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Conseil de sécurité: pour le BRENUAC, le coup d’État au Gabon appelle à une réflexion sur les changements non constitutionnels de gouvernement en Afrique

9505e séance - Après-midi
CS/15528

Conseil de sécurité: pour le BRENUAC, le coup d’État au Gabon appelle à une réflexion sur les changements non constitutionnels de gouvernement en Afrique

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique centrale, M. Abdou Abarry, a estimé cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, que le récent coup d’État au Gabon, consécutif à d’autres en Afrique de l’Ouest, doit inciter la communauté internationale à mener une réflexion sur la résurgence des changements non constitutionnels de gouvernement sur le continent.  À l’approche de scrutins au Tchad et en République démocratique du Congo (RDC), cette question a figuré au cœur des prises de parole des membres du Conseil aujourd’hui.

M. Abarry, qui est également le Chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), a estimé que le coup d’État du 30 août au Gabon, pays hôte non seulement du BRENUAC mais aussi du siège de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), illustre « la fragilité institutionnelle de certains pays de la sous-région ».  Il est intervenu à la suite d’un « processus électoral discutable », marqué notamment par le rejet d’une observation électorale indépendante, y compris celle proposée par la CEEAC.

Le Gabon assurait pourtant la présidence en exercice de la CEEAC, a précisé le Représentant spécial.  « Les nouvelles autorités qui, dès les premières heures du coup d’État, ont reçu le soutien de la population, ont démontré leur volonté de donner un nouveau départ au pays à travers l’organisation de consultations avec les différentes couches sociales, prélude à la tenue en avril prochain d’un Dialogue national inclusif », a noté le haut fonctionnaire.

M. Abarry a précisé que la nouvelle donne au Gabon a conduit les ministres de la sous-région à adopter la Déclaration de Kigali sur la prévention et la lutte contre les changements non constitutionnels de gouvernement en Afrique centrale. « Une Conférence régionale sur la résurgence des changements anticonstitutionnels de gouvernements est prévue, en début de l’année prochaine, à Sao Tomé-et-Principe, qui permettra à la sous-région de poser les jalons d’un instrument normatif destiné à faire face à ce fléau. »

C’est dans ce droit fil que le Chef du BRENUAC a dit espérer que le processus de transition au Tchad franchira une étape cruciale avec la tenue, le 17 décembre prochain, d’un référendum destiné à doter le pays d’une nouvelle constitution, en prélude à l’organisation de différents scrutins prévus en 2024. M. Abarry a fait part de son « souhait ardent » que les élections prévues le 20 décembre en RDC permettent de consolider l’ancrage démocratique du pays.

Le Ghana, qui parlait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), s’est dit encouragé par l’élan positif constaté sur le plan politique dans plusieurs pays de la région, pour renforcer et restaurer les institutions en vue de répondre aux aspirations des populations locales.  S’agissant du Gabon, les A3 ont noté avec satisfaction les initiatives prises par les autorités de transition pour stabiliser le pays et désamorcer les tensions politiques.

Le groupe s’est dit également encouragé par l’annonce du calendrier de transition.  Au sujet du Tchad, il a salué les avancées significatives dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Doha signé en août 2022 par les acteurs nationaux.  Des progrès politiques d’autant plus remarquables qu’ils surviennent à un moment où le pays a été durement touché par le conflit au Soudan, ont relevé les A3.  Les répercussions régionales de cette crise soudanaise ont d’ailleurs suscité les préoccupations de plusieurs membres du Conseil, de la Chine à Malte, en passant par la Fédération de Russie, les États-Unis ou encore l’Albanie.

La France a souhaité que les transitions engagées dans plusieurs pays permettent un retour à des institutions démocratiques, avec la participation pleine et entière de toutes les composantes de la société, y compris des femmes et des jeunes.  Elle a pris note des éléments présentés par le Représentant spécial sur le processus en cours au Gabon, y compris la crédibilité et le soutien dont il bénéficie auprès de la population.  S’agissant du Tchad, la délégation française a espéré que le référendum du 17 décembre se déroulerait dans un climat permettant un retour pacifique à l’ordre constitutionnel.

Pour le Royaume-Uni, l’opportunité d’un « tournant » existe au Gabon. La délégation britannique a encouragé les autorités de transition de ce pays à assurer un retour à l’ordre constitutionnel à travers une transition inclusive et crédible.  Elle s’est dite rassurée par la feuille de route pour la transition, qui prévoit des élections en août 2025, plaidant pour un dialogue national véritablement inclusif en avril 2024.  Plus globalement, le Royaume-Uni a invité les États de la sous-région à s’engager en faveur de processus politiques et transitoires « inclusifs, crédibles et responsables ».

LA SITUATION EN AFRIQUE CENTRALE ET LES ACTIVITÉS DU BUREAU RÉGIONAL DES NATIONS UNIES POUR L’AFRIQUE CENTRALE S/2023/934 

Déclarations 

M. ABDOU ABARRY, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique centrale et Chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), a loué le « potentiel considérable » de l’Afrique centrale en matière de développement et de stabilité, avant de féliciter les chefs d’État et de gouvernement de la sous-région qui, ces six derniers mois, se sont réunis cinq fois sur les questions de paix et de sécurité.  Il a ensuite détaillé l’impact de l’action des Nations Unies dans la sous-région, mentionnant, en République centrafricaine, la réintégration en cours de centaines d’ex-combattants dans les différentes composantes des forces de défense et de sécurité.  « Ceci s’ajoute aux 70 combattants de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) qui se sont démobilisés volontairement et dont certains ont déjà été rapatriés en Ouganda, grâce à l’appui des Nations Unies », a-t-il rappelé.  Le Représentant spécial a également salué l’opérationnalisation du Réseau de femmes médiatrices de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), qui selon lui « démontre l’importance que la sous-région accorde à la participation et à l’inclusion des femmes dans la médiation et d’autres processus politiques ».  Il a par ailleurs signalé l’appui apporté par le BRENUAC au développement d’une stratégie régionale de lutte contre les discours de haine et la violence en Afrique centrale. 

Au Tchad, a-t-il poursuivi, malgré les nombreux défis auxquels le pays est confronté, notamment les répercussions du conflit soudanais, « le processus de transition franchira une étape cruciale avec la tenue, le 17 décembre prochain, d’un référendum destiné à doter le pays d’une nouvelle constitution ».  M. Abarry a estimé que l’adoption de cette nouvelle constitution constituera un prélude à l’organisation des différents scrutins prévus en 2024.  Il a salué la poursuite de la « politique de la main tendue » de M. Mahamat Idriss Deby Itno, Président de la transition, qui a permis à bon nombre de membres de l’opposition en exil de retourner au Tchad, en particulier M. Succès Masra, qui préside le parti Les Transformateurs.  Le Représentant spécial a cependant regretté que, malgré cette politique, d’autres acteurs politiques et certains groupes politico-militaires restent en marge du processus de transition. 

M. Abarry a aussi évoqué le « changement anticonstitutionnel de gouvernement » intervenu le 30 août au Gabon, pays hôte de la CEEAC et de son Bureau.  Cette nouvelle donne a conduit les ministres de la sous-région, réunis au Rwanda, à adopter la Déclaration de Kigali sur la prévention et la lutte contre les changements non constitutionnels de gouvernement en Afrique centrale, a-t-il indiqué.  Dans le prolongement de ces efforts, une conférence régionale sur la résurgence des changements anticonstitutionnels de gouvernement est prévue, au début de l’année prochaine, à Sao Tomé-et-Principe, « qui permettra à la sous-région de poser les jalons d’un instrument normatif destiné à faire face à ce fléau », a précisé le Représentant spécial. 

Il a par ailleurs longuement abordé la crise soudanaise, qui continue « avec son lot de destructions et d’atrocités », poussant encore plus de Soudanais à se réfugier au Tchad et en République centrafricaine.  Selon lui, les risques sécuritaires sont réels, compte tenu de l’afflux vers le Tchad d’un millier de soldats des Forces armées soudanaises qui ont fui les affrontements au Darfour, sur fond de tensions entre les deux pays.  Sur le plan humanitaire, a-t-il ajouté, la réponse humanitaire s’avère insuffisante pour faire face aux besoins de plus d’un million de réfugiés enregistrés, sans compter ceux qui sont hébergés dans des familles d’accueil. 

Pour M. Abarry, le coup d’État au Gabon est venu rappeler la fragilité institutionnelle de certains pays de la sous-région.  Il a ainsi relevé que ce coup d’État est intervenu à la suite d’un processus électoral « discutable », jalonné de réformes non consensuelles du cadre électoral et d’un rejet de toute observation électorale indépendante, y compris celle de la CEEAC, dont le Gabon assurait pourtant la présidence en exercice.  Il s’est toutefois réjoui que les nouvelles autorités du pays aient, dès les premières heures du coup d’État, reçu le soutien de la population et montré leur volonté de donner un nouveau départ au Gabon, à travers l’organisation de consultations avec les différentes couches sociales, prélude à la tenue en avril prochain d’un « dialogue national inclusif ».  Notant que ces mêmes autorités ont décliné un chronogramme de 24 mois, il a indiqué que le BRENUAC travaille à la mise en place d’un « groupe des amis du Gabon » pour accompagner ces efforts « de façon efficace et dans le strict respect des principes des Nations Unies ».  Le Représentant spécial a rappelé que ce coup d’État au Gabon fait suite à ceux déjà intervenus dans la sous-région voisine de l’Afrique de l’Ouest, ce qui, selon lui, devrait inciter la communauté internationale, notamment les Nations Unies, à mener une réflexion sur la résurgence des changements non constitutionnels de gouvernement sur le continent africain. 

S’agissant de la situation humanitaire en Afrique centrale, M. Abarry l’a qualifiée d’« extrêmement préoccupante ».  Au mois d’octobre dernier, plus de 42 millions de personnes avaient besoin d’une aide humanitaire, alors que les ressources pour les assister deviennent de plus en plus rares, a-t-il alerté.  Il a aussi indiqué que la sécurité maritime continue d’être un sujet de grande préoccupation pour la sous-région, laquelle, pendant la période sous examen, a enregistré quatre incidents liés à la sécurité maritime, y compris une prise d’otages. 

Avant de conclure, le Représentant spécial a fait part de son « souhait ardent » que les élections prévues le 20 décembre en République démocratique du Congo (RDC) se déroulent dans la paix, « de façon à consolider l’ancrage démocratique dans ce pays et à renforcer le processus d’édification d’une Afrique centrale de paix, de stabilité et de prospérité ». 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), qui s’est exprimé au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), s’est dit encouragé par l’élan positif pris sur le plan politique, dans plusieurs pays de la région, pour renforcer et restaurer les institutions en vue de répondre aux aspirations des populations locales.  À cet égard, il a salué les avancées significatives dans la mise en œuvre de l’accord de paix de Doha signé en août 2022 par les acteurs tchadiens, d’autant plus que ces progrès politiques remarquables surviennent à un moment où le pays a été durement touché par le conflit au Soudan. 

S’agissant du Gabon, les A3 notent avec satisfaction les initiatives prises par les autorités de transition pour stabiliser le pays et désamorcer les tensions politiques.  À cet égard, le représentant a également relevé le dialogue en cours entre le Président de la Transition et les pays de la région, se disant également encouragé par l’annonce du calendrier de transition.  Sur le plan régional, il a salué la coopération entre le BRENUAC et l’UNOWAS, qui a permis d’organiser une mission conjointe d’évaluation dans les zones des deux régions touchées par les activités terroristes de Boko Haram. 

Préoccupé par l’impact des changements climatiques en Afrique centrale, le délégué a également exprimé son inquiétude devant la poursuite des activités des groupes armés dans le nord-ouest et le sud-ouest du Cameroun.  Pour finir, le représentant s’est félicité de la poursuite du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) en République centrafricaine, qui contribue grandement à apaiser les tensions dans le pays.  À cette fin, les A3 invitent donc tous les partenaires à poursuivre leur soutien financier pour que les programmes de DDR en cours soient menés à bien en temps opportun. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a constaté que la sous-région est confrontée à un risque permanent d’instabilité, mis en évidence par les récents coups d’État et la violence.  Face à cette vulnérabilité exacerbée par les changements climatiques, il a encouragé les États de la sous-région à s’engager en faveur de processus politiques et transitoires inclusifs, crédibles et responsables et à travailler avec le BRENUAC, y compris sur les questions de sécurité climatique.  Le représentant s’est ensuite félicité des progrès accomplis dans la transition politique au Tchad.  Il a exhorté les autorités à veiller à ce que le processus référendaire soit pacifique, inclusif et respectueux des droits et libertés fondamentaux.  Par ailleurs, il a remercié le Tchad, ainsi que d’autres États de la région, pour leur soutien continu aux réfugiés du Soudan, avant de rappeler que le Royaume-Uni a fourni 18 millions de dollars pour soutenir la réponse humanitaire dans l'est du Tchad. 

Par ailleurs, estimant qu’il existe une opportunité pour un « tournant » au Gabon, le représentant a encouragé les autorités de transition de ce pays à assurer un retour à l’ordre constitutionnel à travers une transition inclusive et crédible.  Il s’est dit rassuré par la feuille de route pour la transition, qui prévoit des élections en août 2025, et a espéré voir un dialogue national véritablement inclusif en avril 2024.  Il a exhorté les autorités de transition à répondre aux aspirations démocratiques de tous les Gabonais, avec le soutien du BRENUAC et l’engagement des partenaires régionaux.  S’agissant du Cameroun, le représentant a concédé que les progrès « semblent toujours difficiles à réaliser », compte tenu de la violence.  Le Royaume-Uni continue de travailler avec des partenaires multilatéraux pour atténuer les pires effets de la violence sur la population, notamment en soutenant les défenseurs des droits humains et les femmes qui œuvrent à la consolidation de la paix, a-t-il dit, appelant les parties à veiller à ce que le dialogue soit inclusif. 

M. DAI BING (Chine) s’est félicité que les pays de l’Afrique centrale aient déployé des efforts importants pour améliorer leur gouvernance.  À cet égard, il a noté que plusieurs pays de la région, notamment le Cameroun, la République centrafricaine et le Tchad, entameront une transition politique ou organiseront des élections l’an prochain.  Le représentant a par ailleurs constaté que les opérations antiterroristes régionales ont porté leurs fruits, comme, par exemple le désarmement d’ex-combattants de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA).  Il a toutefois déploré que, dans le même temps, Boko Haram et Daech aient multiplié les attaques et que le conflit au Soudan ait une incidence en République centrafricaine et au Tchad.  Face à ces développements, il a appelé les pays concernés à promouvoir, avec le soutien du BRENUAC, des mécanismes de sécurité collective pour répondre aux menaces transfrontières. 

Le représentant a ensuite observé que la piraterie connaît une recrudescence dans le golfe de Guinée, avant d’exhorter la communauté internationale à continuer d’appuyer les opérations de lutte contre ce fléau.  Il a également appelé à se focaliser sur les causes profondes des conflits, estimant que la pauvreté et l’inégalité de développement peuvent constituer un terreau pour l’extrémisme et la violence.  Enfin, rappelant que les pays en développement ont besoin d’un soutien accru de la communauté internationale pour faire face aux changements climatiques, il a plaidé pour que davantage d’aide soit canalisée vers la région 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a félicité le BRENUAC du rôle qu’il joue dans la promotion de la diplomatie préventive et de la médiation ainsi que dans le renforcement de la coopération avec les organisations régionales, telles que l’Union africaine et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).  Le renforcement de la coordination et des partenariats est fondamental pour la paix et la sécurité régionales, a-t-il fait valoir, avant d’insister sur l’importance de processus politiques inclusifs, pacifiques et crédibles dans la construction d’une paix durable en Afrique centrale.  Préoccupé par les changements anticonstitutionnels de gouvernement dans la région, le représentant a appelé à s’attaquer aux causes profondes, notamment aux problèmes de gouvernance.  Le Brésil soutient les efforts visant à rétablir l’ordre constitutionnel, à renforcer l’état de droit et à faciliter les processus électoraux et transitoires inclusifs, a-t-il assuré.  Préoccupé en outre par la situation dans le bassin du lac Tchad, où les hostilités ont touché des communautés entières, le délégué a salué les initiatives régionales et les efforts déployés par les États pour relever ces défis, faire respecter les droits humains et prendre en compte le point de vue des femmes et des jeunes.  Pour ce qui est de la sécurité maritime dans le golfe de Guinée, il a souligné la nécessité d’une coopération accrue, notamment par le biais de l’architecture de Yaoundé et du Code de conduite de Yaoundé.  En outre, le représentant a noté le succès de l’opération Guinex III qui s’est déroulée en août et en septembre derniers, en rappelant qu’il s’agit d’un exercice qui aide les pays du golfe de Guinée à relever les défis en matière de sécurité maritime et à améliorer l’interopérabilité entre la marine brésilienne et les marines et garde-côtes de la région. 

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) a indiqué que son pays soutient les processus politiques en cours en Afrique centrale.  « Les transitions engagées dans plusieurs pays ces derniers mois doivent permettre un retour à des institutions démocratiques, permettant la participation pleine et entière de toutes les composantes de la société, y compris des femmes et des jeunes », a-t-il souligné, formant le vœu que les prochaines étapes de ces processus se dérouleront de manière inclusive, crédible et apaisée. 

Au Gabon, s’est félicité le représentant, le Gouvernement de transition a annoncé un calendrier, conformément aux demandes du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine.  Il a également pris bonne note des éléments présentés par le Représentant spécial sur ce processus, y compris la crédibilité et le soutien dont il bénéficie auprès de la population.  Au Tchad, a-t-il poursuivi, la France appelle à la poursuite de la transition et espère que le référendum du 17 décembre se déroulera dans un climat qui permettra un retour pacifique à l’ordre constitutionnel.  Il a souhaité que les autorités avancent vers l’organisation d’élections libres, crédibles, inclusives et transparentes. 

S’agissant du Cameroun, le représentant s’est dit préoccupé par la situation dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest.  Il a appelé les autorités à poursuivre le dialogue en vue d’une solution politique à cette crise au profit de la stabilité de l’ensemble du pays et de la sécurité de ses habitants.  Pour ce qui est de la République centrafricaine, il a salué l’engagement des autorités en faveur du processus de paix et l’appui apporté par le BRENUAC et la MINUSCA.  Il a aussi vu dans la démobilisation de plusieurs factions de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) un signal encourageant pour la consolidation de la paix dans le pays.  Le travail de retour à la paix dans les différentes régions doit se poursuivre pour permettre le retour des populations encore réfugiées dans les pays voisins, a-t-il ajouté. 

Le représentant a d’autre part réitéré l’inquiétude de la France sur les conséquences alarmantes des changements climatiques en Afrique centrale.  Avertissant des risques posés à la stabilité et à la sécurité dans plusieurs pays, il a noté qu’au Tchad et au Cameroun, les inondations et disparitions de terres agricoles entraînent des déplacements de population dans des régions déjà fragiles et renforcent la concurrence autour des ressources qui se raréfient.  Face à ces défis, il a salué le travail du BRENUAC, qui, en lien avec les organisations sous-régionales, s’emploie à renforcer les réponses communes. 

M. TAKAYUKI IRIYA (Japon) a salué les bons offices du BRENUAC à la suite de la prise du pouvoir militaire au Gabon.  Il s’est également félicité de l’élaboration d’une feuille de route devant mener à une transition démocratique et à une élection présidentielle, prévue pour août 2025.  Sur le plan politique, le représentant a relevé deux événements clefs prévus dans la région en décembre, à savoir la tenue d’un référendum constitutionnel au Tchad et d’élections générales en République démocratique du Congo (RDC).  Toutefois, la poursuite des violences dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest du Cameroun demeure profondément préoccupante.  Le délégué a appelé le Gouvernement de ce pays à s’engager de manière constructive en faveur de la reconstruction et du développement dans ces zones, sur la base du dialogue national de 2019. 

L’Afrique centrale, a poursuivi le représentant, continue par ailleurs de faire face à une situation humanitaire désastreuse, exacerbée par les changements climatiques, l’insécurité alimentaire et les conflits entre agriculteurs et éleveurs.  Pour parvenir à une paix et une sécurité durables, il a jugé essentiel que les gouvernements de la région fournissent des services de base à leurs citoyens, par le biais d’institutions résilientes soutenues par des communautés fortes.  Ces efforts doivent être inclusifs et tenir compte des voix des femmes, des jeunes et des groupes marginalisés.  Pour y parvenir, la communauté internationale doit selon lui adopter une approche holistique basée sur le lien humanitaire-développement-paix et intégrant le système des Nations Unies, les institutions financières internationales et les organisations régionales. 

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a exhorté le Conseil à faire montre d’engagement dans la région.  Rappelant que l’Afrique centrale est l’une des régions au monde les plus vulnérables aux chocs climatiques et environnementaux, le représentant s’est alarmé des centaines de morts déjà causés par les conflits induits par le climat, notamment entre agriculteurs et éleveurs.  La crise climatique amplifie également les inégalités de genre structurelles, a-t-il prévenu, insistant pour un renforcement des droits fonciers des femmes. 

Le délégué a également salué l’engagement stratégique du BRENUAC auprès de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) dans l’élaboration d’une stratégie régionale sensible aux conflits liés aux changements climatiques.  Il s’est ensuite inquiété des fractures ethniques qui continuent de s’accentuer, notamment le risque croissant de débordement du conflit soudanais au-delà de ses frontières.  Enfin, il relevé les mesures de conciliation mises en œuvre par les autorités de transition au Tchad.  Pour finir, le représentant a salué la synergie entre le BRENUAC et la CEEAC pour prévenir et combattre les discours de haine. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a salué l’efficacité des actions entreprises par les forces multinationales africaines de la région, souhaitant que la communauté internationale leur fournisse des financements et une assistance prévisibles.  Elle a marqué sa préoccupation devant la poursuite d’attaques à main armée contre des navires commerciaux dans le golfe de Guinée.  Selon elle, il est important pour la communauté internationale d’engager des ressources pour renforcer les capacités des États côtiers pour lutter contre la piraterie. 

Préoccupée par les flambées de violence dans le nord-ouest et le sud-ouest au Cameroun, la déléguée a jugé fondamental de renoncer à la violence et de trouver des moyens de résoudre les désaccords en suspens par le biais de négociations.  Nous observons le processus de transition au Tchad, et la mise en œuvre des recommandations du dialogue national intertchadien, a indiqué la déléguée, qui a dit que son pays note par ailleurs les décisions des autorités de transition gabonaises de revenir à l'ordre constitutionnel dans les délais convenus.  En ce qui concerne la République centrafricaine, la déléguée a indiqué que les autorités ont réussi à surmonter la phase la plus difficile de la lutte contre les groupes armés.  La Russie continuera d’aider Bangui à combattre les groupes armés illégaux et à étendre la présence de l’État dans l’ensemble du pays, a-t-elle annoncé. 

La représentante a en outre dit sa préoccupation devant la situation humanitaire difficile dans la région, notamment au Soudan, dont la crise a des conséquences sur les États voisins.  Nous sommes convaincus qu’en matière de prévention des crises et de résolution des conflits, un rôle clef doit être joué par les États de la région dotés d’instruments internationaux nécessaires, a-t-elle argué. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a plaidé en faveur d’une réponse régionale aux défis régionaux, et de la coopération entre tous les acteurs d’Afrique centrale pour consolider la paix.  Il a noté à cet égard que la détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire dans certaines régions affecte l’Afrique centrale dans son ensemble.  Le conflit au Soudan a provoqué la plus grande crise de déplacement de populations au monde, crise qui affecte également les pays frontaliers.  Des processus démocratiques inclusifs sont à ses yeux nécessaires pour consolider une paix durable dans la région.  Le représentant a salué les bons offices du Représentant spécial au Gabon et au Tchad pour renforcer l’espace civique et le dialogue entre les autorités et l’opposition.  Il a cependant regretté le rétrécissement de cet espace au Cameroun et au Burundi.  Face à l’impact néfaste des changements climatiques sur la paix et la sécurité en Afrique centrale, le représentant a salué la nomination d’un conseiller climat, paix et sécurité au sein du BRENUAC.  Des projets tels que le renforcement de l’élevage pastoral au Tchad, appuyé par la Suisse, contribuent selon lui à combattre l’insécurité alimentaire et au développement économique de la région, tout en prévenant la violence. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a plaidé en faveur de solutions qui favorisent une gouvernance inclusive tout en permettant de s’attaquer aux causes profondes des conflits en Afrique centrale, au moyen notamment de réformes démocratiques.  Au Tchad, il a pris note des progrès réalisés en vue de la tenue du référendum constitutionnel et des élections générales en 2024.  Il a s’est par ailleurs félicité du retour des personnes déplacées et de l’amélioration économique dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest du Cameroun, avant de saluer les efforts visant à soutenir le dialogue national entre le Gouvernement et les groupes armés.  Tout en relevant des progrès « encourageants » dans la lutte contre Boko Haram dans le bassin du lac Tchad, il a appelé à un soutien international accru à la Force multinationale mixte et à la Stratégie régionale afin de briser le contrôle des groupes terroristes sur les zones où l’autorité de l’État est absente. 

S’agissant de la guerre civile au Soudan, le délégué a salué l’ouverture du Tchad et de la République centrafricaine aux réfugiés, malgré leurs propres difficultés.  Il a invité la communauté internationale à ne pas laisser ces deux pays supporter seuls le poids de cette crise humanitaire.  Face à ces défis, qui s’ajoutent aux effets de la crise climatique tels que l’insécurité alimentaire, la pénurie d’eau et les affrontements entre communautés, les efforts communs du BRENUAC et de la CEEAC demeurent cruciaux, a-t-il conclu. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a réaffirmé l’engagement de son pays à appuyer les aspirations démocratiques des populations d’Afrique centrale.  À cet égard, il a estimé que l’heure est venue pour le Gouvernement tchadien de créer les conditions d’un avenir démocratique.  Félicitant le Tchad pour l’ouverture de ses frontières aux réfugiés soudanais, il s’est toutefois dit préoccupé par la recrudescence de la violence dans la région.  Il a encouragé le Tchad à appuyer un règlement pacifique de la guerre au Soudan et à éviter le retour de matériel aux forces belligérantes.  Le représentant a également exprimé l’appui des États-Unis au Gabon dans sa transition vers un gouvernement démocratique et civil.  Il a par ailleurs déclaré compter sur ce pays pour préserver la sécurité dans le golfe de Guinée.  S’agissant de la République centrafricaine, le représentant a appelé le Gouvernement et l’opposition à travailler de manière constructive et transparente avant et pendant les premières élections locales et régionales du pays depuis 1988.  Ces élections sont un élément clef de la décentralisation et de la création d’institutions locales à même de satisfaire les besoins des citoyens, a-t-il souligné.  Évoquant enfin le Cameroun, il s’est dit préoccupé par la recrudescence des violences, notamment dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest du pays, avant de condamner les attaques de Boko Haram et de Daech qui ont provoqué des déplacements de milliers de personnes dans la région. 

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a estimé que les défis sécuritaires qui pèsent sur la région supposent une stratégie multidimensionnelle cohérente.  Elle a recommandé d’intensifier la coopération régionale afin de contrer les menaces transfrontalières, telles que l’extrémisme, le terrorisme et le trafic d’armes, tout en renforçant les capacités nationales et la résilience communautaire.  Pour la représentante, la démobilisation récente de groupes armés avec la participation d’acteurs régionaux démontre l’importance d’une action multilatérale pour renforcer la sécurité et la stabilité dans la région.  Elle a fait le même constat s’agissant de la riposte coordonnée de la République centrafricaine et du Tchad pour éviter les retombées des conflits dans la région.  Poursuivant, la représentante a appelé à se concentrer sur la lutte contre l’extrémisme et le terrorisme, en s’attaquant à leurs causes profondes et en promouvant les valeurs de tolérance et de coexistence.  À cet égard, elle a dit attendre avec intérêt la prochaine réunion ministérielle à Bangui, qui sera l’occasion de débattre de la stratégie régionale pour prévenir et lutter contre les discours de haine en Afrique centrale. 

M.  JOSÉ JAVIER DE LA GASCA LOPEZ DOMÍNGUEZ (Équateur) a relevé, sur le plan politique, une vague d’instabilité en Afrique centrale liée au mécontentement des populations face à la détérioration du niveau de vie, le manque d’opportunités professionnelles et l’accès limité aux services de base, entre autres facteurs.  Il a aussi regretté l’effondrement de l’ordre constitutionnel dans plusieurs pays de la région, appelant au retour à la vie démocratique.  Le délégué a ensuite apprécié les efforts déployés, avec le soutien du BRENUAC, dans les préparatifs du référendum constitutionnel organisé dans quelques jours au Tchad.  De même, il a salué le plan de transition proposé au Gabon et souhaité plein succès au Président centrafricain Faustin-Archange Touadéra, qui dirige la facilitation politique de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) dans ce pays. 

Concernant la sécurité, le délégué s’est dit préoccupé de la poursuite des violences causées par des groupes non étatiques opérant dans la région.  Il a constaté qu’une menace supplémentaire y est l’expansion de la criminalité organisée et ses liens avec l’exploitation illégale des ressources naturelles.  Pour juguler ce fléau, le représentant a encouragé la coopération interétatique, ainsi qu’avec les agences spécialisées des Nations Unies, à laquelle invite la déclaration du Conseil de sécurité en date du 7 décembre 2023.  Nous constatons avec inquiétude les effets du conflit soudanais et apprécions l’accueil que les pays de la région offrent aux civils fuyant les violences, a-t-il ajouté.  Enfin, inquiet des informations faisant état de restrictions de l’espace civique et d’arrestations lors de manifestations pacifiques dans certains pays de la région, le représentant a exhorté les gouvernements concernés à respecter les droits humains et les libertés fondamentales.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: l’examen d’un budget ne relève pas de la physique nucléaire, tance le Président, devant la lenteur des négociations

Soixante-dix-huitième session,
23e séance plénière - matin
AG/AB/4447

Cinquième Commission: l’examen d’un budget ne relève pas de la physique nucléaire, tance le Président, devant la lenteur des négociations

Avant de plonger dans les incidences budgétaires, estimées à 49 millions de dollars, de 73 décisions et résolutions du Conseil des droits de l’homme en 2024, la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a entendu une ferme mise au point de son président, M. Osama Mahmoud Abdel Khalek Mahmoud, de l’Égypte. 

Nous sommes aux dernières heures de la session dont la fin est prévue ce 15 décembre à minuit, a-t-il rappelé. 

Le Président a pressé tous les coordonnateurs des négociations, qui travaillent tard le soir et tôt le matin, à bien vouloir commencer « leur marathon ».  Ne croyez pas, a-t-il prévenu, que je vais demander une autre prolongation.  Nous allons faire ce que nous pouvons et rendre notre copie, le 15 décembre, quitte à examiner le reliquat à la reprise de session.  Ne prenez pas le risque de douter de mes paroles car après tout, a souligné le Président, nous ne faisons pas de la physique nucléaire, nous examinons le budget.  C’est aussi simple que cela!  Certes, a-t-il reconnu, tout le monde est sous pression mais je resterai ferme dans ma demande de régler les problèmes d’efficacité et de supprimer les goulets d’étranglement. 

Les 73 décisions et résolutions du Conseil des droits de l’homme nécessiteront pour 2024, une enveloppe supplémentaire de 49 729 700 dollars. Au nom d’un groupe de 13 pays, le Costa Rica a appuyé cette demande, arguant de la parfaite égalité entre les trois piliers du travail de l’ONU.  En revanche, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) ramène l’enveloppe à 47 711 300 dollars, à imputer sur le fonds de réserve.   

Le Soudan s’est étonné de la résolution intitulée « les effets du conflit actuel au Soudan sur les droits de l’homme » par laquelle le Conseil décide que l’Expert des droits de l’homme doit, avec effet immédiat, avoir également pour mandat de surveiller toutes les violations commises depuis le 25 octobre 2021, y compris celles découlant directement du conflit actuel.  Alors que nous avons accepté la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) pour l’ouverture d’une enquête sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par les Forces d’appui rapide, une milice formée de mercenaires jouissant d’appuis extérieurs, il est curieux que le Conseil prenne une telle décision à laquelle nous nous opposons fermement, a prévenu le Soudan. 

La Fédération de Russie, qui s’est retirée du Conseil, a, à son tour, rejeté « catégoriquement » l’idée d’inscrire au budget ordinaire des ressources pour la mise en œuvre de la résolution sur la situation des droits de l’homme en Ukraine suite à l’agression russe et celle sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie.  Ces deux résolutions prouvent le refus des pays occidentaux de coopérer et d’engager un dialogue constructif, équitable et respectueux sur la question des droits humains, a argué la Fédération de Russie, accusant lesdits pays de rester aveugles et sourds aux violations commises par l’Ukraine. 

La Cinquième Commission tiendra une autre séance publique, jeudi 14 décembre à partir de 10 heures, sur le Fonds de réserve. 

PROJET DE BUDGET-PROGRAMME POUR 2024

Prévisions révisées comme suite aux résolutions et décisions adoptées par le Conseil des droits de l’homme à ses 52e, 53e et 54e sessions ordinaires et à sa 36e session extraordinaire, en 2023 - A/78/574A/78/7/Add.39

Déclarations

Au nom de l’Argentine, du Brésil, du Chili, de la Colombie, de l’Équateur, d’El Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Mexique, du Panama, du Paraguay, du Pérou, de la République dominicaine et de l’Uruguay, M. CARLOS MANUEL VIDECHE GUEVARA (Costa Rica) a rappelé qu’en 2023, le Conseil des droits de l’homme a tenu trois sessions ordinaires et une session extraordinaire, au cours desquelles 85 résolutions ont été adoptées, dont 73 ont des incidences budgétaires de 68 517 300 dollars, dont 18 787 600 dollars ont été inclus dans le projet du budget-programme de 2024; les 49 729 700 dollars restants constituant une demande de ressources supplémentaires. 

À l’occasion du soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, les États Membres ont insisté sur l’égalité entre les trois piliers du travail de l’Organisation dont le financement relève de la responsabilité de tous.  L’allocation de ressources à la hauteur des besoins est une condition fondamentale pour renforcer le pilier « droits de l’homme ».  Le représentant a donc appuyé la demande de ressources supplémentaires, en mettant en garde contre la tentation de faire de la Cinquième Commission un outil « pour tuer dans l’œuf » les mandats établis.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, Mme LEMLEM FISEHA MINALE (Éthiopie) a insisté sur le fait que les principes d’indépendance, d’objectivité et de non-sélectivité sont ancrés dans la résolution portant création du Conseil des droits de l’homme, tout comme l’élimination du deux poids, deux mesures et de la politisation.  La responsabilité première d’assurer la protection des droits de l’homme incombe aux pays concernés.  Dès lors, la coopération internationale en la matière ne peut être que complémentaire pour autant qu’elle soit fondée sur la bonne foi et le plein consentement du pays concerné.  La représentante a ensuite rappelé qu’avant la décision actuelle du Conseil des droits de l’homme sur le Soudan, des mécanismes existaient déjà, en vertu de deux résolutions et de l’assistance technique, sur lesquels le Soudan a toujours coopéré.  En conséquence, l’opposition de ce dernier à la création d’une mission d’établissement des faits aurait dû être prise en compte. 

En effet, la pratique consistant à adopter des mécanismes spécifiques aux pays malgré l’opposition des concernés et l’absence d’une majorité est un signal négatif pour l’impartialité et l’efficacité que l’on attend du système des droits de l’homme des Nations Unies.  Nous voudrions, a poursuivi la représentante, comprendre les méthodes de travail du Conseil qui aboutissent à des résolutions spécifiques aux pays d’une seule région. Nous craignons que la création d’un autre mécanisme sur le Soudan ait un impact négatif sur le respect des précédents et l’efficacité dans l’utilisation de ressources déjà limitées. 

Mme KELLI DEGREGORY (Bahamas) a dit souscrire au rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), en soulignant que son pays est conscient de la valeur des infrastructures physiques, des connaissances institutionnelles, du renforcement des capacités et de l’expertise que le Bureau régional des droits de l’homme fournit.  Ce sont des atouts qui n’ont rien à voir avec les différentes ressources et capacités d’autres initiatives en matière des droits de l’homme. Elle a donc soutenu la recommandation faite sur les effectifs du Bureau, ajoutant que son pays ne cesse de se féliciter de ce que le Bureau régional appuie les États de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).

M. VADIM N. LAPUTIN (Fédération de Russie) a rappelé qu’après le retrait de son pays du Conseil des droits de l’homme, l’« Occident collectif » et les représentants du « régime de Kiev » continuent d’imposer aux autres une image subjective et partiale du monde.  Un monde, a-t-il dit, dans lequel la Fédération de Russie est le seul coupable d’événements qui, en fait, ont été provoqués exclusivement par les « actes criminels » du « régime de Kiev » à l’instigation de l’Occident.  Le représentant a illustré ses propos, en invoquant l’adoption par le Conseil des droits de l’homme des résolutions 52/32 sur la situation des droits humains en Ukraine et 54/23 sur la situation des droits humains en Fédération de Russie.  Ces deux résolutions prouvent le refus des pays occidentaux de coopérer et d’engager un dialogue constructif, respectueux et sur un pied d’égalité sur la question des droits humains. 

De fait, a-t-il argué, la poursuite des travaux de la prétendue Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine ne vise qu’à imposer ouvertement les « intérêts conjoncturels » des pays occidentaux toujours aveugles et sourds devant les violations commises par l’Ukraine. Nous ne reconnaissons pas cette commission et nous refusons toute coopération avec elle, a martelé le représentant.  De même, a-t-il estimé, il faut s’étonner de la prolongation du mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Fédération de Russie, en vertu d’une décision qui n’a rien à voir avec la réalité puisqu’elle est fondée sur une vision étroite et des accusations fabriquées de toutes pièces par la société civile.  Nous continuerons, a conclu le représentant, de nous opposer à l’adoption de résolutions politisées et spécifiques à des pays pour servir les intérêts des autres. La Fédération de Russie rejette l’idée d’inscrire au budget ordinaire des ressources pour la mise en œuvre des résolutions 52/32 et 54/23.

M. BADRELDEEN BAKHIT MUSA BAKHIT (Soudan) a dénoncé la résolution S-36/1 du Conseil des droits de l’homme qui, en toute subjectivité, met sur un pied d’égalité les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, au détriment de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale du Soudan.  Le représentant a dit ne pas comprendre comment l’on peut placer au même niveau des forces nationales et une milice formée de mercenaires jouissant d’appuis extérieurs.  Comment, a-t-il ajouté, peut-on adopter une telle résolution alors que les autorités soudanaises ne font qu’assumer leur devoir constitutionnel de protéger les civils?  La promotion des droits de l’homme est une priorité pour notre gouvernement soudanais, a affirmé le représentant, en en voulant pour preuve le fait que les autorités travaillent en bonne intelligence avec le Bureau national des droits de l’homme et les mécanismes de l’ONU. 

Il a rappelé que la résolution, poussée par certains États, a été catégoriquement rejetée par les deux groupes régionaux auxquels son pays appartient, à savoir le Groupe des États d’Afrique et le Groupe arabe.  Nous rejetons un texte qui ne tient pas compte des priorités du peuple soudanais, dans la conjoncture actuelle.  En revanche, nous avons accepté la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par la milice.  Il est donc curieux, s’est, une nouvelle fois, étonné le représentant, de voir une résolution sur la création d’une commission d’enquête.  Il a prévenu que les mécanismes créés par le Conseil des droits de l’homme sans le consentement des pays hôtes sont voués à l’échec.  Le Soudan n’entend en aucun cas coopérer. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale exige un cessez-le-feu humanitaire immédiat dans la bande de Gaza ainsi que la libération inconditionnelle des otages

Soixante-dix-huitième session, Dixième session extraordinaire d’urgence (reprise)
45e séance plénière – après-midi
AG/12572

L’Assemblée générale exige un cessez-le-feu humanitaire immédiat dans la bande de Gaza ainsi que la libération inconditionnelle des otages

Gravement préoccupée par la situation humanitaire « catastrophique » qui règne dans la bande de Gaza et par les souffrances endurées par la population civile palestinienne, l’Assemblée générale a adopté, cet après-midi, lors d’une session extraordinaire d’urgence, une résolution exigeant un cessez-le-feu humanitaire immédiat, la libération inconditionnelle des otages ainsi que l’assurance d’un accès humanitaire. 

« De toute évidence, nous assistons en temps réel à l’effondrement sans précédent d’un système humanitaire déjà en ruine », a déploré le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis, à l’ouverture de la séance, « et à un profond manque de respect à la fois du droit international et du droit international humanitaire ».  Si la trêve humanitaire temporaire a permis la libération des otages et des détenus ainsi que l’acheminement d’une « certaine aide », depuis le 1er décembre, nous assistons, selon le Président, à une reprise des violences avec une « sorte de férocité ». 

C'est dans ce contexte que l’Assemblée générale a adopté, par 153 voix en faveur, 10 contre (Autriche, États-Unis, Guatemala, Israël, Libéria, Micronésie, Nauru, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, Tchéquie) et 23 abstentions, la résolution intitulée « Protection des civils et respect des obligations juridiques et humanitaires », qui exige également que les parties s’acquittent de leurs obligations au titre du droit international, y compris le droit international humanitaire, notamment pour ce qui est de la protection des civils.  En présentant la résolution, l’Égypte a fait valoir, au nom du Groupe des États arabes, que la mise en œuvre de ce texte restait un « devoir non accompli » de la communauté internationale depuis plus de deux mois, tout en mettant en garde contre le risque de « génocide » et d’embrasement de la région. 

L’Égypte et la Mauritanie, agissant au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), avaient demandé la reprise de la dixième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale à la suite du veto opposé par les États-Unis au Conseil de sécurité, le 8 décembre dernier, à un projet de résolution exigeant un cessez-le-feu humanitaire immédiat.  Il s’agissait du deuxième veto opposé par Washington sur cette question, après celui du 18 octobre dernier. 

L’Assemblée générale a en outre rejeté, par 89 voix pour, 61 contre et 20 abstentions, soit en deçà de la majorité des deux tiers requise, un projet d’amendement présenté par l’Autriche et visant à modifier le paragraphe 3 de la résolution en y insérant, après « otages », les mots « détenus par le Hamas et d’autres groupes ».  La délégation autrichienne a expliqué que ce texte « court et constructif », basé sur la résolution 2712 (2023) du Conseil, visait à remédier aux insuffisances de la résolution en ce qui concerne le droit d’Israël à assurer la sécurité de ses citoyens et en désignant le groupe terroriste responsable de la prise d’otages.  « Les enfants, les femmes et les hommes innocents retenus captifs à Gaza n’ont pas simplement disparu ou se sont égarés.  Ils ont été enlevés par le Hamas. »

Tout en se déclarant favorables à de nombreux aspects de la résolution, les États-Unis ont présenté à leur tour un projet d’amendement visant à insérer, en tête du dispositif, un paragraphe par lequel l’Assemblée aurait rejeté et condamné « sans équivoque les attentats terroristes odieux perpétrés par le Hamas en Israël depuis le 7 octobre 2023 et la prise d’otages », un « minimum absolu » pour la délégation américaine, qui a été défait par 84 voix en faveur, 62 contre et 25 abstentions.  

Le Pakistan a regretté que l’Autriche et les États-Unis aient présenté des amendements pour, « une fois encore », ne condamner qu’une seule partie, se disant convaincu que les États Membres refuseraient de condamner exclusivement le Hamas sans accuser Israël, ce qui serait à la fois « injuste et inéquitable ».  « Est-ce de la légitime défense lorsque vous pouvez tuer 18 000 civils en toute impunité? » 

Non seulement cette résolution « hypocrite » ne condamne pas le Hamas, mais elle ne le mentionne même pas, a rétorqué Israël.  « Ce n’est pas Israël qui a violé le cessez-le-feu qui était en vigueur le 6 octobre, mais 3 000 nazis du Hamas », a fustigé la délégation.  Elle a accusé le Hamas d’avoir fait voler en éclats la pause humanitaire en refusant de libérer des otages, en violant des femmes et en faisant pleuvoir des missiles sur son territoire.  « Ceux qui appuient cette résolution ne font que signer un chèque en blanc à cette organisation terroriste, a encore averti Israël, en ajoutant que « l’exploitation » des Palestiniens a fait de l’ONU une « tache sur la conscience de l’humanité ».  Le représentant israélien a alors brandi une affiche indiquant le numéro de téléphone du bureau du Hamas à Gaza. 

Pourtant, a constaté l’Arabie saoudite, chaque jour qui passe la situation humanitaire continue de se détériorer, tandis que la communauté internationale se montre incapable d’endiguer une catastrophe qui est le résultat d’une escalade incessante.  Appuyé par Chypre, le Liechtenstein a indiqué pour sa part avoir soutenu la résolution en se fondant sur les progrès accomplis lors du court répit accordé aux populations civiles pendant la pause humanitaire, tant en ce qui concerne la libération des otages que l'acheminement des secours humanitaires. 

Comme la Bulgarie et les Pays-Bas, l’Allemagne a jugé « inacceptable » un texte qui ne condamne ni les actes terroristes ni les violations du droit international dont le Hamas s'est rendu coupable le 7 octobre, y compris les actes de violence sexuelle atroces commis contre les femmes et les filles israéliennes.  

Dans ce contexte, les États–Unis ont fait valoir qu’un cessez-le-feu serait dangereux à la fois pour les Israéliens, qui seraient pris pour cible par des attaques incessantes, mais aussi pour les Palestiniens, qui méritent la chance de construire un avenir meilleur sans le Hamas.  Néanmoins, « la manière dont Israël se défend importe », a reconnu la représentante américaine.  Tel Aviv doit donc éviter tout déplacement de masse de civils dans le sud de Gaza, veiller à l’acheminement de l’aide humanitaire et permettre aux civils de regagner leur foyer dès que la situation le permettra.  « Le Hamas ne peut avoir de rôle à l'avenir dans la gouvernance de Gaza », a insisté le Canada. 

Pour sa part, la Suisse a soutenu cette résolution et demandé sa mise en œuvre, en considérant un cessez-le-feu humanitaire comme une pause humanitaire limitée dans le temps, sans préjudice du droit d’Israël d’assurer sa sécurité. Afin d’éviter une escalade régionale du conflit, elle a appelé les parties à respecter leurs obligations, dont celle d’assurer un accès humanitaire à travers tous les points de passage. 

Une fois de plus, le Conseil de sécurité a échoué à s’acquitter de son mandat, a déploré l’Afrique du Sud, même après que le Secrétaire général a pris l’initiative d’invoquer, le 6 décembre, l’Article 99 de la Charte des Nations Unies pour attirer son attention sur les menaces qui pèsent sur la paix et la sécurité internationales.  Ayant vécu l’apartheid, elle a souligné l’importance d’agir conformément au droit international, lequel doit être appliqué de façon uniforme et non sélective.  

« Ce dont nous sommes témoins à Gaza constitue une violation manifeste du droit international humanitaire et des droits de l'homme », a renchéri la Slovénie, consternée par le risque d’effondrement de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  L’UNRWA, qui représente une « lueur d’espoir » pour des milliers d'habitants de Gaza, a vu son personnel décimé par les combats et a lui-même besoin d’une aide humanitaire.

Pour sa part, la Fédération de Russie a espéré qu’après l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité sera en mesure de s’acquitter de ses responsabilités. « En opposant leur veto à un appel à un cessez-le-feu, les États-Unis ont donné un droit de tuer à Israël et sont pleinement responsables de toute nouvelle victime dans le cadre du conflit à Gaza », a-t-elle accusé.  

« Tant que cette violence persistera, une solution politique à ce conflit continuera d’être compromise », a prévenu le Président de l’Assemblée générale.  Plus cela prendra de temps, plus grand sera le risque qu’une solution négociée à deux États devienne hors de portée.

La reprise de la dixième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale se poursuivra le vendredi 15 décembre, à 15 heures. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Président du Comité des sanctions concernant Haïti s’alarme du retard pris dans le déploiement d’une force multinationale spécialisée

9504e séance - après-midi
CS/15526

Le Président du Comité des sanctions concernant Haïti s’alarme du retard pris dans le déploiement d’une force multinationale spécialisée

À l’occasion d’un bref exposé devant le Conseil de sécurité, cet après-midi, le Président du Comité des sanctions créé par la résolution 2653 (2022) concernant Haïti a regretté que le déploiement d’une force multinationale spécialisée en soutien de la Police nationale d’Haïti (PNH) tarde à se concrétiser, alors que la situation sécuritaire du pays demeure préoccupante.

M. Michel Xavier Biang, Représentant permanent du Gabon, a constaté qu’Haïti reste en proie à une extrême violence caractérisée par des kidnappings avec demandes de rançons, des affrontements entre gangs rivaux, une justice populaire et l’infiltration des institutions par des réseaux criminels. Dans la capitale, Port-au-Prince, plus de la moitié du territoire est aux mains des bandes criminelles qui dictent leur loi et rendent le quotidien des populations haïtiennes infernal, a dénoncé le Président du Comité 2653.

Face à cette situation, l’adoption par le Conseil de sécurité, le 2 octobre dernier, de la résolution 2699 (2023) visant le déploiement d’une force multinationale spécialisée en vue d’apporter un appui à la PNH pour rétablir la paix et la sécurité dans ce pays avait été accueillie avec beaucoup d’espoir, a rappelé M. Biang, regrettant que la mise en œuvre de ce texte « tarde à être effective ».  Pourtant, a-t-il insisté, l’enjeu lié au déploiement de cette force est crucial: « il s’agit de restaurer l’état de droit, de réformer le système judiciaire, de professionnaliser la Police nationale d’Haïti et de la rendre autonome, pleinement opérationnelle, bien structurée et équipée ».

Pour le Président du Comité 2653, il importe de travailler au déploiement effectif de cette force, qui, combinée aux sanctions prévues par le régime de sanctions, « constitue un atout pour le retour espéré de la paix et la stabilité à Haïti, mais également pour l’éradication des violations des droits humains, des enlèvements, des violences sexuelles, de la traite des personnes, des exécutions extrajudiciaires et de la contrebande d’armes ».  M Biang a ajouté que son comité s’emploie en outre à élargir les sanctions.

En guise de conclusion, il a réitéré ses félicitations au Kenya pour son leadership et son engagement, qui, selon lui, mérite d’être « soutenu de façon multiforme » par la communauté internationale.  Il a également salué les efforts déployés sur le terrain par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et la Communauté des Caraïbes (CARICOM), avant d’appeler une nouvelle fois à la mise en œuvre pleine et effective de la résolution 2699 (2023).

Intervenant à leur tour, les États-Unis ont salué les activités du Comité ainsi que le rapport exhaustif de son Groupe d’experts, qui met en lumière les activités des chefs de gangs en Haïti.  À cet égard, ils ont indiqué avoir demandé l’inscription de trois chefs de gangs sur la Liste des sanctions.  Invitant le Conseil à utiliser tous les outils à sa disposition pour « venir à bout de la violence en Haïti », ils ont déclaré envisager l’inscription de nouveaux individus sur cette liste et compter sur l’appui des membres du Conseil à cet égard.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil sécurité entend un exposé de la Présidente du Comité des sanctions concernant le Soudan, qui demande à nouveau la levée de l’embargo sur les armes

9503e séance - après-midi
CS/15525

Le Conseil sécurité entend un exposé de la Présidente du Comité des sanctions concernant le Soudan, qui demande à nouveau la levée de l’embargo sur les armes

Le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, un bref exposé de la Présidente du Comité créé en application de la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan.  Mme Carolyn Oppong-Ntiri, du Ghana, a présenté les activités menées par cet organe subsidiaire du Conseil depuis le 14 septembre, avant que la délégation soudanaise ne demande à nouveau la levée de l’embargo sur les armes s’appliquant contre son pays et rejette les appels à sa prorogation.

Au cours du dernier trimestre, le Comité, a expliqué la Présidente, a ainsi reçu des mises à jour de la part du Groupe d’experts, chargé de surveiller la mise en œuvre du régime de sanctions applicables au Soudan, notamment sur l’escalade des violences qui touchent en particulier les femmes et les enfants, faisant part d’« hostilités généralisées » impliquant les Forces d’appui rapides.

Le représentant soudanais a donc appelé à l’imposition d’un embargo sur le transfert d’armes et d’équipements militaires aux Forces d’appui rapide ainsi qu’aux mercenaires qui combattent à leurs côtés, en raison des attaques auxquelles ils se livrent contre les populations civiles, dans les États du Darfour méridional et du Darfour central, grâce à leurs relations avec des « acteurs militaires » de pays voisins.  Selon lui, ces appuis constituent un crime d’agression et une atteinte à la souveraineté soudanaise qui doivent être condamnés.

Le représentant a en outre accusé la communauté internationale de ne pas avoir respecté ses engagements relatifs à la mise en œuvre du programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration, qui a entravé ainsi celle de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan.

Le délégué soudanais a ensuite évoqué les progrès accomplis dans le cadre du Plan national de protection des civils par le Gouvernement avant la guerre actuelle, notamment l’adhésion des mouvements du Darfour à l’Accord de Djouba contre une agression soutenue par des pays voisins.  Ce plan nécessite un soutien financier pour accroître l’approvisionnement des forces régulières dans la région du Darfour et la lutte contre le trafic d’êtres humains et de drogues, a-t-il argué.

Mme Oppong-Ntiri a indiqué qu’au cours de la période à l’examen, le Groupe d’experts du Comité a également fait rapport sur les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire au Darfour et notamment dans le centre de cet État, ainsi que sur les dynamiques régionales et la hausse des tensions entre les signataires à l’Accord de Djouba.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la Présidente du Mécanisme des Tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda présente un plan d’action pour l’avenir

9502e séance – matin
CS/15524

Conseil de sécurité: la Présidente du Mécanisme des Tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda présente un plan d’action pour l’avenir

Compte tenu de l’achèvement en substance des principaux travaux judiciaires hérités des Tribunaux ad hoc, le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux de l’ex-Yougoslavie et du Rwanda se concentre sur la planification pour l’avenir et sur la réduction progressive de ses opérations, a expliqué ce matin sa Présidente, Mme Graciela Gatti Santana.  Maintenant que les procédures en première instance et en appel sont closes, son Bureau s’attache pleinement à l’exécution de ses fonctions résiduelles restantes, a assuré le Procureur, M. Serge Brammertz, lors du débat semestriel sur le Mécanisme au Conseil de sécurité.

Mme Gatti Santana a informé qu’elle avait revu les priorités de sa présidence « pour mieux refléter la nouvelle phase de l’existence du Mécanisme », une évolution saluée par la majorité des délégations.  Ainsi a-t-elle présenté hier au Groupe de travail informel sur les tribunaux internationaux un projet de « cadre d’action pour mener à bien les fonctions ».  J’entends démontrer la valeur de la transparence et de la responsabilité, a-t-elle dit, et « prouver qu’une institution aux ressources limitées peut continuer à fonctionner dans le respect des normes d’exécution les plus rigoureuses ». 

La Présidente et le Procureur ont présenté le onzième rapport annuel et les progrès du Mécanisme.  Les Chambres ont considérablement avancé dans l’achèvement de leurs activités judiciaires, ont-ils expliqué.  À la suite du prononcé de l’arrêt le 31 mai 2023 dans l’affaire Le Procureur c. Jovica Stanišić et Franko Simatović, la dernière affaire héritée du Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie, le Mécanisme n’est plus saisi que d’une affaire relative aux crimes principaux, à savoir l’affaire mettant en cause Félicien Kabuga, qui est temporairement suspendue en attendant qu’il soit statué sur l’appel de la décision par laquelle la Chambre de première instance a conclu que M. Kabuga n’était pas apte à être jugé.  S’agissant de la procédure dans cette affaire, M. Brammertz a dit ressentir un « très grand mécontentement ».  Non pas à l’égard des juges, dont la décision est fondée sur la jurisprudence et doit être respectée, a-t-il expliqué, mais pour la justice non obtenue par les victimes et les rescapés des crimes commis par M. Kabuga, qui ne rendra pas de comptes pour le rôle qu’il a joué dans les souffrances du peuple rwandais.  Mais « nous avons le pouvoir de veiller à ce que d’autres criminels soient jugés, en particulier ceux qui continuent de se cacher au sein de diasporas à travers le monde », a insisté le Procureur. 

De l’avis du Gabon, qui préside le Groupe de travail informel, le Mécanisme doit désormais pouvoir se consacrer de façon définitive à la réouverture de l’affaire Kabuga.  « La lutte contre l’impunité doit demeurer un impératif pour la communauté internationale. »  Soulignant le rôle capital des États dans l’exécution des peines, le Mozambique a pour sa part invité le Conseil à se pencher sur la situation préoccupante des personnes acquittées et libérées qui ont été réinstallées au Niger.  Saluant l’arrestation de Fulgence Kayishema, l’un des derniers fugitifs inculpés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le 24 mai 2023, en Afrique du Sud, le Ghana a appelé tous les États qui abritent des fugitifs à coopérer avec le Mécanisme.

Le Mécanisme a fait un pas de plus vers l’achèvement de ses fonctions en matière de recherche de fugitifs, a précisé Mme Gatti Santana, qui a signalé le décès, le 15 novembre, du fugitif Aloys Ndimbati, initialement mis en accusation par le TPIR en 1995 et dont l’affaire avait été renvoyée au Rwanda.  À ce jour, il ne reste plus que deux fugitifs du TPIR. M. Brammertz n’a émis aucun doute quant au fait que les autorités sud-africaines veilleront à ce que M. Kayishema soit remis au Mécanisme sans plus tarder. 

Le Mécanisme a officiellement reconnu la capacité du Rwanda à mener des procès pour génocide dans le strict respect des normes internationales de procédure régulière, a souligné le représentant de ce pays.  Selon lui, la responsabilité s’étend au-delà des individus responsables du génocide des Tutsis en 1994 et concerne également les nations où ils cherchent refuge.  À ce jour, le Rwanda a émis plus de 1 000 actes d’accusation contre des suspects de génocide dans 33 pays et auprès du Secrétariat d’INTERPOL. 

« On ne peut pas m’expliquer de manière rationnelle pourquoi un tribunal ad hoc existe depuis si longtemps », a protesté la Fédération de Russie.  Dans une situation où le « panier » judiciaire du Mécanisme est vide, les efforts de ses dirigeants devraient viser, avant tout, à restreindre ses activités, a-t-elle ajouté, disant se méfier des tentatives visant à augmenter « artificiellement » le nombre de procès pour « outrage à la justice ». 

S’agissant de l’ex-Yougoslavie, et devant « l’absence de progrès dans l’affaire Petar Jojić et Verica Radeta pour outrage au tribunal », la Serbie a assuré qu’elle a respecté ses obligations internationales et invité le Mécanisme à « reconsidérer sa décision » et à autoriser le renvoi de cette affaire aux autorités judiciaires serbes.  « Ce ne sont pas les Serbes, les Croates ou les Bosniaques qui sont coupables.  Ces crimes ont été l’œuvre d’individus.  Et ce sont ces individus, provenant de tous les groupes ethniques, que nous avons fait juger et déclarer coupables », a dit le Procureur, pour avoir pris part à une entreprise criminelle commune visant à un nettoyage ethnique dans de vastes portions du territoire de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine. 

Aux yeux de la Croatie, ce jugement établit un lien clair entre les hauts dirigeants serbes et les crimes d’atrocité commis en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.  Quelque 3 000 auteurs présumés de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide commis en ex-Yougoslavie n’ont toujours pas été traduits en justice, a rappelé la Bosnie-Herzégovine, appelant à renforcer la coopération judiciaire régionale.  Plusieurs délégations, dont la France, se sont dites préoccupées par le déni des crimes, les discours de haine et la glorification de génocidaires et criminels de guerre condamnés par les Tribunaux pénaux internationaux au terme de procédures impartiales et indépendantes. 

Si le Mécanisme est déterminé à rationaliser ses activités et à réduire ses effectifs, « il ne ferme pas encore ses portes », conclut le rapport annuel du Mécanisme.  De nombreuses responsabilités à long terme et relatives aux fonctions résiduelles continues nécessiteront l’attention du Mécanisme jusqu’à ce que le Conseil de sécurité en décide autrement.

MÉCANISME INTERNATIONAL APPELÉ À EXERCER LES FONCTIONS RÉSIDUELLES DES TRIBUNAUX PÉNAUX (S/2023/566)

Déclarations

Mme GRACIELA GATTI SANTANA, Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (MIFRTP), a fait valoir le rôle pionnier des Tribunaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda (TPIY et TPIR) qui ont traduit en justice des centaines d’auteurs de crimes notoires qui, pour beaucoup à l’époque, échappaient aux juridictions nationales.  Quant au Mécanisme, il est l’incarnation des promesses faites il y a 75 ans par l’Assemblée générale, et des mesures qu’elle a prises il y a 30 ans pour les matérialiser en réponse aux ravages causés en ex-Yougoslavie et au Rwanda dans les années 1990.  Mme Gatti Santana a indiqué que « des événements décisifs » se sont produits depuis sa dernière intervention devant le Conseil, en juin dernier, le Mécanisme ayant enfin opéré une transition en entrant dans sa phase véritablement résiduelle. 

Ainsi, concernant le Rwanda, cette institution n’est plus saisie d’aucun procès en première instance ou en appel dans des affaires relatives à des crimes principaux depuis la suspension sine die, en septembre, de la procédure dans l’affaire concernant Félicien Kabuga, a-t-elle indiqué. Dans l’intervalle, ce dernier demeure au quartier pénitentiaire des Nations Unies, à La Haye, pendant que la Chambre de première instance est saisie de la question de sa mise en liberté provisoire.  Les conseils assurant la défense de Félicien Kabuga, avec l’aide du Greffier, cherchent activement un lieu qui convienne à cet effet, et ces questions seront débattues au cours d’une conférence de mise en état qui se tiendra demain, le 13 décembre. En outre, il a été conclu à titre provisoire, en octobre, que Félicien Kabuga n’était pas indigent et qu’il serait en mesure de financer l’intégralité des frais engagés pour sa défense s’il lui était donné accès aux avoirs gelés par le TPIR et le Mécanisme.  Établir la faisabilité du recouvrement des frais engagés pour sa défense et les recouvrir in fine est primordial pour le Mécanisme, a affirmé la Présidente. 

Par ailleurs, le Mécanisme a fait un pas de plus vers l’achèvement de ses fonctions en matière de recherche de fugitifs. Mme Gatti Santana a rappelé le décès, le 15 novembre, du fugitif Aloys Ndimbati, qui avait été initialement mis en accusation par le TPIR en 1995 et dont l’affaire avait été renvoyée au Rwanda, ce qui fait que désormais, il ne reste plus que deux fugitifs du TPIR. En conséquence, le Mécanisme se concentre maintenant sur la planification pour l’avenir et sur la réduction progressive de ses opérations, ainsi que pour répondre pleinement aux éléments connexes de la résolution 2637 (2022), et aux recommandations formulées par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI).

La Présidente du Mécanisme a informé qu’elle avait revu les priorités de sa présidence « pour mieux refléter la nouvelle phase de l’existence du Mécanisme ».  Ainsi a-t-elle présenté hier au Groupe de travail informel sur les tribunaux internationaux un projet de « cadre d’action pour mener à bien les fonctions », en particulier la promotion d’une direction efficace et une bonne gouvernance dans la transparence et la responsabilité, aux fins de « prouver qu’une institution aux ressources limitées peut continuer à fonctionner dans le respect des normes d’exécution les plus rigoureuses ».  Le Mécanisme s’attèle aussi à identifier les domaines dans lesquels son efficacité peut être accrue en fusionnant, restructurant et rationalisant son organisation et ses processus internes. 

Se déclarant convaincue que les informations et les propositions présentées aideront le Conseil de sécurité à décider de l’avenir des diverses activités, Mme Gatti Santana a signalé que le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) a présenté certaines conclusions préliminaires sur le plan opérationnel et qu’elle attend de recevoir ultérieurement l’intégralité de son rapport.

La Présidente du Mécanisme a ensuite évoqué certaines difficultés susceptibles de survenir après le prononcé de jugements. S’agissant de l’exécution des peines, par exemple, des difficultés, imprévisibles il y a 30 ans, ont récemment engendré d’épineux problèmes.  Elle a ainsi expliqué que plusieurs personnes condamnées ont été renvoyées au quartier pénitentiaire des Nations Unies, à La Haye, par des États incapables de poursuivre l’exécution de leurs peines, créant par là-même une charge tant pour le Mécanisme que pour l’État hôte et « transformant en substance le quartier pénitentiaire en prison ».  Mme Gatti Santana a dit s’attendre à ce qu’une telle situation se répète dans les années à venir, insistant que « la solution à ce problème est politique ».  Elle a néanmoins reconnu que les responsabilités liées à l’exécution des peines peuvent être lourdes, et salué les efforts des 12 États chargés de l’exécution des peines, dont l’engagement avéré en faveur de la justice pénale internationale est source d’inspiration.  Elle a également tenu à rappeler la situation des sept personnes réinstallées au Niger, autre difficulté qui n’aurait pu être prévue au moment de la création des tribunaux ad hoc et qui requiert la ferme intervention des États.  Le 27 décembre, cela fera deux ans que les personnes réinstallées sont de facto assignées à résidence, a-t-elle fait savoir, exhortant les États à prêter main-forte au Mécanisme par tous les moyens possibles en vue de régler la question une fois pour toutes. 

Par ailleurs, la Présidente a mentionné les tentatives « inquiétantes » visant à affaiblir les travaux et les jugements du Mécanisme, en faisant référence à la propension toujours plus grande, selon elle, à la négation du génocide et au révisionnisme, ainsi qu’à la glorification des criminels de guerre.  Cela peut se traduire de diverses manières, notamment par l’utilisation des médias sociaux pour nier, banaliser ou justifier ce qui s’est passé au Rwanda et en ex-Yougoslavie.  « La négation du génocide nous concerne tous, et le meilleur moyen d’éviter de nouvelles atrocités passe par la protection de la vérité », a-t-elle affirmé.  Elle a notamment rappelé le « refus persistant » de la Serbie d’exécuter les mandats d’arrêt et ordres de transfèrement visant les accusés dans l’affaire d’outrage Jojić et Radeta.  Pareil comportement, particulièrement dans le contexte d’un outrage au tribunal, vise à affaiblir le processus judiciaire engagé devant le Mécanisme.  Il porte également directement atteinte à l’autorité du Conseil de sécurité, a-t-elle tranché.  « À cet égard également, nous demandons votre aide. »

Le Mécanisme se tient prêt à coopérer dans le cadre de l’examen pour l’année 2024, a conclu Mme Gatti Santana, se disant déterminée à faire « tout ce qui est en son pouvoir » afin de « mener à terme, de manière optimale, les activités restantes, qu’elles soient exercées par le Mécanisme lui-même ou par une autre instance appropriée désignée pour prendre la relève ». 

M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, présentant les activités de son Bureau et des résultats qu’il a obtenus, a indiqué avoir mené à bien son importante mission qui consistait à diligenter les poursuites dans les dernières affaires héritées du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et du Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). 

Ainsi, le 31 mai 2023, la Chambre d’appel a rendu son arrêt dans l’affaire Stanišić et Simatović.  Elle a retenu les arguments du Bureau montrant que Jovica Stanišić et Franko Simatović étaient pénalement responsables en tant que participants à une entreprise criminelle commune visant à un nettoyage ethnique dans de vastes portions du territoire de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine. « Ce ne sont pas les Serbes, les Croates ou les Bosniaques qui sont coupables.  Ces crimes ont été l’œuvre d’individus.  Et ce sont ces individus, provenant de tous les groupes ethniques, que nous avons fait juger et déclarer coupables », a déclaré le Procureur.

S’agissant de la procédure dans l’affaire Kabuga, elle est close, a dit M. Brammertz, ajoutant que son Bureau, et tous ceux qui ont foi en la justice, ne peuvent que ressentir un « très grand mécontentement ».  Non pas à l’égard des juges, dont la décision est fondée sur la jurisprudence et doit être respectée, a-t-il expliqué, mais pour la justice non obtenue par les victimes et les rescapés des crimes commis par Félicien Kabuga, qui ne rendra pas de comptes pour le rôle qu’il a joué dans les souffrances du peuple rwandais.  Mais « nous avons le pouvoir de veiller à ce que d’autres criminels soient jugés, en particulier ceux qui continuent de se cacher au sein de diasporas à travers le monde », a insisté le Procureur.  Quant à Fulgence Kayishema, il a été arrêté le 24 mai dernier et reste en détention en Afrique du Sud, dans l’attente de son transfèrement initial à Arusha.  M. Brammertz a dit ne pas douter que les autorités sud-africaines veilleront à ce que Fulgence Kayishema soit remis au Mécanisme, sans plus tarder. 

Maintenant que les procédures en première instance et en appel sont closes, son Bureau s’attache pleinement à l’exécution de ses fonctions résiduelles restantes, a assuré le Procureur.  La plus importante de ces fonctions est l’assistance apportées aux autorités nationales qui poursuivent le processus d’établissement des responsabilités pour les crimes commis au Rwanda et en ex-Yougoslavie. Conformément aux stratégies d’achèvement des travaux, le Bureau continue de répondre aux demandes d’assistance des partenaires nationaux.  Les autorités rwandaises entendent toujours traduire en justice plus de 1 200 génocidaires en fuite.  De même, les parquets en ex-Yougoslavie doivent encore diligenter des enquêtes pour plus de 1 000 criminels de guerre présumés et, lorsqu’il y a lieu, les poursuivre. 

Les autorités dans les États Membres tiers, en particulier en Europe et en Amérique du Nord, ont également des dossiers à traiter, a poursuivi M. Brammertz.  Au cours des dernières années, le Bureau a reçu plus de 300 demandes d’assistance par an.  C’est là le signe de la réelle nécessité de l’appui que nous apportons, s’est réjoui le Procureur, avant de détailler les formes d’assistance apportées à ses partenaires nationaux.  Mais alors que cette année marque le soixante-quinzième anniversaire de l’adoption de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, il a rappelé qu’« il n’y a pas de date de péremption pour l’obligation qu’a la communauté internationale de juger les auteurs de crimes de génocide ».  S’il est vrai que les procès internationaux concernant les crimes commis au Rwanda et en ex-Yougoslavie sont aujourd’hui terminés, les parquets nationaux poursuivent le travail dans leurs tribunaux.  Sachant que des milliers d’auteurs de crimes provenant du Rwanda et de l’ex-Yougoslavie doivent toujours être jugés, chaque État Membre a la responsabilité et la possibilité de jouer un rôle en apportant son entière coopération et un appui concret, a-t-il conclu. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a appuyé les efforts déployés par le Mécanisme en dépit des nombreux défis pour mener à bien les fonctions résiduelles.  Le représentant a noté l’efficience des procédures judiciaires, tant pour le respect des droits fondamentaux des accusés que pour la protection de l’identité des témoins.  Il a soutenu les mesures prises en vue de permettre une transition effective des fonctions résiduelles.  S’agissant des procédures judiciaires, la conclusion de l’affaire Jovica Stanišić et Franko Simatović représente selon lui une étape cruciale dans la réponse aux violations des lois et des coutumes de la guerre, aux cas de déportation, aux actes inhumains et aux crimes contre l’humanité commis dans les Balkans en 1992.  Elle redonne aux victimes l’espoir que, « quelle que soit la durée, justice sera rendue », a-t-il souligné.

De l’avis du représentant, le Mécanisme doit désormais pouvoir se consacrer de façon définitive à la réouverture de l’affaire Félicien Kabuga, tel qu’il ressort du jugement de la Chambre de première instance, le 8 septembre 2023.  La lutte contre l’impunité doit demeurer un impératif pour la communauté internationale, a-t-il insisté.  À cet égard, il a encouragé les États Membres concernés à une coopération étroite avec les deux branches du Mécanisme afin de maximiser la collecte des éléments de preuve indispensables à l’ouverture d’enquêtes judiciaires futures. En conclusion, il a dénoncé la glorification des auteurs de crimes graves.

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a encouragé les efforts visant à faire du Mécanisme résiduel une entité véritablement restreinte, temporaire et efficiente, telle qu’imaginée par les résolutions 1966 (2010) et 2637 (2022) du Conseil de sécurité.  Le représentant a reconnu les défis qui subsistent s’agissant de l’exécution du mandat du Mécanisme, y compris l’exécution des peines. Il a souligné le rôle capital des États dans l’exécution desdites peines.  Il a également invité le Conseil à se pencher sur la situation des personnes acquittées et libérées qui ont été réinstallées au Niger, en vertu d’un accord entre ce pays et les Nations Unies.  Leur situation sans issue est préoccupante, notamment depuis le coup d’État qui a eu lieu au Niger le 26 juillet dernier, a fait observer le délégué. Il a estimé que ces personnes, qui ont purgé leurs peines, doivent pouvoir jouir de leur liberté et de leurs droits.  « Nous encourageons la poursuite des efforts en vue de trouver une solution à cette question rendue urgente par l’instabilité politique au Niger », a-t-il déclaré. 

M. CHANAKA LIAM WICKREMASINGHE (Royaume-Uni) a noté l’efficacité des travaux du Mécanisme au cours du semestre écoulé, relevant notamment la confirmation de la mort du fugitif Aloys Ndimbati, et se faisant l’écho de l’appel figurant dans le rapport en faveur de la poursuite de la coopération entre tous les États afin de parvenir à l’arrestation des deux derniers fugitifs rwandais dès que possible.  Le travail du Mécanisme demeure essentiel, a-t-il affirmé en pointant l’exacerbation des tensions « ethnonationales » dans les Balkans occidentaux ainsi que l’utilisation « inquiétante » de discours de haine par certaines personnalités politiques.  Un tel langage enracine la division et empêche les pays d’offrir les environnements sûrs, inclusifs et prospères que leurs citoyens méritent, a opiné le représentant pour qui le Mécanisme a joué un rôle essentiel dans l’administration de la justice pour tous.  Après avoir salué les progrès dans les discussions avec le Gouvernement de la Croatie sur l’établissement à Zagreb d’un centre d’information sur le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, il a estimé que de tels centres pourraient contribuer à lutter contre le déni de crimes d’atrocités. Il a considéré tout aussi essentiel le travail avec le Gouvernement rwandais alors que le Rwanda s’apprête à commémorer, en avril 2024, le trentième anniversaire du génocide contre les Tutsis. 

Le Royaume-Uni, a indiqué le représentant, manifeste son soutien au Mécanisme en exécutant les peines et en prenant soin des détenus, sous la supervision dudit Mécanisme.  Il a néanmoins signalé plusieurs questions en suspens qui ont une incidence sur la capacité du Mécanisme à s’acquitter de son mandat, et exprimé sa déception concernant les informations selon lesquelles certains États bloquent la coopération dans les Balkans occidentaux.  Il a ainsi appelé la Serbie à s’acquitter de son obligation d’arrêter et de transférer Petar Jojić et Vjerica Radeta au Mécanisme après des années de demandes.  Cela est également vrai face à la situation des Rwandais relocalisés au Niger qui sont devenus apatrides depuis 2022 et restent assignés à résidence.  Enfin, il a souhaité une mise à jour sur les efforts déployés pour trouver une solution durable concernant ces personnes.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a noté que le Mécanisme continue de jouer un rôle important pour que justice soit faite pour les crimes les plus graves commis au siècle dernier.  S’agissant des derniers fugitifs mis en accusation par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, il a salué l’arrestation de Fulgence Kayishema en Afrique du Sud, après 20 ans en cavale.  Il a pris note de la mort d’Aloys Ndimbati, recherché depuis près de 20 ans, et du fait que M. Kabuga n’est pas apte à être jugé. Le délégué a toutefois espéré que les victimes de ces criminels puiseront du réconfort dans le fait que le Mécanisme ne les a pas oubliées.  Pour ce qui est de l’ex-Yougoslavie, il s’est félicité du jugement en appel dans l’affaire Stanišić et Simatović, la dernière relative aux crimes les plus graves commis en ex-Yougoslavie, refermant ainsi un chapitre important de la justice internationale.  Alors que le Mécanisme passe par sa phase pleinement résiduelle, le délégué a salué les recommandations à cet effet par la juge Santana ainsi que les efforts du Mécanisme face aux demandes d’assistance formulées par certains États.  Il a fait valoir que le bon fonctionnement et la réussite du Mécanisme dépendent avant tout d’une coopération étroite avec ces États pour que les criminels purgent leurs peines.

M. GENG SHUANG (Chine) a rappelé que, conformément aux résolutions du Conseil, le Mécanisme est une entité temporaire dont les fonctions et la taille doivent diminuer au fur et à mesure.  Le représentant a dit espérer que le Mécanisme, eu égard aux progrès réalisés, va continuer de réduire ses fonctions et de rationaliser ses dépenses tout en optimisant l’allocation des ressources financières.  Il a par ailleurs estimé qu’une coopération efficace entre le Mécanisme et les États est cruciale pour l’exécution du mandat et la poursuite des travaux du Mécanisme.  Concernant l’échange d’informations, la réinstallation des personnes libérées et acquittées et le suivi de la question des fugitifs, le délégué a souhaité que tout cela soit discuté en tenant compte des préoccupations de tous, afin de lutter ensemble contre l’impunité.  Il a enfin remercié le Gabon, qui préside le Groupe de travail informel sur les tribunaux internationaux.

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a réaffirmé son soutien au Mécanisme et l’a félicité des efforts entrepris pour mettre en œuvre son mandat.  Elle a ajouté que les décisions rendues dans les affaires Kabuga et Stanišić et Simatović marquent l’entrée du Mécanisme dans une phase purement résiduelle, mais que la conclusion des derniers procès ne diminue toutefois en rien la pertinence du Mécanisme, au contraire.  Sa détermination à lutter contre l’impunité reste cruciale pour promouvoir la paix et prévenir les tendances négationnistes et révisionnistes ainsi que la glorification des criminels. 

La représentante a également pris note des nouvelles priorités et de l’élaboration d’un projet-cadre en vue de l’achèvement des fonctions du Mécanisme.  Elle a dit considéré avec intérêt l’échange du Mécanisme avec l’Office des Nations Unies à Genève concernant son programme de conservation numérique, avant de saluer ses efforts pour aider les communautés affectées, en particulier les jeunes générations, à mieux connaître les faits relatifs aux crimes commis et pour reconnaître leurs souffrances. 

La représentante a en outre insisté sur la nécessité d’une coopération internationale soutenue pour lutter efficacement contre les crimes internationaux.  Les fonctions dont le Mécanisme doit s’acquitter sont cruciales et il doit pouvoir compter sur un soutien vigoureux de l’ONU et du Conseil de sécurité dans cette tâche, a-t-elle plaidé, appelant les États à renforcer leurs cadres de coopération régionale en matière pénale, à l’heure où le Mécanisme entre dans une phase purement résiduelle. 

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) a rappelé que le Mécanisme résiduel est un organisme temporaire appelé à disparaître et a demandé un calendrier clair pour la fin de ses activités.  Le représentant a aussi rappelé que les fonctions résiduelles du Mécanisme concernent le contrôle de l’exécution des peines, la protection des victimes et des témoins, la conservation des archives et la recherche des fugitifs, avant d’appeler le Bureau du Procureur à coopérer pleinement en vue de l’arrestation des deux fugitifs restants.  À cet égard, il a souligné la nécessité de collaborer avec le Mécanisme pour l’exécution des mandats d’arrêt et des ordonnances de remise et de réinstallation des personnes acquittées ou libérées.

Après avoir souligné l’importance de préserver l’héritage du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le représentant a estimé nécessaire de donner du temps et des ressources au Mécanisme pour qu’il mène à bien les tâches qui lui ont été confiées, même si le mandat actuel du Procureur et de ses juges expireront en juin prochain.  Le projet de cadre de l’exercice des fonctions, récemment présenté par les responsables du Mécanisme résiduel au Conseil de sécurité, constitue selon lui un guide important pour redéfinir le mandat du Mécanisme.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a souligné la nécessité d’une poursuite du travail du Mécanisme, notamment en ce qui concerne l’exécution des peines, la préservation des archives, la protection des témoins et l’appui aux juridictions nationales.  Elle a appuyé les efforts en vue de l’arrestation des derniers fugitifs, avant de souligner la nécessité de la coopération des États afin que ceux-ci puissent être arrêtés et traduits en justice.  La déléguée a souhaité que les archives du Mécanisme soient plus aisément accessibles, compte tenu du rôle crucial que ledit Mécanisme et ses prédécesseurs ont joué dans l’établissement des responsabilités pour les atrocités commises au Rwanda et en ex-Yougoslavie.  Enfin, elle a salué l’engagement du Mécanisme et des autorités rwandaises en ce sens, ainsi que les discussions avancées en cours pour créer un centre d’information à Zagreb, en Croatie.

M. ANDRIS STASTOLI (Albanie) a salué l’arrêt du 31 mai 2023 rendu par la Chambre d’appel dans l’affaire Stanišić et Simatović, selon lui un réel jalon en matière de justice internationale et une source de soulagement pour de nombreuses victimes.  Il a aussi salué l’accent mis par la présidence pour mener à son terme cette phase résiduelle des activités du Mécanisme, y compris en répondant favorablement aux demandes d’assistance.  Pour le représentant, le cycle de la justice ne s’achève pas avec le fait de rendre des arrêts.  L’exécution des peines est importante, ainsi que la consolidation de l’héritage des Tribunaux pénaux internationaux et du Mécanisme, tout comme la poursuite de l’assistance aux juridictions nationales.  La justice et l’établissement des responsabilités signifient aussi que les crimes du passé ne doivent plus se reproduire, a-t-il observé. Le délégué a remercié les juges et l’ensemble du personnel des TPIR et TPIY pour leur travail en faveur de la justice, afin que reviennent la réconciliation et la cohabitation pacifique dans les régions touchées.  Il a également exhorté la Serbie à arrêter et remettre à la justice Petar Jojić et Vjerica Radeta.

M. NAGANO SHUNSUKE (Japon) a loué les progrès remarquables du Mécanisme cette année.  En ce qui concerne les poursuites, il a noté l’arrêt rendu en appel dans l’affaire Stanišić et Simatović en mai dernier, et le fait que l’affaire Kabuga a fait l’objet d’un sursis à statuer pour une durée indéterminée en septembre.  Ces deux affaires marquent la fin des procès en première instance et en appel transférés par les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Rwanda (TPIR).  Au sujet des enquêtes, le représentant a relevé que le Bureau du Procureur a réussi à arrêter Fulgence Kayishema en mai, un fugitif recherché depuis longtemps, et a confirmé la mort d’Aloys Ndimbati, en novembre.  Il s’est en conséquence félicité que le Mécanisme passe du statut de juridiction opérationnelle à celui d’institution véritablement résiduelle. Tout en reconnaissant que le Mécanisme continue d’avoir un rôle indispensable et appuyant le projet de « cadre » présenté hier par Mme Gatti Santana aux membres du Conseil sur l’achèvement de ses fonctions, il a espéré que ses activités et sa taille seront réduites à mesure que celles-ci s’amenuisent.  Le représentant a aussi salué l’initiative de restructuration interne, qui combine à la fois une réduction des postes et une rationalisation des flux de travail. 

M. SOLOMON KORBIEH (Ghana) a fait part de son inquiétude devant les défis auxquels le Mécanisme continue de faire face, notamment en termes de coopération avec les États et dans le domaine de l’exécution. Comme indiqué à juste titre dans le rapport, le retour de certaines personnes condamnées au quartier pénitentiaire de l’ONU par les États fait peser une charge financière sur le Mécanisme alors que ce quartier n’a pas été prévu à cet effet, a-t-il relevé.  Une autre question cruciale, à ses yeux, est la réinstallation dans des États tiers des personnes acquittées et libérées par le Mécanisme.  Le Ghana souhaite encourager ce dernier à poursuivre ses efforts diplomatiques en vue de trouver une solution à l’amiable avec le ou les États destinataires, a ajouté le délégué.  L’arrestation de M. Fulgence Kayishema, l’un des derniers fugitifs inculpés par le Tribunal international pour le Rwanda, le 24 mai 2023 en Afrique du Sud, montre que lorsque les États coopèrent avec le Mécanisme, cela permet de clore rapidement les affaires dont il est saisi, a-t-il argué.  Aussi a-t-il appelé tous les États qui abritent des fugitifs à coopérer avec le Mécanisme en honorant leurs responsabilités au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.  Le représentant a estimé que même si « les rouages de la justice peuvent parfois grincer lentement », le Conseil de sécurité doit parler d’une seule voix et reconnaître que s’il a failli à sa responsabilité de protéger les victimes des génocides, il a aujourd’hui la responsabilité collective de demander justice pour ces dernières, peu importe le temps que cela prendra.  Ayant pris note des mesures mises en place par le Mécanisme pour protéger les témoins, le délégué s’est dit confiant qu’elles encourageront d’autres à ne pas se rétracter lorsqu’ils seront appelés à comparaître.

Mme MARIA ZABOLOTSKAYA (Fédération de Russie) a rappelé que la résolution 1966 (2010) a établi le Mécanisme résiduel comme une « petite structure temporaire dont les fonctions et la taille seront réduites au fil du temps ».  Dans une situation où le « panier » judiciaire du Mécanisme est vide, les efforts de ses dirigeants devraient viser, avant tout, à restreindre ses activités, comme le prescrit le Conseil.  « On ne peut pas m’expliquer de manière rationnelle pourquoi un tribunal ad hoc existe depuis si longtemps », a protesté la déléguée, sachant que le Tribunal de Nuremberg a traité d’une catégorie de crimes tout aussi graves en un an et demi.  De plus, la résolution 1534 (2004) a chargé les Tribunaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda de prendre toutes les mesures nécessaires pour achever leurs enquêtes et procès fin 2008 et leurs travaux en général fin 2010.  Or les Tribunaux n’ont pas respecté les délais et cette structure, a-t-elle tancé, continue non seulement d’exister 13 ans plus tard, mais compte également poursuivre ses activités « provisoirement ».

La déléguée a dit se méfier des tentatives visant à augmenter « artificiellement » le nombre de procès pour « outrage à la justice », une catégorie de procédure profondément secondaire selon elle.  Cela confine même à l’absurdité: le Mécanisme envisage le lancement d’une nouvelle affaire sur la base de circonstances survenues dans le contexte de l’affaire Kabuga, récemment gelée.  Ce projet ne suscite-t-il vraiment de questions qu’au sein de notre délégation?  Après avoir accusé le Mécanisme de ne pas aborder toutes ses fonctions avec le même zèle, notamment en ce qui concerne les règles minimales relatives aux conditions de détention des Serbes condamnés, la déléguée a estimé que lors du prochain examen du Mécanisme, en 2024, il sera nécessaire de clarifier le calendrier de l’achèvement définitif de ses travaux.  Les promesses sans fin et les prévisions vagues faites au cours des 30 dernières années ne font que retarder les choses.  Les instructions du Conseil de sécurité doivent être suivies, c’est un impératif, a-t-elle intimé, disant attendre du prochain rapport une description détaillée des options spécifiques et réalistes pour le transfert des fonctions restantes.

Mme DIARRA DIME LABILLE (France) a salué les efforts déployés par le Mécanisme pour exécuter son mandat, notamment l’achèvement des procès ou l’arrestation des fugitifs, ou encore l’assistance aux juridictions nationales.  Le Conseil de sécurité doit continuer à l’appuyer dans son action, a exhorté la représentante.  S’agissant de l’ex-Yougoslavie, le prononcé de l’arrêt d’appel dans l’affaire Stanišić and Simatović le 31 mai dernier marque une étape cruciale de l’activité judiciaire du Mécanisme concrétisant, pour les victimes, « la victoire de la justice face à l’impunité ».  S’agissant du Rwanda, dans leur décision du 6 juin, les juges de la Chambre de première instance ont conclu que M. Kabuga, arrêté par la France en 2020 et remis au Mécanisme, n’était pas apte à être jugé.  Le 7 août dernier, a poursuivi la représentante, la Chambre d’appel du Mécanisme a demandé la suspension de la procédure et a renvoyé la question devant la Chambre de première instance qui, le 8 septembre, a suspendu la procédure sine die.  Elle a encouragé le Mécanisme à trouver les moyens de répondre à la quête de justice des victimes. 

Si la France a regretté que certains partenaires refusent de coopérer avec le Mécanisme pour arrêter les derniers fugitifs pour qu’ils puissent comparaître devant la justice, l’arrestation de Fulgence Kayishema le 24 mai dernier est toutefois un exemple de coopération internationale efficace dans la lutte contre l’impunité.  La représentante a noté que « le Mécanisme prépare activement son avenir en tant qu’institution véritablement résiduelle » et noté le cadre d’orientation répondant à la demande du Conseil de sécurité de connaître les voies possibles et recevoir les recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) afin d’élaborer des scénarii pour l’avenir.  S’inquiétant que le Mécanisme rencontre encore des difficultés relatives à la réinstallation des personnes acquittées et des condamnés ayant purgé leur peine, elle a insisté sur l’importance de réinstaller ces personnes.  La représentante s’est également dite vivement préoccupée par le déni des crimes, les discours de haine et la glorification de génocidaires et criminels de guerre condamnés par les Tribunaux pénaux internationaux au terme de procédures impartiales et indépendantes. 

M. RASHED JAMAL IBRAHIM IBRAHIM AZZAM (Émirats arabes unis) a tout d’abord encouragé la communauté internationale à remédier aux causes profondes des atrocités commises, telles que les discours haineux et la déshumanisation de l’autre.  Il s’est ensuite félicité de la mise en place des fonctions purement résiduelles du Mécanisme et a souhaité qu’il continue de progresser dans le transfert de ses activités aux autorités nationales.  Il importe de faire rendre des comptes à tous ceux qui ont commis des crimes graves, a-t-il souligné, estimant que les organes internationaux jouent un rôle complémentaire en matière de justice.  Tous doivent coopérer avec le Mécanisme pour qu’il termine ses travaux comme prévu.  La reddition de comptes et la justice sont la meilleure façon de rendre hommage aux victimes, a-t-il ajouté, avant de souligner l’importance du respect de la Charte des Nations Unies.  C’est ainsi que la communauté internationale pourra arriver à la paix et à la sécurité de manière efficace, a conclu le délégué. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a déclaré que le Mécanisme illustre ce qui peut être accompli lorsqu’il existe un engagement ferme et durable de la part de la communauté internationale.  La conclusion des affaires Stanišić et Simatović et Kabuga marque la transition du Mécanisme vers sa phase véritablement résiduelle, qui devrait dorénavant porter son attention sur les fonctions à plus long terme qui lui ont été confiées par le Conseil de sécurité en 2010.

Le représentant a suggéré que le cadre pour l’achèvement des opérations, assorti d’un calendrier pour toutes les activités et d’options relatives à leur transfert, tienne compte des recommandations du Bureau des services de contrôle interne, ainsi que du collège de juges qui a été constitué à cette fin.  Il a également conseillé de veiller à ce que les dossiers judiciaires soient accessibles au public.  Le représentant a ensuite salué le travail accompli par le Bureau du Procureur pour confirmer la mort d’Aloys Ndimbati, l’un des fugitifs inculpés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, avant de l’encourager à retrouver les autres fugitifs.  Il a en outre appuyé les mesures prises pour protéger les témoins et renforcer les capacités des autorités judiciaires nationales.  La diffusion du legs juridique et historique du Mécanisme est également l’un des outils les plus puissants de lutte contre les discours révisionnistes et la glorification des criminels de guerre, a encore souligné le délégué.

M. ERNEST RWAMUCYO (Rwanda) a rappelé que le Mécanisme a officiellement reconnu la capacité du Rwanda à mener des procès pour génocide dans le strict respect des normes internationales de procédure régulière. Ainsi le Rwanda a-t-il géré efficacement les procès et les appels dans les affaires qui lui ont été soumises par le Mécanisme au cours des dernières années.  Pour son pays, a expliqué le délégué, la responsabilité s’étend au-delà des individus responsables du génocide des Tutsis en 1994, elle concerne également les nations où ils cherchent refuge.  À ce jour, le Rwanda a émis plus de 1 000 actes d’accusation contre des suspects de génocide dans 33 pays et auprès du Secrétariat d’Interpol.  Le délégué a exhorté ces pays à intensifier leur coopération pour appréhender les fugitifs, avant de saluer l’engagement de ceux qui ont extradé ou jugé des fugitifs. Malgré plusieurs résolutions du Conseil de sécurité, on constate une « réticence de la part de certains États à coopérer », a-t-il regretté.  Cette inaction, malgré les options d’extradition disponibles ou de procès sur leur territoire, pose un problème important dans la lutte contre l’impunité.

Garantir la justice aux victimes et aux survivants du génocide des Tutsis transcende les simples poursuites, a insisté le délégué. Il s’agit fondamentalement d’obtenir justice en temps voulu.  « Chaque retard dans ce processus équivaut à un déni de justice. »  La lutte contre l’impunité n’est pas une tâche que le Rwanda devrait assumer seul, a-t-il poursuivi, assurant qu’il s’agit d’une responsabilité collective que la communauté mondiale doit assumer.  Le délégué a appelé le Conseil à condamner la négation du génocide.  Sur la question de la réinstallation des personnes acquittées et libérées, il a rappelé que le Rwanda avait laissé entendre que les neuf Rwandais acquittés et libérés par le Mécanisme sont libres de revenir vivre au Rwanda s’ils le souhaitent.  Cela a été le cas pour des centaines de milliers de Rwandais, anciens réfugiés, combattants ou anciens condamnés pour le génocide qui vivent aujourd’hui en paix aux côtés de survivants, ce qui témoigne du succès de l’unité et de la réconciliation du Rwanda, a-t-il assuré.  S’ils souhaitent vivre dans d’autres pays, c’est aussi leur plein droit et ils devraient pouvoir demander l’asile dans le pays de leur choix, a-t-il ajouté.  Ce que nous trouvons très discutable, a-t-il déploré, c’est que ces personnes acquittées ou libérés et qui sont aujourd’hui libres, continuent à représenter une charge pour la communauté internationale et bénéficient des contributions statutaires des États Membres.

M. ZLATKO LAGUMDŽIJA (Bosnie-Herzégovine) a rappelé que son gouvernement s’est engagé à enquêter, poursuivre et punir toutes les personnes responsables de crimes de guerre.  La Stratégie nationale révisée sur les crimes de guerre contient des mesures visant à surmonter les difficultés qui entravent le traitement efficace de ces affaires, a-t-il dit, soulignant que l’un des objectifs de la Stratégie est la coopération régionale.  Or, quelque 3 000 auteurs présumés de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide commis en ex-Yougoslavie n’ont toujours pas été traduits en justice.  Le délégué a noté que les autorités nationales chargées des poursuites pénales n’ont pas accès à 35% des affaires non résolues en Bosnie-Herzégovine.  Plus de 63% des personnes concernées se trouvent en Croatie, au Monténégro et en Serbie.  La justice de Bosnie-Herzégovine rencontre des problèmes de communication avec les parquets des États de la région, a-t-il souligné, appelant à renforcer la coopération judiciaire régionale.

Après la fuite en Serbie de l’accusé Novak Djukic, la justice de Bosnie-Herzégovine a demandé aux autorités judiciaires serbes d’exécuter le jugement définitif dans cette affaire, mais elle n’a jamais donné suite au verdict, a déploré le délégué pour qui cette attitude fragilise le processus de rétablissement de la confiance et des relations entre les deux pays.  Cette situation ralentit aussi le processus et va à l’encontre de la justice et de l’état de droit.  « L’indisponibilité du suspect ou de l’accusé compromet l’efficacité de nos tribunaux, banalise l’impunité et entrave le processus de réconciliation dans la région. »  Évoquant l’héritage du TPIY, du TPIR et du Mécanisme et l’importance historique de leur jurisprudence, le délégué a plaidé pour que leurs archives soient conservées en Bosnie-Herzégovine.  Son pays a ainsi appuyé le projet de numérisation complète des archives qui devraient être disponibles pour les procès en cours ainsi que pour la recherche, l’éducation et le public.

M. NEMANJA STEVANOVIC (Serbie) s’est félicité de l’intention « déclarée » de la Présidente Santana de faire en sorte que le Mécanisme achève rapidement les travaux résiduels, tout en faisant remarquer que certaines activités donnent à penser qu’elle est encline à prolonger son existence.  Notant à ce sujet l’absence de progrès dans l’affaire Petar Jojić et Verica Radeta pour outrage au tribunal, le représentant a assuré que la Serbie n’a pas failli à ses obligations internationales mais qu’au contraire elle a déployé des efforts pour agir conformément à la résolution 1966 (2010). La Serbie reste prête à engager des poursuites pénales dans cette affaire et dans d’autres affaires similaires, a-t-il dit, avant de demander au Mécanisme de reconsidérer sa décision et d’autoriser le renvoi de l’affaire Jojić et Radeta aux autorités judiciaires serbes.

S’agissant de la confirmation de l’inculpation de Vojislav Šešelj et de quatre autres personnes pour outrage au tribunal, le représentant a espéré qu’il n’y aura pas d’« oublis » dans le cadre de la procédure de décision, comme ce fut le cas pour l’affaire Petra Jojić et Verica Radeta.  Il a offert à ce propos de « solides assurances » que le système judiciaire de la Serbie dispose d’un cadre juridique et institutionnel approprié, permettant la prise en charge et le traitement de ces affaires de manière transparente et professionnelle.

Il a d’autre part jugé nécessaire de revoir les critères nouvellement établis pour la libération anticipée ou conditionnelle. À ses yeux, ces critères ont été fixés principalement pour prolonger le fonctionnement du Mécanisme, ce qui se traduit par une inégalité de traitement des personnes condamnées.  Le représentant a donc proposé de revenir aux normes en vigueur avant l’introduction de ces nouveaux critères, appelant à ce que les demandes de libération anticipée ou conditionnelle soient traitées rapidement, étant donné que toutes les personnes condamnées sont à un stade avancé de leur vie et souffrent de problèmes de santé.  Dans ce contexte, il a mis l’accent sur l’insuffisance des soins prodigués au général Ratko Mladić, rappelant que le Mécanisme, en tant qu’entité de l’ONU, est lié par l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement, adopté par l’Assemblée générale en 1988.

Le représentant a par ailleurs estimé que l’accusation relative à la coopération entre la Serbie et la Croatie ne tient pas compte du cadre juridique existant, ancré non seulement dans la législation nationale mais aussi dans la Convention européenne d’extradition et celle relative à l’entraide judiciaire en matière pénale.  Les retards dans les négociations bilatérales en vue d’un accord sur les crimes de guerre ne devraient pas être un obstacle à la réalisation de la coopération régionale, a-t-il argué, avant de réaffirmer que les plaintes concernant la « négation des crimes et la glorification des condamnés » par la Serbie sont sans fondement.  Il a conclu son propos sur une note critique au sujet de l’héritage du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et du Mécanisme.  Selon lui, les acquittements de Ramush Haradinaj, Naser Orić et Ante Gotovina, respectivement accusés de crimes graves au Kosovo, en Bosnie-Herzégovine et en Croatie, ont considérablement renforcé la politique d’impunité pour les crimes commis contre le peuple serbe.

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a réaffirmé le soutien de son pays au travail du Mécanisme et à sa transition vers une institution véritablement résiduelle.  Il a réitéré l’importance du verdict rendu en mai dernier contre Jovica Stanišić et Franko Simatović, anciens responsables des services de sécurité serbes, qui ont participé à une entreprise criminelle dirigée par feu le Président serbe Slobodan Milošević.  Ce jugement établit un lien clair entre les hauts dirigeants serbes et les crimes d’atrocité commis en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, a-t-il souligné.  Le représentant a toutefois regretté que le Président du Mécanisme ait dû rappeler que la Serbie n’a pas arrêté et transféré Petar Jojić et Vjerica Radeta à La Haye.  L’impunité pour outrage au Mécanisme et la violation de la sécurité des témoins ne font qu’encourager d’autres cas semblables, a-t-il mis en garde, avant de se féliciter de la confirmation de l’acte d’accusation contre Vojislav Šešelj et quatre autres accusés, pour la divulgation d’informations confidentielles du TPIY, y compris des informations sur l’identité de dizaines de témoins protégés.

Le représentant a assuré que la Croatie reste pleinement engagée à respecter les obligations qui lui incombent en termes de coopération judiciaire constructive, transparente et non politisée, fondée sur des preuves, avec les autres États voisins dans les affaires liées aux crimes de guerre.  Faisant valoir qu’une coopération significative et productive n’est pas un « processus à sens unique », il a indiqué que la Croatie attend toujours la réponse de la Serbie à l’invitation qu’elle lui a adressée pour le quatrième et dernier cycle de négociations en vue d’un accord bilatéral sur le traitement des crimes de guerre. 

Le délégué a également soulevé la question de la coopération insuffisante avec la Serbie dans la recherche des personnes disparues et des dépouilles mortelles.  Déterminer où se trouvent les 1 803 citoyens croates disparus est notre priorité de longue date, a-t-il rappelé, avant de regretter que la Serbie refuse de partager les informations et de permettre l’accès aux archives.  « Il est essentiel, pour tourner la page et se réconcilier, d’établir le sort des personnes disparues, de retrouver les dépouilles mortelles et de les enterrer comme il se doit », a-t-il argué. Appelant de ses vœux une meilleure coopération bilatérale, il a demandé au Mécanisme de soutenir la recherche des personnes disparues et des dépouilles mortelles au cours du mandat qu’il lui reste à accomplir. 

Reprenant la parole en fin de séance, M. STEVANOVIC (Serbie) a déclaré que son homologue de la Croatie est « obsédé » par son pays à chaque fois qu’il intervient sur ce sujet. Après avoir donné lecture d’un paragraphe du rapport du Procureur du Mécanisme, lequel insiste sur la détérioration considérable de la coopération de la Croatie, et sur la poursuite des Serbes ethniques, il a fait valoir que les Croates ne bénéficient pas de la justice et que « les auteurs continuent de jouir de l’impunité ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: examen des incidences budgétaires de sept textes recommandés par les Deuxième, Troisième et Sixième Commissions

Soixante-dix-huitième session,
22e séance plénière - matin
AG/AB/4446

Cinquième Commission: examen des incidences budgétaires de sept textes recommandés par les Deuxième, Troisième et Sixième Commissions

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a examiné, ce matin, les incidences sur le budget-programme 2024 de sept projets de résolution recommandés à l’Assemblée générale par la Deuxième Commission, chargée des questions économiques et financières, la Troisième, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, et la Sixième, chargée des questions juridiques.  Un projet de la Deuxième Commission sur la coopération fiscale internationale est décrit comme « une lueur d’espoir pour les pays en développement » par le Groupe des États d’Afrique, auteur du texte.

Comme la mise en œuvre de ce projet de résolution (A/C.2/78/L.18/Rev.1) suppose la création de quatre postes d’administrateur et d'un poste d’agent des services généraux, le Secrétaire général estime les incidences budgétaires à 1 495 500 dollars.  Le Groupe des États d’Afrique s’est, une nouvelle fois, félicité d’un texte qui est le résultat des efforts déployés pendant des décennies pour lutter contre les flux financiers illicites qui ont fait perdre à l’Afrique jusqu’à 1 800 milliards de dollars, entre 1970 et 2008. 

Cette « perte abyssale » est bien plus élevée que l’aide publique au développement (APD) reçue par l’Afrique, a rappelé le Groupe qui a attribué cette situation, entre autres, à la faiblesse de l’administration fiscale et à l’absence d’une véritable coopération internationale dans la surveillance et la répression des délits fiscaux.  Pour y remédier, le continent a conçu de nombreuses stratégies aux niveaux national et régional, y compris la mise en place d’un Groupe de haut niveau sur les flux financiers illicites, présidé par l’ancien Président sud-africain, M. Thabo Mbeki.  Toutefois, ces efforts n’ont pas été fructueux, compte tenu, en particulier, de l’inexistence d’un cadre de coopération internationale en matière fiscale.

Pour un autre texte (A/C.2/78/L.45) de la Deuxième Commission et cette fois, sur le suivi et l’application des modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable de ces États, le Secrétaire général, appuyé par le Groupe des 77 et de la Chine, propose une enveloppe de 129 800 dollars. 

Le G77 a également appuyé la proposition du Secrétaire général de renforcer les capacités et les fonctions du Bureau du Haut-Représentant pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, compte tenu des difficultés auxquelles ces pays doivent faire face dans la question vitale du développement.  Le Groupe a tout autant appuyé les incidences budgétaires de 24 500 dollars proposées par le Secrétaire général s’agissant du texte sur le suivi de la cinquième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (A/C.2/78/L.57).

Le dernier texte de la Deuxième Commission examiné aujourd’hui porte sur le suivi et la mise en œuvre des textes issus des Conférences internationales sur le financement du développement (A/C.2/78/L.59), pour lesquels le Secrétaire général estime les incidences budgétaires à 1 283 800 dollars, y compris pour cinq postes au titre du personnel temporaire, pendant 10 mois à compter du 1er mars 2024. 

Toutefois, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) rejette l’idée de recruter tous les consultants proposés et juge que l’emploi d’économiste au titre du personnel temporaire doit passer de la classe P-3 à la classe P-2. 

Le Groupe des 77 a marqué son soutien à la convocation en 2025 de la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement, compte tenu de la nécessité urgente d’accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réforme de l’architecture financière internationale. Le Groupe s’est dit favorable à la création d’un comité préparatoire intergouvernemental chargé d’assurer les préparatifs de la Conférence.

En ce qui concerne le projet de résolution recommandé par la Sixième Commission sur le « renforcement et la promotion du régime conventionnel international » (A/C.6/78/L.4), les incidences budgétaires sont estimées à 106 900 dollars, y compris pour la création d’un poste de juriste au niveau P-3. 

Quant à la Troisième Commission, son projet de texte sur l’ Appel mondial à une action concrète en vue de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée (A/C.3/78/L.60/Rev.1), a des incidences budgétaires de 233 800 dollars, que le Groupe des 77 a approuvées. 

Au sujet du Centre sous-régional pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique centrale (A/C.3/78/L.55) dont la mise en œuvre exige la création de 11 postes, les incidences budgétaires sont estimées à 2 115 300 dollars.  Ici encore, le CCQAB a proposé de ramener ce chiffre à 9 postes, avant que le Cameroun ne demande que la proposition du Secrétaire général soit adoptée par consensus comme l’a été le projet de résolution en Commission. 

La Cinquième Commission tiendra une autre séance publique, mercredi 13 décembre à partir de 10 heures, pour examiner les estimations budgétaires révisées des résolutions et décisions du Conseil des droits de l’homme. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Fédération de Russie convoque une nouvelle réunion du Conseil de sécurité sur le transfert d’armes occidentales à l’Ukraine

9501e séance – matin
CS/15522

La Fédération de Russie convoque une nouvelle réunion du Conseil de sécurité sur le transfert d’armes occidentales à l’Ukraine

Cet après-midi, le Conseil de sécurité, de nouveau réuni à la demande de la Fédération de Russie pour se pencher sur les transferts d’armes occidentales à l’Ukraine, a entendu un exposé du Haut-Représentant adjoint et Directeur du Bureau des affaires de désarmement, M. Adedeji Ebo.  Les délégations occidentales ont dénoncé une « énième » tentative de la Russie de faire diversion.

Une « nouvelle tentative cynique de présenter l’agresseur comme la victime, et la victime comme l’agresseur », a déploré Malte.  Pour le Royaume-Uni, « ce septième débat du Conseil de sécurité convoqué par Moscou sur la fourniture d’armes à l’Ukraine a pour objectif d’influencer l’opinion publique occidentale contre le soutien à Kyïv ».  « La Russie devrait s’inquiéter de l’effet de ses propres armes en Ukraine avant de s’inquiéter du soutien international apporté à l’Ukraine pour répondre à l’agression russe », s’est emporté le Japon.  La Russie n’a pas réussi à soumettre le peuple ukrainien ni à tromper l’opinion internationale, ont fait remarquer les États-Unis.

Plusieurs représentants ont réaffirmé que l’Ukraine a le droit, en vertu de la Charte des Nations Unies, d’assurer sa sécurité et de défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté.  Dès le début de l’agression militaire injustifiée contre l’Ukraine, la volonté affichée de la Fédération de Russie a été de saper le rôle et le soutien de la communauté internationale alors même que cette dernière a fait le choix de soutenir l’Ukraine en vertu des principes de l’ordre international fondé sur des règles, a relevé l’Albanie.

S’interrogeant à son tour sur les raisons de la convocation de cette réunion, sachant que « la mort et la destruction en Ukraine n’ont rien d’extraordinaire pour la Russie », le représentant ukrainien a assuré que la seule chance pour les troupes russes d’avancer sur la ligne de front est de s’assurer que l’Ukraine est à court d’armes.  Or les transferts d’armes à son pays ne doivent jamais être considérés comme un facteur d’insécurité ou d’aggravation de la guerre, a-t-il prévenu, notant que la défense aérienne ukrainienne a encore abattu 18 drones et 8 missiles balistiques lancés par la Russie sur Kyïv hier soir.  Il a rejeté toute tentative visant à confondre la responsabilité de l’Ukraine de défendre son propre territoire avec celle de la partie qui viole la Charte des Nations Unies et qui poursuit une guerre d’agression non provoquée.

Dans une longue diatribe, le représentant de la Fédération de Russie a qualifié le Président ukrainien de « dictateur ». Il a assuré que le « régime » ukrainien ne survit aujourd’hui que grâce aux aides financières et à la fourniture d’armes occidentales, et s’est dit convaincu que la réticence croissante des Ukrainiens à se battre s’explique par le fait que beaucoup d’entre eux commencent à se rendre compte que la Russie n’est « pas vraiment un ennemi ».

Invitée comme représentante de la société civile, Mme Mary Ann Wright, colonelle à la retraite de l’armée des États-Unis et ancienne diplomate, a appelé à cesser d’alimenter les conflits avec d’énormes quantités d’armes qui profitent aux entreprises et aux hommes politiques à l’intérieur et à l’extérieur des pays en conflit.

« Que la Russie mette fin à ses frappes, qu’elle retire ses troupes du territoire ukrainien, comme l’a exigé la Cour internationale de Justice, et la guerre cessera », a lancé la France.  Le monde ne peut pas permettre que cette guerre insensée se poursuive, a prévenu M. Ebo.  Dressant le tableau de la situation, le Haut-Représentant adjoint a indiqué que, depuis son dernier exposé au Conseil de sécurité sur ce sujet, le 27 octobre, la fourniture d’une assistance militaire aux forces armées de l’Ukraine s’est poursuivie.  Il a passé en revue les armes lourdes qui ont été livrées et mentionné des informations relatives au transfert de munitions à l’uranium appauvri pour des chars.  Parallèlement, il a relevé des signalements sur des États qui transfèrent ou envisagent de transférer aux forces armées russes des armes telles que des véhicules aériens sans équipage et des munitions, y compris en vue d’une éventuelle utilisation en Ukraine.  En outre, le Haut-Représentant a réitéré son appel à l’arrêt immédiat de l’utilisation de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions, « ces armes horribles qui ont un impact durable et dévastateur sur des civils innocents longtemps après la fin des conflits ».

Le Mozambique s’est alarmé des risques accrus de voir ces armes tomber aux mains de groupes non étatiques à des fins terroristes, tandis que le Gabon a évoqué « un terreau pour l’insécurité et la résilience de groupes terroristes ».  Les Émirats arabes unis ont salué les mesures prises pour faire face à ce risque de détournement d’armes.  Le Brésil a pour sa part exhorté tous les États Membres à adhérer au Traité sur le commerce des armes et au Registre des armes classiques de l’ONU.

Plusieurs délégations, dont le Japon, se sont inquiétées des transferts d’armes de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et de la République islamique d’Iran vers la Russie, dont plusieurs ont été confirmés.  Le représentant des États-Unis a affirmé que son pays détient des preuves de transferts de drones iraniens vers la Russie, alors que la résolution 2231 (2015) interdit de telles transactions.

En ce qui concerne le bilan humain en Ukraine, le Haut-Représentant a fait savoir que, du 24 février 2022 au 11 décembre 2023, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré 28 711 victimes civiles, dont 10 058 morts et 18 653 blessés, soulignant que « les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés ». Face à la poursuite et à l’intensification des combats en Ukraine, le sort des enfants et des personnes vulnérables à l’approche de l’hiver a suscité une inquiétude particulière, et plusieurs délégations ont exhorté toutes les parties à faciliter l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire.  Enfin, la Suisse a rappelé qu’elle s’est engagée à soutenir la création d’un tribunal spécial pour le crime d’agression contre l’Ukraine.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES 

Déclarations

M. ADEDEJI EBO, Haut-représentant adjoint et Directeur du Bureau des affaires de désarmement, a indiqué que, depuis son dernier exposé au Conseil de sécurité sur ce sujet, le 27 octobre, la fourniture d’une assistance militaire aux forces armées de l’Ukraine s’est poursuivie dans le contexte de l’invasion totale de ce pays, lancée par la Fédération de Russie le 24 février 2022 en violation de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Des informations sur les transferts de systèmes d’armes et de munitions par les gouvernements sont disponibles via des sources ouvertes, a-t-il précisé, avant de détailler les armes livrées: des armes classiques lourdes –chars, véhicules blindés et avions de combat, hélicoptères, systèmes d’artillerie de gros calibre, systèmes de missiles et véhicules aériens de combat sans équipage), ainsi que des munitions et des armes légères et de petit calibre.

M. Ebo a aussi pris note d’informations relatives au transfert de munitions à l’uranium appauvri pour des chars.  Il a également fait état des signalements sur des États qui transfèrent ou envisagent de transférer aux forces armées russes des armes telles que des véhicules aériens sans équipage et des munitions, y compris en vue d’une éventuelle utilisation en Ukraine.  « Tout transfert d’armes doit s’inscrire dans le cadre juridique international applicable, y compris les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité » a-t-il réaffirmé.

Le Haut-représentant adjoint s’est ensuite inquiété des informations relatives à l’utilisation de mines terrestres antipersonnel ainsi qu’à l’utilisation et au transfert d’armes à sous-munitions en Ukraine.  Il a réitéré son appel à l’arrêt immédiat de l’utilisation de « ces armes horribles qui ont un impact durable et dévastateur sur des civils innocents longtemps après la fin des conflits ».  Il s’est fait l’écho des propos du Secrétaire général, qui a récemment encouragé, dans son Nouvel Agenda pour la paix, les États Membres à s’engager à réduire le coût humain des armes, notamment par l’universalité des traités d’interdiction des armes inhumaines et aveugles.

La fourniture d’armes et de munitions dans toute situation de conflit armé suscite de vives inquiétudes quant à l’escalade potentielle de la violence et aux risques de détournement, a-t-il expliqué, ajoutant que les mesures visant à contrecarrer le détournement potentiel d’armes et de munitions sont essentielles pour éviter d’aggraver l’instabilité en Ukraine et pour contribuer au relèvement après le conflit.

M. Ebo a voulu répéter une fois de plus que toutes les parties à un conflit armé ont l’obligation de protéger les civils et de respecter le droit international applicable, notamment le droit international humanitaire, en vertu duquel il est interdit de cibler des civils et des biens civils, en particulier les infrastructures.  Ils ont aussi la responsabilité de prendre toutes les précautions possibles dans la conduite des opérations militaires pour éviter, ou du moins limiter, la perte de vies civiles.  À cet égard, il s’est alarmé des attaques permanentes et intensives contre des civils et des infrastructures civiles en Ukraine.

Le haut fonctionnaire a fait savoir que, du 24 février 2022 au 11 décembre 2023, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré 28 711 victimes civiles en Ukraine, dont 10 058 morts et 18 653 blessés, soulignant que « les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés ».  La grande majorité des victimes civiles ont été touchées par des bombardements et des tirs de roquettes multiples dans les zones proches de la ligne de front. Toutefois, les attaques se sont récemment intensifiées dans les zones peuplées de l’ensemble de l’Ukraine.

Le monde ne peut pas permettre que cette guerre insensée se poursuive, a conclu M. Ebo, ajoutant que, comme le Secrétaire général l’a souligné à plusieurs reprises, l’ONU est déterminée à soutenir tous les efforts constructifs visant à instaurer une paix juste et durable en Ukraine, dans le respect de la Charte des Nations Unies, du droit international et des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Mme MARY ANN WRIGHT, colonel à la retraite de l’armée des États-Unis et ancienne diplomate, s’est déclarée honorée de s’exprimer sur les fournitures d’armes dans les zones de conflit et leurs effets néfastes sur les perspectives de paix.  Elle a indiqué avoir servi 29 ans dans les rangs de l’armée américaine et y avoir enseigné le droit de la guerre terrestre et les Conventions de Genève.  Elle a ajouté avoir également exercé la profession de diplomate pendant 16 ans, durant lesquels elle a servi dans les ambassades américaines au Nicaragua, à la Grenade, en Somalie, en Ouzbékistan, au Kirghizistan, en Sierra Leone, en Micronésie et en Mongolie.  « Je faisais partie de la petite équipe qui a rouvert l’ambassade des États-Unis à Kaboul, en Afghanistan, en décembre 2001 », a-t-elle déclaré, précisant avoir démissionné de ses fonctions diplomatiques en 2003 pour s’opposer à la « guerre américaine » contre l’Iraq, « une guerre que le Conseil de sécurité a refusé d’autoriser, ce qui est tout à son honneur ».

Mme Wright a dit s’exprimer en tant que citoyenne américaine « très préoccupée », qui, « en tant que contribuable, paie les armes que mon pays utilise et vend pour alimenter des guerres qui tuent des civils innocents ».  À ses yeux, il ne fait aucun doute que les fournitures continues d’armes font durer les conflits.  Pendant ce temps, de nombreux innocents sont tués jusqu’à ce qu’un accord de cessez-le-feu soit trouvé.  À cet égard, l’intervenante a rappelé qu’au cours de la guerre de Corée, entre 1950 et 1953, les pourparlers entre les parties au conflit ont commencé en 1951 et se sont finalement conclus, après 575 réunions, par un armistice en 1953.  Au cours de cette guerre, plus de 4 millions de Coréens, 500 000 Chinois, 35 000 Américains et des dizaines de milliers de membres du commandement de l’ONU ont été tués, a-t-elle déploré, avant de dénoncer le fait qu’aujourd’hui, son pays participe à la fourniture d’armes dans deux conflits meurtriers, en Ukraine et au Moyen-Orient.

Mme Wright a ensuite relevé qu’alors que l’Administration Biden a demandé au Congrès américain d’approuver 14 milliards de dollars supplémentaires pour qu’Israël les utilise pour « tuer des Palestiniens à Gaza », elle vient d’autoriser, cette fois sans l’approbation du Congrès, l’octroi à l’armée israélienne d’obus d’artillerie pour un montant de 106 millions de dollars.  S’agissant du conflit en Ukraine, elle a dit en savoir plus sur la quantité d’équipement militaire fournie par Washington au Gouvernement ukrainien que sur l’équipement militaire dépensé par la Fédération de Russie. Elle a ainsi noté qu’il y a quatre jours, le Secrétaire d’État Blinken a indiqué que les États-Unis ont fourni ces deux dernières années 70 milliards de dollars pour soutenir l’Ukraine, tandis que leurs alliés européens ont versé une aide militaire de plus de 110 milliards de dollars.  M. Blinken, a-t-elle relevé, n’a pas caché que 90% de cette « aide à la sécurité » est de production américaine et a créé « plus d’emplois américains », tout en bénéficiant à la croissance économique des États-Unis.  Selon Mme Wright, la situation « gagnant-gagnant » décrite par le Secrétaire d’État se justifie non pas pour les civils des zones de conflit, mais pour le « complexe militaro-industriel ».

Elle a donc appelé à cesser d’alimenter les conflits avec d’énormes quantités d’armes qui profitent aux entreprises et aux hommes politiques à l’intérieur et à l’extérieur des pays en conflit.  Selon elle, des fabricants d’armes américains comme Lockheed Martin, Boeing, Raytheon et General Atomics pourraient avoir commis des crimes contre l’humanité et violé les lois pénales fédérales américaines, comme les en accuse un tribunal citoyen.  Dans le même temps, a-t-elle poursuivi, des informations se font jour selon lesquelles les États-Unis et le Royaume-Uni ont demandé au Gouvernement ukrainien de ne pas entamer de négociations de paix avec la Russie et ont fait obstacle à des tentatives de médiation.

« Les pourparlers de paix ne doivent pas être torpillés », a-t-elle lancé, souhaitant également que cesse la criminalisation de l’opposition aux guerres, tant en Russie, qu’en Ukraine, en Israël et aux États-Unis.  Avant de conclure, Mme Wright a lu un poème « pour les enfants de Gaza mais applicables aux enfants de toutes les zones de conflit ».

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé que le soutien au Gouvernement ukrainien décline rapidement. Après avoir trompé son peuple pour remporter les élections en 2019, le Président ukrainien a intensifié la persécution des locuteurs russes, qui sont majoritaires dans ce pays, a-t-il accusé. Il est à ses yeux évident que la mise en œuvre des accords de Minsk serait la meilleure solution pour l’Ukraine. Au lieu de cela, le Président a préparé la guerre contre la Russie avec l’aide des États-Unis, ainsi que l’adhésion de son pays à l’OTAN, a continué le représentant.  La « junte de Kiev » a encore trompé les Ukrainiens en rejetant les conditions de paix avec Moscou en avril 2022 pour choisir l’escalade militaire.  Le résultat est là, a-t-il ajouté, en pointant les centaines de milliers de morts, la dévastation économique, la corruption et une « dictature brutale » incluant l’annulation de l’élection présidentielle.  Le « régime » ukrainien ne survit aujourd’hui que grâce aux aides financières et à la fourniture d’armes occidentales, a dit le représentant, lesquelles n’ont pas d’impact significatif sur le champ de bataille. Des recrues sont jetées en première ligne sans aucune formation et sans leur consentement, a-t-il dénoncé, tandis que « des orphelins mineurs sont mobilisés ».

Selon le représentant, la réticence croissante des Ukrainiens à se battre s’explique par le fait que beaucoup d’entre eux commencent à se rendre compte que la Russie n’est « pas vraiment un ennemi ».  Ainsi, depuis le début de la guerre dans le Donbass, plus de 5 millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge en Russie.  Poursuivant, il a vilipendé les tentatives de Kiev d’interdire l’Église orthodoxe canonique, la persécution de son clergé et la confiscation de ses biens en faveur d’une organisation « pseudo-religieuse schismatique ».  Quel que soit le nombre d’armes que le « dictateur ukrainien » demande lors de son « spectacle de cirque » aux États-Unis, elles seront « broyées » par l’armée russe sur le champ de bataille sans affecter la réalisation des objectifs de « notre opération militaire spéciale », a-t-il averti.  Enfin, le représentant a réitéré que les fonds alloués à l’Ukraine sont dépensés aux États-Unis où ils créent des emplois et augmentent les recettes fiscales.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a affirmé que dès le début de l’agression militaire injustifiée contre l’Ukraine, la volonté affichée de la Fédération de Russie a été de saper le rôle et le soutien de la communauté internationale alors même que cette dernière a fait le choix de soutenir l’Ukraine en vertu des principes de l’ordre international fondé sur des règles. On ne saurait cautionner le cynisme russe selon lequel ce sont les livraisons d’armes à l’Ukraine qui sont la cause du conflit, a-t-il tranché, en rappelant que les principales cibles des frappes russes sont des infrastructures civiles et agricoles en Ukraine.  La Russie cherche à rendre insupportable la vie des Ukrainiens dans l’espoir de les voir accepter les conditions du Kremlin, en a-t-il déduit.  C’est la raison pour laquelle l’Albanie continuera de soutenir l’Ukraine politiquement, économiquement et militairement, a-t-il expliqué, et cela jusqu’à ce qu’on arrive à une paix juste et durable dans le respect de la Charte des Nations Unies.

M. MARTINS KUMANGA (Mozambique), tout en reconnaissant le droit souverain des États à la légitime défense, a indiqué que tout transfert d’armes doit être « responsable », eu égard aux risques accrus de voir ces armes tomber aux mains de groupes non étatiques à des fins terroristes.  De fait, a-t-il étayé, les transferts irresponsables et illicites d’armes risquent de prolonger et d’exacerber le conflit, sapant ainsi les perspectives d’une paix pérenne, sans parler des retombées sur la région et le monde.  De façon générale, le délégué a souhaité une plus grande transparence conformément au cadre juridique international existant.  C’est dans cet esprit qu’il a appelé tous les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à adhérer aux instruments internationaux pertinents. Quant à la position de son pays, elle demeure « cohérente et n’a pas changé », a-t-il conclu.  Le Mozambique plaide en faveur d’une solution politique et négociée, comme seul moyen de mettre fin à ce conflit et de jeter les bases d’une paix durable entre les deux pays.

Mme AYSHA MOHAMMED HADDAF RADWAN ALMENHALI (Émirats arabes unis) a dit que le droit à l’autodéfense, y compris le développement de capacités de sécurité et de défense, exige des mécanismes de surveillance appropriés, en particulier en ce qui concerne le transfert, le stockage et la distribution d’armes.  Dans le contexte de la guerre en Ukraine, elle a salué les mesures prises pour faire face au risque de détournement d’armes, qu’il faut poursuivre, notamment en continuant d’échanger des informations et en renforçant la coordination et la coopération à tous les niveaux.  Cependant, a fait observer la déléguée, l’élimination de toutes les menaces et répercussions liées à ce conflit ne sera possible qu’avec une cessation permanente des hostilités, le Conseil ne devant ménager aucun effort pour soutenir la paix en Ukraine.  Les Émirats arabes unis continueront de soutenir ces efforts, a-t-elle promis.   Elle a aussi insisté sur la nécessité pour les parties concernées de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour limiter les répercussions du conflit, notamment en respectant leurs obligations, conformément au droit international humanitaire.

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon)s’est dite particulièrement préoccupée par l’intensification des bombardements et les attaques contre les populations civiles et les infrastructures essentielles, dont les installations portuaires et céréalières.  La déléguée a réaffirmé l’opposition du Gabon à la guerre, dont le bilan atteint des « proportions insoutenables ».  Elle a aussi réitéré son appel aux belligérants de s’abstenir d’utiliser des armes de destruction massive et de ne pas cibler les populations civiles et les infrastructures.

La représentante s’est par ailleurs inquiétée de la circulation incontrôlée des armes, qui constitue « un terreau pour l’insécurité et la résilience de groupes terroristes ». Selon elle, la tendance à la banalisation de l’usage de la force militaire, avec un renforcement du recours aux armes de destruction massive, au réarmement massif et au regain d’intérêt évident pour la dissuasion nucléaire par de nombreux pays alimentent les tensions. Elle a plaidé pour un « véritable sursaut » face à cette tendance et pour reconnecter l’Organisation, et en particulier le Conseil de sécurité, à sa vocation première de protéger les générations présentes et futures du fléau de la guerre.

M. JOHN KELLEY (États-Unis) a noté que 665 jours après le début de son invasion de l’Ukraine, la Russie n’a toujours pas accompli ses objectifs militaires. Elle n’a pas réussi à soumettre le peuple ukrainien ni à tromper l’opinion internationale, a-t-il constaté, relevant que « Moscou préfère masquer ses échecs en remettant en cause l’assistance légitime qu’apportent des pays à l’Ukraine pour l’aider à se défendre ».  De plus, a poursuivi le représentant, au lieu de mettre fin à cette guerre et de commencer à assumer ses responsabilités en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la Russie a acquis des armes par des canaux explicitement interdits par les résolutions du Conseil.  La République populaire démocratique de Corée (RPDC) aurait ainsi fourni plus de 1 000 conteneurs de matériel militaire et de munitions, ce qui va augmenter le bilan humanitaire du conflit, a-t-il dénoncé.  En contrepartie, la RPDC sollicite l’aide de la Russie pour obtenir des technologies, des avions de chasse, des blindés et des capacités balistiques qui lui permettront d’atteindre ses objectifs militaires.

Ces échanges sapent la stabilité dans la région et le régime de prolifération, a condamné le représentant. Il a ajouté que, parallèlement, le Kremlin s’est tourné vers un autre régime, celui de l’Iran, « qui n’a rien à faire des droits humains, de la non-prolifération, de la sécurité internationale ou du maintien de la paix ».  L’Iran fournit à la Russie des bombes guidées, des munitions d’artillerie et du matériel létal pour tuer des Ukrainiens, a-t-il accusé, affirmant que son pays détient des preuves de transferts de drones iraniens vers la Russie, alors que la résolution 2231 (2015) interdit de telles transactions.  « Grâce à ces armements nord-coréens et iraniens, la Russie peut prolonger sa guerre contre Ukraine », a tranché le représentant, avant de rejeter l’hypocrisie russe quant aux raisons de ce conflit long.  Il a conclu son propos en enjoignant une nouvelle fois à la Russie de se retirer du territoire internationalement reconnu de l’Ukraine.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a vu dans cette réunion une « énième tentative de la part de la Russie de se décharger de la responsabilité de la guerre contre l’Ukraine et de ses conséquences ».  Il n’y a aucun doute sur qui est l’agresseur et qui est l’agressé, a-t-elle souligné, avant de réaffirmer que l’Ukraine a le droit, en vertu de la Charte des Nations Unies, d’assurer sa sécurité et de défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté.  Toutefois, rappelant qu’il est impératif de mettre en œuvre de manière efficace et globale les conventions et instruments multilatéraux relatifs aux transferts d’armes, elle a appelé tous les États à s’acquitter de leurs obligations et à respecter les résolutions 1718 (2006) et 2231 (2015) du Conseil de sécurité.  Mais pour favoriser un règlement pacifique, la Russie doit cesser toutes ses opérations de combat et retirer toutes ses troupes du territoire ukrainien, a-t-elle ajouté.

La représentante s’est ensuite alarmée de la poursuite des attaques russes contre des infrastructures civiles alors que l’hiver approche.  Elle a exprimé son inquiétude quant au sort des enfants et des autres personnes vulnérables, avant d’exhorter à nouveau toutes les parties à épargner la population et à faciliter l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire dans toute l’Ukraine.  En outre, un processus de reconstruction inclusif et participatif doit être appuyé, a-t-elle plaidé, précisant que son pays a fait du déminage en Ukraine une priorité.  Enfin, après avoir appelé à traduire en justice les auteurs de crimes graves, elle a rappelé que la Suisse s’est engagée à soutenir la création d’un tribunal spécial pour le crime d’agression contre l’Ukraine.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a reconnu que des mesures s’imposent pour éviter la prolifération et le détournement des armes utilisées dans le conflit en Ukraine.  Après avoir réaffirmé le droit de l’Ukraine à la légitime défense en vertu du droit international, la représentante a appelé à la fin immédiate de la guerre et demandé le retrait inconditionnel des troupes russes du territoire ukrainien. Il est regrettable qu’après 22 mois de combats, un règlement pacifique continue d’échapper aux parties, au détriment des civils innocents.  Dans cette optique, la représentante a renouvelé son appui à la paix et au dialogue, tout en encourageant la communauté internationale à tout faire pour rassembler les parties autour de la table des négociations.  Toutefois, a-t-elle souligné, tout effort de paix en Ukraine doit être guidé par les principes du droit international afin de garantir une solution juste, globale et durable au conflit.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a accusé la Russie de chercher à brosser un tableau différent basé sur une autre réalité en convoquant cette réunion.  Ce faisant, elle espère détourner l’attention du Conseil de sécurité de son agression, a-t-elle affirmé, et tente de justifier l’injustifiable.  Pour Malte, il s’agit d’une nouvelle tentative cynique de présenter l’agresseur comme la victime, et la victime comme l’agresseur. Faisant un bilan de l’agression russe depuis le 24 février 2022, la déléguée a reproché à la Russie d’avoir violé la souveraineté, et l’intégrité territoriale de l’Ukraine et d’avoir ramené la guerre en Europe sans oublier les plus de 10 000 civils ukrainiens tués, les milliers d’autres blessés et les millions de personnes déplacées et la crise humanitaire qui s’est ensuivie.  Forte de ce constat, la déléguée a réaffirmé que l’Ukraine a le droit de se défendre contre cette agression russe, comme le prévoit l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, qu’elle a le droit de protéger ses citoyens, ses frontières, sa souveraineté et son intégrité territoriale, comme tout autre membre de l’ONU.  Elle a condamné l’escalade des attaques russes visant des zones peuplées en Ukraine au cours des dernières semaines en appelant à mettre fin aux attaques de civils et d’infrastructures civiles qui sont une violation du droit international humanitaire.  Notant que les guerres ont un impact disproportionné sur les femmes et les enfants, la représentante a affirmé que celles-ci ne dérogent pas à cette vérité en faisant état de viols et de tortures sexuelles.  Elle a salué l’engagement du Gouvernement ukrainien à mettre fin et à prévenir les violations graves à l’encontre des enfants par l’élaboration d’un plan de prévention avant de demander instamment à la Russie de renoncer immédiatement à toutes les pratiques qui portent atteinte aux droits des enfants ukrainiens.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a déclaré que la fin de cette guerre et de ses conséquences tragiques dépend de la Russie, qui peut y mettre un terme à tout moment sans préjudice à sa propre sécurité.  Or les missiles russes et les drones acquis depuis des mois auprès de l’Iran continuent de frapper quotidiennement l’ensemble du territoire ukrainien, a déploré le représentant, rappelant que le 25 novembre, « Kiev » a subi une des attaques les plus importantes depuis le début du conflit. Ce matin encore, la capitale ukrainienne a été visée par des missiles et des drones russes.  La Russie décide de faire durer cette guerre, en dépit d’appels répétés de l’Assemblée générale à y mettre un terme.  « Que la Russie mette fin à ses frappes, qu’elle retire ses troupes du territoire ukrainien, comme l’a exigé la Cour internationale de Justice, et la guerre cessera. »

Le représentant a dénoncé l’emploi des armes et munitions acquises par la Russie auprès de l’Iran et de la « Corée du Nord », en violation de résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, et la « rhétorique nucléaire irresponsable » de la Russie.  La France, a-t-il expliqué, a fait le choix de soutenir le peuple ukrainien et fournira les matériels militaires nécessaires pour que celui-ci puisse se défendre.  La Russie ne doit pas gagner cette guerre, car la force ne doit pas primer sur le droit; la souveraineté et l’intégrité territoriale ne doivent pas être impunément bafouées, a exhorté le représentant qui a promis l’aide humanitaire française à l’Ukraine.

M. GENG SHUANG (Chine) a estimé qu’il n’était dans l’intérêt de personne de prolonger la crise en Ukraine qui est « très compliquée ».  Les dépenses militaires des parties au conflit ont augmenté considérablement et sont même « montées en flèche » l’an dernier, s’est-il alarmé. Dans le même temps, plus de 700 millions de personnes risquent de souffrir de la faim, sans parler de leurs difficultés d’accès aux services de base.  De plus, deux milliards de personnes dans le monde sont en proie à des difficultés économiques, et les inégalités et l’injustice persistent, a déploré le représentant, qui s’est par ailleurs inquiété des obstacles qui se dressent sur la voie des objectifs de développement durable (ODD).  C’est pourquoi il a lancé un appel aux pays concernés, les exhortant à canaliser tous leurs efforts et leurs ressources vers des questions plus utiles.  Rappelant que la Chine a toujours été du côté de la paix et du dialogue, qu’il s’agisse de l’Ukraine, du Moyen-Orient, des conflits en Afrique ou de situations en Asie-Pacifique, le représentant a estimé que les différends doivent être réglés par des moyens politiques dès que possible, en invitant la communauté internationale à adhérer à cette vision.

M. IRIYA TAKAYUKI (Japon) a reproché à la Russie d’avoir demandé à plusieurs reprises des réunions du Conseil de sécurité sur le même sujet dans le but de détourner l’attention du fait indéniable qu’elle est à l’origine de cette guerre d’agression. « La Russie devrait s’inquiéter de l’effet de ses propres armes en Ukraine avant de s’inquiéter du soutien international apporté à l’Ukraine pour répondre à l’agression russe », s’est emporté le représentant.

Il s’agit pour lui d’aider l’Ukraine à exercer son droit de légitime défense contre une agression. Les transferts de certaines armes en violation des résolutions du Conseil de sécurité et le soutien nécessaire à l’Ukraine sont deux choses complètement différentes, a-t-il fait valoir. Dès lors, tous les États Membres devraient s’abstenir de soutenir l’agression russe, directement ou indirectement, a-t-il martelé, dénonçant pour sa part les transferts d’armes de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) vers la Russie, dont plusieurs ont été confirmés.  Enfin, le représentant s’est dit préoccupé par la possibilité d’un transfert de technologie liée aux missiles nucléaires ou balistiques vers la RPDC, qui menacerait davantage la paix et la stabilité de la région et du monde entier.

M. GUSTAVO SÉNÉCHAL DE GOFFREDO JUNIOR (Brésil) a réitéré la préoccupation de son pays quant à l’utilisation d’armes de plus en plus meurtrières et destructrices dans le conflit en Ukraine.  Cette tendance inquiétante, combinée à la rhétorique de l’escalade nucléaire, entrave les perspectives d’une résolution pacifique du conflit et suscite des inquiétudes mondiales bien au-delà des pays directement touchés par le conflit, a-t-il dénoncé, s’alarmant en outre du risque de détournement d’armes vers des groupes criminels et terroristes.  Cela met non seulement en danger la sécurité immédiate et future de la population civile en Ukraine, mais représente aussi un risque important pour la paix et la sécurité, a insisté le représentant, avant d’exhorter tous les États Membres à adhérer au Traité sur le commerce des armes et au Registre des armes classiques de l’ONU.  Soulignant également l’importance de la transparence dans les transactions d’armes et de la prévention de leur détournement, il a attiré l’attention du Conseil sur la protection des installations nucléaires civiles en Ukraine, jugeant que cette question devrait être une priorité pour toutes les parties au conflit.  Il a donc réitéré l’appel du Brésil à la désescalade et au début de négociations, directes ou par l’intermédiaire de tiers, conformément à l’Article 33 de la Charte des Nations Unies.  « Ce n’est que grâce à des négociations diplomatiques alimentées par une bonne volonté politique que nous pourrons parvenir à une paix juste et durable en Ukraine et ailleurs dans le monde », a-t-il conclu.

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) a constaté que « ce septième débat du Conseil de sécurité convoqué par Moscou sur la fourniture d’armes à l’Ukraine a pour objectif d’influencer l’opinion publique occidentale contre le soutien à Kyïv ». Ces débats sont à ses yeux la preuve « évidente » d’une campagne menée par la Fédération de Russie afin de servir sa volonté de conquérir l’Ukraine sans que celle-ci n’ait les moyens de se défendre.  Or, a-t-il ajouté, il n’est ni dans l’intérêt du Royaume-Uni ni dans celui des États Membres de permettre à la Russie de saper, par la violence, les principes de souveraineté et d’intégrité territoriale qui sous-tendent l’ordre international.  « C’est pourquoi nous sommes fiers de soutenir le droit de légitime défense de l’Ukraine, et nous continuerons à lui fournir une assistance militaire robuste aussi longtemps que nécessaire. »

De telles mesures sont d’autant plus importantes aujourd’hui que Moscou s’approvisionne en armes auprès de l’Iran et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) afin de tuer des civils et de cibler des infrastructures critiques de l’Ukraine, a ajouté le représentant.  En plus d’envoyer d’énormes quantités d’armes dans ce pays, le Gouvernement russe sacrifie la vie d’un nombre croissant de ses propres citoyens pour prolonger une invasion fondée sur des mensonges, a-t-il poursuivi, en dénonçant un « tapis roulant incessant de pères, de fils et de filles russes envoyés à la mort ».  Ainsi, depuis le début de l’invasion, plus de 300 000 soldats russes ont été tués ou blessés, soit davantage qu’au cours des 10 années d’occupation soviétique de l’Afghanistan.  Dans ces circonstances, le représentant a jugé difficile de voir en quoi il est dans l’intérêt du peuple russe que Moscou prolonge son agression.

M. ANDRÉS FERNANDO FIALLO KAROLYS (Équateur) a instamment demandé à la Russie de cesser son agression militaire en Ukraine, afin de permettre un cessez-le-feu qui rendra possibles des progrès vers une paix juste et durable.  Préoccupé par les risques liés à l’afflux d’armes et de munitions en Ukraine, le représentant a soutenu les recommandations du Bureau des affaires de désarmement, réitérées aujourd’hui, sur les mesures à prendre pour atténuer ces risques.  Il serait souhaitable, a-t-il déclaré, de renforcer les normes de marquage, d’enregistrement et de traçabilité des armes et des munitions et de mettre en œuvre toute mesure visant à prévenir le détournement, la propagation et l’escalade des conflits.  Il a insisté également sur la nécessité de donner la priorité à la protection des civils par rapport à toute autre considération en rapport avec l’industrie, la production ou la distribution d’armes.  Par ailleurs, le délégué a souligné que la fourniture de matériels et de systèmes de défense doit contribuer à la protection des infrastructures civiles et de la population.  Toute fourniture d’armes ou de munitions doit être soumise à des garanties suffisantes pour garantir le respect des principes de distinction, de proportionnalité et de précaution dans leur utilisation, a-t-il également exigé, ajoutant que toute arme ou munition qui n’est pas compatible avec ces principes ne devrait pas être transférée ou utilisée.

M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a dit que la mort et la destruction en Ukraine n’ont rien d’extraordinaire pour la Russie.  Alors pourquoi la Russie a-t-elle demandé cette réunion, une fois de plus, sur la question des transferts d’armes?  Est-ce à cause de la résistance des Ukrainiens et de leur détermination à restaurer la souveraineté et l’intégrité territoriale de leur État?  Est-ce dû à la résilience de la ville ukrainienne d’Avdiivka, qui continue de résister aux attaques et aux bombardements russes?  Le délégué, citant un média en ligne, a fait état d’un appel rédigé par plus de 100 proches de soldats russes mobilisés qui affirment avoir été envoyés à Avdiivka dans le but de s’emparer de la ville avant le 14 décembre.  Or, ce jour-là, a-t-il noté, Putin est censé répondre aux questions improvisées des citoyens ordinaires.  « Une improbable victoire militaire servirait de thème pour cette propagande », a avancé le délégué.  La seule chance pour les troupes russes d’avancer sur la ligne de front est de s’assurer que l’Ukraine est à court d’armes, a-t-il ajouté.

L’Ukraine continuera d’exercer son droit à l’autodéfense tant que les troupes russes resteront sur le territoire ukrainien, tant qu’elles tueront des Ukrainiens et terroriseront le pays, a martelé le délégué.  Il a salué les alliés qui soutiennent le noble combat de son pays en lui fournissant des armes.  « Ces armes servent aux soldats ukrainiens pour défendre leurs maisons et leurs proches contre l’invasion », a-t-il assuré.  Les transferts d’armes ne doivent jamais être considérés comme un facteur d’insécurité ou d’aggravation de la guerre, a prévenu le délégué, informant que la défense aérienne ukrainienne a abattu 18 drones et 8 missiles balistiques lancés par la Russie sur Kyïv hier soir. Il a rejeté « toute tentative visant à confondre la responsabilité de l’Ukraine de défendre son propre territoire avec celle de la partie qui viole la Charte des Nations Unies et qui poursuit une guerre d’agression non provoquée ».  Dès que la guerre sera terminée et que les troupes russes se seront retirées de l’Ukraine, dès que l’obligation de rendre des comptes pour les crimes les plus graves au regard du droit international sera assurée, la voie vers une paix globale, juste et durable sera ouverte, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

RDC: le Conseil de sécurité débat du retrait de la MONUSCO à neuf jours des élections et dans un contexte de tensions accrues avec le Rwanda

9500e séance – matin
CS/15521

RDC: le Conseil de sécurité débat du retrait de la MONUSCO à neuf jours des élections et dans un contexte de tensions accrues avec le Rwanda

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo (RDC), Mme Bintou Keita, et une majorité de délégations ont plaidé ce matin, devant le Conseil de sécurité, pour un retrait responsable de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MONUSCO) dans un contexte difficile, marqué notamment par l’exacerbation des tensions avec le Rwanda voisin.  Les élections qui doivent se tenir dans neuf jours en RDC ont également figuré au cœur des interventions.

« Nous sommes aujourd’hui à un tournant important des relations entre l’ONU et la RDC, mais également à un moment important pour le pays lui-même », a d’emblée déclaré Mme Keita, qui est également Cheffe de la MONUSCO. « La RDC est en pleine période électorale, à neuf jours d’un scrutin présidentiel, législatif national et provincial, et également local. »  Si les préparatifs électoraux sont en bonne voie, elle a souligné certains défis persistants, notamment la propagation de discours de haine.

Mme Keita a fait état de la crise sécuritaire et humanitaire « extrêmement éprouvante » pour les populations de l’est du pays, notamment les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu.  « La situation s’est détériorée dans le sud de la province du Nord-Kivu, notamment après la reprise des hostilités entre les Forces armées congolaises et le M23 depuis le mois d’octobre, et l’offensive du M23 dans le territoire de Masisi, à la suite du début du retrait des troupes de la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est. »

Les tensions entre la RDC et le Rwanda restent également très vives et le risque d’escalade militaire entre les deux pays demeure, a-t-elle averti.  À cette aune, Mme Keita a félicité le Gouvernement d’avoir officiellement interdit à ses forces armées toutes relations avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Elle s’est en revanche dite préoccupée par la montée récente de tensions entre le Rwanda et le Burundi, au lendemain de l’engagement des forces burundaises contre le M23 au Masisi.

La haute fonctionnaire a rappelé que la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) se prépare au déploiement dans les semaines qui viennent d’une nouvelle force, la SAMIRDC, qui devrait être dotée d’un mandat offensif.  Si ces efforts régionaux sont louables, ils ne pourront atteindre leurs objectifs sans l’investissement soutenu du Gouvernement congolais dans les processus politiques de résolution des conflits à l’est du pays, a noté la Représentante spéciale.

C’est dans ce contexte « extrêmement difficile », selon l’expression du Brésil, que se déroule le processus de retrait de la MONUSCO.  Mme Keita a rappelé qu’un plan de désengagement conjoint a été transmis au Conseil le 23 novembre, ce dernier s’étant engagé à décider, d’ici à la fin de l’année, du retrait progressif de la Mission.  Mme Keita a indiqué que celle-ci se concentrera sur sa tâche de protection des civils, tout en se tenant prête à épauler les opérations des forces régionales.

« Le départ de la MONUSCO doit se faire de manière responsable, en évitant tout risque de violence supplémentaire », a appuyé le Brésil, qui a en outre souhaité que les forces de la SADC coopèrent avec la Mission.  Dans chaque province, le retrait de la MONUSCO doit être évalué en fonction de l’impact sur la protection des civils, ont appuyé les États-Unis.  La Suisse a de son côté salué la coopération entre la RDC et la Mission dans l’élaboration du plan de désengagement.

La Coordonnatrice nationale de Solidarité des femmes pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI), Mme Sandrine Lusamba, s’est montrée plus critique, en déclarant que la société civile n’a eu que peu d’informations et s’interroge sur le contenu de ce plan.  Elle a dit craindre la détérioration de la protection des civils et des personnes déplacées.

Ce plan fait de la protection des civils une priorité, a pour sa part déclaré la France, tout en souhaitant que la transition ne crée pas de vide sécuritaire.  Elle a indiqué avoir proposé aux membres du Conseil un projet de résolution portant sur la mise en œuvre du plan de désengagement, qui prévoit le retrait de la Mission du Sud-Kivu d’ici au 30 avril prochain et l’élaboration d’un nouveau rapport conjoint à l’issue de cette première phase.  « Nous pouvons faire du retrait de la MONUSCO un succès », a assuré la délégation française.

De la relation entre la RDC et la MONUSCO, l’histoire retiendra que la Mission a accompli des « exploits » dans l’exécution de son mandat, a souligné le représentant congolais.  Pour apaiser les tensions tout en consolidant les progrès réalisés, le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire, a-t-il appuyé, justifiant ainsi la demande de son gouvernement de ramener le début du retrait de la MONUSCO de décembre 2024 à décembre 2023.

« Mon pays a fait preuve de flexibilité en acceptant une année de plus pour appliquer le plan de désengagement », a-t-il fait remarquer.  Sur le plan sécuritaire, la priorité doit être la fin de l’agression rwandaise et le retrait du Nord-Kivu, l’éradication des groupes armés « terroristes », dont le M23, le retour des populations déplacées et le rétablissement de l’autorité de l’État dans les territoires occupés par le M23, a détaillé le délégué.  « Le peuple congolais est soumis depuis trois décennies à une guerre d’agression imposée par un voisin aux visées expansionnistes », a-t-il affirmé.

Le Gouvernement congolais et sa « coalition de milices armées illégales » ont violé le cessez-le-feu dans l’est du pays, a quant à lui accusé le Rwanda.  « Le départ prématuré de la MONUSCO, à la demande de Kinshasa, met à mal les efforts régionaux de paix. »  La délégation a aussi déploré que la Mission reste muette sur la persécution des communautés tutsies par l’État congolais, conséquence directe de « l’idéologie génocidaire » dirigée contre les Tutsis congolais.  « Les solutions aux défis sécuritaires en RDC ne peuvent être trouvées dans des jeux de reproches », a-t-elle ajouté.

LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO (S/2023/93)

Déclarations

« Nous sommes aujourd’hui à un tournant important des relations entre l’ONU et la RDC, mais également à un moment important pour le pays lui-même », a déclaré Mme BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Elle a rappelé que la RDC est en pleine période électorale, à neuf jours de scrutins présidentiel, législatif, national et provincial, et également local.  Elle demande par ailleurs un retrait accéléré, ordonné et responsable de la MONUSCO, pour lequel un rapport spécial du Secrétaire général et un plan de désengagement conjoint ont été transmis au Conseil de sécurité avec ses recommandations.  La Représentante spéciale a indiqué que l’est du pays, et notamment les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, fait par ailleurs toujours face à une crise sécuritaire et humanitaire extrêmement éprouvante pour ses populations et à des tensions régionales persistantes.  « L’ensemble de ces facteurs doit être pris en considération pour redéfinir le partenariat qui nous unit », a-t-elle estimé.

La haute fonctionnaire a indiqué que la situation ne cesse de se détériorer dans le Nord-Kivu.  Les tensions régionales entre la RDC et le Rwanda se sont encore exacerbées, aggravant le risque d’une confrontation militaire directe qui pourrait entraîner le Burundi.  Selon la Commission électorale nationale indépendante, les préparatifs des élections sont en bonne voie, a-t-elle noté, en saluant la validation des 26 candidats à l’élection présidentielle, dont deux femmes.  Elle a aussi mentionné les préoccupations en ce qui concerne les listes électorales, qui n’ont pas été publiées dans tous les bureaux de vote avant le 5 décembre, comme l’exigeait la loi.  La qualité des cartes électorales et l’accréditation des missions d’observation électorales sont d’autres défis qui pourraient alimenter la défiance, a-t-elle dit, en exhortant la Commission à y remédier.  Elle a regretté la désinformation et la propagation des discours de haine, déplorant également que les populations de certains territoires, notamment Masisi et Rutshuru, soit plus de 1,5 million de Congolais, ne pourront pas voter en décembre.

« La situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains s’est malheureusement détériorée dans le sud de la province du Nord-Kivu, notamment à la suite de la reprise des hostilités entre les Forces armées congolaises et le M23 depuis le mois d’octobre, et l’offensive du M23 dans le territoire de Masisi, à la suite du début du retrait des troupes de la Force de la Communauté de l’Afrique de l’Est », a relevé Mme Keita.  Les tensions entre la RDC et le Rwanda restent également très vives et le risque d’escalade militaire entre les deux pays demeure important malgré les efforts régionaux et internationaux pour atténuer les tensions, a-t-elle dit.  La Représentante spéciale a félicité le Gouvernement d’avoir officiellement interdit toutes relations des Forces armées de la RDC (FARDC) avec les Forces démocratiques de libération de Rwanda (FDLR).  « L’expansion de l’opération conjointe Shujaa, entre les forces armées congolaises et ougandaises dans le nord de la province a mis sous pression le groupe armé ADF, sans pouvoir empêcher pour autant de nouvelles attaques contre les populations civiles. »  Elle a noté qu’en Ituri, l’insécurité est principalement alimentée par les groupes armés CODECO, Zaïre, FRPI et FPIC ainsi que les ADF, Djugu et Irumu restant les principaux foyers d’insécurité.  Les opérations coordonnées des FARDC et de la MONUSCO ont pu repousser plusieurs attaques contre les civils, mais le manque de ressources pour assurer l’autorité de l’État dans la province reste criant, a-t-elle déploré.

Pour protéger les civils, la MONUSCO et les FARDC ont mené six opérations conjointes en Ituri et au Nord-Kivu lors du précédent trimestre, a-t-elle poursuivi. Elle a indiqué que l’opération Springbok a notamment été lancée en novembre pour sécuriser les villes de Goma et de Sake et constitue jusqu’à présent un moyen de dissuasion efficace contre les tentatives d’avancées du M23 vers ces deux villes.  « Au Sud-Kivu, même si les incidents violents ont diminué ces derniers mois, des poches d’insécurité persistent, notamment dans les territoires de Kalehe, Mwenga, Shabunda, Uvira et Fizi. »  Elle s’est dite préoccupée par la montée récente de tensions entre le Rwanda et le Burundi, à la suite de l’engagement des forces burundaises contre le M23 au Masisi, avant d’appeler à l’apaisement pour éviter toute escalade.  « À la demande du Gouvernement congolais, le mandat de la force régionale de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) n’a pas été prolongé au-delà du 8 décembre et celle-ci a entamé son retrait. »  La Représentante spéciale a précisé que plus de 500 soldats du Kenya, du Soudan du Sud et de l’Ouganda ont déjà quitté la RDC.  En parallèle, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) se prépare au déploiement dans les semaines à venir d’une nouvelle force, la SAMIRDC, qui devrait être dotée d’un mandat offensif, a-t-elle déclaré.  Si ces efforts régionaux sont louables, ils ne pourront atteindre leurs objectifs sans l’investissement continu et soutenu du Gouvernement congolais dans les processus politiques régionaux, nationaux et locaux de résolution des conflits à l’est du pays, a tranché la Représentante spéciale.  « Cet investissement doit aller de pair avec la réforme du secteur de la sécurité congolais et la mise en œuvre de son programme de désarmement et de réinsertion communautaire, le P-DDRCS. »

Sur le plan humanitaire, elle a indiqué que le pays compte plus de 6,3 millions de personnes déplacées, dont 5,5 millions dans les trois provinces orientales du pays.  Le plan de réponse humanitaire n’est financé qu’à hauteur de 37,5%, a-t-elle précisé.

Enfin, la Représentante spéciale a rappelé que le plan de désengagement conjoint a été présenté au Conseil le 23 novembre dernier.  Pendant toute la durée du processus, la Mission se concentrera sur ses tâches prioritaires, telles que la protection des civils et le programme de désarmement.  Dépendant d’une autorisation de ce Conseil, la Mission se tient prête à épauler les opérations des forces régionales, dans le plein respect de la politique de diligence en matière de droits humains, a-t-elle dit.  « Si les défis en RDC sont nombreux et complexes, ils sont loin d’être insurmontables. »  La haute fonctionnaire a estimé que la déclaration présidentielle du 16 octobre a permis de renouer un partenariat constructif entre la Mission et le Gouvernement.  Le renouvellement du mandat de la MONUSCO doit nous permettre de poursuivre cet effort conjoint, dans un esprit de respect mutuel et de confiance, a conclu la Représentante.

Mme SANDRINE LUSAMBA, Coordonnatrice nationale de Solidarité des femmes pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI), une organisation congolaise qui milite pour la défense et la promotion des droits des femmes, a fait état d’une dégradation de la situation sécuritaire en République démocratique du Congo (RDC) depuis son dernier briefing au Conseil de sécurité en 2021, et cela malgré la présence des Casques bleus de la MONUSCO et d’autres forces militaires nationales et étrangères dans le pays.

À la croisée des chemins, la RDC n’accueillera bientôt plus d’opération de maintien de la paix de l’ONU, a-t-elle constaté, mais hormis un communiqué annonçant que le Gouvernement de la RDC et la MONUSCO avaient convenu d’un plan de désengagement de la Mission, « la société civile n’a eu que peu d’informations et s’interroge sur le contenu de ce plan ».  Le retrait de la MONUSCO pousse les organisations de la société civile, y compris celles dirigées par des femmes, à considérer à la fois les opportunités du transfert de certaines tâches de la MONUSCO et les risques que présente un tel retrait.  S’agissant des opportunités, Mme Lusamba a estimé que certaines activités des sections des affaires civiles, du genre et de l’enfance de la MONUSCO pourraient être transférées à des ONG locales.  Ce transfert se ferait en fonction des compétences, de l’expertise et des domaines d’intervention des ONG, celles-ci devant recevoir les ressources et le soutien nécessaires pour bien assumer ces responsabilités de manière durable.

Quant aux risques liés au retrait de la MONUSCO, la représentante de la société civile a dit craindre la détérioration de la protection des civils et des personnes déplacées, notamment dans les zones non accessibles aux forces armées et à la police, ainsi que le manque de suivi sur les droits de l’homme par le Bureau conjoint pour les droits de l’homme.  Elle s’est également inquiétée d’un impact négatif sur le système d’alerte précoce et sur la collecte de données vérifiées sur la violence sexiste que le système des Nations Unies utilise pour rendre compte des droits humains en RDC et, plus généralement, pour surveiller les violations des droits des femmes.  En outre, les défenseurs des droits humains et les artisans de la paix, en particulier les femmes, risquent d’être confrontés à un harcèlement accru et à d’autres menaces de protection.  Mme Lusamba a aussi appréhendé une augmentation du chômage, car une grande partie de la main d’œuvre civile de la MONUSCO issue de la communauté locale va perdre son emploi.  Enfin, « la fermeture de la radio OKAPI signifie que la société civile n’aura plus accès à cette plateforme communautaire indépendante incontournable pour faire passer ses messages gratuitement et sans distinction », a-t-elle regretté.

Au vu de ces observations, Mme Lusamba a formulé une série de recommandations.  Premièrement, les femmes doivent être placées au centre du travail de la MONUSCO et de l’équipe de pays des Nations Unies.  Elles doivent diriger la prise de décision dans tous les domaines, y compris l’action humanitaire et l’attribution des ressources afin que la réponse se concentre sur les groupes les plus marginalisés et à risque.  Deuxièmement, la MONUSCO et l’équipe de pays devraient travailler avec les ONG locales et nationales pour développer des indicateurs spécifiques pour mesurer la protection et la promotion des droits humains des femmes, en particulier en ce qui concerne la violence sexiste et les attaques contre les défenseures des droits humains, dont les droits sexuels et reproductifs.  Troisièmement, le Conseil de sécurité devrait exiger que le Gouvernement et tous les autres acteurs intègrent une approche fondée sur les droits de l’homme et centrée sur les survivants tout au long de l’action humanitaire, et qu’ils fassent en sorte que les efforts visant à gérer la crise climatique et les ressources naturelles soient sensibles au genre.  « La communauté internationale des donateurs ne doit pas laisser tomber la population de la RDC », a conclu l’intervenante.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que la communauté internationale doit continuer d’accompagner la RDC dans l’organisation d’élections libres, inclusives et transparentes.  Il a pris note des avancées du processus électoral et des efforts déployés par la Commission électorale nationale indépendante pour organiser des élections crédibles dans les délais prévus.  Pour y parvenir, le représentant a encouragé les parties prenantes à s’abstenir de toute violence et de discours de haine.  Alors que les tensions se poursuivent dans l’est du pays, il a demandé au Rwanda de cesser son soutien au M23 et à la présence de soldats sur le territoire congolais.  Les Forces armées congolaises doivent quant à elles cesser toute collaboration avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  « Toute approche militaire ne fera que contribuer à l’escalade », a prévenu le délégué, avant d’appeler à la reprise des processus de Luanda et de Nairobi après les élections.

Poursuivant, il a salué les efforts consentis par les autorités congolaises et la MONUSCO pour finaliser le plan de désengagement conjoint de la Mission.  En octobre, a-t-il rappelé, le Conseil s’est engagé à décider, d’ici à la fin de l’année, du retrait progressif de la MONUSCO. Il s’est félicité de « l’esprit de responsabilité » de ce plan, qui fait de la protection des civils une priorité, tout en souhaitant que la transition ne crée pas de vide sécuritaire. Dans cette optique, la France a proposé aux membres du Conseil de sécurité une résolution portant sur la mise en œuvre du plan de désengagement, qui prévoit le retrait de la Mission du Sud-Kivu d’ici au 30 avril prochain et l’élaboration d’un nouveau rapport conjoint à l’issue de cette première phase.  « Nous pouvons faire du retrait de la MONUSCO un succès », a-t-il assuré.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana), qui parlait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a pris note du lancement de la campagne électorale, le 19 novembre 2023, en vue de la tenue d’élections générales le 20 décembre en RDC.  Avec 44 millions d’électeurs, elle a salué l’engagement du Gouvernement à organiser les élections dans un contexte sécuritaire particulièrement difficile. Les A3 encouragent la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à prendre des mesures de confiance et à maintenir le dialogue avec tous les acteurs politiques afin que les résultats de ces élections soient acceptés par tous, notant que le soutien apporté par la MONUSCO à cet égard est très apprécié.  En outre, les A3 ont appelé les autorités congolaises à ne ménager aucun effort pour faire en sorte que le bon voisinage et la stabilité régionale restent également une priorité avant, pendant et après les élections.  Sur le plan régional, la déléguée a réitéré le soutien des A3 à un règlement politique de la crise sécuritaire qui affecte l’est de la RDC, réaffirmant leur soutien aux processus régionaux qui constituent des solutions politiques africaines crédibles pour mettre fin à la crise, en citant notamment les actions prioritaires des accords de Nairobi et de Luanda en vue de la cessation des hostilités, du retrait immédiat du M23 des zones occupées, du rapatriement de tous les groupes armés étrangers et des étrangers et du respect par les groupes armés locaux du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation.  Les A3, a poursuivi la déléguée, ont pris note de la signature, le 21 novembre 2023, du plan et du calendrier de désengagement entre la MONUSCO et la RDC ainsi que de la demande de Kinshasa de refléter ce plan dans la résolution sur le renouvellement du mandat de la MONUSCO en cours de négociation.  À ce sujet, elle a encouragé la RDC et la MONUSCO à continuer à promouvoir un dialogue constructif afin d’assurer un retrait concerté, ordonné et responsable de la Mission.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) s’est félicité du plan de retrait progressif de la MONUSCO et de l’engagement du Gouvernement congolais à assurer la protection des civils et à renforcer l’autorité de l’État dans les provinces où est actuellement déployée la Mission de l’ONU.  Il a insisté sur le fait que, dans chaque province, le retrait de la MONUSCO doit être évalué en fonction de l’impact sur la protection des civils et de la situation humanitaire.  De même, a-t-il ajouté, aucun vide sécuritaire ne peut être accepté.  Le cas échéant, une pause devra être envisagée avant de passer aux phases ultérieures.  À cet égard, le représentant a salué l’engagement pris pour que des évaluations de la mise en œuvre du plan aient lieu tous les trois mois, souhaitant qu’elles soient communiquées au Conseil de sécurité.  Il a cependant estimé que, comme tout désengagement de mission, le retrait de la MONUSCO sera difficile, la RDC étant confrontée à des problèmes financiers sur fond de besoins humanitaires et de développement en hausse. Rappelant que l’Agence des États-Unis pour le développement international et le Département d’État ont alloué plus de 956 millions de dollars à l’assistance bilatérale pour 2022, sans compter le soutien apporté à la MONUSCO, il a demandé à la communauté internationale de mobiliser des ressources supplémentaires pour renforcer l’action des agences, fonds et programmes de l’ONU en vue du départ de la Mission.

Pour le représentant, le retrait de la MONUSCO exige aussi de nouvelles visions sécuritaires face à la crise que connaît la RDC depuis 30 ans.  Selon lui, le déploiement de forces régionales doit s’accompagner d’un engagement renouvelé dans les processus politiques.  Se disant alarmé des tensions grandissantes entre la RDC et le Rwanda, il a demandé à ce pays de cesser son soutien au M23 et de se retirer du territoire congolais.  Il a aussi appelé tous les acteurs régionaux à réaffirmer leur attachement aux processus de Nairobi et de Luanda, avant de se dire encouragé par les préparatifs du Gouvernement congolais visant à assurer la tenue d’élections libres et équitables le 20 décembre.  Dans ce contexte, il a exhorté les acteurs politiques à s’abstenir de tout discours de haine afin que tous les Congolais puissent voter en toute sécurité.  Enfin, après avoir rappelé les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles au sein de la MONUSCO, il a souhaité que le personnel de l’ONU rende des comptes sur sa conduite et ses performances.

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire à l’est du pays et par les tensions accrues entre la RDC et le Rwanda.  Il a appelé toutes les parties au conflit, ainsi que les pays voisins, à se réengager en faveur des processus politiques, notamment les processus de Luanda et de Nairobi.  Le délégué a appelé tous les groupes armés à déposer leurs armes et à la cessation de tout appui extérieur auxdits groupes.  La transition de la MONUSCO se déroule dans un environnement extrêmement difficile, a reconnu le délégué.  Mentionnant le plan de désengagement agréé par l’ONU et la RDC, il a estimé que la priorité doit être donnée à un transfert raisonnable des tâches.  Le départ de la Mission doit se faire de manière responsable, en évitant tout risque de violence supplémentaire, a-t-il conclu.  « Alors que les forces de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) s’apprêtent à s’engager dans le Nord-Kivu, nous attendons d’elles qu’elles agissent en pleine coopération avec la MONUSCO. »

M. DAI BING (Chine) a reconnu que la RDC se trouve à la croisée des chemins, s’agissant du processus politique et de la sécurité.  Alors que les élections approchent à grands pas, il s’est félicité des efforts déployés par les autorités congolaises et la Commission électorale nationale indépendante en vue d’assurer la tenue d’un scrutin pacifique susceptible d’imprimer un nouvel élan à la stabilité à long terme du pays.  Selon lui, la communauté internationale doit pleinement respecter la souveraineté et l’appropriation nationale de ces élections, lesquelles relèvent des affaires internes de la RDC.  Le délégué a exprimé son appui aux opérations conjointes menées par la MONUSCO et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), et enjoint le M23 et les autres groupes armés à mettre un terme immédiat aux hostilités et à se retirer du territoire qu’ils occupent.

Considérant que la situation dans l’est du pays a une incidence sur la sécurité de l’ensemble de la région, le délégué a fait valoir que la communauté internationale se doit d’appuyer les processus de Nairobi et de Luanda.  Il a en outre exprimé son soutien aux organisations régionales et aux opérations de paix, en espérant que les pays de la région sauront renforcer leur coopération avec la RDC afin de préserver la sécurité régionale.  Enfin, le délégué s’est félicité de la signature du plan de désengagement et du programme de retrait progressif de la MONUSCO. La transition devra donc garantir le transfert de tâches au Gouvernement de la RDC afin de préserver la stabilité et la sécurité de la région.

M. TAKAYUKI IRIYA (Japon) s’est inquiété de l’aggravation de la situation sécuritaire dans les provinces de l’est de la RDC, soulignant les conséquences profondes et dévastatrices de la violation du cessez-le-feu sur les populations.  La nouvelle coalition de groupes armés qui se battent en appui aux Forces armées congolaises a aggravé les hostilités et déclenché des déplacements massifs de population, s’est-il alarmé.  Tous les groupes armés congolais et étrangers doivent rendre les armes sans conditions et participer au processus de démobilisation.

Au sujet de la stratégie de sortie de la MONUSCO, le représentant a estimé qu’un retrait graduel, responsable et durable exige une coopération étroite et constructive entre toutes les parties prenantes, sous la férule du pays hôte.  La protection des civils doit toujours être placée au centre des efforts et il est indispensable d’éviter tout vide sécuritaire sur le terrain, a-t-il poursuivi.  Par ailleurs, la protection du personnel, des installations et des équipements de la MONUSCO doit être assurée au cours du processus de retrait.  Le représentant s’est également inquiété du nombre élevé de violations des droits de l’homme, notamment de la violence sexuelle.  Quant aux élections à venir, il a estimé qu’elles sont l’occasion de gagner la confiance de la population et de renforcer l’unité.  Selon lui, renforcer la cohésion sociale est fondamental pour une stabilité durable, et des élections libres, justes, inclusives, pacifiques et transparentes sont plus nécessaires que jamais.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a constaté que la RDC se trouve à un moment critique marqué par la persistance de tensions avec le Rwanda, le risque d’élargissement du conflit, la poursuite des exactions de groupes armés, l’augmentation des besoins humanitaires et des violences à l’approche des élections.  C’est dans ce contexte que le Conseil de sécurité négocie le renouvellement du mandat de la MONUSCO, a-t-il observé, indiquant que son pays entend mettre l’accent sur la protection des enfants, alors que 2023 risque de devenir l’année la plus meurtrière pour les enfants depuis la création du mécanisme de surveillance et de notification en 2005.  À l’approche des élections, il a salué le travail effectué par la MONUSCO et l’UNICEF pour que les partis politiques signent une charte contre l’utilisation des enfants à des fins politiques et électorales, rappelant que la tolérance à l’égard des groupes armés mobilisés contre le M23 a conduit à une recrudescence du recrutement d’enfants.  Il a salué en particulier le travail effectué avec l’appui des autorités congolaises, qui a permis de ne plus recenser de tels cas de recrutement par les Forces armées congolaises entre 2021 et 2023.  Mettre en œuvre un retrait responsable de la MONUSCO, c’est protéger les plus vulnérables, a insisté le représentant, appelant à ce qu’une présence civile résiduelle soit maintenue dans les régions où les militaires partiront, afin de « laisser du temps au transfert des connaissances, à la formation et au renforcement des capacités ».  Se déclarant par ailleurs encouragé par la forte présence de candidates aux prochaines élections, il a souhaité que l’ONU consulte régulièrement les organisations de femmes de la société civile et veille à ce qu’une analyse complète de genre soit menée tout au long de la transition. « Nous devons comprendre et répondre à l’impact sur les femmes et les filles de toute reconfiguration de la présence de l’ONU », a-t-il dit, notant l’adoption d’une loi sur la protection et les réparations pour les victimes de violences sexuelles liées au conflit.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué la volonté du Gouvernement de la RDC de garantir un retrait responsable et échelonné de la MONUSCO.  Le Gouvernement devra assumer sa responsabilité de protection des civils, a dit le délégué, en l’exhortant à accélérer ses efforts en ce sens.  Il a souligné l’urgence d’un processus réussi, tant la violence s’intensifie dans le pays, notamment à l’est.  Il a appelé toutes les parties à s’engager en faveur d’un dialogue, en soulignant le risque d’une nouvelle escalade.  Les parties doivent s’engager en faveur des processus régionaux de Nairobi et de Luanda qui constituent la meilleure feuille de route en vue d’un pays en paix, a ajouté le délégué.  Enfin, il a appelé tous les pays de la région à s’acquitter de leur engagement en faveur de processus politiques revitalisés et à prendre les mesures concrètes en vue d’améliorer l’accès humanitaire et de réduire la violence.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a fait état d’un moment critique pour la RDC, une semaine avant la tenue des élections.  Elle a encouragé la MONUSCO et l’équipe de pays des Nations Unies à fournir le soutien nécessaire pour assurer le succès du processus électoral.  Alors que les attaques des groupes armés se poursuivent, notamment dans la région du Nord-Kivu, « la protection des civils doit rester une priorité absolue ». La représentante a condamné la violence croissante que connaît la région du fait de la violation du cessez-le-feu entre le M23 et l’armée congolaise.  Elle a appelé les autres groupes armés à déposer les armes et à s’engager sérieusement dans le processus de désarmement.  L’insécurité dans l’est du pays a en outre entraîné une augmentation significative des incidents de violence sexuelle depuis mars dernier, a dénoncé la représentante.  Afin d’assurer la sécurité et la stabilité de la région, il est à ses yeux essentiel que le dialogue entre la RDC et les acteurs régionaux se poursuive.  De même, la détérioration rapide de la situation humanitaire nécessite une réponse collaborative entre le Gouvernement congolais et la communauté internationale, des besoins immédiats à la planification à long terme. Enfin, elle s’est félicitée de la coopération entre la Représentante spéciale et le Gouvernement congolais afin d’élaborer un plan visant à accélérer progressivement le retrait de la MONUSCO.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a exprimé sa préoccupation au sujet des récentes violations du cessez-le-feu en RDC malgré l’accord conclu entre les forces de sécurité et le M23.  Elle a voulu souligner que le déplacement de population a atteint sept millions de personnes, ce qui est un chiffre colossal, et que la poursuite du conflit dans l’est du pays entraînera inévitablement une dégradation de la situation humanitaire.  La représentante a appelé tous les groupes armés à déposer les armes et à intégrer le processus de démobilisation, estimant que seule une solution politique permettra un cessez-le-feu global et une stabilisation durable de la situation.

Elle a jugé tout aussi indispensable de lancer des initiatives régionales dans ce contexte, se félicitant du prochain déploiement d’un contingent de développement de la Communauté de l’Afrique de l’Est dans l’est du pays.  Elle a également salué le rôle important joué par la MONUSCO, rappelant que son retrait doit tenir compte de l’évolution sur le terrain et être graduel et progressif.  Par ailleurs, la déléguée a appelé à enquêter sur les allégations de fautes graves commises par des Casques bleus, afin d’établir les responsabilités et de sanctionner leurs auteurs.  Il existe au sein de l’Organisation des mécanismes sur les atteintes à caractère sexuel et il faut se concentrer sur l’utilisation des outils existants, a-t-elle rappelé.

En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la Russie continuera de tout mettre en œuvre pour veiller au règlement de la crise en RDC, a assuré la représentante en conclusion.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a déclaré que le désengagement de la MONUSCO doit être responsable et échelonné.  La Suisse salue la collaboration entre les autorités congolaises et la Mission dans l’élaboration du plan de désengagement, a-t-elle dit, en reconnaissant l’appel de la RDC en faveur d’un retrait progressif de la Mission. « Ainsi, nous saluons la volonté du Gouvernement de garantir un retrait mené de manière responsable et échelonnée. »  Elle a souhaité que la priorité soit notamment donnée à la protection des civils. En vue du déploiement de forces régionales en RDC, il est essentiel que tout appui de la part de la MONUSCO soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme, a rappelé la déléguée.  Elle a appelé au renforcement des initiatives politiques pour mettre fin aux affrontements et consolider une paix durable.  « La tenue d’un dialogue sincère et approfondi, notamment entre la RDC et le Rwanda, est urgente pour mettre un terme aux cycles de violence. » Pour cela, tout soutien aux groupes armés, notamment au M23 et aux FDLR, doit cesser immédiatement, a tranché la déléguée.  Enfin, elle a regretté que les populations de certains territoires, notamment les territoires de Masisi et de Rutshuru, au Nord-Kivu, soient privées de la possibilité de participer au processus électoral.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a réitéré son appel à tous les groupes armés pour qu’ils déposent les armes et qu’ils s’engagent immédiatement dans les activités de désarmement.  Elle a appelé le Rwanda et la RDC à assurer la désescalade, dans le cadre du processus de Luanda, afin de briser le cycle de la méfiance et d’emprunter la voie de la paix en vue d’assurer la prospérité commune des pays de la région des Grands Lacs.  Bien qu’elle soit difficile, la voie de la réconciliation commence selon elle par la fin du soutien au M23 et le respect de l’intégrité territoriale de la RDC.  Pour sa part, la communauté internationale doit suivre de près le déroulement du scrutin à venir en RDC et montrer au peuple congolais qu’elle se tient à leur côté. La représentante a par ailleurs exprimé son appui au plan de désengagement ainsi qu’au retrait accéléré de la MONUSCO, tant qu’ils ne bénéficient pas aux groupes armés.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a espéré que les élections qui auront lieu le 20 décembre prochain en RDC garantiront un processus libre et transparent.  Les femmes et les jeunes doivent faire partie du processus de prise de décisions à tous les niveaux, a-t-il plaidé, leur participation étant essentielle dans tout processus électoral, car elle contribuera à construire des sociétés inclusives, sûres et pacifiques.  Notant les restrictions de l’espace civique, les incitations à la haine, les menaces de violence et la détention arbitraire de membres de l’opposition et de la presse en RDC, le représentant a réitéré la nécessité de défendre la liberté d’expression, d’opinion et de réunion, ainsi que l’obligation de protéger les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes, et de lutter contre l’intolérance.  Préoccupé par la détérioration de la situation en RDC, il a souligné l’importance du soutien de la communauté internationale pour répondre aux besoins de 25,4 millions de personnes confrontées à l’insécurité alimentaire et de plus de 450 000 personnes déplacées dans la région du Nord-Kivu.  Enfin, notant la décision du Gouvernement de la RDC sur le retrait anticipé de la MONUSCO, le représentant a estimé qu’il importe d’assurer une transition progressive, ordonnée et sûre, dans le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire à tous les stades.  Il a appelé à la mise en œuvre des décisions des processus de Luanda et de Nairobi pour parvenir à la paix dans la région.

M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a déclaré s’exprimer à un « moment crucial » pour son pays, alors que les négociations en cours sur le retrait de la MONUSCO entrent dans leur phase finale.  Rappelant que le peuple congolais est soumis depuis trois décennies à une « guerre d’agression imposée par un voisin aux visées expansionnistes », il a rendu hommage aux soldats de la paix qui œuvrent aux côtés des communautés locales à la prévention des conflits et à la protection des civils.  Il a également rappelé que, le 29 mars 2022, un hélicoptère de la MONUSCO qui effectuait une mission de reconnaissance au Nord-Kivu a été abattu par le M23, causant la mort de huit Casques bleus.  Après avoir remercié les pays contributeurs de contingents pour leurs efforts et leurs sacrifices, il a salué le leadership de la Représentante spéciale et Cheffe de la MONUSCO dans le processus en cours.

De la relation entre la RDC et la MONUSCO, née en 2010 sur les cendres de la Mission d’observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), l’histoire retiendra que la Mission a accompli des « exploits » dans l’exécution de son mandat, a souligné le représentant, citant son apport au processus électoral, aux Forces armées de la RDC (FARDC), à la police nationale et à l’action humanitaire.  Sur le plan sécuritaire, il a regretté le caractère éphémère de la brigade d’intervention, créée en 2013 par le Conseil de sécurité pour soutenir les FARDC contre les insurgés du M23 au Nord-Kivu et composée de soldats de l’Afrique du Sud, du Malawi et de la Tanzanie.  Il a noté qu’après sa débâcle en 2013, le M23 a refait surface en novembre 2021 lorsque ses combattants ont lancé des attaques contre les FARDC et aggravé les tensions régionales.  Depuis lors, a-t-il déploré, ce mouvement soutenu par l’armée patriotique rwandaise a conquis des positions qu’il occupe depuis bientôt deux ans et la MONUSCO, malgré sa taille, n’a pu mettre fin au cercle infernal de massacres, de crimes de guerre et contre l’humanité et d’exploitation des ressources naturelles de la RDC.  Ces exactions se sont même amplifiées dans les provinces d’Ituri et du Nord et Sud-Kivu, tandis que Daech venait y étendre ses tentacules terroristes.

Cette situation est à l’origine des tensions survenues entre la MONUSCO et la population congolaise, notamment au Nord-Kivu, a précisé le représentant, avant de rappeler que le, 20 septembre dernier, le Président Tshisekedi a jugé que le temps était venu pour la RDC de « prendre en main son destin ».  Pour apaiser les tensions tout en consolidant les progrès réalisés, le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire, a appuyé le délégué, justifiant ainsi la demande de son gouvernement de ramener le début du retrait de la MONUSCO de décembre 2024 à décembre 2023. Se réjouissant des « convergences de vue » entre le Gouvernement congolais et le Secrétariat de l’ONU, il a salué l’attitude du Conseil de sécurité, qui, à travers sa déclaration présidentielle du 16 octobre, a jeté les bases juridiques du plan de désengagement, tel que convenu à Kinshasa le 21 novembre dernier. Ce plan est le résultat d’un engagement consensuel des deux parties, a-t-il insisté, appelant à l’exécution de bonne foi des engagements qui en découlent.

Le représentant a cependant rappelé que « la guerre n’est pas terminée ».  Si le Conseil tient à la protection des civils et la restauration totale de la paix, il doit s’investir dans la mise en œuvre intégrale des processus de Luanda et de Nairobi validés par l’Union africaine et l’ONU, a-t-il plaidé, ajoutant que le dénouement des discussions politiques engagées par le Gouvernement congolais avec les groupes armés, arrêté à sa troisième phase, nécessite une synergie des deux processus.  De même, alors que la plupart des partenaires recommandent un dialogue avec le Rwanda, il a rappelé l’esprit d’ouverture du Président Tshisekedi à ce sujet, tout en faisant valoir que la feuille de route de Luanda prévoit notamment le retrait du M23 des zones qu’il occupe et la cessation de tout soutien aux groupes armés opérant dans l’est de la RDC.  À ses yeux, la priorité sur le plan sécuritaire est donc la fin de l’agression rwandaise et le retrait du Nord-Kivu, l’éradication des groupes armés « terroristes », dont le M23, le retour des populations déplacées, la restauration de l’autorité de l’État dans les territoires occupés par le M23 et la mise en œuvre du programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRCS).

Concernant le renouvellement du mandat de la MONUSCO, le représentant a indiqué que son gouvernement a fait preuve de flexibilité en acceptant une année de plus pour appliquer le plan commun de désengagement. Parmi les problèmes majeurs auxquels la Mission devra s’atteler avant son retrait, il a cité la protection des civils, l’appui à la réforme du secteur de la sécurité, le soutien à la police nationale et aux FARDC, le transfert des capacités pour renforcer l’appropriation, et l’appui au PDDRCS et aux élections de décembre.  Le plan de désengagement et le retrait ne sont pas une fin en foi, a-t-il affirmé.  Le Conseil de sécurité demeurera saisi de la situation en RDC et ne peut se décharger de son obligation de mettre un terme à la situation d’insécurité qui mine l’est du pays, a souligné le délégué.  Il a les capacités juridiques, politiques et matérielles pour contraindre toutes les parties à mettre en œuvre la feuille de routes issue des processus de Nairobi et de Luanda.  « Agissez avant qu’il ne soit trop tard », a-t-il lancé en conclusion, assurant que son gouvernement entend faire de ce plan de désengagement « un modèle pour les autres retraits de missions de maintien de la paix de l’ONU ».

M. ERNEST RWAMUCYO (Rwanda) a déclaré que le Gouvernement congolais et sa « coalition de milices armées illégales », dont la force « génocidaire » des FDLR, ont violé le cessez-le-feu mandaté par les processus de Nairobi et de Luanda, aggravant la crise humanitaire désastreuse dans la région.  De même, le départ prématuré de la MONUSCO, à la demande de Kinshasa, met à mal les efforts régionaux visant à ramener la paix dans l’est du pays.  Le représentant a exhorté le Gouvernement de la RDC à réaffirmer son engagement en faveur des accords régionaux, qui offrent selon lui les meilleures chances de paix.

Selon le délégué, le rapport de la MONUSCO reste muet sur les violations des droits humains et l’impunité des FARDC, y compris les meurtres systématiques de civils et la persécution des communautés tutsi par l’État congolais.  Les crimes odieux qui sont commis sont, à ses yeux, la conséquence directe de la prévalence des discours de haine, de la discrimination et de « l’idéologie génocidaire » dirigée contre les Tutsis congolais.  Il a imploré le Conseil de tenir Kinshasa responsable pour encourager la désinformation et les discours de haine, lesquels atteignent selon lui des niveaux sans précédent.  La rhétorique « violente et anti-rwandaise » menée par les responsables congolais, y compris le Président sortant, continue en outre de menacer le Rwanda « d’invasion, de meurtres de masse et d’annexion ».  Le représentant a exhorté la RDC à cesser les provocations, comme celles du 21 octobre 2023, lorsque des hommes lourdement armés, dont des FDLR, se sont mobilisés à la frontière entre les deux pays en proférant des menaces.

« Les solutions aux défis sécuritaires en RDC ne peuvent être trouvées dans des jeux de reproches ou dans l’externalisation des problèmes internes », a ajouté le représentant.  Il a plutôt préconisé la tenue d’un dialogue inclusif et constructif, la coopération régionale et la cessation des hostilités, tout en priorisant le bien-être des civils.

Reprenant la parole, M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a félicité le Rwanda d’être très intéressé par ce qui se passe en RDC mais a précisé, s’agissant du « discours génocidaire » qui devient « pratiquement un leitmotiv dans le langage des dirigeants rwandais », que si le génocide pouvait avoir une référence en Afrique, ce n’est pas en RDC qu’on la trouverait.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le projet de résolution exigeant un cessez‑le‑feu à Gaza se heurte au veto américain

9499e séance – après-midi 
CS/15519

Conseil de sécurité: le projet de résolution exigeant un cessez‑le‑feu à Gaza se heurte au veto américain

En raison du veto des États-Unis, le Conseil de sécurité a rejeté un projet de résolution exigeant un cessez-le-feu à Gaza, qui a recueilli 13 voix pour et l’abstention du Royaume-Uni.  C’est la deuxième fois, avec le veto du 18 octobre, que les États-Unis exercent un droit réservé aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité. 

Le texte, doté d’un dispositif de trois paragraphes de fond et présenté par les Émirats arabes unis, exigeait un cessez-le-feu humanitaire immédiat et la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages ainsi que l’assurance d’un accès humanitaire.  Il exigeait aussi que toutes les parties s’acquittent des obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire, notamment pour ce qui est de la protection des civils. 

Ce texte, « clair et bref », se sont enorgueillis les Émirats arabes unis, a, en moins de 24 heures, rassemblé au moins 97 coauteurs qui se sont fait l’écho du souhait des dirigeants du monde, des organisations humanitaires et de l’appel exceptionnel et sans précédent du Secrétaire général, qui a invoqué l’Article 99 de la Charte des Nations Unies.  Quel est le message que nous envoyons aux civils du monde entier qui pourraient se retrouver dans des situations similaires un jour? ont lancé les Émirats arabes unis. 

Les États-Unis ont justifié leur décision par le caractère « déséquilibré et déconnecté de la réalité » du projet de texte et le refus de ses coauteurs d’insérer une formulation condamnant les actes horribles que le Hamas a perpétrés le 7 octobre dernier contre Israël.  La position américaine a été dénoncée comme « une approche destructrice » par la Fédération de Russie qui a reproché à Washington de soutenir aveuglément Israël et d’empêcher de facto toute solution. 

Le Royaume-Uni, seul abstentionniste, mais aussi la France, l’Albanie et le Ghana -qui ont voté en faveur du texte, en raison de « l’extrême gravité de la situation humanitaire »- ont également déploré que le Conseil de sécurité n’ait pas encore pu condamner les attaques terroristes du Hamas et des autres groupes terroristes.  Le Conseil ne peut pas et ne doit pas fermer les yeux sur ces actes, a tancé la France. 

Les États-Unis ont aussi fustigé un projet de résolution qui ne reconnaît pas le droit d’Israël de se défendre contre le terrorisme, conformément au droit international, arguant qu’un cessez-le-feu « inconditionnel » est irréaliste voire dangereux.  On ne peut attendre des États-Unis le moindre bon sens, a taclé la Fédération de Russie, avant que le Japon ne conseille aux délégations de cesser de pointer un doigt accusateur et de travailler de manière constructive. 

Plusieurs délégations, et en premier lieu celle de l’État de Palestine, ont exprimé leur « déception », en cette journée « funeste ».  En prolongeant cette guerre, toujours plus d’enfants vont être tués, blessés ou devenir orphelins, parce que « ces assassins » n’ont aucun respect pour les vies palestiniennes, a accusé l’État de Palestine. 

La Chine a dénoncé une hypocrisie patente qui illustre une fois de plus, la politique de deux poids, deux mesures.  Les Palestiniens rejettent ce vote et continueront de recourir à toutes les solutions légitimes pour mettre un terme à ces atrocités, y compris en demandant la reprise de la session extraordinaire de l’Assemblée générale, a prévenu l’État de Palestine. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations avant la mise aux voix

Présentant le projet de résolution soumis aux voix, M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a déclaré que ce texte avait, en moins de 24 heures, rassemblé au moins 97 coauteurs.  Il est « clair et bref », a‑t‑il souligné.  Il vise à exiger un cessez-le-feu humanitaire et la libération des otages.  Il rappelle également aux parties leurs obligations de respecter le droit international humanitaire et se fait l’écho des appels des dirigeants du monde, des organisations humanitaires et, plus récemment, du Secrétaire général. 

Le représentant a indiqué que le processus a été accéléré car, après 63 jours de conflit et la mort de plus de 18 000 personnes, il n’y a plus d’autres choses à dire.  La seule chose à faire est d’obtenir le cessez-le-feu et de sauver le plus de vies possible, « maintenant », a martelé le représentant.  « C’est cet impératif qui doit prévaloir sur toute autre considération. »  Le délégué a rappelé que l’adoption de la résolution 2712 (2023) n’avait pas suffi. « Je vous implore, chers collègues, de voter en faveur de cette résolution », a‑t‑il déclaré en conclusion de sa présentation. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté que le Conseil de sécurité n’arrive pas à s’acquitter de sa responsabilité depuis deux mois, y voyant une seule raison: l’approche destructrice des États-Unis qui appuient aveuglément Israël et empêchent de facto toute solution.  Il résulte, à son avis, de la soi-disant diplomatie américaine qu’Israël veuille maintenant inonder les tunnels avec de l’eau de mer, ce qui risque d’entraîner des répercussions désastreuses.  « Il est difficile d’attendre le moindre bon sens de la délégation américaine. »  Le délégué russe a demandé comment les membres du Conseil allaient expliquer à leurs citoyens le refus d’un cessez-le-feu aujourd’hui, alors que le monde entier réclame l’arrêt des attaques qui vont vers une éradication totale de la population.  Il a rappelé que la Russie n’a pas cessé de demander au Conseil de réagir aux demandes d’un cessez-le-feu.  Il a salué le courage et le professionnalisme des nations arabes et des Émirats arabes unis qui présentent un texte s’inscrivant dans les meilleures traditions du Conseil.  C’est là la dernière occasion pour les États-Unis et les pays occidentaux de se racheter, a‑t‑il conclu. 

Explications de vote après le vote

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) s’est dit déçu de l’issue du vote.  Face à une « tragédie inimaginable », le Conseil n’a pas été en mesure aujourd’hui de réclamer un cessez-le-feu humanitaire, s’est-il désolé. Quel est le message que nous envoyons aux civils du monde entier qui pourraient se retrouver dans des situations similaires un jour, a lancé le représentant à ses homologues.  Il a insisté sur l’impératif pour le Conseil de s’unir et de réagir en assurant que les Émirats arabes unis continueront à œuvrer en ce sens et ne se laisseront pas décourager. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a affirmé qu’en dépit d’un processus précipité et de l’absence de consultations appropriées, les États-Unis se sont engagés dans ces discussions en proposant notamment des libellés pour aboutir à une résolution constructive.  Le but était de favoriser la possibilité d’acheminer l’aide humanitaire et d’encourager la libération des otages ainsi que la reprise des pauses humanitaire. Cependant, a‑t‑il déploré, presque toutes les recommandations de sa délégation ont été ignorées, donnant lieu à un texte « déséquilibré et déconnecté de la réalité ».  Le représentant a indiqué ne pas comprendre pourquoi les auteurs de la résolution ont refusé d’insérer une formulation condamnant les actes horribles perpétrés par le Hamas.  Il a fait part de sa déception face à l’absence de condamnation des meurtres et violences sexuelles commis le 7 octobre.  Le Conseil et nombre de ses membres ont fermé les yeux face aux violences commises par le Hamas au lieu de les condamner, a‑t‑il déploré.  Il a regretté que ce texte ne reconnaisse pas le droit d’Israël à se défendre contre le terrorisme conformément au droit international. 

Le délégué a en outre estimé que le cessez-le-feu « inconditionnel » envisagé par le texte n’était pas réaliste.  Il serait même dangereux, a‑t‑il ajouté, en s’appuyant sur les propos d’un dirigeant du Hamas qui souhaitait reproduire les actes du 7 octobre. Tant que le Hamas s’accrochera à son idéologie destructrice, tout cessez-le-feu sera temporaire, a averti le représentant. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a expliqué son vote en faveur de la résolution par l’extrême gravité de la situation humanitaire à Gaza, pour laquelle le Secrétaire général a tiré la sonnette d’alarme.  La France, a‑t‑il rappelé, a permis de favoriser un engagement plus important de la communauté et s’est particulièrement mobilisée pour apporter un soutien médical aux populations de Gaza.  Il est cependant inacceptable, a poursuivi le représentant, que le Conseil de sécurité n’ait pas encore pu condamner les attaques terroristes du Hamas et d’autres groupes terroristes commises le 7 octobre dernier. Ce groupe terroriste a commis des crimes barbares et inhumains contre des civils -des femmes et des enfants- israéliens.  « Le Conseil ne peut pas, ne doit pas fermer les yeux sur ces actes. »  Le délégué a assuré que sa délégation continuera de s’engager résolument dans la voie d’une mobilisation pleine et entière du Conseil sur tous les volets de la crise (sécuritaire, humanitaire et politique). 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a déploré le rejet du texte en citant le message clair pourtant envoyé par le Secrétaire général, sur la base de l’Article 99 de la Charte des Nations Unies.  La pleine mise en œuvre de toutes les dispositions de la résolution 2712 (2023) n’en devient que plus urgente, s’est-elle impatientée, appelant à garantir la protection des civils et des infrastructures civiles à titre prioritaire, ainsi qu’à veiller à l’acheminement de l’aide humanitaire pour éviter la destruction et l’effondrement de l’ordre public.  Il faut aspirer à la mise en place de conditions propices à la coexistence entre Israéliens et Palestiniens, a‑t‑elle prôné. Privilégier la solution des deux États n’a jamais été aussi cruciale, a conclu la représentante. 

Mme BARBARA WOODARD (Royaume-Uni) s’est dite extrêmement préoccupée par la situation « désespérante » qui règne à Gaza.  Elle a demandé des pauses humanitaires supplémentaires pour permettre l’acheminement d’une aide plus conséquente, exigeant aussi la libération de tous les otages.  Elle a expliqué son abstention par le fait que le texte ne condamnait pas les actes de terreurs commis par le Hamas le 7 octobre.  Israël doit pouvoir faire face à la menace que représente le Hamas en respectant le droit international humanitaire, a argué la déléguée, espérant qu’à terme on puisse parvenir à la solution des deux États. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a indiqué avoir voté pour le projet de résolution, précisant que le cessez-le-feu devait être compris comme une pause humanitaire limitée dans le temps, sans porter préjudice au droit d’Israël à assurer sa défense et sa sécurité.  Elle a regretté que la résolution n’ait pas pu être adoptée. 

M. ZHANG JUN (Chine) s’est dit déçu par le veto américain alors que deux mois de combats ont déjà causé des milliers de morts.  Rien ne peut justifier cela, a estimé le représentant, jugeant contradictoire d’invoquer la sécurité d’Israël et de craindre en même temps une escalade, ou d’approuver tacitement la poursuite des combats et de parler de la nécessité de protéger les femmes et les enfants.  Tout cela relève d’une hypocrisie patente et illustre une fois de plus, la politique de deux poids, deux mesures.  Toutefois, a prévenu le représentant, cela n’arrêtera pas les efforts de ce Conseil de sécurité et de la communauté internationale pour obtenir un cessez-le-feu. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a déclaré avoir voté en faveur du texte dans le but d’éviter une catastrophe humanitaire.  La déléguée a cependant estimé que le projet de résolution aurait pu inclure une condamnation des attaques du Hamas.  Tout en regrettant cet échec, elle a réaffirmé son attachement à la solution des deux États. 

Reprenant la parole, M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a dit: nous vivons aujourd’hui l’une des journées les plus sombres de l’histoire du Moyen-Orient.  En bloquant ce texte, « nos collègues » ont encore une fois condamné des dizaines de milliers de femmes et d’enfants palestiniens à des souffrances indicibles.  L’histoire jugera la position des États-Unis, a‑t‑il pronostiqué, en pointant du doigt les deux membres du Conseil qui ont choisi de se faire complices des agissements inacceptables d’Israël à Gaza.  Les appels de l’opinion publique américaine sont, une nouvelle fois, ignorés aujourd’hui et il est temps que les membres du Conseil redoublent d’efforts pour soulager les souffrances de tous les civils et fassent tout pour que la résolution 2712 (2023) soit « quand même » appliquée. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a indiqué avoir voté pour le projet de résolution afin de préserver les civils israéliens et palestiniens.  Prenant très au sérieux le fait que le Secrétaire général ait invoqué l’Article 99 de la Charte des Nations Unies, il a regretté que le texte n’ait pu être adopté, tout en saluant les efforts des États-Unis sur le terrain.  Cessons de pointer un doigt accusateur et travaillons de manière constructive, a‑t‑il conseillé. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a dit avoir voté en faveur de la résolution pour sauver les civils et en aucun cas pour le Hamas que l'on ne saurait laisser profiter d’un cessez-le-feu pour perpétrer de nouvelles attaques similaires à celles du 7 octobre.  La représentante a appelé le Conseil de sécurité, qui selon elle, n’a pas condamné ces attaques, à réfléchir aux moyens d’établir les responsabilités de ce groupe et de libérer les otages.  Le seul moyen de le faire est de garantir le droit d’Israël d’exister, a‑t‑elle conclu, appelant le peuple de Gaza à rejeter une fois pour toutes le Hamas. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit avoir voté pour le projet de résolution, avec le sentiment urgent qu’il est temps d’arrêter la violence meurtrière et le bain de sang « insoutenable » à Gaza.  Une fois de plus, a déploré le représentant, le Conseil n’a pas pu répondre d’une façon unanime à la situation chaotique dont sont victimes les populations civiles, en particulier les femmes, les enfants, dans les ruines de Gaza.  Il n’y aura donc pas de cessez-le-feu ce soir dans la guerre entre Israël et le Hamas et pas non plus d’écho à l’appel exceptionnel et sans précédent du Secrétaire général qui a invoqué l’Article 99 de la Charte des Nations Unies pour déclencher une action urgente et coordonnée afin de sauver la vie de milliers de femmes et d’enfants qui n’ont d’autres soutiens que l’aide humanitaire.  Le représentant a demandé au Conseil davantage d’engagement à se hisser à la hauteur de sa vocation et de son mandat qui est d’arrêter les guerres, à défaut de les prévenir.  Il a appelé le Conseil à dépasser les clivages car il faut qu’en tout temps, il y ait une place dans cette salle pour rejeter l’horreur, quels qu’en soient les auteurs, réclamer un cessez-le-feu humanitaire et embrasser toute la dimension des responsabilités à assumer. 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a regretté que le projet de résolution n’ait pu être adopté, en dépit des 13 voix en sa faveur.  L’ampleur de la tragédie humanitaire à Gaza est sans précédent et exige une action urgente, s’est-il alarmé, en plaidant pour un cessez-le-feu humanitaire immédiat, l’acheminement de l’aide humanitaire et la libération inconditionnelle de tous les otages, sans quoi le Conseil de sécurité risque de se rendre complice des pertes en vies humaines.  Le prix de l’inaction est insupportable et inacceptable tant sur le plan moral, politique et juridique, a‑t‑il martelé, en prévenant qu’il risque de compromettre la solution des deux États.  Le Brésil, a‑t‑il conclu, appelle le Conseil de sécurité à rétablir son autorité et à défendre, dans toutes ses actions, le droit international humanitaire et le maintien de la paix et de la sécurité. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a vivement regretté l’incapacité du Conseil de dégager un consensus autour du projet de résolution, en dépit des efforts consentis.  Rappelant qu’il a voté pour le texte dans le souci d’atténuer les souffrances infligées aux civils, le représentant a jugé impératif que toutes les parties respectent leurs obligations découlant du droit international humanitaire.  Il a salué les efforts des Émirats arabes unis, avant d’exprimer sa gratitude envers le Secrétaire général qui a, à juste titre, invoqué l’Article 99 de la Charte des Nations Unies, pour sensibiliser le Conseil à l’urgence de la situation humanitaire. 

M. JOSÉ JAVIER DE LA GASCA LOPEZDOMÍNGUEZ (Équateur) s’est prononcé pour la paix et pour un cessez-le-feu.  Il a une nouvelle fois condamné les attaques terroristes du 7 octobre, tout en soulignant que chaque vie du côté israélien et palestinien est une tragédie.  C’est dans cet esprit, s’est-il expliqué, que nous avons voté en faveur du projet de résolution qui ne demandait rien d’autre qu’un cessez-le-feu humanitaire et la libération inconditionnelle et immédiate de tous les otages.  Chaque peuple mérite de vivre dans la paix et la sécurité, a‑t‑il martelé, et cela passe par la solution des deux États dans les frontières de 1967. 

M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a déclaré que le vote de cet après-midi marquait « un tournant dans l’histoire ».  Le Conseil de sécurité, une fois encore, n’a pas été à la hauteur des enjeux, alors qu’il y a une menace à la paix et la sécurité de toute la région du Moyen-Orient, s’est-il alarmé, en martelant que chaque vie est sacrée et mérite d’être protégée. Après avoir exigé que cessent les atrocités que subit son peuple depuis plus de deux mois, l’Observateur permanent a demandé qui pouvait justifier le massacre de tout un peuple.  Car, en prolongeant cette guerre, c’est bien de cela qu’il est question, a‑t‑il fait remarquer.  Toujours plus d’enfants vont être tués, blessés ou devenir orphelins de manière volontaire, parce que « ces assassins » n’ont aucun respect pour les vies palestiniennes, s’est indigné M. Mansour, pour qui il ne fait pas de doute que la catastrophe humanitaire à Gaza va atteindre de nouvelles proportions. 

« Si vous êtes contre le déplacement forcé du peuple palestinien, alors vous devez être contre cette guerre », a‑t‑il raisonné, de même que si vous êtes contre les crimes de guerre et le génocide.  Avant de conclure, l’Observateur permanent a tenu à remercier les près de 100 pays qui, en moins de 24 heures, se sont portés coauteurs de ce projet de résolution, ainsi que les 13 membres du Conseil de sécurité qui ont voté en sa faveur.  Cette journée est funeste pour le Conseil de sécurité, a‑t‑il tranché. Il a déclaré que les Palestiniens rejettent ce vote et qu’ils continueront de recourir à toutes les solutions légitimes pour mettre un terme à ces atrocités, y compris en reprenant la session extraordinaire de l’Assemblée générale, pour ne pas permettre que la barbarie l’emporte sur l’humanité. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.