En cours au Siège de l'ONU

9350e séance – matin
CS/15325

Conseil de sécurité: le Mali demande le retrait sans délai de la MINUSMA

Le Ministre des affaires étrangères du Mali a demandé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le retrait sans délai de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), arguant notamment d’une crise de confiance entre les autorités maliennes et la Mission.

La MINUSMA semble devenir une partie du problème en alimentant les tensions communautaires exacerbées par des allégations d’une extrême gravité, a accusé M. Aboulaye Diop qui a de plus constaté qu’après plusieurs années de déploiement des forces de la MINUSMA sur le terrain, la situation sécuritaire, qui concernait jadis le nord du pays, s’est progressivement dégradée dans les autres régions du Mali, notamment le centre.  Pour le Gouvernement du Mali, le constat est clair: la MINUSMA n’a pas atteint son objectif fondamental, a-t-il affirmé. 

Insistant sur le caractère fondamental que revêt la coopération de l’État hôte, le Chef de la Mission et Représentant spécial du Secrétaire général pour la Mali, a assuré au contraire que malgré l’environnement complexe dans lequel elle opère et les restrictions à sa liberté de mouvement, la MINUSMA s’est employée à mettre en œuvre son mandat de la manière la plus efficace qui soit, évoquant notamment son soutien au processus de transition en cours. 

Selon M. El-Ghassim Wane, la Mission a d’indéniables avantages comparatifs « qui peuvent et doivent » être mis plus effectivement à contribution pour appuyer l’État malien.  Il a plaidé pour un engagement encore plus soutenu du Gouvernement malien à travers un dialogue régulier avec la Mission « pour élargir le champ des possibilités et saisir les multiples opportunités qui existent, au bénéfice des populations »  

L’examen stratégique interne effectué par l’ONU avec toutes les parties prenantes a confirmé que la MINUSMA reste le principal instrument international pour soutenir la paix au Mali, a souligné la France qui a relevé qu’il importe que la MINUSMA soit en mesure de mettre en œuvre son mandat, « ce qui n’est pas le cas actuellement ».  Dénonçant l’augmentation de restrictions depuis l’arrivée du groupe paramilitaire russe Wagner au Mali, la France a souligné que les troupes de la MINUSMA ont besoin d’un soutien sans réserve et d’une pleine liberté de mouvement.  Elle a ensuite invité le Conseil à se fonder sur plusieurs des recommandations du Secrétaire général pour adapter le déploiement de la MINUSMA à ces réalités.

Dans son dernier rapport sur le Mali, le Secrétaire général établit quatre paramètres déterminant l’efficacité de l’engagement de la Mission: avancement de la transition politique; progrès accomplis dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation; liberté de circulation de la Mission, y compris pour les moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance essentiels à la sûreté et à la sécurité des soldats de la paix; et enfin, capacité d’exécuter l’intégralité du mandat confié par le Conseil de sécurité, y compris les dispositions relatives aux droits humains.  Au nom des A3, le Mozambique a également proposé plusieurs pistes pour améliorer l’efficacité de la Mission, dont la protection des civils, le rétablissement de l’autorité de l’État dans les zones vulnérables, et le renforcement de la présence de la MINUSMA dans les zones critiques.  Le Conseil de sécurité doit se prononcer le 29 juin sur le renouvellement du mandat de la MINUSMA. 

Au cours de cette séance, de nombreux appels ont par ailleurs été lancés en faveur de l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation, et de l’achèvement de la transition politique.  Nombre de délégations ont en outre salué la tenue prochaine, le 18 juin, du référendum constitutionnel, première étape, a rappelé le Représentant spécial, du processus devant aboutir à la restauration de l’ordre constitutionnel dans le pays.

Précisant qu’une expertise internationale a conclu que rien dans le projet de Constitution ne s’oppose à la mise en œuvre de l’Accord, y compris la prise des dispositions législatives et réglementaires relatives au cadre institutionnel et à la réorganisation territoriale, M. Wane a encouragé les parties à rechercher un consensus sur les questions qui les divisent, notant que la Coalition des Mouvements de l’Azawad, la Plateforme et une partie des Mouvements de l’Inclusivité, regroupés au sein du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP/PSD), ont indiqué ne pas se reconnaître dans le projet de Constitution.

Si tous les intervenants se sont inquiétés de la progression du terrorisme au Mali, certaines délégations se sont plus particulièrement alarmées de la situation des droits humains, notamment dans le cadre des opérations menées par les Forces armées maliennes et le groupe Wagner, à Moura en mars 2022.

De fait, pour l’Albanie, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis, l’action déstabilisatrice du groupe et la menace qu’il représente pour le peuple malien et la souveraineté du pays n’ont jamais été aussi évidentes. 

La Fédération de Russie a dénoncé la réaction négative au renforcement de la coopération russo-malienne, manifestation selon elle d’approches néocoloniales et du « deux poids, deux mesures », soulignant que grâce à son soutien, les Forces armées maliennes ont obtenu des résultats tangibles contre des organisations terroristes dans le centre du pays.  Décriant les « conclusions hâtives » du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur l’incident de Moura, le Ministre malien a décrié pour sa part la volonté de certains États d’instrumentaliser l’ONU pour « nuire et punir le Mali pour ses choix souverains ».

LA SITUATION AU MALI (S/2023/402)

Déclarations

M. EL-GHASSIM WANE, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), a rappelé qu’après-demain, se tiendra le référendum constitutionnel, initialement prévu le 19 mars, qui marquera la première étape du processus devant aboutir à la restauration de l’ordre constitutionnel. Il a expliqué que l’une des questions qui a surgi dans le cours des débats sur le projet de Constitution a porté sur la mesure dans laquelle le texte prend en compte l’Accord pour la paix et la réconciliation.  Le 28 mars 2023, la Coalition des Mouvements de l’Azawad, la Plateforme et une partie des Mouvements de l’Inclusivité, regroupés au sein du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP/PSD), ont diffusé un communiqué dans lequel ils ont indiqué ne pas se reconnaître dans le projet de Constitution.  M. Wane a également fait savoir qu’une expertise internationale a conclu que rien dans le projet de Constitution ne s’oppose à la mise en œuvre de l’Accord, y compris la prise des dispositions législatives et réglementaires relatives au cadre institutionnel et à la réorganisation territoriale.  Le Représentant spécial a jugé regrettable que l’appel pour le vote des membres des Forces de défense et de sécurité maliennes (FDSM) dans la région Kidal n’ait pas été entendu.  Il a encouragé les parties à rechercher un consensus sur les questions qui les divisent, et ce sur la base du communiqué de la médiation du 11 juin. 

Il a relevé que la reprise du cours normal du processus de paix permettra de s’attaquer plus efficacement à la situation sécuritaire qui reste « préoccupante », marquée par la pression que continue d’exercer l’État islamique dans le nord-est du Mali et dans les régions de Gao et de Menaka. Dans le centre du pays, les groupes terroristes et les milices d’autodéfense communautaires continuent d’être actifs, et la MINUSMA a également été la cible d’attaque, la plus récente étant celle intervenue le 9 juin dernier à côté de la localité de Ber, qui a fait 2 tués parmi les soldats burkinabé et 7 blessés.  Depuis janvier 2023, 5 Casques bleus ont trouvé la mort et 31 blessés lors d’actes hostiles, a-t-il encore déploré. 

Sur le plan humanitaire, le Représentant spécial a indiqué qu’à la date de mai 2023, le nombre de déplacés s’élevait à 375 539 personnes, et que cette année, 8,8 millions de personnes auront besoin d’assistance dans l’ensemble du pays.  Il s’est préoccupé du fait que le plan de réponse humanitaire n’est financé qu’à hauteur de 11% des 751 millions de dollars requis.  Il a ensuite indiqué que les enquêtes de la MINUSMA sur les allégations de violations des droits humains se poursuivent « ex situ » du fait de difficultés d’accès et/ou d’absence d’autorisations de la part des autorités.  Il a ajouté que les conclusions du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur l’incident de Moura ont suscité une forte réaction de la part des autorités maliennes qui ont annoncé l’ouverture d’une enquête. 

M. Wane a ensuite indiqué que malgré l’environnement complexe dans lequel elle opère et les restrictions à sa liberté de mouvement, la MINUSMA s’est employée à mettre en œuvre son mandat de la manière la plus efficace qui soit, évoquant notamment son soutien au processus de transition en cours.  Il a insisté sur le caractère fondamental que revêt la coopération de l’État hôte et la relation de confiance à bâtir avec lui. Selon lui, la Mission a d’indéniables avantages comparatifs, qui peuvent et doivent plus effectivement être mis à contribution pour appuyer l’État malien.  Il a plaidé pour un engagement encore plus soutenu du Gouvernement malien à travers un dialogue régulier avec la Mission « pour élargir le champ des possibilités et saisir les multiples opportunités qui existent, au bénéfice des populations ». 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que le renouvellement du mandat de la MINUSMA, sur lequel se penchera prochainement le Conseil de sécurité, constitue un enjeu important pour le Mali et la stabilité régionale.  À cet égard, l’examen stratégique interne effectué par l’ONU avec toutes les parties prenantes a confirmé que la MINUSMA reste le principal instrument international pour soutenir la paix au Mali, a-t-il souligné, avant d’appeler au respect des paramètres fixés par le Secrétaire général. Dans ce cadre, a précisé le représentant, les processus politiques que la MINUSMA est chargée de soutenir doivent pleinement être mis en œuvre, « ce qui n’est actuellement pas le cas ».  Selon lui, la première priorité est l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation afin que des progrès se matérialisent sur le terrain, avec l’appui de la médiation internationale menée par l’Algérie.  La seconde priorité est l’achèvement de la transition politique dans le cadre agréé entre le Mali et la CEDEAO, avec un retour à l’ordre constitutionnel en mars 2024, a-t-il ajouté, rappelant que la MINUSMA est prête à contribuer à l’organisation des élections. 

Pour le représentant, il importe également que la MINUSMA soit en mesure de mettre en œuvre son mandat, « ce qui n’est pas non plus le cas actuellement ».  Constatant que, malgré le dialogue qu’elle poursuit avec les autorités maliennes, la Mission reste entravée, il a dénoncé le fait que, depuis l’arrivée du groupe paramilitaire russe Wagner au Mali, ces restrictions n’ont fait que s’accroître, de même que les graves violations des droits humains du droit international humanitaire, comme cela a été documenté dans le rapport sur Moura.  C’est pourquoi, a-t-il dit, les troupes de la MINUSMA ont besoin d’un soutien sans réserve et d’une pleine liberté de mouvement, conformément à l’accord sur le statut des forces.  Il a donc invité le Conseil à se fonder sur plusieurs des recommandations du Secrétaire général pour adapter le déploiement de la MINUSMA à ces réalités et faire un bilan régulier de ce déploiement. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), s’est félicité des progrès réalisés dans le pays, citant notamment l’annonce d’une date pour la tenue du référendum et la détermination des autorités maliennes à mettre en œuvre l’Accord pour la paix. Il s’est cependant inquiété des lacunes consécutives au retrait des pays fournisseurs de contingents, de même que de la détérioration de la situation humanitaire.  Il a condamné les actes terroristes perpétrés dans l’ensemble du pays et s’est félicité des importants investissements consacrés au renforcement des capacités de l’armée, appelant à un plus grand appui des donateurs.  Il a de plus décrié les contraintes imposées aux vols de renseignement, de surveillance et de reconnaissance de la MINUSMA qui entravent son efficacité.

S’agissant de l’amélioration de l’efficacité de la Mission, le représentant a appelé à mettre l’accent sur plusieurs domaines, dont la protection des civils, le rétablissement de l’autorité de l’État dans les zones vulnérables, la coopération avec l’État, le renforcement de la présence de la MINUSMA dans les zones critiques et le soutien à la feuille de route pour des élections pacifiques.  La Mission peut également aider les parties signataires de reprendre le dialogue en vue de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix.  Et il conviendrait de l’aider à se positionner pour mieux appuyer les mécanismes régionaux de lutte contre le terrorisme.  Il a ensuite engagé les autorités de transition à intensifier leur coopération avec la Mission, notamment en facilitant ses mouvements terrestres et aériens.  Une action coordonnée des acteurs nationaux, régionaux et internationaux s’impose également pour éviter le retour des combattants terroristes étrangers et la prolifération des armes légères et de petit calibre. 

Sur le plan politique, le représentant a encouragé les autorités à maintenir le dialogue avec l’ensemble des parties prenantes afin de répondre aux différends liés à la constitution et au rétablissement de l’ordre constitutionnel. Les processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR), y compris la mise en œuvre du plan stratégique national pour 2022-2024, permettraient également de renforcer le processus de réconciliation.  Il a appelé à ce que tous les incidents de violation des droits humains et du droit international humanitaire, tels que les enlèvements, les violences sexuelles et les attaques contre les écoles et les hôpitaux, fassent l’objet d’enquêtes et que les auteurs répondent de leurs actes.  Le représentant a enfin mis l’accent sur la nécessité de combler les déficits de gouvernance et de développement qui sont au cœur de la lutte contre les causes profondes de l’instabilité au Mali. 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est dit heureux de constater que le Secrétaire général continue de suivre les progrès enregistrés par le Gouvernement de transition concernant les quatre critères de référence dans le cadre de l’examen interne de la MINUSMA.  Selon lui, ces paramètres sont clairement définis et facilement atteignables.  Il a demandé aux autorités maliennes de respecter leurs obligations au titre de l’Accord sur le statut des forces, en vertu de l’Accord d’Alger de 2015 et du calendrier fixé par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour la transition.  Le délégué a toutefois exprimé sa déception face à l’adoption de mesures d’obstruction par le Gouvernement malien, notamment les entraves à la liberté d’accès et de circulation de la MINUSMA alors que 117 demandes d’autorisation de vol ont été refusées au cours des trois derniers mois. Les autorités de transition ont également refusé quatre demandes de la MINUSMA sur cinq pour mener des enquêtes concernant des violations des droits humains. 

Malgré ces restrictions, la MINUSMA a mené avec diligence des dizaines d’enquêtes en utilisant des outils de police scientifique à distance, s’est félicité le délégué, y compris, en mars dernier, concernant des violations commises par les Forces armées maliennes et le groupe Wagner à Moura.  Accuser la MINUSMA d’espionnage alors qu’elle mène une enquête prévue dans le cadre de son mandat est à ses yeux inacceptable et met en péril la sécurité des Casques bleus autorisés par le Conseil de sécurité. Les États-Unis, a-t-il rappelé, ont imposé des restrictions de visas à deux officiers maliens impliqués dans des violations de droits humains à Moura.  Le représentant s’est dit consterné par le mépris de ces droits dont a fait preuve l’armée malienne dans cette localité, avec la coopération du groupe Wagner, appuyé par le Kremlin.  Selon lui, l’action déstabilisatrice de Wagner et la menace qu’il représente pour le peuple malien et la souveraineté du pays n’ont jamais été aussi évidentes. 

S’agissant des élections, le délégué s’est félicité des préparations « robustes » entreprises par le Gouvernement de transition en vue de la tenue du référendum constitutionnel du 18 juin prochain et des élections prévues en février 2024.  Il a encouragé les autorités de transition et les groupes armés signataires à démontrer un engagement du même ordre envers l’accord de paix en répondant de façon constructive aux propositions présentées par l’équipe de médiation internationale. Pour le représentant, il est clair que la MINUSMA ne pourra s’acquitter de son mandat dans les conditions actuelles et, par conséquent, que le statu quo est intenable. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a déclaré soutenir le renouvellement du mandat de la MINUSMA, estimant que l’examen stratégique partagé plus tôt cette année offre de solides perspectives à cet effet.  Elle s’est par ailleurs félicitée de la tenue du référendum constitutionnel au Mali, avant de remercier la CEDEAO et l’Union africaine pour leurs efforts en faveur d’un processus inclusif.  Elle s’est dite convaincue qu’un retour assuré à l’ordre démocratique et constitutionnel est essentiel et a exhorté les autorités maliennes et toutes les parties à créer un environnement propice aux droits des femmes et à leur protection.  La représentante a ensuite salué la rencontre, à Kidal, entre le Ministre malien de la réconciliation, de la paix et de la cohésion nationale avec des représentants de la Coordination des mouvements de l’Azawad et de la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 d’Alger. 

Elle a d’autre part exhorté toutes les parties à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et à respecter leurs obligations en vertu du droit international, tout en exprimant son inquiétude face aux attaques extrémistes signalées dans l’ouest et le sud du pays.  La déléguée s’est en outre alarmée de la forte progression de la violence sexuelle et sexiste ainsi que des violations graves à l’encontre d’enfants. Les capacités de protection de l’enfance au sein de la MINUSMA doivent être renforcées, a-t-elle plaidé, avant d’appeler à une plus grande coopération des autorités maliennes pour garantir la liberté de mouvement de la MINUSMA. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a constaté que la capacité de la MINUSMA à accomplir de manière efficace et prévisible son mandat est entravée.  À ses yeux, la complexité du contexte opérationnel, l’immensité de la zone d’intervention et le manque de personnel rendent cette mission particulièrement ardue.  Des ajustements sont donc nécessaires afin de concilier les tâches de la mission avec les réalités actuelles, a estimé le représentant, pour qui l’efficacité de la MINUSMA dépendra également d’une meilleure coopération avec les autorités maliennes et de leurs avancements sur les quatre paramètres identifiés par le Secrétaire général en janvier dernier, parmi lesquels figure la liberté de mouvement.  Or, la mission continue d’être confrontée à des restrictions, y compris la non-autorisation des vols de reconnaissance, a-t-il relevé. 

Le délégué s’est également alarmé de la persistance des allégations de violations et abus des droits humains et du droit international humanitaire sur tout le territoire malien.  Évoquant les événements de Moura, qui ont eu lieu en mars 2022 dans le cadre d’une opération militaire, il a souhaité que ces violations fassent l’objet d’enquêtes impartiales, indépendantes et efficaces et de poursuites pénales. Enfin, après avoir invité toutes les parties à reprendre le dialogue, avec l’appui de la médiation internationale, il a rappelé l’importance d’une transition politique pacifique, en vue de la tenue d’élections crédibles et transparentes dans les délais impartis, et s’est félicité de l’organisation d’un référendum constitutionnel ce dimanche. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a estimé que pour que la MINUSMA fonctionne correctement, les quatre paramètres définis dans l’examen interne de la mission doivent être respectés.  « Ces paramètres ne sont pas déraisonnables et ne sont pas imposés au Mali de l’extérieur », a-t-il plaidé, en rappelant qu’il s’agit d’engagements pris par les autorités maliennes de transition envers leur peuple, les États voisins et la communauté internationale.  Le délégué a donc demandé instamment des progrès en vue d’une transition pacifique et rapide vers l’ordre constitutionnel d’ici à mars 2024, ce qui suppose la pleine participation de la société civile au référendum constitutionnel de dimanche et à l’élection présidentielle de février prochain. 

Par ailleurs, des efforts urgents sont nécessaires pour relancer le dialogue entre les signataires de l’Accord de paix chancelant, en s’appuyant sur les propositions de la médiation internationale.  De plus, a poursuivi le représentant, les restrictions sur les mouvements de la MINUSMA –pour lesquelles il n’y a pas eu d’amélioration– doivent être levées.  Enfin, l’obstruction aux tâches de la MINUSMA en matière de droits humains doit cesser, a tranché le délégué, qui a demandé que les responsables du massacre tragique de plus de 500 personnes à Moura par les Forces armées maliennes et le groupe Wagner rendent des comptes.  C’est aux autorités maliennes de transition qu’il appartient de choisir leurs partenaires, a concédé le représentant.  « Mais soyons clairs: le groupe Wagner –qu’il opère de manière autonome ou sous le contrôle direct de Moscou– n’est pas la solution.  Au Mali ou ailleurs. » 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a insisté sur l’importance de garantir la liberté de mouvement de la MINUSMA, déplorant qu’aucune solution n’ait été trouvée au sujet des vols de renseignement, de surveillance et de reconnaissance malgré l’adoption, par la Mission, des mesures agréées avec le Gouvernement de transition malien.  Il a appelé à doter la MINUSMA de toutes les capacités nécessaires pour lui permettre d’appuyer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix ainsi que la transition politique, protéger les civils et soutenir le rétablissement de l’autorité de l’État sur l’ensemble du pays.  Il a estimé que la coopération régionale est un facteur clef pour aider le Mali à ouvrir la voie à un processus de transition réussi.  À cet égard, il a réitéré son soutien à l’engagement actuel avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), tout en espérant que le dialogue avec les autorités maliennes de transition conduira à une collaboration plus poussée sur le développement et la mise en œuvre d’un plan de transition propice au rétablissement de l’ordre constitutionnel. 

Poursuivant, le représentant a souligné que le retour à la normalité démocratique doit inclure les femmes, les jeunes et les minorités ethniques et religieuses.  À cet égard, il a espéré la tenue d’un référendum constitutionnel plus inclusif et pacifique le 18 juin.  Le délégué a ensuite salué la coopération entre la MINUSMA et l’Autorité indépendante de gestion des élections en vue de coordonner le soutien technique et logistique et de renforcer les capacités des organisations de la société civile en matière de promotion du genre dans les processus électoraux.  Il s’agit là, a-t-il relevé, de mesures concrètes encourageantes en faveur d’une plus grande inclusion et d’une meilleure participation aux élections. 

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que le Mali a accompli des progrès considérables et que la coopération avec l’ONU et les autres partenaires est entrée dans une phase cruciale.  Le référendum constitutionnel, qui aura lieu dimanche, permettra au Mali d’aller encore plus de l’avant et d’accomplir des progrès durables, a pronostiqué le représentant.  À cet égard, il a appelé les parties à régler leurs divergences par le moyen du dialogue. Pour lui, la MINUSMA doit se limiter à apporter un appui technique au Mali pour l’organisation du référendum. Réagissant aux appels d’autres membres du Conseil sur l’importance de respecter les droits humains dans la lutte contre le terrorisme, le représentant a demandé que les opérations antiterroristes maliennes ne soient pas stigmatisées.  Quant aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, elles doivent respecter le principe de consentement des parties concernées, a rappelé le délégué, en jugeant nécessaire d’ajuster le mandat de la MINUSMA pour qu’elle respecte la souveraineté du pays hôte, tout en s’accordant sur son calendrier de sortie.  Les inquiétudes du Mali doivent être entendues et il faut maintenant prendre une décision axée sur le consensus s’agissant du renouvellement du mandat de la MINUSMA, a insisté le représentant.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a considéré que la stabilité à long terme ne peut être atteinte sans un retour à l’ordre constitutionnel, saluant le référendum constitutionnel qui doit se tenir ce dimanche et les efforts déployés par les autorités maliennes de transition.  Il a ensuite rappelé que l’Accord de paix est le seul cadre existant pour parvenir à une paix et une réconciliation durables, demandant aux autorités de transition et aux parties signataires de reprendre rapidement les pourparlers.  Le représentant a salué le travail de la médiation internationale, l’encourageant à accélérer ses efforts pour renforcer la confiance dans le processus.  Par ailleurs, les opérations militaires de lutte contre l’insécurité, qu’elles soient menées par les Forces de défense et de sécurité maliennes ou des forces de sécurité étrangères, doivent respecter les droits humains, a-t-il souligné.  Le délégué s’est fait l’écho de l’appel lancé par le Secrétaire général aux autorités de transition pour qu’elles mènent rapidement une enquête crédible et transparente et publient rapidement ses résultats afin que les auteurs des crimes de Moura soient tenus responsables. Le Japon estime que le Conseil de sécurité doit doter la MINUSMA d’un mandat clair et réaliste, a ajouté le représentant en conclusion.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a constaté que, par le biais de la désinformation, de l’utilisation d’engins explosifs improvisés et d’attentats-suicides, le terrorisme continue de progresser au Mali.  Lutter contre ce fléau, surtout quand il met en danger la sécurité du personnel de la MINUSMA et l’empêche de remplir son mandat de protection des civils, doit être une priorité, a souligné le représentant. Par ailleurs, après avoir appelé le Gouvernement de transition malien à diligenter une enquête indépendante sur le massacre de Moura, il a souhaité que toutes les restrictions de mouvement imposées à la Mission soient levées et l’accord sur le statut des forces respecté. Le délégué s’est ensuite déclaré préoccupé par le blocage du processus de paix, avant de saluer les efforts de la médiation internationale, lesquels ont débouché sur l’engagement renouvelé du Gouvernement de transition à promouvoir la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Il s’est également réjoui de la poursuite des processus électoral et constitutionnel, en vue d’une transition politique, avant d’applaudir les efforts déployés par la MINUSMA pour accroître la participation des femmes.  S’agissant enfin de l’avenir de la Mission, il a jugé que les préférences exprimées par le Mali doivent aller de pair avec une coopération en matière de renforcement des capacités et un respect du mandat qui lui a été confié.  Cela permettrait, selon lui, de garantir un apport continu de troupes et la poursuite de la mise en œuvre de l’Accord.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a déclaré que la transition politique doit être transparente et inclusive, regrettant que les points de vue de certaines parties prenantes et de la société civile n’aient pas été pris en compte dans le projet de constitution.  Elle a également relevé que les progrès dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix stagnent et a appelé les autorités de transition à faire preuve de volonté politique pour coopérer et appliquer ledit accord, tout en s’abstenant de contribuer à l’escalade des tensions. 

La situation sécuritaire pose de plus en plus de défis, a enchaîné la représentante, s’inquiétant notamment de l’escalade des tensions entre les groupes terroristes dans les régions de Goa et de Ménaka.  Elle s’est aussi préoccupée de l’augmentation dramatique des violations des droits humains et a appelé les autorités de transition à appliquer les recommandations du HCDH à la suite des atrocités commises à Moura en coopération avec le groupe Wagner.  La déléguée a ensuite dénoncé les restrictions imposées à la liberté de mouvement de la MINUSMA, et a regretté le peu de progrès réalisés pour appliquer les quatre paramètres identifiés par le Secrétaire général pour assurer la poursuite du fonctionnement de la mission.  Alors que le Mali se prépare à rétablir l’ordre constitutionnel d’ici à mars 2024, plusieurs étapes cruciales doivent être franchies pour assurer la tenue d’élections crédibles, a-t-elle ajouté. 

M. VASILLY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est alarmé de la situation au Mali qui reste, « sans exagération », difficile.  L’État islamique dans le Grand Sahara et Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin (JNIM) ont nettement intensifié leurs activités meurtrières, s’est-il inquiété.  En outre, a-t-il ajouté, la multiplication des attaques terroristes entraîne une nouvelle détérioration de la situation humanitaire, relevant que près de 9 millions de personnes ont besoin d’une forme d’aide au Mali.  La gravité de la crise est encore exacerbée par le sous-financement chronique de l’appel lancé en faveur du pays, a-t-il observé, appelant les partenaires internationaux de Bamako à s’abstenir de politiser les questions liées à l’aide des donateurs. 

Le représentant russe a ensuite rappelé que dans le contexte du « vide » sécuritaire qui s’est installé à la suite du retrait « honteux », entre autres, de l’opération française Barkhane, le Gouvernement malien développe une coopération avec des partenaires internationaux capables de contribuer à la sécurisation et à la protection de sa population.  Grâce notamment au soutien de la Russie, les forces armées maliennes ont obtenu des résultats tangibles « sur le terrain », dont 59 opérations réussies menées, entre février et mars de cette année, contre des terroristes dans le centre du pays.  D’ailleurs, s’est-il enorgueilli, le dernier rapport en date du Secrétaire général note que les efforts de l’armée malienne ont permis de réduire le nombre de victimes civiles.  Aussi a-t-il dénoncé la réaction négative d’un certain nombre de pays au renforcement de la coopération russo-malienne, manifestation selon lui d’approches néocoloniales et de « deux poids, deux mesures ».  Il est nécessaire d’apporter une aide efficace aux autorités maliennes, plutôt que de leur « mettre des bâtons dans les roues », ce que, malheureusement, Paris continue de faire avec ses alliés, y compris en usant de son influence au sein des structures multilatérales, a déploré le représentant en conclusion. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a appelé à rester concentré sur une transition politique durable au Mali, estimant à cet égard que le calendrier électoral des 12 prochains mois sera crucial.  Considérant que, dans ce contexte, la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation reste essentielle, elle a encouragé les parties à s’engager dans le dialogue facilité par la médiation internationale. Évoquant ensuite la menace terroriste qui s’étend à présent aux pays voisins du Mali, la représentante a souhaité voir les efforts nationaux complétés par des approches bilatérales et régionales, avec le concours des communautés concernées.  Les problèmes sécuritaires, notamment dans le centre du Mali, alimentent la crise humanitaire catastrophique que connaît le pays, a-t-elle relevé, avant d’appeler la communauté internationale à continuer de soutenir collectivement les efforts du Gouvernement malien pour accroître la présence de l’État et assurer la protection des civils. 

La représentante a par ailleurs noté que les changements climatiques agissent comme un « multiplicateur de risques ».  Rappelant l’intérêt qu’accorde son pays à cette question, elle s’est alarmée de la désertification croissante et de la réduction des précipitations au Mali, qui amenuisent encore les ressources et entravent le travail agricole saisonnier.  Cette situation livre des Maliens sans nourriture ni emploi au recrutement par des groupes armés, a-t-elle averti, souhaitant qu’à l’avenir, le rapport du Secrétaire général inclue des données sur la contribution des changements climatiques à l’instabilité dans le pays.  S’agissant enfin du mandat de la MINUSMA, la déléguée a jugé impératif de le renouveler et de favoriser une coopération accrue avec les autorités maliennes.  Ce rapprochement permettrait de lutter contre le problème de la désinformation, a-t-elle souligné, non sans rappeler que le Conseil a récemment adopté la résolution 2686 (2023) qui condamne ce fléau et l’incitation à la violence contre les opérations de maintien de la paix de l’ONU. 

M. ABOULAYE DIOP, Ministre des affaires étrangères du Mali, a déclaré que le Gouvernement de transition a pris des mesures fortes et irréversibles pour le retour à un ordre constitutionnel apaisé et sécurisé, dans les délais convenus, précisant que le scrutin référendaire, prévu le 18 juin 2023, vise à doter le Mali d’une nouvelle Constitution.  Le bon déroulement du processus de vulgarisation du projet de Constitution et la campagne électorale y relative augurent un scrutin référendaire apaisé et crédible, a-t-il assuré.

Le Ministre a ensuite estimé que les prescriptions internationales prodiguées par la MINUSMA depuis sa création en 2013, ont montré leur limite.  Sinon comment expliquer le fait que la situation sécuritaire du Mali en 2013 soit bien meilleure à celle d’aujourd’hui?  Le réalisme impose le constat de l’échec de la MINUSMA dont le mandat ne répond pas au défi sécuritaire, a-t-il tranché. Il a indiqué que le Gouvernement de transition a donné une place de choix au renforcement des capacités des Forces de défense et de sécurité maliennes qui, a-t-il affirmé, continuent de remporter contre les groupes armés terroristes des victoires décisives. 

Concernant le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) sur les événements de Moura, M. Diop a expliqué que c’est sur la base de renseignements fiables faisant état de la présence dans cette localité de principaux chefs terroristes pour planifier des attaques d’envergue, que les Forces de défense et de sécurité maliennes ont pris la décision de mener une opération à la hauteur de cette menace au cours de laquelle 203 combattants terroristes ont été neutralisés.  Il a rejeté vigoureusement « les conclusions hâtives du rapport biaisé » du HCDH, y voyant l’expression d’une volonté réelle de certains États d’instrumentaliser l’ONU pour nuire et punir le Mali pour ses choix souverains. De plus, ce rapport comporte des images obtenues par l’usage satellite à l’insu des autorités nationales ce qui constitue de l’espionnage, a accusé le Ministre qui a signalé que la teneur de ce rapport a également été démenti par de nombreux habitants de Moura. 

Après avoir réaffirmé l’engagement du Gouvernement à poursuivre la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation, le Ministre a constaté qu’après plusieurs années de déploiement des forces de la MINUSMA sur le terrain, la situation sécuritaire, qui concernait jadis le nord du pays, s’est progressivement dégradée dans les autres régions du Mali, notamment le centre. Pour le Gouvernement du Mali, le constat est clair: la MINUSMA n’a pas atteint son objectif fondamental, a-t-il affirmé.  En outre, ni les propositions du Secrétaire général et encore moins le projet de résolution en cours de négociation n’apportent des réponses appropriées aux attentes des Maliens.  Ce projet de résolution conforte d’ailleurs la récusation de la France en tant que porte-plume, tant son contenu est hostile à l’égard du Mali, a-t-il ajouté.

Pour le Ministre, la Mission semble devenir une partie du problème en alimentant les tensions communautaires exacerbées par des allégations d’une extrême gravité et qui sont fortement préjudiciables à la paix, à la réconciliation et à la cohésion nationale du Mali.  Cette situation engendre un sentiment de méfiance des populations à l’égard de la MINUSMA et une crise de confiance entre les autorités maliennes et la Mission.  De ce qui précède, a terminé M. Diop, le Gouvernement du Mali demande le retrait sans délai de la MINUSMA. 

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