9354e séance – matin
CS/15330

Afghanistan: les interdictions imposées aux femmes perturbent le travail des Nations Unies mais aussi les chances des Taliban de sortir de leur isolement

L’interdiction faite, le 5 avril dernier par les Taliban aux femmes afghanes de travailler pour les organes des Nations Unies en Afghanistan remet en question nos activités à travers le pays, a déclaré ce matin devant le Conseil de sécurité la Représentante spéciale du Secrétaire général, Mme Roza Otunbayeva. L’examen trimestriel de la situation a été dominé par les multiples restrictions que les Taliban continuent d’imposer aux Afghanes et qui amènent la communauté internationale à refuser de reconnaître les « autorités de fait », lesquelles ont en outre été accusées par plusieurs délégations de ne pas respecter leur promesse de lutter contre le terrorisme. 

Mme Otunbayeva, qui est également Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) a expliqué que, pour éviter de le mettre en danger, la Mission avait demandé de ne plus venir au bureau à son personnel national féminin, mais aussi, au nom du principe de non-discrimination, à son personnel masculin.  Elle a précisé avoir décliné la suggestion des Taliban de remplacer les employées nationales par des hommes.  Suivie par les membres du Conseil, la Représentante spéciale a déclaré que les Taliban devaient abroger les différentes restrictions imposées aux femmes depuis leur prise de pouvoir à Kaboul il y a bientôt deux ans, comme l’a exigé le Conseil dans sa résolution 2681 (2023), adoptée le 27 avril dernier et dont les États-Unis ont rappelé qu’elle avait été coparrainée par plus de 90 États Membres, signe d’un message clair adressé aux Taliban et au peuple afghan par le monde entier.  Les membres du Conseil ont répété aujourd’hui cette exigence. 

Mme Otunbayeva a aussi mis en avant les contradictions des Taliban, qui demandent à être reconnus par l’Organisation des Nations Unies et ses membres, mais, en même temps, agissent contre les valeurs fondamentales de la Charte des Nations Unies, comme l’a noté également le Brésil.  La Cheffe de la MANUA a estimé que les Taliban sont pris au piège des restrictions qu’ils ont imposées aux femmes et filles et qui, a-t-elle affirmé, sont très impopulaires, infligent des souffrances à la moitié de la population et nuisent aussi à l’économie.  La Suisse a elle aussi mis l’accent sur les conséquences dramatiques des mesures imposées aux femmes et filles pour des familles et des communautés entières, dont les enfants.  L’Équateur a suggéré d’identifier les domaines dans lesquels les femmes peuvent contribuer et fournir des ressources pour stimuler la croissance et leur autonomisation. 

La répression des droits des femmes dissimule en outre certaines conséquences positives d’autres mesures prises par les Taliban, a fait observer la Représentante spéciale, qui a cité la diminution de la culture de l’opium, la réduction de la corruption de haut niveau, une relative stabilité de l’économie marquée par un ralentissement de l’inflation et des taux de change stables, et des rentrées fiscales suffisantes pour payer les salaires des 500 000 fonctionnaires.  Plusieurs de ces points ont été salués également par des membres du Conseil, comme les A3, ainsi que par plusieurs des voisins de l’Afghanistan, désireux de réintégrer ce pays dans l’économie régionale.  Ainsi, le Pakistan s’est félicité de la reprise des échanges et du commerce afghans, parlant en outre d’un pays doté d’un gouvernement stable sans menaces internes avérées.  Le Kazakhstan, tout en disant se conformer strictement à la position du Conseil de sécurité s’agissant de la reconnaissance internationale des Taliban, a néanmoins fait valoir que la nouvelle Administration de l’Afghanistan œuvre depuis deux ans à la construction de l’État et que le pays « doit survivre et construire des relations normales avec ses voisins et d’autres partenaires, y compris les organisations internationales ».  Le Kirghizistan a expliqué qu’il entretient des relations de bon voisinage avec l’Afghanistan et que les relations diplomatiques entre les deux pays se sont poursuivies après l’arrivée au pouvoir des Taliban en août 2021.  Il a suggéré d’intégrer l’économie afghane aux processus régionaux, y compris les projets énergétiques permettant l’exportation de l’électricité en Afghanistan depuis l’Asie du Sud. 

Pour ces différents pays, la meilleure solution consiste à négocier avec les Taliban, y compris pour obtenir d’eux l’abandon des mesures prises contre les femmes.  Le Kazakhstan, qui a accrédité des représentants de la nouvelle Administration afghane, « sans leur accorder le statut diplomatique », a ainsi estimé que la rencontre tenue en mai à Doha, au Qatar, entre le Secrétaire général et les représentants spéciaux pour l’Afghanistan d’un certain nombre de pays avait confirmé l’importance d’une coopération accrue entre la communauté internationale et les Taliban, principalement en matière commerciale, économique et humanitaire. Une opinion partagée par le Kirghizistan, alors que l’Ouzbékistan disait avoir toujours préconisé d’élaborer des mesures concrètes susceptibles de favoriser le redressement de l’économie nationale et de ne pas se contenter d’apporter une aide humanitaire, toutefois indispensable. 

Beaucoup des intervenants ont en effet mis l’accent sur l’extrême pauvreté des ménages afghans, dont 58% ont du mal à satisfaire leurs besoins fondamentaux.  L’ONU répond aux besoins de près de 20 millions de personnes en Afghanistan, a rappelé Mme Otunbayeva, qui a averti que la diminution du financement des donateurs commence à avoir des effets négatifs sur la stabilité monétaire. La Fédération de Russie a estimé que, sans une assistance internationale et régionale et dans des conditions de famine et de pauvreté à grande échelle, il serait difficile pour l’Afghanistan de faire face, seul, à tous ses défis.  C’est pourquoi la Chine, mais aussi l’Iran, ont demandé que soient restitués à l’Afghanistan quelque 7 milliards de dollars d’avoir gelés, en particulier aux États-Unis. 

La fin de l’isolement des Taliban est aussi soumise par beaucoup de pays à la démonstration de leur réelle volonté de lutter contre le terrorisme.  À cet égard, la Cheffe de la MANUA a fait état de résultats mitigés.  D’une part, les Taliban combattent l’État islamique d’Iraq et du Levant-Province du Khorassan (EIIL-K) mais subissent aussi des attaques de la part de ce groupe. D’autre part, certains membres du Conseil estiment que les Taliban continuent d’entretenir des liens avec certains groupes comme Al-Qaida.  Le Royaume-Uni et le Japon ont demandé que ces liens soient rompus.  D’autres pays, des Émirats arabes unis à la Chine et de l’Inde à l’Albanie, ont surtout exprimé la crainte que le pays ne redevienne un havre pour certains groupes terroristes. 

LA SITUATION EN AFGHANISTAN

Déclarations

Mme ROZA OTUNBAYEVA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour l’Afghanistan et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a déclaré que l’ONU vit une situation compliquée en Afghanistan.  Les restrictions imposées le 5 avril par les autorités de fait aux femmes afghanes travaillant pour les Nations Unies remettent en question nos activités à travers le pays, a-t-elle rappelé.  Or, les autorités n’ont donné aucune explication à leur geste et aucune assurance que ces mesures seront levées un jour. 

La MANUA, qui ne veut pas mettre en danger son personnel féminin, a demandé à ses employées de ne pas se présenter dans ses bureaux, a expliqué la Représentante spéciale. Pour respecter le principe de non-discrimination, la Mission a fait de même avec le personnel masculin et ne remplacera pas non plus le personnel national féminin avec du personnel national masculin, comme l’ont suggéré les Taliban, a assuré Mme Otunbayeva, qui a salué la résolution 2681 (2023) du Conseil de sécurité qui condamne ces restrictions. 

Pour la Cheffe de la MANUA, les Taliban demandent à être reconnus par l’Organisation des Nations Unies et ses membres, mais en même temps ils agissent contre les valeurs fondamentales de la Charte des Nations Unies.  L’interdiction faite aux femmes afghanes de travailler pour l’ONU fait suite à celle de travailler pour des ONG et des missions diplomatiques et à l’interdiction faite aux filles et femmes de se rendre dans les parcs publics, les bains et les salles de sports.  Les Taliban doivent abroger ces interdictions pour que l’ONU puisse poursuivre son appui au peuple afghan.  Citant un rapport d’ONU-Femmes et de l’Organisation internationale pour les migrations, la Représentante spéciale a dénoncé le fardeau que ces interdictions représentent pour la santé physique et mentale des femmes et leur sécurité.

Pour Mme Otunbayeva, ces interdictions cachent les conséquences positives d’autres mesures prises par les Taliban, comme la diminution de la culture de l’opium.  Ainsi, l’économie reste stable, l’inflation a ralenti et les taux de change restent stables.  La Représentante spéciale a salué la réduction de la corruption de haut niveau et noté que les recettes fiscales sont suffisantes pour payer les salaires des 500 000 fonctionnaires.  Mais elle a dans le même temps pointé du doigt la pauvreté extrême des ménages afghans, dont 58% ont du mal à satisfaire leurs besoins fondamentaux.  L’ONU répond aux besoins de près de 20 millions de personnes en Afghanistan, a rappelé Mme Otunbayeva, qui a averti que la diminution du financement des donateurs commence à avoir des effets négatifs sur la stabilité monétaire.

Le cadre d’engagement transitoire pour l’Afghanistan mis à jour décrit les activités que l’ONU entend mener d’ici à 2025 si les Taliban créent un environnement favorable comme la transparence et la responsabilisation, a poursuivi la Représentante spéciale.  Elle a décrit un régime taliban qui reste isolé politiquement et autocratique, dénonçant un gouvernement composé uniquement d’hommes issus de la base politique pachtoune et rurale des Taliban ainsi qu’un centralisation du pouvoir par une autorité centrale irresponsable.  Mme Otunbayeva a réclamé une gouvernance inclusive, sans quoi, a-t-elle averti, le pays risque de plonger dans l’instabilité. 

La Cheffe de la MANUA a jugé mitigés les résultats en matière de lutte contre le terrorisme. Elle a pris note de la lutte menée contre l’État islamique d’Iraq et du Levant-Province du Khorassan (EIIL-K) et des attaques de ce groupe visant les Taliban et la population civile.  Elle a apporté son appui à l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions du Comité créé par la résolution 1988 (2011), pour qui les procédures de sanctions actuelles sont obsolètes et devraient être mises à jour afin de refléter les nouvelles réalités de l’Afghanistan. 

Mme Otunbayeva a dit être préoccupée par la vulnérabilité de l’Afghanistan aux changements climatiques.  Elle a fait observer que, pour remédier au manque d’eau et à l’insécurité alimentaire, les Taliban ont construit un canal qui détournera les eaux du nord de l’Amou-Daria, suscitant l’inquiétude des pays voisins.  Elle a plaidé pour un dialogue entre les Taliban et la communauté internationale pour atténuer les effets des changements climatiques.

La Représentante spéciale a estimé que les Taliban sont pris au piège des décrets et des restrictions qu’ils ont promulgués, en particulier à l’encontre des femmes et des filles.  Tant que ces décrets sont en place, il est impossible que leur gouvernement soit reconnu par la communauté internationale.  Ces décrets sont aussi très impopulaires car ils infligent des souffrances à la moitié de la population et nuisent à l’économie.  Le prix à payer pour les Taliban est leur légitimité nationale et internationale, a-t-elle relevé. En dépit de ces défis, la MANUA a établi des voies de communication fiables avec les Taliban et dressé une liste des possibilités de coopération pour améliorer les conditions de vie du peuple afghan, si les Taliban abrogent les restrictions punitives imposées aux femmes afghanes, a-t-elle conclu.

Mme SHABANA BASIJ-RASIKH, Présidente de la School of Leadership, Afghanistan (SOLA), un établissement réinstallé au Rwanda depuis août 2021 et le retour des Taliban au pouvoir dans son pays, a expliqué qu’il s’agissait de la seule école où les filles afghanes étaient éduquées au niveau secondaire, jusqu’au lycée. « Je ne pensais pas devoir faire une telle déclaration de mon vivant », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle était « l’héritière de la bravoure des Afghanes, et des Afghans aussi, qui ont allumé des feux dans l’obscurité de notre nation alors que le monde détournait son attention de nous ».

Ces feux brûlent encore aujourd’hui, a poursuivi l’intervenante.  Des écoles secrètes ont rouvert leurs portes à Kaboul et dans les provinces.  La sienne, contrainte à l’exil, prospère au Rwanda, un pays hôte extraordinaire.  Nous venons de terminer les admissions pour la nouvelle année scolaire qui débutera cet automne, a-t-elle expliqué.  Historiquement, nous n’avons jamais reçu plus de 300 demandes d’admission au cours d’une année donnée, mais pas cette année.  Cette année, nous avons reçu près de 2 000 candidatures d’élèves de communautés afghanes réparties dans le monde entier, s’est enorgueillie la Présidente de l’école.  Ce qu’elles veulent?  La stabilité. Et ce qui la rend possible, c’est l’éducation, a-t-elle résumé, affirmant que « tout part de l’école ». 

Mme Basij-Rasikh a ensuite fait deux recommandations.  La première, c’est que la communauté internationale veille à ce qu’Internet reste ouvert et accessible en Afghanistan.  Lorsque les filles ne peuvent pas aller à l’école, nous, en tant qu’éducateurs, pouvons leur apporter l’école - et nos classes ne sont qu’à un smartphone et à une connexion en ligne près, a-t-elle expliqué.  Personne ne devrait ignorer qu’il existe des moyens rentables d’assurer un accès fiable à Internet partout dans le monde, y compris en Afghanistan, et que ces moyens doivent être mis en œuvre. 

En second lieu, Mme Basij-Rasikh a également recommandé que la communauté internationale veille à ce que les réfugiés afghans, en particulier les femmes, aient accès à une éducation de qualité dans leur pays de résidence.  Il faut que les communautés de la diaspora puissent bénéficier d’opportunités, et que ces opportunités soient portées par des institutions qualifiées, autorisées par les nations d’accueil à opérer au sein de ces communautés.  « C’est ce qu’a fait SOLA au Rwanda, et notre modèle peut être suivi par d’autres », a-t-elle assuré, en citant en conclusion le hadith du prophète Mahomet qui dit: « Cherchez la connaissance, même jusqu’en Chine! »

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a appelé le Conseil à rester uni sur le dossier afghan.  Elle a appelé au respect des droits des femmes et des filles, en dénonçant la révision des programmes scolaires annoncée par les Taliban.  Elle a également souligné que les filles doivent avoir accès à Internet, notant que c’est leur seul espace de liberté.  La représentante a aussi alerté qu’en empêchant les femmes de participer au travail humanitaire, les Taliban entravent la capacité de prévenir et de répondre aux abus sexuels.  Elle a ensuite déploré les entraves apportées par les Taliban au bon acheminement de l’aide humanitaire, avant de demander une totale dépolitisation de l’aide humanitaire.  Les travailleurs humanitaires ne doivent pas devenir des pions, a-t-elle insisté.  Elle a aussi appelé à veiller à ce que l’Afghanistan ne devienne pas un sanctuaire pour les terrorises, avant d’insister sur l’importance de revitaliser l’économie afghane qui, a-t-elle ajouté, ne peut dépendre de la seule aide humanitaire. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a regretté que l’avenir de l’Afghanistan reste sombre, notant que les besoins humanitaires sont énormes et la pauvreté quasi universelle.  En outre, l’accès humanitaire a été entravé par une série de restrictions à la capacité des femmes de travailler, a dénoncé le représentant.  Après avoir engagé les Taliban à prendre des mesures contre le terrorisme, le délégué a constaté que l’espoir diminue, en particulier pour les femmes et les filles en Afghanistan.  Il a exhorté les Taliban à lever rapidement les restrictions imposées à ces dernières et à permettre leur participation pleine, égale, significative et sûre à la société.  Cela garantira non seulement le bien-être et la dignité des femmes et des filles, mais permettra à l’Afghanistan de réaliser son potentiel et d’atteindre la stabilité et une prospérité à long terme, a-t-il dit.  Le représentant a ensuite appelé la communauté internationale à poursuivre un engagement patient, pragmatique et fondé sur des principes avec les Taliban afin de les encourager à aligner leurs politiques aux souhaits du peuple afghan. 

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que le dialogue et les interactions doivent se poursuivre avec le gouvernement intérimaire afghan, jugeant essentiel de renforcer la confiance mutuelle.  À cet égard, il s’est félicité du rôle de chef de fil joué par les pays de la région. Il a fait savoir que le 6 mai, la Chine, l’Afghanistan et le Pakistan ont relancé le dialogue entre leurs ministres des affaires étrangères, avant de revenir sur la réunion des envoyés spéciaux tenue le 2 mai, sous les auspices du Secrétaire général.  Cela témoigne de la volonté de la communauté internationale d’édifier un Afghanistan prospère et pacifique, s’est félicité le représentant qui a appelé à appuyer le Gouvernement afghan pour assurer l’inclusivité, la modération et la mise en place un dispositif politique pérenne.  Il a également exhorté le gouvernement intérimaire à préserver le droit des femmes et des filles à l’éducation et l’emploi.

Poursuivant, le délégué a relevé que les activités terroristes demeurent un problème majeur pour le pays, la région et le monde entier, pressant les autorités afghanes à adopter des mesures robustes pour lutter contre ce fléau et éviter que le pays ne devienne, une fois encore, un épicentre du terrorisme.  Soucieux de promouvoir le dialogue et l’interaction, il a appelé le Comité des sanctions du Conseil de sécurité à adopter des dérogations pour les voyages des représentants du gouvernement intérimaire. Enfin, il a appelé les États-Unis à restituer à l’Afghanistan ses avoirs gelés, estimés à 7 milliards de dollars.

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) a demandé aux Taliban de renoncer à leurs politiques d’exclusion à l’égard des femmes et des jeunes filles, qui entrent en contradiction flagrante avec la Charte des Nations Unies et le cadre multilatéral des droits humains. 

Le représentant s’est ensuite dit profondément préoccupé par la situation humanitaire en Afghanistan, jugeant alarmant que le nombre de nécessiteux dans le pays ait augmenté d’un demi-million au cours du seul premier semestre 2023, atteignant le chiffre stupéfiant de 28,8 millions à la fin du mois de mai.  Face à une telle adversité, la promotion de la sécurité alimentaire devient primordiale, surtout si l’on considère que le pays est aux prises avec sa troisième année consécutive de sécheresse et la menace imminente d’une infestation dévastatrice de criquets pèlerins, a-t-il prévenu. 

Sur le plan économique, un secteur privé robuste est la clef de l’avenir de l’Afghanistan, a estimé le représentant, ajoutant que son pays apporterait sa contribution aux investissements cruciaux dans les infrastructures et aiderait à relever les défis du système bancaire pour faciliter le crédit, comme le soulignent les perspectives socioéconomiques de l’Afghanistan pour 2023 du PNUD.  C’est aussi pourquoi le représentant a souligné l’importance de restituer les actifs afghans détenus à l’étranger. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a dénoncé les restrictions à l’exercice par les femmes de leurs droits humains.  Le représentant a demandé l’abrogation immédiate de ces mesures, conformément aux exigences de la résolution 2681 (2023) qui, a-t-il rappelé, a été coparrainée par plus de 90 États Membres, signe d’un message clair aux Taliban et au peuple afghan de la part du monde entier.  Les États-Unis n’accepteront pas que les Taliban oppriment les femmes et les jeunes filles, a-t-il martelé.  En choisissant de compliquer la vie de millions d’Afghans qui dépendent de l’aide d’urgence, les Taliban ne font qu’exacerber le fardeau des ménages, souvent dirigés par les femmes, a-t-il ajouté, avant de saluer la décision de l’ONU de rester présente en Afghanistan tout en faisant une priorité de la sûreté et la sécurité de son personnel.  Le peuple afghan ne mérite pas de souffrir davantage du fait des décisions honteuses des Taliban, a-t-il insisté. 

Les États-Unis sont opposés aux discriminations et défendent la sûreté, la sécurité et l’inclusion des femmes et jeunes filles, a affirmé le représentant, pour qui les restrictions que leur imposent les Taliban doivent faire l’objet d’une réponse robuste de la part des pays voisins et de l’ensemble de la communauté internationale. 

Le représentant a attribué la détérioration de la situation monétaire en Afghanistan à l’interférence des Taliban dans les interventions humanitaires.  Il a également accusé les Taliban d’avoir, par leurs agissements, provoqué une hausse des flux de migrants et de déplacés vers les pays voisins.  Les dérogations d’ordre humanitaire prévues par la résolution 2615 (2023) ont évité la famine, a-t-il encore estimé.  Face à la diminution de l’aide, les États-Unis continueront d’appuyer le peuple afghan, a assuré le représentant, qui a aussi exigé que les Taliban garantissent l’accès et la sécurité des travailleurs de l’humanitaire, quel que soit leur sexe.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a souhaité que tous les Afghans puissent s’engager dans le processus politique et exhorté les autorités de facto à permettre aux femmes fonctionnaires de reprendre leur travail.  S’agissant de l’éducation, un facteur majeur de développement, il a souligné que les filles et les femmes doivent pouvoir réaliser pleinement leur potentiel en étant en mesure de reprendre leurs études.  Abordant la situation en matière de sécurité, le représentant a évoqué les atteintes aux droits humains et les violations commises à l’encontre d’anciens fonctionnaires et membres des forces de sécurité, tout en notant que le trafic de stupéfiants et la présence de forces étrangères accroissent la volatilité de la situation sur le terrain.  Préoccupé par les tensions sous-régionales entre l’Iran et l’Afghanistan au sujet de l’approvisionnement en eau, le délégué a appelé à une désescalade. Sur le plan économique, il a salué l’augmentation de la collecte des recettes, les résultats commerciaux positifs, le recul de la corruption et l’éradication accrue des champs de pavot à opium, tout en soulignant les perspectives limitées de croissance et de réduction de la pauvreté.  Le délégué s’est aussi félicité du déminage réussi de 9,2 kilomètres carrés de terres et de la campagne de sensibilisation menée à ce sujet auprès de 39 000 personnes, dont 14 000 femmes et jeunes filles.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a noté que, près de deux ans après la « fuite précipitée » des troupes américaines et de l’OTAN et le retour des Taliban au pouvoir, l’Afghanistan et son peuple vivent dans une nouvelle réalité, faisant face presque seuls à d’anciens problèmes et à de nouveaux défis.  Le représentant a tancé les pays occidentaux et leurs promesses creuses, qui en vingt ans ont détruit le pays et abandonné son peuple à son sort au moment le plus crucial. Il a trouvé une explication à cet abandon par le fait que toutes les forces de « nos collègues occidentaux » ont été lancées dans la lutte contre la Russie sur le « terrain ukrainien ». 

Le représentant a dit partager l’évaluation faite par le Secrétaire général quant à la difficile situation politique intérieure en Afghanistan, se disant particulièrement préoccupé par les risques sécuritaires posés par l’activité terroriste de l’EIIL-K.  De toute évidence, a-t-il estimé, l’État islamique cherche à se positionner comme une force alternative dans le pays, soupçonnant même un soutien de forces extérieures.

Tout en notant les efforts des autorités de facto, le représentant a ensuite estimé que, sans une assistance internationale et régionale globale et dans des conditions de famine et de pauvreté à grande échelle, il sera difficile pour l’Afghanistan de faire face, seul, aux défis.

Le représentant a également dit continuer à suivre la dynamique de la situation dans le domaine des droits de tous les Afghans, y compris les femmes et les filles.  Construire une paix à long terme et durable en Afghanistan est impossible sans un engagement patient et pragmatique continu avec les nouvelles autorités sur un large éventail de questions urgentes, a-t-il estimé.  La Russie est toujours favorable au développement de la coopération avec l’Afghanistan sur les questions d’un règlement global.  Le « format de Moscou » sert également cet objectif, a-t-il conclu.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a indiqué que les Taliban ont pris une cinquantaine de mesures visant à restreindre les droits des femmes et des filles et à entraver l’acheminement de l’aide humanitaire.  « La trajectoire est négative et les options à disposition sont limitées », a ajouté la représentante, qui a exhorté la communauté internationale à fournir de l’aide humanitaire et déploré que l’appel humanitaire pour 2023 n’est actuellement financé qu’à hauteur de 13%. 

Nous devons rester unis dans les messages envoyés aux Taliban, à savoir couper les liens avec les terroristes; garantir un accès humanitaire et promouvoir les droits humains, ainsi qu’une gouvernance inclusive, a poursuivi la représentante. Ignorer les demandes de la communauté internationale ne doit pas rester sans conséquence, a-t-elle ajouté.  Si les Taliban persévèrent dans cette voie, alors il n’y aura aucun progrès s’agissant d’une reconnaissance internationale et il n’y aura pas d’allégement des sanctions, a-t-elle averti.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a salué la décision de la MANUA de ne pas remplacer son personnel féminin avec du personnel masculin, condamnant les restrictions et les mesures discriminatoires à l’égard des femmes.  Il a appelé à renforcer la coordination des travaux entre les organismes de l’ONU, les organisations régionales et les pays voisins, afin de prévenir l’escalade de la violence aux frontières et soutenir la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent et le trafic de drogue.  Il a par ailleurs condamné les exécutions arbitraires, les détentions extrajudiciaires, les persécutions et les tortures des membres de l’opposition et des anciens responsables de l’Afghanistan. 

En ce qui concerne la situation humanitaire, le représentant a dénoncé la restriction des opérations humanitaires pour les femmes veuves, les déplacés, les handicapés, les malades et les enfants.  Il a encouragé les donateurs à maintenir le financement de l’aide humanitaire.  Face aux restrictions imposées aux femmes afghanes, le représentant a suggéré d’identifier les domaines dans lesquels elles peuvent contribuer et fournir des ressources pour stimuler la croissance et leur autonomisation.  Il a également appelé les pays voisins de l’Afghanistan à donner la priorité à la participation des femmes dans leurs échanges. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a déploré les efforts continus des Taliban pour codifier la ségrégation entre les sexes au sein de la société afghane, ainsi que de l’ONU et du système humanitaire actif dans le pays.  Les autorités de facto ont signé plus de 520 décrets restrictifs depuis juillet 2022, au détriment de millions de femmes et d’enfants afghans, s’est-elle émue.  Ils doivent être annulés et les droits fondamentaux des femmes en Afghanistan respectés, a tranché la déléguée, en faisant valoir en particulier le droit à l’éducation des femmes et des jeunes filles.  Elle a appelé le Conseil à exiger une révocation immédiate et inconditionnelle des dictats régressifs des Taliban et entreprendre des actions qui bénéficieront à la population afghane en cette période de défis humanitaires majeurs.

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est inquiété de la situation humanitaire catastrophique en Afghanistan.  Il s’est également alarmé des activités terroristes, craignant que ce pays ne devienne de nouveau un havre pour le terrorisme.  Les Taliban, qui ont méthodiquement réduit à néant les progrès des dernières décennies poussant à la fermeture de médias, d’écoles et d’organisations intergouvernementales censées protéger et promouvoir les droits humains, sont en voie de faire de l’Afghanistan un « trou noir », s’est-il alarmé, avertissant que cela ne fera qu’accroître l’isolement et l’exclusion du pays.  De même, le représentant s’est élevé contre la campagne de répression et de misogynie des autorités de facto à l’encontre des femmes et des jeunes filles.  Il a ensuite réitéré son soutien à la MANUA qui s’acquitte de son mandat dans un environnement éminemment complexe. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a estimé que les interventions d’aujourd’hui confirment l’étendue de la crise multidimensionnelle en Afghanistan, dont l’oppression des femmes et des filles est l’élément le plus criant.  La représentante a noté qu’aucune des mesures qui excluent les femmes et les filles de la vie publique, politique, économique, culturelle et sociale et dont le Conseil de sécurité a demandé l’abandon n’a été officiellement révoquée.  Le mépris flagrant des droits humains par les Taliban entraîne des conséquences dramatiques non seulement sur les femmes, mais aussi sur des familles et des communautés entières, dont les enfants, a-t-elle ajouté, avant de se dire consternée par la décision récente de la Cour suprême, contrôlée par les Taliban, d’imposer la peine de mort, qu’elle a jugée incompatible avec le respect des droits humains et de la dignité humaine. 

Sur le plan économique, un soutien humanitaire et la fourniture des besoins fondamentaux resteront donc nécessaires, a noté la représentante, qui a souligné que les Taliban ont la responsabilité de subvenir aux besoins de la population afghane, sans discrimination aucune, et doivent s’assurer que l’aide humanitaire et les services de base parviennent à toutes les personnes dans le besoin. 

Par ailleurs, la Suisse juge urgent d’atténuer les effets négatifs des changements climatiques pour améliorer durablement la sécurité alimentaire en Afghanistan.  Dans ce cadre, la représentante a salué le travail de la MANUA auprès des communautés locales pour renforcer leur gestion des risques liés aux changements climatiques ainsi que leur résilience.  Elle a insisté en conclusion sur la nécessité de garantir la participation active de la société civile et des organisations de femmes dans tous les domaines, y compris dans l’évaluation indépendante prévue par la résolution 2679 (2023).

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que la situation en Afghanistan demeure très préoccupante, les Taliban continuant de fouler aux pieds les exigences de la communauté internationale et les résolutions de ce Conseil.  Les Taliban poursuivent leur politique d’oppression systématique à l’encontre des Afghanes, a rappelé la représentante, avant de condamner la décision prise, en avril dernier, d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour les Nations Unies.  Elle a exhorté la communauté internationale à continuer d’exiger que les Taliban reviennent sur les décisions qui entravent la vie quotidienne des femmes, violent leurs droits et restreignent leurs libertés fondamentales. 

L’aide humanitaire au service de la population afghane est inconditionnelle et doit le rester, a poursuivi la représentante, qui a rappelé que la France a versé plus de 140 millions d’euros depuis août 2021.  « Il nous faut continuer, collectivement, à souligner que nous attendons des gestes concrets de la part des Taliban, sur la base des exigences que nous leur avons posées », a-t-elle insisté.

M. NASEER AHMED FAIQ (Afghanistan), qui est un opposant aux autorités de facto de son pays, a salué l’engagement du Conseil pour les droits fondamentaux du peuple afghan, en particulier des femmes et des filles, ainsi que les efforts visant à assurer la paix, la stabilité et la sécurité en Afghanistan. Dressant un sombre bilan depuis l’arrivée au pouvoir des Taliban, il y a bientôt deux ans, le représentant a affirmé que l’espoir s’est évanoui.  Les Taliban n’ont pas répondu aux attentes internationales mais ont justifié leurs actions en déformant la religion et la culture, a-t-il accusé.  Sur la scène internationale, ils ont eu recours à une politique de chantage et d’extorsion avec l’ONU et les ONG.  Au niveau national, ils sont revenus aux politiques draconiennes des années 1990 en consolidant leur pouvoir par des actes d’intimidation et de répression, imposant des restrictions et isolant le peuple afghan.  En deux ans, la situation humanitaire, des droits de l’homme, sécuritaire et la politique s’est aggravée, a-t-il accusé.  Selon lui, le peuple afghan attend de la communauté internationale qu’elle adopte une approche unie et cohérente face à cette érosion des droits de l’homme. 

Affirmant que les Taliban avaient aussi failli à leurs promesses d’inclusion, de rupture avec les groupes terroristes, de respect des droits de l’homme et de ne pas menacer la sécurité d’autres pays, le représentant a demandé une stratégie antiterroriste à la fois mondiale et régionale, unifiée et cohérente contre les groupes terroristes. Sur le plan politique, il a assuré que le peuple afghan est déterminé à surmonter la crise et atteindre la stabilité, saluant le travail de la société civile, des groupes de femmes et de jeunes et des partis politiques dont l’objectif principal est de converger vers un agenda national basé sur l’unité. 

Le représentant a appelé la communauté internationale à adopter une nouvelle approche, unifiée et cohérente, pour l’Afghanistan.  À cet égard, il a dit attendre avec intérêt l’évaluation intégrée et indépendante de la situation demandée par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2679 (2023), qui doit être présentée d’ici à novembre.  Il a aussi demandé la participation des représentants du peuple afghan au suivi de la réunion de Doha et de sa « feuille de route ».  Pour lui, le règlement politique de la situation repose sur un dialogue national.  La communauté internationale doit quant à elle structurer les forces politiques démocratiques pour leur donner l’occasion d’améliorer et de stabiliser la situation du pays, sur la base de la volonté du peuple afghan.

M. JONIBEK ISMOIL HIKMAT (Tadjikistan) a déploré la dégradation de la situation des femmes en Afghanistan et condamné la décision d’interdire aux femmes afghanes de travailler pour des organisations internationales.  Contrairement à ce que déclarent les Taliban, des groupes terroristes étrangers, autres que Daech, sont présents dans le pays, a dit le délégué, en citant notamment Al-Qaida, le Mouvement islamique du Turkestan oriental ou bien encore le Mouvement islamique d’Ouzbékistan.  Ces mouvements font peser de réelles menaces sur les pays voisins, a averti le délégué.  Il a rappelé la proposition du Président de son pays visant à établir un « cordon sécuritaire » autour de l’Afghanistan en vue de remédier aux menaces en émanant. Enfin, il a réaffirmé l’engagement de son pays à continuer de fournir une aide humanitaire. 

M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique d’Iran) a estimé que les autorités de facto ont maintenu la stabilité en Afghanistan et géré l’économie, même si les besoins demeurent considérables.  Les sanctions unilatérales ont aggravé la situation actuelle et entravent la réponse humanitaire.  L’aide humanitaire doit être impartiale et inconditionnelle et les engagements pris à ce titre doivent être honorés, a ajouté le représentant, qui a également demandé la restitution des avoirs afghans gelés ainsi que la levée des sanctions. 

Le représentant a dénoncé les restrictions toujours plus sévères imposées aux femmes et aux filles par les Taliban, ainsi que les mesures prises visant à affaiblir le farsi et les tentatives d’imposition d’une domination pachtoune.  Toutefois, et tout en reconnaissant que les Taliban ne se sont pas acquittés de leurs engagements, il a appelé à un maintien du dialogue avec ces derniers par l’entremise de la MANUA.

Mme AIDA KASYMALIEVA (Kirghizistan) a estimé que la réunion des envoyés spéciaux sur l’Afghanistan qui s’est tenue début mai à Doha représente un grand pas en avant.  Elle a jugé important d’organiser des consultations régulièrement avec les pays de la région pour promouvoir la paix et la sécurité en Afghanistan.  La crise ne sera résolue que par le biais de négociations, a-t-elle souligné, insistant sur l’importance de la sécurité régionale et de la paix et de la stabilité en Afghanistan.  Elle a indiqué que le Kirghizistan entretient des relations de bon voisinage avec l’Afghanistan, et que les relations diplomatiques entre les deux pays continuent depuis l’arrivée au pouvoir des Taliban en août 2021.  Le Kirghizistan accueille en outre près de 500 étudiants afghans dans ses universités.  La représentante a ensuite appelé à assurer la participation des femmes à tous les domaines de la vie publique ainsi que leur accès à l’éducation, dénonçant les restrictions dont elles font l’objet en Afghanistan.  Elle a ensuite souligné l’importance d’intégrer l’économie afghane aux processus régionaux, y compris les projets énergétiques permettant l’exportation de l’électricité en Afghanistan depuis l’Asie du Sud. 

M. PRAKASH GUPTA (Inde) a exprimé, « en tant que voisin contigu et partenaire de longue date de l’Afghanistan », un intérêt direct à assurer le retour de la paix et de la stabilité dans ce pays.  Il a notamment rappelé la livraison de 40 000 tonnes de blé et 150 tonnes d’aide médicale, précisant que l’Inde travaille notamment en partenariat avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).  Le représentant a aussi annoncé que ce mois-ci avait débuté l’expédition de 20 000 tonnes d’aide en blé en partenariat avec le Programme alimentaire mondial (PAM) via le port de Chabahar.  « À l’heure où nous parlons, la première tranche de 2 500 tonnes de blé a déjà été remise à l’entrepôt du PAM à Hérat en vue d’une distribution ultérieure, et la prochaine, de 2 500 tonnes supplémentaires, est en route », s’est-il félicité.

Le représentant a jugé important qu’il existe un consensus international sur les questions liées à l’Afghanistan, et a noté que cette approche collective a été formulée dans la résolution 2593 (2021) du Conseil.  Nos priorités communes et immédiates comprennent la fourniture d’une aide humanitaire au peuple afghan, la formation d’une structure gouvernementale inclusive et représentative, la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue et la préservation des droits des femmes, des enfants, et des minorités, a-t-il rappelé.

L’Inde apprécie et soutient le travail accompli par l’ONU en Afghanistan et est prête à travailler avec le Secrétaire général pour faire évoluer la situation, a affirmé le représentant, pour qui la paix et la stabilité en Afghanistan sont « des impératifs cruciaux que nous devons tous atteindre collectivement ». 

M. MUNIR AKRAM  (Pakistan) a déclaré qu’il existe des raisons pour être à la fois optimiste et pessimiste.  Il est vrai que la situation a avancé sur la bonne voie, a-t-il constaté, énumérant la reprise des échanges et du commerce, un gouvernement stable sans menaces internes avérées, une diminution de l’économie de l’opium, ainsi que l’interaction des autorités de facto avec leurs voisins et d’autres pays de la région.  Il s’est cependant inquiété de la situation humanitaire catastrophique et de l’effet intolérable des restrictions imposées aux femmes et aux filles qui n’ont fait qu’augmenter.  Sur le plan politique, il a déploré le peu de progrès réalisés pour promouvoir l’inclusion.  De plus, les organisations terroristes qui opèrent dans ce pays et la région, constituent une véritable menace et doivent être empêchées de nuire, a-t-il souligné, citant notamment Daech. 

Le représentant a ensuite rappelé, à cet égard, la récente visite du Ministre en exercice des affaires étrangères afghan à Islamabad, pour des entretiens avec le Pakistan et la Chine.  À cette occasion, plusieurs questions ont été abordées, notamment la coopération concernant tout l’éventail des sujets qui « nous préoccupent », a-t-il indiqué, invitant la communauté internationale à apporter un concours constructif au gouvernement intérimaire.  Il a souhaité, pour finir, que cette rencontre et celle de Samarkand fassent des émules, invitant d’autres pays de la région, dont ceux membres de l’Organisation de la coopération islamique à jouer un rôle de premier plan. 

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a indiqué que son pays se conforme strictement à la position du Conseil de sécurité s’agissant de la reconnaissance internationale des Taliban.  Il a cependant fait valoir que la nouvelle Administration de l’Afghanistan œuvre depuis deux ans à la construction de l’État.  « Le pays doit survivre et construire des relations normales avec ses voisins et d’autres partenaires, y compris les organisations internationales », a-t-il dit, estimant que l’intégration de l’Afghanistan dans le système économique régional répond aux intérêts de toute l’Asie centrale. 

C’est pourquoi, a expliqué le représentant, le Kazakhstan a accrédité des représentants de la nouvelle Administration afghane, sans leur accorder le statut diplomatique. Il a estimé à cet égard que la rencontre tenue en mai à Doha, au Qatar, entre le Secrétaire général et les représentants spéciaux pour l’Afghanistan d’un certain nombre de pays a confirmé l’importance d’une coopération accrue entre la communauté internationale et les Taliban, principalement en matière commerciale, économique et humanitaire. 

C’est dans cet esprit que le Kazakhstan s’est engagé à coopérer avec la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme de forces extérieures opérant dans ce pays, a précisé le représentant, qui a formulé l’espoir que les autorités de facto de l’Afghanistan prendront les mesures appropriées pour mettre en place un gouvernement inclusif et représentatif, défendre les droits humains et promouvoir la participation des femmes à tous les aspects de la société. Dans l’immédiat, a-t-il conclu, le Kazakhstan entend établir une coopération entre son agence de développement international KazAID et les entités des Nations Unies dans la mise en œuvre de projets pertinents pour la stabilisation économique de l’Afghanistan. 

M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a déclaré que son pays avait toujours préconisé de ne pas se contenter d’apporter une aide humanitaire en Afghanistan, mais d’élaborer des mesures concrètes susceptibles de favoriser le redressement de l’économie nationale.  Il a jugé important de ne pas isoler l’Afghanistan sur le plan international, car cela ne ferait qu’exacerber la crise humanitaire qui y sévit.  Le représentant s’est dit convaincu que la révocation rapide de l’interdiction de l’éducation des filles et de l’emploi des femmes deviendrait un facteur clef pour parvenir à un consensus national, à un développement durable et à l’intégration de l’Afghanistan dans la communauté internationale en tant que membre responsable.  Pour lui, les conditions fondamentales pour une paix à long terme dans ce pays restent la formation d’un gouvernement inclusif et la garantie des droits et libertés fondamentaux des personnes, en particulier des femmes et des minorités nationales.  L’Ouzbékistan s’en tient strictement à cette position dans ses contacts avec les Taliban, a affirmé le délégué.  L’initiative du Président de l’Ouzbékistan, M. Shavkat Mirziyoyev, concernant la formation d’un groupe de négociation international de haut niveau sous les auspices des Nations Unies, visant à préparer et à convenir avec les autorités afghanes de la mise en œuvre progressive des obligations des parties, répond à cet objectif.

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