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Soudan: « le retour à la paix est proche », promet le Chef de la MINUATS devant le Conseil de sécurité

9289e séance – après-midi
CS/15236

Soudan: « le retour à la paix est proche », promet le Chef de la MINUATS devant le Conseil de sécurité

« Le retour à la paix est proche » au Soudan, selon M. Volker Perthes, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan.  Celui qui est aussi le Chef de la Mission intégrée d’assistance à la transition des Nations Unies au Soudan (MINUATS) a informé le Conseil de sécurité, ce lundi matin, des progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord-cadre politique, signé le 5 décembre dernier, et salué à l’unisson par les membres du Conseil.  Le processus peut être « critiqué pour sa lenteur », mais il est parvenu à obtenir le soutien de nombreuses parties, y compris les autorités militaires.  M. Perthes a appelé les membres du Conseil à soutenir le futur gouvernement en vue de préparer des « élections libres, justes et équitables ». 

Les signataires de l’accord-cadre ont lancé en janvier la phase finale des pourparlers visant à un règlement politique définitif, sous l’égide du mécanisme trilatéral - composé de l’Union africaine (UA), de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de la MINUATS.  Les parties se sont mises d’accord sur les prémisses de la rédaction d’un « accord politique final » et d’un « processus constitutionnel ».  L’objectif de la MINUATS est clair: « parvenir à un accord politique définitif », se mettre d’accord sur une constitution, et constituer un gouvernement civil avant la mi-avril, a rappelé le Représentant spécial.  « C’est ambitieux.  Mais cela peut se faire » avec la volonté politique nécessaire, a estimé M. Perthes.  Le mécanisme trilatéral poursuit ses efforts pour s’adresser aux partis et mouvements non signataires pour définir un calendrier. 

Le Brésil a particulièrement apprécié ces dispositions encourageant ces acteurs à se joindre à l’accord.  La Russie a dit vouloir travailler avec toutes les forces politiques, groupes ethniques et confessionnels, y compris les non-signataires.  Il s’agit de susciter l’adhésion la plus large possible pour avancer dans le processus politique, et d’accoucher d’une constitution qui unirait le pays entier.  Le Soudan a précisé qu’un accord final, qui suivrait l’accord-cadre, inaugurerait une période de transition de deux ans, dirigée par un gouvernement civil.  Cette transition serait assortie d’un engagement de l’armée à « quitter la vie politique ».  Le Gouvernement soudanais a promis devant le Conseil de ne ménager aucun effort pour négocier avec les factions qui ne se sont pas encore jointes au processus de paix. 

Les réactions positives des membres du Conseil ont abondé, tel l’Équateur, qui a émis l’espoir d’une solution politique inclusive, et d’un nouveau gouvernement civil par le biais d’un processus électoral crédible, inclusif et transparent.  Les États-Unis, reconnaissant que les leaders militaires ont déclaré vouloir se retirer de la vie politique, ont appelé toutes les parties à faire passer les intérêts nationaux du Soudan avant leurs propres intérêts politiques.  Les promesses de la participation des femmes au processus de paix à hauteur de 40% n’ont pas échappé à Malte, l’Albanie et l’Équateur, en particulier aux postes de direction, et dans les futures nominations des autorités de transition.  La Suisse a au passage rappelé que les femmes ont été à l’avant-garde de la révolution soudanaise et que leur participation pleine, égale et significative reste donc cruciale pour la réussite de la transition politique.  Malte a quant à elle appelé à traduire en justice les auteurs de violences basées sur le genre durant le conflit. 

Il n’en reste pas moins que les tensions demeurent vives.  La France et d’autres ont constaté que le niveau des violences intercommunautaires ne cessait d’augmenter, appelant les parties à mettre fin au recrutement de combattants qui alimente l’escalade.  Les A3 (Gabon, Ghana et Mozambique) se sont inquiétés de leur persistance en particulier dans les États du Nil-Bleu, du Kordofan occidental, du Kordofan méridional, du Darfour central et du Darfour méridional.  Concernant l’attitude des autorités soudanaises face aux manifestations populaires, des appels ont été entendus pour que la liberté d’expression et d’association soit garantie dans le pays.  Le Japon s’est dit profondément préoccupé par l’usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques.  Le Chef de la MINUATS a rapporté à ce sujet qu’un jeune manifestant avait été abattu à Khartoum le 28 février, relevant tout de même que la réaction « immédiate » des autorités pour enquêter sur l’auteur du ou des tirs était un signe encourageant.

Plusieurs membres du Conseil ont mis l’accent sur la détérioration de la situation économique et humanitaire dans le pays, car le rapport du Secrétaire général alerte sur les besoins qui ont atteint un niveau record: 15,8 millions de personnes, soit environ un tiers de la population, auront besoin d’une aide humanitaire cette année, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  On dénombre au Soudan 3,7 millions de personnes déplacées et 926 000 réfugiés d’autres pays.  L’Albanie a appelé les autorités soudanaises à laisser acheminer l’aide humanitaire, sans restriction, tandis que le Royaume-Uni et Malte leur ont demandé de faciliter la délivrance de visas.  Le Soudan a répondu que toutes les demandes de visa et d’autorisation de voyage requises par la MINUATS ont été certifiées, et que les autorités soudanaises n’ont pas fait obstacle aux déplacements du personnel de la Mission.

La Chine a demandé à la communauté internationale d’apporter une assistance financière au Soudan et de débloquer l’aide internationale sans aucune condition préalable.  En écho, la Russie a jugé « hypocrites » les tentatives de lier l’octroi de l’aide humanitaire au transfert du pouvoir à un gouvernement civil.  Ces deux membres ont aussi demandé au Conseil de mettre fin aux sanctions contre le Soudan.  Ce dernier s’est dit impatient de la reprise de l’aide au développement de la part de ses partenaires bilatéraux engagés dans la transition, ainsi que des institutions financières internationales, afin d’atténuer les effets des chocs économiques et d’alléger le fardeau de sa dette extérieure. 

Le représentant russe a aussi rejeté toute ingérence extérieure dans les affaires du Soudan, de même que le Brésil a souligné l’importance du principe de l’appropriation et de la direction de la transition par les Soudanais.  Mais le Représentant spécial s’est montré rassurant à cet égard en affirmant que « les Soudanais se sont vraiment approprié le processus ».

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD S/2023/154

M. VOLKER PERTHES, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan et Chef de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), a rappelé que lors de sa dernière intervention au Conseil le 8 décembre dernier, les militaires soudanais et une palette d’acteurs civils avaient signé un accord-cadre politique déclenchant une nouvelle phase, une période de transition.  « Aujourd’hui, nous n’avons jamais été aussi près d’une solution bien que des défis subsistent », s’est-il réjoui.  Avec l’aide du mécanisme trilatéral les signataires de l’accord-cadre se sont mis d’accord le 9 janvier pour organiser des consultations à grande échelle, appelées « ateliers », chacun traitant de cinq contentieux: le démantèlement de l’ancien régime, la réforme du secteur de la sécurité, la justice et la justice transitionnelle, la mise en œuvre de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan, et enfin la question de l’est du Soudan.  Ces ateliers ont réuni des centaines de femmes et d’hommes soudanais représentant des groupes socioprofessionnels et des zones géographiques divers, a-t-il précisé en ajoutant que certains, qui avaient rejeté le processus politique, ont tout de même participé.  Il a trouvé que chaque atelier a permis des discussions enrichissantes et inclus des membres de la société souvent privés de parole.  Les femmes ont ainsi activement participé bien que le seuil des 40% n’ait pas été atteint.  L’atelier sur l’est du Soudan a permis des avancées significatives, tel cet accord sur un forum qui permettra de travailler à une réconciliation dans la région, s’est félicité M. Perthes.

La réforme du secteur de la sécurité fait partie des sujets les plus sensibles, a poursuivi le Représentant spécial.  La semaine dernière, les chefs militaires et civils ont signé un document conjoint sur le sujet, permettant au mécanisme trilatéral de lancer à son tour l’atelier, dans le courant de cette semaine.  Cet atelier se focalisera sur les possibilités de réforme et d’intégrer les Forces d’appui rapide et les mouvements armés en une seule force armée professionnelle nationale. 

Hier, a poursuivi M. Perthes, les signataires militaires et civils ont rencontré le mécanisme trilatéral pour se féliciter du début du processus et évoquer les prochaines étapes.  Les parties se sont mises d’accord sur le début d’un processus de rédaction d’un accord politique final et sur un processus constitutionnel.  Un comité a aussi été mis en place pour s’adresser aux partis et mouvements non signataires pour définir un calendrier.  L’objectif de la MINUATS est de « parvenir à un accord politique définitif », de se mettre d’accord sur une constitution, et de lancer un gouvernement civil avant la mi-avril, a rappelé le Représentant spécial.  « C’est ambitieux.  Mais cela peut se faire » avec la volonté politique nécessaire, a-t-il lancé.  Le mécanisme table sur « le faible nombre de différences subsistant sur le fond entre les acteurs principaux », y compris les leaders des deux grands mouvements armés membres du Gouvernement militaire actuel, qui n’ont pas signé l’accord-cadre et n’ont pas participé aux réunions d’hier.  En outre, les différends ne reposent pas sur la structure du dispositif.  « Ils veulent faire en sorte d’être représentés dans ce gouvernement », a nuancé le Représentant spécial pour le Soudan.  Rejoindre ce processus, énoncer leurs demandes dans le cadre de l’accord-cadre serait le meilleur moyen que ceci soit fait, selon lui.  Les Soudanais se sont vraiment approprié le processus, s’est-il également félicité.  Le général al-Burhan et d’autres leadeurs n’ont pas cessé de souligner qu’ils voulaient que le processus prenne corps, a souligné le Représentant spécial, louant leur coopération pour parvenir à un accord. 

Dans le même temps, le Chef de la MINUATS s’est dit préoccupé par « l’aggravation des tensions » ces dernières semaines entre l’armée soudanaise et les Forces d’appui rapide.  Il a appelé les parties à une désescalade rapide, encouragé par l’accord sur la réforme du secteur de la sécurité. 

Il s’agit maintenant de finaliser les discussions sur les mécanismes qui permettront de désigner un premier ministre et un nouveau gouvernement, a-t-il insisté.  Le Représentant spécial a aussi mis l’accent sur la détérioration de la situation économique et humanitaire dans le pays.  Le rapport du Secrétaire général indique que les besoins humanitaires dans le pays ont atteint un niveau record.  On estime que 15,8 millions de personnes, soit environ un tiers de la population, auront besoin d’une aide humanitaire cette année, selon l’aperçu des besoins humanitaires pour 2023 publié par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) en novembre 2022. 

Les conflits locaux, au Darfour notamment, portent sur l’accès et le contrôle des ressources, a-t-il précisé en soulignant que près de 16 000 personnes ont été déplacées par ce conflit entre décembre 2022 et février 2023.  Il a, là aussi, appelé à la désescalade, tout en déplorant que le déploiement des forces conjointes de sécurité continue d’être repoussé ainsi que la recrudescence des violences sexuelles et sexistes.

Le Comité du cessez-le-feu permanent pour le Darfour n’a relevé aucune violation depuis le 8 décembre, a toutefois informé M. Perthes pour qui l’accès humanitaire demeure une préoccupation centrale, ainsi que les freins bureaucratiques.  La MINUATS dialogue constamment avec les autorités pour fluidifier l’arrivée de visas, a-t-il dit en assurant que le dialogue est constant entre la Mission et les autorités sur le plan national de protection des civils.  Si les protestations contre le régime militaire continuent, elles sont moins nombreuses et moins fréquentes, a-t-il observé en notant que le recours excessif à la force a lui aussi été réduit, bien qu’un jeune manifestant ait été abattu à Khartoum le 28 février.  La réaction immédiate des autorités pour enquêter sur l’auteur du ou des tirs est un signe encourageant, selon le Chef de la MINUATS.  Au cours des deux derniers mois, 122 enfants associés à des groupes armés ont aussi été libérés (92 garçons et 30 filles).

Les défis du prochain gouvernement sont immenses, entre garantir la justice et respecter les droits humains, a déclaré M. Perthes, avant de conclure en revenant sur le long chemin parcouru.  « Le retour à la paix est proche. »  Le processus peut être « critiqué pour sa lenteur », mais il est parvenu à obtenir le soutien de nombreuses parties, y compris les autorités militaires.  M. Perthes a appelé à soutenir le futur gouvernement, en vue de préparer des élections libres, justes et équitables.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué les progrès réalisés depuis l’annonce de l’accord-cadre politique du 5 décembre au Soudan, notamment le large éventail de participants impliqués dans les ateliers achevés.  Il a encouragé la tenue dès que possible de l’atelier restant sur la réforme du secteur de la sécurité, en arguant qu’à l’approche du ramadan, il est essentiel de consolider les progrès réalisés jusqu’à présent.  Le moment est venu pour toutes les parties de saisir l’élan actuel, d’accélérer leur engagement et de parvenir à un accord final dans les semaines à venir, a encouragé le représentant.  Pour sa part, le Royaume-Uni travaillera avec ses partenaires pour garantir un soutien rapide et coordonné à un gouvernement de transition dirigé par des civils, a-t-il indiqué.  Il a soutenu le rôle de la MINUATS, de l’UA et de l’IGAD dans la facilitation du processus politique, avant d’encourager les parties non signataires des discussions et contributions à l’accord-cadre à se joindre à cet accord final. 

Sur le volet sécuritaire, le représentant a appelé les autorités soudanaises à accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan et du plan national pour la protection des civils, et à déployer la force conjointe de maintien de la sécurité au Darfour.  Quant à l’aggravation de la situation humanitaire, il a noté que cela continue d’avoir un effet dévastateur sur les citoyens soudanais ordinaires, avant de demander instamment aux autorités soudanaises de lever tous les obstacles bureaucratiques qui empêchent les humanitaires de répondre aux niveaux records des besoins.  Il s’agit notamment de traiter d’urgence les demandes de visas et de lever les restrictions de circulation pour le personnel des Nations Unies, a exigé le représentant. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a estimé que la signature, le 5 décembre dernier, de l’accord-cadre politique a donné un nouvel espoir au processus de transition civile, avec la possible tenue d’élections.  Il s’est aussi félicité du lancement de la dernière phase du processus politique, le 8 janvier, exhortant les non-signataires à y adhérer sans délai.  Pour être pérenne, ce processus doit être exhaustif et soutenu par le grand public, a-t-il dit, avant de s’alarmer du recours excessif à la force contre les manifestants.  Pour le représentant, il est urgent de mettre en œuvre les dispositions de l’Accord de Djouba et d’enquêter sur toutes les allégations de recours illégitime à la force, y compris de la part des forces de sécurité.  Les manifestants doivent avoir le droit de se rassembler pacifiquement, a-t-il insisté, encourageant également les parties à inclure des femmes dans leurs délégations à hauteur de 40%.  Malgré les progrès enregistrés sur le front politique, le délégué s’est dit préoccupé par la montée en intensité des confrontations dans les régions du Nil-Bleu, de l’ouest et du sud du Kordofan et dans certaines zones du Darfour.  Notant par ailleurs que les conditions en matière d’alimentation resteront difficiles, il a appelé les autorités soudanaises à fournir un accès humanitaire sans restriction.  Enfin, après avoir exprimé son inquiétude face aux informations faisant état de violences sexuelles contre les femmes, notamment dans les camps de personnes déplacées au Darfour, il a réaffirmé son soutien au mécanisme trilatéral et s’est félicité du travail de la MINUATS en vue du rétablissement de la stabilité au Soudan. 

Mme MONICA SOLEDAD SANCHEZ IZQUIERDO (Équateur) a salué la signature de l’accord-cadre du 5 décembre dernier au Soudan en espérant qu’il vienne renforcer l’espoir d’une solution politique inclusive et d’un nouveau gouvernement civil par le biais d’un processus électoral crédible, inclusif et transparent.  Elle a insisté sur la participation des femmes à ce processus politique et demandé à tous les signataires de l’accord de maintenir leur engagement sur la représentation des femmes, en particulier aux postes de direction, et dans les futures nominations des autorités de transition.  Le Conseil de sécurité devrait encourager les groupes non signataires de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan à se joindre au processus de paix, a ajouté la représentante.

Face à la situation de la violence, en particulier dans les États du Nil-Bleu, du Kordofan occidental, du Kordofan méridional et du Darfour, elle a demandé aux autorités soudanaises de redoubler d’efforts pour assurer la protection des civils, en soulignant, à ce sujet, la pertinence du plan national de protection des civils pour renforcer la protection de ces communautés.  Elle a également exprimé ses préoccupations face aux obstacles bureaucratiques et sécuritaires qui limitent la capacité de la communauté internationale à acheminer une aide humanitaire à ceux qui en ont le plus besoin, soit plus de 15,8 millions de personnes, c’est-à-dire un tiers de la population.  Elle a donc exhorté les autorités à lever immédiatement ces obstacles et à respecter l’accord sur le statut des forces de la Mission, notamment en levant les restrictions à la circulation du personnel de l’ONU.

M. ROBERT WOOD (États-Unis) a jugé essentiel de parvenir à un accord politique définitif pour un nouveau gouvernement civil, en vue de mettre fin à la crise politique au Soudan et de répondre aux problèmes sécuritaires, économiques et humanitaires les plus urgents.  Saluant les progrès réalisés pendant la phase 2 de l’Accord de paix, il a appelé les parties à s’appuyer sur cet élan en finalisant rapidement un accord sur un gouvernement civil et en mettant en place un processus constitutionnel permettant au Soudan de reprendre sa transition démocratique.  Reconnaissant que les leaders militaires ont déclaré vouloir se retirer de la vie politique, le délégué a appelé toutes les parties à faire passer les intérêts nationaux du Soudan avant leurs propres intérêts politiques. 

Le représentant, reconnaissant la fragilité des transitions démocratiques, a dit que les États-Unis chercheront à promouvoir la redevabilité de ceux qui porteraient atteinte à ce processus, qu’ils soient civils ou militaires.  Il a de plus exigé que les femmes, les jeunes et les personnes déplacées puissent participer à ce processus sans craintes de représailles.  Arguant que le respect absolu des libertés d’expression et d’association est vital à la réussite du processus de transition, il a demandé de faire répondre de leurs actes ceux qui sont responsables des violences contre les manifestations pacifiques.  Sur le plan sécuritaire, il s’est dit préoccupé par les violences chroniques et a appelé au respect de l’Accord de Djouba en vue de permettre, notamment, un déploiement des forces conjointes de sécurité.

M. HAMAMOTO YUKIYA (Japon) a passé en revue les quatre piliers du mandat de la MINUATS, saluant, en particulier, la signature de l’accord-cadre politique en décembre dernier ainsi que le travail du mécanisme trilatéral dans la mise en œuvre de cet accord, en tant que facilitateur sur les questions en suspens. 

À cet égard, le représentant s’est félicité de la large participation des différentes parties prenantes, notamment des femmes, des jeunes et des représentants de l’ensemble du pays, dans de le cadre de l’accord.  Le représentant s’est dit d’avis que le lancement de la phase finale du processus politique, le 8 janvier, et l’annonce hier du calendrier convenu du processus politique, constituent des avancées importantes vers le retour d’un gouvernement de transition dirigé par des civils.  Le Conseil devrait encourager les non-signataires de l’accord à se joindre au processus, a-t-il insisté, appelant également à exhorter les partenaires régionaux et internationaux à soutenir ce processus politique dirigé par le Soudan et appartenant au Soudan, conformément au mécanisme trilatéral et en étroite consultation avec lui. 

Abordant ensuite le deuxième pilier de l’accord-cadre, il a plaidé pour le soutien du processus de paix et de la mise en œuvre de Accord de Djouba pour la paix au Soudan.  S’agissant du volet relatif à la consolidation de la paix, la protection des civils et l’état de droit, le représentant s’est dit profondément préoccupé par l’usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques qui exercent leur droit légitime de se rassembler pacifiquement, appelant les autorités à prendre les mesures appropriées pour mettre fin à ces actes contre les manifestants non violents.  Venant à la détérioration des conditions de vie des citoyens soudanais, le délégué a plaidé en faveur d’un gouvernement de transition dirigé par des civils afin de garantir la fourniture d’une aide humanitaire suffisante par la communauté internationale.  Pour finir, il a réitéré le soutien total de son pays à la MINUATS, rappelant qu’en décembre dernier, le Japon a décidé d’apporter une contribution de 664 435 dollars pour soutenir ses activités dans le Kordofan méridional et l’État du Nil-Bleu. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a reconnu le rôle clef que jouent la MINUATS, l’UA et l’IGAD dans le processus de transition au Soudan, déclarant qu’il s’agit maintenant de consolider sans tarder les progrès dans un accord politique, et ce pour trois raisons.  Premièrement, une solution politique au niveau national est essentielle pour améliorer la situation humanitaire, économique et sécuritaire dans l’ensemble du pays, a dit le représentant.  Elle s’est dite profondément préoccupée par la violence persistante au Darfour, dans les États Kordofan et dans celui du Nil-Bleu, jugeant inacceptable ces violences, qui touchent tout d’abord la population civile, et appelant toutes les parties à respecter le droit international humanitaire.  La déléguée a salué le travail du Comité du cessez-le-feu permanent pour le Darfour en termes de désamorçage des tensions, l’un des rares mécanismes mis en place par l’Accord de Djouba, appelant cependant à faire davantage pour lutter contre l’insécurité.  La souffrance humaine ne cesse d’augmenter puisque près de 16 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire, a-t-elle rappelé.

En deuxième lieu, la déléguée a fait valoir qu’avec le retour imminent d’un leadership civil, il faut investir dans le renforcement d’une transition inclusive, portée par un large soutien public.  Les efforts déployés par les signataires civils et militaires visant à élargir la participation de divers acteurs dans les cinq processus de dialogue constituent un signal encourageant, a-t-elle relevé.  Toutefois, et malgré leur engagement, les femmes restent sous-représentées tout au long du processus et cela doit changer, a-t-elle exigé en rappelant que les femmes ont été à l’avant-garde de la révolution soudanaise, et que leur participation pleine, égale et significative reste absolument cruciale pour la réussite de la transition politique.  Elle a donc appelé toutes les parties à tenir leurs promesses d’assurer une représentation d’au moins 40% de femmes dans des futures institutions de transition.  En dernier lieu, elle a estimé qu’un engagement ferme en faveur de la justice sera fondamental pour rétablir la confiance du peuple soudanais dans les autorités du pays et briser les cycles de la violence, en insistant sur le fait que les responsables des violations et des abus des droits humains doivent rendre des comptes. 

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) a estimé que le rétablissement d’une transition démocratique demeure la priorité au Soudan.  Il a donc appelé l’ensemble des forces politiques soudanaises à suivre l’esprit de compromis qui a rendu possible l’accord-cadre du 5 décembre 2022.  Cette coopération est indispensable pour traiter les questions qui restent en suspens, y compris par une participation effective des femmes aux processus politiques, a-t-il dit, avant de souligner l’importance d’un rétablissement de la confiance de la communauté internationale.  Rappelant à cet égard que le Secrétaire général a présenté dans son rapport les défis auxquels le gouvernement civil devra faire face une fois qu’il sera mis en place, le représentant a salué les efforts de la MINUATS pour préparer cette perspective.  Il a cependant constaté que la situation humanitaire reste précaire et que le niveau des violences intercommunautaires ne cesse d’augmenter, appelant les parties à mettre fin au recrutement de combattants qui alimente l’escalade.  Le délégué a également rappelé que l’Accord de Djouba a fixé un cadre pour la réintégration des groupes armés non signataires et le déploiement d’une force conjointe.  Enfin, il a exhorté les autorités soudanaises à coopérer avec la MINUATS et à lever les obstacles qui affectent son fonctionnement, en particulier le blocage des visas de son personnel et les restrictions à leur liberté de mouvement. 

M. LUÍS GUILHERME PARGA CINTRA (Brésil) a souligné l’importance du principe de l’appropriation et de la direction de la transition par les Soudanais, saluant, à cet égard, les efforts menés dans le cadre du mécanisme trilatéral (MINUATS, UA et IGAD) en vue de soutenir et de faciliter la transition dirigée par les civils.  Le représentant a dit apprécier tout particulièrement les mesures prises par le mécanisme trilatéral pour impliquer les parties prenantes soudanaises qui n’ont pas encore signé l’accord-cadre, encourageant ces acteurs politiques à se joindre à l’accord et à participer aux procédures formelles.  Il a estimé que l’appropriation soudanaise est cohérente avec des consultations globales et véritablement nationales.  À cet égard, il s’est félicité de la manière dont le mécanisme trilatéral a permis une large participation non seulement aux dialogues officiels, mais aussi aux activités communautaires.

Abordant ensuite la situation au Darfour, le délégué s’est inquiété des violences intercommunautaires et conflits armés, en particulier dans l’État du Nil-Bleu et dans celui du Kordofan méridional.  Bien que la MINUATS soutienne les processus de paix au Soudan et la mise en œuvre de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan, la protection des civils est devenue une responsabilité exclusive des autorités soudanaises depuis que l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) a achevé son retrait, a rappelé le représentant.  Par conséquent, a-t-il conclu, la protection adéquate des civils et le maintien de la paix dépendent également des progrès de la transition politique menée par les civils.

M. DAI BING (Chine) a loué les progrès politiques en cours au Soudan, notamment la signature de l’accord-cadre et le consensus autour d’un accord politique et de l’élaboration d’une nouvelle constitution.  La situation économique et humanitaire est cependant inquiétante, avec un tiers de la population dans le besoin d’une assistance humanitaire.  Le délégué a encouragé les organisations financières internationales à reprendre leur soutien aux autorités, sans condition.  Certains pays, a-t-il relevé, lient les conditions d’assistance humanitaire aux progrès sur le front politique.  Or ceci mine la souveraineté du Soudan et méprise les droits humains des Soudanais.  Concernant l’imposition par le Conseil de sécurité de sanctions et le maintien de celles-ci, il a, là aussi, émis des réserves.  Les sanctions ne se justifient plus d’un point de vue politique; en plus, elles sapent les efforts du Soudan pour lutter contre le crime et l’instabilité, a-t-il estimé.  Il a encouragé à prendre en considération les améliorations dans le pays, ainsi qu’à arrêter d’utiliser les sanctions comme un outil de « manipulation politique ». 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) s’est inquiétée du paysage politique qui reste instable avec de multiples perspectives évolutives, tout en saluant la volonté des dirigeants de s’engager de manière constructive avec les différentes composantes de la société civile, ce qui a rendu possible, selon elle la signature, le 5 décembre 2022, de l’accord-cadre politique.  Dans le même temps, elle a constaté que cet accord a laissé de côté des acteurs importants de la scène politique du pays qui continue de le rejeter.  Il a dès lors jugé peu probable d’aboutir à un règlement global en forçant artificiellement le processus politique actuel.  Afin de parvenir à une solution durable, il a recommandé de fonder le dialogue inter-soudanais sur le principe de l’inclusivité, en travaillant avec toutes les forces politiques et groupes ethniques et confessionnels, y compris ceux qui n’ont pas signé l’accord.  Il faut une adhésion la plus large possible pour avancer dans le processus politique, a-t-elle expliqué.  C’est pourquoi elle a demandé instamment au mécanisme trilatéral de poursuivre ses efforts pour soutenir la rédaction et la mise en œuvre d’un document constitutionnel qui unira le pays dans son ensemble.  « Toute ingérence extérieure dans les affaires du Soudan ami est contre-productive et inacceptable », a-t-elle mis en garde, se disant convaincue que les citoyens de ce pays ont la capacité et le besoin de résoudre eux-mêmes leurs problèmes internes. 

Venant ensuite à la situation socioéconomique, la représentante a estimé qu’une période prolongée de turbulences politiques internes et de violences récurrentes a eu un impact négatif, relevant qu’un pourcentage important de la population soudanaise vit en dessous du seuil de pauvreté et que le pays souffre de pénuries alimentaires.  C’est pourquoi elle a demandé à la communauté internationale d’apporter une aide financière au Soudan et de débloquer l’aide internationale sans aucune condition préalable.  Elle a en effet jugé « hypocrites » les tentatives de lier cette question au transfert du pouvoir dans le pays à un gouvernement civil.  Abordant ensuite la situation au Darfour, la représentante a fait valoir que les dirigeants soudanais ont su stabiliser la situation et mettre en œuvre les accords l’Accord de paix de Djouba. 

Pour finir, elle a soutenu la demande de Khartoum de revoir les sanctions obsolètes du Conseil de sécurité, à laquelle fait écho la position consolidée de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), de la Ligue des États arabes et du Groupe des États d’Afrique, à New York.  Dans la même veine, la déléguée s’est dite catégoriquement opposée à l’utilisation de mesures restrictives unilatérales contre le Soudan dans le but d’exercer une pression politique sur les autorités, les jugeant illégitimes de par leur nature et préjudiciables pour les Soudanais.

M. SUOOD RASHED ALI ALWALI ALMAZROUEI (Émirats arabes unis) a appelé le Conseil et la communauté internationale à aider le Soudan à surmonter les obstacles auxquels il est confronté, notamment le manque de ressources financières nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba.  Il faut également créer un environnement propice pour réaliser des progrès significatifs et durables dans le processus politique.  Il a relevé que l’achèvement de la période de transition au Soudan reste tributaire d’un large consensus politique, saluant à cet égard les efforts récemment déployés pour élargir l’éventail des parties impliquées dans le processus politique.  L’élaboration de la voie à suivre nécessitera des efforts considérables de la part de tous les acteurs pour surmonter leurs divergences, travailler à un consensus et instaurer la confiance, a insisté le représentant qui y a vu le seul moyen de parvenir à une solution véritablement dirigée et appartenant au Soudan.  De même, il a estimé que les efforts diplomatiques en cours pour appuyer le processus politique doivent s’accompagner d’un soutien décisif à l’économie, relevant que l’inflation reste parmi les plus élevées au monde.  Le délégué a également souligné l’ampleur de la crise humanitaire puisqu’on estime que 15,8 millions de personnes -soit environ un tiers de la population– auront besoin d’une aide humanitaire cette année.  La paix ne se construit pas dans le vide, a-t-il tranché, et les conditions matérielles du progrès sont essentielles pour lutter contre les inégalités et promouvoir une paix durable.  Compte tenu de la vulnérabilité du Soudan aux chocs climatiques, il a également insisté sur la nécessité d’une réponse globale pour appuyer la résistance des communautés. 

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a indiqué que Malte soutient fermement une transition civile au Soudan qui, une fois établie, reflétera les aspirations du peuple soudanais.  Se félicitant de la signature de l’accord-cadre politique en décembre dernier, il a exhorté les signataires comme les non-signataires à s’engager pleinement et à rejoindre le processus politique.  Il a ensuite insisté sur le nécessaire caractère inclusif du processus, appelant les signataires à respecter leur engagement d’inclure une représentation minimale de 40% de femmes dans les organes législatifs, exécutifs et souverains, ainsi que sur la nécessité de traduire en justice les auteurs de violences basées sur le genre durant le conflit.  S’il s’est félicité de la libération de détenus darfouriens à Khartoum, le délégué a déclaré demeurer profondément préoccupé par la recrudescence des violences intercommunautaires au Soudan, notamment au Darfour.  Il a de même condamné l’assassinat d’un conseiller en consolidation de la paix dans l’État du Nil-Bleu, et appelé à la protection urgente des travailleurs humanitaires dans le pays.  Concernant la situation humanitaire, les besoins ont atteint un niveau record avec un tiers de la population ayant besoin d’aide humanitaire, a-t-il noté en prévenant que la situation devrait s’aggraver en 2023.  Le représentant a également mentionné les chocs climatiques qui ont, eux aussi, entraîné des déplacements de population, alors que les ressources ont été taries par des années de guerre civile et d’impunité.  Le délégué maltais a enfin réitéré son engagement en faveur d’un processus dirigé et pris en charge par le Soudan, facilité par le mécanisme trilatéral, pour faire revenir la paix.

Au nom du des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), a, d’emblée, fait remarquer que le Soudan est à la croisée des chemins, et salué les efforts déployés par le peuple soudanais pour surmonter les défis politiques, sécuritaires et humanitaires.

Les A3 continuent de soutenir fermement les initiatives en cours visant à promouvoir la réconciliation nationale, à rétablir l’ordre constitutionnel et à garantir la stabilité et réitèrent leur appel à la communauté internationale pour qu’elle œuvre de concert avec la MINUATS afin de faciliter le processus de paix et mettre un terme à ce conflit qui dure depuis des années.

Sur le plan politique, le représentant a salué les progrès réalisés avec la signature, le 5 décembre 2022, d’un accord-cadre visant à relancer le processus de transition au Soudan et à mettre fin au blocage du processus politique.

Cet accord, qui prévoit une période de transition de deux ans sous « une autorité civile pleinement démocratique », constitue, à ses yeux, une réelle avancée vers une sortie de crise et la tenue d’élections crédibles, justes et démocratiques.  Les A3 ont donc invité les partis politiques non signataires à s’inscrire dans la nouvelle dynamique impulsée par ces évolutions positives.

Poursuivant, les trois pays africains se sont, en outre, fait l’écho de l’appel lancé par le Président de la Commission de l’Union africaine, qui encourage toutes les parties à travailler ensemble de bonne foi à la mise en place d’institutions démocratiques et à l’instauration d’un ordre constitutionnel.

À cet égard, le représentant a noté avec satisfaction la tenue de la conférence sur l’Accord de paix de Djouba, qui s’est déroulée du 31 janvier au 3 février, et qui a été l’occasion de discuter de la question des droits des femmes.  « Nous tenons à souligner que la participation des femmes est essentielle au succès du processus politique au Soudan », a-t-il insisté, insistant à veiller à ce qu’elles soient représentées dans tous les domaines, y compris aux postes de décision dans les institutions à mettre en place. 

Sur le plan de la sécurité, malgré la tendance à la baisse de l’insécurité, les conflits armés et la criminalité restent des défis majeurs au Soudan, a fait remarquer le représentant, faisant part de la préoccupation des A3 sur la persistance des affrontements intercommunautaires, en particulier dans l’État du Nil-Bleu, le Kordofan occidental, le Kordofan méridional, le Darfour central et le Darfour méridional.

Il est regrettable que les populations civiles du nord soient prises pour cible, notamment les femmes, les enfants et les personnes vulnérables.  Toutefois, les A3 ont noté avec satisfaction la mise en œuvre par la MINUATS d’une évaluation de la menace pour les civils, l’amélioration de la documentation sur les droits humains liés aux conflits et la protection des civils.  Tout en soutenant les efforts des autorités soudanaises pour créer un environnement propice à la reconstruction du pays, il s’est félicité de la libération de détenus du Darfour, de Khartoum et de Port-Soudan, ainsi que de la décision de mettre fin à l’usage de la force contre les manifestants.

S’agissant de la situation humanitaire, les A3 ont réitéré leur appel à un soutien durable au Plan de réponse humanitaire 2023 pour le Soudan.

Pour finir, le délégué a salué le rôle de facilitation du mécanisme trilatéral, qui a permis la relance du processus politique mais aussi le renforcement de l’aide des donateurs et du Fonds pour la consolidation de la paix. 

M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a fait état de l’accord-cadre politique signé en décembre dernier avec les composantes civiles du pays, notamment les Forces de la liberté et du changement, le Conseil central et d’autres entités professionnelles et syndicales.  Cet accord devrait être suivi d’un accord final inaugurant une période de transition de deux ans, dirigée par un gouvernement civil, assortie d’un engagement de l’armée à quitter la vie politique.  La composante militaire a affirmé à maintes reprises son attachement à cet accord-cadre et son intention de travailler avec l’ensemble des parties afin de parvenir à un accord final ouvrant la voie à la formation d’un gouvernement de transition dirigé par des civils, a assuré le délégué.  De leur côté, les forces civiles signataires de l’accord-cadre ont entrepris la mise en œuvre d’un plan visant à obtenir le consensus national le plus large possible, a expliqué le délégué. 

Au terme d’une importante réunion qui s’est tenue la semaine dernière avec l’ensemble des parties prenantes, il a été décidé que le mécanisme tripartite adressera une invitation aux forces signataires et non signataires afin de procéder immédiatement à la rédaction d’un projet d’accord final, a expliqué le délégué.  En ce qui concerne la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, il a indiqué que le Gouvernement de transition a fixé le mois dernier un calendrier pour la mise en œuvre des dispositions en suspens de l’accord.  Une matrice actualisée de la mise en œuvre de l’accord approuvée par le Gouvernement et les partenaires du processus de paix a été signée en février dernier.  Le Gouvernement soudanais ne ménagera aucun effort pour s’engager de manière positive et constructive dans les négociations avec les autres factions qui ne se sont pas encore jointes au processus de paix, a-t-il assuré, en réaffirmation de sa détermination à renforcer la protection des civils au Darfour.  Il a aussi indiqué que la situation dans cette région et dans l’État du Nil-Bleu s’améliore progressivement, alors que nombre de réfugiés et de personnes déplacées regagnent leur foyer. 

Poursuivant, le représentant a dit attendre avec impatience la reprise de l’aide au développement de la part des partenaires bilatéraux engagés dans la transition au Soudan, ainsi que des institutions financières internationales, afin d’atténuer les effets des réformes économiques et d’alléger le fardeau de la dette extérieure.  Le rapport du Secrétaire général reconnaît par ailleurs les développements positifs que constituent la sortie de l’impasse politique grâce aux efforts du mécanisme tripartite, a-t-il fait remarquer, en notant l’engagement de la composante militaire à sortir du processus politique et à donner une impulsion à la conclusion d’un accord final et à la formation d’un gouvernement civil.  Il s’est félicité de la participation au processus politique des personnes déplacées, des jeunes, des nomades, des pasteurs et des représentants des femmes.  À ses yeux, le rôle de l’ONU doit dès lors consister à assurer la tenue d’un dialogue multilatéral, à conclure des arrangements sécuritaires et à faciliter le retour des personnes déplacées.  Le délégué a confirmé à cet effet que toutes les demandes de visa et d’autorisation de voyage requises par la MINUATS ont été certifiées conformément à son mandat et que les autorités soudanaises n’ont pas fait obstacle aux mouvements du personnel de la Mission.  Il a en outre ajouté qu’un comité exécutif national composé des institutions compétentes de l’État est chargé d’éliminer tout obstacle au fonctionnement de la MINUATS. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RPDC: le Conseil de sécurité divisé sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne dans un contexte d’escalade des tensions

9287e séance - matin
CS/15234

RPDC: le Conseil de sécurité divisé sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne dans un contexte d’escalade des tensions

Le Conseil de sécurité a une fois encore affiché, ce matin, ses divisions pour l’heure insurmontables autour du dossier nucléaire de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), cela après de nouveaux tirs de missiles balistiques effectués par les autorités de Pyongyang, dont un datant du 16 mars. 

Aux membres du Conseil, le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, n’a pas seulement indiqué que les systèmes qui ont été mis à l’épreuve jeudi dernier et le 18 février, « ainsi qu’à deux reprises en 2022 », sont capables d’atteindre la plupart des zones de la Terre.  M. Miroslav Jenča leur a surtout signifié que le Secrétaire général de l’ONU, qui demeure profondément attaché à la réalisation d’un monde exempt d’armes nucléaires, est préoccupé par les divisions qui empêchent le Conseil d’agir de manière unie sur la question cruciale de la non-prolifération et de la RPDC.  Des délégations ont malgré tout campé sur leurs positions, a priori irréconciliables, quant aux moyens à mettre en œuvre pour parvenir à une sortie de crise politique par la voie de la diplomatie.  Les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont réagi aux violations des résolutions du Conseil sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne de la RPDC en proposant qu’il soit adopté, en l’état, une déclaration présidentielle.

La délégation des États-Unis a notamment déploré qu’alors que ce pays a déjà procédé à 10 tirs de ce type en 2023, « la Chine et la Fédération de Russie pratiquent l’obstruction » pour permettre à Pyongyang « de lancer des missiles en toute impunité ».  Combien de fois la RPDC devra-t-elle violer les résolutions du Conseil avant que ces deux membres permanents du Conseil arrêtent de la protéger? a-t-elle demandé, allant jusqu’à « implorer » Chine et Russie à faire en sorte que le Conseil de sécurité retrouve le niveau de coopération qui était le sien autour du dossier nucléaire nord-coréen.  La France et le Royaume-Uni ont abondé en ce sens, la délégation française déclarant avec gravité que « l’inaction du Conseil ne peut pas devenir la norme sur le dossier nord-coréen ».  Reconnaissant que la division du Conseil offre à la RPDC une « couverture », le représentant français a estimé que la question était désormais de savoir si l’organe chargé de la paix et de la sécurité internationales peut accepter que ce pays devienne un État nucléaire.  « La France ne s’y résoudra pas! » a-t-il martelé en guise de réponse, expliquant que ne rien faire aujourd’hui reviendrait à banaliser la prolifération nucléaire. 

Dans son exposé, M. Jenča a souligné que la RPDC poursuit « activement » son programme d’armement nucléaire, comme en atteste l’approbation en septembre 2022 d’une nouvelle loi définissant les conditions dans lesquelles elle pouvait utiliser des armes nucléaires, « y compris de manière préventive dans certaines circonstances ».  Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’activité sur le site d’essais nucléaires de Punggye-ri reste élevée, aussi un septième essai nucléaire saperait-il pour de bon la norme internationale contre les essais nucléaires, a-t-il en outre averti. 

Le représentant de la République de Corée, qui a condamné la multiplication des tirs de missiles intercontinentaux par la RPDC, a indiqué que celui de samedi avait été effectué quelques heures seulement avant le vol du Président coréen vers le Japon, et ce, pour « saboter une étape critique dans le renouveau des relations entre les deux pays ».  Au Conseil de sécurité qui « continue de fermer les yeux sur les violations répétées de la RPDC », il a rappelé que son pays subit presque quotidiennement les plus « dangereuses provocations ».  Soulignant que les sanctions internationales ont contribué à ralentir le développement des programmes nucléaires et de missiles de la RPDC, il a exhorté tous les États Membres à appliquer les résolutions du Conseil de sécurité afin d’empêcher Pyongyang de profiter de la paralysie du Conseil de sécurité pour poursuivre ses activités militaires illégales. 

La Russie et la Chine ne l’ont pas entendu ainsi.  Leurs déclarations ont visé directement les États-Unis, leur reprochant l’incohérence d’exhorter la RPDC à abandonner son programme nucléaire au nom de la non-prolifération tout en menant des manœuvres militaires avec la République de Corée pour « parvenir à la paix par la force », et en scellant des alliances militaro-industrielles avec des États non dotés d’armes nucléaires propices à une course aux armements.  Sans surprise, les deux membres permanents du Conseil ont rejeté la proposition américaine de déclaration présidentielle, les États-Unis agissant aux côtés de la République de Corée pour, d’après eux, défendre leurs intérêts au mépris de la situation humanitaire en RPDC et de la stabilité régionale.  À la place, ils ont invité la délégation américaine à accueillir favorablement leur projet de résolution « politico-humanitaire » conjoint. 

Dans une seconde déclaration, les États-Unis ont répondu à la Chine que l’alliance AUKUS, qui les lie à l’Australie et au Royaume-Uni, ne représente en rien une violation du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Quant aux exercices militaires conjoints qu’ils mènent avec la République de Corée, les États-Unis les ont qualifiés de « routiniers et de nature purement défensive ».  La représentante américaine a également estimé que le projet de résolution de la Chine et de la Russie ne ferait que « récompenser la RPDC pour son inaction absolue, y compris sur le plan humanitaire ».  Sur ce dernier point, le Sous-Secrétaire général a appelé la RPDC à autoriser l’entrée sans entrave du personnel international, y compris le Coordonnateur résident, et de l’aide humanitaire. 

NON-PROLIFÉRATION: RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE

Déclarations

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour lEurope, l’Asie centrale et les Amériques, a informé les membres du Conseil de sécurité que, selon son agence de presse officielle, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a mené le 16 mars ce qu’elle a décrit comme un exercice de lancement de missiles balistiques intercontinentaux.  La RPDC a annoncé dans la foulée que le missile balistique en question, désigné sous le nom de Hwasong-17, a volé sur une distance de 1 000 kilomètres et à une altitude de 6 045 kilomètres, a-t-il ajouté.  M. Jenča a également confirmé que la RPDC a procédé au tir d’un missile balistique à courte portée pas plus tard que dimanche, un tir faisant partie, d’après les autorités du pays, d’un  « exercice simulant une contre-attaque nucléaire ».  Notant qu’il s’agit là du quatrième événement en 11 jours au cours duquel la RPDC a effectué des tirs de missiles reposant sur l’usage d’une technologie balistique, le Sous-Secrétaire général a indiqué qu’en 2023, ce pays a déjà réalisé un total de 14 tirs de ce type.  Or, s’est-il empressé de souligner, les systèmes qui ont été mis à l’épreuve les 16 mars et 18 février, ainsi qu’à deux reprises l’an dernier, sont capables d’atteindre la plupart des zones de la Terre. 

Dans ce contexte, M. Jenča a réitéré que Secrétaire général de l’ONU condamne fermement le lancement d’un énième missile balistique de portée intercontinentale par la RPDC, ainsi que ses autres lancements utilisant la technologie des missiles balistiques.  « Le Secrétaire général réitère ses appels à la RPDC pour qu’elle renonce immédiatement à toute nouvelle action déstabilisatrice, qu’elle se conforme pleinement à ses obligations internationales en vertu de toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, en vue reprendre le dialogue menant à une paix durable et à la dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne », a-t-il encore dit. 

Après avoir confirmé que la RPDC poursuit activement son programme d’armement nucléaire, ayant approuvé en septembre 2022 une nouvelle loi définissant les conditions dans lesquelles elle pouvait utiliser des armes nucléaires, « y compris de manière préventive dans certaines circonstances », il a indiqué que, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’activité sur le site d’essais nucléaires de Punggye-ri reste élevée.  Aussi, un septième essai nucléaire serait-il une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité et saperait-il la norme internationale contre les essais nucléaires, a réagi M. Jenča. 

Selon le Sous-Secrétaire général, la RPDC a clairement fait part de son intention de poursuivre ses programmes d’armes nucléaires et de missiles balistiques, en violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  La situation dans la péninsule coréenne continue de prendre une mauvaise direction.  Les tensions continuent d’augmenter, sans aucune bretelle de sortie en vue, s’est-il inquiété.  Il également a indiqué que le Secrétaire général reste profondément préoccupé par les divisions qui ont empêché la communauté internationale d’agir sur cette question.  La péninsule coréenne doit être une zone de coopération et la réunion d’aujourd’hui l’occasion de discuter des mesures pratiques pour parvenir à une solution pacifique, globale, diplomatique et politique, a-t-il estimé.  Il a exhorté la RPDC à prendre des initiatives immédiates pour renouer le dialogue menant à une paix durable et à la dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne.  En outre, les canaux de communication doivent être améliorés afin que cesse la rhétorique conflictuelle qui ne fait qu’attiser les tensions politiques et empêche l’instauration d’un climat propice à l’exploration d’issues diplomatiques à la crise.  Enfin, s’agissant de la situation humanitaire, M. Jenča a appelé la RPDC à autoriser l’entrée sans entrave du personnel international, y compris le Coordonnateur résident, et de l’aide humanitaire. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a condamné dans les termes les plus forts les essais effectués par la RPDC les « 15 et 17 mars ».  Rappelant que le Conseil de sécurité s’est réuni il y a un mois pour répondre à la menace liée au lancement par la RPDC d’un missile balistique intercontinental, elle a constaté que Pyongyang a depuis lancé d’autres engins de ce type.  Ces lancements sont non seulement une menace et un élément de déstabilisation graves mais permettent aussi à la RPDC de poursuivre ses programmes d’armes dangereuses, a-t-elle souligné, avant d’observer que « le silence du Conseil n’aboutit à rien ».  Penser que la RPDC arrêtera par elle-même est erroné, a fait valoir la représentante, jugeant que l’inaction du Conseil face à cette escalade affaiblit sa crédibilité et donne plus d’audace à la RPDC.  Les résolutions adoptées par le passé ont envoyé un message diplomatique clair mais aussi lancé un avertissement à tous ceux qui pourraient se lancer dans la prolifération, a-t-elle ajouté. 

Alors que la RPDC a lancé 10 missiles balistiques intercontinentaux depuis un an, les États-Unis lui ont proposé de produire des résultats pour aboutir à des négociations en toute bonne foi, a relevé la déléguée, rappelant que la majorité des membres du Conseil ont appuyé cette approche.  Mais la RPDC continue de la refuser, tandis que la Russie et la Chine, par leur attitude, l’encourage à lancer des missiles balistiques en toute impunité.  « Ce que font ces pays en dit plus long que leurs paroles », a-t-elle dénoncé, non sans préciser que ces campagnes de lancement sans précédent ont commencé bien avant que les États-Unis et leurs alliés reprennent leurs exercices défensifs.  Combien de fois la RPDC devra violer les résolutions du Conseil pour que la Russie et la Chine arrêtent de la soutenir? s’est-elle interrogée.  Combien de morts à cause de la famine faudra-t-il pour que la RPDC renonce à son programme d’armes de destruction massive?  Que se passera-t-il si un missile balistique intercontinental explose en plein vol?  La représentante a donc imploré le Conseil à retrouver le niveau de coopération qui a existé face à cette menace et à condamner cette évolution qui met en péril la paix et la sécurité internationales.  Il est grand temps que la RPDC renonce à son programme d’armes de destruction massive de manière vérifiée, transparente et irréversible, a-t-elle insisté, en indiquant que sa délégation a proposé l’adoption d’une déclaration présidentielle pour répondre aux menaces de la RPDC.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a dénoncé les provocations de la RPDC qui mettent en danger la sécurité et la stabilité dans la région.  Mais la vraie question est de savoir que fera le Conseil de sécurité, a-t-il ajouté, exhortant l’organe à faire preuve d’unité, à éviter l’escalade, et à ne pas rester les bras croisés face à un régime qui continue de violer ses résolutions.  Le silence du Conseil autorise Kim Jong-un à faire plus et c’est exactement ce qu’il fait, s’est alarmé le délégué qui a exhorté le Conseil à collectivement condamner les violations de ses résolutions.  N’attendons pas une catastrophe pour nous réveiller, a-t-il lancé.  Il a indiqué que les États-Unis et l’Albanie, entre autres, ont demandé cette réunion du Conseil pour appuyer la diplomatie et le dialogue, exhortant Pyongyang à en faire de même. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a dit avec gravité que « l’inaction ne peut pas devenir la norme sur le dossier nord-coréen ».  Rappelant les enjeux, il a indiqué qu’un missile tel que le Hwasong-17 menace la sécurité de tous les membres du Conseil.  Il a en effet fait observer qu’il peut frapper tous les continents et qu’il est capable d’emporter les têtes nucléaires dont la RPDC dispose et qu’elle continue de fabriquer, ajoutant que ce type de missile n’est qu’une partie du problème, ceux de courte portée comme ceux tirés hier étant produits en série.  M. de Rivière a déclaré que chacune des provocations du « régime de Pyongyang » défie l’autorité du Conseil et viole ses résolutions.  Il a reconnu que la division du Conseil offre à la RPDC une couverture, posant ensuite la question de savoir si le Conseil peut accepter que ce pays devienne un État nucléaire.  « La France ne s’y résoudra pas », a-t-il martelé en guise de réponse, expliquant que ne rien faire aujourd’hui revient à banaliser la prolifération nucléaire.  Cela revient à accepter de voir, demain, les crises de prolifération se multiplier ailleurs dans le monde, a-t-il encore averti. 

Après avoir souligné que la priorité est de renouer le dialogue « sans préconditions », le délégué a mis l’accent sur les propositions faites en ce sens et qu’il appartient aux autorités nord-coréennes de saisir.  « Notre objectif est inchangé: la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la Corée du Nord », a-t-il poursuivi, ajoutant que le Conseil doit faire respecter ses propres décisions.  Ainsi a-t-il jugé que, pour enrayer l’escalade, il est indispensable que soient appliquées pleinement toutes les sanctions internationales adoptées à l’unanimité, ce qui suppose de lutter contre toutes formes de contournement.  Les nouvelles provocations de la RPDC exigent une réponse unie et résolue de la communauté internationale, a-t-il prôné, assurant que les membres du Conseil de sécurité ne ménageront aucun effort pour que celui-ci soit à la hauteur de la responsabilité historique qui est la sienne sur ce dossier. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a déploré qu’une fois de plus la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a lancé deux missiles balistiques dont un de portée intercontinentale qui a atterri à seulement 200 kilomètres du Japon.  Elle a rappelé qu’il n’y a pas plus d’un mois, le Conseil a discuté du lancement illégal d’un missile balistique par un ce ? pays, qui avait mis en danger les navires, exposé les avions dans la région à de grands risques et terrifié les citoyens japonais.  Regrettant vivement que le Conseil doive à nouveau se réunir pour discuter de la même situation, la représentante a fermement condamné ces actes « illégaux et scandaleux ».  Le missile balistique intercontinental lancé cette fois-ci aurait la capacité de frapper toute l’Asie, toute l’Europe, toute l’Amérique du Nord, y compris New York, toute l’Afrique et même une partie de l’Amérique du Sud, a-t-elle averti. 

La représentante a pressé le Conseil d’empêcher la RPDC de prendre en otage l’ensemble de la communauté internationale.  « Ne nous enlisons pas dans la rhétorique politique », a-t-elle recommandé en faisant valoir qu’il ne s’agit pas de trouver une solution à un conflit à armes égales entre les parties, mais d’empêcher la prolifération des armes nucléaires et de s’opposer à la menace de ces armes.  C’est pourquoi, elle a invité tous les membres du Conseil à se joindre à l’appel en faveur de la non-prolifération nucléaire et à ne pas offrir une échappatoire à la RPDC.  À ceux qui affirment que « nous sommes pris au piège d’un cycle négatif action-réaction », elle a répondu qu’il ne faut pas se laisser abuser par les tentatives de la RPDC de justifier son ambition de se doter d’armes nucléaires.  Elle a donc appelé à « être lucide » sur ce sujet.  La déléguée a regretté le silence du Conseil face aux actions provocatrices de la RPDC, qui s’est sentie dès lors libre de poursuivre sans relâche son programme illégal d’armes de destruction massive.  « Il est grand temps de mettre fin à ce cycle négatif d’action-inaction! » 

Pour finir, la représentante a réaffirmé son ferme soutien à la déclaration présidentielle proposée par les États-Unis, qui constitue, à son avis, un pas en avant, tout en se tenant prête à travailler avec ses collègues pour adopter des « mesures plus énergiques ».  « Sommes-nous du côté de ceux qui enfreignent les règles ou du côté de ceux qui les respectent? » a-t-elle lancé, avant d’appeler l’ensemble du Conseil à se mettre au travail.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a condamné le tir de missile balistique intercontinental effectué par la RPDC le 16 mars, dénombrant six tirs de ce type depuis le début de l’année.  C’est un missile qui est développé depuis 2020, a fait remarquer le représentant en rappelant aussi que la RPDC a mené des exercices militaires.  Il a fait la différence entre ces exercices et ceux, menés par des pays comme les États-Unis et la République de Corée, qui ne constituent pas un problème lorsque que ces pays en informent les autres États et le font dans une zone bien déterminée.  Ne nuisons pas à la crédibilité du Conseil de sécurité, a-t-il lancé en demandant de dénoncer l’inaction de celui-ci qui, depuis cinq ans, a été forcé à se croiser les bras à cause de la pression de deux membres.  Le délégué a dénoncé le coût de ces lancements illicites de missiles qui privent la population de la RPDC de ressources économiques dont elle a besoin.  Le représentant a encouragé à fournir de l’aide humanitaire dans ce pays avant de souligner l’importance des résolutions du Conseil de sécurité sur les programmes nucléaires de la RPDC.  Ce pays doit cesser ses lancements et poursuivre le dialogue avec les États-Unis et la République de Corée, a conclu le délégué. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a déploré que, dans le contexte actuel dans la péninsule coréenne, le Conseil de sécurité reste pieds et poings liés.  Elle a regretté l’inaction découlant de son impossibilité à surmonter ses divisions.  Au mépris des préoccupations exprimées par de nombreux États Membres, la RPDC peut ainsi continuer à développer son programme de missiles balistiques et nucléaire, avec un nombre record de lancements de missiles balistiques en 2022, a-t-elle constaté.  La RPDC a même récemment annoncé une nouvelle doctrine fixant les conditions dans lesquelles elle pourrait utiliser des armes nucléaires, y compris de manière préventive, a poursuivi la représentante, estimant que la gravité de cette situation ne saurait être sous-estimée.  Parce que le Conseil de sécurité ne peut pas rester les bras croisés tandis que son autorité est foulée au pied, Mme Gatt s’est prononcée en faveur de l’adoption d’une déclaration présidentielle sur les agissements et les provocations de la RPDC, qui sont autant de violations de ses résolutions pertinentes et de menaces caractérisées à la paix et à la sécurité internationales. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a dénoncé à son tour les nouveaux lancements de missiles intercontinentaux par la RPDC.  Constatant que cette pratique est devenue « monnaie courante » depuis 2022, il a regretté qu’elle ne fasse l’objet d’aucune réponse concertée du Conseil de sécurité.  Ces actes portent atteinte à la crédibilité du Conseil, a insisté le représentant, condamnant ces lancements qui foulent au pied les résolutions de la communauté internationale ainsi que le système de non-prolifération et de désarmement.  Après avoir enjoint la RPDC à souscrire à ses obligations contenues dans le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, il a rappelé que la résolution 2397 (2017), entérinée à l’unanimité, a tracé une ligne de conduite ferme à adopter face à d’éventuels lancements par la RPDC, tout en évoquant les répercussions de ces actes sur l’insécurité alimentaire du pays.  Le délégué a donc jugé qu’une solution diplomatique et politique est essentielle pour faire cesser ces lancements et permettre une dénucléarisation de la péninsule coréenne de façon complète, vérifiable et irreversible.  Il a également appelé le Conseil à faire fond sur tous les outils à sa disposition pour veiller à ce que la RPDC respecte ses résolutions.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est étonné de la fréquence des réunions du Conseil de sécurité sur la RPDC, estimant que pour taper du poing sur la table, il faudrait qu’un essai nucléaire ait lieu.  Il a affirmé que l’on ne peut laisser la RPDC faire ce qu’elle veut au risque de nous retrouver devant une situation inédite à l’avenir.  Pour le délégué, ce dossier peut évoluer, a-t-il considéré, saluant le projet de déclaration présidentielle que les États-Unis ont fait circuler, lequel est un bon point de départ, puisqu’il condamne la RPDC tout en proposant de continuer à négocier.  Le représentant a plaidé en faveur d’une solution à la fois humanitaire et politique à la crise qui sévit en RPDC, se demandant quel rôle peut jouer l’ONU dans ce contexte.  Cela peut passer par le recours au Chapitre VI de la Charte des Nations Unies, a suggéré le délégué, en appelant à trouver une solution crédible pacifiquement.

M. HAROLD ADLAI AGYEMA (Ghana) a jugé qu’à la lumière des actes récents et répétés de la RPDC; qui violent les obligations du droit international et les résolutions du Conseil, les membres du Conseil doivent réitérer d’une seule voix l’appel à une désescalade des tensions dans la péninsule coréenne.  La RPDC doit se conformer à ses obligations en vertu des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, elle doit s’abstenir de nouveaux tirs de missiles balistiques, respecter de nouveaux la lettre et les dispositions du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ainsi que les garanties de l’ Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a-t-il ainsi déclaré.  Pour le représentant, si les moyens de pression que le Conseil a utilisés jusqu’à présent n’ont pas pleinement réussi à ce qu’il soit mis fin au programme d’armement de la RPDC ou à susciter sa coopération internationale, « nous devons réévaluer notre approche et renouveler notre engagement envers nos objectifs communs pour réaliser des progrès concrets dans la promotion de la paix et de la sécurité dans la péninsule coréenne ».  À cet égard, il a plaidé pour une approche raisonnée et pragmatique basée sur la diplomatie, le dialogue et le renforcement de la confiance entre les parties et les États Membres au tour du dossier nucléaire nord-coréen.

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a condamné le lancement par la RPDC d’un nouveau missile balistique intercontinental le 16 mars, qui avait été précédé de celui de plusieurs missiles de courte portée et d’un autre missile balistique.  Cela témoigne d’une escalade sans précédent, s’est émue la représentante en observant que les capacités militaires de la RPDC et sa rhétorique belliqueuse « ne laissent plus aucun doute sur ses intentions ».  Selon elle, cette situation doit être endiguée de toute urgence pour prévenir une catastrophe, « intentionnelle ou non ».  En tant qu’État partie au TNP, le Gabon réaffirme son attachement à la non-prolifération nucléaire, a-t-elle ajouté, avant d’appeler le Conseil à garantir la paix et la sécurité internationales.  Le fait qu’il se trouve empêché est un sujet de grande préoccupation, alors les populations de la région vivent sous la menace nucléaire, a poursuivi la déléguée, en enjoignant les parties à revenir à la table des négociations et à trouver un consensus pour mettre une halte à cette escalade.  « Chaque nouveau tir nous rapproche d’une confrontation » et une telle issue ne peut être envisagée, a-t-elle insisté en invitant ceux qui ont une influence sur les parties à agir pour mettre fin à la menace nucléaire dans la péninsule coréenne.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a déclaré que dans le domaine de la non-prolifération nucléaire, et à la lumière de l’exposé de M. Jenča, « il est de notre devoir de condamner les essais de missiles balistiques de la RPDC ».  Ces tirs constituent une violation des résolutions du Conseil de sécurité et donc du droit international, a-t-elle dit avant d’exhorter la RPDC à mettre en œuvre ses obligations selon les résolutions du Conseil et à prendre des mesures concrètes en vue d’abandonner ses armes nucléaires, ses missiles balistiques et ses programmes connexes de manière complète, vérifiable et irréversible.  Elle a également appelé la RPDC à signer et à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, ainsi que tous les autres États figurant dans l’annexe 2.  La représentante a ensuite salué l’attention accordée par le Conseil pour veiller à ce que la fourniture de l’aide humanitaire reste possible dans le pays.  Elle a souligné que le Comité 1718 joue un rôle essentiel afin de faciliter son acheminement grâce à son système d’exemptions.  Ce mécanisme, a-t-elle précisé, est désormais complété par une exemption humanitaire applicable à l’ensemble des régimes de sanctions. 

La représentante a d’autre part regretté le silence prolongé du Conseil sur les options diplomatiques pour sortir de la crise nord-coréenne, « ce qui suscite l’inquiétude et l’empêche d’agir comme acteur politique sur la péninsule coréenne ».  Elle a noté la volonté collective et individuelle de mener et de soutenir un dialogue avec la RPDC, avant d’accueillir favorablement l’appel aux bons offices du Secrétaire général et d’encourager la RPDC à engager un dialogue avec le Conseil et le système onusien de manière constructive.  « Cet appel au dialogue devrait s’articuler autour d’une position unie de ce Conseil, et la Suisse soutiendra tous les efforts pour parvenir à cette unité. »  La déléguée a conclu son intervention en se prononçant en faveur de l’option d’une déclaration présidentielle, qui semble une voie à suivre à cette fin.

M. GENG SHUANG (Chine) a pris note des tirs de missiles balistiques effectués récemment par la RPDC, y compris ceux réalisés pas plus tard qu’il y a deux jours de cela.  Nous notons également l’intensification de manœuvres militaires dans la région, a-t-il dit, appelant toutes les parties à éviter une escalade des tensions.  Le représentant a rappelé qu’en 2018 et 2019, la République populaire démocratique de Corée s’était engagée à remettre des armes stratégiques en échange de mesures de garantie négative de sécurité, proposition à laquelle les États-Unis avaient choisi de ne pas donner suite.  Le délégué a condamné les manœuvres militaires conjointes des États-Unis et d’autres États de la région dans la péninsule coréenne, « qui ne font que renforcer le sentiment d’insécurité de la RPDC et plonger la zone dans une situation très difficile ».  Selon lui, cette situation nécessite désormais que la RPDC s’organise pour « contrecarrer les objectifs américains » dans la région.  Gardons la tête froide pour stabiliser la situation et restaurer la confiance entre les parties, a-t-il plaidé, accusant ensuite les États-Unis et leurs alliés de ne pas pratiquer ce qu’ils prêchent, cela en se livrant à des manœuvres militaires censément destinées à « parvenir à la paix par la force ».  Le représentant a insisté sur la nécessité que les États-Unis fassent au Conseil de sécurité des propositions concrètes pour qu’une solution politique soit atteinte par la voie diplomatique autour du dossier de la RPDC.  En l’état, il a rejeté la proposition américaine de déclaration présidentielle qui ne « ferait que jeter de l’huile sur le feu ».  Les États-Unis devraient plutôt accueillir positivement le projet de résolution politico-humanitaire conjoint de la Chine et de la Russie et adresser des signaux positifs à la RPDC pour dire qu’ils sont prêts à désamorcer la crise dans l’intérêt de la population nord-coréenne et de la sécurité régionale, a-t-il encore déclaré.  Le représentant a en outre reproché aux États-Unis d’exhorter Pyongyang à renoncer à ses armes nucléaires au nom de la non-prolifération, tout en transférant des cargaisons de plutonium à des États non dotés d’armes nucléaires dans le cadre de la nouvelle alliance militaire AUKUS, les liant à l’Australie et au Royaume-Uni.  L’aide apportée à l’acquisition de sous-marins nucléaires témoigne d’une course aux armements qui contrevient aux efforts de paix et de sécurité internationales axés sur la non-prolifération nucléaire, a-t-il conclu.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a condamné le lancement par la RPDC d’un nouveau missile balistique intercontinental le 16 mars, le dixième de ce type en un an, constatant que cette escalade très grave a mis en péril le trafic aérien et la navigation maritime.  De l’avis de la représentante, il est regrettable que la RPDC poursuive cette attitude dangereuse pour la région et pour le monde entier.  La RPDC doit respecter le droit international, la Charte des Nations Unies et les résolutions du Conseil de sécurité, a-t-elle affirmé, avant d’exhorter ce dernier à ne pas rester les bras croisés.  Il importe que le Conseil fasse preuve d’unité face au comportement de la RPDC, a insisté la représentante, avant d’exprimer sa reconnaissance au groupe d’experts du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 1718 (2006) pour leurs travaux sur les tirs de missiles balistiques et les cyberattaques menées par la RPDC.  Selon elle, la posture de RPDC est devenue plus agressive, ce qui renforce la menace.  Dans le même temps, des millions de Nord-Coréens continuent de souffrir d’insécurité alimentaire, a fait observer la déléguée, regrettant que Pyongyang donne la priorité à ses programmes d’armement.  Jugeant que, dans ce contexte, le dialogue est la seule voie à suivre, elle a invité le Conseil à se positionner de manière unie pour que la diplomatie l’emporte.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a déclaré que toute activité militaire dans la péninsule coréenne représente une menace à la paix et à la sécurité.  Elle a appelé à la retenue et à la reprise du dialogue, insistant sur l’importance de prendre en compte tous les facteurs qui exercent une influence sur la situation.  Elle a pointé du doigt la responsabilité particulière des États-Unis et de ses alliées, dénonçant notamment les rhétoriques belliqueuses et les exercices militaires conjoints des États-Unis et de la République de Corée qui illustrent, selon elle, leur volonté de « parvenir à la paix par la force ».  La représentante a également accusé les États-Unis d’avoir ignoré les démarches initiées par Pyongyang en 2018-2019 qui auraient pu améliorer la situation dans la région.  Selon l’oratrice, la situation en RPDC ne peut pas être dissociée de la situation en Asie-Pacifique, notant que la création d’un nouveau bloc entre les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni est une source de préoccupation pour la RPDC et d’autres pays.  Elle s’est également inquiétée de l’impact des sanctions unilatérales avant d’attirer l’attention sur le plan d’action présenté par la Russie et la Chine qui prévoit des mesures politiques et humanitaires pour résoudre la situation dans la péninsule coréenne.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a appelé la République populaire démocratique de Corée à respecter les résolutions du Conseil de sécurité, le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde étant la raison d’être des Nations Unies à laquelle tout État Membre doit souscrire.  Le Mozambique en appelle à la responsabilité de tous les États Membres, a-t-il ajouté, sa délégation rejetant toutes les approches qui menacent la stabilité et la paix.  Le représentant a souligné la nécessité de continuer de faire des offres de dialogue à la RPDC pour atténuer les tensions et éloigner le risque d’un péril nucléaire, cela pour préserver « notre avenir commun ». 

Reprenant la parole, Mme THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a répondu à la Chine qu’AUKUS ne représente en rien une violation du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et que la RPDC n’a que temporairement suspendu ses essais nucléaires.  De plus, pour la représentante américaine, la résolution conjointe de la Chine et de la Russie ne ferait que « récompenser la RPDC pour son inaction absolue, y compris sur le plan humanitaire ».  Quant aux exercices militaires conjoints qu’ils mènent avec la République de Corée, les États-Unis les ont qualifiés de routiniers et de nature purement défensive.

M. KARIUKI (Royaume-Uni) a repris la parole en réponse aux déclarations de la Chine et de la Fédération de Russie sur la coopération AUKUS.  Rappelant que les lancements de missiles balistiques par la RPDC constituent une violation de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité, il a estimé qu’aucune comparaison ne peut être faite avec AUKUS, programme qui respecte pleinement les obligations de ses participants au titre du TNP.  Quant au projet de résolution mentionné par la Chine et la Fédération de Russie, il a fait valoir que le Conseil doit se fonder sur le respect de ses résolutions par la RPDC.  Or la RPDC ne respecte pas ces résolutions, a-t-il ajouté, appelant tous les membres du Conseil à faire preuve de sérieux et à répondre à une situation grave dans la péninsule sans récompenser la RPDC pour ses tirs de missiles.

Reprenant la parole, M. GENG (Chine) a souhaité réagir aux interventions des États-Unis et du Royaume-Uni.  Assurant que la Chine agit pour la paix et la stabilité dans la péninsule coréenne ainsi que pour sa dénucléarisation, il a indiqué qu’à cette fin, elle utilise des moyens diplomatiques.  Il a ensuite relevé une nouvelle fois que, depuis le début de cette année, les États-Unis et d’autres pays ont organisé des exercices militaires sans précédent dans la péninsule, aggravant les tensions.  Il a constaté à cet égard que la RPDC a fait preuve de retenue et n’a pas réagi de manière excessive, alors même que ces exercices militaires gagnaient en intensité.  Contestant le caractère défensif de ces exercices, comme l’ont avancé les États-Unis, le représentant a noté qu’ils incluent des opérations « clairement offensives ».  Face à cette coercition, a-t-il ajouté, la RPDC a alerté d’une détérioration de la situation dans la péninsule par le biais de ses médias officiels.  Il semble donc justifié, selon lui, de répondre aux préoccupations légitimes de la RPDC et de déployer des efforts diplomatiques.  Et ce, d’autant plus que la coopération sous-marine AUKUS est « un sujet que personne ne veut évoquer ».  Or cette coopération tripartite « n’est que pure tromperie » dans la mesure où elle donne lieu à des transferts d’armes nucléaires à des États non nucléaires, créant de fait un risque grave en matière de prolifération.  Dénonçant le « deux poids, deux mesures » des États-Unis, il a rappelé qu’il y a une vingtaine d’années, ce pays a recouru à la force en Iraq sous le prétexte de la non-prolifération.  Cette fois, a-t-il poursuivi, les États-Unis ont renoncé au respect des normes et se livrent à des transferts de plusieurs tonnes de matériels vers l’Australie, au mépris de leurs obligations.  Dans ce contexte, le délégué a exhorté les États-Unis et le Royaume-Uni à examiner de manière très sérieuse la proposition de la Chine et de la Fédération de Russie pour « créer un environnement plus favorable ».

À son tour, Mme EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a affirmé que les activités militaires de Washington sont sans précédent.  Notant que les exercices de Ssangyong n’ont pas été effectués depuis cinq ans, elle a estimé qu’ils ne pouvaient pas être qualifiés de « routiniers ».  Avec leur rhétorique, les États-Unis et leurs alliés sont en train de tout bouleverser, s’est-elle inquiétée, déplorant que les appels de Pyongyang à une résolution politique et diplomatique aient été complètement ignorés.  Elle a évoqué le projet de résolution russo-chinoise qui vise à trouver un règlement politique et diplomatique, affirmant que les États-Unis bloquent constamment de telles initiatives. 

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a fermement condamné la poursuite des lancements de missiles balistiques par la RPDC, y compris le tir d’un missile balistique intercontinental le 16 mars, suivi de celui de plusieurs missiles balistiques le 19, opérés en violation flagrante des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  La RPDC, a-t-il précisé, a lancé ce qui semble être un missile balistique intercontinental Hwasong-17 quelques heures seulement avant le vol du Président de la République de Corée vers le Japon, tentant ainsi de saboter délibérément une étape critique dans le renouveau des relations bilatérales entre les deux pays.  Selon le représentant, la RPDC a lancé un total de 10 missiles balistiques intercontinentaux depuis février 2022, soit des lancements presque tous les mois.  Malgré cela, a-t-il déploré, le Conseil de sécurité est resté silencieux depuis le veto opposé par deux membres permanents en mai dernier.  Et alors que, lors du débat de l’Assemblée générale de juin dernier, une majorité écrasante d’États Membres s’est prononcée pour une action du Conseil dans l’unité, celui-ci continue de fermer les yeux sur les violations répétées et effrontées de la RPDC, s’est indigné le délégué en ajoutant que son pays subit presque quotidiennement les dangereuses provocations de la RPDC. 

À cet égard, le représentant a dénoncé plusieurs informations erronées circulant selon lui à l’ONU, qui contribuent à l’inaction du Conseil et brouillent l’attention de la communauté internationale.  La RPDC, a-t-il relevé, fait ainsi valoir que ses lancements de missiles balistiques sont la conséquence des exercices militaires de la République de Corée et des États-Unis.  Or ce dispositif de défense et de dissuasion, qui comprend des exercices conjoints, répond justement à la menace militaire de la RPDC, a-t-il souligné, avant d’affirmer que de telles mesures défensives sont le devoir d’un gouvernement responsable.  De plus, indépendamment de ces exercices militaires, Pyongyang a effectué six essais nucléaires et lancé plus de 200 missiles balistiques ces 20 dernières années, selon son propre plan, a poursuivi le délégué. 

Dans ce contexte, l’incapacité du Conseil à répondre à la grave provocation de la RPDC en mai a encore enhardi le pays, a-t-il regretté, notant qu’en septembre dernier, Pyongyang a promulgué une nouvelle loi qui autorise l’utilisation préventive des armes nucléaires « sur une base dangereusement arbitraire ».  Depuis, la RPDC a annoncé en janvier dernier qu’elle produirait en masse des armes nucléaires tactiques et augmenterait de façon exponentielle son arsenal nucléaire.  De surcroît, après avoir déclaré son intention de rechercher de nouveaux types de missiles balistiques intercontinentaux, elle vient d’annoncer qu’elle avait mené une simulation de contre-attaque nucléaire en menaçant d’utiliser des armes nucléaires tactiques contre la République de Corée, a-t-il poursuivi, constatant que la RPDC mène à sa guise sa politique nucléaire en jouant des circonstances. 

Le représentant a également réfuté le récit selon lequel les soi-disant mesures positives prises par la RPDC en 2018-2019 n’auraient pas été réciproquées.  Les programmes nucléaires et de missiles de la RPDC violent de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et, en ce sens, le moratoire autoproclamé de la RPDC sur les essais nucléaires et les missiles balistiques intercontinentaux ne constituait pas une démonstration de « bonne volonté », mais une obligation qu’elle avait toujours été tenue de respecter, a-t-il fait valoir.  De plus, Pyongyang n’a ni fourni un état des lieux complet de son programme nucléaire ni tenté de geler ses activités nucléaires, même pour une courte période, a ajouté le délégué, avant d’accuser la RPDC de rejeter catégoriquement les appels continus de la communauté internationale au dialogue et à la diplomatie, y compris l’« initiative audacieuse » de la République de Corée, ainsi que l’appel des États-Unis au dialogue sans condition préalable. 

Si certains prétendent que les sanctions sont inefficaces, il est difficile de nier qu’elles ont contribué de manière significative à ralentir les programmes nucléaires et de missiles de la RPDC, a encore souligné le représentant.  Selon lui, la RPDC cherche maintenant à gagner du temps pour faire avancer ses programmes nucléaires et balistiques illégaux, profitant pleinement de la mise en œuvre affaiblie des sanctions ainsi que de la paralysie du Conseil de sécurité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité examine les travaux du Comité 1591, alors que le Soudan appelle à lever les sanctions et à sortir son pays du lit de Procuste

9288e séance - matin
CS/15235

Le Conseil de sécurité examine les travaux du Comité 1591, alors que le Soudan appelle à lever les sanctions et à sortir son pays du lit de Procuste

Le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, une brève présentation des activités du Comité créé en application de la résolution 1591 (2005) en rapport avec le Soudan.  Seul intervenant de la séance après cet exposé, le délégué soudanais a réitéré que les sanctions imposées au Soudan sont devenues « inutiles et contre-productives », invoquant la mythologie grecque pour expliquer la position impossible dans laquelle se trouve son pays et rappelant que le Sud global est en faveur de leur levée. 

Le Président du Comité 1591, M. Harold Adlai Agyeman, Représentant permanent du Ghana auprès des Nations Unies, a présenté le rapport du Comité à qui le Groupe d’experts sur le Soudan a lui-même présenté son dernier rapport le 6 février dernier lors de consultations informelles.  Le Comité a pris note des recommandations du Groupe d’experts et le rapport a ensuite été rendu public le lendemain.  Ce même 7 février, le Groupe d’experts a fait sa mise à jour trimestrielle sur les chapitres suivants: l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan, la situation régionale, le statut des groupes armés et la protection des civils.  Le Président du Comité 1591 a salué la collaboration du Soudan au travail du Groupe d’experts, avant de rappeler que le régime de sanctions avait été mis en place pour ramener la paix au Darfour et non pour sanctionner le pays. 

Le délégué du Soudan a précisément rappelé que les sanctions avaient été prises dans un contexte politique et sécuritaire différent, marqué par un conflit interne au Darfour, lequel n’existe plus.  Cette région du pays connaît d’ailleurs actuellement une transition importante du maintien à la consolidation de la paix, a-t-il fait valoir tout en reconnaissant que la situation n’y est pas idéale, puisque parfois des conflits tribaux éclatent.  Il a assuré que le Soudan s’emploie à relever ces défis par la réconciliation et la promotion de la coexistence pacifique.  De même, les autorités du pays ont déployé la force conjointe pour protéger les civils ainsi que pour renforcer l’état de droit et les mécanismes de justice réparatrice. 

Pour le délégué soudanais, la résolution 1591 et les résolutions ultérieures du Conseil de sécurité concernant les sanctions imposées au Soudan sont tout simplement devenues « inutiles et contre-productives ».  Il a comparé la 1591 à une épée placée sur la tête du pays, estimant que ce texte est devenu un outil pour certains membres du Conseil de sécurité qui veulent exercer une pression politique sur le Soudan.  Il a relevé, à l’opposé, que six membres du Conseil ont appelé à la fin des sanctions, dont deux membres permanents, la Chine et la Fédération de Russie.  De même, le Groupe des États arabes et ses 22 membres ont exprimé cette demande, ainsi que les 54 membres du Groupe des États d’Afrique, les 57 membres de l’Organisation de la coopération islamique, et les pays du Groupe des non-alignés. 

Le délégué en a conclu que les membres du Sud global au Conseil de sécurité ont un avis tranché en faveur de la fin des sanctions.  Il a dit espérer que les autres membres du Conseil adoptent une attitude similaire et que les porte-plume adhèrent à l’avenir à cette position, afin de ne point transformer « leur stylo en épée qui servirait à dépecer le Soudan ».  Il a évoqué une sorte de torture pour le pays en assurant que sa situation sous sanctions revient à être dans le « lit de Procuste ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité spécial de la décolonisation commence les préparatifs de son Séminaire régional pour le Pacifique, prévu du 24 au 26 mai 2023 à Bali

Session de 2023,
2e séance – matin
AG/COL/3364

Le Comité spécial de la décolonisation commence les préparatifs de son Séminaire régional pour le Pacifique, prévu du 24 au 26 mai 2023 à Bali

Le Comité spécial de la décolonisation (Comité spécial des Vingt-Quatre) a commencé, ce matin, les préparatifs de son Séminaire régional pour le Pacifique, qui se tiendra cette année à Bali, en Indonésie, du 24 au 26 mai.  Il aura pour thème « Mesures innovantes visant à assurer la réalisation des objectifs de développement durable dans les territoires non autonomes », a précisé la Présidente de cet organe subsidiaire de l’Assemblée générale, Mme Menissa Rambally, de Sainte-Lucie.

L’objectif du Séminaire, dont les langues de travail seront l’anglais, l’espagnol et le français, est de recueillir les points de vue de représentants des territoires non autonomes, d’experts, de membres de la société civile, de représentants d’États Membres et d’autres parties prenantes, qui pourraient l’aider à définir les politiques et les modalités pratiques susceptibles d’être retenues par le processus de décolonisation mené par l’ONU. 

Ce sera l’occasion de procéder à une analyse et à une évaluation réaliste de la situation dans les territoires non autonomes, au cas par cas, ainsi que des moyens par lesquels le système des Nations Unies et la communauté internationale dans son ensemble pourraient renforcer les programmes d’assistance aux territoires.  Les contributions des participants serviront de base à un examen plus approfondi par le Comité spécial, en vue de soumettre à l’Assemblée générale des propositions concernant la réalisation des objectifs de la quatrième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme. 

Le Séminaire sera dirigé par une délégation du Comité spécial composée de la Présidente, de son conseiller, des membres du Bureau et de quatre autres membres représentant chacun des groupes régionaux au sein du Comité spécial, soit un total de 10 membres du Comité.  Leurs frais de voyage seront pris en charge par les Nations Unies, et la Présidente a demandé aux groupes régionaux de lui communiquer au plus tôt les noms de leurs représentants respectifs afin d’éviter des frais de voyage exorbitants résultant de réservations faites à la dernière minute.  Les représentants élus ou nommés des territoires non autonomes seront également pris en charge par les Nations Unies.

En outre, pourront participer à ce séminaire des représentants des États Membres; du gouvernement hôte; des puissances administrantes; des institutions spécialisées et d’autres organismes des Nations Unies concernés; des organisations établies dans la région et dans les territoires non autonomes; et des spécialistes des territoires non autonomes; ainsi qu’un représentant du Secrétaire général.  La Présidente et le Bureau finaliseront en outre au plus tôt la liste des experts et des représentants des ONG invités au Séminaire.

Le Nicaragua et le Venezuela ont appelé à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la participation pleine et entière des représentants des territoires non autonomes au Séminaire de Bali.

Les Directives et le Règlement intérieur du Séminaire peuvent être consultés sur le site Web de l’ONU, sur la page consacrée à la décolonisation: www.un.org/dppa/decolonization/en/c24/regional-seminars.

On y trouvera aussi les documents de travail annuels du secrétariat sur chaque séminaire pour le Pacifique: www.un.org/dppa/decolonization/en/documents/workingpapers.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission de la condition de la femme clôt sa session 2023 en adoptant des conclusions concertées en lien avec l’innovation technologique

Soixante-septième session,
17e séance plénière, soir
FEM/2230

La Commission de la condition de la femme clôt sa session 2023 en adoptant des conclusions concertées en lien avec l’innovation technologique

La Commission de la condition de la femme a clôturé les travaux de sa soixante-septième session en adoptant, au terme de longues négociations qui se sont poursuivies tard dans la nuit de vendredi pour aboutir samedi au petit matin, ses conclusions concertées en lien avec son thème prioritaire consacré à l’innovation technologique et l’éducation à l’ère du numérique aux fins de la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles. 

« Ces derniers jours, nous avons pu constater l’énorme potentiel qui existe lorsque les filles et les femmes ont la possibilité de diriger, d’innover et de collaborer dans le monde numérique », a lancé la Présidente de la Commission, Mme Mathu Joyini, de l’Afrique Sud, en concluant la session 2023 de Commission. 

Les conclusions concertées seront publiées ultérieurement sous la cote E/CN.6/2023/L.3, accompagnées des résumés des tables rondes ministérielles et des discussions interactives qui ont eu lieu au cours de cette session.  Elles seront ensuite transmises au Conseil économique et social (ECOSOC), dont la Commission est un organe subsidiaire, ainsi qu’à son forum politique de haut niveau. 

Étant donné l’heure tardive de leur adoption, le Secrétariat n’a pas été en mesure de fournir un avis sur les éventuelles implications budgétaires des conclusions concertées. 

En début de séance, la Commission a également adopté le projet de rapport de sa soixante-septième session.  Elle a en outre pris note du rapport du Groupe de travail sur les communications et décidé de l’inclure, dans son intégralité, dans son propre rapport. 

La Commission a par ailleurs adopté l’ordre du jour provisoire et la documentation de sa soixante-huitième session, qui aura pour thème prioritaire « l’accélération de la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles par la lutte contre la pauvreté, le renforcement des institutions et un financement tenant compte des questions de genre ». 

Après la clôture de la session, la Commission a procédé à l’élection du Bureau de sa soixante-huitième session qui sera présidée par M. Antonio Manuel Revilla Lagdameo (Philippines).  Après avoir reconduit à la vice-présidence Mme Maria del Carmen Squeff, de l’Argentine, et M. Māris Burbergs, de la Lettonie, la Commission a convenu de reporter à une date ultérieure l’élection des Vice-Présidents du Groupe des États d’Afrique et du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États. 

Outre le Maroc, l’élection des membres du Groupe de travail chargé de l’examen des communications relatives à la condition de la femme a été reportée à une date ultérieure. 

La prochaine réunion de la Commission de la condition de la femme sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Ukraine: le Conseil de sécurité prend acte des efforts de l’ONU pour proroger l’Initiative céréalière, sur fond de pressions pénales sur l’exécutif russe

9286e séance – après-midi
CS/15233

Ukraine: le Conseil de sécurité prend acte des efforts de l’ONU pour proroger l’Initiative céréalière, sur fond de pressions pénales sur l’exécutif russe

Dans un climat de grande tension, accentuée par l’annonce d’un mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) à l’encontre du Président Vladimir Putin pour « crimes de guerre » en lien avec la déportation d’enfants ukrainiens, le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, un exposé du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires sur les répercussions mondiales de la guerre en Ukraine.  M. Martin Griffiths a profité de cette intervention pour assurer que l’ONU s’emploie à obtenir la prolongation de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, qui doit expirer le 18 mars.  Une autre intervenante, proposée par la Fédération de Russie, a quant à elle été empêchée de s’exprimer à la suite d’un vote de procédure demandé par les États-Unis. 

Avant que ne débute la séance, la représentante des États-Unis a justifié ce vote au motif qu’ « un membre du Conseil » a demandé la participation de Mme Daria Morozova en tant que « médiatrice de la République populaire de Donetsk ».  Inviter cette personne reviendrait à légitimer les tentatives d’annexion de l’Ukraine et à reconnaître une « autorité illégitime », a-t-elle fait valoir, avant d’appeler le Conseil à se prononcer contre.  Son homologue russe a fait la demande inverse, arguant que la participation de cette « militante humanitaire compétente » du Donbass serait parfaitement conforme au règlement de l’organe.  Le Conseil a finalement rejeté l’invitation faite à Mme Morozova par 8 voix contre (Albanie, Équateur, États-Unis, France, Japon, Malte, Royaume-Uni et Suisse), 4 pour (Brésil, Chine, Fédération de Russie et Ghana) et 3 abstentions (Émirats arabes unis, Gabon et Mozambique).   

M. Griffiths a ensuite fait état des implications du conflit ukrainien pour l’insécurité alimentaire mondiale.  Afin de faciliter les exportations russes d’aliments et d’engrais, la Fédération de Russie et le Secrétariat de l’ONU se sont entendus pour lancer l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire et conclure un mémorandum d’accord parallèle, a rappelé le Secrétaire général adjoint, selon lequel la signature de ces accords a permis d’apaiser les marchés et de faire baisser les prix alimentaires.  Grâce à l’Initiative, conclue fin juillet 2022, près de 25 millions de tonnes de denrées alimentaires ont été exportées en toute sécurité depuis l’Ukraine, a-t-il indiqué, ajoutant que le Programme alimentaire mondial (PAM) a, lui, pu transporter plus d’un demi-million de tonnes de blé pour soutenir les opérations humanitaires en Afghanistan, en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Yémen. 

Sous la direction de son Secrétaire général, l’ONU fait aujourd’hui « tout son possible » pour que l’Initiative puisse se poursuivre, notamment en collaborant étroitement avec toutes les parties, a précisé M. Griffiths.  Il a ajouté que la Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Mme Rebeca Grynspan, et le Secrétaire général lui-même ne ménagent aucun effort pour faciliter la pleine mise en œuvre du protocole d’accord parallèle avec la Fédération de Russie.  Malgré les progrès réalisés, des obstacles subsistent, a reconnu le Coordonnateur des secours d’urgence, avant d’insister sur le caractère « vital » du maintien des deux accords. 

Plusieurs délégations, à l’instar du Royaume-Uni, de Malte et du Danemark, qui s’exprimait au nom des pays nordiques, ont appelé à une prorogation de l’Initiative pour une période de 120 jours.  Les Émirats arabes unis ont salué l’engagement continu du Secrétaire général et de la Türkiye à garantir le renouvellement de cet accord, tout en demandant la mise en œuvre intégrale du protocole d’accord sur les engrais et les produits alimentaires russes, une demande également relayée par le Ghana.  Rappelant pour sa part que 55% des exportations permises par l’Initiative sont destinées aux pays en développement, le Japon a lui aussi appuyé la reconduction automatique du dispositif, soutenu dans ce sens par l’Union européenne, tandis que l’Équateur mettait en garde contre une interruption des opérations du PAM. 

« Tant que la Fédération de Russie continuera de bloquer les ports ukrainiens, le monde aura besoin de l’Initiative », ont renchéri les États-Unis, qui ont annoncé l’octroi à l’Ukraine d’une enveloppe de 7,4 milliards de dollars d’ici à septembre, en plus de l’aide humanitaire et budgétaire déjà versée depuis le début de l’invasion.  Assurant avoir elle aussi fourni une aide d’urgence à l’Ukraine et aux autres pays touchés par le conflit, la Chine a souhaité que l’Initiative soit préservée mais mise en œuvre « de manière équilibrée ». 

De son côté, la Fédération de Russie a maintenu son aval à une prorogation de seulement 60 jours, non sans déplorer que cet accord humanitaire se soit mué en « accord commercial au profit des grandes sociétés occidentales ».  À son avis, le « mémorandum » signé entre la Russie et l’ONU « ne fonctionne tout simplement pas », l’Organisation ayant reconnu ne pas être en mesure de « soustraire les exportations russes aux sanctions occidentales ». 

Par ailleurs, dans une réponse indirecte à l’Ukraine, qui, après avoir signalé que 40% de sa population a besoin d’une aide humanitaire, a dénoncé les déportations illégales d’enfants ukrainiens vers la Russie et salué les mandats d’arrêt émis aujourd’hui par la CPI contre deux individus, le Président Putin et Mme Maria Lvova-Belova, Commissaire russe pour les droits de l’enfant, la délégation russe a réaffirmé son rejet de cette « instance judiciaire internationale incompétente et biaisée ».  Fustigeant un « outil aux mains de l’Occident et toujours prête à rendre justice au moyen de sanctions », elle a rappelé que son pays n’est pas partie au Statut de Rome et que toute décision émanant de cette instance est « nulle et non avenue ». 

L’Albanie a néanmoins vu dans ces mandats d’arrêt une « première victoire pour l’établissement des responsabilités ».  Rappelant que le rapport de la Commission internationale indépendante d’enquête sur l’Ukraine, publié le 15 mars, reconnaît que « la déportation et l’adoption forcées d’enfants ukrainiens constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité », la Lituanie a enjoint la Russie à rendre ces enfants à leurs parents et tuteurs, à fournir des listes d’enregistrement des enfants enlevés et à permettre à des observateurs indépendants d’accéder aux zones occupées.  Les responsables d’exactions devront rendre des comptes devant les juridictions ukrainiennes et la CPI, a martelé la France en prévenant qu’elle soutiendra les enquêtes. 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE

Vote procédural

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a demandé un vote de procédure au sujet de la participation de Mme Daria Morozova en tant qu’intervenante proposée à cette séance.  Elle a regretté d’avoir à le faire, étant donné que les membres du Conseil ont déjà exprimé leur préoccupation auprès de la présidence.  Les États-Unis, a-t-elle indiqué, appuient pleinement la participation de représentants de la société civile qui peuvent faire part de leur expérience et de leur expertise.  Leur point de vue est essentiel et alimentent les travaux du Conseil.  Cette fois, a ajouté la représentante, un membre a ajouté Mme Morozova en tant que « médiatrice de la République populaire de Donetsk ».  Elle a rappelé qu’après la tentative de la Fédération de Russie d’annexer illégalement le territoire internationalement reconnu de l’Ukraine, l’Assemble générale a adopté l’an dernier une résolution appelant tous les États à ne pas reconnaître quelque modification que ce soit au statut de la région de Donetsk et de s’abstenir de toute interaction pouvant être considérée comme une altération de ce statut.  Il serait donc inapproprié selon elle que le Conseil invite en quelque qualité que ce soit une personne se proclamant « médiatrice de la République populaire de Donetsk ».  Cela reviendrait à légitimer les tentatives d’annexion de l’Ukraine et à reconnaître une autorité illégitime, a fait valoir la représentante, avant d’appeler tous les membres à agir en conformité avec les résolutions pertinentes du Conseil en votant contre cette participation. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a précisé que sa délégation a proposé la participation de Mme Daria Morozova à cette séance pour permettre au Conseil d’obtenir des informations directes quant à la situation humanitaire catastrophique dans le Donbass, une région qui, depuis 2014, vit sous les bombardements des forces armées ukrainiennes sans réaction de la part de la communauté internationale.  Il a regretté que ses collègues occidentaux ignorent cette question dans leurs tentatives de « blanchir Kiev ».  L’intervenante en question est une ressortissante de cette région qui participe activement à l’action humanitaire sur place et qui a participé auparavant à des échanges de prisonniers, a-t-il précisé.  Elle est prête à faire part de ses observations au Conseil de sécurité.  Le délégué russe a appelé les membres du Conseil de sécurité à appuyer l’invitation de Mme Morozova en tant que militante humanitaire compétente, arguant que sa participation est parfaitement conforme au règlement intérieur du Conseil. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé que le but de cette réunion est d’attirer l’attention du Conseil sur la situation humanitaire catastrophique en Ukraine, causée par l’agression de la Fédération de Russie, en violation flagrante du droit international.  Trois résolutions de l’Assemblée générale adoptées à une écrasante majorité des États Membres ont établi clairement que la Fédération de Russie est responsable de la crise humanitaire en Ukraine et au-delà, a-t-il noté.  Le mandat d’arrêt émis aujourd’hui par la Cour pénale internationale (CPI) contre le Commandant en chef russe confirme cette situation a ajouté le représentant selon qui la Fédération de Russie tente de créer des écrans de fumée pour détourner l’attention et instrumentaliser le Conseil à ses fins.  Inviter une représentante de la soi-disant « République populaire de Donetsk » est une tentative désespérée de légitimer ce qui ne peut l’être, à savoir l’agression d’un pays souverain. 

Le Président du Conseil de sécurité a ensuite mis aux voix l’invitation faite à Mme Daria Morozova d’intervenir devant l’hémicycle, laquelle a été rejetée par 8 voix contre (Albanie, Équateur, États-Unis, France, Japon, Malte, Royaume-Uni et Suisse), 4 pour (Brésil, Chine, Fédération de Russie et Ghana) et 3 abstentions (Émirats arabes unis, Gabon, Mozambique).

À l’issue du vote, le délégué de la Fédération de Russie a regretté la décision du Conseil, prise sous des prétextes obscurs.  Vous ne considérez pas les habitants du Donbass comme des êtres humains, a lancé le délégué, aux membres ayant voté contre.  Il a fait observer que c’est la première fois qu’un orateur se voit refuser la parole, rappelant ensuite qu’une récente séance du Conseil sur l’Ukraine a été marquée par l’intervention d’un invité qui a prononcé un tissu de mensonges.  Il a prévenu que dorénavant, son pays devra changer d’approche sur les invitations à s’exprimer devant le Conseil.  Il a ainsi demandé si l’invitation à parler de représentants du Kosovo constitue une violation des résolutions du Conseil, comme le prétend la déléguée des États-Unis à propos de l’oratrice qui s’est vu refuser la parole aujourd’hui. 

Comparer deux réalités qui n’ont rien à voir l’une avec l’autre est « absolument artificiel », a déclaré le représentant de l’Albanie selon qui la soi-disant République populaire de Donetsk, un territoire de l’Ukraine, annexé illégalement par la Russie, et la République du Kosovo n’ont « rien en commun ».  Il est regrettable que vous tentiez le tout pour le tout lorsque vous êtes acculé, a accusé le représentant s’adressant à son homologue russe.  La soi-disant République populaire de Donetsk annexée de force n’existe que dans les rêves de la Russie, a-t-il ironisé.  Enfin, le représentant a rappelé que le Kosovo et la Serbie interviennent ensemble au Conseil de sécurité et négocient pour trouver des solutions mutuellement convenues à leur problème commun. 

« Estimez-vous que le Kosovo est un territoire reconnu par l’ONU? », a alors interrogé le représentant de la Fédération de Russie.

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a rappelé que, lors de son exposé sur la situation en Ukraine le mois dernier, il avait souligné l’impact humanitaire de cette guerre à grande échelle un an après le début des hostilités.  Il s’est cette fois concentré sur les répercussions mondiales de ce conflit.  Dans un monde déjà en butte à des chocs multiples, allant de la faim aux conflits, en passant par la pandémie de COVID-19, l’urgence climatique et la crise du coût de la vie, cette guerre a des implications très importantes pour l’insécurité alimentaire mondiale, a-t-il fait observer.  La Fédération de Russie et l’Ukraine sont en effet les principaux fournisseurs de produits alimentaires essentiels, et la Fédération de Russie est également l’un des principaux exportateurs d’engrais, a précisé le haut fonctionnaire.  Alors que le monde dépend de ces approvisionnements, il en va de même pour les Nations Unies qui en ont besoin pour fournir de l’aide aux pays en détresse, a-t-il relevé, indiquant que, pour sa réponse humanitaire, le Programme alimentaire mondial (PAM) s’approvisionne en blé surtout en Ukraine. 

En février dernier, lorsque la navigation a été suspendue à partir des ports ukrainiens de la mer Noire, les effets d’entraînement ont été immédiats, a rappelé M. Griffiths, ajoutant qu’en mars, après des hausses régulières depuis le second semestre de 2020, les prix des denrées alimentaires ont atteint des niveaux record dans le monde entier.  Le prix des engrais a également été affecté et il reste plus de 200 fois plus élevé qu’en 2019, a-t-il ajouté.  Pour faciliter les exportations russes de céréales et d’engrais, la Fédération de Russie et le Secrétariat de l’ONU se sont entendus pour lancer l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire et conclure un mémorandum d’accord parallèle, a poursuivi le Secrétaire général adjoint, pour qui la signature de ces accords a été une étape cruciale dans la lutte plus large contre l’insécurité alimentaire mondiale, en particulier dans les pays en développement.  Les marchés se sont apaisés et les prix alimentaires ont continué de baisser, a-t-il affirmé. 

Dans le cadre de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, près de 25 millions de tonnes de denrées alimentaires ont été exportées en toute sécurité depuis l’Ukraine depuis le mois d’août, a indiqué M. Griffiths.  Le PAM a, lui, pu transporter plus d’un demi-million de tonnes de blé pour soutenir les opérations humanitaires en Afghanistan, en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Yémen, a-t-il précisé, avant d’assurer que, sous la direction du Secrétaire général, l’ONU fait aujourd’hui tout son possible pour que l’Initiative puisse se poursuivre, notamment en collaborant étroitement avec toutes les parties.  Cette semaine, a-t-il dit, des denrées alimentaires ont continué d’être transportées hors d’Ukraine par le corridor maritime humanitaire, sous la supervision du Centre conjoint de coordination.  Il a ajouté que la Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Mme Rebeca Grynspan, et le Secrétaire général lui-même ne ménagent aucun effort pour faciliter la pleine mise en œuvre du protocole d’accord parallèle avec la Fédération de Russie.  Si des progrès ont été réalisés, des obstacles subsistent, notamment en ce qui concerne les systèmes de paiement, a-t-il expliqué, jugeant vital pour la sécurité alimentaire mondiale que ces deux accords restent en vigueur. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a ensuite alerté qu’à l’échelle mondiale, les besoins humanitaires dépassent largement les moyens disponibles.  Pour répondre aux besoins de près de 347 millions de personnes dans 69 pays, une aide d’un montant sans précédent de 54 milliards de dollars est nécessaire, a-t-il souligné.  Alors que le financement humanitaire total a atteint 38,7 milliards de dollars en 2022, il n’est pas certain que ce niveau puisse être atteint cette année, alors même que nous avons besoin de beaucoup plus de soutien de la part des États Membres, a prévenu le haut fonctionnaire, selon lequel il convient également de renforcer la collaboration entre les communautés humanitaires et de développement et les institutions financières internationales.  Ensemble, nous devons chercher des solutions durables aux problèmes qui se posent à nous, a-t-il conclu, en appelant de ses vœux une solution politique à la « terrible guerre » en Ukraine. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a rappelé la contribution de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire pour atténuer les conséquences mondiales de l’insécurité alimentaire exacerbée par le conflit en Ukraine.  Malgré l’incertitude qui entoure la prorogation de cet accord, les opérations du Programme alimentaire mondial (PAM) ne doivent pas être interrompues, a-t-il prévenu, en rappelant que la résolution 2417 (2018) du Conseil exhorte les parties à assurer le bon fonctionnement des marchés alimentaires dans les situations de conflit armé.  Le représentant a insisté sur la nécessité de respecter les systèmes d’approvisionnement en vivres et en eau, rappelant l’interdiction qui existe d’attaquer et de détruire les biens essentiels à la survie de la population civile.  Il s’est dit préoccupé par les conclusions publiées récemment par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur l’impact de la guerre sur l’agriculture et les moyens de subsistance en Ukraine, où les pertes se chiffrent en dizaine de milliards de dollars.  Il a exprimé sa plus vive préoccupation quant au contenu du rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, qui rend compte de violations « cruelles » des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Il y a aujourd’hui exactement un an que la Cour internationale de Justice (CIJ) a ordonné à la Fédération de Russie de suspendre ses opérations militaires en Ukraine, a-t-il rappelé, en demandant que cette décision soit respectée.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé que, depuis un an, des millions d’Ukrainiennes et d’Ukrainiens sont victimes des exactions commises par les forces armées russes et leurs supplétifs de Wagner.  Les Nations Unies ont documenté ces violations massives du droit international humanitaire et des droits de l’homme, a-t-il souligné, avant de relever que, aujourd’hui, la Cour pénale internationale (CPI) a émis des mandats d’arrêt contre le Président Vladimir Putin et la Commissaire russe pour les droits de l’enfant, Mme Maria Lvova-Belova.  La Cour, a-t-il dit, estime qu’il existe suffisamment d’éléments pour établir leur implication dans la déportation et le transfert d’enfants ukrainiens.  Les responsables d’exactions devront rendre des comptes devant les juridictions ukrainiennes et la CPI, dont nous soutenons les enquêtes, a déclaré le représentant. 

Le délégué a ensuite jugé qu’en s’attaquant aux infrastructures agricoles ukrainiennes et en restreignant les exportations maritimes, la Fédération de Russie cherche à instrumentaliser les vulnérabilités de certains pays tiers aux fluctuations des cours ou à l’approvisionnement en céréales.  Saluant la conclusion de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, en juillet dernier, il a constaté que cette mesure a produit les effets attendus.  L’indice FAO des prix alimentaires, qui avait atteint des niveaux record en mars 2022, a ainsi diminué sur 10 mois consécutifs, tandis que, depuis sa signature, l’Initiative a permis l’exportation de plus de 24 millions de tonnes de céréales, dont 55% étaient destinées aux pays en développement.  Il ne doit pas y avoir de chantage sur la prolongation de l’Initiative, a martelé le représentant, non sans saluer l’investissement du Secrétaire général de l’ONU et la contribution de la Türkiye.  Il a ajouté que la France continuera de se mobiliser avec ses partenaires européens pour la mise en œuvre des « corridors de solidarité », qui ont permis l’exportation par voies fluviales et terrestres de plus de 29 millions de tonnes de céréales et d’autres produits alimentaires.  Face à cette agression aux conséquences insupportables sur les populations civiles, l’appui humanitaire, mais aussi militaire et financier de la France à l’Ukraine se poursuivra aussi longtemps qu’il le faudra, a-t-il affirmé. 

Mme LANA NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a rappelé que cette réunion a lieu à la veille de l’expiration de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, « l’une des rares réussites au milieu de la tragédie de ce conflit ».  Soulignant que l’impact sur les marchés mondiaux de la crise ukrainienne a été atténué par cette initiative, elle a rappelé que, selon les estimations des Nations Unies, la réduction des prix des denrées alimentaires de base a indirectement empêché quelque 100 millions de personnes de plonger dans l’extrême pauvreté, puisque 24 millions de tonnes de céréales et plus de 1 600 navires ont traversé la mer Noire en toute sécurité.  La représentante a donc soutenu l’engagement continu du Secrétaire général et de la Türkiye à garantir le renouvellement de cet accord et à résoudre les problèmes qui entravent sa mise en œuvre.  Elle a aussi demandé la mise en œuvre intégrale du protocole d’accord sur les engrais et les produits alimentaires russes et encouragé les efforts pour résoudre les problèmes liés à l’assurance et à l’infrastructure financière et logistique. 

Mme Nusseibeh a souligné l’importance absolue de la protection des enfants dans les conflits armés, en indiquant que les Émirats arabes unis travaillent actuellement à la mise en place d’un programme d’aide de 100 millions de dollars afin d’alléger les souffrances sur le terrain.  Une autre année de ce conflit, c’est une autre année de vies perdues, de communautés détruites et de divisions dans le monde, a-t-elle mis en garde, alors que cette guerre, qui est entrée dans sa deuxième année, n’est plus la tragédie d’un moment et d’un lieu.  Elle risque de devenir un conflit prolongé dont on ne voit pas la fin.  La poursuite d’une victoire militaire totale est un obstacle à une paix juste et durable, a martelé la représentante, en exhortant le Conseil à s’efforcer de trouver une solution au conflit et à continuer de se concentrer sur le règlement des autres conflits dans les pays et les régions qui en ont cruellement besoin.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a expliqué avoir voté contre la participation d’une intervenante lors du vote de procédure en début de séance, tout en saluant en principe la possibilité qu’a le Conseil d’inviter des intervenants qu’il considère qualifiés en vertu de l’article 39 de son règlement intérieur.  Elle a invoqué la résolution ES11-4 de l’Assemblée générale qui appelle tous les États à s’abstenir de tout acte susceptible d’être interprété comme une reconnaissance de la modification du statut des régions annexées de l’Ukraine.

La représentante a salué et soutenu les efforts de M. Griffiths, notamment pour prolonger l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire.  Elle s’est dite préoccupée par le rapport et par les conclusions de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine qui ont été publiés cette semaine, en réaffirmant le soutien suisse au mandat et à la poursuite des travaux de cet organe.  Condamnant les frappes persistantes sur les infrastructures civiles, y compris les attaques aveugles de la Russie contre les infrastructures énergétiques ukrainiennes, la représentante a exigé le plein respect du droit international humanitaire.  « Nul ne peut justifier des attaques ciblées contre les personnes et objets civils. »  Elle a également demandé que le personnel humanitaire obtienne un accès sans entrave aux près des 18 millions de personnes dans le besoin en Ukraine, y compris celles qui se trouvent dans les zones occupées par la Russie.

En dernier lieu, la déléguée a rappelé le fait que l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, en parallèle avec le protocole d’accord axé sur l’exportation de produits alimentaires et d’engrais russes, est essentielle pour la sécurité alimentaire mondiale et doit se poursuivre.  La Suisse appelle donc toutes les parties à redoubler d’efforts afin de trouver une solution durable, dans le but de soulager les conséquences de la guerre, a déclaré la représentante en insistant sur l’importance d’une perspective à long terme pour une meilleure prévisibilité.  La Suisse se félicite des bons offices du Secrétaire général à cet égard, a-t-elle indiqué, et se tient prête à apporter son soutien, notamment dans son rôle d’État hôte.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a déploré que l’agression de la Russie contre l’Ukraine ait aggravé la situation humanitaire en Ukraine et dans le monde entier.  En 2023, 222 millions de personnes dans 53 pays ne savent pas s’ils auront accès à la nourriture, s’est emportée la représentante, estimant que face à la précarité de l’approvisionnement alimentaire mondial, l’Initiative sur l’exportation céréalière par la mer Noire est devenue plus cruciale que jamais.  Cette initiative a permis l’exportation de 24 millions de tonnes de céréales à partir des ports ukrainiens et de sécuriser plus de 1 600 navires à travers la mer Noire, a-t-elle rappelé, précisant que 55% des exportations de denrées alimentaires étaient destinées aux pays en développement.  Elle a appuyé la prorogation automatique de l’Initiative pour la même période, ainsi que son extension, et a invité les parties concernées à collaborer à cet égard.  De même, elle a jugé essentiel de rétablir la capacité de production agricole de l’Ukraine, non seulement pour assurer la stabilité économique, mais aussi pour renforcer l’approvisionnement alimentaire mondial. 

La représentante a ensuite fait savoir que la semaine dernière, le Japon a fourni des semences de tournesol et de maïs à 400 petits exploitants agricoles de Kharkiv, en donnant la priorité aux femmes et aux jeunes agriculteurs, dont la production agricole et les revenus ont diminué en raison de la guerre.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré que la guerre en Ukraine montre que la paix ne sera jamais acquise tant que des dirigeants autoritaires seront au pouvoir.  Il a dénoncé les attaques perpétrées par la Russie contre les civils en Ukraine et les crimes de guerre commis par ce pays.  « Dans quel monde voulons-nous vivre? » a-t-il demandé, avant de se dire résolument en faveur d’un ordre mondial fondé sur des règles.  Il a donc salué le mandat d’arrêt délivré aujourd’hui par la Cour pénale internationale (CPI) comme « une première victoire pour l’établissement des responsabilités ».  La guerre en Ukraine, a-t-il ajouté, concerne le monde entier.  En attendant sa fin, il a appelé à la prorogation illimitée de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire et exhorté la Russie à accepter la réalité, à renoncer à la violence et à retirer ses forces du territoire ukrainien.  « Nous resterons aux côtés de l’Ukraine. »

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a présenté la rétrospective du conflit intra-ukrainien provoqué par le « coup d’État anticonstitutionnel de Kiev de février 2014 » que comptait donner Mme Daria Morozova, « dont nos anciens partenaires occidentaux ont tant craint le discours ».  Selon lui, les manifestations dans les régions russophones étaient une « réponse naturelle » aux actions anticonstitutionnelles du nouveau Gouvernement ukrainien.  Le « régime de Kiev » a ensuite envoyé l’armée pour réprimer les rassemblements à l’aide d’armes meurtrières, sous le couvert d’une opération anti-terroriste, avant de mener selon lui une répression brutale de la population civile désormais soumise à un blocus économique.  À ses yeux, l’Ukraine a ainsi légalisé des décisions qui constituent un « génocide » contre sa propre population, avec l’assentiment des pays occidentaux. 

Poursuivant, M. Nebenzia a déploré les pertes civiles et la destruction d’infrastructures enregistrées depuis le 24 février 2022, « à la suite de l’agression armée de l’Ukraine sur le territoire de la "république populaire de Donetsk" ».  En tant que commissaire aux droits de l’homme de ce territoire, Daria Morozova a officiellement informé les organes internationaux des droits de l’homme des violations des droits humains et des crimes de guerre perpétrés selon lui depuis 2014 par l’Ukraine dans la « république populaire de Donetsk ».  Ses appels sont toutefois restés lettre morte, a-t-il ajouté, tout comme la communauté internationale n’a pas su réagir « objectivement » au « sabotage » des accords de Minsk par les autorités ukrainiennes. 

Selon le délégué, l’Ukraine préparait alors une opération militaire à grande échelle dans le Donbass, prévue pour le début mars 2022, comme le démontre l’agression militaire menée par les forces armées ukrainiennes.  C’est sur cette base que la décision de l’évacuation massive des habitants de la région et la demande d’aide à la Fédération de Russie est intervenue.  La réponse à cette demande a donc été « l’opération militaire spéciale » annoncée par le Président Putin pour « protéger la population du Donbass », a encore expliqué M. Nebenzia qui a fustigé l’emploi aveugle d’armes lourdes, de mines antipersonnel et de missiles par l’armée ukrainienne contre la population civile.  Aujourd’hui, Kiev commet des « attentats terroristes et des provocations » contre les infrastructures d’approvisionnement en eau et en électricité, et exécute des prisonniers dans les territoires sous son contrôle, a déclaré le représentant.  Depuis le début de « l’opération militaire spéciale », quelque 4,5 millions de personnes, dont 690 000 enfants ont gagné le territoire russe, la grande majorité accompagnés de leurs parents ou tuteurs, a-t-il ajouté, en disant ne pas comprendre les spéculations faisant état d’un grand nombre d’enfants non accompagnés. 

S’agissant de la prorogation pour 60 jours de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, le représentant a déploré que les pays occidentaux refusent de mentionner cet accord dans ce que produit le Conseil de sécurité.  Cet accord humanitaire s’est selon lui mué en accord commercial au profit des grandes sociétés occidentales, alors que les prix des denrées alimentaires restent élevés.  « Le mémorandum Russie-ONU ne fonctionne tout simplement pas », a dit le représentant, alors que l’Organisation a reconnu, selon lui, qu’elle n’avait pas le levier nécessaire pour soustraire les exportations russes aux sanctions occidentales. 

Le représentant a enfin parlé du mandat d’arrêt émis aujourd’hui par la CPI.  Il provient à ses yeux d’une « instance judiciaire internationale incompétente et biaisée », qui a montré encore une fois son caractère préjudiciable.  « La CPI est un outil aux mains de l’Occident toujours prête à rendre justice au moyen de sanctions », a-t-il dit, en ajoutant que la Fédération de Russie n’est pas partie au Statut de Rome et que toute décision émanant de cette instance est « nulle et non avenue ».  « La CPI est à nos yeux morte », a-t-il conclu. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a fait part de sa préoccupation face à l’absence d’amélioration de la situation humanitaire en Ukraine, rappelant aux deux parties les résolutions pertinentes du Conseil qui appelle à épargner les objets civils et garantir le bon fonctionnement des systèmes alimentaires et des marchés.  Afin de mettre un terme à cette crise humanitaire, le représentant a exhorté tous les États Membres à tendre vers des solutions réalistes pour rétablir la paix et protéger la vie humaine, car, a-t-il affirmé, préserver la dignité humaine doit être « notre priorité ».  Il a également appelé à préserver toutes les possibilités de dialogues, soulignant que les actions militaires, renforcées par les sanctions, ne mettront pas un terme au conflit.  Il a réitéré son soutien en faveur d’une solution négociée, conseillant de bien comprendre les préoccupations sécuritaires des parties et cela de manière « constructive et pragmatique ».

M. GENG SHUANG (Chine) a d’abord fait part de son soutien à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et à son rôle actif de promoteur de la sécurité des installations nucléaires.  Il a annoncé que son pays va verser une somme de 200 000 euros à l’Agence au titre de l’assistance technique à l’Ukraine.  Tout doit être mis en œuvre, a-t-il poursuivi, pour préserver l’assistance humanitaire.  Comme depuis le début du conflit, les zones affectées connaissent une pénurie d’eau, d’électricité et de chauffage, la Chine a offert une aide humanitaire d’urgence à l’Ukraine mais aussi aux pays touchés par les conséquences de la guerre, a rappelé le représentant.  Il a exhorté les parties à garantir un accès rapide et sans entrave aux agents humanitaires et à soutenir l’ONU dans son rôle de coordonnateur des secours d’urgence.  Il faut une aide ciblée en fonction des besoins des populations, a-t-il insisté.

Le représentant a par ailleurs pressé les parties d’œuvrer de concert à l’atténuation des conséquences des crises énergétique et alimentaire.  À cet égard, il a demandé aux États concernés de cesser d’abuser des sanctions unilatérales et de nuire à la coopération commerciale.  Il a félicité le Secrétaire général de l’ONU pour ses contacts avec les parties, afin de préserver l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, laquelle doit être mise en œuvre de manière équilibrée.  Il a plaidé pour la poursuite des efforts diplomatiques en vue d’un règlement pacifique du conflit.  Avant de conclure, le représentant a regretté que le Conseil de sécurité ait eu à voter sur une question de procédure.  Pour lui, l’organe des Nations Unies chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales doit se prononcer par consensus, grâce à des consultations préalables.  Nous devons respecter le Règlement intérieur provisoire et rester cohérents avec nos pratiques, a souligné le représentant. 

M. FELIX OSEI BOATENG (Ghana) a expliqué que sa délégation a voté en faveur de la participation de Mme Daria Morozova, conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, pour lui permettre de faire part de son point de vue personnel sur la situation humanitaire dans la région de Donbass en Ukraine.  Le Ghana ne reconnaît pas la soi-disant « République populaire de Donetsk », ni aucune personne prétendant agir à titre officiel au nom de cette entité, a précisé le représentant, mais Mme Morozova est une résidente de la région de Donbass et, par extension, une citoyenne de l’Ukraine, a-t-il fait valoir, estimant qu’à ce titre, elle aurait pu être autorisée à parler au Conseil.

Le Ghana reste profondément préoccupé par la situation humanitaire générale et, en particulier, par le sort des civils innocents pris dans les feux croisés des combats intenses dans plusieurs villes d’Ukraine, a indiqué le représentant.  Alors que le nombre des victimes et des destructions augmente, il a notamment regretté que l’infrastructure énergétique de l’Ukraine, déjà mise à mal, continue d’être pilonnée sans se soucier des besoins des civils dont la survie en dépend, en particulier en cette saison hivernale.  Et si les infrastructures détruites peuvent être reconstruites, la destruction dans l’esprit et le cœur des gens est peut-être pire que ce que nous pouvons imaginer, s’est-il inquiété.  Compte tenu de l’aggravation des conditions humanitaires, il a renouvelé l’appel du Ghana aux parties pour qu’elles respectent les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Les civils doivent être protégés et les prisonniers de guerre traités avec respect, conformément aux mesures prescrites par les conventions de Genève et les protocoles additionnels, a-t-il exigé.

Le représentant a souhaité que les parties renoncent à toute logique militaire visant à gagner la guerre pour parvenir à la paix en Ukraine.  Il a plaidé en faveur du dialogue et de la diplomatie et réitéré son appel à l’intensification des efforts internationaux en vue d’une paix globale, juste et durable en Ukraine.  Dans cet esprit, le représentant a appelé de ses vœux la conclusion d’un accord pour le renouvellement de l’Initiative sur les exportations de céréales par la mer Noire à son expiration le 18 mars de cette année.  Il a également insisté sur la nécessité de poursuivre les efforts et la coopération en ce qui concerne l’exportation de l’ammoniac et des produits agricoles russes.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a déclaré que les effets dévastateurs de la guerre en Ukraine se feront sentir sur des générations.  Elle a dénoncé l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre, ainsi que la déportation illicite et par la force de plus de 6 000 enfants ukrainiens.  « De tels actes constituent des crimes de guerre. »  Elle a appuyé les efforts de la CPI afin que les responsables de violations rendent des comptes.  La déléguée a ensuite appelé à la prorogation de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, jugeant celle-ci d’une importance capitale pour la stabilité des prix mondiaux.  Elle a en outre demandé que le Comité international de la Croix-Rouge ait accès aux prisonniers de guerre ukrainiens comme le prévoit la troisième Convention de Genève, qui s’applique au traitement des prisonniers de guerre.  Enfin, la déléguée a exhorté la Russie à retirer ses forces de l’Ukraine.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a rappelé que plus de 21 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire à la suite de l’invasion massive de la Russie, soit plus de 50% de la population ukrainienne d’avant-guerre.  Parmi ces personnes, plus de 5 millions sont déplacées et 8 millions ont fui en Europe en tant que réfugiés.  Il s’agit du déplacement le plus important jamais observé dans le monde depuis des décennies, a-t-il souligné ajoutant que dans les zones sous contrôle russe, environ 4 millions de personnes ont un besoin urgent de protection et d’assistance humanitaires.  « Ces chiffres démontrent l’impact dévastateur des actions de la Russie en Ukraine. »  Passant à la situation à Bakhmout, une ville soumise à des bombardements quasi constants où les infrastructures civiles ont subi des dommages considérables, il a constaté qu’il ne reste plus beaucoup de bâtiments debout et que les conséquences humanitaires y sont extrêmes.  L’aide humanitaire dans la ville s’est arrêtée à la mi-février lorsque les combats se sont intensifiés et qu’il est devenu trop dangereux pour la plupart des secours d’entrer dans la ville, a-t-il rappelé en s’inquiétant pour les près de 4 000 civils extrêmement vulnérables qui restent cachés dans les sous-sols.  Le Royaume-Uni demande par conséquent un accès humanitaire sans entrave et durable à la population ukrainienne, y compris à Bakhmout, a-t-il déclaré, exigeant aussi que la Russie arrête de refuser cet accès et qu’elle mette fin à ses attaques contre les infrastructures essentielles et les zones résidentielles.

Sur un autre volet, le représentant a réitéré le soutien du Royaume-Uni aux efforts déployés par les Nations Unies, en partenariat avec la Türkiye, pour continuer à acheminer les céréales ukrainiennes vers les marchés mondiaux.  L’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire est vitale, a martelé le délégué en faisant remarquer que le monde entier a besoin des céréales ukrainiennes.  Tout doit être mis en œuvre pour lutter contre l’insécurité alimentaire mondiale et faire en sorte que l’aide alimentaire parvienne à ceux qui en ont le plus besoin, a-t-il demandé.  Le représentant a ainsi exhorté la Russie à respecter les termes de l’accord et de la dernière prolongation, qui était d’une durée de 120 jours.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que tant que la Fédération de Russie continuera de bloquer les ports ukrainiens, le monde aura besoin de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, qui a permis d’abaisser les coûts des denrées alimentaires et de sauver des vies.  Seuls trois ports de la mer Noire peuvent actuellement fonctionner, alors que les prix des denrées alimentaires restent à des niveaux historiques à l’échelle mondiale, a-t-elle relevé.  La Fédération de Russie exporte selon elle des denrées alimentaires en quantités au moins aussi élevées qu’avant la guerre, ce que nie la Russie.  En plus de l’aide humanitaire et budgétaire apportée par les États-Unis depuis le début de l’invasion, le Gouvernement américain entend fournir 7,4 milliards de dollars additionnels d’ici à septembre, a précisé la déléguée, en invitant la communauté internationale à faire de même.  Elle a par ailleurs demandé à la Fédération de Russie de mettre un terme à ses attaques sur les infrastructures civiles et les installations nucléaires de l’Ukraine afin de permettre la livraison de l’aide humanitaire.  Pendant ce temps, a-t-elle déploré, des femmes et des filles sont confrontées à une augmentation effrayante des cas de traite et de violence fondée sur le genre en tentant d’échapper aux troupes russes.  « Engageons-nous à faire en sorte que la Fédération de Russie mette un terme à ces atrocités », a-t-elle lancé, en demandant son retrait immédiat et inconditionnel du territoire ukrainien. 

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a, d’entrée, estimé que les réunions de ce Conseil doivent être tournées vers la recherche d’une solution pour les victimes de la guerre en Ukraine, pour les plus de 8 millions de réfugiés, 5 millions de déplacés et plus de 17 millions d’Ukrainiens qui ont besoin d’aide humanitaire.  De toute évidence, la guerre s’enlise davantage, de même que ses conséquences internationales désastreuses comme l’envolée des prix des biens de consommation, s’est inquiétée la représentante.  Dans certains pays, a-t-elle fait observer, l’on voit s’élever depuis peu, un vent de contestation contre l’augmentation du coût de la vie et la réduction du pouvoir d’achat, provoquées par une inflation galopante.  Qu’elles soient directement ou indirectement liées à l’impact de la crise en Ukraine sur les secteurs clefs de l’économie, tels que les prix du carburant, du gaz ou des produits de consommation, ces émeutes urbaines peuvent être des catalyseurs de mouvements déstabilisateurs susceptibles de dégénérer, a-t-elle averti.

Tous ces paramètres doivent être pris en compte dans les projections qui sont faites sur l’issue du conflit, a-t-elle dit, en soulignant le bilan global de la guerre, l’ampleur des pertes et le tribut déjà lourd payé par des populations innocentes.  Elle a appelé les parties à renouveler l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire et ce, pour la durée prévue par l’accord initial.  Cet accord, a-t-elle avoué, reste une lueur d’espoir et une ancre potentielle sur laquelle peuvent s’agréger des initiatives plus larges susceptibles de tracer un chemin vers la cessation des hostilités.  Pour conclure, elle a exhorté les parties à s’engager pour la paix, par un dialogue franc et direct, et à s’abstenir de recourir à des actions unilatérales susceptibles de rétrécir et d’éloigner encore plus la fenêtre des négociations.  Le Gabon est toujours convaincu qu’il n’existe aucune autre issue que l’issue politique et que la cohabitation pacifique est l’objectif ultime. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a déclaré que le soutien le plus efficace que le Conseil puisse apporter aux efforts humanitaires en Ukraine consiste à intensifier les efforts pour mettre fin à ce conflit.  Il a déploré que les plus de 22 réunions du Conseil consacrées à la seule Ukraine, depuis 2022, ainsi que les multiples avertissements et offres de médiation, n’ont jusqu’à présent insufflé aucun élan positif vers la paix.  Il a appelé à redoubler d’efforts pour prendre des mesures concrètes et pragmatiques afin de mettre fin à ce conflit, exhortant à s’éloigner de la dynamique dominante qui assimile le compromis à la défaite et consacre une vision à somme nulle du règlement de ce conflit, avec des gagnants et des perdants.  Dans la recherche d’une solution négociée, les griefs et les préoccupations en matière de sécurité des deux parties devront être abordés, conformément aux principes de la Charte, a recommandé le représentant. 

Qualifiant par ailleurs l’Initiative sur les exportations céréalières par la mer Noire de rare lueur d’espoir de la diplomatie multilatérale, le délégué a appelé à en préserver l’intégrité et à assurer sa continuité. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a salué la décision du Conseil de ne pas permettre à une « citoyenne russe » de s’exprimer aujourd’hui.  Il a indiqué que l’ONU fournit une aide humanitaire vitale à son pays, avant de mentionner la récente visite du Secrétaire général en Ukraine.  Il a rappelé qu’une paix juste ne sera possible que dans le respect de l’intégrité territoriale du pays.  Il a déclaré que l’Ukraine a survécu à l’hiver le plus difficile de son histoire.  « La Russie n’a pas réussi à mettre l’Ukraine à genoux. »  L’ONU a dénoncé les « crimes inimaginables » commis par la Russie en Ukraine, a poursuivi le délégué, en faisant notamment état de viols répétés sur une même personne ou encore le viol d’une femme enceinte qui a fait, peu après, une fausse couche.  Il a dénoncé les déportations illégales d’enfants ukrainiens vers la Russie, avant de saluer les mandats d’arrêts délivrés par la CPI contre deux individus, dont le Président Putin.  Le processus d’établissement des responsabilités se poursuit et ira à son terme, s’est-il félicité.

Le délégué a ensuite rappelé que 40% de la population ukrainienne a besoin d’une aide humanitaire, avant d’insister sur le danger que représentent les mines posées par les soldats russes en Ukraine.  L’Ukraine est désormais l’un des pays les plus minés au monde, s’est-il inquiété.  Le délégué a indiqué que son pays s’est acquitté de ses obligations au titre de l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire, avant de dénoncer les agissements de la Russie en vue de retarder les inspections de navires.  Cette initiative devrait être prorogée et élargie au port ukrainien de Mykolaïv, a-t-il souhaité.  Enfin, le délégué a appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution adoptée le 23 février dernier par l’Assemblée générale.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a constaté que depuis un an, la Fédération de Russie peine à trouver une quelconque justification à sa guerre d’agression contre l’Ukraine.  Tandis que le monde souffre de la flambée des prix alimentaires, la « guerre de la Russie » continue d’entraver les efforts d’exportation des céréales ukrainiennes.  « Cela doit cesser », a dit le délégué.  Après que la guerre a perturbé la production agricole et fait grimper les prix mondiaux des denrées alimentaires et des engrais à des niveaux sans précédent, il est crucial que l’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire soit renouvelée pour éviter l’arrêt des expéditions de céréales vers les pays en développement. 

Hier, a poursuivi le délégué, la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a conclu que la Fédération de Russie avait commis de nombreuses violations des droits humains et du droit international humanitaire en Ukraine, en plus de crimes de guerre.  Il a condamné dans les termes les plus forts les attaques systématiques et aveugles de la Fédération de Russie contre les populations civiles et les infrastructures essentielles.  « Le représentant de la Fédération de Russie vient de nous dire que seules des armes de précision sont utilisées; il semblerait qu’il vienne confirmer que ces destructions sont bien délibérées et intentionnelles », a-t-il relevé.  Le représentant a en outre noté que le 9 mars, la centrale nucléaire de Zaporijia a de nouveau été coupée du réseau électrique ukrainien pendant plusieurs heures, pour la sixième fois depuis le début de la guerre.  Il a exprimé son appui à l’action de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) visant à assurer la sécurité nucléaire et les garanties conformément aux obligations de l’Ukraine.  Il a aussi réaffirmé son appui au peuple ukrainien et à une approche globale, juste et équitable en faveur de la paix, conformément à la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 23 février dernier. 

Au nom des pays nordiques, M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a, au regard du caractère humanitaire de la réunion d’aujourd’hui, tenu tout d’abord à présenter ses condoléances au Mozambique, au Malawi et à Madagascar, après les ravages causés par le cyclone Freddy.  Il a ensuite rappelé que, le mois dernier, une majorité écrasante d’États Membres de toutes les régions du monde a adopté une résolution en faveur de la paix en Ukraine, exigeant, une nouvelle fois, que la Russie se retire immédiatement, complètement et inconditionnellement du territoire ukrainien.

Le représentant a mis l’accent sur trois domaines de préoccupation, citant en premier lieu, les conséquences mondiales désastreuses de la guerre d’agression menée par la Russie et l’importance de maintenir l’Initiative sur l’exportation des céréales par la mer Noire, au nom de la sécurité alimentaire mondiale.

Il a exprimé la détermination des pays nordiques à atténuer les conséquences de la guerre dans le monde, en particulier en Afrique où l’insécurité alimentaire est aggravée par la baisse des exportations ukrainiennes.  Il a estimé, à cet égard, que l’Initiative a contribué à stabiliser le marché mondial des denrée alimentaires.  Il a donc demandé à la Russie de faire partie de la solution et d’approuver la prorogation de ladite Initiative pour une nouvelle période de 120 jours.  Pour finir, le représentant a voulu attirer l’attention sur les rapports alarmants faisant état de violence sexuelle et fondée sur le sexe en Ukraine, lesquelles sont perpétrées, pour la plupart d’entre elles, par des militaires russes sur des femmes, des filles, des hommes et des garçons ukrainiens.  Il a averti que nous sommes là devant une violation flagrante du droit international humanitaire qui pourrait constituer un crime de guerre et un crime contre l’humanité.

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie), qui s’exprimait au nom des pays baltes (Lituanie, Estonie et Lettonie), a constaté que le bilan humanitaire de la guerre non provoquée de la Russie contre l’Ukraine continue de s’alourdir, avec près de 18 millions de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire, près de 6 millions de personnes déplacées, et 8 millions de réfugiés en Europe et ailleurs.  S’agissant du sort des enfants ukrainiens, le représentant a relevé que le rapport de la Commission internationale indépendante d’enquête sur l’Ukraine, publié le 15 mars 2023, reconnaît que « la déportation et l’adoption forcées d’enfants ukrainiens constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité » et qu’il s’agit d’une violation flagrante de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.  À cet égard, il s’est félicité des mandats d’arrêt délivrés aujourd’hui par la CPI à l’encontre de M. Vladimir Putin et de Mme Maria Lvova-Belova.  Il a exigé que la Russie rende ces enfants à leurs parents et tuteurs, fournisse des listes d’enregistrement des enfants qu’elle a enlevés et permette à des observateurs indépendants d’accéder aux installations situées dans les zones d’Ukraine contrôlées ou occupées par la Russie. 

Le représentant a ensuite fait part de son appui à l’Initiative sur les exportations de céréales par la mer Noire, ainsi qu’aux corridors de solidarité de l’UE qui contribuent à réduire le coût mondial des denrées alimentaires et à en fournir aux populations les plus vulnérables.  La Russie doit autoriser la circulation sans restriction des céréales en provenance des ports ukrainiens et prolonger l’Initiative au-delà du 18 mars, a-t-il exigé. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des 34 achève sa session 2023 par l’adoption d’un rapport faisant 159 recommandations en vue d’améliorer le maintien de la paix par l’ONU

Session de 2023,
276e séance plénière – après-midi
AG/PK/247

Le Comité des 34 achève sa session 2023 par l’adoption d’un rapport faisant 159 recommandations en vue d’améliorer le maintien de la paix par l’ONU

Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, aussi appelé « Comité des 34 », a conclu aujourd’hui ses travaux, qui se sont tenus au Siège de l’ONU du 21 février au 17 mars, en adoptant sans vote, tel qu’oralement amendé, un rapport* de fond pour sa session de 2023.   La version finale de ce document sera traduite de l’anglais vers les cinq autres langues officielles de l’ONU avant qu’il ne soit soumis pour approbation à l’Assemblée générale, via un projet de résolution de la Quatrième Commission, chargée des questions de politiques spéciales et de la décolonisation.

Depuis 2020, le nouveau format du rapport de fond annuel du Comité s’articule autour des huit domaines d’action prioritaires identifiés par l’initiative « Action pour le maintien de la paix » (A4P) du Secrétaire général, qui sont les suivants: conduite des opérations de maintien de la paix et du personnel; partenariats; maintien et pérennisation de la paix; performance et responsabilité; politiques; protection; sûreté et sécurité; et femmes, paix et sécurité.

Cent-cinq neuf recommandations ont été adressées par les États Membres au Département des opérations de paix (DPO), au Département de l’appui aux missions (DOS) et au Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, recommandations que le Secrétariat de l’ONU s’est dit prêt à mettre en œuvre, a assuré un responsable.

Plusieurs délégations ont pris la parole, dont celle de l’Union européenne (UE), qui a remercié le Bureau, les facilitateurs et les négociateurs pour leur souplesse ayant permis de parvenir à ce consensus.  Cette année, a-t-elle dit, la Russie a demandé que l’on supprime certaines références dans la section partenariats, ce que nous avons accepté.  « Ce faisant, l’intention de la Russie était claire, elle voulait quelque chose en échange de ne pas parler de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) », a affirmé la représentante de l’UE, tout en se félicitant des partenariats mis en valeur par ailleurs dans le rapport.

La Fédération de Russie a déclaré s’opposer à tous les efforts de politisation des travaux du Comité des 34, rejetant les « attaques » de l’Union européenne, animée selon elle d’« objectifs très étroits ».  L’UE, a-t-elle ajouté, « n’a aucun droit » de se présenter en tant que soldat de la paix, alors qu’elle fournit des armes, remettant ainsi en cause de nombreux documents de l’ONU.

Le Maroc, au nom du Mouvement des non-alignés, s’est félicité de l’adoption de ce rapport de fond, après les difficultés rencontrées par le passé.  Elle a toutefois noté que le recours à certains compromis ne devrait pas être considéré comme un précédent, même s’il a permis d’éviter la « catastrophe » qu’aurait été un rapport de procédure pour une deuxième année consécutive. 

L’Uruguay, qui s’est exprimé au nom de l’Argentine, du Brésil et du Mexique, s’est félicité de l’adoption du rapport, de même que le Rwanda, l’Éthiopie, la Norvège et la Chine.

Outre M. Muhammad-Bande, du Nigéria (Président), le Bureau du Comité était composé cette année de MM. Fabián Oddone, de l’Argentine; Richard Arbeiter, du Canada; Yukiya Hamamoto, du Japon, et Mateusz Sakowicz, de la Pologne, aux postes de vice-présidents; et M. Wael Eldahshan, de l’Égypte, au poste de rapporteur.

*A/AC.121/2023/L.3

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité examine comment les États fragiles peuvent, avec de l’aide, s’approprier et réussir leur réforme du secteur de la sécurité

9285e séance – après-midi
CS/15232

Le Conseil de sécurité examine comment les États fragiles peuvent, avec de l’aide, s’approprier et réussir leur réforme du secteur de la sécurité

À la séance d’information convoquée cet après-midi par le Mozambique, Président du Conseil de sécurité ce mois de mars, les 15 membres et deux délégations invitées ont débattu de questions relatives à la réforme du secteur de la sécurité dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Éclairés par deux exposés, ils ont détaillé les éléments nécessaires pour que les pays concernés mènent cette réforme avec succès et ont discuté de l’appui prévisible que doit fournir le Conseil dans ce domaine.  Il a été avant tout prôné de suivre une approche centrée sur la gouvernance, au motif que la confiance entre la population et l’État repose sur l’existence d’institutions qui servent les besoins des citoyens. 

Après un conflit, la réforme du secteur de la sécurité est primordiale pour consolider et construire la paix.  Elle constitue en outre une base importante pour parvenir à un développement durable.  C’est ce qu’a fait valoir notamment le Brésil, qui a misé sur l’appropriation nationale pour que la réforme soit menée à bien.  Une appropriation qui malheureusement manque trop souvent, a regretté le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité.  M. Alexander Zouev a cependant placé son espoir dans le lancement, par l’équipe spéciale interinstitutions sur la réforme du secteur de la sécurité, d’un programme d’action de l’ONU pour guider la mise en œuvre du rapport du Secrétaire général sur le sujet. 

Ledit rapport*, du 15 mars 2022, a adopté le terme « gouvernance du secteur de la sécurité », a noté le Représentant permanent du Mozambique auprès des Nations Unies dans sa lettre** publiée à l’occasion de ce débat.  Le représentant a réitéré, dans son intervention d’aujourd’hui, la nécessité pour ce secteur de respecter les normes de bonne gouvernance, dans la droite ligne de l’accent mis par le Secrétaire général sur cette exigence.

L’Union africaine continue à cet égard de déployer une assistance technique à ses États membres pour appuyer leurs efforts stratégiques visant à relever les défis de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité.  C’est ce qu’a assuré le Commissaire de l’Union africaine chargé des affaires politiques, de la paix et de la sécurité, M. Bankole Adeoye, avant de souligner que le traitement de ces questions nécessite un consensus plus large et doit se faire au niveau politique. 

La réforme institutionnelle du secteur de la sécurité est une « entreprise politique », a confirmé le Japon.  C’est un « processus intrinsèquement politique », a renchéri le Brésil en faisant observer qu’il dépend non seulement de la mise en place de règles de gouvernance et de la réorganisation des institutions, mais aussi de la répartition des ressources au sein d’une société.

Les conditions requises pour que la gouvernance du secteur de la sécurité gagne la confiance de la population ont été énumérées dans les différents discours: il faut suivre les valeurs classiques de transparence, de responsabilité, de respect des droits humains et de l’état de droit, tout en veillant à un alignement sur les valeurs et les normes qui façonnent chaque pays.

Sur un plan plus concret, les délégations, comme le Secrétaire général dans son rapport, ont fait valoir la nécessité de financer de manière adéquate la réforme de ce secteur et d’œuvrer au renforcement des compétences techniques.  Le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) des anciens combattants font partie intégrante de ce processus, ont rappelé certains.

L’ONU et les missions de maintien de la paix en particulier, ont été vues comme ayant un rôle important, et à renforcer selon le Secrétaire général, pour accompagner ces efforts de réforme, notamment parce qu’ils facilitent le partage d’informations au niveau technique.  Le Gabon a souhaité que les mandats des opérations de paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies continuent de mettre un accent particulier sur la réforme de la sécurité.  Le Royaume-Uni a souligné en particulier le rôle du Conseil dans l’application, par l’ONU et ses partenaires, des meilleures pratiques en matière de réforme du secteur de la sécurité.  La délégation a aussi appelé à redoubler d’efforts pour faire progresser l’inclusion des femmes dans le processus de cette réforme, à l’instar d’autres membres qui ont également plaidé pour une participation effective des communautés et des jeunes.  La participation des femmes à ces réformes est une clef pour garantir la confiance, a fait valoir M. Zouev.

Au niveau des organisations régionales et sous-régionales, le Gabon a mis en avant le Cadre d’orientation sur la réforme du secteur de la sécurité, adopté en 2013 par l’Union africaine, qui vise précisément à offrir une plateforme pour mettre en œuvre, contrôler et évaluer les processus de réforme du secteur de la sécurité sur le continent.  La Slovaquie, invitée avec l’Afrique du Sud en tant que coprésidents du Groupe d’Amis pour la réforme du secteur de la sécurité, a quant à elle encouragé les États Membres à contribuer aux moyens de la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi (Italie) en matière de réforme du secteur de la sécurité.

Enfin, quelques exemples du soutien des efforts de réforme du secteur de la sécurité ont été mis en avant.  Ainsi, en République démocratique du Congo, des experts japonais travaillent en étroite collaboration avec la Police nationale congolaise pour créer un modèle de police communautaire.  Dans ce pays, le corps permanent des spécialistes de la réforme et de la gouvernance du secteur de la sécurité, dont a parlé M. Zouev, a notamment aidé la Mission de l’ONU (MONUSCO) à mobiliser des ressources et des capacités pour faciliter la transition.  En Libye, le Royaume-Uni, qui copréside le Groupe de travail sur la sécurité dans ce pays, soutient les efforts visant à unifier les différentes forces armées en une seule armée d’État responsable.  La Fédération de Russie a jugé nécessaire l’assistance offerte dans ce secteur, mais à condition qu’elle se fonde sur les principes « fondamentaux » du consentement de l’État, du respect de sa souveraineté et son indépendance. 

* S/2022/280

** S/2023/168

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

M. ALEXANDRE ZOUEV, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, a présenté au Conseil de sécurité le rapport du Secrétaire général sur le renforcement de la réforme du secteur de la sécurité (S/2022/280).  Ce rapport, a-t-il indiqué, met l’accent sur la primauté des aspects politiques et de gouvernance, avec un ensemble de recommandations sur l’application de la résolution 2553 (2020).  Faisant état de progrès depuis l’adoption de cette résolution « historique », M. Zouev a mentionné le lancement, par le biais de l’équipe spéciale interinstitutions sur la réforme du secteur de la sécurité, d’un programme d’action à l’échelle du système pour guider la mise en œuvre du rapport et le renforcement des partenariats stratégiques avec l’Union africaine (UA), l’Union européenne (UE), l’Organisation pour la coopération économique et le développement (OCDE) et la Banque mondiale.  Nous avons également créé le corps permanent des spécialistes de la réforme et de la gouvernance du secteur de la sécurité, a-t-il ajouté, précisant qu’en peu de temps, cette équipe est devenue indispensable pour apporter un soutien souple, opportun et de qualité aux opérations de paix, en particulier dans les contextes de crise et de retrait des missions.  En République démocratique du Congo, a relevé le haut fonctionnaire, ces spécialistes ont notamment aidé la MONUSCO à mobiliser des ressources et des capacités pour faciliter la transition et ont permis des consultations avec la Banque mondiale. 

Si les progrès réalisés sont louables, le travail est encore loin d’être terminé, a averti M. Zouev, constatant que ce processus se heurte à des difficultés pour l’exécution des tâches prévues par la résolution 2553 (2020), en particulier au niveau des pays.  Nous nous retrouvons souvent dans des situations où l’appropriation nationale et le rôle moteur de l’État sont absents, a déploré le Sous-Secrétaire général.  En effet, faute d’implication des plus hautes autorités nationales, l’ONU ne dispose pas des moyens suffisants pour apporter son appui et assurer une paix pérenne.  De plus, a-t-il poursuivi, les parties à l’échelle nationale et les partenaires internationaux sont souvent réticents à intégrer la réforme du secteur de la sécurité dans les premières étapes de la médiation et du processus de paix, faisant courir un risque de répétition du conflit lorsque des questions liées à la réforme demeurent en suspens.  De même, les progrès dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité ne peuvent être durables sur le plan financier après le retrait des opérations de paix, ce qui peut entraîner là encore une recrudescence des conflits.  Trop d’obstacles subsistent également quant à la participation des femmes, avec à la clef une baisse de la confiance de la population.  Pour s’attaquer à ces difficultés, l’ONU doit faire montre d’un rôle de chef de file, a plaidé le Sous-Secrétaire général.  Des mandats prévisibles de la part du Conseil de sécurité sont aussi nécessaires pour que les opérations de paix puissent appuyer les institutions sécuritaires, a-t-il dit, avant de plaider pour des interventions stratégiques étayées par des analyses économiques et politiques permettant d’identifier les obstacles et incitant les acteurs nationaux à s’engager dans la réforme du secteur de la sécurité. 

Dans son rapport, a noté M. Zouev, le Secrétaire général recommande de renforcer le rôle des Nations Unies pour intensifier l’appropriation nationale des efforts de réforme du secteur de la sécurité.  Il appelle également à faciliter le dialogue, à partager les enseignements et à proposer des avis techniques.  De l’avis du Sous-Secrétaire général, il faut en outre assurer la viabilité financière de la réforme par le biais d’examens des dépenses publiques, ce que l’ONU fait avec la Banque mondiale.  Mettre en œuvre la résolution 2553 (2020), a-t-il souligné, doit commencer par la mise en œuvre de mandats adaptés et identifiant les priorités adéquates.  Enfin, après avoir invité les États Membres à appuyer la mise en œuvre de ces priorités, il a souligné le rôle de supervision du Conseil de sécurité et l’importance d’une présentation continue de rapports, dans le cadre de cycles fixes, par exemple tous les cinq ans. 

M. BANKOLE ADEOYE, Commissaire de l’Union africaine chargé des affaires politiques, de la paix et de la sécurité, a expliqué que, selon la politique de l’UA, la réforme du système de sécurité d’un pays devrait être intégrée le plus tôt possible dans les processus de paix et constituer un élément essentiel de la prévention des conflits, du relèvement rapide, de la consolidation de la paix et du développement durable, y compris de la réduction de la pauvreté.  Comme références pour ces questions, il a également cité la feuille de route principale de l’UA sur les mesures pratiques à prendre pour faire taire les armes en Afrique d’ici à 2030, adoptée en 2016, ainsi qu’une série de rapports de missions sur le terrain menées par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA et de missions d’enquête d’experts de l’UA.  Ces rapports ont établi que les défis liés à la réforme du secteur de la sécurité et à la gouvernance dans ses États membres sont principalement liés à l’insuffisance des ressources, à l’absence de mécanismes opérationnels de coordination nationale de ladite réforme et aux priorités concurrentes des gouvernements, a précisé le représentant. 

Il a informé que l’UA a continué à déployer une assistance technique à ses États membres, sur demande et sur recommandation de son Conseil de paix et de sécurité, afin de lancer spécifiquement des efforts stratégiques visant à relever les défis de la gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité.  M. Adeoye a précisé que ce soutien a été apporté dans le contexte plus large de la transition politique et de programmes postconflit, de reconstruction et de développement, notamment en République centrafricaine, en Éthiopie, en Guinée-Bissau, au Lesotho, à Madagascar, au Mali et en Gambie.  L’UA a également mis en place un comité de pilotage de la réforme du secteur de la sécurité de la Communauté économique régionale, a-t-il ajouté avant d’informer que le dernier forum africain sur la question s’est tenu en octobre 2022, en se focalisant sur la gouvernance de la sécurité dans la prévention et la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. 

Revenant sur le rapport du Secrétaire général, il a dit être d’accord avec la proposition de procéder à un examen approfondi des principes fondamentaux guidant le soutien à la réforme du secteur de la sécurité, à la lumière de l’expérience et des enseignements tirés au cours de la dernière décennie.  L’accent devrait être mis sur les principes directeurs qui peuvent aider nos deux organisations à s’attaquer aux causes profondes de l’utilisation abusive des institutions de sécurité et de l’instabilité récurrente notable dans certains de nos États Membres, a estimé le représentant.  Il est également d’accord pour collaborer afin d’identifier les principales lacunes dans la mise en œuvre des politiques de cette réforme, telles que l’absence de traitement global de ces questions, leur décentralisation au cours de la médiation et leur relégation à des organes techniques, alors que ces aspects nécessitent un consensus plus large et doivent être traités au niveau politique.  À cet égard, il a remarqué que les accords de paix ont pourtant tendance à s’effilocher en partie à cause de dispositions relatives à la gouvernance du secteur de la sécurité qui ne sont pas réglées. 

Le Commissaire a ensuite parlé de la note d’orientation opérationnelle sur la réforme du secteur de la sécurité et le genre, élaborée par la Commission de l’UA, avant de mentionner l’unité de l’UA chargée du genre, de la paix et de la sécurité.  Il a ajouté que les experts dans ce domaine de réforme collaborent étroitement pour présenter cet outil aux praticiens des États Membres.  Il a également indiqué qu’une institution spécialisée dans le soutien technique à la mise en œuvre de la réforme du secteur de la sécurité, le Centre pour la reconstruction et le développement postconflit de l’UA, situé au Caire, sera opérationnel sous peu.

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a souligné l’importance de la réforme du secteur de la sécurité, ce secteur devant respecter les normes de bonne gouvernance.  Il a déclaré que cette réforme doit être menée conformément aux objectifs de développement des pays concernés.  Cette réforme est une tâche des plus complexes, dans un contexte marqué par les menaces des changements climatiques et du terrorisme, en particulier en Afrique, a-t-il noté.  Il a salué les efforts d’appui du Secrétaire général, en notant l’importance d’associer pleinement les femmes, les jeunes et plus globalement la société civile.  Il a insisté sur le lien entre cette réforme et le développement durable des pays.  Enfin, le délégué a salué la robustesse de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine dans ce domaine.

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a estimé qu’une paix et une stabilité durables exigent la mise en place d’institutions inclusives, efficaces et responsables dans tous les secteurs, dont celui de la sécurité.  Ce secteur étant « au cœur de l’autorité nationale », sa réforme institutionnelle est une « entreprise politique », a-t-il souligné, avant de plaider pour une participation populaire à tous les niveaux.  La transparence, la responsabilité, le respect des droits humains et de l’état de droit sont fondamentaux dans la gouvernance du secteur de la sécurité pour gagner la confiance des gens, a fait valoir le représentant, pour qui la réforme de ce secteur doit être alignée sur les valeurs et les normes qui façonnent chaque pays.  De même, la mobilisation de ressources nationales suffisantes pour renforcer les institutions par le biais des arrangements budgétaires nécessaires doit faire partie du processus de réforme, a-t-il ajouté, plaidant pour un renforcement des capacités techniques dans ce domaine afin de rendre le processus plus durable. 

Le délégué a d’autre part jugé que, compte tenu de leur appui à la réforme du secteur de la sécurité dans les pays où elles opèrent, les missions de paix de l’ONU sont les mieux placées pour jouer un rôle essentiel dans la coordination des efforts internationaux en vue d’un meilleur résultat conforme aux priorités nationales.  Dans cet esprit, une communication étroite et le partage d’informations au niveau technique devraient être davantage encouragés avec les entités des Nations Unies sur le terrain, a-t-il préconisé.  Rappelant à cet égard que le Japon est un partenaire de longue date des pays qui s’efforcent de réformer leur secteur de la sécurité, il a indiqué qu’en République démocratique du Congo, des experts japonais travaillent en étroite collaboration avec la Police nationale congolaise pour créer un modèle de police communautaire, en soutenant le renforcement des capacités des policiers, le développement des infrastructures de postes de police accessibles et l’augmentation de la confiance des populations locales.  Il a ajouté que ce travail, mené en collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), s’étendra à la zone d’où la MONUSCO s’est déjà retirée, conformément à son plan de transition. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a réitéré l’attachement de son pays à la réforme du secteur de la sécurité, un outil essentiel pour la promotion de la paix et de la sécurité internationales.  Le représentant a mis en avant quelques points saillants, relatifs, tout d’abord, à l’importance de l’appropriation nationale pour une réforme du secteur de la sécurité durable et une bonne gouvernance en matière de sécurité.  Il s’est dit d’avis que les mécanismes de réforme du secteur de la sécurité peuvent instaurer la confiance auprès des populations et garantir une meilleure coopération entre les États et les institutions chargées de la sécurité.

Les mécanismes de consultation civils et militaires en Côte d’Ivoire et au Libéria peuvent également jouer un rôle essentiel dans les efforts déployés pour réformer le secteur de la sécurité en période de transition, a relevé le représentant.  Par ailleurs, il a insisté sur le respect des droits humains, sans quoi, a-t-il averti, le secteur de la sécurité n’obtiendra pas la confiance des populations.  Il a, en outre, exhorté à ce que la réforme du secteur de la sécurité tienne compte de la gouvernance dès les premières étapes de sa mise en œuvre.  Le représentant a encouragé à mettre sur pied des partenariats stratégiques et d’envisager des processus de coordination plus transparents avec les différents partenaires, gouvernements mais aussi toutes les institutions qui travaillent sur la réforme du secteur de la sécurité. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a considéré la gouvernance et la réforme du secteur de la sécurité comme essentielles à la paix, à la sécurité et au développement durable.  Au-delà de la coopération bilatérale, la pierre angulaire de l’engagement de la Suisse dans ce domaine est le Centre pour la gouvernance du secteur de la sécurité, qui mène des programmes touchant plus de 70 États.  À ses yeux, les investissements dans des institutions de sécurité efficaces et professionnelles sont préalables à une paix durable et à la prévention des conflits.  Renforcer le secteur de la sécurité revient selon elle à renforcer l’état de droit, avec la participation pleine et significative des femmes à tous les mécanismes décisionnels et de reddition des comptes.  Les opérations de maintien de la paix peuvent également jouer un rôle de premier plan dans l’amélioration de la gouvernance en matière de sécurité, à l’aide de processus politiques nationaux et de la participation d’instances régionales et sous-régionales.  La représentante a donc demandé au Conseil de renforcer les mandats des missions de paix en ce qui concerne la réforme du secteur de la sécurité et d’encourager une coordination accrue entre les opérations de paix ou les missions politique et les équipes pays des Nations Unies.  Comme le reconnaît la résolution 2553, un secteur de la sécurité représentatif, réactif, efficace et responsable, fonctionnant sans discrimination et dans le respect de l’état de droit, est indispensable à la paix et au développement durable, a-t-elle conclu. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a constaté que la faiblesse des institutions chargées de garantir la sécurité dans un État diminue leur capacité à maintenir l’ordre public et l’état de droit.  Dans les États où des processus politiques ont été mis en place avec l’appui de missions de paix, cela crée en outre les conditions d’une résurgence de la violence et d’un échec des processus de paix, a ajouté le représentant, jugeant précieux l’appui que l’ONU offre à la réforme du secteur de la sécurité dans les pays qui en ont besoin.  De fait, en soutenant les efforts de paix dans les pays en situation de conflit et en transition, la Commission de consolidation de la paix s’avère être un outil essentiel, a-t-il souligné, avant d’appeler à renforcer son rôle consultatif auprès du Conseil de sécurité.  Pour le délégué, la capacité institutionnelle des États dans la gestion des ressources pour le secteur de la sécurité est cruciale pour pouvoir mener à bien la réforme du secteur de la sécurité car, sans les ressources nécessaires, toute initiative est selon lui vouée à l’échec.  Il a donc invité les institutions financières internationales et régionales à fournir un soutien aux pays qui en ont besoin, comme établi dans l’ODD 17, et a encouragé la coopération internationale ainsi que la coopération Sud-Sud dans ce domaine.  Il s’est d’autre part déclaré convaincu que la participation de tous les acteurs renforce les processus de transition vers la paix, observant à cet égard que la contribution des femmes dans le secteur de la sécurité favorise la cohésion sociale, nécessaire au développement et à la prévention de la violence.  Enfin, après avoir mentionné les menaces émergentes telles que la criminalité transnationale organisée et le trafic illicite d’armes, il a souhaité que le Conseil intègre davantage les aspects liés aux fonctions de la police, du système judiciaire, de la défense et de la protection des frontières dans les mandats des missions de paix, en particulier dans les phases de transition.

Mme FRANCESCA GATT (Malte) a souligné que la réforme du secteur de la sécurité est un processus politique de longue haleine qui doit être piloté au niveau national et nécessite un engagement et un leadership politiques.  Elle dépend également de la coopération interinstitutionnelle et de la participation d’un grand nombre de parties prenantes afin d’obtenir l’adhésion la plus large possible.  La gouvernance de la réforme du secteur de la sécurité est au cœur du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, a poursuivi la représentante, appelant à former et renforcer les capacités des forces armées, de la police, des gardes-frontières et des services de renseignement sur l’identification des groupes les plus vulnérables.  Une réforme du secteur juridique, judiciaire et de la sécurité qui tient compte de la sexospécificité peut aider à surmonter les obstacles à l’accès des femmes à la justice, a-t-elle fait valoir.  À son avis, un secteur de la sécurité professionnel, efficace et responsable, ainsi qu’un système de justice et d’application des lois accessible et impartial sont nécessaires pour jeter les bases de la paix et du développement durable.

Qui plus est, la réforme du secteur de la sécurité est un élément essentiel du maintien de la paix, de la consolidation de la paix et de la protection des droits humains, a souligné la déléguée, en rappelant que tout en garantissant l’appropriation nationale, l’ONU a renforcé l’assistance aux autorités nationales pour entreprendre des processus cruciaux et complexes de réforme du secteur de la sécurité.  Une approche holistique est nécessaire pour répondre aux besoins de la population locale en matière de sécurité et de justice, et garantir que la réforme aboutisse à la sécurité de l’État et à la sécurité humaine, a fait valoir la représentante.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a fait observer que son pays a investi dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité sur son territoire et à l’étranger.  Nous l’avons fait parce que, selon nous, un secteur de la sécurité démocratiquement responsable et qui fonctionne bien fait partie intégrante d’un système de gouvernement plus large qui offre des protections à ses citoyens, sur la base des principes fondamentaux des droits de l’homme universels et du respect de l’état de droit, a-t-il précisé.  À ses yeux, c’est ce qui rend la réforme du secteur de la sécurité pertinente non seulement pour la reconstruction postconflit, mais aussi pour la prévention des conflits, parce que la confiance entre les citoyens et l’État repose sur l’existence d’institutions qui servent et protègent les besoins de ces citoyens.  Prenant l’exemple de la Libye, le représentant a indiqué que le Royaume-Uni, qui copréside le Groupe de travail sur la sécurité dans ce pays, continuera de soutenir les efforts visant à unifier les différentes forces armées en une seule armée d’État responsable devant un gouvernement élu et capable de relever les défis sécuritaires. 

Plus largement, le délégué a salué les efforts déployés par le Secrétaire général pour renforcer l’approche globale des Nations Unies en matière de réforme du secteur de la sécurité, en particulier l’accent qu’il met sur la gouvernance.  Selon lui, l’ONU dispose là d’un fort avantage comparatif, étayé par l’expérience et une approche qui privilégie l’intégrité, la transparence et la responsabilité.  Il a ensuite affirmé que le Conseil a un rôle important à jouer dans l’application des meilleures pratiques en matière de réforme du secteur de la sécurité par l’ONU et ses partenaires.  Cela comprend la coopération du Conseil pour façonner des mandats adaptés aux besoins afin de guider l’engagement des opérations de paix des Nations Unies, a-t-il noté, avant d’appeler à redoubler d’efforts pour faire progresser l’inclusion des femmes dans les processus de réforme du secteur de la sécurité. 

M. DAI BING (Chine) a appelé au respect du principe d’appropriation nationale s’agissant de la réforme du secteur de la sécurité.  Seules des approches tenant compte des spécificités des pays peuvent être couronnées de succès, a dit le délégué, en rejetant l’imposition de normes uniques, qui sont contre-productives.  Il a indiqué que cette réforme doit être conduite simultanément avec la promotion de l’état de droit et du développement durable.  Il a jugé essentielle une étroite coopération entre le secteur de la sécurité du pays concerné et les opérations de paix de l’ONU, en particulier lors de la phase de retrait desdites opérations.  Enfin, partisan de solutions africaines aux défis africains, il a appuyé l’appel de plusieurs pays africains à une levée des sanctions qui les frappent.

M. SAMUEL ASARE (Ghana) a estimé que l’implication du Conseil ne devrait pas nuire à l’appropriation nationale et au rôle de chef de file de l’État dans le cadre des efforts de paix.  Par ses résolutions et ses mandats, le Conseil devrait renforcer les engagements existants des acteurs nationaux et contribuer à débloquer les ressources nécessaires à l’assistance technique et consultative des gouvernements nationaux pour entreprendre ce qui est généralement une réforme difficile et délicate, a-t-il recommandé.  De même, le Conseil, dans le cadre de son examen périodique de l’agenda de la réforme du secteur de la sécurité, pourrait évaluer les performances des différentes opérations de paix afin de comprendre les pratiques qui ont donné les meilleurs résultats et d’identifier les défis.  Enfin, il a appelé le Conseil à s’appuyer sur l’Équipe spéciale interinstitutions pour la réforme du secteur de la sécurité afin d’adopter une approche globale sur cette question, couvrant l’ensemble du spectre de la paix.

Mme LILLY-STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a jugé que la réforme du secteur de la sécurité est un des piliers sur lesquels doivent se concentrer les efforts internationaux pour une paix durable, notamment pour les pays en situation postconflit.  Rappelant que les résolutions 2151 (2014) et 2553 (2020) en précisent les enjeux, elle a estimé qu’une réforme du secteur de la sécurité permet non seulement de renforcer la résilience du pays mais aussi de restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble de son territoire.  À cette fin, une participation effective des communautés, avec celle des femmes et des jeunes, est indispensable, a fait valoir la représentante, pour qui les populations locales doivent pouvoir participer à toutes les phases des processus de paix.  Soulignant l’importance, dans ce contexte, de l’implication des organisations régionales et sous-régionales, elle a relevé que le Cadre d’orientation de l’Union africaine sur la réforme du secteur de la sécurité, adopté en 2013, vise précisément à offrir une plateforme aux États membres de l’UA et aux structures sous régionales pour mettre en œuvre, contrôler et évaluer les processus de réforme du secteur de la sécurité sur le continent.  Elle s’est d’autre part réjouie que les mandats des opérations de paix et des missions politiques spéciales des Nations Unies continuent de mettre un accent particulier sur la réforme de la sécurité, avant d’appeler à tirer profit de cette dynamique pour mettre en place le Plan conjoint des opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR) mieux adapté et adossé à un financement approprié.  La déléguée a enfin plaidé pour un renforcement des capacités institutionnelles des États fragiles, de sorte qu’ils soient à même de planifier, de mobiliser, de budgétiser, d’allouer et de dépenser de manière responsable les ressources nationales mises au service de la défense et de la sécurité. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a souligné que le secteur de la sécurité est un élément essentiel pour assurer la souveraineté des États et que sa réforme constitue une continuation du processus politique national.  Pour être efficace, le secteur de la sécurité doit tenir compte des caractéristiques historiques, culturelles et politiques de la société dans lesquelles il s’inscrit et servir les intérêts de l’ensemble de la population.  Les initiatives visant à réformer le secteur de la sécurité doivent, selon elle, être menées par les forces nationales et, afin d’assurer leur légitimité, reposer sur l’appropriation nationale.  L’aide de la communauté internationale revêt une importance particulière pour les pays émergeant d’un conflit qui sont incapables d’assurer leur sécurité et de rétablir leurs institutions nationales sans soutien extérieur, a-t-elle relevé, à condition que cette assistance se fonde sur les principes « fondamentaux » du consentement de l’État, du respect de sa souveraineté et son indépendance.  La représentante a mis en garde contre les calendriers rigides ou les approches fondées sur des formules qui sapent les processus déjà fragiles de mise en place des institutions de sécurité.  La réforme du secteur de la sécurité doit être en outre être assortie de mesures de désarmement, de démobilisation et de réintégration, ainsi que d’un appui financier adéquat.  La déléguée a souligné à cet égard le rôle de premier plan qui incombe aux opérations de maintien de la paix et aux missions politiques spéciales de l’ONU.  De même, une approche intégrée de l’appui aux pays sortant d’un conflit, notamment par le biais du Fonds pour la consolidation de la paix, favorise à ses yeux la mise en place de structures de sécurité nationale pérennes et responsables. 

Pour M. MOHAMED ABUSHAHAB (Émirats arabes unis), il importe de veiller à ce que la réforme du secteur de la sécurité soit prise en charge et dirigée par le pays même.  Si les acteurs internationaux peuvent jouer un rôle essentiel en contribuant à la création de cadres et en soutenant leur mise en œuvre, ceux-ci doivent être conçus conjointement avec les priorités des parties prenantes nationales.  Notant que les opérations de paix finissent par se retirer et les programmes d’aide sont réorientés, il a jugé essentiel que l’engagement international se concentre sur le renforcement des capacités nationales et le soutien de solutions spécifiques au contexte.  L’approche axée sur la gouvernance, proposée par le Secrétaire général fournit un cadre utile qui peut englober les perspectives d’un large éventail de parties prenantes, a-t-il estimé. 

Le représentant a insisté sur le fait que le secteur de la sécurité ne peut être neutre en termes de genre, appelant à accroître la participation pleine, égale et significative des femmes dans les secteurs de la sécurité nationale.  Il a également recommandé au Conseil d’inclure des termes liés au genre dans les mandats sur la réforme du secteur de la sécurité, appelant à saisir l’occasion unique qu’offre la réforme dudit secteur pour renforcer à la fois la représentation des femmes et la mise en œuvre de réglementations et de politiques tenant compte de la dimension de genre.  Cela permettrait d’obtenir de meilleurs résultats et des résultats plus durables, a-t-il fait valoir. 

Le délégué a par ailleurs souligné que la réforme du secteur de la sécurité est un processus éminemment politique, et pas seulement technique.  Or les efforts de médiation discutés dans cette enceinte font souvent la distinction entre les volets politique et sécuritaire, a-t-il remarqué, notant qu’une telle approche ne fonctionne que s’il y a une communication ouverte entre les diverses parties prenantes qui négocient les différents arrangements.  Trop souvent, les accords de paix ne sont pas mis en œuvre parce que les questions de sécurité en suspens n’ont pas été résolues ou parce qu’elles ont été laissées à l’appréciation de comités techniques de suivi, a noté le représentant, selon qui les processus de désarmement, démobilisation et réintégration, ou la réforme du secteur de la sécurité, doivent suivre de près la direction politique. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a indiqué que la corruption et le manque de volonté politique sapent la réforme du secteur de la sécurité, avant d’appeler au respect du principe d’appropriation nationale.  Il a souligné l’apport des organisations régionales en appui de ladite réforme et demandé la pleine participation des femmes.  L’état de droit et la justice doivent être au cœur de cette réforme.  Une société fondée sur les droits est plus prospère et heureuse, a conclu le délégué de l’Albanie.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que la réforme du secteur de la sécurité doit s’inscrire dans un projet couvrant l’ensemble des enjeux politiques et de gouvernance.  Selon lui, les grandes opérations de maintien de la paix doivent faire de la réforme du secteur de la sécurité une composante essentielle de leur accompagnement politique.  Il a rappelé, à cet égard, qu’en République démocratique du Congo, où le Conseil de sécurité s’est rendu la semaine dernière, l’appui à la réforme du secteur de la sécurité fait partie des tâches prioritaires de la MONUSCO.

De plus, a rappelé le représentant, la réforme du secteur de la sécurité ne peut se réaliser qu’avec la volonté politique de l’État hôte.  C’est la condition de la confiance des partenaires internationaux, a-t-il insisté, estimant que cette confiance passe aussi par la mobilisation des ressources financières propres de l’État hôte, que complètent celles des partenaires. 

Un enjeu majeur, pour lui, est celui de la coordination des interventions sur le terrain, estimant nécessaire que l’appui fourni par les opérations de maintien de la paix en matière de réforme du secteur de la sécurité soit poursuivi dans le cadre de la transition vers les équipes de pays.  Mais il faut aussi une coordination entre l’ONU et les autres acteurs, a-t-il dit, saluant, à ce titre, l’action des organisations régionales, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui accompagne les réformes du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest. 

M. LUÍS GUILHERME PARGA CINTRA (Brésil) a noté que, dans de nombreuses situations d’après conflit, la réforme du secteur de la sécurité est primordiale pour consolider et construire la paix, et constitue aussi une base importante pour parvenir à un développement durable.  À cette aune, le représentant a estimé que l’appropriation nationale doit être le principe sous-jacent guidant toutes les initiatives dans ce domaine.  L’imposition de solutions globales qui ne tiennent pas compte des réalités du terrain peut mener à l’échec et entraîner l’annulation de réalisations durement acquises, a-t-il averti.  Il a ensuite fait valoir que la réforme du secteur de la sécurité est un processus intrinsèquement politique, qui implique non seulement la mise en place de règles de gouvernance et la réorganisation des institutions, mais aussi la répartition des ressources au sein d’une société.  Observant par ailleurs que les carences du secteur de la sécurité sont souvent à l’origine des conflits, il s’est félicité que plusieurs missions de maintien de la paix des Nations Unies aient joué un rôle important dans l’aide à la réforme de ce secteur.  Il a cependant fait valoir qu’une telle réforme ne doit pas être considérée comme une solution en soi, mais comme faisant partie d’une stratégie de développement coordonnée, qui englobe également les aspects économiques et sociaux.  À cet égard, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants font partie intégrante de ce processus, a-t-il affirmé.  Enfin, après avoir rappelé que l’Union africaine et d’autres organisations régionales et sous-régionales ont considérablement aidé les pays sortant d’un conflit à mener des réformes de leur secteur de la sécurité, il a plaidé pour davantage de coopération entre l’ONU et ces dernières.  

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a observé que le rapport du Secrétaire général nous rappelle que la réforme du secteur de la sécurité et la gouvernance doivent être abordées dès le début des processus de paix.  Attendre la signature d’accords de paix pour s’en préoccuper conduit selon elle à des réformes du secteur de la sécurité inadéquates.  Nous ne saurions trop insister sur l’importance de l’appropriation nationale de la réforme du secteur de la sécurité et de la gouvernance, a continué la représentante, en ajoutant qu’il revient à chaque État de déterminer sa propre approche et que tout appui apporté par la communauté internationale doit répondre à ses besoins spécifiques.  Pour sa part, l’Afrique du Sud a appris d’expérience que la réforme du secteur de la sécurité doit être inclusive, en assurant la participation de l’ensemble des parties prenantes, y compris les chefs traditionnels, les communautés religieuses, les femmes et les jeunes.  Une telle réforme doit en outre être au cœur des discussions concernant le Nouvel Agenda pour la paix.  La déléguée s’est félicitée des suggestions visant à établir un calendrier cohérent pour la présentation par le Secrétaire général d’un rapport au Conseil sur la mise en œuvre de la résolution 2553 (2020).  Elle a également préconisé de mobiliser les soutiens financiers pour la mise en œuvre du programme d’action sur la réforme du secteur de la sécurité, y compris pour les moyens permanents mobilisables basés à Brindisi. 

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a estimé que le nouveau programme d’action sur la réforme du secteur de la sécurité comprend les initiatives les plus importantes que les Nations Unies, les États Membres et les partenaires doivent entreprendre s’ils veulent avoir un impact au niveau national, y compris sur les nouveaux défis en matière de sécurité tels que les changements climatiques, les accords de paix, l’examen des dépenses publiques, la planification de la sécurité nationale, l’égalité des sexes et la jeunesse.  Il a annoncé que la Slovaquie versera sa deuxième contribution financière au programme d’action avant d’encourager les autres États Membres à faire de même.  Avec l’adoption de la résolution 2553 (2020), par laquelle les États Membres ont renforcé leurs engagements en faveur de la réforme du secteur de la sécurité et des priorités définies par le Secrétaire général, les attentes et les tâches liées à l’assistance des Nations Unies se sont considérablement élargies, a-t-il relevé regrettant toutefois que des ressources suffisantes n’aient pas encore été mises à disposition.  Par conséquent, le représentant a appelé les États Membres, outre le soutien qu’ils apportent au programme d’action, à officiellement contribuer aux moyens permanents mobilisables en renfort de la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi (Italie) en matière de réforme du secteur de la sécurité, en puisant dans le budget ordinaire ou dans le compte d’appui au maintien de la paix.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission de la condition de la femme examine des approches novatrices pour retrouver le chemin de la relance et parvenir à la parité femmes-hommes

Soixante-septième session,
16e séance plénière - matin
FEM/2229

La Commission de la condition de la femme examine des approches novatrices pour retrouver le chemin de la relance et parvenir à la parité femmes-hommes

La Commission de la condition de la femme a examiné, ce matin dans le cadre d’un dialogue interactif, la question émergente de la réalisation de la parité femmes-hommes dans le contexte d’urgences qui se superposent. 

Alors que nous nous retrouvons dans cette salle, les femmes et les filles, de par le monde, sont confrontées à une série sans précédent de crises qui ont inversé les progrès enregistrés sur le front de la parité, a déploré le Vice-Président de la Commission, M. Māris Burbergs.  Parmi ces crises, experts et délégations ont identifié, entre autres, la pandémie de COVID-19, l’explosion des taux de pauvreté, la crise mondiale du coût de la vie, la crise climatique et les conflits. 

Au rythme actuel, et en raison des conséquences socioéconomiques de la pandémie de COVID-19, l’on estime qu’il faudra encore 300 ans pour parvenir à l’égalité entre les hommes et les femmes, a alerté la Chef de la section autonomisation économique d’ONU-Femmes. 

Une inquiétude partagée par la Directrice adjointe de la Division de la transformation rurale inclusive et la parité hommes-femmes à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), qui a signalé que si la pandémie a accru l’insécurité alimentaire dans le monde entier, son impact sur les femmes a été particulièrement grave.  De fait, a-t-elle détaillé, plus de 939 millions de femmes âgées de 15 ans ou plus ont connu une insécurité alimentaire modérée ou grave en 2021, contre 813 millions d’hommes de la même tranche d’âge.  Et cette tendance est également à la hausse s’agissant de l’extrême pauvreté qui, selon les prévisions, toucherait 25 millions de plus de femmes et de filles par rapport aux hommes et aux garçons, s’est encore alarmée l’experte.    

Quant aux recommandations et actions concrètes à mettre en place pour renforcer les politiques et les efforts de relance, elles doivent nécessairement passer par une approche intersectionnelle protégeant et promouvant véritablement les droits humains des femmes et des filles dans toute leur diversité, ont estimé plusieurs panélistes à l’instar de la Directrice exécutive du Centre for Social Equity and Inclusion qui a estimé que les  données désagrégées générées par les citoyens et les communautés peuvent être un outil important pour ne laisser personne de côté. 

Les politiques et les gouvernements doivent, en outre, miser et investir dans des services de soins universels et de congés parentaux bien rémunérés car cette approche peut contribuer à créer des emplois et à réduire les inégalités entre les sexes, a insisté, pour sa part, un économiste à l’Open University, au Royaume-Uni.  Pour contribuer à cette transformation, M. Jerome De Henau a estimé, sur la base d’un simulateur lancé la semaine dernière, qu’un tel investissement pourrait créer plus de 300 millions d’emplois dans le monde, dont au moins 240 millions pour les femmes, et 270 millions d’emplois formels, chiffres qui se traduiraient par une hausse du taux d’emploi de plus de 10% pour les femmes. 

Une approche qui a tout son sens, pour le Vice-Président de la Commission de la condition de la femme, sachant, a-t-il dit, que les ménages affectés par la fermeture des écoles pendant la pandémie ont dû assurer près de 700 milliards d’heures non rémunérées de garde d’enfants, un fardeau qui a essentiellement pesé sur les femmes qui en ont assumé près de 70%. 

Parmi les autres mesures préconisées visant la parité, les participants ont insisté sur les moyens de combler les fossés en matière d’éducation et dans le domaine des STIM. L’occasion pour l’assistance de prendre connaissance de l’expérience de la Conseillère en matière de genre dans le cadre du programme SERVIR-Amazonia, au Centre international d’agriculture tropicale (CIAT), qui a expliqué comment les femmes issues des populations les plus vulnérables, notamment en Amazonie, peuvent être impliquées dans des programmes qui encouragent l’utilisation des technologies géospatiales, pour surveiller les changements socioenvironnementaux dans leurs territoires et prévenir les crimes environnementaux. 

Les délégations ont également entendu la Directrice exécutive de la Fondation Allamin pour la paix et le développement, au Nigéria, s’inquiéter de la radicalisation des femmes qui rejoignent Boko Haram et recommander de donner aux femmes et aux jeunes des possibilités de réalisation de soi et un sentiment d’inclusion dans leur communauté.  Il faut également, selon elle, mettre en évidence les récits alternatifs positifs, et élaborer des programmes de formation centrés sur la pensée critique et l’éducation aux médias, afin de les prémunir contre les discours extrémistes. 

D’où l’importance d’intégrer une perspective de genre dans les systèmes de justice pénale par le biais de mesures visant à supprimer les obstacles à la promotion des femmes et à leur autonomisation dans les services juridiques pénaux, a noté la Présidente de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale. 

La Commission de la condition de la femme se réunira de nouveau demain, vendredi 17 mars, à partir de 10 heures.

SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE »

Questions nouvelles, tendances, domaines d’intervention et approches novatrices des questions ayant une incidence sur la situation des femmes, notamment sur l’égalité entre femmes et hommes

Mme ANNIE NAMALA, Directrice exécutive du Centre for Social Equity and Inclusion, s’est penchée sur les enseignements tirés de son travail avec les femmes et les filles marginalisées en Inde et en Asie du Sud, indiquant que leurs lacunes en matière d’éducation limitent leur accès au numérique.  En Inde, les filles sont deux fois plus susceptibles que les garçons d’avoir moins de quatre ans de scolarité, 30% des filles issues des familles les plus pauvres n’ont jamais mis les pieds dans une salle de classe, tandis que 42% des filles et 39% des garçons sont incapables de faire une soustraction élémentaire en arithmétique, a-t-elle détaillé.  En outre, les femmes âgées de 15 à 65 ans sont 46% moins susceptibles de posséder un téléphone portable et 62% moins susceptibles d’utiliser Internet que les hommes du même âge.  Elle a également expliqué que les niveaux de revenu et d’éducation sont étroitement liés à la possession d’un téléphone portable.  Ainsi, une augmentation de 1% du revenu est associée à une augmentation de 1,6% à 16% de la probabilité de posséder un téléphone portable, tandis qu’une année supplémentaire d’éducation formelle peut entraîner une augmentation de 0,5% à 3,4% de cette même probabilité. 

L’experte a ensuite indiqué que la plupart des études et enquêtes fournissent une image globale de l’écart entre les hommes et les femmes en matière d’accès au numérique.  Dans l’ensemble, les données désagrégées disponibles se limitent au sexe, à la région, à la classe sociale et aux clivages entre zones rurales et urbaines.  Or il est possible d’identifier de nombreuses sous-catégories à l’intérieur de ces grandes catégories, a-t-elle fait remarquer.  Par exemple, l’Inde reconnaît 21 sous-catégories dans la catégorie des personnes handicapées, plus de 3 000 communautés sont identifiées dans la catégorie des « castes répertoriées », et plus de 700 communautés dans celle des « tribus répertoriées ». 

Les réalités vécues, les opportunités et l’accès au pouvoir et aux ressources de chacune de ces communautés sont négociés en fonction de leur situation géographique, de leur langue, de leur identité religieuse, de leur travail, sans oublier leurs normes sociales, et de leurs pratiques culturelles.  Et chacune de ces dimensions comporte des formes d’exclusion et de discrimination.  Les données générées par les citoyens et les communautés constituent donc, à ses yeux, un outil important pour appuyer une approche intersectionnelle ainsi que la participation et l’inclusion des communautés. 

Elle a indiqué que les résultats et les recommandations générés à l’aide de ces données sont compilés dans des « profils communautaires » qui sont utilisés par les membres de la communauté pour dialoguer avec le gouvernement local et, par la suite, au niveau de l’État.  Les données générées par les citoyens et les communautés sont à même de contribuer à la réalisation des principes de « ne laisser personne de côté » et d’« atteindre d’abord les plus éloignés », a-t-elle soutenu. 

Mme LAUREN PHILLIPS, Directrice adjointe de la Division de la transformation rurale inclusive et la parité hommes-femmes à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a expliqué que la pandémie a accru l’insécurité alimentaire dans le monde entier, mais que l’impact sur les femmes a été particulièrement grave.  De fait, a-t-elle détaillé, plus de 939 millions de femmes âgées de 15 ans ou plus ont connu une insécurité alimentaire modérée ou grave en 2021, contre 813 millions d’hommes de la même tranche d’âge.  Et cet écart ne cesse de se creuser, passant de 1,7 point de pourcentage avant la pandémie en 2019, à 3 points de pourcentage en 2020, pour atteindre 4,3 points de pourcentage en 2021.  Ce creusement est principalement dû à la situation en Amérique latine et dans les Caraïbes, ainsi qu’en Asie, a-t-elle précisé. 

Passant aux changements climatiques, la panéliste a constaté que les inégalités entre les hommes et les femmes sont importantes dans les pays fortement exposés aux phénomènes climatiques extrêmes, tels que les petit État insulaire en développement (PEID).  Les moyens de subsistance, les responsabilités et les droits différenciés des femmes et des hommes ruraux, largement façonnés par les normes de genre et les structures sociales, influencent la nature de leur sensibilité aux risques climatiques.  L’élimination des inégalités entre les hommes et les femmes est donc, à son avis, une « étape clef et indispensable » pour renforcer la résilience climatique. 

L’experte a également exhorté à renforcer la résilience des systèmes agro-alimentaires face à l’augmentation de la faim et de l’insécurité alimentaire dans les contextes de conflits armés.  Elle a jugé essentiel de renforcer les liens entre l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, d’une part, et la sécurité alimentaire et la nutrition de l’autre, notant que ces domaines politiques restent souvent déconnectés aux niveaux national et international.  Il est également fondamental de collecter des données ventilées par sexe fiables et à jour, en particulier dans les contextes d’urgence, afin d’élaborer des politiques, des programmes et des plans d’investissement solides dans le secteur agroalimentaire. 

M. JEROME DE HENAU, maître de conférences en économie à l’Open University, au Royaume-Uni, a fait valoir que la pandémie de COVID-19 a montré à quel point nous comptions sur le travail de soins pour soutenir nos économies et la mesure dans laquelle ce type d’emploi demeure sous-évalué et marqué par les inégalités entre les sexes.  Par conséquent, investir dans des services de soins universels et de congés parentaux bien rémunérés peut contribuer à créer des emplois et à réduire les inégalités entre les sexes, tout en favorisant le développement des enfants et améliorant le bien-être de ceux qui fournissent et reçoivent un soutien.  Comme l’éducation et la santé, les soins font partie intégrante de l’infrastructure économique et sociale, et nécessitent, à ce titre, des investissements publics directs et soutenus, a observé M. De Henau.  Pourtant, a-t-il noté, malgré les avantages qu’ils procurent à la société, les investissements dans les services sociaux ne sont pas considérés comme des dépenses d’infrastructure.  Les gouvernements sont également réticents à considérer les dépenses publiques consacrées à ces services comme constituant un investissement, contrairement, par exemple, à celles allouées aux projets de construction.  « Cela doit changer.  Et ça change », a estimé le maître de conférences. 

Pour contribuer à cette transformation, M. De Henau a été chargé par l’Organisation internationale du Travail (OIT), au moyen d’un projet financé par la Fondation Bill et Melinda Gates, de participer à l’élaboration d’un outil de simulation qui quantifie certains besoins d’investissement annuels et les avantages sociaux liés aux dépenses dans les soins.  Lancé la semaine dernière, ce simulateur estime, à partir de données tirées de 82 pays représentant 87% de l’emploi mondial et 94% du PIB mondial, les besoins en matière de soins pour les enfants d’âge préscolaire.  Il met en exergue les politiques de congés payés et de services universels pour combler le fossé des politiques concernant la garde d’enfants, estimant séparément les besoins en soins de longue durée pour les enfants et les adultes.  Se fondant sur un exemple créé par l’OIT pour 2035, M. De Henau a démontré que les dépenses consacrées aux services de soins de longue durée représenteraient 60% de l’investissement total dans les pays à revenu élevé, reflétant des populations relativement plus âgées ayant des besoins de soins plus importants. 

Selon ses calculs, un tel investissement pourrait créer plus de 300 millions d’emplois dans le monde, dont au moins 240 millions pour les femmes, et 270 millions d’emplois formels, chiffres qui se traduiraient par une hausse du taux d’emploi de plus de 6% dans le monde et de plus de 10% pour les femmes.  De même, les écarts salariaux entre les sexes pourraient être réduits de 13% à l’échelle mondiale, soit une baisse de 21% dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur.  De tels investissements auraient selon lui un effet « transformateur » sur la structure budgétaire des États, la création d’emplois et la hausse des revenus permettant d’élargir l’assiette fiscale.  Considérant que tout le monde a besoin de soins à un moment donné de sa vie, il a estimé que le financement public de tels investissements est le meilleur moyen de mettre en place une économie plus solidaire et plus égalitaire.

Mme MARINA IRIGOYEN, Conseillère en matière de genre dans le cadre du programme SERVIR-Amazonia, au Centre international d’agriculture tropicale (CIAT), a expliqué comment les femmes issues des populations les plus vulnérables, notamment en Amazonie, peuvent être impliquées dans des programmes qui encouragent l’utilisation des technologies géospatiales, au bénéfice de leurs communautés, tout en relevant les défis environnementaux. 

À São Félix do Xingu, une municipalité de l’État du Pará, en Amazonie brésilienne, une association dirigée par des femmes produit de la pulpe de fruits et du cacao.  Ces agricultrices subissent quotidiennement une détérioration de la qualité de l’air en raison des épandages aériens de pesticides sur les pâturages, et de l’eau, en raison de la pollution minière des rivières. 

Avec le soutien du programme SERVIR-Amazonia, une application de téléphonie mobile a été conçue pour le suivi géospatial des changements socioenvironnementaux dans les territoires.  Ces femmes ont ainsi bénéficié de formation sur l’utilisation de Google Maps, la création d’un compte e-mail, la connexion à Internet, la gestion des contacts, l’échange de messages, les réunions en ligne, l’utilisation de l’appareil photo et l’installation d’applications. 

À Madre de Dios, dans le sud-est du Pérou, SERVIR-Amazonia a développé l’outil RAMI qui permet de détecter en temps quasi réel les activités d’orpaillage associées à la déforestation en Amazonie, à l’aide de satellites.  Dans cette localité, les femmes utilisent des drones pour défendre leurs territoires.  La panéliste a également cité le projet PREVENIR au Pérou, qui encourage les femmes de l’Amazonie à utiliser la technologie pour prévenir les crimes environnementaux, tels que l’exploitation forestière et minière illégale, en leur proposant des formations et même en fournissant des services de garde d’enfants afin qu’elles puissent y participer pleinement. 

Ailleurs, au Cambodge, Open Development Cambodia utilise une application technologique basée sur le moteur de recherches Google Earth Engine, pour suivre l’impact des inondations sur le taux d’abandon scolaire le long du lac Tonle Sap et dans les zones environnantes.  C’est la première fois que Google Earth Engine est utilisé pour analyser l’impact des inondations sur les femmes, a-t-elle précisé. 

Sur la base de ces expériences, l’intervenante a relevé que la formation orientée vers les femmes nécessite des pédagogies spécialisées, en se basant sur une étude qui a montré que les femmes souhaitaient être formées à la surveillance du territoire, mais étaient limitées par les tâches ménagères et l’éducation des enfants.  À cela s’ajoute le préjugé de la limitation de l’accès des femmes à la forêt.  Elle a appelé à appuyer les campagnes d’alphabétisation numérique dès l’enfance afin de réduire la fracture numérique entre les sexes.  Dans le cas de l’Amazonie, les organisations autochtones sont un allié potentiel à cet égard.  La voie a été ouverte pour une plus grande implication des femmes dans les services géospatiaux visant à relever les défis environnementaux, mais cela nécessite de compléter les efforts publics-privés, avec la mise en œuvre de politiques et de programmes, afin d’en assurer la durabilité, a-t-elle indiqué. 

Mme HAMSATU ALLAMIN, fondatrice et Directrice exécutive de la Fondation Allamin pour la paix et le développement, au Nigéria, a noté que les raisons de l’endoctrinement et de la radicalisation des hommes et des femmes qui se joignent à Boko Haram, groupe terroriste radical qui sévit depuis plus de 13 ans dans le nord-est du Nigéria et dans la région du lac Tchad, vont de l’enlèvement et à la coercition, aux pressions sociales, à la motivation circonstancielle, au besoin d’appartenance et à la recherche de sens.  Pour ces adeptes, tout est permis pour atteindre les objectifs du groupe, y compris rompre les liens avec leur famille et d’autres personnes externes au groupe, ce qui permet de mener des « actions drastiques contre-normatives » pour signaler leur engagement envers leur « nouvelle société », a expliqué Mme Allamin.  Des garçons et des hommes ont également été enlevés et recrutés de force et endoctrinés, des filles et des femmes enlevées dans leurs communautés pour être confrontées à des mariages forcés et des viols collectifs en série.  Celles qui parviennent à échapper à Boko Haram sont souvent stigmatisées et rejetées par leur famille avec des grossesses et des bébés conçus en captivité. 

Les violences sexuelles et sexistes continuent d’augmenter, a poursuivi Mme Allamin, tandis que les opérations antiterroristes s’accompagnent souvent d’une vulnérabilité accrue pour les femmes suite aux arrestations, détentions, meurtres et disparitions de leurs proches.  La Fondation Allamin pour la paix et le développement conteste le récit de l’extrémisme de Boko Haram avec des messages de paix, de tolérance et de coexistence pacifique dans des clubs de paix dans les écoles islamiques.  Pour mettre un terme à l’influence délétère des groupes radicaux, elle a recommandé de donner aux femmes et aux jeunes des buts, des possibilités de réalisation de soi et un sentiment d’inclusion de la part de leur famille et de leur communauté.  Il faut également, selon elle, mettre en évidence les récits alternatifs positifs et élaborer des programmes de formation centrés sur la pensée critique et l’éducation aux médias.

Mme JEMIMAH NJUKI, Chef de la section autonomisation économique d’ONU-Femmes, a indiqué que les retombées économiques et sociales de la pandémie de COVID-19 ont eu un impact délétère sur l’égalité entre les hommes et les femmes, au point que l’on estime maintenant qu’il faudra encore 300 ans pour atteindre l’égalité.  Elle s’est également inquiétée de l’augmentation de l’extrême pauvreté qui, selon les prévisions, toucherait 25 millions de plus de femmes et de filles par rapport aux hommes et aux garçons.  En outre, le phénomène s’accompagne d’un creusement des écarts entre les sexes pour ce qui est de l’insécurité alimentaire liée à la convergence des conflits nouveaux et prolongés, des changements climatiques, de l’inflation galopante et des coûts de l’alimentation et de l’énergie.  Or, a fait valoir la responsable onusienne, la capacité des femmes et des filles à agir et à construire un avenir résilient dépend justement de l’élimination des obstacles structurels et des disparités entre les sexes, et de l’augmentation de leur inclusion dans les processus de prise de décisions et de consolidation de la paix. 

Pour aller de l’avant, elle a appelé à donner la priorité à des services de soins abordables et de qualité.  Ces services sont non seulement essentiels pour favoriser la réinsertion des femmes sur le marché du travail et le bien-être des enfants et des personnes âgées, mais ils peuvent également offrir des avantages à plus long terme pour l’économie, a-t-elle expliqué. 

Elle a, ensuite, suggéré de privilégier des systèmes de protection sociale universels et sensibles à la dimension de genre afin de constituer un rempart contre les chocs et les conflits économiques et environnementaux et répondre aux défis spécifiques auxquels sont confrontées les femmes et les jeunes filles, notamment la sécurité alimentaire et la nutrition.  L’experte a, en outre, plaidé pour une approche intersectionnelle dans les politiques et programmes en promouvant véritablement les droits humains des femmes et des filles dans toute leur diversité, depuis la conception des technologies et des innovations jusqu’à la garantie d’un accès égal des femmes et des filles aux outils et aux services numérisés.

Mme MARY WANGUI MAGWANJA, Présidente de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, a indiqué qu’en tant que principale institution politique des Nations Unies dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale, la Commission s’efforce d’intégrer la dimension de genre dans les domaines relevant de son mandat.  La Déclaration de Kyoto visant à faire progresser la prévention de la criminalité, la justice pénale et l’état de droit: vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, préparée par la Commission, appelle ainsi à intégrer une perspective de genre dans la prévention du crime, au moyen de la prévention de toutes les formes de violence et de criminalité liées au genre, a-t-elle noté.  Elle souligne également l’importance d’intégrer une perspective de genre dans les systèmes de justice pénale par le biais de mesures visant à supprimer les obstacles à la promotion des femmes et à leur autonomisation dans les services juridiques pénaux, tout en assurant la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing. 

Pour y parvenir, Mme Mugwanja a souligné la nécessité de disposer de statistiques sur le genre et de données ventilées par sexe pour une prévention de la criminalité fondée sur des preuves et pour l’intégration d’une perspective de genre dans le système de justice pénale.  Elle a espéré, en terminant, que la communauté internationale saura réaffirmer ses engagements en faveur du renforcement de l’égalité entre les femmes et les hommes d’une manière transparente et inclusive afin de relever ces nouveaux défis, en particulier dans les pays en développement. 

Dialogue interactif

« La pauvreté a un visage féminin », a constaté l’Union européenne en ouvrant le dialogue interactif qui a suivi les exposés des panélistes.  Les crises multiples qui se sont succédé au cours des dernières années ont en effet renforcé les inégalités entre les hommes et les femmes, et aggravé les risques de violences sexuelles et sexistes. 

Ces violences s’accroissent en temps de crise et sont utilisées par certains groupes armés comme arme de guerre, ont renchéri les États-Unis, pour qui ces éléments doivent faire partie de la réflexion sur l’octroi de l’aide humanitaire, notamment au profit des organisations dirigées par des femmes. 

Les conséquences des changements climatiques dans les zones rurales sont propices à l’émergence de conflits, a relevé pour sa part le Soudan.  C’est pourquoi le Gouvernement a mis en place des programmes de sécurité alimentaire centrés sur les femmes et assortis de campagnes de sensibilisation.  Au Mali, où plus de 70% de la population vit en milieu rural, la lutte contre les changements climatiques s’articule autour des priorités nationales de la restauration de la sécurité et de la création d’emplois, qui demeurent tributaires des efforts d’alphabétisation et de littératie numérique. 

En Afrique de l’Ouest, le terrorisme continue de gagner du terrain et désorganise nos sociétés, s’est inquiétée à son tour la Côte d’Ivoire, en appelant à la mobilisation pour lutter contre la pauvreté qui fragilise les populations, les femmes au premier chef.  « Il y a urgence de prévenir au lieu de guérir », a martelé la délégation. 

Les points de vue des États Membres du Sahel sur cette question se rejoignent, a constaté la Directrice exécutive de la Fondation Allamin pour la paix et le développement, « mais ne nous arrêtons pas là: les pays du Moyen-Orient et de l’Asie connaissent aussi le fléau de l’extrémisme violent, et maintenant, c’est ensemble de nous devons l’affronter ». 

Cependant, pour Justice Watch Association, toute discussion relative aux droits des femmes en Iran qui ne tient pas compte des effets des sanctions unilatérales imposées par les États-Unis ne nous fera pas avancer. 

Arriver à la parité dans un contexte de crises superposées exige une approche ciblée, a dit le Pakistan, où les inondations ont récemment plongé 33 millions de personnes dans un état de détresse humanitaire, tandis que le plan de réponse reste largement sous-financé.  « La lutte contre l’urgence climatique ne pourra être menée sans les femmes », a ajouté la délégation.  Même constat au Malawi où les dévastations causées cette semaine par le cyclone Freddy ont affecté en premier lieu les plus vulnérables, en particulier les femmes, les personnes âgées et les personnes handicapés. 

La dimension de genre doit en effet être intégrée aux politiques gouvernementales, a fait valoir le Centre de recherche pour les femmes de l’Asie-Pacifique, en particulier en matière de santé sexuelle et génésique, d’alimentation et d’éducation.  La superposition des crises a largement effacé les avancées enregistrées sur le front de la parité entre les hommes et les femmes, a reconnu le Japon, qui fait désormais appel aux technologies numériques pour que celles-ci puissent acquérir les compétences nécessaires à leur développement professionnel. 

Nous devons en outre valoriser les connaissances traditionnelles des populations locales, qui connaissent le mieux le territoire et l’environnement qu’elles habitent, et qui savent souvent comment elles ont fait face à certains problèmes dans le passé, a ajouté la Conseillère en matière de genre dans le cadre du programme SERVIR-Amazonia au CIAT

Le Comité de coopération internationale médicale a toutefois mis en garde contre les stéréotypes sexistes et les normes sociales négatives qui font que les soins non rémunérés sont souvent considérés comme une responsabilité qui incombe aux femmes, qui consacrent de 2 à 10 fois plus de temps aux soins des enfants que les hommes.  La Malaisie a d’ailleurs mis en place des politiques tenant compte de la dimension de genre afin d’abattre les obstacles systémiques à l’émancipation des femmes, tels que les soins non rémunérés, afin de leur permettre de participer pleinement à la société. 

Les femmes occupant un emploi informel ne bénéficient d’aucun filet de protection sociale et sont menacées d’instabilité, a opiné l’Indonésie, en particulier en zone rurale.  Comme la Fundacion Abba Colombia, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a observé que de nombreuses femmes travaillant dans le domaine agroalimentaire occupent des emplois informels, à temps partiel et peu rémunérés, tout en s’occupant de leur famille, ce qui produit une « dimension biaisée » de la protection sociale en fonction du genre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité appelle à des élections nationales libres, sûres et transparentes en Libye

9284e séance – après-midi
CS/15231

Le Conseil de sécurité appelle à des élections nationales libres, sûres et transparentes en Libye

Dans une déclaration présidentielle adoptée cet après-midi, le Conseil de sécurité a appelé à la tenue, cette année en Libye, d’élections nationales présidentielle et législatives « libres, régulières, sûres, transparentes et inclusives », en vue de mener à bien la transition politique dans ce pays.

Le Conseil se félicite dans cette optique des pourparlers au Caire entre les présidents de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État, ainsi que des progrès graduels accomplis sur le plan du cadre constitutionnel des élections et du treizième amendement à la déclaration constitutionnelle.

« Il convient d’insuffler un nouvel élan, sur la base de ces progrès, pour consolider l’assise juridique et l’accord politique qui sont essentiels en vue de la tenue de ces élections en 2023 », notent les membres du Conseil dans cette déclaration.

Le Conseil estime par ailleurs encourageante l’initiative prise par le Représentant spécial du Secrétaire général consistant à mettre en place un groupe libyen de haut niveau chargé des élections, en vue de compléter les progrès accomplis au cours des autres processus et de réunir les parties prenantes libyennes. 

Il exhorte lesdites parties prenantes à dialoguer, de manière constructive et transparente avec le Représentant spécial, dans un esprit de compromis, et à respecter les garanties concernant l’indépendance et l’intégrité d’un processus électoral inclusif, « ainsi que les résultats des élections ».

Enfin, le Conseil rappelle que les individus ou entités qui entravent le bon déroulement de sa transition politique, « notamment en faisant obstacle ou en remettant en cause les élections », peuvent être visés par ses sanctions.  Toutes les parties prenantes libyennes ont précédemment donné des garanties fermes pour respecter l’intégrité du processus électoral, note le Conseil

LA SITUATION EN LIBYE

Texte de la déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité réaffirme son ferme attachement à un processus politique inclusif dirigé et contrôlé par les Libyens, facilité par l’Organisation des Nations Unies et accompagné par la communauté internationale, et appuie résolument le fait de voir le peuple libyen se prononcer sur ses futurs dirigeants au moyen d’élections et de veiller à ce que cette demande légitime soit entendue dans le cadre du processus politique.

Le Conseil se félicite du rôle joué par l’Égypte pour faciliter les pourparlers au Caire entre les présidents de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État.  Il salue les progrès graduels accomplis sur le plan du cadre constitutionnel des élections et du treizième amendement à la déclaration constitutionnelle.  Il prend note de la continuité du rôle joué par la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État et souligne qu’il convient d’insuffler un nouvel élan, sur la base de ces progrès, pour consolider l’assise juridique et l’accord politique qui sont essentiels en vue de la tenue en 2023 en toute sécurité d’élections nationales présidentielle et législatives libres, régulières, sûres, transparentes et inclusives, dans l’ensemble du pays, et mener à bien la transition politique en Libye.

Le Conseil réaffirme son ferme appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), Abdoulaye Bathily, et en particulier à son rôle de médiation et de bons offices pour faire progresser un processus politique inclusif, conformément à ses résolutions pertinentes.  Il se félicite des longues consultations qu’a menées le Représentant spécial avec les parties prenantes libyennes et régionales et la communauté internationale, afin de définir une voie de consensus vers la tenue d’élections nationales présidentielle et législatives en 2023 et de satisfaire les aspirations de tous les Libyens de choisir leurs dirigeants par la voie des urnes.

Le Conseil estime encourageante l’initiative prise par le Représentant spécial du Secrétaire général de mettre en place un Groupe libyen de haut niveau chargé des élections, facilité par l’ONU, en particulier, qui entend compléter les progrès accomplis au cours des autres processus et réunir les parties prenantes libyennes.  Il souligne l’importance d’un processus participatif et représentatif qui comprend des représentants des institutions politiques et des personnalités politiques, des chefs tribaux, des représentants d’organisations de la société civile, des acteurs de la sécurité et des jeunes, ainsi que la participation pleine, égale et véritable des femmes, et qui peut par conséquent aider à forger un consensus sur les mesures nécessaires à prendre pour mener à bien le processus électoral, notamment établir les bases constitutionnelles et les lois électorales, de manière inclusive et transparente, afin de veiller à ce que l’issue de ses actes et de ses délibérations, quelle qu’elle soit, puisse être acceptée et appuyée par l’ensemble des principales parties prenantes.  Il exhorte toutes les parties prenantes à dialoguer pleinement, de manière constructive et transparente avec le Représentant spécial, dans un esprit de compromis, et à respecter les garanties concernant l’indépendance et l’intégrité d’un processus électoral inclusif, ainsi que les résultats des élections.  Il souligne qu’il importe d’établir une coopération et des échanges constructifs entre toutes les institutions compétentes libyennes à cet égard.  Il insiste sur l’importance d’instaurer des conditions sûres pour que les organisations de la société civiles puissent travailler en toute liberté et de protéger celles-ci contre toutes menaces et représailles.

Le Conseil demande à la communauté internationale d’appuyer pleinement le Représentant spécial du Secrétaire général et la MANUL dans l’exécution de leur mandat et encourage à cet égard le Représentant spécial à continuer de mettre à profit les contributions des pays voisins et des organisations régionales, en particulier de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes, pour trouver une solution durable et pacifique à la crise en Libye.

Le Conseil se félicite de l’appui apporté par l’Organisation des Nations Unies à la Haute Commission électorale nationale libyenne et l’encourage à poursuivre cet appui, en dépêchant notamment une mission d’évaluation des besoins, afin de permettre la conduite d’élections présidentielle et législatives nationales libres, régulières, transparentes et inclusives, dans toute la Libye.

Le Conseil insiste sur l’importance des principes de responsabilité financière, de lutte contre la corruption et de transparence, dans le cadre des élections.  Il souligne que les autorités et les institutions libyennes sont capables d’organiser des élections en toute neutralité dans l’ensemble du pays en 2023 et sont tenues d’en rendre compte.

Le Conseil rappelle que les individus ou entités qui mettent en danger la paix, la stabilité ou la sécurité de la Libye ou qui entravent ou compromettent le bon déroulement de sa transition politique, notamment en faisant obstacle ou en remettant en cause les élections, peuvent être visés par ses sanctions.  Il rappelle également que toutes les parties prenantes libyennes avaient précédemment donné des garanties fermes pour appuyer et respecter l’indépendance et l’intégrité du processus électoral, ainsi que les résultats des élections, et leur demande de nouveau de respecter ces garanties, conformément aux responsabilités politiques qu’elles ont à l’égard du peuple libyen.

Le Conseil met l’accent sur l’importance d’un processus de réconciliation inclusif, fondé sur les principes de la justice transitionnelle et du fait d’avoir à rendre des comptes, et se félicite de l’action menée par le Conseil présidentiel pour lancer le processus de réconciliation nationale, avec le concours de l’Union africaine, et notamment pour faciliter une réunion sur la réconciliation nationale en Libye pendant les mois à venir.

Le Conseil réaffirme que le processus politique devrait s’accompagner d’un dialogue constructif, dans les domaines économique et de la sécurité, et du plein respect du droit des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Il demande à toutes les parties de respecter l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020 et d’accélérer l’application intégrale de ses dispositions, notamment du Plan d’action approuvé par la Commission militaire conjointe 5+5 à Genève le 8 octobre 2021, qui devra être exécuté de manière synchronisée, progressive et équilibrée.  Il exhorte les États Membres à respecter et appuyer la pleine application de cet accord de cessez-le-feu et du Plan d’action, notamment au moyen du retrait, sans plus tarder, de l’ensemble des forces étrangères, des combattants étrangers et des mercenaires du territoire libyen.  Il rappelle qu’il importe de planifier la réforme du secteur de la sécurité et de progresser sur le plan de la démobilisation, du désarmement et de la réintégration des groupes armés, comme convenu par la Commission militaire conjointe 5+5 le 8 décembre 2022.  Il souligne la nécessité d’établir un dispositif de sécurité inclusif, unifié et comptable de son action, placé sous le contrôle des autorités civiles pour toute la Libye.

Le Conseil rappelle qu’il a exigé de tous les États Membres qu’ils respectent pleinement l’embargo sur les armes qu’il a imposé par sa résolution 1970 (2011), telle que modifiée par des résolutions ultérieures.

Le Conseil rappelle que les ressources pétrolières de la Libye doivent être utilisées au profit de tous les Libyens.  Il se félicite que le groupe de travail économique du Comité international de suivi de la situation en Libye, issu du processus de Berlin, appuie les mesures prises par la Libye en vue de l’unification des institutions financières, notamment de la Banque centrale, et l’établissement d’un mécanisme transparent, dirigé par les Libyens, visant à améliorer la gestion et la transparence des recettes, mis à la disposition du peuple libyen.  Il réaffirme qu’il entend veiller à ce que les avoirs gelés en application du paragraphe 17 de la résolution 1970 (2011) soient, à une étape ultérieure, mis à la disposition du peuple libyen.

Le Conseil se déclare à nouveau gravement préoccupé par le trafic de migrants et de réfugiés et par la traite d’êtres humains dans toute la Libye, ainsi que par la situation à laquelle se heurtent les migrants et les réfugiés, notamment les enfants, dans le pays.  Il rappelle la nécessité d’appuyer de nouveaux efforts visant à renforcer la gestion des frontières libyennes.  Il demande aux autorités libyennes de respecter et de protéger les droits humains des migrants et de prendre des mesures en vue de la fermeture des centres de détention des migrants.

Le Conseil réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Libye.

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