En cours au Siège de l'ONU

Non-alignés ou pro-Russes, les tenants d’un « nouvel ordre mondial », exposent leurs visions divergentes à l'Assemblée générale

Soixante-dix-huitième session,
12e et 13e séances – matin & après-midi
AG/12538

Non-alignés ou pro-Russes, les tenants d’un « nouvel ordre mondial », exposent leurs visions divergentes à l'Assemblée générale

Au cinquième jour du débat général, marqué notamment par le discours du Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, nombre des intervenants ont présenté devant l’Assemblée générale leurs perceptions et leurs souhaits quant à la gestation d’un nouvel ordre mondial.  Peu de dirigeants occidentaux s’étant exprimés aujourd’hui, les positions se sont distribuées entre tenants d’une analyse proche de celle de la Fédération de Russie et défenseurs du non-alignement, tous étant d’accord pour juger l’ordre actuel injuste et condamné. 

« Un nouvel ordre mondial est en train de naître sous nos yeux », a ainsi affirmé le Ministre russe, en évoquant une lutte entre une majorité d’États qui défendent une diversité civilisationnelle et une répartition plus équitable des richesses et une poignée d’autres qui « utilisent des méthodes néocoloniales d’assujettissement pour maintenir leur domination ».  « Ils font tout pour empêcher la formation d’un ordre mondial véritablement multipolaire et juste », a lancé M. Sergey Lavrov, qui a accusé les États-Unis et le « collectif occidental qui leur est subordonné » de mépriser le reste du monde, de multiplier les promesses et de contracter des obligations contraignantes pour s’y soustraire ensuite et de générer des conflits qui entravent la réalisation d’objectifs communs. 

M. Lavrov a pourtant jugé le processus « inexorable », mettant particulièrement en avant le rôle des BRICS et « d’autres associations qui offrent aux pays du Sud des opportunités de développement commun et défendent la place qui leur revient dans l’architecture multipolaire objectivement émergente ». Pour la première fois peut-être depuis la création de l’ONU en 1945, une véritable démocratisation des affaires mondiales existe, s’est-il félicité, y voyant une source d’optimisme pour tous ceux qui croient en la suprématie du droit international et souhaitent la renaissance de l’ONU en tant qu’organe central de coordination de la politique mondiale.

Si le monde actuel va si mal, c’est, pour Djibouti, en raison d’une lente érosion de la confiance mutuelle, attribuée à une compétition géopolitique récemment renforcée, mais aussi à une « résistance implacable au changement » des institutions mondiales créées après 1945 et à une inégalité « qui se creuse et se fossilise ».  « Depuis les dures tranchées de la périphérie », le Premier Ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines a quant à lui « posé trois questions obsédantes: Quoi de neuf?  Quel monde? Et qui donne les ordres? » 

« Comme en 1955, nous nous trouvons aujourd’hui à un carrefour stratégique », a estimé la Cheffe de la diplomatie de l’Indonésie, évoquant les principes de la Conférence de Bandung, fondés sur la solidarité mondiale et la responsabilité collective comme réponses au déficit de confiance et aux inégalités mondiales.  Son homologue du Mexique a appelé à un changement de paradigme de développement pour « redistribuer le pouvoir et la richesse et combler les écarts inacceptables entre les riches et les pauvres et entre les pays ».  Comme plusieurs autres intervenants, il a aussi préconisé une réforme en profondeur de l’architecture financière internationale pour « renforcer la solidarité mondiale et donner une voix à tous les peuples du Sud ».  Pour sa part, M. Lavrov a appelé à dépolitiser le G20 pour lui « permettre de faire ce pour quoi il a été créé »: élaborer des mesures généralement acceptables de gestion de l’économie et des finances mondiales. Comme lui, les responsables de plusieurs pays, dont le Bélarus, Saint-Kitts-et-Nevis ou le Venezuela, ont demandé la suppression des régimes de sanctions unilatérales, jugés incompatibles avec la réalisation des objectifs de développement durable dans les pays du Sud. 

Certains pays ont prôné des changements radicaux, comme l’Érythrée, qui a souhaité « un bouleversement complet » de l’architecture de gouvernance mondiale, supposant de profondes réformes de l’ONU.  Le Conseil de sécurité a été particulièrement visé, de nombreux pays demandant une meilleure représentation des pays du Sud. 

Beaucoup ont surtout souhaité une plus grande coopération pour résoudre les grands défis mondiaux.  Plusieurs exemples positifs ont été cités, en particulier l’adoption récente du traité sur la biodiversité marine (BBNJ), saluée aussi bien par le Samoa que la Nouvelle-Zélande ou l’Islande.  Mais là aussi, l’Occident a été sommé de respecter ses engagements, en particulier dans le domaine climatique.  Le Samoa, l’Égypte et Djibouti ont ainsi souhaité que la COP28, en fin d’année, permette de rendre opérationnel le plus rapidement possible le fonds pour les pertes et les préjudices décidé il y a un an à Charm el-Cheikh. 

Parmi les autres interventions du jour figuraient celles des Ministres des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie, au lendemain de l’offensive du premier au Haut-Karabakh.  Réaffirmant les positions exprimées deux jours plus tôt devant le Conseil de sécurité, l’Arménie a accusé l’Azerbaïdjan de nettoyage ethnique dans la région de ce pays à population arménienne et de chercher à étendre le conflit à son propre territoire. L’Azerbaïdjan a défendu une opération antiterroriste limitée et d’ailleurs achevée, ajoutant que la population du Haut-Karabakh bénéficierait désormais des mêmes droits et protection que le reste de la population du pays. 

Par ailleurs, le Chef de la diplomatie du Mali a dit s’exprimer au nom du Président de la transition de son pays, du peuple malien et du « Chef d’État du Niger », M. Abdourahmane Tiani, arrivé au pouvoir par le coup d’État du 26 juillet, « empêché de s’exprimer » à la tribune de l’Assemblée générale.

L’Assemblée générale reprendra et conclura son débat général mardi 26 septembre, à partir de 9 heures. 

SUITE DU DÉBAT GÉNÉRAL

Déclarations

M. RALPH E. GONSALVES, Premier Ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a brossé un sombre tableau de la situation mondiale, rappelant que les cibles essentielles des objectifs du développement durable (ODD) ne seraient pas atteintes d’ici à 2030 et que la lutte contre les changements climatiques était « en panne », enregistrant même des reculs dans certains domaines, avec des conséquences pour l’humanité entière, notamment dans les pays les plus vulnérables. Le Premier Ministre a dénoncé des conflits « absurdes », s’inquiétant de la situation en Ukraine, où « les principaux adversaires -l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et la Fédération Russie- pourraient, sans le vouloir, ouvrir les portes d’une apocalypse nucléaire ».  Il a fustigé le refus des anciennes puissances coloniales de répondre aux exigences de réparation, ainsi que celui des plus grands émetteurs de carbone de fournir les ressources nécessaires pour l’adaptation, l’atténuation et les pertes et dommages des pays vulnérables.  M. Gonsalves a estimé que les grandes puissances et les grands blocs avaient tourné le dos au multilatéralisme au profit de réflexes impérialistes à visée hégémonique, déguisés en appels hypocrites à l’émergence d’un nouvel ordre mondial destiné à servir leurs intérêts.  « Depuis les dures tranchées de la périphérie, Saint-Vincent-et-les Grenadines pose trois questions obsédantes: Quoi de neuf?  Quel monde?  Et qui donne les ordres? » 

Appelant à se débarrasser de certaines « toiles d’araignée idéologiques », M. Gonsalves a rejeté la thèse erronée d’une lutte entre démocraties et autocraties, décrivant plutôt un affrontement entre puissances dominantes pour le contrôle des ressources mondiales.  Raillant la « schizophrénie historique » des grandes puissances, il a considéré que même si elles détiennent toutes les armes de la domination, elles restent accablées d’insécurités déconcertantes qui les transforment en « bêtes insensés » à leur propre détriment et au détriment de toute l’humanité.  Le Chef du Gouvernement a exhorté les États-Unis à mettre un terme aux sanctions unilatérales contre Cuba, le Nicaragua et le Venezuela.  Il est d’après lui « idiot » et « incorrect » de considérer Cuba comme un État parrain du terrorisme.  Il a encore regretté que l’utilisation du dollar comme arme contre le Venezuela ait provoqué l’effondrement de l’accord Petro Caribe qui bénéficiait largement à une dizaine de pays des Caraïbes, dont Saint-Vincent-et-les Grenadines.

Le Premier Ministre a affirmé qu’il était « grand temps que la République de Chine –Taiwan- sorte de l’isolement diplomatique ».  « La paix dans le détroit de Taiwan est un impératif pour la prospérité et la sécurité du monde entier », a-t-il affirmé.  Dénonçant la « douce musique » jouée par les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, États et entreprises, M. Gonsalves a déploré un manque de mesures de réparation effectives.  Selon lui, la COP28 sera un test décisif en la matière.  Une attention particulière doit être portée aux pays les plus vulnérables, comme les petits États insulaires en développement (PEID) des Caraïbes et du Pacifique, ainsi qu’aux communautés les plus pauvres des régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine.  Il a exhorté l’Assemblée générale à soutenir l’initiative de Bridgetown et l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle concernant les PEID, cruciales pour réformer le financement du développement.  Il a également appelé à faire disparaître « l’emprise » de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur les questions de la fiscalité internationale qui devraient incomber à l’ONU. 

« Nous ne pouvons pas nous permettre de nous lasser de la question haïtienne », a-t-il enfin martelé, plaidant en faveur d’un véritable plan Marshall financé par la communauté internationale.  Dénonçant un « tabou », le Premier Ministre a abordé plus largement la question des réparations de la part des États européens à la suite d’un sous-développement hérité du génocide des peuples autochtones et de l’esclavage des corps africains.  « Le temps des maîtres et des esclaves est révolu et les jours de l’impérialisme sont comptés. »

Mme FIAMĒ NAOMI MATA’AFA, Première Ministre et Ministre des affaires étrangères et du commerce du Samoa, a passé en revue les catastrophes dévastatrices qui se sont produites ce dernier semestre en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique, décimant vies et moyens de subsistance.  Il faut se rendre à l’évidence, les effets des changements climatiques ont un impact de plus en plus profond et de plus en plus dévastateur sur nos vies, et les nier ne fera qu’aggraver la situation, a-t-elle prévenu.  Elle a appelé à s’attaquer à leurs causes profondes, rappelant que les scientifiques ont mis en garde contre des événements météorologiques plus fréquents et plus extrêmes, entraînant davantage de pertes en vies humaines et de dégâts aux infrastructures. 

La Première Ministre a recommandé de s’orienter vers des énergies propres et abordables, et d’évoluer vers des économies vertes et résilientes.  Protéger la nature doit être la priorité de chacun pour le bien de l’humanité, a-t-elle martelé, estimant que des solutions ciblées doivent être complétées par la garantie d’un financement climatique pour les pays en première ligne et par l’utilisation des meilleures sciences et technologies disponibles. 

C’est pourquoi, la prochaine COP28 doit inclure des engagements pour concrétiser la réalité imaginée, a-t-elle affirmé.  Elle a évoqué en particulier l’importance de rendre opérationnel le fonds pour les pertes et les préjudices le plus rapidement possible. 

De fait, franchir ce seuil de 1,5° C signifierait la fin de bon nombre de nos sociétés insulaires, a-t-elle averti, expliquant que la crise climatique cause des dommages à la biodiversité qui constitue le réseau de la vie dont son pays dépend pour ses moyens de subsistance et sa croissance économique. Elle a également plaidé pour une meilleure protection de la biodiversité et à veiller à une gestion durable des ressources marines, exhortant notamment à une ratification rapide du nouveau traité sur la protection de la biodiversité marine en haute mer.  À cet égard, la dignitaire a exhorté les États Membres à contribuer à la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée qui prive les petits États insulaires en développement (PEID) de revenus indispensables à une époque de tensions budgétaires accrues. 

Au plan national, elle a attiré l’attention sur les maladies non transmissibles (MNT) qui représentent près de la moitié des décès dans son pays.  En outre, le Samoa enregistre l’un des taux d’obésité les plus élevés au monde, parmi les enfants notamment.  C’est pourquoi, a-t-elle informé, son gouvernement a fait des services de santé centrés sur la personne et de la lutte contre les MNT une priorité du Plan de développement du Samoa 2019-2025.  Elle a également insisté sur l’importance de moins dépendre de la nourriture industrielle importée.  La nutrition et l’exercice physique, associés à d’autres changements de mode de vie, contribueront le plus à la lutte contre les MNT, mais ces efforts doivent être renforcés par un soutien financier afin d’appuyer la sensibilisation et le renforcement des capacités des professionnels de la santé et de l’éducation.

M. TERRANCE MICHEAL DREW, Premier Ministre de Saint-Kitts-et-Nevis, regrettant l’existence de fortes disparités de revenus et de bien-être au niveau mondial, mais aussi la défiance croissante vis-à-vis des États, des organisations internationales et des médias traditionnels, a noté l’importance de la prévention, de la coordination et du partenariat.  Il a souligné que les pays en développement souffraient de plus en plus de fardeaux dont ils ne sont pas à l’origine, en rappelant notamment les injustices de l’esclavage, source de richesses pour les pays développés.  Il est donc temps, a déclaré M. Drew, de rechercher une forme de justice réparatrice et de justice climatique, car des pays comme Saint-Kitts-et-Nevis sont, alors même que leur empreinte carbone est négligeable, obligés de remédier à la crise climatique en empruntant à des taux exorbitants auprès des pays qui sont à l’origine du problème.  Dénonçant les insuffisances de l’architecture financière internationale, il a appelé à une réforme de sa gouvernance ainsi qu’à la mise en place d’un mécanisme multilatéral de gestion de la dette souveraine et d’un indice multidimensionnel de vulnérabilité.  Il s’agit, a-t-il précisé, de tenir compte d’indicateurs comme la dette des pays concernés ou encore les risques et coûts d’événements environnementaux catastrophiques, susceptibles d’effacer jusqu’à 5% du PIB. 

Concernant les progrès en matière de développement, le Premier Ministre a expliqué que la vision de son gouvernement reposait sur plusieurs piliers, comme la sécurité alimentaire, la transition vers une énergie verte, la diversification économique, ou encore les industries durables.  Il s’est félicité des investissements réalisés par Saint-Kitts-et-Nevis dans la production d’énergie géothermique, des leçons tirées de la pandémie de COVID-19, de l’adoption de lois sur l’intégrité de la vie publique et la bonne gouvernance ou encore des programmes qui s’adressent aux plus vulnérables comme les femmes, les jeunes, les personnes âgées, les handicapés et la communauté rastafari. 

S’agissant de la prolifération d’armes illicites et indétectables qui entrent dans la région caraïbe, le Chef du Gouvernement a invité les États qui fabriquent ces armes à assumer une plus grande responsabilité dans la lutte contre leurs flux illégaux, qui constituent une vraie menace pour la sécurité et la stabilité nationales et régionales.  M. Drew a ensuite rappelé que certains pays continuaient à être victimes d’inégalités au niveau mondial: le Venezuela et Cuba, du fait des sanctions et des embargos qui les frappent et causent des souffrances à des peuples qui ne les méritent pas, ou encore Taiwan qui, tout en étant un partenaire fiable de développement pour Saint-Kitts–et-Nevis, compte 23 millions d’habitants qui ne sont pas adéquatement représentés à l’ONU.  Il a en outre appelé à une solution politique de toute urgence en Haïti. 

Abordant la question de la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, le Premier Ministre a rappelé la nécessité d’un rôle et d’une présence renforcés des pays en développement du Sud au sein du Conseil pour mieux refléter les réalités géopolitiques contemporaines et renforcer son efficacité.  Il a jugé cette réforme essentielle, en rappelant que le monde était à la croisée de « ce qui est » et de « ce qui pourrait être ». 

M. JOSÉ ULISSES CORREIA E SILVA, Premier Ministre et Ministre de la réforme de Cabo Verde, a déclaré qu’en cette période de « crise intense », caractérisée par la résurgence de l’extrémisme, des attaques contre la démocratie et des coups d’État successifs en Afrique, son pays se range du côté de la liberté et du respect de la souveraineté des nations.  Sur cette base, il a condamné l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie ainsi que le recours aux coups de force pour accéder au pouvoir.  Selon une enquête récente, les deux tiers des Africains préfèrent la démocratie à toute autre forme de gouvernement, mais seulement 38% d’entre eux sont satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays. Des données qui laissent présager une meilleure gouvernance et une plus grande responsabilisation des citoyens, notamment à l’égard de fléaux tels que la corruption, a-t-il estimé.  Pour raffermir la confiance des citoyens dans la démocratie, le Premier Ministre a préconisé des systèmes électoraux et judiciaires crédibles, la liberté de la presse et des institutions publiques fortes. Il s’est dit prêt à travailler avec détermination aux côtés des États Membres pour lutter contre l’insécurité et favoriser la stabilité en Afrique de l’Ouest. 

Dans un monde de plus en plus interconnecté, l’insécurité se propage et ne respecte pas les frontières, a prévenu M. Silva.  Un « partenariat entre les nations » est donc essentiel pour surmonter les menaces à la sécurité mondiale, sanitaire et climatique ainsi qu’à la sécurité alimentaire.  Il s’est également inquiété des effets sur la région du trafic de drogue, du terrorisme et de la piraterie qui, tous, recèlent un potentiel pandémique énorme. Qui plus est, les défis liés à la réalisation des ODD continuent de s’accroître et nécessitent des réformes et des investissements accélérés.  Nous devons encore revoir l’architecture financière internationale, alléger la dette des pays les moins avancés (PMA) et augmenter considérablement les droits de tirage spéciaux, a-t-il ajouté, tout en simplifiant les règles régissant leur attribution.  Le Premier Ministre a plaidé en faveur d’une représentation juste des pays africains au sein du Conseil de sécurité et dans les institutions financières internationales. De même, le recours à l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle en tant que critère d’accès à un financement à faible coût et à long terme pour les petits États insulaires en développement (PEID) est essentiel. 

De façon générale, M. Silva a expliqué que l’Afrique doit croître davantage et être mieux intégrée à l’économie mondiale afin de produire, exporter et créer des emplois bien rémunérés.  À ce titre, des transformations structurelles en matière de connectivité, qui constitue une contrainte majeure à l’intégration économique africaine, sont nécessaires.  Il a fait savoir que le Portugal et Cabo Verde ont récemment signé un accord visant à convertir la dette bilatérale de ce dernier en financement climatique pour atteindre ces objectifs, tout en créant des possibilités d’investissement pour le secteur privé et des emplois qualifiés pour les jeunes.  Dans l’intervalle, le dirigeant a indiqué que son pays a pour ambition d’éradiquer l’extrême pauvreté d’ici à 2026, de diversifier son économie et de devenir une nation numérique. 

M. HAMZA ABDI BARRE, Premier Ministre de la Somalie, a critiqué la contradiction entre les promesses et la dure réalité à laquelle fait face le monde, pointant les conséquences négatives de l’inaction pour les personnes vulnérables lorsque le développement n’est pas réalisé.  Il faut raviver l’action, a-t-il exhorté, s’élevant contre la complaisance alors que le monde est à mi-parcours de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Il faut trouver une solution innovante aux problématiques et aux crises et créer des partenariats effectifs pour que les promesses se transforment en politique et les engagements en mesures concrètes. 

La pandémie de COVID-19 a mis à nu les fragilités et démontré, dans le même temps, le pouvoir de la solidarité et la coopération lors de périodes difficiles.  C’est pourquoi M. Barre a proposé la création de plateformes de coordination des politiques à l’échelle mondiale et régionale pour collecter des données et des connaissances afin de protéger les communautés contre les pandémies.  Poursuivant, le Chef du Gouvernement a souligné la nécessité de refondre l’ordre financier mondial, rappelant les inégalités dans l’accès aux ressources lors de la pandémie.  Il s’agit, a-t-il dit, d’adapter un système financier obsolète et de corriger les maux historiques au bénéfice du progrès collectif. 

Le Premier Ministre a relevé les défis inédits marqués par une augmentation des violences, liées notamment aux nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle -une « menace terrifiante »-, les conflits armés et les coups d’État en hausse sur le continent africain.  Ces conflits sont une source de vive préoccupation, en raison notamment de leurs effets destructeurs sur les civils condamnés aux déplacements et à la pauvreté. À une époque marquée par la haine et la violence, la Somalie, a assuré M. Barre, reste guidée par les principes de l’islam noble.  Il a défendu la tolérance entre les différentes fois, la discrimination raciale et l’oppression qui visent les communautés musulmanes dans diverses régions du monde.  « Ce phénomène obscurantiste est une honte pour tous. » 

Le Chef du Gouvernement a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU, qui vient rappeler que les conflits proviennent souvent de l’inaction face aux inégalités.  Abordant le volet des changements climatiques, il a, là encore, mis en relief les conséquences de l’inaction collective.  Au cours des dernières années, la Somalie a connu un cercle vicieux d’inondations et de sécheresses ayant conduit au déplacement de millions de personnes.  M. Barre a appelé la communauté internationale à appuyer son pays pour renforcer sa résilience. 

Pour finir, le Premier Ministre est revenu sur les progrès significatifs réalisés en Somalie, au cours de la décennie écoulée, vers la paix et la sécurité ainsi que sur le front économique.  Il s’est félicité des campagnes couronnées de succès lancées contre les groupes terroristes, notamment les Chabab.  Aujourd’hui, 45% des zones contrôlées par ce groupe terroriste ont été récupérées.  De fait, a-t-il expliqué, « si nous coopérons avec les communautés locales, les terroristes n’auront nulle part où se cacher », une approche qu’il recommande à l’échelle mondiale.  Pour finir, M. Barre a salué le courage et le sacrifice de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) ainsi que les pays contributeurs de troupes.  Son pays, a-t-il conclu, s’est engagé à la pleine mise en œuvre du plan de transition en matière de sécurité et à assurer l’ensemble des prérogatives en la matière après le départ de la mission en 2024. 

M. SALEUMXAY KOMMASITH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République démocratique populaire lao, a indiqué que tout en défendant le multilatéralisme, son pays était convaincu que l’ONU, pour pouvoir remplir efficacement son mandat, devait être réformée.  Il a appelé au dialogue en Ukraine et au Moyen-Orient, en estimant que l’unilatéralisme contrevenait aux principes de la Charte des Nations Unies et entravait le développement.  Il a en outre réitéré l’appel de son pays à lever l’embargo économique contre Cuba et à retirer ce pays de la liste des États soutenant le terrorisme. 

Notant que lors du Sommet du G77 et de la Chine qui s’est tenu à La Havane la semaine dernière, les chefs d’État et de gouvernement des pays en développement avaient identifié la science, la technologie et l’innovation comme des mécanismes moteurs du développement, le Vice-Premier Ministre a appelé de ses vœux un système de gouvernance mondiale fondé sur ces mécanismes.  Il a noté que l’un des principaux obstacles à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) avait toujours été l’insuffisance du financement et la faible participation des pays en développement au processus décisionnel économique international.  Il a indiqué que son pays avait ajouté un dix-huitième ODD pour permettre à sa population de vivre à l’abri des munitions non explosées, un obstacle à la réalisation d’autres objectifs.  M. Kommasith a appelé à la poursuite d’une assistance de la communauté internationale dans cette tâche. 

S’agissant des autres ODD, le Vice-Premier Ministre a reconnu que nombre d’entre eux stagnaient ou régressaient et a indiqué que la République démocratique populaire lao cherchait actuellement à identifier ceux qui nécessitaient un soutien et des financements supplémentaires.  Il a rappelé que son pays disposait d’un capital naturel considérable avec des opportunités de développement des énergies renouvelables et d’investissement dans le captage et le stockage du carbone.  M. Kommasith a souligné que même si son pays faisait partie de ceux qui contribuaient le moins aux émissions mondiales, son gouvernement avait adopté une stratégie nationale sur les changements climatiques dont il a demandé qu’elle bénéficie de ressources financières et d’une assistance technique suffisantes en appelant à la concrétisation de l’engagement international à hauteur de 100 milliards de dollars de financement climatique pour les pays qui en ont le plus besoin. 

Il a conclu en soulignant que son pays était déterminé à renforcer l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), qui joue un rôle central dans la promotion de la paix, de la sécurité et du développement dans la région et a rappelé qu’en 2024, son pays assumerait la présidence de l’ASEAN sur le thème « ASEAN: renforcer la connectivité et la résilience ». 

M. DEMEKE MEKONNEN, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de l’Éthiopie, a estimé que la communauté internationale peut relever les défis actuels en faisant le pari de coopérer, plutôt que de privilégier «°des choix géopolitiques qui exacerbent les tensions ».  Il a donc appelé les États Membres à se réengager en faveur de la Charte des Nations Unies et à travailler ensemble pour un système multilatéral inclusif et solidaire qui pourra juguler l’inflation mondiale, les changements climatiques ou encore la menace nucléaire.  Réformer le Conseil de sécurité n’est pas un choix mais une nécessité absolue, a-t-il ajouté, estimant qu’allouer des sièges permanents pour l’Afrique serait moralement et politiquement justifié.  S’il a salué les efforts de financement entrepris pour aider l’Union africaine dans ses opérations de soutien à la paix, M. Mekonnen a toutefois appelé à lever les sanctions économiques appliquées aux pays en développement.  Par ailleurs, il a plaidé en faveur de la réforme du système onusien dans sa totalité pour le rendre « plus inclusif et efficace ». L’Éthiopie soutient les objectifs de développement durable (ODD), a poursuivi le Vice-Premier Ministre, et s’engage à accélérer ses réformes économiques et politiques pour les atteindre. À cet égard, il a demandé la pleine mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba. 

Par ailleurs, M. Mekonnen a souligné les efforts de stabilisation et de consolidation de la paix dans son pays, notamment via l’Accord de paix de Prétoria et la politique de justice transitionnelle.  Exprimant la solidarité de l’Éthiopie avec le Soudan, il a espéré que la paix serait bientôt retrouvée, à travers l’intégration régionale et la coordination des initiatives de paix.  Il a ensuite indiqué que l’Éthiopie continuera de promouvoir une approche concertée et la confiance mutuelle pour accroître l’intégration régionale et augmenter la connectivité entre les pays de la région.  L’intégration régionale, couplée à des projets de développement des infrastructures, a des effets positifs sur les citoyens, a-t-il estimé, en soulignant l’immense potentiel de l’Afrique.  Pour développer ce potentiel, il a néanmoins jugé nécessaire de mobiliser davantage de ressources et de résoudre rapidement la crise de la dette en Afrique, ce qui requiert une réforme de l’architecture financière internationale.  L’égalité, l’espoir et la justice devraient être la pierre angulaire de cette Assemblée générale, a-t-il conclu, tout en rappelant l’importance d’inclure toutes les nations et d’œuvrer pour le consensus global.

M. JOHN ROSSO, Vice-Premier Ministre et Ministre de l’immigration, des terres et de l’aménagement du territoire de Papouasie-Nouvelle-Guinée, a expliqué que son pays est confronté à des problèmes de relèvement suite à la pandémie de COVID-19, ainsi qu’en raison des changements climatiques et de la guerre menée contre l’Ukraine.  Ces questions sont abordées dans le nouveau Plan de développement quinquennal 2023-2027 de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, lancé en juillet de cette année.  Il a précisé que le Gouvernement entend accroître l’économie de 31 milliards à 57 milliards de dollars par an, d’ici à 2030, et créer un million d’emplois supplémentaires.  En outre, la « Vision 2050 », vise à faire passer la Papouasie-Nouvelle-Guinée dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici à 2030 et améliorer l’indice de développement humain d’ici à 2050. 

M. Rosso a indiqué que son pays accorde une attention particulière à la santé, un défi majeur étant la prévention et le contrôle des maladies non transmissibles, la santé reproductive et maternelle ainsi que la tuberculose.  Un partenariat de développement pour la santé est donc crucial pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée qui compte un nombre limité d’experts, de capacités et de ressources dans ce domaine.  Le financement du développement est un autre défi de taille, a-t-il poursuivi, la Papouasie-Nouvelle-Guinée ayant besoin de 26 milliards de dollars, au cours des cinq prochaines années, pour atteindre « l’aspiration de développement » de 57 milliards de dollars par an.  Pour maîtriser le risque d’endettement, le Gouvernement a mis en place des mesures pour mobiliser ses ressources nationales, notamment en lançant une réforme fiscale. 

Le Premier Ministre a ensuite exigé une réforme urgente du système financier international afin de relever les défis économiques et financiers auxquels sont confrontés les petits États insulaires en développement (PEID).  Il a également appelé à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle afin de prendre en compte les facteurs de vulnérabilité de ces pays.  Il faut en outre veiller à ce que l’application des lois « taille unique » de lutte contre le blanchiment d’argent ne constitue pas un obstacle à la croissance économique et au développement durable des petits pays en développement.

Le Chef de Gouvernement a aussi souligné l’urgence de lutter contre la crise climatique et exhorté les pays développés à tenir leur engagement de financement climatique de 100 milliards de dollars par an.  Il a fait savoir que son gouvernement compte signer l’Accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine dès que les processus procéduraux et juridiques domestiques seront terminés.  Sur le plan politique, M. Rosso a assuré que le processus de paix de Bougainville est une priorité pour son gouvernement. 

M. JEYHUN BAYRAMOV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a dressé la liste des défis mondiaux transcendant les frontières et appelé à des actions audacieuses et concertées, malgré l’érosion du multilatéralisme.  S’inquiétant d’une exacerbation de l’intolérance, des discours de haine et de l’islamophobie, il a mis en avant la tradition séculaire de diversité et de multiculturalisme de son pays. 

Plaidant en faveur d’un système multilatéral revigoré et réformé, avec les Nations Unies en son centre, le Ministre a évoqué les initiatives mondiales proposées par son pays pour lutter contre la pandémie de COVID-19 et en a appelé à la solidarité internationale pour en atténuer les effets persistants. Il a mis en avant l’assistance humanitaire, technique et économique d’une valeur de 300 millions de dollars que son pays a apportée à plus de 130 nations depuis 2020.  Il a aussi vanté les performances économiques de son pays et sa volonté de réaliser les objectifs de développement durable (ODD).  Il a par ailleurs mis en avant la transition de son pays « du statut de fournisseur traditionnel de pétrole brut à celui de fournisseur fiable de gaz naturel » et son rôle dans la sécurité énergétique du continent, rappelant que l’Azerbaïdjan fournit actuellement du gaz à 7 pays européen, qui seront 10 dans un avenir proche. 

Le Ministre s’est ensuite longuement étendu sur le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.  Affirmant que son pays avait entamé une normalisation des relations et offert la paix à son voisin, il a regretté que celui-ci ait « reproduit les schémas du passé en faisant mine de négocier, en revenant sur les engagements pris et en se livrant à des provocations politiques et militaires afin d’éviter de prendre des décisions concrètes ».  Accusant l’Arménie d’avoir soutenu la présence de plus de 10 000 hommes équipés d’armes lourdes sur le sol souverain de l’Azerbaïdjan, notamment en utilisant abusivement la route de Latchine, il l’a accusée de mener depuis des mois une « campagne de manipulation » basée sur des allégations fabriquées de blocus, de crise humanitaire ou de nettoyage ethnique, ajoutant que c’est l’Arménie qui entravait la livraison de marchandises à la région azerbaïdjanaise de Garabagh.

Le Ministre a présenté l’offensive menée le 19 septembre comme une série d’opérations militaires « limitées et proportionnées » de lutte contre le terrorisme pour préserver sa souveraineté, son intégrité territoriale et de protéger ses résidents, « dans le respect total des normes du droit humanitaire ».  Assurant que ces opérations avaient désormais cessé, il s’est félicité de l’ouverture, le 21 septembre, d’un dialogue entre son pays et les « résidents arméniens », ajoutant que tous les efforts ont été mobilisés pour répondre aux besoins immédiats des civils et que l’aide humanitaire leur parvient.  L’Azerbaïdjan est déterminé à réintégrer les résidents arméniens de la région du Garabagh dans la société azerbaïdjanaise en tant que citoyens égaux, sur la base de la Constitution, de la législation nationale et des engagements internationaux du pays, a-t-il assuré.

Le Ministre a ensuite évoqué une « opportunité historique » pour l’Azerbaïdjan et l’Arménie d’établir des relations de bon voisinage.  Appelant les acteurs internationaux désireux de soutenir le processus à s’engager de manière significative, il a en revanche invité « ceux qui ne sont pas en mesure de jouer un rôle d’intermédiaire honnête » à s’abstenir.  Il a aussi demandé que justice soit rendue pour les crimes de guerre graves et les crimes contre l’humanité dont il a accusé l’Arménie, lui demandant en particulier de faire la lumière sur le sort de près de 4 000 citoyens azerbaïdjanais portés disparus pendant le conflit.  Il a aussi appelé à faire respecter le droit au retour de quelque 300 000 Azerbaïdjanais, expulsés de force de leur terre ancestrale par l’Arménie entre 1987 et 1991. 

M. SERGUEI LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré qu’un « nouvel ordre mondial est en train de naître sous nos yeux », ajoutant que les contours de l’avenir se dessinent dans une lutte entre une majorité d’États qui prônent la diversité civilisationnelle et une répartition plus équitable et une poignée d’autres qui « utilisent des méthodes néocoloniales d’assujettissement pour maintenir leur domination ».  Il a accusé Américains et Européens, habitués à mépriser le reste du monde, de multiplier les promesses et de contracter des obligations contraignantes, avant de s’y soustraire.  L’Occident est un véritable « empire du mensonge », a-t-il dit, reprenant une expression du Président Putin. 

Après avoir accusé les États-Unis et le « Collectif occidental qui lui est subordonné » d’avoir cherché l’affrontement avec l’URSS puis, après la fin de la guerre froide, d’avoir trahi les assurances données à la Russie en matière d’architecture de sécurité européenne, M. Lavrov a rappelé qu’en 2021 les propositions russes visant à des accords sur des garanties mutuelles de sécurité en Europe sans modifier le statut de pays non aligné de l’Ukraine ont été rejetées avec arrogance.  Il a accusé l’Occident de continuer à militariser systématiquement le régime russophobe de Kiev, porté au pouvoir à la suite d’un coup d’État sanglant et utilisé pour préparer le déclenchement d’une guerre hybride contre la Russie. 

Disant avoir l’impression persistante que cet « Occident collectif » a décidé de donner à la doctrine Monroe une projection mondiale, M. Lavrov a dénoncé comme une nouvelle manifestation dangereuse de l’expansionnisme de l’OTAN la tentative d’étendre la zone de responsabilité du bloc à l’ensemble de l’hémisphère oriental sous le slogan de « l’indivisibilité de la sécurité de la région euro-atlantique et indopacifique » et par la création d’une série « d’alliances militaro-politiques miniatures » ouvertement focalisées contre son pays et la Chine, et menaçant l’architecture régionale inclusive développée autour de l’ASEAN. 

Les États du monde ne veulent plus vivre sous les ordres mais échanger sur un pied d’égalité, a affirmé M. Lavrov, qui a dénoncé une division artificielle de l’humanité en blocs hostiles du fait des conflits générés par les États-Unis et le « collectif occidental », laquelle entrave la réalisation d’objectifs communs.  « Ils font tout pour empêcher la formation d’un ordre mondial véritablement multipolaire et juste », a-t-il asséné. 

Pourtant, la logique du processus historique est inexorable, a déclaré M. Lavrov, qui a mis en avant en particulier le rôle des BRICS et d’autres associations qui offrent aux pays du Sud des opportunités de développement commun et défendent la place qui leur revient dans l’architecture multipolaire objectivement émergente.  « Pour la première fois peut-être depuis la création de l’ONU en 1945, une véritable démocratisation des affaires mondiales existe », a estimé le Ministre, y voyant une source d’optimisme pour tous ceux qui croient en la suprématie du droit international et souhaitent la renaissance de l’ONU en tant qu’organe central de coordination de la politique mondiale.

M. Lavrov a accusé l’Occident de continuer à se considérer comme supérieur au reste de l’humanité.  Il a dénoncé le recours à des mesures coercitives unilatérales comme une violation flagrante du principe de l’égalité souveraine des États, « pierre angulaire de l’ordre mondial créée après la Seconde Guerre mondiale », exigeant notamment la levée de celles qui frappent Cuba et la Syrie.  Il a de nouveau accusé l’OTAN d’avoir détruit l’État libyen, ouvrant les vannes à la propagation du terrorisme dans la région saharo-sahélienne et à des vagues de millions de migrants illégaux en Europe.

M. Lavrov a par ailleurs dénoncé « l’égoïsme de la minorité occidentale », l’illustrant par ses « tentatives obsessionnelles d’ ’ukrainiser’ l’ordre du jour international » en repoussant au second plan d’autres crises régionales non résolues, notamment au Moyen-Orient, a-t-il affirmé, les Palestiniens attendent depuis plus de 70 ans l’État qui leur est solennellement promis.

M. Lavrov a ensuite comparé et opposé l’engagement non tenu de l’Occident de fournir aux pays en développement 100 milliards de dollars par an pour financer des programmes d’adaptation aux changements climatiques et les 170 milliards de dollars dépensés depuis février 2022 par les États-Unis, l’OTAN et l’Union européenne pour soutenir le « régime raciste de Kiev ». 

Le Ministre a ensuite souligné l’urgence d’une réforme rapide de l’architecture de gouvernance mondiale existante.  Il a ainsi demandé une redistribution des quotas de vote au FMI et à la Banque mondiale afin de reconnaître le poids économique et financier réel des pays du Sud, et demandé que le G20 cesse d’être politisé et ait la possibilité de faire ce pour quoi il a été créé: élaborer des mesures généralement acceptables de gestion de l’économie et des finances mondiales.  Il a estimé que l’élargissement du Conseil de sécurité, « de plus en plus demandé » devrait se faire en éliminant la sous-représentation des pays de la majorité mondiale, ajoutant que les nouveaux membres, permanents ou non, devraient jouir de l’autorité à la fois dans leur région et au sein d’organisations mondiales telles que le Mouvement des pays non alignés, le Groupe des 77 ou l’Organisation de la coopération islamique.  Il a aussi demandé des « méthodes plus équitables » pour former le Secrétariat de l’ONU, affirmant que les critères en vigueur ne reflètent pas le poids réel des États dans les affaires mondiales et assurent artificiellement une « domination prohibitive » des citoyens des pays de l’OTAN et de l’UE.

Rappelant que « l’histoire ne dépend que de nous », M. Lavrov a conclu en citant le Secrétaire général sur la responsabilité particulière des dirigeants de parvenir à un compromis pour concevoir notre avenir commun pour le bien commun, estimant qu’il s’agissait d’une « bonne réponse à ceux qui divisent le monde en démocraties et autocraties et ne dictent à tout le monde que leurs règles néocoloniales ».

Mme RETNO LESTARI PRIANSARI MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a évoqué les principes de la Conférence de Bandung de 1955, fondés sur la solidarité mondiale et la responsabilité collective en tant que réponse au déficit de confiance et aux inégalités mondiales.  Comme en 1955, nous nous trouvons aujourd’hui à un carrefour stratégique qui entrave la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), en particulier dans les pays du Sud.  Si nous réalisons toutes les promesses prononcées cette semaine devant cette assemblée, la situation mondiale ne ressemblera plus à celle que nous voyons actuellement, a lancé la Ministre.  Le problème, a-t-elle ajouté, est que nous ne joignons pas le geste à la parole, d’où le déficit de confiance. 

Selon Mme Marsudi, un monde pacifique et prospère est un droit et une responsabilité collective de tous les pays, grands et petits, du Nord et du Sud, développés et en développement.  Le respect du droit international garantit que les différends seront réglés à la table des négociations plutôt que sur le champ de bataille.  La Ministre a évoqué « notre responsabilité collective » de sauver les peuples de Palestine et d’Afghanistan, en particulier les femmes et les filles.  Tandis que la chaîne d’approvisionnement mondiale demeure monopolisée par certains États, les pays en développement sont confrontés à des dettes et un manque de financement du développement. 

En tant que Présidente de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour cette année, la Ministre a prévenu qu’elle ne laissera pas la région devenir un « pion des rivalités ».  « L’Asie du Sud-Est doit plutôt être un épicentre de croissance dont tous les pays peuvent bénéficier de manière significative ».  Concernant le Myanmar, elle a exhorté la junte militaire à mettre en œuvre le consensus en cinq points. 

Mme ALICIA BÁRCENA IBARRA, Ministre des affaires étrangères du Mexique, s’est alarmée de la stagnation dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), appelant de ses vœux un changement de paradigme de développement, « qui redistribue le pouvoir et la richesse et comble les écarts inacceptables entre les riches et les pauvres et entre les pays ».  Selon elle, c’est précisément ce que s’efforce de faire le gouvernement du Président Andrés Manuel López Obrador en mettant en œuvre des politiques structurelles transformatrices.  « Nous sommes déterminés à éliminer la culture des privilèges », a clamé la Ministre, pour qui la durabilité environnementale est un élément fondamental des stratégies de développement.  Voyant dans les changements climatiques l’un des plus grands risques mondiaux, elle a averti que le coût de leurs effets affectera non seulement la croissance économique mais aussi les secteurs les plus vulnérables. Il importe donc de donner la priorité à l’adaptation, ce que fait valoir le Mexique en préconisant une réforme en profondeur de l’architecture financière internationale. 

Dénonçant à cet égard le manque de solidarité mondiale, la Ministre a estimé que l’époque actuelle nécessite « la somme de plus de volontés pour donner une voix à tous les peuples du Sud ».  C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, le Mexique envisage de participer aux efforts du Groupe des 77 et la Chine visant à renforcer la position de négociation des pays du Sud.  Au niveau régional, le Mexique agit comme garant de la paix, comme l’atteste sa participation au dialogue entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN) et à la recherche de solutions politiques au Venezuela. S’agissant du conflit entre l’Ukraine et la Russie, Mme Bárcena a condamné l’invasion russe et reconnu que tout État souverain a le droit de recouvrer son intégrité territoriale.  Cependant, a-t-elle nuancé, « il est également vrai que la course aux armements nous éloigne encore plus d’une solution pacifique ».  Il faut donc « cesser de parler de guerre et commencer à parler de paix », a-t-elle plaidé. 

La Ministre s’est ensuite inquiétée de l’augmentation du trafic illicite d’armes à feu, faisant observer que 200 000 armes à feu sont introduites chaque année dans son pays et tombent entre les mains de la criminalité organisée.  Elle a averti que les efforts déployés par le Mexique pour lutter contre le trafic de drogue resteront limités tant que les pays de fabrication et d’origine des armes trafiquées n’assumeront pas leur responsabilité face à ce fléau.  Notant à ce propos que la violence des gangs à laquelle fait face Haïti est due en grande partie au trafic illicite d’armes, elle a souhaité que la communauté internationale agisse de manière décisive pour aider ce pays à retrouver sa stabilité. De même, elle a appelé à la levée de l’embargo économique « injustifié » que subit Cuba. 

Mme Bárcena a d’autre part rappelé que son pays fait face au défi de la mobilité humaine, avant d’insister sur l’urgence de lutter contre les causes structurelles de la migration.  Il convient, a-t-elle dit, de renforcer le développement intégral des pays d’origine avec le soutien de tous les pays, en particulier de ceux qui bénéficient le plus du travail des migrants.  À ses yeux, il est également essentiel d’évoluer vers des modèles de gestion des migrations offrant des espaces d’insertion qui facilitent, dans le respect des droits humains, l’intégration dans les sociétés d’accueil et le retour volontaire dans le pays d’origine.  À l’approche de l’échéance de 2030, a conclu la Ministre, nous devons avoir le courage de créer un monde égalitaire et juste, « où les droits ne sont pas des marchandises et où la nature n’est pas la victime inévitable de nos modes de production et de consommation ».

M. ENRIQUE MANALO, Secrétaire aux affaires étrangères des Philippines, a plaidé pour adapter les efforts à la réalité, en plaçant les personnes et les communautés au cœur de l’action.  Guidées par une politique étrangère indépendante, les Philippines travaillent activement avec les nations pour promouvoir un ordre international fondé sur des règles et prônent le règlement pacifique des différends, conformément au droit international.  Telle a toujours été la position de son pays concernant les différends en mer des Philippines occidentales, a indiqué M. Manolo en réitérant sa détermination à défendre sa souveraineté, ses droits et son intégrité territoriale.

En tant qu’archipel dont le destin est étroitement lié à l’océan, les Philippines sont un champion de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a affirmé le Secrétaire aux affaires étrangères, se disant fier d’être parmi les premiers États à signer cette semaine l’accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine, qui ouvre de nouvelles possibilités de coopération pour assurer la gestion responsable de la haute mer. La primauté de la Convention sur le droit de la mer a été réaffirmée, à ses yeux, par la sentence arbitrale de 2016 sur la mer de Chine méridionale, qui a réglé de manière définitive le statut des droits historiques et maritimes dans cette zone.  Le respect du droit international permet, selon M. Manalo, de faire en sorte que la zone indopacifique reste stable, en paix et ouverte. « Nous sommes guidés par ces principes. »

Abordant ensuite les menaces liées aux armes de destruction massive, le Secrétaire aux affaires étrangères a déploré une situation marquée par la course aux armements et l’émergence de nouveaux outils de guerre, notamment dans le cyberespace, qui sont venus transformer le panorama stratégique du XXIsiècle, raison de plus pour respecter l’état de droit.  À cet égard, il a annoncé l’organisation par son pays d’une réunion des pays de la région indopacifique en décembre, visant à prôner l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique.  Il s’agit d’établir davantage de responsabilité pour réduire les menaces dans l’espace, a-t-il précisé.  Pour finir, il a abordé la question des changements climatiques, qui doit être traitée dans le cadre d’une coopération multilatérale, car « nous avons besoin de solutions décisives, justes et durables, tenant compte des populations et préservant les individus les plus vulnérables » du fait de leur situation géographique.

Mme NANAIA MAHUTA, Ministre des affaires étrangères et des gouvernements locaux de Nouvelle-Zélande, a rappelé que, pour la première fois depuis des générations, il existait une possibilité très réelle d’un conflit entre grandes puissances et que, dans notre monde interconnecté et interdépendant, les sociétés humaines « prospéreraient ou périraient ensemble ».  Elle s’est dite choquée de voir un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU lancer une attaque non provoquée contre un État souverain, l’Ukraine, tenter d’annexer son territoire et faire la guerre à sa population civile, affirmant que son pays soutenait fermement les efforts visant à demander des comptes à la Russie devant la Cour internationale de Justice et la Cour pénale internationale. 

La Ministre a ensuite dénoncé les dangers des armes nucléaires et de leur « héritage toxique », visibles aussi dans la région du Pacifique, mais aussi les risques liés aux systèmes d’armes autonomes, et appelé à établir des normes claires sur l’utilisation responsable d’autres technologies nouvelles et émergentes comme l’intelligence artificielle.  Elle a rappelé l’engagement de son gouvernement dans la lutte contre les cybermenaces et l’extrémisme en ligne, notamment dans le cadre de l’Appel à l’action de Christchurch, qui mobilise des gouvernements, la société civile et les industriels du secteur pour éliminer les contenus terroristes et extrémistes violents en ligne. 

S’agissant des crises humanitaires, la Ministre a rappelé que la nourriture ne devait pas être utilisée comme une arme et a regretté que l’instabilité et la violence dans de nombreuses régions ait placé des millions de personnes dans des situations humanitaires d’urgence cruelles et immorales.  Elle s’est aussi dite préoccupée par l’effritement de la prospérité et de la sécurité dans la région du Pacifique bleu et s’est félicitée, dans ce cadre, du rôle central du Forum des îles du Pacifique et de l’adoption d’une feuille de route pour ces pays, la Stratégie pour le continent du Pacifique bleu 2050.

Notant qu’aucun pays n’était à l’abri des impacts des changements climatiques, Mme Mahuta a souligné que les pays du Pacifique subissaient déjà des pertes et des dégâts irréversibles.  Elle a demandé aux grands émetteurs d’adapter leurs actions à l’objectif d’une limitation de l’augmentation des températures à 1,5 degré et d’éliminer progressivement l’utilisation des combustibles fossiles à l’échelle mondiale. 

La Ministre a présenté les mesures ambitieuses prises par son pays, qui s’est engagé à réduire ses émissions de 50% par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2030.  La Nouvelle-Zélande aidera ses partenaires du Pacifique à se préparer et à répondre aux événements liés au climat, notamment sur la question prioritaire des pertes et des dommages, a-t-elle assuré.  Elle a par ailleurs salué l’adoption du traité mondial sur la biodiversité des océans et le lancement des négociations sur un instrument international juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution plastique.

En conclusion, Mme Mahuta s’est dite favorable à une réforme de l’ONU et du système multilatéral dans son ensemble en se félicitant à cet égard de la tenue du Sommet de l’avenir de l’année prochaine.

M. NABIL AMMAR, Ministre des affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens à l’étranger de la Tunisie, a réitéré le soutien de son pays aux efforts du Secrétaire général pour promouvoir le multilatéralisme.  Le monde, a-t-il fait remarquer, traverse une phase délicate de multiplication des crises géopolitiques, d’augmentation de la pauvreté, de ralentissement dans la réalisation des objectifs de développement durable et d’élargissement du fossé entre le Nord et le Sud.  Ces éléments, a-t-il estimé, dessinent une image très éloignée des buts et des valeurs qu’incarnent les Nations Unies.  Il a donc appelé à renforcer la coopération et la solidarité internationale « sur la base de responsabilités communes mais différenciées ». 

Des centaines de millions de personnes avaient fondé de grands espoirs dans la réalisation du Programme 2030, a relevé le Ministre, qui a regretté que les résultats actuels ne soient pas à la hauteur.  À ce titre, il a réaffirmé le soutien de son pays au projet du Secrétaire général pour sauver les objectifs de développement durable et mis l’accent sur les mesures visant à pallier les problèmes de financement.  Il s’est félicité de la création par le Secrétaire général d’un groupe pour limiter les répercussions de la guerre en Ukraine sur les prix de l’alimentation et de l’énergie.  Dans le même élan, il a évoqué l’appel récent du Président de la Tunisie pour créer un stock stratégique mondial de céréales.

Pour M. Ammar, le système monétaire mondial a failli.  Censé fournir un soutien aux pays en développement, il a fini par élargir le fossé qui les sépare des pays développés, a-t-il estimé, relevant que les pays en développement doivent maintenant choisir entre le remboursement de leur dette et les besoins de leur population.  Il a lancé un appel à la réforme de la finance mondiale et préconisé des mesures pour faciliter le recouvrement des fonds pillés à l’étranger, afin qu’ils bénéficient aux populations des pays lésés. 

Nous devons faire tout notre possible pour relever le défi des changements climatiques, a affirmé le Ministre, soulignant que, pourtant, « nos pays ne sont pas responsables de l’état de la planète ».  Il a salué le lancement d’un Sommet sur l’ambition climatique par le Secrétaire général.  Dans ce cadre, il a plaidé en faveur de l’octroi de financements climatiques aux pays les plus touchés.

S’inquiétant de l’aggravation de la situation migratoire, le Ministre a insisté sur la nécessité d’une approche globale de l’immigration illégale qui repose sur ses causes profondes.  Cependant, a-t-il averti, il faut que toutes les parties assument leurs responsabilités: pays d’origine, de transit et de destination.  La Tunisie n’acceptera pas l’implantation voilée de migrants en situation irrégulière sur son territoire et condamne les exploitations politiques ou médiatiques de la situation.

Enfin, M. Ammar a rappelé que son pays s’est engagé dans le processus de Notre Programme commun du Secrétaire général, une vision qui implique un système mondial plus équilibré, « sans différence entre les États », a-t-il insisté.  Dans ce cadre, il a dénoncé « l’injustice historique infligée au peuple palestinien » et encouragé le Conseil de sécurité à fixer un cadre qui permette au peuple palestinien de construire un « État unique, contigu, sur la base des frontières de 1967 et avec Jérusalem comme capitale ».  Réclamant l’arrêt des actions militaires en Libye et de l’escalade de la violence au Soudan, il a estimé que nous nous trouvions maintenant à la croisée des chemins, préconisant le respect de l’humanité, de notre croyance en un destin commun et de la Charte des Nations Unies pour rendre sa crédibilité au système multilatéral.

Mme THÓRDÍS KOLBRÚN REYKFJÖRD GYLFADÓTTIR, Ministre des affaires étrangères de l’Islande, a souligné que l’humanité vivait désormais, plus que jamais dans l’histoire, dans un état d’interdépendance, pour le pire mais aussi pour le meilleur: les problèmes dans une région peuvent en affecter d’autres, mais les solutions trouvées quelque part peuvent aussi être appliquées partout, instantanément.  Hélas, c’est lorsqu’on en a le plus besoin que le multilatéralisme connaît sa crise la plus profonde, s’est-elle lamentée, estimant que nous étions tous « à la croisée des chemins ». 

Notant que seuls 15% des objectifs de développement durable sont en bonne voie pour 2030, la Ministre a insisté sur la nécessité d’actions concrètes et s’est engagée à maintenir le cap en Islande où, a-t-elle admis, le bilan est contrasté, comme dans la plupart des pays.  Elle a également mis en garde contre les risques climatiques accrus, rappelant que les plus vulnérables subissent le plus grand impact de ces crises.  Sur le plan de la coopération internationale, la Ministre a célébré l’accord BBNJ sur la biodiversité marine comme un triomphe du multilatéralisme, reconnaissant l’importance de ce type d’accords pour faire face aux défis environnementaux. 

Présentant la candidature de l’Islande au Conseil des droits de l’homme pour le mandat 2025-2027, Mme Gylfadóttir s’est inquiétée de la dégradation de ces droits à travers le monde —notamment en Afghanistan, en Iran, au Bélarus, au Soudan, au Myanmar ou en Israël et Palestine— et a salué les courageuses voix qui continuent de lutter pour les libertés.  Elle a critiqué les politiciens populistes qui sapent les valeurs démocratiques tout en se protégeant par les mêmes droits humains qu’ils attaquent.  Elle a également mis en garde contre les dangers de l’intelligence artificielle et a insisté sur la liberté d’expression comme un droit humain fondamental, non extensible aux « bots programmés pour propager la haine et les mensonges ». 

La Ministre a dénoncé l’agression russe en Ukraine et a rappelé que son pays présidait le Conseil de l’Europe quand il a décidé d’établir un Registre des dommages.  La Russie est l’agresseur et doit être arrêtée, a-t-elle tranché, appelant au soutien international en faveur de l’Ukraine qui défend, selon elle, notre système international.  L’ONU, « un miracle de l’esprit humain depuis sa création », reste l’institution la plus pertinente pour inventer des solutions aux problèmes internationaux, a-t-elle ajoutant, jugeant néanmoins nécessaire de la réformer, en particulier le Conseil de sécurité.  « Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter », a-t-elle jugé.

M. SAMEH HASSAN SHOUKRY SELIM, Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, a présenté le point de vue de son pays sur les priorités destinées à restaurer la confiance dans le multilatéralisme.  Rappelant que, dans un monde dont l’interdépendance et la mondialisation sont les principales caractéristiques, « personne n’est en sécurité si tout le monde ne l’est pas », il a estimé que le succès de la sécurité collective dans de telles conditions dépend de celui des efforts communs pour assurer l’application efficace et non sélective des principes de la Charte des Nations Unies. 

Les défis auxquels notre monde est confronté sont nombreux et interdépendants, a ajouté le Ministre, et la communauté internationale est loin d’avoir trouvé des solutions efficaces aux fléaux des conflits armés, de l’insécurité alimentaire et du terrorisme.  Pour lui, les graves implications du conflit en Ukraine ont clairement montré que la sécurité et la stabilité d’une partie au conflit ne peuvent être abordées à l’exclusion d’une autre et que la responsabilité de la résolution de la guerre incombe in fine « à nous tous, et pas seulement à ceux qui sont directement touchés ».  C’est dans cet esprit que l’Égypte a rapidement agi en créant un groupe de contact arabe et en participant à l’initiative des dirigeants africains pour mettre fin « à l’effusion de sang et rechercher un règlement pacifique de la crise russo-ukrainienne ». 

M. Selim a ensuite appelé à la réforme immédiate et radicale des mécanismes de gouvernance internationale, héritages inefficaces dans le monde actuel des systèmes de sécurité de l’après-guerre.  Ainsi a-t-il affirmé que seul l’octroi de deux sièges permanents du Conseil de sécurité à l’Afrique, avec pleins droits et privilèges, permettrait de corriger les injustices faites depuis des décennies « à notre continent ». L’Égypte aspire en outre à contribuer efficacement à la prospérité des BRICS, cela en défendant les intérêts et les ambitions du Sud, qui ne représente actuellement pas moins de 30% de l’économie mondiale, a-t-il dit. 

À propos des changements climatiques, le Ministre, qui a rappelé que son pays avait réussi à mobiliser un consensus international en faveur de la justice climatique lors de la COP27 tenue l’an passé à Charm el-Cheikh, a appelé à la concrétisation du fonds pour les pertes et les préjudices lors de la COP28,  qui aura lieu cet automne aux Émirats arabes unis.  Sur la question de l’eau, M. Selim, qui a rappelé que les 100 millions d’Égyptiens dépendent du Nil pour 98% de leurs besoins, a rejeté toute mesure unilatérale relative à la gestion des ressources en eau transfrontalières.  Il a cité comme mesure de cette nature le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne, affirmant que sa construction avait été lancée sans consultations préalables ni études suffisantes quant à ses effets sur les États riverains.  Il a reproché à l’Éthiopie de continuer d’exploiter ce barrage « en violation directe du droit international, de la Déclaration de principes de 2015 et de la Déclaration présidentielle de 2021 du Conseil de sécurité.  En dépit de ces agissements, il a assuré que l’Égypte demeure optimiste que l’Éthiopie saura contribuer à un accord sur le partage des eaux du Nil qui sauvegardera ses intérêts, ceux de son pays et ceux du Soudan.

M. FAISAL BIN FARHAN AL FURHAN AL-SAUD, Ministre des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, a souligné l’importance capitale de la Charte des Nations Unies et du droit international, avant de dire que son pays fait son possible pour, à l’horizon 2030, répondre aux aspirations des générations futures, notamment par l’autonomisation des femmes et des jeunes.  Les droits humains revêtent une importance capitale pour l’Arabie saoudite, a-t-il également assuré, ajoutant que la législation nationale comporte des textes clairs à ce propos. 

Le Ministre a poursuivi en plaidant pour un règlement de la situation palestinienne, fondé sur le droit international, en vue d’un État palestinien indépendant, dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.  Il a condamné les mesures unilatérales, arguant qu’elles violent le droit international et sapent les efforts vers une solution politique.  Sur la même lancée, il a fait part de son souci quant à l’instabilité en Syrie, en Iraq, au Yémen, en Libye, au Liban et au Soudan, qui fait planer des menaces sur la sécurité régionale et mondiale.  En outre, souhaitant que l’Afghanistan ne soit pas un refuge pour les terroristes, il a appelé au respect des droits du peuple dans le pays, y compris des droits de la femme.  Pour illustrer le rôle pacificateur de l’Arabie saoudite dans la région, il a mentionné la reprise des relations diplomatiques avec l’Iran.

Concernant la guerre en Ukraine, M. Al Furhan Al-Saud a appelé les belligérants à conclure un accord dans le respect du droit international.  Il a fait valoir que l’Arabie saoudite avait déployé des efforts soutenus en appui aux pays concernés, notamment pour obtenir la libération de prisonniers de nationalités diverses.  En outre, a-t-il mentionné, son pays a invité l’Ukraine à la trente-deuxième session des États arabes à Djedda.  Relevant par ailleurs l’importance des efforts visant à éliminer les armes nucléaires, il a exhorté la communauté internationale à honorer ses engagements. 

Se félicitant des succès de son pays contre le terrorisme, il a mis en garde contre toute forme d’atteinte aux « valeurs sacrées » et contre la propagation de la haine et de l’islamophobie, appelant à empêcher de brûler le saint Coran. Il s’est félicité à ce sujet de la récente adoption par le Conseil des droits de l’homme de la résolution portant sur la lutte contre la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence.  Enfin, le Ministre a assuré du rôle prépondérant que joue son pays en faveur de la stabilité des marchés mondiaux de l’énergie, assurant qu’il contribue à la fiabilité, la durabilité et la sécurité des marchés mondiaux du brut, pour garantir à l’échelle mondiale une économie saine tant pour les producteurs que pour les consommateurs, par exemple à travers la coopération avec l’OPEP+.

M. MAHAMOUD ALI YOUSSOUF, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de Djibouti, a jugé nécessaire de reconnaitre tacitement que la direction prise par le monde était opposée à l’accélération du Programme de développement durable à l’horizon 2030 dont la présente session de l’Assemblée générale a fait son objectif.  Il a déploré la suspicion mutuelle, qui freine la coopération internationale, et la « logique de club », qui s’oppose à un multilatéralisme intégré.  Il y a vu la conséquence d’une lente érosion de la confiance mutuelle, qu’il a attribuée à une « résistance implacable au changement » des institutions mondiales créées après 1945, à une inégalité « qui se creuse et se fossilise » et à une compétition géopolitique accrue.  Pour le Ministre, cette évolution n’est toutefois pas irréversible.  Il a appelé à un investissement massif dans les efforts multilatéraux, en particulier les Nations Unies, pour établir un système qui tienne compte des réalités géopolitiques du moment et dans lequel les groupes s’engageraient à renouer des liens de solidarité forts.

M. Youssouf a jugé accablant pour la crédibilité du système le retard pris dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD).  Malgré les engagements pris, des pays sont aujourd’hui davantage dans le besoin qu’il y a une décennie, le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé qu’un tiers de l’économie mondiale serait en récession en 2023 et le PNUD a constaté que l’indice de développement humain baissait dans 9 pays sur 10, a énuméré le Ministre, qui a demandé une réforme urgente de l’architecture financière internationale, notamment pour réformer le régime de la dette, qui empêche les pays en développement et les pays les moins avancés d’investir dans les ODD.  Les moyens d’y parvenir sont identifiés, a rappelé le Ministre, qui a demandé qu’on prenne mieux en compte le plan de sauvetage du Secrétaire général.

Le Ministre a ensuite présenté les mesures prises par son pays pour réaliser les ODD, citant en particulier l’action climatique, Djibouti étant situé trouvant dans une région particulièrement vulnérable aux changements climatiques.  À cet égard, il a jugé urgent d’honorer les engagements pris dans l’Accord de Paris et s’est dit profondément déçu que la promesse de mobilise chaque année 100 milliards de dollars n’ait jamais été tenue.  Il s’est en revanche réjoui de la création d’un fonds pour les pertes et les préjudices décidé lors de la COP27 et a souhaité que la COP28 adopte les mesures qui en permettront la mise en œuvre la mise en place concrète. 

Au plan régional, le Ministre a apporté son soutien au Gouvernement somalien mais s’est inquiété du calendrier actuel de réduction des effectifs de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS).  Djibouti est en outre très préoccupé par la crise au Soudan et souhaite une accélération de la mise en œuvre de l’Accord revitalisé au Soudan du Sud.  Rappelant la nécessité d’un accord de paix inclusif au Yémen, le Ministre s’est félicité du succès de transbordement de la cargaison du pétrolier Safer, rappelant le rôle de base arrière et de coordination que Djibouti avait joué à cette occasion et voyant dans toute l’opération un exemple modèle de coopération internationale.  Enfin, il a affirmé que son pays était disponible pour achever le processus de normalisation de ses relations avec l’Érythrée et trouver un règlement pacifique au différend frontalier qui oppose les deux pays. 

M. SERGEI ALEINIK, Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a souligné le fossé entre la discussion et l’action au sein des Nations Unies, dressant un parallèle inquiétant avec la Société des Nations, qui n’avait pas réussi à éviter la Seconde Guerre mondiale et a été oubliée.  Selon lui, l’ONU, si elle veut éviter un sort similaire, devait agir plutôt que d’être un « observateur passif ».  Citant le diplomate américain George Kennan, qui estimait qu’un « certain degré de conflit est présent dans toutes les relations internationales », le Ministre a appelé au compromis pour régler les antagonismes.

Pour parvenir à réformer l’institution et à débloquer la situation actuelle, M. Aleinik a offert trois pistes de réflexion.  D’abord, il a exigé la fin de l’ostracisme politique, arguant que chaque État Membre devait être traité avec égalité et respect.  Il a ainsi réprouvé l’utilisation du terme « régime » pour qualifier certains États, et a dénoncé les tentatives de limiter la participation d’États Membres aux activités de l’organisation.  « Traitons-nous les uns les autres avec respect et égalité », a-t-il insisté. 

En second lieu, le Ministre a critiqué la politisation de l’ONU, soutenant que l’organisation était de plus en plus perçue comme un instrument de la politique étrangère des États Membres plutôt que comme une plateforme de coopération mondiale.  Les problèmes bilatéraux ne doivent pas être portés devant les organisations internationales », a-t-il recommandé, plaidant pour un retour à la mission originelle de l’ONU, qui est de servir les intérêts des peuples du monde. 

M. Aleinik a également proposé une classification des problèmes mondiaux en deux catégories, selon leur complexité et leur degré de conflictualité.  La première catégorie, qui regroupe les questions sécuritaires, est la plus délicate.  La seconde, plus facile et consensuelle, comprend des sujets comme les changements climatiques, les pandémies et la criminalité transnationale. Pour le Ministre, il convient de régler d’abord ces derniers avant de s’attaquer à ceux, plus épineux, de la 0première catégorie.  Il a cité comme exemple le succès de la résolution sur la lutte contre la traite des êtres humains présentée par le Belarus lors d’une récente session de l’ONU à Vienne

Abordant la crise alimentaire mondiale, le Ministre a estimé qu’elle était d’origine humaine et non d’ordre systémique.  Les sanctions unilatérales en sont pour lui la cause principale, et il a donc appelé à leur suppression immédiate.  Persuadé que nous assistons à un « glissement de pouvoir » de l’Occident vers le reste du monde, il a par ailleurs exhorté à élargir le nombre de membres permanents au Conseil de sécurité des Nations Unies, et il a annoncé la tenue d’une conférence internationale sur La sécurité eurasienne, à Minsk, les 26 et 27 octobre prochains.  Enfin, il a mentionné la situation en Ukraine, regrettant que ce pays soit devenu « une monnaie d’échange dans le grand jeu de l’Occident pour préserver son hégémonie mondiale », et a critiqué les livraisons d’armes occidentales, qui ne font selon lui que « poursuivre la guerre jusqu’au dernier Ukrainien ».

M. SAYYID BADR BIN HAMAD BIN AMOOD ALBUSAIDI, Ministre des affaires étrangères d’Oman, a rappelé que le dialogue était non seulement le principe cardinal de la politique internationale de son pays mais aussi une pratique effective, la plus à même de résoudre les conflits à travers le monde.  Réaffirmant son attachement au multilatéralisme, il a appelé la communauté internationale à respecter la Charte des Nations Unies, pour qu’un monde de prospérité, de dignité et de sécurité puisse voir le jour. « Nous continuerons à appuyer les causes justes et équitables », a ensuite déclaré le Ministre.  La cause palestinienne en fait partie, a-t-il défendu, avant de la qualifier d’injustice durant depuis plus de 70 ans.  Il s’est toutefois félicité que le peuple palestinien reste ferme en dépit de l’occupation israélienne brutale, et a fait part de son appui à la solution des deux États.

Mentionnant le conflit ukrainien, le Ministre a estimé que celui-ci, outre ses retombées humanitaires, posait des défis importants pour la paix internationale et le bon fonctionnement des chaînes d’approvisionnement.  Il a invité les parties prenantes à entamer des négociations de paix.  Sur la question des changements climatiques, il a présenté le plan d’Oman pour encourager les investissements dans les projets d’énergie renouvelable, basé sur une stratégie de zéro émission de carbone d’ici à 2050, et a confirmé la participation de son pays à la prochaine COP28 en novembre à Doha.  Il a enfin défendu la « Vision 2024 » pour le développement durable d’Oman, qui inclut notamment un plan de modernisation du système éducatif, à tous les niveaux.  Une condition essentielle pour le développement. 

Concernant les droits humains, le Ministre a assuré que son pays visait à les renforcer, et à créer une communauté mondiale équitable, respectueuse des valeurs religieuses et culturelles.  Il a condamné les actes incitant à la violence, à la haine et à la discrimination basés sur la religion ou la race, exhortant la communauté internationale à les criminaliser.  Les défis mondiaux complexes d’aujourd’hui, notamment les changements climatiques, les épidémies mondiales, la traite des êtres humains et les conflits, nécessitent une coopération mondiale, a-t-il martelé.  Il a enfin appelé à la mise en œuvre des principes du droit international, en évitant le « deux poids, deux mesures ».  C’est seulement à cette condition que la confiance règnera entre les États et les peuples, a-t-il estimé. 

M. EAMON COURTENAY, Ministre des affaires étrangères de Belize, a relevé que le monde actuel est marqué par des promesses solennelles régulièrement non tenues et un nationalisme étroit.  Seuls 12% des ODD sont en bonne voie d’être atteints, et, pour la première fois, l’indice de développement humain a diminué à l’échelle mondiale pendant deux années consécutives, imposant un fardeau encore plus lourd aux plus vulnérables, s’est-il inquiété.  De même, il a déploré que les pays du G20, responsables de 80% des émissions de gaz à effet de serre, continuent de manquer à leur devoir de réduire drastiquement celles-ci, alors que les températures moyennes mondiales des trois derniers mois ont été les plus élevées jamais enregistrées. 

Le Ministre a ensuite plaidé pour une réforme urgente de l’architecture financière internationale, souhaitant que les politiques des institutions de celle-ci soient mieux alignées sur les objectifs en matière de climat et de développement. Il a aussi recommandé de réformer les critères d’éligibilité aux financements pour le développement, arguant que les critères actuels excluent certains pays vulnérables de l’accès à ces financements.  Il faut donc des critères qui tiennent compte de leurs besoins, a-t-il dit.  De plus, le Ministre a prôné un élargissement de la gouvernance des institutions financières internationales, afin d’y inclure la voix des pays en développement.  « Les décisions qui nous concernant ne peuvent plus être prises sans nous. »  De plus, pour donner un coup d’accélérateur à la réforme du Conseil de sécurité, M. Courtenay a appelé à la tenue de négociations fondées sur des textes. 

Par ailleurs, il a abordé la « terrible injustice et l’héritage empoisonné du génocide indigène, de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves », lesquels ne peuvent continuer à être ignorés sur le fond.  Les descendants d’esclaves continuent de lutter contre une discrimination raciale persistante et une marginalisation, a-t-il déploré en soulignant les effets dévastateurs d’un « traumatisme générationnel ».  Il a imputé notamment le sous-développement, la pauvreté et les inégalités structurelles qui minent des pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) aux conséquences de l’esclavage.  La CARICOM a présenté un plan en 10 points qui aborde « le cœur de la justice réparatrice telle que nous la concevons », a signalé le Ministre en expliquant la nécessité d’une telle justice pour pouvoir laver un tort historique aussi indélébile.  « Aux gouvernements des pays européens qui ont permis ce mal, nous disons que le temps de la rédemption, de la réparation et du respect est arrivé, et nous l’exigeons! » 

M. OSMAN SALEH MOHAMMED, Ministre des affaires étrangères de l’Érythrée, a dit craindre que les tentatives d’imposer un ordre mondial unipolaire au cours des 30 dernières années poussent de plus en plus la communauté mondiale vers le « précipice ».  Il a également regretté que, dans cette réalité mondiale calamiteuse, le continent africain reste marginalisé, contraint de supporter le poids de ces politiques destructrices.  Saluant les mouvements de résistance qui se développent en Afrique en réaction à l’esclavage moderne, au pillage incessant et à la domination d’anciennes puissances coloniales, il a dit voir dans les groupes terroristes Al-Qaida, Daech et autres Chabab des entreprises criminelles soutenues et financées par ces mêmes forces de domination à des fins politiques.  Rappelant à cet égard que son pays n’a pas été épargné par les actes de déstabilisation déclenchés par les « forces de l’hégémonie », il a estimé que les sanctions imposées à l’Érythrée de 2009 à 2018 constituent un autre acte récent de transgression nécessitant réparation et responsabilisation. 

Dans ce contexte, le Ministre s’est félicité de la « résistance vigoureuse et persistante » des peuples du monde.  Cette tendance montre selon lui que nous sommes à l’aube d’une nouvelle réalité, à un carrefour historique qui augure un nouvel ordre mondial.  Reconnaissant que ce changement ne sera « ni facile ni réalisable en peu de temps », il a souhaité qu’il s’appuie sur un bouleversement complet de l’architecture de gouvernance mondiale.  À ses yeux, toute mesure « cosmétique » ne ferait qu’engendrer de faux espoirs chez les peuples et les pays du monde qui aspirent à de véritables changements.  Dans ce cadre, l’ONU sera amenée à entreprendre de profondes réformes, a estimé l’orateur, pour qui les changements souhaités doivent être à la mesure des aspirations en matière de justice et d’état de droit, de respect de l’indépendance et de la souveraineté nationales, et d’avènement d’une nouvelle ère de partenariat. 

De l’avis de M. Mohammed, l’ONU doit être en mesure, en tant que principale plateforme internationale, de remplir son mandat avec « efficacité et puissance ». Pour ce faire, la réforme « tant attendue » du Conseil de sécurité ne peut selon lui se limiter à une augmentation du nombre et de la représentation géographique de ses membres. L’architecture du droit de veto et les autres « distorsions institutionnelles » qui empêchent le Conseil d’exercer ses responsabilités sur la base du droit international doivent être examinées en prenant pour modèle le bilan historique, a soutenu le Ministre, selon lequel les marchandages politiques et l’utilisation abusive de la qualité de membre pour promouvoir des intérêts nationaux étroits ne sont pas compatibles avec la responsabilité stipulée dans la Charte des Nations Unies.  Les membres de cet organe doivent refléter le large éventail des États Membres de l’ONU, a-t-il conclu, non sans inviter l’Assemblée générale à examiner ces « paramètres complexes » au cours de la présente session. 

M. ARARAT MIRZOYAN, Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a relevé que, s’il y a quelques années, « nous envisagions le déclin du multilatéralisme, aujourd’hui nous assistons à l’érosion de ce principe même et de ses fondements », ajoutant qu’il ne s’agissait pas « d’une inférence théorique mais d’une réalité avec laquelle le peuple arménien du Caucase du Sud fait face à la situation depuis trois ans ». 

Affirmant que le Gouvernement arménien avait déployé des efforts importants « et dûment constatés » pour résoudra la crise qui oppose son pays à l’Azerbaïdjan, il a déploré n’avoir pas de partenaire pour la paix mais un pays qui déclare ouvertement que « le plus fort a raison » et utilise constamment la force pour perturber le processus de paix.  Il a estimé que la récente « offensive à grande échelle » contre le peuple autochtone du Haut-Karabakh démontrait « un mépris ouvert et un défi de l’Azerbaïdjan contre la communauté internationale » réunie à New York.  Pour lui, le message de l’Azerbaïdjan est clair: « Vous pouvez parler de paix et nous pouvons faire la guerre et vous ne pourrez rien changer. »

M. Mirzoyan a accusé l’Azerbaïdjan d’avoir « cyniquement défini l’atroce offensive à grande échelle qui a coûté des centaines de vies, dont des femmes et des enfants » comme une opération antiterroriste locale, alors qu’il s’agit en fait d’une « atrocité de masse planifiée et bien orchestrée » qui a débuté par le blocage, le 12 décembre 2022, du corridor de Latchine, seule route reliant le Haut-Karabakh à l’Arménie et au monde extérieur.  Il a rappelé que, le 22 février dernier, la Cour internationale de Justice avait ordonné à titre provisoire à l’Azerbaïdjan d’assurer la libre circulation le long du corridor de Latchine, et que, lors d’une réunion, le 16 août dernier, du Conseil de sécurité, la majorité de ses membres avaient eux aussi insisté sur la nécessité de débloquer ce couloir.  Il a également rappelé la séance du Conseil tenue le 21 septembre 2023, après l’offensive de l’Azerbaïdjan au Haut-Karabakh.

Pour le Ministre toutefois, il est clair que les problèmes ne peuvent pas être résolus simplement par des déclarations et des appels génériques.  Dénonçant le recours à la famine comme méthode de guerre et faisant état des inquiétudes exprimées hier par la conseillère spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour la prévention du génocide, il a averti que les affirmations selon lesquelles les Nations Unies ne sont pas présentes sur le terrain et n’ont donc pas la capacité de vérifier la situation ne pouvaient être une excuse pour l’inaction.  Il a demandé à la communauté internationale de condamner la reprise des hostilités et le ciblage des colonies civiles et a réclamé, comme déjà dans le passé, l’envoi immédiat au Haut-Karabakh d’une mission interinstitutions d’évaluation des besoins et d’établissement des faits.  Il s’est dit convaincu que des mécanismes doivent être mis en place pour garantir le retour des personnes déplacées depuis la guerre de 2020.  Il a ensuite demandé que soit mis en place un mécanisme international durable et viable pour empêcher le nettoyage ethnique de la population autochtone du Haut-Karabakh.  Il a également demandé que la communauté internationale exige le retrait de toutes les unités azerbaïdjanaises de toutes les colonies civiles du Haut-Karabakh.

La politique de nettoyage ethnique contre le Haut-Karabakh n’est qu’une partie d’un tableau plus vaste, a ensuite affirmé M. Mirzoyan, qui a accusé l’Azerbaïdjan de vouloir impliquer la République d’Arménie elle-même dans des actions militaires et d’élargir ainsi les hostilités.  Il en a vu la preuve dans la réticence de l’Azerbaïdjan à s’engager de manière constructive dans un processus de paix avec son pays, notamment en reconnaissant son intégrité territoriale, en retirant ses forces armées des territoires arméniens occupés et en délimitant la frontière interétatique. 

Le peuple arménien « défendra fermement notre souveraineté, l’indépendance et la démocratie et surmontera la guerre hybride déclenchée contre nous », a conclu M. Mirzoyan, après avoir réitéré la volonté de son pays de s’engager en faveur de la normalisation des relations et de l’établissement d’une paix durable.

M. BASSOLMA BAZIE, Ministre d’État et Ministre du service civil du Burkina Faso, a mis en garde contre l’ivresse du pouvoir, « l’hypocrisie diplomatique et les mensonges d’État » faisant courir l’ONU à sa perte.  Dénonçant la paralysie du Conseil de sécurité, il a avancé que les preuves de la dissonance entre les discours s’agissant du respect des valeurs de la Charte –droit à l’autodétermination, souveraineté des États, inviolabilité du territoire et respect du droit international, entre autres– se trouvaient en Libye, au Sahel et dans « la crise entre la Russie et l’Ukraine ».  Au sujet de la Libye, il a exigé des excuses de la communauté internationale pour l’avoir « saccagée et mise à genoux », avant que les eaux du déluge n’endeuillent le pays davantage.  Il a désigné la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine (UA) et un ancien Président de la France, M. Nicolas Sarkozy, comme responsables de la chute du Colonel Kadhafi. 

Partant de ce constat, il a dressé un parallèle entre cette ingérence en Libye et la situation actuelle au Niger.  Du communiqué lu par les autorités du Niger, il en ressort que la France est, « de connivence avec le Secrétariat général de l’ONU », à la base de cette situation inqualifiable.  L’ONU ne doit en aucun cas être un instrument dans les mains d’un quelconque pays, fut-il la France.  Il a aussi mis en opposition les discours invitant au respect de la Charte et le fait que les dirigeants représentant le peuple frère du Niger aient été pratiquement interdits d’accès au Siège des Nations Unies.  Le Ministre burkinabé a solennellement appelé tous les peuples d’Afrique à se mobiliser davantage dans la fraternité « afin d’éviter que les impérialistes mettent le feu au Niger comme en Libye ».  La CEDEAO, l’UA et l’ONU, a-t-il insisté, doivent représenter les peuples, au lieu de servir une poignée de chefs d’État: « elles ne doivent pas être utilisées et instrumentalisées pour déstabiliser des pays frères en assassinant leurs leaders ».

Concernant l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Ministre a reproché à plusieurs pays occidentaux, notamment les États-Unis et l’Union européenne (UE), de « déverser toute sorte de soutiens, notamment militaires », à l’Ukraine.  Les populations civiles ukrainiennes engagées comme volontaires, dont certains pilotent même des chars, sont félicitées et traitées de patriotes, s’est-il étonné.

Vivement critique envers la France tout au long de son intervention, il l’a accusée d’être « venue de nulle part imposer son instrument qu’est le G5 Sahel », alors que le Mali, le Burkina Faso, le Niger et d’autres pays se sont organisés sur leurs frontières communes en mutualisant leurs forces pour faire face au terrorisme.  Il a aussi très sévèrement critiqué la communauté internationale pour avoir imposé des sanctions au Burkina Faso à la suite du coup d’État du 30 septembre 2022, communauté internationale qu’il a qualifiée de « nébuleuse » et caractérisée par sa « non-assistance à un État en proie au terrorisme » et sa « complicité au pillage de l’Afrique », entre autres.  De son point de vue, cette communauté internationale devrait être traduite devant la Cour pénale internationale (CPI). 

Le Ministre a évoqué deux groupes armés agissant au Burkina Faso -les « forces de défense et de sécurité » et les « volontaires pour la défense de la patrie »- en des termes positifs, les qualifiant de « patriotes ». Or certains chefs d’État de la CEDEAO et de l’UA, s’est-il alarmé, tentent de faire croire à la communauté internationale que ce sont des milices:  « C’est cela, le mensonge éhonté d’État! »  Enfin, sur la question de la présence du groupe Wagner au Burkina Faso « chantée par une certaine presse téléguidée depuis l’Élysée », il a déclaré que ces groupes armés susdits constituaient en fait le groupe Wagner.  « Oui, Monsieur le Président, c’est nous, les Wagner du Burkina Faso! », s’est exclamé le Ministre.

M. DATO SERI PADUKA AWANG HAJI ERYWAN BIN PEHIN DATU PEKERMA JAYA HAJI MOHD YUSOF, Ministre des affaires étrangères du Brunéi Darussalam, a rappelé qu’à mi-parcours du Programme 2030, il est opportun de réfléchir à une vision commune d’un monde durable afin d’effectuer des ajustements dans les domaines exigeant des efforts supplémentaires.  Il s’est réjoui des réalisations nationales entreprises conformément au plan Wawasan Brunei 2035 visant à créer une économie dynamique et durable.  Il a toutefois indiqué que des défis liés à la collecte des données fiables a entravé le suivi et l’évaluation précise des progrès accomplis pour réaliser les ODD.  Il a parlé du lancement, dans son pays, du centre de l’ASEAN pour les changements climatiques, précisant que celui-ci permettra de renforcer la collecte de données sur l’action climatique.

Revenant sur le thème de cette session, le Ministre a rappelé la nécessité d’associer tolérance et respect aux principes de confiance et de solidarité.  À ce titre, il a fustigé la multiplication d’actes d’intolérance, dénonçant notamment les actions haineuses dirigées contre la foi islamique.  Notant que de tels actes sapent les efforts en faveur d’une paix durable, il a appelé à une action accrue contre la haine religieuse.  Il est inacceptable de justifier la haine religieuse, même sous le prétexte de la liberté d’expression, a-t-il tranché.  Le Ministre a ensuite réaffirmé le droit du peuple palestinien à l’autonomie, l’autodétermination et la paix, et dénoncé les politiques et pratiques agressives de la « puissance occupante », condamnant avec la plus grande fermeté les actions qui violent de manière flagrante les droits et la dignité du peuple palestinien.  Il a également exhorté les Nations Unies à maintenir leur engagement en faveur de la solution des deux États. 

Évoquant les répercutions multiples causés par la COVID-19, le Ministre a estimé que le monde était à un carrefour déterminant pour son avenir.  Il a déploré le manque de détermination commune face à une situation caractérisée par des crises humanitaires et une méfiance globale, et appelé à ne pas céder aux divisions.  Nous ne devons pas laisser la méfiance prendre le pas sur l’unité, a-t-il lancé. 

M. YVAN GIL PINTO, Ministre du pouvoir du peuple et des affaires étrangères du Venezuela, a critiqué l’interventionnisme des États-Unis dans le différend territorial opposant son pays au Guyana, différend qu’il a décrit comme « un conflit territorial vieux de plus de 200 ans sur notre territoire de Guayana Esequiba ».  Le Gouvernement des États-Unis, a-t-il détaillé, veut s’approprier les ressources pétrolières vénézuéliennes en utilisant la société Exxon Mobil, qui a incorporé dans son personnel des membres du Gouvernement du Guyana et accorde des concessions pétrolières dans une mer territoriale non délimitée, en violation totale du droit international.  Il n’est pas possible de disposer unilatéralement d’un territoire contesté, mais le Gouvernement du Guyana persiste dans son comportement illégal, a fustigé le Ministre avant de dénoncer l’intention du Gouvernement des États-Unis de militariser la situation. 

Plus largement, il a brocardé les provocations irresponsables des États-Unis, qui, en divisant le monde en blocs de pouvoir, exacerbe les conflits et entraîne l’humanité dans une course aux armement inquiétante.  Il a aussi dénoncé la politique d’agression américaine se manifestant par l’application illégale de mesures coercitives unilatérales à l’encontre d’un tiers de l’humanité.  C’est une attaque délibérée contre le droit au développement des peuples qui entrave la réalisation du Programme 2030, a-t-il fustigé.  Le Ministre a précisé que plus de 930 mesures coercitives unilatérales ont été appliquées contre le Venezuela par le Gouvernement américain « et ses complices », pour des pertes estimées à plus de 232 milliards de dollars, sans compter la chute brutale du PIB vénézuélien.  Il a également déploré la confiscation de milliards de dollars de ressources souveraines séquestrées dans le système financier international, dont 31 tonnes d’or séquestrées par le Gouvernement britannique à la Banque d’Angleterre. 

Le Ministre a exigé la fin complète, immédiate et inconditionnelle de toutes les politiques illégales de sanctions et de blocus auxquelles sont soumis le Venezuela, Cuba, l’Érythrée, l’Iran, le Nicaragua, la Syrie, le Zimbabwe « et d’autres nations sœurs ».  Pour y faire face, il a proposé la création d’une « zone libérée des mesures coercitives unilatérales » dans laquelle ces pays pourront effectuer leurs transactions financières et leurs paiements interbancaires.  Cela leur permettrait, a-t-il expliqué, d’assurer des investissements directs et de faire commerce légalement entre nations, sans risques, ni obstacles arbitraires ou punitifs de la part des puissances occidentales. 

Mme ANNE BEATHE TVINNEREIM, Ministre du développement international en Norvège, rappelant le soutien indéfectible de son pays aux principes de la Charte, a exprimé son inquiétude face à l’agression de la Russie envers l’Ukraine, pays voisin du sien.  Elle a appuyé la formule de paix du Président de l’Ukraine et a indiqué que la Norvège continuera de fournir l’aide civile, militaire et humanitaire aux Ukrainiens aussi longtemps qu’il le faudra.  Elle a également déploré les répercussions mondiales de cette guerre sur l’énergie, l’alimentation et l’inflation qui mettent en péril le Programme 2030 et détournent l’attention d’autres problèmes urgents.  Pourtant, les ODD et les objectifs de l’Accord de Paris doivent être atteints, a-t-elle exhorté, soulignant les efforts environnementaux de son pays pour réduire les émissions, faciliter la création d’emploi et améliorer l’accès aux ressources énergétiques.  Elle a également précisé les efforts pour améliorer la sécurité alimentaire, notamment les investissements dans les petits producteurs et la lutte contre le gaspillage, ainsi que pour assurer une gestion durable et multilatérale des océans en dépit des tensions géopolitiques.  Elle a en outre appelé à investir dans la couverture sanitaire universelle pour mieux se préparer aux futures pandémies. 

Revenant sur les tensions géopolitiques, la Ministre a souligné que sans dialogue, il est plus difficile de se comprendre et de résoudre les problèmes, appelant à un renouveau du dialogue régional au Moyen-Orient, en Colombie, dans la Corne de l’Afrique et en Afghanistan.  En outre, elle a mentionné l’importance des droits humains, notant que les sociétés prospèrent lorsque les femmes et les filles peuvent y participer sur un pied d’égalité et jouir de leurs droits sexuels et reproductifs.  Or les normes sont en train de s’éroder dans de nombreux endroits, s’est-elle inquiétée, soulignant que le potentiel humain est notre ressource la plus précieuse.  Elle a ensuite exhorté les États Membres de se mettre au travail pour trouver des solutions communes, revitaliser le Programme 2030 et honorer les engagements internationaux. 

M. ABDOULAYE DIOP, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali, a dit s’exprimer au nom du Président de la transition, du peuple malien et du « Chef d’État du Niger », M. Abdourahmane Tiani, « empêché de s’exprimer » à la tribune.

M. Diop a rappelé qu’avant une décennie de violences aux conséquences dévastatrices, la région du Sahel était autrefois connue pour être un havre de paix, de cohésion sociale et de vivre ensemble.  Face aux menaces, le Mali a changé de paradigme et pris son destin en main, a-t-il affirmé, précisant que les forces de sécurité maliennes s’acquittent de leurs missions régaliennes.  Le peuple malien a confiance dans l’engagement du Gouvernement contre les groupes terroristes a -t-il assuré. 

Le Ministre a ensuite dénoncé les ingérences de puissances qui facilitent les activités de groupes armés terroristes au Mali et au Sahel.  Le 15 août 2022, le Mali a alerté le Conseil de sécurité sur les actes d’hostilité commis par la France, a-t-il expliqué.  Accusant la France d’avoir libéré des terroristes dans la zone frontalière du Burkina Faso, du Mali et du Niger, il a également dénoncé des manœuvres de déstabilisation visant à retarder ou empêcher des demandes de financements auprès des institutions internationales ou régionales. 

Rappelant qu’une action militaire ne suffit pas à enrayer de manière durable le terrorisme, M. Diop a plaidé en faveur d’une stratégie intégrée, tout en indiquant qu’après 10 ans de présence la réponse sécuritaire internationale n’est pas à la hauteur des menaces et ne tient pas compte des attentes des populations.  Alors qu’en 2013, l’insécurité ne concernait que les régions du nord, elle s’est, depuis, propagée au centre et au sud, a-t-il relevé.  Il a rappelé qu’en juin 2023 le Conseil de sécurité avait approuvé la demande de retrait sans délai de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), qui interviendra en décembre 2023, conformément à la résolution 2690 (2023) du Conseil de sécurité.

Réaffirmant l’attachement du Mali aux idéaux de la Charte de l’Organisation des Nations Unies, M. Diop a déploré l’incapacité du Conseil de sécurité à parvenir à un consensus pour dénoncer les actes barbares commis le 7 septembre à Gao, Bourem et Bamba.  De la part du Mali, la riposte aux terroristes sera immédiate, a-t-il averti. 

Le Ministre a réitéré sa solidarité et son soutien au Gouvernement et au peuple du Niger.  Il a dénoncé les actions et mesures coercitives prises par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union monétaire ouest-africaine contre ce pays.  Réaffirmant l’opposition du Mali à toute intervention militaire au Niger, il a ajouté que celle-ci constituerait une menace directe pour la région et a rappelé les conséquences désastreuses de l’intervention menée en Libye et autorisée par le Conseil de sécurité en dépit de l’avis des dirigeants africains.  Si une telle situation se reproduisait au Niger, le Mali ne resterait pas les bras croisés, a-t-il averti.

M. Diop a réitéré son soutien à une réforme du Conseil de sécurité afin de le rendre plus représentatif.  Il a également salué l’ouverture des BRICS à de nouveaux états africains ainsi que l’élargissement du G20 à l’Union africaine, qualifié d’encourageant mais insuffisant.  Enfin, réitérant son attachement à la coopération internationale, le Ministre a adressé une mention particulière à la Fédération de Russie et rappelé que l’alliance Mali-Burkina-Faso et Niger vise à renfoncer une intégration des peuples fondée sur la solidarité, le respect de la dignité, l’affirmation de la souveraineté et rejette toutes formes d’ingérence extérieure.

Mme REEM AL HASHIMY, Ministre d’État pour la coopération internationale des Émirats arabes unis, a relevé que la communauté internationale est capable de trouver des solutions innovantes aux problèmes grâce à ses institutions multilatérales fortes, ses cadres juridiques et la technologie.  C’est une volonté politique forte et une vision de l’avenir perspicace qui manquent, a-t-elle regretté, prônant une réforme du Conseil de sécurité en matière de droit de veto, de membres permanents et non permanents, et de méthodes de travail.  Elle a ensuite rappelé l’importance du respect du droit international, de l’intégrité territoriale, des solutions politiques, des valeurs communes, de la diversité politique et des disparités de développement, soulignant le rôle significatif des organisations internationales et régionales pour apaiser les tensions entre les puissances mondiales. 

Après avoir appelé l’Iran à mettre fin à son occupation de trois îles émiriennes et l’Iraq à se pencher sur les effets négatifs de sa loi sur la navigation maritime dans la région de Khor Abdullah, elle a précisé que les Émirats arabes unis œuvrent en faveur de l’intégration économique régionale et font leur possible pour empêcher les groupes armés de maintenir une présence dans la région.  Les conflits ne sont pas inévitables mais la sécurité et la prospérité ne peuvent être rétablies qu’avec une volonté politique, a-t-elle insisté, réitérant le soutien de son pays à l’établissement d’un État palestinien indépendant.  Condamnant les discours de haine et l’extrémisme, la Ministre a déploré qu’il y ait deux poids, deux mesures en matière de promotion de la tolérance.  Il est nécessaire de garantir les droits humains et de prohiber les pratiques racistes, a-t-elle exhorté, pointant également la discrimination envers les femmes en Afghanistan. 

Elle a ensuite appelé la communauté internationale à s’occuper des risques de prolifération nucléaire, tout comme de l’aide humanitaire aux peuples affectés par les conflits dans des pays où des sanctions sont appliquées, annonçant à cette occasion le lancement d’une plateforme numérique pour une meilleure gestion de l’aide internationale dans les pays concernés.  Par ailleurs, elle a appelé à des changements pour tenir les promesses de l’Accord de Paris.  Elle a donné les quatre axes sur lesquels la COP28, qui aura lieu dans son pays, se penchera pour accélérer la transition énergétique et renforcer la résilience des communautés.  La capacité de financement, l’amélioration de la structure financière internationale et la participation du secteur privé seront ici primordiaux, a-t-elle ajouté, appelant la communauté internationale à développer des solutions collectives.  L’action multilatérale pour le climat permettra aussi de minimiser la crise alimentaire, la pénurie d’eau et les répercussions des catastrophes naturelles, a-t-elle fait valoir.  L’action collective n’est plus une option mais un besoin urgent pour bâtir un avenir inclusif et durable, a-t-elle conclu.

Droits de réponse

La Chine a réagi à l’accusation des Philippines sur la prétendue violation du droit international en mer de Chine méridionale.  Mon gouvernement, a-t-elle dit, ne reconnaît pas la décision de la Cour d’arbitrage qui ne saurait compromettre notre souveraineté.  Nous sommes prêts à dialoguer avec les Philippines pour trouver des solutions communes à ce différend, a tout de même déclaré la Chine. À son tour, le Guatemala a répondu au Belize, en rappelant que plusieurs rapports publiés par les États d’Amérique du Sud ont reconnu sa culture de paix.  Nous avons également, a-t-il ajouté, une collaboration bilatérale, au niveau militaire.  Le Guatemala a insisté sur sa lutte contre le trafic de drogues et s’est présenté comme victime des attaques des groupes radicaux du Belize, au détriment de sa souveraineté.  Malgré ces provocations, les soldats guatémaltèques n’ont jamais riposté car leur pays honore ses engagements et s’en remet à la compétence de la Cour internationale de Justice (CIJ).  En attendant, a encore souligné le Guatemala, nous sommes l’un des principaux investisseurs au Belize.

L’Iran a réitéré sa souveraineté sur les îles d’Abou Moussa, de la Grande-Tounb et de la Petite-Tounb, qui feront toujours partie intégrante de son territoire. Il a tout de même exprimé sa volonté d’améliorer ses relations avec les Émirats arabes unis sans pour autant renoncer à sa souveraineté.  Répondant au Koweït, il a réaffirmé que sa politique étrangère est fondée sur le respect du droit international et les relations de bon voisinage.  Les différends sur l’exploitation d’hydrocarbures devraient être réglés dans le cadre de ces relations, a-t-il ajouté avant que les Émirats arabes unis ne soulignent que les trois îles font partie intégrante de son territoire.  Ils ont dénoncé leur occupation et accusé l’Iran de rester sourd aux appels à la médiation. Ils ont tenu à rappeler à l’Iran la nécessité de respecter la Charte des Nations Unies et le droit international, afin de parvenir à un règlement pacifique de ce contentieux, par le biais de négociations directes ou la saisine de la CIJ. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: malgré la multiplication des crises, les petits États insulaires demandent l’avènement d’un véritable multilatéralisme

Soixante-dix-huitième session,
10e et 11e séances – matin & après-midi
AG/12536

Assemblée générale: malgré la multiplication des crises, les petits États insulaires demandent l’avènement d’un véritable multilatéralisme

La menace que fait peser la crise climatique sur les petits États insulaires en développement (PEID) et les multiples facettes des points de tension mondiaux ont animé, aujourd’hui, les interventions des chefs d’État et de gouvernement réunis à l’occasion du débat général de l’Assemblée générale, lesquels ont préconisé un multilatéralisme raffermi et une coopération toujours plus étroite entre les États, notamment au niveau régional. 

« Bon nombre d’entre nous, dirigeants des petites îles marginalisées de notre planète, entourées par la montée des eaux et brûlées par la hausse des températures, commençons à remettre en question ces démonstrations de fraternité feinte qui ne tiennent pas leurs promesses », a lancé d’emblée le Premier Ministre de Sainte-Lucie.  Il a dénoncé « l’inanité » de la communauté internationale lorsqu’il s’agit de prendre des mesures collectives en faveur des plus vulnérables, la réalisation du Programme 2030 au premier chef. 

Son homologue de la Barbade a dit craindre qu’il ne soit trop tard pour sauver la population des effets de la crise climatique « qui nous étouffe », trop tard pour réaliser les objectifs de développement durable, cette « promesse de dignité », et trop tard encore pour les petits États insulaires « qui, peut-être, n’existeront plus à l’avenir ».  « Il est désormais probable que davantage de personnes mourront de la faim en 2030 qu’en 2015 », s’est indignée la Première Ministre. 

Malgré des progrès tels que la création, par le Fonds monétaire international (FMI), du Fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité, qui a permis de réduire l’instabilité macroéconomique des pays à revenu intermédiaire, elle a en outre constaté que quelque 60 pays demeurent confrontés à des défis énormes liés à la dette, au point de devoir choisir entre le développement et le renforcement de la résilience climatique. 

Face à cette situation, le Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda a prôné, pour sa part, l’adoption, par les institutions financières internationales, d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle afin de faciliter l’accès des petits États insulaires en développement (PEID) au financement concessionnel.  Les chefs de gouvernement des PEID ont également été nombreux à déplorer que les engagements financiers climatiques pris par les pays développés soient nettement inférieurs aux 100 milliards de dollars par an promis. 

Pour sa part, le Premier Ministre des Tuvalu a réclamé une « justice climatique » mettant l’accent sur les efforts d’atténuation, d’adaptation et de soutien aux nations les plus vulnérables, comme le prévoit la résolution proposée par Vanuatu concernant la demande d’un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ). 

Après avoir évoqué le conflit frontalier « dangereux et inutile » avec la République dominicaine, le Premier Ministre haïtien a reconnu que son pays se trouve plongé dans une profonde crise multidimensionnelle, l’insécurité engendrée par la violence des gangs ayant atteint un stade « critique ».  À ce titre, il a jugé urgent que le Conseil de sécurité autorise le déploiement d’une mission multinationale spécialisée, à composante policière et militaire, en appui à la Police nationale d’Haïti. 

Comme la faim et la paix, la lutte contre les changements climatiques relève de notre responsabilité collective, a martelé le Premier Ministre des Pays-Bas.  Or, les grandes menaces de notre temps, qu’il s’agisse des turbulences géopolitiques, des guerres, du terrorisme ou encore des vagues migratoires, surviennent à un moment où l’ensemble du système multilatéral traverse une « crise d’identité », selon les propos du Président de la Macédoine du Nord.  La seule véritable réponse à ces questions ne peut être qu’un multilatéralisme renouvelé, tenant compte des besoins spécifiques de chaque pays, tout en offrant une vision claire du bien commun, a-t-il argué. 

Le Premier Ministre de la Malaisie a toutefois constaté que l’aggravation des rivalités entre les puissances trahit un abandon graduel du multilatéralisme et des mécanismes de l’ONU au profit d’un « minilatéralisme » de façade, avec des effets délétères sur les petites nations situées dans des régions en proie à des conflits.  « Le monde ne peut pas se permettre une guerre froide 2.0 », a prévenu le Premier Ministre du Pakistan, en évoquant les conflits qui font rage en Ukraine et dans quelque 50 autres endroits dans le monde, sur fond de tensions accrues entre les puissances. 

Situé à un carrefour névralgique entre l’Asie et l’Europe, le Premier Ministre israélien a estimé pour sa part que son pays est appelé à devenir un « pont pour la prospérité entre les continents », dans la foulée des accords d’Abraham conclus en 2020. « La paix entre Israël et l’Arabie saoudite va véritablement façonner un nouveau Moyen-Orient », a-t-il prédit, en rejetant l’idée « erronée » voulant que les Palestiniens détiennent un « droit de veto » sur les relations entre l’État hébreux et ses voisins arabes. 

Après être revenu sur la récente « intervention militaire sans effusion de sang » menée afin de renverser Ali Bongo, le Premier Ministre du Gabon a jugé que le système de sécurité collective de l’ONU n’était qu’une « fiction » dans des régions comme le Sahel ou les Grands Lacs, devenus de véritables « épicentres de l’instabilité ».  À ses yeux, seule une transformation structurelle de l’architecture de paix et de sécurité de l’Organisation permettra de prévenir l’émergence de nouveaux conflits. 

On retiendra également l’intervention du Vice-Premier Ministre du Royaume-Uni qui a longuement parlé de la question de l’intelligence artificielle, saluant sa capacité à aider à inverser les changements climatiques, entres autres, tout en s’inquiétant de son utilisation à mauvais escient.  Selon lui, sa réglementation exigera une nouvelle forme de multilatéralisme impliquant gouvernements, entreprises technologiques et acteurs non étatiques d’influence.

L’Assemblée générale poursuivra son débat général demain, samedi 23 septembre, à compter de 9 heures. 

SUITE DU DÉBAT GÉNÉRAL

Déclarations

M. STEVO PENDAROVSKI, Président de la Macédoine du Nord, a estimé que l’attention portée au débat général sera plus grande que jamais cette année, l’état émotionnel de l’humanité étant aujourd’hui la peur: peur des guerres, de la famine, de la pauvreté et des catastrophes environnementales.  « Il est indéniable que l’ordre international a été profondément ébranlé en diverses parties du monde », a-t-il dit.  Il a condamné avec la plus grande fermeté l’agression perpétrée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, qui se poursuit avec « férocité ».  Pourtant, la Charte des Nations Unies est très claire: tous les différends doivent être réglés par des moyens pacifiques, par la négociation et le dialogue, en excluant l’usage de la force.  Lorsque qu’un membre permanent du Conseil de sécurité attaque illégalement un autre État Membre, c’est l’ensemble de l’architecture de sécurité planétaire qui est ébranlée, a-t-il noté. 

« La paix est le fondement de tout », a poursuivi le Président, qui s’est inquiété de la perte de confiance entre les États, essentielle à la coopération.  « Les alternatives au dialogue entre les nations sont effrayantes, et chaque report nous conduira à nouveau à la même menace, avec la différence que le prix à payer sera alors beaucoup plus élevé », a-t-il averti. 

Pour M. Pendarovski, la guerre en Ukraine crée un « état d’imprévisibilité générale et une boucle constante de crises », qui perturbent l’approvisionnement alimentaire et énergétique des plus vulnérables.  Le Président a exprimé son appui aux efforts du Secrétaire général visant à rétablir l’Initiative de la mer Noire, tout en condamnant le recours à la nourriture comme arme pour atteindre des objectifs militaires ou politiques.  Il a jugé incompréhensible que, dans la troisième décennie du XXIe siècle, des millions de personnes soient incapables de satisfaire leurs besoins humains élémentaires.  « Quelle sera notre autorité en tant que dirigeants politiques lorsque nous discuterons de démocratie, de droits de l’homme et de prospérité, alors que des millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable, à la nourriture ou à l’éducation? » s’est-il interrogé. 

Rappelant que les changements climatiques ne connaissent pas de frontières, M. Pendarovski a fait valoir qu’une réponse efficace nécessite une action commune.  Or, les grandes menaces de notre temps -turbulences géopolitiques, guerres, terrorisme et vagues migratoires massives- surviennent à un moment où l’ensemble du système multilatéral traverse une crise d’identité ou de fonctionnalité, voire les deux.  Pour le Président, la seule véritable réponse ne peut être qu’un multilatéralisme renouvelé et renforcé, valorisant les besoins spécifiques de chaque pays tout en offrant une vision claire du bien commun.  « Il n’y a pas de meilleur endroit pour cette entreprise commune que l’ONU », a-t-il noté, en soulignant le besoin urgent de rétablir la prévisibilité et la prévention dans les relations internationales. 

À cet égard, le Président a posé pour condition préalable la réforme du système des Nations Unies, sur la base d’une plus grande représentation géographique reflétant la réalité du monde d’aujourd’hui.  Depuis son indépendance en 1991, Skopje a mis en place une culture de dialogue dans la résolution de ses problèmes internes, au moyen notamment de l’affirmation des droits des communautés ethniques qui composent le pays, a-t-il fait valoir.  En cette année « remplie de défis sans précédent », la Macédoine du Nord assume la présidence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a en outre rappelé M. Pendarovski, qui a affirmé que son pays demeure l’un des plus grands promoteurs de la coopération régionale en Europe du Sud-Est, tout en respectant les critères d’adhésion à l’Union européenne, qu’il a souhaitée effective en 2030. 

M. BENJAMIN NETANYAHU, Premier Ministre d’Israël, a d’abord rappelé comment le prophète Moïse avait dit à son peuple que son avenir serait déterminé par le choix entre une bénédiction et une malédiction.  Ce choix est le même aujourd’hui, a-t-il constaté, entre la « bénédiction d’une paix historique » et la « malédiction de la guerre du terrorisme » menée par les « tyrans de Téhéran ». 

C’est pourtant cette menace qui a permis de rapprocher Israël « de nombreux États arabes », a estimé le Premier Ministre.  Si les précédents efforts de paix entre États arabes et Israël ont échoué, a-t-il expliqué, c’est parce qu’ils étaient « fondés sur une idée erronée », selon laquelle la paix avec les Palestiniens était un préalable aux autres accords de paix.  « Cela fait longtemps que je tente de faire la paix avec les Palestiniens », a insisté M. Netanyahu, qui a toutefois ajouté que les Palestiniens, qui « représentent 2% du monde arabe », ne devaient pas avoir « un droit de veto sur les traités de paix avec les autres États arabes ». 

Les Palestiniens abandonneront « le fantasme qui consiste à vouloir détruire Israël » quand les pays du monde arabe se réconcilieront avec Israël, a estimé M. Netanyahu, qui a détaillé le contenu des « accords d’Abraham », ces « quatre traités de paix conclus en l’espace de quatre mois en 2020 avec quatre pays arabes »: Émirats arabes unis, Bahreïn, Soudan et Maroc. Ces accords, avec leurs volets commercial et de coopération, sont un tournant de notre histoire et le signe d’une ère de paix, y compris avec les Palestiniens, a affirmé le Premier Ministre, qui s’est félicité de la « possibilité d’une réconciliation entre judaïsme et islam, entre Jérusalem et la Mecque, entre les descendants d’Isaac et les descendants d’Ishmael. 

M. Netanyahu a assuré qu’Israël, au carrefour de l’Asie et de l’Europe, pouvait devenir un pont pour la prospérité entre continents.  Il s’est réjoui de l’annonce, faite lors du récent Sommet du G20 par le Président Biden, le Premier Ministre indien Modi et des représentants arabes et européens, d’un plan pour un « corridor visionnaire » constitué d’oléoducs, de liens maritimes et ferroviaires et de câbles optiques, qui s’étendra de la péninsule arabique à Israël pour connecter l’Inde à l’Europe. « La paix entre Israël et l’Arabie saoudite va véritablement façonner un nouveau Moyen-Orient », a aussi anticipé M. Netanyahu, en montrant aux délégations une carte représentant Israël entouré de pays arabes hostiles en 1948, puis une autre représentant la situation d’aujourd’hui, avec une vaste zone de prospérité colorée en vert, allant du Soudan à l’Arabie saoudite. 

Revenant sur les relations de son pays avec les Palestiniens, M. Netanyahu a invité leur dirigeant Mahmoud Abbas à cesser de propager ses « théories du complot antisémites » contre le peuple juif et de « rémunérer des terroristes qui tuent des Juifs ».  L’antisémitisme doit être condamné, a insisté le Premier Ministre, et les Palestiniens doivent se réconcilier avec le droit des Juifs d’avoir un État. 

M. Netanyahu a ensuite accusé l’Iran de dépenser des milliards pour armer les terroristes et de continuer à s’adonner au « chantage nucléaire » tout en développant un programme de missiles et de « drones qui sèment la mort en Ukraine ».  Il a déploré l’indifférence des puissances occidentales vis-à-vis des violations par ce pays de l’accord sur le nucléaire et appelé au rétablissement des sanctions.

Enfin, le Premier Ministre a mis en garde contre les dangers de l’intelligence artificielle (IA).  « La promesse utopique de l’IA ne doit pas se transformer en dystopie », a-t-il déclaré, en appelant les nations qui, comme Israël, participent à la révolution de l’IA à se concerter pour « pleinement domestiquer » son potentiel. 

M. PRAVIND KUMAR JUGNAUTH, Premier Ministre de Maurice, a plaidé pour une intensification de la réduction des émissions de gaz à effet afin de s’aligner sur les objectifs de l’Accord de Paris.  Même si l’on parvient à limiter la hausse des températures à 1,5 degré Celsius, les petits États insulaires en développement (PIED) sont confrontés à une menace existentielle, a-t-il prévenu, ajoutant que « dépasser ce seuil serait catastrophique ».  Pour garantir un avenir durable, nous devons collectivement éliminer l’utilisation des combustibles fossiles et accélérer la transition juste vers des sources d’énergie durables, en visant zéro émission nette à l’échelle mondiale d’ici à 2050, a préconisé le dirigeant, non sans rappeler que son pays est aux prises avec le stress hydrique, l’érosion côtière, la pollution marine et, surtout, une élévation du niveau de la mer de 5,6 millimètres par an, contre une moyenne mondiale de 3,3 millimètres. Ces défis combinés accroissent nos vulnérabilités inhérentes et mettent en péril nos objectifs de développement durable, a-t-il constaté, avant de détailler les actions menées par son pays pour répondre à cette urgence.

Outre les 2% de son PIB consacrés aux politiques environnementales et climatiques et la promulgation d’une loi sur les changements climatiques, Maurice a mis en œuvre une série de mesures d’adaptation telles que des programmes de réhabilitation côtière, de propagation des mangroves et de gestion des inondations, a précisé le Premier Ministre.  Il a également fait état d’une stratégie nationale d’atténuation, l’objectif étant de réduire les émissions de carbone de 40% et d’atteindre 60% de production d’énergie verte d’ici à 2030.  M. Jugnauth a cependant indiqué que pour appliquer les contributions nationales déterminées de son pays, 6,5 milliards de dollars sont nécessaires.  Si 2,5 milliards de dollars ont pu être engagés malgré les contraintes économiques, il reste à trouver les 4 milliards restants.  À l’instar de Maurice, tous les PEID ont besoin d’un soutien adéquat et prévisible, a-t-il souligné, avant d’appeler les institutions financières internationales et les partenaires de développement à faciliter cet accès au financement climatique. 

Le Premier Ministre a dit attendre avec impatience la mise en œuvre rapide du mécanisme de pertes et de dommages convenu lors de la COP27.  Il a aussi souhaité que les pays développés tiennent la promesse faite il y a 14 ans, lors de la Conférence de Copenhague, de fournir un financement climatique de 100 milliards de dollars par an.  Reste que, dans l’état actuel des choses, ce montant n’est plus suffisant, a-t-il argué, appelant à établir un nouvel objectif quantifié collectif. Jugeant à ce propos que le PIB par habitant ne peut être la seule mesure du développement d’un pays, il a exhorté les institutions financières internationales et les partenaires de développement à utiliser l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle développé par l’ONU dans leur prise de décisions.  Il a également souhaité que le Sommet de l’avenir de l’année prochaine permette d’aborder les questions de stabilité financière, d’inclusion financière et de viabilité de la dette, essentielles pour les PEID. 

Pour finir, le Premier Ministre a annoncé que son pays avait signé l’accord conclu au titre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer relatif à la conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale, un instrument juridiquement contraignant qui, selon lui, constitue une victoire pour le multilatéralisme et le droit international.  Encourageant tous les pays à le signer et à le ratifier, il a également déclaré attendre avec impatience la finalisation de l’instrument international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, y compris dans le milieu marin.

M. ANWAR IBRAHIM, Premier Ministre de la Malaisie, a rappelé que les fondateurs de l’ONU l’avaient bâtie sur une vision reléguant au passé la loi du plus fort. Or, a-t-il estimé, cette vision est aujourd’hui fortement ébranlée par des puissances qui laissent de plus en plus de côté les Nations Unies et l’impératif du multilatéralisme, se satisfaisant d’un « minilatéralisme ».  Il a ajouté que ces rivalités entre puissances affectaient notamment les plus petites nations dans des régions en proie à des conflits. 

Rappelant que son pays condamnait sans équivoque l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le Premier Ministre a regretté que ce conflit se prolonge et appelé à des efforts multilatéraux renouvelés sous l’égide des Nations Unies pour le résoudre.  Il s’est par ailleurs inquiété de l’accélération du rythme de construction des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés, qui constituent un obstacle insurmontable à la solution des deux États, en appelant la communauté internationale à agir pour faire cesser ces violations des droits de ces populations. 

Rappelant que son pays contribue à l’aide humanitaire destinée à l’Afghanistan, qui connaît sa troisième année de sécheresse consécutive, le Premier Ministre a appelé les autorités afghanes à mettre fin aux politiques de discrimination à l’égard des femmes et des filles, qu’il a estimées « contraires aux enseignements de l’islam, sans parler de la Charte des Nations Unies et du cadre multilatéral des droits humains ».

M. Ibrahim s’est dit « absolument horrifié » par la violence et l’instabilité qui affectent le Myanmar depuis le coup d’État de 2021, y voyant le « principal défi » auquel l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) est confrontée.  Dénonçant une « barbarie injustifiable », il a appelé les États Membres à maintenir la pression sur les autorités militaires pour mettre un terme aux atrocités et demandé au Myanmar d’appliquer sans tarder le consensus en cinq points de l’ASEAN.  Constatant que l’organisation régionale était confrontée à la rivalité entre grandes puissances dans la région de l’Asie-Pacifique, il a expliqué que son pays cherche à éviter d’exacerber la « course à la domination » en cours. 

Rappelant que l’été écoulé a été le plus chaud jamais enregistré sur Terre, le Premier Ministre a énuméré les effets négatifs des changements climatiques ressentis en Malaisie.  Assurant que son pays jouait son rôle sur ce front, il a appelé les pays développés à honorer leurs engagements en fournissant 100 milliards de dollars par an pour soutenir l’ambition climatique dans les pays en développement.  Des sommes encore plus importantes seront nécessaires dans un avenir proche, a-t-il averti. 

M. Ibrahim s’est inquiété du « fort retard » sur un tiers des cibles des objectifs de développement durable, qui connaissent soit une inertie soit un recul. Il s’est aussi préoccupé d’une situation économique mondiale caractérisée par des « inégalités sidérantes » en matière d’alimentation, de logement, d’éducation et de santé, appelant des réformes systémiques drastiques et une remise à plat totale des institutions internationales.

Le Premier Ministre s’est également inquiété de l’avènement d’une « nouvelle forme de racisme », caractérisée par des discriminations à l’encontre des musulmans. Il s’est dit « absolument scandalisé » que le fait de brûler le Coran puisse être légitimé au nom des droits humains, parlant de son côté « d’acte islamophobe qui alimente la haine ».  Appelant à ne pas rester les bras croisés face à de telles provocations, il en a appelé à la tolérance et à la compréhension interculturelle. 

M. ROBERT ABELA, Premier Ministre de Malte, s’est dit fier de représenter son paysune nation insulaire mais loin d’être isolée, qui assume consciemment un rôle unique, celui de construire des ponts et renforcer la compréhension entre les différentes traditions.  Preuve en est, s’est-il enorgueilli, l’accueil en début de ce mois de pourparlers entre les deux plus grandes puissances mondiales, les États-Unis et la Chine.  Membre non permanent du Conseil de sécurité, Malte continuera de travailler sans relâche avec ses partenaires en Europe et au-delà pour défendre la paix et l’état de droit, a-t-il promis.

Malheureusement, a déploré M. Abela, la nécessité de défendre ces valeurs a rarement été aussi urgente qu’aujourd’hui, alors que « nous sommes témoins de la violation du droit international » par la Fédération de Russie avec son attaque continue contre l’Ukraine.  La réponse de Malte à cette situation, comme à d’autres crises à travers le monde, est guidée par les valeurs de neutralité, a déclaré le Premier Ministre.  Cependant, a-t-il nuancé, « nous ne serons jamais neutres face à la douleur et à la souffrance causées par une invasion illégale ».  C’est dans cet esprit de paix, qu’il a appelé la Russie à retirer ses forces du territoire souverain de l’Ukraine et exhorté toutes les nations rassemblées ici à s’unir pour mettre fin à la guerre, dont les conséquences se répercutent dans le monde entier.  Il en a voulu pour preuve les 122 millions de personnes supplémentaires qui ont sombré dans la faim depuis 2019, avant d’exhorter Moscou à revenir à l’Initiative de la mer Noire.

Tout en étant neutre, Malte n’omet pas pour autant les problèmes auxquels sont confrontés ses voisins méditerranéens, a assuré M. Abela, qui s’est dit fier d’accueillir dans quelques jours le prochain sommet de UE-Med, qui regroupe neuf États membres de l’Union européenne situés sur la rive méditerranéenne, pour examiner le problème le « plus urgent » dans la région, la Libye.  À cet égard, il a jugé vital le rétablissement d’une Libye pacifique, stable et prospère, à travers un processus politique dirigé par les Libyens.  Il a souligné l’aide apportée par Malte à ce pays après le passage de la tempête Daniel. De même, il a évoqué la participation de son pays dans le cadre de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), autre illustration de l’importance que Malte attache au maintien et à la consolidation de la paix en Méditerranée. 

Revenant à la situation « inquiétante » dans le monde, de l’Ukraine au Mali, de la Libye au Niger, le Premier Ministre a appelé à ne pas céder au découragement, et à agir pour « faire la différence ».  Se voulant réaliste, car conscient qu’il n’y a pas de baguette magique, il a dit sa confiance dans le fait qu’agir ensemble fera la différence, notamment s’agissant de la menace des changements climatiques, dont les conséquences se font sentir partout dans le monde.  Il a salué « de tout cœur » l’initiative du Secrétaire général de l’ONU, visant à aider les États à accélérer leurs efforts au niveau mondial en la matière.  Il s’est aussi inquiété de l’élévation du niveau de la mer, une grave menace pour la sécurité, les moyens de subsistance et même l’existence de pays insulaires comme le sien. 

C’est pourquoi, a-t-il conclu, « nous avons fait du climat et des océans la priorité numéro un » de Malte durant son mandat au Conseil de sécurité des Nations Unies. 

M. MARK RUTTE, Premier Ministre et Ministre des affaires générales des Pays-Bas, a insisté sur le concept de responsabilité collective, un mot clef, selon lui, pour combattre les changements climatiques, lutter contre la faim et protéger la paix.  Il a mis en garde contre la myopie des gouvernements tentés de faire cavalier seul face à ces défis alors que chacun d’entre eux doit être considéré à l’échelle mondiale. Depuis trop longtemps, à l’ONU, certains intérêts pèsent plus lourd que d’autres, mais le monde a changé depuis 1945. Aujourd’hui, a noté M. Rutte, les 193 États Membres ont tous besoin les uns des autres puisque tous sont confrontés à une tâche commune: combattre les changements climatiques.  En la matière, les Pays-Bas jouent leur part en visant à bâtir une économie circulaire d’ici à 2050, en rendant leur secteur financier plus durable, ainsi qu’en luttant contre la déforestation et la perte de biodiversité.  Dans chacun de ces domaines, les partenariats sont essentiels, surtout avec les pays les plus durement touchés, a ajouté le Premier Ministre qui a fait savoir qu’il dialoguera aujourd’hui avec plusieurs PEID au sujet de l’expertise néerlandaise et de solutions innovantes pour s’adapter à la nouvelle donne climatique.  En outre, les Pays-Bas ont porté à 1,8 milliard d’euros d’ici à 2025 leur contribution annuelle au financement international de la lutte contre les changements climatiques, plus de la moitié de cette somme étant consacrée à l’adaptation. 

Les valeurs cardinales de l’ONU ont été bafouées le 17 juillet 2014, le jour où le vol MH17 a été abattu par la Fédération de Russie, a poursuivi le dirigeant néerlandais, qui a lié cet acte à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.  Face à cette agression, « c’est à nous, pays européens, de réagir.  De décrocher le téléphone.  De répondre à celui qui frappe à la porte.  Nous ne pouvons pas laisser un pays se débrouiller seul », a-t-il prévenu. À ceux qui hésitent et se demandent pourquoi s’impliquer, M. Rutte a répondu que cette guerre concerne tout le monde, soulignant que le comportement de la Russie va à l’encontre de « tout ce que nous défendons au sein des Nations Unies ».  Il a rappelé que la Charte, très claire à ce sujet, a été conçue pour des moments comme celui-ci, tout comme l’Assemblée générale est le lieu idoine pour demander des comptes.  Il a appelé à dénoncer la violation de la Charte par M. Putin et à exiger que la Russie rende « les enfants volés à l’Ukraine ».  Il a affirmé que la Russie est seule responsable de la guerre: il ne peut donc y avoir de solution partagée, mi-chèvre mi-chou, à ce conflit.  Un cessez-le-feu immédiat signifierait la victoire de la Russie, a analysé M. Rutte, pour qui M. Putin compte capitaliser sur l’essoufflement du soutien à l’Ukraine et l’enlisement du conflit.  Face à ce danger, le Premier Ministre néerlandais a appelé ses homologues à tirer les leçons du passé, décrocher leur téléphone et assumer leurs responsabilités. 

M. ANWAAR-UL-HAQ KAKAR, Premier Ministre du Pakistan, a rappelé que les conflits font rage en Ukraine et dans 50 autres endroits dans le monde, tandis que les tensions entre les puissances globales ne font que s’accroître.  « Le monde ne peut pas se permettre une guerre froide 2.0 », a-t-il dit, notant qu’il existe des défis bien plus considérables que l’humanité doit relever et qui exigent une action collective.  Il a souligné la nécessité que les engagements pris envers les pays développés lors de la COP28 soient honorés, notamment la fourniture de 100 milliards de dollars annuels de financement climatique et l’accélération des mesures de limitation des émissions.  Il a précisé que son pays est l’un des plus touchés par les conséquences des changements climatiques, en rappelant les graves inondations qui ont submergé un tiers de son territoire l’été dernier.  Il a espéré que les partenaires de développement du Pakistan contribueront au financement de son plan de résilience estimé à 13 milliards de dollars. 

Le Pakistan souhaite des relations pacifiques avec tous ses voisins, y compris l’Inde, a poursuivi le Premier Ministre, en rappelant que la situation au Jammu-et-Cachemire est l’un des plus anciens points à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Il a accusé l’Inde de ne pas s’être conformée aux résolutions de cet organe.  Depuis août 2019, l’Inde a déployé 900 000 hommes dans le territoire illicitement occupé du Jammu-et-Cachemire afin d’y imposer « la solution finale », a-t-il affirmé.  À cette fin, l’Inde a imposé des couvre-feux, emprisonné tous les véritables leaders de la région, recouru à des exécutions extrajudiciaires de personnes innocentes et détruit des villages entiers.  « Les puissances globales devraient convaincre New Dehli d’accepter l’offre du Pakistan de retenue mutuelle s’agissant des armes stratégiques et conventionnelles. » 

Le Premier Ministre a ensuite dit partager la préoccupation de la communauté internationale s’agissant des droits des femmes et des filles en Afghanistan, avant de plaider en faveur d’une assistance humanitaire continue pour ce pays.  Il a condamné les attaques terroristes transfrontalières lancées depuis l’Afghanistan contre son pays, notamment de Tehrik-eTaliban Pakistan (TTP) et de Daech, et a fait savoir que le Pakistan est en train de prendre les mesures nécessaires pour éliminer ce terrorisme externe.

De même, M. Kakar a appelé à remédier à la menace posée par les groupes d’extrême droite et fascistes, tels que les extrémistes inspirés par l’hindutva qui menacent les musulmans et les chrétiens d’Inde de génocide.  Enfin, il a exhorté à lutter contre l’islamophobie qui a pris, depuis les attaques du 11 septembre, des « proportions épidémiques », comme l’attestent les récents autodafés du Coran.  Le Premier Ministre a salué les projets législatifs du Danemark et de la Suède visant à interdire de brûler le Coran et autres provocations, avant de proposer la création d’un poste d’envoyé spécial chargé de lutter contre l’islamophobie.

Mme MIA AMOR MOTTLEY, Première Ministre, Ministre de la sécurité nationale et de la fonction publique, et Ministre des finances, des affaires économiques et des investissements de la Barbade, s’est inquiétée que malgré tous les efforts déployés, il soit trop tard pour sauver la population des effets de la crise climatique, des conflits ou de la malnutrition.  Il est désormais probable que davantage de personnes mourront de la faim en 2030 qu’en 2015, s’est-elle alarmée, en se demandant encore s’il sera aussi trop tard pour réaliser les ODD, cette « promesse de dignité ». Aujourd’hui, la question est de savoir si nous saurons faire preuve de la détermination nécessaire pour changer les choses et sauver nos démocraties, a-t-elle dit.  Elle a également appelé à établir un cadre réglementaire pour faire face à la menace de la désinformation et de l’intelligence artificielle. 

Pendant ce temps, les changements climatiques « nous étouffent », parfois littéralement, a poursuivi la Première Ministre, évoquant les inondations récentes en Libye. Pour y faire face, elle a jugé crucial que les entreprises pétrolières et gazières s’impliquent de façon crédible, notant qu’il est impossible de préserver les biens publics mondiaux uniquement avec l’argent public tandis que les marchés capitalistes poursuivent leur domination et leur accumulation de la richesse.  « Ces entreprises doivent assumer leurs responsabilités, et il nous incombe d’y veiller », a martelé Mme Mottley.  Exhortant à cesser de donner la priorité aux intérêts d’une poignée de personnes au détriment de tant d’autres , elle a rappelé le sort des 735 millions de personnes qui ont souffert de la faim l’an dernier, de ceux qui ont perdu leur famille dans les nombreuses crises des dernières années, ou encore « des petits États qui, peut-être, n’existeront plus à l’avenir ». 

La Première Ministre s’est ensuite félicitée de la création, par le Fonds monétaire international (FMI), du Fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité qui a permis de réduire l’instabilité macroéconomique en allouant des fonds pour les pays à revenus intermédiaires et vulnérables.  De son côté, la Banque mondiale a reconnu la pertinence d’un moratoire sur les dettes.  Mais il reste beaucoup à faire, a-t-elle ajouté, quelque 60 pays demeurant confrontés à des défis énormes liés à la dette, au point de devoir choisir entre le développement et le renforcement de la résilience climatique.  Selon elle, ces problèmes sont exacerbés par l’échec du monde développé à accepter que la justice et la réparation sont des « obligations solennelles ».  De fait, Mme Mottley a indiqué qu’elle comptait aborder la question de la justice réparatrice avec l’Union européenne l’an dernier mais qu’elle n’avait pas pu le faire en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie.  « Il semblerait que certains ne soient pas prêts à faire la paix ailleurs », a-t-elle lancé. 

Appelant par ailleurs à trouver une solution pour Haïti, la Première Ministre a invité les acteurs politiques haïtiens à parvenir à un compromis afin de mettre sur pied un gouvernement d’unité nationale légitime, « pour que les viols et les meurtres cessent ».  En retour, la communauté internationale doit assurer le soutien institutionnel dont la population haïtienne a besoin.  Elle a ensuite dénoncé le fait que la population des pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) n’ait pas accès au pétrole vénézuélien à un prix favorable. 

M. SRETTHA THAVISIN, Premier Ministre de la Thaïlande, a expliqué que dans un contexte de paix fragile et de « déclin du développement humain », son pays était favorable au multilatéralisme et au renforcement du rôle de l’ONU.  Il a dit soutenir les efforts du Secrétaire général dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix et souligné que paix et développement durable sont liés au respect des droits humains, de la dignité humaine et des libertés.  C’est la raison pour laquelle le Gouvernement thaïlandais veut faire progresser l’égalité et la justice, a-t-il expliqué, notamment pour les plus vulnérables, un engagement reflété par la candidature de la Thaïlande pour l’ASEAN au Conseil de droits de l’homme pour le mandat 2025-2027. 

Le Chef du Gouvernement a annoncé que son pays allait investir davantage pour améliorer sa couverture maladie universelle créée en 2002 et garantir à tous les Thaïlandais le droit aux services de santé préventifs et curatifs.  Cet accès aux soins de santé garanti par le Gouvernement est l’une des leçons de la récente pandémie mondiale, a souligné M. Thavisin, en insistant sur le fait que la lutte contre les maladies contagieuses est une responsabilité partagée au niveau global qui exige une réforme et un renforcement de l’architecture de la santé mondiale.  Il a appelé de ses vœux un traité sur la pandémie qui permette de disposer d’infrastructures de santé publique mondiales « plus résilientes, réactives et prêtes pour l’avenir ». 

Appelant à l’accélération de la mise en œuvre du Programme 2030, il a rappelé que les gouvernements doivent « d’abord prendre soin de leurs populations » et lancé un appel en faveur d’une croissance plus équilibrée, humaine et durable, qui est au cœur de ce qu’il a appelé la « philosophie de l’économie de suffisance », une approche pilotée au niveau local que la Thaïlande pratique de longue date.  Il a aussi vanté le modèle thaïlandais d’agronomie durable, qui réinvente la manière dont les terres sont cultivées et dont l’approvisionnement en eau est géré.  Il a indiqué que son pays souhaitait former des partenariats régionaux et mondiaux pour le développement durable et la résilience par le biais de la coopération Sud-Sud, notamment entre pays de l’ASEAN. 

Le Premier Ministre a décrit la Thaïlande comme un grand exportateur de produits alimentaires et agricoles.  Le pays étant en première ligne des effets des changements climatiques, il a assuré qu’il fait le nécessaire pour garantir la sécurité alimentaire.  La Thaïlande, a-t-il indiqué, a mis en œuvre un mécanisme de finance verte, qui prévoit notamment l’émission d’obligations liées au développement durable pour stimuler la croissance et les investissements dans des projets environnementaux et sociaux.  Le pays ambitionne de réduire de 40% ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2040, et d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.  Il a conclu son intervention en disant son espoir que le Sommet de l’avenir démontre la validité de « l’esprit du multilatéralisme, avec l’ONU à la barre ».

M. XAVIER ESPOT ZAMORA, Chef du Gouvernement de l’Andorre, a commencé son discours en citant le Secrétaire général de l’ONU qui a récemment affirmé: « L’ère du réchauffement global est terminée, c’est le moment de l’ébullition globale.  Le changement climatique est là.  Il est accablant.  Et ce n’est qu’un début. »  Constatant que les températures extrêmes qui avaient provoqué plus de 61 000 morts en Europe en 2022, la vague d’incendies sur le continent nord-américain et la côte méditerranéenne ou le phénomène el Niño sont désormais habituels, il a fait remarquer qu’ils poussent des populations à fuir leur pays et à devenir des réfugiés climatiques.  Il a prôné, pour respecter l’Accord de Paris, de grandes transformations et des mutations sociales et économiques. 

Le Chef du Gouvernement a invité, plus que jamais, à se souvenir des valeurs originelles de l’ONU, qui est née sur les ruines de la guerre la plus dévastatrice de l’histoire. Regrettant qu’une guerre d’usure soit aujourd’hui en cours sur le sol européen, il a condamné énergiquement la violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine.  Il a rappelé que si le Yémen, le Pakistan, l’Éthiopie, le Sahel et d’autres territoires ne faisaient plus la une des médias, les populations de ces pays souffraient toujours de conflits plus ou moins actifs.  L’Andorre contribue au soutien des plus vulnérables, notamment des femmes et des enfants, à travers des programmes du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et du Comité internationale de la Croix-Rouge, a‑t‑il fait valoir. 

M. Zamora a rappelé que le 28 juillet dernier, l’Andorre avait fêté le trentième anniversaire de son adhésion en tant que cent quatre-vingt-quatrième État Membre de l’ONU et que son pays avait bénéficié de plus de 750 années de paix continue.  L’Andorre, a‑t‑il indiqué, a adopté un plan stratégique national pour la mise en œuvre du Programme 2030, en mettant l’accent sur l’ODD 4 pour garantir une éducation de qualité, inclusive, équitable et multilingue. 

Le Chef du Gouvernement a rappelé l’importance de la biodiversité et du cycle de l’eau pour son pays, plaidant pour que la vulnérabilité particulière des régions de haute montagne jouisse d’une attention spécifique dans les forums internationaux de lutte contre les changements climatiques.  Il a rappelé que l’Andorre était membre de la Coalition pour la neutralité carbone et avait été pionnière dans la mise en place d’une taxe verte moyennant l’établissement d’un prix du carbone à 30 euros la tonne, ce qui ne l’avait pas empêché de mettre en place la gratuité des transports publics.  Son pays, a‑t‑il ajouté, a adopté une loi sur l’économie circulaire qui fixe l’année 2035 comme horizon pour atteindre un modèle de production dans lequel la plupart des déchets seront réintroduits dans la chaîne de production. 

M. PHILIP JOSEPH PIERRE, Premier Ministre de Sainte-Lucie, a commencé par ironiser sur ce « défilé annuel de discours fleuris » et de démonstration publique de « fraternité feinte » qui ne tient pas ses promesses. 

« Bon nombre d’entre nous, dirigeants des petites îles marginalisées de notre planète, entourées par la montée des eaux et brûlées par la hausse des températures, commençons à remettre en question ces démonstrations de fraternité feinte qui ne tiennent pas leurs promesses », a-t-il confié, s’emportant contre l’inanité de la communauté internationale lorsqu’il s’agit de prendre des mesures collectives sur les questions critiques affectant les pauvres et les impuissants.  De fait, s’est-il demandé, comment rétablir la confiance et raviver la solidarité mondiale en faveur, notamment, du Programme 2030, objectif de cette session, lorsque « la confiance et l’espoir sont justement la monnaie dévaluée du dialogue mondial ». 

Le constat est sans appel pour M. Pierre, d’autant qu’il ne reste que sept ans avant l’année cible de 2030 et que les ODD sont en péril.  Pour lui, il est difficile de maintenir la foi et la croyance dans les principes de l’engagement mondial, quand toute son expérience postindépendance a été marquée par des attentes déçues et une « frustration institutionnelle ». 

D’autant plus que, dans les années 90, il a été le témoin impuissant de pays puissants utilisant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour démanteler les accords de commercialisation des bananes de Sainte-Lucie en Europe.  Des actions qui avaient plongé des centaines d’agriculteurs saint-luciens dans la pauvreté, tandis que ces pays déjà riches accordaient d’énormes subventions à leurs propres agriculteurs, a-t-il accusé.  Pire, s’est-il emporté, lorsque certains des pays des Caraïbes ont développé avec succès les industries de services financiers, ils ont été mis sur une liste noire et une liste grise, comme « des lépreux et des parias ». 

Cependant, la guerre Russie-Ukraine a selon lui permis de révéler de façon claire quelles capitales métropolitaines sont les véritables paradis fiscaux et lesquelles sont les véritables canalisateurs de l’argent illicite.  M. Pierre a également dénoncé les programmes dits de « passeport doré » (Golden Passport) émis par certains pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui restent incontestés et intacts, tandis que les programmes de citoyenneté par investissement, mis en œuvre dans sa région avec succès depuis des décennies, sont sapés. 

Sainte-Lucie est venue à cette soixante-dix-huitième session pour plaider en faveur de la justice dans les relations entre pays développés et pays en développement, a expliqué le Premier Ministre.  Il a mis en garde que son pays n’est plus disposé à venir à ce défilé annuel simplement pour « prêter notre voix en faveur de tel ou tel conflit mondial », ou condamner celui qui, d’année en année, est le « nouvel ennemi mondial ».  Il a aussi demandé justice pour les crimes contre l’humanité qui ont « arraché ses ancêtres » pour les réduire en esclavage sur les terres de l’hémisphère occidental, estimant urgent de proclamer une deuxième décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.  Le moment est venu pour que la question des réparations pour la traite transatlantique des esclaves devienne un élément central de l’agenda mondial et du travail de l’ONU, a-t-il lancé. 

M. SITIVENI LIGAMAMADA RABUKA, Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères, des changements climatiques, de l’environnement, du service public, de l’information et des entreprises publiques des Fidji, s’est inquiété des crises environnementales imprévisibles qui menacent l’humanité tout entière, de même que de la montée des tensions géopolitiques, y compris au cœur de la région des Fidji.  Il a appelé à partager la richesse commune pour qu’aucun État Membre ne soit laissé pour compte.  Or, l’élévation du niveau de la mer menace jusqu’à l’existence même des Fidji en tant qu’État, s’est-il alarmé.  Et pour ne rien arranger, les taux d’endettement des PEID s’envolent, avec des conséquencesdélétères sur la réalisation des ODD et des inégalités croissantes.  En outre, la pandémie a alourdi les charges pesant sur tous les secteurs de l’économie fidjienne - dont le tourisme, son épine dorsale.  M. Rabuka a appelé à une approche intégrée, un multilatéralisme efficace et à un engagement ciblé pour la paix et la sécurité.  Le Pacifique bleu, plus grand océan du monde et puits de carbone important, doit demeurer une zone de paix, a-t-il insisté. 

Le Premier Ministre a également appelé au respect des droits des peuples autochtones car selon lui, réduire les émissions ne suffit pas: il faut aussi venir en aide aux communautés vulnérables.  Il a dit attendre beaucoup de la prochaine COP28, et notamment de l’adoption définitive des modalités relevant des fonds pour les pertes et les préjudices.  Il a également appelé les pays développés à honorer leurs engagements en matière de financement climatique, à hauteur de 100 milliards de dollars par an.  De même, il a exhorté à faire de la réforme de l’architecture financière mondiale une réalité afin de financer la transition et l’adaptation climatique des nations les plus vulnérables. 

Les Fidji, pour leur part, développent une stratégie d’adaptation à la mobilité climatique, et ont déjà réinstallé six tribus côtières fidjiennes dont l’existence est menacée.  Les Fidji, a-t-il ajouté, sont aussi signataires de l’Accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine, et entendent le ratifier le plus tôt possible; tout comme l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) relatif aux subventions du secteur de la pêche, accord déjà entériné par le parlement fidjien la semaine dernière.  Enfin, M. Rabuka a fait savoir que les Fidji négocient pied à pied un nouveau traité pour combattre la pollution plastique et a exhorté les parties prenantes à travailler d’arrache-pied sur le texte « avant qu’il ne soit trop tard ». 

M. XAVIER BETTEL, Premier Ministre du Luxembourg, a invité les États Membres à faire montre d’unité pour répondre aux menaces globales, de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine au dérèglement climatique, de la pauvreté aux pandémies.  Être uni signifie pouvoir compter l’un sur l’autre, a-t-il expliqué, soulignant que son pays s’engage dans tous les domaines pour appuyer les buts et principes des Nations Unies.  Cet engagement prend la forme d’un appui aux objectifs de développement durable (ODD), a indiqué le dirigeant, pour qui, malgré les défis, « il ne saurait être question de baisser les bras ».  Le Luxembourg, a-t-il rappelé, consacre depuis plusieurs années 1% de son revenu national brut à l’aide publique au développement et concentre son appui sur les pays les moins avancés et les secteurs sociaux de base. 

Le Luxembourg contribue aussi aux efforts visant à mobiliser les ressources dont les pays en développement ont besoin pour sortir de l’endettement et assurer le financement des ODD, s’est enorgueilli le Premier Ministre, avant de plaider pour une action climatique à la hauteur des défis.  À cet égard, le Premier Ministre a appelé la communauté internationale à tenir l’objectif fixé par l’Accord de Paris de limitation du réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius par rapport aux niveaux préindustriels.  Il s’est engagé à soutenir, lors de la prochaine COP28, le nouveau fonds pour les pertes et les préjudices afin d’aider les pays en développement particulièrement vulnérables aux changements climatiques. M. Bettel a d’autre part annoncé que son gouvernement augmentera la contribution du Luxembourg au Fonds vert pour le climat de 25% pour la période 2024-2027. 

Les droits humains sont au cœur des politiques du Luxembourg, qu’il s’agisse de son appui au développement durable ou de son action climatique, a affirmé M. Bettel. En cette année marquant le soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, il a rappelé que son pays a porté une initiative humanitaire qui a abouti à la décision de l’Assemblée générale de créer, sous les auspices de l’ONU, une institution indépendante chargée de la question des personnes disparues en République arabe syrienne.  Cette institution, a-t-il détaillé, vise à garantir le droit des familles de connaître le sort de leurs proches disparus et le lieu où ils se trouvent, et de recevoir un soutien adéquat.  Il a également souligné l’engagement de son pays à lutter contre l’antisémitisme et d’autres formes d’intolérance ainsi que pour la protection et la protection des droits des personnes LGBTI. 

Le Premier Ministre a ensuite présenté la contribution de son pays au maintien de la paix et de sécurité internationales.  Il a rappelé que le Luxembourg a appuyé la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) en lui fournissant des capacités en matière de communication satellitaire et du personnel spécialisé. Après avoir regretté la décision des autorités maliennes de demander le retrait de cette mission, il a réitéré sa condamnation de la tentative de coup d’État au Niger, exigeant un retour à l’ordre constitutionnel et démocratique dans ce pays, qui était jusqu’alors l’un des pays partenaires de la coopération luxembourgeoise.  Enfin, après avoir à nouveau condamné la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, il a exprimé le soutien du Luxembourg au travail engagé par les autorités judiciaires ukrainiennes et la Cour pénale internationale pour que les auteurs de crimes de guerre répondent de leurs actes. 

Mme SHEIKH HASINA, Première Ministre du Bangladesh, a indiqué que, depuis sa prise de fonctions en 2009, le Bangladesh est devenu un pays à revenu intermédiaire grâce à des politiques publiques pragmatiques et des investissements d’avenir.  Le taux de pauvreté qui était de 41,5% en 2006 s’élevait à 18,7% en 2022, le taux d’extrême pauvreté passant, lui, de 25,1% à 5,6%.  Elle a souligné qu’un financement adéquat est capital pour la réalisation des ODD.  Malheureusement, l’architecture financière internationale n’est pas cohérente avec un tel objectif, a‑t‑elle noté, en ajoutant que les besoins en financement des pays en développement ne sont pas satisfaits, en particulier par temps de crise.  Elle a souligné la nécessité pour ces pays de disposer de financements concessionnels à taux d’intérêt peu élevé, assortis d’une conditionnalité minimale. 

La Première Ministre a indiqué que le filet de protection sociale dans son pays avait été élargi au bénéfice des femmes pauvres, des veuves, des personnes âgées et autres personnes marginalisées.  Cette année, 12 milliards de dollars ont été alloués à cette fin.  Elle a assuré que l’élimination des discriminations à l’encontre des femmes est de la plus haute importance pour son pays, et que près de 30% du budget est alloué à la promotion de l’autonomisation économique et sociale des femmes.  Nous souhaitons parvenir à une participation des femmes à hauteur de 50% dans tous les secteurs de la société d’ici à 2030, a‑t‑elle ajouté. 

Elle a ensuite rappelé la grande vulnérabilité du Bangladesh aux changements climatiques alors qu’il n’est responsable que de 0,47% des émissions globales.  Elle a demandé des actions audacieuses, urgentes et ambitieuses pour remédier au défi climatique, avant de passer en revue les efforts de son pays dans ce domaine.  Nous avons ainsi établi un fonds d’affectation pour financer les mesures d’adaptation et qui a été doté jusqu’à présent de 480 millions de dollars, a‑t‑elle fait savoir. 

Mme Hasina s’est par ailleurs dit vivement préoccupée par la fin de l’Initiative de la mer Noire et appeléà son rétablissement.  Pour des pays comme le mien, un accès continu à des engrais est capital, a‑t‑elle signalé. Elle a souhaité que le Bangladesh puisse quitter en 2026 la catégorie des pays les moins avancés.  Les crises mondiales actuelles ne devraient pas nous faire dérailler de notre trajectoire, a‑t‑elle dit, en demandant un soutien international lors de cette période de transition. 

Enfin, la Première Ministre a abordé la situation des réfugiés rohingya au Bangladesh, en indiquant que la situation est devenue insupportable.  Leur présence prolongée a de graves conséquences, et les frustrations découlant de l’incertitude entourant leur retour pourraient alimenter l’extrémisme, a‑t‑elle mis en garde.

M. MOHAMMED SHIA’ AL SUDANI, Premier Ministre de l’Iraq, a déclaré que le succès de l’ONU dépend avant tout de la solidarité et l’entraide entre les peuples.  Il a indiqué que le Gouvernement qu’il dirige a engagé des réformes politiques, économiques et juridiques destinées à restaurer la confiance envers la classe politique et construire un Iraq solide et uni, répondant aux besoins et aspirations du peuple iraquien.  Des avancées considérables ont été réalisées en un temps record, s’est-il félicité, le climat économique étant à présent favorable à la conclusion d’accords régionaux et internationaux pour attirer des investissements étrangers massifs.  Le Premier Ministre a notamment évoqué le projet de la « Route du développement », l’un des plus modernes du Proche-Orient, qui vise à relier les secteurs commerciaux et économiques les plus importants au niveau régional. 

Il a reconnu la nécessité de mettre un terme au fléau de la corruption dans son pays par le biais notamment de poursuites judiciaires.  Or, nos partenaires doivent nous aider à engager les poursuites visant les personnes corrompues, lesquelles sont souvent liées aux réseaux terroristes et doivent restituer aux Iraquiens ce qu’elles leur ont volé, a-t-il dit.  Pour lui, la stabilité de l’Iraq permettra au pays de faire pleinement partie du concert des nations et peser dans les processus de décisions qui engagent le devenir du monde.  Notre souhait premier est d’établir des relations de bon voisinage avec les pays de la région, tout en rejetant les ingérences dans les affaires intérieures de l’Iraq, et ce, quelles que soient les raisons invoquées, y compris sécuritaires, a également souligné le Chef du Gouvernement.  Il a en outre jugé essentiel que soient levés tous les obstacles qui, dans son pays, empêchent la libre circulation des personnes, des capitaux et des marchandises.  C’est en retrouvant cette liberté que nous pourrons, grâce à l’intégration économique et politique, endiguer les risques de conflit, a-t-il dit, avant d’annoncer la tenue, d’ici à la fin de l’année, d’une conférence à Bagdad sur la stabilité et l’intégration économique régionale. 

Le Premier Ministre a par ailleurs assuré que son gouvernement a fait du retour des réfugiés vers les zones libérées une priorité absolue.  C’est en ce sens que nous nous efforçons d’inscrire dans la loi les droits humains et que nous dotons nos forces de sécurité de moyens pour protéger les citoyens dans toutes les collectivités et provinces iraquiennes, a-t-il expliqué.  S’agissant des changements climatiques, il a indiqué que les autorités spécialisées du pays mènent une lutte acharnée contre les effets délétères de la sécheresse « pour que nous ne mourrions pas de soif » et afin de sauver les écosystèmes.  Il a également indiqué que l’Iraq organise la création d’un bloc de pays de la région pour assurer une gestion commune de l’utilisation des ressources en eaux transfrontalières et pour préserver l’environnement.  Il a cité la Stratégie nationale 2023-2030 pour combattre la pollution et l’accent mis par les autorités iraquiennes pour démanteler, à l’horizon 2025, les réseaux qui opèrent à la croisée du trafic de drogues et du terrorisme.  Investir dans la jeunesse est vital pour aider l’Iraq à s’épanouir dans des emplois verts et du secteur numérique mais aussi dans le domaine sportif, où nos athlètes femmes excellent déjà, a-t-il aussi souligné.  Il a conclu son intervention en appelant à lutter, par le dialogue et dans le cadre du droit, contre l’islamophobie et l’extrémisme, et souhaité le rétablissement de la souveraineté de la Syrie sur l’ensemble de son territoire, ainsi que la constitution d’un État de Palestine viable. 

M. GASTON ALPHONSO BROWNE, Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda, a exhorté les pays les moins fortunés, qui subissent de façon disproportionnée les conséquences des nombreuses crises internationales, à s’unir.  Il a mentionné à cet égard la création conjointe, par les Tuvalu et son propre pays, de la Commission des petits États insulaires sur les changements climatiques et le droit international, constituée après avoir requis, il y a deux ans en marge de la COP26 à Glasgow, l’avis du Tribunal international du droit de la mer (TIDM).  Il a souligné l’importance des océans pour les petits États insulaires en développement (PEID), non seulement pour leur subsistance et comme élément clef de leur patrimoine et de leur identité, mais aussi comme puits de carbone vital, dans un contexte de températures record.  Le Premier Ministre a également prôné l’adoption par les institutions financières internationales de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle concernant les PEID, un outil essentiel pour accéder aux financements. Il a annoncé que cet enjeu serait défendu lors de la prochaine réunion conjointe du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale. 

En vue de la conférence internationale sur les PEID de 2024, où seront évoqués les changements climatiques et les répercussions économiques d’événements mondiaux tels que l’incursion russe en Ukraine, M. Browne a appeléà une stratégie audacieuse pour faire face à ces défis interconnectés.  Abordant la question du climat, il a mis en lumière les liens entre la justice réparatrice et la justice climatique.  Les pays qui ont payé le plus lourd tribut humain supportent aujourd’hui le fardeau climatique le plus lourd, a-t-il observé.  Évoquant le prochain sommet de la COP28 à Dubaï, le Premier Ministre a averti que l’Accord de Paris était en train de s’effriter, et a exigé que le fonds pour les pertes et les préjudices, longtemps différé, soit rendu opérationnel et suffisamment financé.  Si la COP28 échoue dans cette mission cruciale, elle risque de saper la confiance mondiale, a-t-il prévenu. 

Le Premier Ministre a ensuite mentionné plusieurs problématiques liées au voisinage d’Antigua-et-Barbuda.  Il a d’abord exhorté les États-Unis à réviser leurs embargos sur Cuba et le Venezuela, soulignant que les sanctions actuelles sont « cruelles » et ne font qu’exacerber les crises humanitaires.  Il a ensuite mentionné les difficultés auxquelles Haïti est confronté, ajoutant que les erreurs historiques de la France avaient laissé des séquelles sur le développement du pays.  Il a insisté sur la nécessité d’une intervention urgente et coordonnée pour rétablir la gouvernance et l’état de droit en Haïti. S’agissant de la sécurité dans les Caraïbes, M. Browne a pointé du doigt l’impact dévastateur des armes à feu illégales, qui posent des défis considérables aux forces de l’ordre et dont la majorité, a-t-il noté, proviennent des États-Unis.  Plus alarmant encore, il a évoqué les risques liés aux « armes autonomes », couplées à des intelligences artificielles, et a appeléà l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant pour les interdire.  Pour finir, le Ministre a regretté le « manque d’action transformative » malgré des discours abondants sur la justice financière et climatique, exhortant les nations puissantes à jouer leur rôle pour façonner un monde plus juste et inclusif. 

M. RAYMOND NDONG SIMA, Premier Ministre du Gabon, est longuement revenu sur les événements récents survenus dans son pays, ajoutant que tout observateur attentif, honnête et de bonne foi de la vie politique gabonaise de ces dernières années avait pleinement conscience de la dégradation de la situation.  Il a assuré que, pour éviter « une nouvelle forfaiture électorale », les forces de défense et de sécurité gabonaises avaient décidé d’interrompre un processus frauduleux et dangereux pour la cohésion nationale. 

Le Premier Ministre a ajouté que les forces armées avaient opté pour cette voie afin de conjurer le risque d’un incendie dont l’embrasement aurait ébranlé les fondements même de la société gabonaise et n’aurait pas épargné les nombreuses populations étrangères vivant au Gabon.  En conséquence, a‑t‑il encore dit, cette intervention militaire « sans effusion de sang et sans aucun dégât matériel constaté, a été un moindre mal », la population l’ayant approuvée dans sa très large majorité.  « Condamner un tel processus c’est soutenir qu’il aurait mieux valu laisser les affrontements se faire et venir constater ultérieurement le nombre de victimes », a‑t‑il plaidé. 

Le Premier Ministre a déclaré que son gouvernement de transition s’était engagé sans délai dans une démarche inclusive pour préparer les réformes et revenir à un jeu institutionnel ordinaire qui permette la dévolution du pouvoir par les élections. Il a annoncé la tenue, la semaine prochaine, d’une conférence de presse au cours de laquelle il indiquera le calendrier des consultations de l’ensemble de la classe politique ainsi que de la société civile, précisant qu’il mettrait à profit cette occasion pour « décliner le chronogramme des différentes étapes qui nous conduiront à de nouvelles élections ».  Il en a profité pour lancer un appel solennel à l’ensemble des partenaires bilatéraux, régionaux et multilatéraux du Gabon pour accompagner et soutenir l’élan populaire de salut national en vue de renforcer les fondements de l’état de droit et de la démocratie pour une prospérité partagée. 

Le Premier Ministre a ensuite estimé que le système de sécurité collective et indivisible prôné par la Charte des Nations Unies apparaît comme une fiction dans de nombreuses régions du monde en proie aux soubresauts de la guerre, notamment en Afrique, où la région du Sahel, la Corne de l’Afrique, la région des Grands Lacs sont devenues de véritables épicentres de l’instabilité.  Dans la plupart de ces régions, la prédation des ressources naturelles constitue une source importante de conflictualité au point qu’elles deviennent une véritable malédiction pour les pays qui les possèdent. La situation exige donc, de chacun des membres de la communauté, une réappropriation des objectifs de la Charte « et une réconciliation avec les aspirations des peuples du monde ». Il a plaidé pour une véritable transformation structurelle de l’architecture de paix et de sécurité de l’Organisation, ainsi que pour l’adaptation des mécanismes de promotion de la paix et de la sécurité dans un contexte global de crises et de conflits en constante mutation. Il a notamment préconisé le renforcement de la prévention et de la consolidation de la paix pour empêcher la résurgence de crises en période de transition ou que naissent de nouveaux conflits. 

En matière d’environnement, le Premier Ministre a fait savoir que son pays vient de bénéficier d’une restructuration de 3% de sa dette en échange d’un engagement à investir 163 millions de dollars dans la préservation de ses écosystèmes marins.  Il a invité les partenaires financiers internationaux à multiplier les initiatives de conversion de dette pour faire face aux défis du réchauffement climatique, de la perte de la biodiversité et du développement durable.  C’est par une approche multilatérale et la réinvention de nos réponses que nous pouvons efficacement relever les défis multiformes qui se posent à l’humanité, a‑t‑il ajouté. 

M. MANASSEH DAMUKANA SOGAVARE, Premier Ministre des Îles Salomon, s’est inquiété des difficultés mondiales à mettre en œuvre les ODD.  Pour tenter de sauver le Programme 2030, le pays a révisé sa Stratégie nationale de développement pour 2016-2035.  Les Îles Salomon ont ainsi priorisé la résilience de l’infrastructure, la connectivité numérique, le transfert de technologie, l’investissement, le commerce et la réforme du secteur énergétique, a-t-il expliqué.  Appelant à la mise en œuvre immédiate des six priorités du Programme d’action de Doha 2022-2031, il a également salué l’inclusion de son pays dans la phase pilote des systèmes d’alerte précoce, en vue de renforcer la résilience aux chocs. 

Le Premier Ministre a demandé davantage de volonté politique des pays riches pour soutenir les pays les moins avancés (PMA), tout en valorisant la coopération Sud-Sud.  Il a également salué les initiatives chinoises, telles que Une Ceinture et une Route, pour accélérer la mise en œuvre des ODD.  Il a par ailleurs prôné une réforme de l’architecture financière internationale, plaidant pour que les PEID occupent une place permanente dans les institutions financières internationales, et pour qu’y soit adopté l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle.  M. Sogavare a réitéré son appel à l’arrêt de tous les conflits, y compris la guerre en Ukraine.  « Les épées doivent maintenant être converties en charrues », a-t-il exhorté. Il a également appelé à un Conseil de sécurité plus démocratique et transparent.  Évoquant la menace des changements climatiques, il a souligné l’importance du fonds pour les pertes et dommages et a salué les délibérations de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur l’initiative de Vanuatu pour la justice climatique.  En matière de droits humains, il a annoncé la ratification par son pays de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. 

M. Sogavare a également appelé au respect du droit à l’autodétermination, en évoquant les cas de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française, et s’est opposé à l’embargo imposé par les États-Unis à Cuba, qu’il a par ailleurs remerciée de son soutien médical.  Concernant les océans, le Premier Ministre s’est félicité de l’adhésion des Îles Salomon à l’Accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine et a annoncé qu’un sommet sur la mise en œuvre de l’ODD nº14.4 se tiendrait l’année prochaine à Honiara, avec notamment l’ambition de renforcer le leadership du Pacifique dans la gestion des pêcheries de thon.  Passant aux enjeux nucléaires, M. Sogavare a condamné l’historique des essais nucléaires dans le Pacifique, et a souligné que la région n’a jamais eu son mot à dire, exigeant une indemnisation.  Il a mis en avant l’engagement ferme des Îles Salomon envers un Pacifique sans armes nucléaires et a critiqué la décision du Japon de déverser des eaux usées de Fukushima dans l’océan. 

M. PHAM MINH CHINH, Premier Ministre du Viet Nam, a déclaré que la confiance, la sincérité et la solidarité sont les trois conditions pour que l’ONU et ses États Membres parviennent à surmonter les défis mondiaux, et à promouvoir la paix et la coopération aux niveaux national, régional et mondial.  Il a identifié plusieurs crises complexes nécessitant un tel effort collectif par lequel les pays doivent placer les intérêts communs au-dessus des intérêts particuliers.  Les tensions géopolitiques accrues, la fragmentation inquiétante du multilatéralisme et la crise des ressources sont autant de problèmes appelant des réponses de la part des dirigeants du monde entier, a‑t‑il dit.  Selon lui, les populations doivent être le moteur de la croissance économique comme de la mise en œuvre des solutions climatiques qu’ils auront contribué à définir.  Il a en outre plaidé pour le renforcement du rôle centrale de l’ONU par le biais d’un soutien concret et volontaire au plan de relance des ODD du Secrétaire général. 

Par ailleurs, il a exhorté les États-Unis, dans un souci d’unité, à lever l’embargo contre Cuba. Le développement durable devient réel quand il permet des retombées positives pour chaque individu en matière d’emploi, de sécurité sociale et de prévention des catastrophes et des épidémies, a‑t‑il souligné.  À cet égard, il a indiqué que son gouvernement investit de longue date dans une économie plus intelligente, circulaire, verte et numérique, ajoutant qu’il est nécessaire de réformer les institutions financières et monétaires internationales pour libérer les PMA du piège de la dette.  Ces pays, les plus vulnérables aux changements climatiques, doivent bénéficier d’une assistance financière, technologique et en matière de gouvernance digne de ce nom, a‑t‑il souligné.  Le Viet Nam, où le taux de pauvreté a été réduit à 2%, est désormais un partenaire fiable et un membre actif et responsable de la communauté internationale, a‑t‑il dit, notant que la sécurité alimentaire des 100 millions de personnes qui forment sa population est garantie depuis deux décennies.  Enfin, il a demandé que les différends en mer de Chine soient réglés par les seules voies légales du droit international et du droit international maritime.

M. NTSOKOANE SAMUEL MATEKANE, Premier Ministre du Lesotho, a estimé que les avancées obtenues par l’ONU en 78 ans d’existence sont trop flagrantes pour être niées.  Qu’il s’agisse de prévenir la troisième guerre mondiale, de renforcer les fondements de la sécurité mondiale ou de faire progresser le développement économique, l’Organisation a laissé une marque indélébile dans l’histoire, a-t-il observé, estimant toutefois que, face aux défis actuels, le système multilatéral n’est plus adapté à ses objectifs.  « Il nous appartient de faire de cette décennie un tournant », a déclaré le dirigeant, avant de saluer le thème retenu pour le débat: « reconstruire la confiance et raviver la solidarité mondiale ».  Selon lui, le défi que représentent des perspectives économiques inégales et incertaines est au cœur des problèmes mondiaux, alors que les progrès vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) se sont inversés en termes de pauvreté, d’emploi, de santé et d’éducation.  Dans ce contexte, a relevé M. Matekane, les petites économies en développement sans littoral, comme le Lesotho, sont les plus durement touchées, car elles ne sont pas encore pleinement intégrées aux marchés mondiaux.  Il a donc appelé à uniformiser les règles du jeu en ce qui concerne l’architecture financière mondiale et à parler d’une seule voix pour exiger la démocratisation et la réforme des institutions de Bretton Woods. 

Le Premier Ministre a ensuite joint sa voix à l’appel lancé aux pays du G20 pour qu’ils fournissent des mesures de relance des ODD à hauteur d’au moins 500 milliards de dollars par an.  Les engagements internationaux pris doivent être respectés, a-t-il souligné, applaudissant en outre la récente décision du G20 d’accréditer l’Union africaine en tant que membre officiel.  En dépit des défis auxquels il fait face en tant que PMA, le Lesotho n’entend pas rester les bras croisés dans le processus de réalisation des ODD.  M. Matekane a ainsi fait état de l’organisation en mars dernier d’un événement de haut niveau sur la nutrition et la sécurité alimentaire, dont l’objectif était de mobiliser des engagements et des investissements dans la lutte contre la faim et la malnutrition sur le continent. Il a aussi rappelé qu’il y a deux mois, il a lancé le Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable, qui vise à encadrer la mise en œuvre du Programme 2030. 

Évoquant les effets dévastateurs des changements climatiques, « l’un des formidables défis de notre époque », le Premier Ministre s’est réjoui qu’il existe une « lueur d’espoir » pour son pays.  En effet, a-t-il expliqué, le Lesotho dispose d’eau, de soleil et de vent en abondance, ce qui offre des opportunités d’innovation et de partenariats dans la production d’énergies renouvelables et la création d’emplois.  Il a d’autre part annoncé que son pays accueillera en octobre une conférence internationale sur l’eau et l’hydrogène.  Notre objectif est de produire de l’énergie propre pour un usage domestique et pour l’exportation vers les pays voisins, a expliqué le Chef du Gouvernement, non sans exhorter les pays développés à respecter leur engagement de verser 100 milliards de dollars par an aux pays en développement pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris.  Enfin, après avoir décrit la consolidation de la paix comme une condition préalable au développement, il a appelé à la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et à l’élimination totale des armes nucléaires et autres armes de destruction massive.

M. SAMDECH MOHA BORVOR THIPADEI HUN MANET, Premier Ministre du Cambodge, a estimé qu’il est temps de restaurer une sécurité stratégique entre les nations et de rétablir la confiance dans un ordre international régi par des règles.  Nous devons avant toute chose donner la priorité aux besoins de développement et faire en sorte que les conflits actuels ne s’aggravent pas, a-t-il dit.  Il a ensuite détaillé les progrès notables accomplis en vue du développement du Cambodge. Le taux de pauvreté a ainsi diminué ces deux dernières décennies pour atteindre un taux annuel de 1,6%.  Il a précisé que le taux de croissance de l’économie devrait être de 5,6% cette année.  Le Cambodge devrait sortir d’ici à 2027 de la catégorie des pays les moins avancés, grâce à des politiques publiques saines, à sa stabilité politique et à une distribution équitable des fruits de la croissance, a-t-il dit. 

Le Premier Ministre a ensuite indiqué que son pays continuera de mener une politique étrangère neutre et indépendante.  Le Cambodge n’autorisera aucune base militaire étrangère sur son territoire, comme l’énonce clairement sa constitution, et ne permettra à aucun pays ou groupe d’user de son territoire contre un autre pays, a-t-il souligné.  Il a ensuite demandé la fourniture d’un appui financier et technique pour déminer entièrement le Cambodge d’ici à 2025, en insistant sur la dangerosité de ces « assassins cachés ».  En tant que pays contributeur de troupes, le Cambodge a par ailleurs décidé de postuler pour devenir membre du Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix pour les années 2025-2026.  Enfin, le Premier Ministre a pleinement appuyé la Déclaration politique adoptée lors du Sommet sur les ODD en vue de leur réalisation d’ici à 2030.

M. IRAKLI GARIBASHVILI, Premier Ministre de la Géorgie, a rappelé que son pays avait connu une agression militaire à grande échelle en 2008 et qu’il continue à en subir les conséquences, puisque 20% du territoire géorgien est encore occupé par la Fédération de Russie et que des centaines de milliers de personnes ont été déplacées de leurs foyers suite à ce conflit.  Il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle persuade la Fédération de Russie de participer aux discussions internationales de Genève et de mettre en œuvre l’accord de cessez-le-feu de 2008 négocié par l’Union européenne (UE). 

Malgré cette situation, le Premier Ministre s’est félicité du rythme positif de la croissance dans son pays, de l’augmentation de son PIB et de taux de chômage et de pauvreté à des niveaux historiquement bas.  Il a expliqué que son pays avait élaboré et approuvé l’an dernier un programme de réformes intitulé « Vision 2030 – Stratégie de développement de la Géorgie » qui couvre des domaines aussi variés que l’économie, le social, la bonne gouvernance, la justice et la protection des droits humains.  Il a par ailleurs insisté sur les investissements importants consentis par son pays dans le système éducatif, les soins de santé et la protection sociale. 

Pour M. Garibashvili, tous ces efforts démontrent la volonté de la Géorgie de rejoindre la famille européenne à laquelle elle appartient.  Cette priorité géopolitique du pays lui fait, selon lui, mériter son statut de candidat à l’UE, comme le démontrent la signature de l’Accord d’association, mais aussi l’Accord de libre-échange complet et approfondi et le régime d’exemption de visa conclus avec cette dernière. 

Rappelant la contribution de la Géorgie aux missions de l’OTAN et notamment le sacrifice de ses soldats en Afghanistan, le Premier Ministre a évoqué la solidarité de son pays avec le peuple ukrainien, l’aide humanitaire accordée à l’Ukraine ou encore l’accueil de 2º200 étudiants ukrainiens, et a assuré que son pays respectait toutes les sanctions adoptées en réponse à la guerre.  Il a également rappelé la philosophie fondamentale de son gouvernement qui, du fait de la situation géographique du pays, est d’éviter la guerre à tout prix pour garantir la sécurité de sa population.  De la même manière, il a déclaré que la Géorgie était prête à discuter avec ses voisins de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan pour contribuer à une paix durable dans le Caucase du Sud. 

M. Garibashvili s’est félicité que la Géorgie soit devenue un pôle régional qui attire les investisseurs internationaux, développe des corridors de transport stratégiques et participe à plusieurs initiatives internationales et projets d’infrastructure qui visent à améliorer la connectivité Est-Ouest.  Il a aussi évoqué plusieurs grands projets de modernisation de son pays, comme celui des chemins de fer géorgiens, la construction du port en eau profonde d’Anaklia sur la côte orientale de la mer Noire, ou encore le projet phare de l’UE sur le câble sous-marin de la mer Noire, qui vise à renforcer la sécurité énergétique en Europe et dans la région du Caucase du Sud. Tous ces projets de transformation apporteront des emplois, de la croissance économique et de la prospérité à la population géorgienne et à toute la région, a-t-il affirmé, avant d’appeler, dans cette perspective, au renforcement des partenariats internationaux avec son pays pour bâtir un avenir durable, marqué par la paix. 

M. LEO VARADKAR, Taoiseach d’Irlande, s’est félicité que son pays ait atteint 80% de ses objectifs de développement durable (ODD), tout en regrettant leur stagnation, voire régression, au niveau mondial.  Concernant le financement climatique, il a confirmé l’engagement de l’Irlande à fournir au moins 225ºmillions d’euros par an d’ici à 2025 pour les pays en développement.  Évoquant le triste souvenir de la Grande Famine irlandaise au milieu du XIXe siècle, il a mis en lumière les efforts de son pays dans les domaines de l’alimentation, de l’agriculture et de la nutrition -300 millions d’euros dépensés dans ces domaines en 2023- et a par ailleurs rappelé l’augmentation des dépenses en matière de santé, de 15% en trois ans) et la position de l’Irlande parmi les trois principaux donateurs pour ce qui est de l’égalité des sexes.  Il a enfin jugé essentiel que les discussions sur le fonds pour les pertes et les dommages aboutissent à de véritables progrès. 

Le Chef du Gouvernement a fermement condamné l’invasion russe de l’Ukraine, qualifiée « d’acte d’agression impérialiste et brutal » qui a non seulement causé d’immenses souffrances en Ukraine, mais a également accru l’insécurité alimentaire, énergétique et économique à l’échelle mondiale.  Disant comprendre les « critiques légitimes » sur l’incapacité du monde développé à réagir avec la même intensité de sentiment et d’action aux conflits et aux souffrances qui se déroulent ailleurs, il a estimé que ce n’était pas au peuple ukrainien d’en payer le prix.  Celui-ci mérite un soutien inconditionnel de chaque État Membre de ces Nations Unies, a-t-il insisté.  M. Varadkar a en outre blâmé la Russie pour ses menaces nucléaires et a plaidé pour un monde sans armes nucléaires, encourageant les États à rejoindre la Déclaration politique sur l’usage des armes explosives dans les zones peuplées, initiée par l’Irlande et adoptée en novembre dernier à Dublin. 

Concernant le conflit israélo-palestinien, M. Varadkar a souligné l’impasse récurrente dans laquelle est plongée la communauté internationale, et a insisté sur l’importance de la loi internationale et des droits de l’homme comme fondements d’une paix juste et durable.  L’Irlande détient le plus long record ininterrompu de service dans les missions de maintien de la paix des Nations Unies, s’est enorgueilli le Taoiseach.  Pour finir, il a appelé à une réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, y compris à l’abolition du droit de veto, jugé anachronique.  Il a conclu en célébrant les valeurs de paix, de compromis et de dévouement, faisant référence au vingt-cinquième anniversaire de l’Accord du vendredi saint, qui a permis d’instaurer la paix en Irlande du Nord. 

M. DICKON MITCHELL, Premier Ministre de la Grenade, a indiqué que son pays célébrera, en février prochain, le cinquantième anniversaire de son indépendance, un moment approprié pour son gouvernement et ses citoyens de réfléchir à son rôle dans le concert des nations.  Il a salué la résilience de son peuple qui, malgré des pertes tragiques, a fait face à la pandémie de COVID-19.  Alors que le monde poursuit son chemin vers le redressement et la reconstruction, cette expérience a mis en avant l’importance de la coopération internationale, a-t-il relevé, invitant à tirer les leçons de ces trois dernières années de tragédie et d’adversité. 

Abordant, par ailleurs, les objectifs de développement durable (ODD), le Premier Ministre s’est enorgueilli des progrès significatifs de son pays en matière d’éducation de qualité pour tous les citoyens.  Il a partagé l’expérience du lancement pilote d’un collège communautaire axé sur l’économie verte, pour encadrer les jeunes en décrochage scolaire et les préparer au marché de l’emploi.  De même, il s’est félicité des nombreux progrès vers la réalisation de l’égalité des sexes, citant l’initiative « Spotlight », dans le cadre d’un partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) qui vise à mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles. 

Il a également informé que son pays s’est lancé dans la transition vers une économie bleue, rappelant que la majorité des Grenadiens, en particulier la communauté des pêcheurs, dépendent fortement de l’océan pour leur subsistance.  Il a ensuite énuméré les diverses actions visant cet objectif, notamment la création de zones marines protégées supplémentaires, ainsi que des cadres législatifs et politiques, tous destinés à protéger l’intégrité et à soutenir la gestion des zones marines de l’île.  De plus, la politique forestière du pays fournit un cadre global pour assurer la résilience et la durabilité de cette ressource verte limitée à travers un certain nombre d’orientations stratégiques.  Enfin, le Premier Ministre s’est longuement attardé sur les mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions, insistant sur l’importance de résoudre le problème du financement nécessaire pour faire face à leur impact. 

M. KAUSEA NATANO, Premier Ministre des Tuvalu, a assuré que l’ONU est source d’espoir pour son pays.  Car elle donne la confiance et la capacité de naviguer en ces temps incertains.  Pour réaliser le thème de cette soixante-dix-huitième session, il faut rétablir la confiance entre les nations et dans les organisations internationales, a déclaré le Chef du Gouvernement, qui a déploré que l’érosion de la confiance ait entravé les progrès vers les objectifs de développement durable (ODD).  Il faut accorder la priorité aux efforts de consolidation de la paix, a-t-il poursuivi. 

Les Tuvalu sont confrontés aux changements climatiques et à la montée du niveau des océans qui mettent en péril sa capacité à réaliser les ODD, a poursuivi M. Natano.  « Nous ne demandons pas de la sympathie, nous voulons des solutions! » a-t-il lancé, en réclamant une justice climatique qui mette l’accent sur les efforts d’atténuation, d’adaptation et de soutien des nations les plus vulnérables.  Il a dit souscrire à la résolution proposée par Vanuatu visant à demander un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) afin de renforcer la responsabilité des États de sauvegarder le système climatique.  Un avis favorable de la CIJ donnerait un coup de pouce moral pour éliminer les combustibles fossiles et confronter les pollueurs face à leurs responsabilités, a-t-il estimé.  Il a ajouté que, la semaine dernière, le Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda et lui-même avaient présenté devant le Tribunal international du droit de la mer à Hambourg leur argumentation en vue d’une demande d’avis consultatif similaire, relatif aux obligations des États parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de protéger et préserver le milieu marin face aux conséquences des changements climatiques.  Tous les États Membres doivent soutenir cette initiative en faveur de la justice climatique, a-t-il ajouté. 

S’agissant de la transition numérique, M. Natano a dévoilé le projet « Future Now » de son gouvernement visant à faire des Tuvalu une « nation numérique » dans laquelle personne n’est laissé sur le bord du chemin.  Les Tuvalu se doteront des outils nécessaires à la mise en œuvre des solutions innovantes qui répondent aux préoccupations climatiques et environnementales.  Pour contrer la menace de la montée des océans, l’exécutif a lancé la Coalition contre les menaces de la montée des océans dont l’objectif est de déclencher l’action de la communauté internationale en faveur des petits États insulaires en développement (PEID) et d’autres pays confrontés à des défis similaires. 

Le Premier Ministre a également appelé à une action mondiale plus forte en vue de l’élimination de la production et de la consommation de combustibles fossiles, en demandant l’adoption d’un nouveau traité visant à réduire la dépendance à l’égard de ces derniers.  Enfin, M. Natalo a demandé que Taiwan puisse participer aux travaux des institutions spécialisées et des mécanismes pertinents des Nations Unies, ainsi qu’à la levée du blocus contre Cuba. 

M. ARIEL HENRY, Premier Ministre et Ministre de la culture et de la communication de la République d’Haïti a déclaré que le monde, à la veille de l’échéance de 2030, va mal, s’inquiétant notamment de l’insécurité alimentaire, engendrée par les conflits et les violences, et de l’inflation impactant Haïti, dont la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. M. Henry s’est également alarmé de la dégradation outrancière de la situation sécuritaire en Haïti où la population subit quotidiennement les attaques violences des gangs armés.  Il a rapporté que la détérioration de la situation a engendré une nouvelle crise humanitaire, faisant plus de 16 500 déplacés.  Selon les estimations, 4,9 millions de personnes se trouvent dans l’insécurité alimentaire et près de la moitié de la population vit avec moins de 2 dollars par jour.  Ceci fait perdre à la population haïtienne tout espoir d’un avenir meilleur, at déploré. 

À ce titre, le Premier Ministre a jugé urgent que le Conseil de sécurité autorise le déploiement d’une mission multinationale spécialisée, à composante policière et militaire, en appui à la Police nationale d’Haïti, afin de combattre les gangs et de rétablir la sécurité.  De même, il a lancé un appel pressant à la coopération internationale pour accompagner, à moyen et long terme Haïti sur les questions sécuritaires, mais aussi celle du développement durable.  Le Premier Ministre a ensuite indiqué qu’il s’est attelé à l’objectif de remettre le pouvoir à des élus capables de rétablir les institutions de l’État et d’adresser les grands défis politiques et socioéconomiques auxquels le pays fait face. 

Le Premier Ministre a ensuite alerté sur la situation inquiétante qui s’est développée ces dernières semaines à la frontière haïtiano-dominicaine, créant un conflit dangereux et inutile entre les deux pays, la République dominicaine ayant, selon lui, contesté de façon inamicale et agressive le droit d’Haïti d’exploiter la rivière Massacre.  Il a rappelé l’importance accordée par son pays au dialogue et à la négociation pour favoriser un partage équitable des ressources hydriques binationales. 

M. SIAOSI ‘OFAKIVAHAFOLAU SOVALENI, Premier Ministre des Tonga, a d’emblée averti que les menaces liées aux changements climatiques ont atteint un niveau existentiel, tout particulièrement pour les petits États insulaires en développement (PEID) comme le sien.  « La fréquence et la gravité accrues des cyclones, l’élévation du niveau de la mer provoquée par la fonte des glaces polaires, le plastique et la pollution de nos océans, ainsi que les vagues de chaleur et les incendies, causent des souffrances à mon pays, à notre population et à notre région du Pacifique », a‑t‑il souligné.  Il a toutefois relevé que, selon le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), il est encore possible de limiter à 1,5 degré Celsius l’augmentation des températures par rapport aux niveaux préindustriels si les émissions culminent d’ici à 2025 et sont réduites de moitié d’ici à 2030.  Encourageant les États Membres à tout faire pour atteindre cet objectif, le dirigeant s’est réjoui de « lueurs d’espoir » telles que la mise en place du fonds pour les pertes et les préjudices.  Dans le même ordre d’idées, il s’est prononcé pour la création d’un fonds Pacifique afin d’offrir une assistance directe aux PEID de cette région.  M. Sovaleni a ajouté que les Tonga, récemment nommées « championnes du financement climatique dans le Pacifique », porteront cette problématique dans tous les forums internationaux.  Il a déploré à cet égard que les engagements financiers climatiques pris par les pays développés soient nettement inférieurs aux 100 milliards de dollars par an promis à partir de 2020 et a plaidé pour davantage de justice climatique. 

Le Premier Ministre a rappelé que les dirigeants du Pacifique appellent depuis des décennies la communauté internationale à agir d’urgence en faveur du climat.  S’ils se sont sentis encouragés par l’adoption par consensus de la résolution de l’Assemblée générale, dirigée par Vanuatu et un groupe de pays, demandant à la Cour internationale de Justice de rendre un avis consultatif sur les obligations des États en matière de changements climatiques, ils constatent aussi que l’absence d’accès rapide au financement les empêche de progresser.  M. Sovaleni a donc appelé à revoir les mécanismes de financement pour que la priorité soit donnée aux besoins de financement à court terme après une catastrophe et à la réduction des risques à long terme.  De même, il a plaidé pour l’adoption de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle concernant les PEID et souhaité que sa mise en œuvre intègre l’accès de ces États à un financement « à faible coût et à long terme ». 

Le Chef de Gouvernement a ensuite applaudi l’adoption de l’Accord sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ).  Il s’est notamment réjoui que ce nouvel accord reconnaisse les circonstances particulières des PEID comme celles du Pacifique.  Il est désormais impératif que cette reconnaissance se traduise par un renforcement concret des capacités, un transfert de technologies marines et un soutien suffisant, pour permettre au Pacifique de devenir un leader encore plus proactif en matière de sauvegarde, de préservation et d’utilisation durable de l’océan et de ses ressources, a‑t‑il affirmé. 

M. OLIVER DOWDEN, Vice-Premier Ministre, Chancelier du Duché de Lancaster et Secrétaire d’État du Bureau du Cabinet du Royaume-Uni, a rappelé le soutien du Royaume-Uni à l’Ukraine et a déploré les conséquences de ce conflit auquel la Russie pourrait mettre fin immédiatement.  Il a ensuite établi l’intelligence artificielle comme étant la plus grande transformation que le monde ait connue, bouleversant fondamentalement l’éducation, les affaires, les soins de santé, la défense, la gouvernance et l’ONU.  Les gouvernements doivent maintenant comprendre et contrôler le pouvoir transformateur qu’offre l’intelligence artificielle sans en connaître la myriade de possibilités.  Selon lui, l’intelligence artificielle pourrait nous aider à inverser les changements climatiques, améliorer les chaînes d’approvisionnement, détecter les signes de maladies chroniques ou de pandémies, ou encore accroître la productivité des entreprises et des gouvernements.  L’intelligence artificielle peut surtout devenir un outil de démocratisation qui permettra à tout un chacun de par le monde de s’autonomiser, a-t-il ajouté. 

Malheureusement, l’intelligence artificielle peut aussi être utilisée à mauvaise escient, a-t-il poursuivi, citant le piratage de données bancaires et gouvernementales et la duperie des électeurs grâce à des contenus faussés.  Les principaux risques proviendront donc de la mauvaise utilisation de cette technologie de pointe, a-t-il averti, exhortant les gouvernements à déterminer, ensemble, les risques pour mieux les anticiper.  Il a déploré que la compétition mondiale pousse certaines sociétés et pays à œuvrer pour la création d’une superintelligence qui dépasserait de loin l’intelligence humaine.  La communauté internationale doit se prémunir des implications négatives de l’intelligence artificielle tout autant qu’en saisir les opportunités, a-t-il insisté. Si, par le passé, les dirigeants ont régulé les développements scientifiques et technologique a posteriori, ils doivent cette fois-ci légiférer en parallèle, a-t-il estimé, appelant les législateurs à s’entourer d’experts pour réaliser cette tâche. 

Il a noté que les actions les plus significatives doivent être menées avec les entreprises technologiques et les acteurs non étatiques d’influence, ce qui exige une nouvelle forme de multilatéralisme.  En novembre prochain, le sommet britannique sur l’intelligence artificielle permettra d’évaluer les risques sécuritaires des technologies de pointe.  Convaincu que les gouvernements ferment les yeux sur le consensus scientifique lié au risque d’extinction de l’humanité par l’intelligence artificielle, M. Dowden a appelé la communauté internationale à s’entourer d’experts et à se réunir plus régulièrement.  Il a également annoncé que le Royaume-Uni a décidé de mettre sur pied une équipe spéciale avec l’ambition qu’elle devienne une structure permanente avec un accès international.  C’est une culture de normes, de transparence et d’échange d’idées qui doit inspirer les gouvernements dans cette tâche inédite mais passionnante, a-t-il martelé. Si nous ne connaissons pas les risques, nous savons néanmoins que la puissance de l’action dépendra de la coopération entre les nations, a-t-il conclu. 

M. VIVIAN BALAKRISHNAN, Ministre des affaires étrangères de Singapour, a dépeint le monde comme un endroit troublé par les ravages causés par les pandémies, les catastrophes naturelles et maintenant la guerre d’invasion de la Russie contre l’Ukraine.  Il a évoqué notamment le violent coup d’État au Myanmar qui a privé le peuple de la paix et du développement.  Tous les pays doivent travailler ensemble pour élaborer des solutions multilatérales cohérentes et concrètes, a-t-il recommandé en soulignant que l’ONU offre un cadre stable pour « prospérer, exercer notre autonomie et tracer notre propre avenir pour notre peuple ».  Ravi que le Sommet sur l’ambition climatique, les trois réunions de haut niveau sur la santé et la réunion préparatoire du Sommet de l’avenir aient redynamisé le système multilatéral, le Ministre a proposé plusieurs pistes pour arriver à un système multilatéral plus résilient et prêt pour l’avenir. 

Déjà, a-t-il prôné, le système multilatéral devrait refléter nos intérêts à long terme en tant que communauté mondiale.  Il a notamment visé la lutte contre les changements climatiques, l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique et les normes technologiques, des domaines dans lesquels les gouvernements devraient conjuguer leurs intérêts nationaux avec les intérêts collectifs à long terme.  « Le système multilatéral fonctionne grâce au compromis et à la compréhension mutuelle, non par le blocage. »   

M. Balakrishnan a aussi souhaité que les États Membres respectent la diversité des expériences, des systèmes et des idées au sein du système multilatéral, arguant qu’il n’existe pas de modèle unique pour organiser un pays.  Il a fait valoir que la diversité des peuples et des nations peut conduire au croisement des idées et à l’élaboration d’un plus grand nombre d’options politiques pour faire face aux nombreux défis.  L’ONU est d’ailleurs une plateforme indispensable pour partager les expériences dans des domaines allant du développement durable aux droits de l’homme, a-t-il soutenu.  Le Ministre a espéré que le Sommet de l’avenir donne l’occasion de renforcer le système multilatéral en tenant compte de la diversité des points de vue et en construisant un cadre commun pour l’avenir. 

S’agissant de la révolution de l’intelligence artificielle, à son avis, le monde doit se préparer aux risques et répartir équitablement les avantages.  Dès aujourd’hui, a-t-il conseillé, il faut commencer un dialogue mondial inclusif à l’ONU pour gérer cette technologie et prendre les précautions nécessaires.  Il a salué à cet égard la décision du Secrétaire général de convoquer un organe consultatif de haut niveau sur l’intelligence artificielle pour étudier ces questions importantes.  L’activité du Groupe de travail à composition non limitée des Nations Unies sur la sécurité des technologies de l’information et de communication (TIC), présidé par Singapour, peut offrir des enseignements utiles pour l’intelligence artificielle, a-t-il signalé avant de dire attendre avec intérêt l’adoption du pacte numérique mondial lors du Sommet de l’avenir en 2024.  Il a assuré que cela est possible, se basant sur l’exemple de l’Accord sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine. 

Mme PENNY WONG, Ministre des affaires étrangères de l’Australie, a affirmé, en tant que membre du Forum des îles du Pacifique, qu’elle croit en la souveraineté et la solidarité des États bordés par cet océan.  Ainsi soutient-elle la transition de la région vers les énergies renouvelables, en aidant certains pays à renforcer leur résilience climatique et à bénéficier de ses contributions au financement des mesures d’adaptation et d’atténuation.  C’est le cas des Palaos, où jusqu’à un cinquième des besoins énergétiques du pays seront couverts par de nouveaux systèmes de stockage solaire et par batteries, grâce à un mécanisme de financement des infrastructures pour le Pacifique préparé par Canberra, a illustré la Ministre.  Soulignant le besoin de prendre en compte les cas particuliers des PEID pour leur accorder des financements adaptés, elle a salué les travaux du Groupe de haut niveau sur l’élaboration d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle pour les petits États insulaires en développement. 

Par ailleurs, elle a dit soutenir l’objectif de l’ASEAN de jouer un rôle de chef de file dans la promotion de la paix, la sécurité, la stabilité et la prospérité dans la région. L’ASEAN a raison d’affirmer que les différends doivent être résolus de manière pacifique, a ajouté la Ministre. « De nouvelles mesures visant à prévenir les conflits entre grandes puissances constituent une priorité australienne, et nous espérons qu’elle sera partagée par les États Membres tout au long de cette Assemblée générale. »  La Ministre a plaidé pour des mesures modestes, axées sur une réassurance stratégique mutuelle, des mesures de réduction des risques militaires et l’ouverture de lignes de communication à tous les niveaux.  À son avis, la communication ne doit jamais être refusée comme s’il s’agissait d’une punition ou offerte à titre de récompense.  Étant donné la manière dont un conflit peut être déclenché, il serait avantageux selon elle de conclure des accords plus clairs entre pays maritimes –tous les pays maritimes de manière égale– pour prévenir les actions dangereuses en mer. 

Comme ce sont les armes nucléaires qui posent le plus grand risque de catastrophes, la Ministre a appelé à redoubler d’efforts pour parvenir à un monde qui en soit exempt. Elle a assuré vouloir continuer d’œuvrer avec d’autres au renforcement du TNP, « malgré ceux qui cherchent à lui porter atteinte « pour leurs propres gains ».  Enfin, cette semaine, a-t-elle annoncé, l’Australie s’est jointe au Japon et aux Philippines pour demander instamment des progrès sur un traité d’arrêt de la matière fissile, ce qui comblerait une lacune cruciale de notre architecture de désarmement, en arrêtant la production des matières nécessaires à la création d’armes nucléaires. 

M. ABDULLATIF BIN RASHID AL ZAYANI, Ministre des affaires étrangères du Royaume de Bahreïn, a réaffirmé son attachement à la coopération internationale fondée sur la confiance mutuelle, avant de se féliciter de la récente signature de l’accord global d’intégration de sécurité et de prospérité entre les États-Unis et le Bahreïn.  Soutenant le droit du peuple palestinien à établir un État indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale, le Ministre a appelé au renforcement de la coexistence pacifique entre les peuples de la région.  Exprimant également son soutien à la prolongation de la trêve humanitaire au Yémen, il a insisté sur la nécessité de rechercher des solutions pacifiques durables aux crises en Syrie, au Liban, au Soudan, en Libye et en Afghanistan, de manière à préserver l’unité, la souveraineté et l’intégrité territoriale de ces pays et soutenir leur processus de développement.  M. Al Zayani a en outre appeléà redoubler d’efforts pour mettre fin à la guerre en Ukraine en tenant compte des pays voisins.  Le Ministre s’est félicité par ailleurs des développements régionaux positifs symbolisés par le retour de la Syrie au sein de la Ligue des États arabes et la reprise des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran. 

Insistant sur la nécessité de promouvoir les valeurs de tolérance et une culture de paix et de dialogue entre les religions, il a appelé à soutenir la proposition d’adoption d’une convention internationale pénalisant les discours de haine et empêchant l’utilisation abusive des libertés, des médias et plateformes numériques à des fins de mépris religieux, d’incitation au terrorisme et d’intolérance.  Désireux de revitaliser les efforts communs en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme, il a réaffirmé la nécessité d’intensifier ceux déployés dans la prévention de la prolifération des armes de destruction massive. 

Le Ministre a ensuite exhorté la communauté internationale à intensifier les efforts pour atteindre la croissance et la prospérité, saluant la création future par le Royaume d’Arabie ´saoudite d’une organisation mondiale de l’eau.  Il a réitéré la détermination de son gouvernement à promouvoir des partenariats efficaces avec l’ONU et ses agences spécialisées afin de soutenir les objectifs de développement commun.  Partageant les réalisations du plan de relance économique de son pays, M. Al Zayani s’est réjoui du taux de croissance national de 5% et de la contribution du secteur non pétrolier au PIB culminant à 83%.  Il a rappelé la deuxième place occupée par le Bahreïn parmi les pays à développement humain très élevé dans le monde arabe, selon le rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et s’est félicité de sa première place parmi les pays arabes dans l’indice de Bâle sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.  Enfin, réaffirmant l’importance accordée à un environnement durable, il a réitéré l’engagement du pays à réduire les émissions de dioxyde de carbone d’ici à 2035.

M. TOBIAS BILLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a déploré le comportement de la Russie qui fait montre d’un « mépris absolu pour la vie humaine ».  La mobilisation de moyens militaires et l’instrumentalisation des ressources alimentaires au service de ses ambitions politiques et impérialistes sapent la sécurité européenne et la sécurité alimentaire mondiale, a-t-il dénoncé.  Il a applaudi les efforts de l’Union européenne, via l’établissement de corridors de solidarité qui permettent à l’Ukraine d’exporter ses céréales, ainsi que les efforts d’aide humanitaire, menés conjointement avec la Suède, pour augmenter les productions locales.  Rappelant que le non-respect de la souveraineté d’un État constitue une violation flagrante du droit international, il a averti que la Russie ne s’arrêterait pas à l’Ukraine.  Il a ainsi justifié la décision de son pays de se porter candidat à l’OTAN, rompant ainsi avec plus de deux siècles de tradition de non-alignement militaire.  Ce choix augmentera la sécurité de la Suède et, avec la candidature de la Finlande, celle de la région euro-atlantique, a-t-il argué.  Le délégué a ensuite déploré les attaques russes et les souffrances du peuple ukrainien, exigeant que la Russie soit tenue responsable de ses crimes.  C’est pourquoi la Suède soutient la création d’un tribunal pour le crime d’agression commis par la Russie, ainsi que la formule pour la paix proposée par l’Ukraine et toute initiative qui se base sur le respect du droit international. 

Saluant l’opportunité de redynamisation que constituait le Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD), il a détaillé la contribution généreuse, efficace et transparente de la Suède à l’aide au développement international.  Il a néanmoins rappelé que des institutions multilatérales fortes sont primordiales pour atteindre les ODD et mobiliser d’importants financements privés et publics.  Il a ensuite appelé la communauté internationale à se mobiliser à la COP28 pour davantage de financements publics et privés afin d’augmenter la résilience des communautés locales face aux changements environnementaux.  Il s’est félicité des avancées technologiques réalisées en Suède pour aider à la transition environnementale et atteindre les ODD.  Par ailleurs, il a souligné les opportunités sans précédent qu’offrent les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle pour atteindre les ODD.  Afin de développer leur potentiel et atténuer les risques, il a prôné une vision commune et le développement d’un pacte numérique mondial. 

Les pays où la démocratie, l’état de droit et les droits humains sont bien ancrés ont de meilleurs indicateurs de développement, a-t-il poursuivi, estimant qu’il est nécessaire d’œuvrer pour des sociétés démocratiques pour atteindre les objectifs du Programme 2030.  Déplorant les récents actes d’intolérance envers la communauté musulmane en Suède, il a condamné ces actes et réitéré l’importance des libertés qui ont toujours fait de son pays une terre d’accueil, libre et ouverte. Il a annoncé que son gouvernement révisera les lois sur les rassemblements publics.  Il a ensuite réitéré que l’agression russe sur l’Ukraine et les menaces nucléaires mettent en péril la sécurité en Suède.  Selon lui, le multilatéralisme est la meilleure chance de préserver les objectifs de non-prolifération. 

M. FREDERICK AUDLEY MITCHELL, Ministre des affaires étrangères des Bahamas, a déclaré que son pays n’acceptait pas « l’évangile du non » prêché par les « ex-maîtres coloniaux » pour les réparations de l’esclavage, comme du reste pour les changements climatiques, dont son pays est victime, alors qu’il n’est pas responsable de cette crise.  Il a ensuite exhorté au déploiement d’une force multinationale en Haïti, remerciant le Gouvernement kényan de son offre de la diriger pour améliorer la sécurité et fournir une aide humanitaire.  Le Ministre a annoncé l’intention des Bahamas d’y participer, comme la Jamaïque et d’autres pays des Caraïbes. 

Après avoir appelé à la levée du blocus économique et financier injuste imposé à Cuba, M. Mitchell s’est lancé dans une diatribe contre la relation asymétrique qui prévaut entre les pays caraïbéens et leurs partenaires commerciaux de l’Union européenne qui, avec l’OCDE, se sont arrogés le rôle de « gendarmes du monde en matière de taxation » et dans le domaine bancaire. L’ONU est donc l’instance universelle adéquate pour élaborer une « nouvelle architecture d’administration fiscale internationale » reposant sur une représentation égale des États Membres, a estimé M. Mitchell. 

M. ARNOLDO RICARDO ANDRÉ TINOCO, Ministre des affaires étrangères du Costa Rica, a expliqué que son pays, soucieux de lutter contre la militarisation des nouvelles technologies, avait l’intention, avec l’Autriche et le Mexique, de présenter un projet de résolution à l’Assemblée générale pour réglementer le recours aux systèmes d’armements autonomes.  Aussi a-t-il lancé un appel à tous les États Membres pour qu’ils s’engagent à réduire de manière significative et irréversible leurs dépenses militaires.  « Notre seule arme doit être le droit international »! a tranché le Chef de la diplomatie costaricienne, pour qui la sécurité humaine doit être le socle sur lequel repose un nouveau pacte mondial. M. Tinoco a ensuite rappelé que le Costa Rica est le pays américain qui accueille sur son territoire le plus grand nombre de migrants par rapport à sa population, avec plus de 270 000 demandes d’asile enregistrées pour l’instant cette année.  Et ce, alors que nous sommes un pays à revenu intermédiaire et que nos ressources sont limitées.  Raison pour laquelle il s’est prononcé en faveur de mesures permettant d’encadrer les flux migratoires de manière sécurisée et d’un appui financier pour intégrer ces réfugiés dans le tissu social du pays.  Le Ministre a également demandé que soit réformée l’architecture financière internationale, y compris des banques régionales de développement, pour changer les modalités d’accès à l’aide publique au développement.  Enfin, évoquant les changements climatiques, M. Tinoco a expliqué que le Costa Rica était pionnier dans le mouvement de reforestation, auquel sont associées les populations autochtones du pays.  Il organisera d’ailleurs les 7 et 8 juin 2024 un événement de haut niveau afin de revoir à la hausse son ambition climatique, particulièrement s’agissant de la viabilité des océans, a précisé le Ministre.

Droits de réponse

La représentante de l’Inde a déploré « l’attitude malveillante » du Pakistan visant à détourner l’attention de la communauté internationale de la question des droits humains.  Rappelant que l’Inde est la plus grande démocratie du monde, elle a appelé le Pakistan à « balayer devant sa porte ».  La déléguée a affirmé que le Pakistan accueille le plus grand nombre de terroristes au monde.  Enfin, elle a appelé ce pays à agir pour la paix en Asie du Sud en cessant le terrorisme transfrontière, en quittant les territoires indiens occupés de manière illégale et en mettant un terme aux graves violations des droits humains à l’encontre des minorités au Pakistan. 

Réagissant aux affirmations des Îles Salomon, la déléguée du Japon a expliqué que les eaux déversées en mer ont été purifiées, démontrant une concentration de tritium largement inférieure aux normes réglementaires pour l’eau potable fixée par l’OMS.  Elle a ajouté que des experts ont analysé le récent déversement et que si celui-ci devait dépasser les normes internationales, le Japon cesserait immédiatement.  Le pays continuera à fournir les informations demandées par la communauté internationale en toute transparence, a-t-elle assuré

La représentante du Pakistan a déclaré que le Jammu-et-Cachemire ne fait pas partie de l’Inde, ne l’a jamais été et ne le sera jamais.  Le Conseil de sécurité a décidé, dans une résolution, que le statut final de ce territoire serait déterminé par sa population lors d’un plébiscite appuyé par les Nations Unies, a-t-elle rappelé.  Elle a affirmé que l’Inde, parrain du terrorisme, doit rendre des comptes pour ces crimes de guerre et pour ces violations des droits humains dans les territoires occupés.  Aujourd’hui, a-t-elle accusé, l’Inde exporte le terrorisme à l’échelle mondiale en soutenant et finançant les Taliban qui ont mené de nombreuses attaques contre des civils et des cibles militaires au Pakistan.  La représentante a enfin condamné la répression des minorités musulmanes, chrétiennes et des dalit en Inde citant des attaques contre les lieux de culte et les meurtres de personnes de confession musulmane ou chrétienne. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a répondu aux propos tenus par le Premier Ministre israélien ce matin, après avoir remercié les gardes de sécurité de l’ONU d’avoir expulsé de la salle, mardi, le « soi-disant ambassadeur de ce régime ».  Il a ensuite accusé Israël de nombreuses atrocités et dénoncé ses campagnes de désinformation contre son pays, les jugeant « risibles ».  Ces allégations ont été exprimées par Israël dans cette enceinte, a-t-il déploré, expliquant que son pays a ainsi été accusé, de façon totalement infondée, d’avoir fourni des armes à la Russie dans le cadre de la guerre en Ukraine.  Le Gouvernement israélien tente de détourner l’attention de la communauté internationale de ses propres méfaits, selon le délégué iranien, alors qu’il abrite sur son territoire des réseaux terroristes et commet des crimes depuis sept décennies contre le peuple palestinien.  Le « régime israélien » est une menace à la paix et la sécurité dans la région et le monde, a-t-il ajouté en regrettant qu’il empêche la création d’une zone exempte d’armes nucléaires.  Le délégué a aussi déploré la menace de l’usage de la force par Israël contre l’Iran.  Il a réaffirmé son droit à l’autodéfense conférée par le droit international et la Charte des Nations Unies.  « Nous sommes prêts à rétorquer en cas d’agression d’Israël », a prévenu le représentant. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Lutte contre la tuberculose: les États s’engagent à faire progresser la science, les finances et l’innovation pour juguler une épidémie mondiale

Soixante-dix-huitième session,
Réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose, matin & après-midi
AG/12537

Lutte contre la tuberculose: les États s’engagent à faire progresser la science, les finances et l’innovation pour juguler une épidémie mondiale

Une réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose, organisée aujourd’hui en marge du débat annuel de l’Assemblée générale, a rassemblé des dirigeants, ministres de la santé, présidents d’organisations internationales et non gouvernementales et représentants de la société civile.  En début de session, les États Membres ont approuvé une déclaration politique visant à faire progresser la science, les finances et l’innovation, et à tirer parti de leurs bienfaits pour mettre fin d’urgence à l’épidémie mondiale de tuberculose, « en particulier en assurant un accès équitable à la prévention, au dépistage, aux traitements et aux soins ».  Le texte est désormais en attente d’une approbation formelle par l’Assemblée générale.  Près de cinq ans après la première déclaration politique consacrée à la lutte contre la tuberculose, en 2018, les États ont ainsi réaffirmé leur volonté de juguler l’épidémie mondiale d’ici à 2030, conformément aux objectifs de développement durable (ODD). 

« Nous sommes rassemblés pour revitaliser notre engagement et mettre fin à la tuberculose », a déclaré M. Dennis Francis, Président de l’Assemblée générale, notant que la déclaration était un outil essentiel pour parvenir à son éradication en 2030.  Il a déploré que l’on n’ait toujours pas mis fin à une « maladie ancienne » alors que les moyens techniques sont disponibles.  Un constat partagé par M. Tedros Adhanom Ghebreyesus, Président de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS): « pendant des millénaires, nos ancêtres ont souffert et sont morts de cette maladie sans savoir ce dont il s’agissait, ce qui la causait ou comment arrêter sa progression.  Aujourd’hui, nous avons des connaissances et des outils dont ils n’auraient pu que rêver ». 

Mme Amina Mohammed, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a rappelé que la tuberculose demeure la maladie infectieuse la plus meurtrière du monde avec 1.5 million de victimes par an, soulignant la « menace majeure » que font planer les formes pharmacorésistantes.  Mme Marisol Touraine, Présidente du conseil d’administration d’Unitaid, a fait part de son inquiétude quant à la progression des souches résistantes, qui aurait accéléré pendant la pandémie de la COVID-19. Son organisation, a-t-elle expliqué, finance des essais cliniques pour développer des traitements plus faciles et moins toxiques contre la tuberculose résistante.

La question de la pharmacorésistance figurait également au cœur des préoccupations exprimées par M. Peter Sands, Directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.  Selon lui, ce trait particulier de la maladie exige des moyens techniques adaptés.  « Il faut des outils de diagnostic complexes qui puissent détecter les résistances microbiennes », a-t-il relevé. 

Les intervenants se sont accordés sur le fait que la tuberculose était une maladie aux profondes implications sociales.  La pauvreté, notamment, serait l’un des facteurs majeurs de susceptibilité.  Chaque jour, 650 enfants en meurent, s’est indignée Mme Touraine, qualifiant ce bilan d’« insupportable, parce que c’est une maladie de la pauvreté ».  Dans le même esprit, M. Ghebreyesus a rappelé que la majorité des 10 personnes qui sont mortes de la tuberculose pendant les quelques minutes de son intervention sont « pauvres, marginalisées, mal nourries ». M. Sands a qualifié la tuberculose de « pandémie des pauvres », prônant un système inclusif qui englobe les personnes les plus marginalisées de la société. 

La dimension sociale de la lutte contre la tuberculose a fait l’objet de discussions en marge de la session plénière, lors d’une table ronde consacrée ce matin aux actions multisectorielles.  Dans ce cadre, Mme Binika Shrestha, survivante de la maladie et membre de la Campagne nationale de la jeunesse contre la tuberculose au Népal, a relevé que de nombreuses personnes sont poussées vers la précarité à cause du coût des traitements. 

Durant ce premier débat, sur le thème intitulé « Accélérer les initiatives multisectorielles pour assurer une offre de soins équitables et de qualité contre la tuberculose, qui soient centrés sur les personnes, et s’attaquer aux déterminants de la tuberculose dans le contexte de la couverture sanitaire universelle », de nombreux pays ont soutenu le principe d’un accès gratuit aux soins.  La Pologne, la Russie et la Thaïlande ont relevé que cette mesure avait contribué à leurs progrès contre la maladie.  L’Estonie et la République dominicaine ont insisté sur le fait qu’outre la gratuité, l’accès aux soins et au diagnostic doit être ouvert à tous, notamment aux migrants et aux réfugiés, quel que soit leur statut.

Selon M. Budi Gunadi Sadikin, Ministre de la santé de l’Indonésie et modérateur de la première table ronde, la nature multifactorielle de la tuberculose exige la coopération de plusieurs branches du gouvernement, afin de répondre aux problèmes de logements insalubres, de pauvreté ou de malnutrition. Un constat également émis par le Paraguay, qui souligne la nécessité de travailler avec des secteurs divers au sein du gouvernement, l’épidémie ne répondant pas qu’à des facteurs sanitaires. Outre la mobilisation de plusieurs branches du gouvernement, plusieurs intervenants ont prôné la coopération entre tous les acteurs de la lutte – systèmes de santé publics et privés, société civile, organisations gouvernementales, bailleurs de fonds…  Les malades et survivants, tout particulièrement, devraient être intégrés aux processus.  Ainsi, selon M. Sadikin, « il faut mobiliser l’ensemble de la société, y compris les survivants, les soignants, la société civile, notamment pour lutter contre la discrimination ».

La stigmatisation représenterait une entrave majeure au progrès de la lutte contre la maladie.  De peur d’être exclues, de nombreuses personnes hésiteraient à se faire diagnostiquer ou à obtenir des soins.  Mme Handaa Enkh-Amgalan, survivante de la tuberculose et autrice du livre « Stigmatized: Le voyage d’une jeune fille mongole de la stigmatisation et de la maladie à l’autonomisation », a appelé à lutter contre ce problème. Mme Shrestha a témoigné qu’elle avait dû elle aussi cacher sa maladie à sa famille.  « Si l’on se limite à traiter la tuberculose comme quelque chose de purement médical, cela entraîne stigmatisation et abandon. » La République dominicaine, notamment, a expliqué avoir mis en place des programmes scolaires pour lutter contre la stigmatisation des malades.

Enfin, l’accès aux soins et au diagnostic doit être amélioré, ont relevé de nombreux intervenants.  Les centres de lutte contre les maladies tentent notamment de résoudre ce problème sur le plan technique, en développant des traitements plus brefs, à même de traiter rapidement les patients.  Mais, a relevé le Président de l’Assemblée générale, les discriminations entravent les efforts de santé publique, et il faut également résoudre la dimension sociale du problème.  « Par où commencer?  Il faut innover, que ce soit en sciences sociales ou pour des systèmes de recherche essentiels qui garantissent l’accès aux soins. »

Les participants ont enchaîné l’après-midi avec une deuxième table ronde ayant pour thème: « Mettre l’accent sur des financements adéquats et durables à l’échelle nationale, régionale et internationale pour garantir l’équité dans la prestation de services de lutte contre la tuberculose, les stratégies innovantes, ainsi que pour la recherche-développement de nouveaux outils de diagnostic, de vaccins et de médicaments ». 

Coprésidé par MM. Alexandru Rafila, Ministre de la santé de la Roumanie , et Kalumbi Shangula, Ministre de la santé et des services sociaux de la Namibie, cet évènement a donné l’occasion à Mme Jamilya Ismoilova, Conseillère régionale en matière de changement de comportement social et de genre chez Abt Associates Inc. en Asie centrale, qui représentait la société civile, de mettre en avant le rôle des communautés dans la lutte contre la tuberculose, puisque leur connaissance du terrain et leurs connexions avec la base permettent de mieux détecter les cas de tuberculose et de faciliter les soins.  Faisant un parallèle avec la pandémie de COVID-19, elle a plaidé pour une mobilisation similaire de la communauté internationale autour de la tuberculose en vue de combler le manque de financement chronique pour trouver un vaccin contre cette maladie infectieuse qui reste la plus mortelle au monde.  Il s’agit également de fidéliser les agents de santé et de répondre aux besoins en termes de médicaments face à cette maladie. Les sources de financement traditionnelles ne sauraient suffire, a-tranché Mme Ismoilova.  Par conséquent, les gouvernements doivent allouer les ressources nécessaires au renforcement des systèmes de santé en vue de parvenir à une couverture sanitaire universelle.  Elle a notamment préconisé des subventions ciblées pour les services de santé au niveau communautaire.  Les financements internationaux alloués à la lutte contre la tuberculose doivent augmenter, a-t-elle exigé en arguant que leurs retours sur investissements sont énormes, surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire. 

Lui emboitant le pas, le docteur Antonio Brito, Membre du Parlement et Président du Groupe parlementaire brésilien sur la tuberculose, a apporté le témoignage de l’un des pays à la plus forte prévalence de tuberculose dans sa région et où les coûts pour les patients restent énormes.  Il a mis en avant le rôle des parlements dans la lutte contre cette maladie.  Au Brésil, cela va bien au-delà du simple cadre législatif.  Des recommandations ont été faites pour éliminer cette maladie en tant que problème de santé publique, et la commission interministérielle mise en place à cet effet doit remédier au problème du sous-financement de cette lutte. Le Parlement supervise l’affectation des ressources pour veiller à leur rentabilité et garantir qu’elles parviennent à ceux qui en ont le plus besoin, a-t-il expliqué.  Avant de conclure, le docteur Brito a encouragé les parlements du monde à unir leurs forces dans le cadre de cette lutte et à agir maintenant.

Répondant à une question sur le fort engagement des États-Unis dans la lutte contre la tuberculose, le docteur Atul Gawande, Administrateur adjoint pour la santé mondiale à l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), a rappelé qu’il s’agit de la maladie infectieuse la plus mortelle au monde.  Il a pointé du doigt les écarts entre le monde en développement et le monde développé où cette « maladie des négligés » a été pratiquement éradiquée.  Aujourd’hui, a-t-il martelé, on sait ce qu’il faut faire – dépister, traiter et suivre les cas contacts dans toutes les communautés. Ce n’est donc pas faute de solution que l’on ne vient pas à bout de cette maladie, mais plutôt faute de volonté et de moyens, a déploré le docteur Gawande.  Concrètement, on peut dépister la maladie en une journée, les traitements existent et fonctionnent et on sait comment traiter les personnes qui sont cas contacts.  Pour sa part, USAID s’est engagé à réduire les coûts des traitements et assure des transferts de technologie vers des fabricants africains, a-t-il expliqué, en mettant en avant l’importance du financement des capacités locales de lutte contre la tuberculose.  Sur une note positive, il a évoqué les recherches en cours à l’Université Johns Hopkins qui développe actuellement un traitement de longue durée qui consiste en une seule injection par mois. 

Son collègue, le docteur Mark Hatherill, Directeur de l’Initiative sud-africaine pour un vaccin contre la tuberculose (SATVI) à l’Université du Cap, a fait un parallèle entre l’approche du vaccin anti-COVID-19 et celle du vaccin contre la tuberculose.  « Pour la première fois un candidat prometteur est à notre portée. »  Si confirmé, son impact sera transformateur et pourrait faire économiser des milliards de dollars en traitement, a-t-il fait valoir.  En attendant, le docteur Hatherkill a encouragé à faire avancer les sept autres vaccins les plus prometteurs qui en sont à la phase de test, notamment ceux à ARN messager.  Il a également plaidé pour des partenariats avec les pays les plus touchés par la tuberculose et pour un programme d’investissement dédié uniquement à la recherche et au développement des vaccins, en notant que l’un des plus grands freins à leur développement reste le nombre de tests réalisés.  Il ne fait pas de doute à ses yeux qu’il appartient aux pays développés de s’investir davantage dans la recherche vaccinale contre la tuberculose. 

Concrètement, il faut sortir du silence autour de cette maladie pour pouvoir y mettre un terme, d’autant plus que le nombre de malades est à nouveau en hausse dans le monde, a-t-il été souligné.  Cette responsabilité incombe au premier chef aux gouvernements et aux dirigeants, ont encore fait valoir de nombreux intervenants du segment interactif de cette réunion qui était largement dominé par des représentants de la société civile, y compris des médecins.  Des appels multiples ont été lancés pour des investissements plus forts de la part des partenaires, mais aussi pour davantage de partenaires, y compris du secteur privé.  Le fait que 80% des décès de la tuberculose surviennent dans le monde en développement, est, pour certains, la principale explication de l’absence de vaccin contre cette maladie à ce jour. 

Pour la première fois, une déclaration politique reconnait le droit à la science, ont salué les participants.  Mais cela ne suffit pas.  Les États Membres, ont-ils estimé, doivent combler les lacunes en matière de diagnostic et de traitement au niveau national et cela ne sera possible que si ces services deviennent plus accessibles.  En fin de compte, pour les militants et représentants présents dans la salle aujourd’hui, la lutte contre la tuberculose est bien une lutte pour les droits humains.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité examine les conséquences humanitaires immédiates et politiques à terme de l’opération militaire de l’Azerbaïdjan au Haut-Karabakh

9422e séance – après-midi      
CS/15418

Le Conseil de sécurité examine les conséquences humanitaires immédiates et politiques à terme de l’opération militaire de l’Azerbaïdjan au Haut-Karabakh

Après l’opération militaire lancée lundi par l’Azerbaïdjan contre les séparatistes de la région à la population arménienne du Haut-Karabakh, le Conseil de sécurité s’est réuni cet après-midi à la demande de la France et en présence des Ministres des affaires étrangères de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan.  Si toutes les délégations ont pris note de l’annonce d’un cessez-le-feu, elles ont aussi appelé à un règlement durable du conflit entre les deux pays par la voie de la négociation et ont réclamé un accès humanitaire sans entrave aux populations dans le besoin. 

Chargé de présenter les faits aux membres du Conseil, M. Miroslav Jenča, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a rappelé que c’est le 19 septembre que l’Azerbaïdjan a annoncé le lancement « d’activités antiterroristes dans la région économique du Karabakh » après la mort de deux civils et quatre policiers dans des incidents impliquant des mines terrestres, qui auraient été posées par les forces armées arméniennes.  Tout en précisant que l’ONU, absente de la région, n’est pas en mesure de vérifier les diverses affirmations et allégations, il a fait état d’une « grave escalade des opérations militaires », de victimes, y compris au sein de la population civile, et de l’évacuation de plusieurs milliers de personnes.  Il a aussi pris note de l’annonce, hier, d’un cessez-le-feu. 

Le représentant de la Fédération de Russie a apporté quelques précisions sur le rôle du contingent de la force de paix russe présente au Haut-Karabakh depuis deux ans, dont cinq membres ont été tués, qualifiant d’« infondée et absolument inacceptable » toute tentative d’accuser son pays d’inaction dans un contexte « difficile ». 

Les membres du Conseil ont fait écho à « l’extrême préoccupation » exprimée par les dirigeants de l’ONU, en particulier quant à la population civile du Haut-Karabakh, dont la situation humanitaire était déjà très difficile depuis plusieurs mois en raison du blocage du corridor de Latchine, qualifié de « blocus » par la Ministre des affaires étrangères de la France.  Comme l’a précisé M. Jenča, les questions relatives à la liberté de mouvement des civils et à l’accès humanitaire avaient été sources de tensions entre Bakou et Erevan.  Le Ministre des affaires étrangères de Malte a d’ailleurs rappelé que le Conseil de sécurité avait été amené à se pencher sur cette question le 16 août dernier

Ainsi, la Suisse a appelé au respect inconditionnel du droit international, en particulier du droit humanitaire et des minorités.  Elle a insisté pour que les acteurs humanitaires, dont le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), puissent mener à bien leurs missions impartiales et que l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire soit garanti au profit des population dans le besoin.  L’accès humanitaire est également une préoccupation majeure pour Malte ou l’Équateur.  Les États-Unis ont demandé que l’Azerbaïdjan assure, comme il s’y est engagé publiquement, l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire le long du corridor de Latchine menant au Haut-Karabakh.  Le Brésil et la Suisse ont fait observer que cette escalade intervient alors que, le 18 septembre, un convoi d’aide humanitaire avait pu transiter par le corridor de Latchine pour la première fois depuis des semaines et ont souhaité que ce « signe positif » soit préservé. 

Replaçant les événements des derniers jours dans le contexte plus large des violations régulières du cessez-le-feu conclu à l’issue de la « guerre de 44 jours » de l’automne 2020, M. Jenča a estimé que la priorité absolue est désormais d’empêcher la reprise des hostilités et de ramener la situation sur le terrain politique et diplomatique.  Comme l’a fait remarquer le Ghana, en cette période de multiplication des défis sécuritaires, le continent européen et le reste du monde ne peuvent guère se permettre une nouvelle escalade des tensions dans l’enclave. 

La Fédération de Russie, qui a dit tenir plus que quiconque à la résolution rapide de la crise, a affiché son intention de continuer à jouer un rôle de premier plan dans le processus de normalisation des relations entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, affirmant que la réconciliation devrait s’accompagner de garanties de sécurité et du respect des droits de la population du Haut-Karabakh.

Le rôle que le Conseil pourrait jouer a fait débat.  À l’origine de la séance, la France a condamné l’opération de Bakou, qui a en revanche obtenu le soutien de la Türkiye.  Pour la France, le Conseil doit apporter son soutien au Premier Ministre arménien, du fait de son engagement pour trouver une solution négociée avec l’Azerbaïdjan.

Le Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, qui a dénoncé une « agression planifiée » et « barbare » visant à parachever un nettoyage ethnique de la population arménienne du Haut-Karabakh, a reproché au Conseil de n’avoir pas réagi de manière adéquate lorsqu’il avait été saisi en décembre 2022.  Il l’a exhorté à agir cette fois en condamnant la reprise des hostilités et le ciblage des infrastructures civiles, à déployer immédiatement une mission interinstitutionnelle de l’ONU au Haut-Karabakh pour surveiller et évaluer la situation humanitaire, sécuritaire et des droits humains, et à envisager le déploiement d’une opération de maintien de la paix.  « Il n’existe pas d’alternative au rôle du contingent russe de maintien de la paix dans la région », a toutefois fait savoir le représentant russe.

Au contraire, le Chef de la diplomatie azerbaïdjanaise a dénoncé une tentative de l’Arménie d’exploiter le Conseil afin de tromper la communauté internationale.  Rejetant tout projet de « nettoyage ethnique », il a expliqué que l’objectif de l’opération était de détruire une quantité considérable de matériel militaire entreposé illégalement sur son territoire par l’Arménie et utilisé par des séparatistes.  Les mesures antiterroristes ont atteint leurs objectifs, a-t-il ajouté, estimant qu’on aurait pu arriver au même résultat de manière pacifique si l’Arménie avait honoré ses engagements au titre de la Déclaration trilatérale.  Il a également assuré que les installations administratives, sociales, éducatives, médicales et religieuses arméniennes seront dorénavant assurées conformément aux lois de l’Azerbaïdjan et aux normes du droit international humanitaire. 

LETTRE DATÉE DU 13 SEPTEMBRE 2022, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’ARMÉNIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2022/688)

Déclarations

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a présenté la chronologie de la crise en rappelant, que le 19 septembre, l’Azerbaïdjan avait annoncé le lancement « d’activités antiterroristes dans la région économique du Karabakh » après la mort de deux civils et quatre policiers dans des incidents impliquant des mines terrestres, qui auraient été posées par les forces armées arméniennes. L’Azerbaïdjan affirme avoir informé la force de maintien de la paix de la Russie et le centre commun russo-turc de surveillance de ses activités, et présenté celles-ci comme visant à empêcher des provocations à grande échelle de la part des forces armées arméniennes, neutraliser leurs infrastructures militaires, et assurer leur retrait et la restauration de l’ordre constitutionnel de la République d’Azerbaïdjan. 

Le Sous-Secrétaire général a fait état d’une « grave escalade des opérations militaires », de victimes, y compris au sein de la population civile, et de l’évacuation de plusieurs milliers de personnes.  La force russe de maintien de la paix, qui a elle-même subi des pertes, a documenté de nombreuses violations du cessez-le-feu, a‑t‑il ajouté, tout en précisant que l’ONU, qui n’est pas présente dans les régions concernées, n’est pas en mesure de vérifier les diverses affirmations et allégations. 

M. Jenča a fait état de « l’extrême préoccupation » du Secrétaire général, ainsi que du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Volker Türk.  Le Secrétaire général, a‑t‑il rappelé, exhorte toutes les parties concernées au strict respect du cessez-le-feu, conformément à la déclaration commune du 9 novembre 2020, et à la mise en œuvre de leurs obligations, notamment en ce qui concerne le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme. 

Le Sous-Secrétaire général a rappelé que l’escalade a fait suite à la livraison, la veille, de produits alimentaires et médicaux essentiels à travers le corridor de Latchine et la route d’Aghdam et que, ces derniers mois, les questions relatives à la liberté de mouvement des civils et à l’accès humanitaire avaient été sources de tensions entre Bakou et Erevan.  Il a pris note des préoccupations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) concernant l’impact humanitaire des derniers événements sur les personnes déjà vulnérables, du fait de l’accès extrêmement limité aux services de base et soins de santé au cours des derniers mois.

M. Jenča a ensuite appelé à replacer les événements des derniers jours dans le contexte plus large des violations régulières du cessez-le-feu. Il a pris note de l’annonce, hier, d’une cessation des hostilités et a dit comprendre que les représentants de la population locale et du Gouvernement de l’Azerbaïdjan s’étaient rencontrés plus tôt aujourd’hui pour un premier échange, une mesure qu’il a jugée positive. 

Le Sous-Secrétaire général a appelé à une cessation « crédible et durable » des hostilités, avertissant que toute nouvelle escalade serait cause de nouvelles souffrances humaines et ferait reculer encore davantage les efforts de paix soutenus par la communauté internationale.  Pour l’ONU, la protection et les besoins essentiels de la population civile, y compris leurs droits humains, doivent être la priorité absolue.  D’autre part, la seule voie à suivre est celle d’un véritable dialogue entre le Gouvernement de l’Azerbaïdjan et les représentants de la région, ainsi que l’engagement de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan dans un processus de normalisation.  Il a annoncé que le Secrétariat resterait en contact étroit avec tous les acteurs concernés et se tenait prêt à soutenir les efforts de paix en cours comme à répondre aux besoins humanitaires. 

Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a indiqué que son pays avait demandé la tenue en urgence de cette réunion, « compte tenu de la gravité de la situation au Haut-Karabagh ».  Après avoir massé depuis plusieurs semaines une importante quantité de troupes et de matériel militaire, l’Azerbaïdjan a décidé, le 19 septembre, de lancer une opération militaire de grande envergure, a-t-elle rappelé, ajoutant que cette opération avait touché la population civile.  Elle a condamné cette opération qui contrevient au principe de règlement pacifique des différends.  Notant qu’un cessez-le-feu a été annoncé hier, la Ministre française a jugé essentiel qu’il soit respecté. 

Pour la France, ce n’est pas l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan qui est en jeu ici, ce sont les conditions d’une paix juste et durable, a poursuivi la Ministre avant de rappeler que le Haut-Karabagh fait l’objet, depuis plusieurs mois maintenant, d’un blocus qui l’empêche de s’approvisionner en nourriture, en médicaments et en énergie.  Elle a considéré que l’Azerbaïdjan porte la responsabilité du sort de la population.  Ainsi, a-t-elle souligné, si l’Azerbaïdjan souhaite réellement parvenir à une solution pacifique et négociée, il doit dès à présent fournir des garanties tangibles. À cet égard, la Ministre française a exhorté ce pays à s’engager de bonne foi dans les discussions, à assurer l’amnistie aux forces qui ont accepté le cessez-le-feu et de rétablir, sans délai et sans condition, la circulation par le corridor de Latchine, conformément à l’ordonnance rendue par la Cour internationale de Justice le 22 février 2023.  Enfin, l’Azerbaïdjan doit accepter une présence internationale humanitaire au Haut-Karabagh alors que l’hiver approche, a-t-elle ajouté. 

Elle a appelé le Conseil à apporter son soutien actif à la définition des paramètres d’une solution négociée entre Bakou et Stepanakert, et à rester vigilant face à toute tentative visant à « entraîner l’Arménie dans ces événements tragiques et à en prendre prétexte pour remettre en cause son intégrité territoriale ». Enfin elle a estimé que le Conseil doit apporter son soutien au Premier Ministre Pachinian, notant son engagement pour trouver une solution négociée avec l’Azerbaïdjan

M. IAN BORG, Ministre des affaires étrangères, des affaires européennes et du commerce de Malte, a fait part de sa vive préoccupation face à l’escalade militaire menée par l’Azerbaïdjan contre les Arméniens du Haut-Karabakh. Ces affrontements surviennent quelques semaines à peine après que le Conseil de sécurité a appelé les parties à s’engager dans un dialogue constructif afin de désamorcer la crise. Le Ministre a condamné toute action susceptible de mettre la vie des civils en péril, les personnes vulnérables au premier chef.  Il a ainsi déploré les déplacements de population et les destructions engendrés par les hostilités, tout en demandant la levée immédiate des obstacles à la livraison de l’aide humanitaire à ceux qui en ont le plus besoin.  Une rhétorique agressive et dangereuse, combinée à la propagation de la désinformation et de la mésinformation, ne feront qu’engendrer la méfiance entre les parties, a-t-il mis en garde. Afin de faire baisser les tensions et de parvenir à un règlement pacifique du conflit, le Ministre a exhorté les parties à s’abstenir de toute violence et à reprendre le dialogue et la diplomatie, avec la participation de l’Union européenne.  Il a réaffirmé en terminant son soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. 

M. AHMED BIN ALI AL SAYEGH, Ministre d’État des Émirats arabes unis, a plaidé pour le dialogue et une solution pacifique à cette crise avant de saluer le cessez-le-feu conclu hier dans la région.  Notant que celui-ci a été soutenu par la Russie, il y a vu la confirmation que toutes les parties concernées ont choisi la voie du calme et de la désescalade.  Il a appelé toutes les parties à s’engager à protéger les civils et à prendre les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et leur sûreté en cas de tensions accrues.  Il a salué le rôle joué par les équipes russes de maintien de la paix, et regretté profondément la perte de vies civiles.  Insistant sur la nécessité de maintenir et de stabiliser le cessez-le-feu, et pour les parties concernées de faire preuve de retenue et d’éviter toute escalade, le Ministre s’est dit encouragé par les pourparlers qui ont eu lieu aujourd’hui à Yevlakh et a espéré qu’ils permettront de renforcer la compréhension entre les parties.

M. TARIQ AHMAD, Ministre d’État chargé de l’Asie du Sud et du Commonwealth du Royaume-Uni, s’est dit de plus en plus préoccupé par les fortes pressions qui s’exercent sur la population du Haut-Karabakh dont les besoins humanitaires sont importants et ne cessent de croître.  Rappelant que son pays avait été encouragé par un mouvement limité de biens humanitaires via les routes de Latchine et d’Aghdam en début de semaine, il a regretté que cette possibilité de progrès ait été bloquée par l’annonce par l’Azerbaïdjan du début d’une opération militaire.  Il a également rappelé que le Royaume-Uni avait exhorté ce dernier à mettre fin à son recours à la force, à s’abstenir de toute nouvelle escalade et à reprendre le dialogue. 

Tout en reconnaissant pleinement la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan, le Ministre a estimé que la puissance militaire ne pouvait être utilisée pour résoudre les tensions entre les communautés.  De même, il a jugé essentiel que les pourparlers reprennent avec les représentants des Arméniens du Haut-Karabakh, sur la base d’un plan crédible visant à garantir les droits et la sécurité de tous les habitants de la région.  « La poursuite du recours à la violence ne fera que compromettre les progrès timides vers un accord de paix durable entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie », a-t-il souligné.  Se félicitant de l’annonce d’un cessez-le-feu faite hier, il a demandé instamment à toutes les parties de le respecter, de mettre fin à la violence et d’engager d’urgence un dialogue ouvert sur un avenir sûr pour les habitants de cette région. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a appelé l’Azerbaïdjan à mettre un terme à ses activités militaires sur le territoire, à commencer par celles pouvant toucher les civils.  Elle a également exhorté les parties à respecter le droit international, et l’Azerbaïdjan à protéger les civils et à traiter humainement les combattants séparatistes.  Il faut que Bakou assure, comme elle s’y est engagée publiquement, l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire le long du corridor de Latchine menant au Haut-Karabakh, a insisté la représentante.  À ce propos, elle a indiqué que, depuis le début de la crise dans la région, les États-Unis ont accordé une aide humanitaire de 24 millions de dollars aux populations « qui ont besoin de nous ».  Enfin, elle a souligné que la seule solution à cette crise est la fin des violences et l’instauration d’une paix négociée et durable. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) s’est dite profondément préoccupée par les opérations militaires lancées par l’Azerbaïdjan en début de semaine, qui font peser un fardeau supplémentaire sur la population civile de la région du Haut-Karabakh, alors qu’elle souffre déjà d’une situation humanitaire très difficile.  Rappelant que le recours à la force pour résoudre les conflits n’est pas acceptable, la représentante a pris note du cessez-le-feu annoncé hier et demandé un arrêt durable des hostilités, considérant que la situation actuelle reste fragile. 

La représentante a rappelé au respect inconditionnel du droit international, en particulier du droit international humanitaire et des droits des minorités.  Elle a insisté pour que les acteurs humanitaires, dont le Comité international de la Croix-Rouge, puissent mener à bien leurs missions impartiales et que l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire soit garanti au profit des population dans le besoin.  L’évolution positive observée ces derniers jours dans le corridor de Latchine et sur la route d’Aghdam doit être maintenue.  La Suisse appelle en outre au respect des obligations découlant de la déclaration trilatérale de novembre 2020 et des décisions de la Cour internationale de justice.

La représentante a appelé à « ne pas en rester aux paroles éphémères » et à rechercher l’unité nécessaire pour agir en faveur d’un règlement pacifique et d’une paix durable entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, laquelle devra être acquise par la poursuite d’un dialogue à la table des négociations. La paix doit être basée sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, ainsi que sur la protection des droits des minorités, a rappelé la représentante, qui a assuré que son pays « se tient à disposition des parties si elles le souhaitent ».

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a fait état d’une forte intensification de la confrontation armée au Haut-Karabagh le 19 septembre dernier, causant la mort de civils ainsi que de cinq soldats de maintien de la paix russes et une aggravation de la situation humanitaire.  Malgré cette situation difficile, le contingent russe s’efforce de protéger la population et, avec la coopération des représentants arméniens du Karabakh et des autorités azerbaïdjanaises, de faire cesser les hostilités a-t-il assuré.  Quelque 5 000 civils ont été évacués des zones les plus dangereuses, dont plus d’un millier d’enfants, et reçoivent une aide humanitaire. 

Dans ce contexte, le représentant a considéré toute tentative d’accuser son pays d’inaction comme « infondée et absolument inacceptable ».  Un accord a été conclu le 20 septembre sur la cessation complète des hostilités et le début des négociations entre les représentants de la population arménienne du Haut-Karabakh et l’Azerbaïdjan, a-t-il indiqué.  La priorité absolue est désormais d’empêcher la reprise des hostilités et de ramener la situation sur le terrain politique et diplomatique, a-t-il ajouté.

La Fédération de Russie continue de jouer un rôle de premier plan dans le processus de normalisation des relations entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, et tient plus que quiconque à la résolution rapide de la crise, a affirmé le représentant, qui a rappelé que le Président russe s’est entretenu avec son homologue azerbaïdjanais et le Premier Ministre arménien.  Pour la Fédération de Russie, la réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan devrait s’accompagner de garanties de sécurité et du respect des droits de la population du Haut-Karabakh.  En 2022, a rappelé le délégué, Erevan a reconnu que le Haut-Karabakh fait partie du territoire de l’Azerbaïdjan à l’occasion des sommets organisés sous les auspices de l’Union européenne.  Toutefois, a-t-il ajouté, les déclarations issues de ces sommets, signées par l’Arménie, ne faisaient pas mention de la nécessité de garantir les droits et la sécurité de la population arménienne du Haut-Karabakh. 

Pour le représentant, il faut maintenant élaborer une feuille de route en vue de l’intégration juridique de la population du Haut-Karabakh à l’Azerbaïdjan, assortie de garanties de sécurité strictes.  Les déclarations des sommets trilatéraux pour 2020-2022, qui ont jeté les bases juridiques du processus de normalisation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, restent le fondement d’un règlement durable de la crise.  « Il n’existe pas d’alternative au rôle du contingent russe de maintien de la paix dans la région », a-t-il ajouté. Dans l’intervalle, la Fédération de Russie entend faciliter la normalisation des relations entre les deux pays, y compris l’élaboration d’un traité de paix, le déblocage des voies de communication, la délimitation de la frontière et l’établissement de contacts humanitaires.

M. SERGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a profondément regretté la montée des tensions et la perte de vies humaines résultant des violences de mardi dernier dans le Haut-Karabakh.  Condamnant des « actions unilatérales », il a dénoncé les attaques contre des zones peuplées, qui ont fait des dizaines de victimes, y compris des civils et des soldats de la paix russes, mettant en péril la fragile stabilité obtenue après le cessez-le-feu de 2020.  Saluant le cessez-le-feu conclu hier, il a exhorté les parties à s’efforcer de sauvegarder les droits et la sécurité de la population civile et à éviter toute nouvelle escalade. 

Le délégué a fait part de son appui à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan.  Conscient que le conflit dure depuis des générations, il a jugé essentiel d’éviter la logique de représailles et de s’abstenir de toute tentative de modifier le statut politique du territoire par la force. 

Réitérant l’appel du Brésil à la réouverture du corridor de Latchine, afin que les civils bénéficient d’un accès sans entrave à la nourriture et aux médicaments, il a demandé instamment à toutes les parties d’explorer les mécanismes permettant d’éviter l’isolement.  L’acheminement de l’aide humanitaire par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) via le corridor de Latchine et la route d’Aghdam, en début de semaine, est un signe positif, a-t-il dit. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a déclaré que rien ne saurait justifier le recours à la force militaire, en violation du droit international et du droit humanitaire international, ainsi que des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies.  Il a appelé à la mise en œuvre du cessez-le-feu récemment et a souhaité que celui-ci serve de moyen de désescalade des tensions, en vue d’obtenir les garanties nécessaires de sécurité et de stabilité pour les habitants de la région.  Il a ensuite attiré l’attention du Conseil sur le problème de la liberté de circulation dans le corridor de Latchine, et de ses répercussions graves sur la situation humanitaire.  Le représentant a jugé essentiel de faciliter l’accès sans restriction à l’aide humanitaire afin d’éviter que la situation de la population civile ne se détériore.  Le représentant a ensuite appelé les parties à reprendre le dialogue et les négociations sous l’égide du Groupe de Minsk de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe  (OSCE), entre autres.

M. GENG SHUANG (Chine) a appelé au respect du cessez-le-feu pour qu’un retour au calme devienne effectif le plus tôt possible et que l’acheminement humanitaire puisse parvenir sans entrave vers les populations dans le besoin. Ces deux pays voisins ne peuvent pas s’éloigner l’un de l’auteur, ils doivent reprendre la voie du dialogue dans l’intérêt de leur population et de la sécurité régionale et internationale, a ajouté le délégué.  Il les a assurés de l’appui de la Chine à tous les efforts diplomatiques qui seront engagés pour régler le différend, conformément aux normes du droit international et dans le cadre des accords conclus préalablement entre les parties. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a déclaré que l’opération « antiterroriste » menée par l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh il y a deux jours rappelle la fragilité de la paix dans la région.  Elle s’est toutefois dite encouragée par l’accord de cessez-le-feu conclu entre les parties et fait sien les appels en faveur de la cessation immédiate des hostilités. En cette période marquée par la multiplication des défis sécuritaires, le continent européen et le reste du monde ne peuvent guère se permettre une nouvelle escalade des tensions dans l’enclave, a-t-elle souligné.  Elle a donc encouragé les parties à faire preuve de retenue et à coopérer avec le contingent russe de maintien de la paix dans le cadre des accords convenus antérieurement. 

S’agissant de la réintégration du Haut-Karabakh à l’Azerbaïdjan, la représentante a préconisé une approche fondée sur la réconciliation et le dialogue.  Ces développements ne doivent pas faire dérailler les accords de cessez-le-feu antérieurs, ni les progrès réalisés en vue d’un règlement global du différend entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, a-t-elle prévenu, évoquant notamment la démarcation des frontières.  La déléguée a ensuite réitéré son appel en faveur d’un accès humanitaire sans entrave aux personnes dans le besoin et de la libre circulation des personnes, des marchandises commerciales et des transports le long du corridor de Latchine. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) s’est dit très préoccupé par l’escalade de la violence militaire au Haut-Karabakh ayant conduit à des dizaines de morts et des centaines de blessés, dont des civils et des soldats de maintien de la paix russes.  Il s’est inquiété de la crise humanitaire que traverse la population de cette région. Appelant les parties à mettre un terme à la violence, il s’est félicité de l’accord de cessez-le-feu atteint hier entre l’Azerbaïdjan et les représentants de la population du Haut-Karabakh, sous l’égide de la force de maintien de la paix russe.  Il a exhorté les parties à respecter cet accord ainsi que la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020 qui avait alors permis la fin des hostilités.

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a condamné les combats qui ont éclaté entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, causant de nombreux morts et des déplacements de population.  Ces événements surviennent alors que la reprise des convois humanitaires des dernières semaines au Haut-Karabakh laissait entrevoir des signes de désescalade. La reprise des hostilités ne fait selon elle que compliquer le règlement politique de la crise et aggraver la situation humanitaire.  À ses yeux, seule une solution politique fondée sur la mise en œuvre de l’accord tripartite de 2020 permettra de « sortir de ces cycles de violence meurtrière », de mettre en œuvre le cessez-le-feu et de parvenir à un règlement durable du conflit.  La représentante a exprimé l’espoir que l’accord de cessez-le-feu conclu hier et les négociations en cours permettront de ramener la paix dans l’enclave, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des parties. Enfin, elle a appelé celles-ci à faciliter l’accès humanitaire sans entrave aux personnes dans le besoin. 

M. HAMAMOTO YUKIYA (Japon) a exprimé sa profonde préoccupation face à la détérioration de la situation et a appelé à la cessation immédiate des hostilités, l’Azerbaïdjan devant mettre un terme à ses activités militaires. Tout changement unilatéral visant à aggraver la situation n’est pas acceptable, a ajouté le représentant.  Il a noté que, pas plus tard qu’hier, il a été convenu de suspendre toute activité militaire, ajoutant toutefois que, même si la confrontation a cessé, la situation sur le terrain reste incertaine. 

Dans ces conditions, le Conseil de sécurité doit rester saisi de cette situation pour peser positivement sur la suite des événements, a estimé le représentant. À ses yeux, le Conseil doit tout particulièrement suivre de près l’évolution de la situation humanitaire au Haut-Karabakh, la vie des personnes les plus vulnérables, notamment les personnes malades, les personnes âgées, les femmes et les enfants, ne devant y être en aucun cas menacée.  L’accès humanitaire des organisations internationales doit être assuré pour protéger la sécurité et les besoins de la population locale, a-t-il ajouté. 

M. IGLI HASANI, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, s’est inquiété des récents développements sur le terrain, notant que les arguments avancés par les parties divergent fortement.  Alors que l’Azerbaïdjan estime que l’Arménie organise des actes subversifs qui le pousse à lancer des mesures de lutte contre le terrorisme, pour l’Arménie, il s’agit d’une attaque militaire de grande envergure contre la population civile d’origine arménienne du Haut-Karabakh, a-t-il analysé.  Cela reflète l’énorme méfiance et le fossé qui existent entre les deux parties.  Il a appelé les parties à accorder la priorité à la protection des civils et à la préservation des zones résidentielles et des infrastructures civiles.  C’est une obligation en vertu du droit international, leur a-t-il rappelé avant d’appeler à la retenue, au calme, et au dialogue.  S’agissant de l’accord de cessez-le-feu qui a été conclu hier, le Ministre s’est félicité que « la raison a triomphé » et a appelé à son respect.  De même, il a salué la tenue aujourd’hui, à Yevlakh, de la réunion entre les représentants du Gouvernement central azerbaïdjanais et les représentants de l’ethnie arménienne qui y vit.  Les premiers résultats sont encourageants, a-t-il constaté en incitant les parties à s’appuyer sur ces résultats et à aller de l’avant pour trouver des solutions appropriées et mutuellement acceptables. 

M. ARARAT MIRZOYAN, Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a fait observer que « l’agression planifiée » de l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh avait été lancée le 19 septembre, au moment même où l’Assemblée générale commençait à débattre des moyens de sauvegarder la Charte des Nations Unies.  Cette opération militaire a placé la totalité du territoire sous les tirs indiscriminés de missiles et d’artilleries, a-t-il ajouté, accusant l’Azerbaïdjan d’avoir utilisé ces armes illégales au regard du droit international et du droit international humanitaire que sont les armes à sous-munition. 

Pour le Ministre, l’intensité et la cruauté de l’offensive montrent clairement que l’agression « barbare » de l’Azerbaïdjan, qui a pris pour cible délibérée les populations et les infrastructures civiles, constitue l’acte final d’une tragédie visant l’exode irréversible des habitants du Haut-Karabakh et le parachèvement du nettoyage ethnique de la population arménienne de la région.  Il a décrit l’agression actuelle comme étant le point culminant d’un blocus de dix mois du corridor de Latchine et de la famine forcée imposée à la population du Haut-Karabakh, avant d’évoquer la grave pénurie de nourriture, de médicaments, de carburant, de gaz naturel, d’électricité et d’autres biens essentiels qui a précipité les populations vulnérables du territoire au bord de la catastrophe humanitaire. 

Lorsque l’Azerbaïdjan a bloqué le corridor de Latchine et que l’Arménie a appelé à une réunion urgente du Conseil de sécurité des Nations Unies en décembre 2022, celui-ci n’a pas réagi de manière adéquate, a déploré M. Mirzoyan. Pour lui, maintenant que l’Azerbaïdjan a recommencé à recourir à la force contre la population du Haut-Karabakh, que cette population est expulsée de force de ses maisons et risque de l’être expulsée de son pays; maintenant que beaucoup de ceux qui défendent leurs familles et leur droit à vivre librement et dignement dans leur pays depuis trente ans risquent d’être arrêtés et poursuivis en masse; et maintenant qu’abondent les preuves irréfutables qu’une politique de nettoyage ethnique et d’atrocités massives est en cours, « le Conseil de sécurité des Nations Unies doit agir ». 

Le Ministre a ainsi exhorté le Conseil à condamner la reprise des hostilités et le ciblage des infrastructures civiles, à exiger le plein respect des obligations découlant du droit international humanitaire, y compris celles liées à la protection des civils, en particulier des femmes et des enfants, et des infrastructures civiles critiques, et à déployer immédiatement une mission interinstitutionnelle de l’ONU au Haut-Karabakh.  Celle-ci aurait pour but de surveiller et d’évaluer la situation humanitaire, sécuritaire et des droits humains, d’assurer un accès sans entrave des agences des Nations Unies et d’autres organisations internationales au Haut-Karabakh, conformément aux principes humanitaires, et d’assurer le retour dans leur foyer des personnes déplacées au cours de l’agression actuelle, ainsi qu’à la suite de la guerre de 2020. 

Il faut en outre exiger le rétablissement immédiat de la liberté et de la sécurité de circulation des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Latchine, conformément aux ordonnances de la CIJ, a insisté le Ministre.  Il a, de même, plaidé pour la mise en place d’un mécanisme international de dialogue entre les représentants du Haut-Karabakh et les responsables de Bakou pour aborder les questions liées aux droits et à la sécurité des Arméniens du territoire.  M. Mirzoyan a enfin demandé que soit examiné la possibilité d’établir une force de maintien de la paix mandatée par les Nations Unies pour que soient assurées de façon pérenne la stabilité et la sécurité au Haut-Karabakh.

M. JEYHUN AZIZ OGLU BAYRAMOV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a déploré la tentative de l’Arménie d’exploiter le Conseil de sécurité afin de tromper la communauté internationale, y voyant un « abus irresponsable » et une violation flagrante de la Charte des Nations Unies. En fait, a-t-il poursuivi, cette réunion survient alors que les mesures antiterroristes ont déjà pris fin et que le dialogue en vue de la réintégration à l’Azerbaïdjan des Arméniens de souche du Garabagh a commencé concrètement sur le terrain.  Lors d’une réunion tenue aujourd’hui, le représentant spécial de l’Azerbaïdjan pour le dialogue avec les résidents arméniens a d’ailleurs présenté les plans du Gouvernement en matière de réintégration et traité des questions liées à la restauration des infrastructures.  À la demande des résidents arméniens, la livraison de carburant pour les écoles, les hôpitaux et autres services d’urgence, ainsi que l’aide humanitaire, devraient reprendre prochainement, a-t-il annoncé. 

Or, un tel dialogue était auparavant impossible en raison de « l’obstruction » de la partie arménienne, a déclaré le Ministre, qui s’appuyait sur une forte présence militaire illégale sur le sol souverain de l’Azerbaïdjan. Pour lui, ce que l’Arménie tente de présenter comme une attaque contre les résidents pacifiques de la région n’est en fait qu’une mesure antiterroriste visant à désarmer les formations armées stationnées illégalement sur le territoire azerbaïdjanais.  De même, la tentative de l’Arménie d’accuser son pays de violer la déclaration trilatérale du 10 novembre 2020 est également sans fondement.  Le Ministre a accusé l’Arménie d’avoir maintenu un nombre considérable d’effectifs équipés d’armes lourdes sur le territoire de l’Azerbaïdjan, notamment en abusant du corridor de Latchine.  Il a ensuite détaillé l’important matériel neutralisé en seulement 24 heures, photos à l’appui, en affirmant qu’aucun État souverain ne tolérerait une présence militaire illégale aussi importante sur son sol. 

Bakou a mis en garde depuis plusieurs semaines contre « l’aventure militaire imminente » de l’Arménie, a rappelé le Ministre, qui a énuméré les multiples violations de la Déclaration trilatérale par les formations armées arméniennes, présentées comme la preuve que l’Arménie n’a pas abandonné ses revendications territoriales contre son pays et qu’elle n’a pas l’intention de cesser d’alimenter le séparatisme sur son territoire. 

M. Bayramov a rappelé qu’à la suite d’efforts diplomatiques internationaux, y compris de la part de membres du Conseil de sécurité, une livraison de biens humanitaires via les corridors d’Aghdam et de Latchine a finalement été effectuée le 18 septembre par le CICR, après des semaines de retards « artificiels » causés selon lui par des obstructions illégitimes de l’Arménie et de son « régime fantoche ».  Pour le Ministre, après avoir échoué à imposer son « faux discours » humanitaire à la communauté internationale, l’Arménie a eu recours à la provocation militaire dès le lendemain, dans l’espoir qu’un regain de tension l’aiderait à rejeter la faute sur Bakou.  Présentant de nouveau des photos, il a dénoncé les explosions meurtrières perpétrées par un groupe de sabotage arménien qui ont coûté la vie à deux civils et quatre policiers azerbaïdjanais.  C’est donc en réponse à ces actes subversifs que les forces armées azerbaïdjanaises ont lancé des mesures antiterroristes.  Selon M. Bayramov, ces mesures visaient exclusivement à neutraliser des cibles militaires sur son territoire souverain. Il a rejeté les accusations selon lesquelles des civils auraient été ciblés délibérément par les forces armées azerbaïdjanaises, ainsi que toute notion de « nettoyage ethnique ». 

La protection des installations administratives, sociales, éducatives, médicales et religieuses arméniennes seront dorénavant assurées conformément aux lois de l’Azerbaïdjan et aux normes du droit international humanitaire, a assuré le Ministre.  Les mesures antiterroristes ont donc atteint leurs objectifs, ce qui aurait pu se faire de manière pacifique si l’Arménie avait honoré ses engagements au titre de la Déclaration trilatérale.  De fait, la présence militaire « illégale et continue » de l’Arménie sur le territoire de l’Azerbaïdjan demeure selon lui l’obstacle le plus sérieux au processus de normalisation entre les deux pays. Malgré ces défis, il a réaffirmé une fois de plus sa volonté d’entreprendre de véritables négociations avec son voisin, sur la base du respect des intérêts légitimes de chacun. 

Mme ANNALENA BAERBOCK, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a affirmé que beaucoup trop de personnes avaient été tuées en l’espace de deux jours seulement, tandis que des milliers d’autres avaient été contraintes de fuir leur domicile.  « L’Azerbaïdjan a choisi de créer des faits accomplis par la force », a-t-elle constaté, condamnant fermement l’assaut de Bakou et l’appelant à cesser définitivement et complètement ses opérations militaires.  Prenant note des informations faisant état d’un cessez-le-feu, elle en a appelé à un arrêt complet de la violence. « L’Azerbaïdjan a la responsabilité de protéger de manière fiable et complète la population civile vivant dans le Haut-Karabakh », a-t-elle martelé, ajoutant que l’exode forcé des Arméniens du Karabakh n’était pas acceptable. 

Estimant « difficile d’imaginer les difficultés qu’endure la population du Haut-Karabakh depuis « la fermeture effective du corridor de Latchine par les autorités de Bakou », elle a regretté que juste au moment où des fournitures humanitaires avaient enfin été autorisées à entrer dans le Haut-Karabakh, Bakou n’ait pas tenu ses promesses répétées de s’abstenir de recourir à la force.  Elle a appelé à maintenir le corridor de Latchine ouvert pour des raisons humanitaires, mais aussi parce qu’« il constitue un pont culturel et social pour les Arméniens de souche vivant au Haut-Karabakh ».  La Ministre a demandé instamment à l’Azerbaïdjan et à l’Arménie de reprendre le dialogue en vue d’une paix durable grâce à la médiation de l’Union européenne.  « Aucun pays ne doit utiliser cette situation pour déstabiliser la démocratie arménienne », a-t-elle averti. 

M. BURAK AKÇAPAR, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Türkiye, a rappelé que des pourparlers commençaient et qu’une paix « juste et durable » semblait enfin se dessiner.  Il a appelé toutes les parties, les tierces parties et les acteurs internationaux à tirer parti de l’occasion offerte de contribuer au règlement de ce conflit, rappelant que la Türkiye avait lancé un processus de normalisation avec l’Arménie. 

Le Vice-Ministre a toutefois estimé qu’au cours des trois dernières années, la partie arménienne avait rechigné à pleinement mettre en œuvre l’accord trilatéral de 2020.  Il a regretté que malgré l’accord, des activités militaires se soient ensuite poursuivies au Haut-Karabakh et que des armes lourdes aient été utilisées contre la population de l’Azerbaïdjan, estimant que ce dernier avait essayé de régler la situation par le dialogue avec l’Arménie, se heurtant à une attitude non coopérative.  Le délégué a également affirmé que les démarches pour réintégrer la population arménienne de la région au sein de l’Azerbaïdjan avaient été refusées. Dénonçant des accusations infondées lancées par la partie arménienne, basées sur des rapports de soi-disant experts, il a estimé que cela contrevenait aux tentatives de négocier de bonne foi. 

« Après avoir souffert de cette situation pendant trois ans, l’Azerbaïdjan n’avait pas d’autre choix que de prendre les mesures qu’il estimait nécessaire pour sa propre sécurité », a affirmé M. Akçapar.  Il a rappelé que, quelques heures avant le début des opérations, l’Azerbaïdjan avait perdu sept civils dans deux explosions de mines installées par des groupes armés.  Il a souhaité que les contacts en cours permettent de mettre fin à conflit ancien et a lancé un appel pour que les résidents arméniens du Haut-Karabakh vivent en paix en Azerbaïdjan.  Il a également appelé l’Arménie à ne pas répéter ses erreurs passées et à ne pas manquer une occasion historique d’aboutir à la paix. 

M. JOSEP BORRELL FONTELLES, Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a déclaré que l’Azerbaïdjan a la responsabilité de garantir le plein respect des droits et de la sécurité des Arméniens du « Karabakh ».  Il a souligné que le recours à la force pour résoudre les différends n’est pas acceptable, et a condamné l’opération militaire menée par l’Azerbaïdjan, déplorant les victimes et les pertes en vies humaines causées par cette escalade.  Il a pris note des annonces respectives de cessez-le-feu et espéré que la cessation des hostilités sera maintenue.  Il a souligné que la population locale a un besoin urgent d’aide humanitaire et a appelé au respect de ses droits et de sa sécurité. 

Il a demandé à l’Azerbaïdjan de garantir un accès humanitaire sans entrave à la population civile dans le besoin, notamment par la réouverture complète du corridor de Latchine, la Commission européenne ayant annoncé le décaissage d’urgence d’une aide humanitaire de 500 000 euros. L’Azerbaïdjan doit également s’engager dans un dialogue transparent avec les Arméniens du Haut-Karabakh pour que soient garantis leurs droits et leur sécurité, y compris leur droit de vivre dignement dans leur foyer, a-t-il insisté.  Il a rappelé que l’UE soutient pleinement la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie avant d’appeler à la reprise des négociations entre ces deux pays sur toutes les questions en suspens, afin de conclure un traité de paix.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: les pays les moins avancés exposent leurs griefs et réclament des réformes du système financier mondial pour bâtir leur futur

Soixante-dix-huitième session,
8e et 9e séances plénières – matin & après-midi
AG/12534

Assemblée générale: les pays les moins avancés exposent leurs griefs et réclament des réformes du système financier mondial pour bâtir leur futur

Les appels à de profonds changements se sont poursuivis en ce troisième jour de débat général de l’Assemblée générale des Nations Unies.  Outre la réforme du Conseil de sécurité, il a aujourd’hui beaucoup été question de réformer l’architecture financière internationale: des initiatives réclamées d’urgence par les pays les moins avancés (PMA), dont 15 se sont exprimés aujourd’hui. 

Il ne suffit pas d’appeler à la prospérité pour tous si les règles commerciales et les systèmes financiers aggravent la pauvreté des nations, a ainsi sèchement souligné le Président du Malawi, un PMA en proie au choléra, à la sécheresse et aux cyclones.  « Annulez les dettes »! a-t-il d’ailleurs scandé à la tribune, affirmant que seul ce type d’actes forts pourrait permettre de rattraper les pertes économiques de la pandémie de COVID-19 et les deux années de progrès perdues à cause de la guerre en Ukraine.  D’ici là, il compte continuer de « frapper aux portes des institutions financières qui restent trop lentes, trop insensibles et trop rigides ». 

Même son de cloche de son homologue zimbabwéen, qui a parlé d’une architecture « excluante », incapable de fournir aux PMA les ressources nécessaires pour les aider à financer leur développement en matière de santé et d’environnement.  Outre l’annulation et la restructuration de la dette, le dirigeant a réclamé des prêts concessionnels à long terme ainsi qu’un accès accru aux droits de tirage spéciaux (DTS) non utilisés.  « Pour rétablir la confiance, il est impératif que le Nord tienne ses promesses et écoute les voix du Sud », a ajouté le Chef de l’État tanzanien; mais il a concédé que le Sud devrait aussi, de son côté, augmenter ses recettes nationales en mettant fin à l’hémorragie de ses ressources naturelles et aux sorties illicites de capitaux. 

L’aide publique au développement (APD) a, elle aussi, été brocardée.  « Politiquement orientée », elle est synonyme d’aumône organisée, a lancé le Président du Congo, qui a ironisé sur « les subventions au compte-goutte, distillées au rythme des intérêts propres des donateurs ».  Le dirigeant du Burundi a dit ressentir aussi de la « mauvaise foi » dans cette forme d’aide, puisqu’en parallèle, les ressources offertes pour assurer la relance de son pays –et son indépendance économique- régressent. 

Sur le plan de la gouvernance, il n’a pas échappé au Président de la Guinée qu’après la pandémie de COVID-19, l’Afrique est aujourd’hui frappée par une « épidémie de coups d’État », en particulier les pays francophones du sud du Sahara.  Il l’a expliquée par des promesses non tenues, par l’apathie de la population et le « tripatouillage des constitutions » aux dépens des intérêts nationaux, ainsi que par la mauvaise répartition de la richesse.  Dénonçant l’héritage politique des pays colonisateurs et l’imposition insidieuse et inefficace du modèle démocratique aux Africains, il n’en a pas moins mis en garde ses homologues contre la corruption des élites africaines.  Car le putschiste, a glissé le dirigeant guinéen, n’est pas seulement celui qui prend les armes pour renverser un régime, mais également ceux, « plus nombreux », qui ont recours à la duplicité pour « manipuler la Constitution afin de se maintenir éternellement au pouvoir ». 

Le conflit au Soudan a par ailleurs préoccupé les dirigeants des pays voisins.  Le Président de la République centrafricaine a ainsi relevé que 51 077 réfugiés soudanais et tchadiens avaient déjà été enregistrés dans la préfecture centrafricaine de la Vakaga, exposant sa population à des risques humanitaires et sécuritaires.  Son homologue du Soudan du Sud a aussi indiqué que l’afflux de réfugiés soudanais et de rapatriés du Soudan du Sud avait mis à rude épreuve les communautés sud-soudanaises.  Le dirigeant soudanais a répondu en affirmant faire son possible pour mettre fin à la guerre, attribuant les échecs des négociations à l’« intransigeance » des rebelles, qu’il souhaite voir désignés comme « groupes terroristes » par la communauté internationale.  Rappelant que son gouvernement avait accepté l’initiative de paix lancée par le Soudan du Sud, l’Ouganda et la Türkiye, il a concédé que la guerre touchait massivement les populations civiles et pouvait embraser toute la région.  Il a lancé un appel pour obtenir aide alimentaire, médicaments et abris: « nos besoins sont énormes », a-t-il déclaré. 

Le dirigeant d’un autre pays en proie à un conflit meurtrier, le Chef de l’État yéménite, a appelé la communauté internationale à veiller à ce que les fonds destinés au Yémen ne tombent pas dans l’escarcelle des rebelles houthistes, « lesquels continuent de violer le système bancaire et de mener des actions de blanchiment ». Faute de cette assistance, les institutions du Yémen resteront faibles et sous-financées, a averti le Président. 

En écho aux appels des PMA, le Président du Conseil européen a appelé à accroître la capacité de prêt des institutions financières internationales, rappelant qu’en 60 ans, le pouvoir de financement de la Banque mondiale, proportionnellement à la production mondiale, avait été divisé par 7.  La Ministre des affaires étrangères de la France a appelé tous les États à endosser le « Pacte de Paris pour les peuples et la planète » qui prévoit notamment la réallocation de 100 milliards de DTS. 

Les efforts nationaux ne suffiront pas à eux seuls à garantir le succès des objectifs de développement durable (ODD), a prévenu le Président de Sri Lanka qui, comme les PMA, a plaidé pour une solidarité mondiale et averti qu’une absence de restructuration de l’ordre budgétaire mondial ferait échouer la lutte contre les changements climatiques.  « Il est encore temps de rectifier le tir car la crise n’a pas atteint son paroxysme », a-t-il voulu croire, en misant sur le prochain Sommet de l’avenir en 2024. 

Aspirant lui aussi à un avenir meilleur, le Président de l’État de Palestine a rappelé que le processus de paix israélo-palestinien se trouve dans une impasse « en raison de la politique israélienne ».  Il a exhorté l’ONU et son Secrétaire général à convoquer une conférence de paix afin de sauver la solution des deux États et empêcher une détérioration de la situation qui menacerait « non seulement la région, mais aussi le monde entier ». 

Le débat général de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale reprendra demain, vendredi 22 septembre, à 9 heures.

SUITE DU DÉBAT GENERAL

Déclarations

M. RASHAD MOHAMMED AL-ALIMI, Président du Conseil présidentiel du Yémen, a expliqué que son pays reste concentré sur la recherche de la paix afin de faire cesser les souffrances du peuple yéménite, rétablir la confiance dans les institutions nationales et continuer le développement durable.  Saluant les pays qui soutiennent l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale du Yémen, le Président a remercié tout particulièrement l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis pour leur solidarité.  L’appui de ces « pays frères » a empêché l’effondrement complet de nos institutions attaquées par les milices houthistes soutenues par l’Iran, a-t-il affirmé, reconnaissant toutefois qu’en dépit de cette dynamique régionale et internationale, « les problèmes demeurent ».  Il a d’autre part exprimé sa gratitude à l’Arabie saoudite, au Sultanat d’Oman et à l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour leurs efforts de médiation, formant l’espoir que les houthistes admettront que seul un État fondé sur l’état de droit peut permettre de rétablir la stabilité et la sécurité. 

Pour l’heure, le Président a appelé la communauté internationale à la méfiance quant aux intentions des houthistes, mettant en garde contre tout « autosatisfecit » lié aux accords passés avec les miliciens.  Selon lui, les houthistes utilisent les accords de paix comme moyen de gagner du temps et des ressources.  Il faut donc obtenir des garanties solides et s’assurer que tout accord de paix débouche sur des résultats tangibles, a-t-il souhaité.  Les victimes doivent en bénéficier en priorité, mais il convient également de ranimer la confiance du peuple dans les institutions légitimes et de reconstruire des relations de voisinage, notamment avec les pays du Conseil de coopération du Golfe, a poursuivi le Chef de l’État.  Dans le même temps, il a jugé important de renforcer l’économie du pays pour que le Gouvernement puisse fournir des services et mettre fin à l’action des milices. Pour cela, a-t-il dit, les grandes puissances doivent envoyer un message fort aux houthistes, leur disant de ne pas renverser le système constitutionnel.  De même, pour permettre au pays de passer des secours d’urgence au développement durable, la communauté internationale doit veiller à ce que les fonds destinés aux institutions nationales ne tombent pas dans les mains des houthistes, « lesquelles continent de violer le système bancaire et de mener des actions de blanchiment ». 

Faute de cette assistance, les institutions du Yémen resteront faibles et sous-financées, a averti le Président, pour qui chaque report de l’aide internationale occasionne des souffrances supplémentaires pour les Yéménites. À cet égard, il a signalé que le budget de l’État yéménite ne peut plus faire face aux besoins, en raison notamment des attaques houthistes contre les installations pétrolières du pays.  S’il n’y avait pas les donations de l’Arabie saoudite, nous ne pourrions pas honorer nos obligations de base, a-t-il expliqué, non sans saluer les annonces de contributions des Émirats arabes unis, des États-Unis et de l’Union européenne.  Appelant en outre la communauté internationale à condamner les ingérences du « régime iranien » et de le soumettre à des sanctions, il a signalé une augmentation des attaques houthistes en mer Rouge et dans le golfe d’Aden.  Ces actions visent à déstabiliser la région et à saper tout processus politique, a dénoncé le Président, qui a aussi demandé aux États Membres de respecter l’embargo sur les armes et d’empêcher l’Iran de fournir des capacités militaires aux houthistes.  Enfin, après avoir réaffirmé l’attachement du Yémen aux traités internationaux dont il est partie, en particulier dans le domaine des droits humains, il a exprimé son soutien au peuple palestinien et a adressé ses condoléances à la Libye et au Maroc. 

M. FAUSTIN ARCHANGE TOUADERA, Président de la République centrafricaine, a d’abord exprimé sa solidarité aux peuples du Maroc et de la Libye, durement frappés par des catastrophes naturelles.  Il a espéré que ces catastrophes interpellent la communauté scientifique quant à l’urgence d’identifier les régions du monde vulnérables aux événements climatiques extrêmes et de donner les informations nécessaires aux États concernés afin d’en limiter les dégâts.  Il a également évoqué l’arrivée massive de milliers de jeunes Africains sur l’île italienne de Lampedusa, à la recherche d’un eldorado en Europe, conséquence selon lui des pillages des ressources des pays d’Afrique, des ravages de la colonisation, de l’esclavage et de l’impérialisme occidental.  Il a cependant salué la solidarité internationale et l’action de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) dans cette tragédie. 

M. Touadera a ensuite évoqué le confit armé interne « d’une rare cruauté » qui a éclaté au Soudan en avril dernier, alors même que le pays était sur la voie de la normalisation.  Il a noté que 51 077 réfugiés soudanais et tchadiens ont déjà été enregistrés dans la préfecture centrafricaine de la Vakaga, ce qui expose la population de son pays, « certes résiliente », à des risques d’aggravation de la situation humanitaire et d’insécurité.  Le Président en a appelé à la solidarité internationale en faveur des réfugiés et à prendre en compte l’impact de cette crise sur la géopolitique régionale. 

La persistance des conflits dans le monde, comme en Ukraine, a-t-il poursuivi, soulève des interrogations quant à l’efficacité de certains mécanismes de prévention et de règlement pacifique des différends.  C’est pourquoi M. Touadera a réaffirmé sa volonté de réforme du Conseil de sécurité, afin d’en augmenter le nombre de membres africains permanents et non permanents. « Ce ne sera que justice », a-t-il déclaré. 

Il a également dénoncé les blocus économiques unilatéraux frappant le peuple centrafricain avec la reconduction, le 29 juillet 2023, de l’embargo sur les armes contre le pays.  Une « décision cynique », selon lui, « motivée par des rapports fallacieux et tronqués », qui traduisent une volonté d’instrumentaliser les régimes des sanctions à des fins de pression politique.  À travers les embargos sur les armes et diamants reconduits depuis plus de 10 ans, il ne s’agit rien de moins pour le Président centrafricain que de pérenniser l’insécurité et la mainmise sur les ressources naturelles du pays au profit de puissances étrangères, peu importe que ces embargos compromettent gravement les capacités du pays à réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Concernant les changements climatiques, il a regretté que les promesses de financement des pays historiquement émetteurs ne bénéficient pas aux « victimes innocentes » de la surexploitation des ressources comme la République centrafricaine. 

Enfin, M. Touadera a dénoncé les campagnes de désinformation et de dénigrement menées par certains médias occidentaux contre son pays.  Le 30 juillet dernier, une nouvelle Constitution a été adoptée par son peuple avec une majorité écrasante de 95,3% et un taux de participation de plus de 57%, a-t-il fait valoir avant d’assurer que le Gouvernement poursuit l’exécution de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.  Il a dissous neuf groupes armés, s’est-il félicité.

M. LAZARUS McCARTHY CHAKWERA, Président du Malawi, a fait remarquer que lorsque les dirigeants du monde parlent d’avenir à la tribune de l’Assemblée générale, ils parlent d’un avenir qui ne leur appartient pas, mais qui appartient à leurs enfants et petits-enfants.  Il ne suffit pas d’appeler à la prospérité pour tous, a-t-il poursuivi, si les règles commerciales et les systèmes financiers continuent d’aggraver la pauvreté des autres nations.  Pour ce qui concerne son pays, il a parlé de son plan de mise en œuvre des 17 ODD, qui lui a permis d’être en bonne voie sur cinq d’entre eux (faim, santé, éducation, eau et vie aquatique), tout en regrettant que les autres n’aient encore pu être atteints.  Soulignant que son pays avait besoin de soutien pour sauvegarder ces progrès réalisés et renforcer la résilience de son économie, il a expliqué que le Malawi avait connu cette année à la fois la pire épidémie de choléra de son histoire, une sécheresse entraînant des pertes agricoles importantes et un cyclone faisant plus d’un millier de morts et un demi-million de déplacés. 

Les PMA ont besoin de décisions et d’actions sur le financement climatique, a-t-il rappelé, exigeant des actes forts s’agissant de l’annulation de leurs dettes.  « Annulez les dettes! » a martelé le Président à la tribune, en rappelant que seul ce type de mesures pourrait permettre de rattraper les pertes économiques de la pandémie de COVID-19 et les deux années supplémentaires de progrès « perdues à cause de la guerre en Europe de l’Est ».  L’argent dépensé pour le service de la dette devrait plutôt servir à la reconstruction des routes, écoles, hôpitaux, entreprises et moyens de subsistance, a-t-il déclaré.

M. Chakwera a indiqué que son pays voulait non seulement renforcer sa résilience économique, mais aussi continuer, pour combler les déficits de financement des ODD, à « frapper aux portes des institutions financières qui restent trop lentes, trop insensibles et trop rigides ».  Si le Malawi est attaché à un système international fondé sur des règles, ces règles, qui ont longtemps joué contre les PMA, doivent être changées, a-t-il prié.  C’est pourquoi le Malawi est également favorable à une « réforme radicale » du Conseil de sécurité, a-t-il poursuivi, fondée sur des valeurs de démocratie, d’inclusion, de responsabilité et de confiance.  Il a relevé à cet égard, comme un élément significatif, qu’à l’occasion de cette session de l’Assemblée générale axée sur la confiance et la solidarité, un seul chef d’État parmi les membres permanents du Conseil, le Président des États-Unis, s’était présenté à la tribune. « Ce n’est pas ainsi que l’on construit la confiance et que l’on fait preuve de solidarité. »  Faisant écho aux mots du Président Joseph Biden, il a insisté sur le fait que l’Afrique devait avoir des sièges permanents au Conseil de sécurité de l’ONU avec droit de veto. 

Le Président du Malawi a conclu son intervention en appelant de ses vœux une ONU réformée et un « nouveau paradigme de développement » qui tienne compte des intérêts du monde en développement, en matière d’innovation, de résilience climatique, de développement des capacités de chaque continent à faire face aux futures pandémies, et qui encourage les jeunes à prendre les commandes pour atteindre les ODD.

M. TANETI MAAMAU, Président de Kiribati, s’est félicité que cette session de l’Assemblée générale vise à « reconstruire la confiance et raviver la solidarité mondiale ».  Face aux tensions, aux disparités économiques et aux défis provoqués par les pandémies, les crises et les catastrophes climatiques, cet appel souligne la nécessité pour les pays de rétablir la confiance dans la coopération et la diplomatie multilatérales, a-t-il salué, appelant à un engagement mutuel pour forger des partenariats stratégiques.  Il a souligné le fait qu’aucune nation ne peut prospérer dans l’isolement et qu’il importe de travailler ensemble, comme l’a démontré l’expérience pandémique.  Dans ce contexte, le Président a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur des objectifs de développement durable (ODD), rappelant qu’en 2018, Kiribati a été l’un des rares États Membres à présenter son rapport national volontaire.  Dans l’optique de 2030, il a invité les pays à faire preuve d’ambition et de mobilisation pour garantir la réalisation à temps de ces objectifs.  Toutefois, rien ne garantit que les ODD seront atteints, a-t-il reconnu, craignant dès lors que la sortie de Kiribati de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) ne soit pas durable.

Le Président a ensuite rappelé que, depuis son indépendance en 1979, Kiribati a bénéficié de 44 années de gouvernance stable et pacifique.  Tout en reconnaissant que son pays manque des capacités et des compétences nécessaires à son développement, il a souligné la concorde confessionnelle qui y règne et la volonté de son gouvernement de parvenir à l’équilibre entre les sexes et à l’égalité des chances.  Kiribati a ainsi renforcé ses politiques et ses lois pour soutenir et autonomiser les femmes et les filles, les personnes handicapées, les seniors, les chômeurs, les jeunes et les enfants, s’est-il enorgueilli.  Le Chef de l’État a également souligné l’attachement de son pays aux buts et principes de la Charte des Nations Unies.  Il s’est toutefois alarmé des menaces liées à l’existence d’armes nucléaires, au rejet d’eaux traitées nucléairement et à la fuite de matières radioactives dans l’océan Pacifique.  Assurant que Kiribati continuera de promouvoir la non-prolifération et l’élimination totale des armes nucléaires, M. Maamau s’est prononcé pour le versement de compensations aux habitants de l’île Christmas qui ont été exposés aux essais nucléaires. 

Après avoir plaidé pour l’intensification de la lutte contre la corruption, le Président a souligné les efforts de son gouvernement pour améliorer la prospérité nationale, notamment par le biais de l’apprentissage et du renforcement des capacités.  Saluant le soutien des partenaires de développement, il a souhaité que cet appui soit coordonné pour garantir une distribution juste et inclusive de ressources limitées.  L’objectif, a-t-il dit, est d’accélérer la réalisation des ODD, en dépit des défis auxquels Kiribati est confronté, qu’il s’agisse de son isolement géographique, de la dispersion de ses îles au sein de sa zone économique exclusive ou de sa vulnérabilité aux changements climatiques.  Mais ces efforts s’avèrent très coûteux, a-t-il fait valoir.  Pour exploiter durablement nos ressources océaniques, nous avons besoin d’une aide financière et d’un accès aux capacités, technologies et équipements appropriés, a-t-il insisté, invitant également les pays développés à consacrer à l’adaptation aux changements climatiques davantage de fonds que ce que prévoit l’Accord de Paris.  Cela permettrait notamment financer les pertes et dommages et de faciliter les investissements dans l’alerte précoce, a-t-il conclu. 

M. EMMERSON DAMBUDZO MNANGAGWA, Président du Zimbabwe, s’est réjoui de la consolidation de la démocratie et de l’état de droit dans son pays, à la suite des élections générales organisées cette année.  Pourtant, a-t-il protesté, le Zimbabwe est soumis depuis 23 ans à des sanctions économiques « illégales et unilatérales imposées par certains pays occidentaux », visant à « soumettre » la volonté souveraine du peuple zimbabwéen.  Il a exigé leur levée inconditionnelle, comme celles imposées à des pays comme Cuba.  Malgré ces sanctions, le peuple du Zimbabwe maîtrise son destin en utilisant ses propres ressources intérieures.  Au cours des trois dernières années, le pays a connu la croissance économique la plus rapide d’Afrique australe, a affirmé le Président.  En outre, le Zimbabwe donne la priorité à l’élimination de la pauvreté et à l’amélioration de la qualité de vie de sa population, en particulier celle des zones rurales.  L’autonomisation et le renforcement des capacités des petits agriculteurs ont permis de parvenir à la sécurité alimentaire et nutritionnelle au niveau national.  Cette année, le pays deviendra d’ailleurs exportateur net de son blé.

Cependant, le Zimbabwe n’a pas été épargné par les effets négatifs des changements climatiques, a souligné M. Mnangagwa.  C’est pourquoi le Gouvernement continue de réaliser les investissements nécessaires pour renforcer la résilience de ses infrastructures face aux changements climatiques et que des barrages sont construits dans tout le pays.  Un programme ambitieux, mais réalisable, vise à creuser des forages alimentés à l’énergie solaire dans chacun des 35 000 villages du pays.  « Le Zimbabwe est ouvert aux affaires », a lancé le Président: des pôles d’innovation et des parcs industriels créés au sein des établissements d’enseignement supérieur incitent les étudiants à se tourner vers le développement et la production de biens et de services.

Réformer les institutions financières mondiales est essentiel pour débloquer des financements pour les pays en développement, a poursuivi le Président.  L’architecture actuelle est selon lui « excluante ».  Dominée par quelques États, elle est incapable de fournir à ces pays les ressources nécessaires pour financer leur développement en matière de santé et d’environnement.  Les lacunes du dernier cycle d’allocation de droits de tirage spéciaux (DTS) doivent être corrigées, a-t-il ajouté.  Soutenant le plan de relance proposé par le Secrétaire général, le Président a en outre demandé des prêts concessionnels à long terme, un accès accru aux DTS non utilisés, ainsi que la possibilité d’avoir recours à des modalités telles que l’annulation et la restructuration de la dette.  De même, la mise en place d’une architecture de sécurité mondiale juste et inclusive est devenue urgente.  « Le maintien de la paix et de la sécurité ne devrait jamais être l’apanage de quelques privilégiés », a argué le Président, avant de réaffirmer les appels de l’Afrique à une réforme du Conseil, conformément au Consensus d’Ezulwini et à la Déclaration de Syrte.

M. JOSÉ RAMOS-HORTA, Président du Timor-Leste, a déclaré qu’au cours des 20 dernières années, depuis l’indépendance de son pays, les indicateurs économiques et sociaux du Timor-Leste n’ont cessé de progresser, notamment en termes d’espérance de vie, de réduction de la pauvreté et de mortalité infantile.  Cela est dû presque entièrement à la solidarité cubaine, a-t-il précisé, même si notre propre gouvernement continue de contribuer pour une part importante au financement des programmes de coopération sanitaire en cours.  Aujourd’hui, 96,1% des habitants ont l’électricité et les panneaux solaires sont largement utilisés au profit des foyers pauvres et isolés, a-t-il encore indiqué, et l’accès à Internet s’améliorera considérablement dans les prochaines années grâce au déploiement de la fibre optique. 

Le Chef de l’État a aussi salué les progrès réalisés ces dernières années en matière de promotion du leadership des femmes au niveau national, 34% des sièges au Parlement national étant occupés par des femmes.  Après avoir souligné le lancement, en 2022, d’un plan d’action national pour mettre fin à la violence basée sur le genre au cours de la prochaine décennie impliquant la société civile, il a attiré l’attention sur le rôle accru que joue son pays au sein de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’adhésion prochaine du Timor-Leste à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Par ailleurs, il a considéré que la communauté internationale devrait accroître son appui aux pays fragilisés par un conflit afin de les aider à relever les défis du développement, de la stabilité et la de résilience. 

M. Ramos-Horta a jugé essentiel que le Conseil de sécurité réforme son fonctionnement et sa composition, selon lui « anachroniques », pour répondre efficacement aux crises au Myanmar et en République populaire démocratique de Corée.  « Le Timor-Leste condamne l’invasion, la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine », a ajouté le Président, notant que les conséquences économiques et environnementales de la guerre touchent le peuple ukrainien, mais aussi les Russes et le reste du monde.  Enfin, pour répondre aux défis climatiques, les pays les moins avancés et les petits État insulaires en développement devraient pouvoir bénéficier des efforts combinés visant à débloquer des financements grâce à l’allégement de la dette, à rationaliser le financement international sur la base des taux d’intérêt les plus bas, et à augmenter l’aide publique au développement. 

M. SALVA KIIR MAYARDIT, Président du Soudan du Sud, a indiqué que son pays était attaché au multilatéralisme et à la coopération internationale, qui selon lui sont les meilleurs moyens d’atteindre des objectifs et aspirations communs.  Il a insisté sur la nécessité de rétablir la confiance et la solidarité sur la base de l’égalité souveraine de tous les États pour relever les défis du développement.  Le Soudan du Sud, a-t-il expliqué, a à cette fin élaboré un plan prévoyant sept cibles pour atteindre les ODD, dans lequel l’éducation est clef. 

Le Président a cité quelques exemples des progrès réalisés dans ce domaine par son pays, notamment l’inclusion dans la Constitution de l’accès garanti à l’éducation gratuite, l’éducation étant prévue comme un droit humain de chaque enfant.  Il a également rappelé qu’une loi avait été votée pour interdire le mariage des enfants et permettre aux filles de recevoir une éducation au même titre que les garçons. Il a enfin expliqué que son pays avait revalorisé les salaires des enseignants pour leur permettre de « joindre les deux bouts ».  Concernant les soins de santé, autre ODD prioritaire, M. Kiir a souligné que son pays fait le nécessaire pour que le système de santé permette à tous d’accéder à des soins de bon niveau, à des prix abordables. 

Concernant les changements climatiques, il a indiqué vouloir promouvoir non seulement l’utilisation durable des terres mais aussi la production d’énergies renouvelables, en coopérant avec ses partenaires internationaux. Il a jugé juste, dès lors, d’appeler les pays développés à diminuer leurs propres émissions de 45% et à s’engager davantage pour soutenir les pays en développement, notamment par le biais du fonds pour les pertes et dommages.  À ce titre, il a estimé que le Sommet africain sur le climat, qui s’est tenu début septembre à Nairobi au Kenya, avait représenté un tremplin pour raviver la solidarité et mettre en œuvre le Programme 2030.

Le Président a reconnu que le Soudan du Sud avait connu des « difficultés depuis 2013 » mais que le pays avait tourné la page en signant l’Accord de paix revitalisé de 2018, lui permettant désormais de se consacrer à sa stratégie de développement, de consolider la paix et de stabiliser son économie.  Plusieurs dispositions de cet accord de paix doivent encore être mises en œuvre, a-t-il indiqué, notamment des élections transparentes, libres et régulières en 2024. À ce titre, il a insisté sur le dialogue renoué avec la société civile et l’opposition pour s’assurer que le processus de paix soit « aux mains des citoyens ».  Il a aussi lancé un appel aux Nations Unies pour que soit levé l’embargo sur les armes qui vise le Soudan du Sud, un embargo qui a jusqu’à présent entravé la mise en œuvre des modalités de sécurité nécessaires à l’organisation de ces élections. 

Évoquant en conclusion le conflit au Soudan voisin, il a indiqué que l’afflux de réfugiés soudanais et de rapatriés du Soudan du Sud avait mis à rude épreuve les communautés sud-soudanaises.  Il a donc demandé à la communauté internationale, dans l’attente d’une stabilisation de la situation dans ce pays, de mettre à disposition des ressources et un soutien durable pour aider les réfugiés et déplacés au Soudan du Sud.

M. MAMADI DOUMBOUYA, Président de la Guinée, a souligné qu’après la pandémie de COVID-19, l’Afrique est aujourd’hui frappée par une « épidémie de coups d’État », en particulier les pays francophones du sud du Sahara.  Pendant que le monde condamne, impose des sanctions et s’émeut, à juste titre, de la « brusque » réapparition de cette pratique que l’on croyait révolue, le Président a souhaité que la communauté internationale ait « l’honnêteté » de ne pas dénoncer les seules conséquences de ces coups de force, mais aussi d’en examiner les causes profondes.  « Le putschiste n’est pas seulement celui qui prend les armes pour renverser un régime », a-t-il argué, mais également ceux, plus nombreux, qui ont recours à la duplicité pour manipuler la Constitution afin de se maintenir éternellement au pouvoir.  Le Président a visé ainsi « ceux en col blanc qui modifient les règles du jeu pendant la partie pour conserver les rênes du pays ».  La « rectification institutionnelle » à laquelle il a pris part le 5 septembre 2021 n’était à ses yeux qu’une conséquence du chaos qui fissurait le tissu social de son pays. 

Pour expliquer la multiplication des coups d’État en Afrique de l’Ouest, M. Doumbouya a cité les promesses non tenues, l’apathie de la population, le « tripatouillage des constitutions » aux dépens des intérêts nationaux.  Qui plus est, la mauvaise répartition de la richesse engendre des « inégalités sans fin », la famine et la misère. L’Afrique souffre d’un modèle de gouvernance qui lui a été imposé par l’Occident et qui s’adapte mal aux réalités et aux coutumes africaines, a-t-il analysé en tirant la conclusion que ce modèle démocratique « insidieusement » imposé aux Africains par l’Occident ne fonctionne pas.  Ce modèle a contribué « à entretenir un système d’exploitation et de pillage de nos ressources par les autres », a-t-il regretté avant de dénoncer aussi la corruption des élites africaines considérées comme des démocrates « en fonction de leur docilité ou de leur aptitude à brader les ressources et les biens de leurs peuples », ou encore « à céder aux injonctions d’institutions internationales au service des grandes puissances ».  Dans ce contexte, il a dit comprendre, « sans les approuver », ceux qui ont cédé à ce qu’on leur demandait. 

Pour sa part, cependant, M. Doumbouya a affirmé n’avoir pour seule préoccupation que le bien-être de son peuple.  Bien que le Sahel traverse l’une des crises les plus graves de sa « très vieille histoire », il saura y faire face, a-t-il assuré.  À cette fin, il a jugé que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) devrait revenir à sa vocation économique et cesser de se mêler de politique pour privilégier le dialogue.

« Nous, Africains, sommes fatigués, épuisés des catégorisations dans lesquelles les uns et les autres veulent nous cantonner », a poursuivi le Président, en s’insurgeant contre ces classements « insultants » qui les placent sous l’influence des Américains, des Français ou encore des Russes. « Nous ne sommes ni pros ni anti-Américains, ni pro ni anti-Chinois, ni pro ni anti-Français; nous sommes tout simplement pro-Africains », a-t-il martelé.  Avec plus d’un milliard d’Africains dont environ 70% de jeunes « totalement décomplexés », il est temps selon lui de prendre conscience que les règles issues de l’après-guerre, lorsque les États africains n’existaient pas, sont périmées.  Le moment est venu « d’arrêter de nous faire la leçon, d’arrêter de nous traiter comme des enfants », a conclu M. Doumbouya, pour qui cette « infantilisation est du plus mauvais effet pour une jeunesse africaine qui s’est émancipée ».

M. EVARISTE NDAYISHIMIYE, Président du Burundi, a considéré que la confiance et la solidarité, en tant valeurs qui devraient caractériser les relations entre les États, sont fragilisées car mises au service d’intérêts particuliers. Nous devons les libérer, a-t-il plaidé, pour qu’elles soient des valeurs partagées et retrouvent leur sens originel « perdu de manière fracassante avec la colonisation et l’expansion d’autres idéologies égoïstes qui veulent que les pays moins développés soient enfoncés davantage au profit des pays riches ».  Pour le Chef de l’État, la colonisation a raté son tournant car elle aurait pu créer une solidarité par la rencontre des cultures et des savoir-faire et par un partenariat mutuellement bénéfique à la place d’un partenariat « de dépendance ».  Il a blâmé les effets du néocolonialisme caractérisés par l’ingérence multiforme dans les affaires intérieures des États en développement, l’injuste rémunération des matières premières et les fortes exigences imposées par les institutions de Bretton Woods.  Pour le Président, « l’aide au développement et autre partenariat pour le développement sont autant de termes imprégnés de mauvaise foi ».  Ces termes prolifèrent pour voiler l’hypocrisie alors que les ressources mises en action pour espérer des rendements économiques susceptibles d’assurer la relance, elles, régressent, a-t-il jugé. Fort de ce constat, il a appelé à transcender les besoins et les intérêts des États, la solidarité internationale devant veiller à ce que tous les pays puissent interagir entre eux sur un pied d’égalité. 

Le Chef de l’État a ensuite assuré que son gouvernement et le peuple burundais sont déterminés à optimiser les dividendes d’une paix et d’une réconciliation nationale « si chèrement acquises ».  Pour cela, a-t-il expliqué, notre cheval de bataille est la promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre toute forme d’injustice.  Il a mis l’accent sur les efforts consentis en matière d’amélioration de la gestion de la chose publique et de renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance.  En instaurant un climat propice aux affaires, le Burundi est devenu un lieu sûr pour les opportunités en matière d’investissement et d’activités économiques diverses, a assuré M. Ndayishimiye.  En outre, pour gagner le pari économique, son pays met à l’avant-garde les jeunes et les femmes, lesquels sont de réels acteurs du développement socioéconomique, à travers la promotion de l’entrepreneuriat, l’innovation et l’esprit de créativité. 

S’agissant de la situation sur le plan régional, le Président a souligné que, dans le cadre de sa direction de la Communauté d’Afrique de l’Est, il a initié une série d’actions en vue du retour à la paix et à la sécurité dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).  Le Burundi participe également aux opérations de maintien de la paix et à la lutte contre le terrorisme en République centrafricaine (RCA) et en Somalie, ce qui témoigne d’après lui de la volonté du peuple burundais de contribuer à l’avènement d’un monde meilleur et plus solidaire.  Le dirigeant a réitéré son appel à la solidarité internationale pour la pacification de l’est de la RDC, et réaffirmé à ce sujet son soutien indéfectible aux processus de paix de Luanda et de Nairobi ainsi qu’à l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région, dont le Mécanisme régional de suivi est présidé par le Burundi.  Il a de nouveau condamné les ingérences extérieures dans les affaires des États, y compris au nom des droits de l’homme, tout en s’insurgeant également contre les changements anticonstitutionnels de pouvoir qui représentent un sérieux revers en termes d’acquis démocratiques enregistrés depuis plusieurs années en Afrique.  L’ordre constitutionnel et l’état de droit doivent primer avant tout, a insisté M. Ndayishimiye, le Burundi restant fermement attaché au règlement pacifique des conflits par la voie du dialogue, de la coopération, de la concertation et de la négociation.

M. ALEKSANDAR VUČIĆ, Président de la République de Serbie, a déclaré que son pays était sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne (UE), mais qu’il n’était pas pour autant prêt à tourner le dos aux amitiés traditionnelles bâties depuis des siècles.  En tant que Président d’une petite nation, il ne souhaite pas s’arroger le droit de parler des relations entre grandes puissances; il peut, en revanche, parler des horribles conséquences du non-respect du droit international.  La tentative de découper son pays en morceaux, qui avait officiellement commencé en 2008 par la déclaration unilatérale de l’indépendance du Kosovo, n’est pas encore achevée.  De son point de vue, la violation de la Charte des Nations Unies dans le cas de la Serbie fut le précurseur de nombreux problèmes d’aujourd’hui. 

Le Président a jugé « hypocrites » les déclarations de son homologue américain et du Chancelier allemand puisque presque toutes les puissances occidentales ont violé à la fois la Charte et la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.  M. Vučić a fait référence à « un évènement sans précédent dans l’histoire du monde », quand les 19 pays les plus puissants de la planète ont pris la décision -sans implication du Conseil de sécurité, a‑t‑il insisté– d’attaquer et de punir brutalement la Serbie, pays souverain sur le sol européen, soi-disant pour empêcher un désastre humanitaire.  Quand le Président de la Fédération de Russie a utilisé ces mêmes prétextes, ces mêmes mots, pour attaquer l’Ukraine, lesdits pays « ne riaient plus ».  Le Président a ensuite protesté contre la manière dont le « soi-disant Kosovo » a obtenu son indépendance en 2008, événement qu’il a interprété comme « la décision illégale de sécession de la province autonome du Kosovo-Metohija ».  Cette décision a été prise à un moment où le Gouvernement serbe s’était engagé en faveur de l’intégration européenne et euro-atlantique.  Depuis, 70% des Serbes de la province du Kosovo-Metohija ont quitté leur foyer.  « Belle loi, belle justice », a ironisé le Président, dénonçant un deux poids, deux mesures: les agresseurs de la Serbie d’hier donnent aujourd’hui des leçons d’intégrité territoriale s’agissant de l’Ukraine.  La Serbie, elle, soutient l’intégrité territoriale de l’Ukraine, fidèle à ses principes, indépendamment de son amitié séculaire avec la Russie.  « Pour nous, toute violence est la même, toute violation de la Charte des Nations Unies est la même », a insisté M. Vučić. 

Aujourd’hui, au « Kosovo-Metohija, province méridionale de la République de Serbie », l’autorité séparatiste d’Albin Kurti, Premier Ministre du Kosovo, s’exerce de manière brutale contre les Serbes, a dénoncé le Chef de l’État, et la communauté internationale « détourne le regard en haussant les épaules ».  Il a appelé à ce que l’intégrité territoriale de la Serbie soit respectée comme celle de chaque État Membre de l’ONU, à ce qu’un ordre international basé sur des règles prévale, afin que personne ne disparaisse dans un « conflit darwiniste entre puissances ».  La République de Serbie, son gouvernement et toutes les institutions œuvrent pleinement à la préservation du dialogue avec Pristina, sous les auspices de l’UE, a assuré M. Vučić.  Toutefois, le déséquilibre qui l’amène à devoir constamment faire des concessions ne mène à rien.  Du point de vue du Président, la discussion avec le Gouvernement de M. Kurti ressemble plus à un monologue qu’à un dialogue, car il est difficile d’expliquer pourquoi, plus de 10 ans après la signature de l’Accord de Bruxelles, une communauté des municipalités à majorité serbe n’a pas été formée au Kosovo.  La confiance des Serbes est très ébranlée, a prévenu le Président. 

M. CHARLES ANGELO SAVARIN, Président de la Dominique, a souligné la nécessité urgente de financer la lutte contre les changements climatiques et de travailler à l’atténuation de leurs conséquences.  Regrettant que le conflit en Ukraine se prolonge, « alors que le monde entier réclame la fin de cette terrible guerre », il a rappelé que la dernière estimation de la Banque mondiale concernant la reconstruction de l’Ukraine s’élevait à 411 milliards de dollars.  Appelant à la fin des combats, il a soutenu la déclaration commune du G20 publiée à l’issue du sommet de New Delhi.  Le Président a rappelé qu’en 2010, l’Occident avait qualifié de « Printemps arabe » des soulèvements ayant abouti à la chute de plusieurs gouvernements sans qu’il soit question de sanctions ou d’interventions militaires pour les rétablir.  « Quelle est la différence entre le Printemps arabe et l’Été africain? » s’est-il ensuite interrogé, appelant à tenir compte de la sagesse des dirigeants de l’Union africaine, opposés à une intervention militaire qui, selon lui, « ne servirait certainement pas le peuple africain ». 

M. Savarin est revenu sur les défis considérables auxquels sont confrontés les petits États insulaires en développement (PEID), pris en étau entre leur manque de ressources financières et le coût des pertes dues aux changements climatiques.  Il s’est félicité de l’organisation du Dialogue de haut niveau sur le financement du développement et de l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’un sommet sur l’ambition climatique.  Le Président a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre le fonds « pertes et dommages », créé lors de la COP27, pour permettre aux économies des PEID de se redresser après les catastrophes.  Il a expliqué qu’au cours des 30 dernières années, les PEID n’avaient pas reçu de soutien suffisant de la part des partenaires du développement et des institutions financières internationales, les contraignant à emprunter à des conditions défavorables et les poussant vers des niveaux d’endettement insoutenables.  Le Président a rappelé le soutien de son pays à la mise en place de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle.  En outre, il a qualifié d’indispensable la réforme des institutions financières internationales, rappelant le soutien de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), présidée par son pays, à l’initiative de Bridgetown pour la restructuration des dettes souveraines.

M. Savarin s’est félicité de l’accord créant un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Il a également salué l’engagement pris par les parties de transférer des technologies marines afin d’aider les pays en développement à mettre en œuvre l’accord et à en tirer profit.

Qualifiant de désastreuse la situation en Haïti, État membre de la CARICOM, le dirigeant a estimé qu’elle méritait une intervention internationale urgente et appelé le Conseil de sécurité à agir de manière décisive en ce sens. Il a aussi rappelé que la Dominique réclamait, comme l’écrasante majorité des États Membres, la levée du blocus économique imposé par les États-Unis à Cuba.  Il a aussi réaffirmé son soutien à la levée des sanctions contre le Venezuela qui « constituent une violation des droits humains du peuple vénézuélien ».  Enfin, rappelant que les tempêtes Erika en 2015 et Maria en 2017 avaient respectivement coûté à la Dominique l’équivalent de 90% et de 226% de son PIB, il a compati aux souffrances du Maroc et de la Libye, récemment affectés par des catastrophes naturelles. 

M. RANIL WICKREMENSINGHE, Président de Sri Lanka, a rappelé que, l’an dernier à la même époque, son pays a traversé la période la plus difficile de son histoire récente sur les plans social, économique et politique.  Même nos traditions démocratiques ont été menacées par les tentatives visant à occuper notre parlement et à le paralyser, a-t-il déploré, ajoutant toutefois qu’une transition politique a pu se mettre en place.  Il a indiqué que les réformes qu’il a depuis initiées visent d’une part à reconstruire la confiance entre le peuple et le Gouvernement et d’autre part, à jeter les bases de la stabilisation et de la reprise économiques.  Assurant que les Sri-Lankais bénéficient déjà des résultats positifs de ces mesures dans leur vie quotidienne, il a dit vouloir conduire le pays vers une reprise et une croissance durables, avec le soutien de la communauté internationale. 

Sur le plan géopolitique, le Président a noté l’émergence de nouveaux centres de pouvoir dans le cadre d’un monde multipolaire. Nous voyons un monde où les anciennes rivalités des grandes puissances et les tensions se sont ravivées dans une guerre ouverte, a-t-il observé, déplorant que, parallèlement, les divisions Nord-Sud se creusent en raison de la fracture numérique, de la crise financière, de la dette, et de la transition énergétique. De plus, a alerté le Chef de l’État, contrairement à la promesse de 2030, nous assistons aujourd’hui à des niveaux de pauvreté et de faim jamais vus depuis des décennies.  De fait, les pays neutres et non alignés du Sud, comme Sri Lanka, se trouvent une fois de plus « coincés dans le jeu des puissances mondiales », a-t-il regretté, non sans rappeler les appels à l’unité et à la solidarité lancés à l’ONU, au G20, au sommet des BRICS et au G7 pour construire un avenir inclusif. 

Le Président a ensuite signalé que les impacts financiers de crises telles que les changements climatiques et la pandémie de COVID-19 entravent la capacité des petits pays endettés comme le sien à progresser dans la réalisation des ODD ainsi que dans l’adaptation et l’atténuation.  Malgré cela, Sri Lanka « ne fuit pas sa responsabilité envers la planète », a-t-il affirmé, évoquant le plan national d’ambition climatique présenté l’an dernier lors de la COP27. Grâce à ce dispositif, nous aurons, d’ici à 2030, 70% d’énergies renouvelables dans la production d’électricité, nous augmenterons la couverture forestière de 32% et nous réduirons les émissions de gaz à effet de serre de 14,5%, s’est-il enorgueilli, promettant également d’éliminer progressivement le charbon d’ici à 2040 et d’atteindre le « zéro net » d’ici à 2050.  Reste que le dérèglement climatique a des implications sur les engagements pris en faveur de l’énergie propre, de la sécurité alimentaire, de la disponibilité de l’eau potable et des moyens de subsistance des agriculteurs, a concédé le Chef de l’État, pour qui l’urgence de mobilisation des financements climatiques est aujourd’hui plus grande que jamais. À cet égard, il a regretté que les pays riches ne tiennent pas leurs promesses en matière d’assistance pour l’atténuation et l’adaptation, et de compensation pour les pertes et les dommages. 

Pour M. Wickremesinghe, les efforts nationaux ne suffiront pas à eux seuls à garantir le succès des ODD et à inverser les changements climatiques.  Une solidarité mondiale est donc nécessaire pour restructurer l’architecture financière internationale, a-t-il plaidé, avertissant qu’une absence de restructuration de l’ordre budgétaire mondial ferait échouer la lutte pour inverser les changements climatiques et atteindre les ODD.  « Il est encore temps de rectifier le tir car la crise n’a pas atteint son paroxysme », a-t-il voulu croire, avant de souhaiter que ces questions soient abordées en priorité lors du Sommet de l’avenir en 2024.

M. DENIS SASSOU NGUESSO, Président de la République du Congo, a vu la question du climat comme « la plus pressante de toutes les urgences ». La montée continuelle du niveau des mers qui met en péril les pays insulaires, la désertification déferlante, la canicule suffocante qui emporte chaque fois plus de personnes, les inondations répétitives et les coulées de boue soudaines, autant de phénomènes aussi dangereux que dévastateurs qui interpellent désormais jusqu’aux plus sceptiques d’entre nous, a-t-il constaté.  C’est dans cet esprit, et en sa qualité de Président de la Commission climat du bassin du Congo, que le Président Nguesso a lancé, lors de la COP27 en Égypte, l’Initiative de la « Décennie mondiale de l’afforestation » pour une biodiversité et un couvert végétal plus dense, au service de l’humanité.  S’inscrivant dans cet élan, son pays s’est engagé à accueillir, en octobre prochain, un sommet des trois bassins des écosystèmes de biodiversité et des forêts tropicales (Amazonie, Bornéo-Mékong et Congo), comme réponse collective et concertée de ces trois poumons verts de la planète à l’insécurité climatique, a-t-il annoncé. 

Le Président a ensuite abordé la question du développement agricole en Afrique, soulignant la nécessité impérieuse de protéger les terres arables des incidences néfastes des changements climatiques.  L’Afrique, a-t-il recommandé, doit dès à présent opérer un bond qualitatif pour disposer demain d’une nourriture suffisante et de qualité et conjurer à tout jamais le spectre de la famine et de l’exode de ses populations.  Pour cela, il a souligné son besoin urgent d’agriculture moderne, soutenue notamment par des dispositifs performants d’irrigation et de mécanisation, une agriculture qui lui permette de réduire de manière significative ses importations alimentaires, celles-ci étant aujourd’hui encore trop élevées.  Le Président a souhaité avoir des partenariats techniques et financiers efficients pour pouvoir réaliser des avancées substantielles dans ce secteur.  Toutefois, a-t-il déclaré, l’Afrique n’a nullement besoin de ces partenariats sous-tendus par des « aides publiques au développement politiquement orientées et synonymes d’aumône organisée ».  « Les subventions au compte-gouttes, distillées au rythme des intérêts propres des donateurs, ne permettront certainement pas l’essor réel et effectif de notre continent… qui, du reste, n’en a nul besoin », a tranché le Président. 

En sa qualité de Président du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, il a fait valoir que la Conférence de réconciliation interlibyenne n’aura de sens que si elle est inclusive, constructive et consensuelle. Il en a appelé « une fois encore » à l’accompagnement de la communauté internationale, à commencer par les pays de la sous-région et les organisations qui les regroupent, pour soutenir au mieux les efforts de médiation.  Le Président a, enfin, rappelé « l’impérieuse nécessité de réformer » le Conseil de sécurité, afin d’assurer une représentation plus juste de tous les continents et de tous les peuples du monde, rappelant la position commune de l’Afrique, « une position conciliante et consensuelle, scellée à Ezulwini ».  Il a réitéré « l’exigence africaine » de voir deux de ses États y siéger en tant que membres permanents, avec droit de veto.  « Ce ne serait que justice devant l’histoire! »

M. WILLIAM SAMOEI RUTO, Président du Kenya, a regretté la paralysie dans lequel le monde actuel est plongé, déplorant l’échec des systèmes de paix et de sécurité, l’inadéquation du développement et le manque d’action climatique sur fond de progrès technologiques et d’énormes richesses.  C’est dans ces moments que le multilatéralisme et l’action collective internationale sont les plus nécessaires, a‑t‑il noté, en dénonçant une « clique hostile de formations géopolitiques » qui défie les valeurs et principes fondamentaux des Nations Unies.  Soulignant l’impunité de certains acteurs de la scène mondiale et les dysfonctionnements d’un Conseil de sécurité « antidémocratique, non inclusif et non représentatif », il a regretté la méfiance omniprésente entre Nord et Sud, entre riches et pauvres, ou encore entre pollueurs émetteurs et victimes. 

Le Président a rappelé les contributions de son pays aux efforts de paix dans différentes régions, citant non seulement l’Accord de paix de Djouba sur le Soudan, le Dialogue intercongolais, les négociations entre les Gouvernements de la Somalie et du Somaliland, mais aussi la visite et le plan de paix en 10 points d’une délégation africaine pour la paix à Moscou et à Kyïv. S’agissant d’Haïti, où le Kenya est prêt à jouer son rôle dans le cadre du possible déploiement d’un « soutien multinational à la sécurité », M. Ruto a demandé au Conseil de sécurité d’approuver une résolution en ce sens, dans un but humanitaire et en vue d’aider à la tenue d’élections libres et équitables en Haïti. 

Le Chef de l’État a souligné que le « spectacle tragique » de jeunes Africains embarqués sur des esquifs pour risquer leur vie à la recherche d’opportunités à l’étranger est un témoignage des échecs du système économique mondial.  Sur ces questions, il a souligné que le sommet africain sur le climat de Nairobi avait proposé un changement de paradigme en reconnaissant que l’action climatique et les ODD doivent être poursuivis simultanément.  Le développement, a‑t‑il insisté, est donc un impératif fondamental, et la croissance verte le seul moyen durable d’y parvenir.  Pour exploiter les ressources de l’Afrique, sa jeunesse, son potentiel d’énergies renouvelables ou encore ses terres arables, le Président a rappelé que la Déclaration de Nairobi faisait du déblocage des financements à grande échelle, et donc de la réforme du système financier international, une priorité. 

Il a présenté les quatre grands axes d’intervention possibles de cette réforme, à commencer par l’appel lancé à la communauté internationale en faveur d’une « nouvelle architecture de la dette souveraine » pour prolonger la durée de cette dernière et prévoir un délai de grâce de 10 ans.  En deuxième lieu, la Déclaration de Nairobi encourage les institutions financières internationales à accorder davantage de prêts concessionnels, à des conditions financières favorables.  En troisième lieu, elle demande une réorganisation des marchés financiers, notamment celle du système d’évaluation des risques de certains pays employé par les agences de notation de crédit qui, comme l’a montré la crise financière, se sont trop fréquemment trompées.  Pour finir, la Déclaration de Nairobi réclame un mécanisme public mondial de financement du climat, financé par une taxe mondiale sur le carbone et sur le commerce des combustibles fossiles, et par une taxe sur les émissions des transports aériens et maritimes.  Fort de cette feuille de route, M. Ruto a conclu son intervention en disant compter, pour la concrétiser, sur une « nouvelle charte mondiale du financement climatique », qui devrait être négociée dans le cadre de l’Assemblée générale et de la COP notamment. 

M. WESLEY SIMINA, Président desÉtats fédérés de Micronésie, a relevé qu’en 2015, l’année où le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a été adopté, la communauté internationale a également entériné l’Accord de Paris, instrument clef pour lutter contre la crise climatique et « point culminant du multilatéralisme ».  Malheureusement, le monde n’a pas su déployer les efforts nécessaires pour limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale à 1,5 degré Celsius.  Les dommages causés par la crise climatique s’accumulent chaque jour en Micronésie, s’est alarmé le Président, et ils continueront de s’aggraver à un rythme plus rapide encore à mesure que les points de bascule seront atteints.  Pour y remédier, il a préconisé une approche contraignante inspirée du Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, qui constitue à ses yeux le « meilleur accord environnemental » ratifié par les États Membres.  Ce traité pourrait servir de modèle pour un nouvel accord visant à réduire le méthane, véritable « chalumeau poussant la planète du réchauffement climatique à l’ébullition globale ».  Bien qu’il s’agisse d’une menace existentielle pour son pays et de nombreux autres petits États insulaires en développement (PEID), les principaux émetteurs, y compris ceux des pays en développement, ne se sont pas encore engagés à mettre à jour leurs contributions déterminées au niveau national, a-t-il déploré. 

Cette semaine, la Coalition de la haute ambition sur les changements climatiques, dont fait partie l’archipel, a publié un appel fort à l’action pour demander aux principaux émetteurs de s’engager à réduire leurs émissions d’au moins la moitié d’ici à 2030 et de fixer leurs objectifs de zéro émission nette au plus tard à 2050.  Même si la Micronésie a des émissions négligeables, elle s’est engagée à réduire de 65% ses émissions de CO2 liées à la production d’électricité d’ici à 2030, a annoncé M. Simina.  Le dirigeant a réitéré son appel à la nomination d’un Représentant spécial pour le climat et la sécurité et à la pleine opérationnalisation du fonds pour les pertes et dommages lors de la COP28.  En outre, son pays a récemment adopté un amendement à sa constitution afin de reconnaître le droit à un environnement sain.  La Micronésie fait partie du groupe de pays qui ont plaidé pour que l’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice (CIJ) d’émettre un avis consultatif sur les obligations des États et les conséquences des changements climatiques au regard du droit international. 

En première ligne des changements climatiques, la Micronésie n’a pas besoin de plus de promesses, mais de plus d’action, a analysé le Président. Il incombe à la communauté internationale de s’attaquer aux sources des facteurs de stress qui perturbent l’océan. Selon lui, l’adoption récente de l’Accord sur la diversité biologique marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ) n’aurait pas été possible sans la contribution des PEID du Pacifique comme la Micronésie, qui s’est engagée activement dans les négociations.  C’est pourquoi M. Simina a été le premier Chef d’État à signer cet accord hier.  La quatrième Conférence internationale sur les PEID examinera en 2024 la création de partenariats internationaux ainsi que la manière dont la connectivité Internet peut changer la vie des insulaires, en rendant la télémédecine et l’éducation à distance accessibles sur chaque île isolée. 

Confronté aux effets néfastes de la guerre en Ukraine sur la sécurité alimentaire, l’énergie et les finances, le Président a plaidé ensuite pour une réforme en profondeur du Conseil de sécurité, devenu « archaïque et inefficace » face aux défis sécuritaires du monde contemporain, en élargissant le nombre de membres permanents et non permanents, y compris un siège réservé aux PEID.

M. JAKOV MILATOVIĆ, Président de la République du Monténégro, a expliqué que son élection il y a à peine quatre mois ne laissait aucun doute quant à l’orientation politique souhaitée par ses concitoyens: renforcer l’état de droit, développer la prospérité, garantir la cohésion sociale et l’égalité des chances.  Il a souligné l’importance de l’état de droit en tant que clef pour déverrouiller le potentiel économique et améliorer le niveau de vie dans son pays, avec une politique de tolérance zéro à l’égard de la corruption et de la criminalité organisée. « Pour mieux atteindre nos objectifs politiques plus larges, nous fondons notre politique étrangère sur trois piliers: le premier consiste à accélérer notre intégration dans l’Union européenne (UE); le deuxième à renforcer encore la crédibilité du Monténégro en tant que membre de l’OTAN; le troisième favorise les meilleures relations possibles avec les pays voisins des Balkans. »  Partisan d’une société monténégrine inclusive, le Président a affirmé que son pays s’engage à aborder le passé sans parti pris, « en appelant les choses telles qu’elles sont, comme les victimes de ces événements tragiques s’attendent à ce qu’elles soient appelées ». 

Après avoir condamné l’agression non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine, le dirigeant a invité la communauté internationale à intensifier ses efforts pour lutter contre les changements climatiques, en mettant en œuvre l’Accord de Paris.  Il s’est dit fier que le Monténégro ait été le premier pays à inscrire l’engagement en faveur des ODD dans le cadre national à travers sa stratégie de développement durable.  Une réforme fiscale et du marché du travail particulièrement importante a abouti à une augmentation du salaire et de la pension minimums, suivi par d’autres réformes de la sécurité sociale.  M. Milatović a appeléà une réponse mondiale à la crise des réfugiés et des migrants, fondée sur le partage des responsabilités.  Aujourd’hui, s’est-il enorgueilli, il y a plus de réfugiés ukrainiens par habitant au Monténégro que dans n’importe quel autre pays d’Europe. 

Par ailleurs, le Monténégro reste déterminé sur la voie d’un avenir euro-atlantique. C’est dans cet esprit, a précisé le Président, qu’il a soumis sa candidature pour un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2026-27.  En tant que pays européen, a-t-il assuré, nous sommes convaincus que l’adhésion du Monténégro à l’UE, ainsi que de l’ensemble de la région des Balkans occidentaux, renforcera encore notre position contre les « influences malveillantes des pays tiers », et fournira un exemple positif à tous les candidats des Balkans, à savoir que « l’élargissement de l’UE est encore possible ». 

M. MAHMOUD ABBAS, Président de l’État de Palestine, a ouvert son discours sous les applaudissements de l’Assemblée, en proclamant: « Ceux qui pensent que la paix peut prévaloir au Moyen-Orient sans le peuple palestinien jouissant de ses pleins droits se trompent. »  Après avoir rappelé que les territoires occupés défient plus de 1 000 résolutions de l’ONU et violent les principes du droit international, le Président a assuré l’Organisation de la confiance et de l’espoir qu’il garde, notamment dans la mise en œuvre de solutions exigeant la fin de l’occupation israélienne et la réalisation de l’indépendance de l’État de Palestine pleinement souverain, avec Jérusalem-Est comme capitale, selon les frontières du 4 juin 1967.  De même pour le règlement de la question des réfugiés palestiniens, qui doit se faire conformément aux résolutions pertinentes, en particulier la 194 (III). 

Alertant sur le risque de la transformation du conflit politique en conflit religieux, dont « Israël portera l’entière responsabilité », il a dénoncé des attaques commises par le « gouvernement raciste de droite » sur des sites islamiques et chrétiens, en particulier la mosquée Al-Aqsa, reconnue comme un lieu de culte exclusivement réservé aux musulmans, selon un rapport de la Société des Nations datant de 1930. 

Le Président Abbas a dénoncé le silence de la communauté internationale concernant les violations flagrantes du droit international commises par Israël.  Réaffirmant son intention de réclamer justice auprès des instances internationales compétentes, il a pointé du doigt Israël ainsi que le Royaume-Uni et les États-Unis pour leur rôle dans la « fatidique Déclaration Balfour ».  Il a exigé une reconnaissance, des excuses, des réparations et des compensations conformément au droit international. « Nous n’oublierons pas la douleur, nous n’oublierons pas l’histoire », a-t-il averti. 

Rappelant que le processus de paix se trouve dans une impasse « en raison de la politique israélienne », il a exhorté l’ONU et son Secrétaire général à convoquer une conférence de paix afin de sauver la solution des deux États et empêcher une détérioration de la situation qui menacerait non seulement la région, mais aussi le monde entier.  « Nous exigeons la protection. » 

Le Président a enjoint les États favorables à la solution des deux États, mais ne reconnaissant pas la Palestine, notamment les États-Unis et certains pays européens, à reconnaître l’État de Palestine.  Au nom de la paix et de la justice, et par respect pour le droit international, il a exigé la mise en place de mesures dissuasives à l’égard d’Israël, et ce, jusqu’à ce que le pays honore ses obligations telles que présentées dans une déclaration écrite du Ministre des affaires étrangères de l’époque, Moshe Sharett. 

Face à « l’odieuse occupation israélienne », M. Abbas a dit continuer d’avoir besoin de l’aide financière de la communauté internationale, en plus d’un appui financier à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Venant aux élections tenues en Palestine récemment, il a déploré que le Gouvernement israélien empêche la tenue de celles prévues à Jérusalem-Est. 

Après avoir plaidé en faveur d’une criminalisation du déni de la Nakba palestinienne et appelé à désigner le 15 mai journée internationale de commémoration, le Président Abbas s’est adressé à son peuple, qu’il soit en Palestine, dans les camps de réfugiés ou qu’il s’agisse de la diaspora, en s’exclamant: « Nous célébrerons l’indépendance de notre État à Jérusalem, notre capitale éternelle.  Ils la voient lointaine, nous la voyons proche. » 

M. CHARLES MICHEL, Président du Conseil européen, a rappelé que le système des Nations Unies est aujourd’hui « ankylosé, entravé par des forces hostiles ».  Il a alerté sur l’érosion de la confiance, craignant la menace d’une « dangereuse confrontation bipolaire ».  Pour remettre la coopération sur les rails, il a donc préconisé de restaurer la confiance, résoudre les problèmes les plus urgents et réparer le système des Nations Unies.  La confiance, a‑t‑il souligné, est fondée sur le respect de la Charte des Nations Unies.  Dans ce cadre, il a déploré la « guerre de conquête » menée par la Russie en Ukraine et ses répercussions sur le crédit dont jouit l’ONU.  Pour y remédier, il a détaillé un plan de réforme du Conseil de sécurité et assuré du soutien de l’Union européenne concernant les propositions de changement présentées par le Secrétaire général dans « Notre Programme commun ». 

En premier lieu, M. Michel a prôné la réforme du droit de veto, jugeant choquant qu’un membre permanent du Conseil de sécurité oppose son veto à des sanctions contre lui-même, quand bien même il viole la Charte des Nations Unies. Rappelant que la Charte prévoit qu’un membre du Conseil de sécurité s’abstienne lors d’un vote dont il est l’objet, il a exhorté les autres pays siégeant au Conseil à invoquer cette clause contre la Russie.  Il a assuré la France et le Mexique du soutien de l’Union européenne concernant leur initiative pour limiter l’exercice du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse.  De même, il a appelé de ses vœux un nouveau mécanisme conjuguant prise de décisions à la majorité et usage modéré du droit de veto. 

M. Michel s’est également prononcé en faveur d’une meilleure représentativité au sein du Conseil de sécurité, notant qu’à ce jour, 60 pays n’y ont encore jamais siégé.  Il a déploré la quasi-absence de régions entières du monde, en Afrique, Amérique du Sud, Caraïbes et Asie.  Ce manque de représentativité, a‑t‑il averti, érode la légitimité du Conseil.  Enfin, il a proposé d’intégrer dans cet organe les organisations régionales ou continentales, lesquelles représenteraient « un nouveau niveau de légitimité » dans le monde actuel. 

Face aux changements climatiques, le Président du Conseil européen a estimé qu’il était dans l’intérêt de tous les pays avancés d’appuyer les efforts des pays en développement vers la neutralité carbone.  Ces pays ne bénéficieraient que d’un quart des investissements privés mondiaux, alors même que le G20 serait responsable de 80% des émissions, a‑t‑il fait remarquer.  Soulignant l’ampleur du défi, il a rappelé que, selon l’Agence internationale de l’énergie, le « zéro carbone » exige 5 000 milliards d’euros par an d’investissements mondiaux –soit 4% du PIB mondial– dès 2030 et jusqu’en 2050. 

Enfin, il s’est inquiété de la situation économique des économies les plus vulnérables, fragilisées par la pandémie et la guerre en Ukraine.  « Personne ne doit être contraint de choisir entre la réduction de la pauvreté et le verdissement de l’économie », a‑t‑il estimé, préconisant la mise en place d’un système financier « plus robuste, plus juste, et mieux préparé au XXIe siècle ».  Il a réclamé notamment la réforme du système de Bretton Woods pour le rendre plus équitable, plus inclusif et plus efficace, soutenant aussi le stimulus des ODD présenté par le Secrétaire général.  Enfin, il a appelé à accroître la capacité de prêt des institutions financières internationales, rappelant qu’en 60 ans, le pouvoir de financement de la Banque mondiale, proportionnellement à la production mondiale, avait été divisé par 7. 

M. RUSS KUN, Président de la République de Nauru, le « plus petit État Membre de cette auguste instance », s’est demandé si l’ONU allait être réformée de manière à permettre à tous ses membres de bénéficier de la paix, de la prospérité, du progrès et de la viabilité.  Une étape cruciale sera à cet égard la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), qui a pris du retard, a-t-il regretté, en blâmant l’insuffisance des financements alloués aux pays en développement.  Aussi faut-il de toute urgence prendre des mesures audacieuses et nouer des partenariats fondés sur le respect mutuel entre égaux, en nous appuyant sur un système de catégorisation des vulnérabilités plus précis et nuancé.  « Sur la base des mesures existantes de l’aide publique au développement, Nauru n’est éligible ni à des subventions ni à des prêts », a-t-il déploré, en vantant les mérites de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle (MVI), qui garantirait que son pays reçoive une assistance à sa juste mesure. 

Une autre voie pour accélérer la mise en œuvre du Programme à l’horizon 2030 sera pour le Président la reconnaissance et l’intégration de la situation spécifique des petits États insulaires en développement (PEID) à tous les niveaux.  Une telle opportunité se présentera lorsque nous nous réunirons pour la conférence des PEID en mai de l’année prochaine à Antigua-et-Barbuda, s’est-il réjoui, en plaidant pour l’adoption d’un programme d’action plus ciblé et doté de ressources complètes, avec des solutions pratiques pour accélérer leur développement durable.  Le soutien des partenaires du développement et de la communauté internationale, y compris le financement, sera essentiel à cet égard.  M. Kun a par ailleurs demandé la nomination d’un Représentant spécial du Secrétaire général sur la sécurité climatique. 

Nauru, a-t-il poursuivi, se félicite de l’adoption plus tôt cette année de l’instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ), appelant à un soutien international pour renforcer la capacité à ratifier et mettre en œuvre ce traité.  Le dirigeant a en particulier rappelé l’importance de garantir une pêche durable, en veillant à ce qu’il n’y ait pas de surpêche, à ce que des prix équitables soient payés aux PEID pour le poisson pêché dans leurs eaux et à éliminer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée. 

La vision nationale à long terme de Nauru envisage un avenir dans lequel les partenariats individuels, communautaires, commerciaux et gouvernementaux contribuent à une qualité de vie durable pour tous les Nauruans.  Un pilier clef sera de garantir la santé de notre population.  Toutefois, Nauru reste vulnérable aux épidémies de maladies transmissibles, a prévenu le Chef de l’État.  En effet, la pandémie de COVID-19 a démontré la nécessité urgente d’investir massivement pour renforcer les besoins institutionnels et infrastructurels d’un système de santé fragile. Notre pays, a ajouté le Président, a besoin de soutien et d’expertise technique pour développer des solutions innovantes afin de lutter contre les risques viraux, par exemple la médecine électronique et le développement et l’utilisation de technologies numériques. 

M. ÚMARO SISSOCO EMBALÓ, Président de la Guinée-Bissau, a encouragé les États Membres à introduire les changements requis dans l’architecture internationale de paix et de sécurité ainsi que dans le système financier mondial pour être à la hauteur des enjeux contemporains.  La réforme du Conseil de sécurité, jugée depuis longtemps nécessaire, a rappelé le dirigeant, doit prendre en compte la position de l’Union africaine afin d’assurer une représentation réaliste et plus juste, cohérente avec le rôle de plus en plus prépondérant de l’Afrique dans la construction et le maintien de l’équilibre mondial.  Depuis son entrée en fonction à la tête de l’État en 2020, M. Embaló a expliqué que son pays s’était focalisé sur le dialogue, la consolidation de la paix, la stabilité politique ainsi que le développement social et économique au niveau national et dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest et au-delà.  Des principes, a‑t‑il ajouté, qui l’ont également guidé au cours de son mandat de Président de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui s’est achevé en juillet dernier. 

Le Président a ensuite réitéré sa grande préoccupation face à la répétition des coups d’État et aux reculs en matière de démocratie et d’état de droit dans certains pays de la sous-région d’Afrique de l’Ouest, en « violation flagrante des résultats des urnes ».  Il a ensuite rappelé qu’il présidait aussi depuis un an l’Alliance des dirigeants africains contre le paludisme, grâce à laquelle plus de 1,5 milliard de cas ont été évités et 10,5 millions de vies sauvées sur le continent depuis 2000.  Après avoir réaffirmé que, cette année, le peuple de la Guinée-Bissau célèbre ses 50 ans d’existence en tant qu’État indépendant et souverain, M. Embaló a conclu en réaffirmant l’engagement de son pays et de son peuple à continuer à travailler avec l’ONU et à coopérer avec tous les gouvernements et peuples amis. 

M. BAJRAM BEGAJ, Président de l’Albanie, s’est félicité des changements survenus en Albanie depuis son adhésion à l’ONU et a rappelé que le pays achevait son deuxième mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité.  M. Begaj a également tenu à souligner le rôle de son pays en matière de paix et de stabilité dans les Balkans, rappelant que l’Albanie a fait le choix d’une « politique d’amitié et de relations de bon voisinage ».  Avec le Kosovo, l’Albanie s’est engagée en faveur de la paix et entend renforcer sa contribution aux efforts de paix, a‑t‑il souligné.

Indiquant que le dialogue entre le Kosovo et la Serbie se poursuivait dans le cadre des efforts de médiation de l’Union européenne et avec l’appui des États-Unis, le Président a réaffirmé son attachement à la prospérité, l’intégrité et la reconnaissance du Kosovo. Estimant que la présence de citoyens serbes au Kosovo reflète la modernité du pays, il a souhaité que la situation soit similaire pour les citoyens albanais se trouvant en Serbie.  Malgré des efforts dans le domaine de la paix et la sécurité, M. Begaj a fait part de sa préoccupation concernant l’insuffisance de l’investissement dans la région.

Après avoir rappelé le passé de l’Albanie, marqué notamment par des guerres, le Président a réitéré son attachement à l’ordre international fondé sur des règles.  Les relations entre États doivent être basées sur l’égalité et non sur la loi du plus fort, a‑t‑il fait valoir, condamnant fermement l’agression contre l’Ukraine.  Insistant sur le lien indéfectible entre les objectifs de développement durable et la sécurité internationale, il a considéré que le conflit russo-ukrainien remettait en question le développement durable dans la région et dans le monde. Il a également déploré le détournement des sources de financement en raison des incertitudes causées par la guerre.

Le Chef de l’État s’est toutefois félicité de la tenue du Sommet sur les objectifs de développement durable qui doit permettre la revitalisation des efforts conjoints de mise en œuvre du Programme 2030.  À cet égard, il a insisté sur la nécessité d’appuyer les pays en développement dans sa réalisation.  M. Begaj a jugé nécessaire d’entamer une réforme incluant les pays en développement afin qu’ils participent activement à l’économie internationale.  Après avoir réaffirmé son attachement aux droits humains, condition sine qua non de la prospérité et de l’épanouissement, il a annoncé la candidature de l’Albanie au Conseil des droits de l’homme en insistant sur le désir de coopérer « main dans la main » avec les autres pays.

M. ABDEL-FATTAH AL-BURHAN ABDELRAHMAN AL-BURHAN, Président du Conseil souverain de transition du Soudan, a rappelé que son peuple était la victime d’une guerre lancée par les Forces d’appui rapide.  Ces dernières, a‑t‑il affirmé, bénéficieraient de l’assistance de factions tribales et d’autres acteurs venus de l’étranger, dont des mercenaires.  Elles auraient commis des actes de pillage, de viol, de meurtre, et de destruction de bien civils et publics. « Elles ont aussi tenté d’effacer notre histoire en détruisant des registres et des musées et libéré des prisonniers, dont des terroristes. »  Auteurs de nettoyages ethniques et d’actes de torture au Darfour, à Khartoum et ailleurs, selon lui, ces groupes seraient coupables de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Le Président a lancé un appel à la communauté internationale pour que ces groupes et leurs alliés soient désignés comme groupes terroristes, une mesure qu’il a estimée nécessaire pour protéger non seulement le peuple soudanais, mais aussi le monde entier. 

M. Al-Burhan a affirmé avoir fait son possible pour mettre fin à la guerre.  Il a attribué les échecs des négociations à l’intransigeance des rebelles, rappelant que son Gouvernement avait accepté l’initiative de paix lancée par le Soudan du Sud, l’Ouganda et la Türkiye.  Cette guerre, a‑t‑il estimé, n’est pas un conflit entre belligérants armés, comme on l’entendrait souvent, puisqu’elle touche massivement les populations civiles.  En outre, a‑t‑il ajouté, elle constituerait une menace pour la paix nationale et internationale, dans la mesure où les rebelles recrutent dans divers pays du monde.  « Elle peut se propager et mettre le feu à toute la région », a‑t‑il averti. 

Saluant les efforts des Nations Unies, de son Secrétaire général, de ses organismes ainsi que d’autres agences et nations alliées, il a précisé que son pays tentait d’éliminer les obstacles à l’acheminement de l’aide humanitaire.  Ce faisant, il a appelé les nations à remplir leurs promesses en matière d’aide alimentaire, de médicaments et d’abris.  « Nos besoins sont énormes », a‑t‑il ajouté. 

M. Al-Burhan a affirmé que son gouvernement était prêt à honorer ses engagements et à transférer le pouvoir au peuple.  Sur ce point, un consensus règne au sein des forces armées, a‑t‑il assuré.  Il a proposé un transfert du pouvoir sous la forme d’élections pacifiques et légitimes, avec une période de transition courte et un gouvernement civil. Dans ce but, il s’est dit prêt à poursuivre le dialogue avec tous les acteurs impliqués. 

Il a enfin exprimé sa volonté de soutenir les femmes, les enfants et toutes les catégories de personnes vulnérables pour qu’elles puissent jouir pleinement de leurs droits.  Réaffirmant son engagement envers les ODD, il a souligné les répercussions négatives du gel de l’aide humanitaire sur leur réalisation, ainsi que sur la crise alimentaire et le sort des personnes déplacées.  À ce titre, il a lancé un appel aux agences et aux bailleurs de fonds internationaux.

M. HAN ZHENG, Vice-Président de la Chine, a jugé que le monde était dans une situation qui n’était guère reluisante.  Il a attiré l’attention sur plusieurs domaines d’action prioritaires, à commencer par la nécessité de veiller à ce que les intérêts sécuritaires de tous les pays soient protégés de manière égale, sans qu’aucun ne soit lésé.  Une sécurité complète axée sur la coopération, plutôt que sur la concurrence, et sur le dialogue plutôt que sur la confrontation, est indispensable, a-t-il défendu.  La Chine appuie tous les efforts déployés pour mettre fin pacifiquement à la crise ukrainienne, a dit le Vice-Président en déclarant qu’elle est prête à y concourir. Il a également assuré du soutien de son gouvernement au peuple palestinien, en faisant valoir la solution des deux États. 

La Chine, a-t-il dit, s’oppose à l’hégémonisme, à l’unilatéralisme et à la « mentalité héritée de la guerre froide cultivée par un certain nombre d’États ».  La communauté internationale doit résister collectivement à ces agissements, a-t-il dit, en rappelant le soutien historique de la Chine à Cuba pour s’opposer aux ingérences extérieures et à l’embargo qui lui a été imposé. 

Le dirigeant a ensuite exprimé l’opposition de son gouvernement à l’utilisation d’armes nucléaires et à la guerre nucléaire, avant de souligner que la Chine est le seul membre permanent du Conseil de sécurité à s’être engagé à ne pas se servir de ce type d’armes.  Il s’est ensuite enorgueilli du succès de l’initiative Route de la soie, qui fête cette année son dixième anniversaire.  Il faut maintenant mettre en œuvre l’Accord de Paris et les pays développés doivent en faire davantage pour s’acquitter de leurs obligations et assurer un financement viable du monde en développement, a exhorté M. Han. 

Pour lui également, nous devons rester ouverts et inclusifs et faire progresser la civilisation humaine dans son ensemble, tout en respectant le contexte spécifique à chaque pays, et en s’abstenant d’instrumentaliser la notion des droits humains pour s’ingérer dans les affaires intérieures des autres.  Il faudra en outre faire en sorte que la gouvernance mondiale soit réformée, pour qu’elle reflète les équilibres existants, a préconisé le Vice-Président.  La Chine ne se lancera jamais dans l’expansion et l’hégémonie, a-t-il assuré, en rappelant cependant que son pays est déterminé à défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté nationale, en parachevant son unification.

M. TIÉMOKO MEYLIET KONÉ, Vice-Président de la République de Côte d’Ivoire, rappelant que le contexte actuel est marqué par une incertitude croissante, a tenu à alerter sur le manque de ressources pour parvenir à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Se penchant sur les questions sécuritaires, il a déploré une hausse mondiale des dépenses de sécurité, et invité à un règlement pacifique de la guerre en Ukraine.  Après avoir souligné son engagement dans la lutte contre le terrorisme, le Vice-Président a rappelé que les groupes terroristes mettaient en péril des décennies de progrès dans des secteurs clef tels que l’éducation, la santé ou encore la culture.  À ce titre, il a enjoint l’ONU et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDAO) à examiner les modalités de financement du plan d’actions prioritaires antiterroristes, adopté par la CEDEAO en 2019, afin d’en accélérer la mise en œuvre. 

M. Koné a réitéré son engagement en faveur de la lutte contre les effets des changements climatiques, précisant que la Côte d’Ivoire œuvrait à renforcer la résilience des populations dans un premier temps, avant de développer une « conscience citoyenne ».  Dans cette perspective, le Vice-Président a exhorté les parties prenantes de la COP15 à poursuivre leur soutien en faveur de la mise en œuvre de l’Initiative d’Abidjan.  Il a également demandé aux partenaires bilatéraux et multilatéraux de tenir leurs engagements financiers au titre de l’Accord de Paris sur le climat et de faciliter le fonds pour les pertes et dommages créé lors de la COP27. Le Vice-Président s’est également félicité du succès du Sommet africain sur le climat et de la détermination du continent à faire entendre sa voix lors de la COP28. 

Après être revenu sur les effets de la pandémie de COVID-19 sur l’économie de la Côte d’Ivoire, M. Koné a rappelé que son pays s’est doté en 2019 d’un régime dénommé « Couverture maladie universelle ».  Il s’est dit enthousiaste à l’idée de pouvoir procéder à un partage d’expériences et de contribuer ainsi au renforcement des systèmes de couverture sanitaire. Le Vice-Président a également indiqué que la Côte d’Ivoire consolide ses avancées démocratiques, rappelant que des élections municipales, régionales et sénatoriales avaient été organisées au mois de septembre dernier. 

Abordant la question des objectifs de développement durable (ODD), M. Koné a rappelé que des plans nationaux de développement avaient concouru à l’amélioration des ODD en Côte d’Ivoire.  Toutefois, ces progrès sociaux se trouvent fortement fragilisés en raison de l’afflux massif de réfugiés provenant des pays voisins, a-t-il averti, affirmant qu’il était urgent de recourir au multilatéralisme pour faire face aux difficultés actuelles.  Dans la continuité du discours du Secrétaire général de l’ONU et conformément à la vision du Président Alassane Ouattara, M. Koné a enjoint les membres de l’Assemblée à s’interroger sur la nécessité de réformer la gouvernance mondiale à tous les niveaux, en vue de renforcer la solidarité entre les nations. 

Mme JESSICA ALUPO, Vice-Présidente de l’Ouganda, a souhaité une revitalisation de l’Organisation pour relever les défis actuels.  À cet égard, elle a prôné une réforme du Conseil de sécurité, afin de le rendre plus représentatif et de remédier aux « injustices historiques commises à l’encontre des peuples africains ».  Son pays étant le nouveau Président du Mouvement des pays non alignés, la Vice-Présidente a souligné l’importance de cette alliance au sein de l’ONU et sa pertinence pour servir les intérêts de ses États membres.  Elle a également insisté sur l’importance de la coopération Sud-Sud, saluant « la solidarité dont font preuve les pays du Sud pour soutenir leurs homologues ». 

S’alarmant des problèmes de financement des pays du Sud, Mme Alupo a appelé de ses vœux une réforme de l’architecture financière mondiale. Elle a évoqué les répercussions économiques de la pandémie de COVID-19 en Ouganda et dans d’autres pays en développement sur les plans de l’emploi, des chaînes d’approvisionnement, de la chute des investissements étrangers et de l’augmentation de la pauvreté.  La Vice-Présidente a souligné la nécessité de réaliser les objectifs de développement durable (ODD).  Dans ce cadre, elle a mentionné les initiatives phares de son pays, dont l’organisation d’une conférence nationale annuelle en présence de toutes les parties prenantes.  Selon elle, l’Ouganda enregistre des progrès constants dans la mise en œuvre du Programme 2030, lesquels devraient être présentés lors du forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social, en juillet 2024. 

Cependant, a averti le la Vice-Présidente, les changements climatiques compromettent la réalisation des ODD.  L’Ouganda, a-t-elle assuré, prend des mesures audacieuses en faveur du climat, que ce soit en matière d’accès à une énergie abordable et durable, d’augmentation de la couverture forestière et des zones humides, ou en promulguant une agriculture « intelligente ».  Préoccupée par le fait que les pays qui émettent le moins de gaz à effet de serre sont ceux-là même qui sont les plus affectés par les changements climatiques, elle a appelé les nations développées signataires de l’Accord de Paris à respecter leurs engagements de fournir 100 milliards de dollars par an aux pays en développement jusqu’en 2025. 

Sur le plan de la paix et de la sécurité, Mme Alupo a souligné l’importance de résoudre les conflits par la coopération et la diplomatie.  Elle a rappelé l’engagement de son pays auprès de l’Union africaine, de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), de la Communauté d’Afrique de l’Est et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs.  L’Ouganda, a-t-elle rappelé, se classe parmi les premiers pays mondiaux en termes d’accueil de réfugiés, et travaille avec l’ONU et d’autres partenaires pour s’attaquer aux causes profondes des déplacements. 

Estimant que son pays avait encore du travail en matière d’égalité des sexes, la Vice-Présidente s’est réjouie que plus de 34,9% des sièges parlementaires et exécutifs soient occupés par des femmes.  En matière de droits fondamentaux, elle a rappelé que la Constitution de l’Ouganda stipule que « les valeurs culturelles et coutumières sont compatibles avec les droits de l’homme et les libertés fondamentales ».  À ce titre, Mme Alupo a prôné une approche des droits de l’homme respectueuse des valeurs culturelles d’autrui.  Les questions des droits humains, a-t-elle insisté, « ne doivent pas devenir le facteur modérateur de nos relations à long terme avec nos partenaires de développement ».

M. MOHAMMED JALLOW, Vice-Président de la Gambie, a appelé, en tant que pays faisant partie des pays les moins avancés (PMA), à la mise en œuvre résolue du nouveau Programme d’action de Doha afin d’éviter que la décennie 2022-2031 soit celle des engagements non tenus.  Eu égard aux dures réalités économiques actuelles dans les pays du Sud, de nombreux pays en développement sont confrontés à un fardeau de dette insoutenable qui compromet leur capacité à sortir de la pauvreté, a-t-il ajouté.  Ainsi a-t-il considéré essentiel, dans le contexte de la reprise économique postpandémie, de trouver de toute urgence des moyens de remédier à ce fardeau, « car la plupart de nos pays courent le risque d’être de véritables laissés-pour-compte ». 

Le Chef de l’État a rappelé que l’objectif des PMA est de reconstruire leur économie en créant un environnement politique propice à une reprise rapide de la croissance.  Dans cette optique, il a souhaité que la communauté internationale intensifie ses efforts à travers des initiatives nouvelles pour trouver des solutions durables au problème de la dette.  Il a rappelé que la question de l’allégement de la dette des PMA est liée à la nécessité d’une réforme plus approfondie des institutions financières internationales et de leurs mécanismes de prise de décisions.  « Nous nous joignons à d’autres pays en développement pour appeler à des réformes qui garantissent notre plus grande participation à ces mécanismes », a déclaré M. Jallow, qui a salué en ce sens la récente désignation d’un siège permanent pour l’Union africaine au sein du G20. « Cela amplifiera considérablement la voix et la participation de l’Afrique aux débats sur les questions géopolitiques et dans les initiatives mondiales de développement qui concernent le bien-être de sa population. » 

Sur la question des changements climatiques, qui touchent durement et de façon disproportionnée l’Afrique, le Président gambien a relevé que si le monde ne manque ni d’engagements en matière d’action climatique ni de ressources financières à la hauteur des ambitions collectives, la volonté politique pour agir vite et de manière décisive fait défaut.  Quand sera respecté l’engagement annuel de consacrer 100 milliards de dollars pour lutter contre le réchauffement de la planète, et allons-nous bientôt nous mettre d’accord sur les modalités du fonds pour les pertes et dommages en vue de la tenue la COP28? a-t-il demandé. « Nous appelons les États Membres et la communauté internationale à remplir d’urgence leurs engagements envers la Terre nourricière! » 

Par ailleurs, le Chef de l’État a attiré l’attention sur les défis auxquels l’Afrique de l’Ouest est confrontée en matière de développement, de gouvernance démocratique, d’état de droit, de paix et de sécurité.  Il a assuré à cet égard que si la Gambie est elle-même aux prises avec ses défis régionaux, elle est véritablement déterminée à faire grandir sa jeune démocratie, à renforcer ses institutions, à protéger et à promouvoir les droits et libertés fondamentaux, ainsi que l’autonomisation des femmes et des jeunes.  « Nous profitons désormais de plus en plus des dividendes de la démocratie et nous pensons qu’elle constitue la meilleure forme de gouvernance pour notre peuple. »  

M. TEODORO NGUEMA OBIANG MANGUE, Vice-Président de la Guinée équatoriale, s’est élevé contre l’ingérence de certains pays dans les affaires intérieures d’autres pays et le pillage de leurs ressources naturelles, qui continuent d’être un facteur déterminant de sous-développement, de conflit et d’instabilité.  Pour lui, l’Afrique mérite une attention prioritaire dans les initiatives d’appui et de financement du développement, avec une matérialisation décisive des engagements pris en faveur du développement durable.  Préoccupé par les crises répétées que subit Haïti, le dignitaire a proposé d’organiser une conférence des Nations Unies pour ce pays, afin d’analyser cette situation en profondeur et de trouver une solution durable à ses tourments. 

Le Vice-Président a ensuite réitéré avec insistance la nécessité de réformer le système des Nations Unies, notamment le Conseil de sécurité, le continent africain continuant d’être victime de l’injustice historique d’être le seul sans représentation permanente au sein de cet organe.  Et ce, malgré le fait que la plupart des questions à l’ordre du jour sont des questions africaines, s’est-il étonné.  L’Afrique, dans le cadre du consensus d’Ezulwini et de la Déclaration de Syrte, réclame depuis plus de 15 ans l’attribution de deux sièges permanents et deux sièges non permanents supplémentaires, a rappelé M. Obiang Mangue. 

Le Vice-Président a rejeté catégoriquement l’imposition unilatérale de mesures coercitives en violation de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Ainsi s’est-il élevé contre le blocus commercial, économique et financier imposé à Cuba il y a plusieurs décennies.  Il a enfin annoncé l’intention de son pays d’élaborer le Plan stratégique 2035 de diversification économique, espérant que ses partenaires l’accompagneront dans sa mise en œuvre. 

M. PHILIP ISDOR MPANGO, Vice-Président de la République-Unie de Tanzanie, a estimé que, depuis des décennies, les appels persistants du Sud à la paix, au progrès et à la prospérité pour tous étaient restés sans réponse.  Il a regretté que les principes de solidarité, de fraternité, de non-ingérence ou d’égalité entre les nations, légués par les pères fondateurs de l’ONU, soient en train de s’étioler.  Ajoutant que la paralysie du multilatéralisme entraînait « le déplacement des plaques tectoniques géopolitiques et la création de nouveaux blocs », M. Mpango a déploré une érosion de l’état de droit et un retour à l’unilatéralisme.  Il a appelé à la réforme immédiate du système des Nations Unies et des institutions financières internationales dont il a jugé l’efficacité « plus que jamais remise en question ». 

Évoquant la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, les conflits armés, l’insécurité alimentaire, la pauvreté persistante, les inégalités croissantes et les crises de l’énergie et de la dette qui se profilaient, le Vice-Président s’est inquiété des résultats décevants obtenus sur le front des objectifs de développement durable (ODD).  Il a notamment blâmé les promesses de financement et de transfert de technologie non tenues par le Nord et la faible marge de manœuvre budgétaire de la plupart des pays africains.  « Pour rétablir la confiance, il est impératif que le Nord tienne ses promesses et écoute les voix du Sud », a-t-il martelé, ajoutant que le Sud devait augmenter ses recettes nationales, notamment en mettant fin à l’hémorragie de ses ressources naturelles et aux sorties illicites de capitaux. 

M. Mpango a prié les États Membres de prendre dûment en considération le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général dont les priorités « correspondent parfaitement à l’esprit et à l’essence du thème de cette session de l’Assemblée générale ».  Il a rappelé qu’en mars 2023, la Tanzanie était le douzième contributeur des 125 pays participant aux missions de maintien de la paix de l’ONU.  Il a aussi appelé l’Organisation à traquer et condamner ceux qui alimentent les conflits en Afrique afin de « tirer profit du commerce des armes ou de s’ouvrir une voie ensanglantée vers les richesses minérales ». 

Le Vice-Président s’est dit découragé de constater qu’à mi-parcours, à peine 15% des 169 cibles des ODD étaient en voie d’être atteintes, tandis que 37% d’entre elles avaient soit stagné, soit même régressé par rapport aux valeurs de référence de 2015.  Il a précisé qu’en juillet 2023, la Tanzanie avait présenté son deuxième rapport national volontaire qui montrait des progrès significatifs concernant les ODD 2 à 7, notamment en termes de sécurité alimentaire, de disponibilité des médicaments, de mortalité infantile, d’égalité des sexes et d’approvisionnement en eau et en électricité.  M. Mpango a toutefois reconnu des progrès limités concernant les ODD 1, 8 et 10 et indiqué que son pays restait déterminé à faire mieux en augmentant ses recettes nationales et en capitalisant sur les partenariats public-privé. 

Le Vice-Président s’est inquiété des conclusions du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) selon lequel le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la limite de 1,5 degré Celsius fixée par l’Accord de Paris et l’Afrique se réchauffe à un rythme supérieur à celui de la planète.  Plaidant en faveur d’une action « urgente et concertée » des États Membres pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et renforcer les mesures d’atténuation et d’adaptation, il a demandé que soient facilités les investissements nécessaires.  En conclusion, appelant les belligérants du monde entier à faire taire leurs armes, il a cité l’adage: « œil pour œil et tout le monde finit aveugle ». »

M. KEITH ROWLEY, Premier Ministre de Trinité-et-Tobago, s’est inquiété de l’état de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) qui ne peut que pousser au « pessimisme ».  À ses yeux, le monde est « en péril », du fait des crises en cascade qui secouent différentes régions du globe.  Les investissements dans les instruments de guerre ont largement dépassé les investissements dans les instruments de paix, a déploré M. Rowley, aux dépens des plus vulnérables et de l’esprit du multilatéralisme, objectif même de l’ONU.  « Est-ce là l’héritage que nous voulons laisser aux générations futures »?  Son pays, a-t-il assuré, s’engage à jouer son rôle pour parvenir au développement durable ainsi qu’à la paix et à la sécurité pour tous. 

Cependant, a alerté le Premier Ministre, la capacité de Trinité-et-Tobago à naviguer en toute sécurité vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est entravée par des menaces, notamment la prolifération et l’utilisation d’armes à feu illégales.  Une situation qui s’est aggravée en grande partie à cause de la disponibilité des armes, couplée au trafic illégal depuis les pays de fabrication vers les territoires presque sans défense des Caraïbes.  Sur une population de 1,4 million d’habitants, a ainsi témoigné M. Rowley, Trinité-et-Tobago a connu plus de 600 meurtres l’année dernière, dont 90% impliquant des armes de poing et, de plus en plus, des armes d’assaut.  Cette année, le bilan a été porté à 400 meurtres violents.  Il s’agit d’une crise partagée par presque tous les territoires des Caraïbes et qui s’ajoute aux défis qui font obstacle à la réussite des ODD, s’est lamenté le Premier Ministre. 

Trinité-et-Tobago, tant individuellement qu’en tant que membre de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a tenté de concevoir des solutions pour relever ces défis de manière significative et holistique, a expliqué le Chef du Gouvernement, citant le récent symposium régional de la CARICOM, accueilli par son pays, pour aborder la criminalité et la violence en tant que problème de santé publique.  Conscient de la nécessité d’une coopération à tous les niveaux, il a fait part de son plein attachement au Traité sur le commerce des armes et à ses objectifs déclarés, et de son engagement à continuer à travailler en collaboration avec ses partenaires régionaux et internationaux, en particulier les États-Unis, pour endiguer de toute urgence le commerce illicite d’armes à feu illégales, dont la plupart sont produites par des fabricants et promoteurs d’armes basés dans ce pays.  M. Rowley a encore mis en garde contre la prolifération des crimes violents qui, alliée à d’autres crises, constitue un terreau susceptible de déstabiliser n’importe quel pays. 

Par conséquent, a poursuivi le Premier Ministre, Trinité-et-Tobago, alors qu’elle mène sa propre bataille dans ce domaine, reste profondément préoccupée par les développements en Haïti, et salue la décision du Gouvernement du Kenya de proposer son aide pour diriger une unité multinationale dans ce pays.  Il a exhorté la communauté internationale à collaborer avec Haïti pour parvenir à une solution crédible à la crise actuelle, qui garantirait que le pays et son peuple ne soient pas laissés pour compte, avant de conclure sur l’emblématique titre du chanteur de calypso David Rudder, « Haïti, je suis désolé »! 

M. KYRIAKOS MITSOTAKIS, Premier Ministre de la Grèce, a mis l’accent sur les changements climatiques et les migrations dont la gestion sera au cœur de la candidature de la Grèce pour la période 2025-2026 au Conseil de sécurité et, si élue, au centre de son mandat, de pair avec la sécurité maritime.  La communauté internationale doit adopter une approche collective face à ces défis, a exhorté le Premier Ministre.  Appelant à agir pour la gestion des migrations irrégulières, le Chef du Gouvernement grec a jugé la mise en œuvre des accords internationaux existants comme un échec.  Insistant encore sur les conséquences des catastrophes naturelles comme les derniers incendies survenus dans le nord de son pays, M. Mitsotakis a observé qu’il ne s’agit plus d’une crise réservée au Sud.  Une bataille très inégale avec la nature est livrée dans le sud de l’Europe, en particulier vers la Méditerranée, a‑t‑il témoigné.  Face à cela, la Grèce a pris des propositions ambitieuses pour la décarbonisation de notre île, a annoncé le Premier Ministre en précisant que le Gouvernement investit dans les recherches sur les technologies vertes et les énergies renouvelables dont l’énergie éolienne. 

Le Gouvernement grec, a‑t‑il fait savoir, agit également de manière résolue pour l’atténuation sur le long terme, et l’adaptation à court terme.  M. Mitsotakis a proposé aux dirigeants de la Croatie, de Chypre, de la France, de l’Italie, de Malte, du Portugal, de la Slovénie et de l’Espagne de reconnaître que les circonstances exigent d’agir en dehors du cadre à long terme de l’Union européenne.  Il faut trouver et mettre en œuvre un plan de financement pour relever les nouveaux défis, a‑t‑il expliqué.  Il a annoncé l’organisation d’un forum pour l’adaptation mondiale afin de réfléchir collectivement, de relancer la coopération, d’accéder à de nouveaux financements et de travailler à l’adaptation à court terme.  Il faut investir davantage dans les nouvelles technologies et les modèles de prévision avancée, a‑t‑il recommandé, en soulignant que « notre première obligation est la protection de la vie humaine ». 

S’agissant du défi des migrations, a continué M. Mitsotakis, la Grèce fournit abri et protection à des centaines de milliers de réfugiés et demandeurs d’asile et fait tout ce qui est en son pouvoir pour sauver des dizaines de milliers de vies en mer.  « La Grèce sera toujours un pays ouvert qui accueillera ceux qui fuient persécutions et violences, ceux qui cherchent un avenir meilleur en utilisant les voies d’accès légales. »  Pour ce qui est de l’immigration, le Premier Ministre a signalé que la politique de la Grèce est « dure, mais juste », ayant pour but de prévenir les migrations illégales et d’améliorer l’efficacité des systèmes de retour.  Cette politique facilite la migration sûre, régulière et ordonnée et répond rapidement aux demandes d’asile. 

Sur la relation de la Grèce avec la Türkiye, le Premier Ministre a dit que le différend portant sur la délimitation de leurs zones maritimes en mer Égée est un problème important pouvant être résolu en appliquant le droit international, notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Pour ce qui concerne Chypre, il faut une solution viable, acceptable pour tous, a‑t‑il reconnu.  Athènes soutient pleinement les efforts menés par l’ONU pour faciliter la reprise des négociations, a dit le Premier Ministre se fondant sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU. M. Mitsotakis a par ailleurs réitéré sa condamnation de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. 

M. PUSHPA KAMAL DAHAL ‘PRACHANDA’, Premier Ministre du Népal, a passé en revue les réalisations de son pays dans le cadre d’une transition réussie menée à l’échelle nationale depuis 2008.  II s’est engagé à achever la tâche restante en matière de justice transitionnelle qui figure en tête de son agenda politique.  Le projet de loi proposé, issu d’un processus consultatif plus large, adopte une approche centrée sur la victime et reconnaît la réparation comme un droit de la victime, a précisé le Premier Ministre, assurant qu’il n’y aura « pas d’amnistie générale » pour les violations graves des droits de l’homme. 

Aujourd’hui, alors que la trajectoire politique du Népal s’est stabilisée, l’attention se porte sur l’agenda de la transformation économique, a confié M. Dahal, annonçant que son pays sortira de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) d’ici à 2026.  En attendant, en tant que Président du Groupe des PMA, il reste activement engagé dans toutes les enceintes pertinentes, y compris au sein du système des Nations Unies, pour protéger et promouvoir l’intérêt collectif des PMA, appelant à un régime commercial international juste et équitable. 

Le Chef du Gouvernement a souligné que les pays montagneux vulnérables comme le Népal subissent de plein fouet les changements climatiques, alertant sur la fonte des glaciers de l’Himalaya qui menace plus de 2 milliards de personnes.  Le Népal, dont la superficie est constituée à 45% de forêts riches en biodiversité et à 15% de hautes montagnes, émet peu de gaz à effet de serre et contribue de manière significative à la préservation écologique, mais, a pointéM. Dahal, il a injustement souffert de la crise climatique. 

Ce type d’inadéquation doit être résolu par un mécanisme de compensation en faveur des pays qui contribuent positivement au verdissement de la planète, a‑t‑il martelé.  Pour sa part, le Premier Ministre a indiqué rester pleinement engagé en faveur de la mise en œuvre efficace de l’Accord de Paris. 

Outre les changements climatiques, le Premier Ministre a évoqué les conséquences de la pandémie de COVID-19 et de la concurrence géopolitique accrue sur les progrès durement acquis dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Il a donc appelé à un soutien international tout en saluant l’appel du Secrétaire général pour une augmentation du financement des ODD à hauteur de 500 milliards de dollars par an.  Enfin, il a rappelé que le Népal, en tant que deuxième pays contributeur de troupes et de policiers aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, a répondu « à chaque appel et sans aucune réserve ».  Il a de nouveau demandé une part équitable des postes de direction au quartier général et sur le terrain pour les pays contributeurs de troupes et de policiers. 

M. AHMAD NAWAF AL-AHMAD AL-SABAH, Premier Ministre de l’État du Koweït, rappelant les nombreux défis mondiaux, a souligné l’importance de la coopération internationale et du partenariat et s’est référé à la vision du Secrétaire général dans son rapport Notre Programme commun.  Rappelant les efforts de son pays pour améliorer les relations avec l’Iraq, le Premier Ministre a dit sa surprise devant la décision de la Cour suprême fédérale iraquienne déclarant « inconstitutionnelle » la loi de ratification de l’accord sur la réglementation de la navigation maritime dans la zone de Khor Abdallah, signé en 2012, entre les deux gouvernements.  Ce jugement comprend plusieurs contradictions historiques à l’encontre de l’État du Koweït, a protesté M. Al-Sabah.  Il s’est également étonné de la décision de l’Iraq d’annuler le protocole d’échanges sécuritaires signé entre les forces des deux pays il y a quelques jours.  Cela aura des répercussions négatives sur la sécurité maritime et sur la navigation dans la région de Khor Abdallah, a prévenu le Premier Ministre pour qui les deux accords restent en vigueur.  Il a ajouté que l’État du Koweït prendra des mesures concrètes et décisives pour remédier aux répercussions de ce jugement et aux contradictions historiques qu’il contient.  Le Premier Ministre a appelé l’Iraq à faire preuve de sa bonne foi et à poursuivre les réunions des équipes techniques en charge de la délimitation des frontières.  En tout cas, a promis M. Al-Sabah, le Koweït se réserve le droit de prendre les mesures juridiques nécessaires pour sauvegarder ses droits légitimes sur la base du droit international. 

Sur la question palestinienne, le Premier Ministre a informé que son gouvernement a écrit à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour demander son avis sur les répercussions de l’occupation israélienne et les violations du droit du peuple palestinien à l’autodétermination.  S’agissant du Soudan, il a exhorté les parties à mettre immédiatement un terme au combat, à recourir au dialogue et à retourner au processus politique pour sauvegarder la paix et la sécurité. Il a dit soutenir les initiatives de l’Arabie saoudite et des États-Unis à cet égard.  En ce qui concerne le Yémen, M. Al-Sabah a renouvelé son appui aux efforts de l’ONU à travers son Envoyé spécial afin d’aboutir à un règlement global du conflit.  Concernant la Syrie, il a recommandé d’intensifier les efforts afin de trouver une solution politique purement syrienne, dans le respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Le Premier Ministre a ensuite appelé l’Iran à prendre des mesures sérieuses pour rétablir la confiance, entamer un dialogue basé sur la non-ingérence dans les affaires internes des États et maintenir la sûreté et la liberté de la navigation internationale.  Il a rejeté toute prétention sur le champ gazier d’Al-Durra qui est une propriété commune entre l’État du Koweït et le Royaume d’Arabie saoudite.  Enfin, a conclu le Chef du Gouvernement, son pays, dans le cadre de sa vision de développement, a pris l’engagement d’assurer la neutralité carbone à l’horizon de l’an 2050.

M. ALEXANDER SCHALLENBERG, Ministre fédéral des affaires européennes et internationales de l’Autriche, a énuméré les grands défis de notre époque, marquée par des conflits violents, des crises climatiques et un recul des droits humains.  Utilisant la métaphore du tremblement de terre pour illustrer le sentiment général d’incertitude, tandis que se creusent des failles dans nos systèmes de commerce et de sécurité, il a estimé que « nous vivons dans un temps entre les temps ».  Se montrant critique envers les « populistes polarisants qui diffusent de fausses informations », le Ministre a rappelé que les réponses simples aux questions complexes n’étaient que des formes dangereuses de pensée magique, comme « cela a été douloureusement prouvé le 24 février de l’année dernière, lorsque la Russie a brutalement envahi l’Ukraine ». 

Affirmant que la coopération, le pacifisme et le multilatéralisme étaient dans l’ADN de l’Autriche, M. Schallenberg a rappelé que Vienne était « fière d’abriter l’un des sièges des Nations Unies et plus de 50 organisations internationales ». Selon lui, l’ordre international basé sur des règles a rempli son office pendant près de huit décennies, mais il n’est plus adaptéà son objectif et ne pourra sans doute pas durer encore 80 ans.  Il a donc plaidé pour un Conseil de sécurité plus inclusif et représentatif, suggérant de l’ouvrir à de nouveaux pays, notamment africains. L’Autriche défendra cet objectif lors de sa candidature pour un siège non permanent en 2026, a‑t‑il fait savoir.  

Qualifiant l’Autriche contemporaine de « pays florissant, socialement stable, économiquement prospère, et protecteur de l’environnement, dont la capitale, Vienne, a été élue à plusieurs reprises ville la plus agréable à vivre au monde », plus d’un siècle après avoir chu de son piédestal impérial, il a mis en garde contre les abus du recours à l’histoire pour justifier la violence.  « Vous ne pouvez pas construire un avenir en restant coincés dans le passé », a‑t‑il défendu, affirmant que le multilatéralisme restait la meilleure alternative pour garantir la prospérité et la sécurité.  En conclusion, M. Schallenberg a insisté sur le besoin de dialogue et de compromis, rejetant la notion de « avec nous ou contre nous » et exhortant à un multilatéralisme pragmatique.  Selon lui, cette approche nécessitera de « l’endurance, de la patience stratégique et une bonne dose de réalisme », mais « nous en émergerons plus forts, plus prospères et plus résistants », a‑t‑il espéré. 

M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Ministre d’État, Ministre des affaires étrangères, des Tchadiens de l’étranger et de la coopération internationale du Tchad, a regretté que le rêve commun de bâtir un monde stable et paisible et l’espoir d’une vie meilleure cèdent le pas à l’angoisse et à l’incertitude des conflits armés, du terrorisme, des changements climatiques, des migrations à grande échelle, du sous-développement, de la pauvreté, des crises politiques, économiques et financières.  Saluant le thème de cette soixante-dix-huitième session, le Ministre a appelé les nations à accélérer la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD).  Cette action devrait se faire sans exclusive et sans préjudice pour rétablir la confiance.  M Annadif a fait le point sur la matérialisation du Programme 2030 dans son pays.  Le Gouvernement a ainsi inscrit les ODD au nombre des priorités de la « Vision 2030: le Tchad que nous voulons » et de ses plans nationaux de développement pour les périodes 2017-2023 et 2024-2028. 

Cette mise en œuvre, a rappelé le Ministre, a été marquée, entre autres, par la chute des cours des matières premières sur les marchés mondiaux, les attaques de la secte Boko Haram, la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, les conflits intercommunautaires dans les pays voisins avec des effets directs sur la population tchadienne, ainsi que les conflits politico-militaires.  Selon lui, cette situation est aujourd’hui aggravée par la guerre en cours au Soudan voisin.  Quelque 400 000 nouveaux réfugiés se sont ajoutés aux 600 000 réfugiés déjà installés au Tchad depuis plusieurs années.  « Sur une population totale de 17 millions d’habitants, près de 2 millions sont des réfugiés.  C’est un fardeau bien lourd pour le Tchad », a résumé le Ministre.  M. Annadif a demandé une action rapide et concertée de la communauté internationale pour faire face à cette catastrophe humanitaire sans équivalent. 

Le Ministre a poursuivi en disant que depuis le décès du Président Idriss Deby, le Tchad est engagé dans un processus de transition politique inclusif et transparent.  Le premier jalon fut la conclusion de l’Accord de Doha entre le Gouvernement et les mouvements politico-militaires en août 2022.  Cet accord, a‑t‑il ajouté, a permis le retour aux pays de nombreux Tchadiens exilés ou réfugiés.  Aujourd’hui, le Gouvernement d’union nationale est à pied d’œuvre pour la tenue du référendum constitutionnel qui déterminera la forme de l’État et qui ouvrira la voie au rétablissement progressif de l’ordre constitutionnel.  Des reformes administratives, judicaires, sécuritaires et militaires sont en cours, a rapporté M. Annadif.  En outre, « des gestes d’apaisement allant de l’ouverture de l’espace politique à la grâce présidentielle ont contribuéà détendre le climat au sein de la classe politique ». Cette dynamique a permis la mise en place d’un cadre de concertation des partis politiques sur des bases plurielles.  Concernant la crise soudanaise, le Ministre a appelé à un cessez-le-feu durable.  Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, a‑t‑il tranché. Enfin, M. Annadif a demandé la réforme du Conseil de sécurité telle que reflétée dans le consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte.  Il a encouragé la création d’un État palestinien indépendant et souverain vivant en sécurité aux côtés de l’État d’Israël et exigé la levée de l’embargo imposé à Cuba.

M. ROBERT DUSSEY, Ministre des Affaires étrangères du Togo, a commencé par exprimer son inquiétude quant à l’état « peu reluisant » du monde, se demandant si nos engagements étaient « à la hauteur » et rappelant l’urgence de rétablir la confiance et la solidarité globales.  Il a énuméré les multiples défis auxquels fait face l’Afrique et en particulier son pays, le Togo.  Dans la litanie de « vulnérabilités », la plus préoccupante est selon lui le terrorisme, que le Gouvernement togolais entend combattre avec une stratégie multisectorielle, conciliant les approches sécuritaires et de développement. 

Le Ministre a ensuite insisté sur les efforts de son pays en matière de protection environnementale.  Le Togo ambitionne de protéger 90% de ses côtes d’ici à 2025 et il a lancé un programme de reboisement d’un milliard d’arbres, ayant aussi interdit le glyphosate, a-t-il détaillé.  Il a également mis en avant les initiatives pour promouvoir les énergies renouvelables, notamment à travers le projet Cizo qui consiste à fournir des kits d’énergie solaire aux populations rurales vulnérables.  Il a exhorté à une action mondiale plus efficace contre les changements climatiques lors de la COP28, mais il a surtout mis en exergue l’importance de trouver une voie africaine face aux défis régionaux et internationaux.  « L’Afrique sait ce qu’elle veut.  Les peuples africains et du Sud global sont frustrés car ils se sentent insultés, déshumanisés », a-t-il souligné. 

Insistant sur le pacifisme profond du Togo, M. Dussey a vanté les succès de son pays en tant que médiateur, citant en exemple la libération de 49 soldats ivoiriens le 6 janvier dernier.  Il a appelé à la cessation des hostilités dans les différents foyers de tension dans le monde et en particulier en Afrique de l’Ouest, avant de dénoncer les ingérences extérieures, affirmant que l’Afrique doit rester maîtresse de son destin.  « Les ingérences ne sont plus les bienvenues dans une Afrique qui a conscience de ses propres responsabilités », a-t-il clamé.  Le Ministre a aussi mentionné la crise soudanaise et les consultations menées par le Togo pour parvenir à un compromis et ouvrir un couloir humanitaire.  Il a incité les parties en conflit à adopter la voie du dialogue.  Abordant la question de la gouvernance, il a annoncé le Forum de la paix et de la sécurité de Lomé, dont la première édition se tiendra au mois d’octobre, avant de critiquer le statu quo au Conseil de sécurité de l’ONU et d’exiger une représentation plus équitable pour le continent africain. 

Il a réaffirmé que l’Afrique cherche des relations fondées sur l’égalité et le respect mutuel. « La réalité du monde, c’est qu’il n’a plus de centres de gravité monopolistique.  Le centre du monde est désormais ici et nulle part ailleurs », a-t-il déclaré, précisant que la réforme de « l’architecture multilatérale mondiale » avait été identifiée comme un sujet clef du prochain (neuvième) Congrès Panafricain de 2024, prévu à Lomé.  Selon le Ministre, l’Afrique doit éviter de s’impliquer dans des rivalités extérieures et se concentrer sur ses propres combats, qui sont, entre autres, « la lutte contre le néocolonialisme, la lutte contre la pauvreté, l’industrialisation du continent et la prospérité économique, le combat pour la paix, la lutte contre la désafricanisation de l’Afrique et pour la renaissance africaine et la dignité ».  En conclusion, il a répété sa fatigue face au paternalisme, au mépris, à la condescendance, et à l’arrogance. 

Mme DOMINIQUE HASLER, Ministre des affaires étrangères, de l’éducation et du sport du Liechtenstein, a fait appel à la « responsabilité commune » afin de sauvegarder l’ordre international pour les générations futures, en agissant pour une ONU plus forte, plus équitable et plus résiliente, et en promouvant l’état de droit illustré par la Charte des Nations Unies, « le traité le plus réussi jamais adopté ». Mais, en tant que dirigeants, « faisons-nous réellement suffisamment d’efforts pour mettre ces promesses en pratique »? s’est-elle interrogée, pointant du doigt la guerre de colonisation que la Russie mène contre son voisin, l’Ukraine.  Se lever ensemble contre cet acte d’agression signifie, avant tout, défendre l’ordre juridique international. La Ministre a salué à cet égard le défi « admirablement relevé » par l’Assemblée générale face à un Conseil de sécurité paralysé par le recours au veto, soulignant le rôle central désormais dévolu à cette Assemblée dans un Nouvel Agenda pour la paix.  De fait, a-t-elle étayé, « c’est ensemble que nous avons appelé au retrait complet de toutes les troupes russes du territoire ukrainien et défini les paramètres d’une paix juste, et c’est ensemble que nous devons franchir la prochaine étape évidente: garantir la responsabilité pénale des individus pour cet acte d’agression ». 

Abordant la problématique des changements climatiques, Mme Hasler a reconnu que nous ne sommes pas sur la bonne voie pour gagner ce combat.  Si elle a placé ses espoirs dans la COP28, elle s’en est remise, en dernier ressort, à la loi qui « doit nous guider ». C’est pourquoi le Liechtenstein a soutenu la demande d’un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) qui aidera à clarifier les questions juridiques complexes liées aux changements climatiques.  S’agissant du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui reste, à ses yeux, l’une des expressions les plus réussies d’un terrain d’entente de la dernière décennie, la Ministre a reconnu que le chemin est encore long à parcourir au regard du nombre croissant de personnes vivant dans l’extrême pauvreté depuis la pandémie de COVID-19.  De même, au rythme actuel, il faudra des siècles pour atteindre l’égalité totale entre les sexes.  Mme Hasler a évoqué les innombrables femmes qui souffrent de violence et d’oppression dans le monde entier, dénonçant les situations de persécution systématique liée au genre, de l’Afghanistan à l’Iran, en passant par le Bélarus et le Myanmar. 

Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a commencé par rappeler les principes directeurs de la politique internationale française, dans le contexte de l’agression russe contre l’Ukraine.  Le premier d’entre eux est l’égalité entre États, le respect de leur intégrité territoriale et de leur souveraineté, « principes sur lesquels personne ne peut ni ne doit transiger ».  Puis la Ministre a défendu la sécurité alimentaire, pour laquelle la France se bat en finançant des livraisons du Programme alimentaire mondial au bénéfice des pays les plus fragiles et en facilitant l’exportation des céréales ukrainiennes.  Elle a ensuite évoqué l’inviolabilité du patrimoine historique, « que ce soit à Mossoul et à Tombouctou hier, à Odessa ou à Lviv, aujourd’hui », ainsi que la lutte contre l’impunité des crimes, et le soutien de la France à la Cour pénale internationale (CPI).  « Ce qui se joue en Ukraine nous concerne tous.  Si nous laissons nos principes communs être transgressés là-bas, ils le seront partout », a insisté Mme Colonna. 

Elle a ensuite abordé le rôle croissant de la France dans la solidarité internationale, le pays étant devenu le quatrième acteur mondial en termes d’aide, aux côtés des États-Unis, du Japon et de l’Allemagne.  Le Sommet pour un nouveau Pacte financier mondial, qui s’est tenu à Paris les 22 et 23 juin et « a permis de tracer un chemin pour rehausser les financements publics et privés », a abouti au « Pacte de Paris pour les peuples et la planète », a-t-elle expliqué.  Elle a appelé tous les États qui ne l’ont pas encore fait à endosser ce pacte, conçu pour « affronter en même temps la pauvreté, les changements climatiques et la perte de biodiversité, en faisant en sorte qu’aucun pays n’ait à choisir entre ces objectifs ».  Puis elle a évoqué diverses initiatives, telles que l’accueil prochain de la coalition pour l’alimentation scolaire, à Paris en octobre, et la réunion de reconstitution du Fonds international de développement agricole (FIDA) en décembre.  Elle a également annoncé l’accroissement significatif de l’aide alimentaire de la France, portée à 900 millions d’euros et bénéficiant à 67 pays.  Sur le front environnemental, la Ministre a vanté l’engagement financier de la France en faveur du climat, à hauteur de 7,6 milliards d’euros en 2022, avant d’annoncer que la France accueillera la Conférence des Nations Unies sur l’océan en juin 2025 et s’engagera pour la protection des forêts.  Puis, elle a critiqué le régime des Taliban pour leur politique de ségrégation et de violence contre les femmes, et a souligné l’engagement continu de la France auprès des Casques bleus et des travailleurs humanitaires.  « Nous devons mieux les protéger », a déclaré la Ministre. 

En ce qui concerne les crises internationales, Mme Colonna a appelé à des solutions pacifiques et inclusives dans des régions conflictuelles comme le Haut-Karabakh, le Soudan, et la République démocratique du Congo.  La France, a-t-elle indiqué, continuera de soutenir les organisations régionales africaines dans des crises comme celle au Niger, en mettant l’accent sur le rôle vital de ces organisations, comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), pour instaurer la paix et la stabilité. « En Afrique, nous croyons aux solutions africaines aux crises africaines, et nous soutenons les organisations régionales africaines à chaque fois qu’elles demandent l’appui de leurs partenaires », a-t-elle affirmé, défendant également une plus grande présence africaine au Conseil de sécurité.  Dans un contexte de recomposition du Moyen-Orient, elle a enfin annoncé la participation de la France à la troisième conférence dite « de Bagdad », soulignant la volonté de la France de contribuer à des projets concrets de coopération régionale. 

M. DAN JØRGENSEN, Ministre de la coopération pour le développement et de la politique climatique globale du Danemark, a rappelé que, depuis plus de 40 ans, son pays a réalisé l’objectif consistant à consacrer au moins 0,7% de son produit national brut à l’aide au développement.  Or même si tous les pays respectaient l’objectif en question, cela ne couvrirait que 10% du déficit de financement actuel, ce qui n’est tout simplement pas acceptable, a déclaré le Ministre.  Cette année, le Danemark a décidé d’augmenter « à un niveau jamais atteint » son financement climatique basé sur des subventions: 745 millions de dollars, dont environ 60% seront alloués aux mesures d’adaptation.  Et en 2024, nous doublerons notre contribution au Fonds vert pour le climat pour atteindre environ 234 millions, a promis le Ministre. Il a expliqué que Copenhague augmentera également son soutien à l’institution danoise de financement du développement, lui permettant de tripler sa contribution annuelle au financement climatique dans les pays en développement, de 300 millions de dollars aujourd’hui à environ 900 millions d’ici à 2030. 

Pour mobiliser des financements pour le développement et l’action climatique, nous devons également mieux exploiter l’énorme potentiel des institutions financières internationales, a poursuivi M. Jørgensen.  Les banques de développement, dont la Banque mondiale, doivent lever non pas des milliards, mais des milliers de milliards de dollars pour l’action climatique et les ODD, a expliqué le Ministre, en soulignant à quel point l’architecture financière internationale doit être revisitée. 

Pour le Danemark, le manque de respect flagrant de la Russie envers les principes les plus fondamentaux de l’ONU est une « tragédie » pour l’Organisation.  Raison pour laquelle son pays, a indiquéM. Jørgensen, soutient tous les efforts visant à mettre fin à l’agression russe contre l’Ukraine, à commencer par la formule de paix du Président Zelenskyy.  Il a également demandé que soient établies les responsabilités complètes de la guerre d’agression illégale menée par la Russie contre l’Ukraine.  Hier, a ensuite informé le Ministre, le Danemark était fier de signer le traité international historique (BBNJ) pour protéger la haute mer qui a été adopté plus tôt cette année, permettant ainsi de faire progresser l’ODD 14.  Cette adoption revêt également une énorme valeur symbolique, a-t-il estimé, montrant qu’en dépit des tensions et des divisions croissantes, il est encore possible de rassembler et de trouver un terrain d’entente. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les États Membres se réengagent en faveur d’une couverture sanitaire universelle, « parce que la santé ne peut être une question de revenu »

Soixante-dix-huitième session,
Réunion de haut niveau sur la couverture sanitaire universelle, matin & après-midi
AG/12535

Les États Membres se réengagent en faveur d’une couverture sanitaire universelle, « parce que la santé ne peut être une question de revenu »

Les États Membres ont approuvé aujourd’hui une déclaration politique par laquelle ils proclament que chaque être humain a le droit de jouir du plus haut niveau de santé physique et mentale possible et se réengagent en faveur d’une couverture sanitaire universelle.  Cette déclaration, qui doit encore être formellement adoptée par l’Assemblée générale, survient quatre ans après l’adoption en 2019 de la première Déclaration sur le sujet, par laquelle les États Membres s’engageaient à mettre en œuvre des politiques « à haut impact » pour protéger la santé des personnes. 

Dans cette nouvelle déclaration, approuvée au début d’une réunion de haut niveau riche de plus d’une centaine d’interventions, les États Membres reconnaissent par ailleurs que la couverture sanitaire universelle est fondamentale pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD), non seulement ceux liés à la santé et au bien-être, mais aussi ceux relatifs à l’éradication de la pauvreté, à l’accès à l’éducation, à l’égalité de genre ou encore à l’édification de sociétés pacifiques et inclusives.  Ils réaffirment en outre le rôle premier des États dans la mise en place d’une telle couverture. 

Les États Membres prennent également note des graves lacunes sanitaires révélées par la récente pandémie de COVID-19, aucun progrès n’ayant en effet été enregistré depuis 2019 dans l’expansion de la couverture sanitaire dans le monde.  Ils notent aussi la gravité du sous-financement des systèmes de santé nationaux, notamment en ce qui concerne l’allocation de fonds publics et externes. Ils déplorent également la pénurie en travailleurs de la santé, puisque 10 millions devraient manquer d’ici à 2030. 

« La santé est un droit pour tous, une question fondamentale de justice sociale, d’équité et de droits humains », a réagi le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis, sitôt le texte approuvé.  Il a rappelé que chaque année des millions de personnes sombrent dans la pauvreté en raison du coût de leurs soins de santé.  « Santé et développement durable sont les deux faces d’une même pièce », a-t-il rappelé, appuyé par la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed. 

« La santé ne peut être une question de revenus », a abondé le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), M. Tedros Adhanom Ghebreyesus, en faisant siens ces mots de Nelson Mandela.  Il a souligné que 4,5 milliards de personnes ne sont pas totalement couvertes par les services de santé essentiels et que 2 milliards font face à des difficultés financières, c’est-à-dire qu’ils doivent choisir entre l’achat de médicaments ou de nourritures.  En outre, près de 800 femmes meurent chaque jour de complications liées à un accouchement et 100 000 personnes meurent chaque jour de façon prématurée en raison d’une maladie non transmissible. 

Le Chef de l’OMS a surtout rappelé que l’instauration d’une couverture sanitaire universelle est un défi politique, non pas technique.  « C’un choix politique. »  À ce titre, il a estimé que cette déclaration envoie un signal fort, avant de rappeler que le renforcement des soins de santé primaire dans le monde permettrait de sauver pas moins de 60 millions de vies. 

« Faisons le choix politique de la couverture sanitaire universelle. »  Même son de cloche du côté de Mme Rebecca Akufo-Addo, Première Dame du Ghana, qui a estimé que le monde ne fait pas assez d’efforts pour instaurer une couverture sanitaire universelle, y compris au sein des pays développés où des écarts dans l’accès aux soins subsistent.  Elle a exhorté ces pays à aider les pays en développement pour la distribution de médicaments génériques.  « La santé doit être accessible à tous, si nous le voulons, nous y arriverons », a-t-elle dit. 

Tous les intervenant se sont félicités de l’approbation de cette déclaration, à l’instar du Président du Chili qui a rappelé combien la rivalité l’avait emporté sur la coopération pendant la pandémie, s’agissant notamment de l’accès aux vaccins.  « Le droit à la santé est un droit humain qui doit être garanti pour tous », a-t-il déclaré, tandis que le Président du Monténégro a rappelé qu’il ne peut y avoir de « prospérité sans santé ».

« La couverture sanitaire universelle est une question de droit humain », a renchéri le Ministre de la santé de l’Irlande, qui a indiqué que la rétention du personnel de santé est un axe majeur de sa politique sanitaire.  Son homologue de l’Iraq s’est engagé à mettre en place une telle couverture, tandis que la Ministre de la santé de l’Estonie a loué les avantages de la numérisation quant à l’accès aux prestations médicales.  « La condition de la santé c’est la paix », a-t-elle dit, en condamnant vigoureusement la guerre en Ukraine. 

La Ministre des affaires étrangères des Tonga a, elle aussi, fait le pari de l’innovation pour renforcer l’offre de soins, notamment par le recours à la télémédecine, tandis que le Ministre de la santé de la Roumanie a souligné la nécessité de réorienter les systèmes de santé vers les soins primaires.  « Ce sont eux qui nous permettront de mettre en place une couverture sanitaire universelle. »  « Cette couverture est le Saint Graal en matière de santé », a appuyé la Ministre de la santé du Timor-Leste, qui a rappelé que la santé est un « droit tout autant qu’un devoir ».

Les appels à une solidarité internationale renforcée se sont également multipliés lors de cette réunion, à l’instar de celui lancé par le Ministre de la santé de la Jamaïque qui a appelé à regagner le terrain perdu pendant la pandémie.  « Il faut une solidarité mondiale en vue de renforcer les capacités des pays en développement dans le domaine de la santé », a déclaré le Ministre des relations extérieures du Cameroun, en soulignant l’importance, à ce titre, de l’aide publique au développement.   

« La résilience des Libanais est totale mais la solidarité internationale reste fondamentale », a appuyé le Ministre de la santé du Liban.  Le Ministre de la santé et de l’assainissement de la Sierra Leone a indiqué que l’absence de couverture sanitaire universelle en Afrique a une incidence négative sur la santé des populations, moins d’adultes étant à même de pouvoir obtenir un traitement pour les maladies non transmissibles.  Son homologue du Mali a exhorté la communauté internationale à épauler son gouvernement dans l’extension d’une telle couverture au Mali, y compris dans les zones en crise. 

De son côté, la Ministre de la santé d’Antigua-et-Barbuda a attiré l’attention sur la vulnérabilité des petits pays insulaires en développement dans l’approvisionnement en vaccins.  « Il ne peut y avoir de priorité plus impérieuse que le bon financement des systèmes de santé », a-t-elle insisté.  La Ministre des affaires étrangères du Mexique a indiqué que deux millions de personnes vont être couvertes dans son pays grâce aux efforts de son gouvernement, avant de s’élever contre la marchandisation de la santé.  « On ne doit pas gagner de l’argent grâce à des problèmes de santé. » 

Le Ministre de la santé de la Slovaquie a appelé à élaborer un budget mondial pour investir à l’échelle nationale, tandis que le Premier Ministre du Japon a indiqué que le G7 est conscient de la nécessité de renforcer le système sanitaire mondial pour se préparer pandémies.  Cinq milliards de dollars ont été donnés par le Japon, a-t-il dit.  « L’heure est venue pour les leaders du monde de parvenir à la couverture universelle d’ici à 2030, y compris dans les pays en développement. »  C’est une priorité absolue pour l’UE, a renchéri la Commissaire aux affaires intérieures de l’Union européenne

Des notes quelque peu dissonantes sont néanmoins venues de certaines délégations.  Le Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie a ainsi déclaré que l’application d’une telle couverture doit aider en premier lieu ceux qui en ont besoin sans créer des problèmes supplémentaires.  Les réfugiés autorisés à résider temporairement sur le territoire doivent donc avoir accès aux mêmes soins de santé, tandis que les migrants illégaux ne devraient pas avoir les mêmes droits, a-t-il tranché. 

De son côté, le Ministre de la santé de Singapour a rappelé que la tâche fondamentale des systèmes de santé est de prendre soin des malades, ce qui est difficile lorsque la population vieillit.  Plus de ressources doivent donc être investies dans les soins préventifs, tels que la promotion de modes de vie sains, a-t-il dit.  Enfin, le Vice-Ministre de la santé de la Fédération de la Russie a déploré la politisation de cette réunion à l’encontre de son pays.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: appels des pays du Sud à la diplomatie et à la négociation pour permettre une sortie de la crise en Ukraine

Reprise de la 9421e séance – après-midi  
CS/15420

Conseil de sécurité: appels des pays du Sud à la diplomatie et à la négociation pour permettre une sortie de la crise en Ukraine

Le Conseil de sécurité a achevé, cet après-midi, son débat public consacré au maintien de la paix et de la sécurité en Ukraine, l’occasion pour la petite dizaine d’intervenants qui n’avaient pas pu s’exprimer hier d’exposer leurs points de vue sur cette crise.

Cette réunion avait été marquée, hier, par la première intervention en personne depuis l’hémicycle du Président ukrainien, M. Volodymyr Zelenskyy, qui a présenté, à grands traits, sa « formule pour la paix ». Le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Sergey Lavrov, avait souligné pour sa part qu’en l’état, aucune négociation n’était possible avec « les putschistes néonazis de Kiev » et présenté sa propre chronologie de la crise ukrainienne.

Aujourd’hui, le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la Sierra Leone, a insisté sur l’importance du respect des objectifs et des principes de la Charte des Nations Unies par le biais d’un multilatéralisme efficace.  Il a donc invité les États Membres à s’engager dans la diplomatie et la négociation pour relever le pari difficile du règlement des conflits et de la promotion de solutions pacifiques, « une responsabilité qui incombe en premier au Conseil de sécurité ».  Le Ministre a également mis l’accent sur l’importance de l’égalité, de l’équité et de la cohérence dans l’application du droit international, y compris en ce qui concerne l’amélioration des recours et des réparations en cas de violation du droit international. 

Appelant à éviter toute mesure qui mettrait en danger les possibilités de dialogue et de négociation, la Secrétaire d’État aux affaires étrangères de l’Inde a posé la question de savoir s’il existe à ce stade une solution acceptable pour les deux parties et, à défaut, pourquoi le Conseil de sécurité, pourtant mandaté pour cette tâche, est-il devenu « inefficace, voire obsolète ». 

Le Directeur général du Département des relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud a lui aussi épinglé l’échec du Conseil de sécurité sur ce dossier, en regrettant que cela sape sa crédibilité. Le Conseil devrait veiller à ce que l’intégrité territoriale, la souveraineté et les droits des personnes reçoivent toute son attention, qu’il s’agisse de l’Ukraine, de la Palestine ou d’autres conflits, a-t-il exigé avec le soutien de l’Indonésie

L’Argentine a martelé que seuls le dialogue et la diplomatie mèneront à une sortie de crise, un point de vue partagé par le Ministre du pouvoir populaire pour les affaires étrangères du Venezuela qui a dénoncé le « scénario de la confrontation » en Ukraine avant d’appeler à changer de cap et à miser sur un dialogue sincère pour construire un mécanisme de sécurité européen plus juste et équilibré.  Les Nations Unies ont un rôle de premier plan à jouer afin d’éviter l’escalade et l’arrivée à un point de non-retour, a souligné le Ministre.  Le dignitaire a fait observer que l’initiative des dirigeants africains pour l’Ukraine s’inscrit dans cette logique, en ce qu’elle cherche à faciliter la fin de cette guerre à travers un processus diplomatique et des négociations. 

La réunion a également été marquée par l’intervention du Grand Chancelier de l’Ordre souverain de Malte qui a indiqué que selon les estimations, d’ici à la fin 2023, 224 milliards de dollars auront été dépensés dans ce conflit.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Face aux pandémies, les États Membres s’engagent à une meilleure coordination et à garantir un accès équitable aux traitements

Soixante-dix-huitième session,
Réunion de haut niveau sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies, AM & PM
AG/12533

Face aux pandémies, les États Membres s’engagent à une meilleure coordination et à garantir un accès équitable aux traitements

Aujourd’hui, les États Membres ont participé à une réunion de haut niveau inédite sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies.  À cette occasion, ils ont approuvé une déclaration politique qui appelle à renforcer la coopération internationale en s’appuyant sur les agences de l’Organisation des Nations Unies, au premier rang desquelles l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), et à garantir un accès « rapide, durable et équitable » aux vaccins, aux diagnostics et aux traitements.  

Ouvrant les débats, le Président de l’Assemblée générale a présenté la pandémie de COVID-19 comme « un des défis mondiaux les plus pressants de notre époque », ajoutant que son impact sur les économies et les systèmes de santé durerait encore pendant des années.  « La réalité, c’est que nous avons tout simplement manqué de préparation et de réactivité », a-t-il martelé, insistant sur la nécessité de se préparer à d’autres pandémies. 

M. Dennis Francis a aussi noté que la pandémie de COVID-19 avait révélé les inégalités qui affectent notre monde, rappelant que nombre de pays en développement, en particulier parmi les pays les moins avancés (PMA), n’avaient pas pu soigner leurs malades, organiser le travail et l’éducation à distance, ni relancer leurs économies.  

Dans la Déclaration politique, les États Membres s’inquiètent d’ailleurs des « inégalités criantes » d’accès aux vaccins contre la COVID-19, notant qu’en décembre 2022, 22% de la population des pays à faible revenu était complètement vaccinée contre 75% dans les pays à revenu élevé. Ils soulignent aussi que trois ans après le début de la pandémie, 84% des États continuent de signaler des perturbations dans au moins un service de santé essentiel. 

Préoccupée par l’accumulation des vaccins dans les pays riches alors que les populations des pays pauvres étaient laissées pour compte, la Secrétaire générale adjointe, Mme Amina J. Mohammed, a appelé à ne pas reproduire une telle situation en appliquant les préconisations de la Déclaration politique.   

Dans cette dernière, les États Membres appellent notamment à promouvoir la distribution équitable de médicaments abordables et de qualité, en réaffirmant l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), qui prévoit des flexibilités pour la protection de la santé publique et favorise l’accès aux médicaments pour tous, en particulier pour les pays en développement.  

Les États Membres y appellent également à renforcer les capacités de production locale et régionale de vaccins et de médicaments, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, en procédant à des transferts de technologie et en coopérant avec des communautés de brevets volontaires.  

Lors de son intervention, Mme Mohammed a également appelé à une réforme de l’architecture financière internationale afin d’alléger le fardeau de la dette des pays en développement qui les empêche d’atteindre l’objectif d’une couverture sanitaire universelle.  Pour ce faire elle a plaidé pour un financement à long terme d’au moins 500 milliards de dollars par an dans le cadre du plan de relance des objectifs de développement durable (ODD).   

Elle a également appelé à lutter contre la désinformation sur les vaccins, notamment grâce à un code de conduite sur les plateformes numériques.  De même, elle a proposé la création d’une plateforme de coordination d’urgence pour réagir face aux chocs internationaux complexes.  Les États Membres pourraient s’emparer de ces deux propositions et les mettre en œuvre à l’occasion du Sommet de l’avenir de septembre 2024, a-t-elle suggéré.  

Qualifiant l’adoption de la déclaration politique d’« historique », le Directeur général de l’OMS a exhorté les États Membres à prendre des mesures d’urgence pour mettre en œuvre les engagements pris dans la déclaration politique.  M. Tedros Adhanom Ghebreyesus les a aussi exhortés à aboutir d’ici au mois de mai 2024, à un accord solide en vue de rédiger un instrument international de l’OMS sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies, ainsi qu’à amender le Règlement sanitaire international (2005).   

Le Directeur général principal de la Banque mondiale a salué le premier anniversaire du Fonds de lutte contre les pandémies, qui a reçu des annonces de contributions de 133 pays pour un montant de 2 milliards de dollars.  En dépit de ce « très bon point de départ », M. Axel Van Trotsenburg a toutefois estimé qu’il faudrait allouer 10 milliards de dollars à la préparation aux pandémies et appelé les États Membres à fournir les ressources nécessaires. 

« Dépenser des milliards permettra d’économiser des billions », a renchéri la Championne de haut niveau pour la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies qui a, elle aussi, plaidé en faveur d’un système de financement mondial capable de réagir immédiatement en cas de pandémie. Estimant que les vaccins, les diagnostics et les traitements, devraient être considérés comme des « biens communs planétaires », elle a souhaité qu’ils soient disponibles dans le monde entier au sein d’un système préfinancé. 

« Les virus pouvant causer des pandémies ne vont pas attendre des années que la diplomatie produise des résultats », a averti Mme Helen Clark, appelant à conclure aussi vite que possible des accords dans le cadre des négociations en cours à Genève et à envisager la création d’un organe de coordination mondial dédié.  « L’ingéniosité et la solidarité humaine peuvent faire de la COVID-19 la dernière pandémie à causer une telle dévastation », mais cela dépend avant tout du choix politique des États Membres, a-t-elle souligné. 

Après ce segment liminaire, les délégations ont poursuivi leurs discussions dans le cadre d’un débat plénier et de deux tables rondes consacrées à la garantie de l’équité par le jeu de la gouvernance et l’application du principe de responsabilité́; ainsi qu’en renforçant les capacités de prévention, de préparation et de riposte face aux pandémies et en mobilisant des financements et des investissements durables et novateurs. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Ukraine: « cette guerre a tout changé pour l’ONU », déclare le Président Zelenskyy au Conseil de sécurité en presentant sa formule pour la paix

9421e séance – matin & après-midi
CS/15416

Ukraine: « cette guerre a tout changé pour l’ONU », déclare le Président Zelenskyy au Conseil de sécurité en presentant sa formule pour la paix

En marge du débat général de l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité a tenu aujourd’hui une réunion de haut niveau consacrée à la défense des buts et principes inscrits dans la Charte des Nations Unies au moyen d’un multilatéralisme efficace: maintien de la paix et de la sécurité de l’Ukraine.  Présent en personne pour la première fois dans la salle du Conseil de sécurité, le Président ukrainien, M. Volodymyr Zelenskyy, y a présenté, à grands traits, sa « formule pour la paix ».  Le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie a pour sa part répété qu’en l’état, aucune négociation n’était possible avec « les putschistes néonazis de Kiev » et a présenté sa propre chronologie de la crise ukrainienne. 

L’une des questions auxquelles les participants étaient invités à répondre portait sur les répercussions de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine sur le fonctionnement du multilatéralisme en général et celui de l’ONU en particulier.  Le Secrétaire général de l’ONU a rappelé que les Nations Unies ont condamné sans ambiguïté la guerre en exigeant que la Russie quitte l’Ukraine et en rejetant les efforts de ce pays pour annexer le territoire ukrainien.  « Il n’y a pas d’autre voie que celle du dialogue, de la diplomatie et d’une paix juste », a insisté M. António Guterres, qui a assuré que l’Organisation continue d’œuvrer en faveur d’une paix juste et durable en Ukraine, conforme à la Charte des Nations Unies, au droit international et aux résolutions de l’Assemblée générale.  Il a exhorté tous les pays à faire leur part pour éviter une nouvelle escalade et jeter les bases d’une paix durable.

« L’ONU a reconnu que le responsable de la guerre est la Russie, mais cela n’a rien changé pour elle; or, cette guerre a tout changé pour l’ONU », a répondu M. Zelenskyy.  Présentant sa formule pour la paix en 10 points comme destinée à actualiser et préserver l’ordre international basé sur les règles auquel les États Membres sont attachés, le Président ukrainien a imputé l’inaction du Conseil de sécurité à la présence en son sein d’un pays qui ment pour pouvoir conduire sa destruction de l’Ukraine.  « La Russie est un État qui estime que sa première ligne de défense et d’attaque n’est pas la Charte mais son armée », a-t-il accusé avant d’énoncer ses propositions. 

Une de celles-ci consiste à faire supprimer le droit de veto de la Fédération de Russie, accusée d’y recourir abusivement, par une résolution de l’Assemblée générale soutenue par les deux tiers de ses membres.  La formule de paix préconise aussi la mise en place d’un mécanisme juridiquement contraignant pour riposter rapidement en cas de violation de la Charte et empêcher la constitution d’armées d’invasion.  « Laissons la paix l’emporter! », a lancé M. Zelenskyy, qui a renouvelé sa proposition d’organiser un sommet pour la paix pour examiner comment sa formule pourrait être intégrée dans une Charte « amendée ».

La formule n’a pas reçu de réponse lors de la séance de ce jour.  Pour l’essentiel, à l’exception de la Fédération de Russie, la plupart des nombreux intervenants –environ 45 devraient s’exprimer ce jour et demain en plus des 15 membres du Conseil- ont réaffirmé leur soutien à l’exercice, par l’Ukraine, de son droit à la légitime défense contre l’agression illégale dont elle est victime, et redit leur détermination à agir collectivement pour affermir l’ordre international fondé sur des règles. 

Ainsi, les ministres présents des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France se sont bornés à souligner qu’il y a un agresseur et une victime, le premier, la Russie, qui s’attaque aux principes de la Charte des Nations Unies, et l’autre, l’Ukraine, qui s’efforce, avec leur soutien militaire et économique, de les défendre. La Chine, pour sa part, a réitéré sa position sur le règlement de la crise ukrainienne, qui prône en particulier la reprise de pourparlers et la levée des sanctions. 

Quant à la Fédération de Russie, après avoir protesté contre le fait que M. Zelenskyy était invité à s’exprimer immédiatement après le Secrétaire général et avant les membres du Conseil, dont plusieurs étaient pourtant représentés par leur chef d’État, elle a maintenu fermée la porte du dialogue.  Son ministre des affaires étrangères, M. Sergey Lavrov, a dénoncé avec une véhémence égale le « régime néonazi de Kiev » et les slogans antirusses des États-Unis et de leurs alliés.  Il a ensuite présenté sa propre chronologie de la crise, faisant remonter au démantèlement de l’Union soviétique les ingérences occidentales en Ukraine et leurs propres violations de la Charte des Nations Unies, en affirmant notamment que c’est « l’Occident global » qui aurait porté à la tête de l’Ukraine un président pro-occidental à l’issue d’un coup d’État. 

Attirant l’attention sur les ravages causés par la « politique russophobe » des « putschistes néonazis de Kiev » dans le Donbass, le Ministre des affaires étrangères russe a affirmé que les référendums qui y ont été organisés en 2022 étaient légaux et conformes à la Charte.  Il a surtout soutenu qu’à l’exception du Président Putin, tous les signataires des accords de Minsk, entérinés en 2015 par une résolution du Conseil de sécurité, avaient déclaré publiquement qu’en signant ce document ils n’avaient en réalité cherché qu’à gagner du temps « pour abreuver en armes l’Ukraine contre la Russie et pour mieux organiser le blocage économique du Donbass ». 

S’il a affirmé que son pays restait prêt à établir des contacts avec l’Organisation du Traité de sécurité collective et l’OTAN pour discuter des principes relatifs à l’indivisibilité de la sécurité, qui trouvent leur source dans ceux de la Charte, M. Lavrov a toutefois demandé « comment imaginer un tel dialogue au service d’un multilatéralisme efficace quand l’Occident rejette toute forme de négociation sur un pied d’égalité? ».

Le Conseil achèvera son débat demain, jeudi 21 septembre, dans l’après-midi. 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Défense des buts et principes inscrits dans la Charte des Nations Unies au moyen d’un multilatéralisme efficace : maintien de la paix et de la sécurité de l’Ukraine S/2023/653

Motion d’ordre préalable 

À l’ouverture de la séance, le représentant de la Fédération de Russie a demandé au Président albanais du Conseil de sécurité sur quelles bases il avait été décidé que le Président de l’Ukraine s’exprime avant les membres du Conseil de sécurité, alors que plusieurs de ces derniers sont également représentés au niveau des chefs d’État.  Il a également demandé pourquoi la Macédoine du Nord interviendrait en tant que représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). 

Le Président du Conseil de sécurité a répondu qu’il existe des précédents d’interventions présidentielles dans cet ordre conforme au paragraphe 33 du règlement du Conseil.  De plus, a-t-il dit, les États Membres pourront ensuite réagir aux propos de M. Zelenskyy.  Par ailleurs, il a indiqué que l’OSCE interviendrait en tant qu’elle joue un rôle majeur pour le maintien de la sécurité régionale et internationale. 

Le représentant de la Fédération de Russie a contesté ce point de vue et averti que, si ce débat devait se tenir dans ces conditions, la présidence albanaise du Conseil en serait entachée à jamais.  Créer un tel précédent odieux montre que ce débat est en réalité un spectacle organisé en coulisses par les États membres de l’OTAN, a affirmé le représentant.  Il a également demandé que le représentant de l’OSCE se contente de faire une déclaration correspondant au mandat de cette organisation, laquelle ne contribue d’ailleurs nullement au règlement de la situation en Ukraine. 

Le Président du Conseil de sécurité a repris la parole en qualifiant la « leçon russe sur la violation des règles » de « grandiose ».  La Russie pourrait mettre fin à la guerre afin que le Président ukrainien n’ait pas à prendre la parole dans cette enceinte, a-t-il ajouté. 

Déclarations 

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé d’emblée que « la Charte des Nations Unies représente notre feuille de route pour parvenir à un monde plus pacifique ».  Selon lui, les outils et les mécanismes fondés sur les principes de la Charte offrent en effet des moyens pratiques de régler les conflits. C’est « ensemble » que les efforts collectifs des États Membres ont contribué au fil des ans à prévenir la guerre à l’échelle mondiale et à sauver des millions de vies, grâce précisément au rétablissement de la paix et à la diplomatie préventive, aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, aux efforts de désarmement et de non-prolifération, aux programmes humanitaires et de développement, et aux activités de promotion des droits humains.

Le Chef de l’ONU a indiqué qu’en adoptant, hier, un plan de sauvegarde des objectifs de développement durable, les États Membres venaient d’agir pour prévenir les conflits et les crises de toutes sortes.  Et c’est parce que le multilatéralisme fonctionne, qu’il est essentiel et efficace, qu’il faut aussi en préserver les outils et mécanismes, lesquels sont mis à mal par la montée des tensions et des défis géopolitiques. 

M. Guterres a déploré que le nombre de décès liés aux conflits ait presque doublé l’année dernière, que les opérations de paix des Nations Unies soient soumises à une pression sans précédent.  Il a constaté que le désarmement nucléaire est à l’arrêt et qu’il n’existe aucun cadre mondial adéquat pour faire face aux menaces que les nouvelles technologies font peser sur la sécurité.  Ainsi a-t-il exhorté les États à faire davantage pour renouveler leur engagement vis-à-vis des obligations de la Charte.  À cette fin, il les a invités à utiliser l’ensemble des outils diplomatiques qu’elle met à leur disposition, à donner la priorité à la prévention des conflits et des crises et à tenir compte des propositions de nouveaux cadres et outils présentés dans le Nouvel Agenda pour la paix. 

Le Secrétaire général a une nouvelle fois qualifié l’invasion de l’Ukraine par la Russie de violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international, violation qui accentue les tensions et les divisions géopolitiques, met en péril la stabilité régionale, accroît la menace nucléaire et « creuse de profondes fissures dans un monde de plus en plus multipolaire ».  Rappelant que les Nations Unies ont condamné sans ambiguïté la guerre, en exigeant que la Russie quitte l’Ukraine et en rejetant les efforts de la Russie pour annexer le territoire ukrainien, il a réitéré son appel à une paix juste et durable en Ukraine, conforme à la Charte et au droit international, « pour l’Ukraine, pour la Russie et pour le monde entier ».

« Les attaques contre les civils et les infrastructures civiles doivent cesser immédiatement », a poursuivi le Secrétaire général.  Après avoir rappelé les conséquences humanitaires de la guerre pour la population ukrainienne, il a souligné que les programmes humanitaires en sa faveur s’étaient intensifiés cette année.  Il a aussi rappelé que l’Agence internationale de l’énergie atomique avait établi une présence à la centrale nucléaire de Zaporizhzhia et sur d’autres sites nucléaires ukrainiens importants afin d’en contrôler la sûreté, et qu’en coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge, l’ONU avait pu organiser avec succès l’évacuation des civils de l’aciérie Azovstal à Marioupol l’année dernière. 

Sur le volet judiciaire, le Secrétaire général a fait savoir que les équipes d’enquête continuent de recueillir des preuves de violations choquantes et généralisées des droits humains –« qui sont principalement le fait de la Fédération de Russie »– y compris les transferts forcés de civils ukrainiens, dont des enfants. Ce travail de collecte de preuves est indispensable pour établir les responsabilités, a-t-il relevé, jugeant essentiel que tous les auteurs de violations des droits humains répondent de leurs actes, conformément aux règles et aux normes internationales. 

S’agissant des répercussions économiques de la guerre, M. Guterres a rappelé que l’Initiative de la mer Noire ainsi que le Mémorandum d’accord visant à faciliter l’exportation des produits alimentaires et engrais russes ont contribué à réduire les prix des denrées alimentaires de plus de 23%, rendant en outre possible l’exportation de près de 33 millions de tonnes de céréales et de denrées alimentaires.  Il a dit regretter profondément que la Russie ait mis un terme à sa participation à l’Initiative de la mer Noire en juillet de cette année et qu’aussitôt après cette décision, la Russie ait bombardé des ports ukrainiens et des installations de stockage de céréales sur la mer Noire et le Danube.  Exhortant la Russie à cesser ces attaques, il a rappelé que l’ONU maintient le dialogue avec toutes les parties pour garantir la sécurité de l’exportation des céréales et des engrais en provenance de Russie et d’Ukraine.  Mais ce dialogue doit reposer sur une base stable, sans la menace répétée d’une suspension, a-t-il averti.

M. Guterres a assuré que l’ONU continue d’œuvrer en faveur d’une paix juste et durable en Ukraine, conforme à la Charte des Nations Unies, au droit international et aux résolutions de l’Assemblée générale.  Il a exhorté tous les pays de faire leur part pour éviter une nouvelle escalade et jeter les bases d’une paix durable.  Rappelant son plein à attachement à « la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues », le Secrétaire général a conclu en soulignant qu’il n’y a pas d’autre voie que celle du dialogue, de la diplomatie et d’une paix juste. 

M. VOLODYMYR ZELENSKYY, Président de l’Ukraine, s’est d’abord demandé comment un État, auteur d’une agression illégale, pouvait toujours siéger en tant que membre permanent du Conseil de sécurité.  Il a demandé aux États Membres de prendre la mesure du fait que cette agression a pour objectif profond de saper les normes internationales créées pour protéger le monde contre les guerres.  À la violation de la Charte des Nations Unies que constitue cette agression, l’Ukraine répond en exerçant son droit à la légitime défense, a martelé le Président ukrainien, qui a noté que si l’ONU a bien reconnu que le responsable de la guerre est la Russie, « cela n’a rien changé pour elle ».  Or, cette guerre a tout changé pour l’ONU, a-t-il ajouté. 

M. Zelenskyy a ensuite présenté sa formule pour la paix, qu’il a présentée comme pouvant permette d’actualiser les fondements du système de sécurité actuellement en vigueur dans le monde, afin de préserver l’ordre international basé sur les règles auquel les États Membres sont indéfectiblement attachés.  Pour le Président ukrainien, le monde entier voit ce qui empêche le Conseil de sécurité d’agir: c’est la présence en son sein d’un pays manœuvrier qui ment pour pouvoir conduire sa destruction et son rapt de l’Ukraine.  La Russie est selon lui un État qui estime que sa première ligne de défense et d’attaque n’est pas la Charte mais son armée. 

La formule pour la paix, qui comporte 10 points, pourrait être partiellement intégrée dans une Charte des Nations Unies « amendée, révisée », a estimé M. Zelenskyy.  À cet égard, il a soutenu que l’utilisation abusive du droit de veto par la Russie devrait être supprimée par le biais d’une résolution de l’Assemblée générale soutenue par les deux tiers de ses membres.  L’Assemblée générale a reconnu à maintes reprises que la Russie exerce son droit de veto pour donner libre cours à son goût pour la violence et la guerre, a-t-il affirmé.  Il a également plaidé pour un élargissement de la composition du Conseil de sécurité qui, adapté aux nouvelles réalités du monde, serait plus efficace et en mesure de rendre des comptes de façon franche et transparente à l’ensemble des États Membres. Il a de plus souhaité que les activités du Conseil de sécurité impliquent les États Membres reconnus comme n’étant pas des agresseurs potentiels.  Sur ce point, il a proposé qu’un mécanisme juridiquement contraignant soit mis en place non seulement pour riposter rapidement en cas de violation flagrante de la Charte mais aussi pour, en amont, empêcher la constitution d’armées d’invasion. 

Le Chef de l’État a appelé au retrait complet de son pays des troupes russes, des formations militaires, « comme ce qui reste de la flotte russe en mer Noire », ainsi que des formations paramilitaires.  Cela seul, couplé à la reprise du contrôle de nos frontières, marquera la fin de l’agression russe contre l’Ukraine, a-t-il dit.  Il a néanmoins demandé aux États Membres de ne pas attendre la fin de cette agression pour réformer les institutions internationales garantes de l’ordre international fondé sur des règles qu’ils ont contribué à instaurer.  Le cœur de la défense de cet ordre international se trouve dans cette salle et plus encore dans celle de l’Assemblée générale, a-t-il souligné, avant de répéter que l’Ukraine est prête à organiser un sommet mondial pour examiner sa formule pour la paix. Chaque nation peut d’ores et déjà faire preuve de leadership en s’engageant, dans le cadre de groupes de travail, à examiner un ou plusieurs points de la formule, a-t-il précisé avant de conclure en lançant: « Laissons la paix l’emporter! ».

M. EDI RAMA, Premier Ministre de l’Albanie, a salué la présence d’un tel nombre de dignitaires à cette réunion « ce qui en dit long sur l’importance capitale de la question à l’ordre du jour ».  Qui aurait pu imaginer qu’une guerre catastrophique soit lancée au vingt et unième siècle, par un membre permanent du Conseil de sécurité, sapant de façon brutale tous les principes qui ont donné naissance à l’ONU.  Qui aurait pu imaginer qu’une agression militaire non-justifiée et injuste d’un grand pays contre une petite démocratie n’aurait pas été immédiatement et universellement condamnée par le concert des nations?  Comment comprendre ce « oui mais », s’est emporté le Ministre en pointant du doigt les nations qui refusent toujours d’appeler un chat un chat.  La guerre en Europe ne peut pas être le problème de la seule Europe comme d’aucuns l’affirment ou le murmurent, a-t-il martelé, reprochant à ces derniers de penser parfois que l’Ukraine l’aurait cherché.  Dénonçant ensuite les menaces nucléaires inacceptables qui continuent d’être brandies par le Kremlin, il a estimé qu’on est en droit de craindre qu’un jour cette folie dégénère encore plus: la guerre en Ukraine était elle aussi inimaginable hier, a-t-il dit. 

Reconnaissant qu’on peut ne pas être d’accord sur tout, y compris sur les façons de mettre un terme à cette guerre, le Premier Ministre a appelé à « en parler ».  Il a affirmé qu’il serait « insultant » pour l’ONU d’être incapable d’affirmer haut et fort qui est l’agresseur et qui est l’agressé.  La lutte des Ukrainiens est celle de toute personne aspirant à vivre dans un monde où les nations sont libres sur un pied d’égalité, où l’intégrité territoriale est sacro-sainte et où le droit de vivre dans la paix n’est pas contesté.  Il a déploré que l’usage abusif du droit de veto ait paralysé le Conseil, tout en affirmant que l’organe n’avait pas été réduit au silence.  Selon lui, il serait inacceptable que la force des règles et des valeurs qui rassemblent les États soit remplacée par la règle de la force et des anti-valeurs.  « Nous refusons d’être complices d’un bouleversement dangereux de l’ordre mondial dont les conséquences ne peuvent être qu’imprévisibles, sinon tragiques pour tout le monde », a-t-il dit. 

M. GUILLERMO LASSO MENDOZA, Président constitutionnel de l’Équateur, a exhorté la Russie à suspendre immédiatement ses actions, conformément au jugement de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a relevé que la guerre en Ukraine portait atteinte aux principes les plus sacrés de l’ONU, dont le respect de l’intégrité territoriale.  La Charte des Nations Unies est valable partout dans le monde, et son contenu reste le même dans toutes les langues: en russe comme en espagnol, elle n’autorise jamais le recours à la force, a-t-il lancé. Il a souligné l’impossibilité de défendre le multilatéralisme sans condamner « le voisin agresseur », réprouvant l’indifférence, voire la complicité de certains.  De même, il a récusé ceux qui estiment que la crise résulte d’une insuffisance de la Charte, estimant qu’aucun cadre institutionnel ne peut fonctionner si les États ne s’engagent pas à en respecter les principes. 

En plus de semer le trouble dans la dynamique de travail du Conseil de sécurité, la guerre met à l’épreuve la confiance dans les Nations Unies, s’est-il alarmé.  Après avoir fait part de son soutien à la prorogation de l’Initiative de la mer Noire, le Président a souligné qu’aucune base juridique peut justifier le conflit, dénonçant ceux qui soutiennent qu’elle serait « une riposte à un soi-disant complot occidental pour affaiblir la Russie ».  Il a également estimé qu’il n’y a pas de fracture entre les pays du Nord et du Sud à propos de la guerre en Ukraine, comme d’aucuns l’affirment parfois. « Il suffit de voir les votes à l’Assemblée générale pour constater que ce n’est pas le cas », a-t-il ajouté. Constatant que le conflit constitue une menace mondiale, nucléaire, alimentaire et économique, il a appelé à soutenir les bons offices du Secrétaire général. 

M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, a déclaré que le monde est en situation difficile du fait des tensions politiques entre grandes puissances, des changements climatiques, des inégalités ou encore des changements inconstitutionnels de gouvernement, tous facteurs qui hypothèquent la confiance et la solidarité et remettent en question la logique qui prévalait jusqu’à présent, selon laquelle il est préférable de tolérer les défauts du multilatéralisme pour le bien de chacun plutôt que de faire le choix du chaos pour des motifs d’ordre national. 

Le Président a qualifié l’agression russe d’inacceptable pour la population ukrainienne mais aussi pour le reste du monde, en particulier en Afrique.  Tout en dénonçant cette remise en cause de l’ordre international, il a estimé que la situation n’était pas sans issue, à condition que l’on soit prêt à coopérer à la refonte de l’ordre international pour en rendre les structures plus conformes à la réalité du monde.  Les fondateurs des Nations Unies se sont engagés à renoncer à recourir à la force pour régler leurs différends et les principes qui sous-tendant la Charte des Nations Unies demeurent pertinents, a poursuivi le Chef de l’État. C’est pourquoi le Ghana continue de plaider en faveur d’un règlement diplomatique du conflit ukrainien, seul moyen de parvenir à une solution juste, pérenne, fondée sur la Charte et le droit international. 

M. Akufo-Addo a appelé à faire le choix d’un multilatéralisme revitalisé. À ses yeux, plusieurs organes créés par la Charte sont toujours pertinents, comme le Conseil de sécurité, même si sa composition doit être revenue dans le cadre d’une réforme complète.  Il a fait observer en ce sens que la position africaine commune incluse dans le consensus d’Ezulwini était soutenue par un nombre croissant d’États Membres, a plaidé pour une limitation du droit de veto et un moratoire sur son utilisation, qui pourrait progressivement mener à son retrait complet.  Il a plaidé pour mettre davantage l’accent sur la diplomatie préventive, a rappelé que certaines politiques socioéconomiques peuvent exercer une influence sur la paix. Et ajouté que le multilatéralisme au niveau international devait aller de pair avec des partenariats régionaux, dont il faut exploiter tout le potentiel.  En conclusion il a de nouveau appelé le Conseil de sécurité à assumer ses responsabilités, en particulier en Ukraine.

M. ALAIN BERSET, Président de la Confédération suisse, a regretté qu’il faille, sans cesse, rappeler les principes essentiels de la Charte des Nations Unies et du multilatéralisme, qui expriment pourtant « la volonté commune de tous les peuples à vivre en paix ».  Il a déploré que les civils continuent à souffrir des conflits armés en dépit du droit international humanitaire, précisant que la Suisse s’engage à respecter ses engagements en la matière.  Soulignant la violation claire de la Charte par la Russie, il s’est indigné que la Russie continue à nier sa responsabilité.  Cette guerre engendre de nombreux réfugiés et victimes, tout en fragilisant la sécurité mondiale alimentaire, énergétique et nucléaire, a-t-il poursuivi, avant d’exhorter la Russie à cesser les hostilités et à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

M. Berset a ensuite déploré l’enlisement des discussions au Conseil, lequel dès lors, ne peut remplir son mandat efficacement.  Pourtant, a-t-il ajouté, le Conseil ne doit pas gaspiller le bien le plus précieux dont il dispose: la confiance de celles et ceux qui comptent sur lui pour leur garantir une vie dans la dignité et la paix.  Le Conseil peut et doit garder sa capacité d’action, a poursuivi M. Berset: il a les moyens de remplir son mandat, comme en ont témoigné les 26 résolutions adoptées depuis janvier, qui démontrent que le multilatéralisme, bien qu’affaibli, a gardé sa capacité d’action.  Des réformes sont nécessaires, mais aucune réforme ne remplacera la volonté des États à respecter la Charte, a averti le Président. 

La Suisse compte bien faire montre de solidarité, comme demandé par le Secrétaire général dans son Nouvel Agenda pour la paix.  Elle a ouvert ses portes aux réfugiés ukrainiens, participe au déminage humanitaire et contribue à promouvoir une solution politique au conflit. M. Berset a également appelé à la relance de l’Initiative de la mer Noire.  Saluant les initiatives diplomatiques en faveur d’une paix pérenne en Ukraine, il a réitéré son soutien au multilatéralisme pour sortir des logiques individuelles et trouver des solutions communes et durables.  Il faut sortir de la violence, qui n’a pas apporté de solutions aux dysfonctionnements et aux déséquilibres, a ajouté le Président suisse, qui a conclu en répétant que la paix et la sécurité ne peuvent être atteintes que dans un esprit de confiance et de collaboration. 

M. KISHIDA FUMIO, Premier Ministre du Japon, a exprimé sa détermination à soutenir l’Ukraine face à la guerre d’agression que mène la Russie. Toute tentative visant à modifier unilatéralement le statut pacifiquement établi des territoires par la force ou la coercition ne doit être tolérée nulle part dans le monde, a-t-il fait valoir, voyant dans la rhétorique nucléaire irresponsable de la Russie, son déploiement d’armes nucléaires au Bélarus et son occupation de la centrale nucléaire de Zaporizhzhia une menace pour la paix et la stabilité mondiales.  Il a également jugé que l’abus du droit de veto pour faire obstacle aux décisions du Conseil de sécurité ne peut être accepté par la communauté internationale.  Selon le Premier Ministre, il importe d’empêcher l’avènement d’un « règne d’anarchie » dans le monde.  Pour cela, il est essentiel de parvenir à une paix globale, juste et durable en Ukraine, afin de protéger un ordre international fondé sur l’état de droit, a-t-il soutenu.  Dans cet esprit, il a appuyé les « efforts sincères » du Président Zelenskyy pour faire respecter les principes de la Charte dans sa « formule de paix ». 

Jugeant qu’un multilatéralisme efficace n’a jamais été aussi nécessaire qu’aujourd’hui, le Premier Ministre a rappelé que son pays a organisé un débat public du Conseil de sécurité sur l’état de droit et la consolidation de la paix pendant sa présidence du Conseil afin d’écouter les diverses voix de la communauté internationale.  Le Japon, a-t-il ajouté, redoublera d’efforts pour résoudre les problèmes liés à la paix et à la sécurité internationales, notamment par le biais de la diplomatie préventive, tout en garantissant l’état de droit dans le cadre du multilatéralisme. Le Premier Ministre a par ailleurs appelé à élargir le nombre des sièges permanents et non permanents du Conseil de sécurité afin de « mieux refléter les réalités du monde d’aujourd’hui, en particulier de l’Afrique ».  Il est temps d’aller de l’avant pour faire de l’ONU une plateforme à l’écoute des personnes confrontées à des difficultés et de travailler avec elles pour relever ensemble les défis, a-t-il affirmé.

M. ROBERT ABELA, Premier Ministre de Malte, a déclaré que plus que jamais, le monde a besoin d’un système multilatéral efficace centré sur l’ONU.  Nous devons redoubler d’efforts pour faire respecter et défendre les principes fondamentaux qui nous unissent, a-t-il ajouté. Ainsi un multilatéralisme efficace est-il le seul moyen de résoudre les enjeux existentiels actuels de manière collective et efficace.  Et pour atteindre cet objectif ambitieux, les États Membres ne peuvent pas se résigner à vivre dans un monde où c’est le plus fort qui impose sa loi. 

Il a affirmé que la guerre lancée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine mine profondément le système multilatéral.  Elle affaiblit et déstabilise le Conseil de sécurité, posant la question des conséquences à long terme pour l’intégrité de l’ONU des crimes commis par l’un de ses membres permanents.  Le Premier Ministre a ensuite souligné le droit de l’Ukraine à la légitime défense, tel que consacré à l’Article 51 de la Charte des Nations Unies.  Il ne peut y avoir de paix si les forts peuvent piétiner les faibles, si le droit international peut être ignoré.  Et il ne peut y avoir de paix si les droits des États et des individus peuvent être suspendus ou révoqués à tout moment, a poursuivi le Chef de gouvernement, qui a rappelé l’engagement de Malte en faveur de la paix, du dialogue et du multilatéralisme.  Se posant en défenseur acharné des buts et principes de la Charte, il a déclaré que la seule réponse possible aux guerres et aux agressions illégales était de redoubler d’efforts en continuant « d’investir dans notre système multilatéral ».  Ce faisant, nous devons également réformer le Conseil pour l’adapter aux réalités du monde d’aujourd’hui.  Un Conseil plus transparent, plus efficace, plus représentatif, plus responsable et plus démocratique, a-t-il ainsi appelé de ses vœux. 

M. RAYMOND NDONG SIMA, Premier Ministre du Gabon, a rappelé que son pays avait condamné la violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine dès le début des hostilités.  Évoquant une menace nucléaire de « plus en plus diffuse », il a estimé que l’« onde de choc » du conflit se propageait au-delà des frontières ukrainiennes, notant que des millions de personnes auraient trouvé refuge en dehors du pays.  À l’échelle internationale, il a considéré que la guerre menaçait de nombreuses chaînes de valeur, en particulier le secteur agricole, et contribuait à la détérioration du bilan humanitaire mondial en exacerbant la faim et la précarité, mais aussi en infligeant « des blessures invisibles telles que la haine et le rejet de l’autre ». 

Se demandant quel niveau d’horreur doit être atteint pour que les belligérants finissent par entamer des pourparlers, il les a appelés à négocier de bonne foi « dans la retenue et la responsabilité ».  Estimant que les invectives qui ont émaillé les réunions des Nations Unies n’avaient été « d’aucune aide ni d’aucun recours pour ceux qui tombent dans les tranchées ou sont écrasés sous les décombres sur les champs de bataille », il a appelé à une réconciliation avec l’esprit de la Charte des Nations Unies.  Il s’est opposé aux actions unilatérales, expliquant qu’elles ne font qu’alimenter les antagonismes et a assuré que le Gabon soutiendra toute initiative fondée sur la diplomatie en faveur de la cohabitation pacifique entre la Russie et l’Ukraine. 

Pour M. OLIVER DOWDEN, Vice-Premier Ministre du Royaume-Uni, le combat que mène l’Ukraine contre l’agression russe n’est pas seulement un combat pour la liberté.  C’est aussi un combat pour les principes sur lesquels reposent les Nations Unies elles‑mêmes, des principes étayés par la Charte qui disposent que la souveraineté de tous les États est égale; que l’intégrité territoriale est inviolable; que les différends doivent être réglés pacifiquement et que nous devons protéger ces choses ensemble. 

Lorsque les chars russes sont entrés en Ukraine, ils ont piétiné chacun de ces principes, et n’ont cessé de le faire depuis, a dénoncé le Vice-Premier Ministre, qui a rappelé le coût humain de ce conflit à ce jour: 9 500 civils tués, dont 550 enfants; 17 000 blessés et 500 000 victimes militaires des deux côtés, sans oublier les Ukrainiens disparus, torturés, violés et déportés.  Les attaques russes ont aussi détruit plus de 280 000 tonnes de céréales, soit de quoi nourrir plus de 1,25 million de personnes pendant un an, a‑t‑il poursuivi, avant d’annoncer que le Royaume‑Uni apporterait une contribution supplémentaire de 3 millions de livres sterling au Programme alimentaire mondial (PAM) afin de poursuivre le travail entamé dans le cadre de l’initiative « Céréales d’Ukraine » du Président Zelenskyy. 

M. Dowden a dit pleinement soutenir les initiatives des Nations Unies et de la Türkiye visant à encourager la Fédération de Russie à revenir à l’Initiative de la mer Noire et à permettre les exportations de céréales ukrainiennes par d’autres voies, sans délai.  La seule façon de mettre fin à ces souffrances généralisées est d’instaurer une paix juste et durable, a argué le Vice-Premier Ministre, en rappelant que l’Ukraine a fait la preuve de son engagement en faveur de la paix à maintes reprises, notamment à Copenhague et à Djedda au cours de l’été, afin de dégager un consensus sur les principes communs de cette paix. 

Sur la question d’un multilatéralisme efficace, M. Dowden a mis en exergue le large soutien de la communauté internationale, lors des votes à l’Assemblée générale, pour condamner l’invasion russe.  S’il a admis qu’on est en droit de se demander quelle différence ce type de soutien peut faire lorsque la Fédération de Russie semble si imperméable aux exigences de l’ONU, le ministre a fait observer que, contrairement aux apparences, la Russie est bien consciente du pouvoir de l’action collective puisqu’elle s’efforce d’affaiblir et de diviser la communauté internationale. Il a donc appelé à collectivement œuvrer à trouver une solution durable à travers un multilatéralisme efficace pour rendre justice aux nombreuses victimes de ce conflit, mais également pour aider l’Ukraine à retrouver le chemin de la prospérité et garantir la paix. 

M. ANTONY BLINKEN, Secrétaire d’État des États-Unis, a commencé par relater une visite effectuée il y a deux semaines dans une petite ville d’Ukraine qui avait été envahie par les forces russes au premier jour de l’invasion. Un poste de commandement avait été créé dans l’école du village et les femmes, les enfants et les personnes âgées avaient été forcés de se rendre dans un sous-sol inhabitable, a-t-il expliqué. « Les forces russes les y ont gardés 28 jours en se servant d’eux comme des boucliers humains, avant finalement de s’enfuir ».  Sur un mur de ce sous-sol irrespirable, d’où n’étaient extraites que les dépouilles des personnes décédées, deux listes de noms avaient été inscrites: les villageois exécutés et ceux qui avaient péri dans ce lieu, a poursuivi M. Blinken, qui a justifié ce récit par le fait que le confort de la salle du Conseil de sécurité peut faire perdre de vue les réalités de l’agression russe.  Il a aussi rappelé que, rien que la semaine dernière, la Fédération de Russie a bombardé des bâtiments résidentiels, incendié des dépôts humanitaires et détruit des silos à grains. 

Dans cette guerre, qui a pour objectif de rayer l’Ukraine de la carte, il y a l’agresseur et la victime, a fait valoir le Chef de la diplomatie américaine.  « L’un s’attaque aux principes de la Charte des Nations Unies, l’autre s’efforce de les défendre », a-t-il souligné, accusant la Russie de fouler au pied les piliers de la Charte et les résolutions du Conseil en envahissant un pays souverain, en commettant des crimes de guerre et contre l’humanité au quotidien, en brandissant la menace nucléaire, en militarisant la faim et en utilisant des drones iraniens pour attaquer les civils ukrainiens.  La semaine dernière, a-t-il ajouté, le Président Putin a reçu le dirigeant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) pour discuter de la coopération militaire.  « Tout transfert d’armes de la RPDC à la Russie serait également une violation des résolutions du Conseil ».  De fait, a souligné M. Blinken, il est difficile de trouver un pays qui méprise autant les Nations Unies et ce qu’elle représente que la Russie, alors même qu’elle dispose d’un siège permanent au Conseil de sécurité. 

Pour M. Blinken, le Président Putin espère que s’il continue cette guerre, le monde renoncera à ses principes et que l’Ukraine cessera de se défendre.  Or, les Ukrainiens n’abandonnent pas la lutte car ils savent ce qui se passerait s’ils se soumettaient à la Russie:  « Cela ressemblerait à ce sous-sol », a-t-il dit, rappelant également les déportations d’enfants ukrainiens arrachés à leur famille, les ruines de Marioupol et les charniers de Bucha.  « Nous non plus nous n’abandonnons pas », a-t-il assuré, avant de se féliciter du nombre croissant de pays qui se rassemblent pour trouver une autre solution.  En juin, a-t-il rappelé, une dizaine de pays ont rencontré l’Ukraine à Copenhague pour rechercher une paix juste et durable.  Deux mois plus tard, plus de 40 pays ont poursuivi ce dialogue à Djedda.  Et alors que le Président Zelenskyy a présenté un plan de paix en dix points, « le Président Putin n’a, lui, rien présenté », a fait observer M. Blinken. 

Le Secrétaire d’État a ensuite qualifié de « faux dilemme » les affirmations selon lesquelles le soutien à l’Ukraine détournerait d’autres priorités.  « Nous pouvons faire les deux », a-t-il affirmé, appelant à relever les défis mondiaux et à réaliser les objectifs de développement durable, des efforts auxquels les États-Unis sont les « premiers contributeurs ».  Parallèlement, a-t-il souligné en conclusion, il nous faut continuer à renforcer les piliers des relations pacifiques entre les nations et donc envoyer un message fort à la Russie et à tout agresseur potentiel: « Nous ne resterons pas les bras ballants lorsque les règles dont nous sommes convenus seront foulées au pied ». 

M. SERGEY LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déploré que l’ONU fasse de plus en plus le choix de renier l’héritage de ses pères fondateurs.  Pour la Russie, l’ONU est malmenée par certains qui voudraient l’utiliser à la seule fin de défendre leurs intérêts géopolitiques.  Ce faisant, le Ministre a estimé que les Occidentaux aggravent et attisent de nouveaux foyers de tension et exacerbent les risques de conflit. M. Lavrov a affirmé que son pays compte uniquement sur une application non sélective des principes de la Charte, y compris en matière de droit des peuples à l’autodétermination et de non-ingérence.  Sur ce dernier point, il a accusé les États-Unis et leurs alliés de s’être ingérés dans les affaires intérieures de l’Ukraine au lendemain du démantèlement de l’Union soviétique.  Cessons de taire l’histoire jusqu’à 2014, a-t-il demandé, avant de se lancer dans un rétablissement chronologique de la vérité des incidents qui, depuis 2004-2005, ont été émaillés de nombreuses violations de la Charte des Nations Unies. 

À cet égard, M. Lavrov a soutenu que « l’Occident global » avait porté à la tête de l’Ukraine un Président pro-occidental à l’issue d’un coup d’État que plus personne ne conteste.  Les événements de Maïdan en 2013-2014 furent d’après M. Lavrov l’occasion d’ingérences encore plus flagrantes, violentes et antidémocratiques, cela avec le consentement des Européens.  En sus, du fait que le principe d’ingérence a été foulé au pied à maintes reprises en Ukraine, M. Lavrov a attiré l’attention sur les ravages causés par la « politique russophobe » des « putschistes néonazis de Kiev » dans le Donbass, ajoutant que les référendums qui y ont été organisés en 2022 étaient tout à fait légaux et conformes à l’esprit comme à la lettre de la Charte. 

M. Lavrov est notamment revenu sur les Accords de Minsk, rappelant qu’ils avaient été entérinés en 2015 par une résolution du Conseil de sécurité.  Or, a-t-il soutenu, l’an dernier, tous les signataires de ces Accords, excepté M. Putin, ont déclaré publiquement qu’en signant ce document ils n’avaient en réalité cherché qu’à gagner du temps pour abreuver en armes l’Ukraine contre la Russie et pour mieux organiser le blocage économique du Donbass.  Pour sa part, a-t-il affirmé, la Russie n’a eu de cesse d’appeler à la conclusion d’un accord pérenne sur la sécurité européenne, appuyant notamment les déclarations de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur la sécurité indivisible.  Pour M. Lavrov, aujourd’hui les Occidentaux n’ont plus pour eux que des slogans:  « Ils n’ont aucune proposition à soumettre pour ce qui est de ce régime nazi de Kiev qui bafoue sa propre histoire et méprise sa Constitution, laquelle commande de protéger les minorités ».  Il a répété qu’en l’état, aucune négociation n’était possible avec le régime de Kiev. 

M. Lavrov a déclaré que son pays restait prêt à établir des contacts avec l’Organisation du Traité de sécurité collective et l’OTAN pour discuter de la mise en œuvre des principes relatifs à l’indivisibilité de la sécurité, qui trouvent leur source dans ceux de la Charte.  Mais comment imaginer l’élaboration d’un tel dialogue au service d’un multilatéralisme efficace quand l’Occident rejette toute forme de négociation sur un pied d’égalité? a-t-il demandé, accusant les États-Unis et leurs alliés de privatiser les organisations internationales et de détourner leurs mandats pour châtier ceux qui rejettent leur ligne néocoloniale. 

Commentant des déclarations du Secrétaire général de l’ONU sur les bienfaits de la démocratie, M. Lavrov l’a invité à réfléchir aux conséquences des aventures des démocraties occidentales en Iraq, en Afghanistan ou en Libye.  Face aux accusations d’usage abusif du droit de veto, il a affirmé que la Russie, qui n’a rien à cacher sur cette question, continuera de s’expliquer devant l’Assemblée générale à chaque fois qu’elle aura à le faire sur le recours à cet instrument légitime pour éviter les divisions susceptibles de saper le fonctionnement général de l’Organisation. 

Enfin, M. Lavrov a appelé le Conseil de sécurité à conduire des évaluations humanitaires de l’application de ses sanctions et de celles prises de surcroît de manière unilatérale et illégale au regard du droit international par les Occidentaux contre des pays en développement.  On le voit, l’Occident ne veut pas surmonter les crises, a-t-il dit, ajoutant que les États Membres sont « responsables du sort de notre Organisation et de la paix ».  À la défense d’un hypothétique « ordre international fondé sur les règles », M. Lavrov a préconisé que les pays mettent en œuvre les engagements historiques qu’ils prirent quand fut adoptée la Charte il y a près de huit décennies. 

Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a déclaré que la guerre d’agression de la Russie n’a d’autre motivation que la volonté de renouer avec « un passé impérial fantasmé, bien qu’il ait été condamné par l’Histoire ».  Elle a affirmé que cette guerre contre l’Ukraine est aussi une guerre contre les règles de la vie internationale, et les principes les plus fondamentaux de la Charte commune.  C’est une guerre contre l’idée même des Nations Unies, s’est-elle alarmée.  Elle a ensuite dénoncé la fin brutale et cynique de l’Initiative de la mer Noire.  Qu’un membre de ce Conseil fasse de la faim une arme constitue une transgression de plus du cadre moral dans lequel notre action devrait s’inscrire, a-t-elle dit.  Elle a relevé que seule une poignée d’États soutient les choix catastrophiques de la Russie et a souligné que les membres du Conseil ont une responsabilité autant qu’un devoir moral d’agir pour mettre un terme à l’agression. 

La Ministre a ensuite indiqué que la France continuera à poursuivre le soutien militaire et civil qu’elle apporte à l’Ukraine et à soutenir les juridictions ukrainiennes et internationales pour assurer qu’il n’y ait pas d’impunité pour les crimes commis par la Russie.  Elle a appelé à soutenir la vision pour la paix développée par le Président Zelenskyy, notant que les principes de la primauté du droit sur la force, la solidarité internationale et le soutien aux plus démunis figurent en son cœur.

M. MAURO LUIZ IECKER VIEIRA, Ministre des affaires étrangères du Brésil, a regretté que les institutions multilatérales ne puissent réagir de manière appropriée et efficace aux défis contemporains.  Le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, qui maltraite un système multilatéral déjà éprouvé par de nombreux défis, éreinte la crédibilité du Conseil qui aurait déjà dû être réformé il y a longtemps, a‑t‑il jugé.  Il a défendu le droit à la légitime défense, tout en déplorant l’escalade du conflit, via des armes plus élaborées et des menaces d’utilisation de l’arme nucléaire, sapant ainsi les efforts pour la paix et violant les principes fondamentaux de la Charte. 

Le Ministre a regretté la destruction des infrastructures civiles qui aggrave la crise humanitaire et s’est dit favorable à la relance de l’Initiative de la mer Noire.  Il a appelé la communauté internationale à s’attaquer aux causes profondes de la crise alimentaire, déplorant les taux d’intérêts élevés qui empêchent davantage d’investissements dans les infrastructures de production.  Il s’est inquiété des retombées géopolitiques du conflit, appelant à une prompte désescalade et au règlement du conflit par le dialogue, comme prévu par la Charte.  Le Brésil est prêt à jouer son rôle pour atteindre cet objectif, alors même que « l’espace laissé au règlement diplomatique se rétrécit ».  Selon lui, seuls des mécanismes préventifs et une démarche plus globale que celle proposée actuellement permettra une solution pacifique et une paix pérenne.  Les États doivent maintenant œuvrer de concert vers un « multilatéralisme revitalisé », a‑t‑il exhorté.  Encourageant les deux parties à dialoguer, il a annoncé que le Brésil convoquerait une réunion spéciale pour le règlement pacifique du conflit lors de sa présidence du Conseil le mois prochain. 

Mme MARIAM ALMHEIRI, Ministre de l’environnement et du changement climatique des Émirats arabes unis, a commencé par évoquer le coût humain de la guerre en Ukraine, dont le déplacement de près d’un enfant sur trois. Le pays, a-t-elle rappelé, détient désormais le triste record de la plus forte concentration de mines terrestres au monde, et un tiers du territoire national ne serait plus considéré comme sûr en raison des munitions non explosées.  Elle a exhorté les parties belligérantes à respecter leurs obligations en vertu du droit international, tout particulièrement en ce qui concerne la protection des biens indispensables à la survie de la population civile.  Les Émirats arabes unis, a-t-elle rappelé, se sont engagés à verser 100 millions de dollars pour juguler la crise et à financer les programmes de la fondation de la première dame ukrainienne à hauteur de 4 millions de dollars.  Cette semaine seulement, a-t-elle ajouté, les Émirats arabes unis ont organisé 11 ponts aériens de secours et de fournitures médicales, fourni plus de 2 500 générateurs et envoyé 23 ambulances. 

La Ministre a évoqué les répercussions mondiales du conflit, notamment en matière de sécurité alimentaire, et réaffirmé le soutien de son pays au renouvellement de l’Initiative de la mer Noire.  Mais, a-t-elle estimé, de telles mesures ne font qu’alléger les souffrances, elles n’y mettent pas un terme.  En outre, a-t-elle déploré, la guerre a accéléré l’érosion de la foi dans le multilatéralisme.  Pour les Émirats arabes unis, seule la paix peut rétablir la confiance, mais elle ne peut devenir réalité qu’avec des pourparlers entre la Russie et l’Ukraine, et ne peut être équitable que si elle respecte la Charte des Nations Unies.  Le rôle du Conseil de sécurité, est essentiel, a insisté la Ministre, pour qui le Conseil peut inciter à la désescalade des hostilités et élargir le cercle des artisans de la paix.

M. MA ZHAOXU, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Chine, a indiqué que la position de son pays sur la crise ukrainienne a été rappelée par le Président Xi, qui a appelé au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de tous les pays, conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, et à la prise en compte des préoccupations légitimes de chacun en matière de sécurité.  Il a ajouté qu’en février dernier, la Chine a publié sa position sur le règlement de cette crise en présentant 12 propositions, qui prônent notamment le respect de la souveraineté, la cessation des hostilités, la reprise de pourparlers et la levée des sanctions unilatérales.  Il s’agit de faciliter la tenue de négociations entre les parties au conflit, a expliqué le Vice-Ministre, selon qui la Chine ne ménage pas ses efforts à cette fin. Il a ainsi évoqué la poursuite de dialogues avec différents pays, la visite « dans le pays concerné » d’un représentant spécial du Gouvernement chinois et sa participation à la conférence de Djedda sur l’Ukraine.  Nous entendons jouer un rôle positif et constructif pour régler la crise ukrainienne, dont le prolongement « n’est dans l’intérêt de personne », a-t-il ajouté. 

Faisant valoir que « la guerre ne permet de résoudre tous les problèmes », le Vice-Ministre a estimé qu’il importe en priorité d’aider les parties à trouver un consensus et à cesser les hostilités.  Pour cela, la communauté internationale doit, selon lui, « remplir les conditions nécessaires », tandis que les parties doivent « prendre du recul » et défendre la vision d’une « sécurité dans la coopération ».  Il convient d’autre part d’éviter de « jeter de l’huile sur le feu », a poursuivi M. Ma.  Les parties devraient faire montre de retenue et s’abstenir de lancer une initiative risquant de conduire à une escalade, a-t-il plaidé, appelant également à « préserver la sécurité nucléaire ».  Il faut ensuite gérer les retombées de cette guerre, qui a de lourdes conséquences sur la situation alimentaire et énergétique mondiale, notamment dans les pays en développement, a-t-il préconisé.  Appelant également les pays à cesser d’abuser des sanctions et à préserver les chaînes d’approvisionnement, il a appuyé le maintien de la communication avec la Russie et l’Ukraine dans la cadre de l’Initiative de la mer Noire. 

Le Vice-Ministre a par ailleurs estimé que tout doit être fait pour alléger la crise humanitaire.  Rappelant la contribution de la Chine à cet effort, il a enjoint aux parties de respecter le droit international humanitaire, de protéger les civils et les infrastructures civiles et d’offrir un accès humanitaire sûr et sans entrave pour alléger les souffrances.  Il a enfin assuré que son pays restera engagé en faveur du multilatéralisme et d’une « position juste » soutenant le dialogue et la paix. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a rappelé l’importance du multilatéralisme pour approfondir la coopération, les partenariats et les interactions sous l’égide des normes et des valeurs communes.  Le multilatéralisme implique aussi dialogue, inclusion, respect et solidarité, et est important pour trouver des solutions communes aux défis communs et instaurer une paix pérenne.  Il a indiqué que le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine illustre parfaitement les difficultés actuellement rencontrées par le multilatéralisme.  Ce conflit, qui intervient dans un contexte d’opinion publique divisée, menace la stabilité mondiale en raison de l’insécurité alimentaire qu’il génère, et se répercute aussi sur les objectifs de développement durable et les efforts conjoints en faveur de la non-prolifération. Le représentant s’est inquiété d’une possible escalade militaire du conflit aux dépens d’un compromis par le dialogue.  Il a exhorté le Conseil à œuvrer en faveur d’une solution politique, tel qu’établi par la Charte, et à s’engager activement dans des efforts diplomatiques sérieux pour une reprise des négociations. 

Interventions des délégations invitées à participer au débat au titre des articles 37 et 39 du règlement du Conseil de sécurité

« Les choses sont simples: si la Russie cesse de se battre, il n’y aura plus de guerre.  Si l’Ukraine cesse de se battre, il n’y aura plus d’Ukraine ».  C’est en ces termes que le Ministre des affaires étrangères du Danemark a dépeint les enjeux de la crise liée à la guerre d’agression lancée par la Russie contre l’Ukraine il y a exactement 574 jours aujourd’hui, et qui a couté la vie à plus de 26 000 civils.  Il y a clairement un agresseur et un agressé dans ce conflit, a affirmé le Premier Ministre de l’Espagne.

Qualifiant cette guerre d’« insulte scandaleuse » à l’ordre fondé sur des règles, et donc à l’ensemble de la communauté internationale, le Président de la République tchèque a souligné qu’« aucun pays ne peut être véritablement neutre »  

Le Chancelier de l’Allemagne a rappelé à ceux qui soutiennent que cette guerre aurait pu être évitée par des moyens diplomatiques, que la France et l’Allemagne ont tenu des centaines de réunions avec Moscou et Kyïv depuis le début de l’attaque russe contre l’est de l’Ukraine en 2014.  Ces tentatives visant à trouver une solution conforme au droit international ont échoué parce qu’une partie, la Russie, a choisi la guerre plutôt que la diplomatie, a-t-il déploré.  Quant aux appels à un cessez-le-feu formulés par plusieurs pays, le Chancelier a salué ces « bonnes intentions », tout en appelant à « se méfier des solutions apparemment faciles qui ne promettent la paix que de nom ».  La paix signifie le respect de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de l’Ukraine, « c’est la promesse que la Charte des Nations Unies donne à chaque État Membre de l’ONU », a-t-il fait valoir. 

À l’instar de nombreux autres intervenants, le Premier Ministre du Canada a exigé de la Russie qu’elle retire complètement et inconditionnellement toutes ses troupes et tout son équipement militaire de l’ensemble du territoire ukrainien, et que les dirigeants du Kremlin aient à subir les conséquences de leurs actes et soient traduits en justice.  Sur ce dernier point, le Président du Guatemala, au nom du Groupe des Pays amis sur la responsabilité découlant de l’agression contre l’Ukraine, composé de 49 États Membres et de l’Union européenne, a mis en exergue l’importance de poursuivre les auteurs de crimes internationaux.  Sans obligation de rendre des comptes, les crimes se poursuivront et l’impunité persistera, ce qui compromettra les perspectives de paix et de réconciliation, a-t-il fait valoir.

Tous les responsables de crimes et d’atrocités doivent répondre de leurs actes, a insisté la Présidente de la Slovénie en mentionnant la conférence diplomatique organisée cette année par son pays qui a abouti à l’adoption de la Convention de Ljubljana-La Haye sur la coopération internationale en matière d’enquêtes et de poursuites concernant les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et autres crimes internationaux.  De leur côté, les Présidents de la Lettonie et de la Pologne ont demandé la création d’un tribunal spécial international pour poursuivre les auteurs du crime d’agression, une demande également appuyée par la Ministre des affaires étrangères, des affaires européennes et du commerce extérieur et des institutions culturelles fédérales de la Belgique.  En attendant, les manifestations de soutien à la formule de paix du Président Zelenskyy, ont été nombreuses, nombre de dignitaires estimant qu’elle respecte le droit international et la Charte des Nations Unies.  Il appartiendra à l’Ukraine de déterminer le moment et les conditions du lancement du processus visant à mettre fin au conflit, a souligné à cet égard le Président de la Lituanie

Un autre sujet qui a mobilisé l’attention au cours de ce débat public était l’importance de la réforme du Conseil de sécurité « qui n’a pas été en mesure de jouer son rôle de chef de file », comme l’a constaté la Ministre des affaires étrangères du Liechtenstein.  Pourtant, a rappelé son homologue de l’Australie, lorsque le Conseil a été créé, ses cinq membres permanents se sont vu accordé un droit de veto qui leur impose l’obligation de prévenir les conflits, de ne pas agir en tant qu’agresseur et de montrer l’exemple en respectant les règles.  Les dénonciations de l’utilisation abusive de ce droit par la Russie « qui se moque de nous tous » ont été très nombreuses.  Le Ministre des affaires étrangères du Danemark, qui s’exprimait au nom du Groupe des pays nordiques, a d’ailleurs jugé « intolérable » que le droit de veto puisse donner carte blanche pour envahir d’autres États en vue de s’emparer de leur territoire.  Les États Membres ont été nombreux à saluer le fait que l’Assemblée générale ait agi là où le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure de le faire, et ont insisté sur la responsabilité collective de faire respecter la Charte des Nations Unies qui constitue le fondement de la coopération internationale depuis soixante-dix-huit ans.  Les pays nordiques ont toutefois reconnu que le rétablissement de la confiance en l’ONU ne sera pas un processus facile, et que cela demandera du temps et de l’effort. 

Le Président du Guatemala a lui aussi plaidé pour un soutien fort et transrégional et une défense collective de la Charte des Nations Unies afin de pouvoir mettre un terme aux actions irresponsables de la Russie.  Aujourd’hui plus que jamais, il est essentiel que nous fassions preuve d’un tel engagement, a renchéri la Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, constatant que c’est l’ordre fondé sur des règles qui est menacé par ce conflit.  Il faut empêcher la Russie de mettre à mal la crédibilité de l’ONU, a exigé le Président de la Lituanie, qui a plaidé pour la défense de la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, un point de vue partagé par son homologue de la Macédoine du Nord et d’autres. 

Le Ministre des affaires étrangères et européennes de la Croatie a accusé pour sa part la Russie, en décidant de mettre fin à l’Initiative de la mer Noire et en multipliant les attaques militaires contre les ports et les infrastructures agricoles ukrainiens, de militariser la nourriture et d’aggraver l’insécurité alimentaire mondiale.  Le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Türkiye a espéré qu’à termes la diplomatie et la négociation permettront la relance de cette initiative, en faisant état des efforts de son pays en ce sens.  L’impact de l’invasion russe sur l’insécurité énergétique, et ses répercussions sur l’économie mondiale, a également été évoqué à plusieurs reprises.  Qui plus est, cette guerre a mis à mal les dispositifs sécuritaires de l’Europe, a signalé à son tour le Président de la Pologne, accusant « une Russie impérialiste » de se discréditer aux yeux de la communauté internationale alors même qu’elle est un membre permanent du Conseil de sécurité. L’agression russe contre l’Ukraine n’est pas un conflit européen ou régional, mais une question qui nous concerne tous, a tranché la Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie.

Le Ministre des affaires étrangères et européennes de l’Autriche a souligné pour sa part que le droit international est le meilleur bouclier commun contre le recours unilatéral à la force et contre un système international de la loi du plus fort.  À ce propos, le Président du Conseil européen a appelé toutes les nations responsables à jouer leur rôle et à unir leurs forces pour parvenir à la paix et à la sécurité, en tendant notamment la main à la Chine.  C’est d’autant plus important qu’il est toujours préférable et moins coûteux d’investir dans la paix plutôt que dans la guerre, a commenté le Secrétaire pour les relations avec les États et les organisations internationales du Saint-Siège

À suivre...

 

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À l’Assemblée générale, la guerre en Ukraine, symptôme d’une « fragmentation de la gouvernance globale », n’occulte pas d’autres foyers de tension

Soixante-dix-huitième session,
6e & 7e séances – matin & après-midi
AG/12532

À l’Assemblée générale, la guerre en Ukraine, symptôme d’une « fragmentation de la gouvernance globale », n’occulte pas d’autres foyers de tension

Au deuxième jour du débat général de l’Assemblée générale, chefs d’État et de gouvernement se sont succédé à la tribune pour battre le rappel des États Membres afin de relever les multiples défis, plus que jamais complexes et interdépendants, qui se posent dans un monde marqué par une « fragmentation de la gouvernance globale ».  Comme hier, il a été beaucoup question –mais pas seulement- de la guerre d’agression de la Russie en Ukraine, au moment même où se tenait au Conseil de sécurité une séance organisée par la présidence albanaise sur le maintien de la paix et de la sécurité en Ukraine, au titre de la « défense des buts et principes de la Charte des Nations Unies au moyen d’un multilatéralisme efficace ». 

Ainsi, le Président de la Roumanie, pays qui accueille 6 millions de réfugiés ukrainiens, a rappelé l’importance de défendre un ordre international « fondé sur des règles et le respect du droit international », face aux « ingérences malveillantes » de Moscou.  C’est particulièrement vrai à ses yeux dans la région « stratégique » de la mer Noire, d’où part l’Initiative qui porte son nom et à laquelle la Russie a mis unilatéralement fin, aggravant une crise alimentaire mondiale déjà marquée par la flambée des prix des denrées.  Son homologue de la Lituanie a abondé dans le même sens, accusant la Russie, « par ses visées impérialistes », d’infliger des revers douloureux dans des domaines qui vont au-delà de la sécurité alimentaire, comme l’action climatique ou les migrations.  Un recul qui se traduit non seulement par des pertes humaines, mais qui détruit aussi « l’optimisme de mieux rebâtir ». 

Si les dirigeants de la Lettonie, de la Bulgarie, de la Slovaquie, de la Finlande et de la République de Moldova ont pris fait et cause pour l’Ukraine, plusieurs intervenants ont attiré l’attention sur d’autres foyers de conflit, parfois éclipsés par l’actualité, mais tout aussi susceptibles de nourrir l’instabilité, y compris en plein cœur de l’Europe.  « Jadis témoin des pires horreurs, l’Europe restera fracturée aussi longtemps que Chypre sera divisée », a ainsi mis en garde le Président chypriote, en dénonçant de nouvelles violations par les forces turques du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité. « C’est pourquoi la reprise des négociations est ma priorité absolue », a-t-il assuré, en expliquant que le statu quo actuel « ne peut pas être l’avenir » de l’île. 

Le Président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine a de son côté fustigé le système politique de cette république fédérale, qui n’est pas selon lui une démocratie à part entière, mais une « ethnocratie ».  Ce système « totalitaire et autocratique », a-t-il soutenu, est instrumentalisé par des pays voisins qui cherchent à diriger la Bosnie-Herzégovine par le biais du contrôle qu’ils exercent sur certaines communautés, avec pour objectif de diviser le pays.  Une emprise qui ne fait que favoriser « népotisme et corruption » au sein des institutions gouvernementales, expliquant la fuite des cerveaux et des travailleurs qualifiés vers des horizons professionnels plus attrayants. 

Lui aussi préoccupé par la dynamique migratoire, le Président du Ghana a prédit qu’une Afrique de l’Ouest pacifique et prospère serait dans l’intérêt du monde entier, plutôt que l’exode périlleux des « forces vives » de cette région vers une Europe « inhospitalière ».  Pour y parvenir, il a jugé nécessaire d’appuyer les efforts des organisations régionales et continentales concernées pour rétablir la stabilité dans les pays de la région minés par les organisations terroristes et tombés aux mains de putschistes. 

Face à la vague de coups d’État militaires dans plusieurs pays du Sahel, le Président de l’Angola s’est d’ailleurs dit convaincu « de l’existence d’une main invisible intéressée par la déstabilisation de notre continent et l’expansion de sa zone d’influence, alors que nous savons qu’elle ne fournit pas le soutien nécessaire au développement économique et social des pays africains ».  S’il a condamné tout changement de gouvernement extraconstitutionnel, son homologue de la Sierra Leone a cependant souligné que les atteintes à l’état de droit tiennent à des causes profondes tels que la pauvreté, le chômage généralisé et les discriminations. 

Après avoir salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, le Président du Rwanda a rappelé que si des interventions bilatérales peuvent apporter des réponses à des situations de crise, l’engagement multilatéral reste nécessaire pour réaliser des progrès politiques et servir les intérêts des populations locales.  Aussi a-t-il insisté sur l’urgence pour l’Afrique de « parler d’une seule voix » et d’être pleinement représentée au sein des instances où se prennent les décisions relatives à son avenir. 

Étonné de l’impunité dont jouissent les auteurs de crimes, le Président de la République démocratique du Congo (RDC) a mis en cause le « silence » de l’Organisation des Nations Unies (ONU) avant de saluer les sanctions infligées par les États-Unis au Rwanda pour son soutien au M23, un groupe terroriste « qui exige un dialogue qui ne leur sera jamais accordé ». Estimant qu’il est grand temps pour Kinshasa de devenir le principal acteur de sa propre stabilité, le Chef de l’État congolais s’est également prononcé en faveur du retrait « progressif », mais « accéléré », de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC (MONUSCO), qu’il a décidé d’avancer à décembre 2023 au lieu de décembre 2024. 

Des success-stories sont cependant possibles, comme celle du Libéria, où « nous avons maintenu la paix et la sécurité, et protégé les droits humains et le droit des médias d’opérer pacifiquement et librement », s’est enorgueilli le Président de ce pays. Les scrutins d’octobre marqueront ainsi les quatrièmes élections générales pacifiques au Libéria depuis la fin de la guerre civile en 2003, a-t-il rappelé, précisant que ce seront aussi les premiers depuis le retrait de la Mission de l’ONU en 2018. 

L’Assemblée générale poursuivra son débat général demain jeudi 21 septembre, à partir de 9 heures. 

SUITE DU DÉBAT GÉNÉRAL

Déclarations

M. WAVEL RAMKALAWAN, Président des Seychelles, a considéré que la confiance et la solidarité constituent le fondement d’un ordre multilatéral fonctionnel, tout en regrettant que le monde d’aujourd’hui soit caractérisé par la désunion et la méfiance.  À mi-parcours du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il est crucial d’accélérer nos efforts conjoints pour réaliser des progrès transformateurs à cet égard, alors que le dernier rapport en date fait état de revers et de retards. Pour inverser cette tendance, a recommandé le Président, nous devons donner la priorité à leur mise en œuvre à tous les niveaux, en exploitant le pouvoir des partenariats entre les gouvernements, la société civile, le secteur privé et les organisations internationales. La coopération Sud-Sud, en particulier, recèle un grand potentiel d’échange de connaissances et de développement mutuellement bénéfique, a-t-il estimé. 

Les Seychelles, à travers des processus tels que le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs et l’Examen national volontaire, cherchent à consolider les acquis des succès politiques et socioéconomiques actuels, s’est enorgueilli le Chef de l’État, en se disant prêt à partager les pratiques optimales et à renforcer la coopération avec d’autres pays.  Par ailleurs, les partenaires du développement doivent mettre en œuvre le Programme d’action d’Addis-Abeba en augmentant le financement.  En outre, les institutions financières internationales devraient entreprendre des réformes pour garantir que les besoins spécifiques des pays vulnérables soient pris en compte dans l’accès au financement du développement, a poursuivi M. Ramkalawan.  Il a apporté son soutien à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle qui réponde pleinement aux besoins des petits États insulaires en développement (PEID).  Enfin, a-t-il ajouté, il faut tirer parti des partenariats public-privé et de l’allégement de la dette pour obtenir de meilleurs résultats pour les programmes de développement tels que l’Agenda 2063 et les résultats prochains de la quatrième Conférence des PEID en 2024.  Il a salué les mesures de relance des ODD prises par le Secrétaire général.

La lutte contre la crise climatique n’est plus une option, mais une nécessité immédiate, a poursuivi M. Ramkalawan.  Pour citer le Secrétaire général, l’ère du réchauffement climatique est devenue « une ère d’ébullition mondiale », et les dirigeants doivent faire preuve de volonté pour limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 degré.  Pour lui, une gouvernance transparente des océans offre des opportunités de développement et de protection de l’environnement, raison pour laquelle il a rendu hommage aux actions audacieuses des PEID, tels que les Bermudes et les Tonga, qui ont délibérément choisi d’exploiter l’énergie des vagues comme solutions réalisables pour un avenir énergétique indépendant et propre.  Les Seychelles poursuivront la même approche ambitieuse alors que nous assumons la présidence du SIDS (PEID) « Dock », a annoncé le Président. 

M. PAUL KAGAME, Président du Rwanda, a commencé par rappeler les résultats du Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD), qui a une fois encore cette année alerté sur la lenteur de la mise en œuvre de ces objectifs.  Il a souligné les difficultés auxquelles sont confrontés les pays en développement, notamment la charge de la dette et les taux d’intérêts élevés dans les économies développées, qui creusent les disparités économiques et finissent par ralentir les progrès vers les ODD.  Pour résoudre ces problèmes, le dirigeant a appelé à la coopération, mais aussi à l’amélioration de la gouvernance financière et de la gestion des ressources naturelles dans les pays en développements eux-mêmes.  Il a par ailleurs salué les propositions de l’Initiative de Bridgetown et du Sommet de Paris pour un nouveau pacte de financement mondial, ainsi que la « reconstitution du Fonds vert pour le climat » pour permettre aux pays les plus vulnérables de lutter contre les changements climatiques.

Se disant pessimiste sur la fin des conflits dans le monde, M. Kagame a dénoncé l’injustice que ces conflits font peser sur les innocents, prenant comme exemple la crise migratoire qui pousse chaque année migrants et réfugiés à entreprendre des voyages dangereux à la recherche d’un avenir meilleur.  Il a indiqué que son pays travaillerait avec ses partenaires, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), pour contribuer à une solution durable.

Concernant les questions de gouvernance auxquelles aucun pays ni aucune région ne peut échapper, le Président a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, en rappelant que si les interventions bilatérales, auxquelles le Rwanda contribue en divers endroits, peuvent apporter des réponses à des situations de crise, l’engagement multilatéral restait nécessaire pour réaliser des progrès politiques et pour que de telles interventions « servent les intérêts des populations sur le terrain ».  Concernant l’Afrique en particulier, il a insisté sur l’urgence pour ce continent de « parler d’une seule voix » et d’être pleinement représenté dans les instances où se prennent les décisions concernant son avenir.

Appelant une nouvelle fois à la mise en place d’un cadre de coopération pour le développement plus efficace et de partenariats plus justes et égaux, M. Kagame s’est notamment félicité de l’initiative de Tombouctou du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui vise à renforcer l’écosystème d’innovation des start-up africaines, ou encore de celle de l’Union internationale des télécommunications (UIT), qui ambitionne d’améliorer l’infrastructure publique numérique inclusive - deux exemples, selon lui, « de ce que l’ONU peut produire de meilleur ».  Rappelant que son pays commémorera le génocide contre les Tutsis pour la trentième fois en avril 2024, M. Kagame a conclu son intervention en disant sa reconnaissance envers tous ceux qui ont été aux côtés de son pays dans cette traversée, et s’est félicité d’accueillir la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral, en juin prochain.

M. NIKOS CHRISTODOULIDES, Président de Chypre, a déclaré que la Charte des Nations Unies restera « une promesse et non une réalité » si nous faisons preuve de complaisance dans nos actions.  Les dirigeants qui nous ont précédés, ayant « hérité de cendres et non d’institutions », n’ont eu d’autre choix que de se tourner vers le multilatéralisme et le droit international, a-t-il observé.  Il a condamné dans les termes les plus fermes toute action militaire contraire à la paix et la sécurité internationales, en assurant que dans de tels cas, son pays se rangera toujours du bon côté de l’histoire. Depuis le premier jour de l’agression contre l’Ukraine, Chypre a fait preuve de solidarité, a-t-il noté, avant de rappeler qu’un tiers de la population chypriote est toujours déplacée du fait de l’agression étrangère contre son propre pays.  Il a donc appelé à la cessation immédiate des hostilités et encouragé les parties à engager des négociations constructives. 

Pendant ce temps, les Chypriotes grecs comme turcs continuent de subir les conséquences de l’invasion et de la division.  « Jadis témoin des pires horreurs, l’Europe restera fracturée aussi longtemps que Chypre sera divisée », a mis en garde le Président. En l’absence d’un processus de paix, il s’est inquiété du risque « sérieux » de nouvelles violations du droit international par les forces turques, comme celles perpétrées récemment à Varosha, « ville fantôme » prise en otage en violation des résolutions du Conseil de sécurité.  Nous l’avons également vu plus récemment dans la zone tampon, a-t-il noté, où les attaques contre les Casques bleus par les forces turques nous ont alertés une fois de plus sur l’urgence de la paix.  « C’est pourquoi la reprise des négociations, solidement ancrées sur le cadre convenu, est ma priorité absolue », a affirmé M. Christodoulides, pour qui le statu quo actuel « ne peut pas être l’avenir de Chypre ». 

À ses compatriotes chypriotes turcs, le Président a déclaré qu’il entendait leur appel à la paix et qu’il ne ménagerait aucun effort « pour réaliser notre rêve commun de réunification et de paix sur notre île ».  Toutefois, a-t-il insisté, il n’existe pas d’autre base pour le règlement de la question chypriote que celle dictée par les résolutions du Conseil.  « L’illégalité résultant de l’invasion, de l’agression et du recours à la force ne peut être reconnue », a-t-il ajouté, avant d’inviter son homologue turc à « travailler ensemble, guidés par une vision de paix ».  Afin de favoriser la reprise des négociations sur la base du cadre convenu et des acquis du cycle précédent, le Président a encouragé l’ONU à devenir une force motrice du dialogue en nommant un envoyé spécial pour la question chypriote.  À ses yeux, il incombe à l’Organisation d’agir en tant que catalyseur de la paix dans son pays, avec la collaboration de l’Union européenne

S’agissant des changements climatiques, M. Christodoulides a exprimé sa vive préoccupation face aux conséquences de la « colère de la nature » en Méditerranée orientale, particulièrement vulnérable aux incendies de forêt et aux inondations.  Reconnaissant par ailleurs que les droits humains sont essentiels à la paix et à un développement durable, il a annoncé la candidature de Nicosie au Conseil des droits de l’homme pour la période 2025-2027. 

M. HAGE G. GEINGOB, Président de la Namibie, a considéré que le fossé « terrifiant » qui sépare les riches des marginalisés n’est pas seulement une préoccupation morale, mais une menace pour la stabilité et l’harmonie mondiales.  Ce matin, l’Assemblée générale adoptera une déclaration politique sur la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies, a-t-il rappelé.  Les pandémies sont depuis longtemps de redoutables adversaires qui ravagent de manière disproportionnée le tissu socioéconomique des pays en développement, a souligné le Chef de l’État.  Aussi a-t-il demandé que l’on mette fin à l’« apartheid vaccinal ».  Nous devons en outre garantir un accès équitable aux articles de santé, avec un engagement plus vigoureux de la part des pays riches en matière de transfert de technologies, de suppression des obstacles à la propriété intellectuelle, et d’investissements pour permettre la production de vaccins dans les pays du Sud.

M. Geingob s’est ensuite dit fier que la Namibie soit classée comme le huitième pays au monde à déployer des efforts visant à réduire les inégalités entre les sexes.  En plus d’avoir 44% de représentation féminine au Parlement, nous avons des femmes aux postes de premier ministre et de vice-premier ministre, et les deux tiers de nos principales institutions bancaires sont dirigées par des femmes.  Autre fossé que son pays souhaite voir comblé, celui creusé par les progrès rapides de l’informatique quantique et de l’intelligence artificielle, qui offrent des opportunités de croissance et de développement sans précédent.  Les pays en développement ne doivent donc pas être laissés pour compte dans cette révolution numérique, a plaidé le Président.

De même, la Namibie est parfaitement consciente que la transition énergétique n’est pas seulement une nécessité pour lutter contre les changements climatiques, mais aussi une opportunité pour le développement économique, a relevé le Chef de l’État.  Conformément à leurs engagements pris lors de la COP21 à Paris en 2015, les pays développés doivent donc fournir un soutien financier et technologique pour permettre aux pays en développement de passer à des sources d’énergie plus propres sans entraver leur développement, a-t-il rappelé.  Pour sa part, la Namibie avait annoncé, lors de la soixante-quinzième session de l’Assemblée générale, son intention de modifier sa structure économique en tirant parti d’outils financiers innovants pour mobiliser un financement durable pour la lutte contre les changements climatiques.  « Un an plus tard, à Glasgow, en marge de la COP26, nous avons annoncé le développement de projets à hydrogène vert à grande échelle qui fourniraient au monde les molécules propres nécessaires à la décarbonation des secteurs difficiles à réduire », a encore cité le Président.  Il s’est félicité d’avoir lancé dans son pays plus de cinq projets de ce type, avec un budget de plus de 20 milliards de dollars, afin de développer un potentiel d’énergies renouvelables de classe mondiale.  « Le but est de donner à nos générations futures une chance de lutter contre le réchauffement de la planète. »

M. KLAUS WERNER IOHANNIS, Président de la Roumanie, a rappelé l’importance qu’il y a à défendre un ordre international « fondé sur des règles et le respect du droit international ».  À ce titre, la guerre d’agression continue de la Russie contre l’Ukraine a démontré selon lui l’importance stratégique de la région de la mer Noire, une zone qui doit être protégée contre les effets de la « guerre hybride » et des « ingérences malveillantes » de la Russie.  La Roumanie restera solidaire de l’Ukraine, a-t-il déclaré, comme elle l’a déjà été en accueillant plus de 6 millions d’Ukrainiens et en soutenant l’obligation internationale de rendre des comptes pour que tous les responsables d’atrocités soient traduits en justice.  M. Iohannis a par ailleurs rappelé que la Russie avait mis fin à l’Initiative de la mer Noire en attaquant les ports ukrainiens, aggravant ce faisant la crise alimentaire mondiale.  Son pays a facilité la livraison de plus de 25,5 millions de tonnes de céréales ukrainiennes, a-t-il rappelé en affirmant qu’il ne laisserait pas tomber ses partenaires les plus vulnérables, notamment en Afrique. 

Le Président a ensuite présenté la stratégie de développement durable de la Roumanie, qui vise à promouvoir une gouvernance efficace, transparente et centrée sur les citoyens, une stratégie qui, même si le pays « reste à la traîne au niveau mondial », est sur la bonne voie, avec 62% des objectifs nationaux atteints pour 2030.  Rappelant l’importance du financement du développement, il s’est engagé à augmenter l’APD de son pays à 0,33% de son PIB national d’ici à 2030 et à contribuer à l’objectif de l’UE d’allouer 0,20% de son APD collective aux PMA.

Sur les questions des changements climatiques, le Président a rappelé la détermination de son pays à mettre en œuvre rapidement l’Accord sur la diversité biologique marine dans les zones situées au-delà de la juridiction nationale et à œuvrer, dans le cadre d’un groupe de travail de la Cour internationale de Justice (CIJ), sur les obligations des États en matière de changements climatiques, mais aussi à encourager l’éducation climatique.  Il a appelé de ses vœux l’accélération d’une transition énergétique juste en précisant que celle-ci doit se faire sans compromettre la sécurité énergétique.  Elle doit aussi être réalisée en parallèle d’autres mesures, comme la coopération internationale en matière de lutte contre les risques de catastrophe. 

En conclusion, M. Iohannis a fait part de son soutien aux initiatives visant à inclure « d’autres voix importantes », dont celle du « plus petit groupe régional » de l’Europe de l’Est au sein du Conseil de sécurité. Il a plaidé pour le renforcement du système des droits de l’homme des Nations Unies, qui mérite notamment un financement adéquat, ainsi que pour une acceptation plus large par les États de la juridiction de la CIJ.  Il s’est félicité de l’organisation du Sommet de l’avenir de l’année prochaine, qui devrait fournir aux Nations Unies les outils nécessaires pour agir pour les générations présentes et futures.

M. CHANDRIKAPERSAD SANTOKHI, Président du Suriname, a exprimé son impatience face aux crises qui se multiplient dans le monde sans trouver de réponse adéquate. « Nous faisons des promesses, que nous ne tenons pas souvent; nous exprimons de nobles objectifs, dont la réalisation est médiocre », a-t-il lancé.  « Cela ne peut pas durer. »  Or, aucun pays n’est épargné par les effets de ces crises, les pays en développement comme le Suriname au premier chef, et aucun pays ne peut résoudre ces défis seul, a-t-il relevé.  Le Président a rappelé que « nous, les humains, sommes responsables de ces crises », appelant à en assumer la responsabilité.  Pour y parvenir, M. Santokhi a proposé un nouveau multilatéralisme, plus juste et plus efficace.  Il a recommandé de transcender les intérêts nationaux et de mettre de côté les divergences idéologiques pour agir de manière constructive en faveur de la prospérité de nos peuples et de la protection de notre planète, en misant sur une ONU forte, déterminée et unie. 

Néanmoins, a reconnu le Président, le fardeau de la dette, les changements climatiques, le ralentissement économique et l’impact de la guerre qui fait rage en Ukraine ont exercé une pression énorme sur la mise en œuvre des ODD. Pour les petits pays en développement dotés de zones côtières de faible altitude, la pression budgétaire due à des crises indépendantes de leur volonté constitue un problème réel et quotidien. Il a souligné l’importance de la science, de la technologie et de l’innovation pour augmenter la production alimentaire et rendre l’agriculture plus productive, citant en exemple le programme de sécurité alimentaire de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Dans cette optique, le Suriname a récemment adopté une stratégie numérique nationale 2023-2030. 

Face à la détérioration de l’environnement politique, humanitaire et sécuritaire en Haïti, M. Santokhi a appelé à intensifier les efforts afin de traduire les intentions en actions tangibles.  Dans le même temps, les acteurs haïtiens, divisés, doivent démontrer sans délai leur attachement au dialogue afin de parvenir à un consensus sur la voie à suivre pour sortir de la crise, a-t-il recommandé.  Le Président a ensuite souligné que le Suriname est l’un des trois seuls pays dans le monde à présenter un bilan carbone négatif, assurant qu’il demeure engagé à jouer son rôle dans la protection de l’environnement au moyen d’actions nationales ciblées, mais aussi de partenariats publics et privés internationaux.  Il a plaidé en faveur d’un accès plus facile au financement climatique pour mettre en œuvre des politiques d’atténuation et d’adaptation.  Le Sommet sur l’Amazonie, qui s’est tenu en août au Brésil, a été l’occasion pour le Suriname et sept autres pays de la région de s’engager en faveur d’une meilleure gestion de la région amazonienne.  La ville de Paramaribo a d’ailleurs formé le vœu de mettre un terme à la déforestation d’ici à 2030.  En ce qui concerne la réforme « urgente » de l’architecture financière internationale, M. Santokhi a encouragé les États Membres à contribuer à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle. 

M. ZELJKO KOMŠIĆ, Président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine, a axé le début de son intervention sur la gestion de la migration, constatant que les pays puissants sélectionnent les migrants les plus éduqués et hautement qualifiés dans le but d’exploiter leurs capacités.  Les petits pays, en revanche, perdent non seulement leurs meilleurs personnels, mais également les investissements consacrés à la « création » de ces profils hautement qualifiés.  Préoccupé par cet affaiblissement systématique des pays d’origine, il a jugé difficile de renforcer la confiance lorsque les « grands » pays s’accaparent la population des pays plus petits, entravant ainsi toute perspective de développement.  En ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, il a expliqué que la raison fondamentale qui pousse les gens à partir est le manque de perspectives, né du fait que le système politique en place n’est pas une démocratie à part entière mais une forme d’« ethnocratie » où les élections et l’attribution des postes au sein du gouvernement se font en fonction de l’ethnicité de la personne, créant un système totalitaire et autocratique.  En outre, la difficulté qu’il y a à remplacer les autorités crée un environnement où les autorités elles-mêmes cessent de travailler pour le bénéfice des citoyens car elles n’en voient pas la nécessité.

De plus, ce système politique est habillement utilisé par nos voisins qui cherchent à diriger la Bosnie-Herzégovine à travers les communautés ethniques qu’ils revendiquent.  Leur objectif, a-t-il accusé, est de diviser le pays et de le rendre futile.  Cette attaque contre la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine rend le développement démocratique impossible.  Et il est regrettable que certains, à l’Est comme à l’Ouest, pensent que l’appui qu’ils accordent à ceux qui veulent diviser la Bosnie-Herzégovine permettra d’assurer la stabilité des Balkans occidentaux.

Le Président a également indiqué que le système ethnique d’exercice du pouvoir favorise le népotisme et la corruption dans tous les segments de la société, en particulier dans les institutions gouvernementales.  C’est pour cela que nous ne sommes pas parvenus à créer une société d’égalité des chances, a-t-il regretté.  Il a affirmé que « l’intervention » du Haut-Représentant et la suspension pour 24 heures de la Constitution, « un précédent inconcevable dans le monde démocratique », n’avaient pas permis de retirer les obstacles au fonctionnement de l’État mais contribué à renforcer les principes ethniques antidémocratiques ainsi que la discrimination à l’encontre des citoyens au sein de la Constitution et de la législation électorale.  Si l’égalité n’est pas assurée parmi les citoyens, il est difficile de renforcer la confiance dans une société postconflit comme la Bosnie-Herzégovine, a-t-il dit.  Selon lui, le pays doit opérer une transformation d’un système de représentation politique ethnique à un système de représentation politique civique.

M. Komšić a ensuite déploré le rejet par « le Premier Ministre de notre pays voisin » du jugement rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Kovačević, y voyant une forme d’interférence dans les affaires internes de la Bosnie-Herzégovine.  Ce n’est que lorsque la représentation politique civique sera acceptée en Bosnie-Herzégovine, à travers le mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne, et les attaques perpétrées par ses voisins contre sa souveraineté cesseront, que la Bosnie-Herzégovine pourra pleinement contribuer au Programme 2030 et rejoindre le rang des sociétés démocratiques et matures.

Pour M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, le moment est venu de corriger « l’injustice de longue date » subie par le continent africain concernant la structure et la composition actuelles du Conseil.  Il n’est en effet plus possible de continuer à prêcher la démocratie, l’égalité et la bonne gouvernance dans le monde si l’Organisation est toujours régie par une structure injuste et inéquitable.  Il a aussi regretté que l’ONU semble ne pas vouloir -ou ne pas pouvoir- influencer le cours des événements en Ukraine.  Le Ghana, qui a siégé au Conseil tout au long de cette période, peut témoigner que la solidarité mondiale tant recherchée ne se concrétisera que si cela convient aux nations détenant le droit de veto.  Convaincu que l’Organisation constitue le meilleur endroit pour régler les problèmes mondiaux, le Président n’en a pas moins estimé qu’une réforme profonde du Conseil est indispensable pour ne pas voir sapée sa crédibilité.

Concernant les événements « tragiques » en Afrique de l’Ouest et au Sahel, le Président a évoqué l’instabilité et les activités terroristes généralisées ayant soumis les pays de la région à de fortes pressions. Plusieurs d’entre eux ont perdu de vastes étendues de territoire au profit de terroristes « déchaînés ». Les coups d’État sont réapparus.  « Certains espèrent à tort qu’ils soient la solution aux menaces pesant sur leurs nations. »  Le Chef de l’État s’est dit convaincu que ces conflits seraient mieux gérés si la communauté internationale soutenait les efforts des organisations régionales et continentales, au lieu de saper leur travail.  Les Africains, a-t-il rappelé, ont combattu et sont morts pendant la Seconde Guerre mondiale pour défendre l’Europe et ses alliés: « il est temps que le monde nous rende la pareille en ces temps difficiles ».  Une Afrique de l’Ouest pacifique et prospère serait dans l’intérêt du monde entier, plutôt que les forces vives de ces nations migrent, au péril de leur vie, vers une Europe « peu accueillante ».

Sans chercher à se soustraire à ses responsabilités, M. Akufo-Addo a appelé à reconnaître qu’une grande partie de l’Europe et des États-Unis a été construite et a prospéré « grâce à la sueur, aux larmes, au sang et aux horreurs de la traite négrière transatlantique et des siècles d’exploitation coloniale ».  Des réparations doivent être versées pour la traite des esclaves, a-t-il réclamé.  Aucune somme d’argent ne pourra jamais compenser les horreurs commises, mais cela permettrait de souligner que le mal a été perpétré, que des millions d’Africains productifs ont été arrachés à leur continent et exploités sans compensation.  L’Union africaine a autorisé le Ghana à organiser une conférence mondiale sur cette question en novembre à Accra, a-t-il rappelé.

Le Président a enfin évoqué les flux financiers illicites en provenance du continent africain, qui feraient perdre à l’Afrique quelque 88 milliards de dollars par an.  « Oui, ces sommes doivent également être restituées au continent », a lancé M. Akufo-Addo, qui s’est étonné que les pays recevant de tels fonds n’hésitent pas à les conserver, trop heureux de qualifier de « corrompus » des pays comme le Ghana.  Un groupe de travail conjoint de la Commission de l’Union africaine et du Secrétariat de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sous les auspices de l’ONU, devrait être chargé de trouver des moyens de mettre un terme à ces sorties de fonds préjudiciables, a-t-il estimé.

M. GITANAS NAUSĖDA, Président de la Lituanie, a rappelé qu’il ne peut y avoir de développement durable dans un contexte de guerre.  « Une guerre de type colonial a fait son retour en Europe. »  L’agression de la Russie contre l’Ukraine aggrave la situation mondiale dans des domaines tels que la sécurité alimentaire, l’action climatique ou bien encore les migrations, a dit le Président.  Il a accusé la Russie de prendre en otage, par ses visées impérialistes, la vision d’un monde libre et ouvert reposant sur la coopération.  « La communauté internationale ne peut plus laisser la Russie manipuler et détourner les règles mondiales. »  Il a demandé qu’une pression accrue soit mise sur la Russie afin qu’elle cesse ses attaques délibérées contre les civils et les infrastructures civiles en Ukraine.  Cette guerre d’agression doit cesser avec le retrait immédiat, total et inconditionnel des troupes et matériel russes du territoire ukrainien, a tranché le Président. Il a dit parler de « tout le territoire ukrainien, c’est-à-dire au sein de ses frontières et eaux territoriales internationalement reconnues de 1991. »

Le dirigeant a soutenu les efforts de la Cour pénale internationale (CPI) en vue de poursuivre en justice les auteurs de crimes de guerre, de génocide et de crimes contre l’humanité commis en Ukraine.  Il a notamment appuyé le mandat d’arrêt délivré à l’encontre du Président russe.  M. Nausėda a également demandé la création d’un tribunal spécifique afin de juger du crime d’agression commis par les autorités russes.  Il a condamné le retrait de la Russie de l’Initiative de la mer Noire, avant de s’opposer à toute levée des sanctions contre ce pays. Il a appelé l’Assemblée à se montrer déterminée et à condamner tout type d’agression qui viole de manière flagrante la Charte.  La politique de la peur et de l’intimidation doit cesser une bonne fois pour toute, a conclu le Président.

Mme ZUZANA ČAPUTOVÁ, Présidente de la Slovaquie, a noté que la guerre en Ukraine a grandement contribué à faire de 2023 l’année la plus meurtrière depuis 1994 en termes de décès liés aux conflits.  Depuis plus de 570 jours, a-t-elle dénoncé, les forces russes non seulement tuent des civils innocents, kidnappent des enfants et détruisent des villes et des villages, mais bombardent aussi les infrastructures et les ports qui exportent les céréales ukrainiennes vers ceux qui en ont besoin au Bangladesh ou en Égypte.  « Nous ne pouvons pas permettre à la Russie de transformer l’Initiative de la mer Noire en une initiative de chantage », a-t-elle martelé, avant d’indiquer que son pays augmente ses capacités de transit pour acheminer les céréales ukrainiennes là où elles sont nécessaires.  .  Elle a toutefois appelé les États Membres à ne pas fermer les yeux sur ceux qui compromettent la paix et la sécurité alimentaire mondiales.  « Nous avons besoin d’un Nouvel Agenda pour la paix, comme l’a dit à juste titre le Secrétaire général, mais nous avons avant tout besoin d’une action en faveur de la paix de la part de la Russie en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU », a-t-elle ajouté. 

La Présidente a ensuite exhorté la communauté internationale à faire reculer les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2030.  Assurant que des solutions réalisables, efficaces et peu coûteuses existent en matière d’atténuation et d’adaptation, elle a souligné que la Slovaquie participe à cet effort en produisant d’ores et déjà 85% de son électricité avec zéro émission.  Elle a également rappelé que la crise climatique affecte le plus ceux qui en sont le moins responsables et qu’à mi-chemin, seuls 12% des objectifs de développement durable définis à l’horizon 2030 sont sur la bonne voie pour être atteints. 

Mme Čaputová a d’autre part souligné l’immense potentiel des nouvelles technologies dans des domaines tels que la santé publique et l’action climatique, tout en mettant en garde contre l’essor rapide des médias sociaux et le flot de désinformation et de discours de haine qui en découle.  Si rien n’est fait pour les réguler démocratiquement, les plateformes, l’intelligence artificielle et d’autres technologies émergentes « peuvent agir comme des accélérateurs des crises actuelles », a-t-elle averti.  En conclusion elle a appelé à écouter les enfants qui, selon elle, demandent qu’on leur lègue un monde où l’égalité est la règle, où le développement peut être durable et résilient au climat et où l’on puisse vivre en paix. 

M. SAULI NIINISTÖ, Président de la Finlande, a constaté que, 10 ans après sa première intervention à la tribune de l’Assemblée générale, le monde est devenu encore plus complexe et les crises se multiplient, et les avis pour y mettre fin semblent maintenant se contredire les uns les autres. Aucun des défis auxquels nous sommes confrontés ne pourra être réglé par un seul pays ou groupe de pays, a-t-il mis en garde, en affirmant que les possibilités offertes par les nouvelles technologies seront également mieux maîtrisées « si on les maîtrise ensemble ».  De l’avis du Président, pour renforcer la coopération multilatérale, toutes les voix doivent être entendues, en particulier celles qui expriment des doléances. 

Il y a un an et demi, la Russie a déclenché une guerre contre l’Ukraine en violation directe de la Charte des Nations Unies, a rappelé le Chef de l’État en faisant remarquer que la lutte pour la liberté de Kyïv trouve un écho dans la propre histoire de la Finlande.  Celle-ci a en effet combattu pour son indépendance contre un ennemi bien plus grand par la taille, s’est-il souvenu affirmant ne pas vouloir voir le monde retomber dans une situation où les puissants considèrent qu’ils peuvent dominer les plus petits.  Il s’est dit convaincu que les efforts de paix déployés de part et d’autre, y compris dans l’enceinte du Conseil de sécurité au même moment, seront de nature à atténuer les tensions et les autres foyers de conflit ailleurs.  Membre du Conseil des droits de l’homme, la Finlande plaide aussi pour la sauvegarde des droits humains.  Aucun pays n’étant parfait, chacun peut apprendre des expériences des autres, et quand l’un d’entre nous échoue, la communauté internationale doit veiller à l’établissement des responsabilités, a préconisé M. Niinistö. 

Par ailleurs, il est temps pour lui d’envisager avec le plus grand sérieux l’engagement collectif en faveur des ODD et de la lutte contre les changements climatiques, alors que le réchauffement planétaire se poursuit, marqué par la perte de biodiversité et des températures records cet été.  L’ONU a précisément été créée pour répondre à de tels moments et le moment est venu d’identifier les causes profondes du mécontentement qui conduit à des échecs répétés, a-t-il déclaré.  Le Président, voyant les Nations Unies comme la somme de ses États Membres, a recommandé que chacun veille à ce que le système soit à la hauteur de la tâche qui lui a été confiée. 

M. RUMEN RADEV, Président de la Bulgarie, a regretté qu’après la pandémie, la guerre en Ukraine ait exacerbé des crises de toutes sortes et détruit non seulement des milliers de vies humaines, « mais aussi l’optimisme de mieux rebâtir ».  Il a lancé un appel à reconstruire la confiance dans le multilatéralisme et à maintenir l’ordre international fondé sur des règles, en soulignant que l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine menaçait non seulement la paix et la sécurité, mais aussi le développement économique et social du monde entier.  Pour mettre fin à cette guerre, il faut une volonté politique plus forte de négocier une paix juste et durable fondée sur les principes internationalement reconnus de l’ONU, a déclaré le Président, en dénonçant les décisions de la Russie de se retirer de l’Initiative de la mer Noire, de bombarder des infrastructures portuaires ukrainiennes et de restreindre la navigation dans la mer Noire, qui aggravent l’insécurité alimentaire mondiale, en particulier dans les pays du Sud.

Concernant les autres conflits dans le monde, M. Radev a appelé toutes les parties au conflit israélo-palestinien à reprendre des négociations directes conduisant à une solution à deux États.  Il a par ailleurs rappelé sa position en faveur de l’unité et de la souveraineté du Yémen et souligné, au sujet de l’Afghanistan, l’importance de lutter contre les menaces terroristes et la migration irrégulière. Il a expliqué que dans les Balkans occidentaux, la stabilisation passait par des relations de bon voisinage, des réformes et le respect des critères d’adhésion à l’Union européenne.  Il a appelé les États dotés d’armes nucléaires à dialoguer, se disant notamment préoccupé par l’intention de la Russie de déployer des armes nucléaires au Bélarus. 

S’agissant du Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD), le Président a estimé qu’il constituait une opportunité pour remettre sur les rails le Programme 2030, en notant que l’accès au financement et à des partenariats solides entre l’ONU et les institutions financières internationales était la clef du développement durable, et en insistant sur l’importance du pacte numérique mondial pour accélérer la réalisation des ODD grâce au potentiel des technologies numériques.  La pandémie de COVID-19 ayant entraîné un « revers » dans la réalisation du Programme 2030, notamment dans le domaine de l’éducation, il s’est dit prêt, au nom de son pays, à respecter les engagements pris lors du Sommet sur la transformation de l’éducation de 2022.

Concernant les changements climatiques, qu’il a définis comme un « multiplicateur de menaces », le Chef de l’État a jugé que l’action climatique était « un test pour la capacité de réponse du système multilatéral », notamment à l’approche de la COP28.  Rappelant ensuite le soutien sans ambiguïté de son pays au système des droits de l’homme de l’ONU, M. Radev a indiqué que la Bulgarie avait présenté sa candidature au Conseil des droits de l’homme pour la période 2024-2026 et a insisté, en tant que membre des conseils d’administration de l’UNICEF et d’ONU-Femmes, sur l’importance d’investir, entre autres, dans la santé, l’éducation et la protection des enfants contre la violence, ainsi que dans l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles. 

En conclusion, M. Radev a rappelé que son pays avait coparrainé la résolution de l’Assemblée générale sur le recours au droit de veto, souhaitant que le Conseil de sécurité soit plus efficace dans l’exercice de sa responsabilité première et qu’au moins un siège non permanent supplémentaire y soit attribué au Groupe des États d’Europe orientale. 

M. MOHAMED IRFAAN ALI, Président du Guyana, a affirmé que le multilatéralisme est l’approche la plus efficace pour relever le défi des changements climatiques.  Les États touchés de plein fouet par les phénomènes climatiques, tels que les petits États insulaires en développement (PEID) et les États côtiers de faible altitude comme le Guyana, sont aussi ceux qui contribuent le moins aux émissions et qui ont le plus besoin de financement, a-t-il observé.  Or, les engagements des pays développés, dont celui de fournir 100 milliards de dollars par an, ne sont toujours pas tenus. 

Doté de la deuxième couverture forestière par habitant au monde, le Guyana connaît l’importance des forêts pour l’atténuation des changements climatiques, et poursuit une stratégie de développement à faible taux d’émission, a expliqué le Président.  Ainsi, son pays a reçu 33,4 millions de tonnes de crédits d’emission de carbone, soit 750 millions de dollars pour la période allant jusqu’à 2030.  En outre, le Guyana utilise les revenus tirés des ressources pétrolières et gazières pour financer sa transition vers les énergies renouvelables.  Néanmoins, il est clair à ses yeux que l’ambition mondiale de zéro émission nette d’ici à 2050 est « irréaliste », compte tenu du coût de la transition.  La COP28 n’atteindra pas ses objectifs de zéro émission nette si nous continuons à aborder cette question de manière « doctrinaire » en ignorant les réalités actuelles, a-t-il prédit.  Qui plus est, « le manque de financement des forêts sur pied suggère qu’elles valent plus mortes que vivantes ». 

L’architecture financière actuelle est incapable de relever les défis mondiaux actuels et doit être réformée, a encore dit M. Ali.  À cet égard, il a fait valoir que l’adoption rapide d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle doit faire partie du programme de réforme.  Le Président a condamné la « militarisation de la nourriture » comme instrument de guerre.  « La paix mondiale dépend du respect de la dignité humaine », a-t-il noté, et le travail des dirigeants mondiaux consiste à faire progresser les droits de tous afin de créer un monde juste, équitable et pacifique.  Or, depuis le début de la guerre en Ukraine, ce pays a reçu quelque 260 milliards de dollars de financement d’urgence.  En revanche, en 26 ans, le peuple palestinien a reçu une aide totalisant 40 milliards, Haïti recevant pour sa part 20 milliards de dollars d’aide à la reconstruction et au développement au cours des 60 dernières années.  S’il a réaffirmé sa pleine solidarité avec le peuple ukrainien, le dirigeant a toutefois déploré la disparité des approches par rapport aux autres pays et régions du monde. Ainsi, des mesures urgentes et décisives doivent être prises pour parvenir à une solution globale en Haïti.  Il en va de même pour Cuba, cible depuis 60 ans d’une « agression économique et politique ». 

M. Ali s’est dit convaincu que la souveraineté et l’intégrité territoriale du Guyana seront affirmées lorsque la Cour internationale de Justice (CIJ) rendra son arrêt concernant les efforts du Venezuela visant à leur porter atteinte.  Néanmoins, le Guyana a reçu, hier, un message « très menaçant » du Venezuela après avoir mis aux enchères certains blocs pétroliers dans ses eaux souveraines, a dénoncé le Président, y voyant une menace pour la paix et la sécurité régionales et internationales.  Alors que le Guyana deviendra membre du Conseil de sécurité en janvier prochain, il entend se laisser guider par les principes du droit international et de la Charte des Nations Unies. 

M. ZORAN MILANOVIĆ, Président de la République de Croatie, a déclaré que « la paix n’advient pas d’elle-même ».  Il est donc beaucoup plus rentable d’investir dans la prévention des conflits que dans leur résolution après coup.  C’est pourquoi la prévention des conflits et le maintien de la paix devraient être au cœur du cadre du nouvel Agenda pour la paix, en lien avec un engagement renouvelé en faveur du multilatéralisme, de la solidarité mondiale et de la confiance.  En tant que Présidente de la Commission de consolidation de la paix (CCP) pour 2023, la Croatie plaide en faveur de son renforcement et de l’élargissement de son champ d’action géographique et thématique. 

S’agissant du développement durable, les performances de la Croatie en matière de mise en œuvre des ODD sont classées parmi les meilleures.  Toutefois, a reconnu son président, il reste encore beaucoup à accomplir.  La Croatie possède un vaste patrimoine naturel, qu’elle souhaite préserver pour les générations futures.  Elle est notamment déterminée à intensifier la coopération en matière de protection de l’environnement marin et de lutte contre la pollution plastique.  M.  Milanović s’est ainsi félicité de l’adoption historique du « traité de la haute mer », adopté par la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il y a vu un « triomphe pour le multilatéralisme ».  Aujourd’hui, la Croatie a rejoint le premier groupe de pays signataires du traité, s’est félicité le Président.  En tant qu’État membre de l’Union européenne (UE), la Croatie s’est aussi engagée politiquement et juridiquement à contribuer à faire de l’Europe le premier continent neutre en émission de carbone d’ici à 2050. En poursuivant dans cette voie, en accélérant le développement des énergies renouvelables et en augmentant les investissements verts, le Président a dit espérer pouvoir transformer la crise actuelle et la transition énergétique en « nouvelle chance pour nos économies ».  À titre d’exemple, il a cité un projet dit de « la vallée de l’hydrogène de l’Adriatique du Nord », qui englobe les régions italiennes du Frioul et de la Vénétie, ainsi que la Slovénie et la Croatie. 

Le Président a assuré que son pays continue d’attacher la plus grande importance à son voisinage immédiat dans le sud-est de l’Europe.  Les questions liées au passé et à l’héritage de la guerre, telles que le sort des personnes toujours portées disparues, la coopération dans le traitement des crimes de guerre, l’accès aux archives, ainsi que d’autres questions non résolues et très sensibles, doivent être abordées de manière approfondie, a‑t‑il dit. La Croatie soutient activement les efforts de la Bosnie-Herzégovine pour intégrer l’UE.  Elle est aussi très préoccupée par les relations entre le Kosovo et la Serbie et encourage les mesures de désescalade.  « Ces deux pays doivent se concentrer sur la normalisation de leurs relations, respecter leurs engagements et commencer à mettre en œuvre ce qui a été convenu cette année à Bruxelles et Ohrid », a conclu le Président, qui a estimé dans l’intérêt de la Croatie de promouvoir la stabilité et le développement des Balkans ainsi que le processus d’intégration européenne.

M. GUILLERMO LASSO MENDOZA, Président de l’Équateur, a rappelé que son gouvernement avait mis en place une politique « historique » pour la transition écologique et pour préserver le patrimoine naturel de l’Équateur.  En parallèle, le pays a amorcé des changements pour passer d’un système de production non durable à une économie circulaire à basses émissions.  Par ailleurs, le Président s’est félicité d’avoir élargi la protection des îles Galápagos en créant la réserve marine « Hermandad » qui s’étend sur 60 000 kilomètres carrés.  De plus, en renforçant le corridor marin du Pacifique, l’Équateur a créé la plus grande réserve transfrontalière du monde en coopération avec la Colombie, le Costa Rica et le Panama, a-t-il poursuivi. 

Insistant sur la nécessité de concilier les préoccupations environnementales et le bon sens économique, M. Lasso Mendoza s’est félicité de la réalisation de la plus grande initiative innovante d’échange de dette: la dette de 1,63 milliard a permis de réorienter les ressources vers la protection des Galápagos.  Se disant préoccupé par le phénomène El Niño susceptible de provoquer des inondations dévastatrices dans toute la région, il a appelé la communauté internationale à envisager des mesures d’atténuation des risques par le biais de fonds financiers non remboursables et d’une coopération internationale, ajoutant que la gravité de cet événement était liée aux effets des changements climatiques. 

Le Chef de l’État a également tenu à partager les résultats encourageants obtenus par son pays en matière sociale.  Après avoir investi dans le recrutement de personnels médicaux et communautaires, l’Équateur a réduit de 3,5% le taux de malnutrition chez les enfants de moins de 2 ans.  Indiquant que l’Équateur s’efforce de promouvoir une migration sûre et responsable, il a précisé que le pays connaît toutes les facettes de la migration et tient à faciliter l’intégration des migrants en garantissant tous leurs droits et en leur accordant un visa humanitaire.  Plaidant en faveur d’une politique de porte ouverte, il s’est félicité d’avoir permis l’enregistrement de 201 711 citoyens, essentiellement vénézuéliens, avant d’inviter la communauté internationale à faire également preuve de solidarité et de cohérence. 

Après 31 ans d’absence du Conseil de sécurité, M. Lasso Mendoza s’est félicité du retour de l’Équateur dans un contexte marqué par une guerre inattendue et des tensions nucléaires accrues.  Il a réaffirmé sa volonté de privilégier un règlement pacifique des conflits garantissant la protection des civils pour répondre aux nouvelles menaces sécuritaires.  Concernant la guerre en Ukraine, il a exigé la fin de l’agression militaire conformément à l’ordonnance de la CIJ, rappelant que ce conflit, en plus d’infliger douleur et destruction au peuple ukrainien, déstabilise la sécurité alimentaire et l’économie mondiales, en particulier dans les pays en développement.  Pour cette raison, il a appelé à la reprise de l’Initiative de la mer Noire et à la fin des guerres et conflits. 

Enfin, abordant la criminalité transnationale organisée, qu’il a qualifiée de « système corrupteur et meurtrier qui pénètre l’État et la société », le Président a rappelé que son pays joue un rôle actif dans la lutte contre ce fléau, notamment contre le trafic de drogues.  Il a conclu en exhortant les États à multiplier leurs efforts face à un ennemi capable de se multiplier.  « Si nous voulons partager pleinement les bienfaits de la mondialisation, nous devons aussi -et ensemble- faire face aux mêmes difficultés. » 

M. JOÃO MANUEL GONÇALVES LOURENÇO, Président de l’Angola, a indiqué que le fossé entre pays développés et pays en développement demeure une réalité inacceptable, en raison d’un manque de volonté politique de le combler.  Parce que les pays en développement ne sont pas représentés correctement au sein des institutions de gouvernance mondiale, ils ne peuvent pas faire entendre leurs points de vue et préoccupations, a-t-il regretté.  Cette situation génère selon lui de l’anxiété et de la frustration au sein des populations les plus vulnérables, lesquelles, parce que leurs doléances ne sont pas prises en compte, deviennent aisément perméables à des influences négatives qui sont dangereuses pour l’ordre et la stabilité. 

Le Président a exhorté les partenaires internationaux de l’Afrique à miser sur le marché africain, le taux de rendement des investissements étant satisfaisant.  « Nous voulons répondre aux attentes des jeunes qui sont obligés de partir pour réaliser leurs rêves », a-t-il assuré, en soulignant la traversée périlleuse de la Méditerranée.  Il a ensuite passé en revue les efforts de son pays en vue d’appuyer les initiatives de règlement des conflits et d’instauration de la paix, en mettant l’accent sur la situation en République démocratique du Congo.  M. Lourenço a pensé qu’il est possible de construire une base de confiance entre les belligérants, ce qui permettra d’apaiser les tensions dans la région des Grands Lacs et de mener à la paix.  Le Président a demandé un financement adéquat, durable et prévisible des efforts de lutte contre le terrorisme sur le continent, en se disant en faveur de contributions fixes pour les opérations sous pavillon de l’Union africaine.  Il a ensuite mentionné la vague de coups d’État menés par les militaires dans plusieurs pays du Sahel.  « Nous sommes de plus en plus convaincus de l’existence d’une main invisible qui est intéressée par la déstabilisation de notre continent et l’expansion de sa zone d’influence, alors que nous savons qu’elle ne fournit pas le soutien nécessaire au développement économique et social des pays africains », a-t-il déclaré. 

 Le Président a appelé à la fin immédiate de la guerre en Ukraine, en raison des destructions et des pertes humaines, et des conséquences délétères pour la sécurité alimentaire mondiale.  Il est peu probable qu’il y ait un vainqueur et un perdant sur le champ de bataille, c’est pourquoi les parties doivent privilégier le dialogue, a dit le Président.  Il a demandé une réforme du Conseil de sécurité afin que l’Afrique y soit mieux représentée. Enfin, M. Lourenço a exhorté la communauté internationale à honorer les engagements pris au titre du financement climatique. 

M. EDGARS RINKĒVIČS, Président de la Lettonie, a ouvert son discours en rappelant que l’ordre mondial subit une transformation et qu’il est crucial de raviver la confiance et la solidarité internationale.  Rappelant que la Russie est un État doté de l’arme nucléaire et un membre permanent du Conseil de sécurité, il a estimé que l’agression contre l’Ukraine représente un test pour le système multilatéral.  Déplorant l’absence de réaction à la suite de l’agression russe contre la Géorgie en 2008 et l’annexion de la Crimée en 2014, le Président a exhorté la communauté internationale à s’opposer fermement à l’attaque actuelle de la Russie, dans l’intérêt vital de tous les États. L’issue de cette guerre déterminera la sécurité mondiale pour les années à venir a-t-il lancé, condamnant avec la plus grande fermeté l’agression de la Russie et mettant en cause le rôle du Bélarus. 

Après avoir appelé la Russie à retirer toutes ses forces et tous ses équipements militaires d’Ukraine, M. Rinkēvičs a réitéré le soutien de la Lettonie à la formule de paix de l’Ukraine fondée sur la souveraineté et l’intégrité territoriale, exhortant tous les membres de l’ONU à en faire de même et à apporter un soutien global pour la reconstruction de l’Ukraine. 

Revenant sur les attaques commises contre les civils, M. Rinkēvičs a assuré que la Russie devrait assumer l’entière responsabilité juridique et financière de son agression et des violations du droit international.  Après avoir salué les mesures prises par la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur les atrocités commises en Ukraine, il a mentionné les contributions financières de son pays à la CPI, notamment à travers le fonds d’aide aux victimes.  Tout en indiquant soutenir d’autres mécanismes internationaux établissant les violations commises par la Russie, et après avoir salué le registre des dommages créé par le Conseil de l’Europe, il a réitéré l’appel à la création d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression contre l’Ukraine. 

Le Président a condamné la résiliation unilatérale de l’Initiative de la mer Noire par la Russie.  Rappelant que l’accès à l’alimentation constitue un droit humain, il a indiqué que la Lettonie travaille en collaboration avec le Programme alimentaire mondial (PAM) et encourage les Nations Unies à réagir de manière plus efficace aux besoins humanitaires. 

Concernant les défis entravant la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il a rappelé la nécessité de coopérer avec les pays d’Afrique et les petits États insulaires en développement (PEID) confrontés aux changements climatiques. Dans cette perspective, il a assuré de la contribution politique et financière de la Lettonie à la préparation de la prochaine conférence des Nations Unies sur les PEID. 

Enfin, alors qu’il a appelé à la revitalisation du système des Nations Unies, M. Rinkēvičs a exhorté le Conseil de sécurité à se réformer afin d’être plus transparent.  Dénonçant son inaction, il a rappelé que le droit de veto relève non pas du privilège, mais de la responsabilité. Dans cette lignée et afin de protéger les valeurs fondamentales de la Charte des Nations unies, il a annoncé la candidature de la Lettonie aux élections du Conseil de sécurité en 2025. 

M. YOON SUK YEOL, Président de la République de Corée, a évoqué le soixante-dixième anniversaire de l’armistice de la guerre de Corée, après que l’invasion des « forces totalitaires communistes » a été stoppée avec le soutien des forces de l’ONU.  Depuis, a-t-il fait observer, la République de Corée est sortie « des cendres de la guerre » pour devenir une démocratie libérale et une économie de marché animée du désir de contribuer de manière responsable à la communauté internationale.  Or, la guerre en Ukraine a creusé les divisions idéologiques et provoqué une contraction de l’économie mondiale, aggravant les crises alimentaires et énergétiques dans de nombreuses régions, a déploré le Président en appelant la communauté internationale à rester unie, avec l’ONU en son centre. 

M. Yoon s’est attardé sur les « fractures » qui se font jour dans trois domaines clefs (développement, climat et numérique).  Il a rappelé que le développement est impossible sans infrastructures de base telles que des systèmes de traitement de l’eau potable et les installations énergétiques.  Le Gouvernement sud-coréen, a-t-il fait valoir, a augmenté de plus de 40% son budget consacré à l’APD pour 2024, une hausse qui sera canalisée vers l’éducation et la formation.

Venant à la crise climatique, M. Yoon a expliqué que son pays compte augmenter de 300 millions de dollars sa contribution au Fonds vert pour le climat. La République de Corée exploitera non seulement les énergies renouvelables, mais également des énergies sans carbone à haut rendement, telles que l’énergie nucléaire et l’hydrogène, a-t-il ajouté en présentant son objectif de mener des recherches conjointes internationales sur l’énergie sans carbone et de faciliter l’innovation technologique et les investissements du secteur privé: le pays lancera une « Carbon Free Alliance », plateforme ouverte destinée à promouvoir l’adoption d’énergies sans carbone. 

Considérant que la fracture numérique est une cause majeure de la fracture économique, le Président a indiqué que son gouvernement soutiendra la transformation numérique des pays ayant une pénétration et une utilisation limitées du numérique.  À cet effet, il a proposé la création d’une organisation internationale, sous l’égide de l’ONU, dont la fonction consisterait à établir des règles relatives à l’éthique numérique. 

« Sans paix et sécurité internationales, le développement et la prospérité restent hors de portée », a prévenu M. Yoon dont le pays soutiendra la reconstruction de l’Ukraine en fournissant 300 millions de dollars l’an prochain et un programme d’appui à moyen et long terme de plus de 2 milliards de dollars.  Il a rappelé que les programmes nucléaires et balistiques de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) constituent non seulement une menace directe et existentielle pour la République de Corée, mais également un défi à la paix dans la région Indopacifique et au-delà.  Il a jugé « paradoxal » qu’un membre permanent du Conseil de sécurité envahisse une autre nation souveraine et reçoive des armes et des munitions d’un « régime qui viole de manière flagrante les résolutions du Conseil ». Il s’est vivement inquiété du transfert éventuel de la technologie nécessaire pour renforcer les capacités de la RPDC en matière d’armes de destruction massive en échange d’un soutien à la Russie avec des armes conventionnelles.  « La République de Corée ainsi que ses alliés et partenaires ne resteront pas les bras croisés », a affirmé le Président en soulignant qu’en tant que membre du Conseil de sécurité en 2024-2025, son pays s’engage à jouer un rôle responsable dans la construction de la paix mondiale.

M. EMOMALI RAHMON, Président du Tadjikistan, a regretté qu’en dépit des efforts consentis, les objectifs de développement durable (ODD) n’allaient pas être atteints et que les pays en développement, les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement payeraient le plus lourd tribut.  Il a souligné que le Tadjikistan lui-même se heurtait à des difficultés, et estimé que la solidarité et le financement de ces objectifs devraient être renforcés.  À ce titre, le Président s’est félicité du plan de relance proposé par le Secrétaire général pour mettre en œuvre le Programme 2030 et qui appelle à ce qu’au moins 500 milliards de dollars soient mis à disposition de ces pays chaque année. 

Notant les répercussions fortes des changements climatiques partout dans le monde, le Chef de l’État a indiqué que l’Asie connaissait un réchauffement plus rapide que d’autres régions et rappelé les conséquences négatives de ce réchauffement, qu’il a jugé alarmantes, surtout pour son pays, constitué à 90% de montagnes.  C’est la raison pour laquelle le Tadjikistan accorde une importance particulière au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, qui permet de renforcer les systèmes d’alerte précoce et l’assistance financière en cas de catastrophe naturelle, a-t-il expliqué.  Il a rappelé que le Tadjikistan avait vu disparaître plus de mille glaciers, sources d’eau douce, sur les 13 000 enregistrés dans ce pays, une situation qui pourrait impacter les ressources en eau et l’ensemble des écosystèmes de la région.  M. Rahmon a réclamé des mesures concrètes en matière de recherche et de collecte de données à cet égard, et s’est félicité de la proclamation de l’Année internationale de la préservation des glaciers en 2025.  Il a également rappelé que Douchanbé accueillerait en 2024 la troisième Conférence de haut niveau sur la mise en œuvre de la Décennie d’action sur le thème « L’eau pour le développement durable », ainsi que la Conférence internationale sur la préservation des glaciers en 2025. 

S’agissant des réalisations de son pays dans le domaine de l’économie verte, le Président a expliqué qu’il produisait 98% de son électricité à partir de sources renouvelables, et plus précisément de l’hydroélectricité.  L’utilisation de ces ressources peut aider au développement de la production d’énergie verte dans toute la région, a-t-il indiqué, en notant le rôle positif joué par le Fonds vert pour le climat dans ce domaine. 

Saluant le renforcement de l’intégration régionale en Asie centrale, M. Rahmon a rappelé que la sécurité, la stabilité et la coopération dans cette région étaient directement liées à la situation en Afghanistan.  Il a appelé la communauté internationale à augmenter le volume de l’aide humanitaire au peuple afghan, en lançant un appel au dialogue intra-afghan et à la création d’un gouvernement véritablement inclusif.  S’agissant du trafic de drogue en provenance de ce pays, il a déclaré que les autorités du Tadjikistan avaient saisi plus de 10 tonnes de stupéfiants à la frontière avec l’Afghanistan cette année et fait part de sa conviction que la réponse aux menaces du terrorisme, de l’extrémisme ou encore du trafic de stupéfiants devait être globale, et que le Bureau de lutte contre le terrorisme pouvait notamment y contribuer. 

Le Président a par ailleurs jugé inacceptables les manifestations de discrimination et d’hostilité raciale et religieuse, et réitéré l’importance de la promotion du dialogue et de la compréhension mutuelle entre les civilisations.  Il a conclu son intervention en faisant part de l’intention du Tadjikistan d’obtenir un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU pour 2028-2029. 

Mme IRIS XIOMARA CASTRO SARMIENTOPrésidente du Honduras, s’est présentée devant l’Assemblée pour la seconde fois depuis qu’elle est devenue la première femme présidente de son pays.  Elle s’est décrite comme une présidente issue de la résistance populaire ayant lutté contre un coup d’État qui avait réussi à renverser M. José Manuel Zelaya Rosales, Président démocratiquement élu.  Les progrès et les résultats du Gouvernement actuel ont déjà été reconnus par la communauté internationale et les organisations financières, a‑t‑elle signalé.  La Cheffe de l’État a cité, entre autres, une meilleure croissance économique, le sauvetage des finances publiques avec la liquidation des fonds d’affectation corrompus, une discipline fiscale, le paiement en temps voulu de la dette et la diminution de l’inflation.  De plus, a‑t‑elle ajouté, plusieurs lois favorisant la corruption ont été abrogées.  La Présidente a également fait état d’investissements pour la santé et l’éducation, tels qu’une collation pour chaque écolier, la reconstruction d’écoles à l’abandon, ainsi que des constructions de routes et d’hôpitaux. 

En 2022, a‑t‑elle rappelé, l’ancien Président du Honduras a été accusé par les États-Unis d’avoir conspiré et organisé pendant plus d’une décennie le trafic de milliers de tonnes de drogue, à la tête d’une organisation criminelle comprenant différentes figures de la pègre, des maires, des ministres, des députés, des généraux de l’armés et des chefs de la police.  Elle a assuré que certains d’entre eux ont déjà été condamnés.  Or « ces agresseurs qui ont pris l’État en otage complotent aujourd’hui contre mon gouvernement », s’est insurgée la Présidente, leur reprochant de vouloir interrompre les changements structurels que le peuple a ordonnés via les urnes.  Il est à son avis impossible de saisir l’ampleur de la tragédie subie par le peuple hondurien -et les caravanes constantes de migrants arrivant aux États-Unis- si l’on détourne le regard des 13 années d’une dictature « protégée par la communauté internationale », dictature qui a multiplié la dette publique du pays par six et entraîné un taux de pauvreté de 74%, le plus élevé de l’histoire du Honduras. 

La Présidente a rappelé que le peuple hondurien lui a confié un mandat exhaustif: « combattre et démanteler un narco-État et la corruption publique-privée qui a mis à sac les institutions, trahi la volonté populaire par des fraudes électorales, et imposé un terrorisme d’État avec des escadrons de la mort ».  Mme Castro Sarmiento a remercié tous ses appuis à l’intérieur et à l’extérieur du pays qui l’aident à rétablir l’état de droit. 

À son arrivée à New York, après sa participation au sommet du Groupe des 77 et la Chine à La Havane (Cuba), la Cheffe de l’État hondurien a remis au Secrétaire général une proposition officielle visant à créer la commission internationale contre la corruption et l’impunité pour le Honduras, une commission « impartiale, autonome et indépendante, dotée de la capacité d’enquêter et d’engager des poursuites dans les affaires de réseaux de corruption et de crimes financiers à fort impact ».  C’est, selon elle, le seul moyen de nettoyer un État où les institutions publiques, les « pirates » de la classe politique et les partenariats public-privé ont été infiltrés par le crime organisé. 

La Présidente a enfin appelé à la fin des mesures coercitives unilatérales cruelles envers Cuba et le Venezuela, souhaitant également que Cuba soit retirée de la liste des pays qualifiés de terroristes: une mesure « fausse, fantaisiste et faisant l’objet de manipulations », selon elle.  Enfin, les mesures « injustes » contre le Nicaragua doivent également être levées, a‑t‑elle prié. 

M. ALAR KARIS, Président de l’Estonie, a déclaré: « Nous vivons des moments difficiles et des moments de gloire, en tant qu’êtres humains, pays, sociétés et humanité. » Il a estimé que faire le bien est une aspiration universelle, avant de souligner les périls qui menacent le monde.  En Afghanistan, les filles se voient refuser un droit à l’éducation, a‑t‑il déploré, avant de dénoncer les visées impérialistes de la Russie en Ukraine.  « Qu’il y a‑t‑il de bien à coloniser un autre pays »? Le Chef de l’État a estimé que ce conflit sera déterminant pour savoir dans quel monde l’humanité veut vivre, un monde régi par la violence ou alors par le droit.  Il a appelé à juger le crime d’agression commis par la Russie, ce pays abusant de son mandat de membre permanent au Conseil.  Un crime constitue un crime, partout où il est commis, a‑t‑il dit, en demandant la création d’un tribunal spécifique.  « L’impunité ne doit pas l’emporter, sous peine de fouler aux pieds nos principes moraux. »  La réponse aux crimes russes est capitale, a tranché le Président.  Le Conseil de sécurité est, sur ce dossier, dans l’impasse et paralysé, avec des incidences négatives dans le monde entier.  Nous avons besoin d’un Conseil qui soit à la hauteur, a ajouté M. Karis.  Selon lui, les responsables d’agression doivent être traduits en justice plutôt qu’exercer leur droit de veto. 

Le Président a admis la difficulté d’une réforme du Conseil de sécurité avant d’en souligner la nécessité. Faisons-le pour les enfants au Tigré ou en Syrie, a‑t‑il plaidé, en appelant à lancer le processus de réforme.  Il a estimé que la difficulté majeure est le droit de veto, avant de demander qu’il ne soit pas exercé en cas d’atrocités.  Il a aussi demandé une représentation équitable de tous les continents au sein du Conseil, ainsi qu’une plus grande transparence.  M. Karis a estimé que l’Assemblée devrait pouvoir renverser le veto exercé au Conseil si la situation l’exige.  « Avons-nous besoin d’une nouvelle guerre mondiale pour aboutir à un monde meilleur? »   

M. AZALI ASSOUMANI, Président de l’Union des Comores, a tenu à porter la voix de l’Afrique, en tant que Président de l’Union africaine, en rappelant l’attachement profond du continent au système multilatéral.  Il a cependant insisté sur la nécessité de réformer le système des Nations Unies, indiquant qu’il était essentiel que l’Afrique, qui abritera 3,8 milliards d’individus à la fin de ce siècle, prenne part au Conseil de sécurité en tant que membre permanent.  Il s’agit d’une question à la fois d’équité et d’efficacité, car il en va de la légitimité du multilatéralisme a‑t‑il poursuivi.  À ce titre, le Chef de l’État s’est félicité de l’intégration de l’Union africaine au sein du groupe du G20, qualifiant cet événement de « victoire diplomatique ». 

Affirmant que l’Afrique fait face à des difficultés dans l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD), M. Assoumani a rappelé que si l’agriculture représentait un potentiel de développement pour l’Afrique, dans un contexte d’insécurité alimentaire, il était indispensable de renforcer les partenariats entre les gouvernements africains, les organismes de développement et les secteurs privés étrangers.  Il est temps également que nos partenaires nous appuient dans la mise en œuvre de réformes ambitieuses, telles que le transfert d’expertise et de technologies, a‑t‑il lancé. 

Renouvelant ses condoléances aux peuples marocains et libyens victimes de pertes humaines et matérielles dues aux effets des changements climatiques, le Président a adressé un appel à la communauté internationale afin de garantir une réponse efficace aux conséquences des changements climatiques en Afrique.  Plus spécifiquement, il a exigé la mise en œuvre effective des recommandations liées à la protection et à la préservation de l’environnement, et la concrétisation des engagements pris en faveur de l’adaptation et de la mitigation. Par conséquent, il a appelé à soutenir la Déclaration de Moroni, la Déclaration de Mombasa pour une économie bleue au service d’une croissance économique accélérée et la Déclaration de Nairobi, afin que les pays africains puissent plaider en faveur du développement durable, notamment lors de la prochaine COP28 de Dubaï.  Enfin, il a adressé un appel en faveur du renforcement des capacités de l’ONU-Habitat, dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, afin d’assurer un soutien aux localités africaines vulnérables aux changements climatiques. 

M. Assoumani a ensuite abordé les menaces qui planent sur le Sahel.  Alertant sur des attaques terroristes de plus en plus intenses, il a exhorté la communauté internationale à renforcer les efforts entrepris en matière de stabilisation tout en précisant qu’il incombait aux Africains de mettre en œuvre des plans de développement économique et social, dans le cadre de l’Agenda 2063.  Le Chef de l’État s’est également dit préoccupé par la résurgence de changements anticonstitutionnels qui compromettent la démocratie, la paix, la sécurité et le développement socioéconomique, précisant que l’Union africaine avait imposé des sanctions. 

Après avoir indiqué que la Zone de libre-échange continentale africaine mise en œuvre depuis 2021 contribuerait à stimuler l’économie, le Président a réitéré sa demande d’appui au renforcement du partenariat stratégique entre l’Afrique et la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC).  Concernant la guerre russo-ukrainienne, il a salué l’initiative de paix africaine et a rappelé qu’il soutenait toutes les autres initiatives visant à contribuer à mettre fin à la guerre.  Assurant enfin que les prochaines élections présidentielles aux Comores seraient organisées de manière libre et transparente, il a sollicité l’appui de la communauté internationale. 

M. LUIS RODOLFO ABINADER CORONA, Président de la République dominicaine, s’est inquiété de l’impact des crises générées par les changements climatiques sur notre planète et nos sociétés.  Il a dénoncé la pratique du contrôle de l’offre par les pays exportateurs pour maintenir les prix du pétrole brut à un niveau élevé, au détriment des pays importateurs.  Selon lui, l’ONU devrait adopter un mécanisme financier garantissant la stabilité des prix du pétrole brut pour les pays importateurs à revenus moyens et faibles, comme le sien.  Le Président a recommandé l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle applicable aux pays en développement et la mise en place du fonds pour les pertes et dommages à l’intention des nations les plus vulnérables aux catastrophes.  Selon lui, une réforme profonde de l’architecture financière internationale bénéficierait équitablement à tous les pays.  Par ailleurs, la République dominicaine a créé une table ronde multisectorielle pour traiter de la prolifération massive des sargasses, qui dévorent les côtes caribéennes des États-Unis et du Mexique. 

Le Président a illustré la différence entre son pays et son voisin sur l’île d’Hispaniola tels qu’ils apparaissent depuis l’espace: une moitié verte et florissante correspondant à la République dominicaine, qui a donné la priorité à la conservation et à la gestion durable de ses ressources naturelles, et l’autre moitié, dépourvue de couverture forestière, reflétant le « spectaculaire paysage de déforestation d’Haïti ».  « Cette frontière naturelle n’est pas seulement une leçon géographique, mais un puissant rappel de ce qui attend le monde si nous continuons d’ignorer les alarmes de la nature », a mis en garde M. Abinader Corona. Haïti souffre non seulement d’une tragédie environnementale, mais aussi d’une instabilité politique et sociale qui constitue une menace pour la région. 

Aujourd’hui, a déploré le Président, des Haïtiens ont repris la construction d’un canal de transfert illégal sur le territoire haïtien pour extraire l’eau de la rivière Dajabón, en violation des traités frontaliers entre les deux pays.  Ce projet, son impact environnemental et l’identité de ses bénéficiaires, n’ont jamais été officiellement communiqués au Gouvernement dominicain.  Celui-ci a demandé à plusieurs reprises aux autorités haïtiennes de cesser cette construction « unilatérale et illégale », et les autorités haïtiennes ont indiqué qu’il ne s’agit pas d’un projet gouvernemental, sans toutefois prendre de mesures pour y mettre un terme du fait de la faiblesse institutionnelle et de la crise sécuritaire.  Face à cet acte illicite, a expliqué le dirigeant, le Gouvernement dominicain a été contraint de prendre des mesures « énergiques », en fermant la frontière. 

« Nous ne cherchons pas de confrontation avec le peuple haïtien, mais nous sommes confrontés à des acteurs incontrôlables qui entretiennent l’insécurité en Haïti pour leurs intérêts particuliers », a poursuivi le Président.  À ses yeux, « le problème d’Haïti n’est plus en Haïti mais entre les mains de la communauté internationale », et le Conseil de sécurité doit autoriser de toute urgence une mission de sécurité dans ce pays.  Le Conseil a donné son aval à la création d’une force multinationale pour assister la police nationale haïtienne, comme l’a demandé le Gouvernement haïtien.  « Ce qui se passe en Haïti est une perturbation de l’ordre public par des éléments criminels sans aucune revendication politique », a martelé le Président.  Il a réitéré sa solidarité avec le peuple haïtien, en précisant que sa principale responsabilité est de défendre les intérêts du peuple dominicain.  « Il n’y aura jamais de solution dominicaine au problème haïtien », a-t-il conclu.

Mme MAIA SANDU, Présidente de la République de Moldova, a rappelé que son pays était en première ligne dans la lutte pour la démocratie, et que son pays soutenait son voisin, l’Ukraine, qui « résiste obstinément »à l’attaque brutale de la Russie. Ce soutien ne doit pas faiblir, a‑t‑elle lancé aux États Membres.  L’Europe et le monde libre sont confrontés « à un assaut extérieur lancé contre leurs valeurs », a‑t‑elle insisté, en rappelant la nature hybride de l’assaut de la Russie, fait de chantage énergétique, de soutien aux séparatistes, d’attaques cybernétiques et de désinformation.  Cette menace ne s’applique pas uniquement à nous, a expliqué Mme Sandu, mais aussi à d’autres États démocratiques qui doivent faire preuve de vigilance et d’unité. 

Mme Sandu a rappelé que le Moldova avait envers et contre tout réussi à maintenir la paix dans le pays, y compris dans la région de Transnistrie où sont stationnées « illégalement » des troupes russes qu’elle a appelées à se retirer sans condition.  Elle a expliqué que le Moldova avait développé sa résilience grâce à l’aide de ses partenaires, en réduisant sa dépendance au gaz russe, en investissant dans l’efficacité énergétique ou encore en construisant des lignes électriques vers l’Europe. Elle a rappelé que ce qui distingue avant tout les démocraties est leur capacité à offrir une vie meilleure à leurs concitoyens.  La Présidente a dressé la liste des efforts faits par son pays pour développer ses exportations, combattre l’inflation, ou encore lutter contre le crime organisé, notamment celui des oligarques fugitifs.  À cet égard, elle a souligné les progrès considérables accomplis par son pays en matière de lutte contre la corruption. 

La résilience passe aussi par l’investissement dans les infrastructures, a expliqué Mme Sandu, pour créer des emplois et des « couloirs de solidarité » avec l’Ukraine, couloirs qui aideront aussi à reconstruire ce pays après la guerre, a‑t‑elle précisé.  Le Moldova est un allié de l’Ukraine mais aussi un partenaire sécuritaire pour l’Europe, a‑t‑elle ajouté, soulignant que la réunion de la Communauté politique européenne que le Moldova a accueillie en juin dernier avait permis d’ancrer l’appartenance du Moldova à la famille européenne.  S’agissant des aspirations européennes de son pays, la Présidente a indiqué qu’elles n’étaient pas seulement un choix politique, mais aussi la seule manière de protéger la démocratie du pays et d’être ancré dans le monde libre, tout en offrant une vie meilleure à ses concitoyens.  Elle a conclu son intervention par un appel aux plus « robustes » des démocraties à poursuivre leur lutte pour la défense de ce système, en expliquant que « lorsqu’une démocratie prospère, elle inspire de l’espoir aux autres, et lorsqu’une démocratie s’effondre, on risque un effet domino ».  « Dans ce combat pour la démocratie, nous l’emporterons », a‑t‑elle lancé.

M. JULIUS MAADA BIO, Président de la Sierra Leone, a dressé un bilan de ses cinq premières années au pouvoir, marquées par de multiples bouleversements mondiaux (pandémie, tensions géopolitiques, guerre en Ukraine, crise alimentaire), en expliquant avoir œuvré à éliminer les legs déplaisants du passé.  Il a cité notamment l’abrogation de lois désuètes telles que la « loi sur la diffamation séditieuse », l’abolition de la peine de mort, ainsi que les progrès enregistrés dans la lutte contre la corruption.  Le financement national de l’éducation a été augmenté, en veillant à ce qu’il constitue en moyenne 22% du budget national, a‑t‑il ajouté.  Le Président a aussi indiqué qu’une « éthique d’inclusion radicale » a été adoptée, offrant à tous un accès libre et gratuit à un enseignement primaire et secondaire de qualité. 

Le Président a encore illustré l’engagement inébranlable de son gouvernement à démanteler les barrières de l’inégalité entre les sexes en citant l’état d’urgence qui a été déclaré contre les crimes de viol et contre les violences sexuelles et sexistes.  Il s’est aussi prévalu d’une loi de 2022 sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes qui a consacré l’engagement du pays à réserver au moins 30% des sièges d’élus du peuple aux femmes. Cette loi garantit en outre l’égalité des chances en matière d’emploi, prolonge le congé de maternité et oblige les institutions financières nationales à favoriser l’accès des femmes aux ressources financières. 

M. Bio a ensuite défini les piliers de son nouveau mandat qui sont notamment la sécurité alimentaire, étroitement liée aux investissements dans l’agriculture; le développement du capital humain, avec une perspective particulière sur l’égalité des sexes et un programme d’accès à l’emploi pour les jeunes; et le développement des technologies et des infrastructures.  La Sierra Leone vise à devenir un pays à revenu intermédiaire d’ici à 2035, a‑t‑il fait savoir. 

S’agissant de politique africaine, le Chef de l’État a exprimé sans équivoque son désaccord à l’égard de tout changement de gouvernement extraconstitutionnel.  Il a toutefois noté que chaque action portant atteinte à l’état de droit est liée à des problèmes sous-jacents tels que la pauvreté, le chômage généralisé et les discriminations.  S’agissant de son propre pays, le Président a dit avoir institué le Comité national d’examen des systèmes électoraux pour faire face aux défis logistiques persistants du processus électoral.  Il a aussi jugé regrettable « la décision d’un certain État Membre d’introduire des mesures coercitives unilatérales, notamment des restrictions de visa, à l’encontre des citoyens sierra-léonais », à la suite de récentes élections nationales.  De telles mesures unilatérales, contraires au droit international, ont parfois été utilisées dans d’autres pays africains pour exercer des « pressions politiques », s’est-il inquiété. 

Abordant enfin la réforme du Conseil de sécurité, le Président a relevé que les injustices historiques endurées par le continent africain demeurent non résolues dans les négociations intergouvernementales. L’Afrique, a‑t‑il regretté, se distingue comme la seule région sans représentation permanente, et elle est manifestement sous-représentée dans la catégorie de non-permanents.  « Le Conseil de sécurité demeure prisonnier d’un temps où une grande partie de l’Afrique était encore sous l’emprise du colonialisme, qui persiste trois quarts de siècle plus tard. »  La demande de l’Afrique de deux sièges permanents -assortis de droits proportionnés, y compris le droit de veto s’il est maintenu- et de cinq sièges non permanents sont des questions d’équité et de justice, a‑t‑il plaidé.  Il s’agit, a‑t‑il soutenu, du droit de l’Afrique à obtenir une voix égale dans la prise de décisions sur les questions qui l’affectent. 

Le Prince ALBERT II de Monaco a souligné combien l’enrichissement du droit international est un succès sous-estimé des efforts de coopération au sein de l’ONU et rappelé que, depuis son admission à l’ONU, la Principauté de Monaco est devenue partie à une cinquantaine de traités internationaux couvrant un large éventail de sujets tels que les droits de l’homme, le désarmement, l’environnement ou encore le droit de la mer.  Au cours de l’année qui vient de s’écouler, le multilatéralisme a, dans certains domaines, une nouvelle fois démontré sa vigueur et son efficacité, à force de persévérance, a‑t‑il dit.  « En décembre dernier, nous avons franchi un cap historique en adoptant le nouveau Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal et, quelques mois plus tard, nous sommes parvenus à conclure près de deux décennies de négociations en finalisant l’Accord sur la diversité biologique en haute mer que j’ai eu l’honneur de signer ce matin. »  Cet instrument juridique contraignant marquera une autre étape, décisive, pour la protection et la préservation des mers et des océans, a‑t‑il poursuivi.  « Ces victoires, fruits de nos efforts collectifs, doivent nous donner de l’espoir. »  Il a ajouté que ces nouveaux instruments offrent des outils puissants pour combattre les changements climatiques. 

Le dirigeant a déclaré que la bataille climatique ne pourra être gagnée qu’en avançant de front sur l’ensemble des objectifs de développement durable.  Il a précisé que le Gouvernement contribuera à la reconstitution du Fonds vert pour le climat à hauteur de 3,3 millions d’euros pour la période 2024-2027, soit une augmentation de 10% par rapport à la période précédente alors que Monaco est déjà le premier bailleur per capita de cet instrument capital de mise en œuvre de l’Accord de Paris.  Enfin, il a estimé que l’intelligence artificielle porte en elle à la fois un potentiel immense pour accélérer la réalisation des ODD et des risques sans précédent pour la paix et la sécurité mondiales.  « Elle peut être comme la langue d’Ésope, à la fois la meilleure et la pire des choses pour l’humanité », a‑t‑il conclu, en appelant à l’élaboration d’un cadre de gouvernance mondial et de normes éthiques imposant des limites à l’utilisation de l’intelligence artificielle. 

M. GABRIEL BORIC FONT, Président du Chili, a rappelé qu’il y a neuf jours, son pays a marqué le cinquantième anniversaire du coup d’État qui a brisé sa trajectoire démocratique en 1973.  « Le palais de La Moneda bombardé et feu le Président Salvador Allende sont dans toutes les mémoires ».  Saluant le rôle joué par les organisations multilatérales dans la défense des droits humains et de la démocratie, il a reconnu que le Chili a une « dette immense »à l’égard de l’ONU et de ses États Membres.  Depuis la dictature du général Pinochet, le Chili a restauré la démocratie et a su tirer les leçons de ce passé douloureux, a assuré le Chef de l’État.  Le pays mise désormais sur l’état de droit et s’emploie à protéger les droits humains, en tant que membre du Conseil des droits de l’homme, a souligné M. Boric Font.  Pour preuve de l’attachement de son pays à la démocratie, il a expliqué que, dans les moments d’instabilité politique, le Gouvernement peut s’unir à l’opposition pour sortir de l’impasse.  « Pour ma génération, qui n’était pas née en 1973, la démocratie est un legs qu’il nous faut protéger, tout en faisant face aux défis et menaces de notre temps. »  

À ses yeux, la défense de la démocratie impose de lutter contre la progression du totalitarisme et de l’intolérance, mais aussi de protéger les droits des minorités, voire des majorités s’agissant des femmes.  Il faut aussi réfléchir aux causes profondes de la désaffection des électeurs, a poursuivi le Président, estimant que la démocratie doit pouvoir offrir des résultats tangibles à des populations souvent frustrées.  Après avoir dénoncé les régimes dictatoriaux, comme celui du Président Ortega au Nicaragua, M. Boric Font s’est élevé contre les sanctions unilatérales « qui ne contribuent aucunement à la solution ». Les sanctions imposées au Venezuela n’aident pas à améliorer les conditions de vie du peuple vénézuélien, a-t-il dit, avant d’appeler les États-Unis à lever ces mesures et à cesser de « violenter » Cuba pour de fausses raisons.  Cuba ne promeut pas le terrorisme, a rectifié le Président.  Dans le même esprit, il a condamné l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, estimant que le chemin de la paix passe par le respect de l’intégrité territoriale.  « Les pays comme le nôtre n’ont que le droit international pour se prémunir des agressions », a encore fait valoir le Président. 

Évoquant les défis liés aux changements climatiques et à la perte de biodiversité, M. Boric Font a appelé à agir sans délai pour accélérer la transition verte et repenser les modes de consommation.  À titre national, il a précisé que 43% du territoire chilien est désormais protégé et que le pays s’est doté d’une loi de protection de la biodiversité.  Face à l’accélération du dérèglement climatique, le Chef de l’État a exhorté les pays industrialisés à assumer une « éthique de la responsabilité » plus respectueuse de l’environnement et plus solidaire.  Dans le même ordre d’idées, il a plaidé en faveur d’un cadre éthique pour les nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle, dans le respect de la dignité et la vie privée des individus.  Il a enfin souhaité que l’ONU reste à la hauteur de ces défis, ce qui, selon lui, implique de réformer la gouvernance mondiale, du Conseil de sécurité aux institutions financières internationales. 

M. KHURELSUKH UKHNAA, Président de la Mongolie, a d’abord affirmé que face aux multiples défis géopolitiques, socioéconomiques et environnementaux auxquels le monde est confronté, la Charte des Nations Unies restait le meilleur instrument pour renforcer la paix et favoriser la coopération internationale.  D’après le rapport Notre Programme commun du Secrétaire général, la Mongolie serait un « symbole de paix dans un monde troublé », s’est enorgueilli le Président.  Puis M. Ukhnaa a abordé l’essor rapide de la technologie numérique, qui présente à la fois des opportunités et des menaces pour la sécurité mondiale, notamment via le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive.  La Mongolie, a-t-il assuré, collabore activement à l’établissement d’une convention internationale pour contrer l’utilisation criminelle des technologies de l’information et de la communication. 

Le Président a rappelé que son pays s’était débarrassé de toutes les armes nucléaires entreposées sur son territoire il y a plus de 30 ans, avant de vanter l’initiative du Dialogue d’Oulan-Bator sur la sécurité en Asie du Nord-Est.  Insistant sur la dimension profondément pacifique de son peuple, il a cité le pape François qui, lors de sa récente visite en Mongolie, a évoqué la « Pax Mongolica », à savoir l’absence de conflits.  Il a souligné la participation de la Mongolie à des opérations de maintien de la paix de l’ONU —avec plus de 20 000 Casques bleus déployés ces 20 dernières années— et a réaffirmé l’importance d’inclure davantage de femmes dans ces missions. 

Abordant la question du développement durable, le Président a alerté sur les inégalités croissantes entre et au sein des nations.  Malgré les avancées sur les objectifs de développement durable (ODD), des lacunes importantes demeurent, s’est-il inquiété, remarquant que seulement 12% des ODD avaient été pleinement atteints jusqu’ici, et que leur financement restait insuffisant. « La Mongolie aura besoin de dépenses supplémentaires d’environ 18% du PIB par an en moyenne jusqu’à 2030 pour atteindre ses propres objectifs », a-t-il prévenu.  Au sujet du climat, M. Ukhnaa a fait valoir que la Mongolie avait adopté des réformes législatives pour attirer les investissements dans des technologies plus vertes.  Il a également mentionné plusieurs projets nationaux visant à atténuer les effets des changements climatiques et à promouvoir le développement durable, notamment la plantation de nombreux arbres, ou la reconstruction de Kharkhorum, l’ancienne capitale des Mongols, avec des normes « d’éco-ville intelligente et respectueuse de l’environnement », a-t-il précisé.  « Si nous ne suivons pas une voie résolue pour préserver notre Terre nourricière dès maintenant, elle trouvera inévitablement son propre moyen de survivre, même si cela signifie le faire sans nous », a-t-il averti. 

Enfin, M. Ukhnaa a souligné l’engagement actif de la Mongolie auprès des Nations Unies, en particulier en faveur des pays en développement sans littoral (PDSL).  Il a loué les efforts collectifs, y compris ceux de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), pour la prévention des pandémies et appuyé l’élaboration d’un document juridique international pour une distribution équitable des vaccins.  Il a conclu en réaffirmant l’importance croissante de la coopération multilatérale, anticipant que le Sommet de l’avenir en septembre 2024 serait un événement décisif pour revitaliser le multilatéralisme. 

M. MOHAMED OULD CHEIKH EL GHAZOUANI, Président de la Mauritanie, s’est inquiété de crises « particulièrement aiguës » qui se chevauchent et affectent le monde entier, quoique de manière inégale.  Voyant dans cet état de fait la preuve d’une destinée commune, il a constaté que la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) s’essoufflait, notamment dans les pays en développement.  S’inquiétant de la montée de la pauvreté, de l’inflation, des crises alimentaires, sanitaires, sécuritaires et environnementales, il a plaidé en faveur d’un renforcement du multilatéralisme, d’une correction des déséquilibres en matière d’aide au développement et de la création de nouveaux mécanismes pour le financement du développement durable. 

Affirmant que son pays avait fait des ODD l’axe principal de ses efforts de développement, le Président a détaillé des progrès dans plusieurs domaines, notamment en matière de lutte contre la pauvreté et d’élargissement de la protection sociale en vue de parvenir à une couverture sanitaire universelle.  Il a aussi dressé une liste de réformes engagées afin de diversifier l’économie tout en renforçant la productivité de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, en vue de parvenir à l’autosuffisance alimentaire.  Rappelant que la croissance avait atteint 6,4% en 2022, il s’est félicité d’un accès à l’eau potable pour 72% et à l’électricité pour 53% de la population. 

M. El Ghazouani a évoqué le lancement d’un programme de développement de l’hydrogène vert afin d’atteindre l’objectif national de réduction de 11% des émissions de carbone du pays.  Il a appelé les États industrialisés à respecter leurs engagements en la matière.  Face à la désertification, il a expliqué que son pays mettait en œuvre l’initiative Grande Muraille verte pour le Sahara et le Sahel (IGMVSS) et s’engageait au sein du Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS). 

Le Président a aussi affirmé que son pays promouvait les droits humains, notamment ceux des femmes et des enfants et luttait contre toutes les formes d’esclavage moderne et que les résultats avaient été salués par les partenaires internationaux et les organisations internationales spécialisées.  Il s’est aussi félicité de la stabilité et de la sécurité qui prévalaient dans son pays malgré une situation régionale instable.  Il a rappelé que son pays présidait actuellement le G5 Sahel et contribuait au contingent de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). 

Après avoir réaffirmé le soutien de la Mauritanie à la création d’un État palestinien indépendant dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale, le Chef de l’État a réitéré la position de principe de son pays sur le Sahara occidental, soutenant les efforts de l’ONU et rappelant les résolutions du Conseil de sécurité visant à parvenir à une solution durable et acceptable pour tous.  Rejetant enfin toute prise du pouvoir par des moyens non constitutionnels, il a appelé les « États frères du Sahel » à un retour rapide à l’ordre constitutionnel. 

M. GEORGE MANNEH WEAH, Président du Libéria, a exprimé ses inquiétudes quant à la prolifération des acteurs non étatiques armés, la menace d’escalade nucléaire et les conditions climatiques extrêmes.  Le Libéria, a-t-il poursuivi, a accompli des progrès dans divers domaines, allant de la santé à l’éducation, en passant par l’égalité de genre et le développement des infrastructures.  « Nous sommes fiers de nos accomplissements en termes de réduction du taux de mortalité maternelle, d’augmentation de la parité entre les sexes dans la scolarisation, et d’amélioration de notre santé et de notre bien-être en général. »  M. Weah a affirmé soutenir le plan de relance des ODD lancé par le Secrétaire général.  Il a appelé à lever 500 milliards de dollars par an pour stimuler le développement durable des pays en développement.  Cela implique notamment de s’attaquer au coût élevé de la dette et aux risques croissants de surendettement, a-t-il précisé. 

Venant à la question de la consolidation des institutions et infrastructures, le Président du Libéria a rappelé avoir annoncé, il y a cinq ans à cette tribune, la transition démocratique pacifique de son pays.  « Nous avons maintenu la paix et la sécurité.  Nous avons protégé les droits humains et le droit des médias d’opérer pacifiquement et librement. »  Il a ajouté que le peuple libérien jouit maintenant du plein exercice de ses droits constitutionnels, avant d’informer de la tenue prochaine de scrutins pour les élections présidentielle et législatives.  Les élections d’octobre marqueront les quatrièmes élections générales pacifiques au Libéria depuis la fin de la guerre civile en 2003, a-t-il dit, précisant que ce seront les premières depuis le retrait de la présence de maintien de la paix de l’ONU.  Il s’est prévalu de toutes les mesures prises pour garantir des élections libres, équitables, transparentes, pacifiques, inclusives et crédibles. 

Enfin, le Président Weah a plaidé pour que la priorité soit donnée à la gestion de la crise climatique.  Il a mis en avant l’appui nécessaire à fournir aux pays, y compris le Libéria, qui ont la capacité d’utiliser la biodiversité, pour renforcer la résilience face aux changements climatiques.  En conclusion, le Président a réitéré son engagement à protéger la planète, à promouvoir la paix et à prévenir les conflits.  De même pour le financement durable et le renforcement des partenariats, a-t-il ajouté en soulignant que ces objectifs ne peuvent être atteints que grâce à une collaboration entre les gouvernements, les parties prenantes non gouvernementales et d’autres partenaires. 

M. FÉLIX-ANTOINE TSHISEKEDI TSHILOMBO, Président de la République démocratique du Congo (RDC), a rappelé qu’à mi-parcours sur la voie des objectifs de développement durable (ODD) 2030, les besoins humanitaires et les déplacements de population atteignent des niveaux inédits.  Il est évident que la mutualisation des énergies et une approche multilatérale sont des atouts majeurs et indispensables pour venir à bout de menaces existentielles, a-t-il dit. 

M. Tshisekedi Tshilombo a réaffirmé son attachement aux valeurs de solidarité et de confiance prônée par l’Organisation tout en dénonçant « l’attitude équivoque et la politique de deux poids, deux mesures de l’ONU ».  Mettant en cause les prises de position du Conseil de sécurité dans certaines crises politiques et sécuritaires qui sévissent en Afrique, le Chef de l’État a abordé la question de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Après avoir remercié la communauté internationale, il a plaidé en faveur du retrait progressif de la MONUSCO à partir de décembre 2023, indiquant qu’il s’agissait d’une étape nécessaire pour la consolidation des progrès entrepris.  Pointant du doigt l’incapacité de la MONUSCO à faire face aux rébellions et conflits armés touchant la RDC et la région des Grands Lacs, le Président a affirmé qu’il était « illusoire et contre-productif de maintenir la MONUSCO au nom de la restauration et de la stabilisation de la paix ».  Il a précisé que la RDC explorait de nouveaux mécanismes de collaboration stratégiques avec l’ONU en intégrant les contingences actuelles.  Le Président a également fait état d’un courrier adressé au Président du Conseil de sécurité le 1er septembre 2023. 

Le Président a réitéré la demande adressée par la RDC au Conseil de sécurité visant à sanctionner tous les auteurs, coauteurs et complices de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité ainsi que des violations graves des droits de l’homme, du droit international et de la Charte des Nations Unies sur le territoire congolais.  S’étonnant de l’impunité dont jouissent les responsables de crimes, pourtant cités dans les rapports de l’ONU, il a mis en cause « le silence total" de l’Organisation avant de saluer les sanctions infligées par les États-Unis au Rwanda.  Il a rappelé que ce pays soutenait le groupe terroriste du M23 qui ne respecte aucun des engagements conclus par les chefs d’État de la région dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi.  Sous les applaudissements d’une partie de l’Assemblée, il a ajouté que le M23 exigeait « un dialogue qui ne leur sera jamais accordé ». 

Le Président a invité la communauté internationale à revitaliser les approches du réchauffement climatique, déplorant le non-respect d’engagements pris en 2009.  S’illustrant notamment par le Sommet africain sur le climat de Nairobi, la volonté du continent de jouer un rôle clef dans la solution au réchauffement planétaire a été mise en exergue par M. Tshisekedi Tshilombo.  Il a également appelé à la création d’un marché du carbone équitable. 

Pressant les États d’élargir le Conseil de sécurité et d’intégrer deux représentants du continent africain comme membres permanents, le dirigeant a précisé qu’une réforme de l’ONU serait indispensable mais insuffisante. 

Rappelant les progrès entrepris par la RDC, il a évoqué le Fonds national des réparations des victimes des violences sexuelles liées aux conflits et des victimes des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité (FONAREV) créé en décembre 2022.  Enfin, soulignant l’imminence des élections générales organisées en RDC, il a de nouveau appelé les institutions internationales à accompagner ce processus de consolidation de la démocratie et exhorté l’ONU à œuvrer à la levée immédiate des sanctions contre le Zimbabwe. 

Le Roi MSWATI III d’Eswatini s’est dit vivement préoccupé par la persistance des conflits, des coups d’État et des changements anticonstitutionnels de gouvernement dans plusieurs États africains.  Il a appuyé les efforts en vue de trouver une solution à la situation relative au Sahara occidental conformément à la résolution 2654 (2022).  Il a appelé à faire taire les armes partout dans le monde et plaidé pour une résolution pacifique des conflits et pour un renforcement continu de la règle démocratique.  Il a précisé que son pays soutient l’égalité entre les genres et la lutte contre les violences faites aux femmes.  « Nous avons établi un bureau d’aide juridique afin de faciliter l’accès à la justice, en particulier pour les groupes vulnérables et marginalisés. » 

Le dirigeant a précisé que la mise en œuvre des ODD par son pays a été affectée par de multiples chocs, tant nationaux qu’internationaux.  Malgré ces défis, nous restons déterminés dans nos engagements à les réaliser, a-t-il assuré.  « Nous avons été classés par la Banque mondiale dans le top 5 des économies en expansion avec une croissance du PIB de 7,8%. »  Il a précisé que son pays est au neuvième rang des 10 pays africains avec le PIB par habitant le plus élevé.  « Nous n’allons pas nous reposer sur nos lauriers mais travailler encore plus pour fortifier notre économie. » 

Le Roi a loué le modèle démocratique unique en vigueur en Eswatini.  Notre constitution reconnaît le rôle de la monarchie au même titre que le parlement, la séparation des pouvoirs, les droits humains et l’état de droit, a-t-il dit, en parlant de « démocratie monarchique ».  Enfin, il a estimé que l’inclusion de Taiwan est un élément essentiel en vue d’un bon accomplissement du Programme 2030.  L’inclusion de Taiwan dans le système onusien et les activités se rapportant à la mise en œuvre des ODD permettra de renforcer la coopération internationale et de faire en sorte que personne ne soit laissé de côté, a-t-il conclu. 

M. DAVID KABUA, Président des Îles Marshall, a déclaré qu’une ONU forte et efficace est plus que jamais nécessaire pour confronter les chocs économiques, les tensions politiques et les changements climatiques.  Il a souhaité que la Russie rende des comptes pour son « invasion illégale et immorale » de l’Ukraine.  De même, il a exhorté tous les pays du monde à respecter les droits de la personne et protéger les voix des plus vulnérables.  Pays candidat au Conseil des droits de l’homme pour la période 2025-2027, les Îles Marshall écouteront tous les points de vue sur les droits humains, a promis le Chef de l’État. 

Rappelant l’adoption du nouveau traité sur la haute mer, M. Kabua a souhaité que le texte entre en vigueur avant la Conférence des Nations Unies sur les océans de 2025. Aujourd’hui, a-t-il dit, les Îles Marshall sont confrontées aux défis de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion des côtes, aux inondations causées par les marées hautes, au blanchissement des coraux et au réchauffement de l’océan.  Dès lors, il a appelé à créer un mécanisme de financement international pour aider les petits États insulaires en développement qui en ont besoin, afin qu’ils soient protégés contre les chocs énergétiques, les bouleversements de la chaîne d’approvisionnement, l’insécurité alimentaire, les pandémies et l’hyperinflation. 

Il faut déclarer la guerre aux changements climatiques, a exhorté le Président, faisant valoir que l’avenir des Îles Marshall et de tous les États insulaires de basse altitude est en jeu. À cet égard, il a misé sur la COP28, qui devra être le tournant après l’échec de l’Accord de Paris.  Le Président a invité le monde à réagir en élaborant une feuille de route claire pour corriger la trajectoire, avec l’élimination progressive des combustibles fossiles.  M. Kabua a réitéré l’importance d’un financement adéquat, prévisible et accessible pour répondre aux conséquences des changements climatiques pour les pays les plus vulnérables.  Les pays donateurs doivent respecter leurs engagements à faire face à la crise du financement climatique, en se fondant sur la science et les besoins des États vulnérables, a lancé le Président. 

S’agissant des relations bilatérales avec les États-Unis, M. Kabua a accusé ce pays d’avoir manqué à ses obligations envers le peuple des Îles Marshall découlant du programme d’essais nucléaires mené dans le passé.  Toujours est-il que les Îles Marshall souhaitent poursuivre leur libre association avec les États-Unis, a-t-il assuré, tout en soulignant que le peuple marshallais veut voir les questions nucléaires traitées.  En outre, il a fait part de son inquiétude concernant le rejet en mer des eaux de la centrale nucléaire de Fukushima.  Il a demandé, en conclusion, la participation des 23 millions d’habitants de Taiwan aux institutions spécialisées du système des Nations Unies, ainsi qu’aux réunions et aux mécanismes qui contribuent à la réalisation des ODD. 

M. MOKGWEETSI ERIC KEABETSWE MASISI, Président du Botswana, a commencé par exprimer son accord avec l’importance de « reconstruire la confiance et raviver la solidarité mondiale » afin d’accélérer les progrès vers les objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.  Dans une époque marquée par des crises multiples, il a cité les tensions géopolitiques en Ukraine, les défis des changements climatiques et les effets persistants de la pandémie de COVID-19 comme autant de défis mondiaux.  Inquiet face à la stagnation, voire au recul des ODD, M. Masisi a estimé qu’il « était temps » d’avoir une femme au poste de secrétaire général de l’ONU, l’égalité des genres étant l’un des objectifs affichés.  « La gravité des défis auxquels nous sommes confrontés exige que nous transcendions l’approche « business as usual », a-t-il lancé. 

Le Président a ensuite rappelé l’impact dévastateur de la pandémie de Covid-19, dont les conséquences ont été ressenties dans toutes les nations, mais dont l’étendue des dégâts a grandement varié, avant de saluer les discussions en cours sur la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies. Il a fait état des priorités du Botswana pour garantir l’équité pendant une pandémie et s’est félicité que son pays ait été désigné Centre d’excellence de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en matière de diagnostic du VIH/sida.  S’agissant des changements climatiques, M. Masisi s’est alerté des niveaux records d’émissions de gaz à effet de serre rapportés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), et a plaidé pour une coopération internationale renforcée, incluant un financement adéquat pour les pays en développement, à hauteur de 100 milliards de dollars par an.  « Nous réaffirmons notre engagement à atteindre une réduction de 15% des émissions de carbone d’ici à 2030 », a-t-il indiqué. 

En ce qui concerne la paix et la sécurité, le Président a rappelé les conséquences mondiales de la guerre en Ukraine et a appelé à un arrêt immédiat des hostilités, saluant les efforts diplomatiques récents. Il a également exprimé sa préoccupation quant aux conflits persistants et aux « déstabilisations de gouvernements légitimes » en Afrique et a appeléà une collaboration étroite entre l’ONU et l’Union africaine.  M. Masisi a ensuite énuméré les défis posés aux pays en développement sans littoral (PDSL), « qui continuent de souffrir de leur marginalisation dans le commerce mondial en raison des coûts exorbitants du commerce », avant de plaider pour un soutien international accru en vue de la prochaine conférence à Kigali, au Rwanda.  Pour conclure, le Président a martelé que la reconnaissance des problèmes mondiaux ne suffisait pas.  « Nous avons besoin de plus d’actions »! a-t-il clamé, en soulignant l’urgence de revitaliser le système de l’ONU. 

Mme GIORGIA MELONI, Présidente du Conseil des ministres de l’Italie, notant que le monde vit une époque complexe, faite d’urgences et de changements, a préconisé de revenir sur le « sens profond » de la Charte des Nations Unies, qui a été établie pour trouver des solutions communes et garantir la paix et la prospérité.  Pour la Présidente, la guerre d’invasion de l’Ukraine par la Russie est le fait de ceux qui veulent nous ramener dans un monde de domination et de guerres néo-impériales.  L’Italie a choisi la justice en s’opposant à un monde dans lequel l’avantage serait donné à ceux qui bombardent les infrastructures civiles, utilisent l’énergie et la nourriture aux dépens des pays en développement.  L’Italie, a annoncé Mme Meloni, est particulièrement tournée vers l’Afrique où sévissent la sécheresse, les effets des changements climatiques, l’insécurité alimentaire, le terrorisme et le fondamentalisme.  Mais c’est un choix qui est fondé sur la foi dans la dignité et la valeur de la personne humaine.  Le Gouvernement italien entend être en première ligne sur la migration et le développement en suivant deux axes principaux: « vaincre les marchands d’esclaves du troisième millénaire » et, en même temps, s’attaquer aux causes profondes de la migration. 

Selon la Présidente, « l’Afrique n’est pas un continent pauvre ».  Au contraire, elle détient la moitié des minéraux du monde et 60% des terres arables.  L’Italie veut contribuer à la construction d’un modèle de coopération capable de collaborer avec les nations africaines afin qu’elles puissent croître et prospérer grâce aux grandes ressources qu’elles possèdent.  Ce sera une coopération d’égal à égal, car l’Afrique n’a pas besoin de charité, mais d’être mise en condition de rivaliser sur un pied d’égalité, avec des investissements stratégiques sur des projets mutuellement bénéfiques.  De cette façon, a analysé Mme Meloni, l’Italie peut offrir une alternative sérieuse au phénomène de la migration de masse via le travail, la formation, des opportunités pour les nations d’origine et des voies de migration légale.  Elle a évoqué le « Plan Mattei pour l’Afrique », qui est un plan de coopération en matière de développement qui va équilibrer les intérêts nationaux de l’Italie avec le droit des États partenaires. 

Il faut avoir le courage de remettre l’humanité et les droits humains au centre de notre action, a déclaré la Présidente en mettant en garde contre les implications des technologies comme l’intelligence artificielle notamment. Il faut des mécanismes de gouvernance mondiale qui garantissent que ces technologies respectent les limites éthiques, a-t-elle précisé, car l’évolution technologique doit être mise au service de l’humanité et non l’inverse.  Ce sont, a-t-elle promis, quelques-uns des thèmes majeurs que l’Italie prévoit de mettre au centre du G7 en 2024.  Mme Meloni a souligné, en conclusion, la nécessité d’une réforme du Conseil de sécurité qui doit être plus représentatif, plus transparent et plus efficace.

M. PEDRO SÁNCHEZ PÉREZ-CASTEJÓN, Président du Gouvernement de l’Espagne, est revenu sur le triste sort de la jeune humanitaire espagnole qui a perdu la vie dans la région de Bakhmut en Ukraine, lorsque son véhicule a été touché par des tirs d’artillerie.  Il a exigé une réflexion urgente sur la nécessité de prendre position contre l’injustice et de ne pas rester silencieux lorsque les droits humains et les règles les plus fondamentales qui régissent la coexistence pacifique des nations sont violés.  Il a préconisé de s’atteler en premier lieu à l’urgence climatique, notant qu’après l’été le plus chaud jamais mesuré et face à la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes, il ne s’agit plus d’essayer d’empêcher la hausse des températures, mais d’atténuer et, dans la mesure du possible, de s’adapter. 

De même, il a plaidé pour une plus grande solidarité avec les pays les plus vulnérables, en faisant avancer le programme d’adaptation et en mettant en pratique l’accord sur les pertes et dommages conclu lors de la COP27. Lutter contre l’urgence climatique demande du courage et de la détermination, a-t-il concédé.  Il a défendu l’idée d’une révolution technologique et économique, appelant à se départir du déni climatique et à suivre la science à chaque étape du processus.  Il a ensuite fait savoir que l’Espagne compte contribuer à hauteur de 225 millions d’euros au Fonds vert pour le climat, avant d’annoncer qu’il avait signé, aujourd’hui même, au nom de l’Espagne, le traité de la haute mer. 

Le Président s’est ensuite inquiété de la « profonde » crise d’apathie et de méfiance à l’égard des institutions, et de la montée d’une vague d’extrémisme et de pensée réactionnaire partout dans le monde, propulsée par des mouvements qui promettent un retour à un passé mythique qui n’a jamais existé et qui marginalisent et criminalisent les minorités défavorisées.  Il a appelé à la défense du multilatéralisme et d’un ordre international fondé sur des règles, prônant en outre une intensification des efforts de mise en œuvre du Programme 2030. 

Abordant la question de Gibraltar, le Chef du Gouvernement a rappelé la conclusion le 31 décembre 2020, d’un accord entre l’Espagne et le Royaume-Uni dans le contexte de la sortie de ce dernier de l’Union européenne.  « Depuis lors, nous avons travaillé sans relâche pour que cette compréhension constitue la base des futures relations de Gibraltar avec l’Union européenne », a-t-il attesté.  Enfin, alors que son pays assure la présidence du Conseil de l’Union européenne (UE), il a promis que « nous n’allons pas rester les bras croisés et laisser quiconque s’en prendre aux objectifs et aux principes de la Charte des Nations Unies ».

M. PATRICE EMERY TROVOADA, Premier Ministre de Sao Tomé-et-Principe, a déclaré que l’humanité est confrontée à l’inversion des progrès du développement humain et à l’aggravation des inégalités entre les régions du monde et au sein des États.  Il s’est également inquiété de la persistance d’un déficit énorme en termes d’autonomisation et d’égalité des chances, notamment en ce qui concerne la participation des femmes aux organes de décision politique.  Il a fait savoir que son pays, qui est au premier rang des victimes du dérèglement climatique, de la dégradation de l’écosystème et de la dépendanceéconomique, connaît une situation d’urgence économique et financière de court terme, tout en traversant un processus de transition complexe vers « le stade de développement moyen ».  Il a pointé du doigt les responsables en matière de dérèglement climatique au sein du G20 ou des instances de gouvernance économique mondiale qui continuent à ne pas tenir compte des objectifs sociaux et environnementaux de son pays, particulièrement en le privant d’accès aux ressources financières en quantité et conditionnalité raisonnables. 

Poursuivant, M. Trovoada s’est inquiété de la polarisation et de la fragmentation de plus en plus grande du monde et de la gouvernance globale, constatant que même la société technologique digitale devient une nouvelle source d’inégalité, de concentration de la richesse et de domination.  De plus, il a relevé que les conflits armés en violation du droit international reçoivent eux aussi un traitement différencié, regrettant le manque de réaction pour imposer la paix face à la situation de conflit larvé dans la région des Grands Lacs.  Le Premier Ministre a ensuite appelé les dirigeants à faire germer un art capable d’articuler les solutions attendues, et qui puisse « éclairer tant d’humains dont l’expérience n’est rien d’autre qu’un voyage de souffrance et d’incertitude ».  Le vrai leadership c’est de trouver les compromis nécessaires, et avoir la capacité de faire la paix et de promouvoir le progrès, a-t-il souligné. 

M. ALEXANDER DE CROO, Premier Ministre de la Belgique, a tout d’abord partagé ses raisons d’être optimiste, évoquant les progrès en matière d’accès à l’éducation et à une eau salubre et potable bénéficiant à plus de 2 milliards d’individus dans le monde.  Mais le tableau est moins rose si l’on pense aux événements climatiques extrêmes récents, comme les feux de forêt en Grèce, en Espagne, au Canada et à Hawaï, ou les inondations en Libye et à Hong Kong.  La Belgique elle-même a connu de longues périodes de sécheresse et de stress hydrique.  Sur une note positive toutefois, a nuancé le Premier Ministre, le prix de l’énergie renouvelable ne cesse de baisser.  De nombreux spécialistes du climat pensent que les émissions de carbone atteindront leur niveau le plus élevé en 2025 et qu’elles baisseront ensuite si le rythme actuel des investissements dans le secteur des énergies renouvelables est maintenu.  « Il ne faut pas sombrer dans le désespoir », a exhorté le Premier Ministre qui a vanté les mérites de la transition verte.  Il faut mettre en place une nouvelle donne industrielle, et augmenter les capacités d’innovation pour trouver les solutions climatiques de demain. 

Selon M. de Croo, cette nouvelle donne industrielle sera l’une des principales priorités de la présidence belge de l’Union européenne, qui commencera le 1er janvier de l’année prochaine.  Pour en faire un succès, l’Europe a besoin de partenariats avec l’Afrique.  La Belgique dispose de partenariats avec des pays comme la Namibie, le Maroc et l’Égypte pour accélérer la transition verte dans le domaine de l’énergie éolienne et solaire et dans le domaine de l’hydrogène. Les investissements se multiplient, créent des emplois et des connaissances au niveau local et elles permettront bientôt d’exporter des molécules propres des côtes de l’Afrique vers les ports de l’Europe du Nord.  De concert avec l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Danemark, la Norvège, l’Irlande et le Royaume-Uni, a annoncé le Chef du Gouvernement, « nous transformons la mer du Nord en une centrale électrique verte pour l’Europe d’ici à 2030 dont la production d’électricité atteindra 120 gigawatts ».  Dans le domaine du nucléaire, la Belgique va prolonger la durée de vie de ses deux plus grandes centrales, a encore informé M. De Croo. 

S’agissant de la migration irrégulière, le Premier Ministre a indiqué qu’au au cours de sa présidence de l’Union européenne, Bruxelles entend signer un nouveau pacte européen d’immigration qui veillera à ce que chaque pays de l’Union fasse ce qui lui incombe.  Il faut également traiter les principales causes de la migration, à savoir la pauvreté, le manque d’opportunités économiques et les changements climatiques.  La réponse, d’après M. De Croo, ce sont des partenariats entre l’Europe et les pays de transit et d’origine, des partenariats qui permettent de construire des institutions fortes et ouvertes à tous, et pas seulement à une poignée de personnes ou à la classe dirigeante.  Régler le problème de la migration suppose également de créer des moyens légaux de se rendre en Europe via des programmes de recherche de talents et d’éducation pour renforcer les sociétés des pays d’accueil, afin que les jeunes Africains puissent réaliser leurs rêves africains.  S’agissant de la région du Sahel, le Premier Ministre a fait valoir que la seule manière d’avancer est de rétablir l’état de droit.  À cet égard, il a dénoncé la Russie qui « sème la mort et la destruction en Afrique », de même qu’en Ukraine.

M. MOHAMMAD NAJIB AZMI MIKATI, Président du Conseil des ministres du Liban, a indiqué que son pays, qui célèbre cette année le quatre-vingtième anniversaire de son indépendance, fait face aujourd’hui à des crises multiples et complexes exacerbées par un système multilatéral plein de défis et un environnement régional fragile.  Cette situation affecte lourdement le peuple libanais qui souffre quotidiennement de l’absence de biens de subsistance, en plus de la fuite des cerveaux et des jeunes, a-t-il déploré.  Mais le premier des défis réside, selon lui, dans l’incapacité à élire un président, ce qui se reflète sur la stabilité institutionnelle et politique de son pays, contribue à accentuer la crise financière et économique ainsi qu’à freiner le lancement de réformes pour la relève du Liban. 

À cet égard, le Chef du Gouvernement a dit « espérer sincèrement » voir le Parlement libanais exercer son rôle souverain à travers l’élection d’un président qui rassemblera autour de lui le peuple libanais et, partant, retrouvera sa place dans le concert des nations en coopération avec ses « frères arabes » et ses partenaires internationaux.  Le Président du Conseil des ministres a saisi cette occasion pour saluer le rôle du Comité des cinq ainsi que celui de l’initiative française en vue d’aboutir à cet acquis constitutionnel. 

Évoquant la crise des déplacés syriens au Liban, il a alerté sur les vagues successives supportées par son pays, regrettant la frilosité de la communauté internationale face à cette tragédie humanitaire malgré plusieurs appels en ce sens.  Il a prévenu contre les conséquences négatives de ce fardeau qui ne fait qu’accentuer la crise de son pays, pressant pour la mise en œuvre d’une feuille de route avant que la situation « ne devienne incontrôlable ». 

Il s’est, dans le même temps, félicité de l’accord avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) lié à la présence syrienne au Liban, indiquant sa volonté d’approfondir son action avec les organisations internationales et onusiennes dans ce sens. 

Le Président du Conseil des ministres libanais a, par ailleurs, abordé la poursuite de la colonisation israélienne d’une partie de son territoire, dans le sud du pays, en violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont la 1701 (2006).  Il a salué, à cet égard, tous les pays participant à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  Sur un autre registre, il s’est félicité des forages exploratoires menés près des côtes du Liban pour la recherche des hydrocarbures. 

M. Najib Azmi Mikati s’est aussi inquiété de l’absence de stabilité politique et sécuritaire dans certains pays de la région, à l’exception de ceux du Conseil de coopération des États arabes du Golfe, qui jouissent du développement et de la croissance.  Parmi les autres acquis, il a salué le retour de la Syrie dans la famille arabe et l’accord scellé entre l’Arabie saoudite et la République islamique d’Iran. 

Sur un autre volet, le Président du Conseil des ministres libanais s’est inquiété de la situation déplorable dans laquelle vivent les populations palestiniennes sous le joug de la colonisation, réitérant son attachement à une paix juste et globale sur la base de la solution des deux États et des résolutions du Conseil de sécurité.  Il a appelé en outre la communauté internationale à s’acquitter de ses responsabilités en faveur des réfugiés de Palestine, notamment à travers le plein soutien de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Il a conclu son allocution en assurant de son engagement à poursuivre la mise en œuvre des ODD ainsi que de l’Accord de Paris. 

M. FATALLA AF ELZUNI, Ministre de la Jeunesse de la Libye, qui s’exprimait au nom du Président de la Libye retenu dans son pays en raison de la récente catastrophe, a d’abord exprimé ses condoléances au peuple libyen, affecté par de terribles inondations.  Il a également offert ses condoléances au peuple marocain, victime d’un tremblement de terre quelques jours auparavant. 

C’est « le cœur lourd et l’âme emplie de tristesse », que le Ministre a peint un tableau sombre de la situation en Libye, décrivant la tragédie du 10 septembre à Derna, où des torrents ont ravagé un quart de la ville et tué des milliers de personnes.  En dépit des efforts du Gouvernement d’unité nationale de transition, de l’armée libyenne et du pays tout entier pour évacuer les personnes, pour extraire les survivants des décombres et pour contenir la situation sanitaire, « l’ampleur de la catastrophe a dépassé toutes les capacités locales d’intervention », s’est ému le Ministre.  Il a remercié les nations qui ont offert leur assistance et lancé un appel à la communauté internationale pour davantage de soutien, notamment pour éviter une crise sanitaire. 

« Les grandes valeurs naissent d’une grande souffrance », a déclaré le Ministre, soulignant que ce moment difficile avait uni les Libyens, les poussant à « transcender les plaies du passé et à tracer les contours du futur ».  Selon lui, le Libye doit désormais s’écarter des « marchands de guerre » et emprunter le « chemin de la réconciliation » et de la démocratie.  Il a ainsi demandé l’arrêt de l’ingérence étrangère et plaidé pour la tenue d’élections et l’établissement d’une autorité unifiée.  Enfin, il a précisé que son peuple n’avait plus besoin d’armes pour s’entretuer mais d’un appui technique et logistique pour voter, avant d’annoncer « l’aube d’une nouvelle ère » pour son pays. 

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