Un Conseil de sécurité divisé constate à nouveau l’insuffisance des progrès dans le dossier de l’utilisation présumée des armes chimiques en Syrie
D’accord pour constater que le dossier de l’utilisation présumée d’armes chimiques en Syrie n’avance pas, les membres du Conseil de sécurité ont cependant exprimé, ce matin, des divergences quant aux raisons de ce blocage, certains accusant Damas d’empêcher les inspections de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), là où d’autres ont estimé que celle-ci pècherait par manque de professionnalisme.
Jugée « frustrante » par la France, cette absence de progrès a poussé certaines délégations à réclamer de nouveau un changement de périodicité pour cette situation examinée chaque mois, ou de la rattacher à un examen global de la crise syrienne. Il est vrai, a noté le Brésil, que le dernier rapport du Directeur général de l’OIAC en date du 25 avril présente peu de nouveautés.
Nous nous réunissons uniquement pour permettre à certains de répéter les mêmes « discours antisyriens éculés », a dénoncé la Fédération de Russie, pour qui l’OIAC, manipulée par Washington et « ses satellites », perd rapidement sa crédibilité. Elle a une fois de plus argué aujourd’hui qu’une réunion trimestrielle sur le sujet serait largement suffisante. Même son de cloche pour la Chine qui a préconisé que le Conseil se saisisse chaque mois de tous les volets du dossier syrien simultanément. Une proposition également partagée par les Émirats arabes unis qui se sont du reste réjouis de la décision prise hier de réadmettre la République arabe syrienne au sein de la Ligue des États arabes, espérant qu’elle ouvrirait la voie à une solution à la crise dans ce pays.
Pour Mme Izumi Nakamitsu, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques, prévue la semaine prochaine, porte également l’espoir de voir les parties renouveler leurs engagements en faveur de cet instrument, avec le soutien, a-t-elle espéré, du Conseil de sécurité.
Le Secrétariat technique de l’OIAC continue de planifier la prochaine série d’inspections prévues en 2023 dans les installations de Barzé et Jamraya, a indiqué la haute fonctionnaire. Mais Damas, a-t-elle précisé, n’a pas encore fourni suffisamment d’informations ou d’explications qui permettraient de clore le dossier lié à la détection d’un produit chimique du tableau 2 dans les installations de Barzé en novembre 2018. Aussi l’a-t-elle exhortée à nouveau à répondre de toute urgence aux demandes du Secrétariat technique.
Mme Izumi Nakamitsu a rappelé que le Secrétariat technique de l’OIAC avait proposé, en mai 2022, de traiter les questions relatives à la déclaration initiale de la Syrie par le biais d’un échange de correspondances. Même si Damas a accepté cette proposition, le Secrétariat technique de l’OIAC n’a toujours pas reçu de déclarations ou autres pièces demandées. Par conséquent, il a proposé de déployer une équipe réduite composée de plusieurs membres de l’Équipe d’évaluation des déclarations en Syrie pour mener des activités limitées dans le pays. Ainsi, le premier déploiement de ce type a eu lieu du 17 au 22 janvier 2023, et le second du 12 au 19 avril 2023.
Si plusieurs délégations ont salué ces visites, notamment la Suisse, la France, elle, a estimé que ces déploiements limités ne constituent pas une alternative viable. Des avancées pourraient être enregistrées si les autorités syriennes coopéraient pleinement et respectaient tous les aspects de la décision du Conseil exécutif de l’OIAC en date du 27 septembre 2013, a indiqué le Ghana au nom des A3. La République islamique d’Iran a de son côté critiqué les lacunes de l’Organisation et la persistance, au sein de la communauté internationale, d’un « deux poids, deux mesures », comme en témoigne selon elle la « politisation » de la Convention et de l’OIAC. Ce n’est pas le moment d’affaiblir leur autorité, à l’approche de la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques, a jugé de son côté le Japon.
Tant que la Syrie n’aura pas fait de progrès significatifs sur ces questions, son programme d’armes chimiques restera une menace permanente, a avancé le Royaume-Uni. Pour la délégation, le « régime d’Assad » a violé à plusieurs reprises ses obligations en vertu de la Convention et de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité, notamment par l’usage sur ses propres civils d’armes chimiques. Selon les États-Unis, la protection « honteuse » accordée par la Fédération de Russie au « régime d’Assad » expose le peuple syrien à une nouvelle attaque à l’arme chimique. De plus, le régime continue d’entraver les activités de l’Équipe d’évaluation des déclarations en empêchant le principal expert d’être déployé sur le territoire syrien, ont dénoncé les États-Unis.
Rejetant « les accusations et mensonges » visant son pays, le représentant syrien a assuré que l’équipe réduite est la même que l’Équipe d’évaluation des déclarations, moins un expert. Celle-ci a pu mener à bien toutes ses activités comme l’Équipe d’évaluation des déclarations lors des 24 premiers cycles de consultations, a-t-il observé. Il s’est étonné que le Secrétariat technique de l’OIAC refuse toujours d’organiser le vingt-cinquième cycle de consultations, se demandant si ce ne serait pas un prétexte pour que d’autres accusent la Syrie de ne pas coopérer.
Le délégué a par ailleurs insisté pour que la mission d’établissement des faits réforme ses méthodes de travail, remédie à de graves lacunes et rende des rapports professionnels et objectifs. La Syrie continuera de travailler avec l’OIAC, bien qu’elle s’écarte de la voie fixée par la Convention, a assuré le délégué, appelant le Secrétariat technique à l’impartialité.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT S/2023/297
Déclarations
Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, a indiqué que depuis la dernière réunion du Conseil sur cette question, l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a poursuivi ses efforts pour clarifier toutes les questions en suspens concernant la première déclaration et celles ultérieures de la République arabe syrienne. Malheureusement, les efforts déployés par le Secrétariat technique de l’OIAC pour organiser la prochaine série de consultations entre l’Équipe d’évaluation et l’Autorité nationale syrienne sont restés infructueux. Comme cela a été mentionné précédemment au Conseil, le Secrétariat technique a fourni à la République arabe syrienne la liste des déclarations en suspens et autres documents demandés par l’Équipe d’évaluation depuis 2019. Le Secrétariat technique de l’OIAC a proposé, en mai 2022, de traiter les questions relatives à la déclaration dans le cadre d’un échange de correspondances. Même si Damas a accepté cette proposition, le Secrétariat technique de l’OIAC n’a toujours pas reçu de déclarations ou autres pièces demandées. Par conséquent, le Secrétariat technique a proposé de déployer une équipe réduite composée de plusieurs membres de l’Équipe d’évaluation en Syrie pour mener des activités limitées dans le pays. Ainsi, a poursuivi la Haute-Représentante, le premier déploiement de ce type a eu lieu du 17 au 22 janvier 2023, et le second du 12 au 19 avril 2023. Les résultats du premier ont été transmis aux États parties en mars 2023 et ceux du second le seront au Conseil exécutif de l’OIAC en temps voulu.
La pleine coopération de la République arabe syrienne avec le Secrétariat technique de l’OIAC est essentielle pour clôturer toutes les questions, a insisté Mme Nakamitsu. Compte tenu des lacunes, incohérences et divergences identifiées qui subsistent à ce stade, a-t-elle indiqué, le Secrétariat technique estime que la déclaration soumise par la République arabe syrienne ne peut toujours pas être considérée comme exacte et complète. En ce qui concerne les inspections des installations de Barzé et Jamraya, le Secrétariat technique de l’OIAC continue de planifier la prochaine série d’inspections prévues en 2023. La Syrie, a-t-elle précisé, n’a pas encore fourni suffisamment d’informations ou d’explications qui permettraient de clore le dossier lié à la détection d’un produit chimique du tableau 2 dans les installations de Barzé en novembre 2018. Aussi l’a-t-elle exhortée à nouveau à répondre de toute urgence à toutes les demandes du Secrétariat technique.
Au sujet de l’invitation adressée par le Directeur général de l’OIAC au Ministre syrien des affaires étrangères pour une réunion en personne, la haute fonctionnaire a indiqué que le Secrétariat technique est prêt à s’engager plus avant sur un ordre du jour. En attendant, la mission d’établissement des faits de l’OIAC continue d’étudier toutes les informations disponibles relatives aux allégations d’utilisation d’armes chimiques en Syrie. Elle prépare actuellement des déploiements et fera rapport au Conseil exécutif sur les résultats de son travail en temps voulu. Simultanément, l’Équipe d’enquête et d’identification de l’OIAC poursuit ses enquêtes sur les incidents dans lesquels il a été établi que des armes chimiques ont été utilisées ou auraient pu l’être. Pour la Haute-Représentante, la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques prévue la semaine prochaine sera l’occasion pour les États parties de renouveler leurs engagements en faveur de cet instrument, avec le soutien, a-t-elle espéré, du Conseil de sécurité.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté qu’à l’instar des réunions précédentes consacrées à l’examen du « dossier chimique » en Syrie, aucune évolution significative de la situation « sur le terrain » n’ait été portée aujourd’hui à l’attention du Conseil. Nous nous réunissons uniquement pour permettre à certaines délégations de répéter les mêmes discours antisyriens éculés, a-t-il dénoncé. Il a dit s’attendre à nouveau à des allégations infondées de la part de ses collègues occidentaux selon lesquelles le manque de progrès serait à imputer à l’insuffisance de la coopération des autorités syriennes. Cela ne les dérange pourtant pas que même le Secrétariat technique de l’OIAC, malgré son approche partisane, admette, dans le rapport à l’examen, que Damas poursuit sa collaboration, a-t-il relevé. Le délégué a affirmé que le vingt-cinquième cycle de consultations entre Damas et la mission d’évaluation de la déclaration initiale n’avait pas encore eu lieu parce que le Secrétariat technique de l’OIAC n’est pas intéressé par un tel scénario. Il trouve de plus en plus de raisons de reporter ses consultations afin que les pays occidentaux continuent de présenter cette situation comme preuve de la non-coopération des autorités syriennes. Tout cela n’est rien qu’un élément de plus dans la mise en scène de la pièce de théâtre qui se joue chaque mois dans cette salle, a ironisé le délégué. Il a ensuite rappelé que le Directeur général de l’OIAC ne s’est jamais rendu en Syrie et a même explicitement fait part de son refus de le faire. En d’autres termes, il ne veut tout simplement pas faire son devoir, préférant s’aligner sur le discours des pays occidentaux, a tranché le délégué.
La Fédération de Russie, a-t-il poursuivi, ne reconnaît ni la légitimité de la décision « punitive » de la Conférence des États parties à la Convention sur les armes chimiques, « grossièrement poussée par les délégations occidentales » en violation des dispositions de cet instrument, ni le travail du Groupe d’enquête et d’identification (IIG), établi en violation du principe de consensus et de l’article XV de la Convention. La seule chose qui mérite, selon le représentant, d’être mentionnée aujourd’hui est la réunion en « formule Arria » que sa délégation a organisée le 24 mars, au cours de laquelle sont apparues de nouvelles preuves convaincantes de la méthodologie utilisée, en violation directe des principes d’enquête de la CAC, notamment s’agissant de la collecte et de la conservation des preuves. Bien sûr, nos collègues occidentaux, sourds et aveugles, prétendront qu’il s’agit de propagande russe et syrienne, a-t-il ironisé: après tout, leur seule tâche consiste désormais à couvrir les fabrications du Secrétariat technique et sa manipulation du rapport sur la mise en scène de l’incident de Douma en 2018. Le représentant a dit avoir très peu d’espoir que lors de la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques –prévue du 15 au 19 mai à La Haye– on puisse éviter la politisation des discussions. La vérité, c’est que l’OIAC perd rapidement sa crédibilité, grâce aux efforts de Washington et de ses satellites, a-t-il soutenu. Avant de conclure, le représentant a une fois de plus demandé un échéancier adéquat pour les discussions du Conseil sur ce sujet, arguant qu’une réunion trimestrielle sur le dossier des armes chimiques en Syrie serait plus que suffisante.
M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a affirmé que le « régime d’Assad » n’a pas respecté ses obligations en vertu de la Convention sur les armes chimiques et de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité, refusant de collaborer avec l’OIAC et de faire preuve de transparence auprès de l’OIAC. Des consultations exhaustives avec l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’OIAC restent nécessaires, a-t-il insisté, regrettant que la Syrie ne semble pas prête à éliminer entièrement son programme d’armes chimiques. Ce n’est que grâce aux efforts de l’Équipe d’évaluation que le « régime d’Assad » a été forcé de révéler, à sept reprises, des informations sur son programme d’armes chimiques. Si ces informations comblent des lacunes dans les questions en suspens de la Syrie, le régime continue cependant à entraver les activités de l’Équipe d’évaluation en empêchant le principal expert d’être déployé sur le territoire syrien. L’Équipe d’évaluation n’est à même de mener que des activités limitées dans le pays, ce qui limite considérablement l’efficacité de ses visites, a constaté à regret le représentant américain. Pour lui, la protection honteuse accordée par la Fédération de Russie au « régime d’Assad » expose le peuple syrien à une nouvelle utilisation des armes chimiques. Condamnant avec la plus grande fermeté de tels actes, le délégué a appelé le régime syrien à modifier ses déclarations au titre de la Convention sur les armes chimiques afin de les rendre exactes et complètes et de donner immédiatement un accès sans entrave au personnel de l’OIAC.
Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est dit préoccupé par la lenteur des progrès accomplis dans l’élimination du programme d’armes chimiques de la Syrie. Il a maintenu que des avancées pourraient être enregistrées si l’Autorité nationale syrienne coopérait pleinement et si elle respectait tous les aspects de la décision du Conseil exécutif de l’OIAC du 27 septembre 2013. Il importe selon lui que la Syrie remplisse ses obligations conformément à la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité et à la Convention sur les armes chimiques afin d’aider à résoudre les questions en suspens, notamment la détection d’un produit chimique du tableau 2 (pouvant être utilisé comme arme chimique) dans les installations de Barzé en novembre 2018, la déclaration de toutes les armes chimiques et de leurs installations de production, et l’organisation de la vingt-cinquième série de consultations avec l’Équipe d’évaluation des déclarations. Le représentant a également exhorté les points focaux des autorités syriennes et de l’Équipe à accélérer les préparatifs de la réunion de haut niveau proposée et à parvenir à une décision sur son ordre du jour. Dans ce contexte, après avoir rappelé que l’utilisation d’armes chimiques représente une grave menace pour la paix et la sécurité internationales, il a exhorté toutes les parties prenantes à faire preuve d’un engagement total pour permettre la résolution de toutes les questions en suspens et une conclusion réussie des enquêtes.
M. THOMAS PATRICK PHIPPS (Royaume-Uni) a estimé que la Convention sur les armes chimiques et la non-prolifération au sens large ne peuvent tenir que si ses règles sont respectées et les contrevenants tenus pour responsables. Le « régime d’Assad » a violé à plusieurs reprises ses obligations en vertu de la Convention et de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité, a-t-il déclaré en citant « des preuves indéniables et directes » du meurtre par l’État syrien de ses propres civils avec des armes chimiques, au moins à neuf reprises. Il a déploré le fait que le Conseil de sécurité n’ait pas tenu le « régime » pour responsable de l’utilisation de ces armes odieuses, notamment du fait d’actions d’un de ses membres permanents qui a lui-même utilisé des armes chimiques ces dernières années, « y compris dans mon pays en 2018 ». Le délégué a félicité l’OIAC pour les efforts continus de ses équipes et a souligné les obligations fondamentales qui pèsent sur la Syrie, en tant qu’État partie à la Convention. Tant que la Syrie n’aura pas fait de progrès significatifs sur ces questions, son programme d’armes chimiques restera une menace permanente à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il conclu.
M. ANDRÉS FERNANDO FIALLO KAROLYS (Équateur) a réitéré l’appel de sa délégation à la soumission rapide, par la Syrie, des déclarations et des documents demandés par l’Équipe d’évaluation des déclarations, et à l’accès immédiat et sans restriction à tous les sites et lieux faisant l’objet d’une enquête au personnel désigné par le Secrétariat technique de l’OIAC. Il a regretté la position prise par la Syrie d’exclure l’expert technique principal de la composition de l’Équipe d’évaluation des déclarations comme condition préalable à la conduite du vingt-cinquième cycle de consultations, empêchant ainsi son bon déroulement. Demandant instamment aux autorités syriennes d’instaurer une coopération efficace et sans restriction avec le Secrétariat technique pour s’acquitter des responsabilités qui leur incombent en vertu, notamment, de la Convention sur les armes chimiques et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, le représentant a réitéré le soutien de l’Équateur aux travaux de l’OIAC ainsi qu’à l’intégrité, l’impartialité, l’objectivité et l’indépendance de ses équipes techniques.
M. SUN ZHIQIANG (Chine) a noté que le Gouvernement syrien a dit s’opposer à l’utilisation d’armes chimiques et être prêt à œuvrer avec l’OIAC pour régler les questions en suspens. Il a aussi fait observer que malgré ses difficultés intérieures et sécuritaires, la Syrie a accueilli une petite équipe de membres de l’Équipe d’évaluation des déclarations pour qu’elle mène les activités dans le pays. « C’est une évolution bienvenue », a commenté le représentant qui a exhorté la communauté internationale à examiner objectivement ces efforts et à reconnaître que la Syrie est prête à coopérer. Le délégué a encouragé les deux parties à maintenir la communication sur les questions telles que le vingt-cinquième cycle des consultations techniques et la réunion entre le Directeur général de l’OAIC et le Ministre syrien des affaires étrangères. Le représentant a réitéré l’importance de respecter les données scientifiques et les faits, appelant à mener une démarche objective et équitable. Les deux parties doivent poursuivre leur discussion approfondie pour régler les questions en suspens, a-t-il aussi conseillé. Il a enfin recommandé que le Conseil réduise la fréquence des examens de la question syrienne ou envisage d’examiner en une fois les différents volets du dossier afin d’adopter une démarche holistique concernant la question syrienne et de rendre plus efficaces les travaux du Conseil.
M. YUKIYA HAMAMOTO (Japon) a salué la publication du troisième rapport de l’Équipe d’enquête et d’identification sur l’incident de Douma, en rappelant que l’utilisation d’armes chimiques par la Syrie demeure une menace pour la paix et la sécurité internationales. Il s’est ensuite dit profondément préoccupé par « les divergences, les lacunes et les incohérences persistantes » dans les déclarations initiales et ultérieures de la Syrie, avant de se féliciter des efforts continus déployés par l’OIAC et son secrétariat technique pour régler toutes les questions en suspens, notamment la deuxième série d’activités limitées dans le pays menées par l’Équipe d’évaluation des déclarations. À cet égard, le représentant a regretté que les efforts visant à organiser la prochaine série de consultations entre cette équipe et l’Autorité nationale syrienne aient une nouvelle fois été infructueux. La Syrie devrait faciliter la tenue de ces consultations et s’abstenir de trouver d’autres excuses pour empêcher l’entrée de l’expert technique principal de l’Équipe d’évaluation des déclarations sur son territoire, a-t-il plaidé, exhortant à nouveau la Syrie à respecter ses obligations au titre de la Convention sur les armes chimiques et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.
Alors que la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention doit avoir lieu plus tard ce mois-ci, le représentant a exhorté vivement tous les États parties à participer activement et de manière constructive à cette discussion. Ce n’est pas le moment d’affaiblir l’autorité de la Convention et de l’OIAC, a-t-il ajouté, appelant le Conseil à rester uni et à manifester son ferme appui aux efforts mondiaux destinés à éliminer la menace d’utilisation d’armes chimiques.
M. GUSTAVO SÉNÉCHAL DE GOFFREDO JUNIOR (Brésil) a relevé que le dernier rapport du Directeur général de l’OIAC en date du 25 avril apporte peu de nouveautés, mais il s’est néanmoins dit encouragé par le fait que l’équipe réduite qui s’est rendue en Syrie au début de cette année a rendu son rapport aux États parties à l’OIAC à la fin du mois dernier. Cette visite et les rapports ultérieurs sont des étapes importantes dans le rétablissement de la confiance entre la Syrie et l’OIAC, a-t-il argué. Il a appelé la Syrie et l’OIAC à s’appuyer sur cette expérience en explorant de nouveaux formats de dialogue politique de haut niveau, ainsi que pour la conduite des activités des équipes techniques dans le pays. Il a en même temps recommandé une coopération plus étroite entre l’OIAC et l’ONU, « puisque l’ultime instance d’attribution des responsabilités est le Conseil de sécurité ».
Mme ISIS JARAUD-DARNAULT (France) a jugé « frustrante » l’absence de progrès sur le dossier syrien des armes chimiques, en soulignant que la responsabilité en incombe intégralement au « régime syrien ». Il est impératif que celui-ci autorise le personnel de l’OIAC à se déployer en Syrie, comme c’est son mandat, a-t-elle exigé, en dénonçant les restrictions « inacceptables » imposées une nouvelle fois par la Syrie au déploiement de l’Équipe d’évaluation de la déclaration initiale. Pour la France, le déploiement limité des équipes de l’OIAC en Syrie, tel que celui intervenu le mois dernier, ne constitue pas une alternative viable. La représentante a donc appelé la Syrie à cesser d’entraver les travaux du Secrétariat de l’OIAC et à se mettre en conformité avec ses obligations internationales. Ce secrétariat, malgré les obstacles, poursuit son travail d’enquête avec « ténacité, indépendance et professionnalisme », a salué la déléguée. Elle a rappelé que la lutte contre l’impunité est le fondement de l’efficacité et de la crédibilité du régime d’interdiction, assurant que la France continuera d’œuvrer en ce sens avec ses partenaires.
M. ARIAN SPASSE (Albanie) a déclaré que 10 ans après l’adoption de la résolution 2118 (2013), il n’existe toujours aucune preuve de la destruction par la Syrie de ses stocks d’armes chimiques. Saluant la publication du troisième rapport de l’équipe réduite qui confirme l’utilisation de telles armes le 7 avril 2018 à Douma et le non-respect systématique, par Damas, de ses obligations au titre de la Convention sur les armes chimiques, le représentant a condamné l’utilisation répétée par le régime syrien de ces armes atroces, en violation flagrante de ses obligations internationales. Les responsables doivent être traduits en justice, a-t-il ajouté.
Le représentant a regretté que le vingt-cinquième cycle de consultations n’ait toujours pas eu lieu et que la Syrie continue de fixer des conditions préalables à leur tenue. Elle veut exclure le principal expert technique de l’Équipe d’évaluation, a déploré le délégué, au mépris de ses obligations au titre de la Convention des armes chimiques et de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité. Le représentant a par ailleurs dit attendre avec intérêt les conclusions de la visite d’avril 2023 de l’équipe réduite. De nombreuses questions importantes demeurent, le dernier rapport en date du Secrétariat de l’OIAC confirmant les lacunes de la déclaration initiale de la Syrie et des incohérences entre celle-ci et les suivantes, a observé le représentant, en dénonçant la non-coopération du régime syrien avec le Secrétariat technique.
M. DARREN CAMILLERI (Malte) a rappelé qu’à neuf reprises, l’OIAC ou des enquêtes conjointes ONU-OIAC ont conclu que la Syrie avait utilisé des armes chimiques contre son propre peuple. De tels actes sont totalement indéfendables et leurs auteurs ne doivent pas rester impunis, a-t-il souligné, avant de noter que le troisième rapport de l’Équipe d’enquête et d’identification a conclu qu’il existait des motifs raisonnables de croire que les forces aériennes arabes syriennes étaient à l’origine de l’attaque aux armes chimiques à Douma. Ce rapport a été rédigé en respectant les meilleures pratiques des organes internationaux d’établissement des faits et des commissions d’enquête, ainsi que les procédures applicables de l’OIAC, a-t-il fait valoir, avant de réitérer son soutien au travail indépendant, impartial et expert de l’OIAC et de son secrétariat technique. Le représentant a ensuite regretté le refus des autorités syriennes de coopérer pleinement avec l’OIAC, dénonçant notamment le fait qu’elles n’aient pas autorisé l’accès aux sites de l’incident de Douma, malgré les obligations qui leur incombent en vertu de la Convention sur les armes chimiques et de la résolution 2118 (2013).
De plus, les déclarations en attente et les autres documents demandés par l’Équipe d’évaluation des déclarations depuis 2019 n’ont toujours pas été fournis par la Syrie, a poursuivi le délégué, qui a également déploré que Damas continue d’imposer des limites à la composition de cette équipe, ce qui empêche la tenue d’une vingt-cinquième série de consultations. L’Équipe complète devrait être en mesure de se déployer dès que possible, a-t-il plaidé, affirmant attendre avec impatience le résultat de ses activités limitées menées dans le pays en avril. Il a d’autre part souhaité que l’ordre du jour de la réunion proposée entre le Directeur général de l’OIAC et le Ministre des affaires étrangères de la Syrie pourra être convenu dès que possible. Il a enfin encouragé la reconduction de l’accord tripartite entre l’OIAC, le Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS) et la Syrie, qui doit expirer le 30 juin prochain. Ce n’est que grâce à la coopération significative de la Syrie avec l’OIAC que nous pouvons garantir que le programme d’armes chimiques syrien a été éliminé complètement et de manière vérifiable, a-t-il conclu en enjoignant à la Syrie de fournir les garanties nécessaires sur son programme, conformément à la Convention sur les armes chimiques.
Mme GHASAQ SHAHEEN (Émirats arabes unis) a salué la décision prise hier de réadmettre la Syrie au sein de la Ligue des États arabes, espérant qu’elle ouvrirait la voie à une solution à la crise dans ce pays. La déléguée a ensuite appelé à un dialogue constructif entre l’OIAC et Damas pour faire progresser le dossier des armes chimiques. Elle a insisté sur la nécessité d’incarner un esprit de coopération qui repose sur les principes techniques et fondamentaux de l’OIAC, à savoir le consensus et la non-politisation. Concernant la visite de l’équipe réduite de l’OIAC en Syrie le mois dernier, elle a souhaité voir des avancées avec la tenue de consultations approfondies entre les deux parties dans les plus brefs délais. Face à la menace posée par le terrorisme chimique, la déléguée a appelé à rester vigilant, mettant en garde contre le fait que Daech n’hésitera pas à utiliser tous les moyens à sa disposition pour atteindre ses objectifs. Elle a ensuite demandé d’examiner l’efficacité de la pratique du Conseil de sécurité consistant à tenir ces réunions sur le dossier chimique syrien, surtout quand aucune évolution ne justifie la tenue d’une telle réunion. Au lieu de quoi, nous pourrions envisager une périodicité trimestrielle, a-t-elle suggéré.
Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a commencé par saluer le fait que, pour la deuxième fois cette année, des représentants de l’Équipe d’évaluation des déclarations de l’OIAC aient pu se rendre en Syrie du 12 au 19 avril. Elle a souhaité que ce déplacement mène au rétablissement d’une coopération pleine et entière entre la Syrie et l’OIAC. Aussi a-t-elle rappelé que les autorités syriennes doivent fournir un accès immédiat et sans entrave au personnel de l’OIAC, incluant le droit d’inspecter tous les sites. La déléguée a noté à cet égard que les obstacles posés par la Syrie aux visites de l’Équipe d’évaluation des déclarations au grand complet constituent un sérieux manquement aux obligations faites par la résolution 2118(2013). De plus, 20 points de la déclaration initiale de la Syrie demeurent en suspens, a-t-elle souligné. Réaffirmant une nouvelle fois la confiance de la Suisse en l’OIAC et en toutes ses missions, la représentante a salué la tenue, du 15 au 19 mai, de la cinquième Conférence d’examen des États parties à la Convention sur les armes chimiques à La Haye. Celle-ci sera l’occasion de renforcer le rôle de la Convention dans la lutte contre l’emploi et la prolifération de ces armes de destruction massive ainsi que le désarmement, a-t-elle noté. L’adoption par consensus d’une déclaration conjointe adresserait, selon elle, un message clair en ce sens.
M. BASSAM SABBAGH (Syrie) a rejeté « les accusations et les mensonges » visant son pays. La Syrie a honoré ses obligations y compris en détruisant tous ses stocks d’armes chimiques, a-t-il affirmé. Il a informé que, les 15 mars et 15 avril 2023, la Syrie a présenté ses rapports mensuels ayant trait à la mise en œuvre de la décision du Conseil exécutif de l’OIAC du 15 novembre 2013. En ce qui concerne l’Équipe d’évaluation des déclarations, il a fait remarquer que ce n’est pas une équipe d’inspection. Il a rappelé qu’une équipe réduite s’est rendue en Syrie deux fois cette année, visites qui ont été facilitées par l’Autorité nationale syrienne, de même que lors des consultations sur différents aspects du dossier et les questions en suspens. Le représentant a tenu à dire que l’équipe réduite est la même que l’Équipe d’évaluation des déclarations, à l’exception d’un seul expert. Il a ajouté qu’elle a mené toutes ses activités comme l’a fait l’Équipe d’évaluation des déclarations lors des 24 premiers cycles de consultations, en concluant qu’elle a travaillé normalement. Il s’est donc étonné que le Secrétariat technique de l’OIAC refuse toujours d’organiser le vingt-cinquième cycle de consultations, alors que l’équipe réduite a mené toutes les activités prescrites à l’Équipe d’évaluation des déclarations. Il s’est demandé si ce ne serait pas un prétexte pour que d’autres accusent la Syrie de ne pas coopérer.
S’agissant des inspections au Centre d’études et de recherches scientifiques, le rapport d’inspection fait état de la coopération de la Syrie, s’est réjoui le représentant regrettant que le rapport mensuel du Directeur général ne fasse pas référence aux résultats du rapport du neuvième cycle, ni à celui du huitième cycle. De même, le Secrétariat technique n’aborde pas ces résultats lorsqu’il parle de la pleine coopération de la Syrie et alors qu’il ne signale aucune activité allant à l’encontre de la Convention et des décisions de l’OIAC relatives à ce dossier. Pour lui, cette attitude pose la question de l’impartialité des rapports du Directeur général. Après s’être félicité des consultations de haut niveau qui se sont tenues, le délégué a insisté sur la nécessité pour la mission d’établissement des faits de réformer ses méthodes de travail, de remédier à de graves lacunes et de rendre des rapports professionnels et impartiaux. La Syrie attend toujours la publication, par la mission d’établissement des faits, des rapports sur les incidents rapportés par le Gouvernement syrien, a dit le représentant. La Syrie continuera de travailler avec l’OIAC, malgré le fait qu’elle s’écarte de la voie fixée par la Convention, a assuré le délégué appelant à l’impartialité du Secrétariat technique dans la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.
M. AMIR SAEID IRAVANI (République islamique d’Iran) a commencé par assurer que son peuple n’oubliera jamais le rôle que certains pays occidentaux ont joué en aidant le régime de Saddam Hussein à utiliser des armes chimiques contre lui pendant la guerre imposée à l’Iran par l’Iraq. Accusant ces pays d’avoir été « complices de ces atrocités », il a constaté qu’en raison de leurs « actions néfastes », le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure de prendre des mesures efficaces pour tenir les auteurs responsables de ces crimes atroces. Il est selon lui « troublant » de voir persister ce « deux poids, deux mesures », comme en témoigne la « politisation » de la Convention et de l’OIAC. Pour le représentant, une telle approche risque non seulement de créer des divisions entre États Membres, mais aussi de saper la crédibilité et la légitimité de l’architecture de désarmement.
Le délégué a ensuite estimé que, conformément à ses obligations au titre de la Convention, le Gouvernement syrien a poursuivi sa coopération constructive avec l’OIAC, notamment en soumettant au Directeur général de cette organisation ses derniers rapports mensuels en date. Il a d’autre part noté qu’une formation réduite de l’Équipe d’évaluation des déclarations s’est rendue en Syrie à deux reprises, en janvier puis en avril, et que l’Autorité nationale syrienne lui a fourni les facilitations nécessaires. En outre, des consultations ont eu lieu entre les deux parties et de nombreux aspects liés à certaines questions en suspens ont été discutés, s’est-il félicité, avant d’évoquer la menace d’une utilisation d’armes chimiques par des organisations terroristes. Damas a exprimé à plusieurs reprises sa préoccupation à ce sujet, a-t-il dit, appelant à ne pas ignorer ou sous-évaluer cette menace et à agir en conséquence. Le représentant a également exhorté tous les États Membres à respecter les principes de la Convention et à garantir l’impartialité, le professionnalisme et l’intégrité de l’OIAC. Il a enfin jugé qu’en l’absence de nouveaux développements, la tenue de réunions mensuelles sur le dossier chimique syrien n’est « pas constructive ». À ses yeux, toute approche politique de ce dossier ne peut que compromettre le processus de résolution des questions en suspens et nuire à la nature technique des discussions.
Mme CEREN HANDE ÖZGÜR (Türkiye) a relevé que la Syrie a l’obligation de respecter les principes de la Convention sur les armes chimiques à laquelle elle a adhéré, ainsi que les dispositions de la résolution 2118(2013) du Conseil de sécurité. Après avoir énuméré ces obligations, elle a rappelé qu’il a été démontré que le « régime syrien » a utilisé des armes chimiques à neuf reprises au moins. De plus, le pays refuse de collaborer avec l’OIAC et ne lui a pas encore fourni les informations attendues, qui permettraient de clore certains dossiers. Elle a de plus regretté qu’il n’ait pas été possible jusqu’à présent d’organiser la prochaine série de consultations entre l’Équipe d’évaluation des déclarations et l’Autorité nationale syrienne, et ce depuis plus de deux ans, notamment à cause des objections du « régime » sur la composition de l’Équipe. Notant les lacunes et divergences toujours pas résolues, la déléguée a appelé le « régime syrien » à respecter ses obligations en la matière et a condamné l’utilisation répétée d’armes chimiques en Syrie.