9353e séance – après-midi 
CS/15329

Le Conseil de sécurité inquiet de l’impact du conflit au Soudan sur la stabilité du Soudan du Sud

Les conséquences politiques, sociales et économiques directes pour le Soudan du Sud des hostilités déclenchées le 15 avril dernier au Soudan ont alarmé les États membres du Conseil de sécurité réunis, cet après-midi, pour faire le point sur la situation au Soudan du Sud.  Un sentiment partagé par le Représentant spécial du Secrétaire général pour ce pays et Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), qui note avec inquiétude la lenteur de l’application de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud et les retards importants accusés dans la mise en œuvre des objectifs convenus dans le cadre de la feuille de route adoptée en août 2022. 

Venu présenter le rapport semestriel du Secrétaire général sur la situation au Soudan du Sud, M. Nicholas Haysom a appelé la communauté internationale à ne pas se détourner du Soudan du Sud car, comme on l’a vu avec le Soudan, « les dividendes de la paix peuvent vite disparaître ».  S’ils ne sont pas traités d’urgence, ces retards pourraient amener les parties à un point où aucune mesure corrective ne saurait être efficace, peut-on lire dans le rapport.  Il est donc demandé aux parties d’achever rapidement les tâches en suspens avant la fin de la période de transition, comme prévu dans l’Accord revitalisé.

La situation humanitaire déjà désastreuse au Soudan du Sud a encore été exacerbée par l’arrivée de Sud-Soudanais qui rentraient au pays et de réfugiés du Soudan.  Cela, associé à l’augmentation des prix des produits de base, met à rude épreuve les populations vulnérables et les ressources disponibles, a résumé le diplomate, appuyé par les délégations.  Plus de 117 000 personnes ont déjà franchi la frontière, dont 93% de rapatriés sud-soudanais.  Tout en félicitant le Gouvernement pour sa politique d’ouverture, M. Haysom s’est interrogé sur ses capacités d’absorption et sur celles des travailleurs humanitaires.   

Le Soudan du Sud ne dispose pas des capacités financières immédiates pour venir en aide à l’afflux de réfugiés et de rapatriés fuyant le conflit au Soudan, s’est plaint le représentant du Soudan du Sud.  Un appel entendu par les trois membres africains du Conseil –Gabon, Ghana et Mozambique- qui ont de nouveau demandé à la communauté internationale d’accroître son aide humanitaire, qui reste gravement sous-financée.

Par la voix du Mozambique, ces pays ont tenu à saluer les progrès « importants » réalisés par le Soudan du Sud dans la consolidation de l’État, notamment en ce qui concerne les processus constitutionnel et électoral.  Ils ont noté la réduction des incidents de violence intercommunautaire au niveau régional, en particulier dans l’État de Jongleï, tout en restant préoccupés par la vulnérabilité persistante de certaines régions du pays, exacerbée par les chocs climatiques.  Ils ont encouragé la MINUSS à renforcer les actions de développement des capacités des autorités sud-soudanaises compétentes, en particulier dans les domaines logistique, financier et judiciaire. 

Plusieurs pays, à l’instar du Brésil, n’ont pas caché leur crainte que la détérioration aiguë du niveau de vie de millions de personnes, déjà confrontées à des niveaux alarmants d’insécurité alimentaire, ne provoque des problèmes de sécurité encore plus graves.  La France, les États-Unis et l’Albanie ont pointé du doigt la situation autour de Malakal où des affrontements ethniques se sont produits dans le centre de protection des civils.  Ces affrontements auraient fait 13 morts et brûlé 4 000 maisons, selon le Royaume-Uni.

Si le rapport à l’étude fait en effet ressortir des progrès dans l’exécution du mandat de la Mission, le rythme de mise en œuvre de l’Accord revitalisé reste trop lent, ont relevé diverses délégations, une grande partie des objectifs visés après la période transitoire de trente-six mois n’ayant pas été réalisés. 

En conséquence, l’Accord revitalisé a été prolongé de vingt-quatre mois, de février 2023 à février 2025, pour permettre l’achèvement de l’unification des forces armées, l’élaboration de la constitution permanente et la préparation de la tenue d’élections crédibles, libres et équitables en décembre 2024, a expliqué M. Charles Tai Gituai, Président par intérim de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée.  Si le responsable de l’organe chargé de superviser l’état de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé a salué l’établissement des branches exécutive et législative du Gouvernement provisoire d’union nationale, il a en revanche déploré l’absence d’avancée dans le processus de désarmement, démobilisation et réintégration. 

Face à l’impasse politique actuelle, et ce retard dans la feuille de route, la France et Malte ont encouragé les parties à continuer d’honorer leurs engagements prévus au titre de l’Accord revitalisé.  La Fédération de Russie a, quant à elle, salué le rôle de la MINUSS dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et demandé que la Mission accorde plus d’attention à la stabilisation durable de la situation dans le pays par un accompagnement accru du Gouvernement vers la transition.

Pour la Chine, le Soudan du Sud a progressé, en particulier sur la question du processus politique et institutionnel, et il faut contribuer aux efforts du Gouvernement et travailler avec lui pour créer les conditions favorables à la transition politique.  C’est dans cet esprit que le Président de la Communauté de Sant’Egidio s’est engagé, promettant de poursuivre un dialogue politique complémentaire dans le cadre de l’initiative de Rome avec l’intention de créer un terrain favorable à l’éradication de la violence. 

Le Soudan du Sud, en conclusion, s’est engagé à travailler plus vite dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  Malgré les défis, « nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir à cette fin », a promis sa délégation. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD - S/2023/433

Déclarations

M. NICHOLAS HAYSOM, Représentant spécial pour le Soudan du Sud et Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a signalé les répercussions de la crise au Soudan sur la mise en œuvre de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud.  De fait, depuis mi-avril, près de 117 000 femmes, enfants et hommes ont franchi la frontière, dont 93% sont des rapatriés sud-soudanais.  Il a tenu à féliciter le Gouvernement de sa politique d’ouverture des frontières.  Cependant, a-t-il averti, les capacités d’absorption du Gouvernement et des humanitaires sont mises à rude épreuve, d’autant plus que les ressources locales limitées créent des goulots d’étranglement.

Les répercussions économiques du conflit se font durement ressentir dans un contexte déjà fragile, a expliqué M. Haysom.  L’interruption soudaine des importations venant du Soudan rend les produits de base souvent inabordables.  L’exportation de brut du Soudan du Sud et passant par Port Soudan constitue une planche de salut qui, si elle disparaissait, comme des menaces récentes l’ont laissé entendre, pourrait entraîner des effets dévastateurs pour l’économie du pays.  Sur le plan politique, a poursuivi le Représentant spécial, « le conflit au Soudan détourne l’attention du Soudan du Sud en cette phase cruciale de la transition ». Alors que les efforts déployés par l’Autorité intergouvernementale pour le développement sur le Soudan du Sud (IGAD) et le Président Salva Kiir pour mettre un terme au conflit au Soudan restent tout à fait louables, le calendrier du processus de paix au Soudan du Sud ne devrait pas pâtir de ces efforts. 

Ces facteurs aggravent les éléments moteurs du conflit, compliquant une situation sécuritaire déjà fragile dans le pays, a mis en garde M. Haysom.  L’absence d’accords locaux régissant les déplacements du bétail en dehors de la saison sèche aggrave les risques de heurt entre les éleveurs du nord et les communautés agraires sud-soudanaises.  De surcroît, il a noté des rivalités grandissantes autour des rares ressources dans les zones des nouveaux déplacements, ce qui entraîne une montée des tensions entre les communautés souvent teintées de connotation tribale dans un environnement marqué par des difficultés économiques, des tensions préexistantes et la présence d’armes à feu.  Le diplomate a cité le cas de l’accès aux points d’eau dans le Haut-Nil où ces facteurs ont mis le feu aux poudres dans une chronologie d’événements préoccupants.  La MINUSS a constaté qu’au moins 14 personnes déplacées avaient été tuées et plus de 28 blessées.  À la demande des autorités, les partenaires humanitaires ont suspendu de façon temporaire les déplacements à Malakal en provenance du Soudan.  À la suite de ces événements, le Représentant spécial s’est rendu à Malakal pour, a-t-il dit, observer la dynamique sur le terrain.

À l’heure actuelle, a rapporté le Représentant spécial, les humanitaires adaptent leur plan d’intervention pour aider les deux communautés dans les camps et à l’extérieur des camps.  Le plan de prévention de la MINUSS inclut le déploiement intensifié de patrouilles de plus de 600 Casques bleus sur le terrain.  Il est prévu un renforcement des opérations de cordon sanitaire et de recherche pour récupérer les armes à feu dans les camps.

Tout ceci, a continué M. Haysom, est assorti d’engagements et d’un dialogue avec les dirigeants politiques, locaux et nationaux qui prône la tolérance intercommunautaire et un désarmement pacifique.  Il a salué le soutien apporté par le Gouverneur du Haut-Nil, les forces populaires de défense du Soudan du Sud et des services de police.  Le diplomate s’est encore inquiété de la montée des tensions à Malakal qui ne fait qu’aggraver l’enchevêtrement de conflits intercommunautaires et intra-nationaux auxquels la Mission est confrontée.  Lors de la publication du rapport trimestriel de la MINUSS, il a fait part de son sentiment d’alarme face à la réapparition de meurtres extra-judiciaires dans l’État des Lacs, une préoccupation remontée aux autorités.  Il a dit avoir enjoint le Gouvernement à publier les conclusions de l’enquête.

Dans le même temps, le renouvellement du mandat de la MINUSS requiert des tâches supplémentaires de protection des civils, qui doivent être conformes aux capacités et aux ressources.  À cet égard, le Chef de la Mission a annoncé l’élargissement de l’empreinte de la force dans le pays tout en gardant des réserves pour tout imprévu intracommunautaire, infranational ou pré-électoral.  Pour finir, M. Haysom a dit attendre le résultat d’une étude des capacités militaires et de police qui permettra de voir si « nous sommes à la hauteur ».  Nonobstant les difficultés géographiques, il ressort d’un sondage indépendant que les Sud-Soudanais appuient la Mission et sa présence stabilisatrice.  En conclusion, il a appelé à ne pas perdre des yeux le Soudan du Sud car, comme nous l’avons appris avec le Soudan, « les dividendes de la paix peuvent vite disparaître ».

M. CHARLES TAI GITUAI, Président par intérim de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée, l’organe chargé de superviser l’état de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé de 2018 sur la résolution du conflit au Soudan du Sud et de soumettre des rapports trimestriels au Conseil de sécurité.  Il a noté qu’au cours des cinq dernières années, le Soudan du Sud avait connu sa plus longue période de paix et de stabilité relatives depuis son indépendance en 2011.  Il a toutefois constaté que le rythme de mise en œuvre de l’Accord revitalisé avait été lent, une grande partie des objectifs visés à la suite de la période transitoire de trente-six mois n’ayant pas été réalisés.  En conséquence, l’Accord revitalisé a été prolongé de vingt-quatre mois, de février 2023 à février 2025, pour permettre l’achèvement de l’unification des forces armées, l’élaboration de la constitution permanente et la préparation de la tenue d’élections crédibles, libres et équitables en décembre 2024.

L’intervenant a salué l’établissement des branches exécutive et législative du Gouvernement provisoire d’union nationale revitalisé au niveau national et au niveau des États, la résolution du différend sur le nombre d’États, et l’incorporation de l’Accord revitalisé dans la Constitution de transition.  Il a ajouté qu’environ 55 000 des 83 000 membres des forces unifiées ont été formés et diplômés, mais que le processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) n’avait pas commencé. M. Gituai s’est également félicité de l’ouverture de couloirs humanitaires ayant facilité le retour de certains réfugiés sud-soudanais et de déplacés internes.  Il a aussi noté des progrès dans la rédaction des projets de loi relatifs à la création de la Commission vérité, réconciliation et apaisement et de l’Autorité pour les compensations et les réparations.  Il a plaidé en faveur d’un soutien accru du Conseil de sécurité et de la communauté internationale afin d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord revitalisé, notamment grâce à un financement prévisible et adéquat.  La Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée estime que la communauté internationale pourrait financer directement le processus d’élaboration de la constitution, le désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), ainsi que la préparation et la conduite des élections, a conclu l’intervenant. 

M. MARCO IMPAGLIAZZO, Président de la Communauté de Sant’Egidio, s’est dit préoccupé par la situation au Soudan du Sud depuis les années 90, rappelant que M. John Garang, père fondateur de ce pays, s’était rendu à plusieurs reprises à Rome pour chercher des voies de dialogue, en pleine lutte pour l’indépendance.  L’initiative de Rome est née au lendemain de la signature de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud, dans la phase compliquée de la création du Gouvernement d’unité nationale.  Plusieurs entités politiques et militaires avaient rejeté cet accord et il était nécessaire de les récupérer, a encore expliqué l’intervenant. Le pape François est intervenu personnellement depuis la mémorable « Retraite spirituelle », a-t-il poursuivi.  C’est ainsi qu’ont été créées les conditions préalables à la convocation à Rome des parties non-signataires de l’Accord revitalisé, avec un mandat complet du Président Salva Kiir pour négocier avec eux. L’initiative de Rome a donc conduit à une reconnaissance mutuelle entre le Gouvernement et l’opposition non-signataire et créé un cadre de négociation pour l’engagement politique, a-t-il ajouté. 

Malgré les interruptions forcées dues à la pandémie de COVID-19, ce dialogue a permis de réduire le niveau de violence dans le pays et de créer un nouvel espoir de paix, s’est réjoui M. Impagliazzo.  L’initiative de Rome a donc permis, selon lui, de former des représentants de l’Alliance des mouvements d’opposition du Soudan du Sud (SSOMA), en vue de leur inclusion future dans le Mécanisme de vérification et de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité (CTSAMVM).  Le processus est aujourd’hui plus inclusif et évolue dans cette direction. L’initiative de Rome représente un dialogue politique complémentaire et en harmonie avec les institutions internationales.  C’est pourquoi, a-t-il assuré, Sant’Egidio s’engage à poursuivre dans cette voie avec l’intention de créer un terrain favorable à l’éradication de la violence. Mentionnant l’importante contribution des représentants de la société civile et des dirigeants des confessions chrétiennes et religieuses du pays, l’intervenant s’est dit convaincu que cette participation ne fera que s’accroître au cours des prochaines étapes. Ce sera un élan décisif pour appeler les dirigeants du Gouvernement et de l’opposition à assumer leurs responsabilités à l’égard du peuple du Soudan du Sud et de ses souffrances. 

M. RICHARD A. WOOD (États-Unis) a dit être préoccupé par les violences communautaires au camp de Malakal.  Il a regretté que des mesures de protection n’aient pas été prises rapidement en dépit des signes précurseurs.  Les États-Unis sont prêts à aider la MINUSS à cet égard, a assuré le représentant qui s’est également inquiété de la présence de groupes armés autour du camp et du trafic d’armes qu’ils alimentent à l’intérieur du camp.  Il a exhorté le Gouvernement à empêcher l’arrivée de ces groupes armés dans les camps et les sites de protections de civils.  Le représentant a noté que des inondations ont détruit les moyens de subsistance des populations alors que la situation humanitaire est déjà catastrophique.  Le Gouvernement doit mettre en œuvre son programme de relèvement pour trouver des réponses durables aux problèmes, a-t-il ajouté, en insistant sur l’importance de protéger la population. 

M. DARREN CAMILLERI (Malte) s’est dit préoccupé par les implications négatives de l’impasse politique actuelle et, dans ce contexte, a encouragé les parties à continuer d’honorer leurs engagements prévus au titre de l’Accord revitalisé.  Il a en outre soutenu les instruments de vérification de l’Accord, y compris la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée.  Pour le représentant, ce n’est que grâce à un espace civique inclusif que les processus électoraux et constitutionnels pourront être menés à bien d’ici à la fin de 2024.  Ainsi a-t-il souligné l’importance de l’adoption de la loi électorale nationale afin que puissent être réunies toutes les conditions nécessaires au déroulement d’élections libres, justes et crédibles. 

En outre, « Malte soutient les appels au renforcement du quota de 35% de femmes tel que prescrit par l’accord de paix, et demande instamment leur participation égale et significative à tous les processus, y compris la rédaction de la constitution ». 

Après avoir salué le rôle que le Président Salva Kiir a joué au sein de la mission de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) dans la médiation d’un cessez-le-feu au Soudan, le représentant a apporté le soutien de son pays aux mesures de protection de l’enfance prises par la MINUSS dans le contexte inquiétant de radicalisation des jeunes, signalé dans le rapport du Secrétaire général.  Par ailleurs, il s’est félicité de l’assistance humanitaire apportée par l’Union européenne au Soudan du Sud, laquelle s’élève à 81 millions d’euros en 2023.

M. PEDRO COMISSARÍO AFONSO (Mozambique), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a salué les progrès importants réalisés par le Soudan du Sud dans la consolidation de l’État, notamment en ce qui concerne les processus constitutionnel et électoral.  Il a noté avec satisfaction la réduction des incidents de violence intercommunautaire au niveau régional, en particulier dans l’État de Jongleï, tout en restant préoccupé par la vulnérabilité persistante de certaines régions du pays, exacerbée par les chocs climatiques. 

Le représentant a encouragé la MINUSS à étendre son assistance technique et son soutien aux mécanismes de responsabilisation et à renforcer la chaîne de la justice pénale. Il a réitéré l’appel des A3 à renforcer les actions de développement des capacités des autorités sud-soudanaises compétentes, en particulier dans les domaines logistique, financier et judiciaire. 

S’inquiétant des retombées du conflit au Soudan voisin, le représentant a constaté que l’afflux de rapatriés, de réfugiés soudanais et de ressortissants de pays tiers, combiné à la réduction des flux de marchandises et de carburant en provenance du Soudan, accentuait la pression sur les communautés vulnérables et aggravait une situation humanitaire déjà désastreuse.  Il a condamné fermement les attaques contre les travailleurs humanitaires, appelant toutes les parties à respecter le droit international humanitaire et à garantir un accès sans restriction aux populations dans le besoin.  Il a réitéré l’appel des A3 à la communauté internationale pour qu’elle augmente son soutien financier à l’aide humanitaire, qui reste gravement sous-financée.

M. DAI BING (Chine) a estimé que le Soudan du Sud a progressé, en particulier, sur la question du processus politique et institutionnel.  Il a exhorté la communauté internationale à contribuer aux efforts du Gouvernement et à travailler avec lui pour créer les conditions favorables à la transition politique.  Le représentant a aussi encouragé le Gouvernement à accorder la priorité à la prospérité de la population.  Rappelant que le Soudan du Sud est la plus jeune nation au monde, il a prié ses collègues du Conseil de faire preuve de patience et de respecter la souveraineté nationale du pays.  La période à l’examen, a-t-il constaté, a été marquée par la baisse de la violence même si dans certains États, la situation demeure fragile.  Le représentant a donc prié le Gouvernement de renforcer la prévention et la cohésion nationale.  Avant de conclure, il a réclamé la levée de l’embargo sur les armes et demandé à la communauté internationale d’aider le Soudan du Sud à surmonter la crise économique et ce, sans imposer de conditions politiques. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a condamné les attaques contre les convois humanitaires, soulignant la nécessité de renforcer la protection du personnel humanitaire afin qu’il soit en mesure de s’acquitter de son travail vital au profit de ceux qui en ont le plus besoin.  Concernant le volet politique, le représentant s’est dit préoccupé par la lenteur excessive dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  Selon lui, le processus de paix et sa mise en œuvre nécessitent l’engagement de toutes les parties à l’Accord pour qu’enfin le pays puisse s’engager sur la voie de la transition politique.  La participation des femmes étant fondamentale pour la réussite de cette transition et celle des processus électoraux, conformément à la résolution 1325 (2020) du Conseil de sécurité, il a encouragé le Gouvernement à intensifier ses efforts pour atteindre le quota minimum de 35% de femmes dans les institutions transitoires et les organes exécutifs.  Il n’a pas manqué de saluer l’action de la MINUSS, qui continue d’assurer, dans un contexte difficile, une fonction essentielle de protection des civils. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est inquiétée des retards dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et de la feuille de route.  Elle a appelé le Gouvernement de transition à mettre l’accent sur les réformes qui demeurent en souffrance, notamment l’adoption et la promulgation de la loi sur les élections nationales et la mise en œuvre des plans de déploiement pour les Forces unifiées nécessaires.  Le Gouvernement doit également travailler avec la MINUSS pour préparer la tenue d’élections pacifiques et inclusives.

La représentante s’est également préoccupée des affrontements ethniques qui se sont produits dans le centre de protection des civils de Malakal et du risque que l’afflux de réfugiés venant du Soudan n’attise les tensions.  Elle a appelé le Gouvernement à travailler avec la MINUSS pour renforcer la protection des civils, l’engageant par ailleurs à assurer un accès sans entrave aux partenaires humanitaires dans l’ensemble du pays.  Elle a en outre appelé à établir les responsabilités pour les crimes commis à l’encontre du personnel humanitaire.

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) s’est dit préoccupé par le retard pris dans la mise en œuvre de la feuille de route, ajoutant que la préparation des élections prévues fin 2024 nécessitait la définition d’un cadre législatif et constitutionnel, la mise en place d’institutions et l’octroi de ressources budgétaires.  Il s’est également inquiété de l’impact du conflit au Soudan sur la stabilité du Soudan du Sud, notant qu’il avait aggravé la situation humanitaire avec plus de 100 000 réfugiés de retour dans le pays.  Il a rappelé que l’assistance humanitaire de l’Union européenne au Soudan du Sud s’élevait à 81 millions d’euros en 2023 et que la France avait mobilisé 41,3 millions d’euros pour faire face à la crise humanitaire au Soudan et répondre à son impact régional.

Le délégué a salué les efforts de médiation du Soudan du Sud et regretté la tentative du Soudan de fragiliser les efforts de paix de la région.  Il a rappelé que les États membres de l’Union européenne avaient approuvé le 24 mai un financement des mécanismes de suivi de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) à hauteur de 5,8 millions d’euros.  Appuyant l’action de la MINUSS, qui continue d’assurer une fonction essentielle de protection des civils et de renforcement des capacités du Soudan du Sud, il a ajouté que son pays y prenait sa part en soutenant des projets de réinsertion et en apportant son expertise en matière de gestion des stocks d’armes et de munition. Il a appelé les autorités sud-soudanaises à tirer le plein parti de l’assistance des Nations Unies, de la région et de la communauté internationale pour accélérer la mise en œuvre de la transition politique. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a reconnu que le Soudan du Sud connaît des temps difficiles, subissant notamment les influences délétères du conflit au Soudan, y compris l’afflux de réfugiés.  Elle a salué les efforts de médiation du Président Salva Kiir pour trouver une issue à la crise au Soudan, ajoutant que Djouba connaît mieux que quiconque les réalités profondes de la région.  La déléguée a d’autre part pris note de l’activité fructueuse du Parlement sud-soudanais pour préparer les élections prévues en 2024.  Nous convenons qu’il faut accélérer les processus politiques en cours, mais cela nécessite de soutenir davantage Djouba, a-t-elle ajouté avant d’estimer que des forces militaires unifiées au Soudan Sud sont indispensables pour garantir la poursuite du processus de paix.  La représentante a également jugé que les flambées de violence dans les régions périphériques du Soudan du Sud, lesquelles aggravent la situation humanitaire, devraient être apaisées par la prise en compte des importants efforts de médiation de l’Union africaine (UA) et des États membres de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Elle a par ailleurs salué le rôle de la MINUSS dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé et demandé que la Mission accorde plus d’attention à la stabilisation durable de la situation dans le pays par le biais d’un accompagnement accru du Gouvernement vers la transition.  Enfin, la déléguée a appelé le Conseil de sécurité à aller plus loin qu’un simple assouplissement de l’embargo sur les armes, comme le demandent et Djouba et l’UA.  En conclusion, elle a rappelé l’importance de ne pas s’ingérer dans les affaires du Soudan du Sud, notamment en évitant de conditionner de quelque façon que ce soit l’acheminement de l’aide humanitaire. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a salué l’ensemble du personnel de la MINUSS pour le travail de protection des civils et d’atténuation de la violence dans un environnement difficile.  En tant que pays fournisseur de contingents, le Japon s’engage à poursuivre son déploiement auprès de la MINUSS, a affirmé la représentante.  Elle a jugé essentiel de mettre en œuvre l’Accord revitalisé, conformément au calendrier établi dans la feuille de route adoptée comme base d’une paix durable au Soudan du Sud. 

Dans ce contexte, elle a salué les progrès accomplis, tels que l’approbation du projet de loi 2023 sur les élections nationales et les préparatifs en cours pour le déploiement des forces unifiées nécessaires lequel doit se faire rapidement, en tenant compte de l’examen stratégique du secteur de la défense et de la sécurité.  Toutefois, elle s’est inquiétée du retard pris dans la mise en œuvre des autres aspects de l’Accord.  La déléguée, qui a constaté une réduction des violences intercommunautaires, au niveau infranational, a cependant mis en garde contre une aggravation de la situation, en raison de l’afflux de rapatriés et de réfugiés en provenance du Soudan. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est dit préoccupé par les affrontements aux frontières avec le Soudan qui ont exacerbé la situation humanitaire au Soudan du Sud.  Plus de 119 000 personnes ont maintenant franchi la frontière.  « Ces déplacements vers des zones déjà confrontées à des besoins humanitaires importants aggravent les tensions politiques et intercommunautaires. »  Le représentant s’est également inquiété des affrontements intercommunautaires dans le camp de protection des civils de Malakal, qui auraient fait 13 morts et brûlé 4 000 maisons.  Pour éviter de nouvelles tragédies, il faut de toute urgence trouver des solutions aux tensions à Malakal et s’attaquer aux causes profondes de la fragilité du Soudan du Sud, a-t-il dit.  Le représentant a appelé le Gouvernement du Soudan du Sud à mettre fin à la violence infranationale, fournir des services de base à la population et réaliser des progrès dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Il a regretté que les processus électoraux et constitutionnels connaissent dix et douze mois de retard.  Ainsi la Commission nationale de révision constitutionnelle attend-elle toujours d’être reconstituée.  Des lois doivent être promulguées et les institutions qu’elles créent doivent être financées.  Mais la législation à elle seule n’apportera pas une paix durable au Soudan du Sud, a averti le représentant.  Il a appelé le Gouvernement du Soudan du Sud à mettre fin à la violence et à la corruption, et à assurer la justice, les services essentiels et la tenue d’élections libres et équitables pour son peuple. 

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) a estimé que l’afflux important de réfugiés et de rapatriés qui avaient fui le Soudan du Sud en premier lieu souligne l’ampleur de la crise au Soudan.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par la situation dans certaines régions du Soudan du Sud qui manquent de nourriture et d’eau potable.  À ce sujet, il a regretté que le type de combats pour les ressources constatés à Malakal aient pu se propager et même susciter des tensions ethniques ailleurs.  Selon le délégué, il est crucial que la communauté internationale fournisse les fonds supplémentaires que le Secrétaire général, le HCR et OCHA ont demandés lors de récents appels.  « L’ONU, le Conseil de sécurité et la MINUSS devraient renforcer leur rôle en tant qu’acteurs essentiels au Soudan du Sud. »  Le Brésil craint en outre que la détérioration aiguë du niveau de vie de millions de personnes qui ont déjà été confrontées à des niveaux alarmants d’insécurité alimentaire ne provoque des problèmes de sécurité encore plus graves.  Déplorant les attentats qui ont tué des travailleurs humanitaires dans l’exercice de leurs fonctions, le délégué a appelé le Soudan du Sud à redoubler d’efforts pour assurer leur sécurité et veiller à ce que les auteurs soient traduits en justice.  Enfin, la violence persistante à Abyei, dans le Haut-Nil, à Jongleï et ailleurs montre clairement que les efforts actuels de maintien de la paix bénéficieraient d’initiatives supplémentaires de consolidation de la paix.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a commencé par saluer la solidarité dont fait preuve le Soudan du Sud à l’égard de ceux qui fuient le conflit dévastateur au Soudan, ainsi que les efforts déployés par le Gouvernement pour soutenir une solution pacifique du conflit.  Elle a souligné que son pays a annoncé des fonds supplémentaires lors de la Conférence de haut niveau, tenue à Genève, sur les annonces de contributions à la réponse humanitaire au Soudan et dans la région.  Alors que l’attention de la communauté internationale se focalise sur ce pays, elle doit aussi redoubler d’efforts pour la réalisation des étapes clefs de la transition qui détermineront l’avenir du Soudan du Sud. 

La représentante a vivement encouragé les parties à respecter les délais fixés dans la feuille de route et à mettre en place sans tarder les organes prévus.  La protection des civils, a-t-elle insisté, reste essentielle à la réussite de la transition politique.  Malgré une baisse des violences intercommunautaires et au niveau infranational, elle s’est dite préoccupée par l’augmentation marquée des violations des droits humains et des incidents violents touchant la population.  Enfin, elle s’est inquiétée de la détérioration de la situation humanitaire qui affecte plus des trois quarts de la population.  À ce jour, seuls 30% du Plan de réponse humanitaire pour 2023 ont été financés, a-t-elle relevé, avant d’appeler la communauté internationale à faire plus.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a appelé à renforcer le dialogue intercommunautaire pour mettre fin au cycle de la violence et établir une culture de la paix au niveau local.  Elle a qualifié d’« essentiels » les efforts de l’UNMISS pour se rapprocher des chefs locaux et traditionnels. Après avoir salué l’entrée en vigueur de la loi sur les élections nationales et l’adoption du budget national pour le déploiement des Forces unifiées nécessaires, elle a appelé à respecter le calendrier de l’Accord revitalisé.  Elle a rappelé l’ampleur des défis sécuritaires au Soudan du Sud, notamment à la lumière des événements récents dans l’État du Haut-Nil, en particulier dans la ville de Malakal.  Elle a condamné les meurtres de travailleurs humanitaires, et les attaques contre leurs convois, notamment dans un contexte régional d’afflux de réfugiés. 

M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a déclaré qu’au cours de la période examinée par le rapport du Secrétaire général, le Soudan du Sud a connu une paix relative, ce qui n’a en rien entamé sa détermination à faire en sorte que la vie du citoyen ordinaire redevienne normale.  C’est pourquoi il a appelé ceux qui ne l’ont pas encore fait à devenir partie à l’Accord revitalisé, son gouvernement restant pleinement engagé à travailler plus vite à sa mise en œuvre.  Malgré les défis, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir à cette fin, a-t-il assuré avant de rappeler combien les dégâts causés par les aléas climatiques continuent de faire peser la menace d’un retour des famines et leur cortège de déplacements et de migrations, autant de sources potentielles d’instabilité, d’insécurité et de tensions communautaires au Soudan du Sud et dans la région.  Le représentant a exhorté la communauté internationale et la MINUSS à aider son pays à investir dans le développement durable et le déploiement de systèmes d’alerte rapide.  Par ailleurs, il a indiqué que « le Soudan du Sud ne dispose pas des capacités financières immédiates pour venir en aide à l’afflux de réfugiés et de rapatriés fuyant le conflit au Soudan ».  La communauté internationale doit aider davantage ces déplacés et ces réfugiés, a-t-il répété.  Le représentant a ensuite remercié la MINUSS, l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et tous les pays partenaires « qui nous aident à mettre en œuvre la feuille de route politique afin de permettre la tenue réussie des élections générales prévues par l’Accord revitalisé ».  Enfin, il a demandé à la communauté internationale, aux partenaires régionaux et aux amis du Soudan du Sud de ne pas renoncer à l’aider à instaurer une paix et une stabilité pérennes. 

 

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