En cours au Siège de l'ONU

9345e séance – matin & après-midi
CS/15318

Le Conseil de sécurité réfléchit aux moyens d’une plus grande cohérence entre action climatique et maintien de la paix et de la sécurité internationales

Le Conseil de sécurité a débattu, aujourd’hui, des moyens d’assurer une plus grande cohérence entre la lutte contre les changements climatiques et le maintien de la paix et de la sécurité internationales, alors que 3,5 milliards de personnes vivent dans des zones à risque climatique.  Renforcement des capacités des missions de l’ONU, diminution de leur empreinte carbone, respect des engagements pris au titre du financement climatique et rôle accru des femmes ont été quelques-unes des pistes explorées.

Pour ce débat, riche d’une soixantaine d’interventions, les Émirats arabes unis, à la présidence du Conseil ce mois de juin, avaient distribué une note de cadrage mentionnant les données de plus en plus nombreuses qui montrent que les changements climatiques influent sur la paix et la sécurité internationales.  Ces changements ajoutent en effet à la souffrance humaine et exacerbent l’instabilité politique, le stress économique, les déplacements forcés et la compétition pour les ressources, en particulier dans les zones fragiles ou touchées par un conflit, précise la note.

Si la plupart des intervenants, dont plusieurs ministres et hauts représentants, ont partagé ce diagnostic, certains pays ont fait entendre une note dissonante à l’instar de la Fédération de Russie ou du Brésil, qui a estimé qu’un tel débat du Conseil « n’est ni productif ni efficace » et « soulève un problème très grave concernant l’empiètement du Conseil sur des thèmes abordés par la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et le pilier développement de l’ONU ».  Les émissions de carbone se produisent principalement dans les pays développés, pas dans les zones de conflit, a dit le Brésil.

Ce n’est pas l’avis de Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. Jean-Pierre Lacroix, pour qui, au contraire, les « effets en cascade des changements climatiques sont en train de reconfigurer les paramètres de notre travail sur la prévention des conflits, le maintien et la consolidation de la paix ».  Considérer les changements climatiques dans ce que nous faisons ne relève plus d’un choix, a tranché le Secrétaire général adjoint.

À cette aune, il a précisé que l’ONU investit dans le renforcement des capacités des opérations de paix afin de répondre aux corrélations entre changements climatiques, paix et sécurité.  L’ONU doit également réduire son empreinte environnementale, a-t-il reconnu.  En effet, dans nombre de pays hôtes, les missions comptent parfois parmi les plus gros émetteurs, a-t-il dit, en rappelant que 6% de l’électricité utilisée par les missions venaient de sources d’énergie renouvelable en 2021-2022.

« Malgré le désir de certains membres du Conseil, les conséquences des changements climatiques et des conflits convergent très clairement », a appuyé l’ancien Président de la Colombie, prix Nobel de la paix et membre des Sages, M. Juan Manuel Santos, en estimant que le Conseil « pourrait en faire beaucoup plus ».  Il a appelé à augmenter le nombre de conseillers en climat et sécurité attachés aux missions de maintien de la paix et à utiliser les prévisions climatiques dans le cadre des outils de prévention de l’ONU pour anticiper et atténuer les risques. 

Dans ce droit fil, l’Allemagne, au nom du Groupe des Amis du climat et de la sécurité, qui compte 66 États, a souhaité la remise de rapports réguliers du Secrétaire général au Conseil sur les implications pour la paix et la sécurité des effets néfastes des changements climatiques, la nomination par le Secrétaire général d’un représentant spécial pour le climat ou bien encore l’intégration systématique des risques climatiques dans les mandats de toutes les missions des Nations Unies.

De son côté, Mme Salma Kadry, experte au sein de l’Organisation du Système CGIAR, a souhaité que les instruments de paix et de sécurité renforcent la résilience, en particulier celle des femmes et des jeunes.  Mettant l’accent sur l’importance du financement climatique, elle a insisté sur la nécessité de payer des réparations aux pays qui ont le moins contribué au réchauffement climatique afin de leur permettre de s’adapter et de faire face aux pertes et dommages qu’ils subissent. 

La Ministre des changements climatiques et de l’environnement des Émirats arabes unis a précisé que, lors de la prochaine COP28 à Dubaï, son pays prévoit d’organiser une journée sur « les secours, le relèvement et la paix ».  Son objectif est de mettre en évidence l’intersection des changements climatiques, de la paix et de la sécurité, et de proposer des solutions pratiques pour prévenir et gérer le fardeau climatique pesant sur la stabilité, a encore indiqué la Ministre, en appelant à éviter toute polarisation sur le sujet.

La Chine a souligné, à ce propos, le rôle de chef de file que les pays développés doivent endosser dans la lutte contre les changements climatiques.  La Russie a jugé que ces pays sont passés « maîtres dans l’art d’attiser l’alarmisme » face à la « crise climatique ». Ils font des déclarations « populistes » mais, lorsqu’on aborde les mesures concrètes comme le financement du nouveau fonds pour les pertes et dommages et le transfert de technologies, on ne les entend plus, a-t-elle accusé, en les exhortant à s’acquitter de leurs engagements.

Les 100 milliards de dollars promis à Paris seront payés, a assuré l’Envoyé spécial du Président des États-Unis pour les changements climatiques. Il a aussi mentionné le plan d’urgence et de résilience mis en place par le Président Biden, doté de 2 milliards de dollars, qui est destiné à aider les populations des pays en développement d’ici à 2030.  L’Envoyé spécial a rappelé que 48 pays d’Afrique contribuent à moins de 0,55% des émissions et que 20 pays contribuent à 70% des émissions.  « Il faut faire quelque chose à ce sujet », a-t-il admis, en misant sur la prochaine COP.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Les changements climatiques et la paix et la sécurité (S/2023/408)

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a rappelé que 3,5 milliards de personnes vivent dans des zones à risque climatique.  Les changements climatiques contribuent à la diminution des ressources naturelles, affectent la cohésion sociale et alimentent les conflits, a-t-il souligné, sans compter qu’ils perturbent les transhumances et nourrissent les tensions entre éleveurs de bétails et agriculteurs.  Il a pris l’exemple du Soudan du Sud où 8 États sur 10 sont touchés par les inondations et les déplacements.  Ces inondations entravent la mobilité des Casques bleus qui doivent user d’hélicoptères et de bateaux en nombre limité.  Il a aussi mentionné l’Iraq où le manque d’eau, l’augmentation des températures et les tempêtes de sable mettent une pression accrue sur les relations communautaires.  Les effets en cascade des changements climatiques sont en train de reconfigurer les paramètres de notre travail sur la prévention des conflits, le maintien et la consolidation de la paix, a dit M. Lacroix.  « Considérer les changements climatiques dans ce que nous faisons, comme cela est d’ailleurs demandé par ce Conseil, ne relève plus d’un choix. »

À cette aune, il a indiqué que l’ONU investit dans le renforcement des opérations de paix afin d’anticiper et de répondre aux corrélations entre changements climatiques, paix et sécurité.  L’intégration de telles capacités dans les missions permet une meilleure exécution des mandats confiés par le Conseil.  Il a indiqué qu’au sein de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) un conseiller sur le climat, la paix et la sécurité fournit des orientations dans ce domaine aux acteurs de la sécurité.  Il a aussi souligné la nécessité de disposer de données de qualité sur les corrélations entre changements climatiques, paix et sécurité. 

M. Lacroix a fait valoir les bénéfices communs qui sont retirés de l’action climatique et de l’action de paix et de sécurité de l’ONU, lesquelles poursuivent nombre d’objectifs identiques, qui concourent à l’édification de sociétés résilientes, équitables et inclusives.  Les capacités des femmes dans ces domaines sont encore sous-utilisées, a-t-il relevé, en soulignant le rôle catalyseur que joue le Fonds pour la consolidation de la paix pour y remédier.  Depuis 2016, ce Fonds a investi dans plus de 70 projets à dimension climatique et sexospécifique, a-t-il dit, prenant l’exemple de la gestion des ressources hydriques au Yémen. 

Enfin, le Secrétaire général adjoint a souligné la nécessité pour l’ONU de réduire son empreinte environnementale.  En effet, dans nombre de pays hôtes, les missions de l’ONU sont parfois parmi les plus gros émetteurs, a-t-il dit en rappelant que seulement 6% de l’électricité utilisée par les missions venait de sources d’énergie renouvelable en 2021-2022.  Il a indiqué que l’appui du pays hôte, des acteurs de développement et du secteur privé est crucial pour un recours accru à ces énergies renouvelables.  Ensemble, nous pouvons façonner un avenir où les efforts de prévention des conflits et de pérennisation de la paix sont renforcés par notre engagement en faveur de la lutte contre les changements climatiques, a-t-il conclu.

M. JUAN MANUEL SANTOS, ancien Président de la Colombie, prix Nobel de la paix et membre des Sages, a expliqué qu’avant d’entrer en fonctions, il avait sollicité la bénédiction d’un peuple indigène de son pays, les Kogis, lesquels l’avaient appelé à faire la paix avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) « mais aussi avec la nature ». À la fin de son mandat, marqué par l’Accord de paix colombien, lequel comprend des dispositions sur la protection de la nature, ces mêmes Kogis lui ont expliqué que sa mission n’était pas achevée car il manquait aux objectifs de développement durable, adoptés entre-temps à l’ONU notamment grâce aux efforts de la Colombie, une dimension spirituelle.  M. Santos a ajouté qu’il revenait du Vatican, où le pape François avait invité une trentaine de prix Nobel de la paix pour lancer un appel à la construction d’une « fraternité environnementale » afin de « faire la paix avec la nature, car tout est en relation avec tout le reste ». L’ancien Chef d’État a affirmé que les questions de la perte de biodiversité et des changements climatiques ne peuvent être traitées séparément et a estimé que ce serait une grande réussite de la prochaine COP28 que de « lier explicitement la Convention sur la biodiversité à la Convention sur le climat », voire de les fusionner en une seule Convention qui reconnaîtrait et financerait de manière adéquate la protection de la nature.

M. Santos a rappelé que le groupe des Sages, fondé par Nelson Mandela, a pour mission d’appeler les dirigeants mondiaux à intensifier et à répondre aux menaces existentielles auxquelles l’humanité est confrontée, parmi lesquelles il a cité notamment la crise climatique.  Déplorant que les divisions croissantes au sein du Conseil de sécurité sapent sa capacité à s’acquitter de son mandat principal, il a salué la « sage décision » des Émirats arabes unis, hôtes de la prochaine COP28, de mettre le climat, la paix et la sécurité à l’ordre du jour. 

« Malgré le désir de certains membres du Conseil de traiter les changements climatiques et la sécurité comme des questions distinctes, dans le monde réel, les conséquences des changements climatiques et des conflits convergent très clairement », a affirmé l’ancien Chef d’État, pour qui les changements climatiques exacerbent les menaces à la sécurité humaine, alors que la guerre nuit à la nature et à l’environnement de nombreuses manières. Il a cité en exemple la destruction de barrages en Ukraine et les attaques contre les oléoducs et les terres agricoles dans son propre pays. 

Pour M. Santos, le Conseil de sécurité doit jouer son rôle pour relever le défi sans précédent de l’insécurité climatique, en travaillant avec d’autres parties de l’ONU et d’autres institutions internationales. Le Conseil « pourrait faire beaucoup pour intégrer plus efficacement le climat dans les opérations de l’ONU sur le terrain », a-t-il notamment affirmé, appelant à augmenter le nombre de conseillers en climat et sécurité attachés aux missions de maintien de la paix et à utiliser les prévisions climatiques dans le cadre des outils de prévention de l’ONU pour anticiper et atténuer les risques. Rappelant qu’il ne peut y avoir de paix sans développement durable, il en a inféré que la paix ne peut être maintenue que si les forêts, les sols et les rivières mêmes dont dépendent les communautés sont protégés et gérés de manière durable.  Appelant à une « action politique audacieuse », il a demandé des « solutions positives pour la nature », en particulier pour conserver les écosystèmes qui fournissent à l’humanité de l’air pur et de l’eau propre. 

M. Santos a appelé les membres du Conseil de sécurité à l’unité, au dialogue constructif et à la coopération, « non seulement sur le climat, la paix et la sécurité, mais sur le mandat du Conseil dans son ensemble ». Face aux défis sans précédent et aux menaces existentielles auxquelles nous sommes tous confrontés, « unissez-vous, coopérez ou nous périrons tous », a-t-il conclu.

Mme SALMA KADRY, experte en climat, paix et sécurité de l’Organisation du Système CGIAR, a averti que si l’on ne prend pas conscience de l’ampleur de la crise climatique, l’humanité fera face à de nombreux dangers et de l’insécurité.  « Tous les humains ne sont pas sur un même pied d’égalité face à la force de la nature. »  Elle a attiré l’attention sur le fait que les changements climatiques déstabilisent les systèmes alimentaires, fonciers et hydriques dans la région arabe qui est pauvre en eau et tributaire des importations de denrées alimentaires. Elle a aussi souligné que les conflits et la fragilité affaiblissent la gouvernance, provoquent des frictions politiques et détricotent le tissu social des sociétés arabes, tout en détruisant les infrastructures civiles et hydrauliques, les logements, les systèmes éducatifs et les établissements de santé.  Ils déstabilisent tous les outils de résilience et conduisent les sociétés sur une voie incertaine, a-t-elle remarqué.  L’experte a évalué l’état de la transition énergétique actuelle et a tranché: elle ne sert pas le développement humain et n’apporte pas le développement local; elle augmente les inégalités et ne traite pas les causes des conflits et de la fragilité. 

De ce qui précède, elle a tiré quatre recommandations.  D’abord, il faut mettre les personnes au centre de l’adaptation, de la création et de l’innovation.  Les outils de paix et de sécurité doivent soutenir les innovations au service de la population et renforcer la résilience, en particulier celle des femmes et des jeunes, a-t-elle ajouté.  L’experte a aussi souligné l’importance des données pour le Conseil dans sa prise de décision et dans ses interventions.  « Cet organe doit tirer parti des réseaux locaux des chercheurs et des penseurs arabes pour une compréhension de la relation entre la paix, la résilience et le climat. »  Mme Kadry a également recommandé de tirer parti des processus régionaux comme l’initiative Réponses climatiques pour la pérennisation de la paix ou encore le Conseil arabe de l’eau.  Enfin, elle a mis l’accent sur l’importance du financement climatique qui doit bénéficier à ceux qui en ont besoin.  Elle a insisté sur la nécessité de payer des réparations aux pays qui ont le moins contribué au réchauffement climatique afin de leur permettre de s’adapter et de faire face aux pertes et dommages qu’ils subissent. Il est également nécessaire, selon elle, de mettre en place des outils simplifiés de financement de lutte contre les changements climatiques qui soient adaptés aux pays en conflit.  Elle a terminé en insistant sur l’importance de la volonté politique dans ce domaine. 

Mme MARIAM BINT MOHAMMED SAEED HAREB ALMHEIRI, Ministre des changements climatiques et de l’environnement des Émirats arabes unis, a rappelé que c’est en 2007 que le Conseil de sécurité s’était réuni pour la première fois pour discuter des implications potentielles des changements climatiques pour la paix et la sécurité internationales.  Si la corrélation entre ces changements et les menaces à la paix et à la sécurité avait alors été contestée par certains, tel n’est plus le cas aujourd’hui, a-t-elle relevé, soulignant qu’il s’agit d’une « une réalité vécue quotidiennement dans divers contextes de conflit à travers le monde ». 

La Ministre a cité plusieurs exemples pour illustrer le « cycle destructeur » de la vulnérabilité, des changements climatiques et des conflits armés.  En Somalie, le groupe terroriste des Chabab profite de la sécheresse persistante dans la Corne de l’Afrique pour recruter parmi les communautés déplacées et imposer des taxes aux agriculteurs et aux éleveurs désespérés.  Au Moyen-Orient, qui abrite 14 des 33 pays les plus touchés au monde par le stress hydrique, la vulnérabilité aiguë de l’Iraq aux pénuries d’eau met en danger sa reprise post conflit.  Au Soudan du Sud, les inondations ont encore aggravé une crise humanitaire majeure, entravant la capacité de la mission de maintien de la paix de l’ONU à mettre en œuvre son mandat de protection des civils, tandis que les effets néfastes des changements climatiques ont exacerbé les tensions existantes entre les communautés pastorales et agricoles. 

Dans les conflits à travers le monde, les changements climatiques ont encore aggravé l’épidémie de violence et d’inégalité fondées sur le genre, a déploré la Ministre, observant que les femmes et les filles sont exposées à des situations plus précaires lorsque les ressources naturelles et la production agricole sont mises à mal.  Avertissant que ces conséquences ne feront qu’augmenter en intensité et en force avec le temps, elle a regretté que la réponse du Conseil de sécurité à cette crise mondiale soit pour l’heure restée insuffisante.  Il est crucial que le système multilatéral, y compris le Conseil de sécurité, s’adapte à la nature systémique, lente et dispersée des changements climatiques, a-t-elle plaidé.  Pour le Conseil, cela implique d’adopter des tentatives innovantes pour mieux comprendre et traiter l’interaction entre les changements climatiques, la paix et la sécurité.  Le Conseil doit renforcer la capacité et les mandats des opérations de paix pour intégrer les changements climatiques dans les efforts de prévention et de règlement des conflits, a souligné la Ministre, qui a appelé à tirer parti du travail du mécanisme de sécurité climatique et du déploiement de conseillers en sécurité climatique auprès des missions de l’ONU. 

Il faut éviter toute polarisation dans l’examen de cette question, a poursuivi la Ministre, avant de se prononcer pour un dialogue avec des représentants locaux des communautés de première ligne, en particulier des femmes et des jeunes, ainsi qu’avec des organisations régionales menant des initiatives liées au climat.  Cela enrichirait la réponse du Conseil en incluant des nuances locales et des approches sensibles au genre dans les discussions sur les changements climatiques et les conflits, a-t-elle soutenu, tout en invitant le Conseil à favoriser des solutions holistiques.  Lors de la prochaine COP28 à Dubaï, la présidence émirienne prévoit d’organiser une journée sur « les secours, le relèvement et la paix », dont l’objectif est de mettre en évidence l’intersection des changements climatiques, de la paix et de la sécurité, et de proposer des solutions pratiques pour prévenir et traiter le fardeau climatique sur la stabilité, a encore indiqué la Ministre.

M. HERMANN IMMONGAULT, Ministre des affaires étrangères du Gabon, a estimé qu’au-delà de sa dimension environnementale, la crise climatique actuelle est une menace évidente à la stabilité de plusieurs régions dans le monde, notamment sur le continent africain, où l’on dénombre 17 des 20 pays les plus affectés par les dérèglements climatiques, dont la majorité fait face à des défis sécuritaires inextricables.  Cette réalité, a relevé le Ministre, est l’un des moteurs du plaidoyer du Gabon pour la reconnaissance du lien entre la vulnérabilité climatique et la sécurité. 

D’ici à 2050, l’Afrique pourrait enregistrer plusieurs millions de migrants climatiques internes, en raison des dérèglements climatiques et de ses effets néfastes, a indiqué le Ministre.  Ces mouvements de masse vont de pair avec la déstabilisation, l’amplification des tensions, des crises et des conflits dans les régions affectées.  Le risque que ces déplacements de populations créent des tensions susceptibles de se muer en conflits transfrontaliers est réel. C’est pourquoi, a poursuivi le Ministre, il paraît judicieux d’intégrer le risque climatique dans la modélisation des conflits, en matière de prévention ou de règlement durable.  Le nexus climat et sécurité doit être systématisé dans toutes les stratégies géopolitiques de paix et de sécurité internationales.  La lutte contre les changements climatiques est beaucoup plus qu’une question de développement durable, a affirmé le Ministre.  C’est une question de survie pour les populations qui sont affectées, une question dont dépendent la paix et la sécurité de nombreux peuples dans le monde. 

Pour M. KWAKU AFRIYIE, Ministre de l’environnement, des sciences, de la technologie et de l’innovation du Ghana, le Conseil devrait mieux intégrer les changements climatiques dans ses efforts de paix, en encourageant les missions politiques spéciales à les incorporer dans leurs processus de médiation et les négociations de paix.  C’est le cas pour le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel: un bon exemple à reproduire dans d’autres missions, selon lui. 

Un financement adéquat reste essentiel pour faire face aux risques liés au climat, a poursuivi le Ministre.  Soulignant l’importance d’un engagement continu auprès des organes de l’ONU tels que la Commission de consolidation de la paix, il s’est félicité de l’allocation du Fonds pour la consolidation de la paix consacrée à des projets liés à la sécurité climatique dans les pays à l’ordre du jour du Conseil. Rappelant aussi les pays développés à leur engagement de mobiliser conjointement 100 milliards de dollars par an pour le financement de la lutte contre les changements climatiques entre 2020 et 2025, le Ministre a conclu en encourageant l’ONU à approfondir sa coopération avec les mécanismes régionaux. 

Mme ANA COMOANE, Ministre de l’administration d’État et des services publics du Mozambique, a indiqué qu’il ne fait « aucun doute » que les changements climatiques ont des conséquences négatives pour le maintien de la paix et de la sécurité.  De plus, a fait remarquer la Ministre, ces changements frappent davantage les pays africains.  Elle a souligné la vulnérabilité de son pays à cet égard.  Elle a ensuite mentionné les solutions élaborées par le Mozambique pour y remédier, en mentionnant la mise en œuvre des instruments de lutte contre les changements climatiques ou encore sa participation à toutes les conférences sur le sujet, sous les auspices de l’ONU, de l’Union africaine ou de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  Elle a enfin signalé que le Centre régional d’urgence de la Communauté se trouve à Nacala, dans le nord du Mozambique.

M. JOHN KERRY, Envoyé spécial du Président des États-Unis pour les changements climatiques, a réagi à la déclaration du Mozambique en disant que les États-Unis ne sont pas non plus à l’abri de catastrophes climatiques. Il a d’ailleurs rappelé les coûts, qui se chiffrent en milliards de dollars, de la menace climatique pour son pays. L’Envoyé spécial a martelé que la crise arrive à grand pas, avec notamment des invasions d’insectes et des pertes de biodiversité causées par le réchauffement du climat.  Sept millions de personnes meurent chaque année à cause de la pollution, a-t-il encore alerté avant de mettre en garde également contre le besoin croissant de financement pour faire face aux catastrophes climatiques. Les trois dernières tornades aux États-Unis ont coûté 265 milliards de dollars, a-t-il donné comme exemple. M. Kerry n’en a pas moins assuré que les 100 milliards de dollars promis à Paris seront payés. 

M. Kerry a insisté pour qu’on ne reste pas les bras croisés, s’inquiétant de voir la crise empirer, même si cela fait des années le Conseil s’est saisi de la question.  Il a demandé au Conseil de faire davantage.  Il faut mettre en place des systèmes d’alerte précoce et l’ONU doit repenser complètement sa façon de comprendre les risques climatiques, a-t-il déclaré.  M. Kerry a ensuite mentionné le plan d’urgence et de résilience mis en place par le Président Joe Biden, doté de 2 milliards de dollars, qui est destiné à aider les populations des pays en développement d’ici à 2030.  Il a évoqué la COP de Dubaï, où il faudra établir un rapport sur l’adaptation, traiter les questions des pertes et dommages, et faire une évaluation mondiale de la situation actuelle.  L’Envoyé spécial a rappelé que 48 pays d’Afrique contribuent à moins de 0,55% des émissions et que 20 pays contribuent à 70% des émissions.  Il faut faire quelque chose à ce sujet, a exhorté M. Kerry appelant également les universités et les scientifiques à contribuer à la réduction des émissions et à la recherche sur systèmes de capture de carbone.  Il faut mettre fin à la création d’usines à charbon, mobiliser le financement et les financements mixtes, a conseillé l’Envoyé spécial suggérant qu’aucun pays ne crée de nouvelles sources d’émissions.  Le temps des paroles est révolu, il faut appliquer les mesures de 45% de réduction dès que possible.  C’est la promesse faite à Paris, à Glasgow et à Charm el-Cheikh, a-t-il rappelé en espérant que le Conseil de sécurité contribue à gagner cette bataille.

Mme LIVIA LEU, Secrétaire d’État au Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, a jugé impératif de reconnaître le lien entre les changements climatiques et la sécurité.  Chaleur et sécheresse, tempêtes et inondations déstabilisent de nombreuses régions du monde, a-t-elle constaté, citant l’exemple du Sahel ou encore du Soudan du Sud, où le cercle vicieux des tensions, des fragilités et des conflits est renforcé par les changements climatiques.  Face à l’impact sans précédent de ces derniers, il importe de mettre la science et les nouvelles technologies au service de la prévention des conflits, à l’instar des systèmes d’alerte précoce mis en œuvre par l’initiative sur les systèmes d'alerte précoce aux risques climatiques (CREWS), dont l’Organisation météorologique mondiale (OMM) est un partenaire clef. Intégrer l’expertise scientifique et diplomatique est une approche stratégique de la Suisse, a indiqué la Secrétaire d’État, non sans rappeler qu’un pôle d’expertise sur les effets des changements climatiques sur la sécurité humaine a récemment été créé à Genève. 

La Secrétaire d’État a d’autre part estimé que les efforts collectifs visant à bâtir et consolider la paix doivent également intégrer les liens entre les changements climatiques et la sécurité, notamment en ce qui concerne le financement climatique dans les pays fragiles.  Enfin, elle a souhaité que les mandats des opérations de maintien de la paix soient sensibles aux risques climatiques et s’appuient davantage sur les conseillers climatiques et environnementaux pour soutenir les missions dans l’intégration et l’atténuation des risques climatiques dans leur travail. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a réitéré la position de son pays selon laquelle la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et son Accord de Paris sont les forums les plus appropriés pour discuter de la réponse mondiale aux changements climatiques. Un débat thématique et transversal sur ce sujet dans le cadre du Conseil de sécurité « n’est ni productif ni efficace » et « soulève un problème très grave et potentiellement insoluble concernant l’empiétement du Conseil sur des thèmes généralement abordés par la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et le pilier développement des Nations Unies », a-t-il assené.  Le représentant a en outre rappelé que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a évalué comme « relativement faible » l’influence du climat sur les conflits. « Tout au long de notre histoire, les émissions de carbone se sont produites principalement dans les pays développés, pas dans les zones de conflit », a-t-il ajouté.

Pour le représentant, le Conseil de sécurité, qui n’a pas la légitimité nécessaire pour faire face aux changements climatiques, manque aussi des outils adéquats pour s’attaquer aux questions clefs, qui sont aux mains de la CCNUCC et du pilier développement de l’ONU.  Le représentant a également fait observer que le régime multilatéral sur les changements climatiques est basé sur divers principes qui garantissent l’équilibre, la transparence et l’inclusivité, avec des décisions basées sur le consensus de tous les pays parties à la Convention.  Or, a-t-il fait valoir, « rien n’est plus éloigné de la réalité du Conseil de sécurité, qui fonctionne et est structuré d’une manière fondamentalement différente ».  Le représentant en a profité pour rappeler l’urgence d’une réforme en profondeur du Conseil de sécurité, avant d’affirmer que l’ajout des changements climatiques au mandat des missions autorisées par le Conseil ne ferait que les surcharger encore plus alors que beaucoup sont déjà soumises à de sérieuses pressions en raison de l’extension excessive de leurs rôles multidimensionnels.  Pour le Brésil, le traitement des changements climatiques dans des enceintes appropriées et, surtout, la fourniture d’engagements financiers dans le cadre de l’Accord de Paris pourraient certainement avoir un impact plus tangible sur le terrain.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a d’abord jugé nécessaire d’accroître et d’améliorer l’accès au financement pour les pays les plus touchés par les changements climatiques.  Pour sa part, le Royaume-Uni travaille à la réforme du système financier international et à l’augmentation des financements publics et privés pour la résilience climatique et la paix, y compris pour les pays inscrits à l’ordre du jour du Conseil. En juillet, il organisera des événements sur le financement du climat au Royaume-Uni et à New York, y compris pour les pays ayant des besoins humanitaires, dans la perspective de la COP28.

Le représentant a aussi appelé à veiller à ce que les facteurs de conflit soient pris en compte dans les actions d’intervention et les efforts d’adaptation contre les changements climatiques.  Enfin, il a suggéré que la réduction des risques liés au climat et aux conflits, ainsi que le système d’alerte précoce, soient intégrés dans les programmes humanitaires, de consolidation de la paix et de développement, conformément au cadre de Sendai. 

M. ZHANG JUN (Chine) a demandé une nouvelle gouvernance climatique mondiale permanente, en appuyant les efforts de l’ONU dans ce domaine et en espérant le succès de la prochaine COP28.  Il a souligné le lien entre changements climatiques et sécurité, tout en prenant note des divergences sur le sujet.  Il a encouragé le Conseil à procéder à une étude contextualisée de ce lien, à la lumière de son mandat, et dans les limites de ses moyens.  Il a pris l’exemple de l’Iraq et d’Haïti, pays où cette corrélation entre climat et sécurité peut se prouver dans une certaine mesure. 

Le Conseil doit aider les États confrontés à des défis sécuritaires et ne pas devenir « un salon où s’entendent de bonnes paroles », a insisté le représentant, qui a ensuite souligné le rôle de chef de file que les pays développés doivent endosser dans la lutte contre les changements climatiques. Enfin, il a fustigé le « protectionnisme vert » prôné par certains pays, le qualifiant de « véritable fléau ».

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a rappelé que les changements climatiques sont responsables de catastrophes climatiques dans le monde, en particulier dans les pays en développement, lesquels ont pourtant moins contribué aux émissions qui sont responsables du réchauffement du climat.  Préoccupé par la façon dont le Conseil se saisit de cette question en mettant en avant notamment les effets multiplicateurs de conflit du climat, le représentant a attiré l’attention sur le rôle des pays contributeurs de contingents dans les opérations de maintien de la paix.  Il a demandé de renforcer les capacités de chaque pays et des institutions de sécurité.  Il a aussi souligné l’importance de la démocratie et l’état de droit. 

Rappelant en outre la proposition du Secrétaire général de créer des systèmes d’alerte précoce, le représentant a plaidé pour que le fonds pour les pertes et dommages décidé lors de la COP27 entre en vigueur dès que possible.  Il a aussi appelé à mobiliser rapidement les 100 milliards de financement climatique promis depuis 2020 à Paris en faveur des pays en développement.  Il a demandé à prendre en compte des instabilités sociales générées par les changements climatiques en mettant l’humain au cœur des approches, et en trouvant des solutions sexospécifiques.  Il a enfin souligné l’importance des organisations régionales, estimant que l’action climatique est une action conjointe qui appelle les pays développés à assurer leur rôle de chefs de file. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que débattre des problèmes mondiaux que les changements climatiques posent à l’humanité est d’une importance fondamentale, en particulier pour les pays en développement. Dans le même temps, le représentant a regretté que les discussions à l’ONU n’insistent pas suffisamment sur le rôle crucial des questions de développement durable dans les mesures de prévention des conflits, ne mettant en évidence que le climat dans un contexte plus large.  Or, la promotion de la croissance économique et du bien-être social et la lutte contre les inégalités sont des éléments essentiels pour bâtir des sociétés résilientes capables de s’adapter efficacement aux défis climatiques, a-t-il fait valoir, ajoutant qu’assurer un développement durable contribue certainement à éliminer les conditions préalables aux conflits. 

Le représentant a jugé que les pays développés sont passés « maîtres dans l’art d’attiser l’alarmisme » face à la « crise climatique ». Ils font des déclarations « populistes » mais, lorsqu’on aborde les mesures concrètes comme le financement du nouveau fonds pour les pertes et dommages et le transfert de technologies, on ne les entend plus, a-t-il accusé.  Il a donc exhorté ces pays à remplir avant tout leurs engagements en fournissant des ressources financières et des technologies aux pays en développement, afin de soutenir leurs efforts d’adaptation et d’atténuation. 

M. Nebenzia a ensuite reconnu que, dans certaines situations nationales et régionales, l’élément climatique peut être un facteur supplémentaire d’aggravation des conflits.  Il a toutefois estimé que le débat sur les changements climatiques « ne relève pas du mandat du Conseil » et ne fait que détourner l’attention des causes premières, souvent socioéconomiques, des conflits.  Le lien direct entre l’agenda climatique et la sécurité « n’est pas étayé scientifiquement », a-t-il insisté, ajoutant à titre de rappel que « des changements climatiques sur la planète Terre se sont produits à toutes les périodes de son existence, que ce soit dans le sens d’une élévation ou d’une baisse de la température ». 

Le représentant a, enfin, appelé à respecter la « division du travail » prévue par la Charte des Nations Unies, sans dupliquer le travail d’outils tels que la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et l’Accord de Paris.  Ces deux mécanismes, ajoutés aux travaux de l’Assemblée générale, du Conseil économique et social et du système des Nations Unies pour le développement, offrent des plateformes fiables pour relever les défis de l’environnement et du développement durable en général, a-t-il conclu. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a fait observer que des preuves scientifiques solides montrent que si les risques liés à la sécurité climatique sont laissés de côté et ne sont pas contrôlés, ils pourraient avoir des conséquences dévastatrices.  Ce constat nécessite donc à son avis un changement de paradigme, car on ne peut plus traiter de la dynamique des conflits et de la fragilité climatique sur des pistes distinctes.  Les régions en conflit sont souvent les plus vulnérables au climat, avec une instabilité encore exacerbée par les chocs climatiques, a-t-elle noté. 

La déléguée a souhaité que les efforts déployés par les missions des Nations Unies dans l’exécution de leurs mandats tiennent davantage compte des conséquences climatiques et environnementales, car celles-ci ont un impact sur les opérations de terrain.  Pour sa part, Malte a maintenu le discours climat-paix-sécurité au cœur de ses priorités du Conseil, a-t-elle relevé.  Le fait que le Conseil se penche sur ces questions ne détourne en aucune façon son attention du Secrétariat de la Convention-cadre sur les changements climatiques ou d’autres organes compétents, mais complète plutôt et renforce leurs rôles distinctifs, a-t-elle argué.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a été d’avis que les changements climatiques contribuent à l’instabilité politique et aux conflits.  Ainsi, dans les régions déjà confrontées à la pauvreté, à une mauvaise gouvernance et à des tensions ethniques, leurs impacts amplifient les conflits en perturbant les moyens de subsistance, en causant une pénurie d’eau et une insécurité alimentaire qui peuvent alimenter les troubles sociaux et accroître le risque de violence et de terrorisme.  De plus, il a fait remarquer que dans un monde interconnecté, les événements d’une région peuvent avoir des répercussions sur d’autres régions, en en déduisant que le Conseil ne peut y rester indifférent.

Constatant que le monde a uni ses efforts pour réduire les émissions de carbone, le délégué a regretté le peu de mesures prises pour réduire la probabilité que les changements climatiques multiplient les menaces.  Il a donc jugé urgent d’aider à améliorer la résilience et la capacité des nations vulnérables déjà directement touchées.  Pour réduire les risques d’instabilité géopolitique liés aux changements climatiques, le délégué albanais a appelé à poursuivre les efforts collectifs pour renforcer la bonne gouvernance, mener à bien la transition énergétique et améliorer la gestion des ressources naturelles, notamment grâce à des financements appropriés.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a constaté que sur les 20 pays les plus touchés par les conflits dans le monde, 12 font partie des plus vulnérables aux changements climatiques et alertent régulièrement sur les effets de ce phénomène sur leur sécurité.  Il a regretté que la communauté internationale reste loin de l’objectif qu’elle s’était fixé en 2009 dans la résolution 281 de l’Assemblée générale, qui appelait les Nations Unies à redoubler d’efforts face aux répercussions des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales.  Le représentant a donc misé sur le Conseil de sécurité pour mieux évaluer, anticiper et prévenir cet impact, et pour que l’ONU agisse sur le terrain.  Pour ce faire, il importe selon lui que les représentants spéciaux transmettent au Conseil des informations précises lors de leurs exposés et présentent des recommandations d’actions ciblées pour certaines zones, en particulier l’Afrique, où des initiatives ambitieuses prennent forme telles que la Grande muraille verte. 

Il a aussi recommandé au Conseil de mettre davantage l’accent sur la prévention des risques en renforçant les mandats des missions de l’ONU, de sorte que celles-ci puissent venir en appui des pays les plus vulnérables et identifier des actions concrètes, comme l’a par exemple fait le Représentant spécial au Soudan du Sud en proposant de faire du Nil un axe démilitarisé et un bien commun. De même, a-t-il poursuivi, le Conseil doit continuer à appuyer le travail de terrain de l’ONU, en particulier au travers des conseillers climat, paix et sécurité déployés auprès des missions, qui accompagnent les pays dans le renforcement de leurs capacités en matière d’évaluation et de gestion des risques.  La France, a-t-il précisé, est mobilisée en ce sens, notamment au bénéfice de la MANUI en Iraq.  Il a aussi encouragé l’ONU, en lien avec les pays contributeurs de troupes, à poursuivre la mise en œuvre de stratégies environnementales au sein des opérations de maintien de la paix, y compris par la mobilisation des énergies renouvelables. Enfin, le délégué a appelé les États Membres à se joindre à l’effort collectif en adhérant au mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies, dont la France copréside avec l’Allemagne le comité de pilotage. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a déclaré que les changements climatiques sont une menace imminente pour nombre de pays et constituent un multiplicateur de risques de conflit.  Le Conseil doit donc agir pour remédier à l’insécurité climatique, a plaidé le délégué. Il l’a encouragé à coopérer à cette fin avec le Conseil économique et social (ECOSOC), les coordonnateurs résidents ou bien encore la Commission de consolidation de la paix.  Il s’est prononcé pour la préservation des démarcations maritimes établies en vertu de la Convention sur le droit de la mer, malgré l’érosion côtière due aux changements climatiques.  Enfin, il a répété que son pays continuera d’œuvrer à renforcer la résilience des groupes de pays vulnérables.

M. PETER SZIJJARO, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a évoqué la guerre régionale qui se déroule dans son voisinage appelant la communauté internationale à sauver des vies et à parvenir à un cessez-le-feu immédiat pour donner une chance aux pourparlers de paix. La solution doit toujours venir de la table des négociations, a observé le Ministre.  Il a rappelé qu’avant cette guerre, le monde vivait déjà à l’ère des menaces et des dangers en raison de l’accélération des changements climatiques, de la pression croissante de la migration et de la menace terroriste.  En raison de la guerre, les céréales exportées des pays en guerre ont diminué, s’est-il inquiété en constatant une déstabilisation des régions déjà fragiles et de l’approvisionnement alimentaire. 

Le représentant a aussi alerté sur le fait que la guerre a ouvert la voie à des idéologies extrêmes.  La guerre en Ukraine provoque également de très graves catastrophes naturelles, a constaté le Ministre en se préoccupant du fait que la plus grande centrale nucléaire d’Europe opère dans des circonstances très risquées.  Pour lui, sans l’énergie nucléaire, la lutte contre les changements climatiques et la protection de l’environnement n’auront aucune chance de réussir.  Il a donc appelé à unir les efforts pour briser ce cercle vicieux.  Si le Conseil n’est pas en mesure de le faire, le monde peut se retrouver facilement dans une crise qui sera totalement insoluble, a-t-il prévenu. 

Mme CATHERINE STEWART, Ambassadrice pour les changements climatiques et Sous-Ministre adjointe à l’environnement et aux changements climatiques du Canada, qui s’exprimait également au nom de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a reconnu que les changements climatiques sont un « multiplicateur de menaces », qui aggrave les risques de sécurité préexistants. L’élévation du niveau de la mer, le réchauffement polaire et les conditions météorologiques de plus en plus imprévisibles ne peuvent être séparés de leurs implications en matière de sécurité, a-t-elle observé, prenant l’exemple de la région du Sahel, où les pressions supplémentaires sur les ressources exacerbent les tensions et les conflits existants.  Pour répondre à ces défis évolutifs, nous devons collectivement mieux évaluer et comprendre les implications des changements climatiques sur la sécurité, notamment la manière dont ils affectent les États fragiles et touchés par des conflits, a-t-elle affirmé, avant d’insister sur les impacts spécifiques de ce phénomène sur les femmes, les jeunes et les populations autochtones. 

Sur cette base, la représentante a souhaité que le Conseil de sécurité continue d’intégrer les risques climatiques dans les mandats et les pratiques de maintien de la paix.  Elle a aussi préconisé que l’ONU évalue dans quelle mesure les différentes formes d’assistance et d’intervention, telles que le soutien à l’adaptation et à la résilience, affectent les résultats en matière de sécurité.  À cet égard, elle a indiqué que le Canada, appuyé par ses alliés de l’OTAN, établira cette année à Montréal un « centre d’excellence sur les changements climatiques et la sécurité ».  Faisant également état des efforts déployés par l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour renforcer la résilience et la sécurité de leur région face aux changements climatiques, la déléguée a appelé à intensifier la coopération internationale pour faire face à cette menace commune. 

Au nom du Groupe arabe, M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a appelé la communauté internationale à aborder les changements climatiques dans un cadre intégré incluant la relation avec la paix et la sécurité.  Il a relevé que les répercussions négatives des changements climatiques contribuent à alimenter les conflits et à augmenter le nombre de déplacés dans de nombreuses régions du monde, comme le Moyen-Orient, le Sahel et la Corne de l’Afrique.  Le représentant a indiqué qu’environ 90% des citoyens des pays arabes vivent dans des pays qui souffrent de pénuries en eau, une situation qui a un impact sur la sécurité alimentaire et sur la sécurité tout court. 

Au vu de ces constats, le groupe arabe appelle à l’action, afin de réduire les défis climatiques relatifs à la paix et à la sécurité.  Cela ne sera possible, a précisé le représentant, que si les engagements financiers pris par les pays développés envers les pays en développement sont respectés, en particulier la promesse de débourser 100 milliards de dollars américains par an pour l’adaptation.  Il a en outre rappelé la décision de créer le fonds sur les pertes et dommages lors de la COP27, tenue en 2022 à Charm el-Cheikh.  Enfin, il a insisté sur le fait que la question climatique doit être traitée selon une approche intégrée, afin de trouver des solutions radicales à ce défi existentiel.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne), au nom du Groupe des Amis du climat et de la sécurité, a rappelé que ce dernier compte 66 États de toutes les régions du monde, unis par une préoccupation commune: les changements climatiques, « le défi majeur de notre époque », qui menacent de plus en plus le développement durable, posant ainsi un sérieux défi à la paix et à la sécurité humaine.  Pour que la prochaine COP28 soit un succès, le Groupe appelle tous les États à rehausser leur ambition sur l’action climatique, tout en admettant qu’il n’est plus possible de prévenir tous les impacts négatifs des changements climatiques, qui agissent comme un multiplicateur de risques, en particulier dans les contextes fragiles.  L’ensemble du système des Nations Unies doit relever ce défi complexe. 

Pour le Groupe, les travaux du Conseil de sécurité « bénéficieraient grandement » de l’examen des conclusions des récentes réunions de la Commission de consolidation de la paix sur différents contextes régionaux spécifiques où les changements climatiques ont un impact direct sur la sécurité et la stabilité.  Le Groupe estime que le Conseil a « un rôle crucial » à jouer, compte tenu de sa responsabilité première dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La représentante a salué les travaux du Groupe informel d’experts des membres du Conseil de sécurité et pris note du leadership de certains des membres élus du Conseil, citant les Émirats arabes unis, Malte, le Mozambique et la Suisse. 

Jugeant toutefois qu’il reste beaucoup à faire au sein du Conseil de sécurité, la représentante a demandé d’envisager une série d’actions « concrètes et tangibles ».  Elle a notamment cité des rapports réguliers du Secrétaire général sur les implications pour la paix et la sécurité des effets néfastes des changements climatiques, la nomination par le Secrétaire général d’un représentant spécial pour le climat, l’intégration systématique des risques climatiques dans les mandats de toutes les missions de maintien de la paix et missions politiques spéciales des Nations Unies et une incitation à ces missions d’améliorer leur empreinte environnementale et à multiplier les actions de gestion environnementale.  Le Groupe souhaite également que le Conseil se réfère aux risques liés aux changements climatiques dans certaines situations nationales ou régionales spécifiques, en particulier dans ses prochaines déclarations présidentielles relatives aux Bureaux des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC) et pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), car cela « correspond également au souhait des pays concernés ».

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a demandé que la question des menaces des changements climatiques soit intégrée dans les programmes de travail du Conseil de sécurité.  L’objectif est de consolider les travaux de la Commission de consolidation de la paix, en vue d’assurer l’efficacité de la médiation et d’établir la paix.  Selon le représentant, les stratégies de réduction de risques de catastrophe dans les opérations de maintien de la paix et les missions de maintien de la paix doivent être mises en œuvre afin de garantir notamment la sécurité alimentaire. Il a aussi recommandé que les économies émergentes reçoivent le financement nécessaire en matière de renforcement de capacités et de transfert de technologies, afin d’être mieux armées face aux changements climatiques.  Les pays développés doivent respecter leurs engagements, notamment dans le cadre du fonds de compensation en matière de pertes et de dommages, a-t-il aussi exigé. 

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a dit avoir entendu le message des pays les plus touchés par les changements climatiques: au lieu de remettre en question le lien entre le climat, la paix et la sécurité, il faut le contrer.  Le représentant s’est réjoui que des États Membres responsables restent déterminés à rechercher la pleine reconnaissance du lien entre climat et sécurité, tout en tenant compte des questions relatives aux changements climatiques dans les efforts de prévention et de règlement des conflits, de même que pour les efforts de consolidation de la paix.  L’Italie, a déclaré le délégué, appuie l’utilisation de systèmes d’alerte rapide liés au climat comme outil de prévention des conflits et de consolidation de la paix ainsi que l’intégration des risques climatiques dans les mandats des missions de maintien de la paix. 

Le délégué a encouragé le système des Nations Unies à poursuivre ses travaux sur le climat et la sécurité.  Il a ajouté que son pays travaille avec le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe et l’Union africaine pour renforcer les systèmes d’alerte rapide et la gestion des risques transfrontières.  Il contribue à la mise en œuvre de la Feuille de route pour l’Afrique pour améliorer la disponibilité, l’accès et l’utilisation de l’information sur les risques de catastrophe.  L’Italie coopère en outre avec le Département de l’appui opérationnel en matière de formation, de renforcement des capacités et d’échange de connaissances dans les domaines de la gestion et de la protection de l’environnement, a encore signalé le représentant. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a appelé à une coopération plus étroite, à travers et au-delà du système des Nations Unies, pour répondre à la menace des changements climatiques.  Dans ce cadre, il a jugé crucial de tirer efficacement parti des outils existants, tels que le mécanisme de sécurité climatique, et de renforcer la collaboration entre la Commission de consolidation de la paix et le Conseil de sécurité.  Pour le représentant, il faut également que les risques liés au climat figurent explicitement dans tous les mandats de consolidation de la paix des Nations Unies. 

Par ailleurs, le représentant a jugé important d’aborder les risques liés à l’eau dans les efforts de prévention, de règlement des conflits et de consolidation de la paix.  Nous devons prendre des mesures décisives pour protéger les ressources en eau et les infrastructures pendant et après les conflits armés, a-t-il plaidé, jugeant à cet égard que la récente attaque contre le barrage de Kakhovka, en Ukraine, viole de manière flagrante le droit international humanitaire.  La destruction de cet ouvrage a non seulement mis en danger des milliers de civils, mais a aussi causé de graves dommages à l’environnement, a dénoncé le représentant.  Enfin, après s’être prononcé pour l’intégration d’une perspective de genre dans les réponses climatiques, il a indiqué que son pays, en tant que membre nouvellement élu du Conseil, soutient le traitement par cet organe des risques de sécurité liés au climat. 

Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a jugé crucial que le Conseil de sécurité reconnaisse le lien grandissant entre les changements climatiques et la paix et la sécurité internationales.  Selon elle, continuer de tenir ce genre de débat sur cette thématique permettra de lui donner la visibilité requise.  Elle a expliqué qu’en Jordanie, la pénurie croissante d’eau amplifie la pression sans précédent sur les infrastructures hydrauliques causée par l’afflux de réfugiés de pays voisins.  Elle a invité le Conseil de sécurité à renforcer les initiatives existantes au sein du système des Nations Unies, comme l’initiative sur les systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques dont les évaluations complètes des risques pourraient servir de points de référence pour contribuer à la sécurité climatique.  Elle a aussi souhaité l’intégration d’experts en sécurité climatique dans les travaux des missions de maintien de la paix.  La déléguée a souligné que la Jordanie, le deuxième pays le plus pauvre en eau au monde, connaît une menace imminente en matière de sécurité à cause des changements climatiques.  C’est pourquoi la représentante a appelé le Conseil à saisir cette opportunité pour utiliser la coopération sur le climat comme moyen de promouvoir la paix et la sécurité internationales.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a évoqué l’exploitation historique, issue de la colonisation, des populations paupérisées, touchées de plein fouet par les changements climatiques.  Néanmoins, selon elle, bien peu de preuves existent pour faire un lien définitif entre changements climatiques et insécurité.  Sur ce point, la représentante a mis en garde le Conseil contre les « simplifications », qui pourraient finalement saper la cause de la paix et de la justice. 

Le Conseil de sécurité a envoyé des missions de maintien de la paix en invoquant le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies: il faudrait qu’il s’abstienne d’invoquer les changements climatiques pour de prochaines interventions, a poursuivi la représentante.  Il faut, en revanche, faire nettement plus d’efforts en matière d’anticipation, d’adaptation, de financement, de transfert des technologies et de renforcement des capacités, a-t-elle élaboré.  Enfin, elle a mis en garde contre les tentatives de certains pays de prendre des mesures unilatérales sous couvert d’aide à la lutte contre les changements climatiques.

M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a salué la tenue de ce débat, souhaitant que l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales soit mieux appréhendé par les Nations Unies et par le Conseil de sécurité.  Mettant l’accent sur les conséquences pour les personnes qui vivent dans des situations de fragilité, de conflit et de violence, il a rappelé le projet de résolution présenté en décembre 2021 par l’Irlande et le Niger, et soutenu par 113 États Membres, qui répondait à la nécessité de mieux prendre en compte l’impact sécuritaire des changements climatiques.  Il a dit regretter « fortement » qu’il n’ait pas pu être adopté à cause du veto de la Russie, avant d’appeler à « travailler ensemble » et à agir « maintenant ». 

Le délégué a détaillé trois priorités, la première étant la prise en compte des changements climatiques dans la médiation et la prévention des conflits.  Il a fait remarquer que les ressources naturelles sont en cause dans beaucoup de conflits, une situation aggravée par les changements climatiques.  Il a cité l’exemple de la région du Sahel, où le Luxembourg est activement engagé en faveur de conventions locales pour la gouvernance intercommunautaire, inclusive et durable des ressources naturelles.  Il a ajouté que son pays soutient un programme mis en œuvre par le European Institute of Peace dans la région du Liptako-Gourma, à la frontière entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, qui vise à mieux tenir compte des questions foncières et de la gouvernance des ressources naturelles pour résoudre et prévenir les conflits.  Sa deuxième priorité étant le renforcement des capacités et de l’expertise sur le terrain, il a dit soutenir les initiatives liées au climat prises par les missions politiques spéciales, les opérations de maintien de la paix et les envoyés spéciaux ainsi que par les départements et agences des Nations Unies.  Il a salué le rôle clef que joue le mécanisme de sécurité climatique à cet égard. Enfin, le délégué a plaidé pour la nomination par le Secrétaire général d’un représentant spécial pour le climat et la paix et la sécurité.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a déclaré que le Conseil devait donner la priorité au lien entre le climat, la paix et la sécurité.  Il faut affermir les capacités de l’ONU sur la question et prendre en compte le lien entre les changements climatiques et la sécurité. Les missions de maintien de la paix doivent être dotées de personnel formé dans ce domaine et d’équipes en capacités d’analyse pour s’adapter aux changements climatiques. 

Le représentant s’est dit favorable à la nomination d’un envoyé spécial pour le climat et la sécurité.  Il a demandé à réfléchir aux voies juridiques utiles pour traiter des effets des changements climatiques et protéger le climat et l’environnement.  Il s’est félicité en ce sens de la saisine par l’Assemblée générale de la Cour internationale de Justice en vue d’un avis consultatif sur la question.  Pour le représentant, il est essentiel de désigner les dommages étendus ou durables causés à l’environnement comme un crime, après s’être entendu sur une définition commune de l’environnement. 

Soulignant le caractère transfrontalier des changements climatiques, le représentant a insisté sur la nécessité de renforcer les partenariats en lien avec la paix et la sécurité, notamment avec des organisations régionales. Il s’est félicité du déploiement de conseillers climat dans des missions régionales de l’ONU, comme le BRENUAC ou l’UNOWAS.  Ces partenariats permettraient aussi de réduire l’empreinte environnementale des missions de paix de l’ONU, a-t-il estimé. 

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) a souligné l’évidence du lien entre le climat et la sécurité.  Il a observé que les changements climatiques se sont transformés en problèmes multiples ayant des effets sur l’environnement, la société et l’économie. Sur le plan sécuritaire, les changements climatiques deviennent des multiplicateurs de risques et peuvent intensifier les conflits existants, a constaté le représentant.  Ils peuvent aussi rendre l’instabilité sociale et politique plus complexe et, plus grave encore, faire le lit du terrorisme.  Ils peuvent par ailleurs provoquer des conflits internationaux liés à la rareté des ressources, voire inverser les efforts de maintien de la paix de certains pays qui sortent à peine d’un conflit, a-t-il averti, appelant le Conseil de sécurité à honorer sa responsabilité première et à faire davantage pour promouvoir cette question. 

Plus largement, le Conseil devrait prendre des mesures globales pour lutter contre les causes profondes des conflits et intégrer systématiquement les risques climatiques dans les mandats des opérations de maintien de la paix, a estimé le représentant.  Il importe en outre que le Conseil coopère avec tous les mécanismes traitant des questions climatiques, notamment la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris, ainsi qu’avec les organisations régionales, a poursuivi le représentant, qui y a vu un moyen de prendre de meilleures décisions en vue d’une riposte efficace. 

M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a appelé à davantage de synergies au sein des Nations Unies pour faire face au défi des changements climatiques.  Il a aussi plaidé pour des mesures tangibles qui vont au-delà de la rhétorique et qui permettent de soutenir les pays les plus vulnérables.  Le représentant a invité les opérations de maintien de la paix des Nations Unies à réduire leur empreinte environnementale dans les pays hôtes. En outre, il a appelé le Conseil à donner aux soldats de la paix des capacités appropriées pour faire face aux changements climatiques.  Pour le représentant, il est tout aussi important de renforcer les partenariats, y compris au niveau régional. 

Mme X (Colombie) a appelé à une paix remettant la planète au cœur de l’action collective, alors que les changements climatiques risquent d’accroître les effets des conflits dans un effet multiplicateur.  Pays en paix, la Colombie veut mettre un terme à la perte de biodiversité, sachant que l’adaptation aux changements climatiques nécessite davantage de ressources financières, a expliqué l’oratrice.  Elle a en effet estimé qu’il faut à la fois contrer les menaces présentes et prévenir les menaces futures.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a souligné les conséquences sécuritaires des changements climatiques, telles que les sécheresses dans la Corne de l’Afrique qui peuvent créer des conflits, entre fermiers et éleveurs par exemple. Mais fondamentalement, a-t-il ajouté, il nous fait comprendre que les changements climatiques créent en eux-mêmes de l’insécurité et constituent donc une menace à la paix et la sécurité. Inquiet des prévisions sur la hausse des températures mondiales, qui va probablement dépasser 1,5 degrés Celsius au cours des cinq prochaines années, le délégué a indiqué que son pays s’est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici à 2030, par rapport à 1990, et à atteindre le net zéro d’ici à 2050.  Il a appelé les plus gros émetteurs à faire de même. S’inquiétant en particulier pour les pays insulaires volcaniques ou composés d’atolls, il a évoqué le cas d’inondation partielle de territoire d’un État et de relocalisation de son peuple: cela ne devrait pas changer, en droit international, la présomption générale que les peuples concernés peuvent exercer leur droit à l’auto-détermination.

Le Liechtenstein a été fier de faire partie du groupe de pays soutenant la résolution de l’Assemblée générale demandant un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur l’obligation des États en lien avec les changements climatiques, a poursuivi le délégué.  Il a salué cette décision historique et a espéré que la CIJ fournirait des directives claires sur ces questions.  S’agissant du Conseil de sécurité, le représentant a suggéré qu’il travaille avec la Commission de consolidation de la paix pour garantir une approche du risque climatique qui soit systématique et préventive.  Le Conseil, a-t-il ajouté, peut aussi faire fond sur les travaux du Groupe informel d’experts sur le climat et la sécurité.  Il a regretté que le projet de résolution de l’Irlande et du Niger, en décembre 2021, n’ait pas été adopté à cause du veto russe.

M. AMIR SAIED IRAVANI (République islamique d’Iran) a déclaré que les défis environnementaux que son pays doit relever sont aggravés par les sanctions imposées par les États-Unis, qui empêchent les investissements dans les sources d’énergies renouvelables et l’accès aux technologies plus durables.  Le représentant a estimé qu’en raison des sanctions le droit de la population iranienne à vivre dans un environnement sain est sapé.  L’Iran reste néanmoins fidèle à ses engagements, a-t-il affirmé, en mentionnant la tenue en septembre prochain à Téhéran d’une conférence sur la lutte contre les tempêtes de sable.  Enfin, il a exhorté les pays développés à s’acquitter de leurs obligations en vertu de l’Accord de Paris.  Les sanctions, qui entravent les efforts d’atténuation des pays en développement face aux changements climatiques, doivent être supprimées, a-t-il réaffirmé en conclusion.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a noté que les changements climatiques ont des énormes conséquences sur le développement.  Toutefois, a-t-il dit, ce sont avant tout des multiplicateurs de risques pour la sécurité humaine, comme le démontre le nombre croissant des personnes affectées et des déplacements de population liés au climat.  De fait, bien comprendre les effets négatifs des changements climatiques sur la paix et la sécurité est nécessaire pour prendre des mesures efficaces, a souligné le représentant, non sans rappeler que son pays est en première ligne face à cette menace.  En plus des inondations, des cyclones et des sécheresses de plus en plus fréquents, les changements climatiques ont des répercussions profondes sur l’alimentation, l’énergie, l’eau et la sécurité sanitaire, a fait remarquer le délégué, avant de saluer le fait que l’Assemblée générale ait demandé un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les effets juridiques des changements climatiques.  Il a d’autre part averti que, dans les pays accueillant des opérations de maintien de la paix ou des missions politiques, les changements climatiques peuvent empêcher des transitions sans heurt et nuire aux efforts de consolidation de la paix. Il est donc essentiel que la communauté internationale appuie les autorités nationales concernées dans leurs efforts d’adaptation et d’atténuation, a-t-il conclu, en souhaitant que le fonds mondial pour les pertes et les dommages, créé lors de la COP27 en Égypte, devienne rapidement opérationnel. 

Mme NJAMBI KINYUNGU (Kenya) a plaidé pour que toutes les ressources disponibles soient orientées vers une approche multidimensionnelle de l’action climatique, avec l’ONU au centre.  Elle a invité les membres du Conseil à convenir d’un lien entre le climat, la paix et la sécurité, et de dépasser les divisions.  Ce consensus non seulement incitera à une action urgente, mais favorisera également des conversations soutenant le maintien et la consolidation de la paix face aux crises environnementales et climatiques, a-t-elle argué.  La représentante a appelé à tirer parti de l’expertise du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) afin de « coordonner notre résilience climatique collective et soutenir nos efforts vers une économie verte ».  Elle a terminé en invitant la communauté internationale à Nairobi pour le premier Sommet sur l’action climatique en Afrique, prévu en septembre 2023.

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a fait remarquer qu’en tant que petite nation insulaire à faible élévation, son pays est particulièrement vulnérable aux effets des changements climatiques, avec même un risque pour sa survie.  Il a cité notamment les vagues de chaleur récentes et l’élévation du niveau de la mer, des phénomènes qui peuvent faire perdre du territoire aux pays comme le sien et qui font peser des risques de conflit. Il s’est donc dit favorable à l’examen de cette question par le Conseil de sécurité, en détaillant la façon dont, à son avis, le Conseil devrait agir dans ce domaine.  Il a souhaité tout d’abord qu’il adopte une approche multidimensionnelle et holistique s’agissant de la sécurité climatique, faisant observer que les changements climatiques peuvent faire augmenter le risque de famine et de malnutrition de 20% d’ici à 2050, selon le PAM.  Il a aussi suggéré au Conseil d’encourager les pays à tenir leurs engagements dans la lutte contre les changements climatiques, dont les contributions déterminées au niveau national et les stratégies de développement urbain à faibles émissions.  Le délégué a assuré que Singapour assume sa part du contrat, avec pour objectif des émissions net zéro d’ici à 2050.  Enfin, il a recommandé au Conseil de sécurité de promouvoir un soutien renforcé aux pays en développement vulnérables, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID), afin que ceux-ci soient en mesure de renforcer leur résilience et leur adaptation.  Cela inclut des investissements dans l’innovation et les technologies, a-t-il précisé.

M. PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) a insisté sur l’importance du financement de la lutte contre les changements climatiques, encore insuffisant au niveau mondial, en particulier pour les pays en développement.  À cet égard, la raison pour laquelle les changements climatiques affectent la sécurité internationale réside précisément dans le fait que « les flux financiers n’ont pas été suffisants » pour prévenir à temps les conséquences du réchauffement de la planète, a estimé le représentant.

Le représentant a réitéré que les initiatives relatives aux changements climatiques et à la sécurité internationale doivent prendre en compte la perspective des communautés affectées: communautés locales, autochtones et organisations de la société civile.  En première ligne face au dérèglement climatique, elles disposent de moins de ressources pour s’en protéger, a-t-il souligné. 

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a salué les progrès réalisés en matière de lutte contre les changements climatiques dans plusieurs mandats de maintien et de consolidation de la paix des Nations Unies et s’est dit satisfait que le Conseil de sécurité ait intégré le langage des changements climatiques dans les résolutions concernant les opérations de paix.  Le travail en ce sens doit se poursuivre, a-t-il indiqué. Le représentant a ensuite rappelé qu’en plus de la détérioration de la sécurité causée par le climat, on pouvait observer des catastrophes environnementales causées par l’homme et liées aux conflits en cours « ou simplement utilisées comme arme et tactique de guerre ».  Il a cité en exemple la destruction du barrage du Dniepr à Nova Kakhovka, en Ukraine et a rappelé la menace pesant sur la centrale nucléaire de Zaporijia.

Le Conseil de sécurité doit identifier de toute urgence les mesures supplémentaires nécessaires pour que les missions de maintien de la paix et des missions politiques spéciales planifient et traitent correctement les risques de sécurité liés au climat dans le contexte des missions, a affirmé le représentant.  Il a jugé évident que l’accès à l’eau et à l’énergie sur le terrain, les méthodes d’opération et la mobilité des troupes de l’ONU seront de plus en plus affectées par les effets des changements climatiques.  Il a aussi jugé essentiel de former les soldats de la paix de l’ONU au lien entre climat et sécurité.  La Pologne appuie fermement les efforts visant à renforcer la résilience opérationnelle de ces missions face aux impacts climatiques afin de mettre en œuvre efficacement leur mandat, avec un coût minimal pour l’environnement. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a appuyé l’idée d’encourager les représentants spéciaux des Nations Unies à présenter au Conseil de sécurité des informations liées au climat, de renforcer les mandats de toutes les missions par un aspect « évaluation et gestion des risques liés au climat » et de continuer à appuyer l’ONU sur le terrain.  Il a aussi soutenu l’idée de demander au Secrétaire général de présenter régulièrement des rapports au Conseil de sécurité et celle de nommer un envoyé spécial des Nations Unies sur le climat et la sécurité.  Le climat et l’environnement, a souligné le représentant, sont une partie intégrante des priorités du partenariat stratégique 2022-2024 entre l’Union européenne et l’ONU pour les opérations de paix et la gestion des crises. 

L’Union européenne a d’ailleurs commencé à déployer des conseillers de l’environnement dans toutes ses 22 missions et opérations militaires dont 13 travaillent aux côtés de celles des Nations Unies.  N’oublions pas, a prévenu le représentant, que les forces armées doivent aussi contribuer à l’objectif zéro net.  L’Union européenne entend, dans ce cadre, mener une communication conjointe sur le climat et la sécurité et souhaite une collaboration renforcée avec le système des Nations Unies, l’OSCE et l’OTAN.  Le représentant a dit attendre une COP28 ambitieuse qui conduise le monde vers la transition énergétique et qui maintienne en vie l’objectif de 1,5 degré Celsius.

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a souligné que le lien mis sur le climat, la paix et la sécurité a négligé l’Amérique latine et les Caraïbes. C’est pourtant une région où les défis climatiques ont des implications potentielles en matière de sécurité, a fait observer la représentante, qui a évoqué le cas du « couloir sec » d’Amérique centrale, qui fait face à des saisons des pluies retardées et irrégulières, des sécheresses prolongées, des ouragans, des pertes de récoltes importantes et des niveaux croissants d’insécurité alimentaire.  Ces catastrophes provoquent des tensions sur la gestion et l’accès à l’eau et à la terre. 

La représentante a demandé une approche globale qui combine des pratiques de gestion durable des terres, une agriculture résiliente au climat, un accès équitable aux ressources en eau.  Il faut s’attaquer aux causes profondes de la rareté des ressources et des disparités sociales, a-t-elle ajouté.  Elle a également souligné le rôle du mécanisme pour le climat et la sécurité en tant que plateforme de coordination des opérations des Nations Unies. Les femmes et les enfants, leur protection et leur autonomisation ne doivent pas être négligées, a-t-elle ajouté, en demandant que soient collectées des données fiables ventilées par sexe. 

M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark), s’exprimant au nom des pays nordiques (Finlande, Suède, Norvège, Islande et Danemark), a souhaité que la question climatique soit intégrée dans le mandat des missions de maintien de la paix. Il a souhaité également que la Commission de consolidation de la paix puisse partager son expérience avec le Conseil de sécurité sur l’interaction entre climat et consolidation de la paix, en prenant comme exemples le Sahel et les îles du Pacifique.  Le représentant a souligné que les femmes sont les plus affectées par les conflits liés aux changements climatiques.  Il faut donc tenir compte du programme sur les femmes et la paix et la sécurité, ainsi que de celui sur les jeunes. 

Certains se demandent sur le Conseil est l’instance la mieux placée pour traiter de la question, a reconnu le représentant.  Pour les pays nordiques, le Conseil peut faire sa part en accélérant par exemple la transition énergétique des opérations de maintien de la paix dans un contexte où seuls 6% des sources d’énergie de ces opérations viennent de sources renouvelables.  Il faut absolument insister pour « verdir le bleu », a-t-il plaidé. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a énuméré les impacts négatifs des changements climatiques en particulier pour les petits États insulaires en développement (PEID) et leurs populations.  Il a ensuite demandé à la communauté internationale de consolider le multilatéralisme et la coopération internationale pour relever le défi des changements climatiques et de leurs effets négatifs sur la sécurité humaine et sur la stabilité à long terme des États, des communautés et de la planète. Il faut respecter la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris en tant que pierre angulaire de la gouvernance climatique mondiale, a-t-il insisté.  Le représentant a en outre appelé les pays développés à verser les 100 milliards de dollars par an, reconstituer le Fonds vert pour le climat et honorer leurs engagements financiers en matière d’adaptation en faveur des pays en développement. 

Les opérations de maintien et de consolidation de la paix doivent réduire leur empreinte environnementale, notamment grâce à une meilleure gestion environnementale sur le terrain, a poursuivi le représentant.  Il a par ailleurs demandé d’adopter des politiques qui permettront aux sociétés et aux communautés de surmonter les conflits et de mieux se préparer aux effets négatifs des changements climatiques.  La Thaïlande soutient la mise en œuvre effective de la Stratégie environnementale pour les opérations de paix et des mandats relatifs à l’environnement.  Quant au Conseil de sécurité, il devrait se concentrer sur les risques induits par les changements climatiques dans des contextes de conflit, afin de mobiliser davantage de ressources et d’appui de la part du système des Nations Unies et de la communauté internationale en faveur des pays en conflit. 

Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a jugé crucial que le système des Nations Unies, en tant que plateforme la mieux à même de promouvoir une réponse coopérative et coordonnée, s’emploie à répondre davantage aux implications sécuritaires des changements climatiques.  En particulier, il est essentiel, selon elle, que le Conseil continue d’œuvrer en faveur d’une approche globale pour faire face aux impacts et aux risques sur la sécurité, tout en développant des mécanismes d’alerte précoce sur la base des informations générées par le mécanisme de sécurité climatique.  Elle a souhaité à cet égard que le Conseil intègre davantage les questions de sécurité liées au climat dans ses résolutions.  La représentante a d’autre part plaidé pour un alignement des efforts de consolidation de la paix et de développement pour promouvoir la résilience et l’adaptation aux changements climatiques.  Plutôt que de seulement gérer les risques, nous devrions utiliser les outils dont nous disposons pour promouvoir et maintenir la paix, a-t-elle professé, estimant à cet égard que le Fonds pour la consolidation de la paix joue un rôle important en apportant des financements climatiques aux zones touchées par des conflits.  Enfin après avoir rappelé que le rapport du Secrétaire général sur « Notre Programme commun » recommande que l’ONU renforce son soutien aux capacités régionales pour faire face aux effets des changements climatiques sur la sécurité, elle a dit attendre avec intérêt la note d’orientation sur le « Nouvel Agenda pour la paix », qui pourrait donner un nouvel élan aux discussions du Conseil sur ce sujet.

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a appelé à urgemment intégrer le sujet dans les politiques de l’Organisation, et à agir pour protéger les communautés les plus vulnérables des petits États insulaires en développement (PEID), ainsi que celles des pays de faible élévation.  Ces problèmes liés aux changements climatiques menacent l’identité, voire l’existence, de plusieurs États Membres, a prévenu le délégué roumain. Il a rappelé que Vanuatu avait demandé à la Cour internationale de Justice (CIJ) de travailler sur les implications juridiques des changements climatiques.  L’orateur a appelé le Conseil de sécurité à agir enfin dans le cadre de ces questions.

M. BASSAM SABBAGH (Syrie) a suggéré de mettre en œuvre la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques pour atténuer les effets néfastes du réchauffement climatique dans les pays en développement les plus touchés. Pour le représentant, les actes terroristes des milices et des groupes terroristes dans son pays provoquent des dégâts environnementaux, polluent l’air et les eaux, affectent la santé des populations et impactent négativement les secteurs économiques et sociaux.  Il a aussi dénoncé les mesures coercitives unilatérales imposées par certains pays, qui, a-t-il affirmé, empêchent de protéger l’environnement, de lutter contre les changements climatiques et d’assurer un développement durable.  Il a plaidé pour une action mondiale afin de réduire les effets négatifs des changements climatiques sur la paix, la sécurité et le développement durable. 

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a jugé urgent de se pencher sur les questions climatiques, compte tenu de leur effet démultiplicateur des crises existantes, notamment dans les zones fragiles où les gouvernements ont des ressources limitées pour y répondre.  Face à cette menace, il y a lieu d’aider les plus vulnérables et de sauver des vies, a-t-elle affirmé, rappelant au passage que son pays est extrêmement vulnérable aux variations du climat.  Dans ce contexte, le Guatemala appuie l’idée selon laquelle les questions climatiques doivent être traitées dans le cadre du pilier paix et sécurité de la Charte des Nations Unies.  La représentante a appelé l’ONU à assumer le rôle de chef de file sur ces questions et se doter des outils nécessaires pour répondre à des situations mettant en péril le bien-être des individus.  Mais il faut aussi des perspectives à long terme pour faire face aux risques, avant qu’ils ne débouchent sur une crise. 

Compte tenu de sa responsabilité principale, le Conseil de sécurité doit intégrer dans ses évaluations les questions de sécurité climatique, a encore préconisé la représentante, pour qui l’initiative du Secrétaire général en faveur d’alertes précoces pour tous est une proposition utile.  Le Guatemala est heureux de figurer parmi les premiers pays où ce dispositif sera mis en œuvre, a-t-elle indiqué, avant d’inviter le Conseil à se pencher sur la question des migrations climatiques d’une façon interdisciplinaire. 

M. MAX RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée), au nom du Forum des îles du Pacifique, a rappelé que les changements climatiques sont considérés comme la plus grande menace existentielle à laquelle est confronté le continent Pacifique bleu.  Le Conseil de sécurité a un rôle essentiel à jouer et doit aligner son mandat sur celui d’autres organes des Nations Unies, notamment la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, a affirmé le représentant, pour qui cet alignement est, en fait, en cours.  Le représentant a en outre rappelé que le Groupe des amis du climat et de la sécurité, actuellement coprésidé par Nauru, compte plus de 60 membres.  Il a salué la possibilité de veiller à ce que le futur « Nouvel Agenda pour la paix » intègre les changements climatiques en tant que menace pour la sécurité. 

Le maintien de la paix, la consolidation de la paix et la résolution des conflits doivent tous être sensibles au climat, a poursuivi le représentant, qui a appelé le Conseil de sécurité à nommer un rapporteur spécial chargé de produire un examen régulier des menaces à la sécurité mondiale, régionale et nationale causées par les changements climatiques.  Jugeant « aussi complexes qu’indéniables » les implications des changements climatiques pour la paix et la sécurité, il a conclu en demandant que le Conseil et le système multilatéral dans son ensemble agissent sur ces questions de toute urgence. 

M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a souhaité que le Conseil de sécurité intègre une dimension climatique dans tous ses mandats de maintien de la paix, en particulier pour les missions opérant dans des lieux très vulnérables aux changements du climat.  À cet égard, il a exprimé son soutien aux efforts du Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix (DPPA) et du Département des opérations de paix (DPO) visant à initier le personnel de terrain aux concepts de climat, de paix et de sécurité.  Il importe également d’intégrer ces concepts aux programmes sur les femmes et les jeunes, et de protéger les défenseurs de l’environnement, a plaidé le représentant, appelant en outre la Commission de consolidation de la paix et le Fonds de consolidation de la paix à soutenir les partenariats noués dans sa région avec les organisations de femmes et le Groupe de femmes d’influence d’Asie centrale. 

Pour le représentant, l’action autour des changements climatiques peut servir de plateforme pour les efforts de consolidation de la paix et de résilience, mais aussi pour la réalisation du Programme 2030, à condition de s’appuyer sur des cadres, des indicateurs et des critères développés collectivement.  Le Kazakhstan, qui subit de plein fouet les conséquences néfastes de ces changements, collabore ainsi avec ses voisins pour en atténuer les conséquences, notamment dans le cadre du Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral.  Il propose de créer à Almaty un bureau de projet des pays d’Asie centrale sur le climat et l’énergie verte, et d’organiser en 2026 un sommet régional sur le climat. 

Pour M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie), si les changements climatiques peuvent mener à la guerre, les guerres, elles, entravent la possibilité d’un avenir durable. La destruction d’un barrage dans la région de Kherson en Ukraine par la Fédération de Russie en est l’exemple le plus dévastateur, en ayant provoqué une nouvelle crise humanitaire, mais aussi un désastre environnemental, dont les proportions sont peu à peu révélées, a accusé le représentant.  « La nature est elle aussi victime de la guerre menée par la Russie », a-t-il ajouté. 

La Lettonie, qui a coparrainé la résolution de l’Assemblée générale demandant un avis consultatif à la CIJ sur les changements climatiques, estime qu’en intégrant les considérations relatives aux changements climatiques dans ses efforts de prévention et de résolution des conflits, le Conseil de sécurité deviendra plus efficace.  Les missions qu’il mandate devraient contribuer au renforcement de la résilience, a ajouté le représentant.  Enfin, il a estimé important de « verdir » l’action des Casques bleus par des pratiques environnementales saines, afin de réduire l’empreinte environnementale des activités de maintien de la paix.

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a noté les progrès accomplis dans la reconnaissance du lien entre le climat et la paix et la sécurité, qui a été pris en compte dans plusieurs mandats de maintien de la paix.  Le Conseil n’a toujours pas les outils nécessaires pour aider les pays et régions vulnérables aux changements climatiques, a-t-il toutefois relevé.  De son avis, l’heure est vraiment venue que le Conseil demande au Secrétaire général un rapport sur les risques que font peser les changements climatiques sur la paix et la sécurité, qui pourrait permettre de planifier des mesures et d’identifier les régions devant faire l’objet d’une alerte précoce.  Le délégué a aussi plaidé pour des ressources humaines et financières plus grandes, dans les missions de paix, pour gérer les questions liées au climat, et notamment pour avoir suffisamment de conseillers sur le climat, la paix et la sécurité.  Le représentant a enfin fait état des efforts de son pays pour contribuer à tous les niveaux, citant par exemple la plateforme pour l’hydrogène non polluant développée par la République de Corée, pour que ce soit une ressource du futur.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a axé son intervention sur le financement des mesures d’atténuation aux changements climatiques.  Rappelant que la cinquième Conférence sur les pays les moins avancés (PMA) a été organisée à Doha, la représentante a fait valoir qu’à sa suite, le Qatar avait investi 60 millions de dollars pour soutenir ses activités d’atténuation dans les PMA.  Cette action s’intègre dans une démarche globale et stratégique du Qatar pour renforcer la lutte contre les changements climatiques à l’échelle mondiale, a-t-elle expliqué. 

Le Qatar dispose d’une longue histoire d’appui aux efforts internationaux pour lutter contre les changements climatiques, dont l’un des jalons a été l’accueil de la COP18, a poursuivi la représentante qui a souhaité que des mesures ambitieuses soient prises lors de la COP28.  La dernière coupe du monde de football, organisée au Qatar l’an dernier, a été la première sans émission de carbone, a-t-elle assuré en conclusion. 

Mme LAURA OLSON, de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), a rappelé que 90% de toutes les catastrophes actuelles sont liées au climat et aux conditions météorologiques et que les conséquences de la crise climatique aggravent d’autres crises et annulent les gains de développement, affectant ainsi la paix et la sécurité mondiales. Elle a appelé à concentrer les efforts sur les communautés les plus touchées et les plus à risque, en particulier celles qui se trouvent dans des contextes fragiles.

S’il n’existe pas de solution unique pour réduire les risques climatiques, la FICR propose trois changements.  Il faut investir au niveau communautaire dans la réduction des risques de catastrophe à grande échelle, l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques. Il faut ensuite combler les lacunes de financement en adoptant une approche plus intégrée du financement humanitaire, du développement, du climat et de la paix, qui mette les besoins des communautés au centre.  Il faut enfin intensifier les systèmes d’alerte précoce et d’action précoce, ce qui implique de donner aux organisations locales un accès plus direct au financement et aux processus décisionnels. 

La déléguée a appelé tous les acteurs de l’humanitaire, du développement, du climat ou de la paix à travailler ensemble pour à la fois répondre aux besoins immédiats et renforcer la résilience à long terme, l’objectif étant de prévenir et d’atténuer les souffrances humaines et de contribuer au maintien de la dignité humaine et de la paix dans le monde.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, de l’Union africaine, a rappelé que l’Afrique est l’un des continents les plus touchés par les changements climatiques tout en étant le moins contributeur aux émissions de gaz à effet de serre.  Énumérant les effets néfastes de ce fléau, elle a parlé de défi majeur entravant les efforts africains visant à faire taire les armes et à réaliser l’Agenda 2063.  Le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a souligné la nécessité d’un lien éclairé entre la sécurité climatique et l’Afrique, a-t-elle indiqué, ajoutant que le risque climatique est un multiplicateur de menaces à la paix et à la sécurité.  En matière de prévention, elle a dit que la Commission de l’Union africaine intègre les changements climatiques dans toutes ses activités.  S’agissant de la perspective sexospécifique, elle a souligné la nécessité urgente d’une approche soucieuse de l’égalité des sexes dans les efforts d’atténuation des effets des changements climatiques et ceux de maintien de la paix.  En outre, elle a demandé d’augmenter le financement de la lutte contre les changements climatiques, afin de pouvoir atteindre les objectifs ambitieux énoncés dans l’Accord de Paris.

M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie) a souligné que la Corne de l’Afrique est l’une des régions les plus frappées par des sécheresses et des inondations sans précédent.  Toutefois, discuter des conséquences des changements climatiques sous l’angle politique et sécuritaire ne contribuera pas à la recherche de solutions, a estimé le représentant, arguant qu’une telle démarche ne peut que compromettre le consensus autour de la Convention-cadre, soumettre les efforts de développement et l’utilisation des ressources naturelles à des considérations sécuritaires inutiles, faire des victimes climatiques le problème principal, retirer aux pollueurs leur responsabilité et la déporter vers les pays et les communautés en conflit. 

La question des déplacés climatiques est une question socioéconomique qui échappe au mandat du Conseil de sécurité.  Il nous faut, a dit le représentant, une action climatique visant la baisse des émissions, le respect des engagements financiers pour l’atténuation et la résilience et des investissements dans les systèmes d’alerte rapide.  Les entités des Nations Unies doivent appuyer, de manière décisive, des initiatives telles que la Grande muraille verte ou celle de l’Éthiopie elle-même qui a conduit à la plantation de milliards d’arbres.  Le Conseil, a conclu le représentant, doit résister à la tentation de s’immiscer dans les discussions sur les changements climatiques.

M. EOGHAN MCSWINEY (Irlande) a rappelé que les conséquences des changements climatiques sont encore plus graves et profondes quand elles concernent des situations de fragilité et de conflit.  S’il s’est ensuite félicité que le Conseil de sécurité ait reconnu les effets néfastes des changements climatiques sur la dynamique des conflits dans un nombre croissant de mandats de maintien de la paix et de missions politiques spéciales, le représentant a néanmoins jugé qu’il devait faire davantage pour mieux comprendre et traiter les risques de sécurité liés au climat dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Ce n’est pas un hasard, a-t-il ajouté, si 8 des 15 pays les plus vulnérables aux changements climatiques accueillent des opérations de paix des Nations Unies et si 80% des Casques bleus des Nations Unies actuellement déployés le sont dans ces pays.

Là où les changements climatiques sont un facteur d’aggravation de l’instabilité et de sape de la paix et de la sécurité, le Conseil a le devoir d’utiliser tous les outils à sa disposition pour y faire face, a asséné le représentant, pour qui, en faisant moins, le Conseil trahit la responsabilité qui lui a été confiée par les États Membres.  Il a plaidé pour une approche globale et collaborative qui donne la priorité à la prévention, à la résilience, à la coopération internationale et à la résolution des conflits. 

Le représentant a rappelé que durant son récent mandat de membre élu du Conseil, l’Irlande s’était engagée, avec le Niger, « l’un des pays les plus touchés par les risques de sécurité liés au climat » à faire avancer la question du climat et de la sécurité pendant notre mandat au Conseil de sécurité. S’il a reconnu la déception de son pays lorsque la Fédération de Russie a opposé son veto à une résolution sur la question en décembre 2021, il a jugé évident que ce programme « bénéficie d’un énorme soutien de tous les coins de l’ONU ».  Pour l’Irlande, la question n’est plus de savoir si le Conseil de sécurité doit tenir compte des risques de sécurité liés aux changements climatiques dans sa prise de décision, mais quand ce doit être le cas.  Ce n’est qu’alors que le Conseil pourra véritablement s’acquitter de ses obligations envers les plus vulnérables d’entre nous, a conclu le représentant.

M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) s’est félicité que le Conseil de sécurité ait inclus des considérations climatiques dans ses résolutions depuis 2017. Il a cependant regretté qu’en décembre 2021, l’organe en charge de la paix et de la sécurité internationales n’ait pu trouver un accord sur le projet de résolution relatif aux conséquences des changements climatiques sur la sécurité, qui était pourtant coparrainé par 113 pays.  Le texte, a-t-il précisé, proposait une approche globale qui intégrait systématiquement les risques de sécurité liés au climat dans la prévention et la gestion des conflits, ainsi que dans le maintien de la paix.  Le représentant a ajouté que son pays soutient le travail du mécanisme de sécurité climatique et de la communauté de pratiques des Nations Unies sur la sécurité climatique, initiatives qui selon lui ne remettent pas en cause la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), mais complètent l’action des différents organes du système onusien.  Enfin, le délégué a indiqué que la stratégie espagnole de diplomatie humanitaire récemment approuvée reconnaît les changements climatiques comme l’une des causes des conflits et prône l’inclusion de paramètres climatiques dans les mécanismes d’alerte précoce. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a jugé nécessaire de sensibiliser les esprits aux conséquences sécuritaires du réchauffement planétaire, citant en exemple la désertification qui menace l’Afrique.  « Une terre perdue à la vie est une terre gagnée à l’insécurité », a-t-il lancé, notant que, sur le continent, les zones en prise avec une dégradation extrême des conditions climatiques sont bien souvent aussi celles où les conflits éclatent, où les populations sont déplacées et où les groupes terroristes et séparatistes cherchent à s’infiltrer. 

Après avoir salué les efforts des Émirats arabes unis pour faire de la prochaine COP28 un succès et rappelé plusieurs initiatives de son pays, le représentant a jugé important que le mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies, « excellent exemple de coopération interinstitutionnelle » du système des Nations Unies pour analyser et traiter les effets néfastes des changements climatiques sur la paix et la sécurité, travaille en complémentarité avec les trois commissions climat pour l’Afrique issues du Sommet de Marrakech de 2016. 

Quant au Conseil de sécurité, le représentant lui a attribué un rôle crucial, du fait de son mandat.  Le Maroc se félicite des progrès accomplis, notamment de la reconnaissance croissante des effets des changements climatiques lors de l’examen des mandats de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, dont la majorité est déployée dans des pays très vulnérables au changement climatique.  Contributeur majeur de troupes le Maroc soutient les efforts du Secrétariat pour réduire l’empreinte écologique des opérations de maintien de la paix, à travers une stratégie dédiée.  Il se félicite également du leadership des Émirats arabes unis et d’autres membres du Conseil, pour élaborer un engagement commun à renforcer le nexus climat et sécurité au sein du Conseil.  Rappelant que certains impacts négatifs des changements climatiques sont désormais inévitables et qu’ils agissent comme un multiplicateur de risques, le représentant a appelé à investir dans des mesures d’adaptation pour renforcer la résilience en période de changements climatiques. 

M. JEANNE MRAD (Liban) a souligné qu’au Moyen-Orient, le réchauffement climatique est deux fois supérieur à la moyenne mondiale.  La température devrait augmenter de 4 degrés Celsius d’ici à 2050 alors que la limite est de 1,5 degré.  Plusieurs villes devraient donc devenir inhabitables, s’est alarmé le représentant qui a estimé que le nexus changements climatiques, paix et sécurité mène à l’équation du lien entre ces changements et les conflits armés.  Sont-ce les guerres qui ont un impact sur les changements climatiques ou les effets de ces derniers qui les alimentent?  Ce qui est certain c’est qu’ils se renforcent mutuellement comme au Moyen-Orient où, pendant ces deux dernières décennies, les guerres ont ruiné la biodiversité et contribué à une crise climatique grave.  Toutefois, a pronostiqué le représentant, les changements climatiques joueront à l’avenir un rôle encore plus important en tant que déclencheurs de conflits.

M. JONATHAN MILLER (Israël) a jugé de plus en plus évident le lien croissant entre changements climatiques et sécurité, lequel exige une attention immédiate et collective du fait du caractère de multiplicateur de risques des changements climatiques.  Il a cité le cas du Moyen-Orient et du Sahel, où la combinaison des changements climatiques, de la pénurie de ressources et parfois du manque de politiques de développement coordonnées, offre un terrain fertile pour la croissance des organisations terroristes.

Le représentant a ensuite affirmé que les Accords d’Abraham avaient ouvert la voie à la coopération dans un variété de domaines au Moyen-Orient, y compris face aux défis des changements climatiques.  Affirmant qu’Israël surmonte ces défis depuis des décennies, il a mis en avant la coopération offerte par l’Agence israélienne de développement international, MASHAV, et les mesures prises par son pays.  Il a toutefois insisté sur la nécessité d’une réponse globale aux défis des changements climatiques, prônant une réduction des émissions de gaz à effet de serre, une adaptation aux effets des changements climatiques, le renforcement de la résilience communautaire et l’aide internationale. 

M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a axé son discours sur le danger de l’élévation du niveau de la mer et ses retombées économiques, sociales et environnementales.  Concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, il a déclaré que sécurité énergétique, développement économique et changements climatiques devaient être mis sur un pied d’égalité, sans donner la priorité à une source d’énergie en particulier.  Pour atteindre la neutralité carbone, le Royaume s’efforce de promouvoir la diversité économique et il a, de plus, revu à la hausse ses contributions nationales.  L’Arabie saoudite a prévu de réduire drastiquement -de 30%- ses émissions de méthane et de développer les énergies renouvelables à grande vitesse d’ici à 2030, a encore témoigné le représentant. 

Nous n’avons cessé de le dire, a déclaré Mme AMATLAIN ELIZABETH KABUA (Îles Marshall), au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, les changements climatiques sont la menace la plus grave qui pèsent sur nous.  Nous sommes les signes avant-coureurs d’une catastrophe, si l’on n’abandonne pas les combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables et si l’on n’augmente pas les financements de l’adaptation et de l’atténuation. Insistant sur l’objectif de 1,5 degré Celsius, la représentante a dit que pour les pays comme le sien, 0,5 degré, c’est la différence entre la sécurité et le chaos, entre la vie et la mort par noyade.  Elle a plaidé pour une définition holistique de la sécurité, arguant que son pays est peut-être, avec d’autres, sur la ligne de front, mais les changements climatiques sont une menace à la paix et à la sécurité du monde entier.  Il faut donc une action claire, concrète et transformatrice. 

La représentante a appuyé la nomination d’un rapporteur spécial et appelé le Conseil à considérer les risques climatiques dans l’exécution des mandats de toutes les missions et opérations de paix.  Le Conseil, a-t-elle estimé, doit élaborer une doctrine pour les mandats, les structures, les opérations, la documentation et la formation du personnel, dont les Casques bleus.  Le Conseil, a-t-elle insisté, doit rechercher l’avis des communautés comme les petits États insulaires.  La représentante a conclu en réitérant la proposition de demander à la Cour internationale de Justice (CIJ) un avis consultatif sur les obligations des États par rapport aux changements climatiques.

M. SARHAD SARDAR ABDULRAHMAN FATAH (Iraq) a reconnu que la CCNUCC est l’enceinte appropriée à l’ONU pour débattre des changements climatiques, mais a estimé que ce débat au Conseil est une façon pour la communauté internationale d’endosser ses responsabilités.  Il a attiré l’attention sur les migrants qui ont quitté leur pays pour des raisons écologiques, appelant à réfléchir aux raisons qui les ont poussés à le faire.  Parmi ces causes, il a noté l’absence d’accords ou de cadres régionaux pour l’utilisation des ressources, ainsi que le résultat des changements climatiques.  Il a estimé juste que la communauté internationale prenne à bras le corps les zones vulnérables qui sont plus fragiles aux changements climatiques, comme le delta iraquien, là où se trouve le jardin d’Éden décrit dans les livres saints. C’est une région riche en eau douce qui devient malheureusement saumâtre, a-t-il témoigné.  Le représentant a aussi prôné des approches régionales et des initiatives diplomatiques pour régler les différends entre États riverains.  L’Iraq a récemment accueilli une conférence régionale sur l’eau, a fait savoir le délégué qui a dit vouloir une meilleure coordination entre États riverains.

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a rappelé qu’avant même l’agression russe, son pays souffrait déjà de l’impact des changements climatiques.  Toutefois, d’après les données, la guerre a causé des émissions de 33 millions de tonnes de gaz à effet de serre.  Les violations russes du droit international humanitaire, comme stratégie militaire, ont donc des conséquences climatiques évidentes.  Le 6 juin dernier, la destruction du barrage de Kakhovka a provoqué la plus grande catastrophe européenne de ces dernières décennies, privant d’eau 94% des systèmes d’irrigation de la région de Kherson, 74% de celle de Zaporijia et 30% de la région de Dnipropetrovsk.  C’est peut-être, a souligné la représentante, en reprenant les propos du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, le choc le plus horrible infligé au peuple ukrainien parce qu’il aura des conséquences pour la sécurité alimentaire, étant donné que le « grenier » de l’Ukraine sera le plus affecté.  La représentante a conclu, en réclamant une paix globale, juste et durable, fondée sur la Charte des Nations Unies, pour rendre plus efficace l’action commune de lutte contre les changements climatiques.

Pour M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua), il est urgent que les pays développés renoncent à leurs modes de production et de consommation non durables, et respectent leur engagement de fournir aux pays en développement des ressources financières supplémentaires, prévisibles et suffisantes pour l’adaptation, l’atténuation, les pertes et dommages, le renforcement des capacités, le transfert de technologies, la conservation et la durabilité.  Revenant sur les pertes et dommages, il a estimé que la seule solution scientifique, équitable et éthique est que les pays historiquement responsables des changements climatiques dédommagent les pays qui en subissent les conséquences.  Si les petits États insulaires, qui perdent leur avenir, ne sont pas indemnisés, on ne pourra pas parler de justice climatique, a martelé le représentant.

M. JEEMS S. LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a estimé que pour assurer le succès de la COP28, il faut prendre des mesures pour limiter le réchauffement climatique et se montrer plus ambitieux dans l’application de la Convention-cadre et de l’Accord de Paris.  Nous devons nous maintenir en-deçà de l’objectif de 1,5 degrés Celsius. Nous devons, a poursuivi le représentant, investir dans des mesures d’adaptation pour assurer la résilience aux changements climatiques et traiter des pertes et dommages.  Le système des Nations Unies doit relever ces défis, de manière globale, et le Conseil de sécurité doit tirer parti des conclusions présentes et futures de la Commission de consolidation de la paix. 

Les progrès sont là mais il faut faire plus, a ajouté le représentant, en appuyant la nomination d’un représentant spécial pour le climat, la paix et la sécurité, la présentation régulière de rapports du Secrétaire général et la création de systèmes d’alerte rapide incorporant prévention des conflits, médiation et consolidation de la paix.  Il a aussi ajouté une dimension « gestion des risques climatiques » aux mandats des opérations de paix et des missions politiques spéciales.

M. MARC GERARD C. BOUTHÉ (Belgique) a rappelé le rôle de multiplicateur de risques que joue les changements climatiques et apporté le plein soutien de son pays aux efforts visant à intégrer les risques sécuritaires-climatiques, comme le mécanisme de sécurité climatique et la nomination de conseillers pour le climat, la paix et la sécurité.  Il a estimé que la nomination d’un envoyé spécial pour le climat et la sécurité renforcerait une approche à l’échelle de l’ONU et a souhaité des rapports complets et réguliers du Secrétaire général sur la question du climat, de la paix et de la sécurité, estimant qu’ils permettraient au Conseil de se concentrer sur les pays et les régions les plus touchés.

Rappelant que les opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales ont un impact significatif sur l’environnement, le représentant a souhaité que leur empreinte carbone soit réduite là où cela est possible. Il a demandé que le prochain rapport du Secrétaire général sur le maintien de la paix y consacre une attention particulière.  Par ailleurs, il a regretté l’absence de consensus global sur le lien entre le climat et la sécurité alors même que certains pays d’Afrique centrale et de l’Ouest appellent à porter une attention particulière aux conséquences des changements climatiques sur la sécurité de leurs régions respectives.  Il a donc souhaité que la voix de ces pays soit prise en compte, permettant ainsi la publication prochaine de déclarations présidentielles relatives au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et au Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale. 

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a déclaré que son pays s’est félicité de l’examen continu par le Conseil de sécurité des risques liés aux changements climatiques pour la sécurité.  Récemment élue au Conseil pour la période 2024-2025, la Sierra Leone entend accorder la priorité à la poursuite de l’examen et à l’engagement du Conseil de sécurité sur la sécurité et les risques climatiques. 

Pour le représentant, le Conseil peut mieux intégrer l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité dans ses efforts de prévention, de règlement et de consolidation de la paix.  Il doit mieux sensibiliser à la question des conséquences des changements climatiques pour la paix et la sécurité en s’engageant auprès des gouvernements, de la société civile et du secteur privé.  Il devrait aussi adopter une approche plus intégrée de la résolution des conflits afin de s’attaquer à leurs causes profondes des conflits, y compris les changements climatiques.  En outre, il devrait placer les changements climatiques au centre de ses délibérations sur la prévention, la résolution des conflits et la consolidation de la paix. Il devrait aussi les intégrer dans les mandats des missions de l’ONU menées dans des contextes climatiquement fragiles. 

Ayant convenu de la nécessité de lutter contre les changements climatiques, le Conseil de sécurité doit s’accorder sur le rôle qu’il doit jouer pour faire face à cette menace dans le cadre de son mandat et dans des circonstances appropriées, a poursuivi le représentant, qui l’a appelé à mieux promouvoir les points de vue et les voix des personnes les plus touchées, en particulier les femmes et les enfants.  Ceci suppose un engagement avec la société civile, qui aidera le Conseil à comprendre les besoins et les préoccupations spécifiques de ces groupes et à y répondre en conséquence, a-t-il encore affirmé. 

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) a jugé essentiel d’évaluer également l’impact des changements climatiques sur la sécurité maritime, une question qui sera parmi les domaines d’action de la neuvième Conférence sur les océans prévue en Grèce en 2024.  Il faut, a-t-il dit, améliorer la base des données pour faire mieux en matière d’évaluation des risques et renforcer les politiques, au niveau local, pour mieux comprendre, intégrer, anticiper et gérer l’impact des changements climatiques sur la sécurité internationale.  Nous devons aussi améliorer nos connaissances sur les risques sécuritaires liés au climat, en sachant que la sécurité climatique doit être intégrée dans les systèmes d’alerte rapide et de prévention des conflits.  Il est important, a conclu le représentant, d’établir des politiques climatiques ambitieuses et d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord de Paris et du Programme 2030. 

Mme LAETITIA COURTOIS, du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rappelé que son organisation a régulièrement averti le Conseil quant au fait que les effets combinés de la dégradation de l’environnement, des changements climatiques et des conflits armés modifient la structure des besoins humanitaires, créant des risques nouveaux pour les populations vulnérables. Pour sa part, l’environnement naturel, qui bénéficie pourtant de protections en vertu du droit international humanitaire, continue d’être une « victime silencieuse de la guerre », avec des conséquences pour les populations touchées par le conflit, notamment une résistance réduite aux chocs climatiques, a relevé la déléguée.  Dans ce contexte, les organisations humanitaires comme le CICR ont pour responsabilité de réduire les impacts des crises et de renforcer la résilience des populations face aux risques croissants dans les situations de conflit, conformément à la charte sur le climat et l’environnement signée par plus de 360 ONG, a-t-elle relevé, non sans inviter les gouvernements à souscrire eux aussi à ces engagements. 

Sachant que 60% des 25 pays les plus vulnérables aux changements climatiques et les moins capables d’adaptation sont touchés par des conflits armés, cette situation entraîne des conséquences sur toutes les dimensions de la vie des gens, leur sécurité, leur santé, leur sécurité alimentaire, hydrique et économique, a poursuivi la déléguée, pour qui l’action humanitaire, composante vitale dans les environnements fragmentés, est toutefois loin d’être le seul ingrédient pour parvenir à une paix durable.  Pour le CICR, des changements systémiques à plus long terme sont nécessaires pour autonomiser les populations et assurer une protection contre des chocs climatiques plus importants et plus fréquents.  Si le Conseil de sécurité et ses partenaires régionaux apportent la capacité de concevoir des réponses adaptées au contexte et sensibles au climat, il convient aussi de tirer parti de l’expertise collective des acteurs dans les situations de conflit et postconflit et d’écouter attentivement les communautés locales qui sont les plus touchées, a conclu la déléguée. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a insisté sur les menaces multiples que les changements climatiques font peser sur les systèmes socioéconomiques et les infrastructures.  Il a aussi insisté sur l’aggravation des crises dans les zones qui ont des mécanismes de réponse limités.  En tant qu’État insulaire, le Bahreïn a pris à bras le corps le développement durable, alors que son taux d’émission de dioxyde de carbone demeure très bas.  Nous avons, a expliqué le représentant, pris des initiatives pour doubler la consommation d’énergies renouvelables et ralentir l’élévation du niveau de la mer.  Appuyant l’initiative saoudienne sur le Moyen-Orient vert, il a ajouté que son pays a dûment adhéré aux initiatives internationales contre les changements climatiques.  Face aux défis sécuritaires, il a appelé le Conseil à travailler à des solutions globales et à accélérer le travail de pérennisation de la paix. 

M. FAISAL GH A. T. M. ALENEZI (Koweït) a dit que le monde vit le lien entre la sécurité et les changements climatiques depuis les années 70.  Dans ce contexte, il a estimé qu’il faut mettre l’accent sur l’aide aux petits États insulaires en développement (PEID).  Au Moyen-Orient, a-t-il expliqué, le lien entre sécurité et changements climatiques n’est plus à démontrer.  Treize pays arabes sur 19 sont exposés aux risques hydriques qui peuvent déboucher sur des conflits dans et entre les pays.  Plaidant pour que l’on évite un tel scenario, le représentant a salué les engagements environnementaux des pays arabes, comme en atteste la proclamation du 6 novembre comme Journée de la protection de l’environnement en temps de guerre et de conflit armé, six ans après l’invasion du Koweït.  Le délégué a aussi fait observer que son pays produit du pétrole en respectant les normes environnementales et qu’il entend atteindre ses objectifs environnementaux et énergétiques de neutralité carbone entre 2030 et 2050.

M. DAVID BAKRADZE (Géorgie) a insisté sur les dommages environnementaux causés par les actions illicites de la Russie dans les régions occupées de Géorgie. Les principaux réservoirs d’eau des systèmes d’irrigation sont sous le contrôle du régime d’occupation, ce qui n’est pas sans causer de graves problèmes aux régions de la Géorgie confrontées à la sécheresse, a assuré le représentant.  Il a précisé que le déploiement de fils barbelés et de barrières artificielles dans ces zones affecte les populations qui y vivent, en les empêchant notamment d’accéder à leurs propriétés et à leurs champs.  Enfin, il a précisé que son pays est en train d’élaborer une loi sur le climat.

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a qualifié les changements climatiques de défi majeur de notre époque, notamment sur le plan sécuritaire.  Il est donc impératif, selon elle, d’inclure les considérations climatiques dans le travail de l’ONU sur la paix et la sécurité, et ce à chaque étape du processus.  Les risques sécuritaires liés au climat doivent être intégrés dans les stratégies de prévention des conflits et les outils d’alerte précoce de l’ONU, a-t-elle préconisé, avant de citer en exemple le Partenariat pour l’eau, la paix et la sécurité, un outil innovant permettant d’identifier les risques de sécurité hydrique, du Mali à l’Iraq et de l’Éthiopie au Kenya.  La représentante a d’autre part voulu que l’on intègre davantage le climat dans l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU.  Elle a salué le travail du mécanisme de sécurité climatique en tant que « catalyseur » des approches pertinentes.  En soutenant les missions sur le terrain, les coordonnateurs résidents des Nations Unies et les organisations régionales dans l’évaluation des risques climatiques et des stratégies de gestion de ces risques, le mécanisme contribue aux efforts de consolidation de la paix, a fait valoir la déléguée.  Elle s’est félicitée, à cet égard, du déploiement de conseillers en climat, paix et sécurité dans les opérations de paix. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a indiqué que selon l’Institut de l’environnement de Stockholm, la moitié des opérations de paix de l’ONU sont déployées dans les pays les plus exposés aux changements climatiques.  Comme le climat n’est pas une menace traditionnelle à la sécurité, les structures militaires classiques ont du mal à y faire face.  Il s’agit en effet d’une menace spécifique qui exige des stratégies différentes parce qu’elle touche à la relation entre la civilisation humaine et la biosphère, et pas seulement à celle entre États.  Le Conseil de sécurité doit donc faire de l’examen de cette menace la norme et pas l’exception. 

Présidente de la Commission de consolidation de la paix, la Croatie, a souligné le représentant, a entendu plusieurs pays, surtout ceux d’Afrique centrale, identifier les changements climatiques comme un amplificateur des risques sécuritaires.  Face au manque de formation des Casques bleus à ces questions, il nous faut, a prescrit le représentant, des civils, dont des conseillers pour la sécurité environnementale qui travailleraient avec les gouvernements hôtes et qui contribueraient à l’intégration des solutions au système des Nations Unies.  Ce qu’il nous faut, a-t-il insisté, c’est une approche soucieuse des questions climatiques et gérée soigneusement.

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