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Conseil de sécurité: des tensions politiques et sécuritaires au Kosovo conjuguées à une impasse du dialogue entre Belgrade et Pristina, selon la Représentante spéciale

9450e séance – après-midi
CS/15461

Conseil de sécurité: des tensions politiques et sécuritaires au Kosovo conjuguées à une impasse du dialogue entre Belgrade et Pristina, selon la Représentante spéciale

Les derniers mois ont été marqués par des tensions politiques et sécuritaires croissantes dans le nord du Kosovo, parallèlement à l’absence de progrès tangibles dans le dialogue facilité par l’Union européenne (UE) entre Belgrade et Pristina, a constaté, cet après-midi au Conseil de sécurité, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le Kosovo lors de la première séance consacrée à cette question depuis mars dernier.

Venue présenter le dernier rapport en date du Secrétaire général sur les activités de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), qu’elle dirige, Mme Caroline Ziadeh est revenue sur le grave incident sécuritaire survenu le 24 septembre dernier près du village de Banjska/Banjskë, de la municipalité de Zvečan/Zveçan, dans le nord du Kosovo, au cours duquel un policier kosovar a été tué et deux autres blessés.  Des coups de feu ont ensuite été échangés entre la police du Kosovo et des « éléments lourdement armés », faisant quatre morts.

Cet incident, a-t-elle ajouté, est venu exacerber un environnement précaire, marqué par une atmosphère de « suspicion mutuelle » et de « perceptions contradictoires » au sein de la population, en particulier dans le nord du Kosovo et parmi les communautés serbes du Kosovo, a expliqué la Représentante spéciale.  La Première Ministre de la Serbie, Mme Ana Brnabić, et Mme Vjosa Osmani-Sadriu, du Kosovo, ont en effet présenté des visions diamétralement opposées de la crise.

La situation est si grave, a déclaré la Cheffe de gouvernement serbe, qu’il devient nécessaire pour tous de la comprendre, « non pas en tant que politiciens, mais en tant qu’êtres humains », pour éveiller une « lueur d’espoir » pour celles et ceux qui souffrent dans la « province autonome du Kosovo-Metohija ».  Pour Mme Brnabić, Pristina a trois principaux messages à adresser aujourd’hui.

Le premier, c’est que les Serbes partis après 1999, ou durant le « nettoyage ethnique » de 2004, ne sont pas les bienvenus au Kosovo-Metohija, le territoire avec le plus petit nombre de rapatriés au monde, selon la Première Ministre. Le deuxième, a-t-elle poursuivi, c’est que les Serbes qui sont restés doivent partir, culmination d’années d’atteintes systématiques à leurs droits les plus élémentaires ainsi qu’à ceux d’autres non-Albanais, « transformant leur vie en véritable cauchemar ».  Enfin, le troisième message, a ajouté Mme Brnabić, c’est qu’il ne faut pas que les accords conclus soient mis en œuvre, et que ceux qui l’ont été en partie soient « annulés, démantelés ou bloqués », a-t-elle encore soutenu.

« Comme l’indique ce rapport, et du reste ceux des 10 dernières années, pas un mot du Premier Accord sur les principes gouvernant la normalisation des relations n’a été effectivement mis en œuvre par Pristina », a-t-elle dénoncé.  Fustigeant également une « campagne de nettoyage ethnique silencieux », la Première Ministre a réclamé l’exécution de tous les accords passés et l’établissement de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, conformément à l’accord de 2015.

Mme Osmani-Sadriu, du Kosovo, a rejeté ces allégations, en commençant par désigner l’État serbe comme le commanditaire de « l’agression commise, le 24 septembre dernier, par des groupes terroristes et paramilitaires », preuve selon elle que la détermination de Belgrade à « déstabiliser la région et à reproduire les scénarios de Milošević et de Putin est à son apogée ».  Sans doute s’attendait-elle ce jour-là à réussir son projet d’annexion du nord du Kosovo, « à la manière de la Russie en Crimée », a-t-elle ironisé.  L’Albanie s’est dite de son côté surprise d’entendre l’analyse de la Première Ministre serbe, dont les éléments ne sont « pas reflétés » dans le rapport du Secrétaire général ni dans celui de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Mme Osmani-Sadriu a par ailleurs invité les membres du Conseil à se rendre au Kosovo pour y constater les progrès accomplis, au travers de l’établissement de cadres constitutionnels et juridiques « parmi les plus avancés au monde ».  Elle a souligné que la minorité serbe du Kosovo, qui représente environ 3 à 4% de la population totale, détient un droit de veto sur les amendements constitutionnels. Ce qui signifie donc que, même si plus de 90% des membres du Parlement votent en faveur d’un projet de loi, rien ne peut être adopté sans leur consentement, signe de l’engagement du Kosovo à créer une société inclusive et diversifiée, s’est enorgueillie Mme Osmani-Sadriu.

Reste que la réunion de haut niveau du 14 septembre à Bruxelles n’a produit aucun consensus sur le calendrier de mise en œuvre des accords antérieurs, a relevé la Représentante spéciale, en déplorant une nouvelle occasion manquée par les parties, qui ont en revanche échangé des allégations incendiaires au cours de la période à l’examen.  En outre, le boycott, par les Serbes du Kosovo, des élections locales du 23 avril dans le nord du Kosovo, les questions liées à la représentation politique, ainsi que les « terribles violences » du 29 mai, lorsque 93 membres de la Force de paix au Kosovo ont été blessés lors d’échauffourées dans le nord du Kosovo, représentent à ses yeux de graves dangers pour l’instauration d’une paix durable.

Plusieurs membres du Conseil de sécurité ont abondé en ce sens, la Suisse jugeant urgente la désescalade, tous les acteurs devant s’abstenir de promouvoir la violence, ou d’y recourir, ainsi qu’à des actions « unilatérales et provocatrices ». Un sentiment dont se sont fait l’écho l’Équateur, le Japon ou encore les Émirats arabes unis.

Tel n’a pas été l’avis de la Fédération de Russie, qui s’est élevée contre les visées des « prétendues autorités » de Pristina sur le nord du Kosovo, une « région » peuplée de Serbes.  S’il n’est pas mis fin à l’arbitraire, les conséquences pourraient être extrêmement graves, « voire conduire à la reprise d’un conflit armé », a prévenu la délégation.  Rejetant ces « fantaisies », l’Albanie a affirmé que « la balkanisation a été remplacée aujourd’hui par l’européanisation, parce que la région est de nouveau connectée à sa véritable identité, qui est européenne ».

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ (S/2023/735)

Déclarations

Mme CAROLINE ZIADEH, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a évoqué le grave incident sécuritaire survenu le 24 septembre près du village de Banjska/Banjskë, de la municipalité de Zvečan/Zveçan, dans le nord du Kosovo, au cours duquel un policier kosovar a été tué et deux autres blessés.  La police du Kosovo et des éléments lourdement armés ont ensuite échangé des coups de feu, faisant quatre morts.  La police kosovare a saisi un nombre important de véhicules, de matériels militaires et d’armes.  La MINUK s’est jointe à la communauté internationale pour condamner sans équivoque cet incident, tout en appelant à la retenue.  Cet incident, a-t-elle ajouté, est venu exacerber un environnement sécuritaire dégradé, caractérisé par une atmosphère de suspicion mutuelle et de perceptions contradictoires au sein de la population, en particulier dans le nord du Kosovo et parmi les communautés serbes du Kosovo. 

Les mois qui ont précédé cet incident ont été marqués par des tensions politiques et sécuritaires croissantes dans le nord du Kosovo, a noté la Représentante spéciale, parallèlement à l’absence de progrès tangibles dans le dialogue facilité par l’Union européenne.  La réunion de haut niveau tenue le 14 septembre à Bruxelles n’a produit aucun consensus sur le calendrier de mise en œuvre des accords antérieurs, a-t-elle ajouté.  Elle a déploré une nouvelle occasion manquée de s’engager en faveur d’un programme de mise en œuvre des engagements pris par les parties dans le cadre des accords conclus cette année à Bruxelles et Ohrid. Depuis, celles-ci ont échangé des allégations incendiaires, fragilisant encore plus les canaux de communication intercommunautaires au Kosovo et entre Belgrade et Pristina.  Plutôt que d’attiser les tensions, les dirigeants élus ont, selon la haute fonctionnaire, la responsabilité de répondre aux besoins sécuritaires et socioéconomiques de tous les segments de la société, indépendamment de leur origine ethnique, linguistique ou politique.  Le boycott, par les Serbes du Kosovo, des élections locales du 23 avril dans le nord du Kosovo, les questions liées à la représentation politique et les « terribles violences » du 29 mai représentent à ses yeux de graves dangers pour l’instauration d’une paix durable. 

Or, l’impasse politique actuelle ne peut être surmontée que par un compromis élaboré dans le cadre du dialogue entre Belgrade et Pristina, a relevé la Représentante spéciale. Pour y parvenir, elle a souhaité que les réunions dirigées par l’Union européenne et les États-Unis, qui se sont tenues à Pristina et à Belgrade le 21 octobre, permettent de mettre en œuvre les mesures de désescalade et les propositions formulées.  Les deux parties s’engagent à nouveau à mettre pleinement en œuvre tous les accords de dialogue antérieurs.  En conséquence, la mise en place de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo devrait commencer sans délai ni conditions préalables, en même temps que tous les autres accords essentiels.  À cet égard, elle a noté que les retards accusés dans la mise en œuvre des accords de dialogue ont conduit au report d’une conférence des donateurs de l’Union européenne.  Selon la haute fonctionnaire, les initiatives régionales de coopération et d’intégration doivent être saluées et priorisées.

Poursuivant, Mme Ziadeh a souligné la nécessité d’une communication claire avec le public sur les questions affectant leurs moyens de subsistance et les droits humains, en particulier s’agissant de l’expropriation des terres et la liberté de circulation des personnes et des biens, y compris à travers la ligne de démarcation administrative. « Le dialogue est la seule voie à suivre », a-t-elle conclu.

Mme ANA BRNABIĆ, Première Ministre de la Serbie, a expliqué qu’elle s’abstiendrait de recourir à un langage trop bureaucratique pour présenter ses vues de façon à la fois claire et directe.  Au cours des deux années écoulées, et plus particulièrement durant les 12 derniers mois, la situation est devenue si grave, a-t-elle avancé, qu’il devient nécessaire pour tous de la comprendre, non pas en tant que politiciens, mais en tant qu’êtres humains, pour susciter une lueur d’espoir pour ceux qui souffrent dans la province autonome du Kosovo-Metohija.  Mme Brnabić a signalé que l’Administration à Pristina avait trois principaux messages pour les Serbes, pour d’autres non-Albanais dans la province autonome et pour la communauté internationale.  Le premier, c’est que les Serbes qui sont partis après 1999, ou durant le « nettoyage ethnique, pogrom » de 2004, ne devraient pas revenir.  Dès lors, elle a jugé profondément troublant que la province autonome du Kosovo-Metohija soit un territoire avec le plus petit nombre de rapatriés au monde, soit moins de 2% des personnes déplacées.  Pour la Cheffe de gouvernement, ce « n’est pas un accident », puisque ceux qui retournent chez eux découvrent que leurs propriétés ont été illégalement saisies. Et s’ils s’avisent de recourir aux autorités, ils sont arrêtés et mis en prison.  Elle a cité les exemples du plusieurs personnes placées en détention au cours des derniers mois et accusées de crimes de guerre, qui sont pourtant entrées plusieurs fois dans le territoire et n’ont jamais été inquiétées jusqu’à ce qu’elles demandent à récupérer leurs propriétés et leurs terres.

Le second message « brutal » adressé aux Serbes, a poursuivi la Première Ministre, c’est que ceux qui sont restés doivent partir, ce qui s’est manifesté par des mois et des années d’atteintes systématiques aux droits les plus élémentaires des Serbes et d’autres non-Albanais, transformant leur vie en véritable cauchemar. 

Mme Brnabić a indiqué que le rapport du Secrétaire général (S/2023/735) montre clairement qu’il existe une violence politique, juridique, institutionnelle et physique à l’encontre des Serbes, en évoquant l’incident survenu lors d’une procession de Noël durant laquelle il a été attenté à la vie de Stefan Stojanović, un enfant âgé de 11 ans, et de son cousin, Miloš, âgé de 21 ans, par Azem Kurtaj, un membre des forces de sécurité du Kosovo, pourtant illégales en vertu de l’article 15 de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.  L’amnistie accordée à Kurtaj équivaut foncièrement à une invitation à d’autres individus à commettre de tels actes, s’est-elle emportée, en énumérant toute une série d’exactions en présence même de la KFOR, d’EULEX et de la Mission intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK).  La Première Ministre a précisé qu’au cours des deux ans et demi écoulés, on a dénombré 434 attaques à motivation ethnique contre les Serbes et leurs propriétés, soit une hausse de 50% par rapport à la période antérieure à l’Administration Kurti, et l’on ignore si des chefs d’accusation ont été émis à l’encontre de leurs auteurs.

Le troisième message pour les Serbes, a poursuivi Mme Brnabić, en précisant qu’il s’adressait aussi à la communauté internationale, c’est qu’il ne faut pas que les accords conclus soient mis en œuvre, et que ceux qui l’ont été en partie seront annulés, démantelés ou bloqués.  Comme l’indique ce rapport, et du reste ceux des 10 dernières années, pas un mot du Premier Accord sur les principes gouvernant la normalisation des relations n’a été effectivement mis en œuvre par Pristina, a-t-elle dénoncé.  Fustigeant également une « campagne de nettoyage ethnique silencieux », elle a réclamé l’exécution de tous les accords passés et l’établissement de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo conformément à l’accord de 2015; la sécurité des Serbes et de tous les habitants de la province autonome du Kosovo-Metohija; le plein respect de la résolution 1244 et la création d’un climat propice à la paix et la stabilité.  À cette fin, a déclaré la Première Ministre, il faut un « partenaire sincère/honnête » que la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR), en vertu de son mandat, assume provisoirement la pleine responsabilité de la sécurité dans le nord de la province autonome, et que de nouvelles élections municipales soient organisées, dans les plus brefs délais, dans le nord, dans le cadre des efforts de désescalade. 

Mme VJOSA OSMANI-SADRIU, du Kosovo, s’est adressée au Conseil en tant que « présidente » d’un pays qui a perdu environ 13 000 personnes en quelques mois de guerre, mais qui, une fois de plus, a choisi de se relever et de bâtir un avenir pour tous ses citoyens, « quelle que soit leur origine », et tendre la main de la coopération à son voisin, la Serbie.  Malheureusement, a-t-elle déploré, celle-ci est toujours dans le déni, n’a jamais demandé pardon, ni montré de repentir pour les crimes commis par le régime de Milošević, et redouble d’efforts pour ramener la région dans les années 90. 

Mais si aujourd’hui, Mme Osmani-Sadriu est ici, c’est pour dire que « nous ne laisserons pas cela se reproduire » et confirmer l’engagement du peuple kosovar à aller de l’avant.  L’occasion pour elle de dénoncer l’agression commise, le 24 septembre dernier, par des groupes terroristes et paramilitaires soutenus par la Serbie, qui a provoqué la mort d’un policier et blessé un autre.  Cela prouve à ses yeux que si l’engagement du Kosovo à protéger sa souveraineté, à promouvoir et faire progresser l’état de droit et à favoriser des relations de voisinage positives, reste inébranlable, la détermination de la Serbie à déstabiliser la région et à reproduire les scénarios de Milošević et de Putin est à son apogée.  Ce jour-là, la Serbie s’attendait à réussir son projet d’annexion du nord du Kosovo, à la manière de la Russie en Crimée, a-t-elle ironisé.  Elle a ensuite affirmé que les groupes terroristes et forces paramilitaires qui ont mené cette opération ont été financés, entraînés, armés par l’État serbe.  Pour preuve, a-t-elle étayé, les armes et véhicules blindés ont été introduits par des voies illégales et certaines armes introduites par des véhicules portant de faux sigles de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). 

Poursuivant, Mme Osmani-Sadriu a dévoilé l’élément le plus important qui étaye, à ses yeux, ses accusations, à savoir que « Radoicic, le chef du groupe terroriste qui a ouvertement admis être à l’origine de cet attentat », est l’un des plus proches collaborateurs et partenaires du Président serbe.  L’intervenante a voulu mettre une chose au clair: ce qui s’est passé le 24 septembre n’était pas seulement une attaque contre le Kosovo.  Il s’agissait d’un plan visant à déstabiliser l’ensemble des Balkans occidentaux, a-t-elle prévenu.  De fait, a-t-elle appuyé, la quantité et le type d’armes confisquées représentaient une menace importante pour la sécurité non seulement des citoyens du Kosovo, mais aussi du personnel international, dont les troupes de l’OTAN.  Elle a ensuite pointé du doigt les motivations profondes de Vučić, qui veut plus de territoire et plus d’instabilité.

Enfin, elle a invité les membres du Conseil à se rendre au Kosovo pour constater de visu les progrès accomplis, au travers notamment de l’établissement de cadres constitutionnels et juridiques parmi les plus avancés dans le monde et qui protègent résolument les droits des communautés.  Illustrant son propos, elle a souligné que la minorité ethnique serbe du Kosovo, qui représente environ 3 à 4% de la population totale, détient un droit de veto sur les amendements constitutionnels.  En d’autres termes, même si plus de 90% des membres du Parlement votent en faveur de la loi, rien ne peut être adopté sans leur consentement.  Tout cela témoigne de l’engagement du Kosovo à créer une société inclusive et diversifiée, où les droits de tous ses citoyens, y compris les minorités, sont protégés et respectés, a-t-elle soutenu.  Pour finir, elle a voulu assurer à « chaque Serbe vivant au Kosovo, que le Kosovo est sa maison autant que la mienne ».

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que la voie vers une relation normalisée et prospère entre le Kosovo et la Serbie se dessine en trois étapes: la désescalade, une solution politique et l’instauration de la confiance, notamment par le traitement du « passé ».  La désescalade est urgente, a embrayé le représentant qui a condamné les actes de violence et appelé la Serbie et le Kosovo à revenir au calme.  Tous les acteurs doivent s’abstenir de l’usage et de la promotion de la violence ainsi que d’actions unilatérales et provocatrices, a-t-il lancé.  Il faut mettre en œuvre les solutions politiques, a conseillé le délégué qui a appelé tous les acteurs à coopérer pleinement dans le cadre de l’enquête sur l’attaque du 24 septembre pour que ses auteurs soient traduits en justice.  La Suisse, a poursuivi le représentant, appelle les parties à s’investir pleinement dans le dialogue facilité par l’Union européenne et à mettre en œuvre leurs engagements pris dans le cadre de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie. 

Le délégué a fait valoir que son pays offre un cadre informel dans lequel des représentants de haut niveau des partis politiques des deux pays peuvent discuter des mesures concrètes en vue d’une normalisation.  La participation des femmes et l’intégration de la perspective de genre doivent être garanties tout au long du processus, a-t-il rappelé en soulignant aussi que l’instauration d’un climat de confiance, tant entre les parties au dialogue qu’entre les communautés au Kosovo, est cruciale.  Un pas important sur cette voie est « le traitement du passé », qui doit bénéficier à toutes les communautés, y compris les plus marginalisées telles que les Roms, a encouragé le représentant. Afin de parvenir à une stabilité durable, il faut répondre aux préoccupations de tous les habitants et habitantes du Kosovo, a-t-il encore dit en réitérant le soutien de son pays au Kosovo dans ses efforts pour renforcer l’état de droit et le respect des droits humains. 

M. GENG SHUANG (Chine) a encouragé les parties concernées à trouver une solution mutuellement acceptable sur le dossier du Kosovo.  La souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Serbie doivent être respectées, a plaidé le représentant rejetant toute pratique du « deux poids, deux mesures » sur ce dossier crucial.  Préoccupé par la situation dans le nord du Kosovo, le délégué a dénoncé les mesures unilatérales prises par les autorités du Kosovo.  Il a demandé à celles-ci de se remettre sur le droit chemin du dialogue et des consultations, de prendre des mesures positives pour réduire les tensions ethniques et de respecter le droit légitime de toutes les communautés. 

Le représentant a souhaité que les rencontres entre la Serbie et le Kosovo, initiées par l’Union européenne (UE), depuis le début de l’année, aboutissent à des solutions politiques dès que possible.  Il a rappelé que la médiation de l’UE a permis la création de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo.  Les autorités du Kosovo devraient selon lui prendre des mesures concrètes pour lever des obstacles au dialogue direct entre les deux parties.  S’agissant du rôle de la MINUK, le représentant a exhorté les autorités du Kosovo à garantir la sécurité du personnel de la Mission et à faciliter son travail. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a exprimé sa préoccupation face à la multiplication des incidents sécuritaires au cours des six derniers mois au Kosovo, lesquels ont affecté le processus de dialogue.  Il a condamné les incidents de mai dernier au cours desquels des civils et des membres de la force de l’OTAN ont été grièvement blessés, ainsi que ceux du 24 septembre qui ont coûté la vie à un policier.  Dans ce contexte, le représentant a appelé les parties à faire preuve de la plus grande responsabilité dans la conduite de leurs actions et à s’abstenir de toute action ou rhétorique susceptible d’exacerber les tensions.  Il a jugé regrettable que les parties ne soient pas parvenues à un consensus sur les mesures d’application de l’accord et des mesures de désescalade dans le nord du Kosovo, en dépit de la réunion de haut niveau de septembre dernier facilitée par l’Union européenne.  Pour y parvenir, les parties doivent, selon lui, maintenir un processus transparent et inclusif, tout en s’engageant dans le dialogue facilité par l’Union européenne. Le délégué a également jugé prioritaire de mettre en œuvre la Déclaration sur les personnes disparues afin d’appuyer le processus de réconciliation et de renforcer les mesures de confiance.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a réaffirmé l’attachement de son pays au maintien de la stabilité dans les Balkans occidentaux avant de déplorer, pour les condamner, les violences du 24 septembre dans le nord du Kosovo, qui se sont soldées par la mort d’un policier.  Il a exigé que les auteurs rendent des comptes, et que les individus ayant fui vers d’autres pays soient recherchés, retrouvés et extradés. 

Le représentant américain a mis en garde les deux parties face à toute mesure négative et les a exhortées à reprendre le dialogue piloté par l’UE afin de prendre des mesures concrètes dans le cadre de tous les engagements pris.  La présence de la KFOR dans le nord du Kosovo doit être maintenue et pérennisée, a-t-il recommandé avant d’encourager le Kosovo à collaborer avec elle à l’avenir.  Les événements récents ont prouvé que l’ONU peut jouer son rôle mais le Chapitre VII ne l’oblige pas à le faire, a-t-il encore souligné, ajoutant que la MINUK s’est déjà acquittée de son mandat et n’a plus de rôle à jouer dans la sécurité au Kosovo.  Il a en conséquence demandé au Conseil de sécurité de mettre fin au déploiement de la MINUK. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a exhorté les deux parties à concentrer tous leurs efforts sur la désescalade des tensions et à s’abstenir de toute action unilatérale ou discours de division qui pourrait saper les efforts diplomatiques déployés au cours des derniers mois.  Le dialogue est essentiel pour résoudre les questions en suspens, et la collaboration est le seul moyen de garantir la paix et la stabilité dans la région, a-t-elle insisté.  À cet égard, la représentante a encouragé la participation pleine et inconditionnelle de tous les acteurs aux élections locales dans les municipalités du nord du Kosovo.

Elle a saisi cette occasion pour réitérer le plein soutien de son pays aux aspirations d’adhésion de la Serbie et du Kosovo à l’UE.  À cette fin, la déléguée a dit avoir pris « bonne note » des progrès réalisés jusqu’à présent par le Kosovo sur la voie des réformes, l’invitant à s’assurer de la pleine participation des diverses parties prenantes de la société civile, notamment les communautés vulnérables et marginalisées. Malte reconnaît également l’importance du rôle de la MINUK dans la promotion de la sécurité, de la stabilité ainsi que de la préservation et de la promotion des droits humains.

Pour finir, la représentante a exhorté à la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, faisant valoir que cela favorisera non seulement la paix dans la région, mais également la prospérité économique et sociale dans les Balkans occidentaux.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a constaté que « la situation politique et sécuritaire se dégrade au nord du Kosovo », citant les événements du 24 septembre dernier comme la dernière illustration de cette situation. La représentante a condamné fermement l’attaque visant la police du Kosovo et souhaité que toute la lumière soit faite sur les circonstances de cette attaque pour que les responsables soient traduits en justice.  Elle a appelé les parties à faire preuve de retenue et à entreprendre les efforts nécessaires pour s’engager dans la voie de l’apaisement.  Cette montée des tensions ne peut être dissociée de la dimension politique du dossier, a analysé la représentante, déplorant « la faiblesse des avancées dans la mise en œuvre des accords de Bruxelles-Ohrid ». Selon elle, le contexte actuel plaide pour que la Serbie comme le Kosovo reviennent rapidement et sans conditions au dialogue facilité par l’Union européenne (UE) pour la normalisation de leurs relations.

La représentante a lancé un appel aux parties pour qu’elles s’engagent sans réserve, dans un esprit de responsabilité et de compromis, dans la mise en œuvre de l’ensemble des engagements prévus au titre des accords conclus.  Cela inclut la mise en place d’une Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, a-t-elle précisé.  L’organisation rapide de nouvelles élections inclusives dans le nord du Kosovo est également primordiale, selon la déléguée pour qui ces différents processus sont des éléments clefs pour le renforcement de la perspective européenne des deux pays.  La France reste pleinement attachée à une intégration dès que possible des Balkans occidentaux au sein de l’UE, a-t-elle déclaré, avant de saluer les actions de la MINUK à destination des femmes et des jeunes, notamment, ainsi que son travail de sensibilisation contre les mariages d’enfants ou encore l’appui au retour des personnes réfugiées ou déplacées.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a exprimé ses vives préoccupations face aux tensions croissantes dans le nord du Kosovo, appelant les deux parties à faire preuve de la plus grande retenue et à s’abstenir de prendre des mesures unilatérales qui pourraient conduire à une nouvelle escalade.  Il a aussi estimé que la situation sécuritaire dans le nord du Kosovo doit être stabilisée et renforcée pour éviter une nouvelle crise sur le terrain. Pour cette raison, il a salué la récente décision de renforcer la KFOR, qui continue de jouer un rôle important pour la stabilité et la sécurité au Kosovo.  Il sera utile de garantir un environnement propice au retour des Serbes dans la police et les institutions du Kosovo, a-t-il ajouté.

Le représentant a ensuite exhorté les deux parties à réaffirmer leur engagement dans le dialogue Belgrade-Pristina facilité par l’Union européenne, qui est essentiel à la paix et à la stabilité dans les Balkans occidentaux.  Elles doivent mettre pleinement en œuvre, rapidement et de bonne foi, leurs obligations respectives au titre des accords visant à normaliser les relations entre la Serbie et le Kosovo.  Le représentant a par ailleurs dit reconnaître que la situation au Kosovo est très différente de celle qui prévalait lors de la création de la MINUK en 1999.  Dans ce contexte, il a estimé que le rôle de la Mission devrait être revu.

M. MOHAMMAD YOUSUF ABDULLA MOHAMMAD BASTAKI (Émirats arabes unis) a déploré la détérioration de la situation sécuritaire au Kosovo au cours des six dernier mois, après les espoirs suscités par la conclusion des accords d’Ohrid et de Bruxelles, facilités par l’Union européenne, et l’adoption de la déclaration commune sur les personnes portées disparues.  Après une période électorale difficile, des violences ont éclaté en mai, a-t-il rappelé, au cours desquelles des dizaines de soldats de la paix de la KFOR ont été blessés.  Le représentant a fait état d’un « sentiment collectif de peur et d’incertitude » depuis les événements du 24 septembre dernier, au cours desquels un policier a été tué, ce qui risque de ramener la région « à une période plus sombre de son histoire ».  Il a salué les mesures prises par les dirigeants du Kosovo et de la Serbie pour désamorcer la situation, tout en appelant à la mise en œuvre des accords conclus sous les auspices du dialogue facilité par l’Union européenne.  À ses yeux, il est plus important que jamais que les parties se concentrent sur un dialogue constructif et évitent toute rhétorique incendiaire qui ne ferait qu’exacerber les tensions.  À cet égard, il a encouragé la MINUK à poursuivre ses efforts visant à instaurer la confiance entre les communautés du Kosovo, en coordination avec le Gouvernement et les dirigeants communautaires.

Mme ANNETTE ANDRÉE ONANGA (Gabon) a déclaré que les suites de la démission massive de milliers de Serbes du Kosovo des institutions locales, ainsi que du boycott des élections municipales de décembre 2022 doivent trouver une solution durable par le droit, afin de restaurer la confiance et promouvoir le vivre ensemble.  Elle a estimé cruciale la création du statut pour l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, appelant les autorités de Pristina à mettre en œuvre les accords de Bruxelles, ce qui, selon elle, constituera un jalon décisif dans la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina.  La représentante a regretté que les parties n’aient pu s’accorder sur ce statut, et que les tentatives visant à renouer le dialogue soient restées stériles.

Elle a donc exhorté l’Union européenne et d’autres acteurs régionaux bilatéraux à poursuivre leurs actions en vue de surmonter les incompréhensions et blocages qui subsistent, appelant les parties à prendre en considération le plan en neuf points de l’OSCE pour sortir de l’impasse.  La représentante a salué d’autre part la création du « centre Barabar » avec l’appui de la MINUK et de nombreuses actions multiformes que cette dernière mène et visant au renforcement des droits de communautés non majoritaires, des femmes et des jeunes.  Dans cette perspective, la représentante a demandé aux parties de réprimer les discours de haine, la stigmatisation et la violence et de s’abstenir de toute action unilatérale et de fait accompli qui nuisent aux efforts politiques.  Cela est également vrai des attaques visant les symboles religieux, a-t-elle ajouté, en appelant également à des solutions pour les milliers de personnes des communautés non majoritaires déplacées à l’intérieur ou réfugiées à l’extérieur du Kosovo qui souhaitent revenir chez elles.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana), compte tenu des conditions politiques prévalant dans la région, a soutenu le rôle vital de la MINUK dans la promotion de la sécurité, de la stabilité et du respect des droits humains.  Ce faisant, la représentante a salué les initiatives menées par la MINUK en faveur du renforcement de la confiance, de la cohésion sociale et du renforcement des contacts intercommunautaires.  Dans le même temps, elle s’est dite préoccupée par la violation des bureaux de la MINUK et réaffirmé l’inviolabilité de ses locaux et de ses biens, invitant à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir le bon déroulement des opérations de la Mission.

Sur le plan politique, la déléguée s’est dite alarmée par les tensions persistantes qui entravent la poursuite de la mise en œuvre de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, ainsi que de son annexe.  Elle s’est dite convaincue que cet accord offre une nouvelle opportunité de parvenir à une « normalisation globale des relations entre la Serbie et la région du Kosovo », nécessaire à la paix, à la sécurité et à la prospérité à long terme dans la région des Balkans.

M. PEDRO COMMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a encouragé les efforts diplomatiques de la MINUK pour promouvoir la paix et la sécurité, la stabilité et les droits humains au Kosovo.  Il a demandé aux partenaires nationaux, régionaux et internationaux de tout faire pour préserver les progrès accomplis depuis l’adoption de la résolution 1244 (1999). Le représentant a dit être préoccupé par les tensions entre Belgrade et Pristina qui contribuent à la détérioration de la situation sécuritaire.  Ces incidents mettent en péril la mise en œuvre de l’accord de Bruxelles sur la normalisation et constituent une menace à la paix, la stabilité et la sécurité.  Le représentant a appelé les parties serbe et kosovare à jeter les bases d’un véritable dialogue et de la réconciliation entre les communautés.  Les parties, a-t-il insisté, doivent s’abstenir de tout acte susceptible de susciter la violence et d’autres tensions.  Les incidents et les affrontements armés doivent faire l’objet d’enquêtes impartiales et transparentes et leurs responsables doivent répondre de leurs actes.  L’implication des femmes, des jeunes et des acteurs de la société civile est essentielle pour promouvoir la paix, non seulement au Kosovo, mais aussi dans la région, a déclaré le représentant en conclusion.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dénoncé le désir des soi-disant autorités de Pristina d’établir un contrôle total sur le nord du Kosovo, une région peuplée de Serbes.  Il a dénoncé la reconnaissance par les États-Unis et l’Union européenne des prétendues élections municipales dûment boycottées par la population serbe et qui n’ont eu qu’un taux de participation de 3,47%.  Les derniers événements éclairent Pristina sous un jour peu glorieux et pour détourner l’attention, on rejette la responsabilité sur Belgrade et on la calomnie. S’il n’est pas mis fin à l’arbitraire, les conséquences pourraient être extrêmement graves, voire conduire à la reprise d’un conflit armé.  Le représentant a jugé « significatif » que Pristina déclare une continuité entre la police et l’Armée de libération du Kosovo, « une organisation terroriste » dont les dirigeants et parmi eux, Hashim Thaçi, sont jugés actuellement pour crimes de guerre à La Haye.  Nous espérons, a-t-il dit, que l’on ne répétera pas les erreurs du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et que tous les responsables recevront la peine qu’ils méritent.

Reprochant aux pays occidentaux de détruire les principes du droit international et de faire passer les projets unilatéraux pour un compromis réussi, le représentant a estimé que le fameux accord sur la voie de la normalisation néglige les intérêts fondamentaux de la Serbie et exige la reconnaissance de la souveraineté du Kosovo. Cet accord ignore la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité de même que les accords de Bruxelles.  Or, les premiers pas vers la désescalade devraient être le retrait des forces spéciales albanaises du Kosovo du nord de la région et le démantèlement de leurs bases et points de contrôle.  Il faut également revenir au mandat de la KFOR, clairement défini par la résolution 1244 (1999), car il n’y a pas d’alternative aux paramètres juridiques internationaux fixés par ce document « fondamental », a conclu le représentant. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a annoncé une « bonne nouvelle », à savoir la liberté de mouvement dans l’espace Schengen accordée aux citoyens du Kosovo, une mesure qui n’avait selon lui que trop tardé.  Il a rappelé la dissolution « brutale » de l’ex-Yougoslavie qui a précédé la séparation du Kosovo de la Serbie, laquelle s’est accompagnée de « crimes contre l’humanité et de crimes de guerre » dont nous découvrons encore aujourd’hui les « charniers ».  Le représentant s’est dit surpris d’entendre l’analyse de la Première Ministre serbe concernant la situation au Kosovo, dont les éléments ne sont pas reflétés dans le rapport du Secrétaire général ni dans celui de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Malgré les problèmes, on ne peut nier l’existence de lois et d’institutions démocratiques au Kosovo, a-t-il noté.  Il a rejeté les « fantaisies » évoquées par la Fédération de Russie en parlant de la « Grande Albanie ».  « La balkanisation a été remplacée aujourd’hui par l’européanisation, parce que la région est de nouveau connectée à sa véritable identité, qui est une identité européenne », a-t-il insisté.  Lors du dixième sommet entre l’UE et les Balkans, qui s’est tenu la semaine dernière à Tirana, les participants ont appelé à faire fond sur la dynamique actuelle pour tracer une voie claire vers un avenir commun, a-t-il ajouté.

Le Parlement européen a qualifié l’incident sécuritaire du 24 septembre « d’attentat terroriste » préparé en Serbie, a rappelé le représentant.  Selon lui, cet incident a opposé des terroristes aux forces de l’ordre d’un pays.  Il a donc appelé à l’ouverture d’une enquête afin d’éviter la « pente glissante de l’impunité ».  Le Kosovo et la Serbie « ne vivront plus jamais sous le même toit, mais ils seront toujours voisins et, nous l’espérons, de bons voisins », a ajouté le délégué. En adoptant les accords conclus cette année à Bruxelles et Ohrid, le Kosovo et la Serbie se sont entendus pour normaliser leurs relations, a-t-il rappelé, notamment en créant un comité de suivi conjoint.  Le représentant a également salué l’adoption de la Déclaration sur les personnes disparues.  « Ceux qui pensent pouvoir résoudre les problèmes par des manipulations, des menaces et des jeux de guerre doivent être sanctionnés », a-t-il conclu.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni), soulignant que son pays est le plus ancien appui du Kosovo en tant qu’État indépendant et souverain, a salué les progrès constants du Gouvernement dans des dossiers comme l’état de droit, la justice transitionnelle, la lutte contre la criminalité organisée et la corruption. Le Royaume-Uni a pleinement appuyé la déclaration sur les personnes disparues, endossée par le Kosovo et la Serbie, a dit le représentant en précisant qu’il s’agit d’une question prioritaire qu’il ne faut pas politiser.  Il s’est également fait l’écho de l’appel de la MINUK au Gouvernement du Kosovo pour l’exécution de la décision de la Cour constitutionnelle du Kosovo, en 2016, relative la propriété du monastère de Dečani: cela adressera un message positif aux communautés minoritaires et prouvera l’engagement du Kosovo en faveur d’un avenir inclusif et pluriethnique. 

Le représentant a exprimé par ailleurs sa profonde inquiétude face aux défis sécuritaires immédiats dans le nord du Kosovo.  Il a catégoriquement condamné les attaques ayant visé le personnel international, en mai, et celles contre la police du Kosovo, le 24 septembre.  Il a jugé indispensable que leurs auteurs comparaissent devant la justice, demandant à la Serbie de pleinement coopérer avec les enquêtes en cours et de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier à la criminalité organisée et à la contrebande d’armes transfrontières.  Le Kosovo doit être en mesure de faire régner l’état de droit sur l’ensemble de son territoire, en étroite coordination avec l’EULEX et la KFOR, a estimé le représentant.  Il a conclu en exprimant sa fierté d’avoir 600 soldats britanniques au Kosovo en réponse à une demande de l’OTAN, afin d’aider à remplir le mandat de la KFOR, qui consiste à maintenir un climat sûr et sécurisé au Kosovo.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a dit avoir suivi avec inquiétude les événements de ces dernières semaines qui menacent les importantes avancées réalisées dans le cadre du dialogue négocié par l’Union européenne.  Il a exhorté les parties à prendre toutes les mesures possibles pour éviter de nouveaux affrontements, à exercer leur influence et à inciter à la retenue.  Le représentant a vivement encouragé les dirigeants à démontrer, par la parole et les actes, leur volonté de maintenir la paix.  Rétablir la confiance entre les deux parties, a-t-il professé, passera nécessairement par une solution à la crise de représentation dans le nord du Kosovo. Il a dit voir derrière le boycott des institutions locales et des élections municipales d’avril, des inquiétudes « raisonnables » qui méritent considération, compréhension et respect.

Le représentant a réitéré son appel à la création rapide de l’Association/Communauté des municipalités serbes du Kosovo, sans condition préalable ni retard supplémentaire, conformément aux engagements pris à Bruxelles.  Il a, en outre, encouragé les parties à maintenir leur engagement de respecter les sites d’importance historique, culturelle ou religieuse et de préserver la liberté de mouvement.  Enfin, le représentant a félicité la MINUK pour son rôle dans la prévention des conflits et la lutte contre la désinformation et les discours de haine.

La Première Ministre de la Serbie , Mme BRNABIĆ, s’est dite attachée au dialogue contrairement au Kosovo qui refuse de mettre en œuvre les accords de Bruxelles et de créer l’Association/Communauté des municipalités serbes et ce, depuis 10 ans.  Les Serbes, a-t-elle dénoncé, n’ont le droit de vote que sur le papier.  S’ils avaient pu voter, la création des forces de sécurité du Kosovo n’aurait jamais été envisagée.  La Première Ministre a aussi dénoncé le fait que les églises orthodoxes, y compris le monastère de Visoki Dečani, soient l’unique site religieux au monde sous protection militaire.  Rappelant que 11% des Serbes ont quitté le Kosovo, elle a souligné qu’ils n’auraient pas pris cette décision si le Kosovo avait été cet exemple brillant de démocratie et d’état de droit.  Le Kosovo, a-t-elle dit, est le champion du monde des réfugiés sans espoir de retour. Jusqu’à ce jour, a-t-elle rappelé, l’ONU reconnaît la République de Serbie dans son intégrité territoriale, avec la province autonome du Kosovo-Metohija.  En revanche, le Kosovo-Metohija n’est pas reconnu comme pays. 

Mme OSMANI-SADRIU, du Kosovo, a remercié tous les pays qui ont participé au débat et salué leur travail sur le terrain, ajoutant que la démocratie au Kosovo demeure un processus en cours.  Comme nous ne craignons pas la justice, nous avons créé une chambre spécialisée pour éviter l’amalgame entre les génocidaires et les victimes.  C’est au nom des souffrances endurées par notre peuple que nous ne voulons pas la guerre, a-t-elle insisté, fustigeant la propagande de la Fédération de Russie et de la Première Ministre de la Serbie.  Nous ne renoncerons jamais au dialogue, car nous sommes mus par un désir de paix.  C’est notre identité et notre ADN, car nous sommes une nation qui a payé le prix de sa liberté.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Haïti: la Représentante spéciale du Secrétaire général mise sur le soutien de la nouvelle mission multinationale aux efforts de la Police nationale

9449e séance – matin
CS/15460

Haïti: la Représentante spéciale du Secrétaire général mise sur le soutien de la nouvelle mission multinationale aux efforts de la Police nationale

Trois semaines après l’adoption de la résolution 2699 (2023) du Conseil de sécurité autorisant pour un an le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), la Représentante spéciale du Secrétaire général, Mme María Isabel Salvador, a alerté le Conseil sur la situation sécuritaire et humanitaire qui continue de se détériorer, sur fond de lenteur dans les processus électoraux.  Elle a misé sur le déploiement à venir de la nouvelle mission dont le mandat est de soutenir l’action menée par la Police nationale d’Haïti pour rétablir la sécurité dans le pays et créer les conditions propices à la tenue d’élections libres et régulières.  Certains membres du Conseil ont rappelé à cette occasion les règles qui restent à définir pour son bon fonctionnement.

Mme Salvador, qui est aussi Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a présenté le rapport du Secrétaire général dont était saisi le Conseil, en citant des chiffres criants: entre le 1er juillet et le 30 septembre 2023, 1 239 homicides ont été signalés par la Police nationale d’Haïti (PNH), contre 577 au cours de la même période en 2022.  De juillet à septembre, 701 personnes ont été victimes d’enlèvements, soit 244% de plus qu’en 2022.  De plus, pas plus tard que mercredi dernier, le Secrétaire général du Haut Conseil de la transition a lui-même été victime, en plein jour, d’un enlèvement par des membres d’un gang déguisés en policiers.

Par ailleurs, entre le 24 avril et le 30 septembre, le BINUH a enregistré le lynchage d’au moins 395 membres de gangs présumés par les membres du groupe d’autodéfense dénommé « Bwa Kale », qui a intensifié ses activités dans la capitale.  Il a été précisé également que l’insécurité s’étend en dehors de la zone métropolitaine de Port-au-Prince à d’autres départements comme l’Artibonite et le département Central.

À cela s’ajoute le trafic d’armes, qui profite des capacités limitées du secteur de la sécurité haïtienne en termes d’équipement et d’infrastructure de surveillance des frontières terrestre et maritime.  Les mouvements d’armes se poursuivent, vers et à l’intérieur d’Haïti, a précisé Mme Ghada Fathi Waly, Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), qui a identifié quatre routes maritimes et terrestres, principalement venant des États-Unis.  Elle a recommandé la mise en place d’un cadre réglementaire solide pour les armes à feu, afin de faire face à ce trafic qui ne fait qu’augmenter le nombre de fusillades et d’enlèvements, de même que le nombre de personnes déplacées, fuyant la violence, qui sont près de 200 000.

Sur le champ politique, les efforts vers la tenue d’élections ne se déroulent pas au rythme souhaité, en raison des divergences significatives persistantes entre acteurs politiques et en dépit de la reprise des consultations interhaïtiennes, sous les auspices du Groupe de personnalités éminentes de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a expliqué Mme Salvador.

Quant à la situation humanitaire, la moitié de la population haïtienne, dont près de trois millions d’enfants, a besoin d’une assistance.  En outre, la moitié de ces personnes ayant besoin d’aide humanitaire n’y a même pas accès, en raison de l’insécurité et de l’insuffisance des ressources financières qui entravent la fourniture des services de base.  Parmi ces personnes aussi, deux millions, dont 1,6 million de femmes et d’enfants, vivent dans des zones sous l’emprise des groupes armés.

Cette situation a entraîné une augmentation inédite du nombre d’enfants souffrant de malnutrition chronique, laquelle coïncide avec une flambée de choléra, s’est alarmée la Directrice exécutive de l’UNICEF, Mme Catherine Russell.  Le représentant de la Jamaïque, au nom de la CARICOM, a déploré dans ce contexte que le Plan de réponse humanitaire 2023 pour Haïti (720 millions de dollars) ne soit à ce jour financé qu’à hauteur de 28%.

Dans cette situation, la Représentante spéciale et les autres intervenants de la séance ont appelé de leurs vœux le rétablissement de la sécurité en Haïti.  Les parties haïtiennes attendent d’ailleurs avec impatience le déploiement de la MMAS, qui aidera la PNH à rétablir son contrôle, une condition préalable à la tenue d’élections crédibles et inclusives.

Il est temps que le Conseil de sécurité « passe de la parole aux actes », a réclamé pour sa part la Présidente du Haut Conseil de la transition, Mme Mirlande Manigat, assurant appuyer toute initiative de l’ONU susceptible de permettre à la population haïtienne de reprendre une vie normale.  Elle a précisé au passage que « les interventions des troupes étrangères d’appui à la PNH ne peuvent être discriminatoires », mais doivent adresser des « signaux clairs » que la protection des civils sera assurée.

Les membres du Conseil ont eux aussi misé sur le déploiement de la MMAS et le représentant d’Haïti a exprimé sa « gratitude et reconnaissance » au Gouvernement kenyan pour sa « solidarité transatlantique et panafricaine » envers Haïti, étant donné que le Kenya envisage de la diriger et de mettre à disposition 1 000 de ses policiers.  Avant le déploiement, le Japon a souhaité que les questions portant sur le commandement et la structure opérationnelle soient résolues.  Le Brésil a suggéré d’adopter dès que possible les règles d’engagement de la Mission. La Fédération de Russie attend en particulier que la MMAS présente au Conseil ses règles de recours à la force et sa stratégie de sortie.  L’Albanie a pour sa part voulu avoir des garanties quant au respect des normes les plus élevées de transparence et de discipline afin notamment de gagner la confiance des communautés locales.

Une dynamique et une coopération doivent s’installer entre la MMAS et le BINUH, a-t-on également entendu chez les délégations, en particulier les États-Unis qui se sont dits prêts à discuter de cette question lors du prochain renouvellement de mandat du Bureau.

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI (S/2023/768)

Déclarations

Mme MARÍA ISABEL SALVADOR, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a commencé par souligner l’importance de l’adoption de la résolution 2699 (2023) autorisant les États Membres à établir et déployer la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), mission qui sera cruciale pour aider la Police nationale d’Haïti (PNH) à rétablir les conditions de sécurité propices aux élections.  De la même manière, elle s’est félicitée de l’adoption de la résolution 2700 (2023) qui reconduit pour un an le régime de sanctions appliqué à ceux qui soutiennent la violence en Haïti.  Elle a, dans ce contexte, jugé nécessaire, que le Comité des sanctions reconsidère rapidement la liste des individus et entités désignés conformément à la résolution 2653 (2023) en tenant compte des rapports soumis par les Groupe d’experts.  « C’est ce qu’attendent les Haïtiens. » 

La Représentante spéciale a ensuite expliqué que, sur le terrain, la situation sécuritaire continue de se détériorer.  La violence croissante des gangs plonge la vie des habitants d’Haïti dans le désarroi, s’est-elle désolée, en notant aussi que les crimes majeurs continuent fortement d’augmenter, atteignant de nouveaux records.  Mercredi dernier par exemple, le Secrétaire général du Haut Conseil de transition a été enlevé en plein jour par des membres d’un gang déguisés en policiers.  Les meurtres et la violence sexuelle, y compris le viol collectif et les mutilations, continuent en outre d’être utilisés par les gangs quotidiennement. Et rien qu’entre le 24 avril et le 30 septembre, le BINUH a par ailleurs enregistré le lynchage d’au moins 395 membres de gangs présumés par le mouvement d’autodéfense dénommé « Bwa Kale », a-t-elle encore illustré.

La Représentante spéciale a ensuite indiqué que, sur le champ politique, elle avait continué de s’engager avec un large éventail de parties prenantes, les encourageant à s’impliquer totalement dans le dialogue, dans le but d’organiser des élections pour rétablir les institutions démocratiques et l’état de droit.  Sous les auspices du Groupe de personnalités éminentes de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), des consultations interhaïtiennes ont repris, même si, néanmoins, des divergences significatives persistent. « Je suis inquiète de voir que les efforts vers la tenue d’élections ne se déroulent pas au rythme souhaité. »  Mme Salvador a appelé les acteurs à engager des négociations constructives et significatives pour surmonter l’impasse politique actuelle et à aller vers la tenue d’élections inclusives, crédibles et participatives, dès que les conditions de sécurité le permettent.

Reprenant les mots du Secrétaire général, sa Représentante spéciale a ajouté qu’il ne peut y avoir de sécurité durable sans un rétablissement des institutions démocratiques. Et il est impossible de parvenir à des solutions politiques pérennes et pleinement représentatives sans une amélioration drastique de la situation sécuritaire, a-t-elle dit.  Dans cette optique, et alors que les parties haïtiennes attendent avec impatience le déploiement de la MMAS, elle a jugé que le rétablissement du contrôle par la PNH est une condition préalable pour la tenue d’élections crédibles et inclusives.

La Représentante spéciale a en outre déclaré que les efforts de la PNH, avec le soutien de la MMAS, déclencheront un autre besoin, celui de répondre aux exigences de justice.  Or, les établissements de justice et de services correctionnels d’Haïti continuent de faire face à des défis importants, bien que certains progrès aient été réalisés.  Dans ce contexte, elle a demandé que des ressources soient fixées pour permettre à l’ONU de gérer des programmes et des projets de soutien à la MMAS, à cet égard. Elle a cité notamment les fonds du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Concluant, elle a déclaré que « les élections sont le seul chemin et le seul impératif » pour restaurer les institutions démocratiques en Haïti.  La démocratie et l’état de droit constituent la seule base à partir de laquelle Haïti peut progresser vers le développement et la croissance durables, a-t-elle assuré.

Mme CATHERINE RUSSELL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), qui intervenait par visioconférence, a dit qu’elle était « championne de la défense humanitaire » du Comité interinstitutions en Haïti.  Elle a souligné que la moitié de la population nécessite une assistance humanitaire, dont près de trois millions d’enfants, mais que la moitié de ceux qui ont besoin d’assistance humanitaire n’y a pas accès en raison de l’insécurité et de l’insuffisance des ressources financières entravant la fourniture des services de base, qui sont véritablement « absents ».  Elle a ensuite rapporté le chiffre de deux millions de personnes, dont 1,6 million de femmes et d’enfants, qui vivent dans des zones sous l’emprise des groupes armés.  Témoignant de la violence et de la peur dont souffre la population en raison du contrôle exercé sur le terrain par les bandes armées, elle a précisé que celles-ci mutilent des familles entières.  Les communautés sont terrorisées; les femmes et filles sont prises pour cible dans les cas de violence et d’exploitation sexuelles.  L’année dernière, cinq hommes d’un groupe armé ont enlevé une fille que Mme Russell a dit avoir rencontrée.  Aujourd’hui, cette jeune fille est enceinte de 8 mois après un viol collectif.

D’autre part, les enlèvements contre rançon ont aussi augmenté, a poursuivi la Directrice exécutive en expliquant que les travailleurs qualifiés sont forcés de fuir le pays en raison de la violence et d’un accès restreint aux services essentiels. La situation a entraîné une augmentation inédite du nombre d’enfants souffrant de malnutrition chronique, laquelle coïncide avec une flambée de choléra.  Les enfants risquent de décéder du choléra en raison du manque de soins, a prévenu la responsable de l’UNICEF tout en saluant les organisations de l’ONU qui, en dépit des risques, fournissent des services vitaux. L’UNICEF et ses partenaires ont ainsi pu libérer plusieurs enfants, s’est-elle enorgueillie. Mme Russell a tout de même mis en garde que seulement le quart des 727 millions de dollars nécessaires a été reçu, ce qui est insuffisant, surtout pour les activités de résilience à long terme.  Elle a encouragé les membres du Conseil à lancer des appels aux donateurs.

La Directrice exécutive de l’UNICEF a également dégagé quelques pistes pour la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti, récemment créée par la résolution 2699 (2023).  Ainsi, celle-ci pourrait faciliter les activités humanitaires en recourant aux « moyens les moins violents et proportionnés » aux fins d’atteindre les objectifs légitimes conformément à la loi.  Par ailleurs, le personnel de police devrait prendre les mesures nécessaires pour enquêter et faire rendre des comptes dans les cas de violences sexuelles.  Il faudrait en outre que la Mission facilite les opérations humanitaires tout en demeurant une opération séparée de l’humanitaire.  Elle a conclu en se disant impressionnée par le courage et le dévouement du peuple haïtien compte tenu de la situation qu’il traverse.

Mme GHADA FATHI WALY, Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a recommandé la mise en place d’un cadre réglementaire solide pour les armes à feu pour que, par des mesures impératives, les autorités haïtiennes affirment leur contrôle et rétablissent la normalité. La Directrice exécutive a invité les États Membres à prendre des mesures pour atteindre ces objectifs et fournir un soutien approprié à Haïti, parallèlement au déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), récemment autorisée par le Conseil.

Mme Waly a indiqué que le dernier rapport de l’ONUDC, présenté au Conseil le 17 octobre, donne des informations sur les itinéraires et les mouvements d’armes vers et à l’intérieur d’Haïti, identifiant quatre routes maritimes et terrestres principales, qui arrivent principalement des États-Unis.  Elle a expliqué que les trafiquants profitent des capacités limitées du secteur de la sécurité haïtienne en termes d’équipement et d’infrastructure de contrôle et de surveillance des frontières et de la mer. En outre, la Police nationale d’Haïti opère dans le cadre d’un état d’urgence permanent et avec des ressources humaines et techniques limitées également, ce qui compromet sa capacité à gérer les armes et les munitions, a-t-elle fait valoir.  D’autant plus, a-t-elle ajouté, que l’intervention de sociétés de sécurité privées pour combler le vide sécuritaire ainsi que leur implication signalée dans les flux d’armes à feu illicites compliquent encore la situation.

Le nombre de fusillades et d’enlèvements continue d’augmenter, tandis que près de 200 000 personnes ont été déplacées pour fuir la violence, ce qui les expose à des risques supplémentaires, a-t-elle averti.  Pendant ce temps, l’insécurité s’étend en dehors de la zone métropolitaine de Port-au-Prince à d’autres départements comme l’Artibonite et le département Central.  La Directrice exécutive a, de même, relevé que la demande d’armes à feu en Haïti est liée au besoin des groupes criminels de renforcer le commerce illicite de la drogue, car le pays reste une destination de transit principalement pour la cocaïne et le cannabis.

Pour lutter efficacement contre le trafic d’armes et de munitions en Haïti, Mme Waly a préconisé de renforcer les contrôles aux frontières, en Haïti comme à l’étranger, d’améliorer radicalement les mécanismes d’interdiction maritime et de renforcer les capacités de collecte, d’analyse et d’utilisation des données relatives aux saisies d’armes à feu.  Parmi ses autres recommandations, elle a insisté sur le renforcement du régime haïtien de contrôle des armes à feu et des capacités d’application par la justice pénale.  Il faut aussi donner aux institutions haïtiennes les moyens de détecter le trafic d’armes à feu et les infractions connexes, de mener des enquêtes et de poursuivre les auteurs, notamment grâce à une coopération plus directe et plus efficace avec les pays voisins.

Alors que l’ONUDC renforce son équipe sur le terrain, des experts du siège et de la région ont rejoint la semaine dernière l’équipe de l’Office en Haïti pour soutenir notre programmation à la frontière terrestre de Belladère ainsi qu’au port et à l’aéroport de Port-au-Prince, a indiqué Mme Waly.  Elle a saisi cette occasion pour souligner l’excellente coopération avec les autorités haïtiennes, précisant que l’ONUDC travaille à la mise en place d’une unité conjointe de contrôle aéroportuaire et portuaire, qui réunira des fonctionnaires des douanes et de la police afin de mieux comprendre les flux illicites et d’améliorer l’efficacité des interceptions.  La formation commence le mois prochain et l’équipement est déjà en cours d’acheminement, a-t-elle annoncé.  Encouragée par l’engagement de la police des frontières, des autorités portuaires et des garde-côtes haïtiens, qui travaillent tous avec des équipements limités dans des conditions de sécurité instables, la Directrice exécutive a promis, pour finir, d’informer le Conseil des progrès réalisés dans son prochain rapport, dans trois mois.

Mme MIRLANDE H. MANIGAT, Présidente du Haut Conseil de transition, a sollicité l’indulgence des membres du Conseil face au trouble qu’elle éprouve suite à l’enlèvement et la séquestration en pleine rue, le 18 octobre dernier, du Secrétaire général du Haut Conseil de transition, M. Antony Virginie Saint-Pierre.  Cet enlèvement, a-t-elle ajouté, « n’est certes pas un hasard ».  Elle a évoqué les drames qui émaillent de la vie des Haïtiens, qu’il s’agisse des milliers d’enfants privés « du pain de l’instruction », des malades qui succombent à leurs blessures faute d’accès à un hôpital, des marchandises détruites, pillées ou brûlées par les gangs, ou encore des jeunes filles et garçons violés en toute impunité et « meurtris dans leur chair ». Mme Manigat a appelé les membres du Conseil de sécurité à ne pas rester indifférents aux frustrations des jeunes condamnés à la mendicité, à la corruption et à la délinquance dans un gang criminel.  « C’est face à cette réalité que la résolution 2700 apporte un souffle d’espérance à ce peuple englué dans les marasmes de l’insécurité », a-t-elle ajouté.  Devant cette accumulation de misère, elle a jugé le temps venu pour que l’aide promise se matérialise.

En attendant que le Conseil « passe de la parole aux actes », la Présidente a assuré que le Haut Conseil de transition est prêt à appuyer toute initiative de l’ONU susceptible de permettre à la population haïtienne de reprendre une vie normale.  Si les interventions des troupes étrangères d’appui à la Police nationale d’Haïti ne peuvent être discriminatoires, Mme Manigat a fait valoir qu’elles doivent adresser des « signaux clairs » que la protection des civils sera assurée.  « Et que ce ne soit pas le contraire, comme cela s’est vu dans les cas antérieurs! » a-t-elle prévenu.  Afin d’éviter que le pays ne replonge dans le chaos à l’avenir, elle a encouragé les États Membres à envisager la création d’un fonds pour la reconstruction des infrastructures nationales.  Pour sa part, le Haut Conseil de transition continuera de soutenir tout effort en faveur du respect des accords et de la reprise du dialogue, de la paix et de la tolérance.  L’heure est maintenant à l’action, a-t-elle conclu.

M. MAURO VIEIRA, Ministre des affaires étrangères du Brésil, s’est appuyé sur les deux résolutions adoptées ce mois-ci par le Conseil sur la situation en Haïti pour assurer que les responsables de la violence dans ce pays rendent des comptes.  Le Ministre a prié les États Membres qui se sont portés volontaires pour contribuer à la MMAS d’adopter dès que possible les règles d’engagement de la Mission. Celle-ci et le BINUH devront établir une dynamique positive pour s’assurer que les conditions de sécurité s’améliorent en Haïti, a-t-il recommandé.  Le Ministre a rappelé que le Brésil contribue depuis 13 ans aux efforts de maintien de la paix en Haïti, notamment lorsqu’il dirigeait la composante militaire de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Cette expérience augure, selon lui, de meilleures opportunités de coopération avec la MMAS sur la question de la stabilité et du développement d’Haïti.

Le Ministre a insisté sur l’importance d’efforts coordonnés en matière de sécurité ainsi que pour trouver une solution durable à la crise multidimensionnelle d’Haïti. Cette coopération doit s’accompagner d’une forte aide au développement ainsi que d’un soutien au renforcement institutionnel pour s’attaquer aux causes profondes de la violence, de l’instabilité et de la pauvreté.  Il a appelé à jeter des bases d’un large accord politique national exhortant les acteurs politiques haïtiens à parvenir à un accord sur un cadre crédible pour la tenue d’élections.  Le Ministre a appelé la MMAS à créer les conditions pour cela.  La sécurité doit profiter à toute la société haïtienne et pas seulement à un acteur ou un groupe politique particulier, a-t-il souligné.

M. Vieira a ensuite informé du soutien concret apporté par son gouvernement: plus de 90 000 visas humanitaires délivrés à des Haïtiens; un don de 5 000 doses de vaccin contre la rage en 2023; une contribution au programme de vaccination haïtien; des dons d’ambulances; et la fourniture de bourses d’études.

Le Ministre a prié la communauté internationale de croire au potentiel du peuple haïtien et à tout faire pour résoudre la crise actuelle.  « Haïti a une longue histoire et une culture riche.  Les Haïtiens sont résilients et travailleurs. »  Avec un soutien supplémentaire de la communauté internationale et un sens du devoir de la part des dirigeants politiques haïtiens, le pays devrait être en mesure de surmonter ses défis, a-t-il conclu.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a rappelé que sa délégation avait soutenu les dernières résolutions adoptées par le Conseil de sécurité sur Haïti.  Il a estimé qu’il existe une complémentarité entre les mandats du BINUH et de la MMAS, ce qui nécessite une coopération renforcée entre les deux entités à l’avenir, pour contribuer à sortir ce pays de la crise sécuritaire dans laquelle il se trouve.  Le représentant a aussi déclaré que des ressources supplémentaires seront nécessaires pour la MMAS, de même qu’au BINUH pour soutenir le système de justice pénale national.  Il est nécessaire d’examiner au sein du Conseil de sécurité la manière dont le BINUH peut assumer cette responsabilité, avant de proroger son mandat, a préconisé le délégué.  Les États-Unis sont ouverts à toute discussion portant sur des mécanismes d’établissement des responsabilités en ce qui concerne les violations des droits humains, a-t-il ajouté.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a déclaré que son pays et ceux d’Amérique latine et des Caraïbes seront toujours redevables à Haïti, pour sa contribution historique à la liberté tant de la région que du monde.  De ce fait, il n’existe pas d’autre manière de rétribuer Haïti qu’en faisant montre d’une solidarité agissante et de l’unité de la communauté internationale, du Conseil de sécurité plus particulièrement.  Le représentant a salué, à cet égard, l’adoption récente de pas moins de trois résolutions concernant ce pays, tout en admettant que beaucoup reste à faire pour surmonter la crise humanitaire, politique et sécuritaire, ainsi que la crise sociale et économique en Haïti.  Il a suggéré de commencer par mettre en œuvre les résolutions adoptées, proposant sept mesures susceptibles de faciliter cette tâche.  Le représentant a d’abord demandé un appui aux efforts du BINUH pour accompagner et faire progresser les dialogues politiques interhaïtiens dans l’exécution de l’accord du 21 décembre 2022 intitulé « Consensus national pour une transition inclusive et des élections transparentes ».  Cela doit se faire notamment par la remise sur pied des institutions démocratiques et de l’état de droit par les mécanismes prévus dans le cadre de la transition, et avec la participation politique des femmes.

Le délégué a en outre exhorté la communauté internationale à soutenir Haïti en matière judiciaire et pénitentiaire de sorte à élargir la lutte contre la corruption et l’impunité, et à améliorer les capacités de protection et de respect des droits humains.  Le représentant a aussi demandé que le Comité des sanctions actualise et élargisse la liste des principaux individus et entités responsables d’actes délictueux dans le cadre des résolutions 2653 (2022) et 2700 (2023).  Il a aussi plaidé en faveur de l’embargo sur les armes, de la lutte contre la criminalité transnationale organisée et du traçage des flux financiers illicites.  Il a également fait des propositions en vue de l’intensification du déploiement de l’aide humanitaire, demandant un appui de la part des États en termes de personnel et de moyens financiers et matériels, en vue du déploiement de la MMAS. Il faudra faire en sorte que le personnel de la Mission ait des connaissances et une formation spécialisée dans la protection des enfants ainsi que dans la prévention et la réponse à la violence sexuelle et sexiste, centrée sur les victimes, a encore recommandé le représentant.

M. AHMED ALMAHMOUD (Émirats arabes unis) s’est alarmé de la détérioration de la situation en Haïti, notamment l’aggravation des conditions sécuritaires, économiques et humanitaires, appelant à concentrer les efforts sur la lutte contre la violence et l’insécurité croissantes dans ce pays. Il s’agit notamment de prévenir les violences sexuelles et sexistes et d’accorder une attention particulière à la situation désastreuse des enfants.  À cette fin, il a vu dans le déploiement de la MMAS, en étroite coordination avec la Police nationale d’Haïti, une étape importante pour lutter contre la violence des gangs.  Toutefois, il a recommandé de compléter cette approche en privilégiant une coordination étroite avec les organes de l’ONU sur le terrain pour obtenir des résultats cohérents, citant le BINUH, l’ONUDC ou encore le Groupe d’experts chargé de surveiller la mise en œuvre du régime de sanctions.  Poursuivant, le délégué s’est également inquiété de l’absence de progrès dans le volet politique.  Pour finir, il a exhorté toutes les parties prenantes à s’engager de bonne foi pour parvenir à un consensus politique inclusif dirigé et pris en charge par les Haïtiens eux-mêmes.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a jugé préoccupante la situation en Haïti, alors que se poursuivent les violences « abjectes » commises par les gangs contre la population civile, plongeant chaque jour le pays davantage dans le chaos.  Loin d’être une solution, la multiplication des groupes d’autodéfense ne fait, selon elle, qu’aggraver le « cercle de la violence » en Haïti. La représentante a condamné les obstacles à l’aide humanitaire par les gangs, en appelant à assurer un accès sûr et sans entrave aux populations vulnérables et la sécurité du personnel humanitaire.  Elle s’est félicitée de l’adoption de la résolution 2699 (2023) autorisant le déploiement d’une mission de soutien sécuritaire à la Police nationale haïtienne. La déléguée a également salué la « ferme volonté » du Kenya de prendre la tête de cette mission.  Cet engagement témoigne, selon elle, de la volonté d’apporter rapidement l’aide dont Haïti a besoin.  De son côté, la France s’est engagée à soutenir la Police nationale haïtienne à hauteur de 1,1 million d’euros en 2023.

L’adoption de la résolution 2700 (2023) concernant le renouvellement du régime de sanctions, qui a notamment élargi l’embargo sur les armes, a également rencontré l’aval de la délégation, laquelle a exprimé le souhait d’imposer des mesures contre de nouvelles personnes menaçant la paix en Haïti.  Pour que la crise multidimensionnelle qui affecte le pays puisse se résorber sur le long terme, la déléguée a exprimé son appui aux efforts déployés par le Premier Ministre et le Haut Conseil de transition dans la recherche d’un accord politique permettant d’organiser des élections inclusives, de restaurer les institutions politiques ainsi que la bonne gouvernance du pays.

Au nom du Gabon, du Ghana et du Mozambique (A3), M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a salué la poursuite du dialogue entre le Premier Ministre et les acteurs politiques haïtiens en vue d’une transition inclusive et d’élections justes, transparentes et crédibles.  Il a pris note de l’accord conclu à Kingston, en juin dernier, disant attendre sa mise en œuvre pour sortir de l’impasse politique actuelle. Les A3, a indiqué le délégué, appellent à résoudre la situation sécuritaire qui s’est considérablement détériorée depuis la publication du dernier rapport en date du Secrétaire général. Saluant la décision du Kenya de diriger la MMAS, le délégué a rappelé qu’Haïti est « la sixième région du continent africain », avant de remercier les États de la CARICOM de renforcer les rangs de cette mission.

Il a ensuite appelé à rompre le lien entre la classe politique, les gangs et les flux financiers illicites, se félicitant de l’assistance apportée par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) aux autorités haïtiennes dans la lutte contre les flux financiers illicites, le renforcement des capacités dans la lutte contre la corruption, les crimes économiques et le blanchiment d’argent.  Le représentant a salué les efforts d’intégration d’Haïti dans des projets régionaux visant à démanteler les réseaux de traite des êtres humains et de trafic illicite de migrants.  Il faut offrir d’autres alternatives à la jeunesse haïtienne tentée de rejoindre les gangs ou de prendre la mer pour échapper à un quotidien insupportable, a lancé le délégué, en réitérant l’appel du secteur privé et de la société civile au Gouvernement pour ne ménager aucun effort à cette fin.  En conclusion, il a demandé aux pays partenaires de contribuer au financement du Fonds multidonateurs géré par le PNUD, doté de 28 millions de dollars pour les deux prochaines années.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a dit espérer que le déploiement de la MMAS pour soutenir les efforts de la Police nationale d’Haïti (PNH) aboutisse à rétablir la sécurité et permette de renforcer les conditions propices à la tenue d’élections libres et équitables.  Pour que la Mission réussisse, il est impératif que les pays participants aient une compréhension approfondie de son mandat et de la situation sur le terrain, a-t-elle recommandé, rappelant aussi l’importance d’un commandement et d’une structure opérationnelle appropriés.  Elle a appelé les États Membres à contribuer et à partager leurs expériences et expertises pour garantir une bonne préparation de la MMAS. Le Japon, pour sa part, s’engagera activement avec la communauté internationale et n’épargnera aucun effort pour assurer le fonctionnement efficace et réussi de la MMAS, a-t-elle dit.

La représentante a aussi souligné que la paix et la sécurité durables en Haïti ne peuvent être réalisées que par le peuple haïtien lui-même.  Il est donc crucial que toutes les parties prenantes haïtiennes s’engagent dans le dialogue et fassent preuve de sagesse pour convenir des solutions sécuritaires et politiques et s’accorder sur des réformes constitutionnelles et électorales.  Dans ce contexte, la déléguée a dit saluer les efforts du Haut Conseil de transition pour créer les conditions d’un dialogue interhaïtien et pour élargir le consensus.  « Nous sommes impatients de progresser », a-t-elle conclu, se réjouissant aussi de la coopération du BINUH et des pays de la CARICOM pour soutenir ces efforts.

M.  ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a déclaré que face à la dégradation de la situation sécuritaire et à l’expansion de la violence des gangs hors de Port-au-Prince, notamment dans les départements de l’Artibonite et du Centre, l’autorisation du déploiement de la MMAS adresse un puissant signal de solidarité de la part du Conseil.  En outre, le régime de sanctions qui vient d’être reconduit, et l’embargo renforcé sur les armes qui l’accompagne, joueront un rôle essentiel, a-t-il poursuivi, en demandant également que les secteurs judiciaire et correctionnel soient réhabilités pour que la MSS puisse soutenir pleinement la Police nationale d’Haïti et impulser un nouvel élan à la lutte contre l’impunité.

Il s’est félicité que la protection de l’enfance fasse désormais partie intégrante du mandat du BINUH, en pointant la vulnérabilité des jeunes haïtiens, qui continue de s’accentuer en raison du nombre de violations graves de leurs droits et du manque de perspectives économiques et sociales.  Les écoles étant fermées, la rentrée des classes est, à nouveau, incertaine et les gangs sont à l’affût.  Le délégué a aussi jugé essentielle une coopération avec les entités onusiennes sur le terrain, encourageant les autorités à s’acquitter de leur responsabilité de surveiller et de signaler les graves violations des droits des enfants.

Le représentant a recommandé une poursuite du dialogue interhaïtien, et appelé toutes les actrices et acteurs à y participer de manière constructive, tout en recommandant simultanément le maintien de la dynamique de soutien régional sous les auspices du Groupe d’éminentes personnalités de la CARICOM et par le biais de son interaction avec toutes les parties prenantes.  En parallèle des efforts sécuritaires, seul un travail conjoint permettra la préparation d’élections libres, participatives et démocratiques ainsi que le renforcement de l’intégration régionale d’Haïti, a-t-il encore estimé.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est alarmée de l’augmentation, à un rythme sans précédent, des meurtres aveugles, d’enlèvements, de viols et d’attaques dans plusieurs quartiers auparavant considérés comme sûrs en Haïti.  Cette année, près de 3 500 personnes ont été tuées et environ 1 800 enlevées, s’est-elle inquiétée. Parmi elles, un grand nombre de femmes et d'enfants, s’est désolée la représentante, voyant dans l’adoption récente de la résolution 2699 (2023) une bouée de sauvetage pour Haïti afin d’endiguer l’escalade de la violence.  À cette fin, la déléguée a estimé indispensable que le pays parvienne à un large accord politique pour la restauration des institutions démocratiques, par le biais d’élections crédibles, participatives et inclusives.  Cela est nécessaire pour faire progresser la stabilité, la bonne gouvernance et l’état de droit en Haïti, a-t-elle observé.  Pour finir, la représentante a appelé les parties prenantes haïtiennes à mettre de côté leurs différences et à s’engager dans un dialogue constructif afin d’élargir le consensus politique en faveur du rétablissement des institutions démocratiques.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est inquiétée de la détérioration de la situation en Haïti et du niveau alarmant des violations des droits humains perpétrées par les gangs.  L’adoption de la résolution 2699 (2023) par le Conseil constitue à ses yeux une mesure judicieuse de la communauté internationale pour rétablir la sécurité et un système judiciaire viable dans le pays. Dans cette optique, elle a exprimé son appui au renforcement des capacités du BINUH afin de lui permettre d’exercer pleinement son mandat.  Elle a en outre salué l’engagement du Kenya à diriger la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) et à déployer quelque mille policiers, ainsi que la contribution à ces efforts d’Antigua-et-Barbuda, des Bahamas et de la Jamaïque.

Néanmoins, la représentante a appelé la MMAS à respecter les normes les plus élevées de transparence et de discipline afin de préserver l’intégrité de la Mission et de gagner la confiance des communautés locales. Afin que cette mission soit un succès, la représentante a estimé que la mise en place d’un dialogue inclusif et la mise en œuvre de dispositions transitoires constituent des conditions préalables à la restauration des institutions démocratiques, au moyen d’élections crédibles et inclusives.  De même, un soutien financier adéquat de la communauté internationale est essentiel à la mise en œuvre de la stratégie nationale en matière de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de réduction de la violence communautaire.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a relevé que la situation en Haïti demeure extrêmement difficile avec notamment la violence des gangs gagnant des territoires jusque-là épargnés.  La représentante a pris note des efforts déployés par l’ONU et d’autres organisations humanitaires pour appuyer la population civile, dénonçant les attaques contre les convois humanitaires et leurs pillages.  Elle a dit suivre de près le déploiement de la MMAS qui devra présenter au Conseil de sécurité ses règles de recours à la force et sa stratégie de sortie.  Elle a pris note des voix, y compris celle de la diaspora, qui se sont exprimées contre les interventions étrangères au motif qu’elles s’étaient soldées par des échecs. L’ingérence étrangère est un des facteurs d’instabilité en Haïti, a renchéri la déléguée dénonçant aussi les sanctions unilatérales qui ont fait sombrer le pays dans une crise de l’État. Haïti n’a plus d’institutions étatiques élues démocratiquement depuis six mois, a souligné la déléguée.

Pour la représentante, il faut un règlement politique répondant aux besoins des Haïtiens et qui soit acceptable par toutes les parties.  Elle a regretté le fait que le meurtre du Président Jovenel Moïse n’ait toujours pas été élucidé deux ans après.  Il aurait été difficile de s’attendre à un autre résultat puisque l’enquête est menée par le pays dont des citoyens sont suspectés du meurtre du Président, a-t-elle commenté.  Elle a appelé à ce que cette « tragédie qui a mis le feu aux poudres » fasse l’objet d’une enquête transparente.  Elle a aussi demandé à faire la lumière sur les sources et les itinéraires de contrebande d’armes en Haïti, y compris celles venant des États-Unis. Il faut mettre à jour la liste des individus désignés par le Comité des sanctions créé par la résolution 2653 (2022) afin de stabiliser la situation, a encore recommandé la représentante qui a conclu en dissuadant la communauté internationale de mettre en place à Port-au-Prince des dirigeants soutenus par l’Occident.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a déclaré que le déploiement de la MMAS, bien qu’une étape appréciable pour aider la Police nationale d’Haïti (PNH) à répondre à la crise sécuritaire, ne réglera pas, à lui seul, les problèmes multidimensionnels que connaît le pays.  Selon lui, la crise ne sera pas résolue tant que les Haïtiens ne pourront pas choisir librement leurs dirigeants.  Pour cette raison, il a appelé les acteurs politiques à mettre de côté leurs divergences, à privilégier l’intérêt national et à parvenir à un dialogue constructif afin de créer les conditions propices à la tenue d’élections, qui à leur tour permettront de restaurer une gouvernance dont le pays a besoin.  Il leur faut élaborer une feuille de route en vue de la tenue d’élections, a insisté le représentant, avant de se réjouir de l’adoption de la résolution prorogeant le régime de sanctions concernant Haïti.  La délégation britannique est disposée à étudier l’ajout de nouvelles sanctions et de nouveaux noms à cette liste, a précisé son représentant.

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré qu’étant donné l’impasse politique dans laquelle se trouve Haïti et la présence de bandes criminelles armées, la situation sur place ne cesse de se détériorer, conduisant le Conseil de sécurité à adopter trois résolutions, dont une relative à la prorogation des sanctions. Sans un gouvernement digne de ce nom, les efforts extérieurs n’auront aucun effet sur le long terme, les principaux acteurs politiques haïtiens n’étant toujours pas parvenus à un accord. Il a donc conseillé à toutes les parties concernées d’œuvrer à un consensus politique en vue de l’organisation d’élections libres.  Le délégué a soutenu les efforts du BINUH en se félicitant également de ceux déployés par la CARICOM pour une solution pérenne soit trouvée dans le pays.  La MMAS, créée par la résolution 2699 (2023), devra aider à atténuer la situation sécuritaire, a-t-il souligné, en espérant que le Comité des sanctions veillera à la pleine mise en œuvre des mesures applicables dans le pays.  Sachant que le flux illicite d’armes provient principalement des États-Unis, le Comité aura besoin du soutien du Conseil, a-t-il fait remarquer.  Le représentant s’est également inquiété du rapatriement forcé de migrants haïtiens par un pays de la région.

M. ANTONIO RODRIGUE (Haïti) a noté que cette réunion d’information trimestrielle se déroule dans un contexte particulier marqué par une ferme volonté des acteurs, tant au niveau bilatéral que multilatéral, de poser de véritables actions en vue de gérer la situation de manière décisive et holistique, dans le contexte de décisions importantes prises sur la crise haïtienne.  À cet égard, le représentant a salué la décision « courageuse et d’une portée hautement solidaire » du Kenya d’envisager de diriger la MMAS et de contribuer à hauteur de 1 000 policiers, qui a créé une dynamique pour combattre les gangs armés semant la terreur en Haïti.  Il a saisi cette occasion pour exhorter d’autres nations à emboîter le pas en apportant un soutien concret à cette « initiative solidaire louable ».

Tout en réitérant sa « gratitude et reconnaissance » au Gouvernement du Kenya pour cette « solidarité transatlantique et panafricaine » envers Haïti, le représentant a félicité le Conseil pour l’adoption de trois résolutions de grande importance, dont deux à l’unanimité.  Il s’est attardé sur l’adoption de la 2699 (2023), la voyant comme un moment fort dans la gestion de la crise et un support robuste à la PNH. Cette résolution ouvre la voie à des lendemains meilleurs pour la majorité de la population en proie quotidiennement aux violences des gangs depuis environ deux ans, a-t-il déclaré. Quant à la résolution 2700 (2023), qui renouvelle le régime de sanctions en Haïti, le délégué a dit avoir pris bonne note de la sortie du rapport du Groupe d’experts et dit attendre la publication de la liste des personnes qui soutiennent la violence dans le pays.

Il s’est ensuite penché sur la situation « toujours très préoccupante » sur le plan national, saluant le rapport du Secrétaire général qui fournit une vision très complète des principaux défis guettant Haïti et de certains progrès accomplis malgré tout dans des domaines socioéconomique et politique. En matière d’état de droit, le fait marquant demeure l’ouverture de l’année judiciaire qui consacre la reprise des activités judiciaires dans le pays, malgré les actes de violences qui frappent certaines juridictions, a fait valoir le représentant.

Sur le plan socioéconomique, il a informé que le nouveau budget prévoit une réduction drastique de certaines dépenses de l’État pour l’exercice 2023-2024.  Il s’est réjoui par ailleurs des réformes de l’administration des douanes qui ont porté fruit puisque les recettes sont en hausse constante depuis l’année dernière, atteignant 65,8%.  En revanche, a-t-il déploré, l’inflation de près de 40% est toujours à un niveau inacceptable.

Venant à la situation sur le plan social, les activités scolaires ont repris à travers le pays et timidement dans la capitale, a-t-il informé.  Quant au volet politique, il a reconnu que les acteurs ne sont pas encore parvenus à un consensus minimal, en dépit des efforts inlassables déployés par la CARICOM et le BINUH.  « Le temps joue en notre défaveur », a reconnu le délégué qui a dès lors pressé d’agir vite afin d’« inverser cette descente aux enfers ».

M. JOSÉ ALFONSO BLANCO CONDE (République dominicainea exprimé la gratitude de son pays pour l’adoption par le Conseil de la résolution 2699 (2023) afin de rétablir la sécurité et l’ordre institutionnel en Haïti.  Dans le même ordre, il s’est félicité de l’aide apportée par le Groupe de personnalités éminentes de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) afin de parvenir à une solution haïtienne à la crise que vit ce pays frère.  L’aggravation de la situation humanitaire, notamment à Port-au-Prince, est le résultat des activités criminelles menées par des bandes armées.  Cette détérioration constante de la situation en Haïti a fait en sorte que des pans entiers de la population ont été contraints de fuir leur foyer, aggravant encore les risques auxquels ils sont confrontés.  Or, si la situation alimentaire reste extrêmement préoccupante, plus d’un demi-million de personnes ne sont plus dans une situation d’insécurité alimentaire aiguë, grâce à l’action des acteurs humanitaires et des donateurs.

Le représentant a remercié le Kenya pour son engagement à diriger l’appui international, ainsi que les autres pays qui ont offert un soutien concret à cet effort multinational.  Il s’est également félicité de l’adoption de la résolution 2700 (2023), qui vient compléter la résolution 2699 en prorogeant le régime de sanctions qui comprend un embargo sur les armes, des interdictions de voyager et le gel des avoir de personnes et entités responsables du climat de violence qui prévaut dans le pays.  À ce moment crucial de l’histoire d’Haïti, le délégué a formé le vœu que la mise en œuvre des deux résolutions, grâce à l’engagement soutenu de la communauté internationale, contribuera à restaurer la stabilité économique et sociale du pays et à mettre fin à la situation « cauchemardesque » dans laquelle il est plongé, pour s’engager sur le chemin de la prospérité et d’une paix durables.

M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque), qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a noté parmi les progrès le ralentissement de l’inflation, la réduction du choléra, l’amélioration des performances de la monnaie haïtienne et l’augmentation des recettes douanières.  Il faut maintenant accélérer les efforts pour rétablir la sécurité, la stabilité et poursuivre sur la voie du développement durable en Haïti, a-t-il ajouté.  Le représentant a exprimé les préoccupations de la CARICOM face à l’augmentation du nombre de meurtres, d’enlèvements et d’abus sexuels et face à la propagation de la violence.  Il s’est inquiété du manque d’opportunités pour les jeunes en proie à la criminalité.

Préoccupé par les faits nouveaux publiés dans le rapport du Secrétaire général, le délégué a dit être déçu de constater que sur les 720 millions de dollars estimés pour le plan de réponse humanitaire 2023 pour Haïti, seulement 28% du financement ont été reçus.  Qui plus est, le volet « sécurité alimentaire » n’est financé qu’à hauteur de 18%.  Il a donc appelé la communauté internationale à redoubler d’effort et à fournir les ressources et le soutien nécessaires pour aider le peuple haïtien.  Il a remercié le Kenya pour son offre de diriger la MMAS en Haïti.  Compte tenu de l’urgence, le Conseil doit accélérer ses procédures pour que le Kenya puisse s’acquitter rapidement de ce mandat dès que possible, a-t-il recommandé. Le Représentant a réitéré l’appui fourni par la CARICOM en facilitant le dialogue politique en vue de rétablir la sécurité, la démocratie et la bonne gouvernance et d’organiser des élections libres et équitables en Haïti.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Alors que l’extrême pauvreté guette, la Troisième Commission se penche sur les droits au logement convenable, à l’alimentation et à la justice

Soixante-dix-huitième session,
30e et 31e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4388

Alors que l’extrême pauvreté guette, la Troisième Commission se penche sur les droits au logement convenable, à l’alimentation et à la justice

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a dialogué aujourd’hui avec six titulaires de mandat qui ont attiré l’attention des délégations sur tout un éventail de problématiques, notamment le droit à un logement convenable, l’autonomisation juridique, l’aggravation de la crise alimentaire et la précarisation de l’emploi.  La question de l’impact des systèmes de surveillance sur les droits humains a également été abordée, de même que le fléau des féminicides.

Ouvrant la discussion, le Rapporteur spécial sur le logement convenable a alerté que 1,6 milliard de personnes dans le monde n’ont pas de logement adéquat, un chiffre qui pourrait atteindre 3 milliards d’ici à 2030 alors que l’on estime à 100 millions le nombre de personnes sans abri dans le monde.  Appelant à transcender le « paradigme de la propriété », il a notamment encouragé les États Membres à investir dans le développement de modèles alternatifs de logement abordable, notamment des fiducies foncières communautaires, et à mettre un terme à la privatisation des logements sociaux.  Il a également encouragé à reconnaître l’accessibilité économique comme partie intégrante du droit à un logement convenable dans leur droit national ou constitutionnel.  Évoquant par ailleurs la situation au Moyen-Orient, le Rapporteur spécial a appelé à reconnaître le domicide comme un crime international à part entière.

De son côté, le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a fustigé l’utilisation croissante de la nourriture comme arme pour affamer les populations en situation de conflits et déclencher des nettoyages ethniques, exhortant les délégations à adopter une résolution prohibant l’utilisation de la famine et le blocage de l’aide humanitaire comme armes de guerre.  Il a également fait état d’une aggravation de la crise alimentaire dans le monde, imputant le phénomène à l’arrêt des programmes mis en place par les gouvernements pendant la pandémie de COVID-19, comme la gratuité des repas pour les écoliers et les aides financières directes aux ménages.  Face à cette situation, il a notamment appelé les États Membres à rendre les systèmes alimentaires résistants aux changements climatiques et à abandonner l’agriculture industrielle au profit de l’agroécologie, entre autres. Suite à son intervention, la Fédération de Russie a critiqué le fait que son rapport pose la situation en Ukraine comme un facteur d’augmentation de l’insécurité alimentaire dans le monde. 

Les délégations ont ensuite échangé avec le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté qui a rappelé aux États désireux d’améliorer leur compétitivité-coûts dans une économie mondialisée que les salaires de misère constituent une violation des droits humains, exhortant à garantir à chaque travailleur un salaire minimum vital.  À rebours des idées reçues, son rapport souligne en effet que l’emploi ne permet pas d’échapper à la pauvreté.  Un travailleur sur cinq dans le monde vit en dessous du seuil de pauvreté, s’est-t-il en effet alarmé, mettant en cause la faiblesse des salaires réels qui ont chuté l’an dernier pour la première fois depuis le début de ce siècle, alors même que les bénéfices des entreprises augmentent. 

Selon le Rapporteur spécial, cette situation s’explique essentiellement par la baisse des contrats de travail à temps plein au profit de contrats à temps partiel « occasionnels » mal rémunérés.  De nombreux travailleurs sont également classés à tort comme « travailleurs indépendants », notamment dans l’économie des petits boulots, tandis que des violations persistantes des droits syndicaux ces 30 dernières années ont miné la capacité des travailleurs à négocier, a-t-il indiqué. 

Venue attirer l’attention sur les 5,1 milliards de personnes privées d’un véritable accès à la justice dans le monde, la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, a vanté pour sa part les mérites de l’autonomisation juridique et a appelé à élargir l’écosystème juridique en appuyant les travailleurs de la justice de proximité qui, a-t-elle expliqué, reçoivent une formation plus limitée dans un domaine précis, notamment la négociation ou le plaidoyer. Ces travailleurs de la justice élargissent les possibilités offertes aux personnes confrontées à des problèmes juridiques, ou les orientent vers des avocats lorsqu’une expertise technique est nécessaire, contribuant ainsi à démocratiser l’état de droit.  Relevant cependant que nombre d’entre eux sont la cible d’attaques ou travaillent sous la menace d’une criminalisation pour avoir mené des activités d’autonomisation juridique considérées comme équivalant à une pratique juridique non autorisée, la Rapporteuse spéciale a appelé les États Membres à travailler avec les barreaux pour dépénaliser la fourniture de ce type d’assistance juridique. 

De son côté, le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a attiré l’attention sur les meurtres fondés sur le genre ou l’orientation sexuelle, en particulier la « pandémie » des féminicides.  À ce propos, Chypre a signalé qu’en 2021, 80 000 femmes et filles avaient été tuées volontairement dont 45 000 par des membres de leur famille, faisant du foyer l’endroit le plus dangereux pour elles.  La Belgique s’est plus particulièrement préoccupée des féminicides commis par les États, rappelant qu’aujourd’hui, 5 000 femmes se trouvent dans le couloir de la mort dans au moins 41 pays.  La peine de mort constitue parfois un féminicide, en raison des discriminations préexistantes, a indiqué la délégation.  De son côté, le Chili a fait savoir qu’il avait inclus le délit de « suicide-féminicide » à sa législation.

Les délégations ont également dialogué avec la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, au sujet des conséquences sur les droits humains de l’utilisation des nouvelles technologies, notamment les drones armés, les données biométriques, les interfaces de programmation et les systèmes de surveillance.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux, lundi 23 octobre, à partir de 10 heures. 

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. BALAKRISHNAN RAJAGOPAL, Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard, a appelé à reconnaître les violations systématiques du droit à un logement convenable lors de conflits violents en tant que crime international à part entière.  Les violations systématiques du droit au logement doivent faire l’objet d’enquêtes et de poursuites devant les tribunaux nationaux et internationaux, a estimé le Rapporteur spécial, condamnant les tirs de roquettes aveugles du Hamas contre de nombreuses communautés en Israël, ainsi que la destruction d’immeubles d’habitation et d’infrastructures civiles à Gaza par les bombardements israéliens.  Le domicile, a-t-il insisté, doit être identifié et sanctionné. 

Passant à son rapport consacré à la crise climatique et au droit au logement (A/HRC/52/28), le Rapporteur spécial a appelé les États Membres à investir dans le développement de nouveaux logements sociaux neutres en carbone, résilients au climat et abordables pour tous, notant que le secteur du logement représente plus d’un tiers de toutes les émissions de dioxyde de carbone. Il a annoncé son intention d’examiner la problématique de la réinstallation en tant que question des droits humains, avant d’appeler les États Membres à s’attaquer au problème du sans-abrisme.

En venant à son rapport intitulé « Un lieu où vivre dans la dignité pour tous: rendre le logement abordable » (A/78/192), M. Rajagopal a alerté que 1,6 milliard de personnes dans le monde n’ont pas de logement adéquat, ni accès aux services de base.  Ce chiffre pourrait atteindre 3 milliards d’ici à 2030 et on estime en outre que 100 millions de personnes dans le monde sont sans abri. Il a appelé à redoubler d’efforts pour s’attaquer aux causes sous-jacentes du problème, notant que la crise du logement abordable se répercute de manière disproportionnée sur les groupes vulnérables.  Et dans de nombreux pays, qu’ils soient riches ou à faible revenu, le prix d’un logement adéquat est hors de portée du revenu moyen, contraignant des millions de personnes à vivre dans des établissements informels ou de qualité inférieure, renforçant ainsi la ségrégation spatiale. 

Parmi les facteurs de cette crise, il a cité la financiarisation du logement et le retrait de nombreux États des politiques de logement public.  En outre, l’augmentation des déplacements causés par des conditions météorologiques extrêmes ou les changements climatiques, les grands projets de développement ou les conflits violents ont tous contribué au sans-abrisme et à la crise de l’accessibilité économique, de même que le manque de terrains abordables pour la construction, a analysé le Rapporteur spécial.  En outre, les gouvernements locaux n’ont souvent pas l’autorité nécessaire pour réglementer les loyers ou l’utilisation des terres, tandis que les politiques fiscales ne fournissent pas à l’État une marge de manœuvre budgétaire suffisante pour rendre le logement abordable et lutter contre le sans-abrisme. 

Face à cette situation, le Rapporteur spécial a engagé les États à reconnaître l’accessibilité économique comme partie intégrante du droit à un logement convenable dans leur droit national ou constitutionnel.  Appelant à transcender le « paradigme de la propriété », il les a encouragés à investir dans le développement de modèles alternatifs de logement abordable, notamment des fiducies foncières communautaires et des logements communautaires.  Les gouvernements locaux doivent disposer de l’autorité nécessaire pour garantir des logements abordables grâce à des mesures telles que la réglementation des loyers, a-t-il ajouté.  De même, il a appelé les États à protéger les locataires des expulsions dues au non-paiement du loyer, à mettre un terme à la privatisation des logements sociaux, et à limiter la spéculation, recommandant, en outre, l’utilisation des banques foncières publiques.

Dialogue interactif

Après cet exposé, le Chili a voulu connaître les bonnes pratiques pour aborder les problématiques de genre dans la crise du logement, soulignant les difficultés rencontrées par les femmes.  Comment mieux réguler les marchés immobiliers afin de se prémunir des fluctuations et d’offrir un logement aux plus vulnérables, ont demandé El Salvador, le Brésil, et la Malaisie.  La Croatie, elle, s’est particulièrement interrogée sur l’accessibilité des jeunes au logement, tandis que la Chine s’est focalisée sur les personnes âgées et les personnes handicapées.  Quant au Cameroun, il s’est demandé quels modèles alternatifs pouvaient transcender le paradigme de l’accès à la propriété. 

L’Union européenne, de son côté, a noté que les logements accessibles sont souvent relégués loin des centres urbains, ce qui augmente les coûts de transport, et affecte de manière disproportionnée les groupes les plus vulnérables, les éloignant d’autres droits humains tels que le droit à l’éducation. Constatant qu’environ 1,5 million de personnes par an font l’expérience du sans-abrisme aux États-Unis, malgré les différentes mesures politiques visant à réduire ce nombre de 25% d’ici à 2025, le représentant américain a demandé au Rapporteur spécial quelles étaient, selon lui, les bonnes pratiques pour s’attaquer à ce problème.  Le Bangladesh a, pour sa part, témoigné de ses efforts pour fournir des terres et des logements aux sans-abri, dans un contexte rendu particulièrement difficile par les changements climatiques.  L’Ordre souverain de Malte a, d’ailleurs, mentionné l’aide qu’il avait fournie à ce pays, ainsi qu’au Myanmar et au Pakistan.  

L’Ukraine a essentiellement dénoncé la destruction de nombre de ses bâtiments par la Russie.  Depuis l’invasion de février 2022, ce ne sont pas moins de 4 500 logements résidentiels, 570 écoles, 150 centres de santé, et 59 bâtiments religieux qui ont été endommagés ou rasés, a-t-elle révélé.  La Fédération de Russie a insisté, pour sa part, sur son statut « d’État social », inscrit dans sa Constitution, contestant les allégations du Rapporteur spécial voulant que certains groupes y seraient discriminés. 

Regrettant d’avoir été pointé du doigt par le Rapporteur spécial dans son exposé, Israël a souligné qu’avant même de pouvoir se préoccuper du logement abordable, il devait investir dans des abris anti-bombes pour se protéger du Hamas.  Car depuis le 7 octobre, a détaillé la délégation, près de 7 000 roquettes sont tombées en Israël et plus de 100 000 personnes ont dû quitter leur foyer, sans parler des familles qui n’ont pas pu partir et ont été tuées chez elles.

Répondant à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard a tout d’abord abordé la question du suivi, qualifiant d’insuffisantes les méthodologies employées pour assurer le contrôle des personnes faisant face à la crise du logement.  Le manque de données empêche notamment de connaître le nombre de personnes affectées. Il a également déploré que la question du sans-abrisme ne figure dans aucun des objectifs de développement durable (ODD), exhortant les États à se pencher sérieusement sur cette question. Relevant en outre que les caractéristiques du sans-abrisme varient d’une ville à l’autre, il a conseillé de privilégier un système de collecte de données libres, recommandant à cet égard le modèle kényan. 

Le Rapporteur spécial a ensuite fait observer que les mécanismes participatifs n’ont de sens que dans la mesure où les participants ont la conviction de pouvoir exercer une influence dans le processus de décisions.  Citant l’exemple du Brésil, il a invité à la mise en place de processus participatifs pour la planification, l’utilisation des terres, les revenus, ou la budgétisation, entre autres. 

Exposé

M. MICHAEL FAKHRI, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a confié avoir du mal à présenter son rapport sur le droit à l’alimentation, la reprise après la pandémie de COVID-19 et la transformation du système alimentaire car, a-t-il expliqué, « si la pandémie a pris officiellement fin en mai dernier, la crise alimentaire s’est aggravée ».  Il a imputé cette aggravation à l’arrêt des programmes spéciaux mis en place par les gouvernements, comme la gratuité des repas pour les écoliers et les aides financières directes aux ménages.  D’une manière générale, la faim et la malnutrition ont augmenté depuis 2015, a-t-il regretté, ajoutant qu’aucun pays n’a échappé à la crise alimentaire.  M. Fakhri a expliqué que, depuis au moins 60 ans, la production alimentaire mondiale dépasse toujours les besoins et que la persistance de la faim est causée par des échecs politiques.  Il a par ailleurs constaté que la nourriture est de plus en plus utilisée comme arme dans les conflits pour affamer les populations et déclencher des nettoyages ethniques, avant d’évoquer les événements récents dans le Haut-Karabakh ou à Gaza.

Signalant à ce sujet que plusieurs experts des droits humains ont fait état hier d’un risque de génocide contre le peuple palestinien, le Rapporteur spécial a indiqué aux États Membres qu’ils avaient la possibilité de réduire ce risque à Gaza et ailleurs dans le monde.  Il les a appelés à voter rapidement une résolution solide réaffirmant en premier lieu que toutes les parties à tous les conflits doivent respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme.  Selon lui, ce texte doit aussi s’appuyer sur la résolution 2417 (2018) du Conseil de sécurité, qui prohibe l’usage de la famine et du blocage de l’aide humanitaire comme armes de guerre, et sur la résolution 52/16 adoptée cette année par le Conseil des droits de l’homme, qui s’inquiète de l’effet de tous les conflits armés sur le droit à l’alimentation.  « Hier, nous avons sonné l’alarme, aujourd’hui c’est à vous d’agir », les a-t-il exhortés. 

Face à ce sombre tableau, le Rapporteur spécial a indiqué que son rapport propose un plan de redressement postpandémie et une transformation des systèmes alimentaires à plus long terme.  Il a appelé les États à mener trois types d’actions interdépendantes: adopter des plans nationaux, élaborer une stratégie internationale coordonnée et rendre les systèmes alimentaires résistants aux changements climatiques et compatibles avec la préservation de la biodiversité.  M. Fakhri leur a également recommandé d’abandonner l’agriculture industrielle au profit de l’agroécologie, de cesser de donner la priorité aux marchés mondiaux pour soutenir les marchés territoriaux, de limiter la dépendance vis-à-vis des entreprises pour renforcer l’économie sociale et solidaire et de renforcer le multilatéralisme. 

Le Rapporteur spécial a rappelé qu’au début de son mandat en 2021, la situation était mauvaise mais que les résolutions sur le droit à l’alimentation de 2021 et 2022 avaient donné de l’espoir au monde.  Ce droit est aujourd’hui énergiquement défendu par un nombre croissant d’États dans les forums internationaux, a-t-il salué, se félicitant notamment de voir les droits humains et la transformation des systèmes alimentaires enfin figurer à l’ordre du jour des conférences des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP). Enfin, concernant le projet de résolution sur le droit à l’alimentation, il a souhaité que les défis structurels, tels que la crise de la dette et le fonctionnement des institutions financières internationales, soient traités dans le contexte plus large de la coopération multilatérale. 

Dialogue interactif

Réagissant à cet exposé, l’Union européenne a demandé des exemples de coopération et de partenariats internationaux favorisant la réalisation du droit à l’alimentation et la transition vers des systèmes alimentaires durables.  Le Lesotho a dit craindre que les effets de la pandémie sur la sécurité alimentaire durent plusieurs décennies.  Cuba a ensuite établi un lien entre un ordre international injuste et l’insécurité alimentaire, avant de dénoncer l’embargo que lui imposent les États-Unis depuis six décennies, le qualifiant « d’acte de génocide ». La délégation a également exprimé sa solidarité avec le peuple palestinien, « victime lui aussi d’un blocus illégal ».  Le Cameroun a, pour sa part, déploré l’augmentation des prix des denrées alimentaires dans le monde, demandant quelles mesures peuvent être prises pour venir en aide aux plus pauvres, surtout ceux qui n’ont même pas accès aux filets de sécurité sociale.  Le Brésil, évoquant à son tour la situation à Gaza, a souligné que le droit international comprend des dispositions pour que les civils ne soient pas privés de nourriture.  La Roumanie a, elle, déploré les effets néfastes de la guerre en Ukraine sur la sécurité alimentaire mondiale, avant de demander au Rapporteur spécial comment la coopération internationale peut se traduire en actes. 

Plus critique à l’égard de M. Fakhri, le Bélarus a regretté que certaines des mesures proposées dans son rapport ne tiennent pas compte de l’ampleur de la « tragédie alimentaire ».  Il a également regretté que les conclusions ne fassent pas mention des mesures coercitives unilatérales, qui sont devenues l’un des principaux obstacles à la reprise postpandémie.  Le Maroc a détaillé les efforts nationaux déployés pour éliminer la faim, tout en avertissant que 600 millions de personnes risquent de souffrir de ce fléau d’ici à 2030 si des changements n’interviennent pas.  Exprimant lui aussi ses inquiétudes, El Salvador a demandé quelles mesures devraient prendre les États sur le plan commercial afin d’honorer les engagements pris dans le cadre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels pour assurer une répartition équitable des aliments, une interrogation reprise par la Malaisie.  S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a, quant à lui, exprimé sa préoccupation face à la forte volatilité des prix des denrées alimentaires dans le monde, laquelle remet en cause le droit à l’alimentation. 

De son côté, Israël a affirmé que c’est le Hamas et non son pays qui prive la population de Gaza de son droit à l’alimentation.  Il est honteux de porter de telles accusations à Israël, s’est indignée la délégation.  Dans ce contexte, a-t-elle ensuite demandé, comment être sûr que les fournitures envoyées aux populations civiles ne soient pas utilisées par la machine de mort terroriste qu’est le Hamas?  Pour sa part, la République dominicaine a demandé des exemples de mesures concrètes permettant de protéger les petits producteurs alimentaires dans les situations pandémiques ou de crise climatique.  Abordant un tout autre sujet, la Fédération de Russie a critiqué le point 50 du rapport, qui pose la situation en Ukraine comme un facteur d’augmentation de l’insécurité alimentaire dans le monde.  Elle a rappelé que, le 5 juin, elle a signé un accord sur les exportations de denrées et d’engrais russes qui n’a malheureusement pas porté ses fruits, les pays occidentaux bloquant les paiements et interdisant les livraisons.  Tout au contraire, l’Ukraine a présenté la guerre sur son sol comme un facteur d’insécurité alimentaire dans le monde entier, assurant tout faire pour que ce conflit n’affecte pas le reste du monde.

À la suite de la Chine, qui s’est félicitée d’avoir pu garantir le droit à l’alimentation à plus d’un milliard de personnes malgré la pandémie, la République arabe syrienne a accusé Israël et ses alliés de tenter de justifier leurs crimes contre le peuple palestinien.  Permettre aux Gazaouis d’accéder à de l’eau potable représente-t-il un danger pour la sécurité d’Israël? s’est interrogée la délégation.  Le Japon a, lui, rappelé l’importance de la promotion d’une pêche durable pour parvenir à la sécurité alimentaire, tandis que la République islamique d’Iran dénonçait les effets dévastateurs des mesures coercitives unilatérales pour la sécurité alimentaire des pays visés.  Enfin, l’Ordre souverain de Malte a détaillé l’aide alimentaire qu’il fournit au Pakistan et au Soudan du Sud, avant de dénoncer les effets des mesures coercitives unilatérales sur la sécurité alimentaire des populations. 

Répondant aux questions et remarques des délégations, le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation a mis en avant les bonnes pratiques observées pendant la pandémie de COVID-19, comme la gratuité de l’alimentation scolaire, les aides financières aux ménages et le soutien aux marchés locaux.  Il a aussi plaidé en faveur du soutien à l’agriculture locale afin d’éviter la dépendance aux marchés mondiaux, faisant le même constat concernant les engrais.  M. Fakhri a par ailleurs dénoncé les mesures coercitives unilatérales et l’occupation illégale de territoires comme des actions causant des dommages aux civils.  Évoquant l’Initiative de la mer Noire, il a estimé que cet accord céréalier, aujourd’hui interrompu, avait prouvé que même des parties ennemies devaient coopérer sur cette question, le système alimentaire international étant interdépendant. 

Le Rapporteur spécial a indiqué qu’il se rendrait dès demain à Rome pour la réunion annuelle du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) afin d’établir un plan d’action pluriannuel.  Il a estimé qu’une résolution solide sur le droit à l’alimentation à l’Assemblée générale permettrait d’enhardir les négociateurs réunis au CSA en vue d’une planification multilatérale ambitieuse. Évoquant la Conférences des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP) qui se tiendra dans quelques semaines aux Émirats arabes unis, il a, là aussi, jugé qu’une résolution solide sur le droit à l’alimentation contribuerait à faire avancer les négociations.  S’agissant de l’aspect commercial, il s’est félicité que de nombreux pays soient prêts à inclure la question du droit à l’alimentation au menu de la Deuxième Commission.  Il s’est également réjoui de constater qu’au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), de plus en plus de pays considèrent les produits alimentaires comme un droit humain et non comme des denrées commerciales, « ce qui aurait été inimaginable il y a trois ans seulement ». 

Exposé

M. OLIVIER DE SCHUTTER, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté a déclaré qu’à mi-chemin de l’échéance du Programme 2030, les progrès en matière d’éradication de la pauvreté sont compromis. Le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté est plus élevé qu’il y a quatre ans, 165 millions de personnes sont tombées dans la pauvreté entre 2020 et 2023, et si la tendance actuelle se poursuit, 575 millions de personnes vivront encore dans l’extrême pauvreté en 2030, a-t-il averti.

En venant à la présentation de son rapport, il a indiqué que l’emploi ne permet pas d’échapper à la pauvreté, précisant que plus d’un travailleur sur cinq dans le monde vit en dessous du seuil de la pauvreté national, y compris 6,3 millions de personnes aux États-Unis, soit 4,1% des travailleurs de ce pays.  Et dans l’Union européenne, environ 8,5% de la population active, soit près de 20 millions de personnes, sont menacées de pauvreté.  En cause essentiellement: la faiblesse des salaires. Depuis les années 80, a-t-il expliqué, la part du travail en pourcentage du PIB diminue, et pour la première fois depuis le début du siècle, les salaires réels ont chuté en 2022, alors même que les bénéfices des entreprises augmentent. 

Selon le Rapporteur spécial, cette situation s’explique essentiellement par la baisse des contrats de travail à temps plein au profit de contrats à temps partiel « occasionnels » mal rémunérés.  De nombreux travailleurs sont également classés à tort comme « travailleurs indépendants », notamment dans l’économie des petits boulots, tandis que des violations persistantes des droits syndicaux ces 30 dernières années ont miné la capacité des travailleurs à négocier.  Il en résulte un cercle vicieux: la précarisation du travail entraînant un déclin de la syndicalisation, et inversement. 

Les salaires de misère sont une violation des droits humains, a souligné le Rapporteur spécial, appelant les gouvernements à garantir à chaque travailleur un salaire minimum vital.  Or, le salaire minimum légal est rarement fixé à un niveau adéquat, a-t-il déploré, pointant la volonté constante des pays d’améliorer leur compétitivité-coûts dans une économie mondialisée « comme si condamner les travailleurs à la pauvreté afin de rester attractifs pour les acheteurs ou les investisseurs était une stratégie de développement viable ».  Et même lorsque le salaire minimum légal est adéquat, les employeurs sont systématiquement autorisés à ignorer cette exigence en toute impunité, notamment dans le cas des travailleurs informels ou des travailleurs migrants sans papiers.

Citant une étude de l’Organisation internationale du Travail, le Rapporteur spécial a relevé, en outre, que les travailleurs considérés comme essentiels durant la pandémie de COVID-19 gagnaient en moyenne 26% de moins que les autres travailleurs.  Dénonçant une situation absurde, il a exhorté les gouvernements à lister les professions les plus utiles socialement et à garantir des salaires décents aux travailleurs de ces secteurs, ainsi qu’à plafonner les salaires dans les secteurs qui imposent des coûts élevés à la société. 

Dialogue interactif

Réagissant à la présentation du Rapporteur spécial sur l’extrême pauvreté et les droits humains, le Cameroun a alerté sur l’échec annoncé de l’ODD 1 sur la réduction de la pauvreté; échec que sa représentante attribue notamment au fardeau de la dette et à l’injustice de l’architecture financière internationale.  Quelles mesures peuvent prendre les gouvernements des pays en développement pour instaurer un salaire minimum et prendre en charge les travailleurs pauvres? a-t-elle ainsi demandé.  Le Bangladesh s’est interrogé sur la meilleure façon d’éliminer la pauvreté et de mobiliser davantage de ressources pour mettre en place des systèmes de protection sociale ambitieux, surtout dans le contexte actuel de crise financière. 

Par la suite, reconnaissant que leurs efforts pour éliminer la pauvreté ont été perturbés par la pandémie de COVID-19, plusieurs pays ont demandé au Rapporteur spécial quelles étaient les meilleures pratiques pour garantir une rémunération équitable.  C’est le cas de l’Indonésie; du Pakistan, qui a par ailleurs insisté sur la nécessité de régulariser le travail domestique et le travail informel; de la Malaisie, qui a évoqué le rôle crucial des entreprises aux côtés de l’État; et du Chili, qui veille à aider les petites entreprises pour compenser les augmentations de salaire minimum.  Le Pérou a, pour sa part, demandé au Rapporteur spécial s’il avait des éléments de comparaison entre la situation des travailleurs pauvres en Amérique latine et dans le reste du monde.  Quant au Brésil, il a cherché à faire le lien entre la justice fiscale et le salaire minimum. 

L’Union européenne (UE) a rappelé que plus de 28 millions de personnes sur le continent travaillent par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs plateformes numériques, et qu’en 2025, ce nombre devrait atteindre 43 millions de personnes.  Souhaitant mettre en place de nouvelles règles afin d’améliorer les conditions de travail et les droits sociaux de ces travailleurs, l’UE a demandé au Rapporteur spécial ce qu’il attend des négociations sur le sujet au sein de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Quant à la France, elle a voulu savoir comment, dans un contexte post-COVID-19 et de fortes contraintes budgétaires, les États pourraient financer au mieux le nouveau contrat écosocial afin de briser le cycle de la pauvreté. 

Cuba a interrogé le Rapporteur sur l’effet des mesures coercitives unilatérales sur la réduction de la pauvreté.  La Fédération de Russie a précisé qu’elle avait adopté une approche diversifiée pour assurer des opportunités professionnelles et une protection sociale à sa population, tandis que la Chine, qualifiant la sortie des travailleurs ruraux chinois de leur état d’extrême pauvreté de réussite historique, a expliqué que l’élimination de la pauvreté avait toujours été sa première priorité. 

L’État de Palestine a exigé un cessez-le-feu et un accès humanitaire immédiat dans la bande de Gaza, qualifiant le blocus et les bombardements quotidiens menés par Israël de crimes de guerre.  Israël, en réponse, a déploré une tentative de réécrire l’histoire, arguant que le seul châtiment collectif est celui imposé à la population gazaouie par le Hamas, qui l’utilise comme bouclier humain.  Prenant la parole à la suite, la République arabe syrienne a estimé que l’agresseur n’est autre que l’État hébreu et que son audace à nier cette réalité est « inouïe ».  Puis, abordant le contenu du rapport, il a mis en exergue le concept de travailleur pauvre, dont il a dit comprendre personnellement les souffrances, puisqu’une grande partie de la population syrienne entre dans cette catégorie du fait des mesures coercitives unilatérales. 

Achevant cette série d’interventions, l’Ordre souverain de Malte a rappelé que selon l’ONU, 575 millions de personnes vont vivre dans l’extrême pauvreté d’ici à 2030, assurant qu’il est à pied d’œuvre pour soutenir les plus démunis, comme au Soudan du Sud où des semences sont offertes. 

Reprenant la parole, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté a affirmé que les pays en développement étaient très souvent victimes d’une sorte de chantage de la part des entreprises qui contrôlent les chaînes mondiales d’approvisionnement et qui les menacent de partir ou de ne plus leur acheter de matières premières si les salaires augmentaient.  La seule réponse pour les gouvernements est de mettre en place et de garantir le respect d’un salaire minimum vital.  « C’est un droit élémentaire », a-t-il souligné.  Il a espéré que ce sujet figure en bonne place dans les négociations qui s’ouvraient lundi au Conseil des droits de l’homme pour l’élaboration d’un instrument juridique contraignant relatif aux entreprises et aux droits humains.  Citant l’exemple du Bangladesh qui ne peut augmenter les salaires dans le domaine textile de crainte de voir les acheteurs se tourner vers le Myanmar, il a estimé que les États étaient tous perdants dans cette course au moins-disant. 

Rappelant que l’Union européenne s’apprête à légiférer sur la question des travailleurs de l’économie numérique, le Rapporteur spécial a indiqué que de nombreuses plateformes mettaient en concurrence des travailleurs du monde entier dans des domaines tels que la comptabilité et l’édition avec une réserve de personnes prêtes à accepter des salaires très faibles à l’échelle mondiale. Il a indiqué que le salaire moyen sur ces plateformes mondialisées était de 3,40 dollars de l’heure et que la moitié travaillaient pour moins de 2,10 dollars de l’heure.  Évoquant les négociations en cours à l’Organisation mondiale du Travail (OIT)concernant les travailleurs des plateformes, il a affirmé que la question du salaire minimum serait centrale.  Les travailleurs du monde entier finiront tous perdants en cas de mise en concurrence généralisée, a-t-il mis en garde. 

Abordant la question du secteur informel en Amérique latine, il a expliqué que certains prônaient une réduction des protections des travailleurs dans le secteur formel afin d’encourager les employeurs à déclarer leurs employés, regrettant que cette position soit souvent adoptée par la Banque mondiale. S’opposant à ce point de vue, il a affirmé qu’il convenait, au contraire, d’élargir les protections existantes à tous les travailleurs.  Il s’est inquiété de l’existence de conditions d’emploi proches de l’esclavage dans le secteur agricole et a exhorté les États à faire respecter les législations existantes.  Abordant la question du financement de la transition « écosociale », il a appelé les pays développés à arrêter de subventionner les énergies fossiles, indiquant que le montant total de ces subventions atteignait 7 000 milliards de dollars en 2022 soit 7,1% du PIB mondial.  Il y a vu une source de financement considérable pour l’éducation, la santé et la protection sociale.  Enfin, il a proposé d’augmenter les taxes de succession, notant que, dans de nombreux pays, les inégalités de patrimoine étaient supérieures aux inégalités de revenu, et qu’elles progressaient plus vite.  S’agissant de la réforme de l’architecture financière mondiale, il a plaidé pour une restructuration de la dette en échange d’investissements dans la protection sociale, appelant en outre les États Membres à lutter contre l’optimisation fiscale. 

Exposé

Mme MARGARET SATTERTHWAITE, Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, a d’abord regretté une époque « très douloureuse » où le pouvoir de la loi semble bien trop faible face au fracas des armes. Elle s’est inquiétée de la grande vulnérabilité des opérateurs judiciaires indépendants dans le monde, déplorant que les juges soient menacés et harcelés ou l’objet de sanctions administratives et disciplinaires en raison de leur travail.  Elle s’est aussi inquiétée des attaques contre les avocats, en particulier ceux qui représentent les défenseurs des droits humains et les figures de l’opposition politique.  Nombre d’entre eux sont surveillés, criminalisés, détenus et même tués, a-t-elle rapporté. 

Poursuivant, la Rapporteuse spéciale a indiqué que 5,1 milliards de personnes, soit les deux tiers de la population mondiale, n’ont pas d’accès véritable à la justice.  Elle a évoqué la situation des travailleurs sans papiers qui n’ont aucune voie de recours s’ils ne sont pas payés, ainsi que celle des communautés contraintes d’abandonner leurs sources hydriques lorsque celles-ci sont polluées par les déchets toxiques des sociétés minières.  Il existe parfois des lois qui permettent de remédier à ces problèmes, mais les personnes concernées peuvent ne pas en être informées ou ne pas avoir moyen d’en faire usage, a-t-elle expliqué.  En outre, le nombre d’avocats et de juges est loin d’être suffisant pour combler ce déficit de justice, a-t-elle déploré.

Face à ce problème, la Rapporteuse spéciale a vanté les mérites de l’autonomisation juridique qui consiste à soutenir la capacité des communautés à connaître, utiliser et façonner elles-mêmes le droit.  Et cette méthode relativement peu coûteuse a déjà fait ses preuves, s’est-elle réjouie.  Elle a également appelé à élargir l’écosystème juridique en appuyant les travailleurs de la justice de proximité qui, a-t-elle expliqué, reçoivent en général une formation plus limitée dans un domaine précis, notamment la négociation ou le plaidoyer.

Souvent issus des communautés elles-mêmes, ces travailleurs de la justice élargissent les possibilités offertes aux personnes confrontées à des problèmes juridiques, ou les orientent vers des avocats lorsqu’une expertise technique est nécessaire, contribuant ainsi à démocratiser l’état de droit.

Pourtant, nombre d’entre eux sont la cible d’attaques ou de campagnes de dénigrement, ou travaillent sous la menace d’une criminalisation pour avoir prodigué des conseils ou mené d’autres activités d’autonomisation juridique qui sont parfois considérées comme équivalant à une pratique juridique non autorisée.  La Rapporteuse spéciale a donc appelé les États Membres à travailler avec les barreaux pour dépénaliser la fourniture d’une assistance juridique par des travailleurs de la justice de proximité ayant reçu une formation. 

Dialogue interactif

Le Lesotho a admis que son système judiciaire est sous-financé, mais a détaillé ses efforts pour y remédier, notamment via une aide internationale.  Reconnaissant l’importance d’englober dans l’écosystème judiciaire tous les travailleurs de la justice communautaire, afin d’améliorer son accessibilité aux personnes en situation de vulnérabilité, particulièrement dans le contexte de la violence sexuelle et sexiste, l’Union européenne a d’abord demandé à la Rapporteuse spéciale de citer les meilleures pratiques en ce qui concerne une approche multipartite et communautaire de la réalisation de l’ODD 16.3, avant de poser la question de l’impartialité et de l’indépendance du pouvoir judiciaire.  Quel est l’impact de la corruption sur l’accès à la justice pour tous et que peuvent faire les États Membres face à l’intimidation des juges? a demandé le Liechtenstein, qui s’est inquiété des mandats d’arrêt émis par la Fédération de Russie contre des juges de la Cour pénale internationale. 

Le Chili a indiqué qu’il allait recevoir la Rapporteuse spéciale l’année prochaine, avant de s’intéresser aux mesures capables d’améliorer l’éducation juridique, notamment concernant les groupes vulnérables.  La Colombie a demandé plus de détails sur le lien entre l’accès à l’information juridique et l’ODD 16.6, tandis que l’Indonésie a souhaité savoir comment mettre les recommandations en pratique en tenant compte des disparités de ressources entre les États. 

Les États-Unis ont regretté que, dans de nombreuses régions du monde, les juges prennent leurs décisions sur ordre des gouvernements.  Comment susciter une plus grande prise de conscience sur l’importance de l’indépendance de la justice pour protéger les droits humains? La Fédération de Russie s’est inquiétée de la violation systématique des droits humains des personnes ne partageant pas les points de vue officiels.  Elle s’est également préoccupée de la situation aux États-Unis où les personnes noires se voient imposer des peines plus sévères et constituant la majorité des détenus, demandant des explications à la Rapporteuse à ce sujet.

Le système judicaire russe était le premier à être soumis au pouvoir politique, a affirmé l’Ukraine qui a demandé instamment l’arrêt des violations massives des droits humains dans les territoires ukrainiens occupés, et plus particulièrement en Crimée.  La Chine a appelé à respecter la diversité des traditions judiciaires dans le monde, suivie de l’Ordre souverain de Malte qui a souligné l’importance d’un financement adéquat du système judiciaire. 

Répondant aux questions et remarques des délégations, la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats a de nouveau exhorté les États à soutenir la dépénalisation des activités des travailleurs de la justice de proximité, déplorant, à nouveau, qu’ils fassent l’objet de campagnes de calomnies.  Quand l’expertise des avocats et des juges est requise, ces derniers devraient collaborer avec les États.

Abordant le volet des bonnes pratiques, la Rapporteuse spéciale a cité l’exemple d’une communauté autochtone qui, grâce à la formation de certains de ses membres, avait pu dénoncer des activités illicites nuisant à son environnement et demander un appui juridique pour y mettre un terme.  Les approches communautaires peuvent également être utiles face à la corruption, a-t-elle ajouté. 

La Rapporteuse spéciale a ensuite déploré la pénurie de données pertinentes sur l’ODD 16.3, tout en assurant qu’il est néanmoins possible d’effectuer des enquêtes sur les besoins judiciaires des populations.  C’est la manière la plus efficiente de déterminer si les services de justice en question fonctionnent, ou pas, a-t-elle indiqué. Elle a également vanté les mérites de la collecte de « petites données », qui peuvent être compilées à un niveau national, et ainsi permettre de jauger où un État se situe sur le chemin de la promotion de la justice pour tous. 

Exposé

M. MORRIS TIDBALL-BINZ, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, présentant les conclusions de son rapport, s’est alarmé du nombre important de victimes d’exécutions, y compris de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, dans le monde.  Ces victimes, a précisé le Rapporteur spécial, sont le plus souvent des femmes, des enfants et des personnes âgées, mais aussi des dissidents politiques, des défenseurs des droits humains et de l’environnement, des journalistes, ou des représentants de minorités et de groupes vulnérables. 

S’attardant sur les meurtres fondés sur le genre ou l’orientation sexuelle, en particulier les féminicides qu’il a qualifiés de « pandémie entraînant des centaines de milliers de morts dans le monde », M. Tidball-Binz a regretté que ceux-ci fassent souvent l’objet d’enquêtes insuffisantes de la part des autorités.  Il a ainsi appelé à mettre fin à cette « tragédie mondiale, inacceptable et choquante » qui, a-t-il souligné, engage sérieusement la responsabilité des États.  Il s’est, par ailleurs, lamenté que la peine de mort continue d’être utilisée de manière discriminatoire et en violation flagrante du droit international. 

Pour contrer le fléau des exécutions sommaires, en particulier des femmes et des filles, y compris les transgenres, le Rapporteur spécial a avancé des recommandations fondées sur des normes internationales et des bonnes pratiques. Il a notamment évoqué le modèle de protocole latino-américain d’enquête sur les morts violentes de femmes pour des raisons de genre, élaboré par le Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et ONU-Femmes.  Le devoir des États de respecter et de protéger le droit à la vie « n’est pas une option, mais une obligation », a-t-il conclu. 

Dialogue interactif

Le Pakistan s’est inquiété des féminicides organisés dans le Jammu-et-Cachemire, occupé par l’Inde, et a demandé au Rapporteur spécial de se pencher sur cette question.  Que faire pour que les autres titulaires de mandat s’en saisissent également?  L’Ukraine a souligné que des centaines de civils ukrainiens ont été victimes d’exécutions sommaires ou arbitraires aux mains des forces russes et a espéré que la prochaine visite, en décembre, du Rapporteur spécial en Ukraine permettra d’ouvrir des enquêtes.  Le Mexique s’est inquiété de la prévalence de l’impunité pour les cas de féminicides.  Que faire pour lutter contre la violence domestique et particulièrement les féminicides aux mains du conjoint?  Au nom des pays nordiques, la Suède a noté l’intérêt de la proposition du Rapporteur spécial d’élaborer un addenda au Protocole du Minnesota afin d’améliorer les enquêtes concernant les crimes basés sur le genre et a demandé quelles étaient les étapes à venir à cette fin. 

La Colombie a expliqué comment elle mettait en œuvre le Protocole du Minnesota, suivie de la Belgique qui s’est préoccupée des féminicides commis par les États, rappelant qu’aujourd’hui, 5 000 femmes se trouvent dans le couloir de la mort dans au moins 41 pays.  La peine de mort constitue parfois un féminicide, en raison des discriminations préexistantes, a fait observer la délégation qui a demandé comment améliorer l’intégration d’une perspective de genre dans les enquêtes des forces de police.  Quelles sont les trois mesures immédiates les plus importantes à adopter pour mieux enquêter sur les féminicides dans le monde, a renchéri le Royaume-Uni.  Le représentant du Myanmar a regretté l’absence d’action décisive du Conseil de sécurité pour faire cesser les violations massives des droits humains commises par la junte au pouvoir dans son pays et a demandé au Rapporteur spécial comment faire pour que les États Membres se mobilisent à cette fin.  L’Union européenne a appelé à traiter les causes profondes des discriminations de genre, insistant en outre sur l’importance d’améliorer la collecte de données liées au féminicide. 

Le Chili a indiqué qu’il avait inclus le délit de « suicide-féminicide » à sa législation, et prévoyait une pension pour les enfants des victimes de féminicides et de suicides-féminicides.  Par ailleurs, comment obtenir un consensus afin d’inclure une perspective de genre dans les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil des droits de l’homme?  Chypre a rappelé qu’en 2021, 80 000 femmes et filles avaient été tuées volontairement dont 45 000 par des membres de leur famille, ce qui signifie que cinq femmes et filles sont tuées par des membres de leur famille chaque heure, faisant du foyer l’endroit le plus dangereux pour elles.  La délégation a ajouté que l’an dernier, Chypre avait adopté une loi spécifique sur le féminicide qui en faisait un crime distinct dans le code pénal, soit une première en Europe. 

Soulignant que la notion de féminicide n’était pas encore largement reconnue sur la scène internationale, la Fédération de Russie a appelé à se concentrer sur les questions d’exécutions extra-judiciaires, s’inquiétant de la propagation du phénomène particulièrement de la part des soldats ukrainiens.  Le Maroc a indiqué qu’il observait un moratoire sur la peine de mort, suivi de l’Inde qui a détaillé les mesures adoptées pour protéger les femmes de la violence, notamment à travers des postes de police spécialement conçus pour leur permettre de porter plainte dans un environnement rassurant.  La délégation a par ailleurs condamné la propagande du Pakistan la prenant pour cible. 

Les États-Unis se sont préoccupés de l’impunité persistante dans les cas d’exécutions extrajudiciaires, notamment commises par des individus d’un État sur le territoire d’un autre État.  Notant que les communautés vulnérables étaient particulièrement touchées, ils se sont intéressés aux meilleurs pratiques pour rétablir la confiance en l’État au sein de ces communautés et dans le cadre de processus de justice transitionnelle.  La Chine a défendu sa politique de maintenir la peine de mort avec un contrôle très strict, ce qu’elle a qualifié de choix prudent adapté à son contexte national.  De son côté, l’Ordre souverain de Malte a relayé l’appel du Pape pour abolir la peine de mort. 

Reprenant la parole après ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a souligné l’importance de s’engager dans des politiques publiques concrètes pour lutter contre les féminicides, un crime qui reste largement impuni dans de nombreux pays.  « Ce n’est donc pas la peine de réinventer la roue », a-t-il martelé, insistant sur l’adoption de mesures fondées sur de bonnes pratiques internationales, notamment celles déjà mises en pratique en Amérique latine. 

Le Rapporteur spécial a relevé l’absence de législation sur le féminicide dans la plupart des pays du monde, avant d’affirmer que la caractérisation juridique précise de ce délit était essentielle pour l’efficacité des enquêtes. Ainsi, le Mexique lui est apparu comme un exemple à suivre, où des procureurs spécialisés ont les moyens de bien mener leurs enquêtes.  Il est par ailleurs fondamental de protéger les victimes, a-t-il ajouté, en mentionnant l’initiative chilienne de créer un fonds spécialisé pour les mineurs dont la mère a été victime de féminicide.  En conclusion, il s’est à nouveau référé à la coopération internationale, notamment Sud-Sud, et à la mise en pratique des mesures développées par des organisations comme ONU-Femmes. 

Exposé

Mme FIONNUALA NÍ AOLÁIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a tout d’abord évoqué les récents actes de terrorisme commis en Israël, à Bruxelles et au Pakistan, ainsi que les attaques continues contre des civils au Sahel, plaidant pour une prévention du terrorisme qui aille « au-delà de la compassion ».  Au titre de ses activités de l’année écoulée, elle a fait état de visites effectuées en Bosnie-Herzégovine, en Allemagne, en Macédoine du Nord, aux États-Unis, au camp de détention de Guantanamo, à Cuba, et dans le nord-est de la Syrie. 

La Rapporteuse spéciale a précisé que son rapport, présenté en mars au Conseil des droits de l’homme, traite des conséquences sur les droits humains de l’utilisation des nouvelles technologies, notamment les drones armés, les données biométriques, les interfaces de programmation et les systèmes de surveillance.  Elle a par ailleurs attiré l’attention de la Commission sur les conclusions de l’étude mondiale sur les effets de la lutte contre le terrorisme sur la société civile et l’espace civique.  Ces conclusions ne sont pas « abstraites », a-t-elle affirmé, constatant que les atteintes aux activités légitimes de la société civile empêchent de plus en plus cette dernière d’effectuer son travail vital. 

Depuis des décennies, a-t-elle relevé, les organisations de la société civile et les mécanismes de défense des droits humains des Nations Unies mettent en garde contre la persistance et le défi que représente l’utilisation abusive des mesures de lutte contre le terrorisme et de protection de la vie privée. Les données ainsi collectées ont pourtant été ignorées ou rejetées, a regretté Mme Ní Aoláin, avant de former le vœu que l’extraordinaire consolidation de données de l’étude en question permettra d’alimenter le débat sur la nature, la forme et les conséquences des violations des droits humains perpétrées au nom de la lutte contre le terrorisme et/ou l’extrémisme violent.

Si la matrice des préjudices varie selon les communautés et les pays, l’étude constate que la multiplicité des mesures décrites est constante: lorsque les États déploient des mesures de lutte contre le terrorisme ou de protection des témoins, ils entrent dans un domaine d’exceptionnalité, où les déficits en matière de droits humains sont omniprésents et où les règles normales de respect des droits et de protection procédurale ne s’appliquent généralement pas, a expliqué Mme Ní Aoláin.  Concrètement, a-t-elle détaillé, l’utilisation abusive de la lutte contre le terrorisme et de la protection de la vie privée entraîne le recours abusif à des mesures antiterroristes à l’encontre des minorités religieuses, ethniques et culturelles, des femmes, des filles, des LGBT et des personnes de sexe différent, ou encore des communautés autochtones.

Or, bien que ces abus généralisés et systématiques aient des conséquences directes sur les droits de la société civile, il n’existe que peu de recours adéquats, et ce, en dépit des recommandations adressées aux États Membres, aux Nations Unies et autres acteurs dans le but de transformer ce statu quo, a déploré la Rapporteuse spéciale.  Selon elle, l’étude fait apparaître la résilience et les innombrables contributions de la société civile à la dignité humaine et à l’égalité, malgré les immenses pressions auxquelles elle est confrontée. 

Abordant ensuite sa visite technique aux États-Unis et au camp de détention de Guantanamo, Mme Ní Aoláin s’est réjouie de l’important précédent que représentent ces déplacements, peu de pays ayant « le courage d’examiner leur passé douloureux en matière de droits humains ».  Exposant ses conclusions, elle a noté que, malgré des améliorations depuis l’ouverture du centre, les conditions de détention continuent d’atteindre le « niveau de traitement cruel, inhumain et dégradant prévu par le droit international ».  Elle a insisté sur les « défis extrêmes » en matière de droits humains auxquels sont confrontés les anciens détenus, notamment la pénurie, les problèmes de santé persistants, l’absence de réadaptation à la torture, la surveillance et, dans certains cas, le ré-emprisonnement et la retorture. 

Mme Ní Aoláin a également parlé de sa visite technique, en juillet dernier, dans des lieux de détention du nord-est de la République arabe syrienne, remerciant le Gouvernement syrien de l’avoir facilitée.  Rappelant les violations du droit international commises par le groupe terroriste Daech, elle a constaté que la population est confrontée à des défis quotidiens et que des violations flagrantes des droits de l’enfant continuent d’être perpétrées, notamment dans les camps de Hol et Roj et dans la prison d’Alaya.  La grande majorité de la population détenue, estimée à 70 000 personnes, est constituée d’enfants, a-t-elle rapporté, décrivant le nord-est de la Syrie comme « le plus grand site de détention d’enfants pour cause de terrorisme au monde ».  Selon la Rapporteuse spéciale, l’ampleur, la portée et l’étendue des pratiques abusives dans ces lieux de détention « peuvent atteindre le seuil des crimes contre l’humanité en vertu du droit international ».  Enjoignant à tous les acteurs de cesser de saper les droits de l’enfant et d’adopter une position de protection, elle a également appelé les États à rapatrier leurs ressortissants car, a-t-elle dit, « c’est la seule solution aux multiples violations des droits humains et du droit international humanitaire, et à la crise humanitaire sur ce territoire ». 

Dialogue interactif

Réagissant l’exposé de la Rapporteuse spéciale, la Suisse a rappelé que les mesures antiterroristes sont utilisées trop souvent contre des défenseurs des droits humains.  Elle a voulu en savoir plus sur les mesures susceptibles de garantir leur protection.  Le Maroc a fait état d’un renforcement de sa riposte antiterroriste, et ce, dans une approche régionale associant les Nations Unies.  La délégation a demandé des exemples de mesures permettant d’empêcher le recrutement d’enfants à des fins terroristes.  Le Mexique a condamné sans équivoque les attaques perpétrées le 7 octobre en Israël, appelant toutefois ce pays à autoriser sans délai le passage de l’aide humanitaire à Gaza.  S’élevant contre l’extrémisme « anti-islamique néofasciste », le Pakistan a condamné les mesures antiterroristes servant à réprimer les peuples occupés, comme au Jammu-et-Cachemire et en Palestine.  Pour sa part, Cuba a condamné les « pratiques cruelles et inhumaines » des États-Unis dans le camp de détention de Guantanamo, la Fédération de Russie estimant, elle, que ce camp de détention « ne devrait même pas exister ».  La délégation russe a d’autre part signalé que 34 enfants ont été récemment rapatriés de Syrie vers la Russie et que beaucoup d’autres devraient bientôt revenir.  La Belgique a elle aussi fait état du rapatriement 33 enfants belges des camps du nord-est de la Syrie.  La République de Corée a insisté sur l’impact délétère des nouvelles technologies sur les droits humains dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. 

L’Irlande a ensuite exhorté tous les États à mettre les droits humains au cœur de leur riposte antiterroriste.  L’Égypte a quant à elle indiqué que sa stratégie antiterroriste prévoit un soutien aux victimes de ce fléau, avant d’interroger la Rapporteuse spéciale sur le rôle que les ONG peuvent jouer dans cette lutte.  L’Union européenne, s’alarmant des cas de refus d’accès humanitaire, ainsi que des violations des droits humains qui pourraient impliquer des crimes fondamentaux subis par les enfants, a souhaité savoir comment rendre prévisibles de tels accès.  À sa suite, l’Afrique du Sud s’est alarmée du blocus imposé à la bande de Gaza. De son côté, la République arabe syrienne s’est félicitée qu’« enfin quelqu’un parle de ce qui passe dans le nord-est du pays ».  Elle a cependant reproché à la Rapporteuse spéciale d’avoir omis de préciser que la force qui détient des enfants dans ce territoire syrien est constituée de milices séparatistes, soutenues par les États-Unis, lesquels sont présents dans toute cette région. « Coopérez avec nous pour rapatrier toutes les personnes de toutes les nationalités détenues en Syrie », a‑t‑elle exhorté. 

Après avoir décrit le terrorisme comme « l’ennemi commun de l’humanité », la Chine a appelé les États Membres à travailler collectivement pour lutter contre ce fléau et à s’opposer à la politique de « deux poids, deux mesures » sur cette question.  L’Inde a, elle, rejeté les allégations du Pakistan concernant le Jammu-et-Cachemire, qui fait « partie intégrante » de son territoire, jugeant inutile de répondre à cette « propagande ».  L’Ukraine s’est déclarée en accord avec la Fédération de Russie quand celle-ci affirme que tous les États doivent rendre les enfants à leurs familles, l’accusant d’une politique de « deux poids, deux mesures » en la matière puisqu’elle se livre à une politique d’enlèvements d’enfants ukrainiens.  Elle a demandé leur retour immédiat et a dénoncé le « lavage de cerveau agressif » auquel les enfants ukrainiens sont soumis, en violation de la Quatrième Convention de Genève et de la Convention relative aux droits de l’enfant.  Enfin, l’Ordre souverain de Malte a souhaité savoir comment les agences humanitaires peuvent collaborer pour empêcher l’exploitation de l’aide humanitaire à des fins terroristes. 

Reprenant la parole après les nombreuses questions des délégations, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste a partagé sa position sans équivoque concernant les victimes du terrorisme: « elles sont fatiguées de votre compassion et de votre solidarité; ce dont elles ont vraiment besoin, c’est de l’application de leurs droits et de la prévention du terrorisme », a-t-elle affirmé.  Répondant à la question de la Suisse et de la Belgique sur l’usage abusif du contreterrorisme, la Rapporteuse spéciale a expliqué que les États qui ciblent les journalistes ou les humanitaires ne se contentent pas de violer les droits humains, « ils pratiquent également un mauvais contre-terrorisme ».  Car la société civile est en réalité la mieux placée pour prévenir la violence à long terme, a-t-elle fait valoir.

Abordant la question des ressortissants détenus en Syrie, notamment des enfants, la Rapporteuse spéciale a réitéré la nécessité pour les États de les rapatrier, martelant qu’il s’agit là de « la seule solution conforme au droit international » et saluant les efforts déjà faits en ce sens par de nombreux pays, dont les États-Unis, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, la Belgique, la France, la Fédération de Russie ou l’Iraq.  À propos des enfants dans les conflits armés, justement, elle a regretté l’échec collectif à observer la Convention relative aux droits de l’enfant.  En ce qui concerne l’accès humanitaire, elle a appuyé l’appel du Secrétaire général à garantir un tel accès dans tous les contextes, y compris à Gaza.  Elle a en outre fermement condamné la prise d’otages par des groupes armés tels que le Hamas. Interrogée sur la discrimination dans le contre-terrorisme, elle a rappelé que le terrorisme « sous toutes ses formes » doit être rejeté.

Pour ce qui est du rôle des technologies de surveillance dans le contre-terrorisme, Mme Ní Aoláin a dénoncé l’utilisation de logiciels espions commerciaux, « menace existentielle pour la société civile », avant d’appeler à leur régulation immédiate.  Concernant les installations de détention, elle a encouragé les autres États à suivre l’exemple des États-Unis en permettant leur accès sans restriction, même lorsqu’ils sont de haute sécurité.  Enfin, elle a mis en lumière l’usage problématique du terme « extrémisme », de plus en plus « synonyme de terrorisme ».  À ses yeux, cette confusion sert mal l’état de droit et mine les engagements fondamentaux en matière de contre-terrorisme. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: unanimité autour du Programme pour la diffusion du droit international, impasse au sujet du rapport du Comité spécial de la Charte

Soixante-dix-huitième session,
21e & 22e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3697

Sixième Commission: unanimité autour du Programme pour la diffusion du droit international, impasse au sujet du rapport du Comité spécial de la Charte

Les délégations ont été aujourd’hui, unanimes, à la Sixième Commission chargée des questions juridiques, à saluer la qualité du Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.  Les divergences se sont en revanche fait jour au sujet du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation.  Ce rapport n’a en effet pas pu être adopté pour la deuxième année consécutive.

Le Programme d’assistance est un instrument clef pour des relations internationales amicales, dans le respect de la Charte, a d’emblée déclaré l’Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, en soulignant son apport pour réaliser l’ODD 16 sur la paix et la justice.  L’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, a lui, insisté sur les ressources offertes par la Médiathèque de droit international, jugeant primordiales ces activités pour l’Afrique, notamment pour le renforcement des capacités des professionnels africains du droit. 

Même son de cloche du côté de Cuba, qui, au nom du G77 et de la Chine, a exprimé la reconnaissance de sa délégation pour le Programme d’assistance et la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer, soulignant qu’il permet de tisser « des relations d’amitié ». Plus d’un demi- siècle après sa création, le Programme d’assistance revêt toujours une valeur ajoutée pour les pays en développement, a rappelé la déléguée de ce pays.

Les délégations, à l’instar de l’Union européenne, se sont en particulier réjouies de la reprise des trois cours régionaux de droit international pour l’Afrique, pour l’Asie et le Pacifique et pour l’Amérique latine et les Caraïbes après « les assauts de la COVID-19 », selon la formule du Cameroun.  Si les délégations ont donné leur préférence aux programmes de formation en présentiel, « notamment en termes d’interactions » comme l’a expliqué Singapour, d’autres, comme l’Iran, ont estimé que des cours à distance peuvent être une solution de repli si les circonstances l’exigent.

Certaines délégations ont offert des pistes d’amélioration.  Le Mexique a ainsi appelé à promouvoir l’égalité des sexes et une meilleure représentation géographique dans les contenus du Programme d’assistance, tout en mettant l’accent sur le multilinguisme.  La formation et les séminaires régionaux devraient englober les différents systèmes juridiques du monde afin de favoriser la diversité et l’inclusion, a appuyé le Pakistan.  La Fédération de Russie a souhaité que les bourses soient attribuées aux candidats « les plus méritants et les plus prometteurs ».

La question du financement pérenne du Programme d’assistance a été abordée par la plupart des délégations, dont la Mauritanie et la République-Unie de Tanzanie. « Au moment où nous percevons de plus en plus les signes de raréfaction des ressources et que la tendance est à la restriction tous azimuts », le représentant du Cameroun a noté avec intérêt l’allocation des ressources nécessaires dans le budget ordinaire de l’ONU pour 2024. 

Singapour, au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a rappelé que celle-ci est associée au financement du budget du Programme d’assistance et a remercié, à l’instar des États-Unis, les États Membres qui se sont engagés à offrir des financements additionnels.  « Parce qu’il répond à une demande croissante de formation et d’accès aux ressources du droit international, la France a versé, au titre de sa contribution volontaire de 2023, 70 000 euros afin de soutenir le programme d’assistance », a informé la déléguée de ce pays.

La Commission a entamé ensuite son débat sur le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, en entendant notamment son Président, M. Zéphyrin Maniratanga, regretter que le rapport du Comité n’ait pu être adopté, à l’exception de dispositions procédurales. 

« Cela est dû au fait qu’une délégation refuse que le rapport reflète les discussions tenues », a déclaré la déléguée de la Géorgie, au nom de l’Ukraine et de la République du Moldova.  « La Russie a abusé de la pratique consensuelle d’une adoption du rapport paragraphe par paragraphe, en excluant tous les paragraphes qui sont une part essentielle du rapport et sont capitaux pour nos trois pays. »  La représentante de l’Union européenne a, elle aussi, exprimé sa déception face au fait que, pour la deuxième année consécutive, le Comité spécial a conclu ses travaux sans adopter de rapport de fond du fait de l’opposition « d’une délégation ». 

Cela fait plus d’un an que nous abordons la question des méthodes du Comité spécial, s’est plaint le délégué de la Fédération de Russie, et malheureusement, « un grand nombre d’initiatives spécifiques » sont bloquées pour des raisons politiques, toujours par les mêmes pays, a-t-il accusé. D’après lui, la meilleure façon de rendre efficace le travail de cet organe est de passer à la discussion sur diverses « propositions de fond » portant sur le règlement pacifique des différends.  Le Bélarus et l’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, ont, quant à eux, noté la « politisation des travaux » du Comité spécial.

La Sixième Commission entamera lundi 23 octobre, à 10 heures, l’examen du rapport de la Commission du droit international.

PROGRAMME D’ASSISTANCE DES NATIONS UNIES AUX FINS DE L’ENSEIGNEMENT, DE L’ÉTUDE, DE LA DIFFUSION ET D’UNE COMPRÉHENSION PLUS LARGE DU DROIT INTERNATIONAL A/78/514

Présentations

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), Président du Comité consultatif pour le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international, a présenté le rapport annuel du Secrétaire général sur la question. Il a noté que le Programme d’assistance continue de profiter de l’appui des membres.  Ses activités restent plébiscitées, en particulier les cours régionaux de droit international des Nations Unies en Afrique, Amérique latine et Caraïbes, Asie et Pacifique et le Programme de bourses de perfectionnement en droit international. 

M. Agyeman a rappelé l’importance des programmes en présentiel pour la tenue desdits cours.  Il a précisé que 32 cours magistraux ont été inscrits à la Médiathèque de droit international des Nations Unies avec une attention apportée au multilinguisme et à une bonne représentation des traditions juridiques.  Les ressources de la Médiathèque doivent être renforcées, a-t-il dit.  Plus globalement, il a souligné la nécessité de contributions volontaires supplémentaires pour le Programme d’assistance.

M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, a fait état des difficultés que le Programme d’assistance a traversées pendant la pandémie de COVID-19, qui ne permettait pas d’organiser les nombreux programmes en présentiel.  Toutefois, le Programme d’assistance a reçu des centaines de candidatures à cette période, ce qui montre un intérêt continu, et les difficultés de la pandémie ont été surmontées depuis.  Les programmes sont publiés sur le site de la Médiathèque de droit international des Nations Unies.

Le Secrétaire général adjoint a noté que le budget ordinaire permet un financement stable des programmes, rappelant toutefois la nécessité de contributions additionnelles pour lesquelles il a remercié les principaux donateurs.  Il a ensuite expliqué que sa proposition de poursuivre le Programme d’assistance avait été bien accueillie et soutenue par le Bureau des affaires juridiques.  Il a expliqué avoir nommé M. Markus Pallek en tant qu’Administrateur général jurisconsulte au renforcement des capacités au sein des différentes unités du Bureau des affaires juridiques, ainsi que Secrétaire du Comité consultatif sur le Programme, afin qu’il l’assiste dans sa mission.  M. Pallek, a-t-il précisé, est chargé de voir dans quelle mesure le Bureau peut assister les États Membres efficacement, de mettre en œuvre les programmes, d’assurer les bonnes pratiques et de nouer des partenariats. 

M. MARKUS PALLEK, Secrétaire du Comité consultatif sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international, a donné un aperçu de l’exécution du Programme d’assistance, à travers les programmes de formation, la Médiathèque de droit international et les publications du Bureau des affaires juridiques.  Il a fait part des quatre programmes de formation mandatés par l’Assemblée générale: le Programme de bourses de perfectionnement en droit international tenu à La Haye et les trois cours régionaux de droit international, respectivement pour l’Afrique, pour l’Asie et le Pacifique, et pour l’Amérique latine et les Caraïbes.  À ce titre, M. Pallek a rappelé que parmi les 100 participants qui ont suivi les programmes de formation, 82 personnes venues de 68 États différents avaient bénéficié d’une bourse couvrant la totalité de leurs frais, en soulignant qu’une parité globale entre femmes et hommes avait été respectée. 

S’agissant de la Médiathèque de droit international des Nations Unies, le Secrétaire a indiqué qu’avec quelque 600 conférences en ligne, la Médiathèque avait été consultée par près de 2,9 millions d’utilisateurs.  Il a ensuite présenté la liste des publications juridiques publiées sur la période et rappelé que l’appel à candidatures au cours régional en langue française de droit international pour l’Afrique, pour lequel il a encouragé les candidatures féminines, était ouvert jusqu’au 31 octobre.  Enfin, il a remercié l’Assemblée générale d’avoir inclus le Programme d’assistance dans le budget ordinaire, notant que si cela permettait l’organisation des activités sur une base continue, les contributions volontaires restaient néanmoins essentielles.

Mme ALICE HICUBURUNDI, Administratrice générale jurisconsulte de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer du Bureau des affaires juridiques, a déclaré que 34 boursiers, dont 16 femmes, provenant de 30 pays en développement, ont bénéficié de la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer.  Aujourd’hui, nombre d’entre eux jouent un rôle actif au nom de leur État ou d’autres organisations nationales et régionales lors de forums liés aux affaires maritimes et au droit de la mer.  Les ateliers régionaux de formation, comme ceux menés cette année au Chili, au Cameroun ou encore aux Seychelles, visent à répondre aux besoins stratégiques des pays émergents en matière de gouvernance des océans et du droit de la mer.  Il est plus important que jamais pour les pays en développement d’être en mesure de participer activement aux processus liés aux océans et d’appliquer efficacement le droit international de la mer, a expliqué Mme Hicuburundi, notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et d’autres instruments internationaux connexes. 

Afin que les bourses issues de la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe soient mises en œuvre de manière cohérente, Mme Hicuburundi a demandé que les fonds nécessaires soient mis à disposition.  En date du 31 juillet 2023, l’actif net du Fonds fiduciaire de la Dotation s’élevait à environ 120 000 dollars, a-t-elle précisé, les coûts d’une bourse pouvant atteindre les 75 000 dollars.  Ainsi, faute de de fonds suffisants, aucune bourse n’a été décernée entre 2007 et 2009, de même qu’en 2014 et en 2016.  La date limite des candidatures pour le prochain cycle des bourses Hamilton Shirley Amerasinghe, en 2024, est le 12 novembre 2023.  Elle a encouragé les États Membres à poursuivre leurs contributions volontaires pour soutenir les futurs boursiers. 

Débat général

M. BAHRAM HEIDARI (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a indiqué que le Programme d’assistance est un instrument clef pour des relations internationales amicales, dans le respect des principes de la Charte des Nations Unies.  Le Programme d’assistance est capital pour la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 16, a-t-il dit.  Il a souligné l’importance des cours régionaux de droit international des Nations Unies en Afrique, Amérique latine et Caraïbes, Asie et Pacifique.  Le délégué a déploré l’annulation de certaines activités en raison de la pandémie de COVID-19.  Si les cours en présentiel sont préférables, des cours à distance peuvent être une solution de repli si les circonstances l’exigent.  Le délégué a salué les formations de la Médiathèque de droit international des Nations Unies, tout en soulignant l’importance de veiller à une bonne représentation géographique parmi les conférenciers.  Il est essentiel d’assurer le bon financement de ce Programme, a-t-il conclu.

Mme ARIANNA CARRAL CASTELO (Cuba), au nom du G77 et de la Chine, a exprimé la reconnaissance de sa délégation pour le Programme d’assistance et la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer, soulignant qu’il permet de tisser « des relations d’amitié ». Plus d’un demi-siècle après sa création, le Programme d’assistance revêt toujours une valeur ajoutée pour les pays en développement, a-t-elle rappelé, en assurant des formations en droit international et en permettant à ces pays de participer davantage aux relations multilatérales.  Espérant que le Programme continuera d’être financé, elle a attiré l’attention sur les cours régionaux récemment organisés à Santiago du Chili, à Bangkok et à Addis Abeba, ainsi que sur les ateliers régionaux en ligne sur le règlement pacifique des différends internationaux.  Saluant la qualité de la Médiathèque de droit international, « un outil ouvert à tous et gratuit », la représentante a noté que son accès est devenu plus inclusif encore avec la mise à disposition d’ordinateurs.  Elle a souligné l’importance du Programme d’assistance pour l’ODD 16, dans la mesure où ses activités garantissent une plus large diffusion du droit international et viennent, à terme, renforcer l’état de droit. 

M. MARVIN INKONDERE (Ouganda), au nom du Groupe des États d’Afrique, s’est félicité des activités relatives au programme de bourses de droit international et des cours régionaux de droit international des Nations Unies, ainsi que des ressources offertes par la Médiathèque de droit international, jugeant primordiales ces activités pour l’Afrique, notamment pour le renforcement des capacités des professionnels africains du droit.  Il a cité en exemple le cours régional de droit international accueilli par le Gouvernement éthiopien à Addis-Abeba.  Le représentant a par ailleurs espéré la reprise de toutes les activités du programme de bourses en présentiel.  Il a salué les activités de formation continue proposées par la Division de la codification.  Il a en outre encouragé le Secrétariat à étendre son soutien pour la poursuite du séminaire des universités africaines sur le droit international.  Soulignant ensuite l’importance de « garantir le budget prévisible nécessaire aux activités du Programme d’assistance », le représentant a estimé que les allocations du budget ordinaire de l’ONU devraient être une priorité pour l’ensemble des États Membres.  Outre les contributions volontaires des États, il a aussi encouragé celles des entités et individus intéressés, afin de créer une « prévisibilité de financement pour le Programme » et d’étendre ses activités. 

Mme HAYLEY-ANN MARK (Saint-Vincent-et-les Grenadines), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), s’est prononcée en faveur du renforcement de l’enseignement et de la diffusion du droit international par l’ONU.  Elle s’est félicitée des directives et des recommandations concernant la mise en œuvre du Programme d’assistance pour la période 2023-2024. Selon la représentante, les dotations et cours offerts, y compris le Programme de bourses de perfectionnement en droit international, qui permet aux participants de suivre des formations à l’Académie de droit international de La Haye, ont un effet multiplicateur pour les étudiants et les professionnels.  Considérant que les cours régionaux constituent des instances utiles pour enseigner le droit international dans des pays comme ceux de la CELAC, la représentante a demandé que les ressources nécessaires soient allouées aux trois cours régionaux du Programme d’assistance dans le budget ordinaire de l’ONU 2023-2024.  Elle s’est en outre félicitée que le cours régional sur le droit international pour l’Amérique latine et les Caraïbes ait pu être organisé cette année au Chili. 

La représentante a salué les efforts déployés par le Bureau des affaires juridiques pour assurer le fonctionnement de 26 sites Internet portant sur le droit international.  De même, le site des séries législatives, les archives et la Médiathèque constituent des outils indispensables pour atteindre les objectifs du Programme.  Elle s’est également félicitée de la publication électronique de documents juridiques, notamment les recueils de sentences arbitrales. Qui plus est, elle a jugé particulièrement précieuse la publication des compilations des décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans toutes les langues officielles de l’Organisation. 

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne (UE), a dit son attachement au Programme d’assistance, en saluant la transition numérique opérée lors de la pandémie de COVID-19.  Elle a néanmoins souligné l’importance des séances en présentiel et salué la reprise des cours régionaux dans ce format.  La représentante a recommandé de veiller à une bonne représentation géographique parmi les bénéficiaires des cours et des bourses.  Elle a également insisté sur l’importance de la Médiathèque de droit international des Nations Unies.  Les « mini-séries » offertes en ligne sur des sujets complexes de droit international sont très utiles.  Elle a enfin appuyé le financement du Programme d’assistance via le budget ordinaire de l’ONU, en rappelant une nouvelle fois le très fort attachement de l’Union européenne à ce programme.

M. MARK SEAH (Singapour), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a salué les efforts qui ont permis d’organiser trois cours régionaux en présentiel ces deux dernières années et s’est réjoui de la reprise des bourses internationales.  Il a mentionné le cours régional sur le droit international qui se tiendra en présentiel en Thaïlande cet hiver, estimant que l’apprentissage à distance ne peut remplacer de facto les programmes en présentiel. Le Programme d’assistance renforce la paix et la sécurité internationales, a-t-il assuré, en insistant sur l’importance de tels cours pour les pays en développement.  Le représentant a également salué les travaux de la Division de la codification pour accompagner le réseau des anciens participants, l’organisation de sessions interactives et des archives en ligne, et la ressource importante que constitue la Médiathèque de droit international. Enfin, il a rappelé que l’ASEAN est associée au financement du budget ordinaire pour le Programme d’assistance et a remercié les États Membres qui se sont engagés à offrir des financements additionnels. 

M. ERIK LAURSEN (Danemark), au nom des pays nordiques, a rappelé que la coopération multilatérale fondée sur des règles était indispensable pour s’attaquer aux problèmes mondiaux tels que les changements climatiques, la perte de biodiversité, la pauvreté et les conflits.  Il a jugé encourageante à cet égard l’adoption réussie d’instruments tels que l’instrument sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale et la Convention de Ljubljana-La Haye.  À cet égard, le représentant a indiqué que l’ordre international fondé sur des règles dépendait largement du professionnalisme et de l’engagement des personnes agissant au nom des États, soulignant l’importance du Programme d’assistance qui a permis à des générations de juges et de diplomates de se former.  Il s’est en outre félicité du développement continu de la Médiathèque de droit international des Nations Unies et de sa bibliothèque de recherche en ligne, qui, pendant la pandémie de COVID-19, a éte une « ressource inestimable d’informations juridiques fiables et de la plus haute qualité, accessibles à tous ». 

M. MARK SEAH (Singapour) a estimé que le Programme d’assistance contribue à une meilleure connaissance et à un plus grand respect du droit international.  Il a salué à cet égard la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques pour ses efforts inlassables visant à offrir des possibilités de formation en ligne et en personne.  Le représentant a pris note du programme de bourses en droit international qui s’est déroulé cette année à La Haye, ainsi que de la reprise des cours régionaux de droit international à Bangkok, Addis-Abeba et Santiago.  Il a convenu que les programmes de formation en présentiel offrent des avantages particuliers, notamment en termes d’interactions.  La Médiathèque de droit international constitue en outre une archive inestimable de documents historiques et contemporains mise à la disposition de la communauté internationale.  Le représentant a salué la tenue de missions d’enregistrement hors site par la Division s’agissant des conférences à La Haye, tout en suggérant de procéder à des enregistrements par vidéoconférence à l’avenir.  Il a aussi proposé que la Division de la codification envisage de « tirer parti des médias sociaux pour atteindre un public plus large ».  Pour sa part, Singapour contribue à l’enseignement, à l’étude, à la diffusion du droit international par le biais d’initiatives de renforcement des capacités. 

Mme DOROTHY PATTON (États-Unis) a salué la qualité des cours régionaux de droit international des Nations Unies en Afrique, Amérique latine et Caraïbes, Asie et Pacifique.  Ces cours sont très prisés, comme le montre le grand nombre de candidats.  Elle a également salué le catalogue de la Médiathèque audiovisuelle qui ne cesse de s’enrichir, en notant que plus de 2,9 millions de personnes en ont bénéficié.  Enfin, elle s’est félicitée du travail de la Division de la codification et a salué les contributions généreuses versées par les États Membres.

Mme MATOS (Portugal) a salué le Programme d’assistance qui permet la promotion et une meilleure compréhension du droit international. Les cours régionaux rendent des ressources et des formations sur le droit international accessibles à de nombreux juristes, a-t-elle reconnu.  Néanmoins, il faut renforcer la sensibilisation au Programme d’assistance afin que ses activités soient mieux connues dans les entreprises et les universités, notamment.  La déléguée a félicité la Division de la codification et le Bureau des affaires juridiques pour leurs travaux, ainsi que l’expansion à moindre coût de la Médiathèque du droit international.  Selon elle, les outils d’apprentissage à distance permettent d’inclure un plus grand nombre de participants et il faut veiller à la diffusion du contenu en renforçant la diversité géographique et linguistique.  Toutefois, le financement ordinaire n’est pas suffisant, a regretté la déléguée, estimant nécessaire de considérer d’autres mécanismes de financements inédits, tels que des partenariats avec des universités, des ONG ou encore des cabinets d’avocats. 

M. DIAMANE DIOME (Sénégal) s’est réjoui de l’existence des trois cours régionaux de droit international qui ont contribué, a-t-il noté, au perfectionnement des connaissances de 78 participants.  Il s’est félicité du bon déroulement du cours régional pour l’Afrique et des interactions qui ont eu lieu dans ce cadre avec le Bureau du Conseiller juridique de l’Union africaine, expliquant l’importance de ces activités pour le renforcement des capacités.  Autre motif de satisfaction, l’impulsion donnée au réseau des anciens participants aux programmes de formation à travers l’organisation d’une séance de discussions interactives en ligne, permettant de renforcer les efforts de diffusion et de promotion du droit dans toutes les langues officielles de l’ONU et dans tous les supports, « dans un contexte de complexification de la matière juridique internationale ».  Le délégué a salué les efforts du Bureau des affaires juridiques pour le développement de la Médiathèque de droit international, dont il a noté « l’effet multiplicateur en termes d’accessibilité et de partage du savoir ».  Il a rappelé que son pays avait accueilli, en coopération avec le Bureau des affaires juridiques et la France, un atelier sous-régional de droit international pour les pays francophones d’Afrique de l’Ouest les 8 et 9 mai derniers à Dakar, un atelier qui a permis d’échanger sur le droit de la mer, le droit et la pratique des traités ou encore les privilèges et les immunités des fonctionnaires des Nations Unies.

M. DELGADO FERNANDEZ (Mexique) a fait valoir que l’éducation est indispensable pour assurer la réalisation du développement durable et parvenir à une paix globale.  Aujourd’hui plus que jamais, la diffusion et la compréhension du droit international en tant que mécanisme de règlement pacifique des différends sont de la plus haute importance, a-t-il ajouté.  C’est pourquoi le Gouvernement mexicain mène régulièrement des activités de diffusion du droit international, notamment des séminaires et des simulations de tribunaux internationaux, ainsi qu’un atelier annuel sur le droit international. S’agissant du Programme d’assistance, le représentant a souligné l’importance des cours régionaux et du Programme de bourses de perfectionnement en droit international, qui offrent des connaissances techniques aux étudiants, aux fonctionnaires et aux juristes du monde entier afin de favoriser le développement du droit international.  Il a salué à cet effet la tenue, en mai de cette année, du cours régional de droit international pour l’Amérique latine et les Caraïbes à Santiago, au Chili.  Depuis sa création en 2008, plus de 2,9 millions de personnes provenant des 193 États Membres ont consulté la Médiathèque de droit international, a-t-il relevé.  Se tournant vers l’avenir, le représentant a appelé à promouvoir l’égalité des sexes et une meilleure représentation géographique dans les programmes et les contenus du Programme d’assistance, tout en mettant l’accent sur le multilinguisme.

Mme STEPHANIE BOTERO PRIETO (Colombie) s’est réjouie des formations proposées en ligne qui ont permis à des avocats et des membres du corps diplomatique en Colombie d’y avoir accès.  Sa délégation est favorable à l’expansion de la Médiathèque de droit international et souhaite que le Programme d’assistance s’attache à garantir la diversité de genre, d’expérience et de localisation géographique dans les formations, estimant que les panels de conférenciers et de participants doivent être « plus hétérogènes ».  Elle a souligné que la Colombie a souhaité siéger au Comité consultatif du Programme d’assistance pour pouvoir participer plus largement aux diverses activités, réitérant l’importance du Programme pour le renforcement de l’état de droit, actuellement « en déclin » au niveau international.

M. AMR MOHAMED MOSAAD NOUH (Égypte) a rappelé l’importance des efforts déployés dans le cadre du Programme d’assistance afin de promouvoir l’état de droit au niveau international.  Il a salué les efforts de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques concernant les programmes de formation en droit international, le matériel de formation ou encore la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer.  Il a déclaré que son pays appréciait particulièrement que les possibilités d’éducation et de formation offertes par le Programme permettent de contribuer au renforcement des capacités dans le domaine du droit international, et le caractère positif des cours d’études régionaux, en particulier sur le continent africain.  Le délégué a appelé à un développement du contenu de ces cours pour s’assurer qu’ils soient mis à jour « en fonction des développements survenus sur la scène internationale ». 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a exprimé sa reconnaissance à la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques pour sa poursuite de la mise en œuvre du Programme d’assistance, dont ont bénéficié les experts juridiques de son pays.  Les Philippines ont participé au cours régional de droit international pour l’Asie-Pacifique qui s’est tenu cette année à Bangkok et qui a permis de renforcer les capacités nationales en la matière.  La représentante s’est également félicitée du Programme de bourses de perfectionnement en droit international et des activités de l’Académie de droit international de La Haye, lesquels ont profité à de nombreux participants provenant de pays en développement.  Par ailleurs, elle a pris note avec satisfaction de l’augmentation du nombre de cours et de matériaux disponibles à la Médiathèque de droit international, en espérant que les ressources incluses dans le budget-programme permettront de poursuivre son développement tout en assurant une meilleure parité géographique et de genre. 

Mme YANBO MA (Chine) a souligné le rôle irremplaçable du Programme d’assistance pour renforcer les capacités des pays en développement.  À cet égard, elle s’est félicitée de la reprise des cours régionaux de droit international des Nations Unies en Afrique, Amérique latine et Caraïbes, Asie et Pacifique.  Elle a assuré que son pays soutient le Programme d’assistance et contribue au renforcement des capacités des pays en développement.

Mme KEKE MANTSHO ANNASTACIA MOTSEPE (Afrique du Sud) a salué les cours régionaux qui sont bénéfiques pour les représentants des États dans le domaine du droit international, remerciant les pays qui les organisent. En outre, elle a loué le rôle de la Médiathèque de droit international qui offre un accès à des archives irremplaçables de l’ONU, ainsi qu’à des conférences auxquelles participent des praticiens et des professeurs spécialisés.  Le Programme d’assistance constitue une ressource précieuse qui doit se poursuivre, a-t-elle estimé, concluant que l’Afrique du Sud continuera à le soutenir. 

M. AMMAR MOHAMMED MAHMOUD MOHAMMED (Soudan) a expliqué que son pays attachait une grande importance au Programme d’assistance, surtout s’agissant du programme de bourses et des différents cours régionaux. Ce programme a contribué de manière claire à la sensibilisation aux principes et objectifs du droit international, a-t-il noté, en soulignant le rôle de la Médiathèque des Nations Unies dans la diffusion de programmes de formation.  Le délégué s’est félicité du rôle de différentes organisations africaines dans l’organisation des cours des Nations Unies au niveau régional, et en particulier celui de la Commission économique de l’Union africaine.  Il a espéré que le Programme d’assistance pourra continuer à être financé, pour aller de l’avant dans la mise en œuvre de formations « de grande qualité » et accroître la coopération dans le domaine juridique dans toute la région.  Le délégué a conclu son intervention en appelant au renforcement des capacités et ressources de l’Institut africain du droit international, afin que cet institut puisse assumer un rôle plus important dans la diffusion du droit international dans la région. 

Mme THI PHUONG HA TRAN (Viet Nam) a considéré que la diffusion et l’enseignement du droit international sont essentiels pour renforcer les capacités des États et promouvoir une meilleure compréhension des questions contemporaines du droit international.  À cet égard, elle s’est félicitée de la reprise des cours en présentiel dispensés par le Programme d’assistance, lequel permet de soutenir les experts juridiques et les dirigeants des États Membres.  La déléguée a salué le travail entrepris par la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques pour proposer davantage de matériel de formation et de recherche à l’intention des spécialistes via la Médiathèque de droit international.  Elle a également salué les représentations organisées par la Cour permanente d’arbitrage afin de former les experts gouvernementaux à la résolution des différends au moyen de programmes spécialisés. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a noté avec intérêt la reprise des trois cours régionaux de droit international pour l’Afrique, l’Asie et le Pacifique, et l’Amérique latine et les Caraïbes qui ont souffert des assauts de la COVID-19.  Cette reprise est d’autant plus à saluer, a-t-il dit, que ces cours permettent de remédier à l’offre limitée des bourses de perfectionnement en droit international et contribuent également, et de manière significative, au perfectionnement en droit international, notamment à l’intention des participants venant de pays en développement.  « Au moment où nous percevons de plus en plus les signes de raréfaction des ressources et que la tendance est à la restriction tous azimuts », le représentant a noté avec intérêt l’allocation des ressources à cette activité au budget ordinaire pour 2024.  Selon lui, ces provisions, qui doivent absolument être renforcées, permettront de poursuivre la mise en œuvre des activités menées au titre du Programme d’assistance. 

Mme MELINA LITO (Royaume-Uni) a estimé que le Programme d’assistance contribue à la primauté du droit, à la promotion des relations amicales et au renforcement de la paix et de la sécurité mondiales.  Le Royaume-Uni continuera à apporter des contributions volontaires au Programme d’assistance, a-t-elle assuré, en soutenant notamment les séminaire organisés dans le cadre des cours régionaux de droit international, la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer, le Programme de bourses judiciaires de la CIJ et le fonds d’affectation spéciale devant aider les États en développement, en particulier les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement, à préparer les dossiers destinés à la Commission des limites du plateau ontinental.

M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) s’est félicité que le Programme d’assistance ait pu mener à bien l’essentiel de ses activités et du fait qu’il soit devenu un « outil de promotion du multilatéralisme ».  Il a noté que le Programme d’assistance s’était progressivement amélioré avec la diversification des bénéficiaires, des conférenciers, des supports et des publications et thèmes abordés.  Saluant l’enrichissement continu de la Médiathèque de droit international, le représentant a reconnu qu’elle était une « source inestimable de connaissance et d’apprentissage » au profit des juristes du monde entier.  Il a par ailleurs remercié les États, institutions et organisations contributeurs pour leur participation au financement du Programme d’assistance, ainsi que les institutions et États qui accueillent le Programme de bourse de perfectionnement en droit international et les différents cours régionaux.  Il a appelé à la poursuite du financement du Programme d’assistance pour en assurer la pérennité.  Le Programme, a expliqué le représentant, doit disposer de ressources prévisibles pour permettre le maintien du multilinguisme, accroître le nombre de bénéficiaires et innover.  Il a en outre suggéré que le Programme s’oriente vers les pays qui en ont le plus besoin afin de renforcer les capacités des services juridiques en charge du régime conventionnel international. 

Le représentant du Pakistan a jugé essentiel de reconnaître le succès du Programme d’assistance, mais aussi d’investir dans son avenir afin qu’il continue de jouer un rôle clef dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Pour le représentant, le Programme atteint ses objectifs, comme le démontrent « les centaines d’anciens étudiants dont les contributions continuent de résonner dans le monde entier ».  Afin d’enrichir le contenu de la Médiathèque de droit international, le représentant a proposé d’allouer des ressources additionnelles susceptibles de lui permettre d’élargir son offre auprès d’un public plus large.  De même, la formation et les séminaires régionaux devraient englober les différents systèmes juridiques du monde afin de favoriser la diversité et l’inclusion. 

Mme THAPUTR (Thaïlande) a souligné que les magistrats du Palais de la Paix (La Haye) ont un impact sur les populations via les politiques juridiques et que des étudiants ont les yeux rivés sur le Programme de bourses de perfectionnement et l’Académie de droit international de La Haye.  Les cours régionaux permettent également aux praticiens du droit dans les pays en développement de se rencontrer et de bénéficier des apports d’éminents spécialistes, a-t-elle rappelé, soulignant le succès du cours régional en Asie et Pacifique.  La Médiathèque de droit international est fondamentale pour que le Programme d’assistance puisse atteindre un maximum de personnes, a-t-elle poursuivi.  La Thaïlande encourage l’utilisation des nouvelles technologies pour promouvoir les formations à travers le monde, a-t-elle déclaré, appelant à ne pas négliger les formations à distance, même si les formations en présentiel restent importantes.  En conclusion, elle a estimé que le Comité consultatif pourrait bénéficier d’une participation accrue. 

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a salué le travail de la Division de la codification, qui est notamment chargée d’actualiser les contenus de la Médiathèque, et la tenue des trois cours régionaux de droit international pour l’Afrique, pour l’Asie et le Pacifique et pour l’Amérique latine et les Caraïbes.  Elle a remercié les pays qui les ont accueillis et financés.  La déléguée a demandé un renforcement accru des capacités de la Division de la codification.  Elle a souligné l’importance d’une bonne représentation géographique et de genre au sein des conférenciers.  Enfin, elle a salué l’offre accrue des cours proposés par la Médiathèque, avant de rappeler l’importance du multilinguisme.  Elle a en outre annoncé que son pays souhaitait intégrer le Comité consultatif du Programme d’assistance en 2024.

Mme ESSAIAS (Érythrée) a constaté les efforts importants déployés en matière d’enseignement et de diffusion du droit international auprès des fonctionnaires et des juristes, ainsi que des étudiants en droit.  Des professionnels de son pays ont ainsi participé au cours régional de droit international pour l’Afrique organisé cette année à Addis-Abeba.  La déléguée s’est félicitée des cours dispensés par le Secrétariat de l’ONU en Érythrée sur des questions contemporaines du droit international, relatives notamment au droit de la mer.  De façon générale, le Programme de bourses de perfectionnement en droit international, les cours régionaux et la Médiathèque constituent autant d’outils essentiels pour renforcer les capacités juridiques des délégations des pays en développement.  Ces activités devraient, selon la déléguée, continuer d’être financées par le budget ordinaire de l’Organisation et par le biais de contributions volontaires de ses États Membres. 

Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a déclaré que le Programme d’assistance est un outil précieux car il promeut l’état de droit et la coopération entre les États grâce à la diffusion du droit international.  « Il répond à une demande croissante de formation et d’accès aux ressources du droit international. »  C’est la raison pour laquelle la France a versé, au titre de sa contribution volontaire de 2023, 70 000 euros afin de soutenir le Programme d’assistance, a déclaré la déléguée.  Elle s’est félicitée du plein retour cette année aux cours régionaux de droit international et aux autres formations en présentiel.  « Ces enseignements permettent tant d’améliorer les connaissances du droit international, qui connaît une complexification croissante, que de créer un réseau durable entre les participants. » Nous nous réjouissons également que le Programme de bourses de droit international ait eu lieu en présentiel pour la première fois l’année dernière, a-t-elle conclu, en encourageant le Secrétariat à augmenter le nombre de bourses octroyées au titre des programmes de formation.

Mme NUR AZURA BINTI ABD KARIM (Malaisie) a reconnu l’importance du Programme d’assistance, estimant que les programmes de bourses et les cours régionaux font toujours l’objet d’une forte demande et sont accueillis favorablement.  Les cours en présentiel permettent de construire des « liens durables » entre les participants, a-t-elle souligné.  Elle s’est également félicitée des initiatives en faveur d’une meilleure représentation des genres dans les formations.  Enfin, elle a salué le développement de la Médiathèque de droit international, les enregistrements hors site, les mini-séries à destination de publics non initiés et la diffusion des ressources en différentes langues, appelant néanmoins à continuer la promotion de ces ressources et à financer le Programme d’assistance.

Mme N’NAGBÈ CONDE (Guinée) a remercié la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques pour ses programmes de formation, à savoir les trois cours régionaux et le Programme de bourses de perfectionnement en droit international.  De même, la Médiathèque de droit international et la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer contribuent à la promotion de la recherche et de l’enseignement du droit international.  Le Programme d’assistance constitue selon elle un instrument de renforcement des capacités qui permet l’accès des ressortissants des pays en développement à des informations indispensables à leur participation effective à l’élaboration d’instruments juridiques internationaux. La représentante a salué le rôle du Comité consultatif pour le suivi des activités du Programme d’assistance, notamment s’agissant de la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes et de la diversité culturelle dans les différents programmes de formation. 

La représentante de l’Éthiopie a rappelé que le cours régional à Addis-Abeba avait accueilli de nombreux participants.  Les programmes de formation ont permis à des praticiens de participer à une plateforme de renforcement des liens professionnels, a-t-elle souligné. La déléguée a salué l’amélioration constante de la Médiathèque de droit international, appelant néanmoins à des efforts supplémentaires pour encourager son utilisation, notamment en la promouvant au sein des universités.  Elle a toutefois déploré qu’un séminaire qui devait se tenir dans son pays n’ait pas pu avoir lieu à cause de contraintes financières, encourageant le Secrétariat à réfléchir à des nouvelles sources de financement concrètes. 

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) s’est félicité de l’organisation en présentiel de trois cours régionaux sur le droit international. Tout en saluant le travail du Programme de bourses de perfectionnement en droit international, il a insisté sur l’importance, pour le succès du Programme, d’une représentation géographique équitable, tant parmi les participants que parmi les conférenciers, et sur le fait que les bourses devaient être attribuées aux candidats « les plus méritants et les plus prometteurs ».  S’agissant de la Médiathèque, le délégué a noté que les cours et cycles de conférences contribuaient à la diffusion élargie du droit international.  À ce titre, il a souligné que le processus d’assistance de l’ONU pour le réapprovisionnement des bibliothèques universitaires des pays en développement en documents imprimés sur le droit international pouvait lui aussi constituer une aide cruciale à la diffusion des connaissances juridiques.  Il a en outre indiqué que son pays était prêt à examiner, en coopération avec ses collègues du Comité, les initiatives des pays en développement s’agissant notamment du renforcement des capacités de leurs établissements d’enseignement supérieur locaux. 

M. JOSÉ HERNÁNDEZ (Chili), réitérant son soutien à la diffusion et à l’enseignement du droit international, en particulier parmi les pays en développement, a jugé essentiel d’assurer la continuité du financement du Programme d’assistance au titre du budget ordinaire de l’ONU.  Le Chili accorde une grande importance au cours régional sur le droit international pour l’Amérique latine et les Caraïbes, qu’il a l’honneur d’accueillir depuis 2017.  Après une interruption de deux ans due à la pandémie, le cours régional s’est tenu cette année en présentiel, avec la participation de 26 étudiants de plus de 20 pays de la région, a précisé le représentant.  Depuis sa création, en 1965, le Programme d’assistance a apporté une contribution indispensable à la formation des étudiants et des professionnels du droit international et mérite un soutien continu des États Membres.  Il a jugé essentiel à l’avenir que les cours régionaux abordent non seulement les questions clefs du droit international, mais également des sujets spécifiques aux régions où ils sont présentés.  Les ressources et l’enseignement virtuels étant désormais un complément essentiel aux cours en présentiel, le représentant a salué l’ajout de nouveaux outils à la Médiathèque de droit international.  Il s’est en outre félicité de l’inclusion de documents en espagnol et dans les différentes langues officielles de l’ONU.  Il a notamment souligné l’équilibre croissant entre le nombre d’hommes et de femmes qui prennent part aux activités du Programme d’assistance.  Le Chili a maintenant pour objectif de rejoindre le Comité consultatif du Programme d’assistance pour la période 2024-2027. 

M. DAVID ANTONIO GIRET SOTO (Paraguay) a rappelé les effets positifs que le Programme d’assistance a eu en termes de collaboration et de dialogue entre universitaires, experts et représentants des gouvernements.  Il a souligné que le travail accompli par le Programme contribuait au renforcement des capacités dans le domaine du droit international, et reflétait aussi « l’aspiration à l’égalité souveraine entre nations ».  Soulignant l’importance des cours régionaux, en particulier celui qui se déroule au Chili, pour son pays et pour toute la région, le délégué a rappelé que la pandémie de COVID-19 avait démontré le caractère impératif de plans d’urgence pour organiser des cours régionaux virtuels si nécessaire.  Il s’est donc félicité des mesures visant à permettre l’utilisation des nouvelles technologies dans le cadre du Programme.  Il a en outre mis en relief le caractère « inestimable » des ressources offertes par la Médiathèque de droit international et a notamment plaidé pour la création d’un plus grand nombre de publications en espagnol. 

M. JOSEPH ARON MWASOTA (Tanzanie) a souligné le rôle essentiel des cours régionaux afin d’améliorer la compréhension du droit international.  Il a néanmoins recommandé d’étendre la portée du Programme d’assistance dans les pays d’Afrique, appelant à la collaboration avec l’Institut africain de droit international en Tanzanie qui a pour but de promouvoir la primauté du droit sur le continent africain.  La Médiathèque de droit international est une ressource cruciale pour les personnes qui ne peuvent assister aux cours régionaux, a-t-il également rappelé, saluant toutefois la reprise des activités en présentiel.  Enfin, il a appelé à une augmentation du budget ordinaire du Programme. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda) s’est félicité des activités du Programme d’assistance ainsi que de la « reprise complète » des cours régionaux et du Programme de bourses en droit international.  Il a souligné la nécessité de garantir la diversité des traditions juridiques et l’équilibre hommes et femmes parmi les participants aux programmes de formation régionaux.  Il a fait part du soutien de son pays au financement des activités du Programme par le budget ordinaire de l’ONU, tout en soulignant l’importance des contributions volontaires pour le renforcement de ces activités.  Le délégué a indiqué que son pays était favorable aux programmes en présentiel et s’est donc félicité de l’organisation du Programme de bourses de perfectionnement en droit international à La Haye du 4 juillet au 5 août derniers.  Il a souligné l’importance d’assurer également au sein même du corps enseignant du Programme d’assistance une diversité des traditions juridiques et un équilibre entre les sexes.  Il a réaffirmé son soutien à toutes les possibilités de renforcement des capacités et à la demande du Secrétaire général de fournir un financement au titre du budget-programme.  Le délégué s’est dit favorable à l’utilisation des nouvelles technologies, en particulier les réseaux sociaux, pour assurer une plus large diffusion du contenu de la Médiathèque et a encouragé la Division de la codification à en améliorer le contenu.  L’ajout de conférences dans d’autres langues serait un autre moyen d’enrichir le contenu de cette bibliothèque. 

Mme OLISA (Nigéria) s’est félicitée du travail réalisé dans le cadre du Programme d’assistance pour fournir des résumés de la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ)pour les séries législatives, ainsi que l’annuaire judiridique des Nations Unies ou encore l’annuaire de la Commission du droit international (CDI).  Elle a souligné l’importance du Programme dans l’apport de connaissances et le renforcement des capacités pour mettre en œuvre de l’état de droit.  La déléguée a loué la mise en place des trois cours régionaux de droit international qui bénéficient aux étudiants et praticiens du droit.  Elle a insisté sur la nécessité d’organiser des cours en anglais pour augmenter la participation à ces cours.  Si elle a rappelé l’engagement financier de son pays en faveur du Programme d’assistance par le biais de ses contributions volontaires, notamment pour la région Afrique, la déléguée a appelé à un financement approprié pour le Programme, en particulier pour la Médiathèque et pour les cours régionaux, par le biais du budget ordinaire de l’ONU et par davantage de contributions volontaires. 

Mme CATHERINE NYABOKE NYAKOE (Kenya) a rappelé le rôle central du Programme d’assistance pour la contribution des États Membres au « discours multilatéral ».  Elle s’est félicitée de la reprise d’un cycle complet de formations en personne après la pandémie de Covid-19, celles-ci renforçant les relations amicales entre les États.  Néanmoins, la déléguée a aussi encouragé à développer les méthodes utilisées pendant la pandémie afin d’atteindre un public plus large, sans que celles-ci ne portent atteinte aux activités en présentiel.  Si la Médiathèque constitue un outil utile, certaines infrastructures sont nécessaires pour y accéder, a-t-elle toutefois remarqué, ce qui reste un problème dans les pays en développement.  À ce titre, elle a demandé la création de programmes et de partenariats régionaux, principalement via les institutions régionales déjà en place, afin d’améliorer les capacités techniques.  Enfin, elle a appelé à préserver le financement via le budget ordinaire de l’ONU, en sus des contributions volontaires. 

M. JAMES KIRK (Irlande) a noté que bien que le Programme d’assistance soit financé par le budget ordinaire de l’ONU, il ressort clairement du rapport du Secrétaire général que des contributions volontaires sont également nécessaires.  Il a encouragé les États Membres à fournir un soutien financier au Programme, comme le fait son pays.  À ses yeux, une meilleure connaissance du droit international contribue à la poursuite des principes et objectifs des Nations Unies, notamment s’agissant du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Cette année, a poursuivi le représentant, l’Irlande a participé aux cours régionaux de droit international de l’ONU, ressources importantes pour les étudiants des pays en développement afin de renforcer les capacités nationales en la matière.  Le Programme de bourses de perfectionnement en droit international facilite l’accès à des formations « précieuses », tout comme la Dotation commémorative Hamilton Shirley Amerasinghe sur le droit de la mer. Enfin, le représentant a souligné l’apport de la Médiathèque de droit international, laquelle permet d’étendre la portée du Programme d’assistance grâce à ses conférences informatives. 

Mme MARIAM SAO (Mauritanie) a noté avec satisfaction la tenue en présentiel du Programme de bourses à La Haye du 3 juillet au 4 août 2023, avec la participation de 21 participants, dont 11 femmes. « Mon pays, la Mauritanie, a bénéficié de cette formation en ma personne, et a pu acquérir plus de connaissances et de savoir et participer à des exercices de simulation de plaidoirie. »  Toutefois la déléguée a estimé qu’il devrait y avoir davantage de diversité géographique des enseignants représentés aux cours, notamment ceux en provenance de la région Afrique.  En conclusion, elle a exhorté tous les États Membres à veiller à ce que les activités du Programme d’assistance soient correctement financées par le budget ordinaire de l’ONU et d’autres contributions volontaires.

M. YOUSSEF HITTI (Liban) a salué le renforcement des capacités sur le droit de la mer et la mise en œuvre du Programme d’assistance par la Division de la codification.  Il a remercié les pays hôtes pour l’organisation des cours régionaux en présentiel qui permettent de tenir des débats interactifs et de tisser des « liens durables ».  Les programmes de formation en présentiel sont plus inclusifs que les programmes en ligne qui peuvent entraver une participation fluide à cause des problèmes de connexion, a-t-il estimé.  Néanmoins, le représentant a prôné l’intérêt des programmes à distance pour compléter les cours en présentiel.  Il s’est félicité de l’enregistrement des conférences hors site permettant une participation des personnes qui ne peuvent se déplacer.  Remarquant que la Médiathèque reste principalement utilisée dans les pays développés, il a salué la diffusion des supports de formation et des publications via des clés USB dans les régions où Internet est moins accessible.  Le représentant a ensuite demandé l’augmentation de la part de participants et d’intervenants d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient afin de refléter les différentes traditions juridiques.  L’équilibre passe aussi par une diversité de genre, a-t-il rappelé.  Enfin, il a appelé les États Membres à promouvoir davantage le Programme d’assistance en impliquant les universités, les anciens participants ou encore les ONG.  Remerciant les États Membres pour leurs contributions volontaires, il a néanmoins appelé au financement du Programme et des bourses via le budget ordinaire de l’ONU. 

Mme ESTELA MERCEDES NZE MANSOGO (Guinée Équatoriale) s’est dite convaincue que le renforcement des capacités et la formation continue des avocats, diplomates et juges des pays en développement était la meilleure manière de promouvoir le respect du droit international.  Le Programme d’assistance est un instrument précieux qui permet d’atteindre cet objectif, a-t-elle indiqué, en se félicitant par ailleurs de la représentation géographique adéquate au sein des cours régionaux de droit international qui se sont tenus pendant la période.  La représentante a pris note des efforts déployés pour faciliter l’accès au contenu de la Médiathèque de droit international et salué la large gamme de publications juridiques et leur diversité linguistique.  Sur les questions de financement, elle a remercié les États pour leurs contributions volontaires et s’est associée à d’autres États pour demander la poursuite du financement du programme sur la base du budget ordinaire, afin de répondre aux demandes de renforcement des capacités. 

M. WISNIQUE PANIER (Haïti) a souligné que le Programme d’assistance est une plateforme indispensable pour le renforcement des capacités de pays en développement comme Haïti.  Les cours régionaux de droit international offrent une occasion unique de formation et de discussion sur des sujets fondamentaux du droit international.  Le représentant a salué l’approche inclusive du Programme, qui s’efforce d’assurer une représentation équilibrée entre les genres et entre les pays, et il a appelé à une coopération renforcée afin d’assurer la pérennité des programmes.  Le Programme d’assistance favorise également le renforcement des capacités institutionnelles nationales, de même que la prévention des conflits et la résolution pacifique des différends.  Comme le souligne le rapport, la demande pour des formations en droit international ne cesse de croître, ce qui témoigne selon le représentant de l’importance qu’accordent les pays en développement à ces formations. Dans ce contexte, il a fait valoir que l’expansion du Programme d’assistance profite aux pays en développement et aux pays les moins avancés (PMA), mais constitue aussi un investissement dans l’avenir de la gouvernance mondiale. 

Mme CARMEN ROSA RIOS (Bolivie) a indiqué que le Programme d’assistance était au final un outil essentiel permettant d’atteindre les objectifs de l’Organisation.  Elle a salué l’existence du Programme de bourses de perfectionnement en droit international, et plus particulièrement le cours organisé cette année pour sa région, à Santiago du Chili.  La déléguée a souligné l’importance de la politique d’équité de genre dans le cadre du Programme de bourses et du travail réalisé par la Médiathèque et sa bibliothèque de recherche dans diverses langues.  Elle a proposé que certaines publications soient publiées dans des langues autochtones, en rappelant que l’ONU promouvait actuellement la Décennie internationale des langues autochtones, et ce afin d’enrichir les connaissances de de groupes historiquement exclus de ces questions.

RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES ET DU RAFFERMISSEMENT DU RÔLE DE L’ORGANISATION - A/78/33A/78/114A/78/296

Présentations

M. ZEPHYRIN MANIRATANGA, Président du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, a présenté le rapport de la session de 2023 du Comité spécial.  Ce dernier s’est réuni à New York du 21 février au 1er mars 2023 et a poursuivi ses délibérations sur les questions mandatées par la résolution 77/109.  Il a indiqué que le Comité spécial n’a pu adopter qu’un seul chapitre de son rapport de la session de 2023, qui contient 13 paragraphes et qui est de nature procédurale.

« Sur la question du maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Comité spécial a examiné la question de l’imposition et de la mise en œuvre des sanctions imposées par l’ONU et a été informé par le Secrétariat à ce sujet. »  Le Comité spécial a également poursuivi l’examen de la proposition révisée présentée par la Libye en vue de renforcer le rôle des Nations Unies dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a informé M. Maniratanga. Le Comité spécial a en outre examiné le nouveau document de travail révisé présenté par la Biélorussie le Bélarus et la Fédération de Russie visant à demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les conséquences juridiques du recours à la force par un État sans l’autorisation préalable du Conseil de sécurité, et en dehors des cas où serait exercé le droit de légitime défense.

Le Président a indiqué que le Comité spécial s’est également penché sur le document de travail révisé présenté par Cuba sur le renforcement du rôle de l’Organisation et l’amélioration de son efficacité et sur le document de travail révisé présenté par le Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les accords ou organismes régionaux pour le règlement pacifique des différends.  Il a précisé que le Comité spécial n’a pas fait de recommandation sur le sous-thème du débat thématique annuel de l’année prochaine, au titre du point de l’ordre du jour sur le règlement pacifique des différends.  « J’espère sincèrement que le Comité spécial sera en mesure d’adopter son rapport régulier lors de la session de l’année prochaine », a conclu M. Maniratanga.

Mme BLANCA MONTEJO, spécialiste des questions politiques au sein du Service de la recherche sur la pratique du Conseil de sécurité et sur la Charte, Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, a informé que diverses parties et suppléments du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité étaient terminés et devraient être téléversés sur le site avant la prise de fonction des membres nouvellement élus du Conseil de sécurité. Les documents seront disponibles dans toutes les langues officielles au cours du deuxième trimestre de l’année 2024, a-t-elle précisé.  Mme Montejo a ensuite fait état des différents outils disponibles, tels que des analyses des tendances de travail au Conseil, ainsi qu’un bulletin sur les procédures et le travail de fond, mois par mois.  Elle a mentionné la collaboration avec le Japon qui a publié un manuel interactif détaillant les méthodes du Conseil sur une seule page et facilitant la recherche d’information.  Son service, a ajouté la spécialiste, a accru son rôle vis-à-vis du Conseil et des États Membres en lançant des recherches à leur demande, et en recevant leurs contributions au Répertoire.  Depuis 2021, nous avons lancé de multiples appels pour reconstituer le fonds d’affectation spéciale pour la mise à jour du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité afin de permettre sa publication dans les temps impartis, a-t-elle précisé, regrettant néanmoins le financement limité qui ne permet pas de garantir une stratégie pérenne. 

M. HUW LLEWELLYN, Directeur de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques, a rappelé que le Secrétaire général a été invité par l’Assemblée générale à prendre des mesures pour remédier à titre prioritaire au retard pris dans la rédaction de tous les volumes du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies, en particulier le volume III.  La Division de la codification a réalisé une série d’études pour compléter lesdits volumes. Le Directeur a souligné que l’Assemblée a appelé les États à envisager d’appuyer des experts associés pour travailler sur le Répertoire.  Il a également appelé les délégations à contribuer au fonds d’affectation spéciale créé pour la résorption de l’arriéré de travail relatif au Répertoire et à pousser les institutions académiques à s’intéresser à la préparation d’études, la diversité géographique étant un élément important dans ce contexte.

Débat général

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a exprimé son attachement au renforcement du rôle des Nations Unies ainsi qu’aux efforts déployés pour en développer le plein potentiel.  Elle a toutefois réitéré sa préoccupation face à « l’empiétement constant du Conseil de sécurité sur les compétences de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC) ».  La représentante a donc réaffirmé que la réforme de l’Organisation doit être menée conformément aux principes et procédures établis par la Charte des Nations Unies, tout en préservant le cadre juridique de cet instrument « constitutionnel ». 

La représentante a souhaité connaître les évaluations des conséquences socioéconomiques et humanitaires à court et à long terme des sanctions administrées par les comités des sanctions du Conseil de sécurité, y compris la méthodologie utilisée.  À cette fin, elle a appelé le Secrétariat à développer sa capacité à évaluer les effets secondaires involontaires des sanctions imposées par le Conseil, qui restent un « sujet de grave préoccupation » pour les pays non alignés. Les sanctions, a-t-elle rappelé, ne devraient être envisagées qu’en dernier recours, de façon ciblée, et uniquement en cas de menace à la paix et à la sécurité internationales ou d’acte d’agression.  Les sanctions sont à leurs yeux des instruments « grossiers » dont l’utilisation soulève des questions éthiques, et qui ne peuvent en aucun cas avoir pour objectif de punir la population civile.  À ce titre, la représentante a demandé qu’elles soient levées dès que les objectifs clairement définis au préalable sont atteints, et faire l’objet d’un réexamen périodique.  À cet égard, les débats thématiques annuels sur les moyens de règlement des différends constituent une initiative importante pour promouvoir une culture de paix entre les États Membres.

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda), au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné le rôle important du Comité spécial.  Il a déploré néanmoins que son potentiel n’ait pas pu être pleinement exploité en raison d’une « polarisation politique » en son sein.  Il a rappelé que le règlement pacifique des différends est un pilier de l’ONU et une thématique évidente du Comité spécial. Le délégué a insisté sur la pertinence de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux de 1982.

M. JHON GUERRA SANSONETTI (Venezuela), au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, a réaffirmé que les principes de la Charte constituent le fondement du droit international et qu’ils sont toujours aussi pertinents qu’en 1945.  Selon lui, la Charte permet d’avancer vers un ordre juste et équitable.  Dans ce contexte, le délégué s’est dit préoccupé par les menaces croissantes et constantes contre la Charte.  Il a surtout déploré les « pratiques néocoloniales modernes » de certains gouvernements à l’encontre d’États souverains, tels que le recours à de « prétendus exceptionnalismes », à l’unilatéralisme, à de nouvelles règles n’ayant pas fait l’objet d’un débat multilatéral ou à des approches sélectives.  Selon le Groupe qu’il représente, ces pratiques exacerbent les tensions dans le monde entier.  Convaincu que le Comité spécial peut jouer un rôle actif dans le renforcement de la Charte et de l’Organisation, le délégué s’est dit préoccupé par l’absence de volonté de certains États Membres d’examiner les propositions présentées au Comité spécial.  Il a regretté les tentatives « délibérées » de « faire obstruction » à son travail.  Selon lui, il est indispensable de progresser sur la proposition de lignes directrices concernant les mesures unilatérales coercitives qui ont des répercussions sur la vie quotidienne de plus d’un tiers de l’humanité. 

Mme DUNBAR (Saint-Vincent-et-les Grenadines), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a jugé impératif que les États Membres fassent de réels efforts pour définir un agenda thématique solide, basé sur des sujets existants et sur des sujets nouvellement identifiés pour permettre « l’utilisation optimale des ressources » du Comité spécial.  Pour être efficaces et contribuer au maintien de la paix et de la sécurité internationales, les sanctions devraient être appliquées par l’ONU conformément à la Charte et aux autres textes pertinents, a dit la déléguée.  Elle a rappelé que le Conseil de sécurité devait garder à l’esprit la nécessité d’éviter leurs conséquences négatives pour la population civile, en rappelant l’impact que des sanctions « mal conçues » peuvent avoir sur la disponibilité et le coût des ressources alimentaires et énergétiques.  Elle a aussi jugé nécessaire de poursuivre l’examen de la question de l’application des dispositions de la Charte relatives à l’assistance aux États tiers touchés par l’application des sanctions.  À ce titre, elle a noté que le Conseil de sécurité, dans la plupart des cas, avait décidé d’adopter des exceptions permettant aux États de demander une autorisation d’accès aux fonds gelés pour leurs dépenses de base et exceptionelles. Elle a souligné le rôle essentiel joué par l’Assemblée générale et le Conseil économique et social sur cette question et rappelé le travail du Secrétariat pour proposer des solutions. 

La déléguée s’est ensuite félicitée des contributions notables apportées par le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et des progrès réalisés en ce qui concerne l’incorporation des divers volumes sur le site Web des Nations Unies, et elle a encouragé les efforts pour combler les lacunes existantes.  Elle a cependant dénoncé l’impasse dans laquelle se trouvait le Comité spécial, qui n’a pas été en mesure d’adopter son rapport dans son intégralité « faute de consensus entre ses membres ».  Elle a donc appelé tous les États Membres à adopter le rapport du Comité spécial lors de la prochaine session et à une revitalisation de ses travaux afin qu’il puisse exercer efficacement son mandat. 

Mme SIMONA POPAN de l’Union européenne (UE) a salué la présentation de l’exposé annuel sur les sanctions de l’ONU, estimant que celles-ci doivent être mises en œuvre dans le plein respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, y compris le droit à une procédure régulière pour les personnes qui y figurent.  Se disant déterminée à préserver l’espace humanitaire, la représentante s’est félicitée de l’adoption de la résolution 2664 (2022) du Conseil de sécurité, qui introduit une exception humanitaire aux mesures de gel des avoirs dans les régimes de sanctions des Nations Unies. De même, la référence au médiateur dans la résolution 2653 (2022) concernant Haïti constitue à ses yeux une étape vers le renforcement du droit à une procédure régulière, au-delà des régimes de sanctions contre Daech et Al-Qaida. 

Après avoir participé au débat thématique sur le recours aux agences ou aux arrangements régionaux en tant que moyen pacifique de règlement des différends, l’Union européenne souhaite discuter d’autres moyens de règlement lors de la prochaine session du Comité spécial, jugeant utile d’examiner des sujets non politiques qui ne font pas double emploi avec d’autres instances de l’ONU. La représentante a cependant exprimé sa déception face au fait que, pour la deuxième année consécutive, le Comité spécial de la Charte a conclu ses travaux sans adopter de rapport de fond du fait de l’opposition d’une délégation. 

Mme SOPIO KUPRADZE (Géorgie), au nom également de l’Ukraine et de la République du Moldova, a déploré qu’aucune partie substantielle du rapport du Comité spécial n’ait pu être adoptée, pour la deuxième année consécutive. Cela est dû au fait qu’une délégation refuse que le rapport reflète les discussions tenues, a avancé la déléguée. « La Russie a abusé de la pratique consensuelle d’une adoption du rapport paragraphe par paragraphe, en excluant tous les paragraphes qui sont une part essentielle du rapport et sont capitales pour nos trois pays. »  Elle a rappelé que les délégations doivent négocier de bonne foi et s’atteler au maintien d’une atmosphère constructive lors des délibérations.  La déléguée a dénoncé l’agression de la Russie contre l’Ukraine, ainsi que l’occupation par ce pays de régions géorgiennes.  Elle a enfin rappelé la présence illicite de troupes russes dans la région séparatiste de la Transnistrie, en violation de la neutralité de la République de Moldova.  « Les peuples de nos trois pays demeurent sous la menace », a conclu la déléguée.

Mme DOROTHY PATTON (États-Unis) a déclaré attendre avec intérêt les discussions afin de trouver des solutions pacifiques au règlement des différends. Elle a rappelé que les sanctions ciblées du Conseil de sécurité constituent un outil vital pour qu’il puisse remplir son mandat.  Quant aux sanctions imposées directement par les États Membres, elles restent « un outil approprié, effectif et légitime de politique étrangère » permettant aux États de répondre aux menaces à la sécurité et aux droits humains, a-t-elle affirmé.  La déléguée a précisé, à ce titre, que son pays a pris des mesures concrètes pour minimiser les effets secondaires des sanctions en proposant, avec l’Irlande, des dérogations aux régimes de sanctions onusiens dans le cadre des efforts humanitaires.  Par ailleurs, elle a regretté « l’utilisation du Comité spécial comme instance de règlement de différends qui seraient mieux pris en charge dans d’autres instances ».  Déplorant le « refus constant d’une délégation » d’accepter un libellé qui caractérisait les violations de la Charte, la déléguée a regretté l’échec de l’adoption d’un rapport de fond et demandé que l’on revienne à la tradition bien établie au sein du Comité spécial d’enregistrer les vues des États Membres. 

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a fait part de son attachement aux activités du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et rappelé que la question des sanctions occupait une place importante dans son ordre du jour.  Son pays reconnaît que les sanctions peuvent être appliquées dans des cas exceptionnels, mais elles ne devraient pas être imposées sans discernement, ni être une source de souffrance pour les groupes vulnérables et de nature punitive.  Se disant favorable à la poursuite de l’étude de moyens pacifiques de règlement des différends, le délégué a critiqué la « politisation des travaux » du Comité spécial, tout en indiquant qu’il restait l’une des rares instances pour discuter des questions d’interprétation de la Charte et de la réforme de l’Organisation.  Pour conclure, il s’est dit convaincu que le résultat du débat thématique sur ces diverses initiatives aurait non seulement une valeur académique, mais aussi des applications pratiques. 

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) a rappelé le potentiel de la Charte et de l’ONU pour le développement du droit international dans un contexte multilatéral.  Le mandat du Comité spécial est d’examiner les propositions et suggestions des États Membres s’agissant du renforcement du rôle de l’Organisation pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Le Mexique a recommandé que le Comité spécial examine d’autres propositions dans le cadre de son mandat, a souligné le délégué.  Déplorant que certains États aient empêché l’inclusion de cette idée dans le programme du Comité, il a tout autant regretté la non-adoption de son programme de travail.  Mon pays espère inverser cette tendance et réitère que la proposition faite vise à mener une conversation juridique et technique, et non politique, afin de disposer d’un répertoire sur les points de vue des États Membres, a-t-il conclu. RAS

Mme MELINA LITO (Royaume-Uni) a rappelé que le Comité spécial de la Charte a été créé en tant qu’organe subsidiaire de l’Assemblée générale pour examiner les propositions concernant le maintien de la paix et de la sécurité internationales, dans le but de renforcer le rôle de l’ONU.  Si elle a noté que le Comité spécial continuait effectivement à s’engager dans ces discussions, la déléguée a insisté sur le fait qu’il était important qu’il soit cohérent avec les décisions de l’Assemblée générale, en particulier sur une question aussi grave pour la paix et la sécurité que la question de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, selon elle, « la violation la plus grave de la Charte des Nations Unies » de la part de ce pays.  Jugeant regrettable que le Comité spécial n’ait pas été en mesure de parvenir à un consensus pour approuver son rapport annuel complet, elle a fait part de la disponibilité de sa délégation pour s’engager « de manière constructive » dans les délibérations informelles à ce sujet. 

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) a fait valoir que sa délégation participait toujours activement aux travaux du Comité spécial.  Or cela fait plus d’un an que nous abordons la question des méthodes du Comité spécial, a-t-il déclaré, et malheureusement, « un grand nombre d’initiatives spécifiques » sont bloquées pour des raisons politiques, toujours par les mêmes pays, a-t-il accusé.  Il a trouvé « intéressant » que ces pays se plaignent ensuite du manque d’efficacité du Comité spécial.  D’après le délégué, la meilleure manière de rendre efficace le travail de cet organe est de passer à la discussion sur des « propositions de fond » portant sur le règlement pacifique des différends. Il a jugé la proposition de la Syrie sur les privilèges et immunités des représentants des États Membres et l’abus de ce statut de la part du pays hôte, particulièrement digne d’intérêt, entre autres propositions.  Au niveau international, le délégué a noté que la question des sanctions était pertinente, rappelant que les mesures coercitives unilatérales pouvaient « dépasser de loin » les sanctions imposées par le Conseil de sécurité.  Ces mesures entraînent souvent des souffrances dans les populations, a-t-il relevé, en soulignant que la proposition de l’Iran sur ce sujet méritait elle aussi d’être examinée.  Par ailleurs, il a proposé que le Comité spécial aborde les tentatives d’abuser des procédures des cours pénales internationales à des fins politiques, ou encore le « problème constant du statut des ONG » à l’ONU.  Il a conclu son intervention en regrettant que certaines délégations aient empêché pour des raisons politiques l’adoption du rapport du Comité spécial. 

M. MHD. RIYAD KHADDOUR (Syrie) a regretté les tentatives « délibérées et constantes » de certains États Membres de politiser les travaux du Comité spécial, comme ce fut le cas lors de la dernière session.  L’abus du principe du consensus par ces États, a empêché selon lui l’adoption, pour la deuxième année consécutive, du rapport du Comité spécial.  Dans ce contexte, le délégué a jugé important que le Comité spécial examine les propositions d’États Membres, dont la Fédération de Russie et le Bélarus, concernant la demande d’un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les conséquences juridiques du recours à la force par un État, sans autorisation préalable du Conseil de sécurité, en dehors de la légitime défense. Il a également soutenu l’examen de la proposition de l’Iran concernant les directives destinées à limiter les effets des mesures coercitives unilatérales.  La Syrie a pour sa part soumis, en 2020, une proposition portant sur les privilèges et immunités des représentants des Nations Unies afin de permettre l’exercice indépendant de leurs fonctions au sein de l’Organisation. Le délégué a donc espéré que le Comité spécial se montrera à la hauteur de ses responsabilités et qu’il produira un rapport objectif sur les discussions constructives concernant lesdites proposition lors de sa deuxième session.  Il s’est inquiété de « précédents destructeurs » contraires aux principes de la Charte, lesquels sont promus d’une manière non consensuelle. 

M. AMMAR MOHAMMED MAHMOUD MOHAMMED (Soudan) a rappelé que les régimes de sanctions soulèvent des questions éthiques et morales. Sont-elles utilisées pour faire pression, punir ou encore se venger de la population?  Selon sa délégation, les régimes de sanctions doivent éviter toute conséquence non-voulue, être bien définis et munis d’un calendrier, se limiter à de clairs objectifs et revus de manière périodique.  Le délégué a appuyé les efforts pour régler les différends par des moyens pacifiques et via la Cour internationale de Justice (CIJ).  Les progrès réalisés au niveau des répertoires de la pratique suivie par les organes de l’ONU doivent se poursuivre, a-t-il exhorté, demandant une publication en ligne dans toutes les langues officielles de l’ONU.  Il a souhaité en conclusion un rôle renforcé du Comité spécial. 

M. AL-MARRI (Qatar) a noté que le Comité spécial jouait un rôle important dans la promotion des dispositions du droit international et de la Charte des Nations Unies, tout en appuyant le processus de réforme de l’Organisation.  Il a appelé les États Membres à consentir davantage d’efforts pour rapprocher leurs points de vue afin d’aboutir à un consensus sur les différentes questions débattues.  La Charte, a signalé le délégué, appelle à « développer les relations amicales entre les nations » et à réaliser la coopération internationale.  La Charte nous invite donc à chercher l’entente nécessaire.  Le Qatar jouit de la confiance de la communauté internationale pour le rôle de premier plan qu’il joue dans le domaine de la médiation, s’est-il enorgueilli, et si la voie du règlement pacifique est longue et difficile, elle est aussi moins coûteuse, a‑t‑il noté, en soulignant le rôle important joué par le Centre pour les études des conflits et du travail humanitaire, établi à Doha en 2016, qui œuvre à une meilleure compréhension des conflits. 

M. MORA FONSECA (Cuba) a fait valoir que le mandat du Comité spécial se trouve renforcé quand certains pays s’efforcent, selon lui, de réinterpréter les principes de la Charte afin de promouvoir leurs « politiques interventionnistes » et de s’ingérer dans les affaires intérieures des États, en particulier des pays en développement.  Ainsi, les États-Unis continuent d’imposer des mesures coercitives unilatérales contre le peuple cubain, pour la seule raison que celui-ci exerce librement son droit à l’autodétermination, a accusé le délégué.  Comme si cela ne suffisait pas, Washington s’efforce également d’affecter les relations économiques entre Cuba et les pays tiers. Cette année, a déploré le délégué, les tentatives visant à entraver les travaux du Comité spécial ont été encore plus tangibles que jamais, plusieurs délégations manifestant une attitude « agressive » lors du débat sur les méthodes pacifiques de règlement des différends.  Il s’est encore opposé aux politiques de deux poids, deux mesures, que certains pays tentent d’imposer dans le cadre des travaux du Comité spécial et qui ont rendu impossible l’adoption de son rapport. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a pris acte du travail important accompli par le Comité spécial pour encourager les États à résoudre, par des moyens pacifiques, les différends qui mettent en péril la paix et la sécurité internationales.  Elle a souligné le rôle important joué par les organisations régionales et sous- régionales dans le règlement pacifique des différends et le maintien de la paix. 

La représentante a appelé le Comité spécial à se concentrer sur l’Article 33 de la Charte des Nations Unies et sur la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux en mettant l’accent sur d’autres moyens pacifiques.  À ce titre, elle a encouragé le Comité spécial à procéder à un examen indicatif de la liste des moyens supplémentaires de règlement pacifique, notamment l’échange d’information et de communication, et suggéré que le secrétariat du Comité prépare une note conceptuelle pour guider les délégations sur les termes d’une telle discussion. 

Mme RABIA IJAZ (Pakistan) a considéré que la « tragédie » en cours en Palestine illustre la multiplication actuelle des menaces à la paix. Malgré la paralysie du Conseil de sécurité sur cette question, la déléguée a espéré que les autres organes et institutions de l’ONU seront en mesure d’assurer l’ouverture de couloirs humanitaires pour acheminer nourriture, eau et carburant à Gaza.  La Charte prévoit le respect du principe de l’égalité des droits et de l’autodétermination des peuples, a‑t‑elle rappelé, et établit la légitimité, au regard du droit international, de la lutte des peuples sous occupation étrangère.  Qui plus est, un État qui occupe illégalement un territoire étranger ne peut selon elle justifier ses actions en invoquant le droit à la légitime défense.  Il est à ses yeux évident que les menaces contre la paix et la sécurité internationales ne peuvent être combattues que par une coopération multilatérale dans le cadre de la Charte.  Par conséquent, a poursuivi la représentante, le Comité spécial doit faire « beaucoup plus » pour promouvoir le respect des principes de la Charte et garantir le fonctionnement efficace du système onusien.  Les réponses inadéquates à ces menaces ne dénotent pas tant l’échec de l’ONU que l’incapacité des États Membres à responsabiliser ses organes et à s’entendre sur des mesures collectives pour y faire face. Pour remédier à cette situation, la déléguée a préconisé une réforme complète du Conseil de sécurité et un recours plus large à l’Assemblée générale, aux mécanismes multilatéraux des Nations Unies pour le désarmement, à la Commission de consolidation de la paix, ainsi qu’à la CIJ.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les accords régionaux, un outil précieux au service de la prévention des conflits et du règlement pacifique des différends

9448e séance – matin & après-midi
CS/15458

Conseil de sécurité: les accords régionaux, un outil précieux au service de la prévention des conflits et du règlement pacifique des différends

Rétablir la confiance et encourager la diplomatie préventive.  Telles sont quelques-unes des priorités du Secrétaire général dans son Nouvel Agenda pour la paix, dont le Brésil s’est fait l’écho pour organiser, aujourd’hui, un débat de haut niveau au Conseil de sécurité sur la contribution des accords régionaux, sous-régionaux et bilatéraux à la prévention des conflits et au règlement pacifique des différends.

De fait, le Conseil n’a pas été à la hauteur, continuant de perdre de sa crédibilité et de sa légitimité, aussi bien dans de nouvelles situations de crises que dans le très long conflit entre Israéliens et Palestiniens, a constaté le Brésil, qui préside le Conseil au mois d’octobre.  En outre, cet organe s’est replié sur le recours des mesures coercitives, puisque plus de la moitié des résolutions adoptées l’an dernier se plaçaient sous le signe du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.  Aussi l’a-t-il invité à mieux exploiter son rôle de prévention, au titre du Chapitre VI de la Charte.

Le Chapitre VI prévoit que tous les États s’appuient sur des moyens pacifiques en première option pour régler tout différend, a rappelé M. Khaled Khiari, Secrétaire général adjoint pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique, invitant la diplomatie à prendre des risques et à faire preuve de créativité.  Le monde est en effet entré dans une nouvelle ère et une transition est en cours vers un nouvel ordre mondial, a-t-il fait observer.

Des partenariats solides entre l’ONU et les organisations régionales sont essentiels pour un multilatéralisme efficace, ont reconnu nombre de délégations.  De fait, les violations de la Charte et du droit international renforcent la méfiance et mettent en péril le système multilatéral, alors même que la communauté internationale doit faire face à des menaces existentielles, s’est inquiétée Malte.  Les organisations et cadres régionaux ont un rôle essentiel à jouer à ce titre puisqu’ils peuvent assurer la crédibilité et la légitimité de la diplomatie préventive, tout en contribuant à renforcer la confiance, a abondé M. Khiari. 

En outre, les acteurs régionaux sont les premiers à reconnaître les signes d’un conflit latent, a fait remarquer l’Équateur.  Ils doivent être les premiers à tirer la sonnette d’alarme, à prendre des mesures de prévention et à faciliter la médiation, a renchéri l’Union européenne (UE).

En bref, la recherche de la paix est trop importante pour se permettre de ne pas réunir tous les acteurs désireux de faire une différence, en privilégiant ceux qui sont les mieux à même de rétablir la confiance, ont fait valoir les Émirats arabes unis.  D’autant qu’à l’heure de célébrer les 75 ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme, leur respect accuse un recul dans toutes les régions, a déploré Mme Michelle Bachelet, ancienne Présidente du Chili.  Elle a exhorté à revenir d’urgence aux fondamentaux et à rebâtir le consensus entre États Membres au sein du système multilatéral.

Plusieurs délégations en ont profité pour mettre en avant l’élargissement du Conseil afin qu’il devienne plus représentatif.  De l’avis de l’Égypte, l’approche actuelle de la communauté internationale est en effet dépassée par le temps et les événements, et une présence permanente arabe et africaine au Conseil de sécurité est nécessaire. Selon le Japon, le nouveau conflit entre Israël et la Palestine prouve que les systèmes de gestion de la paix dans l’urgence ne sont pas viables en l’état.  À ce propos, l’Égypte a souligné que son président a convoqué un sommet d’urgence, qui aura lieu demain au Caire, avec la participation des parties prenantes régionales et internationales, pour parvenir à désamorcer la crise en cours.

À l’instar de la Chine, plusieurs pays ont reconnu que les mécanismes et accords régionaux ont joué un rôle important dans le règlement pacifique des différends et dans le maintien de la paix internationale, en complément de celui joué par l’ONU.  L’accord de paix en Colombie a été montré en exemple à plusieurs reprises.  Ainsi, la Directrice de l’institut Peace Accords Matrix (PAM) a fait valoir que l’écoute des victimes est un élément essentiel pour concevoir un accord de paix et surmonter la violence.  De l’avis de Mme Bachelet, la participation des femmes aux efforts de médiation pour parvenir à une paix durable est indispensable. La paix est « une œuvre collective » qui requiert la confiance, a résumé la Suisse, qui accompagne depuis plus de 20 ans le processus de paix en Colombie.

La coopération entre l’ONU et l’Union africaine (UA) a également été citée. M. Thabo Mbeki, ancien Président de l’Afrique du Sud, a ainsi jugé dans « l’intérêt vital » du Conseil de veiller à ce que ses partenaires régionaux, en particulier l’UA, soient suffisamment équipés pour leur permettre de tenir leur rôle dans le cadre de l’architecture mondiale de paix.  Un financement prévisible et durable pour les opérations de paix dirigées par l’UA est indispensable, a plaidé la République de Corée.

Sur ce point précis, le défi actuel pour l’UA et l’ONU, a déclaré l’Algérie, consiste à s’entendre sur une interprétation commune de l’esprit du Chapitre VIII de la Charte, tout en consacrant la primauté du rôle du Conseil de sécurité dans la préservation de la paix et la sécurité internationales.  « Un tel principe devant ouvrir de plein droit aux opérations de soutien à la paix africaines, autorisées par ce Conseil, l’accès aux contributions statutaires des Nations Unies », a ajouté cette délégation. 

L’Afrique du Sud a, elle aussi, mis l’accent sur le rôle des coalitions, parfois efficaces pour soutenir le règlement pacifique des différends, comme ce fut le cas de la troïka au Soudan du Sud.  Le dialogue et la diplomatie, a-t-elle rappelé, ont permis de parvenir à des solutions politiques aux différends en République démocratique du Congo (RDC), au Burundi et, récemment, au Tigré, en Éthiopie.  Quant au Maroc, membre du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, il a accueilli, en octobre 2022, la première édition du processus de Tanger pour lutter contre les causes profondes des conflits sur le continent, a fait valoir son représentant.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

La paix par le dialogue: contribution des accords régionaux, sous-régionaux et bilatéraux à la prévention et au règlement pacifique des différends (S/2023/732)

Déclarations

M. KHALED KHIARI, Secrétaire général adjoint pour le Moyen-Orient, l’Asie et le Pacifique aux Départements des affaires politiques et de la consolidation de la paix, et des opérations de paix, s’est alarmé de la situation dangereuse et en pleine escalade en Israël et dans les territoires palestiniens occupés.  En l’absence de solution négociée à deux États, ce cercle vicieux de violence risque de faire sombrer, des années durant, l’ensemble de la région dans un conflit, a averti M. Khiari.

Le monde est entré dans une nouvelle ère, la période de l’après-guerre est terminée et une transition est en cours vers un nouvel ordre mondial, a fait observer M. Khiari.  Les tensions géopolitiques sont au plus haut depuis des décennies, la concurrence entre États mettant de plus en plus à l’épreuve les limites établies par la Charte des Nations Unies.  La perte de confiance consécutive et les risques d’escalade concernent toutes les régions ou presque. 

Par ailleurs, a-t-il noté, un certain nombre d’États sont sceptiques quant à la manière dont le système multilatéral leur profite et expriment de graves doléances concernant les engagements non tenus et les politiques de deux poids, deux mesures. Aussi, les règlements négociés pour les conflits deviennent de plus en plus complexes.  La recherche de solutions militaires devient une caractéristique proéminente des récents conflits, au cours desquels les civils paient un lourd tribut, s’est inquiété M. Khiari.

Dans ce contexte, il a souligné que la diplomatie implique de prendre des risques et de faire preuve de créativité, et qu’elle est cruciale entre pays en désaccord.  Le Chapitre VI de la Charte prévoit que tous les États s’appuient sur des moyens pacifiques en première option pour régler tout différend, et propose un large ensemble d’options en ce sens. M. Khiari a estimé que les organisations et cadres régionaux ont un rôle essentiel à jouer à ce titre.  Ils peuvent assurer la crédibilité et la légitimité de la diplomatie préventive, contribuer à renforcer la confiance, et porter en leur sein des mécanismes de gestion des crises.  Les actions régionales ont déjà permis de prévenir des conflits et des escalades, a-t-il souligné.  Renforcer, établir ou rétablir des cadres régionaux est d’une importance particulière dans les régions où le dispositif sécuritaire de longue date s’effondre ou est dans l’impasse.

Les États Membres ont les moyens de s’acquitter des obligations qui leur ont été confiées par le biais de la Charte des Nations Unies, a assuré M. Khiari.  Les bons offices permettent de gérer ou d’inverser la détérioration des relations mondiales ou régionales.  En ce sens, le Nouvel Agenda pour la paix entend présenter une analyse unificatrice des éléments géopolitiques actuels en faisant fond sur des solutions conjointes.  Parce qu’il est de plus en plus divisé, le monde a besoin d’au moins une institution en laquelle il peut avoir confiance, a fait observer M. Khiari.  Il faut avoir le courage d’écouter et de comprendre le point de vue des autres, ce en quoi les organisations régionales jouent un rôle clef, a-t-il conclu.

Intervenant par visioconférence, Mme MICHELLE BACHELET, ancienne Présidente du Chili, a rappelé que le Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies contient des dispositions relatives aux arrangements régionaux, leurs rôles dans le maintien de la paix et la sécurité et leurs relations avec le Conseil de sécurité. Aujourd’hui, plus que jamais, l’ONU est appelée à jouer un rôle vital en encourageant ses membres à atteindre l’objectif du renforcement des organisations régionales et à leur permettre à jouer un rôle accru dans le maintien de la paix et la sécurité, a-t-elle ajouté. Après avoir mis l’accent sur le « Nouvel Agenda pour la paix » qui appelle à l’établissement de cadres régionaux robustes, elle a souligné que les conflits naissent d’une mauvaise gouvernance, des atteintes aux droits de l’homme et du ressentiment face à une distribution inégale des ressources, de la richesse et du pouvoir. 

Mme Bachelet a ensuite constaté qu’au moment où on célèbre le soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, leur respect accuse un recul dans toutes les régions, conjointement avec une érosion de l’état de droit, notamment dans les zones de conflit.  Il nous faut revenir d’urgence aux principes fondamentaux, a-t-elle exhorté, en invitant à rebâtir le consensus entre États Membres au sein du système multilatéral.  Partant, la diplomatie s’avère être un outil non seulement pour la réduction des risques de conflit, mais également pour remédier aux fractures grandissantes qui marquent l’ordre géopolitique actuel et pour dégager des espaces de coopération pour des intérêts partagés, a proposé Mme Bachelet, pour qui la participation des femmes dans la médiation pour parvenir à une paix durable est indispensable, ce qui va bien au-delà de faire taire les armes.  Cela permet de garantir aussi la participation des communautés concernées aux processus de paix, a-t-elle encore expliqué, en exhortant à réexaminer les rapports de force. 

Illustrant le caractère décisif des initiatives régionales, elle a achevé son propos en évoquant le vingt-cinquième anniversaire de la signature des Accords de Brasilia (26 octobre 1998) qui furent un tournant historique pour le règlement des différends frontaliers dans les Amériques avec la participation active des garants (Argentine, Brésil, Chili et États-Unis) 

M. THABO MBEKI, ancien Président de l’Afrique du Sud, a rappelé que depuis des décennies, la majorité des Casques bleus ont été déployés sur le continent africain, raison pour laquelle l’Union africaine s’est engagée avec l’ONU dans le domaine du maintien de la paix.  Il a ensuite cité un ancien fonctionnaire de l’ONU qui, en 2015, avait estimé que le maintien de la paix avait globalement échoué en Afrique, notamment au Mali, au Soudan du Sud, en République démocratique du Congo (RDC) ou encore au Rwanda, lors du génocide de 1994.  Personne, ni les Nations Unies, ni l’Union africaine, ne veut reproduire ces échecs, a-t-il dit.

Poursuivant, M. Mbeki a cité le rapport de 2015 du Groupe consultatif des Nations Unies sur le maintien de la paix, dans lequel il est indiqué qu’une paix pérenne ne peut être obtenue que par le biais d’un soutien technique et la mise en œuvre des accords de paix.  Le rapport précise également que le temps est venu pour l’ONU et l’Union africaine (UA) de reconnaître et de faire valoir leurs avantages comparatifs en matière de maintien de la paix.

Après avoir disserté sur les capacités et avantages comparatifs de l’UA, l’ancien Président a jugé qu’il est dans « l’intérêt vital » du Conseil de veiller à ce que ses partenaires régionaux, en particulier l’Union africaine, soient suffisamment équipés pour leur permettre de tenir leur rôle dans le cadre de l’architecture mondiale de paix.  Dans ce contexte, il est, a-t-il dit, important que des accords soient conclus dans le but d’utiliser les ressources des Nations Unies pour appuyer les opérations de maintien de la paix de l’UA.  Le Conseil a, en effet, besoin de partenaires régionaux solides, capables de l’appuyer pour qu’il s’acquitte de ses responsabilités, dans le respect des Chapitres VI, VII et VIII de la Charte.  Il est à espérer que le débat de ce matin contribuera à réaliser cet objectif, a lancé en conclusion l’ancien chef d’État. 

Mme JOSEFINA ECHAVARRÍA ÁLVAREZ, professeur au « KROC Institute for international peace studies » de University of Notre Dame, où elle dirige Peace Accords Matrix (PAM), a fait remarquer que c’est en cas de désaccords et de difficultés politiques qu’un dialogue soutenu est le plus nécessaire. Ce dialogue permet d’approfondir notre compréhension de comment et quand la mise en œuvre d’accords pacifiques échoue – « ce qui n’est pas rare ».  Il permet aussi de se concentrer sur la façon de concevoir et de mettre en œuvre des accords pacifiques qui peuvent réussir à court, moyen et long terme.  Dans le cadre du projet PAM, elle a mentionné l’analyse de plus de 34 accords de paix intra-étatiques, qui remontent jusqu’à 1989.  L’Institut suit le processus de mise en œuvre jusqu’à 10 ans après la signature de chaque accord, a-t-elle indiqué en expliquant que cela permet de comparer les accords de paix et les résultats de l’application de leurs dispositions.  Grace à sa base de données et à ses analyses, l’Institut offre ainsi des explications pertinentes sur les raisons de l’échec des accords de paix. 

L’intervenante a remarqué en premier lieu que les accords de paix ont plus de chances de réussir lorsque les engagements inclus dans l’accord vont au-delà des dispositions militaires et sécuritaires, telles que celles concernant la démobilisation et la réintégration des anciens combattants.  Ils ont plus de chances de réussir lorsqu’ils intègrent des questions de développement politique et social, de droits ethniques et de droits des femmes, ainsi que des réformes liées à la justice qui profitent à l’ensemble de la société.  Le plus souvent, ces réformes sont apportées à la table des négociations par les victimes de la guerre et d’autres représentants d’organisations de la société civile. 

C’est ce qui explique que la réussite des accords de paix dépend aussi de la présence de ces parties prenantes à la table des négociations, dont les personnes les plus touchées par la guerre, telles que les femmes, les jeunes et les communautés ethniques.  Écouter les voix des victimes permet de mieux comprendre les transformations nécessaires pour surmonter la violence, a fait valoir l’experte.

Le troisième et dernier facteur qui contribue au succès et à la résilience des accords de paix est l’existence de mécanismes de contrôle et de vérification solides, indépendants et fiables.  Les recherches de PAM montrent que les accords de paix dotés de tels mécanismes ont un taux de réussite de mise en œuvre supérieur de près de 47% à ceux qui n’en ont pas.  L’oratrice a donc recommandé d’inclure ces mécanismes dans la conception de l’accord de paix et de les choisir en fonction de leur validité, de leur légitimité et de leur fiabilité.  Elle a souligné à cet égard l’importance des institutions universitaires et des centres de recherche qui prêtent leurs connaissances techniques et leur crédibilité à l’exercice de ce contrôle indépendant, en donnant l’exemple de l’accord de paix en Colombie entre le Président Santos et les FARC.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a commencé par souligner qu’aussi bien dans certaines nouvelles situations de conflit que dans celle, très ancienne, entre Israéliens et Palestiniens, le Conseil de sécurité n’a pas été à la hauteur, continuant de perdre sa crédibilité et sa légitimité.  Il doit revitaliser son rôle dans la prévention des conflits et la promotion des solutions pacifiques, a-t-il recommandé, avant d’avancer présenter deux options: réviser la portée de son mandat et se référer aux initiatives ayant réussi à d’autres mécanismes et ayant fait leurs preuves à d’autres niveaux de gouvernance.

À cette fin, le Chapitre VI confère au Conseil une marge de manœuvre considérable pour faire preuve de créativité.  Malheureusement, ces dernières années, il s’est, de plus en plus, concentré sur des mesures coercitives, puisque, a-t-il documenté, plus de la moitié des résolutions adoptées l’an dernier se plaçaient explicitement sous le signe du Chapitre VII.  Or, cela a rendu plus difficile l’obtention de consensus et limité la capacité de cet organe à s’adapter à des crises spécifiques.  Pourtant, ailleurs, des solutions pacifiques ont continué à être utilisées de manière créative et efficace, a indiqué le représentant, citant l’exemple de sa région, où des règlements bilatéraux directs ont été obtenus dans des différends territoriaux et des règlements diplomatiques trilatéraux dans l’utilisation de fleuves.  Parmi les autres initiatives bilatérales de renforcement de la confiance, couronnées de succès, le délégué a cité l’Agence argentino-brésilienne de comptabilité et de contrôle des matières nucléaires (ABACC) ainsi que de vastes initiatives régionales, telles que le Groupe de Rio et l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL).  Pour finir, le délégué a plaidé pour un élargissement du Conseil de sécurité pour le rendre plus représentatif, car davantage de voix autour de la table pourraient aider à surmonter la logique de rivalité qui paralyse périodiquement de nombreuses décisions ici.

M. IGLI HASANI, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de l’Albanie, a salué l’organisation de ce débat dans un monde en pleine évolution et confronté à des défis d’ampleur historique.  Le conflit en Ukraine constitue un tournant pour la sécurité européenne et rappelle la nécessité de reprendre le dialogue et la coopération pour faire face aux crises et pour régler les différends.  En outre, a continué le Ministre, l’escalade spectaculaire de la situation au Moyen-Orient suite à l’attaque « ignoble » menée par le Hamas est devenue une immense source de souffrance pour les Israéliens et pour les Palestiniens, et une menace pour le Moyen-Orient dans son ensemble. 

Face aux défis intriqués et complexes dans le monde, il a remarqué que l’ordre international basé sur des règles est une base solide qui permet de traiter ces questions par la coopération et des moyens pacifiques.  Ce n’est pas la panacée, a regretté le Ministre, mais il s’agit d’outils essentiels à la promotion de la paix et de la stabilité au sein du système international.  Le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général appelle à des partenariats plus forts entre les cadres régionaux et les Nations Unies et il devient impératif de réfléchir au fonctionnement de ces partenariats, selon lui.  Cela est d’autant plus indispensable pour les petits États qui ont parfois du mal à se faire entendre, a fait observer M. Hasani. En travaillant ensemble et en défendant leurs intérêts partagés, ces petits États peuvent avoir une incidence sur les affaires mondiales et une voix plus importante dans les processus de décision.

En tant que pays candidat à l’Union européenne (UE), l’Albanie souligne avec conviction le rôle indéniable que joue l’UE sur toute une série de questions.  Il y a quelques jours, l’Albanie a accueilli à Tirana le dixième Sommet du processus de Berlin sur les Balkans occidentaux, le premier à avoir eu lieu en dehors de l’UE.  Cette initiative a permis de lancer un processus délicat mais irréversible de réconciliation entre les pays de la région, s’est félicité le Ministre avant de souligner que la rivalité entre les puissances et leurs intérêts peut soit exacerber les conflits, soit faciliter leur règlement.  Prônant le dialogue, la seule manière de régler les problèmes, il a misé sur les organisations régionales et sous-régionales qui peuvent jouer un rôle clef et dont il faut libérer le potentiel.

L’impact de notre travail de prévention sera jugé à l’aune des résultats et non par nos déclarations, a affirmé Mme NOURA AL KAABI, Ministre d’État au Ministère des affaires étrangères des Émirats arabes unis, qui a souligné que ce débat consiste à examiner dans quelle mesure la responsabilité partagée peut être concrètement mise en œuvre et améliorée.  La recherche de la paix est trop importante pour se permettre de ne pas réunir tous les acteurs désireux de faire une différence, en privilégiant ceux qui sont les mieux à même de rétablir la confiance, a-t-elle poursuivi. Elle a appelé à tirer davantage profit de la diversité des États Membres de l’ONU, tout en appelant le Conseil à parler d’une seule voix sur la crise « catastrophique » qui se déroule à Gaza.  Les efforts déployés au niveau régional sont vitaux pour la fourniture d’une assistance humanitaire sur place et prévenir toute expansion du conflit.  Leurs voix sont indispensables pour réactiver l’horizon politique dont Israël et la Palestine ont désespérément besoin à présent. 

Les accords humanitaires, comme l’échange de détenus, pourraient ouvrir des canaux de communication, a-t-elle suggéré, en exhortant à prendre aussi davantage de mesures humanitaires.  La Ministre s’est ensuite félicitée du soutien des associations et des réseaux de femmes médiatrices, proposant de renforcer l’inclusivité des mécanismes de médiation.  La Ministre a jugé, en conclusion, que la crise qui fait rage au Moyen-Orient n’est que le résultat de la conviction qu’elle pouvait être gérée indéfiniment, sans se pencher sur ses causes profondes.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a relevé que les violations de la Charte des Nations Unies et du droit international renforcent la méfiance et mettent en péril, peut-être irrémédiablement, le système multilatéral dont nous dépendons tous, alors même que la communauté internationale doit faire face à des menaces existentielles telles que les changements climatiques, le terrorisme, la désinformation et la cybercriminalité.  Le recul des droits humains, en particulier des droits des femmes, est évident dans le monde entier, s’est encore inquiétée Mme Frazier.

De l’avis de Malte, les organisations régionales et sous-régionales font partie intégrante du système multilatéral, dont la connaissance en profondeur de leur région est un atout précieux pour avancer vers la paix.  Ainsi, depuis sa création sur les cendres de la Seconde Guerre mondiale, l’Union européenne a joué un rôle fondamental pour assurer la paix et stabilité en Europe.  En outre, l’approche ONU-UE de la gestion des crises, de la médiation, des opérations de paix a aidé plusieurs pays à réaliser la difficile transition du conflit vers la paix.  Mme Frazier a également salué les efforts remarquables de l’Union africaine, citant la coopération trilatérale ONU-UA-UE pour la paix et la sécurité comme un exemple de partenariat entre organisations internationales et régionales.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a réaffirmé l’attachement de son pays au rôle des organisations régionales et sous-régionales dans la recherche de la paix. C’est cet attachement qui a prévalu lorsque des mécanismes de prévention et de gestion des crises et des conflits ont été mis en place dans sa sous-région, a-t-il expliqué, en citant le mécanisme d’alerte rapide du Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique centrale (COPAX).  Il a également salué le rôle du bureau régional de l’ONU à Libreville dont le mandat intègre notamment la prévention, ou encore les Accords de Luanda et de Nairobi dans le règlement de la crise dans l’est de la RDC.  Pour le représentant, cela montre que les cadres sous-régionaux peuvent être des relais crédibles des actions internationales ainsi que des mécanismes de maintien de la paix proposés par l’ONU. 

Le délégué a considéré les arrangements régionaux et sous-régionaux comme des partenariats de référence dans la promotion de la paix, en particulier parce qu’ils intègrent les spécificités de chaque situation et saisissent les besoins réels des parties prenantes, notamment des femmes, des jeunes et des communautés vulnérables dont la participation aux processus de paix est un enjeu crucial. Les mécanismes régionaux et sous-régionaux fournissent également une plateforme idéale pour les négociations de paix et pour la médiation, a fait valoir le représentant en faisant référence à la coopération ONU-UA et ONU-UA-IGAD.  Il s’agit d’outils essentiels pour l’efficacité de l’Agenda pour la paix et la sécurité de l’Afrique, a argué le délégué, parce que cette coopération se fonde sur l’indispensable complémentarité et subsidiarité du partenariat entre ces organisations.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a mis en avant le rôle des partenariats pour relever les nouveaux défis mondiaux et régionaux liés aux changements climatiques, à l’insécurité alimentaire et énergétique et au terrorisme.  Il a cité les efforts de coopération entre l’ONU et l’Union africaine (UA) ainsi qu’avec d’autres institutions telles que l’Union européenne, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ou encore la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  Le processus du Sommet de l’avenir et le Nouvel Agenda pour la paix, seront l’occasion de faire le bilan des outils mentionnés dans le Chapitre VI de la Charte. 

Pour leur part, les États-Unis continueront à appuyer le rôle fédérateur de l’ONU dans les crises émergentes et prolongées pour définir des objectifs clairs et coordonnés parmi le large éventail d’acteurs.  À cet égard, le représentant a salué l’accent mis dans le Nouvel Agenda pour la paix sur la prévention et le rôle de la Commission de consolidation de la paix.  Il a, de même, insisté sur la promotion et le respect des droits humains.  Le Conseil de sécurité, a-t-il poursuivi, doit répondre à la demande de soutien des organisations régionales.  À cet égard, il a réitéré son appui au processus de transition au Burkina Faso, au Mali et en Guinée.  Évoquant la détérioration de la situation en Haïti qui montre la nécessité d’apporter des réponses souples à l’insécurité croissante, il a réitéré l’engagement de son pays à travailler avec ses « partenaires haïtiens ». Dans ce contexte, il a loué la Communauté des Caraïbes (CARICOM), un partenaire de premier plan pour rétablir la sécurité en Haïti.  Les États-Unis sont déterminés à apporter leur concours, au moment où la mission multidimensionnelle élaborera son plan de déploiement. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a souligné que le dialogue est au cœur de toute résolution de conflit, estimant que la paix par le dialogue est tout aussi importante que la paix par le droit.  Selon lui, lorsque des conflits entre États sont déclenchés par surprise, ils sont le fait d’une absence de dialogue, et par conséquent d’un manque de confiance.  L’Afrique australe a ainsi profondément souffert d’une absence de dialogue, a indiqué le représentant, en expliquant que lorsque ce dialogue est devenu une réalité, le colonialisme a disparu; lorsqu’il a été accepté, l’apartheid, crime contre l’humanité, a été rayé de la carte. 

Pour le Mozambique, la coopération aux niveaux régional et sous-régional, ainsi que les accords bilatéraux, constituent la pierre angulaire des efforts conjoints pour faire face aux conflits, bâtir la confiance, nourrir la paix et promouvoir le développement durable, en Afrique et partout dans le monde.  De l’avis du représentant, l’idée même de « solutions africaines aux problèmes africains » est une reconnaissance claire de la contribution indéniable des entités locales, infrarégionales et régionales, ainsi que des accords bilatéraux pour parvenir à une paix et à une sécurité durables.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a constaté que le monde est dans la tourmente, avec une série de problèmes géopolitiques graves, notamment l’agression contre l’Ukraine, la situation de plus en plus tendue autour de la bande de Gaza, les lancements répétés de missiles balistiques intercontinentaux par la Corée du Nord et les troubles politiques dans plusieurs pays d’Afrique.  Pour faire face à autant de crises variées et complexes, il est impératif que la communauté internationale reste unie et mobilise tous les outils à sa disposition, dont le Chapitre VI de la Charte. 

Les accords bilatéraux, régionaux et sous-régionaux, a fait observer le représentant, se concluent sur la base de la confiance mutuelle et de l’intérêt commun, entre des parties qui ont des affinités et des spécificités géographiques partagées.  Ils visent tous à résoudre les problèmes par le dialogue.  Il faut donc, a reconnu le représentant, recourir davantage à ces accords. Le fait que les résolutions du Conseil de sécurité aient été violées à maintes reprises confirme qu’il faut travailler main dans la main avec les acteurs régionaux.  Le représentant a tenu à insister sur le fait que le succès des opérations de paix, outils essentiels, dépend de la qualité de l’appui du Conseil.  Il a aussi souligné la légitimité et l’efficacité des sanctions comme un outil central au titre du Chapitre VI de la Charte pour autant qu’elles soient judicieusement et rigoureusement appliquées.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a invoqué le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies, relatif au règlement pacifique des différends, qui donne aux États Membres la possibilité de parvenir à des solutions durables aux conflits sur la base de la compréhension mutuelle et de la coopération. Le rôle des organisations régionales et sous-régionales à cet égard est incontestable, a-t-il estimé, ajoutant que, souvent, celles-ci jouissent d’une connaissance approfondie des réalités locales et des spécificités culturelles, économiques et sociales.  Ces organisations peuvent jouer un « rôle de passerelle » entre les initiatives nationales et internationales, garantissant une résolution plus ciblée et plus efficace des conflits.  Le délégué a pris pour exemple l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), dont la contribution à la stabilité régionale depuis plus de 20 ans est réelle.  Des travaux sont menés en permanence pour relever les défis régionaux, notamment ceux en provenance du territoire afghan, a-t-il rappelé, en faisant part de l’intention de Moscou de contribuer davantage au renforcement de l’OTSC et de sa coopération avec l’ONU.

Malgré la suspension du statut d’observateur de notre pays auprès de l’Organisation des États américains (OEA), a encore dit le représentant, nous sommes prêts à poursuivre notre coopération avec ceux d’entre eux qui sont encore intéressés. Le délégué s’est félicité du renforcement de l’autorité de l’Union africaine, reflétant le rôle et l’influence croissants du continent dans le monde en tant que l’un des piliers les plus importants du monde multipolaire.  Il a cité à cet égard le travail efficace de l’UA dans la lutte contre les menaces des organisations terroristes, notamment Daech, Al-Qaida, Boko Haram et Al-Shabaab.  Le représentant s’est néanmoins alarmé des décisions de l’Union européenne au cours des dernières années, laquelle bafoue ses propres valeurs en fournissant des armes et munitions dans une zone de conflit.  En effet, l’UE ne contribue en rien à la résolution du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ou encore au Kosovo, a-t-il critiqué, qualifiant le « bloc nord-atlantique » de clair « vestige » de la guerre froide. 

M. ZHANG JUN (Chine) a reconnu que les mécanismes et autres arrangements régionaux ont joué un rôle important dans le règlement pacifique des différends, des conflits et dans le maintien de la paix internationale, en complément du rôle joué par l’ONU.  Dans un monde de plus en plus complexe, avec des crises et conflits qui éclatent partout, il est important que ces mécanismes travaillent avec les Nations Unies pour renforcer leur coopération, a-t-il souligné.  Il a insisté pour que ces mécanismes respectent le droit international, notamment la souveraineté des États, et pour qu’ils usent du dialogue, des bons offices, de la diplomatie préventive et de la plus grande prudence dans la menace d’utilisation de la force.  Ils doivent aussi éliminer les causes premières des conflits et assister les pays dans les périodes de reconstruction après conflits pour arriver à une paix durable. 

Pour le représentant, le nouveau conflit entre Israël et la Palestine a prouvé que les systèmes de gestion de la paix dans l’urgence ne sont pas viables.  Il a dit soutenir l’action des États de la Ligue des États arabes, avant d’appeler l’ONU à en faire autant en entendant les appels pour parvenir à un cessez le feu immédiat et à la livraison d’une aide humanitaire.  Il a exprimé son soutien à l’UA et appuyé ses demandes en faveur du financement, par l’ONU, de ses opérations de paix.  Il a aussi dit appuyer la CARICOM et ses efforts à Haïti, que les Nations Unies devraient aussi soutenir.  Les Nations Unies devraient aussi travailler de concert avec les mécanismes régionaux en Asie pour aider à trouver des solutions aux problèmes régionaux, notamment au Myanmar a encore recommandé le délégué avant de citer l’Union européenne. Celle-ci devrait à son avis pratiquer le vrai multilatéralisme, s’abstenir d’ingérence dans les affaires internes des États et respecter leur volonté de choisir librement la voie de développement qu’ils veulent pour leur population. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a rappelé que la paix est « une œuvre collective », ce qui requiert la confiance.  C’est une observation que la Suisse a faite dans toutes ses expériences de médiation, et notamment dans celui de la Colombie, qu’elle accompagne depuis plus de 20 ans.  Bien sûr, la confiance ne va pas de soi, a-t-elle concédé, elle se construit et se gagne.  La confiance trouve souvent un terrain fertile dans les organisations régionales qui encouragent un dialogue continu et une coopération technique, a-t-elle relevé, ajoutant que ces organisations sont bien placées pour prendre les devants dans la médiation des conflits.  À cet égard, la déléguée a évoqué l’exemple des discussions internationales, à Genève, sur la Géorgie, sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), de l’Union européenne (UE) et de l’ONU, où des questions pratiques essentielles pour les populations touchées par les conflits sont abordées. 

« Alors qu’en est-il du Conseil de sécurité lorsque les organisations régionales prennent les devants? »  La déléguée a estimé que le Conseil avait un triple rôle à jouer: gardien normatif, catalyseur et préventif.  À titre normatif, il doit veiller à ce que les arrangements régionaux soient conformes aux normes universelles, comme les droits humains, ce qui favorise la confiance. En tant que catalyseur, le Conseil peut amplifier les efforts régionaux de médiation des conflits notamment par le partage de perspectives et de recommandations grâce aux visites du Conseil sur le terrain, à ses dialogues interactifs informels et au rôle fédérateur de la Commission de consolidation de la paix (CCP).  Enfin, le Conseil doit exercer son rôle préventif en misant sur la coopération au sens large, notamment dans le cadre des missions politiques spéciales de l’ONU qui doivent œuvrer davantage sur le terrain de la prévention. Selon la représentante, le Secrétaire général devrait aussi utiliser pleinement tous ses outils de médiation, comme il s’engage à le faire dans son Nouvel Agenda pour la paix. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a d’entrée tiré la sonnette d’alarme sur le nombre des victimes enregistrées, l’année dernière, dans les 55 conflits qui secouent le monde, un nombre jamais égalé depuis 1984.  Le représentant s’est demandé ce que peuvent faire ce Conseil, l’ensemble des Membres de l’ONU et d’autres acteurs pour inverser cette tendance.  Il a proposé une action plus coordonnée pour aider les acteurs nationaux à prévenir et régler les conflits, reconnaissant la nécessité de prendre parfois des décisions difficiles et accepter l’aide des amis de bonne foi.  Le Royaume-Uni, a-t-il expliqué, a eu le privilège d’être un de ces amis dans plusieurs processus de paix et il continue de soutenir activement les efforts bilatéraux et multilatéraux, notamment en tant que donateur majeur, aux programmes internationaux des Nations Unies pour la paix. 

À cet égard, le représentant a suggéré de renforcer et de mieux coordonner les actions avec les organisations régionales.  Il a d’ailleurs demandé d’approfondir encore le dialogue annuel fructueux entre le Conseil de sécurité et l’Union africaine (UA).  Ardent défenseur du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies, le Royaume-Uni, a-t-il dit, estime qu’en cette période de profonde division géopolitique, il est encore plus important de laisser les organisations régionales jouer un rôle actif.  Si les efforts nationaux et régionaux échouent, alors il est du devoir de ce Conseil de prendre des mesures pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, mais, a-t-il nuancé, dans une position de dernier recours.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé, citant le rapport du Secrétaire général sur le Nouvel Agenda pour la paix, que la sous-utilisation des moyens relatifs au règlement pacifique des différends, présentés dans l’Article 33 de la Charte, est l’une des plus grandes lacunes de la communauté internationale dans le règlement pacifique des différends.  Or, les accords régionaux, sous-régionaux et bilatéraux ont le potentiel de compléter et de renforcer les efforts des Nations Unies visant à prévenir et à régler pacifiquement les différends.  De plus, les acteurs régionaux sont les premiers à reconnaître les signes d’un conflit latent.  De même, ils peuvent garantir la mise en œuvre des accords de paix à travers la création de zones démilitarisées, des cessez-le-feu et l’accompagnement des processus politiques et de négociation, entre autres, a-t-il relevé. 

L’expérience de l’Amérique latine dans ce domaine est révélatrice, selon le représentant. L’histoire de la région, a-t-il rappelé, a été marquée par des conflits armés et des guerres civiles, mais elle a démontré au cours des dernières décennies sa capacité à prévenir et résoudre les conflits de manière pacifique.  L’Équateur et le Pérou ont signé les Accords de paix de Brasilia en 1998, après le conflit armé de Cenepa, survenu au début de 1995.  En février de la même année, les deux pays ont convenu de la Déclaration de paix d’Itamaraty, qui a ouvert la voie à un processus de négociation, dans lequel ils ont été accompagnés par l’Argentine, le Brésil, le Chili et les États-Unis, en tant que pays garants du processus.  Le représentant a encore parlé de la création de la Mission militaire d’observation Équateur-Pérou, sur la base de ce qui avait été convenu dans la Déclaration d’Itamaraty et avec le plein engagement des pays garants.  Cela a permis l’établissement d’une zone démilitarisée qui est devenue l’un des fondements du processus de paix, a, entre autres, illustré le représentant. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a relevé que l’intégration régionale sert le maintien de la paix et de la sécurité internationales, une vision qui continue d’animer la construction européenne jusqu’à ce jour.  C’est encore ce modèle que nous défendons à travers la perspective européenne reconnue à l’Ukraine, depuis la guerre d’agression déclenchée par la Russie, a-t-il ajouté.  La France, a déclaré le délégué, soutient l’ensemble des acteurs régionaux qui partagent cette vision, donnant l’exemple du soutien à l’UA, via la Facilité européenne de paix, qui s’élève à 600 millions d’euros pour 2022-2024. Il a réitéré son appui aux efforts de l’UA et de l’ensemble des acteurs de la région, alors que le conflit au Soudan fait rage depuis six mois.  En Amérique latine, a encore illustré le représentant, le partenariat UE-CELAC est essentiel pour faire face aux défis communs qui dépassent la paix et la sécurité internationales, notamment à la lutte contre les changements climatiques. 

En Asie, la coopération avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) fait aussi partie intégrante de la stratégie Indopacifique de la France pour faire face ensemble aux défis multilatéraux et renforcer la stabilité régionale, a poursuivi le délégué.  Il a également fait savoir que l’action au niveau régional doit rester complémentaire de l’action du Conseil de sécurité qui conserve la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  « C’est impératif alors que des puissances régionales tentent de plus en plus fréquemment de mettre à profit leur influence pour imposer des situations de fait accompli et faire échec aux efforts de médiation régionaux. »  Il a cité le nouvel Agenda pour la paix présenté qui réitère que l’ONU a besoin d’une action collective des États Membres pour remplir efficacement leur mandat, qu’il s’agisse des bons offices du Secrétaire général, de la défense des droits de l’homme ou du maintien de la paix.  Le représentant a soutenu le financement des opérations de paix africaines par les contributions au budget ordinaire de l’ONU. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a déclaré que le défi pour le Conseil est de se départir du recours à la force et de recourir à des moyens pacifiques pour résoudre les différends.  Certains États ont l’impression que le recours à des moyens pacifiques ne produirait pas toujours les résultats rapidement, a-t-il relevé, en les rassurant: en matière de paix et de sécurité, les moyens pacifiques ont généralement eu des résultats durables.  Le représentant a donc encouragé les États Membres, et le Conseil en particulier, à approfondir l’utilisation des dispositions du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies dans le règlement des différends.  Ils doivent utiliser l’Agenda pour la paix et réfléchir à une nouvelle approche de la prévention, de la gestion et du règlement des conflits, et adopter des approches pacifiques. 

Le représentant a encouragé le Conseil à appeler les parties au conflit à régler leurs différends par des moyens pacifiques.  Il a aussi recommandé de renforcer la capacité du Secrétaire général à soutenir les États en conflit pour qu’ils aient confiance aux architectures de soutien de la paix de l’ONU notamment les bons offices du Secrétaire général, la médiation et la diplomatie préventive.  Ces capacités devraient s’imbriquer dans celles des arrangements régionaux de manière à tirer parti des connaissances et de l’expérience régionales, a encore conseillé le représentant, avant de souligner le rôle essentiel des systèmes d’alerte précoce de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine (UA), du Groupe des sages de l’Union africaine ou celui de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  Ces mécanismes ont besoin de ressources supplémentaires pour renforcer leur efficacité, a-t-il néanmoins relevé.  Enfin, il a encouragé le Conseil à multiplier les visites sur le terrain et les dialogues avec ces arrangements régionaux.  Le processus de paix en Colombie en est un des bons exemples, a estimé le délégué qui, avant de conclure, a appelé à investir dans la résilience des femmes et des jeunes face aux défis de la paix et de la sécurité. 

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL, Premier Ministre adjoint des affaires étrangères de Cuba, a commencé par condamner les bombardements aveugles par Israël dans la bande de Gaza de ces derniers jours et fustiger les États-Unis pour leur « complicité » dans ces « crimes de guerre ».  Le chemin de la paix passe par le multilatéralisme et le plein respect de la Charte des Nations Unies et des normes du droit international, a-t-il insisté, avant de dénoncer dans la foulée les sanctions unilatérales et les tentatives d’imposer un mode de pensée unique.  Saisissant l’occasion de rappeler que l’Amérique latine et les Caraïbes se sont décrétées zones de paix, il y a près de 10 ans, le représentant a fait part de sa fierté pour le rôle joué par Cuba dans l’accord de paix colombien en tant que garant des dialogues entre les parties.  Pour son pays, le Nouvel Agenda pour la paix passe de manière inconditionnelle par une réforme intégrale et profonde du Conseil de sécurité, y compris une meilleure représentation des pays du Sud, et un Conseil plus démocratique, transparent et inclusif, ainsi que la fin de ses interférences dans les travaux d’autres organes comme l’Assemblée générale, a lancé le délégué, pour qui elles portent atteinte à la crédibilité et à l’efficacité de l’ONU.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a souligné l’importance du Nouvel Agenda pour la paix qui peut servir de base pour la diplomatie préventive, la médiation et la consolidation de la paix de sorte à promouvoir la résilience au sein des sociétés.  C’est pourquoi il souscrit à l’appel lancé par le Secrétaire général, visant à revoir l’approche en matière de règlement pacifique des différends.  En amont du Sommet de l’avenir, il a préconisé de discuter de l’opérationnalisation de cet appel et d’utiliser les structures existantes, tels que les examens nationaux volontaires sur les objectifs de développement durable (ODD) ou la Commission de consolidation de la paix.  Il a demandé au Secrétariat de l’ONU de donner des orientations à ce sujet. 

Passant à l’élaboration des partenariats, il a appelé l’ONU et le Conseil de sécurité à œuvrer pour des partenariats plus robustes avec les organisations régionales et infrarégionales, car tirer « parti d’autrui » est à ses yeux le seul moyen de mettre le multilatéralisme à profit pour relever les défis de l’humanité.  Le délégué a en outre encouragé à mieux appréhender le « multilatéralisme en réseaux » et a exhorté à garantir, à l’international, un financement pérenne des opérations et partenariats régionaux.  Cette approche ne signifie pas toutefois revoir à la baisse les opérations de maintien de la paix qui doivent rester centrales à l’ONU, a-t-il conclu. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) s’est concentré sur le rôle que le Conseil de sécurité peut jouer en Afrique et au Moyen-Orient dans le renforcement des mécanismes régionaux et bilatéraux pour le règlement pacifique des conflits. L’Afrique a toujours été consciente de l’importance de développer de tels mécanismes, selon le principe visant à apporter des solutions africaines aux problèmes africains, a-t-il fait observer. Il a relevé les succès de ces mécanismes, directement liés à l’UA, mais aussi leurs défis de taille, notamment un manque de coordination.  Aussi a—t-il appelé le Conseil à les renforcer et à leur accorder un rôle plus important pour les questions africaines, y compris en finançant les opérations de l’UA pour la paix.  Comme exemple de l’importance de la coordination entre les initiatives, il a cité le récent sommet sur le Soudan qui a eu lieu au Caire et deux réunions ministérielles à New York et N’Djamena pour résoudre la crise soudanaise.

Au sujet de la question palestinienne, le représentant a déploré que le Conseil se montre incapable de mettre un terme à la situation actuelle et de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza.  Ces dernières années, l’Égypte n’a pas épargné ses efforts pour éviter une escalade, a-t-il fait remarquer, en disant avoir été le premier pays à avoir signé un accord de paix avec Israël.  L’Égypte, a-t-il ajouté, a une vision claire de la situation et poursuit ses efforts.  Il a souligné que le Président égyptien a demandé la convocation d’un sommet urgent, qui aura lieu demain au Caire, avec la participation des parties prenantes régionales et internationales pour essayer de parvenir à désamorcer la crise et à un règlement juste.  De l’avis de l’Égypte, l’approche actuelle de la communauté internationale est dépassée par le temps et les événements.  Une présence permanente arabe et africaine au Conseil de sécurité est nécessaire, a conclu le représentant.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a voulu que ce débat public ne se limite pas uniquement aux mécanismes régionaux, mais qu’il soit axé sur l’efficacité et l’impact des accords bilatéraux dans le règlement des différends.  Elle a aussi mis l’accent sur le rôle des coalitions qui sont parfois efficaces pour soutenir le règlement pacifique des différends, comme ce fut le cas de la troïka au Soudan du Sud.  La multiplication des conflits rappelle l’importance de donner la priorité à la diplomatie préventive, a plaidé la déléguée, en se demandant pourquoi celle-ci et les mesures prévues au Chapitre VI de la Charte des Nations Unies sont rarement utilisées.

La représentante a demandé à la communauté internationale de faire preuve de patience pour que les efforts entrepris dans le cadre d’arrangements régionaux portent leurs fruits, en particulier lorsqu’il y a un déficit de confiance. Le rétablissement et l’instauration de la confiance entre les parties en conflit sont un processus fastidieux qui doit être abordé avec délicatesse, a-t-elle conseillé.  Le dialogue et la diplomatie, a rappelé la déléguée, ont permis de parvenir à des solutions politiques aux différends en République démocratique du Congo (RDC), au Burundi et, récemment, au Tigré, en Éthiopie. Elle a expliqué qu’en raison de leur proximité, les organisations régionales sont souvent les mieux placées pour arbitrer les conflits.  La représentante a donc demandé de les soutenir, rappelant que le Nouvel Agenda pour la paix fournit le cadre idoine des relations entre l’ONU et les arrangements régionaux.

Au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie)a rappelé que le règlement pacifique des différends est au cœur même du principe de responsabilité de protéger.  Il a illustré ses propos en invoquant les paragraphes 138 et 139 du Sommet mondial de 2005.  Les organisations régionales, a poursuivi le représentant, sont bien placées pour orienter l’action multilatérale puisqu’elles ont une meilleure compréhension des dynamiques de leur région.  Il a aussi souligné le rôle du Secrétaire général dans la prévention et le règlement pacifique des différends, étant donné qu’il peut actionner la diplomatie préventive, établir les faits, alerter le Conseil et offrir ses bons offices.  Il a donc encouragé M. António Guterres à user des pouvoirs que lui confère l’Article 99 de la Charte pour porter à l’attention du Conseil tout risque ou commission de crimes de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique ou de crimes contre l’humanité susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il a enfin exhorté tous les membres du Conseil de sécurité à y répondre, en s’inspirant du Code de conduite du Groupe ACT (Groupe Responsabilité, cohérence, transparence), et de l’Initiative franco-mexicaine sur l’exercice du droit de veto en cas d’atrocités de masse.

M. HYUN WOO CHO (République de Corée) a déclaré que les mécanismes régionaux et sous-régionaux sont bien placés non seulement pour comprendre les causes profondes des conflits grâce à leur connaissance approfondie de la région, mais aussi pour promouvoir la confiance et le dialogue entre les parties concernées au sein de leurs régions respectives.  C’est pourquoi le Conseil de sécurité devrait tirer pleinement partie de leurs avantages comparatifs.  Pour cette raison, il a salué la dix-septième Réunion consultative conjointe annuelle entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, qui s’est tenue à Addis-Abeba le 6 octobre. Selon le représentant, de tels efforts de coopération doivent se poursuivre, en gardant à l’esprit trois points. Tout d’abord, au-delà de son partenariat ONU-UA plus fort, le Conseil devrait également mettre en lumière d’autres organisations régionales telles que l’ASEAN ou la CEDEAO, où des outils de prévention et de règlement pacifique des conflits ont également été mis au point. Ensuite, a poursuivi le délégué, il faut un financement prévisible, durable et flexible pour les opérations de soutien à la paix dirigées par l’UA.  Enfin, l’inclusivité doit être garantie à tous les niveaux tout au long des processus, selon le délégué, et les acteurs de la société civile, notamment les femmes et les jeunes, doivent jouer un rôle crucial dans l’instauration de la confiance entre parties, a conclu le représentant.

M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a expliqué qu’en tant que fervent défenseur du renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, son pays insiste sur l’importance d’organisations régionales solides pour un multilatéralisme en réseau.  C’est d’autant plus nécessaire pour les régions où les arrangements de sécurité durables sont en train de s’effondrer ou n’ont jamais existé.  Le représentant s’est dit convaincu de la nécessité de renforcer les partenariats entre l’ONU et les organisations régionales qui luttent pour la paix, la sécurité et le développement dans leurs régions respectives, notamment l’Union européenne, l’Union africaine, l’Association des nations du Sud-Est et la Ligue des États arabes. 

Dans le cas de son pays, il a expliqué que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a été assez active sur le terrain depuis le début de l’agression russe en 2014 jusqu’à la deuxième, en février dernier.  Il a en revanche reproché à l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) d’être un bloc militaire dirigé de facto par la Russie.  Cette organisation est devenue un exemple éloquent des outils politiques les plus destructeurs utilisés par la Russie dans la région et renforcer la crédibilité de l’ONU, c’est refuser sa tribune à des organisations comme celle-là, a tranché le représentant.  Il a soutenu l’idée de la Présidence brésilienne d’élargir le champ de la discussion, en abordant le rôle des accords bilatéraux dans le règlement pacifique des conflits.  L’évolution actuelle de la sécurité dans notre région, dont la guerre menée par la Russie, met en lumière l’importance de la contribution des cadres et des réseaux de coopération établis pour aider la victime d’une agression à se défendre, a-t-il fait valoir. 

S’exprimant au nom des cinq pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), M. ERIK LAURSEN (Danemark) a souligné que la paix ne peut être réalisée que par les parties au conflit même si des tiers, acteurs internationaux, pays voisins ou organisations régionales, peuvent les aider à trouver des solutions mutuellement acceptables.  Dans ce contexte, le dialogue est un outil important de règlement des conflits et de la prévention.  Le Conseil devrait donc mieux exploiter son rôle préventif, au titre du Chapitre VI de la Charte.  De plus, les organisations régionales et sous-régionales peuvent jouer un rôle important grâce à leurs connaissances locales et à leurs potentielles relations personnelles.  La Charte, dans son Chapitre VIII, est claire sur ce rôle.  Le représentant a aussi déclaré que, dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix, l’appropriation nationale est essentielle à tout processus de prévention et de règlement des conflits.  Les parties doivent rechercher et s’approprier leurs solutions, de manière inclusive et représentative des besoins et perspectives des populations touchées par le conflit.  

M. RENÉ ALFONSO RUIDÍAZ PÉREZ (Chili) a déclaré que le renforcement des entités régionales fait partie du Nouvel Agenda pour la paix dans la perspective du Sommet pour un avenir transformateur qui aura lieu l’an prochain.  Puis il a souligné le rôle crucial des organismes régionaux face à des menaces sécuritaires plus que jamais transfrontalières, comme la criminalité transnationale organisée et ses réseaux. Le représentant a donc jugé judicieux de s’inspirer des mécanismes de coopération, de confiance mutuelle, du savoir et de l’assistance existants aux niveaux régionaux et sous-régionaux. 

Il a également appuyé les mécanismes ad hoc, qui peuvent servir de catalyseur et contribuer à la consolidation de la paix, comme les divers groupes d’amis et les groupes de travail autour de la question femmes, paix et sécurité.  Ces mécanismes sont également susceptibles de rendre plus visibles les causes profondes de leur discrimination et de leur oppression dans les différents pays, ce qui permettra d’offrir des lignes directrices à la mise en œuvre des plans d’action qui les concernent.

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a dit que des partenariats solides entre l’ONU et les organisations régionales sont essentiels si l’on souhaite un multilatéralisme efficace.  Les organisations régionales peuvent participer utilement au règlement pacifique des différends et à la prévention, a-t-il constaté.  Le délégué a dit que l’Italie soutient pleinement le Nouvel Agenda pour la paix, invitant les États à s’en inspirer et à élaborer une feuille de route pour la paix fondée sur les droits humains et l’état de droit. Poursuivant, le délégué a déclaré que les organisations régionales peuvent faire la différence en matière de prévention des crises, de pérennisation de la paix, de développement de l’état de droit, de respect des droits humains, d’égalité, d’autonomisation et de coordination entre les organisations régionales elles-mêmes. S’agissant de la consolidation de la paix, le représentant a rappelé que son gouvernement a doublé ses contributions annuelles au Fond de consolidation de la paix.  Enfin, il a souligné l’importance de ressources prévisibles et pérennes pour les opérations de l’UA. 

M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique d’Iran) a affirmé que, dans un monde en évolution constante, la diplomatie et le dialogue demeurent les instruments les plus efficaces pour régler les conflits.  Ainsi, la politique étrangère iranienne est attachée au dialogue comme pierre angulaire du maintien la paix et de la sécurité régionales et internationales.  Le représentant en a voulu pour preuve la participation significative aux négociations du Plan d’action global commun sur le programme nucléaire, dénonçant le « retrait illégal et irresponsable » des États-Unis, des « exigences excessives » des parties occidentales et de l’introduction de questions sans rapport avec le sujet.  Toutefois, le retour à la pleine mise en œuvre de l’accord est « encore possible » si les États-Unis et la troïka européenne font preuve de responsabilité et de pragmatisme. 

Le représentant a espéré que les États Membres respecteront leurs engagements en vertu de l’Article 25 de la Charte et lèveront les restrictions prévues par la résolution 2231 (2015).  Il n’a pas manqué d’alerter la communauté internationale sur la situation palestinienne qui exige une attention urgente.  Se déclarant très déçu par l’incapacité du Conseil à adopter une résolution élémentaire sur un cessez-le-feu immédiat et l’aide humanitaire, il a insisté pour que ce dernier et l’ONU mettent fin à ce « supplice » qui constitue un crime de génocide, un crime contre l’humanité et un crime de guerre.  Après sept décennies d’inertie, le Conseil doit assumer enfin ses responsabilités et prendre des mesures décisives pour remédier à la situation critique du peuple palestinien, a-t-il exigé.

M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie) a déclaré que les mécanismes régionaux en matière de paix et de sécurité ont pour grande caractéristique d’être à même de prendre en compte les contextes locaux pertinents dans la gestion des crises. Il a également déclaré que la paix se pérennise lorsque l’inclusion et le développement se pérennisent aussi. Le représentant a ensuite passé en revue les organes de l’architecture de paix de l’Union africaine, qui, selon lui, dispose d’outils et mécanismes adéquats pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits.  Ces mécanismes ont d’ailleurs déjà fait leur preuve et obtenu de nombreux succès, a-t-il assuré.  Pour cette raison aussi, il a plaidé pour que le système des Nations Unies mette à la disposition de l’architecture de paix de l’UA des ressources financières prévisibles, souples et pérennes, pour lui permettre de remplir sa tâche.

Mme ANA JIMENEZ DE LA HOZ (Espagne) a dit apprécier les efforts en cours au Conseil de sécurité pour renforcer la coopération avec les organisations régionales. Elle a toutefois fait observer qu’un Conseil élargi, avec un plus grand nombre de membres élus, serait plus légitime et représenterait mieux la réalité et les préoccupations stratégiques, régionales et sous-régionales contemporaines.

S’agissant de la politique extérieure de l’Espagne, la prévention et la médiation des conflits figurent au rang des priorités, a fait savoir la représentante. En outre, l’Espagne mise sur un multilatéralisme réformé et renforcé, ainsi que sur l’intégration régionale pour améliorer la gouvernance globale.  Ces dernières années, elle s’est concentrée sur le rôle des femmes. Au niveau ibéro-américain, elle a ainsi créé avec le Mexique et une dizaine d’autres pays le Réseau ibéro-américain de femmes médiatrices, qui cherche à dispenser des formations et à créer un comité de femmes expertes en médiation.  L’Espagne a travaillé dans le même sens avec la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest et avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.

La représentante a également souhaité mentionner l’Alliance des civilisations de l’Organisation des Nations Unies, coparrainée par son pays et la Türkiye depuis sa création, et qui, dans son plan d’action 2019-2023, souligne l’importance du dialogue interculturel et interreligieux dans la prévention des conflits, ainsi que le rôle des femmes médiatrices dans ce contexte.

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a souligné l’importance des relations bilatérales qui demeurent la pierre angulaire de la paix, la sécurité et la stabilité dans toutes les régions et au niveau du système mondial.  Il s’est dit convaincu que ce sont ces relations bilatérales mutuellement profitables, surtout entre « voisins », qui créent la paix et la stabilité sur le long terme.  C’est pourquoi, a-t-il fait valoir, « nous voulons être l’ami de tous et l’ennemi de personne ».  La voix, les points de vue et les idéaux des régions ont de l’importance, a-t-il souligné, car les pays de la région connaissent très bien les causes de leurs problèmes et par conséquent les solutions appropriées. Dès lors, leur sagesse devrait être entendue, a-t-il lancé en demandant de ne pas sous-estimer la valeur ajoutée des organisations régionales.

À ce titre, le délégué a partagé l’expérience de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), organisation née lors de la guerre froide, qui est devenue une base de paix, de stabilité et de progrès.  Fondée sur des normes et valeurs partagées, elle est, en outre, mue par des intérêts pragmatiques communs.  Dans le même temps, elle fait place à la diversité pour faire émerger le consensus. Voilà qui a contribué à la paix, la sécurité et la stabilité dans sa région, s’est-il enorgueilli.  C’est dans cet esprit qu’il a défendu la volonté de chaque région de créer son « propre chemin » pour parvenir à la paix. 

Pour finir, il a recommandé davantage de coopération entre les organisations régionales, non seulement pour tirer parti des bénéfices mutuels mais également pour contribuer à la paix mondiale.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a rappelé que la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, l’ex-OSCE, avait lancé dès 1992 une initiative spécifique visant à résoudre le conflit du Haut-Karabagh, avec l’aval du Conseil de sécurité.  Coprésidé alors par la France, la Fédération de Russie et les États-Unis, le Groupe de Minsk de l’OSCE, respectueux des principes de la Charte, a par la suite été créé et doté d’un mandat international pour mener des négociations de paix entre les parties, a poursuivi le délégué.  Il a accusé l’Azerbaïdjan d’avoir torpillé cette initiative quand il s’est lancé dans une guerre destructrice en pleine pandémie, en septembre 2020, et ce, en violation flagrante des accords de cessez-le-feu de 1994 et 1995 et de la Charte des Nations Unies.  L’Azerbaïdjan a opté pour une agression non provoquée et à grande échelle, émaillée d’atrocités commises contre des civils arméniens du Karabakh. Le représentant a accusé ce pays d’avoir cette fois violé ses obligations au titre de l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) lorsqu’en décembre 2022, ses forces armées ont décidé d’imposer le blocus inhumain du couloir de Latchine.  Pour l’Arménie, la situation actuelle, découlant d’un non-respect par l’Azerbaïdjan des accords de sécurité régionaux et bilatéraux ayant ouvert la voie à une agression militaire barbare, exige que l’ONU et son Conseil de sécurité protègent la population arménienne du Karabakh d’une destruction pure et simple. 

Nous sommes tous d’accord pour dire que la coopération régionale fonctionne, a déclaré Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal), qui a noté une tendance croissante à la régionalisation des efforts visant à maintenir la paix et la sécurité.  Elle a proposé que les arrangements régionaux et sous-régionaux reprennent plusieurs des recommandations du Nouvel Agenda pour la paix, en particulier celles relatives à l’élaboration de « stratégies de prévention ayant une dimension interrégionale pour faire face aux menaces transfrontalières ». 

Elle a en outre encouragé les organisations régionales et sous-régionales à envisager de collaborer avec la Commission de consolidation de la paix pour partager les pratiques optimales et présenter leurs stratégies.  Plaidant également pour une meilleure synergie du Conseil de sécurité et de la CCP, la déléguée a mis en avant le fait qu’en attendant des progrès dans la réforme sur la composition du Conseil, une telle coopération serait l’un des meilleurs moyens pour faire de la prévention des conflits une priorité.  Cela implique également de s’assurer du financement prévisible et durable de cette commission. Elle a conclu en soulignant qu’outre les répercussions des changements climatiques sur le plan sécuritaire, la valeur intrinsèque du respect des droits humains et leur rôle en matière d’alerte précoce, ainsi que la participation active des citoyens, des groupes communautaires et d’autres parties prenantes, d’autres questions telles que le renforcement des capacités institutionnelles, tant au niveau national que régional, mériteraient une plus grande attention de la part de ce Conseil. 

M. THOMAS PETER ZAHNEISEN (Allemagne) a soutenu les efforts de prévention et de médiation menés par l’ONU et appelé à une meilleure utilisation des outils du Chapitre VI par le Conseil de sécurité.  En tant que donateur majeur de l’unité de soutien à la médiation de l’ONU, de la Commission de consolidation de la paix et des « bons offices » du Secrétaire général, l’Allemagne souhaite qu’il soit fait bon usage des outils disponibles dans le Chapitre VI dans les mandats du Conseil de sécurité.  Faisant valoir le rôle central des organisations régionale dans cette approche, le délégué a exhorté le Conseil à explorer de nouvelles voies pour favoriser la coopération avec elles et tirer le meilleur parti de leur expérience en matière de médiation et de facilitation du dialogue aux niveaux régional et infranational.

Le délégué a, en outre, préconisé d’investir collectivement dans le développement de plans de prévention nationaux et régionaux.  Toutefois, a-t-il nuancé, cette approche ne devrait pas inclure uniquement les gouvernements, mais également les sociétés dans leur ensemble, en particulier les minorités et les groupes marginalisés.  Naturellement, cela inclut les femmes, a-t-il plaidé. C’est pourquoi, a-t-il conclu, son gouvernement s’efforce d’utiliser 100% de son financement pour la prévention des conflits, la consolidation de la paix et la stabilisation d’une manière sensible au genre et, le cas échéant, ciblée sur le genre. 

Pour M. OMAR HILALE (Maroc), le recours au Chapitre VI de la Charte des Nations Unies pour le règlement pacifique des différends, notamment la prévention, la médiation et la négociation, doit demeurer au centre des efforts de la communauté internationale pour le maintien de la paix et de la sécurité.  Il s’est fait l’écho du Secrétaire général pour promouvoir la primauté des solutions politiques aux différends.  Il a argué que les arrangements régionaux et sous-régionaux peuvent, lorsque cela est nécessaire, apporter un soutien aux efforts de l’ONU et du Conseil de sécurité, mais ils ne sauraient s’y substituer ou se télescoper avec les efforts du Conseil de sécurité.  Ils doivent faire l’objet de l’accord préalable des parties au processus, a-t-il ajouté.

Le représentant a rappelé la contribution du Maroc aux missions de paix onusiennes, ainsi que ses initiatives de médiation en faveur de la paix et de la sécurité, en particulier sur le continent africain, qui ont abouti à des résultats fructueux. Sur le plan humanitaire, le Maroc contribue constamment aux appels humanitaires, a souligné le représentant, y compris par le développement d’hôpitaux de campagne.  En tant que membre actif du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), et pendant qu’il présidait le Conseil, le Royaume a accueilli, en octobre 2022, la première édition du processus de Tanger pour lutter contre les causes profondes de conflit sur le continent.  Il œuvre inlassablement pour promouvoir le rôle et la coopération entre les organisations régionales et sous-régionales du continent africain.  Par ailleurs, le Maroc a fait de l’Atlantique africain une identité, un lieu d’introspection et une aire de projection à travers un groupement régional pour soutenir l’intégration et le codéveloppement de la côte atlantique, a indiqué le délégué en réaffirmant l’engagement de son pays en faveur des espaces régionaux.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a souligné que la cohérence, la complémentarité et la coordination des efforts de paix sont de la plus grande importance et à bien des égards, la clef du succès.  La diversité des acteurs peut être un atout si la division du travail est claire, a-t-il insisté.  Les organisations régionales, a-t-il poursuivi, peuvent offrir un espace pour le dialogue et le compromis et, à ce titre, elles doivent être les premières à tirer la sonnette d’alarme, à prendre des mesures de prévention et à faciliter la médiation.  Compte tenu de leur proximité géographique, elles connaissent probablement mieux les questions, la situation et les parties locales, et elles ont tout intérêt à gérer et à atténuer un conflit pour éviter une propagation dans leur région. Toutefois, les efforts de ses organisations ne sont pas exclusifs.  Ils peuvent être complétés ou appuyés par les Nations Unies.  Trop souvent, a constaté le représentant, les organisations régionales n’aiment pas voir le Conseil se saisir de la situation d’un pays de leur région de peur de perdre la main.  Nous voyons les choses autrement, a expliqué le représentant: les efforts régionaux ont parfois du mal à se faire entendre des parties et nécessitent donc un appui de la communauté internationale.  Cela ne veut pas dire que le Conseil se substitue à ces efforts, bien au contraire, il les renforce.

La coopération entre les organisations régionales est aussi une clef du succès, a encore estimé le représentant, en se vantant de la bonne coopération entre l’Union européenne et ses pairs, en particulier l’Union africaine.  Ces organisations peuvent jouer un rôle important même dans les pays qui sortent de leur périmètre géographique.  Par exemple, le réseau des envoyés spéciaux et des médiateurs de l’Union européenne travaillent dans le monde entier pour rétablir la confiance entre les populations locales et les autorités nationales, et bien souvent aux côtés de l’ONU.  Les efforts de consolidation de la paix au Mozambique peuvent être une source d’inspiration, a fait observer le représentant, en parlant d’un processus caractérisé par l’appropriation nationale, un dialogue ouvert et constant entre les parties, un engagement communautaire effectif et l’appui des partenaires régionaux et internationaux, sans oublier l’intégration d’une perspective sexospécifique à tous les niveaux. 

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a souligné le rôle émergent de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie, dont son pays a initié la création en 1992, en tant que partenaire important de l’ONU.  Il a noté la compétence de la Conférence en matière d’élaboration de mesures de confiance à ce niveau, notamment dans des domaines tels que l’atténuation des tensions émergentes, la sécurité épidémiologique, les changements climatiques, l’insécurité alimentaire et hydrique ou encore la lutte contre le terrorisme.  Forte de 28 États membres, la Conférence est la seule organisation panasiatique couvrant un vaste territoire allant du Pacifique à la Méditerranée et de l’Oural à l’océan Indien, a-t-il ajouté.  « C’est en outre la seule institution où Israël et la Palestine siègent à la table des négociations en tant que membres à part entière et égaux », a-t-il encore signalé.  Pour conclure, le représentant a insisté sur l’importance de maintenir une synergie dynamique entre le système des Nations Unies et les organisations régionales, en particulier avec les organisations pancontinentales.

M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a appelé à privilégier le dialogue et la diplomatie, faisant remarquer que laisser faire en pensant que les problèmes se résoudront d’eux-mêmes est un « postulat fallacieux ».  Aucune crise ne peut être réglée sur le long terme sans une prise en considération des causes sous-jacentes des conflits, a-t-il ajouté. Le représentant a exhorté à agir au lieu de se contenter de gérer des conflits.  Il a donc jugé important de ne jamais céder à la méthode du deux poids, deux mesures, et de veiller, au contraire, à ce que les lois soient appliquées de manière équitable et de façon universelle.  « Votre géographie détermine votre destinée », a-t-il aussi observé, raison pour laquelle son pays a toujours été un chantre de la prise en charge régionale et reste un fervent défenseur du multilatéralisme. Il a donné l’exemple, en termes d’initiatives régionales, de la collaboration de son pays avec l’Iran et la Russie, pour lancer la « plateforme d’Astana » qui a largement contribué au processus politique en Syrie. 

En tant que membre actif de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), la Türkiye, a poursuivi le délégué, concentre à présent ses efforts sur la désescalade du dossier israélo-palestinien en mettant l’accent sur un cessez-le-feu immédiat sans condition préalable, en insistant sur un accès humanitaire rapide et durable à Gaza et en poussant vers une reprise des pourparlers et d’une solution entre les deux États.  Concernant l’Ukraine, il a fait valoir que le dialogue avec les parties a permis de mettre en œuvre l’Initiative de la mer Noire avec l’ONU.  Il a aussi parlé de la plateforme régionale « 3+3 » qui a pour objectif de renforcer le dialogue dans le Caucase du Sud.  La Türkiye travaille en outre à son processus de normalisation avec l’Arménie et à la médiation entre ce pays et l’Azerbaïdjan. La réforme du Conseil est une nécessité, a déclaré le représentant en conclusion, en se félicitant du Nouvel Agenda pour la paix et en assurant que son pays persévérera dans tous ses efforts multilatéraux.

Les organisations régionales possèdent une grande expertise dans l’identification des causes profondes des conflits, a rappelé M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne), avant d’observer que certaines ne disposent pas des ressources et capacités nécessaires.  Un élément important à garder à l’esprit lorsque l’on « externalise » les opérations de paix vers les organisations régionales, a-t-il souligné. Le délégué s’est félicité que l’une des plus grandes réussites de la récente présidence polonaise de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ait été la mobilisation de l’opinion publique internationale, en permettant de voir clairement qui est l’agresseur et qui est l’agressé, et ce, malgré la violation permanente par Moscou des règles de l’OSCE.  La Pologne est fermement convaincue que les organisations régionales sont capables de répondre aux conflits armés, raison pour laquelle la coordination entre le Conseil de sécurité et les mécanismes régionaux doit être améliorée.  Pour que cette tâche soit menée, il est nécessaire que toutes les actions entreprises dans ce cadre soient conformes à la Charte des Nations Unies, au droit international humanitaire et des droits humains, a-t-il conclu. 

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a encouragé le Conseil et les organisations régionales à renforcer la diplomatie préventive, demandant au Conseil d’encourager le règlement pacifique des différends locaux par le biais d’arrangements régionaux.  Ainsi, la détérioration de la crise au Myanmar souligne l’importance de la collaboration entre le Conseil et l’Alliance des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a indiqué la représentante.  Elle a mis l’accent sur l’importance du soutien du Conseil aux efforts de médiation, avant de saluer les relations étroites entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. 

La représentante a insisté sur le fait que les décisions du Conseil sont juridiquement contraignantes.  Elle a rappelé l’Article 27 stipulant que « dans les décisions prises en vertu du Chapitre VI et du paragraphe 3 de l’Article 52, une partie à un différend s’abstient de voter ».  Bien que cette limitation s’applique à tous les membres du Conseil, la représentante a noté que l’article qui consacre le droit de veto pour les membres permanents institue également une restriction explicite à son utilisation. L’efficacité du Conseil bénéficierait grandement de l’application de cette disposition, a conclu la représentante. 

M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie), s’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a commencé par exprimer sa préoccupation face à l’escalade de la violence dans la région du Moyen-Orient.  Il a demandé la cessation de toutes les hostilités afin d’éviter des morts supplémentaires.  Il a ensuite déclaré que 55 ans après sa création, l’ASEAN a beaucoup avancé pour parvenir aux objectifs communs d’un développement et d’une prospérité durables pour tous.  L’Association a promu le dialogue et la coopération pour ce faire.  Le représentant a également déclaré que face aux menaces, il faut défendre l’état de droit.  Cela est plus urgent que jamais, a‑t‑il affirmé. 

Le délégué a appelé l’ASEAN à étudier une architecture régionale de dialogue pour aider le Myanmar, en particulier, à mettre en œuvre le consensus en cinq points, afin de trouver une solution durable pour ce pays qui reste un membre de la famille de l’ASEAN.  Le représentant s’est également dit préoccupé par les tensions dans la région de l’Asie du Sud-Est.  L’ASEAN cherche toutefois à mettre en œuvre des activités de coopération, notamment dans le domaine de l’environnement maritime, afin de promouvoir le dialogue et la confiance mutuelle, au lieu des tensions. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déclaré que le Conseil de sécurité n’avait pas réussi à assumer les responsabilités que lui confère la Charte des Nations Unies, notamment dans le cas de l’Ukraine et de la Palestine, où il est « paralysé et ankylosé ».  Il n’arrive pas à faire cesser le massacre à Gaza, a-t-il déploré.  Il a espéré que l’Assemblée générale parviendrait à obtenir le cessez-le-feu et la fourniture d’une aide humanitaire.  De la même manière, le Conseil n’a pas non plus réussi à résoudre la question de l’occupation du Jammu-et-Cachemire, en dépit de ses propres résolutions appelant à l’autodétermination des peuples qui y vivent, a encore regretté le délégué.  Il a rappelé que, « comme dans le cas de la Palestine occupée », cette région est victime d’une occupation de grande ampleur.  Selon le représentant, plus de 900 000 militaires indiens l’occupent, avec pour objectif de supprimer la lutte pour l’indépendance de cette région et d’imposer ce que les dirigeants extrémistes appellent une « solution finale » pour le Jammu-et-Cachemire.

Le délégué a alors estimé nécessaire, pour sortir de cette paralysie et de ces échecs, une réforme du Conseil de sécurité, afin de le rendre plus démocratique, plus large et plus ouvert.  Car, selon le représentant, les lacunes de ce Conseil sont directement liées au droit de veto de certains de ses membres, de manière directe ou non.  Sur la question des mécanismes régionaux, il a reconnu leur rôle dans le maintien de la paix, mais estimé que ce rôle devait rester subsidiaire.  Ces organisations régionales pourraient en revanche représenter leurs membres au Conseil de sécurité, comme ils le font en d’autres lieux, a plaidé le représentant, rappelant les propositions du Groupe du consensus.  Selon lui, elles pourraient servir de base pour une hypothétique réforme du Conseil de sécurité. 

Pour Mme ZORAYA DEL CARMEN CANO FRANCO (Panama), les accords bilatéraux, régionaux et sous-régionaux favorisent la coopération entre des pays partageant des intérêts géographiques, culturels ou économiques communs.  En encourageant la coopération, ils créent un environnement propice à la prévention des conflits.  Le Panama, a dit la représentante, croit fermement aux accords régionaux pour le règlement pacifique des différends.  Elle a cité l’expérience du Groupe de Contadora, que le Panama a formé en 1983 avec la Colombie, le Mexique et le Venezuela, et qui a joué un rôle décisif dans le processus de négociation de la paix en Amérique centrale, au cours de cette décennie.  Le Groupe de Contadora est ensuite devenu le Groupe de Rio, dont le Panama était également membre, et qui a servi de base à la création de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC). 

Les partenariats sous-régionaux jouent un rôle crucial dans la prévention et le règlement des conflits, a poursuivi la représentante.  Ces coalitions peuvent s’attaquer à des problèmes spécifiques qui affectent un groupe de pays géographiquement proches, facilitant ainsi l’identification de solutions appropriées et la mise en œuvre de mesures conjointes.  La représentante s’est attardée sur le succès de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) qui a promu la paix et la stabilité par le dialogue et la coopération dans des domaines tels que le commerce, la sécurité et le développement durable. Ces instruments représentent une approche proactive et efficace pour relever les défis en matière de paix et de sécurité.  La volonté politique, le dialogue et la diplomatie jouent un rôle central dans leur succès. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a déclaré que le Conseil de sécurité peut et doit faire davantage pour mieux comprendre les crises et les régler en amont, quand les parties sont encore disposées à discuter au sein de processus établis sur la base du respect mutuel.  Prévenir les conflits, a-t-il dit, c’est empêcher des souffrances humaines incommensurables, et, dans cette optique, les initiatives régionales ont un rôle précieux à jouer pour maintenir la confiance entre protagonistes régionaux quand celle-ci commence à s’effriter.  Le représentant a ajouté que les partenariats régionaux incluant l’ONU doivent non seulement être solidifiés mais aussi impliquer les femmes.  Il n’est plus possible de se passer de la moitié de l’humanité dans les efforts internationaux de maintien de la paix et de la sécurité internationale, a-t-il dit.  Par ailleurs, le délégué a attiré l’attention sur les conséquences des changements climatiques sur l’exacerbation des tensions dans les sociétés les plus vulnérables.  Là aussi, le Conseil de sécurité doit coopérer avec les mécanismes régionaux pour mieux appréhender les liens spécifiques entre insécurité climatique et conflits, et, partant, pour envisager l’édification d’une véritable justice climatique, gage de rapprochements entre belligérants potentiels. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a estimé que, grâce à leur connaissance approfondie des facteurs locaux, les organisations régionales et sous-régionales, en particulier en Afrique, sont bien placées pour trouver des solutions aux conflits dans leurs régions respectives.  Il a recommandé que les forces de maintien de la paix soient reconfigurées pour assurer une liaison active avec les forces régionales.  À son avis, il est important de renforcer les capacités des partenaires régionaux potentiels, ainsi que des États hôtes.  C’est ce que son pays a fait avec plusieurs partenaires, notamment en Afrique, a-t-il affirmé.

Tout cela n’aurait aucune importance, a-t-il assené, si nous ne nous attaquions pas au problème de « l’éléphant dans la pièce », à savoir que « nous sommes incapables de résoudre pacifiquement les différends par l’intermédiaire des Nations Unies, parce que son organe principal, le Conseil de sécurité, a été rendu inefficace ».  Selon le représentant, à défaut de mener des réformes globales et de mettre de l’ordre « dans cette maison, nous continuerons à être confrontés à une crise de crédibilité permanente ».  La nouvelle orientation pour un multilatéralisme réformé découle de l’idée qu’il ne peut y avoir de véritable solidarité sans confiance, a-t-il rappelé en affirmant qu’une majorité de pays du Sud partagent la conviction que les réformes de l’architecture de l’ONU ne sont plus une question de pourquoi, mais de quand et de combien de temps.  Il a espéré que l’opportunité offerte par le Sommet de l’avenir de l’année prochaine pousse à changer dans le sens d’un « multilatéralisme réformé », y compris par l’élargissement du Conseil de sécurité dans les deux catégories de ses membres.

M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie) a souligné que la prévention et le règlement efficaces et durables des conflits nécessitent les connaissances, les capacités et l’engagement des groupes régionaux et sous-régionaux.  Tout en reconnaissant le rôle important du Conseil de sécurité pour faciliter le dialogue, la médiation et la conciliation grâce à son pouvoir de convocation en vertu du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies, il l’a appelé à collaborer davantage avec les groupes régionaux et sous-régionaux pour tirer parti de leur expertise et faciliter le règlement pacifique des différends.  Cela permettra non seulement d’améliorer l’efficacité du règlement des conflits, mais aussi de donner aux nations -et aux régions- les moyens de mener leurs propres processus de consolidation de la paix et de favoriser une paix plus durable, a fait valoir le représentant. 

Le délégué a également plaidé pour le renforcement du rôle, du financement et de l’inclusivité de la Commission de consolidation de la paix partant du principe qu’une Commission plus forte et proactive contribuera à mobiliser le soutien politique en faveur de la réconciliation.  Elle s’appuiera sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité et, surtout, soutiendra la contribution des accords régionaux, sous-régionaux et bilatéraux à la prévention et au règlement pacifique des différends.  Fort de ce constat, le délégué s’est associé à l’appel à la formalisation de la participation des organisations régionales aux travaux de la Commission de consolidation de la paix afin de rendre ses délibérations plus holistiques et inclusives. Favorable à un leadership régional en matière de maintien de la paix, l’Australie a salué la proposition des Fidji de créer une nouvelle association de maintien de la paix dans le Pacifique afin de renforcer les capacités et la coopération de sa région. 

M. OMAR (Malaisie), en tant que membre de l’ASEAN, a mis en avant le rôle précieux joué par cette organisation pour la paix et la sécurité dans la région.  À cette fin, l’esprit de négociation et de médiation guide ses membres dans le règlement des différends, a-t-il expliqué, avant d’encourager la participation active des organisations régionales et sous-régionales –« partenaires fiables des Nations Unies »- en arguant qu’elle est cruciale pour réaliser le mandat de l’Organisation.  Sur le Myanmar, « l’un des dossiers les plus difficiles de la région », le représentant a salué la résolution 2669 (2022) du Conseil de sécurité et a dit vouloir travailler étroitement avec les autres membres de l’ASEAN et du Conseil de sécurité pour parvenir à un règlement pacifique et durable à cette crise.  En tant que membre de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), il a salué les efforts de cette dernière pour faire face à la crise au Moyen-Orient avant de réaffirmer le droit à l’autodétermination des Palestiniens.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar), évoquant les circonstances exceptionnelles dans le Moyen-Orient, a appelé à la poursuite de la coopération et de la coordination entre les efforts internationaux et régionaux, tant ces événements menacent la paix et la sécurité internationales.  Ce qu’il faut, a‑t‑elle dit, c’est adopter une démarche holistique pour parvenir à une paix juste, complète et durable, y compris en examinant les causes premières des conflits dans cette région.  Il faut, dans le même temps, réfléchir aux aspirations communes dans le cadre du Sommet de l’avenir de 2024 et penser au processus d’examen de la structure de consolidation de la paix de l’ONU, qui doit intervenir en 2025. 

La représentante a ensuite dit la fierté de son pays de mener, dans le cadre de sa politique étrangère, une diplomatie de prévention des conflits.  Le Qatar, depuis le début de son histoire, a accumulé un certain nombre de succès louables en matière de médiation, en adoptant une approche holistique, allant de la prévention aux remèdes à apporter aux causes des conflits, a‑t‑elle détaillé.  Elle a estimé que, pour remplir son mandat, le Conseil de sécurité devrait se fonder sur la Charte et sur ses propres résolutions.  Elle a conclu son intervention en invitant à financer les outils de prévention et d’alerte précoce, comme le recommande le Secrétaire général dans son Nouvel Agenda pour la paix. 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a rappelé que son pays a eu recours à divers systèmes, processus et institutions aux niveaux national, régional et sous-régional.  Son pays a dû recourir à des institutions internationales, telle que la Cour internationale de Justice (CIJ) qui, une fois, a statué en sa faveur et déterminé la nécessité de mettre fin à l’occupation de la Namibie.  À une autre occasion, la CIJ n’a pas été en faveur de son pays, qui a « dû faire preuve de magnanimité et accepter » sa décision.  Face à ce monde qui évolue au gré des flux et reflux de la polarisation, il a recommandé de s’en remettre à la Charte des Nations Unies et aux outils prévus par son Chapitre VI, comme première ligne de défense en vue de prévenir les conflits armés.  Le représentant a, toutefois, souligné que le règlement pacifique des différends n’est pas une simple ambition noble, mais nécessite la création de conditions propices au dialogue.  Il a saisi cette occasion pour saluer les efforts déployés par le Gouvernement égyptien et toutes les parties prenantes, notamment le Secrétaire général de l’ONU, pour organiser le Sommet international sur Gaza qui se tiendra ce samedi au Caire. 

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) s’est enorgueillie du succès des processus sous-régionaux de rétablissement de la confiance lesquels ont permis de passer d’une logique de la confrontation à une logique de la coopération, et de faire de l’Amérique du Sud une zone de paix.  Les organisations d’Amérique latine et des Caraïbes ont exprimé à plusieurs reprises leur intérêt pour le règlement du différend de souveraineté entre l’Argentine et le Royaume-Uni au sujet des Îles Malvinas, de Géorgie du Sud, de Sandwich du Sud et des zones maritimes environnantes.  Ces organisations, qui soutiennent les droits légitimes de l’Argentine, ont appelé à une solution rapide, conformément aux résolutions pertinentes de l’ONU.  La représentante a par ailleurs évoqué les alternatives promues aux niveaux régional et sous-régional en matière de paix et de sécurité, en particulier la création de zones exemptes d’armes nucléaires et de zones de paix, qui contribuent à l’architecture internationale de la paix.  En outre, l’Argentine fait partie de la zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud, composée de trois États sud-américains et de 21 États africains, et reconnue, en 1986, par la résolution 41/11 de l’Assemblée générale.  La représentante s’est également enorgueillie du Traité de Tlatelolco, tout en appuyant la création de zones régionales exemptes d’armes nucléaires. 

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) s’est félicité de la tenue de ce débat « qui n’aurait pas pu tomber à un meilleur moment », alors que le Conseil de sécurité a convoqué des réunions d’urgence pour éviter l’escalade de la crise en Palestine et sauver des millions de civils dans la bande de Gaza. De plus, les conflits dont le monde est témoin se sont accompagnés de grandes souffrances pour des milliards de personnes, créant des crises alimentaires et énergétiques, entre autres, a-t-il fait remarquer.  Partant des expériences collectives, le représentant a estimé que la seule façon de régler les différends est de s’en remettre au Chapitre VI.  Par conséquent, les accords bilatéraux, régionaux et sous-régionaux ont un rôle crucial à jouer, a-t-il affirmé en soulignant qu’ils ont le potentiel de rétablir la confiance entre tout un éventail de parties et d’aider les parties belligérantes à pérenniser le dialogue. Ces accords sont plus à même de prendre en compte les dynamiques régionales et locales pour trouver les meilleures solutions et éliminer les causes profondes des conflits.  À cet égard, le représentant a renvoyé à la résolution 2669 (2022) qui a salué le rôle de l’ASEAN pour négocier une solution à la crise des Rohingya. 

Il est d’avis que le Conseil de sécurité doit soutenir davantage les organisations régionales et sous régionales dans le règlement des différends, insistant pour que les missions politiques spéciales aient elles aussi un rôle important à jouer dans la collaboration entre celles-ci et l’ONU pour une coopération plus significative.  Enfin, le délégué a estimé que la CCP devrait transmettre ce qui se dit au plan régional et sous régional au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale, ce qui contribuerait, à ses yeux, à une architecture sécuritaire collective plus solide. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a estimé qu’un Conseil de sécurité divisé par les rivalités géopolitiques entre ses principales puissances risque de saper les efforts régionaux de promotion de la paix, a-t-il mis en garde.  De plus, il existe des cadres régionaux qui peuvent accroître les risques de conflit armé.  Il faut donc s’efforcer d’adopter des accords régionaux qui s’inscrivent dans le prolongement des valeurs et des normes des Nations Unies, et, à ce titre, le représentant a fait quelques recommandations sur la manière dont le Conseil peut utiliser les Chapitres VI et VIII de la Charte. Tout d’abord, il devrait envisager des évaluations conjointes sur le terrain avec des entités régionales afin d’établir des diagnostics communs sur l’interaction complexe des facteurs menant à un conflit, a souhaité le délégué.  Le groupe de travail ad hoc sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique constitue une autre piste, selon lui, et il serait utile que ce mécanisme soit également adopté pour d’autres régions.  Le représentant a également encouragé le Conseil à approfondir sa coopération avec la Commission de consolidation de la paix, engagée dans un dialogue inclusif avec les mécanismes régionaux et les acteurs nationaux. Enfin, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité peut, selon le représentant, insuffler une nouvelle vie à la recherche de la paix en plaçant les 50% de la population qui sont trop souvent marginalisés au cœur des processus politiques et de la prise de décision. 

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a rappelé les engagements couronnés de succès de la CEDEAO dans les conflits au Libéria, en Sierra Leone et en Gambie, lesquels illustrent l’efficacité des organisations régionales et sous-régionales dans la recherche de la paix.  Le rôle croissant de l’Union africaine dans les initiatives de paix à travers le continent, cela malgré des ressources limitées, accrédite l’idée qu’il est utile de développer des partenariats efficaces entre l’ONU et les entités régionales pour formuler des réponses rapides aux différends et aux crises émergentes, a-t-il dit.  Il a expliqué que les organisations régionales et sous-régionales sont en effet les mieux placées pour comprendre les causes des conflits, grâce à leur connaissance approfondie des intérêts et des préoccupations des parties aux conflits. Elles ont une meilleure compréhension des relations bilatérales entre les pays et sont les mieux indiquées pour agir en tant que médiateurs crédibles dans les situations de conflit, ce que souligne le Secrétaire général de l’ONU dans son Nouvel Agenda pour la paix, a encore indiqué le délégué.  Après avoir mentionné certains des succès les plus marquants des principaux mécanismes régionaux de paix et de conciliation en Afrique, il a déploré ce mal récurrent qu’est le manque de financement adéquat, prévisible et durable dont ils pâtissent.  C’est en ce sens que son pays souscrit pleinement au document adopté récemment par l’Assemblée de l’Union africaine en faveur d’un tel financement abondé, notamment par des contributions statutaires de l’ONU aux missions hybrides. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a noté que le Brésil a mentionné, dans la note de cadrage du débat d’aujourd’hui, l’Accord final et définitif de paix signé entre le Pérou et l’Équateur en 1998, en tant qu’exemple réussi d’une solution pacifique à un différend qui célébrera son vingtième anniversaire le 26 octobre prochain. Le représentant a rappelé les différentes étapes et les outils utilisés pour atteindre ce résultat, tous relevant du Chapitre VI de la Charte, ainsi que des mécanismes de rétablissement de la confiance et des négociations bilatérales directes.  Lorsqu’il y avait blocage, les parties comptaient sur le concours des pays garants, à savoir l’Argentine, le Brésil, le Chili et les États-Unis qui ont assuré la médiation, la conciliation et l’arbitrage, toujours dans le cadre du Protocole de Rio de Janeiro de 1942.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque) s’est dit fier du statut de la région comme zone de paix dénucléarisée, mettant en exergue la collaboration entre ses États membres. Il a mentionné les réunions organisées régulièrement au sein de la CARICOM pour traiter des dossiers de paix et de sécurité ainsi que les mécanismes régionaux, dont l’Organisme d’exécution des mesures de sécurité et de lutte contre la criminalité chargée du suivi, de l’analyse et du développement de projets de sécurité régionale de la CARICOM. 

Il s’est enorgueilli de la contribution de la CARICOM à la paix et à la sécurité internationales, à la lutte contre le terrorisme, au désarmement nucléaire, à la lutte contre les flux illicites des armes légères et de petit calibre et au partage des renseignements.  Il en a voulu pour preuve l’action de paix, de stabilité et de développement durable menée en Haïti, en collaboration avec la communauté internationale.  Grâce à cette approche, les membres de la CARICOM ont contribué à l’adoption de la résolution 2699 (2023) qui autorise notamment le déploiement d’une mission de soutien sécuritaire multinationale en Haïti pour venir épauler la police nationale. 

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique) a réitéré l’importance de la diplomatie multilatérale, du recours aux bons offices, de la médiation et de la justice pour régler les différends.  La représentante a rappelé que c’était en Amérique centrale qu’avait vu le jour la première cour internationale permanente, la Cour centraméricaine de justice, créée au début du XXe siècle pour résoudre les conflits dans la région. Le Pacte de Bogota a vu le jour en 1948, a-t-elle précisé.  Elle a ajouté qu’au cours de la dernière décennie, la région a fait appel à la Cour internationale de Justice (CIJ) à 15 reprises.  La Commission interaméricaine des droits de l’homme et la Cour interaméricaine des droits de l’homme sont devenues une référence incontournable aux niveaux national, régional et international, a aussi fait valoir la déléguée en les présentant comme le socle de la démocratie et de l’état de droit. 

Le Mexique, a ajouté la déléguée, a reconnu la compétence de la CIJ depuis 1947. Étonnée de constater qu’à ce jour seuls 74 États avaient accepté la compétence de la CIJ, dont un seul membre permanent de ce Conseil, la représentante a dit soutenir la Déclaration sur la promotion de la compétence de la CIJ.  Elle a demandé l’inclusion de la clause juridictionnelle de la CIJ dans les accords internationaux.  Elle a aussi rappelé la participation de son pays au Groupe de Contadora.  En outre, elle a salué la reprise des négociations et du dialogue entre le Gouvernement du Venezuela et l’opposition, qui ont donné lieu à des accords de grande importance.  Le Mexique est aussi un des pays garants du processus de paix entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale, a rappelé la déléguée, en annonçant que son pays accueillera le cinquième cycle de pourparlers. 

M. AMAR BENDJAMA (Algérie) a affirmé que le règlement des conflits par les moyens pacifiques a toujours été enraciné dans les principes fondateurs de la diplomatie algérienne.  Sa contribution au règlement des crises, notamment dans son environnement immédiat, s’est toujours fondée sur la primauté du dialogue.  C’est ainsi que l’Algérie s’est engagée en 2015, dans un processus de médiation entre les parties maliennes, qui a abouti à la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Dans le cadre des efforts de l’Union africaine, l’Algérie préconise également un processus de réconciliation nationale en Libye et au même titre, prône une solution politique à la crise institutionnelle au Niger. L’Algérie rejette toute intervention militaire étrangère dans ce pays, a souligné le représentant. 

Il a ensuite déclaré que la coopération entre l’ONU et les organisations régionales est un élément essentiel pour la réussite des objectifs communs.  Il s’est félicité de la signature du Cadre commun pour un partenariat renforcé pour la paix et la sécurité en 2017, et applaudi les consultations annuelles entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, appelées, selon lui, à être renforcées.  Il a aussi salué les propos du Secrétaire général appelant à une nouvelle génération de missions de paix dirigées par des forces régionales, dotées d’un financement garanti et prévisible.  Le défi actuel pour l’UA et l’ONU consiste à s’entendre sur une interprétation commune de l’esprit du Chapitre VIII de la Charte, tout en consacrant la primauté du rôle du Conseil de sécurité dans la préservation de la paix et la sécurité internationales.  « Un tel principe devant ouvrir de plein droit aux opérations de soutien à la paix africaines, autorisées par ce Conseil, l’accès aux contributions statutaires des Nations Unies », a ajouté le délégué.

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a demandé une analyse impartiale de l’échec des arrangements régionaux dans la plupart des conflits et des situations d’après conflit. L’expérience de l’Azerbaïdjan de près de 30 ans d’occupation de ses territoires par l’Arménie illustre la nécessité de faire beaucoup plus aux niveaux régional et international pour lutter contre l’interprétation erronée du droit international, a déclaré le représentant.  La communauté internationale, a-t-il dénoncé, n’a pas pu empêcher l’agression, le nettoyage ethnique et les atrocités commises contre l’Azerbaïdjan; elle n’a pas respecté ses propres décisions.  Les efforts de médiation menés dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour aider à résoudre le conflit n’ont donné aucun résultat, a encore regretté le délégué qui a accusé l’Arménie de ne s’être jamais engagée dans le processus de paix. « L’échec de cette politique était inévitable. » 

À la suite d’une guerre de 44 jours, l’Azerbaïdjan a libéré plus de 300 villes et villages de l’occupation, a informé le délégué.  Toutefois, il a déploré que l’Arménie ait opté pour le maintien de ses revendications territoriales et refuse de retirer complètement ses forces armées du territoire de l’Azerbaïdjan.  Le délégué a dit attendre de la communauté internationale qu’elle encourage l’Arménie à respecter ses obligations internationales, à s’abstenir de pratiquer la désinformation et à s’engager dans les efforts visant à instaurer la paix et la stabilité dans la région.  Il a brocardé les tentatives de certains États, qui ne sont pas dans la région, d’imposer leur passé colonial dans le Caucase du Sud et d’étendre leurs « politiques xénophobes » dans la région, ce qui ne sert pas la paix. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) est d’avis que le Conseil de sécurité pourrait être plus efficace dans l’application de ses propres résolutions, en prenant des mesures contre ceux qui ne s’y plient pas.  Le Conseil pourrait également renforcer l’état de droit et promouvoir l’établissement des responsabilités pour les violations des droits de l’homme et les crimes de guerre.  Le délégué a rappelé aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité leur influence inégalée sur les questions de paix et de sécurité internationales, dont le droit de veto.  Ils ont donc un rôle essentiel à jouer pour parvenir à un règlement du conflit israélo-palestinien.  Ils les appelés à s’engager dans une diplomatie proactive afin d’encourager des négociations directes entre les parties, à offrir leur expertise de médiation et à donner des incitations aux parties pour les encourager à entamer des négociations et à faire des compromis.  Les membres du Conseil peuvent aussi exercer des pressions ou imposer des sanctions.

Le représentant a plaidé pour un soutien financier et technique aux initiatives visant à consolider la paix et la réconciliation et aux mesures de confiance entre Israéliens et Palestiniens.  Il a pressé les membres du Conseil de réaffirmer collectivement et individuellement leur engagement en faveur du droit international, y compris les résolutions pertinentes des Nations Unies, et veiller à leur mise en œuvre.  Il a conclu en exhortant les membres permanents à exercer leur droit de veto avec la plus grande retenue.

M. AKRAM (Pakistan) a brièvement réagi à la déclaration de l’Inde pour dire que « les mensonges que nous venons d’entendre » se rapportent au fait que « le Jammu-et-Cachemire appartient à l’Inde ».  Le représentant a souligné que toute répétition ne sert à rien car l’Inde a accepté la décision de l’ONU.  Il a rappelé que la question du Jammu-et-Cachemire est un débat au Conseil de sécurité depuis 55 ans, estimant que c’est à celui-ci d’en décider.  « Si l’Inde veut véritablement respecter le droit international et la Charte des Nations Unies, et si elle en a le courage, elle devrait respecter les décisions de l’ONU, en retirant notamment ses troupes du Jammu-et-Cachemire, et laisser son peuple vivre en paix. »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: deux approches s’affrontent pour assurer la sécurité de l’espace extra-atmosphérique

Soixante-dix-huitième session,
17e séance - matin
AG/DSI/3723

Première Commission: deux approches s’affrontent pour assurer la sécurité de l’espace extra-atmosphérique

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a consacré l’essentiel de sa séance de ce jour à son débat sur les aspects de désarmement dans l’espace extra-atmosphérique.  Pour en limiter l’exploitation à des buts pacifiques et prévenir de futurs conflits spatiaux, deux approches divergentes se sont fait face pendant les discussions. 

La première, notamment soutenue par les pays occidentaux, repose sur la promotion d’un comportement responsable dans l’espace.  La seconde, défendue notamment par la Fédération de Russie et la Chine, vise à l’élaboration directe de normes juridiques contraignantes, interdisant notamment le placement en premier d’armes dans l’espace.  Certaines délégations ont estimé que les deux approches n’étaient pas incompatibles, se montrant disposées à soutenir toute mesure permettant de prévenir une course aux armements dans l’espace et de garantir le statut de bien commun de l’humanité que lui confère le Traité sur l'espace extra-atmosphérique de 1967. 

Les tenants de l’approche par des principes et règles destinés à promouvoir un comportement responsable ont estimé, à l’image de la Nouvelle-Zélande, que son point fort réside dans le fait qu’elle cherche à identifier des solutions pragmatiques là où des consensus commencent à émerger.  Une analyse partagée par le représentant des États-Unis, pour qui cette approche se distingue par sa recherche de consensus visant à mettre en place des outils juridiquement contraignants. 

Ces pays ont apporté leur soutien au projet de résolution présenté par le Royaume-Uni et basé sur la résolution 76/231 de l’Assemblée générale, qui propose de créer un nouveau Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) sur la réduction des menaces spatiales, destiné à poursuivre le travail du groupe créé pour la période 2022-2023, qui vient de s’achever. Plusieurs délégations ont en effet estimé, comme la France, que le premier Groupe de travail avait permis de progresser sur la question de manière concrète et pragmatique en identifiant des sujets prometteurs sur lesquels il sera possible de progresser à court terme. La France a ainsi affirmé que le travail du Groupe avait catalysé certaines initiatives qui renforcent la sûreté spatiale, comme la résolution 77/41, qui appelle tous les États à ne pas conduire d’essais destructifs de missile antisatellite à ascension directe.  Le fait que ce Groupe de travail ne soit pas parvenu à adopter un rapport final à cause des objections de quelques rares États ne doit pas éclipser la valeur du travail accompli, ont en outre estimé les délégations favorables au projet britannique, parmi lesquelles figuraient également le Japon, la République de Corée, l’Italie ou encore la Nouvelle-Zélande. 

Cette approche a toutefois été jugée insuffisante par la Chine, qui a demandé aux autres pays de bien vouloir accepter les doutes exprimés par elle-même et par la Fédération de Russie quant à la pertinence et la portée de la notion de « comportement responsable ».  Celle-ci a été jugée par la Fédération de Russie trop vague pour répondre aux velléités de domination de certains États, que la Chine a présentés comme obsédés par un souci de domination hérité de la guerre froide, ce qui les conduit à tenter de faire de l’espace un lieu de concurrence stratégique au risque de relancer une course aux armements. 

Nombre de résolutions sur la nécessité de réduire les menaces spatiales sont adoptées à une large majorité chaque année par l’Assemblée générale, a fait observer la Chine.  Elle en a déduit que le temps était venu de passer à l’élaboration d’un cadre juridiquement contraignant comme celui qu’elle-même et la Fédération de Russie proposent depuis plusieurs années de négocier au sein de la Conférence du désarmement. C’est pourquoi elle soutient le projet de résolution sur de nouvelles mesures pratiques pour prévenir une course aux armements dans l’espace, et notamment la proposition de créer un GTCNL chargé de faire des recommandations sur les éléments constitutifs d’un futur instrument juridiquement contraignant à cette fin.  Cuba et l’Algérie ont apporté leur plein appui à ce projet. 

D’autres pays, comme le Mexique ou le Brésil, sont également favorables à l’adoption à terme d’un instrument juridiquement contraignant, mais aussi à celle de mesures pratiques, qu’ils voient comme un moyen d’y mener.  Étant donné la dépendance croissante de nombreuses infrastructures essentielles et les risques que leur feraient courir des dégâts causés à des biens spatiaux, toute mesure immédiate pour les prévenir, qu’elle soit contraignante ou non, représente un gain net, a ainsi estimé le Brésil. 

Pour la Suisse, les deux approches, capacitaire ou comportementale, sont en fait complémentaires mais la difficulté vient de la mise en place des processus parallèles auxquels aboutirait l’existence de plusieurs Groupes de travail. Les États-Unis y ont vu un facteur de division.  Le représentant russe a rétorqué que le Groupe de travail proposé ne vise qu’à réfléchir sur un possible projet de convention, « ce qui n’a rien d’illégitime ». 

En fin de séance, la Première Commission a entamé son débat thématique sur les armes classiques.  Quatre groupes importants ont pris la parole: le Mouvement des pays non alignés, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et les Groupes des États d’Afrique et des États arabes.  Ils ont donné la tonalité au débat en mettant en particulier l’accent sur la question du commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC), ces « véritables armes de destruction massive » dont souffre notamment le continent africain.  Ils ont également soulevé la question de l’application du Traité sur le commerce des armes (TCA) au regard du droit souverain et des États d’acquérir, fabriquer, exporter, importer et conserver des armes classiques pour répondre à leurs besoins légitimes de sécurité. 

Le débat thématique de la Première Commission se poursuivra lundi, 23 octobre, à partir de 10 heures. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Espace extra-atmosphérique (aspects du désarmement) (Suite) 

Déclarations 

Mme CAMILLE PETIT (France) a déclaré que, pour répondre aux défis de la sécurité spatiale, le droit international est déjà appliqué.  En effet, a-t-elle rappelé, la Charte des Nations Unies et le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 en sont deux piliers.  Parce que le respect de ce droit international est fondamental, la représentante a suggéré de le compléter avec des mesures concrètes pour renforcer la sûreté spatiale. 

Ceci passe d’abord par plus de transparence sur les activités spatiales, et la France y prend toute sa part en étant très claire sur sa doctrine et sa politique spatiale, a assuré la représentante, ajoutant que de plus en plus d’États et d’organisations internationales souscrivent à cette approche. Elle a estimé que le Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) des Nations Unies sur la réduction des menaces spatiales avait pour la première fois permis de progresser sur ce front de manière concrète et pragmatique, puisqu’il a permis d’identifier des sujets prometteurs sur lesquels il sera possible de progresser à court-terme.  Pour la représentante, le Groupe a catalysé certaines initiatives qui renforcent la sûreté spatiale, comme la résolution 77/41 appelant tous les États à ne pas conduire d’essais destructifs de missile antisatellite à ascension directe.  Il a aussi permis à tous les États, même ceux qui nourrissaient des réserves sur le processus, d’exprimer librement leurs préoccupations. 

La représentante a noté que le Groupe avait dégagé de nombreux éléments qui constitueront une base pour de possibles futurs instruments juridiquement contraignants, base à laquelle, a-t-elle ajouté, l’approche par les normes de comportement responsable peut contribuer dès maintenant.  Enfin elle a indiqué que l’absence de consensus sur le rapport final du Groupe n’enlève rien à ces succès, la France soutenant la résolution proposée par le Royaume-Uni visant à établir un second groupe de travail, « suite naturelle et appelée de ses vœux par la majorité des participants au premier Groupe ». 

M. BRAULIO FAUSTO (Mexique) a assuré que son pays s’oppose depuis toujours au placement d’armes dans l’espace.  Il a rappelé que l’utilisation et l’exploration de l’espace extra-atmosphérique doivent bénéficier aux intérêts de tous les États sans égard à leur taille, leur puissance ou leur richesse.  L’espace, a-t-il ajouté, est un paramètre toujours plus important pour réaliser les objectifs de développement durables (ODD).  Conformément au Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967, il a rappelé qu’aucune arme –en particulier celles de destruction massive– ne peut être située ou utilisée dans l’espace. 

Les technologies spatiales jouent un rôle crucial dans la lutte contre les changements climatiques, la gestion des catastrophes naturelles, l’agriculture, l’éducation et la santé, a-t-il poursuivi, estimant qu’à ce titre il importe de veiller à ce qu’elles restent accessibles à tous, en particulier aux États dotés de moindres capacités spatiales.  S’exprimant au nom d’un pays en développement, il a préconisé un traitement inclusif et multilatéral des questions spatiales.  En conséquence, il a insisté sur la nécessité d’établir un instrument juridiquement contraignant afin qu’aucun acteur, qu’il s’agisse d’un État ou d’une entité privée, ne place d’armes dans l’espace, de quelque nature que ce soit et en aucune circonstance. 

Le représentant a également mis en exergue les mesures de confiance, relevant que le développement de nouvelles technologies -dont certaines sont utilisées à des fins malveillantes- requiert l’attention immédiate des Nations Unies. 

Mme YOON SEONGMEE (République de Corée) a rappelé qu’en tant que nation spatiale, la République de Corée s’est fermement engagée à garantir un espace sûr, sécurisé et durable.  La représentante s’est félicitée de l’adoption par consensus du rapport sur les mesures de transparence et de confiance dans l’espace extra-atmosphérique par la Commission du désarmement des Nations Unies en avril dernier.  Il a rappelé que 165 États avaient soutenu la résolution 73/36 de l’Assemblée générale qui a établi le GTCNL sur la réduction des menaces spatiales. Au cours des deux dernières années, le Groupe de travail s’est révélé être une plateforme constructive, a estimé la représentante.  Même si elle a regretté que sa dernière session n’ait pas abouti à un résultat, ni même à un rapport de procédure, la représentante a en effet estimé que cette absence de consensus ne devait pas éclipser la valeur du travail accompli et du Groupe.  Pour préserver la sécurité spatiale, la poursuite de ces travaux devrait être une priorité urgente, a‑t‑elle estimé.  La représentante a apporté son plein soutien au projet de résolution présenté par le Royaume-Uni relatif au Groupe de travail et a exprimé son plein engagement pour les sessions de suivi prévues en 2025 et 2026. 

En revanche, la représentante a exprimé sa profonde inquiétude quant à la possible création d’un autre GTCNL consacré à la prévention d’une course aux armements dans l’espace avant même le début des discussions au sein du Groupe d’experts gouvernementaux (GEG) sur le même sujet. Elle y a vu une duplication inutile. 

S’agissant du récent lancement par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) d’un prétendu « satellite de reconnaissance militaire ».  Tout lancement utilisant la technologie des missiles balistiques par la RPDC contribue à l’amélioration de ses capacités à lancer des armes nucléaires, a‑t‑elle affirmé.  De ce fait, ces lancements, même s’ils se sont avérés infructueux, ne peuvent être considérés comme une utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique, a fait observer la représentante, qui a appelé à la vigilance, la RPDC s’apprêtant à tenter d’autres lancements en octobre. 

M. NICHOLAS CLUTTERBUCK (Nouvelle-Zélande) s’est réjoui que sa délégation, cette année encore, se porte coauteur du projet de résolution sur la réduction des risques de menaces spatiales par le biais de normes, règles et principes de comportements responsables, lequel appelle à la création d’un nouveau GTCNL pour la période 2025-2026.  Le mandat proposé pour le Groupe de travail vise à concentrer les discussions sur les domaines dans lesquels un consensus a émergé depuis 2022 et, sur cette base, d’identifier et de convenir d’axes de progrès pragmatiques et opportuns, a-t-il expliqué. 

À l’inverse, le représentant a dit les préoccupations de son pays quant à l’approche proposée par la Russie à travers son projet de résolution relatif aux mesures pratiques supplémentaires visant à prévenir la course aux armements dans l’espace.  Ce texte appelle à la création d’un groupe de travail distinct de quatre ans et axé sur l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant particulier pour faire face au risque de conflit dans l’espace, a-t-il rappelé.  La Nouvelle-Zélande considère en effet cette initiative comme étant inutilement longue et redondante, susceptible en outre de restreindre le débat qui sera mené au sein du prochain GTCNL sur les comportements responsables. 

M. ICHIRO OGASAWARA (Japon) a soutenu l’objectif de prévention d’une course aux armements dans l’espace comme de base inébranlable.  Il a apprécié les discussions inclusives du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable.  Bien qu’il ait regretté qu’aucun consensus n’ait été atteint sur le rapport de fond, ni même sur le rapport de procédure, le représentant a loué le vif intérêt pour l’effort commun de réduction des menaces spatiales, estimant qu’il aiderait aux futures discussions sur ce sujet. 

Lors des discussions du Groupe de travail, le Japon a souligné la nécessité de prendre en compte le double usage des systèmes spatiaux pour faire face aux menaces spatiales, a rappelé le représentant.  Il a soutenu fermement la poursuite des discussions sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable en rétablissant un GTCNL à compter de 2025. 

Le représentant s’est félicité également des recommandations visant à promouvoir la mise en œuvre pratique de mesures de transparence et de confiance dans les activités spatiales dans le but de prévenir une course aux armements dans l’espace qui ont été adoptées par la Commission du désarmement en avril. 

M. JASON ROBINSON (Irlande) a fait observer l’intensification rapide des activités humaines dans l’espace, assurant que son pays compte préserver l’environnement spatial comme un environnement durable et sécurisé.  Les satellites et autres services spatiaux sont importants au fonctionnement des infrastructures civiles comme à l’approvisionnement ou la gestion des déchets, a-t-il poursuivi.  Dans le même temps, les difficultés s’accumulent, s’est inquiété le représentant, qui a évoqué de potentielles conséquences considérables pour les civils.  À ce titre, il a pointé la responsabilité des États, leur rappelant que l’espace est un bien commun de l’humanité.  Il a préconisé l’élaboration de normes internationales pour régir les activités spatiales, conformément au droit international, y compris la Charte des Nations Unies. 

Les menaces spatiales peuvent également provenir d’infrastructures terrestres, a rappelé le représentant, qui a évoqué les attaques menées depuis la Terre contre des satellites ou les cyberattaques.  À ce titre, il s’est inquiété de risques liés à la création de débris spatiaux à longue durée de vie et de conflits entre acteurs spatiaux, disant craindre d’importantes répercussions humanitaires.  Il a rappelé l’engagement de son pays, avec l’Union européenne, à ne pas procéder à des essais de missiles antisatellites à ascension directe, appelant à l’élaboration de règles juridiquement contraignantes à ce propos.  Il a toutefois estimé qu’actuellement la promotion de mesures volontaires constitue la meilleure solution. 

Plaidant en faveur d’une approche multilatérale, le représentant a appelé à faire participer les États et les organisations internationales, mais aussi les acteurs commerciaux et la société civile, afin de rendre l’espace plus sûr et plus durable pour tous.

M. MANUEL JESÚS DEL ROSARIO VELA (Espagne) a rappelé que sa délégation avait soutenu dès le début les travaux du GTCNL créé par la résolution 76/231, sur la réduction des menaces spatiales grâce à des normes, règles et principes de comportement responsable.  Ces travaux, a-t-il ajouté, ont posé un cadre de dialogue inclusif et de confiance dans lequel les États ont pu partager leurs préoccupations et leurs priorités.  À son tour, il a appelé les États Membres à appuyer le projet de résolution que présente cette année le Royaume-Uni et qui propose qu’un nouveau groupe de travail prolonge cette discussion normative et conceptuelle sur la réduction des menaces spatiales, cela pour la période 2025-2026. 

M. LAURENT MASMEJEAN (Suisse) a estimé que dans l’espace, le strict respect des obligations existantes en vertu du droit international est fondamental. Il a réaffirmé que le droit international humanitaire s’applique à tous les conflits armés.  Par ailleurs, le risque de dommages collatéraux pour les civils en raison de la chute de débris spatiaux soulève de sérieuses questions. Pour le représentant, le GTCNL sur la réduction des menaces spatiales a été l’occasion de mener des discussions inclusives.  À bien des égards, le Groupe de travail a innové.  Le représentant a regretté que le Groupe n’ait pas été en mesure de s’accorder sur un document final, mais a toutefois salué la proposition visant à son renouvèlement. 

Le représentant a souligné que les approches capacitaire et comportementale sont toutes les deux importantes car complémentaires.  Il a souligné son inquiétude concernant la possibilité de processus parallèle dans ces domaines et a émis l’espoir que cette situation puisse être évitée. 

M. ASADOLLAH ESHRAGH JAHROMI (République islamique d’Iran) a insisté sur le ferme engagement de son pays en faveur de la consécration de l’espace extra-atmosphérique comme bien commun de l’humanité, appelant à son exploitation pacifique par tous les États, indépendamment de leur état d’avancement économique.  La militarisation de l’espace, a-t-il poursuivi, contribue au climat d’insécurité mondiale.  Se disant préoccupé par les risques que présente le déploiement dans l’espace de systèmes de défenses et de missiles stratégiques, le représentant a préconisé une approche multilatérale pour aborder ces questions aux Nations Unies. Il s’agit selon lui de promouvoir la sécurité tout en préservant les droits des États à l’utilisation pacifique des technologies spatiales. 

Le représentant a rejeté la déclaration émise par les États-Unis en 2018 qui ferait de l’espace le prochain champ de bataille de l’humanité.  À ce titre, il a averti des dangers d’une course aux armements dans l’espace, apportant le soutien de son pays au projet conjoint de la Russie et de la Chine.  Saluant également les progrès réalisés au sein du GEG, il a blâmé les États-Unis pour avoir empêché l’adoption d’un consensus. 

Le représentant a salué la création du nouveau GEG sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace pour promouvoir des mesures de transparence et de confiance, relevant toutefois que son succès dépend de sa non-politisation. Il a rappelé que l’on attendait la création d’un comité spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace depuis plus de deux décennies, accusant les États-Unis d’y faire obstacle. Enfin, il a dénoncé un régime de contrôle des exportations restrictif, lequel impose des limitations injustes sur de nombreux biens, créant de fait une monopolisation de l’espace extra-atmosphérique par les pays développés. 

M. LEONARDO BENCINI (Italie) a rappelé que son pays est fermement attaché à la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. Le domaine spatial devient de plus en plus complexe, a-t-il rappelé.  L’amélioration de la sécurité spatiale est donc nécessaire non seulement pour les nations spatiales, mais aussi pour tous les pays, compte tenu de la dépendance du monde contemporain à l’égard des systèmes spatiaux. 

Le représentant a jugé urgent d’améliorer la sécurité de l’espace et a rappelé avoir participé aux réunions du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable.  Bien que le Groupe de travail ne soit pas parvenu à un consensus sur un rapport, il a considéré que les travaux menés pendant deux ans avaient révélé une convergence interrégionale significative en faveur de l’approche comportementale, comme en témoignent les deux déclarations conjointes présentées lors de la quatrième et dernière session.  Une entente rapide sur les normes, les règles et les principes peut fournir la base la meilleure pour poursuivre le développement du droit international dans ce domaine, a ajouté le représentant, qui a donc appuyé le renouvellement du mandat de ce Groupe de travail, comme le propose le Royaume-Uni.

L’une des questions examinées par le Groupe de travail est celle des essais destructeurs de missiles antisatellites à ascension directe, qui créent des débris potentiellement dangereux et à durée de vie longue, a fait observer le représentant. L’Italie s’est engagée à ne pas procéder à de tels essais, a-t-il déclaré. 

Par ailleurs, le représentant s’est dit préoccupé par la possibilité que la Première Commission approuve les mandats de deux GTCNL distincts.  Outre l’effet évident de duplication, cela demanderait des ressources financières -qui sont limitées-, mettrait une pression énorme sur un calendrier de désarmement déjà encombré et rendrait pratiquement impossible pour les petites délégations de suivre les deux exercices avec un niveau d’attention suffisant, a-t-il fait valoir. 

Mme ASHLYN MILLIGAN (Canada) a notamment affirmé que les menaces contre la sécurité de l’espace peuvent uniquement être abordées en tirant profit de l’expertise de l’ensemble de la communauté spatiale.  Non seulement cette vaste mobilisation enrichit le débat, mais elle est aussi garante de succès à long terme compte tenu du rôle de la société civile dans la promotion et dans la mise en œuvre des résultats, a-t-elle dit. 

La représentante a en outre attiré l’attention sur le fait que le genre est une dimension de l’inclusion qui est souvent négligée.  Le Canada milite pour la participation entière, significative et égale des femmes dans tous les aspects du désarmement, « et la sécurité de l’espace ne fait pas exception », a-t-elle ajouté.  Après avoir apporté le soutien de sa délégation au projet de résolution britannique sur la réduction des menaces spatiales, elle a souhaité souligner les avantages de l’application de points de vue et de recommandations diversifiés et sexospécifiques.  Un environnement spatial sécurisé, sûr et durable est dans l’intérêt de l’ensemble de l’humanité, et cela permettra d’assurer l’accès continu aux importants avantages que nous tirons de l’espace, a-t-elle ajouté. 

M. MOHAMMED LAWAL MAHMUD (Nigéria) a estimé que, compte tenu des défis posés par l’espace extra-atmosphérique, il est important qu’un engagement international soit conclu pour y prévenir une course aux armements.  C’est là une mesure urgente en raison de l’inadéquation des instruments juridiques existants à l’égard de la volonté existante de décourager la poursuite de la militarisation de l’espace, a-t-il ajouté. 

Le représentant a en outre souligné l’importance d’un cadre juridique international contraignant pour permettre une exploration égale de l’espace extra-atmosphérique à des fins exclusivement pacifiques, et qui devrait être fondé sur les principes de non-appropriation et d’utilisation pacifique, conformément aux cinq traités des Nations Unies sur les activités spatiales et en particulier le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967.  Pour le Nigéria, il est donc essentiel que ce traité garantisse la primauté de la Charte dans l’espace, le libre accès à l’espace sans discrimination, le règlement pacifique des différends, le droit de développer des technologies à des fins pacifiques, la coopération et l’assistance internationales, ainsi que la protection des droits humains. 

Le représentant a souhaité l’adoption d’un traité global juridiquement contraignant sur les armes dans l’espace et sur les attaques armées contre des objets spatiaux.  Il s’est notamment prononcé pour l’interdiction de placer des armes dans l’espace à des fins offensives ou défensives, de mener des attaques armées contre des satellites, d’utiliser des objets spatiaux comme armes pour mener des attaques armées ou des interférences nuisibles contre des cibles spatiales ou terrestres.  Il s’est également prononcé pour l’interdiction de la mise au point, de l’essai et du stockage d’armes conçues dans le seul but de mener des attaques armées contre des satellites ou d’autres objets spatiaux, y compris des armes antisatellites. 

Pour le Nigéria, tous les États, en particulier ceux qui disposent d’importantes capacités spatiales, ont la responsabilité de contribuer à l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique ainsi qu’à la prévention de la course aux armements.  Le représentant a donc appelé les États à s’abstenir de toute action contraire à l’utilisation pacifique de l’espace et à adhérer aux traités pertinents existants. 

M. BRUCE TURNER (États-Unis) a assuré que son pays s’engage en faveur d’un espace extra-atmosphérique sûr, stable et durable.  De nombreux développements positifs ont eu lieu dans ce domaine ces dernières années, s’est-il réjoui, suggérant que nous pouvons sortir de l’impasse.  Il a notamment salué la résolution adoptée l’an dernier par l’Assemblée générale appelant à ne pas effectuer d’essais de missiles antisatellites à ascension directe, afin de répondre aux menaces urgentes pour la sécurité spatiale.  Rappelant que la résolution a été mise en œuvre par 36 pays, le représentant a appelé les autres nations à faire de même afin que cette proposition devienne une norme. 

Le représentant s’est dit ravi que les États soient parvenus à un consensus lors de la réunion récente de la Commission du désarmement à propos des mesures de transparence et de restauration de la confiance.  Il a également salué le travail du GTCNL sur les normes de comportement responsable, qui montre que l’on peut compter sur un forum novateur pour discuter de la sécurité spatiale.  Il s’est félicité que s’y soient déroulées des discussions inclusives et d’un grand intérêt, quand bien même des obstructions ont fait obstacle au consensus.  Il appelé à continuer sur cette lancée afin de promouvoir des normes volontaires de transparence et de restauration de la confiance, dans la ligne des recommandations du Secrétaire général de l’ONU.  Il a donc appuyé le projet de résolution L.15 présenté par le Royaume-Uni, qui prévoit la création pour 2025-2026 d’un tel groupe de travail et s’est réjoui du large soutien dont bénéficie cette approche, estimant qu’elle contribue à la mise en place d’outils juridiquement contraignants par le consensus. 

Le représentant a par contre appelé à rejeter le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie qui prévoit la création d’un autre GTNCL chargé d’étudier la possibilité d’une convention juridiquement contraignante, estimant que ce processus ferait doublon et sèmerait la division, qui plus est selon une perspective limitée.  Il s’est également prononcé en défaveur du projet de résolution portant sur le non-déploiement en premier d’armes dans l’espace, estimant qu’il ne définit pas suffisamment ce qui peut constituer une arme. 

Mme ARTEMIS PAPATHANASIOU (Grèce) a soutenu que les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique devraient prévaloir sur tout recours à la force dans l’espace.  Pour la Grèce, le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) et ses deux sous-comités sont des plateformes uniques pour un dialogue inclusif sur le droit de l’espace, pour la coopération internationale, y compris sur le développement du droit international de l’espace, des normes internationales, des lignes directrices et des meilleures pratiques.  La représentante a reconnu à cet égard la nécessité pour la communauté internationale de discuter des moyens de renforcer la gouvernance de l’espace. 

Par ailleurs, la représentante s’est dite fermement convaincue que la paix ne peut être atteinte sans prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  À cet égard, elle s’est félicitée de l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution 76/231 sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable au bénéfice de tous.  Elle s’est dite prête à soutenir le projet de résolution présenté cette année sur le même sujet par le Royaume-Uni.  La Grèce s’associe en effet à ceux qui estiment qu’une approche basée sur des comportements responsables offre un cadre réaliste pour améliorer la sécurité de l’espace, sans exclure la possibilité de nouveaux instruments juridiquement contraignants à l’avenir.  En outre, la représentante a estimé que tout futur texte juridiquement contraignant dans le domaine de la sécurité spatiale devrait viser à couvrir toutes les menaces pertinentes, de manière efficace et vérifiable. 

M. JIAN SHEN (Chine) a appelé les États Membres à trouver un consensus sur les utilisations pacifiques de l’espace, déplorant que certains pays demeurent obsédés par un souci de domination hérité de la guerre froide.  Cela les conduit à tenter de faire de l’espace un lieu de concurrence stratégique, et c’est ainsi qu’ils y déploient des armes, prenant le risque de relancer une course aux armements, a déclaré le représentant. 

Rappelant que son pays et la Fédération de Russie le préconisent depuis plusieurs années, le représentant a proposé d’aller à l’encontre de ces initiatives en lançant la négociation, à la Conférence du désarmement, d’un instrument juridiquement contraignant interdisant le placement en premier d’armes dans l’espace.  Nombre de résolutions sur la nécessité de réduire les menaces spatiales sont adoptées à une large majorité chaque année par l’Assemblée générale, a fait observer le représentant, pour qui le temps est donc venu de passer à l’élaboration d’un tel cadre juridiquement contraignant.  Il a ainsi rappelé que sa délégation propose la création d’un nouveau Groupe de travail axé sur une telle élaboration, avant de demander, en conclusion, que certains pays acceptent les doutes exprimés par la Chine et la Russie quant à la pertinence et la portée de la notion de comportement responsable. 

M. WILLIAM SAETER (Norvège) a estimé que l’approche basée sur le comportement continue d’offrir une voie à suivre vers un instrument juridiquement contraignant, la prise d’engagements politiques, « ou les deux ».  Pour la Norvège, la forme est secondaire par rapport à l’objectif de réduction des menaces spatiales, a expliqué le représentant, qui a rappelé qu’il existe un accord de longue date entre les États sur le fait que le droit international, y compris la Charte des Nations Unies, est applicable dans l’espace extra-atmosphérique.  Et comme l’a observé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), l’applicabilité du droit international humanitaire dans l’espace n’y légitime pas l’usage de la force, ni sa militarisation.  L’applicabilité du droit international humanitaire ne diminue en rien l’obligation des États de s’abstenir du recours à la force ou à sa menace, a insisté le représentant. 

Par ailleurs, le représentant a attiré l’attention sur le fait que le Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques constitue une mesure importante de transparence et de confiance, en soutenant fermement l’universalisation.  La Norvège se félicite d’avoir pris l’engagement de ne pas procéder à des essais destructeurs de missiles antisatellites à ascension directe, a-t-il aussi déclaré, jugeant qu’il s’agit là d’un choix apte à contribuer à l’instauration de la confiance dans le domaine spatial. 

M. FLÁVIO SOARES DAMICO (Brésil) a rappelé certaines tendances importantes dans l’espace extra-atmosphérique, comme l’augmentation du nombre d’acteurs spatiaux, la baisse des coûts de lancement des engins spatiaux qui entraine une croissance exponentielle des véhicules en orbite et les risques liés aux débris qui augmentent.  Les infrastructures essentielles sur Terre, telles que les communications, dépendent trop des satellites, a souligné le représentant, pour qui le développement de capacités spatiales offensives par plusieurs États ne fait que renforcer cette inquiétude.  Les préoccupations relatives à la sécurité dans l’espace ne se limitent plus à une poignée de nations spatiales mais bel et bien à 91 États qui ont mis un satellite en orbite, a-t-il fait valoir.  Aujourd’hui, plus que jamais, l’espace extra-atmosphérique est devenu une province de l’humanité, a-t-il ajouté. 

Le Brésil aspire à devenir une nation spatiale à part entière et s’engage à maintenir l’espace pacifique, stable, sûr et accessible à tous, a déclaré son représentant.  Il a estimé que les dommages et dégâts causés à ces biens spatiaux compromettraient inévitablement des infrastructures critiques.  Par conséquent, toute mesure immédiate pour les prévenir, qu’elle soit contraignante ou non, représente un gain net, car elle accroît la capacité de survie de nos biens rares et précieux, a-t-il déclaré.  Il a dit partager les aspirations de la communauté internationale qui a souscrit à diverses initiatives telles que les Lignes directrices aux fins de la viabilité à long terme des activités spatiales, adoptées par consensus dans le cadre du COPUOS, ainsi que d’autres groupes d’experts. Toutefois, il a regretté que la communauté internationale n’ait pas réussi à trouver un consensus sur la façon d’aborder une formulation globale qui mettrait tout le monde d’accord, mais a émis l’espoir qu’une formulation consensuelle puisse être trouvée. 

M. OLIVER MUSONDA (Zambie) a estimé que les approches concurrentes en matière de sécurisation de l’espace devraient être unifiées dans un seul processus de délibération, la prévention d’une course aux armements dans l’espace et le respect de l’exercice du droit aux utilisations pacifiques de celui-ci étant souhaités par la majorité des pays.  Il en va du partage de la prospérité et de la sauvegarde d’un environnement qui est un patrimoine commun de l’humanité, a-t-il ajouté.  Les bienfaits de l’espace en matière de développement socioéconomique doivent être accessibles à tous, quel que soit le niveau de développement des pays, a encore rappelé le représentant, pour qui l’espace ne doit pas être un outil de discorde, de militarisation ou de compétition stratégique. 

Mme VIVIANA ROCIO SANABRIA DUARTE (Paraguay) a rappelé que toute activité spatiale avait une incidence sur l’humanité, estimant qu’à ce titre son exploitation doit avoir lieu de manière durable et dans l’intérêt de tous les pays, indépendamment de leur niveau de développement économique. Détaillant les initiatives déployées sur le plan national, la représentante a notamment cité le développement d’un programme spatial autochtone et durable.  Son pays dispose d’une politique spatiale depuis 2019, a-t-elle rappelé.  À ce titre, elle a réitéré l’engagement du Paraguay contre la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, s’inquiétant de voir celui-ci devenir le théâtre de conflits armés en violation de la Charte des Nations Unies.  Le Paraguay a également appuyé et participé à la rédaction de la convention de l’Agence spatiale d’Amérique latine et des caraïbes (ALCE), laquelle agit en tant que mécanisme régional de coopération entre ses États membres et la communauté internationale, a-t-elle rappelé. 

La représentante a insisté sur la nécessité de promouvoir des mesures internationales en faveur de la transparence et de la restauration de la confiance, et a plaidé pour un renforcement du respect des directives de l’ONU.  Elle s’est également prononcée en faveur de l’inclusion des femmes dans les débats, afin de contribuer à un dialogue inclusif, plus à même d’identifier les menaces. 

M. LARBI ABDELFATTAH LEBBAZ (Algérie) a estimé que militariser l’espace extra-atmosphérique aurait de graves conséquences et qu’il est donc impératif d’y empêcher une course aux armements.  Il faut renforcer la coopération internationale en matière d’exploration spatiale et d’utilisation pacifique de l’espace, afin que tous puissent en bénéficier, a affirmé le représentant, pour qui le cadre juridique actuel reste insuffisant pour répondre à la prévention de la militarisation de l’espace.  Il faut donc le renforcer en adoptant un instrument international juridiquement contraignant qui traite spécifiquement de cette question.  Le projet de traité actualisé soumis à la Conférence du désarmement par la Fédération de Russie et la Chine sur la prévention du déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique est une bonne base pour la poursuite des discussions et des négociations, a estimé le représentant, qui a appelé la Conférence du désarmement à entamer des négociations sur la question. 

Le représentant a reconnu que l’utilisation croissante de l’espace extra-atmosphérique exige des mesures supplémentaires pour garantir une meilleure communication des informations.  Il a regretté que le GTCNL créé conformément à la résolution sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, règles et principes régissant un comportement responsable ait conclu son mandat sans être parvenu à un accord commun.  Il s’est engagé à travailler pour conclure un instrument international juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, essentiel pour préserver la paix et la sécurité de l’espace extra-atmosphérique pour l’ensemble de l’humanité. 

Mme TATIANA BÁRBARA MUÑOZ PONCE (Bolivie) a souligné l’importance pour les pays en développement d’un accès aux ressources spatiales à des fins de prospérité partagée et du progrès humain de leurs sociétés.  Elle a ensuite apporté le soutien de sa délégation au projet de traité sino-russe sur le non-placement en premier d’armes dans l’espace, y voyant un moyen de compléter le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967. 

Mme YILIAM GOMEZ SARDINAS (Cuba) a déclaré qu’il n’est pas encourageant de voir des tentatives répétées pour détourner du chemin menant à un instrument juridiquement contraignant pour la prévention de la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Pour la représentante, le projet de traité présenté par la Fédération de Russie et la Chine constitue une bonne base de travail. 

Nous avons le devoir d’utiliser l’espace à des fins uniquement pacifiques, a déclaré la représentante, pour qui les technologies spatiales doivent bénéficier à tous les peuples.  L’espace extra-atmosphérique ne peut en aucun cas servir à miner la souveraineté des nations, a-t-elle ajouté, avant de condamner l’utilisation de satellites espions, la jugeant incompatible avec le respect des peuples. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a observé que, depuis le lancement du premier satellite artificiel en 1957, l’espace extra-atmosphérique est resté relativement pacifique.  Estimant que la militarisation de l’espace est encore mesurée, il a toutefois noté les risques croissants de course aux armements.  Il s’est notamment dit préoccupé des essais d’armes antisatellites conduits par plusieurs États, notant que de telles technologies pourraient finir par obstruer l’espace avec des déchets orbitaux. À ce titre, il a salué la résolution adoptée à l’Assemblée générale l’an dernier pour interdire les essais de missiles antisatellites à ascension directe.  Selon lui, la Conférence du désarmement devrait également s’appuyer sur la nécessité d’une prévention d’une course aux armements dans l’espace pour exclure les capacités destructives visant des objets spatiaux. 

Condamnant tout l’emploi d’armes dans l’espace extra-atmosphérique, et s’inquiétant des dépenses militaires croissantes dans ce domaine, l’Observateur permanent a appelé la Première Commission à revenir à son objectif principal, c’est-à-dire le désarmement complet.  Si l’espace extra-atmosphérique devait se militariser, l’objectif n’en deviendrait que plus difficile à atteindre, a-t-il averti.  Notant l’importance des normes de confiance et de transparence, il a salué le travail du Groupe de travail sur la réduction des menaces dans l’espace au moyen de normes, règles et principes de comportement responsable. Toutefois, il a estimé que ce Groupe devait s’assurer de ne pas faire doublon avec la Conférence du désarmement ou la Commission du désarmement.  Enfin, il a regretté l’absence de consensus portant sur des recommandations concrètes qui pourraient promouvoir des mesures pratiques de restauration de la confiance. 

Droits de réponse

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a demandé à la République de Corée de ne pas utiliser la Commission pour y défendre sa politique hostile et agressive tout en proférant des allégations infondées contre son pays, qui « a le droit souverain de développer des missiles et des satellites pour assurer sa légitime défense et sa survie ». 

Le Représentant de la Fédération de Russie a rejeté les déclarations des États-Unis et de la Nouvelle-Zélande, qui visent sans nuance le projet de traité russe visant à prévenir une course aux armements dans l’espace.  Nous proposons de créer un GTCNL dévolue à la réflexion sur ce projet, ce qui n’a rien d’illégitime », a-t-il déclaré, ajoutant que le caractère non consensuel de l’approche occidentale reposant sur la vague notion de comportement responsable n’est pas adapté à la formulation de solutions pour répondre efficacement aux velléités de domination de certains dans l’espace. 

La représentante d’Israël a répondu à la République islamique d’Iran et à la République arabe syrienne, ainsi qu’au Groupe des États arabes, qui se sont exprimés cette semaine, estimant que leurs interventions n’avaient rien à voir avec les débats de la Première Commission.  Nous sommes ici pour réduire les armements, a-t-elle insisté, avant d’accuser l’Iran de financer le Hamas à hauteur de 100 millions de dollars par an. 

Le représentant des États-Unis a réaffirmé que l’attaque menée en Israël le 7 octobre par le Hamas était un attentat et a réaffirmé son soutien à Israël et à son droit à la légitime défense.  Concernant l’hôpital bombardé, l’enquête continue, a-t-il noté, mais pour le moment l’enquête montre qu’il ne s’agit pas d’une frappe israélienne mais plutôt du Hamas.  Répondant à son homologue de la Fédération de Russie, il a dit comprendre que la Russie ne comprenne pas la notion de « comportement responsable », compte tenu de son comportement en Ukraine.  S’agissant de la RPDC, il a affirmé que les exercices menés conjointement par les États-Unis, la République de Corée et le Japon étaient des activités défensives, routinières et annoncées à l’avance, ce qui est radicalement différent de ceux de la RPDC. 

Le représentant de la République de Corée a dénoncé les tirs de missiles effectués par la RPDC, rappelant les résolutions adoptées en vue d’y mettre fin. Il l’a accusée d’utiliser l’espace extra-atmosphérique à des fins belliqueuses, notant que la Charte des Nations Unies exclut de telles activités.  Il a rappelé une déclaration de la RPDC en faveur de l’interdiction de la menace ou l’emploi de la force contre des objets spatiaux, constatant que ses essais balistiques vont à l’encontre de ces principes. 

Le représentant de la Jordanie, au nom du Groupe des États arabes, a répliqué au droit de réponse d’Israël, réitérant la condamnation des agressions contre des civils.  Il a accusé Israël d’utiliser la plateforme des Nations Unies pour répandre des mensonges. Il l’a appelé à lever le siège et à laisser entrer l’aide humanitaire, dénonçant une punition collective, à ce titre contraire au droit international. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a qualifié d’absurde la déclaration de la représentante d’Israël, dont le pays menace le sien d’annihilation nucléaire à la tribune de l’ONU, bafoue les droits humains et multiplie les violations du droit international et du droit international en frappant des civils palestiniens sans défense « et en tuant y compris des membres du personnel de l’UNRWA ». 

Le représentant de la République arabe syrienne a condamné les tentatives d’Israël de détourner l’attention internationale des crimes et violations du droit international commis par « l’entité israélienne expansionniste ».  Par ses crimes commis grâce à des pays complices, ce régime a mis au bord du précipice et de l’instabilité l’ensemble de la région, a-t-il ajouté. 

Le représentant de la Fédération de Russie a réagi aux tentatives de manipulations menées par les États-Unis.  Selon eux, on a l’impression que c’est la Russie qui est responsable de tout dans le monde, a-t-il dit, ce que nous rejetons.  Concernant le GTCNL, il a accusé les États-Unis de chercher à rejeter son échec sur son pays et a appelé les délégations à prendre connaissance des comptes rendus de séance pour se rendre compte que c’est faux.  Ces dissensions concernant le comportement responsable dans l’espace montre qu’il est inutile de renouveler ce Groupe de travail, car de tels travaux ne feront que diviser davantage la communauté internationale, a-t-il ajouté. 

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a rejeté les assertions des représentants des États-Unis et de la République de Corée, leur reprochant ironiquement de ne pas vouloir laisser son pays lancer un satellite militaire avec un missile balistique.  Voulez-vous dire que nous devons le faire via une montgolfière? a-t-il demandé.  Les exercices militaires des États-Unis témoignent que le Conseil de sécurité est manipulé par les États-Unis, a encore accusé le représentant, qui a estimé que de tels exercices devraient être menés loin des frontières de son pays.  Nous ne reconnaissons pas les résolutions du Conseil de sécurité qui empiètent sur notre droit souverain, a-t-il ajouté. 

Le représentant des États-Unis a répondu à l’intervention de la Russie concernant les notions relatives au comportement responsable.  La Russie a affirmé hier que les satellites utilisés par l’Ukraine pour se défendre constituent une cible légitime en cas de représailles, a-t-il rappelé, y voyant dans ces propos une menace directe de recours à la force dans l’espace extra-atmosphérique.  Je n’y vois pas la marque d’un comportement responsable, a-t-il dénoncé.  Au même titre, le représentant a mentionné des essais de missiles antibalistiques et des cyberattaques russes contre les réseaux de gestion des communications satellitaires ukrainiennes, lesquelles ont affecté des fermes éoliennes en Europe. Enfin, il a affirmé qu’en 2017 et en 2020, la Russie avait tiré des projectiles en orbite et déployé des satellites armés, alors même que sa délégation prétend être en faveur du principe de non-déploiement en premier. 

Armes conventionnelles

Déclarations

Mme MARIA BENEDICTA DIAH KRISTANTI (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a souligné la nécessité d’une mise en œuvre équilibrée, complète et efficace du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et de l’Instrument international de traçage.  Sur ce dernier point, la représentante a attiré l’attention sur l’urgence d’intensifier les efforts visant à promouvoir la coopération et l’assistance techniques internationales pour renforcer la mise en œuvre dudit instrument.  Le Mouvement des pays non alignés appelle également l’ONU, dans ses activités de soutien à la mise en œuvre de ces deux dispositifs, à s’appuyer davantage sur l’expertise disponible dans les pays en développement. 

Le Mouvement des pays non alignés salue l’adoption du Cadre mondial pour la gestion des munitions classiques.  Ce Cadre, a rappelé la représentante, fonctionne sur une base volontaire et propose un ensemble d’engagements politiques visant à renforcer et à promouvoir les initiatives existantes en matière de gestion des munitions conventionnelles tout au long de leur cycle de vie et à combler les lacunes qui existaient de longue date. 

Après avoir appelé à une mise en œuvre équilibrée du Traité sur le commerce des armes (TCA), la représentante a ajouté que les États membres du Mouvement des pays non alignés qui sont parties à la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) sont d’avis qu’il faut, dans ce cadre, établir de nouvelles dispositions juridiquement contraignantes pour relever les défis humanitaires et de sécurité internationale posés par les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA). 

M. TITHIARUN MAO (Cambodge), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), s’est dit préoccupé par la prolifération d’armes classiques.  L’utilisation d’armes légères dans les conflits a des incidences sur les populations et exerce une pression considérable sur les gouvernements locaux, a-t-il rappelé.  À ce titre, il a estimé nécessaire d’entreprendre des actions à l’échelle internationale et appelé à l’élaboration d’instruments juridiquement contraignants.  Il s’est également félicité des résultats de la huitième Réunion biennale des États parties pour prévenir, combattre et éradiquer le commerce des armes légères et de petit calibre (ALPC).  Il a aussi salué l’adoption d’un rapport final par le GTCNL en vue de combler les lacunes existantes dans la gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie.  Détaillant les initiatives déployées sur le plan régional, il a notamment cité le renforcement du système de désarmement et la lutte contre le trafic d’armes, en particulier lors de la réunion de l’ASEAN sur la criminalité transnationale organisée. 

Le représentant a souligné la menace que représentent les engins explosifs improvisés entre les mains d’acteurs non étatiques.  Il a également appelé à l’adoption d’un outil juridique contraignant concernant les SALA, évoquant à ce titre le deuxième Protocole amendé de la CCAC. 

Enfin, le représentant a appelé à l’action dans le domaine des mines antipersonnel. Dans ce cadre, il a salué la tenue cette année à Genève de la vingt-et-unième Réunion des États parties à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel.  L’ASEAN, a-t-il poursuivi, continue de soutenir son Centre régional d’action contre les mines (ARMAC), dont l’importance est prépondérante pour les États du Groupe touchés par ces armes.  Il a préconisé le renforcement des projets de déminage selon une approche complète qui inclut le soutien aux victimes.  Dans ce but, il a appelé les pays développés à offrir une assistance financière, technique et humanitaire. 

M. MOHAMMED LAWAL MAHMUD (Nigéria), au nom du Groupe des États d’Afrique, a reconnu la portée décisive du travail considérable accompli en Afrique pour lutter contre le commerce illicite des ALPC, citant à ce propos la plupart des initiatives régionales en vigueur, notamment la Convention de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes et le Programme « Faire taire les armes en Afrique ». 

Le représentant a également souligné que la promotion d’une participation pacifique, sans entrave et inclusive des nations aux actions mondiales visant à lutter contre le flux illicites d’ALPC, en particulier en Afrique -continent qui souffre le plus de l’utilisation de ces véritables armes de destruction massive- facilitera la réalisation tant des ODDD que de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Les États d’Afrique soulignent la nécessité d’établir et de maintenir un contrôle strict sur la propriété privée des armes légères et appelle tous les États à veiller à ce que la fourniture d’ALPC soit limitée aux seuls gouvernements ou à des entités dûment autorisées par les gouvernements des États bénéficiaires, a-t-il ensuite expliqué. Pour ces pays, il ne fait aucun doute que l’adhésion universelle à cet engagement peut grandement contribuer aux efforts visant à éradiquer le commerce et les transferts illicites d’ALPC. 

Concernant la mise en œuvre du TCA, dont il a salué les objectifs, le représentant a réaffirmé le droit souverain des États d’acquérir, de fabriquer, d’exporter, d’importer et de conserver des armes conventionnelles pour répondre à leurs besoins de sécurité, conformément à la Charte des Nations Unies.  La pleine mise en œuvre du Traité ne sera réalisable qu’avec la coopération de bonne foi entre toutes les parties prenantes, a-t-il ajouté. 

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI (Jordanie), au nom du Groupe des États arabes, a condamné les actions d’Israël contre l’État de Palestine. De telles actions vont mener la région au bord du précipice et la communauté internationale doit agir, a-t-il déclaré. 

Le représentant a dit accorder une attention particulière à la lutte contre le commerce illicite d’armes légères, en particulier en raison des effets économiques de l’augmentation de l’offre illicite d’ALPC dans la région arabe, laquelle semble être la conséquence du comportement de certains gouvernements qui ont recours à l’approvisionnement de terroristes et de groupes armés.  Le représentant a souligné l’importance du Programme d’action des Nations Unies pour lutter contre le commerce illicite des ALPC et a appelé à le préserver en tant qu’outil international consensuel dont l’objectif est de renforcer la coopération afin d’éradiquer le trafic illicite de ces armes. 

Toutefois, les mesures prises ne peuvent entrer en conflit avec le droit légitime des États de fabriquer et d’importer des armes conventionnelles, a fait observer le représentant, qui a souligné la nécessité de distinguer la lutte contre le trafic illicite et l’imposition de restrictions politisées et discriminatoires au commerce légitime entre gouvernements, en conformité avec l’appréciation souveraine de chacun d’eux sur la nature des menaces sécuritaires auxquelles il est confronté.  Il a réitéré le droit légitime des États à subvenir à leurs besoins en armes classiques conformément à l’Article 51 de la Charte. 

Il est important que l’assistance à un État ne porte pas atteinte aux ressources officielles d’aide au développement allouées à ce pays, ni ne tente de créer des liens non spécifiés entre l’apport de l’aide nécessaire dans le domaine de la lutte contre le trafic et l’approvisionnement illicite en armes classiques, a en outre plaidé le représentant.  Par ailleurs, il s’est félicité de l’adoption du document final de la huitième Réunion du Programme d’action des Nations Unies sur les ALPC, et a dit attendre avec impatience de s’appuyer sur les recommandations qu’il contient, en préparation de la Conférence d’examen de 2024. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission passe au crible les problématiques liant les droits humains et les périls environnementaux

Soixante-dix-huitième session,
28e et 29e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4387

La Troisième Commission passe au crible les problématiques liant les droits humains et les périls environnementaux

La Troisième Commission, chargée des affaires sociales, humanitaires et culturelles, a dialogué aujourd’hui avec six titulaires de mandat et poursuivi sa discussion générale sur la promotion et la protection des droits humains.  Si les problématiques de gouvernance mondiale et l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les droits humains ont donné lieu à des débats nourris, il a surtout été question des préoccupations environnementales de la communauté mondiale. 

Le partage de « l’or bleu » a ainsi été problématisé par le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, qui a rappelé que 2 milliards de personnes sur Terre n’ont pas un accès garanti à une eau potable saine.  Une situation aggravée par les conséquences des changements climatiques, telles que les sécheresses et les inondations.  Préconisant une réponse fondée sur les droits humains et le respect des écosystèmes, M. Pedro Arrojo-Agudo y a vu une nécessité planétaire pour assurer la survie de centaines de millions de personnes. 

En écho au blocus de Gaza, le Rapporteur spécial a dénoncé la « logique de haine » qui transforme l’eau en arme. Appelant le Conseil de sécurité à accorder une attention particulière à la gestion transfrontalière de l’eau comme « élément clef de la paix et de la sécurité », il a également souligné l’importance d’une adaptation aux changements climatiques qui garantisse la bonne santé des écosystèmes et des populations. 

Soulevant d’autres inquiétudes en lien avec la crise climatique, le Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable a mis en garde contre un possible blocage des lois et politiques plus strictes que sont tenus de mettre en œuvre les États en matière de climat et d’environnement.  Selon M. David Boyd, ce risque tient au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), qui confère aux premiers un immense pouvoir sur les seconds. 

Trois sociétés minières australiennes ont ainsi poursuivi la République du Congo pour un montant total de plus de 35 milliards de dollars, alors que le PIB annuel de ce pays est de 13 milliards de dollars, a relevé M. Boyd, entre autres exemples de cette « folie du système ».  « Au lieu de faire payer les pollueurs, les États paient les pollueurs », s’est-il ému, avant de constater que les pays les plus riches refusent désormais de se soumettre au RDIE au motif qu’il rend l’action climatique trop coûteuse.

Le manque de riposte écologique des États nourrit une frustration grandissante parmi les communautés, a observé pour sa part le Rapporteurspécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques.  S’alarmant du sort réservé aux défenseurs des droits de l’environnement dans le monde, M. Ian Fry a aussi déploré que trop d’États négligent l’adaptation des communautés aux changements climatiques et que très peu se penchent sur les déplacements liés à ces phénomènes. 

Bouclant cet état des lieux des problématiques environnementales, le Rapporteur spécial sur les substances toxiques et les droits de l’homme, a exposé le lien entre ces droits et le transport maritime, responsable du transit de 90% des biens commerciaux mondiaux.  M. Marcos Orellana a relevé que la pollution de l’air associée à la navigation contribue à environ 60 000 décès chaque année.  Incriminant l’insuffisance des conventions de l’Organisation maritime internationale (OMI) en la matière, il a plaidé pour que les droits humains soient davantage pris en compte par l’industrie maritime, insistant sur la nécessité de transparence.

Ce besoin a également été au cœur de l’exposé de l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable, qui s’est fait l’avocat d’une participation accrue du public dans la gouvernance mondiale.  Déplorant que cette participation soit encore trop symbolique dans des espaces de décision comme le G7, le G20, les BRICS et le G77, M. Livingstone Sewanyana a appelé ces instances à prendre au sérieux la consultation des différentes sections de la société, par souci de crédibilité mais aussi d’efficacité.  Il a d’autre part noté que les institutions financières internationales sont des acteurs majeurs du financement du développement et de la réalisation des objectifs de développement durable et ont donc une influence directe sur la mise en place d’un ordre international démocratique et équitable. 

Cet ordre est toutefois empêché par les effets indésirables des sanctions, a de son côté expliqué la Rapporteuse spéciale sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme.  Centrant son exposé sur le respect excessif des sanctions par les entreprises, dérive qui contribue à élargir des mesures présentées comme « ciblées », Mme Alena Douhan a constaté que ces pratiques conduisent à atteindre des cibles ne faisant pas l’objet de sanctions et entravent l’action humanitaire. 

Le dialogue interactif qui a suivi la présentation de Mme Douhan a fait apparaître une ligne de fracture très nette sur cette question.  Seule Malte a pris la parole côté occidental, alors qu’une dizaine de pays du Sud se sont succédé pour dénoncer des pratiques contraires au droit international et à la Charte des Nations Unies.  Le Venezuela a condamné les visions « néocoloniales et suprémacistes » des États qui les imposent, la République arabe syrienne percevant dans le silence des pays occidentaux la preuve de leur « complicité coupable ». 

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 20 octobre, à partir de 10 heures.  

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS(A/78/198)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. LIVINGSTONE SEWANYANA, Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable, a présenté son sixième et dernier rapport, dans lequel il rassemble ses principales observations et recommandations faites à l’Assemblée générale et au Conseil des droits de l’homme au cours des six dernières années.  Il a ainsi rappelé avoir mis l’accent en 2019 sur la question de la participation du public dans les espaces de gouvernance mondiale et son impact sur un ordre international démocratique et équitable.  Dans ces espaces, qui comprennent le G7, le G20, le groupe BRICS et le Groupe des 77, des efforts ont été déployés pour accroître les consultations avec les différentes sections de la société qui sont affectées par les décisions prises, a-t-il observé.  Toutefois, cette participation semble parfois symbolique, tandis que d’autres espaces restent inaccessibles, a regretté l’Expert indépendant.  Selon lui, la participation du public doit être prise au sérieux, non seulement parce qu’elle renforce la transparence, la légitimité et la crédibilité de ces espaces, mais aussi parce qu’elle contribue à la réalisation de leurs objectifs d’une manière efficace, durable et inclusive. 

M. Sewanyana a ensuite expliqué s’être intéressé à l’interaction entre les politiques économiques et la bonne gouvernance au niveau local.  Dans ce cadre, il a noté que les institutions financières internationales sont des acteurs majeurs du financement du développement et de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Par les différentes politiques qu’elles mènent, elles ont, en effet, une influence directe sur la manière dont la bonne gouvernance est mise en œuvre au niveau local et, en fin de compte, sur la mise en place d’un ordre international démocratique et équitable, a relevé l’Expert indépendant.  Ces institutions, a-t-il ajouté, doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer qu’elles n’entraînent pas de violations des droits humains, y compris celles commises par leurs clients, que ce soit dans le secteur public ou privé. De même, elles doivent user de leur influence pour garantir que ces clients respectent les droits humains et le principe de bonne gouvernance. 

Par ailleurs, M. Sewanyana a dit avoir examiné en 2021 le test qu’a représenté la pandémie de COVID-19 pour le multilatéralisme.  Alors que l’action multilatérale était mise à l’épreuve et que le virus ne cessait de muter, il s’est révélé essentiel d’adopter un multilatéralisme plus efficace, plus inclusif, recentré sur les droits humains. Un tel dessein nécessitait notamment la coordination d’une ONU solide et dotée d’un financement adéquat et, surtout, l’engagement de la société civile, a analysé l’Expert indépendant. 

Évoquant ses rapports de 2022, consacrés aux défis et enjeux liés à la paix et à la sécurité internationales au niveau mondial dans la perspective de son mandat, M. Sewanyana a estimé que le multilatéralisme, par le dialogue, la diplomatie, la négociation et l’inclusion, reste la seule voie pour résoudre les conflits et maintenir la paix et la sécurité internationales, et plus généralement, pour surmonter tous les défis mondiaux auxquels l’humanité est confrontée.  Il a dit espérer que la gravité de la situation en Ukraine donnera une impulsion en ce sens. 

S’agissant enfin de son rapport de 2023 au Conseil des droits de l’homme, il a dit s’être concentré sur le rôle que les jeunes peuvent jouer dans les forums intergouvernementaux, via leur participation à divers programmes et conférences mondiales, y voyant un aspect essentiel de l’avancement de la démocratie.  À ses yeux, la création d’espaces accessibles et inclusifs pour l’expression et l’engagement des jeunes auprès des entités intergouvernementales au niveau mondial, y compris les jeunes du Sud et issus de communautés marginalisées, devrait être une priorité.  En conclusion, l’Expert indépendant a regretté le désengagement de certains États Membres depuis la création du mandat, avant d’appeler l’ensemble de la communauté internationale à coopérer avec son successeur. 

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Ordre souverain de Malte a souhaité savoir s’il est possible de créer des mécanismes plus solides en matière de droits humains.  La Chine a appuyé la nécessité d’inclure les jeunes aux processus de décision, rejointe par la Malaisie, qui s’est enquise des moyens de mieux appréhender les défis des jeunes pour intégrer leur perspective dans les processus de décision à tous les niveaux. 

Le Cameroun s’est dit préoccupé par la séparation entre l’Assemblée générale et les institutions financières internationales, estimant que ce fossé empêche de traiter des questions liées à la réforme de l’architecture financière.  La délégation a souhaité savoir comment améliorer la démocratie et la transparence au sein de ces institutions.  Elle a, d’autre part, demandé à l’Expert indépendant dans quelle mesure il est possible de rendre l’ordre international plus équitable.  Intervenant au nom du Mouvement des pays non alignés, l’Azerbaïdjan a, pour sa part, soutenu que, si toutes les démocraties ont des éléments communs, il n’existe pas de modèle unique. 

Le Venezuela a ensuite demandé à l’Expert indépendant s’il pense qu’il est possible de combler le fossé entre les tenants d’une idéologie qui entraîne une fracture du multilatéralisme et ceux qui promeuvent une vision plus inclusive.  De manière connexe, Cuba et la Fédération de Russie ont dénoncé le recours de certains pays à des mesures coercitives unilatérales.  La République islamique d’Iran a, elle, voulu connaître l’avis de l’Expert indépendant sur les répercussions de ces mesures au niveau humanitaire et pour les droits humains. 

En réponse à ces questions et commentaires, l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a rappelé que la Charte des Nations Unies exhorte les États Membres à coopérer et à travailler de manière solidaire.  Elle demeure le meilleur cadre pour résoudre les défis auxquels nous faisons face, a-t-il affirmé.  Il a ensuite critiqué l’imposition de mesures coercitives unilatérales.  Selon lui, ces mesures pourraient éventuellement avoir un effet positif si elles étaient mieux ciblées, mais, en l’état, « elles ont plutôt tendance à nuire aux populations les plus vulnérables et sont donc contre-productives ».

Évoquant ensuite les nombreuses réformes souhaitables du système international, M. Sewanyana a estimé qu’un Conseil de sécurité plus inclusif et une architecture financière internationale plus juste et plus efficace doivent être des priorités.  Il a par ailleurs invité les États Membres à créer une plateforme permettant d’examiner les nombreuses résolutions adoptées par l’Assemblée générale, et a encouragé les instances internationales à mieux accueillir les jeunes.

Citant les exemples de Sri Lanka, de l’Arménie, du Sahara occidental, du Cameroun ou de la Palestine, l’Expert indépendant a plaidé pour le droit à l’autodétermination des peuples.  Enfin, après avoir constaté que la démocratie est une valeur universelle « sujette à polémiques », il a proposé la création d’un mandat de rapporteur spécial sur la démocratie, invitant les États Membres à réfléchir à cette suggestion. 

Exposé

Mme ALENA DOUHAN, Rapporteuse spéciale sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme, a constaté une expansion rapide du recours à divers types de sanctions unilatérales, ainsi qu’à des sanctions pour contournement présumé ou aide à leur contournement. Ces pratiques ont conduit à atteindre des cibles –des individus, des entités et parfois des populations entières- ne faisant pas l’objet de sanctions, mais dont les droits sont gravement affectés, avec un impact disproportionné sur les plus vulnérables, a-t-elle expliqué.  La Rapporteuse spéciale a précisé que son rapport examine l’impact de ces mesures sur diverses catégories de droits humains et sur la fourniture de l’aide humanitaire, tout en s’intéressant au respect excessif des sanctions.

Comparant cette « sur-conformité » à celle que les entreprises s’imposent à elles-mêmes, au-delà des restrictions réelles prévues, Mme Douhan a noté que les États qui appliquent des sanctions unilatérales les considèrent souvent comme en dehors de leur domaine de responsabilité et comme une conséquence involontaire.  Opposée à cet argument, elle a jugé que les régimes de sanctions unilatérales contemporains créent un environnement qui rend la sur-conformité inévitable, notamment en raison de leur multiplicité, de leur complexité, de leur manque de clarté, de leur évolution rapide et de leur chevauchement.  Pour étayer sa position, elle a évoqué le recours fréquent à des sanctions secondaires, l’extension du champ de la juridiction extraterritoriale, l’incertitude quant à la portée des exclusions humanitaires et l’absence de mécanisme de protection des acteurs humanitaires.

De l’avis de la Rapporteuse spéciale, le respect excessif des sanctions unilatérales par les États, les organisations internationales, les banques et autres entreprises, les donateurs et la société civile, y compris les organisations non gouvernementales (ONG), entraîne la violation de la quasi-totalité des droits civils, économiques, sociaux et culturels, ainsi que du droit au développement des peuples, notamment ceux des pays sanctionnés. Elle a estimé que les politiques de sur-conformité peuvent être qualifiées de pratiques discriminatoires à l’encontre des ressortissants et des résidents des pays soumis à des sanctions en raison de leur nationalité, de leur origine et de leur résidence.  De plus, la crainte de sanctions secondaires, de sanctions civiles et pénales, et d’un coût élevé de l’aide juridique entraîne une violation du droit à la justice, a ajouté Mme Douhan. 

Abordant la question de l’impact sur l’action humanitaire, la Rapporteuse spéciale a constaté que les sanctions unilatérales et la sur-conformité entravent l’acheminement de l’aide, même dans les situations d’urgence, comme le tremblement de terre de février dernier en Syrie, et ce, malgré l’adoption de licences prévoyant un allégement des sanctions pour une durée de six mois. Elle a regretté, à ce sujet, de ne pas avoir reçu de réponse substantielle aux communications qu’elle a émises, notamment concernant l’acheminement de médicaments vitaux, d’équipements médicaux et d’aide humanitaire après des catastrophes naturelles.  Selon elle, les États et les entreprises se rejettent trop souvent la responsabilité des situations.

Observant que l’écrasante majorité des sanctions unilatérales sont illégales et sont condamnées comme telles dans des résolutions du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale, Mme Douhan a estimé qu’en conséquence, l’application de sanctions secondaires, de sanctions civiles et pénales pour contournement présumé et, à travers elles, l’application extraterritoriale de la juridiction constituent indéniablement des violations du droit international.  Si les États peuvent exercer leur autorité sur la base d’une compétence universelle, territoriale ou personnelle, aucun autre lien avec la cible ne justifie l’application extraterritoriale de la juridiction nationale, a-t-elle fait valoir. Toute demande d’extradition dans des affaires pénales liées à des sanctions est donc contraire au droit international, a souligné la Rapporteuse spéciale. 

Pour Mme Douhan, le fait de ne pas s’assurer que la conduite des entreprises ne viole pas les droits consacrés par le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de ne pas mettre en place de mécanismes de prévention, y compris au niveau extraterritorial, constitue une violation du Pacte.  Enfin, elle a recommandé de lever les sanctions unilatérales qui ne répondent pas aux critères de rétorsion, à lever les sanctions secondaires et à veiller à ce que les sanctions unilatérales et la sur-conformité n’aient pas d’impact négatif sur la santé, l’alimentation, l’agriculture, l’électricité, l’approvisionnement en eau et l’assainissement. 

Dialogue interactif

Dans la foulée de cette présentation, le Venezuela a condamné les visions « néocoloniales et suprémacistes » de certains États, avant de demander à la Rapporteuse spéciale si son mandat a progressé dans la sensibilisation des pays du Nord aux effets délétères des mesures coercitives unilatérales.  Après l’Azerbaïdjan, qui a rappelé la condamnation de ces mesures contraires au droit international par le Mouvement des pays non alignés, le Bélarus a estimé l’extraterritorialité, qui élargit l’application des sanctions primaires, est non seulement une violation du droit international mais une pratique criminelle.  La délégation a exigé la levée complète, inconditionnelle et irréversible de ces pratiques, tout comme la République arabe syrienne, selon laquelle le danger que représentent ces mesures a été démontré lors du séisme qui a frappé la Syrie, certains États ayant refusé de fournir une assistance aux populations affectées au nom des mesures coercitives unilatérales.  Le silence des pays occidentaux prouve, selon elle, leur « complicité coupable » avec les États-Unis.  À sa suite, la République islamique d’Iran a présenté les mesures coercitives unilatérales qui lui sont imposées comme des violations de la Charte des Nations Unies et des droits humains, avant de demander à Mme Douhan si elle coopère sur cette question avec d’autres rapporteurs spéciaux.  

Le Nicaragua s’est, lui aussi, présenté comme une victime de premier plan des mesures coercitives unilatérales, déplorant plus généralement leur impact sur le développement des pays du Sud.  Les effets délétères de ces mesures touchent particulièrement les groupes les plus marginalisés, a ajouté le Zimbabwe, regrettant que les États qui imposent les mesures coercitives unilatérales refusent de s’associer au mandat de Mme Douhan.  La Malaisie a ensuite estimé que les effets négatifs des sanctions ont été amplement démontrés lors de la période pandémique, avant de s’interroger sur les moyens de minimiser ces retombées.  Présentant le blocus économique et financier que lui imposent les États-Unis comme le principal obstacle à son développement, Cuba a demandé des informations complémentaires sur la portée extraterritoriale des mesures coercitives unilatérales. 

Jugeant, pour sa part, que la légitimité des sanctions n’appartient qu’au seul Conseil de sécurité, la Fédération de Russie a dénoncé l’exclusion des athlètes russes de toutes les compétitions sportives internationales. L’Afrique du Sud a, quant à elle, décrit les mesures coercitives unilatérales comme un moyen dont usent les États puissants pour influer sur d’autres États.  Elle s’est déclarée particulièrement inquiète des sanctions unilatérales imposées au Zimbabwe et à Cuba.  La Chine s’est alarmée des conséquences des sanctions décidées par les pays occidentaux sur le droit à la santé des populations ciblées, notamment en Syrie et en Iran.  Concluant cette série d’interventions, l’Ordre souverain de Malte a déploré le ralentissement bureaucratique de l’assistance humanitaire, aggravé, selon lui, par des « arrangement fiscaux complexes ».  Il s’est enquis des stratégies préconisées à ce sujet par la Rapporteuse spéciale. 

Répondant aux délégations, la Rapporteuse spéciale sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme a plaidé pour le dialogue, y voyant la meilleure solution pour trouver un compromis au sujet des mesures coercitives unilatérales.  Elle a également prôné une sensibilisation accrue car, a-t-elle expliqué, les mesures coercitives unilatérales sont souvent décrites comme de simples outils, sans se soucier des conséquences humanitaires.  À cet égard, elle a invité les États Membres à lire ses rapports et à ne « pas fermer les yeux sur les faits et les chiffres ». Saluant la création d’une plateforme de recherche servant à nourrir le débat, elle s’est réjouie de constater une utilisation active de cet instrument à travers le monde.  Elle a ajouté qu’elle travaillera, l’an prochain, à l’établissement d’un outil de surveillance des sanctions, invitant tous les États à répondre à son appel afin d’offrir une vue d’ensemble de la situation. 

La Rapporteuse spéciale a par ailleurs relevé que les personnes ou entreprises visées par des sanctions ont du mal à accéder à la justice.  Outre le manque de clarté des législations, elle a mentionné la crainte des avocats de représenter les personnes ou entités visées. Elle a également signalé que les personnes qui ne sont pas touchées directement, qui constituent le groupe principal, n’ont aucune possibilité de saisir les tribunaux ou organes conventionnels. S’agissant par ailleurs de l’assistance humanitaire, Mme Douhan a fait remarquer que les exceptions faites aux sanctions ne fonctionnent pas dans la pratique.  Selon elle, la mise en œuvre des exceptions humanitaires du Conseil de sécurité « n’est pas faisable en raison de l’effet des limitations imposées par les sanctions unilatérales et du respect excessif de la part des entreprises ».  Elle a notamment fait référence aux restrictions financières en matière de transport. 

Pour ce qui est du respect excessif des sanctions unilatérales, la Rapporteuse spéciale a estimé qu’il contribue à élargir les sanctions prétendument ciblées. Au-delà des individus ou des entités qu’elles visent, ces sanctions privent les gouvernements de fonds pouvant être utilisés pour des projets de développement ou pour un soutien social, a-t-elle souligné, ajoutant que le respect excessif des sanctions par les entreprises a un effet sur l’ensemble de la population.  À cet égard, Mme Douhan a souligné l’importance des recommandations fournies dans son rapport et des lois qui existent, notamment en matière de normes coutumières et de diligence raisonnable.  Elle a aussi fait valoir le principe de responsabilité des États et des entreprises, avant d’indiquer qu’elle prépare des « principes directeurs » sur les sanctions, le respect excessif et les droits humains. 

Concernant les défis dans le domaine des sports, la Rapporteuse spéciale a appelé à éviter le respect excessif des sanctions, qui constitue, selon elle, « une discrimination ne se fondant pas sur le droit international ».  Enfin, Mme Douhan a constaté que, dans le contexte actuel, les entreprises sont confrontées à l’incertitude et à la crainte de ne pas être protégées en cas de sanctions civiles ou pénales, ce qui les incitent à opter pour le respect excessif, même au risque de faire faillite. 

Exposé

M. PEDRO ARROJO-AGUDO, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement, a indiqué que 2 milliards de personnes réparties dans 153 pays n’ont pas un accès garanti à une eau potable saine. Une situation aggravée par les conséquences des changements climatiques, telles que les sécheresses et les inondations, qui menacent non seulement l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, mais également la sécurité alimentaire et la vie de millions de personnes. Estimant que ces enjeux ne peuvent être abordés à l’échelle nationale, le Rapporteur spécial a préconisé une approche à l’échelle du bassin, fondée sur les droits humains et le respect des écosystèmes.  Il a également critiqué la « logique de haine » qui transforme parfois l’eau en arme de guerre, constituant des crimes de guerre selon le droit international. 

« Il ne s’agit pas seulement d’une exigence éthique et de justice, mais d’une nécessité mondiale si nous voulons lutter contre les changements climatiques et promouvoir la paix, la sécurité et la survie de centaines de millions de personnes », a-t-il insisté, avant de prôner une responsabilité partagée sur les ressources.  Il a salué des initiatives positives en Afrique (au Tchad, au Sénégal et au Niger), en Asie (la Commission du Mékong) et en Europe (la Directive-cadre sur l’eau de l’UE).  Il a également mentionné le Blue Peace Movement, qui encourage les initiatives dans les domaines de l’eau, de la paix, de la sécurité et de la coopération, de l’échelon local à l’échelon mondial. 

« Le Conseil de sécurité devrait accorder de l’attention à la gestion transfrontalière de l’eau comme élément clef de la paix et de la sécurité », a poursuivi le Rapporteur spécial, soulignant les recommandations de son rapport.  Ces dernières incluent l’adaptation aux changements climatiques en garantissant la bonne santé des écosystèmes et des populations au niveau du bassin, de même que l’inclusion du droit humain à l’assainissement dans les accords transfrontaliers, avec une attention particulière à la pollution toxique.  Enfin, le Rapporteur a appelé à clarifier les concepts clefs du droit international de l’eau, et à imposer des obligations contraignantes pour une mise en œuvre efficace de ces concepts par les États. 

Dialogue interactif

L’Iraq a indiqué que la construction des barrages et l’absence de distribution équitable des ressources en eau avait rendu 60% de ses surfaces arables trop salées pour être cultivées, entraînant un exode rural et une pression démographique sur les villes ainsi que des problèmes d’équilibre communautaires.  Que dit le droit international sur le fait de considérer l’eau comme une denrée et non un élément essentiel à la vie?  La Croatie a demandé comment mettre en œuvre les recommandations du rapport.  L’Union européenne a appelé à restaurer les systèmes hydriques tout en fournissant assez d’eau aux populations, s’intéressant en outre à l’aide à apporter aux États et communautés victimes des changements climatiques.  Quels facteurs favoriseraient la coopération transfrontalière, s’est enquise l’Espagne après avoir rappelé qu’elle avait reconnu les droits d’une lagune salée comme entité naturelle.  Le Bangladesh a demandé comment aider les femmes et les filles en la matière, appelant en outre les pays développés à renforcer les capacités des pays en développement sur la question des eaux usées. 

La Türkiye a rejeté les mentions du rapport la concernant, exprimant des réserves importantes sur les paragraphes 28, 30 et 83 qu’elle a qualifié d’accusations infondées.  L’Allemagne a voulu connaître les principaux défis rencontrés par le Rapporteur spécial, suivie de la Chine qui a critiqué le déversement d’eaux contaminées dans l’océan par le Japon, demandant la création d’un mécanisme international incluant les voisins du Japon.  La Fédération de Russie a critiqué le blocus hydrique imposé par les autorités de Kiev en 2014, dénonçant une sanction collective imposée aux habitants de la Crimée. 

Les États-Unis se sont inquiétés des conflits liés à l’eau et ont demandé des exemples de diplomatie efficace relative à l’eau.  L’Égypte a dénoncé la construction de barrage sans l’assentiment des pays concernés, insistant sur l’importance de ne pas nuire aux sources des masses d’eau.  Comment améliorer la coopération entre les pays quand il s’agit de garantir leur accès à l’eau?  Et comment soutenir la coopération internationale en vue de renforcer les capacités des pays en développement, a ajouté le Maroc.  Répondant à la Chine, le Japon a indiqué qu’il avait toujours fourni des informations transparentes et que l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) avait confirmé qu’aucune anomalie en termes de radioactivité n’avait été constatée.  L’Ordre souverain de Malte a insisté, pour sa part, sur l’importance pour les femmes d’avoir accès à une hygiène menstruelle. 

Répondant à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement a indiqué qu’il lui est fréquemment demandé de faire des recommandations dans le cadre de la situation à Gaza.  « J’essaie de faire en sorte que l’eau soit l’âme bleue de la vie, un argument de paix, et non de mort », a-t-il déclaré, soulignant que l’eau ne saurait être utilisée comme un instrument de sanction.  C’est pourtant ce qui se produit dans la bande de Gaza, où la population vit un blocus depuis 15 ans, a-t-il déploré, dénonçant le blocus « inhumain ».  Exhortant à mettre un terme au conflit, il a jugé temps de mettre en avant le droit à l’eau et à l’assainissement comme argument pour briser cette spirale de haine qui ne sert ni la sécurité d’Israël, ni le droit à la justice du peuple palestinien. 

Discussion générale 

M. FELIPE MACHADO MOURIÑO (Uruguay) a d’abord noté que les cadres normatifs sont insuffisants sans actions nationales concrètes.  Il a estimé que le dialogue et la coopération entre États doivent primer sur la confrontation.  Après avoir rappelé que l’Uruguay avait aboli la peine de mort dès 1907, il a condamné fermement les exécutions extrajudiciaires, prônant plutôt la prévention et la reddition de comptes.  La protection des droits humains et la gestion de la justice sont étroitement liées, a-t-il insisté. 

En cette année marquant le soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, il a exhorté la Commission à prêter une attention particulière aux groupes vulnérables.  Il a souligné que les pays d’origine, de transit et de destination des migrants ont la responsabilité de protéger leurs droits humains, estimant ensuite que la coopération internationale pour répondre à la crise actuelle est insuffisante.  Enfin, il a insisté sur la nécessité de maintenir un système multilatéral fort pour répondre aux multiples défis internationaux. 

M. GODFREY KWOBA (Ouganda) a affirmé que son pays est prêt à promouvoir les droits humains en tant que pilier central de ses politiques, conformément à sa Constitution et aux nombreux instruments des droits humains qu’il a ratifiés.  Le représentant a détaillé les efforts déployés au niveau national, rappelant notamment la création, en 1997, de la Commission des droits de l’homme de l’Ouganda qui, a-t-il précisé, à le pouvoir d’ordonner la libération de détenus. Notre approche en matière de droits humains est de respecter les valeurs d’autrui et nous nous attendons à ce que nos valeurs, qui sont profondément ancrées dans notre culture, soient respectées aussi, a-t-il souligné.  Il a ensuite indiqué que son gouvernement appui la discrimination positive en faveur des groupes les plus vulnérables et accorde une attention particulière à la protection de l’enfance.

Mme VICTORIANA MBASOGO MANGUE (Guinée équatoriale) a insisté sur les outils dont dispose son pays pour lutter contre la corruption et la torture.  La représentante a également évoqué la législation visant à abolir la peine de mort, de même que les efforts déployés par la Guinée équatoriale pour promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomie de la femme.  Cette politique s’illustre notamment par la nomination des femmes à des postes politiques clefs, a-t-elle précisé.  Au niveau international, la représentante a insisté sur la nécessité de promouvoir les droits humains selon les principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité et non de sélectivité, ainsi que les principes de dialogue constructif et authentique.  À cet égard, elle a insisté sur le caractère unique de chaque État. 

Mme ZEBIB GEBREKIDAN (Érythrée) a d’abord évoqué la nécessité de réduire les inégalités mondiales, s’alarmant du fait qu’1% de la population mondiale se soit accaparée la moitié des richesses créées ces 10 dernières années pendant qu’une personne sur 10 dans le monde fait face à la faim, en particulier les femmes et les filles.  Elle a critiqué les mesures coercitives unilatérales, qui démontrent un mépris pour les droits humains des populations dans les pays affectés en les privant de ressources vitales, et qui constituent selon elle une violation flagrante du droit international. 

La représentante a prôné une meilleure coopération internationale, basée sur un multilatéralisme sincère.  « Il est temps d’abandonner l’autosatisfaction et d’adopter une approche plus franche et plus coopérative, favorisant un engagement respectueux entre les États », a-t-elle déclaré, souhaitant que les institutions des droits humains ne soient plus utilisées à des fins politiques. 

Mme LELISA (Lesotho) a noté que la Déclarations universelle des droits de l’homme avait, aujourd’hui, un poids moral et juridique que beaucoup de ses rédacteurs n’auraient pu imaginer en 1948.  Elle a ensuite détaillé les lois promulguées récemment par le Lesotho, notamment en termes d’égalité femmes–hommes.  Elle a également indiqué qu’une invitation permanente aux procédures spéciales des organes de traités du HCDH avait été émise, précisant que la visite de l’Expert indépendant sur le droit au développement avait eu lieu en janvier 2023.  Elle a aussi indiqué qu’un examen du Comité des droits de l’homme concernant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques avait été effectué, en juillet de cette année, et que le Lesotho mettait en œuvre ses observations finales. 

M. ALI MABKHOT SALEM BALOBAID (Yémen) a indiqué que son gouvernement a adopté des mesures pour ramener la paix au Yémen par des voies politiques.  Un Conseil judiciaire suprême a été érigé, et de nouveaux juges ont été nommés au sein de la Cour suprême, a-t-il exemplifié. Abordant la situation au Proche-Orient, il a appelé à lever le blocus imposé à Gaza, qualifiant les actions d’Israël d’agression barbare et de crimes contre l’humanité, condamnant notamment le bombardement d’un hôpital civil.  Que chaque partie renonce aux deux poids, deux mesures et condamne ces violations du droit international, afin qu’un cessez-le-feu permette l’acheminement de l’aide humanitaire, a-t-il exhorté. 

Revenant à son pays, il a dénoncé l’action des milices houthistes qui aggrave la situation humanitaire, et a demandé à la communauté internationale de faire pressions sur ces milices afin qu’elles cessent leurs violations des droits humains, telles que les restrictions des droits des femmes ou le recrutement d’enfants.  Les milices, a-t-il ajouté, doivent respecter la trêve et coopérer avec l’ONU. 

M. MATEUS PEDRO LUEMBA (Angola) a affirmé que son pays dispose d’une législation pour assurer la protection des droits humains et libertés fondamentales. Il est revenu sur les efforts déployés en ce sens au niveau national, citant, entre autres, la création de la Commission nationale pour la mise en œuvre du plan de réconciliation, rappelant la guerre qui a sévi dans son pays de 1975 à 2022.  Il a ensuite réitéré l’attachement de l’Angola envers les instruments internationaux des droits humains. 

Mme COSTANZA LUCI, de l’Ordre souverain de Malte, a évoqué l’appui déployé par l’Ordre en solidarité avec le Maroc, et qui intègre notamment les questions clefs de l’eau et de l’assainissement.  Plus de 250 000 dollars ont été donnés par l’Ordre de Malte pour renforcer les actions humanitaires en court, en tenant compte des besoins grâce à des évaluations réalisées sur place, a-t-il précisé.

De manière plus générale, le représentant à appeler à veiller au respect des droits fondamentaux des personnes vivant en marge ou exclues de la société.  À cet égard, il a appelé à renforcer la collaboration entre toutes les parties prenantes afin d’optimiser la mobilisation des ressources et de partager les compétences.

Mme KALLIE AULTMAN, de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a abordé la question des droits humains des migrants, estimant que la migration est une expérience humaine fondamentale et complexe, exacerbée par des facteurs tels que la violence, les conflits et les changements climatiques.  Elle a signalé que le nombre de migrants traversant le bouchon du Darién et la Méditerranée avait doublé cette année, relevant en outre que 1 500 personnes avaient été tuées sur les routes qui mènent vers l’Amérique du Nord en 2022, et que 28 000 personnes avaient perdu la vie en voulant traverser la Méditerranée ces 10 dernières années. 

Fustigeant les gouvernements qui ne respectent pas leurs obligations en matière de droits humains, notamment en entravant le travail des organisations humanitaires, la représentante a mis en avant le travail de l’IFRC, qui offre une protection et une assistance humanitaires dans les pays d’origine, de transit et de destination.  Elle a appelé à une collaboration plus étroite avec les gouvernements pour sauver des vies, garantir l’accès à des services essentiels et cesser toute obstruction ou criminalisation des efforts humanitaires.  Elle a également préconisé une évaluation régulière des lois et des politiques nationales pour s’assurer qu’elles sont conformes aux obligations légales internationales. 

M. DANIEL DEL VALLE, de l’Organisation internationale de la jeunesse des pays ibéro-américains, a indiqué que son organisation s’est dotée d’une Charte des droits de la jeunesse pour promouvoir les droits des jeunes et le développement durable à l’échelle régionale, en accordant une attention particulière à leurs contributions aux questions liées au maintien de la paix.  Il a insisté sur l’importance d’appuyer la participation des jeunes dans les processus de prévention et de règlement de conflits. La Charte, a-t-il ajouté, est un instrument important pour intégrer les droits des jeunes dans les cadres juridiques nationaux des pays ibéro-américains. 

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

M. DAVID BOYD, Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, a tout d’abord indiqué que son rapport pourrait faire économiser « des millions, voire des milliards de dollars » aux États.  Sur le fond, il a rappelé que l’aggravation de la crise climatique exacerbe la situation de millions de personnes luttant déjà contre la pauvreté et la marginalisation. Cette situation s’inscrit dans le cadre d’une crise environnementale planétaire, couplée à une crise de droits humains, a analysé le Rapporteur spécial.  Mais alors que les États sont contraints de mettre en œuvre et de faire respecter des lois et des politiques plus strictes en matière de climat et d’environnement, ces mesures risquent d’être bloquées, en raison du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) créé par les traités internationaux sur le commerce et l’investissement, lesquels confèrent aux investisseurs étrangers un immense pouvoir, a-t-il mis en garde.

À l’avenir, les investisseurs étrangers demanderont des centaines de milliards de dollars pour compenser la réduction de la valeur de leurs actifs, a averti le Rapporteur spécial.  Citant le litige opposant le Pakistan et un investisseur étranger ayant utilisé le mécanisme RDIE, M. Boyd a rappelé que le pays a été condamné à verser 5,8 milliards de dollars de compensation.  Onze des 12 plus importantes indemnisations accordées à ce jour concernent des investissements dans le secteur des combustibles fossiles et de l’exploitation minière, a-t-il précisé.  Comparant les avocats d’affaires à des « requins », il a brandi le chiffre de 126 affaires RDIE connues visant des mesures prises par les États pour protéger l’environnement au cours de la période 2011-2021. Trois sociétés minières australiennes ont ainsi poursuivi la République du Congo pour un montant total de plus de 35 milliards de dollars, alors que le PIB annuel de ce pays est de 13 milliards de dollars, a-t-il indiqué. 

Les litiges entre investisseurs et États sont tranchés par des arbitres internationaux, qui peuvent être des avocats représentant souvent des investisseurs étrangers dans d’autres affaires, a poursuivi M. Boyd.  En plus de ces conflits d’intérêts manifestes, il a dénoncé des interprétations d’expressions vagues telles que « expropriation indirecte » et « attentes légitimes » pour pénaliser les États prenant des mesures légitimes en matière de climat et d’environnement.  C’est le cas notamment de l’Allemagne, condamnée à verser 4,5 milliards de dollars à des investisseurs étrangers auxquels la loi impose de fermer leurs centrales électriques au charbon d’ici à 2038.

Les investisseurs étrangers gagnent plus souvent qu’ils ne perdent, et il n’y a pas d’appel, a encore constaté le Rapporteur spécial, qui a qualifié ce processus de « fondamentalement défectueux, unilatéral, imprévisible et entaché de conflits d’intérêts ».  Les riches États du Nord l’ont bien compris, a-t-il observé, notant à cet égard que les recours en arbitrage international entre les 27 États membres de l’Union européenne ont été éliminés et que de nombreux États européens se sont retirés du Traité sur la Charte de l’énergie parce que le RDIE rendait l’action climatique trop coûteuse.  Pour des motifs comparables, le Canada et les États-Unis ont convenu de supprimer le mécanisme RDIE de l’Accord de libre-échange nord-américain, a-t-il ajouté, avant de faire état de mesures d’évitement du RDIE prises par l’Inde, l’Indonésie et l’Afrique du Sud. 

Rappelant que les investisseurs étrangers peuvent conserver la même capacité que les investisseurs nationaux à faire valoir leurs droits devant les tribunaux nationaux et bénéficier d’assurance, M. Boyd a appelé à réfléchir à la folie du système qui guette de nombreux pays tentant de lutter contre les crises climatiques et environnementales et de préserver les droits humains.  « Au lieu de faire payer les pollueurs, les États paient les pollueurs », a-t-il regretté, enjoignant à tous les États d’accélérer les actions fondées sur les droits humains. 

Dialogue interactif

Après cette présentation, la République dominicaine s’est interrogée sur l’équilibre à trouver entre la promotion des droits humains, la protection de l’environnement et la nécessité d’attirer des investissements étrangers.  Dans le même ordre d’idées, critiquant l’actuel système d’arbitrage, de nombreux États tels que l’Espagne, le Luxembourg, la Slovénie ou Cuba ont demandé au Rapporteur spécial comment améliorer le système des RDIE.  Le Costa Rica, en particulier, a mentionné sa nécessaire adaptation aux problématiques des peuples autochtones, souvent en première ligne des combats juridiques.  La Colombie, rappelant que la science nous appelle à agir pour éviter un point de non-retour dans la destruction de l’environnement, a souhaité savoir comment assurer un cadre de discussion inclusif, qui permettrait de trouver des réponses immédiates aux problèmes mentionnés dans le rapport, tandis que le Mexique s’est demandé comment organiser des actions afin d’éviter la pollution du sol, de l’air et de la terre.

L’Union européenne, qui dit s’employer à signer des traités d’investissement plus équilibrés, a plaidé pour l’établissement d’une cour multilatérale pour les investissements dotée d’un système à deux niveaux, permettant de faire appel.  Elle a demandé au Rapporteur spécial quelles sont les actions les plus importantes et urgentes que les États Membres doivent prendre ces prochains mois.  Quant aux États-Unis, qui se sont déclarés inquiets pour la sécurité des défenseurs de l’environnement —dont beaucoup, et notamment des autochtones, se font tuer— ils ont demandé à M. Boyd comment accélérer l’application du principe de « démocratie environnementale » de la Déclaration de Rio.  La Croatie, pour sa part, a insisté pour que l’expérience des jeunes, dont l’avenir doit impérativement être sauvegardé, soit prise en compte dans les processus de décisions internationaux.

Le Chili a demandé l’avis du Rapporteur spécial sur les trois processus consultatifs environnementaux actuellement en cours devant la Cour internationale de Justice, le Tribunal international du droit de la mer et la Cour interaméricaine des droits de l’homme.  Il s’est également enquis du rôle que ces tribunaux peuvent et doivent jouer dans la lutte contre l’urgence climatique et la protection de l’environnement. Revenant sur la question des droits de tirage spéciaux, la Malaisie s’est demandé quels mécanismes multilatéraux seraient envisageables pour les améliorer.

De son côté, la Fédération de Russie a jugé que les liens établis entre les droits humains et l’environnement par le Rapporteur spécial sont quelque peu artificiels, et a souhaité que ne soient pas créées de nouvelles catégories juridiques aux contours flous.  De manière connexe, l’Indonésie a mis en avant le lancement, il y a trois semaines, de sa stratégie nationale sur les droits humains et l’environnement, et a mis en garde M. Boyd contre les informations obsolètes.  La Chine a rappelé son exemplarité sur les questions environnementales et de droits humains, avant de demander comment avoir un environnement plus sain dans le Sud, particulièrement touché par les effets des changements climatiques.  Elle a par ailleurs reproché au Japon son « choix irresponsable » de déverser les eaux contaminées de Fukushima dans l’océan Pacifique.  En réponse, le Japon a accusé la Chine de propager des mensonges et a promis qu’il continuera à fournir à la communauté internationale les preuves scientifiques du bien-fondé de ses actes, en toute transparence.

Enfin, après s’être félicitée de l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution historique A/76/300, la Suisse a demandé à M. Boyd comment évaluer l’impact de cette résolution sur la réalisation du droit humain à un environnement propre, sain et durable.

Reprenant la parole, le Rapporteur spécial sur la question des obligations relatives aux droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, a confirmé que les mécanismes d’arbitrage des différends entre entreprises et États ne fonctionnent pas et ne tiennent pas compte des questions environnementales, citant à ce sujet plusieurs exemples d’échecs flagrants.  Constatant que les 27 États de l’Union européenne, d’un côté, et les États-Unis et le Canada, de l’autre, ont « relégué ce type de mécanismes dans les poubelles de l’histoire », il a invité les pays en développement, notamment ceux du Groupe des 77 et de l’Alliance des petits États insulaires, à dénoncer ensemble les accords commerciaux existants avec les États-Unis, le Canada et l’Union européenne.  Comment les riches nations du Nord pourraient-elles défendre un système de relation avec les États en développement quand elles refusent de l’appliquer pour elles-mêmes? a-t-il résumé, ajoutant que cela peut sembler un peu radical, mais que les recherches de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montrent que l’existence de traités commerciaux ne change rien aux quantités d’investissements directs étrangers reçus pas les pays du Sud. 

Rappelant que l’Assemblée générale a adopté l’an dernier une résolution reconnaissant le droit à un environnement propre, sain et durable, par 164 voix pour et aucune contre, M. Boyd s’est félicité d’une série de progrès aux niveaux international, régional et national, citant l’exemple du Canada qui a transposé ces termes dans sa législation.  Le Rapporteur spécial a appelé à faire progresser la reconnaissance de ce droit dans un pacte international ainsi que dans les traités en cours de négociation. Concernant la mise en œuvre nationale, il a insisté sur la qualité de l’air et de l’eau, et sur l’élimination des combustibles fossiles.  Il a également souligné l’importance d’un contrôle par les organes des Nations Unies. Enfin, cette présentation étant sa dernière à ce poste, il a conclu son propos en évoquant des personnes rencontrées autour du monde dans l’exercice de son mandat.  « Derrière les statistiques, il y a des visages humains », a-t-il dit, souhaitant à tous de pouvoir jouir d’un environnement sûr, propre, sain et durable. 

Exposé

M. IAN FRY, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques, a indiqué que de plus en plus de travaux établissent un lien entre les responsabilités en matière de changements climatiques et les obligations des traités relatifs aux droits humains, regrettant toutefois que de nombreux pays n’aient pas encore franchi ce pas.  Il a constaté une montée de la frustration des communautés face au manque d’empressement des gouvernements et des entreprises à prendre des mesures pour lutter contre les changements climatiques, entraînant des protestations publiques de plus en plus réprimées.  Il s’est inquiété du recours aux arrestations, aux emprisonnements et aux assassinats de défenseurs des droits de l’environnement dans diverses parties du monde, tant dans les pays développés que dans les pays en développement, notant que cette réponse tendait à intensifier la dissidence. 

Abordant la question des législations nationales, le Rapporteur spécial a indiqué que l’établissement d’un lien entre les changements climatiques et les droits humains était un phénomène relativement récent.  Il a expliqué que ces législations se concentraient sur la réduction des émissions de carbone, reléguant l’adaptation et la sensibilisation au second plan et les procédures de traitement des pertes et dommages au troisième.  Toutes ses catégories devraient être liées aux droits humains, a-t-il souligné, regrettant que les peuples autochtones, les personnes handicapées et les autres détenteurs de droits mentionnés dans le préambule de l’Accord de Paris ne soient pas bien couverts par les législations nationales.  Il a également indiqué que très peu de pays s’étaient penchés sur la question des déplacements liés aux changements climatiques, à l’exception des Fidji, et que les références aux obligations de protection des droits humains des groupes vulnérables étaient limitées dans les législations sur les changements climatiques.

Estimant que les litiges relatifs aux changements climatiques pouvaient conduire à des changements législatifs et politiques, M. Fry a rappelé que le Secrétaire général avait suggéré qu’ils étaient un moyen de défier les « entreprises qui détruisent le climat », telles que les producteurs de combustibles fossiles.  Il a constaté une tendance croissante à la prise en compte des violations des droits humains dans le cadre de ces litiges, qui concernent surtout des gouvernements, mais aussi, de plus en plus, des entreprises ou des institutions financières. Un certain nombre d’avis consultatifs ont également été demandés pour clarifier les obligations juridiques des États en matière de changements climatiques, notamment au Tribunal international du droit de la mer, à la Cour interaméricaine des droits de l’homme et à la Cour internationale de Justice.  Fermement convaincu que les États ont la responsabilité juridique et morale de veiller à ce que les émissions de gaz à effet de serre produites dans un État ne nuisent pas à un autre État, le Rapporteur spécial a constaté qu’il s’agissait également d’une question de justice intergénérationnelle. 

Au chapitre des recommandations, il a encouragé vivement tous les États à élaborer une nouvelle législation sur les changements climatiques qui intègre les droits humains, une série de principes-clefs étant fournis dans son rapport.  Il a ensuite conseillé l’élaboration de programmes de formation à l’intention des juges sur cette question.  Enfin, il a encouragé l’Assemblée générale à prendre pleinement en considération les Principes de Maastricht sur les droits humains des générations futures et à préparer une résolution reflétant les éléments clefs de ces principes lors de la session en cours. 

Dialogue interactif

À la suite de l’exposé du Rapporteur spécial, la Malaisie s’est enquise des priorités que les États Membres doivent établir pour protéger les droits humains dans le contexte des changements climatiques.  Quel est votre plan pour motiver les États et les entreprises à reconnaître leur impact et s’engager dans un dialogue constructif avec les acteurs locaux, a demandé Malte.  Le Bangladesh a voulu savoir comment encourager les pays les plus responsables des changements climatiques à assumer leurs obligations notamment à l’égard des pays les moins responsables.  Même son de cloche du côté des Maldives, qui ont rappelé que les changements climatiques impactent les populations et touchent particulièrement le secteur agricole.

De son côté, la Chine a affirmé assumer ses obligations à la hauteur de son développement et de ses capacités.  Elle a ajouté que, compte tenu de la responsabilité que portent les pays développés dans le dérèglement climatique, ils devraient s’acquitter d’un financement et d’un renforcement des capacités des pays en développement.  L’Australie a souhaité savoir comment aider au mieux les petits États insulaires en développement (PEID).  Qu’en est-il de la justice intergénérationnelle et faut-il inclure ce principe dans la législation? a demandé la République dominicaine, après avoir fait part de ses préoccupations nationales.  Les Îles Marshall ont, pour leur part, estimé que chacun doit prendre conscience des conséquences de l’action ou de l’inaction climatique.

Comment intégrer une approche des droits humains et de justice environnementale qui garantisse une action cohérente dans la gouvernance globale, s’est interrogée la Colombie, tandis que le Maroc se demandait comment les États Membres peuvent renforcer l’interaction entre les changements climatiques et les droits humains. Se penchant sur la situation des défenseurs des droits humains, la Suisse a souhaité savoir quels moyens permettraient de mieux protéger les défenseurs de l’environnement.  Après avoir appuyé les recommandations du Rapporteur spécial sur cette même question, Malte a voulu connaître les facteurs empêchant la participation à tous les niveaux de la prise de décisions, en dehors de la race et du genre.  La Grèce a, elle, souhaité savoir quelle approche peut être envisagée au niveau législatif pour faire face aux effets de la crise climatique.

Pouvez-vous donner des détails sur les effets des changements climatiques sur les questions de genre? a ensuite demandé le Liechtenstein, l’Union européenne insistant, elle aussi, sur la nécessité d’une approche basée sur le genre. Comment assurer la prise en compte de la perspective genre dans les législations nationales, a demandé la délégation de l’UE.  Les jeunes sont souvent qualifiés de moteurs du changement, mais comment assurer leur prise de participation effective et l’intégration de leur point de vue, s’est interrogée la Croatie.  Par la voix de sa déléguée de la jeunesse, l’Italie a rappelé que le rôle des jeunes est inscrit dans les Principes de Maastricht, avant de s’enquérir des pratiques optimales en la matière.  L’Allemagne et les États-Unis ont ensuite questionné le Rapporteur spécial sur la manière d’inclure les personnes marginalisées ou vulnérables. 

Après le Chili, qui a invité les États Membres à mettre à jour leur législation pour répondre aux recommandations du Rapporteur spécial et agir en conformité avec la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, le Costa Rica a voulu savoir comment les avis consultatifs mentionnés dans le rapport peuvent consolider une approche basée sur les droits humains dans la lutte contre les changements climatiques.  Pour sa part, la Fédération de Russie s’est élevée contre les tentatives visant à modifier la Convention-cadre ou risquant de créer des obligations doubles qui représenteront des charges supplémentaires pour les systèmes juridiques nationaux. 

Répondant à ces questions, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans le contexte des changements climatiques a commencé par rappeler que, dans la mesure où les changements climatiques touchent absolument tout le monde et affectent tous les secteurs de l’activité humaine, ils ne peuvent pas être envisagés indépendamment.  Pour cette raison, il a encouragé les États Membres à intégrer à leurs législations nationales la notion « d’approche holistique ».  Il a ensuite insisté sur l’importance de défendre l’égalité de genre dans la lutte pour le climat, car les femmes se révèlent être les plus innovatrices en la matière. 

En réponse aux interrogations sur l’aspect judiciaire de la question, M. Fry a recommandé d’organiser des ateliers d’apprentissage pour les juges sur les enjeux des changements climatiques, comme il l’a lui-même fait dans le Pacifique.  Encourageant les délégations à s’intéresser aux Principes de Maastricht, qui donnent des directives utiles sur les droits alloués aux générations futures, il a préconisé de faire au maximum participer les jeunes aux travaux, notamment lors des Conférences des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP).

Exposé

M. MARCOS A. ORELLANA, Rapporteur spécial sur les substances toxiques et les droits de l’homme, a d’abord fait le lien entre les droits humains et le transport maritime, relevant plusieurs exemples de dégâts occasionnés à l’environnement et aux communautés humaines par les navires: déversements d’hydrocarbures sur les côtes, pollution atmosphérique et émissions de gaz à effet de serre, démantèlement ou échouage des bateaux en fin de vie et conditions de travail dangereuses pour les marins, voire esclavage.  Soulignant que 90% des biens commerciaux mondiaux sont transportés par voie maritime, le Rapporteur spécial a admis que si l’industrie maritime est essentielle au fonctionnement de l’économie mondiale, le secteur fait l’objet de préoccupations sérieuses en matière de droits humains et d’environnement. 

Parmi les nombreux défis qu’il est urgent de traiter pour progresser dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), le Rapporteur spécial a évoqué la situation des femmes, qui ne représentent que 2% des 1,2 million de marins dans le monde et sont souvent victimes de mauvais traitements, de violences sexuelles et de harcèlement, et celles des démolisseurs de navires, qui sont régulièrement blessées mortellement dans le cadre de leur travail, même dans des installations agréées.  Il a également mentionné la pollution croissante des océans par des produits chimiques qui s’accumulent dans les organismes marins tout au long de la chaîne alimentaire et finissent par affecter les espèces non aquatiques.  Il a rappelé que la pollution de l’air associée à la navigation maritime, qui représente un tiers des émissions globales dues au commerce, contribue à environ 60 000 décès chaque année.  En outre, il a noté qu’en 2022, le secteur a été responsable de 2,89% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Évoquant des lacunes réglementaires, M. Orellana a critiqué la méconnaissance des enjeux par la communauté des droits humains et pointé du doigt l’insuffisance des conventions de l’Organisation maritime internationale (OMI) en la matière. Tout en reconnaissant que l’OMI a adopté plus de 50 traités internationaux, il a prévenu que, sans adhésion et application mondiales, leur impact sera forcément réduit.  Le Rapporteur spécial a donc plaidé pour que les droits humains soient davantage pris en compte par l’industrie maritime, insistant sur la nécessité de transparence, dans « une industrie historiquement caractérisée par l’opacité ».  Pour conclure, il a exhorté les États et les entreprises à la responsabilité, et a appelé à protéger les lanceurs d’alerte pour garantir l’accès à l’information.

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, le Chili a salué l’adoption de l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, avant d’indiquer qu’il l’a signé et qu’il a proposé d’accueillir le siège de l’instrument ainsi créé.  Il a souligné la responsabilité des entreprises concernant la protection des droits humains.  Le Maroc a ensuite rappelé que la pollution atmosphérique tue 7 millions de personnes chaque année, et qu’un quart des maladies infantiles sont liées à des facteurs environnementaux.  Il a détaillé les actions de son pays concernant la surveillance de l’environnement aux niveaux régional et national.  Enfin, il a demandé au Rapporteur spécial ce qu’il pense du principe de précaution et s’il préconise l’utilisation de données produites indépendamment et exemptes de tout conflit d’intérêt. 

En réponse aux questions et commentaires des États Membres, le Rapporteur spécial sur les substances toxiques et les droits de l’homme a insisté sur « l’interface entre la science et la politique », y voyant un élément clef pour la réalisation du droit à la science, notamment dans le secteur de la pollution.  Il a, d’autre part, appelé à traiter sérieusement la question des conflits d’intérêt, faute de quoi nous n’obtiendrons pas les résultats escomptés pour « désintoxiquer la planète ».  M. Orellana a également estimé que le principe de précaution peut s’appliquer aux questions abordées dans son rapport sur les droits humains et les transports maritimes. 

Le Rapporteur spécial a ensuite détaillé certaines actions que doivent envisager les États pour mieux lutter contre la pollution marine.  Il a rappelé que la pollution engendrée en 2021 sur les côtes sri-lankaises par l’incendie survenu à bord du cargo porte-conteneur singapourien X-Press Pearl était la conséquence d’une série de dysfonctionnements dans le transport maritime de substances toxiques. Il a ajouté que d’importantes lacunes existent aussi en matière de protection des communautés touchées par la pollution plastique. Par ailleurs, tout en se félicitant que l’Organisation maritime internationale (OMI) ait récemment révisé sa stratégie climatique afin qu’elle soit alignée sur l’Accord de Paris, il a estimé que l’introduction de nouveaux combustibles alternatifs nécessitera d’en évaluer les effets et de ne pas tenir compte uniquement du potentiel de réduction des gaz à effet de serre.   

S’agissant des instruments relatifs à la responsabilité en cas de déversement de pétrole, le Rapporteur spécial a appelé à la mise en place de recours pour les communautés victimes de marées noires, avant de déplorer le fait que de nombreux États ne ratifient pas les amendements les plus récents, ce qui les prive d’une couverture adéquate en cas de déversement.  Évoquant ensuite les taxes sur le carbone dans le contexte des changements climatiques, il a proposé qu’elles soient utilisées pour renforcer les capacités d’installations portuaires. Souvent, a-t-il fait remarquer, les installations de réception sont inadéquates et les communautés locales se retrouvent exposées aux subsistances dangereuses déchargées par les navires.  Pour ce qui est du démantèlement des navires, il s’agit selon lui d’une activité qui a non seulement un impact sur les travailleurs et les communautés locales, mais aussi sur l’environnement en raison des courants et des vents.  Pour finir, M. Orellana a mis l’accent sur l’opacité concernant les propriétaires.  Plaidant pour la divulgation des informations et la protection des lanceurs d’alerte, il a jugé que ces éléments doivent être pris en compte pour adopter une approche basée sur les droits humains dans les transports maritimes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission adopte un projet de résolution qui reflète une inquiétude croissante face à la désinformation et la mésinformation

Soixante-dix-huitième session,
14e séance plénière - après-midi
CPSD/787

La Quatrième Commission adopte un projet de résolution qui reflète une inquiétude croissante face à la désinformation et la mésinformation

Au troisième et dernier jour du débat général consacré à l’information, la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation) a adopté sans vote, et sur recommandation du Comité de l’information, ses deux projets de résolution annuels, dont son texte phare sur les politiques et activités de l’ONU en matière de communication globale, dans lequel il fait part de sa « grande inquiétude » face à la montée de la désinformation et de la mésinformation visant les opérations de maintien de la paix de l’ONU.

Alors que la lutte contre ce phénomène a été au cœur de leurs préoccupations ces derniers jours, les États Membres ont placé leurs espoirs dans l’initiative lancée par le Secrétaire général pour établir un Code de conduite sur l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  À l’instar du Royaume-Uni, ils ont été nombreux à applaudir les efforts en ce sens du Département de la communication globale (DCG) qui a donné le coup d’envoi d’une vaste consultation et s’apprête à lancer une enquête mondiale en vue de collecter des données à l’appui de ce processus.

Illustrant l’importance de ce débat, l’Ukraine et la Fédération de Russie d’un côté, et Israël et l’État de la Palestine de l’autre, se sont accusés mutuellement de propagande mensongère et de désinformation, confrontant leurs points de vue sur les enjeux de la manipulation de l’information et de l’ampleur de ce problème, y compris le rôle des médias qui relaient les « infox ».  

Si le Royaume-Uni n’a pas hésité à accuser la Fédération de Russie d’avoir fait du Conseil de sécurité une « instance de désinformation » depuis le début du conflit ukrainien, le Canada a mis en garde contre les répercussions de ce fléau, qui exacerbe la discrimination et la violence en créant des divisions au sein des sociétés, tant en ligne que dans la vie réelle, pour finir par réduire l’espace dévolu au dialogue démocratique.

Doté d’un dispositif de 161 paragraphes, le texte consacré aux politiques et activités de l’ONU demande au DCG d’appuyer, dans la limite des ressources existantes, les efforts déployés par les opérations de maintien de la paix de l’ONU pour fournir des contenus exacts, y compris dans les langues locales, afin d’aider à mieux faire comprendre leurs mandats, de gérer les attentes et de gagner la confiance et le soutien des parties prenantes concernées.  Il invite également le DCG à recommander que le système des Nations Unies utilise systématiquement dans ses communications la terminologie des résolutions adoptées par l’Assemblée générale. 

La Commission recommande en outre aux États Membres d’envisager de meilleurs moyens de coopérer pour écarter les menaces que pose l’utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) à des fins terroristes. 

Le projet consacré à l’information au service de l’humanité demande que tous les pays et organismes des Nations Unies coopèrent afin d’atténuer les disparités dans la façon dont l’information circule à tous les niveaux.  Il appelle également à ce que les journalistes puissent travailler librement et efficacement.  Un appel relayé aujourd’hui par le représentant du Myanmar, qui a dénoncé le sort réservé aux médias libres par la junte militaire au pouvoir dans son pays, ou par l’Ukraine, qui a fait état de 66 journalistes tués sur son territoire depuis le début du conflit qui l’oppose à la Fédération de Russie.

Tout en saluant les efforts déployés actuellement pour renforcer le multilinguisme dans la stratégie de communication des Nations Unies, certaines délégations ont remarqué qu’il reste néanmoins encore beaucoup à faire.  Pourtant, a argué le Canada, le multilinguisme de l’ONU est un « lubrifiant de la diplomatie multilatérale », essentiel à la communication entre les peuples.  De son côté, l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) a observé une tendance au monolinguisme qui se renforce au détriment de la grande diversité des publics ciblés dans le monde par l’ONU.  Aussi attend-elle avec grand intérêt l’adoption du Cadre d’action stratégique pour le multilinguisme, sous l’égide du Secrétaire général de l’ONU, qui aura vocation à accélérer l’intégration du multilinguisme dans l’ensemble des processus onusiens.

S’appuyant sur l’exemple des communiqués de presse qui, à ce jour, ne sont publiés qu’en anglais et en français, le Mexique a fait le lien entre les recommandations de la Quatrième Commission et leur traduction concrète au sein de la Cinquième Commission.  En effet, alors que dans les semaines à venir, la proposition visant à améliorer la disponibilité des communiqués de presse dans toutes les langues officielles de l’ONU y sera discutée, la délégation a mis en garde contre l’absence des « ressources budgétaires nécessaires », sans lesquelles les objectifs proposés ne resteront que des « vœux pieux ».  

La Commission poursuivra ses travaux, le mardi 24 octobre 2023, à partir de 10 heures.

QUESTIONS RELATIVES À L'INFORMATION (FIN)

Déclarations

Mme HELENA NDAPEWA KUZEE (Namibie) a rappelé le vieil adage qui dit que le savoir, c’est le pouvoir.  À une époque où le scepticisme règne quant à la valeur et à la pertinence du travail de l’ONU, il est essentiel, selon elle, d’avoir accès à des informations sur le « bon travail » qu’accomplit l’Organisation.  Dans le même temps, il est également utile de disposer de comptes rendus précis sur la situation humanitaire désastreuse dans les zones de conflit à travers le monde.  Les sources quotidiennes telles que ONU Info et les sites Web officiels de l’Organisation, les médias sociaux et autres plateformes numériques sont facilement accessibles et régulièrement mis à jour avec des informations utiles et pertinentes, a-t-elle remarqué.  À une époque où les campagnes de désinformation ont la capacité de déstabiliser la politique mondiale, en s’appuyant sur les outils numériques, il est important que les propositions relatives à un code de conduite et à un cadre pour contrer les lacunes dans l’espace d’information gagnent du terrain.  À cette fin, elle a appelé à une coordination avec les institutions nationales et régionales afin de garantir l’alignement sur les avancées significatives dans la lutte contre ces développements en saluant le projet de code de conduite sur l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques du Secrétaire général.  Pour répondre à toutes ces questions, la déléguée a estimé que le Sommet de l’avenir sera une occasion à ne pas manquer.  Elle a souligné le rôle des centres régionaux d’information des Nations Unies dans la promotion du travail de l’Organisation. 

Mme REBECCA SUZANNE BRYANT (Australiea rappelé que l’an dernier, le groupe CANZ, dont fait partie son pays, a publié une déclaration en faveur de l’accès du public à une information impartiale et exprimant ses préoccupations croissantes à l’égard des tendances mondiales en matière d’intégrité de l’information.  Propulsée par les progrès technologiques tels que l’intelligence artificielle et l’amplification inauthentique, cette manipulation de l’information s’est encore aggravée depuis, a-t-elle constaté.  Dans la région Indo-Pacifique, des États autoritaires ont recours à des discours malveillants pour provoquer des divisions régionales, entraver la souveraineté nationale et perturber la cohésion sociale. Dans ce contexte, c’est l’architecture mondiale de l’information dans son ensemble qui pose un problème, selon la déléguée, en évoquant la propriété étrangère des médias, la corruption, la manipulation des algorithmes, la syndication exclusive et l’intimidation des journalistes. Pour sa part, l’Australie concentre ses efforts sur la sauvegarde d’un environnement ouvert et transparent, à même de préserver la diversité des points de vue à l’aide d’informations exactes et crédibles.  En outre, Canberra continue de revoir sa législation nationale et ses cadres réglementaires pour protéger ses citoyens par le biais notamment de l’intégrité électorale ainsi que la sécurité des données et des infrastructures de communication. 

Mme ANASTASIIA TOKARSKA (Ukraine) s’est inquiétée de voir « l’État agresseur » persister à utiliser de manière abusive le cadre de l’ONU, et en particulier le Conseil de sécurité, pour diffuser une propagande agressive et de fausses informations dans le but de détourner l’attention des États Membres de ses propres violations flagrantes de la Charte des Nations Unies, du droit international humanitaire et du droit international.  Mettant en garde contre les répercussions que cela peut avoir sur la crédibilité du Conseil, elle a insisté sur la pertinence de la disposition relative à l’inadmissibilité de toutes les formes de propagande susceptibles de provoquer ou d’encourager une menace à la paix ou un acte d’agression, et qui figure dans la résolution adoptée en 2022 à l’initiative de l’Ukraine sur les politiques et activités de communication globale des Nations Unies. Accusant l’État qui viole la Charte de tenter d’instrumentaliser le langage pour rejeter la responsabilité du conflit sur la partie attaquée, elle a appelé à empêcher ces tentatives, en particulier au sein de l’ONU, en se servant d’une formulation précise pour éviter toute manipulation ou interprétation erronée de la part de l’État agresseur dans le but de dissimuler sa propre responsabilité et de rejeter la faute du conflit sur un État qui se défend. 

Depuis le début du conflit en Ukraine, 66 professionnels des médias ont été tués, dont 10 journalistes, 14 journalistes ont disparu, 22 ont été enlevés par les troupes russes et 24 blessés, a précisé le représentant.  Il a plaidé pour une approche globale et systémique pour s’attaquer à toutes les tentatives de falsification de l’information et d’utilisation de celle-ci comme outil pour légitimer les violations de la Charte et les guerres d’agression, ainsi que pour porter atteinte à la sûreté, à la paix et à la sécurité.  La désinformation et la propagande de guerre, ainsi que ceux qui se livrent à ces activités, doivent être clairement dissociés du journalisme professionnel et des journalistes, a tranché le délégué, en pointant du doigt les médias russes.  À l’approche de la Semaine mondiale de l’éducation aux médias et à l’information 2023, il a donc encouragé les États Membres à se concentrer sur le problème de la désinformation et de la mésinformation, en vue de rendre l’information plus sûre et plus propice au développement durable et au règlement des problèmes mondiaux. 

M. JEAN LUC NGOUAMBE WOUAGA (Cameroun) a félicité l’ONU des réformes en cours qui portent leurs fruits, avec la planification des activités des centres régionaux d’information des Nations Unies dans le domaine des partenariats et de l’innovation, afin d’amplifier le message de l’ONU.  Il a soutenu la stratégie de communication du DCG pour lutter contre la désinformation et la prolifération des discours de haine, particulièrement sur les plateformes numériques.  Le délégué a également soutenu l’élaboration d’un code de conduite afin de garantir la responsabilité des autorités publiques.  Il a encouragé l’utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) en complément des médias classiques comme la télévision, la radio ou la presse écrite, pour que la voix de l’ONU soit entendue aux quatre coins du monde.  Sur un autre plan, il a jugé indispensable que la parité linguistique soit respectée, y compris dans le cadre des processus de négociations.  Aussi le représentant a-t-il exhorté le DCG à prendre des dispositions pour corriger la tendance à se limiter à de simples traductions de textes anglais au lieu de diversifier les contenus originaux.  Le multilinguisme doit également être amélioré sur les plateformes numériques tout en conservant sa pertinence sur les moyens de communication traditionnels. 

Mme SARAH AHMED AHMED AL-MASHEHARI (Yémen) a salué les efforts déployés par le DCG pour une communication fluide, précise et efficace dans les situations de crise. Notant la prévalence des discours de haine, de l’islamophobie, de la discrimination et du racisme, la déléguée a appelé à soutenir un dialogue constructif et à renforcer les valeurs d’harmonie et de respect mutuel entre les cultures.  Consciente du rôle croissant joué par les plateformes numériques, elle a mis en garde contre la désinformation et la manipulation de l’information sur ces supports en exigeant que des mesures soient prises pour y répondre. Elle a cité l’exemple de la crise humanitaire en cours à Gaza pour illustrer son propos, en exigeant que la communauté internationale condamne ces crimes, veille au respect du droit international et mette fin à la politique de deux poids, deux mesures.  La représentante a également insisté sur l’impératif d’acheminer sans entraves de l’aide humanitaire à Gaza, d’éviter un déplacement massif de Palestiniens, et d’instaurer un cessez-le-feu.  Avant de conclure, la représentante a demandé le respect du multilinguisme sur toutes les plateformes utilisées par le DCG.

M. MUNGO WOODIFIELD (Royaume-Uni) a salué le DCG pour ses travaux d’élaboration d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  Ces plateformes ont changé notre accès à l’information, ce qui offre des opportunités mais aussi crée aussi des risques.  Le représentant s’est inquiété de la menace « généralisée » que représentent la désinformation et la manipulation de l’information, lesquelles portent atteinte à nos libertés et à nos sociétés, notamment en temps de crise.  À cet égard, l’ONU a un rôle important à jouer pour fournir une information précise et basée sur des faits.  Il incombe donc aux États Membres de protéger l’intégrité de l’ONU en tant que source d’informations fiables.  Or, des États diffusent des informations faussées sur l’ONU, en particulier sur les opérations de maintien de la paix, ce qui constitue une menace pour le personnel de l’ONU déployé sur le terrain. Le délégué a donné son aval au projet du DCG de développer un laboratoire de l’intégrité de l’information afin de soutenir les informations diffusées par l’ONU sur le terrain. Depuis le début de son invasion de l’Ukraine, la Fédération de Russie a fait du Conseil de sécurité une « instance de désinformation », a poursuivi le délégué, une action sans précédent dans l’histoire de cet organe.  La Russie a ainsi invité des dizaines d’individus à propager des théories du complot sur la guerre en Ukraine, malgré les dénégations des experts et des responsables de l’ONU.  Selon lui, les États Membres et les plateformes ont une responsabilité commune de mieux comprendre les nouvelles technologies pour mieux les encadrer. 

Mme GUZIK DUNO (Mexique) a salué les efforts déployés actuellement pour renforcer le multilinguisme dans la stratégie de communication des Nations Unies, tout en notant qu’il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine.  Il est important de souligner que les conclusions auxquelles les délégations parviennent sur cette question et sur d’autres au sein du Comité de l’information doivent être reflétées dans les négociations qui se déroulent au sein de la Cinquième Commission, a fait valoir la représentante, en rappelant que dans les semaines à venir, la proposition visant à améliorer la disponibilité des communiqués de presse dans toutes les langues officielles de l’ONU y sera discutée. En l’absence des ressources budgétaires nécessaires, les objectifs proposés ne seront que des vœux pieux, a-t-elle concédé. 

La déléguée a ensuite appelé le DCG à s’appuyer sur des données dans sa stratégie, y voyant des outils essentiels dans des domaines tels que la lutte contre les discours de haine et la désinformation. Cette question revêt selon elle une importance particulière dans les contextes où opèrent les opérations de paix qui, ces dernières années, ont fait l’objet de véritables campagnes hostiles qui mettent en danger la vie et l’intégrité des personnels déployés. L’analyse des données peut également aider à prendre des décisions éclairées sur le contenu à mettre en priorité à la disposition du public dans certaines langues.  Notant que les hispanophones constituent le deuxième groupe linguistique le plus important à fréquenter le site d’information de l’Organisation, la déléguée a espéré que cette demande se traduira par une offre comparable en termes de quantité et de diversité des informations disponibles en espagnol.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a considéré que préserver des médias libres et indépendants est la clé de voûte de la promotion de la démocratie et des droits humains.  L’information, notamment sur les plateformes numériques, joue un rôle vital, mais encore faut-il pouvoir y accéder, ce qui n’est pas le cas dans son pays depuis le coup d’état illégal de la junte, qui a contraint à la fermeture 13 médias.  Les réseaux sociaux sont souvent hors d’accès, des journalistes ont été menacés, voire tués, le Myanmar étant le pays où l’on emprisonne le plus d’entre eux au monde, s’est indigné le délégué. Condamnant la désinformation à laquelle se livre l’armée, il a cité les tentatives de blâmer d’autres acteurs pour une attaque commise contre un camp de déplacés dont la junte était responsable. Raison de plus pour que toutes les populations dans des situations de conflit armé aient accès à des informations vérifiables.

Mme REUT SHAPIR BEN NAFTALY (Israël) a commencé par rappeler les faits survenus en Israël le 7 octobre, à savoir l’attaque terroriste du Hamas, « qui s’est livré à des actes haineux dans le seul but de massacrer des Juifs ». Nous sommes en guerre, a-t-elle déclaré, et œuvrons sans relâche pour protéger nos citoyens.  Mais l’autre bataille à remporter selon elle se situe sur les plateformes numériques, en faisant référence aux « infox » qui y sont diffusées par l’« organisation terroriste » Hamas.  Elle a mis en garde tous les médias et individus qui relaient de telles informations, en accusant certains fonctionnaires de l’ONU de l’avoir fait, en citant le cas de l’attaque de l’hôpital Al-Ahli à Gaza, pour laquelle Israël a été accusé avant d’attendre que les responsabilités soient clairement établies.  La déléguée a appelé à répondre à ces phénomènes de manipulation de l’information et de désinformation.  Elle a ensuite salué le rôle joué par le Programme de communication sur l’Holocauste et les Nations Unies qui continue de sensibiliser la communauté internationale à cette tragédie, notant toutefois que, ces derniers jours, on assiste à des niveaux sans précédent d’antisémitisme.

M. FEDOR K. STRZHIZHOVSKIY (Fédération de Russie) a pris acte des succès du Département concernant les métadonnées et la traduction du site de l’ONU dans les six langues officielles.  Les services de l’information de l’Organisation ont la responsabilité de vérifier les faits et de fournir des informations impartiales, sans publier de « citations biaisées qui nient les faits ».  Selon lui, les représentants des différentes structures de l’ONU renvoient à des données non vérifiées.  Leurs opinions « politisées » ne doivent pas selon lui remettre en question les normes des médias et de l’ONU.  Le représentant a dit suivre avec attention les initiatives du Secrétaire général en matière d’information, notamment l’élaboration du Code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques.  À ce titre, il a jugé « inacceptable » que l’ONU, dans ce cadre, ne soit représentée que par des ressortissants occidentaux issus d’un petit groupe de pays.  La Fédération de Russie, a-t-il ajouté, soutient inlassablement la mise en place d’un cadre réglementaire international concernant les activités numériques.  Il est à ses yeux indispensable que les entreprises numériques respectent la législation des États où elles sont situées et où elles opèrent.  Le délégué a encouragé les délégations qui « s’attaquent à son pays », en particulier celle de l’Ukraine, à participer aux discussions sans transformer leurs interventions en « plateforme de désinformation politique ».  Selon le représentant, « l’attaque informationnelle » lancée contre son pays consiste à imposer à la communauté internationale une interprétation biaisée de ce qui se passe dans le monde et à écraser toute source d’information alternative, notamment les médias russes. 

Mme CARMEN ROSA RIOS (Bolivie) a rappelé qu’à une époque où l’information circule plus rapidement que jamais, des défis nouveaux ont émergé, avec les réseaux sociaux et à présent l’intelligence artificielle.  Toutefois, cette abondance d’information n’est pas sans danger, l’un des problèmes les plus graves étant le manque de véracité, de nature à entraîner des conséquences désastreuses.  Elle s’est félicitée que les TIC aient permis aux femmes de pouvoir s’exprimer de façon nouvelle.  Pourtant, la déléguée a souligné que le harcèlement touche de façon disproportionnée celles-ci, victimes d’une fracture numérique par rapport aux hommes.  Elle a lancé un appel pour que tous les documents de l’ONU puissent être traduits dans toutes les langues officielles.  Prenant l’exemple de son pays, la représentante a déclaré que le caractère plurinational de la Bolivie se traduit dans sa Constitution, qui reconnaît 36 langues autochtones, raison pour laquelle elle a encouragé à traduire les traités internationaux dans les langues autochtones. 

Mme ANDREA MEGAN TURNBULL (Canada) a noté que l’exposé de la Secrétaire générale adjointe nous a rappelé l’importance de prendre des décisions sur la base d’informations exactes.  Presqu’au même moment, nous avons entendu, dans les couloirs de l’ONU, des récits très différents sur l’identité des responsables de l’explosion dévastatrice dans un hôpital de Gaza.  C’est dans de tels moments que les délégués et les citoyens se tournent vers l’ONU pour obtenir des informations, a-t-elle ajouté.  La déléguée a fait siennes les inquiétudes exprimées à propos de la prolifération de la désinformation, qui peut exacerber la discrimination et la violence en créant des divisions dans les sociétés, tant en ligne que hors ligne. Il importe donc que les démocraties aient accès à des sources d’information fiables afin que leurs citoyens puissent se forger leur propre opinion, demander des comptes aux gouvernements et participer au débat public. 

La représentante réitéré son appui à la nature multilingue de l’Organisation, y voyant un « lubrifiant de la diplomatie multilatérale » essentiel à la communication entre les peuples.  Membre de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le Canada s’est joint à l’appel en faveur d’initiatives visant à rétablir l’équilibre entre les six langues officielles de l’ONU, dont le français, dans les produits de communication traditionnelle et numérique.  La déléguée a en outre salué l’action du Département pour ses efforts dans la promotion de la diversité linguistique, tout en conservant son rôle crucial de source d’informations crédibles et impartiales. Elle a pris acte des efforts déployés par le DCG pour consulter les États Membres sur l’élaboration d’un code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques. 

M. MARTHINUS CHRISTOFFEL JOHANNES VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud) a salué les efforts du Département de la communication globale (DCG) qui doit avoir au cœur de son travail la diffusion d’informations équilibrées et précises.  Il a également salué les nouvelles initiatives du Département et l’a encouragé à mettre l’accent sur la paix et la sécurité ainsi que les questions liées à l’environnement.  Le rapport du Secrétaire général, a-t-il poursuivi, fait état de l’intérêt du public pour le multilinguisme.  Il est donc essentiel que l’ONU prête l’attention voulue à cet intérêt pour informer le plus de gens possible.  Le représentant a conclu en se félicitant des efforts de lutte contre la désinformation. 

Mme. ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a fait part des préoccupations de son pays face aux développements dans la bande de Gaza, en appelant à un cessez-le-feu et en condamnant les attaques et les meurtres de civils innocents tout comme la politique de punition collective.  Exigeant l’ouverture de couloirs humanitaires dans le territoire, elle a également mis en garde contre le danger que représente le déplacement forcé de ses habitants.  Se procurer des informations fiables revêt une importance capitale, a noté la déléguée, et le DCG, avec son réseau de Centres régionaux d’information des Nations Unies, joue un rôle primordial à cet égard pour promouvoir les activités des Nations Unies avec transparence et crédibilité et en temps opportun.  La parité des langues officielles de l’ONU est à cet égard particulièrement importante.  La représentante a appelé à prendre les mesures techniques et règlementaires nécessaires pour pallier les phénomènes de la désinformation et de la mésinformation. Elle a également mis en garde contre le rôle des plateformes numériques dans la dissémination des discours de haine, de la violence et de l’extrémisme, sa délégation attachant une importance particulière à la numérisation des documents historiques de l’ONU. 

M. MAJED S. F. BAMYA, Observateur permanent adjoint de l’État de Palestine, a déclaré: « on nous a appris que la déshumanisation est le premier outil de la guerre, celui qui permet tous les crimes ».  Or, Israël mène en ce moment-même une campagne d’information pour faire précisément cela.  De hauts responsables israéliens ont appelé les Palestiniens de Gaza des « animaux humains », affirmant sans ambages et dans une promesse tenue, « s’ils veulent l’enfer, ils l’auront ».  Cette déshumanisation a été reprise dans les médias car nous avons le sentiment que le monde semble nier la douleur des Palestiniens.  L’Observateur s’est dit surpris que la représentante d’Israël ait parlé de l’horreur du 7 octobre sans mentionner ce qui a eu lieu après.  Les Israéliens, a-t-il fait remarquer, partent du principe que les Palestiniens sont responsables de leur propre mort allant jusqu’à dire « nous ne pardonnerons jamais aux Arabes de nous avoir forcé à tuer leurs enfants ».  Ce n’est donc jamais de leur faute, malgré les annexions, le blocus de Gaza, la colonisation et les meurtres de ces 75 dernières années. 

Ces derniers jours, s’est lamenté l’Observateur permanent adjoint, 4 000 Palestiniens ont perdu la vie, Mais combien de morts faut-il pour susciter l’indignation? Ne faisons-nous pas partie de la famille humaine? a-t-il lancé aux gouvernements qui ont eu du mal à reconnaître l’égalité des droits et des obligations entre toutes les nations, alors que des millions de gens manifestent dans leurs capitales.  Quand est-ce qu’on rendra Israël comptable de ses actes? Pourquoi lui accorde-t-on le droit de tuer en toute impunité?  Aujourd’hui Israël demande à la population de Gaza d’aller vers le sud puis bombarde les convois.  Il demande que l’on évacue les hôpitaux sans s’émouvoir que les gens ne sachent où aller? L’Holocauste, a ajouté l’Observateur permanent adjoint, est la pire horreur du XXe siècle et c’est lui qui a conduit à la Charte des Nations Unies et aux Conventions de Genève.  Alors n’invoquez pas l’Holocauste pour commettre des crimes de guerre et ne désacralisez pas la mémoire des morts pour tuer les autres.  L’ONU, a-t-il conclu, doit faire entendre sa voix pour mettre fin au bain de sang et au massacre et faire respecter le droit international et le droit international humanitaire.  Nous voulons que les Palestiniens vivent.  Nous voulons que les Israéliens vivent.  Nous voulons pouvoir coexister, a martelé l’Observateur permanent adjoint. 

Mme NASRIA ELARDJA FLITTI, de la Ligue des États arabes, a déclaré que les médias de l’ONU constituent la plateforme idoine pour mettre en évidence la façon dont l’Organisation traite de questions fondamentales sur les plans régional et international.  Elle s’est félicitée de l’accent mis sur les médias émergents dans notre Programme commun et son appel à promouvoir la transparence.  De même, le DCG joue un rôle central dans la présentation des questions d’importance pour la région arabe, en particulier sa couverture de la cause palestinienne.  Les événements récents ont démontré à quel point les fausses nouvelles peuvent répandre des idées erronées qui contribuent à la destruction de sociétés entières.  À cet égard, la Ligue des États arabes réaffirme l’importance du plan stratégique des médias arabes pour couvrir les souffrances des peuples sous occupation, et au premier chef les Palestiniens. 

L’observatrice a ainsi comparé la couverture intensive des diverses crises, dont l’Ukraine, à la question palestinienne.  Nous devons soutenir le discours médiatique sur les plans régional et international afin d’appuyer le concept d’État national et réfuter les idées extrémistes.  La représentante a souligné l’importance qu’il y a à véhiculer des informations en langue arabe dans les médias traditionnels, en particulier dans les régions moins développées où l’accès aux nouvelles technologies est limité.  Comme le démontrent les événements de Gaza, il est nécessaire de codifier l’interdiction de cibler les journalistes dans les zones en conflit.  Afin de contrer la désinformation, elle a appelé à la réglementation des réseaux sociaux sur les plans national et régional, tout en promouvant le rôle des médias au moyen de législations appropriées.  Enfin, la déléguée a plaidé pour le multilinguisme et la sensibilisation du public aux questions vitales du monde arabe, et ce, sans la politique de deux poids, deux mesures, s’agissant en particulier de la question palestinienne. 

M. NKALWO, de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a souligné qu’en dépit des efforts remarquables accomplis pour développer des supports de communication dans plusieurs langues, d’importantes disparités entre l’usage de l’anglais et celui des cinq autres langues officielles persistent.  À cet égard, les visuels et bannières qui ont accompagné le Week-end d’action et le Sommet sur les objectifs de développement durable ont illustré de manière préoccupante cette tendance au monolinguisme qui se renforce au détriment de la grande diversité du public ciblé dans le monde. L’Observateur a par ailleurs dit attendre l’adoption du Cadre d’action stratégique pour le multilinguisme, sous l’égide du Secrétaire général de l’ONU, qui aura vocation à accélérer l’intégration du multilinguisme dans l’ensemble des processus onusiens.  Pour lutter contre la désinformation, l’Observateur a recommandé d’élargir l’accès aux informations objectives et fiables dans les différentes langues sur les plateformes numériques des Nations Unies. De plus, il convient de capitaliser sur le savoir-faire des vérificateurs de faits opérant dans diverses langues. 

La contribution de l’OIF sur cet axe s’illustre dans le développement de la plateforme ODIL, la plateforme francophone des initiatives de lutte contre la désinformation.  Il s’agit d’un espace unique pour s’informer en français sur l’actualité de la lutte contre la désinformation, et promouvoir les ressources et les initiatives de lutte contre la désinformation en langue française et dans les langues locales.  Cette plateforme est un précieux répertoire de solutions innovantes qui enrichit les réponses multilatérales à la désinformation, a-t-il déclaré.  Il est crucial de soutenir les capacités de recherche sur la désinformation dans les différentes langues et dans les différents contextes culturels.  C’est un axe important du projet phare « Lutte contre la désinformation » de l’OIF, qui a contribué, entre autres, à l’élaboration d’une cartographie des capacités de recherche francophone sur la désinformation, a-t-il déclaré. 

Droits de réponse

En réponse aux propos de la Fédération de Russie, l’Ukraine a déploré que l’agresseur se fasse une fois de plus passer pour la victime, considérant les propos de la Russie sur les journalistes comme un affront pour tous les journalistes dignes de ce nom. 

Israël a accusé le représentant de l’État de Palestine d’avoir refusé de condamner les attaques du Hamas contre son pays.  Sa représentante a réfuté les allégations de déshumanisation du peuple palestinien par Israël.  Elle a demandé au délégué palestinien de s’abstenir d’évoquer l’Holocauste. 

Chypre a répondu aux allégations russes à propos d’un journaliste expulsé de l’île.  Sa représentante a considéré cette mesure justifiée par des préoccupations sérieuses quant à sa sécurité nationale, en raison des activités de cet individu.  À Chypre, a-t-elle assuré, la liberté de la presse est respectée. 

L’État de Palestine s’est opposé aux propos d’Israël en refusant de justifier le meurtre de qui que ce soit.  Sa représentante, a-t-il poursuivi, parle de paix et prétend lutter contre la désinformation, alors que son pays bombarde les populations civiles avec des bombes au phosphore, propage le terrorisme et justifie des crimes de guerre. À ce titre, il s’est demandé de quel côté se trouvait la propagande, fustigeant l’instrumentalisation de l’Holocauste pour justifier le meurtre de Palestiniens.  Il a assuré ne pas nier la réalité de cet évènement, l’une des pires horreurs du XXe siècle.  Dans ce cadre, il a exhorté Israël à prier son gouvernement de cesser la tuerie de civils, refusant les leçons de morale d’Israël.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission aborde la responsabilité des organisations internationales et débat des bonnes pratiques des dépositaires de traités

Soixante-dix-huitième session,
19e & 20e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3696

La Sixième Commission aborde la responsabilité des organisations internationales et débat des bonnes pratiques des dépositaires de traités

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a débattu aujourd’hui de la responsabilité des organisations internationales puis du renforcement et de la promotion du régime conventionnel international. 

La Commission avait auparavant conclu son débat, entamé mardi, sur l’état de droit aux niveaux national et international – débat au cours duquel plusieurs délégations ont de nouveau soulevé la question du conflit au Moyen-Orient, quand d’autres continuaient d’axer leurs interventions sur l’avènement de la justice en ligne. 

Mais c’est bien la responsabilité des organisations internationales qui a été au centre des discussions, et notamment la question de savoir si le projet d’articles y relatif, adopté par la Commission du droit international (CDI) en 2011 constituait une base appropriée pour l’élaboration d’une convention ou si les articles devaient plutôt rester sous leur forme actuelle.

Une majorité d’États ont fait part de leur opposition à l’idée d’un instrument juridiquement contraignant, ou l’ont du moins jugé prématurée.  Certains, comme les États-Unis, ont même recommandé de ne plus inscrire ce point à l’ordre du jour de la Commission, notant qu’en l’espèce, le développement progressif du droit l’emportait sur sa codification. 

L’Union européenne, l’une des organisations internationales les plus intégrées au monde, a tenu à rappeler sa spécificité puisqu’il y a des domaines dans lesquels le droit européen l’emporte sur le droit des États, et où s’applique le principe de lex specialis

D’autres délégations, comme le Portugal, la Colombie, l’Iran, l’Égypte ou le Bélarus, ont toutefois réitéré leur soutien au projet d’articles de la CDI et appelé à la poursuite des débats pour parvenir à un consensus. 

L’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication a fait son retour dans les discussions sur le renforcement et la promotion du régime conventionnel international, la majorité des intervenants soulignant les avantages considérables que ces technologies pouvaient apporter pour l’enregistrement et la publication des traités, conformément à l’Article 102 de la Charte de Nations Unies et à la Convention de Vienne sur le droit des traités.

Si plusieurs délégations ont salué le rôle du Secrétaire général de l’ONU en tant que principal dépositaire de traités multilatéraux, d’autres États dépositaires de traités, comme la Belgique, avec la récente Convention de Ljubljana-La Haye pour la coopération internationale en matière d’enquête et de poursuite du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et autres crimes internationaux, ont échangé sur les bonnes pratiques en la matière.  Singapour a fait observer que le Secrétaire général de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) fait office de dépositaire de divers traités multilatéraux liés à l’ASEAN, y compris des traités impliquant des parties prenantes externes.

La Suisse, qui est notamment dépositaire des Conventions de Genève pour la protection des victimes de guerre, a rappelé que les principales tâches du dépositaire se résumaient à la publicité d’une part, et à l’impartialité, d’autre partL’obligation de publicité a trait à l’enregistrement et au devoir d’information et de publication des textes, tandis que l’impartialité a trait à l’exercice indépendant du rôle de dépositaire eu égard aux autres parties, ou celles intéressées à le devenir, a-t-elle résumé. 

Afin de promouvoir « un régime conventionnel fort et inclusif », ces bonnes pratiques devraient être partagées par le biais d’une assistance technique ou de formations pour les pays en voie de développement, a plaidé le représentant du Cameroun.  Ses homologues hispanophones ont défendu l’importance du multilinguisme, et la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), par la voix de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a demandé que les six langues officielles de l’ONU soient traitées sur un pied d’égalité.

La Commission se penchera demain, vendredi 20 octobre, dès 10 heures, sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.

L’ÉTAT DE DROIT AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONALA/78/184

Débat général (suite et fin)

Mme AL MARZOOQI (Émirats arabes unis) a appelé à une désescalade du conflit dans la bande de Gaza, à la libération des territoires palestiniens occupés et au respect du droit international humanitaire.  L’état de droit est un des piliers de la coopération internationale, a-t-elle dit.  Expliquant que son pays a adopté une approche fondée sur la justice et le respect des droits humains, la déléguée a assuré que les Émirats arabes unis continueront leurs efforts pour bâtir une société tolérante et multiculturelle où les peuples du monde entier peuvent vivre en paix.  Elle a reconnu que les technologies sont importantes pour promouvoir l’accès à la justice pour tous, mentionnant les lois qui définissent l’utilisation des technologies de l’information et de la communication et le règlement des différends en lignes dans les procédures pénales et civiles.  Par ailleurs, elle a rappelé que son pays continue à lutter activement contre la traite des êtres humains.  Son pays, s’est félicitée la déléguée, est classé numéro un dans la catégorie des pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord pour l’index mondial de l’état de droit et 37ème dans l’index du World Justice Projet. 

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan), déplorant près de trente ans d’occupation de ses territoires souverains par l’Arménie, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et de résolutions du Conseil de sécurité, a dit qu’il fallait lutter davantage contre les idéologies racistes, la propagande haineuse, la désinformation et l’interprétation erronée du droit international.  La communauté internationale n’a pas réussi à empêcher l’agression et les crimes atroces perpétrés contre l’Azerbaïdjan et son peuple, ni à veiller à l’application de ses propres décisions et à résoudre le conflit par des moyens pacifiques, a encore dénoncé le représentant.  En 2020, lorsque les hostilités ont repris, la situation n’a pas laissé d’autre choix que de recourir à la force comme ultima ratio d’auto-défense, a-t-il expliqué.  Après 44 jours de guerre, l’Azerbaïdjan a libéré plus de 300 villes et villages de l’occupation.  En l’occurrence, l’Azerbaïdjan n’a pas lutté contre des civils, comme le prétend l’Arménie, mais contre les forces armées de ce pays et contre des groupes de terroristes et de mercenaires sous leur contrôle, a asséné le représentant.  Au niveau national, l’Azerbaïdjan a pris des mesures visant à enquêter sur les crimes graves commis durant l’agression arménienne, a-t-il fait savoir.  Au niveau international, le pays a engagé des procédures devant la Cour internationale de Justice (CIJ)et la Cour européenne des droits de l’homme.  Il est important que la communauté internationale insiste sur l’obligation de l’Arménie de rendre des comptes pour la guerre qu’elle a déclenchée, a-t-il conclu. 

M. YOUSSEF HITTI (Liban) a déclaré que la situation à Gaza continue de mettre la conscience de l’humanité à l’épreuve, en dénonçant une application à géométrie variable du droit international.  Comment peut-on être crédible en parlant d’état de droit devant cette situation faite à ce peuple, à cette nation? a fustigé le délégué, en appelant à une reddition de comptes pour les crimes israéliens.  Il a condamné toute « vengeance aveugle » et le refus d’appliquer les Conventions de Genève au peuple palestinien. « Il faut agir. »  Il a rappelé que la paix se trouve dans le respect du droit et du multilatéralisme.  Il faut respecter les règles qui ont été forgées pour tous, a insisté le délégué.

Mme HAWANATU KEBE (Sierra Leone) a expliqué que son pays continuait de promouvoir un environnement national démocratique et stable, tel que démontré lors des élections de juin 2023, avec la conduite d’un processus électoral libre, équitable, transparent.  Pour renforcer l’intégrité de ce processus, la Sierra Leone a mis en place un comité national de révision des systèmes électoraux et des cadres juridiques existants, auquel participent des représentants du Gouvernement, de la société civile et des partis politiques, a-t-elle expliqué.  La représentante a en outre rappelé que son pays s’était engagé dans un processus de médiation et de dialogue politique qui représente « un modèle de prévention des conflits », pour assurer le maintien de la paix et de la cohésion nationale.  S’agissant de l’utilisation de la technologie pour promouvoir l’état de droit, elle a décrit comment la stratégie de réforme du secteur de la justice et le plan d’investissement de la Sierra Leone reconnaissaient le rôle essentiel des technologies numériques dans l’accès des citoyens à la justice, mais aussi pour les magistrats à des fins de transparence et de responsabilité.  En conclusion, elle a appelé à une application cohérente et non sélective des principes de la Charte des Nations Unies, des principes du droit international humanitaire et des décisions de la Cour pénale internationale (CPI). 

Mme BOUZIANE (Maroc) a condamné le bombardement par les forces israéliennes de l’hôpital Al Ahli Arab dans la bande de Gaza et appelé à ce que les civils soient protégés par toutes les parties. Elle a souligné l’urgence de fédérer les efforts de la communauté internationale pour mettre fin au plus vite aux hostilités, respecter le droit international humanitaire et œuvrer à éviter que la région ne tombe dans une spirale de nouvelles tensions. S’agissant du rapport du Secrétaire général, la représentante a souligné que l’état de droit suppose que la gouvernance d’un pays repose sur des principes juridiques équitables et prévisibles. « Il transcende les frontières et instaure un socle commun sur lequel repose la confiance de la société envers ses institutions. »  En ce sens, les organisations internationales et régionales, et en particulier l’ONU, jouent un rôle primordial en contribuant au renforcement de l’état de droit, a dit la représentante.  Le Maroc a lancé en 2012 un dialogue national qui a abouti à la mise en place de la Charte de la réforme du système judiciaire, une étape importante dans l’administration de la justice, a-t-elle fait savoir.  Cette modernisation a consacré un volet important à la numérisation de la justice, qui s’est accélérée durant la pandémie de COVID-19, permettant par exemple de tenir des procès à distance.  Des plateformes numériques ont été initiées, afin de faciliter l’accès des citoyens à la justice, et le Ministère de la justice a également mis en place un centre d’appel permettant de mieux orienter les citoyens. 

Mme NUR AZURA ABD KARIM (Malaisie), évoquant l’impact de la numérisation sur l’accès à la justice, a indiqué que les audiences en ligne n’étaient pas simplement pour la Malaisie un moyen de faire face à la pandémie, mais qu’elles constituaient désormais une « caractéristique permanente » de son système judiciaire.  Son gouvernement préconise l’utilisation proactive des technologies de l’information et de la communication au sein du système judiciaire, a-t-elle expliqué, notant que le Parlement avait pris des dispositions pour autoriser explicitement la tenue d’audiences en ligne. La représentante a ajouté que le Gouvernement malaisien avait mis en place un système de gestion des dossiers en ligne, que les tribunaux avaient adopté des systèmes électroniques de présentation des preuves et adopté la technologie de vidéoconférence - des approches qui améliorent l’accessibilité du système judiciaire.  La numérisation des processus initiée dès 2010 a aussi permis de combler l’arriéré des dossiers et de faciliter leur règlement, a-t-elle rapporté, en mentionnant aussi la diffusion de directives et circulaires pratiques, la création de tribunaux spécialisés, ou encore l’accès à des audiences itinérantes et autres installations adaptées aux personnes vulnérables.

M. FRANCISCO JOSE DA CRUZ (Angola) a souligné que l’appui de l’ONU en matière d’état de droit doit respecter la souveraineté des États.  Il a indiqué que son pays est doté d’un système judiciaire solide et qu’il a forgé les instruments nécessaires en vue de faciliter l’application des conventions internationales.  « Nous recherchons les meilleures solutions pour combattre les crimes internationaux. »  Nous avons renforcé les capacités de nos institutions judiciaires afin de garantir l’application de l’état de droit et des principes démocratiques au niveau national, a expliqué le délégué.  Il a indiqué que son pays est en faveur d’un ordre mondial plus équilibré. « L’amélioration de l’état de droit au niveau international est de notre responsabilité à tous. »

M. ALHARBI (Koweït) a condamné l’attaque contre l’hôpital Al Ahli Arab de Gaza, une violation flagrante et injustifiable du droit international humanitaire.  Ce grave évènement exige de la communauté internationale qu’elle mette fin au deux poids, deux mesures face aux pratiques criminelles israéliennes et à la question de l’octroi d’une protection aux civils sans défense, a argué le représentant. S’agissant de l’état de droit, il a indiqué que la Constitution du Koweït garantit le principe de la séparation des pouvoirs.  Le respect du droit international et des obligations découlant des traités et instruments auxquels le Koweït est partie, revêt un caractère central.  L’état de droit, a insisté le représentant, constitue une obligation pour tous les pays, il doit être fondé sur le droit international pour édifier un monde pacifique et prospère. 

Mme LOUREEN O. A. SAYEJ, observatrice de l’État de Palestine, a évoqué le « carnage » provoqué par la frappe israélienne contre l’hôpital Al Ahli Arab de Gaza.  Elle a parlé notamment d’un homme qui portait la dépouille de son enfant dans un sac plastique.  « C’est indicible », a témoigné la déléguée.  Elle a dénoncé « le crime le plus public de l’histoire, un véritable massacre ordonné par Israël ».  Elle a condamné les propos d’un responsable israélien, selon lesquels les enfants palestiniens sont les « enfants du mal ».  La déléguée a déclaré que prendre les hôpitaux pour cible est une politique assumée d’Israël, en indiquant que 16 agents de santé ont trouvé la mort.  Elle a également dénoncé la frappe contre une école de l’ONU à Gaza. « Cinq enfants palestiniens sont tués toutes les heures », s’est indignée la déléguée, en ajoutant que la réalité est trop horrible pour être décrite.  Elle a dénoncé la sélectivité dans l’application de l’état de droit, comme le montre la situation de la Palestine depuis des décennies et l’absence de toute application du principe de responsabilité pour les crimes commis par Israël.  Ce n’est que lorsque les Israéliens rendront des comptes que l’état de droit pourra être restauré, a-t-elle conclu.

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé que toute société juste devait être fondée sur le principe de l’état de droit qui restreint intrinsèquement l’exercice du pouvoir et dans lequel la loi, et non la volonté arbitraire des individus, est souveraine. Pour assurer l’état de droit au niveau international, il est nécessaire de recourir constamment à la négociation, à la médiation et à l’arbitrage.  Selon le représentant, les nouveaux conflits armés d’une part, et l’augmentation « alarmante » du nombre de transitions violentes en termes de pouvoir d’autre part, sont des défis adressés à ce principe, auquel il ne peut y avoir d’exception, « même en période d’urgence ».  Se référant à la Nouvelle vision de l’état de droit du Secrétaire général, le représentant a espéré que les valeurs et principes fondamentaux indispensables à la fraternité et à l’harmonie sociale seront défendus avec diligence.  Il a souligné que les progrès technologiques permettaient de mettre en place des institutions plus responsables et de combler le fossé entre l’état de droit « et ceux qui ont pu être exclus de ses avantages ».  Mais ces outils doivent aussi être utilisés dans le respect de l’éthique afin de favoriser la transparence et l’efficacité du système judiciaire, tout en respectant la dignité de chaque être humain, a-t-il averti. 

M. HENK-JAN BRINKMAN, Observateur permanent de l’Organisation internationale de droit du développement (IDLO), a fait remarquer que l’IDLO reconnaît depuis longtemps le potentiel de la technologie numérique et de l’innovation comme moyen de renforcer l’accès à la justice, notamment pour les deux tiers de la population mondiale qui n’y ont pas véritablement accès.  C’est ainsi que l’IDLO a acquis une grande expérience en la matière, notamment par la promotion de la justice en ligne pour renforcer les systèmes et les processus judiciaires, en les rendant plus transparents, plus responsables et plus efficaces.  L’Observateur permanent a cité des exemples de collaboration visant à améliorer l’accès à la justice en Indonésie, au Kenya et en Ukraine.  En Ukraine, l’IDLO a élaboré un cadre juridique pour les registres publics électroniques et les outils de gouvernance électronique afin d’améliorer la communication entre les institutions publiques et la qualité des services fournis aux citoyens et aux entreprises et, ce faisant, de réduire les risques de corruption.

L’Observateur permanent a toutefois mis en garde contre les risques d’inégalités hors ligne.  La fracture numérique risque en particulier de perpétuer les inégalités vécues par les groupes marginalisés.  « Parmi les 2,9 milliards de personnes qui ne sont pas connectées dans le monde, la majorité sont des femmes et des filles, en particulier dans les pays les moins avancés, où seulement une femme sur cinq a accès à Internet. » Si la technologie est mise au point sans tenir compte des questions de genre, a-t-il averti, elle peut générer l’exclusion des femmes, des filles et des minorités LGBTQI+ et une augmentation de la violence et de la discrimination fondées sur le genre.  Pour que la fracture numérique ne devienne pas le nouveau visage des inégalités, il a formulé deux recommandations: veiller à ce que la justice en ligne soit inclusive et centrée sur les êtres humains; et veiller à ce que l’approche de la justice en ligne et de l’accès au numérique soit féministe et porteuse de transformations relatives au genre.

M. LUCA MELCHIONNA, observateur de l’Organisation européenne de droit public (EPLO), a annoncé la création de la Commission mondiale du droit, basée à Cascais au Portugal, qui comprend de nombreuses personnalités imminentes des milieux académiques, judiciaires et politiques.  Ces experts seront disponibles pour fournir expertise et conseils à tous les pays du monde sur les questions d’état de droit, sans exercer leurs fonctions de manière politisée, a-t-il précisé.  Il a également informé que la Commission présentera, chaque année, un rapport à l’Assemblée générale, appelant tous les pays du monde à prendre contact avec ladite Commission.

M. NICAISE SERVAIS DOUCKAGA NZENGUI (Congo) a déclaré que l’état de droit participe au progrès social et constitue un principe cardinal de la paix et de la sécurité internationales.  Le Congo accorde une place de choix à l’état de droit et à la promotion des droits de l’homme et des droits de la femme, a-t-il assuré.  Le délégué a expliqué que son pays a institué une haute autorité pour la lutte contre la corruption et qu’il soutient les initiatives de l’ONU pour le renforcement du dialogue comme mode de règlement des conflits.  L’état de droit est lié au développement durable, a-t-il rappelé, soulignant l’encadrement juridique des politiques publiques nationales dans le domaine des nouvelles technologies, y compris l’accès à Internet.

Droits de réponse 

Le délégué de la Fédération de Russie a dénoncé les tentatives de certaines délégations d’inclure dans le débat un sujet n’ayant rien à voir avec l’ordre du jour.  L’Occident collectif se livre à des guerres dans le monde entier, a-t-il fustigé, en mentionnant notamment le démantèlement de l’ex-Yougoslavie, l’invasion de l’Iraq et l’intervention en Libye dont ce pays souffre encore.  « Voilà la contribution de l’Occident à l’état de droit. »

Le délégué d’Israël a expliqué que sa délégation n’a pas pris la parole sur le point à l’ordre du jour en raison des évènements du 7 octobre dernier.  Toutefois, il a jugé les dynamiques au sein de ce groupe « inacceptables », n’ayant entendu aucune condamnation des actes commis contre les civils israéliens, hormis un « tissu de mensonges » amplifié par les partisans de l’autre partie au conflit.  Selon lui, la représentante palestinienne a relayé un mensonge en disant que l’hôpital à Gaza avait été bombardé par Israël, alors que les preuves démontrent que l’organisation palestinienne du djihad islamique a lancé un missile, devenu incontrôlable, qui s’est retourné contre l’hôpital.  Israël n’a effectué aucune action dans cette zone, a assuré le délégué, invitant à prendre « avec des pincettes » la déclaration de son homologue.  Il a demandé si la délégation palestinienne et ses soutiens ne devraient pas plutôt chercher à améliorer l’état de droit plutôt que de critiquer Israël.  Pour sa part, Israël respecte l’état de droit, a-t-il dit, avant d’exiger la libération immédiate des otages.  Le délégué a jugé incompatible de comparer une démocratie comme son pays avec le Hamas, « une organisation terroriste génocidaire qui terrorise les civils et souhaite annihiler les Israéliens ». 

La déléguée de l’État de Palestine a rappelé qu’en 2009 Israël avait déjà bombardé une école, puis fabriqué et diffusé des « mensonges ».  Ce pays, a-t-elle dit, avait aussi attaqué l’hôpital Al-Qots avec une bombe au phosphore, bombardement à propos duquel l’ONU, après enquête, a conclu « qu’il y avait des motifs raisonnables de penser qu’Israël avait bombardé cet hôpital ».  « Après chaque attaque, Israël nie et falsifie les informations. » 

Le délégué d’Israël, réitérant que les Palestiniens répètent constamment les mêmes « mensonges », a demandé de ne pas succomber à leur « propagande mensongère ».

« Notre vie même est la preuve », a conclu la déléguée de l’État de Palestine.

RESPONSABILITÉ DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES - A/78/135A/78/83

Débat général 

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne (UE), a salué le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la responsabilité des organisations internationales qui établit un régime juridique complet et fixe des règles sur l’attribution d’un comportement à une organisation internationale et sur le contenu et la mise en œuvre de leur responsabilité, y compris en lien avec l’action d’un État.  En tant qu’organisation internationale avec un niveau très élevé d’intégration, l’Union européenne (UE) constitue un cas particulier, a précisé la représentante. Elle a expliqué que les États membres ont transféré des compétences à l’UE sur un grand nombre de questions régulées par un ordre juridique spécifique.  Ce dernier crée des droits pour les citoyens européens qui doivent être respectés par les États, et le droit européen l’emporte sur le droit national en cas de conflit entre l’UE et un État membre.  L’UE est sujette aux principes des organisations internationales mais il y a des exceptions, a poursuivi la représentante.  Par exemple, quand un État membre applique une législation de l’UE dans des domaines qui relèvent de sa compétence exclusive, l’UE peut être tenue pour seule responsable.  De plus, l’UE applique le principe de lex specialis, ce qui n’est pas le cas dans le projet d’articles de la CDI.  Dans le cas de l’UE, l’application des obligations et des responsabilités doit être clairement distinguée de l’attribution du comportement, a-t-elle conclu. 

Mme VIRPI LAUKKANEN (Finlande), au nom des pays nordiques, a estimé prématurée, l’élaboration d’une convention sur la base des articles adoptés par la Commission du droit international (CDI).  « Nous notons que cela est la position dominante parmi les États et organisations internationales à avoir présenté leurs commentaires écrits. »  Le manque d’une pratique consistante et pertinente dans ce domaine est la raison pour laquelle nous pensons qu’il est trop tôt pour élaborer une convention, a tranché la déléguée.  Elle a estimé que la pratique n’est pas suffisante depuis que l’Assemblée générale a pris note du projet d’articles en 2014.  Nous restons néanmoins impressionnés par la qualité du travail de la CDI, a conclu la déléguée.

M. YONG-ERN NATHANIEL KHNG (Singapour) a fait savoir que Singapour ne soutient pas l’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles de la CDI sur cette question.  En effet, Singapour n’est toujours pas convaincu que ces textes fassent l’objet d’un consensus s’agissant du droit relatif à la responsabilité des organisations internationales.  Par ailleurs, a-t-il fait observer, il n’existe pas non plus de consensus pour un projet de convention sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. 

Mme ELIZABETH MARYANNE GROSSO (États-Unis) a noté que le développement du droit sur la responsabilité des organisations internationales et la mention « peu fréquente » du projet d’articles ne nécessitait pas d’en faire une convention.  En effet, la représentante a indiqué que, comme la CDI, son pays considérait que le développement progressif du droit en la matière l’emportait sur la codification, car le projet d’articles « ne reflète pas le droit actuel en la matière ».  Au vu des divergences d’opinions, elle a donc réitéré que son pays n’était pas favorable à la transformation du projet d’articles en convention et recommandé de ne plus inclure ce point dans le programme de travail de la Commission. 

Mme WIETEKE ELISABETH CHRISTINA THEEUWEN (Pays-Bas) a jugé qu’il était prématuré de pousser pour l’élaboration d’une convention étant donné que la pratique en la matière est insuffisante pour consolider les projets d’articles.  Elle a également fait remarquer qu’il n’y a pas suffisamment de textes sur le règlement des différends entre les organisations internationales et les personnes privées. 

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a jugé essentielle la coopération entre les États avec l’appui des organisations internationales pour relever les défis actuels.  D’après lui, les projets d’articles de la CDI sont importants pour assurer la stabilité et l’équité, en ce sens qu’ils créent un équilibre entre la responsabilité des organisations internationales et celle des États.  Ils constituent en outre « un grand pas en avant » pour régler les questions des indemnités que les organisations internationales pourraient avoir à verser aux parties lésées.  Le niveau de confiance dans une organisation internationale dépend directement de sa reconnaissance et de son autorité au niveau international, a souligné le délégué, en mettant en garde contre toute tentative d’exonérer lesdites organisations de leur responsabilité pour servir les intérêts particuliers d’un groupe d’États.  Il a relevé que de nombreuses dispositions sont formulées à partir du droit international coutumier et peuvent servir de base à l’adoption d’une convention.  Le Bélarus est d’avis que certaines questions ont encore besoin d’être examinées de manière plus détaillée par les experts, avec la participation des États.  Le délégué a ainsi proposé de créer un comité spécial ou un groupe de travail pour achever les projets d’articles et leur donner la forme d’une convention internationale.

M. AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) s’est dit convaincu de l’importance du projet d’articles de la CDI sur la responsabilité des organisations internationales, mais aussi de la valeur d’autres rapports et avis sur ce sujet, notamment ceux des juges, susceptibles d’enrichir ledit projet.  Le projet d’articles est la « contrepartie » de la responsabilité des États, a-t-il noté, en appelant à la poursuite du débat et en demandant que cette question reste à l’ordre du jour de la Commission, car le projet permet le développement progressif du droit international.  Il représente plus de 60 ans de travail de la CDI et aide à « prévenir toute fragmentation » au niveau de la jurisprudence des tribunaux nationaux sur les responsabilités respectives des organisations internationales et des États, a conclu le délégué.

M. BAHRAM HEIDARI (République islamique d’Iran) a déclaré que le projet d’articles représente, malgré la diversité des organisations internationales, un apport important de la CDI, et qu’il pourrait servir de référence pour les pratiques des organisations internationales.  Il a évoqué la contrainte qui peut être exercée par une organisation internationale sur un État ou une autre organisation internationale. Le délégué a noté que l’absence de mécanismes de règlement des différends en la matière, constitue une lacune en droit international.  Les organisations internationales devraient être mieux encadrées dans un traité pertinent, a-t-il estimé, soutenant l’élaboration d’un instrument contraignant sur la base du projet d’articles de la CDI. 

M. DELGADO FERNANDEZ (Mexique) a vu dans le projet d’articles de la CDI un « progrès normatif capital ».  Ce projet, s’il donnait lieu à une convention, renforcerait selon lui la sécurité juridique.  Le délégué a proposé l’élaboration d’un document de travail qui serait le point de départ pour des discussions plus ciblées.  Ce document listerait ainsi les divergences entre les délégations afin d’avancer sur le fond et d’écarter les « faux débats », comme celui qui consiste à se dire « pour ou contre » une convention.  Il a proposé une fréquence accrue des discussions sur ce point, ainsi que la création d’un groupe de travail.  Il convient de briser le cycle d’inaction, a-t-il conclu.

M. JONATHAN HOLLIS (Royaume-Uni) a considéré que cette question est importante, mais que les pratiques pertinentes sont insuffisantes pour étayer les projets d’articles de la CDI.  En outre, des divergences persistent entre les États quant à ces projets d’articles, notamment sur le fait de savoir dans quelle mesure ils reflètent le droit international coutumier.  Par conséquent, le Royaume-Uni est d’avis que les articles sur la responsabilité des organisations internationales doivent rester en l’état.

Mme STEPHANIE BOTERO PRIETO (Colombie) a salué le travail de la CDI sur le sujet et rappelé le grand nombre d’organisations internationales sur le territoire colombien. La responsabilité des organisations internationales est un domaine qui doit être réglementé, a déclaré la déléguée. Elle a insisté sur la complémentarité du travail de la CDI sur cette question avec celui sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite.  La déléguée a déploré l’inaction des États sur ce point qui est susceptible d’aboutir à un recul de la codification.  Il faut avancer dans la voie d’une convention, a-t-elle plaidé, en appelant à ne pas considérer les différents produits de la CDI séparément les uns des autres.  « Il convient de modifier nos méthodes de travail. »

M. ATTLEB (Égypte) a voulu souligner le rôle essentiel des organisations internationales et régionales en matière de coopération.  Au vu des divergences exprimées lors des débats sur les projets d’articles et de la complexité juridique du sujet, il a jugé important de continuer à délibérer, afin de parvenir à un consensus.  Selon le délégué, il faut faire un distinguo entre la responsabilité des organisations internationales et celle des États Membres. 

M. MORA FONSECA (Cuba) a salué le projet d’articles de la CDI qui représente un effort significatif pour réglementer de manière harmonisée les organisations internationales face à des faits illicites.  Il a néanmoins rappelé que la définition d’organisation internationale dans le règlement des différends doit coïncider avec la Convention de Vienne.  Selon sa délégation, les références aux dommages et préjudices sont des éléments essentiels puisqu’ils résultent en l’obligation de réparation.  En outre, le délégué a souhaité que le libellé « contre-mesures collectives » soit remplacé par « sécurité collective », en lien avec la Charte des Nations Unies.  Les mécanismes de règlement pacifique sont essentiels pour les pays en développement, a-t-il estimé, précisant que son pays respecte les privilèges d’immunité mais exige une responsabilité pénale pour les personnes morales.  Une convention sur la base du projet d’articles, qui devra être claire et contraignante, contribuerait à accroître la certitude juridique, a-t-il conclu. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a souligné la proximité du projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales avec celui sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite.  « Ma délégation est préoccupée par la portée des mécanismes de mise en œuvre de la responsabilité des organisations internationales. »  Il a relevé que le schéma classique suppose que le sujet de droit international qui a subi un dommage -État ou organisation internationale- adresse une réclamation à celui auquel le fait internationalement illicite peut être attribué, dès lors qu’existe un lien de causalité entre le fait internationalement illicite et le dommage.  Estimant que ce principe pose « quelques problèmes de compréhension », le représentant a noté à cet égard que la CDI indique que la responsabilité d’une organisation internationale peut être mise en jeu devant une juridiction nationale. L’analyse de ce projet d’articles laisse à ma délégation un arrière-gout d’inachevé, a-t-il dit.  En conclusion, le représentant a trouvé laborieuse la tentative de structuration du régime spécifique applicable aux organisations internationales.

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a rappelé que les organisations internationales étaient des sujets de droit international et que leur autonomie juridique leur permettait d’accomplir leurs obligations et de produire des effets juridiques.  À l’appui de cette thèse, la déléguée a cité plusieurs décisions de justice de son propre pays, notamment sur la capacité des organisations internationales de conclure des traités.  Elle a rappelé les prérogatives dont bénéficiaient les organisations internationales et leurs agents et le principe de responsabilité qui en découlait, au même titre que pour les États.  La déléguée s’est donc dite favorable au maintien de ce sujet à l’ordre du jour de la Sixième Commission, notant que plusieurs décisions de justice internationale importantes ont fait spécifiquement référence au projet d’articles de la CDI.

Mme ESTELA MERCEDES NZE MANSOGO (Guinée équatoriale) a salué les efforts de la CDI pour la codification du droit, notamment sur la question de la responsabilité des organisations internationales qui est particulièrement pertinente.  Néanmoins, elle a estimé qu’il est prématuré à ce stade d’élaborer une convention basée sur le projet d’articles.

Mme BETELIHEM TAYE (Éthiopie) a considéré qu’au vu des « diktats » du droit international sur l’immunité des organisations internationales, il était nécessaire d’établir un cadre juridique pour s’assurer d’une mise en œuvre de l’obligation de rendre des comptes en cas d’abus et de comportement « qui ne relèveraient pas de l’immunité fonctionnelle » de ces organisations. Dans le même temps, la représentante s’est dite consciente de la possibilité d’une application « mal intentionnée » d’une telle obligation et a souligné que pour combler cette lacune il faudrait s’appuyer sur « des considérations pratiques ». Elle a donc appelé la Sixième Commission à poursuivre son examen de la question et la CDI à revoir ce sujet et se pencher sur d’autres points, notamment sur la responsabilité des organisations internationales régionales. 

Mme ANNA V. ANTONOVA (Fédération de Russie) a trouvé le projet d’articles de la CDI intéressant.  Elle a attiré l’attention sur l’importance de l’article 32 en vertu duquel une organisation internationale responsable ne peut se prévaloir de ses règles pour justifier un manquement aux obligations qui lui incombent, particulièrement envers ses États membres.  Or les cas se sont multipliés récemment, a-t-elle déploré, citant à titre d’exemple la création de « mécanismes attributifs illégitimes avec pouvoir quasi policier », tels que les mécanismes d’enquête pour le Myanmar et la Syrie.  Ces mécanismes « illicites », a dit la représentante, peuvent entraîner la responsabilité de l’organisation fondatrice.  Selon elle, le projet de la CDI contient un principe important de responsabilité internationale et il serait inapproprié que les organisations jouissent d’une immunité pour tous leurs actes.  L’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles permettrait de combler des lacunes juridiques, a-t-elle concédé, notant toutefois qu’un échange de vues sur cette question ne presse pas.  Étant donné « le précédent des crimes contre l’humanité », sa délégation propose de continuer l’examen approfondi et détaillé de cette question dans le cadre d’une reprise de session de la Sixième Commission en 2025. 

Mme THI PHUONG HA TRAN (Viet Nam) a salué le projet d’articles de la CDI sur la responsabilité des organisations internationales, avant de souligner la proximité dudit projet avec celui sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite.  Les États et les organisations internationales ne peuvent néanmoins pas être assujettis aux mêmes règles, a-t-elle dit.  Estimant que certains articles sont ambigus, la déléguée a demandé que ce point reste à l’ordre du jour afin que les discussions puissent se poursuivre.

RENFORCEMENT ET PROMOTION DU RÉGIME CONVENTIONNEL INTERNATIONAL

Débat général 

M. HAYLEY-ANN MARK (Saint-Vincent-et-les Grenadines), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a salué la possibilité de discuter des meilleures pratiques des dépositaires de traités multilatéraux.  Elle a rappelé leur fonction importante, sachant qu’ils doivent agir de manière impartiale. Elle a regretté le déséquilibre géographique dans l’enregistrement des traités et estimé que la simplification des procédures d’enregistrement permettra sans doute d’accélérer le processus. La déléguée a espéré que la publication des traités pourra également faire l’objet d’une modernisation, ce qui permettrait de rattraper le retard pris dans le multilinguisme.  À cet égard, elle a demandé que les six langues officielles de l’ONU soient traitées sur un pied d’égalité.

M. SEBASTIAN BYTH-VISHOLM (Danemark), au nom des pays nordiques, a expliqué que leurs pays étaient dépositaires de plusieurs traités multilatéraux, notamment d’instruments les concernant directement.  Il a noté que la synthèse de la pratique du Secrétaire général en tant que dépositaire de traités multilatéraux fournissait des indications importantes sur la pratique de l’ONU en la matière.  Pour les pays nordiques, il est important que le rôle des dépositaires dans l’enregistrement des traités soit explicitement reconnu, et que l’utilisation accrue des méthodes électroniques modernes d’enregistrement et de publication soit dûment prise en considération.  À ce titre, le représentant s’est félicité de la poursuite des discussions sur un système d’enregistrement des traités en ligne. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine), s’exprimant au nom de de l’Autriche, du Brésil, de l’Italie, de Singapour et de son pays, a rappelé que sa délégation avait demandé l’inscription de ce point à l’ordre du jour pour plusieurs raisons, notamment pour réfléchir aux amendements à appliquer à l’Article 102 de la Charte des Nations Unies relatif à l’enregistrement des traités et pour permettre un échange de vue entre les États Membres et la diffusion des bonnes pratiques parmi les dépositaires de traités multilatéraux.  Le délégué a rappelé que ceux-ci doivent agir de manière impartiale et apolitique dans l’exercice de leurs fonctions.  Si chaque organisation ayant ce rôle a développé ses propres pratiques, ces dernières doivent toujours être guidées par la Convention de Vienne.  Avec plus de 600 traités multilatéraux, l’ONU est le principal dépositaire pour les traités multilatéraux, a rappelé le délégué, soulignant que son rôle va dorénavant au-delà du rôle traditionnel d’un dépositaire. Le Secrétaire général conseille les États membres sur les questions relatives aux traités et encourage à leur diffusion, ce qui renforce le régime conventionnel international, a-t-il apprécié. Toutefois, il a regretté que des ateliers sur ces pratiques n’aient pas été organisés depuis 2016. 

Mme NAUSHYN JANAH (Nouvelle-Zélande), au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a souligné que l’enregistrement facile d’accès et la publication des traités sont des éléments importants d’un ordre international fondé sur des règles.  Elle a rappelé que les articles 76 à 80 de la Convention de Vienne sur le droit des traités précisent les fonctions de dépositaires des traités.  Ces dispositions constituent le point de départ de toute bonne pratique dans ce domaine, a dit la déléguée.  Elle a rappelé que, selon l’article 76 de la Convention précitée, le dépositaire est tenu d’agir impartialement dans l’accomplissement de ses fonctions.  Elle a enfin précisé que la Nouvelle-Zélande est dépositaire de 11 traités multilatéraux, l’Australie de huit et le Canada de neuf.  « Publier en ligne les informations pertinentes sur les traités permet de faciliter l’accès à ces textes. »

M. YONG-ERN NATHANIEL KHNG (Singapour) a pris note du fait que l’une des meilleures pratiques parmi les dépositaires de traités consiste aujourd’hui à utiliser la technologie pour promouvoir une plus grande transparence et efficacité.  Il a recommandé de s’inspirer de l’expérience des principaux dépositaires de traités multilatéraux, notamment le Secrétaire général de l’ONU et le Secrétaire général de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN).  Ce dernier fait office de dépositaire de divers traités multilatéraux liés à l’ASEAN, y compris des traités impliquant des parties prenantes externes. Le Secrétariat de l’ASEAN exploite également la technologie dans l’exercice de ses fonctions.  Selon le représentant, tous les États peuvent contribuer à rendre l’enregistrement et la publication des traités plus efficients.  Dans le cas de l’ONU, il suggéré d’offrir des « traductions de courtoisie », dans au moins une des langues de travail de l’ONU, pour faciliter les processus d’enregistrement et de publication qui seront entrepris. 

Mme DOROTHY PATTON (États-Unis) a indiqué que les États-Unis sont dépositaire de plus de 200 traités multilatéraux et qu’ils ont adopté la diffusion électronique, qui est un moyen efficace de mettre à jour les informations, en particulier sur le statut des traités.  La déléguée a encouragé l’adoption de ces fonctionnalités électroniques pour tous les dépositaires.

Mme FANNY RATHE (Suisse) a fait part de la pratique de son propre pays en tant que dépositaire de près de 80 traités multilatéraux.  La Suisse était notamment dépositaire des Conventions de Genève pour la protection des victimes de guerre et de leurs Protocoles additionnels ou encore de la Convention de Washington sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.  La déléguée a rappelé que les principales tâches du dépositaire se résumaient à la publicité d’une part, et à l’impartialité d’autre partL’obligation de publicité a trait à l’enregistrement et au devoir d’information et de publication des textes, tandis que l’impartialité a trait à l’exercice indépendant du rôle de dépositaire eu égard aux autres parties, ou celles intéressées à le devenir, a-t-elle résumé.  En conclusion, « l’État dépositaire doit distinguer clairement son rôle de dépositaire de sa position en tant qu’État partie. » 

M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a salué les efforts du Secrétariat visant à améliorer la base de données électronique des traités internationaux et à garantir leur accessibilité au grand public.  Il a réaffirmé l’importance de l’Article 102 de la Charte, qui fournit la base juridique pour l’enregistrement et la publication des traités internationaux. Ce processus contribue au bon respect des obligations que contiennent les traités, clef de la stabilité de l’ordre juridique international.  Si certains aspects de l’article précité peuvent être révisés, les amendements apportés devront bénéficier du soutien massif des États Membres, reflétant leurs opinions générales, a prévenu le délégué.  À ce titre, il a appuyé les propositions compatibles avec la Convention de Vienne sur le droit des traités, notamment pour préserver le multilinguisme à l’ONU. Il a aussi soutenu la disposition qui permet de fournir une traduction volontaire dans l’une des six langues officielles de l’Organisation, afin d’accélérer le processus de publication.  Reconnaissant que la modification des règles existantes en vue de garantir la traduction des traités internationaux dans toutes les langues officielles de l’ONU entraînera des coûts financiers, le délégué a toutefois défendu cette approche conforme au principe du multilinguisme.  Il s’agit de mieux répondre aux objectifs du régime des traités internationaux, a-t-il estimé. 

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a souligné la nécessité d’avoir des procédures claires d’enregistrement des traités, en renvoyant à l’Article 102 de la Charte.  La technologie est un outil utile à cette fin, a déclaré le délégué. Il a noté les retards de traduction avant la publication des traités et appelé à la préservation du multilinguisme. Mon pays est dépositaire de 15 instruments internationaux, a-t-il indiqué, en ajoutant qu’un système électronique de signature a été récemment mis en place.  « Le changement est la seule chose qui ne change pas et le droit des traités n’échappe pas à la règle », a conclu le délégué, en souhaitant que la Commission dispose d’un rapport du Secrétaire général sur la question.

Mme MELINA LITO (Royaume-Uni) a fait savoir que son pays est attaché au régime conventionnel international, en particulier en tant que dépositaire de plus de 50 traités multilatéraux.  Il est convaincu que tous les États bénéficient de la stabilité offerte par la Convention de Vienne sur le droit des traités.  S’agissant des meilleures pratiques, la déléguée en a fait valoir trois en se fondant sur l’expérience du Royaume-Uni: l’obligation d’agir avec impartialité, en faisant bien la distinction entre la fonction de dépositaire et celle d’État partie à un traité; l’importance d’un service efficace permettant d’enregistrer une copie électronique des instruments; et l’accessibilité et la mise à jour des enregistrements.  Le Royaume-Uni s’est engagé à faire preuve de transparence à propos des données de traités qu’il gère en tant que dépositaire et il dispose d’un site Internet dédié, a ajouté la déléguée.

Mme STEPHANIE BOTERO PRIETO (Colombie) a fait remarquer que son pays est dépositaire de plusieurs traités et qu’il a bien conscience des responsabilités que ce rôle lui confère.  La Convention de Vienne constitue le meilleur outil pour répondre aux questions sur ce sujet, a-t-elle poursuivi, rappelant que les amendements, tels que ceux relatifs au multilinguisme et à la publication limitée des traités, doivent être compatibles avec les principes de la Convention.  Soutenant tout effort de modernisation de la Convention de Vienne, sa délégation écoutera toute proposition en ce sens, a assuré la déléguée. 

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines), déclarant respecter fidèlement les obligations en vertu de l’Article 102 de la Charte, a appuyé le maintien à l’ordre du jour de la Commission de la question du renforcement et de la promotion du régime conventionnel international.  La représentante a indiqué que son pays avait, l’an dernier, déposé sept instruments conventionnels auprès du Secrétaire général, dont la ratification de la Convention des Nations Unies sur l’utilisation de communications électroniques dans les contrats internationaux et la ratification de l’Amendement au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone.  Les Philippines ont, en outre, signé l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. 

Mme KEKE MANTSHO ANNASTACIA MOTSEPE (Afrique du Sud) s’est félicitée de l’amendement au règlement de l’Article 102 de la Charte qui consacre le rôle d’autres dépositaires que le Secrétaire général.  Dans le règlement, les dépositaires sont encouragés à enregistrer les traités, a-t-elle remarqué, mais sa délégation pense que l’enregistrement devrait être une obligation.  Par ailleurs, le retard préoccupant dans l’enregistrement et la publication des traités pourrait être éliminé par l’utilisation des nouveaux moyens technologiques, a-t-elle estimé.  La déléguée a appuyé un système d’enregistrement en ligne, avec des ajustements pour les pays en développement qui ont difficilement accès aux technologies de l’information et de la communication. 

M. MORA FONSECA (Cuba) a rappelé que les traités sont l’une des sources principales du droit international et appuyé le travail de la Section des traités.  Il a souligné l’importance des séminaires organisés par cette section.  Les ressources électroniques permettent de surmonter certaines difficultés, notamment en ce qui concerne la compilation des traités, a fait valoir le délégué.  Il a appelé à préserver le multilinguisme et souligné le pied d’égalité sur lequel sont placées les six langues officielles de l’ONU.  L’enregistrement et la publication des traités dans l’une des six langues devrait être possible, a conclu le délégué, en notant les gains de temps et de ressources financières que cela permettrait.

Mme ZHAO YANRUI (Chine) a jugé bienvenu le partage de bonnes pratiques. La Chine est dépositaire de traités multilatéraux et s’engage à honorer ses fonctions.  À cet égard, la déléguée a invité la Section des traités à accompagner au mieux les pays dépositaires.  Sur le point du multilinguisme, elle a insisté sur la nécessité de traductions « faisant foi » en chinois des traités non encore traduits. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a rappelé que les discussions de la Sixième Commission sur cette question avaient pour but de « renforcer l’ordre juridique international ».  Les traités et accords internationaux doivent être enregistrés et publiés dans les délais prévus pour garantir la sécurité juridique, a-t-elle ajouté, se félicitant de l’adoption d’un amendement de l’Assemblée générale qui a permis de moderniser les méthodes de travail applicables à l’enregistrement et la publicité de traités internationaux, en donnant le choix entre un format électronique ou un format papier.  La représentante a jugé favorablement la proposition de l’Assemblée visant à permettre au Secrétariat d’élaborer un « recueil électronique des traités ».  Appelant le Secrétariat à continuer d’aider les États Membres à renforcer leurs capacités en la matière, elle a salué l’organisation d’ateliers sur le droit des traités, qui doivent être pérennisés malgré les difficultés de financement actuelles, a-t-elle insisté. Elle a conclu son intervention en demandant un renforcement de la Section des traités, en appui du travail de la Sixième Commission.

Mme NUR AZURA ABD KARIM (Malaisie) a souligné que l’enregistrement et la publication des traités sont des éléments importants pour la transparence des relations internationales, renvoyant à cet égard à l’Article 102 de la Charte et à l’article 80 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.  L’enregistrement et la publication de tout traité par le dépositaire doit être encouragé et n’est pas obligatoire, conformément à l’article 77 de ladite Convention, a-t-elle rappelé.  Compte tenu des retards du Secrétariat dans l’enregistrement et la publication des traités, il serait avantageux de revoir l’obligation de traduction en français et en anglais, a conclu la déléguée.

Mme ELISA DE RAES (Belgique) a rappelé que son pays est dépositaire de nombreux traités multilatéraux, ainsi que de conventions conclues dans le cadre du Benelux et des Communautés européennes.  La Belgique met en œuvre ses responsabilités en tant que dépositaire selon les articles pertinents de la Convention de Vienne qui prescrivent d’agir en toute impartialité, a-t-elle informé, assurant que son pays s’occupe également de l’enregistrement des traités auprès de l’ONU et de la mise à jour de la liste des parties prenantes.  La représentante a cité plusieurs traités dont la Belgique est dépositaire, notamment l’Organisation mondiale des douanes, plusieurs protocoles pour la sécurité aérienne dans le cadre d’Eurocontrol, l’accord ferroviaire pour l’Eurotunnel entre la Belgique, le Royaume-Uni et la France, plusieurs traités historiques en matière de droit maritime, une multitude d’accords et de protocoles du Bénélux sur la propriété intellectuelle et les visas, ou encore l’accord sur le statut des missions et des représentants d’États tiers auprès de l’OTAN.  Enfin, elle a mentionné que la Belgique a été désignée comme dépositaire de la récente Convention de Ljubljana-La Haye pour la coopération internationale en matière d’enquête et de poursuite du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et autres crimes internationaux, appelant les États à signer et ratifier cet instrument.

Mme AJILEYE ABIMBOLA (Nigéria) s’est félicitée des amendements apportés aux articles 5, 7, 9 et 13 du règlement qui facilitent le dépôt électronique de traités.  Malgré les divergences sur ce point, la déléguée a exhorté les États Membres à accepter le dépôt électronique des traités.  Des procédures simplifiées d’enregistrement et de publicité lui ont semblé indispensables pour trouver une solution pérenne à la question du retard accumulé.  Quant à l’hétérogénéité géographique, la déléguée a noté qu’elle s’explique par l’absence de ressources adéquates qui entravent les dépôts.  Elle a rappelé l’importance de l’assistance technique, en particulier aux pays en développement, afin qu’ils puissent remplir leurs obligations.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a salué les efforts de la Commission qui ont permis, a-t-il noté, d’aboutir à un consensus sur la mise en place d’un outil d’enregistrement des traités en ligne qu’il a qualifié de « saut significatif » et d’« élément structurant de la diffusion du droit international ». Il a toutefois rappelé les besoins importants en termes d’assistance technique, de renforcement des capacités et d’ateliers de formation des pays en voie de développement sur les questions d’enregistrement, de publication des traités, et plus généralement de pratique conventionnelle, afin de promouvoir ce qu’il a appelé « un régime conventionnel fort et inclusif ».  Concernant l’utilisation des nouvelles technologies, il a mis en garde contre les problèmes de sécurité posés par la numérisation des traités et invité à la mise en place de processus d’accès sécurisés pour garantir l’intégrité des données conventionnelles – une approche susceptible, a-t-il par ailleurs noté, de générer des « coûts additionnels ».  Le représentant a en outre insisté sur le rôle essentiel du multilinguisme et demandé que les traités soient publiés au moins dans toutes les langues officielles, à la charge du Secrétariat, pour rendre ces documents importants « accessibles à tous ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les délégations débattent des moyens d’empêcher que l’espace ne devienne le prochain théâtre de conflits

Soixante-dix-huitième session,
16e séance - matin
AG/DSI/3722

Première Commission: les délégations débattent des moyens d’empêcher que l’espace ne devienne le prochain théâtre de conflits

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a affiché, ce matin, les divergences des États Membres en matière de sécurisation de l’espace extra-atmosphérique, que les pays qualifient volontiers de patrimoine commun de l’humanité, ou encore de sanctuaire dont les ressources ne doivent être exploitées qu’à des fins pacifiques.  Ce n’est pas tant la nécessité d’établir un instrument juridiquement contraignant de prévention d’une course aux armements dans l’espace -agréée par tous les intervenants du jour-, que les voies à emprunter pour y parvenir qui ont été débattues aujourd’hui.   

Comme souvent à la Première Commission, les positions des Occidentaux et de la Fédération de Russie ont été exposées dans des termes très marqués.  Une position médiane s’est fait entendre, à travers les déclarations de délégations aussi diverses que l’Allemagne, la Malaisie -au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)-, la Suède, les Pays-Bas ou encore les Philippines.  Pour ces pays, les délégations leaders sur les questions spatiales doivent renoncer à soumettre des projets de résolution concurrents, dont l’adoption aurait pour effet dommageable de dédoubler les processus de délibérations, les petites délégations ne disposant pas des ressources humaines pour courir plusieurs lièvres à la fois.   

En outre, le Président du Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) sur la réduction des menaces spatiales a dressé le bilan de quatre sessions de fond tenues depuis 2022 et ponctuées, a-t-il regretté, par l’impossibilité de parvenir à un rapport sur la base du consensus.  M. Hellmut Lagos a souligné que l’objectif de remettre à l’Assemblée générale un tel rapport n’avait pu être atteint en raison du rejet de la Russie de la notion même de comportement responsable dans l’espace.   

L’Union européenne et le Royaume-Uni, porteurs d’une vision pragmatique et axée sur l’application du droit international dans le domaine spatial, ont contesté à la Russie la portée du concept de non-placement en premier d’armes dans l’espace, concept socle d’un projet de traité sino-russe proposé à la Conférence du désarmement.  Pour le Royaume-Uni, ce concept de non-placement en premier n’est pas suffisant pour ouvrir des négociations sur un nouvel instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.   

Pour la représentante de l’Union européenne, les traités des Nations Unies sur l’espace et le droit international humanitaire sont applicables à l’espace, à l’image notamment du Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967.  Pour les États membres de l’Union, la recrudescence de problèmes de sécurité spatiale incite, en l’état, à privilégier une approche pragmatique basée sur la définition de comportements responsables.  Il s’agit là de la voie la plus rapide pour progresser collectivement dans le domaine de la sécurité spatiale, a fait valoir la représentante européenne.  Saluant la richesse des travaux menés par le Groupe de travail présidé par M. Lagos, elle a appelé les délégations à soutenir en nombre le projet de résolution du Royaume-Uni visant à établir un nouveau Groupe de travail chargé de poursuivre ces travaux conceptuels.   

La Fédération de Russie a répliqué en soutenant qu’il devient urgent d’élaborer un instrument juridiquement contraignant en raison du lancement par les États-Unis et leurs alliés occidentaux d’armements dans l’espace à même d’attaquer des objets spatiaux.  Son représentant a dénoncé « des opérations qui portent atteinte à la paix et à la sécurité internationales » et condamné « l’utilisation provocatrice de satellites civils » par les États-Unis.   

Le représentant britannique s’est voulu confiant dans le fait que les discussions qui se tiendront dans le futur Groupe de travail sur la réduction des menaces spatiales seront enrichies par les progrès considérables réalisés sous la houlette de M. Lagos.  « Notre compréhension collective de l’application dans l’espace du droit international et des menaces pesant sur les systèmes spatiaux a été très nettement améliorée grâce aux travaux du Groupe », a-t-il déclaré.   

En début de séance, la Première Commission avait entendu les derniers orateurs désireux de s’exprimer sur le thème des armes de destruction massive autres que les armes nucléaires.   

Par ailleurs, plusieurs délégations ont exercé une fois encore leur droit de réponse, notamment sur la crise en cours au Moyen-Orient.   

La Première Commission poursuivra demain, à partir de 10 heures, son débat sur les aspects du désarmement de l’espace extra-atmosphérique. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR 

Autres armes de destruction massive (fin) 

Déclarations 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a considéré que la menace nucléaire ne doit pas occulter celle des autres armes de destruction massive, lesquelles représentent également une menace existentielle pour la sécurité internationale.  Estimant que les normes pour prévenir leur utilisation sont solides, le représentant a toutefois souligné qu’elles ne préviennent pas la probabilité qu’un groupe terroriste ou un acteur solitaire mette la main sur ces armes.  Saluant la destruction des stocks déclarés d’armes chimiques, il a cependant estimé que la menace persiste.  Dans ce cadre, il a déploré l’échec des deux dernières Conférences d’examen de la Convention sur les armes chimiques (CIAC).  Conformément à cette dernière, il a préconisé la coopération internationale et l’assistance dans le domaine de la chimie et des utilisations non prohibées.   

Le représentant s’est félicité du succès de la neuvième Conférence d’examen de la Convention sur l'interdiction des armes biologiques (CIABT), estimant qu’elle marquait une étape importante pour combler les importantes lacunes du Traité, notamment en vue de la création d’un mécanisme d’éradication reposant sur un protocole juridiquement contraignant.  Il a également appelé au contrôle à l’exportation des matières à double usage qui pourraient être utilisées pour fabriquer des armes de destruction massive, ainsi qu’à la surveillance des technologies émergentes qui pourraient permettre la mise au point de nouveaux types d’armes.   

Rappelant que, par le passé, son pays a mené un programme d’armes chimiques en infraction de la CIAC, le représentant a mentionné une usine située dans le sud du Myanmar, qui fabriquait du gaz moutarde dans les années 1980.  Le Gouvernement civil élu a été informé de la situation il y a quelques années seulement, a‑t‑il poursuivi, déplorant que l’armée ait mis fin à l’enquête suite à son coup d’État en 2021.  Estimant que l’armée peut elle-même constituer une menace, il a exhorté la communauté internationale à prévenir l’acquisition d’articles à double usage par la junte.   

Mme NOHRA MARIA QUINTERO CORREA (Colombie) a salué l’étape importante marquée par la destruction de tout l’arsenal chimique déclaré, estimant qu’il s’agit d’un grand succès pour l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) et la mise en œuvre de la CIAC.  La représentante a appelé à ce que l’OIAC se concentre désormais sur les questions liées à l’assistance et à la coopération internationales.  À ce titre, il a mentionné les efforts du Secrétariat technique de l’OIAC pour renforcer les capacités des États parties en matière de protection contre les armes chimiques.  Toutefois, elle a déploré que la dernière Conférence d’examen de la Convention n’ait pas abouti à l’adoption d’un rapport final.  Appelant à un consensus en vue de la prochaine Conférence d’examen, elle a assuré que son pays continuerait à veiller à la répartition géographique ainsi qu’à l’égalité des sexes au sein du Secrétariat technique comme dans ses activités et programmes.   

Soulignant l’importance historique de la CIABT pour le régime de désarmement et de non-prolifération des armes de destruction massive, la représentante a rappelé qu’il s’agissait du premier traité multilatéral à interdire une catégorie entière d’armes.  Se félicitant du consensus atteint lors de la neuvième Conférence d’examen de la Convention, elle a salué le rapport présenté à la Première Commission par le Président de la Conférence, M. Leonardo Bencini.  Elle a notamment mis en exergue la formation d’un Groupe de travail, chargé d’examiner des mesures concrètes, éventuellement contraignantes, avec pour objectif de renforcer la Convention.   

La Colombie contribue à renforcer l’application de la CIABT au niveau national, notamment par sa participation au projet « Renforcer la biosûreté et la biosécurité en Amérique latine conformément à la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité des Nations Unies », a encore déclaré la représentante.   

M. HONG LI, de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), a rappelé que l’OIAC est une organisation multilatérale qui vérifie depuis 26 ans la destruction des armes chimiques déclarées par les États parties.  Il s’est félicité de la destruction cet été des derniers stocks d’armes chimiques déclarés.  Il a rappelé que l’OIAC surveille aussi 5 000 sites dans plus de 80 pays.   

Toutefois, a poursuivi le représentant, l’OIAC ne saurait se reposer sur ses lauriers.  En effet, sept États n’ont toujours pas adhéré à la CIAC et, lors de la dernière décennie, les armes chimiques ont été utilisées.  À cet égard, le dossier des armes chimiques syrien est à notre ordre du jour depuis 10 ans, a‑t‑il rappelé.  De plus, de nombreux aspects restent à clarifier concernant notamment les technologies émergentes, qui offrent des opportunités, mais aussi des défis.  L’Organisation s’est lancée dans un processus d’adaptation, marqué en particulier par la création cet été d’un nouveau centre de chimie et technologie.   

Le représentant a souligné que la cinquième Conférence d’examen de la CIAC avait ouvert un nouveau chapitre postdestruction.  Pour l’avenir, empêcher la réémergence des armes chimiques est notre priorité, a‑t‑il expliqué.  Telle est notre mission à l’OIAC pour les générations futures, ainsi que pour la paix et la sécurité internationales, a‑t‑il conclu.   

Droits de réponse 

Le représentant des États-Unis a estimé que les campagnes de désinformation russes n’ont pas d’autres effets que de saper les travaux des instances du désarmement multilatéral.  Le réseau des laboratoires que nous accompagnons ne vise que la réduction des menaces biologiques, de quelque nature que ce soit, a‑t‑il insisté.   

Le représentant de la Fédération de Russie a réagi à l’intervention des États-Unis en rejetant toute accusation quant à la mise au point d’armes biologiques par son pays.  Il s’est ensuite dit las et fatigué d’entendre les mêmes réponses aux questions de sa délégation quant aux activités biologiques conduites sur le territoire ukrainien avec le soutien des États-Unis.  Nos questions sont fondées et posées dans le cadre strict des conventions pertinentes, a‑t‑il insisté.   

Le représentant des États-Unis a répondu à la Russie que le principal élément contrevenant à la santé publique en Ukraine relève de leur invasion militaire.   

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté les accusations concernant les causes de la crise en Ukraine, estimant que la crise sanitaire dans ce pays et l’effondrement de son système de santé avaient commencé bien avant l’opération militaire spéciale en 2022.  Cette destruction a été mentionnée dès les années 2010, a‑t‑il considéré, estimant qu’elle coïncide avec une aide apportée par les États-Unis dans le domaine de la santé biologique et accusant les États-Unis d’avoir alors nommé directement les ministres de la santé ukrainiens dans le but de détruire le système de santé national.  Déplorant le manque de réponses à ses questions concernant les armes biologiques et à toxines, il a ajouté que le consensus fait défaut à ce propos, citant en appui le rapport de la réunion consultative de la CIABT de l’année dernière.   

Espace extra-atmosphérique (aspects du désarmement) 

Déclarations 

M. HELLMUT LAGOS, Président du Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales grâce à des normes, règles et principes de comportements responsables, a présenté le processus multilatéral de fond du Groupe, qui avait été mandaté par l’Assemblée générale pour travailler sur la base du consensus.  Il a notamment indiqué que les recommandations sur les normes en question devaient ouvrir la voie à la négociation d’un instrument juridiquement contraignant pour prévenir la course aux armements dans l’espace.   

S’il a indiqué qu’au cours des sessions de fond le débat a été de plus en plus direct entre délégations, lesquelles auront bénéficié des vues indispensables des experts sur des questions aussi techniques, M. Lagos n’a pu que reconnaître que le Groupe n’a pas été en mesure d’achever ses travaux cet été par l’adoption d’un rapport sur la base du consensus.  Pour une délégation en particulier, le concept même de comportement responsable n’était pas acceptable, a‑t‑il signalé.  Il a toutefois souligné que la richesse des discussions, notamment sur la nécessité urgente de faire face aux nouvelles menaces spatiales, qui sont désormais beaucoup mieux appréhendées par les États Membres, avait jeté les bases d’une discussion à prolonger dans le cadre des travaux du futur groupe.  Il est dans l’intérêt de tous de préserver les usages pacifiques de l’espace, cela les pays en sont conscients, a‑t‑il conclu.   

M. MOCHAMMAD IQBAL SIRIE (Indonésie), au nom du Mouvement des pays non alignés, a souligné le droit souverain des États dans l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques.  Le représentant a exprimé sa vive inquiétude face aux menaces qui pèsent sur la paix et la sécurité internationales du fait de l’éventuelle militarisation de l’espace extra-atmosphérique ou de sa transformation en un domaine de guerre et de conflits armés.  Il a réaffirmé l’urgence d’entamer des négociations de fond à la Conférence du désarmement sur un instrument juridiquement contraignant et multilatéralement vérifiable sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects.   

En revanche, le Mouvement des pays non alignés rejette la déclaration faite par les États-Unis en 2018 selon laquelle « l’espace est un domaine de guerre » ou « le prochain champ de bataille ».  Il prend note d’un projet de traité sur la prévention du placement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique, de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux.  Il exprime sa forte déception sur le fait que le consensus sur le projet de rapport final du Groupe d’experts gouvernementaux (GEG) ait été bloqué par les États-Unis tout en notant qu’il aurait pu représenter une bonne base pour de nouvelles négociations en vue de l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant.   

Le représentant a aussi fait part de l’inquiétude du Mouvement des pays non alignés concernant les implications négatives du déploiement de systèmes de défense antimissiles balistiques (ABM) et de la menace d’une militarisation de l’espace extra-atmosphérique.  L’abrogation du Traité sur les systèmes antimissiles balistiques a posé de nouveaux défis à la prévention d’une course aux armements dans l’espace, a‑t‑il déclaré.  Pour le Mouvement des pays non alignés, les mesures de confiance volontaires ne peuvent ni remplacer ni conditionner la conclusion rapide d’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  À cet égard, le représentant s’est félicité de l’adoption, lors de la session de fond de 2023 de la Commission du désarmement de l’ONU, de recommandations visant à promouvoir la mise en œuvre pratique de la Convention sur la prévention des conflits dans l’espace extra-atmosphérique dans le but de prévenir une course aux armements dans l’espace, conformément aux recommandations énoncées dans le rapport du GEG sur cette question.   

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), s’est d’abord félicité de ce que la Commission du désarmement ait pu cette année aboutir à un résultat consensuel concernant des mesures de transparence et de confiance en matière de prévention d’une course aux armements dans l’espace.  S’il a ensuite déploré que le Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) sur la sécurité spatiale ait achevé ses travaux sans parvenir à un document final consensuel, le représentant a souhaité une poursuite des travaux sur cette question s’appuyant sur les résultats substantiels du Groupe.  Sur ce point, il a plaidé pour un processus ouvert, inclusif, transparent, durable et souple pour toutes les discussions sur l’espace tenues dans le cadre onusien.   

À cet égard, l’ASEAN est préoccupée par les propositions visant à établir des processus parallèles sur le même sujet, ce qui représenterait un défi difficilement surmontable pour les pays en développement aux ressources limitées.  L’ASEAN exhorte donc les États Membres à trouver une solution pour éviter un tel chevauchement.  Après avoir reconnu les progrès significatifs réalisés par le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et le Bureau des affaires spatiales des Nations Unies dans la promotion de la coopération internationale en matière d’utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, le représentant a jugé que les activités dans l’espace ne doivent pas rester l’apanage exclusif d’un petit groupe d’États.   

M. MOHAMMED LAWAL MAHMUD (Nigéria), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a appelé à ce que l’espace extra-atmosphérique et les corps célestes soient considérés comme un patrimoine commun de l’humanité.  À ce titre, ils devraient être explorés et utilisés à des fins pacifiques dans l’intérêt de tous les États Membres, quel que soit leur niveau de développement social, économique ou scientifique.  Soulignant l’importance de parvenir à un instrument juridiquement contraignant pour prévenir une course aux armements dans l’espace, le représentant a préconisé un accord qui permettrait d’explorer l’espace extra-atmosphérique sur la base des principes de non-appropriation et d’utilisation pacifique, conformément aux cinq traités des Nations Unies régissant les activités spatiales. 

Saluant la résolution 76/23 de l’Assemblée générale sur le « Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier » et celle visant à la « prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique », le représentant a estimé que les deux textes précisent l’importance de la lutte contre une course aux armements.  Il a également mentionné la résolution 73/72, sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, qui réaffirme que l’enjeu de ce problème n’est autre que le maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Appelant tout particulièrement à ce que l’espace extra-atmosphérique soit exempt d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive, le représentant a souligné l’importance du respect des accords existants dans ce domaine, y compris les traités bilatéraux.  Exhortant au démarrage de négociations sur un instrument juridiquement contraignant, au sein de la Conférence du désarmement, il a rappelé l’adoption par l’Union africaine (UA) d’un cadre politique pour la promotion d’un espace extra-atmosphérique africain.  À cet égard, il a appelé les Nations Unies à soutenir un accès égal et non discriminatoire à l’espace extra-atmosphérique pour toutes les nations.  Enfin, il a partagé ses préoccupations sur la création de débris spatiaux résultant de la destruction délibérée de systèmes orbitaux, estimant que ce problème devrait figurer parmi les priorités du travail des Nations Unies.   

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI(Jordanie), au nom du Groupe des États arabes, a appelé à un cessez-le-feu à Gaza avant de dire que le Groupe des États arabes est convaincu que l’espace extra-atmosphérique doit être utilisé à des fins exclusivement pacifiques.  L’espace extra-atmosphérique est un patrimoine commun, en conséquence toute activité qui y est menée doit être soumise à l’accord des autres nations, a poursuivi le représentant, qui a noté qu’aucune obstruction ne devrait être opposée aux droits légitimes de tout État et que l’espace extra-atmosphérique devait rester exempt de conflit.  À cet égard, l’instrument juridiquement contraignant que le Groupe des États arabes appelle de ses vœux doit interdire le développement d’armes dans l’espace.   

Par ailleurs, le représentant a réitéré l’importance de la coopération interétatique en la matière.  Il a pris acte des progrès réalisés en lien avec le débat thématique du GEG et il s’est félicité de l’établissement d’un GEG qui pourrait faire avancer les contributions.  Il a pris bonne note des travaux menés sous l’égide du GTCNL et a pris note de son rapport final.   

Mme CARINE CLAEYS, de l’Union européenne, a d’abord indiqué que les Traités des Nations Unies sur l’espace et le droit international humanitaire sont applicables à l’espace, à l’instar notamment du Traité sur l’espace extra-atmosphérique.  L’UE et ses États membres reconnaissent l’espace extra-atmosphérique comme un bien commun mondial devant être utilisé au profit de l’ensemble de l’humanité, a‑t‑elle ajouté.   

La représentante a souligné que l’espace extra-atmosphérique avait été l’objet d’une recrudescence de problèmes de sécurité ces dernières années, les menaces réelles et perçues se multipliant et mettant en danger la durabilité de l’environnement spatial et la fourniture sûre et sécurisée des services essentiels dont dépend la communauté mondiale à ce niveau.  Pour l’Union européenne, il convient en l’état de privilégier une approche pragmatique basée sur la définition de comportements responsables.  Il s’agit là de la voie la plus rapide pour progresser collectivement dans le domaine de la sécurité spatiale, a fait valoir la représentante.   

La représentante a ensuite salué les déclarations communes et les initiatives interrégionales qui ont permis, au sein du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales, d’enrichir la compréhension des États des nouvelles menaces spatiales et de rappeler la nécessité d’y répondre de façon responsable.  C’est pourquoi l’Union européenne appuie le projet de résolution du Royaume-Uni visant à établir un nouveau GTCNL afin de poursuivre ces travaux conceptuels.   

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) a déclaré que son pays avait toujours préconisé la préservation de l’espace extra-atmosphérique pour les activités pacifiques de tous les États sur des bases d’égalité.  Il a toutefois estimé réels les risques que l’espace soit transformé en tremplin de la guerre.  Il a accusé les États-Unis et d’autres nations occidentales de lancer des armements dans l’espace à même d’attaquer des objets spatiaux, dénonçant des opérations qui portent atteinte à la paix et à la sécurité internationales.   

Depuis le début des événements en Ukraine, a poursuivi le représentant, les États-Unis et leurs alliés ont commencé à utiliser dans l’espace des composants civils commerciaux à des fins militaires.  Qualifiant ces infrastructures de « quasi civiles », il a averti qu’elles pourraient devenir une cible légitime en cas de représailles.  Dénonçant une utilisation provocatrice de satellites civils, il a estimé que celle-ci soulevait des questions dans le contexte du Traité sur l’espace extra-atmosphérique, qui prévoit une utilisation exclusivement pacifique de l’espace extra-atmosphérique.  Il a exhorté la communauté internationale à condamner ces actions.   

Le représentant a appelé à des négociations pour prévenir une course aux armements dans l’espace, conformément au Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 et comme l’encadrent les décisions de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale de 1978 sur le désarmement.  Dans ce cadre, il s’est félicité de la reprise prochaine des travaux du GEG, créé par la résolution 77/250 de l’Assemblée générale pour formuler des recommandations en vue d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Il a également salué les recommandations de la Commission du désarmement des Nations Unies pour promouvoir la mise en œuvre pratique de mesures de transparence et de confiance dans les activités spatiales.   

Le représentant a estimé qu’il fallait préserver les prérogatives du Comité des Nations Unies sur les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), en ne transférant pas vers d’autres enceintes les débats qui relèvent de son mandat.  Enfin, il a mentionné les trois projets de résolution que son pays soumet à la Première Commission à ce sujet, visant à consolider le débat sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.   

Mme LIANDRA JEAN SINAGA (Indonésie) a déclaré que le régime existant concernant l’espace extra-atmosphérique est inadéquat.  Elle a demandé la conclusion d’un instrument juridiquement contraignant qui pourrait prévenir les risques qui pèsent sur l’espace extra-atmosphérique, lequel doit rester sûr et durable.  Nous devons préserver l’espace en tant que patrimoine commun, a‑t‑elle plaidé, avant d’exhorter tous les États Membres à soutenir les efforts en ce sens.   

M. ABDELRHMAN MOHAMED FARID HEGAZY (Égypte) a appelé au renforcement des normes existantes pour préserver l’espace extra-atmosphérique des périls de la militarisation.  Il a préconisé la mise en place d’un instrument juridique contraignant, lequel devrait être assez général pour interdire le déploiement d’armes dans l’espace, la mise au point et le déploiement d’armes à cette fin ainsi que les attaques armées et de toute ingérence malveillante contre des satellites.   

Le représentant a salué les progrès du GEG, mis en place en application de la résolution 72/250 de l’Assemblée générale, estimant qu’il a approfondi des questions techniques et juridiques controversées.  Il s’est réjoui de la convocation du Groupe en novembre prochain, sous la présidence de l’Égypte, afin de travailler à un instrument contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Il s’est également félicité de ce que la Commission du désarmement a adopté, cette année, des recommandations pour promouvoir la mise en œuvre de mesures de confiance.  Il en a demandé l’application aux États pourvus de capacités spatiales majeures, estimant que ces mesures peuvent prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.   

Avec Sri Lanka, l’Égypte a présenté une nouvelle fois sa résolution d’ensemble sur la prévention de la course aux armements dans l’espace, a rappelé le représentant, qui a appelé les États Membres à continuer de la soutenir.   

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a présenté son projet de résolution sur un futur groupe de travail au sein duquel la discussion sur la réduction des menaces spatiales entamée par le GTCNL qui était présidé par M. Lagos, devra se poursuivre.  La discussion sera enrichie par les travaux considérables qui ont été menés par le Groupe, a ajouté le représentant, qui a souhaité que le projet de résolution de sa délégation reçoive le soutien le plus large possible.  Notre compréhension collective de l’application dans l’espace du droit international et des menaces pesant sur les systèmes spatiaux a été très nettement améliorée grâce aux travaux du Groupe, a‑t‑il plaidé.  À cet égard, le représentant a estimé que la notion de non-placement en premier dans l’espace n’était pas suffisante pour ouvrir des négociations sur un nouvel instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.   

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé que les technologies spatiales ont une portée mondiale car les conflits qui pourraient survenir dans l’espace affecteraient le monde entier.  Il a reconnu le rôle essentiel de la préservation de l’espace extra-atmosphérique, qui doit être utilisé à des fins uniquement pacifiques, et a rejeté fermement les notions de guerres potentielles dans l’espace.   

Pour le représentant, il est clair que les régimes juridiques existants devraient être remplacés par un nouveau régime interdisant tout déploiement d’armes pouvant cibler des objets spatiaux ainsi que la menace de l’emploi de la force dans l’espace.  Le représentant a rappelé qu’il présentera comme à l’accoutumée son projet de résolution sur l’espace extra-atmosphérique.   

Mme DIANE SHAYNE DELA FUENTE LIPANA (Philippines) a déclaré que sa délégation avait participé de manière proactive au GTCNL sur la réduction des menaces spatiales, et bien que celui-ci n’ait pas pu adopter un rapport de fond lors de sa dernière session cet été, la représentante a salué les « riches discussions nées au cours de ce processus ».  Elle a estimé que les travaux du Groupe avaient montré que ce format était le bon pour que puissent se tenir des discussions inclusives entre les États Membres et toutes les parties cherchant de bonne volonté à réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportements responsables.  Les Philippines sont donc déterminées à poursuivre les travaux du GTCNL au sein du groupe qui devrait être créé par un projet de résolution entériné ensuite par l’Assemblée générale.  La représentante a en outre exhorté les auteurs de résolutions concurrentes sur l’espace extra-atmosphérique à parvenir à un accord autour d’un seul texte, estimant que cela présenterait l’avantage d’envoyer le message que les instances de désarmement peuvent travailler de façon unie ».   

M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) s’est dit préoccupé par le possible déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique et par l’utilisation d’objets en tant qu’armes spatiales.  Le représentant a déploré le manque de résultats du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales, mis en place conformément à la résolution 76/231.  Il a toutefois noté que ses discussions fournissent de bonnes bases pour l’avenir.   

Pour que les pays en développement puissent continuer de participer aux discussions, il faut éviter de mettre en place des processus parallèles sur les processus clefs du désarmement –notamment ceux qui ont trait à la prévention d’une course à l’armement dans l’espace extra-atmosphérique-, a estimé le représentant.  Il a également préconisé plus de transparence, ainsi que l’adhésion aux traités internationaux régissant l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, lesquels mettent en œuvre les principes énoncés par l’Assemblée générale dans sa résolution de 1963.   

Enfin le représentant a salué les contributions du COPUOS et du Bureau des affaires spatiales de l’ONU.  Ces deux instances ont joué un rôle important, a‑t‑il estimé, notamment en renforçant les capacités des pays en développement.   

M. JAROSLAV ŠTĚPÁNEK (République tchèque) a fait part de sa profonde déception face au manque de volonté de certains États d’adopter ne serait-ce qu’un rapport de procédure du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales grâce à des règles de comportement responsable.  Il a en revanche dit avoir apprécié le niveau d’engagement de ceux des participants qui ont démontré leur détermination à trouver des solutions acceptables.   

Compte tenu de l’augmentation de la dépendance à l’égard des biens spatiaux, ainsi que du nombre croissant d’États, d’acteurs non étatiques et d’entreprises privées, l’approche comportementale semble le moyen le plus approprié d’englober les nouveaux développements, a estimé le représentant.  La Tchéquie se joint donc à d’autres États Membres pour appeler à la poursuite des travaux du Groupe de travail sur l’environnement. 

La Tchéquie s’est engagée à ne pas conduire d’essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe, conformément à la résolution 77/41 de l’Assemblée générale.  Le représentant a estimé que cet engagement contribuerait à l’adoption de nouvelles mesures visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et pourrait, à long terme, ouvrir la voie à des normes internationales juridiquement contraignantes.   

M. BENJAMIN ESCAIG (Suède) a considéré que notre dépendance croissante au services spatiaux augmente d’autant les risques et les vulnérabilités, s’inquiétant des conséquences potentiellement catastrophiques d’un conflit qui s’étendrait à l’espace.  Le représentant a rappelé que l’espace extra-atmosphérique est un bien commun mondial qui doit être utilisé dans l’intérêt de tous.  À ce titre, il a souligné l’applicabilité du droit international, y compris la Charte des Nations Unies, à toutes les activités dans l’espace.  Estimant nécessaire de prévenir une course aux armements dans l’espace, il a préconisé l’élaboration progressive d’un accord sur des normes, des règles et des principes de comportement responsable, conformément à la demande faite par le Secrétaire général de l’ONU dans son rapport de 2021.   

Le représentant a regretté l’impossibilité d’adopter un consensus au sein du GTCNL sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable.  Il a toutefois considéré que ses travaux constitueraient un excellent point de départ pour alimenter d’autres efforts visant à renforcer la sécurité de l’espace extra-atmosphérique, dont le GEG sur d’autres mesures pratiques pour prévenir une course aux armements dans l’espace.   

La Suède soutient le projet de création d’un nouveau GTCNL chargé de formuler des recommandations sur l’élaboration de normes, règles et principes pour un comportement responsable, conformément à la résolution du Royaume-Uni, qu’elle coparraine.  En revanche, le représentant a émis des réserves quant à la création d’un GTCNL axé sur les efforts juridiquement contraignants, estimant que cette initiative risquait de conduire à une duplication des efforts, au détriment de l’inclusion des plus petites délégations.  Enfin, il a mentionné les efforts déployés par son pays au niveau national, parmi lesquels une stratégie visant à décrire les objectifs de la stratégie de défense et de sécurité de la Suède pour l’espace.   

M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas) a estimé que le GTCNL sur la réduction des menaces spatiales avait démontré que tous les États Membres sont concernés par l’espace extra-atmosphérique, qu’ils soient ou non des nations spatiales.  Il est essentiel que tous les États bénéficient des opportunités économiques et sociales inhérentes au domaine spatial, aujourd’hui et pour les générations à venir, a ajouté le représentant, pour qui la gouvernance de la sécurité spatiale reste insuffisante.  Pour réduire les risques, il faut donc améliorer celle-ci.  Il a constaté le large soutien pour y parvenir au moyen d’engagements politiques concernant des comportements responsables.  L’appel lancé à tous les États à ne pas procéder à des essais destructeurs d’armes antisatellites à ascension directe est une mesure pragmatique visant à inscrire des engagements volontaires dans un futur instrument juridiquement contraignant, a‑t‑il déclaré.   

La double finalité des objets spatiaux complique le débat sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, a relevé le représentant.  Tout objet spatial peut, en principe, être utilisé comme arme spatiale, a‑t‑il rappelé.  S’il a déploré que, malgré l’attitude constructive d’une large majorité d’États, le Groupe de travail n’ait pas pu parvenir à un consensus sur les recommandations, le représentant a néanmoins relevé qu’il avait permis un dialogue inclusif entre les États avec la participation de toutes les parties prenantes.  Les Pays-Bas s’engagent à préserver l’élan actuel et soutiennent un processus de suivi sans ambiguïté qui vise à renforcer la convergence entre ces voies.   

En outre, le représentant a dit sa préoccupation concernant la perspective de voir deux nouveaux GTCNL parallèles, ce qui représenterait une lourde charge pour les délégations.  De plus, pour les Pays-Bas, les discussions sur les mesures pratiques ne devraient pas être étalées sur plusieurs années, mais au contraire produire des résultats intermédiaires en temps voulu, selon une approche progressive.  Nous pouvons progresser efficacement vers la prévention d’une course aux armements dans l’espace en développant davantage de normes et de principes de comportement responsable et en élaborant des recommandations incluant des mesures juridiquement contraignantes et des engagements politiques, a conclu le représentant.   

M. ANDREAS BILGERI (Autriche) a rappelé que l’espace extra-atmosphérique revêt une importance toujours plus critique pour notre vie quotidienne, laquelle dépend de plus en plus des systèmes spatiaux.  Dans le même temps, a‑t‑il poursuivi, les risques liés aux activités spatiales vont grandissant avec les tensions géopolitiques croissantes et les progrès rapides des technologies.  Dans ce cadre, le représentant a salué les efforts multilatéraux pour renforcer la sécurité dans l’espace et prévenir une course à l’armement spatial. 

Un conflit dans l’espace pourrait entraîner des conséquences graves pour les civils sur Terre, s’est inquiété le représentant, qui a fait état des potentielles répercussions sur les infrastructures énergétiques ou autres.  À ce titre, il a préconisé l’application du droit international humanitaire, plus particulièrement de ses principes de distinction, de proportionnalité et de précaution.  Le COPUOS a bien avancé sur ces questions, s’est-il félicité. 

Saluant la valeur du Groupe de travail chargé d’élaborer des mesures juridiques contraignantes, le représentant a émis des réserves sur l’établissement de processus parallèles qui pourraient mettre à rude épreuve les ressources de certaines délégations.  Il a encouragé les États spatiaux à améliorer les échanges d’informations pour plus de transparence et de confiance.  Enfin, il a dit ses inquiétudes sur les essais menés dans l’espace extra-atmosphérique par certaines nations, qui débouchent sur la création de davantage de déchets spatiaux, appelant dans ce cadre au respect du moratoire prononcé contre certains types d’essais balistiques.   

ALEX LIA (Australie) a rappelé que tous les pays dépendent des services spatiaux pour leur prospérité et leur sécurité.  Pour l’Australie, il existe un intérêt de tous à prévenir une course aux armements dans l’espace et à maintenir un environnement spatial pacifique, sûr, stable, durable et sécurisé.  Le meilleur moyen pour y parvenir est de réduire les menaces qui pèsent sur les systèmes spatiaux.  Cela signifie qu’il faut adopter une approche axée sur les comportements plutôt que sur les capacités pour éviter les problèmes de vérification inhérents à une approche basée sur les capacités.   

Pour l’Australie, le GTCNL sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable est une initiative qu’il faut poursuivre.  Il s’est révélé être une plateforme très inclusive.  Les mesures visant à réduire les menaces spatiales et à prévenir une course aux armements dans l’espace peuvent inclure à la fois des engagements politiques et des instruments juridiquement contraignants, et que les deux peuvent se renforcer mutuellement.  Il est donc essentiel que le travail du Groupe sur les comportements responsables se poursuive.  L’Australie regrette toutefois qu’un nouveau groupe de même nature ait été proposé, qui fonctionnerait parallèlement au Groupe de travail sur les comportements responsables.  L’Australie ne peut soutenir la création d’un nouveau forum, alors que le GTCNL sur les comportements responsables a prouvé qu’il offrait de réelles perspectives de progrès sur ces questions cruciales.   

M. BENJAMIN HIMMLER (Allemagne) a rappelé l’engagement de son pays à contribuer à renforcer la sécurité dans l’espace dans le but ultime d’y prévenir une course aux armements.  Il existe différentes manières de poursuivre cet objectif, a souligné le représentant, qui a rappelé l’appui apporté par l’Allemagne au GTCNL sur la réduction des menaces spatiales grâce à des normes, règles et principes de comportements responsables, lequel a achevé ses travaux avec succès cet été.   

Le représentant a salué le fait que, dans ce cadre, les États aient pu avancer les premiers éléments de normes possibles pour des comportements responsables.  Comme l’a dit plus tôt ce matin l’ancien Président du Groupe de travail, grâce à des discussions inclusives et complètes, tous les États ont pu accroître leur compréhension de la sécurité spatiale au point que de réels domaines de convergence sont apparus, a ajouté le représentant.  Il a estimé que les pays doivent se garder d’aborder la question des menaces à la sécurité de l’espace dans une logique binaire, mais accepter plutôt différentes approches qui se renforcent mutuellement et contribuent toutes à l’objectif de prévention d’une militarisation de l’espace.   

Le représentant a annoncé que sa délégation appuierait le projet de résolution de suivi sur les comportements responsables, lequel propose la création d’un nouveau GTCNL pour la période 2025-2026.  Il a insisté sur la nécessité d’une continuité de travail sur cette question.  Il s’est par ailleurs félicité de ce qu’à l’heure actuelle, 34 États, y compris tous les membres de l’Union européenne, se sont engagés à ne pas procéder à des essais de missiles antimissiles destinés à détruire des satellites.   

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a insisté pour que l’espace extra-atmosphérique soit réservé à des activités pacifiques.  Le Costa Rica est convaincu que la participation active et équitable des femmes dans la prise de décision est l’une des voies les plus sûres pour parvenir à la paix, la sécurité et le développement durables dans l’espace, a‑t‑elle rappelé.  Notant que le Traité de 1967 sur l’espace extra-atmosphérique établit dans son article premier que l’exploration et l’utilisation de l’espace doivent inclure toute l’humanité, sans discrimination, la représentante a considéré que le texte exige la participation des femmes de toutes les nationalités dans les négociations, notamment relatives à la sécurité spatiale.  Déplorant que les activités spatiales soient dominées par les hommes, et appelant à la mise en place d’un environnement plus inclusif, elle s’est toutefois félicitée des tendances positives observées au sein du GEG, lequel comprend cette année 33% de femmes, contre seulement 12% en 2019.   

M. JORGE VIDAL (Chili) a regretté profondément qu’un rapport sur la base du consensus n’ait pas été adopté à l’issue des travaux du Groupe de travail présidé par M. Lagos.  Toutefois, il a ajouté que sa délégation est convaincue que les discussions et les idées et préoccupations exprimées lors des quatre sessions de fond du Groupe depuis 2022 seront éminemment utiles pour les prochains processus et discussions onusiens sur la sécurité spatiale.   

Le représentant a également souligné l’urgence de négocier un instrument international juridiquement contraignant sur cette question, expliquant que les comportements hostiles qui entraînent une perturbation des systèmes spatiaux, avec un risque élevé d’escalade, ne peuvent plus être tolérés, pas plus que l’absence de mesures de transparence et de confiance pour y remédier.   

M. ZHANDOS ISSAYEV (Kazakhstan) a préconisé une utilisation de l’espace qui tende à des buts pacifiques et réponde aux intérêts de tous les pays, quels que soient leurs niveaux de développement économique et scientifique.  Il a estimé crucial de parvenir à un instrument juridiquement contraignant pour prévenir la course aux armements.  Relevant que de nombreux États et acteurs non étatiques participent aux activités spatiales, le représentant a notamment évoqué une prolifération de nanosatellites, l’utilisation de technologies robotiques ainsi que des programmes pour éliminer les débris spatiaux.  Cette dynamique déploie également des effets pervers, a‑t‑il déploré, augmentant le risque que l’espace extra-atmosphérique devienne le théâtre d’une lutte pour la suprématie.  À ce titre, il a préconisé le suivi des règles du GEG sur les normes, mesures de confiance et transparence.   

Le représentant a salué les résolutions sur le non-placement d’armes dans l’espace et sur les mesures de transparence et de confiance, ainsi que le projet de traité sur la prévention du placement d’armes dans l’espace, introduit par la Chine et la Russie à la Conférence sur le désarmement.  Il a toutefois déploré l’impasse dans laquelle se trouve ce dernier.  Il a également considéré le Code de conduite de La Haye comme un élément central.  Enfin, il a averti sur l’usage des systèmes à doubles usages, estimant qu’ils risquent de saper les structures actuelles.   

M. GUL QAISER SARWANI (Pakistan) a rappelé que les manifestations de la course aux armements de l’espace et la militarisation de l’espace ont une incidence sur la stabilité stratégique du monde.  Les armes stratégiques utilisent l’espace, d’où un risque de combats dans l’espace.  Or, tout conflit dans l’espace aurait des conséquences dévastatrices sur notre vie quotidienne, a déclaré le représentant, qui a jugé regrettable qu’il ait été impossible de progresser dans la réglementation de l’espace depuis 40 ans.   

Étant donné le double usage de l’espace extra-atmosphérique, il faut se concentrer sur les comportements, a estimé le représentant, qui a constaté que la sécurité spatiale connait une crise et que certains États remettent en question l’intérêt de la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  C’est pourquoi une approche globale sur les capacités et les comportements est la seule façon de progresser.  Le représentant a souligné qu’il ne s’agit pas de se substituer à un instrument non contraignant.   

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a qualifié l’espace extra-atmosphérique de bien commun dont l’exploitation doit bénéficier à toute l’humanité.  Il a souligné la nécessité de renforcer le cadre juridique régissant les aspects sécuritaires d’une utilisation grandissante de l’espace, qui est de plus en plus souvent génératrice de débris et dont les fins apparaissent insuffisamment transparentes.  Les capacités terrestres ne sauraient être utilisées pour endommager délibérément des biens spatiaux, comme les satellites, a insisté le représentant, avant de souligner que les États doivent respecter les normes en vigueur et s’engager à mettre au point des dispositifs de prévention adaptés.  Tous les pays doivent participer à ces activités, qui engagent l’avenir de notre humanité commune, a‑t‑il conclu.   

M. WAJDI HASSAN M. MOHARRAM (Arabie saoudite) a salué les initiatives visant à réglementer et sécuriser l’utilisation de l’espace à des fins de développement.  Pour le représentant, il faut, pour parvenir à une coopération fructueuse dans le domaine spatial, convenir de mesures de confiance interétatiques et d’un renforcement des capacités des pays en développement.  Il a appuyé l’élaboration à terme d’un instrument juridiquement contraignant de prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Le partage d’informations en toute transparence sur les programmes de lancement d’engins spatiaux est essentiel dans le contexte de saturation des activités spatiales, a‑t‑il encore dit.   

En tant que Présidente du G20, l’Arabie saoudite a accueilli Space20, la première réunion des dirigeants de l’économie spatiale visant à coordonner les efforts en faveur d’utilisations strictement pacifiques de ce patrimoine commun de l’humanité qu’est l’espace extra-atmosphérique, a conclu le représentant.   

M. HUGO EMMANUEL GUERRA (Argentine) s’est notamment dit favorable à l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant de prévention de la militarisation de l’espace.  Celui-ci, négocié à la Conférence du désarmement, devrait englober les notions de comportement responsable des États ainsi que les considérations les plus techniques, a‑t‑il estimé.  Il a en outre appelé à éviter toute entrave à l’exercice du droit inaliénable de tous les États Membres respectueux du droit international à utiliser les ressources spatiales pacifiquement et à des fins civiles.   

Droits de réponse 

Le représentant de la Jordanie, au nom du Groupe des États arabes, a exprimé ses condoléances pour les Palestiniens victimes des bombardements d’Israël, notamment l’attaque contre l’hôpital Al Ahli Arab qui a fait de nombreuses victimes.  Il a ensuite déclaré qu’Israël dissimulait ses crimes contre les Palestiniens en falsifiant les faits.  Le Groupe des États arabes tient Israël, Puissance occupante, pour responsable de son dernier crime, commis contre un hôpital, qui a tué des centaines de personnes innocentes.  Israël devrait cesser d’utiliser la Première Commission pour diffuser des falsifications, a-t-il déclaré, ajoutant qu’Israël sape constamment le système de sécurité international et refuse de participer aux conférences visant à établir une zone exempte de destruction nucléaire au Moyen-Orient. 

La représentante d’Israël, répondant aux déclarations du Groupe des États arabes, a dit trouver surprenant qu’aucune condamnation de la part de ces pays n’ait été prononcée lorsque 1 400 Israéliens ont été massacrés.  Les nombreux innocents qui ont été tués dans l’hôpital l’ont été par un tir du Hamas, a-t-elle affirmé, ajoutant que la position d’Israël s’appuie sur des faits.  Israël ne sera pas sermonné par des pays qui pourraient défendre les droits des Palestiniens, mais qui semblent pourtant se soucier uniquement des Palestiniens lorsqu’ils les utilisent comme une arme contre Israël.  Le Hamas et le Jihad islamique sont des « groupes terroristes génocidaires » armés, financés et entraînés par l’Iran, a-t-elle ajouté.   

Le représentant du Yémen a déclaré que la représentante d’Israël essayait de fabriquer des faits et de se soustraire à sa responsabilité dans les crimes commis contre le peuple palestinien.  Israël, Puissance occupante, doit cesser immédiatement le feu, autoriser l’entrée de l’aide humanitaire et mettre fin aux déplacements forcés.  Pour sa part, la communauté internationale devrait cesser de recourir à une politique de deux poids, deux mesures, et à l’hypocrisie et respecter le droit international et le droit international humanitaire sans sélectivité.   

L’observateur de l’État de Palestine a condamné les attaques israéliennes contre Gaza, notamment le bombardement d’un hôpital construit en 1882, avant la création de l’entité sioniste.  La plupart des personnes tuées étaient des personnes qui s’étaient réfugiées à l’hôpital pour échapper aux attaques de missiles israéliens.  L’hôpital a été détruit par du matériel militaire lourd dont personne dans la région à part Israël ne dispose, a-t-il affirmé.   

Le représentant de la République islamique d’Iran a déclaré que le régime israélien menaçait d’autres pays d’anéantissement nucléaire par le biais de son programme clandestin d’armes de destruction massive.  Ce régime d’occupation a continuellement violé tous les droits humains et le droit international humanitaire en Palestine, a-t-il ajouté.

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