En cours au Siège de l'ONU

La Sixième Commission se félicite de l’adoption par la CNUDCI de six textes législatifs d’importance pour le commerce international

Soixante-dix-huitième session,
13e & 14e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3693

La Sixième Commission se félicite de l’adoption par la CNUDCI de six textes législatifs d’importance pour le commerce international

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, s’est penchée aujourd’hui sur le rapport annuel de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), présenté par sa Présidente, Mme Kathryn Sabo, l’une des rares femmes à avoir présidé cet organe.  Celui-ci a parachevé en 2023 six textes importants, notamment sur le règlement des différends entre investisseurs et États.

La Sixième Commission a auparavant clos son débat sur la portée et l’application du principe de compétence universelle, entamé vendredi, après que plusieurs intervenants aient constaté et parfois regretté, comme la Sierra Leone ou le Viet Nam, l’absence de consensus et de progrès des discussions sur cette question.  Nombre de délégations ont, à l’instar de l’Algérie, du Burkina Faso, du Mozambique ou encore des Émirats arabes unis, rappelé que ce principe, aussi décisif soit-il pour lutter contre l’impunité des crimes internationaux, ne devait pas être politisé mais s’appliquer dans le respect des prémisses de la Charte des Nations Unies, à savoir l’égalité souveraine des États, la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et l’immunité de leurs représentants.  Comme l’a résumé le représentant du Togo, la compétence universelle incarne « l’opposition potentielle, ou la délicate synergie, entre d’un côté les impératifs de souveraineté nationale et de non-ingérence et, de l’autre, ceux de la prévention et de la répression des plus graves violations des droits humains ».

En introduisant son rapport annuel, la Présidente de la CNUDCI s’est félicitée de l’adoption de pas moins de quatre projets dans le cadre de la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États, unanimement salués lors du débat qui a suivi: les Dispositions types de la CNUDCI sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux; les Lignes directrices de la CNUDCI sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux; le Code de conduite de la CNUDCI destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux; et le Code de conduite de la CNUDCI destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux, texte de « compromis » vu par l’Union européenne, l’Autriche ou encore les États-Unis comme une véritable avancée. 

La Secrétaire de la CNUDCI, Mme Anna Joubin-Bret, a pour sa part évoqué les sujets des prochaines sessions, notamment en matière de résolution des différends dans les domaines du commerce numérique, des nouvelles technologies et des communications électroniques.  Elle a en outre indiqué que la Convention des Nations Unies sur les effets internationaux des ventes judiciaires de navires, adoptée l’année dernière, comptait déjà 15 États signataires dont la Chine. 

Nombre de délégations se sont par ailleurs félicitées des progrès enregistrés au sein des six groupes de travail de la CNUDCI, comme celui sur le commerce électronique et numérique, dont l’Ouganda et le Bélarus, ainsi que plusieurs autres pays en développement, ont souligné l’importance des enjeux pour le développement de leurs économies. 

L’adoption des Recommandations de la CNUDCI sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit a aussi été positivement accueillie par les délégués.  Beaucoup se sont ainsi félicités du cadre juridique offert par ce texte pour les petites entreprises qui cherchent à financer leurs activités.  Le Chili a notamment rappelé que ces entreprises représentaient 90% des entreprises et 50% de l’emploi dans le monde, et étaient une source inestimable de création d’emplois décents.  Mme Sabo a aussi souligné qu’une des recommandations était de permettre aux femmes d’accéder au crédit de manière plus égalitaire, ces dernières se heurtant trop souvent encore à des obstacles liés au genre dans leur recherche de financement. 

La CNUDCI a également finalisé un « texte d’orientation » sur le rejet rapide et la décision préalable, destiné à être inséré dans l’Aide-mémoire de la CNUDCI sur l’organisation des procédures arbitrales. 

En fin d’après-midi, la Sixième Commission a entendu le Pakistan et l’Argentine présenter, respectivement, les candidatures de l’International Parliamentarians’Congress et de l’Organisation des États ibéro-américains pour l’éducation, la science et la culture, au statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale.

La Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 17 octobre, à partir de 10 heures, avec l’examen de la question de l’état de droit aux niveaux national et international.

PORTÉE ET APPLICATION DU PRINCIPE DE COMPÉTENCE UNIVERSELLE - A/78/130

Suite et fin du débat général

M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) a déclaré que la compétence universelle pourrait constituer l’un des mécanismes les plus appropriés de lutte contre l’impunité des crimes internationaux, en ultime recours quand l’État compétent n’agit pas.  À ce titre, il a rappelé que le principe de compétence universelle se justifie par l’obligation des États de faire respecter les droits de la communauté internationale dans son ensemble.  Les juridictions burkinabé peuvent exercer leur compétence à l’égard des crimes internationaux les plus graves quel que soit le lieu du crime ou la nationalité de l’auteur ou de la victime, a-t-il poursuivi.  Toutefois, le représentant a souligné que certaines inquiétudes devaient être prises en considération, notamment le respect de la territorialité et de la nationalité tel que défini par le droit pénal international.  « La compétence universelle doit, dès lors, être appliquée avec prudence et ses limites doivent être formellement définies afin d’éviter les abus. »  Il a exhorté les tribunaux nationaux à respecter la souveraineté des États et l’immunité des représentants officiels.  Réitérant l’ouverture de sa délégation à des débats constructifs, le représentant a estimé que la compétence universelle doit concerner les crimes internationaux les plus graves « qui interpellent la conscience individuelle et collective des États », tels que le terrorisme et son financement, le génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, l’esclavage, la torture et la traite des personnes. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a fait savoir que le code pénal de son pays prévoit la possibilité d’appliquer le droit interne à des crimes commis contre des biens protégés internationalement ou constituant de graves violations des droits de l’homme, quel que soit le lieu où ces crimes ont été commis.  De plus, El Salvador est partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). La déléguée a été d’avis que la portée et l’application du principe de compétence universelle doivent être examinées à la lumière des critères de jurisprudence des tribunaux des États Membres.

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a souligné que la compétence universelle était considérée comme faisant partie du droit philippin, étant à la fois incorporée dans la Constitution et dans les textes législatifs depuis 2009.  Elle a rappelé qu’aux Philippines, en règle générale, la compétence était territoriale et que la compétence universelle était « une exception fondée sur la nécessité impérative de préserver l’ordre international ».  Sa portée et son application doivent donc être clairement définies, a-t-elle souligné, en indiquant notamment que l’immunité des représentants de l’État devait être préservée.  Enfin, la déléguée a noté que les infractions devaient être limitées aux crimes de jus cogens qui ont été jugés « si graves » qu’ils sont considérés comme relevant « de la compétence de tous les États ».

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a indiqué que le principe de compétence universelle s’applique en droit malien pour les crimes internationaux et pour les actes terroristes commis par un Malien où que ce soit dans le monde.  Il s’est félicité du jugement de la Cour pénale internationale (CPI) dans l’affaire Al-Mahdi relative à la destruction de sanctuaires dans la ville de Tombouctou en 2012, en rappelant que c’est le Mali qui avait saisi la Cour « au nom de la compétence universelle. » Le délégué a toutefois demandé que ce principe soit encadré, afin qu’un équilibre soit trouvé entre quête de justice et préservation des droits souverains des États.  L’application de ce principe emporte nécessairement une coopération accrue entre États, a-t-il souligné, appelant à des convergences afin d’en préciser la portée.

Mme KAJAL BHAT (Inde) a expliqué que quand un État invoque la compétence universelle, c’est qu’il a intérêt à exercer sa compétence pour poursuivre les infractions que toutes les nations ont condamnées.  La raison d’être de cette compétence réside donc dans la nature même de certaines infractions, qui affectent les intérêts de tous les États, même si elles ne sont pas liées à l’État qui assume cette compétence, a-t-elle analysé.  La déléguée a toutefois souligné que plusieurs questions restaient sans réponse, notamment celles relatives à l’application élargie de ce principe, à sa relation avec les lois relatives à l’immunité, à la grâce et à l’amnistie, ainsi qu’à l’harmonisation avec les lois nationales.  À ce titre, elle a précisé que la piraterie en haute mer était le seul crime pour lequel la revendication de la compétence universelle était incontestée en vertu du droit international, car codifié dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982.  S’agissant des autres crimes tels que le génocide, les crimes de guerre ou les crimes contre l’humanité, la déléguée a indiqué que c’étaient les traités internationaux, notamment les quatre conventions de Genève, plutôt que le droit coutumier, qui fournissaient « la base de la compétence universelle ».  Selon son pays, la nationalité est la justification première pour un État de protéger et de poursuivre des individus.  Elle s’est cependant dite ouverte à une discussion approfondie sur un concept « opérationnel » de compétence universelle.

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a regretté que les discussions sur la compétence universelle n’aient pas progressé au sein de la Sixième Commission, malgré le rapport du Secrétaire général qui en confirme une pratique accrue. Selon lui, il est important d’identifier des points de convergence sur la portée et l’application de ce principe. Son pays, a-t-il expliqué, l’applique de manière limitée, en majorité pour des crimes graves commis par ses ressortissants ou commis sur son territoire.  « Il s’agit d’éviter tout abus de ce principe. »  Jugeant nécessaire de séparer les questions juridiques des questions politiques, le délégué a demandé que ce point soit retiré de l’ordre du jour de la Commission.  Selon lui, la CDI peut s’occuper des questions juridiques en toute indépendance, alors que la Sixième Commission risque d’aborder des questions politiques. En effet, sa délégation estime que les États Membres peuvent entraver des travaux préparatoires sur la codification de la compétence universelle en matière de crimes sexuels et sexistes, a-t-il expliqué.  Estimant qu’il est nécessaire de garantir l’accès à la justice et à des mesures de réparation pour les rescapés de violence sexuelles et sexistes, le délégué a invité la CDI à élaborer des propositions sur la compétence universelle concernant les violences sexuelles.

M. TCHAKPIDE OURO-BODI (Togo) a déclaré que la compétence universelle incarne « l’opposition potentielle, ou la délicate synergie, qui peut s’opérer entre, d’un côté, les impératifs de souveraineté nationale et de non-ingérence et, de l’autre, ceux de la prévention et de la répression des plus graves violations des droits humains et du droit international humanitaire ».  De ce fait, a-t-il dit, sa portée doit être limitée; elle doit être complémentaire et ne saurait contredire la compétence des juridictions nationales.  La responsabilité pénale incombe au premier chef à l’État dans lequel les crimes les plus graves ont été commis, a ajouté le représentant.  Il a estimé que la nature politique et l’abus du principe de compétence universelle par certains États restent une violation claire de la souveraineté et de l’intégrité territoriale d’autres États.  La « politisation » de plus en plus observée sur le plan international de ce principe et surtout son application à géométrie variable ne rendent pas service aux intérêts de la justice et de la paix internationale, a-t-il conclu.

Mme BETELIHEM TAYE (Éthiopie) a indiqué que le droit pénal éthiopien avait depuis longtemps adopté le principe de la compétence universelle pour les crimes internationaux tels que le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre ou le terrorisme, mais aussi pour d’autres crimes comme le trafic de drogues, la traite des êtres humains ou la production d’images et publications indécentes.  Elle a cependant déclaré que pour son pays, la compétence universelle ne devrait être utilisée « qu’en dernier recours » et dans la mesure où le rôle principal des pays avec un lien direct avec l’incident était préservé.  Ce principe ne doit pas non plus être confondu avec la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) et autres mécanismes similaires, a expliqué la représentante, en rappelant que l’Éthiopie n’était pas partie au Statut de Rome et ne soutenait « aucun rapprochement » entre la compétence de la CPI et la compétence universelle.  Elle a enfin rappelé que l’application « arbitraire et politiquement motivée » de cette notion ne devrait jamais saper le principe de souveraineté des États et appelé à un examen minutieux de la portée et de l’application de ce principe pour « garantir sa crédibilité et sa légitimité ». 

Mme ENIOLA OLAITAN AJAYI (Nigéria) a appelé la communauté internationale à adopter des mesures définissant la portée et l’application du principe de compétence universelle pour mettre fin aux abus et à la politisation.  Ma délégation estime qu’il s’agit d’un principe central du droit international pour promouvoir l’état de droit et les libertés fondamentales, ainsi que pour lutter contre l’impunité et rendre justice aux victimes, a-t-elle développé.  D’après les dernières tendances, certains responsables échappent à la justice, a regretté la déléguée, appelant les États à se doter de législations permettant de les poursuivre conformément au principe de compétence universelle.  Réitérant l’engagement de son pays dans la lutte contre l’impunité, elle a exposé les différentes initiatives législatives adoptées au Nigéria pour contrer, notamment, le terrorisme international.  Néanmoins, elle a rappelé que la compétence universelle ne doit être utilisée qu’en dernier recours et qu’il faut empêcher les États qui n’ont pas la responsabilité première d’effectuer les poursuites d’agir de manière « prématurée », notamment en ce qui concerne l’extradition.  « La compétence universelle ne doit pas servir d’excuse pour certains États afin d’imposer leur autorité sur d’autres États », a-t-elle précisé, appelant la communauté internationale à œuvrer à la sensibilisation sur ce principe afin de renforcer la confiance et la coopération entre les États et d’éviter toute mesure politisée. 

M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a souligné le fort intérêt de cette question, avant d’appeler à lutter contre l’impunité.  Il a rappelé que la compétence universelle doit respecter les principes fondamentaux du droit international, tels que la souveraineté des États et l’immunité de ses hauts représentants.  Enfin, le délégué a souhaité une application du principe de compétence universelle qui soit conforme à la Charte des Nations Unies et au droit international afin de parvenir à l’objectif commun: la lutte contre l’impunité.

M. HUSSEIN ATHMAN KATTANGA (République-Unie de Tanzanie) a fait part de l’attachement de son pays à la recherche du consensus sur le principe de compétence universelle, tout en rappelant qu’il fallait éviter toute politisation de ce principe, aux dépens de la souveraineté des États.  À ce titre, il a souligné que son pays soutenait la décision de l’Assemblée générale d’établir à sa prochaine session un groupe de travail de la Sixième Commission chargé de mener des discussions approfondies sur ce sujet et indiqué que la Tanzanie était, comme bien d’autres États, préoccupée par l’application « arbitraire » de ce principe, qui doit être conforme au droit international.  Le délégué a conclu son intervention en soulignant que la définition, la portée et les règles d’application de ce principe devaient être établies « de façon claire » afin d’éviter tout abus.

Mme Pham NHA (Viet Nam) a noté les divergences entre États autour du principe de compétence universelle.  Le manque de consensus est de nature à conduire à une application « sélective » de ce principe, sapant le droit international, a estimé la déléguée.  Elle a rappelé que l’application du principe de compétence universelle doit respecter les principes fondamentaux du droit international, tels que la souveraineté des États et l’immunité de ses hauts représentants.  Ce principe ne doit s’appliquer que pour les crimes les plus graves, a-t-elle averti, en ajoutant que son extension à des crimes d’une moindre gravité risque de remettre en cause sa légitimité même.  Enfin, la déléguée a souhaité l’élaboration de lignes directives sur la portée de ce principe afin d’en garantir une application impartiale.

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a rappelé que l’Afrique est favorable à la portée du principe de compétence universelle, mais qu’elle continue de solliciter son application dans le respect du droit international.  « Cela sous-entend pour nous, que ce principe s’applique dans le respect des normes consacrées par la Charte des Nations Unies, telles que l’égalité souveraine des États, la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, le droit à l’autodétermination, la liberté de nouer des relations internationales pacifiques. »  Dans l’application de la compétence universelle, la priorité doit être accordée aux juridictions de l’État sur le territoire duquel le crime est présumé avoir été commis, a conclu le délégué, en rappelant que la compétence universelle est un « mécanisme par défaut ».

M. GERALDO SARANGA (Mozambique) a constaté que les opinions des États Membres restaient « divergentes » et que depuis 15 ans, aucun progrès n’avait été enregistré sur la question à l’étude.  Il s’est dit convaincu que le consensus et la collaboration étaient nécessaires pour éviter les recours abusifs et impropres au principe de compétence universelle, qui doit venir « compléter » les juridictions nationales exercées de bonne foi.  Le délégué a expliqué que les juridictions pénales de son pays punissaient déjà les crimes visés par la compétence universelle et que le cadre légal en matière de coopération juridique avec d’autres États et organisations internationales ne permettait pas l’impunité pour de tels crimes. Après avoir dénoncé « l’utilisation sélective » et la « manipulation » du principe, qu’il a jugées « inacceptables », il a appelé au dialogue au sein de la Sixième Commission dans la recherche d’un consensus et d’une position commune. 

M. SCOTT TAN (Singapour) a souligné l’importance du principe de compétence universelle qui contribue à la « lutte mondiale contre l’impunité ».  Il a toutefois expliqué que la compétence universelle n’était pas et ne devrait pas être la base principale de la compétence pénale des États.  Elle ne devrait être invoquée qu’en « dernier recours », car la responsabilité principale de l’exercice de cette compétence incombe à l’État sur le territoire où le crime a été commis ou à l’État de nationalité de l’auteur présumé.  Le délégué a, en outre, indiqué que ce principe ne devrait être appliqué qu’à l’égard de crimes particulièrement graves, qui intéressent ou affectent la communauté internationale dans son ensemble. D’après lui, il existe une distinction entre la compétence universelle, qui est un principe de droit international coutumier, et la compétence en vertu d’une obligation conventionnelle, comme l’extradition.  La compétence universelle ne peut être appliquée isolément ou à l’exclusion d’autres principes du droit international, comme l’immunité des représentants de l’État ou l’intégrité territoriale des États, a conclu le délégué.

M. KHALID LAHSAINI (Maroc) a estimé qu’afin de « parer à toute instrumentalisation du principe de compétence universelle », il convient de mettre en avant l’importance primordiale de respecter la souveraineté des États, notamment en matière judiciaire.  Il a rappelé que le système judiciaire de son pays considère que toute personne, quelle que soit sa nationalité, ayant commis un crime sur le territoire marocain, est passible de jugement par les tribunaux marocains.  Le Maroc a adopté le principe de compétence universelle en matière de terrorisme, permettant à ses tribunaux de juger tout individu, qu’il soit marocain ou étranger, qui commet un acte terroriste en dehors de son territoire et qui participe à de telles activités, a informé le délégué.

Mme CATHERINE NYABOKE NYAKOE (Kenya) a rappelé que pour son pays, la compétence pour les crimes internationaux graves ne s’arrêtait pas au niveau national mais s’étendait « par nécessité » au niveau international.  Elle a toutefois rappelé qu’il fallait, dans le même temps, veiller à ne pas invoquer cette compétence d’une manière « arbitraire » qui ouvrirait la voie à des abus des procédures judiciaires, « dans la poursuite d’intérêts politiques étroits ».  La représentante a donc appelé au respect du principe de complémentarité dans la recherche de la responsabilité pour les crimes les plus graves au regard du droit international.  Elle a par ailleurs indiqué que le recours à ce principe devait s’inscrire dans un « cadre clair » qui en précise la portée et les limites et tienne compte des réalités des démocraties mondiales.  Cela signifie entre autres que les chefs d’État et les représentants des gouvernements bénéficient des immunités requises par le droit international.

Mme EDA GÜÇ (Türkiye) a déclaré que la compétence universelle est une procédure exceptionnelle pour éviter l’impunité.  Elle a toutefois partagé les préoccupations d’autres délégations concernant le respect des principes d’égalité souveraine et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États, lorsque le concept est invoqué de manière abusive et à des fins politiques.  De tels comportements risquent de nuire à ces principes et aux relations entre les États, a-t-elle mis en garde, même si les États visent à protéger des valeurs communes.  Réitérant le soutien de sa délégation à un examen détaillé de la portée et de l’application de la compétence universelle en pleine conformité avec la Charte des Nations Unies, la déléguée a rappelé que la Türkiye a transposé ce principe dans sa législation nationale selon des critères très stricts et limités aux crimes graves, en sus de traités bilatéraux, notamment en matière d’extradition. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a rappelé que les États ont la responsabilité première de prévenir et de punir les crimes internationaux graves, tels que le génocide, le nettoyage ethnique, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Néanmoins, la communauté internationale devrait promouvoir activement l’état de droit et le renforcement des systèmes de justice nationaux, en particulier pendant les conflits, a-t-il poursuivi.  À ce titre, le délégué a vu la compétence universelle comme un mécanisme complémentaire de lutte contre l’impunité lorsque l’État qui a la compétence ne peut ou ne veut pas poursuivre les crimes graves.  Il a partagé ses inquiétudes concernant les abus de ce principe et ses implications politiques et juridiques, exhortant la communauté internationale à continuer les débats au sein de la Sixième Commission sur ce point et demandant à la CDI de l’inscrire à son ordre du jour actuel.  Depuis le coup d’État en 2021, a poursuivi le délégué, la junte militaire massacre des civils, brûle leurs maisons et leurs terres et lance des frappes aériennes à travers le pays, entraînant le meurtre et le déplacement de millions d’habitants, a-t-il déploré.  Estimant que le régime politique actuel du Myanmar favorise l’impunité et ne constitue pas un environnement adéquat pour mener des poursuites crédibles, il a espéré que les preuves collectées par le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar seront aussi mises à disposition de tout effort national ou international visant à tenir les auteurs pour responsables de leurs crimes, y compris via la compétence universelle.  Regrettant que le Conseil de sécurité n’ait pas pris les mesures adéquates pour rétablir la démocratie dans son pays, il a soutenu l’application de bonne foi de la compétence universelle pour rendre justice aux victimes. 

M. ALBLOOSHI (Émirats arabes unis) s’est dit attaché à l’idée que la compétence universelle soit utilisée pour des crimes spécifiques qui se situent en dehors du champ habituel des lois nationales » et souligné qu’elle restait un principe complémentaire par rapport à la compétence nationale de l’État où le crime a été commis.  Il a appelé en particulier à ne pas donner un « caractère politique » au recours à la compétence universelle contre les chefs d’État et de gouvernement ou leurs hauts fonctionnaires qui jouissent de l’immunité, et ce conformément au principe de l’égalité souveraine entre les pays.  À ce titre, le délégué a souligné que l’article 7 du projet de la CDI sur les crimes contre l’humanité (Établissement de la compétence nationale) ne reflétait ni les dispositions du droit international, ni les pratiques des États ou la jurisprudence internationale. Il a appelé les pays à renforcer, notamment par des accords, leur coopération judiciaire en matière pénale pour lutter contre l’impunité des auteurs de crimes.  Le délégué a indiqué que son pays avait ainsi promulgué en 2006 une loi fédérale sur la coopération judiciaire internationale sur le plan pénal et conclu divers accords judiciaires avec plusieurs pays, notamment en matière d’assistance judiciaire ou d’extradition. 

M. MHD. RIYAD KHADDOUR (République arabe syrienne), citant les raisons politiques, les intérêts et les pratiques différenciées qui sous-tendent l’exercice de la compétence universelle, a demandé une « analyse objective » du principe.  Alors que des États font la promotion de leur législation pour la protection des droits humains, ils font un choix pragmatique, régi par « des calculs politiques et des questions d’intérêt » lorsqu’il s’agit d’appliquer ce principe, a estimé le délégué.  Selon lui, la compétence universelle doit être envisagée en dernier recours et ne peut se substituer à la compétence nationale, et les États doivent s’assurer qu’aucune poursuite n’est entreprise par un autre État avant qu’ils n’aient pu eux-mêmes s’en charger.  Le délégué a néanmoins reconnu que certains États ne peuvent ou ne veulent pas mener de poursuites, ce qui ne doit pas pour autant amener à penser que d’autres États peuvent appliquer leur compétence librement.  « Nous ne pouvons jamais utiliser l’absence de volonté pour justifier le recours à la compétence universelle. »  Étant donné que le principe ne répond pas aux normes minimales du droit international en raison de sa haute politisation, il a conclu que la compétence universelle n’est pas un outil efficace pour lutter contre l’impunité. Le recours à ce principe ne fait qu’attiser les tensions et suscite l’incertitude, a-t-il tranché.  Sa délégation estime qu’en l’absence d’un consensus, il faut éviter les applications arbitraires et limiter le principe aux matières consensuelles, tels que la piraterie, le génocide, la traite de personnes et l’esclavage, jugeant prématuré de demander à la CDI de s’exprimer sur le sujet. 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a déclaré que le principe de compétence universelle ne doit pas s’appliquer à tous les crimes internationaux, mais seulement aux crimes les plus graves, qui choquent la conscience internationale, tels que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.  Ce principe doit en outre respecter les principes de nationalité et de territorialité, a-t-il dit, en soulignant sa nature complémentaire par rapport à la compétence nationale.  Le délégué a aussi demandé que le principe de compétence universelle s’applique dans le respect des normes consacrées par la Charte telles que l’égalité souveraine des États et la non-ingérence dans leurs affaires intérieures. Soulignant les divergences des États sur ce principe, il a mis en garde contre tout abus et sélectivité dans son application.

Mme MERON HABTE ESSAIAS (Érythrée) a rappelé la responsabilité première des États du territoire où le crime est commis de tenir ses auteurs pour responsables, ainsi que la complémentarité du principe de compétence universelle dans la lutte contre l’impunité.  Selon elle, la compétence universelle doit être conforme aux principes d’immunité, d’intégrité territoriale et de non- ingérence dans les affaires intérieures des États.  La déléguée a partagé les inquiétudes concernant les abus et l’utilisation du mécanisme à des fins politiques.  Dénonçant le « deux poids, deux mesures » dans l’application de la justice internationale, elle a appelé à corriger la portée et l’application de la compétence universelle à la lumière du principe de souveraineté des États. En conclusion, elle a réitéré l’engagement de sa délégation pour des discussions « prudentes mais constructives sur ce principe ». 

Mme LOUREEN O. A. SAYEJ (État de Palestine) a fait état de la situation humanitaire catastrophique, des bombardements incessants, de l’état de siège dans la bande de Gaza et des assassinats de masse à laquelle la population palestinienne est soumise actuellement.  Son pays a-t-elle témoigné, « a perdu foi en l’humanité ».  Des familles entières ont été annihilées et des infrastructures civiles ont été bombardées. Alors que les hôpitaux sont menacés par des frappes, les organisations humanitaires ont établi que des évacuations reviendraient à signer « l’arrêt de mort des patients », a-t-elle rapporté.  Déplorant « des années d’épuration ethnique de masse effectuée par Israël, sous prétexte de la guerre », la représentante a critiqué l’inaction de la communauté internationale pour ce qui est de faire appliquer le droit international par un pays qui a clairement reconnu « vouloir éliminer les Palestiniens ».  Elle a également déploré que la politique publique de « punition collective » soit justifiée, et même « applaudie », par le monde, dénonçant l’incapacité collective à exiger qu’Israël rende des comptes. Pourquoi la communauté internationale s’évertue- t-elle à défendre des règles qui dépendent en fait de l’identité des auteurs et des victimes?  D’après elle, « seul un tel racisme permet d’envisager que la vie d’un enfant palestinien vaille moins que celle d’un autre enfant ».  En conclusion, la représentante a fait remarquer qu’à l’heure où la Sixième Commission débat de l’impunité et des crimes graves, Israël continue de bombarder et d’assiéger l’État de Palestine en toute impunité. 

M. PIERRE APRAXINE (Comité international de la Croix-Rouge) a rappelé que le principe de compétence universelle était l’un des principaux outils qui permettent de dissuader les violations graves du droit international humanitaire et que les conventions de Genève exigeaient des États parties qu’ils établissent dans leur législation nationale une compétence universelle « suffisante » pour poursuivre ou extrader les auteurs de telles violations. Notant que l’exercice de la compétence universelle sur les crimes de guerre pouvait constituer un mécanisme efficace pour garantir la responsabilité et limiter l’impunité, le délégué a expliqué comment les États l’utilisaient pour combler efficacement les lacunes en matière d’impunité et faire en sorte que les auteurs de violations graves soient tenus de rendre compte de leurs actes.  À ce titre, il s’est félicité de l’adoption de la Convention de Ljubljana-La Haye qui constitue selon lui l’exemple le plus récent de la reconnaissance de l’importance du principe de compétence universelle dans un traité multilatéral.  Le CICR soutient les États dans leurs efforts visant à renforcer leur législation pénale nationale sur cette question, a ajouté le délégué.  Au cas où les États fixeraient des conditions d’application, celles-ci devraient viser à « accroître l’efficacité et la prévisibilité de la compétence universelle » et non à restreindre les perspectives de justice internationale, a- t-il insisté. 

Droits de réponse 

La déléguée d’Israël a déclaré ne pas en vouloir à la déléguée palestinienne, « même si son discours est sans nuances ».  Elle a rappelé que la population de Gaza vit sous le règne de terreur du Hamas.  Ce dernier a ordonné à la population de Gaza de ne pas se déplacer vers le Sud comme le demande Israël, qui cherche à préserver les civils, conformément au droit international.  Elle a accusé le Hamas d’utiliser la population palestinienne à des fins odieuses, en se dissimulant derrière celle-ci.  « Nous mettrons un terme au règne du Hamas », a assuré la déléguée, en rappelant les atrocités commises par ce dernier, de « la cruauté pure et simple. »  Elle a déploré toute perte dans la région mais a regretté que la déléguée palestinienne n’ait pas condamné le Hamas.

La déléguée de l’État de Palestine a souligné qu’Israël contournait ses responsabilités en tant que Puissance occupante et que ce pays avait mis en place une « oppression » et un système « d’apartheid » auquel il convenait de mettre un terme. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DES NATIONS UNIES POUR LE DROIT COMMERCIAL INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-SIXIÈME SESSION A/78/17

Mme KATHRYN SABO, Présidente de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) a présenté le rapport annuel de la Commission et les six textes législatifs entérinés par la CNUDCI. 

S’agissant de la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États, la Commission a finalisé et adopté: les Dispositions types de la CNUDCI sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux; les Lignes directrices de la CNUDCI sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux; le Code de conduite de la CNUDCI destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux; et le Code de conduite de la CNUDCI destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux. 

Dans le cadre de son examen d’un projet de guide sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, la Commission a finalisé et adopté les Recommandations sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, qui traitent du cadre juridique dans lequel les entreprises peuvent obtenir un financement pour leurs activités, a précisé Mme Sabo.  Elle a souligné notamment que les micro- et petites entreprises détenues par des femmes se heurtaient souvent à davantage d’obstacles que celles détenues par des hommes et que le guide recommandait donc que les exigences relatives à l’accès au crédit n’entraînent pas de discrimination fondée sur le genre. 

Enfin, la Présidente a noté que la Commission avait finalisé et adopté le texte d’orientation sur le rejet rapide et la décision préalable, destiné à être inséré dans l’Aide-mémoire de la CNUDCI sur l’organisation des procédures arbitrales.  Ledit texte vise à aider les praticiens et les utilisateurs de l’arbitrage à comprendre le pouvoir discrétionnaire conféré au tribunal arbitral par le Règlement d’arbitrage de la CNUDCI et d’autres règlements d’arbitrage. 

Les textes susmentionnés sont reproduits en annexe dans le rapport de la CNUDCI. 

En plus d’achever ces textes, la Commission a pris note des progrès réalisés par ses groupes de travail au cours du dernier cycle.  Elle a confirmé le programme de travail de ces six groupes: le Groupe de travail I entamera les travaux visant à élaborer un projet de loi type sur les récépissés d’entrepôt; le Groupe de travail II poursuivra ses travaux sur le règlement des différends liés aux technologies, et sur la décision d’urgence rendue par un tiers; le Groupe de travail III continuera de s’occuper de la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États et se chargera notamment de l’établissement d’un centre consultatif sur le droit international des investissements et de l’élaboration d’un guide sur la prévention et l’atténuation des différends; le Groupe de travail IV avancera en parallèle la formulation des règles supplétives concernant les contrats de fourniture de données, et des principes relatifs aux contrats automatisés; le Groupe de travail V poursuivra ses travaux sur la localisation et le recouvrement civils d’actifs, et sur la loi applicable dans les procédures d’insolvabilité; enfin, le Groupe de travail VI continuera de s’intéresser à l’élaboration d’un nouvel instrument international sur les documents de transport multimodal négociables. 

Mme Sabo en enfin indiqué que la Commission avait appelé son secrétariat à publier le document « COVID-19 et instruments de droit commercial international: boîte à outils juridiques » et élaborer une étude détaillée sur les aspects du droit commercial international liés aux crédits d’émission de carbone volontaires.  Elle l’a également prié de finaliser ses travaux sur l’élaboration d’un document d’orientation sur les questions juridiques liées à l’utilisation des systèmes d’enregistrement distribués dans le commerce en vue de fournir des explications utiles aux opérateurs commerciaux, en particulier dans les pays en développement. 

Mme ANNA JOUBIN-BRET, Secrétaire de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), a souhaité fournir un aperçu des sujets qui seront abordés durant les prochaines sessions, à New York, par le groupe de travail pour une convention multilatérale en matière de règlement des différends entre investisseurs et États.  Elle a attiré l’attention sur l’établissement d’un centre consultatif sur le droit international des investissements pour les pays en développement et de l’élaboration d’un guide de la prévention.  Elle a ensuite fait état des textes à venir en matière de résolution des différends dans les domaines du commerce numérique, des nouvelles technologies et des communications électroniques dans la résolution des différends en lien avec l’arbitrage commercial. 

Par ailleurs, la Secrétaire a souligné que la Convention des Nations Unies sur les effets internationaux des ventes judiciaires de navires, également appelée « Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires », adoptée en 2022, compte à ce jour 15 États signataires.  D’autres évènements phares de la CNUDCI sont importants pour la coopération en Asie et en Afrique, a-t-elle ajouté, citant la Semaine des congrès de Singapour et la Journée mondiale de l’Afrique.  Elle a également remercié l’Union européenne pour son appui au Secrétariat de la CNUDCI sur le Registre de la transparence. 

S’agissant des méthodes de travail de la CNUDCI, Mme Joubin-Bret a mentionné l’accès en ligne aux débats, qui permet la participation à distance de nombreux pays, ainsi qu’un système de réunions officieuses, qui donne un aperçu des projets élaborés pour les pays en développement.  Elle a salué la participation accrue de pays francophones. Enfin, elle a précisé que la résolution omnibus consacrée aux travaux de la Commission n’est, en aucun cas, une tentative des membres de la CNUDCI de s’ingérer dans les débats de la Sixième Commission, mais plutôt une offre de coopération afin de présenter ses travaux plus clairement. 

Débat général

M. THOMAS RAMOPOULOS, de l’Union européenne, a salué les progrès enregistrés au sein de tous les groupes de travail de la CNUDCI, en particulier le Groupe de travail V sur le droit de l’insolvabilité.  Il a salué la finalisation et l’adoption du Code de conduite de la CNUDCI destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux et l’adoption de principe du Code de conduite de la CNUDCI destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux. Il a souhaité davantage de progrès en ce qui concerne d’autres éléments de réforme, notamment la création d’un centre consultatif sur le droit international de l’investissement et un mécanisme d’appel.  Enfin, il a rappelé les contributions de la France et de l’Allemagne pour prendre en charge les frais de voyage du Groupe de travail III Réforme du règlement des différends entre investisseurs et États) et invité les autres pays à en faire de même.

M. JÖRUNDUR VALTÝSSON (Islande), au nom des pays nordiques, s’est félicité de l’adoption des textes relatifs au règlement des différends entre investisseurs et États et des recommandations sur l’accès au crédit pour les micro-, petites et moyennes entreprises, ainsi que des travaux menés par le groupe de travail I sur les récépissés d’entrepôt.  Il a salué l’objectif de développer un « régime juridique moderne et prévisible », notamment compte tenu de l’importance de ces récépissés pour l’agriculture et la sécurité alimentaire. Le groupe de travail II a été chargé d’examiner les questions de règlement et d’arbitrage des différends liés à la technologie et de s’appuyer sur le Règlement d’arbitrage accéléré, a-t-il noté.  Concernant le groupe de travail III sur le règlement des différends entre investisseurs et États, le représentant s’est félicité des progrès des travaux et s’est dit pleinement engagé à poursuivre la réforme du système de règlement des différends entre investisseurs et États.  Concernant le groupe de travail IV sur l’économie numérique, il a dit espérer des négociations constructives dans ce domaine très important et actuel de la pratique et du droit.  S’agissant de l’insolvabilité traitée par le groupe de travail V, le représentant a pleinement soutenu l’approche consistant à discuter des deux sujets « simultanément » et s’est félicité des progrès réalisés dans le domaine de la loi applicable.  Enfin, s’agissant du groupe de travail VI, il s’est félicité de voir la réintroduction du droit des transports à l’ordre du jour de la Commission, en notant qu’il est essentiel que le cadre juridique du transport international permette la circulation des documents de transport électroniques « dans un contexte multimodal » et d’examiner minutieusement les risques éventuels encourus. 

Mme ELIZABETH MARYANNE GROSSO (États-Unis) a estimé que l’adoption du Code de conduite de la CNUDCI destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux est une « grande avancée. »  Ce texte est le fruit d’un compromis délicat entre les délégations qui avaient des avis divergents, a-t-elle dit.  Elle a ajouté que, selon le Code, il est désormais attendu que les arbitres internationaux agiront de manière impartiale et indépendante et qu’ils décideront efficacement.  La déléguée s’est aussi demandé dans quelle mesure le Code aura une incidence sur la diversité des arbitres, en termes de genre et d’origine géographique notamment. Elle a enfin salué l’adoption du Guide de la CNUDCI sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, avant de se féliciter de la tenue d’un colloque sur le droit commercial international et les changements climatiques pendant la session de la CNUDCI en juillet. 

M. MAXIMILIAN GORKE (Autriche) a expliqué que la modernisation et l’harmonisation des règles du commerce international revêtait une grande importance pour le secteur privé et que les États eux-mêmes avaient intérêt à améliorer la sécurité juridique dans ce domaine pour favoriser le commerce et l’investissement.  Il a insisté sur l’importance pour les membres de la Commission de participer à ses délibérations, et que c’était la raison pour laquelle l’Autriche avait versé une nouvelle contribution au fonds d’affectation spéciale pour fournir une aide au voyage aux pays en développement membres de la CNUDCI.  Le représentant s’est félicité plus particulièrement des progrès réalisés dans le cadre du Groupe de travail III s’agissant de l’adoption d’un Code de conduite pour les arbitres et d’un Code de conduite pour les juges dans le cadre du règlement des différends relatifs aux investissements internationaux, ainsi que des Dispositions types sur la médiation et Lignes directrices sur la médiation pour les différends relatifs aux investissements internationaux.  Soulignant que les petites et moyennes entreprises étaient « l’épine dorsale de l’économie autrichienne », il s’est félicité de l’adoption de recommandations sur l’accès au crédit pour les micro-, petites et moyennes entreprises. 

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a félicité la CNUDCI pour ses travaux qui contribuent à renforcer le cadre juridique du commerce international, saluant les dispositions- types proposées, les principes directeurs et les orientations pratiques.  Les codes de conduite dédiés aux arbitres et aux juges apportent une contribution déontologique importante, a-t-il précisé.  Il a espéré que le Groupe de Travail III sur la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États continuera à coopérer avec les gouvernements en œuvrant pour le consensus et la transparence, avant de saluer les propositions concrètes applicables par les organes normatifs dans le rapport sur les petites et moyennes entreprises du Groupe de travail I.  Le Bélarus est tout particulièrement intéressé par le commerce électronique et numérique et par les relations entre les entreprises, a poursuivi le délégué.  Selon lui, la CNUDCI a pris en compte les pratiques et les traditions lors des négociations, ce qui a permis de maintenir une approche équilibrée et de trouver des solutions.  En conclusion, il a espéré d’autres évènements de la CNUDCI puisque ceux-ci contribuent à l’harmonisation de la législation dans le domaine du commerce international. 

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili) a souligné l’importance de l’adoption des recommandations sur l’accès au crédit pour les micro-, petites et moyennes entreprises, rappelant que celles-ci représentaient 90% des entreprises et 50% de l’emploi dans le monde, et étaient la principale source de création d’emplois décents dans leurs pays respectifs.  En ce qui concerne le groupe de travail II sur le règlement des différends, il a appuyé le rejet anticipé et la détermination préliminaire en tant que pouvoirs inhérents d’un tribunal arbitral.  Le représentant a salué le travail réalisé sur la médiation des différends internationaux en matière d’investissements et sur le Code de conduite des arbitres dans le règlement des différends relatifs aux investissements internationaux, dont il a noté qu’il renforçait l’indépendance et l’impartialité des arbitres, élargissait les exigences en matière de divulgation et réglementaient le dédoublement des fonctions des arbitres.  Il a aussi souligné l’important travail conjoint de la CNUDCI et du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) dans la négociation et la préparation du code de conduite des arbitres.  Il a enfin souligné l’importance des cours en ligne gratuits que la CNUDCI propose sur son site web pour la formation des professionnels des secteurs public et privé.

M. BAHRAM HEIDARI (République islamique d’Iran) a salué l’utilité des différents outils présentés par la CNUDCI, même si le Code de conduite destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux est, à ce stade, trop « prématuré » pour avoir un mécanisme indépendant.  Il a également applaudi l’élaboration d’un guide pour les crédits aux micro-, petites et moyennes entreprises, notant tout de même un empiètement sur certaines recommandations.  Selon le délégué, la CNUDCI devrait adopter une approche prudente prenant en compte le principe de responsabilité commune mais différenciée, ainsi que les besoins spécifiques des États.  De même, il a demandé que les sanctions unilatérales et les changements climatiques fassent l’objet d’un traitement particulier car ils entraînent des situations inégalitaires.  Le délégué a également invité à se pencher sur des mesures concrètes pour l’économie numérique.  Saluant les efforts considérables de la Commission pour raviver les six groupes de travail, il a loué les méthodes de travail améliorées, soulignant que sa délégation continuera à utiliser les textes de la CNUDCI pour améliorer le cadre juridique du pays sur ce sujet. 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a indiqué que son pays était particulièrement satisfait de la tenue cette année du colloque de la CNUDCI sur le changement climatique et le droit commercial international, qui a examiné les domaines dans lesquels le droit commercial international pouvait soutenir efficacement la réalisation des objectifs d’action climatique fixés par la communauté internationale.  Elle a aussi encouragé la poursuite de l’engagement avec les partenaires universitaires, ciblé sur les jeunes chercheurs et praticiens du droit commercial international, notamment par le biais des Journées Asie-Pacifique de la CNUDCI.  La déléguée s’est félicitée du rôle du Centre régional de la CNUDCI pour l’Asie et le Pacifique qui a « contribué à renforcer les capacités de notre région en matière de droit commercial international » et à mieux faire connaître la CNUDCI. 

Mme MELINA LITO (Royaume-Uni) s’est félicitée de l’adoption des Recommandations sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit. Après une consultation publique, a-t-elle indiqué, le Royaume-Uni a signé la Convention de Singapour sur la médiation en mai dernier, démontrant son engagement à promouvoir la médiation comme méthode efficace de résolution des litiges au même titre que le contentieux et l’arbitrage, à maintenir sa position en tant que centre de résolution des litiges internationaux et à s’appuyer sur sa tradition de leadership en matière de droit international privé.  S’agissant du Groupe de travail III sur la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États, la représentante a noté que les réformes achevées marquaient « un moment important ».  Elle a encouragé la poursuite de l’examen par le Groupe de travail IV de l’utilisation de l’intelligence artificielle et du commerce électronique, convenant que la Loi type de la CNUDCI sur l’utilisation et la reconnaissance internationale de la gestion de l’identité et des services de confiance favoriserait l’uniformité dans l’élaboration de règles opérationnelles, de politiques et de pratiques pour la gestion de l’identité dans le contexte des activités commerciales et des services liés au commerce.  Concernant le Groupe de travail V, elle a noté les progrès réalisés sur la recherche d’un consensus sur la loi applicable dans les situations d’insolvabilité. Sur le Groupe de travail VI, son pays continue de suivre les développements dans le domaine des documents de transport multimodal négociables.  La représentante s’est par ailleurs félicitée de l’adoption par l’Assemblée générale de la Convention des Nations Unies sur les effets internationaux de la vente judiciaire des navires.  Enfin, elle a salué l’examen des questions relatives aux changements climatiques dans le cadre des travaux de la CNUDCI, tout en estimant que ce programme de travail devrait être plus « ciblé » -pour ne pas faire double emploi avec les travaux de l’Institut international pour l’unification du droit privé (UNIDROIT)- et mis en œuvre « dans des délais qui reflètent l’urgence de la crise climatique ».

M. ABDULLAH IBRAHIM ABDELHAMID ALSAYED ATTELB (Égypte) a souligné l’importance du rôle de la CNUDCI et salué le travail du Groupe de travail III sur le règlement des différends entre investisseurs et États.  Il s’est dit en faveur de la création d’un tribunal permanent en vue de trancher lesdits différends.  Il s’est félicité des progrès enregistrés au sein du Groupe de travail IV sur les documents de transport multimodal négociables.  Enfin, il s’est félicité de la tenue d’un colloque sur le droit commercial international et les changements climatiques. En conclusion, le délégué a mis en garde contre un élargissement du mandat de la CNUDCI qui pourrait être source de confusion.  « Avançons avec prudence »! a-t-il dit.

M. SCOTT TAN (Singapour) a félicité la CNUDCI pour l’adoption des réformes sur les règlements des différends entre investisseurs et États, dont le Code de conduite est destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux. L’adoption de documents de médiation envoie un signal fort en tant qu’outil complémentaire, pour le règlement des conflits, a-t-il ajouté.  D’après lui, la médiation est « efficace et abordable », tout en préservant la relation entre les parties.  Les codes de conduite permettront, quant à eux, d’établir une référence de normes éthiques.  Le représentant a félicité la Chine pour la signature de la Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires, soulignant que son pays fait partie des 15 signataires initiaux.  Par ailleurs, il a salué l’adoption des Recommandations sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit.  Espérant que les débats pourront avancer au sein du Groupe de travail III, il a réitéré l’engagement de Singapour à appuyer le travail au sens large de la CNUDCI et à contribuer aux échanges sur les mécanismes d’appel permanents et multilatéraux. 

M. SANCHEZ CORDERO (Mexique) a souligné l’importance du rôle de la CNUDCI dans l’harmonisation des normes dans un contexte de globalisation.  Il a noté les avancées sur le règlement des différends entre investisseurs et États, fruit des efforts du Groupe de travail III.  L’adoption du Code de conduite destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux est selon lui une « avancée considérable » en vue de garantir l’impartialité des arbitres.  Le délégué a également salué l’adoption du Guide de la CNUDCI sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit.  Il s’est enfin félicité que la CNUDCI se soit penchée sur de « nouvelles réalités » comme l’intelligence artificielle et les changements climatiques.

Mme YANRUI ZHAO (Chine) a salué les discussions constructives et la session pragmatique qui ont permis d’aboutir aux documents présentés par la CNUDCI.  La signature de la Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires a été un succès, a-t-elle rappelé, attirant l’attention sur les 24 pays et régions qui étaient présents à la cérémonie d’ouverture et les 15 pays ayant déjà signé cet instrument.  La Chine fera toujours une priorité des travaux de la CNUDCI, a-t-elle assuré. 

Mme KEKE MANTSHO ANNASTACIA MOTSEPE (Afrique du Sud) a salué l’adoption des Lignes directrices sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux.  Elle a détaillé la loi adoptée par son pays dans ce domaine en 2015 qui vise à un équilibre entre les droits et obligations des investisseurs dans le respect de la Constitution sud- africaine.  Elle a ensuite salué l’adoption du Code de conduite destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux.  Cela permettra d’améliorer la transparence dans ce domaine et de garantir l’indépendance et l’impartialité des juges, a estimé la déléguée.  Enfin, elle s’est félicitée de la récente tenue d’un colloque sur le droit commercial international et les changements climatiques.

Mme TRAN THI PHUONG HA (Viet Nam) a expliqué que grâce à la Loi type de la CNUDCI sur les documents transférables électroniques,

Le Viet Nam avait promulgué cette année une loi modifiée sur les transactions électroniques, illustrant le rôle que la CNUDCI pouvait jouer en la matière pour des pays comme le sien.  Saluant l’adoption des quatre premiers textes juridiques préparés par le Groupe de travail III, notant que ces textes représentaient une étape clé pour œuvrer à la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États, elle a encouragé le secrétariat de la CNUDCI à diffuser largement ces textes auprès des États, des arbitres et autres praticiens du droit.  La déléguée a par ailleurs indiqué que le Viet Nam attachait une grande importance à la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États et s’est félicitée que les discussions sur ce sujet au sein du groupe de travail III visent, entre autres, à « encourager l’investissement responsable et à faire progresser le développement durable ». 

M. MORA FONSECA (Cuba) a estimé que la création de la CNUDCI a permis aux pays en développement de participer à l’harmonisation et à la codification du droit commercial international.  À ce titre, il a salué le caractère inclusif des réunions qui permet une acceptation universelle des textes.  Toutefois, les textes sont de plus en plus complexes en raison de la rapide transformation technologique et de la diversification accrue des activités commerciales, a- t-il fait remarquer, suggérant une adaptation des textes à la vitesse des changements.  Le délégué a ensuite attiré l’attention sur les effets néfastes des sanctions et de la pandémie de COVID-19 sur le commerce international.  Il a rappelé que les changements climatiques sont une priorité macroéconomique à Cuba, saluant le colloque international qui permettra de réaliser les objectifs fixés et d’harmoniser les textes juridiques dans ce domaine. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a salué la contribution des travaux de la CNUDCI à la codification du droit commercial international. Elle a souligné que son pays a signé la Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires, encourageant les autres parties à faire de même.  Elle a également applaudi les Recommandations sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, ainsi que les efforts pour la diffusion de pratiques de commerce international dans les Caraïbes.  Les journées de la CNUDCI pour les Caraïbes, a-t-elle apprécié, constituent des opportunités précieuses pour les entreprises et les universités.  Attirant l’attention sur les efforts de son pays pour rendre les dispositions nationales sur la communication électronique compatibles avec les travaux de la CNUDCI, elle a mentionné que son pays est candidat pour réintégrer la CNUDCI en tant que membre afin de contribuer davantage à ses travaux. 

Mme YANINEE NACHOM (Thaïlande) a dit que son pays est un membre « actif » de la CNUDCI.  Elle a loué les progrès remarquables accomplis par les groupes de travail. Elle a notamment salué l’adoption des Recommandations de la CNUDCI sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, en rappelant que son pays accueille nombre de ces entreprises. Elle a aussi salué l’adoption des Dispositions types sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux.  La représentante s’est félicitée de la tenue d’un colloque sur le droit commercial international et les changements climatiques pendant la session de la CNUDCI. Ce sujet est crucial pour mon pays, a dit la déléguée.  Enfin, elle a appuyé la création d’un centre consultatif sur le droit international de l’investissement.

M. ENRICO MILANO (Italies’est félicité de l’adoption d’un premier ensemble d’instruments par le Groupe de travail III, notamment s’agissant de l’adoption de codes de conduite à l’intention des arbitres et des juges dans le règlement de différends relatifs à des investissements internationaux.  Selon lui, la réforme du système de règlement des différends entre investisseurs et États est essentielle pour l’avenir du droit commercial international.  De même, l’adoption des recommandations concernant l’accès au crédit vient compléter les travaux importants réalisés par le groupe de travail I, auxquels l’Italie a participé, en contribuant à créer un environnement plus propice aux micro-, petites et moyennes entreprises.  Le représentant a encouragé la CNUDCI à élargir sa coopération avec l’Institut international pour l’unification du droit privé (UNIDROIT) et la Conférence de La Haye sur le droit international public et privé, une collaboration qui a mené selon lui à des résultats « extrêmement positifs » dans différents domaines. 

Mme KAJAL BHAT (Inde) a attiré l’attention sur la deuxième Conférence de la CNUDCI en Asie du Sud, qui a été organisée en coopération avec son pays. Cette première initiative après la pandémie de COVID-19 a rassemblé des experts du monde entier qui ont partagé leur éclairage sur l’arbitrage commercial international, la médiation et les technologies numériques, entre autres.  La représentante a souligné l’utilité du guide sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, ainsi que les textes sur le règlement des différends dans le domaine des technologies.  Elle a néanmoins jugé nécessaire d’adapter les procédures en fonction des litiges.  Concernant le projet sur la médiation, la représentante a reconnu qu’il s’agissait d’une alternative efficace, mais qui ne constitue pas une obligation.  Selon sa délégation, le projet de guide législatif devrait être revu sous une forme non prescriptive.  Il est préférable de compiler des informations et de lister des recommandations « afin d’éviter l’adoption d’une approche à l’emporte-pièce », a-t-elle mis en garde.  Tout travail sur les changements climatiques doit également être cohérent avec les traités existants, la souveraineté des États, le respect des ressources et des richesses naturelles, a-t-elle poursuivi, soulignant l’importance de la coopération et l’assistance technique pour les pays en développement.  Enfin, elle a salué l’organisation de réunions à distance qui ont permis d’augmenter la participation des pays en développement. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda) s’est félicité de l’adoption des Dispositions types de la CNUDCI sur la médiation, des Lignes directrices de la CNUDCI sur la médiation pour les différends internationaux, du Code de conduite des arbitres et du Code de conduite des juges, fruits de plusieurs années de préparation et de discussions au sein du Groupe de travail III, a-t-il rappelé.  S’agissant des Dispositions types sur la médiation pour les différends relatifs aux investissements internationaux, le délégué a recommandé aux États et aux autres parties prenantes concernées d’envisager de les inclure dans leurs législations nationales et encouragé leur publication sous forme électronique dans les six langues officielles de l’ONU, afin de les diffuser largement. S’agissant de la taxonomie juridique sur les systèmes de registres distribués, il a noté que le document d’orientation proposé pourrait fournir des explications utiles aux opérateurs commerciaux, en particulier aux micro-, petites et moyennes entreprises et aux opérateurs situés dans des pays en développement comme l’Ouganda.  Il a souligné, concernant le règlement des différends, que le travail réalisé pouvait contribuer à leur épargner le coût prolongé d’un litige.  Le délégué a en outre indiqué que son pays était favorable à la poursuite de l’élargissement de l’engagement de la Commission avec des partenaires universitaires, notamment les jeunes chercheurs, et avec les praticiens du droit commercial international.  Il s’est félicité du lancement de la série inaugurale des Journées de la CNUDCI en Afrique en 2022.  Il a rappelé que la révolution numérique était « une opportunité incroyable » pour les pays africains qui doivent développer une infrastructure juridique pour bénéficier de l’économie numérique. 

M. FAISAL GH A. T. M. ALENEZI (Koweït) a réaffirmé l’engagement de son pays à adapter sa législation nationale relative aux activités commerciales et économiques avec les récentes évolutions mondiales.  Le Koweït, a-t-il dit, compte travailler sans relâche afin de mettre en œuvre des projets d’une importance capitale pour devenir un « centre commercial régional et international », conformément à son plan national de développement.  En vertu de sa stratégie nationale visant à promouvoir la participation du secteur privé au développement des infrastructures, le Koweït a établi, en 2014, un programme de partenariat public-privé dans les domaines de l’énergie, de la santé publique, des transports et des communications afin de favoriser la compétitivité et la créativité.  Le délégué a également décrit les efforts déployés par son pays pour mettre en œuvre un système commercial et économique moderne par le biais de technologies de pointe susceptibles de favoriser un développement durable et inclusif.  Face à la menace de la cybercriminalité, un centre national de cybersécurité a en outre été créé afin d’assurer une utilisation sûre du commerce électronique.  Enfin, le délégué a souligné le rôle essentiel de la CNUDCI en vue de l’adoption d’un cadre juridique international visant à résoudre les différends commerciaux internationaux. 

La représentante de la France a salué le temps supplémentaire accordé aux groupes de travail en raison des premiers résultats tangibles obtenus depuis 2017 dans le domaine des règles déontologiques des juges et des arbitres.  Elle a reconnu le « dynamisme » de la Commission qui s’efforce de codifier le droit commercial international.  Manifestant l’intérêt de sa délégation pour les chantiers ouverts dans les domaines de l’économie numérique, la déléguée a espéré que la CNUDCI continuera de déceler les pratiques nouvelles.  Concernant les méthodes de travail, elle a mentionné l’initiative conjointe de la Suisse et de la France qui consiste à proposer des règles pour les consultations à distance afin d’assurer la transparence et le respect des langues de travail. 

M. CHOI TAEEUN (République de Corée) a noté l’amélioration de la coopération de son pays avec la CNUDCI.  Il a salué l’adoption du Code de conduite destiné aux arbitres dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux et du Code de conduite destiné aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux. « Cela permettra de garantir l’impartialité des juges et des arbitres », a déclaré le délégué. Il a assuré en conclusion que son pays continuera de jouer un rôle important au sein de la Commission.

M. PABLO AGUSTÍN ESCOBAR ULLAURI (Équateur) a salué le travail réalisé par la CNUDCI s’agissant de l’unification et de l’harmonisation progressives du droit international, ce qui contribue à l’intensification de la coopération économique entre tous les États sur un pied d’égalité sur la base de l’état de droit tout en évitant les doublons entre les organisations qui élaborent des normes en matière de droit international.  Il s’est félicité de la finalisation des textes portant sur le règlement de différends relatifs à des investissements internationaux, dont les codes de conduite de la CNUDCI pour les arbitres et les juges dans le règlement de différends relatifs à des investissements internationaux.  À ses yeux, l’adoption de ces instruments représente une contribution essentielle dans le cadre du mandat confié au Groupe de travail III. Le délégué a en outre relevé la finalisation des Recommandations sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit, notamment dans les pays en développement. 

M. NAGANO SHUNSUKE (Japon) est revenu sur la Convention de Singapour sur la médiation, soulignant que son pays y a adhéré afin de promouvoir cette méthode dans le règlement des différends dans le domaine du commerce international. En effet, a-t-il précisé, le Japon n’avait pas de cadre pour la médiation, les Japonais recourant automatiquement à l’arbitrage.  Il a ensuite réitéré le plein engagement de son pays à contribuer de manière tangible aux travaux de la CNUDCI.  Concernant le projet de bilan des évolutions constatées en matière de règlement des différends dans l’économie numérique, le délégué a remercié les États Membres pour leur soutien, précisant que le Japon a alloué les fonds nécessaires pour l’exécution de ce projet dans son intégralité pour une deuxième année.

Mme NUR AZURA BINTI ABD KARIM (Malaisie) a mentionné les différents instruments adoptés par la CNUDCI et loué les progrès remarquables ainsi accomplis.  Une telle réussite n’aurait pas été possible sans la coopération de toutes les parties, a‑t‑elle déclaré.  Elle s’est dite en faveur de la création d’un tribunal permanent pour trancher les différends relatifs à des investissements internationaux.  La question du financement de cette structure se posera, a averti la déléguée, en demandant une règlementation du financement par des tiers. Enfin, elle a souligné le travail de qualité de la Commission. 

M. KEVIN TIMOTHY MEAD (Canada) a souligné la grande qualité du travail de la Commission, avant de se féliciter de l’adoption de quatre instruments au sujet de la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États. Il a notamment salué l’adoption des Recommandations de la CNUDCI sur l’accès des micro-, petites et moyennes entreprises au crédit et insisté sur son utilité dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Il s’est par ailleurs félicité de la tenue d’un colloque sur le droit commercial international et les changements climatiques, en notant la complexité des questions soulevées.  Enfin, le délégué a qualifié le programme de travail futur de la Commission « d’ambitieux et d’avant-gardiste ». 

Mme BOUZIANE (Maroc) a souligné le travail efficace pour la codification et les bonnes pratiques du droit commercial international en tenant compte des besoins des pays.  Ma délégation, qui attache une grande importance à la lutte contre les pratiques frauduleuses, souhaite préserver le droit des États tout en protégeant les investisseurs étrangers, a-t-elle déclaré.  À ce titre, elle a fait état des actions multilatérales et nationales de son pays, dont la modernisation de son cadre juridique en accord avec les recommandations de la CNUDCI, ainsi que l’alignement des réformes juridiques en matière d’investissements avec les normes standard pour la promotion des investissements étrangers dans des conditions saines et légales.  « Mon pays surfe sur une nouvelle ère de libéralisation de son économie au travers de partenariats étrangers », a dit la déléguée, soulignant le souhait du Maroc d’offrir aux investisseurs un climat favorable pour l’exercice de leurs pratiques commerciales.  Dans ce but, le Maroc a étoffé sa législation dans divers domaines, tels que l’insolvabilité, les secteurs des petites et moyennes entreprises et des transports, et les technologies numériques, entre autres. Elle a invité la CNUDCI à multiplier ses efforts pour les pays en développement, en collaboration avec les États, afin de renforcer la paix internationale au moyen de pratiques commerciales. 

M. KHOKAAR (Pakistan) a salué l’adoption des Dispositions types de la CNUDCI sur la médiation pour les différends relatifs à des investissements internationaux.  L’adoption des codes de conduite destinés aux arbitres et aux juges dans des procédures de règlement de différends relatifs à des investissements internationaux permettront de répondre aux préoccupations des pays en développement quant à l’impartialité desdits arbitres et juges, a également déclaré le délégué.  Il a toutefois estimé que la question des préjudices infligés à des États souverains n’a pas reçu l’attention nécessaire au sein du Groupe de travail III et demandé qu’il y soit remédié.

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) a salué l’apport de la CNUDCI au développement de la coopération économique et du droit international privé. Il s’est félicité que la CNUDCI ait pu apporter la dernière main à plusieurs textes élaborés au sein du Groupe de travail III sur la réforme du règlement des différends entre investisseurs et États, ce qui démontre selon lui, que la Commission est à même d’assurer le développement progressif et l’harmonisation du droit commercial international.  Il a souligné l’importance d’adopter une approche prudente et équilibrée dans les discussions sur la réforme du système de règlement des différends entre investisseurs et États, en tenant compte des spécificités régionales.  Le délégué s’est également félicité des travaux réalisés par le Secrétariat pour donner suite à l’initiative conjointe relative à la pandémie de COVID-19 menée par son pays, l’Arménie et le Viet Nam afin d’appuyer le commerce international. 

OCTROI DU STATUT D’OBSERVATEUR AUPRÈS DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À L’INTERNATIONAL PARLIAMENTARIANS’ CONGRESS

Venu présenter le projet de résolution A/C.6/78/L.2 concernant l’octroi du statut d’observateur à l’International Parliamentarians’ Congress, le délégué du Pakistan a indiqué qu’il s’agissait d’une association de législateurs créée en 2019 par le Sénat pakistanais pour travailler sur des questions essentielles, telles que les changements climatiques ainsi que la paix et la sécurité, et permettre aux parlementaires de créer des synergies en matière de législation. 

La déléguée de l’Inde a estimé cette organisation n’est pas de nature intergouvernementale et s’est demandé quelle serait la valeur ajoutée de l’octroi du statut d’observateur.

Si la déléguée des États-Unis a salué les objectifs de l’International Parliamentarian’s Congress, elle a jugé cette plateforme inéligible au statut d’observateur dans la mesure où il ne s’agit pas d’une organisation intergouvernementale dans le cadre de laquelle des États souverains auraient signé un accord. Selon sa délégation, cette candidature va à l’encontre de la résolution de l’Assemblée générale qui, a-t-elle rappelé, ne souhaite pas créer de catégorie supplémentaire d’observateurs. 

Reprenant la parole, le délégué du Pakistan a pris note du refus de l’Inde et des États-Unis d’appuyer le projet de résolution.  Il a fait remarquer que la Sixième Commission et l’Assemblée générale avaient déjà approuvé des projets qui ne satisfaisaient pas aux critères énoncés par les États-Unis.  Dans ce contexte, il a demandé que les règles de l’Assemblée générale soient appliquées de façon « cohérente ». 

OCTROI DU STATUT D’OBSERVATEUR AUPRÈS DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À L’ORGANISATION DES ÉTATS IBÉRO-AMÉRICAINS POUR L’ÉDUCATION, LA SCIENCE ET LA CULTURE

Venue présenter le projet de résolution A/C.6/78/L.3 concernant l’octroi du statut d’observateur à l’Organisation des États ibéro- américains pour l’éducation, la science et la culturela déléguée de l’Argentine a informé qu’il s’agit d’une organisation intergouvernementale créée en 1949, qui regroupe 23 pays, et dont le siège est à Madrid.  Elle a loué la contribution que pourrait apporter cette organisation dans l’échange de bonnes pratiques dans les domaines de l’éducation, de la science et de la culture.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: rejet d’un projet de résolution russe sur la situation à Gaza

9439e séance – soir
CS/15445

Conseil de sécurité: rejet d’un projet de résolution russe sur la situation à Gaza

Réuni en début de soirée, le Conseil de sécurité a rejeté par 5 voix pour, 4 voix contre (États-Unis, France, Japon et Royaume-Uni) et 6 abstentions un projet de résolution présenté par la Fédération de Russie par lequel le Conseil aurait notamment exprimé sa profonde inquiétude face à l’aggravation de la crise humanitaire à Gaza et appelé à l’instauration d’un cessez-le-feu humanitaire durable.  La Chine, les Émirats arabes unis, le Gabon et le Mozambique ont voté en faveur du texte, de même que la Fédération de Russie.

« Une fois de plus, le Conseil demeure otage des velléités des délégations occidentales », a déploré la Fédération de Russie à l’issue du vote qui, a-t-elle ajouté, montre clairement qui est en faveur d’une trêve et de l’envoi d’une aide humanitaire à Gaza. 

La représentante des États-Unis a cependant indiqué n’avoir pas pu voter en faveur du projet en raison de l’absence de toute référence au Hamas.  C’est un affront aux victimes du pire massacre de Juifs depuis l’Holocauste, a dénoncé la représentante qui a également affirmé que la grande majorité des familles de Gaza souffrent des conséquences des actes du Hamas.  « Le Hamas doit être tenu pour responsable de ses actes.  Il ne représente pas le peuple palestinien et il n’a rien fait pour promouvoir la paix et la stabilité, préférant le chaos », a martelé la représentante. 

Même son de cloche du côté de la France et du Royaume-Uni qui a notamment jugé inacceptable que le Conseil de sécurité fasse fi de la pire attaque terroriste subie par Israël.  Le Japon a expliqué de son côté avoir voté contre le projet en raison de la façon dont le texte a été présenté.  « Pourquoi a-t-il fallu mettre aux voix ce projet alors que nous avions la possibilité de l’améliorer? »

L’Équateur a également déploré la présentation d’un projet de résolution n’ayant pas fait l’objet de larges consultations, relevant qu’un autre texte proposé par le Brésil, mais au sujet duquel le Conseil ne s’est pas prononcé ce soir, cherche, lui, à rassembler tous les points de vue.  De son côté, la Suisse a expliqué son abstention par le fait que le Conseil ne peut faire l’économie de se référer clairement au droit international et au droit international humanitaire dans ses résolutions parce que « même les conflits armés ont des règles ». 

La Chine a justifié son vote favorable eu égard à la gravité de la situation, soulignant que la sécurité des civils est une ligne rouge à ne pas dépasser et plaidant pour l’ouverture d’un couloir humanitaire.  Le Conseil doit parvenir à un consensus dans un contexte où le processus de paix a déraillé, a-t-elle insisté.  Affirmant lui aussi que son vote pour était en réponse à une crise extrêmement grave, le Gabon a appelé le Conseil à faire preuve de plus d’engagement pour éviter une catastrophe aux « conséquences irréparables ».  Le projet de résolution répondait pourtant à la nécessité d’un cessez-le-feu, ont regretté les Émirats arabes unis, alertant que le spectre d’un bain de sang se profile.

Pourquoi ce Conseil n’est-il pas en mesure d’obtenir un cessez-le-feu pour mettre fin aux massacres? s’est inquiété l’État de Palestine notant que depuis 10 jours, le monde regarde Israël agresser plus de 2 millions de Palestiniens.  Alertant qu’« Israël n’a pas épargné une seule famille palestinienne à Gaza », la délégation a notamment appelé à arrêter l’assaut; à permettre un accès humanitaire immédiat et sans entrave dans toute la bande de Gaza, et à mettre fin au déplacement forcé de son peuple.  Israël n’a pas le droit de forcer la population de Gaza à choisir entre la fuite forcée ou la mort.  Et personne ne devrait entretenir l’illusion que tuer le plus de Palestiniens possible rendra les Israéliens plus sûrs, a-t-elle tranché.

Pour la sécurité de la population d’Israël et de son avenir, nous allons éradiquer le Hamas, a prévenu la délégation israélienne qui a rappelé que ce « groupe barbare » a massacré près de 1 800 Israéliens et pris en otage plus de 200 personnes.  Elle a également fustigé « l’idée absurde » selon laquelle un État démocratique peut coexister à côté d’un « monstre terroriste » qui tire des roquettes aveuglément contre des civils.  Rien ne changera une idéologie génocidaire, ni la réhabilitation de Gaza, ni des mesures économiques, ni la promesse d’un avenir meilleur.  Mais si le Hamas dépose les armes demain et libère les otages, la guerre pourrait cesser, a-t-elle signalé, tout en se demandant pourquoi un tel appel ne figurait pas dans le projet de résolution. 

Au nom du Groupe des États arabes, la Jordanie s’est interrogée quant à elle sur le « silence du monde » face aux meurtres, s’emportant contre les efforts de « déshumanisation » de la population palestinienne.  C’est un silence qui en dit long, a-t-elle déploré.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Présentation du projet de résolution S/2023/772 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que, dès le début des événements, son pays avait appelé, en vain, à une réunion du Conseil. Il a condamné la mort de citoyens israéliens et de citoyens pacifiques de Gaza.  Il a indiqué que, face à l’escalade, sa délégation a proposé, vendredi dernier, un projet de résolution à des fins humanitaires car sans un cessez-le-feu, il est impossible d’acheminer l’assistance humanitaire. Depuis, seule une délégation s’est exprimée sans pour autant faire de proposition, a-t-il constaté.  Il a ensuite remercié les délégations ayant coparrainé son projet, soulignant qu’il bénéficie de l’appui de nombreux pays arabes, ainsi que de celui de l’État de Palestine.  Il a invité les membres du Conseil à appuyer le texte. 

Le projet de résolution S/2023/772 a été rejeté par 5 voix pour, 4 voix contre (États-Unis, France, Japon et Royaume-Uni) et 6 abstentions. 

Déclarations après le vote 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déploré qu’une fois de plus, le Conseil demeure otage des velléités des délégations occidentales. C’est la seule raison pour laquelle le Conseil de sécurité n’est pas, aujourd’hui, en mesure d’envoyer un message clair pour la désescalade, alors qu’on parle d’un bain de sang.  Le monde entier attendait que le Conseil de sécurité réagisse.  Il n’en est rien, pour des raisons uniquement politiciennes, a-t-il regretté.  Le représentant a également déclaré que le vote de ce jour montre clairement qui est en faveur d’une trêve et de l’envoi d’une aide humanitaire à Gaza.  Il a ensuite affirmé que bien que n’ayant pas été adopté, le projet de résolution a atteint son but: lancer un débat.

Expliquant son vote contre le projet de résolution, Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis), a rappelé qu’il y a une semaine seulement que « le pire massacre de Juifs depuis l’Holocauste » a eu lieu.  Cela a fait ressortir les cicatrices douloureuses d’un antisémitisme vieux de plusieurs millénaires.  Le Hamas a pris des innocents en otage, y compris des Américains, et sa brutalité rappelle les atrocités les plus odieuses de Daech.  La représentante a accusé le Hamas d’être à l’origine de la crise humanitaire à Gaza.  Les civils ne devraient pas souffrir des atrocités commises par le Hamas. Ce Conseil, a insisté la représentante, a la responsabilité de régler la crise humanitaire, de condamner sans équivoque le Hamas et de réitérer le droit souverain à la légitime défense d’Israël. 

Or, le projet de texte de la Fédération de Russie ne mentionne pas le Hamas, ce qui est inacceptable parce qu’il fait fi du terrorisme.  C’est un affront aux victimes, tout en insistant sur le fait que la grande majorité des familles de Gaza souffrent des conséquences des actes du Hamas.  On ne peut rejeter la faute sur Israël et pardonner des décennies de cruauté commises par le Hamas.  La déléguée a fait savoir qu’en ce moment même, le Secrétaire d’État américain, M. Antony Blinken, et la Maison Blanche œuvrent à des négociations intenses avec Israël et d’autres pays de la région pour garantir la libération immédiate et sans condition des otages mais aussi pour l’acheminement et l’accès humanitaire. 

C’est indispensable, a martelé la représentante, en soulignant les efforts de la diplomatie américaine pour que les pays de la région facilitent un accès humanitaire sûr et sans entrave à Gaza.  Mon pays, a-t-elle dit, a nommé hier un envoyé spécial qui sera à la tête des efforts diplomatiques américains pour promouvoir la sécurité des civils et régler de façon urgente cette crise humanitaire en coordination avec les Nations Unies.  Les États-Unis travaillent également avec Israël pour qu’il ait ce dont il a besoin pour protéger sa population et libérer les otages.  Le Hamas, a martelé la représentante, doit être tenu pour responsable de ses actes.  Il ne représente pas le peuple palestinien et il n’a rien fait pour promouvoir la paix et la stabilité, préférant le chaos.  Après avoir appelé la communauté internationale à tout faire pour éviter que le conflit ne s’étende à la région, elle a exigé que le Hamas soit jugé pour les attentats terroristes qu’il a perpétrés.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a indiqué avoir voté contre le projet de résolution non pas en raison de son contenu, mais parce qu’il estimait qu’il aurait pu être amélioré si on avait tenu compte d’un contexte plus vaste.  Le représentant a dit être conscient de la situation sur le terrain ainsi que du nécessaire respect des droits des Palestiniens et des Israéliens.  Le Japon a voté contre également en raison de la façon dont le texte a été présenté, a-t-il ajouté, se demandant pourquoi il avait fallu mettre aux voix ce projet alors que « nous avions la possibilité de l’améliorer ».  Une résolution n’est pas une fin en soi, a-t-il conclu.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a dit que son gouvernement travaille avec acharnement pour répondre à la situation humanitaire qui se détériore à Gaza. Elle a dit avoir voté contre le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie car elle ne peut pas soutenir un texte qui ne condamne pas les attaques terroristes du Hamas.  Les actes du Hamas sont une menace existentielle à l’existence même d’Israël.  Il est inacceptable et inimaginable que le Conseil de sécurité fasse fi de la pire attaque terroriste subie par Israël.  Toutes les mesures prises sur place doivent minimiser le nombre des victimes civiles et faciliter l’assistance humanitaire.  La gravité de la situation nécessite d’autres discussions approfondies au Conseil parce que le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie et le processus qu’il l’a entouré ne constituent pas une véritable tentative de parvenir au consensus.  C’est la raison pour laquelle nous voulons la poursuite des consultations sur la base de la proposition de la présidence brésilienne. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a indiqué que son pays s’était abstenu car le texte laissait de côté des éléments essentiels qu’il fallait prendre en compte, des éléments qui influencent la situation sur le terrain. Elle a condamné dans les termes les plus forts les attaques du Hamas contre Israël.  La représentante a soutenu le droit de ce pays à la légitime défense, conformément au droit international humanitaire et dans le respect du principe de proportionnalité. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a dit déplorer que la Fédération de Russie ait soumis au Conseil de sécurité un projet de résolution qui n’a pas fait l’objet de larges consultations et qui ne représente que le point de vue de sa délégation.  Alors qu’il y a de véritables préoccupations, le texte russe ne condamne pas le terrorisme du Hamas, pas plus qu’il ne tient compte du droit international.  On ne peut jouer avec la souffrance des gens pour des raisons politiques, a souligné le représentant, avant de souligner qu’à l’inverse, le texte proposé par la délégation du Brésil cherche, lui, à rassembler tous les points de vue.  C’est pour cela que nous nous sommes abstenus, s’est expliqué le représentant. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que dès le 7 octobre dernier, la Suisse a fermement condamné les actes de terreur, les attaques indiscriminées et les prises d’otages perpétrées par le Hamas contre la population israélienne.  Elle a déploré la mort de milliers de civils, dont des centaines d’enfants en Israël et dans le Territoire palestinien occupé, notamment à Gaza.  Elle a dit partager le sens d’urgence pour le Conseil d’agir uni face à la situation au Moyen-Orient, en soulignant que la désescalade, la protection des civils, la libération des otages et l’acheminement de l’aide humanitaire doivent être la priorité de la communauté internationale. Elle a expliqué l’abstention de la Suisse par le fait que le Conseil ne peut faire l’économie de se référer clairement au droit international et au droit international humanitaire dans ses résolutions parce que « même les conflits armés ont des règles ». Les appels au respect du droit international humanitaire doivent aussi permettre de freiner une spirale de la violence qui pourrait enflammer la région tout entière, a argué la représentante qui a assuré qu’elle restera engagée en ce sens pour trouver un consensus au sein du Conseil sur la résolution soumise par le Brésil. 

M. ZHANG JUN (Chine) s’est alarmé du nouveau cycle de violence qui continue et s’est inquiété des nombreuses victimes, dans un conflit qui alimente l’instabilité régionale.  Il s’est dit opposé à toute violation du droit international et a soutenu tous les efforts pour l’atténuation des tensions et le rétablissement de la paix. Partant de ce principe, s’est-il expliqué, nous avons voté en faveur du projet de résolution présenté par la Fédération de Russie, compte tenu de la grave situation.  Il faut arrêter les hostilités le plus vite possible, a-t-il exhorté, craignant une détérioration de la situation.  La sécurité des civils est la ligne rouge à ne pas dépasser, a-t-il martelé, appelant également à la protection du personnel humanitaire et des Nations Unies.

Le représentant a dit appuyer les efforts diplomatiques pour la libération des otages et a appelé à l’ouverture d’un couloir humanitaire.  Il s’est dit inquiet du siège total de Gaza et de l’évacuation des civils.  Il faut, a-t-il martelé, mettre un terme au châtiment collectif des populations.  Il a salué les efforts de l’Égypte et d’autres pays pour mettre fin à l’escalade.  La Chine, a-t-il promis, continuera de fournir une aide d’urgence par le biais de l’ONU et des canaux bilatéraux.  En attendant, le Conseil doit parvenir à un consensus, dans un contexte où le processus de paix a déraillé.  Nous devons aller au-delà de l’approche « au cas par cas » et nous diriger vers la solution des deux États.  Notre ministre des affaires étrangères, a annoncé le représentant, est en contact avec les parties et notre envoyé spécial se rendra dans la région pour entamer une médiation.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit avoir voté en faveur d’un projet de résolution qui appelle à un cessez-le-feu et qui condamne fermement les violences et les hostilités contre les civils ainsi que les actes de terrorisme. Ce texte appelle à la libération sans condition d’otages et à laisser un accès sans entrave pour que l’aide humanitaire arrive aux civils, a-t-il ajouté.  Il a justifié cette « action » en réponse à une crise extrêmement grave qui, en quelques jours, a fait des milliers de morts et cause une détresse humaine sans mesure.  Le représentant a réitéré sa condamnation ferme des attaques barbares contre Israël le 7 octobre dernier et regretté que le Conseil n’ait pas pu parvenir à un consensus.  Il a appelé à plus d’engagement pour une réponse juste « à la mesure de notre mandat », à faire taire les armes et à établir les responsabilités. Il a invité le Conseil à faire preuve de plus d’engagement pour trouver une solution durable à la situation humanitaire et à éviter une catastrophe aux conséquences irréparables. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a déclaré qu’avant l’attaque injustifiable du Hamas le 7 octobre, Gaza se trouvait déjà dans une situation lamentable.  Or le Hamas ne représente ni les Palestiniens, ni le peuple de Gaza, a-t-elle souligné.  Elle a alerté que la moitié des personnes tuées depuis le 7 octobre sont des enfants, tout en relevant que le cauchemar avait commencé il y a déjà plusieurs années, faisant perdre tout espoir.  Décrivant la situation qui prévaut actuellement sur place, elle a rappelé qu’il n’y a accès ni à l’eau ni à l’électricité ou au carburant et à la nourriture dans la bande de Gaza.  Elle a également jugé absolument injustifiable que l’on exige que plus d’1,1 million de personnes évacuent une zone.  Le projet de résolution de la Fédération de Russie répondait à la nécessité d’un cessez-le-feu, a-t-elle indiqué, regrettant qu’il n’ait pas été adopté. Le droit international humanitaire doit être respecté et le cycle de la violence cesser, a-t-elle martelé, car sans cela, le spectre du bain de sang se profile.  Les Palestiniens ont le droit de prospérer dans un État indépendant, a-t-elle insisté. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré que le 7 octobre 2023 restera « un jour noir dans l’histoire de l’humanité » avec les attaques du Hamas, « ce groupe terroriste qui ne représente personne ».  L’Albanie s’est abstenue, a-t-il dit, car le texte présenté ne représentait pas la réalité.  Le délégué a espéré que le Conseil aurait l’occasion de se réunir à nouveau, pour répondre de la meilleure manière possible à tous les impératifs du terrain.  Cette situation ne méritait pas deux textes, a regretté le représentant. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que l’attaque terroriste commis par le Hamas, le 7 octobre dernier, est sans doute la pire subie par Israël depuis sa création.  La sécurité d’Israël n’est pas négociable ni son droit à la légitime défense, a martelé le représentant.  Face à la crise actuelle, une aide humanitaire d’urgence à Gaza est indispensable et la protection des civils est un impératif tout comme le respect des Conventions de Genève.  Soulignant que la population civile de Gaza est aussi victime du Hamas, le représentant a expliqué son opposition au vote du projet de résolution de la Fédération de Russie par le fait que plusieurs éléments essentiels font défaut.  À ce stade, a-t-il dit, la France souhaite l’unité du Conseil autour du projet de texte proposé par la présidence brésilienne. Il doit se mettre d’accord pour condamner l’attaque terroriste, encadrer l’aide humanitaire et protéger la population civile de Gaza. 

M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a déclaré que depuis 10 jours, le monde regarde Israël agresser plus de 2 millions de Palestiniens dans la bande de Gaza et compte les gens tués, blessés, déplacés et terrorisés.  Israël n’a épargné une seule famille palestinienne à Gaza, a-t-il dénoncé, ajoutant que personne ne devrait oublier qu’il s’agit de vies humaines, que les vies palestiniennes ont aussi une importance et personne ne devrait entretenir l’illusion que tuer le plus de Palestiniens possible rendra les Israéliens plus sûrs.  Israël, a-t-il poursuivi, a assiégé la bande de Gaza pendant 17 ans, lançant des agressions répétées.  Cela l’a-t-il rendu plus sûr?  Peut-il convaincre qui que ce soit que tuer plus de Palestiniens innocents, à savoir des enfants, des femmes, des hommes, des vieux et des jeunes, est la réponse?  Je suis venu à ce Conseil à plusieurs reprises pour vous dire: le peuple palestinien ne croit plus que l’aide est en route.  Prouvez-leur qu’ils ont tort.  Redonnez-leur l’espoir dans votre action collective.

M. Mansour a énuméré une longue liste de violations répétées des droits des Palestiniens, tués par des soldats ou des colons israéliens, depuis des années maintenant.  Vous nous demandez de faire preuve de retenue et vous nous dites que la violence n’est pas la solution, alors même qu’Israël continue de coloniser et d’annexer notre terre et de mutiler et de tuer notre peuple.  Pourquoi ce Conseil n’est-il pas en mesure d’obtenir un cessez-le-feu pour mettre fin aux massacres?  Il faut, a martelé l’Observateur permanent, arrêter les tueries et les destructions.  Sur le terrain, a-t-il décrit, le système humanitaire et sanitaire de Gaza s’est effondré.  Plus d’un million de personnes ont fui et les gens ne peuvent même pas enterrer leurs proches et les pleurer.  Il faut, a-t-il poursuivi, lever le siège et assurer un accès humanitaire immédiat et sans entrave pour sauver des vies.  Il y a quelques mois, a rappelé M. Mansour, j’avais déjà déclaré devant ce Conseil: « Aussi difficile que puisse paraître la prise des décisions nécessaires, les conséquences de l’inaction sont infiniment plus élevées. » 

À ce stade, a estimé l’Observateur permanent, il faut faire trois choses, du point de vue juridique, moral et politique.  Il faut d’abord arrêter l’assaut contre notre peuple, maintenant, permettre un accès humanitaire immédiat et sans entrave dans toute la bande de Gaza et mettre fin au déplacement forcé de notre peuple.  Israël n’a pas le droit de les forcer à choisir entre la fuite forcée ou la mort.  Il faut ensuite reconnaître la nécessité de protéger les civils et de respecter le droit international.  Pensez au fossé qui se creuse entre l’Occident et le monde arabo-musulman, entre le Nord et le Sud, entre les communautés.  Notre conflit est un conflit politique, pas religieux.  C’est ce qui le rend soluble.  Mais il a un impact, compte tenu de son importance, dans la région et le monde.  Si vous ne voulez pas d’un débordement régional et international, a prévenu l’Observateur permanent, arrêtez les massacres. 

Il s’est dit reconnaissant pour les efforts de tous ceux qui se mobilisent pour mettre fin au carnage, permettre l’accès humanitaire et mettre fin au déplacement forcé des populations.  Nous continuerons à travailler avec eux, en sachant que chaque minute compte car le peuple palestinien de Gaza n’a pas de temps à perdre.  Il a enfin adressé un message, en arabe, au peuple palestinien et à la population de Gaza, en l’assurant que des millions de personnes à travers le monde les voient, les appuient et défendent leur liberté, leur dignité et leur cause juste.  Peu importe le nombre de victimes, l’occupation prendra fin et l’État de Palestine sera créé. Nous allons survivre car la raison et le droit sont de notre côté, a-t-il assuré.

M. GILAD MENASHE ERDAN (Israël) a voulu paraphraser le Président Mahmoud Abbas, en disant que le Hamas ne représente pas la population palestinienne. Il y a près d’une semaine, a-t-il rappelé, nous avons été de nouveau les témoins d’une nouvelle tentative de génocide. Les membres du Hamas, tels des nazis, s’en sont pris à notre population car le Hamas n’est pas un mouvement de résistance mais une organisation terroriste comme Al-Qaida.  Quand nous nous somme retirés de Gaza, il y a 18 ans, a affirmé le représentant, le Hamas n’a cessé de chercher à exterminer notre pays, comme en attestent les horreurs que l’on a vues il y a une semaine.  Si le Hamas a la possibilité de perpétrer de nouveau ces atrocités, il le fera. 

Pour la sécurité de la population d’Israël et de son avenir, nous allons éradiquer le Hamas, a affirmé le représentant.  Nous ne pouvons qu’éliminer les capacités de ce groupe barbare qui a massacré près de 1 800 Israéliens, blessé des milliers et pris en otage plus de 200 personnes. Ces atrocités sont 15 fois plus grave que celle du 11 septembre 2001.  C’est, a accusé le représentant, la communauté internationale et l’ONU qui ont permis le renforcement du Hamas, lequel a pu mettre en place sa machine de guerre.  L’on a accepté l’idée absurde selon laquelle un État démocratique peut coexister à côté d’un monstre terroriste qui tire des roquettes aveuglément contre des civils.  Rien ne changera l’idéologie du Hamas, ni la réhabilitation de Gaza, ni des mesures économiques, ni la promesse d’un avenir meilleur.  L’ONU a essayé, les États-Unis aussi, sans compter d’autres pays, mais tout le monde a échoué.  Rien ne pourra changer une idéologie génocidaire.

Pour le représentant, il n’existe qu’une seule solution pour guérir un cancer: l’ablation de toutes les cellules cancéreuses, d’autant que la communauté internationale a déjà déversé des milliards de dollars dans la bande de Gaza, des sommes qui ont servi à la machine de guerre du Hamas et à sa ville souterraine de la terreur.  Aujourd’hui la population de la bande de Gaza n’est rien d’autre que de la chair à canon et un bouclier humain.  Le Hamas la menace même, en l’empêchant de partir vers le sud, a-t-il déploré.  Le représentant a dit que si le Hamas dépose les armes demain et libère les otages, la guerre pourrait cesser.  Il a donc demandé aux coauteurs du projet de résolution pourquoi ils n’ont pas fait cet appel. 

Avant tout appel à l’assistance humanitaire ou à la retenue, le Hamas doit d’abord être inscrit sur la liste des organisations terroristes et le Conseil doit appuyer le droit d’Israël à la légitime défense et être solidaire de la mission visant à éradiquer les capacités du Hamas.  Israël, a insisté le représentant, respecte le droit international, contrairement au Hamas qui est un groupe terroriste génocidaire qui ne reconnaît pas le droit international.  Il revient au Conseil, a-t-il conclu, de demander des comptes au Hamas sur la situation à Gaza et d’exiger la libération immédiate et sans conditions de tous les otages car nous refusons d’avoir les mains liées pendant que nous luttons pour notre sécurité et l’avenir de nos enfants. 

Au nom du Groupe des États arabes, M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a noté que le Conseil de sécurité se réunit aujourd’hui alors que la guerre brutale d’Israël contre la bande de Gaza se poursuit, annonçant un nouveau cycle de violence.  Le représentant a appelé le Conseil à œuvrer pour éviter une propagation de ce conflit, notamment sur le plan humanitaire.  Il s’est inquiété de l’incapacité de faire valoir le droit international humanitaire et de protéger les civils confrontés à l’enfer de cette guerre, rappelant le manque d’électricité, de nourriture et de soins de santé.  Il s’est interrogé sur le « silence du monde » face aux meurtres, s’emportant contre cette agression et les efforts de « déshumanisation » de la population palestinienne.  C’est un silence qui en dit long, a-t-il répété, décriant les efforts visant à entraver l’acheminement de l’aide humanitaire, ce qui est « une violation grave du droit international ».

Le délégué a salué les efforts de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et appelé la communauté internationale à lui fournir un soutien financier adéquat.  Il a dénoncé toutes les tentatives de déplacement forcé vers l’Égypte ou un autre pays voisin.  Il s’agirait, a-t-il prévenu, d’un crime et d’une violation de la quatrième Convention de Genève.  Il a estimé qu’il est du devoir de la communauté internationale de régler le conflit jugeant regrettable qu’un certain nombre de pays consacre le droit de légitime défense d’Israël alors qu’il agit dans un territoire occupé, en violation des dispositions de la Cour internationale de Justice (CIJ) qui exhorte la Puissance occupante à respecter les principes de distinction entre cible militaire et infrastructure civiles.  Le représentant a réaffirmé l’importance d’une paix pérenne, conformément à la légalité internationale et à l’Initiative de paix arabe.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Deuxième Commission: bilan des travaux des commissions économiques régionales et débat sur la situation en Palestine après le siège de Gaza

Soixante-dix-huitième session,
Dialogue avec les commissions régionales & 19e séance plénière, AM & PM
AG/EF/3592

Deuxième Commission: bilan des travaux des commissions économiques régionales et débat sur la situation en Palestine après le siège de Gaza

Les « mesures transformatrices » et les « approches intégrées » prises et menées au niveau régional en faveur du développement durable ont été mises à l’honneur, ce matin, lors du dialogue annuel de la Deuxième Commission avec les responsables des commissions économiques régionales de l’ONU.  Les discussions ont également porté, dans l’après-midi, sur les « répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe du Golan syrien occupé ».  L’occasion pour de nombreux orateurs de dénoncer les graves conséquences économiques de l’occupation israélienne et d’appeler à faire cesser l’escalade de la violence actuelle.

S’alarmant de « niveaux de mort et de destruction sans précédent », en particulier à Gaza, où la situation était déjà insupportable avant les récents événements catastrophiques, M. Tarik Alami, de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a appelé à s’attaquer d’urgence aux causes profondes du conflit.  « Le respect du droit international est un impératif, si l’on veut qu’aucune partie ne puisse jouir de l’impunité et que tous les peuples de la région soient assurés de connaître la justice et la paix », a-t-il tranché, estimant qu’Israël continue d’adopter des politiques et des pratiques contraires aux résolutions du Conseil de sécurité.

Évoquant plus précisément la situation dans la bande de Gaza, victime d’un blocus « illégal et inhumain » depuis plus de 16 ans, et aujourd’hui assiégée, privée d’électricité, d’eau, de carburant et de nourriture, l’observatrice de l’État de Palestine a dénoncé les « crimes contre l’humanité » qui y sont actuellement perpétrés contre plus de 2 millions de Palestiniens vivant dans une zone ne dépassant pas 365 kilomètres carrés. Comme elle, le Groupe des 77 et de la Chine, le Groupe des États arabes, le Conseil de coopération du Golfe et de nombreuses autres délégations ont appelé la communauté internationale à mettre fin à cette situation et à fournir d’urgence une aide humanitaire à Gaza.

L’Iraq a dénoncé « les pratiques des colons qui usurpent les droits des Palestiniens sur leurs terres et ressources naturelles », de même que la Syrie a déploré le pillage des ressources palestiniennes et syriennes par Israël.  Le Yémen a appelé à indemniser les Palestiniens, tandis que l’Arabie saoudite et la Chine ont assuré de leur soutien au peuple palestinien, par le biais de programmes de développement et de l’UNRWA.  Cette agence fait face à un nombre de réfugiés qui explose, a relevé l’Indonésie en soulignant la nécessité de la soutenir.

Le délégué israélien a, de son côté, dénoncé la partialité du rapport de la CESAO et du projet de résolution de la Deuxième Commission.  Dans le contexte actuel d’attaques terroristes commises par le Hamas avec « des meurtres aveugles et le kidnapping de personnes innocentes », il s’est dit surpris que cette organisation, qui vise la destruction d’Israël, n’y soit mentionné qu’une seule fois, en note de bas de page.

Il ne faut pas oublier « comment cela a commencé », a renchéri le représentant des États-Unis en condamnant avec force les massacres commis par des terroristes en Israël et la « brutalité » du mouvement Hamas.  Il a désigné ce dernier comme « responsable de cette guerre », faisant remarquer qu’Israël a le droit de se défendre.  Le délégué a aussi appelé à des mesures de justice et de liberté pour Israël et pour les Palestiniens.  Il a toutefois recommandé de ne pas se leurrer sur les intentions du Hamas de semer la terreur et le sang.

Au cours du dialogue de la matinée, la Secrétaire exécutive de la CESAO s’était déjà alarmée de la situation dans les pays arabes, une région touchée par de nombreuses catastrophes naturelles et conflits, où 52 millions de personnes dépendent de l’aide humanitaire, où 36% des individus souffrent d’insécurité alimentaire et où la dette cumulée s’élève à plus de 1 500 milliards de dollars.  Malgré ce sombre tableau, elle s’est réjouie de la croissance économique de certains pays comme le Koweït, l’Arabie saoudite ou l’Égypte.  Elle s’est aussi félicitée de l’engagement à dépenser 1 000 milliards de dollars dans des actions climatiques régionales, en partenariat avec sa commission et diverses institutions financières, comme la Banque islamique de développement.

L’exposé du Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a lui aussi été axé sur une croissance verte et sur les besoins financiers du continent pour garantir un développement durable.  Il a misé sur la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pour que le continent devienne un acteur clef dans la chaîne de valeur pour les produits verts, et plus seulement une zone d’extraction de minerais précieux.  Reconnaissant toutefois les importants besoins de financement, il a insisté sur les nécessaires réformes macroéconomiques pour permettre aux pays africains un accès équitable aux marchés financiers.

La difficulté d’accès aux marchés financiers a également été soulignée pour la région de l’Amérique latine et des Caraïbes.  Le Secrétaire exécutif de la CEPALC s’est inquiété à cet égard du coût croissant de l’emprunt, alertant sur le faible niveau d’investissement dans le développement durable (seulement 20% du PIB en 2022) qui découle de ces contraintes budgétaires.  Pour y remédier, la CEPALC mise notamment sur la récente création d’une plateforme régionale de coopération fiscale pour l’Amérique latine et les Caraïbes.

La Directrice exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE) s’est, quant à elle, concentrée sur la lutte contre les changements climatiques, tandis que son homologue de la CESAP a témoigné que la région Asie-Pacifique se situe « à la pointe de la finance innovante, verte et sociale ».

La Deuxième Commission se réunira à nouveau demain, mardi 17 octobre, à partir de 10 heures.

Dialogue avec les secrétaires exécutifs des commissions régionales

Mme ROLA DASHTI, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a rapporté que les pays arabes avaient connu à la fois des progrès et des revers majeurs, soulignant que les récentes calamités naturelles et les conflits, notamment à Gaza en ce moment même, ne faisaient qu’augmenter les défis à relever.  « Malheureusement, 36% des Arabes sont confrontés à l’insécurité alimentaire, et la dette de la région a atteint le chiffre faramineux de 1 500 milliards de dollars en 2022 », a-t-elle précisé, ajoutant que plus des deux tiers des pays arabes ont des difficultés à atteindre les ODD et que, l’année dernière, près de 52 millions de personnes dans la région avaient besoin d’une aide humanitaire.

Pourtant, des pays comme le Koweït, l’Arabie saoudite et l’Égypte ont montré une croissance économique impressionnante, a relevé la Secrétaire exécutive.  La CESAO a fourni en 2023 plus de 100 services consultatifs et a conduit 44 événements pour le développement des capacités, bénéficiant à environ 1 000 décideurs politiques et praticiens, a-t-elle fait savoir, soulignant le rôle du Forum arabe pour le développement durable, qui aide les pays à renouveler leur engagement et à accélérer leurs actions dans ce domaine.  Mme Dashti a mentionné plusieurs initiatives stratégiques comme l’Agenda numérique arabe 2023-2033, mené en collaboration avec la Ligue des États arabes, ainsi que les partenariats significatifs avec des institutions financières régionales et le secteur privé, notamment avec la Banque islamique de développement, pour intégrer l’action climatique, avec un engagement total d’environ 1 000 milliards de dollars entre 2024 et 2030.  Enfin, elle a évoqué les progrès de la région, encouragés par la CESAO, en matière d’énergie renouvelable et d’écotourisme.

Mme TATIANA MOLCEAN, Secrétaire générale adjointe et Directrice exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), a souligné que la divergence entre l’augmentation de la prospérité économique à court terme et la durabilité environnementale à long terme demeure un problème dans la région Europe.  Les effets immédiats des changements climatiques, de la pollution et de la gestion non durable des ressources nuisent déjà aux économies et à la santé de la population, a-t-elle relevé.  Une évolution rapide et d’ampleur des systèmes énergétiques, alimentaires et de transport est primordiale, a insisté Mme Molcean, précisant que de nouvelles approches dans la manière de produire et de consommer, comme la circularité, sont nécessaires pour réduire notre empreinte carbone.

Mme Molcean a fait part de quelques idées explorées par la CEE.  Par exemple, elle travaille à la réduction de la pollution de l’air en encourageant l’adoption d’énergies renouvelables, la décarbonation des transports et l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, ce qui entraîne aussi des progrès vers d’autres objectifs, tels que l’atténuation des changements climatiques et l’amélioration des performances économiques. Ainsi, le Programme paneuropéen sur les transports, la santé et l’environnement (PPE-TSE) se concentre sur les liens entre ces domaines et promeut des solutions de nouvelles mobilités.  Il repose sur des approches intégrées et une coordination intersectorielle.

La Directrice exécutive a également parlé des efforts dans le domaine de la gestion de l’eau, arguant que faire le lien entre l’eau, l’alimentation et l’énergie est essentiel pour relever conjointement divers défis dans le cadre d’une action efficace en faveur du climat et de la transition verte.  Dans la région, la CEE encourage cette approche intégrée.

De l’avis de Mme Molcean, l’investissement est la clef du changement et davantage de ressources financières sont nécessaires, à condition qu’elles soient utilisées à bon escient.  Elle a misé sur les cadres normatifs de la CEE, qui facilitent l’alignement de ces ressources avec les ODD.  Sa méthodologie permet par exemple d’évaluer si des infrastructures en partenariat public-privé répondent à la crise climatique ou soutiennent la reconstruction en Ukraine.

Enfin, elle a mis en avant le système des Nations Unies pour la gestion des ressources, élaboré par la CEE et récemment adopté par le Conseil économique et social (ECOSOC), qui fournit un ensemble de principes et d’exigences qui guident la planification, la conception, l’exploitation et la fermeture des activités d’extraction et de traitement des ressources, afin de parvenir à un équilibre entre développement économique, durabilité écologique et responsabilité sociale.  Nous avons besoin d’approches intégrées, de ressources pour les mettre en pratique et de faire participer de multiples partenaires, a résumé Mme Molcean.

M. ANTONIO PEDRO, Secrétaire exécutif par intérim de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a mis en avant la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), considérée comme le « Plan Marshall de l’Afrique ».  Une fois opérationnelle, ladite Zone permettra de développer des chaînes de valeur régionales et de stimuler le commerce intra-africain de plus de 30% d’ici à 2045, a-t-il promis en misant aussi sur sa contribution pour promouvoir l’industrialisation, la diversification économique, la création d’emplois et la réduction de la pauvreté sur le continent.  Il a fait valoir que la Commission a été un partenaire stratégique majeur de l’Union africaine (UA) dans la conception de la Zone et qu’elle soutient les pays dans le développement de leurs stratégies industrielles. 

L’orateur a en outre mis en avant la richesse de l’Afrique en minéraux essentiels, « un atout clef dans la construction de chaînes de valeur » pour les produits verts, y compris les panneaux solaires, les batteries et les véhicules électriques.  La Commission soutient d’ailleurs le développement de cette chaîne de valeur compétitive en République démocratique du Congo (RDC) et en Zambie, un projet qui permettra à l’Afrique de participer à un marché dont la valeur devrait atteindre 46 billions de dollars d’ici à 2050.  En augmentant les capacités de production du continent et en permettant la libre circulation des marchandises à travers les frontières, les biens produits dans une partie du continent peuvent être utilisés partout en Afrique, a fait remarquer M. Pedro.  Ainsi, les batteries produites en RDC peuvent être déployées dans la région du Sahel pour stocker l’énergie solaire et alimenter d’autres industries, y compris la transformation de la viande, en veillant à ce que les chaînes du froid soient maintenues.

Après avoir évoqué des exemples d’initiatives de la CEA dans le domaine de la lutte contre les changements climatiques, le représentant a ajouté que sa commission soutenait les pays africains dans la réforme de leurs politiques macroéconomiques, ainsi que dans le renforcement de leur gouvernance économique, via des services de conseil sur mesure, et en militant pour une réforme de l’architecture financière mondiale.  La hausse des taux d’intérêt empêche de nombreux pays africains d’accéder aux marchés financiers internationaux, a-t-il souligné en s’inquiétant également que ces pays semblent aussi payer une prime inexpliquée de 1,7% sur les obligations souveraines émises sur le marché international.  Dans ce contexte, la CEA estime que les pays africains devraient avoir un meilleur accès aux investissements, à des conditions plus équitables, pour obtenir des crédits sur les marchés mondiaux, a conclu le haut-fonctionnaire.

M. RAUL GARCIA BUCHACA, Secrétaire exécutif adjoint pour la gestion et l’analyse des programmes de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a souligné l’urgence d’agir dans une région où seulement 25% des ODD sont en passe d’être atteints d’ici à 2030, et où 27% sont en recul par rapport à 2015.  Au cours de la dernière décennie, la croissance de la région n’a connu qu’un taux de 0,8% par an, une performance pire que celle de la décennie perdue des années 80, a précisé le Secrétaire exécutif.  Son constat est particulièrement sévère concernant les ODD 8 (travail décent et croissance économique) et 2 (élimination de la faim).  Les taux de croissance de l’emploi sont historiquement bas et le taux de pauvreté régional reste élevé à 32%.  M. Buchaca a également alerté sur les impacts croissants des changements climatiques, qui pourraient réduire la croissance de 9 à 12% d’ici à 2050 dans certains pays.  Pour répondre à ces défis, il a exposé un ensemble de secteurs prioritaires pour la CEPALC, parmi lesquels la transition énergétique, la transformation numérique, l’agriculture durable, le commerce des services, l’économie circulaire ou encore les industries pharmaceutiques. 

Présentant plusieurs initiatives régionales, il s’est d’abord réjoui des progrès effectués dans l’ODD 7 (énergie propre et abordable), citant comme exemple le Forum technique permanent sur l’innovation et le développement du lithium, qui vise à capitaliser sur les réserves considérables de ce minerai crucial dans la région.  Au sujet de l’écart de genre persistant en matière d’emploi, il a précisé que 74% du travail non rémunéré est effectué par des femmes et que sa commission apporte un soutien technique aux gouvernements pour y remédier.  Poursuivant sur le thème du financement du développement, il a critiqué le faible niveau d’investissement dans la région, qui atteignait seulement 20% du PIB en 2022.  Il a relevé les pressions accrues sur l’espace budgétaire dues aux coûts croissants de l’emprunt sur les marchés financiers, ajoutant que, dans certains cas, 25 à 30% des revenus fiscaux sont consacrés au service de la dette, ce qui limite les investissements dans le développement durable.  Toutefois la récente plateforme régionale de coopération fiscale pour l’Amérique latine et les Caraïbes, dont la CEPALC assure le secrétariat technique, vise à remédier à ce problème, a-t-il conclu.

Mme ARMIDA SALSIAH ALISJAHBANA, Secrétaire générale adjointe des Nations Unies et Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a mis en avant les initiatives de la Commission dans l’action climatique: promotion de l’utilisation des énergies renouvelables, connectivité du système électrique régional et promotion des mobilités à faible émission, entre autres.  Pour soutenir cette ambition, la CESAP a travaillé avec ses pays membres pour accélérer une transition énergétique inclusive et juste, en développant des scénarios pour une telle transition à travers des feuilles de route nationales concernant cet ODD.  La Secrétaire générale adjointe a aussi évoqué une feuille de route régionale sur la connectivité des réseaux électriques, dont la CESAP se sert comme d’une plateforme pour travailler avec les États membres à la mise en place d’un réseau régional interconnecté. 

La région Asie Pacifique se situe aussi à la pointe de la finance innovante, s’est-elle félicitée.  Pour preuve, l’émission d’obligations souveraines, vertes et sociales y a été multipliée par plus de 40 entre 2015 et 2022.  La CESAP aide les pays à réaliser le potentiel de ces instruments de financement innovants en travaillant avec les pays membres pour renforcer leurs capacités nationales et élaborer les cadres nécessaires à la finance verte et durable, tels que le cadre pour les obligations vertes à Sri Lanka et au Bhoutan.  La modélisation macroéconomique pour le développement durable de la CESAP vient désormais en aide à des pays tels que l’Indonésie, le Kirghizistan, la Mongolie, le Népal, le Pakistan, Samoa et Sri Lanka à élaborer des voies pour la reprise post-COVID. 

La haute fonctionnaire a aussi mis en avant la transformation numérique de la région.  Pour aider à combler la fracture numérique entre et à l’intérieur des pays, la CESAP soutient ses pays membres en les aidant à tirer parti des investissements de partenariat public-privé pour déployer des réseaux, ainsi que pour récolter des données géospatiales et numériques, à des fins d’analyse et de prévision stratégique.  Dans ce contexte, la Commission se penchera l’an prochain sur l’exploitation de la transformation numérique pour le développement durable.

Discussion interactive

Après avoir entendu ces exposés, le Président de la Deuxième Commission a donné la parole aux États Membres pour entendre leurs commentaires et entamer un dialogue interactif.  Les délégations ont reconnu la nécessité d’adopter des mesures transformatrices et des approches intégrées en faveur du développement durable.  Par la voix du Botswana, le Groupe des pays en développement sans littoral (PDSL) a espéré qu’elles seraient prises en compte lors de la préparation de la troisième Conférence sur les PDSL, qui aura lieu à Kigali (Rwanda) en juin 2024.

Pour la Thaïlande, pays d’accueil de la CESAP, les approches intégrées devraient être la priorité, ce qui devrait pousser les commissions régionales à renforcer leur partenariat et leur coopération avec d’autres organisations régionales et sous-régionales non onusiennes pour remettre les ODD sur les rails. En ce sens, l’Initiative de complémentarité entre la Vision 2025 de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et le Programme 2030 de la CESAP peut servir de modèle de bonne pratique.

Disposé à collaborer avec les commissions régionales, et en particulier avec la CEPALC, le Mexique a jugé nécessaire d’adopter des initiatives transformatrices pour que 75% des cibles des ODD ne soient pas laissées de côté d’ici à 2030 en Amérique latine et dans les Caraïbes.  Exerçant la présidence pro tempore de la CEPALC durant la session 2022-2024, l’Argentine est d’avis que de tels espaces sont fondamentaux pour reconstruire l’intégration politique, sociale et productive de l’Amérique latine et des Caraïbes, et pour débattre de stratégies visant à renforcer les économies, les intégrer et améliorer les conditions de vie des habitants.

La Bolivie a estimé que le dialogue permanent sur les innovations et le développement technologique permettra à tous les pays d’aller de l’avant, mais a insisté sur les principes d’équité et de responsabilités communes mais différenciées.  La Colombie a fait part de sa préoccupation sur le manque d’investissements pour le développement dans la région, et a jugé important de renforcer les mécanismes nécessaires à cet effet.

De l’avis de la Fédération de Russie, les décisions des États Membres dans le cadre des commissions régionales peuvent véritablement contribuer à la réalisation des ODD.  Elle a toutefois déploré, comme le Bélarus, la politisation de la CEE.  Elle a condamné les tentatives d’utiliser la Commission pour adopter des politiques qui n’ont pas l’agrément de tous les États Membres.  Le Bélarus a voulu que la CEE reste un espace de coopération sur le principe de l’égalité souveraine des États et a dit compter sur une interaction fructueuse avec la CESAP, notamment dans le domaine des transports.

Pour sa part, le Kazakhstan a reconnu les efforts de la CEE pour encourager les ODD et entraîner des transformations dans la région.  Il a souligné son rôle pour faciliter le commerce dans les pays sans littoral en Asie centrale.

La Pologne s’est en revanche inquiétée des perspectives de la région en raison de la guerre en Ukraine.  Elle a demandé à la Directrice exécutive de la CEE quels sont les grands obstacles identifiés à l’accélération de la transition verte en vue de respecter les engagements en matière climatique.

Estimant que le rôle des commissions régionales devrait être élargi en tirant parti de la coopération Sud-Sud pour accélérer la mise en œuvre des ODD, le Liban a dit compter sur la CESAO comme un partenaire solide.

Insistant sur la souveraineté alimentaire, l’Éthiopie a assuré que la CEA continue d’être l’élément le plus important en matière de développement et a demandé de lui fournir les ressources nécessaires pour qu’elle puisse assurer sa mission.

En réponse aux commentaires et interrogations des pays, la Secrétaire exécutive de la CESAP s’est réjouie que le rôle des plateformes régionales ait été souligné et a pris acte des observations sur la nécessité d’une synergie avec d’autres commissions régionales en matière de bonnes pratiques.

Le Secrétaire exécutif par intérim de la CEA a remercié l’Éthiopie, hôte de la CEA qui siège à Addis-Abeba depuis des décennies, pour son appui.  Il a dit partager les principes essentiels de la coopération Sud-Sud.  Il a également défendu l’intérêt de prendre en compte les services écosystémiques.

En réponse au Groupe des PDSL, la Directrice exécutive de la CEE a dit être en mesure de fournir des exemples concrets pour les systèmes de gestion de ressources. La perspective de genre dans les approches synergiques est importante, de même que la transformation numérique, a-t-elle reconnu.  Elle a conclu que le monde entier est sur la même longueur d’onde pour ce qui est de la réalisation des ODD.

La Secrétaire exécutive de la CESAO s’est dite résolue à améliorer les conditions de vie et assurer un avenir plus prospère et plus durable dans la région.

Après avoir remercié les délégations de la région Amérique latine et Caraïbes qui se sont exprimées, le Secrétaire exécutif adjoint à la CEPALC a dit partager le point de vue de la Bolivie.  Il a assuré que la CEPALC n’épargnera aucun effort pour appuyer le forum pour l’innovation technique, estimant qu’il faut changer de paradigme de production et de consommation pour protéger la Terre.  Il a pris acte de la nécessité de procéder à l’échange de dette contre des actions climatiques, qui pourrait intéresser en particulier les petits États insulaires des Caraïbes.  La CEPALC est également favorable à une mesure du développement au-delà du PIB.

SOUVERAINETÉ PERMANENTE DU PEUPLE PALESTINIEN DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST, ET DE LA POPULATION ARABE DANS LE GOLA SYRIEN OCCUPÉ SUR LEURS RESSOURCES NATURELLES

Présentation de rapport

M. TARIK ALAMI, Directeur de la Division des questions émergentes et liées aux conflits de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a présenté, par visioconférence, le rapport intitulé « Répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe du Golan syrien occupé » (A/78/127-E/2023/95), réalisé par le Conseil économique et social (ECOSOC).

Cette année, il a présenté ce rapport alors que le Territoire palestinien occupé et Israël connaissent « des niveaux de mort et de destruction sans précédent », en particulier à Gaza, où la situation était déjà insupportable, voire invivable, avant les récents événements catastrophiques, a souligné M. Alami.  Toutefois, les informations contenues dans le rapport ne couvrent que la période allant du 1er avril 2022 au 31 mars 2023.  Il a donc décidé de concentrer sa présentation sur les contenus qui sont toujours pertinents et qui fournissent un contexte plus clair sur les conditions de vie des Palestiniens vivant sous l’occupation militaire israélienne.

Dans ses conclusions, le rapport indique que « l’occupation israélienne prolongée du territoire palestinien et du Golan syrien ne cesse d’avoir des répercussions sur les conditions de vie des populations palestinienne et syrienne et de nuire au développement économique et social des territoires occupés ».  Il souligne également que « l’escalade alarmante de la tension et de la violence [dans le Territoire palestinien occupé] au cours de la première partie de l’année 2023 montre qu’il est urgent de s’attaquer aux causes profondes du conflit ».

« Israël continue d’adopter des politiques et des pratiques contraires aux résolutions du Conseil de sécurité sur la question, au droit international humanitaire et au droit international des droits de l’homme.  Certaines pratiques peuvent être considérées comme discriminatoires et d’autres s’apparentent au transfert forcé de personnes protégées ou à une peine collective, ce qui constitue une violation grave de la quatrième Convention de Genève et du droit international », réitère le rapport, qui poursuit ainsi: « Le respect du droit international est un impératif, si l’on veut qu’aucune partie ne puisse jouir de l’impunité et que tous les peuples de la région soient assurés de connaître la justice et la paix, y compris les Palestiniens et les Syriens vivant sous occupation.  En outre, faute d’appliquer les résolutions du Conseil de sécurité portant sur la question de Palestine, on compromet les chances de voir appliquer, dans le Territoire palestinien occupé et dans l’ensemble de la région, les cadres convenus au niveau international, notamment le programme pour les femmes et la paix et la sécurité et le Programme de développement durable à l’horizon 2030. »

Le système israélien de politiques restrictives a vidé l’économie palestinienne de nombreux éléments essentiels à son bon fonctionnement, la rendant très vulnérable aux chocs internes et externes et très dépendante d’Israël et des transferts extérieurs, a continué M. Alami.  Le blocus de Gaza depuis 16 ans représente une peine collective, a-t-il conclu en se désolant de savoir qu’au début de l’année, 1,3 million d’habitants, sur une population de 2,1 millions, avaient besoin d’aide humanitaire.

Mme SAHAR J.O.  NASSER-ABUSHAWESH (observatrice de l’État de Palestine) a fait état de la « détérioration horrifique et inimaginable » des conditions socioéconomiques et humanitaires en Palestine occupée, y compris à Jérusalem-Est et particulièrement dans la bande de Gaza.  Elle a fustigé les pratiques « oppressives et destructrices » d’Israël, les qualifiant de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, en violation de tous les principes du droit international.  Évoquant plus précisément la situation dans la bande de Gaza assiégée, elle a dénoncé un blocus « illégal et inhumain » qui y sévit depuis plus de 16 ans et qui affecte 2,3 millions de Palestiniens vivant dans une zone ne dépassant pas 365 kilomètres carrés. Cette situation a accentué la pauvreté, la faim et le chômage, et s’est aggravée au fil des ans par les agressions répétées d’Israël, s’est lamentée la déléguée.

Elle a alerté sur les récents développements et, particulièrement, la déclaration de guerre d’Israël à la population civile palestinienne, critiquant la décision d’imposer un siège complet à Gaza, de priver la région d’électricité, d’eau, de carburant et de nourriture, et de transformer une situation déjà dangereuse en catastrophe humanitaire, sanitaire et environnementale. Estimant que « l’occupation coloniale et le régime d’apartheid d’Israël doivent prendre fin » pour que le peuple palestinien puisse vivre en paix et en sécurité, la déléguée a appelé l’ONU et tous les États Membres à faire cesser ces crimes contre l’humanité et à fournir une aide humanitaire immédiate pour sauver des vies.  « Que la paix et l’humanité prévalent, pas la guerre et la vengeance », a-t-elle conclu.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba) s’est félicité des conclusions du rapport du Secrétaire général soulignant les effets préjudiciables de l’occupation israélienne.  Il a réaffirmé son appui sans équivoque aux aspirations du peuple palestinien des territoires occupés, y compris Jérusalem-Est, ainsi que des populations du Golan syrien occupé.  Les pratiques de l’occupant, a-t-il poursuivi, ont eu un effet très sérieux sur le développement économique et social palestinien, ainsi que sur l’exercice de leurs droits fondamentaux, entravant la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le délégué a rappelé que la colonisation continue va contre le droit international humanitaire et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  De plus, a-t-il déclaré, les colonies de peuplement israéliennes n’ont « aucune valeur juridique » et constituent une violation flagrante -ainsi qu’un grave préjudice- à la solution des deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le représentant a encouragé tous les États Membres et les organisations internationales indépendantes à poursuivre des politiques permettant de faire respecter les obligations au titre du droit international, s’agissant des pratiques israéliennes illégales dans les territoires occupés, y compris l’exploitation des ressources naturelles.  Il a aussi exigé d’Israël qu’il cesse d’exploiter et de mettre en danger les ressources naturelles palestiniennes.

Au nom du Groupe des États arabes, Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a souligné, comme l’a fait la Ligue des États arabes, l’importance d’arrêter immédiatement la guerre israélienne dans la bande de Gaza afin d’éviter une escalade dans la région et de protéger la population civile, conformément au droit international.  Elle a fait part de sa profonde préoccupation au sujet de l’impact des activités d’Israël sur les populations et a réaffirmé que tant que cette occupation continuera, elle aura des répercussions sur les peuples occupés. 

La représentante a réitéré le droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination et à sa souveraineté sur les ressources naturelles.  Elle a également dénoncé les violations constantes des droits des Arabes dans le Golan syrien occupé par les autorités israéliennes, et la violation constante du droit international par Israël, qui continue à créer des colonies.  Le Groupe des États arabes, a-t-elle conclu, demande à la communauté internationale de respecter ses engagements pour qu’Israël assume la responsabilité de ces violations, conformément à la Charte des Nations Unies.

Parlant au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), M. KHALID SALEH SAID AL RUBKHI (Oman) a exprimé son inquiétude face aux graves violations mentionnées dans le rapport.  Soulignant l’impact négatif de l’occupation sur les conditions de vie des personnes concernées, le représentant a appelé à une cessation immédiate de la « guerre israélienne » et a mis en garde contre les répercussions humanitaires et sécuritaires si l’escalade devait se poursuivre.  Il a appelé à la levée du blocus de Gaza, à une assistance humanitaire, ainsi qu’à l’envoi immédiat de nourriture, d’électricité, d’eau et de carburant dans l’enclave.  Il a aussi préconisé une intervention financière adéquate de la communauté internationale et des États arabes pour faire face aux défis actuels.

Insistant sur l’urgence de la situation, le représentant a déclaré que les civils doivent être protégés à tout prix et a réaffirmé l’importance du droit au retour et à la compensation financière pour les réfugiés.  Prônant une solution globale conforme aux résolutions de l’ONU et à l’Initiative de paix arabe, il a réaffirmé le soutien total de son groupe aux efforts des Palestiniens pour établir un État indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale.

M. TALAL ABDULAZIZ M H AL-NAAMA (Qatar) s’est déclaré contre l’évacuation du Nord de la bande de Gaza, qui ne fera, selon lui, qu’empirer la situation.  Il a réclamé aussi l’ouverture d’un corridor d’aide humanitaire pour apporter de l’aide alimentaire, sanitaire, et évacuer la population civile.  Il a dénoncé les résultats contenus dans le rapport du Secrétariat faisant état de mesures arbitraires adoptées contre les prisonniers Palestiniens et la poursuite de la colonisation, entre autres.  Ces pratiques stoppent le développement palestinien et contribuent à la fragmentation de la Palestine et de son peuple. Le délégué s’est opposé à un « châtiment collectif » infligé aux habitants de la bande de Gaza, une des zones les plus densément peuplées au monde.  Il a réaffirmé l’appui du Qatar au développement économique et social de la Palestine, mentionnant la contribution financière qatarie pour la réaliser, ainsi que la nécessité, pour Israël, de revenir aux frontières d’avant 1967.

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL (Cubaa condamné énergiquement les assassinats de civils et d’enfants, ainsi que les bombardements aveugles de la bande de Gaza et les privations multiples subies par sa population.  Il a lancé un appel urgent au cessez-le-feu ainsi qu’à une intervention humanitaire immédiate sur ce territoire.  Le scénario actuel doit cesser, a-t-il insisté, appuyant les efforts de négociation afin que cesse l’escalade de la violence.  Il a réitéré sa position en faveur d’une solution à deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.  Il a enfin dénoncé les graves conséquences économiques de l’occupation israélienne et appuyé les exigences du Gouvernement syrien de récupérer les hauteurs du Golan.

M. WISSAM AL NAHHAS (République arabe syrienne) a commencé par affirmer son soutien au peuple palestinien, estimant que « ce qui se passe aujourd’hui dans les territoires occupés est le résultat de décennies d’occupation coloniale et d’agression ».  Il a souligné que les Palestiniens étaient privés de leur droit à l autodétermination et faisait face à une campagne violente ciblant des infrastructures civiles. Il a dénoncé les récents actes d’agression israéliens, tant sur le territoire palestinien que dans le Golan syrien, ainsi que l’attaque récente d’un aéroport civil en Syrie.

Il a également fustigé le pillage des ressources palestiniennes et syriennes par Israël et a appelé à un arrêt immédiat de ces pratiques.  Remerciant la CEDEAO pour son soutien, le délégué a insisté sur l’importance d’appliquer les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale des Nations Unies, et a appelé à une solution globale qui respecte les droits des Palestiniens et des Syriens.

Mme TAHEREH JALILI (République islamique d’Iran) s’est alarmée de la situation à Gaza depuis le 7 octobre, aggravant encore le constat fait par le rapport présenté aujourd’hui.  Rappelant que plus de 2 000 personnes ont été tuées, dont plus de 1 000 enfants, par le régime israélien, elle a dénoncé les conditions de vie terribles imposées par le blocus inhumain.  Selon elle, ces actes violent le droit international, et la communauté internationale, par son inaction, s’en rend complice.

Observant que le peuple palestinien est privé du droit inaliénable à la libre détermination et subit la catastrophe humanitaire en cours, la représentante a également abordé l’intégrité territoriale de la Syrie et condamné toutes les tentatives du régime israélien pour saper celle-ci.  Enfin, elle a appelé à des mesures rapides et efficaces pour forcer Israël à respecter ses obligations internationales et à renoncer à ses actes d’agression.  Sans quoi l’on assistera à « une catastrophe humanitaire qui aura de graves conséquences sur la paix, la sécurité et la stabilité internationales », a-t-elle averti.

M. HASAN BADRI MHALHAL AL-KHALIDI (Iraq) a noté que les violations constantes du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme par Israël dégradent la situation économique et sociale et les conditions de vie des Palestiniens.  Il a dénoncé les pratiques des colons qui usurpent les droits des Palestiniens sur leurs terres et leurs ressources naturelles et les pratiques coloniales dans Jérusalem-Est.  Un juste règlement de la situation donnera aux Palestiniens leurs droits sur leurs terres et leur eau et leur permettra d’être indemnisés, a dit le représentant, qui a appelé les organisations internationales à faire tout ce qui est possible pour atténuer les souffrances du peuple palestinien et de la population occupée dans le Golan syrien.

M. AL SAUD (Arabie saoudite) a relevé les violations constantes du droit international par Israël et a rappelé que l’Arabie saoudite a toujours été aux cotés des Palestiniens pour le rétablissement de leurs terres et de leurs droits légitimes.  Le représentant a condamné les mesures unilatérales visant à saper la solution des deux États.  Aucun développement n’est possible sans solution juste et durable répondant aux revendications légitimes des Palestiniens, a-t-il ajouté.

L’Arabie saoudite continue à soutenir le peuple palestinien par le biais de programmes de développement et de l’aide humanitaire, en particulier en donnant des ressources à l’UNRWA.  Elle suit de très près l’évolution des affrontements et estime que l’occupation armée israélienne est la cause profonde du conflit israélo-palestinien. Le représentant a appelé à un cessez-le-feu immédiat et a condamné le déplacement des civils de Gaza.  Il a également appelé la communauté internationale à mettre en œuvre une solution crédible pour parvenir à la paix, à la stabilité et au développement durable de la région. 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a déploré la détérioration de la situation humanitaire dans la région et mis en contexte le fait que depuis 75 ans, les Palestiniens sont privés du droit à un État indépendant.  Il a aussi condamné les « horribles attaques » de la semaine dernière et appelé sans équivoque à un cessez-le-feu.  Enjoignant à se saisir des causes profondes du conflit enraciné, il a dénoncé les violations du droit international que sont les politiques israéliennes telles que l’expansion des colonies, les restrictions de mouvement, ainsi que le « châtiment collectif » infligé à la population palestinienne, au nom de la sécurité.  Il a établi un lien de cause à effet entre la dernière explosion de violence et les discriminations dont les Palestiniens sont victimes depuis de trop nombreuses années.

M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (État plurinational de Bolivie) a qualifié le traitement des Palestiniens de « génocide systématique » et estimé que les actes d’Israël sont incompatibles avec ceux d’un État démocratique.  « Couper l’eau et l’aide alimentaire à Gaza participe d’un manque d’humanité, d’une politique cruelle et d’une volonté d’instaurer l’apartheid », s’est indigné le représentant.  Israël doit cesser immédiatement la poursuite de la colonisation, car une solution durable ne sera possible que lorsque toutes les vies humaines de la région seront traitées sur un pied d’égalité, sans considération économique ou politique préalable, a-t-il ajouté.

Mme HALA HAMEED (Maldives) s’est alarmée de ce que les Palestiniens soient piégés dans un cycle sans fin de désespoir et de destruction.  Faisant siennes les paroles du Président palestinien, il a souligné la responsabilité collective de la communauté internationale et rejeté ensuite catégoriquement le meurtre des civils des deux côtés, car elles sont contraires à la morale, à la religion et au droit international.  La déléguée a dénoncé l’ordre intimée par l’armée israélienne à 1,2 million de civils gazaouis, de se réfugier dans le sud du territoire en seulement 24 heures.  Cet ordre, a-t-elle insisté, constitue une violation manifeste du droit international, mais aussi une grave menace pour d’innombrables civils palestiniens innocents, et parmi eux de nombreux enfants.  Elle a déploré les attaques indiscriminées qui ont déjà causé la perte de centaines de vies innocentes et des dégâts considérables aux infrastructures essentielles, comme les hôpitaux, les écoles et les installations des Nations Unies.  La déléguée a appelé à la levée du blocus de Gaza pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.

Elle a appelé la communauté internationale à prendre toutes les mesures possibles pour mettre fin aux attaques en cours contre des civils innocents et a réaffirmé l’engagement sans faille de son pays en faveur du peuple palestinien.  Enfin, elle a réclamé une solution durable au conflit via l’établissement d’un État palestinien indépendant et souverain, basé sur les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.

Après avoir présenté ses condoléances pour les pertes civiles dans la crise actuelle, Mme AL HAMMADI (Émirats arabes unis) a insisté sur l’importance de leur protection, comme l’exige le droit international.  Dénonçant les souffrances socioéconomiques de la population palestinienne, elle s’est particulièrement émue de l’effondrement de certains secteurs vitaux comme la santé et l’éducation.  Elle a précisé que son pays a versé à la Palestine une somme de 750 millions de dollars de 1996 à 2023, alors qu’une aide supplémentaire de 180 millions de dollars est prévue cette année.

La déléguée a également dénoncé les conditions de vie à Gaza, où les hôpitaux sont surchargés et les enfants privés de ressources essentielles, en violation de l’article 33 de la Convention de Genève.  Elle a insisté sur la nécessité de mettre fin à la guerre et de rétablir le calme pour protéger la perspective d’une solution à deux États, soulignant l’engagement de son pays à travailler avec les partenaires régionaux et internationaux à une solution juste, pacifique et durable.  En conclusion, elle a réaffirmé la solidarité de son pays avec le peuple palestinien et a encouragé les efforts visant à faire baisser la tension.

De l’avis de M. EMIL BEN NAFTALY (Israël), le projet de résolution de la Deuxième Commission à l’examen n’est pas impartial en raison de son sujet et de son contenu.  Et ce dans le contexte d’attaques commises par le Hamas dans tout Israël, a souligné le représentant, dénonçant les meurtres aveugles et le kidnapping de personnes innocentes, dont des femmes et des bébés.  Le représentant s’est demandé si la CESAO réfléchissait au « contenu de mauvaise foi » dans son rapport, où le Hamas n’est mentionné qu’une fois en bas de page.  Le Hamas vise la destruction d’Israël et la CESAO l’aide par son silence, a accusé le représentant.  Il a encore déploré que la CESAO propage des faits erronés et de faux espoirs en mentionnant chaque année que la situation va s’améliorer d’elle-même, ce qui ne fait qu’aggraver les choses.  « On incite à la haine et à la violence, parfois dans cette enceinte même », a lancé le représentant aux délégations.

Mme ALMEZYAD (Koweïta exprimé sa préoccupation face à l’escalade militaire dans le Territoire palestinien occupé et dans le Golan syrien occupé.  Elle a rappelé que le Koweït avait toujours soutenu les droits du peuple palestinien à l’arrêt de l’occupation israélienne et à un État indépendant, conformément aux résolutions pertinentes des Nations Unies.  La représentante a noté que la destruction de propriétés et de logements dans les territoires occupés est devenue « une manière de vivre à laquelle les Palestiniens se sont malheureusement habitués ».  Elle a appelé à la levée du blocus afin que les médicaments, la nourriture et l’eau parviennent jusqu’aux Gazaouis.  Elle a réaffirmé l’appui du Koweït à toutes les mesures prises par l’État de Palestine pour garantir sa souveraineté sur ses ressources naturelles et à celles du Conseil de sécurité pour trouver une solution politique à ce conflit.

Mme ASBINA MARIN SEVILLA (République bolivarienne du Venezuela) a dénoncé l’intensification du blocus de Gaza, lequel ne fait qu’aggraver encore les conditions de vie de la population civile.  Elle a appelé à l’arrêt des violences et réclamé une aide humanitaire en faveur des Palestiniens.  S’alarmant devant l’horreur et l’ignominie de la Puissance occupante, elle a souligné que l’occupation est le principal obstacle au développement durable de la Palestine et de son peuple, dont les droits sont bafoués depuis 1967, y compris via l’exploitation de son eau, dont Israël conserve le contrôle total, au mépris du droit international.  Elle a aussi dénoncé l’expansion des colonies ainsi que l’exploitation des ressources naturelles en Cisjordanie.  La déléguée a enfin appelé à la cessation des relations commerciales avec les entreprises installées dans le Territoire occupé.

Mme ALBINKHALIL (Bahreïna réitéré son soutien total à la création d’un État palestinien, dans les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.  Elle a dénoncé les conditions de vie des Palestiniens qui ont besoin d’une aide humanitaire.  La situation actuelle menace les plus vulnérables, y compris les enfants et les personnes âgées.  La déléguée a enfin brandi le droit des Palestiniens à accéder à leurs ressources naturelles et a préconisé une solution politique, plutôt que militaire, au conflit, afin d’éviter d’alimenter la haine et le terrorisme.

M. MUHAMMAD USMAN IQBAL JADOON (Pakistans’est inquiété du comportement illégal des forces israéliennes et des colons, qui a provoqué la mort de nombreuses personnes.  Il a exprimé sa profonde préoccupation face à ces pratiques et à l’interruption de la fourniture en eau et en électricité à Gaza, ce qui est contraire au droit international.  Le Pakistan, a-t-il dit, exige qu’Israël respecte ses obligations de puissance occupante et demande à l’ONU de jouer un rôle actif pour parvenir à un cessez-le-feu et améliorer la situation humanitaire à Gaza.  Nous restons, a conclu le représentant, attaché à la solution des deux États.

M. GOLAM FARUK KHANDAKAR PRINCE (Bangladesha rappelé que, chaque année, l’Assemblée générale, par une résolution de la Deuxième Commission, exige qu’Israël, Puissance occupante, cesse d’exploiter, d’endommager et de mettre en péril les ressources naturelles du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et du Golan syrien occupé.  Or, l’objectif de cette résolution n’a toujours pas été atteint puisque l’occupation et le blocus de Gaza se poursuivent, tout comme les meurtres et les hostilités insensées à l’encontre du peuple palestinien.  Le tissu socioéconomique de Gaza est sur le point de se déchirer en raison de l’impact cumulé du blocus et des restrictions au commerce et à l’accès aux ressources.  La campagne militaire disproportionnée et aveugle menée actuellement à Gaza génère un risque grave de détérioration de la situation socioéconomique du territoire.

Pour parvenir au développement durable, le peuple palestinien et la population arabe du Golan syrien occupé doivent avoir accès à la terre, aux produits agricoles et aux ressources naturelles vitales telles que l’eau.  Ils doivent surtout en avoir le contrôle, a insisté le délégué qui a appelé à un cessez-le-feu immédiat à Gaza pour sauver la vie et les moyens de subsistance de plus de 2 millions de Palestiniens.

Mme CAROLYN RODRIGUES-BIRKETT (Guyana) a appelé à un arrêt immédiat des hostilités et soulignant que la violence n’est jamais la solution, elle a appelé à des mesures d’urgence pour le retour des parties à la table des négociations.  La solution des deux États demeure la seule porte de sortie à ce conflit, a-t-elle dit, avant d’appeler les deux parties à épargner les civils et à faire en sorte que les Palestiniens puissent de nouveau exploiter leurs ressources naturelles.  Il ne peut y avoir de paix sans développement durable, ni de développement durable sans paix.

Mme YANG AISHAH BINTI ADNAN (Malaisie) a dénoncé l’oppression et les discriminations systématiques dont sont victimes les Palestiniens et la confiscation de leurs biens et de leurs terres qui de toute évidence sont incompatibles avec la réalisation de la paix. Ignorer le sort des Palestiniens est une faute morale, a-t-elle lancé, en appelant la communauté internationale à mettre fin à l’occupation et à appliquer les résolutions pertinentes des Nations Unies.  La crise financière qui frappe l’UNWRA aggrave encore une situation économique déjà critique pour les Palestiniens, a fait observer la représentant, avant d’appeler les États Membres à se montrer généreux.

M. DWI WISNU BUDI PRABOWO (Indonésie) a jugé décourageant de constater qu’aucun progrès important ne peut être accompli. Il s’est dit profondément préoccupé par les événements des derniers jours et a appelé au respect du droit international, notamment humanitaire, et à l’arrêt immédiat des hostilités.  Toutes les mesures possibles doivent être prises pour éviter une dégradation de la situation, a demandé le représentant, appelant les parties à trouver une solution qui permette la survie des civils. En outre, les pays doivent continuer à apporter leur soutien à l’UNRWA, car le nombre de réfugiés explose et l’Office de secours a besoin de ressources durables.

M ISMAÏL MERABET (Algérie) a dénoncé l’agression israélienne qui prend les civils pour cibles dans les bombardements.  Le représentant a condamné les pratiques israéliennes, dénonçant des crimes de guerre et de génocide perpétrés par la Puissance occupante. Le rapport de la CESAO concluait déjà que l’occupation a de graves conséquences, a poursuivi le représentant, qui a qualifié de politique immorale d’occupation la confiscation et l’exploitation des ressources naturelles palestiniennes en violation flagrante de leurs droits.  La stratégie d’Israël est de longue haleine, a-t-il relevé, observant des restrictions et des blocages qui empêchent l’État palestinien de se constituer.  Le représentant a réitéré le soutien sans faille de l’Algérie au peuple palestinien et appelé les organisations internationales à apporter un soutien aux civils.

M. ABDULRAHMAN HASAN YAHYA AL-BARATI (Yémen) a appelé à mettre en œuvre les résolutions consacrant la solution des deux États basée sur l’instauration d’un État de Palestine indépendant, selon le tracé des frontières d’avant 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.  Appelant la communauté internationale à faire pression sur Israël pour qu’il cesse l’exploitation des ressources naturelles des territoires occupés par la Puissance occupante, ainsi qu’à la fin des restrictions de mouvement, il a appelé à indemniser les Palestiniens pour ces violations.  Condamnant la prise pour cible des civils, le délégué a aussi appelé à laisser entrer l’aide humanitaire à Gaza et à la libre circulation des habitants afin de cesser de violer la quatrième Convention de Genève. Il a enfin dénoncé la tentative de « changer la démographie » du Golan syrien occupé, et appuyé le droit de la Syrie à reprendre le contrôle de l’ensemble de son territoire selon ses frontières d’avant 1967.

Mme CAO LIWEN (Chinea déclaré que la question n’était plus de savoir si les ODD seraient atteints en Palestine, mais de savoir si la population palestinienne pourrait simplement survivre.  Ce n’est que quand l’injustice historique des Palestiniens sera corrigée que le développement durable pourra y subvenir, a-t-elle pointé.  Pour sa part, la Chine soutient financièrement la Palestine depuis de nombreuses années.

M. MARTHINUS CHRISTOFFEL JOHANNES VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud) a exprimé sa profonde préoccupation face à l’escalade dans le conflit israélo-palestinien et appelé à l’arrêt immédiat des violences et à la retenue.  Il a demandé l’ouverture immédiate et sans conditions de couloirs humanitaires, avant d’attribuer les derniers évènements à l’occupation illégale des terres palestiniennes, à l’expansion des colonies, à la profanation de la mosquée Al-Aqsa et des lieux saints chrétiens, aux violations constantes des droits humains et aux répercussions sociales et économiques des pratiques d’apartheid.  Nous condamnons avec la plus grande fermeté la violence aveugle contre les civils de Gaza et d’Israël, ainsi que les violations par Israël des Conventions de Genève et du droit international humanitaire.  Le représentant a dénoncé le fait que les infrastructures civiles essentielles soient prises pour cible et l’arrêt de la fourniture de nourriture, d’eau, d’électricité et de carburant à Gaza.  L’ordre donné par Israël à 1,1 million de Gazaouis de quitter le nord de la bande de Gaza conduira à une catastrophe encore plus grave, a prévenu le représentant, ajoutant que le déplacement forcé des populations constitue un crime contre l’humanité.  Il a conclu, en appelant à la libération immédiate des otages israéliens retenus à Gaza.

M. GHUWAR (Libye) a fait le parallèle entre la situation actuelle et celle de 1948, quand toute la population palestinienne a été déportée. La communauté internationale, a-t-il rappelé, essaye depuis longtemps de mettre un terme au conflit, mais elle doit reconnaître que le peuple palestinien a le droit de se défendre tant qu’il n’aura pas un État indépendant avec Jérusalem-Est pour capitale.  Des milliers de Palestiniens font l’objet d’un siège, alors que les Israéliens essaient maintenant de les déporter, comme en 1948.  Nous sommes devant, s’est alarmé le représentant, des crimes de guerre et il est surprenant que la communauté internationale ferme les yeux sur cette situation catastrophique.  Cette communauté internationale doit assumer sa responsabilité morale, mettre immédiatement un terme à cette catastrophe, obtenir un cessez-le-feu et fournir une aide humanitaire à la population de Gaza, a martelé le représentant.

M. KEMAL ONUR EKREN (Türkiye) a fait état de la profonde préoccupation de son pays face à l’escalade des tensions en Israël et dans la bande de Gaza. Il a jugé inacceptables les attaques aveugles contre les personnes et les infrastructures civiles.  Il a insisté sur le respect des droits humains en toutes circonstances, et a appelé toutes les parties à la retenue pour éviter tout autre escalade.  Réaffirmant l’engagement diplomatique de la Türkiye pour empêcher que la crise ne déborde sur la scène internationale et n’affecte encore davantage la population de Gaza, il a appelé à un règlement du conflit sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies.

M. AHMED MAGDY MOHAMED RASHAD ABDELAAL (Égypte) a déploré la crise humanitaire grave à laquelle sont confrontés les Palestiniens, en particulier dans la bande de Gaza, en raison de la guerre et d’un siège de 16 ans.  Rappelant que des efforts diplomatiques sont en cours pour contenir l’escalade du conflit, il a appelé la communauté internationale à unir ses efforts pour mettre fin au bain de sang et prévenir tout débordement qui pourrait enflammer la région.  Il a également voulu que l’on soutienne les efforts visant à trouver une solution durable et globale pour toute la Palestine, insistant sur la création d’un État palestinien indépendant dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.

Israël doit mettre fin à ses pratiques coloniales et résoudre les problèmes financiers et économiques en suspens avec l’Autorité nationale palestinienne.  Le blocus israélien sur Gaza est inacceptable, a poursuivi le représentant, avant de réclamer la libre circulation des biens et des services entre la Cisjordanie et Gaza.  Nous appelons la communauté internationale à fournir son soutien aux Palestiniens qui sont maintenant l’objet d’une punition collective.  La résolution du conflit contribuerait à la stabilité et à la sécurité de tout le Moyen-Orient, a-t-il souligné.

M. ASSANE DIOUM (Sénégal) a exprimé sa solidarité avec le peuple palestinien et déploré l’échec de la communauté internationale à trouver une solution permanente à ce conflit.  Il a rappelé le besoin de faire respecter la quatrième Convention de Genève sur la protection des civils en temps de guerre et notamment son article 27, qui prévoit les obligations de tout État occupant de respecter la protection ainsi que le droit à l’aide humanitaire des peuples occupés.  Le délégué a réclamé « de la sagesse » et la fin des affrontements, sans quoi les conséquences seraient gravissimes.  Selon lui, la seule solution réside dans le respect des traités et conventions du droit international humanitaire.  Imposer une punition collective, un siège à toute une population est en fait « l’exact opposé du développement durable », a-t-il pointé.  Le siège de Gaza est interdit par le droit international, sape le droit des Palestiniens au mouvement et entrave leur accès aux ressources naturelles, a-t-il résumé.

M. ANDREW WEINSTEIN (États-Unisa appelé à ne pas oublier « comment cela a commencé ». Il a condamné avec force les massacres commis par des terroristes en Israël, « une tragédie rappelant de funestes souvenirs ».  Certaines victimes et otages sont américains, a-t-il souligné avant de condamner sans équivoque la « brutalité » du mouvement Hamas.  « Nous » et « les terroristes » sommes fondamentalement différents dans le sens où « nous accordons une importance au principe de dignité », a-t-il estimé.  « Nous ne visons pas délibérément les civils. »

Pour le délégué, c’est sur le mouvement Hamas que repose la responsabilité de cette guerre et Israël a le droit de se défendre face à cette attaque cruelle.  Les États-Unis regrettent les pertes en vie humaines palestiniennes, israéliennes et américaines, a déclaré le représentant.  Toute partie doit respecter le droit international humanitaire, a-t-il aussi déclaré en demandant de ne pas accuser les civils palestiniens du terrorisme du mouvement Hamas.  Le délégué a aussi appelé à des mesures de justice et de liberté pour Israël et Palestiniens.  Il a toutefois recommandé de ne pas se leurrer sur les intentions du Hamas de semer la terreur et le sang, avant de réitérer son soutien à Israël pour que ce dernier puisse se défendre.

M. SIDI MOHAMED LAGHDAF (Mauritanie) a rappelé plusieurs résolutions demandant la protection des ressources naturelles dans les territoires occupés, et a tenu la Puissance occupante pour responsable des abus.  Il a demandé à la communauté internationale d’assumer ses responsabilités et d’adopter les mesures nécessaires dès que possible pour mettre un terme à cette effusion de sang et trouver une solution politique au conflit.

Mme GRACE LOUISE WOOD (Royaume-Uni) a condamné les actes terroristes du Hamas contre Israël et la mort de civils palestiniens et israéliens.  Le Royaume-Uni soutient le droit des Israéliens à se défendre en proportion, en s’assurant que les pertes civiles soient aussi faibles que possible et en permettant l’acheminement de l’aide humanitaire, a déclaré la représentante.

Mme REBECCA SUZANNE BRYANT (Australie) a appelé à protéger la vie des civils et respecter le droit international humanitaire.  L’Australie condamne sans équivoque les actions du Hamas et lui demande de relâcher tous les otages retenus à Gaza, a-t-elle déclaré en précisant: « immédiatement et sans conditions ».  La représentante a estimé que rien ne pouvait justifier l’attaque terroriste menée par le Hamas contre Israël et son peuple et qu’Israël avait le droit de se défendre. Face à la situation humanitaire qui se dégrade rapidement à Gaza, l’Australie, a-t-elle informé, fournit une assistance aux civils touchés par le conflit et appelle à la mise en place rapide d’un couloir humanitaire.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission se penche sur plusieurs défis liés aux droits humains, dont les disparitions forcées et la migration

Soixante-dix-huitième session,
22e et 23e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4384

La Troisième Commission se penche sur plusieurs défis liés aux droits humains, dont les disparitions forcées et la migration

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi, aujourd’hui, son examen de la promotion et de la protection des droits de l’homme en dialoguant avec six titulaires de mandat.  Les échanges avec les délégations ont porté sur les disparitions forcées et les droits des migrants, mais aussi sur la traite des personnes et le processus de réparations pour les victimes de violations graves du droit humanitaire et des droits humains. 

Premier titulaire de mandat à s’exprimer, le Vice-Président du Comité des disparitions forcées a indiqué que son organe a enregistré au cours de l’année écoulée 1 636 demandes d’action urgente au titre de l’article 30 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, un mécanisme qui promeut l’enquête sur les cas de disparitions forcées, la recherche des personnes disparues et la protection des personnes qui font connaître ces faits.  Le recours à cette procédure a permis de localiser 494 personnes disparues, dont 438 en vie, s’est félicité M. Juan-Pablo Albán Alencastro. 

Malgré ces résultats, il a constaté la persistance de défis dans la participation des familles et des proches dans les processus de recherche.  Il a également déploré un déficit global de coopération avec le Comité, dénonçant à cet égard les représailles contre les personnes qui font appel à lui, avant de rappeler aux États qu’ils ont pour obligation de prévenir tout acte d’intimidation à l’encontre des victimes et de ceux qui les assistent, d’enquêter sur toute allégation de commission de tels actes et de punir les auteurs. 

À son tour, la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires a appelé les États à contribuer davantage aux efforts déployés.  Elle a notamment déploré les difficultés auxquelles son organe est confronté dans l’organisation de visites.  En ne s’y pliant pas, les États manquent l’occasion de recevoir une assistance pour la mise en œuvre de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et empêchent les victimes d’exprimer leurs revendications, s’est indignée Mme Aua Baldé. 

La Présidente-Rapporteuse a fait état de 1 103 nouveaux cas de disparitions forcées en un an, parmi lesquels figurent ceux de prisonniers de guerre par les forces armées russes dans le cadre du conflit armé en Ukraine. Selon elle, la pratique des disparitions forcées évolue avec l’essor des technologies de l’information et des communications, lesquelles sont de plus en plus utilisées contre les défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile, y compris les proches des personnes disparues et leurs représentants. 

Les outils numériques constituent aussi une source de préoccupation pour le Président du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.  Alors que nous approchons de l’achèvement de la carte neuronale du cerveau humain, « nous devons veiller à protéger les migrants, comme le reste de la population, afin de protéger leur vie privée et leur identité mentale », a plaidé M. Edgar Corzo Sosa.  À une approche incomplète, focalisée sur l’économie ou la sécurité, s’ajoute une rhétorique xénophobe anti-migrants, a-t-il déploré, jugeant « plus logique, sur le plan migratoire et humanitaire, de promouvoir la paix que de tenter d’expulser des millions de personnes dans le délai souhaité », comme on le voit aujourd’hui dans la bande de Gaza. 

Si les États ont des intérêts légitimes à sécuriser leurs frontières, le droit international indique que ces préoccupations ne peuvent l’emporter sur leurs obligations de respecter les droits humains internationalement reconnus des 280 millions de migrants, a renchéri le Rapporteur spécial sur les droits humains des migrants.  Appelant les États à placer les droits humains au centre de leurs politiques migratoires, M. Felipe González Morales les a aussi incités à ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits humains, en particulier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. 

Principal facteur de migration, les conflits ont été au cœur de l’exposé de la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, qui a souligné l’obligation de rendre compte de la traite des personnes dans les situations de conflit.  Une obligation dont le respect reste limité, réduisant l’accès à la justice pour les victimes de la traite et entraînant des échecs persistants en matière de prévention, s’est désolée Mme Siobhan Mullally.  De cette « défaillance collective », il résulte, selon elle, un manque d’enquête, même de la part des mécanismes de responsabilité établis par le Conseil des droits de l’homme. 

Il importe de donner la priorité aux victimes, femmes et filles au premier chef, a pour sa part plaidé le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, venu présenter un rapport consacré au financement des réparations pour les victimes de violations graves du droit humanitaire et des droits humains.  Pour M. Fabian Salvioli, les réparations pour les survivants et leurs proches constituent la forme de réponse «  la plus urgente, la plus transformatrice et la plus vitale  ». 

Pour financer l’octroi de réparations aux victimes, le Rapporteur spécial a appelé les anciennes puissances coloniales à créer des fonds spéciaux et à envisager des mécanismes tels que l’annulation de la dette contractée illégitimement pendant la colonisation.  Il a suggéré de procéder de la même façon avec les avoirs gelés et les sommes collectées grâce aux sanctions contre des personnes impliquées dans des violations des droits humains.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 17 octobre, à partir de 10  heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandats au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies par un dialogue interactif

Exposé

M. JUAN-PABLO ALBÁN ALENCASTRO, Vice-Président du Comité des disparitions forcées, a présenté son rapport annuel d’activité, l’occasion pour lui d’encourager les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier ou à adhérer à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.  Il s’agit, a-t-il dit, de donner plus de force et de légitimité au corpus juridique international de protection dans ce domaine, un engagement que 72 États à travers le monde ont déjà pris à ce jour.  Au cours de la période écoulée, a expliqué M. Albán Alencastro, le Comité a examiné les rapports initiaux soumis par la République tchèque, le Mali et le Costa Rica, ainsi que les réponses à la liste des problèmes soumis par la Zambie en l’absence d’un rapport initial.  Dans ce cadre, il a tenu des dialogues constructifs avec ces quatre États et a adopté des recommandations pour un suivi approfondi des mesures de mise en œuvre.  Le Comité a d’autre part examiné des informations supplémentaires soumises par différents États, dont l’Ukraine, adopté des listes de questions à soumettre à d’autres pays et envoyé des rappels aux États parties dont les rapports sont en retard. 

À ce jour, a précisé le Vice-Président, le Comité a enregistré 1 636 demandes d’action urgente au titre de l’article 30 de la Convention, un mécanisme qui promeut l’enquête sur les cas de disparitions forcées, la recherche des personnes disparues et la protection des personnes qui font connaître ces faits ou qui s’impliquent dans les efforts d’enquête et de recherche au niveau local.  Le recours à cette procédure a permis de localiser, au 1er octobre 2023, 494 personnes disparues, dont 438 en vie, a-t-il indiqué. 

Malgré ces résultats, M. Albán Alencastro a déploré un déficit de coopération avec le Comité, un manque de coordination entre les autorités responsables de l’enquête et de la recherche, ainsi que des défis dans la participation des familles et des proches des personnes disparues dans les processus de recherche.  Autre source d’inquiétude: les représailles contre les personnes qui font appel au Comité. Les États, a-t-il rappelé à ce sujet, ont pour obligation de prévenir tout acte d’intimidation et de harcèlement à l’encontre des victimes et de ceux qui les accompagnent ou les représentent, d’enquêter sur toute allégation de commission possible de tels actes et de punir les auteurs.

Le Vice-Président est ensuite revenu sur plusieurs décisions et visites du Comité. Il a notamment évoqué le déplacement du Comité en Iraq, en novembre 2022, qui a donné lieu à un rapport de visite reconnaissant la coopération de l’État partie pour l’accomplissement de cette mission.  Il a cependant fait état d’une série de recommandations visant à soutenir cet État et les autres acteurs intéressés dans la prévention et l’éradication des disparitions, la lutte contre l’impunité et la satisfaction des droits des victimes.  En ce qui concerne le mécanisme de visites de pays, il a dit être toujours en attente d’une réponse positive de la part de la Colombie. 

M. Albán Alencastro s’est par ailleurs félicité de la tenue de réunions productives avec les États parties et non parties à la Convention, les organes conventionnels et les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, les bureaux du système des Nations Unies, les organismes régionaux des droits de l’homme, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), les organisations de la société civile et, « par-dessus tout », avec les victimes.  Il a ajouté que le Comité a adopté sa première observation générale, relative aux disparitions forcées dans le contexte de la migration, et a continué de travailler sur son projet de déclaration sur les disparitions forcées dites à court terme, en collaboration avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées et involontaires.

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, le Japon a insisté sur la nécessité de promouvoir une plus grande universalisation de la Convention.  La Colombie s’est, pour sa part, enquise de l’état d’avancement des progrès observés en matière de ratification des instruments. Après avoir appelé tous les États parties à « coopérer sincèrement » avec le Comité pour garantir le droit des victimes à la justice et la réparation, l’Union européenne a souhaité savoir ce que l’organe compte faire avec les États parties qui ne coopèrent pas en ne répondant pas à ses demandes ou n’assurant pas un suivi de ses recommandations. 

Quelles sont les stratégies les plus efficaces pour garantir une ratification universelle de la Convention et comment les États et l’ONU peuvent-ils coopérer pour promouvoir une plus grande adhésion à cet instrument international?, a demandé l’Argentine, après avoir indiqué que, 40 ans après la fin de la dictature dans le pays, elle poursuit ses enquêtes pour faciliter les recherches de personnes disparues.  Elle a ajouté qu’avec la France et le Maroc, elle a présenté à nouveau la résolution relative à la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, afin de sensibiliser et de promouvoir la ratification universelle.  L’Ordre souverain de Malte a ensuite interrogé le Vice-Président du Comité sur la manière de favoriser une plus grande collaboration de la société civile, du secteur privé et des États parties en vue d’optimiser la mobilisation de ressources et l’échange d’expertise. 

Certains pays ont tenu à insister sur la spécificité de leur situation. C’est le cas notamment de l’Ukraine, qui a fait savoir que des citoyens ukrainiens enlevés par la Fédération de Russie transitent par le Bélarus.  Elle a appelé à aider le Comité à accomplir son mandat et à prendre en compte les notifications sur les crimes russes.  L’Iraq a, quant à lui, fait part de son mécontentement, assurant avoir facilité la visite du Comité et lui avoir apporté des réponses, ce qui, selon lui, n’est pas mentionné dans le rapport de l’organe.  La délégation a par ailleurs déclaré avoir présenté des demandes au sujet de l’enregistrement de certaines allégations contre l’Iraq, « dont certaines remontent à des éléments fondés sur une collaboration avec des terroristes, en particulier avec l’EIIL ».  À cet égard, elle a souhaité savoir quels sont les critères retenus par le Comité pour accepter des demandes au titre de l’article 30 de la Convention et comment le Comité décide de clôturer un cas.  Plus conciliant, le Mexique a réitéré sa politique d’ouverture à l’examen international et de collaboration avec les mécanismes des droits de l’homme.

Reprenant la parole, le Vice-Président du Comité des disparitions forcées a indiqué que la seule façon d’adopter des mécanismes de prévention est de faire en sorte que les États créent des structures internes dédiées à cette question. Il a insisté sur le fait que le manque de ressources entrave la promotion de la Convention sur les disparitions forcées et empêche d’adopter des procédures urgentes.  Afin de promouvoir la ratification et l’universalisation de la Convention, dont les objectifs ne sont pas atteints, M. Albán Alencastro a appelé à soutenir la convocation l’an prochain d’une conférence internationale sur la question de la ratification.  Il s’agit de faire comprendre l’importance de l’adhésion à ce traité, compte tenu de l’absence de mécanisme de rapport périodique, qui entraîne une charge de travail accrue pour les États, a-t-il expliqué. 

Répondant à l’Iraq, concernant le rapport du Comité, le Vice-Président a réaffirmé son appréciation pour les efforts de cet État partie et a assuré que le but du Comité est de soutenir les États.  S’adressant à l’Ukraine, il a rappelé que la Fédération de Russie n’est pas partie à la Convention, avant d’indiquer qu’une discussion plus approfondie aura lieu lors de la présentation par l’Ukraine de son premier rapport dans le cadre de la Convention.  M. Albán Alencastro a ensuite salué le travail de la Colombie et les mesures mises en place par ce pays, notamment un mécanisme national de recherches.  Il lui a demandé d’accepter l’organisation d’une visite du Comité sur place pour lui apporter un plus grand soutien.  À cet égard, il a rappelé qu’un guide pratique sur la Convention a été édité par le Comité pour aider les États, notamment ceux qui prévoient de ratifier la Convention en 2024.  Enfin, il a dit vouloir soutenir le Mexique face aux défis importants auxquels il doit faire face, comme le reflète le rapport. 

Exposé

Mme AUA BALDÉ, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a commencé par se féliciter de la composition exclusivement féminine du Groupe de travail, fait unique dans l’histoire de cette instance créée en 1980.  Elle a ensuite constaté que, bien que le Groupe de travail soit le plus ancien mandat thématique des procédures spéciales, la question des disparitions forcées demeure plus que jamais d’actualité, avec de nouvelles modalités et formes de disparition, notamment dans le contexte de mesures antiterroristes ou de lutte contre la criminalité organisée. 

S’appuyant sur la Convention de 2006 et la Déclaration de 1992, Mme Baldé a rappelé qu’aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier une disparition forcée, l’interdiction de cette pratique relevant du jus cogens.  Malgré cela, le rapport annuel présenté le mois dernier au Conseil des droits de l’homme fait état de 1 103 nouveaux cas de disparition forcée transmis à 28 États, dont 791 transmis en procédure d’urgence à 15 États, a-t-elle fait observer.  Selon la Présidente, la grande majorité des cas transmis concernent des rapports reçus par le Groupe de travail sur des disparitions forcées de civils et de prisonniers de guerre imputées aux forces armées russes dans le cadre du conflit armé en Ukraine. 

Si la criminalisation, les représailles et le harcèlement à l’encontre des familles à la recherche de leurs proches demeurent le modèle courant, ces pratiques évoluent et nécessitent de nouvelles réponses et approches de la part du Groupe de travail et de la communauté internationale, a souligné Mme Baldé.  C’est pourquoi, a-t-elle indiqué, le Groupe de travail a conduit une étude thématique sur les nouvelles technologies et les disparitions forcées.  Présentée le mois dernier au Conseil des droits de l’homme, cette étude apporte un éclairage sur la manière dont les nouvelles technologies sont utilisées contre les défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile, y compris les proches des personnes disparues et leurs représentants, et sur les types de stratégies de protection existants ou pouvant être mis en place.  Elle vise aussi à faciliter la recherche des personnes disparues, en veillant à ce que leur sort et le lieu où elles se trouvent soient établis rapidement et de manière fiable, et à faire en sorte que les responsables rendent des comptes, a-t-elle expliqué. 

Après avoir noté que l’année 2024 sera consacrée à la corrélation entre les élections et les disparations, avec un appel à contributions lancé aux États, Mme Baldé a fait état des visites du Groupe de travail en Uruguay et au Honduras dans le cadre de son mandat de suivi.  Déplorant les difficultés croissantes auxquelles le Groupe de travail est confronté dans l’organisation de visites, elle a rappelé que ces déplacements servent à mettre en lumière les pratiques des pays en matière de lutte contre les disparitions forcées.  En ne s’y pliant pas, les États manquent l’occasion de recevoir une assistance pour la mise en œuvre de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et empêchent les victimes d’exprimer leurs revendications, a-t-elle regretté. 

Signalant, par ailleurs, les activités de coopération technique entreprises au cours de la période considérée avec le Chili, l’Égypte, le Mexique, la République démocratique populaire lao et la Thaïlande, la Présidente-Rapporteuse a souligné l’importance capitale de la coopération des États.  À cet égard, elle a appelé tous ceux qui ne l’ont pas encore fait à ratifier ou adhérer à la Convention et à reconnaître la compétence du Comité des disparitions forcées. 

Dialogue interactif

Après cet exposé, la Croatie a indiqué qu’elle recherche toujours 1 805 personnes portées disparues.  Elle s’est félicitée de l’introduction de nouvelles technologies dans ce domaine, notamment pour l’identification des corps.  Après avoir encouragé les États à accepter les visites sur leur territoire, l’Argentine a voulu connaître l’approche adoptée par le Groupe de travail dans le cadre de son rapport thématique sur les disparitions forcées et les élections.  L’Union européenne s’est plus spécifiquement inquiétée des disparitions de journalistes et de défenseurs des droits humains, avant d’inviter à son tour tous les États à répondre aux communications et demandes de visite du Comité. Elle a souhaité savoir comment les nouvelles technologies peuvent permettre d’obtenir des éléments de preuve. S’alarmant de la recrudescence du phénomène des disparitions forcées, la France a appelé tous les États à ratifier et mettre en œuvre la Convention, qui fête ses 13 ans. Elle a demandé à la Présidente-Rapporteuse comment coordonner tous les acteurs travaillant sur la question de l’usage des nouvelles technologies dans le cadre des disparitions forcées.  La Belgique s’est inquiétée du nombre important d’États ne donnant pas suite aux demandes de visite, avant de s’interroger sur les moyens d’intensifier la coopération entre le Groupe de travail et le Comité des disparitions forcées. 

Le Japon a ensuite exprimé sa préoccupation face aux enlèvements de ressortissants étrangers, notamment de Japonais enlevés par la République populaire et démocratique de Corée (RPDC), exhortant ce pays à appliquer l’Accord de Stockholm sur cette question.  Le Chili a, lui, rappelé que, le 30 août dernier, le Président chilien a signé un décret donnant un caractère officiel au plan de recherche élaboré avec le Groupe de travail.  Il a indiqué que sur les 1 500 personnes disparues pendant la dictature, seulement 300 ont été retrouvées.  Il s’est, par ailleurs, réjoui d’avoir accueilli le Groupe de travail en février dernier.  Le Pakistan a précisé qu’au 31 décembre 2022, la commission nationale en charge de cette question avait réglé 15% des cas soumis par le Groupe de travail.  Dénonçant d’autre part les crimes contre l’humanité commis par la puissance occupante au Jammu-et-Cachemire, notamment les disparitions forcées, il a indiqué que 7 000 tombes anonymes n’ont pas fait l’objet des enquêtes nécessaires, avant de demander quelles réparations pouvaient être fournies aux familles des victimes.  De son côté, le Maroc s’est félicité du fait que 98 États Membres aient signé la Convention et que 72 l’aient ratifiée ou y aient accédée, appelant tous les États à faire de même.  Après avoir demandé des exemples de bon usage des nouvelles technologies dans les efforts de recherche, il a voulu avoir des précisions sur la conférence internationale attendue l’an prochain. 

Les États-Unis ont, eux, demandé au « régime d’Assad » de donner des informations sur le sort de 96 000 personnes portées disparues en Syrie.  Ils ont aussi demandé à la RPDC et à la République démocratique populaire lao des informations sur le sort de défenseurs des droits humains, avant de s’inquiéter des disparations forcées d’Ukrainiens emmenés en Russie, notamment d’enfants, s’interrogeant sur ce que la communauté internationale peut faire à ce sujet.  La République populaire et démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les accusations infondées du Japon et des États-Unis qui « s’efforcent de créer une atmosphère d’hostilité » contre elle.  Elle a estimé que la question soulevée par le Japon a déjà été réglée par les « mesures raisonnables » prises par la RPDC, accusant Tokyo d’instrumentaliser cette question pour dissimuler ses crimes de guerre, notamment l’enlèvement forcé de 200 000 femmes transformées en esclaves sexuelles.  Le Myanmar a indiqué que, depuis le coup d’État militaire de février 2021, les disparitions forcées sont devenues fréquentes pour instiller la peur dans le pays.  Appelant la communauté internationale à aider à mettre fin au régime militaire, il a voulu connaître les recommandations de la Présidente-Rapporteuse sur les cas de disparitions forcées dans ce type de configuration. 

La Chine a, pour sa part, indiqué qu’elle fournit les informations nécessaires aux procédures spéciales pour qu’elles ne soient pas mal informées. Elle a néanmoins regretté les informations fausses que contient le rapport du Groupe de travail et a souhaité que ce dernier engage une relation constructive avec les États Membres. Rejetant catégoriquement les allégations des États-Unis, elle a accusé ce pays de diffamer la Chine et d’utiliser les droits humains comme une arme politique.  La République arabe syrienne a, elle aussi, rejeté les « allégations infondées » des États-Unis, avant de rappeler que le nombre de décès par arme à feu dans ce pays est passé de 33 000 en 2019 à 42 000 en 2022. 

Réagissant aux remarques et questions des délégations, la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires a tout d’abord félicité les États qui ont répondu favorablement à ses demandes de visite, expliquant qu’elles permettent au Groupe de travail d’épauler les États dans leur lutte nationale contre les disparitions forcées. Elle s’est ensuite faite l’écho des nombreuses interrogations liées aux nouvelles technologies, assurant que ces outils se révèlent efficaces dans la lutte contre les disparitions forcées. Le Groupe de travail a cartographié toutes les ressources technologiques gratuites à disposition des proches des victimes, a-t-elle relevé, indiquant toutefois que les nouvelles technologies complètent les techniques traditionnelles de recherche, mais ne les remplacent pas.  Selon elle, les deux méthodes sont complémentaires.

Après avoir remercié des pays comme la France et l’Argentine dans leur appui continu à son mandat et à la ratification universelle de la Convention, Mme Baldé a confirmé que le prochain rapport du Groupe de travail, à paraître en septembre prochain, abordera la thématique des disparitions forcées dans le cadre d’élections.  Parmi les défis traités figurera la responsabilisation des auteurs de telles pratiques, a-t-elle précisé. 

La Présidente-Rapporteuse s’est ensuite déclarée préoccupée par les accusations de fausses informations adressées par plusieurs États Membres au Groupe de travail.  Celui-ci observe pourtant les normes les plus élevées en termes d’impartialité, en cohérence avec le droit international humanitaire, a-t-elle fait valoir. Enfin, Mme Baldé a de nouveau exhorté les États à répondre favorablement aux demandes de visite du Groupe de travail et à ratifier sans délai la Convention, y voyant « le pas le plus important sur le chemin de la lutte contre les disparitions forcées ». 

Exposé

M. FABIAN SALVIOLI, Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, a présenté son rapport, consacré cette année au financement des réparations pour les victimes de violations graves du droit humanitaire et des droits humains.  Il a précisé à cet égard que cette présentation serait sa dernière devant la Troisième Commission, son mandat prenant fin en avril prochain.  À propos de son rapport, M. Salvioli a souligné l’importance des réparations pour les survivants, les membres de la famille des victimes et les communautés touchées, estimant qu’elles peuvent constituer la forme de réponse « la plus urgente, la plus transformatrice et la plus vitale ».  Il a insisté sur la nécessité de donner la priorité aux victimes, en particulier aux femmes et aux filles, dans les décisions relatives aux réparations, notamment l’allocation de fonds et d’avantages pour les réparations communautaires. 

Le Rapporteur spécial a invité les États à budgétiser les ressources nécessaires aux réparations par la création de fonds spéciaux, l’imposition de taxes et l’inclusion de ce poste dans le budget national, afin de garantir un financement pérenne.  Il a aussi demandé aux États d’adopter des mesures complémentaires comme l’utilisation des biens mal acquis des anciens dictateurs, l’obligation de financement imposée aux acteurs non étatiques impliqués dans des violations et l’annulation de dettes illégitimes afin de libérer les ressources nécessaires au paiement des réparations.  Lorsque les États ne sont pas en mesure d’assumer seuls les coûts des programmes de réparations, il est essentiel de trouver d’autres sources de financement, sans diluer la responsabilité de l’État, a-t-il ajouté, invitant les organisations internationales et les donateurs potentiels à prioriser les réparations dans leurs portefeuilles de financement. 

De l’avis de M. Salvioli, les États ayant accès aux avoirs de personnes impliquées dans des violations des droits humains pourraient envisager d’établir des mécanismes de récupération de ces avoirs illégaux pour les allouer au financement de réparations pour les victimes.  Le Rapporteur a suggéré de procéder de la même façon pour les avoirs gelés et les sommes collectées grâce aux sanctions contre des personnes impliquées dans des violations des droits humains.  Pour ce faire, il importe, selon lui, que les États mettent en place des mécanismes solides de transparence et de respect des procédures, et veillent à ce que le fonctionnement de ces mécanismes soit basé sur l’intérêt des victimes.  Il a cependant ajouté que si la confiscation et la réaffectation des avoirs d’un État sanctionné sont envisagées pour financer les réparations en faveur des victimes résidant dans un autre État, alors il faut s’assurer que cette confiscation ne conduira pas à la violation des droits humains de la population de l’État sanctionné.

À cette aune, le Rapporteur spécial a appelé les anciennes puissances coloniales et les États où la colonisation persiste à envisager de mettre en place des mécanismes individuels ou collectifs pour financer l’octroi de réparations aux victimes, notamment une compensation financière, l’annulation de la dette contractée illégitimement pendant la colonisation, et la restitution ou l’indemnisation des terres, des ressources naturelles et du patrimoine culturel.  Si le financement des réparations doit être distingué du financement des programmes de développement, le second ne peut se substituer au premier, a-t-il fait valoir, estimant toutefois que les deux peuvent exister simultanément de manière distincte.  Enfin, M. Salvioli a estimé qu’aucun processus de justice transitionnelle ne peut porter ses fruits si les victimes ne reçoivent pas les réparations auxquelles elles ont droit.

Dialogue interactif

Dans la foulée de cette présentation, le Japon a réfuté l’ensemble des allégations faites par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) au sujet d’enlèvements et disparitions forcées imputées à son pays.  L’Argentine s’est, elle, émue du sort de la communauté LGBT, demandant au Rapporteur spécial quelles mesures peuvent être prises par les États pour répondre aux demandes de réparations des groupes les plus exclus de la société.  Citant le rapport, la Suisse a rappelé que de nombreux programmes de réparations ne bénéficient pas d’un financement adéquat.  Elle a donc voulu savoir comment les programmes de réparations peuvent attirer des financement nationaux et internationaux.  L’Indonésie a ensuite demandé dans quelle mesure la communauté internationale peut imposer des sanctions économiques à certains États sans les empêcher de fournir des réparations, notamment quand les sanctions impactent leur économie.

De son côté, l’Ukraine a rappelé que des centaines de milliards d’euros seront nécessaires à la réparation des villes rayées de la carte par la Fédération de Russie.  Elle a ajouté que, conformément au droit international, celle-ci est tenue d’indemniser toutes les victimes, y compris les victimes de disparitions forcées.  Le Chili a, pour sa part, demandé des exemples de pratique optimale en termes d’intégration du genre dans la lutte contre les disparitions forcées.  Pour finir, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté et condamné les accusations du Japon sur la question des disparitions forcées, appelant ce pays à reconnaître ses crimes de guerre et à présenter ses excuses. 

En réponse à ces questions et remarques, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition s’est félicité de la satisfaction exprimée par un certain nombre de délégations, affirmant s’être évertué à travailler de manière impartiale afin de soutenir les victimes de violations. Il a indiqué à cet égard s’être particulièrement impliqué dans la mise en œuvre de la justice transitionnelle en Indonésie et au Chili. Répondant spécifiquement à la Colombie, il a remercié ce pays de son « esprit d’ouverture », tout en lui rappelant qu’il est nécessaire de faire respecter les normes établies. 

Pour ce qui est des réparations évoquées par plusieurs délégations, M. Salvioli a expliqué qu’elles constituent une préoccupation majeure pour son mandat. Mentionnant l’existence de réparations transformatrices, il a cependant estimé que celles-ci doivent permettre de surmonter les écarts et les inégalités sous peine de voir le problème persister.  En effet, a-t-il ajouté, les réparations doivent non seulement permettre de couvrir les dommages, mais aussi de surmonter les situations d’inégalités.

S’agissant de l’équilibre à trouver en matière de sanctions, pour ne pas saper la capacité de l’État ni affaiblir les droits économiques, sociaux et culturels de sa population, M. Salvioli a reconnu qu’il s’agit de la dimension la plus délicate de son rapport. Selon lui, la communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité de l’ONU, ne doit pas prendre des mesures qui risquent d’engendrer des violations des droits économiques, sociaux et culturels. Toutes les parties doivent agir comme appartenant à un même système, a souligné le Rapporteur spécial. 

Enfin, il a dit avoir eu « le cœur vraiment brisé » en se rendant dans des pays où des processus de transition sont à l’œuvre alors que l’état des victimes va en empirant. « Nous sommes tous responsables de cet état de fait », a-t-il affirmé, avant d'appeler les entités de l’ONU assurant le suivi des processus de justice transitionnelle à donner la priorité aux victimes. À ses yeux, il n’est pas logique que des personnes vivent avec des programmes de justice de transition et que les victimes ne reçoivent rien. « C’est immoral et inacceptable », a-t-il conclu, exhortant les États Membres à « changer la donne ». 

Exposé

M. EDGAR CORZO SOSA, Président du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, a présenté son rapport annuel en constatant que les conditions de vie des migrants sont loin des objectifs de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il a regretté que, s’agissant des migrations, la dimension des droits humains soit largement négligée au profit d’approches centrées sur le développement économique ou sur la sécurité et le contrôle des frontières.  M. Corzo Sosa a également dénoncé la rhétorique incendiaire et xénophobe contre les migrants que des politiciens utilisent pour gagner des voix, à laquelle s’ajoute le contexte inhumain provoqué par les récents conflits. « Il est plus logique, sur le plan migratoire et humanitaire, de promouvoir la paix que de tenter d’expulser des millions de personnes dans le délai souhaité », a-t-il déclaré en référence aux événements de Gaza.  Il a ajouté que les changements climatiques sont à l’origine d’un nouveau front alarmant dans la mobilité humaine, avant d’appeler à la compréhension des pays d’accueil et à la solidarité des pays d’origine et de transit. 

Évoquant ensuite le fonctionnement du Comité, M. Corzo Sosa a indiqué qu’au 20 mai dernier, huit rapports initiaux et 16 rapports périodiques en retard n’avaient pas encore été soumis par les États parties au titre de l’article 73 de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Malgré la récente ratification de la Convention par la Côte d’Ivoire, nous travaillons avec un nombre limité d’États parties, a-t-il expliqué, déplorant l’absence d’activation des procédures de communications individuelles et interétatiques.  Il s’est toutefois félicité de la tenue de plusieurs réunions importantes du Comité, notamment celle de septembre 2022 qui a permis une discussion générale fructueuse sur le projet d’observation générale n°6 relatif à la convergence de la Convention et du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

Après avoir détaillé les rapports examinés par le Comité ainsi que les observations finales approuvées au cours des dernières sessions, M. Corzo Sosa a tenu à remercier le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Volker Türk, pour les efforts qu’il déploie en faveur d’une ratification universelle des traités relatifs aux droits de l’homme, et notamment de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.  Enfin, le Président du Comité a attiré l’attention de la Troisième Commission sur l’avenir des droits humains à la lumière des avancées des technologies de l’information et des communications (TIC), ainsi que de l’intelligence artificielle et les neurosciences.  Alors que nous approchons de l’achèvement de la carte neuronale du cerveau humain, « nous devons veiller à protéger les migrants, comme le reste de la population, afin de protéger leur vie privée et leur identité mentale », a-t-il plaidé. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne s’est déclarée très préoccupée par les disparitions dans un contexte de migrations accrues, indiquant qu’il pouvait s’agir d’enlèvements, mais aussi de traite d’êtres humains. Quelle forme devrait prendre la coopération internationale face à ce phénomène?, a demandé la délégation.  De son côté, El Salvador a souhaité connaître les mesures spécifiques que peuvent adopter les pays d’origine, de transit et de destination, afin de veiller au bien-être de tous les travailleurs migrants dans le cadre d’une migration environnementale, sociale et économique. 

Rappelant que 3,6% de la population mondiale sont des migrants, le Bangladesh a souhaité connaître les stratégies que le Comité prévoit d’adopter alors que de nombreux pays n’ont toujours pas ratifié la Convention internationale.  La Malaisie a ensuite indiqué qu’elle approuve toute initiative régionale susceptible de conduire à des solutions, notamment concernant la traite des travailleurs migrants.  Quels sont les pratiques optimales observées en ce qui concerne la protection des droits des travailleurs migrants et de leur famille? a-t-elle demandé. 

L’Ordre souverain de Malte a, pour sa part, estimé que les discriminations fondées sur le genre ou d’autres facteurs ne devraient pas affecter les travailleurs migrants et leur famille, avant d’appeler à assurer la pleine protection des droits de ces personnes à travers la coopération.  Le Mexique a, quant à lui, interrogé le Président du Comité sur la question de la régularisation mentionnée dans son rapport. Comment peut-on remédier à l’extrême vulnérabilité des travailleurs migrants et de leur famille notamment lorsqu’ils se trouvent en situation irrégulière? lui a-t-il demandé.

Reprenant la parole, le Président du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a évoqué la question des disparitions forcées de travailleurs migrants, indiquant que des mécanismes nationaux ont été mis en place pour éclaircir ces cas.  Il a appelé les États qui ne se sont pas encore dotés de tels mécanismes à le faire sans délai.  Après avoir constaté que les discriminations raciales à l’égard des migrants sont « très répandues », il a fait état de l’élaboration d’une prochaine observation générale du Comité centrée sur cette question, après celle sur la convergence entre la Convention internationale et le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

S’agissant de la mise en place de programmes nationaux de migration visant notamment à la régularisation des sans-papiers, M. Corzo Sosa a appelé à se concentrer sur l’emploi et l’intégration des migrants dans les communautés d’accueil.  Le Président du Comité a ensuite invité les États signataires à aller plus loin en ratifiant la Convention, indiquant qu’un groupe d’ami des pays signataires a été créé à cette fin.  Il a ajouté que des efforts sont aussi déployés en direction des pays non signataires. Il leur est rappelé que les droits humains sont une question transversale et que l’on ne peut pas fermer les yeux sur les droits de l’enfant ou des femmes, a-t-il indiqué.  Une « approche holistique » doit s’imposer en la matière, a conclu le Président, non sans ajouter que tout est fait pour comprendre les préoccupations des pays non signataires. 

Exposé

Mme SIOBHAN MULLALLY, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a indiqué que son rapport fournit une analyse des défis entraînant des lacunes en matière de responsabilité dans les situations de conflit.  À cet égard, elle a insisté sur l’obligation de rendre compte de la traite des personnes dans les situations de conflit, alors que cette dernière demeure limitée, réduisant l’accès à la justice et aux voies de recours pour les victimes de la traite et entraînant des échecs persistants en matière de prévention et de protection.  Dénonçant une « défaillance collective internationale », elle a constaté qu’en l’espèce, l’application effective et intégrale des régimes juridiques internationaux pertinents en matière de droit international n’est pas assurée. De même, elle a déploré l’absence de prise en compte de la traite des personnes dans les processus de rétablissement de la vérité et de responsabilisation de la justice transitionnelle. 

Malgré l’adoption de la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité reconnaissant les actes associés à la traite des personnes dans le contexte d’un conflit susceptible de constituer des crimes de guerre, on relève une absence de signalement ou d’identification de cette violence, laquelle, entraîne la persistance de l’impunité, a encore déploré Mme Mullally.  Observant à ce sujet que la Cour pénale internationale (CPI) n’a pas engagé de poursuites pour le crime de traite des personnes, la Rapporteuse spéciale a appelé l’Assemblée des États parties au Statut de Rome à envisager une modification dudit statut afin d’y inclure une infraction autonome de traite des personnes. 

Après avoir rappelé le rôle des missions d’enquête des Nations Unies, Mme Mullally a regretté que la plupart des mécanismes de responsabilité établis par le Conseil des droits l’homme ne mènent pas d’enquête.  Elle a également constaté que la dimension sexospécifique de la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle ne fait pas non plus l’objet d’une enquête ou d’une documentation systématique.  Face à ces lacunes, elle a insisté sur la nécessité de veiller à l’application globale du droit.

La Rapporteuse spéciale a par ailleurs invité les États, les agences et programmes des Nations Unies, les organisations internationales et les acteurs humanitaires à mettre en place des mécanismes d’enquête systématique sur la traite par le personnel international.  Elle leur a aussi demandé de prendre des mesures proactives pour former le personnel à identifier, aider, protéger et prévenir les victimes et potentiels victimes.  Enfin, Mme Mullally a invité les entreprises à s’engager dans un processus renforcé en matière de droits humains, notamment en intégrant des outils de prévention des atrocités et de prévention des conflits. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne a évoqué sa stratégie de lutte contre la traite des personnes.  Elle a demandé comment mieux protéger les victimes de la traite facilitée par les technologies et leur permettre d’accéder à la justice.  Après avoir appelé à adopter une approche fondée sur la dimension de genre, Malte a voulu connaître les mesures que les États Membres pourraient adopter pour mieux protéger les enfants victimes de la traite dans les situations de conflit armé.  La Grèce a demandé si la traite des êtres humains peut être assimilée à un crime contre l’humanité.  S’inquiétant ensuite de la situation des réfugiés ukrainiens, elle a demandé comment traduire en justice les responsables de la traite dans ce conflit. L’Inde a dénoncé la propagande haineuse du Pakistan à son endroit et a critiqué la situation des droits humains dans ce pays, avant d’insister sur le fait que le Jammu, le Cachemire et le Ladakh font partie intégrante de son territoire.

L’Australie a soutenu la résolution de l’Organisation internationale du Travail (OIT) de mars 2022 sur la protection des travailleurs migrants dans les situations de conflit, notamment en Ukraine.  Elle a également salué le programme de l’ASEAN, d’un montant de 80 millions de dollar, mis en place depuis 2018 pour lutter contre la traite des personnes, avant de s’interroger sur la mise en œuvre pratique des recommandations du rapport de Mme Mullaly, en particulier celles ayant trait aux contextes de conflit.  La République dominicaine a, pour sa part, détaillé les mesures adoptées au niveau national, en particulier sur la protection des enfants dans le cadre du tourisme.  Elle a demandé quelles bonnes pratiques peuvent être envisagées pour lutter contre le caractère lucratif de certaines industries. 

De son côté, la Fédération de Russie a estimé que chaque État a le droit de choisir ses mécanismes nationaux.  Concernant les prélèvements d’organe, elle a souhaité que la Rapporteuse spéciale soit plus précise, affirmant craindre que les réfugiés ukrainiens en Europe puissent être victimes de certains groupes criminels.  La Suisse a, elle, appelé à ce que les auteurs de traite lors des conflits armés soient poursuivis en justice.  Elle a d’autre part souhaité en savoir plus sur la coopération de la Rapporteuse spéciale avec les différents acteurs du système des Nations Unies, notamment les Casques bleus.  La Roumanie a demandé des exemples de bonnes pratiques en vue d’élaborer son prochain plan stratégique dédié au sujet.  Elle a aussi demandé comment les gouvernements et les ONG peuvent se coordonner pour lutter contre la traite en temps de conflit.  La Malaisie a détaillé ses mesures nationales et demandé comment poursuivre les coupables de traite malgré le caractère transfrontalier de ce crime. 

Le Maroc a, lui, évoqué la création d’une commission nationale consacrée au sujet en 2019.  Quelles sont les bonnes pratiques pour sensibiliser les entreprises, notamment en ce qui concerne les femmes dans le secteur informel? a-t-il demandé.  À sa suite, l’Égypte s’est interrogée sur les efforts internationaux permettant de lutter contre la pauvreté et de promouvoir le développement en vue de réduire les facteurs de la traite. L’Irlande a voulu savoir comment les États pouvaient renforcer l’entraide internationales pour renforcer les enquêtes, tandis que le Bélarus déplorait le manque d’attention accordée au thème des réfugiés.  Le Pakistan a évoqué les mesures adoptées au plan national, avant de demander comment renforcer la coopération internationale sur le sujet.  Le Luxembourg s’est inquiété du risque de traite pour les enfants dans les contextes de conflit.  Il a voulu savoir comment faire pour que la traite soit systématiquement incluse dans les rapports et les recherches des Nations Unies. 

Les États-Unis ont rappelé que 90% des réfugiés ukrainiens sont des femmes et des enfants.  Ils ont demandé quelles mesures pouvaient être mises en œuvre pour créer des mécanismes de protection.  La Chine a appelé à punir les responsables de traite, insistant sur l’importance des cessez-le-feu et sur l’initiative mondiale qu’elle a lancée dans ce sens.  L’Ukraine a, quant à elle, rappelé que 14,5 millions de ses citoyens ont été déplacés par l’invasion russe à grande échelle, avant de se féliciter des échanges d’informations avec ses partenaires sur la question de la traite.  La République arabe syrienne a, pour sa part, relevé qu’elle est mentionnée dans neuf paragraphes du rapport, dont sept fois sur la base d’une source unique et peu claire.  Elle a exigé que des sources fiables soient utilisées à l’avenir. Pour finir, l’Ordre souverain de Malte a détaillé ses actions en matière de lutte contre la traite, notamment l’ouverture récente d’un refuge pour victimes dans le Massachusetts.  Il a appelé tous les acteurs à travailler ensemble pour éradiquer la traite, notamment celle impliquant des femmes et des enfants. 

En réponse aux questions et commentaires des États Membres, la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants a assuré qu’une étroite coopération existe avec les agences des Nations Unies pour renfoncer les compétences des acteurs du secteur judiciaire.  Il s’agit de faire en sorte qu’ils puissent enquêter et poursuivre les auteurs de violations, a-t-elle expliqué, appelant à aller plus loin pour garantir l’accès à la justice pour les victimes, notamment en situation de conflit armé. Mme Mullally a également demandé de veiller à la responsabilité des entreprises technologiques dans la traite des personnes. 

Concernant les droits des victimes, la Rapporteuse spéciale a estimé que l’accès au droit d’asile, l’identification précoce, l’aide inconditionnelle, le principe de non-refoulement et l’octroi de visas humanitaires sont des mécanismes efficaces qui contribuent à l’accroissement de leurs droits.  Elle a également appelé à renforcer le système de protection de l’enfance dans les contextes de conflit afin que les acteurs puissent identifier les enfants susceptibles d’être victimes de la traite, notamment les enfants déplacés.  Elle a souhaité qu’une attention particulière soit accordée aux enfants isolés et aux enfants séparés. 

Mme Mullally a aussi souhaité que soit mentionnée spécifiquement dans la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité la question de la traite, qui peut, selon elle, être assimilée à un crime contre l’humanité.  S’agissant des mécanismes d’enquête, elle leur a conseillé de dialoguer avec son mandat et de faire expressément référence aux victimes de traite.  Elle s’est également prononcée en faveur d’un dédommagement des victimes pour le préjudice subi. 

Revenant sur les commentaires de la Fédération de Russie, elle a assuré que son mandat prête attention aux questions de prélèvement d’organes.  Elle a ensuite indiqué que des travaux conjoints ont été engagés avec la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, notamment des déclarations mettant en lumière l’exploitation des enfants.  Pour ce qui est de l’exploitation technologique, elle a mentionné l’utilité des rapports du groupe d’experts du Conseil de l’Europe. Elle a aussi mentionné la convention récemment adoptée, consacrée aux enquêtes et à la répression des crimes internationaux.  Dans ce cadre, l’identification précoce des victimes de la traite doit être renforcée, afin de permettre aux victimes de participer aux enquêtes si elles le souhaitent, a-t-elle complété. 

Mme Mullally a également souligné l’importance des accords bilatéraux, notamment sur l’entraide judiciaire et les enquêtes.  Au Bélarus, elle a indiqué que le rapport présenté cette année est un document thématique dans lequel est mis en avant le principe de non-refoulement des réfugiés et demandeurs d’asile.  Le rapport invite aussi les mécanismes de justice transitionnelle à veiller aux enjeux de la traite, particulièrement lorsque ce sont les enfants qui en sont victimes.  Enfin, après avoir remercié l’Ukraine, qui a appelé à ne pas négliger le risque de traite en situation de conflit, particulièrement pour les enfants, elle a salué l’Ordre souverain de Malte pour son travail en faveur de la protection des victimes. 

Exposé

Dressant un bilan de ses six ans de mandat, M. FELIPE GONZÁLES MORALES, Rapporteur spécial sur les droits humains des migrants, a souligné que si les États avaient des intérêts légitimes à sécuriser leurs frontières, le droit international indiquait que ces préoccupations ne pouvaient l’emporter sur leurs obligations de respecter les droits humains internationalement reconnus de tous les migrants.  Il a affirmé que les États devaient placer les droits humains au centre de leurs politiques migratoires et s’efforcer de lutter contre les discours de haine et toutes les formes de discrimination à l’encontre des migrants, y compris ceux en situation irrégulière.  Il les a également appelés à ratifier les principaux instruments internationaux relatifs aux droits humains, en particulier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. 

 Le Rapporteur spécial a ensuite présenté son rapport annuel, soulignant que les questions liées au travail et aux droits humains des 280 millions migrants recensés aujourd’hui étaient déterminantes à notre époque.  Il a ajouté qu’au facteur clef des inégalités économiques, s’ajoutaient de nouveaux facteurs comme les changements climatiques. Il a également listé les multiples formes de discrimination croisées qui frappaient les travailleurs migrants: le sexe, l’âge, la race, la nationalité, l’appartenance ethnique, la religion, le statut migratoire, le handicap, ou encore le milieu socioéconomique. Soulignant que les travailleurs migrants n’avaient pas le même accès à un travail décent que les nationaux, il a ajouté qu’ils étaient confrontés à des situations d’exclusion diverses, en matière d’éducation, de formation linguistique, d’accès aux équipements socioculturels et récréatifs, ainsi qu’aux services d’emploi.  Les systèmes de protection sociale les excluent souvent des systèmes de retraites, de sécurité sociale et de chômage, les rendant plus vulnérables aux chocs économiques.  Il a aussi évoqué les difficultés d’accès au logement, notant que certaines industries installaient des camps, entraînant une ségrégation de facto présentant des risques pour la santé physique et mentale des migrants et compromettant leur droit à la vie privée et à la vie de famille.  Ils se heurtent également à des obstacles dans l’exercice de leur liberté d’expression, de réunion, d’association et syndicale, ce qui compromet encore davantage leur accès à la justice et l’exercice d’autres droits fondamentaux, a-t-il ajouté. 

Se félicitant de développements positifs prometteurs dans différents pays, notamment l’accès à un statut migratoire permanent, à la protection sociale et à des contrats normalisés, il a invité les États à établir des voies d’accès permanentes à leur territoire, à étendre la protection sociale nationale aux travailleurs migrants, et à garantir l’accès à un travail décent dans des conditions de liberté, d’équité, de sécurité et de dignité.  Il a également appelé les États à mettre en place des « pare-feu » entre les services publics et les autorités chargées de l’immigration afin de veiller à ce que tous les migrants ne soient pas découragés d’obtenir l’égalité de traitement devant la loi, un niveau de vie décent et l’accès à la protection sociale, notamment en matière de santé. En outre, il a invité les États à créer un système d’inspection du travail solide et à prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir, enquêter, poursuivre et sanctionner les violations des droits humains commis à l’encontre des travailleurs migrants. Enfin, il a appelé à ce qu’ils participent aux procédures de prise de décisions afin d’intégrer leurs points de vue et leurs expériences lors de l’élaboration de politiques et de programmes sur les questions qui les concernent. 

Dialogue interactif

Après cette présentation, El Salvador a souhaité connaître les principaux défis en matière de droits humains auxquels les travailleurs migrants sont confrontés.  Oman a demandé au Rapporteur spécial comment les organisations régionales peuvent coopérer avec son mandat.  Dans le même ordre d’idées, la Suisse et le Portugal ont voulu savoir ce que le Rapporteur spécial recommande aux États Membres.  Plus spécifiquement, le Pakistan a demandé quelles directives pourraient être formulées pour faire respecter les normes et droits humains dans les pays de destination. 

De son côté, l’Afrique du Sud a demandé l’avis du Rapporteur spécial sur les pratiques et mécanismes internationaux qui permettent de tenir pour responsables les employeurs en cas d’enfreinte aux droits des travailleurs migrants.  Concernant les difficultés que rencontrent les migrants, existe-t-il des mécanismes de protection des travailleurs qui pourraient être effectifs à cet égard? a questionné l’Union européenne.

Le Cameroun s’est dit préoccupé par la situation des Africains migrants souffrant de discrimination raciale et a souhaité obtenir des informations supplémentaires sur la manière dont les recommandations auront un impact positif sur les migrants et leur famille, notamment en matière de regroupement familial.  Le Venezuela a, pour sa part, rappelé sa solidarité historique à l’égard des migrants, avant d’interroger le Rapporteur spécial sur l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les mouvements migratoires. 

Cuba a ensuite pointé la différence de salaire entre hommes et femmes migrants aux États-Unis, constatant qu’elle dépasse largement l’écart relevé au sein de la population nationale.  À ses yeux, c’est d’autant plus inacceptable que les États-Unis se présentent comme les « héros des droits humains ». Elle a également dénoncé l’incarcération forcée de migrants dans ce pays, appelant le Rapporteur spécial à rester vigilant sur cette situation.  À sa suite, le Mexique a signalé ses actions de protection consulaire pour lutter contre l’exploitation d’enfants migrants aux États-Unis.  Quels sont les mécanismes les mieux adaptés face à ce problème? a demandé la délégation. 

Le Panama a alerté sur la situation du parc national de Darien, par lequel plus de 430 000 migrants ont transité, ce qui affecte notamment les communautés autochtones.  Il a souhaité que chacun assume ses responsabilités au niveau multilatéral pour que la migration puisse être vraiment sûre, ordonnée et régulière.  La Fédération de Russie s’est, elle, alarmée de la situation en mer Méditerranée, devenue un cimetière pour des milliers de migrants africains.  L’Union européenne et les pays côtiers n’honorent pas leurs obligations, a-t-elle estimé, avant d’appeler à des enquêtes et à l’affectation de tous les rescapés secourus en mer à des ports sûrs, conformément au droit de la mer.

Le Bangladesh a demandé au Rapporteur spécial comment il compte communiquer avec les gouvernements en ce qui concerne les « pare-feu » entre les services soutenant les migrants et les services de l’immigration, tandis que le Luxembourg demandait des exemples de bonnes pratiques pour mettre fin aux discriminations contre les travailleurs migrants.  La Malaisie a indiqué qu’elle avait mis en place des mécanismes pour lutter contre les discriminations et a demandé des exemples de nouveaux mécanismes nationaux et de voies de migration régulières permanentes mis en place par les pays de destination.  Pour sa part, l’Égypte s’est interrogée sur la manière de renforcer les acteurs bilatéraux et multilatéraux pour faciliter les migrations économiques.  Elle a aussi encouragé la reconnaissance des qualifications des travailleurs migrants dans les pays d’accueil ainsi qu’à leur retour dans les pays de destination. 

Les États-Unis ont reconnu l’importance des changements climatiques comme facteurs de migration et insisté sur l’importance des mécanismes d’alerte précoces pour aider les communautés à anticiper leurs impacts.  Ils ont indiqué avoir créé des plateformes pour organiser des migrations sûres et régulières tant pour les demandes d’asile que pour des raisons humanitaires ou économiques.  Ils ont ensuite voulu savoir comment les États peuvent s’assurer que les informations sur les voies légales de migration atteignent les candidats au départ.  La République arabe syrienne s’est, elle, inquiétée des références du rapport aux discriminations dont sont victimes les travailleuses migrantes aux États-Unis et au Canada en raison de la non-reconnaissance de leurs qualifications.  Elle a souhaité savoir comment ces États pourraient y remédier.  Le Chili a annoncé la création d’une nouvelle instance pour protéger les droits humains des migrants et a appelé à une coopération internationale renforcée.  La Chine s’est inquiétée des sentiments anti-migrants croissants dans les pays développés, constatant que des politiciens se servent d’eux comme de bouc-émissaires.  Elle a aussi rappelé que des législations restrictives ont été adoptées dans certains pays, s’inquiétant notamment du cas du Royaume-Uni qui a entraîné une réaction du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.  Enfin, l’Ordre souverain de Malte a rappelé qu’il revient aux États de destination de faire respecter les droits humains des migrants. 

Reprenant la parole, le Rapporteur spécial sur les droits humains des migrants a fait observer que le niveau de protection des travailleurs migrants offert par les accords bilatéraux est « très hétérogène ».  Saluant néanmoins le travail important réalisé par l’Organisation internationale du Travail (OIT), il a appelé tous les pays à travailler sur la question migratoire de manière dépolitisée.  Il a par ailleurs estimé que les pays d’accueil devraient mettre en place une inspection du travail, avant d’applaudir le renforcement des services consulaires des pays de départ qui peuvent soutenir les travailleurs migrants. M. González Morales s’est particulièrement inquiété de l’exploitation des travailleuses domestiques, plaidant pour que des voies de recours en cas de problème leur soient ouvertes.  Concernant l’accès à la santé, il a noté une grande disparité des situations et s’est interrogé sur le lien entre droits professionnels et droits connexes.  Le Rapporteur spécial a aussi souligné l’importance de la coopération avec les organisations régionales et les agences et fonds spécialisés des Nations Unies.

Évoquant ensuite la question du racisme, notamment pour les afro-descendants, M. González Morales a indiqué avoir envoyé des communications aux pays concernés.  En matière de bonnes pratiques, il a appelé à mettre en place des voies régulières de migration et à éviter que les questions sécuritaires permettent de contourner les droits humains.  Il a également souligné l’importance pour les pays de destination de protéger proactivement les travailleurs migrants, préconisant une séparation claire, par des « pare-feu », des services publics et des services de l’immigration pour éviter que les intéressés renoncent à réclamer à leurs droits humains de peur de retombées négatives. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les États dotés défendent vigoureusement leurs doctrines de sécurité liées aux armes nucléaires

Soixante-dix-huitième session,
12e & 13e séances plénières - matin et après-midi
AG/DSI/3719

Première Commission: les États dotés défendent vigoureusement leurs doctrines de sécurité liées aux armes nucléaires

À l’occasion de la deuxième journée de son débat thématique sur les armes nucléaires, la Première Commission a entendu aujourd’hui huit des États en possession de telles armes, qui ont, en général, fait assaut de bonnes intentions en matière de désarmement tout en justifiant leur arsenal actuel par le comportement d’autres puissances.   

Parmi les neuf États possédant l’arme nucléaire –les cinq États dotés au sens du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), plus Israël, l’Inde, le Pakistan et la République populaire démocratique de Corée (RPDC)– seule la France s’était exprimée le premier jour de ce débat.   

Les États-Unis ont rappelé que leur propre arsenal nucléaire avait pour but de dissuader toute attaque nucléaire et défendre leurs intérêts vitaux et ceux de leurs alliés, tout en rappelant leur attachement à la déclaration commune faite en janvier 2022 par les cinq États dotés au sens du TNP –le P5-, selon laquelle la guerre nucléaire ne peut jamais être gagnée et ne doit jamais être livrée.  Affirmant que son pays ferait montre d’un comportement responsable tant que les armes nucléaires continueront d’exister, le représentant des États-Unis s’est en outre dit prêt à travailler avec la Russie pour relancer le Traité New START, et a invité la Chine à des discussions bilatérales pour promouvoir en toute transparence la stabilité et réduire les tensions.   

Critiqué par plusieurs pays pour son manque de transparence sur le nombre de ses armes nucléaires et pour être le seul membre du P5 à n’avoir pas annoncé de moratoire sur la production de matières fissiles à usage militaire, la Chine a répliqué que ses stratégies et politiques en matière de sécurité « sont stables, ce qui n’est pas le cas de celles d’autres États dotés ».  Pour son représentant, la Chine a, par son attitude, contribué comme aucun autre pays au processus de désarmement nucléaire et continue en outre de plaider pour l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant sur le non-emploi en premier d’armes nucléaires.   

Quant au Royaume-Uni, qui s’est présenté comme le seul pays du P5 à ne disposer que d’une composante nucléaire –sous-marine– il a rappelé qu’il avait ratifié les protocoles aux traités créant les zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN) en Amérique latine et dans les Caraïbes, dans le Pacifique Sud, en Afrique et en Asie centrale, et a mis l’accent sur son rôle actif dans les recherches relatives à la vérification du désarmement nucléaire, y compris dans le cadre du Partenariat mondial, défendu par ailleurs par plusieurs pays non dotés, comme la Norvège.   

Mais pour la Fédération de Russie, ambitionner l’interdiction des armes nucléaires comme le demandent de nombreux États non dotés, est irréaliste, la détention d’armes nucléaires étant la seule réponse possible aux agissements « antirusses » des Occidentaux.  Le pays affaiblirait sa sécurité en réduisant son arsenal nucléaire « alors que les États-Unis maintiennent des armes nucléaires en Europe », a ainsi déclaré le représentant russe, qui a rendu les États-Unis responsables de toutes ses décisions récentes: menaces d’utilisation de l’arme nucléaire, annonce du déploiement d’armes nucléaires au Bélarus, retrait du Traité New START et annonce d’un prochain retrait du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).  En revanche, la Russie a assuré qu’elle visait à la dénucléarisation complète de la péninsule coréenne et était à cette fin disposée à dialoguer directement avec la RPDC.   

Autres États nucléaires, et non parties au TNP, l’Inde et le Pakistan ont quant à eux défendu leur « politique responsable » de « défense minimale ».  L’Inde a rappelé sa doctrine de non-emploi en premier et a réitéré son attachement à un désarmement nucléaire dans des délais limités, par un processus en étapes reposant sur un engagement universel et un cadre multilatéral.  Le Pakistan a dit ne développer des armes nucléaires qu’en raison d’impératifs de sécurité, avant de se lancer dans une violente attaque contre tout projet de traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires qui ne tiendrait pas compte des stocks existants.   

La RPDC a pour sa part réaffirmé son droit souverain à une dissuasion nucléaire d’autodéfense, ajoutant que « tant que les armes nucléaires tyranniques des impérialistes existeront sur la planète, nous ne modifierons ni n’abandonnerons le statut actuel de notre pays en tant qu’État doté d’armes nucléaires ».   

Quant à Israël, sa représentante a reconnu la contribution majeure du TNP, mais estimé qu’un régime de non-prolifération n’est efficace que dans la mesure du respect que lui accordent ses membres.  Comme « quatre des cinq cas de violation grave du Traité ont eu lieu au Moyen-Orient », Israël considère que le TNP ne représente pas un remède aux défis sécuritaires de la région et n’a « aucune intention » de confier sa sécurité à des arrangements internationaux.   

Israël visait notamment l’Iran, qui a, en retour, dénoncé le fait que le « régime israélien » refuse d’adhérer au TNP, déstabilisant du coup « la région tout entière ».  Il l’a également accusé de violer le statut de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et la Charte des Nations Unies en s’attaquant à ses activités nucléaires pacifiques, y compris « par le meurtre et le sabotage ». 

 Les pays non dotés ont une nouvelle fois mis en avant le TNP, le TICE mais aussi le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), en insistant souvent sur les aspects humanitaires et environnementaux du dernier.  Pays victimes des retombées d’essais nucléaires, le Kazakhstan et Kiribati ont annoncé le dépôt de projets de résolution conjoints pour promouvoir l’assistance aux victimes et la décontamination des territoires irradiés.   

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 17 octobre, à 10 heures, et devrait achever son débat thématique sur les armes nucléaires. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR 

Armes nucléaires (suite)

Exposé liminaire sur la vérification du désarmement nucléaire 

M. JØRN OSMUNDSEN (Norvège), Président du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner plus avant la vérification du désarmement nucléaire, a indiqué que, cette année, le Groupe avait identifié les questions sur lesquelles poursuivre ses travaux.  Ces questions peuvent être classées en trois catégories principales: les questions conceptuelles, le renforcement des capacités et le concept de création d’un groupe d’experts techniques et scientifiques, a-t-il dit.  Le genre, la jeunesse et l’éducation ont été soulignés comme des questions transversales à débattre, a-t-il ajouté. 

Le Président du Groupe d’experts a expliqué que les questions principales ont été discutées lors de deux séances, qui ont fourni la base d'un projet de rapport qui a été discuté lors d’une séance ultérieure.  Les experts se sont également engagés dans des travaux intersessions par le biais de documents de travail, lesquels sont devenus le moteur de notre travail, de véritables moyens de rechercher des positions susceptibles de faire l'objet d'un consensus, a-t-il souligné. 

L’Ambassadeur a ensuite signalé que le rapport annuel du Groupe présente 21 conclusions, dont 17 sont le fruit d’un consensus, tandis que les 7 autres reflètent les positions divergentes du Groupe.  Le rapport présente également cinq recommandations qui traduisent, comme le rapport du Groupe précédent, la volonté des États de poursuivre la discussion de fond sur la vérification, s’est-il encore réjoui. Pour le Président, la combinaison des deux rapports envoie un signal fort qu’un accord solide sur la vérification du désarmement nucléaire est souhaité et possible.  « Je crois également que les deux Groupes ont posé les bases conceptuelles pour la poursuite des travaux sur la vérification nucléaire dans un contexte multilatéral », a-t-il conclu. 

Déclarations 

M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie), qui s’exprimait au nom d’un groupe de pays, a expliqué que ce groupe, constitué, outre de son pays, de la République de Corée, du Japon, du Canada et d’une vingtaine de pays européens, était uni face à l’augmentation des risques nucléaires.  La guerre illégale de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, sa rhétorique nucléaire et ses attaques autour des infrastructures nucléaires civiles ont ébranlé l’ordre mondial fondé sur des règles, a déclaré le représentant.  Il a salué par ailleurs le rôle de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) en ce qui concerne la centrale nucléaire de Zaporizhzhia.  Il s’est déclaré profondément préoccupé par la suspension par la Fédération de Russie de sa participation au Traité New START et a encouragé la Russie à engager un dialogue avec les États-Unis sur un traité qui lui succéderait.  Le représentant a également condamné la République populaire démocratique de Corée (RPDC) pour ses programmes illégaux de missiles nucléaires et balistiques, en violation des résolutions du Conseil de sécurité.  Il a demandé instamment à la République islamique d’Iran de s’acquitter de toutes les obligations qui lui incombent en vertu du Plan d’action global commun (PAGC).   

Cela fait 78 ans que les armes nucléaires n’ont pas été utilisées et 40 ans que les arsenaux nucléaires mondiaux diminuent, a constaté le représentant.  Pour le groupe, cette tendance doit être poursuivie et non inversée.  Il faut sortir de l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement et entamer des négociations en vue d’un traité interdisant la production de matières fissiles (FMCT).  Le représentant a renouvelé l’appel aux États pour qu’ils ratifient sans délai le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et s’est déclaré profondément préoccupé par les commentaires récents de la Russie sur un possible retrait de sa signature.  Le représentant a déclaré que les États dotés d’armes nucléaires ont une responsabilité particulière, comme le prévoit l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et s’est félicité de la déclaration des cinq États dotés au sens du TNP (P5) de janvier 2022, qui entérine le principe selon lequel une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée.  Il est très préoccupant que la Russie déploie une rhétorique nucléaire dangereuse, a‑t‑il estimé.  Les États dotés d’armes nucléaires doivent tenir leurs engagements en prenant des mesures concrètes visant à réduire les risques, a‑t‑il conclu.   

M. FLÁVIO SOARES DAMICO (Brésil), s’exprimant au nom d’un groupe de pays, a consacré son intervention au travail de vérification du désarmement et de la non-prolifération nucléaires.  À ce titre, il s’est félicité des conclusions du groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner plus avant les questions de vérification du désarmement nucléaire.  Il a estimé que l’on dispose ainsi d’une base consensuelle solide pour déployer un travail pratique dans les contextes multilatéraux existants.  Le groupe, a‑t‑il rappelé, avait notamment pour mandat de réfléchir à un groupe d’experts scientifiques et technique (GSTE).  La mise en place d’un tel groupe permettrait de progresser dans la direction du désarmement, a‑t‑il considéré.  De manière multilatérale, le futur GSTE pourrait être chargé de compiler les connaissances accumulées au cours des initiatives présentes et passées, d’identifier les défis techniques en matière de vérification, de participer à des discussions techniques, d’intégrer et de préserver les connaissances sur la question et de fournir des garanties aux États.  En conclusion, le représentant a appelé les États à ouvrir le dialogue en faveur de la mise en place d’un tel groupe d’experts.   

M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) a estimé que l’utilisation pacifique des sciences et de la technologie nucléaires procurait des bénéfices considérables à l’humanité.  Rien ne doit entraver l’accès des pays en développement à la technologie nucléaire à des fins pacifiques, ni la coopération internationale, notamment dans le cadre du programme de coopération technique de l’AIEA, a‑t‑il déclaré.  Le représentant a souligné le danger réel que représente le terrorisme nucléaire et ajouté que le maintien de normes élevées de sécurité nucléaires doit rester une condition préalable à une exploitation optimale de la technologie nucléaires.  L’impasse dans les négociations entre les États dotés d’armes nucléaires et ceux qui ne le sont pas fonde des inquiétudes légitimes, a‑t‑il estimé.   

Le délégué a souligné qu’après 13 ans d’absence, son pays venait d’être élu au Conseil des gouverneurs de l’AIEA pour la période 2023-2025, lors de la soixante-septième Conférence générale de l’AIEA.  Il a réitéré son ferme attachement aux objectifs du TNP et au Traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN), avant de lancer des appels en faveur de l’entrée en vigueur du TICE et de l’universalisation du TNP.  Il s’est réjoui du choix porté sur le Burkina Faso pour accueillir l’atelier régional sur les inspections de la sûreté du transport des matières radioactives, prévu du 11 au 14 décembre prochains.   

M. EDUARDO ALCIBIADES SÁNCHEZ KIESSLICH (Mexique) s’est dit préoccupé par la recrudescence de la menace d’utilisation des armes nucléaires, déplorant leur banalisation et condamnant ceux qui prônent l’usage de la menace comme moyen de coercition.  Ce ne sont pas des questions abstraites, a‑t‑il insisté.   

La plupart des États sont non dotés et respectent à la lettre le TNP, a rappelé le représentant, ajoutant que certains pays ont adhéré à d’autres traités comme ceux établissant des ZEAN ainsi que, plus récemment, le TIAN.  Le Mexique, a‑t‑il rappelé, présidera la deuxième Conférence des États parties au TIAN cette année à New York, avant d’inviter les pays non parties à participer en tant qu’observateurs.  Il a en outre salué le Secrétaire général de l’ONU pour avoir attiré l’attention des pays membres sur le besoin d’éliminer les armes nucléaires dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix.   

Le représentant a rappelé avoir présenté le projet de résolution sur l’accélération de la marche vers un monde libéré des armes nucléaires, précisant que l’objectif principal était d’attirer l’attention sur le besoin de renforcer le respect des obligations prises dans le cadre du TNP –tout particulièrement de la part des États dotés.  L’objectif, a‑t‑il poursuivi, c’est que l’Assemblée générale relaie l’appel lancé en faveur du renforcement des engagements.  Ce texte contient également des informations sur les délibérations du groupe de travail chargé du processus d’examens du TNP et de la première session du Comité préparatoire à la onzième Conférence d’examen.  Enfin, au nom de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et de son pays, il a annoncé le dépôt du projet de résolution relatif au TICE.   

M. ALEXANDER KMENTT (Autriche) a noté que les nouvelles technologies engendrent de nouveaux risques, lesquels, couplés à la rhétorique nucléaire de la Russie dans le cadre de sa guerre d’agression contre l’Ukraine, fragilisent notre monde commun.  Le TNP et le PAGC sur le programme nucléaire iranien sont en péril, a‑t‑il ajouté.  Dans ce contexte compliqué, l’entrée en vigueur du TICE permettrait que les essais, désastreux pour les victimes et l’environnement, soient relégués pour toujours dans le passé, a estimé le représentant.   

Pour l’Autriche, la communauté internationale a besoin d’un changement de paradigme: il devient indispensable de s’écarter définitivement des doctrines de dissuasion nucléaire.  Dans tous les cas, de telles doctrines de sécurité signifient que l’on se tient prêt à utiliser le feu nucléaire, en faisant fi par principe des conséquences systématiquement catastrophiques des détonations nucléaires, a fait observer le représentant.  C’est pourquoi il a appelé les délégations à soutenir le projet de résolution sur les conséquences humanitaires et environnementales de toute détonation nucléaire.  Enfin, le représentant a vu dans le TIAN une avancée concrète sur la voie d’un monde sans armes nucléaires.   

Mme JESSIE LIM (Singapour) a souligné les progrès significatifs en matière de désarmement et de non-prolifération nucléaires réalisés sous les auspices de l’AIEA, du TNP et du TICE.  Toutefois, un environnement sécuritaire international divisé a freiné cet élan positif, a‑t‑elle noté.  La représentante a rappelé que la sécurité de son pays dépend de l’État de droit international et a réaffirmé son attachement au TNP, pierre angulaire du régime de non-prolifération.  Elle a rappelé que les États dotés d’armes nucléaires doivent remplir les obligations qui leur incombent en vertu de l’article VI du Traité et freiner la modernisation de leurs arsenaux.  Les États non parties au TNP doivent également être associés aux discussions sur le désarmement, dans le cadre des efforts consentis en faveur de l’universalisation du TNP, a‑t‑elle ajouté.   

La représentante a réitéré son soutien à l’entrée en vigueur du TICE et s’est dite encouragée par les récentes adhésions des Îles Salomon et de Sri Lanka.  Elle s’est déclarée favorable à l’ouverture, dans le cadre de la Conférence du désarmement, de négociations sur un FMTC.  Elle s’est félicitée des discussions qui ont eu lieu lors du premier comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen du TNP sur la réduction du rôle des armes nucléaires dans les doctrines de sécurité, le renforcement des garanties de l’AIEA et l’amélioration de l’efficacité de l’aide.  En outre, elle a réaffirmé son engagement en faveur du Traité de Bangkok qui a établi la zone exempte d’armes nucléaires (ZEAN) en Asie du Sud-Est.   

Mme CHRISTIAN HOPE REYES (Philippines) a déclaré que, tout comme le TIAN, l’entrée en vigueur d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires, multilatéral, non discriminatoire, efficace et vérifiable complèterait le régime de non-prolifération et de désarmement nucléaire.  Cela empêcherait non seulement la prolifération, mais limiterait également l’expansion des stocks d’armes nucléaires, a estimé la représentante.  Elle a rappelé que les Philippines, avec le Japon et l’Australie, avaient organisé, en marge du débat général de l’Assemblée générale, un événement de haut niveau pour inciter à la concrétisation des efforts déployés depuis trois décennies en faveur d’un tel traité.  En attendant le début des négociations à la Conférence du désarmement, les Philippines appellent à l’application d’un moratoire sur la production de telles matières fissiles. 

Après avoir exhorté à l’entrée en vigueur du TICE, la représentante a annoncé que les pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) soumettraient un projet de résolution demandant le renforcement du Traité de Bangkok à l’origine de la ZEAN en Asie du Sud-Est.  Nous espérons en outre que la Fédération de Russie et les États-Unis reprendront la mise en œuvre du Traité New START, a par ailleurs déclaré la représentante.   

M. JORGE VIDAL (Chili) a estimé que le TIAN et le TNP étaient des instruments complémentaires. Le représentant a exhorté les États à signer, ratifier et adhérer au TIAN, ainsi qu’à voter en faveur des résolutions qui seront présentées relativement à ce traité.  Il a également demandé aux États figurant à l'annexe 2 du TICE de ratifier le Traité pour en permettre l’entrée en vigueur. Pour le Chili, ces trois traités doivent former le cadre de référence pour que les armes nucléaires ne soient plus jamais utilisées.  

En outre, le représentant a réaffirmé l'importance de démarrer sans délais des négociations sur un traité interdisant les matières fissiles, y compris les stocks antérieurs, dans le cadre revitalisé de la Conférence du désarmement.  Enfin, le Chili adhère au principe de « l'indivisibilité » de la sécurité internationale, car tous les États, quelle que soit leur taille ou leur puissance, ont la responsabilité de contribuer à la consolidation d’un ordre international fondé sur le multilatéralisme, la coopération et régi par le droit international, y compris le droit international humanitaire, a conclu son représentant.   

M. MUTHANNA SALIH (Iraq) a fait part de sa déception concernant les résultats des neuvième et dixième Conférences d’examen du TNP. Le représentant a estimé qu’il fallait faire preuve de plus de souplesse pour relever ces défis et a émis l’espoir que la onzième Conférence d’examen soit couronnée de succès. Il y a 13 000 têtes nucléaires dans le monde, ce qui représente un problème pour le monde entier, a‑t‑il rappelé. Face à cette situation, toutes les parties doivent agir avec sérieux et respecter l’article VI du TNP.  En outre, des négociations dans le cadre de la Conférence du désarmement devraient aboutir à un traité qui permettrait l’interdiction de la production de matières fissiles et des stocks.  Ces négociations dans le cadre de la Conférence du désarmement doivent présenter un échéancier pour l’élimination complète des armes nucléaires, a en outre estimé le représentant, qui a aussi souligné l’importance de la création de zones exemptes d’armes nucléaires.   

M. HUSSAIN MOHAMMED AL-SAFRAN (Qatar) a apporté le soutien de son pays aux travaux de la Conférence sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  À cet égard, il a assuré la présidence libyenne de la quatrième session de la Conférence, qui aura lieu le mois prochain à New York, de la contribution constructive et de bonne foi de sa délégation.  Dans le contexte de tension géopolitique actuelle et de prolifération, la mise en œuvre de ces zones est un gage de confiance entre États voisins et de stabilité régionale, a‑t‑il ajouté.   

Après avoir appelé les États dotés parties au TNP à honorer leurs engagements en matière d’élimination de leurs arsenaux, le représentant a souligné la qualité des échanges techniques entre l’agence nationale de l’énergie atomique du Qatar et l’AIEA.  Il a annoncé que son pays organiserait au cours du premier trimestre 2024 une réunion sur l’utilisation pacifique du nucléaire civil.   

M. ZHANGELDY SYRYMBET (Kazakhstan) a attiré l’attention sur le fait que les armes nucléaires deviennent plus complexes avec les progrès de la science et des technologies nucléaires, comme en témoignent le degré de sophistication des systèmes de défense antimissiles actuelles et les systèmes de lancement hypersoniques. L’émergence de l’intelligence artificielle entraîne aussi des incertitudes encore plus grandes, a aussi mis en garde le représentant. Il a demandé que soient prises de toute urgence des mesures pour restaurer la confiance, qui est le pilier de la paix, et afin que tous les États respectent leurs engagements en vertu des instruments clefs de désarmement et de non-prolifération nucléaires.   

Rappelant la conviction de son pays qu’il est nécessaire de renforcer, d’autonomiser et de consolider les zones exemptes d’armes nucléaires existantes dans le but de les reproduire au Moyen-Orient, le représentant a affirmé que le TIAN renforce l’initiative portée par son pays pour parvenir à un monde sans armes nucléaires à l’horizon 2045. Le Kazakhstan se joint à d'autres pour réaffirmer la compatibilité du TIAN et du TNP.  Le représentant a rappelé que sa délégation et celle de Kiribati soumettraient un projet de résolution sur les conséquences humanitaires et environnementales des essais nucléaires, un texte qui, a‑t‑il expliqué, vise à utiliser le cadre des traités multilatéraux pour promouvoir l'assistance aux victimes et l'assainissement des territoires contaminés par les radiations.   

M. MUHAMMAD USMAN IQBAL JADOON (Pakistan) a déploré les évolutions négatives concernant la sécurité et la sûreté nucléaires sur le plan international, dont l’échec le plus criant est celui des États dotés de l’arme nucléaire à réduire leurs arsenaux.  La possibilité que les États reprennent des essais nucléaires est réelle, a regretté le représentant, ajoutant qu’en dépit d’appels lancés, la priorité, qui est de vivre dans un monde exempt d’armes nucléaire, recule.   

Le représentant a ensuite mis l’accent sur une nécessaire nouvelle approche du désarmement nucléaire, qui tienne compte de leur lien avec des armes classiques nouvelles et avancées.  Évoquant en particulier les « situations d’asymétrie des capacités conventionnelles et nucléaires », il a affirmé que, laissées sans réponse ou poursuivies de manière isolée, les perspectives de mettre fin à la course aux armements nucléaires ou de poursuivre le désarmement nucléaire ne resteraient qu’une utopie.   

Le représentant a également appelé à « reconnaître le contexte variable dans lequel évoluent les États possédant des armes nucléaires », affirmant que, pour le Pakistan, le développement de ces armes « reste uniquement guidé par les impératifs de sécurité et de défense ».   

Le représentant a ensuite détaillé l’opposition de son pays à « l’approche fondamentalement erronée » en faveur d’un traité qui aboutirait uniquement à un arrêt de la production future de matières fissiles.  Un tel traité  perpétuerait les asymétries et n’apporterait aucune valeur ajoutée au désarmement nucléaire, a‑t‑il affirmé, dénonçant aussi bien « le mantra égoïste » de certains États que le « zèle messianique »  de ceux qui insistent sur des « propositions gratuites » telles que le plafonnement quantitatif des matières fissiles comme « la prochaine étape logique », tout en résistant à l’inclusion de milliers de tonnes de stocks de matières fissiles dans le champ d’application d’un traité international.  Il a donc réclamé une « approche réaliste » qui reconnaisse l’importance d’un consensus sur un traité sur les matières fissiles qui remédierait aux asymétries des stocks existants et aboutirait à une sécurité égale et non diminuée pour tous les États. 

En attendant l’avènement d’un monde sans armes nucléaires, le représentant a jugé que la priorité devrait être donnée à la négociation d’un instrument juridique offrant aux États non dotés des garanties négatives de sécurité de la part des États dotés.  Une telle convention internationale aurait un impact transformationnel sur la création d’un environnement de sécurité international et régional propice, a estimé le représentant, qui a rappelé qu’en mars dernier, le Pakistan avait soumis à la Conférence du désarmement un nouveau document de travail sur la question.   

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) a qualifié de fragmentée la communauté internationale face aux questions de désarmement nucléaire, estimant que le problème résulte de la réticence à prendre en compte l’environnement de sécurité dans le contexte du désarmement.  Au contraire, la sécurité internationale était évidente à l’époque de la création du TNP et clairement intégrée dans le traité, a‑t‑il estimé.  S’inscrivant en faux contre les tentatives de réviser l’approche que représente le TNP, le représentant a dénoncé l’irréalisme des raccourcis vers le zéro nucléaire, visant notamment les interdictions pures et simples de ces armes.   

Le représentant a estimé qu’aujourd’hui, la possession d’armes nucléaires est la seule réponse possible aux menaces extérieures qui pèsent sur la Russie, fustigeant l’attitude antirusse de l’Occident.  Dans de telles conditions, a‑t‑il poursuivi, son pays affaiblirait considérablement sa sécurité nationale en réduisant son arsenal nucléaire.  Il a dénoncé le fait que les États-Unis maintiennent des armes nucléaires en Europe, estimant que la pratique de partage nucléaire de l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) oblige la Russie à prendre des mesures compensatoires.   

La Fédération de Russie s’efforce de maintenir la prévisibilité et la stabilité face à la destruction du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) et la suspension du Traité New START, a assuré le représentant, qui a blâmé pour cette situation la politique des États-Unis.  La Russie, a‑t‑il poursuivi, continuera de respecter les limites prévues par le Traité New START.  Quant au moratoire russe sur le déploiement de missiles terrestres à portée intermédiaire et à courte portée, il est mis à rude épreuve par les États-Unis, qui déplacent de telles armes en Europe et dans la Région Asie/Pacifique, a‑t‑il poursuivi.  Rappelant que son pays avait ratifié le TICE en 2000 –attendant en vain que les États-Unis fassent de même–, il a confirmé la préparation actuelle d’un projet de loi visant au retrait de son pays du Traité.  Selon lui, la responsabilité en incombe aux États-Unis.   

Pour l’heure, les appels au lancement de négociations sur le contrôle des armements nucléaires sont irréalistes, a estimé le représentant.  De telles initiatives ne sauraient être séparées des réalités actuelles et de l’état des relations entre les puissances nucléaires, a‑t‑il continué, estimant que la maîtrise des armements est destinée à consolider la démonstration réciproque de promouvoir une stabilité à long terme, fondée sur le respect mutuel des intérêts de sécurité.   

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a déclaré que, complémentaire du TNP, le TIAN devait être l’objet d’une attention accrue, afin de renforcer son importance et son efficacité.  Il a jugé fondamental son universalisation, et plus encore que les États dotés en reconnaissent la portée et l’utilité.  Ce Traité représente une alternative pragmatique vers l’élimination totale des armes nucléaires, a ajouté le représentant, indiquant que sa délégation s’était portée coautrice du principal projet de résolution qui lui est consacré.  Ce texte forme le vœu que la deuxième Réunion des États parties du TIAN, prévue fin novembre, permettra d’en accélérer la mise en œuvre, a‑t‑il précisé.   

Le représentant a souligné l’utilité des ZEAN, voyant dans leur création une étape nécessaire pour progresser vers le désarmement et la non-prolifération nucléaires.  Cette réalité se vérifie dans toutes les zones soumises actuellement à un régime de dénucléarisation, y compris le continent africain, devenu la quatrième zone du genre depuis l’adoption du Traité de Pelindaba, a‑t‑il ajouté, appelant à étendre cette expérience positive à toutes les parties du monde, « surtout celles confrontées à des tensions récurrentes ».  Le représentant a réaffirmé le soutien de son pays aux projets de résolution de la Première Commission sur les conséquences humanitaires et environnementales « catastrophiques » de l’utilisation des armes nucléaires ainsi qu’à l’Initiative mondiale de lutte contre le terrorisme nucléaire.   

Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) a jugé profondément inquiétante l’érosion continue de la confiance dans le domaine de la maîtrise des armements et de la non-prolifération.  Après l’extinction du Traité sur les FNI en 2019, en raison du non-respect par la Fédération de Russie, le Traité New START est resté le seul mécanisme contraignant garantissant la confiance et la vérification de la réduction des arsenaux nucléaires stratégiques, a‑t‑elle rappelé. Aussi la représentante s’est-elle dite préoccupée par la suspension par la Russie de sa participation à ce traité, l’appelant à revenir aux obligations y afférentes et à réaffirmer de plus son engagement pris au titre de la déclaration commune du P5 du 3 janvier 2022 sur la prévention de la guerre nucléaire et de la course aux armements.  

La représentante a rappelé que l’invasion russe de l’Ukraine avait empêché l’AIEA de mener ses activités de garantie et de vérification dans ce pays et considérablement accru la menace d’un accident nucléaire. En tant que membre du Conseil des gouverneurs de l’AIEA, la Bulgarie condamne ce comportement dangereux et irresponsable et appelle à la pleine mise en œuvre des sept piliers du Directeur général de l’AIEA pour garantir la sûreté et la sécurité pendant un conflit armé. La Bulgarie soutient tout aussi fermement le programme de coopération technique de l'AIEA, a insisté la représentante, qui y a vu un mécanisme clef pour le transfert de technologie, le renforcement des capacités et l’amélioration de la sûreté et de la sécurité nucléaires et de ce fait, pour le renforcement de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.   

M. JAROSLAV ŠTĚPÁNEK (Tchéquie) a regretté que l’architecture internationale du désarmement continue de se détériorer, à l’image du Traité New START, dont la suspension annoncée par la Russie découle en réalité de son non-respect des obligations y afférentes, en particulier celles relatives au mécanisme de vérification prévu par cet instrument. Ce traité répond aux intérêts de sécurité de tous les États, a poursuivi le représentant, qui a donc appelé toutes les parties concernées à agir de manière responsable et à s’engager de manière constructive, afin de relancer la réduction des stocks.   

D’autre part, le représentant a dit observer avec préoccupation les demandes de certaines délégations visant à placer le projet d’accord de coopération militaire tripartite formé par l'Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni (AUKUS) sous le contrôle de l’AIEA. Pour lui, le temps n’est pas encore venu. La République tchèque soutient par ailleurs pleinement le mandat de l’Agence dans le domaine de la sûreté nucléaire et réfute les accusations entourant le rejet des eaux traitées de la centrale nucléaire de Fukushima. Le représentant a dit avoir à cet égard une confiance totale dans l’évaluation des experts de l’Agence comme dans les informations fournies régulièrement par le Gouvernement japonais. 

M. CARLOS EFRAÍN SEGURA ARAGÓN (El Salvador) a rappelé que son pays est parti au Traité de Tlatelolco qui a créé la première ZEAN au monde.  Il a soutenu que ces zones font partie intégrante de l’architecture internationale de désarmement et de non-prolifération nucléaires.  Il a reconnu le travail de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), qui a pour mandat de vérifier la mise en œuvre de la zone d’application du Traité et qui comprend les 33 pays de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes.   

Le représentant a regretté que les deux Conférences d’examen du TNP n’aient pas été en mesure d’adopter des documents.  Si le TNP reste un instrument pertinent, il faut que le Comité préparatoire de la prochaine Conférence d’examen puisse avancer, a‑t‑il souligné.  Toutefois, il a estimé que le TNP n’est pas le seul moyen d’atteindre les objectifs en matière de désarmement nucléaire et a notamment souligné l’importance du TIAN en tant que mesure efficace pour la mise en œuvre de l’article VI du TNP et donc complémentaire aux objectifs et à l’esprit du TNP.   

Le représentant a souligné l’importance d’assurer la participation et le leadership égaux, pleins et efficaces des femmes et des hommes dans les instruments de l’architecture internationale du désarmement et de la non-prolifération.  Il faut insister sur le fait que les femmes ont un rôle important à jouer à cet égard, a‑t‑il martelé.  En outre, il a souligné la valeur de la participation de multiples parties prenantes aux processus liés à l’objectif d’un monde exempt d’armes nucléaires.  Les échanges avec la société civile, les organisations non gouvernementales, le monde universitaire et l’industrie et leurs contributions mérite notre reconnaissance, a‑t‑il conclu.   

M. RAFIQUL ALAM MOLLA (Bangladesh) a relevé que seule une poignée d’États détiennent des armes nucléaires, lesquelles continuent cependant de représenter la plus grave menace actuelle pour l’humanité.  Ces armes ne protègent personne, a affirmé le représentant, qui a plaidé en faveur de leur élimination complète à travers le TIAN et exhorté les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier au plus vite ce Traité.  Se félicitant de l’entrée en vigueur du TIAN en 2021, il a aussi salué la Déclaration politique et le Plan d’action adoptés à l’issue de première réunion des États parties.   

Le représentant a dit sa déception après les échecs des neuvième et dixième Conférences d’examen du TNP, qualifié de la clef de voûte du régime de non-prolifération mondial.  Il s’est dit préoccupé par la modernisation des armes nucléaires et le développement de nouveau types d’armes nucléaires, appelant à un désarmement systématique, progressif, vérifiable et irréversible, conformément à l’article VI du TNP.  Dans ce cadre, il a appelé les États dotés à faire preuve de volonté politique.   

Le représentant a réaffirmé le droit des États d’utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Le Bangladesh est très intéressé par l’utilisation pacifique de l’atome, a‑t‑il poursuivi, estimant qu’elle lui permettrait d’atteindre ses objectifs de développement durable et assurant travailler dans le strict respect des normes de l’AIEA.  Enfin, il a apporté le soutien de son pays à un traité interdisant la production de matières fissiles, à la mise en place d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, ainsi qu’à l’adoption d’un outil juridiquement contraignant qui protégerait les États non dotés contre les États dotés.   

M. PAPA SAMBA DIACK (Sénégal) a appelé les États dotés à limiter, sinon à freiner, la prolifération horizontale et verticale des armes nucléaires et à accorder des garanties négatives de sécurité aux pays non dotés en attendant la conclusion, en toute priorité, d’un instrument universel, inconditionnel, non discriminatoire et juridiquement contraignant visant à̀ garantir tous les États non dotés contre l’emploi ou la menace d’emploi de ces armes.   

Le représentant a en outre plaidé en faveur de l’universalisation des zones dénucléarisées.  À cet égard, il a réitéré l’attachement de son pays au respect du Traité de Pelindaba, qui a consacré le statut de l’Afrique en tant que ZEAN.  Le Sénégal soutient également le projet de création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.   

Par ailleurs, estimant important de réaffirmer la foi commune dans le multilatéralisme dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération, le représentant en a appelé à la revitalisation des instances de désarmement par le rétablissement de la confiance mutuelle, une volonté politique accrue et un engagement plus conséquent de tous les États Membres en faveur de la pacification des relations internationales.   

M. MATÍAS ANDRÉS EUSTATHIOU DE LOS SANTOS (Uruguay) a fait part de son inquiétude liée au conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine et a appelé au règlement pacifique des différends entre les parties impliquées.   

Le représentant a rappelé que son pays n’a pas développé, produit ou acquis d’armes de destruction massive, qu’elles soient chimiques, biologiques ou nucléaires, apportant ainsi sa contribution au désarmement, à la non-prolifération, à la sécurité et à la paix internationales en faveur desquels il est fermement engagé.  Il a estimé essentiel de renforcer les échanges sur le plan multilatéral afin de faire progresser l’agenda international.   

Cependant, a ajouté le représentant, c’est aux États dotés d’armes nucléaires d’assurer un rôle de chefs de file, et ce, sans délai.  Il les a appelés au respect de leurs obligations d’éliminer leurs arsenaux nucléaires en vertu de l’article VI du TNP et des engagements découlant des Conférences d’examen du Traité.  De même, les États qui ne possèdent pas d’armes nucléaires devraient avoir la possibilité de faire un suivi du respect des engagements des pays qui en possèdent.  Le multilatéralisme est l’outil approprié pour y parvenir.  Le représentant a aussi réaffirmé son adhésion au Traité de Tlatelolco ainsi qu’au TICE, invitant les États Membres qui n’ont pas encore ratifié ce Traité à le faire sans délai en vue de son entrée en vigueur.   

M. GIDEON KINUTHIA NDUNG’U (Kenya) a estimé que la réalité des conséquences catastrophiques d’une détonation nucléaire devrait susciter un engagement constructif urgent, à l’appui d’une une volonté politique renouvelée et d’une mise en œuvre complète des obligations et engagements juridiques multilatéraux en vigueur, cela « jusqu’à ce que l’objectif d’élimination totale des armes nucléaires soit atteint ».  Nous devons cultiver sans relâche la confiance, la volonté politique et l’engagement en faveur du désarmement et de la non-prolifération, a‑t‑il dit.   

Pour le représentant, le Kenya, État partie au Traité sur une ZEAN en Afrique, reconnaît les zones régionales comme des éléments constitutifs d’un monde plus sûr.  Nous encourageons les efforts visant à établir de telles zones ailleurs dans le monde, a‑t‑il insisté.  Il a également rappelé que le droit des États à l’utilisation de la technologie nucléaire pacifique dans le respect des garanties de l’AIEA devait être respecté.  Le Kenya, membre de l’Agence, soutient un accès équitable à la technologie, en particulier pour les pays en développement.   

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) a reconnu le statut central du TNP dans le régime de non-prolifération nucléaire, soulignant la nécessité de progresser vers la pleine mise en œuvre de l’article VI.  Il a également apporté le soutien de son pays aux efforts de l’AIEA visant à universaliser son mécanisme d’application des garanties.  Plaidant en faveur du TIAN et du TICE, il a qualifié de prioritaire la ratification de ce dernier, en particulier par les États figurant à l’annexe 2 du Traité.  Il a également appelé à la conclusion rapide des négociations, au sein de la Conférence du désarmement, sur un traité interdisant la production de matières fissiles destinées à être utilisées dans des armes nucléaires ou d’autres dispositifs explosifs.   

Qualifiant la menace nucléaire de la Russie de violation de la Charte des Nations Unies, le représentant a rappelé qu’elle en avait fait usage dès le début des hostilités contre son pays, augmentant le niveau d’alerte de ses forces nucléaires dans les premiers jours de l’invasion.  Il a également relevé que la Russie avait été le seul pays à bloquer le consensus sur le document final de la dixième Conférence d’examen du TNP en 2022.  La Russie, a‑t‑il poursuivi, s’est déclarée prête à procéder à un essai d’armes nucléaires, a suspendu sa participation au Traité New START et annoncé un déploiement d’armes nucléaires sur le territoire du Bélarus, suite à un accord entre les deux pays.  Plus récemment, elle a annoncé son intention de reconsidérer la ratification du TICE, a‑t‑il rappelé.  Pour le représentant, toutes ces actions et déclarations de la Russie sont contraires à la déclaration commune de janvier 2022 des dirigeants des P5 sur la prévention de la guerre nucléaire et la course aux armements.  La Russie, s’est-il alarmé, est prête à saper le TNP et, avec lui, le système de sécurité international dans son ensemble.  Il a appelé les États à ne pas se laisser prendre au piège de la menace nucléaire russe et à assurer une dissuasion fiable.   

Le représentant a appelé la RPDC à abandonner ses armes nucléaires, rappelant qu’elle ne pourra jamais avoir le statut d’État doté d’armes nucléaires conformément au TNP.  Enfin, il a exprimé ses inquiétudes sur le PAGC, estimant qu’il dépend toujours du respect par l’Iran de ses obligations.   

M. SUNGHOON KIM (République de Corée) a souligné que, si le désarmement nucléaire est une responsabilité partagée, le rôle moteur des États dotés d’armes nucléaires revêt indéniablement une importance particulière.  Le représentant s’est félicité des échanges de haut niveau entre les États-Unis et la Chine et a appelé à l’élargissement de cet engagement bilatéral en toute bonne foi.  Il a exhorté la Fédération de Russie à reprendre la mise en œuvre du Traité New START.   

Le représentant a estimé que les garanties négatives de sécurité peuvent contribuer de manière substantielle à la non-prolifération nucléaire, dans la mesure où ces garanties pourraient réduire les incitations des États non dotés d’armes nucléaires à acquérir des armes nucléaires.  Toutefois, l’obsession de la RPDC pour les programmes nucléaires, et le niveau sans précédent de ses provocations, avec le lancement de plus de 100 missiles en un an, en violation du droit international, menacent le régime international de non-prolifération nucléaire, a‑t‑il estimé.   

La République de Corée et les États-Unis ont, à maintes reprises, donné de nombreuses garanties de sécurité à la RPDC, sous diverses formes, a assuré le représentant.  Les menaces nucléaires illégales de la RPDC, qui ne cessent de croître, sont la raison même pour laquelle la République de Corée renforce sa coopération avec les États-Unis en matière de dissuasion élargie, et non l’inverse.  Pour le représentant, il est donc évident qu’il n’existe aucune raison légitime de justifier les tentatives illégales de la RPDC de développer des armes nucléaires et des missiles balistiques.  Il a demandé instamment à la RPDC d’abandonner toutes ses armes nucléaires, tous ses missiles balistiques et tous ses programmes connexes de manière complète, vérifiable et irréversible, de se conformer pleinement aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de reprendre le dialogue.   

Mme LINDA KESSE ANTWI (Ghana) a considéré que les politiques de non-prolifération ne devraient jamais porter atteinte au droit inaliénable des États d’accéder aux matières et technologies nucléaires à des fins pacifiques.  Le Ghana souligne que le développement pacifique de la technologie nucléaire doit être mené sous la supervision de l’AIEA et dans le plein respect de ses garanties, protocoles additionnels et régimes de vérification.   

La représentante a mis en avant l’importance des ZEAN pour le désarmement nucléaire et les traités correspondant, tels que le Traité de Pelindaba pour l’Afrique.  À cet égard, elle a salué les progrès réalisés à la suite de la convocation des première, deuxième et troisième sessions de la Conférence sur la création d’une ZEAN au Moyen-Orient.  Selon elle, c’est grâce à la coopération et à une volonté résolue qu’il sera possible de surmonter les défis qui attendent les pays, ce qui suppose la reconnaissance mutuelle que les armes nucléaires constituent une menace constante pour l’humanité.  Choisissons la voie de la paix, de la coopération et de la prospérité partagée pour le bien-être de tous, a‑t‑elle conclu.   

M. OGASAWARA ICHIRO (Japon) a réaffirmé le statut central du TNP, clef de voûte du régime de désarmement et de non-prolifération nucléaire.  Toutefois, a déploré le représentant, le chemin est semé d’embûches toujours plus nombreuses.  Il a ainsi dénoncé en particulier la Russie, avec sa rhétorique nucléaire dans sa guerre contre l’Ukraine, et la Chine, qui accumule des armes nucléaires sans dialogue ni transparence.  Dans ce cadre, il importe de sauvegarder le TNP, a‑t‑il estimé.   

Le Japon déploie des efforts conformément à son plan d’action d’Hiroshima, annoncé l’année derrière, a poursuivi le représentant.  Ce plan donne la priorité au plafonnement qualitatif –avec l’interdiction des essais– et quantitatif –avec l’interdiction de la production de matières fissiles pour des armes nucléaires.  Il existe des instruments efficaces, a estimé le représentant, qui a cité le TICE pour le premier, et le projet de traité sur les matières fissiles pour le second.  Il a également partagé ses inquiétudes face aux intentions russes de se retirer du TICE.   

Le Japon a soumis un projet de résolution pour fixer un cap vers un monde exempt d’armes nucléaires dans le contexte international actuel, a déclaré le représentant, expliquant qu’il s’agissait de mesures à prendre en vue d’élaborer une feuille de route.  Il a exprimé son espoir que cette approche, réaliste, créera un nouvel élan vers le désarmement.   

Le représentant a dit ses préoccupations face aux activités nucléaires et balistiques de la RPDC, appelant la communauté internationale à garantir le désarmement complet, vérifiable et irréversible dans ce pays.  Enfin, il a évoqué une initiative nationale pour transmettre aux jeunes générations les témoignages des hibakushas, les survivants des bombardements atomiques de 1945.   

M. PATRICK DUFFY (Irlande) a condamné fermement les menaces nucléaires de la Fédération de Russie dans sa guerre contre l’Ukraine.  Il a souligné son soutien à l’AIEA dans sa contribution à garantir la sûreté et la sécurité nucléaires en Ukraine.  La centrale nucléaire de Zaporizhzhia doit être rendue au contrôle ukrainien, a‑t‑il affirmé.  En outre, il a appelé la Russie à reprendre la mise en œuvre intégrale du Traité New START, et à annuler le déploiement annoncé d’armes nucléaires au Bélarus.   

Le représentant s’est réjoui de la deuxième Réunion des États parties au TIAN, rappelant qu’il est pleinement compatible avec le TNP et le complète.  Il a encouragé les États à soutenir les projets de résolution relatifs à l’interdiction des armes nucléaires et aux conséquences humanitaires de celles-ci.  Il a appelé les huit États figurant à l’annexe 2 du TICE qui ne l’ont pas encore fait à adhérer au plus vite.   

En outre, le représentant a soutenu la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient et s’est dit encouragé par les résultats de la Conférence organisée sous l’égide des Nations Unies.  Il a en outre souligné le rôle indispensable de l’AIEA dans le domaine de l’énergie, de la sûreté et de la sécurité nucléaires, avant de demander instamment aux États qui développent leurs programmes nucléaires civils de modifier ou d’abroger leur protocole relatif aux petites quantités de matières et de signer et ratifier le protocole additionnel en priorité.   

Enfin, le représentant a jugé essentiel que l’Iran mette pleinement en œuvre le PAGC, en coopérant pleinement avec l’AIEA et en résolvant les questions de garanties en suspens.  Par ailleurs, il a demandé instamment à la RPDC de signer et de ratifier immédiatement le TICE, de se conformer à nouveau aux obligations qui lui incombent en vertu du TNP et de coopérer pleinement avec l’AIEA.   

M. MANUEL JESÚS DEL ROSARIO VELA (Espagne) a condamné la rhétorique nucléaire irresponsable et injustifiée utilisée par la Russie dans le cadre de son agression contre l’Ukraine et a déploré tant sa décision de suspendre sa participation au Traité New START que ses déclarations sur la possibilité de se retirer du TICE.  L’objectif d’un monde exempt d’armes nucléaires s’éloigne, ce qui constitue un énorme revers dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération nucléaires et constitue une menace immédiate contre la paix et la sécurité internationales, a‑t‑il déploré.   

Pour relancer le désarmement multilatéral et la non-prolifération, le représentant a appelé au démarrage de négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires au sein d’une Conférence du désarmement revitalisée.  Il a aussi appuyé la reprise de l’application du PAGC, notant que l’Iran doit pour cela collaborer avec l’AIEA afin que les questions en suspens puissent être résolues dans le cadre de son Accord de garanties.  Il a également jugé essentiel que la RPDC respecte toutes les résolutions du Conseil de sécurité, cesse définitivement ses essais d’armes nucléaires et de missiles et s’engage enfin la voie d’une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible.   

M. TAWFIC OURO-TAGBA (Togo) a affirmé que l’élimination totale des armes nucléaires et l’assurance juridiquement contraignante qu’elles ne seront plus jamais produites demeurent les seules garanties absolues contre l’emploi ou la menace de leur emploi.  Le représentant a donc appelé à consolider les acquis historiques de la marche vers le désarmement nucléaire et à faire preuve de volontarisme pour parvenir le plus tôt possible à l’objectif ultime du désarmement nucléaire.  À cette fin, il a appelé à renouer avec la pratique du consensus afin que la prochaine Conférence d’examen du TNP ne se solde pas par un nouvel échec.  Il a aussi appelé au plein respect des engagements figurant dans le TNP, notamment celles de son article VI, qui incombent aux États dotés.   

Le représentant a appuyé l’interdiction de la production de matières fissiles à des fins militaires et l’élimination des stocks existants.  Il a insisté sur l’importance d’une entrée en vigueur au plus tôt du TICE.  Saluant le succès de la première réunion des États parties au TIAN à Vienne l’an passé, il a souhaité que la prochaine réunion permette de consolider les acquis.  Il a par ailleurs réaffirmé le rôle central des ZEAN dans la non-prolifération et le désarmement nucléaires et rappelé la nécessité de ne laisser aucune région du monde dépourvue de telles zones.   

Enfin, le représentant a réaffirmé l’attachement de son pays à la promotion de la coopération internationale dans les utilisations pacifiques de l’énergie atomique, droit inaliénable en vertu du TNP, et rappelé que le Togo avait bénéficié, cette année, de l’assistance technique de l’AIEA pour un projet de décret portant sur les mesures de sûreté et de sécurité du transport des matières radioactives.   

M. JULIEN THÖNI (Suisse) a estimé que seule l’élimination totale des armes nucléaires pourra nous débarrasser de la menace existentielle qu’elles représentent.  Dans ce cadre, le représentant a appelé à un renforcement des normes existantes de non-prolifération et contre l’emploi de ces armes, saluant les mesures préconisées par le Secrétaire général de l’ONU dans son Nouvel Agenda pour la paix.   

Le représentant a ensuite noté que le TNP est soumis à de fortes tensions.  Il a préconisé un retour à un processus d’examen fonctionnel et productif, rappelant avoir formulé avec l’Irlande et la Nouvelle-Zélande des propositions pour renforcer la transparence et la redevabilité dans le cadre des Conférences d’examen du Traité.  Il s’est dit préoccupé par l’érosion de l’architecture de maîtrise des armes nucléaires, les arsenaux des pays dotés étant en cours de modernisation.  En outre, a‑t‑il noté, de multiples rapports indiquent qu’un État doté serait en train d’accroître son arsenal, en contradiction avec ses obligations prises dans le cadre du TNP.   

Le représentant a plaidé en faveur d’un renforcement des normes contre les armes nucléaires, plus particulièrement contre leur emploi.  La conformité de leur utilisation avec le droit international, et plus particulièrement le droit international humanitaire, est difficile à imaginer, a‑t‑il rappelé.  Il a également préconisé la réduction de leur rôle dans les doctrines militaires pour limiter le risque d’usage.  Enfin, il a exhorté les États non parties au TICE à y adhérer, ajoutant qu’il serait regrettable qu’un État revienne sur sa ratification.  Le représentant a également appelé au respect de la norme de non-prolifération.  Se disant déçu face à la paralysie du PAGC, il a appelé l’Iran à mettre en œuvre ses engagements.  De même, il a formulé ses inquiétudes face aux programmes nucléaires et balistiques de la RPDC, l’exhortant à revenir aux garanties du TNP et de l’AIEA.   

Enfin, le représentant a relevé l’augmentation des menaces.  Outre la rhétorique incendiaire de la Russie et ses déploiements d’armes nucléaires au Bélarus, il a mentionné les risques liés aux technologies émergentes, comme l’intégration de l’intelligence artificielle dans les structures de commandement et de contrôle nucléaires, plaidant pour un plus ample dialogue à ce propos.   

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a souligné que les États dotés d’armes nucléaires ont l’obligation juridiquement contraignante de parvenir à un désarmement nucléaire complet sans imposer de conditions.  Les États non dotés d’armes nucléaires ont adhéré au TNP dans l’espoir de ne pas être visés ou menacés par des armes nucléaires, a‑t‑il estimé.  Le TNP vise à garantir la sécurité de toutes les nations, et non le monopole nucléaire de quelques privilégiés, a insisté le représentant, avant de souligner que la seule garantie contre la menace d’utilisation d’armes nucléaires est leur élimination complète, conformément à l’article VI du TNP.  D’ici là, les États dotés d’armes nucléaires ont l’obligation de fournir des garanties inconditionnelles contre l’utilisation d’armes nucléaires, a‑t‑il estimé, avant de dénoncer les États-Unis, le Royaume-Uni et l’OTAN, en tant qu’alliance militaire nucléaire, comme les principaux coupables de l’affaiblissement des progrès vers le désarmement nucléaire, voire leur empêchement.   

En outre, le représentant a exprimé de sérieuses inquiétudes concernant le programme nucléaire militaire clandestin d’Israël.  Le refus du « régime israélien » d’adhérer au TNP et de soumettre ses activités nucléaires à des garanties constitue une menace permanente pour la paix et la sécurité internationales, a‑t‑il affirmé.  À cet égard, les récentes déclarations du Premier Ministre du « régime » devant l’Assemblée générale, qui plaide ouvertement en faveur d’une « menace nucléaire crédible » à l’encontre de l’Iran, exigent une réponse internationale forte.  La communauté internationale doit exhorter ce régime à adhérer au TNP et à soumettre ses installations nucléaires aux garanties de l’AIEA, a‑t‑il affirmé.   

Le représentant a souligné l’engagement inébranlable de l’Iran à coopérer avec l’AIEA, en mettant en place de solides activités de vérification et de contrôle.  Le représentant a affirmé que les États-Unis s’étant retirés du PAGC il y a cinq ans, les sanctions illégales se poursuivent.  Les responsables de cette situation doivent lever les sanctions illégales, a‑t‑il affirmé.  En conclusion, il a souligné que l’Iran, en tant que coauteur, présentera un projet de résolution biennal sur le « Suivi des obligations en matière de désarmement nucléaire convenues lors des Conférences d’examen du TNP », et a émis l’espoir qu’il sera adopté avec un large soutien.   

Mme MICHAL MAAYAN (Israël) a déploré la remise en cause des bases du contrôle des armements et de la non-prolifération par un certain nombre d’États.  Ce qui commence par un manque d’engagement se poursuit avec le non-respect des obligations juridiques et finit par saper le socle sur lequel repose la sécurité mondiale, a averti la représentante.  À ce titre, elle a apporté le soutien de son pays aux efforts mondiaux de non-prolifération dans le cadre de l’AIEA ou du TIAN.  Israël, a‑t‑elle ajouté, est partie d’une initiative mondiale pour lutter contre le terrorisme nucléaire.   

Reconnaissant la contribution majeure du TNP, la représentante a toutefois estimé qu’un régime de non-prolifération n’est efficace que dans la mesure du respect que lui accordent ses membres.  À ce titre, le TNP ne représente pas un remède aux défis sécuritaires uniques au Moyen-Orient, a‑t‑elle poursuivi, rappelant que quatre des cinq cas de violation grave du Traité ont eu lieu dans la région.   

La représentante a ainsi a mentionné les grandes quantités d’uranium fortement enrichi que possède l’Iran, alors qu’il s’agit d’un matériau qui n’a aucune justification civile.  Elle a accusé l’Iran d’utiliser les négociations uniquement pour « jouer la montre » et continuer de développer son programme nucléaire militaire, estimant qu’il n’y avait jamais renoncé.  Elle a appelé la communauté internationale à se mobiliser pour que l’Iran coopère avec l’AIEA.  Il est difficile d’imaginer l’étendue des dégâts si des entités pilotées par l’Iran, comme le Hamas, avaient accès à des armes nucléaires, s’est-elle alarmée.  Elle s’est également inquiétée de l’existence en Syrie d’un réacteur nucléaire qui n’aurait pas été inspecté par l’AIEA, mentionnant une résolution de 2011 de l’Agence.  Selon elle, il s’agit, d’un dangereux précédent en matière de non-respect.   

Enfin, la représentante s’est inscrite en faux contre le projet d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Ces derniers jours ont montré que la région continue d’être aux prises avec l’instabilité, la terreur, la haine et le rejet d’Israël, a‑t‑elle déclaré.  Face à une telle réalité, Israël a l’obligation de protéger ses civils et ne peut se fier qu’à lui-même, a‑t‑elle poursuivi, ajoutant en conclusion que son pays n’avait aucune intention de confier sa sécurité à des arrangements internationaux.   

M. JARMO VIINANEN (Finlande) a appelé la Fédération de Russie à mettre fin à ses menaces nucléaires insensées.  Il s’est dit déçu par la décision de la Russie de se retirer du Traité New START et inquiet de voir ce pays développer et déployer des armes nucléaires déstabilisantes, contribuant ainsi à l’escalade des tensions.  Par ailleurs, le représentant a déclaré qu’il suivrait de près le développement de l’arsenal nucléaire de la Chine et appelé ce pays à être plus transparent.  Il semble plus important que jamais que les armes nucléaires ne soient plus jamais utilisées, a‑t‑il conclu.   

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a appelé de ses vœux la négociation, au sein d’une Conférence du désarmement revitalisée grâce à la volonté politique de ses membres, d’un instrument juridiquement contraignant apportant des garanties négatives de sécurité aux États non dotés d’armes nucléaires, et d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires.  La Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) défend cette approche et plaide pour l’entrée en vigueur du TICE pour sortir le désarmement et la non-prolifération de l’ornière, a‑t‑elle ajouté.   

La représentante a également salué les travaux pionniers réalisés par les différents groupes d’experts sur la vérification du désarmement nucléaire, y compris les jalons qu’ils ont su poser à travers des rapports obtenus par consensus qui pourraient jeter les bases d’un régime robuste en la matière.   

Mme VICTORIA LIETA LIOLOCHA (République démocratique du Congo) a rappelé les discussions menées l’année dernière dans cette même salle à propos de la pandémie de COVID-19 et de la manière dont elle avait révélé nos faiblesses.  Cette même réflexion, a estimé la représentante, devrait nous inciter à réfléchir sur ce que deviendrait le monde après un seul accident impliquant une utilisation, accidentelle ou non, des armes nucléaires.  Elle a en outre rappelé que, l’année dernière, 82,9 milliards de dollars avaient été dépensés pour la modernisation des arsenaux nucléaires – des sommes qui auraient pu servir à réaliser les objectifs de développement durables, a‑t‑elle déploré.  Pendant que les États dotés traînent les pieds, le rôle de l’intelligence artificielle prend de l’ampleur, s’est inquiétée la représentante, pour qui cette technologie peut, tout comme les cyberattaques, augmenter le risque d’utilisation accidentelle d’armes nucléaires.   

Les effets des armes nucléaires ne se limitent pas aux frontières des zones ciblées, a poursuivi la représentante, qui a noté qu’ils pourraient aussi toucher les pays appartenant pourtant à des ZEAN.  Face à ce problème, elle a estimé que le TIAN reste l’initiative la plus convaincante, saluant le travail effectué par les États parties au Traité pour mettre en œuvre le Plan d’action de Vienne.  Elle a lancé un appel aux États non encore signataires pour qu’ils y adhèrent.   

La République démocratique du Congo reste engagée en faveur du désarmement nucléaire à travers les nombreux traités internationaux qu’elle a ratifiés: TNP, Traité de Pelindaba, ainsi que la signature du protocole additionnel relatif à l’application de garanties, a déclaré la représentante.  Enfin, se prononçant pour le droit à exploiter l’atome à des fins pacifiques, elle a encouragé l’AIEA à continuer d’offrir de l’assistance technique dans ce but.   

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a rappelé être le seul État doté d’armes nucléaires à utiliser un seul système de lancement.  Il a déploré que certains États augmentent leurs arsenaux nucléaires, tandis que d’autres en développent de nouveaux qu’ils intègrent dans leurs stratégies et doctrines politiques pour contraindre les autres.  L’invasion illégale de l’Ukraine par la Fédération de Russie, ainsi que les programmes nucléaires de la RPDC et de la République islamique d’Iran continuent de jeter une ombre sur les négociations internationales en matière de désarmement, a déclaré le représentant.   

Le Royaume-Uni joue un rôle actif dans la recherche sur la vérification, par le biais de son programme national mais aussi via les travaux novateurs entrepris avec le « Quad Nuclear Verification Partnership » et d’initiatives internationales telles que le Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire.  En outre, le représentant a souligné que son pays a signé et ratifié les protocoles aux traités relatifs aux ZEAN en Amérique latine et dans les Caraïbes, dans le Pacifique Sud, en Afrique et en Asie centrale.  Il a dit être prêt à faire de même pour l’Asie du Sud-Est.   

Le représentant a rappelé que le Royaume-Uni est un fervent partisan du TICE qui, depuis 25 ans, veille à ce qu’aucune explosion expérimentale d’arme nucléaire ne passe inaperçue.  Il est de notre responsabilité collective de faire respecter l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (OTICE), a‑t‑il déclaré, et de promouvoir l’entrée en vigueur du Traité.  À cet égard, il a invité les États visés à l’annexe 2 à signer ou ratifier le Traité dans les meilleurs délais.   

Au cours de l’existence de l’OTICE, la RPDC a procédé à six essais nucléaires et s’est préparée à en effectuer un septième, a rappelé le représentant, pour qui ce pays doit abandonner son programme nucléaire illégal de manière complète, vérifiable et irréversible, reprendre le dialogue, et signer et ratifier le TICE.  Si la RPDC procède à un nouvel essai, la communauté internationale devra réagir fermement, a‑t‑il martelé.  En outre, il a assuré que le Royaume-Uni restait profondément attaché à la mise en œuvre du TNP sous tous ses aspects.   

Mme THI THANH HAI TRAN (Viet Nam) a souhaité des efforts supplémentaires pour parvenir à un instrument juridiquement contraignant apportant des garanties négatives de sécurité aux États non dotés d’armes nucléaires, et pour établir de nouveaux mécanismes de nature à promouvoir la réduction des armements stratégiques parmi les États dotés.   

En attendant l’élimination totale de ces armes, la représentante a souligné la contribution importante des ZEAN pour se rapprocher d’un monde exempt d’armes nucléaires.  Elle a également réaffirmé le droit inaliénable des États d’utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.  Le Viet Nam appuie le rôle précieux de l’AIEA dans la promotion des applications pacifiques de la technologie nucléaire et espère poursuivre sa coopération en ce sens avec l’Agence, a‑t‑elle conclu.   

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a plaidé en faveur d’actions collectives face à un contexte géopolitique tendu, qui intensifie le risque d’un recours aux armes nucléaires.  Le représentant a manifesté sa déception face à l’échec des deux dernières Conférences d’examen du TNP.  De même, il a déploré que le TICE n’ait pas encore atteint son objectif, lequel requiert la ratification de tous les États mentionnés à son annexe 2.  Il a donc appelé à travailler à renforcer la crédibilité du TNP et à parvenir à l’entrée en vigueur du TICE.  Le représentant a ensuite réitéré l’attachement de son pays au TIAN, considérant qu’il complétait d’autres instruments, comme le TNP, en vue de parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires.  Il a encouragé la participation de tous les États, même non signataires, à la deuxième réunion des États parties au Traité, fin novembre à New York.   

Le représentant a insisté sur la complémentarité des diverses initiatives en matière de désarmement et de non-prolifération nucléaires, citant non seulement les traités internationaux, mais aussi les accords bilatéraux, les initiatives contre la prolifération et les forums régionaux.  Il a estimé que de telles approches favorisent la confiance mutuelle, la transparence et la coopération.  À ce titre, il a également salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.   

Enfin, le représentant a estimé que la confiance et les efforts régionaux jouent un rôle essentiel dans le renforcement de la paix et de la sécurité.  Il a donc soutenu la création de ZEAN dans toutes les régions, y compris au Moyen-Orient.  Rappelant que la Thaïlande est partie au Traité de Bangkok ayant créé la ZEAN en Asie du Sud-Est, il a exhorté les États Membres à soutenir le projet de résolution qui sera déposé à ce propos au sein de la Première Commission.   

M. AHMET ERMAN ÇETIN (Türkiye) a estimé que, plus de 50 ans après son entrée en vigueur, le TNP reste la pierre angulaire du régime mondial de non-prolifération nucléaire et a appelé les États qui n’y sont pas parties à y adhérer sans conditions.  Le représentant s’est déclaré favorable à un désarmement nucléaire systématique, progressif, vérifiable, irréversible et qui tienne compte de l’environnement stratégique.  Il a souligné la responsabilité particulière des États dotés et les a encouragés à prendre des mesures en vue de réduire leurs arsenaux nucléaires et de parvenir à une plus grande transparence concernant leurs doctrines nucléaires et de sécurité.   

Le représentant a regretté qu’après quatre semaines de négociations intensives, la dixième Conférence d’examen du TNP n’ait pas été en mesure de se mettre d’accord sur un document final, estimant toutefois que cela n’entachait en rien sa pertinence.  En tant que membre de l’Initiative sur la non-prolifération et le désarmement, la Türkiye salue les efforts visant à renforcer le processus d’examen du Traité.  Le représentant a regretté que le groupe de travail sur le renforcement du processus d’examen du TNP n’ait pas pu se mettre d’accord sur des recommandations concrètes.  Il a en outre appelé les États figurant à l’annexe 2 au TICE qui n’y sont pas encore parties à y adhérer sans délai ni condition préalable.   

Par ailleurs, le représentant a maintenu son engagement en faveur de la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient, conformément à la décision de la Conférence d’examen de 1995.  En tant que membre du Conseil des gouverneurs de l’AIEA et nouveau venu dans le domaine de l’énergie nucléaire, il a souligné l’importance de l’accord de garanties généralisées (AGG) de l’AIEA, ainsi que du protocole additionnel pour la sûreté et la sécurité des applications pacifiques de la technologie nucléaire.   

M. KIM IN CHOL (République populaire démocratique de Corée) a accusé les États-Unis de mener avec obstination des opérations militaires provocatrices et hostiles qui menacent gravement la sécurité de la RPDC et des pays voisins, tout en prônant une « logique de puissance » mégalomane, augmentant ainsi le risque d’une guerre nucléaire sans précédent dans l’histoire.  En envoyant un sous-marin nucléaire stratégique dans et autour de la péninsule coréenne pour la première fois en 42 ans, les États-Unis et leurs alliés ont, selon le représentant, manifesté la volonté de provoquer une guerre nucléaire contre son pays.   

Dans ce contexte, le renforcement par la RPDC de sa dissuasion nucléaire d’autodéfense constitue l’exercice d’un droit souverain légitime pour empêcher une telle catastrophe et pour sauvegarder la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RPDC, a plaidé le représentant.  Il a prévenu que « tant que les armes nucléaires tyranniques des impérialistes existeront sur la planète, nous ne modifierons ni n’abandonnerons le statut actuel de notre pays en tant qu’État doté d’armes nucléaires ».  C’est en tant qu’État responsable doté d’armes nucléaires que la RPDC remplira sa mission, qui est d’empêcher une guerre nucléaire en vue de contribuer à l’édification d’un monde pacifique où prévaut la justice internationale, justice que bafouent les États-Unis, a conclu le représentant.   

M. ANOUPARB VONGNORKEO (République démocratique populaire lao) a dit se joindre à la majorité des États Membres de l’ONU en appelant de ses vœux l’élimination totale des armes nucléaires.  Le TICE fournit des bases essentielles à cette fin, a‑t‑il estimé, se félicitant du nombre d’États signataires, qui s’élève à 178, et appelant les pays restant à le ratifier pour en faciliter l’entrée en vigueur.  Il a également estimé encourageante la mise en vigueur du TIAN en 2021, saluant le succès de la première Réunion des États parties l’année dernière.   

Le TNP et le TIAN sont complémentaires, a également estimé le représentant.  Le premier reste la clef de voûte du désarmement nucléaire, de la non-prolifération et de l’utilisation pacifique de l’atome, a‑t‑il poursuivi, appelant les États signataires à réaffirmer leurs engagements malgré les échecs des dernières Conférences d’examen du TNP. 

Le représentant a plaidé en faveur de la promotion pacifique de l’énergie nucléaire, remerciant l’AIEA pour son assistance sans faille.  Avec les autres États membres de l’ASEAN, il a réaffirmé son engagement avec l’Agence, notamment en mettant en œuvre les arrangements pratiques de coopération de 2019.  Cette année, a‑t‑il annoncé, l’ASEAN proposera un projet de résolution sur la ZEAN en Asie du Sud-Est.   

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a estimé que les armes nucléaires ne sont pas neutres du point de vue du genre.  Les femmes et les filles courent un risque beaucoup plus élevé de développer un cancer que les hommes ou les garçons, a‑t‑elle affirmé, et ce sont elles qui donnent naissance à des enfants souffrant de malformations graves et de maladies graves.  Du fait de ces malformations, elles risquent d’être étiquetées comme « non mariables », ce qui représente, dans de nombreuses régions du monde, une tragédie socioéconomique.   

Lors de la dixième Conférence d’examen du TNP, en 2022, 67 pays ont publié une déclaration commune sur l’égalité des sexes et l’égalité des chances qui souligne l’importance d’une participation pleine, égale et efficace des femmes dans tous les aspects du Traité, a rappelé la représentante.  Ces préoccupations ont été reflétées dans le projet de document final de la dixième Conférence d’examen du TNP, qui contenait de nombreuses références aux questions de genre, en particulier en ce qui concerne la participation significative et le rôle de premier plan des femmes dans le TNP, a‑t‑elle souligné.  En dépit de l’absence de consensus sur le document final, ce libellé a été accepté par tous les États parties, a‑t‑elle fait observer.  Par ailleurs, a‑t‑elle rappelé, le Plan d’action de Vienne relatif au TIAN décrit toute une série de mesures reconnaissant les questions de genre, en demandant des mesures, comme la création d’un plan focal concernant l’application de rapports.   

Il existe une disparité marquée dans le niveau et le nombre de femmes par rapport aux hommes dans les domaines du désarmement, de la non-prolifération et de la maîtrise des armements, a fait observer la représentante.  Ici même, dans le forum universel par excellence, on ne comptait que 37% de femmes déléguées en 2022, a‑t‑elle souligné.  Il s’agit de sensibiliser tout un chacun aux questions de genre pour être conscients de ce biais qui existe dans les domaines de sécurité, a‑t‑elle encore déclaré.   

Mme GIEDRĖ GELEŽEVIČIENĖ (Lituanie) a déclaré que la situation à la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporizhzhia, la plus grande d’Europe, reste alarmante, la Russie poursuivant sa saisie illégale de la centrale et le stationnement d’équipements et de personnel techniques et militaires.  Après avoir rappelé que la Russie menace d’utiliser des armes nucléaires et exprime son intention d’implanter ses armes nucléaires dans un pays voisin -le déploiement annoncé d’armes nucléaires russes au Bélarus étant incompatible avec l’engagement pris par ce pays en vertu du Mémorandum de Budapest- la représentante a noté avec préoccupation la suspension du Traité New START par la Russie et les mesures prises pour révoquer sa ratification du TICE.  Ces développements démontrent la dépendance croissante de la Russie à l’égard des armes nucléaires, a‑t‑elle considéré.  En conclusion, elle a réaffirmé l’engagement de toujours de son pays en faveur de la maîtrise des armements, du désarmement et de la non-prolifération, et appelé tous les États à respecter leurs obligations et engagements dans ces domaines.   

M. KEDIR GETAHUN (Éthiopie) a fait part de son inquiétude face à la situation actuelle du désarmement et à l'aggravation de la situation géopolitique mondiale, qui nécessitent la promotion et la réalisation rapide des objectifs de désarmement nucléaire. En Afrique, nous avons montré notre conviction de garantir la paix et la sécurité régionales en adoptant le Traité de Pelindaba faisant du continent une zone exempte d'armes nucléaires, qui affirme aussi le droit fondamental et inaliénable de toutes les nations à développer, produire et utiliser des armes nucléaires à des fins pacifiques, a rappelé le représentant.  L'Éthiopie remplit les obligations qui lui incombent en vertu de ce Traité, a‑t‑il ajouté.   

Le représentant a réitéré l'importance vitale de la mise en œuvre et du renforcement des trois piliers du TNP de manière équilibrée et non discriminatoire. Il s'agit là d'un élément essentiel de nos efforts collectifs pour progresser dans le domaine du désarmement nucléaire et parvenir à un monde exempt d'armes nucléaires, a‑t‑il conclu.   

M. LEONARDO BENCINI (Italie) a plaidé en faveur de l’élimination totale des armes nucléaires.  Dans ce but, il a préconisé une approche progressive, appelant les États dotés à prendre des mesures concrètes par le biais d’une réduction de leurs arsenaux.  Le représentant a regretté l’absence de consensus à l’issue de la première Réunion du Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen du TNP, qui s’est tenue en août dernier à Vienne.  Néanmoins, il s’est dit encouragé par le large degré de convergence quant aux mesures visant à renforcer le processus d’examen et sur les questions de transparence et de responsabilité.  Il a appelé les États parties au TNP à faire preuve de responsabilité pour permettre le succès de la onzième Conférence d’examen, en 2026.  Il n’y a pas d’alternative au TNP, a‑t‑il poursuivi, appelant à sa préservation et à son renforcement.   

Réitérant l’attachement de l’Italie au TICE, le représentant s’est réjoui que huit États supplémentaires y aient adhéré au cours du mandat que son pays a exercé en tant qu’un des coordonnateurs de l’article XIV.  Il a partagé sa préoccupation quant aux récentes déclarations des autorités russes sur leur possible retrait du Traité, les exhortant à ne pas aller de l’avant, et a encouragé les États non parties, en particulier ceux figurant à l’annexe 2, à ratifier le Traité.   

En vue de sortir de l’impasse, le représentant a appelé tous les États à respecter un moratoire sur la production de matières fissiles.  En outre, il a exhorté la Russie à cesser d’user de la menace nucléaire, à revenir au Traité New START, et à revenir sur sa décision de déployer des armes nucléaires au Bélarus.  Enfin, il a demandé à l’Iran de revenir sans délai à la diplomatie pour raviver le PAGC, et à la RPDC de prendre des mesures concrètes vers une dénucléarisation complète.   

M. TAMÁS TALPAI (Hongrie) s’est alarmé que la situation internationale menace de saper les normes visant à empêcher l’utilisation, la dissémination et les essais d’armes nucléaires.  Dans le conflit militaire en Ukraine, le risque d’utilisation d’armes nucléaires est plus élevé que jamais depuis l’apogée de la guerre froide, a estimé le représentant.  Pour la Hongrie, les États dotés ont une responsabilité particulière dans le domaine du désarmement nucléaire et le représentant s’est dit profondément préoccupé par l’absence actuelle de dialogue et la course qualitative aux armements nucléaires en cours.  Il a fait part de sa déception concernant l’échec de la dixième Conférence d’examen du TNP, achevée sans l’adoption d’un document final global, et par celui de la première session du Comité préparatoire à la onzième Conférence d’examen, à l’issue duquel aucun rapport consensuel n’a pu être adopté.   

Le désarmement nucléaire nécessite une approche progressive impliquant des mesures graduelles et concrètes qui peuvent produire des résultats tangibles, a déclaré le représentant, pour qui il faudrait se concentrer sur l’identification des domaines où il est possible de trouver un terrain d’entente et un consensus incluant les États dotés d’armes nucléaires.  Pour la Hongrie, une de ces mesures est l’entrée en vigueur du TICE, qui devrait être une priorité absolue pour tous, car il ne peut y avoir de désarmement nucléaire significatif sans une interdiction complète et totale des essais nucléaires.   

Un traité sur les matières fissiles limiterait la quantité de matière à usage militaire direct et contribuerait également à la mise en œuvre des obligations découlant de l’article VI du TNP, a par ailleurs estimé le représentant, pour qui les États dotés et les États non dotés devraient travailler ensemble à la création d’un tel instrument.  Enfin, il a estimé que l’accord de garanties généralisées de l’AIEA et le protocole additionnel devraient constituer la norme de vérification actuelle dans le cadre du TNP. 

M. THOMAS FETZ (Canada) a accusé la Chine d’accumuler de manière évidente une plus grande quantité d’armes nucléaires, tout en rejetant un moratoire volontaire sur la production de matières fissiles pour la fabrication de telles armes.  La Russie, quant à elle, continue de brandir ses menaces et d’agir de manière irresponsable sur le plan nucléaire tout en menant une guerre agressive contre l’Ukraine, a noté le représentant, qui s’est dit profondément troublé par le fait que la Russie puisse révoquer sa ratification du TICE et reprendre ses essais nucléaires. 

Le représentant a également exprimé la préoccupation du Canada devant les efforts de l’Iran pour accroître son programme nucléaire.  Il a condamné les programmes illégaux d’armes de destruction massive et de missiles balistiques de la RPDC, ainsi que son intention déclarée d’accroître son arsenal d’armes nucléaires.   

Quant à l’élaboration, dans le cadre de la Conférence du désarmement, d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires, le représentant a indiqué que le principal projet de résolution sur ce point propose, cette année, une nouvelle option pour des progrès, en invitant les États qui possèdent des armes nucléaires à agir et l’ONU à offrir un soutien en matière de facilitation.  Le Canada demande l’appui des autres délégations pour cette prochaine étape importante.  Le représentant a, par ailleurs, déclaré que son pays appuierait tout particulièrement les projets de résolution les plus ouvertement inclusifs.   

M. KHALID ABDULLAH M. ALIBRAHIM (Arabie saoudite) s’est dit convaincu de l’importance du TNP, pierre angulaire du régime de non-prolifération et de désarmement nucléaire.  À ce titre, il a appelé à respecter l’équilibre des trois piliers du Traité, appelant tout particulièrement à la mise en œuvre de l’article VI pour parvenir à l’élimination totale des armes nucléaires.  Le représentant a déploré les échecs des neuvième et dixième Conférences d’examen du TNP, de même que celui de la première Réunion préparatoire à la onzième Conférence d’examen.  Le TNP fait face à un problème grave, s’est-il inquiété, qui requiert une action sérieuse pour que soit conservée sa force juridique.   

La sécurité et la stabilité ne sauraient être instaurées par la possession des armes nucléaires, a déclaré le représentant, estimant que la mise au point de systèmes de dissuasion déchaînerait une course aux armements.  Le développement des armes nucléaires mènera inévitablement à un monde propice aux conflits et à l’apparition de blocs militaires, a‑t‑il averti.   

Le représentant s’est dit pressé de voir la Conférence du désarmement sortir de la paralysie, préconisant dans ce but l’élaboration d’un programme d’action global et équilibré lui permettant de s’atteler aux fonctions pour lesquelles elle a été créée.  À ce titre, il a émis le souhait que de nouveaux membres soient acceptés, de manière à élargir le processus de négociation et de parvenir à l’universalisation des traités.   

Mme EMIOLA AJAYI (Nigéria) a estimé que face aux défis mondiaux actuels que sont le terrorisme, les changements climatiques, la cybercriminalité, la faim, les maladies zoonotiques, consacrer des ressources à l’entretien des armes nucléaires n’a aucun sens.  La représentante a rappelé que les pays africains ont adopté le Traité de Pelindaba, qui interdit l’acquisition d’armes nucléaires à des fins militaires et déclare l’Afrique ZEAN.  Elle a renouvelé son engagement envers le TNP et son soutien continu à ses buts et objectifs.  Toutefois, elle a dit son mécontentement face à l’échec consécutif sans précédent des Conférences d’examen du TNP depuis l’adoption d’un document final en 2010.  Ces échecs persistants érodent la crédibilité du Traité, ce qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour l’humanité et l’environnement, a‑t‑elle ajouté.   

La représentante a fait part de sa fierté concernant le rôle actif qu’a joué le Nigéria en tant que coparrain dans les processus qui ont conduit à l’adoption du TIAN et à son entrée en vigueur.  Elle a enjoint aux États dotés d’armes nucléaires et ceux qui se trouvent sous ce qu’on appelle le « parapluie nucléaire », de saisir l’occasion de signer et de ratifier le Traité dans les meilleurs délais.  En outre, elle a réaffirmé le droit inaliénable de tous les États d’utiliser les technologies nucléaires pour leurs aspirations en matière de développement.   

Le TICE joue un rôle essentiel dans notre aspiration à éliminer les armes nucléaires, a déclaré la représentante.  Toutefois, la priorité du Nigéria est de veiller à ce que le TICE ne se limite pas à l’interdiction des essais d’armes nucléaires, mais qu’il souligne également l’importance de l’énergie nucléaire pour le bien des êtres humains et de l’environnement.  La mise en œuvre du TICE est essentielle pour notre sécurité en tant qu’humanité, a‑t‑elle conclu.   

M. WU JIANJIAN (Chine) a reconnu que la destruction complète des armes nucléaires est une aspiration commune.  Or, a noté le représentant, les circonstances invitent à renforcer le multilatéralisme pour sortir de la logique des blocs, soulignant que, pour la Chine, le désarmement nucléaire doit être progressif et porté en premier lieu par les États les plus dotés d’armes nucléaires.  La réduction des risques stratégiques doit être la priorité du P5, tout en assurant la sécurité de tout un chacun, a poursuivi le représentant, qui a appelé à l’abaissement du rôle des armes nucléaires dans les doctrines nationales sécuritaires.  Dans cette optique, il a rappelé l’attachement de son pays à l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant sur le non-emploi en premier d’armes nucléaires pour restaurer la confiance interétatique.   

Le représentant a par ailleurs demandé d’éviter de déployer des missiles de moyenne portée en Europe et en Asie/Pacifique.  En outre, a‑t‑il dit, la Conférence du désarmement devrait négocier un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires sur la base d’un programme de travail équilibré et dépolitisé.  Nos stratégies et politiques en matière de sécurité sont stables, ce qui n’est pas le cas de celles d’autres États dotés, a encore affirmé le représentant.  Ces politiques et stratégies n’ont pas varié, la communauté internationale le sait, a‑t‑il insisté, affirmant qu’elles ont contribué comme aucune autre au processus de désarmement nucléaire.   

M. BRUCE TURNER (États-Unis) a rappelé la doctrine de son pays, selon laquelle l’arsenal nucléaire a pour but de dissuader toute attaque nucléaire et défendre les intérêts vitaux des États-Unis et de leurs alliés.  La guerre nucléaire ne doit jamais être livrée, a poursuivi le représentant, appelant tous les États dotés à respecter ce principe.  Il a assuré que l’engagement de son pays est pleinement compatible avec le droit international, ajoutant que les États-Unis feraient montre d’un comportement responsable tant que les armes nucléaires continueront d’exister.   

Estimant la transparence indispensable pour dissiper les malentendus, le représentant a rappelé que son pays avait volontairement diffusé des données sur les armes stratégiques dans le cadre du Traité New START, tout en faisant observer que la Russie n’avait pas fait de même et en dépit de l’annonce par la Russie de son retrait du Traité.  Il a en outre déploré les projets russes de se retirer du TICE, estimant qu’une telle décision mettrait en danger les normes mondiales en matière de sécurité nucléaire.   

Le représentant a accusé la Chine de viser l’élargissement de son arsenal nucléaire tout en refusant de reconnaître son programme.  La Chine est le seul État doté à ne pas avoir adopté de moratoire sur la production de matières fissiles, a‑t‑il rappelé, relevant en outre qu’elle n’avait pas communiqué sa production à l’AIEA.  Le représentant a déploré les réticences chinoises face aux mesures de transparence et de réduction des risques.  Il a ensuite évoqué la RPDC, l’accusant d’avoir violé de multiples résolutions du Conseil de sécurité.   

Le représentant s’est dit prêt à travailler avec la Russie pour redémarrer le Traité New START, et a appelé la Chine à mener des discussions bilatérales pour promouvoir la stabilité et réduire les tensions.  Précisant que son pays visait la dénucléarisation complète de la péninsule coréenne, il a assuré être disposé au dialogue sans prérequis avec la RPDC.  Enfin, il a lancé un appel en vue de soutenir des négociations multilatérales pour un traité sur l’interdiction de la production de matières fissiles pour des armes nucléaires ou d’autres dispositifs explosifs nucléaires.   

M. ANUPAM RAY (Inde) a déclaré que son pays, en tant qu’État doté de l’arme nucléaire, mais responsable, a adopté une position qui consiste à ne pas utiliser en premier l’arme nucléaire contre tout État.  Le représentant a dit rester attaché au désarmement nucléaire.  Cet objectif est réalisable dans des délais limités, par un processus en étapes reposant sur un engagement universel et un cadre multilatéral, a‑t‑il estimé, précisant que le cadre devait être mondial et non discriminatoire.  En tant que principale instance de désarmement nucléaire, la Conférence du désarmement doit pouvoir entamer des négociations sur une convention sur les armes nucléaires, non discriminatoire et sur la base des textes déjà exposés.   

La résolution annuelle sur une Convention d’interdiction de l’emploi de l’arme nucléaire, présentée depuis 1982 par l’Inde à l’Assemblée générale, prie d’entamer des négociations sur une Convention interdisant l’emploi ou la menace de l’arme nucléaire quelles que soient les circonstances, a rappelé le représentant.  Pour sa part, le texte sur la réduction des dangers nucléaires présenté depuis 1988 a suscité une attention importante.  Le représentant a demandé le soutien des États membres sur ces deux projets de résolution pour permettre leur adoption.  La communauté internationale doit tout mettre en œuvre pour empêcher que des terroristes ou des acteurs non étatiques mettent la main sur ces armes, a‑t‑il ajouté.   

Passant à la question de la crise en Israël et en Palestine, le représentant a affirmé que son pays avait toujours respecté les règles de la guerre en temps de guerre et attendait des autres pays qu’ils fassent de même.  Nous sommes solidaires du Gouvernement et du peuple d’Israël en ces heures difficiles, a‑t‑il ajouté, ajoutant que peu de pays avaient autant souffert du terrorisme que l’Inde.   

M. PIOTR DZWONEK (Pologne) a notamment estimé nécessaire d’œuvrer pour un monde sans armes nucléaires par le biais d’une approche de désarmement étape par étape, pragmatique, efficace, vérifiable et irréversible.  À cet égard, nos préoccupations légitimes en matière de sécurité, telles que le début du déploiement de l’arsenal nucléaire tactique russe au Bélarus, doivent être sérieusement prises en compte, a souligné le représentant.   

Pour la Pologne, il est également important de se pencher sur l’avenir du système mondial de contrôle des armements.  Le représentant l’a imaginé enrichi d’une application élargie des dispositions les plus ambitieuses du Traité New START, et de l’implication de la Chine aux efforts de transparence en matière de réduction des risques et de stabilité stratégique.   

M. JØRN OSMUNDSEN (Norvège) a condamné la rhétorique nucléaire russe, qu’il a jugée « inadmissible », ainsi que son intention annoncée de se retirer du TICE ou ses projets de stationnement d’armes nucléaires au Bélarus.  Sur ce dernier point, une comparaison avec le partage nucléaire de l’OTAN est trompeuse, a affirmé le représentant, pour qui l’alliance atlantique respecte tous les accords internationaux.  Il a appelé la Russie à reprendre la mise en œuvre du Traité New START ainsi qu’à engager, avec la Chine, un dialogue sur la réduction des risques, dans le but de réduire toutes les catégories d’armes nucléaires.  Réitérant l’engagement de son pays en faveur du TNP, le représentant s’est dit déçu que le groupe de travail ne soit pas parvenu à se mettre d’accord, en juillet, sur des recommandations ou sur un rapport.  Il a toutefois estimé encourageant le fait qu’une écrasante majorité d’États parties ait fait preuve d’un engagement clair pour renforcer le Traité.   

La vérification du désarmement nucléaire reste une priorité clef pour la Norvège, a déclaré le représentant, qui a mentionné la présidence norvégienne du Groupe d’experts gouvernementaux de l’ONU sur ce sujet.  Se félicitant du consensus obtenu par le Groupe concernant un rapport destiné à l’Assemblée générale, il a appelé les États Membres à soutenir le projet de résolution sur la vérification du désarmement nucléaire.  Il a en outre confirmé la continuation de la participation de son pays au Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire en se concentrant sur les aspects techniques et scientifiques.   

Enfin, le représentant a réitéré le soutien de la Norvège au TICE, rappelant que son pays avait coprésidé en septembre la Conférence convoquée en vertu de l'article XIV du Traité aux côtés du Panama, et exhortant les pays non signataires à ratifier le Traité.  Il s’est également prononcé en faveur d’un traité sur l’interdiction de la production de matières fissiles.  Il a par ailleurs souligné l’importance du système de garanties de l’AIEA, le qualifiant d’élément indispensable du régime international de non-prolifération nucléaire.  À ce titre, il a salué les efforts de l’Agence pour garantir la sécurité nucléaire en Ukraine.   

M. IVENS MANUEL FRANCISCO GUSMĂO DE SOUSA (Timor-Leste) a estimé que, depuis leur création, les Nations Unies sont parvenues à empêcher l’utilisation d’armes nucléaires dans le monde moderne.  Pourtant, la rhétorique de l’utilisation des armes nucléaires a été constamment utilisée, ce qui a affecté le travail en faveur d’un désarmement nucléaire général.  La dixième Conférence d'examen du TNP et la première session du Comité préparatoire de la onzième Conférence d'examen du TNP tenue récemment à Vienne nous ont montré les nombreuses failles du régime actuel de désarmement nucléaire, a estimé le représentant.  Il a toutefois estimé que le TNP demeure l’une des pierres angulaires du désarmement nucléaire mondial et du régime de non-prolifération.  Quant au TIAN, la deuxième Conférence des États parties qui se tiendra fin novembre sera l’occasion pour d’autres États membres de signer et de ratifier le Traité, a‑t‑il déclaré.   

Mme INDIRA GOHIWAR ARYAL (Népal) a salué le rôle joué par les centres régionaux des Nations Unies dans la promotion du désarmement et de la non-prolifération, y compris celui de Katmandou.  La représentante a ensuite rappelé que les États dotés d’armes nucléaires avaient dépensé, en 2022, environ 82,9 milliards de dollars pour moderniser et accumuler ces armes catastrophiques.  Réorienter ces ressources vers des causes sociales et humanitaires pourrait accélérer nos progrès vers les objectifs de développement durable, en éradiquant la pauvreté et la faim bien avant 2030 et en améliorant la qualité de vie de l’ensemble de l’humanité, a‑t‑elle souligné.   

Selon M. FLÁVIO SOARES DAMICO (Brésil), les armes nucléaires sont trop nombreuses et risquent de l’être encore plus à l’avenir.  Craignant un affaiblissement prochain des traités de désarmement, le représentant a dénoncé la tendance dangereuse à la menace d’utiliser les armes nucléaires dans le but d’intimider.  Estimant que la Première Commission ne faisait pas grand-chose, si ce n’est lancer des dénonciations, il a rappelé que cette année, seules 23 résolutions sont proposées sur les armes nucléaires, dont une seule initiative nouvelle.  Malheureusement, a‑t‑il poursuivi, nous risquons aussi d’avoir des problèmes au moment des votes.   

Appelant à la protection des régimes de non-prolifération, notamment celui du TNP, le représentant a dénoncé les États dotés, qui ne respectent pas leurs engagement pris pendant les Conférences d’examen.  En revanche, il s’est félicité de l’élan apporté par l’entrée en vigueur du TIAN en 2021.  Estimant que le TICE est paralysé, il a en outre souligné qu’il risque bientôt de subir des revers.  Enfin, il s’est dit favorable à un traité sur l’interdiction des matières fissiles.   

M. KADIM OUSSEIN (Comores) a considéré que la doctrine de dissuasion nucléaire, prônée par certains États, est une fausse promesse de sécurité.  Elle repose sur la menace d’utilisation d’armes de destruction massive, menace qui, si elle était mise à exécution, entraînerait des conséquences humanitaires et environnementales inimaginables, a‑t‑il noté.  Les Comores condamnent ainsi toute utilisation ou menace d’utilisation d’armes nucléaires et exhortent tous les États à rejeter cette doctrine dangereuse.   

Les Comores encouragent les États dotés d’armes nucléaires à s’engager résolument dans la voie du désarmement et demandent aux États qui accueillent des armes nucléaires étrangères sur leur territoire de cesser de le faire, a poursuivi le représentant, pour qui « le risque est trop grand, et le coût pour l’humanité, trop élevé ».  Il a rappelé qu’en 2021, les Comores avaient marqué leur engagement en devenant parties au TIAN et au TICE, deux traités qui, renforçant le cadre du TNP, sont fondamentaux dans la lutte contre la prolifération nucléaire, a‑t‑il ajouté.   

M. CHRISTIAN CIOBANU (Kiribati), qui s’exprimait également au nom du Kazakhstan, a rappelé que les deux pays avaient connu le stress dévastateur et les atteintes à long terme des essais nucléaires.  Vu l’héritage de nos deux nations, nous nous sommes fait les défenseurs de la cause de la justice nucléaire dans les instances internationales, a expliqué le représentant.  Il s’est dit convaincu que la Première Commission doit travailler à la sûreté pour tous, mais également se tourner vers le passé pour voir l’héritage laissé par ces armes.  C’est pourquoi, a‑t‑il rappelé, les deux délégations ont présenté des projets de résolution, dont une sur l’assistance aux victimes, l’aide humanitaire et l’évaluation environnementale.   

Mme TATIANA BÁRBARA MUÑOZ PONCE (Bolivie) a réaffirmé le rejet par son pays de l’emploi et de la menace de l’emploi des armes nucléaires.  Elle a déploré qu’il existe encore des pays qui considèrent ces armes comme un garant de leur propre sécurité, qui les modernisent ou qui mettent au point de nouveaux types d’armes nucléaires.  Le TNP, a-t-elle estimé, est le socle du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  À ce titre, elle a réitéré le soutien de son pays au TNP mais a aussi noté que, plus de 50 ans après son entrée en vigueur, subsistent des d’inégalités dans sa mise en œuvre.  Elle a cité notamment l’article VI, en rendant les États dotés responsables de sa mauvaise application.   

La représentante a plaidé l’entrée en vigueur complète du TIAN, dénonçant l’incohérence de certains États qui prétendent vouloir un monde exempt d’armes nucléaire mais n’ont pas ratifié le Traité.  Elle a souligné la complémentarité entre le TIAN, le TNP et le TICE, lesquels renforcent mutuellement le régime de garantie de l’AIEA.  De même, a-t-elle ajouté, le TIAN mentionne l’assistance aux victimes et à la réhabilitation de l’environnement, tout en prenant en compte la perspective de genre.  Elle a lancé un appel pour que des efforts de non-prolifération soient lancés parallèlement à ceux qui visent un désarmement complet, vérifiable et irréversible.   

Mme VIVIAN OKEKE, de l’Agence internationale de l’énergie atomique, a rappelé les objectifs de l’Agence relatifs au TNP, à savoir diffuser les avantages de l’atome tout en prévenant la prolifération des armes nucléaires.  En 2022, l’AIEA a ainsi aidé 149 pays et territoires au travers de son programme de coopération technique.  La représentante a indiqué que les différentes initiatives d’action de l’AIEA sur les traitements des cancers, les zoonoses ou encore la pollution plastique sur les océans sont en train de porter leurs fruits.  Les capacités de l’énergie nucléaire dans le secteur de l’électricité vont devoir augmenter si le monde veut satisfaire à ces objectifs en matière de climat, a‑t‑elle par ailleurs fait observer.   

L’AIEA apporte une contribution vitale à la paix et la sécurité grâce à son système de garanties, y compris la détection précoce, a encore fait valoir la représentante.  Le TNP compte aujourd’hui seulement quatre États parties qui ne sont pas dotés de garanties globales, a‑t‑elle ajouté, précisant que le Directeur général de l’Agence les avait encouragés à se doter de ces accords sans retard.   

Mme Okeke a par ailleurs rappelé le travail de l’Agence en Ukraine, faisant état notamment de 53 missions menées à la date du 31 août et de 116 membres du personnel de l’Agence déployés dans le cadre de la présence continue sur les cinq sites nucléaires d’Ukraine.  Elle a rappelé que, au cours de l’année écoulée, 11 rotations d’experts de l’AIEA avaient traversé les lignes de front jusqu’à la centrale nucléaire de Zaporizhzhia (ZNPP) et que, depuis près de cinq mois, l’AIEA surveille et rend compte du respect des cinq principes concrets de protection de la ZNPP établis par le Directeur général lors d’une réunion du Conseil de sécurité, le 30 mai dernier.   

M. JOSÉ ROSEMBERG, de l’Organisation du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, a fait état d’un certain nombre d’évolutions récentes importantes pour le TICE, en particulier la ratification du Traité par huit États lors des 18 derniers mois.  À ce jour, le TICE compte 187 États signataires et 178 l’ont ratifié, a‑t‑il rappelé.  Il a également mentionné qu’en septembre, la Conférence convoquée en vertu de l'article XIV du Traité, qui visait à faciliter l’entrée en vigueur du Traité, avait constitué une occasion importante de délivrer des messages forts de soutien au TICE, avant que ces derniers ne se retrouvent dans le texte d’un accord final adopté par consensus.   

M. Rosemberg a jugé « préoccupante et très regrettable » l’annonce par la Fédération de Russie de la possible révocation de sa ratification du TICE.  Mais, a‑t‑il ajouté, quelle que soit cette décision, nous -le Secrétaire exécutif, l’OTICE et le vaste réseau de partisans du TICE dans le monde entier- nous ne changeons pas de cap.  Nous ne changeons pas l’engagement.  Nous ne nous laissons pas décourager alors que nous luttons pour notre objectif collectif de parvenir à l’entrée en vigueur du Traité.  Notre mouvement mondial pour cette noble cause reste fort, avec de plus en plus d’États qui rejoignent nos rangs.   

Nous traversons une période difficile mais notre objectif est noble et notre engagement est ferme a ajouté le représentant.  L’universalisation du TICE et son entrée en vigueur représentent un effort collectif et les revers ne doivent pas nous empêcher de réussir.  Un monde sans essais nucléaires est un monde meilleur, et c’est notre privilège et notre devoir de lutter pour atteindre cet objectif, a‑t‑il conclu, se disant convaincu qu’il ne faudra pas longtemps avant que le TICE compte plus que les 178 ratifications actuelles.   

Droits de réponse 

Le représentant de la Fédération de Russie a répondu aux accusations concernant la présence d’armement russe à la centrale de Zaporojie.  Il a affirmé que la centrale se trouve sur le territoire russe du fait des référendums de 2022 tenus dans les républiques populaires de Donetsk, de Lougansk et dans les régions de Kherson et de Zaporojie.  En octobre 2022, le Président russe a signé un décret sur l’utilisation de l’énergie atomique dans la région de Zaporojie, a-t-il poursuivi, arguant que le texte définit le statut de la centrale comme étant sous juridiction russe.  Selon lui, la Russie n’a pas procédé à des attaques sur le territoire de la centrale, et aucun armement lourd ni personnel militaire n’y est posté, précisant que l’on y trouve seulement les forces nécessaires pour assurer la sécurité de la centrale – un fait confirmé en partie par l’AIEA dans son rapport, a-t-il ajouté.  Il a accusé l’Ukraine de perpétuer des attaques dangereuses sur la centrale, au mépris des risques de fuites nucléaires.  Ces attaques ne pourraient avoir lieu sans le soutien de l’Occident, a-t-il ajouté.  Enfin, il a rappelé que les experts de l’AIEA ont eu accès à la centrale grâce à la collaboration russe.   

Le représentant de la Chine a accusé les États-Unis, le Canada, la Finlande et le Japon de dépeindre sa position de manière biaisée.  Son représentant a appelé la communauté internationale à se préoccuper plutôt de ce que font les États-Unis en matière de nucléaire, appelant ce dernier pays à procéder à un travail d’introspection, à suivre le consensus international et à assumer ses responsabilités en réduisant son arsenal.  En ce qui concerne le projet de traité interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et autres dispositifs explosifs nucléaires, le représentant a considéré que la Conférence du désarmement est la seule instance légitime pour le négocier.  La Chine, a-t-il poursuivi, appuie les négociations en vue d’un texte juridiquement contraignant et multilatéral.  Il a estimé que les initiatives visant à un moratoire, mal définies et peu vérifiables, risquent de nuire à la négociation du traité.  Dans ce cadre, la revendication d’un moratoire est un peu hypocrite, a-t-il jugé.  Il a rappelé que la Chine pratique la politique de non-utilisation en premier, estimant qu’il s’agissait de la mesure la plus efficace, et appelant les autres États dotés à adopter la même approche.   

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a répété que les États-Unis continuent de vouloir mettre fin au régime de son pays via une action brutale.  Une alliance militaire triangulaire a été créée qui a entraîné de véritables agressions dont nous sommes la victime directe et un chantage nucléaire qui remonte aux années 1940 et 50, a-t-il affirmé, ajoutant que c’est la raison pour laquelle les menaces des forces hostiles devaient être contrées.  Le représentant a rejeté les allégations infondées des États-Unis quant à de prétendus accords d’armements entre son pays et la Russie.  Ce sont les États-Unis qui alimentent en armes l’Ukraine, perpétuant ainsi le conflit, a-t-il dit.   

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu aux accusations infondées d’Israël à l’égard de son pays, ajoutant que les tentatives désespérées de cacher les immenses arsenaux d’armes de destruction massive « de l’entité d’occupation » ne trompent personne.   

Le représentant de la République islamique d’Iran a rejeté comme infondées les accusations d’Israël.  Aucune campagne de diffamation ne saurait faire oublier les atrocités et les violations répétées du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale, y compris l’attaque en cours à Gaza, a-t-il martelé.  Ce que fait le « régime israélien » est préoccupant, a ajouté le représentant, qui a parlé d’installations clandestines dans des lieux qui ne sont pas sécurisés.  Il a en outre rejeté les menaces proférées contre son pays.  S’agissant du programme nucléaire iranien, il a rappelé les sanctions imposées à son pays avant de rejeter les allégations de la France, avant de condamner celle-ci au titre de l’article 2 du TNP, en l’accusant d’avoir aidé Israël à obtenir l’arme nucléaire.   

Le représentant de la République de Corée a répondu à la RPDC que le programme nucléaire de la RPDC est illégitime.  Les allégations concernant une politique qui serait hostile de la part de la République de Corée et qui justifierait le comportement de la RPDC sont simplement fausses, a-t-il déclaré, ajoutant que son pays était ouvert au dialogue.  Il a demandé à la RPDC de se conformer aux décisions du Conseil de sécurité.   

Le représentant de l’Union européenne a répondu à la Russie qu’elle ne reconnaît pas la tentative d’annexion de la République autonome de Crimée, ainsi que celle ayant eu lieu dans les régions de Donetsk, Luhansk, Kherson et Zaporizhzhia.  L’Union européenne continuera de soutenir l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières reconnues sur le plan international.  Le représentant a accusé la Russie d’avoir mis en péril la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes et l’a appelée à retirer ses troupes de la centrale de Zaporizhzhia.  En outre, il s’est félicité de la résolution de la Conférence générale du Conseil des gouverneurs de l’AIEA, qui appelle au retrait du personnel militaire non autorisé présent dans la centrale.  Le Directeur général de l’Agence, a-t-il poursuivi, a indiqué qu’il y avait une présence militaire significative dans la centrale malgré les dénégations russes.   

Le représentant de l’Ukraine a répondu à la Russie sur la question des référendums organisés en Ukraine, qu’elle a qualifié de « simulacres » sans aucune valeur au regard du droit international.  En ce qui concerne la situation dans la centrale, il a souligné que le décret du président russe mentionné par la délégation russe est une violation du droit international, en claire violation des accords passés entre l’Ukraine et l’AIEA.  Il a également rappelé que la centrale avait été occupée dès les premiers jours de la guerre, et que les installations avaient été utilisées comme tremplin pour l’offensive russe.  Il a évoqué une série de résolutions adoptées par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA qui appellent la Russie à retirer immédiatement ses troupes, son équipement et son personnel de la centrale, et à la remettre à l’Ukraine.  Enfin, il a rappelé que des bombardements avaient eu lieu sur la centrale au début du conflit, qui constituaient un risque majeur d’accident nucléaire.   

Exerçant de nouveau son droit de réponse, la représentante d’Israël a rejeté les accusations contenues dans les discours de certaines délégations.  Elle a dit avoir entendu un certain nombre de délégations refuser de condamner l’attaque du 7 octobre.  Rien ne peut justifier les attaques du Hamas, a-t-elle déclaré.  Nous ne sommes pas venus sur cette terre en colons.  La Syrie et l’Iran ont contesté le droit d’Israël d’exister, ce qui est un appel au génocide.  Gaza est utilisée par le Hamas comme bouclier humain et ce qui se passe est de leur seule responsabilité.  Nous protégerons le droit des civils dans la mesure de ce que nous pourrons faire.  Si vous ne faites pas la différence entre des actes terroristes prémédités et des personnes utilisées comme boucliers humains, c’est que vous avez perdu vos repères moraux, a-t-elle déclaré.   

Exerçant également son droit de réponse une deuxième fois, le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a estimé que la République de Corée est responsable de ce qui se passe dans la péninsule coréenne, notamment en raison des appels lancés à la destruction de la RPDC.  Si ces acteurs continuent de se comporter de la sorte, nous devrons continuer de nous protéger contre les États-Unis qui veulent détruire la RPDC par l’arme nucléaire, a-t-il ajouté.   

Le représentant de la Fédération de Russie a fait observer à l’Union européenne qu’elle n’est présente dans cette instance qu’en tant qu’observatrice.  Il l’a exhortée à utiliser avec discernement son droit de réponse, lui rappelant qu’il s’agissait d’un privilège qui lui a été accordé par les États Membres.  Il l’a accusée de désinformation dans le but de cacher sa participation à la crise en Ukraine.  C’est le soutien des pays occidentaux, notamment des pays membres de l’Union européenne, qui a entraîné cette crise, a-t-il estimé.  En ce qui concerne les déclarations de l’Ukraine, il a regretté qu’elle n’ait pas répondu à ses interpellations sur ses tentatives de s’emparer de la centrale, estimant qu’elles font courir un risque d’accident nucléaire.  La Russie, a-t-il conclu, aborde avec le plus grand sérieux ses obligations en termes de sécurité à Zaporojie.   

Le représentant de la République islamique d’Iran a répondu à Israël, arguant que ses fausses accusations ne sauraient les exonérer du respect du droit international et mentionnant des « crimes atroces » perpétrés à Gaza.  Affirmant qu’elles auraient déjà causé plus de 3 000 victimes, dont un tiers d’enfants, il a lancé un appel à la condamnation de l’utilisation du pouvoir de l’État pour réprimer les populations dans leur droit légitime à l’autodétermination.  La lutte contre l’occupation ne saurait constituer un acte de terrorisme, a-t-il enchaîné.  Il a accusé Israël d’œuvrer pour détourner les instances onusiennes, dont la Première Commission, afin de lancer des campagnes de désinformation. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: en Libye, une nouvelle crise politique est à prévoir sans un projet de loi électorale viable, met en garde le Représentant spécial

9438e séance – matin
CS/15444

Conseil de sécurité: en Libye, une nouvelle crise politique est à prévoir sans un projet de loi électorale viable, met en garde le Représentant spécial

Si les inondations meurtrières de Derna, dans l’est de la Libye, le mois dernier, ont été unanimement déplorées par les membres du Conseil de sécurité ce matin, reste qu’elles auront démontré l’unité, la solidarité et la compassion des Libyens ordinaires à travers tout le pays, a observé le Représentant spécial du Secrétaire général pour ce pays, au Conseil de sécurité.  Un exemple à suivre pour M. Abdoulaye Bathily, pour qui cette catastrophe a aussi mis en exergue des problèmes de gouvernance « en l’absence de processus décisionnel politique unifié au niveau national ».

Raison pour laquelle de nombreuses délégations, du Royaume-Uni à l’Équateur, en passant par les Émirats arabes unis, ont soutenu la proposition du haut fonctionnaire de mettre en place un « mécanisme national » de gestion des catastrophes afin de coordonner les efforts de relèvement et de reconstruction dans tout le pays, où règne une situation « bicéphale », selon le Mozambique, qui s’exprimait au nom des A3.  En effet, une partie du pays est contrôlée par le Gouvernement d’unité nationale installé à Tripoli, qui n’est pas reconnu par les autorités adverses basées à Syrte.

Nombre d’intervenants ont donc plaidé pour que les parties prenantes libyennes s’accordent sur un projet de loi électorale viable, « dès que possible ». M. Bathily, qui est également le Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), s’est à cet égard dit satisfait des progrès enregistrés par le processus électoral en Libye, tout en mettant en garde contre les risques d’un « remake du scénario de décembre 2021 ou de la crise d’août 2022 ».

M. Bathily a indiqué que le comité mixte chargé de préparer les lois électorales en Libye, également connu sous le nom de « Comité 6+6 », avait achevé ses travaux début octobre.  Composé à part égale de membres de la Chambre des représentants et du Haut Conseil d’État, il est parvenu, au terme de délibérations « laborieuses », à un compromis sur de nombreuses questions controversées, les lois électorales révisées ayant été publiées par la Haute Commission électorale nationale. 

D’un point de vue technique, a poursuivi le haut fonctionnaire, elles constituent une amélioration par rapport aux précédentes.  Elles répondent aux problèmes identifiés par la Haute Commission électorale nationale et la MANUL, notamment le droit de vote des membres de l’armée, le séquencement des élections, la répartition des sièges au Sénat et à la Chambre des représentants.  Les questions relatives au mécanisme de résolution des litiges électoraux y sont également clarifiées, s’est encore félicité M. Bathily.

En revanche, s’est-t-il alarmé, d’autres questions plus controversées restent en souffrance, dont celle du second tour obligatoire de l’élection présidentielle, indépendamment du nombre de voix obtenues par l’un ou l’autre des candidats arrivés en tête du premier tour.  Une disposition qui pourrait être instrumentalisée pour perturber l’ensemble du processus, de même que le lien entre scrutins présidentiel et législatif: soumettre la validité des législatives à celle de la présidentielle expose le processus à un risque élevé d’échec et de perturbations.

La question de la formation d’un « nouveau gouvernement » n’est pas davantage résolue, sans compter le rejet, par le Haut Conseil d’État, desdits amendements à la loi électorale.  Il y a, là aussi, un risque de remise en cause d’avancées durement acquises, a anticipé le Représentant spécial, en appelant le Haut Conseil d’État à renoncer à cette position, de nature à plonger le pays dans une nouvelle crise politique.  Le Conseil doit user de son influence pour empêcher que cela ne se produise, a-t-il demandé. 

Reconnaissant eux aussi les risques d’instabilité politique, les trois pays africains membres du Conseil de sécurité, à savoir le Gabon, le Ghana et le Mozambique (A3), ont souhaité qu’un consensus politique entre les parties prenantes libyennes se dégage le plus rapidement possible sur un projet de loi électorale viable.

Nombre de délégations, à l’instar de la France, ont souligné la nécessité et l’urgence d’avancer vers l’organisation d’élections présidentielle et parlementaires, « dans les meilleurs délais ».  Pour ce faire, les dirigeants libyens doivent faire des concessions et placer l’intérêt national au-dessus de toute autre considération, ont estimé les États-Unis, l’Albanie ou encore le Brésil.  Pour le Japon, les solutions se doivent d’être consensuelles et réalisables pour garantir le bon déroulement du processus électoral, d’autant que les élections sont le seul moyen de faire avancer un processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens eux-mêmes, a renchéri Malte. 

Pour la Fédération de Russie et la Chine en revanche, c’est aux Libyens de convenir des paramètres du processus politique, sans qu’on leur impose des « recettes toutes prêtes », ni qu’on leur fixe des « délais artificiels irréalistes ».  La communauté internationale devrait éviter d’imposer des solutions de l’extérieur, ont insisté ces deux délégations.

Si le représentant libyen a reconnu l’importance de finaliser un calendrier électoral, il a par ailleurs jugé essentiel que le Comité des sanctions et l’Autorité libyenne des investissements continuent à coopérer, pour mettre en place des mécanismes de gestion des avoirs gelés en raison des mesures imposées par le Conseil de sécurité.  « Ce régime de sanctions a été mis en place pour protéger la Libye et non pour la sanctionner  », a rappelé le délégué.  Il s’est également félicité des initiatives de certains membres du Conseil en vue de radier de la liste des sanctions des individus inscrits sur « la base d’une politisation ».

En début de séance, le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye a informé les membres du Conseil des activités de cet organe subsidiaire pour la période allant du 23 août au 16 octobre 2023.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

M. ABDOULAYE BATHILY, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies dans ce pays (MANUL), a déclaré que la tragédie de Derna, si elle a coûté la vie à des milliers de personnes, avait démontré l’unité, la solidarité et la compassion des Libyens ordinaires à travers tout le pays.  Au niveau institutionnel, le Conseil présidentiel et le Gouvernement d’unité nationale se sont mobilisés pour apporter leur soutien, tout comme la Chambre des représentants et le Gouvernement, ainsi que l’Armée nationale libyenne, qui a mis en place une salle opérationnelle pour soutenir les activités de secours. Ces inondations meurtrières ont cependant révélé, pour le Représentant spécial, de graves déficits de gouvernance dans divers domaines relatifs à l’entretien des systèmes de barrage, de même que dans la gestion des ressources ou l’absence d’un mécanisme efficace de gestion des catastrophes.  En outre, l’absence de processus décisionnel politique unifié au niveau national a compliqué les choses.  Si ces problèmes de gouvernance avaient été résolus, ils auraient sans doute atténué l’impact de la tragédie, a-t-il fait observer. 

M. Bathily s’est cependant dit heureux d’annoncer que le processus électoral avait enregistré certains progrès.  Ainsi, le Comité 6+6 a achevé ses travaux début octobre.  Grâce à d’énormes pressions et à des délibérations laborieuses à Bouznika, au Maroc, ainsi qu’à Tripoli, Benghazi et dans d’autres villes de Libye, les membres de cet organe sont parvenus à un compromis sur de nombreuses questions controversées.  Les lois électorales révisées ont été publiées par la Chambre des représentants le 5 octobre et officiellement reçues par la Haute Commission électorale nationale le 9 octobre.  D’un point de vue technique, a poursuivi le haut fonctionnaire, elles constituent une amélioration par rapport aux précédentes, dans la mesure où plusieurs problèmes identifiés par la Haute Commission électorale nationale et la MANUL ont été résolus.  Il s’agit notamment du droit de vote des membres de l’armée, de la clarification sur le séquencement des élections, de la répartition des sièges au Sénat et à la Chambre des représentants, et du mécanisme de résolution des litiges électoraux. Mais d’un point de vue politique, les questions les plus controversées restent en souffrance, notamment celles relatives au second tour obligatoire de l’élection présidentielle. 

Contrairement à la pratique courante, a-t-il poursuivi, cette disposition impose aux deux favoris de l’élection présidentielle de se présenter au second tour, quel que soit le nombre de voix obtenues par eux.  Une disposition qui pourrait être instrumentalisée pour perturber l’ensemble du processus.  De plus, le lien entre scrutins présidentiel et législatif reste lui aussi problématique, a considéré M. Bathily.  Même si ces deux élections peuvent se dérouler le même jour, soumettre la validité des législatives à celle de la présidentielle expose le processus à un risque élevé d’échec et de perturbations.

Par ailleurs, la formation d’un « nouveau gouvernement » n’est pas davantage résolue, pas plus que celle de l’égalité des sexes pour les sénatoriales: seuls six sièges (6,6%) restent attribués à des femmes sur 90 en tout. S’ajoutent également des désaccords entre la Chambre des représentants et le Haut Conseil d’État sur les lois électorales.  Le Haut Conseil d’État conteste les amendements apportés aux lois électorales, insistant pour que prévale la version issue des négociations de Bouznika. Or, a mis en garde le Représentant spécial, le rejet, par le Haut Conseil d’État, des amendements apportés par le Comité 6+6 après Bouznika risque de remettre en cause les acquis durement acquis par les deux chambres.  Il doit donc renoncer à cette position, de nature à entraver le processus électoral et à plonger le pays dans une nouvelle crise politique, vers un remake du scénario de décembre 2021 ou de la crise d’août 2022.  M. Bathily a donc appelé le Conseil à user de son influence pour empêcher que cela ne se produise. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon), Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye, a fait rapport sur les activités de cet organe subsidiaire du Conseil pour la période allant du 23 août au 16 octobre 2023.  Concernant l’embargo sur les armes, le Comité a répondu à une lettre de la Libye sur un incident entre un navire battant pavillon libyen et l’opération IRINI, et reçu un rapport d’inspection d’un navire de cette même opération, ainsi qu’une lettre du Groupe d’experts et une communication d’un État Membre sur une note verbale envoyée par l’Italie sur le transfert au Gouvernement libyen de certains navires à des fins d’organisation de patrouilles côtières.

S’agissant du gel des avoirs, aucune décision négative n’a été prise sur le paragraphe 19 au sujet des quatre communications adressées par Bahreïn et de celle du Royaume-Uni.  En ce qui concerne les interdictions de voyager, le Comité a été saisi d’une communication du représentant de Mme Aïcha Kadhafi, inscrite sur la liste des sanctions, dans laquelle il a été confirmé son retour d’Oman, depuis l’Égypte et l’Italie, ainsi qu’une notification des Émirats arabes unis en tant qu’État de transit, a indiqué le Président.  Le Comité a également reçu une demande de radiation de la Libye pour une personne inscrite sur la liste qui est encore à l’examen, ainsi qu’une note verbale de Malte concernant le déploiement d’un navire dans le port de Tobrouk, qui menait une opération humanitaire.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué la déclaration du Représentant spécial pour la Libye concernant la nécessité de mettre en place un mécanisme national afin de diriger les efforts de relèvement et de reconstruction, dans l’est comme dans l’ouest du pays.  Les inondations dévastatrices qui ont frappé la Libye confirment selon lui que le statu quo n’est pas durable et ne permet pas de répondre aux besoins du peuple libyen. À cet égard, il a pris note de l’évaluation de la MANUL selon laquelle les lois électorales actualisées constituent une base valable pour des élections.  Toutefois, les questions controversées en suspens doivent d’abord être résolues au moyen d’un accord politique inclusif.  Le représentant s’est ainsi adressé directement aux dirigeants libyens pour leur demander d’assister aux réunions convoquées par l’ONU et de faire des concessions afin de mener la Libye sur la voie des élections. Alors que le mandat de la MANUL doit être renouvelé au cours des prochaines semaines, il a estimé qu’il s’agit d’un partenaire essentiel à l’organisation d’élections présidentielle et parlementaires libres, équitables et inclusives. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a salué les efforts inlassables de tout le personnel national et international impliqué dans les activités de recherche et de sauvetage au lendemain de la tragédie de Derna, ainsi que pour l’aide internationale apportée à la Libye, qui a dépassé les questions géopolitiques. Il a espéré que cette expression d’unité durera jusqu’à la stabilisation de la situation en Libye, qui doit se concentrer sur son développement.  Le représentant s’est fait l’écho de l’appel lancé par la MANUL à toutes les autorités libyennes pour faciliter un accord sur un mécanisme national unifié et coordonné. L’impact de la tragédie a souligné l’urgence de surmonter la stagnation politique, a insisté le délégué, avant de prendre note du travail accompli par le Comité 6+6 pour élaborer les lois électorales ensuite adoptées par la Chambre des représentants.  Maintenant, les acteurs libyens concernés, soutenus par la MANUL, doivent régler toutes les questions litigieuses afin que des élections pacifiques, transparentes et ouvertes puissent avoir lieu dans les meilleurs délais, a-t-il souligné.  Le représentant a enfin souligné la nécessité de renforcer la coopération internationale pour lutter contre le trafic et la traite des êtres humains dans la région et pour traduire les auteurs de ces actes en justice. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a lancé un appel à la tenue d’élections présidentielle et parlementaires nationales à travers toute la Libye dans les plus brefs délais.  Les élections étant le seul moyen de restaurer la légitimité des institutions du pays, le Conseil doit clairement montrer son soutien continu au Représentant spécial en adoptant à l’unanimité un projet de résolution vigoureux à la fin de ce mois.  Le Japon est déterminé à participer de manière constructive aux négociations à venir, a annoncé son représentant.  Il a ensuite dit prendre note des efforts du Comité 6+6 dans l’élaboration des lois électorales.  Tout en respectant le processus dirigé et contrôlé par les Libyens eux-mêmes, le délégué a estimé que les solutions doivent être consensuelles et réalisables pour garantir le bon déroulement du processus électoral. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a joint sa voix à celle du Secrétaire général pour demander la mise en place d’un mécanisme national unifié en vue de faire avancer les efforts de reconstruction dans les zones touchées par les inondations. Sur le plan politique, la situation « bicéphale » du pays et l’impasse actuelle font craindre une nouvelle instabilité, a-t-il relevé, espérant qu’un consensus politique entre les parties prenantes libyennes sur un projet de loi électorale viable se dégage, dès que possible.  Le délégué a salué les efforts continus déployés par le Représentant spécial auprès de toutes les institutions et acteurs libyens concernés pour résoudre les questions en souffrance du cadre électoral, l’encourageant en particulier à fixer des délais fermes.  Il a aussi réitéré l’appel en faveur d’un processus politique pris en charge par les Libyens eux-mêmes, avant de prendre note de l’approbation des lois électorales par la Chambre des représentants.  Le délégué a également relevé que l’accord de cessez-le-feu de 2020 tient toujours, en dépit d’une situation tendue et d’incidents sécuritaires dans le pays. Jugeant « isolés » les incidents en date des 14 et 15 août 2023, il a appelé les parties à faire preuve de retenue pour préserver l’élan positif actuel en vue d’une paix et d’une sécurité durables.  Il a enfin exhorté les autorités libyennes, avec le soutien de la communauté internationale, à œuvrer efficacement à soulager le fardeau des migrants et des réfugiés en Libye.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a déclaré que la communauté internationale doit continuer de prendre des mesures urgentes pour porter secours au peuple libyen suite aux inondations de Derna.  La solidarité du peuple libyen à cette occasion confirme, selon lui, que l’unification du pays n’est pas un objectif inaccessible.  Dans ce contexte, il a exprimé son soutien à la proposition du Représentant spécial de créer un mécanisme national unifié permettant de mobiliser les appuis aux efforts de relèvement des zones touchées par les inondations.  Le délégué a appelé les parties à placer l’intérêt national au-dessus de toute autre considération en s’engageant en faveur du dialogue et en prenant des mesures concrètes pour surmonter les questions non résolues, avec l’appui de l’ONU. Les efforts déployés par le Comité 6+6 en vue d’organiser des élections parlementaires et présidentielle susceptibles d’être reconnues par toutes les parties restent une étape importante pour mettre fin à la transition dans le pays. 

S’agissant de la résolution qui doit être adoptée en ce qui concerne le régime des sanctions, le représentant a souligné la nécessité pour le Conseil de sécurité d’évaluer régulièrement la situation sur le terrain.  Il est tout aussi nécessaire, à ses yeux, de prendre des mesures permettant d’assurer la préservation et la répartition équitable des richesses du peuple libyen.  Il s’est ainsi félicité de l’inclusion, dans la résolution, de dispositions confirmant que les avoirs libyens gelés seront disponibles ultérieurement et évoquant la possibilité d’autoriser l’Autorité à réinvestir ses liquidités afin de relancer l’économie.  Enfin, le représentant a exprimé son appui aux efforts de la Commission militaire conjointe 5+5 en vue d’unifier les institutions militaires et sécuritaires libyennes. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a assuré que sa délégation continuera de soutenir tous les efforts visant à sortir la Libye de l’impasse politique.  Elle continuera d’appeler toutes les parties libyennes à s’engager pleinement, de manière constructive, transparente et dans un esprit de compromis, dans tous les efforts visant à atteindre cet objectif. C’est la seule voie pour faire avancer un processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens eux-mêmes.  La communauté internationale doit donc rester guidée par cet objectif global et veiller à ce que tous les processus politiques garantissent la participation pleine, égale, significative des femmes, en toute sécurité.

La représentante a également déclaré regretter le rétrécissement de l’espace réservé à la société civile en Libye.  Nous devons garantir que tous les Libyens puissent jouir de leurs droits humains fondamentaux, a-t-elle plaidé, avant de saluer et soutenir les efforts de la MANUL pour résoudre ce problème.  Elle s’est aussi dite préoccupée par la présence continue de combattants étrangers, de forces étrangères et de mercenaires, dont le retrait complet devrait être une priorité.  Elle a aussi estimé que les fonds libyens détenus à l’étranger doivent être déclarés et gelés en vue d’un éventuel rapatriement.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a jugé urgent d’avancer vers l’organisation d’élections présidentielle et parlementaires en Libye dans les meilleurs délais, à la suite des travaux du Comité 6+6.  Dans ce contexte, il a assuré que son pays appuie la médiation du Représentant spécial pour atteindre l’objectif d’élections crédibles, inclusives et transparentes.  S’agissant de la situation sécuritaire, qui reste fragile en Libye, il faut garantir la pleine mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020.  La France continuera, a-t-il dit, d’appuyer, en coordination avec l’ONU et l’ensemble de ses partenaires, la Commission militaire conjointe 5+5 libyenne et les deux chefs d’état-major, en vue d’une réunification de l’armée libyenne qui passe par la création d’une force conjointe. Enfin, à l’approche du renouvellement du mandat de la MANUL, le délégué a appelé le Conseil à encourager les efforts d’unification des institutions sécuritaires et militaires.  Ceci doit permettre à la Libye de retrouver sa stabilité, en mettant un terme à l’emprise des milices, a-t-il conclu.

M. DAI BING (Chine) a constaté que les parties prenantes sont confrontées à des difficultés inédites et multiples que la communauté internationale devrait contribuer à résoudre.  Il a noté que la Chambre des représentants a approuvé le code électoral, espérant que toutes les parties feront avancer le processus politique en vue de la tenue d’élections.  De son côté, la communauté internationale devrait éviter d’imposer des solutions de l’extérieur.  Il demeure aussi essentiel de s’employer à pallier les répercussions de la catastrophe humanitaire due aux inondations dans l’est du pays, a encore souligné le représentant.  Le mois dernier, des denrées alimentaires sont arrivées en Libye en provenance de Chine, laquelle a également versé 30 millions de dollars d’aide humanitaire.  La Libye a besoin d’une aide vitale, a-t-il rappelé, regrettant le maintien du gel des avoirs dans ce pays. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a appelé les autorités libyennes à veiller à ce que les personnes affectées aient accès à une aide alimentaire, à des soins de santé et à des installations sanitaires appropriés, les femmes au premier chef.  Conformément au droit international humanitaire, les acteurs humanitaires doivent être en mesure de s’acquitter de leurs fonctions de manière indépendante et avoir accès aux nécessiteux.  Le représentant a pris note de la récente révision des lois électorales par le Comité 6+6, tout en constatant que certaines questions de fond demeurent controversées.  Il a fait écho à l’appel de la MANUL aux acteurs libyens pour qu’ils fassent preuve de bonne foi en vue de résoudre ces questions afin de favoriser le processus électoral.  Dans le cas contraire, le représentant a mis en garde contre le risque d’une impasse durable.  Il s’est en outre inquiété des restrictions imposées à la société civile, estimant que les libertés d’expression, d’association et de réunion, y compris par les représentants de la société civile, constituent des éléments clefs du processus politique. 

Par ailleurs, a poursuivi le représentant, la tragédie de Derna ne constitue pas seulement un symptôme de la crise climatique, mais aussi du déficit de gouvernance et de la division ainsi que de leur impact sur les infrastructures et la prévention des risques.  Dans ce contexte, il a fait valoir que l’unité dont a su faire preuve le pays après avoir été frappé par la tempête Daniel doit se traduire au niveau politique, en plaçant les intérêts du pays au premier plan.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a appuyé les efforts de l’ONU visant à soutenir une intervention humanitaire au lendemain de la tempête Daniel qui a frappé Derna, en rappelant que les États-Unis ont fourni plus de 13 millions de dollars sous la forme de programmes humanitaires et plus de 29 tonnes de biens destinés aux victimes.  Elle a appuyé l’appel de la MANUL pour qu’un mécanisme unique soit mis en place pour faciliter et coordonner l’assistance humanitaire et technique en Libye.  La reconstruction du pays doit se faire de manière apolitique, a insisté la représentante, en martelant que « l’heure n’est pas à la division et aux jeux politiques ».  Elle a encouragé les dirigeants politiques libyens à œuvrer au redressement et à la reconstruction du pays, mais également à s’engager sur une voie crédible pour assurer la tenue d’élections et une gouvernance efficace unie à l’échelle de la Libye.  Les États-Unis soutiennent les efforts du Représentant spécial à cet égard, a expliqué la déléguée avant d’appeler tous les acteurs libyens à jouer un rôle constructif et transparent pour trouver un accord politique, finaliser le code électoral et placer la Libye sur la voie de la tenue d’élections présidentielle et législative justes, transparentes et libres.  Elle a enfin salué le travail de la Commission militaire conjointe 5+5 et les efforts en vue d’un rapprochement est-ouest.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a noté que, même après la tragédie de Derna et malgré l’unité démontrée par le peuple libyen face à cette crise, le processus politique en Libye est toujours en suspens, avec en toile de fond le maintien d’un « double pouvoir ».  Sa conséquence est une absence de perspectives pour un règlement durable, avec une incidence sur la situation sécuritaire, a-t-il noté en appelant à la retenue.  La question la plus importante à l’ordre du jour de la Libye est la préparation et la tenue d’élections présidentielle et législatives, a-t-il insisté, et la mise en place d’autorités unifiées avec une représentation équitable de toutes les régions et des principales forces politiques présentes en Libye.

Sur le volet constitutionnel du processus politique libyen, il a pris note du travail important du Comité 6+6, en demandant que les résultats de ses travaux soient pris au sérieux.  C’est aux Libyens de convenir des paramètres du processus politique, sans qu’on leur impose des « recettes toutes prêtes » et qu’on leur fixe de délais artificiels irréalistes, a-t-il exigé.  Ce processus électoral doit être transparent, véritablement inclusif, sur une base non discriminatoire, et inclure l’ensemble des principales forces politiques de l’ancienne Jamahiriya, y compris les représentants des anciennes autorités, a-t-il ajouté, avant de soutenir les efforts du Représentant spécial pour promouvoir un processus politique intralibyen, dont la pierre angulaire est l’organisation d’élections présidentielle et législatives, « si possible en même temps ».  Tout « ersatz de mécanisme » avec des représentants de nombreux pays occidentaux mais n’incluant ni les Libyens eux-mêmes, ni la Russie, est non seulement inutile mais aussi contre-productif, a-t-il estimé.  Il a condamné les tentatives de certains pays occidentaux d’instrumentaliser la situation en Libye pour régler certains problèmes géopolitiques et économiques, notamment sur le marché des hydrocarbures.  En ce qui concerne l’élimination de la présence militaire étrangère, il a rappelé que le Russie a toujours préconisé un retrait synchronisé, équilibré, graduel et progressif de tous les groupes armés et unités militaires non libyens, sans exception, afin de ne pas perturber l’équilibre des forces.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a fait valoir que les dirigeants politiques libyens de l’est et de l’ouest du pays doivent faire preuve « d’humilité » devant la solidarité dont a fait preuve le peuple libyen dans la foulée de la tempête Daniel.  Cette catastrophe constitue à ses yeux un rappel dramatique du besoin « désespéré » d’institutions unifiées et efficaces dans l’ensemble du pays.  Dans ce contexte, le représentant a exprimé son soutien à la création d’un mécanisme national unifié de réponse aux inondations, avec la collaboration de l’ONU.  Constatant que les négociations entre les deux chambres se trouvent dans une nouvelle impasse, il a appuyé les initiatives prises par le Représentant spécial pour la Libye, le peuple libyen ne pouvant « tout simplement pas attendre indéfiniment les résultats de négociations interminables ».  À cette fin, une médiation active de l’ONU est essentielle, a-t-il jugé.  Qui plus est, les parties au processus électoral libyen doivent comprendre qu’il ne s’agit pas d’un jeu à somme nulle et que chacun peut jouer un rôle important dans la reconstruction d’une Libye réunifiée. 

Pendant ce temps, la situation sécuritaire à Benghazi demeure profondément préoccupante du fait des récents affrontements armés, qui ont fait des victimes civiles et perturbé les communications.  Le processus de stabilisation de la Libye reste selon lui une priorité essentielle, notamment en raison de son impact sur l’Afrique du Nord et le Sahel.  Le représentant s’est inquiété à cet égard du ralentissement des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5 avec les comités de liaison du Niger et du Soudan du Sud du fait des évolutions récentes sur le terrain.  Il a donc appelé les acteurs régionaux à jouer un rôle proactif en soutenant les efforts de médiation de l’ONU. 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a jugé fondamental que les parties prenantes libyennes règlent leurs différends par le dialogue et dans un esprit de compromis. Leur appropriation continue du processus politique suppose un engagement en appui de la tenue d’élections nationales, conformément aux aspirations du peuple libyen et au cadre juridique pertinent, a-t-il dit.  Le délégué a salué l’annonce faite par la Haute Commission électorale nationale confirmant qu’elle était techniquement prête à appliquer les lois électorales. À cet égard, il a espéré que si des problèmes persistaient, la mise en œuvre ne sera pas entravée par une rivalité d’ordre purement politique.  Le délégué a précisé que si les parties prenantes et les institutions libyennes en faisaient la demande, le Représentant spécial pourrait faciliter davantage un consensus et contribuer à jeter les bases d’un climat susceptible de conduire à une réunification du Gouvernement. 

Le représentant a ensuite soutenu l’appel de la MANUL en faveur d’une réponse unifiée dans les zones affectées par les inondations dans l’est de la Libye.  À cet égard, il a conseillé aux parties de s’inspirer de l’unité nationale dont a fait montre leur peuple, qualifiant de « remarquable » par ailleurs l’appui des acteurs régionaux et internationaux à Derna en particulier.  Le délégué a également appelé tous les États Membres au respect de l’embargo sur les armes et à synchroniser le retrait des forces étrangères de la Libye, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité.

M. TAHER M. T. ELSONNI (Libye) a rappelé que des milliers de personnes ont perdu la vie à Derna, et que les secours travaillent encore pour retrouver d’autres corps.  Certaines équipes de sauvetage y ont perdu leur vie, a-t-il déploré.  L’altruisme démontré par toute la population libyenne est un message fort à tous les acteurs politiques pour qu’ils s’unissent et surmontent la crise.  Les autorités locales ont rapidement répondu, pour leur part, à la catastrophe et offert l’assistance nécessaire.  Il a remercié tous les pays et organisations ayant aidé la Libye à faire face aux incidences de cette situation sans précédent.

Le représentant a ensuite jugé important de mettre en place un calendrier électoral pour que la législation pertinente adoptée puisse être appliquée, en particulier s’agissant de l’organisation d’élections justes, libres et répondant effectivement aux attentes du peuple libyen qui attend depuis longtemps.  Il a jugé essentiel, s’agissant du gel des avoirs, que le Comité des sanctions et l’Autorité des investissements libyenne continuent à coopérer, de manière à mettre en place des mécanismes de gestion de ces avoirs gelés pour éviter davantage d’érosion par certains. « Ce régime a été mis en place pour protéger la Libye et non pas pour la sanctionner », a tranché le délégué, rappelant à cet égard l’indépendance de ladite Autorité des investissements.  Il a en outre salué les initiatives positives de certains membres du Conseil en vue de radier de la liste des sanctions des individus inscrits sur la base d’une politisation.

Aujourd’hui, le peuple palestinien est en état de siège, sous les bombes, sans eau, électricité et nourriture, s’est ensuite indigné le représentant libyen. L’assassinat de civils non armés est inacceptable et il importe de dénoncer une politique de deux poids, deux mesures, a-t-il déclaré.  N’est-ce pas déjà une situation de génocide?  Devons-nous attendre que cela se transforme en un autre Rwanda? s’est-il demandé.

Le représentant libyen a dit qu’il faut se garder de mélanger le droit de l’agresseur et des agressés et prendre en compte, au contraire, l’assassinat pur et simple de ce rêve de paix, a-t-il dit, en fustigeant le meurtre collectif des Palestiniens dans « la plus grande prison à ciel ouvert du monde ».  Il a dit avoir un message reflétant la position arabe commune en faveur de la cause palestinienne, que le peuple libyen considère comme fondamentale.  Ce message consiste à demander une cessation immédiate des hostilités et de la violence, la garantie d’un accès humanitaire sans entrave et d’éviter, à tout prix, le déplacement de populations: personne ne veut d’une nouvelle Nakba, a-t-il explicité, en appelant à une solution juste, avec la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale au chevet d’une Afrique « malade » mais forte du ressort nécessaire pour son relèvement

Soixante-dix-huitième session,
18e séance – matin
AG/12544

L’Assemblée générale au chevet d’une Afrique « malade » mais forte du ressort nécessaire pour son relèvement

L’Assemblée générale s’est penchée, aujourd’hui, sur les « triples paradoxes » et les obstacles persistants et nouveaux qui entravent la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique que « rien ne pourrait arrêter » si elle était bien soutenue par la communauté internationale et en avait l’opportunité, a soutenu son Président, M. Dennis Francis.

Mais il faut se rendre à l’évidence, car aujourd’hui l’Afrique « est malade », a alerté le Cameroun, et le continent doit, au préalable, relever des défis urgents pour être sur la bonne voie et réaliser le Programme 2030 et l’Agenda 2063, a abondé M. Francis, lors de cette séance de l’Assemblée générale qui était notamment saisie d’un rapport du Secrétaire général consacré aux paradoxes du développement dans les domaines du financement, de l’énergie et des systèmes alimentaires à l’échelle du continent.

De fait, a soutenu le Président de l’Assemblée générale, l’Afrique est riche en ressources financières, mais elle connaît une crise de la dette si grave qu’elle perd 500 à 600 milliards de dollars par an, une somme plus importante que le produit intérieur brut (PIB) de 35 pays africains réunis.  Par conséquent, la réforme de l’architecture financière internationale et la viabilité de la dette doivent être notre priorité absolue, a-t-il souligné. 

Une approche défendue par l’ensemble des délégations à l’instar de l’Afrique du Sud, de la Thaïlande, de la Sierra Leone et de la Namibie qui ont également appelé à faciliter l’accès aux financements extérieurs et réaffecter les droits de tirage spéciaux (DTS). 

Par la voix de la Tunisie, le Groupe des États d’Afrique a jugé crucial de s’attaquer aux défis structurels et institutionnels qui empêchent les pays africains de maximiser l’utilisation de leurs ressources, à commencer par la prévalence du secteur informel qui emploie environ 84% des travailleurs, la faiblesse des systèmes d’administration fiscale et les flux financiers illicites, qui coûteraient au continent 89 milliards de dollars par an en perte de revenus.  Le Groupe a également jugé primordial d’assurer la viabilité de la dette, notant que la dette extérieure représente 60% de la dette publique de l’Afrique et que le service de la dette absorbe en moyenne plus de 20% des recettes publiques.  L’Afrique dépense actuellement plus pour le service de la dette que pour les soins de santé, s’est-il alarmé, recommandant par ailleurs l’élaboration d’une convention fiscale internationale. 

D’autres délégations, comme l’Inde, ont remis en cause la structure des économies africaines, héritée du colonialisme et fortement orientée vers les marchés extérieurs, tandis que la Libye a demandé la restitution des fonds détournés aux pays d’origine.  Les mesures coercitives unilatérales imposées à plusieurs pays africains ont été décriées par la Fédération de Russie et le Venezuela, la Pologne s’inquiétant, pour sa part, des répercussions des « activités néocoloniales » russes sur la sécurité alimentaire mondiale.

Mais au-delà de ces obstacles, des solutions existent, car même « très malade », l’Afrique a su tracer sa vision, a relevé le Cameroun, en allusion à l’Agenda 2063 de l’Union africaine et à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).  En tant que moteur de croissance, celle-ci peut réaliser des revenus de l’ordre de 450 milliards de dollars d’ici à 2035, tout en ajoutant 76 milliards de dollars à l’économie mondiale, a fait valoir la Thaïlande.  Cependant, a temporisé le Président de l’Assemblée générale, il ne faut pas que l’avenir de la jeunesse africaine, qui représente 60% de la population du continent, soit obscurci par l’instabilité politique et les conflits aux conséquences dévastatrices pour la paix et la prospérité. 

La récente vague incontrôlable de coups d’État ramène le continent plusieurs décennies en arrière et n’augure rien de bon pour la quête d’une paix durable et la nécessité de faire taire les armes en Afrique, a prévenu M. Francis, avant d’appeler à continuer de placer les besoins du continent au centre du cadre stratégique du système de l’ONU.  La Chine a exhorté, pour sa part, à trouver des solutions africaines pour résoudre les problèmes africains.

L’Assemblée générale reprendra ses travaux mercredi 18 octobre, à partir de 10 heures 

NOUVEAU PARTENARIAT POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE: PROGRÈS ACCOMPLIS DANS LA MISE EN ŒUVRE ET APPUI INTERNATIONAL (A/78/309)

LES CAUSES DES CONFLITS ET LA PROMOTION D’UNE PAIX ET D’UN DÉVELOPPEMENT DURABLES EN AFRIQUE (A/78/234A/78/291)

Déclaration liminaire

M. DENNIS FRANCIS, Président de l’Assemblée générale, a déclaré que s’il en avait l’opportunité et s’il était bien soutenu par la communauté internationale, rien ne pourrait arrêter le continent africain.  Mais il doit au préalable relever des défis urgents pour être sur la bonne voie afin de réaliser le Programme 2030 et l’Agenda 2063.  Le Président a notamment relevé que l’Afrique est riche en ressources financières, mais qu’elle connaît une crise de la dette si grave qu’elle perd 500 à 600 milliards de dollars par an, une somme plus importante que le produit intérieur brut (PIB) de 35 pays africains réunis.  Par conséquent, la réforme de l’architecture financière internationale et la viabilité de la dette doivent être notre priorité absolue, a-t-il souligné. Il a également relevé que l’Afrique dispose d’une richesse extraordinaire en ressources naturelles, mais que près de 58% de sa population souffre d’insécurité alimentaire modérée ou grave – presque le double de la moyenne mondiale.  « Nous ne parviendrons pas à un développement pleinement durable en Afrique si nous ne donnons pas la priorité à la mise en œuvre de l’ODD no 2, c’est-à-dire éliminer la faim et assurer la sécurité alimentaire », a-t-il insisté.

Notant en outre que 60% de la population africaine est âgée de moins de 25 ans, le Président de l’Assemblée générale s’est inquiété que l’avenir de cette jeunesse soit obscurci par l’instabilité politique et les conflits aux conséquences dévastatrices pour la paix et la prospérité.  Il est donc crucial de disposer d’un système financier international capable de répondre aux injustices historiques, de promouvoir une économie mondiale ouverte, inclusive et équitable et de mieux représenter les voix africaines au sein de sa gouvernance, a-t-il insisté.

Conscient que la pauvreté et les inégalités économiques sont un déclencheur de conflit, il a pressé à promouvoir les opportunités économiques, l’accès à l’éducation –en particulier pour les filles– et la création d’emplois, en particulier pour les jeunes, les femmes et les communautés marginalisées.  Il faut également aider les pays africains à intégrer la prévention des conflits et la consolidation de la paix aux efforts de développement durable, et fournir une aide humanitaire et une aide au développement robuste aux pays et régions d’Afrique touchés par des conflits. M. Francis a aussi appelé les États Membres à établir des partenariats internationaux solides pour répondre aux défis communs de l’Afrique, exhortant en outre les partenaires de développement, les parties prenantes et le secteur privé à accroître les investissements durables dans le développement de l’Afrique afin de garantir qu’aucun pays du continent ne soit laissé de côté.  La récente vague incontrôlable de coups d’État ramène le continent plusieurs décennies en arrière et n’augure rien de bon pour la quête d’une paix durable et la nécessité de faire taire les armes en Afrique, a-t-il prévenu, appelant à continuer de placer les besoins du continent au centre du cadre stratégique du système de l’ONU.

Débat conjoint sur les questions subsidiaires de l’ordre du jour

Mme HEDDA SAMSON, de l’Union européenne (UE), a indiqué que l’Union africaine (UA) et l’Union européenne entretiennent un partenariat étroit et de longue date en matière de sécurité et de développement.  L’Europe et l’Afrique ont besoin l’une de l’autre pour construire une réponse solide et durable aux défis mondiaux communs, a insisté la déléguée. Elle a indiqué que l’UE est le plus grand partenaire de l’Afrique en matière de commerce, d’investissement et de développement.  Pour la période 2022-2024, l’UE a alloué 600 millions d’euros pour les missions de paix de l’UA et elle soutient par ailleurs le développement et la recherche pour une agriculture durable et économe en ressources en Afrique.  L’UE est en outre l’un des moteurs de la décision d’allouer 100 milliards de dollars en droits de tirage spéciaux aux pays les plus vulnérables particulièrement en Afrique.  Trente-trois des pays africains les moins avancés ont bénéficié d’un régime douanier plus favorable pour toutes les importations de marchandises, à l’exception des armes et des munitions. 

L’UE est de loin le principal partenaire commercial de l’Union africaine avec un volume total de 268 milliards d’euros en 2021, s’est félicitée la représentante, qui a précisé que 90% des exportations africaines entrent dans l’UE exemptes de droits de douane.  En outre, l’aide de l’UE à l’Afrique a augmenté de 11% pour la période 2021-2027. Comme convenu lors du sixième Sommet UE-UA de février 2022, près de 150 milliards d’euros d’investissements seront mobilisés d’ici à 2027 en Afrique.  Ces investissements ont déjà commencé, a indiqué la déléguée. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. TAREK LADEB (Tunisie) a souligné l’urgence de s’attaquer au « triple paradoxe » de la finance, de l’énergie et de la sécurité alimentaire au regard des ramifications des crises actuelles qui ont perturbé les marchés et mis à nu les vulnérabilités des économies africaines aux chocs extérieurs.  Ces chocs, ainsi que les effets des changements climatiques, ont collectivement rétréci l’espace politique et budgétaire, réduit la capacité de génération de revenus, accru les pressions inflationnistes et exacerbé le fardeau de la dette et le déficit de financement des ODD, s’est-il inquiété.  Il est, dès lors, crucial de s’attaquer aux défis structurels et institutionnels qui empêchent les pays africains de maximiser l’utilisation de leurs ressources.  Parmi ces obstacles, il a cité la prévalence du secteur informel qui emploie environ 84% des travailleurs, la faiblesse des systèmes d’administration fiscale et les flux financiers illicites, qui coûteraient au continent 89 milliards de dollars par an en perte de revenus.  À cet égard, il a souligné l’importance de l’élaboration d’une convention fiscale internationale.  Il a également jugé primordial d’assurer la viabilité de la dette, notant que la dette extérieure représente 60% de la dette publique de l’Afrique et que le service de la dette absorbe en moyenne plus de 20% des recettes publiques.  L’Afrique dépense actuellement plus pour le service de la dette que pour les soins de santé, a-t-il signalé.  De même, le délégué a plaidé en faveur d’un accès au financement extérieur à des conditions préférentielles et à la réaffectation des droits de tirage spéciaux (DTS). 

Passant ensuite à la question de la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique, le représentant a relevé que le chômage et le déficit de travail décent sont de possibles facteurs d’instabilité.  En outre, la population active du continent atteindra 511 millions de personnes en 2023, avec un taux de chômage qui est en hausse, passant de 6,5% en 2019 à 7,1% en 2022.  C’est pourquoi, il a encouragé la mise en œuvre de réformes réglementaires et politiques pour renforcer les flux commerciaux et d’investissement, notamment transfrontaliers, dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). 

M. FRANCISCO JOSÉ DA CRUZ (Angola) a déclaré que l’Afrique continue malheureusement de faire face à des défis majeurs en matière de paix et de sécurité.  La Banque mondiale, a cité le représentant, estime qu’un conflit civil dans un pays en développement moyen coûte environ 30 ans de croissance de son PIB.  Les pays confrontés à une crise prolongée peuvent accuser un retard de plus de 20% dans la lutte contre la pauvreté.  Les données indiquent également que ces pays subissent généralement une réduction de la croissance annuelle du PIB de 2% à 4% et jusqu’à 8,4% si le conflit est grave.  Cette baisse de croissance est toujours accompagnée d’une hausse rapide de l’inflation. Souvent, les pays voisins subissent également de plein fouet les effets secondaires des conflits violents, avec une baisse annuelle de 1,4% de leur PIB. 

Le représentant a estimé que la nature changeante des conflits et des crises exige une approche plus globale et intégrée de la réponse aux crises humanitaires et des violations des droits humains afin d’identifier des solutions politiques durables. Il a également souligné que la confiance et l’unité dans la diversité des peuples d’Afrique sont la voie à suivre pour que le continent parvienne à la paix et à la réconciliation, ainsi qu’à la gestion et à la résolution des conflits.  La réalisation de la paix en Afrique est une responsabilité partagée qui exige de tous les citoyens africains, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, de contribuer au maintien de la cohésion et de l’unité sociales et d’apprécier, valoriser et encourager la paix dans leurs capacités et leurs environnements individuels et collectifs, a-t-il appuyé. 

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a relevé que le problème du manque de financement s’est aggravé après les crises récentes, insistant sur la nécessité de réformer le système financier international injuste et de mobiliser des ressources pour financer le développement.  Notant que le continent perd entre 500 et 600 milliards de dollars par an, elle a insisté sur l’importance d’une justice fiscale internationale, appelant en outre à faire face au fléau des flux financiers illicites qui, depuis des décennies maintenant, privent le continent de ressources importantes essentielles pour son développement.  Elle a insisté sur la nécessité d’adopter une approche basée sur le développement pour appuyer le règlement des conflits et de consacrer davantage de ressources à la consolidation de la paix et à la prévention de conflit. 

L’avenir c’est l’Afrique, a déclaré M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) soulignant que le continent a la capacité de générer une plus grande prospérité non seulement pour lui-même, mais aussi pour le monde entier.  Il a relevé que l’un des principaux moteurs de cette croissance est la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), qui relie 1,3 milliard de personnes avec un PIB combiné évalué à 3,4 billions de dollars.  La ZLECAf pourrait accroître les revenus de quelque 450 milliards de dollars d’ici à 2035, tout en ajoutant 76 milliards de dollars à l’économie mondiale, a-t-il ajouté, citant la Banque mondiale. 

Soulignant que « nous ne pouvons rien réaliser sans l’Afrique », le représentant a appelé à fournir un financement accru au continent afin de progresser dans la réalisation du Programme 2030.  Il a plaidé pour la mise en œuvre complète du Programme d’action d’Addis-Abeba, exhortant ensuite les pays développés à respecter leur engagement en matière d’APD.  Il s’agit également de traiter le problème de la dette, a-t-il ajouté, appelant à mettre en œuvre les propositions importantes faites par le Groupe des 77 et la Chine pour son allègement. 

Le représentant a ensuite appelé à une réforme plus approfondie de l’architecture financière internationale et à accorder davantage de droits de tirage spéciaux (DTS) aux pays en développement.  Le système commercial multilatéral doit également élargir l’accès des pays en développement aux marchés mondiaux notamment pour faciliter le commerce alimentaire et des produits agricoles.  Enfin, le délégué a défendu des partenariats plus forts et renforcés avec l’Afrique. 

M. OLEGS ILGIS (Lettonie) a indiqué que son pays a proposé des projets liés à la technologie et à l’autonomisation des femmes en Afrique du Sud, au Cameroun, en Namibie, en Zambie et au Zimbabwe.  Il a estimé que les banques multilatérales de développement ont un rôle important à jouer et a fait savoir que le Gouvernement letton prévoit de verser une subvention de 2 millions de DTS au Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance du FMI, afin d’aider les pays qui en ont le plus besoin.  Le représentant a également insisté sur l’importance d’une réforme de l’architecture financière internationale et du renforcement de la lutte contre les flux financiers illicites.  La promotion d’une bonne gouvernance et des mesures de lutte contre la corruption sont essentielles à cet égard.  Le représentant a par ailleurs appelé à redoubler d’efforts pour assurer la cohérence des efforts de consolidation de la paix entre l’ONU et l’UA, ainsi que d’autres partenaires concernés, y compris les représentants de la société civile. 

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a dénoncé l’ingérence de puissances extrarégionales et des intérêts étrangers qui pillent les ressources naturelles de l’Afrique.  Associés aux changements climatiques, ils perpétuent l’héritage désastreux du colonialisme, s’est inquiété le représentant qui a souligné que le Programme 2030 et l’Agenda 2063 constituent la feuille de route pour des sociétés plus justes, inclusives et équitables en Afrique.  Il s’est inquiété des pressions exercées par le système commercial et financier international sur des nations souveraines en leur soumettant des programmes néolibéraux qui, a-t-il affirmé, ne font qu’envenimer les crises et les tensions sociales.  Après avoir salué la mise en place de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), le représentant a appelé les anciennes puissances coloniales à mettre fin au néocolonialisme et au pillage des ressources naturelles.  Il a aussi appelé à la levée des mesures unilatérales coercitives imposées à la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, l’Érythrée, la Libye, le Mali, la Somalie, la Soudan, le Soudan du Sud et le Zimbabwe.  Des mesures urgentes s’imposent en outre pour réformer l’architecture financière internationale, a ajouté le délégué.

M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) s’est dit alarmé par le nombre record de coups d’État militaires perpétrés en Afrique, après une période de relative stabilité.  Il a expliqué que l’aide polonaise au développement est largement axée sur la réduction des inégalités économiques et sociales, l’objectif étant d’appuyer les ODD et d’éradiquer la pauvreté.  C’est pourquoi, le représentant a jugé important de disposer d’un système financier international capable de s’attaquer aux injustices historiques et de promouvoir une économie mondiale ouverte, inclusive et juste où la voix de l’Afrique est écoutée. 

Poursuivant, le représentant a constaté que nombreux sont ceux qui ont tendance à perdre de vue les formes contemporaines du néocolonialisme, évoquant sa manifestation à travers les activités de la Fédération de Russie dans son voisinage immédiat et dans d’autres parties du monde.  Il a notamment rappelé que l’insécurité alimentaire mondiale s’est aggravée depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie.  La Pologne fait tout son possible pour atténuer cette crise, a-t-il assuré.

M. BORIS A. MESCHCHANOV (Fédération de Russie) a dénoncé les analyses attribuant la responsabilité des crises économiques actuelles en Afrique à la Russie et au conflit en Ukraine.  Il a affirmé que de nombreux experts indépendants pensent que les crises alimentaire et énergétique actuelles résultent des erreurs et des mauvais calculs des grandes économies de l’Occident, en particulier l’imposition de sanctions aux pays africains.  Le risque d’une crise alimentaire avait été déjà signalé dès 2020, a-t-il rappelé, notant que, selon les données de la FAO, l’indice des prix pour les denrées alimentaires a augmenté de 50% entre 2019 et 2020.  La Fédération de Russie a toujours accordé une attention prioritaire à la coopération avec l’Afrique, a assuré le représentant, évoquant un allégement de 23 milliards de dollars de dette.  En outre, le deuxième Sommet Russie-Afrique qui s’est tenu à Saint-Pétersbourg a témoigné de la volonté commune de la Russie et des gouvernements du continent de coopérer dans les domaines politique, sécuritaire, économique et social, y compris la lutte contre le terrorisme, le néocolonialisme et les sanctions illicites.  La Russie va continuer d’aider ses amis africains non seulement sur le plan alimentaire, mais également en favorisant le développement énergétique et agricole, a-t-il promis. 

Mme GABRIELA-CORNELIA HOROSANU (Roumanie) a mis en exergue le soutien concret de son pays à l’Afrique, en facilitant l’approvisionnement alimentaire et en appuyant la modernisation agricole du continent.  Face aux changements climatiques, la Roumanie travaille également avec des partenaires africains pour partager les bonnes pratiques et mettre en place des systèmes d’alerte précoce. 

Elle a également évoqué la mise à disposition annuelle de 500 bourses au profit d’étudiants africains.  La Roumanie dispense également une formation technique à ceux qui souhaitent acquérir des connaissances sur les technologies vertes, de même que dans le domaine de la consolidation de la paix.

M. DAI BING (Chine) a salué les résultats positifs engrangés par l’Afrique ces dernières années.  Cependant, a-t-il nuancé, ce continent se heurte encore à de graves difficultés comme les conflits, les pénuries alimentaires, les déficits financiers ou encore les changements climatiques qui entravent la réalisation du Programme 2030 et de l’Agenda 2063.  Il a souligné que la communauté mondiale a la responsabilité collective de soutenir l’Afrique.  Nous devons comprendre les besoins des pays africains et respecter leur autonomie de choisir leur propre modèle de développement conformément à leur priorité nationale, a-t-il insisté.  Il a également appelé à appuyer les efforts de l’Afrique pour maintenir la paix et la sécurité. 

Affirmant défendre le principe de trouver des solutions africaines pour résoudre les problèmes africains, le représentant a également appelé les bailleurs de fonds et les pays développés à répondre aux initiatives des pays africains.  Il faut leur fournir un financement prévisible et soutenu pour les aider à relever les défis du financement du développement, a-t-il indiqué, appelant en outre à réformer le système financier international. À cette fin, il a pressé les pays développés à assumer leur responsabilité en honorant leur engagement en matière d’APD et en soldant la dette historique.  Il a également appelé à lutter contre les actes d’hégémonie, pointant notamment l’imposition de mesures unilatérales coercitives. 

M. SUWEED (Libye) a souligné la nécessité d’harmoniser le Programme 2030 et l’Agenda 2063 en tenant compte des spécificités religieuses, économiques et sociales des différents pays.  Face à la persistance de nombreux défis, les pays développés doivent respecter leurs promesses d’investissements, de renforcement des capacités africaines et de transfert de technologies, en particulier dans le domaine de la sécurité alimentaire, la paix et la sécurité. 

Le délégué a ensuite demandé à l’ONU d’engager des dialogues en vue d’établir des solutions pacifiques pour appuyer le développement de la Libye qui est un pays de transit pour de nombreux migrants.  Le Gouvernement n’est pas en mesure de contrôler ses frontières, a reconnu le représentant, qui a souligné que la migration est un problème international qui ne peut pas être assumé uniquement par les pays de transit comme le sien.  Il a appelé à une coopération entre les pays d’origine, de transit et de destination, insistant en outre sur l’importance de lutter contre la traite des êtres humains. Dénonçant le pillage des ressources financières et naturelles de l’Afrique, le représentant a demandé la restitution des fonds détournés aux pays d’origine.  Il a par ailleurs informé que le Gouvernement d’unité nationale de transition travaille avec des ONG de développement pour appuyer la reconstruction de la ville de Derna.

M. RAJESH PARIHAR (Inde) est revenu sur les défis qui ont impacté les efforts de développement de l’Afrique, citant la pandémie de COVID-19, la hausse des prix du carburant, des engrais et des céréales alimentaires, la crise climatique et les tensions géopolitiques croissantes.  Il s’est également inquiété de l’instabilité politique chronique qui touche plusieurs pays du Sahel, de la Corne de l’Afrique et de l’Afrique centrale, de même que des graves défis en matière de financement, d’énergie et de sécurité alimentaire.  Il a remis en cause la structure des économies africaines, héritée du colonialisme et fortement orientée vers les marchés extérieurs. 

 Face à cette situation, le représentant a appelé à établir des partenariats capables de promouvoir la durabilité économique, sans conditionnalités et conformément aux attentes africaines.  Il a indiqué que l’Inde a accordé des prêts concessionnels de plus de 12,37 milliards de dollars à l’Afrique, avant de rappeler que le Sommet du G20 qui s’est tenu le mois dernier, à New Delhi, a été marqué par l’inclusion historique de l’Union africaine en tant que membre permanent du Groupe. 

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a souligné l’importance de l’allégement et de l’annulation de la dette.  Le service de la dette est de plus en plus insoutenable et continue d’asphyxier les véritables initiatives de développement de l’Afrique, a-t-il signalé. Il a appelé à mobiliser les ressources nationales afin de compléter l’APD dans le processus de développement de l’Afrique.  La mobilisation de financements privés est également importante, a estimé le représentant, notant qu’une économie de marché florissante est marquée par la prépondérance du capital du secteur privé.  Il a aussi exhorté à réduire les flux financiers illicites.  À cet égard, la Sierra Leone a renforcé sa Commission de lutte contre la corruption et créé une agence de lutte contre le blanchiment d’argent.  La mobilisation des ressources nationales est également essentielle pour améliorer l’accès à l’énergie et assurer la sécurité alimentaire en l’Afrique, a-t-il ajouté, insistant en outre sur l’importance de la bonne gouvernance et de fournir les services publics essentiels aux populations.  Au niveau continental, la promotion d’une paix durable et d’un développement durable en Afrique nécessite également un partenariat entre l’ONU et la Commission de l’Union africaine afin d’assurer un financement adéquat, prévisible et flexible par le biais d’une contribution obligatoire pour les opérations de soutien de la paix dirigées par l’UA. 

M. MICHEL TOMMO MONTHE (Cameroun) a rappelé que, quand les chefs d’État et de gouvernement sont venus pour apprécier la mise en œuvre du Programme 2030, ils ont constaté que l’Afrique était la plus en retard dans le cadre de ce Programme qui lui-même accuse déjà un retard.  Mais bien que très malade, l’Afrique n’a pas dormi, a-t-il affirmé, saluant la création de l’Agenda 2063 qui, à son échéance, fera de l’Afrique un acteur majeur dans les relations internationales.  Il a indiqué que la prochaine décennie sera axée sur la finance, la technologie, la science et la recherche, l’énergie et l’agriculture.  Les Africains, eux-mêmes, ont pris à bras le corps ces secteurs, s’est-il félicité, avant de mettre en avant la création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZECLAf).  Il a ensuite appelé les partenaires stratégiques à agir, avant de recommander la création d’une matrice avec des indicateurs précis « pour nous conduire à bon port ». 

M. NEVILLE GERTZE (Namibie) a souligné que l’augmentation du revenu des ménages est essentiel pour lutter contre la pauvreté, atténuer les inégalités et renforcer la résilience économique, sociale et environnementale des sociétés africaines.  Il a appelé à s’attaquer à la faiblesse des systèmes fiscaux et aux flux financiers illicites, à appuyer la coopération fiscale internationale et à assurer la viabilité de la dette.  Il faut faciliter l’accès aux financements extérieurs, notamment par le biais de conditions préférentielles et la réaffectation des droits de tirage spéciaux, a-t-il précisé.  S’agissant des ressources énergétiques, le délégué a plaidé pour un accès aux énergies renouvelables en partenariat avec le secteur privé.  Le Gouvernement namibien est en train de mettre en œuvre cinq projets de ce type en cours de développement d’une valeur de 20 milliards de dollars des États-Unis.  Le développement d’une nouvelle industrie des carburants synthétiques en Namibie n’est pas seulement l’occasion de lutter contre les changements climatiques, mais offre une opportunité pour l’industrialisation du pays, a-t-il affirmé. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité encourage la RDC et l’ONU à élaborer un plan pour le retrait de la MONUSCO, sur lequel il se prononcera avant fin 2023

9437e séance – matin
CS/15443

Le Conseil de sécurité encourage la RDC et l’ONU à élaborer un plan pour le retrait de la MONUSCO, sur lequel il se prononcera avant fin 2023

Le Conseil de sécurité a, ce matin, encouragé le Gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et l’ONU à élaborer « d’ici à novembre » un plan de désengagement complet et des propositions sur la chronologie du retrait progressif et ordonné des contingents de la MONUSCO, la mission des Nations Unies déployée dans ce pays.

Dans une déclaration présidentielle, le Conseil se dit prêt à décider, « d’ici à la fin de 2023 », du retrait « progressif, responsable et durable » de la MONUSCO et des mesures à prendre en priorité pour le mener à bien.

Le Conseil lance également un appel au calme et à une intensification du dialogue entre la RDC et le Rwanda pour faire avancer une paix durable dans la région.  Il exige qu’il soit mis fin à toute nouvelle avancée du M23, visé par des sanctions de l’ONU, et que les engagements pris en faveur du retrait du groupe et de son cantonnement soient immédiatement et pleinement mis en œuvre, comme convenu dans le processus de Luanda.

Le Conseil condamne le soutien apporté au M23 par toutes parties extérieures et exige d’elles qu’elles y mettent un terme et se retirent immédiatement de la RDC.  Il se déclare profondément préoccupé par les informations présentées par le Groupe d’experts sur la RDC concernant l’appui militaire extérieur fourni au M23 et le soutien apporté également aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) par des forces militaires.

La déclaration encourage enfin les autorités congolaises à continuer de mettre en place des processus pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles en vue de la tenue des élections prévues en 2023 dans l’ensemble de la RDC, pour faciliter des élections libres et régulières.  Elle engage les autorités du pays à garantir un espace civique libre et demande à toutes les parties de privilégier le dialogue et le consensus.

Le représentant congolais s’est félicité de l’adoption de ce texte après « des négociations difficiles et laborieuses » qui, « heureusement », ont abouti au résultat de « compromis » que constitue cette déclaration présidentielle. Très attendue des populations congolaises, elle déterminera la décision que les membres du Conseil de sécurité prendront au mois de décembre, a-t-il relevé.  Elle permettra aussi d’atténuer les tensions entre elles et la MONUSCO et d’« éviter les dégâts du genre de ceux que nous avons vus au mois d’août », a ajouté le délégué.

 

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Texte du projet de déclaration de la présidence du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo.

MONUSCO

Le Conseil se félicite des mesures de stabilisation prises par la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), demande de nouveau à toutes les parties de continuer de s’attacher à coopérer pleinement avec la Mission et rappelle qu’il a prié le Secrétaire général de la doter des moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat.

Le Conseil encourage le Gouvernement congolais à continuer de s’acquitter de la responsabilité qui lui incombe avant tout de protéger les civils se trouvant sur son territoire et d’assurer la sûreté et la sécurité du personnel et des biens des Nations Unies.

À cet égard, le Conseil prend bonne note du rapport daté du 2 août 2023 que le Secrétaire général lui a présenté conformément au paragraphe 44 de sa résolution 2666 (2022), ainsi que de la lettre émanant du Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo, Christophe Lutundula Apala Pen’Apala, en date du 1er septembre 2023, sur le retrait accéléré de la MONUSCO à partir de la fin de 2023.

Le Conseil se déclare prêt à décider, d’ici la fin de 2023, de l’avenir de la MONUSCO, de son retrait progressif, responsable et durable et des mesures concrètes et réalistes à prendre en priorité pour mener à bien ce retrait.

Le Conseil encourage le Gouvernement congolais et l’ONU, dans le cadre du groupe de travail conjoint composé du Gouvernement, de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies, à élaborer d’ici novembre, en coordination avec les parties prenantes concernées, et en s’inspirant des efforts déployés pour réviser le plan commun de transition et conformément aux quatre jalons retenus dans sa version actualisée, à savoir la sécurité, la protection des civils, l’appui aux élections et le Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, un plan de désengagement complet et des propositions sur la chronologie du retrait progressif et ordonné des contingents de la MONUSCO; la réduction progressive des effectifs de la Mission; la définition des modalités pratiques du transfert graduel des responsabilités; l’élaboration du plan opérationnel de mise en place du retrait et la définition des tâches devant être accomplies dans le cadre de la transition de la Mission.

Action menée au niveau régional

Le Conseil lance un appel au calme et à une intensification du dialogue entre la République démocratique du Congo et le Rwanda pour faire avancer une paix durable dans la région.

Le Conseil souligne l’importance de parvenir à un règlement politique de la crise actuelle, réaffirme son appui à l’action menée au niveau régional et demande instamment à tous les groupes armés congolais d’y participer sans conditions.

Le Conseil souligne l’importance de la coordination et de la complémentarité entre les initiatives politiques et militaires mises en œuvre en République démocratique du Congo, notamment avec l’appui du Secrétaire général, de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo et de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs.

Le Conseil se félicite de l’action menée pour harmoniser et coordonner les initiatives de paix visant à remédier à la situation en République démocratique du Congo, notamment dans le cadre du sommet quadripartite de la Communauté d’Afrique de l’Est, de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et de la Communauté de développement de l’Afrique australe, qui s’est tenu à Luanda le 27 juin sous les auspices de l’Union africaine.

Groupes armés

Le Conseil exige qu’il soit mis fin à toute nouvelle avancée du M23, visé par des sanctions de l’ONU, et que les engagements pris en faveur du retrait du groupe de tous les secteurs occupés et de son cantonnement soient immédiatement et pleinement mis en œuvre, comme convenu dans le processus de Luanda.

Le Conseil condamne le soutien apporté au M23 par toute partie extérieure et exige de toutes ces parties qu’elles y mettent un terme et se retirent immédiatement de la République démocratique du Congo.

Le Conseil condamne également le soutien apporté à certains groupes armés, tels que les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), visées par des sanctions de l’ONU, et exige qu’il y soit mis un terme.

Le Conseil se déclare profondément préoccupé par les informations présentées dans le rapport annuel du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo concernant l’appui militaire extérieur fourni au M23 et le soutien apporté également aux FDLR par des forces militaires.

Le Conseil condamne énergiquement la poursuite des violences et des atteintes aux droits humains par tous les groupes armés, notamment les exécutions sommaires, la violence sexuelle et fondée sur le genre et le recrutement et l’utilisation d’enfants à grande échelle, et demeure vivement préoccupé par l’intensification de la mésinformation et de la désinformation.  Il demande également à tous les acteurs de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il conviendra, et de veiller à ce que les auteurs de violations, et notamment de violence sexuelle dans les situations de conflit et d’après-conflit, aient à répondre de leurs actes.

Élections

Le Conseil encourage les autorités congolaises à continuer de mettre en place, avec l’appui de la MONUSCO, des processus pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles en vue de la tenue des élections prévues en 2023, dans le respect de la Constitution et de la loi électorale, dans l’ensemble de la République démocratique du Congo, pour faciliter des élections libres et régulières et garantir la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes, à toutes les étapes de ce processus, tant des candidates que des électrices.  Il engage la République démocratique du Congo à garantir un espace civique libre et demande à toutes les parties de privilégier le dialogue et le consensus.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: débat nourri au sujet du projet de pacte international sur le droit au développement

Soixante-dix-huitième session,
20e et 21e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4383

Troisième Commission: débat nourri au sujet du projet de pacte international sur le droit au développement

La question du droit au développement a mobilisé, aujourd’hui, l’attention de la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, dont les débats ont été dominés par l’état d’avancement d’un instrument juridiquement contraignant consacrant ce droit. 

Ouvrant le dialogue interactif combiné, le Président-Rapporteur du Groupe de travail intergouvernemental sur le droit au développement s’est félicité du fait que le Conseil des droits de l’homme ait soumis hier pour adoption le projet de pacte international sur le droit au développement à l’Assemblée générale. 

Plaidant pour l’adoption la plus rapide possible de ce pacte, M. Zamir Akram a estimé que cette norme doit être élevée au rang d’instrument juridique contraignant au même titre que les autres droits humains, après avoir rappelé que son groupe travaille sur ce projet depuis 2019. 

« Mon objectif a été d’assurer l’acceptation la plus large possible du projet de traité, en n’imposant pas de nouvelles obligations », a-t-il expliqué, soulignant que ce droit est unanimement reconnu dans les documents finaux de nombreuses conférences majeures, notamment la Déclaration et Programme d’action de Vienne et le Programme 2030. 

Rappelant les obstacles rencontrés depuis la Déclaration sur le droit au développement de 1986, il a toutefois fait état de différences idéologiques entre le Nord et le Sud, certains pays du Nord ne reconnaissant tout simplement pas ce droit comme un droit humain, d’autres estimant qu’il était individuel et non collectif, ou relevant des États et non du droit international.  Il a également signalé que certains pays du Nord n’avaient pas participé à l’élaboration du texte. 

Le droit au développement est central pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), a cependant souligné le Rapporteur spécial sur le droit au développement, qui a regretté que celui-ci ne soit pas effectif pour des millions de personnes dans le monde.  Au chapitre des recommandations, M. Surya Deva s’est concentré sur le rôle indispensable des entreprises dans la réalisation du droit au développement, tout en mettant en garde contre les pratiques commerciales qui le sapent, comme l’évasion fiscale et l’exploitation des travailleurs migrants.  Il a également appelé à un changement fondamental dans le rôle et la place des entreprises dans la société, ainsi qu’à l’imposition d’obligations contraignantes en matière de droits humains, insistant en outre sur la nécessité de réformer l’architecture juridique actuelle qui, a-t-il affirmé, facilite les abus. 

Dans le même ordre d’idées, la Présidente-Rapporteuse du Mécanisme d’experts chargé de la question du droit au développement a recommandé d’ancrer l’aide au développement dans les principes normatifs du droit au développement afin de traiter les causes profondes des conflits.  Le droit au développement, a expliqué Mme Liliana Valiña, soutient un système de mesure qui inclut des indicateurs pour toutes les dimensions du développement: civile, culturelle, économique, politique, sociale et environnementale.  Appelant à la réforme du système financier international, elle a recommandé d’augmenter les prêts et de réformer l’architecture de la dette souveraine, qui ne permet pas aux pays en développement de surmonter leurs vulnérabilités financières.  Cette réforme est le fondement du processus de développement, a acquiescé le Mali. 

La question du droit au développement a largement dominé le dialogue interactif de la matinée. L’égalité entre les grands types de droits humains a été rappelée par plusieurs délégations, dont le Zimbabwe.  Elle aussi soucieuse de promouvoir le droit au développement, la Chine a appelé à l’intégrer dans l’ensemble du système de l’ONU. Au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a quant à lui exhorté les mécanismes de l’ONU chargés des droits humains à faire de la mise en œuvre du droit au développement une priorité, renouvelant sa proposition de convoquer une conférence internationale de haut niveau sur le sujet. 

Autre préoccupation largement répandue, la question de l’impact négatif des mesures coercitives unilatérales sur le droit au développement a notamment été soulevée par Cuba, le Venezuela, le Bélarus, le Zimbabwe, la République arabe syrienne, l’Iran et la Chine, le Nicaragua rappelant pour sa part que plus de 30 pays étaient concernés.  À ce propos, M. Akram a fait savoir que l’article 14 du projet demandait aux États de s’abstenir d’adopter, de maintenir ou d’appliquer de telles mesures. 

La Fédération de Russie a fait valoir que le droit au développement constituait une réponse à l’exploitation coloniale.  Un constat partagé par Cuba qui a affirmé que les pays développés ont une responsabilité historique à assumer face au degré de développement d’autres pays en raison de « siècles d’exploitation et de colonialisme contre leurs peuples et leurs ressources ». 

« C’est un appel aux États qui ont bénéficié du cours de l’histoire pour qu’ils aident d’autres pays, non par charité mais comme un engagement en faveur de la stabilité sociale », a avancé l’Afrique du Sud, interrogeant les titulaires de mandat sur la possibilité de considérer la stabilité humaine comme indicateur alternatif à la croissance économique. 

Dans l’après-midi, les délégations ont dialogué avec le Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, qui a attiré l’attention sur les violations des droits humains commises dans le contexte des programmes de transition énergétique, ainsi qu’avec la Rapporteuse spéciale sur le droit à la vie privée qui s’est inquiétée de l’omniprésence de l’intelligence artificielle dans nos sociétés.  Le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage a également participé à la discussion en s’attardant sur le rôle ambivalent de la technologie en tant qu’instrument à la fois de facilitation et de prévention des formes contemporaines d’esclavage. 

La Troisième Commission poursuivra son examen de la situation des droits humains, lundi 16 octobre à partir de 10 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandats au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposés

M. ZAMIR AKRAM, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement, a rappelé que le mandat du Groupe était d’examiner les progrès réalisés dans la promotion de ce droit, d’identifier les obstacles rencontrés et de formuler des recommandations.  Depuis 2019, sa priorité est de négocier un instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement, a-t-il indiqué, précisant que la version finale avait été proposée au Conseil des droits de l’homme lors de sa cinquante-quatrième session en septembre dernier.  Il s’est félicité que le Conseil ait suivi sa recommandation et, annexant le texte à sa résolution sur le droit au développement adopté hier, l’ait soumis à l’Assemblée générale.  Mon objectif a été d’assurer l’acceptation la plus large possible du projet de traité, en utilisant le libellé accepté dans les instruments internationaux pertinents et en n’imposant pas de nouvelles obligations, a-t-il expliqué, ajoutant que l’aspect essentiel de ce projet était sa nature purement volontaire. 

Il a par ailleurs indiqué que plusieurs États Membres avaient souhaité que ce projet soit qualifié de « pacte », tout en faisant observer que, sur le plan juridique, il n’y avait pas de différence entre un pacte et une convention.  Toutefois, l’emploi du terme « pacte » souligne qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les droits humains et que le droit au développement doit être traité sur le même pied et avec la même importance que les deux autres catégories de droits de la personne, tels que consacrés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Le Président-Rapporteur a souhaité que le projet de pacte international sur le droit au développement soit adopté par l’Assemblée générale dès que possible. Il a rappelé que la Déclaration sur le droit au développement a été adoptée, en 1986, et que ce droit était unanimement reconnu dans les documents finaux de nombreuses conférences majeures, notamment la Déclaration et Programme d’action de Vienne et le Programme 2030.  Cette norme doit être élevée au rang d’instrument juridique contraignant au même titre que les autres droits humains, a-t-il insisté.  « Il est temps de passer à l’action. » 

Mme LILIANA VALIÑA, Présidente-Rapporteuse du Mécanisme d’experts chargé de la question du droit au développement, a recommandé que l’aide au développement soit ancrée dans les principes normatifs du droit au développement afin de traiter les causes profondes des conflits.  Selon elle, cela suppose plusieurs conditions, notamment la participation et la contribution des secteurs marginalisés et vulnérables de la société, la réalisation d’évaluations de l’impact sur les droits humains, une approche sexospécifique et l’absence de conditionnalité de l’aide. 

Le droit au développement, a poursuivi Mme Valiña, soutient un système de mesure qui inclut des indicateurs pour toutes les dimensions du développement: civile, culturelle, économique, politique, sociale et environnementale.  Un tel système devrait, à ses yeux, surveiller non seulement les ressources nationales, mais aussi l’aide extérieure qu’un État fournit ou reçoit, permettre aux détenteurs de droits de suivre leur propre voie de développement et laisser une marge d’adaptation locale.  Il devrait, en outre, avoir accès à des données sur les groupes qui sont actuellement les moins à même de participer à la distribution équitable des bénéfices résultant du développement et s’assurer qu’il sera utilisé pour contribuer à un environnement international favorable à la réalisation du droit au développement, a-t-elle expliqué. 

Abordant la réforme du système financier international, la Présidente-Rapporteuse a recommandé, entre autres mesures, d’augmenter les prêts, y compris les financements concessionnels des banques multilatérales et régionales de développement.  Elle a également appelé de ses vœux une réforme de l’architecture de la dette souveraine, arguant qu’en l’état, celle-ci ne permet pas aux pays en développement de surmonter leurs vulnérabilités financières.  Autre recommandation: les échanges de dettes liés à la protection de l’environnement ou toute nouvelle mesure incluant la taxation de l’économie numérique et des incitations pour que le secteur privé mobilise les investissements nécessaires. 

Pour ce qui est du principe d’équité intergénérationnelle, Mme Valiña a préconisé de concevoir des forums qui agissent comme des fiduciaires pour les générations futures et d’écouter les voix et les aspirations des jeunes, rappelant que ces derniers vivent principalement dans les pays en développement. Elle a appelé aussi à s’attaquer aux changements climatiques et à d’autres secteurs critiques qui affecteront le bien-être des générations futures, étant donné que la plupart de ces personnes naîtront dans des pays où les revenus sont actuellement faibles ou moyens. 

Enfin, en vue d’améliorer la participation des jeunes, la Présidente-Rapporteuse a recommandé de les inclure en tant que chefs de projet, y compris dans les accords de coopération internationale.  Elle a aussi plaidé pour le renforcement ou la création de nouveaux mécanismes, notamment de plateformes numériques, à tous les échelons, et pour l’octroi d’un soutien financier aux fins d’accroître les capacités de participation des jeunes, dans le cadre de processus sûrs et transparents, prévoyant des mécanismes de retour d’information adéquats.

M. SURYA DEVA, Rapporteur spécial sur le droit au développement, a insisté sur l’importance cruciale du droit au développement, « central pour atteindre les ODD », regrettant qu’il ne soit pourtant pas effectif pour des millions de personnes à travers le monde.  Selon son rapport présenté au Conseil des droits de l’homme le mois dernier (A/HRC/54/27), six défis entravent la pleine réalisation de ce droit, nécessitant des stratégies ciblées pour les surmonter. 

Le Rapporteur s’est concentré sur le rôle indispensable des entreprises dans la réalisation du droit au développement -en construisant des maisons, en offrant des services bancaires, ou en créant des opportunités d’emploi, entre autres- tout en mettant en garde contre les pratiques commerciales qui le sapent, comme l’évasion fiscale ou l’exploitation des travailleurs migrants. Il a donc proposé une feuille de route pour exploiter positivement la contribution des entreprises tout en minimisant leurs impacts négatifs.  Celles-ci peuvent, a-t-il énuméré, verser un salaire décent aux travailleurs, combler le fossé numérique, payer des impôts, faire progresser l’égalité réelle entre les sexes, respecter les droits culturels des peuples autochtones et faciliter la participation des citoyens aux processus de prise de décisions. 

M. Deva a ensuite critiqué les modèles commerciaux actuels pour leur incompatibilité avec une compréhension holistique du droit au développement.  Il a appelé à un changement fondamental dans le rôle et la place des entreprises dans la société, avançant trois éléments pour ce changement: repenser le but des entreprises dans la société, changer les modèles commerciaux irresponsables et aller au-delà de l’approche consistant à « ne pas nuire ».  Les États et les organisations de la société civile ont un rôle essentiel à jouer pour soutenir cette évolution fondamentale, a-t-il ajouté.  Le Rapporteur a ainsi appelé à la création d’obligations contraignantes en matière de droits humains pour les entreprises et a insisté sur la nécessité de changer l’architecture juridique actuelle qui facilite les abus.  Enfin, il a exhorté la communauté internationale à adopter le projet de pacte sur le droit au développement le plus rapidement possible. 

Dialogue interactif

À la suite de ces présentations successives, le Brésil a rappelé que l’élimination de la pauvreté représente un élément crucial pour le développement durable, avant d’appuyer les négociations sur une convention censée protéger le droit au développement en tant que droit humain.  S’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, la Tunisie a, pour sa part, indiqué que le Conseil des droits de l’homme a adopté, hier, une résolution (A/HRC/54/L.27) par laquelle il décide de soumettre à l’Assemblée générale, « pour examen, négociation puis adoption », un projet d’instrument juridiquement contraignant, intitulé « projet de pacte international sur le droit au développement ». 

Affirmant que le droit au développement est essentiel pour parvenir aux droit économiques, sociaux, culturels et politiques, le Pakistan a demandé aux trois titulaires de mandat d’expliquer comment la réalisation du droit au développement permettra d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD).  La délégation a également souhaité que soit développée la question des instruments contraignants existants.  Même son de cloche du côté du Cameroun, qui a souhaité recueillir les impressions de M. Akram sur le processus d’élaboration du « pacte international sur le droit au développement ».  Après avoir exprimé son soutien à ce processus, la Malaisie a voulu obtenir des précisions sur la meilleure manière de rendre effectif le droit au développement.

De son côté, la Fédération de Russie a fait valoir que le droit au développement constitue une réponse au passé et à l’exploitation coloniale de certains pays, avant de s’enquérir des mesures supplémentaires que l’ONU peut prendre pour assurer la pleine application du droit au développement. Le constat dressé par la délégation russe a été partagé par l’Afrique du Sud, qui a souligné que le droit au développement repose sur le principe de responsabilité partagée.  « C’est un appel aux États qui ont bénéficié du cours de l’histoire afin qu’ils aident d’autres pays, non par charité mais comme un engagement en faveur de la stabilité sociale », a expliqué la délégation sud-africaine, qui a ensuite interrogé les titulaires de mandat sur la possibilité d’inclure la stabilité humaine dans les activités humaines en alternative à la seule mesure du produit national brut (PNB).

La Chine a appuyé, à son tour, la création d’une convention sur le droit au développement, appelant à intégrer ce droit humain dans tout le système des Nations Unies.  Elle a souhaité savoir dans quelle mesure il est possible de renforcer la position du droit au développement dans la convention et dans d’autres instruments. De plus, la délégation a exprimé son opposition résolue aux mesures coercitives unilatérales imposées aux pays en développement.  Le Zimbabwe a, lui aussi, interpellé M. Akram sur les répercussions des mesures coercitives unilatérales, avant de réaffirmer l’importance du droit au développement dans la « quête collective du développement durable ». Sur un mode plus offensif, Cuba a jugé inadmissible que le droit au développement soit « réduit au minimum par certains et méconnu par d’autres ».  Les pays développés ont une responsabilité historique dans le degré de développement d’autres pays en raison des « siècles d’exploitation et de colonialisme contre leurs peuples et leurs ressources », a martelé la délégation.  Elle a également appelé à mettre un frein aux mesures coercitives unilatérales, qui sont un « affront aux droits des peuples » et constituent un obstacle au droit au développement.  Un avis partagé par le Venezuela et le Bélarus.

Après avoir salué les progrès réalisés dans la conception d’un instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement, le Bangladesh a interrogé les titulaires de mandat sur les façons d’augmenter les ressources des pays en développement, insistant sur l’aide publique au développement (APD), la coopération économique et l’émission de droits de tirage spéciaux (DTS).  L’Union européenne a rappelé, à cet égard, qu’elle contribue à l’aide au développement mondiale à hauteur de 46%.  S’agissant de la responsabilité sociale des entreprises, également évoquée par le Bangladesh, elle a souligné que les entreprises ont le devoir de protéger les droits humains.  Elle a souhaité obtenir des exemples de bonnes pratiques sur ce point.  L’Égypte a, quant à elle, demandé si les entreprises biomédicales ont bien respecté leur devoir de fournir un accès aux technologies médicales, comme mentionné dans les rapports. 

L’Indonésie a ensuite insisté sur l’importance de la participation de tous et le besoin de changer les paradigmes en matière de droit au développement.  Une approche partagée par le Nicaragua, qui a défendu la nécessité de créer un nouveau modèle économique international fondé sur l’inclusion et la solidarité, l’équité, la justice sociale et l’élimination de la pauvreté.  Se disant convaincue que les entreprises peuvent apporter leur contribution à la matérialisation du droit au développement, la délégation a exhorté les pays développés à tenir leurs engagements historiques en la matière. Elle a également pointé les mesures coercitives unilatérales illicites imposées à plus de 30 pays, qui constituent l’un des principaux obstacles au développement.  Sur cette même ligne, la République islamique d’Iran a insisté sur les effets dévastateurs de ces mesures.  « Si les pays qui les imposent y étaient confrontés, ils comprendraient les impacts catastrophiques de leurs actes », a renchéri la République arabe syrienne.

Revenant sur le projet d’instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement, l’Arabie saoudite a vivement souhaité que les États Membres parviennent à un consensus.  Saluant la dynamique internationale dans ce sens, elle a rappelé l’importance de son fonds pour le développement, lequel a accordé plus de 700 prêts à plus de 80 pays pour la réalisation de leurs objectifs de développement durable (ODD). À cette aune, elle a voulu savoir quels sont les meilleurs moyens d’apporter une assistance en tenant compte des priorités et programmes au développement des différents pays.  Au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a quant à lui exhorté les mécanismes des Nations Unies chargés des droits de l’homme à garantir la mise en œuvre du droit au développement en tant que priorité, notamment via l’élaboration d’une convention sur le droit au développement.  Il a, d’autre part, renouvelé la proposition du Mouvement d’œuvrer à la convocation d’une conférence internationale de haut niveau parrainée par les Nations Unies sur le droit au développement. 

Prenant à son tour la parole, l’Algérie a affirmé vouloir construire une économie productive en veillant au développement durable et à la préservation de l’environnement.  À cette fin, elle a dit n’épargner aucun effort sur la voie de la réalisation des ODD avant la date butoir de 2030.  La délégation a ainsi rappelé qu’en 2020, son pays a réservé une enveloppe d’un milliard de dollars pour la mise en œuvre de projets de développement dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’accès à l’eau et aux infrastructures dans la région du Sahel.  Considérant pour sa part que la réforme de l’architecture financière est le fondement du processus de développement, le Mali a souhaité savoir comment il serait possible de faire adhérer les institutions financières internationales à cette approche. 

Reprenant la parole, le Président-Rapporteur du Groupe de travail sur le droit au développement a indiqué que le projet de pacte en cinq parties et 39 articles était disponible sur le site Internet du HCDH.  Il a indiqué que l’article 14 demandait aux États de s’abstenir d’adopter, de maintenir ou d’appliquer des mesures coercitives unilatérales.  Il a insisté sur le principe d’adhésion volontaire, notant qu’une telle approche permet d’exercer des pressions morales tout en écartant l’idée de pointer du doigt certains États. 

Abordant les obstacles rencontrés depuis l’adoption, en 1986, de la Déclaration sur le droit au développement, le Président-Rapporteur a évoqué les différences idéologiques entre le Nord et le Sud, certains pays du Nord ne reconnaissant pas le droit au développement comme un droit humain.  D’autres estiment, en outre, que ce droit est individuel et non collectif et qu’il relève des États et non du droit international, a-t-il ajouté. Il a fait savoir que certains pays du Nord n’avaient pas participé à l’élaboration du texte, et qu’un consensus n’avait pas pu être trouvé, mais que le Groupe avait pris en compte leurs préoccupations.  Il a également souligné que le projet de pacte était basé sur un corpus de textes juridiques déjà existants et largement acceptés.  Il a demandé que le projet soit lu, estimant que cela contribuera à un soutien accru envers le pacte. 

Lui emboîtant le pas, la Présidente-Rapporteuse du Mécanisme d’experts chargé de la question du droit au développement a souligné que le droit au développement renforce la capacité des États à matérialiser leurs efforts en termes de droits humains.  C’est pourquoi le Mécanisme s’efforce de contribuer au renforcement des capacités nationales.  Elle a insisté sur l’importance de travailler sur des principes fondamentaux, comme la participation libre et active de tous les acteurs, notant que le manque d’appui des communautés concernées entraîne l’échec des efforts investis par les organisations intergouvernementales.  La consultation n’est donc pas seulement bénéfique pour les communautés elles-mêmes, mais pour tous les acteurs du développement, a-t-elle souligné. 

Abordant la réforme de l’architecture financière internationale, la Présidente-Rapporteuse a estimé que les effets de la dette sur le droit au développement doivent être examinés à l’aune du contexte de chaque État.  Les institutions financières internationales peuvent apporter des bénéfices concrets et réels aux populations, a-t-elle ajouté.  Elle a également insisté sur l’importance de la participation de la société civile aux réunions du Mécanisme, notant qu’une grande partie des travaux accomplis reposent sur ses observations sur des questions telles que la justice climatique.

À son tour, le Rapporteur spécial sur le droit au développement, a d’abord encouragé les entreprises, notamment celles de réseaux sociaux, à se saisir pleinement du principe de diligence voulue et à y investir davantage de ressources, afin d’éviter, par exemple, le harcèlement de certains groupes. Dans le même contexte, il a cité le droit à l’eau parfois menacé par des entreprises qui fabriquent des boissons ou qui pratiquent l’agriculture intensive, et auxquelles le principe de diligence voulue pourrait s’appliquer. 

Sur la question de la coopération entre les États et les entreprises, il a avancé que des réglementations obligatoires en matière de droits humains sont nécessaires, mais que les entreprises peuvent aussi répondre à des incitations fiscales pour adopter de bonnes pratiques.  En ce qui concerne la santé publique spécifiquement, il a critiqué le monopole des technologies médicales par le secteur privé, et, donnant l’exemple des vaccins contre la COVID-19, a défendu « l’obligation morale » de partager ces technologies. 

Passant à l’économie des droits humains, il a affirmé que le modèle actuel suscitait trop d’inégalités, appelant à aller « au-delà du PIB ».  À la question d’identifier le meilleur moyen de fournir l’aide publique au développement, il a plaidé pour une écoute attentive des besoins spécifiques de chaque pays.  Il a en outre élargi la notion de ne laisser personne de côté aux animaux et aux plantes, soulignant ainsi une vision écosystémique du développement. 

Pour ce qui est de l’espace de participation, le Rapporteur spécial a appelé tous les gouvernements à respecter la société civile, même lorsqu’ils ne sont pas d’accord avec elle.  Il a également insisté sur l’importance d’un développement participatif, où les personnes à la base sont impliquées à chaque étape de la prise de décisions, faisant une distinction claire entre « participation » et « consultation ». 

Répondant aux pays qui dénoncent l’unilatéralisme, il a estimé que les sanctions unilatérales sont une déviation du droit international, exhortant à revenir à la Charte des Nations Unies et à chercher le consensus, « ce qui aura pour effet de rendre les sanctions caduques ». 

Enfin, il a prédit que le pacte international sur le droit au développement pourrait être adopté d’ici à 2026, coïncidant avec le quarantième anniversaire de la Déclaration sur le droit au développement, insistant sur l’importance de la gouvernance et des compétences techniques pour mettre en œuvre ce pacte dans les politiques nationales. 

Exposé

M. DAMILOLA OLAWUYI, Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a déclaré avoir exploré, dans le cadre de son rapport intitulé « Secteur extractif, transition juste et droits humains », les facteurs conduisant à des violations des droits humains dans le contexte des programmes de transition énergétique.  Il a dit avoir examiné le meilleur moyen pour les États, les entreprises, les investisseurs et les autres parties prenantes du secteur extractif de concevoir et de mettre en œuvre des programmes de transition énergétique justes, inclusifs et fondés sur les droits humains au regard des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits humains.

Le Président du Groupe de travail a noté que, depuis l’adoption de l’Accord de Paris en 2015, un nombre croissant de parties prenantes dans le monde ont annoncé des engagements et des plans pour mettre en œuvre des programmes de transition énergétique.  Il a toutefois exprimé la crainte que ces engagements ne viennent exacerber davantage les violations des droits humains liées aux entreprises, comme cela a déjà été vérifié dans certains pays.  Parmi les violations évoquées, M. Olawuyi a mentionné les déplacements forcés, le travail des enfants, l’esclavage moderne, la discrimination ou encore la pollution de l’environnement. 

Il a, par conséquent, recommandé aux États de saisir la transition énergétique en cours comme une opportunité pour promouvoir des lois et des politiques cohérentes et tenir les entreprises et les investisseurs pour responsables des violations des droits humains tout au long de la chaîne de valeur.  Une transition juste nécessitera également une forte coordination aux niveaux international, régional, national et local, a-t-il fait valoir, appelant les États à remplir leurs obligations extraterritoriales, car « tenter de respecter les engagements internationaux en matière de climat au niveau national ne peut justifier l’ignorance des violations des droits humains dans les États où se déroulent les activités extractives ».  Lorsqu’ils négocient de nouveaux contrats, concessions ou accords bilatéraux dans le secteur extractif ou qu’ils réforment les accords existants, les États doivent, selon lui, conserver une marge de manœuvre nationale suffisante afin de remplir leurs obligations en matière de droits de l’homme en vertu du droit international.

Après avoir passé en revue les défis actuels, ainsi que des pratiques émergentes mises en évidence dans ce contexte, le Président du Groupe de travail a évoqué un plan d’action pour garantir que tous les programmes de transition énergétique existants et futurs soient compatibles avec les normes et standards internationaux en matière de droits humains.  Saluant à cet égard l’adoption d’un cadre réglementaire clair et complet pour atteindre les objectifs de transition énergétique fondés sur les droits humains, il a incité les États à réviser les politiques fiscales actuelles liées au secteur de l’extraction afin de garantir le respect du droit au partage des bénéfices entre les communautés affectées. 

S’agissant des entreprises, M. Olawuyi leur a suggéré de veiller à ce que tous leurs programmes de transition énergétique existants et futurs soient compatibles avec les obligations internationales en matière de droits humains.  Il les a en outre invitées à aligner leurs pratiques commerciales, politiques, processus, structures de gouvernance et décisions sur les objectifs de l’Accord de Paris.  Tout en leur enjoignant d’éviter « l’écoblanchiment » et les allégations trompeuses sur les programmes de transition énergétique, le Président du Groupe de travail a demandé aux entreprises d’assurer une consultation efficace et significative avec tous les titulaires de droits concernés, notamment en garantissant le consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones. 

Dialogue interactif 

Dans la foulée de cet exposé, les États-Unis ont appelé à une coopération multipartite pour créer un environnement qui minimise les effets négatifs de l’environnement sur les droits humains.  Ils ont ensuite souhaité savoir comment le Groupe de travail va assurer la participation des communautés autochtones pour favoriser un monde plus durable et plus juste. Souscrivant aux conclusions du rapport concernant le rôle des États et des entreprises dans l’accomplissement d’une transition énergétique juste, l’Union européenne a voulu connaître les principes à inclure dans le cadre réglementaire pour que la transition énergétique soit juste et efficace.  Comment tenir les entreprises responsables de leurs actions dans le contexte de transition énergétique?, a demandé la délégation européenne. 

De manière connexe, l’Irlande, après avoir exprimé son adhésion au principe de « tolérance zéro » face aux représailles, a souhaité savoir comment les États peuvent appuyer les entreprises en matière de droits humains. Elle a été rejointe en ce sens par le Pakistan et la Suisse, laquelle a demandé à M. Olawuyi si le Groupe de travail prévoit des activités spécifiques pour promouvoir le partage des bonnes pratiques mises en évidence dans le rapport.  La France a, pour sa part, rappelé qu’elle soutient activement les discussions visant à la création d’un instrument juridiquement contraignant universel sur les entreprises et les droits de l’homme. Elle a voulu en savoir plus sur la contribution que le Groupe de travail peut apporter à la poursuite d’une transition énergétique juste et au respect des droits humains dans le secteur des industries extractives. 

À la suite de la Chine, qui a appelé les sociétés transnationales opérant dans les pays en développement à respecter et protéger les droits humains, le Cameroun a regretté que le rapport de M. Olawuyi se montre « peu favorable aux pays où sont menées des activités extractives ». Il a par ailleurs demandé au Président du Groupe de travail un exemple de pays ayant adopté un programme de transition énergétique en Afrique.  De son côté, la Fédération de Russie a souhaité que cette discussion ne soit pas un prétexte pour faire obstacle au développement économique des États. Selon elle, le lien entre les questions de droits humains et d’environnement est « infondé et largement artificiel ».  Jugeant que l’objectif principal du rapport de M. Olawuyi doit être de prévenir les conséquence négatives des activités des entreprises sur les droits humains, elle s’est prononcée pour un renforcement des mécanismes internationaux existants. 

Réagissant aux remarques et questions des délégations, le Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises a évoqué, en premier lieu, les actions que peuvent entreprendre les États.  Ceux-ci doivent adopter des plans nationaux et créer des cadres réglementaires clairs, qui concilient droits humains et efforts de promotion de la transition énergétique, a-t-il dit.  Cela implique aussi de réexaminer les accords et les politiques budgétaires déjà existants, pour faire en sorte qu’ils ne mettent à mal ni les efforts visant à promouvoir la transition énergétique ni les droits humains, a-t-il expliqué. M. Olawuyi a indiqué que nombre de recommandations du rapport sont adressées aux entreprises pour qu’elles inscrivent la transition énergétique dans le respect des droits humains.  À ce titre, les entreprises doivent éviter de faire de fausses affirmations sur leurs programmes et, au contraire, fournir des rapports clairs et objectifs.  Elles doivent en outre s’assurer que leurs pratiques sont conformes aux objectifs de l’Accord de Paris, a-t-il ajouté. 

S’agissant des impacts sur les peuples autochtones, le Président du Groupe de travail a appelé à associer toutes les parties prenantes pour garantir en amont une consultation éclairée sur les incidences des activités économiques sur le droit à un environnement propre.  D’une manière générale, a-t-il précisé, nous attendons des entreprises qu’elles fassent davantage pour contribuer au développement de la société, en mettant les personnes au-dessus des profits. 

Après avoir fait état de sa collaboration étroite avec le Rapporteur spécial sur le droit au développement, qui, jusqu’à l’an passé, était membre du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, M. Olawuyi a évoqué la situation du continent africain, regrettant que seuls trois États –l’Ouganda, le Nigéria et le Kenya– aient adopté des plans nationaux sur les entreprises et les droits humains.  Il a encouragé les autres pays de la région à les imiter.  Il a enfin remercié les membres de la société civile, notamment les syndicats et les représentants des peuples autochtones, pour leurs contributions, avant d’indiquer qu’il se rendra, en 2024, en Colombie et en Tunisie. 

Exposé

M. TOMOYA OBOKATA, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, s’est concentré sur le rôle ambivalent de la technologie en tant qu’instrument à la fois de facilitation et de prévention des formes contemporaines d’esclavage.  Les réseaux sociaux, salles de forum de discussions ou autres plateformes sont fréquemment utilisés par les recruteurs et exploiteurs afin d’instaurer une confiance avec les victimes, en particulier les femmes économiquement défavorisées, les migrants et les jeunes, a expliqué le Rapporteur, qui a également évoqué les annonces d’emploi en ligne fallacieuses.   

Néanmoins, il a reconnu le potentiel de certaines technologies comme l’intelligence artificielle et la technologie de la chaîne de blocs pour lutter contre ces formes d’exploitation.  L’intelligence artificielle permet notamment d’analyser de multiples sources de données pour débusquer des situations d’exploitation au travail et des itinéraires de traite humaine, a-t-il fait valoir.  En outre, la technologie de la chaîne de blocs peut augmenter la transparence des chaînes d’approvisionnement, tandis que la télédétection par satellite offre un moyen de surveiller des zones où les inspections du travail sont difficiles à mener.  « La technologie n’est cependant pas une panacée », a prévenu le Rapporteur spécial.  Soulignant la nécessité de s’attaquer aux causes profondes comme la pauvreté et l’inégalité, il a insisté sur l’importance de la protection des données et de la réduction du fossé numérique. 

Il a appelé à une révision régulière des réponses légales aux formes contemporaines d’esclavage, en tenant compte des avancements technologiques.  Il a également plaidé pour un dialogue international sur les normes techniques et pour une collaboration multisectorielle afin de concevoir des solutions technologiques efficaces.  Enfin, il a encouragé les gouvernements ainsi que les entreprises technologiques de toutes tailles à adopter des mesures obligatoires et autres formes de diligence raisonnable en matière de droits humains dans leurs opérations commerciales. 

Dialogue interactif

Après cet exposé, le Royaume-Uni a souligné l’importance de la législation pour combattre l’exploitation en ligne, particulièrement celle des femmes et des filles, et s’est réjoui que des données statistiques et des outils comme l’intelligence artificielle puissent être utilisés pour prévenir l’esclavage moderne.  L’Australie a renchéri en mettant l’accent sur la coopération régionale et la consultation des victimes, avant de demander des exemples de gouvernements qui collaborent efficacement avec les entreprises technologiques. 

Le Japon a voulu connaître l’avis du Rapporteur sur la possible création par l’ONU d’un nouvel organisme international qui serait chargé de régir l’utilisation de l’intelligence artificielle face à des risques potentiellement catastrophiques et existentiels.  Que pourraient faire les États et les entreprises technologiques pour développer des solutions technologiques simples et conviviales, destinées à lutter contre l’esclavage moderne, s’est, de son côté, enquise l’Union européenne, en insistant sur l’accessibilité de tels outils aux enfants et aux adolescents.  Le Liechtenstein s’est concentré sur le suivi financier pour appréhender les auteurs de crime, tandis que le Chili a souligné le rôle crucial des entreprises technologiques, en complément des États, dans la prévention de l’esclavage moderne. 

La Fédération de Russie, de son côté, a soutenu une approche multidimensionnelle, notant que le problème n’est pas forcément lié à des technologies intrinsèquement « mauvaises », mais plutôt sur des utilisateurs malintentionnés.  Elle a appelé à une réglementation législative des technologies de l’information, insistant en outre sur l’importance de former les forces de l’ordre à ces défis particuliers.  La Chine a reproché aux États-Unis de ne pas avoir ratifié certaines conventions, notamment celle sur le travail des enfants, alors que 500 000 enfants sont toujours exploités, notamment aux États-Unis.  Par ailleurs, plus de 70% des personnes en détention aux États-Unis travaillent dans des prisons privées, pour de très faibles salaires, a dénoncé la délégation qui a demandé une enquête internationale sur le sujet. 

« Les États-Unis condamnent l’esclavage sous toutes ses formes. Point barre », a clarifié le représentant américain, avant de noter que des millions de personnes sont victimes de la traite humaine à des fins sexuelles ou professionnelles.  Il a insisté sur la nécessité de s’attaquer aux moteurs de la vulnérabilité, tels que la pauvreté et la discrimination et s’est demandé comment les États pouvaient mieux intégrer l’analyse des données pour traquer les nouveaux esclavagistes. 

Concernant la façon d’établir un équilibre entre risques et avantage des technologies, le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences a appelé à travailler de près avec les entreprises et les experts technologiques pour identifier les risques qui pourraient aboutir à des formes contemporaines d’esclavage moderne. Il faut demander aux entreprises de mettre au point des outils pour détecter et prévenir ces pratiques, a expliqué le Rapporteur spécial qui a également conseillé de travailler avec les universitaires et la société civile.  À cet égard, il a mis en avant une initiative asiatique analysant la manière dont les technologies peuvent contribuer à la prévention, ainsi qu’un projet de l’Union européenne qui examine la façon dont la technologie peut protéger les droits des victimes des formes modernes d’esclavage 

Il a également soutenu l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’une initiative mondiale sur l’intelligence artificielle, insistant sur l’importance d’une gouvernance multipartite pour aborder la problématique de la protection des victimes, entre autres.  L’intelligence artificielle peut être utilisée pour déformer les transactions financières mais aussi protéger la vie privée et combattre les formes contemporaines d’esclavage, a noté le Rapporteur. 

Exposé

Mme ANA BRIAN NOUGRÈRES, Rapporteuse spéciale sur le droit à la vie privée, a tout d’abord relevé l’omniprésence de l’intelligence artificielle dans nos sociétés, depuis les appareils mobiles du quotidien jusqu’aux systèmes de gestion d’entreprise les plus complexes.  Cette présence grandissante est source d’opportunités mais aussi de défis, a-t-elle expliqué, mettant notamment en garde contre la prise de décisions biaisées, non transparentes ou incorrectes.  Face à ces dangers, « conformons l’intelligence artificielle aux droits humains », a exhorté la Rapporteuse spéciale.  Et même si l’intelligence artificielle permet de collecter, stocker, analyser et traiter d’énormes quantités d’informations, la vie privée doit malgré tout demeurer un droit essentiel, a-t-elle fait valoir. 

Sur la base de son rapport, Mme Nougrères a noté que la transparence et l’explicabilité renforcent tout à la fois le respect des droits humains et la confiance dans les systèmes d’intelligence artificielle.  La transparence, a-t-elle précisé, concerne non seulement la masse de données utilisées par l’intelligence artificielle, mais aussi la manière dont les décisions basées sur celle-ci sont prises.  Quant à l’explicabilité, elle l’a explicitée en ces termes: « toutes les personnes affectées par une décision prise sur la base de l’intelligence artificielle méritent une explication claire, simple, complète, véridique et compréhensible de la motivation de cette décision ». Selon la Rapporteuse spéciale, ces deux principes exigent la clarté, l’exhaustivité, la véracité, l’impartialité et la publicité des décisions prises par l’intelligence artificielle. À l’opposé, l’opacité, la tromperie, le mensonge et l’abus de puissance informatique sont autant de symptômes d’un traitement illégal des données manquant d’éthique et de respect pour l’être humain et de sa dignité, a-t-elle ajouté. 

En termes de recommandations, la Rapporteuse spéciale a exhorté les États, à promouvoir la transparence dans les développements de l’intelligence artificielle et à incorporer dans leurs réglementations normatives des dispositions relatives à la protection des droits humains.  Les États, a-t-elle poursuivi, doivent notamment intégrer dans leurs réglementations normatives le principe d’explicabilité, afin que les personnes comprennent parfaitement comment les décisions qui les concernent ont été prises et qu’elles puissent disposer d’outils pour défendre leurs droits humains face à l’intelligence artificielle.  Un autre champ d’action proposé est celui de l’éducation et de la culture numériques pour que les citoyens comprennent mieux les concepts liés à l’intelligence artificielle et qu’ils puissent exiger le respect de leurs droits.  L’utilisation de cette dernière doit être promue comme « un outil de protection du droit à la vie privée et du respect de la vie privée », a conclu Mme Nougrères.

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, l’Union européenne a souhaité connaître l’outil réglementaire le plus efficace pour veiller à ce que l’intelligence artificielle et les technologies de l’avenir respectent les droits humains.  Que peuvent faire les usagers pour refuser le traitement automatisé des données personnelles, a demandé l’Autriche, tandis que le Luxembourg et le Brésil s’enquéraient des meilleures pratiques en matière de protection des données, dans le respect des droits humains.  La Malaisie a ensuite voulu savoir quelles difficultés poserait l’intégration de la transparence dans le développement de l’intelligence artificielle.  L’humanité est-elle prête à laisser l’intelligence artificielle prendre des décisions en son nom?, s’est, pour sa part, interrogée la République arabe syrienne.

De son côté, la Fédération de Russie a dénoncé les violations à grande échelle du droit à la vie privée et du secret de la correspondance commises dans plusieurs pays occidentaux, notamment la surveillance totale et l’interception des données des utilisateurs.  La délégation a également critiqué la résistance des Occidentaux en matière de transfert de technologies, dans le but de conserver leur domination mondiale et de garantir un avantage compétitif à leurs ressortissants. 

Après avoir réitéré son engagement à œuvrer avec la communauté internationale pour formuler des règles de gouvernance numérique internationale qui respectent les intérêts de toutes les parties, la Chine s’est attaquée aux États-Unis qui, selon elle, se livrent au « cybervol » dans le monde entier.  Elle a ainsi affirmé qu’en 2021, le FBI a effectué plus de 3,4 millions de recherches sur des données numériques, et ce, sans mandat.  Les agences américaines ont en outre mené 45 cyberattaques contre d’autres pays, dont la Chine, a-t-elle ajouté.  Pour leur part, les États-Unis ont souhaité savoir comment les gouvernements peuvent agir ensemble pour appuyer la liberté de la presse et protéger les journalistes des surveillances arbitraires et illégales, notamment dans le cyberespace. 

En réponse aux questions et commentaires des délégations, la Rapporteuse spéciale sur le droit à la vie privée a souligné le consensus existant quant aux risques liés à l’intelligence artificielle.  Toutefois, a-t-elle nuancé, l’atténuation de ces risques ne devrait pas pour autant empêcher de poursuivre l’innovation. Dans la mesure où les systèmes d’intelligence artificielle représentent une aide, il importe surtout de veiller à ce que leurs effets qui ne répondent pas aux droits de l’homme soient « atténués au maximum », a-t-elle préconisé.  Pour ce qui est de garantir le respect des droits humains, Mme Nougrères a appelé à analyser les principes généraux, en l’absence de règlement en la matière, invitant notamment à se pencher sur la finalité et la proportionnalité, principes qu’elle avait déjà évoqués dans de précédents rapports. La Rapporteuse spéciale a également insisté sur la sensibilisation, en tant qu’outil complémentaire à l’éducation, afin d’introduire la notion de respect de la vie privée dans toutes les strates de la société. 

Par ailleurs, Mme Nougrères a fait le constat qu’à l’intérieur des frontières des États, en raison de l’existence de règlements particuliers, le fonctionnement des systèmes de données personnelles se fait sans grande difficulté. En revanche, le problème se pose à l’échelon international, a-t-elle ajouté, appelant les États à envisager des solutions internationales sur ce point. 

Revenant ensuite sur les deux principes énoncés dans son dernier rapport, à savoir la transparence et l’explicabilité, elle a assuré qu’ils n’entrent aucunement en contradiction avec le principe de précision.  Quant aux préoccupations exprimées par plusieurs pays au sujet du cyberespionnage, la Rapporteuse spéciale a déclaré les partager car, a-t-elle souligné, ces activités nuisent aux droits humains fondamentaux.  Enfin, en réponse à la République arabe syrienne, elle a invité les États à échanger plus largement sur ces questions avec son bureau, lequel prend en compte tous les avis. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission entame son débat thématique sur les armes nucléaires, dominé par les frustrations et les craintes des États non dotés

Soixante-dix-huitième session,
11e séance plénière – après-midi
AG/DSI/3718

La Première Commission entame son débat thématique sur les armes nucléaires, dominé par les frustrations et les craintes des États non dotés

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entamé aujourd’hui la phase de sa session consacrée aux débats thématiques en commençant par le volet consacré aux armes nucléaires.  Les délégations qui ont pris la parole, parmi lesquels plusieurs Groupes d’États, ont déploré le manque de progrès, voire les reculs, en matière de désarmement nucléaire, et ont mis en cause le manque de volonté des États dotés de négocier des accords de désarmement.   

Alors que la Malaisie a rappelé les répercussions indélébiles des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki sur la conscience mondiale, Cuba, ainsi que les États parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) ou signataires du Traité se sont dit gravement préoccupés par le fait que neuf États possèdent encore environ 13 000 armes nucléaires, prêtes à être lancées en quelques minutes.   

Les représentants du Mouvement des pays non alignés et des États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) ont stigmatisé le manque de progrès du désarmement nucléaire, déplorant que certains pays modernisent au contraire leur arsenal.  Ainsi, ont-ils dénoncé, les États dotés auraient dépensé environ 89  milliards de dollars en 2022 rien que pour leurs arsenaux nucléaires, des sommes jugées déraisonnables en regard du sous-financement des objectifs de développement durable.  Le Groupe des États d’Afrique a lui aussi dénoncé le fait que ces pays continuent de moderniser leur arsenal nucléaire aux dépens de la sécurité collective.  « Nous vivons dans un monde de géants nucléaires et de nains éthiques », a assené Sri Lanka, alors que l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) jugeait nécessaire que les États dotés fournissent des garanties négatives de sécurité inconditionnelles et juridiquement contraignantes.   

Pour de très nombreuses délégations, dont le Groupe des États arabes, la CARICOM, Singapour, la Jordanie ou encore l’Union européenne, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) reste la clef de voute du régime international de non-prolifération et de désarmement nucléaires et ce, malgré l’échec de la dixième Conférence d’examen du Traité.  À l’image de la Nouvelle-Zélande, plusieurs pays ne s’en sont pas moins dits profondément déçus par l’absence de résultats lors des deux dernières Conférences d’examen et par les maigres progrès réalisés cette année lors de la première session du Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen, prévue en 2026.  Pour le Groupe des États d’Afrique, ces échecs persistants érodent la crédibilité du TNP.  Quant à la Malaisie, elle a estimé que les États parties au Traité naviguent désormais en terrain inconnu alors que les armes nucléaires et leurs vecteurs sont modernisés à grande vitesse.   

La Suède s’est voulue moins pessimiste en se disant convaincue que les engagements en matière de désarmement issus des précédentes Conférences d’examen du TNP restent valables.  Elle a en outre mis en exergue l’Initiative de Stockholm et sa démarche pragmatique visant à mobiliser un soutien politique et à réaliser des progrès concrets pas à pas.  Même si elles ne peuvent remplacer le désarmement, de bonnes mesures de réduction des risques peuvent permettre de progresser dans le désarmement en réduisant les tensions, en favorisant l’instauration de la confiance et en ouvrant la voie à des mesures pratiques complémentaires de celles prévues en vertu des traités et accords pertinents, a-t-elle fait valoir. 

L’Union européenne a insisté sur le caractère inacceptable des menaces de la Fédération de Russie de recourir à la force nucléaire, d’autant que l’année dernière, la Russie avait signé la déclaration conjointe des dirigeants du P5 et réitéré cet engagement avec la Chine le 22 mars 2023.  L’Union européenne et la France se sont en outre dites profondément préoccupées par la suspension par Moscou du Traité New START de désarmement stratégique et de vérification qui lie les États-Unis et la Fédération de Russie.  Plusieurs délégations se sont également alarmées de l’intention affichée par la Fédération de Russie de retirer son adhésion au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), autre pilier du régime international de désarmement, même s’il n’est toujours pas juridiquement entré en vigueur 27 ans après son adoption.  D’autres ont appelé ceux des États figurant à l’annexe 2 du TICE qui ne l’ont pas encore fait –ils sont huit– à y adhérer rapidement pour permettre, enfin, son entrée en vigueur.   

Seul État doté à s’exprimer aujourd’hui, la France a mis en avant ses propres « mesures unilatérales considérables et sans égales » de réduction de son arsenal nucléaire, ajoutant qu’elle souhaite l’ouverture, dans le cadre de la Conférence du désarmement, de négociations portant sur l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires.  Plusieurs autres pays ont souhaité l’adoption d’un tel traité, tout en demandant, en attendant, que le seul des cinq États officiellement dotés qui n’a pas adopté de moratoire sur une telle production le fasse à son tour   

Plusieurs Groupes d’États ont en outre rappelé le rôle des zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN).  Ont été mentionnées celles existant en Amérique latine et Caraïbes, en Afrique, en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique Sud.  Le Mouvement des pays non alignés et le Groupe des États arabes ont rappelé leur appui à la création d’une telle zone au Moyen-Orient.   

En début de séance, la Première Commission avait entendu M. Adedeji Ebo, Directeur du Bureau des affaires de désarmement et Haut-Représentant adjoint pour les affaires de désarmement, puis M. Flávio Damico, de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL)M.  Ebo avait notamment souligné qu’il existe un ensemble de principes qui sous-tendent la sécurité collective, à savoir la confiance, la solidarité, et l’universalité.  M. Damico avait mis en avant l’importance d’un dialogue fructueux entre États dotés et pays rassemblés au sein de ZEAN.  Les membres de la Première Commission ont ensuite dialogué à huis clos avec les deux responsables.   

La Première Commission poursuivra son débat thématique sur les armes nucléaires, lundi 16 octobre, à 10 heures.   

DÉBATS THÉMATIQUES SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR 

Déclarations liminaires 

M. ADEDEJI EBO, Directeur du Bureau des affaires de désarmement et Haut-Représentant adjoint pour les affaires de désarmement, a rappelé que, lors du débat général de la Première Commission, certains États avaient souligné les menaces très élevées de recours à l’arme nucléaire.  Nombre d’entre eux ont fait part de leur préoccupation concernant les dépenses militaires croissantes, qui nuisent aux objectifs de développement durable.  Concernant l’espace extra-atmosphérique, les délégations ont indiqué les vulnérabilités de gouvernance.   

M. Adedeji Ebo a souligné qu’il existe un ensemble de principes qui sous-tendent la sécurité collective, à savoir la confiance, la solidarité, et l’universalité.  Il a rappelé que le Secrétaire général avait présenté un Nouvel Agenda pour la paix, qui inclue des recommandations pour un système multilatéral efficace, afin de trouver de nouvelles approches pour la paix et déceler les domaines potentiels de conflits.  La maîtrise des armes est essentielle pour ces actions, a‑t‑il rappelé, et le désarmement est un outil puissant de prévention, essentiel à la paix et la sécurité.  Il y a un lien entre le désarmement et la réalisation des objectifs de développement durable.  Il faut aussi reconnaitre l’action humanitaire et l’autonomisation des femmes.   

Le Sommet de l’avenir de 2024 sera l’occasion de discuter de l’importance du désarmement pour la paix et la sécurité, a encore noté M. Ebo.  À terme, ce sont les États qui ont la responsabilité de traiter des problèmes de désarmement, a‑t‑il rappelé.  De surcroit, il est fondamental que les États tiennent compte des impératifs humanitaires pour réduire le coût humain des armes.  En raison de l’urbanisation des conflits, les États doivent davantage protéger les populations et conclure des traités pour bannir les armes inhumaines, comme les armes à sous-munitions.   

Les armes légères et de petit calibre (ALPC) continuent d’avoir des effets très lourds conduisant à de grandes souffrances, a également relevé le Directeur du Bureau des affaires de désarmement, qui a appelé à de nouveaux efforts concernant ces armes, en particulier sur les plans régional et sous-régional.  Il a cité en exemple des approches régionales qui incluent les ALPC dans les objectifs de réduction de la violence.   

Enfin, les États doivent porter leur attention sur les nouvelles technologies, a déclaré M. Ebo, qui les a invités à réfléchir à la façon de traiter la propagation des hostilités dans le cyberespace et à traiter des conséquences du recours à l’intelligence artificielle, y compris via la mise en œuvre de normes.   

M. FLÁVIO DAMICO, représentant de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), a plaidé en faveur de la création d’une structure de gouvernance multilatérale de non-prolifération et de désarmement nucléaire, dont l’ONU serait le moteur.  Il a ajouté que 50 ans après l’entrée en vigueur du Traité de Tlatelolco portant création d’une zone exempte d’armes nucléaires (ZEAN) dans la région, les normes régissant les structures de ce type n’ont jamais été aussi pertinentes qu’aujourd’hui pour renforcer la sécurité collective, restaurer la confiance régionale et améliorer la coopération technique au profit du développement socioéconomique et de la paix.   

À cette aune, le représentant a jugé important que les États dotés dialoguent de manière fructueuse avec les pays rassemblés au sein de telles zones.  C’est à cette fin que l’OPANAL a mis en place un mécanisme avec les cinq grandes puissances nucléaires (P5) pour débattre de solutions mutuellement acceptables donnant des garanties négatives de sécurité aux pays de notre région, a‑t‑il expliqué.  Il a ajouté que, cette année, ces pays ne présenteraient pas leur projet de résolution sur tous les aspects des ZEAN.  Nous le ferons l’an prochain avec l’idée, à travers un texte dont nous espérons qu’il sera consensuel, de faire progresser les traités actuels ayant porté création de ZEAN et de proposer des initiatives pour créer de nouvelles zones de ce type, a‑t‑il conclu.   

Après cette intervention, la Première Commission a tenu un débat interactif en privé avec MM. Ebo et Damico.   

Armes nucléaires 

Déclarations

Mme MARISKA DWIANTI DHANUTIRTO (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a fait part de ses inquiétudes face à la modernisation des armes nucléaires, ainsi qu’au développement de nouveaux types d’armes nucléaires, y compris de nouveaux vecteurs.  La représentante a déploré un dialogue stratégique limité entre les États dotés au sens du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), prenant note de la prorogation du Traité New START jusqu’en 2026 et appelant au renouvellement des engagements qu’il contient.  Le Mouvement appelle ces États à éliminer totalement leurs armes nucléaires, de manière transparente, irréversible et vérifiable sur le plan international.   

En attendant l’élimination totale, le Mouvement des pays non alignés préconise l’élaboration d’un instrument universel et juridiquement contraignant pour protéger les États non dotés contre l’emploi ou la menace de l’emploi des armes nucléaires.  Il souligne que le désarmement nucléaire ne doit pas être subordonné à d’autres efforts de désarmement et que les mesures de réduction des risques ne sont pas un substitut au désarmement.  À ce titre, le Mouvement des pays non alignés réaffirme son plein engagement en faveur du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN), ainsi que l’importance de parvenir à une adhésion universelle au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE). 

La représentante a appelé les États dotés au sens du TNP à faire preuve de volonté politique pour permettre à la onzième Conférence d’examen du TNP de parvenir à des recommandations concrètes, estimant que les pays membres du Mouvement des pays non alignés avaient fait preuve d’un engagement actif lors de la première session du Comité préparatoire.  Elle a fait part de ses préoccupations quant au fait que certains États dotés, de même que des États non dotés, ont accru le rôle des armes nucléaires dans leurs doctrines de sécurité, soulignant une incompatibilité avec la lettre, l’esprit et les objectifs du TNP.   

Par ailleurs, le Mouvement des pays non alignés réitère son soutien à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, se félicitant de la convocation des trois sessions de la Conférence sur le sujet, conformément à la décision 73/546 de l’Assemblée générale.  À ce titre, il appelle Israël, seul pays de la région non-partie au TNP, à signer le Traité et à placer ses infrastructures nucléaires sous le régime de garantie de l’AIEA.   

Enfin, la représentante a évoqué le droit inaliénable des États d’acquérir, d’avoir accès, d’importer ou d’exporter des matières, équipements et technologies nucléaires à des fins pacifiques, rappelant que les normes et règles multilatérales en matière de sécurité nucléaire doivent être convenues dans le cadre fixé par l’AIEA.   

M. HOANG GIANG DANG (Viet Nam), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a souligné qu’il est nécessaire que les États dotés d’armes nucléaires fournissent des garanties négatives de sécurité inconditionnelles et juridiquement contraignantes et adoptent une politique de non-recours en premier aux armes nucléaires.  Ils doivent en outre réduire, en vue de l’éliminer, le risque d’utilisation involontaire et accidentelle d’armes nucléaire.   

Le représentant a réaffirmé que chaque État a droit à une utilisation sûre et pacifique de la technologie nucléaire, en particulier pour son développement économique et social, rappelant en ce sens l’engagement des pays de l’ASEAN de renforcer leur coopération avec l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), notamment par la mise en œuvre d’accords pratiques de coopération.  En outre, il a indiqué que les pays de l’ASEAN présenteront une version actualisée de leur projet de résolution sur le traité ayant porté création de la zone exempte d’armes nucléaires (ZEAN) de l’Asie du Sud-Est.  Enfin, il a assuré que les pays de l’ASEAN s’engagent, aux termes de ce texte, à améliorer et à renforcer davantage la mise en œuvre dudit traité à travers un plan d’action couvrant la période 2023-2027 et tel qu’adopté à Phnom Penh en 2022.   

M. EDUARDO ALCIBIADES SÁNCHEZ KIESSLICH (Mexique), au nom des États parties au TIAN ou signataires du Traité, s’est dit gravement préoccupé par le fait que neuf États possèdent encore environ 13 000 armes nucléaires, prêtes à être lancées en quelques minutes.  La fragilité du contexte international actuel exacerbe les risques d’utilisation de ces armes, a estimé le représentant.  Les conséquences catastrophiques de toute détonation d’arme nucléaire ne peuvent être prises en compte de manière adéquate, a‑t‑il ajouté.  Il s’est dit fermement convaincu qu’il est dans l’intérêt de tous les États d’engager des discussions sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires afin d’élargir et d’approfondir la compréhension.   

En outre, le représentant s’est dit préoccupé par les menaces d’utilisation d’armes nucléaires, menaces qu’il a condamnées sans équivoque, quelles qu’en soient les circonstances.  Il a rejeté l’utilisation des armes nucléaires comme instruments de politique et d’exacerbation des tensions, ainsi que la prétendue valeur de sécurité de la dissuasion nucléaire.   

Pour les États parties au TIAN, l’établissement d’un régime juridiquement contraignant d’interdiction des armes nucléaires est une mesure nécessaire et efficace pour prévenir une course aux armements nucléaires et parvenir au désarmement nucléaire.  Le TIAN est la concrétisation de cet objectif, a souligné le représentant.  En attendant l’élimination totale des armes nucléaires, tous les États possédant des armes nucléaires doivent s’engager à ne jamais les utiliser ou menacer de les utiliser, quelles que soient les circonstances.  À cet égard, il a demandé instamment aux États dotés de redoubler d’efforts pour s’acquitter de l’obligation de désarmement nucléaire énoncée à l’article VI du TNP.   

M. CARLOS FULLER (Belize), s’exprimant au nom des 15 États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), s’est dit préoccupé du manque de progrès dans le domaine du désarmement nucléaire, déplorant que certains pays modernisent leur arsenal, mettent au point de nouvelles armes ou emploient la menace nucléaire.  Le représentant a exhorté les États dotés à respecter leurs obligations et à réaffirmer leurs assurances en matière de non-utilisation aux États non dotés.  Il s’est prononcé en faveur d’un désarmement nucléaire total en tant que seule norme acceptable pour un monde sécurisé.  À ce titre, il s’est inscrit en faux contre la stratégie de la dissuasion, apportant son soutien au TIAN et relevant que tous les États de la CARICOM y sont parties, en sont signataires ou en passe d’y adhérer.  Il s’est félicité de la première Réunion des États parties au TIAN, en 2022.   

Malgré l’échec de la dixième Conférence d’examen du TNP, le représentant a estimé que le traité demeurait le fondement de l’architecture mondiale du désarmement nucléaire.  Il a appelé les signataires à faire en sorte que des recommandations concrètes soient adoptées lors de la onzième Conférence d’examen, en 2026.   

Rappelant que les États de la CARICOM sont tous parties au Traité de Tlatelolco, le représentant a dit sa fierté de faire partie de la première ZEAN au monde.  Il a ensuite dénoncé les dépenses consacrées aux armes et systèmes nucléaires, relevant que les États dotés auraient dépensé environ 89 milliards de dollars en 2022 rien que pour leurs arsenaux nucléaires.  Jugeant ces sommes déraisonnables en regard du sous-financement des objectifs de développement durable, il a exhorté les États dotés à prendre des mesures pour orienter leur financement vers des politiques axées sur la prévention, la paix et le développement durable.  Concluant son intervention sous un angle humanitaire, il a dénoncé les conséquences des essais nucléaires sur un grand nombre de personnes, s’inquiétant de ce que nous ne comprendrons peut-être jamais totalement: l’effet de ces essais sur l’environnement et ses répercussions sur l’humain au fil des générations.   

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie), au nom de la Ligue des États arabes, a réitéré son soutien au TNP, pierre angulaire du désarmement et de la non-prolifération, tout particulièrement à la lumière des évolutions géopolitiques et l’érosion des accords bilatéraux sur l’usage des armes.  Le représentant a dénoncé les États dotés dont les doctrines permettent l’emploi des armes nucléaires, estimant que leurs accords de coopération nucléaire contreviennent à l’esprit du TNP.  Les mesures de confiance sont importantes, a‑t‑il relevé, mais elles ne se substituent pas à un accord international contraignant.  À ce titre, il a exprimé ses regrets face à l’échec de la dernière Conférence d’examen du TNP et fait part de son espoir que l’on parvienne à restaurer la crédibilité du Traité.   

Insistant sur l’importance des efforts internationaux pour l’universalisation des accords concernant les armes nucléaires, le représentant a encouragé les pays figurant à l’annexe 2 du TICE à le ratifier.  Enfin, il a plaidé pour la création d’une ZEAN au Moyen-Orient, considérant qu’il s’agissait d’une question nécessitant un engagement international et appelant à ce que soient prises des mesures pratiques immédiates.   À ce titre, il s’est dit préoccupé par Israël, seul pays de la région non-partie au TNP, et de son refus de soumettre ses installations au régime de garanties de l’AIEA.   

M. MOHAMMED LAWAL MAHMUD (Nigéria), au nom du Groupe des États d’Afrique, a dénoncé le fait que les États dotés d’armes nucléaires continuent de moderniser leur arsenal nucléaire aux dépens de la sécurité collective.  Pour le Groupe, l’élimination des armes nucléaires devrait représenter l’objectif général de l’ONU.  Le représentant a donc exprimé sa préoccupation face à la résistance des États dotés et leur a rappelé leurs obligations au titre de l’article VI du TNP.  L’universalisation de ce dernier, a‑t‑il poursuivi, dépend du respect de ses trois piliers – désarmement, non-prolifération et utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. 

Le Groupe africain est déçu du nouvel échec de la Conférence d’examen du TNP, laquelle représentait pourtant une occasion pour les États dotés de raviver leurs engagements.  Les échecs persistants des conférences d’examen du TNP érodent sa crédibilité, a déploré le représentant, pour qui tant la lettre que l’esprit du traité sont violés par le stockage et la modernisation des arsenaux nucléaires, la poursuite de l'emploi et de la menace de l'emploi d'armes nucléaires, ainsi que le partage nucléaire et l'extension des garanties nucléaires.  

Le représentant a réitéré l’engagement du Groupe envers le Traité de Pelindaba, qui consacre le statut de l’Afrique en tant que ZEAN, interdisant le stationnement et les essais de dispositifs explosifs nucléaires sur l'ensemble du continent.  Il s’est également dit préoccupé par la non-mise en œuvre des engagements relatifs à la Conférence sur la création d'une zone exempte d'armes nucléaires et de toutes autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. 

Soulignant l’importance du respect du droit inaliénable à l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire, le représentant a souligné le rôle central de la communauté internationale et plus particulièrement celui du soutien technique fourni par l’AIEA.  Enfin, il a appelé à prendre en compte les considérations humanitaires durant cette session de la Première Commission, se félicitant à ce titre de l’entrée en vigueur du TIAN comme de la meilleure manière d’éviter l’emploi des armes nucléaires. 

M. STEEN MALTHE HANSEN, de l’Union européenne, a réaffirmé qu’il soutenait fermement les trois piliers du TNP et la mise en œuvre complète du Plan d’action de la Conférence d’examen de 2010.  Il a regretté vivement qu’aucun document de consensus n’ait été adopté lors de la première session du Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen du TNP, en raison de l’attitude peu constructive de certains États parties, mais s’est dit encouragé par l’engagement constructif d’une majorité d’États, y compris de certains États dotés d’armes nucléaires.   

Les menaces de la Fédération de Russie de recourir à la force nucléaire sont inacceptables, a déclaré le représentant, qui a rappelé que, l’année dernière, la Russie avait signé la déclaration conjointe des dirigeants des P5 et réitéré cet engagement avec la Chine le 22 mars 2023.  Il a condamné le déploiement annoncé d’armes nucléaires russes sur le territoire du Bélarus, le jugeant incompatible avec l’engagement pris par le Bélarus dans le Mémorandum de Budapest.   

Le représentant a souligné la nécessité de réaliser des progrès concrets en vue de la pleine mise en œuvre de l’article VI du TNP, notamment par la réduction globale du stock mondial d’armes nucléaires.  Il s’est dit profondément préoccupé par la suspension du Traité New START par la Russie et lui a demandé de s’acquitter de toutes ses obligations.  Il a demandé instamment à la Chine de prendre des mesures de transparence dans sa doctrine nucléaire.  Il s’est dit profondément préoccupé par les rapports récents de l’AIEA documentant le niveau alarmant du programme nucléaire iranien.  Il a demandé à l’Iran d’inverser sa trajectoire nucléaire et de revenir à ses obligations juridiques et à ses engagements politiques.  Il a exhorté la République arabe syrienne à coopérer avec l’AIEA pour rétablir la confiance dans son programme nucléaire, en faisant entrer en vigueur un protocole additionnel à son accord de garanties en lien avec le TNP, conformément à la résolution du Conseil des gouverneurs de l’AIEA de juin 2011.  Enfin, il a affirmé que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) ne pourrait jamais avoir le statut d’État doté d’armes nucléaires et qu’elle devait abandonner ses armes nucléaires et toute autre arme de destruction massive, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et au TNP.   

Mme SHERINA SARAN (Afrique du Sud) s’est dite préoccupée par le nombre croissant d’États qui mettent l’accent sur la valeur de la dissuasion nucléaire et s’appuient toujours davantage sur les armes nucléaires dans leurs doctrines militaires et de sécurité.  L’approche des États non dotés d’armes nucléaires, qui appellent au désarmement et demandent à bénéficier de garanties de dissuasion nucléaire étendues, doit être évaluée à cette aune, a‑t‑elle ajouté.   

Pour la représentante, il est essentiel que les États dotés stabilisent leurs relations géopolitiques et s’engagent sans détour à éliminer leurs arsenaux nucléaires dans des délais précis et vérifiables.  Cela renforcera la sécurité de tous, a‑t‑elle affirmé.  Aujourd’hui plus que jamais, une action urgente est nécessaire pour mettre pleinement en œuvre les obligations du TNP, notamment le désarmement nucléaire et les engagements pris lors des conférences d’examen du Traité, a poursuivi la représentante.  Elle a par ailleurs estimé que le TIAN peut servir de catalyseur à des progrès attendus depuis longtemps par les opinions publiques.  Réaffirmant que les portes de ce Traité sont et ont toujours été ouvertes, elle a encouragé tous les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le TIAN et à rejoindre la communauté des nations engagées en faveur d’un monde exempt d’armes nucléaires.   

M. ANDY ARON (Indonésie) a estimé que la reconfiguration des engagements politiques de la part des États dotés est essentielle.  Nous avons besoin d’engagement pour avancer vers un monde exempt d’armes nucléaires, a‑t‑il déclaré.  Les États dotés doivent s’acquitter de leurs obligations découlant du TNP, a poursuivi le représentant, qui a condamné l’association de certains pays à des États déjà dotés comme contraire aux accords et traités sur la non-prolifération.   

Il faut concrétiser les bonnes intentions exprimées en matière de désarmement et passer des paroles aux actes, a lancé le représentant, pour qui le désarmement doit être renforcé.  Il a appelé à veiller à l’entrée en vigueur du TICE et à l’universalisation du TIAN.  Il a en outre estimé qu’il fallait avancer vers une institutionnalisation des ZEAN.  Il a dit avoir besoin d’instruments juridiques contraignants élaborés dans le cadre de la Conférence du désarmement et d’assurances négatives de sécurité contre la menace d’utilisation de l’arme nucléaire.   

M. AMR ESSAMELDIN SADEK AHMED (Égypte) a réaffirmé l’importance de l’élimination complète, vérifiable et irréversible des armes nucléaires comme seule garantie contre leur utilisation ou la menace de leur utilisation.  Déplorant l’échec des deux dernières Conférences d’examen du TNP, le représentant a estimé que les risques étaient exacerbés par la modernisation en cours des arsenaux nucléaires et a fait part de son inquiétude quant à l’érosion des accords bilatéraux sur les armes nucléaires.  Les mesures de réduction des risques ne sont pas un substitut à l’élimination des armes nucléaires, a‑t‑il averti.  Pour restaurer la confiance dans le régime de désarmement, il a préconisé des progrès immédiats, ajoutant qu’il s’agit également de reconfirmer la validité de tous les engagements antérieurs.  Il a exhorté les États dotés à plus de transparence, exigeant qu’ils rendent des comptes et produisent des rapports sur la mise en œuvre de leurs engagements.  Il les a aussi rappelés à leurs obligations au titre de l’article VI du TNP.   

Pour l’Égypte, le projet de création d’une ZEAN au Moyen-Orient est dans l’impasse.  Cette paralysie constitue une entrave à la paix et la sécurité dans une région qui fait déjà face à de nombreux problèmes, a déclaré le représentant.  L’Égypte entend présenter un projet de résolution à ce propos, en visant un engagement à long terme à travers le consensus, sans pointer du doigt un État de la région en particulier.  Le représentant a également fait part d’un autre projet de résolution sur le risque de prolifération au Moyen-Orient, appelant au soutien des États Membres.   

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL (Cuba) a déploré la présence de 13 000 armes nucléaires dans le monde, leurs détenteurs continuant de moderniser leurs arsenaux et tardant à respecter leurs engagements en vue de réaliser un monde exempt d’armes nucléaires.  Seule l’adoption du TIAN a marqué un progrès marquant ces dernières années, a estimé le représentant, cet instrument ayant codifié pour la première fois le caractère illégitime de ces armes en droit international.  Or, les États dotés ne le reconnaissent pas, empêchant sa nécessaire universalisation, a‑t‑il encore regretté.   

Le représentant a appelé ces pays à abandonner leurs doctrines fondées sur la dissuasion nucléaire, laquelle légitime un statu quo intolérable pour les États non dotés et les opinions publiques éprises de paix et de développement.  Il a également exhorté les États-Unis à sauver le Plan d’action global commun (PAGC) sur le programme nucléaire iranien et à y revenir « pour corriger le tir ».  Par ailleurs, il a indiqué que seuls le dialogue entre les pays de la région et la négociation permettraient d’aboutir à la dénucléarisation de la péninsule coréenne.  Enfin, le représentant a affirmé que le blocus de son pays par les États-Unis l’empêche d’exercer pleinement son droit inaliénable aux utilisations et au développement de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.   

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé qu’il est important d’écouter les récits de l’agonie endurée par les survivants.  « Nous vivons dans un monde de géants nucléaires et de nains éthiques », a‑t‑il souligné.  Une croyance bien ancrée dans la dissuasion nucléaire comme stratégie de défense et l’absence de progrès sur le désarmement, pilier du TNP, empêchent l’humanité d’entrer dans une ère plus pacifique où le monde serait libéré de la peur de l’anéantissement nucléaire, a poursuivi le représentant.  Il a souligné que, le 6 juin, la Sri Lanka avait ratifié le TICE, une étape cruciale vers un monde plus sûr.  Fidèle à son engagement de longue date en faveur de la non-prolifération et du désarmement nucléaires, la Sri Lanka a également eu le plaisir d’adhérer au TIAN au cours de la semaine de haut niveau, a rappelé le représentant.   

Mme AMANDA GORELY (Australie) a déclaré que le monde attend de tous les États dotés qu’ils respectent leur déclaration et leurs obligations au titre du TNP, en prenant des mesures concrètes vers le désarmement nucléaire.  En tant que grande puissance, l’engagement de la Chine dans le processus de contrôle des armements sera nécessaire pour façonner la nouvelle ère de contrôle des armements et de stabilité stratégique que nous espérons tous, a souligné la représentante.   

La représentante a estimé que pour sortir de l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement, il serait opportun d’y entamer des négociations en vue d’un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles, une lacune dans l’architecture multilatérale de désarmement.  En attendant la finalisation d’un tel traité, elle a appelé les États dotés qui ne l’ont pas encore fait à déclarer et à maintenir un moratoire sur la production de matières fissiles à des fins militaires.  Outre l’entrée en vigueur du TICE, l’élaboration d’outils et de processus crédibles de vérification du désarmement nucléaire constituerait une autre étape nécessaire sur la voie du désarmement nucléaire, a‑t‑elle ajouté.   

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a rappelé les répercussions indélébiles des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki sur la conscience mondiale.  Aujourd’hui, a‑t‑il estimé, les progrès vers la paix restent entravés par les risques inacceptables que présentent les armes nucléaires.   

Les États parties au TNP naviguent en terrain inconnu depuis les deux échecs consécutifs des conférences d’examens du Traité, a déploré le représentant, tandis que les armes nucléaires et leurs vecteurs sont modernisés à grande vitesse.  On ne saurait préserver la crédibilité du TNP si ses objectifs sont constamment reportés par les considérations de stabilité stratégique des États dotés, a‑t‑il ajouté.  Selon lui, la première session du Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen du TNP, qui s’est tenue récemment à Vienne, reflète le profond déficit de confiance entre les États parties.  Pour la rétablir, il a appelé à la diplomatie et au dialogue.  Enfin, il a réclamé la pleine mise en œuvre de toutes les obligations du TNP citant en particulier celles de l’article VI. 

Se prononçant en faveur de l’élimination totale des armes nucléaires comme seule garantie absolue contre leur emploi, le représentant a expliqué que cette position est à la base du soutien de son pays au TIAN.  Rappelant que la Malaisie copréside le Groupe de travail informel sur l’universalisation du TIAN, il a salué l’adhésion récente de deux nouveaux pays.  Il a émis l’espoir que les avancées du TIAN donnent une impulsion positive aux autres éléments clés de l’architecture mondiale de désarmement nucléaire et de non-prolifération, dont le TICE.  Concernant ce dernier, il a exhorté les États figurant à l’annexe 2 du Traité à le ratifier afin de permettre son entrée en vigueur.   

Le représentant a estimé que l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, rendu en juillet 1996, reste d’actualité.  À ce titre, il s’est félicité du soutien et du coparrainage de la résolution annuelle déposée par son pays à la Première Commission sur le suivi de cet avis.  Enfin, il a appelé au dialogue dans la péninsule coréenne, afin de parvenir à une dénucléarisation complète et a insisté sur l’importance du rétablissement du PAGC sur le programme nucléaire iranien.   

M. PANTELIS MARGARIS (Grèce) a déclaré que l’adhésion universelle au TICE et son entrée en vigueur constituent une priorité essentielle.  Toutefois, il s’est dit préoccupé par certains développements récents qui menacent l’intégrité du Traité.  Si la Grèce reste un fervent défenseur du TNP, le représentant n’en a pas moins regretté que la première session du Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen se soit achevé sans rapport factuel.  Il a reconnu l’importance vitale de l’ouverture de négociations en vue d’un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles dans le cadre de la Conférence du désarmement.   

Le représentant a dit accorder une grande importance à l’expertise technique et à l’impartialité de l’AIEA dans l’accomplissement de son mandat.  Son système de garanties multilatéral, impartial, qualifié et efficace reste l’une des composantes essentielles du TNP et une garantie fondamentale pour la sécurité nucléaire, assurant la nature exclusivement pacifique des activités nucléaires, a‑t‑il estimé.  Les pays qui utilisent l’énergie atomique, ou qui aspirent à le faire à l’avenir, devraient respecter les normes de transparence les plus élevées, notamment en raison des implications possibles sur l’environnement naturel transfrontalier, a encore déclaré le représentant.   

Mme CAMILLE PETIT (France) a rappelé l’attachement de son pays à la mise en œuvre du TNP et a salué les propositions récemment soumises pour accroître la transparence sur les trois piliers du Traité et renforcer le cycle d’examen.  Dans le cadre du TNP et des obligations qu’il emporte au titre de son article VI, la France a pris des mesures unilatérales considérables et sans égales en matière de désarmement, a affirmé la représentante.  En attestent le démantèlement irréversible des installations de production de matières fissiles pour les armes nucléaires, le démantèlement complet de sa composante nucléaire sol-sol, la réduction de moitié du nombre d’armes nucléaires, la réduction d’un tiers de la composante océanique et de la composante aéroportée et le démantèlement irréversible du site d’essais dans le Pacifique, a‑t‑elle énuméré.  La représentante a également rappelé que la France souhaite l’ouverture de négociations portant sur l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires dans le cadre de la Conférence du désarmement.   

Mme Petit a ensuite condamné la rhétorique nucléaire irresponsable des attaques russes sur les infrastructures énergétiques, y compris nucléaires, en Ukraine.  La France déplore en outre la suspension par la Russie de sa participation au traité New START et exprime sa préoccupation face à l’annonce par ce pays qu’il se tiendrait prêt à revenir sur sa ratification du TICE.   

La représentante a condamné la poursuite des violations par l’Iran de ses engagements en matière de non-prolifération au titre du PAGC, les autorités iraniennes devant mettre en œuvre l’ensemble de leurs obligations en vertu de son accord de garanties généralisées avec l’AIEA.  « Notre objectif reste constant: l’Iran ne doit jamais se doter de l’arme nucléaire », a‑t‑elle martelé.  La France reste également préoccupée par la poursuite par la RPDC de ses activités proliférantes, a ajouté la représentante, qui a exhorté Pyongyang d’abandonner ses programmes proliférants, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et à ses engagements internationaux.   

M. BENJAMIN ESCAIG (Suède) a indiqué que par le biais de l’Initiative de Stockholm pour le désarmement nucléaire, la Suède, en collaboration avec un groupe interrégional de partenaires, sensibilise à la nécessité de poursuivre les progrès en matière de désarmement à ce niveau.  Convaincue que les engagements en matière de désarmement issus des précédentes conférences d’examen du TNP restent valables, l’Initiative a présenté des propositions visant à mobiliser un soutien politique et à réaliser des progrès concrets en matière de désarmement, a‑t‑il rappelé.  Pour la Suède, il est urgent de prendre des mesures pour réduire le risque d’utilisation d’armes nucléaires car, a ajouté le représentant, même si elles ne peuvent remplacer le désarmement, de bonnes mesures de réduction des risques peuvent permettre de progresser dans le désarmement en réduisant les tensions, en favorisant l’instauration de la confiance et en ouvrant la voie à des mesures pratiques complémentaires de celles prévues en vertu des traités et accords pertinents.   

Le représentant a également salué le rôle de l’AIEA dans la prévention de la prolifération des armes nucléaires, la promotion de la sûreté nucléaire et radiologique et la facilitation de l’utilisation de la technologie nucléaire à des fins pacifiques.  Il est essentiel que l’Agence reçoive le soutien politique et financier nécessaire, a‑t‑il insisté.   

Concernant la vérification du désarmement nucléaire, le représentant a encouragé vivement davantage d’États à s’engager dans ce domaine, la Suède étant un membre actif du Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire.  Le représentant a également mentionné la participation de la Suède au Groupe d’experts gouvernementaux sur la vérification du désarmement nucléaire de l’Assemblée générale, dont il a salué les travaux et le rapport final.   

Pour M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas), la confiance a toujours été une rareté en matière de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération.  À ce titre, a poursuivi le représentant, la devise officieuse est depuis toujours « faire confiance mais vérifier ».  Un simple appel ne suffit pas dans ces circonstances, a‑t‑il estimé, appelant à l’emploi des mesures qui sont déjà en place, ou « encore en place », a‑t‑il précisé en guise d’avertissement.  Le Traité New START a démontré à quel point la vérification renforce la maîtrise du désarmement, a‑t‑il poursuivi, exhortant la Russie à revenir au respect de l’accord.  Dans le même esprit, il a déploré l’annonce russe d’une révocation prochaine de sa ratification du TICE. 

Estimant que le TNP reste la pierre angulaire du régime mondial de non-prolifération et de désarmement nucléaire, le représentant a regretté que le Groupe de travail chargé de renforcer le processus d’examen n’ait pas pu se mettre d’accord sur des recommandations concrètes en vue de la onzième session de la Conférence d’examen du Traité en 2026.  Les États dotés officiels et non officiels doivent continuer de rendre des comptes sur leurs engagements, a‑t‑il poursuivi, précisant que le premier groupe devrait informer sur ses doctrines et ses arsenaux.  À ce titre, il a considéré que le formulaire standard de déclaration, élaboré par l’Initiative sur la non-prolifération et le désarmement, était un outil indispensable.  Renforcer les mesures de transparence, a‑t‑il ajouté, permettra aux États dotés d’armes nucléaires de démontrer leur mise en œuvre du TNP –en particulier la pleine mise en œuvre de l’article VI.   

Jusqu’à présent, quatre pays dotés officiels sur cinq ont déclaré un moratoire sur la production de matières fissiles, a relevé le représentant, qui a appelé le cinquième à faire de même.  Enfin, il a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU, estimant qu’il insuffle un sentiment d’urgence renouvelé en matière de désarmement, de réduction des risques et de non-prolifération nucléaire.   

M. BENJAMIN HIMMLER (Allemagne) a souligné la nécessité de trouver des mesures concrètes et pratiques en faveur du désarmement nucléaire et du renforcement du TNP si les États Membres veulent se rapprocher d’un monde libéré de telles armes.  Il appartient également à la Russie de faire très rapidement un grand pas en revenant sur sa décision de suspendre la mise en œuvre du Traité New START, a ajouté le représentant, qui a rappelé que ce Traité « est l’un des plus importants traités de contrôle des armements nucléaires, qui a considérablement réduit les deux plus grands arsenaux nucléaires du monde ».  Il a en outre appelé la Chine, dont les arsenaux ne cessent de croître, à entamer un dialogue avec les États-Unis sur son programme nucléaire et leur responsabilité commune en matière de stabilité stratégique.   

Le représentant a par ailleurs estimé que le temps est venu de démarrer des négociations en vue d’un traité sur l’arrêt de la production de matières fissiles, qui contribuerait grandement selon lui à renforcer la non-prolifération et le désarmement nucléaires.  Dans l’immédiat, il a appelé la Chine à décréter enfin un moratoire sur la production de matières fissiles.   

M. NICHOLAS CLUTTERBUCK (Nouvelle-Zélande) a recommandé le projet de résolution de la Coalition pour un nouvel ordre du jour sur l’accélération de la mise en œuvre des engagements en matière de désarmement nucléaire.  Ce texte trace une voie à suivre en réponse aux préoccupations mondiales concernant la montée de la rhétorique nucléaire et le risque d’utilisation d’armes nucléaires, ainsi que la trajectoire des arsenaux et des doctrines nucléaires, a expliqué le représentant.  Toutefois, il s’est dit profondément déçu par l’absence de résultats lors des Conférences d’examen successives du TNP et par les maigres progrès réalisés cette année par le Groupe de travail et le Comité préparatoire.   

Le représentant a rappelé que la Nouvelle-Zélande est l’un des principaux auteurs de la résolution sur le TICE, aux côtés du Mexique et de l’Australie, et a encouragé tous les États Membres à soutenir ce texte.  Il est important que tous les signataires du TICE respectent leurs obligations, a‑t‑il déclaré.  En outre, la Nouvelle-Zélande est l’un des principaux auteurs de la résolution sur le TIAN, qui reste une lueur d’espoir dans un horizon par ailleurs bien sombre.   

Le représentant a rappelé que son pays est partie au Traité de Rarotonga qui a établi une ZEAN dans le Pacifique Sud, y voyant un symbole important de l’opposition de longue date de cette région aux armes nucléaires.  Il s’est dit heureux de diriger, avec le soutien du Brésil, de l’Indonésie et de l’Afrique du Sud, le projet de résolution visant à créer un hémisphère sud exempt d’armes nucléaires.  Ce texte réaffirme le rôle essentiel joué par les ZEAN dans le renforcement du régime de désarmement et de non-prolifération nucléaires, ainsi que l’intérêt d’étendre ces zones, a‑t‑il rappelé.   

Droits de réponse 

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les allégations de l’Union européenne, l’accusant de ne pas mettre en pratique ce qu’elle préconise et de manquer de diplomatie tout en suivant les États-Unis dans leur quête brutale et belliqueuse de suprématie dans la péninsule coréenne.  Les résolutions du Conseil de sécurité visant mon pays sont contraires aux principes de la Charte des Nations Unies en matière de souveraineté, a aussi dit le représentant.  L’Australie, qui parle de non-prolifération, n’est pas crédible compte tenu de son partenariat périlleux avec les États-Unis, a‑t‑il ajouté.   

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté les mensonges des Occidentaux, obsédés par leur propagande antirusse.  Les capitales occidentales qui transforment l’Ukraine en place d’armes antirusse et qui s’impliquent toujours plus militairement dans la crise, c’est cela qui attise les risques de catastrophes nucléaires, a‑t‑il dit.  S’agissant de la décision russe de se retirer du Traité New START, le représentant l’a expliquée par la dégradation des relations politiques et militaires entre Russie et États-Unis.  Les Américains, en sapant le principe de non-divisibilité de la sécurité au cœur du Traité, en aidant techniquement et militairement Kiev et en frappant plus ou moins indirectement des sites stratégiques russes, ont violé ce Traité bilatéral, a‑t‑il encore affirmé.   

La représentante d’Israël a répondu au Mouvement des pays non alignés, qui avait présenté son pays comme une menace régionale, qu’il suffit de constater les atrocités du Hamas pour comprendre ce qu’est la véritable menace.  Le Groupe des États arabes a mentionné le danger d’Israël, mais n’a pas mentionné les violations continues de l’Iran dans sa coopération avec l’AIEA, a‑t‑elle aussi relevé.  Nous vivons des jours sombres, a‑t‑elle poursuivi, ajoutant que son pays se rappellera ceux qui ont été à ses côtés dans sa lutte contre le Hamas, décrit comme un agent par procuration de l’Iran.  Diderot disait qu’il n’y a qu’un pas du fanatisme à la barbarie, un pas franchi par le Hamas.   

Le représentant de la République arabe syrienne a répondu à la déclaration de l’Union européenne concernant sa coopération avec l’AIEA en affirmant avoir collaboré avec l’Agence avec clarté et transparence.  Il a estimé que son pays n’avait renoncé à aucun effort, y compris pour régler toutes les questions en suspens.  Les rapports de l’AIEA montrent que la Syrie a mis en œuvre les accords relatifs aux sauvegardes, a‑t‑il continué, ajoutant que son pays avait honoré tous ses engagements dans les délais impartis.  Il a dénoncé une confusion délibérée entre engagement juridique non contraignant et procédures volontaires, estimant qu’il s’agit là d’une manipulation politique et d’une stratégie visant à falsifier les faits pour semer la confusion.   

Le représentant de la Chine a répondu à l’Allemagne qu’elle contrôle sa puissance nucléaire en la maintenant à un niveau minimum de sécurité et en restant fidèle à son engagement de ne jamais utiliser en premier le feu nucléaire.  Nos activités concernent la maintenance et la modernisation de nos arsenaux les plus vieillissants, des activités qui permettent d’assurer leur sûreté, a‑t‑il notamment ajouté.   

Le représentant de la République islamique d’Iran a rejeté les allégations infondées de la représentante du régime israélien, qui occupe illégalement le territoire palestinien depuis 70 ans.  Il a accusé de nouveau le régime israélien de perpétrer des crimes de guerre et de crimes contre l’humanité contre les Palestiniens, bafouant l’esprit et la lettre de la totalité des accords internationaux de désarmement.  Ce régime, qui est connu pour s’être doté clandestinement d’un arsenal nucléaire, ose accuser l’Iran, dont il assassine les scientifiques et détruit des installations nucléaires civiles, de ne pas respecter le PAGC, a encore déclaré le représentant.   

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