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Conseil de sécurité: l’examen du dernier rapport sur l’action de la MINUK donne lieu une nouvelle fois à de violents échanges entre la Serbie et le Kosovo

9312e séance – matin
CS/15268

Conseil de sécurité: l’examen du dernier rapport sur l’action de la MINUK donne lieu une nouvelle fois à de violents échanges entre la Serbie et le Kosovo

En écho à une situation dégradée sur le terrain, la présentation du rapport du Secrétaire général consacré à la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), ce matin, au Conseil de sécurité, a donné lieu à des échanges acrimonieux entre le Ministre des affaires étrangères de la Serbie, M. Ivica Dačić, et la représentante du Kosovo.  « Le ton ne laisse pas d’interpeller et demeure inquiétant », a constaté la France, et ce, malgré certaines avancées jugées significatives sur certaines questions. 

Mme Donika Gërvalla-Schwarz, du Kosovo –certains membres du Conseil lui dénient le titre de « représentante », le Kosovo n’étant pas reconnu comme État à l’ONU- a ainsi affirmé que les responsables du génocide contre les Kosovars étaient toujours au pouvoir à Belgrade et que le représentant de la Serbie, le Ministre des affaires étrangères, M. Dačić, était le bras droit du « boucher des Balkans », M. Slobodan Milošević.  L’oratrice a ajouté qu’il devrait comparaître devant un tribunal pour crimes de guerre. 

Répondant à ces propos en fin de séance, M. Dačić a rappelé que le père de Mme Gërvalla-Schwarz plaidait pour un Kosovo albanais, ajoutant: « Ce que vous voulez, c’est la guerre, mais nous n’avons pas peur de vous. »  L’intéressée a répliqué que son père, journaliste et écrivain, avait été assassiné par des services secrets dominés par les Serbes en raison de ses positions en faveur de l’indépendance du Kosovo.  Elle a accusé M. Dačić « d’être de la Serbie de Milošević » et « pas de la nouvelle Serbie qui aspire à la paix et à l’Europe ». 

Avant ces interventions sous tension, la Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la MINUK, Mme Caroline Ziadeh, avait déploré que les tensions du second semestre de 2022 aient amené Pristina et Belgrade « au bord de la confrontation armée ».  Mme Ziadeh a appelé les dirigeants des deux parties à « inverser la tendance » et à reprendre le chemin du dialogue facilité par l’Union européenne.  Le commerce et les investissements contourneront tout simplement les zones dans lesquelles les relations ne sont pas normalisées et où les tensions menacent la stabilité institutionnelle, a-t-elle averti. 

La Représentante spéciale a notamment appelé les deux parties à respecter leurs engagements pris le 27 février dernier à Bruxelles, puis le 18 mars à Ohrid dans le cadre du nouvel « accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie », un progrès salué par la quasi-totalité des délégations.  Elle a également appelé le Kosovo à prendre des mesures pour démontrer que la police et les organes judiciaires sont totalement à l’abri des interférences politiques, ainsi qu’à rassurer les habitants « des deux côtés de l’Ibar ».  Comme ensuite de nombreuses délégations, allant de la Serbie aux États-Unis en passant par la France, elle a demandé aux autorités kosovares un examen « immédiat, détaillé et de bonne foi » du projet de statut pour l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, un projet cher à Belgrade que Pristina retarde depuis 10 ans.  Plusieurs membres, dont les États-Unis ou le Japon, ont d’ailleurs estimé que le dialogue facilité par l’Union européenne reste le principal mécanisme visant à concilier les positions, ajoutant que l’élan positif enregistré ces derniers mois devait être maintenu. 

Estimant que le rapport présenté « n’aidait pas à comprendre » les défis sécuritaires dans la région que la Serbie continue de considérer comme faisant partie de son territoire sous le nom de Kosovo-Metohija, M. Dačić a affirmé que l’objectif de Pristina était d’en expulser tous les Serbes.  Il a notamment fait valoir que, 24 ans après l’adoption de la résolution 1244 (1999), le dernier rapport faisait toujours état de 200 000 déplacés du Kosovo-Metohija, avec un taux de retour de 2% seulement.  La Fédération de Russie a d’ailleurs regretté que Pristina, avec le soutien des capitales occidentales, n’abandonne pas ses tentatives de prise de contrôle des zones peuplées de Serbes et a dénoncé la poursuite d’une politique systématique de déplacement physique des Serbes et de transformation de la région en un « espace albanais ethniquement pur ». 

Le Ministre serbe a aussi décrit les menaces qui pèsent selon lui sur le patrimoine spirituel orthodoxe serbe au Kosovo-Metohija et a dénoncé l’effacement de l’histoire, la destruction des églises et la profanation des cimetières orthodoxes.  Il a martelé que la Serbie ne reconnaîtrait jamais l’indépendance déclarée unilatéralement du Kosovo et qu’elle n’accepterait jamais que le Kosovo devienne membre de l’ONU. 

Mme Gërvalla-Schwarz, qui a qualifié l’intervention de la Serbie de « tirade faisant l’apologie de la propagande », a accusé la Serbie de constituer une menace grave pour les Balkans, ajoutant que seule la présence de troupes américaines et de l’OTAN au Kosovo, via la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR), empêchait la Russie et la Serbie de déclencher une guerre.  Selon elle, « la Serbie de 2023 n’a plus envie d’être européenne, elle veut juste ses millions d’euros, tout en souhaitant que Moscou dirige le monde ». 

Mme Gërvalla-Schwarz s’en est en outre vivement prise au rapport du Secrétaire général et à la MINUK, estimant qu’elle était devenue inutile et agissait même comme un « facteur déstabilisant ».  Si le Japon a lui aussi jugé nécessaire de revoir les fonctions et le mandat de la MINUK, afin notamment de réduire ou d’éliminer les chevauchements avec les activités de l’UE et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. Dačić a au contraire demandé qu’on en revienne à la pleine application de son mandat défini dans la résolution 1244 (1999).  La Chine a jugé sa présence indispensable et d’autres membres comme le Gabon ou le Mozambique ont salué son travail de réconciliation intercommunautaire, raison pour laquelle le Brésil a lui aussi jugé prématuré d’envisager le retrait de la Mission.

Signe de la tension qui régnait lors de la séance, Mme Gërvalla-Schwarz a regretté de n’avoir pas été autorisée à intervenir en albanais alors que M. Dačić avait pu s’exprimer en serbe, provoquant une mise au point de la présidence russe du Conseil de sécurité, mais aussi des interventions des États-Unis et de l’Albanie. 

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ (S/2023/247)

Déclarations

Mme CAROLINE ZIADEH, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a constaté « les graves difficultés » rencontrées récemment, tout en saluant l’important effort collectif réalisé pour stabiliser et normaliser les relations entre Belgrade et Pristina.  Évoquant des cycles de tensions, de provocations et de griefs ayant marqué une grande partie de l’année 2022 et 2023, elle s’est inquiétée d’un « manque de confiance » qui pourrait s’aggraver, avec des conséquences directes sur la stabilité régionale.  Elle a appelé les deux parties à respecter leurs engagements conjoints pris le 27 février à Bruxelles et le 18 mars à Ohrid dans le cadre du nouvel « Accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie » et les a invitées à prendre des mesures immédiates pour démontrer leur bonne volonté sur le terrain. 

S’inquiétant des tensions ayant précipité le retrait massif des Serbes des institutions du Kosovo en novembre dernier et de celles qui ont polarisé l’opinion publique lors des élections locales de dimanche dernier, la Représentante spéciale a appelé le Kosovo à prendre des mesures pour démontrer que la police et les organes judiciaires sont totalement à l’abri des interférences politiques.  Soulignant aussi des difficultés dans les domaines des moyens de subsistance et des droits humains, concernant notamment les expropriations et l’impartialité de la justice, elle a appelé à rassurer les habitants ordinaires « des deux côtés de l’Ibar ». 

Saluant le calme qui a prévalu lors des élections du 23 avril, Mme Ziadeh a toutefois constaté que des questions de représentativité persistaient: « les élus, les policiers et les membres des services municipaux devraient refléter véritablement les intérêts de la population locale », a-t-elle affirmé.  Elle a appelé les deux parties à approuver la déclaration commune sur les personnes disparues, facilitée par l’Union européenne (UE), le 2 mai prochain.  Elle a également appelé à un examen « immédiat, détaillé et de bonne foi » du projet de statut pour l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo. 

Déplorant que les tensions du second semestre de 2022 aient amené Pristina et Belgrade « au bord de la confrontation armée », la Représentante spéciale a appelé les dirigeants des deux parties à « inverser la tendance » et à reprendre le chemin du dialogue facilité par l’UE.  Le commerce et les investissements contourneront tout simplement les zones dans lesquelles les relations ne sont pas normalisées et où les tensions menacent la stabilité institutionnelle, a-t-elle averti. 

Saluant le travail effectué par la Mission dans le cadre de son programme de renforcement de la confiance, qui fête son cinquième anniversaire, la Cheffe de la MINUK a expliqué qu’il visait à dépasser les préjugés ethniques, notamment grâce au soutien apporté aux droits linguistiques via une plateforme en ligne, sur laquelle 70 000 personnes apprennent le serbe et l’albanais. Un centre de ressources pour les personnes disparues, des programmes d’aide à l’autonomisation des femmes et des jeunes, un programme pour garantir un égal accès à la justice, ainsi qu’un centre de dialogue communautaire complètent le dispositif, a-t-elle ajouté, en estimant que « les accords politiques ont besoin d’un tel terreau pour se développer ». 

M. IVICA DAČIĆ, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a déclaré que le rapport du Secrétaire général n’aide pas à comprendre les défis sécuritaires et autres au Kosovo-Metohija.  Il a d’emblée appelé à la mise en œuvre de la résolution 1244 (1999) du Conseil et à une présence active de la MINUK dotée du mandat alors conféré, sans changement. Si cette résolution n’est pas respectée, c’est comme si l’ONU n’existait plus, a lancé le Ministre. 

M. Dačić a décrit une atmosphère de peur, d’incertitude et de pression envers les Serbes et les autres communautés non albanaises sur le terrain.  Il a une nouvelle fois demandé la mise en œuvre de l’accord de Bruxelles signé il y a 10 ans et la formation au plus vite de l’Association/Communauté des municipalités serbes, seul mécanisme possible à ses yeux pour protéger les droits et la sécurité de la communauté serbe au Kosovo-Metohija.  En 10 ans, Pristina n’a fait que se dérober à ses obligations, a accusé le Ministre, pour qui l’objectif de Pristina est d’expulser tous les Serbes du Kosovo-Metohija.  La Serbie prendra toutes les mesures politiques et économiques légales pour protéger la vie et les droits humains et politiques fondamentaux des Serbes et des autres populations non albanaises au Kosovo-Metohija, a averti le Ministre. 

M. Dačić a regretté que, 24 ans après la résolution 1244 (1999), le rapport mentionne toujours 200 000 personnes déplacées du Kosovo-Metohija, et que le taux de retour soit de 2%.  À ce rythme, il faudra des siècles pour que tous les exilés retournent dans leurs maisons et leurs foyers, a-t-il affirmé, en demandant si c’était là le résultat du développement démocratique de Pristina et sa contribution à la coexistence pacifique des Serbes et des Albanais au Kosovo-Metohija.  Le Ministre a aussi affirmé que le patrimoine spirituel orthodoxe serbe au Kosovo-Metohija était visé par des attaques menées par des Albanais du Kosovo et a dénoncé l’effacement de l’histoire, la destruction des édifices de l’Église orthodoxe serbe, la profanation des cimetières orthodoxes et le déni du droit à la liberté de religion.  Il a fait état d’attaques à motivation ethnique à l’occasion des fêtes religieuses orthodoxes. 

Le Ministre a accusé Pristina de violer les droits démocratiques fondamentaux des Serbes du Kosovo-Metohija avec la tenue récente d’élections spéciales dans quatre municipalités à majorité serbe. La pression sur les communautés non albanaises n’est pas un signe de compromis, a-t-il fait observer. 

M. Dačić a vu dans la question de l’adhésion de Pristina au Conseil de l’Europe un chantage et une manœuvre politique visant à retarder la formation de l’Association/Communauté des municipalités serbes.  Il a dénoncé l’octroi de visa européen aux Albanais alors que les Serbes en sont exclus. Le renforcement des capacités de Pristina ne fait qu’aggraver et priver la communauté serbe de ses droits, a affirmé le Ministre. 

La Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) doit garantir le droit à la vie et à la sécurité de la communauté serbe au Kosovo-Metohija, a encore rappelé le Ministre, qui a dressé un bilan comptable des incursions des unités spéciales de la police du Kosovo dans des municipalités non albanaises, menées sans le consentement de la KFOR.  Ces actions des unités spéciales ne font qu’alimenter les tensions interethniques, a-t-il affirmé, rappelant qu’aux termes de la résolution 1244 et de l’accord militaro-technique, la KFOR seule est mandatée pour l’ensemble des aspects militaires de la sécurité. 

Le Ministre a réitéré l’engagement de la Serbie à adhérer à l’Union européenne et à trouver une solution durable par le dialogue entre Belgrade et Pristina.  Attendre 10 années de plus que Pristina respecte ses obligations est inacceptable, a-t-il toutefois fait valoir, appelant à la formation inconditionnelle et urgente de l’Association/Communauté des municipalités serbes, conformément à l’accord de Bruxelles.  Il a regretté que les discussions sur ce sujet important ne commencent que le 2 mai prochain. 

Rappelant que le peuple serbe a vécu au Kosovo-Metohija depuis des siècles, M. Dačić a martelé que la Serbie ne peut pas et ne reconnaîtra jamais l’indépendance déclarée unilatéralement du Kosovo et qu’elle n’acceptera jamais que le Kosovo devienne membre de l’ONU.  Quinze ans après la déclaration d’indépendance, 28 États Membres ont révoqué leur reconnaissance du Kosovo et sur 193 membres de l’ONU, seuls 84 reconnaissent le Kosovo, a-t-il en outre rappelé. 

Mme DONIKA GËRVALLA-SCHWARZ, du Kosovo, a d’abord regretté de n’avoir pas été autorisée à intervenir dans la langue majoritairement parlée dans son pays, l’albanais, puis a qualifié l’intervention de la Serbie de « tirade faisant l’apologie de la propagande ». La paix et la sécurité sont menacées dans sa région, a-t-elle affirmé, alors même que les jeunes États des Balkans ont fait de grands progrès. 

Plus de 90 des 100 points soulevés dans le rapport de la MINUK comportent des erreurs plus ou moins graves et le rapport souffre d’importants oublis, a ensuite accusé l’intervenante, qui a ajouté que les défaillances de la Mission étaient bien connues depuis longtemps et qu’elle agissait comme un facteur déstabilisant.  Le présent rapport montre combien elle est devenue inutile, a-t-elle insisté.  Elle a notamment regretté l’oubli, dans le rapport, de toute mention crédible du processus de Berlin de 2022, qui s’inscrit pourtant dans les efforts plus larges déployés par l’Europe et d’autres parties prenantes.  Ce processus reste bloqué dans les pays où le Président Vučić de Serbie exerce une influence, a-t-elle affirmé, rappelant que ce dernier a pourtant signé cet accord.  Si les promesses et les accords signés ne sont pas honorés, les négociations deviennent une farce, a commenté Mme Gërvalla-Schwarz, qui a affirmé que derrière les actes de la Serbie se trouve la Russie.  On ne peut que constater à quel point les processus tels que le processus de Berlin et d’autres initiatives visant à promouvoir l’intégration dans le marché européen ne sont pas respectés, a poursuivi l’oratrice, accusant MM. Vučić et Dačić d’en être les principaux responsables. 

Après avoir assuré que le Kosovo se tient aux côtés de l’Ukraine, Mme Gërvalla-Schwarz a accusé la Serbie, qui se dit partenaire de l’Europe, d’être prête à cautionner les activités repréhensibles de la Russie en Ukraine.  La Serbie soutient activement la guerre et le génocide en Ukraine, a-t-elle affirmé, en regrettant que tout cela ne figure pas non plus dans le rapport de la MINUK.  La Serbie constitue une menace grave pour les Balkans, a-t-elle poursuivi, estimant que la présence actuelle de troupes américaines et de l’OTAN au Kosovo empêche la Russie et la Serbie de mettre leur projet à exécution mais que sans cette présence, il y aurait déjà une guerre dans les Balkans. 

La célébration du quinzième anniversaire de l’indépendance du Kosovo n’est pas non plus mentionnée dans le rapport de la MINUK, a déploré Mme Gërvalla-Schwarz, qui a affirmé qu’avec sa jeune armée moderne, son pays s’attachait à préserver la paix et la liberté dans la région et faisait partie des pays qui font front commun pour faire respecter la Charte des Nations Unies.  « Plus jamais nous ne serons une victime sans défense de l’agression et du génocide », a-t-elle lancé, ajoutant qu’avec ses alliés, le Kosovo est aujourd’hui en mesure de se défendre. 

Nous sommes un exemple concret de ce qui peut se faire sur la voie de l’état de droit, de la lutte contre la corruption et le crime et de la progression vers l’intégration à l’Europe, s’est félicitée Mme Gërvalla-Schwarz, qui a présenté le Kosovo comme le pays le plus démocratique dans les Balkans, ajoutant que cela constitue une provocation pour le régime de Belgrade.  L’avenir du Kosovo, c’est l’Europe, a-t-elle assené, rappelant la bonne intégration régionale du Kosovo, la croissance de ses recettes fiscales, sa représentation dans des capitales étrangères ou encore les investissements étrangers qu’il attire. 

Contrairement au Kosovo qui est tourné vers l’Europe, la « Serbie de Vučić et Dačić » est tournée vers l’Est, vers « le reliquat d’anciennes puissances » et elle fait fi des accords qu’elle signe avec l’Occident et des valeurs européennes comme l’état de droit et la liberté de la presse, a poursuivi Mme Gërvalla-Schwarz, qui a affirmé que « la Serbie de 2023 n’a plus envie d’être européenne, elle veut juste ses millions d’euros, tout en souhaitant que Moscou dirige le monde ».  Notant que les responsables du génocide contre les Kosovars sont toujours au pouvoir et que le Ministre serbe ici présent, M. Dačić, était le bras droit du « boucher des Balkans », M. Slobodan Milošević, l’oratrice a estimé qu’il devrait comparaître devant un tribunal pour crimes de guerre.  Le Kosovo reste néanmoins disposé à négocier, a-t-elle assuré, « parce que nous voulons la paix pour toute la région et une Serbie meilleure qui ne veut plus être une menace pour ses voisins ». 

Intervenant en tant que Président du Conseil, M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rejeté les allégations de Mme Gërvalla-Schwarz selon lesquelles la présidence ne l’aurait pas autorisée à intervenir en albanais.  La Présidence a été informée que vous étiez prête à intervenir en anglais, comme vos prédécesseurs l’ont fait avant vous, a-t-il justifié.  Si vous souhaitiez vraiment intervenir en albanais, ce qui s’est déjà produit, cela aurait été possible, même si ce n’est pas une langue officielle.  Nous vous aurions autorisée à intervenir en albanais si vous n’aviez pas le choix, a ajouté le Président. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a déclaré soutenir la recherche d’une solution dans le cadre de la résolution 1244 (1999), reconnaissant les efforts déployés par les parties, en particulier les mesures prises pour atténuer les tensions survenues au cours de l’année écoulée. Il les a exhortées à rester sur cette voie et à s’abstenir de mesures unilatérales susceptibles d’entraver l’avènement d’une paix durable.  Le processus de normalisation des relations, a-t-il ajouté, doit inclure la société civile, en particulier les femmes et les jeunes, dans ses délibérations, pour veiller à ce que leurs besoins et attentes soient pris en compte.  Il a émis l’espoir que les parties honoreront leur engagement à respecter l’accord sur la voie de la normalisation des relations. Le délégué s’est toutefois dit préoccupé de constater que peu de progrès ont été réalisés dans le dossier des personnes portées disparues depuis 1999, souhaitant qu’avec le soutien de la MINUK, il soit possible de les localiser et de venir en aide à leurs familles.  Il s’agit là d’un aspect humanitaire important du processus de réconciliation, a-t-il insisté.  Enfin, le représentant a exhorté les autorités à intensifier leurs efforts pour garantir une protection efficace et un accès à la justice et aux services de soutien pour les survivantes de la violence sexiste et domestique. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) s’est félicitée de la conclusion de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie.  Elle a encouragé Pristina et Belgrade à poursuivre sur cette lancée et à mettre pleinement en œuvre toutes les obligations découlant de cet accord.  La représentante s’est cependant déclarée préoccupée par certains des faits présentés dans le rapport de la MINUK, tels que les agressions signalées contre des civils, ainsi que les informations faisant état d’actes d’intimidation et de recours excessif à la force par des unités d’opérations spéciales.  Elle a appelé les deux parties à désamorcer les tensions et à s’abstenir de toute action unilatérale ou rhétorique de division qui pourrait annuler les progrès réalisés et à opter pour le dialogue et la réconciliation.  Une coopération accrue entre Pristina et Belgrade conduira selon elle à une plus grande prospérité économique dans la région et contribuera à stabiliser les Balkans occidentaux. 

Dans ce contexte, la déléguée a exprimé son soutien aux réformes que mène le Kosovo et à ses efforts sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne.  Appelant les autorités kosovares à répondre aux besoins de tous les membres de la société, elle a salué la convocation par le Président Osmani d’un forum régional de haut niveau sur les femmes et la paix et la sécurité.  Après avoir condamné les cas de violence sexuelle et sexiste, y compris les féminicides et les mariages d’enfants, elle s’est félicitée des efforts visant à renforcer le Code pénal, le Code de procédure pénale, le Protocole pour le traitement des cas de violence sexuelle et la loi sur la protection et la prévention de la violence à l’égard des femmes et de la violence sexiste. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a rappelé le rôle important qu’a joué la MINUK depuis sa création en 1999 en soutenant le Kosovo dans l’élaboration de sa constitution, de son gouvernement et de son parlement. Même après sa reconfiguration, la Mission a continué de contribuer à la paix et à la stabilité au Kosovo et dans la région, a-t-il relevé, saluant l’engagement actif de la Représentante spéciale avec les partenaires locaux et internationaux pour encourager la désescalade et promouvoir la confiance mutuelle. 

Le représentant s’est également félicité qu’après l’inquiétante escalade des tensions entre le Kosovo et la Serbie, à la fin de l’an dernier, les deux parties se soient entendues sur l’accord de normalisation de leurs relations proposé par l’Union européenne le 27 février dernier, puis sur l’annexe de mise en œuvre de l’accord, le 18 mars.  À cette aune, compte tenu de l’évolution politique et sociale et des efforts déployés par toutes les parties prenantes, le représentant a jugé nécessaire de revoir les fonctions et le mandat de la MINUK, afin notamment de réduire ou d’éliminer les chevauchements avec les activités de l’UE et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Enfin, le Japon continue de soutenir les efforts du Kosovo en vue de son adhésion à l’UE, convaincu que les réformes en cours dans le pays conduiront à de nouvelles étapes dans cette direction. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a noté que la réunion d’aujourd’hui intervient dans le contexte d’avancées significatives vers la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo, même si le ton des deux « Vice-Premiers Ministres serbe et kosovar » ne laisse pas d’interpeller et demeure inquiétant. Elle a salué l’esprit de responsabilité des deux parties qui a permis d’obtenir un accord de principe à Bruxelles le 27 février et un accord sur son annexe de mise en œuvre à Ohrid le 18 mars.  Nous attendons désormais de la Serbie et du Kosovo qu’ils s’engagent sans réserve, de bonne foi, et avec le même esprit de compromis, dans la mise en œuvre immédiate de l’ensemble de leurs engagements au titre de l’accord.  Parmi ceux-ci, a-t-elle ajouté, la mise en place d’une association de municipalités à majorité serbe au Kosovo est un élément essentiel, et la réunion entre Aleksandar Vučić et Albin Kurti mardi prochain à Bruxelles doit permettre de lancer des discussions concrètes et substantielles sur un projet de statut.  La représentante a jugé essentiel d’éviter une nouvelle crise sur le terrain dans les semaines qui viennent afin de ne pas perturber la dynamique positive à l’œuvre, appelant les parties à faire preuve de retenue et à s’abstenir de toute mesure unilatérale susceptible de nourrir les tensions.  Elle a en outre encouragé le Kosovo et la Serbie à trouver des solutions sur la question de la conversion des plaques d’immatriculation et de la fourniture d’électricité au nord du Kosovo.

Poursuivant, la déléguée s’est réjouie de l’absence d’incidents lors de la tenue des élections dans quatre municipalités du nord du Kosovo le 23 avril, regrettant toutefois la faible participation électorale et l’absence de participation de certains partis politiques. Dans ce contexte, ces élections ne sauraient constituer une solution politique de long terme pour les municipalités concernées, a estimé la représentante pour qui la priorité doit être la mise en œuvre de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo et le retour des Serbes dans les institutions kosovares.

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) a noté que la démocratie et les institutions du Kosovo ont continué à montrer leur maturité et ont gagné des points dans les classements internationaux établis par Freedom House sur les libertés politiques et civiles.  De même, il a salué les efforts du Gouvernement pour lutter contre la corruption, renforcer l’état de droit, et combattre la violence domestique et sexiste.  Le représentant a estimé qu’un examen du rôle et des responsabilités de la MINUK s’impose, les conditions sur le terrain n’étant plus les mêmes depuis 1999.  Il a salué les progrès considérables qui ont été accomplis dans le cadre du dialogue de normalisation sous les auspices du Représentant spécial de l’UE, y compris l’accord de Bruxelles du 27 février et son annexe de mise en œuvre négocié le 18 mars à Ohrid. 

Le délégué a appelé les deux parties à s’engager à dialoguer de bonne foi, honorer leurs engagements et éviter les actions ou les discours qui pourraient réduire les perspectives d’un accord de normalisation global et durable.  Il a également engagé le Kosovo et la Serbie à établir dès que possible l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo.  Il s’est inquiété de la persistance du vide sécuritaire dans le nord du Kosovo qui laisse les communautés isolées et a jugé essentiel que les institutions fonctionnent dans cette région.  La Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX) ne sont pas une solution pour le long terme, a-t-il dit.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que son pays était parmi les premiers à reconnaître le Kosovo comme État indépendant.  Saluant les progrès réalisés par le Kosovo en matière de lutte contre la corruption et le crime organisé, elle a réaffirmé le soutien de la Suisse à la perspective européenne du Kosovo et à son intégration dans les structures internationales.  La représentante a également souligné le travail important effectué par la MINUK depuis 1999 et s’est dite prête à discuter d’un éventuel examen stratégique de la Mission.  Dans l’immédiat, elle s’est félicitée de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, facilité par l’Union européenne (UE), y voyant une étape cruciale pour préserver la stabilité. Elle a souhaité que les engagements pris dans ce cadre soient pleinement réalisés. 

Abordant la situation sécuritaire, la représentante a déploré les nouvelles tensions observées dans le nord du Kosovo, appelant les parties à éviter toute action ou rhétorique qui puisse entraver les perspectives de réconciliation et de paix durable.  Elle a condamné l’augmentation des incidents intercommunautaires et a constaté que la KFOR, à laquelle la Suisse fournit le plus important contingent militaire, continue de jouer un rôle essentiel en tant que garant d’un environnement stable et sûr au Kosovo.  Elle a d’autre part regretté que la communauté serbe du Kosovo n’ait pas participé aux récentes élections locales, encourageant les dirigeants du Kosovo à rechercher le dialogue avec les représentants de cette minorité. Estimant qu’il importe aussi de traiter le passé pour prévenir une résurgence du conflit, elle a applaudi le projet de stratégie inclusive du Gouvernement du Kosovo pour la justice transitionnelle.  La représentante a appelé les parties à coopérer dans ce domaine, avec une approche centrée sur les victimes et les survivants, et à progresser sur la question des disparitions forcées. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a pris note des progrès importants accomplis sur la voie de la normalisation des relations entre la région du Kosovo et la Serbie, malgré l’aggravation des tensions au cours des six derniers mois, se disant encouragée par la volonté politique manifestée par les parties de surmonter leurs difficultés actuelles.  Elle s’est en particulier félicitée du nouvel accord sur la voie de la normalisation des relations conclu le 27 février 2023 à Bruxelles et de l’annexe relative à sa mise en œuvre, qui a été signée à Ohrid le 18 mars 2023.  Ces documents offrent une nouvelle chance de résoudre les différends en suspens et d’ouvrir la voie à la paix, à la stabilité et au progrès économique et social pour tous au Kosovo, a estimé la représentante, selon qui leur mise en œuvre contribuerait également à résoudre les crises persistantes liées à la reconnaissance des documents officiels, des symboles et des plaques d’immatriculation des véhicules.  Les promesses du nouvel accord ne pourront toutefois se concrétiser que si toutes les parties s’engagent à un niveau sans précédent dans le processus de normalisation, a-t-elle prévenu. 

La représentante s’est ensuite dite préoccupée par l’aggravation des tensions dans la région du nord du Kosovo, ainsi que par les déclarations incendiaires et les actes provocateurs.  Le faible taux de participation aux élections locales du 23 mars 2023 met en évidence de graves divisions au sein de la société, mais surtout la nécessité de poursuivre le dialogue afin de définir un processus crédible pour le retour des Serbes du Kosovo dans les institutions administratives, a-t-elle estimé. 

Ainsi, la question toujours en suspens des 1 600 personnes disparues demeure un point d’achoppement qu’il faut aborder dans une perspective strictement humanitaire et en l’absence de politisation, a déclaré la représentante, qui a invité à la coopération mutuelle pour faire la lumière sur les faits concernant ces disparus.  Cela contribuerait à dissiper les récits infondés qui perpétuent la méfiance entre groupes ethniques de la région du Kosovo, a-t-elle estimé, avant d’apporter son soutien au travail de la MINUK.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a souligné les relations et les affinités étroites qu’entretient son pays avec le Kosovo et la Serbie, liens qui ont été soulignés le mois dernier, lors de la visite du Ministre émirien des affaires étrangères à Belgrade et à Pristina.  Elle a salué le récent accord entre la Serbie et le Kosovo qui constitue l’avancée la plus significative dans leurs relations depuis plus d’une décennie.  Elle s’est aussi félicitée de l’accord conclu à Bruxelles en février dernier sur la voie de la normalisation, ainsi que de la signature d’une feuille de route à Ohrid le mois dernier.  Si la détermination de chaque partie a permis de passer des cendres de la guerre à un accord, le passage de la planche à dessin à la réalité est la prochaine étape à franchir, a-t-elle déclaré, et cela nécessite un travail considérable.  Les élections locales de dimanche au Kosovo, qui se sont déroulées sans la participation d’acteurs politiques importants dans les quatre municipalités à majorité serbe du nord, ont souligné la complexité de la situation, a relevé la déléguée qui a également rappelé qu’en novembre, de nombreux responsables serbes de ces régions avaient démissionné de leurs fonctions au sein du Gouvernement du Kosovo.  Ces développements présentent une nouvelle série de défis à relever, a-t-elle concédé. Cela étant dit, elle s’est dite confiante que les accords de Bruxelles et d’Ohrid offrent la possibilité d’aller de l’avant.  En définissant des mesures spécifiques susceptibles de soutenir la stabilité et de renforcer la participation civique, ils clarifient les moyens d’améliorer la situation, non seulement dans ces municipalités, mais dans l’ensemble du Kosovo, a-t-elle soutenu. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) s’est félicité de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, signé en février, et de son annexe de mise en œuvre signée en mars. Il s’est toutefois préoccupé des reculs sur d’autres fronts, tels que la feuille de route pour la mise en œuvre des accords énergétiques de 2013 et 2015.  Il s’est également inquiété de la persistance des tensions entre les communautés, en particulier dans le nord du Kosovo, comme en témoigne le boycott des élections locales de dimanche dernier.  Le délégué a appelé les parties à adopter des mesures de confiance et à éviter les actions unilatérales qui pourraient déclencher la violence.  Réitérant son appel à la création de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, il a encouragé les parties à respecter leurs engagements ainsi que les sites d’importance historique, culturelle ou religieuse et à préserver la liberté de circulation.  Le représentant a ensuite jugé prématuré d’envisager le retrait de la MINUK à l’heure actuelle car elle joue un rôle important dans la prévention des conflits intercommunautaires. 

Le délégué s’est par ailleurs inquiété de la présence de troupes du Kosovo dans les « Îles Malvinas », notant que l’envoi de troupes étrangères sur ce territoire constitue une violation de la résolution 31/49 de l’Assemblée générale et va à l’encontre de l’esprit de la résolution 41/11, qui a solennellement déclaré l’Atlantique Sud zone de paix et de coopération.  Il a réitéré son ferme soutien à la souveraineté argentine sur les « îles Malvinas » et exhorté les États Membres à s’abstenir de toute action unilatérale concernant ce territoire. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a regretté que la représentante du Kosovo n’ait pas été autorisée à s’exprimer dans la langue de son choix et déclaré qu’en vertu de l’article 44 du Règlement intérieur provisoire du Conseil, un représentant pouvait s’exprimer dans une langue de son choix avec la mise à disposition des services d’interprétation adéquats.  Cela avait été accordé par écrit mais la Russie s’y est opposée, également par écrit.  Ce faisant, la présidence russe a fait preuve de partialité dans le rôle qui a été le sien, a accusé le représentant, qui lui a reproché d’être allé à l’encontre des règles du multilatéralisme.  Il a cité des précédents à l’occasion desquels d’autres langues ont été utilisées par des délégations au Conseil de sécurité, jugé ridicule la position de la présidence russe et salué la compréhension dont a fait preuve la représentante du Kosovo.

M. Hoxha a ensuite noté que les choses ont beaucoup changé depuis que, le 15 décembre dernier, le Kosovo a présenté sa demande d’adhésion à l’Union européenne, confirmant sa volonté de s’intégrer à l’UE et son appartenance à la région de l’Atlantique Nord.  Les citoyens du Kosovo sont autorisés à voyager dans une soixantaine de pays, y compris dans l’espace Schengen.  Le Conseil de l’Europe a accepté la demande officielle du Kosovo.  Il s’agit là d’une percée historique pour le Kosovo, s’est félicité le représentant, qui a rappelé que l’Union européenne avait facilité le dialogue entre la Serbie et le Kosovo et estimé que cette initiative avait porté ses fruits. 

Le représentant s’est dit « abasourdi » d’entendre le Ministre des affaires étrangères de la Serbie affirmer le contraire.  Les parties doivent respecter leurs promesses de normaliser leurs relations, a-t-il affirmé.  S’agissant des récentes élections locales, il a regretté que tous les électeurs n’aient pas pu participer alors que leurs intérêts sont en jeu.  Il faudra trouver une solution à cette question car les Serbes du Kosovo ont le droit d’être représentés à tous les niveaux, a-t-il ajouté. Il a aussi souhaité des solutions concernant les 1 600 personnes toujours portées disparues. 

Enfin, M. Hoxha a estimé que le moyen de sortir du mandat de la MINUK se trouve dans l’Union européenne.  C’est vers elle qu’il faut aller pour que les Serbes et les Kosovars puissent jouir de leurs droits, en tant que ressortissants de l’Union européenne. 

M. GENG SHUANG (Chine) a salué les deux récentes réunions de haut niveau entre les parties serbe et kosovare, sous facilitation de l’UE, avec à la clef, peut -être, un début de normalisation.  La Chine ayant toujours été favorable à une solution mutuellement acceptable pour les deux parties au travers du dialogue et sur la base de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, le représentant a insisté sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Serbie dans ce contexte.  Il a également encouragé les deux parties à maintenir le dialogue.  La création de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo est une composante essentielle de l’accord de Bruxelles a-t-il noté, appelant l’UE à rester neutre dans ce processus.  Le représentant s’est inquiété de la situation instable qui prévaut dans le nord du Kosovo -à majorité serbe-, et de la tenue d’élections avec un taux de participation inférieur à 4%, ce qui a conduit à une escalade des tensions préoccupante. Il a exhorté le Kosovo à reprendre la voie du dialogue et de la consultation, en appelant l’UE à jouer un rôle de médiateur constructif à cet égard.  Préoccupé par les tensions ethniques actuelles, il a demandé que des mesures actives soient prises pour protéger la sécurité et les droits de toutes les communautés de la région, y compris des Serbes.  Il a par ailleurs estimé que le rôle de la MINUK demeure indispensable.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que la question des plaques d’immatriculation demeure une pomme de discorde et que le taux de participation historiquement bas aux récentes élections locales illustre l’ampleur de la fracture entre les communautés ethniques concernées.  Il s’est ensuite dit persuadé que la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina doit passer par la mise en œuvre de l’accord de Bruxelles de 2013.  Le représentant a appelé les parties à demeurer engagées dans le processus de normalisation de leurs relations en évitant toute approche unilatérale susceptible d’exacerber les tensions.  Il a souligné la nécessité de garantir le retour des expatriés, notant avec intérêt les 112 retours volontaires enregistrés au cours de la période sous examen, avant d’encourager les efforts en vue d’assurer le retour de l’ensemble des 200 000 personnes déplacées.  Le délégué a par ailleurs salué la multiplication des initiatives de la MINUK, notamment des campagnes de sensibilisation contre les mariages précoces au Kosovo et son soutien accru à l’autonomisation économique des jeunes, ainsi que l’organisation des séminaires et conférences par le PNUD, ONU-Femmes et les partenaires internationaux pour faciliter les contributions des femmes dans le processus de paix. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) s’est inquiété de la persistance de l’animosité et des tensions entre Belgrade et Pristina.  Les récents désaccords sur la liberté de mouvement et le processus de vote ainsi que le boycott par les Serbes du Kosovo de leur participation aux institutions du Kosovo, saperont la mise en œuvre de la « proposition de l’Union européenne », a-t-il mis en garde.  Le représentant a exhorté les dirigeants serbes et kosovars à promouvoir de manière proactive la réconciliation et à s’abstenir de tout acte incitant au vandalisme et à la violence, notant que les représailles intercommunautaires compromettent les perspectives de règlement à long terme des divisions existantes entre les deux communautés.  Il a insisté sur l’importance de l’inclusion de toutes les parties prenantes, notamment les femmes, les jeunes et les acteurs de la société civile, pour assurer le succès du processus de réconciliation, et a salué les efforts de la MINUK pour créer un terrain d’entente, préserver la stabilité, rétablir la confiance et améliorer le dialogue.

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est dit fermement attaché au renforcement de la stabilité dans les Balkans occidentaux en ces temps de tensions très vives en Europe.  Il s’est félicité de l’accord « juridiquement contraignant » conclu à Bruxelles et de son annexe d’Orhid, et a engagé la Serbie et le Kosovo à respecter rapidement leurs engagements et à éviter de raviver les tensions.  Le délégué a également invité à la création de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo.  Espérant que la rencontre entre les parties prévue le 2 mai aura bien lieu, il a affirmé que le dialogue facilité par l’Union européenne (UE) restait le principal mécanisme visant à concilier les positions et que l’élan positif enregistré ces derniers mois devait être maintenu.  Il a ensuite a appelé à l’ONU à remplir son rôle sans recourir au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, considérant que si la MINUK avait apporté une contribution cruciale à la paix et à la stabilité dans la région lors de sa création en 1999, sa mission avait été remplie depuis longtemps. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a jugé que les propos tenus par Mme Gërvalla-Schwarz portaient surtout sur les relations bilatérales entre la Serbie et la Russie, ce qui n’était pas le sujet du jour.  Il a ajouté qu’elle avait présenté le plan de consultation conclu entre la Serbie et la Russie de manière « tout à fait ridicule, fausse et non professionnelle ». 

Le représentant s’est ensuite déclaré favorable à la réalisation par Belgrade et Pristina d’une « solution juridique internationale stable et mutuellement acceptable », basée sur la résolution 1244 (1999).  Il a souhaité que le dénouement réponde aux intérêts de Belgrade et du peuple serbe et soit approuvé par le Conseil de sécurité.

Le représentant s’est par ailleurs alarmé de la situation dans la région, regrettant que Pristina, avec le soutien des capitales occidentales, n’abandonne pas ses tentatives de prise de contrôle des zones peuplées de Serbes.  Selon lui, la politique systématique de déplacement physique des Serbes et de transformation de la région en un « espace albanais ethniquement pur » se poursuit.  Ainsi, a-t-il indiqué, sur les 372 000 non-Albanais qui vivaient dans la région jusqu’en juin 1999, 209 000 ont été contraints de partir et seules quelques dizaines de Serbes vivent encore à Pristina alors qu’ils étaient 50 000 en 1981.  Citant le rapport de la MINUK, le représentant a précisé que 112 personnes sont retournées dans la région en six mois, ce qui, à ses eux, démontre clairement l’absence de conditions normales de coexistence interethnique et la réticence à les créer.  Il a également fait état d’incursions régulières dans le nord de la région par les forces spéciales de la police du Kosovo, de poursuites lancées sous divers prétextes contre d’anciens membres serbes des forces de l’ordre du Kosovo ainsi que de profanations de sanctuaires et lieux de sépulture orthodoxes.  Depuis l’arrivée au pouvoir de M. Albin Kurti en février 2020, les attaques physiques contre les Serbes et leurs biens au Kosovo sont devenues plus fréquentes, a-t-il ajouté et ce, sans que les auteurs soient inquiétés.

Sans processus de négociation ou de mécanisme approprié pour protéger les Serbes vivant dans le nord et au sud de la rivière Ibar, il ne sera pas possible de résoudre les problèmes existants, a souligné le représentant, qui a déploré que les autorités kosovares n’appliquent pas l’accord de Bruxelles de 2013, dont la principale disposition était la création de la Communauté des municipalités serbes du Kosovo.  À cette aune, il a jugé « largement exagéré » l’optimisme exprimé dans le rapport de la MINUK quant à la perspective d’application de l’Accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie et de son annexe de mise en œuvre.  Il a rappelé que Belgrade n’avait accepté de poursuivre le dialogue avec Pristina qu’à la condition que ses « lignes rouges » soient respectées, à savoir son désaccord avec « l’indépendance » unilatéralement proclamée et l’adhésion du Kosovo à l’ONU, ainsi que la création de la Communauté des municipalités serbes du Kosovo. 

Pour le représentant, Pristina a une fois de plus, fait volontairement monter la tension le 23 avril en organisant dans le nord du Kosovo des élections municipales malgré le boycott par la majorité serbe de cette « parodie de procédure démocratique ».  Il a rappelé la faiblesse de la participation -3,5%- qui n’a pourtant pas empêché Pristina de qualifier de « réussies » ces élections « illégitimes » et de déclarer vainqueurs quatre Albanais du Kosovo ne représentant qu’une proportion insignifiante de la population locale, ni les « parrains » occidentaux de Pristina de les reconnaître.  

M. Nebenzia a d’autre part accusé les États-Unis et les Européens de « tolérer l’usurpation effective des prérogatives du pouvoir ». Il a également estimé que la MINUK était sous pression des Albanais du Kosovo, ce que, selon lui,  les pays occidentaux « ne permettraient jamais pour d’autres opérations de maintien de la paix ».  Pour le représentant, l’objectif principal de l’Occident est d’assujettir les Balkans par tous les moyens possibles et d’en attirer les pays dans l’OTAN.  Évoquant enfin le procès à La Haye de M. Hashim Thaçi, ex-dirigeant de l’Armée de libération du Kosovo, et de ses « complices », il y a vu la « dernière chance » pour le rétablissement de la justice et a souhaité que les juges de La Haye ne répètent pas les « erreurs catastrophiques » du Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).

En sa qualité de Président du Conseil, M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a repris la parole pour apporter des éclaircissements au sujet de l’intervention en anglais de Mme Gërvalla-Schwarz.  Il a indiqué que deux membres du Conseil ont examiné la demande de l’invitée de pouvoir s’exprimer en albanais.  Il a également précisé que l’article 34 du règlement du Conseil, cité par le représentant de l’Albanie, prévoit que tout intervenant peut s’exprimer au Conseil dans une langue autre que les langues officielles du Conseil, à condition toutefois d’apporter des services d’interprétation dans cette langue.  En vertu de l’article 39 du règlement, a-t-il précisé, certaines déclarations peuvent être prononcées au Conseil dans des langues natives si les représentants concernés ne parlent aucune des langues officielles.  Si Mme Gërvalla-Schwarz s’était trouvée dans cette situation, elle aurait pu parler en albanais, a assuré le Président.  Mais en vertu de l’article dont elle relève, elle se devait de parler en anglais, a-t-il maintenu, ajoutant que la décision finale de Mme Gërvalla-Schwarz de s’exprimer en anglais a été transmise au Secrétariat puis à la présidence du Conseil.  Nous refusons donc le postulat selon lequel nous aurions fait preuve de partialité, a-t-il conclu. 

Reprenant à son tour la parole, M. DELAURENTIS (États-Unis) a remercié le Président d’avoir apporté ces éclaircissements mais a estimé que ce qu’a dit le représentant de l’Albanie a tout lieu d’être.

Reprenant la parole à son tour, M. DAČIĆ, Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a argué que l’intervention de Mme Gërvalla-Schwarz au sujet du dialogue entre Pristina et Belgrade indique bien que le Kosovo ne souhaite pas la paix mais la poursuite de la guerre.  Le Ministre a réfuté les accusations de « ségrégation » lancées à son encontre, rappelant qu’il est né lui-même dans l’actuel Kosovo.  Il a également rappelé le poste politique qu’occupait le père de Mme Gërvalla-Schwarz, « bien avant Milošević », quand son père plaidait pour un Kosovo albanais, et il a accusé Mme Gërvalla-Schwarz d’avoir dit en 2017 que la question du Kosovo ne pouvait être réglée que par le biais de la guerre. 

Invoquant les différentes résolutions du Conseil de sécurité qui parlent des forces kosovares comme des « forces terroristes », le Ministre a aussi réfuté les relations affichées du Kosovo avec l’Union européenne et sa position de soutien à l’Ukraine, rappelant que l’Ukraine ne reconnaît pas le Kosovo. Quant à l’affirmation de Mme Gërvalla-Schwarz selon laquelle le Kosovo est le pays le plus démocratique des Balkans, il lui a rappelé qui étaient ses alliés pendant les Première et Seconde Guerres mondiales.  

Des accords ont été signés et Mme Gërvalla-Schwarz dit qu’ils n’ont pas été suivis d’effet, a poursuivi le Ministre, estimant que c’est bien le cas puisque l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo n’a toujours pas vu le jour.  Il lui a demandé si le programme politique du Kosovo vise vraiment à promouvoir l’unité. Il a également reproché à l’intervenante d’en appeler à l’unité albanaise et de détester la Serbie.  Il a conclu en affirmant que, pour la Serbie, le Kosovo n’est pas un État de jure et de facto, et que son adhésion à l’ONU est hors de question.  « Ce que vous voulez, c’est la guerre, mais nous n’avons pas peur de vous », a-t-il assené, en estimant « qu’avec des propos pareils, Mme Gërvalla-Schwarz ne restera pas longtemps à son poste ».  Pour défendre les positions politiques de la Serbie « nous devons nous faire entendre », a conclu M. Dačić. 

Reprenant la parole, Mme GËRVALLA-SCHWARZ, du Kosovo, a estimé que l’intervention du Premier Vice-Président du Gouvernement et Ministre des affaires étrangères serbe, M. Ivica Dačić, illustrait pourquoi il avait été baptisé « le petit Slobodan » dans les années 90, en référence à Slobodan Milošević.  Répondant à la mention faite par celui-ci de son père, elle a expliqué que ce journaliste et écrivain avait été assassiné par des services secrets dominés par les Serbes en raison de ses positions en faveur de l’indépendance du Kosovo.  Elle a accusé M. Dačić « d’être de la Serbie de Milošević » et pas de la nouvelle Serbie qui aspire à la paix et à l’Europe.  Elle a rappelé les efforts du peuple kosovar pour sauver des dizaines de milliers de personne de l’énorme machine de guerre à laquelle il avait participé, l’accusant en outre d’avoir glorifié un génocide.  « On ne peut pas tomber plus bas », a-t-elle dit. 

Estimant que la Serbie s’était livrée au terrorisme d’État, soutenu par un blocus russe, elle s’est dite convaincue que l’ex-Président kosovar Hashim Thaçi démontrerait au tribunal de La Haye que les accusations contre l’Armée de libération du Kosovo étaient infondées.  Elle a aussi rappelé que le Kosovo était un État qui avait été reconnu par 115 États Membres des Nations Unies.  Elle a ajouté que son pays était prêt à mettre en œuvre l’accord de Bruxelles et son annexe d’Orhid de même qu’à normaliser ses relations avec la Serbie. Estimant que les déclarations de M. Dačić semblaient plus destinées à l’opinion serbe qu’au Conseil de Sécurité, elle a douté que la réciproque soit vraie.

Dans une nouvelle reprise de parole, M. HOXHA (Albanie) a déploré que l’esprit qui prévaut à Bruxelles ne prévaut pas au Conseil.  À Bruxelles, où les parties se sont réunies, tout le monde est d’accord pour dire que ce qui a été décidé le 18 mars est un jalon, a-t-il fait valoir, souhaitant qu’il en soit de même au Conseil et que l’on cesse de discuter de faits historiques sur lesquels nous ne sommes pas d’accord.  C’est important pour le Kosovo et la Serbie mais aussi pour tous les pays de la région, a-t-il insisté, avant d’affirmer qu’une seule réunion par an sur le sujet, au lieu de deux, devrait suffire.  

Avant de conclure cette réunion, M. NEBENZIA, Président du Conseil, s’est dit d’accord avec le représentant de l’Albanie sur le fait que « l’esprit » devrait prévaloir.  « Mais encore faut-il savoir lequel », a-t-il ajouté.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: un an après son adoption, la résolution sur l'organisation d'un débat en cas de veto au Conseil de sécurité « a changé les règles du jeu »

Soixante-dix-septième session,
68e et 69e séances plénières – matin & après-midi
AG/12500

Assemblée générale: un an après son adoption, la résolution sur l'organisation d'un débat en cas de veto au Conseil de sécurité « a changé les règles du jeu »

Entrée en vigueur le 22 avril 2022, la résolution (A/RES/76/262) par laquelle l’Assemblée générale s’autorise à organiser systématiquement un débat sur une question bloquée par un veto au Conseil de sécurité a « changé les règles du jeu ».  C’est ce qu’a affirmé aujourd’hui le Président de l’Assemblée, M. Csaba Kőrösi, en sonnant l’heure du bilan.  Il a prévenu qu’il ne s’agit pas d’opposer un organe à un autre mais bien de fortifier leur unité autour de l’objectif commun qui est de débarrasser le monde du fléau de la guerre. 

La résolution, qualifiée d’« historique » par plusieurs délégations, a été adoptée après le lancement de « l’opération militaire spéciale » de la Fédération de Russie en Ukraine, le 23 février, les blocages qui ont suivi au Conseil de sécurité et l’ouverture à la demande de ce dernier, de la onzième Session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale, le 28 février.  Avant de passer à l’adoption de textes sur la connectivité interrégionale, le renforcement des examens nationaux volontaires et, à l’issue d’un vote, sur la coopération entre l’ONU et le Conseil de l’Europe, le Président de l’Assemblée générale a dit: nous sommes ici pour discuter de la meilleure manière d’utiliser l’addition à notre grande boîte à outils qu’est la résolution du 22 avril et obtenir des membres du Conseil qu’ils s’unissent autour de solutions viables, dépassent leurs intérêts immédiats et agissent de manière responsable au service de la paix et de la sécurité internationales. 

Aussi n’aurons-nous plus à organiser systématiquement ce type de débats, a prédit le Président, en comparant ladite résolution à un masque à oxygène dans un avion.  « C’est bien de l’avoir, mais c’est mieux de ne pas à avoir à l’utiliser. »  Exprimant un sentiment largement partagé, les pays nordiques ont estimé qu’un an plus tard, la résolution a fourni à l’Assemblée générale un instrument concret pour établir les responsabilités de ceux qui exercent le droit de veto, avec des effets politiques réels sur le modus operandi.  Dans ce qui est un changement structurel profond, l’Assemblée peut réaffirmer ses prérogatives et garantir une relation plus responsable et plus transparente avec le Conseil de sécurité.  Il faut, ont insisté les pays nordiques, mettre pleinement en œuvre le paragraphe 3 de l’Article 27 de la Charte des Nations Unies qui stipule qu’un État ne peut être « partie, juge et jury » dans un conflit.  L’exercice du droit de veto doit en conséquence être limité lorsqu’un membre permanent est directement impliqué dans un conflit dont le Conseil est saisi car on ne peut s’attendre à ce qu’il travaille de manière impartiale, a renchéri l’Ukraine. 

Le Pakistan a dit avoir également subi l’exercice abusif de ce droit qui rend impossible, depuis plusieurs décennies, le règlement des questions du Jammu-et-Cachemire mais aussi de la Palestine. Nous ne l’exercerons qu’à des « occasions rares et extraordinaires », ont annoncé les États-Unis dont les propos ont été confirmés par la France.  En revanche, l’année dernière, c’est la Fédération de Russie qui a abusé de ce droit pour empêcher le Conseil de réagir à sa guerre illégale et non provoquée contre l’Ukraine, a rappelé le Royaume-Uni.  Deux mois plus tard, elle opposait un autre veto à une résolution sur la sécurité climatique et l’aide humanitaire, a dit celui qui n’y a plus recouru depuis plus de 30 ans, à l’instar de la France.  Jusqu’à ce jour, il n’est toujours pas possible d’établir, devant le Conseil, l’entière responsabilité du crime d’agression contre l’Ukraine, ont fait observer les pays baltes.

La France s’est réjouie que son initiative, portée également par le Mexique, visant la suspension volontaire et collective du veto en cas d’atrocités de masse, soit soutenue par 106 pays.  Ce droit doit lentement tomber en désuétude, a estimé le Liechtenstein, à l’origine, avec d’autres, du Code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT), salué unanimement aujourd’hui.  Face aux accès de paralysie du Conseil, il a appelé l’Assemblée générale à se montrer plus active, soulignant qu’elle l’a déjà fait, comme lorsqu’elle a condamné, un an et demi avant le Conseil, le coup d’État militaire au Myanmar. 

Toujours aujourd’hui, l’Assemblée générale a encouragé la coopération régionale pour améliorer la connectivité des infrastructures liées au transport, à l’énergie et au numériqueCompte tenu de la nécessité d’impliquer les secteurs public et privé, elle reconnaît, dans sa résolution (A/77/L.59), qu’il faut surmonter les obstacles à l’investissement dans les pays à revenu faible et intermédiaire et le manque de projets durables susceptibles d’être financés.  Davantage peut être fait pour instaurer un climat favorable aux affaires et à l’investissement, dit-elle, en encourageant l’utilisation d’outils novateurs tels que les partenariats public-privé, le financement mixte ou encore les structures de titrisation. 

Les États-Unis ont salué la résolution, malgré leur réserve sur la mention de leur politique commerciale, alors que le Pakistan a plaidé pour un plan mondial de développement des infrastructures durables et de reconstruction et rappelé sa proposition de créer un mécanisme de financement pérenne pour le développement d’infrastructures durables. L’Assemblée prie, dans une autre résolution (A/77/L.64), les entités des Nations Unies d’appuyer les efforts déployés pour entreprendre des évaluations nationales de la mise en œuvre des objectifs de développement durable et de faciliter l’échange d’expériences et de supports de connaissance issus de ces évaluations. 

Elle se félicite, dans ce contexte, de la contribution du Conseil de l’Europe à la mise en œuvre du Programme 2030 et demande de nouveau que la coopération entre ce dernier et l’ONU soit renforcée (A/77/L.65).  Cette résolution a été adoptée par 122 voix pour, l’opposition du Bélarus, de la Fédération de Russie, du Nicaragua, de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et de la Syrie, et 18 abstentions, après l’adoption par 81 voix pour, 10 voix contre et 48 abstentions de l’alinéa 9 du préambule qui parle de la guerre en Ukraine.

La Fédération de Russie a rejeté une résolution politisée sortant du cadre habituel et la volonté de transformer le Conseil de l’Europe en un outil antirusse, au service de l’expansionnisme de l’Union européenne.  Voter contre la résolution, ce n’est pas appuyer la guerre en Ukraine, a-t-elle rassuré, c’est préserver l’intégrité de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales.  Les propos sur une résolution sortant du cadre habituel ont été appuyés par le Venezuela, Cuba et le Mexique.  Le Sénégal a réitéré son opposition au concept de « genre » et la Hongrie, à l’invitation à signer ou ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, arguant d’une lutte déjà vigoureuse, au niveau national.

L’Assemblée a prévu une autre séance publique mardi 16 mai à partir de 10 heures pour parler de la zone de paix, de confiance et de coopération en Asie centrale. 

EXERCICE DU DROIT DE VETO

Débat sur la question

M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, a déclaré que l’adoption, il y a un an, de la résolution de l’Assemblée sur l’exercice du droit de veto a été une véritable avancée.  Elle a changé la règle du jeu, en ouvrant une nouvelle forme de collaboration entre l’Assemblée et le Conseil, a dit le Président qui a rappelé le rôle complémentaire de ces deux organes.  Il a estimé que le débat d’aujourd’hui représente l’occasion de fortifier l’unité plutôt que de semer la division.  Si l’Assemblée et le Conseil sont dotés de mandats distincts, ils poursuivent le même objectif qui est de débarrasser le monde du fléau de la guerre, a dit le Président.  Pour le monde extérieur, nous ne faisons qu’un.  Nous ne nous réunissons pas aujourd’hui pour débattre de la réforme du Conseil ou pour opposer un organe onusien à un autre.  Nous sommes ici, a insisté le Président, pour discuter de la meilleure manière d’user de la nouvelle résolution dans notre grande boîte à outil onusienne. 

Le Président a interrogé les membres sur ce qu’ils souhaitent.  Voulez-vous dupliquer les divisions du Conseil ou voulez-vous une Assemblée qui complète le travail du Conseil, qui soit plus active sur des situations spécifiques, prenne des décisions, formule des recommandations concrètes et les soumette au Conseil?  Dans quelle direction souhaitez-vous aller?  Le Président a exhorté les délégués à se montrer audacieux et créatifs.  Il n’y a pas de mauvaise réponse, il n’y a que de nouvelles idées.  L’exercice du droit de veto ayant des répercussions mondiales, il a estimé qu’il ne doit intervenir qu’en dernier ressort.  Il a souhaité que les membres du Conseil puissent se réunir autour de solutions viables, dépasser leurs intérêts immédiats et agir de manière responsable au service de la paix.  Ainsi, nous n’aurons plus à recourir à ce débat sur le veto, a dit le Président, en comparant la nouvelle résolution à un masque à oxygène dans un avion.  C’est bien de l’avoir, mais c’est mieux de ne pas à avoir à l’utiliser. ».  Enfin, il a précisé que le verbatim du débat de ce jour sera envoyé au Président du Conseil.

Au nom des pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie), M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a estimé que la résolution A/RES/76/262 a marqué une étape importante dans le renforcement de la transparence et de la cohérence des travaux du Conseil de sécurité et l’amélioration de la collaboration entre les principaux organes de l’ONU.  Les trois débats qui se sont tenus sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC), la Syrie et la Fédération de Russie ont été l’occasion de discuter ouvertement de l’exercice du droit de veto.  Pour les pays baltes, les abus de plus en plus fréquents de ce droit illustrent à quel point la Fédération de Russie tient le Conseil de sécurité en otage, ce qui rappelle le caractère inévitable d’une réforme dudit Conseil, y compris par l’élargissement de sa composition.  L’exercice abusif du droit de veto est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas établir, devant le Conseil de sécurité, l’entière responsabilité du crime d’agression contre l’Ukraine.  Le représentant a ainsi rappelé que les pays baltes appuient l’initiative franco-mexicaine visant à interdire l’exercice du droit de veto en cas d’atrocités de masse, y compris le crime d’agression.

Au nom du Bénélux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg), M. MARK ZELLENRATH (Pays-Bas) a emboîté le pas de son homologue lituanien, en apportant leur soutien à l’initiative franco-mexicaine et à celles conduites par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT). Il a aussi estimé que, face à l’érosion de la confiance du public dans la capacité du Conseil à maintenir la paix et la sécurité internationales, l’adoption de la résolution A/76/262 a marqué une étape importante vers le renforcement de la transparence des méthodes de travail du Conseil, tout en améliorant le rôle de l’Assemblée générale, les États Membres ayant la possibilité de se prononcer ouvertement sur l’exercice du droit de véto. Le Bénélux, a dit le représentant, est d’avis que l’Assemblée générale a la responsabilité politique de régler les situations bloquées par un veto.  Il a rappelé à cet égard la pertinence et la portée de la session extraordinaire d’urgence ouverte après l’invasion de l’Ukraine.

Au nom du Groupe des pays nordiques, M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a estimé qu’un an plus tard, la résolution sur l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité a fourni à l’Assemblée générale un outil concret pour établir les responsabilités de ceux qui l’exercent, avec des effets politiques réels sur notre modus operandi, puisque ce texte a relevé les enjeux liés à cet exercice et offert à l’ensemble des États Membres une plateforme d’action.  Ce faisant, la résolution a permis de rééquilibrer les relations entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité.  Dans ce qui est un changement structurel profond, l’Assemblée peut réaffirmer ses prérogatives, y compris sur les questions de paix et de sécurité internationales, et garantir une relation plus responsable et plus transparente avec le Conseil de sécurité. 

Le représentant a estimé qu’une nouvelle réforme est nécessaire « de toute urgence » pour veiller à ce que le droit de veto soit toujours exercé dans l’esprit de la Charte, sans paralyser l’action du Conseil.  Il a exhorté de nouveau les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au code de conduite du Groupe ACT et à la déclaration politique sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocité de masse, initiée par la France et le Mexique.  Il a encouragé toutes les délégations à faire part de leurs points de vue sur d’autres réformes pertinentes visant à limiter davantage la portée et l’exercice du droit de veto.  Il faut, a insisté le représentant, mettre pleinement en œuvre le paragraphe 3 de l’Article 27 de la Charte qui, en substance, prévoit qu’un État ne doit pas être autorisé à être « partie, juge et jury ». 

Lorsque le droit de veto est invoqué, il affaiblit le plus souvent la crédibilité du Conseil et ne contribue guère à garantir la paix et la sécurité internationales, a résumé le délégué danois.  Être convoqué à l’Assemblée générale pour expliquer ses positions introduit un certain degré de responsabilité et donne à tous les États Membres l’occasion de faire entendre leur voix dans l’entreprise commune, qui est d’œuvrer pour la paix et la sécurité sur tous les continents et avec la participation de tous. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein), s’il a salué les membres du Conseil qui ont répondu à l’appel pour expliquer leur veto à chaque occasion qui s’est présentée jusqu’à présent, a dit apprécier encore plus leur décision de renoncer à exercer ce droit.  Selon lui, la perspective de devoir rendre des comptes donne déjà des résultats positifs, et il a espéré qu’elle encouragera les auteurs de textes, en particulier les membres élus du Conseil, à proposer des formulations répondant aux attentes de l’ensemble des membres.  Le délégué a souligné que cette initiative contribue à rétablir l’équilibre des pouvoirs entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Sachant qu’il n’est pas réaliste d’espérer une plus grande unité du Conseil dans un avenir proche, il appelé de ses vœux une Assemblée générale active dans le domaine de la paix et de la sécurité afin de garantir le multilatéralisme.  Il a rappelé que l’Assemblée avait prouvé sa capacité à intervenir en adoptant des résolutions sur la création du Mécanisme international, impartial et indépendant en Syrie et en condamnant le coup d’État militaire au Myanmar, précédant le Conseil de sécurité de plus de 18 mois.  Il a aussi souligné son rôle de premier plan après l’invasion illégale de l’Ukraine, en particulier depuis que le Conseil lui a délégué son autorité dans le cadre de la formule « S’unir pour la paix ».  Le représentant a regretté que l’Article 27 (3) de la Charte, garantissant qu’« une partie à un différend s’abstient de voter » dans les décisions prises au titre du Chapitre VI, n’ait pas été appliqué et a invité de nouvelles discussions à ce sujet.  « Le veto ne doit plus être une menace permanente et un obstacle potentiel à l’efficacité de notre organisation, mais doit lentement tomber en désuétude grâce à une série de mesures » a-t-il martelé en conclusion. 

Mme MARITZA CHAN-VALVERDE (Costa Rica) a relevé qu’avant l’adoption de la résolution sur l’exercice du droit de veto par l’Assemblée générale, un veto pouvait paralyser l’ensemble de l’ONU.  « L’impact de cette paralysie politique est dévastateur et les civils du monde entier en paient le prix. »  Selon la déléguée, l’initiative du veto a réorienté les relations entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée, en renforçant notamment le rôle de celle-ci dans le soutien de la paix et de la sécurité internationales. « Nous ne devons pas non plus considérer cette initiative comme une solution miracle qui résout toutes les dynamiques entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale », a-t-elle tempéré.  La déléguée a rappelé que les nominations à des postes supérieurs ne sont que l’un des domaines qui justifient un réajustement.  À cet égard, le Conseil de sécurité continue de dominer le processus de sélection du Secrétaire général, et ses membres permanents continuent de limiter les nominations aux postes de direction à leurs ressortissants.  Avec l’initiative du veto, a-t-elle poursuivi, « les États peuvent être à la fois petits et importants ».  Les petits États sont les « vrais gardiens » de l’ordre international, contrairement à la mentalité qui veut que « la force fait la loi ».  Ladite initiative est une pièce importante du puzzle et marque le début du voyage, a conclu la déléguée.

M. EDUARDO MANUEL DA FONSECA FERNANDES RAMOS (Portugal) a loué l’avancée qu’a été l’adoption de la résolution sur l’exercice du droit de veto.  Le Conseil doit être responsable vis-à-vis des États Membres, quand il agit ou quand il n’agit pas, a dit le délégué.  Il a estimé que « le veto cessera d’exister quand tous les membres décideront de ne plus y recourir ».  Enfin, il a indiqué que le code de conduite défendu par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (Groupe ACT) est en passe de recueillir l’assentiment de plus des deux tiers des membres de l’ONU.

M. MITCH FIFIELD (Australie) a rappelé l’opposition de longue date de son pays à l’exercice du droit de veto au sein du Conseil de sécurité, laquelle remonte à la création même de l’ONU, lorsque le Ministre australien des affaires étrangères de l’époque et Président de l’Assemblée générale, M. Herbert Evatt, avait été l’un des premiers à remettre en question l’équité et l’efficacité d’un tel droit.  Pour lui, la résolution adoptée il y a un an renforce la relation complémentaire entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale.  Le délégué a ensuite condamné l’utilisation du droit de veto par la Russie l’an dernier dans le cadre de son invasion « illégale et immorale » de l’Ukraine, considérant qu’il s’agit d’une violation flagrante de l’Article 27 (3) de la Charte, qui dispose qu’« une partie à un différend s’abstient de voter ».  Pour sa part, l’Australie, a-t-il dit, s’efforcera de rechercher des occasions de tirer parti de cette importante initiative; de renforcer le rôle de l’Assemblée générale conformément au mandat que lui confère la Charte des Nations Unies; et d’appeler à de meilleures normes pour encadrer l’utilisation du droit de veto, telles que le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocités de masse.

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a souligné que lors de l’adoption de la résolution 76/262, il y a un an jour pour jour, les États Membres espéraient un renouveau du multilatéralisme.  Il a regretté la poursuite de certaines des violations les plus graves du droit international, renforcées par l’« immunité » du droit de veto. Son exercice a entraîné la paralysie du Conseil face aux conflits et aux injustices perpétrés au Myanmar, en Palestine, en Syrie et en Ukraine, a-t-il résumé.  Le délégué a regretté maints abus de ce droit pour satisfaire les intérêts de certains pays et de leurs alliés, au détriment de l’intérêt collectif de la communauté internationale.  Affirmant que ce droit devrait être réglementé, il a estimé qu’il ne devrait pas être utilisé dans des situations de génocide, de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre.  Son pays estime également qu’il devrait être exercé par au moins deux membres permanents et soutenu par trois membres non permanents du Conseil de sécurité, ajoutant qu’il devrait alors être soutenu par un vote à majorité simple à l’Assemblée générale.  Le délégué a toutefois rappelé que la Malaisie considérait qu’à long terme, le veto n’avait aucun rôle à jouer dans une architecture multilatérale démocratique moderne, et réitéré son appel à son abolition.  Le principe antidémocratique du veto va à l’encontre des principes mêmes sur lequel les Nations Unies ont été construites, a-t-il martelé pour conclure son propos.

M. HARI PRABOWO (Indonésie) a demandé d’aller au-delà de cette initiative sur le veto de l’Assemblée générale pour essayer de résoudre les questions en suspens.  Cependant, il a constaté que les questions de la République populaire démocratique de Corée et de la Syrie, qui ont donné lieu au veto au Conseil de sécurité, n’ont toujours pas connu de progrès au sein de cet organe.  Selon le délégué, il faut donc se focaliser sur la résolution efficace des problèmes posés et non multiplier les réunions de l’Assemblée générale pour discuter du veto.  De plus, a-t-il poursuivi, la résolution de l’Assemblée générale sur le veto devrait servir d’outil pour aller vers un travail plus transparent et plus efficace du Conseil de sécurité.  De fait, si l’explication de ceux qui ont exercé le droit de veto est importante, il ne faut pas oublier qu’à terme, il est question de renforcer le travail global des Nations Unies afin de promouvoir davantage de multilatéralisme. Le délégué a également appelé à l’amélioration de l’interaction entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. Une interaction qui contribuera à une plus grande responsabilisation et à la légitimité du Conseil.  Il a souligné que la Charte des Nations Unies est claire sur le rôle, le mandat et la compétence des deux organes.  Par conséquent, toutes les délibérations au titre de ce point de l’ordre du jour ne doivent pas se substituer au travail et à la responsabilité du Conseil de sécurité.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a notamment rappelé que son pays « connaît bien » les utilisations abusives du droit de veto, car c’est par son exercice qu’il a été rendu impossible selon lui « de régler en temps voulu la question du Jammu-et-Cachemire ».  C’est l’exercice abusif de ce droit qui, aujourd’hui encore et ce depuis des décennies, empêche qu’une solution durable soit trouvée en ce qui concerne la question de Palestine, a-t-il renchéri.  Pour le délégué pakistanais, la refonte de l’exercice du droit de veto doit être le socle de la réforme du Conseil de sécurité, lequel ne devra plus accueillir de nouveaux membres afin de pourvoir être élargi à d’autres membres issus en premier lieu des groupes de pays en développement.  Ainsi, d’après le Pakistan, le Conseil s’exposera-t-il à des risques limités de paralysie et fonctionnera de manière plus ouverte, transparente et efficace au bénéfice de tous les États Membres de l’ONU. Débattre du droit de veto a révélé certaines réalités et ouvert d’autres options, a-t-il aussi estimé, à savoir qu’un exercice négatif de ce droit devrait être atténué par le renforcement du rôle des membres non permanents du Conseil de sécurité via « peut-être » une représentation renforcée. 

M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a rappelé le libellé de l’Article 24 de la Charte, qui dispose que le Conseil de sécurité agit au nom de tous les États Membres.  Il a estimé que le Conseil a échoué à s’acquitter de son mandat, le droit de veto étant au cœur des difficultés éprouvées.  Le délégué a estimé que la résolution de l’Assemblée générale adoptée il y a un an est un élément clef qui contribue à la préservation de la pertinence de l’ONU.  Cette résolution a permis une amélioration de la coopération entre l’Assemblée et le Conseil, s’est-il félicité.

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a estimé que la résolution relative à l’exercice du droit de veto a changé la donne à bien des égards, renforçant le rôle de l’Assemblée générale sans affaiblir celui du Conseil de sécurité. Elle a le potentiel de décourager l’exercice du droit de veto et d’encourager de nouvelles habitudes de dialogue et de coopération au sein du Conseil pour conduire à une plus grande retenue.  Simultanément, cette initiative a donné à l’ensemble des États Membres, en particulier aux petits États, l’occasion de faire connaître leur point de vue, a considéré le délégué, avant d’inviter les délégations à soutenir aussi l’initiative franco-mexicaine et le code de conduite proposé par le Groupe ACT concernant l’action du Conseil de sécurité contre les génocides, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  « Nous appelons également tous les membres du Conseil de sécurité, tant les membres permanents que les membres élus, à affirmer leur engagement vis-à-vis de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies, qui stipule qu’une partie à un différend doit s’abstenir de voter au Conseil de sécurité. »

M. FAHAD M. E. H. A. MOHAMMAD (Koweït) a rappelé que son pays faisait partie du premier groupe d’États ayant appuyé l’initiative sur le veto menée par le Liechtenstein.  La résolution historique qui en a résulté a renforcé le rôle de l’Assemblée générale et augmenté la transparence et la reddition de comptes de la part du Conseil de sécurité.  Dénonçant « l’exercice arbitraire du droit de veto » par certains membres permanents du Conseil comme l’une des raisons de sa paralysie, le délégué a affirmé que le recours au veto devait être limité.  Le Koweït, a-t-il précisé, a signé le code de conduite du Groupe ACT selon lequel les membres du Conseil s’engagent à ne pas s’opposer aux projets de résolution concernant le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Le délégué a ajouté que son pays soutenait également l’initiative franco-mexicaine selon laquelle les membres permanents suspendent volontairement l’exercice du droit de veto en cas de crimes contre l’humanité. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé que le débat du jour n’a rien de protocolaire, tant l’exercice du droit de veto touche directement au multilatéralisme.  Il a expliqué, s’agissant de la réforme du Conseil de sécurité, que son pays s’oppose à l’élargissement du droit de veto par l’accroissement du nombre de ses membres permanents.  « Accorder des privilèges à perpétuité n’aiderait en rien à empêcher ce que l’Organisation, 75 ans après sa création, n’a su éviter, à savoir la commission des pires crimes et atrocités. »  Le représentant a suggéré de s’inspirer des démocraties qui se fondent de plus en plus sur le principe de responsabilité et permettent l’expression de doctrines politiques alternatives.  C’est cela selon lui que doit refléter un Conseil réformé pour être en phase avec les réalités de notre monde.  Le représentant a précisé viser « tous les veto », celui qui peut être exercé lors du processus de sélection du Secrétaire général de l’ONU ou encore pour bloquer l’adoption d’une déclaration présidentielle.  C’est en ce sens qu’il a appelé les États Membres à réfléchir aux mécanismes dont ils disposent pour limiter l’exercice de ce droit. Ainsi les a-t-il invités à développer une diplomatie créative inspirée de l’initiative franco-mexicaine, du code de conduite du Groupe ACT ou encore du mouvement Unis pour la paix.  Son propre pays préconise la mise en place d’un mécanisme permettant qu’une majorité de 90% des États Membres de l’Assemblée générale puissent révoquer un veto quand il a été utilisé négativement. 

M. CORNEL FERUTĂ (Roumanie) a rappelé qu’au cours de l’année 2022, quatre veto ont été opposés, entraînant une souffrance accrue des civils en Ukraine, en Syrie et en République populaire démocratique de Corée.  Selon lui, l’initiative sur le veto crée un pont entre les activités du Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, ce qui favorise un sentiment de responsabilité parmi les membres permanents du Conseil.  Le délégué a noté que la résolution de l’Assemblée complète des efforts antérieurs tels que la « Déclaration politique sur la suspension du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse », initiée par la France et le Mexique, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT.  La Roumanie soutient les deux initiatives, a-t-il dit.  Le délégué a rappelé que l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies dispose qu’une partie à un différend s’abstient de voter. S’abstenir d’utiliser le droit de veto dans de telles situations éviterait une prise d’otage du Conseil de sécurité comme ce fut le cas après l’invasion russe de l’Ukraine, a-t-il argué. Il ne fait aucun doute que le veto affecte la capacité du Conseil à traiter de certaines des violations les plus graves de la Charte et du droit international. 

M. HANS ALMOSLECHNER (Autriche), après avoir salué l’utilité de la résolution A/76/262 et appuyé les initiatives franco-mexicaine et celles conduites par le Groupe ACT pour limiter ou réduire l’exercice du droit de veto en cas de crimes graves, a déclaré: « il n’y a pas place au Conseil de sécurité pour la défense des intérêts nationaux ».  Les membres permanents, en premier lieu, doivent exiger et souscrire au respect des buts, principes et normes de la Charte des Nations Unies et du droit international et en dénoncer les violations, a ajouté le représentant.  Pour l’Autriche, il est en effet de leur devoir d’assurer un Conseil efficace pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales et de ne pas mettre leur veto à des actions prises contre des violations manifestes du droit international et de la Charte. 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a salué l’adoption de la résolution 76/262, qui a ouvert un nouveau chapitre s’agissant de la responsabilité du Conseil de sécurité.  Il a noté la participation élevée des États Membres aux débats qui se sont tenus à l’Assemblée générale dans le cadre de la résolution précitée. Cette résolution représente selon lui une amélioration significative du fonctionnement de l’ONU.  Le délégué a rappelé que le droit de veto n’est pas un privilège mais une lourde responsabilité.  Ce droit ne peut être exercé en cas d’atrocités de masse, a-t-il dit, en insistant sur l’importance de l’initiative franco-mexicaine à ce sujet.  Il a souligné les six principes de comportement responsable récemment avancés par les États-Unis.  Le délégué a appelé à aller plus loin que ces actions qui reposent sur une base volontaire.  Nous devons défendre l’intégrité de la Charte et en appliquer scrupuleusement les principes, a-t-il conclu, en soulignant le rôle central de l’Assemblée.

M. SANGJIN KIM (République de Corée) a considéré que les veto opposés en mai dernier à une nouvelle résolution sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont démontré que l’exercice du droit de veto peut porter atteinte à l’intégrité même du Conseil de sécurité.  Ces veto ont été selon lui une contradiction même dans les termes et s’avéraient « autodestructeurs » d’un point de vue institutionnel, dans la mesure où certains membres permanents ont refusé de réagir face à des violations manifestes de multiples résolutions du Conseil qu’ils avaient eux-mêmes négociées et en faveur desquelles ils avaient voté.  Parmi celles-ci, la résolution 2397(2017) prévoyait de prendre des mesures en cas de nouveau tir de missile balistique intercontinental par la RPDC.  « Les veto ont empêché le Conseil de mettre en œuvre cette décision, l’annulant ainsi virtuellement », a déploré le représentant.  Le représentant s’est rappelé que lors de la toute première réunion de l’Assemblée organisée conformément à la résolution 76/262, il avait été expliqué que ces veto étaient censés contribuer à maintenir la stabilité dans la péninsule coréenne et à atténuer la crise humanitaire en RPDC.  Au lieu de quoi, la RPDC a profité de l’affaiblissement de la mise en œuvre des sanctions du Conseil de sécurité et du silence de ce dernier, procédant depuis à cinq nouveaux tirs de missiles balistiques intercontinentaux, a constaté le délégué. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a rappelé qu’il y a un an, Malte a coparrainé la résolution de l’Assemblée générale sur l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité.  L’exercice du droit de veto nous a laissés avec un Conseil incapable d’agir face à certains des défis les plus urgents de notre époque, a-t-elle constaté.  Il a aussi sapé l’esprit du multilatéralisme, épine dorsale de la Charte des Nations Unies.  L’Assemblée ayant été appelée à débattre des résultats du droit de veto à deux reprises l’année dernière, la déléguée a estimé que la résolution remplit son objectif en donnant à cette instance la possibilité de partager son point de vue sur les questions relatives à la paix et la sécurité internationales.  Et cela nous rappelle aussi qu’avec le veto, vient une responsabilité, a-t-elle ajouté. Soyons clairs: convoquer un débat de l’Assemblée générale pour discuter de l’utilisation du veto n’appelle pas un changement dans l’utilisation du veto, a-t-elle fait remarquer.  Cette discussion, a-t-elle reconnu, reste entre les mains du processus intergouvernemental dédié à la réforme du Conseil de sécurité.  En outre, la déléguée a réitéré son appel au respect de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies qui dispose qu’une partie à un différend doit s’abstenir de voter.  Elle a enfin dit soutenir l’initiative franco-mexicaine sur la limitation du droit de veto en cas d’atrocités de masse.

M. ANTONIO M. LAGDAMEO (Philippines) a fait observer qu’en donnant le pouvoir de convocation au Président de l’Assemblée générale, la résolution « historique » réduit le pouvoir des États Membres.  Toutefois, a-t-il tempéré, nous pensons que ces réunions peuvent donner des résultats concrets susceptibles d’avoir un impact positif sur le terrain et, à long terme, de renforcer la crédibilité et l’efficacité de l’ONU tout entière.  L’exercice du droit de veto est une responsabilité exceptionnelle qui ne doit pas se faire de manière irresponsable.  Ce droit doit être exercé judicieusement et ne pas empêcher indûment le Conseil de sécurité de s’acquitter de son mandat principal de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a souligné le représentant. 

Mme ARLENE BETH TICKNER (Colombie) a souligné la nécessité urgente d’une réforme du Conseil de sécurité et du droit de veto, qui est un mécanisme « antidémocratique ».  Le veto est selon elle une grave lacune dans l’examen des situations de génocide et d’atteintes à l’intégrité territoriale de certains États.  « Nous ne pouvons accepter que le processus de réforme du Conseil de sécurité étende le droit de veto à de nouveaux membres permanents », a tranché la déléguée.  Elle a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine.  Elle a également souhaité que l’État qui exerce la présidence du Conseil se retire lorsqu’il est directement concerné par un point à l’ordre du jour du Conseil. Enfin, elle a rappelé le libellé de l’Article 24 de la Charte qui dispose que le Conseil agit au nom de tous les membres de l’Organisation et non individuellement.

M. YASEEN LAGARDIEN (Afrique du Sud) a estimé que l’Assemblée générale doit être en mesure de demander des comptes au Conseil de sécurité, tout en permettant à ce dernier de s’acquitter de son mandat.  Lorsque le Conseil se trouve dans l’impasse, la saisine de l’Assemblée générale doit viser à l’en sortir et non à perpétuer les divisions au sein de cet organe, a-t-il estimé.  Pour le représentant, il importe de garder à l’esprit que l’Assemblée ne peut formuler aucune recommandation concernant un différend ou une situation examinée par le Conseil de sécurité au cours d’une session ordinaire.  Nous devons donc envisager des moyens concrets permettant à l’Assemblée d’apporter une contribution significative.  Pourquoi ne pas envisager des résumés des débats par le Président de l’Assemblée générale plutôt que de formuler des recommandations relatives aux questions dont le Conseil est saisi? a suggéré le délégué.  Un tel résumé listerait les solutions suggérées par les États Membres pour contribuer à répondre aux besoins des populations affectées par le conflit ayant fait l’objet de l’exercice du droit de veto, a-t-il précisé.  Enfin, il a souhaité que l’accent soit mis sur l’accélération de la réforme du Conseil de sécurité lui-même.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a estimé que la résolution de l’Assemblée générale sur le droit de veto est un pas dans la bonne direction pour rectifier l’ordre des choses.  En effet, les 193 États Membres de l’ONU ne peuvent pas être bloqués par les membres permanents du Conseil de sécurité.  Selon le délégué, autonomiser tous les États Membres sur les questions de paix et de sécurité est particulièrement crucial en ces temps sombres au Conseil.  Il a condamné la poursuite de l’agression russe contre l’Ukraine, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et malgré les nombreuses résolutions de l’Assemblée générale réclamant qu’elle cesse.  Dans ce contexte, le Conseil reste paralysé par la menace d’un veto russe sur toute mesure de paix constructive.  De ce fait, il a été contraint d’abdiquer sa principale responsabilité de maintien de la paix et la sécurité internationales devant ce conflit, a déploré le délégué.  « Nous avons besoin d’actions supplémentaires et d’initiatives visant à améliorer le fonctionnement du Conseil lui-même », a-t-il conclu. 

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a affirmé que le droit de veto est anachronique.  Compréhensible dans le contexte historique particulier de 1945, son exercice contredit aujourd’hui de manière flagrante l’un des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, celui de l’égalité souveraine des États, a-t-il considéré.  Pour le représentant, le droit de veto, en de trop nombreuses occasions, a empêché le Conseil de sécurité de s’acquitter de ses responsabilités vitales dans des situations mettant en danger la paix et la sécurité internationales, empêchant l’ONU « de faire une réelle différence sur le terrain ».  Bien que nous ne nous attendions pas à ce que les membres permanents renoncent à ce privilège qui leur est donné par la Charte, nous leur demandons et attendons d’eux qu’ils agissent de manière responsable et qu’ils fournissent une explication complète à l’ensemble des États Membres représentés lorsqu’ils opposent leur veto, a déclaré M. Massari.  Il a jugé que les défis mondiaux actuels, que ce soit dans le domaine de la paix et de la sécurité, du développement durable, de l’action climatique ou des droits humains et de l’état de droit, nécessitent une réponse multilatérale forte fondée sur un ordre international se basant sur des règles. Profitons de l’occasion qui nous est offerte aujourd’hui pour réaffirmer notre attachement à un système multilatéral efficace, démocratique et inclusif, dans lequel une prise de décision efficace n’est pas sapée par la poursuite des intérêts politiques de quelques-uns, a conclu M. Massari. 

M. PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que son pays s’engageait depuis longtemps pour un usage restrictif du veto au Conseil de sécurité et qu’elle avait soutenu la résolution 76/262.  Elle a regretté que l’exercice du droit de veto ait empêché le Conseil de s’acquitter de sa responsabilité première envers la paix et la sécurité, notamment en ce qui concerne l’agression militaire russe contre l’Ukraine, l’aide humanitaire transfrontalière pour la Syrie et la non-prolifération nucléaire sur la péninsule coréenne.  La déléguée a cependant constaté que la résolution avait permis de renforcer la transparence dans l’exercice droit de veto, notamment par le biais des rapports spéciaux qu’elle instaure.  Ladite résolution favorise la recherche de l’unité au sein du Conseil en vue d’éviter à avoir à justifier un veto devant l’Assemblée générale; elle rappelle à tous les États Membres qu’ils peuvent faire le choix d’agir, notamment en adhérant au code de conduite du Groupe ACT qui prévoit de ne pas voter contre des projets de résolution au Conseil visant à mettre fin à un génocide, à des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre.  La déléguée a salué la signature de ce code par la majorité des membres de l’Assemblée générale, y compris la France et le Royaume-Uni, et encouragé d’autres États à faire de même. 

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déclaré que le droit de veto sape la capacité du Conseil de sécurité à s’acquitter de ses responsabilités, avant de plaider pour un Conseil plus inclusif et représentatif.  Il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine.  Alors que nous débattons de la réforme du Conseil depuis longtemps, le monde a son avis sur la question: le Conseil n’est pas à la hauteur des tâches qui lui ont été confiées, a tranché le délégué.  Il a dénoncé la « paralysie honteuse » du Conseil, avant de juger capitale la résolution 76/262.  Le délégué a aussi insisté sur la pertinence des rapports spéciaux que le Conseil doit envoyer à l’Assemblée générale dans ce cadre. Au regard des attentes qui entourent la réforme du veto, plus nous attendons, plus la crédibilité du Conseil est sapée, a-t-il averti. 

M.  MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a appelé à un Conseil de sécurité qui reflète davantage les réalités du monde d’aujourd’hui.  Il a salué la résolution de l’Assemblée générale sur le droit de veto, coparrainé par près de 80 délégations dont la sienne. Il a rappelé l’indignation de son pays quand la Russie a opposé son veto à deux reprises sur la question ukrainienne, l’an dernier.  Il est important que les cinq membres permanents exercent leur droit de veto de manière responsable, a dit le délégué qui a affirmé que son pays le fait avec sérieux et uniquement à des occasions rares et extraordinaires. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) a remarqué que le recours au veto s’est considérablement accru ces dernières années, empêchant le Conseil de sécurité de s’acquitter efficacement de son mandat et de maintenir la paix et la sécurité internationales.  Son exercice fréquent est l’une des causes de l’incapacité croissante du Conseil de s’acquitter de ses responsabilités, et, dans ce contexte, nous réaffirmons notre soutien à l’initiative franco-mexicaine sur la limitation de l’exercice du droit de veto en cas d’atrocités de masse, a-t-il dit.  En ce premier anniversaire de l’adoption de la résolution A/76/262, le représentant a noté que la Russie poursuit son agression contre l’Ukraine, causant des pertes massives en vies humaines, ciblant délibérément des infrastructures vitales, des sites industriels, des hôpitaux et des écoles.  Il a dit que la Tchéquie continue de condamner dans les termes les plus fermes cette agression russe non provoquée et demande instamment à la Russie de retirer sans condition toutes ses troupes et forces armées de l’ensemble du territoire ukrainien.  Par ailleurs, il a fait remarquer que l’exercice abusif du droit de veto, en empêchant le renvoi d’affaires à la CPI, rend impossible la reddition de comptes pour les crimes les plus graves et contribue ainsi à ce que perdure l’impunité de leurs auteurs. 

M. BOSTJAN MALOVRH (Slovénie) a affirmé qu’au moment de l’adoption de la résolution issue de l’initiative sur le droit de veto, beaucoup d’États Membres espéraient que ce mécanisme n’aurait pas besoin d’être utilisé souvent et qu’il contribuerait à limiter l’exercice du droit de veto.  Il a regretté que lors de l’année écoulée, quatre veto avaient été déposés, bloquant trois initiatives au Conseil de sécurité.  Il a rappelé que l’Assemblée générale s’était réunie pour discuter de ces situations, deux fois lors de la session plénière ordinaire et une fois lors de la onzième session extraordinaire d’urgence.  Soulignant que le nombre d’intervenants dans ces débats parlait de lui-même, le délégué s’est félicité des résultats obtenus, notamment en ce qui concerne la reddition de comptes au sein du Conseil de sécurité et le renforcement du multilatéralisme.  Il a indiqué que son pays, en tant que membre du Groupe ACT, soutenait les efforts visant à limiter l’exercice du droit de veto quand le Conseil étudiait une résolution visant à mettre fin à un génocide, des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre, de même que l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse.  Il a encouragé les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à se joindre à ces initiatives importantes. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a affirmé que le veto est une prérogative si puissante qu’un membre permanent du Conseil doit l’exercer dans le seul but de maintenir la paix et la sécurité internationales.  À cet égard, elle s’est félicitée de l’engagement de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis de s’abstenir volontairement de recourir au droit de veto, sauf dans des circonstances rares et extraordinaires, tout en espérant que les autres membres permanents se joindront à eux.  La déléguée a donc salué le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine sur la suspension du droit de veto en cas d’atrocités de masse.  Alors que nous célébrons le premier anniversaire de l’adoption d’une résolution « historique », la représentante a estimé qu’une véritable réforme du Conseil de sécurité s’impose, exigeant un élargissement des catégories des membres permanents et non permanents.

Le droit de veto, a martelé M. JORGE VIDAL (Chili), n’est pas un privilège. C’est un droit qui doit être exercé de manière responsable, en gardant à l’esprit les buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Il a noté que la résolution de l’Assemblée est de nature à améliorer la communication entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale et souligné que ce texte ne fait pas partie du processus de réforme du Conseil de sécurité.  Il faut, a-t-il estimé, penser le veto dans le cadre d’une réforme globale du système des Nations Unies.  En attendant, il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a tranché: le veto est un outil inefficace pour le fonctionnement du Conseil de sécurité, qui ne peut maintenir la paix et la sécurité internationales lorsque l’un de ses cinq membres permanents exercent son droit de veto.  Tout en réaffirmant son plein soutien au mécanisme défini dans la résolution 76/262, il a considéré que son existence ne doit pas reléguer au second rang les négociations intergouvernementales en cours sur une réforme globale du Conseil.  Or, tout au long de ce processus de réforme, nous avons constaté que certains cherchent à s’orienter vers une réforme qui, au lieu de remédier aux maux du fonctionnement du Conseil de sécurité, ne fait que les aggraver, s’est alarmé le représentant.  L’Argentine, a-t-il dit, ne peut accepter les propositions qui visent à étendre le droit de veto aux nouveaux membres.  Il va sans dire qu’un Conseil ainsi réformé sera inefficace, l’un de ses principaux problèmes étant précisément son inaction face à certaines crises, conséquence de l’exercice du droit de veto.  « L’efficacité et le droit de veto s’excluent mutuellement ». Le délégué a ensuite fait part de son soutien à la proposition de réforme défendue par l’Union pour le consensus (UPC), « la plus rationnelle et la plus juste », qui vise à accroître le nombre de non permanents tout en cherchant à limiter l’exercice du droit de veto. 

M. YURI ARIEL GALA LÓPEZ (Cuba) a dénoncé la tendance croissante du Conseil de sécurité à usurper les prérogatives de l’Assemblée générale en matière de paix et de la sécurité internationales, alors qu’elle est « l’organe le plus démocratique et le plus représentatif du système des Nations Unies ».  Il a cependant contesté le paragraphe 4 de la nouvelle résolution, inscrivant la question de l’exercice du droit de veto comme point permanent à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Cela, s’est-il expliqué, ne peut qu’isoler cette question des négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité.  Dans ce cas, la réforme globale du Conseil serait irréalisable puisque les cinq questions principales identifiées, dont celle du veto, forment un tout indissociable.  Le représentant a aussi jugé insuffisant de limiter les rapports spéciaux du Conseil de sécurité au cas où le droit de veto a été exercé car c’est une approche clairement restrictive de ce que la Charte dit, à savoir « chaque fois que cela est nécessaire ».  En conclusion, il a estimé que le mandat de la résolution 76/262 ne remplace pas les dispositions des articles 8(b) et 9(b) du règlement intérieur de l’Assemblée générale, relatifs à la convocation de sessions extraordinaires d’urgence.

Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a estimé que le veto n’est pas un privilège. « Le veto ne peut viser à paralyser le Conseil de sécurité dans l’accomplissement de son mandat de maintien de la paix et la sécurité internationales. »  Il implique des devoirs et une responsabilité particulière pour les membres permanents.  Dans cet esprit de responsabilité, la France n’a utilisé le veto que 18 fois depuis 1945 et elle n’y a pas eu recours depuis plus de 30 ans, a rappelé la déléguée.  Depuis 2013, la France a proposé que les cinq membres permanents du Conseil suspendent volontairement et collectivement l’usage du veto en cas d’atrocités de masse. Cette démarche volontaire n’exige pas une révision de la Charte mais un engagement politique des membres permanents, a-t-elle expliqué.  Aujourd’hui, cette initiative portée conjointement avec le Mexique est soutenue par 106 pays.  La déléguée a appelé tous les États Membres qui ne l’ont pas fait à la soutenir, en particulier les autres membres permanents du Conseil de sécurité.  Nous avons à cet égard noté avec intérêt l’engagement des États-Unis à restreindre leur usage du veto à des situations rares et exceptionnelles, et souhaitons conjuguer nos efforts en vue d’un usage responsable du veto, a-t-elle déclaré.  Pour renforcer notre système de sécurité collective, a-t-elle ajouté, nous devons plus largement réformer le Conseil de sécurité: la France soutient son élargissement dans ses deux catégories de membres et souhaite qu’une négociation s’engage désormais sur la base d’un texte. 

Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) a affirmé qu’un an après son adoption, on peut constater l’impact positif de la résolution demandant que les membres permanents du Conseil qui ont exercé leur droit de veto viennent expliquer leur décision devant l’Assemblée générale.  Tout d’abord, la transparence et la responsabilité se sont accrues et la résolution a également eu un certain pouvoir préventif: sans avoir éliminé le recours au veto, elle a augmenté son coût politique, a estimé la représentante. Le texte a également renforcé le rôle de l’Assemblée générale dans les questions relatives à la paix et à la sécurité internationales, a-t-elle encore relevé.  Compte tenu du contexte géopolitique actuel, qui est extrêmement difficile, il est probable que le Conseil de sécurité continue d’être empêché d’assumer efficacement son rôle en raison de l’exercice abusif du droit de veto.  Dans de tels cas, il est nécessaire que l’Assemblée dispose d’un moyen d’agir et d’obtenir des résultats, car lorsque le Conseil de sécurité n’agit pas, ce n’est pas seulement un échec pour lui, mais un échec des Nations Unies dans leur ensemble, a estimé la déléguée. 

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a affirmé que le droit de veto est l’élément le plus antidémocratique de l’ONU, son pays s’opposant à son exercice depuis sa création en 1945.  Notre position selon laquelle le veto ne devrait jamais être utilisé reste inchangée, a-t-elle appuyé, saluant les effets positifs qu’a entraînés en un an à peine l’adoption de la résolution A/76/262.  En effet, les deux fois où la résolution a été activée, le débat qui a suivi à l’Assemblée générale a tourné à la démonstration en faveur d’un multilatéralisme fort et inclusif, s’est-elle félicitée.  Après avoir rappelé la participation active de son pays aux travaux du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence, elle a formé le souhait que, dans un an, l’Assemblée générale se réunisse pour fêter cette fois le non-exercice du droit de veto au cours de l’année écoulée. 

M. ROBERT CHATRNUCH (Slovaquie) a rappelé que le droit de veto n’est pas un privilège mais une lourde responsabilité, celle d’agir dans l’intérêt de la paix et de la sécurité dans le monde.  L’exercice abusif de ce droit, comme le fait la Fédération de Russie qui est un État agresseur, est inacceptable, a déclaré le délégué.  Il a estimé que la résolution 76/262 n’a en rien sapé la responsabilité essentielle du Conseil qui est le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  « Au contraire, elle a créé une pression supplémentaire pour la conduite de négociations entre les membres du Conseil. »  Il a exhorté tous les pays à se rallier au code de conduite du Groupe ACT et à l’initiative franco-mexicaine.  Enfin, tout en saluant la résolution précitée, il a souligné la nécessité absolue d’une percée dans les négociations afin de remédier de manière systémique à la difficulté posée par le veto.

M. JUAN ANTONIO BENARD ESTRADA (Guatemala) a estimé que la réalité des différents conflits et l’exercice ou l’abus du droit de veto motivé par des intérêts politiques ou idéologiques démontrent clairement la nécessité d’un changement structurel au sein de l’Organisation, en particulier au Conseil de sécurité.  Aussi s’est-il félicité de la pleine mise en œuvre de la nouvelle résolution.  Il est également nécessaire que les États Membres redoublent d’efforts pour mener à bien des discussions approfondies sur la réforme du Conseil de sécurité, y compris, entre autres, la question de la mise en œuvre de mesures visant à prévenir l’exercice irresponsable du droit de veto ou à en atténuer les effets.  Le Guatemala, a rappelé son délégué, a soutenu, dans le cadre des négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité, que le droit de veto ne devrait pas être utilisé en cas d’atrocités de masse ou de crimes contre l’humanité et qu’il est nécessaire que les méthodes de travail dudit Conseil soient plus transparentes et plus ouvertes.

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a rappelé que son pays a parrainé la résolution « historique » 76/262.  Il a demandé à la présidence du Conseil de sécurité de tenir compte du paragraphe 3 du dispositif de la résolution de l’Assemblée générale selon lequel le Conseil doit soumettre un rapport spécial à l’Assemblée en cas de recours au veto, regrettant que cela n’ait pas toujours été le cas.  Le délégué a rappelé que le droit de veto avait été exercé trois fois en mai, juillet et septembre 2022, bloquant l’action sur des questions d’importance vitale: la paix et la sécurité en Ukraine, la situation au Moyen-Orient et la non-prolifération nucléaire en République populaire démocratique de Corée.  Il a déploré l’abus par la Fédération de Russie de son droit de veto en vue de promouvoir ses propres intérêts dans le cadre de sa guerre d’agression en Ukraine, et la violation de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies en vertu duquel « une partie à un différend s’abstient de voter ».  Constatant que les négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité montrent qu’un nombre croissant d’États s’opposent au droit de veto, considéré par certains comme un « vestige du colonialisme », le délégué a toutefois reconnu que son abolition n’était pas à l’ordre du jour.  Il a appelé à aller au-delà de la résolution 76/262 en limitant le recours au veto à des « cas rares et exceptionnels », comme l’ont proposé les États-Unis en août 2022.  À cette fin, il a souligné le besoin de critères clairs et transparents pour l’exercice de ce droit, soutenant l’initiative franco-mexicaine sur la limitation du droit de veto en cas d’atrocités de masse, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT. 

Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives) a estimé que lorsque le Conseil de sécurité ne peut agir, l’Assemblée générale doit le faire.  L’Assemblée, qui est l’organe le plus inclusif et représentatif des Nations Unies, devrait s’efforcer d’assurer la transparence et la responsabilité, et insister pour que les États Membres expliquent et persuadent au lieu de bloquer l’action avec le veto.  C’est pour cela que les Maldives se sont jointes à plus de 80 pays pour coparrainer la résolution de l’Assemblée sur l’exercice du droit de veto. « Nous croyons fermement que le pouvoir du veto s’accompagne d’une responsabilité extraordinaire. » C’est donc le rôle de l’Assemblée de veiller à ce que cette responsabilité soit utilisée à bon escient, a insisté la représentante.  Selon elle, « la surutilisation du veto paralyse l’ONU à un moment où nous devons plus que jamais aller vers le multilatéralisme ».  Elle a encouragé les idées visant à renforcer l’Assemblée générale et l’ONU dans son ensemble.

M. PHILIP REED (Royaume-Uni) a déclaré que les membres fondateurs de l’ONU ont juré de préserver les générations qui leur ont succédé du fléau de la guerre, conférant pour ce faire la responsabilité première du maintien de la paix et la sécurité internationales au Conseil de sécurité. C’est à cette fin que les membres permanents du Conseil ont obtenu un droit de veto, a-t-il dit.  Il a souligné que le droit de veto représente une lourde responsabilité, que l’on exerce pour éviter et résoudre les conflits, déplorant que tous les membres permanents ne conçoivent pas les choses ainsi.  En février de l’année dernière, la Russie a exercé son droit de veto précisément pour empêcher le Conseil de réagir à sa guerre illégale et non provoquée contre l’Ukraine, a rappelé le représentant. Deux mois seulement plus tard, a-t-il poursuivi, la Russie opposait son veto à l’adoption d’une résolution qui aurait permis au Conseil de prendre des mesures historiques en matière de sécurité climatique, le texte bénéficiant du plus grand nombre de coauteurs jamais enregistré.  Le droit de veto aurait-il donc été créé pour empêcher l’acheminement de l’aide humanitaire aux personnes qui en ont désespérément besoin ou le renforcement de la sécurité climatique, s’est indigné le délégué britannique qui a rappelé que son pays n’a pas exercé son droit de veto depuis 1989.  Il s’est ensuite engagé à ne jamais voter contre un projet de résolution crédible visant à prévenir ou à mettre fin à des atrocités de masse, faisant valoir que son pays est signataire du code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence.  Nous encourageons tous les États Membres, y compris les autres membres permanents du Conseil, à appuyer cette initiative, a-t-il ajouté. 

M. ARTAN SPASSE (Albanie) a estimé que la résolution 76/262 a permis de mieux établir les responsabilités en ce qui concerne le processus de décision des membres permanents du Conseil de sécurité.  Il a également encouragé le dialogue entre les États Membres sur des questions qui relevaient du domaine exclusif desdits membres permanents. Cette résolution joue également un « rôle dissuasif » en venant accroître la pression sur les membres dotés du droit de veto, limitant leur capacité à l’exercer, a poursuivi le délégué.  Enfin, il a indiqué que son pays fait partie du Groupe ACT et appuie l’initiative franco-mexicaine, avant de souhaiter un rôle renforcé de l’Assemblée sur les questions de paix et de sécurité internationales.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a appelé à trouver des solutions pour renforcer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Cela ne signifie pas forcément que le veto ne peut pas être utilisé, a-t-il fait valoir, tout en regrettant que l’exercice de ce droit ait souvent eu un impact sur l’équilibre des pouvoirs au niveau international et sur la capacité à prévenir les abus de pouvoir et les décisions arbitraires d’un ou plusieurs pays.  Pour le représentant, le problème du veto réside dans les motivations politiques de son exercice.  Il a évoqué les multiples veto des États-Unis et de leurs alliés sur les projets de résolution visant à mettre un terme à l’occupation israélienne des territoires arabes occupés, allant à l’encontre des principes de la Charte de l’ONU et sapant la légitimité même du Conseil de sécurité.  Il a rappelé que le veto a été utilisé pour la première fois en 1946 par la Russie sur un projet de résolution concernant l’indépendance de la Syrie et présenté par la France et le Royaume-Uni qui voulaient prolonger le mandat de leurs troupes en Syrie.  Selon le représentant, il existe de nombreux cas de figure dans lesquels le veto a été utilisé par la Russie et la Chine avec une « grande sagesse ». Il a reproché à certains membres permanents d’agir comme si le Conseil était « une entreprise dont ils seraient les membres du Conseil d’administration ».  Le représentant a précisé que la résolution 76/262 ne doit pas être interprétée comme ayant pour objectif de modifier l’équilibre délicat qui existe entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, et qu’elle ne vise pas de saper la légitimité des résolutions du Conseil, mais plutôt à pousser ses membres à redoubler d’efforts pour parvenir à un terrain d’entente pour la paix et la sécurité internationales et pour rendre ses méthodes de travail plus transparentes.  L’objectif n’est pas de faire de l’Assemblée une plateforme pour cibler un pays ou exacerber la polarisation, a-t-il martelé avant d’exprimer sa surprise face aux tentatives de certains d’élargir le mandat de l’Assemblée au détriment de celui du Conseil. 

Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a estimé que chaque jour qui passe montre que l’exercice effectif du droit de veto, et les abus qui en découlent, remettent en question son utilité même.  Face à un Conseil de sécurité qui souffre d’une profonde polarisation, elle a estimé qu’il fallait permettre à l’Assemblée générale de contribuer à la recherche de solutions réalistes et équitables.  La déléguée a affirmé que son pays soutenait la pleine mise en œuvre du code de conduite du Groupe ACT, qui appelle tous les membres du Conseil, élus et permanents, à ne pas voter contre tout projet de résolution visant à prévenir ou à faire cesser des atrocités de masse. La République dominicaine prend également en compte l’initiative franco-mexicaine visant à ce que les membres du Conseil s’abstiennent volontairement d’exercer leur droit de veto dans de telles situations.  Favorable à d’autres propositions allant dans le sens d’une limitation de l’exercice de ce droit, la déléguée a évoqué la possibilité pour l’Assemblée générale d’infirmer un veto du Conseil ou la nécessité d’avoir plus d’une voix pour pouvoir exercer le droit de veto. 

M. PRATIK MATHUR (Inde) a contesté le privilège du veto qui ne fait que perpétuer l’état d’esprit de la Seconde Guerre mondiale, à savoir que le vainqueur remporte le butin.  Si l’on veut traiter sur un pied d’égalité tous les États, les nouveaux membres permanents d’un Conseil réformé doivent également jouir du droit de veto.  Le représentant a dit ne voir aucun risque pour l’efficacité d’un Conseil élargi.  Il a aussi estimé que l’Article 27(3) de la Charte doit mener à une définition objective de l’expression « partie à un différend ».  Il nous faut une compréhension claire du concept car jusqu’ici l’exercice du droit de veto est motivé par des considérations politiques et pas par une obligation morale. 

Mme RAWA ZOGHBI (Liban)a reconnu que le veto a souvent été la première cible des critiques adressées au Conseil de sécurité, dans la mesure où le recours au veto ou la menace d’y recourir ont été un obstacle au maintien de la paix et de la sécurité.  Le Liban a donc coparrainé la résolution 76/262 adoptée par consensus il y a un an.  La représentante a été d’avis que le mécanisme établi par cette résolution représente un pas important vers le renforcement de la responsabilité et de la transparence du Conseil de sécurité.  Il renforce également le rôle et l’autorité de l’Assemblée générale, l’organe le plus universel de l’ONU.  Dans le même esprit, le Liban soutient l’initiative franco-mexicaine sur la limitation de l’exercice du droit de veto en cas de crimes de masse, ainsi que le code de conduite du Groupe ACT.  Tout en soulignant la pertinence de l’initiative de l’Assemblée, la représentante s’est dite consciente qu’elle ne mettra pas fin à l’inaction et qu’elle ne suffira pas à faire cesser les conflits et les violations quotidiennes du droit international.  Il faut faire davantage pour inciter le Conseil à agir de manière plus efficace et plus responsable, a-t-elle insisté, d’où l’urgence d’une réforme globale de cet organe.  Par les temps qui courent, il est grand temps d’œuvrer à un multilatéralisme plus efficace. 

M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a rappelé que lors de l’adoption de la résolution 76/262, les États Membres avaient réaffirmé que celle-ci ne visait pas à empiéter sur le mandat ou les prérogatives du Conseil de sécurité.  En effet, a-t-il expliqué, la question du veto est traitée uniquement dans le cadre de l’Assemblée générale conformément au mandat conféré par la Charte. Cette résolution ne sape pas les négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil et ne préjuge pas de leurs résultats, a précisé le délégué.  Par ailleurs, le Qatar adhère à l’initiative franco-mexicaine sur l’encadrement de l’exercice du droit veto en cas d’atrocités de masse, ainsi qu’au code de conduite du Groupe ACT.  En conclusion, le délégué a réitéré l’engagement de son pays envers le multilatéralisme et réaffirmé le rôle central de l’Assemblée. 

Mme SYROTA (Ukraine) a déclaré que la question du droit de veto a toujours été d’une importance particulière pour l’Ukraine et les autres États Membres qui défendent la Charte des Nations Unies et ses principes.  Or la paralysie délibérée du Conseil de sécurité par la Russie dans le cadre de sa stratégie agressive envers son pays a rendu cette question encore plus épineuse et urgente.  La représentante a noté que tous les projets de résolution que le Conseil de sécurité de l’ONU a tenté d’adopter en réponse à l’agression russe, ont été bloqués dès 2014, en raison de l’exercice abusif du droit de veto « par le pays qui occupait le siège de l’URSS au Conseil de sécurité ». Parce que seule la main levée du représentant russe contre un projet de résolution sur l’Ukraine empêche le Conseil d’exercer sa responsabilité première, nous soutenons la résolution A/76/262 et sommes un fervent partisan des initiatives visant à limiter l’exercice du droit de veto, notamment le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine.  La représentante s’est en outre dite convaincue que ce droit devrait être restreint lorsqu’un membre permanent est directement impliqué dans un conflit dont le Conseil est saisi.  Dans un tel contexte, on ne peut s’attendre à ce qu’il exerce ses droits et privilèges de manière impartiale, a-t-elle conclu. 

M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a déclaré que l’agression russe de l’Ukraine est la preuve patente de l’incapacité du Conseil à s’acquitter de son mandat, en dénonçant l’exercice abusif du droit de veto par un membre permanent.  Et avant l’Ukraine, il y a eu la Géorgie, a-t-il rappelé, indiquant qu’en 2008, « nous avons ressenti dans notre chair à quoi ressemble une incapacité du Conseil à agir ».  Il a demandé une réforme urgente du Conseil et du droit de veto.  En attendant de réels progrès dans ce domaine, nos efforts doivent viser à une revitalisation du rôle de l’Assemblée dans les cas de menaces à la paix et d’actes d’agression, sans préjudice du rôle du Conseil s’agissant du maintien de la paix, a estimé le délégué.

M. SIARHEI MAKAREVICH (Bélarus) a apporté son soutien au processus de négociations intergouvernementales en cours, dans le cadre duquel une réforme du Conseil de sécurité est à l’examen.  Modifier de manière arbitraire les modalités convenues pour les négociations intergouvernementales aurait des conséquences particulièrement néfastes pour cette réforme, autant que pour l’intégrité du système des Nations Unies, a-t-il prévenu.  Il a estimé que le mécanisme du droit de veto, qui est consacré dans la Charte des Nations Unies, est un instrument essentiel permettant de parvenir à des solutions équilibrées dont dépendent la paix et la sécurité internationales. Néanmoins, nous estimons qu’étant donné l’étape embryonnaire à laquelle se trouvent les négociations, il est prématuré de parler d’échanges directs sur la base d’un texte.  Tout vient à point à qui sait attendre, a-t-il ajouté, en exhortant tous les États Membres à la patience. 

M. MICHAEL KIBOINO (Kenya) a rappelé que son pays faisait partie des premiers à avoir soutenu l’initiative sur le veto.  Il a salué la résolution 76/262 comme un pas significatif améliorant l’efficacité du travail des Nations Unies en renforçant le rôle de l’Assemblée générale sur les questions de paix et de sécurité.  Bien que l’exercice du droit de veto n’ait pas diminué, la résolution 76/262 a rendu son recours plus couteux en imposant un droit de regard de l’Assemblée générale, a-t-il estimé.  Le délégué a toutefois noté que l’organe n’avait pas le pouvoir de contraindre les États Membres à agir et que l’efficacité de la résolution reposait donc sur leur volonté de la mettre en œuvre.  De même, le représentant a relevé que la résolution ne dispensait pas d’une réforme du Conseil de sécurité pour le rendre plus représentatif du monde actuel, rappelant au passage son appui à la position africaine commune issue du consensus d’Ezulwini. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a reconnu la pertinence de la résolution 76/262.  Néanmoins, ne perdons pas de vue que celle-ci ne sera jamais une réponse adaptée à la nécessité de la réforme du Conseil du sécurité, a dit le délégué, en pointant le manque de légitimité de ce dernier.  Il est important, a-t-il souligné, que le Conseil compte des membres permanents d’Afrique et d’Amérique latine.  Il a appuyé le code de conduite du Groupe ACT et l’initiative franco-mexicaine. Résoudre les difficultés posées par le droit de veto ne permettra de pas remédier au manque de représentativité du Conseil, a insisté le délégué.  Enfin, il a appelé à ne pas modifier l’équilibre délicat entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: les jeunes veulent que les paroles se traduisent en actes, avec des soutiens financiers et une participation dans tous les secteurs

Session de 2023, Forum de la jeunesse,
3e réunion – après-midi
ECOSOC/7123

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: les jeunes veulent que les paroles se traduisent en actes, avec des soutiens financiers et une participation dans tous les secteurs

La deuxième journée du forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC) a permis d’achever la session ministérielle qui avait pour but d’examiner comment « accélérer le relèvement après la pandémie de COVID-19 et la pleine mise en œuvre du Programme 2030 avec et pour les jeunes », avant la tenue d’une « session spéciale » sur les moyens, financiers et autres, nécessaires pour permettre aux jeunes de réaliser leur plein potentiel. 

L’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, Mme Jayathma Wickramanayake, a fait le bilan de la session ministérielle à laquelle ont participé plus de 65 ministres et 25 représentants de la jeunesse, ainsi qu’un large éventail d’organisations de la jeunesse.  Elle a recensé les sujets abordés, qui reflètent les préoccupations exprimées par rapport aux jeunes, comme les conflits, les changements climatiques, la discrimination contre les groupes marginalisés et LGBTQI, les infrastructures, l’énergie durable, les compétences, entre autres.

Pour arriver à réaliser les changements voulus, il faut un appui des gouvernements, mais aussi du secteur privé, de la société civile, des organisations internationales et de l’ONU, a-t-elle entendu au cours de la session. Les voix ont été nombreuses aussi pour demander d’intégrer les jeunes dans les processus de prises de décisions et les politiques.  « Les jeunes doivent être intégrés à tous les échelons pour que leur participation soit effective, et dans toute leur diversité », a confirmé l’Envoyée pour la jeunesse.  Elle a aussi noté les appels pour qu’ils soient en sécurité, car leur participation en dépend.  D’où l’importance de la lutte contre les atteintes aux droits humains et aux discriminations qui les touchent. 

L’Envoyée du Secrétaire général a, enfin, relevé combien l’accent a été mis sur les besoins de financement, notamment pour financer et renforcer les réseaux de la jeunesse.  Les investissements dans la jeunesse doivent aussi devenir une réalité: « les jeunes veulent que les paroles se traduisent en actes ».

Le forum de la jeunesse se poursuivra demain, jeudi 27 avril, pour sa troisième et dernière journée, à partir de 9 heures.

FORUM DE LA JEUNESSE

Session ministérielle sur le thème « Travailler avec et pour les jeunes afin d’accélérer la reprise après la COVID-19 et de réaliser le Programme 2030 »

Animée par Mme SOVANVOTEY HOK, de Global Partnership for Education Youth Leader, éducatrice au Cambodge, et M. JACOB BLASIUS, membre du Comité exécutif de Global Students Forum, représentant du forum des étudiants le plus représentatif au monde (200 millions d’apprenants), la deuxième partie de la session ministérielle, commencée hier, a tout d’abord visionné une vidéo d’un jeune brésilien engagé dans un urbanisme durable qui implique les jeunes.  Un jeune malentendant a ensuite braqué les projecteurs sur la situation que connaît une personne sur cinq dans le monde, qui vit avec ce genre de troubles. Il a appelé à élaborer des politiques pour sensibiliser sur la perte d’audition et sur ce qui peut être fait pour aider ces personnes.

Le Ministre adjoint de la jeunesse, du sport et de la culture du Botswana a plaidé pour la diversité culturelle, en expliquant ce qui a été fait dans son pays pour préserver le patrimoine culturel, avec notamment des compétitions et des festivals artistiques.  Le Gouvernement appuie financièrement ces événements, a-t-il dit en faisant valoir que les groupes ethniques voient ainsi leurs connaissances préservées.  Le Ministre du développement social et de la prospérité de la Thaïlande a participé à cette discussion par une vidéo (sans interprétation) parlant des questions de santé mentale chez les jeunes, qui bénéficient d’une attention particulière dans son pays.  La Ministre d’État de la jeunesse et de l’enfance de l’Ouganda a détaillé les résultats des efforts déployés par le pays pour mettre en œuvre l’ODD 11 (Villes et communautés durables).  Un mécanisme de coordination de la jeunesse a été créé, a-t-elle signalé en expliquant que cela permet de soutenir les initiatives des jeunes dans le développement durable notamment.  Le Ministre de la jeunesse et des sports du Venezuela a parlé des différents programmes qui permettent de soutenir les jeunes dans son pays, comme la mission Vivienda.  Il a également mentionné la tenue d’un congrès national qui a rassemblé 100 délégués élus et donné lieu à 120 propositions de politiques publiques. 

Il faut des villes résilientes et durables, a recommandé la représentante de Global Refugee Youth Network en soulignant que les jeunes réfugiés rencontrent des difficultés particulières.  Elle a aussi donné l’exemple d’une start-up sociale en Ouganda qui fabrique des produits antimoustiques bios, ce qui permet de protéger la population contre la malaria.  Cela se fait par des financements directs et des transferts en espèces.  Les jeunes ont beaucoup de savoirs et sont des personnes passionnées, a-t-elle rappelé en appelant à les soutenir.  Le Ministre de la jeunesse et du sport de Maurice, intervenant par message vidéo, a présenté des programmes de bénévoles qui permettent de répondre aux catastrophes dans son pays.  Un programme de jeunes ambassadeurs permet de former des jeunes leaders, a-t-il aussi signalé.  Le Ministre de la jeunesse, du développement et des services sociaux de la Trinité-et-Tobago a vanté les mérites de son projet agricole pour la jeunesse qui forme les jeunes dans ce domaine pendant un an, à temps plein.

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la sécurité routière a attiré pour sa part l’attention sur le rôle que jouent les jeunes dans la promotion d’une mobilité plus sûre.  Il a salué ce que fait à cet égard la Coalition mondiale de la jeunesse pour la sécurité routière.  La Ministre d’État de la jeunesse et de l’entrepreneuriat du Tchad a alerté sur la nécessité urgente de prendre des mesures pour la tranche importante de la population de son pays, soulignant que la jeunesse est une force et une potentialité.  Pendant la pandémie de COVID-19, les mouvements de jeunes ont été mobilisés pour les campagnes de sensibilisation, a-t-elle illustré.  Le Malawi a parlé des efforts déployés pour la restauration de forêts et la production d’aliments sûrs, qui sont des investissements pour les jeunes, de même que les enseignements en technologie, informatique et ingénierie pour les jeunes filles.

Une vidéo a ensuite été montrée sur le projet Transcultura, mené par l’UNESCO avec l’appui de l’Union européenne, qui aide les jeunes à réaliser leurs projets culturels.  « Transcultura, pour moi, c’est de l’espoir », a-t-on entendu dans la bouche d’un jeune francophone témoignant dans cette présentation.  Un représentant de la société civile s’est félicité de ce qui est fait à travers son organisation, qui offre un programme de mentorat et de bénévolat.  Il a encouragé à regarder de façon plus attentive « nos pays et nos organisations », tous les systèmes qui permettent de mettre en valeur le potentiel des jeunes.  La Ministre du développement durable du Panama, dans un message vidéo, a dit travailler de façon intersectorielle avec la société publique et privée et les organisations internationales afin que la société et les jeunes puissent pleinement se développer.  La Colombie a rappelé la tenue pendant la pandémie d’une manifestation dans la rue qui a permis aux jeunes de réclamer un pays plus égal.  Elle a dit que la conservation de la forêt amazonienne nous incombe à tous, avant de parler d’un programme dédié à l’emploi des jeunes.  La Croatie a, elle, un programme pour aider les jeunes pour tous leurs problèmes spécifiques.

Le Vice-Ministre de la jeunesse et du sport de l’Ouzbékistan, pays qui compte 20 millions de jeunes, a informé de l’existence d’un parlement des jeunes où ils peuvent envoyer des messages au Parlement pour élaborer de nouvelles lois.  Nous avons ajouté les droits des jeunes à la Constitution, a-t-il aussi signalé.  Il est essentiel d’adopter des mesures politiques appropriées, les jeunes ayant besoin de voir que leurs voix sont entendues et que leurs opinions comptent, a déclaré la Ministre des affaires familiales, des personnes âgées et des jeunes de l’Allemagne qui a dit avoir ainsi créé une alliance pour les jeunes générations qui rassemblent des personnalités des médias, de la culture, du sport, de la politique, des administrations et d’autres secteurs.  Avec l’initiative « Les jeunes qui bâtissent l’avenir », le Mexique a réaffirmé son engagement pour que les jeunes aient davantage d’impact sur les politiques nationales et internationales.  L’âge pour être député a été baissé, a ajouté le délégué de la jeunesse mexicaine.

Le représentant de l’Agence fédérale des affaires des jeunes de la Fédération de Russie, dans un message vidéo, a signalé le lancement l’an dernier d’un concours pour les jeunes qui peuvent ainsi gagner des financements pour mener à bien leurs projets.  « Nous ensemble », action lancée pendant la pandémie, rassemble maintenant des millions d’utilisateurs, a-t-il aussi indiqué.  Le délégué a annoncé l’organisation d’un festival de la jeunesse mondiale en Russie au printemps 2024 pour rassembler les jeunes du monde entier autour de valeurs traditionnelles, des jeunes de 180 pays étant attendus.  La Vice-Ministre de la jeunesse, des femmes et des personnes handicapées d’Afrique du Sud, a dit travailler pour parvenir à une plus grande inclusion économique des jeunes, à travers l’ODD 8(Travail décent et croissance économique). Pour Singapour, le représentant du Conseil des jeunes a dit œuvrer afin de donner des compétences aux jeunes, avec le soutien notamment du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  La jeune déléguée singapourienne a ajouté que son organisation a mis en place des systèmes de mentorats pour les minorités. 

La Ministre de la jeunesse, des sports et des loisirs du Zimbabwe a dit travailler à la réalisation de tous les ODD en partenariat avec l’ONU.  Plusieurs programmes ont ainsi été mis sur pied, avec un budget de 524 millions de dollars, ciblant les réfugiés, les migrants et les agriculteurs.  Un message vidéo du Ministre de la jeunesse et des sports de l’Égypte a notamment mis l’accent sur le soutien à apporter aux jeunes entrepreneurs.  La Gambie a témoigné de ses efforts pour que les jeunes participent à la vie politique et pour les faire participer à la restauration de l’environnement pour faire face aux changements climatiques.  Cela se fait notamment par la formation des agriculteurs.  Une étudiante en droit international au Cap (Afrique du Sud) a fait valoir les bienfaits des ateliers organisés par le réseau auquel elle appartient pour former les jeunes.  Elle a aussi parlé de ce qui est fait dans son pays pour planter des bambous afin de protéger les établissements scolaires et les logements.

Concluant cette session ministérielle tenue sur deux jours, l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, a dénombré plus de 65 ministres et 25 représentants de la jeunesse, ainsi qu’un large éventail d’organisations de la jeunesse.  Leur participation démontre que toutes les régions et tous les secteurs sont intéressés à faire avancer l’implication des jeunes, a-t-elle salué.  Elle a recensé les sujets abordés, qui reflètent les préoccupations exprimées par rapport aux jeunes, comme les conflits, les changements climatiques, la discrimination contre les groupes marginalisés et LGBTQI, les infrastructures, l’énergie durable, les compétences, etc.  Pour arriver à réaliser les changements voulus, il faut un appui des gouvernements, mais aussi du secteur privé, de la société civile, des organisations internationales et de l’ONU, a-t-elle entendu au cours de la session. Il faut aussi intégrer les jeunes dans les processus de prises de décisions et les politiques.  Les jeunes doivent être intégrés à tous les échelons pour que leur participation soit effective, et dans toute leur diversité, a-t-elle précisé. Ils doivent pour cela être en sécurité, a-t-elle relevé en appelant à lutter contre les atteintes aux droits humains et aux discriminations qui les touchent.  L’Envoyée du Secrétaire général a, enfin, mis l’accent sur les besoins de financement qui ont été exprimés dans la discussion: il faut notamment financer et renforcer les réseaux de la jeunesse.  Les investissements dans la jeunesse doivent aussi devenir une réalité: les jeunes veulent que les paroles se traduisent en actes.

Session extraordinaire: Financer notre avenir (ODD 17)

Cette session spéciale, animée par Mme MARIA RODRIGUEZ, Présidente du Forum européen de la jeunesse, était focalisée sur les moyens financiers et autres nécessaires pour mettre en œuvre le Programme 2030 en vue de permettre aux jeunes de réaliser leur plein potentiel. Les intervenants se sont penchés sur des questions telles que l’emploi des jeunes, l’inclusion et les partenariats d’impact.  La session a commencé par une courte vidéo d’un jeune de Türkiye qui a expliqué les raisons de son engagement dans la lutte contre la pollution qui affecte les plages de son pays.

Les solutions des jeunes pour l’emploi

Mme SUSANA PUERTO, Coordonnatrice de l’ Initiative mondiale en faveur de la création d'emplois décents pour les jeunes à l’Organisation internationale du Travail (OIT), a relevé que les deux tiers des jeunes qui se lancent dans le monde de l’emploi manquent de compétences appropriées.  Les jeunes femmes ont deux fois plus de probabilité d’avoir des lacunes, et cela nuit à leurs perspectives socioprofessionnelles.  Elle a appelé à établir des partenariats pour accompagner les jeunes, en tant qu’acteurs de changement dans la société.  Justement, les scouts préparent les jeunes au monde de l’emploi en les aidant à développer des compétences qui leur serviront tout au long de la vie, a affirmé Mme MARIA FLORENCIA CAGLIERO, de l’Organisation mondiale du mouvement scout.  Ainsi, 57 millions de jeunes ont pris part à de tels programmes à travers le monde.

À son tour, Mme KIRSTY COVENTRY, Ministre de la jeunesse, des sports, des arts et des loisirs du Zimbabwe, a évoqué des programmes aidant les jeunes à entreprendre et à s’appuyer sur des initiatives de mentorat.  Au Paraguay également, des programmes sont mis en place pour aider les jeunes à se former avant d’entrer dans le monde du travail, a indiqué M. EDGARD COLMÁN, Ministre et Secrétaire national à la jeunesse du Paraguay.  M. JOÃO PAULO CORREIA, Secrétaire d’État à la jeunesse et aux sports du Portugal, a souligné que ce sont les jeunes qui ont été les plus affectés par la pandémie de COVID-19.  C’est pourquoi l’Union européenne a déclaré 2022 « Année européenne de la jeunesse ».  Il a appelé à investir davantage dans l’éducation, afin de réduire la proportion de jeunes qui ne sont ni en formation ni au travail.

Mme KAI LIU, Vice-Secrétaire générale de la Fédération nationale des jeunes de la Chine, a expliqué que la Fédération a aidé 70 000 jeunes à trouver un emploi l’année dernière.  Beaucoup d’autres ont créé leur propre entreprise et bénéficient de programmes de mentorat.  Des concours sont organisés pour primer les meilleures idées entrepreneuriales.  Il faut faire attention aux chiffres officiels sur le chômage des jeunes, a mis en garde Mme MARÍA FERNANDA TANDAZO GONZÁLEZ, fondatrice de Destellos de Luz de l’Équateur.  Intervenant par visioconférence, elle a expliqué qu’un projet de son organisation a permis de constater que 50% de jeunes ruraux dans le pays n’ont pas d’emploi et se sentent exclus. 

Les solutions des jeunes pour l’inclusion

De l’emploi à l’inclusion, il n’y a qu’un pas que les intervenants suivants ont franchi.  M. LËMNEC TILLER, fondateur de Wayuuda (Colombie), a expliqué que son organisation œuvre à construire des écoles ou à la fourniture d’eau potable dans les communautés autochtones de la Colombie.  Si une personne peut agir sur la vie des peuples, alors imaginons ce que des milliers de gens en synergie peuvent faire, a-t-il lancé.  Mme DAISRY OBAL, Conseillère sur les questions de jeunesse et d’entrepreneuriat à la présidence de la Namibie, a salué le fait que leur plaidoyer a permis d’inclure davantage de jeunes dans les postes à responsabilité dans le pays.  Les jeunes en Gambie sont également impliqués dans les processus de prise de décisions, a renchéri M. LAMIN DIBBA, Représentant permanent de la Gambie auprès des Nations Unies.  Il a souligné que le Gouvernement accompagne les jeunes dans la création d’entreprises. Les jeunes n’ont pas besoin d’experts pour leur dire ce qu’ils doivent faire, a relevé Mme SARAH MATEKE, Ministre d’État chargée de la jeunesse et de l’enfance de l’Ouganda. Elle a expliqué qu’ils sont les mieux informés et les mieux outillés pour investir dans leur développement et qu’il faut juste leur offrir des opportunités.  Il ne faut pas oublier les jeunes défavorisés comme les migrants, a plaidé M. JURRIAAN MIDDLEHOFF, Ambassadeur pour la jeunesse, l’éducation et le travail des Pays-Bas.  Il a averti que le monde ne parviendra pas aux ODD sans l’implication des jeunes. 

Militante de la cause des jeunes femmes et filles du Kenya, Mme DIANA KIMOJINO, fondatrice de Nailepu Girls’ Empowerment Programme (Kenya), a déploré le mariage précoce des filles par leurs familles.  On nous rappelle que l’éducation est la clef du succès, mais chez nous, des jeunes filles abandonnent l’école au secondaire, a-t-elle déploré.  C’est la raison d’être de la fondation qu’elle a créé afin de donner une chance aux filles d’aller au-delà du secondaire et de se donner une chance de réussir dans la vie. M. RAHUL ANTAO, spécialiste de la jeunesse rurale et de l’intégration sociale au Fonds international de développement agricole (FIDA), a expliqué que son organisation donne également le change aux jeunes ruraux qui peuvent participer eux-mêmes à l’élaboration de programmes qui leur sont destinés.  L’ambition est de les accompagner par des partenariats multipartites, a-t-il indiqué. 

Des partenariats fructueux

Il ne faut pas créer de politiques publiques sans intégrer les jeunes au processus de prise de décisions, a noté d’emblée le Directeur général de l’Institut pour le développement de la jeunesse de l’État de Guanajuato, au Mexique, M. ANTONIO DE JESUS NAVARRO PADILLA.  Cet institut investit pour renforcer les capacités des jeunes au moyen notamment d’une approche intersectorielle et d’une stratégie d’internationalisation qui ont permis d’aider plus de 11 000 jeunes à intégrer le marché du travail. 

Après avoir représenté les jeunes au G20 il y trois ans, M. OTHMAN ALMOAMAR, l’Expert principal du Ministère de l’économie et de la planification de l’Arabie saoudite, a fait de l’appui à la jeunesse sa priorité en coopérant à l’élaboration, d’ici à 2025, d’une feuille de route soulignant les engagements du Royaume pour appuyer les jeunes sur les plans national et international via divers programmes. 

La cofondatrice de Nara Synergy, Mme ANGELINE CALLISTA, a estimé pour sa part qu’il nous faut des actions fondées sur la coopération à tous les niveaux de la société.  C’est pourquoi elle a créé une entreprise sociale dont le but est de nouer des partenariats permettant de transformer le secteur de la gestion des déchets en Indonésie, tout en autonomisant les communautés marginales, les femmes et les jeunes.  Elle a ainsi été à même de constater la « puissance transformatrice » des partenariats pour porter les espoirs des jeunes. 

Dans cette optique, les demandes de financement doivent cibler les conglomérats plutôt que les ONG sans moyens, a estimé M. AHMED ELSABAGH, point de contact pour la gouvernance au Moyen-Orient et en Afrique du Nord du Groupe majeur pour l’enfance et la jeunesse.  Il a invité le secteur privé à investir dans les projets portés par la jeunesse, en appelant les gouvernements et les banques centrales à aller au-delà du PIB et à adopter des approches multipartites fondées sur l’innovation. 

Si la technologie peut transformer des vies et les compétences techniques créer des emplois, Mme LYDIA LOGAN, Vice-Présidente de l’éducation mondiale et du développement de la main-d’œuvre chez IBM, a reconnu qu’il existe des écarts de compétence importants parmi les populations vulnérables. Elle a donc créé un programme qui offre des cours gratuits aux populations sous-représentées en 20 langues, en se concentrant sur les partenariats. 

Pour profiter des innovations crées par les jeunes, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la technologie, M. AMANDEEP SINGH GILL, a considéré que le Sommet de l’avenir représente l’occasion idoine. À ses yeux, les jeunes sont au cœur des thèmes de ce sommet, tandis que les partenariats et l’inclusion y occuperont une place de choix.  Selon lui, nous devons investir dans les compétences transdisciplinaires et encourager l’apprentissage continu afin d’affiner les compétences des jeunes selon les besoins du monde du travail.  Nous devons également faire en sorte que les différentes expériences pour la transition démographique dans le monde soient prises en compte, en gérant au mieux le vieillissement de certaines sociétés et le rajeunissement d’autres. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité de l’information achève son débat général sur des appels à combler le fossé numérique et à préserver l’intégrité de l’information en ligne

Quarante-cinquième session
4e séance – matin
PI/2311

Le Comité de l’information achève son débat général sur des appels à combler le fossé numérique et à préserver l’intégrité de l’information en ligne

Le Comité de l’information a conclu, ce matin, son débat général consacré à l’examen des activités du Département de la communication globale (DCG) par des appels répétés à combler la fracture numérique entre le Nord et le Sud et à préserver l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques. 

De nombreuses délégations se sont inquiétées du fossé numérique qui continue de se creuser entre pays développés et en développement à mesure que se développe la technologie numérique, à l’instar de l’Algérie selon qui les disparités numériques constituent une nouvelle forme d’inégalité entre les États qui appelle à des mesures concertées de la part de la communauté internationale. 

Cette fracture technologique, symptôme d’un manque d’infrastructures numériques dans certains États, est devenue un obstacle majeur à la croissance économique et au développement social de nombreux pays, a renchéri la République de Corée qui s’est engagée à intensifier les partages de technologies et de données numériques avec les pays émergents.  Le Maroc a de son côté appelé à réduire l’écart technologique afin de permettre à l’ensemble du public mondial d’être informé sur le travail des Nations Unies, notamment par le biais de moyens de communication classiques tels que la télévision et la radio. 

Le partenariat conclu entre le Département, Google et YouTube constitue pour l’Italie une initiative « historique » permettant de diffuser des informations et des données scientifiques sur des sujets cruciaux tels que les changements climatiques.  La République de Corée a salué pour sa part les approches créatives adoptées par le DCG pour atteindre les jeunes, grâce à la collaboration avec des influenceurs et des entreprises privées.  De son côté, le Liban a recommandé d’établir des politiques coordonnées entre les secteurs public et privé, en mettant l’accent sur la sensibilisation et l’autonomisation technologique des personnes, tout en veillant au respect de la liberté d’expression et au libre accès à l’information.   

Aujourd’hui encore, la menace de la désinformation et mésinformation a retenu l’attention des délations qui ont largement approuvé le projet de création d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  La campagne Verified a également été saluée à plusieurs reprises.  Dans un monde où le public doit faire la distinction entre les nouvelles fallacieuses et les informations fiables, l’ONU doit continuer à fournir des informations objectives en adaptant son message aux nouveaux outils et formats, mais sans laisser de côté les larges segments de la population qui n’ont pas encore accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, a estimé l’Argentine. 

Premier contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix de l’ONU dans le groupe occidental, l’Italie s’est préoccupée du fait que 70% des soldats de la paix ont déclaré que la désinformation avait eu un impact sur leur travail en 2022, le Royaume-Uni s’alarmant de surcroît des menaces visant les Casques bleus au Mali et en République démocratique du Congo (RDC) suite à la diffusion d’informations mensongères.  Face à cette situation, l’Inde a demandé au DCG de collaborer avec les missions de paix sur le terrain et d’adapter ses stratégies de communication en conséquence, le Maroc saluant pour sa part la campagne « Service et sacrifice » qui met en exergue l’action des soldats de la paix ainsi que la contribution des pays fournisseurs de contingents. 

La délégation britannique a en outre accusé la Fédération de Russie d’instrumentaliser les Nations Unies pour diffuser sa propagande, y compris lors de réunions du Conseil de sécurité qui sont exploitées comme une plateforme pour promouvoir « les théories du complot les plus folles ».  En réponse, la Fédération de Russie a appelé à renoncer aux « slogans antirusses » et à se concentrer sur les travaux de fond du Comité. 

Le Comité de l’information se réunira de nouveau jeudi 4 mai pour examiner son rapport.

DÉBAT GÉNÉRAL (SUITE ET FIN)

Déclarations

M. OMAR KADIRI (Maroc) s’est félicité de l’augmentation de 4% du nombre de visites sur les sites de l’ONU entre juillet et novembre 2022, qui illustre la qualité du travail du DCG.  Il a reconnu l’apport du Département pour diffuser des informations fiables sur la promotion des actions des Nations Unies en faveur de la paix et de la sécurité, du développement durable et des changements climatiques.  Le représentant a également apprécié les efforts déployés pour diffuser des contenus dans les six langues officielles de l’ONU.  La montée de la désinformation souligne selon lui le besoin d’une information objective et de développer des instruments de vérification de l’information tels que les initiatives Verified et Together .  Le représentant a également salué la campagne « Service et sacrifice », notant que les Casques bleus déployés dans le cadre d’opérations de maintien de la paix des Nations Unies continuent de faire face aux effets dévastateurs de la désinformation.  Après avoir appelé à renforcer le multilinguisme, corolaire du multilatéralisme, le délégué a jugé essentiel de ne pas laisser pour compte les pays en développement dont les capacités numériques restent limitées.  Il a notamment exhorté à s’attaquer à l’écart qui subsiste entre les pays du Nord et du Sud afin de permettre à l’ensemble du public mondial d’être informé sur le travail de l’ONU, notamment par le biais de moyens de communication classiques tels que la télévision et la radio.

M. NITISH BIRDI (Inde) a souligné que le bon fonctionnement de la démocratie dépend de l’accès de tous à l’information.  Il a appelé à se montrer attentif aux campagnes de désinformation et de mésinformation lancées sur les médias sociaux et les médias de masse dans le but de saper la paix et l’harmonie dans les sociétés.  Pour lutter contre ce fléau, nous avons besoin d’un partenariat entre les étudiants et les jeunes, les journalistes, les influenceurs et le DCG, a estimé le représentant.  Il a ensuite expliqué que l’Inde a réussi à combler le fossé numérique et que les dépenses consacrées aux secteurs des technologies de l’information et des télécommunications ont été multipliées par six au cours des neuf dernières années, précisant que les connexions à Internet ont augmenté de 232% et les connexions à large bande de plus de 1 200% au cours de la même période. 

Poursuivant, le délégué a remercié le DCG pour ses efforts visant à promouvoir le multilinguisme, notamment le compte en hindi des Nations Unies sur les médias sociaux, qui a suscité un engouement massif.  Rappelant que les habitants de cette planète rêvent, lisent, entendent, et échangent dans des langues autres que les six langues officielles de l’ONU, il a encouragé le Département à renforcer ses efforts de sensibilisation dans des langues autres que les langues officielles et d’adopter une approche plus proactive dans la diffusion d’informations en hindi.  Sur un autre volet, il a apprécié le lancement de la campagne de communication visant à faire connaître le service et le sacrifice des soldats de la paix des Nations Unies, ainsi que la contribution des pays fournisseurs de contingents.  À ce sujet, le délégué a souligné l’importance de la sécurité des Casques bleus et a demandé instamment au DCG de collaborer avec les missions sur le terrain et d’adapter ses stratégies de communication en conséquence.  Relevant par ailleurs que la pression exercée sur ses ressources financières oblige le DCG à rechercher des moyens novateurs de collecter des ressources au-delà des allocations budgétaires, il s’est félicité du partenariat établi entre l’Inde et le Département pour consolider les nouvelles et le contenu multimédia en hindi sur le site d’ONU Info. 

Mme BRUNA MARA LISO GAGLIARDI (Brésil) a, elle, insisté sur l’importance du multilinguisme, la diversité étant de la plus haute importance dans l’approche de l’information publique qui doit prévaloir au sein du Département.  Elle l’a encouragé à continuer de diffuser les idéaux et activités de l’Organisation dans autant de langues que possible, en tenant compte de la diversité linguistique entre les pays et de leurs degrés de développement numérique respectifs.  Alors que le portugais à lui seul est la langue officielle d’environ 260 millions de locuteurs dans le monde et la plus parlée de l’hémisphère Sud, le représentant a rappelé que son pays est attaché au travail d’ONU Info en portugais: « nous sommes fiers qu’ONU Info ait récemment interviewé la première autochtone à être nommée ministre au Brésil, Mme Sônia Guajajara, qui est venue à New York pour participer à l’Instance permanente sur les questions autochtones ».  Le Brésil, a-t-il dit, se réjouit de contribuer à la création d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information en ligne.  Le délégué a également souhaité que le DCG dispose d’un personnel diversifié et multilingue pour être en mesure de diffuser des informations précises, claires, et accessibles en temps opportun sur toutes les plateformes des Nations Unies.

M. MOHAMMAD ALI JARDALI (Liban) a estimé que l’équité vaccinale doit demeurer au centre des communications de l’ONU, la COVID-19 continuant de représenter une menace pour certains pays.  Il faut également sensibiliser les populations aux défis créés par les changements climatiques et les moyens de les contrer à tous les niveaux. Relevant que ces défis peuvent culminer en des guerres « internes » et régionales, il a appelé à contrer de manière décisive la mésinformation et la désinformation qui entravent les efforts de lutte contre les changements climatiques.  En la matière, l’ONU, en tant que source d’information scientifique et factuelle fiable et multilingue, devrait être en mesure d’en faire davantage, a-t-il affirmé.  Le représentant s’est inquiété de la propagation d’informations fallacieuses, relevant que les États, l’ONU, les médias et les conglomérats de médias sociaux ont encore beaucoup à faire pour combattre ce danger et sensibiliser sur les risques.  Il a recommandé d’établir des politiques coordonnées entre les secteurs public et privé, et de mettre l’accent sur la sensibilisation et l’autonomisation technologique des personnes, tout en veillant au respect de la liberté d’expression et d’opinion, du libre accès à l’information et de la liberté de la presse.  Faisant ensuite part de son appui au programme d’information spécial sur la question de Palestine, le délégué s’est félicité du changement de nom du programme de formation des journalistes palestiniens en hommage à la journaliste Shireen Abu Akleh. 

M. MOHAMED KAMAL ALI ELHOMOSANY (Égypte) a souligné le rôle des TIC et des médias sociaux dans la communication.  Préoccupé par les risques réels de désinformation, il a soutenu les efforts consentis par le DCG dans la lutte contre ce problème.  Le représentant a également appelé à apporter les ressources nécessaires aux centres d’information des Nations Unies (CINU) et à travailler en concertation avec les pays hôtes de ces centres avant de réduire leurs budgets.  Il a insisté sur l’importance du multilinguisme pour faire entendre la voix de l’Organisation, avant de mettre en avant le potentiel des CINU pour le promouvoir, en particulier sur le terrain.  Le délégué a par ailleurs souligné que l’élaboration d’un code de conduite mondial pour promouvoir l’intégrité de l’information publique, doit se faire dans le cadre de consultations intergouvernementales.

Mme JUNG JIN HO (République de Corée) a salué les approches créatives adoptées par le DCG pour atteindre un public plus large, notamment les jeunes, grâce à la collaboration avec des influenceurs et des entreprises privées telles que Google.  Il est en effet essentiel de mieux faire comprendre au public le travail de l’ONU ainsi que ses priorités, principes et activités.  Toutefois, a-t-elle relevé, à mesure qu’augmente la dépendance à l’égard de la technologie numérique, les préoccupations concernant la fracture numérique vont croissantes, celle-ci représentant un obstacle majeur à la croissance économique et au développement social.  Le Gouvernement de la République de Corée s’est donc engagé à partager davantage de technologies et de données numériques avec les pays en développement. Selon la déléguée, la mésinformation et la désinformation affectent toutes les questions auxquelles s’intéresse l’ONU, faussant le processus d’élaboration des politiques publiques ainsi que la réponse aux situations d’urgence.  Elle a félicité à cet égard le DCG d’avoir mené de solides campagnes de « contre-désinformation », tout en l’exhortant à intensifier sa lutte contre ce fléau et la menace qu’il fait planer sur la liberté d’expression sur Internet.  Elle a également réaffirmé son appui à l’objectif d’élaborer un code de conduite concernant l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.

Mme MA YUANCHUN (Chine) a appelé le DCG à mettre en exergue le programme de l’ONU et refléter les nombreuses initiatives attendues cette année sur le développement, comme le Sommet sur les ODD.  Il doit en outre être professionnel dans son travail et renforcer les consultations avec les États Membres afin de présenter des informations exactes et impartiales tout en luttant contre la désinformation et les discours de haine, a-t-elle ajouté.  Pour parvenir à un code de conduite universellement accepté, le Département doit promouvoir l’ouverture et la transparence tout en accordant la priorité aux contributions des États Membres et en tenant compte de l’environnement médiatique ainsi que du niveau de développement technologique des États.  Elle a appelé à promouvoir davantage le multilinguisme, notant que selon le rapport du Secrétaire général, le site chinois de l’ONU a enregistré le plus petit nombre d’utilisateurs alors que le nombre de sinophones sur Internet ne cesse d’augmenter.  Elle a invité le Département à allouer davantage de ressources pour atteindre le public chinois.

Mme MARIA LUDOVICA MURAZZANI (Italie) a salué le travail « visionnaire » du DCG au cours des dernières années pour faire en sorte que l’ONU se démarque en tant que source d’information fiable pour les citoyens du monde entier.  Elle a particulièrement apprécié la mise en œuvre de campagnes « vitales » telles que Verified , destinée à contrer la désinformation et la mésinformation en ligne. Le partenariat conclu entre le Département, Google et YouTube est à ses yeux une initiative historique permettant de diffuser des informations et des données scientifiques sur des sujets cruciaux tels que les changements climatiques.  Cette année, a poursuivi la déléguée, une communication efficace et multilingue sera cruciale pour atteindre un public mondial à l’approche d’événements de haut niveau tels que le Sommet sur les ODD.  Elle a souhaité qu’une activité de sensibilisation similaire permette de jeter les bases d’autres réunions importantes telles que l’événement de haut niveau pour soutenir la réponse humanitaire dans la Corne de l’Afrique, prévu en mai, ou encore la quatrième Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement (PEID), qui aura lieu en 2024. La représentante a exprimé son appui à l’élaboration d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques, se disant déterminée à lutter contre la désinformation.  En tant que premier contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix de l’ONU dans le groupe occidental, l’Italie est préoccupée du fait que 70% des soldats de la paix ont déclaré que la désinformation avait eu un impact grave, critique ou modéré sur leur travail en 2022.  Alors que la liberté de presse continue d’être mise à mal, la représentante s’est dite gravement préoccupée par le nombre croissant de journalistes tués ou blessés lors de la guerre menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Elle a encouragé, en terminant, le DCG à poursuivre ses efforts pour diffuser des informations dans les langues non officielles de l’Organisation, et salué le travail effectué par le centre d’information des Nations Unies compétent pour l’Italie. 

M. MUNGO WOODIFIELD (Royaume-Uni) a relevé que plus de 5 milliards de personnes ont accès à Internet, un outil d’information essentiel pour la communication et l’éducation.  Cependant, la désinformation en ligne se répand à une vitesse alarmante, déformant l’opinion des gens sur des questions allant des soins de santé aux changements climatiques.  Et lorsque la désinformation en ligne s’infiltre hors ligne, les conséquences réelles peuvent être graves, a-t-il mis en garde, s’inquiétant des menaces visant les Casques bleus de l’ONU au Mali et en RDC suite à la profération de mensonges sur leur travail.  

Le représentant a également accusé le Kremlin d’utiliser des « opérations d’information » pour saper la souveraineté de l’Ukraine, déshumaniser le peuple ukrainien, dissimuler des crimes de guerre et justifier sa guerre illégale.  À maintes reprises, la Russie a aussi tenté d’utiliser les Nations Unies pour diffuser sa propagande, y compris dans les réunions du Conseil de sécurité qui sont exploitées comme une plateforme pour promouvoir les théories du complot les plus folles sur les armes biologiques et des provocations mises en scène, a-t-il dénoncé. Alors que la désinformation prend de l’ampleur, il est plus important que jamais de disposer d’informations correctes, fiables et accessibles, a insisté le délégué, soulignant qu’un journalisme indépendant, diffusé librement et sans crainte, est essentiel au bon fonctionnement de la société et à la réalisation des idéaux de la Charte des Nations Unies.  Alors que la désinformation prolifère et peut être catalysée de manière exponentielle par l’intelligence artificielle, il devient impératif que les entreprises de médias sociaux et la société civile soient associées aux efforts de lutte contre la désinformation, a-t-il ajouté. 

M. EVGENY SHAEV (Bélarus) a noté avec satisfaction qu’en dépit de ressources limitées, le DCG a réussi à augmenter le volume de ses publications et à élargir l’audience de ses plateformes médiatiques, en partie grâce à la promotion du multilinguisme.  Il a cependant noté une approche « sélective » des sujets couverts par le Département alors que des questions importantes telles que la sécurité alimentaire et l’impact des mesures coercitives unilatérales sur la situation humanitaire sont progressivement « évincées ».  Le représentant a dénoncé la politique injuste et hypocrite de certains d’États occidentaux qui tentent de créer des « foyers de chaos contrôlé » à l’encontre de pays uniquement coupables d’avoir défendu leurs intérêts nationaux.  Certains documents publiés sur le site officiel de l’ONU, y compris l’initiative Verified, contribuent selon lui à une « perception déformée de la situation réelle » et pourraient se transformer en instruments de propagande et d’incitation à la haine.  Le projet de code de conduite sur les plateformes numériques est pertinent à cet égard, a-t-il considéré, en espérant que l’inclusion d’algorithmes d’évaluation des ressources médiatiques empêchera le blocage aveugle de certains sites, tels que ceux du Gouvernement du Bélarus, dont l’accès est limité aux États-Unis.  Il a ensuite regretté que certains pays, en particulier les pays baltes, tentent d’utiliser le Comité pour diffuser des slogans de propagande , s’insurgeant qu’un criminel du Troisième Reich soit cité dans une enceinte de l’ONU, « quel que soit le contexte ». 

M. KIM IN CHOL (République populaire démocratique de Corée) a dénoncé l’utilisation abusive par certains pays des technologies de l’information et des communications dans la poursuite de leurs « sinistres objectifs politiques », au lieu de les rendre disponibles pour réduire le fossé sans cesse croissant entre pays développés et pays en développement.  Il a demandé au Comité de l’information de prendre des mesures urgentes pour rendre les activités internationales d’information propices à la promotion de la paix et de la sécurité mondiales, au développement durable ainsi qu’à un progrès social « sain ».  Pour ce faire, la priorité doit être accordée aux moyens d’établir un nouvel ordre international équitable de l’information et de la communication, pour faire contrepoids au « monopole » des technologies par les États-Unis et les pays occidentaux.  Ceux-ci profitent selon lui de leurs avantages pour imposer leurs valeurs et pour diffuser de la désinformation à l’encontre d’autres pays, comme par exemple, Radio Free Asia.  Il s’agit d’une guerre ouverte de l’information et d’une guerre psychologique contre d’autres pays , a-t-il dénoncé.  Le représentant a appelé à aider les pays en développement à améliorer leurs capacités en matière d’information et de communication, notamment au moyen de transferts technologiques et de la formation des journalistes.  Il a également exprimé sa « profonde préoccupation » face à l’attitude « partiale » du Secrétariat de l’ONU concernant les capacités de défense de la RPDC, qui s’éloigne selon lui des principes d’impartialité et d’équité.

M. ISMAÏL MERABET (Algérie) a dit apprécier les efforts déployés par le DCG concernant, entre autres, sa réponse à la pandémie, sa communication de crise, ses campagnes de communication sur le développement durable, l’action pour le climat ainsi que ses initiatives concernant l’Afrique, dont le magazine numérique Afrique Renouveau.  Il a mis l’accent sur la nécessité de lutter contre les nouvelles fallacieuses et la désinformation sur les plateformes en ligne, par l’entremise d’une action collective, dans laquelle le Département pourrait jouer un rôle de premier plan.  Il faut fournir, en permanence et en temps opportun, une information factuelle, précise, ciblée, accessible, en plusieurs langues, impartiale et vérifiée sur toutes les plateformes et publications du DCG, a-t-il insisté.  Le représentant a par ailleurs encouragé le DCG à redoubler d’efforts pour mobiliser des ressources adéquates afin de promouvoir le multilinguisme dans toutes ses publications et plateformes.  « Dans ce contexte, nous sommes également d’avis que davantage peut être fait pour accroître l’utilisation de la langue arabe », a-t-il précisé. 

Le représentant s’est dit ensuite préoccupé par les disparités numériques qui apparaissent comme une nouvelle forme d’inégalité entre et parmi les États, estimant que la communauté internationale devrait prendre les mesures nécessaires pour corriger ces déséquilibres.  Il a dit être préoccupé par les menaces que peuvent faire peser les technologies de l’information et de la communication lorsqu’elles sont utilisées à des fins criminelles.  L’Algérie, a-t-il précisé, contribue de manière significative aux efforts en cours visant à élaborer une convention internationale globale sur la lutte contre le détournement des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles.

M. MAXIMILIANO JAVIER ALVAREZ (Argentine) s’est alarmé de la montée en puissance de la désinformation et de la haine.  Dans un monde où le public doit faire la distinction entre les nouvelles fallacieuses et les informations fiables, l’ONU doit continuer à fournir des informations objectives en adaptant son message aux nouveaux outils et formats, mais sans laisser de côté les larges segments de la population qui n’ont pas encore accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication.  L’ONU doit se positionner comme une source d’informations fiables au service du bien public mondial, a-t-il estimé, et comme un outil de lutte contre la désinformation dans différents domaines, tels que les changements climatiques et les discours de haine. 

Soulignant que le multilinguisme est une valeur fondamentale des Nations Unies, il a appelé le DCG à passer d’une « culture de la traduction » qui prend l’anglais comme langue de base, à une véritable « culture multilingue ».  Cela implique que les spécificités de chaque langue soient prises en compte à tous les stades de la communication, dès la conception des campagnes et des contenus. Il a noté que le manque de ressources représente le principal défi pour appuyer le multilinguisme et a demandé au Secrétariat d’en tenir compte lors de l’allocation interne des ressources existantes. Les allocations budgétaires ne peuvent et ne doivent pas s’écarter du principe selon lequel les six langues officielles ont un droit égal à bénéficier des ressources allouées au Département, a-t-il souligné.  Il a salué le partenariat avec les centres d’information d’Amérique latine, y compris le centre de Buenos Aires, pour produire un contenu qui traite des questions liées à l’agenda mondial de l’ONU en mettant l’accent sur les contributions et les défis des pays de la région.  Il s’est également félicité de l’augmentation continue des consultations en espagnol sur le site Web et les médias sociaux de l’ONU, et a exhorté le Secrétariat à tenir compte de cette tendance dans l’allocation des ressources existantes, en particulier en termes de personnel, pour répondre à cette demande croissante pour des produits en espagnol. 

M. HASSAN MOHAMMED A.  ALAMRI (Arabie saoudite) a salué les efforts déployés par le Département et les centres d’information des Nations Unies pour faire la lumière sur les questions liées à la paix et à la sécurité internationales, au développement durable et aux changements climatiques.  L’Arabie saoudite s’efforce pour sa part de mettre en lumière les réformes sociales globales prévues par la Vision 2030, et déploie tous les efforts pour développer son infrastructure numérique et renforcer les capacités de ses citoyens concernant les questions techniques, a assuré le représentant.  Il a dit attendre avec intérêt les consultations sur la proposition de code mondial favorisant l’intégrité dans les médias.  Le représentant a appelé les centres d’information des Nations Unies à renforcer leur présence médiatique dans toutes les langues officielles de l’ONU, y compris l’arabe, estimant que le multilinguisme est le catalyseur de la diplomatie multilatérale.  Il a également demandé au Département de sensibiliser l’opinion publique mondiale aux progrès réalisés par de nombreux pays arabes et de mettre l’accent sur les questions arabes, en particulier la question palestinienne, tout en luttant contre l’islamophobie et toutes les formes d’incitation à la haine contre les musulmans.

M. VAHID GHELICH (République islamique d’Iran) s’est déclaré profondément préoccupé du fait que certains pays continuent de profiter de leur monopole sur les technologies de communication modernes pour déformer la réalité dans les pays en développement qui recherchent une véritable indépendance vis-à-vis des puissances coloniales.  Il a fermement condamné la prolifération de la désinformation et de la mésinformation au sujet de son pays, plaidant pour des mesures appropriées afin de tenir les plateformes médiatiques ayant une portée extraterritoriale pour responsables de leurs actes. 

Le représentant a appelé le DCG à jouer un rôle plus important pour combler le fossé numérique entre le monde développé et le monde en développement, et à mettre les TIC au service du développement de manière juste et équitable. Le Département devrait également sensibiliser le public aux impacts négatifs des mesures coercitives unilatérales, a-t-il ajouté, notant que certaines puissances persistent à utiliser de telles mesures pour bloquer le transfert de technologie vers les pays en développement.  Il a également appelé à accorder la priorité à la création d’une nouvelle architecture de gouvernance d’Internet qui soit juste, inclusive et transparente.  Le délégué a ensuite exhorté le DCG à poursuivre ses efforts pour lutter contre l’islamophobie, insistant en outre sur l’importance de sensibiliser sur les conséquences négatives de l’occupation de la Palestine. Il a encouragé la publication de divers produits médiatiques dans toutes les langues officielles et non officielles, y compris le persan qui compte plus de 120 millions de locuteurs dans le monde. 

Mme NASRIA ELARDJA FLITTI (Ligue des États arabes) a estimé que les reportages du DCG sont le reflet fidèle de la réalité de notre monde et constituent une réponse aux besoins des Nations Unies en matière de communication.  Les médias jouent un rôle essentiel dans la sensibilisation nécessaire pour faire progresser le développement à l’échelle mondiale, a considéré la représentante.  Par conséquent, la Ligue des États arabes a renforcé les voies de communication avec le centre d’information des Nations Unies dans la région arabe, situé au Caire, de même que les capacités de son personnel en la matière.  Elle s’est inquiétée des répercussions des nouvelles fallacieuses sur la sécurité des citoyens et a souligné le besoin urgent d’élaborer un plan complet pour lutter contre la désinformation, notamment les discours de haine et le racisme. La mise en œuvre d’un plan stratégique mondial des Nations Unies pour les médias, avec la présentation de rapports périodiques soumis par les institutions spécialisées des Nations Unies, en particulier l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), permettrait selon elle de mettre en lumière les souffrances du peuple palestinien qui demeure sous occupation israélienne.  Elle a également prôné la mise en place d’une couverture médiatique dans les six langues officielles de l’ONU et le recours à la radio dans les pays en développement qui ne disposent pas d’une infrastructure numérique adéquate.  La création d’un code de conduite permettrait selon elle la mise en place d’un système mondial d’information impartial et ouvert à tous les États Membres.

Mme PATRICIA HERDT, de l’Organisation internationale de la Francophonie, a relevé que malgré les efforts « remarquables » accomplis ces dernières années pour développer des ressources et des supports de communication dans plusieurs langues, d’importantes disparités entre l’usage de l’anglais et des cinq autres langues officielles persistent.  Les supports visuels de nombreux évènements continuent également d’entretenir le sentiment que l’ONU s’adresse aux locuteurs d’une seule langue, a-t-elle regretté, plaidant pour l’adoption du Cadre d’action stratégique pour le multilinguisme. 

Elle a insisté sur l’indispensable intégration du multilinguisme à l’action de lutte contre la désinformation, faisant part de son soutien aux efforts du DCG en vue d’ancrer le multilinguisme dans le continuum de la lutte contre la désinformation.  Elle a recommandé d’élargir l’accès aux informations objectives et fiables dans les différentes langues sur les plateformes numériques des Nations Unies et de corriger les écarts qui existent entre les informations disponibles en anglais et dans les autres langues afin de ne laisser aucune communauté linguistique de côté.  La représentante a également appelé à développer, au sein des différentes entités du Secrétariat qui conduisent des projets destinés à juguler les répercussions négatives de la désinformation, des systèmes de surveillance des plateformes en ligne, dotés d’équipes multilingues en mesure de détecter des informations erronées ou trompeuses dans les différentes langues.  De même, elle a conseillé de capitaliser sur le savoir-faire des vérificateurs de faits opérant dans diverses langues et de mener des campagnes de sensibilisation du grand public à la désinformation dans les différentes langues et de tenir compte des usages très variés des plateformes numériques. 

De même, la déléguée a appelé au respect du multilinguisme lors des consultations préparatoires à l’élaboration du « code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques » pour une grande pluralité et représentativité des contributions, notamment de l’espace francophone.  L’accès à la documentation, aux réunions et aux informations relatives à ce processus doit être garanti dans les six langues officielles, a-t-elle préconisé. 

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a exercé son droit de réponse pour réfuter un ensemble d’accusations faites à l’encontre de son pays au cours du débat général.  « Chers collègues, vous nous accusez de ce que vous faites chez vous », leur a-t-il dit, « et nous avons apporté des preuves exhaustives de ces faits ».  S’adressant à la Lettonie, il l’a appelé à lire l’ensemble de l’article évoqué plutôt que de citer un post twitter hors contexte.  Quant aux déclarations des États-Unis qui ont dit « ne pas pouvoir répondre aux allégations russes », il a ironisé qu’en effet, leur comportement à l’égard des journalistes russes ne saurait être explicable ou justifiable. Le représentant a également réagi à la déclaration de l’Ukraine dans laquelle il a été dit que la Russie aurait parlé « d’une armée de moustiques militarisés », ce à quoi il a répondu que les armes biologiques ne connaissent pas de limites.  Il a ensuite rappelé à son homologue britannique ce qui se passe dans les médias britanniques, dénonçant notamment la fermeture de la chaîne RT et la révocation de sa licence.  Voilà à quoi ressemble la liberté d’expression au Royaume-Uni, a-t-il déclaré en appelant ses collègues à renoncer aux slogans antirusses et à se concentrer sur le fond des travaux du Comité. 

Réagissant aux propos de la RPDC, le représentant de la République de Corée a précisé que l’exercice militaire conjoint annuel États-Unis/République de Corée vise à défendre son pays contre la menace militaire posée par la RPDC. 

À son tour, le représentant de la République populaire démocratique de Corée a déclaré que les États-Unis et leurs vassaux ont lancé des actes hostiles ayant une incidence sur la souveraineté de son pays, ce qui constitue selon lui un danger intolérable.  Les forces hostiles menées par les États-Unis et la République de Corée ont effectué cette année des tests terrestres et autres.  Les mesures d’autodéfense prises par la RPDC représentent un exercice juste de sa souveraineté pour dissuader les menaces dans un environnement sécuritaire fragile, a-t-il estimé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: face à la violence des gangs, la Représentante spéciale en Haïti réaffirme la nécessité d’un déploiement international

9311e séance – matin
CS/15266

Conseil de sécurité: face à la violence des gangs, la Représentante spéciale en Haïti réaffirme la nécessité d’un déploiement international

Venue présenter, ce matin, au Conseil de sécurité, le dernier rapport trimestriel en date du Secrétaire général sur le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), la nouvelle Représentante spéciale pour ce pays s’est félicitée des progrès politiques accomplis ces derniers mois pour restaurer les institutions démocratiques tout en reconnaissant que « l’horrible violence des gangs » reste au centre du débat national.  Face à cette dynamique alarmante, elle a réaffirmé la « nécessité urgente » du déploiement, autorisé par le Conseil, d’une force internationale spécialisée en appui à la Police nationale d’Haïti (PNH), appuyée dans ce sens par plusieurs délégations, dont celle du pays concerné. 

Mme Maria Isabel Salvador a indiqué que, lors de ses premiers échanges et interactions sur place, elle avait pu observer les prémices d’un dialogue national.  Elle a cependant convenu qu’il sera difficile d’aller de l’avant sans s’attaquer efficacement à l’insécurité endémique, la violence des gangs se développant à un rythme sans précédent dans des zones auparavant considérées comme relativement sûres, à Port-au-Prince et en dehors de la capitale. Pour illustrer son propos, elle a fait état de 1 647 incidents criminels -homicides, viols, enlèvements et lynchages- enregistrés par la PNH et le BINUH au cours du premier trimestre de 2023, soit plus du double du total de l’an dernier à la même période. 

Bien que le Gouvernement continue d’investir dans la PNH, celle-ci est confrontée à un grave sous-effectif et mal équipée pour lutter contre la violence et la criminalité, a déclaré la Représentante spéciale.  Dans ce contexte, si la PNH a réussi à monter des opérations antigangs efficaces, ces succès ne sont que momentanés, a-t-elle déploré.  La Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Mme Ghada Fathi Waly, a corroboré ce constat et averti que cette insécurité désastreuse dépasse les capacités limitées de la PNH, mais aussi des douanes, des patrouilles frontalières et des garde-côtes. Elle a ajouté que les difficultés rencontrées en matière d’application de la loi et de contrôle des frontières font d’Haïti une plaque tournante attrayante pour les trafiquants de drogue. 

La Représentante spéciale s’est cependant réjouie qu’en dépit des problèmes de sécurité, des efforts se poursuivent pour mettre en œuvre l’accord du 21 décembre 2022 pour un consensus national.  Elle a notamment salué l’installation du Haut Conseil de transition, la nomination de juges à la Cour de cassation et la prochaine mise en place du conseil électoral provisoire, chargé de l’organisation d’élections.  Il n’en reste pas moins que le processus global reste fragile et vulnérable à la détérioration de la situation sécuritaire, a observé Mme Salvador, avant de souligner la nécessité d’un soutien international urgent, en écho à l’appel lancé le 8 octobre dernier par le Secrétaire général

« Nous devons trouver des moyens innovants pour définir la force d’appui à la Police nationale d’Haïti », a exhorté Mme Salvador, avertissant qu’un retard supplémentaire dans la résolution de l’insécurité en Haïti pourrait également entraîner un « débordement » au niveau régional.  Elle a été appuyée dans cette supplique par le Ministre des affaires étrangères d’Haïti, qui a rappelé que son gouvernement soutient le principe du déploiement d’une force armée spécialisée internationale et jugé indispensable l’emploi de la « violence légitime » pour vaincre les gangs, comme « première étape ».  Un avis partagé par l’Équateur et l’Albanie, cette dernière voyant dans l’envoi d’une force internationale la « seule réponse adéquate » à la demande légitime d’assistance du peuple haïtien. 

Le chef de la diplomatie haïtienne a également souligné l’importance du régime de sanctions de l’ONU et encouragé le Groupe d’experts du Comité des sanctions à accélérer ses travaux afin de parvenir rapidement à la publication de la liste de tous ceux qui alimentent l’instabilité.  Il a été rejoint sur ce point par de nombreux pays, parmi lesquels les États-Unis, la France, Malte, le Brésil, le Japon et la Chine.  Insistant sur l’application de l’embargo sur les armes prévu par la résolution 2653 (2022), la Chine a également demandé une mise à jour de la liste des sanctions, tandis que la Fédération de Russie appelait le Groupe d’experts à « faire son travail » pour régler la question de la collusion des cercles politiques et économiques du pays avec les gangs criminels. 

Considérant néanmoins que les solutions qui ne reflètent pas les réalités locales ne doivent pas être imposées aux Haïtiens, la Fédération de Russie a dénoncé les tentatives d’ingérence dans le processus politique en Haïti par le biais de sanctions unilatérales.  Selon elle, la crise haïtienne est en grande partie le résultat d’une « ingénierie politique externe et de politiques néocoloniales » et de telles approches ne remédieront certainement pas à la situation. 

Tout en appuyant, lui aussi, le travail du Comité des sanctions créé par la résolution 2653 (2022), le Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine a rappelé que son gouvernement avait déjà imposé des interdictions d’entrée à un certain nombre de ressortissants haïtiens afin de sauvegarder sa sécurité et son intégrité territoriale.  Il a également réitéré son appel au Conseil pour qu’il prenne toutes les mesures appropriées pour empêcher les flux d’armes et de munitions vers Haïti, avant de s’étonner du peu de réaction de l’organe onusien face à cette situation « intenable » qui affecte toute la région.  D’autres pays en crise ont pu bénéficier d’une aide internationale qui n’a pas eu à emprunter un chemin « aussi sinueux », a-t-il pointé, dénonçant une réponse à « géométrie variable ». 

Enfin, au nom du Groupe consultatif ad hoc du Conseil économique et social (ECOSOC) sur Haïti, le Canada a souhaité que les mesures pour rétablir la sécurité s’accompagnent d’efforts pour s’attaquer aux causes de la violence dans le pays, en particulier l’extrême pauvreté, la corruption et l’impunité.  Estimant à son tour que les sanctions sont un outil important pour aider à briser le pouvoir des gangs armés, il a plaidé pour que les solutions à cette crise soient trouvées par les Haïtiens eux-mêmes.

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI (S/2023/274)

Déclarations

Mme MARIA ISABEL SALVADOR, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), dont c’était la première intervention devant le Conseil de sécurité depuis sa prise de fonctions ce mois-ci, a indiqué que, lors de ses premiers échanges et interactions sur place, elle a pu observer qu’une voie permettant aux Haïtiens d’engager un dialogue vers la restauration des institutions démocratiques dans le pays avait été tracée.  Elle a cependant convenu qu’il sera difficile d’aller de l’avant sans s’attaquer efficacement à l’insécurité endémique, la violence des gangs se développant à un rythme alarmant dans des zones auparavant considérées comme relativement sûres à Port-au-Prince et en dehors de la capitale. 

Pour la Représentante spéciale, « l’horrible violence dans les zones infestées de gangs », y compris la violence sexuelle, est emblématique de la terreur qui afflige une grande partie de la population haïtienne.  Pour illustrer l’augmentation choquante de la criminalité en Haïti, elle a indiqué que, selon données recueillies par la Police nationale d’Haïti (PNH) et par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) au cours du premier trimestre 2022, 692 incidents criminels, définis comme des homicides, des viols, des enlèvements et des lynchages, ont été signalés.  Au cours de la même période en 2023, le nombre d’incidents criminels enregistrés a plus que doublé pour atteindre 1 647. 

Face aux gangs armés qui se disputent le contrôle des quartiers de la capitale, certains habitants ont commencé à prendre les choses en main, a expliqué Mme Salvador. Ainsi, il y a seulement deux jours, à Port-au-Prince, un groupe de civils a arrêté 13 membres présumés d’un gang, avant de les battre à mort et de brûler leurs corps.

Face à cette dynamique violente, le Gouvernement a continué d’investir dans la Police nationale d’Haïti, mais la force est en grave sous-effectif et mal équipée pour lutter contre la violence et la criminalité, a relevé la Représentante spéciale.  Elle a ainsi précisé que les décès, les licenciements et l’augmentation des démissions parmi la police ont réduit ses effectifs opérationnels de 14 772 à environ 13 000, dont seulement 9 000 effectuent des tâches policières.  De plus, le recrutement de nouveaux policiers a été interrompu en raison de la détérioration des contraintes sécuritaires et logistiques. Si la PNH a néanmoins réussi à monter des opérations antigangs efficaces, ces succès ne sont que momentanés, a-t-elle déploré, soulignant la nécessité d’un soutien international urgent pour faire face à la détérioration rapide de la situation sécuritaire. 

Au-delà du soutien immédiat dont la Police nationale a besoin, il est urgent selon elle d’avancer vers une solution nationale à l’impasse politique afin de rétablir une sécurité durable ainsi qu’une stabilité sociale et économique, a plaidé Mme Salvador.  Malgré les problèmes de sécurité, les efforts se poursuivent en vue de la mise en œuvre de l’accord du 21 décembre, a-t-elle noté, avant de saluer le fait que le Haut Conseil de transition nouvellement créé continue de travailler avec le Gouvernement et diverses parties prenantes pour élargir le consensus sur la voie à suivre. La Représentante spéciale a affirmé que la mise en œuvre de l’accord se poursuit, notamment les étapes vers la mise en place d’un conseil électoral provisoire, étape essentielle pour la tenue éventuelle d’élections.  Parallèlement, la Cour de cassation a été rendue fonctionnelle le 28 février et se tient prête à assermenter le nouveau conseil électoral provisoire quand il sera établi, tandis qu’un nouveau forum sur la sécurité nationale et une table ronde politique doivent être convoqués sous les auspices du Haut Conseil de transition.  Toutefois, a-t-elle nuancé, en dépit de ces gains politiques, le processus global reste fragile et vulnérable à la détérioration de la situation sécuritaire. 

Abordant ensuite la situation des droits de l’homme, la Représentante spéciale a indiqué qu’avec l’augmentation de la violence des gangs armés, les Haïtiens continuent de subir l’une des pires crises en la matière depuis des décennies. Les entretiens menés par le BINUH font apparaître que les gangs continuent d’utiliser la violence sexuelle, y compris le viol à plusieurs auteurs, pour terroriser et infliger des souffrances aux populations vivant dans les zones sous le contrôle de leurs rivaux.  Elle a aussi fait état d’autres formes de violence sexuelle, telles que l’exploitation sexuelle, utilisées par des gangs contre des femmes et des filles vivant dans des communautés sous leur influence.  Pour la Représentante spéciale, les cas de violence sexuelle commise par des gangs armés sont en outre fortement sous-déclarés en raison de la peur de représailles, de la stigmatisation par les familles et les communautés et de la disponibilité limitée des services de santé et psychosociaux.

Quant aux enfants, ils figurent parmi les victimes des crimes les plus odieux, notamment les meurtres, les enlèvements et les viols.  En outre, de nombreuses écoles ont fermé à la fin de l’année dernière en raison de la violence et de l’extorsion par les gangs, a déploré Mme Salvador, ajoutant que, malgré les réouvertures au début de 2023, de nombreux écoliers ne sont pas retournés en classe.  Dénonçant par ailleurs le recrutement d’enfants dans des gangs armés, elle a qualifié d’évolution bienvenue la nomination par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme d’un expert indépendant sur les droits de l’homme à la suite d’une demande du Gouvernement haïtien. 

La Représentante spéciale a souhaité que ces crimes ne restent pas impunis et que leurs auteurs soient traduits en justice.  Elle a d’autre part rappelé que près de la moitié de la population a besoin d’aide humanitaire, que le nombre de déplacements internes a augmenté de 50% à Port-au-Prince par rapport à novembre 2022 et que quelque 39 000 cas suspects de choléra ont été signalés depuis la réapparition de l’épidémie en octobre dernier.  Dans ce contexte, a-t-elle précisé, l’ONU et ses agences humanitaires restent sur le terrain et fournissent des services essentiels.  Entre mars et avril, au moins 22 missions d’urgence ont ainsi été menées dans des zones contrôlées par des gangs à Port-au-Prince. 

Avant de conclure, la Cheffe du BINUH a souligné la nécessité urgente du déploiement, autorisé par le Conseil de sécurité, d’une force internationale spécialisée, comme demandé par le Secrétaire général dans sa lettre du 8 octobre 2022. « Nous devons trouver des moyens innovants pour définir la force d’appui à la Police nationale d’Haïti », a plaidé Mme Salvador, pour qui un retard supplémentaire dans la résolution de l’insécurité sans précédent en Haïti pourrait également entraîner un « débordement » dans la région.  À ses yeux, le soutien décisif du Conseil de sécurité demeure crucial pour assurer la sécurité, l’état de droit, la stabilité et la paix en Haïti.

Mme GHADA FATHI WALY, Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a d’abord évoqué la dégradation de la crise sécuritaire qui paralyse Haïti.  Depuis sa dernière intervention devant le Conseil en septembre, le non-respect de la loi, l’escalade de la violence et l’ampleur des activités criminelles organisées ont continué à alimenter la crise et n’ont apporté aucun répit au peuple haïtien, a déploré Mme Waly.  Cette situation a progressivement contribué à l’aggravation de la crise et à l’affaiblissement des efforts déployés au niveau national en faveur de la paix et de la sécurité. 

La dirigeante de l’ONUDC a jugé plus inquiétantes encore les nouvelles dynamiques des groupes agissant hors de Port-au-Prince, qui sont directement impliqués dans le trafic d’armes de plus en plus sophistiquées et cherchent à enrôler de nouvelles recrues dans les camps des populations déplacées.  Mme Waly a rappelé que, le mois dernier, l’ONUDC a publié une évaluation intitulée « Marchés criminels d’Haïti: cartographie des tendances en matière d’armes à feu et de trafic de drogue », qui a été présentée lors de la première réunion du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2653 (2022) concernant HaïtiL’évaluation dresse un tableau alarmant, a-t-elle indiqué. 

Mme Waly s’est également plainte des sérieuses limitations en termes de capacités de contrôle maritime, de personnel et d’équipement, ainsi que d’un manque d’infrastructures de surveillance des frontières et de patrouille, qui limitent les efforts visant à stopper l’afflux de ces armes, ce qui permet à la violence liée aux gangs d’atteindre des niveaux sans précédent. 

La situation sécuritaire désastreuse dépasse les capacités déjà limitées de la Police nationale, des douanes, des patrouilles frontalières et des garde-côtes d’Haïti, a jugé Mme Waly.  Elle a reconnu que le pays mène sa réponse sécuritaire du mieux qu’il peut, mais avec un coût humain important.  Les taux d’homicide montent en flèche, tandis que de plus en plus de policiers sont pris pour cible et tués dans l’exercice de leurs fonctions par des gangs.

Parallèlement, les difficultés rencontrées par Haïti en matière d’application de la loi et de contrôle des frontières en font une plaque tournante attrayante pour les trafiquants de drogue, a alerté la Directrice exécutive de l’ONUDC.  Haïti sert de pays de transbordement pour les drogues, principalement la cocaïne et le cannabis, qui arrivent par des ports publics, privés et informels ainsi que par des pistes d’atterrissage clandestines, et qui sont principalement expédiées vers les États-Unis, la République dominicaine et l’Europe de l’Ouest.  Alors que les marchés des drogues illicites se développent dans le monde entier et que l’offre et la demande mondiales de cocaïne atteignent des sommets, la menace du trafic en tant que facteur de déstabilisation en Haïti ne fait que croître. 

Ces réalités compromettent les perspectives du processus politique, sans parler des conséquences catastrophiques sur les efforts déployés pour lutter contre la faim aiguë et l’accès aux services essentiels, a encore déploré Mme Waly.  En conclusion, elle a appelé la communauté internationale et les partenaires investis à développer et soutenir, de toute urgence, des actions globales à grande échelle pour aider à l’application de la loi et à la gestion des frontières, afin de prévenir les flux illicites et de contribuer à stabiliser la situation. 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a salué la nomination de M. William O’Neil comme Expert indépendant sur la situation des droits humains en Haïti, jugeant essentiel de faire rapport de la situation des droits de l’homme en mettant un accent sur le bien-être des femmes et des enfants.  Le représentant s’est ensuite dit préoccupé du fait que les écoles sont devenues de véritables réseaux sur lesquels les gangs ont la main, annihilant ainsi toutes les perspectives de prospérité et exposant les femmes et les filles à la violence sexuelle.  C’est inacceptable, a-t-il insisté, avant de condamner également les assassinats de policiers haïtiens. 

Pour les États-Unis, la stabilité politique est une condition préalable au retour de la paix et de la stabilité dans le pays.  Depuis décembre 2022, date de signature de l’accord de consensus national, des évolutions positives ont été constatées, a affirmé le représentant, qui a cité la nomination des membres au Conseil de transition ainsi que à la Cour de cassation.  Les acteurs politiques se doivent de tout mettre en œuvre pour pouvoir mettre sur pied un conseil électoral provisoire afin de ramener une certaine stabilité politique dans le pays, a-t-il ajouté. 

Il faut faire davantage pour aider le peuple haïtien, a demandé le représentant.  À cette fin, les États-Unis se sont engagés à débloquer plus près de 9 millions de dollars pour aider la Police nationale et 2,7 millions de dollars pour des interventions humanitaires au cours des six derniers mois.  Le représentant a annoncé l’intention de son gouvernement de débloquer 56 millions de dollars supplémentaires à l’aide humanitaire et 1 million de tonnes d’équipements d’assainissement de l’eau et de matériel d’hygiène, mais aussi d’équipements destinés aux travailleurs de la santé pour venir en aide aux patients souffrant du choléra. 

Notant l’appel à l’aide du Gouvernement et du peuple haïtien à la communauté internationale et à sortir de cette situation sécuritaire intolérable, le représentant a, enfin, estimé que le Conseil de sécurité devait imposer des sanctions supplémentaires contre ceux qui financent et qui encouragent la violence et l’instabilité dans le pays. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a constaté que la crise sécuritaire en Haïti dépasse les capacités logistiques et institutionnelles du BINUH.  Il a cependant estimé que le travail du Bureau intégré continue d’être crucial dans les efforts visant à promouvoir la stabilité politique et la bonne gouvernance, la promotion et la protection des droits humains, l’accompagnement et le soutien au dialogue haïtien. 

Pour l’Équateur, le Conseil de sécurité doit encourager le renforcement de l’accord de consensus national du 21 décembre et sa consolidation par le biais d’une participation plus inclusive de tous les acteurs et secteurs haïtiens.  Cela favorisera le renforcement de l’état de droit et des institutions, y compris dans le secteur de la justice, en vue de faire progresser la responsabilisation et la transition démocratique en vue d’élections en février 2024, a estimé le représentant. 

Mais, pour atteindre cet objectif, il est indispensable de rétablir la sécurité, a ajouté le représentant, qui a rappelé qu’il y a maintenant six mois que le Secrétaire général a recommandé le déploiement d’une force multinationale spécialisée d’appui à la Police nationale d’Haïti.  « Le peuple haïtien attend toujours », a-t-il constaté, avant d’appeler à passer des réflexions aux actes.  « Combien d’Haïtiens doivent encore mourir? » s’est-il interrogé. Si nous ne sommes pas capables de contribuer à surmonter l’état de violence et de cruauté en Haïti généré par les gangs, « comment pouvons-nous aspirer à résoudre des conflits beaucoup plus vastes dans le monde »?

Saluant par ailleurs le leadership du Gabon à la présidence du Comité des sanctions concernant Haïti, le représentant s’est dit préoccupé par le contenu du rapport de l’ONUDC sur les marchés criminels en Haïti et la cartographie du trafic de drogue et d’armes à feu.  Il a souhaité que le Conseil de sécurité soutienne les efforts visant à contrôler les frontières et les ports, ainsi que la lutte contre le trafic illicite d’armes et de munitions. 

Le représentant s’est enfin alarmé des projections contenues dans le rapport de suivi de la sécurité alimentaire de la FAO et du PAM pour ce mois-ci, selon lesquelles, d’ici à juin 2023, 4,9 millions de personnes pourraient être touchées par l’insécurité alimentaire aiguë, c’est-à-dire moitié de la population haïtienne. Il a appelé le Conseil de sécurité à envoyer un signal d’unité et de détermination pour assurer un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave, ainsi que la sécurité et la protection du personnel humanitaire. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), s’est dit très préoccupé par le fait que la violence en Haïti n’épargne pas les enfants qui sont, avec les femmes, des victimes privilégiées des gangs et que ces derniers s’en prennent directement à la police et n’hésitent pas à utiliser écoles et établissements de santé comme base arrière pour mener leurs opérations mafieuses.  Rappelant les chiffres, il a parlé d’un niveau de violence encore jamais vu dans le pays, ajoutant que la pression exercée par les gangs sur la police révèle un rapport de force déséquilibré en faveur des gangs, qui sont plus lourdement armés et qui violent tous les droits humains.

Pour les A3, l’insécurité est le défi prioritaire à relever pour restaurer la capacité de Haïti à reprendre en main son destin.  Ils saluent toutes les initiatives concourant à renforcer les capacités matérielles, techniques et humaines de la police haïtienne et appellent les pays donateurs à accroître leur contribution au fonds destiné à sa professionnalisation, qui n’est abondé qu’à hauteur de 14,9 millions de dollars sur les 28 millions attendus.

La stabilisation de l’épidémie de choléra est apparue au représentant comme un répit dans un contexte alarmant marqué par la montée des besoins humanitaires, qui se trouvent à la confluence de facteurs multiples, dont une pauvreté et une précarité endémiques, des déplacements massifs de personnes mais aussi des rapatriements forcés.  Cette situation doit très vite être stabilisée pour permettre de sortir 4,9 millions de Haïtiens de l’insécurité alimentaire aiguë et scolariser plus de 200 000 enfants en rupture de scolarité vivant dans les zones contrôlées par les gangs, a-t-il averti.

Les A3 ont dit avoir foi dans le rôle important que peut jouer la Communauté des Caraïbes (CARICOM) pour accompagner Haïti dans cette saison douloureuse de son histoire, a conclu le représentant, qui a encouragé les pays de la région à renforcer leur solidarité envers un pays « que nous, Africains, considérons comme une part entière de la sixième région de l’Afrique ».

M. GENG SHUANG (Chine) a constaté que le peuple haïtien est plongé dans le plus grand désespoir par une situation profondément préoccupante.  Le représentant a salué l’instauration du Haut Conseil de transition après la signature de l’accord sur la transition politique.  Néanmoins, a-t-il ajouté, le processus de transition politique ne bénéficie toujours pas d’un large soutien.  Il faut sortir de cette impasse en créant les conditions d’élection justes et transparentes dès que possible.  Le BINUH doit faciliter un dialogue entre les groupes politiques en Haïti pour permettre un consensus autour de la transition et pour progresser dans le cadre du processus politique qui devrait être approprié par les Haïtiens. 

Le représentant a appelé à infléchir l’augmentation de la violence armée et de la criminalité, ajoutant qu’il fallait tarir les sources d’approvisionnement en armements, y compris depuis les États-Unis.  Si ces sources ne sont pas contrôlées, elles continueront à alimenter les comportements violents et armés et alimenteront l’insécurité et l’instabilité.  Il faut aussi appliquer la résolution 2653 (2022) sur les sanctions et l’embargo sur les armes qui visent les bandes armées haïtiennes, mettre à jour la liste des sanctions dès que possible, affiner ces mesures et faire en sorte qu’il existe un suivi de leur mise en œuvre.

La Chine est favorable à un rôle plus important des pays de la région, qui doivent travailler en synergie avec les agences onusiennes pour améliorer la situation sur le terrain.  Ce problème complexe n’a pas de solution simple, a averti le représentant, qui a assuré que la Chine continuera à soutenir la population d’Haïti pour trouver une solution efficace aux fléaux auxquels elle est confrontée et pour alléger ses souffrances. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) s’est alarmé de la détérioration continue de la sécurité et des violations flagrantes des droits humains auxquelles les Haïtiens sont confrontés quotidiennement.  Il a notamment condamné le recours systématique à la violence sexuelle par les gangs, ainsi que le ciblage des enfants et le recrutement de mineurs.  Se disant convaincu que la répression de la violence des gangs, voire leur désarmement, permettrait de favoriser les efforts de reconstruction des structures étatiques et du maintien de la paix, le représentant a indiqué que la Suisse maintenait sa présence dans différentes régions d’Haïti et entendait fournir une aide humanitaire en ces temps difficiles.  Pour lui, il est urgent de réduire de manière durable l’insécurité alimentaire, qui s’est aggravée ces deux dernières années.  C’est pourquoi, a-t-il précisé, la Suisse a augmenté son financement pour le Programme alimentaire mondial (PAM) et encourage les organisations humanitaires et de développement à continuer de fournir l’aide nécessaire. 

À cet égard, le représentant s’est déclaré préoccupé par les attaques continues des gangs contre le personnel médical et les infrastructures critiques, les enseignants et les acteurs humanitaires, avant d’appuyer l’appel lancé par le Secrétaire général pour leur protection.  Par ailleurs, après s’être félicité des quelques progrès accomplis au niveau politique, il a estimé que le renforcement du système judiciaire devait être accéléré sans délai.  L’impunité et la corruption doivent être combattues pour lutter efficacement contre l’autonomie et l’indépendance croissantes des gangs et pour briser le cycle de la violence.  Dans ce contexte, a-t-il conclu, la communauté internationale doit rester aux côtés des Haïtiens pour répondre à leurs besoins, les soutenir dans la recherche d’un consensus permettant de sortir de la crise politique et créer les conditions propices à des élections sûres et libres. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a jugé impératif pour Haïti de rétablir l’ordre public et de lutter contre la corruption et l’impunité des bandes armées, rejetant les méthodes brutales -extorsions, enlèvements et trafic de drogue- des gangs qui étouffent la capitale et le pays.  L’Albanie rejette l’idée que ces gangs existent de manière isolée et demande que tous ceux qui sont responsables de la propagation et du financement de la violence des gangs aient à rendre des comptes, y compris ceux qui, au sein de l’élite haïtienne, les utilisent ou en profitent.  Haïti ne peut pas aller de l’avant dans un contexte d’illégalité et de manque de légitimité de ses principales institutions, a ajouté le représentant, qui a souhaité davantage de sanctions pour traquer les chefs de gangs, les trafiquants d’armes et ceux qui profitent du chaos.

L’expérience montre que les forces de police haïtiennes, en sous-effectif, sous-payées et sous-équipées, ne sont pas en mesure de prendre le dessus, a déploré le représentant pour qui, plus cette situation durera, plus les gangs deviendront puissants et pourront dicter leurs conditions et se faire une place dans les sphères politiques et financières du pays.  C’est pourquoi l’Albanie soutient le projet de déploiement d’une force armée internationale spécialisée, préconisée par le Secrétaire général et le Premier Ministre haïtien.  Le représentant y a vu la seule réponse adéquate à la demande légitime d’assistance internationale du peuple haïtien. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a estimé que la liste des exactions en Haïti ne peut laisser personne indifférente.  La priorité absolue doit être de rétablir la sécurité et de soutenir beaucoup plus efficacement la Police nationale haïtienne, qui a besoin d’équipements, de financement et de formation, a estimé la représentante.  La France est prête, avec ses partenaires, à faire davantage afin de redresser la situation sur le terrain.  Pour leur part, les Nations Unies doivent davantage appuyer Haïti sur le plan sécuritaire, via l’action du BINUH.  La représentante a demandé au Conseil d’adopter ses premières sanctions contre les criminels qui déstabilisent ce pays et a dit attendre les propositions du panel d’experts en ce sens. 

Mais les sanctions seules ne résoudront rien, a mis en garde Mme Broadhurst Estival, qui a appelé à reconstruire la justice en Haïti.  La lutte contre l’impunité doit être une priorité si l’on souhaite mettre fin à la violence, a-t-elle fait valoir, jugeant positive la nomination des membres de la Cour de cassation.

La France continuera d’encourager les acteurs haïtiens à poursuivre un dialogue inclusif saluant les efforts fournis afin d’encourager une participation plus large à l’accord de consensus national, ainsi que l’installation du Haut Conseil de transition.  L’objectif demeure l’organisation d’élections démocratiques lorsque les conditions sécuritaires seront réunies, a précisé la représentante, qui a exhorté les acteurs politiques haïtiens à trouver un accord le plus large possible en vue de la nomination rapide d’un conseil électoral provisoire.  Elle a en outre annoncé qu’en 2023, l’aide humanitaire française avait déjà atteint 9 millions d’euros et que le pays travaillait à mobiliser des ressources supplémentaires.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a déploré l’escalade de la violence des gangs en Haïti et l’échec des autorités de l’État à organiser une réponse adéquate. Il a constaté qu’en raison de cette situation « consternante », le pays fait face à des niveaux élevés de déplacements internes, à une forte augmentation de l’insécurité alimentaire et à un accès limité aux services essentiels. Pour le Brésil, l’impasse politique actuelle, associée aux crises humanitaires et sécuritaires, a créé un « cercle vicieux » en Haïti, dans lequel « une crise renforce l’autre ».

Une percée dans le dialogue politique entre le Gouvernement et l’opposition est donc essentielle, a souligné le représentant, qui a déploré le manque de représentants gouvernementaux démocratiquement élus.  Ne pas remédier à ce vide de légitimité pourrait potentiellement plonger la nation dans une crise plus grave aux conséquences imprévisibles, a-t-il averti. Il a néanmoins salué l’initiative lancée le 21 décembre pour construire un consensus national pour une transition inclusive et des élections transparentes, observant que, depuis lors, certaines mesures positives ont été prises pour mettre en œuvre l’accord, telles que l’investiture du Haut Conseil de transition et la récente nomination de juges pour pourvoir les sièges vacants à la Cour de cassation.  Il a encouragé l’intensification des efforts visant à assurer un dialogue politique national large et inclusif afin que la normalité institutionnelle puisse être rétablie et que des élections soient organisées. 

Le représentant a cependant jugé nécessaire de contrôler les activités des gangs, afin de créer les conditions permettant l’organisation d’élections crédibles.  Il lui importe également de veiller à ce que les groupes politiques et économiques n’exploitent pas la crise humanitaire pour leurs propres intérêts.  Il a souhaité à cet égard que le régime de sanctions adopté en octobre dernier contribue à rompre le lien entre le pouvoir politique et économique et les gangs haïtiens. Il a donc appelé le Comité des sanctions à poursuivre ses délibérations pour imposer des sanctions avec le plein appui de la communauté internationale.  Enfin, le représentant a exhorté la communauté internationale à redoubler d’efforts pour favoriser le développement économique et social d’Haïti et l’empêcher ainsi de retomber dans la violence. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a suggéré que le Conseil mette à jour dès que possible la liste des personnes désignées pour faire l’objet de sanctions individuelles au titre de la résolution 2653 (2022), et veille à la pleine mise en œuvre de ces mesures.  Faisant part de sa profonde préoccupation face à la crise politique en Haïti, la représentante a exhorté les autorités haïtiennes à s’engager avec les groupes de la société civile pour construire le consensus le plus large possible sur une feuille de route pour aboutir à des élections libres et équitables. Pour Malte, il devrait s’agir d’un processus politique dirigé et pris en charge par les Haïtiens avec la participation pleine, égale et significative des femmes et des jeunes.  Cela nécessitera un investissement continu dans le renforcement des capacités des femmes et des jeunes leaders, a recommandé la représentante. 

La communauté internationale doit avoir pour priorité de renforcer le système judiciaire haïtien afin de lutter contre la corruption et l’impunité qui alimentent le cycle de la violence et de l’insécurité, a poursuivi la représentante, qui a estimé que les responsables de la poursuite de cette crise devront rendre des comptes. 

M. SUOOD RASHED ALI ALWALI ALMAZROUEI (Émirats arabes unis) a estimé que, pour aborder les crises à multiples facettes en Haïti, plusieurs plans étaient nécessaires, qui doivent inclure toutes les parties prenantes.  La priorité doit rester le renforcement des capacités de la Police nationale à effectuer son travail.  Il faut prendre des mesures pour lutter contre la corruption et le trafic illicite d’armes et les flux financiers illicites. 

En outre, il faut régler la situation humanitaire et lutter contre le recrutement des enfants et la fermeture des écoles, a poursuivi le représentant, pour qui les femmes et les jeunes doivent avoir voix au chapitre concernant l’avenir de leur pays. 

Se disant préoccupé par l’impunité dont jouissent les auteurs de crimes graves tels que la violence fondée sur le genre, le représentant a aussi appelé à faire en sorte que les institutions de l’État regagnent la confiance de la population. Il a enfin appelé à mieux financer les besoins humanitaires du pays. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a jugé alarmante la détérioration de la situation sécuritaire au vu de l’augmentation rapide du nombre de cas d’enlèvements et de crimes violents.  Elle a déploré que des femmes et des enfants soient victimes de crimes graves, notamment de violences sexuelles et de recrutement forcé.  Soulignant la nécessité de protéger les droits les plus fondamentaux de la population, tels que la vie, l’eau, l’alimentation et la santé, ainsi que de respecter l’état de droit, la représentante a appelé au renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti et pris note de l’initiative prise par le Gouvernement pour se procurer les équipements nécessaires. 

Pour la représentante, bien que la responsabilité principale de la stabilité incombe à l’autorité haïtienne, les initiatives régionales et internationales devraient renforcer les efforts nationaux.  Dans ce cadre, le Japon continuera d’appuyer des initiatives telles que le fonds commun du Programme des Nations Unies pour le développement pour renforcer la Police nationale d’Haïti, a-t-elle indiqué, saluant également l’engagement continu de groupes régionaux comme l’Organisation des États américains (OEA) et la Communauté des Caraïbes (CARICOM). 

La représentante a d’autre part insisté sur le rôle des sanctions ciblées dans la lutte contre l’insécurité en Haïti.  Elle a indiqué, à ce sujet, que le Japon participera de manière constructive à la discussion visant à renforcer et à élargir les sanctions contre ceux qui se livrent à des activités criminelles et à la violence, sur la base des demandes d’inscription et par l’intermédiaire du Groupe d’experts. 

La représentante a enfin estimé que la sécurité devait aller de pair avec la résolution des crises politiques, y compris la tenue d’élections libres, justes et transparentes et la mise en place d’un système judiciaire responsable et efficace.  Après s’être félicitée des progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’accord du 21 décembre, elle a exhorté les acteurs politiques et toutes les parties prenantes à participer à sa mise en œuvre et à progresser par la voie du dialogue. 

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) s’est dit est profondément préoccupé par la détérioration de la sécurité au cours du dernier trimestre, illustrée par une augmentation de 21% des homicides et de 63% des enlèvements.  Les cas de viols collectifs et d’autres formes de violence sexuelle perpétrés par des gangs dans le but de semer la peur dans les communautés sont très répandus.  Le recrutement d’enfants dans les gangs, les tirs aveugles de snipers dans les zones civiles et la forte insécurité alimentaire ont contribué à ce « cauchemar vivant », a déploré le représentant.  Jugeant effroyable que le peuple haïtien, en particulier les femmes et les enfants, continue de vivre cette horreur au quotidien, il a apporté le ferme soutien du Royaume-Uni à la nomination d’un expert en droits de l’homme en Haïti au début de ce mois.

Le représentant a encouragé les partenaires internationaux à collaborer pour soutenir les efforts déployés par les Haïtiens afin de s’attaquer aux causes sous-jacentes de la violence des gangs.  Il a enfin jugé nécessaire de répondre à la demande d’aide internationale supplémentaire formulée par Haïti.

Pour M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération du Russie), ce qui se passe aujourd’hui en Haïti est une véritable catastrophe humanitaire, socioéconomique et politique. Ni les Haïtiens ni la communauté internationale n’ont une conception claire de la manière de résoudre les problèmes du pays et de l’empêcher de tomber dans l’abîme, a ajouté le représentant, pour qui le Conseil de sécurité doit accorder la priorité aux questions politiques et de sécurité.  Il a regretté que le « soi-disant consensus national » censé restaurer un gouvernement légitime et stable, n’ait fait, après quatre mois, que peu de progrès réels pour assurer la transition politique et les préparatifs pour la tenue des élections.  Il s’est aussi étonné de l’absence de résultats de l’enquête sur l’assassinat du Président Jovenel Moïse, il y a deux ans, estimant que ce silence ne faisait qu’accroître la défiance du public envers les autorités.  L’extradition de suspects vers les États-Unis annihile tout espoir d’un processus judiciaire indépendant, a-t-il estimé. 

Les solutions qui ne reflètent pas les réalités locales ne doivent pas être imposées aux Haïtiens, a prévenu le représentant, qui a dénoncé les tentatives d’ingérence dans le processus politique en Haïti en utilisant l’instrument des sanctions unilatérales.  Pour M. Nebenzia, la crise haïtienne est en grande partie le résultat d’une « ingénierie politique externe et de politiques néocoloniales ».  De telles approches ne remédieront certainement pas à la situation, a-t-il averti. 

Pour le représentant, la crise institutionnelle et la violence des gangs en Haïti sont les deux faces d’une même pièce.  Appelant à régler la question de la collusion des cercles politiques et économiques du pays avec les gangs criminels, il a invité le Groupe d’experts du Comité des sanctions du Conseil de sécurité à faire son travail à cet égard. 

M. Nebenzia a également constaté que, face au flux illégal d’armes en provenance de l’étranger, les autorités avaient perdu le contrôle des ports et des points de passage transfrontaliers, librement utilisés par les criminels.  Le représentant a fait observer que la part du lion des armes entrant dans l’île provient des États-Unis, avant de s’inquiéter de l’utilisation croissante d’Haïti comme plaque tournante du trafic de drogues d’Amérique latine et des Caraïbes vers les États-Unis.  Ces trafics sont impossibles sans la participation des partenaires américains des gangs haïtiens, a-t-il estimé.  C’est là qu’il faut intervenir pour « couper les ailes » du crime organisé en Haïti, a suggéré le représentant. 

M. JEAN VICTOR GENEUS, Ministre des affaires étrangères et des cultes d’Haïti, a fait état d’une détérioration considérable de la situation sécuritaire de son pays ces dernières 48 heures.  Les scènes « épouvantables » de violence enregistrées dans les rues de la capitale Port-au-Prince traduisent, selon lui, « la colère extrême d’un peuple qui ne veut plus accepter de subir passivement la violence des gangs ». Face à ce « spectre effrayant », il a appelé à « agir vite avant qu’il ne soit trop tard ». 

Le Ministre a rappelé que son gouvernement a fait sien l’appel du Secrétaire général en faveur du déploiement urgent d’une force armée spécialisée internationale.  Associé au soutien stratégique et consultatif du BINUH pour renforcer les capacités de la police, le déploiement d’une telle force reste essentiel pour aider les autorités nationales à endiguer la violence et les violations des droits humains, à rétablir l’état de droit et à créer des conditions propices à la tenue d’élections crédibles, a-t-il plaidé. 

Dénonçant les différentes exactions qui constituent le « mode opératoire » des gangs criminels dans le pays, le Ministre a averti que ces actes terrifiants affectent également les États voisins et ceux de la région, notamment sur le plan migratoire.  « Haïti est en danger et a besoin de l’aide d’urgence de la grande famille des Nations Unies pour sortir de cette zone de turbulence », a-t-il ajouté, affirmant attendre la concrétisation des promesses de coopération faites au Gouvernement haïtien.  Aussi importantes soient-elles, elles ne suffiront toutefois pas à répondre à la réalité actuelle, a prévenu M. Généus, pour qui l’emploi de la force, comme « première étape », est indispensable pour vaincre les gangs et rétablir l’ordre. 

L’utilisation de cette « violence légitime » ne suffira pourtant pas, à elle seule, à résoudre le problème, a poursuivi le Ministre, qui a appelé à prendre en compte le développement socioéconomique pour s’attaquer durablement à l’extrême pauvreté, « source de tous les maux ».  Il a expliqué cette dernière par un « lourd héritage » résultant d’un ensemble complexe de facteurs socioéconomiques et politiques, sans oublier les épidémies et les catastrophes naturelles.  Alors que l’économie nationale s’est contractée tout au long des cinq dernières années, avec un taux de croissance négatif et une inflation incontrôlable, 4,9 millions de personnes se trouvent aujourd’hui dans l’insécurité alimentaire qui a atteint un niveau record, a-t-il alerté.

M. Généus a noté que le fonctionnement normal des institutions démocratiques était une condition indispensable pour sortir du marasme.  Il a affirmé que le Premier Ministre Daniel Henry entendait avancer « inexorablement » vers le processus de normalisation de la vie politique malgré l’énorme défi sécuritaire.  Il a fait valoir que, conformément à l’accord du 21 décembre 2022 pour un consensus national, le Haut Conseil de transition avait été constitué, la Cour de cassation complétée et le cap mis sur la formation du conseil électoral provisoire, organisme indépendant chargé de la réalisation des élections. 

Évoquant ensuite le régime de sanctions établi par la résolution 2653 (2022), le Ministre a félicité le Comité des sanctions pour le travail déjà accompli et a encouragé le Groupe d’experts à accélérer ses travaux afin de parvenir rapidement à la publication de la liste de tous ceux qui alimentent l’instabilité.  Il a également noté que les sanctions imposées par le Canada, les États-Unis et la République dominicaine commencent à produire des effets encourageants, même si les gangs semblent gagner en puissance. 

Mais, pour rétablir l’ordre public et répondre aux grands défis socioéconomiques, le Gouvernement haïtien mise d’abord sur une aide internationale robuste à la Police nationale d’Haïti, a réaffirmé M. Généus, qui a lancé un appel pressant à la coopération pour aider à la sécurisation du pays et l’accompagner financièrement, à moyen et long terme.

M. ROBERTO ÁLVAREZ GIL, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a décrit une situation intenable qui touche non seulement Haïti, mais aussi son pays, se disant étonné qu’aussi catastrophique soit-elle, cette situation n’ait pas encore réussi à émouvoir ou à sensibiliser ceux qui doivent prendre les décisions finales en faveur des Haïtiens.  Il a notamment dit ne pas comprendre pourquoi il a fallu tant de temps à cet organe vital qu’est le Conseil pour faire le nécessaire et fournir l’aide demandée par Haïti, alors que d’autres pays en crise ont pu bénéficier d’initiatives pour lesquelles l’aide internationale n’a pas eu à emprunter un chemin « aussi sinueux ».  Les pays sont aidés en fonction d’une géométrie variable, a-t-il tranché.

Le Ministre a critiqué l’insuffisance des réponses apportées pour aider le peuple haïtien à retrouver un minimum de normalité.  Dans ce long calvaire, la situation humanitaire s’aggrave à tel point que, selon le dernier rapport du Programme alimentaire mondial (PAM), durant la période allant de mars à juillet prochain, près de 18 millions de personnes risquent de se trouver dans une situation d’insécurité alimentaire, a-t-il rappelé.  Dès lors, s’est-il interrogé, comment rester témoin passif d’une situation humanitaire aussi scandaleuse, où les plus vulnérables, les enfants et les femmes, sont les plus touchés.  Il s’est demandé ce que devaient faire de plus les autorités haïtiennes en termes d’appel à l’aide pour faire face aux bandes criminelles, qui sont les principales responsables de ce désastre humanitaire aujourd’hui.

Le Ministre a fait valoir l’importance du travail du Comité des sanctions créé par la résolution 2653 (2022) concernant Haïti, qui a récemment commencé ses travaux. Ces efforts contribueront sans aucun doute à établir les responsabilités et, espérons-le, à imposer des sanctions efficaces, a-t-il ajouté.  Il a fait observer que son gouvernement avait imposé des interdictions d’entrée à un certain nombre de ressortissants haïtiens afin de sauvegarder sa sécurité et son intégrité territoriale, et soutenir ainsi les efforts du Conseil de sécurité. Il a aussi salué la récente résolution adoptée par le Conseil des droits de l’homme, approuvant la nomination d’un expert indépendant en matière de droits de l’homme pour Haïti.

D’autres mesures sont nécessaires pour mettre un terme définitif à l’insécurité, dont on sait où elle se trouve et comment elle opère, a poursuivi le Ministre, qui a réitéré son appel urgent aux membres du Conseil pour qu’ils prennent toutes les mesures appropriées pour empêcher les flux d’armes et de munitions vers Haïti. 

Si la souveraineté d’un État implique l’obligation de protéger son propre peuple, le Ministre a rappelé qu’en cas de défaillance de celui-ci, cette responsabilité passait à la communauté internationale.  Dans le cas d’Haïti, les autorités haïtiennes ont demandé à plusieurs reprises une force spéciale pour soutenir la Police nationale en proie à des épisodes tragiques qui se répètent sans cesse, a-t-il rappelé.  Alors que la situation à Port-au-Prince est comparable à celle d’un conflit armé interne, toute inaction de la part du Conseil de sécurité équivaudrait à une abdication de sa responsabilité, a conclu le Ministre. 

Au nom des 22 membres du Groupe consultatif ad hoc du Conseil économique et social (ECOSOC) sur Haïti, M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a expliqué que ces pays s’étaient engagés à accompagner le développement socioéconomique à long terme d’Haïti.  Le Groupe consultatif a mis l’accent sur l’importance du rétablissement de la sécurité pour aider à soulager les souffrances des Haïtiens, permettre aux gens de quitter leur domicile en toute sécurité et renforcer la confiance des investisseurs dans le pays. 

Il faut freiner le flux d’armes et de munitions, renforcer la Police nationale d’Haïti et l’état de droit, protéger les droits humains et réduire la violence communautaire, a déclaré le représentant.  Le Groupe consultatif encourage le dialogue politique national inclusif afin de tracer la voie à suivre pour remettre le pays sur la voie de la stabilité et du développement durable, notamment par la tenue d’élections crédibles, libres, justes et transparentes.  La communauté internationale doit agir rapidement pour répondre aux besoins humanitaires immédiats des Haïtiens tout en investissant dans le développement durable du pays pour accroître sa résilience aux chocs futurs, a encore suggéré le représentant.

Pour le Groupe consultatif, des mesures doivent être prises d’urgence pour répondre aux besoins alimentaires d’urgence des Haïtiens, tout en fournissant une aide d’urgence aux moyens de subsistance pour construire un environnement plus résilient et un système alimentaire productif.  Les mesures pour rétablir la sécurité doivent s’accompagner d’efforts pour s’attaquer aux causes de la violence dans le pays en particulier l’extrême pauvreté, la corruption, l’impunité et la collusion entre les sphères politique et économique.  Les sanctions sont un outil important pour aider à briser le pouvoir des gangs armés et le Groupe consultatif encourage les travaux du Comité d’experts et du Comité des sanctions mis en place par la résolution 2653 (2022).  Les solutions à cette crise doivent être trouvées par les Haïtiens eux-mêmes, a conclu le représentant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Combats au Soudan: en présence du Secrétaire général, les appels à un cessez-le-feu durable se multiplient au Conseil de sécurité

9310e séance - soir
CS/15265

Combats au Soudan: en présence du Secrétaire général, les appels à un cessez-le-feu durable se multiplient au Conseil de sécurité

À la demande du Royaume-Uni, le Conseil de sécurité s’est réuni ce soir pour examiner la situation au Soudan, aux prises depuis 10 jours avec des affrontements sanglants consécutifs à une lutte sans merci pour le pouvoir aux graves répercussions politiques et humanitaires pour le peuple soudanais et les pays voisins. De nombreux appels ont été lancés pour le respect du cessez-le-feu de 72 heures en cours et la recherche sans délai d’un règlement pacifique à ce conflit.  Inquiets pour la population civile et les ressortissants étrangers, les intervenants ont invité le Soudan à faciliter l’accès humanitaire. 

Le Secrétaire général de l’ONU était présent à cette séance nocturne aux côtés de son Représentant spécial pour le Soudan, M. Volker Perthes, et de la Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, Mme Joyce Msuya.  « Ces 10 jours de violence et de chaos nous brisent le cœur », a déclaré M. António Guterres, qui a brossé un tableau sombre de ce conflit meurtrier entre les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, qui ravage le Soudan. 

Ce qui se déroule dans le pays depuis le 15 avril est « un cauchemar pour les citoyens ordinaires comme pour les travailleurs humanitaires », a alerté Mme Msuya, qui est aussi Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires, précisant qu’avant même le début du conflit, les besoins humanitaires au Soudan étaient à un niveau record.  Au moins 400 personnes ont été tuées, dont quatre membres de la famille des Nations Unies, et plus de 3 700 autres ont été blessées tandis que des dizaines de milliers ont fui leur foyer, a détaillé M. Guterres décrivant des scènes où les gens sont piégés à l’intérieur de chez eux, terrifiés, avec des réserves de nourriture, d’eau, de médicaments et de carburant qui s’amenuisent. 

Le Secrétaire général a donc exhorté à une cessation immédiate des combats et appelé à déployer tous les efforts nécessaires pour parvenir à la paix. C’est dans cet esprit qu’il a demandé aux parties au conflit, les généraux Abdel Fattah al-Burhan et Mohamed Hamdan Daglo Hemedti, ainsi que les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, de « faire taire les armes ». 

Aujourd’hui, c’est la communauté internationale qui s’exprime d’une seule voix, haut et fort, ont fait valoir les États-Unis, à l’origine de la négociation du cessez-le-feu de 72 heures.

L’ONU et ses partenaires redoublent d’efforts pour faire en sorte que ce cessez-le-feu temporaire se maintienne et se transforme en une cessation durable des hostilités et un retour aux négociations politiques, a assuré M. Perthes, qui est le Chef de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS). 

Malheureusement, comme nous n’avons pas été en mesure d’obtenir une pause ou un cessez-le-feu prolongé depuis le début des combats, le 21 avril, les Nations Unies ont pris la décision d’évacuer et de relocaliser leur personnel hors de Khartoum, du Darfour et ailleurs, a expliqué le Représentant spécial.  Au total, près de 1 200 personnes, dont 744 membres du personnel des Nations Unies et les personnes à leur charge, le personnel des ONG internationales et les personnes à leur charge, ainsi que le personnel diplomatique de plusieurs ambassades ont été transférés à Port-Soudan depuis Khartoum.  Mais tant M. Perthes que Mme Msuya l’ont affirmé: les Nations Unies ne quittent pas le Soudan.

Usant de ses bons offices auprès des belligérants, l’Union africaine (UA) a démontré être à la manœuvre pour une paix pérenne au Soudan.  C’est dans cet esprit que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a convoqué et présidé une réunion internationale urgente de haut niveau le 20 avril, a informé sa représentante.

Le Secrétaire général de l’ONU, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Ligue des États arabes, l’Union européenne, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, les A3 (Gabon, Ghana, Mozambique), les pays voisins du Soudan, ainsi que d’autres membres du Conseil, ont fait pression pour obtenir une reprise urgente du processus politique par le dialogue et la négociation, en vue de la mise en place d’un gouvernement civil inclusif. 

Au cours de cette séance durant laquelle se sont succédé 25 orateurs, dont plusieurs représentants du monde arabe et du continent africain, certains ont fermement rejeté toute forme d’ingérence extérieure.  Cette position a été défendue par le représentant du Soudan, « vivement préoccupé » par l’insistance de certains membres du Conseil d’organiser des réunions pour répondre à leurs « propres intérêts ».  À ceux-là, il a opposé le principe « aux problèmes africains, des solutions africaines », insistant pour laisser le rôle de chef de file à son pays et aux États de la région.  Une position approuvée par la Fédération de Russie, pour qui la crise actuelle est en grande partie la conséquence de l’ingérence dans les affaires souveraines du pays.  De fait, a appuyé la délégation chinoise, les prochaines mesures que prendra le Conseil sur le Soudan devront tenir compte du point de vue de ses membres africains et des organisations de la région. 

En attendant, le mécanisme trilatéral élargi, composé de l’Union africaine, de la MINUATS et de l’IGAD, et des représentants à la réunion de haut niveau du 20 avril, devrait se réunir dans les prochains jours pour discuter des mesures pratiques immédiates concernant les questions liées à la cessation des hostilités envisagée, qui est liée à l’accès humanitaire, a annoncé l’observatrice de l’Union africaine. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déploré le conflit meurtrier qui ravage le Soudan depuis 10 jours, malgré les appels au cessez-le-feu lancés à l’intérieur et de l’extérieur du pays.  Au moins 400 personnes ont été tuées, dont quatre membres de la famille des Nations Unies, et plus de 3 700 autres ont été blessées et des dizaines de milliers ont fui leur foyer, a annoncé M. Guterres.  Les rapports en provenance de Khartoum brossent un tableau dévastateur, s’est inquiété le Secrétaire général, qui a décrit des scènes où les gens sont piégés à l’intérieur de chez eux, terrifiés, avec des réserves de nourriture, d’eau, de médicaments et de carburant qui s’amenuisent. 

Les services de santé sont au bord de l’effondrement et, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), plusieurs hôpitaux sont utilisés par les groupes armés, a dénoncé le chef de l’ONU, qui a signalé des affrontements armés dans tout le pays, ainsi que l’arrivée de réfugiés et de rapatriés au Tchad, en Égypte et au Soudan du Sud, en remerciant les gouvernements de ces pays pour leur soutien. 

« Ces 10 jours de violence et de chaos nous brisent le cœur », s’est ému le Secrétaire général, qui a jugé insupportable d’envisager une guerre prolongée à grande échelle.  Le Soudan, a-t-il rappelé, est limitrophe de sept pays qui ont tous été impliqués dans des conflits ou ont connu de graves troubles civils au cours de la dernière décennie.  De fait, le Soudan est la porte d’entrée du Sahel, où l’insécurité et l’instabilité politique aggravent une situation humanitaire déjà catastrophique.

M. Guterres a brossé un tableau sombre de la situation dans l’ensemble de la région, aux prises avec une pauvreté et une faim endémiques, sans compter l’urgence climatique, la crise mondiale du coût de la vie et la montée en flèche de l’endettement qui font des ravages.  Dans certains endroits, l’aide humanitaire est tout ce qui permet d’éviter la famine, s’est-il désolé. 

La lutte pour le pouvoir au Soudan ne met pas seulement en péril l’avenir de ce pays, a averti le Secrétaire général; elle allume une mèche qui pourrait exploser au-delà des frontières, avec son lot d’immenses souffrances un retard en termes de développement sur plusieurs décennies. 

M. Guterres a donc exhorté à une cessation immédiate des combats et appelé à déployer tous les efforts nécessaires pour parvenir à la paix.  C’est dans cet esprit qu’il a demandé aux parties au conflit, les généraux Abdel Fattah al-Burhan et Mohamed Hamdan Daglo Hemedti, ainsi que les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, de « faire taire les armes ». 

Il incombe aux dirigeants soudanais de placer les intérêts de leur peuple au premier plan, a-t-il ajouté, jugeant que ce conflit « ne sera pas, et ne doit pas être », résolu sur le champ de bataille, avec les corps des enfants, des femmes et des hommes du Soudan. 

Le peuple soudanais a exprimé très clairement ses souhaits: il veut la paix et le rétablissement d’un régime civil par le biais d’une transition vers la démocratie, a déclaré le Secrétaire général, qui a pressé les parties au conflit à respecter le cessez-le-feu de 72 heures négocié par les États-Unis et se réunir pour établir une cessation permanente des hostilités. 

Le Secrétaire général a ensuite demandé instamment à tous les membres du Conseil, aux autres États Membres et aux organisations régionales influentes de faire pression sur les parties pour qu’elles désamorcent les tensions et retournent immédiatement à la table des négociations. 

Les Nations Unies ont reconfiguré leur présence afin de protéger leur personnel et leurs familles tout en restant sur place et en apportant leur soutien au peuple soudanais, a poursuivi le Secrétaire général, qui a ajouté que la direction des Nations Unies au Soudan, dirigée par son Représentant spécial, M. Volker Perthes, restait dans le pays.  L’ONU est en train de mettre en place une plateforme à Port-Soudan pour continuer de travailler avec ses partenaires en faveur de la paix et pour alléger les souffrances humanitaires, a ajouté M. Guterres. 

Le Secrétaire général a rappelé qu’un tiers de la population soudanaise avait besoin d’une aide humanitaire avant même cette nouvelle crise récente et s’est dit convaincu que ce chiffre n’avait pu qu’augmenter fortement après les destructions de ces 10 derniers jours. 

Le Secrétaire général a dit se tenir aux côtés de l’Union africaine, de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) ainsi que des partenaires régionaux et internationaux avant de conclure en affirmant: « et par-dessus tout, nous sommes aux côtés du peuple soudanais ».

M. VOLKER PERTHES, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan et Chef de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), a commencé son propos en rendant hommage aux femmes, hommes et enfants soudanais, y compris le personnel des Nations Unies et les travailleurs humanitaires, qui ont perdu la vie ou ont été blessés dans les combats au Soudan.  Intervenant par visioconférence, il a souligné qu’un cessez-le-feu de 72 heures et un mécanisme d’accompagnement de la communauté internationale et de partenaires soudanais ont été négociés par les États-Unis le 24 avril.  Ce cessez-le-feu temporaire semble jusqu’à présent tenir dans certaines régions, même si des rapports font état de tirs sporadiques ainsi que de mouvements de relocalisation de troupes.  Les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide se sont mutuellement accusées de violer le cessez-le-feu.  À Khartoum, les combats se poursuivent autour du palais républicain, de l’aéroport international, du quartier général des Forces armées soudanaises et des bases des Forces d’appui rapide et d’autres sites stratégiques.  De même, les frappes aériennes et les bombardements intensifs se sont également poursuivis, en particulier à Bahri et Omdurman.  L’aéroport de Khartoum serait désormais opérationnel, mais ses aires de trafic sont endommagées, a—t-il témoigné.

Le Représentant spécial a indiqué que les zones résidentielles à proximité des installations des deux forces font l’objet d’attaques persistantes.  Des maisons, des magasins, des écoles, des installations d’eau et d’électricité, des mosquées, des hôpitaux et d’autres établissements de santé ont été endommagés ou sont maintenant entièrement détruits.  Les informations faisant état d’invasions de domicile, de pillages de maison, de magasin et de voiture aux points de contrôle se sont multipliés.  Il s’agit notamment de maisons et voitures de citoyens soudanais, du personnel des Nations Unies, de travailleurs humanitaires et de la communauté diplomatique. Il a aussi évoqué des rapports inquiétants de tentatives d’agressions sexuelles.  Et alors que les lignes d’approvisionnement s’épuisent et sont détruites lors de frappes aériennes, la peur d’une criminalité accrue monte.  Les informations faisant état de prisonniers libérés des centres de détention de Khartoum ont aggravé ces craintes.

Dans l’État du Nord, a poursuivi M. Perthes, le contrôle de l’aéroport de Merowe reste contesté.  Le groupe de forces égyptiennes capturé par les Forces d’appui rapide a été remis en liberté à l’Égypte.  En outre, la situation dans les régions du Darfour reste instable.  Au Darfour Nord, grâce à un cessez-le-feu local négocié par les autorités de l’État et les dirigeants autochtones, avec le soutien du Comité permanent de cessez-le-feu présidé par la MINUATS, la violence a diminué pendant la période de l’Eïd el-Fitr.  Le cessez-le-feu a été renouvelé et tient toujours.  À l’ouest du Darfour cependant, les combats à Geneina, près de la frontière tchadienne, ont repris et des informations de plus en plus nombreuses évoquent des tribus qui s’arment et se joignent au combat. Nyala, dans le sud du Darfour, continue pour sa part de connaître des combats, bien que des initiatives locales visant au dialogue aient conduit à un calme relatif dans certaines localités. Dans le Kordofan septentrional, il y a eu des combats sporadiques à El-Obeid, alors que dans le Nil Bleu, le 21 avril, des affrontements intercommunautaires ont éclaté entre les Haoussa et les Founj en l’absence des forces de sécurité.  Ces combats ont fait neuf morts et quatre blessés, et 4 500 personnes ont été déplacées, a encore informé le Représentant spécial.  D’autres régions du Soudan, bien qu’épargnées par la confrontation armée, ressentent l’impact des combats.  Plusieurs d’entre elles reçoivent des milliers de personnes déplacées, mais les voies d’approvisionnement sont perturbées, ce qui entraîne des pénuries de carburant.  Dans tout le Soudan, une augmentation significative des prix des produits de base est signalée.  On signale également de plus en plus de voleurs armés aux postes de contrôle sur certaines routes, pillant des civils qui fuient la violence.

M. Perthes a indiqué que les combats au Soudan ont créé une catastrophe humanitaire dont les civils font les frais.  À ce jour, a-t-il relevé, au moins 427 personnes ont été tuées et plus de 3 700 blessées.  Ces chiffres sont des estimations prudentes et augmentent à mesure que les combats se poursuivent.  L’étendue des souffrances, des déplacements, de l’impact sur l’accès humanitaire et médical, les installations et les travailleurs à travers le pays est dévastatrice, a-t-il déclaré.  Dans ce contexte, « la société civile et les réseaux communautaires se sont mobilisés pour combler le vide de la réponse humanitaire.  Plusieurs comités de résistance de quartier ont ainsi créé des salles d’urgence pour fournir des soins de santé de base ».  Au milieu de la violence, les femmes et les hommes soudanais ordinaires continuent de faire preuve de solidarité et de compassion, a-t-il salué. 

Les deux parties belligérantes se sont battues au mépris des lois et des normes de la guerre, attaquant sans discernement des zones densément peuplées, des hôpitaux, des magasins et des voitures civiles transférant des malades, des blessés et des personnes âgées, a déploré le Représentant spécial.  « Ces abus sont inadmissibles et peuvent constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité », a-t-il averti. M. Perthes a exhorté les deux parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et à assurer la protection des civils et des infrastructures civiles. De même, la sûreté et la sécurité du personnel, des locaux et des biens des Nations Unies ainsi que des travailleurs humanitaires et médicaux doivent être assurées.  Il a indiqué avoir poursuivi des contacts réguliers avec les généraux Burhan et Hemedti pour les exhorter à arrêter les combats et à permettre des pauses humanitaires.  Il a jugé dangereuses les informations faisant état de la mobilisation de certaines tribus et certains mouvements armés au Darfour qui prennent parti.  Il a souligné que cela pourrait attirer les pays voisins du Soudan.  Le Représentant spécial a renouvelé son appel à toutes les communautés pour qu’elles maintiennent leur neutralité et s’abstiennent de prendre parti.  Au sujet des deux dirigeants, M. Perthes a dit ne pas voir de signe clair faisant croire que l’un ou l’autre soit prêt à négocier sérieusement.  Ce qui laisse croire, a-t-il dit, que les deux pensent qu’il est possible d’assurer une victoire militaire sur l’autre camp.  « C’est une erreur de calcul », a-t-il tranché, avertissant que le Soudan pourrait devenir de plus en plus fragmenté, ce qui aurait un impact dévastateur sur la région.

Malheureusement, comme nous n’avons pas été en mesure d’obtenir une pause ou un cessez-le-feu prolongé depuis le début des combats, le 21 avril, les Nations Unies ont pris la décision d’évacuer et de relocaliser leur personnel hors de Khartoum, du Darfour et ailleurs.  Je vous parle depuis Port Soudan où se trouvent également actuellement nombre de mes collègues et de nos partenaires d’ONG, a rassuré M. Perthes.  Au total, près de 1 200 personnes, dont 744 membres du personnel des Nations Unies et les personnes à leur charge, le personnel des ONG internationales et les personnes à leur charge, ainsi que le personnel diplomatique de plusieurs ambassades ont été transférés à Port Soudan depuis Khartoum.  Quelques membres du personnel international et les personnes à leur charge se trouvent toujours à Khartoum et n’ont pas été évacués pour diverses raisons.  Nous continuons également à veiller à ce que notre personnel national puisse se réinstaller au besoin dans des zones sûres, a-t-il indiqué.  Le Représentant spécial a déclaré que cette relocalisation et l’évacuation ne signifient pas que l’ONU abandonne le Soudan.  « Nous continuerons à maintenir notre présence au Soudan, même réduite », a-t-il assuré en promettant que l’ONU allait se concentrer sur les priorités immédiates, en coordination avec ses partenaires internationaux.  Ces priorités sont: un cessez-le-feu durable avec un mécanisme de surveillance; un retour aux négociations politiques; et l’atténuation de la souffrance humaine.

L’ONU et ses partenaires redoublent d’efforts pour faire en sorte que le cessez-le-feu temporaire de 72 heures se maintienne et se transforme en une cessation durable des hostilités et un retour aux négociations politiques, a expliqué M. Perthes.  Il a appelé les États Membres exerçant une influence sur les parties belligérantes à soutenir ces efforts.  Il a relevé que des personnalités nationales soudanaises, dont l’ancien Premier Ministre Hamdok, des chefs d’entreprise, des partis politiques et des membres de la société civile se mobilisent contre la guerre et demande instamment un soutien pour un cessez-le-feu et un soutien humanitaire.  Toute la famille des Nations Unies travaillera sans relâche pour mettre fin à la violence au Soudan et restaurer l’espoir d’un avenir meilleur, a-t-il conclu, avant de confirmer que l’engagement des Nations Unies envers le Soudan et son peuple reste inébranlable.

Mme JOYCE MSUYA, Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, a décrit ce qui se déroule dans le pays depuis le 15 avril comme « un cauchemar pour les citoyens ordinaires comme pour les travailleurs humanitaires ».  Les combats doivent cesser, a-t-elle ajouté.

La responsable du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a rappelé qu’avant même le 15 avril, les besoins humanitaires au Soudan étaient à un niveau record, rappelant que 15,8 millions de personnes –un tiers de la population– avaient eu besoin d’aide humanitaire, que 4 millions d’enfants et de femmes enceintes et allaitantes souffraient de malnutrition et que 3,7 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays.

Ce conflit ne fera pas qu’approfondir ces besoins, a déclaré Mme Msuya, qui y a vu aussi le risque d’une nouvelle vague de défis humanitaires, d’autant que les combats entravent et menacent les opérations d’aide.  « Une crise humanitaire se transforme rapidement en catastrophe », a-t-elle averti.

La Sous-Secrétaire générale a fait état d’au moins 400 personnes tuées et plus de 3 700 blessées alors que 20 hôpitaux ont été contraints de fermer, de signalements d’agressions sexuelles et sexistes et a insisté sur les conséquences psychologiques « inimaginables », en particulier pour les enfants.  Elle a enfin annoncé que cinq travailleurs humanitaires avaient été tués, que des entrepôts, bureaux et véhicules avaient été attaqués, pillés ou saisis.  La situation est extrêmement dangereuse et alarmante, a-t-elle résumé.

Notre engagement envers le peuple soudanais reste résolu, affirmé la Coordinatrice adjointe des secours d’urgence.  Elle a reconnu que les acteurs humanitaires avaient dû réduire leur présence dans les zones où les combats sont les plus intenses, mais a affirmé: « Nous ne quittons pas le Soudan. »  Elle a annoncé notamment le maintien d’une équipe de la direction humanitaire à Port Soudan, ajoutant que, « dans la mesure du possible », les opérations humanitaires se poursuivent.  L’OCHA cherche en outre les moyens de reconstituer ses stocks afin de pouvoir fournir de l’aide dès que cela sera possible en toute sécurité, et active en outre un hub à Nairobi, au Kenya, pour soutenir la réponse rapide.

Mme Msuya a dit s’attendre à des afflux de réfugiés dans les pays de la région et a dit avoir reçu des informations sur l’arrivée de « dizaines de milliers de personnes » dans les pays voisins du Soudan.  Remerciant les pays d’accueil elle a jugé essentiel de garder les frontières ouvertes.

Mme Msuya a rappelé les obligations qui incombent aux parties en vertu du droit international humanitaire, y compris l’autorisation d’un passage sûr pour les civils qui quittent les zones d’hostilités, le respect des travailleurs et des ressources humanitaires et faciliter les opérations de secours.

La responsable humanitaire a déclaré aux membres du Conseil de sécurité que ce dont le peuple soudanais a besoin, et dont l’OCHA a besoin pour l’atteindre, « c’est d’un cessez-le-feu immédiat et d’une solution durable à la crise ».  Nous comptons sur vos efforts acharnés à cette fin, a-t-elle conclu.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, de l’Union africaine, s’exprimant au nom du Président de la Commission de l’Union africaine, a indiqué que depuis le début des violences, le 14 avril dernier, l’Union africaine (UA)a publié une déclaration appelant à une désescalade urgente, un cessez-le-feu et un retour à la table des négociations.  De son côté, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a convoqué une réunion d’urgence pour examiner l’évolution inquiétante de la situation au Soudan.  Le Conseil a demandé aux parties soudanaises d’opter pour une solution pacifique et le dialogue, a-t-elle indiqué.  Il a chargé le Président de la Commission de l’UA d’user de ses bons offices pour engager les belligérants. 

C’est également dans cet esprit que le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a convoqué et présidé une réunion internationale urgente de haut niveau le 20 avril, à laquelle ont pris part le Secrétaire général de l’ONU, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Ligue des États arabes, l’Union européenne, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (P5), l’A3, les pays voisins du Soudan, ainsi que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar et la Norvège.  Mme Kyari Mohammed est revenue sur les conclusions auxquelles sont parvenus les participants, citant notamment l’appel à un cessez-le-feu humanitaire immédiat pour permettre l’observation de l’Eïd el-Fitr, en vue d’ouvrir la voie à un cessez-le-feu permanent. 

Les participants, a-t-elle rapporté, ont demandé aux belligérants d’établir des corridors humanitaires et de permettre un accès sans entrave pour répondre aux besoins urgents et immédiats de la population, en particulier les services d’eau et d’électricité, de respecter la sécurité du personnel diplomatique et humanitaire et de rouvrir les infrastructures de transport, telles que l’aéroport international de Khartoum.  En outre, ils ont également appelé à la reprise urgente du processus politique, par le dialogue et la négociation, en vue de la mise en place d’un gouvernement civil inclusif. 

Ils ont fermement rejeté toute forme d’ingérence extérieure, a fait savoir l’Observatrice de l’UA. 

À cet égard, a informé Mme Kyari Mohammed, les participants ont demandé que le mécanisme trilatéral, sous la direction du Président de la Commission de l’Union africaine, soit élargi à la Ligue des États arabes, à l’Union européenne, à la Troïka et aux acteurs bilatéraux, afin d’engager immédiatement les dirigeants des Forces armées soudanaises et des Forces d’appui rapide, ainsi que d’autres parties prenantes.  Le mécanisme élargi, a-t-elle indiqué, devrait se réunir dans les prochains jours pour discuter des mesures pratiques immédiates concernant les questions liées à la cessation des hostilités envisagée, qui est liée à l’accès humanitaire. Toutes ces mesures s’appuient sur les principes directeurs de l’Union africaine, à savoir qu’aucune action militaire ne peut résoudre cette crise et que tout processus politique doit être un processus inclusif contrôlé par les Soudanais.

Poursuivant, Mme Kyari Mohammed a réitéré le « rejet catégorique » de toute ingérence étrangère dans ce qui est déjà une crise dangereuse pour le Soudan, la région et le continent, ainsi que pour les millions de civils innocents qui en sont victimes.  Elle a souhaité également rappeler que la réunion du 20 avril a mandaté à l’unanimité l’Union africaine et l’ONU pour coordonner l’action internationale sur le Soudan afin de mettre fin d’urgence à la violence et à la déstabilisation du Soudan, de la région et du continent, car, a-t-elle averti, « il existe un risque réel d’embrasement régional et même d’internationalisation de ce conflit ».  De fait, « tous les ingrédients sont réunis », a-t-elle insisté, renvoyant, pour finir, les participants à la situation qui prévalait il y a 11 ans en Libye, qui se trouve à la frontière nord du Soudan, où les conséquences de ce conflit se font encore sentir aujourd’hui dans toute la région.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a rendu hommage au travail inlassable du Représentant spécial du Secrétaire général, des agences de l’ONU et des ONG partenaires.  Elle s’est réjouie de ce que l’évacuation et la relocalisation du personnel de l’ONU et du personnel associé aient été couronnées de succès.  Mon pays, a-t-elle confié, a fait de même avec ses ressortissants et son personnel d’ambassade.  La représentante a condamné les hostilités et a appelé à la fin des attaques contre les civils et les travailleurs humanitaires.  Saluant le cessez-le-feu de 72 heures négocié par les États-Unis, elle a regretté que les parties aient une nouvelle fois trahi leur engagement.  Elle les a exhortées à instaurer un cessez-le-feu durable dans l’ensemble du pays et à garantir l’accès humanitaire et la protection des civils, des travailleurs humanitaires et du personnel médical.  Encourageant les efforts diplomatiques de la région, la déléguée a assuré que le Royaume-Uni continuera de travailler avec tous les membres du Conseil de sécurité et avec le Secrétaire général pour obtenir la fin des combats, un cessez-le-feu durable et une solution politique. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a appelé à la cessation des combats et a condamné les affrontements entre les forces armés et les Forces d’appui rapide. Elle a réclamé le respect du cessez-le-feu, de même que l’instauration d’un cessez-le-feu permanent.  La représentante a appuyé les efforts de l’ONU, l’IGAD et la MINUATS pour trouver une solution à la crise, saluant en outre le communiqué du 20 avril de l’ONU, l’IGAD, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et les pays voisins.  Il est temps pour les acteurs du Soudan de nous entendre, a plaidé la représentante, déplorant que les affrontements aient fait plus de 400 victimes parmi les civils ainsi que des milliers de blessés.  Elle s’est également inquiétée des informations faisant état de violence sexuelle à l’encontre des civils.  La représentante a appelé à assurer le départ en toute sécurité des ressortissants étrangers et à venir en aide au Soudanais dans le besoin.  Les attaques contre le personnel et les convois humanitaires ont perturbé des opérations humanitaires vitales et les civils souffrent de pénuries en ressources de base, a-t-elle déploré, réclamant l’acheminement sûr et sans entrave de l’assistance humanitaire aux personnes dans le besoin.  Elle a dénoncé le décès de trois membres du personnel du PAM, relevant que la suspension des activités du Programme se fera durement ressentir sur la population. Mais nous n’avions pas le choix, a-t-elle déploré.  Il faut garantir la reddition de comptes, y compris pour les acteurs politiques et militaires qui tentent de retarder les progrès démocratiques au Soudan.  Il est grand temps de déposer les armes et d’entamer les négociations, a-t-elle préconisé.

M. ZHANG JUN (Chine) a déploré les nombreuses victimes civiles et la destruction des infrastructures lors de la dernière flambée de violence au Soudan. En tant que représentant d’« ami proche du Soudan », il a regretté de voir le pays sombrer de nouveau dans le chaos.  Le représentant a appelé les parties belligérantes à accorder la priorité à l’intérêt général et à mettre fin rapidement aux hostilités afin d’éviter l’escalade.  Les deux parties au conflit, a-t-il rappelé, se sont engagées en faveur d’un cessez-le-feu de 72 heures à partir du 25 avril.  Il a dit compter sur la pleine mise en œuvre de ce cessez-le-feu et a insisté sur la protection des civils et du personnel international et diplomatique. Il a aussi insisté sur un acheminement sécurisé de l’aide humanitaire, avant de saluer la réunion d’urgence de l’Union africaine, le 20 avril dernier, ainsi que la mission de négociation entreprise sous l’égide de l’IGAD.  Il a en outre appuyé l’action de l’ONU qui continue de se coordonner avec l’Union africaine, l’IGAD et d’autres organisations régionales afin d’établir des synergies.  Les prochaines mesures que prendra le Conseil sur le Soudan devront, a-t-il estimé, tenir compte du point de vue de ses membres africains et des organisations de la région.  En conclusion, le représentant a exhorté les parties au dialogue et prévenu que toute ingérence extérieure arbitraire serait contre-productive.  La pleine souveraineté du Soudan doit être respectée, a-t-il martelé. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a qualifié la situation sur le terrain de dramatique et rappelé que les civils, le personnel humanitaire, les hôpitaux et les agents de l’ONU ne doivent jamais constituer des cibles, tout comme les pillages d’entrepôts d’aide humanitaire doivent cesser.  « Les responsables de ces violations devront rendre des comptes », a prévenu la déléguée.  La priorité est de respecter le cessez-le-feu humanitaire accepté par les deux parties: l’interruption des combats est indispensable pour que les civils trouvent refuge et pour répondre à l’urgence, avec la mise en place de couloirs humanitaires.  La déléguée a remarqué que l’aide de l’Union européenne (UE) a déjà été rehaussée en février dernier, de 44 millions à 73 millions d’euros.  Appelant à la consolidation de ce cessez-le-feu immédiat, elle a déclaré que son pays était prêt à accompagner ces efforts avec les acteurs régionaux et internationaux, y compris les Nations Unies, une action collective et coordonnée étant indispensable, compte tenu des risques pour l’unité du pays et pour la stabilité de la région.  Cette crise est un immense recul dans le processus de paix et la transition vers un gouvernement civil, a-t-elle déploré. Préoccupée par l’engrenage des violences à l’échelle nationale et la mobilisation des groupes armés selon des affiliations communautaires, la déléguée a appelé l’ensemble des forces politiques soudanaises à ne pas prendre part aux combats, en condamnant toute tentative d’ajouter à l’instabilité, que ce soit à l’initiative des forces d’ancien régime ou d’« acteurs étrangers ». 

Mme LANA AL NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a demandé à l’équipe de l’ONU de tenir bon, espérant qu’elle est en sécurité.  Mon pays, a-t-elle dit, évacue ses ressortissants ainsi que ceux de 19 autres pays.  Insistant sur la sécurité des civils soudanais, laquelle doit être une priorité, elle a déploré les 400 morts et a estimé qu’il est plus que jamais important de cesser les hostilités et de préserver le cessez-le-feu de 72 heures pour jeter les bases d’une assistance humanitaire indispensable.  La représentante a salué les efforts diplomatiques de la région, priant pour que la crise ne s’étende pas au-delà du Soudan où, a-t-elle dit, près de 10 millions de personnes dépendent de l’aide humanitaire et un tiers des établissements médicaux ne sont plus opérationnels.  La représentante a indiqué que son pays a déjà versé 50 millions de dollars pour l’aide humanitaire d’urgence, affirmant que toute personne évacuée vers les Émirats arabes unis aura de l’aide et un logement.  Nous participons également aux efforts visant à désamorcer la situation, en vue de créer un espace de dialogue, a-t-elle indiqué.  Il ne saurait y avoir de victoire militaire, a-t-elle conclu, en appelant tous les acteurs régionaux et internationaux à œuvrer en faveur d’un cessez-le-feu permanent. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a appelé les parties à protéger les civils prisonniers des combats et à respecter le droit humanitaire international et les droits de l’homme.  À cet égard, le Japon a pris note du dernier accord conclu par les deux parties en conflit pour prolonger le cessez-le-feu de trois jours supplémentaires.  Les exhortant à mettre en œuvre cet accord de bonne foi, le Japon appelle les parties à mettre en place un cessez-le-feu permanent et à revenir à un dialogue pacifique.  « Le Conseil doit parler d’une seule voix. »  Le délégué a salué les efforts déployés par le Secrétaire général, la MINUATS, l’Union africaine et d’autres acteurs internationaux, régionaux et soudanais pour mettre en œuvre le cessez-le-feu humanitaire. Le processus politique dirigé et contrôlé par le Soudan ne doit pas être suspendu: le retour d’un gouvernement de transition dirigé par des civils est le seul moyen de parvenir à la paix et à la prospérité au Soudan, et de permettre au pays de recevoir une aide internationale supplémentaire, a-t-il enfin prévenu.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a déclaré que la communauté internationale ne peut pas permettre aux Forces armées soudanaises et aux Forces d’appui rapide de poursuivre leurs combats, qui ont provoqué une crise au sein de la population civile, faisant à ce jour au moins 427 morts et plus de 3 700 blessés, dont des femmes et des enfants.  Les attaques contre les organisations humanitaires et les infrastructures civiles ont entraîné l’arrêt complet de leurs activités, mettant ainsi en danger les populations les plus vulnérables, s’est-il inquiété.  Le représentant a appelé les deux parties à respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international et du droit international humanitaire, les exhortant notamment à établir des corridors humanitaires et à permettre l’évacuation des civils blessés. De même, il a demandé aux parties de s’engager à garantir la sécurité des civils, des missions diplomatiques et du personnel de l’ONU, du personnel humanitaire et médical, y compris des biens et services humanitaires, afin d’assurer le départ en toute sécurité des ressortissants étrangers du Soudan.

Au nom des A3 (Gabon, Ghana, Mozambique),M. HAROLD A. AGYEMAN (Ghana) a apporté son soutien à l’approche régionale visant à résoudre la confrontation entre les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide. Il a appelé tous les membres du Conseil et les partenaires internationaux du Soudan à soutenir une approche guidée par le proverbe swahili selon lequel « ce n’est pas parce que l’on court que l’on arrive forcément à destination ».  Le représentant a plaidé pour des efforts visant la cessation des hostilités, la désescalade et la protection des civils, y compris les blessés, les fonctionnaires internationaux, les agents diplomatiques et les ressortissants étrangers.  Il a demandé aux deux parties au conflit de coopérer à la mise en œuvre du Communiqué de la Session ministérielle spéciale sur le Soudan, qui s’est tenue le 20 avril, sous les auspices de l’Union africaine.  Il a par ailleurs rejeté toute ingérence étrangère qui compliquerait la situation, affirmant que le Soudan ne devrait pas être un lieu où s’affrontent les intérêts géopolitiques internationaux.  Le délégué a encouragé les États voisins à continuer de jouer un rôle positif et constructif dans la stabilisation du Soudan et demandé aux institutions internationales de travailler avec eux, le cas échéant, pour répondre à l’afflux de réfugiés, dont 20 000 sont au Tchad, s’ajoutant aux près de 400 000 réfugiés que ce pays abrite déjà.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a appelé les deux parties à cesser les hostilités, à rétablir le calme et à reprendre le dialogue vers la transition à long terme vers un gouvernement dirigé par des civils au Soudan.  Elle a déploré toutes les attaques contre des civils, les travailleurs humanitaires et le personnel diplomatique.  Elle a rappelé aux parties leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, et elle les a invitées à assurer un accès humanitaire rapide, sûr et sans entrave.  Une attention particulière doit être accordée aux femmes, aux enfants, aux personnes âgées et aux personnes handicapées pour s’assurer qu’elles ne sont pas laissées pour compte dans la protection et les opérations d’évacuation, a—t-elle plaidé. La représentante a salué les efforts diplomatiques déployés par l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement, la Ligue des États arabes et la MINUATS, pour s’assurer que le dialogue reste essentiel.  Sans la fin de la violence, nous risquons un Soudan déstabilisé, avec des retombées potentielles dans la région et au-delà, a-t-elle averti.

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a salué le fait, qu’hier, les Forces armées soudanaises et les forces de soutien rapide ont déclaré un cessez-le-feu à l’échelle nationale pour trois jours.  « Dans le contexte de plusieurs tentatives infructueuses pour faire taire les armes au cours des derniers jours, voire même des dernières heures, nous demandons aux deux parties de respecter ce cessez-le-feu immédiatement et intégralement. »  Elle a exhorté les deux parties à assumer leur responsabilité en autorisant et en facilitant un accès humanitaire rapide, durable et sans entrave aux civils dans le besoin, et en permettant l’évacuation des blessés. Les deux parties doivent assurer la sécurité et la protection de la population civile, des missions et du personnel diplomatiques, de l’ONU et des agences humanitaires et médicales, ainsi que les biens et services humanitaires, a conclu la déléguée, en rappelant qu’au moins cinq employés humanitaires et un diplomate ont été tués.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a condamné les attaques dirigées contre les travailleurs humanitaires et contre les civils.  Elle s’est fait l’écho des appels lancés par le Secrétaire général et le Représentant spécial pour une reprise du dialogue, et a salué le cessez-le-feu négocié par les États-Unis.  Les conflits armés au Soudan aggravent une situation humanitaire déjà précaire, c’est pourquoi la déléguée a appelé à garantir un acheminement humanitaire sans entrave.  Les parties doivent respecter leur engagement à respecter le droit international humanitaire, a-t-elle insisté, en appelant le Conseil de sécurité à agir.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a déploré la violence qui a éclaté le 15 avril et les combats qui se sont ensuivis, exprimant ses craintes que le conflit puisse se propager à toutes les parties du pays voire à la région. Condamnant la violence perpétrée contre le personnel humanitaire, ainsi que les personnels des missions diplomatiques et des organisations internationales, le représentant a également réitéré que l’assistance humanitaire ne doit pas être politisée. La violence doit prendre fin, a-t-il tranché, avant de se féliciter du cessez-le-feu qui a été négocié avant l’Eïd el-Fitr.  Gardons à l’esprit que la société civile soudanaise était la principale partie prenante dans la progression du Soudan vers une transition et un gouvernement civil légitime avant les affrontements militaires récents, a-t-il déclaré, avant d’encourager le peuple soudanais à persister dans sa quête d’un gouvernement civil. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a exprimé sa vive préoccupation du fait des confrontations armées au Soudan qui ont commencé le 15 avril, disant suivre de près l’évolution de la situation.  Elle a noté que la situation humanitaire se détériore et s’est inquiétée des attaques contre des représentants de missions diplomatiques et d’organisations internationales accréditées à Khartoum. Cette situation difficile ne concerne pas que le personnel de l’ONU et des ressortissants étrangers mais aussi des citoyens soudanais qui méritent une attention égale, a-t-elle précisé.  Elle a salué l’approche responsable des pays qui apportent un appui pour régler la situation.  Selon elle, la crise actuelle est en grande partie la conséquence de l’ingérence dans les affaires souveraines du pays.  La représentante a noté que la situation était déjà difficile, concernant notamment les relations entre l’armée et les Forces d’appui rapide. Elle a constaté en outre que beaucoup d’acteurs extérieurs avaient forcé de façon arbitraire le transfert du pouvoir aux autorisés civiles et avaient imposé une série de décisions inacceptables pour de vastes pans de la société.  Toute une série d’États ont fait la promotion de l’accord-cadre du 5 décembre 2022, mais celui-ci n’a pas été une plateforme inclusive pour les différentes forces du Soudan, a relevé la déléguée en notant que des poids lourds de la politique du pays ont été laissés de côté.  L’envoi d’une aide internationale vitale de l’étranger a été directement conditionnée au transfert de pouvoir aux autorités civiles, a-t-elle ajouté.

La représentante s’est aussi inquiétée des activités de la MINUATS.  Elle a dit avoir indiqué aux responsables de la Mission qu’elles ne devaient pas se concentrer sur l’objectif illusoire de la conclusion d’un accord final aux dépens de toutes les tâches mandatées. La crise soudanaise nous a tous pris au dépourvu, a conclu la déléguée avant de prendre note des efforts de médiation en cours et de l’accord conclu ce week-end pour un régime de cessez-le-feu. Elle a jugé essentiel d’éviter de répéter l’expérience de la Libye où les efforts politiques africains avaient été laissés de côté et où les mesures armées des pays occidentaux avaient fait sombrer le pays dans la catastrophe et avaient déstabilisé la moitié du continent. Tous les médiateurs doivent s’exprimer d’une seule voix, en laissant de côté les intérêts nationaux, a-t-elle recommandé.  Il convient de ne pas transformer ce pays en règlement de compte, a-t-elle ajouté, « notamment après certaines provocations des médias occidentaux ». Elle a aussi confirmé la volonté de la Russie de continuer d’appuyer ce pays ami afin qu’il surmonte ses difficultés et reprenne la voie du développement durable.

M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a déclaré que les événements malheureux qui ont commencé le 15 avril sont le résultat de la rébellion des Forces d’appui rapide contre les Forces armées soudanaises dans certains endroits de Khartoum et dans d’autres villes du pays, afin de prendre le pouvoir au moyen d’un coup d’État militaire.  Les forces rebelles ont ainsi attaqué la résidence du Président du Conseil souverain de transition, le quartier général de l’armée soudanaise, l’aéroport international de Khartoum et d’autres installations stratégiques. Cette attaque a eu lieu le même jour que la réunion prévue entre le Président du Conseil, le commandant en chef de l’armée et le commandant des Forces d’appui rapide afin d’examiner les arrangements techniques en vue de la pleine intégration de ces dernières dans l’armée soudanaise.  Les Forces armées soudanaises se sont ainsi efforcées de préserver le « statu quo » reconnu aux niveaux national, régional et international, a assuré le représentant.  Leur objectif est de limiter les pertes civiles ainsi que la destruction de biens publics et privés tout en délogeant les Forces d’appui rapide des positions qu’elles occupent.  Le Président du Conseil souverain de transition a ensuite pris la décision de dissoudre les Forces d’appui rapide et de les déclarer « forces rebelles », alors même que certaines de ses unités ont été intégrées au sein des Forces armées soudanaises. 

Le représentant a indiqué que les dirigeants soudanais ont répondu à l’appel du Secrétaire général à une trêve de trois jours à l’occasion l’Eïd al-Fitr afin d’assurer l’évacuation sécuritaire des civils, du personnel des missions diplomatiques et des organisations régionales et internationales.  Il a ajouté que le Ministère des affaires étrangères a reçu de nombreux rapports de missions diplomatiques et d’organismes de l’ONU indiquant que leurs bureaux et leurs employés ont été attaqués ou intimidés par les rebelles.  Dans ce contexte, les autorités soudanaises ont renforcé la sécurité dans les quartiers diplomatiques.  Le Président du Conseil souverain de transition a par ailleurs accepté de faciliter l’évacuation des ressortissants étrangers et des missions diplomatiques présentes dans le pays.  Le représentant a exprimé sa reconnaissance face aux efforts déployés par les organisations régionales afin d’apaiser la situation dans le pays, en particulier l’IGAD, l’Union africaine et la Ligue arabe.  Il s’est toutefois dit « très préoccupé par l’insistance de certains membres du Conseil à organiser des réunions du Conseil afin de répondre à leurs propres intérêts nationaux qui n’ont rien à voir avec les intérêts du Soudanais ».  L’Union africaine, a-t-il rappelé, a clairement appelé à éviter toute ingérence externe dans une question interne.  Le Soudan, a-t-il ajouté, croit au principe des « solutions africaines aux problèmes africains ». 

Le Soudan est déterminé à faire respecter le processus de transition politique, à adhérer au dialogue, à cesser les hostilités et à accepter les efforts de médiation régionale.  Alors que le Soudan demeure inscrit à l’ordre du jour du Conseil de sécurité depuis 18 ans, le représentant a estimé que son pays a consenti de nombreux efforts pour dialoguer positivement avec le Conseil, notamment en participant aux réunions de la Cour pénale internationale (CPI).  Il a demandé au Conseil de trouver un « équilibre » dans son approche de la situation actuelle du Soudan, qui ne saurait selon lui être qualifiée de guerre civile.  « Les événements actuels ne se seraient pas produits si la communauté internationale avait honoré ses engagements de fournir l’appui financier requis pour l’achèvement des opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion au Darfour », a considéré le représentant. 

S’agissant de la situation humanitaire, le représentant a reconnu que les affrontements ont entraîné le déplacement de nombreux civils et la détérioration de leurs conditions de vie.  Les autorités compétentes profitent de la trêve pour améliorer la situation humanitaire en fournissant une assistance aux personnes touchées et en améliorant les services de base tels que les soins de santé et l’accès à l’électricité.  « Malgré tout, le Soudan demeure un État uni qui s’acquitte de ses fonctions avec responsabilité », a assuré le représentant.  « Nous n’avons pas déclaré l’état d’urgence et la situation n’a pas contaminé les autres pays de la région. »  Nous comptons sur le Conseil pour qu’il comprenne la situation et qu’il octroie au Soudan le soutien dont il a besoin pour parvenir à de véritables progrès permettant de rétablir la situation dans le pays, a-t-il conclu. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a exprimé sa pleine solidarité avec les Soudanais dans la nouvelle crise que traverse leur pays.  Il a assuré que l’Égypte est prête à offrir tout l’appui nécessaire pour aider le Soudan à sortir de cette crise et prévenir un bain de sang.  Déplorant les victimes civiles, la reprise des combats armés et les violations du cessez-le-feu, il a appelé les parties au conflit à entendre la voix de la sagesse et à cesser leurs affrontements qui mettent en danger les Soudanais et les ressortissants étrangers.  Dans l’immédiat, le représentant a formé le vœu que le cessez-le-feu déclaré hier sera maintenu et respecté.  L’Égypte, a-t-il précisé, mène des contacts avec toutes les parties prenantes nationales et régionales pour tenter de trouver une issue à cette crise.  Elle collabore également à l’échelle régionale pour évacuer les ressortissants égyptiens et étrangers.  Après avoir salué l’ONU et la MINUATS pour leurs efforts, il a souligné que le conflit actuel est une affaire intérieure au Soudan. Il a donc mis en garde contre toute intervention étrangère, qui selon lui ne ferait qu’aggraver la situation. Il faut éviter la répétition d’expériences du passé, qui ont débouché sur la déstabilisation de pays, en Afrique et ailleurs, a fait valoir le délégué, avant d’appeler à préserver la cohésion des institutions étatiques soudanaises et à renouer un dialogue national en vue de parvenir à un processus politique inclusif.  Enfin, après avoir rappelé les souffrances endurées par le peuple soudanais en raison de l’effondrement de l’économie nationale, il a averti que ce conflit pourrait encore alourdir le fardeau du pays.  Il importe à ses yeux que la communauté internationale anticipe cette possibilité et prévoit une réponse aussi rapide que possible.  Pour sa part, l’Égypte déploie tous les efforts pour contribuer au rétablissement de la paix et de la sécurité et est disposée à travailler avec toutes les parties prenantes pour désamorcer cette crise. 

M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) s’est exprimé d’abord au nom du Groupe des ambassadeurs de l’IGAD à New York.  Il a pris note des conflits en cours au Soudan, qui ont fait des victimes parmi les civils, et a invité les parties à entendre l’appel à cesser les hostilités sans conditions.  Il a cité à cet égard les conclusions de la session extraordinaire de l’IGAD, qui s’est tenue il y a quelques jours sous format virtuel, et les décisions rendues par la cent quarante-neuvième session de l’UA sur la situation.  Il a lancé un appel pour que les parties embrassent rapidement une solution pacifique et respectent les choix du peuple soudanais pour un retour à la démocratie et le rejet de toute ingérence.  Il a lancé un appel à tous les parties et acteurs pour qu’ils rallient les efforts régionaux et internationaux pour faciliter les visites à Khartoum des présidents de Djibouti, du Kenya et du Soudan du Sud, qui sont prêts à relancer les pourparlers entre les parties dès que les conditions sécuritaires le permettront.  Il a salué l’annonce d’une trêve de trois jours en réponse à l’appel du Secrétaire général, ainsi que la négociation par les États-Unis d’un cessez-le-feu de 72 heures, qui commençait aujourd’hui à minuit, pour permettre un accès humanitaire.  Il a espéré que les parties s’en tiendront aux termes du cessez-le-feu et travailleront de bonne foi avec les négociateurs afin de parvenir le plus vite possible à un cessez le feu permanent.  Il a plaidé pour un règlement selon le principe « à problème africain, solution africaine », réaffirmant sa solidarité envers le peuple soudanais.

À titre national, le représentant a dit que Djibouti est honoré d’avoir servi de « hub clef » pour l’évacuation du personnel et des ressortissants de pays amis et s’est dit ravi de voir que ces opérations ont été efficacement menées, grâce à un travail d’arrache-pied pour que ces opérations se déroulent dans les meilleures conditions.  Il a eu une pensée émue pour les Soudanais et les Soudanaises impactés et s’est inquiété des difficultés d’accès à l’eau, à la nourriture, à l’électricité et aux médicaments.  Il s’est dit cependant encouragé par la disponibilité des Nations Unies, des partenaires bilatéraux et des autres acteurs humanitaires pour y répondre de manière prompte et coordonnée.  Il a enfin réaffirmé sa solidarité sans faille envers le peuple soudanais. 

M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie) a appuyé tout effort pour que le Soudan revienne à la stabilité, en espérant que le processus entamé avec l’IGAD et l’Union africaine permettrait de régler les différends.  Il a aussi fermement insisté sur l’appui de la communauté internationale pour que ce problème africain soit réglé par des Africains.  Évoquant les bonnes relations économiques entre le Soudan et son pays, le délégué éthiopien s’est dit convaincu que les ressortissants éthiopiens présents au Soudan seraient traités avec la gentillesse coutumière au Soudan.  Prêt à garantir tout l’appui aux Soudanais dans le besoin, il a salué un cessez-le-feu constructif et positif, qui rouvrira la voie vers le dialogue. Appelant enfin le Conseil de sécurité à faire preuve de sagesse, il a rappelé que le Soudan avait besoin de l’appui constant de la communauté internationale, à qui il a recommandé de s’abstenir de toute ingérence et de respecter la souveraineté du Soudan.

M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a rappelé que son pays, qui partage une longue frontière avec le Soudan, risque d’être touché directement par la crise dans ce pays, précisant en outre que 10 millions de ressortissant sud-soudanais se trouvent au Soudan.  Il a indiqué que le Soudan du Sud a ouvert ses frontières et qu’en date d’hier 10 000 personnes ont été accueillies, y compris des ressortissants d’états tiers. Il a appelé les voisins du Soudan à ouvrir eux aussi leurs frontières aux personnes fuyant le conflit.  De même, il a fait savoir que son pays est prêt à accueillir toute organisation internationale qui pourrait envisager de se déplacer du Soudan.  Le représentant a indiqué que depuis l’éclatement du conflit, le Président Salva Kiir a lancé un appel en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et de la reprise du processus de négociation.  Il a également assuré que le Chef d’État sud-soudanais est en contact quotidien avec le Président du Soudan et le Commandant des Forces d’appui rapide. 

Poursuivant, le délégué a appelé à ouvrir des couloirs humanitaires et à permettre aux dirigeant de l’IGAD de se rendre à Khartoum dans l’espoir d’amener les parties à la table des négociations.  Il a aussi appelé la communauté internationale a appuyé l’appel de l’IGAD pour trouver une issue à la crise.

M.  ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a regretté les circonstances exceptionnelles que connaît aujourd’hui le « peuple frère » du Soudan.  Il a déploré les morts et les blessés et présenté ses condoléances aux familles des victimes et à l’Égypte qui a perdu un membre de son personnel de l’Ambassade. Nous renouvelons, a dit le représentant, notre appel à la fin des hostilités, à la désescalade, à la protection des civils et à un retour à l’accord-cadre pour parvenir à un accord de paix définitif. Le représentant a aussi plaidé pour des couloirs humanitaires et la facilitation des opérations d’évacuation. Il a d’ailleurs indiqué que son pays œuvre pour le retour à la paix et la relance du dialogue sur un cessez-le-feu permanents.  Ces efforts de médiation sont menés par le Ministre saoudien des affaires étrangères et en attendant leur succès, l’Arabie saoudite a répondu favorablement aux demandes d’évacuation.  Sa marine royale a commencé la première opération en faveur de centaines de Saoudiens et de ressortissants de pays frères et amis.  À cet égard, le représentant a salué la coopération des autorités soudanaises. 

Mme MATH JOYINI (Afrique du Sud) a regretté les souffrances indicibles pour les personnes prises dans l’étau de cette situation insoutenable.  Elle a appelé les parties belligérantes à répondre à l’appel au cessez-le-feu et à utiliser le temps qui leur est donné pour créer les conditions d’un dialogue diplomatique pour résoudre leur différend. « Personne ne pourra gagner ce conflit. »  Elle a salué ceux qui œuvrent sans relâche pour les évacuations et a appelé les parties à garantir un passage sans heurt vers des lieux sûrs.  Le cessez-le-feu temporaire pour l’évacuation fournit un soulagement de court terme mais il faut une solution pérenne, a-t-elle poursuivi. La représentante a dit appuyer les efforts de l’UA, de l’IGAD et de la Ligue des États arabes, qui œuvrent pour la paix, saluant aussi ceux du Secrétaire général de l’ONU.  Elle a déploré la destruction de biens et l’assassinat d’innocents, disant en conclusion se tenir en solidarité avec le peuple du Soudan alors qu’il cherche une paix pérenne.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité de l’information: appels soutenus au multilinguisme en tant qu’outil de lutte contre la désinformation

Quarante-cinquième session,
2e & 3e séances, matin & après-midi
PI/2310

Comité de l’information: appels soutenus au multilinguisme en tant qu’outil de lutte contre la désinformation

Le premier jour du débat général du Comité de l’information a de nouveau suscité de vibrants plaidoyers en faveur du multilinguisme, à la fois dans la communication de l’ONU sur toutes ses plateformes, mais également dans les processus de négociations intergouvernementales et dans la documentation. 

Le Groupe des 77 et la Chine ont insisté sur l’importance du respect du multilinguisme et de la diversité culturelle en encourageant le Département de la communication globale (DCG) à mobiliser des ressources adéquates, y compris des contributions volontaires, pour le promouvoir afin de maximiser la portée de la communication de l’ONU, en particulier au niveau local.  D’autres délégations ont fait valoir que le multilinguisme revêt une importance significative dans la lutte contre la désinformation, exhortant en outre à ne pas perdre de vue sa contribution inestimable à l’efficacité de l’action multilatérale.  Comme l’a remarqué l’Union européenne, promouvoir l’éducation aux médias, lutter contre la manipulation et la désinformation et expliquer le travail de l’ONU sur tous les continents nécessitent un traitement égal des six langues officielles.  Le multilinguisme est à la fois une valeur fondamentale de l’ONU et une condition de son efficacité et de sa transparence, a souligné la délégation.  

Rebondissant sur ce constat, le Groupe des Amis de la langue espagnole, par la voix de Cuba, a demandé au DCG d’éviter les traductions automatiques, l’appelant à produire des contenus dans la langue d’origine, en respectant la parité entre les six langues officielles de l’Organisation.  Le Groupe a également souligné la nécessité de répondre à l’intérêt croissant des populations hispanophones pour le travail des Nations Unies, relevant que la version hispanophone d’ONU Info en espagnol a été le plus visité des neuf sites Web d’ONU Info. 

Sur la problématique de la désinformation, les délégations ont été nombreuses à exprimer leur appui à l’appel du Secrétaire général d’élaborer un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques afin de garantir la responsabilité des autorités publiques et des acteurs privés.  Cette question tient notamment à cœur aux pays contributeurs de troupes et de contingents car, comme l’a remarqué Madagascar, la désinformation tend à saper la confiance dans les Nations Unies et menace la sécurité des contingents.  La Fédération de Russie a toutefois souhaité savoir qui finance cette initiative et a appelé à veiller à assurer l’inclusivité et la transparence dans le cadre de ce processus. 

Alors que se préparent les consultations intergouvernementales qui conduiront à l’adoption de ce code de conduite, Djibouti, au nom du Groupe des ambassadeurs francophones, a dit être particulièrement attentif au respect du multilinguisme lors des consultations en souhaitant notamment que les informations et la documentation relatives à ce processus soient publiées dans les six langues officielles, et que les sessions de consultations bénéficient des services d’interprétation afin de garantir la participation et la contribution de tous les États Membres.

Cette première journée du débat général du Comité a également été marquée par un virulent face à face entre les pays occidentaux et la Fédération de Russie qui était représentée par la Porte-parole du Ministère des affaires étrangères russe, Mme Maria Zhakarova, dont la présence au sein du Comité a été dénoncée à plusieurs reprises.  À l’origine de ces échanges nourris se trouve la question de l’octroi trop tardif par le pays hôte de visas aux journalistes russes qui devaient accompagner la venue à l’ONU de la délégation du Ministre des affaires étrangères russe qui a présidé hier et aujourd’hui le Conseil de sécurité. Selon Mme Zhakarova, ces visas auraient tellement tardé que les journalistes concernés ont fini par rater le dernier vol, ce qui était délibéré. 

La délégation russe a accusé « l’Occident » de discrimination à l’égard des médias russes, et de chercher à museler les points de vue alternatifs aux leurs. Pour étayer son argument, Mme Zhakarova a parlé d’interdictions et de blocages à caractère politique qui ont principalement touché les médias russes, avant de dénoncer le silence des délégations occidentales face aux assassinats de journalistes russes perpétrés avec la complicité des services de renseignements des autorités de Kiev. 

Les allégations de non-délivrance de visas ont été rejetées en bloc par les États-Unis qui ont dit prendre très au sérieux leurs obligations à titre d’État hôte des Nations Unies, accusant en outre la représentante russe de chercher à détourner l’attention de l’agression brutale que mène la Russie contre le peuple ukrainien.  « La Russie abuse du système onusien », s’est insurgée l’Union européenne en relevant la « triste ironie » de voir que l’une de ses principales propagandistes de guerre représente aujourd’hui la Russie à ce Comité.

Rappelant pour sa part que le Tribunal de Nuremberg a poursuivi en justice non seulement les responsables politiques nazis mais également des diplomates, le représentant de l’Ukraine a prédit que la propagande et la justification des effusions de sang par les représentants de la Fédération de Russie les mèneront un jour devant des tribunaux. 

Au nom des pays baltes, la Lettonie a par ailleurs regretté que les trois rapports du Secrétaire général soumis pour examen à la présente session du Comité qualifient l’agression russe de « conflit armé en Ukraine » ou de « situation de conflit », notant que les six résolutions de l’Assemblée générale relatives à l’agression de la Russie contre l’Ukraine, emploient les termes « agression », « invasion » ou encore « guerre contre l’Ukraine ». 

Le Comité de l’information poursuivra ses travaux demain, mercredi 26 avril, à partir de 10 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL

Déclarations

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL (Cuba), qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et la Chine, a fait valoir que la tendance croissante des informations fallacieuses et de la désinformation sur les plateformes en ligne, y compris sur les médias sociaux, exacerbe la discorde sociale, les nationalismes concurrents, la discrimination et le discours de haine et a contribué à la montée du racisme, de la xénophobie, des stéréotypes négatifs et de l’intolérance. Il a demandé au DCG d’intensifier son soutien aux efforts du système des Nations Unies dans la lutte contre la désinformation et les fausses informations saluant notamment la préparation d’un code de conduite mondial qui promeut l’intégrité dans l’information publique. Il a appelé à mettre davantage l’accent sur la diffusion d’informations factuelles, claires, multilingues et fondées sur des données scientifiques sur toutes les plateformes.  Dans ce contexte, on ne saurait trop insister sur l’importance pour le DCG de veiller à ce que toutes les nouvelles et les alertes soient exactes, impartiales et sans parti pris, a-t-il insisté. 

Le représentant s’est inquiété des disparités numériques qui apparaissent comme une nouvelle forme d’inégalité entre et au sein des États, notant que le fossé numérique entre les pays développés et les pays en développement se creuse de plus en plus.  Le DCG est bien placé, de son avis, pour combler ce fossé dans le domaine crucial de l’information et de la communication publiques.  Cela est impératif pour permettre la transition mondiale vers des économies nationales modernes et efficaces et une coopération internationale effective, a-t-il fait valoir, y compris une économie numérique et une connectivité inclusive.  Le représentant du Groupe des 77 et la Chine a également insisté sur l’importance du respect du multilinguisme et de la diversité culturelle et a encouragé le DCG à mobiliser des ressources adéquates, y compris des contributions volontaires, pour promouvoir le multilinguisme afin de maximiser sa portée au niveau local. Il a également demandé au Département de renforcer le réseau de centres d’information des Nations Unies, tout en menant à bien le processus de rationalisation de ces centres en consultation avec les pays desservis par ces centres et d’autres pays intéressés de la région. 

M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba), au nom du Groupe des Amis de la langue espagnole, dont son pays assure la présidence, a rappelé que celui-ci plaide pour la pleine mise en œuvre de cette langue dans les travaux de l’Organisation, ainsi que pour la défense du multilinguisme en tant que valeur fondamentale et principe de travail transversal.  Pour le Groupe, le développement et la planification de contenus devraient se faire de manière équitable entre les différentes langues officielles.  Il a donc demandé au DCG d’éviter les traductions automatiques, l’appelant à produire des contenus dans la langue d’origine, en respectant la parité entre les six langues officielles de l’Organisation. 

Le représentant a exprimé son inquiétude quant au contenu du DCG relatif au multilinguisme, en particulier sur le site Web et les réseaux sociaux.  Si des changements ont été apportés au site qui reflètent plus fidèlement le multilinguisme, ce n’est pas toujours le cas dans certains des messages véhiculés par les différents comptes de réseaux sociaux de l’ONU, a-t-il regretté. Par ailleurs, le délégué a recommandé la production de campagnes et de contenus ciblés pour sensibiliser différents publics grâce à l’utilisation innovante de plateformes numériques qui favorisent une plus grande accessibilité.  De plus, il s’est inquiété de l’existence de différences substantielles dans les contenus des six langues officielles sur le site Web de l’Organisation, considérant particulièrement grave que le site Web de l’ONU destiné à la société civile ne soit disponible qu’en anglais. C’est précisément la société civile, dans toute sa diversité, qui doit pouvoir accéder à cette information dans les six langues officielles afin de garantir son inclusion et sa participation aux travaux de l’Organisation, a argué le représentant. 

Il a rappelé que la version espagnole du site de l’Organisation a enregistré quelque sept millions de pages vues entre le 1er juillet et le 15 novembre 2022, soit une hausse de 10,8% par rapport à la même période en 2021.  Le nombre d’utilisateurs a augmenté de 12,8% pour atteindre 4,2 millions, ce qui témoigne d’une tendance à long terme de croissance soutenue.  En outre, pour la troisième année consécutive, le site Web d’ONU Info en espagnol a été le plus visité des neuf sites Web d’ONU Info entre juillet 2021 et novembre 2022, soulignant la nécessité de répondre à l’intérêt croissant des populations hispanophones pour le travail des Nations Unies, a encore plaidé le délégué. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a dit apprécier les campagnes de communication de plus en plus percutantes menées par le DCG depuis l’introduction, en 2020, de sa stratégie de communication mondiale.  L’épidémie de choléra en Haïti, la situation dramatique des femmes et des filles afghanes ou encore l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire sont des exemples récents de « l’agilité et de l’efficacité accrues » du Département dans l’élaboration de communications en temps de crise.  S’agissant de l’action climatique, de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) et du respect des droits humains, il a estimé que les messages du Secrétaire général sur l’urgence d’agir doivent être transmis par l’ensemble du système onusien.  Le délégué a encouragé à cet égard le DCG à prendre des mesures supplémentaires pour s’assurer que l’ensemble du système des Nations Unies utilise systématiquement, dans toutes ses communications, la terminologie des résolutions adoptées par l’Assemblée générale, en particulier concernant les violations graves de la Charte des Nations Unies. 

Le représentant a salué les efforts du Département visant à associer les jeunes à plusieurs événements de haut niveau organisés cette année, y compris le Sommet sur les ODD et le Sommet de l’avenir. Le fait que les 18-24 ans constituent désormais le plus grand groupe d’audience sur les plateformes multimédias des Nations Unies est très prometteur à cet égard. Le DCG joue en outre un rôle clef pour faire de l’ONU une source d’information fiable dans un environnement médiatique « hautement pollué ».  L’agression de la Russie contre l’Ukraine constitue selon lui un exemple flagrant de manipulation de l’information et de désinformation au sein même des réunions officielles de l’ONU, y compris au Conseil de sécurité.  « La Russie abuse du système onusien », a martelé le représentant, en notant la « triste ironie » que l’une de ses principales propagandistes de guerre représente aujourd’hui la Fédération de Russie au Comité.  Dans cette optique, le délégué a exprimé son appui à l’élaboration d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques afin de garantir la responsabilité des autorités publiques et des acteurs privés.  Promouvoir l’éducation aux médias, lutter contre la manipulation et la désinformation et expliquer le travail de l’ONU sur tous les continents nécessitent un traitement égal des six langues officielles, a-t-il ajouté, en notant que le multilinguisme est à la fois une valeur fondamentale de l’ONU et une condition de son efficacité et de sa transparence.

M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti), qui s’exprimait au nom du Groupe des ambassadeurs francophones, a précisé que ce groupe a notamment pour objectif de consolider le multilinguisme à l’ONU.  Le multilinguisme apporte en effet une contribution inestimable à l’efficacité de l’action multilatérale, a estimé le représentant qui a relevé que les manquements dans la mise en œuvre intégrale du multilinguisme au niveau des organes et du Secrétariat nuisent à l’égale participation des États Membres aux discussions internationales.  Il a rappelé la dernière résolution sur le multilinguisme adoptée par consensus par l’Assemblée générale le 10 juin 2022 et a demandé au DCG de veiller à un emploi équilibré des six langues officielles sur l’ensemble des sites Web du Secrétariat en vue de supprimer le décalage entre l’emploi de l’anglais et des cinq autres langues.  Le représentant a également invité le Secrétariat à assurer l’application cohérente, par toutes ses entités, des normes minimales pour le multilinguisme sur l’ensemble des sites Web de l’ONU, et à rétablir le nécessaire équilibre entre les six langues dans les contenus produits pour les médias sociaux.  Une communication équilibrée dans les six langues officielles est essentielle afin d’atteindre les peuples, notamment en français, langue parlée sur l’ensemble des cinq continents, et langue de travail du Secrétariat, a insisté le Président du Groupe en évoquant la progression constante du nombre de locuteurs francophones. 

Il a également argué que le multilinguisme revêt une importance significative dans le domaine de la lutte contre la désinformation.  À ce sujet, il a invité le Secrétariat à poursuivre son action dans ce domaine et à nouer des partenariats avec les initiatives francophones, à l’instar de la Plateforme francophone des initiatives de lutte contre la désinformation (ODIL). Alors que se préparent les consultations intergouvernementales qui conduiront à l’adoption d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques, les ambassadeurs francophones seront particulièrement attentifs au respect du multilinguisme lors des consultations, a-t-il indiqué. Il a souhaité que les informations et la documentation relatives à ce processus soient publiées dans les six langues officielles, et que les sessions de consultations bénéficient des services d’interprétation afin de garantir la participation et la contribution de tous les États Membres. 

Le représentant a par ailleurs encouragé le renforcement des canaux traditionnels de communication, notamment par la Radio des Nations Unies, dans la diffusion d’informations auprès des populations locales, dans les langues officielles comme dans les langues locales.  Il a aussi appelé à poursuivre les efforts déployés dans le cadre des centres d’information des Nations Unies afin de sensibiliser le plus grand nombre sur l’action de la communauté internationale, là encore dans les langues officielles de l’ONU et dans de nombreuses autres langues.  Il a ensuite dit attendre l’adoption du cadre d’action stratégique pour le multilinguisme qui aura vocation à soutenir l’intégration du multilinguisme dans l’ensemble des processus onusiens.

Au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a salué les efforts déployés par le DCG pour lutter contre la désinformation et la mésinformation, à l’aide d’initiatives telles que la campagne Verified , qui a touché plus de 18 millions de personnes dans le monde.  Il a cependant encouragé le Département à continuer d’utiliser des moyens de communication traditionnels tels que la télévision, les documents imprimés et la radio, qui sont disponibles dans de nombreux pays en développement où l’accès à Internet demeure limité.  L’adoption d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques permettrait selon lui de promouvoir la transparence et la sécurité dans les médias sociaux.  La fourniture d’informations exactes, impartiales et multilingues est un service crucial pour le public international, compte tenu de la diversité linguistique des États Membres et de leurs divers degrés de développement numérique. De même, les centres d’information des Nations Unies jouent un rôle important dans l’élaboration de stratégies de communication de crise dans les langues locales afin d’atteindre les populations les plus vulnérables.  Des discussions sont d’ailleurs en cours entre le DCG et le Gouvernement angolais en vue de mettre en place, à Luanda, un centre d’information à l’intention des pays africains lusophones, a annoncé le délégué.  À l’approche de la Journée mondiale de la langue portugaise, le 5 mai prochain, il a encouragé le DCG à renforcer son approche multilingue dans la promotion des principes et du travail des Nations Unies en portugais et dans d’autres langues non officielles de l’Organisation.

Au nom des pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), M. ANDREJS PILDEGOVICS (Lettonie) a accusé la Fédération de Russie de répandre partout sa campagne de « désinformation massive », y compris à l’ONU, car l’information est pour ce pays « un outil de guerre ».  La Fédération de Russie a recours à la désinformation et à la propagande pour tenter de justifier son agression armée et ses crimes de guerre contre l’Ukraine, après avoir pendant des années utilisé la « manipulation de l’information et le révisionnisme historique » pour « laver le cerveau » des populations. De même, la Fédération de Russie continue d’imposer la censure et la répression des médias indépendants à l’intérieur de ses propres frontières, créant un « vide informationnel » propice à sa propagande de guerre, à son discours de haine et à son incitation à la violence au moyen d’une rhétorique génocidaire et de messages déshumanisants à l’encontre des Ukrainiens.  Le représentant a jugé « scandaleux » que la principale propagandiste du « régime » russe, Mme Maria Zakharova, sanctionnée par l’Union européenne, représente la Fédération de Russie au sein de ce Comité.  Des campagnes de désinformation sont également menées en Afrique, en Amérique latine et au Moyen-Orient pour justifier son agression contre l’Ukraine, ainsi que contre les missions de maintien de la paix de l’ONU et les missions de l’Union européenne. Les « soi-disant » tribunaux russes condamnent des personnes à 25 ans de prison pour avoir exercé leur liberté d’expression, comme ce fut le cas pour l’homme politique Vladimir Kara-Murza.  De nombreux journalistes indépendants ont ainsi été contraints de quitter la Russie en raison de la législation sur les « agents étrangers » et la loi sur les « fake news », qui criminalisent les reportages indépendants sur la guerre. 

Pour mettre un terme à cette situation, le représentant a demandé que le système des Nations Unies utilise dans ses communications la terminologie appropriée, issue des six résolutions de l’Assemblée générale relatives à l’agression de la Russie contre l’Ukraine, y compris les termes « agression », « invasion » ou « guerre contre l’Ukraine ».  Il a regretté à cet égard que les trois rapports du Secrétaire général soumis pour examen à la présente session du Comité qualifient l’agression russe de « conflit armé en Ukraine » ou de « situation de conflit ».  L’ONU devrait, selon lui, utiliser tous ses moyens de communication, en particulier en langue russe, pour diffuser des informations sur la guerre contre l’Ukraine, et redoubler d’efforts pour combattre la désinformation.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a vu dans les centres d’information des Nations Unies (CINU) la principale source d’information sur le système des Nations Unies dans les pays où ils sont situés.  Elle a encouragé la poursuite de la coordination et de la collaboration entre les pays hôtes, les équipes de pays des Nations Unies et les CINU pour la diffusion de messages prioritaires complets, précis et informatifs sur les activités et programmes de l’Organisation, rappelant que son pays accueille le centre d’information de Pretoria.  La représentante a estimé qu’à l’heure de la désinformation et de la mésinformation, il est essentiel que les contenus soient diffusés dans les langues locales auprès d’un large éventail de personnes, notamment les journalistes, les fonctionnaires, les représentants de la société civile, les étudiants, les éducateurs et les chercheurs. Elle s’est inquiétée de l’augmentation de la désinformation et des fausses informations ciblant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, déplorant leur impact négatif sur la sécurité des Casques bleus.  La représentante a mis en avant l’importance de la communication stratégique dans un paysage de communication en évolution rapide avant de demander au DCG de continuer à fournir un contenu précis et fiable.  Pour ce faire, il est essentiel de communiquer les nouvelles et les informations dans les langues locales et en coordination avec les autorités nationales afin de gérer les attentes et d’instaurer la confiance parmi les populations locales et toutes les parties prenantes concernées, a-t-elle souligné. 

Préoccupée par la fracture numérique au sein des nations et entre elles, la représentante a par ailleurs jugé impératif de poursuivre les efforts de collaboration pour accroître l’aide au développement de l’infrastructure et des capacités de communication dans les pays en développement. Elle a pris acte des efforts déployés par le DCG pour élaborer un code de conduite afin de promouvoir l’intégrité de l’information publique dans l’espace, en émettant l’espoir que ce processus, en consultation avec les États Membres, permettra de créer un écosystème numérique plus sain. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a noté que « l’infodémie » qui a suivi la pandémie de COVID-19 illustre le défi auquel nous sommes confrontés pour contrer les informations fallacieuses et les incitations à la haine.  Elle a estimé qu’il incombe à la communauté internationale de fournir aux générations présentes et futures les outils nécessaires pour comprendre le monde et discerner la vérité.  Nous avons donc besoin de stratégies pour lutter contre la désinformation tout en favorisant l’éducation et l’accès à une information de qualité.  Afin de lutter contre la violence et la discrimination en ligne auxquelles sont confrontées en particulier les femmes et les filles, la déléguée a prôné l’intégration d’une perspective de genre aux outils de communication.  Dans le cadre du suivi de la Conférence mondiale des ministres de l’éducation de 2021, le Costa Rica a contribué avec l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Bureau de la prévention du génocide et de la responsabilité de protéger au lancement d’un guide à l’intention des décideurs intitulé « Lutter contre le discours de haine par l’éducation ». La représentante a ensuite exhorté les États Membres à protéger les journalistes et les défenseurs des droits humains, se disant convaincue que la protection de la liberté de la presse est un principe essentiel pour la démocratie et le plein exercice des droits civils.

M. BRETT JONATHAN MILLER (Israël) a jugé essentiel de fournir des informations fiables et de combattre la propagation d’informations fallacieuses, un phénomène qui, a-t-il relevé, n’est pas nouveau, comme en atteste la négation de la Shoah dès la fin de la Seconde Guerre mondiale.  Israël, a-t-il assuré, continuera de combattre le déni de l’Holocauste à travers le monde et dans toutes les enceintes, notamment sur Internet et les réseaux sociaux, qui jouent un rôle de plus en plus important dans la propagation de l’antisémitisme.  Le représentant a ensuite apporté son soutien au Programme de communication sur l’Holocauste et les Nations Unies, mené par le DCG, ainsi que le projet de code de conduite pour l’intégrité de l’information en ligne.  Israël, a déclaré son délégué, est ciblé par des mensonges et par la désinformation propagée par les autorités palestiniennes qui usent de menaces pour encourager la violence.  Selon lui, ces menaces sont également présentes à l’ONU, où des résolutions prennent son pays pour cible, avec des partis-pris propagés à l’échelle mondiale, ne faisant qu’alimenter les cycles de violence et de désinformation.  Il a enfin dénoncé la « rhétorique belliqueuse » du Hezbollah visant la Force intérimaire des Nations Unies au Liban(FINUL), qui doit être en mesure de pouvoir s’acquitter de ses fonctions. 

Mme MARIA ZAKHAROVA (Fédération de Russie) a dénoncé l’abus systématique par les États-Unis de leur rôle de pays hôte, en regrettant que les visas accordés aux journalistes qui comptaient se rendre à New York pour couvrir la présidence russe du Conseil de sécurité assurée par le Ministre des affaires étrangères n’aient été délivrés qu’au moment du départ du dernier vol alors que tous les documents avaient été fournis en temps voulu. Cette violation flagrante des obligations découlant de l’Accord de siège est entourée de prétextes ridicules et moqueurs qui révèlent la véritable attitude des autorités américaines à l’égard de la protection de la liberté d’accès à l’information et du pluralisme des médias, s’est indignée la représentante qui a affirmé que l’année dernière, elle-même n’avait pas obtenu de visa à temps.  Les représentants américains ont apparemment tellement peur d’entendre la vérité qu’ils se livrent déjà à la fraude aux visas à une échelle industrielle, a-t-elle lancé. 

Profitant de leur potentiel médiatique dominant, a-t-elle enchaîné, un certain nombre d’États qui se proclament « démocraties avancées » ont procédé à un balayage total des espaces nationaux d’information en ce qui concerne les points de vue alternatifs à ceux endossés par les autorités. Selon elle, les interdictions et blocages à caractère politique ont principalement touché les médias russes, certains d’entre eux ayant été littéralement acculés à la faillite, et le processus d’élimination des médias indésirables se poursuit encore aujourd’hui.  Dans le même temps, des restrictions unilatérales illégitimes sont imposées de manière agressive à d’autres membres de la communauté internationale qui sont sommés de cesser de rediffuser les chaînes de télévision et de radio russes qui sont populaires auprès du public local.  Parallèlement, les médias occidentaux et les ONG partisanes diffusent des mensonges et de la diffamation pure et simple pour justifier cet abus de pouvoir aux yeux de l’opinion publique mondiale, s’est-elle indignée. 

En outre, les autorités de Kiev bénéficient d’une tolérance absolue de la part de leurs bienfaiteurs occidentaux, qui ne reculent devant rien pour renforcer le régime de censure totalitaire, a-t-elle renchéri en évoquant « les meurtres brutaux des journalistes russes » comme Darya Dugina (Platonova) et Maxim Fomin (Vladlen Tatarsky), perpétrés par des méthodes terroristes sur ordre des services de sécurité ukrainiens.  Y voyant une démonstration répugnante de l’intolérance à l’égard d’autres points de vue, elle a reproché aux « démocraties avancées » de n’avoir pas jugé nécessaire de condamner ces atrocités et d’autres commises par le régime de Kiev.  L’Occident collectif, avec à sa tête les États-Unis, qui joue au néolibéralisme totalitaire, impose de façon rampante sa « culture de l’abolition » au reste du monde en essayant de dénaturer ou d’effacer complètement tout ce que l’ONU devrait protéger: les langues, la culture, les monuments, l’art, les médias pluriels, les peuples indésirables.  Il est inacceptable que l’ONU, ses agences spécialisées et ses institutions spécialisées restent généralement indifférentes à ces idéologies et pratiques barbares, s’est-elle indignée. 

La représentante s’est inquiétée de l’inaction délibérée et de l’inefficacité des structures internationales dont le mandat inclut la protection de la liberté d’expression et du pluralisme des médias, affirmant que certaines d’entre elles ont fait preuve d’une partialité flagrante.  Elle a également qualifié de scandaleuse la pratique de certains pays qui mettent la communauté des médias au service de leurs intérêts politiques, qui contraignent ou recrutent des journalistes pour travailler dans des services spéciaux, et qui instrumentalisent les médias et d’autres moyens de communication de masse dans le but d’interférer dans les affaires intérieures d’autres États. Elle a plaidé pour un cadre universel capable de régir Internet et de mettre un terme au monopole numérique des géants du net qui peuvent bloquer des comptes et des contenus.  Ces sociétés sont devenues « des acteurs de la manipulation de la conscience collective », a-t-elle affirmé, alertant qu’en l’absence d’une réponse collective à un tel défi, l’espace numérique mondial risque d’éclater en segments nationaux et régionaux distincts, avec leurs propres réglementations. 

Après avoir plaidé en faveur du respect du multilinguisme sur toutes les plateformes de l’ONU, la représentante a souhaité en savoir plus sur les sources de financement du code de conduite sur l’intégrité de l’information dans le domaine numérique, ainsi que sur les milieux universitaires qui y participent. Le succès de ce processus dépendra de son approche inclusive et transparente, a-t-elle estimé, insistant sur le fait que les sources d’information de l’Organisation doivent être non politisées, fiables et vérifiées. 

La déléguée a par ailleurs fait savoir que la conférence de presse que devait donner aujourd’hui M. Sergei Lavrov au Siège de l’ONU portera notamment sur l’arrestation d’un journaliste américain en Fédération de Russie.  Elle a expliqué que quand les correspondants occidentaux abusent de leur statut pour mener d’autres activités, les autorités russes se réservent le droit de réagir et de leur retirer leurs visas.  « Mais quand ils font du renseignements, alors notre patience est poussée à bout », a-t-elle indiqué, en ironisant sur le manque de respect que manifestent les autorités américaines à l’égard des journalistes russes qui n’obtiennent pas de visa à temps, ou simplement pour un an au lieu de trois comme auparavant, et qui sont exposés à d’autres restrictions. 

M. ADAM KUYMIZAKIS (Malte) a exhorté le DCG à poursuivre son travail de lutte contre la désinformation et la mésinformation sur trois fronts spécifiques: la crise climatique; la manipulation de l’information dans le cadre des conflits, amplement démontrée selon lui par la guerre en Ukraine; et la santé, s’inquiétant de la prolifération des tentatives visant à discréditer la vaccination pendant la pandémie de COVID-19.  Le délégué a ensuite souligné son attachement au multilinguisme, considérant également comme crucial de garantir l’accessibilité des personnes handicapées à des informations légitimes et factuelles.  En tant que membre élu du Conseil de sécurité, Malte, a dit son représentant, s’efforce de donner la priorité à l’alphabétisation en tant qu’outil de consolidation de la paix.  Il a estimé que la culture numérique, en particulier, est idéale pour développer la capacité des gens à reconnaître et à contrer la mésinformation et la désinformation, l’extrémisme violent et les théories du complot qui, a-t-il relevé, se traduisent souvent par des discours de haine et peuvent régresser davantage vers la violence et les atrocités . 

M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba) s’est félicité des progrès accomplis par le DCG pour lutter contre la désinformation dans le cadre de ses communications stratégiques.  L’initiative Verified a joué un rôle important afin de démanteler les mythes qui étaient diffusés sur la pandémie de COVID-19 et combattre les informations fallacieuses, notamment s’agissant des changements climatiques.  Si l’utilisation des nouvelles technologies est essentielle, il est tout aussi important de continuer de recourir aux médias traditionnels tels que la télévision et la radio, a-t-il argué.  Il a indiqué que le développement du secteur des nouvelles technologiques fait partie des objectifs stratégiques de Cuba, malgré l’embargo imposé par les États-Unis qui a un impact économique délétère sur les communications et l’information.  Entre août 2021 et février 2022, l’impact de cet embargo s’est élevé à plus de 105 millions de dollars, s’est alarmé le délégué, ce qui n’a pas empêché la couverture Internet et cellulaire d’augmenter dans son pays.  Il a rejeté « l’agression » menée par le Gouvernement des États-Unis contre Cuba dans le domaine de la radio et de la télévision.  Les États-Unis encouragent également l’effondrement de l’ordre constitutionnel cubain en diffusant sur l’île des informations destinées à déstabiliser le pays, a encore dit le représentant.

M. CHRISTOPHER P.  LU (États-Unis) a jugé essentiel le travail du DCG pour fournir à la communauté internationale des informations exactes sur les grandes questions de notre temps.  Il a encouragé le DCG à intensifier ses efforts afin d’atteindre les jeunes et les personnes vivant dans des pays où il n’existe pas de presse libre, ainsi qu’à accroître la fréquentation de ses sites Internet non anglophones.  En tant que communauté internationale, a-t-il ajouté, nous devons continuer à dénoncer les pays et les personnes qui diffusent de la désinformation et qui bloquent l’accès à l’information.  Le représentant a notamment évoqué la situation au Mali et en République centrafricaine, où la désinformation a sapé la confiance des populations locales dans l’ONU et menace la sécurité des Casques bleus.  En ce qui concerne la guerre en Ukraine, le délégué a dénoncé le recours à la désinformation par la Fédération de Russie « dans cette salle » afin de détourner l’attention de son agression brutale contre le peuple ukrainien.  Les commentaires de la représentante russe Maria Zakharova devant ce Comité constituent une insulte et un affront aux personnes qui aspirent à la liberté, a-t-il affirmé.  Le délégué a également condamné la détention injustifiée du journaliste américain Evan Gershkovich et appelé la Russie à le libérer immédiatement.  Il a rejeté les allégations concernant la non-délivrance de visas à des journalistes et des membres de la délégation russe, en précisant que les États-Unis prennent au sérieux leurs obligations à titre d’État hôte des Nations Unies.  Il a considéré « ironiques et hypocrites » les plaintes formulées par la Fédération de Russie, notant que la répression en cours dans ce pays contre les journalistes et les médias indépendants a mené à leur exode.  Le représentant a par ailleurs relevé que la libre circulation de l’information est compromise par les fermetures d’Internet imposées par les gouvernements, comme cela fut le cas en septembre dernier lorsque le peuple iranien s’est soulevé pour affirmer son droit à la liberté d’expression et à l’information sur Internet. 

M. EDUARDO MANUEL DA FONSECA FERNANDES RAMOS (Portugal) a constaté qu’un meilleur accès à l’information n’est pas synonyme d’accès à des informations fiables, relevant que les populations sont exposées à une quantité croissante de mésinformation et de désinformation.  L’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie montre selon lui comment la manipulation de l’information est utilisée pour justifier une agression militaire illégale et non provoquée contre un autre État.  Nous devons donc agir maintenant et avec détermination pour contrer la propagation de la désinformation et des discours de haine, tout en protégeant la liberté d’expression.  L’élaboration d’un code de conduite destiné à promouvoir l’intégrité dans l’information publique est à ses yeux une importante initiative pour répondre à ces préoccupations.  Estimant que la communication doit être une voie à double sens, le délégué a dit attendre avec impatience une coopération étroite entre le DCG et le Bureau des Nations Unies pour la jeunesse.  De même, il a exprimé son appui aux efforts visant à assurer des conditions équitables pour les six langues officielles de l’ONU.  « Nous devons également reconnaître que les six langues officielles obligent encore des milliards de personnes à utiliser des langues empruntées pour mieux comprendre le fonctionnement de l’ONU », a-t-il relevé, en saluant au passage le travail « inestimable » effectué par l’unité lusophone d’ONU Info.

Mme SARAH SAFYN FYNEAH (Libéria) a félicité le DCG d’avoir reconnu, dans le cadre de la campagne « Service et sacrifice », le service du personnel en uniforme déployé au sein des missions de maintien de la paix.  Le travail du Département n’a jamais été aussi important ni plus difficile qu’il ne l’est aujourd’hui, a-t-elle noté, alors que les crises mondiales se multiplient, accompagnées d’une recrudescence de la mésinformation et de la désinformation. L’élargissement de la campagne Verified pour inclure la pandémie de COVID-19, les discours de haine, les problèmes de santé mentale et la violence sexiste est à ses yeux pleinement justifié.  L’information publique fournie par le DCG est aussi variée que l’ONU elle-même, a relevé la déléguée, en saluant la mise en œuvre de campagnes thématiques portant sur un large éventail de sujets.  Elle s’est félicitée des efforts du Département pour suivre l’évolution constante du secteur de l’information et des nouvelles technologies ainsi que de son objectif d’établir un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  Il nous faut cependant reconnaître que la fracture numérique perdure et que de nombreuses communautés n’ont toujours pas accès à Internet.  Devant ce constat, elle a appelé l’ONU à redoubler d’efforts pour assurer une meilleure connectivité dans les pays en développement et, dans l’intervalle, à poursuivre son partenariat avec les médias traditionnels.

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a félicité le DCG pour ses initiatives dans le cadre de la riposte mondiale contre la pandémie de la COVID-19, notamment les campagnes de sensibilisation contre les discours de haine, la désinformation et la mésinformation, aussi bien que sur la maladie elle-même et les vaccins développés.  Il a appuyé l’adoption d’un code de conduite mondial visant à promouvoir l’intégrité de l’écosystème du numérique.  Réaffirmant l’importance du multilinguisme comme moteur de la diplomatie multilatérale, le représentant a salué les actions du DCG qui visent à parvenir à l’égalité linguistique au sein du système onusien.  Il l’a toutefois exhorté à veiller davantage à l’emploi équitable des six langues officielles tant pendant les rencontres et séances de travail que sur toutes les plateformes de communication des Nations Unies. En outre, le délégué a demandé aux services onusiens compétents de se conformer aux différentes dispositions de l’Assemblée générale concernant la distribution simultanée des documents dans les six langues officielles, aussi bien sur les supports physiques que numériques. À cette fin, il conviendrait, selon lui, de doter le DCG des ressources adéquates pour lui permettre de mener à bien l’ensemble de ses activités de manière à éliminer l’écart entre l’emploi de l’anglais et celui des cinq autres langues officielles.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a encouragé le Département de la communication globale (DCG) à faire de la promotion du Programme 2030 une priorité à l’approche du sommet sur les ODD qui se tiendra en septembre.  Notant que les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ne sont disponibles qu’en anglais, elle a encouragé le DCG à publier des synthèses de ces rapports dans d’autres langues à l’intention des décideurs politiques, particulièrement en ce qui concerne les données techniques.  Le Département doit en outre mettre en œuvre des campagnes destinées à combattre la désinformation et la mésinformation, s’agissant notamment de la contribution des pays fournisseurs de contingents aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, dans le cadre de la campagne « Service et sacrifice ».  De plus en plus d’informations négatives circulent sur les migrations, a-t-elle relevé, ce qui contribue à la stigmatisation et à la violence à l’encontre des migrants.  Après avoir noté la croissance de 8% du nombre de pages en espagnol visitées sur le site Web de l’ONU, la représentante a appelé à renforcer la publication d’informations dans cette langue.  Nous devons de façon générale renforcer le multilinguisme au sein de l’ONU afin que les informations soient accessibles au plus grand nombre, a-t-elle ajouté.

Mme VERO HENINTSOA ANDRIAMIARISOA (Madagascar) a souligné que le multilinguisme et la diversité culturelle sont des valeurs cardinales du multilatéralisme et a plaidé pour une utilisation équitable et égalitaire des six langues officielles, en particulier pour ce qui est des documents officiels et des informations publiées sur le site Web des Nations Unies.  La traduction littérale d’une langue à une autre modifie souvent le sens et ne fait pas ressortir le message à véhiculer, a-t-elle souligné appelant au respect de la disponibilité desdits documents dans les six langues officielles et sur les plateformes pertinentes dans les délais.  De même, elle a appelé à mettre davantage l’accent sur la diffusion d’informations factuelles, opportunes, ciblées, claires, accessibles, multilingues et fondées sur des données scientifiques sur toutes les plateformes de l’ONU.  Sur ce point, elle a invité le DCG à explorer des options de financement innovantes pour promouvoir le multilinguisme et réduire l’écart entre l’emploi d’une langue officielle par rapport aux autres.  Rappelant que Madagascar est un pays contributeur de personnel en uniforme, elle a salué les campagnes promotionnelles du DCG mettant en avant les pays contributeurs de troupes et de police.  À ce sujet, la déléguée a encouragé le Département à renforcer la communication stratégique dans les domaines de maintien de la paix et les actions de lutte contre la désinformation en vue d’améliorer la sécurité et la sûreté du personnel en uniforme.  Elle a souligné que la désinformation tend à saper la confiance dans les Nations Unies et menace la sécurité des contingents.

Après avoir apporté son soutien au respect du principe du multilinguisme dans les activités du DCG, Mme HANA BINTI NORDIN (Malaisie) a souligné l’importance d’une approche égalitaire, équilibrée et inclusive dans la diffusion d’informations relatives aux trois piliers que sont le développement durable, les droits humains et la paix et la sécurité.  Elle a apprécié la diffusion dynamique d’informations dans les zones de conflit ainsi que sur l’impact existentiel des changements climatiques, tout en estimant que des efforts accrus sont nécessaires pour renforcer la sensibilisation dans le domaine du désarmement, en particulier sur les conséquences humanitaires dévastatrices de l’utilisation des armes nucléaires.  Elle a salué le travail du DCG dans le cadre de l’initiative Verified contre la désinformation et la mésinformation et de la campagne #NoToHate contre les discours de haine et la rhétorique haineuse. Selon la déléguée, des discussions renouvelées et une coopération continues entre les États Membres et des engagements avec les parties prenantes concernées sont nécessaires pour garantir un espace numérique sain. 

M. OSHIMA MASARU (Japon) a déclaré la pandémie de COVID-19 a été une « expérience révélatrice » des vulnérabilités de notre système multilatéral.  La pandémie a en effet alimenté la propagation de la mésinformation et de la désinformation, perturbant la confiance dans les institutions publiques. Il a félicité à cet égard le DCG d’avoir ouvert la voie avec sa stratégie de communication mondiale qui continue d’être remodelée et mise à jour en réponse aux enseignements tirés. Il a appuyé le Département dans ses efforts pour endiguer « l’infodémie » en cours, estimant que les informations fallacieuses menacent non seulement nos valeurs, mais constituent également l’une des plus grandes menaces pour notre sécurité.  Il a relevé que les objectifs du DCG ne pourraient être pleinement atteints sans le vaste réseau mondial des centres d’information des Nations Unies, qui diffusent des informations sur les activités de l’Organisation dans les langues locales du monde entier.  En particulier, il s’est félicité de la campagne Act Now ainsi que de la promotion d’informations précises sur les ODD.  Il a réitéré l’engagement de son pays à protéger la liberté et la sécurité des journalistes où qu’ils se trouvent, et dénoncé tout acte susceptible de porter atteinte à ces droits. 

M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a opposé l’usage de la communication pour renforcer la paix et la compréhension entre les peuples à son utilisation comme une arme pour déclencher et alimenter les guerres.  La militarisation de l’information pour servir les fins de l’agresseur est une stratégie du « régime de Putin » depuis le tout début, à commencer par la destruction des médias indépendants et les meurtres de journalistes en Fédération de Russie.  Il a décrit des vidéos postées en ligne montrant des soldats russes commettant des crimes de guerre contre des soldats ukrainiens capturés.  La machine de propagande russe a amplement prouvé son efficacité en matière d’incitation à la haine contre les Ukrainiens, a-t-il noté, en ayant recours à la déshumanisation.  Pour le délégué, le Kremlin semble suivre les conseils des dirigeants de l’Allemagne nazie qui notaient que pour inciter la population à la violence, il suffit de lui faire croire qu’elle est sur le point d’être attaquée. 

Alors que la Fédération de Russie envoie des armes en Ukraine pour tuer les Ukrainiens, elle diffuse également des fausses informations pour « tuer la vérité » et la confiance dans les Nations Unies, a encore accusé le représentant en dénonçant une « mauvaise utilisation » de l’ONU qui devrait être au centre des préoccupations du Comité. Il a fustigé les allégations formulées devant le Comité par la représentante russe, ajoutant que la Russie s’en remet à des criminels au sein du groupe Wagner pour mener son agression.  Le délégué ukrainien a par ailleurs signalé des cas où des documents de l’ONU sont ambigus en ce qui concerne l’agresseur et l’agressé, ce qui va à l’encontre de résolutions et de déclarations de l’Assemblée générale et du Secrétaire général, qui, a-t-il souligné, devraient faire foi. Il a ensuite rendu hommage aux journalistes victimes de l’invasion russe en Ukraine, où 52 membres du personnel des médias ont été tués jusqu’à présent. Pendant ce temps, les « soi-disant journalistes russes » ont incité à la haine contre l’Ukraine, glorifient l’armée d’occupation et justifient leurs crimes.  Rappelant que le Tribunal de Nuremberg a poursuivi en justice non seulement les responsables politiques nazis mais également des diplomates, le représentant a prédit que la propagande et la justification des effusions de sang par les représentants de la Fédération de Russie les mèneront un jour devant des tribunaux.

M. JUAN RODRÍGUEZ GÓMEZ-ALLER (Espagne) a souligné qu’atteindre les ODD signifie pouvoir compter sur les gens sur le terrain.  Or pour cela il faut en premier lieu leur parler dans leur langue, et en second lieu être autant présent dans les médias mondiaux que dans les médias locaux.  Le multilinguisme est l’une des valeurs fondamentales des Nations Unies, a-t-il martelé.  Le représentant a salué l’évolution positive des outils de communication en espagnol des Nations Unies, en citant notamment l’équipe hispanophone d’ONU info.  Il a toutefois regretté qu’il n’existe toujours pas un juste équilibre entre les six langues officielles, estimant qu’il est temps de corriger l’écart existant entre l’énorme demande de contenu en espagnol et l’offre.  Il est temps d’équilibrer les ressources allouées à chacune des langues officielles, a-t-il exigé notant que c’est la clef pour atteindre plus de 500 millions de personnes. Il est temps de disposer d’équipes plus nombreuses d’hispanophones capables non seulement de traduire, mais aussi de produire des contenus originaux en espagnol et de les diffuser dans l’ensemble du monde hispanophone, a-t-il renchéri.  « Bref, il est temps que l’espagnol fasse un pas en avant au sein des Nations Unies », a-t-il souhaité. 

Le représentant s’est dit convaincu que le multilinguisme est aussi la clef d’une autre question fondamentale, à savoir la désinformation. Il a jugé tristement ironique que, dans un comité qui cherche à lutter contre la désinformation, ce soit précisément la porte-parole du Ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie qui se soit exprimée au nom de la Russie.  La désinformation est l’un des grands ennemis de la démocratie et d’un ordre international fondé sur des normes, a-t-il souligné, appelant à relever ce défi tout en garantissant et en renforçant la liberté d’opinion et d’expression, ainsi que la liberté de la presse.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a insisté sur l’importance de l’accès aux technologies de l’information et de la communication qui reste aujourd’hui un défi majeur. La fracture numérique entre le Nord et le Sud continue de se creuser jour après jour, a-t-il regretté estimant que des progrès réels, significatifs et tangibles sont impératifs pour parvenir à une plus grande démocratisation de l’accès efficace, inclusif et abordable à ces technologies.  C’est d’autant plus important qu’elles ont le potentiel de contribuer positivement aux efforts visant à accélérer la mise en œuvre du Programme 2030 et donc à atteindre les objectifs et cibles qui y sont convenus, a argué le représentant. Il a appelé à l’adoption de mesures propices à la réduction de la fracture numérique, ce qui inclut, d’une part, la sensibilisation du DCG aux effets pernicieux des sanctions et de l’autre, leur abrogation complète et immédiate.  Il a argué que l’amélioration de la connectivité et de l’accès aux TIC sera un facteur déterminant pour mieux se relever dans cette nouvelle ère postpandémique, ainsi que pour surmonter la crise mondiale à multiples facettes en cours. 

Le délégué a également appelé le DCG à maintenir ses efforts de lutte contre les nouvelles fallacieuses, les campagnes de désinformation et les informations erronées qui ne font qu’accroître l’incertitude, l’instabilité, la méfiance et les tensions dans le monde.  Il a espéré que ces questions seront dûment abordées au cours des consultations intergouvernementales visant à élaborer un éventuel code de conduite mondial pour l’intégrité de l’information publique. Le représentant a également saisi cette occasion pour dénoncer la décision des Gouvernements américain et britannique d’approuver des millions de dollars pour financer des médias prétendument indépendants afin de poursuivre leurs politiques interventionnistes, d’influencer les agendas des médias locaux, de subvertir l’ordre constitutionnel et de mener des opérations secrètes visant non seulement à faire progresser leur « infâme politique de changement de régime », mais aussi à menacer la paix sociale dans son pays.

Mme INDIRA GOHIWAR ARYAL (Népal) a plaidé en faveur de la réduction de la fracture numérique, espérant que le projet de pacte mondial pour le numérique proposé par le DCG permettra d’envisager un avenir ouvert, libre, inclusif et sûr.  Mêmes attentes s’agissant du code de conduite mondial sur l’intégrité des plateformes numériques, a indiqué la représentante, qui a également apporté son soutien au Département dans la diffusion d’informations vérifiées.  Partisane du multilinguisme, la représentante a encouragé le Département à élargir le recours à des langues au-delà de celles qui sont considérées comme officielles par l’Organisation, dont le népalais.  Elle a estimé que les centres d’information des Nations Unies (CINU) devraient être renforcés par des capacités techniques et infrastructurelles leur permettant de toucher plus directement les populations des États Membres.  Elle a indiqué que la bibliothèque centrale de l’université de Tribhuwan, au Népal, est le dépositaire désigné des publications onusiennes, mais qu’elle a besoin d’être modernisée et améliorée afin d’intensifier les activités de sensibilisation de l’Organisation au niveau local, raison pour laquelle elle a demandé un financement innovant de la part du Département. 

Mme MARIAM SHAIKH (Pakistan) s’est déclarée profondément préoccupée par les inégalités croissantes dans l’accès, en temps opportun, à des informations fiables et multilingues.  Selon elle, un pacte mondial pour le numérique peut potentiellement fixer un cadre universel pour les questions numériques dans tous leurs aspects, en particulier en ce qui concerne la réduction de la fracture numérique, l’amélioration de la connectivité et le soutien à la transformation numérique.  Par ailleurs, le multilinguisme reste un élément essentiel du travail des Nations Unies et sert à promouvoir l’inclusion, la diversité, une plus grande transparence et la participation effective de tous.  Or, la pandémie de COVID-19 a mis en évidence qu’en raison d’une maîtrise limitée de l’anglais, les populations les plus touchées n’ont pas eu accès à des informations sur la sécurité ou l’aide disponible dans la langue et le format de leur compréhension.  La représentante a donc encouragé le DCG à améliorer sa capacité à fournir des informations en plusieurs langues afin de renforcer le soutien international aux activités de l’Organisation.  Elle s’est ensuite élevée contre la désinformation, en particulier en ligne, de même que contre la multiplication des discours de haine et de propagande, dont l’islamophobie et d’autres formes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie.  C’est pourquoi le Pakistan accueillerait favorablement l’élaboration d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information en ligne, a précisé la déléguée.

Mme FATIMATOU FAYE (Sénégal) a salué les efforts déployés par le DCG pour lutter contre la désinformation, en notant qu’aujourd’hui la propagation de la désinformation, de fausses nouvelles et de vidéos trafiquées susceptibles d’alimenter la violence et de diviser les communautés règnent plus que jamais sur les plateformes d’information, parfois à des niveaux insoupçonnés.  L’éventail des mesures prises par le Département devrait donc être renforcé sur la base du principe du multilinguisme, de la diversité, de l’exactitude, de la diffusion opportune de l’information, et des efforts accrus pour atteindre le plus grand nombre de personnes, en particulier celles qui se trouvent dans les pays en développement, a souhaité la représentante. 

À ce sujet, elle a appelé à renforcer les capacités des centres, services et bureaux d’information des Nations Unies en vue de produire une communication multilingue.  Elle a salué l’élaboration d’un code de conduite mondial visant à promouvoir l’intégrité de l’information publique, en soulignant toutefois que même si l’équipe du Secrétariat est maître d’œuvre de cet important outil, les États Membres devraient disposer de l’espace et du temps nécessaires non seulement pour se prononcer sur les pistes proposées, mais aussi pour en identifier d’autres. Par ailleurs, elle a insisté sur la nécessité de poursuivre les efforts dans les domaines des changements climatiques et sur le défi pressant que représente la réalisation des ODD et le Programme 2030.  Arguant que la diversité dans le système multilatéral est la condition de l’égale participation des États, la représentante a plaidé en faveur de la garantie à chaque État Membre de la possibilité d’assurer la promotion de ses positions dans la langue de son choix. L’Organisation doit donc veiller à assurer un traitement équitable entre les six langues officielles et mieux assumer le choix du français comme langue de travail, a souhaité la déléguée avant d’insister aussi sur l’impératif du respect et de la promotion du multilinguisme dans les opérations de maintien de la paix. Il importe de prendre en considération le poids du facteur linguistique dans la réussite des opérations de maintien de la paix en veillant au principe d’équilibre entre les langues maîtrisées dans la publication des documents et dans le choix des différents acteurs appelés à servir sur le terrain et au siège, a-t-elle argué.  Si le message de l’ONU doit toucher le plus grand nombre de personnes, il doit s’appuyer sur le plus grand nombre de langues possibles, a poursuivi la représentante. Elle a ensuite appelé l’ONU et les partenaires au développement à adopter des mesures aptes à combler le fossé numérique entre le Nord et le Sud, à la lumière de l’évolution fulgurante des technologies de l’information et de la communication.

M. MD SHOWEB ABDULLAH (Bangladesh) a estimé qu’il est grand temps de redynamiser le travail du DCG en abordant les nouveaux défis que sont les changements climatiques, la mise en œuvre des ODD, les conflits, le racisme, le discours de haine et l’inégalité.  Il a axé son intervention sur l’importance d’une coordination étroite entre le Siège de l’ONU et le réseau des centres d’information des Nations Unies pour élaborer et mettre en œuvre des campagnes et des contenus ciblés adaptés aux contextes nationaux et fournis dans des formats multilingues.  Au Bangladesh, le CINU de Dhaka a ainsi secondé les efforts du gouvernement en faveur du multilinguisme en promouvant la langue des minorités ethniques nationales, a relevé le représentant.  Il a également salué la coopération démontrée par le centre avec les stations de radio communautaires pour la diffusion des messages de l’ONU, l’appui apporté aux établissements scolaires pour sensibiliser la jeunesse à l’action de l’ONU et son soutien continu pour faire connaître le rôle et la contribution des opérations de maintien de la paix.  À cet égard, il a insisté sur la nécessité de garantir des ressources adéquates au CINU de Dhaka, se félicitant que les centres aient produit ou traduit des documents dans 134 langues en 2022, soit une hausse de plus de 100% par rapport aux 66 langues répertoriées en 2017.  Le représentant a ensuite recommandé que le DCG mène des activités relatives aux génocides oubliés, comme celui qui a été perpétré au Bangladesh en 1971.  À cet égard, nous demandons également au DGC de sensibiliser le public aux crimes atroces commis contre les Rohingya, a-t-il encore préconisé. 

Mme ELENA CURZIO VILA (Mexique) a exprimé son appui à l’objectif du DCG d’accroître la diffusion d’informations de manière opportune et inclusive en faisant la promotion de nos objectifs collectifs.  Après avoir rappelé que le multilinguisme est un principe directeur des Nations Unies, elle a espéré que le travail effectué en vue de parvenir à la parité entre l’anglais et les cinq autres langues des Nations Unies se poursuivra. Nous devons également faire en sorte que l’ensemble des ressources et des contenus soient offerts dans les six langues officielles.  La déléguée a salué le rapport du Secrétaire général sur la manière de lutter contre la désinformation pour promouvoir et protéger les droits humains et les libertés fondamentales.  Toutefois, a-t-elle ajouté, la lutte contre la désinformation ne saurait être utilisée comme bouclier pour justifier la censure ou réduire la dissidence au silence. En ce « siècle de la communication, de l’accès à l’information et de l’ouverture », la déléguée a souhaité que l’Organisation continue d’ouvrir des canaux de communication avec la société civile, les universités et le secteur privé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial pour le Moyen-Orient dresse un bilan mitigé de la période sainte d’avril

9309e séance – matin & après-midi   
CS/15264

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial pour le Moyen-Orient dresse un bilan mitigé de la période sainte d’avril

Le débat public trimestriel que le Conseil de sécurité consacre à la situation au « Moyen-Orient, y compris la question palestinienne », a été l’occasion pour le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Tor Wennesland, de dresser le bilan des tensions dans tout le Territoire palestinien occupé et en Israël, alors que le mois d’avril a vu juifs, chrétiens et musulmans célébrer leur période sainte de la Pâque juive, de Pâques et du ramadan.  De nombreuses délégations en ont appelé au respect des Lieux saints, notamment après les incidents des 4 et 5 avril. 

M. Wennesland, qui a détaillé l’ensemble des incidents survenus durant le mois écoulé, lesquels ont notamment fait 17 morts parmi les Palestiniens, tués en Cisjordanie occupée par les forces de sécurité israéliennes, et 4 Israéliens tués par des Palestiniens, s’est modérément félicité du fait que la période des fêtes religieuses a été observée de manière pacifique.  Il a ainsi noté que des millions de visiteurs musulmans avaient pu accéder à l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa pour l’Eïd al-Fitr, le nombre le plus élevé depuis de nombreuses années, ce dont le Ministre d’État des Émirats arabes unis s’est ensuite dit soulagé.

M. Wennesland s’est néanmoins attardé sur les affrontements survenus les 4 et 5 avril, lorsque l’armée israélienne est entrée dans la salle de prière al-Qibli de la mosquée Al-Aqsa pour en expulser de force des Palestiniens qui s’y étaient retranchés.  L’incident a amené de nombreuses délégations à rappeler leur attachement au statu quo des Lieux saints et au rôle de gardien de la mosquée Al-Aqsa confié à la Jordanie, dont le représentant a rappelé qu’il était un lieu de culte exclusivement musulman. Plus généralement, le Brésil a demandé que le temps des fêtes religieuses d’une telle importance ne devienne pas systématiquement une période de tension. 

Plusieurs intervenants se sont montrés préoccupés par la montée des tensions, à l’image des États-Unis, qui ont estimé que, en ce seul mois d’avril, une dizaine d’incidents auraient pu déboucher sur un conflit régional s’ils n’avaient pas été traités à temps.  C’est pourquoi beaucoup ont également rendu hommage aux efforts régionaux d’apaisement, illustrés en avril par la rencontre de hauts responsables égyptiens, jordaniens, israéliens, palestiniens et américains à Charm el-Cheikh, en Égypte, pour discuter plus avant des accords conclus à Aqaba, en Jordanie, le 23 février. Les appels à la mise en œuvre concrète des communiqués conjoints issus de ces deux rencontres ont été nombreux.

Pour M. Tor Wennesland et de nombreuses délégations, la trajectoire actuelle n’est ni durable ni inévitable.  Comme la quasi-totalité des intervenants au débat, il a appelé les parties à la retenue, et notamment Israël à s’abstenir de poursuivre ses projets de colonisation, que beaucoup ont jugé inquiétants et susceptibles de porter plus encore atteinte aux espoirs d’une solution à deux États, pourtant considérée comme la seule susceptible d’apporter une paix durable dans la région.  La majorité des délégations ont rappelé que les colonies de peuplement étaient illégales au regard du droit international, à l’image de la France qui, a affirmé son représentant, « ne reconnaîtra jamais l’annexion illégale de territoires, ni la légalisation de colonies sauvages ». 

Alors qu’approche le soixante-quinzième anniversaire de la naissance d’Israël, qui verra aussi celui de la commémoration par les Palestiniens de la Nakba -la « catastrophe »- le Ministre des affaires étrangères et des expatriés de l’État de Palestine a déclaré que, si la Charte des Nations Unies avait été respectée et si les résolutions du Conseil de sécurité avaient été mises en œuvre, la paix aurait prévalu en Palestine depuis longtemps, « plutôt que l’occupation et l’apartheid ».  Pour M. Riad Al-Malki, la réalité actuelle sur le terrain est « le résultat d’un échec et non d’une fatalité ». 

De fait, nombre de délégations ont dénoncé l’inaction du Conseil de sécurité et son incapacité à faire respecter ses propres décisions, y compris sa résolution 2334 (2016), la dernière qu’il a adoptée sur la question, en décembre 2016 et qui, comme l’a rappelé notamment le Gabon, demande une cessation immédiate et complète de toute activité de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est. 

À cet égard, le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, qui présidait la séance, a fait observer que si le veto est un droit inaliénable des membres permanents du Conseil de sécurité dont l’utilisation n’entraîne aucune violation du droit international, le non-respect des résolutions adoptées par le Conseil constitue, lui, une violation de la Charte. M. Sergey Lavrov a ainsi accusé les États-Unis d’avoir « saboté », entre autres, les résolutions du Conseil sur le Moyen-Orient, y compris la résolution 2334 sur laquelle ils s’étaient abstenus, et d’avoir perdu depuis longtemps l’impartialité indispensable au rôle d’« honnête courtier » qu’ils prétendent jouer, « surtout après les décisions bien connues de l’ancienne Administration de Donald Trump », dont M. Lavrov a constaté qu’elles n’avaient pas été annulées par l’Administration actuelle. 

Si de nombreuses délégations ont estimé que le Moyen-Orient était l’illustration d’une politique du « deux poids, deux mesures » menée aux dépens des palestiniens, le représentant d’Israël a, lui, vu dans cette séance, tenue le Jour du souvenir des soldats tombés pour la défense d’Israël, la confirmation d’une attitude biaisée de l’ONU à l’encontre de son pays.  Pour Israël, si le conflit perdure, c’est à cause du refus des Palestiniens d’accepter l’existence même de l’État juif d’Israël.  Refusant de participer à une « mascarade », le représentant a énuméré une liste de noms de soldats tombés pour la défense d’Israël, allumé une bougie en leur mémoire, puis, qualifiant le débat de « honteux », a quitté la salle. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. TOR WENNESLAND, Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, a rappelé que la période sainte de Pâques, de la Pâque juive et du ramadan avait été marquée par de violents incidents sur les Lieux saints et des tensions dans tout le Territoire palestinien occupé et en Israël.  Même si l’escalade a été évitée, la trajectoire actuelle n’est ni durable ni inévitable, a-t-il estimé.  Les parties et la communauté internationale doivent s’attaquer aux défis politiques, sécuritaires, économiques et institutionnels sous-jacents à l’origine du conflit.  Il faut mettre un terme aux mesures unilatérales, aux provocations et à l’incitation qui encouragent la violence et empêchent les progrès vers la résolution de ce conflit et la fin de l’occupation. 

Donnant un bilan chiffré des interventions des Forces de défense israélienne en Cisjordanie occupée, dont 17 Palestiniens tués, M. Wennesland a ajouté que 4 Israéliens ont été tués par des Palestiniens.  En outre, un ressortissant étranger a été tué et 7 autres blessés. Toutefois, les fêtes religieuses ont été largement observées de manière pacifique, avec des millions de visiteurs musulmans dans l’enceinte de la mosquée Al-Aqsa pendant le ramadan, le nombre le plus élevé depuis de nombreuses années. 

Le Coordonnateur spécial a détaillé les différents incidents survenus.  Il a notamment rappelé les affrontements des 4 et 5 avril dans les Lieux saints à Jérusalem, lorsque les Forces de sécurité israéliennes sont entrées dans la salle de prière al-Qibli de la mosquée Al-Aqsa et ont expulsé de force les Palestiniens barricadés à l’intérieur à la suite de provocations de part et d’autre.  Suite à ces événements, des militants à Gaza et au Liban ont tiré des dizaines de roquettes vers Israël.  En réponse, Israël a mené des frappes aériennes à Gaza et dans le sud du Liban le 7 avril, visant le Hamas.  Le Premier Ministre libanais a condamné les tirs de roquettes vers Israël.  M. Wennesland a rappelé que des efforts de désescalade de l’ONU, ainsi que la coordination et la liaison des parties avec la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) avaient contribué à rétablir le calme. 

Le Coordonnateur spécial a cité d’autres violences en Cisjordanie occupée et en Israël, commises au cours de la période considérée, qui ont fait de nombreuses victimes palestiniennes et israéliennes.  En outre, il a noté que les violences des colons israéliens sont restées élevées. 

« Je suis profondément préoccupé par la violence de ces dernières semaines, en particulier les violents affrontements à l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, a commenté M. Wennesland, qui a demandé à nouveau instamment le respect du statu quo sur les Lieux saints à Jérusalem, conformément au rôle particulier du Royaume hachémite de Jordanie.

Le Coordonnateur spécial a aussi condamné les tirs de roquettes contre Israël, ajoutant que les actes de terreur et le ciblage de civils sont odieux et doivent être condamnés et rejetés par tous.  Tous les auteurs de violences doivent être tenus pour responsables et rapidement traduits en justice.  D’autre part, les forces de sécurité doivent faire preuve d’un maximum de retenue et n’utiliser la force que lorsque cela est strictement inévitable pour protéger la vie. M. Wennesland s’est dit « consterné » que des enfants continuent d’être victimes de violence. 

Notant la rencontre de hauts responsables égyptiens, jordaniens, israéliens, palestiniens et américains, le 19 avril, à Charm el-Cheikh, en Égypte, pour discuter plus avant des accords conclus à Aqaba, en Jordanie, le 23 février, M. Wennesland a exhorté à s’abstenir de toute mesure susceptible d’aggraver la situation, et à prendre des mesures concrètes pour mettre en œuvre les communiqués conjoints.  Il a dit être engagé avec les parties pour désamorcer les tensions et tracer la voie politique à suivre.  Il a rappelé que les colonies sont illégales au regard du droit international et constituent un obstacle important à la paix, et a appelé à éviter les mesures unilatérales et les provocations.  Les démolitions et les saisies de biens appartenant à des Palestiniens restent elles aussi une source de grave préoccupation.  Le Coordonnateur spécial a appelé Israël à mettre fin aux déplacements et à l’expulsion des Palestiniens et à approuver des plans supplémentaires qui permettraient aux Palestiniens de construire légalement et de répondre à leurs besoins de développement. 

Concernant le Golan, M. Wennesland a constaté les tirs de roquettes lancés depuis la Syrie vers Israël et les représailles menées par israéliennes, y compris sur des positions de l’armée syrienne.  Rappelant que la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) est en contact avec les Forces de défense israéliennes et les autorités syriennes pour désamorcer la situation, il a exhorté les deux parties à la retenue et à respecter le cessez-le-feu, conformément à l’Accord de désengagement des forces de 1974. 

M. Wennesland a noté les d’importants défis budgétaires et institutionnels auxquels est confrontée l’Autorité palestinienne, de même que les déficits de financement qui affectent les agences, fonds et programmes des Nations Unies, notamment le Programme alimentaire mondial et l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), ce qui limite leurs capacités à fournir les services de base.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par la fermeture prolongée des écoles et des dispensaires de l’UNRWA en Cisjordanie, du fait d’une longue grève des personnels. 

Le Coordonnateur spécial a appelé à un effort politique plus large pour s’attaquer aux moteurs du conflit, offrir l’espace et l’accès nécessaires à la croissance de l’économie palestinienne et encourager les parties à mettre à jour leurs relations économiques et administratives.  La prochaine réunion du comité de liaison ad hoc à Bruxelles offre l’occasion d’un changement stratégique dans cette direction, a-t-il noté.  Relever ces défis peut donner l’élan nécessaire pour rétablir un horizon politique vers la réalisation d’une solution à deux États, a estimé M. Wennesland, qui a conclu en encourageant Israéliens, Palestiniens et communauté internationale à faire preuve de leadership, à se réengager et à œuvrer collectivement à la recherche de la paix dans le but de mettre fin à l’occupation et de résoudre le conflit. 

M. RIAD AL-MALKI, Ministre des affaires étrangères et des expatriés de l’État observateur permanent de Palestine, a tout d’abord rappelé qu’il y a 75 ans, le peuple palestinien a enduré la « Nakba », c’est-à-dire la « catastrophe ».  Presque du jour au lendemain, les deux tiers du peuple palestinien sont devenus des réfugiés, a-t-il résumé, constatant que, 75 ans plus tard, « le déni de nos droits, le déplacement et le remplacement de notre peuple sont toujours en cours, avec un objectif poursuivi au grand jour: l’annexion ». 

Face à ce qui est la crise de réfugiés et de protection la plus longue au monde mais aussi la plus longue occupation d’un territoire entier dans l’histoire moderne, M. Al-Malki a estimé que la communauté internationale avait la responsabilité de faire respecter le droit international.  Si la Charte des Nations Unies avait été respectée, si les résolutions du Conseil de sécurité avaient été mises en œuvre, la paix aurait prévalu en Palestine depuis longtemps, « plutôt que l’occupation et l’apartheid », a martelé le Ministre, pour qui la réalité sur le terrain est « le résultat d’un échec et non d’une fatalité ». 

Les règles sont claires et il faut de la volonté pour les faire respecter, a poursuivi M. Al-Malki.  Selon lui, si les condamnations et les appels du Conseil ne sont pas entendus, c’est en raison de l’impunité dont jouit Israël, en dépit de ses violations répétées de la Charte et des innombrables résolutions adoptées au fil des ans.  C’est aussi du fait de l’impunité que des suprématistes sont arrivés au pouvoir en Israël, sur une plateforme coloniale qui est maintenant la politique officielle du Gouvernement israélien, a-t-il ajouté, affirmant ne pas tenir pour acquis le soutien apporté par la communauté internationale à son peuple, y compris aux réfugiés palestiniens par l’intermédiaire de l’UNRWA. 

De même, a souligné le Ministre, nous ne tenons pour acquis ni le soutien apporté à nos institutions nationales, ni l’appui apporté aux efforts de paix lorsqu’ils étaient en cours, ni les efforts quotidiens destinés à « maîtriser l’appétit colonial d’Israël ».  À ses yeux, deux menaces se profilent: celles de la démobilisation et de la démoralisation de la communauté internationale.  De fait, a-t-il dit, « nous sommes convaincus qu’il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États et nous y restons attachés, mais, malheureusement, les circonstances sont telles que nous ne pouvons plus la sauver ». 

Assurant que les autorités palestiniennes restent malgré tout déterminées à respecter leurs obligations et à poursuivre une voie pacifique, M. Al-Malki a également dit apprécier les efforts visant à épargner la vie des Palestiniens et à améliorer leur vie.  Mais tout cela ne remplace pas une solution politique, a-t-il affirmé.  Selon lui, il ne peut y avoir un ordre international fondé sur le droit pour le reste du monde et un ordre imposé par une puissance occupante pour la Palestine.  Face à cela, Israël nous explique que le problème n’est pas qu’il viole le droit international et les droits fondamentaux du peuple palestinien, mais que nous soulevions cette question dans les instances internationales, a dénoncé le Ministre.  Israël estime que les obstacles à la paix ne sont pas les crimes commis contre notre peuple, mais nos tentatives pour faire en sorte que les responsables soient tenus responsables, a-t-il ajouté, s’interrogeant sur la possibilité, dans ces conditions, de devenir de « véritables partenaires de paix ».  Pour le Ministre, les Palestiniens ne sont pas tués par centaines et par milliers chaque année par erreur, c’est le résultat d’une politique visant à dominer et à priver les habitants légitimes de cette terre de leurs droits. 

Dans ce contexte, la dissuasion est le seul moyen d’empêcher que cela ne se reproduise, a assuré M. Al-Malki.  Tant qu’Israël récoltera les bénéfices de son occupation, l’annexion et l’apartheid resteront notre seule réalité, a-t-il dit.  « Rendez l’occupation coûteuse et je peux vous assurer qu’elle prendra fin », a-t-il affirmé. 

Mais avant cela, il importe de reconnaître l’État de Palestine, a plaidé M. Al-Malki.  Le Ministre a jugé inconcevable qu’un pays qui soutient la solution des deux États et la paix ne reconnaisse pas l’État de Palestine « sans lequel il n’y a pas de solution des deux États ».  Il a rappelé à cet égard que nul n’a attendu qu’Israël reconnaisse l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) avant de reconnaître ce pays.  « Si vous ne reconnaissez pas l’État de Palestine maintenant qu’il est sous une menace vitale, quand le ferez-vous?  Quand la solution des deux États sera définitivement morte et enterrée? », s’est-il indigné.

De même, « pourquoi ce Conseil, qui réclame une solution à deux États depuis des décennies, ne recommanderait-il pas l’adhésion de l’État de Palestine à l’Assemblée générale? », s’est interrogé le Ministre, qui s’est dit convaincu que l’Assemblée générale « sera d’accord une fois que cette recommandation aura été faite ». 

Rappelant enfin que le peuple palestinien a besoin d’une protection internationale, le Ministre a appelé à interdire tout commerce avec les colonies et à désigner comme organisations terroristes les groupes de colons qui tuent, mutilent et brûlent en étant certains de ne pas être tenus pour responsables.  Il faut, a-t-il conclu, « monter un front collectif » pour faire pression en faveur de la paix, prendre des initiatives et tenir les parties comptables de leurs actes si elles ne mettent pas en œuvre la volonté internationale incarnée dans la Charte des Nations Unies et dans les résolutions du Conseil de sécurité. 

M. GILAD MENASHE ERDAN (Israël) s’est dit « triste et choqué » par la tenue de cette réunion le jour du souvenir des soldats tombés pour la défense d’Israël, qu’il a qualifiée d’une des journées nationales les plus sacrées du pays.  Il a regretté que le Conseil de sécurité ait refusé de reporter cette réunion et y a vu la confirmation de ce que les Israéliens savaient déjà de « cette organisation biaisée ».  Il a demandé à la présidence russe du Conseil de sécurité ce que la Russie ferait si une réunion la condamnant était organisée le 9 mai, jour de la victoire soviétique contre le nazisme. 

Le représentant a ensuite dénoncé les mensonges proférés devant le Conseil dépeignant Israël comme la racine de tous les problèmes de la région.  Il a estimé que le conflit perdurait pour une seule raison: le refus des Palestiniens d’accepter l’existence même de l’État juif d’Israël. Il les a accusés de « laver de cerveau de leurs enfants afin qu’ils haïssent et assassinent des Juifs ». 

Le représentant a ensuite dénoncé l’Iran comme « la vraie menace pour la région et pour le monde », le qualifiant de principal parrain du terrorisme, tout proche de la puissance nucléaire, et a regretté que le Conseil de sécurité ne le condamne pas.  Affirmant son refus de participer à une « mascarade », le représentant a énuméré une liste de noms de soldats tombés pour la défense d’Israël, allumé une bougie en leur mémoire.  Puis, qualifiant le débat de « honteux », il a quitté la salle. 

M. SERGEY LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a commencé par rappeler la position de son pays, énoncée dans la nouvelle doctrine de la politique étrangère de la Russie, qui repose en priorité sur la construction d’une architecture globale de stabilité et de coopération au Moyen-Orient, en promouvant le dialogue interreligieux et interculturel. Il a mis en avant l’intention de son pays de développer une coopération active avec tous les pays de la région, tant sur le plan bilatéral qu’à travers les organisations régionales et sous régionales. 

Constatant un intérêt croissant pour l’initiative russe de sécurité collective visant à assurer la participation de tous les pays arabes et iranien, avec l’implication des États influents, le Ministre a, dans le même temps, déploré « avec un profond regret et une profonde inquiétude » que le problème palestinien reste en dehors des changements positifs.  Il a jugé plus que jamais nécessaire de réaffirmer les dénominateurs communs du règlement au Moyen-Orient inscrits dans les décisions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale.  Il faut nettoyer l’horizon politique, a-t-il ajouté. 

Les événements en Cisjordanie, à Gaza, à Jérusalem-Est et le long de la ligne de séparation entre Israël, le Liban et la Syrie ont fait monter les tensions à un niveau extrêmement dangereux, a averti M. Lavrov qui a rappelé que, depuis le début de l’année, plus de 100 Palestiniens ont trouvé la mort alors que les blessés se comptent par milliers.  Le nombre de victimes parmi les Israéliens augmente également, a-t-il déploré.  Dressant un état des lieux dans la région, le Ministre a décrit une situation exacerbée par les frappes israéliennes en Syrie -au moins 10 attaques en 2023- dont le bombardement de l’aéroport d’Alep, par lequel est acheminée l’aide humanitaire aux victimes du tremblement de terre dévastateur du 6 février.  Il a aussi noté une augmentation des incidents le long de la Ligne bleue avec le Liban, avec notamment le plus grand échange de missiles depuis 2006. 

Le Ministre a lié la recrudescence de ces flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens aux démarches unilatérales visant à créer des faits accomplis sur le terrain.  Il a jugé impossible de passer sous silence le rythme record de la construction de colonies israéliennes, des expropriations, des démolitions de maisons ou encore arrestations arbitraires.  De même, on ne peut fermer les yeux sur la radicalisation croissante de la « rue palestinienne » et du fossé grandissant entre les principaux partis palestiniens, semé d’affrontements violents.

S’il a jugé important d’éliminer et de prévenir les symptômes d’une situation qui s’aggrave, le Ministre a estimé impératif de réaffirmer qu’il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États pour répondre au droit des Palestiniens à leur propre État indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale et au droit des Israéliens à une coexistence pacifique et sûre avec leurs voisins et la région dans son ensemble.  Seul un retour aux négociations directes sur les questions relatives au statut final peut briser le cercle vicieux de la violence et de la radicalisation et restaurer la confiance mutuelle, a-t-il affirmé.

M. Lavrov a déploré qu’au lieu d’aider à rétablir l’horizon politique, les États-Unis et l’Union européenne poursuivent leurs « tentatives destructrices » menées à coup de demi-mesures et de promotion de la normalisation arabo-israélienne, en contournant une solution juste au problème palestinien et l’Initiative de paix arabe.  Le Quatuor de médiateurs internationaux du Moyen-Orient composé de la Russie, des États-Unis, de l’UE et de l’ONU a été victime de telles actions, a-t-il accusé.

Le Ministre a accusé les États-Unis de prétendre à être le seul parrain du processus de paix au Moyen-Orient, pas gênés par le fait qu’ils ont depuis longtemps perdu la neutralité et l’impartialité indispensables à un « courtier honnête », surtout après les décisions bien connues de l’ancienne « Administration de Donald Trump », qui contredisent directement les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU et que l’Administration actuelle n’a pas annulées. 

M. Lavrov a noté que, récemment, les États-Unis et leurs alliés avaient déployé tous leurs efforts pour faire en sorte qu’à chaque fois que le droit de veto est utilisé sur une question au Conseil de sécurité, cette question soit débattue à l’Assemblée.  Affirmant n’avoir « rien à cacher », le Ministre a toutefois fait observer que le veto est un droit inaliénable et que son utilisation n’entraîne aucune violation du droit international, alors que le non-respect des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité constitue, lui, une violation de la Charte.  Il a suggéré que ceux qui enterrent ouvertement les résolutions adoptées en fassent aussi rapport à l’Assemblée générale, avant de citer une série de résolutions du Conseil « sabotées » par l’Occident, parmi lesquelles le programme nucléaire iranien, les accords de Minsk concernant l’Ukraine et les décisions sur la Palestine.

Accusant Américains et Européens de « spéculer grossièrement » sur le dossier ukrainien pour tenter d’attirer les pays en développement à leurs côtés et de détourner ainsi leur attention des problèmes du Moyen-Orient et d’autres régions du « Sud Global », M. Lavrov a notamment reproché à son homologue américain, M. Antony Blinken, d’avoir déclaré que le contrôle du plateau du Golan restait très important pour la sécurité d’Israël, « mettant de côté les aspects légaux ». 

Dans de telles circonstances, le rôle de l’ONU en tant que coordinateur de la diplomatie multilatérale est particulièrement nécessaire aujourd’hui, a insisté le Ministre, qui a appelé le Secrétariat de l’ONU et le Secrétaire général à accorder une attention particulière au respect des décisions du Conseil de sécurité.  Il a en particulier suggéré que le Secrétaire général convoque de sa propre initiative une séance du Conseil de sécurité sur le Quatuor, comme il l’avait fait début mai sur l’Afghanistan. 

Appelant Israéliens et Palestiniens à mettre fin à toutes les actions unilatérales qui compromettent la possibilité de concrétiser la solution des deux États, M. Lavrov a annoncé l’institution de son pays de contribuer, avec d’autres pays, à aider à restaurer l’unité palestinienne.  Il a aussi souligné l’importance du travail de l’UNRWA.  La Fédération de Russie continuera aussi de contribuer à la stabilisation du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, pour faire avancer le processus de règlement au Moyen-Orient avec les pays de la région et en coordination avec d’autres médiateurs, en particulier avec la Chine, a conclu M. Lavrov. 

M. KHALIFA SHAHEEN AL MARAR, Ministre d’État des Émirats arabes unis, s’est d’abord dit soulagé que des milliers de fidèles aient pu se rendre prier dans la mosquée Al-Aqsa pour l’Eïd al-Fitr dans le calme, contrairement à ce qu’il s’était passé pendant le mois de ramadan, quand les forces de police israéliennes ont attaqué les fidèles.  Le statut spécial de la Ville sainte de Jérusalem ne doit pas être compromis, a-t-il insisté à ce sujet. 

Le Ministre s’est aussi alarmé de la trajectoire des événements actuels, en particulier si Israël continue « d’enhardir les colons », de leur accorder « une immunité juridique » et de « les exploiter comme un outil » pour confisquer davantage de terres palestiniennes occupées. 

La solution des deux États, a aussi rappelé le Ministre, représente la vision sur laquelle la communauté internationale et le Conseil se sont mis d’accord pour mettre fin au conflit: c’est la seule garantissant que les deux États de Palestine et d’Israël vivent côte à côte dans la paix, la sécurité et la reconnaissance mutuelle.  Le Ministre a donc réitéré son appel à Israël pour qu’il cesse immédiatement toute activité de colonisation et assume ses responsabilités, conformément au droit international. 

La « complaisance » de la communauté internationale n’est plus permise, a affirmé le Ministre, pour qui la situation exige au contraire de maintenir la pression pour réduire l’escalade, ainsi que d’éviter le recours à toute mesure unilatérale.  La responsabilité de résoudre ce conflit incombe principalement aux parties qui en sont à l’origine, a enfin déclaré le Ministre, assurant qu’il continuerait de soutenir le peuple palestinien et son droit légitime à établir un État indépendant, sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que le cycle de violences, alimenté par la frustration et le désespoir dans chaque camp, ne pourra s’arrêter que lorsque la colonisation israélienne, illégale en droit international, prendra fin. « La France ne reconnaîtra jamais l’annexion illégale de territoires, ni la légalisation de colonies sauvages », a affirmé le représentant. 

Notre deuxième conviction, c’est que l’inaction n’est pas tenable, a poursuivi le représentant, pour qui l’inaction ne peut que mener à une régionalisation du conflit, comme l’illustrent les tirs de roquettes indiscriminés contre Israël en provenance de la bande de Gaza, du Sud-Liban et de la Syrie.  La France condamne fermement ces attaques et réitère son attachement indéfectible à la sécurité d’Israël.  Enfin, le représentant a estimé que le Conseil de sécurité avait la responsabilité de défendre la solution des deux États et de faire respecter les résolutions qu’il a adoptées.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est dit préoccupé par les événements malheureux qui se sont produits dans les Lieux saints à Jérusalem au début du mois. Attaquer et frapper des pèlerins est un comportement inacceptable, a-t-il tranché, en condamnant l’usage de feux d’artifice dans les lieux de culte.  Il a rappelé l’importance de respecter leur caractère sacré, avant d’appeler à préserver le statu quo des Lieux saints à Jérusalem, ainsi que le rôle de gardien assigné à la Jordanie.  Le représentant a déploré les tirs de roquettes vers Israël, ainsi que tous les actes de violence, de terreur ou de provocation.  Il a appelé à briser immédiatement le cycle de la violence, tout en insistant sur la nécessité de mener des enquêtes pour des faits passés et de traduire les responsables en justice.  « La vengeance n’est pas la justice et ne mène pas à la paix. »  Selon le représentant, la première étape pour briser le cycle de la violence consiste à éviter toute parole et tout fait d’incitation et de provocation. Il a salué la tenue de réunions de haut niveau à Aqaba, en Jordanie, et à Charm el-Cheikh, en Égypte, avec la participation d’Israël, de l’Autorité palestinienne, de la Jordanie, de l’Égypte et des États-Unis. Le dialogue sincère est le seul chemin qui peut mener à la paix, a—t-il conclu, tout en rappelant le vœu de l’Équateur de voir appliquer la solution des deux États.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a souhaité que cette réunion éclaircisse l’horizon politique vers la solution des deux États par le biais du dialogue.  « La confiance est nécessaire pour un véritable engagement entre les deux parties. »  Le représentant a encouragé les responsables israéliens et palestiniens à travailler ensemble et à prendre de nouvelles mesures pour prévenir la violence.  Il a condamné les actions des extrémistes des deux côtés, y compris les attentats terroristes qui ont visé Israël.  Préoccupé par la situation humanitaire du peuple palestinien, le représentant a appelé à un soutien continu pour la libre circulation vers et depuis Gaza.  Il a également appelé à résoudre la crise à laquelle est confrontée l’Autorité palestinienne.  Israël et la Palestine doivent établir un mécanisme qui contribuera à améliorer les conditions économiques du peuple palestinien ainsi que la situation financière de l’Autorité palestinienne.  L’interminable souffrance du peuple palestinien et les préoccupations de sécurité d’Israël doivent nous obliger à résoudre la question palestinienne, a-t-il conclu. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a condamné toutes les attaques terroristes menées contre des civils, israéliens comme palestiniens.  Alors que 2023 s’annonce comme une nouvelle année difficile dans cette région, il est urgent d’inverser la tendance, a plaidé la représentante, non sans indiquer que, ce seul mois d’avril, une dizaine d’incidents auraient pu déboucher sur un conflit régional s’ils n’avaient pas été traités à temps.  Dans ce contexte alarmant, elle a appelé les parties à faire preuve de retenue et à éviter toute déclaration incendiaire. 

La représentante a ensuite dénoncé les attaques à la roquette effectuées contre Israël depuis des positions dans la bande de Gaza, la Syrie et le Liban.  Utiliser le territoire du Liban pour tirer des roquettes contre Israël ne fait que mettre en danger le peuple libanais et menacer le personnel de la FINUL, a-t-elle affirmé, avant de rappeler que les États-Unis reconnaissent la capacité d’Israël à exercer son droit à la légitime défense. Elle s’est cependant élevée contre les violences intervenues au cours du mois de ramadan dans la mosquée Al-Aqsa et a appelé à respecter le caractère sacré des Lieux saints à Jérusalem. 

Saluant le fait que les récentes fêtes religieuses se soient généralement déroulées de manière paisible, la représentante s’est félicitée des efforts déployés par les parties, ainsi que par la Jordanie, l’Égypte et les États-Unis, pour faire baisser les tensions et relancer des discussions directes.  Les réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh constituent des premiers pas dans cette direction, a-t-elle estimé, exhortant les parties à mettre en œuvre les engagements pris et à renforcer la confiance.  Elle s’est d’autre part déclarée préoccupée par les difficultés financières que connaît l’Autorité palestinienne et a invité la communauté internationale à œuvrer à son redressement.  Elle s’est aussi alarmée de la situation de l’UNRWA, qui n’aura plus de fonds d’ici à cet été.  Rappelant que son pays avait déboursé plusieurs centaines de milliers de dollars ces derniers mois pour lui venir en aide, elle a averti que, si les dons ne se multiplient pas, les conséquences pour la stabilité régionale pourraient être graves.  Elle a enfin assuré que les États-Unis soutiendront tous les efforts visant à parvenir à un règlement d’ensemble afin qu’Israéliens et Palestiniens puissent accéder à la paix et à la prospérité. 

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a réaffirmé que son pays attache une grande importance à la préservation du statu quo historique concernant les lieux saints de Jérusalem.  Il a rappelé que le Premier Ministre, M. Fumio Kishida, avait souligné l’importance du rôle spécial de gardien joué par la Jordanie lors de sa récente réunion au sommet avec le Roi Abdallah.  Il a également rappelé l’appel téléphonique du Premier Ministre avec le Président de l’État d’Israël, au cours duquel il a exprimé son inquiétude face aux mesures unilatérales prises par les deux parties.  Le représentant a condamné les attaques à la roquette des militants palestiniens et le terrorisme sous toutes ses formes, y compris l’attentat perpétré à Tel-Aviv le 7 avril.  Il a appelé le Gouvernement israélien à cesser ses activités de colonisation, ses démolitions et ses expulsions qui constituent une violation du droit international et vont à l’encontre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le représentant a salué les efforts déployés dans le cadre des pourparlers à cinq, tant à Aqaba qu’à Charm el-Cheikh.  Pour sa part, le Japon, qui est l’un des principaux donateurs de l’UNRWA, a accueilli la semaine dernière la réunion des ministres des affaires étrangères du G7, qui ont appelé les parties à réaliser une solution à deux États et exprimé leur volonté de continuer à aider les Palestiniens à renforcer leur autonomie économique. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte), évoquant un « scénario explosif et incontrôlable », s’est inquiétée des actes unilatéraux qui menacent toute tentative de résoudre le conflit.  Elle a condamné tout acte de terrorisme, comme les roquettes lancées depuis Gaza et le sud du Liban.  Si elle a appuyé le droit d’Israël de se défendre, elle a déploré son usage excessif de la force, insistant sur les principes de riposte graduelle et de proportionnalité, afin notamment de protéger les femmes et les enfants.  Elle s’est également dite préoccupée par la politique et les lois israéliennes qui facilitent le démembrement du Territoire palestinien occupé, particulièrement la Cisjordanie, ainsi que par la récente abrogation de la loi sur le désengagement de 2005.  Côté palestinien, la déléguée a souligné l’importance de tenir des élections libres et démocratiques, dans la lignée de la signature de la Déclaration d’Alger de 2022, avant d’exhorter les factions palestiniennes à s’engager de bonne foi dans un processus de réconciliation.  « Un tel processus serait un pas crucial vers la formation d’un nouveau gouvernement représentatif du peuple palestinien. » 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume Uni) a appelé toutes les parties à renoncer aux mesures unilatérales qui compromettent la paix, la stabilité et la solution des deux États.  Elle a condamné les tirs indiscriminés de roquettes sur Israël en provenance des factions terroristes de Gaza, de Syrie et du Liban.  Cette année, 19 Israéliens, dont 3 ressortissants israélo-britanniques, membres d’une même famille, ont été tués dans des actes de terrorisme et 90 Palestiniens, dont un enfant de 15 ans, ont été tués par les Forces de sécurité israéliennes, a déploré la représentante.  Elle a pressé l’Autorité palestinienne de dénoncer l’incitation à la violence, car de tels actes ne sont jamais justifiés.  Si Israël a, pour sa part, le droit légitime de se défendre, ses forces de sécurité doivent faire preuve de retenue dans l’usage de la force et enquêter sur tous les décès.  Toutes les parties doivent cesser les actions unilatérales qui réduisent les perspectives de paix, a poursuivi la représentante, condamnant les raids des forces de sécurité israéliennes sur la mosquée Al-Aqsa pendant le ramadan, qui ont blessé de nombreux fidèles.  Elle a demandé à toutes les parties de respecter le statu quo historique et le statut du Royaume hachémite de Jordanie en tant que gardien des Lieux saints.  Appelant à redoubler d’efforts en vue d’une paix durable, elle a salué ceux qui jettent les bases d’un dialogue, notamment les récentes initiatives jordaniennes, égyptiennes et américaines.  À cet égard, il est essentiel qu’Israël et les Palestiniens respectent les engagements pris, notamment celui d’Israël de suspendre la progression des colonies, illégales au regard du droit international.  Pour sa part, a conclu la représentante, le Royaume-Uni reste déterminé à travailler avec Israël, l’Autorité palestinienne et les partenaires internationaux pour mettre fin au terrorisme auquel Israël est confronté et au cycle destructeur de la violence qui se poursuit. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a jugé la situation très instable avant d’appeler les parties à déployer tous les efforts nécessaires pour réduire les tensions et à s’abstenir de toute mesure unilatérale, de tout acte de provocation et de tout propos inflammatoire susceptibles d’attiser le conflit.  La Suisse appelle les parties à mettre en œuvre les engagements pris à Aqaba et Charm el-Cheikh dans le sillage de la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité du 20 février dernier. 

Le représentant a dit sa préoccupation face à la poursuite de la planification de colonies par Israël ces dernières semaines, en dépit de ses engagements.  Il a rappelé que les colonies de peuplement sont illégales au regard du droit international et représentent un obstacle à la paix.  Enfin, il a jugé urgent que les parties traitent des causes profondes du conflit.  « Les récents engagements devraient servir de base concrète pour la restauration de la confiance en vue d’une solution négociée à deux États, conformément au droit international et aux paramètres convenus au niveau international, y compris les résolutions du Conseil de sécurité », a-t-il conclu.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a déploré l’impasse dans laquelle se trouve le conflit israélo-palestinien.  Il a constaté que la tension est encore montée d’un cran le 4 avril avec le raid effectué par les forces israéliennes à l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, dernière en date des violations du statu quo historique des lieux religieux enregistrées cette année.  Ce statu quo doit être respecté et sauvegardé, a insisté le représentant en rappelant le rôle crucial que joue le Royaume hachémite de Jordanie en tant que gardien officiel des lieux saints musulmans de Jérusalem.  Il s’est également fait l’écho de l’appel lancé par le pape lors des célébrations de Pâques en faveur d’une reprise du dialogue entre Israéliens et Palestiniens, afin que la paix règne dans la Ville sainte et dans toute la région. Relevant à cet égard la portée régionale du conflit, le représentant a dit craindre que 2023 n’égale le record funeste de l’an dernier en termes de victimes civiles, parmi lesquelles des femmes et des enfants.  Après avoir exhorté les forces israéliennes et les groupes armés palestiniens à respecter les obligations que leur imposent le droit international humanitaire, il a demandé aux responsables politiques des deux parties à s’abstenir de toute rhétorique de haine et d’intolérance.  Il a aussi appelé les parties à privilégier la question sensible de la restitution des dépouilles afin de générer un climat de confiance. 

Dans ce contexte, le représentant a jugé fondamental de donner effet à la résolution 2334 (2016) qui, a-t-il rappelé, demande une cessation immédiate et complète de toute activité de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  Il a d’autre part souhaité que des mesures urgentes soient prises pour aider au relèvement économique de l’Autorité palestinienne, avant de se prononcer pour le libre accès des travailleurs palestiniens de Gaza et de Cisjordanie au marché du travail israélien, ainsi que pour la levée de toutes les restrictions en matière d’accès pour les matériels à Gaza. 

Plaidant pour une « dynamique d’apaisement », le représentant a salué la tenue à Charm el-Cheikh, sous l’égide de l’Égypte, d’une réunion des responsables politiques et de la sécurité jordaniens, israéliens, palestiniens et américains, dans le cadre de l’accord conclu à Aqaba, en Jordanie, en février dernier.  Enfin, après avoir réaffirmé l’attachement de son pays à la solution des deux États, il s’est félicité du rétablissement des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran, y voyant un développement porteur d’espoir pour la stabilisation de l’ensemble de la région. 

M. PEDRO COMISSARÍO AFONSO (Mozambique), préoccupé par l’augmentation des tensions qui laisse peu de perspective pour une paix durable et des relations de bon voisinage entre les deux peuples, a encouragé le Conseil à résoudre la question de toute urgence.  L’occupation illégale et l’agression doivent cesser, a-t-il martelé, demandant la mise en œuvre des résolutions du Conseil dans l’intérêt de la paix et de la stabilité au Moyen-Orient.  Attaché à la solution des deux États, le délégué a appelé à la reprise des négociations et à la revitalisation du processus de paix.  La volonté politique et l’engagement des deux parties sont cruciaux à cet égard. Il a dénoncé les colonies illégales qui spolient et déplacent le peuple palestinien de ses terres en violation du droit international.  Le délégué s’est aussi dit préoccupé par l’aggravation de la crise humanitaire dans le territoire palestinien et par la désacralisation des Lieux saints, notamment l’invasion d’Haram el-Charif (esplanade des Mosquées).  Il a donc appelé Israël et la Palestine à revenir à la table des négociations dès que possible et la communauté internationale à accroître son appui à l’UNRWA et au Programme alimentaire mondial (PAM). 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a déploré les incidents « épouvantables », tels que le raid mené à l’intérieur de la mosquée Al-Aqsa, qui ont profondément perturbé la période des célébrations religieuses, blessé des fidèles et endommagé des bâtiments.  Craignant que ces tensions accrues ne débouchent sur une confrontation directe, il a condamné les actions entreprises en violation du statu quo historique des Lieux saints.  Le fait que des fêtes religieuses d’une telle importance pour les musulmans, les juifs et les chrétiens soient devenues une période de tension permanente ne doit pas être normalisé, a affirmé le représentant.  Israël doit cesser immédiatement ses activités de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  L’expansion continue des colonies constitue non seulement une violation flagrante du droit international mais aussi une menace pour la viabilité d’un futur État palestinien, et donc pour les perspectives d’une solution à deux États, a-t-il fait valoir.  Israël doit également mettre fin aux démolitions et aux saisies de structures palestiniennes, ainsi qu’au déplacement des familles palestiniennes, a poursuivi le représentant, avant de condamner la violence liée aux colons, l’usage disproportionné de la force par les forces de sécurité, ainsi que les actes de terreur. Appelant les autorités israéliennes à fournir une protection adéquate à la population civile palestinienne, il a invité les dirigeants de tous bords à promouvoir le calme et à éviter toute rhétorique incendiaire.  Enfin, il a exhorté la communauté internationale à soutenir l’économie palestinienne et à ne pas oublier les réfugiés palestiniens.  À cet égard, il a souligné l’importance d’un soutien accru, prévisible et durable à l’UNRWA. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a condamné les attaques terroristes contre Israël et appuyé son droit à se défendre.  Il a aussi rappelé que 90 civils palestiniens avaient péri depuis le début de l’année et condamné la violence aveugle des colons israéliens.  Rappelant que les colonies étaient illégales au regard du droit international, il a appelé à l’arrêt de la colonisation, qualifiée d’obstacle à la paix qui mine les perspectives d’une solution durable. Le représentant a appelé les deux parties à mettre en œuvre les mesures adoptées à Aqaba et Charm el-Cheikh afin d’ouvrir la voie à des pourparlers de paix.  Il a également appelé à préserver le statut quo des Lieux saints et salué le travail du Royaume hachémite de Jordanie en la matière.  Pour finir, il a réitéré le soutien de son pays à la solution des deux États dans les frontières de 1967 avec Jérusalem pour capitale. 

M. ZHANG JUN (Chine) a appelé les parties au calme et à s’abstenir de toute provocation, en rappelant qu’Israël et Palestine étaient « deux voisins inséparables », et que la sécurité de l’un ne pouvait se baser sur l’insécurité de l’autre.  Le représentant a condamné les activités illicites de colonisation par Israël, ainsi que ses actions unilatérales visant à légaliser de nouvelles colonies, qui réduisent l’espace des Palestiniens et font s’éloigner d’autant la perspective de la création d’un État palestinien.  Appelant une fois encore au respect de la résolution 2334 (2016) et à cesser toute activité de colonisation, il a qualifié tout acte modifiant le statu quo de Jérusalem de « nul et non avenu » et enjoint à Israël de respecter le statu quo historique de ses Lieux saints. 

La protection des civils palestiniens doit aussi être garantie de même que leurs moyens de subsistance, a poursuivi le représentant, sans quoi l’insécurité se propagera davantage.  Israël devrait en outre lever les limitations à la liberté de mouvement dans les territoires palestiniens occupés, lever son blocus de Gaza et créer les conditions d’un développement économique dans les dits territoires.

La communauté internationale devrait soutenir financièrement la Palestine pour soulager la crise financière en cours, a déclaré le représentant, qui a assuré que la Chine ferait de son mieux pour soutenir l’UNWRA.  Notant que plusieurs États arabes avaient normalisé leurs relations avec Israël, le représentant a conclu qu’il n’était jamais trop tard pour bien faire et a encouragé les deux parties à reprendre le dialogue et les négociations, seul moyen pour parvenir à une solution à deux États.

M. KAIRAT UMAROV, Vice-Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a dit partager la préoccupation générale concernant l’expansion continue des colonies dans le Territoire palestinien occupé.  M. Umarov a appelé Israéliens et Palestiniens à s’abstenir de toute action susceptible de compromettre l’avancement de la solution des deux États et s’est prononcé pour une relance du dialogue entre toutes les parties au conflit, accompagnée de nouvelles mesures pour améliorer la situation humanitaire de la population de Gaza et renforcer la confiance.  Rappelant à ce propos qu’Israël et la Palestine sont membres de la Conférence sur l’interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA), il les a invités à utiliser les mécanismes de coopération multilatérale de cette organisation pour rapprocher leurs positions. 

Le Vice-Ministre a par ailleurs réaffirmé la nécessité d’appuyer l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) dans son rôle crucial d’atténuation de la détérioration de la situation à Gaza et de promotion du développement à long terme de la région.  La situation actuelle, marquée par la pauvreté, le chômage et, par conséquent, la régression économique, ne peut qu’alimenter de nouveaux conflits, a-t-il averti, avant d’appeler à une inversion du déclin socioéconomique dans tout le Territoire palestinien occupé. Enfin, après avoir réaffirmé son plein soutien de son pays à la création d’un État palestinien indépendant, coexistant pacifiquement avec Israël à l’intérieur des frontières de 1967, il a assuré que son pays est prêt à se joindre à tous les efforts collectifs de médiation. 

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL, Premier Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba, a salué le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et la République islamique d’Iran, espérant que cette étape contribuera à la stabilité et à la sécurité régionales.  Cette évolution positive, a-t-il regretté, contraste avec les développements déplorables dans le Territoire palestinien occupé.  Il a décrié les « pratiques d’apartheid » d’Israël contre les Palestiniens, dont l’agression militaire et l’occupation du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et la politique d’annexion.  Le Vice-Ministre a reproché aux États-Unis d’être responsables de l’obstruction répétée à l’action du Conseil de sécurité en faveur d’une solution globale, juste et durable au conflit israélo-palestinien, et d’assurer « l’impunité d’Israël ».  La politique du deux poids, deux mesures, la sélectivité, l’incohérence et la manipulation politique doivent cesser, a-t-il martelé.  Il a réitéré sa demande du retrait total et inconditionnel d’Israël du Golan syrien et de tous les territoires arabes occupés et exigé la fin des ingérences extérieures en Syrie.  Poursuivant, le Premier Vice-Ministre a réaffirmé le soutien de Cuba au Plan d’action global commun avec l’Iran, défendant le droit inaliénable des États à l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.  Enfin, il a demandé la fin immédiate et inconditionnelle des mesures coercitives unilatérales arbitraires et illégales imposées par les États-Unis à des nations souveraines du Moyen-Orient. 

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a appelé à prévenir l’escalade de la violence et à apaiser les tensions.  Il a exhorté Israël à reprendre le dialogue avec les Palestiniens en vue de mettre en œuvre la solution des deux États.  Le représentant a plaidé pour le respect du statu quo autour des Lieux saints, chrétiens comme musulmans, à Jérusalem, rappelant que son pays est le protecteur de la mosquée Al-Aqsa, qui est un lieu de culte exclusivement musulman.  Il a appelé à mettre en œuvre les engagements pris lors des récentes réunions d’Aqaba et Charm el-Cheikh, avant de rappeler, une nouvelle fois, l’importance de respecter le statu quo.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a dénoncé les actions récentes d’Israël dans les territoires palestiniens occupés: la prise d’assaut de villes palestiniennes et la poursuite des tueries commises par les forces d’occupation et les colons contre des civils non armés, y compris des enfants.  C’est pour apaiser la situation que l’Égypte a entrepris, avec les États-Unis et la Jordanie, de faire signer des accords aux Palestiniens et aux Israéliens à Aqaba et Charm el-Cheikh, en février et mars.  Au titre des mesures recommandées, le délégué a cité la cessation des mesures unilatérales, notamment en ce qui concerne les colonies, et le respect du statu quo et de la tutelle jordanienne sur les Lieux saints.  Malheureusement, a-t-il déploré, la situation ne s’est pas apaisée sur le terrain du fait de la non-application de ce qui avait été convenu.  Le représentant a déploré l’intrusion de groupes ultra-orthodoxes sur les Lieux saints, ainsi que la restriction de la liberté d’accès aux lieux de culte aux musulmans et aux chrétiens.  Il a exhorté les protagonistes à mettre en œuvre ce qui a été convenu lors des réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh, en particulier la promesse de mettre fin à toutes les mesures unilatérales d’expansion des colonies et aux actes de violence contre les civils.  Il s’agit aussi de « ne pas porter atteinte au statut juridique et historique des lieux saints musulmans et chrétiens à Jérusalem-Est, ainsi que le respect de la tutelle du Royaume hachémite de Jordanie sur les Lieux saints ».  Le représentant a en outre rappelé qu’il avait été convenu de fournir une protection internationale au peuple palestinien.  Il a enfin appelé à relancer les négociations de paix entre les deux pays, en activant le rôle du Quatuor dont les réunions doivent reprendre dès que possible.

Mme JEANNE MRAD (Liban), s’exprimant au nom du Groupe arabe, a dénoncé le non-respect des appels au calme durant la période sainte par la Puissance occupante.  Elle y a vu un acte de provocation irresponsable contre les millions de musulmans dans le monde. Israël doit respecter le statu quo sur les Lieux saints et la tutelle de la Jordanie, a grondé la représentante.  La Palestine doit pouvoir jouir de sa liberté à Jérusalem-Est, capitale de la Palestine.  Israël n’a aucune souveraineté dans cette ville, a martelé la représentante qui a souhaité la poursuite de tous les efforts visant à protéger Jérusalem-Est, pour éviter toute modification de son identité arabe et de sa composition démographique.  Condamnant l’extension des colonies, elle a estimé que le Conseil doit faire respecter ses résolutions que viole Israël.  « Le Groupe arabe réclame une protection internationale pour le peuple palestinien. »  Il condamne les détentions arbitraires et les traitements infligés aux prisonniers palestiniens, et demande leur libération.  Il faut qu’Israël retourne les dépouilles de ses victimes et rendre des comptes, a ajouté la représentante. 

Selon le Groupe arabe, la paix n’est pas possible tant que le peuple palestinien est privé de son droit à l’autodétermination.  La représentante a demandé aux États Membres de soutenir la plainte déposée par la Palestine auprès de la Cour internationale de Justice (CIJ) en faisant part de leur appui par écrit avant juillet 2023.  La Cour doit poursuivre son enquête pour que les auteurs de crimes de guerre rendent des comptes.  « Il faut prévenir la judaïsation de Jérusalem par Israël. »  Constatant que la situation des réfugiés ne cesse de se dégrader, la représentante a regretté que la communauté internationale ferme les yeux sur le droit international.  Elle a appelé à soutenir financièrement l’UNRWA tant que la situation palestinienne n’est pas réglée y compris le droit au retour. 

À titre national, Mme Mrad (Liban) a dénoncé les attaques menées, le 7 avril 2023, par Israël dans le Sud de son pays.  C’est une menace à la stabilité au Sud du Liban et une violation de la résolution 1701 (2006) du Conseil de sécurité.  Elle a mis en garde contre toute violation de la Ligne bleue et salué le rôle de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL). 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) s’est dit profondément préoccupé par les développements récents concernant Israël et la Palestine, avant d’exhorter toutes les parties concernées à faire preuve d’un maximum de retenue et à s’abstenir de tout acte de violence et de provocation afin d’éviter une nouvelle escalade.  Le conflit ne pourra jamais être résolu par la violence, mais seulement par le dialogue et des négociations, conformément au droit international, a affirmé le représentant, qui a exprimé son soutien aux efforts de l’ONU et du Quatuor pour le Moyen-Orient pour relancer le processus de paix et inverser les tendances négatives qui mettent en péril la solution des deux États.  Le représentant a également salué les efforts que déploie l’UNRWA dans des circonstances difficiles pour répondre aux besoins humanitaires des populations palestiniennes touchées par le conflit.  Il a appelé à continuer à soutenir le travail de l’Office pour protéger la livraison des services à des millions de réfugiés palestiniens. 

Le représentant a ensuite enjoint aux parties de mettre davantage l’accent sur le renforcement de la confiance, tout en exhortant l’ensemble des parties prenantes, y compris le Quatuor, à aider à négocier le « meilleur résultat diplomatique possible » pour avancer vers le rétablissement d’un horizon politique. À cet égard, il s’est réjoui des déclarations des États membres de l’Union européenne, de la Déclaration présidentielle du Conseil de sécurité adoptée en février et du Communiqué conjoint d’Aqaba, y voyant des appels au calme bienvenus.  Si elles sont mises en œuvre, les étapes décrites à Aqaba pourraient être le début d’une inversion des tendances négatives sur le terrain, a-t-il estimé, avant de se féliciter également de l’établissement récent de relations diplomatiques entre Israël et un certain nombre de pays arabes, qui permettent à ses yeux d’améliorer les perspectives d’un règlement global du processus de paix au Moyen-Orient. 

M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a dénoncé les violations du statut quo historique des Lieux saints et les raids lancés par Israël contre la mosquée d’Al-Aqsa en période de ramadan, les qualifiant « d’inacceptables ». Rappelant que son pays s’était engagé dans des pourparlers intenses avec les responsables israéliens à tous les niveaux, il a regretté que ses appels à la retenue n’aient pas été entendus.  Selon le représentant, la fin de l’occupation et la création d’un État palestinien indépendant et viable, dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, sont des conditions préalables à une solution juste et durable.  Il a estimé que les capacités financières et administratives des Palestiniens devaient être renforcées, appelant les États Membres à garantir la stabilité financière de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). 

M. NACIM GAOUAOUI (Algérie) a rappelé que le peuple palestinien a été chassé de ses terres il y a 75 ans, « dispersé aux quatre vents », et qu’il rêve de retour.  Il a dénoncé le joug et le véritable système d’apartheid sous lesquels ce peuple vit. Le délégué a condamné l’incursion israélienne dans la mosquée Al-Aqsa, « une violation grave ».  Plus que jamais, nous devons activer les mécanismes nécessaires à la mise en place d’une protection du peuple palestinien, a-t-il dit. Or il a estimé que cette protection est otage de considérations « mesquines ».  Le délégué a demandé que la Palestine devienne un membre à part entière de l’ONU, avant de rappeler le soutien indéfectible de son pays à la Palestine.  Enfin, il a dénoncé le « silence assourdissant » de la communauté internationale face aux souffrances des Palestiniens.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a déploré l’escalade des tensions à Jérusalem du fait du piétinement du processus de paix au Moyen-Orient, piétinement essentiellement dû à la profanation de sites sacrés ainsi qu’à des violations systématiques des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. 

Israël s’est attaqué aux fidèles de la mosquée Al-Aqsa au cours du mois de ramadan, s’est indigné le représentant, qui a déclaré que le Roi du Maroc, qui préside le Comité d’Al-Qods de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), avait rappelé le statu quo juridique et historique des Lieux saints et fait feu de tout bois pour le préserver.  Le Roi a réaffirmé l’Appel de Jérusalem, selon lequel ses Lieux saints doivent être préservés en tant que symbole de coexistence culturelle. 

Le représentant a rappelé que l’an dernier, le Comité d’Al-Qods (Jérusalem) de l’OCI avait mené plusieurs projets dans un grand nombre de domaines, dont le sport et la culture.  En 2023, il a lancé son programme pour un montant de 200 000 dollars.  Réaffirmant sa solidarité pleine et entière avec le peuple palestinien et son soutien indéfectible à une solution à deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale, le représentant a conclu en rappelant les propos du Roi du Maroc, pour qui « la paix est un choix stratégique au Moyen-Orient » et la reprise des négociations, la seule voie permettant de mettre fin au conflit.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a condamné les attaques « brutales » lancées par Israël contre la mosquée Al-Aqsa au cours du mois sacré du ramadan qui ont « offensé les musulmans du monde entier ».  Il a dénoncé des violations du statut quo historique et du droit à la liberté de culte consacré par l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques approuvé par la résolution 36/55 de l’Assemblée générale de 1981.  Le droit international interdit sans équivoque à Israël, Puissance occupante, de s’emparer de terres et de construire des colonies dans les territoires occupés ou de modifier la composition démographique des territoires palestiniens occupés depuis 1967, a poursuivi le délégué.  S’appuyant sur les récentes conclusions de plusieurs rapporteurs spéciaux des Nations Unies qui affirment que les Palestiniens sous occupation israélienne continuent d’être chassés de leurs terres et constatant l’intention délibérée d’Israël de coloniser le territoire qu’il occupe, il a dénoncé des crimes de guerre prima facie.  Il s’est félicité de l’adoption de la résolution 77/400 de l’Assemblée générale demandant l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les conséquences juridiques des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  Le délégué a appelé Israël à respecter le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, demandant à la communauté internationale de refuser la politique du fait accompli imposée par Israël pour détruire la nation palestinienne.  Il s’est par ailleurs félicité de récents développements positifs dans la région, notamment la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran pour laquelle la Chine a déployé de « sincères et fructueux » efforts. Il s’est aussi félicité des avancées diplomatiques et politiques pour rétablir la paix en Syrie et au Yémen. 

M. AMIR SAIED IRAVANI (République islamique d’Iran) a dénoncé des actes horribles qui font partie d’un schéma plus large de violations systématiques des droits fondamentaux du peuple palestinien par le régime israélien.  Des actes qui représentent une violation flagrante du droit international et des principes et normes établis.  Il s’est dit profondément préoccupé par les agressions et les incursions répétées de colons extrémistes, avec le soutien des forces d’occupation israéliennes, contre le site sacré de la mosquée Al-Aqsa au cours du mois sacré de ramadan.  Il a jugé regrettable que le Conseil de sécurité soit resté silencieux, rendant les résolutions onusiennes inefficaces.  Le représentant a appelé à la restauration complète des droits des Palestiniens et à l’établissement de la souveraineté palestinienne sur toute la Palestine.  Pour y parvenir, il faut que le Conseil de sécurité agisse, a-t-il argué en l’appelant à prendre des mesures décisives pour mettre fin à l’occupation et assurer la protection des droits du peuple palestinien. « La simple sympathie ne suffit plus. »  Le représentant a estimé qu’il est du devoir de son pays de soutenir le « droit légitime de la Palestine à la résistance à l’oppression et à l’agression de ce régime d’apartheid », conformément au droit à l’autodétermination. « Ce sera notre politique de principe jusqu’à la fin de l’occupation », a-t-il assuré.  Il a en outre estimé que le représentant du régime israélien a abusé de cette salle et a eu recours aux mensonges et aux fabrications pour faire des réclamations non fondées contre l’Iran et pour détourner l’attention des atrocités commises contre le peuple palestinien. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a exprimé sa préoccupation face à la montée de la violence et de l’extrémisme en Israël et dans le Territoire palestinien occupé, appelant les dirigeants israéliens et palestiniens à s’abstenir de toute action susceptible d’accroître la tension.  Il a salué à cet égard les efforts des États-Unis, de la Jordanie, de l’Égypte et du Conseil de sécurité visant à désamorcer la situation et à soutenir les engagements pris par les parties à Aqaba et à Charm el-Cheikh.  Le représentant a ensuite condamné les incidents violents qui se sont produits pendant le ramadan dans les Lieux saints, avant de rappeler que l’usage de la force doit être proportionné et qu’il convient de respecter le statu quo mis en place en 1967 pour le mont du Temple et l’esplanade des Mosquées, ainsi que pour les lieux saints chrétiens, qui sont soumis à une pression croissante.  Il a également condamné les attaques aveugles à la roquette contre Israël depuis Gaza et les territoires du Liban et de la Syrie, avant d’appeler à l’arrêt immédiat des attentats terroristes en Israël et dans le Territoire palestinien occupé. 

Rappelant par ailleurs que l’UE s’est engagée en faveur de la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) et considère que les colonies de peuplement sont illégales au regard du droit international et constituent un obstacle à la paix et à la solution des deux États, M. Skoog a condamné la violence aveugle des colons israéliens contre les civils palestiniens, y compris la destruction de maisons et de propriétés.  Appelant Israël à mettre fin à l’expansion et à la légalisation des colonies, il a indiqué que l’UE ne reconnaîtrait pas les modifications apportées aux lignes de 1967, sauf accord des parties.  Il a également souhaité que les opérations militaires soient proportionnées et conformes au droit international humanitaire, et que le nécessaire assouplissement des restrictions humanitaire dans la bande de Gaza réponde aux préoccupations légitimes d’Israël en matière de sécurité. 

S’agissant des perspectives de règlement global du conflit israélo-palestinien, le représentant a jugé vital de restaurer un horizon politique vers une solution à deux États.  Seul un accord négocié offre une chance de sécurité et de paix pour tous, a-t-il soutenu, rappelant que l’UE s’est engagée à fournir un soutien économique, politique et sécuritaire sans précédent dans le cadre d’un accord sur le statut final. L’UE continuera d’appeler l’Autorité palestinienne à organiser sans plus tarder des élections nationales libres, transparentes et inclusives, a-t-il ajouté, avant d’exhorter toutes les factions palestiniennes à s’engager de bonne foi dans le processus de réconciliation, à adhérer aux accords antérieurs, à renoncer à la violence et au terrorisme, à reconnaître le droit d’Israël à exister et à s’engager envers les principes démocratiques, y compris l’état de droit.  Dans le même temps, l’UE demande à Israël de s’abstenir de toute action qui empêcherait les organisations de la société civile de poursuivre leur travail essentiel en matière de droits humains, d’aide humanitaire et de développement dans le Territoire palestinien occupé.

Le représentant a ensuite traité de la situation en Syrie, rappelant que le 15 mars 2023 avait marqué le douzième anniversaire du début des manifestations pacifiques dont la brutale répression par le « régime d’Assad », à l’origine du conflit qui perdure à ce jour.  Il a rappelé l’aide humanitaire apportée à la Syrie comme à la Türkiye après le séisme du 6 février dernier et l’organisation conjointe par la Suède et l’Union européenne de la conférence de donateurs qui s’est tenue le 20 mars à Bruxelles et s’est traduite par des promesses de dons de 950 millions d’euros pour la Syrie.  Il a rappelé la position de l’Union européenne concernant la seule voie vers une paix durable en Syrie, qui est une solution politique conforme à la résolution 2254 (2015) et a réitéré le soutien de l’Union européenne aux efforts de l’Envoyé spécial de l’ONU, notamment son approche « pas à pas ».  Il a également de nouveau plaidé pour que la situation en Syrie soit déférée à la Cour pénale internationale (CPI) avant de répéter que l’acheminement ininterrompu de l’aide humanitaire transfrontalière des Nations Unies reste vital pour les Syriens vivant dans le nord-ouest du pays. 

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est inquiété de l’escalade de la violence en Cisjordanie et en Israël, avertissant que si cette tendance se poursuit, il s’agira de l’année la plus meurtrière depuis 2005.  Le représentant a donc exhorté donc toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue, à maintenir le statu quo sur les Lieux saints de Jérusalem et à éviter les mesures unilatérales et les provocations.

De même, le représentant s’est dit très préoccupé par l’intensification des activités de colonisation, les saisies et les démolitions de structures appartenant à des Palestiniens.  Il a ainsi regretté la décision d’autoriser les avant-postes en Cisjordanie et d’approuver de nouvelles unités résidentielles dans les colonies existantes, qui mettent gravement en péril la viabilité de la solution des deux États. Il a exhorté la communauté internationale à s’attaquer aux expulsions forcées et aux déplacements de Palestiniens à Jérusalem-Est et à œuvrer à la prévention d’une nouvelle escalade des conflits.

À long terme, il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États, a affirmé le représentant, qui a pressé les parties prenantes concernées, en particulier au sein du Quatuor, d’élaborer des plans spécifiques et urgents pour faire progresser le processus de paix au Moyen-Orient. 

M. JOAQUIN PEREZ (Venezuela) a regretté que les récentes réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh n’aient pas abouti à la reprise du dialogue politique et de négociations crédibles, sérieuses et directes entre les parties.  Le représentant en a rejeté les torts sur Israël, accusé d’avoir choisi de refuser une nouvelle fois toute chance à la paix. 

En témoignent, a-t-il illustré, les images qui ont fait le tour du monde ces derniers jours, lorsque les forces d’occupation ont souillé ce mois d’avril, qui coïncidait pourtant avec des dates importantes pour les religions musulmane, juive et chrétienne, en attaquant sans discernement les fidèles et la population civile en général aux portes des temples sacrés, en violation flagrante de leur caractère sacré et du statu quo.

Pour le représentant, il est clair que la situation sur le terrain ne s’est nullement améliorée depuis la dernière séance du Conseil de sécurité sur la question, et qu’elle continue à se détériorer jour après jour, comme le confirment les rapports publiés par les Nations Unies eux-mêmes.  Pour le Venezuela, ces rapports montrent bien que la Puissance occupante n’a pas l’intention de mettre fin à l’occupation et que ses politiques visent à prendre le contrôle total du Territoire palestinien occupé, y compris en tentant de modifier la situation démographique. 

Les perspectives ne sont certainement pas encourageantes, a commenté le représentant, qui a dénoncé une réalité qui constitue une violation flagrante, systématique des normes du droit international.  C’est peut-être là le meilleur exemple de « l’ordre fondé sur des règles » que les États-Unis et leurs alliés tentent d’imposer, a-t-il dénoncé, en citant l’unilatéralisme, la suprématie, le double standard et des interprétations accommodantes de leurs obligations internationales par ces pays. Il a appelé à mettre fin au cycle d’impunité qui, depuis des années, ne fait qu’encourager Israël à poursuivre ses crimes et à traduire en justice les responsables de tant de douleurs et de souffrances.

Enfin, le représentant a salué la normalisation des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite, évoquant également la régularisation des relations diplomatiques entre la République arabe syrienne et plusieurs États Membres de la région. 

Pour M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh), Israël sape toutes les lois internationales par son occupation illégale du Territoire palestinien, y compris Jérusalem-Est.  Il a rappelé la réunion du 20 février, au cours de laquelle le Conseil s’est dit consterné par la déclaration d’Israël sur l’expansion continue des colonies de peuplement et la légalisation des colonies situées aux avant-postes.  Exhortant le Conseil à prendre des mesures immédiates et concrètes, le représentant a voulu que l’on traduise Israël en justice pour les atrocités et les violations des droits de l’homme qu’il commet dans le Territoire palestinien occupé et que l’on mette fin à cette culture de l’impunité bien ancrée. 

Près de 5 000 Palestiniens, dont 31 femmes et 170 enfants, étant en détention arbitraire donc illégale, le représentant a lancé un appel à la libération de tous les Palestiniens détenus par les forces d’occupation israéliennes.  Demandant à la communauté internationale d’assurer la protection des Palestiniens sur leur propre terre et de leur fournir l’aide humanitaire nécessaire jusqu’à la création d’un État palestinien indépendant, viable et souverain, avec Jérusalem-Est pour capitale, il a conclu en exhortant le Conseil à appliquer ses propres résolutions pour de bon, y compris la résolution 2334 (2016). 

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a rappelé qu’Israël, en tant que Puissance occupante, a l’obligation en vertu du droit international d’assurer la sécurité et la protection des civils palestiniens vivant sous occupation. La représentante a dénoncé les attaques perpétrées par les forces israéliennes contre les fidèles palestiniens durant le mois saint du ramadan.  La prévalence de telles attaques n’a fait qu’aggraver l’atmosphère de peur et de coercition qui règne, a-t-elle dit, en condamnant les atteintes à la liberté de culte.  Elle a estimé que les actions entreprises depuis le début de cette année ne font que rendre la solution des deux États plus lointaine encore, avant de rappeler l’illicéité au regard du droit international des colonies de peuplement israéliennes.  Enfin, elle a jugé capital qu’Israël soit tenu responsable des violences infligées aux Palestiniens et demandé que les résolutions du Conseil de sécurité soient appliquées strictement.

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a dénoncé l’action de la police israélienne sur l’esplanade des Mosquées, ainsi que les tirs de roquettes contre Israël qui ne font qu’alimenter la violence.  Il a condamné tous les actes de violence contre les civils, y compris les actes de terrorisme, d’où qu’ils viennent.  Il a appelé à des efforts pour apaiser la situation actuelle et surtout relancer le processus de paix, notamment par des négociations directes entre Israël et la Palestine, sous la médiation du Quatuor et de médiateurs internationaux.  Le délégué a insisté sur la préservation du statu quo historique et juridique des lieux saints chrétiens et musulmans à Jérusalem. Il a rappelé qu’en 1947, le Pérou était membre et Vice-Président de la Commission spéciale sur la Palestine, laquelle proposa la création de deux États: la Palestine et Israël.  Conformément à cette position historique, il a dit soutenir la pleine application de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, laquelle exige d’arrêter toutes les activités de colonisation et d’établir les éléments d’une solution juste et durable pour la coexistence des deux États à l’intérieur des frontières de 1967.

M. ARRMANATHA NASIR (Indonésie) a déclaré que tous les jours les Palestiniens paient le prix fort de l’inaction de la communauté internationale.  Quel message envoyons-nous aux femmes et aux enfants palestiniens innocents?  Celui selon lequel leurs vies valent moins que dans d’autres parties du monde en conflit?  Le représentant a exigé des mesures concrètes en faveur de la désescalade, arguant que ce Conseil doit agir face aux actes d’une puissance occupante qui bafoue le droit international.  Il a aussi estimé que le Conseil ne saurait rester « indifférent » devant le soutien écrasant à la solution des deux États et demandé que l’UNRWA soit dotée de ressources financières durables et prévisibles.

M. SARHAD SARDAR ABDULRAHMAN FATAH (Iraq) a estimé que la participation à ce débat témoigne de la volonté de la communauté internationale de soutenir la cause d’un peuple qui essaie de bâtir son État et de vivre en paix.  Ce peuple continue de faire face à des violations flagrantes des accords signés, des résolutions de l’ONU et des dispositions du droit international, a-t-il dénoncé, avant de réaffirmer le respect de son pays pour la Charte des Nations Unies et ses principes.  Pour le représentant, il est essentiel, dans le contexte de ce long conflit, que le statu quo des Lieux saints soit maintenu sous la garde du Royaume hachémite de Jordanie. Il importe également que le droit du peuple palestinien à l’autodétermination soit reconnu, de même que son droit à ériger son propre État indépendant.  Il faut enfin que le Conseil de sécurité s’acquitte de ses responsabilités et veille à la mise en œuvre effective de la résolution 2334 (2016) qui exige l’arrêt des colonies de peuplement et appelle la Puissance occupante à s’abstenir d’actes destructeurs et provocateurs.  Ces violations sont la cause profonde du conflit qui perdure au Moyen-Orient, a souligné le délégué, appelant le Conseil de sécurité à promouvoir des solutions qui permettent au peuple palestinien de vivre en paix et dans la dignité.  Avant de conclure, il a une nouvelle fois condamné la profanation de la mosquée Al-Aqsa, « cœur de la Palestine occupée », et voulu que l’on cesse de manipuler les acquis historiques et juridiques. 

M. BASSAM SABBAGH, (République arabe syrienne) a constaté que chaque année, Israël se livre à une « escalade criminelle » durant le mois de ramadan.  Témoin de ces crimes contre l’humanité, le Conseil ne lève pas le petit doigt, paralysé qu’il est par le soutien sans limite de certains de ses membres permanents à Israël.  Le représentant a condamné avec la plus grande fermeté les attaques israéliennes contre les fidèles de la mosquée Al-Aqsa et la profanation de ce lieu sacré.  Une nouvelle fois, il a déploré le silence de la communauté internationale qui doit pourtant réussir à contraindre Israël à mettre en œuvre les résolutions et à permettre au peuple palestinien de jouir de ses droits inaliénables.  Ce sont, a-t-il expliqué, les crises politiques récurrentes en Israël qui poussent ses dirigeants à exporter leurs tensions, à lancer des attaques contre le peuple palestinien et à commettre des actes d’agression contre la Syrie et le Sud-Liban.  Le représentant a dit ne pas comprendre pourquoi certains États s’obstinent à placer sur un pied d’égalité le bourreau et la victime, la Puissance occupante et le peuple palestinien sans défense soumis à l’occupation et privé de ses droits les plus fondamentaux. 

Il a souligné l’importance d’assurer le financement de l’UNRWA, avant de dénoncer l’occupation du Golan syrien depuis 1967, laquelle reflète la politique systématique d’expansionnisme et de colonisation d’Israël.  Il a dénoncé les attaques israéliennes contre le territoire syrien en mars et en avril qui ont ciblé les alentours de Damas, d’Alep et de Homs et causé des morts et des blessés parmi la population civile, sans oublier les dégâts infligés à l’aéroport international d’Alep lesquels ont bloqué l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones touchées par le tremblement de terre du 6 février dernier. Pour conclure, le représentant a rejeté les déclarations de l’Union européenne sur son pays comme une tentative de détourner l’attention des crimes commis par Israël dans la région. 

M. CHEIKH NIANG, Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a rappelé que le Comité commémorera le 15 mai le soixante-quinzième anniversaire de la Nakba, qui revient sur l’injustice historique subie par le peuple palestinien et la dette de la communauté internationale envers lui et les plus de 5,8 millions de réfugiés enregistrés auprès de L’UNRWA. Le Président du Comité a également voulu se souvenir de l’occupation israélienne, qui dure depuis près de 56 ans et dont la fin n’est pas en vue, comme en témoignent les débats inquiétants en Israël sur la possibilité de poursuivre l’annexion des territoires palestiniens occupés.

À cet égard, M. Niang a rappelé que le Comité s’est déclaré préoccupé par l’adoption par Israël, le 21 mars, d’un amendement à la loi de 2005 sur le désengagement qui ouvre la voie au rétablissement par Israël de l’ancienne colonie de « Homesh » en Cisjordanie et réitère ses appels à un arrêt complet de toutes les activités de colonisation.

Revenant sur les derniers développements dans la région, qui ont coïncidé avec les célébrations du ramadan et de la Pâque juive, M. Niang a regretté que cette période de réflexion et de célébration se soit soldée par des violences de la part des forces israéliennes qui sont entrées dans la mosquée Al-Aqsa.  Le Comité condamne les violences commises dans la mosquée Al-Aqsa et rappelle à Israël le statu quo historique des Lieux saints, dans le respect du rôle particulier du Royaume hachémite de Jordanie et du Waqf.  De même, l’intervenant a dénoncé les restrictions imposées par Israël à la participation des fidèles à la Pâque orthodoxe le 16 avril, faisant, là aussi, un usage excessif de la force. 

En outre, le Comité a fermement condamné les déclarations du Ministre israélien des finances, qui a nié l’existence du peuple palestinien et appelé à « effacer » Houara, un village palestinien de Cisjordanie occupée. M. Niang a appelé les responsables politiques, religieux et communautaires de toutes les parties à rejeter les discours incendiaires et les actions provocatrices, et à s’abstenir de prendre des mesures susceptibles d’aggraver les tensions.  Dans le même temps, il a jugé inacceptables les tirs aveugles de roquettes sur les populations civiles qui doivent cesser. 

Saluant les efforts de médiation des Nations Unies pour désamorcer la situation, le Président du Comité a dénoncé l’établissement incessant par Israël d’avant-postes illégaux, l’avancée des colonies, les saisies et les démolitions de centaines de structures, parfois financées par des donateurs internationaux, et le déplacement de 388 personnes.  Il a aussi dénoncé les plans visant à la construction de plus de 7 200 unités de logement supplémentaires dans les colonies, dont 4 000 au cœur de la Cisjordanie occupée.

Enfin, M. Niang s’est félicité des résolutions adoptées le 4 avril courant par le Conseil des droits de l’homme sur la situation en Palestine et a appelé à leur mise en œuvre.  Il a également salué les réunions de haut niveau organisées à Aqaba et à Charm el-Cheikh et les engagement pris pour faire progresser la sécurité, la stabilité et la paix.

M. MAGED ABDELFATTAH ABDELAZIZ, de la Ligue des États arabes, a reproché au Gouvernement « extrémiste » israélien de violer tous les droits du peuple palestinien et d’appliquer une politique de peuplement « féroce » contrevenant à tous ses engagements en vertu du droit international humanitaire, du droit international et de la résolution 2334 (2016).

Il a dénoncé les attaques répétées commises dans la mosquée Al-Aqsa, et le fait d’en avoir empêché l’accès aux fidèles.  « Une mosquée profanée par les colons durant le mois de ramadan », a-t-il déploré, y voyant « une circonstance aggravante ».  C’est un affront du Gouvernement israélien à la communauté internationale, et même à son propre pays, a ajouté l’Observateur en évoquant les manifestations qui se sont multipliées en Israël.  Le Conseil de sécurité doit s’opposer à ces violations, sans quoi la crédibilité de l’ordre international sera ébranlée.  Selon lui, Israël exploite la polarisation du Conseil pour écarter certains pays du cadre du Quatuor.  « Tout cela présage une troisième intifada, avec les répercussions que l’on peut imaginer pour les peuples de la région tout entière », a-t-il mis en garde.  La Ligue des États arabes invite donc à la création d’un mécanisme multilatéral avant que des massacres comme ceux de 1994 ne se reproduisent.  L’Observateur a ainsi appelé le Secrétaire général à produire immédiatement un rapport contenant des propositions précises sur les moyens de protéger le peuple palestinien.  Cela est très important, car le Gouvernement israélien vise à créer des « milices spéciales » qui ne seront pas sous le contrôle du Ministère de l’intérieur, a-t-il averti. 

S’exprimant au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), M. SIDI MOHAMED LAGHDAF (Mauritanie) s’est dit très préoccupé par l’escalade des crimes perpétrés par les forces d’occupation israéliennes et les colons extrémistes dans les territoires occupés, notamment à Jérusalem, Naplouse, Jénine et Jéricho ayant causé la mort de 96 Palestiniens depuis le début de l’année.  Il s’est dit tout particulièrement préoccupé par la répétition des attaques menées par les forces israéliennes et les colons contre la mosquée Al-Aqsa lors du ramadan et a dénoncé des agressions brutales contre des fidèles qui y priaient.  Il a regretté que les violations multiples du droit international commises par Israël soient perpétrées dans la plus totale impunité, déplorant une « impasse politique » dans laquelle la solution des deux États s’éloigne chaque jour davantage.  Le délégué a appelé le Conseil de sécurité à faire respecter le droit international, notamment la résolution 2334 (2016) et celles 476 et 478, de 1980, sur le statut de Jérusalem comme capitale de l’État occupé de Palestine.  Il a dénoncé la mise à mal du statut quo historique sur les Lieux saints par Israël, qualifié l’expansion de la colonisation de « crime de guerre » et appelé à la levée du blocus contre la bande de Gaza. 

Mme LAUZA ALI (Maldives) a indiqué que les condamnations verbales ne sont pas suffisantes pour mettre un terme aux activités de colonisation dans les territoires palestiniens occupés et aux démolitions de structures palestiniennes. Pour le seul mois de février, plus de 7 000 unités de logement ont été approuvées en Cisjordanie, a-t-elle dénoncé .  Elle a estimé que les actions israéliennes dans ces territoires doivent être soumises au droit car « l’état de droit s’applique à tous les pays ».  La représentante a demandé la pleine application de la résolution 2334 (2016), avant de rappeler l’engagement inébranlable de son pays en faveur de la solution des deux États.  Enfin, elle a jugé indispensable le soutien apporté à l’UNRWA.

M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a rappelé que son pays a condamné l’incursion israélienne sur l’esplanade de la mosquée Al-Aqsa.  La paix, la sécurité et la justice ne seront atteintes que par la solution des deux États et la création d’un État palestinien indépendant et souverain sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.  Le délégué a appelé le Conseil de sécurité à assumer ses responsabilités et à mette en œuvre ses résolutions pertinentes pour mettre fin aux violations d’Israël.  Il a dénoncé les actes d’Israël tendant à modifier la démographie de Jérusalem et à y imposer sa souveraineté.  Il a en outre appelé Israël à mettre immédiatement fin aux actions punitives unilatérales ciblant les Palestiniens.  Il a exigé une protection internationale urgente pour le peuple palestinien, conformément aux propositions du Secrétaire général qui avaient été accueillies favorablement par l’Assemblée générale.  Le délégué a appelé le nouveau Gouvernement israélien à tenir compte des appels à la paix de la communauté internationale et à s’occuper sérieusement du règlement du conflit avec les Palestiniens.  La communauté internationale, a-t-il conclu, doit relancer les efforts pour résoudre le conflit le plus long de l’histoire des Nations Unies.

M. JORGE VIDAL (Chili) a déclaré que la région du Moyen-Orient méritait la paix et que la solution implique des négociations fructueuses et directes entre la Palestine et Israël en vue de parvenir à la solution des deux États libres et vivant dans des frontière sûres et internationalement reconnues.  Le représentant a dit sa préoccupation face à la montée des tensions autour des Lieux saints à Jérusalem et ailleurs.  Ce qui se passe dans les différentes colonies et leur expansion, par Israël, ne favorise pas une paix juste et durable, ni digne et sûre, a-t-il ajouté.  Le Chili demande que le statu quo juridique, historique et religieux des Lieux saints de Jérusalem soit respecté.  Il condamne aussi toutes les actions violentes du Hamas et de tout groupe armé qui utilise la violence pour atteindre un objectif.

Le représentant a pris note de l’adoption le 20 février de la Déclaration présidentielle du Conseil de sécurité, premier texte sur la question depuis la résolution 2334 (2016), adoptée en décembre 2016.  Il a souhaité que la célébration prochaine des 30 ans des Accords d’Oslo incitera les parties à faire preuve de volonté politique pour mettre de côté les éléments radicaux et les discours extrémistes et réaffirmer le respect des droits de l’homme.  Il a aussi salué les efforts des pays de la région en faveur de la réconciliation.  Il a, enfin, rendu hommage au travail l’UNRWA.

M. JASSIM SAYAR A. J. AL-MAAWDA (Qatar) a rappelé que, lors du précédent débat public du Conseil de sécurité sur la situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine, de nombreuses délégations s’étaient alarmées du niveau de violence enregistré en 2022 dans le Territoire palestinien occupé. Il a cependant constaté que les premiers mois de cette année sont marqués par la poursuite de la politique d’escalade d’Israël.  Tout en saluant l’adoption par le Conseil d’une déclaration présidentielle appelant à la baisse des tensions, il s’est dit préoccupé par la tendance extrémiste du nouveau Gouvernement israélien.  Depuis la Déclaration présidentielle, les violations se sont poursuivies, commises par la Puissance occupante et par des colons extrémistes.  S’indignant notamment du raid des forces de sécurité israéliennes à la mosquée Al-Aqsa pendant le mois de ramadan, le représentant a vu dans ces faits une violation flagrante de la liberté de culte et des dispositions de la résolution 2334 (2016).  C’est l’illustration d’une politique qui choque des millions de musulmans dans le monde et dans ce contexte, la solution des deux États, qui reste la seule permettant d’établir une paix juste et durable, semble nous échapper. 

Le représentant a condamné avec véhémence les tentatives de judaïser la ville de Jérusalem et d’en effacer l’identité arabe et chrétienne.  Il a insisté sur le statu quo des Lieux saints et souligné que c’est la politique d’occupation qui est la principale raison de l’instabilité et de la violence dans la région.  Il a rappelé à cet égard que le Qatar a voté en faveur d’une résolution de l’Assemblée générale demandant à la CIJ un avis consultatif sur les répercussions juridiques de l’occupation israélienne.  Il a enfin indiqué que son pays fait tout son possible pour aider le peuple palestinien, notamment à Gaza où un siège injustifié perdure depuis plus de 15 ans. Nous continuerons de soutenir les efforts visant à aboutir à une paix pérenne dans la région, a promis le représentant. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a réitéré sa préoccupation face à la croissance persistante et continue des colonies israéliennes illégales dans les territoires palestiniens occupés et appelé à l’arrêt de leur expansion.  La gravité de la situation liée aux colonies israéliennes a été reconnue par l’Assemblée générale et par ce Conseil de sécurité dans sa résolution 2334 (2016) qui souligne que les colonies établies par Israël en Cisjordanie et à Jérusalem-Est n’ont aucune validité juridique, sont contraires au droit international, entravent la paix et affaiblissent la perspective d’une solution à deux États, a rappelé le représentant.  Dans ce contexte, il a réitéré la préoccupation de son gouvernement quant à la décision des autorités israéliennes de légaliser neuf avant-postes et de construire 10 000 logements dans les colonies existantes en Cisjordanie. 

Par ailleurs, le représentant a fermement condamné le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations et réaffirmé sa consternation face aux attentats perpétrés contre des citoyens israéliens et d’autres nationalités en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à Tel-Aviv.  L’Argentine reconnaît le droit d’Israël à exercer sa légitime défense, en soulignant l’importance que les mesures prises respectent le droit international humanitaire, en particulier les principes de distinction et de proportionnalité, a-t-il conclu.

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a énergiquement condamné « l’attaque vicieuse » des Forces de défense israéliennes contre la mosquée Al-Aqsa durant le mois de ramadan.  Appelant les deux parties à la plus grande retenue, s’agissant de la violence et des provocations, il a sommé Israël de cesser immédiatement et complètement son occupation et l’implantation de colonies dans le Territoire palestinien occupé. L’impunité dont jouit Israël s’apparente à un échec cuisant du Conseil de sécurité, qui ne parvient pas à contenir ces crimes, a estimé le représentant.  Il a fermement condamné cette politique du deux poids, deux mesures, alors qu’il incombe à l’ONU de protéger le peuple palestinien.  Il a enfin appelé les délégations à contribuer de manière cohérente et prévisible au financement de l’UNWRA.

M. KIM SANGJIN (République de Corée) a appelé au respect du statu quo des Lieux saints à Jérusalem, avant de condamner dans les termes les plus forts les attaques terroristes.  Il a appuyé tous les efforts diplomatiques visant à instaurer une paix durable dans la région, arguant qu’il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États.  Il s’est dit vivement préoccupé par l’expansion des colonies de peuplement en Cisjordanie, en rappelant qu’elles sont illicites au regard du droit international.  Enfin, il a déploré la détérioration de la situation humanitaire en Cisjordanie et à Gaza, avant de préciser que son pays a augmenté son soutien financier à l’UNRWA.

M. TAREK LADEB (Tunisie) a condamné le raid des colons et des forces de sécurité israéliennes à la mosquée Al-Aqsa, lequel a provoqué le ressentiment des musulmans du monde entier.  Il a rappelé l’importance de la tutelle historique de la Jordanie sur les lieux saints musulmans et chrétiens de la ville de Jérusalem.  Pour le représentant, l’engagement international en faveur de la cause palestinienne ne peut continuer de se manifester que lorsqu’il y a des épisodes de violence, sans se focaliser sur la cause principale de cette situation, à savoir l’occupation israélienne du Territoire palestinien.  Il a appelé la communauté internationale à promouvoir des négociations sérieuses et efficaces sur l’instauration d’une paix juste, globale et durable.  À l’approche du soixante-quinzième anniversaire de la Naqba, le 15 mai 2023, il s’est incliné devant les énormes sacrifices du peuple palestinien et ses longues souffrances.  Il a invité la communauté internationale et le Conseil de sécurité à offrir la protection nécessaire à ce peuple, à faire campagne contre les actes agressifs de l’occupation et à demander des comptes à la Puissance occupante.  Enfin, il a rappelé le ferme engagement de la Tunisie à rester aux côtés du peuple palestinien dans sa quête légitime de l’autodétermination et de l’établissement d’un État indépendant et souverain dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.

M. ABDULAZIZ A. M. A. ALAJMI (Koweït) a souligné qu’au cours des dernières années des cohortes de colons extrémistes sont allés profaner l’esplanade des Mosquées et agresser les fidèles.  Il a rejeté toute tentative de modifier le statut quo historique des Lieux saints sur lesquels la Puissance occupante n’a aucun droit.  Appelant le Conseil de sécurité à faire respecter les résolutions qu’il adopte depuis 1948, il a dénoncé l’expansion des colonies et s’est inquiété de ce que réserve l’un des gouvernements les plus extrémistes qu’ait jamais connus Israël.  Le délégué a appelé au respect des droits inaliénables du peuple palestinien, à la fin de l’occupation et à la souveraineté nationale de la Palestine dans ses frontières de 1967.  Il a salué la saisine de la CIJ et lui a demandé de finaliser son enquête pour que l’on puisse juger les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis contre le peuple palestinien, notamment les crimes d’annexion, de colonisation, d’expulsion et de blocus.   

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a rappelé que l’ONU a reconnu la solution des deux États sur les frontières de 1967 comme la voie vers une paix juste et durable.  En traçant cette voie, a-t-il ajouté, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité ont adopté un large éventail de résolutions qui condamnent l’occupation de Jérusalem-Est par Israël, la qualifiant d’illégale et appelant à une solution qui tienne compte des préoccupations légitimes des Israéliens comme des Palestiniens.  Pour le représentant, la primauté du droit à l’autodétermination du peuple palestinien est essentielle pour résoudre la question de Palestine.  L’engagement de la communauté internationale envers la Charte des Nations Unies l’oblige selon lui à tenir Israël pour responsable de l’occupation qui dure depuis 56 ans et qui est marquée par la discrimination et la persécution raciales.  En tant que pays ayant une expérience vécue de l’occupation coloniale, la Namibie sait ce que représente l’apartheid, a souligné le représentant, accusant Israël de se rendre coupable de cette pratique.  De fait, la Puissance occupante doit être tenue pour responsable de ses violations du droit international, du droit international des droits de l’homme et des résolutions adoptées par le Conseil et l’Assemblée, a-t-il martelé.  Alors qu’approche le soixante-quinzième anniversaire de la Nakba et qu’une paix juste semble de plus en plus lointaine, ce Conseil a le devoir d’empêcher une autre catastrophe de ce type, de prévenir un génocide, de protéger un peuple vulnérable et de poursuivre la justice avant qu’il ne soit trop tard, a soutenu le délégué.  

Mme LEYLA NOVRUZ (Azerbaïdjan), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés , a dénoncé « une injustice historique persistante, dont le cœur est constitué par des décennies d’occupation israélienne du territoire palestinien et d’autres territoires arabes ».  Elle a qualifié la paralysie internationale prolongée « d’inexcusable », rappelant l’existence d’un consensus sur une solution juste et demandant instamment au Conseil de sécurité d’agir immédiatement pour mettre en œuvre ses propres résolutions, notamment la résolution 2334 (2016). 

Le Mouvement est gravement préoccupé par la détérioration de la situation sur le terrain, marquée par une montée de la violence, en particulier celle des colons, a ajouté la représentante, qui a appelé au plein respect du statu quo historique sur les Lieux saints.  Elle a condamné la prétendue annexion par Israël de Jérusalem-Est, la poursuite de la colonisation et l’expulsion de familles palestiniennes de leurs maisons et de leurs terres.  Le Mouvement réitère son appel à la levée complète du blocus israélien illégal de la bande de Gaza, qui inflige de terribles souffrances à plus de deux millions de personnes.  Il demande instamment à la communauté internationale de fournir à l’UNRWA un financement suffisant et prévisible.  Estimant que beaucoup des violations commises par Israël pouvaient constituer des crimes de guerres, la représentante s’est dite gravement préoccupée par l’absence de responsabilisation de ce pays, dénonçant au passage son « mépris flagrant » pour le Conseil de sécurité et le droit international.  Elle a également dénoncé l’annexion du Golan syrien par Israël en 1981, la qualifiant de « nulle et non avenue ».

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a estimé que, tant qu’une solution globale au conflit israélo-palestinien ne sera pas trouvée, la recrudescence de la violence, telle que celle à laquelle le monde vient d’assister, continuera de se produire et hypothéquera la paix et la sécurité de la région.  Constatant que ce conflit ne cesse de saper les efforts déployés par le Conseil de sécurité pour honorer les principes de la Charte des Nations Unies et s’acquitter de sa mission de paix, le représentant s’est alarmé du nombre effarant de morts, de destructions, de déplacements que ces violences entraînent depuis des décennies.  Face à l’impasse actuelle, il a appelé le Conseil à mettre en œuvre ses résolutions et à envisager toutes les voies diplomatiques et politiques possibles afin d’aboutir à la solution des deux États, dans les frontières de 1967.  Il a également invité Israéliens et Palestiniens à éviter toute mesure unilatérale susceptible d’aggraver les tensions.  Condamnant les flambées de violence de part et d’autre ainsi que toutes les mesures contraires au droit international, il a attiré l’attention du Conseil sur le sort des réfugiés palestiniens et des populations en détresse, qui ont besoin d’une aide humanitaire soutenue.  Il faut leur garantir le droit à la vie, à la liberté et à la prospérité, a-t-il plaidé, avant d’exhorter les parties au conflit à rétablir la confiance mutuelle et à renforcer les chances d’une solution juste et acceptable par tous, fondée sur le consensus. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a estimé que les tensions observées pendant le ramadan, la Pâque juive et Pâques auraient pu facilement devenir incontrôlables et a félicité les parties d’avoir contribué à la désescalade.  Le calme relatif qui a régné à Haram el-Charif/mont du Temple à la fin du ramadan a démontré que même pendant les périodes de tension élevée, il est possible d’éviter une grave escalade, a ajouté la représentante, qui a aussi reconnu les efforts consentis par l’ONU et l’influence apaisante de plusieurs acteurs régionaux, en particulier les déclarations faites lors des réunions d’Aqaba et de Charm el-Cheikh.  La Norvège appelle à leur mise en œuvre et exhorte Israël à respecter le statu quo historique des Lieux saints, y compris le rôle de gardien de la Jordanie.

La représentante a rappelé que la Norvège avait voté en faveur du plan de partage de la Palestine approuvé par l’ONU en 1947.  Elle a donc voté en faveur de la création d’Israël et d’un État palestinien. Elle reste attachée à la solution des deux États, qui est le meilleur moyen de garantir la sécurité et les droits humains des Israéliens et des Palestiniens, ainsi que le droit des deux peuples à l’autodétermination.

Présidente du groupe des donateurs pour la Palestine, la Norvège continue de travailler, même en ces temps très difficiles, à l’amélioration des conditions économiques et à la construction des institutions palestiniennes pour un État palestinien, a affirmé la représentante.  Elle convoquera donc, la semaine prochaine, le groupe des donateurs pour une réunion à Bruxelles, organisée par l’Union européenne.  Il s’agira d’examiner la situation financière très grave de l’Autorité palestinienne et de fixer des objectifs pour sauvegarder la viabilité de la solution des deux États, a conclu la représentante.

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a jugé déplorable que la question de Palestine n’ait pas encore été réglée, avant de rappeler son attachement à la solution des deux États.  Il a rejeté toute annexion du territoire d’un État par un autre et qualifié Gaza de prison à ciel ouvert.  Il a exhorté les parties à faire montre de retenue et à éviter toute provocation.  Il a appelé au respect du statu quo des Lieux saints, avant d’ajouter que la situation en Palestine s’apparente à du colonialisme.  Nous devons trouver une solution à la catastrophe qui se déroule sous nos yeux, a conclu le délégué, en souhaitant une paix pérenne pour la Palestine.

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a réaffirmé le caractère central de la cause palestinienne et l’importance de préserver le processus de paix et les efforts régionaux et internationaux visant à établir un État palestinien indépendant dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. Cette approche, a-t-il dit, est conforme à la solution des deux États, aux principes du droit international et à l’Initiative de paix arabe.  Le représentant a appelé à la protection des fidèles de la mosquée Al-Aqsa et autres Lieux saints, avant d’insister sur la préservation du statu quo historique et juridique et sur le respect du rôle du Royaume hachémite de Jordanie dans la gestion, l’entretien et la protection des Lieux saints.

Le délégué a salué la déclaration tripartite et l’accord entre le Royaume d’Arabie saoudite et la République islamique d’Iran, sous les auspices de la République populaire de Chine.  Il a dit espérer que cet accord sera une étape positive vers la résolution des différends et l’établissement de relations internationales fondées sur la compréhension, le respect mutuel, la non-ingérence dans les affaires intérieures et le respect de la Charte des Nations Unies et des normes internationales.  Le représentant a dit regretter les affrontements armés en cours au Soudan, lesquels ont des répercussions dangereuses sur la population civile.  Il a appelé les parties à la sagesse et à la raison, les priant de privilégier le dialogue pour trouver des solutions politiques qui préservent la sécurité et la stabilité du Soudan et protègent les intérêts de son peuple.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: les jeunes, agents essentiels de progrès vers la réalisation des ODD, sont vus comme le présent et l’avenir

Session de 2023, Forum de la jeunesse,
1re et 2e réunions – matin
ECOSOC/7122

Forum de la jeunesse de l’ECOSOC: les jeunes, agents essentiels de progrès vers la réalisation des ODD, sont vus comme le présent et l’avenir

Le plus grand rassemblement de jeunes personnes aux Nations Unies a commencé ce matin à New York, dans le cadre du forum de la jeunesse du Conseil économique et social.  « Cher monde, nous influençons directement ce qui se passe autour de vous », ont déclaré les jeunes dans la vidéo introductive.  Saluant tous ceux et celles qui sont venus de loin, la Présidente de l’ECOSOC, Mme Lachezara Stoeva, a dit apprécier de voir une salle pleine d’énergie et d’engagement, « que seuls les jeunes peuvent nous apporter ». Elle les a tous invités à ajouter leur voix à la discussion en utilisant le hashtag #YOUTH2030.

« Vous aurez bientôt un bon partenaire », leur a tout d’abord promis le Président de la soixante-dix-septième session de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi: le nouveau Bureau des Nations Unies pour la jeunesse, qui garantira l’intégration systématique des voix de la jeunesse à l’ONU. Une promesse confirmée par le Secrétaire général de l’ONU qui, dans son message vidéo, a dit attendre des mesures pour permettre la participation de la jeunesse dans tous les travaux de l’Organisation.  M. António Guterres a également insisté auprès des États Membres pour qu’ils fassent participer les jeunes aux décisions des Nations Unies.  Et aux jeunes, il a demandé de préparer le sommet de septembre sur les objectifs de développement durable (ODD).

Sur le thème « Les jeunes, agents essentiels d’un changement positif pour la reprise après la COVID-19 et la mise en œuvre des ODD », la session, qui se tient sur trois jours, traitera en particulier des objectifs de développement durable sur l’eau et l’assainissement (ODD 6), les villes et les communautés durables (ODD 11), l’énergie propre et d’un coût abordable (ODD 7), l’industrie, l’innovation et l’infrastructure (ODD 9), et les partenariats (ODD 17) afin d’examiner les progrès et de faire des recommandations pour leur mise en œuvre aux niveaux national, régional et mondial.

« Nous vous voyons comme des combattants », a dit M. Kőrösi aux jeunes en constatant qu’ils luttent avec leurs comptes sur les réseaux sociaux, leurs téléphones portables et leur enthousiasme.  « Et vous gagnez, parce que vous êtes impliqués et entendus », s’est-il réjoui.  Il a donné l’exemple de la demande d’avis consultatif adressée à la Cour internationale de Justice sur la question des changements climatiques, par une résolution de l’Assemblée générale du 29 mars, après une longue bataille qui a duré plus de 10 ans.  C’était un moment historique inspiré par des jeunes étudiants en droit du Pacifique, qui avaient fait entendre leurs préoccupations en 2019 à Vanuatu.  Il a encore cité le cas d’un jeune activiste au Ghana ayant fondé une organisation de la jeunesse pour l’Afrique verte, première organisation à mener un programme Zéro déchet en Afrique de l’Ouest.

L’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, Mme Jayathma Wickramanayake, qui termine bientôt son congé de maternité, a expliqué qu’être devenue mère lui a redonné de l’énergie et de la détermination pour continuer à lutter pour tous les jeunes du monde entier.  Le forum de la jeunesse est organisé sur fond de défis mondiaux complexes, a-t-elle rappelé en soulignant le besoin de solidarité, de coopération et d’engagement ferme.  Que les jeunes soient autonomisés, qu’ils aient accès aux ressources et qu’ils participent en tant que partenaires égaux sont les souhaits qu’elle a formés en appelant à un niveau d’engagement plus élevé.

« Nous avons gaspillé la dernière décennie en parlant de la durabilité mais sans la réaliser », a constaté un membre du Groupe consultatif de la jeunesse sur les changements climatiques, M. Jevanic Henry, pour entrer dans le vif du sujet.  « Comment soutenir un jeune innovateur africain qui veut utiliser l’intelligence artificielle pour améliorer l’accès à l’eau ou un jeune d’Amérique latine qui souhaite exploiter son idée pour renforcer l’utilisation de l’énergie solaire? »  Il a plaidé pour que soient fournis des soutiens financiers à ce genre d’innovateur, appelant également ceux qui sont au pouvoir à agir, ou à quitter leur poste, car « les jeunes ont le droit de prendre le volant pour atteindre la durabilité ».  Vantant leur énorme potentiel de créativité, il a donné la « recette du partenariat: détruire les obstacles qui empêchent les jeunes de participer; rassembler nos solutions, nos idées et nos ressources; et inspirer les autres, car nous ne pouvons rien faire seul ».

« Les jeunes ont le vrai pouvoir », a enchaîné le modérateur de la conversation de la matinée, M. Sherwin Bryce-Pease, chef de bureau et correspondant au South African Broadcasting Corp.  Notant toutefois que les jeunes ont beaucoup de mal à trouver et à conserver un emploi, il a souligné les défis des « 3 C » qu’il importe de relever: coût de la vie, conflits et climat. Pour avancer, il s’est appuyé sur une citation de Nelson Mandela: « Parfois, il incombe à une génération de faire preuve de grandeur.  Vous pouvez être cette grande génération ».

« J’ai été jeune un jour », a fait valoir M. Achim Steiner, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), pour rassurer les jeunes sur le fait qu’ils seront écoutés. Au PNUD, nous ne passons pas beaucoup de temps dans les salles de conférence, nous sommes sur le terrain, a-t-il signalé en expliquant « l’écoute » qui est ainsi pratiquée.  Une écoute complétée par la mise en place de laboratoires d’accélération et par l’établissement de passerelles entre ces laboratoires et les gouvernements.  À sa suite, Mme Shantel Marekera, qui a créé Little Dreamers Foundation, a évoqué « une New-Yorkaise noire, une femme forte », survivante du cancer du sein, qui a utilisé les réseaux sociaux pour mieux diffuser la cause des femmes et l’accès au logement, en particulier pour les femmes noires.  Les jeunes ne sont pas une note en bas de page, a-t-elle défendu.  « Les jeunes sont là et ils œuvrent en faveur des ODD.  Nous ne nous arrêterons pas tant qu’un changement n’aura pas lieu. »

Pour la mise en œuvre des ODD, on écoute toutefois peu les enfants (les mineurs), a fait remarquer une jeune égyptienne, Mme Mai Sami Ahmed, de Save the Children et de la Fondation pour les Nations Unies.  Elle a rappelé que la Convention relative aux droits de l’enfant, de 1989, a reconnu ces derniers comme des agents de plein droit pouvant participer aux prises de décisions qui impactent leur vie et, partant, pouvant contribuer au développement durable.  Elle a alors regretté que leur participation reste rare dans les processus onusiens formels, alors qu’ils contribuent au changement au niveau national.  En Zambie, en 2020, c’est un enfant qui a encadré un processus d’examen, qui a ensuite été présenté officiellement au Parlement, a-t-elle indiqué pour démontrer la valeur de leur participation.  Un autre exemple a été donné par un des 17 Jeunes Leaders pour les ODD, M. Jichen Liu, fondateur de Clear Plate: il a dit avoir élaboré une application visant à réduire le gaspillage alimentaire. Soulignant tout ce que peuvent faire les jeunes, notamment pour les communautés les plus fragiles, Mme Laura Lock, Présidente de Cambridge Climate Society, a observé que « la COVID-19 nous a montré que nous pouvons changer; nous avons l’occasion de faire des changements positifs ».  Démocratiser l’inclusion est d’ailleurs l’objectif que poursuit Mme Isidora Guzmán Silva, une autre membre du groupe des Jeunes Leaders pour les ODD, fondatrice de Encuentra tu Lugar.

« Êtes-vous prêts à agir? » a lancé Mme Marekera après ces discours introductifs.  « Oui », ont clamé les jeunes dans la salle.  « Je pense que nous avons tous un rôle à jouer », a aussi reconnu Mme Sami Ahmed.  Pour Mme Lock, il y a une différence entre rassembler les jeunes dans une salle et rassembler des jeunes ayant une compétence et une efficacité.  Mme Guzmán Silva a tenu à mentionner à cet égard que son handicap l’avait exclue de l’école à l’âge de 12 ans.  « Nous sommes un groupe divers, nous sommes notamment des femmes noires, handicapées ou autochtones », a-t-elle observé en recommandant de travailler de façon intersectionnelle.

La discussion ministérielle, tenue dans la deuxième partie de la matinée sur le thème « Travailler avec et pour les jeunes afin d’accélérer la reprise après la COVID-19 et réaliser le Programme 2030 », a vu la participation de nombreux ministres, représentants gouvernementaux, organisations de jeunesse et délégués de la jeunesse, sous la houlette de l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse.  Ils ont fait part des progrès accomplis sur le plan national en envisageant les prochaines étapes dans la mise en œuvre du Programme 2030 « avec et pour les jeunes ».

Jeune militant vénézuélien asthmatique et réfugié, installé à Bogota, M. Alejandro Daly, cofondateur de Xenophobia Barometer & Latin American Coalition for Clean Air, a ouvert la discussion en soulignant les conséquences de la pollution atmosphérique qui entraîne des déplacements forcés de population.  Pour lutter contre la pollution mais aussi la xénophobie, il a expliqué utiliser l’action civile et la technologie.  Il a aussi fait remarquer que les jeunes rassemblés ici ont des identités intersectionnelles: « nous sommes jeunes, nous sommes de couleurs de peau différentes, nous sommes queer et nous sommes la solution pour faire reconnaître nos différences », a-t-il constaté en souhaitant « construire, ensemble, un monde meilleur que celui hérité de nos parents ».

Exilée soudanaise, la docteure Mayada Adil, une des Jeunes Leaders pour les ODD, a lancé un appel pour que les jeunes héroïques de son pays soient soutenus par la communauté internationale face à la crise que traverse le Soudan: « Tenez-vous aux côtés du peuple soudanais! »  Le forum a également entendu, dans une vidéo, le témoignage d’Irfaan Mangera, d’Afrique du Sud, dont l’organisation Ahmed Kathrada Foundation engage les jeunes à prendre la direction d’actions, dans leurs communautés, pour faire face aux problèmes actuels, tels que le racisme.  La représentante du Comité permanent du Réseau mondial pour les jeunes queer a, lui, attiré l’attention sur le haut niveau de chômage et les problèmes de logements qui affectent la communauté LGBTQ+, dénonçant des services inadaptés et appelant au changement.  Or des changements ont déjà eu lieu pendant la pandémie, comme en témoignent des initiatives prises par des jeunes fidjiens pour trouver des solutions, a souligné le Ministre de la jeunesse et des sports des Fidji, qui a aussi parlé du soutien apporté par son pays à la jeunesse par le biais du sport notamment. Sur ce sujet, la Malaisie a salué les jeunes bénévoles qui soutiennent les programmes sportifs.

Les participants ont aussi détaillé leurs efforts en vue de faire participer pleinement la tranche jeune de la population, comme la Commission européenne qui a dit avoir pris des mesures concrètes en ce sens, notamment à la Conférence sur l’avenir de l’Europe.  La Chine, comme l’a indiqué par vidéo le Vice-Président de la Fédération panchinoise des jeunes, a un concept de développement axé sur la jeunesse et fait participer les jeunes aux forums des Nations Unies, par exemple.  Le Secrétaire national de la jeunesse du Brésil a, quant à lui, annoncé la tenue de la quatrième Conférence nationale de la jeunesse, qui rassemblera 600 000 jeunes avec des séances au niveau local dans tous les États du pays. La Slovénie, elle, a déjà mené 13 consultations régionales auprès des jeunes.  Les jeunes demandent à être pris en considération en tant que partenaires égaux, a confirmé la représentante de la campagne Be seen Be heard en appelant à reconnaitre leurs compétences.

« Il ne faut rien faire sans les jeunes », a renchéri le Secrétaire d’État pour les jeunes et les sports au Portugal, accompagné d’un délégué de la jeunesse, en donnant des exemples de financement d’initiatives de jeunes dans son pays.  En Hongrie, pour autonomiser les jeunes, une exemption fiscale est offerte aux moins de 25 ans.  Le Ministre de la jeunesse et des sports du Soudan du Sud a abordé cette question du soutien financier en indiquant que les jeunes de son pays bénéficient de programmes de microfinance.

Le débat a poussé les intervenants à parler de l’implication de la jeune génération dans la politique.  Nous sommes sur le point de rédiger une nouvelle politique de la jeunesse, a signalé la Ministre de la jeunesse, des sports et de la famille des Seychelles, en expliquant qu’elle se fonde sur le principe suivant: les jeunes ne sont pas l’avenir, ils sont le présent.  « Ce sera une politique menée par eux et pour eux. »  Le Ministre de la jeunesse de la Jordanie a dit que son pays travaille également dans ce sens et qu’il a amendé sa constitution. L’Envoyé spéciale des États-Unis pour les questions liées à la jeunesse mondiale a lancé aux jeunes qu’ils ne sont « jamais trop jeunes pour diriger » en les appelant à nouer des partenariats intergénérationnels.  Le rôle des jeunes dans les parlements a d’ailleurs été abordé par le représentant du Conseil des députés jeunes de l’Union interparlementaire, qui a vanté leur pouvoir en tant que vecteurs de progrès dans la législation.

L’ODD 6 (eau propre et assainissement), l’un des objectifs du Programme 2030 examiné ce matin, a suscité de nombreuses interventions pour présenter les progrès accomplis.  Une journaliste de la République démocratique du Congo, dans une vidéo, a fait part des efforts d’acheminement de l’eau potable, qui est cruciale pour les enfants.  Un accès à l’eau jugé vital également par la représentante de COVIDUNDER19, militante du Bangladesh.  L’ODD 6 est aussi au cœur des préoccupations de l’Organisation de la jeunesse ibéroaméricaine qui a demandé de faire contribuer les jeunes à ces efforts, en particulier dans le secteur « recherche et développement ».  Un appel relayé par le Mouvement mondial pour l’eau, qui a demandé la création de mécanismes de participation formels dans chaque pays pour garantir la participation des jeunes.  C’est primordial, a confirmé le Ministre de l’éducation, de la jeunesse et du sport de la République tchèque: il faut des espaces innovants pour écouter les suggestions des jeunes.  Le Ministre de la jeunesse et des sports de l’Inde a pour sa part misé sur le bénévolat des jeunes, qui sont plus d’un million dans son pays.

Le deuxième segment de la discussion ministérielle, axé sur l’énergie propre et d’un coût abordable (ODD 7), a été animé par Mme Tsvetelina Garelova, déléguée de la jeunesse de la Bulgarie, et M. Nhial Deng, réfugié et militant de la jeunesse du Soudan du Sud. Le Ministre adjoint de l’éducation et de la culture de l’Arménie a, tout d’abord, vanté les mérites de l’éducation sur les questions d’écologie telle qu’elle est fournie dans son pays. Le Ministre de la jeunesse de la Libye a mentionné que son pays est membre de l’Agence internationale de l’énergie et du Centre régional des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique.  Le rôle de la jeunesse dans l’engagement des Maldives en faveur de l’objectif zéro émission nette a été ensuite décrit par son Ministre d’État de la jeunesse, des sports et de l’autonomisation des communautés.  De même, un nombre croissant de jeunes entrepreneurs guatémaltèques lancent des projets dans le domaine de l’énergie, a témoigné la Directrice générale du Conseil général de la jeunesse du Guatemala en signalant les bourses d’étude et de formation qui sont offertes aux jeunes pour accélérer leur participation.

La déléguée de la jeunesse de la Francophonie a mentionné que les 88 États membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) ont adopté un nouveau cadre stratégique 2023-2030 qui réaffirme le rôle de premier plan de la jeunesse dans le développement durable.  Elle a cité également une grande consultation citoyenne menée en 2020 et a assuré que l’OIF accompagne les jeunes à faire en sorte que la transition énergétique soit une réalité.  Une membre fondatrice du Réseau international de la jeunesse de la Francophonie a d’ailleurs témoigné que ces jeunes s’organisent pour trouver des solutions aux enjeux climatiques.

Passant au débat sur l’ODD 9 (Industrie, innovation et infrastructure), le représentant de ITU Generation Connect, membre des Jeunes Leaders pour les ODD, a appelé les gouvernements à faire des investissements suffisants pour connecter les jeunes, et avant cela, pour les former aux outils informatiques.  Le numérique doit prendre sa place à l’école, à l’université et dans la formation des personnes porteuses de handicap, a-t-il recommandé.  Le Pérou a témoigné sur ce sujet en présentant ses programmes qui favorisent l’égalité des chances.  Le Ministre de la jeunesse du Paraguay s’est quant à lui enorgueilli de la mise en place d’un processus simplifié, 100% numérique, pour la création d’entreprises: 1 800 ont ainsi été mises sur pied, ce qui a créé 12 000 emplois.  Cuba a parlé pour sa part des vaccins candidats contre la COVID-19 qui ont été développés par des jeunes pendant la pandémie.

La journée s’est poursuivie par la tenue de débats thématiques parallèles sur les ODD à l’examen afin d’entendre les recommandations de chacun des participants, discussions relayées par le Webcast de l’ONU et interprétées en langue des signes.  Le forum abordera demain, mercredi 26 avril, les réalités régionales avant de poursuivre sa session ministérielle sur les progrès nationaux accomplis dans la mise en œuvre du Programme 2030 ainsi que sur le « financement de notre avenir ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: l’Assemblée générale divisée sur la reddition de comptes pour les crimes et violations les plus graves commis depuis 2011

Soixante-dix-septième session,
67e séance plénière – matin
AG/12499

Syrie: l’Assemblée générale divisée sur la reddition de comptes pour les crimes et violations les plus graves commis depuis 2011

L’Assemblée générale a débattu, ce matin, de l’obligation de rendre compte dans le cadre du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.  La Cheffe de cet instrument créé par l’Assemblée en 2016 a défendu ses résultats et son développement structurel en en présentant le neuvième rapport.  Si les pays occidentaux, ainsi que la Türkiye et le Qatar, ont apporté un soutien sans faille à Mme Catherine Marchi-Uhel, la Fédération de Russie, pour qui « le Mécanisme n’a pas le droit d’exister », la Chine, la République islamique d’Iran mais aussi Cuba, le Venezuela et le Nicaragua, ont répété qu’ils n’en reconnaissent ni le mandat ni le processus selon eux « illégitime » ayant conduit à sa création. 

La Syrie a fait feu de tout bois, en demandant au Président de l’Assemblée de ne pas interpréter sa présence à cette séance comme une reconnaissance quelconque du mandat du Mécanisme et du Mécanisme lui-même: « Le Gouvernement syrien se dissocie complétement des résolutions de l’Assemblée générale non consensuelles ayant porté illégitimement création du Mécanisme », a dit son représentant.  Sans surprise, les opposants au Mécanisme ont appelé les États Membres à refuser toute allocation au Mécanisme au titre du budget ordinaire. À l’inverse, l’Union européenne (UE) ou encore le Qatar, qui a annoncé que ses contributions dépasseront les 2,5 millions de dollars en 2023, ont répondu favorablement à l’appel de Mme Marchi-Uhel pour assurer un financement pérenne et prévisible du Mécanisme dans un contexte de hausse des sollicitations dont il fait l’objet.  « Financer correctement le Mécanisme est le gage de sa réussite, qui consiste à rendre une justice inclusive que de très nombreux Syriens attendent depuis trop longtemps », a-t-elle souligné. 

Mme Marchi-Uhel a attiré l’attention sur le fait que, six ans après sa création, « le Mécanisme a gagné en efficacité ».  Fort d’une coopération de plus en plus fructueuse avec des États Membres, des organisations internationales et des acteurs de la société civile, il est à présent en mesure d’aider 15 juridictions compétentes, lesquelles, a-t-elle précisé, ont soumis 268 demandes d’assistance.  Surtout, le Mécanisme a déjà appuyé 138 enquêtes nationales grâce à la transmission d’informations, d’éléments de preuve, de rapports et d’analyses.  Dans le cadre d’une coopération technique avec la Suède, un procès a abouti à la condamnation d’une femme pour crime de guerre, et, en Allemagne, un autre procès a permis la condamnation d’un homme pour crime de guerre et meurtre, a-t-elle informé.  En France, le Mécanisme a contribué, par le partage d’informations et de preuves et son mémoire sur l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL), au lancement de l’affaire Lafarge toujours en cours.  Les trois pays concernés ont salué le rôle précieux du Mécanisme dans le traitement de ces affaires dans des États membres de l’UE. 

Le représentant de l’UE a pris la parole pour saluer les poursuites engagées et les jugements obtenus contre les auteurs de crimes graves en Syrie dans plusieurs pays de l’Union, ces efforts se poursuivant « dans d’autres juridictions ». Les Pays-Bas et le Canada sont ainsi engagés dans une importante initiative visant à demander des comptes à la Syrie pour avoir enfreint la Convention des Nations Unies contre la torture, a-t-il ajouté.  De leur côté, les États-Unis ont évoqué la possibilité que soient engagées des poursuites sur le sol américain « le cas échéant ».  Les pays occidentaux, comme les Pays-Bas ou l’Australie, ont appelé l’ONU à réfléchir au moyen de contourner la paralysie du Conseil de sécurité, où la Russie a usé 18 fois de son droit de veto sur la Syrie depuis 2011. Pour ces pays, soutenus par l’Ukraine et la Géorgie, la communauté internationale doit renvoyer à la Cour pénale internationale (CPI) les affaires qu’un Conseil « paralysé par la diplomatie d’obstruction russe » ne parvient pas à traiter. 

D’après les pays précités qui n’accordent aucune légitimité au Mécanisme, et qui ont été également soutenus par la République populaire démocratique de Corée (RPDC), la justice serait rendue si les sanctions unilatérales qui en visent certains étaient levées.  À ces prises de position virulentes, le Royaume-Uni a réagi en martelant que la paix en Syrie ou ailleurs sera impossible tant que l’impunité continuera d’y prévaloir et que les violations des droits de l’homme n’auront pas fait l’objet de poursuites systématiques. 

Sur ce dernier point, Mme Marchi-Uhel a expliqué que le Mécanisme continue d’encourager les victimes et les personnes rescapées à jouer un rôle actif dans la quête d’une justice inclusive.  À cette fin, le Mécanisme a développé et diversifié sa collaboration avec les acteurs de la société civile, et il a renforcé son approche axée sur les droits des victimes et des personnes rescapées, en adoptant des stratégies thématiques sur le genre, les enfants et les jeunes et des objectifs de justice plus larges, a-t-elle dit.  Comme l’indique le rapport présenté par Mme Marchi-Uhel, « la consultation avec les acteurs de la société civile syrienne, organisée par les Pays-Bas et la Suisse en juillet 2022 dans le cadre de la plateforme de Lausanne, a permis au Mécanisme de recueillir des vues sur les principaux aspects de son enquête structurelle ».  La Suisse a d’ailleurs rappelé qu’à Genève, en juin 2022, une représentante de la société civile syrienne avait déclaré qu’il n’y aurait pas de paix durable en Syrie « si la justice n’est pas rendue à toutes les victimes ».  Nous nous rallions à cette position, a ajouté le représentant suisse, jugeant que, pour qu’un avenir commun à l’ensemble de la population syrienne soit concevable, « il est impératif que la justice se prononce ».  Dans ce contexte, le Mécanisme est un outil indispensable pour atteindre cet objectif, raison pour laquelle la Suisse a soutenu son établissement dès le début et continue à le soutenir pleinement, a-t-il dit, résumant les vues partagées par la vingtaine de délégations ayant pris fait et cause pour l’instrument dirigé par Mme Marchi-Uhel. 

Par ailleurs, l’Australie a exhorté les autorités syriennes à se préoccuper « enfin » de leur population, les récents tremblements de terre dévastateurs de février dernier ayant aggravé une situation humanitaire où plus de 15 millions de personnes avaient déjà besoin d’aide.

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