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Assemblée générale: multiplication d’appels exhortant le Conseil de sécurité à agir pour sauver des vies palestiniennes et permettre la libération des otages à Gaza

Dixième session extraordinaire d’urgence (reprise),
47e séance plénière – matin & après-midi
AG/12577

Assemblée générale: multiplication d’appels exhortant le Conseil de sécurité à agir pour sauver des vies palestiniennes et permettre la libération des otages à Gaza

Une semaine après avoir adopté une résolution exigeant un cessez-le-feu humanitaire immédiat dans la bande de Gaza, la libération inconditionnelle des otages israéliens ainsi que l’assurance d’un accès humanitaire, l’Assemblée générale a entendu une trentaine d’orateurs intervenir dans le cadre de sa dixième session extraordinaire d’urgence sur les territoires palestiniens occupés pour demander au Conseil de sécurité d’agir pour qu’Israël ne soit plus au-dessus de la loi commune.  Ces délégations ont également réaffirmé leur conviction que seule la concrétisation de la solution des deux États permettra de mettre fin à un conflit vieux de huit décennies. 

La question de la réforme du Conseil de sécurité a également été soulevée par plusieurs États Membres qui ont accusé les États-Unis, en exerçant leur droit de veto pour bloquer l’adoption de projets de résolution humanitaires sur la question de Palestine, de protéger leur allié israélien qui, a fustigé la République populaire démocratique de Corée, « massacre des innocents au prétexte fallacieux de son droit à la légitime défense ».

Nombre d’États arabes, y compris le Liban et Oman, ont retiré toute légitimité aux opérations que mène Israël dans Gaza depuis le 7 octobre suite aux attaques du Hamas, tant leur caractère brutal et disproportionné trahit selon eux la volonté d’infliger aux Palestiniens un châtiment collectif. Pour ces pays -rejoints par d’autres coauteurs de la résolution du 12 décembre comme les Maldives, Brunéi Darussalam ou encore le Bangladesh- en massacrant près de 20 000 Palestiniens et en provoquant l’intensification de la violence extrémiste et des activités de peuplement en Cisjordanie, « Israël, Puissance occupante », sape l’autorité de l’ONU et prend le risque irresponsable d’une régionalisation du conflit.  Pour le représentant de Bahreïn, la coexistence pacifique des deux peuples et des deux pays doit devenir réalité, la paix, la sécurité et l’harmonie devant prévaloir dans la région.

Les Émirats arabes unis, délégation qui porte un projet de résolution du Conseil demandant l’instauration d’une trêve humanitaire durable pour sauver des vies à Gaza et permettre la libération des otages, ont rappelé que, lors de leur visite sur le terrain la semaine dernière, les membres du Conseil de sécurité avaient pu mesurer de près la portée de l’avertissement du Secrétaire général de l’ONU selon qui le système humanitaire à Gaza serait au bord de l’effondrement.  La délégation de l’Équateur, pays qui préside actuellement le Conseil de sécurité, a abondé dans ce sens, parlant d’une détérioration « terrifiante » de la situation humanitaire à Gaza.  Elle a en outre assuré que le Conseil de sécurité ne ménagera aucun effort dans les heures et jours à venir pour obtenir une amélioration des conditions de vie des Gazaouites et la libération des otages. 

« L’histoire n’oubliera ni ne pardonnera ceux qui ont la responsabilité de mettre fin à ce génocide et qui n’ont rien fait », a averti pour sa part la délégation cubaine qui a elle aussi dénoncé le veto du 8 décembre des États-Unis au Conseil de sécurité.

De son côté, la délégation des Maldives, qui a lu un message de son président, a appelé à la reconnaissance de plein droit, par l’ONU, de l’État de Palestine, y voyant le moyen le plus sûr d’entamer son intégration dans le concert des nations et de mettre ainsi un terme à l’occupation israélienne.  « Gaza fait pleinement partie de l’État de Palestine unifié », a souligné de son côté le Maroc.

Préoccupé par la paralysie à laquelle le Conseil ne cesse de se heurter, le Mexique a souligné toute la pertinence de l’initiative portée avec la France pour qu’il ne puisse plus être recouru au droit de veto en cas d’atrocités de masse.  De son côté, la France, selon laquelle Israël « a le droit de se défendre et le devoir de le faire en protégeant les civils », a regretté que la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 12 décembre ne condamne pas les violences sexuelles commises par le Hamas le 7 octobre.  Le Japon et la Finlande ont exprimé des vues similaires, les déléguées du Chili, du Guyana, du Costa Rica et de la Colombie condamnant ensemble les crimes sexuels du Hamas et estimant que le leadership féminin doit être promu à tous les niveaux pour parvenir à une paix « durable et inclusive » à Gaza. 

Par ailleurs, la Thaïlande s’est réjouie de la récente libération d’otages thaïlandais, « grâce notamment aux efforts diplomatiques de pays non membres du Conseil de sécurité ».  Les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, si elles sont appliquées, sauveront des vies, toutes les parties doivent l’entendre, a insisté la délégation. 

Outre ceux cités, les pays suivants ont également pris la parole: Pérou, Norvège, Viet Nam, Maurice, Sri Lanka, Comores, Uruguay, Nigéria et El Salvador. 

La prochaine séance de la dixième session extraordinaire d’urgence sur les mesures illégales prises par les autorités israéliennes à Jérusalem-Est occupée ainsi que dans le reste du Territoire palestinien occupé, qui a débuté en avril 1997, sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Cheffe de la Mission de l’ONU en Afghanistan impute l’impasse actuelle au manque de progrès en matière de droits humains

9515e séance – matin
CS/15541

Conseil de sécurité: la Cheffe de la Mission de l’ONU en Afghanistan impute l’impasse actuelle au manque de progrès en matière de droits humains

Le Conseil de sécurité s’est penché ce matin sur le rapport du Secrétaire général sur l’évolution de la situation en Afghanistan introduit par sa Représentante spéciale qui a exhorté la communauté internationale à ne pas oublier ce pays et les aspirations de son peuple.  Également Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), Mme Roza Otunbayeva, comme la majorité des membres du Conseil, a vilipendé les discriminations à l’encontre des droits des femmes et des filles.  Plus de 29 millions de personnes nécessitent une aide humanitaire, un niveau record, a pour sa part informé le Chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) à Genève. 

Les besoins des femmes et des jeunes filles afghanes ont continué de croître proportionnellement à l’approche répressive adoptée par les autorités de facto, a reconnu M. Ramesh Rajasingham.  L’OCHA a toutefois obtenu un certain niveau de coopération pratique au niveau local permettant aux femmes afghanes d’être impliquées dans l’action humanitaire.  Depuis la prise de contrôle de l’Afghanistan par les Taliban en août 2021, « nous avons été témoins d’une répression des droits des femmes dans tous les domaines, de l’éducation au travail, en passant par la liberté de mouvement et la participation à la vie publique », a abondé Mme Shaharzad Akbar, Directrice exécutive de Rawadari, une organisation de la société civile afghane.  La Suisse, par exemple, a noté qu’aucune femme ne fait partie des 84 234 diplômés de l’enseignement secondaire qui ont participé cette année à l’examen d’entrée à l’université. 

Selon Mme Otunbayeva, le manque de progrès en matière de droits humains est responsable de l’impasse actuelle.  Pour que l’Afghanistan retrouve un siège à l’ONU, le respect du droit international et des traités qu’il a ratifiés est une condition « non négociable », a-t-elle déclaré.  Les États-Unis ont dit qu’ils n’envisageront aucun rétablissement de leurs relations avec ce régime tant que les femmes n’auront pas accès au travail et à la vie sociale et politique, entre autres.  « Les Taliban ont placé la ségrégation et la violence contre les femmes au cœur de leur identité politique, ce que la France n’acceptera jamais », a renchéri ce pays.

La Cheffe de la MANUA a toutefois noté des ouvertures sur la question du traitement des détenus.  Certains éléments des autorités de facto sont disposés à collaborer avec la MANUA s’agissant des droits humains, a-t-elle ajouté.  Pour ce qui est de la voie à suivre, la nouvelle approche doit être guidée par deux facteurs, à savoir un consensus international durable sur l’Afghanistan et la volonté des autorités de facto de dialoguer avec la communauté internationale, a-t-elle dit, en recommandant un engagement plus direct avec celles-ci.

La Fédération de Russie a relevé que cela fait plus de deux ans que les Taliban sont au pouvoir, et malgré « le discours bruyant des collègues occidentaux » sur un éventuel effondrement, l’Afghanistan a survécu. Cependant, en tenant compte de l’ampleur des défis et des menaces, ainsi que de l’ensemble des problèmes laissés en plan après la fuite des troupes étrangères, sa population a plus que jamais besoin de notre aide et de notre soutien continus, a dit le représentant. 

Sur le plan sécuritaire, la Représentante spéciale a jugé le niveau de sécurité « généralement bon » à l’exception des munitions non explosées qui restent une préoccupation majeure en Afghanistan, en particulier pour les enfants.  Elle s’est par ailleurs dite préoccupée par l’aggravation du problème des changements climatiques en Afghanistan.  « Les autorités de facto doivent faire partie de la conversation mondiale sur ce problème. » 

Plusieurs intervenants, dont la Chine, ont toutefois salué la volonté des autorités de facto de coopérer dans la lutte contre les stupéfiants, après avoir réussi à réduire de 95% la culture de l’opium selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). 

Alors que la communauté humanitaire reste déterminée à fournir « une aide fondée sur des principes », M. Rajasingham a regretté que la réponse humanitaire présente un déficit de financement critique de 1,8 milliard de dollars d’ici à la fin de l’année.  Dans ce contexte difficile, l’exception humanitaire prévue par la résolution 2615 (2021) du Conseil de sécurité continue de jouer un rôle essentiel, a-t-il expliqué, dans la mesure où elle rassure les acteurs commerciaux sur le respect des sanctions de l’ONU. 

À ce sujet, le délégué de l’Équateur, intervenant en sa qualité de Président du Comité 1988 (2011) du Conseil de sécurité, a fait le point des derniers développements du régime de sanctions relatif à l’Afghanistan. Les États Membres, a-t-il rapporté, ont considéré que, compte tenu de sa nature et de ses objectifs bien connus d’établir un « califat », Daech-Khorasan, bien que combattu par les Taliban, est la menace terroriste la plus grave en Afghanistan, le groupe se projetant vers les pays voisins, l’Asie centrale et au-delà. 

Sur le plan sécuritaire, les pays voisins de l’Afghanistan, dont le Pakistan, ont pointé la présence continue de groupes terroristes en Afghanistan qui constitue la plus grave menace pour le pays et l’ensemble de la région, « peut-être même pour le monde entier ».  Le représentant pakistanais a dénoncé la « protection » dont bénéficient ces groupes terroristes de la part des autorités de facto.  L’ONU doit mener une enquête sur la provenance de leurs armes, a-t-il dit, ajoutant que Kaboul doit rapatrier les 1,4 million de réfugiés afghans présents au Pakistan.  Pour l’Ouzbékistan, l’Afghanistan ne doit pas redevenir un havre de paix pour les terroristes et une menace pour la région. 

Le représentant de l’Afghanistan a salué les conclusions de l’évaluation indépendante du Coordonnateur spécial, M. Feridun Sinirlioğlu, rédigées en application de la résolution 2679 (2023) du Conseil de sécurité qui, a-t-il dit, mettent l’accent sur les responsabilités de la communauté internationale à l’égard de l’Afghanistan et peuvent servir de base solide pour lancer des discussions visant à résoudre les problèmes fondamentaux. Il a noté que le statu quo existant n’est « ni acceptable ni durable » et que « l’approche internationale actuelle à l’égard de l’Afghanistan ne fonctionne pas ».  

LA SITUATION EN AFGHANISTAN (S/2023/941)

Déclarations

Mme ROZA OTUNBAYEVA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a exhorté le Conseil de sécurité à ne pas oublier l’Afghanistan et les aspirations des populations afghanes. Elle a décrit les discriminations à l’encontre des droits des femmes et des filles, la répression de l’opposition politique et de la liberté, l’absence de représentation des minorités, les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires, la torture et les mauvais traitements.  « Le manque de progrès en matière des droits humains est responsable de l’impasse actuelle. » 

Pour que l’Afghanistan retrouve un siège à l’ONU, le respect du droit international et des traités qu’il a ratifiés est une condition « non négociable », a déclaré Mme Otunbayeva.  Elle a noté des ouvertures sur la question du traitement des détenus.  Certains éléments des autorités de facto sont disposés à collaborer avec la MANUA s’agissant des droits humains, a-t-elle ajouté.  Le dernier rapport à ce sujet porte sur la manière dont ces autorités répondent aux plaintes pour violence sexiste à l’égard des femmes et des filles. 

La Représentante spéciale a constaté que la situation humanitaire reste très préoccupante.  Plus de 20 millions de personnes dépendront de l’aide.  Sur le plan sécuritaire, la Cheffe de la MANUA a dit que le niveau de sécurité est « généralement bon » à l’exception des munitions non explosées qui restent une préoccupation majeure en Afghanistan, en particulier pour les enfants.  La suspension de la coopération avec la lutte antimines et les Nations Unies a été levée le 2 octobre dernier, a-t-elle informé. 

La communauté chiite a été visée par les attaques de l’État islamique d’Iraq et du Levant-Province du Khorassan (EIIL-PK) qui ont tué 39 personnes.  Le Pakistan reste convaincu que les autorités de facto ne font pas assez pour contenir les Taliban au Pakistan.  Mme Otunbayeva a rappelé que l’avis concernant le non-retour en Afghanistan des réfugiés au Pakistan émis en août 2021 demeure en vigueur vu la situation humanitaire et des droits humains en Afghanistan.  Elle a exhorté les deux pays à prendre des mesures pour éviter que la situation ne se détériore davantage.

Par ailleurs, la Cheffe de la MANUA a informé que près d’un demi-million d’Afghans sont rentrés au pays au début de l’hiver. Quelque 80 0000 d’entre eux n’ont « nulle part où aller » en Afghanistan.  Les conséquences sur les droits humains des femmes et des filles forcées de rentrer chez elles sont particulièrement graves.  Elle a déploré la qualité de l’éducation en Afghanistan, demandant la levée de l’interdiction aux filles d’aller à l’école.  Elle a également pointé l’envoi des filles dans ses « écoles coraniques » dont on ignore le programme scolaire et les matières enseignées.  « Une génération de filles risque d’être perdue », a alerté la Cheffe de la MANUA. 

Mme Otunbayeva s’est également dite préoccupée par l’aggravation du problème des changements climatiques en Afghanistan.  « Les autorités de facto doivent faire partie de la conversation mondiale sur ce problème. »  Tout le pays subit un manque d’eaux dû aux sécheresses récurrentes, a-t-elle souligné.  Les Afghans ne sont pas en mesure de faire face à l’énormité de ce défi dont les impacts ne pourront pas être circonscrits à l’intérieur du pays.  Kaboul a honoré les engagements de l’Afghanistan envers la Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUCC) et l’Accord de Paris, a relevé la Représentante spéciale.  Les autorités de facto ont en outre signalé leur volonté de coopérer dans la lutte contre les stupéfiants.  Selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), elles ont réussi à réduire la culture de l’opium de 95%. 

Pour ce qui est de la voie à suivre, la Représentante spéciale a noté le refus des autorités de facto de la nomination d’un envoyé spécial.  « Elles ont une préférence pour les approches bilatérales plutôt que multilatérales et affirment que l’interdiction de l’éducation des filles et du travail des femmes est une affaire interne, prenant ainsi le risque de prolonger l’impasse. »  La nouvelle approche doit être guidée par deux facteurs, à savoir un consensus international durable sur l’Afghanistan et la volonté des autorités de facto de dialoguer avec la communauté internationale.  En conclusion, Mme Otunbayeva a recommandé un engagement plus direct avec celles-ci. 

M. RAMESH RAJASINGHAM, Chef et Représentant du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) à Genève et Directeur de la Division de la coordination, a évoqué l’ampleur de la lutte quotidienne à laquelle sont confrontées tant de familles afghanes.  Alors que l’année 2023 touche à sa fin, les besoins humanitaires continuent d’atteindre des niveaux record, avec plus de 29 millions de personnes nécessitant une aide humanitaire - un million de plus qu’en janvier, et une augmentation de 340% au cours des cinq dernières années. En octobre, trois tremblements de terre d’une magnitude de 6,3 en l’espace de huit jours dans la province occidentale du Hérat ont endommagé 40 000 maisons affectant 275 000 personnes qui vivent désormais dans des tentes et des abris de fortune, où elles sont exposées à la chute rapide des températures hivernales.  Dans les régions de l’est et du sud, le nombre d’Afghans rentrant du Pakistan a considérablement augmenté, à la suite de l’annonce par le Gouvernement pakistanais du rapatriement des « étrangers en situation irrégulière » à partir du 1er novembre. Depuis, plus de 450 000 Afghans sont rentrés, dont plus de 85% sont des femmes et des enfants, a-t-il précisé. Leur arrivée soudaine pourrait avoir des conséquences considérables pour l’ensemble du pays, selon M. Rajasingham, à moins qu’une aide durable et coordonnée ne soit apportée avec le soutien de la communauté internationale. 

En ce qui concerne les besoins des femmes et des jeunes filles afghanes, ils ont continué de croître proportionnellement à l’approche répressive adoptée par les autorités de facto, a-t-il indiqué. Depuis deux ans, les filles et les femmes sont marginalisées dans presque toutes les formes de la vie publique. Elles se voient systématiquement refuser l’accès à l’enseignement secondaire et supérieur, leurs déplacements sont limités et leur capacité à travailler, y compris dans le secteur humanitaire, est interdite.  Néanmoins, « l’OCHA a obtenu un certain niveau de coopération pratique avec les autorités de facto au niveau local, ce qui permet aux femmes afghanes d’être impliquées dans l’action humanitaire », a-t-il précisé.  À ce jour, au moins 630 accords locaux de ce type ont été conclus pour permettre aux femmes afghanes de participer à toutes sortes d’activités d’intervention humanitaire, et certains programmes humanitaires qui avaient été initialement suspendus en raison des interdictions ont repris.

Alors que la communauté humanitaire reste déterminée à fournir une aide fondée sur des principes, le haut fonctionnaire a regretté que la réponse humanitaire présente un déficit de financement critique de 1,8 milliard de dollars d’ici à la fin de l’année.  Dans ce contexte difficile, l’exception humanitaire prévue par la résolution 2615 (2021) du Conseil de sécurité continue de jouer un rôle essentiel, a-t-il expliqué, dans la mesure où elle rassure, principalement les acteurs commerciaux, sur le fait que la fourniture de services et de biens nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire et à la satisfaction des besoins humains fondamentaux, y compris le traitement des transactions financières, n’enfreint pas les sanctions des Nations Unies.  Cette mesure a permis d’atténuer les nombreuses difficultés rencontrées par les organisations humanitaires depuis août 2021. Depuis l’adoption de la résolution 2615 (2021), le nombre d’agences des Nations Unies et d’ONG faisant état de difficultés pour transférer des fonds en Afghanistan est passé de 87% à environ 50% aujourd’hui.  Mais des difficultés subsistent, a concédé M. Rajasingham, principalement en ce qui concerne la réduction des risques bancaires. 

À ce sujet, a-t-il poursuivi, la fourniture de fonds ou d’actifs à des personnes ou entités désignées est autorisée lorsqu’elle est nécessaire à la programmation de l’aide humanitaire et des besoins humains fondamentaux.  Mais en vertu de la résolution précitée, toutes les précautions sont prises, a assuré le représentant de l’OCHA.  Il a dit ne pas observer en Afghanistan ce qui est fréquemment observé dans d’autres contextes, à savoir le pillage d’entrepôts ou le détournement de convois d’aide.  Toutefois, a-t-il reconnu, il peut y avoir une confiscation de l’aide après sa distribution par les autorités ou les chefs de communauté, pour s’assurer que tous les membres d’une communauté, et pas seulement les plus nécessiteux, reçoivent une certaine forme d’assistance.  S’il s’agit d’une « pratique culturelle courante » en Afghanistan, cela ne signifie nullement qu’elle n’est pas problématique, a expliqué M. Rajasingham, mais les mesures d’atténuation et la réponse doivent être adaptées à la nature spécifique de la pratique.  L’autre problème que l’OCHA constate sont les tentatives d’ingérence dans la programmation de l’aide par les autorités de facto, qui ont contribué à une augmentation de 21% des obstacles bureaucratiques et administratifs depuis janvier 2023. 

Alors que l’OCHA vient de lancer son « Aperçu général de la situation humanitaire dans le monde pour 2024 », il ressort que l’Afghanistan reste l’un des pays où les besoins humanitaires sont les plus importants.  La communauté humanitaire s’est engagée à lui apporter une assistance, « mais nous ne pouvons pas être la solution », a averti M. Rajasingham. En fin de compte, le peuple afghan a besoin de solutions durables et d’une approche à long terme qui lui permettent d’aller au-delà de la simple survie, a-t-il conclu, plaidant notamment pour des solutions qui permettent de soutenir la création de revenus, l’agriculture, la résilience climatique et le rétablissement des services de base.

Intervenant en sa qualité de Président du Comité 1988 (2011) du Conseil de sécurité, M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA LOPEZ DOMINGUEZ (Équateur) a fait le point des derniers développements du régime de sanctions relatif à l’Afghanistan.  Deux ans après la prise du pouvoir par les Taliban, a-t-il relevé, la situation en Afghanistan reste complexe et dynamique.  En ce qui concerne la sécurité, il a signalé que certains groupes terroristes ont renforcé leurs activités, ce qui a conduit à une augmentation de la menace terroriste dans les États voisins contigus. Ainsi, des États Membres expriment leurs inquiétudes quant à la présence de combattants terroristes étrangers en Afghanistan.  Et bien que les Taliban combattent Daech-Khorasan, le groupe conserve la capacité de mener des attaques terroristes de grand impact en Afghanistan.  Les États Membres ont considéré que, compte tenu de sa nature et de ses objectifs bien connus d’établir un « califat », Daech-Khorasan était la menace terroriste la plus grave en Afghanistan, le groupe se projetant vers les pays voisins, l’Asie centrale et au-delà. Dans le même temps, certains États ont signalé qu’Al-Qaida tente de reconstruire ses capacités opérationnelles.

Le Président du Comité a cité l’équipe de surveillance, selon laquelle, bien que la production de pavot a été considérablement réduite cette année, les prix ont augmenté et la production de méthamphétamine a suivi la même trajectoire.  Plusieurs des principales figures des Taliban restent profondément impliquées dans la production et le trafic de drogues, a-t-il relevé en suggérant, face à cette situation complexe, de conserver le système actuel du régime de sanctions en ce qu’il reste un outil approprié et efficace pour contrer les menaces à la paix et à la stabilité en Afghanistan. 

Dans le cadre du contrôle des armes, il a noté le déploiement d’armes de même calibre que celles qu’utilise l’OTAN contre les forces gouvernementales d’États voisins.  Il a aussi signalé le transfert de telles armes aux entités incluses dans la liste des sanctions.  Au sujet de la crise humanitaire que vit l’Afghanistan, il a souligné que le mécanisme d’exemption humanitaire, créé par la résolution 2615 (2021), a permis de résoudre ce problème sans violer les sanctions des Nations Unies.  Il a dit en outre que le Comité soutient les exemptions à l’interdiction de voyager pour des Taliban figurant sur la liste des sanctions lorsque ces Taliban œuvrent en faveur de la paix et de la stabilité ou sont engagés dans des activités humanitaires.  Le Président du Comité a terminé son propos en soulignant l’importance pour les États Membres de collaborer et de partager des informations avec l’équipe de surveillance.

Mme SHAHARZAD AKBAR, Directrice exécutive de Rawadari, une organisation de la société civile afghane qui surveille la situation des droits humains dans son pays, notamment ceux des femmes, des filles et des groupes marginalisés, a déclaré avoir constaté une série alarmante de violations à tous les niveaux depuis la prise de contrôle de l’Afghanistan par les Taliban en août 2021.  « Nous avons été témoins d’une répression des droits des femmes dans tous les domaines, de l’éducation au travail, en passant par la liberté de mouvement et la participation à la vie publique. »  Une répression tellement systématique que les experts internationaux l’ont qualifiée d’« apartheid de genre »: les châtiments corporels publics se multiplient, comme les décrets limitant les droits et libertés des femmes, a dénoncé l’activiste.  « Les promesses des Taliban d’un gouvernement inclusif, respectueux des droits des femmes se sont avérées être des mensonges », a tranché Mme Akbar.

Cette répression brutale s’applique également à l’espace civique, à la liberté d’expression et des médias, ainsi qu’aux défenseurs des droits humains, a-t-elle poursuivi, en faisant état d’attaques ciblées et de déplacements forcés.  Elle a aussi dénoncé la marginalisation de différents groupes religieux et ethniques d’Afghanistan (Hazara, Ouzbeks, Turkmènes et Tadjiks), qui n’ont aucune représentation significative au sein de l’administration de facto.  De même pour des oulémas chiites qui ont été exclus des conseils provinciaux.  La Directrice exécutive a déclaré avoir assisté au démantèlement d’un système judiciaire qui était indépendant, de même qu’à celui de la Commission afghane indépendante des droits de l’homme.  Elle a encore dénoncé la remise en cause de l’indépendance d’autres institutions juridiques et le remplacement de femmes, de juges chiites et d’autres professionnels du droit qui n’étaient pas affiliés aux Taliban.  En a résulté une impunité généralisée qui porte atteinte à l’état de droit, en a-t-elle déduit.

Toutes ces violations répétées illustrent la « vision destructrice que les Taliban ont de l’avenir de notre pays. » Est-ce un avenir que la communauté internationale est prête à soutenir? a-t-elle demandé aux membres du Conseil. Elle leur a opposé la vision que la majorité des Afghans ont de leur pays et de leur société: « Nous voulons un pays qui embrasse sa riche diversité ethnique, linguistique et religieuse et respecte les droits humains de tous les Afghans. » Soutiendrez-vous notre vision d’un Afghanistan pacifique, égal, diversifié et démocratique, ou celle des Taliban, qui violent la Charte des Nations Unies et les valeurs fondamentales que ce Conseil prétend défendre? 

La situation en Afghanistan n’est pas simplement une crise humanitaire, c’est aussi une crise politique, sécuritaire et, plus fondamentalement, des droits humains, a fait valoir la militante en demandant au Conseil de dire clairement que ces droits, en particulier ceux des femmes, figureront au cœur des prochaines mesures que la communauté internationale prendra en Afghanistan.  Aussi a-t-elle fait plusieurs recommandations, à commencer par le refus de reconnaître ou de normaliser les Taliban, tant que leur discrimination systématique à l’égard des femmes et des filles perdurera.  Elle a exhorté le Conseil à prévoir des garanties claires et explicites pour protéger les droits des Afghanes, y compris leur participation pleine, égale, significative et sûre, à toute prise de décisions ou nouveau mécanisme, tels que la création d’un envoyé spécial de l’ONU, à l’avenir. Ensuite, la Directrice exécutive a exigé des garanties de justice pour les violations des droits humains commises par les Taliban, notamment en portant plainte devant la Cour internationale de Justice (CIJ) pour violations de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et en établissant un mécanisme international indépendant d’établissement des responsabilités pour l’Afghanistan.

Puis elle a exhorté les États Membres et les organes compétents des Nations Unies à enquêter sur le traitement réservé aux Afghanes par les Taliban et à inclure l’apartheid de genre dans le traité sur les crimes contre l’humanité actuellement à l’étude.  Il est également essentiel, selon Mme Akbar, que la MANUA mette en œuvre pleinement son mandat actuel, notamment en surveillant et en plaidant pour le respect des droits et en assurant la protection des personnes à risque.  Enfin, la communauté internationale doit donner la priorité au soutien des défenseurs des droits humains et de la société civile afghans, a-t-elle encore préconisé.

M. KAZUYUKI YAMAZAKI (Japon) s’est dit préoccupé par la situation des Afghanes.  Il a exhorté les Taliban à revenir sur leurs restrictions, à mettre fin à leur répression, à écouter le peuple afghan et à établir des relations constructives avec la communauté internationale.  Le Japon, a-t-il poursuivi, vient d’annoncer une aide d’environ 58,4 millions de dollars, qui sera fournie principalement par le biais des agences onusiennes pour atténuer la crise multiforme en Afghanistan.  S’agissant de l’évaluation indépendante, le représentant a salué l’accent mis sur la nécessité de promouvoir un climat de confiance avec les Taliban.  La communauté internationale doit se montrer plus cohérente, plus coordonnée et plus structurée, a-t-il dit, avant de saluer l’intention du Secrétaire général d’élaborer une approche internationale mieux coordonnée à l’égard de l’Afghanistan. Il a souhaité la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour faciliter l’implication des parties prenantes, comme le recommande l’évaluation indépendante et souligné que la position des Taliban sur cette évaluation est tout aussi importante. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a expliqué qu’au cours de l’année écoulée, aux côtés du Japon, son pays s’est efforcé de préserver l’unité du Conseil sur le dossier afghan.  La situation en Afghanistan n’est pas tenable, a tranché la déléguée, en saluant une feuille de route fondée sur l’évaluation indépendante demandée par le Conseil dans sa résolution 2679. Affirmant que le Conseil de sécurité n’a pas oublié les Afghanes et rejetant les restrictions qui leur sont imposées, la déléguée s’est dite convaincue que cela ne devrait pas empêcher la fourniture d’une aide qui relève de l’engagement de la communauté internationale en faveur de tout le peuple afghan.  Il est possible d’agir et d’obtenir de part et d’autre des avancées basées sur des principes, a dit, à son tour, la représentante, avant d’annoncer que son pays parrainera le poste de conseiller pour la sécurité climatique au sein de la MANUA et d’appeler le Conseil de sécurité et la communauté internationale au pragmatisme pour préserver la vie et les moyens de subsistance de tous les Afghans.  Personne ne gagnera à plonger l’Afghanistan dans une situation où son économie implose, ses agriculteurs n’ont plus les moyens de travailler et ses frontières sont marquées par une multiplication d’incidents.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a constaté que sur les 84 234 diplômés de l’enseignement secondaire qui ont participé à l’examen d’entrée à l’université cette année en Afghanistan, il ne figure aucune femme.  Le développement économique de l’Afghanistan est inconcevable sans la contribution des femmes, a-t-elle lancé.  Qu’elles soient cheffes d’entreprise, entrepreneures ou salariées, les femmes afghanes sont indispensables à la prospérité, a-t-elle ajouté.  Elle a appelé la communauté internationale à se doter d’une stratégie commune et d’agir dans l’unité. 

Outre l’inclusion des femmes dans tous les processus et activités, la déléguée a insisté sur l’importance du retour massif d’Afghans installés au Pakistan, dont 60% sont des enfants.  Il est nécessaire que les États de la région soient étroitement impliqués dans tous les efforts, a-t-elle plaidé.  Elle a ensuite demandé d’intensifier les efforts sur la question des changements climatiques, notamment au vu de ses impacts régionaux et globaux.  Elle a enfin formé le vœu d’un Afghanistan où les droits humains et les libertés fondamentales de chaque individu sont respectés et où l’on puisse vivre en sécurité, à l’abri de la peur.  Les possibilités d’éducation pour tous, mais surtout pour les femmes et les filles, sont un ingrédient clef de cette dynamique d’espoir pour un Afghanistan stable, sûr et prospère, a—t-elle conclu. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a centré son intervention sur la situation des Afghanes, l’accès humanitaire et l’évaluation indépendante demandée par le Conseil de sécurité.  Il a appuyé l’idée selon laquelle l’ONU doit insister auprès des Taliban sur la nécessité d’inclure les femmes dans tous les secteurs de la société afghane.  Les États-Unis, a-t-il dit, n’envisageront aucun rétablissement de leurs relations avec ce régime tant que les femmes n’auront pas accès au travail et à la vie sociale et politique, entre autres.  Le délégué a noté que le rapport sur les activités de la MANUA relève les difficultés rencontrées par les Afghanes lorsqu’elles essaient de porter plainte pour violences sexistes, de même que l’absence d’agents de police de sexe féminin, ce qui complique l’accès des femmes et des filles à la justice. 

Les États-Unis, a poursuivi le représentant, se sont engagés à fournir une aide qui a atteint un montant de plus de 2 milliards de dollars depuis 2021.  Mais l’aide humanitaire à elle seule ne suffira pas et c’est la raison pour laquelle les Taliban doivent « revoir leur copie » et ne plus empêcher les femmes de contribuer à l’économie nationale.  De notre côté, a assuré le représentant, nous travaillons avec les bailleurs de fonds, les banques de développement et d’autres partenaires pour financer des initiatives pérennes de nature à créer des moyens de subsistance pour le peuple afghan, y compris les Afghanes.  Enfin, s’agissant de l’évaluation indépendante, le représentant a approuvé la recommandation sur la désignation d’un envoyé spécial chargé de créer un groupe de contact international. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a dit être préoccupé par le fait que les femmes et les jeunes filles afghanes continuent d’être « effacées de la vie publique ».  Le représentant a dénoncé l’institutionnalisation de la discrimination et la violence sexuelle à l’encontre des femmes et des filles. Celles-ci vivent sous un régime d’apartheid, a accusé le représentant soulignant également la poursuite des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires et des mauvais traitements infligés à d’anciens responsables gouvernementaux et à des membres des anciennes forces de défense et de sécurité nationales afghanes.  En outre, il a dit craindre un débordement de l’instabilité de l’Afghanistan dans les pays voisins.

Pour le représentant, la situation dans ce pays n’était pas une simple question intérieure.  Il a d’ailleurs noté les efforts déployés par les États Membres pour remédier à la situation sur les plan humanitaire, socioéconomique et des droits humains dans ce pays.  Il a toutefois estimé que ces efforts resteront marginaux s’ils ne s’attaquent pas à la grave situation des femmes et des filles.  En conclusion, le délégué a réitéré l’importance de l’octroi de l’aide humanitaire pour les populations et du soutien aux organisations de base pour faire face à la situation dans le pays. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana, Mozambique), a salué le plan d’intervention mis en œuvre par les autorités talibanes pour gérer le rapatriement à grande échelle des citoyens afghans revenant du Pakistan.  Il a également salué la création de sous-comités chargés de fournir une assistance dans divers domaines, tels que la protection des droits des réfugiés afghans.  Cela témoigne d’une approche proactive de la situation, a-t-il relevé avant de saluer aussi la création d’Ulemas Shuras (conseils provinciaux) dans les 34 provinces.  Cela permet une plus grande participation de la population aux discussions sur les priorités de développement ainsi que sur la prévention et la résolution des conflits. Ce processus est essentiel pour reconstruire le tissu social afghan et favoriser la confiance entre la population et les autorités, a estimé le délégué.  Il a encouragé les autorités talibanes à poursuivre leurs efforts pour rechercher des investissements et à renforcer la coopération avec les pays voisins. 

Bien que la situation en matière de sécurité se soit améliorée, les A3, a-t-il poursuivi, restent préoccupés par la protection des groupes vulnérables, y compris le personnel des Nations Unies sur le terrain.  Le représentant a insisté sur la nécessité impérative, pour les autorités, de poursuivre leurs efforts pour lutter contre le terrorisme et assurer la sécurité de tous les citoyens afghans.  Il a aussi réitéré ses profondes inquiétudes quant aux restrictions imposées à la participation des femmes à la vie politique du pays, plaidant pour un système de gouvernance qui reflète la diversité de la société afghane et garantisse la participation effective et égale de tous les citoyens, y compris les femmes et les autres groupes minoritaires.  En ce qui concerne la situation humanitaire, il a exhorté la communauté internationale à renouveler et même augmenter son soutien, ajoutant que le soutien au développement économique de l’Afghanistan et la fourniture d’une assistance technique sont essentiels pour répondre aux besoins fondamentaux des Afghans et renforcer leur résilience.  Le représentant a fait part de l’approbation des A3 au déblocage des actifs financiers internationaux de l’Afghanistan dans le but de développer son économie, au bénéfice du peuple afghan.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a indiqué que sans accès à l’éducation, l’avenir des filles et des jeunes femmes afghanes est sombre car elles continueront d’être plus vulnérables à l’exploitation, au mariage forcé, à la violence domestique et même au suicide.  Elle a appelé à la libération immédiate des défenseurs des droits humains qui ont été arbitrairement arrêtés et regretté profondément qu’il n’y ait pas eu de commission d’enquête ou de mission d’établissement des faits pour évaluer les violations des droits des femmes.

Malte, a-t-elle dit, reste ferme dans son soutien à la MANUA et à son personnel qui exercent leurs fonctions dans des conditions difficiles.  Les strictes restrictions imposées aux Afghanes qui travaillent pour l’ONU et des organisations de la société civile ont réduit l’accès des filles et des femmes afghanes à une aide humanitaire vitale.  Appelant les donateurs internationaux à se montrer encore plus généreux, elle a conclu en citant la lauréate du prix Nobel de la paix, Malala Yousafzai: Il a fallu une balle dans la tête pour que le monde soit à mes côtés. Que faut-t-il pour qu’il soit aux côtés des filles afghanes?

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a dit suivre avec la plus grande préoccupation la dégradation de la crise humanitaire et la multiplication des violations des droits humains en Afghanistan, qui résultent de la politique des Taliban.  « Ceux-ci ont placé la ségrégation et la violence contre les femmes au cœur de leur identité politique, ce que la France n’acceptera jamais. »  Son gouvernement, a indiqué la déléguée, a versé plus de 140 millions d’euros d’aide humanitaire depuis 2021, et la poursuivra dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la sécurité alimentaire.  En outre, le Gouvernement français s’est aussi engagé, lors du Forum mondial sur les réfugiés qui s’est tenu du 13 au 15 décembre à Genève, à réinstaller des Afghanes en France, via le dispositif « Femmes en danger ».  La déléguée a également fait part de l’engagement de son pays en faveur d’une stratégie unifiée en Afghanistan, dont l’objectif doit être le bien-être de la population afghane en l’absence de toute discrimination.  Cette stratégie doit être le moteur d’un processus politique inclusif, pour permettre aux Afghanes de participer à la prise des décisions qui concernent leur pays.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a souligné l’importance de maintenir des canaux de communication ouverts et actifs avec l’Afghanistan en rappelant que la communauté internationale doit continuer à s’engager de manière constructive, et en reconnaissant les complexités et les nuances sur le terrain, dans le but de favoriser un État politiquement et ethniquement inclusif, exempt de terrorisme et de stupéfiants, et économiquement stable.  Le rôle de la MANUA reste crucial pour soutenir ces efforts, a-t-il souligné, et le soutien international dans ces domaines est non seulement nécessaire mais vital.  Il a salué les efforts déployés par les autorités de facto pour stabiliser l’économie, lutter contre la corruption, et combattre le terrorisme ainsi que la production et le trafic de stupéfiants, entre autres.  Dans le même temps, il est tout aussi important de traiter efficacement la question des avoirs afghans gelés, a-t-il ajouté, en demandant instamment aux parties prenantes concernées de trouver des mécanismes acceptables pour injecter ces fonds dans l’économie afghane.  Le représentant a également appelé les autorités de facto à revenir sur les politiques restrictives qui visent en particulier les Afghanes, et à promouvoir un système politique et social inclusif qui intègre les femmes et les groupes minoritaires.

M. GENG SHUANG (Chine) a regretté que les efforts de la communauté internationale envers l’Afghanistan n’aient pas donné lieu à des résultats tangibles.  Il a appelé à augmenter l’aide humanitaire afin de donner de l’espoir à la population.  Il faut aussi rétablir le secteur bancaire et permettre aux pays de participer de nouveau aux efforts de coopération et de connectivité régionales.  Les avoirs afghans gelés à l’étranger doivent être restitués dans les plus brefs délais, a-t-il insisté. 

Le délégué a ensuite engagé la communauté internationale à contribuer au relèvement pacifique de l’Afghanistan de sorte à créer des conditions propices à la protection des droits et intérêts des femmes et jeunes filles, tout en appelant à ne pas utiliser cette question comme moyen de pression.  Il a également conseillé de renforcer la coopération avec les autorités afghanes afin de mieux comprendre la situation politique dans le pays, exhortant la communauté internationale à ne pas fixer de conditions préalables.  Le représentant a aussi demandé au Conseil de sécurité d’accorder des dérogations aux interdictions de voyager pour les représentants du pays.  En outre, il faut renforcer les efforts de lutte contre le terrorisme en Afghanistan et l’empêcher d’en devenir une plaque tournante.  Prenant note de la diminution de 95% de la culture d’opium, le représentant a par ailleurs appelé à fournir un soutien ciblé pour des cultures alternatives et des programmes de réhabilitation. 

M. THOMAS PATRICK PHIPPS (Royaume-Uni) a exprimé ses préoccupations face aux restrictions constantes des droits humains et des libertés fondamentales en Afghanistan, en particulier pour les femmes et les jeunes filles, et a appelé la communauté internationale à maintenir son action multilatérale en faveur des droits des femmes et de l’égalité des sexes. 

Après avoir passé en revue l’aide fournie aux Afghans par le Royaume-Uni suite au séisme qui a frappé Hérat, le délégué a assuré que son gouvernement est pleinement engagé à trouver une voie constructive pour aller de l’avant.  Il a souligné qu’en l’absence d’une stratégie internationale cohérente, il est de la responsabilité du Conseil de sécurité de saisir l’élan vital du dernier rapport d’évaluation. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a relevé que cela fait plus de deux ans que les Taliban sont au pouvoir, et malgré le discours bruyant des « collègues occidentaux » sur un éventuel effondrement, l’Afghanistan a survécu.  Cependant, en tenant compte de l’ampleur des défis et des menaces, ainsi que de l’ensemble des problèmes laissés sur place après la fuite des troupes étrangères, sa population a plus que jamais besoin de notre aide et de notre soutien continus, a-t-il dit.  « Combien d’années doivent-elles encore s’écouler avant que vous n’avouiez l’inefficacité et la futilité des tentatives de menaces, de pressions et de chantage? » a lancé le délégué. 

Poursuivant, le représentant a jugé insuffisantes les mesures prises par les Taliban pour lutter contre le terrorisme, notant que la perspective d’une propagation des activités terroristes à l’extérieur du pays, en Asie centrale reste bien réelle.  Le problème de la drogue est également étroitement lié au terrorisme, a-t-il ajouté.  Après avoir salué le travail des humanitaires qui sont restés sur le terrain pour aider les Afghans, il s’est opposé à toute politisation de l’aide humanitaire, appelant au dégel des avoirs et à une assistance élargie pour appuyer la reprise économique du pays.  Il a plaidé pour la formation d’un gouvernement véritablement inclusif, avec la participation de tous les groupes ethno-politiques du pays.  Toutefois, une paix durable en Afghanistan est impossible sans une approche patiente et pragmatique et une interaction avec les autorités de facto sur un large éventail de questions.  Il n’y a pas d’alternative à cette voie, a-t-il martelé. Il s’est enfin réjoui de constater que bon nombre des idées présentées dans le rapport du Secrétaire général ont des points communs avec les approches du format de Moscou. 

M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA (Équateur) a fait part de sa préoccupation face à la fragilité du système économique afghan, la poursuite de pratiques qui bafouent les droits humains, la persistance des risques sécuritaires, la détérioration de la crise humanitaire et la vulnérabilité des personnes déplacées et des réfugiés, alors que les pays voisins prennent des mesures pour les contraindre au retour.  Il a condamné les mesures restrictives prises par les Taliban contre les femmes, relevant par exemple qu’aucune fille ne faisait partie des 84 000 lycéens qui ont déposé une demande d’admission à l’université en 2023. Ce système doit être démantelé et le respect des droits fondamentaux des femmes et des filles, rétabli sans délai, a exigé le délégué.  Il a ensuite considéré qu’il est de la responsabilité du Conseil d’analyser les mécanismes pour promouvoir un dialogue intra-afghan inclusif et participatif et une coopération qui améliore les conditions de vie de la population.  Il a aussi estimé qu’il faut doter l’envoyé spécial dont la nomination est envisagée, d’un mandat qui lui permette de soutenir et de compléter les efforts de la MANUA.  Le représentant a insisté, en conclusion, sur la nécessité de restaurer en Afghanistan l’espace civique, l’état de droit et la participation pleine, égale, significative et sûre des femmes à toutes les discussions relatives à l’avenir de leur pays.

M. NASEER AHMED FAIQ (Afghanistan) a salué l’engagement des pays qui défendent les droits fondamentaux du peuple afghan, en particulier des femmes et des filles.  Il a souligné les nombreux défis de son pays notamment le besoin d’aide humanitaire et l’accès à l’éducation et à l’emploi, les assassinats ciblés d’érudits chiites, ainsi que les exécutions extrajudiciaires d’anciens membres des forces de sécurité et de défense et la présence des groupes terroristes.  La baisse de l’aide humanitaire, les catastrophes naturelles, les retours forcés de migrants, le chômage et la pauvreté contribuent à l’incertitude ambiante quant à l’avenir, a déploré le représentant. Non seulement les Taliban ont échoué à relever ces défis, mais ils les ont exacerbés, a-t-il accusé, condamnant en particulier les violations systématiques des droits humains des femmes et des filles.  La principale question, selon le délégué, est ce que la communauté internationale peut faire. 

Les conclusions de l’évaluation indépendante du Coordonnateur spécial, M. Feridun Sinirlioğlu, rédigées en application de la résolution 2679 (2023) du Conseil de sécurité mettent l’accent sur les responsabilités de la communauté internationale à l’égard de l’Afghanistan et peuvent servir de base solide pour lancer des discussions visant à résoudre les problèmes fondamentaux, a estimé le représentant.  Elles dénoncent le statu quo actuel qui n’est « ni acceptable ni durable » et notent que « l’approche internationale actuelle à l’égard de l’Afghanistan ne fonctionne pas ».  Il est recommandé de rétablir les droits fondamentaux de tous les citoyens, en particulier des femmes et des filles, d’assurer leur participation active dans tous les domaines, et d’établir une gouvernance inclusive.  L’évaluation indépendante souligne en outre la nécessité de s’entendre sur un plan d’action assorti d’un calendrier clair, y compris la nomination d’un envoyé spécial. Le représentant a mis en garde contre toute normalisation des relations avec les Taliban s’il n’y a pas de changements notables dans leurs politiques et leurs actions en matière de droits humains et de respect des normes internationales.  Il faut aussi trouver une solution qui aboutisse à la formation d’un gouvernement véritablement inclusif et légitime, capable de refléter la volonté et les aspirations nationales du peuple afghan.  « La voie à suivre doit être façonnée par tous les Afghans. »  S’agissant du retour des réfugiés, le représentant a plaidé pour une solution durable qui donne la priorité à la sécurité, au bien-être et à la dignité des réfugiés afghans. 

Pour M. ULUGBEK LAPASOV (Ouzbékistan), il est essentiel de veiller à ce que l’Afghanistan ne redevienne pas un havre de paix pour les terroristes et une menace pour la région.  Ce serait une grave erreur que d’abandonner les Afghans à leur sort, sans moyens pour faire face aux problèmes auxquels ils sont confrontés.  L’isolement et les sanctions ne font qu’aggraver la situation de l’Afghan moyen. Pour parvenir à une paix à long terme, il faut un gouvernement inclusif qui reflète fidèlement tous les segments de la société afghane et garantisse les droits et libertés, en particulier ceux des femmes et des minorités.  Le représentant a aussi rappelé que pour ces six prochains mois, le Programme alimentaire mondial (PAM) aura besoin d’au moins un milliard de dollars pour fournir une aide vitale à 21 millions de personnes.

Affirmant que les nouvelles autorités afghanes réalisent des progrès significatifs dans la lutte contre la corruption, la toxicomanie, la production et le trafic de drogue et que la situation en matière de sécurité s’est considérablement améliorée, le délégué a fait part de la coopération entre son pays et l’Afghanistan dans le cadre des commissions conjointes sur les questions frontalières et agricoles.  La paix, a-t-il dit, c’est aussi la reconstruction de l’économie nationale et la mise en œuvre de projets de grande envergure dans les domaines de l’énergie et des transports.  Parmi ces projets, le représentant a cité la construction de la ligne ferroviaire Termez - Mazar-i-Sharif - Kaboul - Peshawar et la restauration du réseau routier afghan.

M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique d’Iran) a rappelé que les tremblements de terre d’octobre dans la province d’Hérat ont eu un impact direct sur 150 000 personnes, aggravant la situation humanitaire.  Il a souligné la nécessité d’une aide humanitaire impartiale et de la levée des sanctions afin de soutenir la reprise économique en Afghanistan.  En tant que voisin directement touché par la situation dans ce pays, comme en atteste la présence de millions de réfugiés afghans, l’Iran, a dit le délégué, a maintenu le contact avec les autorités de facto qui, il est vrai, n’ont pas pris de mesures significatives pour parvenir à une véritable intégration ethnique et politique.  Les restrictions strictes imposées aux femmes et aux filles affectent particulièrement leur accès à l’éducation, s’est-il inquiété.  Il a rappelé que lors de la réunion du format Moscou, le 29 septembre, son pays a proposé de créer un groupe de contact régional avec les Taliban afin de les encourager à honorer leurs obligations.

Nous prenons note, a poursuivi le représentant, des mécanismes proposés tels que le groupe de contact international et la nomination d’un envoyé spécial.  Toutefois, a-t-il indiqué, nous jugeons que leur mise en place serait, à ce stade, prématurée.  Il a prôné au préalable un examen approfondi de la situation qui doit dûment tenir compte des mécanismes régionaux existants et du mandat de la MANUA.  La communauté internationale ne doit pas seulement viser la normalisation ou la reconnaissance des autorités de facto, elle doit surtout chercher à ce que cette normalisation ou cette reconnaissance bénéficie d’abord et avant tout au peuple afghan 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a assuré que son pays, « partenaire de longue date du peuple afghan », continuera de coopérer activement avec d’autres dans le but de garantir la paix et la stabilité en Afghanistan.  L’Inde, a-t-elle rappelé, s’associe déjà à plusieurs agences des Nations Unies présentes sur le terrain et continuera de le faire.  La déléguée a souligné que les paramètres fixés par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2593 (2021) définissent l’approche de la communauté internationale en Afghanistan, avec pour priorités communes la fourniture d’une aide humanitaire; la formation d’une structure gouvernementale inclusive et représentative; la lutte contre le terrorisme et le trafic de stupéfiants; et le respect des droits des femmes, des enfants et des minorités.  Pour sa part, New Dehli juge indispensable l’aide humanitaire, a insisté la représentante, en précisant aussi que le programme indien de bourses d’études réservées aux étudiants afghans se poursuit. Nous avons également collaboré avec diverses agences des Nations Unies, notamment le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), dans le cadre de l’assistance au peuple afghan, a-t-elle encore précisé.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déclaré que la paix et la sécurité en Afghanistan sont une priorité stratégique de son pays.  Les autorités de facto afghanes ont consolidé leur contrôle dans tous les domaines de la gouvernance du pays, assurant ainsi un minimum de stabilité.  Parmi les éléments positifs, le représentant a noté que la culture de l’opium a diminué de 95%, des mesures ont été prises pour combattre Daech et la corruption a été réduite.  Néanmoins, de graves difficultés demeurent, le plan de réponse humanitaire n’étant toujours financé qu’à 35% tandis que l’économie afghane est à court de liquidités, sans qu’il n’existe de garantie contre le financement du terrorisme.  Selon le représentant, il est urgent de fournir un appui à la production de cultures alternatives à l’opium afin de préserver les moyens de subsistance des agriculteurs.  Par ailleurs, le Gouvernement de facto doit s’acquitter de ses obligations s’agissant des restrictions imposées au droit à l’éducation et au travail des femmes et des filles. 

La présence continue de groupes terroristes en Afghanistan constitue la plus grave menace pour le pays et l’ensemble de la région, « peut-être même pour le monde entier », a averti le représentant.  Bien que les autorités de facto aient fait état de succès dans la lutte contre le terrorisme, le fait est que des groupes terroristes se trouvent en Afghanistan où ils bénéficient « manifestement » de la protection des autorités.  Pour sa part, le Pakistan est confronté à la menace particulière de Tehrik-e Taliban Pakistan (TTP), responsable d’attaques transfrontières qui ont fait de nombreuses victimes civiles et militaires.  Le TTP a été en mesure d’acquérir des équipements militaires avancés provenant des arsenaux abandonnés par les forces étrangères.  Le représentant a exigé que l’ONU mène une enquête sur la provenance de ces armes.  Ce groupe, a-t-il ajouté, aurait également reçu « le soutien de notre principal adversaire ».  Afin que le Gouvernement de facto agisse contre ces groupes, il a encouragé le Conseil à revitaliser le Comité 1988.  De même, Kaboul devrait selon lui œuvrer au rapatriement des 1,4 million de réfugiés afghans présents au Pakistan, de concert avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale rend hommage à l’Émir défunt du Koweït, « dirigeant exemplaire » et « bâtisseur de consensus »

Soixante-dix-huitième session,
50e séance plénière (reprise) – matin
AG/12576

L’Assemblée générale rend hommage à l’Émir défunt du Koweït, « dirigeant exemplaire » et « bâtisseur de consensus »

L’Assemblée générale a repris, ce matin, sa cinquantième séance plénière pour rendre un hommage solennel au cheik Nawaf Al Ahmad Al Jaber Al Sabah, Émir de l’État du Koweït, décédé le 16 décembre dernier.  L’ensemble des orateurs ont salué la mémoire d’un « dirigeant exemplaire » et résolument engagé en faveur de la paix et de la stabilité au Moyen-Orient et dans le monde. 

Après avoir demandé à l’assistance d’observer une minute de silence en hommage au défunt, le Président de l’Assemblée générale a rappelé que le cheik Nawaf était monté sur le trône du Koweït en septembre 2020, au plus fort de la pandémie de COVID-19.  Incarnation de la continuité de l’État dont le Koweït avait besoin, il a guidé son pays « à travers l’une des phases les plus turbulentes de l’existence humaine », a relevé M. Dennis Francis, saluant un règne et une vie au service des principes d’unité, de dignité et de solidarité. 

Le cheik Nawaf était aussi considéré comme « un rassembleur et un bâtisseur de consensus » par les diplomates et les autres dirigeants du monde, a poursuivi le Président de l’Assemblée générale.  Tout en maintenant la tradition d’engagement multilatéral du Koweït sur des questions telles que la médiation dans les différends, l’appui à l’action humanitaire et la collaboration au service du développement durable, l’Émir défunt a manifesté un « engagement fort en faveur d’une paix et d’une stabilité durables au Moyen-Orient », a souligné M. Francis, invitant à soutenir cette vision « au moment où nous nous efforçons de trouver une solution durable à la crise à Gaza ». 

Dans cette même veine, le Secrétaire général de l’ONU a salué un « défenseur déterminé de la diplomatie préventive », approche qui, selon lui, a contribué à définir le rôle du Koweït dans la région du Golfe et dans le monde.  Le cheik Nawaf « était une voix inébranlable en faveur de la stabilité régionale et mondiale, de la paix et du multilatéralisme », a ajouté M. António Guterres, pour qui cet « engagement personnel en faveur de solutions collectives pour forger la paix » reste une source d’inspiration. 

À cet égard, le Chef de l’ONU a appelé la communauté internationale à se nourrir des principes que défendait le cheik Nawaf.  « Être sage dans nos décisions et nos actions, en reconnaissant leur impact sur le monde qui nous entoure et sur les générations futures.  Se pardonner les uns aux autres, accepter nos différences, comprendre les points de vue de chacun et respecter la valeur de chacun ». Il a également invité les États « à collaborer et à faire des compromis pour forger un monde de paix que nos enfants méritent », comme l’a fait l’Émir défunt « à travers ses paroles et ses actes ». 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, la Zambie a insisté sur « l’héritage important » que laisse le cheik Nawaf grâce à ses contributions aux efforts humanitaires internationaux à travers le monde.  Elle a rappelé que l’Émir a fait don de centaines de millions de dollars pour des opérations humanitaires non seulement au Moyen-Orient mais aussi dans de nombreux pays africains.  « Le leadership et le financement du Koweït ont sauvé des vies et ont incité d’autres personnes à participer à une action humanitaire coordonnée », a salué la délégation. 

Au-delà de ses contributions au développement socioéconomique du Koweït, le cheik Nawaf a fait de son pays « un phare de paix et de coopération » au Moyen-Orient, établissant « une norme à suivre pour les autres », a affirmé le Turkménistan, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Asie et du Pacifique.  Rendant hommage à l’engagement de l’Émir en faveur du renforcement des relations amicales entre les nations de la région et au-delà, il a aussi déclaré se souvenir d’un dirigeant au « style de leadership caractérisé par l’humilité, l’accessibilité et le souci du bien-être de chaque citoyen ». 

Parlant au nom du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États, la Suède a souligné le rôle crucial qu’a joué le cheik Nawaf dans le maintien de la stabilité au Koweït en promouvant la paix, l’unité et la réconciliation.  Elle a également rappelé que, sous sa direction, le Koweït a accueilli plusieurs conférences et réunions internationales de haut niveau, offrant des plateformes de dialogue et appuyant la diplomatie et le règlement pacifique des conflits régionaux.  En tant que pays hôte du Siège de l’ONU, les États-Unis ont, eux aussi, salué la vision que défendait l’Émir en faveur de la paix et de stabilité au Moyen-Orient, ainsi que sa « forte croyance dans les valeurs des Nations Unies ». 

« Personnalité marquée par la sagesse », le cheik Nawaf a contribué à la stabilité du Moyen-Orient et du monde, a soutenu le Qatar, au nom du Conseil de coopération du Golfe, tandis que l’Égypte, s’exprimant au nom du Groupe des États arabes, louait l’engagement constant de ce « noble chevalier » pour toutes les causes arabes, en particulier la cause palestinienne, et pour le renforcement du multilatéralisme, en dépit de défis sans précédent. 

À la suite de ces hommages, le Koweït a estimé que le pays et toute la nation arabe et islamique ont perdu « un fidèle pieux, un dirigeant juste et un homme humble et compassionnel ».  Tout au long de sa vie, le cheik Nawaf s’est sacrifié pour le bien-être et la prospérité du peuple koweïtien, mais aussi pour l’unité et la cohésion sociale de sa nation, a souligné la délégation.  Décrivant le défunt comme un « prince de la modestie et de la tolérance », elle a ajouté que l’Émir jouissait de l’amour de son peuple en raison de l’affection et de la bonté dont il faisait preuve.  Elle a enfin indiqué qu’en vertu de la passation des pouvoirs prévue par la Constitution nationale, le cheik Mishal Al-Ahmad Al-Jaber Al-Sabah, frère du défunt, a prêté serment comme nouvel Émir du Koweït et poursuivra la marche du pays vers le développement et la prospérité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil de sécurité renouvelle le mandat de la MONUSCO jusqu’au 20 décembre 2024 tout en entérinant le plan de retrait progressif de la Mission

9512e séance – matin
​CS/15538​

RDC: le Conseil de sécurité renouvelle le mandat de la MONUSCO jusqu’au 20 décembre 2024 tout en entérinant le plan de retrait progressif de la Mission

À la veille d’élections générales en République démocratique du Congo (RDC), le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé pour un an, jusqu’au 20 décembre 2024, le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), tout en décidant d’initier son « retrait progressif, responsable et durable » du pays et de transférer progressivement les tâches qui lui incombe au Gouvernement congolais.

En vertu de la résolution 2717 (2023), adoptée à l’unanimité de ses 15 membres, le Conseil a donc entériné un plan de retrait discuté à plusieurs reprises cette année, en décidant que la MONUSCO maintiendra, jusqu’au 30 juin 2024, un effectif maximum autorisé de 13 500 militaires, 660 observateurs militaires et officiers d’état-major, 591 policiers et 1 410 membres d’unités de police constituées.  À partir du 1er juillet 2024, ces effectifs seront réduits à 11 500 militaires, 600 observateurs militaires et officiers d’état-major, 443 policiers et 1 270 membres d’unités de police constituées.

Le représentant congolais a salué un texte qui consacre la mise en œuvre du dispositif agréé par l’ONU et Kinshasa en vue du retrait de la MONUSCO, remerciant aussi le Conseil d’avoir étendu son mandat au soutien logistique dans les provinces qui ne faisaient pas partie de sa zone de déploiement, afin d’y accompagner le processus électoral.  En effet, il a été décidé que l’une des priorités de la Mission reste la protection « efficace, rapide, dynamique et intégrée » des populations civiles menacées de violences physiques, en prenant « toutes les mesures nécessaires ».  Le Brésil a insisté sur ce point, avant de souhaiter que la sécurité des Casques bleus soit assurée pendant cette période de transition.

En vertu de cette résolution, le Conseil exige de tous les groupes armés qu’ils mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et aux autres activités déstabilisatrices, à l’exploitation et au commerce illégaux des ressources naturelles.  Il est exigé du M23 qu’il s’acquitte immédiatement et pleinement des engagements qu’il a pris concernant son retrait immédiat de toutes les zones occupées et son cantonnement, conformément au processus de Luanda approuvé par l’Union africaine (UA).

L’élimination de la menace posée par les groupes armés, réaffirme le Conseil, doit passer par une stratégie régionale intégrée et un engagement politique fort de la part du Gouvernement congolais, de l’Union africaine (UA), de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  C’est dans cette optique que le Conseil prie le Secrétaire général de lui dire, avant le 30 juin 2024, en consultation avec les parties prenantes, quel appui logistique et opérationnel l’ONU pourrait prêter aux forces régionales présentes en RDC.

Au nom des A3, le groupe des pays africains qui siègent au Conseil –Gabon, Ghana et Mozambique–, le Ghana a regretté que le libellé de la résolution sur « certains points essentiels », dont l’ampleur du soutien logistique, ait été « affaibli » lors des négociations. La délégation a rappelé que, dans le cadre du retrait de la MONUSCO, les forces régionales, y compris la mission à venir de la SADC, représentent un instrument de paix dans un pays où les groupes armés continuent de sévir.  Or, « limiter l’appui de la MONUSCO à ces forces n’est pas une bonne chose s’agissant du renforcement de la paix et de la sécurité en RDC », a-t-elle relevé. Soulignant la nécessité de parvenir à un règlement politique, les A3 estiment que remédier à la « crise humanitaire catastrophique » dans le pays exige une approche régionale intégrée avec la participation de toutes les parties prenantes.  Enfin, le groupe africain a regretté que des violations isolées perpétrées par des éléments des forces congolaises soient perçues comme des pratiques généralisées au sein de l’armée de ce pays, qui reste attachée selon les A3 à la protection des civils.

Les États-Unis quant à eux ont salué le fait que le Conseil ait répondu positivement à la demande officielle de la RDC d’un soutien logistique pour la tenue des élections au Nord-Kivu, au Sud-Kivu, en Ituri et dans d’autres provinces.  La délégation américaine a réitéré son appel à tous les acteurs politiques et à tous les segments de la société congolaise pour que soit respectée la volonté du peuple, « quel que soit le résultat des élections ».

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (S/2023/932)

Texte du projet de résolution (S/2023/1000)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions antérieures et les déclarations de sa présidence sur la République démocratique du Congo, en particulier ses résolutions précédentes concernant le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et le régime de sanctions établi par les résolution 1493 (2003) et 1807 (2008) et la déclaration de son président (S/PRST/2023/5),

Réaffirmant les principes fondamentaux du maintien de la paix, tels que le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat,

Réaffirmant également son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo et de tous les États de la région, et soulignant qu’il faut de toute urgence que les principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale soient pleinement respectés,

Prenant bonne note du rapport daté du 2 août 2023 que le Secrétaire général lui a présenté conformément au paragraphe 44 de sa résolution 2666 (2022), de la lettre émanant du Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo, Christophe Lutundula Apala Pen’Apala, en date du 1er septembre 2023, sur le retrait accéléré de la MONUSCO à partir de la fin de 2023 et du plan de désengagement complet que lui a présenté le groupe de travail conjoint composé de la MONUSCO et du Gouvernement congolais, le 21 novembre, soulignant, à cet égard, que le retrait de la mission devrait s’accompagner d’un renforcement simultané des capacités et de l’autorité de l’État, en particulier de la présence de forces de défense et de sécurité de l’État afin d’éviter tout vide en matière de sécurité, en commençant par le Sud-Kivu, afin d’assurer une protection efficace des civils, et demandant à tous les partenaires internationaux d’apporter un appui adéquat au Gouvernement congolais à cet égard,

Rappelant que c’est au Gouvernement congolais qu’il incombe au premier chef de protéger les populations civiles se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction, y compris contre les crimes internationaux, conscient que la persistance des problèmes de sécurité constitue une menace pour les populations civiles, et soulignant l’importance des efforts déployés à l’échelle nationale pour rétablir l’autorité de l’État dans tout le pays et surmonter ainsi les menaces que représentent les groupes armés,

Se déclarant préoccupé par l’escalade de la violence dans l’est de la République démocratique du Congo et des tension persistantes entre ce pays et le Rwanda, et notant que la République démocratique du Congo reste en proie à des cycles récurrents et évolutifs de conflits et de violence permanente causés par des groupes armés étrangers et nationaux, notamment le Mouvement du 23 mars (M23), la Coopérative pour le développement du Congo ( CODECO), les Forces démocratiques alliées (ADF), les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), le groupe Zaïre (FPAC), la Résistance pour un État de droit au Burundi (RED Tabara), les groupes Maï-Maï, les Twirwaneho et plusieurs autres groupes armés nationaux et étrangers, et les violations du droit international humanitaire et d’autres normes applicables du droit international ainsi que les atteintes aux droits humains qu’ils commettent, qui exacerbent une crise très inquiétante de la sécurité, de la situation humanitaire et des droits humains, ainsi que la violence intercommunautaire et la violence des milices dans certaines régions du pays,

Se déclarant préoccupé par les liens signalés entre les Forces démocratiques alliées et des réseaux terroristes dans l’est de la République démocratique du Congo, soulignant que de tels liens peuvent exacerber davantage les conflits et contribuer à saper l’autorité de l’État et insistant sur le fait que la solution à ces problèmes ne saurait être purement militaire et qu’il importe d’envisager la lutte contre le terrorisme de façon globale, dans le respect du droit international applicable,

Prenant acte des efforts que le Gouvernement et le peuple congolais déploient en faveur de la réalisation de la paix et du développement national ainsi que de l’appui et de la mobilisation à l’échelon régional, conscient de l’action que mènent les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et la MONUSCO afin de lutter contre la menace que représentent les groupes armés dans le pays,

Demeurant profondément préoccupé par les multiples cas de violation des droits humains et d’atteinte à ces droits ainsi que de violation du droit international humanitaire dans certaines zones commises par toutes les parties et en particulier par des groupes armés, ainsi que par le fait que les violences intercommunautaires se sont intensifiées sous l’effet des discours de haine, de la mésinformation et de la désinformation, notamment dans les médias sociaux,

Réaffirmant que les femmes et les jeunes jouent un rôle important dans la prévention, la gestion et le règlement des conflits, ainsi que dans la consolidation de la paix et les processus électoraux et soulignant qu’il importe d’assurer leur participation pleine, égale, effective, véritable et en toute sécurité à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité en République démocratique du Congo,

Se déclarant gravement préoccupé par la situation humanitaire, quelque 26,4 millions de Congolais ayant besoin d’une aide humanitaire, et l’augmentation du nombre de personnes déplacées dans le pays, 6,9 millions selon les dernières estimations, les 1 058 000 personnes réfugiées vivant en République démocratique du Congo et les autres personnes réfugiées, plus de 1 million, ayant fui le pays pour d’autres pays d’Afrique en raison de la poursuite des hostilités, encourageant les États Membres à s’attacher à une répartition plus équitable des charges et de la responsabilité d’héberger et d’aider les personnes réfugiées en République démocratique du Congo, conformément au cadre d’action global pour les réfugiés, engageant la République démocratique du Congo et tous les États de la région à s’employer à créer un environnement pacifique propice à la mise en place de solutions durables pour les personnes réfugiées et déplacées, et notamment à leur rapatriement volontaire et à leur réintégration à terme en République démocratique du Congo, en toute sécurité et dans la dignité, avec le concours de l’équipe de pays des Nations Unies et des acteurs humanitaires, et soulignant que toute solution de ce type devrait être conforme aux obligations découlant du droit international des réfugiés, du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme,

Rappelant les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence et ses principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance,

Demandant à toutes les parties à des conflits armés de prendre part immédiatement à une pause humanitaire pérenne, de façon à permettre l’acheminement rapide, sûr, sans entrave et durable de l’aide humanitaire, conformément aux principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance,

Notant l’importance de la vente commerciale d’aliments, de combustible et d’autres produits essentiels afin de répondre aux besoins de survie de base de la population civile,

Rappelant en outre toutes ses résolutions sur les femmes et la paix et la sécurité, sur les jeunes et la paix et la sécurité, sur les enfants et les conflits armés et sur la protection des civils en période de conflit armé, saluant l’action menée par le Gouvernement congolais à cet égard et les mesures qu’il a prises pour appliquer la résolution 1325 (2000), soulignant qu’il importe d’avoir des solutions locales qui répondent aux besoins des femmes en temps de conflit, rappelant les conclusions sur la question des enfants et du conflit armé en République démocratique du Congo qu’a adoptées son groupe de travail sur les enfants et les conflits armés le 19 décembre 2022 et qui concernent les parties aux conflits armés se déroulant dans ce pays, se déclarant gravement préoccupé par le grand nombre de violations et d’atteintes perpétrées contre les enfants, en particulier l’augmentation du recrutement et de l’utilisation ainsi que les violences sexuelles et fondées sur le genre commises par les groupes armés et certains membres des forces de sécurité, et demandant à tous les acteurs de contribuer à la réadaptation et à la réintégration des enfants auparavant associés à des forces et groupes armés,

Conscient des effets néfastes que les changements climatiques, les changements écologiques, les catastrophes naturelles et le manque d’accès à l’énergie, entre autres facteurs, ont sur la stabilité de la République démocratique du Congo, précisant qu’il importe de tenir compte de ces effets sur les programmes mis en place dans le pays, se félicitant du rôle moteur que joue la République démocratique du Congo dans l’élaboration de stratégies nationales visant à remédier à ces problèmes et dans la préservation du bassin forestier du Congo, préoccupé par les activités des groupes armés dans les zones protégées entraînant des dommages écologiques et prenant note de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris,

Réaffirmant qu’il est nécessaire que la MONUSCO puisse s’acquitter pleinement de son mandat conformément à ses résolutions applicables, en utilisant toutes les mesures disponibles pour lutter efficacement contre la menace posée par les groupes armés et d’autres menaces pour la sécurité, compte tenu de la multiplication des conflits dans le pays,

Demandant de nouveau à toutes les parties de coopérer pleinement avec la MONUSCO et de continuer à œuvrer à l’exécution intégrale et objective du mandat de la Mission, y compris pendant toute la durée du retrait, rappelant qu’il importe de continuer à respecter l’accord sur le statut des forces, notamment l’entrée et la relève sans entrave des soldats de la paix de la MONUSCO et de leur matériel, et qu’il condamne toutes les attaques dirigées contre les soldats de la paix, qui pourraient constituer des crimes de guerre, et soulignant que les auteurs de ces attaques doivent répondre de leurs actes,

Réaffirmant l’importance de doter les opérations de paix des Nations Unies de ressources suffisantes, notamment pendant les phases de transition des missions, et rappelant la résolution 2594 (2021) sur les transitions en matière d’opérations de la paix des Nations Unies à cet égard,

Soulignant l’importance des activités de communication stratégique pour l’exécution du mandat de la MONUSCO et la sûreté et la sécurité de ses Casques bleus,

Constatant que la situation en République démocratique du Congo demeure une menace pour la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Situation politique

1.    Se félicite des mesures prises par le Gouvernement congolais pour répondre aux besoins de son peuple et prie instamment tous les acteurs politiques congolais de ne ménager aucun effort pour mettre en place les réformes indispensables sur les plans de la gouvernance, de la sécurité et de l’économie, réaffirme qu’il importe de mettre en œuvre les engagements pris afin de réaliser l’unité nationale, de renforcer l’état de droit et le respect des droits humains, notamment le respect de la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de la presse et le droit de réunion pacifique, de lutter contre la corruption, de lancer des programmes nationaux de développement visant à réduire sensiblement la pauvreté et de favoriser l’inclusion politique et la consolidation de la paix, et encourage la MONUSCO à continuer de faciliter, par ses bons offices, des processus politiques pacifiques, transparents, inclusifs et crédibles;

2.    Se réjouit de l’action menée par le Président Tshisekedi et son gouvernement pour favoriser la réconciliation, la paix et la stabilité en République démocratique du Congo, réaffirme qu’il est nécessaire de poursuivre l’action menée auprès des États de la région pour nouer de bonnes relations avec les pays voisins et faire avancer la paix, la sécurité et l’intégration régionale, insiste sur le rôle crucial des mécanismes de paix régionaux, en particulier les processus de Luanda et de Nairobi, et l’appui continu de la MONUSCO, du Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs et des partenaires internationaux, souligne que la stabilité politique et la sécurité ainsi que le renforcement de la présence de l’État dans les zones de conflit, essentiellement dans l’est de la République démocratique du Congo, sont des conditions indispensables pour une paix durable dans le pays, invite les autorités congolaises à œuvrer en faveur de la stabilisation et du renforcement des capacités des institutions de l’État, notamment dans les zones de conflit, avec l’appui de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies, afin de défendre les droits et de répondre aux besoins de l’ensemble de la population congolaise, demande à tous les acteurs politiques de continuer à s’employer, en 2023 et après, à améliorer et défendre, sur l’ensemble du territoire, la consolidation de la paix et le processus électoral, et de garantir la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes à toutes les étapes de ce processus;

3.    Prie le Secrétaire général et demande aux organisations régionales de fournir un appui politique au renforcement des institutions de l’État en République démocratique du Congo et au rétablissement de la confiance entre les différentes parties, notamment par leurs bons offices, en vue de consolider la paix et la sécurité, de s’attaquer aux causes profondes des conflits dans les zones prioritaires ainsi que de susciter un large consensus national autour des principales réformes de la gouvernance et de la sécurité, de lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles et d’appuyer les réformes et les processus électoraux en cours, conformément aux priorités nationales du Gouvernement de la République démocratique du Congo;

Droits humains

4.    Se félicite des mesures et des engagements pris par le Président Tshisekedi pour veiller à ce que le Gouvernement congolais protège et respecte les droits humains et les libertés fondamentales, ainsi que pour combattre l’impunité dans tous les domaines, salue les mesures prises par le Gouvernement congolais en vue de l’instauration d’une stratégie nationale de justice transitionnelle, y compris le lancement de consultations dans plusieurs régions, se félicite de la décision de mettre progressivement fin à l’état de siège décrété en Ituri et dans le Nord-Kivu, et invite le Gouvernement congolais à faire en sorte que les mesures visant à éliminer la menace des groupes armés et à rétablir l’autorité de l’État, soient évaluées régulièrement, modulées en fonction des progrès accomplis par rapport à des objectifs clairement définis et appliquées dans le plein respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire;

5.    Engage instamment le Gouvernement congolais à faire répondre de leurs actes les auteurs de violations du droit international humanitaire ou de violations des droits humains ou d’atteintes à ces droits, en particulier celles qui peuvent constituer un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, souligne l’importance à cet égard de la coopération régionale et de la coopération avec la Cour pénale internationale depuis le renvoi par la République démocratique du Congo devant la Cour de la situation dans le pays en 2004, ainsi que de la coopération avec la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples et constate que cette saisine par les autorités congolaises à amener le Procureur de la Cour pénale internationale à procéder à un examen préliminaire afin d’évaluer les informations reçues concernant les crimes présumés relevant du Statut de Rome commis au Nord-Kivu à compter du 1er janvier 2022;

6.    Encourage l’adoption de nouvelles mesures par le Gouvernement congolais pour que les forces de sécurité répondent des violations du droit international humanitaire et du droit international des droits humains et que la lutte contre l’impunité dans leurs rangs se poursuive, et demande aux autorités congolaises de traduire les responsables de ces faits en justice, prie le Gouvernement congolais de faire en sorte, conformément aux accords déjà passés, que les membres du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo aient pleinement et librement accès aux centres de détention, aux hôpitaux et aux morgues et à tous autres locaux, s’il y a lieu, pour recueillir des informations sur les violations des droits humains, souligne que le Gouvernement congolais doit continuer de faire en sorte que ses forces de sécurité gagnent en professionnalisme, notamment en vérifiant leurs antécédents, en les formant et en renforçant leurs capacités, afin d’assurer le strict respect du droit national et international des droits de l’homme ainsi que du droit international humanitaire, et souligne qu’il importe de respecter l’état de droit;

7.    Condamne fermement toutes les violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit en République démocratique du Congo, et particulièrement par les groupes armés, se félicite de l’action menée par le Gouvernement congolais pour prévenir et combattre les violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit, et notamment des progrès enregistrés dans la lutte contre l’impunité par l’arrestation, la poursuite et la condamnation de membres des FARDC et de la Police nationale congolaise, et dans la création d’un fonds national de réparations en faveur des victimes et des personnes rescapées de violences sexuelles et d’autres crimes, prie instamment le Gouvernement de continuer à intensifier ses efforts pour lutter contre l’impunité des violences sexuelles commises en période de conflit et d’après conflit, notamment celles commises par certains membres des FARDC et de la Police nationale congolaise, et de fournir aux personnes rescapées, aux victimes et aux témoins tous les services nécessaires, tels que des services médicaux, liés à la santé sexuelle et reproductive, au soutien psychosocial, à la santé mentale, d’ordre juridique et socioéconomique, et d’assurer leur protection, salue la loi de décembre 2022 sur les réparations et la création d’un fonds national de réparation au profit des victimes de violences sexuelles liées aux conflits, encourage le Gouvernement à renforcer son application du Communiqué conjoint sur la lutte contre les violences sexuelles commises en période de conflit adopté en 2013 et son additif signé en 2019, et à consacrer les fonds suffisants à la mise en œuvre de ces engagements, salue les nouveaux progrès des FARDC et de la Police nationale congolaise concernant l’application de leurs plans d’action respectifs contre la violence sexuelle, et rappelle l’importance de coopérer avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit;

8.    Se félicite des progrès accomplis par le Gouvernement congolais pour consolider les acquis du plan d’action visant à faire cesser et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants et en accélérer la mise en œuvre afin de faire cesser et de prévenir les violations commises sur la personne d’enfants et de veiller à ce que les enfants ne soient pas détenus pour association supposée avec des groupes armés et qu’ils soient remis aux acteurs de la protection de l’enfance, demande au Gouvernement congolais de continuer ses efforts, en veillant à ce que les auteurs de toutes violations et atteintes, y compris les membres des forces de sécurité, répondent de leurs actes, et rappelle qu’il importe de coopérer avec le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé;

Groupes armés

9.    Condamne fermement tous les groupes armés opérant en République démocratique du Congo, notamment le M23, la Coopérative pour le développement du Congo, les Forces démocratiques alliées, les Forces démocratiques de libération du Rwanda, le groupe Zaïre (FPAC), la Résistance pour un état de droit (RED Tabara), les groupes Maï-Maï, les Twirwaneho et plusieurs autres groupes armés nationaux et étrangers, et les violations du droit international humanitaire et d’autres normes applicables du droit international ainsi que les atteintes aux droits humains qu’ils commettent, réaffirme qu’il condamne les actes de violence contre la population et les infrastructures civiles, le personnel des Nations Unies, le personnel associé et les travailleurs humanitaires, ainsi que le personnel médical et les installations médicales, les exécutions sommaires et les atteintes à l’intégrité physique, les violences sexuelles et fondées sur le genre, le recrutement et l’utilisation d’enfants, l’enlèvement d’enfants et de membres du personnel humanitaire, ainsi que les attaques visant des écoles et des personnes civiles liées aux écoles, notamment des enfants et des enseignants, et des hôpitaux, que commettent les groupes armés et les milices, en violation du droit international applicable, ainsi que l’utilisation de personnes civiles comme boucliers humains, les déplacements forcés et massifs de personnes civiles, les exécutions extrajudiciaires et les arrestations arbitraires, l’emploi indiscriminé d’engins explosifs improvisés, et réaffirme également que les auteurs de tels actes doivent être amenés à en répondre;

10.   Exige de tous les groupes armés qu’ils mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et aux autres activités déstabilisatrices, à l’exploitation et au commerce illégaux des ressources naturelles, exige également qu’il soit mis fin à toute nouvelle avancée du M23, que celui-ci s’acquitte immédiatement et pleinement des engagements qu’il a pris concernant son retrait immédiat de toutes les zones occupées et son cantonnement, conformément au processus de Luanda approuvé par l’Union africaine, exige en outre que tous les membres des groupes armés soient immédiatement et définitivement démobilisés, déposent les armes, renoncent à la violence, préviennent et fassent cesser les violations commises contre les enfants et libèrent les enfants qui se trouvent dans leurs rangs, demande instamment à tous les groupes armés congolais de participer sans condition au processus de Nairobi dirigé par la Communauté de l’Afrique de l’Est pour rechercher des solutions politiques en vue du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, et aux groupes armés étrangers de retourner dans leur pays d’origine, et demande au Gouvernement congolais de prendre de nouvelles mesures, militaires et non militaires, pour lutter contre la menace que représentent les groupes armés, dans le respect du droit international, y compris du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme;

11.   Condamne le soutien apporté au M23 par toute partie extérieure et exige de toutes ces parties qu’elles y mettent un terme et se retirent immédiatement de la République démocratique du Congo, condamne également le soutien apporté à certains groupes armés, tels que les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), exige qu’il y soit mis un terme et se déclare profondément préoccupé par les informations présentées dans le rapport annuel du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo concernant l’appui militaire extérieur fourni au M23 et le soutien apporté également aux FDLR par des forces militaires, et se félicite des engagements pris par les autorités congolaises de contrer cet appui;

12.   Demande instamment au Gouvernement congolais et à ses partenaires, et notamment aux institutions financières internationales, d’apporter d’urgence un soutien adéquat en temps voulu en faveur d’une mise en œuvre rapide et effective du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants remplissant les conditions requises, sous la coordination du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation, au moyen d’initiatives locales spécialement conçues et adaptées au contexte, offrant des possibilités et des solutions économiques de remplacement durables, et en veillant à ce que fassent partie intégrante de ces processus la lutte contre l’impunité des violations des droits humains, des atteintes à ces droits et des crimes internationaux, les initiatives de justice transitionnelle et la protection des droits des enfants, prend note de la promulgation en mai 2023 de la loi portant institution de la réserve armée de la défense et demande au Gouvernement congolais de faire en sorte que cette réserve soit créée en tenant compte du Programme de désarmement, de démobilisation, de relèvement communautaire et de stabilisation et des initiatives de justice transitionnelle et de réforme du secteur de la sécurité;

13.   Condamne la poursuite de l’exploitation et du commerce illégaux des ressources naturelles, notamment des minerais dits de « conflit » comme l’étain, le tantale, le tungstène, l’or, les diamants, le cobalt et le coltan, ainsi que du cacao, du charbon de bois, du bois d’œuvre et des espèces sauvages, auxquels se livrent les groupes armés et les réseaux criminels qui les soutiennent, ainsi que les conséquences néfastes des conflits armés sur les zones naturelles protégées, qui font obstacle à l’instauration d’une paix durable et au développement de la République démocratique du Congo, condamne la présence et les activités destructrices des groupes armés dans les zones naturelles protégées, qui sapent les mesures visant à protéger les forêts, la biosphère et l’environnement dans son ensemble et engage le Gouvernement à redoubler d’efforts pour préserver ces zones, demande aux États membres de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et des communautés économiques régionales de lutter ensemble contre l’exploitation et le commerce illégaux des ressources naturelles par l’amélioration et le renforcement de la sécurité autour des secteurs miniers et par la recherche d’un rapprochement entre les collectivités minières, les autorités locales et les acteurs chargés de la sécurité pour régler les conflits et promouvoir les droits des membres des communautés vivant autour des secteurs miniers, les encourage à promouvoir la gestion transparente et légale des ressources naturelles, notamment l’adoption d’objectifs de recettes publiques, afin de financer le développement, la création de cadres réglementaires et douaniers durables et la mise en place d’une diligence raisonnable dans le cadre de l’approvisionnement en minerais, et rappelle à cet égard ses résolutions 2457 (2019) et 2389 (2017) ainsi que la déclaration de son président S/PRST/2021/19;

14.   Se réjouit des engagements et des mesures pris par le Président Tshisekedi et son gouvernement pour faire avancer la réforme du secteur de la sécurité et promouvoir la consolidation de l’autorité de l’État, la réconciliation, la tolérance et la démocratie, relève que ces mesures préliminaires créent des possibilités nouvelles de collaboration et de coordination entre la MONUSCO et les forces de sécurité congolaises, encourage les autorités congolaises à les respecter et à accélérer la relève des contingents annoncée par le Président Tshisekedi, engage le Gouvernement congolais à demeurer pleinement résolu à protéger la population civile, en se dotant rapidement de forces de sécurité professionnelles, responsables et pérennes, qui respectent le droit international humanitaire et le droit national et international des droits de l’homme, en mettant en place une administration civile congolaise responsable, en particulier dans les secteurs de la police, de la justice, de l’administration pénitentiaire et de l’administration territoriale, et en renforçant l’état de droit ainsi que la promotion et la protection des droits humains, notamment en y allouant les ressources financières nécessaires et en favorisant la participation pleine, égale et véritable des femmes et leur sécurité, et invite les partenaires internationaux à augmenter leur appui à cet égard;

15.   Demande que se poursuivent les mesures prises sur le plan national pour contrer la menace que représentent le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes légères et de petit calibre ainsi que le détournement d’armes au profit des groupes armés dans le pays, notamment les mesures tendant à organiser en toute sûreté et efficacité la gestion, l’entreposage, la surveillance et la sécurité des stocks d’armes et de munitions et la lutte contre le trafic et le détournement des armes, comme le renforcement des capacités et la lutte contre l’impunité, avec l’appui renouvelé de la MONUSCO, selon qu’il conviendra et dans les limites des ressources existantes, prie le Gouvernement congolais d’accroître son appui à la Commission nationale de contrôle des armes légères et de petit calibre et de réduction de la violence armée et encourage l’Organisation des Nations Unies et les partenaires internationaux à aider davantage le Gouvernement congolais à améliorer la gestion des armes et des munitions;

Appui régional

16.   Réaffirme que l’élimination de la menace posée par les groupes armés doit passer par une stratégie régionale intégrée et un engagement politique fort de la part du Gouvernement congolais, de l’Union africaine, de la Communauté de l’Afrique de l’Est, de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, de la Communauté de développement de l’Afrique australe, réaffirme qu’il appuie les efforts nationaux et régionaux visant à promouvoir la paix et la stabilité en République démocratique du Congo et dans la région, déclare qu’il faut revitaliser l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, qui reste un mécanisme essentiel pour la paix et la stabilité durables, et demande aux pays de la région de renouveler leurs engagements à cet égard, souligne les engagements pris par la région au titre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région de ne pas tolérer les groupes armés ni de leur fournir d’assistance ou d’appui de quelque nature que ce soit,

17.   Encourage les États signataires de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région à s’approprier la Stratégie des Nations Unies pour la consolidation de la paix et la prévention et le règlement des conflits dans la région des Grands Lacs ainsi que son plan d’action et à faire preuve de volonté politique en vue de la mettre effectivement en œuvre, appuie pleinement l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs dans l’exécution de son mandat consistant à remédier aux derniers problèmes faisant obstacle à l’application de l’Accord-cadre et à promouvoir la paix et la stabilité dans la région, demande à l’Envoyé spécial d’intensifier son action à l’échelle régionale et internationale en faveur de la pleine application de l’Accord-cadre, y compris en appuyant efficacement les mesures prises pour la revitalisation de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région et par ses bons offices, en coordonnant les stratégies et en partageant l’information avec la MONUSCO, le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale et d’autres entités des Nations Unies, et exhorte la MONUSCO à collaborer avec le Bureau de l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs afin de rechercher des solutions politiques en vue de mettre fin aux flux transfrontaliers de combattants armés, d’armes et de ressources naturelles qui menacent la paix et la stabilité en République démocratique du Congo, en harmonisant les stratégies, en procédant à des échanges d’informations et en coordonnant l’établissement de leurs rapports;

18.   Se félicite de l’action menée pour harmoniser et coordonner les initiatives de paix visant à remédier à la situation en République démocratique du Congo, notamment dans le cadre du sommet quadripartite de la Communauté de l’Afrique de l’Est, de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et de la Communauté de développement de l’Afrique australe, qui s’est tenu à Luanda, le 27 juin, sous les auspices de l’Union africaine;

19.   Lance un appel au calme et au renforcement du dialogue entre la République démocratique du Congo et le Rwanda afin de faire avancer une paix durable dans la région, souligne qu’il importe d’avoir des initiatives politiques et des mesures coercitives coordonnées et complémentaires en République démocratique du Congo, bénéficiant notamment de l’appui du Secrétaire général, de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo et de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs;

20.   Se déclare favorable à ce qu’un appui soit donné à des forces régionales, comme il convient, déclare son intention d’étudier, si le pays hôte et l’organisation concernée en font la demande de manière claire et précise, les conditions dans lesquelles la MONUSCO pourrait donner un appui logistique et opérationnel limité à une force régionale déployée sous l’égide de l’Union africaine dans la zone de déploiement de la Mission, aux fins de l’exécution du mandat de celle-ci, dans la limite des ressources disponibles, rappelle également qu’un tel appui doit tenir rigoureusement compte de la politique de diligence voulue de l’Organisation en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes et souligne qu’il importe de protéger la population civile, de mettre en place une coordination étroite et le partage d’informations entre les forces régionales déployées, les FARDC, la Force de défense nationale du Burundi, les Forces de défense populaires de l’Ouganda et la MONUSCO, notamment pour dé-conflictualiser les opérations et assurer l’exécution du mandat de la MONUSCO, et que ces opérations, unilatérales ou conjointes, doivent toutes être conduites dans le strict respect du droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il conviendra;

21.   Demande aux États Membres qui fournissent des contingents aux forces régionales d’appliquer les normes les plus élevées de transparence, de déontologie et de discipline à leurs contingents, et aux forces régionales d’établir un cadre réglementaire solide, en accord avec le cadre de confirmité de l’Union africaine, et demande également à toutes les entités des Nations Unies concernées d’appuyer son application, dans le respect de leur mandat respectif;

Retrait progressif, responsable et durable

22.   Prend bonne note du plan de désengagement complet, comprenant trois phases distinctes et successives de désengagement, que le Gouvernement congolais et l’ONU lui ont soumis, conformément au document S/PRST/2023/5, prend note du plan de la MONUSCO selon lequel la Mission commencerait à retirer sa force du Sud-Kivu avant la fin de 2023, décide de lancer le retrait progressif, responsable et durable de la Mission de la République démocratique du Congo et de transférer progressivement les tâches au Gouvernement congolais;

23.   Décide que la Mission retirera sa force du Sud-Kivu d’ici à la fin avril 2024 et limitera son mandat aux provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri de mai 2024 jusqu’à la fin de la période couverte par le mandat actuel, autorise la MONUSCO à maintenir une présence civile résiduelle suffisante dans le Sud-Kivu afin d’organiser son retrait ordonné de cette province et un transfert harmonieux et responsable de ses tâches aux autorités congolaises, conformément au plan de désengagement, en mettant particulièrement l’accent sur la protection des civils, le transfert de connaissances et de données et le renforcement des capacités, notamment concernant la protection des enfants, souligne l’importance de la communication entre la MONUSCO, les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police et les autorités congolaises dans ce processus, encourage vivement les autorités congolaises à prendre des mesures concrètes pour appliquer le plan de désengagement afin d’éviter toute lacune en matière de sécurité dans le Sud-Kivu de sorte à assurer une protection efficace des civils;

24.   Demande au Gouvernement congolais et à l’Organisation des Nations Unies, dans le cadre du groupe de travail conjoint composé du Gouvernement congolais, de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies, de donner d’ici au 30 juin 2024, en coordination avec les parties prenantes concernées, y compris en consultation avec la société civile, des informations actualisées sur l’application du plan de désengagement complet et des propositions pour les prochaines étapes du retrait progressif, responsable et durable de la Mission;

25.   Se déclare prêt à envisager d’autres mesures de retrait progressif, responsable et durable de la Mission à la fin de cette première phase, en tenant compte des progrès accomplis concernant les objectifs et les indicateurs énoncés dans le plan de désengagement ainsi que de la situation sur le terrain;

26.   Engage vivement les autorités congolaises à élaborer, avec le soutien de la MONUSCO, de l’équipe de pays des Nations Unies et des parties prenantes concernées, en coordination avec la société civile, une stratégie cohérente de mobilisation des ressources fondée sur une évaluation solide des incidences qu’un transfert des tâches aura sur le financement, les programmes et autres, y compris la situation des droits humains, invite la communauté internationale et les donateurs à appuyer le renforcement des activités et des programmes de l’équipe de pays des Nations Unies et des autres entités des Nations Unies présentes en République démocratique du Congo, y compris les activités de consolidation de la paix, et demande à la MONUSCO, à l’équipe de pays des Nations Unies et à d’autres entités des Nations Unies présentes en République démocratique du Congo de prendre les mesures concertées prioritaires énoncées dans le plan de désengagement et de permettre à l’équipe de pays des Nations Unies d’intensifier les programmes en prévision du retrait progressif, responsable et durable de la MONUSCO, en consultation avec les institutions financières internationales;

27.   Souligne que, dans les contextes de transition, il importe d’avoir une communication stratégique dynamique, demande à la MONUSCO de renforcer ses activités de communication pour appuyer l’exécution de son mandat, renforcer sa protection et mieux faire connaître son mandat et son rôle et, à cet égard, encourage les activités de communication conjointes entre la MONUSCO et le Gouvernement congolais, afin de contribuer à créer des conditions propices à la reconfiguration harmonieuse, responsable et durable de la présence de l’ONU, et demande à la MONUSCO et aux partenaires concernés de continuer d’examiner de toute urgence comment accompagner les programmes indépendants de Radio Okapi dans le contexte du retrait de la MONUSCO;

28.   Demande au Gouvernement congolais de coopérer pleinement avec le personnel de la MONUSCO, en assurant sa sûreté et sécurité pendant le retrait, qui doit se dérouler de façon sûre et ordonnée, et prie le Gouvernement de respecter pleinement toutes les dispositions de l’Accord sur le statut des forces jusqu’au départ de la République démocratique du Congo des derniers éléments de la MONUSCO;

Mandat de la MONUSCO

29.   Décide de proroger jusqu’au 20 décembre 2024 le mandat de la MONUSCO en République démocratique du Congo et, à titre exceptionnel et sans créer de précédent ni remettre en cause les principes convenus régissant les opérations de maintien de la paix, de sa brigade d’intervention;

30.   Décide que la MONUSCO maintiendra un effectif maximum autorisé de 13 500 militaires, 660 observateurs militaires et officiers d’état-major, 591 policiers et 1 410 membres d’unités de police constituées jusqu’au 30 juin 2024, qui sera réduit à 11 500 militaires, 600 observateurs militaires et officiers d’état-major, 443 policiers et 1 270 membres d’unités de police constituées à partir du 1er juillet 2024;

31.   Décide que les priorités stratégiques de la MONUSCO sont les suivantes: i) contribuer à la protection des populations civiles dans la zone où elle est déployée et ii) appuyer la stabilisation et le renforcement des institutions de l’État en République démocratique du Congo ainsi que les principales réformes de la gouvernance et de la sécurité;

32.   Autorise la MONUSCO, en vue d’accomplir les tâches prescrites par son mandat, à prendre toutes les mesures nécessaires pour s’en acquitter;

33.   Souligne que ces opérations, unilatérales ou conjointes, doivent toutes être conduites dans le strict respect du droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, selon qu’il conviendra, prie la MONUSCO de veiller à ce que l’appui fourni aux opérations menées par les forces de sécurité nationales, notamment sous la forme de rations ou de carburant, ne le soit que dans le cadre d’opérations conjointes, planifiées et exécutées en commun et fasse l’objet d’un contrôle et d’un examen minutieux, notamment par l’équipe de pays des Nations Unies, et soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies, faute de quoi cet appui sera suspendu; 

Tâches par ordre de priorité

34.   Décide que le mandat de la MONUSCO comportera les tâches ci-après classées par ordre de priorité du paragraphe 34 au paragraphe 43, souligne que toutes les tâches de la MONUSCO doivent être exécutées dans le respect des droits humains et des libertés fondamentales et insiste sur le fait que la priorité doit être accordée à la protection des populations civiles dans les décisions concernant l’utilisation des capacités et ressources disponibles:

i)    Protéger les populations civiles menacées de violences physiques en prenant toutes les mesures nécessaires pour assurer une protection efficace, rapide, dynamique et intégrée

a)    Prévenir, dissuader et empêcher les groupes armés et les milices locales de commettre des violences contre la population, notamment en les empêchant d’envahir, d’attaquer ou d’encercler de grosses agglomérations, y compris en complément des autorités congolaises, en les désarmant, en recourant aux bons offices, en appuyant ou en entreprenant des initiatives de médiation locale et de plaidoyer au niveau national pour empêcher l’intensification de la violence et contrer les discours de haine, la désinformation et la mésinformation, en prêtant une attention particulière aux civils regroupés dans les camps de déplacés et de réfugiés, aux manifestants pacifiques, au personnel humanitaire et aux défenseurs des droits humains, conformément aux principes fondamentaux du maintien de la paix, tout en veillant à atténuer les risques auxquels sont exposés les civils avant, pendant et après toute opération militaire ou policière;

b)    Mener des offensives ciblées et énergiques en République démocratique du Congo en vue de neutraliser les groupes armés, au moyen d’une brigade d’intervention de la force efficace, sous la pleine autorité du commandant de la force, afin de contribuer à réduire la menace que constituent les groupes armés pour l’autorité de l’État et la sécurité des civils dans le pays et à préparer le terrain pour les activités de stabilisation, unilatéralement ou conjointement avec les forces de sécurité congolaises;

c)    Mener des opérations conjointes plus fréquentes et effectives avec les forces de sécurité congolaises, qui soient le fruit d’activités de planification conjointes et de coopération tactique, conformément au mandat de la MONUSCO et de manière strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits humains, afin de veiller à ce que tous les efforts possibles soient faits pour dissuader et empêcher les groupes armés d’agir ou intervenir pour mettre fin à leurs actes;

d)    Maintenir un déploiement préventif et une présence mobile, flexible, robuste et efficace, notamment en organisant des patrouilles actives, pédestres et motorisées, en particulier dans les zones à haut risque;

e)    Travailler de concert avec le Gouvernement congolais et avec les travailleurs humanitaires afin de déceler les menaces qui pèsent sur les civils, appliquer les plans de prévention et d’intervention communs et renforcer la coopération civilo-militaire, pour protéger les civils contre les violations des droits humains et les atteintes à ces droits et contre les violations du droit international humanitaire, y compris toutes les formes de violence sexuelle et de violence fondée sur le genre ainsi que les violations et exactions commises contre les enfants et les personnes handicapées;

f)    Renforcer sa mobilisation auprès des civils et tirer parti des capacités de la population locale afin de favoriser la mise en place d’un environnement protecteur, notamment le renforcement des mécanismes de protection des civils non armés, et renforcer sa communication stratégique, notamment par des communications conjointes avec le Gouvernement congolais, afin de mieux faire connaître et comprendre son mandat et ses activités de protection des civils, de renforcer son mécanisme d’alerte rapide, y compris de prévenir les campagnes de désinformation et de mésinformation visant à saper la crédibilité de la mission et à entraver l’exécution de son mandat, en particulier pendant les phases de désengagement;

g)    Maintenir un environnement protecteur pour les civils tout au long des phases de désengagement, notamment en établissant des plans de protection intégrés au niveau des provinces, élaborés conjointement avec les autorités locales et les services de sécurité et en consultation avec les populations et la société civile, afin d’assurer le retrait responsable de la MONUSCO, conformément au plan de désengagement.

ii)   Désarmement, démobilisation, réintégration et stabilisation

h)    Offrir ses bons offices, ses conseils et son appui au Gouvernement congolais, en étroite coopération avec les partenaires locaux et internationaux, à l’appui de la revitalisation et de l’application du processus de Nairobi dirigé par la Communauté de l’Afrique de l’Est, de l’application de l’Accord de Luanda et de l’application du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation, conformément à la loi no 21/038 du 5 juillet 2021 et en vue du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des combattants congolais et étrangers qui ne sont pas soupçonnés de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou d’atteintes aux droits humains, et du retour de ces combattants à une vie civile pacifique, l’accent étant particulièrement mis sur les besoins des femmes et des enfants qui ont été associés à des forces et groupes armés;

i)    Offrir un appui aux processus et mécanismes de désarmement, de démobilisation, de rapatriement, de réinstallation et de réintégration des combattants étrangers non soupçonnés de crimes internationaux ou de violations des droits humains, et au retour de ces combattants et des personnes à leur charge à une vie civile pacifique dans leur pays d’origine ou dans un pays tiers d’accueil, l’accent étant particulièrement mis sur les besoins des femmes et des enfants qui ont été associés à des forces et groupes armés;

j)    Conseiller et aider les autorités congolaises en ce qui concerne l’élimination des armes et des munitions des combattants congolais et étrangers désarmés en application des dispositions de ses résolutions et des traités applicables relatifs à la maîtrise des armements;

k)    Offrir une assistance technique au Gouvernement congolais pour l’aider à procéder à la consolidation d’une structure nationale civile efficace qui contrôle les principales activités minières et gère équitablement et de manière productive l’extraction, l’ajout de la valeur, le transport et le commerce des ressources naturelles dans l’est de la République démocratique du Congo, y compris à trouver des points d’entrée pour la transformation des conflits grâce à des moyens de subsistance viables, sûrs, dignes pour les ex-combattants et leur communauté d’accueil, en coordination avec l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs;

l)    Continuer de collaborer avec le Gouvernement congolais en vue de consolider les acquis du plan d’action visant à faire cesser et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants et d’en accélérer l’application, et poursuivre le dialogue avec toutes les parties figurant sur la liste afin d’obtenir qu’elles s’engagent de nouveau et de prévenir et faire cesser les violations et les violences contre les enfants;

iii)  Réforme du secteur de la sécurité

m)    Offrir ses bons offices et des conseils stratégiques et techniques au Gouvernement congolais, selon qu’il convient, et jouer un rôle moteur dans la coordination de l’appui fourni par les partenaires internationaux et bilatéraux et les organismes des Nations Unies, en consultation avec le Gouvernement, pour:

–contribuer davantage, notamment par l’entremise du Service de la lutte antimines de l’ONU, à renforcer et consolider les moyens des forces de sécurité congolaises, notamment les capacités de gestion des armes et des munitions, de lutte contre les engins explosifs improvisés et de neutralisation des explosifs et des munitions ainsi que d’enquêtes et d’exploitation scientifique de base liées aux engins explosifs improvisés;

–accélérer l’appropriation nationale de la réforme du secteur de la sécurité, qui garantisse la sécurité et la justice pour tous par l’intermédiaire d’institutions chargées de la justice et de la sécurité qui soient indépendantes, responsables et opérationnelles et tiennent compte de la participation pleine, égale et véritable et de la sécurité des femmes;

–favoriser et faciliter des réformes essentielles afin de renforcer la responsabilité et l’efficacité dans l’appareil judiciaire et le secteur de la sécurité, en luttant contre l’impunité et en renforçant l’efficacité opérationnelle, y compris grâce à une formation aux droits humains, et aider le Gouvernement congolais à finaliser de manière inclusive la politique de sécurité et la stratégie de réforme du secteur de la sécurité;

Droits humains

35.   Autorise la MONUSCO à surveiller les violations des droits humains et les atteintes à ces droits ainsi que les violations du droit international humanitaire et tout rétrécissement de l’espace politique et tout acte de violence, notamment dans le cadre des élections, à lui en rendre compte immédiatement et à en assurer le suivi;

36.   Autoriseégalement la MONUSCO à utiliser ses capacités existantes afin de concourir à l’exécution des tâches énumérées ci-après exclusivement en coopération avec l’équipe de pays des Nations Unies, d’une manière simplifiée et échelonnée, étant entendu que cela ne doit pas empiéter sur sa capacité à exécuter les tâches prioritaires et sachant que toutes les tâches se renforcent mutuellement:

Protection du personnel et des biens des Nations Unies

a)    Assurer la protection du personnel, des installations et du matériel des Nations Unies et la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé;

Appui au système judiciaire et lutte contre l’impunité

b)    Travailler de concert avec les autorités congolaises, en tirant parti des capacités et des compétences du système des Nations Unies, afin de renforcer et d’appuyer le système judiciaire congolais, d’enquêter sur tous ceux qui pourraient avoir commis un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, des violations du droit international humanitaire et des violations des droits humains ou des atteintes à ces droits dans le pays, et de traduire les intéressés en justice, notamment en coopérant avec les États de la région et avec la Cour pénale internationale;

c)    Offrir ses bons offices, ses conseils et son appui au Gouvernement congolais en vue de promouvoir les droits humains, en particulier les droits civils et politiques, et de lutter contre l’impunité, notamment par l’application de la « politique de tolérance zéro » du Gouvernement à l’égard des infractions à la discipline et des violations des droits humains et du droit international humanitaire commises par les éléments des forces de sécurité, et engager et faciliter des initiatives de médiation au niveau local afin de faire progresser l’instauration d’une paix durable;

Protection de l’enfance

37.   Prie la MONUSCO de tenir pleinement compte de la question transversale de la protection de l’enfance dans toutes les activités prévues par son mandat, notamment dans le cadre des programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration et de la réforme du secteur de la sécurité, ainsi que dans celui des interventions conduisant à la séparation d’enfants des groupes armés, de façon à faire cesser et à prévenir les violations et les violences dont sont victimes les enfants, et de continuer de veiller à l’efficacité des mécanismes de surveillance et de communication de l’information sur les enfants et les conflits armés, et mesure le rôle crucial que jouent à cet égard les conseillers pour la protection de l’enfance déployés à la MONUSCO;

Genre, violence sexuelle

38.   Prie la MONUSCO de tenir pleinement compte dans toutes les activités prévues par son mandat de la question transversale du genre et d’aider le Gouvernement congolais et les autres parties prenantes concernées à créer un environnement juridique, politique et socioéconomique propice à assurer la pleine représentation et la participation pleine, égale, effective et véritable des femmes à tous les niveaux, notamment des personnes rescapées de violences sexuelles et fondées sur le genre, dans le cadre du maintien et de la promotion de la paix et de la sécurité, de la protection des civils, notamment en faisant des réseaux de femmes des partenaires de la protection, de l’appui aux activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration et de réforme du secteur de la sécurité, et de l’appui aux activités de stabilisation, demande à la MONUSCO d’aider le Gouvernement à promouvoir la participation politique pleine, égale, effective et véritable des femmes, et mesure le rôle crucial des conseillers pour la protection des femmes de l’Organisation des Nations Unies déployés à la MONUSCO;

39.   Réaffirme qu’il faut d’urgence traduire en justice tous les auteurs de violations du droit international humanitaire et demande à la MONUSCO d’accélérer la mise en œuvre coordonnée des dispositifs de suivi, d’analyse et de communication de l’information sur les violences sexuelles dans les situations de conflit et d’après conflit;

Accès et appel humanitaires

40.   Rappelle toutes ses résolutions sur la protection du personnel humanitaire et du personnel médical, notamment les résolutions 2439 (2018) et 2286 (2016), et enjoint à toutes les parties d’autoriser et de faciliter, conformément aux dispositions du droit international applicables et aux principes humanitaires, la libre circulation du personnel, du matériel et des fournitures humanitaires, dans de bonnes conditions de sécurité et sans entrave et sans délai, et l’acheminement rapide de l’aide humanitaire vers les populations qui en ont besoin, en particulier les réfugiés et les déplacés, sur l’ensemble du territoire congolais;

41.   Demande aux États Membres et aux organisations internationales et régionales de répondre rapidement aux besoins humanitaires définis dans le plan de réponse humanitaire en augmentant leurs contributions et en veillant à ce que tous les engagements pris soient pleinement honorés dans les délais prescrits;

42.   Souligne qu’il importe de maintenir un appui et un engagement internationaux, sur les plans financier et technique et des dons en nature, afin d’endiguer rapidement les épidémies de maladies infectieuses et demande à toutes les entités compétentes du système des Nations Unies de coordonner efficacement leurs interventions face aux épidémies, conformément à leurs responsabilités et leurs mandats respectifs;

Régime de sanctions

43.   Demande à la MONUSCO de surveiller l’application de l’embargo sur les armes visé aux paragraphes 1 à 3 de la résolution 2688 (2023), en coopération avec le Groupe d’experts créé par la résolution 1533 (2004), et en particulier d’observer et de signaler les mouvements de personnel militaire, d’armes ou de matériel connexe à travers la frontière orientale de la République démocratique du Congo, en recourant notamment, comme indiqué dans la lettre du Président du Conseil en date du 22 janvier 2013 (S/2013/44), à des moyens de surveillance tels que des systèmes de drones aériens, saisir, collecter, enregistrer et détruire les armes ou le matériel connexe introduits dans le pays en violation des mesures imposées par les paragraphes 1 à 3 de la résolution 2688 (2023), et d’aider le Groupe d’experts et d’échanger tous renseignements utiles avec lui;

Efficacité de la mission et sûreté et sécurité des soldats de la paix

44.   Prie le Secrétaire général de doter la MONUSCO des moyens d’action dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat dans des conditions de sécurité complexes marquées notamment par des menaces asymétriques contre son personnel, et de faire en sorte que tous les soldats de la paix sur le terrain aient la motivation, les capacités et le matériel nécessaires pour remplir efficacement leur mission en toute sécurité, prie en outre le Secrétaire général, les États Membres et le Gouvernement congolais de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir au personnel de la MONUSCO un niveau optimal de sûreté et de sécurité, conformément à la résolution 2518 (2020) et conformément aux directives et aux meilleures pratiques de l’Organisation des Nations Unies, afin d’améliorer la sécurité des soldats de la paix, note avec préoccupation les risques graves que les violations de l’Accord sur le statut des forces peuvent représenter pour la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies affecté à des opérations de maintien de la paix, rappelle qu’il incombe au premier chef à l’État hôte d’assurer la sûreté et la sécurité du personnel et des biens des Nations Unies, souligne qu’il importe d’avoir une bonne communication entre les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et le gouvernement hôte afin d’établir la confiance et la compréhension mutuelles et prie le Secrétaire général d’appliquer les dispositions de la résolution 2589 (2021), aux fins de l’établissement des responsabilités en ce qui concerne les crimes commis contre les soldats de la paix;

45.   Prie également le Secrétaire général de mettre en œuvre les activités suivantes dans la planification et la conduite des opérations de la MONUSCO, dans les limites de son mandat et de sa zone d’opérations et conformément aux directives et réglementations existantes de l’ONU ainsi qu’au paragraphe 44 de la résolution 2612 (2021), prie en outre la MONUSCO d’appliquer les dispositions du paragraphe 45 de la résolution 2612 (2021) et les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police d’appliquer les dispositions des paragraphes 46 et 47 de la résolution 2612 (2021), et prend note de la stratégie environnementale pour les opérations de paix du Département de l’appui opérationnel (phase II), qui met l’accent sur une bonne gestion des ressources et un héritage positif de la Mission, et fixe pour objectif une utilisation accrue des énergies renouvelables dans les missions afin de renforcer la sûreté et la sécurité, de réaliser des économies, d’offrir des gains d’efficacité et de profiter à la Mission;

46.   Note avec préoccupation les graves allégations, notamment les récentes, d’exploitation et d’atteintes sexuelles graves et systémiques dans la zone de la mission, prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de prendre des mesures appropriées pour prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles, notamment la vérification des antécédents de tous les membres du personnel et l’organisation d’une formation de sensibilisation avant et pendant le déploiement, de faire en sorte que les membres de leurs contingents qui se livreraient à de tels actes aient à en répondre pleinement, y compris par l’ouverture rapide d’enquêtes sur toutes les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles, par les pays fournissant des contingents ou du personnel de police, pour en poursuivre les auteurs, prendre les mesures disciplinaires qui s’imposent, et demande au Secrétaire général, conformément à ses résolutions 2272 (2016) et 2436 (2018), de rapatrier leurs unités lorsqu’il existe des preuves crédibles qu’elles ont commis des actes d’exploitation et d’atteintes sexuelles de manière généralisée ou systématique, d’en informer rapidement et intégralement l’Organisation des Nations, et demande également à l’Organisation de surveiller le comportement de l’ensemble du personnel de la mission ou de mener des enquêtes, le cas échéant;

Rapports du Secrétaire général

47.   Prie le Secrétaire général de lui présenter tous les trois mois un rapport comportant:

–des informations sur les progrès accomplis dans l’application du plan de désengagement, y compris l’exécution échelonnée et les répercussions sur la protection des civils et la situation humanitaire, notamment le retrait progressif et ordonné des contingents de la MONUSCO ainsi que le transfert progressif des tâches au Gouvernement congolais;

–des informations sur la situation en République démocratique du Congo, notamment les progrès accomplis dans le renforcement des institutions de l’État et dans la mise en œuvre des principales réformes en matière de gouvernance et de sécurité;

–des informations, comprenant des indicateurs de performance qualitatifs, sur l’exécution du mandat de la MONUSCO, y compris sa mission de protection des civils, la coopération entre les forces de sécurité de la région, la performance de la MONUSCO, notamment les opérations de sa brigade d’intervention, la constitution de la police et de la force, et la contribution des activités de la Mission à la réalisation de ses tâches prioritaires visées au paragraphe 24, les problèmes et obstacles rencontrés par la Mission dans cette entreprise, sur la base des données recueillies et analysées au moyen du Système complet de planification et d’évaluation de la performance, l’application par la Mission du cadre intégré de responsabilité et de gestion de la performance dans les missions de maintien de la paix et d’autres outils de planification stratégique et de mesure des résultats permettant de présenter l’impact et la performance globale de la Mission, y compris des informations sur les avertissements non déclarés, le refus de participer à des patrouilles ou d’organiser des patrouilles et les effets de ces actes sur la Mission, et le traitement des cas déclarés de mauvaise performance;

–des informations sur les mesures prises en matière de communication stratégique concernant les activités prescrites et leurs effets;

–des informations sur les efforts visant à trouver des ressources suffisantes et la progression de l’application par les organismes spécialisés, fonds et programmes des Nations Unies des mesures concertées prioritaires énumérées dans le plan de transition;

–des informations sur le transfert progressif des tâches de la MONUSCO au Gouvernement congolais, à l’équipe de pays des Nations Unies et aux autres parties prenantes, notamment, le cas échéant, la suppression des tâches, comme demandé au paragraphe 40;

et prie également le Secrétaire général de faire figurer une analyse des questions de genre dans tous les rapports qui lui sont destinés;

48.   Prie le Secrétaire général de lui dire, avant le 30 juin 2024, en consultation avec les parties prenantes, dont l’Union africaine et les organisations régionales, quel appui logistique et opérationnel l’Organisation des Nations Unies pourrait donner aux forces régionales présentes en République démocratique du Congo, à la demande du pays hôte et de l’organisation concernée, conformément au rapport du Secrétaire général daté du 2 août 2023, y compris à faire des recommandations visant, dans ce cas, la cohérence, la coordination et la complémentarité de l’action de la MONUSCO avec celles de ces forces ainsi que leur bonne formulation; 

49.   Prie également le Secrétaire général de lui présenter, tous les six mois, en coordination avec son envoyé spécial pour la région des Grands Lacs et sa représentante spéciale pour la République démocratique du Congo, un rapport sur le respect des engagements pris dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région et sur ses liens avec la situation en matière de sécurité dans la région des Grands Lacs;

50.   Décide de rester activement saisi de la question.

à suivre...

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale suit les recommandations de ses Deuxième et Troisième Commissions

Soixante-dix-huitième session,
49e & 50e séances plénières – matin & après-midi
AG/12575

L’Assemblée générale suit les recommandations de ses Deuxième et Troisième Commissions

L’Assemblée générale a fait siennes, aujourd’hui, les recommandations proposées, au cours de sa soixante-dix-huitième session, par ses Deuxième et Troisième Commissions, chargées respectivement des questions économiques et financières; et des questions sociales, humanitaires et culturelles.

Les textes de la Deuxième Commission, présentés par son Rapporteur, M. Ivaylo Gatev (Bulgarie), ont été approuvés sans mise aux voix pour 30 d’entre eux, tandis que neuf votes ont été nécessaires sur des textes ou des paragraphes. L’examen de quatre autres textes a été reporté, le temps que la Cinquième Commission examine leurs implications budgétaires.  Sur les 43 textes soumis cette année par la « Deuxième » à l’Assemblée, 39 ont donc été adoptés aujourd’hui.  Dans un contexte géopolitique mondial particulièrement difficile, celle-ci a cherché, autant que possible, à accélérer la mise en œuvre, à mi-parcours, du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de ses 17 objectifs (ODD).  Des avancées ont également été réalisées sur la question de son financement.

Le développement durable, thématique centrale des travaux de la Deuxième Commission et du système des Nations Unies pour le développement, a justement fait l’objet de nombreuses résolutions, portant notamment sur l’éducation (ODD 4), les énergies propres à un coût abordable (ODD 7), l’infrastructure résiliente, notamment via le renforcement des technologies de l’information et des télécommunications, et celui des technologies écologiquement rationnelles (ODD 9), les transports (ODD 9 et 11), les modes de consommation et de production durables (ODD 12), les zones côtières (avec des réserves du Venezuela et de la Türkiye, pour qui la Convention sur le droit de la mer, dont ils ne sont pas parties, ne doit pas être le seul instrument à prendre en considération) et les effets sur l’environnement des munitions chimiques en mer (ODD 14).

L’élimination de la pauvreté et de la faim (ODD 1 et 2), piliers du Programme 2030, ont également fait l’objet de deux résolutions.  La première, adoptée à l’issue d’un vote, se concentre sur la pauvreté en milieu ruralqui touche aujourd’hui plus de 1,4 milliard d’individus.  Le texte avait été critiqué en Commission par une cinquantaine d’États, dont ceux de l’Union européenne (UE), qui lui avaient reproché d’être « idéologique » dans certaines de ses formulations et de faire doublon avec une autre résolution, adoptée elle par consensus, sur « les activités relatives à la troisième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté ».  En ce qui concerne la résolution portant sur l’égalité entre les genres (ODD 5), elle a été adoptée à l’issue d’un vote, ayant fait l’objet d’intenses débats lors de son examen en Commission.

La lutte contre les changements climatiques (ODD 13) a naturellement été consacrée par plusieurs résolutions, la plupart adoptées par consensus. Celles-ci insistent particulièrement sur la diversité biologique; la sauvegarde du climat pour les générations présentes et futures; la réduction des risques de catastrophe; la lutte contre la désertification, en particulier en Afrique; ou encore la lutte contre les tempêtes de sable et de poussière.  Cette dernière a fait l’objet d’un vote, Israël y voyant des formulations politiques sans lien avec le sujet.  La résolution sur la sauvegarde du climat mondial pour les générations présentes et futures a été adoptée par consensus après un vote sur le paragraphe 16 du dispositif, demandé par les États-Unis qui en ont contesté la formulation.

L’Assemblée générale a adopté plusieurs résolutions consensuelles concernant les pays en situation particulière, où la mise en œuvre du Programme 2030 est encore plus difficile qu’ailleurs, comme les pays en développement sans littoral (PDSL) qui auront leur propre conférence en juin 2024 à Kigali (Rwanda), peu de temps après la quatrième Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement (PEID) prévue à Antigua-et-Barbuda en mai 2024.  De même, les pays à revenu intermédiaire, qui font face à des obstacles structurels uniques, n’ont pas été oubliés, avec un texte encourageant leur coopération. 

En revanche, l’Assemblée générale se prononcera ultérieurement sur les résolutions prévoyant les modalités de suivi et de mise en œuvre des textes issus de trois conférences: celle sur les petits États insulaires en développement (PEID), tenue au Samoa en 2014; celle sur le financement du développement (Addis-Abeba, 2015); et celle sur les pays les moins avancés (PMA) tenue cette année en mars à Doha.  Elle doit attendre que la Cinquième Commission examine leurs implications budgétaires.  Pour la même raison, elle a également reporté à plus tard son vote sur la résolution intitulée « Promotion d’une coopération internationale inclusive et efficace en matière fiscale à l’ONU ».  Proposé par le Groupe des États d’Afrique, ce texte avait fait l’objet d’intenses débats en Commission, un tiers des États Membres (dont l’UE, les États-Unis et la Türkiye) s’y étant opposés, lui reprochant de n’être pas assez consensuel et de risquer de faire double emploi avec les travaux déjà en cours à l’OCDE.

Sur le front du financement du développement, une résolution sur les produits de base est venue souligner un défi auquel sont confrontés de nombreux pays en développement (qui sont souvent producteurs et exportateurs de ces produits): la difficulté à en tirer suffisamment de bénéfices pour financer la réalisation des ODD. Le déficit d’investissement pour réaliser les ODD dans les pays en développement étant estimé à 4 000 milliards de dollars, un appel à augmenter les investissements étrangers directs a par ailleurs été lancé.  Et en complément de cette aide, la coopération Sud-Sud a été une nouvelle fois promue.  En ce qui concerne la soutenabilité de la dette extérieure, l’Assemblée a entériné les recommandations faites par la Deuxième Commission au Fonds monétaire international (FMI) consistant à allouer 500 milliards de droits de tirage spéciaux (DTS) supplémentaires en faveur des pays qui en ont le plus besoin.  Un texte en faveur de l’élimination des paradis fiscaux a en outre été voté.

Enfin, le contexte géopolitique est venu plusieurs fois télescoper les enjeux économiques.  Ainsi, la résolution consacrée à la souveraineté du peuple palestinien et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles a été adoptée à l’issue d’un vote qui a reflété les fortes dissensions entre, d’un côté, Israël et ses alliés (États-Unis en tête), et le reste de la communauté internationale de l’autre.  Les débats sur ce texte, voté chaque année, se sont cette fois-ci focalisés, en toute logique, sur le conflit en cours à Gaza.  Un autre texte relatif aux technologies agricoles au service du développement durable, proposé par Israël, a suscité une fronde des États arabes, non pas sur le fond mais du fait qu’il émanait de la « Puissance occupante ».  Et la résolution, elle aussi récurrente, sur la marée noire sur les côtes libanaises, a fait l’objet d’un vote après un débat houleux en Commission.  Enfin, deux résolutions condamnant les mesures coercitives unilatérales —sujet ancien mais rendu particulièrement brûlant par la guerre entre la Russie et l’Ukraine— ont été adoptées à l’issue de votes, et ce, malgré l’opposition de plusieurs pays, à commencer par les États-Unis et le Royaume-Uni, pour qui les sanctions sont des moyens de politique étrangère légitime.

Par ailleurs, l’Assemblée générale a adopté deux décisions, l’une sur la revitalisation des travaux de sa Deuxième Commission, l’autre entérinant le projet de programme de travail provisoire de celle-ci pour la soixante-dix-neuvième session. 

L’Assemblée générale a ensuite adopté 60 résolutions et une décision, recommandées par sa Troisième Commission, dont 16 après un vote.  Deux textes ont été renvoyés à la Cinquième Commission qui examinera leurs implications budgétaires.

Trois nouvelles résolutions ont été entérinées par consensus, dont une sur la protection des droits humains dans le contexte des technologies numériques qui demande à tous les États Membres de prévoir des sanctions effectives et des voies de recours pour protéger les personnes contre les violations des droits humains dans l’environnement numérique.  En faisant sienne la nouvelle mouture de la résolution dédiée aux droits de l’enfant elle exhorte en outre les États à veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans la prise de décisions relatives à l’environnement numérique, notamment en interdisant la surveillance numérique illégale des enfants; et en prenant des mesures appropriées concernant la collecte, le traitement et le partage des données personnelles des enfants. 

Un autre texte inédit sur l’égalité d’accès à la justice pour tous et toutes, engage l’Assemblée générale à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer « en toute équité, transparence, efficacité et sans discrimination » des services qui facilitent l’accès à la justice.  Dernière nouveauté, elle a adopté une résolution sur le renforcement de la contribution de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale à la mise en œuvre du Programme 2030.

Au chapitre des sujets d’actualité, la résolution sur le droit du peuple palestinien à l’autodétermination a été adoptée par un voteL’Égypte a déploré le fait que la « Puissance occupante » demande chaque année la mise aux voix de ce texte.  De son côté Cuba a accusé Israël de commettre des crimes contre l’humanité, dénonçant ses pratiques d’apartheid contre le peuple palestinien. 

En revanche un consensus a été trouvé autour du texte sur la protection des migrants, par lequel l’Assemblée générale exhorte les États à adopter des mesures pour prévenir l’usage excessif de la force contre les migrants et les refoulements. 

Pomme de discorde majeure de cette séance, en adoptant par vote la résolution dédiée à lutte contre la glorification du nazisme, l’Assemblée générale constate avec inquiétude que la Fédération de Russie a cherché à justifier son agression territoriale contre l’Ukraine en invoquant l’élimination du néonazisme. 

L’Ukraine a estimé que la Russie atteignait le « summum de l’hypocrisie » en se faisait porte-plume d’une résolution contre une idéologie qu’elle utilise elle-même pour nier l’existence d’un voisin et l’envahir.  S’exprimant au nom de l’Union européenne (UE), l’Espagne s’est élevée contre l’utilisation par la Russie du terme « dénazification » pour justifier sa guerre d’agression en Ukraine, refusant l’utilisation de l’ONU comme une plateforme de désinformation. 

À fronts renversés, la Fédération de Russie a dénoncé une tentative de certains pays occidentaux de rendre spécifique une résolution thématique, prenant ses distances avec le paragraphe 4 du dispositif.  Neuf autres pays ont pris la parole pour critiquer où se dissocier de ce paragraphe qui a été rajouté au texte de la résolution en Commission à l’issue d’un amendement: la Chine, le Venezuela, le Nicaragua, Cuba, le Bélarus, la République populaire démocratique de Corée, le Zimbabwe, l’Angola et l’Égypte. 

Les États-Unis ont invité les délégations à respecter l’usage et à ne pas répéter des positions déjà reflétées dans le rapport de la Troisième Commission.  Usant de son droit de réponse, l’Égypte a rétorqué que les pays avaient le droit d’utiliser leur temps de parole librement. 

Un florilège de déclarations acerbes a également entouré les résolutions dédiées à la situation des droits humains dans des pays spécifiques. 

Celles consacrées à la République islamique d’Iran, à la République arabe syrienne et aux territoires ukrainiens temporairement occupés ont été adoptées par vote tandis que celles consacrées au Myanmar et à la République populaire et démocratique de Corée (RPDC) l’ont été par consensus. 

La République populaire démocratique de Corée a vu dans ces textes une tentative de renverser les gouvernements qui « s’opposent aux États-Unis et leurs vassaux ».  Une position partagée par la République arabe syrienne qui s’est opposée à toutes ces résolutions, aux côtés du Nicaragua, du Venezuela et du Bélarus.  L’Iran, la Russie et la Chine se sont dissociés du consensus concernant la résolution sur la RPDC, les deux dernières se dissociant aussi de la résolution concernant le Myanmar. 

De son côté, l’Ukraine a dénoncé les violations des droits humains commises par la Fédération de Russie dans les territoires occupés et rappelé que cette année la résolution avait été élargie pour englober tous les territoires concernés. En réponse, la Russie a assuré que les droits humains étaient protégés dans lesdits territoires, et que c’était l’armée ukrainienne qui y bombardait quotidiennement des civils, dont des enfants. La République populaire démocratique de Corée a dit avoir voté contre une résolution « sélective ». 

La RPDC et la Russie se sont aussi opposées à la résolution consacrée à l’Iran qui a dénoncé un complot visant à s’immiscer dans ses affaires internes, en accusant l’Union européenne, le Canada et leurs alliés.  La délégation iranienne a également précisé avoir voté contre la résolution consacrée à la République arabe syrienne, rejoignant ainsi la RPDC, la Russie et Cuba, qui a déclaré au passage que les États-Unis « n’ont cure des droits humains ». 

Autre sujet contentieux majeur du jour, la résolution sur le Renforcement du rôle que joue l’ONU dans la promotion de la démocratisation par laquelle l’Assemblée générale exhorte les États Membres à respecter le droit de voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques et honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret. 

L’Égypte a réitéré son rejet de l’imposition de formulations non-consensuelles, se disant opposée aux références faites à « l’orientation sexuelle et à l’identité de genre », avant de se dissocier des alinéas 10, 11 et 12 du préambule et du paragraphe 7 du dispositif.  Le Nigéria a fait part des mêmes préoccupations, se dissociant de l’alinéa 10 du préambule et du paragraphe 7 du dispositif, rejoint en cela par la Malaisie, la Mauritanie, le Yémen, le Mali, Djibouti, le Qatar, le Niger, le Pakistan et le Bélarus.  Les États-Unis ont de nouveau indiqué qu’il n’était pas nécessaire de répéter les positions déjà exprimées en Commission et les Pays-Bas ont apporté leur soutien aux formulations contenues dans la résolution. 

Si elle s’est ralliée au consensus concernant le projet de résolution intitulé « Aide et protection en faveur des personnes déplacées » Cuba ne soutient pas la référence au Statut de Rome, ni à la Cour pénale internationale (CPI) dans le paragraphe 28 du préambule. 

Des divergences sont aussi apparues concernant les deux résolutions consacrées à l’élargissement de la composition du Comité exécutif du Programme du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, visant à y inclure le Guatemala et l’Ukraine, qui ont elles aussi fait l’objet de votes.  L’Ukraine s’est désolée des tactiques utilisées par la Fédération de Russie, visant à « politiser les débats ». 

En vertu de sa résolution sur le droit au développement, adoptée par un vote, l’Assemblée générale note que le Conseil des droits de l’homme lui a soumis « pour examen, négociation puis adoption », le projet de pacte international sur le droit au développement.  En outre, en faisant sienne la résolution sur la Déclaration et le Programme d’action de Durban, elle demande la présentation de rapports sur les mesures pratiques devant être prises pour que se concrétise la deuxième Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine. 

À la rubrique des événements organisés par les Nations Unies, l’Assemblée générale a, en outre, fait sienne une résolution sur le Renforcement du programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, qui invite notamment à la tenue, durant la soixante-dix-neuvième session, d’un débat de haut niveau sur le thème « Une deuxième chance: relever le défi pénitentiaire mondial » à l’occasion du dixième anniversaire de l’adoption de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela).  La Russie s’est dissociée du consensus en raison des alinéas 57 du préambule et des paragraphes 13, 30 et 43 du dispositif, estimant notamment le terme de « rescapé » trop vague. 

L’Assemblée générale a par ailleurs décidé de célébrer le trentième anniversaire de la Conférence mondiale sur les femmes, en tenant une réunion de haut niveau en marge du débat général de sa quatre-vingtième session. Elle a aussi décidé que le thème principal du quinzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale qui se tiendra en 2026, serait dédié à la protection des populations, de la planète, et à la réalisation le Programme 2030 à l’ère du numérique. 

L’Assemblée générale a également entériné la proclamation d’une nouvelle Année internationale des coopératives en 2025, et adopté un texte portant sur la célébration du soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme

Enfin, elle a pris acte du rapport de la Commission portant sur la question subsidiaire intitulée « Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne ».

L’examen des résolutions intitulées « Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée »  et « Centre sous-régional des droits de l’homme et de la démocratie en Afrique centrale » a été reporté dans l’attente de l’examen de leurs incidences budgétaires par la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires. 

Les rapports de la Troisième Commission ont été présentés par son Rapporteur, M. Robert Alexander Poveda Brito (Venezuela).

Cette cinquantième séance de l’Assemblée générale reprendra demain, mercredi 20 décembre, à 10 heures, avec un hommage à la mémoire du cheik Nawaf al-Ahmad al-Jaber al-Sabah, Émir du Koweït, décédé samedi dernier. 

RAPPORTS DE LA DEUXIÈME COMMISSION DANS LESQUELS FIGURENT LES RÉSOLUTIONS

- Les technologies de l’information et des communications au service du développement durable – Point 15 (A/78/458)

- Questions de politique macroéconomique – Point 16 (A/78/459)

- Commerce international et développement – Point 16 a) (A/78/459/Add.1)

- Système financier international et développement – Point 16 b) (A/78/459/Add.2)

- Soutenabilité de la dette extérieure et développement – Point 16 c) (A/78/459/Add.3)

- Produits de base – Point 16 d) (A/78/459/Add.4)

- Amélioration de l’accès aux services financiers pour le développement durable – Point 16 e) (A/78/459/Add.5)

- Promotion de la coopération internationale dans les domaines de la lutte contre les flux financiers illicites et du renforcement des bonnes pratiques en matière de recouvrement des avoirs pour favoriser le développement durable – Point 16 f) (A/78/459/Add.6)

- Promouvoir l’investissement en faveur du développement durable – Point 16 g) (A/78/459/Add.7)

- Promotion d’une coopération internationale inclusive et efficace en matière fiscale à l’Organisation des Nations Unies – Point 16 h) (A/78/459/Add.8)

- Suivi et mise en œuvre des textes issus des Conférences internationales sur le financement du développement – Point 17 (A/78/460)

- Développement durable – Point 18 (A/78/461)

- Parvenir au développement durable: réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, notamment grâce à l’adoption de modes de consommation et de production durables, en faisant fond sur Action 21 – Point 18 a) (A/78/461/Add.1)

- Suivi et application des Modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations de Samoa) et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement – Point 18 b) (A/78/461/Add.2)

- Réduction des risques de catastrophe – Point 18 c) (A/78/461/Add.3)

- Sauvegarde du climat mondial pour les générations présentes et futures – Point 18 d) (A/78/461/Add.4)

- Application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique – Point 18 e) (A/78/461/Add.5)

- Convention sur la diversité biologique – Point 18 f) (A/78/461/Add.6)

- L’éducation au service du développement durable – Point 18 g) (A/78/461/Add.7)

- Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable – Point 18 h) (A/78/461/Add.8)

- Lutte contre les tempêtes de sable et de poussière – Point 18 i) (A/78/461/Add.9)

- Renforcement de la coopération pour la gestion intégrée des zones côtières aux fins du développement durable – Point 18 j) (A/78/461/Add.10)

- Mondialisation et interdépendance – Point 19 (A/78/462)

- Science, technologie et innovation au service du développement durable – Point 19 a) (A/78/462/Add.1)

- Culture et développement durable – Point 19 b) (A/78/462/Add.2)

- Coopération pour le développement des pays à revenu intermédiaire – Point 19 c) (A/78/462/Add.3)

- Groupes de pays en situation particulière – Point 20 (A/78/463)

- Suivi de la cinquième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés – Point 20 a) (A/78/463/Add.1)

- Suivi de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral – Point 20 b) (A/78/463/Add.2)

- Élimination de la pauvreté et autres questions liées au développement – Point 21 (A/78/464)

- Activités relatives à la troisième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (2018-2027) – Point 21 a) (A/78/464/Add.1)

- Éliminer la pauvreté en milieu rural en vue de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 – Point 21 b) (A/78/464/Add.2)

- Activités opérationnelles de développement – Point 22 (A/78/465)

- Activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies – Point 22 a) (A/78/465/Add.1)

- Coopération Sud-Sud pour le développement – Point 22 b) (A/78/465/Add.2)

- Développement agricole, sécurité alimentaire et nutrition – Point 23 (A/78/466)

- Développement agricole, sécurité alimentaire et nutrition – Point 23 a) (A/78/466/Add.1)

- Fibres végétales naturelles et développement durable – Point 23 b) (A/78/466/Add.2)

- Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles – Point 59 (A/78/467)

- Revitalisation des travaux de l’Assemblée générale – Point 120 (A/78/468)

- Planification des programmes – Point 135 (A/78/469)

RAPPORTS DE LA TROISIÈME COMMISSION DANS LESQUELS FIGURENT LES RÉSOLUTIONS

- Développement social - Point 24 (A/78/472

- Promotion des femmes - Point 25 (A/78/473)

- Rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux déplacés et questions humanitaires - Point 60 (A/78/474

- Rapport du Conseil des droits de l’homme - Point 66 (A/78/475

- Promotion et protection des droits de l’enfant - Point 67 (A/78/476)

- Droits des peuples autochtones - Point 68 (A/78/477

- Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée - Point 69 (A/78/478

- Droit des peuples à l’autodétermination - Point 70 (A/78/479)

- Promotion et protection des droits humains - Point 71 (A/78/481

- Application des instruments relatifs aux droits humains - Point 71 a) (A/78/481/Add.1

- Questions relatives aux droits humains, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits humains et des libertés fondamentales - Point 71 b) (A/78/481/Add.2)

- Situations relatives aux droits humains et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux - Point 71 c) (A/78/481/Add.3)

- Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne - Point 71 d) (A/78/481/Add.4)

- Prévention du crime et justice pénale - Point 107 (A/78/482

- Lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles - Point 108 (A/78/483)

- Revitalisation des travaux de l’Assemblée générale - Point 120 (A/78/484)

- Planification des programmes - Point 135 (A/78/485)

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les délégations pressent Israël de faciliter l’aide humanitaire à Gaza et de faire cesser la violence extrémiste en Cisjordanie

9513e séance – matin
CS/15539

Conseil de sécurité: les délégations pressent Israël de faciliter l’aide humanitaire à Gaza et de faire cesser la violence extrémiste en Cisjordanie

À Gaza, « le système de réponse humanitaire est au bord du gouffre », a alerté, ce matin, M. Tor Wennesland, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient.  Intervenant en vidéoconférence depuis Jérusalem aux côtés du général de division et Chef de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), M. Wennesland a fait un nouveau point particulièrement sombre sur la situation sécuritaire et humanitaire dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, deux mois après le début des hostilités.

Cette réunion d’information a été l’occasion pour les membres du Conseil d’emboiter le pas des responsables onusiens.  Ils ont en majorité demandé une trêve humanitaire durable et attiré l’attention sur l’intensification des violences en Cisjordanie, lesquelles, couplées aux tensions de plus en plus vives entre Israël et le Liban, comme l’a confirmé le Chef de l’ONUST, Patrick Gauchat, et aux attaques de navires par des houthistes en mer Rouge, menacent de faire basculer le Moyen-Orient tout entier dans la guerre.

M. Wennesland a indiqué que depuis son dernier exposé au Conseil le 7 décembre, les frappes aériennes israéliennes se sont intensifiées partout dans la bande de Gaza.  « Ce sont plus d’un millier de morts supplémentaires -en grande majorité palestiniens– qui sont à déplorer, le bilan des tués parmi les civils, notamment des femmes et des enfants, étant insupportable  », a-t-il déclaré.  Le Coordonnateur spécial a également décrit un contexte humanitaire à Gaza marqué par des défis insurmontables, cela « dans un contexte de déplacements d’une ampleur inimaginable et de combats intenses ».  S’il a salué les mesures « limitées » prises par Israël pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et améliorer les conditions de vie dans Gaza, il a répété que ces mesures sont « loin de suffire » pour faire face à la catastrophe humaine sur le terrain.

Surtout, M. Wennesland a exprimé sa profonde préoccupation devant la pression qui ne cesse d’augmenter en Cisjordanie en raison des activités israéliennes de colonisation qui, a-t-il indiqué, ont plus que doublé pour atteindre un nouveau record annuel depuis 2017.  Pour le Coordonnateur spécial, la violence des colons et des opérations des forces de sécurité israéliennes fait « craindre le pire » dans le territoire.

Les membres permanents du Conseil se sont exprimés sur la dégradation de la situation en Cisjordanie, tous condamnant les attaques des colons contre des Palestiniens.  Les États-Unis ont confirmé la prise de sanctions, y compris l’interdiction de visas, contre des « individus extrémistes » sapant la paix et la stabilité en Cisjordanie.  Pour la France, les autorités israéliennes devront traduire en justice les auteurs de violences contre des civils palestiniens dans le territoire.   « Israël doit redoubler d’efforts pour amener les auteurs de violences commises par les colons à rendre des comptes et pour mettre fin à la démolition et à la confiscation des biens palestiniens  », a ajouté le délégué britannique, appelant Israël à mettre « immédiatement et complètement fin » à toutes les activités de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est et son aqueduc inférieur.

Si le délégué russe a lui aussi déploré « les violences qui font rage » en Cisjordanie, rappelant que depuis le 7 octobre 293 personnes y ont été tuées par des colons extrémistes et les forces israéliennes, c’est aux États-Unis qu’il a adressé les propos les plus vifs. « Washington, en dépit de l’appel du Secrétaire général au Conseil de mettre fin au bain de sang à Gaza, continue de bloquer l’adoption de projets de résolution qui sauveraient des vies », a-t-il accusé.  Il a également estimé que les États-Unis préfèrent fournir des armes de tous types aux forces israéliennes, et qu’ils ne pensent qu’à la poursuite de leurs ambitions égoïstes « quand la communauté internationale parle d’une voix pour qu’un cessez-le-feu humanitaire durable soit instauré sans délai ».  La Chine, pour sa part, a exhorté Israël à respecter ses obligations internationales, à cesser les activités de peuplement et à lutter contre la violence des colons afin de mettre un terme à l’impunité.

Les Émirats arabes unis, dont un projet de résolution devait être mis aux voix au cours d’une séance ultérieure du Conseil, ont réitéré leur demande que soient instaurées des pauses humanitaires pour venir en aide aux 2,2 millions de personnes « piégées dans l’enclave » où elles passent des journées entières sans eau ni nourriture.  « Les Gazaouites connaissent une famine et une soif sans précédent alors que les médecins n’ont même pas les articles médicaux de base pour soigner les blessés et faire face à la menace croissante d’infection », s’est insurgé le représentant.  S’il a pris note de l’ouverture du point de passage de Karam Abou Salem, il a insisté sur le fait que seul un cessez-le-feu humanitaire et durable permettrait de « mettre un terme au bain de sang à Gaza » et aux otages israéliens d’être libérés.  « Toute tentative d’exploiter la guerre à Gaza pour élargir les colonies et déplacer des Palestiniens de leurs terres est une grave violation de la résolution 2334 (2016) », a-t-il à son tour averti.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. TOR WENNESLAND, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, intervenant en visioconférence depuis Jérusalem, a indiqué que depuis sa dernière intervention devant le Conseil le 7 décembre dernier, les hostilités se sont poursuivies à l’intérieur de Gaza, alors que les forces israéliennes progressaient plus loin dans Khan Younès, situé dans la partie sud du territoire, et intensifiaient leurs opérations dans les bastions du Hamas au nord, dans le camp de réfugiés de Jabaliya et dans le quartier de Shujaiya, ainsi qu’à l’hôpital de Kamal Adwan. 

Au cours de la période écoulée, a-t-il précisé, les frappes aériennes israéliennes se sont intensifiées partout dans la bande de Gaza, et ce sont plus d’un millier de morts supplémentaires –en grande majorité palestiniens– qui sont à déplorer, le bilan des tués parmi les civils, notamment des femmes et des enfants, étant « insupportable ».  M. Wennesland a noté que tandis que plus d’une centaine d’Israéliens sont toujours détenus par le Hamas, l’armée israélienne a annoncé avoir récupéré les corps de trois otages.  « Et, le 15 décembre, les forces armées israéliennes ont déclaré que des soldats israéliens avaient abattu par erreur trois otages à Shujaiya, alors que le Hamas et d’autres factions continuaient de lancer de manière incriminée des roquettes sur des zones du sud et du centre d’Israël, un tir de barrage ayant aussi visé Jérusalem le même jour. »

Le Coordonnateur spécial a ensuite décrit une situation humanitaire à Gaza qui continue, a-t-il insisté, à se heurter à des défis insurmontables, cela « dans un contexte de déplacements d’une ampleur inimaginable et de combats intenses ».  Le système de réponse humanitaire est au bord du gouffre, a-t-il constaté, relevant que les mesures « limitées » prises par Israël, comme l’autorisation de faire entrer plus de carburant, de nourriture, de gaz domestique et de fournitures humaines, pour positives qu’elles soient, « sont loin de suffire pour faire face à la catastrophe humaine sur le terrain ».  Le nord de la bande de Gaza reste pour l’essentiel inaccessible aux acteurs humanitaires en raison de l’insécurité qui y règne et des restrictions imposées par Israël. 

M. Wennesland a également attiré l’attention sur la situation en Cisjordanie, où la pression ne cesse d’augmenter en raison des activités israéliennes de colonisation, lesquelles ont plus que doublé pour atteindre un nouveau record annuel depuis 2017.  Pour le Coordonnateur spécial, la violence des colons, l’augmentation des attaques armées palestiniennes, les opérations des forces de sécurité israéliennes, une situation budgétaire et économique qui se détériore rapidement et une Autorité palestinienne qui lutte pour faire face à ces défis ne peuvent que « faire craindre le pire » dans le territoire.  À l’aune de ces tensions, il a mis en garde contre une escalade touchant toute la région du Moyen-Orient, à commencer par le Liban et la mer Rouge. 

Après avoir condamné les attaques armées « odieuses » du Hamas le 7 octobre, marquées en outre par la commission de violences sexuelles effarantes sur lesquelles toute la lumière devra être faite, et après avoir salué la libération récente de 110 otages israéliens et d’autres nationalités, M. Wennesland s’est arrêté sur l’ampleur des hostilités et des destructions à Gaza depuis deux mois.  « Ce qui se passe à Gaza est sans précédent et insupportable, et je condamne sans équivoque le meurtre de civils à Gaza – notamment de femmes et d’enfants. »  « Je pleure également la perte de tous les civils, dont 131 collègues des Nations Unies, ce qui représente la plus grande perte en vies humaines dans l’histoire de l’Organisation. »

M. Wennesland a insisté sur le fait que tous les auteurs de violences devront être tenus pour responsables de leurs actes et rapidement traduits en justice.  Après avoir exhorté Israël à faire cesser les activités de peuplement en Cisjordanie, illégales au regard du droit international, il a conclu avec gravité que « cette guerre rappelle de manière dévastatrice et tragique que rien ne peut remplacer un processus politique légitime pour résoudre les problèmes fondamentaux qui en sont à l’origine ».  Ainsi a-t-il rappelé que l’ONU se tient toujours aux côtés des Palestiniens et des Israéliens pour les accompagner sur la voie de la réalisation de la solution des deux États.

Intervenant par vidéoconférence depuis Jérusalem, M. PATRICK GAUCHAT, général de division et Chef de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), a signalé qu’étant donné que l’ONUST n’est présent ni à Gaza ou dans le sud d’Israël ni dans les environs, son personnel n’a pas été en mesure d’observer directement les événements du 7 octobre ni l’évolution de la situation depuis.  « Ces événements ont assurément eu un impact sur nos opérations et les dynamiques régionales », a-t-il reconnu.

Dressant l’historique de l’ONUST, il a déclaré que sa création remonte à 75 ans, le Conseil ayant demandé, le 29 mai 1948, la cessation des hostilités en Palestine, en vertu de la résolution 50.  Cette trêve devait être supervisée par un médiateur de l’ONU, assisté d’un groupe d’observateurs militaires, qui allait devenir l’ONUST, première mission de maintien de la paix de l’histoire des Nations Unies, a-t-il expliqué.  M. Gauchat a souligné qu’en 1949, avec la signature des quatre accords d’armistice entre Israël et chacun de ses voisins arabes –Égypte, Jordanie, Liban et République arabe syrienne–, le Conseil a déclaré que le rôle de médiateur était complet et a été transféré au chef d’état-major de l’ONUST le rôle de supervision de l’application des accords d’armistice.  D’autre part, l’ONUST était mandaté pour appuyer les parties dans l’application des accords jusqu’à la résolution pacifique de la situation en Palestine. M. Gauchat a confirmé que ce double mandat est assumé par le truchement d’observateurs militaires experts pour le maintien de cessez-le-feu inconditionnels et d’une liaison régionale solide avec les pays hôtes.

Au niveau des opérations, a-t-il poursuivi, depuis le 8 octobre, de nombreuses violations du cessez-le-feu ont été perpétrées le long de la Ligne bleue entre Israël et le Liban, et sur le Golan entre Israël et la République arabe syrienne.  Les observateurs militaires de l’ONUST, qui incluent le Groupe d’observateurs au Liban (OGL) et le Groupe d’observateurs au Golan (OGG), placés sous le contrôle opérationnel de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD), ont pris des mesures de sécurité appropriées et adaptées. 

Ces observateurs continuent d’enquêter sur les violations du cessez-le-feu, d’inspecter le Golan et de rédiger des rapports pour assurer la liaison avec les parties, y compris dans le but de désamorcer les tensions.  S’agissant du Golan, M. Gauchat a indiqué que depuis le 8  octobre, les points de passage militaires utilisés par l’ONUST entre Israël et le Liban, ainsi qu’entre le Golan occupé par Israël et le Golan contrôlé par la Syrie, ont été fermés.  Cela est également vrai pour les points d’accès aux postes d’observation qui ont été scellés, ce qui a entravé les rotations et le soutien logistique.  Grâce au dialogue avec les parties, l’ONUST a été en mesure de mettre en place le minimum de soutien et de sécurité requis pour le déploiement des observateurs militaires.  Une nette escalade a été observée d’autre part dans le sud du Liban, a-t-il indiqué, ajoutant que les observateurs militaires de l’ONUST continuent d’effectuer des patrouilles le long de la Ligne bleue en prenant « des risques calculés ».  Il a notamment mis en exergue la fonction de liaison quotidienne des observateurs tant avec la population locale, y compris les femmes et les enfants, qu’avec les dirigeants et commandants militaires.  Il a indiqué à cet égard que le personnel féminin de l’ONUST est composé à 22% de femmes. 

M. Gauchat a également indiqué que l’ONUST dispose de bureaux de liaison au Caire, à Beyrouth et à Damas, ainsi qu’à Jérusalem pour la Jordanie et Israël, ce qui permet à la Mission d’analyser et de traiter des questions complexes, en particulier celles qui ne sont pas couvertes par d’autres missions opérant dans la région, qu’il s’agisse de missions de maintien de la paix ou de missions politiques spéciales.  Il a aussi mis l’accent, dans ce contexte, sur le contact direct avec les cinq parties par la transmission de messages et l’établissement de « mesures tactiques de confiance ». 

Commentant ses visites dans les capitales des cinq pays hôtes de l’ONUST, le général de division a signalé que dans la zone de la Ligne bleue, des représentants d’Israël et du Liban lui ont fait part de leur volonté d’améliorer la sécurité et la mise en œuvre de la résolution 1701 (2006) du Conseil de sécurité.  En ce qui concerne le Golan, Israël et la Syrie ont manifesté leur ferme volonté de maintenir l’armistice, tout en exprimant leurs inquiétudes et attentes respectives.  M. Gauchat a tenu à préciser que lors de ces échanges, il a systématiquement tenté de désamorcer les situations potentiellement dangereuses, de clarifier les positions et d’assurer ses interlocuteurs qu’il transmettra leurs messages, ce qui a toujours été bien accueilli. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a rappelé qu’avant les attaques du 7 octobre, 2023 était déjà l’année la plus mortelle pour les Palestiniens de Cisjordanie.  Condamnant la violence préoccupante des colons extrémistes, il a estimé que leurs auteurs doivent rendre des comptes.  Il a aussi évoqué les mesures d’interdiction de visas pour des individus extrémistes ayant sapé la paix et la stabilité en Cisjordanie.  « Nous avons également indiqué au Gouvernement israélien qu’il doit enquêter et faire en sorte que les colons extrémistes rendent des comptes », a précisé le représentant.  En outre, il a appelé les représentants israéliens à « ne pas mettre de l’huile sur le feu avec des discours incendiaires », déplorant notamment une recrudescence de l’antisémitisme et de l’islamophobie. 

Après voir appelé à faire davantage pour protéger les journalistes, le représentant a abordé la question des otages.  Indiquant que la Mission permanente des États-Unis auprès des Nations Unies a rencontré cette semaine de jeunes Israéliens proches de certains otages, il a évoqué le sort de la jeune Naama Levy, militante de la paix ayant établi des liens avec les Palestiniens et qui rêvait de devenir diplomate avant d’être kidnappée par le Hamas.  « Nous continuerons de transmettre l’histoire de tous les otages jusqu’à ce qu’ils soient libérés », a promis le représentant, avant d’indiquer que le Hamas pourrait faire cesser ce conflit en libérant tous les otages.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a exprimé sa vive préoccupation face à l’aggravation de la crise humanitaire à Gaza.  Israël doit respecter le droit international et le droit international humanitaire, afin d’éviter de nuire aux civils innocents et aux infrastructures civiles de base, a exhorté la représentante, en appelant les parties à agir sur la base de la résolution 2712 (2023).  Notant que la quantité d’aide à l’entrée du point de passage de Rafah est insuffisante, elle a salué l’ouverture de celui de Kerem Shalom, qui devrait permettre l’acheminement direct de cette aide à Gaza.  La déléguée a dit craindre une régionalisation du conflit, avant de s’inquiéter des tirs de missiles et des attaques lancées contre des navires par les houthistes en mer Rouge, qui perturbent considérablement le transport maritime mondial et menacent la sécurité maritime. 

Le navire Galaxy Leader, exploité par une société japonaise, a ainsi été saisi et son équipage multinational est retenu en otage par les houthistes depuis près d’un mois, s’est alarmée la déléguée, qui a demandé aux houthistes de les remettre immédiatement en liberté et sans condition.  Elle a aussi noté qu’en Cisjordanie, la flambée de violence imputable aux colons et les attaques contre les Israéliens par des Palestiniens aggravent la situation.  Aussi a-t-elle demandé à Israël de s’abstenir de poursuivre ses activités de colonisation et à la communauté internationale de redoubler d’efforts pour atténuer les souffrances des Gazaouites et mettre fin à la tragédie.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a regretté que la résolution 2334 (2023) continue d’être ignorée, « comme presque toutes les résolutions adoptées par ce Conseil concernant le conflit israélo-palestinien ».  Il a dénoncé la poursuite et l’extension des activités de colonisation dans l’ensemble du territoire palestinien, qui ont empiré après les attaques terroristes du 7 octobre contre Israël et entraînent l’augmentation des déplacements de Palestiniens.  Face à des niveaux de violence et de destruction sans précédent et au bilan le plus meurtrier du conflit pour les Israéliens comme pour les Palestiniens, le délégué a déploré l’incapacité d’obtenir un cessez-le-feu et d’augmenter l’aide humanitaire.  Il a critiqué la « lenteur » du Conseil qui cautionne depuis bien trop longtemps ce cycle sans fin de violence et d’anarchie.  Cette situation encourage le mépris du droit et l’incrédulité quant à la capacité de la communauté internationale à œuvrer en faveur d’une solution à deux états, a-t-il alerté.  À cet égard, il a insisté sur la nécessité de faire respecter le droit international par toutes les parties au conflit, notamment en mettant fin à l’occupation israélienne qui a commencé en 1967 et en respectant les résolutions pertinentes du Conseil. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a évoqué un risque de régionalisation du conflit, avant d’appeler Israël à respecter ses obligations au regard du droit international, particulièrement concernant l’usage de la force qui doit répondre aux critères de nécessité et de proportionnalité et protéger les droits de tout individu à la vie et à la sécurité de sa personne.  En outre, elle a condamné les actes violents commis par des colons contre les civils palestiniens, qui renforcent l’environnement coercitif en Cisjordanie.  En tant que Puissance occupante, Israël doit s’abstenir de prendre des mesures qui introduiraient des changements permanents dans le territoire palestinien, a exhorté la représentante.  Elle a salué l’ouverture de Kerem Shalom qui doit permettre l’entrée de biens humanitaires et commerciaux par une diversité de voies d’accès.  Face à la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza, la représentante a espéré que ce Conseil saura se prononcer pour soutenir la population civile gazaouite dans le besoin.

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a déclaré que, compte tenu de la situation désastreuse à Gaza, son pays appelle plus que jamais à la pleine mise en œuvre de la résolution humanitaire 2712 (2023) du Conseil de sécurité, pour garantir la fourniture humanitaire en temps et en heure et assurer la protection des civils, en particulier les enfants et les femmes.  Il est urgent d’intensifier et d’améliorer l’accès humanitaire à Gaza, a-t-il insisté, car des vies sont en jeu et nous avons le devoir d’aider les plus vulnérables, notamment les enfants et les femmes.  Par ailleurs, le représentant a appuyé la proposition du Secrétaire général de l’ONU d’établir un mécanisme de sécurisation des envois d’aide à Gaza, pensant que cela permettra d’accélérer la fourniture de l’aide humanitaire dans la zone.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a rappelé que le Premier Ministre britannique avait mis l’accent sur la nécessité d’un « cessez-le-feu durable qui brise le cycle de la violence ».  Il a demandé que le Hamas cesse de tirer des roquettes sur Israël, que tous les otages soient libérés et qu’une assistance humanitaire afflue à Gaza.  « C’est le seul moyen de parvenir à une paix durable fondée sur une solution à deux États, dans laquelle Israéliens et Palestiniens peuvent vivre en paix et en sécurité. »  Le représentant a invité à se concentrer sur trois aspects. Trop de civils ayant été tués, Israël doit se montrer « ciblé et précis » dans ses efforts pour faire face à la menace posée par le Hamas, et faire davantage pour distinguer suffisamment les terroristes des civils.  Il faut également protéger les infrastructures civiles, conformément au droit international humanitaire.  Ensuite, il faut œuvrer à l’accroissement de l’aide humanitaire à Gaza en utilisant « autant de routes directes que possible », a-t-il dit en demandant à Israël d’augmenter immédiatement la liste d’articles humanitaires autorisés à entrer à Gaza, et saluant la mise en œuvre urgente de l’accord sur l’ouverture de Kerem Shalom.  Enfin, après avoir relevé que la violence des colons extrémistes en Cisjordanie a considérablement augmenté ces derniers mois, le représentant a condamné les actes haineux qui compromettent les perspectives de paix.

Israël doit redoubler d’efforts pour amener les auteurs de violences commises par les colons à rendre des comptes et pour mettre fin à la démolition et à la confiscation des biens palestiniens, a poursuivi le représentant.  Il a réitéré son appel à Israël pour qu’il mette « immédiatement et complètement fin » à toutes les activités de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est et son aqueduc inférieur. Ces colonies sont illégales au regard du droit international, constituent un obstacle à la paix et menacent la viabilité physique et la mise en œuvre d’une solution à deux États qui doit devenir une réalité pour garantir la justice et la paix aux Palestiniens et aux Israéliens, a-t-il conclu.

M. ZHANG JUN (Chine) a dénoncé la violence des colons et de l’armée israélienne en Cisjordanie estimant qu’elle s’est intensifiée.  Après avoir indiqué que les activités de peuplement violent la résolution 2334 (2016) du Conseil et sapent la solution des deux États, il a exhorté Israël à respecter ses obligations internationales, à cesser les activités de peuplement et à lutter contre la violence des colons afin de mettre un terme à l’impunité.  Critiquant certains dirigeants politiques qui ont récemment et publiquement « rejeté » la solution des deux États, le délégué a insisté sur la nécessité de reprendre les négociations directes entre Israël et la Palestine.  Toute solution à la question palestinienne devra respecter les préoccupations des Palestiniens et les préoccupations légitimes des pays de la région, a-t-il insisté.  Enfin, il a demandé la convocation d’une conférence internationale, ainsi que l’établissement d’une feuille de route pour réaliser la solution des deux États.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a indiqué que la semaine dernière, de nombreux membres du Conseil de sécurité ont vu que le système humanitaire à Gaza est au bord de l’effondrement.  Près de 2,2 millions de personnes demeurent piégées et 9 personnes sur 10 passent des jours entiers sans avoir accès à des denrées.  Les Gazaouites connaissent une famine et une soif sans précédent alors que les médecins n’ont même pas les articles médicaux de base pour soigner les blessés et faire face à la menace croissante d’infection.  Nous avons besoin d’accès, a souligné le représentant, qui a précisé que la résolution qui doit être mise aux voix aujourd’hui vise à répondre à cette demande en utilisant toutes les voies terrestres, maritimes et aériennes pour acheminer l’aide humanitaire.  Il a appelé Israël à cesser de bloquer l’acheminement de cette aide, tout en prenant note de l’ouverture du point de passage Karam Abou Salem.  Un cessez-le-feu humanitaire permettrait de mettre un terme au bain de sang à Gaza et d’assurer un accès sûr de l’aide humanitaire qui permettrait aux otages d’être libérés. 

Le représentant s’est également inquiété de la montée de la violence et du nombre de personnes tuées en Cisjordanie depuis le 7 octobre, dénonçant la violence sans précédent des colons qui ne connaît pas de répit.  Les extrémistes ne devraient pas décider du sort de la région, a lancé le délégué qui a dit être gravement préoccupé par les informations indiquant qu’Israël aurait approuvé de nouvelles colonies illégales à Jérusalem-Est.  Toute tentative d’exploiter la guerre à Gaza pour élargir les colonies et déplacer des Palestiniens de leurs terres est une grave violation de la résolution 2334 (2016), a souligné le délégué selon qui l’absence de réel processus politique effectif ces deux derniers mois a montré clairement l’urgence de trouver une solution à la question palestinienne.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dénoncé le massacre « sans précédent par son ampleur » de Gaza.  Il a cité le bilan de 19 000 tués depuis deux mois, dont 70% de femmes et enfants, ajoutant que désormais « même les otages israéliens sont les victimes des actes brutaux et aveugles des forces armées israéliennes ».  L’ordre public est au bord de l’effondrement et nul n’est en sécurité à Gaza, les huit derniers hôpitaux encore debout fonctionnent sans eau et électricité, a-t-il dit, déplorant aussi que de nombreux membres du personnel de l’ONU aient perdu la vie, « avec leur famille, y compris des nourrissons ».

Le délégué a attiré l’attention sur les violences qui font rage en Cisjordanie, résultant à la fois des opérations des forces armées israéliennes et des attaques de colons contre les Palestiniens.  Il a ainsi rappelé que depuis le 7 octobre, 293 personnes ont été tuées en Cisjordanie par des colons extrémistes et dans le cadre d’opérations israéliennes.  Par ailleurs, il a regretté qu’en dépit de l’appel du Secrétaire général au Conseil de mettre fin au bain de sang à Gaza, « Washington continue de bloquer l’adoption de projets de résolution qui sauveraient des vies ».  Les États-Unis préfèrent fournir des armes de tous types aux forces israéliennes, a-t-il lancé, accusant ce pays de ne penser qu’à la poursuite de ses ambitions égoïstes « quand la communauté internationale parle d’une voix pour qu’un cessez-le-feu humanitaire durable soit instauré sans délai ».  Washington est dans une impasse stratégique, a ajouté le délégué, avant de condamner une démarche qui, depuis des décennies, fait fi des aspirations des Palestiniens et empêche la réalisation de la solution des deux États.  Il a conclu en réitérant l’attachement de son pays à la concrétisation de cette solution dans le droit fil des résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a regretté que les aspirations collectives à la solution des deux États continuent d’être mises à mal, réitérant que la violence ne parviendra jamais à régler un conflit.  Elle a appelé au respect du droit international et humanitaire, avant de saluer l’ouverture du point de passage de Karam Abou Salem.  Le Conseil doit donner une chance à la paix et accepter l’importance de relancer le processus de paix, conformément aux résolutions pertinentes de l’ONU.  Il faut veiller au respect du droit et des aspirations tant des Israéliens que des Palestiniens, a ajouté la représentante.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a estimé que « la situation humanitaire catastrophique à Gaza ne doit pas faire oublier la colonisation israélienne qui s’accélère en Cisjordanie ».  Assurant que la France ne reconnaîtra jamais l’annexion illégale de territoires, ni la légalisation de colonies sauvages, elle a réitéré la condamnation de la décision israélienne d’autoriser la construction de 1 800 nouvelles unités de logement dans les colonies à Jérusalem-Est, ainsi que les mesures d’expropriation notifiées le 10 décembre à certaines familles.  Après avoir condamné fermement les violences commises par les colons extrémistes en Cisjordanie, elle a appelé les autorités israéliennes à traduire les auteurs de violences en justice.

La représentante a par ailleurs exigé que « toute la lumière soit faite » par les autorités israéliennes sur les circonstances du bombardement d’un bâtiment d’habitation ayant notamment causé la mort d’un agent du Ministère de l’Europe et des affaires étrangères à Rafah.  Face au risque d’un embasement régional, elle a appelé toutes les parties à faire preuve de responsabilité, estimant que la stabilité du Sud-Liban nécessite le plein respect de la résolution 1701 (2006) par toutes les parties.  De plus, la France condamne fermement les attaques houthistes contre des navires commerciaux en mer Rouge et continuera de se mobiliser pour contribuer à la sécurité maritime dans la région. 

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a déclaré: « Ce bain de sang doit cesser. »  Elle a pris note de la déclaration commune de l’Union européenne et de 13 autres pays, publiée le 15 décembre, condamnant les attaques contre les Palestiniens en Cisjordanie occupée, et appelant Israël à prendre des mesures concrètes et urgentes pour freiner les violences des colons.  Après la mort récente de trois otages israéliens abattus par erreur par les Forces de défense israéliennes, la représentante a appelé les autorités israéliennes à la plus grande retenue et à la responsabilité dans la conduite de leurs opérations militaires, conformément au droit international humanitaire.  Elle a également appelé à la libération immédiate et sans condition de tous les otages.

La représentante a jugé « humainement incompréhensibles » les divisions au sein du Conseil de sécurité alors même que la situation sur le terrain ne cesse de se détériorer.  Elle a renvoyé à l’adoption le 12 décembre, à une large majorité, d’une résolution de l’Assemblée générale réclamant un cessez-le-feu humanitaire immédiat à Gaza.  Elle a pointé l’incapacité du Conseil à agir et à apporter des réponses adéquates aux problèmes urgents qui se posent avec acuité à Gaza, notamment concernant l’augmentation et le suivi de l’aide à Gaza.  Notant l’annonce par Israël d’une autorisation temporaire d’une nouvelle entrée d’aide humanitaire dans la bande de Gaza par le point de passage de Kerem Shalom, elle a relevé que seule l’aide en provenance de ce pays sera livrée par cette voie.  « Nous ne pouvons pas nous permettre de demeurer dans l’impasse et l’immobilisme », a-t-elle martelé.  Alors que le mandat du Gabon touche à sa fin, celui-ci « entend jeter ses dernières forces » afin de faire taire les armes entre Israël et le Hamas et d’éviter un embrasement dans l’ensemble de la région. La solution au conflit israélo-palestinien doit être politique et diplomatique, a-t-elle conclu.

Rappelant le massacre du 7 octobre, M. FERIT HOXHA (Albanie) a déploré la perte de chaque vie innocente, qu’elle soit israélienne ou palestinienne.  Estimant que le Hamas avait rompu la première trêve, il s’est dit préoccupé par la situation des otages qui demeurent entre ses « mains sanglantes ».  Il a réitéré l’appel de l’Albanie à leur libération immédiate et inconditionnelle et, dans l’intervalle, à la possibilité pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de leur rendre visite. Dénonçant une « guerre en 140 caractères » sur les réseaux sociaux, le délégué s’est inquiété de l’« immense souffrance des citoyens de Gaza », utilisée par le Hamas pour renforcer son discours.  Il a appelé à s’y opposer, car il constitue une « porte ouverte à toutes les tragédies ».  Il a également appelé à la mise en œuvre intégrale de la résolution 2712 (2023), plaidant en faveur de mesures urgentes pour qu’une aide humanitaire accrue parvienne aux civils le plus rapidement possible, et saluant l’ouverture du point de passage de Kerem Shalom.

Également préoccupé par la situation en Cisjordanie, le représentant a appelé à mettre fin à la violence « inacceptable » des colons à l’égard des civils palestiniens, et à enquêter pour punir les coupables.  Rappelant que l’établissement de colonies constituait une violation du droit international et un obstacle à la solution des deux États, il a appelé à leur démantèlement.

Constatant que la situation au Moyen-Orient s’est détériorée sur tous les fronts, Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a rappelé le nombre de morts et les destructions sans précédent dans les territoires palestiniens occupés et en Israël. « Ce cycle inexorable de violences nous a éloignés d’un horizon politique comme jamais auparavant », a-t-elle regretté.  Ajoutant qu’il est « douloureusement évident » que la crise à Gaza fait payer un « tribut inimaginable » à la population, elle a dénoncé « un nombre choquant de civils tués et déplacés ».  Soulignant que le respect du droit international humanitaire est primordial, elle a appelé toutes les parties à veiller à la protection des civils et des infrastructures civiles.  Elle a estimé qu’une augmentation significative de l’aide humanitaire à Gaza est absolument nécessaire, plaidant en faveur de l’ouverture de nouveaux points de passage et de garanties de sécurité pour les personnels humanitaires, qui paient un tribut « tout à fait inacceptable ».  Pour sa délégation, un cessez-le-feu humanitaire immédiat est désormais impératif pour garantir la protection nécessaire des civils et désamorcer ce conflit.

Elle a réitéré l’appel de Malte pour que le Hamas libère immédiatement et sans condition les otages restants.  Alarmée par le sort des enfants enlevés, tués et mutilés à un rythme effréné, la déléguée a félicité le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et ses partenaires pour l’aide apportée à tous les enfants, en particulier à l’intérieur de Gaza, dans des circonstances extrêmement difficiles.  Elle a condamné les « attaques inexcusables » des colons israéliens contre les Palestiniens de Cisjordanie, réitérant la ferme opposition de Malte à la politique de colonisation d’Israël.  La représentante a réaffirmé l’engagement de Malte en faveur de la solution des deux États, estimant qu’un retour au statu quo ante n’est pas une option.

M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA (Équateur) a appuyé « l’action précieuse » de l’ONU et rappelé, que ce trimestre a été le plus meurtrier à Gaza.  Il s’est également inquiété de l’augmentation de la violence en Cisjordanie, d’actes terroristes, et d’une « glorification inacceptable » d’assassinats de civils, entre autres.  Témoignant de la gravité et de l’urgence de la situation humanitaire après sa visite au point de passage de Rafah, le représentant a déclaré qu’il est du devoir du Conseil d’agir.  La résolution 2712 (2023) et toutes les autres résolutions pertinentes doivent être appliquées de manière intégrale, a-t-il insisté, en pointant l’obligation des dirigeants à condamner, clairement et publiquement, toute incitation à la violence et à la haine, mais aussi à désamorcer les actes de violence.  Pour mettre fin à cette situation, il faut passer par un règlement pacifique pour parvenir à la solution des deux États, a-t-il préconisé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité est toujours divisé après le cinquième tir par la RPDC d’un missile balistique intercontinental en 2023

9514e séance - après-midi
CS/15540

Le Conseil de sécurité est toujours divisé après le cinquième tir par la RPDC d’un missile balistique intercontinental en 2023

Cet après-midi, au Conseil de sécurité, le Sous-Secrétaire général au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, M. Khaled Khiari, a confirmé que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a lancé hier un missile balistique intercontinental de type Hwasong-18, qui a parcouru une distance d’environ 1 000 kilomètres et atteint une altitude de 6 500 kilomètres avant de s’abîmer en mer. 

Il s’agit du cinquième tir d’un tel missile en 2023, après le Hwasong-15 en février, le Hwasong-17 en mars et les missiles à combustible solide Hwasong-18 en avril et en juillet derniers, a relevé le haut fonctionnaire, en notant qu’ils sont désormais capables d’atteindre n’importe quelle cible sur Terre.  Il a également rappelé qu’en novembre, la RPDC avait annoncé avoir procédé à deux essais réussis d’un nouveau moteur pour un missile balistique à combustible solide de portée intermédiaire. 

Tout lancement effectué par la RPDC à l’aide de la technologie des missiles balistiques constitue une violation des résolutions pertinentes du Conseil, a réaffirmé le Sous-Secrétaire général, en demandant instamment à ce pays de s’abstenir de tels actes.  En ce moment particulièrement difficile pour la paix et la sécurité mondiales, il a insisté sur l’impératif de désamorcer la crise dans la péninsule coréenne afin de créer un environnement propice à la coopération.  Dans cette optique, M. Khiari a appelé les membres du Conseil de sécurité à s’unir et à utiliser pleinement les outils du dialogue et de la négociation à leur disposition.  

S’adressant à la RPDC, il l’a encouragée à opter pour la diplomatie plutôt que de choisir l’isolement.  Il a donc insisté sur l’importance de rétablir les canaux de communication, en particulier entre les entités militaires, et de faire preuve d’un maximum de retenue pour éviter une escalade involontaire. 

Les membres du Conseil qui avaient demandé cette réunion –Albanie, Équateur, Émirats arabes unis, France, Japon, Royaume-Uni, États-Unis et Malte– ont unanimement condamné ces récents tirs, exigeant que la RPDC abandonne ses programmes nucléaire et de missiles balistiques et entame un dialogue sur la dénucléarisation. 

À l’instar des États-Unis, ils ont insisté sur le fait que le Conseil ne peut rester silencieux face à ces violations flagrantes et répétées de ses résolutions.  Il est inacceptable pour ses membres d’ignorer les conséquences d’une absence de condamnation unanime des actions illégales de la « Corée du Nord », a estimé la France.  Si pour certains, cela revient à donner carte blanche à la RPDC pour la poursuite de ses provocations, pour d’autres, comme Malte, le silence du Conseil et son manque d’unité sur ce dossier ne font qu’enhardir cette dernière à poursuivre sa stratégie du fait accompli. 

La République de Corée et le Japon, en première ligne des tirs de missiles balistiques de la RPDC, ont condamné ces « provocations irresponsables ».  Ils ont déploré que le « régime de Pyongyang » gaspille ses maigres ressources pour développer son programme d’armes de destruction massive, aux dépens de son propre peuple.  Or si rien n’est fait, a mis en garde la République de Corée, la RPDC continuera de menacer la communauté internationale. S’avouant déçue de l’impasse dans laquelle se trouve le Conseil, qui se trouve « ridiculisé par la RPDC », la délégation coréenne a prévenu que Pyongyang se dirige tout droit vers un « point de non-retour ». 

Face aux réunions à répétition du Conseil de sécurité sur ce dossier, la Fédération de Russie a rappelé que son objectif principal est de résoudre les problèmes et les menaces à la paix et à la sécurité dans le monde. Se contenter de simplement évoquer ces problèmes au sein du Conseil est insuffisant, a tranché la déléguée, avant de demander aux États-Unis de changer d’approche et d’accorder la priorité au dialogue politique pour mettre fin aux « bruits des bottes » dans la région et entamer des pourparlers sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne. 

Ce n’est pas faute d’avoir tenté de mener un dialogue sans conditions avec la RPDC, a rappelé la délégation américaine, mais que c’est cette dernière qui s’y oppose.  Les États-Unis ne souhaitent pas simplement parler de cette question au sein du Conseil mais voudraient agir pour répondre au « comportement éhonté » de la RPDC à travers un « produit » du Conseil, a-t-elle précisé.  

Cela n’a pas empêché la Chine et la Russie de maintenir que les États-Unis contribuent à aggraver la crise dans la péninsule coréenne, en pointant du doigt les manœuvres militaires américaines.  Si la Chine a dénoncé le déploiement dans la région d’armes stratégiques et le renforcement d’alliances militaires, la Russie a même parlé de « signaux offensifs » compte tenu du déploiement de matériel militaire et de sous-marins américains dans la péninsule.  La délégation américaine a rétorqué en soulignant la nature purement défensive de ces manœuvres. 

Même son de cloche du côté de la RPDC, qui a invoqué sa « légitime défense » face aux menaces des États-Unis et d’autres « forces hostiles », le tir du missile balistique étant en réalité une contre-mesure, a justifié son représentant.  Si Washington n’avait pas introduit des armes stratégiques, notamment six sous-marins nucléaires, dans les eaux de la péninsule, les membres du Conseil de sécurité ne seraient pas ici à discuter de manière hypocrite du droit à la légitime défense d’un État souverain, a encore argué la RPDC. 

NON-PROLIFÉRATION: RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE

Déclarations

M. KHALED KHIARI, Sous-Secrétaire général au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, a indiqué que selon l’agence de presse officielle de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et diverses sources gouvernementales, la RPDC a lancé un missile balistique intercontinental de type Hwasong-18 à 8 h 24, heure locale, le 18 décembre.  Le missile a parcouru une distance d’environ 1 000 kilomètres et a atteint une altitude de 6 500 kilomètres avant de tomber en mer. Il s’agit du cinquième lancement d’un tel missile en 2023, après le Hwasong-15 en février, le Hwasong-17 en mars et les missiles à combustible solide Hwasong-18 en avril et en juillet, a-t-il souligné en notant que « ces systèmes seraient capables d’atteindre la plupart des points de la Terre ».  En outre, en novembre, la RPDC a également annoncé qu’elle avait procédé à deux essais réussis d’un nouveau moteur pour un missile balistique à combustible solide de portée intermédiaire. 

Rappelant que le 18 décembre, le Secrétaire général a fermement condamné le lancement d’un missile balistique à longue portée par la RPDC, M. Khiari a précisé qu’il l’a également exhortée à respecter pleinement ses obligations internationales en vertu de toutes les résolutions pertinentes du Conseil.  Le Secrétaire général a en outre réitéré son appel à la RPDC pour qu’elle rouvre les canaux de communication et reprenne le dialogue sans condition préalable afin de parvenir à une paix durable et à la dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne, a dit le haut fonctionnaire.  Tout lancement d’un nouveau missile balistique intercontinental est très préoccupant.  Malgré les nombreuses réunions du Conseil de sécurité sur cette question en 2023, la RPDC n’a pas tenu compte de l’appel pressant des membres du Conseil à s’abstenir de tout nouveau lancement, a-t-il constaté.  Il est également regrettable qu’à nouveau la RPDC n’ait pas signalé ce lancement pour des raisons de sécurité de l’espace aérien ou maritime. M. Khiari a réaffirmé que tout lancement effectué par la RPDC à l’aide de la technologie des missiles balistiques constitue une violation des résolutions pertinentes du Conseil, et il lui a demandé instamment de s’abstenir de tels actes. 

En ce moment particulièrement difficile pour la paix et la sécurité mondiales, il est impératif de désamorcer la situation dans la péninsule coréenne afin de créer un environnement propice à la coopération, a insisté le Sous-Secrétaire général avant d’appeler les membres du Conseil de sécurité à s’unir et à utiliser pleinement les outils du dialogue et de la négociation.  Il a ensuite exhorté la RPDC à opter pour la diplomatie, plutôt que de choisir l’isolement, comme moyen d’aller de l’avant.  À cet égard, M. Khiari a salué la participation des Représentants permanents de la RPDC et de la République de Corée à cette réunion, ce qui permet à toutes les parties de s’exprimer.  L’absence de canaux de communication entrave la possibilité de progresser, a-t-il argué avant de souligner à nouveau l’importance de les rétablir, en particulier entre les entités militaires.  Il est essentiel de faire preuve d’un maximum de retenue pour éviter une escalade involontaire, a-t-il conclu.

M. ROBERT A.  WOOD (États-Unis) a condamné le lancement par la RPDC d’un missile balistique intercontinental et d’un missile à courte portée cette semaine.  « Nous ne sommes pas ici pour châtier la population nord-coréenne ou animés de mauvaises intentions, mais au contraire pour appeler au dialogue avec ce pays » sur quelque sujet que ce soit, sans condition préalable, a-t-il assuré.  Nous sommes ici, a-t-il ajouté, parce que pour la cinquième fois cette année, la RPDC a lancé un missile intercontinental et un missile balistique à courte portée en violation directe des nombreuses résolutions du Conseil de sécurité, en plus des 26 autres essais balistiques effectués cette année. Le représentant a jugé le comportement de la RPDC « irresponsable » et « ridicule ».  Les États-Unis et leurs alliés s’efforcent de se protéger contre les mêmes vecteurs que teste la RPDC en vue de les attaquer, a-t-il dit.  Il a reproché à ce pays de prendre non pas des mesures de défense mais des mesures offensives, alors que la République de Corée a réitéré, elle, son intention de ne pas acquérir d’armes nucléaires, d’où la réaffirmation de son alliance militaire avec les États-Unis. 

Le représentant a rappelé que le Secrétaire général s’est exprimé à ce sujet à plusieurs reprises et qu’en 2021, un plan quinquennal a été établi.  Au lieu de mettre en œuvre ce plan, la RPDC cherche toujours des justifications et préfère rejeter la faute sur les sanctions imposées par le Conseil, a-t-il déploré.  La majorité des membres du Conseil étant selon lui disposée à mettre en œuvre les objectifs de dénucléarisation, il incombe maintenant à la Russie et à la Chine d’en faire de même et d’agir de « manière crédible », ce qui non seulement adresserait un message à tout acteur de la prolifération, mais permettrait aussi d’exiger des comptes de la RPDC.  Le représentant s’est déclaré convaincu que la RPDC développe aussi ses armes de destruction massive pour contourner les sanctions.  « Ce pays doit comprendre que la seule voie à suivre est la diplomatie et la dénucléarisation de la péninsule coréenne. »

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a fermement condamné le tir de missile balistique par la RPDC, qui continue d’ignorer les résolutions du Conseil de sécurité, démontrant ainsi qu’elle constitue une menace pour la région et n’a pas l’intention de désamorcer les tensions, a déclaré la représentante.  Elle a également affirmé que le développement du programme nucléaire de la RPDC entraîne des conséquences préoccupantes sur la crise des droits humains en RPDC.  La déléguée a invité Pyongyang à adopter des mesures de désescalade, notamment le rétablissement du moratoire sur les tirs de missiles balistiques intercontinentaux, abrogé l’an dernier.  La RPDC doit également mettre fin à ses actions dans la péninsule coréenne et renoncer à ses activités cybercriminelles, a affirmé la représentante. Elle devrait enfin rétablir des canaux de communication, notamment en vue de faciliter le retour dans ce pays des personnels de l’ONU, dont le Coordonnateur résident, a-t-elle exigé.

Mme CLARISSE PAOLINI (France) a condamné avec la plus grande fermeté le lancement par la République populaire démocratique de Corée (RPDC), les 17 et 18 décembre, d’un missile balistique de courte portée et d’un missile balistique de portée intercontinentale.  « Jamais la Corée du Nord n’avait lancé autant de missiles » qu’en 2023, s’est-elle inquiétée, notant également la poursuite d’activités illicites dans le domaine nucléaire.  Face aux violations flagrantes et répétées de ses résolutions, le Conseil de sécurité ne doit pas rester silencieux, a lancé la représentante, soulignant que cela reviendrait à donner « carte blanche »à la RPDC pour la poursuite de ses provocations. 

De l’avis de la France, l’avancée des programmes nord-coréens représente une menace pour la stabilité régionale et la sécurité internationale ainsi que pour l’architecture internationale de non-prolifération.  Pour enrayer l’escalade, a argué la représentante, le Conseil doit respecter ses propres décisions et il faut appliquer pleinement toutes les sanctions internationales adoptées à l’unanimité.  Enfin, la France a appelé la RPDC à une reprise du dialogue politique avec la communauté internationale et à se conformer à ses obligations internationales, demandant à tous les acteurs de la région de s’investir.  « Notre objectif reste inchangé: la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la Corée du Nord », a-t-elle conclu. 

M. KAZUYUKI YAMAZAKI (Japon) a vivement condamné, à son tour, la provocation « inacceptable » de la Corée du Nord, en violation de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité, rappelant que le dernier missile balistique intercontinental en date s’est écrasé dans les eaux au large du Japon, à seulement 250 kilomètres d’Hokkaido.  Le délégué a indiqué que plusieurs bateaux de pêche étaient en mer et qu’un certain nombre d’aéronefs volaient au moment du lancement.  Une fois de plus, ce lancement irresponsable a mis en danger les navires, exposé les vols dans les environs à de grands risques et terrifié les citoyens japonais, a dénoncé le délégué.  Il a rappelé que la RPDC s’obstine à nier ses obligations internationales en poursuivant ses ambitions militaires aux dépens du bien-être de sa population. Le représentant a aussi invité à ne pas ignorer les violations et les abus des droits humains commis par Pyongyang, notamment s’agissant des personnes enlevées dans des pays comme le Japon et la République de Corée.  Il est grand temps d’empêcher la RPDC de faire de fausses déclarations, a-t-il tancé, en rappelant au Conseil sa lourde responsabilité, le sommant notamment de restaurer « l’unité affichée en 2017 ».  Le délégué a fait remarquer qu’à l’occasion de plusieurs réunions du Conseil, cette année et l’an dernier, il a été constaté que certains membres du Conseil ont exprimé leurs points de vue tout en empêchant le Conseil d’agir. Il a rappelé qu’en revanche, la résolution 2397 du Conseil de sécurité et d’autres avaient été adoptées à l’unanimité.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a constaté que « la RPDC a violé plusieurs résolutions du Conseil de sécurité à deux reprises en moins de 12 heures ».  C’est la raison pour laquelle Malte s’est jointe à d’autres pays pour demander une réunion du Conseil, a expliqué la déléguée avant de condamner ce lancement avec la plus grande fermeté et de dire qu’il est grand temps que le Conseil fasse de même. La menace posée par la RPDC va bien au-delà de la stabilité de la région, a-t-elle souligné, puisque ses programmes nucléaire et de missiles balistiques menacent la paix et la sécurité internationales et compromettent gravement le régime de non-prolifération. Depuis plus d’un an, la RPDC continue de faire progresser lesdits programmes à un rythme sans précédent, et opère des transferts de technologie et d’armes avec un autre pays.  « Voilà ce qui se passe lorsque le Conseil n’assume pas ses responsabilités », s’est impatientée la déléguée pour laquelle le silence collectif et l’inaction du Conseil ont enhardi la RPDC.  « Nous ne pouvons plus nous le permettre », a-t-elle tranché en appelant, une fois de plus, le Conseil à parler d’une seule voix pour condamner ces actes de la RPDC et pour appeler ses dirigeants à revenir à la diplomatie.  Elle a demandé à la RPDC de cesser toute confrontation et d’engager un dialogue constructif en vue de la dénucléarisation.  La RPDC doit abandonner complètement, de manière vérifiable et irréversible ses programmes nucléaire et de missiles balistiques, revenir au Traité sur la non-prolifération et aux garanties de l’AIEA, et signer et ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a fermement condamné le dernier tir de missile balistique intercontinental de la RPDC le 18 décembre.  Il a remarqué que cette dernière est de plus en plus menaçante vis-à-vis de ses voisins et de la communauté internationale et qu’elle met en danger la paix et la sécurité internationales sans oublier qu’elle sape le régime de non-prolifération.  Ces tirs de missiles s’inscrivent directement dans le cadre de son plan militaire quinquennal et ses ambitions nucléaires, a argué le représentant, en notant que ce dernier tir n’est pas un incident isolé, puisqu’en 2023 seulement, il y en a eu 28.  Ces essais mettent en danger le trafic maritime et aérien, a-t-il souligné, avant d’appeler le Conseil de sécurité à s’unir pour exhorter la RPDC à mettre fin à ces agissements, à revenir à la table des négociations, à s’engager à mettre en œuvre les différents instruments internationaux comme le TNP et à poursuivre la dénucléarisation de la péninsule coréenne. En guise de conclusion, le représentant a insisté sur l’urgence, pour le Conseil de sécurité, d’agir. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a condamné sans équivoque le lancement d’un missile balistique intercontinental par la RPDC le 18 décembre, et le lancement d’un missile balistique de courte portée la veille.  C’était le trente et unième tir de l’année, et le cinquième d’un missile intercontinental, a compté la délégation, dénonçant des actes flagrants de mépris envers les décisions du Conseil et une inquiétante escalade depuis le début de l’année. La communauté internationale doit faire preuve de fermeté et d’unité pour répondre à ces violations, a plaidé le représentant, avant de faire observer que la RPDC reste protégée par deux membres du Conseil. 

Tous les États Membres de l’ONU doivent respecter et appliquer les résolutions du Conseil de sécurité, y compris en ce qui concerne le transfert de technologies vers et depuis la RPDC, a insisté le représentant.  Il a appelé ce pays à abandonner ses programmes illégaux d’armes nucléaires et balistiques, qui ne font qu’appauvrir son propre peuple et déstabiliser toute la région, à s’abstenir de toute nouvelle provocation et à respecter le Traité sur la non-prolifération nucléaire.  Il l’a aussi invitée à saisir les offres de dialogue, soulignant que la diplomatie est la seule option viable pour parvenir à une paix durable dans la péninsule coréenne.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a condamné le dernier lancement d’un missile balistique intercontinental par la RPDC, le cinquième cette année, en violation des résolutions du Conseil de sécurité, en se disant particulièrement préoccupé par les indications selon lesquelles la RPDC pourrait utiliser de plus en plus de tels lancements comme un « signal politique », notamment pour manifester son mécontentement face aux exercices militaires dans la région. L’absence de préavis, a-t-il averti, fait peser des risques inacceptables sur le trafic aérien et maritime commercial ainsi que sur les populations civiles.  Le représentant a déclaré qu’il revient aux principaux acteurs de la région de « modérer leur rhétorique et leurs actions », et aux membres du Conseil d’explorer de nouvelles méthodes d’instauration de la confiance et de promotion de la désescalade.  Enfin, les membres extérieurs au Conseil pourraient de leur côté jouer un rôle actif en soutenant ces efforts et en exprimant l’intérêt de la communauté internationale pour une péninsule coréenne pacifique, stable et exempte d’armes nucléaires.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a condamné les tirs de missiles balistiques et appelé la RPDC à respecter ses obligations internationales au regard des résolutions du Conseil de sécurité.  Elle a également exprimé des inquiétudes quant à la possibilité d’un accident lié à un « mauvais calcul », appelant à une désescalade des tensions dans la région. Compte tenu des risques que posent de telles armes dans un contexte de tensions régionales élevées, la représentante a souligné la nécessité de trouver « des solutions régionales aux tensions régionales ».  Le Conseil de sécurité, pour sa part, doit chercher l’unité et jouer son rôle pour éviter une catastrophe.

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a souligné l’importance de rétablir la communication dans le contexte actuel, en particulier entre les entités militaires, afin d’éviter une escalade involontaire.  Il faut une plus grande prudence et des actions responsables de la part de toutes les parties prenantes impliquées.  Pour cette raison, le représentant a exhorté les parties à s’abstenir de toute action unilatérale qui pourrait mettre davantage à rude épreuve l’état délicat de détente dans la région.  Il a appelé Pyongyang à respecter pleinement ses obligations internationales en vertu des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il faut, a-t-il plaidé, œuvrer collectivement pour garantir une péninsule coréenne pacifique et sûre, où le dialogue prévaut sur la confrontation et la coopération sur le conflit.  Nous pensons qu’avec un engagement suffisant, il est possible d’inverser l’accumulation excessive d’armes de destruction massive et de rendre le monde plus sûr, a-t-il conclu.

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a condamné ces « énièmes » lancements de missiles et s’est dite préoccupée par leur fréquence et leur montée en puissance, qui vont de pair avec une escalade inquiétante de la « rhétorique guerrière et provocatrice » de part et d’autre. Ce cycle d’invectives et de menaces interposées doit cesser, a lancé la représentante, plaidant pour une solution réaliste et pérenne, qui doit être trouvée au moyen du dialogue et de la diplomatie.  Elle a ajouté que le « langage des tirs » n’est pas un mode d’expression dont le Conseil de sécurité peut se satisfaire.  Selon elle, il doit jouer pleinement son rôle de garant de la paix et de la sécurité internationales, ce qui nécessite de faire respecter ses propres résolutions.  Le Gabon déplore que, malgré les déclarations d’intention des parties pour reprendre les pourparlers sur le dossier nucléaire nord-coréen, aucune proposition concrète n’ait jusqu’ici été adressée au Conseil à cette fin. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a condamné le cinquième lancement d’un missile balistique de portée intercontinentale cette année par la RPDC, qui s’inscrit dans une situation sécuritaire tendue.  La Suisse se préoccupe du risque d’escalade inhérent à un tel acte.  L’emploi d’armes nucléaires n’est que difficilement envisageable dans le respect des règles pertinentes du droit international en général, et du droit international humanitaire en particulier, a tranché la déléguée en encourageant les États Membres à renforcer leurs efforts en faveur de la non-prolifération, du désarmement et du maintien du tabou nucléaire.  « Face à ces défis répétés, nous ne saurions fléchir dans notre devoir collectif. »  Ces tirs sont une violation de résolutions juridiquement contraignantes du Conseil de sécurité et donc du droit international, a réitéré la déléguée.  Il est ainsi du devoir collectif de ses membres de condamner les essais de missiles balistiques de la RPDC, qui est tenue de prendre des mesures concrètes en vue d’abandonner ses armes nucléaires, ses missiles balistiques et ses programmes connexes de manière complète, vérifiable et irréversible.  Estimant que la population de la RPDC ne doit pas être laissée pour compte, elle a souligné « le lien qui existe entre le programme nucléaire nord-coréen et les violations des droits humains dans le pays », encourageant le Conseil à examiner davantage ce lien.  Enfin, la déléguée a salué l’appel aux bons offices du Secrétaire général et a encouragé la RPDC à engager un dialogue constructif avec le Conseil et le système onusien. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a fait part de son inquiétude face à une nouvelle escalade « dangereuse » dans la péninsule coréenne.  Elle a signalé qu’un groupe de délégations, dirigé par les États-Unis, a demandé au Conseil de se réunir sur cette question deux semaines à peine depuis la dernière réunion sur le même sujet.  Or, a-t-elle estimé, ni le contenu des discours des initiateurs de la discussion, ni leurs approches n’ont changé. La déléguée a notamment attiré l’attention du Conseil sur « les graves distorsions » dans les remarques formulées par certains membres du Conseil et représentants du Secrétariat lors de l’examen de la situation dans la région, qui ne visent qu’à condamner Pyongyang. « De telles approches unilatérales » sont en fait à l’origine du problème de l’incapacité du Conseil à choisir la bonne optique pour discuter des menaces croissantes, a commenté la représentante. 

Tout en reconnaissant les positions de la République de Corée et de la RPDC par le droit souverain à la légitime défense, elle a dit son incompréhension face au fait que les États-Unis, dont les frontières se trouvent à des milliers de kilomètres de la péninsule coréenne, aient rejoint les rangs des soi-disant « victimes des provocations nord-coréennes ».  Parallèlement, elle a dénoncé la façon dont la « machine militaire américaine » s’est mise en branle dans la région depuis le milieu de l’année écoulée.  Les exercices Bouclier de la liberté et Ssangen de Washington n’étaient rien d’autre qu’une démonstration de force et, par définition, ils ne peuvent avoir d’effet positif sur la situation, s’est élevée la déléguée, qui a en outre signalé que deux bombardiers stratégiques américains B-52H étaient impliqués.  Qu’il suffise de rappeler que cet avion a été conçu pour transporter des ogives thermonucléaires et qu’il a brutalement nettoyé la population civile de ce pays pendant la guerre du Viet Nam, a-t-elle encore dénoncé, précisant qu’il y a un mois, le port de Busan a reçu la visite d’un groupe d’attaque américain dirigé par les porte-avions Carl Vinson et Ronald Reagan.

M. GENG SHUANG (Chine) a déclaré que la situation dans la péninsule de Corée, devenue un théâtre d’affrontement, n’est dans l’intérêt de personne et que son pays ne voudrait pas voir cette situation se développer.  La Chine observe le déploiement dans la région d’armes stratégiques, des exercices entre alliés et le renforcement d’alliances militaires.  « Si ce cycle qui cherche à établir une puissance et un pouvoir étendu n’est pas brisé, une nouvelle escalade est à craindre », a mis en garde le représentant.  Il a estimé que la priorité actuelle est que toutes les parties gardent leur calme, fassent preuve de retenue et créent les conditions d’une reprise du dialogue.  Selon lui, « un certain pays en particulier » doit mettre en avant des plans de dialogue concrets et traduire son discours dans les faits.  Le représentant a appelé le Conseil à créer les conditions de ce dialogue, au lieu « d’exercer des pressions ou de chercher à se faire entendre ».  Un projet de résolution proposé par son pays et la Fédération de Russie met l’accent sur l’aspect humanitaire qui fait consensus, a-t-il noté.  Tous ceux qui veulent la paix dans la péninsule devraient donc soutenir ce texte, a-t-il conclu.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a condamné le lancement d’un missile balistique intercontinental par la RPDC le 17 décembre, « un acte de provocation » qui viole les résolutions du Conseil de sécurité et menace l’architecture internationale de désarmement et de non-prolifération.  Le représentant a exprimé sa solidarité avec la République de Corée et le Japon, dont les populations sont soumises aux risques de tels essais.  Face au nombre élevé de missiles lancés enregistrés en 2022 et en 2023, l’Équateur s’est alarmé que le Conseil n’ait pu prendre de mesures concrètes, se demandant « si son inaction se poursuivra en 2024 ». Le Conseil doit contribuer efficacement à la prévention de la prolifération d’armes nucléaires sous tous ses aspects en RPDC, a insisté le représentant.  Il a apporté son soutien à tous les efforts visant à établir le dialogue et à trouver une solution diplomatique et pacifique pour faire baisser la tension et parvenir à une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la péninsule coréenne. 

M. WOOD (États-Unis) a réagi à l’intervention de la Fédération de Russie, en expliquant que la raison pour laquelle ils continuent de demander des réunions du Conseil de sécurité sur ce dossier, ce sont les violations répétées par la RPDC des résolutions du Conseil de sécurité.  Il a ajouté que c’est une question de menace à la paix et à la sécurité et les membres du Conseil ont le devoir de s’en saisir. 

Il a reproché à sa collègue russe d’avoir opté pour une approche suggestive, avant de lui rappeler que c’est la RPDC qui fait l’objet de sanctions du Conseil de sécurité et non pas les États-Unis.  Il a réitéré que les exercices militaires menés par Washington dans la région ont une vocation purement défensive.  Pour ce qui est de l’allègement des sanctions visant la RPDC, demandé par un projet de résolution diffusé par la Chine en octobre 2021, le représentant américain y a vu une façon de récompenser ce pays pour ces actes, une ligne de conduite que les États-Unis ne soutiennent pas.  Affirmant que son pays continuera à demander des réunions du Conseil à chaque tir de missile de la RPDC, il a dit avoir bon espoir de voir la délégation russe changer de cap et soutenir les autres membres du Conseil dans leurs efforts pour encourager la RPDC à mettre un terme à son comportement provocateur. 

Mme EVSTIGNEEVA(Fédération de Russie) lui a répondu que l’objectif principal du Conseil de sécurité est de résoudre les problèmes et les menaces à la paix et à la sécurité dans le monde, y compris dans la péninsule coréenne.  Se contenter d’évoquer ces problèmes au sein du Conseil ne suffit pas, a-t-elle souligné, avant de demander aux États-Unis de changer d’approche et d’accorder la priorité au dialogue politique et de s’efforcer de mettre fin aux « bruits des bottes » dans la région. 

LesÉtats-Unis se sont efforcés à de nombreuses reprises de mener un dialogue avec la RPDC, lui a retorqué M. WOOD, or cette dernière a refusé le dialogue sans conditions.  Il a affirmé que son pays ne souhaite pas simplement parler de cette question au sein du Conseil mais agir.  Après avoir demandé à tous les membres de prendre au sérieux la menace que représentent ces agissements, il a appelé à répondre à ce « comportement éhonté » à travers un « produit » du Conseil. 

M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée) a déclaré que les États-Unis et d’autres « forces hostiles » ont commis, tout au long de cette année, des actes menaçants à l’encontre de son pays.  Le tir du missile balistique en provenance de la RPDC est en réalité un cri d’alarme, une contre-mesure à ces menaces, a justifié le représentant, déplorant que les États-Unis et les autres pays qui le suivent aveuglement aient convoqué cette réunion, alors que la RPDC ne faisait qu’exercer légitimement son droit à la légitime défense, reconnu par l’ONU et le droit international.  Si les États-Unis n’avaient pas introduit des armes stratégiques, notamment six sous-marins nucléaires, dont le Kentucky, dans les eaux de la péninsule, les membres du Conseil ne seraient pas ici à discuter de manière hypocrite du droit à la légitime défense d’un État souverain. 

Le représentant a ensuite déclaré que pour une fois, le monde devrait se mettre à la place de la RPDC.  Les États-Unis et la République de Corée ont déployé des armes et des bombardiers nucléaires pouvant raser des pays entiers, en plus de s’adonner à de grandes manœuvres mimant des attaques nucléaires.  Si ce n’est pas une violation de l’intérêt sécuritaire de la RPDC, qu’est-ce donc? a demandé le représentant, affirmant qu’aucun pays n’accepterait de telles manœuvres à ses portes.  Il a accusé le Conseil de sécurité d’être aujourd’hui réduit à un mécanisme d’injustice qui légitime ouvertement une logique de brigands et le deux poids, deux mesures. 

Le délégué a également déclaré que tant que les actes illégaux des États-Unis et de leurs alliés sont autorisés, le Conseil de sécurité n’a plus aucune compétence juridique ou morale pour traiter des questions de paix et de sécurité internationales.  Si les États-Unis et ses « laquais » s’efforcent de nouveau de priver la RPDC de sa souveraineté par leurs résolutions, la RPDC invoquerait inéluctablement son droit à la légitime défense, a-t-il mis en garde.  Le représentant s’est voulu ferme dans ses avertissements: si les États-Unis et la République de Corée poursuivent leurs manœuvres militaires, « ces provocateurs » seront tenus pour responsables, a-t-il dit, ajoutant que son pays continuerait à développer ses mesures défensives.

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a condamné le lancement d’un missile balistique intercontinental par la RPDC le 18 décembre, ainsi que le lancement de missiles balistiques à courte portée le 17 décembre visant directement la République de Corée.  Il a affirmé que la RPDC poursuit ses « provocations irresponsables » et le développement de ses programmes illégaux de missiles nucléaires et balistiques, en violation de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité.  Il a déploré également que le « régime de Pyongyang » gaspille ses maigres ressources pour développer son programme d’armes de destruction massive, tout en fermant les yeux sur les souffrances de son propre peuple et en ne s’occupant que d’une poignée de membres de la classe dirigeante fidèles au régime.  Or si rien n’est fait, a mis en garde le représentant, la RPDC continuera de menacer la communauté internationale. S’avouant déçu par l’impasse dans laquelle se trouve le Conseil, qui se trouve « ridiculisé par la RPDC », il a prévenu que Pyongyang se dirige tout droit vers un « point de non-retour ». 

Le Conseil doit prendre des mesures sans délai, a-t-il insisté, car la question de la RPDC ne se limite plus à un problème régional puisqu’elle a élargi l’insécurité à d’autres parties du monde, menaçant les vies de citoyens ordinaires du fait que des armes et munitions nord-coréennes se retrouvent maintenant dans d’autres conflits.  Le représentant a aussi indiqué que de nombreuses banques et entreprises à travers le monde ont été attaquées par des pirates informatiques nord-coréens, et que les revenus générés par des activités illicites comme le vol de cryptomonnaie sont ensuite détournés vers ses programmes d’armes de destruction massive. Dans ce contexte, il a exhorté « les deux membres permanents du Conseil qui hésitent encore à prendre des sanctions supplémentaires » à veiller à adresser au moins trois messages à la RPDC: condamner les provocations nord-coréennes et ses programmes nucléaire et balistique; réaffirmer l’objectif de dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de ce pays; et souligner l’importance de la mise en œuvre « intégrale » de toutes les résolutions du Conseil, en particulier les régimes de sanctions.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte huit résolutions par consensus mais se divise sur les problèmes que posent les drogues de synthèse pour la santé publique et la sécurité

Soixante-dix-septième session,
48e séance plénière, après-midi
AG/12574

L’Assemblée générale adopte huit résolutions par consensus mais se divise sur les problèmes que posent les drogues de synthèse pour la santé publique et la sécurité

L’Assemblée générale a fait siennes, cet après-midi, huit résolutions, dont une, présentée par le Kazakhstan, qui proclame 2026 Année internationale des Volontaires au service du développement durable.  Si ces résolutions ont toutes été adoptées par consensus, des divisions marquées se sont fait jour sur le texte traitant de l’intensification de l’action aux niveaux national, régional et international face aux problèmes que posent les drogues de synthèse pour la santé publique et la sécurité dans le monde. 

Présenté par les États-Unis, ce texte a été entériné après l’adoption d’une proposition d’amendement du Mexique, demandant l’insertion au huitième alinéa du préambule d’une mention à la résolution 77/238 adoptée en décembre 2022 par l’Assemblée générale à l’issue d’un vote.  Un grand nombre de délégations se sont dissociées de cet ajout, faisant valoir que la résolution 77/238, intitulée « Aborder et combattre le problème mondial de la drogue dans le cadre d’une stratégie globale, intégrée et équilibrée », était la première sur ce thème à ne pas être consensuelle.  Une deuxième proposition d’amendement du Mexique consistant à insérer au premier alinéa du préambule une référence aux « marchés de détail illicites » a été rejetée.

Le consensus a en revanche prévalu pour ce qui est de la décision en vertu de laquelle l’édition 2025 de la Conférence de haut niveau des Nations Unies visant à appuyer la réalisation de l’ODD no 14: conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable se tiendra à Nice, en France, du 9 au 13 juin 2025.  Présenté par la France, également au nom du Costa Rica, le texte précise que tous les coûts afférents à l’organisation de la Conférence seront financés au moyen de ressources extrabudgétaires.

Parmi les autres textes adoptés figurent deux résolutions concernant des retraits, l’un effectif, l’autre ajourné, de la catégorie des pays les moins avancés (PMA).  L’Assemblée générale a ainsi salué la volonté du Bhoutan de sortir, le 13 décembre de cette année, de la catégorie des PMA.  Le texte, présenté par le Bhoutan, invite cependant les partenaires de ce pays dans les domaines du développement et du commerce à apporter leur plein appui à l’exécution du treizième plan national de développement et du plan à long terme du Bhoutan s’étendant jusqu’en 2034.  De manière connexe, l’Assemblée générale a décidé d’ajourner le retrait de l’Angola de cette même catégorie, qui était prévu pour février 2024.  Le texte, présenté par l’Angola, prend note de la recommandation du Conseil économique et social (ECOSOC) dans ce sens en vue d’examiner plus avant des stratégies de transition.

L’Assemblée générale a par ailleurs entériné une résolution sur la promotion du dialogue, de l’entente et de la coopération entre les religions et les cultures au service de la paix.  Présenté par le Pakistan, le texte engage les États Membres à promouvoir l’inclusion et l’unité et à combattre le racisme, la xénophobie, le discours de haine, la violence et la discrimination.  Elle a également fait sienne une résolution présentée par les Philippines, qui appelle à des services durables, sûrs et universels d’approvisionnement en eau, d’assainissement, d’hygiène, de traitement des déchets et d’électricité dans les établissements de santé. 

Enfin, après présentation par la Présidente de la Commission de vérification des pouvoirs du rapport de cet organe concernant les pouvoirs des représentants à la soixante-dix-huitième session, l’Assemblée générale a approuvé ledit rapport en adoptant une résolution figurant au paragraphe 14 de ce document. Après cette adoption la République islamique d’Iran a exprimé ses réserves quant à la partie du rapport et de la résolution pouvant être interprétée comme une reconnaissance du « régime israélien ».    

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

Explications de position au sujet de la résolution L.25 « Conférence des Nations Unies visant à appuyer la réalisation de l’objectif de développement durable no 14: conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable, organisée en 2025 »

Après l’adoption de ce texte, l’Australie, qui s’exprimait au nom du groupe CANZ (Australie, Canada et Nouvelle Zélande), ainsi que le Royaume-Uni ont regretté que le libellé du paragraphe 16 de l’annexe 2 de la résolution, qui ne contienne pas les dispositions nécessaires pour garantir la participation de la société civile à cette conférence.  Ce libellé risque de bloquer la participation des partenaires légitimes de la société civile, s’est inquiété la délégation britannique qui a voulu que toutes les voix pertinentes puissent s’exprimer sur ce sujet, notamment les communautés locales, les groupes autochtones, les pêcheurs et les experts. 

Explications de position au sujet de la résolution L.26 « Promotion du dialogue, de l’entente et de la coopération entre les religions et les cultures au service de la paix »

À l’issue de l’adoption, les États-Unis ont fait part de leurs réserves au sujet du paragraphe 15 du dispositif et de l’alinéa 24 du préambule.

Le représentant de l’Espagne, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne (UE), a appelé l’ONU à se montrer impartiale et à éviter de pointer une confession particulière. Choisir d’employer le terme « islamophobie » au lieu de « discrimination anti-musulmane » ou « haine anti-musulmane », place indûment l’accent sur la protection de la religion en tant que telle, sapant ainsi les principes du droit international des droits de l’homme, où l’accent est mis sur la protection des personnes, a estimé la délégation. 

La Fédération de Russie s’est inquiétée de l’adoption, le 19 octobre 2023, en première lecture par le Parlement ukrainien du projet de loi n° 8371 dont l’objectif, a-t-elle affirmé, est d’interdire complètement les activités de l’Église orthodoxe ukrainienne.  Si ce texte est adopté, la plus ancienne église, qui compte des millions de paroissiens, pourrait être détruite sur le territoire de l’Ukraine dès le début de l’année prochaine et remplacée artificiellement par une structure schismatique portant un nom presque identique: l’Église orthodoxe d’Ukraine, s’est alarmée la délégation qui a dénoncé les violations par l’Ukraine de ses obligations au titre de l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. 

Exerçant son droit de réponse, l’Ukraine a accusé la Fédération de Russie d’utiliser cette question importante à des fins de propagande.

Projets d’amendement L.31 et L.32

Le Mexique a présenté deux projets d’amendement à la résolution L.24 « Intensifier l’action aux niveaux national, régional et international face aux problèmes que posent les drogues de synthèse pour la santé publique et la sécurité dans le monde ».  Le premier, L.31, propose d’insérer au huitième alinéa du préambule, après « drogue », le libellé « la plus récente étant la résolution 77/238 du 15 décembre 2022, intitulée « Aborder et combattre le problème mondial de la drogue dans le cadre d’une stratégie globale, intégrée et équilibrée ».  Le second, L.32, propose d’insérer au premier alinéa du préambule, après « distribution », le libellé « sur les marchés de détail illicites ».

Explications de vote

Avant la mise aux voix de ces deux projets, les États-Unis ont annoncé leur intention de s’abstenir sur la proposition d’amendement L.31 au motif que la mention à la résolution 77/238 de l’Assemblée générale -texte dont ils approuvent néanmoins le libellé- n’est pas consensuelle. Pour ce qui est de la proposition d’amendement L.32, elle revient à ajouter un nouveau concept qui n’est reconnu ni par le processus de Vienne ni par la Troisième Commission, ce que nous voulons éviter, a expliqué la délégation, rappelant que le terme « marché de détail » est employé pour désigner une utilisation légitime, à des fins scientifiques et médicales, par opposition au « marché illicite ».  Ce texte dépasse donc les discussions en cours à Vienne et une erreur juridique pourrait être insérée dans la résolution en cas d’adoption, a-t-elle mis en garde.  S’agissant du projet de résolution L.24, la délégation s’est déclarée convaincue de sa nature consensuelle pour répondre aux menaces médicales posées par les drogues de synthèse.  Elle a par ailleurs salué le consensus atteint sur la résolution L.14, tout en exprimant des réserves sur les paragraphes 2, 4 et 6.  Elle a ainsi réaffirmé que les banques de développement multilatérales, le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont une structure de gouvernance et des processus décisionnels indépendants de l’ONU.  Il serait par conséquent inapproprié et potentiellement néfaste pour les fonctions de ces entités que l’ONU cherche à formuler des recommandations spécifiques à leur sujet, a-t-elle fait valoir.

Le Japon a, pour sa part, appuyé la résolution L.14 en se disant convaincu de la force transformatrice de la santé.  Chacun doit pouvoir accéder aux services sanitaires essentiels, indépendamment des circonstances dans lesquelles il ou elle vit, a-t-il souligné. La Fédération de Russie a regretté que la délégation du Mexique ait décidé d’apporter des amendements au projet de résolution L.24.  Ces propositions, si elles étaient adoptées, priveraient un document important pour la lutte contre les stupéfiants de son statut de consensus.   La délégation s’est déclarée convaincue que seule une décision consensuelle forte sur les questions de lutte contre la drogue peut garantir l’unité des approches de la communauté internationale dans l’élaboration d’une réponse efficace à la criminalité liée à la drogue.  À ce jour, le dernier document de ce type est la résolution omnibus 76/188 de 2021, a-t-elle affirmé.

De fait, a poursuivi la délégation, la décision d’introduire des amendements au texte vient saper cette unité.  Ces amendements constituent selon elle une continuation de la « ligne de sape » de l’unité du front antidrogue, qui a commencé l’an dernier.  À l’époque, cette même délégation, qui coordonnait les travaux sur la résolution 77/238, a conduit les États à un texte délibérément incohérent, déséquilibré et tout simplement inacceptable, a-t-elle conclu, non sans rappeler que près d’un tiers des États ont refusé de soutenir ce texte.

Le Bélarus a indiqué qu’il votera contre les amendements, estimant que la résolution 77/238 ne doit pas bénéficier d’un statut spécial, même s’il s’agit du texte le plus récent.  Le Mexique cherche à légitimer le « fiasco » de l’adoption de la résolution 77/238 l’an dernier.  De même, avec la proposition L.32, le Mexique essaie d’induire en erreur les délégations en affirmant que ce texte comprend toute la palette de la problématique liée aux stupéfiants.  En fait, il réduit la portée du premier l’alinéa du préambule, a dénoncé la délégation. 

L’Égypte a dit appuyer la proposition L.31 au motif que la résolution 77/238 ne bénéficie pas de consensus.  Selon elle, le dépôt de cette proposition d’amendement prouve que certains États Membres cherchent à briser le consensus sur la réponse à apporter sur le problème mondial de la drogue.  La délégation a d’autre part rappelé que le libellé que suggère d’introduire la proposition d’amendement L.32 n’a jamais été présentée lors des consultations officieuses.  Selon elle, la définition des types de marchés devrait faire objet de discussions au sein de la Commission de stupéfiants.

La République tchèque a demandé au Secrétariat d’enregistrer son coparrainage de la L.14.

Mise aux voix des propositions d’amendement

Le projet d’amendement L.31 a été adopté par 75 voix pour, 27 voix contre et 36 abstentions.

Le projet d’amendement L.32 a été rejeté par 19 voix pour, 36 voix contre et 82 abstentions.

Explications de position sur la résolution L.14 « Des services durables, sûrs et universels d’approvisionnement en eau, d’assainissement, d’hygiène, de traitement des déchets et d’électricité dans les établissements de santé » et L.24 « Intensifier l’action aux niveaux national, régional et international face aux problèmes que posent les drogues de synthèse pour la santé publique et la sécurité dans le monde »

La Chine a estimé que la résolution L.24 pourrait être améliorée en matière de contrôle des abus des drogues et de message sur le traitement de ce fléau.  Selon la délégation, la communauté internationale doit se fonder sur le principe de responsabilité partagée, en commençant son action dans le contexte national avant d’assumer ses obligations à l’échelon international.  Il faut traiter les causes pour réduire la demande nationale au lieu de renvoyer la responsabilité ailleurs, a-t-elle ajouté.

Le Qatar, qui s’exprimait également au nom du Koweït, du Sultanat d’Oman, de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis et de Bahreïn, a salué adoption de la résolution L.24.  Face à ce grand problème sur le plan mondial, nous devons redoubler d’efforts avec l’ONU et ses agences, a souligné la délégation, avant de se dissocier de l’amendement adopté.

La Suisse s’est félicitée de l’inclusion d’éléments clefs liés à l’obligation de garantir la disponibilité des drogues de synthèse en tant que médicaments essentiels et d’améliorer la prévention et l’accessibilité des traitements fondés sur des données probantes pour les personnes dépendantes.  Elle a toutefois regretté que le texte final ne fasse pas référence à la résolution du Conseil des droits de l’homme 52/L.22 sur la « Contribution du Conseil concernant les incidences des politiques en matière de drogues sur les droits de l’homme », adoptée en avril dernier par consensus.

S’agissant de la L.14, le Royaume-Uni a estimé que le texte ne reconnaît pas suffisant la question de la résistance antimicrobiale et le rôle de WASH dans la lutte contre cette menace.  L’Australie s’est réjouie de l’adoption de la résolution L.24 mais a estimé qu’elle aurait pu être renforcée avec des termes plus fermes sur les droits humains, la santé publique et d’autres points, regrettant une « occasion manquée ». 

La République islamique d’Iran a regretté que ses propositions n’aient pas été prises en compte, notamment sa demande d’inclusion de l’assistance technique aux pays en développement pour les aider à détecter et analyser les drogues de synthèse.  Quant à la résolution L.14, elle a indiqué que sa mise en œuvre dépendra des lois et priorités nationales ainsi que des valeurs sociales, culturelles et religieuses du pays.

Cuba s’est opposée aux termes non consensuels, justifiant ainsi son abstention sur les deux propositions d’amendement, la Fédération de Russie s’est cependant dissociée du consensus sur l’alinéa 8 du préambule de la résolution L.24, rappelant que la résolution 77/238 ne fait pas consensus et ne peut servir de base à la coopération internationale dans la lutte contre les drogues de synthèse.  L’Iraq a appuyé la résolution L.24, tout en regrettant qu’un amendement ait été apporté à son préambule.

La Colombie a déclaré avoir appuyé la résolution L.24 et les propositions d’amendement du Mexique.  Selon elle, la lutte contre les drogues de synthèse ne peut continuer sans des modifications importantes liées aux droits humains et à la protection de l’environnement. Le moment est venu pour la communauté internationale de laisser de côté son attitude punitive car il faut réduire à la fois la demande et l’offre de drogues, a-t-elle ajouté.

Il ne faut à aucun prix compromettre les politiques de lutte contre la fabrication illicite et le trafic de drogues de synthèse si nous voulons nous attaquer sérieusement à la menace de la toxicomanie, a souligné Sri Lanka, selon lequel les systèmes juridiques doivent être encouragés à répondre de la manière la plus stricte au problème de la toxicomanie et à ceux qui se livrent au commerce et à la commercialisation illicites de ces drogues.  Après avoir souligné que les lois contre la toxicomanie doivent être claires, équitables et prévisibles et tenir dûment compte de l’état de droit, la délégation a précisé avoir voté en faveur de cette résolution et de l’amendement à l’alinéa 1 et s’être abstenue de voter sur l’amendement à l’alinéa 8.

Après le Bélarus, qui s’est dissocié de l’alinéa 8 du préambule, l’Égypte a souligné que le consensus doit constituer la base de l’action collective dans la lutte contre les stupéfiants.  C’est pour cela qu’après avoir voté contre les deux amendements, nous avons décidé de nous joindre au consensus sur la résolution adoptée, a indiqué la délégation.  Le Nicaragua s’est lui aussi associé au consensus sur la L.24 tout en estimant que l’alinéa 8 du préambule ne contribue pas au consensus sur cette question importante.

Singapour s’est également dissociée de l’alinéa 8 du préambule qui, selon elle, repositionne le texte en le reliant à la résolution 77/238, la première sur cette question à n’avoir pas bénéficié d’un consensus international.

Le Canada a regretté que la mention à cette résolution ait posé problème, jugeant cette référence appropriée.  La délégation a ajouté qu’elle aurait aimé davantage d’ambition sur la question des inégalités sociales et économiques.

L’Indonésie s’est déclarée déçue de l’amendement adopté, qui détourne le texte de l’esprit du consensus.  Le Mexique s’est associé au consensus, tout en regrettant que certaines approches du problème mondial des drogues n’aient pas été incluses de manière explicite, notamment les efforts pour réduire la mortalité liée aux abus.  Il a aussi déploré le manque d’une approche claire vis-à-vis des droits humains, saluant en revanche l’adoption de l’amendement concernant l’alinéa 8 du préambule du texte.

Au nom de l’Union européenne, l’Espagne a regretté les lacunes en matière de droits humains du texte.  La délégation a souligné l’importance des mesures de réduction des risques et de l’intégration d’une perspective de genre et d’âge, en gardant à l’esprit que les femmes sont touchées de manière disproportionnée par les drogues de synthèse en particulier, et qu’elles sont confrontées à des obstacles importants dans l’accès au traitement.

La République arabe syrienne a regretté qu’une délégation ait forcé la main des États Membres pour un vote qui n’était pas nécessaire.  Elle a répété que la résolution 77/238 ne constitue pas une base consensuelle sur le problème des stupéfiants, et s’est donc dissociée de l’alinéa 8 du préambule de la résolution L.24 tel qu’amendé.  Le Saint-Siège s’est félicité du consensus sur la résolution L.24 tout en regrettant qu’il y soit fait mention d’une résolution non consensuelle.  La délégation a par ailleurs estimé que le terme genre renvoie à la différence biologique entre l’homme et la femme.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Inquiétudes au Conseil de sécurité sur l’échec des efforts diplomatiques en vue de revitaliser le Plan d'action global commun sur le nucléaire iranien

9511e séance – après-midi
CS/15536

Inquiétudes au Conseil de sécurité sur l’échec des efforts diplomatiques en vue de revitaliser le Plan d'action global commun sur le nucléaire iranien

Présentant cet après-midi le rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a regretté que les appels lancés aux parties pour respecter le Plan d’action global commun (PAGC) et la résolution 2231 (2015)soient restés vains.  Dans un contexte régional rendu instable par le conflit israélo-palestinien, de nombreuses délégations ont souligné que le PAGC demeurait un pilier du régime de non-prolifération internationale et de la paix au Moyen-Orient.

La Secrétaire générale adjointe Rosemary Dicarloa également regretté que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ne soit toujours pas en mesure de vérifier le stock d’uranium enrichi en Iran, alors que l’Agence estime que ce pays en conserveune quantité plus de 20 fois supérieure à la limite autorisée aux termes du PAGC.  Une préoccupation partagée par l’Union européenne (UE), en sa qualité de Coordonnatrice de la Commission conjointe du PAGC, qui a rappelé que l’AIEA concluait, dans son dernier rapport, que le programme nucléaire iranien s’écartait gravement de ses engagements en vertu du Plan.

Mme Dicarlo a rappelé que le Secrétaire général considère toujours le PAGC comme la meilleure solution pour s’assurer que le programme nucléaire iranien reste exclusivement pacifique, ajoutant qu’il avait appelé l’Iran à revenir sur les mesures non conformes à ses engagements dans le cadre du PAGC.  De son côté, l’UE a regretté qu’en dépit du texte de compromis qu’elle avait proposé en août 2022, il n’ait pas été possible de ramener les États-Unis à la table des négociations.

Ces derniers ont dénoncé « l’audace » de l’Iran qui continue d’élargir ses programmes nucléaires tout en entravant le travail de vérification et de suivi de l’AIEA.  « Téhéran doit adopter des mesures pour renforcer la confiance de la communauté internationale et entraîner une désescalade plutôt que de s’aventurer de plus en plus loin sur la route de la provocation avec les risques que cela implique », ont-ils martelé.

De son côté, l’Iran s’est dit prêt à reprendre la pleine mise en œuvre de ses engagements dans le cadre du PAGC une fois qu’il sera relancé et que les États-Unis et toutes les autres parties prenantes accepteront d’honorer « en temps opportun, efficacement, pleinement et fidèlement » toutes leurs obligations, ce qui nécessite une véritable volonté politique de leur part.

Rappelant que M. Guterres avait appelé les États-Unis à lever ou à renoncer aux sanctions prévues par le Plan, Mme Dicarlo a ajouté qu’il les invitait aussi à accorder des dérogations concernant le commerce du pétrole avec l’Iran. L’UE a reconnu les dommages économiques très sévères imposés à l’Iran suite à la réimposition des sanctions unilatérales des États-Unis après leur retrait du PAGC.  Elle a rappelé que, de son côté, elle avait levé toutes ses sanctions économiques et financières depuis la mise en œuvre du PAGC et n’était pas revenue sur sa décision.

La Fédération de Russie a accusé l’UE de partialité, lui reprochant de rendre l’Iran responsable de la situation actuelle et de passer sous silence les mesures destructrices adoptées par les États-Unis, par les parties européennes au PAGC et par Bruxelles, souvent en violation des engagements et obligations prévus par le Plan qui consistent notamment à lever les sanctions unilatérales imposées à l’Iran.

Abordant l’utilisation de missiles et de drones par les houthistes, potentiellement fournis par l’Iran en violation de la résolution 2231, Mme Dicarlo s’est appuyée sur des comparaisons des débris avec ceux retrouvés lors d’autres attaques du même type.  Elle a également mentionné les informations transmises par Israël en octobre et novembre derniers, suite à des attaques houthistes contre son territoire, désignant l’Iran comme fournisseur des missiles et des drones utilisés, accusation que ce pays qualifie de « totalement infondées ».  Enfin, elle a fait état de cas de transfert présumés de drones vers la Russie, signalés par l’Ukraine et les États-Unis, en violation du paragraphe 4 de l’annexe  B.  L’Iran et la Russie ont rejeté ces allégations « totalement fabriquées » selon eux.

La facilitatrice chargée par le Conseil de sécurité de promouvoir l’application de la résolution 2231a rappelé quele 18 octobre 2023, les restrictions spécifiques découlant de l’annexe B, relatives aux missiles balistiques et au gel des avoirs,avaient atteint leur date d’expiration et que 23 personnes et 61 entités avaient été radiées de la « Liste 2231 », du site Internet du Conseil de sécurité et de sa Liste récapitulative.

À l’instar de plusieurs délégations, la Chine a appelé les parties concernées à mettre pleinement en œuvre le PAGC, « seule manière de régler la question nucléaire iranienne », les invitant également à reprendre le dialogue aussi rapidement que possible. Estimant que les États-Unis sont responsables de la crise nucléaire iranienne, la Chineles a appelés à s’acquitter de leurs engagements en vertu du PAGC et à lever les sanctions unilatérales imposées à l’Iran et à des tiers.

A contrario, les délégations de pays occidentaux comme la France ont souligné la responsabilité de l’Iran dans des violations du PAGC, qui se sont aggravées au cours des six derniers mois, « comme en témoignent les derniers rapports de l’AIEA », a-t-elle affirmé, ajoutant qu’il continue d’installer de nouvelles centrifugeuses avancées qui accroissent sa capacité d’enrichissement de l’uranium.  De son côté, le Royaume-Uni a affirmé que l’Iran transférait des missiles balistiques à des groupes armés en Iraq, au Yémen et en Syrie, et des drones à la Russie en violation de la résolution 2231.

NON-PROLIFÉRATION (S/2023/963)

Déclarations

Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a regretté que les appels lancés aux parties pour qu’elles renouent le dialogue et s’engagent à revenir à la mise en œuvre du Plan d’action global commun (PAGC) et de la résolution 2231 (2015), soient restés vains.  Elle a rappelé que le Secrétaire général considérait toujours le PAGC comme la meilleure solution pour s’assurer que le programme nucléaire iranien reste exclusivement pacifique et qu’il avait appelé l’Iran à revenir sur les mesures non conformes à ses engagements dans le cadre du PAGC.  Elle a ajouté qu’il avait appelé les États-Unis à lever les sanctions prévues par le Plan et à accorder des dérogations concernant le commerce du pétrole avec l’Iran. 

Regrettant que la mission de surveillance de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) continue d’être « sérieusement affectée » par la non-application par l’Iran de ses engagements dans le cadre du PAGC, comme indiqué dans son rapport du 15 novembre 2023, elle a indiqué que l’AIEA n’était toujours pas en mesure de vérifier le stock d’uranium enrichi dans le pays.  L’Agence, a-t-elle ajouté, estime que l’Iran conserve un stock total plus de 20 fois supérieur à la quantité autorisée aux termes du PAGC, comprenant des quantités accrues d’uranium enrichi à 20% et à 60%, ce qui constitue une « préoccupation très sérieuse ».

La Secrétaire générale adjointe a rappelé que les mesures restrictives relatives aux activités et aux transferts de missiles, ainsi que le gel des avoirs, avaient expiré le lendemain du 18 octobre 2023, conformément à la résolution 2231, et que le rapport présenté s’arrêtait donc à cette date. Concernant les dispositions relatives au nucléaire, elle a indiqué qu’aucune nouvelle proposition n’avait été soumise à la filière des approvisionnements au cours des six derniers mois.  Elle a également indiqué que les États-Unis avaient renouvelé pour une nouvelle période de 180 jours les dérogations concernant certains projets de non-prolifération nucléaire prévus dans le Plan et les dispositions nucléaires de l’annexe B de la résolution 2231. 

Abordant les dispositions relatives aux missiles balistiques, elle a précisé que la France, l’Allemagne, l’Iran, Israël, la Fédération de Russie et le Royaume-Uni avaient fourni des informations au Secrétaire général et au Conseil de sécurité concernant un vol d’essai d’un véhicule de lancement spatial effectué par l’Iran en septembre de cette année, avec des opinions divergentes sur la question de savoir si ce type de lancement était compatible avec la résolution 2231.

Évoquant ensuite le paragraphe 4 de l’annexe B, portant sur les armes à sous-munitions, elle a indiqué qu’à l’invitation du Gouvernement du Yémen, le Secrétariat avait examiné les débris d’un missile de croisière utilisé lors d’une attaque des houthistes contre le terminal pétrolier d’Al-Dhaaba en novembre 2022.  S’appuyant sur les nombreuses similitudes entre ces débris et ceux précédemment retrouvés lors d’attaques antérieures, ainsi qu’avec les composants de missiles de croisière saisis par les États-Unis et le Royaume-Uni, le Secrétariat a estimé que ce missile était d’origine iranienne et pourrait avoir été transféré en violation de la résolution 2231.  Des composants de missiles balistiques saisis par la Royal Navy britannique en février 2023 et présumés avoir été transférés d’une manière incompatible avec la résolution 2231 ont également révélé des caractéristiques similaires à celles du matériel iranien. 

Des cas de transfert présumés de drones vers la Russie, évoqués par l’Ukraine et les États-Unis, en violation du paragraphe 4 de l’annexe B, ont aussi été abordés, l’Iran et la Russie rejetant des allégations « totalement fabriquées ».  Elle a également indiqué qu’Israël avait présenté des lettres concernant de multiples lancements de missiles balistiques et de croisière, ainsi que de drones, par les houthistes en octobre et novembre derniers, accusant l’Iran de leur avoir fourni ces armes en violation de la résolution 2231.  L’Iran a rejeté des allégations « totalement infondées », a-t-elle précisé. 

M. OLOF SKOOG, Chef de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies, s’exprimant au nom du Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, M. Josep Borrell, en sa qualité de Coordonnateur de la Commission conjointe du Plan d’action global commun (PAGC), a indiqué que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a documenté que le programme nucléaire iranien s’écarte gravement de ses engagements dans le cadre du PAGC, notamment en ce qui concerne l’expansion de l’infrastructure d’enrichissement nucléaire et l’augmentation continue des stocks d’uranium hautement enrichi, jusqu’à 60%.  Cela est particulièrement préoccupant, a-t-il déclaré, déplorant en outre la détérioration des relations entre la République islamique d’Iran et l’AIEA, qui a des conséquences négatives sur la capacité de l’Agence à s’acquitter de ses fonctions de surveillance. 

M. Skoog a reconnu les conséquences économiques négatives très graves subies par l’Iran, à la suite du retrait des États-Unis du PAGC et de la réimposition des sanctions unilatérales américaines précédemment levées.  De son côté, a-t-il rappelé, l’Union européenne (UE) a levé toutes ses sanctions économiques et financières liées au nucléaire depuis le jour de la mise en œuvre du PAGC, et cela reste le cas.  De même, l’UE continue de soutenir la mise en œuvre pleine et effective du PAGC et de la résolution 2231 (2015).  Or, à notre connaissance, a souligné M. Skoog, l’Iran n’a pas cherché à ratifier le protocole additionnel à ses accords de garanties généralisées comme il était censé le faire. 

Alors que le monde est confronté à une série de crises graves, il est important de garder à l’esprit que la situation actuelle au Moyen-Orient rend encore plus urgente la recherche de moyens de stabiliser la région, a fait valoir le délégué. À cet égard, le PAGC devrait être un élément essentiel.  Dans cet esprit, a-t-il dit, nous appelons toutes les parties au PAGC et les États-Unis à poursuivre le dialogue afin de se pencher, sans délai, sur le programme nucléaire iranien.  « La diplomatie nucléaire doit être restaurée », a-t-il ajouté, se disant d’accord avec l’évaluation du Secrétaire général dans son rapport selon laquelle le PAGC représente toujours la meilleure option disponible pour garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien. 

En conclusion, M. Skoog a exhorté l’Iran à reprendre pleinement sa coopération avec l’AIEA et à s’abstenir de toute nouvelle mesure s’écartant de ses engagements dans le cadre du PAGC.  Il a encore regretté qu’en dépit du texte proposé en août 2022 par M. Borell, il n’ait pas été possible à ce jour de ramener les États-Unis à la table des négociations sur le PAGC.  Ce texte de compromis est toujours sur la table comme point de départ potentiel pour tout effort renouvelé visant à remettre le PAGC sur les rails, a-t-il rappelé, ajoutant que M. Borell poursuit ses efforts pour faciliter le dialogue entre tous les participants au PAGC et avec les États-Unis.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte), qui s’exprimait en sa capacité de facilitatrice chargée par le Conseil de sécurité de promouvoir l’application de la résolution 2231 (2015), dont c’est le deuxième rapport, a rappelé que celui-ci avait été approuvé par les membres du Conseil le 14 décembre 2023. Le rapport fournit un compte rendu factuel des activités qui ont eu lieu dans le cadre du « format 2231 » du Conseil de sécurité, couvrant la période du 1er juillet au 14 décembre 2023.  La représentante a détaillé les six chapitres du rapport: résumé des activités; suivi de la mise en œuvre de la résolution; communications pertinentes; aspects clefs du fonctionnement de la filière d’approvisionnement; transparence et sensibilisation; et enfin les directives.

Mme Frazier a mentionné la tenue, le 14 décembre, d’une réunion du Conseil dans le « format 2231 ».  De plus, au cours de la période à l’examen, 14 notes au total ont été distribuées sous ce format, a-t-elle informé, soulignant que 4 communications officielles ont été envoyées aux États Membres et à l’équipe de coordination du Groupe de travail sur l’approvisionnement de la Commission conjointe, tandis que 6 communications des États Membres et du Coordonnateur ont été reçues.  Parmi les communications diffusées figuraient les deux rapports trimestriels réguliers de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), datant de septembre et novembre 2023, dont les aspects clefs sont mentionnées dans son rapport.  Mme Frazier a rappelé que l’action de l’AIEA apporte à la communauté internationale des garanties selon lesquelles le programme nucléaire de la République islamique d’Iran a des visées et des fins exclusivement pacifiques. 

Elle a signalé qu’aucune nouvelle proposition n’a été soumise au Conseil de sécurité via la filière d’approvisionnement au cours de la période considérée.  Cette filière représente, à ses yeux, un mécanisme clef de transparence et de confiance dans le cadre du Plan d’action global commun; elle reste opérationnelle et le Groupe de travail sur l’approvisionnement est disposé à examiner toute proposition, a-t-elle assuré. 

Enfin, elle a noté qu’à la date du 18 octobre 2023, les restrictions spécifiques découlant de l’annexe B, à savoir les dispositions relatives aux missiles balistiques (paragraphes 3 et 4) et les restrictions relatives au gel des avoirs (paragraphes 6 c et d), avaient été en vigueur pendant huit ans à compter de la date d’adoption du PAGC, ce qui a été dûment reflété dans son rapport.  À cet égard, le Secrétariat a informé le « format 2231 » des mesures administratives spécifiques qu’il a prises le 19 octobre 2023, notamment la radiation de 23 personnes et 61 entités de la « Liste 2231 », ainsi que du site Web du Conseil de sécurité et de la Liste récapitulative du Conseil de sécurité. 

Pour finir, Mme Frazier a repris à son compte les propos de Mme DiCarlo, selon lesquels le Plan d’action global commun, tel qu’approuvé par ce Conseil par le biais de la résolution 2231 (2015), est la meilleure option disponible pour garantir que le programme nucléaire iranien reste exclusivement pacifique.

M. JOHN KELLEY (États-Unis) a dénoncé « l’audace » de l’Iran qui continue d’élargir ses programmes nucléaires et entrave le travail de vérification et de suivi de l’AIEA.  « Téhéran doit adopter des mesures pour renforcer la confiance de la communauté internationale et entraîner une désescalade plutôt que de s’aventurer de plus en plus loin sur la route de la provocation avec les risques que cela implique. »  Les États-Unis sont pleinement déterminés à répondre aux préoccupations de la communauté internationale concernant le programme nucléaire iranien par la voie de la diplomatie, a assuré le délégué.  « Les États-Unis sont prêts à utiliser tous les moyens nécessaires pour empêcher que l’Iran se dote de l’arme nucléaire », a-t-il insisté. Le 18 octobre, a rappelé le délégué, les États-Unis ont de nouveau montré leur détermination à utiliser tous les moyens à leur disposition pour contrer le développement par l’Iran de missiles balistiques, de drones et autres armes dangereuses.

La communauté internationale doit trouver une solution durable au conflit au Yémen, a continué le délégué, regrettant que le Conseil oublie ses obligations en la matière.  Il a déploré que le Secrétariat de l’ONU n’ait pas examiné des preuves de transfert de drones depuis l’Iran vers la Russie en violation de la résolution 2231 (2015). « Le développement de drones par l’Iran et leur prolifération représentent une menace de plus en plus dangereuse », a-t-il averti, notant que ceux-ci ont été utilisés en Ukraine contre des infrastructures et pour tuer des civils dans une guerre non provoquée.  Le délégué a exhorté les membres du Conseil à condamner ce comportement qui sème la déstabilisation.  Le 25 novembre 2023, Moscou a lancé l’attaque la plus large jamais orchestrée avec des drones iraniens.  En échange, a fustigé le délégué, la Russie propose à l’Iran une coopération de défense sans précédent.  Cette année, a-t-il rapporté, l’Iran a annoncé avoir mis la dernière main à un accord pour acheter des avions de combat à la Russie y compris des hélicoptères d’attaque, des radars et autres afin de développer des satellites et de poursuivre d’autres programmes spatiaux.  « Ce n’est pas acceptable. »

M. GENG SHUANG (Chine) a vu le PAGC comme un pilier fondamental du régime de non-prolifération international, qui contribue à la paix et à la sécurité au Moyen-Orient, notamment dans le contexte actuel de tensions israélo-palestiniennes.  Appelant les parties concernées à mettre pleinement en œuvre ce plan, « seule manière de régler la question nucléaire iranienne », il les a aussi invitées à reprendre le dialogue aussi rapidement que possible.  Il a appelé l’AIEA à respecter les principes d’impartialité, d’objectivité et de neutralité, et à coopérer avec l’Iran concernant les questions de garanties.  Estimant que les États-Unis sont responsables de la crise nucléaire iranienne, il a appelé ce pays à s’acquitter de ses engagements en vertu du PAGC et à lever les sanctions unilatérales imposées à l’Iran et à des tiers.  Le délégué a aussi relevé l’inquiétude de la communauté internationale quant aux récentes menaces nucléaires émanant d’autorités israéliennes, exhortant « certains pays » à cesser leur politique de deux poids, deux mesures en matière de non-prolifération, à soutenir la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, et à encourager Israël à adhérer au Traité sur la non-prolifération en tant qu’État non doté. Il a également encouragé Israël à placer toutes ses installations sous le système de garanties de l’AIEA. 

Constatant que les mesures restrictives du Conseil de sécurité concernant le programme de missiles iranien avaient été levées, le délégué a appelé à cesser d’établir un lien entre les négociations sur le nucléaire iranien et d’autres questions ou à utiliser cette question à des fins géopolitiques.  Dans un contexte régional tendu, il a appelé toutes les parties à coopérer en vue d’une paix pérenne, notamment en instaurant une architecture de sécurité.  Il a appelé certains pays extérieurs à la région à mettre leurs dessins géopolitiques de côté et à cesser de promouvoir la confrontation au Moyen-Orient. 

M.  ARIAN SPASSE (Albanie) a formulé une série d’accusations contre l’Iran qui, selon lui, ne respecte pas ses obligations internationales au regard du régime de non-prolifération et de la résolution 2231 (2015).  Non seulement ce pays continue d’enrichir son uranium, mais il détient le plus grand stock de missiles stratégique au Moyen-Orient, ce qui représente une menace pour les pays de la région.  De plus, l’Iran transfère des armes aux milices houthistes au Yémen, mais aussi à la Fédération de Russie, sans l’autorisation du Conseil de sécurité.  Tout cela montre que ce pays n’est pas disposé à respecter ses obligations. « Tant que l’Iran n’aura pas opté pour la diplomatie, la communauté internationale devra rester saisie de la question du programme balistique de l’Iran », a tranché le délégué.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a d’entrée accusé le Chef de la délégation de l’Union européenne de partialité.  Il lui a reproché d’accuser l’Iran de la situation actuelle et de passer sous silence les mesures destructrices adoptées par les États-Unis, par les parties européennes au PAGC et par Bruxelles, souvent en violation des engagements et obligations prévus par le Plan qui consistent notamment à lever les sanctions unilatérales imposées à l’Iran.  Plus le temps passe, plus l’on observe que certains États qui sont parties au PAGC, ainsi qu’un État qui a quitté cet accord, tentent à tout prix de réduire à néant cette victoire diplomatique commune, a-t-il déploré. 

Dans ce contexte, selon le représentant, la facilitatrice a préféré faire fi des raisons pour lesquelles la pleine mise en œuvre du PAGC a cessé.  Pour lui, ces raisons sont la sortie des États-Unis de l’accord en 2018 et l’imposition de sanctions unilatérales illégales à l’égard de l’Iran.  Plus de cinq ans ont passé, l’Administration américaine a changé, et pourtant, aucune mesure n’a pour l’heure été prise par Washington pour remédier à la situation actuelle.  Il a pointé du doigt « les promesses non tenues des Américains ».

Le délégué s’est impatienté de voir que les rapports du Secrétaire général passent sous silence ce fait et qu’ils s’en tiennent à des « appels modestes » lancés à Washington pour demander la levée des sanctions.  De même, a-t-il ajouté, les rapports passent sous silence les actes du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la France et de l’Union européenne.  Il a reproché à ces pays de suivre le mauvais exemple de « leur ami outre atlantique ».  Concernant le Secrétaire général, il a dit préférer ne pas penser qu’il exprime personnellement sa solidarité avec ces actes.

Pour que l’Iran reprenne la mise en œuvre des obligations volontaires visant à limiter son programme nucléaire, il est impératif que les parties occidentales au PAGC et les États-Unis fassent preuve de compromis, étant donné que ce sont leurs actes, a-t-il justifié, qui ont entraîné la situation actuelle.  C’est cette approche qu’a proposée la Fédération de Russie, a-t-il soutenu.

Une fois encore, il s’agit pour lui d’un clair mépris du droit international et de l’autorité du Conseil de sécurité.  De plus, à son avis, aucune référence à l’article 36 du PAGC ou au mécanisme de règlement des différends lancé en 2020 à Vienne n’est pertinente.  De fait, le représentant a considéré que ce mécanisme n’est pas fonctionnel en raison de nombreuses lacunes en matière de procédures.

Enfin, il s’est dit préoccupé par les tentatives des Occidentaux de diffuser certains récits, comme les accusations envers l’Iran aux motifs que le pays livrerait des drones à la Russie pour leur utilisation en Ukraine.  Il a insisté pour que le Secrétariat mène une enquête pour violation de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies (article qui prévoit notamment que le Secrétaire général de l’ONU n’acceptera d’instructions d’aucun gouvernement).  Il s’est dit déçu que le Secrétaire général ait mentionné une présentation faite par les États-Unis à huis clos sur certains débris qui, soi-disant, appartiendraient à des drones ayant frappé l’Ukraine. 

À cet égard, le représentant a insisté sur le fait que le « format 2231 » n’a ni les compétences ni l’expertise nécessaires pour mener des vérifications ou inspections ou formuler des accusations.  Aucun argument convaincant confirmant des violations de l’annexe B de la résolution n’a été présenté, a tranché le délégué, n’y voyant que « des spéculations, des soupçons ou des déductions ». Aucune livraison violant la résolution 2231 n’a eu lieu, a-t-il martelé.

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) a dit être préoccupé par le fait que, depuis plus de quatre ans, l’Iran viole ses engagements au titre du PAGC, des violations qui se sont aggravées au cours des six derniers mois comme en témoignent les derniers rapports du Directeur général de l’AIEA.  Qui plus est, l’Iran continue d’installer de nouvelles centrifugeuses avancées qui accroissent sa capacité d’enrichissement de l’uranium, a-t-il affirmé.  Il a jugé essentiel que l’Iran coopère avec l’AIEA et lui permette d’exercer son mandat, a encouragé le représentant signalant qu’au cours des six derniers mois, l’Iran a également poursuivi ses activités liées aux missiles balistiques. En outre, l’Iran a transféré des drones armés alors que ces transferts étaient interdits par la résolution 2231 (2015), a-t-il encore listé en affirmant que certains de ces drones ont été transférés vers la Russie et utilisés pour frapper des infrastructures en Ukraine.  Toute nouvelle livraison de missiles balistiques à courte portée ne pourrait que conduire à l’isolement de l’Iran sur la scène internationale, a averti le délégué. 

La France, avec ses partenaires du E3, a recherché de bonne foi une solution dans le cadre du PAGC pour remédier au non-respect par l’Iran de ses engagements, a fait valoir le représentant.  Il a rappelé notamment que la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni avaient déclenché en janvier 2020 le mécanisme de règlement des différends prévu par l’accord. L’Iran n’a pas saisi ces occasions, a-t-il regretté en déplorant les violations persistantes par ce pays de ses engagements qui ne permettaient pas de lever les mesures restrictives devant arriver à expiration le 18 octobre dernier.  « Nous avons donc décidé, avec nos partenaires du E3 et en coordination avec d’autres partenaires de maintenir ces mesures comme nous permettait de le faire l’article 36 du Plan d’action global commun. »  Le délégué a précisé être prêt à revenir sur cette décision dès lors que l’Iran recommencerait à mettre en œuvre ses engagements au titre du PAGC.  L’escalade des programmes nucléaire et balistique iraniens est d’une extrême gravité et accroît les risques pour la stabilité et la sécurité au Moyen-Orient et dans le monde, a-t-il justifié.  La France, a insisté le délégué, demeure déterminée à ce que l’Iran n’acquière pas l’arme nucléaire et est attachée à trouver une solution diplomatique. 

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a pointé la défaillance dans la mise en œuvre du Plan d’action global commun (PAGC), jugeant la situation « plus périlleuse que jamais ».  La Suisse a exprimé à plusieurs reprises sa vive préoccupation tant au sujet du retrait des États-Unis du PAGC, que des différentes mesures prises par l’Iran, a rappelé la représentante.  Malgré une volonté affichée par la plupart des parties de négocier un retour rapide au Plan, aucune avancée n’a été enregistrée, alors que celui-ci reste un élément important du régime international de non-prolifération nucléaire et de la sécurité internationale.  Par conséquent, une mise en œuvre rapide et complète par toutes les parties de leurs obligations est nécessaire, a martelé la représentante. Afin de sauver le PAGC, elle a appelé l’Iran à respecter pleinement les engagements pris au titre du Plan et du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  S’inquiétant ensuite des indications étayées de transferts, depuis l’Iran, de missiles balistiques et de drones vers des pays tiers tels que le Yémen et la Russie, elle a rappelé que jusqu’au 18 octobre, tout transfert d’articles, matériaux, équipements, biens et technologies contenus dans la liste du régime de contrôle de la technologie des missiles, constituait une violation de la résolution 2231 2015).  Enfin, la représentante a estimé qu’il fallait engager des efforts diplomatiques urgents afin d’éviter le délitement complet du PAGC.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a affirmé que son pays est pleinement « déterminé à utiliser tous les outils diplomatiques pour empêcher l’Iran de développer une arme nucléaire », dans le contexte où l’AIEA rapporte que les stocks d’uranium enrichi de l’Iran sont 22 fois supérieurs aux limites du PAGC, sans aucune justification civile crédible.  Il a aussi déclaré que le programme de missiles iranien reste une préoccupation fondamentale pour le régime de non-prolifération nucléaire, tant il est démontré que ce pays fournit des missiles balistiques à des groupes armés en Iraq, au Yémen et en Syrie.  Ces groupes ciblent les navires de la mer Rouge et le personnel de la coalition dans la région.  L’Iran, a relevé le délégué, livre également des drones à la Russie, qui les utilise pour attaquer des civils en Ukraine.  Tous ces transferts constituent une violation de la résolution 2231 (2015), a-t-il rappelé.  Si les restrictions imposées par ladite résolution sur les activités iraniennes en matière de missiles balistiques ont pu être levées, le Conseil doit néanmoins continuer à demander des comptes à l’Iran sur ses activités de prolifération. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a salué le travail de l’AIEA, dont les activités de vérification et de surveillance restent indispensables.  À cet égard, elle a critiqué la décision de l’Iran de retirer tous les équipements de surveillance et de contrôle liés au PAGC, entravant ainsi l’action de l’Agence.  En outre, l’AIEA estime qu’en octobre 2023, le stock total d’uranium enrichi du pays dépassait largement les limites fixées par l’accord, s’est alarmée la représentante.  Jugeant cette situation préoccupante, elle a encouragé une coopération et un partage d’informations plus étroits entre l’Iran et l’AIEA.  Elle a aussi pris note des préoccupations concernant les violations présumées des dispositions contenues dans l’annexe B de la résolution 2231. 

Relevant que l’Iran a exprimé sa position en rejetant ces allégations, la représentante a encouragé, pour finir, toutes les parties concernées à résoudre ces problèmes par le dialogue et la diplomatie.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a regretté les rapports décourageants de l’AIEA et l’absence d’efforts diplomatiques malgré les appels aux parties concernées pour qu’elles renouent le dialogue en vue de la mise en œuvre du PAGC. La représentante a appelé l’Iran et les États-Unis à rétablir le PAGC qui constitue la meilleure approche pour faire face au programme nucléaire iranien.  L’Iran devrait respecter tous ses engagements et revenir sur les actions qui sont contraires à ses obligations, a-t-elle dit.  Pour leur part, les États-Unis devraient lever leurs sanctions.  La représentante a souligné l’importance de la décision du groupe E3 concernant l’allégement des sanctions contre l’Iran.  Elle a suggéré d’élaborer une feuille de route pour que les principales parties prenantes puissent revenir au plein respect du PAGC et de la résolution 2231 (2015).  À cet égard, elle a réaffirmé l’appui de sa délégation aux efforts de l’AIEA pour surveiller et vérifier le programme nucléaire iranien.

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon), estimant qu’il n’y avait pas d’alternative au PAGC, a insisté sur la nécessité pour les parties de faire des concessions: l’Iran doit revenir sur les mesures prises depuis 2019 et les États-Unis doivent lever ou renoncer aux sanctions contre l’Iran, conformément aux engagements au titre de l’annexe II du Plan.  La déléguée a également insisté sur l’importance de permettre à l’AIEA d’assurer ses missions de vérification et de surveillance, ce qui implique le rétablissement des équipements prévus par l’accord, avec la pleine coopération de l’Iran.  Prenant note de la volonté exprimée par ce pays de remplir ses obligations en vertu du PAGC, elle a engagé l’ensemble des parties à reprendre le dialogue sans conditions préalables.  Qualifiant le PAGC de composante importante pour la paix et la sécurité au Moyen-Orient et dans le monde, la déléguée a plaidé en faveur de l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région.  Elle a conclu son propos sur une note positive, soulignant que malgré leurs antagonismes, les parties restaient désireuses de voir le PAGC mis en œuvre.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a regretté le manque de progrès substantiel dans la mise en œuvre du PAGC, depuis la dernière réunion du Conseil sur ce sujet, le 6 juillet 2023.  Cette situation représente un défi supplémentaire pour la paix et la sécurité internationales, dans un contexte international déjà sensible et fragile, a-t-il regretté.  Le représentant a rappelé que le PAGC est le produit d’un long processus de négociation, visant à garantir le caractère pacifique du programme nucléaire iranien. De ce fait, il a appelé toutes les parties signataires à réaffirmer leur engagement envers son noble objectif et à garantir une mise en œuvre pleine et efficace du Plan par tous.  Il a souligné l’importance de nouvelles mesures de confiance, d’une utilisation efficace de chaque voie diplomatique, d’un dialogue et d’un engagement constructifs, ainsi que d’une approche susceptible de garantir des avantages coopératifs et mutuels, en plaçant l’ONU au centre de telles mesures.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a rappelé que depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité sur le sujet, il y a six mois, les négociations visant à relancer le Plan d’action global commun (PAGC) sont restées au point mort. Réitérant le soutien de son pays au PAGC, élément clef du régime international de non-prolifération et de la paix du Moyen-Orient, elle a appelé toutes les parties concernées à revenir rapidement à l’accord et à respecter pleinement leurs engagements.  Le Japon s’inquiète de l’extension des activités nucléaires de l’Iran, notamment l’augmentation continue des stocks d’uranium hautement enrichi au-delà des limites fixées dans le cadre du PAGC. Ainsi a-t-il déployé des efforts diplomatiques de haut niveau pour appeler l’Iran à prendre des mesures constructives, dont la mise en œuvre complète et inconditionnelle de la déclaration conjointe entre l’Iran et l’AIEA.

La déléguée a regretté les tensions élevées qui affectent le Moyen-Orient, notamment en raison du conflit à Gaza, craignant que celui-ci ne s’étende à l’ensemble de la région.  Elle a appelé l’Iran à s’abstenir de toute action déstabilisatrice, comme le transfert de missiles, de drones et d’autres technologies militaires connexes à des acteurs étatiques et non étatiques.  Son pays, a-t-elle affirmé, continuera à prendre les mesures appropriées, en coopération avec la communauté internationale, pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert illégaux d’articles liés aux missiles balistiques. Le Japon a une relation de longue date avec l’Iran et au cours des trois derniers mois, le Premier Ministre japonais a eu une réunion au sommet en personne et un entretien téléphonique avec le Président iranien, tandis que les deux pays ont récemment tenu un dialogue de haut niveau sur les questions de désarmement et de non-prolifération.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) s’est alarmé de la situation qui « nous éloigne encore plus des objectifs » de cette résolution, qui constitue une réalisation historique de ce Conseil.  Il s’est dit préoccupé par la mise en œuvre du Plan d’action global commun (PAGC) depuis 2018, année où les États-Unis ont décidé de se retirer de l’accord.  En outre, le représentant a regretté les actions iraniennes en réponse à cette décision qui ont progressivement sapé la lettre et l’esprit du Plan d’action.  Malgré les appels répétés au rétablissement de la confiance, tout semble indiquer que l’objectif est loin d’être atteint, s’est inquiété le délégué, déplorant les récentes déclarations publiques de responsables clefs qui indiquent qu’un tel scénario n’est « tout simplement pas envisageable ».  En l’absence d’alternative, cela suscite de grandes inquiétudes, a-t-il insisté en avertissant que la résolution 2231 (2015) se trouve à la croisée des chemins.  Accepter qu’il n’y ait aucune perspective de réponse diplomatique et multilatérale au dossier nucléaire iranien serait une approche fataliste et dangereuse, tant pour la région que pour les efforts mondiaux plus larges de non-prolifération, a-t-il averti.

Estimant que l’impasse dans laquelle se trouve le PAGC ne doit pas marquer la fin des efforts diplomatiques, M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a cependant affirmé qu’on ne peut faire fi des « mesures provocatrices » adoptées par l’Iran, ces quatre dernières années, notamment l’abandon de ses engagements en vertu du Plan et les obstacles aux activités de vérification et de surveillance de l’AIEA.  Il a appelé l’Iran à fournir tout le soutien nécessaire à l’Agence et à répondre à ses questions sur les garanties.  Se disant préoccupé par les conclusions du rapport du Secrétaire général qui indiquent que les houthistes continuent de recevoir des armes, comme des drones, il s’est inquiété des implications sur la sécurité régionale. Il a appelé la communauté internationale à prendre des mesures pour éviter le transfert d’armes à des acteurs non étatiques.  En conclusion, il a également appelé l’Iran à redoubler d’efforts pour renforcer la confiance dans son programme nucléaire qui doit rester exclusivement pacifique.

M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA LOPEZDOMÍNGUEZ (Équateur) a dit être préoccupé par les transferts de drones et d’autres armes en violation du PAGC. Le représentant a déploré les actions unilatérales qui ont freiné la mise en œuvre du Plan.  Il a appelé au dialogue et au rétablissement complet de ce mécanisme et encouragé toutes les parties à résoudre les questions en suspens. L’Équateur, a ajouté le délégué, soutient le travail de l’AIEA en matière de coopération, de vérification et de suivi qui est essentiel à l’existence même du PAGC.  Les obstructions aux efforts de vérification et de surveillance de l’AIEA empêchent d’avoir l’assurance de la nature pacifique du programme nucléaire de l’Iran.  Le représentant a donc appelé ce pays à s’acquitter pleinement de ses obligations en vertu de la résolution 2231 (2015).  L’Iran devra revenir à une coopération pleine et effective avec l’AIEA, qui est une condition préalable au rétablissement de la confiance entre tous les acteurs.  Il faut redoubler d’efforts pour faire prévaloir la diplomatie et rechercher des solutions négociées.

M. THOMAS PETER ZAHNEISEN (Allemagne) s’est dit convaincu que si le PAGC était pleinement mis en œuvre, il offrirait une voie claire pour rassurer la communauté internationale de la nature pacifique du programme nucléaire iranien et conduirait à une levée totale des sanctions.  Malheureusement, a déploré le représentant, huit ans plus tard, le Conseil se réunit une fois de plus pour traiter non seulement de l’intensification des activités nucléaires de l’Iran, mais également du développement de ses missiles et de la prolifération d’armes à laquelle il continue de se livrer, en violation flagrante avec l’esprit de la résolution 2231.  L’ampleur des violations du Plan est clairement soulignée dans le dernier rapport du Directeur général de l’AIEA, a dit le représentant qui a illustré ses propos, en citant une donnée frappante à savoir que l’Iran détient désormais un stock d’uranium enrichi qui dépasse de plus de 22 fois la limite convenue dans le PAGC.

Dès lors, a-t-il soutenu, les actes de l’Iran soulèvent de sérieuses questions et préoccupations et ils ont des implications directes sur la paix et la sécurité internationales.  À cet égard, le représentant a expliqué que si une grande quantité d’uranium hautement enrichi était traitée, elle suffirait pour fabriquer trois armes nucléaires.  Si, comme le prétend l’Iran, son programme nucléaire est effectivement totalement pacifique, pourquoi fait-il obstacle à la coopération avec l’AIEA?  S’il affirme agir de bonne foi, pourquoi transfère-t-il des centaines de drones à la Russie, soutenant sciemment la guerre d’agression contre l’Ukraine?  Pourquoi continue-t-il à violer une fois de plus la résolution 2231?  S’est interrogé le représentant.  Il a voulu, une nouvelle fois, réitérer la position de son pays: malgré les violations persistantes de l’Iran et la méfiance qu’elles suscitent, l’Allemagne restera pleinement engagée dans la recherche d’une solution diplomatique au dossier nucléaire iranien.

M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique d’Iran) a fait savoir que son pays travaille activement à la renaissance du PAGC, menant des discussions substantielles avec le groupe E3/UE, notamment lors de la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale.  Il a néanmoins critiqué le manque d’efforts dudit groupe qui, avec les États-Unis, fait preuve d’un manque de sincérité et du non-respect de leurs obligations en vertu du PAGC et de la résolution 2231, appuyés par une campagne de désinformation.

Le délégué a rappelé que l’Iran n’a pris des mesures de rétorsion qu’un an après le retrait des États-Unis du PAGC et l’incapacité du groupe E3/UE de convaincre ces derniers de revenir à l’accord.  Ces mesures, a-t-il expliqué, ne visaient qu’à rétablir le fragile équilibre des engagements.  Elles sont par ailleurs réversibles et seront levées dès que les sanctions occidentales le seront également.  Le représentant a ainsi mis en évidence la responsabilité des États-Unis et du groupe E3/UE dans l’impasse actuelle du PAGC, compte tenu de leur manque de volonté et de leurs intérêts politiques.  Il a également dénoncé la tentative des États-Unis de forcer d’autres États Membres de l’ONU à violer la résolution 2231, en les menaçant de sanctions.

Le représentant a insisté sur la différence entre les engagements de l’Iran en vertu de son accord avec l’AIEA relatif à l’application de garanties dans le cadre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, et ceux en vertu du PAGC. Il a souligné que le programme nucléaire pacifique de l’Iran a été soumis à une surveillance rigoureuse de l’AIEA et a précisé que son pays n’a jamais enrichi d’uranium au-delà de 60%. Il s’est félicité qu’après la levée, en octobre 2020, des restrictions sur les armes et des interdictions de voyager prévues par la résolution 2231, toutes les restrictions sur les activités liées aux missiles balistiques et les transferts vers et depuis l’Iran, ainsi que le gel des avoirs, aient pris fin automatiquement, le 18 octobre 2023. Il a souligné l’importance du respect strict de ces décisions par tous les États Membres de l’ONU, affirmant que toute action contraire irait à l’encontre des obligations énoncées dans la résolution 2231.

Cette résolution n’a rien à voir avec des considérations régionales, et la tentative d’établir un lien entre elle et l’utilisation de drones dans le cadre du conflit en Ukraine est « fallacieuse et totalement infondée », a soutenu le représentant.  La principale menace qui pèse depuis longtemps sur la paix et la sécurité régionales est « bien connue de tous »: les États-Unis sont « entièrement responsables », et ce, depuis des décennies, de toutes les agressions et autres crimes et mesures illégales, dans notre région, a accusé le représentant. Il a ainsi imputé aux États-Unis « tous les crimes du régime israélien », car celui-ci ne peut commettre des « crimes aussi sauvages » à Gaza, sans le consentement, le soutien politique, financier et militaire ainsi que la coopération de Washington.

Le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution 2231 (S/2023/922) fait référence à des visites spécifiques et à leurs « prétendues » conclusions.  Cette activité est « non autorisée et illégale », et en violation flagrante du mandat du Secrétariat, qui se limite strictement à un « soutien administratif ».  De toute façon, cette enquête a été menée par du personnel administratif qui ne dispose pas de l’expertise technique requise, a ironisé le délégué.  En outre, a-t-il précisé, même avant l’expiration, le 18 octobre 2023, de certaines mesures restrictives liées aux missiles balistiques, les programmes spatiaux et de missiles de l’Iran se trouvaient en dehors du champ d’application de la résolution 2231.

En conclusion, a-t-il ajouté, l’Iran est prêt à reprendre la pleine mise en œuvre de ses engagements dans le cadre du PAGC une fois qu’il sera relancé et que les États-Unis et toutes les autres parties prenantes accepteront d’honorer « en temps opportun, efficacement, pleinement et fidèlement » toutes leurs obligations, ce qui nécessite en effet une véritable volonté politique de leur part.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: en Libye, le projet de loi électorale suspendu à un accord politique entre les différents acteurs institutionnels

9510e séance – matin
CS/15535

Conseil de sécurité: en Libye, le projet de loi électorale suspendu à un accord politique entre les différents acteurs institutionnels

Pour la première fois depuis l’échec de 2021, la Libye dispose désormais d’un cadre constitutionnel et juridique pour tenir des élections réussies, s’est félicité le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Abdoulaye Bathily, venu présenter ce matin au Conseil de sécurité les derniers développements politiques, sécuritaires et humanitaires dans le pays.  Enfin considérée comme « techniquement réalisable » par la Haute Commission électorale nationale —après maints rebondissements en 2023, et ce, grâce au travail du Comité 6+6 et de plusieurs pays médiateurs dont l’Égypte et le Maroc— la loi électorale est une réalisation importante qui devrait favoriser la stabilité politique de la Libye, à condition toutefois qu’un accord politique se dessine entre les différents acteurs institutionnels, ce qui n’est pas encore fait, a tempéré M. Bathily.

À cet effet, le haut fonctionnaire, qui est également le Chef de la Mission d’appui des Nations Unies dans ce pays (MANUL), a proposé en novembre aux dirigeants de cinq institutions libyennes une réunion pour tenter de surmonter leurs divergences.  Et bien que personne n’ait catégoriquement rejeté son invitation, certains ont posé des conditions, a-t-il regretté.  Si le Conseil présidentiel, sous la direction du Président Menfi, a offert son plein soutien à l’initiative de M. Bathily, le Président de la Chambre des représentants, M. Agila Saleh, a en revanche conditionné sa participation à la formation d’un « nouveau gouvernement pour les élections », excluant le Gouvernement d’unité nationale.

Quant au Président du Haut Conseil d’État, M. Muhammad Meftah Takala, malgré des réserves initiales, il a fini par désigner ses représentants, cependant que le Premier Ministre du Gouvernement d’unité nationale, M. Abdel Hamid Dbeibah, tout en se disant prêt à discuter des lois électorales, refuse l’idée d’un « nouveau gouvernement ».  Enfin, le commandant de l’Armée de libération nationale, le maréchal Khalifa Haftar, quoique ouvert au dialogue, a lui aussi posé des conditions à la participation du Gouvernement d’unité nationale.

La situation est donc pour l’instant bloquée, a résumé le Représentant spécial, en assurant qu’il redouble d’efforts pour permettre l’émergence d’un consensus et l’inclusion d’un plus large éventail d’acteurs issus de la société libyenne au processus politique, dans un contexte où l’espace civique tend à se restreindre et le nombre de détentions arbitraires à s’accroître.  Lors de ses nombreuses consultations, a-t-il fait savoir, deux messages lui ontété adressés avec insistance: un désir très fort de tenir rapidement des élections, doublé d’une lassitude face aux manœuvres dilatoires de certaines personnalités politiques.

Sentiment repris à leur compte par les membres du Conseil de sécurité, à l’instar de la Fédération de Russie, qui a souligné l’importance pour le Haut Conseil d’État et la Chambre des représentants de continuer à plancher sur le cadre législatif du processus électoral afin d’aboutir rapidement à un calendrier.  Très préoccupée par la persistance d’un double pouvoir en Libye, la délégation russe a par ailleurs averti que toute initiative de médiateurs internationaux ou ingérence étrangère ne ferait qu’accentuer les divisions existantes.

Un avis partagé par la Chine, le Brésil ou encore Malte, qui ont mis en avant la nécessité de respecter la souveraineté libyenne, dans un contexte tendu où des violences éclatent régulièrement –tout récemment dans les villes de Gharyan, Zuwara et Ghadamès– et où des mercenaires et autres forces étrangères opèrent toujours sur le sol libyen.  À ce propos, la Russie a préconisé un retrait « synchronisé, équilibré, progressif et échelonné » de tous les groupes armés non libyens, sans exception.  Sans cela, le pays risque de « répéter le triste scénario de la décennie précédente », a-t-elle averti, la France ajoutant que « le vide politique actuel nourrit les ingérences, déstabilise la Libye et l’ensemble de la région ».

Le Chef de la MANUL est ensuite revenu sur les conséquences dévastatrices de la tempête Daniel à Derna, en septembre, qui a elle aussi cruellement mis en évidence l’absence d’institutions étatiques unifiées et légitimes en Libye.  Plus de trois mois après la catastrophe, a-t-il souligné, l’ONU et ses partenaires humanitaires ont toutefois fourni, en coopération avec les autorités locales, une aide vitale à plus de 203 000 nécessiteux.  Le Royaume-Uni a jugé essentiel que la reconstruction soit financée de façon transparente, contrôlée et responsable.  Le représentant libyen, pour sa part, a fait remarquer que la solidarité de ses compatriotes avait joué à plein lors de cette catastrophe, et ce, en dépit des divergences politiques, laissant l’espoir d’un chemin de sortie de crise.

Plusieurs membres du Conseil, parmi lesquels la Suisse, se sont émus de la mort de 61 migrants dans les eaux libyennes la semaine dernière.  Prenant note des recommandations du rapport du Secrétaire général, les États-Unis, l’Équateur et le Mozambique, s’exprimant au nom des A3 –Gabon, Ghana et Mozambique–, ont ainsi appelé les autorités libyennes à permettre aux réfugiés d’entamer des démarches de régularisation, et à ouvrir des lieux de détention où les droits humains sont respectés.  Le groupe africain au Conseil a également exprimé sa préoccupation devant l’afflux d’armes sophistiquées ou de petit calibre en Libye, ainsi que dans tout le Sahel.  Un trafic qui a donné naissance à une infrastructure de soutien transfrontalier propice aux acteurs terroristes mondiaux et à leurs facilitateurs dans la région, ont alerté les A3.

Par ailleurs, M. Bathily a dénoncé le fait que, malgré l’énorme richesse de la Libye et en dépit d’une croissance de 14% attendue en 2023, ses citoyens sont de plus en plus exposés à des difficultés économiques et sociales, du fait de la corruption et d’une mauvaise gestion des ressources, notamment pétrolières.  Des sanctions —parmi lesquelles des gels d’avoir et des interdictions de voyager— continuent d’être imposées, a rappelé le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye, un état de fait que la Chine a tenu à dénoncer.  Le Représentant spécial a enfin exhorté la communauté internationale et les acteurs locaux à ne pas laisser un petit groupe de responsables politiques compromettre l’avenir prometteur de la Libye.  « L’humeur nationale est mûre pour un nouvel accord politique et pour un avenir plus radieux en Libye », a-t-il conclu, se voulant optimiste.

LA SITUATION EN LIBYE (S/2023/967)

Déclarations

M. ABDOULAYE BATHILY, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies dans ce pays (MANUL), s’est d’abord réjoui de l’établissement d’un cadre constitutionnel et légal pour les élections en Libye, un progrès significatif depuis l’échec des scrutins de décembre 2021, qui devrait favoriser la stabilité politique future du pays.

Le haut fonctionnaire a détaillé sa récente initiative visant à réunir les chefs de cinq institutions libyennes clefs pour tenter de surmonter leurs divergences politiques.  Bien que personne n’ait catégoriquement rejeté l’invitation, certains ont posé des conditions, a regretté le Représentant spécial.  Si le Conseil présidentiel, sous la direction du Président Menfi, a offert son plein soutien à l’initiative, le Président de la Chambre des représentants, M. Agila Saleh, a conditionné sa participation à la formation d’un « nouveau gouvernement pour les élections », excluant le Gouvernement d’unité nationale.  Le Président du Haut Conseil d’État, M. Takala, malgré des réserves initiales, a fini par désigner ses représentants, mais le Premier Ministre du Gouvernement d’unité nationale, M. Dbeibah, tout en se disant prêt à discuter des lois électorales, refuse pour sa part l’idée d’un « nouveau gouvernement ». Enfin, le commandant de l’Armée de libération nationale, le maréchal Haftar, est ouvert au dialogue mais a lui aussi posé ses conditions sur la participation du Gouvernement d’unité nationale.

Faisant mention d’une rencontre importante qui s’est tenue au Caire le 16 décembre, le Représentant spécial a insisté sur la nécessité pour tous les acteurs de s’engager pleinement pour résoudre l’impasse politique.  Il a aussi souligné ses efforts continus pour inclure une plus large gamme d’acteurs de la société libyenne dans le processus politique, exprimant sa gratitude vis-à-vis du soutien international considérable reçu et soulignant l’importance d’un front régional et international uni.

M. Bathily a ensuite évoqué les conséquences dévastatrices de la tempête Daniel à Derna en septembre dernier, laquelle a mis cruellement en évidence l’absence d’institutions étatiques unifiées et légitimes en Libye.  Plus de trois mois après la catastrophe, a-t-il souligné, l’ONU et ses partenaires humanitaires ont toutefois fourni, en collaboration avec les autorités locales, une aide vitale à plus de 203 000 personnes affectées.  Il a aussi rapporté des affrontements armés sporadiques et des incidents sécuritaires divers (notamment dans les villes de Gharyan, Zuwara et Ghadamès), démontrant ainsi la nécessité d’une stabilité et d’une unité renforcées des institutions militaires et de sécurité du pays.

Le Représentant spécial a exprimé ses inquiétudes concernant la réduction de l’espace civique en Libye, s’alarmant notamment du nombre croissant de détentions arbitraires, y compris d’enfants. Il a également souligné la situation inquiétante des migrants et des réfugiés dans le pays, pointant du doigt les expulsions collectives et les conditions de détention qui se détériorent.  Enfin, il s’est ému du fait que, malgré l’énorme richesse de leur pays, les citoyens libyens sont de plus en plus exposés à des difficultés économiques et sociales, du fait de la corruption et de la gabegie.  En conclusion, il a exhorté la communauté internationale et les acteurs locaux à ne pas laisser un petit groupe de responsables politiques compromettre l’avenir prometteur de la Libye.

M. OSAMU YAMANAKA (Japon), s’exprimant au nom du Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011) concernant la Libye, a présenté le rapport du Comité des sanctions pour la période du 16 octobre au 18 décembre 2023, au cours de laquelle il a travaillé selon la procédure d’approbation tacite pour faciliter l’adoption de mesures.  Le 19 octobre dernier, a-t-il rappelé, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 2701 (2023) par laquelle il prolonge les mesures visant à prévenir l’exportation illicite du pétrole depuis la Libye jusqu’au 1er février 2025 et le mandat du Groupe d’experts jusqu’au 15 février 2025.  Le gel des avoirs et les limitations de voyage et l’embargo sur les armes n’étant pas limités dans le temps ont été maintenus.  Le 20 novembre, six personnes ont été désignées pour siéger au sein du Groupe d’experts par le Secrétaire général.

Concernant l’embargo sur les armes, a poursuivi M. Yamanaka, le Comité a reçu le dernier rapport écrit concernant l’inspection d’un navire le 18 juillet 2022.  Les membres du Comité ont exprimé des avis divergents sur la suite à donner à cet évènement, conformément à la résolution 2092 (2013).  Il n’y a pas de consensus parmi les membres du Comité sur cette question.  Concernant le gel des avoirs, aucune décision négative n’a été prise, mais le Comité a répondu à des lettres de la Libye concernant certains aspects de la mesure de gel des avoirs.  Concernant les interdictions de voyage, le Comité a prorogé à six reprises la dérogation de six mois, à des fins humanitaires, de deux individus, M. Mohamed al-Kadhafi et Mme al-Barassi.  En outre, le 16 octobre le Comité a radié Mme Kadhafi de la liste des interdictions de voyage, mais ses avoirs restent gelés.  La liste des sanctions a été amendée en ce sens.  Une autre demande de radiation reste en examen, a indiqué le représentant.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a prié les dirigeants libyens de répondre de manière constructive à l’invitation du Représentant spécial à une réunion préparatoire afin de parvenir à un règlement sur les litiges politiques et d’y participer de bonne foi sans conditions préalables.  Par ailleurs, le Royaume-Uni est très préoccupé par la réduction de l’espace civique en Libye, ainsi que par les violations des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne les migrants et les réfugiés, qui se poursuivent sans reddition de comptes.  Le représentant a également noté l’incident tragique au cours duquel 61 migrants, dont des femmes et des enfants, se sont noyés après un naufrage au large de la Libye en fin de semaine.  Alors que le pays entame sa reconstruction après les inondations dévastatrices de septembre, il a jugé essentiel qu’elle soit financée de façon transparente, contrôlée et responsable.  « Les fonds publics libyens doivent être utilisés dans l’intérêt de tous les Libyens », a insisté le représentant.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) s’est réjoui de la publication, le 1er novembre, de lois électorales, à la suite des travaux du Comité 6+6, en dépit de la persistance de quelques questions controversées.  Il a alors appelé toutes les parties libyennes à se laisser guider par la bonne foi et l’intérêt national et à œuvrer en faveur d’un processus électoral pacifique.  Il a aussi appelé les parties prenantes qui n’ont pas répondu à l’appel de M. Bathily à entreprendre des efforts pour arriver à dialoguer.  C’est la seule voie pour faire avancer un processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens, sous les auspices de l’ONU, avec la participation pleine, égale, significative et sûre des femmes en tant qu’électrices, candidates et observatrices, a-t-il dit.

Le représentant a également abordé le thème de l’insécurité, qui selon lui, est aggravée par la présence continue de combattants étrangers, de forces étrangères et de mercenaires, dont le retrait complet devrait être une priorité, une insécurité aussi aggravée par la prolifération des armes sous le contrôle de divers acteurs étatiques et non étatiques.  Il a estimé dans ce contexte que la poursuite des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5 et d’autres mesures visant à stabiliser la situation sécuritaire nécessitent le plein soutien du Conseil de sécurité.  Il a aussi salué le soutien continu de la MANUL à la Commission 5+5, notamment l’organisation de l’atelier du mois dernier à Tunis en présence des coprésidents du Groupe de travail sur la sécurité. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté que les perspectives d’un règlement durable demeurent éloignées en raison de la persistance d’un double pouvoir en Libye.  Affirmant que la tenue d’élections nationales et la mise en place d’autorités unifiées avec une représentation équitable de toutes les régions de la Libye étaient « le seul moyen de sortir de l’impasse politique interne », il a estimé important que le Haut Conseil d’État et la Chambre des représentants continuent à travailler sur le cadre législatif du processus électoral, regrettant qu’ils ne soient pas parvenues à un accord avant l’achèvement des travaux du comité mixte de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État (Comité 6+6), à la fin du mois de mai 2023.  Affirmant que les Libyens devaient démêler par eux-mêmes « l’enchevêtrement de contradictions » dans lequel ils se trouvaient, il a averti qu’en l’absence de consensus interne sur le cadre législatif, toute initiative de médiateurs internationaux ou d’États étrangers ne ferait qu’accentuer les divisions.

Considérant l’organisation d’élections présidentielle et parlementaires comme une « question centrale », le délégué a affirmé que leur tenue simultanée serait préférable pour préserver la stabilité nationale.  Insistant sur leur caractère inclusif comme condition indispensable de leur succès, il a affirmé qu’il ne fallait pas en exclure des personnalités politiques bénéficiant d’un important soutien populaire, y compris les représentants des anciennes autorités.  Le délégué a appelé à agir rapidement, la fenêtre d’opportunité se refermant rapidement, notamment en raison de combats d’une « régularité alarmante » entre groupes armés.  Concernant la présence militaire étrangère, il a préconisé un retrait « synchronisé, équilibré, progressif et échelonné » de tous les groupes armés et unités militaires non libyens, sans exception.  « Si un consensus politique n’est pas trouvé rapidement, le pays risque de répéter le triste scénario de la décennie précédente », a-t-il averti.

La question la plus importante à l’ordre du jour est le respect des dispositions de l’embargo sur les armes imposé par le Conseil de sécurité, a-t-il affirmé.  Rappelant le régime spécial d’inspection en haute mer au large des côtes libyennes, introduit par la résolution 2292 du Conseil de sécurité présentée par la Russie, il a accusé l’Union européenne de l’avoir « instrumentalisée » à travers l’opération IRINI, dénonçant sa faible efficacité, ses inspections sélectives et l’absence de transparence du système.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a évoqué le naufrage tragique qui s’est produit au large de la Libye samedi dernier.  Des milliers de personnes meurent et disparaissent chaque année dans la Méditerranée, a-t-elle déploré.  En redoublant d’efforts pour garantir le respect des droits de l’homme, la Libye peut catalyser la transformation démocratique, et jeter les bases d’un environnement sûr et propice aux élections, a-t-elle avancé.  La déléguée a dénoncé la répression des défenseurs et défenseuses des droits de l’homme, les détentions arbitraires, dans un contexte de rétrécissement de l’espace civique.  Les voix des journalistes, des universitaires et de membres de la société civile sont réduites au silence, menaçant le droit à la liberté d’expression. C’est pourquoi la Suisse, en tant que coprésidente du Groupe de travail sur le droit international humanitaire et les droits de l’homme, a coorganisé une réunion des quatre groupes issus du processus de Berlin.  Cette réunion, a expliqué la déléguée, a permis d’identifier des synergies pour la mise en œuvre des droits de l’homme dans les domaines politique, économique et sécuritaire.  « Nous maintiendrons notre engagement à cet égard. »  Après un retard de deux ans, il est grand temps que les élections soient tenues de manière inclusive, avec la participation des femmes et des jeunes qui, a-t-elle précisé, est primordiale pour l’avenir du pays. Et pour faire avancer les aspirations du peuple libyen pour des élections, le compromis et la collaboration sont indispensables.  Enfin, la déléguée a appelé les acteurs clefs libyens à accepter l’invitation du Représentant spécial pour une réunion préparatoire.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), s’exprimant au nom des A3 –Gabon, Ghana et Mozambique–, a exprimé une profonde inquiétude quant à l’impasse politique persistante dans le pays, en raison du manque de clarté quant aux élections. Cette situation fait craindre une aggravation de l’instabilité multidimensionnelle, a-t-il déploré, avant d’exprimer sa profonde gratitude pour les efforts déployés par le Représentant spécial du Secrétaire général avec toutes les institutions et acteurs libyens concernés pour résoudre les questions électorales en suspens.  Il a en particulier salué son initiative d’organiser une réunion entre parties prenantes institutionnelles, pour parvenir à un règlement des controverses liées à la mise en œuvre du processus électoral.

Concernant la situation sécuritaire, le délégué mozambicain a indiqué que les A3 notent positivement que l’accord de cessez-le-feu de 2020 continue de tenir, grâce à la retenue dont les parties continuent de faire preuve.  Le délégué a néanmoins exprimé sa profonde préoccupation devant la récurrence des affrontements armés à travers la Libye.  Une réalité très préoccupante, car elle révèle la fragilité du système politique et sécuritaire, a-t-il mis en garde, appelant à trouver une solution urgente face à cette impasse.  Pour atteindre cet objectif, les autorités libyennes doivent poursuivre leurs efforts pour unifier les forces de sécurité libyennes, même si c’est une question complexe qui nécessite une approche globale, a-t-il reconnu.

Le représentant a également évoqué la situation humanitaire liée à la situation « désastreuse et persistante » dans laquelle se trouvent les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile en Libye.  Il a appelé les autorités libyennes à œuvrer, avec le soutien de la communauté internationale, à l’amélioration du sort de ces malheureux et à demander des comptes aux auteurs de violations de leurs droits.  Pareillement, le délégué a exprimé de profondes préoccupations quant à l’afflux d’armes sophistiquées et d’armes légères et de petit calibre en Libye, mais aussi dans la région du Sahel.  Un trafic qui a donné naissance à une infrastructure de soutien transfrontalier propice aux acteurs terroristes mondiaux et à leurs facilitateurs dans la région, a-t-il alerté.  Enfin, il a réitéré l’appel des A3 en faveur du départ immédiat des forces étrangères et des combattants étrangers du sol libyen.  Leur présence porte atteinte à la souveraineté de la Libye ainsi qu’à l’appropriation et à la réconciliation nationale, a-t-il dit.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a déploré que l’impasse politique continue de retarder les élections en Libye, qui doivent être libres et transparentes.  L’invitation du Représentant spécial est un pas dans la bonne direction, a souligné la représentante, qui a également pris note de l’accord tripartite et appelé toutes les parties à le rejoindre pour sortir de l’impasse.  Elle a partagé ses inquiétudes concernant l’amenuisement de l’espace civique et la persistance des violations des droits humains. L’instabilité de la Libye a également des conséquences sécuritaires sur la stabilité de l’Afrique du Nord et du Sahel, a encore noté la déléguée, en réitérant son appel au retrait total de tous les mercenaires et forces étrangères du sol libyen. 

M. JOHN KELLEY (États-Unis) a plaidé en faveur d’une feuille de route claire pour la tenue d’élections, appelant toutes les parties prenantes à participer à un dialogue préparatoire sous l’égide du Représentant spécial en vue d’établir un gouvernement unifié pour servir les intérêts du peuple libyen.  Il a dénoncé ceux qui sapent son travail et continuent ainsi de retarder le processus pour aboutir à un scrutin libre et transparent.  Prenant note des recommandations du rapport du Secrétaire général sur la nécessité de fournir une assistance aux migrants et demandeurs d’asile, il a appelé à ouvrir des lieux de détention humains et leur permettre d’entamer des démarches de régularisation.  Le délégué a également appelé à inverser la tendance à la réduction de l’espace civique qui sape la liberté d’expression.  Saluant le travail de la Commission militaire conjointe 5+5, qui souhaite assurer le retrait des mercenaires et des forces étrangères et ouvrir la voie à un processus de démobilisation, de désarmement et de réintégration.  Il a appelé à accroître la coopération pour unifier les structures de pouvoir de l’est et de l’ouest afin de garantir les frontières du pays et de lutter contre l’instabilité.

M. YAMANAKA OSAMU (Japon) s’est félicité de l’engagement du Conseil de sécurité en faveur de la paix, de la sécurité et de la transition démocratique en Libye.  Bien que les élections nationales tant attendues n’aient pas encore eu lieu, a-t-il relevé, des progrès ont été réalisés.  Les initiatives du Représentant spécial ont ainsi permis de s’accorder sur de nouvelles lois électorales et de résoudre certaines controverses, mais aussi d’unifier les institutions étatiques divisées et de mettre en place un mécanisme de surveillance financière nationale.  La solidarité et l’unité du peuple libyen après les inondations dévastatrices de septembre sont par ailleurs de bon augure, a-t-il souligné.

Toutefois, le représentant a appelé à continuer les efforts pour compléter la transition démocratique en Libye, encourageant les acteurs clefs à s’engager davantage aux côtés de M. Bathily.  Il a fait part de ses préoccupations concernant la situation humanitaire et les droits humains, s’inquiétant tout particulièrement des détentions illégales et des restrictions de mouvement (notamment des femmes), ainsi que des conditions inhumaines imposées aux migrants et aux réfugiés.  Il a enfin réaffirmé le soutien de son pays au peuple libyen dans sa quête d’un gouvernement protégeant leurs vies et leur dignité.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) s’est réjoui de la publication, le 1er novembre, de lois électorales, à la suite des travaux du Comité 6+6, en dépit de la persistance de quelques questions controversées.  Il a alors appelé toutes les parties libyennes à se laisser guider par la bonne foi et l’intérêt national et à œuvrer en faveur d’un processus électoral pacifique.  Il a aussi appelé les parties prenantes qui n’ont pas répondu à l’appel de M. Bathily à entreprendre des efforts pour arriver à dialoguer.  C’est la seule voie pour faire avancer un processus politique dirigé et contrôlé par les Libyens, sous les auspices de l’ONU, avec la participation pleine, égale, significative et sûre des femmes en tant qu’électrices, candidates et observatrices, a-t-il dit.

Le représentant a également abordé le thème de l’insécurité, qui selon lui, est aggravée par la présence continue de combattants étrangers, de forces étrangères et de mercenaires, dont le retrait complet devrait être une priorité, une insécurité aussi aggravée par la prolifération des armes sous le contrôle de divers acteurs étatiques et non étatiques.  Il a estimé dans ce contexte que la poursuite des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5 et d’autres mesures visant à stabiliser la situation sécuritaire nécessitent le plein soutien du Conseil de sécurité.  Il a aussi salué le soutien continu de la MANUL à la Commission 5+5, notamment l’organisation de l’atelier du mois dernier à Tunis en présence des coprésidents du Groupe de travail sur la sécurité. 

M. NORBERTO MORETTI (Brésil), soulignant que le processus électoral doit être mené par les Libyens eux-mêmes, a espéré que les acteurs institutionnels y participeront de manière constructive et dans un esprit de compromis, afin de traduire les aspirations du peuple libyen à l’unification et à la légitimité du Gouvernement.  Par ailleurs, le représentant a estimé que la durabilité de tout règlement politique dépend du respect par tous les acteurs du « droit de la Libye de mener ses affaires sans ingérence étrangère ».  L’unification des institutions publiques, y compris l’armée, peut être facilitée par la communauté internationale tout en respectant la souveraineté du pays, qui est également extrêmement importante en ce qui concerne l’appropriation et le contrôle de ses ressources naturelles, a-t-il précisé.  Ainsi, la création de mécanismes visant à assurer la transparence et la responsabilité dans les dépenses publiques, notamment dans le cadre des efforts de reconstruction à Derna, devrait protéger la richesse de la Libye contre les détournements et la mauvaise gestion, dans l’intérêt du peuple.  À ce propos, a ajouté le représentant, les signalements d’une confiscation d’avoirs libyens gelés dans des banques étrangères devraient être examinés avec attention.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) s’est dite convaincue que la clef de la résolution de la crise en Libye réside dans la pleine appropriation du processus par les Libyens eux-mêmes.  Encourageant le dialogue entre l’ensemble des acteurs, elle a estimé qu’il devait mener à la constitution d’un gouvernement unifié capable de mener le pays aux élections sur l’ensemble du territoire libyen.  « Une transition politique sans fin en Libye n’est pas tenable », a-t-elle affirmé, ajoutant que la catastrophe de Derna et sa gestion non coordonnée par les autorités libyennes avaient rappelé l’urgence d’une gouvernance unifiée.  « Le vide politique actuel nourrit les ingérences, qui déstabilisent le pays et l’ensemble de la région », a-t-elle averti.

Estimant que la tenue d’élections en Libye ne pouvait plus attendre, elle a salué l’adoption de lois électorales, grâce au travail du (Comité 6+6), ainsi que les efforts réalisés par les partenaires régionaux, en particulier l’Égypte, mais aussi le Maroc, pour soutenir le dialogue entre les institutions libyennes.  Elle a estimé que la prochaine étape devait être de fixer un calendrier, indiquant que la France était disposée à faciliter le dialogue interlibyen en vue d’établir un exécutif unifié de transition pour mener le pays aux élections.  Ajoutant que la France continuerait de soutenir les efforts en vue d’une réunification de l’armée libyenne, sous l’égide de la Commission militaire conjointe 5+5 et des deux chefs d’état-major, la déléguée a affirmé qu’elle continuerait également de soutenir les efforts déployés par les Libyens pour parvenir au retrait de toutes les forces composées de mercenaires et de combattants étrangers, une condition essentielle à l’émergence d’une Libye « stable, souveraine et unie ».

M. DAI BING (Chine) a d’abord exprimé son émotion face à la mort de migrants dans les eaux libyennes, critiquant certains pays européens coupables selon lui de ne pas assumer la responsabilité de la protection des réfugiés.  Prenant note du fait que, malgré un dialogue en cours sur une feuille de route électorale, aucun consensus ne s’est encore imposé, il a encouragé les parties libyennes à progresser dans le dialogue le plus rapidement possible.  Il a également mis en garde contre « les interférences étrangères et les solutions imposées », insistant sur le respect de la souveraineté libyenne.  Le représentant a ensuite exprimé ses préoccupations quant aux conflits armés dans diverses régions du pays, notamment le long de la frontière entre la Libye et le Tchad.  Pour préserver la paix, il a exhorté au respect de l’accord de cessez-le-feu, ainsi qu’au retrait des mercenaires et des forces étrangères, tout en soulignant l’importance de la coopération régionale pour relever les défis sécuritaires. La reprise de la production pétrolière en Libye et la croissance économique de 14% attendue en 2023 ont été saluées par le représentant, qui a toutefois évoqué la crise humanitaire due aux inondations de septembre et la nécessité d’une aide humanitaire accrue.  Enfin, il a dénoncé le gel des avoirs libyens à l’étranger, demandant au Conseil de sécurité de prendre des mesures pour répondre aux préoccupations légitimes de la Libye.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a reconnu les progrès significatifs faits par les Libyens vers un règlement pacifique de la situation, en dépit de nombreux obstacles.  L’intérêt du peuple libyen doit être placé au-dessus de toute considération et le processus politique doit rester la principale option pour rétablir la sécurité et la stabilité en Libye.  Cela signifie s’engager dans le dialogue pour résoudre les différends entre les parties.  Et pour cela, l’Envoyé spécial doit poursuivre ses efforts de médiation, a plaidé le représentant.  Il a également estimé que l’avenir de la Libye et de son peuple dépend de la désescalade et de l’absence de recours à la force.  Dans ce contexte, la Commission militaire conjointe 5+5 doit poursuivre ses efforts pour stabiliser le cessez-le-feu et unifier les institutions militaires et de sécurité.  De la même manière, le retrait simultané et progressif de toutes les forces étrangères, des combattants étrangers et mercenaires de Libye est capital pour préserver l’unité, l’indépendance et l’intégrité territoriale du pays.  De plus, le représentant a jugé essentiel d’offrir aux jeunes des opportunités en termes d’éducation et d’emploi et de permettre aux femmes libyennes de jouer un rôle actif dans le développement de leur société.  Il faut assurer la préservation et la répartition équitable des richesses libyennes, ce qui implique de préserver les avoirs libyens gelés pour les générations futures, a ajouté le représentant, appelant aussi à protéger les secteurs pétrolier et financier de la polarisation politique.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a encouragé les institutions politiques libyennes et toutes les parties à surmonter leurs différences au cours d’un dialogue facilité par l’ONU, afin d’ouvrir la voie à des élections présidentielle et législatives libres, transparentes et inclusives dans les plus brefs délais.  En outre, le droit à la liberté d’expression est fondamental pour la transition démocratique, a insisté le représentant, qui a préconisé de garantir la participation pleine et entière des femmes, des jeunes et de la société civile aux processus politiques.  Revenant sur les inondations catastrophiques à Derna, le représentant a misé sur des mesures de reconstruction et d’indemnisation coordonnées et transparentes, par le biais d’une plateforme nationale unifiée, qui donne la priorité au soutien psychosocial et à la santé mentale des rescapés.  En matière de sécurité, il a encouragé la MANUL à continuer de soutenir les efforts de la Commission militaire conjointe 5+5 pour surveiller l’application de l’accord de cessez-le-feu de 2020.  Le représentant a estimé que le Conseil devra rester saisi de la situation des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile en Libye, espérant que les autorités libyennes travailleront, avec le soutien de la communauté internationale, à garantir leurs droits.

Regrettant l’absence de progrès notables sur le plan politique, M. TAHER M. T. EL-SONNI (Libye) a rappelé que des élections présidentielle et législatives sont attendues depuis deux ans.  Il a souligné l’importance d’une solution « prise en main » par les Libyens eux-mêmes pour ramener leur pays sur la voie de la stabilité et rétablir le contrôle des autorités sur l’ensemble du territoire en l’absence de toute ingérence étrangère.  Il en a appelé à la solidarité de tous les Libyens, en dépit de leur divergences politiques, comme lors de la réponse commune à la tempête Daniel, afin de trouver un chemin de sortie de crise.  Le délégué a appelé toutes les parties à participer aux réunions préparatoires sous l’égide du Représentant spécial sans poser de conditions préalables, en vue de créer un environnement propice à la tenue d’élections le plus tôt possible.  Affirmant que le peuple libyen était « las d’attendre » une solution, il a appelé à ne pas céder aux conditions imposées de l’extérieur.  Sur le dossier des migrants, il a rappelé que la question ne pourrait être réglée par la Libye seule, appelant les pays d’origine, de transit et de destination à coopérer avec elle.

Le délégué a estimé que le peuple libyen et la majorité des populations du monde étaient las des approches caractérisées par le « deux poids, deux mesures », qui consistent à leur donner des leçons de morale sur le droit international pour ne pas en tenir compte lorsqu’il s’agit de Gaza.  Affirmant que l’histoire retiendrait l’opposition de certains pays à des projets de résolution à caractère humanitaire au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale, il a réaffirmé que la Libye ne ménagerait aucun effort pour que l’agression contre le peuple palestinien prenne fin et qu’un cessez-le-feu soit conclu.  Il a appelé le Conseil de sécurité à adopter et mettre en œuvre la résolution présentée par les Émirats arabes unis plus tard aujourd’hui.

 

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