont été mis en œuvre dans toutes les régions du pays, la grande majorité dans le cadre des plans de réponse humanitaire pour la Syrie.  Selon elle, le financement total reçu pour ces projets dépasse 640 millions de dollars, soit une augmentation de près de 80 millions de dollars depuis février, ce qui est encourageant au vu de l’immensité des besoins. 

Dans ce contexte, Mme Doughten s’est félicitée que les mesures d’urgence mises en œuvre depuis les tremblements de terre, telles que les visas, les permis de voyage accélérés et les approbations générales, aient permis d’intensifier les opérations dans les zones gouvernementales.  Dans le nord-ouest de la Syrie, les agences de l’ONU et leurs partenaires continuent d’utiliser les trois points de passage transfrontalier disponibles -Bab el-Haoua, Bab el-Salam et Raaï- pour atteindre des millions de personnes chaque mois.  Les missions interorganisations quasi quotidiennes ont aussi permis au personnel de l’ONU de s’assurer que l’assistance transfrontalière répond aux besoins les plus urgents, a-t-elle ajouté, souhaitant que ces modalités soient étendues pour continuer à faciliter les opérations urgentes.  En revanche, des progrès similaires n’ont pas été réalisés dans les opérations à travers les lignes vers le nord-ouest de la Syrie, et ce, malgré un effort concerté, a relevé la responsable, qui a cependant assuré que le dialogue se poursuit à tous les niveaux pour reprendre les convois prévus de manière sûre. 

Mme Doughten a indiqué que l’appel éclair pour la Syrie est presque entièrement financé, avec plus de 384 millions de dollars de contributions signalées.  Ce soutien au plan de trois mois a été vital, en particulier pour permettre à l’ONU et à ses partenaires d’étendre les opérations, de réaffecter les stocks et de soutenir les programmes d’urgence.  Mais il en faut bien plus, a-t-elle souligné, constatant que le plan de réponse humanitaire pour la Syrie reste gravement sous-financé, avec seulement 363 millions de dollars reçus sur les 4,8 milliards de dollars requis avant les séismes.  Le soutien des donateurs sera à nouveau nécessaire lors de la conférence de Bruxelles en juin, a-t-elle indiqué.

Pour M. VASSILY A.  NEBENZIA (Fédération de Russie), il n’y a pas d’alternative à la promotion d’un processus de règlement politique en Syrie, dirigé et mis en œuvre par les Syriens avec l’aide des Nations Unies, dans le strict respect de la résolution 2254 (2015).  Dans ce contexte, il a soutenu les efforts de médiation de l’Envoyé spécial pour promouvoir un processus de règlement syrien dans le respect de la souveraineté, de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale de la Syrie, sans aucune ingérence extérieure, tout en lui demandant de s’en tenir strictement à son mandat, y compris dans le cadre de la Commission constitutionnelle.  Les difficultés rencontrées dans la reprise de ses travaux peuvent être surmontées s’il existe la volonté de le faire et si les intérêts de toutes les parties syriennes sont pris en compte, a-t-il fait valoir.  Notant que la situation sur le terrain reste tendue, il s’est inquiété de la menace d’une opération militaire dans le nord du pays, et de la présence militaire étrangère illégale des États-Unis et de leurs alliés à Zawfrater et Al-Tanf.  Il a également dénoncé l’intensification des frappes aériennes israéliennes sur le territoire syrien à la suite desquelles l’aéroport international d’Alep, par lequel l’aide humanitaire est acheminée aux victimes du tremblement de terre, a été mis hors service à deux reprises. Il s’est indigné de l’absence de réaction de la part des dirigeants de l’ONU suite à ces frappes.  Sur une note positive, il a salué le retour de la Syrie au sein de la famille arabe, en précisant que la normalisation entre Damas et Ankara se poursuit, en s’appuyant sur les avantages du format d’Astana. 

Sur le volet humanitaire, le représentant a constaté que les conséquences du séisme ne sont toujours pas surmontées, et que les besoins et problèmes croissants des Syriens ordinaires n’ont pas empêché les donateurs occidentaux de politiser l’aide et de l’utiliser comme un instrument de pression sur Damas.  Sur le terrain, l’aide occidentale et l’assistance de l’ONU ne sont pour l’instant destinées qu’aux zones échappant au contrôle de Damas, a-t-il affirmé, et l’appel d’urgence de l’OCHA pour le tremblement de terre est financé à 97%, alors que le plan humanitaire traditionnel de l’ONU pour la Syrie, destiné à aider les territoires gouvernementaux, n’est financé qu’à 8%.  Pendant ce temps, les États-Unis, continuent de piller les ressources naturelles de la Syrie, et ne manquent pas une occasion de confirmer qu’ils ne « donneront pas un centime » pour la reconstruction postconflit du pays et ne lèveront les sanctions que lorsqu’une transition politique sera enclenchée.  La Russie ne s’explique pas que seuls 10 convois humanitaires aient été envoyés dans la zone de désescalade depuis août 2021, et cela malgré l’autorisation donnée par Damas à l’ONU d’utiliser deux points de passage supplémentaires, Bab el-Salam et Raaï, pendant trois mois.  Si les collègues occidentaux du Conseil de sécurité continuent à faire comme si de rien n’était, la Russie en tiendra compte lors de la prochaine prorogation du mécanisme transfrontalier en juillet, a-t-il prévenu.  Nous approchons du moment de vérité dans la fourniture de l’aide humanitaire à la Syrie, a lancé le représentant selon qui le « double jeu de nos collègues occidentaux et leurs tentatives d’utiliser le levier humanitaire comme outil de pression sur Damas sont devenus trop évidents pour que les dirigeants de l’ONU continuent de les ignorer ». 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a affirmé que le régime syrien continue de rejeter les efforts diplomatiques visant à mettre fin à la guerre, l’accusant de refuser de négocier directement et de saper le travail de la Commission constitutionnelle.  De son côté, la Russie prétend soutenir le processus politique tout en entravant le travail de la Commission constitutionnelle.  Il a relevé que 130 000 Syriens demeurent portés disparus ou languissent dans les prisons et centres de détention du régime, regrettant que l’amnistie d’avril 2022 de Bashar Al-Assad n’a permis de libérer que 500 personnes dont beaucoup étaient émaciées ou traumatisées.  Depuis cette libération, la pratique brutale des détentions arbitraires et des disparitions forcées d’hommes, de femmes et d’enfants innocents se poursuit, a-t-il dénoncé. 

Le représentant a également accusé le régime d’avoir autorisé la Russie à utiliser la Syrie en tant que plateforme logistique pour exporter ses activités déstabilisatrices vers l’Afrique et inonder la région de drogues illicites.  Dans ce contexte, les États-Unis ne normaliseront pas leurs relations avec Assad et décourageront énergiquement leurs partenaires de le faire.  Et nous ne lèverons pas les sanctions imposées à ce régime sans réformes sincères, durables et sans processus politique, a fait savoir le représentant qui a exhorté le « régime Assad » à s’engager dans un processus politique en toute bonne foi. 

S’agissant du volet humanitaire, le délégué a noté que les opérations transfrontalières de l’ONU ont retrouvé leur niveau d’avant le tremblement de terre.  Cette aide parvient de nouveau à des millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, s’est-il félicité, jugeant impossible de remplacer cet accès transfrontière.  Il a rejeté toute suggestion selon laquelle l’aide humanitaire est bloquée par les sanctions américaines, faisant observer que des dérogations humanitaires ont été mises en place. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse), intervenant au nom de la Suisse et du Brésil, coporte-plumes du dossier humanitaire syrien, a appelé à tenir compte des répercussions à long terme du séisme, notamment l’insécurité alimentaire croissante qui touche aujourd’hui pas moins de 12 millions de personnes en Syrie. Elle a relevé que l’impact des 12 dernières années sur les infrastructures d’eau et de santé a contribué à l’épidémie de choléra qui sévit en Syrie, alertant en outre que l’érosion du tissu économique et social risque d’accélérer l’effondrement d’infrastructures critiques, les réseaux hydriques notamment. 

Pour que l’ONU et ses partenaires puissent réagir et prévenir de tels défis, le financement de l’appel éclair pour le tremblement de terre en Syrie et du plan de réponse humanitaire pour 2023 est crucial, a indiqué la représentante. Elle a souligné que l’assistance transfrontalière demeure un élément indispensable pour assurer l’acheminement de l’aide humanitaire aux plus vulnérables.  Les mesures mises en œuvre par le Gouvernement syrien à la suite des séismes ont contribué à un accès plus large, y compris du personnel de l’ONU, aux populations vulnérables.  Nous espérons que cet accès élargi et facilité se poursuivra aussi longtemps que nécessaire, conformément aux évaluations de l’OCHA, a-t-elle indiqué.  La représentante s’est aussi félicitée de l’amélioration de l’accès humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie, notamment de l’ouverture de deux points de passage transfrontaliers supplémentaires et du nombre important de missions transfrontalières interinstitutions des Nations Unies.  Avant de conclure, elle a appelé le Conseil de sécurité à s’unir derrière l’impératif humanitaire. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a déclaré qu’après plus de 12 ans de conflit et de nombreuses atteintes aux droits fondamentaux des Syriennes et des Syriens, il est essentiel de faire respecter un cessez-le-feu au niveau national.  À ce titre, elle a appelé les membres du Conseil à demeurer unis dans leur plaidoyer pour la désescalade.  Notant qu’il ne peut y avoir de paix durable sans justice, elle a réitéré son plein soutien à la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme et au Mécanisme international, impartial et indépendant.  L’engagement de toutes les composantes de la société syrienne est également nécessaire pour avancer la paix, a-t-elle ajouté, appelant à une participation pleine, égale et significative des femmes syriennes aux décisions qui engagent leur avenir, leurs besoins et leurs aspirations.  Ceci inclut leur engagement dans les processus politiques et dans tous les efforts pour la résolution du conflit, a-t-elle précisé.

M. GENG SHUANG (Chine) a noté que le processus politique syrien est dans l’impasse et que le terrorisme se poursuit.  Toutefois, malgré ces circonstances difficiles, il est encourageant que l’on continue d’œuvrer à la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle, a dit le représentant qui a appelé toutes les parties à travailler de manière constructive avec l’Envoyé spécial pour progresser vers une solution politique.  Il a salué les dernières interactions entre la Syrie et les pays de la région, ce qui laisse présager un nouvel élan au processus politique.  Le représentant a aussi exhorté la communauté internationale à continuer de lutter contre l’activisme terroriste et à intégrer de manière organique l’aide humanitaire dans les efforts de reconstruction à long terme.  Il a également demandé aux acteurs concernés de cesser de saper l’acheminement de l’aide humanitaire dans le nord-ouest de la Syrie. Cette aide doit être garantie et renforcée, « et pas le contraire », a martelé le représentant qui n’a pas manqué de plaider pour la levée des sanctions unilatérales pour ne pas aggraver la situation humanitaire. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a salué le travail accompli par l’OCHA, les agences humanitaires et les ONG dans les circonstances difficiles de ces derniers mois.  Les tremblements de terre de février ont exacerbé la situation humanitaire désastreuse et ont rendu encore plus complexes les opérations dans le nord-ouest de la Syrie, a constaté la représentante, d’autant plus que le conflit se poursuit.  Ainsi, a-t-elle affirmé, entre le 6 février et le 10 avril, le régime syrien et ses alliés ont mené des attaques terrestres près des camps où sont hébergées les victimes du tremblement de terre. 

Pour Mme Woodward, ce dont les humanitaires ont besoin pour fonctionner est clair: un accès humanitaire régulier et prévisible par toutes les voies possibles et pour tous les Syriens.  Ne pas savoir si les postes frontières de Raaï et de Bab el-Salam resteront ouverts au-delà du mois prochain compromet la capacité des humanitaires à planifier et à opérer efficacement, a affirmé la représentante, pour qui ceux qui en payeront le prix sont les Syriens qui ont besoin d’aide.  Elle a donc demandé aux membres du Conseil d’être prêts à agir pour garantir l’accès des acteurs humanitaires aux 4,1 millions de personnes vivant dans le nord-ouest de la Syrie. 

Une solution politique est essentielle pour mettre fin aux souffrances du peuple syrien, a déclaré la représentante, qui a martelé que la résolution 2254 reste la pierre angulaire d’une Syrie pacifique qui ne déstabilise pas l’ensemble de la région.  Sans cessez-le-feu, les Syriens ne pourront pas reconstruire leur vie, a-t-elle insisté.  Sans réconciliation nationale et sans engagements sur la libération des détenus, les réfugiés ne seront pas assurés de pouvoir rentrer dans leur pays en toute sécurité.  Sans informations sur les disparus, les familles souffriront à jamais de ne pas savoir ce qu’il est advenu de leurs proches.  Tous ces éléments constituent une voie vers une paix durable, a-t-elle fait valoir en demandant instamment au régime syrien de s’engager de bonne foi sur cette voie.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a déclaré que seule une solution politique au conflit en Syrie mettra un terme aux souffrances des Syriens.  Il a appelé à un cessez-le-feu national sans délai, notant en outre que la mise en œuvre des dispositions de la résolution 2254 (2015) adoptée à l’unanimité permettrait de construire les bases d’une paix durable à laquelle les Syriens aspirent.  Cette feuille de route a pourtant été ignorée par le régime et ses alliés: le régime refuse de s’engager de bonne foi dans un processus politique tangible sous les auspices des Nations Unies; et la Russie a pris en otage la Commission constitutionnelle qui ne se réunit plus depuis près d’un an, a-t-il dénoncé. 

Le représentant a estimé que les dynamiques de normalisation à l’œuvre depuis le séisme ne permettront pas de stabiliser la Syrie de façon durable.  En l’absence de processus politique, la Syrie continuera de déstabiliser la région, a-t-il prévenu.  C’est pourquoi l’Union européenne a trèsrécemment adopté de nouvelles sanctions ciblant des individus et entités impliqués dans le trafic de captagon, a-t-il indiqué.  Reconnaissant que cette perspective n’est ni acceptable pour le peuple syrien, ni pour les États de la région, ni pour la communauté internationale dans son ensemble, il a exhorté le régime à faire des gestes tangibles afin qu’un véritable processus politique soit initié. 

Abordant le volet humanitaire, le délégué a noté que les tremblements de terre du 6 février dernier ont ajouté des difficultés à une situation déjà très dégradée.  En outre, le séisme a démontré qu’il était indispensable de pouvoir disposer de plusieurs points d’accès transfrontalier, pour acheminer l’aide de la manière la plus efficace possible.  Il a insisté sur la complémentarité entre l’acheminement de l’aide par le biais du mécanisme transfrontalier et par les convois à travers les lignes, déplorant l’arrêt de ces derniers depuis fin janvier.  La réponse internationale au séisme ne saurait faire oublier la réalité du régime syrien, a-t-il affirmé, notant que la situation humanitaire en Syrie est catastrophique avant tout parce que le régime a commis des crimes de grande ampleur contre sa propre population.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a déclaré que le peuple de Syrie doit pouvoir compter sur l’engagement et l’empathie des membres du Conseil. Le représentant a demandé de ne pas de politiser l’aide humanitaire et l’accès aux personnes dans le besoin.  L’aide doit être centrée sur les populations et sur les besoins.  Les points de passage doivent rester ouverts aussi longtemps que nécessaire.  Le Conseil doit s’efforcer de lever tous les obstacles en la matière pour faire en sorte que le mécanisme transfrontière soit reconduit en juillet. 

Pour l’Albanie, le peuple syrien est dans une situation insupportable à cause du régime syrien et de ses alliés, qui sont responsables de violations des droits humains.  Il faut mettre fin à cette violence, a exhorté le représentant, qui a appelé le régime de Bashar Al-Assad de mettre une bonne fois pour toute fin aux frappes aveugles contre les civils et à respecter le droit international humanitaire. 

Le représentant a aussi encouragé la recherche d’une solution politique pérenne en Syrie et la reprise du travail de la Commission constitutionnelle.  Selon lui, il faut une coordination à l’échelle régionale, qui permettrait d’améliorer les processus diplomatiques.  Il a exigé la justice pour les violations commises en Syrie.  Il a demandé à en savoir davantage sur le sort des personnes disparues, afin que justice soit faite et pour mettre fin à l’impunité.  Il a le renvoi de la situation en Syrie à la Cour pénale international, afin qu’elle enquête sur différents faits commis dans le pays et pour renouveler la confiance du peuple syrien dans la communauté internationale. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a constaté l’absence d’avancée diplomatique permettant d’espérer une sortie de la crise syrienne, entrée dans sa treizième année.  Il a donc jugé nécessaire de redoubler d’efforts pour sortir de cette impasse politique d’une manière qui préserve la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Estimant que la diplomatie arabe peut apporter une contribution importante pour mettre fin à cette crise, le représentant a rappelé les conclusions de la réunion consultative du Conseil de coopération du Golfe, de l’Égypte, de la Jordanie et de l’Iraq, tenue à Djeddah ce mois-ci. 

Le représentant a également souligné l’importance de soutenir les efforts internationaux et de l’Envoyé spécial en Syrie, avant d’appeler à mettre fin à la paralysie de la Commission constitutionnelle, seule plateforme susceptible de mener un dialogue national constructif, mené et contrôlé par les Syriens, sans ingérence ni exigences extérieures.  Parallèlement aux efforts déployés au niveau politique, le représentant a appelé à combler les lacunes en matière de sécurité, y compris en matière de lutte contre le terrorisme.  De plus, un cessez-le-feu national global doit être conclu dans toutes les régions de Syrie et l’ingérence étrangère dans le pays doit cesser. 

S’agissant de la situation humanitaire, le représentant a jugé l’aide d’urgence insuffisante pour résoudre la crise.  Il a plaidé pour que soient trouvées des solutions radicales et à long terme, surtout compte tenu des graves répercussions du tremblement de terre du 6 février.  Il importe pour cela de ne pas politiser la situation humanitaire et de soutenir les projets de réhabilitation et de reconstruction d’infrastructures et de services publics, a-t-il souligné, précisant que son pays avait lancé un projet visant à équiper 1 000 logements préfabriqués pour accueillir près de 6 000 Syriens touchés par le séisme, répartis dans sept zones de la province de Lattaquié.  Il a par ailleurs regretté que l’aide à travers les lignes n’ait pu être acheminée vers le nord-ouest de la Syrie depuis le tremblement de terre, en raison de l’obstruction de groupes terroristes. L’aide à travers les lignes doit pouvoir parvenir sans entrave à ceux qui en ont besoin, conformément à la résolution 2672 (2023), a insisté le représentant, qui a conclu son intervention en appelant à faciliter le retour volontaire des réfugiés syriens dans leur patrie.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a remarqué qu’après le tremblement de terre qui a frappé la Türkiye et la Syrie en février, les besoins humanitaires immédiats ont fait place à de nouveaux besoins en termes de protection, qui se sont aggravés.  Selon les évaluations menées par le secteur de la protection du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en Syrie, la surpopulation, la disponibilité limitée d’espaces sûrs et la distribution adéquate d’eau, d’installations sanitaires et de produits d’hygiène ont augmenté l’exposition à la violence sexiste.  Tout en disant comprendre l’ampleur des besoins, la représentante a appelé l’ONU et tous ses partenaires à garantir des abris adéquats et appropriés pour les femmes et les enfants, qui tiennent compte de leurs besoins spécifiques en matière de protection et de respect de la vie privée. 

Consternée par la poursuite des bombardements et des frappes aériennes dans le nord-est et le nord-ouest de la Syrie, Mme Frazier a insisté une fois de plus sur l’importance d’un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave à tous ceux qui en ont besoin en Syrie, y compris ceux du camp de Roukban.  Heureuse de constater que l’aide humanitaire continue d’être acheminée par Bab el-Haoua, avec le soutien des points de passage récemment autorisés de Bab el-Salam et Raaï, elle a insisté pour que ces points de passage restent ouverts. La représentante a toutefois regretté que, depuis la dernière réunion du Conseil, il n’y ait pas eu de convoi humanitaire dans le nord-ouest du pays et elle a appelé les parties, et ceux qui les influencent, à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie par tous les moyens. 

Soulignant une fois de plus l’importance des progrès politiques en Syrie, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité, la représentante a précisé qu’ils doivent inclure la participation pleine, égale et significative des femmes. Une transition politique crédible, inclusive et durable est plus que jamais nécessaire, a-t-elle déclaré, estimant qu’il n’y a pas de solution militaire à ce conflit.  Malte reste convaincue que les actions qui vont de l’avant doivent également être ancrées dans le concept d’une paix juste.  À cet égard, la représentante a réitéré son soutien à l’obligation de rendre des comptes pour les crimes graves, et à une justice transitionnelle fondée sur une procédure régulière.

Au nom des A3 (Gabon, Ghana, Mozambique), M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a noté que l’accès fiable à une eau salubre et en quantité suffisante dans tout le nord de la Syrie reste un défi qui exige un soutien plus large au Plan de réponse humanitaire syrien, y compris pour le relèvement rapide et les moyens de subsistance, qui restent malheureusement sous-financés.  Préoccupé par la persistance des hostilités en Syrie, le représentant a plaidé pour la protection des civils et des biens de caractère civil, dans la conduite de leurs opérations militaires.  Les États qui ont de l’influence sur les parties doivent les convaincre d’assurer cette protection, a-t-il dit, avant d’insister sur un cessez-le-feu pour faciliter l’acheminement de l’aide aux victimes. 

Pour les A3, a indiqué le délégué, l’accès des secours d’urgence constitue la pierre angulaire de la mobilisation.  Il a salué la décision du Président syrien, M. Bashar Al-Assad, d’autoriser l’ouverture des deux nouveaux passages pour une durée de trois mois, en plus du passage de Bab el-Haoua.  Il a aussi prié le Gouvernement syrien d’autoriser la prorogation de l’acheminement transfrontalier de l’aide humanitaire et demandé le règlement de la question des détenus et des personnes disparues.  Le représentant a également appelé à la levée des sanctions afin de ne pas entraver les opérations de secours et exhorté les parties syriennes à saisir l’élan de soutien et d’attention suscité par les tremblements de terre pour s’engager sur la voie politique et résoudre les problèmes fondamentaux qui alimentent le conflit en Syrie.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a déclaré que l’ouverture depuis février des deux nouveaux postes frontières à Bab el-Salam et Raaï, outre celui de Bab el-Haoua, a été une bouée de sauvetage pour l’acheminement de l’aide d’urgence dans les zones touchées par les séismes.  Cependant, l’ampleur et les effets persistants de la catastrophe font qu’un soutien international plus important est nécessaire de toute urgence.  Or, la période initiale de trois mois pour ces deux points de passage supplémentaires, convenue entre l’ONU et le Gouvernement syrien, expirera à la mi-mai.  Étant donné que la majorité des habitants du nord-ouest de la Syrie dépendent totalement de l’aide de l’ONU, le Japon demande instamment au Gouvernement syrien de proroger leur réouverture. 

Pour le représentant, seul un règlement politique peut véritablement résoudre la crise syrienne, raison pour laquelle il s’est dit préoccupé par le fait que la Commission constitutionnelle n’ait pas été convoquée depuis près d’un an. 

Enfin, la question des plus de 100 000 Syriens disparus reste une préoccupation majeure pour le Japon.  Le représentant a soutenu la proposition du Secrétaire général d’établir un nouvel organe par le biais de l’Assemblée générale, afin de clarifier le sort de ces disparus et de fournir un soutien adéquat aux victimes, aux survivants et aux familles.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est exprimé, à titre national, sur les aspects politiques du conflit syrien.  Il s’est tout d’abord déclaré préoccupé par la situation globale, marquée notamment par une poursuite des hostilités dans le nord-ouest où les populations sont exposées à des souffrances supplémentaires, après avoir subi les effets dévastateurs du tremblement de terre du 6 février dernier.  Après avoir appelé les parties à cesser les attaques contre les civils ou les infrastructures civiles, le représentant s’est alarmé de la situation tragique dans le camp de Hol, se faisant l’écho de l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur du retour volontaire et dans la dignité des habitants de ce type de structures vers les zones de leur choix.  Seul un processus dirigé et contrôlé par les Syriens permettra de déboucher sur un règlement durable de cette longue crise, a-t-il estimé, jugeant, à cet égard, que la résolution 2254 (2015) offre une feuille de route. 

Pour le délégué, il est essentiel de rétablir un dialogue franc entre les parties et de convoquer de nouveau l’organe restreint de la Commission constitutionnelle.  Toutefois, a-t-il ajouté, les réunions officielles ne suffisent pas, il faut également que se manifeste la volonté politique de relancer le processus politique et rapprocher les points de vue.  Des résultats concrets sont attendus, a insisté le représentant, avant de saluer l’engagement de l’Envoyé spécial en faveur d’un dialogue intra-syrien.  Il importe maintenant d’exploiter l’attention suscitée par le séisme pour un nouvel élan au processus politique et de renforcer les dynamiques à l’œuvre dans la région, a conclu le représentant. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a constaté la dégradation spectaculaire de la situation humanitaire en Syrie, notant que la guerre prolongée et les tremblements de terre laissent 8,8 millions de personnes aux prises avec une crise multidimensionnelle. Face à cette situation complexe, à laquelle s’ajoute l’augmentation des cas de choléra, le représentant a salué l’action de l’Envoyé spécial et des équipes de l’ONU sur le terrain.  Il s’est également félicité des résultats du plan de réponse au séisme, grâce auquel des écoles ont rouvert, des débris ont été dégagés dans les zones densément peuplées et des abris d’urgence ont été fournis.  Il s’est toutefois dit préoccupé par le grand nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays, soulignant les risques que cela fait courir aux personnes vulnérables, en particulier les femmes et les enfants non accompagnés.  Il s’est par ailleurs alarmé du nombre croissant de personnes vivant en situation d’insécurité alimentaire, et de celles privées d’emploi et dans le désespoir, faute de solution politique au conflit. 

Le représentant a ensuite demandé que soit garantie aux mécanismes existants la possibilité de mener des enquêtes complètes, indépendantes et impartiales sur les violations des droits humains et du droit international humanitaire, afin que des poursuites soient engagées contre les responsables, y compris devant la Cour pénale internationale.  Enfin, après avoir déploré que des incidents de sécurité continuent à être enregistrés, notamment des raids aériens, des détonations d’engins explosifs improvisés, des enlèvements, des assassinats ciblés et des attentats à la bombe, il appelé les parties à établir un cessez-le-feu définitif dans toutes les régions du pays, afin de permettre à l’aide humanitaire d’atteindre ceux qui en ont besoin et ce, par tous les moyens et voies possibles.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a dénoncé les attaques de l’armée israélienne contre les territoires syriens au cours des dernières semaines et le pillage des ressources naturelles de la Syrie par les forces américaines présentes illégalement dans le nord-est du pays.  Il a également dénoncé les attaques des groupes terroristes qui empêchent l’arrivée de l’aide humanitaire dans le nord-ouest du pays, de même que les mesures de terrorisme économique et les punitions collectives imposées au peuple syrien.  Le délégué a souligné l’attachement de la Syrie aux relations fraternelles avec les pays arabes, évoquant les visites du Président syrien au Sultanat d’Oman et aux Émirats arabes unis et celles du Ministre des affaires étrangères et des expatriés et d’autres responsables syriens en Égypte, en Arabie saoudite, en Algérie et en Tunisie.  Aux cours de ces rencontres, les discussions ont porté sur l’unification des efforts arabes pour parvenir à une solution politique aux crises auxquelles le peuple syrien est confronté, ainsi que sur le renforcement de la sécurité et de la stabilité, la lutte contre le terrorisme et le renforcement de la lutte contre le trafic de stupéfiants, a-t-il détaillé. 

Le représentant a mis en garde Israël et ses parrains contre les dangers de leurs politiques « irresponsables » qui poussent la région vers une escalade à grande échelle et une nouvelle phase d’insécurité et d’instabilité.  Le Conseil doit condamner ces attaques, les faire cesser et demander à Israël de rendre des comptes, a-t-il exigé, enjoignant en outre les États-Unis à mettre fin à leur présence militaire illégale sur le territoire syrien, et à cesser de parrainer des groupes terroristes et séparatistes et de piller les ressources naturelles de la Syrie.  Le délégué a également dénoncé l’infiltration illégale de plusieurs sénateurs français, le 31 mars 2023, dans le nord-est de la Syrie. 

Poursuivant, le délégué s’est félicité de la décision souveraine du Gouvernement syrien d’ouvrir deux points de passage frontalier supplémentaires suite au séisme du 6 février.  Après avoir de nouveau dénoncé les mesures coercitives unilatérales illégales imposées par les États-Unis et l’Union européenne à la Syrie, il a pris note des tentatives d’imposer un mécanisme visant à faire lumière sur le sort des personnes disparues en Syrie, rejetant tout mécanisme qui irait à l’encontre des intérêts du peuple syrien ou créé sans le consentement du Gouvernement.

M. AMIR SAEID IRAVANI (Iran) a jugé crucial d’assurer l’acheminement d’une aide humanitaire dénuée de toute politisation et ce, dans toutes les régions de la Syrie.  Il a estimé que les sanctions « illégales » sont un obstacle majeur à l’amélioration de la situation humanitaire et économique, notant, ce faisant, l’absence de progrès dans les opérations humanitaires par les lignes de front, en particulier dans le nord-ouest syrien contrôlé par les groupes terroristes.  L’aide humanitaire, a-t-il insisté, doit se faire en coordination avec le Gouvernement syrien et avec ses partenaires du format d’Astana et l’Iran, a affirmé le représentant, tient à la normalisation de la situation en Syrie.  Il juge, dans ce contexte, que la présence illicite des forces étrangères, y compris celles des États-Unis, constitue une violation flagrante du droit international. Au nom de son pays, le représentant s’est en revanche félicité de l’amélioration des relations diplomatiques entre Syrie et les pays de la région, en particulier les pays arabes. 

M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a rappelé qu’au mois de février, son pays et la Syrie ont été touchés par des tremblements de terre qui ont aggravé la situation humanitaire et montré combien il est urgent de régler le conflit syrien dans toutes ses dimensions.  Depuis le début de cette crise, a-t-il dit, la Türkiye a milité pour une solution pérenne qui n’est possible que dans le cadre d’un processus politique conforme à la résolution 2254 (2015).  Le représentant a indiqué, à cet égard, que les priorités de son pays pour la Syrie sont claires: la sortie de l’impasse politique actuelle, la lutte contre le terrorisme, le respect de l’intégrité et l’unité politique de la Syrie, la facilitation de l’accès humanitaire et la création des conditions favorables au retour sûr et volontaire de tous les réfugiés.  Il a ajouté que les réunions quadripartites lancées à Moscou visent à mettre en œuvre ces priorités dans un processus axé sur les résultats.  Toutes les initiatives sont précieuses, pour autant qu’elles soient menées de manière holistique et coordonnée pour trouver des solutions viables par le biais d’un processus politique crédible.  Il faut « aligner les positions » de toutes les principales parties prenantes, a estimé le représentant. 

Il a aussi d’autre part jugé que le mécanisme d’acheminement d’aide humanitaire transfrontière reste une « planche de salut » pour des millions des Syriens et s’est réjoui de l’ouverture de deux points de passages supplémentaires. Les organisations humanitaires doivent profiter au mieux de cet accès élargi, a encouragé le représentant avant de plaider pour la prorogation dudit mécanisme de manière à garantir plus de visibilité aux acteurs sur le terrain et aux bailleurs de fonds.  Il a également soutenu l’acheminement de l’aide par les lignes de front, conformément à la 2672 (2023), souhaitant qu’il soit plus régulier.  La catastrophe du 6 février dernier, a-t-il conclu, pourrait avoir un « bon côté » si la coopération humanitaire permettait de donner un nouvel élan au règlement de la crise politique. Toutes les parties prenantes doivent profiter de cette « fenêtre d’opportunités ». 

Avant la levée de la séance, Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a réagi aux commentaires sur la présence de députés français en Syrie.  La démocratie française, a-t-elle dit, se fonde sur la séparation des pouvoirs.  En conséquence, le Gouvernement français ne peut pas contrôler le déplacement des parlementaires français mais il est vrai, a concédé la représentante, qu’il faut être un pays démocratique pour le savoir.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: la participation des jeunes est cruciale pour garantir un avenir pacifique, durable et plus prospère

Session de 2023, Forum de la jeunesse,
4e, 5e et 6e réunions – matin et après-midi
ECOSOC/7124

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: la participation des jeunes est cruciale pour garantir un avenir pacifique, durable et plus prospère

La session 2023 du forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC) a pris fin ce soir, après trois jours de travaux sur le thème « Les jeunes, agents essentiels d’un changement positif pour la reprise après la COVID-19 et la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) ».  L’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse a salué la présence de plus de 800 jeunes du monde entier ayant fait le déplacement à New York, ainsi que quelques 20 000 autres ayant pris part virtuellement au forum 2023 qui a battu tous les records.  Mme Jayathma Wickramanayake a promis que les jeunes allaient continuer d’être « sur la ligne de front » pour relever les défis actuels.  « Même si nous dépendons des dirigeants pour prendre les bonnes décisions », ont-ils précisé.

« Vous nous avez donné le sens de l’urgence à mettre en branle une action audacieuse et transformatrice avant et lors du Sommet sur les ODD de septembre », a répondu la Présidente de l’ECOSOC.  Mme Lachezara Stoeva a indiqué que le forum de la jeunesse de cette année a montré que le progrès et le changement ne peuvent se produire sans les jeunes.  « C’est à nous maintenant de fournir des espaces pour davantage d’engagement et de contribution des jeunes si nous voulons réaliser un avenir pour lequel il vaut la peine de se battre, sans injustice, discrimination, conflit et inégalité », a-t-elle reconnu. 

La Présidente de l’ECOSOC a promis de faire la promotion de la participation d’un représentant des jeunes à chaque session du forum politique de haut niveau, qui se tient chaque année en juillet.  Aux membres de gouvernements présents dans la salle, elle a demandé de donner également aux jeunes la possibilité de participer activement au Sommet de septembre sur les ODD.  Pour elle, sans aucun doute, la participation des jeunes est cruciale pour garantir un avenir pacifique, durable et plus prospère.  S’adressant aux jeunes, la Présidente les a encouragés à continuer de « nous tenir responsables de nos promesses et de nos engagements ». 

Les jeunes qui prennent part à ces conclaves internationaux aujourd’hui devront également rendre compte aux jeunes de demain, a prévenu l’Envoyée pour la jeunesse de l’Union africaine.  Mme Chido Mpemba les a donc encouragés à ne pas être des faire-valoir et à se faire entendre pour eux-mêmes.  Elle a également témoigné de la solidarité des jeunes avec leurs pairs du Soudan qui font face à un conflit armé, qui emporte certains parmi eux, privant ainsi le monde de leur créativité.  À sept ans de l’échéance prévue pour réaliser les ODD, elle a rappelé qu’il est temps de faire front pour l’action. 

Depuis son lancement en 2012, le forum de la jeunesse est devenu une plateforme d’interactions entre les jeunes et les dirigeants, a relevé à son tour le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales. M. Li Junhua a assuré que la contribution des jeunes en septembre sera essentielle pour donner un souffle nouveau et permettre de réaliser la percée dont le monde a grandement besoin. Il a suggéré que les prochaines éditions du forum de la jeunesse soient encore plus inclusives en ouvrant la porte à tous les jeunes, notamment les groupes les plus vulnérables. 

FORUM DE LA JEUNESSE

Jeunesse 2030: réaliser les objectifs de développement durable avec et pour les jeunes

Alors qu’il reste sept ans pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) de 2030, cette session consacrée à « Jeunesse 2030 », la Stratégie des Nations Unies pour la jeunesse, fut le moment idoine d’examiner comment le système des Nations Unies a fait avancer la Stratégie et de suggérer des corrections de trajectoire. 

D’entrée de jeu, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU a invité les jeunes à faire des propositions concrètes pour faire avancer la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Mme AMINA MOHAMMED, dans son message vidéo, a souligné que depuis son lancement en 2018, Jeunesse 2030 a été intégrée dans les priorités de nombreuses agences onusiennes dans leur ambition d’aller vers les ODD.

Il faut rappeler que Jeunesse 2030 a été officiellement lancée le 25 septembre 2018 par le Secrétaire général de l’ONU et qu’elle vise à renforcer considérablement la capacité de l’ONU à impliquer les 1,8 milliard de jeunes du monde et à bénéficier de leurs points de vue et de leurs idées.  Le but ultime est de garantir que le travail de l’ONU sur les questions de jeunesse se poursuive de manière coordonnée, cohérente et holistique.  La Stratégie cherche à accroître l’efficacité et la portée de l’action menée aux niveaux mondial, régional et national pour répondre aux besoins des jeunes, renforcer leur capacité d’action et promouvoir leurs droits, tout en respectant leur diversité.  Il est également question d’encourager leur mobilisation et leur participation à la réalisation, l’examen et le suivi du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et des autres programmes et instruments mondiaux pertinents.

L’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, a expliqué que depuis son lancement, Jeunesse 2030 a contribué à adapter le système onusien aux besoins des jeunes. Nous en sommes à la cinquième année de mise en œuvre et, désormais, 55 entités onusiennes et 131 équipes de pays la mettent en œuvre, a-t-elle salué.  L’ONU est par exemple engagée dans la dissémination des données ventilées en tenant compte de la composante jeune de la population.  Les Nations Unies soutiennent également les gouvernements dans l’élaboration et la mise en œuvre de politiques en rapport avec les jeunes dans des secteurs tels que l’éducation, la santé, l’emploi, la protection sociale, les technologies et l’innovation, ainsi que la protection des enfants et des femmes.  Pendant les cinq premières années de mise en œuvre de la Stratégie, s’est-elle réjouie, le soutien de l’ONU en faveur des pays a plus que doublé.

Ces efforts onusiens et multilatéraux ont été accueillis avec intérêt mais des appels à en faire plus ont été lancés au cours de la discussion qui a suivi.  Ainsi, une jeune activiste du Yémen a appelé à investir dans les jeunes de son pays qui représentent 60% de la population totale.  Elle a aussi espéré que les jeunes yéménites de tout le pays pourraient se retrouver pour discuter de paix.  S’agissant de la Serbie, la Coordonnatrice résidente des Nations Unies a expliqué que son bureau accompagne le renforcement des capacités des jeunes pour favoriser leur participation à la vie publique.  Un autre projet qui tient à cœur le système onusien en Serbie est la sensibilisation des jeunes aux méfaits des discours de haine, une problématique de grande importance dans le pays et toute la sous-région, a-t-elle dit. 

Un jeune d’El Salvador a insisté sur les différentes possibilités de collaboration en faveur des jeunes: collaboration entre les jeunes, collaboration au sein des pays et entre eux, et collaboration avec le système des Nations Unies.  Nous sommes prêts à contribuer grâce à nos idées, a-t-il assuré, avant d’appeler la communauté internationale à soutenir les jeunes d’El Salvador.  Un autre jeune du Brésil a appelé au consensus parmi les jeunes avant de faire respecter leurs priorités dans la mise en œuvre des ODD. 

Un représentant du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a évoqué l’engagement de son agence en faveur des jeunes sur le terrain, avant que la représentante du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) n’explique que son agence milite pour un monde dans lequel le potentiel de la jeunesse serait pleinement exploité. Elle a évoqué les défis de la jeunesse, notamment le mariage précoce de 12 millions de filles chaque année à travers le monde.  Une représentante du Bureau de la coordination des activités de développement (BCAD) a de son côté rappelé l’importance du travail des coordonnateurs résidents.  Elle s’est félicitée du fait que 90% des analyses des situations de pays tiennent désormais comptent du module jeunesse, ce qui est déjà un grand pas en avant pour la mise en œuvre de la Stratégie pour la jeunesse.

La représentante de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a invité les États et tous les partenaires à offrir des opportunités d’emplois aux jeunes.  Elle a encouragé ces derniers à se constituer en syndicat, pour défendre leurs intérêts, et à se lancer dans l’entrepreneuriat.  Une option salvatrice serait par exemple de les autonomiser dans les métiers du numérique, a préconisé la représentante de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI). L’agence a promis de continuer de travailler avec et pour les jeunes.  Il faudrait penser à davantage les autonomiser afin qu’ils vivent là où ils veulent, a renchéri le délégué de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Il a souligné que les jeunes représentent environ 21% des migrants, des chiffres qui vont probablement augmenter. L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a, pour sa part, attiré l’attention sur la nécessité d’œuvrer pour des sociétés plus sûres dans lesquelles les jeunes seront protégés des stupéfiants.  Enfin, la représentante du grand groupe des enfants et des jeunes de l’ECOSOC a plaidé pour qu’aucun jeune ne soit laissé de côté. 

Renforcer la confiance des jeunes dans le multilatéralisme au moyen du dialogue intergénérationnel et entre pairs

Lors de cette table ronde, les intervenants se sont penchés sur les liens entre les défis liés au genre, à l’âge et au multilatéralisme et sur la façon dont les échanges entre pairs et intergénérationnels contribuent à promouvoir l’inclusion et la participation des jeunes. Elle s’est déroulée en trois étapes: bilan, exploration des solutions possibles et recommandations.

Le bilan

Au stade actuel, M. PIERRE-LOUIS NEPHTALY, de l’Association internationale des femmes juges, a estimé que la participation des jeunes dans le système multilatéral est « purement symbolique », à l’exception notable de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).  Les organisations multilatérales doivent nous laisser participer et passer enfin des paroles aux actes, a-t-il dit.  « Les jeunes ne sont pas que l’avenir, ils sont aussi le présent. » 

« Les jeunes connaissent très bien les défis qu’ils vivent au quotidien », a renchéri Mme CHRISTY MARLENE BOBADILLA, de Millenials Movement.  Pointant la participation insuffisante des jeunes aux processus de prises de décisions, elle a mis en garde contre une perte de confiance des jeunes dans les institutions. 

Mme DILANAZ GULER, activiste pour l’égalité entre les genres, a souligné « l’angoisse » des jeunes: celle de ne pas être entendus dans un monde qui les abandonne.  La participation de tous est capitale pour faire advenir le changement, a-t-elle dit, en soulignant l’importance du dialogue intergénérationnel.

De son côté, Mme LAURA GUAY, collaboratrice de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a plaidé pour des institutions multilatérales fonctionnelles, en pointant, elle aussi, la défiance qui existe à leur endroit.  « Nous sommes le changement et nous voulons en être le moteur sur le terrain », a-t-elle dit, en saluant, à son tour, le forum des jeunes de l’UNESCO. 

M. ABIDEEN OLASUPO, de Brain Builders Youth Development Initiative, a souligné la montée du protectionnisme et des égoïsmes nationaux qui battent en brèche le multilatéralisme qui a pourtant été présenté comme un « rêve ».  Les puissances du Nord mènent la danse, les pays du Sud n’ayant pas d’autre choix que de s’aligner, a-t-il tranché.  Il a rappelé que le multilatéralisme ne peut remplacer la souveraineté des États, d’autant que ce multilatéralisme est souvent utilisé par les pays du Nord à leur profit. 

Les solutions

Mme ARLINDA RAMQAI, déléguée jeune de la Suisse, a indiqué qu’elle a souvent été accusée de manquer de légitimité pour parler de ces « grands thèmes », tels que le multilatéralisme.  « Mais qui détermine la légitimité? », a-t-elle demandé, en ajoutant que la prise de parole des jeunes est parfaitement légitime. Elle a souligné la nécessité d’un dialogue intergénérationnel pour renforcer le multilatéralisme d’aujourd’hui et de demain.

« Notre présence ne doit pas être symbolique et nous devons avoir voix au chapitre », a appuyé M. SAMEH KAMEL, de MGCY. Il a passé en revue certaines bonnes pratiques allant dans le sens d’une meilleure prise en compte de la voix des jeunes, en prenant l’exemple de l’Égypte et son forum de jeunes leaders. Il a également cité la Finlande, qui a eu le plus jeune Premier Ministre de son histoire, âgé de 34 ans.

Mme LANI AQAYA, de MY World Mexique, a réclamé « moins de paroles » et plus d’actes.  Il est grand temps de passer à la mise en œuvre des engagements pour une participation accrue des jeunes, a-t-elle tranché.  « Les jeunes ne doivent plus être de simples figurants. »  Elle a aussi conseillé que toutes les délégations des États Membres comptent en leur sein un délégué jeune. 

Mme JUSTICE FAITH BETTY, cofondatrice de Révolutionnaire, a pris l’exemple du Kenya en mentionnant les plateformes créées pour porter la voix des jeunes dans l’espace public.  « Cette initiative a suscité beaucoup d’espoir. »  Il est vital d’autonomiser les jeunes, a-t-elle dit, en insistant sur l’apport des nouvelles technologies à la réalisation de cet objectif.  « Œuvrons à l’avènement d’un monde de justice! »

Pour sa part, Mme POONAM GHIMIRE, Secrétaire générale du groupe consultatif de haut niveau pour un multilatéralisme efficace, a déclaré que la clef d’un multilatéralisme efficace est qu’il soit axé sur les êtres humains.  Nous devons renforcer les filets de protection sociale et combler la fracture numérique, a-t-elle conclu, en soulignant la nécessité que tous les peuples puissent toucher les dividendes du multilatéralisme.

Enfin, M. DEV NAGAR, du Bureau de lutte contre le terrorisme, a insisté sur les vertus des échanges entre pairs, en mentionnant les ateliers qui se sont déroulés en Asie du Sud-Est sur l’extrémisme religieux.  Des points de vue ont ainsi pu s’exprimer, a-t-il dit.  Il a aussi demandé que l’ONU se montre plus inclusive. 

Recommandations

Le modérateur M. ZIHAN XUAN, YOUNGO, a présenté un projet de recommandations.  Parmi celles-ci, figure notamment la création de mécanismes transparents de reddition des comptes des responsables politiques en vue d’une institutionnalisation de la participation des jeunes.  Des stratégies d’engagement entre pairs devraient également être adoptées en vue de développer la capacité d’intervention des jeunes.

La jeunesse et le Sommet sur les objectifs de développement durable de 2023

Au cours des derniers mois, l’ONU a organisé des consultations en ligne avec des jeunes du monde entier en vue du Sommet sur les ODD, consultations qui ont mené à l’élaboration du rapport intitulé « Les voix de la jeunesse », a expliqué la modératrice Mme ASMA ROUHABIA, point de contact mondial du groupe des jeunes de l’ODD 7.  Parmi les principaux messages de ce document, Mme INÉS YÁBAR, comodératrice et boursière principale du projet Next Generation, a indiqué que les jeunes sont le fer de lance de l’action pour réaliser les ODD grâce à leurs idées et approches innovantes, et que la collecte de données est essentielle pour mesurer les progrès et comprendre la réalité des personnes sur le terrain. 

Le cofacilitateur de la rédaction de la déclaration politique du Sommet sur les ODD, M. FERGAL MYTHEN (Irlande), a appelé à renouveler l’unité qui a permis l’adoption des ODD, en 2015, par les États Membres, malgré la multiplication des crises qui ont « anéanti » les progrès réalisés.  « Nous ne sommes pas sur la bonne voie pour réaliser les ODD », a-t-il reconnu, en disant néanmoins constater une « exigence d’ambition » de la part des peuples pour qui le désespoir ne saurait constituer une politique.  « Nous sommes arrivés à mi-parcours mais il reste encore un long chemin à parcourir », a opiné Mme YUGRATNA SRIVASTAVA, du grand groupe des enfants et des jeunes (MGCY), en souhaitant que l’action compartimentée à l’ONU devienne une relique du passé. 

Seules des discussions fondées sur des informations objectives et des données scientifiques fiables ont rendu possible l’adoption du document sur les ODD, a rappelé la Sous-Secrétaire générale des Nations Unies et Directrice du Bureau des relations extérieures et du plaidoyer au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Mme ULRIKA MODÉER.  « Vous avez bien plus de force que vous ne le pensez pour mettre en branle un réel changement », a-t-elle lancé en s’adressant aux jeunes.  « Vous avez également la force de façonner les processus existants et de nous forcer à joindre le geste à la parole. »  Une opinion partagée par Mme DIENE KEITA, Sous-Secrétaire générale des Nations Unies et Directrice exécutive adjointe chargée des programmes du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), pour qui la force et le dynamisme des jeunes sont une constante du changement auquel nous aspirons. 

Segment I: mettre en lumière les contributions des jeunes à la mise en œuvre des ODD, ainsi que les principaux défis et opportunités 

Il est impossible d’assurer le développement durable ou l’évolution sociopolitique sans éducation, qu’elle soit formelle ou informelle, a noté Mme ARMEL AZIHAR SLY-VANIA, responsable du cluster éducation science technologie au SAYoF de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  « Les jeunes agissent », a-t-elle dit, en ajoutant que nous ne pourrons régler les problèmes mondiaux sans l’apport de ceux qui croient au changement.

L’innovation et l’entrepreunariat guidés par les jeunes sont en effet d’une importance fondamentale lorsqu’il s’agit de réaliser les ODD, a considéré M. KRISTIAN KAMPMANN, conseiller UNLEASH et jeune leader de la Génération17.  Le microfinancement, le réseautage et les « bonnes aspirations » constituent autant d’éléments susceptibles de favoriser la participation des jeunes à la réalisation des ODD.  Ceux-ci sont à ses yeux des « communicateurs inclusifs », ce qui permet aux organisations qui les représentent de veiller à ce que les politiques et programmes qui les concernent soient élaborés en mettant l’accent sur une multiplicité de facteurs, a relevé M. OMER JAMAL, chargé de projet à Southern Voice, Unlock Coalition

Les jeunes doivent être impliqués dans tous les processus de décision, comme c’est le cas dans mon pays, a renchéri Mme TYEISHA EMMANUEL, membre du Parlement des jeunes d’Anguilla.  Pour Mme IANTHE DOUGLAS, déléguée à la jeunesse et Conseillère en matière d’océan et de changement climatique des Palaos, les jeunes doivent cesser d’être des activistes pour devenir des conseillers en vue d’un avenir durable, avec l’appui des générations qui les précèdent. 

« Nous parlons en rond », s’est impatienté le Qatar, en constatant l’impasse dans laquelle se trouvent les discussions alors que les mêmes discours sont répétés année après année.  En réponse, le conseiller UNLEASH, rejoint par le chargé de projet à Southern Voice, a fait valoir que l’innovation émerge souvent au sein de groupes restreints où chacun peut exprimer ses idées.  Alors que certains jeunes n’ont pu se rendre à New York pour assister au forum, la Présidente de l’ECOSOC, Mme LACHEZARA STOEVA, a rappelé que les jeunes peuvent prendre part à ses activités au sein des commission régionales et que 16 000 personnes ont participé aux débats en ligne. 

Segment II: recommandations des jeunes au Sommet sur les ODD 

Considérant que seules 10% des cibles des ODD sont en voie d’être réalisées, Mme ANITA DYWABA, boursière principale du projet Next Generation de la Fondation pour les Nations Unies, a estimé que les jeunes constituent la clef du développement.  Elle a toutefois constaté un sentiment « écrasant » de défiance à l’endroit des gouvernements et du système multilatéral, particulièrement en Afrique, où les jeunes sont confrontés à l’isolement et au protectionnisme. M. AHMED E. EL SABAGH, de MENA YPS Network et plateforme des jeunes pour le développement durable de la Ligue des États arabes, a considéré pour sa part que le « contrat social » entre les représentants des jeunes, les États Membres et le système des Nations Unies doit être réorganisé pour tenir compte de la réalité d’aujourd’hui.  Il a réclamé la création d’un groupe consultatif des jeunes sur le financement du développement afin d’identifier les moyens de mise en œuvre des ODD et ainsi progresser vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Les partenariats intergénérationnels sont essentiels pour réaliser les ODD, a confirmé Mme THÙY ANH NGÔ, jeune leader de Generation17

Pour donner vie aux ODD sans que personne ne soit laissé de côté, le Directeur de l’Observatoire international de la jeunesse, M. DANIEL CALARCO, a invité les jeunes à se laisser guider non par leurs peurs mais par leurs passions et leur capacité à rebâtir, comme ils l’ont fait lors de la pandémie de COVID-19.  Le Chef de cabinet adjoint du Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, M. FERNANDO MARANI, s’est félicité à cet égard de l’éclairage nouveau que jettent les participants au forum de la jeunesse « sur des problèmes créés par d’autres ». 

Mme SHANNON LISA, point de contact mondial par intérim, MGCY Chemicals and Waste Constituency, a souhaité la levée des obstacles et des inégalités structurelles qui expliquent pourquoi la participation réelle de la jeunesse continue de nous échapper dans de trop nombreux contextes, que ce soit dans le Sud global, dans les petits États insulaires en développement et les pays les moins avancés, ou encore parmi les jeunes autochtones et LGBTQI. 

Après que les conflits et la pandémie ont balayé des années de développement, l’Envoyée du Secrétaire général des Nations Unies pour la jeunesse, Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, a estimé que nous devons remédier d’ici à 2030 aux lacunes en matière de participation des jeunes au moyen de l’éducation et de l’intersectionnalité.  Elle a prôné un financement inclusif de la jeunesse permettant d’aller au-delà du « youth washing », tout en se félicitant de la création du Bureau des Nations Unies pour la jeunesse.  Au nom de la « solidarité intergénérationnelle », elle a appelé les États Membres à inclure des libellés concernant la participation réelle de la jeunesse à la déclaration politique du Sommet sur les ODD.  

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