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République centrafricaine: Le Représentant spécial demande le soutien du Conseil de sécurité pour renforcer une MINUSCA confrontée à des « défis considérables »

8291e séance – matin
CS/13389

République centrafricaine: Le Représentant spécial demande le soutien du Conseil de sécurité pour renforcer une MINUSCA confrontée à des « défis considérables »

Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), M. Parfait Onanga-Anyanga, a demandé au Conseil de sécurité, ce matin, de maintenir son soutien à la MINUSCA pour que celle-ci ait la capacité de répondre aux défis considérables auxquels elle fait face quotidiennement. 

Sont également intervenus à cette séance d’information, par visioconférence depuis Bangui, le Représentant spécial de l’Union africaine en République centrafricaine et le commandant de la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM-RCA), qui ont tous deux apporté des précisions sur leurs missions respectives.

M. Onanga-Anyanga, qui présentait le rapport* du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine, a indiqué que tout est mis en œuvre pour atteindre le niveau de force maximum autorisé par le Conseil dans sa résolution 2387 (2017).  Le rapport précise que les troupes actuelles représentent 94,54% de l’effectif total autorisé.  Les troupes additionnelles attendues renforceront la capacité de protection des civils de la Mission, dans des circonstances où celle-ci, qui est déjà débordée, voit son personnel militaire, policier et civil ciblé par les groupes armés.

Relayant la demande du Représentant spécial, la déléguée de la République centrafricaine a « lancé un cri d’alarme devant le Conseil de sécurité » et demandé que la MINUSCA soit dotée des moyens de faire face aux différents foyers de tension dans le pays.  La MINUSCA a besoin d’être plus robuste et d’avoir des ressources financières et logistiques adéquates, a renchéri le représentant de l’Éthiopie qui préside le Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique.

Cette séance a donné l’occasion aux membres du Conseil de plaider pour un soutien accru de l’ONU et de la communauté internationale à un pays qui vit également une grave crise humanitaire.  Les orateurs se sont aussi inquiétés de la montée des rhétoriques sectaires et des disputes intercommunautaires qui alimentent les conflits armés et sapent les efforts de réconciliation nationale.  À ce propos, l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine a été longuement saluée.

En détaillant la situation sécuritaire sur le terrain, le Chef de la MINUSCA a expliqué que la RCA fait face à plusieurs flambées de violence, tant à Bangui qu’à l’intérieur du pays.  Alors que la capitale a été le théâtre de violents affrontements en avril et début mai, on a pu voir récemment des signes encourageants d’accalmie.  Dans le reste du pays, des groupes armés et des factions continuent d’exercer une influence négative.

Le Représentant spécial de l’Union africaine en RCA, M. Bédializoun Moussa Nébié, s’est félicité du fait que les 14 groupes armés aient remis leur revendications, 70 en tout, par écrit, couvrant des aspects de défense, de sécurité, de justice, et de développement, entre autres.  Il a toutefois averti que si un dialogue était engagé tout de suite, sans préparation, il risquait d’y avoir des blocages.  Pour que le panel puisse achever son travail dans les prochaines semaines avant la tenue du dialogue, il faut mobiliser 3 millions de dollars pour financer les activités restantes.  Il a salué l’octroi, par les États-Unis, de 500 000 dollars à cette fin, tout en faisant « un clin d’œil aux autres membres du Conseil de sécurité ».

Le général de Brigade Hermínio Teodoro Maio, commandant de la EUTM-RCA, s’est félicité quant à lui du récent déploiement de 638 membres des Forces armées centrafricaines (FACA) hors de Bangui, après qu’ils aient reçu une formation de l’EUTM-RCA.  Le général a plaidé pour que cette dynamique de formation et de déploiement ne soit pas rompue.   

Bien que la posture robuste de la MINUSCA ait permis d’éviter que les menaces d’attaques contre Bangui se concrétisent, une rhétorique inquiétante a été exploitée par des acteurs politiques peu vertueux qui ont tiré profit de l’instabilité et cherché à alimenter les tensions sur des bases ethniques et religieuses, a indiqué M. Onanga-Anyanga.  Mais, à son avis, « il n’est pas trop tard pour empêcher la religion et l’ethnicité de devenir le facteur déterminant du conflit ».

M. Onanga-Anyanga a ensuite insisté sur la nécessité de mettre en œuvre un processus politique inclusif.  Ce qui est en jeu, a-t-il expliqué, c’est la recherche de l’indispensable consensus autour du contrat social entre les filles et les fils de la RCA, afin que le « vivre-ensemble » auquel ils sont si attachés devienne une réalité, dans une nation plurielle, unie et réconciliée.  Il a jugé essentiel le rétablissement de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire pour mettre le pays sur la voie de la stabilité à long terme, non sans souligner que justice et réconciliation doivent progresser simultanément.

Appuyant cette idée de justice, le délégué de la France a souhaité que les groupes armés déposent les armes et s’engagent sans délai et sans condition dans le processus de paix.  « Ils doivent aussi savoir que les violences auxquelles ils se livrent ne resteront pas impunies. »  Il a rappelé, à ce titre, que le Conseil de sécurité dispose de l’outil des sanctions contre ceux qui cherchent à nuire à la stabilité du pays et s’en prennent aux civils, au personnel de la MINUSCA et aux travailleurs humanitaires.

Enfin, sur le plan humanitaire, le Chef de la MINUSCA a parlé d’une situation toujours désespérée: 1 Centrafricain sur 4 a dû abandonner sa maison; plus de 688 000 personnes restent déplacées à l’intérieur du pays; et 568 000 autres sont réfugiées dans les pays voisins.  Il en résulte que le peuple centrafricain a un besoin urgent de l’aide des partenaires internationaux pour combler le déficit de financement humanitaire, car seulement 4% du plan d’intervention humanitaire de 2018 a été financé.

*S/2018/611

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Rapport du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine (S/2018/611)

Déclarations

Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, a salué la participation à cette séance du Représentant spécial de l’Union africaine à Bangui et d’un représentant de la Communauté de Sant’Egidio, indiquant qu’il est en effet essentiel que le Conseil entende, outre la voix des autorités centrafricaines elles-mêmes, celles de tous ceux qui œuvrent, ensemble, au retour d’une paix durable en République centrafricaine (RCA).

Depuis fin février, a-t-il noté, la RCA fait face à plusieurs flambées de violence, tant à Bangui qu’à l’intérieur du pays.  Cependant, alors que la capitale a été le théâtre de violents affrontements en avril et début mai, on a pu voir récemment des signes encourageants d’accalmie.  Le Représentant spécial a décrit la situation en expliquant que des groupes armés et des factions continuent d’exercer une influence négative sur de vastes parties du territoire national, notamment à l’est, au centre et au nord-ouest du pays.  De violents affrontements entre groupes armés dans ces régions continuent également à mettre en danger la vie des civils.  Bien que la posture robuste de la MINUSCA ait permis d’éviter que les menaces d’attaques contre Bangui se concrétisent, cette rhétorique inquiétante a malheureusement été exploitée par des acteurs politiques peu vertueux qui ont tiré profit de l’instabilité et cherché à alimenter les tensions sur des bases ethniques et religieuses.

C’est dans ce contexte très volatile que la MINUSCA poursuit la mise en œuvre de son mandat de protection des civils.  Cela n’est évidemment pas une tâche facile, a reconnu le Représentant spécial en relevant que la Mission est débordée et que son personnel militaire, policier et civil constitue une cible pour les groupes armés et les gangs criminels, aussi bien dans la capitale qu’à l’intérieur du pays.  Les menaces contre le personnel du maintien de la paix continuent de s’accroître, a-t-il aussi noté.

Le Représentant spécial en appelle donc au soutien continu du Conseil de sécurité pour faire en sorte que la MINUSCA ait la capacité de répondre aux défis considérables auxquels elle fait face quotidiennement.  M. Onanga-Anyanga a souligné que tout est mis en œuvre pour atteindre le niveau de force maximum autorisé par le Conseil dans sa résolution 2387 (2017).  Les troupes additionnelles renforceront la capacité de la Mission en matière de protection des civils, dans l’esprit des recommandations du rapport Amoussou, consécutif à l’enquête portant sur un certain nombre d’incidents survenus dans le sud-est de la RCA entre le 1er mai et le 31 août 2017.

La situation sécuritaire volatile actuelle et les affrontements récurrents entre les groupes armés continuent d’affecter négativement le processus politique, a poursuivi le Représentant spécial.  Néanmoins, les partenaires internationaux demeurent engagés dans la stabilisation du pays, notamment à travers les efforts de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.  M. Onanga-Anyanga a aussi salué le rôle stratégique du Fonds pour la consolidation de la paix, pour son soutien à la mise en œuvre du plan national de relèvement et de l’Initiative africaine.  Par ailleurs, il a signalé que la première réunion du Groupe international de soutien à la RCA s’est tenue à Bangui le 11 avril.  Cette réunion, a-t-il expliqué, a permis d’envoyer un signal fort au peuple centrafricain, en montrant que la communauté internationale, qui n’a pas oublié son sort, reste déterminée à soutenir les efforts de stabilisation et de développement du pays.  La réunion du 11 avril a également souligné l’importance d’une coopération accrue entre les pays de la sous-région pour assurer la stabilité de la République centrafricaine à long terme.

M. Onanga-Anyanga a ensuite insisté sur la nécessité d’un processus politique inclusif, jugeant crucial que les autres segments de la société centrafricaine soient associés au processus de paix et participent pleinement aux efforts de stabilisation en cours.  Car, « ce qui est en jeu, c’est la recherche de l’indispensable consensus autour du contrat social entre les filles et les fils de la RCA, afin que le « vivre-ensemble » auquel ils sont si attachés devienne une réalité, dans une nation plurielle, unie et réconciliée ».  Dans cette perspective, la MINUSCA continue à travailler en étroite collaboration avec le Gouvernement pour lancer des initiatives locales de paix et de réconciliation dans de nombreuses préfectures, en vue de réduire les menaces sécuritaires et faciliter l’accès humanitaire.  Les représentants religieux, communautaires, les femmes et les jeunes ont joué un rôle essentiel dans le succès de ces processus.  Ces plans locaux de paix ont également servi de fondation aux programmes de désarmement locaux.  À Bangassou et à Bria, villes qui ont enduré de fortes violences en 2017, le processus local de paix a favorisé la remise de plus de 1 000 armes par les groupes armés ainsi que la participation de ces derniers aux programmes de réintégration socioéconomique, s’est-il félicité.   

Le Représentant spécial a en outre souligné que le rétablissement de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire demeure essentiel pour stabiliser la situation et mettre le pays sur la voie de la stabilité à long terme.  Il a noté des progrès substantiels, notamment les déploiements de préfets et de sous-préfets, ainsi que d’autres secteurs de l’administration civile, avec le soutien de la MINUSCA et du système des Nations Unies dans le pays, ainsi que des partenaires stratégiques bilatéraux et institutionnels.  M. Onanga-Anyanga a dit être particulièrement encouragé par le déploiement progressif de magistrats dans de nouvelles régions du pays et l’ouverture de tribunaux hors de Bangui.  « Partout où j’ai voyagé en République centrafricaine, j’ai entendu une demande constante de justice pour aider les communautés à lutter contre la criminalité et pour contrer la longue et triste histoire d’impunité du pays », a-t-il témoigné.  Malgré les progrès lents mais constants de la reconstruction des tribunaux nationaux, les Centrafricains ont de nouveau espoir que les auteurs des crimes les plus graves soient finalement jugés.  En attendant, les démarches initiées par le chef de l’État pour faire avancer la justice transitionnelle sont également encourageantes.  Selon le Représentant spécial, la justice et la réconciliation doivent en effet progresser simultanément.

Le déploiement progressif des Forces armées centrafricaines –les FACA- et de la gendarmerie et de la police en dehors de Bangui a également contribué à accroître la capacité de l’État à travers le pays.  La MINUSCA continuera de travailler avec le Gouvernement pour faire en sorte que les unités nouvellement réformées des FACA soient professionnelles et continuent de refléter la diversité ethnique du pays, et que leur déploiement soit coordonné avec la MINUSCA et d’autres partenaires, dans le cadre de la réforme prévue du secteur de la sécurité.  C’est dans ce contexte, a-t-il rappelé, que le Secrétaire général a écrit au Conseil de sécurité, le 15 mai dernier, pour s’assurer que le déploiement conjoint de la MINUSCA avec les FACA constitue un élément essentiel d'une réponse sécuritaire efficace et d’une stratégie de sortie efficace.

Sur le plan humanitaire, le Chef de la MINUSCA a parlé d’une situation toujours désespérée, car 1 Centrafricain sur 4 a dû abandonner sa maison.  Plus de 688 000 personnes restent déplacées à l’intérieur du pays, et 568 000 autres sont réfugiées dans les pays voisins.  Entretemps, les attaques contre les travailleurs humanitaires font de la République centrafricaine le contexte humanitaire le plus meurtrier au monde.  Au cours de la dernière flambée de violence à Bambari, des groupes armés ont par exemple pillé les bureaux de plusieurs agences humanitaires, les forçant à suspendre leurs opérations.  Ces attaques contre les humanitaires minent gravement leur capacité à fournir une assistance, avec des conséquences terribles pour la population centrafricaine et le fonctionnement des services sociaux essentiels en matière de santé et d’éducation.  Il a déclaré que le peuple centrafricain a un besoin urgent de l’aide des partenaires internationaux pour combler le déficit de financement humanitaire.  Seulement 4% du plan d’intervention humanitaire de 2018 a été financé, laissant de nombreuses régions prioritaires sans assistance.  

Le pays ne peut pas se permettre plus d’affrontements entre groupes armés cherchant des occasions de piller et d’exploiter les ressources naturelles, a martelé le Représentant spécial en assurant qu’il n’est pas trop tard pour empêcher ce comportement prédateur d’éroder les progrès vers la création d'un État centrafricain efficace, responsable et inclusif.  Il n’est aussi pas trop tard pour empêcher la religion et l’ethnicité de devenir le facteur déterminant du conflit.  À l’heure actuelle, ce facteur est toujours le résultat de la manipulation à des fins politiques, ce qui trouve malheureusement un écho chez les groupes vulnérables.  Mais, a-t-il affirmé, ce n’est en aucun cas le sentiment général des Centrafricains.

Pour le Chef de la MINUSCA, « tant que les mains de l’État, dépositaire de la force légitime, ne seront pas plus fortes que les groupes illégitimes et les organisations criminelles, nos efforts pour établir une paix et une stabilité durables en RCA continueront d’être sérieusement remis en question ».  Il a promis l’engagement fort de la MINUSCA, en droite ligne de l’appel du Secrétaire général qui demande à tous de rester engagés avec une dose considérable de patience, de dévouement et dans un esprit de sacrifice.   

Intervenant par visioconférence depuis Bangui, M. BÉDIALIZOUN MOUSSA NÉBIÉ, Représentant spécial de l’Union africaine en République centrafricaine, a indiqué que le panel des facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en RCA avait effectué sa deuxième visite auprès des groupes armés entre février et avril de cette année.  Les 14 groupes armés ont remis leur revendications, 70 en tout, par écrit, couvrant des aspects de défense, de sécurité, de justice, et de développement, entre autres.  

Il a fait état d’une accalmie dans certaines localités du fait des tournées, ajoutant que certains groupes armés, qui n’étaient pas inscrits au préalable, ont fini par accepter le désarmement, démobilisation et réintégration.  Il a aussi pris note de l’engagement du Président Faustin Archange Touadéra à examiner les revendications de ces derniers.  Il a déploré les incidents du mois d’avril au PK5, quartier majoritairement musulman du troisième arrondissement.

Vu la gravité de la situation, le panel a mené d’intenses consultations avec les groupes armés pour les remobiliser autour de l’Initiative africaine.  Il fait état d’un retour au calme depuis la mi-mai, ajoutant que le panel était à présent à pied d’œuvre pour accélérer le processus pour la convocation du dialogue.

M. Nébié a précisé que la préparation des groupes armés au dialogue portait surtout sur les moyens pacifiques de règlement de crises.  Il a annoncé qu’il rencontrera demain la délégation du Gouvernement désignée pour prendre part au dialogue.  

La convocation du dialogue devrait aboutir et déboucher sur un accord consensuel entre les parties portant sur plusieurs points relatifs à la marche à suivre.  Il a toutefois averti que si un dialogue était engagé tout de suite, sans préparation, il risquait d’y avoir des blocages.  Il a assuré que le panel était déterminé à achever son travail dans les prochaines semaines avec la tenue du dialogue.

Cependant il faut mobiliser 3 millions de dollars pour financer les activités restantes.  Il a salué l’octroi, par les États-Unis, de 500 000 dollars à cette fin.  « Vous comprendrez bien que je fais un clin d’œil aux autres membres du Conseil de sécurité », a-t-il ajouté.

L’échec n’est pas une option, a ensuite déclaré le Représentant spécial de l’Union africaine.  La seule et unique option est le succès du dialogue et le retour à la paix pour le peuple centrafricain.  « Une part de cette bataille revient à vous, membres du Conseil de sécurité », a-t-il ajouté.

Le général de Brigade HERMÍNIO TEODORO MAIO, commandant de la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM-RCA), intervenant en visioconférence depuis Bangui, a expliqué que le but de sa mission est de contribuer à la formation des Forces armées centrafricaines (FACA), en vue de leur modernisation.  La mission militaire attend les décisions des États Membres pour poursuivre la formation déjà entamée en coordination avec la MINUSCA, a-t-il indiqué non sans saluer le rôle crucial de la MINUSCA pour le déploiement des FACA dans le pays.  Le général a relevé que ce déploiement progressif est considéré comme une mesure cruciale et urgente pour permettre la reprise des services étatiques dans tout le pays.

À ce jour, 638 membres des FACA ont déjà été déployés hors de Bangui, et ces troupes nationales sont dotées de matériels appropriés pour assurer leur mission, a poursuivi le général.  M. Teodoro Maio a plaidé pour que cette dynamique de formation et de déploiement ne soit pas rompue.  C’est pourquoi il a souligné l’importance du soutien de la MINUSCA à cette initiative, même s’il a reconnu des limites logistiques et opérationnelles du fait de la vaste étendue du territoire national.  Mais, a-t-il insisté, le déploiement des bataillons est crucial pour protéger les civils et les infrastructures.  Il a enfin déclaré que le déploiement et l’opérationnalisation des FACA devaient s’accompagner d’un processus politique visant la réconciliation nationale.  Les pays de la région ont un rôle important à jouer à cet effet, a-t-il souligné.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) s’est dit préoccupé par la persistance des violences perpétrées par les groupes armés contre les civils, les humanitaires et la MINUSCA, ainsi que par les incitations à la haine et à la violence.  Il a jugé essentiel que le Conseil de sécurité continue de marquer son soutien au Président Touadéra et aux autorités centrafricaines dans leurs efforts pour favoriser la réconciliation nationale et rétablir l’autorité de l’État.  M. Delattre a jugé impératif que tous les groupes armés cessent leurs activités déstabilisatrices.  « Le message du Conseil aux groupes armés doit être d’une extrême fermeté: ils doivent déposer les armes et s’engager sans délai et sans condition dans le processus de paix; et ils doivent savoir que les violences auxquelles ils se livrent ne resteront pas impunies. »  Le représentant a rappelé à ce titre que le Conseil de sécurité dispose de l’outil des sanctions contre ceux qui cherchent à nuire à la stabilité du pays et qui se rendent responsables d’incitations à la violence et d’attaques contre les civils, les travailleurs humanitaires ou contre la MINUSCA.

Il a également souligné l’urgence qui s’attache à une mise en œuvre ambitieuse de la feuille de route de l’Initiative africaine en vue d’aboutir à un accord politique global, prônant des discussions directes entre le Gouvernement centrafricain et les groupes armés dans le cadre d’un dialogue inclusif avec les autres segments de la société centrafricaine, notamment les femmes.  Il a appelé à cet égard l’Union africaine et tous les États de la région à poursuivre leur engagement, au plus haut niveau, afin de soutenir et de garantir le succès des prochaines étapes de la mise en œuvre de la feuille de route.

Le représentant a ensuite plaidé en faveur de la restauration de l’autorité de l’État dans toutes ses composantes administratives, sécuritaires ou encore judiciaires.  « Nous appelons nos partenaires du Conseil de sécurité à soutenir la possibilité pour la MINUSCA d’appuyer le redéploiement progressif et maîtrisé des Forces armées centrafricaines formées par la mission EUTM RCA. »  Il a exhorté le Conseil à examiner sérieusement les recommandations du Secrétaire général à ce sujet.  Le représentant a terminé son intervention en réaffirmant « le plein et entier soutien de la France à la MINUSCA et au Représentant spécial, M. Parfait Onanga-Anyanga, pour son action exemplaire », en soulignant que la Mission opère dans un environnement difficile et que les Casques bleus paient malheureusement un lourd tribut.  Il a attiré l’attention sur l’importance de mettre à profit les capacités supplémentaires autorisées par la résolution 2387, notamment pour renforcer la protection des civils.  La France est aussi reconnaissante des efforts de la MINUSCA pour améliorer sa performance et pour prévenir les cas d’exploitation et d’atteintes sexuelles.  Enfin, la France reste très attentive à la question des enfants dans les conflits armés en RCA et se félicite du travail accompli par la MINUSCA à ce sujet, a dit le représentant.

M. FRANCISCO TENYA HASEGAWA (Pérou) a constaté que les efforts menés pour restaurer la présence de l’État et la promotion de la réconciliation interne n’avaient pas réussi à apporter une réponse appropriée face à la grave détérioration de la sécurité et à la dramatique situation humanitaire.  Il s’est inquiété des attaques contre la population civile, le personnel de la MINUSCA et les humanitaires. 

La République centrafricaine représente aujourd’hui un des environnements les plus dangereux et difficiles, a-t-il affirmé.  Dans ce contexte, il a souligné le travail vital qu’effectuent conjointement la MINUSCA et l’Union européenne, avec la formation de forces militaires et policières centrafricaines, aussi bien que les projets de désarmement, démobilisation et réintégration des anciens combattants et la réforme du secteur de la sécurité.  Il a jugé crucial de doter ces forces de l’appui opérationnel et logistique nécessaire.

Le représentant s’est également alarmé de la situation socioéconomique qui contribue à l’instabilité du pays, appelant la communauté internationale à soutenir les efforts du Gouvernement pour la mise en œuvre de ses objectifs. 

Il a salué le rôle de facilitateur de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation ainsi que les synergies entre l’ONU et les organisations régionales et aussi avec les pays voisins.  Ces efforts, a-t-il ajouté, devraient être complétés par un système judiciaire solide.  Il a aussi appelé à renforcer les capacités opérationnelles de la MINUSCA.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est inquiété de la résurgence de la violence et du fait que les groupes de l’ex-Séléka et les antibalaka imposent un contrôle brutal à de larges pans du pays.  Il a notamment dénoncé le fait que les groupes armés continuent de prendre pour cible les travailleurs humanitaires et les effectifs de la MINUSCA à Tagbara.  De tels actes visent à empêcher la MINUSCA de s’acquitter de son mandat, s’est-il alarmé, et leurs auteurs doivent être traduits en justice.

Il a appelé la communauté internationale à appuyer avec détermination le Gouvernement centrafricain dans ses efforts de consolidation de la paix.  Il a appelé à promouvoir la participation de l’ensemble des acteurs politiques, sociaux et civils du pays.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance de tenir compte de tous les besoins socioculturels de tous les pans de la population.

M. Ndong Mba a appelé les groupes armés à déposer les armes et à cesser toute activité déstabilisatrice susceptible de compromettre l’Initiative africaine, la principale feuille de route pour définir une solution politique pour la République centrafricaine.  

Il a salué la tenue prochaine, au mois de juillet, d’un sommet conjoint de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur le radicalisme et l’extrémisme violent.  Il s’est également félicité de la décision du Président, M. Faustin Archange Touadéra, de redynamiser les commissions mixtes avec le Cameroun, le Tchad et le Soudan.

Enfin, le représentant a appelé à la levée des obstacles qui entravent le réarmement des forces de sécurité du pays.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a rendu hommage aux soldats de la paix récemment tués en RCA, affirmant qu’il est plus que jamais important de préserver le mandat de protection des civils de la MINUSCA.  Il a rappelé que la plupart de la population nationale est déplacée et que 70% des familles n’ont pas accès à de l’eau potable.  Il a rappelé que son pays avait déboursé 9 millions de dollars pour soutenir la RCA, mais a regretté que le plan d’aide humanitaire n’ait pas été financé à la hauteur des attentes.

Le représentant a invité tous les groupes armés en RCA à cesser la violence, invitant également les dirigeants religieux à ne plus attiser la violence sectaire par des discours incendiaires.  Il a prévenu que les auteurs de tels actes devront en être rendus responsables.  Le représentant a également appelé de ses vœux l’établissement d’institutions de justice transitionnelle dans le pays.  Il a enfin invité le Conseil de sécurité et la communauté internationale à apporter tout le soutien nécessaire aux initiatives de paix qu’entreprend l’Union africaine dans ce pays.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a réitéré son plein soutien à la MINUSCA en soulignant qu’elle mène son mandat dans des circonstances de plus en plus difficiles.  Elle s’est inquiétée de la détérioration des conditions de sécurité ces derniers mois, avec une violence venant des groupes armés, et a condamné les attaques menées contre les civils, le personnel humanitaire et les Casques bleus.  L’érosion de la confiance entre les communautés et les discours de haine l’ont aussi beaucoup préoccupée.  À cela, la représentante a ajouté les violations de droits de l’homme et l’impunité dont jouissent les auteurs des actes de violence contre les civils, une impunité qui ne doit pas être tolérée.  Elle a prôné un fort leadership et a recommandé au Gouvernement de garantir l’unité nationale.

La Suède soutient l’Initiative africaine en ce sens et souhaite que l’Union africaine continue à lui donner la priorité, en utilisant pleinement sa capacité de médiation.  Aux pays de la région, elle a demandé de faire davantage d’efforts de coordination pour soutenir ceux du Gouvernement centrafricain en faveur de la paix et de la stabilité.  Elle a aussi jugé crucial que tous les segments de la société soient engagés dans le processus politique, en particulier les femmes et les jeunes.  Enfin, elle s’est inquiétée de la situation humanitaire dans le pays et a appelé à augmenter l’aide.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a salué la tenue de consultations avec les groupes armés.  Elle a toutefois déploré que la montée de la violence sapait le processus de paix et a appelé les groupes armés à déposer les armes, notant que la sécurité de la population devait s’améliorer pour qu’un dialogue inclusif pour la paix puisse être mené.  Elle a salué l’initiative du Président Faustin Archange Touadéra pour la réactivation des commissions mixtes bilatérales avec le Cameroun, le Tchad et le Soudan.

La représentante a ensuite souligné le besoin urgent de protéger les civils et a encouragé la MINUSCA à renforcer encore ses mécanismes d’alerte précoce.  Elle a aussi appelé le Gouvernement centrafricain et les dirigeants politiques et religieux à agir pour mettre fin aux incitations à la violence.  

Notant par ailleurs qu’il ne pouvait y avoir de paix sans justice, elle a affirmé que les progrès de la Cour pénale spéciale sont dignes d’éloges, en particulier l’adoption de règles de procédure et de preuve.

Mme Gregoire Van Haaren a également insisté sur l’importance du renforcement de l’autorité de l’État pour parvenir à une solution durable.  Elle a jugé capital que le Conseil prenne aussi tôt que possible une décision sur le redéploiement des forces de sécurité formées par la mission militaire de formation PSDC de l'Union européenne en République centrafricaine (EUTM RCA).

Saluant les progrès réalisés dans le domaine de la restauration de l’autorité de l’État, M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) s’est inquiété de la situation sécuritaire et humanitaire en République centrafricaine.  En effet, la résurgence de la rhétorique incendiaire, la persistance des conflits intercommunautaires ainsi que les attaques menées par les groupes armés contre la MINUSCA et les travailleurs humanitaires demeurent préoccupantes, a expliqué le représentant en condamnant ces actions.  M. Djédjé a invité les parties prenantes au strict respect de la résolution 2399 (2018) et leur a demandé de s’engager dans la recherche d’une solution pacifique à la crise, dans le cadre de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.

Il convient, a ajouté le délégué, d’insister sur le caractère primordial de l’appropriation nationale et de l’inclusivité du processus politique.  C’est pourquoi il a préconisé une forte implication de la société civile, des communautés ethniques et religieuses, des femmes et des jeunes dans le dialogue politique en cours.  La Côte d’Ivoire soutient les efforts du Gouvernement centrafricain et salue le leadership du Président Faustin Archange Touadéra qui privilégie le dialogue et la concertation aussi bien à l’intérieur du pays qu’avec les États voisins, afin de créer les conditions de la réconciliation nationale et d’un engagement réel des parties concernées, en faveur d’une paix durable dans le pays. 

M. COHEN (États-Unis) a appelé à contrer les discours de fauteurs de troubles qui cherchent à détourner la situation à leur profit.  Il s’est félicité du fait que la Cour pénale spéciale soit à présent opérationnelle.  Il a appuyé les efforts de l’Initiative africaine et a appelé l’Union africaine à poursuivre son entreprise de médiation.  Le représentant a ensuite salué les efforts de réconciliation menés sur le plan local par la MINSUCA.  Il a appelé au rétablissement de l’autorité de l’État, soulignant que ce processus doit être lié à un processus « solide » de désarmement, démobilisation et réintégration.  Le représentant a noté la complexité grandissante de l’environnement dans lequel opère la MINUSCA et a prévenu qu’on ne pourrait améliorer son fonctionnement sans une bonne mesure de l’ampleur des défis qu’elle affronte.

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) s’est préoccupé de l’instabilité dans le pays en raison de la résurgence d’une rhétorique incendiaire et d’incitations à la haine.  Il s’est inquiété des attaques qui ciblent des zones à majorité musulmanes.  Il a dénoncé les attaques perpétrées contre les civils et les Casques bleus et a appelé à soutenir les efforts déployés par le Président Touadéra pour asseoir l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire. Le représentant a estimé que les attaques contre les Casques bleus sont constitutives de crimes de guerre et a appelé à diligenter des enquêtes et à traduire les auteurs en justice.  Le représentant s’est aussi soucié de la situation humanitaire « tragique » qui prévaut dans le pays, relevant qu’une personne sur quatre se trouve dans une situation extrêmement critique.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a jugé alarmant le niveau de violence et d’insécurité en République centrafricaine, qui sont le fait des groupes armés et qui sapent les progrès accomplis par le Gouvernement en termes de protection des civils, de renforcement de l’autorité de l’État, de coopération inter-institutions et de formation des forces armées centrafricaines, entre autres.  Il a appelé à trouver des solutions à long terme pour arriver à stabiliser le pays. 

Il a salué les consultations menées avec 14 groupes armés par le panel de facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine.  « Nous nous félicitons que le Gouvernement centrafricain ait décidé de réactiver les commissions conjointes bilatérales entre le Cameroun, le Tchad et le Soudan », a-t-il dit, en espérant que cela limite les mouvements transfrontières de transhumance, de trafic d’armes et de groupes armés. 

Le représentant s’est aussi inquiété de la situation humanitaire en appelant la communauté internationale à maintenir son appui, par un financement prévisible et durable.  Il a condamné les attaques perpétrées par les groupes armés contre les civils, la MINUSCA et les forces de paix.

En outre, il a salué les efforts de la Mission pour identifier les régions où les capacités sont insuffisantes pour appuyer le Gouvernement.  « Nous encourageons la MINUSCA à poursuivre ses efforts pour promouvoir la participation de femmes dans le cadre de l’Initiative africaine et continuer à travailler dans les programmes de réduction de la violence », a-t-il ajouté.

Enfin, il a salué l’aide des organismes régionaux et sous régionaux, tout en appelant à respecter strictement la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la République centrafricaine.

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a salué le soutien de l’Union africaine (UA) pour la paix en République centrafricaine.  Il a souhaité que le processus initié par l’UA implique toutes les couches sociales et catégories de la population, y compris les femmes.  Il a déploré la dégradation de la situation sécuritaire sur le terrain, se disant préoccupé par les appels à la violence ethnique et religieuse qui sont lancés dans le pays. 

Le délégué a salué les progrès réalisés dans l’opérationnalisation d’un tribunal spécial chargé de juger les crimes de guerre, ce qui laisse augurer selon lui de la rupture du cycle de la violence en RCA.  La Pologne plaide également pour le renforcement des institutions sur la base de l’état de droit, et milite pour le renforcement de l’autorité de l’État dans tout le pays.  Le délégué a appelé la communauté internationale à continuer de soutenir la RCA, avant de saluer le travail effectué sur le terrain par la MINUSCA et par la mission militaire de l’UE.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a dit qu’en tant que Président du Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique, l’Éthiopie a convié une réunion le mois dernier sur le cas de la République centrafricaine.

La réunion, à laquelle ont pris part le représentant du pays auprès des Nations Unies et la Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, a permis de relever des inquiétudes quant à la détérioration de la situation sécuritaire, humanitaire et socioéconomique dans le pays, notamment au cours des deux derniers mois.  Les participants à la réunion ont également fait part de leur préoccupation face aux conséquences des déclarations incendiaires et à la violence sectaire.

Il a été aussi noté que l’exploitation illégale des ressources minières, et d’autres également, était la principale source de revenus des groupes armés, se faisant parfois avec l’assistance de pays voisins.  Les attaques croissantes contre les soldats de la MINUSCA semblent avoir un impact sur les efforts en vue de la restauration de l’autorité de l’État.  La réunion de ce groupe de travail a également souligné l’importance de la promotion du dialogue et de la réconciliation à travers l’implication des communautés locales et des pays voisins, afin d’assurer notamment la sécurité aux frontières de la République centrafricaine.

Les participants ont en outre exprimé leur soutien à l’Initiative de paix de l’Union africaine et ont souligné l’importance de renforcer la synergie entre l’ONU et l’Union africaine dans les efforts en faveur de la République centrafricaine. 

La MINUSCA a pour sa part besoin d’être plus robuste, et d’avoir des ressources financières et logistiques adéquates, notamment dans ce contexte où le pays a besoin de préserver le peu d’avancées faites au cours des deux dernières années en République centrafricaine.

M. YAO SHAOJUN (Chine) a condamné les attaques perpétrées contre les Casques bleus et demandé au Gouvernement centrafricain de mener des enquêtes.  Le Gouvernement devra s’assurer que les auteurs de tels actes soient traduits en justice, a-t-il ajouté.  Il a aussi été d’avis que les organisations régionales et sous-régionales doivent renforcer leur collaboration avec le Gouvernement centrafricain en vue de parvenir à une paix durable dans le pays.  Le représentant a enfin lancé un appel en direction de la communauté internationale afin qu’elle apporte tout le soutien nécessaire au Gouvernement centrafricain.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) s’est inquiété de l’intensification des rhétoriques sectaires et des disputes intercommunautaires qui alimentent les conflits armés et sapent les efforts de réconciliation nationale.  Il a noté le rôle joué par le Président Faustin Archange Touadéra pour diriger un processus politique pacifique dans le cadre de l’Initiative africaine, se félicitant notamment de la tenue de la première réunion du Groupe d’appui international.

Il a insisté sur l’importance d’une action coordonnée des partenaires régionaux et internationaux pour consolider les gains réalisés jusqu’à présent et avancer vers la réalisation des principaux objectifs du Programme du développement durable à l’horizon 2030 de l’ONU, de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et de l’initiative « Faire taire les armes d’ici 2020 ».

Il a appelé le Gouvernement de la République centrafricaine à continuer de mettre en œuvre sa stratégie nationale de sécurité et du concept conjoint pour le déploiement des forces de défense et de sécurité internes.  Il a également noté l’importance de l’initiative des États régionaux pour intensifier les commissions bilatérales entre la République centrafricaine, le Cameroun, le Tchad et le Soudan, non seulement pour répondre aux défis sécuritaires transnationaux mais aussi pour renforcer les liens économiques.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est inquiété du fait que des groupes armés contrôlent certaines zones du pays et a déploré la violence meurtrière des conflits interethniques.  Il a jugé la situation intenable.  Il a salué le courage des Casques bleus en RCA et a appuyé les efforts de la MINUSCA et du Représentant spécial dans un contexte « particulièrement difficile ».  Le délégué s’est préoccupé de la dégradation de la situation humanitaire et a appelé à faciliter l’octroi de l’aide et le retour des réfugiés et déplacés.  Il a insisté sur l’importance des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration pour la stabilisation en RCA. Le représentant a ensuite appelé les parties aux accords conclus à Libreville à mettre en application les dispositions de la feuille de route.  Il a également appelé à mettre en œuvre le plan de défense nationale du Président Touadéra.  En outre, il a annoncé qu’en 2018, la Fédération de Russie compte créer des cours de formation miliaire qui bénéficieront à 400 personnes, en plus d’initiatives qu’elle mène sur le plan humanitaire.

Mme AMBROISINE KPONGO (République centrafricaine) a lancé un cri d’alarme devant le Conseil de sécurité, relayant la demande du Représentant spécial de voir la MINUSCA dotée de capacités renforcées, et ce, afin qu’elle soit en mesure de faire face aux différents foyers de tension dans le pays.  Elle a salué les initiatives de l’UA en faveur de la RCA, notamment le panel des facilitateurs de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine, en rappelant que l’objectif final est d’aller vers un dialogue dans la sérénité, condition nécessaire pour le retour à la paix.  S’adressant ensuite aux pays fournisseurs de contingents, elle les a remerciés en saluant le sacrifice de certains de leurs ressortissants, avant de remercier également la communauté internationale pour son soutien au peuple centrafricain.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité spécial de la décolonisation: le Ministre argentin des affaires étrangères fait part d’un climat de détente avec le Royaume-Uni

Session de 2018,
8e & 9e séances plénières – matin & après-midi
AG/COL/3326

Comité spécial de la décolonisation: le Ministre argentin des affaires étrangères fait part d’un climat de détente avec le Royaume-Uni

Avant d’adopter des projets de résolution sur 10 territoires non autonomes et les îles Falkland (Malvinas), le Comité spécial de la décolonisation a entendu le Ministre des affaires étrangères de l’Argentine parler d’un climat de détente avec le Royaume-Uni. 

« Je suis convaincu qu’à travers un dialogue franc et substantiel, et avec un esprit constructif avec le Royaume-Uni, il sera possible d’atteindre un plus haut niveau de coopération sur des questions d’intérêt commun, pour créer un climat de confiance et reprendre des négociations sur le règlement pacifique du différend sur la souveraineté sur les îles Malvinas, les îles Géorgie du Sud, les îles Sandwich du Sud et les zones maritimes environnantes », a déclaré M. Jorge Faurie. 

Tout en soulignant que les revendications de l’Argentine se fondent « sur de solides bases historiques et juridiques », le Ministre argentin des affaires étrangères a réitéré son attachement à un règlement pacifique, par des négociations bilatérales pacifiques avec le Royaume-Uni.  « Cette conviction est inscrite dans la Constitution argentine », a-t-il précisé, rejoignant le Comité spécial qui, dans la résolution* adoptée aujourd’hui sans vote, réitère que le règlement pacifique et négocié du conflit de souveraineté entre l’Argentine et le Royaume-Uni est le moyen de mettre fin à la situation coloniale particulière propre aux îles Falkland (Malvinas).  Il déplore que, malgré le large appui international en faveur de négociations, l’application des résolutions de l’Assemblée générale sur cette question n’ait toujours pas commencé.

Le Comité spécial demande donc aux Gouvernements argentin et britannique de consolider le processus de dialogue et de coopération en cours, en reprenant leurs négociations afin de trouver, dans les meilleurs délais, une solution pacifique au conflit de souveraineté sur les îles Falkland (Malvinas).

La question des Malvinas est une question qui « transcende les différentes administrations argentines et les différences politiques et partisanes », et qui tient à la rupture de l’intégrité territoriale de l’Argentine, en 1833, lorsque le Royaume-Uni a occupé ces îles et expulsé la population et les autorités légitimes argentines, avant de peupler le territoire avec « ses propres colons », a expliqué le Ministre argentin, en soulignant que c’est la raison pour laquelle aucune résolution des Nations Unies n’a incorporé le principe d’autodétermination comme critère du processus de décolonisation de ce territoire.

Ce n’est pas une question de décolonisation mais un différend de souveraineté, a contré un pétitionnaire, M. Roger Edwards.  « Nous ne sommes pas une colonie du Royaume-Uni mais un territoire d’outre-mer qui a depuis longtemps dépassé son statut colonial », a-t-il martelé.  S’il a noté une rhétorique moins virulente de la part du Président argentin, M. Edwards a néanmoins insisté sur la volonté des Argentins de « reprendre notre patrie et de nous coloniser ».

Ce qu’il entend par « rhétorique moins virulente » a été présenté par le Ministre argentin comme l’ouverture d’une nouvelle ère dans les relations bilatérales avec le Royaume-Uni par le Président Mauricio Macri: visites au plus haut niveau, dont celle du Secrétaire d’État britannique, M. Boris Johnson, et multiplication des échanges dans les domaines commercial, scientifique et culturel.

Le développement le plus important, a ajouté le Ministre, a peut-être été la collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge pour identifier les restes des soldats argentins, enterrés dans la tombe du soldat inconnu, au cimetière de Darwin des îles Malvinas.  À la fin de l’identification au mois de mars, les familles des soldats ont pu se rendre dans les îles, a dit le Ministre qui a salué « l’excellente disposition et le respect des habitants des îles », se montrant « particulièrement reconnaissant pour ce geste ». 

Le Comité spécial a ensuite adopté par consensus ses projets de résolution annuels ** sur les Samoa américaines, Anguilla, les Bermudes, les îles Vierges britanniques, les îles Caïmans, Guam, Montserrat, Pitcairn et Sainte-Hélène.

Au terme de ces projets, l’Assemblée générale réaffirmerait le droit inaliénable des peuples de ces territoires à l’autodétermination, conformément à la Charte des Nations Unies et sa résolution 1514 (XV) contenant la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.

Pour ce qui est d’Anguilla, l’Assemblée générale se féliciterait des préparatifs en vue de l’adoption de la nouvelle constitution et souhaiterait vivement que la réforme constitutionnelle entreprise avec la Puissance administrante ainsi que les consultations publiques aboutissent le plus rapidement possible.  L’Assemblée prierait la Puissance administrante d’aider le territoire, s’il en fait la demande, à faire avancer le processus interne de révision de la Constitution.

Intervenant pour la première fois devant le Comité spécial, le Premier Ministre de Montserrat, M. Donaldson Romeo, est venu retirer la demande faite par son prédécesseur de sortir son territoire de la liste des territoires non autonomes.  Il s’agissait, s’est-il expliqué, d’une demande prématurée et non démocratique, le peuple de Montserrat n’ayant pas été consulté.  Compte tenu de l’état de Montserrat depuis l’ouragan Hugo en 1989 et l’éruption volcanique en 1995 et à la lumière des pressions de l’opinion publique britannique sur son gouvernement pour qu’il renonce à des engagements qui auraient pourtant permis à Montserrat de se sortir de sa dépendance, le Premier Ministre a appelé les Nations Unies à encourager la signature d’un mémorandum d’accord entre Montserrat et le Royaume-Uni.  Ce mémorandum comprendrait une liste de projets, un engagement sur les fonds nécessaires et un calendrier.  Comme le mémorandum traiterait aussi des relations de Montserrat avec le Royaume-Uni, les Nations Unies pourraient nommer une équipe « neutre » pour suivre les progrès dans la mise en œuvre des projets. 

*A/AC.109/2018/L.8

** A/AC.109/2018/L.10, L.11; L.12; L.14, L.15; L.16; L.17, L.18 et L.19 

APPLICATION DE LA DÉCLARATION SUR L’OCTROI DE L’INDÉPENDANCE AUX PAYS ET AUX PEUPLES COLONIAUX

Questions des îles Falkland (Malvinas)

Audition de pétitionnaires

M. IAN HANSEN, Assemblée législative, îles Falkland (Malvinas),  a tenu à confirmer que les îles Falkland « ne sont pas une colonie britannique mais un territoire autonome d’outre-mer ».  Plus de 3 500 personnes de plus de 60 pays différents y vivent et y travaillent, ce qui prouve sans l’ombre d’un doute qu’il s’agit d’une société inclusive et multiculturelle.  D’ailleurs le nom « Hansen » est d’origine scandinave, a-t-il souligné.  Il a donc jugé « impossible » de comprendre pourquoi on parlerait de ses habitants comme une population implantée envoyée du Royaume-Uni, comme le fait le Gouvernement argentin.  Les revendications de l’Argentine sont « infondées et inopportunes », a-t-il tranché. 

Le pétitionnaire a rappelé le référendum de mars 2013, à l’issue duquel 99,8% des 92% des votants se sont prononcés pour un statut, « le statut de territoire britannique d’outre-mer ».  Notre relation avec le Royaume-Uni est une relation « moderne, fondée sur le partenariat, des valeurs partagées et le respect de notre droit à l’autodétermination ».  Les Nations Unies, a souligné le pétitionnaire, n’ont jamais dit « explicitement » que ce droit ne s’applique pas aux habitants des îles Falkland. 

Pourquoi un pays voudrait-il priver un territoire de ce droit fondamental?  Aucun peuple ne saurait être dirigé contre sa volonté ou voir son gouvernement et ses ressources naturelles placés sous le contrôle d’un autre pays contre son gré.  C’est un droit de l’homme fondamental.

Même si les relations entre le Royaume-Uni et l’Argentine se sont sensiblement améliorées, notre position sur les revendications de l’Argentine reste la même, a prévenu le pétitionnaire.  Pourquoi voulez-vous que nous changions notre façon de vivre?  Nous élaborons nos propres lois et gérons directement toutes les activités industrielles.  Le terme « colonie » aurait pu s’appliquer dans les années 1950 et 1960, ce n’est certainement pas le cas aujourd’hui.  Nous ne recevons, a souligné le pétitionnaire, aucune aide financière directe du Royaume-Uni, à l’exception du domaine de la défense et nous n’en aurions pas besoin si l’Argentine avait renoncé à ses revendications injustifiées.

Vous entendrez sans doute, a averti le pétitionnaire, des déclarations selon lesquelles les habitants des Falkland ne sont pas un peuple et, dès lors, qu’ils n’ont pas de droit à l’autodétermination.  Cette position « artificielle » est un pur déni de droit de l’homme fondamental, a estimé le pétitionnaire.  Nous sommes ici, a-t-il dit, soutenus par notre électorat et pas comme les marionnettes d’un pays.  Nous avons le droit de vivre en paix, nous avons un droit à notre liberté et, par-dessus tout, nous avons le droit de déterminer notre propre destin.  Avant de terminer, le pétitionnaire a invité le Comité à se rendre dans les îles Falkland, à voir par lui-même le développement politique, social et économique qu’il a décrit aujourd’hui et à bien comprendre la question dont il est saisi.  Ignorez, a-t-il ajouté, les fausses revendications de l’Argentine et appuyez notre souhait de rester un territoire britannique d’outre-mer et non de devenir une « colonie » du Gouvernement de l’Argentine, conformément au rôle de ce Comité! 

M. ROGER EDWARDS, Assemblée législative, îles Falkland (Malvinas), a affirmé que lorsqu’elles ont été découvertes, les îles Falkland ne comptaient aucune population autochtone.  Les assertions avancées devant ce Comité, selon lesquelles une population aurait été installée pour promouvoir les visées colonisatrices de la Puissance administrante, sont tout simplement fausses.  Le pétitionnaire a rejeté les revendications de l’Argentine, arguant que le statut des îles ne constitue en rien une atteinte à l’intégrité territoriale de l’Argentine.  Avec une population très diverse, originaire de plus de 60 pays, « personne ne peut dire que nous sommes implantés », a souligné le pétitionnaire.  Le statut est bien celui d’un territoire britannique d’outre-mer qui est « totalement autosuffisant économiquement et totalement autonome ».  Le Royaume-Uni, a-t-il dit, n’assure que la défense et les relations étrangères.  Loin d’être massivement présentes, les forces militaires britanniques sont à un niveau tout simplement suffisant pour dissuader toute agression.

La situation est un différend de souveraineté, non une question de décolonisation, a analysé le pétitionnaire.  S’il a noté une rhétorique moins virulente de la part du Président argentin, M. Edwards a néanmoins insisté sur la volonté des Argentins de « nous reprendre notre patrie et de nous coloniser ».  Nous sommes parvenus à quelques avancées avec l’Argentine, a-t-il reconnu, avant d’insister, une nouvelle fois, sur le fait que « nous ne sommes pas une colonie du Royaume-Uni mais un territoire d’outre-mer qui a depuis longtemps dépassé son statut colonial ».  Les habitants des îles ont déjà exercé leur droit à l’autodétermination comme le demande la Charte des Nations Unies.

M. LUIS GUSTAVO VERNET, arrière-arrière-petit-fils du Premier Gouverneur argentin des îles Malvinas, a souligné que la « maison de mon père » est encore débout sur les îles.  Je suis la preuve vivante, a-t-il dit, que les Argentins habitaient paisiblement sur ces îles, avant d’être expulsés par la force.  En 1823, a ajouté M. Vernet, mon arrière-arrière-grand-père a été autorisé par l’Argentine à s’installer aux Malvinas, ce qui constitue bien un acte de souveraineté pris par l’Argentine sur les îles Malvinas.  Jusqu’en 1810, l’Espagne contrôlait les îles et les lettres échangées entre l’Argentine et le Gouverneur espagnol, datant de 1768, en témoignent. 

En 1823, a poursuivi le pétitionnaire, mon arrière-arrière-grand-père, Don Luis Vernet, a obtenu du Gouvernement de Buenos Aires l’autorisation d’exploiter le bétail dans les îles Malvinas.  À cette époque, peu de pays s’y intéressaient.  C’est Don Vernet qui a proposé au Gouvernement de Buenos Aires d’en faire une colonie, proposition qui a été acceptée par un décret le 5 janvier 1828.  Pour que ses concessions ne soient pas contestées par les bateaux de pêche étrangers, Don Vernet remit au Procureur britannique la liste des concessions qu’avait établies le Gouvernement de Buenos Aires.  Ce document a été dûment légalisé par le Vice-Consul britannique et couvert par le Traité d’amitié, de navigation et de commerce qui, en l’an 1825, avait été signé entre les Provinces Unies du Rio de la Plata et le Royaume-Uni.  Ce Traité, a-t-il insisté, reconnaît la légitimité de l’Argentine sur les îles, un élément que le Royaume-Uni n’a jamais contesté.

Par la suite, Don Luis Vernet a été nommé Gouverneur des îles Malvinas.  Le Royaume-Uni a cette fois-ci contesté le décret de nomination, pour incompatibilité avec le droit britannique et a ensuite, en 1833, hissé le drapeau britannique et baissé celui de l’Argentine, sans oublier d’ordonner l’expulsion de tous les habitants des îles. 

L’administration britannique était une administration « illégale », a estimé le pétitionnaire.  Le Royaume-Uni a volé les Malvinas et tout le monde est resté sourd aux plaintes de l’Argentine.  Il a exhorté le Royaume-Uni à trouver une solution au différend de souveraineté, en tenant compte des intérêts des insulaires et des droits de toutes les parties.  Le Royaume-Uni doit reprendre les négociations et résoudre son différend avec l’Argentine.

M. RICARDO ANCEL PATTERSON a affirmé que ses ancêtres sont arrivés dans les îles Malvinas en 1873, sur lesquelles l’Argentine n’a jamais accepté la souveraineté britannique.  Il a rejeté les arguments du Royaume-Uni qui ne vise qu’à empêche la recherche d’une solution.  Le Royaume-Uni, a-t-il constaté, refuse de parler avec l’Argentine, alors qu’obligation lui a été faite de reprendre les négociations pour régler pacifiquement ce différend.  Le transfert de souveraineté ne signifierait pas pour autant, a-t-il estimé, que les habitants des Malvinas devraient acquérir la nationalité argentine.  Une population anglo-saxonne peut en effet vivre en Argentine dans le respect de son identité, comme c’est le cas pour les communautés galloises installées depuis longtemps en Patagonie.  L’Argentine est l’exemple probant de l’intégration réussie de vagues migratoires successives.  C’est l’ADN même de ce pays et ma famille en témoigne, a déclaré le pétitionnaire, avant d’exhorter le Royaume-Uni à revenir à la table des négociations.

Déclarations

Cinquante-sept ans ont passé depuis l’adoption de la résolution 1514 de l’Assemblée générale, a compté M. JORGE M. FAURIE, Ministre des affaires étrangères et du culte de l’Argentine.  Des succès ont été enregistrés dans les processus de décolonisation mais la tâche n’est pas finie, a-t-il dit, pointant sur les 17 territoires toujours non autonomes dont les îles Malvinas.  La souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas, les îles Géorgie du Sud, les Sandwich du Sud et les zones maritimes environnantes se fonde sur de « solides bases historiques et juridiques », a martelé le Ministre, et le temps qui passe ne diminue en rien la validité de nos revendications et altère encore moins notre conviction que le différend de souveraineté doit être réglé pacifiquement, par des négociations bilatérales pacifiques entre l’Argentine et le Royaume-Uni.  Cette conviction est inscrite dans la Constitution argentine.  

C’est une question, a expliqué le Ministre, qui transcende les différentes administrations argentines et les différences politiques et partisanes.  Il s’agit d’une « politique d’État » comme en témoigne, a-t-il dit, ma délégation composée de différents partis politiques et du Gouverneur de la Terre de feu.  Ce différend tient à la rupture de l’intégrité territoriale de l’Argentine, en 1833, lorsque le Royaume-Uni a occupé les îles et expulsé la population et les autorités légitimes argentines, avant de peupler le territoire avec « ses propres colons » et empêcher

l’installation de citoyens argentins.  C’est la raison pour laquelle, aucune résolution des Nations Unies n’a incorporé le principe d’autodétermination comme critère du processus de décolonisation du territoire.  En effet, en 1968, l’Assemblée générale a rejeté à une large majorité deux amendements sur ce principe.

Pour être applicable, s’est expliqué le Ministre, le principe d’autodétermination requiert l’existence d’un peuple assujetti à une domination étrangère, c’est-à-dire un sujet susceptible de mériter le droit à l'autodétermination.  Ce ne peut être le cas des îles Malvinas puisqu’aucun de ses habitants n’a jamais été soumis à une domination coloniale étrangère.

Accorder aux habitants des îles le pouvoir de décider du statut du territoire dans lequel ils vivent, serait contraire à la lettre et à l'esprit de la résolution 1514 et des dispositions du droit international relatives à la décolonisation. 

Décolonisation et autodétermination ne sont pas synonymes, a martelé le Ministre.  L’Argentine n’est nullement insensible aux intérêts, au bien-être ou à la prospérité des insulaires.  L’Argentine, a insisté le Ministre, s’est engagée, comme le prévoit sa Constitution, à respecter le style de vie des insulaires et à avoir une attitude constructive à leur égard, et prendre en compte leurs intérêts. 

Le Président Mauricio Marci, s’est réjoui le Ministre, a ouvert une nouvelle ère dans les relations avec le Royaume-Uni: des visites au plus haut niveau ont été effectuées et les échanges se sont multipliés dans les domaines commercial, scientifique et culturel.  Au mois de mai dernier, a rappelé le Ministre, le Secrétaire d’État britannique, M. Boris Johnson, a été reçu en Argentine dans ce qui était la première visite à un tel niveau depuis 22 ans.  Par la suite, le Chef de cabinet des Ministres argentins, M. Marcos Pena, s’est rendu à Londres.

Pour le Président Marci, il s’agit de promouvoir la connectivité entre le continent et les îles Malvinas et de renforcer les liens avec ses habitants.  Les deux Gouvernements ont fait des démarches auprès des pays du MERCOSUR pour ajouter un vol supplémentaire aux vols hebdomadaires déjà existants.  Il y a un mois, le Sous-Comité scientifique de la Commission des pêches de l’Atlantique-Sud a tenu, pour la première fois depuis 14 ans, une réunion sur la préservation des ressources naturelles.    

Le développement le plus important, depuis la dernière réunion du Comité spécial, est peut-être la collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge pour identifier les restes des soldats argentins, enterrés dans la tombe du soldat inconnu, au cimetière de Darwin des îles Malvinas.

À la fin de l’identification au mois de mars, les familles des soldats ont pu se rendre dans les îles et « je ne peux que mentionner l’excellente disposition et le respect des habitants des îles », a dit le Ministre en se montrant « particulièrement reconnaissant pour ce geste ». 

L’Argentine, a-t-il assuré, veut garder un large agenda avec le Royaume-Uni, qui permettrait d'examiner toutes les questions et de parvenir à une compréhension commune des domaines d’intérêt commun et des opportunités pour les deux pays.

Je suis convaincu, a confié le Ministre, qu’à travers un dialogue franc et substantiel, et avec un esprit constructif avec le Royaume-Uni, il sera possible d’atteindre un plus haut niveau de coopération sur des questions d’intérêt commun, pour créer un climat de confiance entre les deux parties et reprendre des négociations sur le règlement pacifique du différend sur la souveraineté sur les îles Malvinas, les îles Géorgie du Sud, les îles Sandwich du Sud et les zones maritimes environnantes. 

Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a rappelé que le Comité spécial a déjà adopté 33 résolutions sur la question des îles Malvinas, ce qui montre l’importance que la communauté internationale accorde à cette question qui doit être réglée dans le respect de la résolution 1514.  « Les îles Malvinas sont argentines et le resteront », a martelé la représentant, soulignant que l’Amérique et les Caraïbes sont un espace de paix, comme l’a proclamé, en janvier 2014, la CELAC.  Tout exercice militaire dans l’espace rattaché aux îles est contraire à la vocation pacifique de la région comme proclamé par la CELAC.  Tout exercice militaire viole la souveraineté de l’Argentine et le droit international, a estimé la représentante, en appelant à une solution négociée, juste et définitive dans le respect de l’intégrité territoriale de l’Argentine.  Elle a reconnu certaines avancées dans la gestion scientifique des stocks halieutiques ou l’identification des dépouilles des soldats argentins morts pendant la « Guerre des Malouines ».  Mais elle a dénoncé l’impasse dans les négociations sur ce différend de souveraineté.  Elle a donc demandé la réouverture des négociations bilatérales, soulignant que « membre de la CELAC, Cuba continuera d’agir dans le cadre du droit international pour que sa région soit débarrassée du colonialisme ».

Mme MARIA RUBIALES DE CHAMORRO (Nicaragua), a réitéré son plein appui à la position du Ministre argentin des affaires étrangères, une position basée « sur le droit international et la justice ».  Nous sommes devant, a estimé la représentante, un différend bilatéral entre l’Argentine et le Royaume-Uni qui doivent trouver une solution pacifique par le biais de négociations.  Elle a donc regretté que le Royaume-Uni n’ait toujours pas pris les mesures nécessaires pour mettre en œuvre le mandat établi par l’Assemblée générale dès 1965.  Le Nicaragua, a insisté la représentante, a toujours affirmé sa solidarité avec l’Argentine et le peuple des îles Malvinas.  Le Parlement a d’ailleurs proclamé le 10 juin, « Journée nationale de solidarité avec l’Argentine pour les îles Malvinas », une décision qui a été reprise par le Parlement centraméricain (PARLACEN).

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a insisté sur le fait que la situation dans les îles Malvinas est une question caribéenne et latino-américaine.  C’est une question « historique » qui remonte à 1833, lorsque l’Armée royale britannique a envahi le territoire argentin.  Mais, s’est emporté le représentant, « une invasion ne peut pas conférer des droits ».  L’Assemblée générale a reconnu le différend de souveraineté et invité les deux parties à le régler pacifiquement.  « Quand nous parlons des îles Malvinas, nous parlons de l’identité argentine, caribéenne et latino-américaine de ces îles », a encore insisté le représentant, ajoutant: « Ces mots me viennent du cœur et de l’âme: Les Malvinas sont argentines ».

M. MILENKO E. SKOKNIC TAPIA (Chili) a appuyé le Gouvernement et le peuple argentins dans leurs revendications sur la souveraineté des îles Malvinas.  S’alignant sur la position de la CELAC et du MERCOSUR, le représentant s’est félicité des progrès dans les relations entre l’Argentine et le Royaume-Uni, citant à titre d’exemple la visite du Secrétaire d’État britannique, M. Boris Johnson, à Buenos Aires et le respect qu’il a manifesté à l’égard des soldats argentins non identifiés morts en 1982.   Le représentant a réitéré la nécessité pour les Gouvernements argentin et britannique de reprendre au plus tôt le dialogue pour trouver une solution pacifique à ce différend.

M. MARIO A. ZAMBRANO ORTIZ (Équateur) a demandé la réouverture des négociations entre l’Argentine et le Royaume-Uni dans le respect de la résolution 1514.  Il a appuyé la souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas, jugeant que la situation actuelle est une atteinte à son intégrité territoriale.  Il a rejeté toute mesure unilatérale modifiant la situation actuelle, y compris s’agissant des réserves d’hydrocarbures du plateau continental argentin.  Le Secrétaire général doit renforcer ses bons offices pour arriver au règlement de ce différend grâce à des négociations. 

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a regretté qu’il y ait toujours 17 territoires non autonomes dans le monde et a invité le Comité spécial à réfléchir à ce que cela signifie politiquement.  Il a appuyé le projet de résolution sur la question des îles Malvinas et s’est dit convaincu qu’une adoption par consensus permettrait de réaffirmer la pleine légitimité de la position du Gouvernement argentin.  La Syrie a toujours défendu le droit des peuples à l’autodétermination et ne peut accepter la manipulation de ce principe dans ce différend car il s’agit bien d’un différend territorial.  La Syrie, a poursuivi le représentant, rejette toutes les mesures unilatérales prises par le Royaume-Uni dans les îles Malvinas.  Il a même estimé que « la situation ressemble beaucoup à la colonisation d’Israël de notre Golan ».  Il a encouragé les deux parties à y mettre fin pacifiquement par le biais d’un dialogue bilatéral.

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), le représentant de El Salvador a donné son plein appui au droit légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas et appelé à une reprise des négociations.  La CELAC est une zone de paix et veut que ce différend soit réglé au moyen des négociations.  Le représentant a lu la déclaration que viennent d’adopter les Chefs d’État et de gouvernement de la CELAC dans laquelle ils réitèrent leur appui à l’Argentine dans ce différend de souveraineté.  Ils engagent également le Secrétaire général à poursuivre sa mission de bons offices pour parvenir à une reprise des négociations.  Le représentant n’a pas oublié de dénoncer toute modification unilatérale de la situation dans les îles Malvinas. 

M. STANISLAV S. ALEKSAEV (Fédération de Russie) a appuyé le règlement de la question des îles Malvinas par des moyens politiques et des discussions entre les deux parties sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies.  Il s’est dit préoccupé par une militarisation possible de la région et a encouragé les parties à respecter le Traité de Tlatelolco.  Il faut se conformer aux décisions prises par le Comité spécial et la Quatrième Commission sur ce différend, a-t-il conclu.

Au nom du Marché commun du Sud (MERCOSUR), M. JULIO CÉSAR ARRIOLA RAMÍREZ (Paraguay) a relayé l’appel lancé par le Ministre argentin des affaires étrangères en faveur d’une reprise des négociations.  Dans le Communiqué de Brasilia de décembre 2017, a-t-il rappelé, les États du Mercosur ont soutenu le droit légitime de l’Argentine.  Ce différend de souveraineté doit être tranché sur la base des résolutions de l’ONU, a-t-il déclaré, en rejetant toute action unilatérale susceptible de modifier la situation actuelle des îles Malvinas.  Le Gouvernement argentin privilégie le dialogue et est prêt à coopérer avec le Gouvernement britannique, a rappelé le représentant.

Pour M. SONG LI (Chine), la question des Malvinas est une question coloniale.  Il a noté les nombreuses résolutions adoptées sur cette question par l’Assemblée générale et le Comité spécial, et a appuyé les revendications de l’Argentine.  La Chine espère un règlement pacifique de ce différend, a-t-il dit.

M. ACHNASUL HABIB (Indonésie) a réitéré que l’esprit de coopération est important au sein du Comité spécial, avant de saluer la bonne volonté affichée par certaines puissances administrantes et de les encourager à poursuivre sur cette voie.  « Un dialogue pacifique permet toujours de faire avancer le processus de décolonisation et de trouver des solutions mutuellement acceptables », a-t-il dit.  Pour ce qui est de la question des îles Malvinas, il a appuyé l’approche consensuelle en cours et a encouragé les Gouvernements argentin et britannique à reprendre les négociations pour trouver une solution juste et pacifique, sur la base des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Au nom de l’Organisation des États américains, M. OMAR CASTAÑEDA SOLARES (Guatemala) a estimé que la présence du Ministre des affaires étrangères de l’Argentine montre l’attachement de ce pays au multilatéralisme et à un règlement pacifique du différend de souveraineté sur les îles Malvinas.  Cette question est un différend colonial très spécifique par rapport aux autres questions coloniales, a-t-il déclaré.  Les îles Malvinas ont été peuplées « d’affidés » par la Puissance administrante, ce qui annihile leur droit à l’autodétermination.  Il ne s’agit pas d’une population autochtone puisqu’elle a été installée par le Royaume-Uni, a-t-il tranché, avant de déplorer le manque de volonté politique du Royaume-Uni de reprendre les négociations, alors que l’Argentine est prête à s’engager sur cette voie.  Le délégué s’est félicité de l’identification des dépouilles des soldats argentins mais a dénoncé les actes unilatéraux du Royaume-Uni, s’agissant notamment de l’exploitation de ressources naturelles.

M. ELBIO OSCAR ROSSELLI FRIERI (Uruguay), qui participe à cette session en tant qu’observateur, a souscrit aux positions de la CELAC et du MERCOSUR sur la question des îles Malvinas.  Il a notamment réaffirmé son appui à la revendication de souveraineté « légitime » de l’Argentine sur ces îles.  La région souhaite que ce vieux différend soit réglé pacifiquement par le dialogue.  Le représentant a dénoncé les actions unilatérales du Royaume-Uni, en particulier l’exploitation des hydrocarbures, et a reconnu le droit de l’Argentine de prendre des mesures légales pour y répondre.  Le cas des îles Malvinas est bien un cas de différend territorial qui doit être réglé par un dialogue, a insisté le représentant.  À cet égard, il a salué les progrès dans les relations bilatérales entre l’Argentine et le Royaume-Uni.

M. FREDERICO SALOMÃO DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) a appuyé le droit souverain de l’Argentine sur les îles Malvinas et estimé que cette question est une situation coloniale très particulière.  Une population britannique s’est installée dans ces îles dans le cadre d’une occupation illégale, a-t-il dit, en appelant à la reprise des négociations.  Il s’est félicité de l’identification des dépouilles de soldats argentins dans le cimetière de Darwin et de l’augmentation du nombre de vols réguliers entre les îles Malvinas et le continent sud-américain.  Il a dénoncé les actes unilatéraux s’agissant de l’exploitation de ressources naturelles.  Mon pays, a-t-il rappelé, interdit l’accès aux ports et aux aéroports brésiliens des navires et avions à destination des îles Malvinas pour contribuer à une modification de la situation actuelle.  Le représentant a appuyé la mission de bons offices du Secrétaire général.

Adoption de la résolution (A/AC.109/2018/L.8)

Le Ministre des affaires étrangères de l’Argentine s’est félicité de cette adoption par consensus et a remercié tous les États qui ont y contribué.

Le représentant du Mexique a insisté sur la souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas, affirmant qu’il s’agit d’une revendication « juste et historique ».  Il a encouragé les deux parties à trouver une solution pacifique par le biais de négociations bilatérales et éviter les mesures unilatérales, aussi longtemps que ce différend n’aura pas été réglé sur la base des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Le représentant de la Colombie a, à son tour, appuyé le droit souverain de l’Argentine sur les îles Malvinas et réaffirmé l’importance de régler cette question par le biais des négociations.  Le dialogue, a-t-il dit, doit être renforcé pour parvenir à une solution conforme aux résolutions de l’ONU.  Déplorant le temps perdu, le représentant a rejeté toute modification unilatérale de la situation actuelle et exhorté le Royaume-Uni à avoir sur ce dossier « une attitude constructive ». 

La représentante du Honduras, observatrice au Comité spécial, a tenu à réitérer son appui à l’Argentine et à son droit souverain sur les îles Malvinas.  Encourageant le Gouvernement argentin à trouver des mécanismes permettant de mettre fin à cette situation coloniale, la représentante a mis l’accent sur l’urgence qu’il y a à s’assoir à la table des négociations pour mettre fin à ce vieux différend.  Le Honduras reconnaît également les efforts des différents organismes des Nations Unies sur ce dossier et encourage tous les États Membres à les appuyer, a-t-elle conclu.

Son homologue du Costa Rica a indiqué que l’aspiration à faire du colonialisme une relique du passé ne s’est toujours pas concrétisée.  Elle a appuyé le droit souverain de l’Argentine sur les îles Malvinas et insisté sur la légitimité de ses revendications.  Elle a insisté sur certains progrès enregistrés, tels que l’identification des dépouilles de soldats argentins dans le cimetière de Darwin.  Il faut avancer pour régler ce différend, a conclu la déléguée.

Le représentant du Pérou a rappelé que son pays avait soutenu invariablement le droit souverain et légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas, « une position qui se fonde sur des critères historiques, géographiques et juridiques ». Cinquante années se sont écoulées depuis l’adoption de la résolution 2065 sur cette question sans qu’une solution ait pu être trouvée, s’est-il impatienté.  Comme l’a toujours indiqué le Comité spécial, la seule solution possible passe par des négociations bilatérales entre l’Argentine et le Royaume-Uni.  En attendant, le représentant a salué les efforts que déploient les deux Gouvernements pour améliorer leurs relations bilatérales.

Question de Montserrat

Audition d’un pétitionnaire

M. DONALDSON ROMEO, Premier Ministre de Montserrat, qui s’exprimait pour la première fois devant le Comité spécial, a demandé au Comité spécial d’ignorer la demande qu’avait formulée son prédécesseur visant à ce que le territoire soit retiré de la liste des territoires non autonomes.  Il s’agissait, s’est-il expliqué, d’une demande « prématurée et non démocratique », le peuple de Montserrat n’ayant pas été consulté.  Rappelant que Montserrat était budgétairement autosuffisant, s’envolant vers un avenir radieux, le Ministre a dit que l’ouragan Hugo de 1989 est venu anéantir tous les espoirs, avant que l’éruption volcanique de 1995 ne transforme la capitale, Plymouth, en « Pompée moderne », sans oublier l’émigration massive vers Antigua-et-Barbuda et le Royaume-Uni.  Depuis lors, les projets de reconstruction ont multiplié les retards, certains d’entre eux étant à l’arrêt depuis 20 ans. 

« Je ne suis pas venu ici en tant qu’ennemi ou cousin éloigné du Royaume-Uni.  Nous sommes britanniques, nous sommes sujets britanniques », a assuré le Premier Ministre.  Il a appelé le Comité spécial à travailler avec le Royaume-Uni et Montserrat dont 60% du budget est toujours assuré par le trésor britannique.  Si la moitié des 500 millions de livres sterling dépensées avait servi à la reconstruction des infrastructures essentielles, Montserrat serait déjà sortie de sa dépendance au Royaume-Uni. 

Le Premier Ministre a reconnu que le Royaume-Uni fait l’objet de pressions de la part de son opinion publique pour qu’il renonce à des engagements qui auraient pourtant permis à Montserrat de sortir de sa dépendance.  Cette « ambivalence » au Royaume-Uni pointe sur la nécessité pour le Comité spécial de faire bouger les lignes.  La population, a assuré le Premier Ministre, était prête à rebâtir en mieux pour faire un pas vers l’émancipation postcoloniale.  Il a donc appelé les Nations Unies à encourager la signature d’un mémorandum d’accord entre Montserrat et le Royaume-Uni qui comprendrait une liste de projets, un engagement sur les fonds nécessaires et un calendrier.  Comme le mémorandum traiterait aussi des relations de Montserrat avec le Royaume-Uni, les Nations Unies pourraient nommer une équipe « neutre » pour suivre les progrès dans la mise en œuvre des projets.  Le Comité spécial, a ajouté le Premier Ministre, devrait se rendre auprès des réfugiés de Montserrat à Antigua-et-Barbuda pour constater par lui-même que beaucoup de ces réfugiés veulent rentrer chez eux pour contribuer au développement de leur territoire.  Ce sont les infrastructures détruites par l’éruption volcanique qui se dressent entre le peuple de Montserrat et son indépendance économique.  Beaucoup de gens veulent l’indépendance mais ils sont effrayés par le manque d’infrastructures, a dit le Premier Ministre, en reprenant les propos prononcés, il y a 30 ans, par un ancien homologue.  Avec les infrastructures, Montserrat pourra opter pour l’indépendance mais il n’a pas réussi à convaincre le Royaume-Uni qu’une aide aujourd’hui veut dire moins d’aide, voire plus d’aide du tout demain.  Dans l’état actuel des choses, a reconnu le Premier Ministre, ce serait une erreur de réclamer l’indépendance.  Le peuple n’est pas en mesure d’exercer son droit dans la situation économique et son manque de préparation à l’indépendance.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Darfour: face à des membres divisés, la Procureure de la CPI dénonce le manque de coopération de certains États et prie le Conseil de sécurité d’agir

8290e séance – matin
CS/13388

Darfour: face à des membres divisés, la Procureure de la CPI dénonce le manque de coopération de certains États et prie le Conseil de sécurité d’agir

L’obligation générale de coopérer a été au cœur de l’exposé semestriel de la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), Mme Fatou Bensouda, qui, ce matin, a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des mesures concrètes face à certains États qui se refusent à arrêter et à transférer à la CPI les suspects liés à la situation au Darfour, lorsque ces derniers se trouvent sur leur territoire.

Mme Bensouda a visé l’Ouganda, le Tchad et la Jordanie, où le Président Omar el-Béchir du Soudan, qui figure parmi les cinq suspects faisant l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI, a effectué différentes visites officielles au courant de l’année 2017.  La Cour, a-t-elle précisé, a pris acte de leur manque de coopération et initié des procédures en vertu de l’Article 87(7) du Statut de Rome.

La Procureure a dénoncé « une situation intenable » et demandé au Conseil d’agir de façon appropriée suite à toute notification émanant de la Cour concernant les États qui ne se plient pas à la règle.

« Le statut officiel de M. el-Béchir ne justifie en rien l’échec d’un État Partie au Statut de Rome à arrêter et à transférer un suspect qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la CPI », a-t-elle insisté.

« Treize ans après le renvoi de la situation au Darfour à la CPI, les victimes de crimes, dont la gravité a poussé le Conseil sécurité à saisir la Cour, attendent toujours que les auteurs comparaissent en justice.  Pendant combien de temps encore les victimes de ces allégations d’atrocités commises au Darfour devront-elles souffrir en silence ou attendre que leur tourment soit reconnu par des résultats concrets? » s’est impatientée Mme Bensouda.

L’appel de la Procureure a été appuyé par le Royaume-Uni qui a, lui aussi, prié le Conseil de sécurité d’agir face aux manquements de certains États Parties au Statut de Rome vis-à-vis de la Cour.  « Il est inacceptable que les victimes des crimes internationaux commis au Darfour attendent toujours que justice soit faite », se sont indignés les Pays-Bas.

Pour les États-Unis, le fait que le Président el-Béchir continue d’être reçu à l’étranger en visite officielle contribue à diminuer l’ampleur des chefs d’accusation qui pèsent contre lui.

« La France refuse de voir se banaliser le refus de coopération de la part d’États Membres des Nations Unies », a renchéri cette délégation qui a réitéré sa proposition visant à ce que les États dont la Cour a constaté qu’ils manquent à leur obligation de coopérer soient invités à s’exprimer devant le Conseil de sécurité.  « Il reviendra ainsi au Conseil de déterminer, sur la base de cet échange, des suites à donner. »

En revanche, le représentant de l’Éthiopie, qui a vivement dénoncé le ton employé par la Procureure à l’égard de « l’un des dirigeants les plus respectés » du continent africain, a appelé à suspendre les procédures en cours contre le Président el-Béchir, le dossier de la CPI étant « si faible » que ce n’est pas logique de le maintenir.  « Au vu du rôle constructif du Gouvernement soudanais, il est plus que temps pour le Conseil de sécurité de réexaminer avec sérieux la question du Soudan et de la CPI », a-t-il argué.  Même son de cloche du côté du Koweït pour qui le Conseil devrait tenir compte de la stabilité croissante au Darfour alors qu’il examine ce dossier.

Insistant sur l’immunité des hauts fonctionnaires de l’État en droit international, la Guinée équatoriale a, dans le même esprit, estimé que « ce n’est pas un hasard » si plusieurs pays, dont certains sont même parties au Statut de Rome, ne coopèrent pas avec la CPI à ce sujet ».  La Chine a souligné qu’un chef d’État bénéficie de l’immunité due à son rang et ne la perd pas, même s’il est convoqué devant la CPI.

La Fédération de Russie a en outre relevé que la résolution 1593 (2005) stipule que les États qui ne sont pas parties au Statut de Rome ne sont pas requis de répondre aux appels de la Cour.  La situation qui en découle est que la confiance en la CPI faiblit inexorablement et que la Cour s’avère être un organe qui ne peut s’acquitter des tâches que lui a conférées le Conseil de sécurité, a-t-il affirmé.

Le représentant du Soudan a ainsi fait observer que son pays n’avait aucun devoir à l’égard de la CPI, n’étant pas partie au Statut de Rome.  Dénonçant tour à tour la « corruption ambiante », « une détestable sélectivité », et une cour politisée, il a rappelé qu’en janvier dernier, le Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine avait demandé un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) au sujet de l’immunité des chefs d’État.

De plus, le représentant soudanais a dénoncé les « mensonges » contenus dans le rapport du Secrétaire général, au sujet de bombardements dans le Jebel Marra ou encore de l’usage d’armes chimiques, avertissant que « l’ingérence de la Cour dans les affaires intérieures soudanaises » met en danger la stabilité au Soudan et au Darfour et incite les groupes armés à commettre davantage d’exactions contre les populations civiles.

Ces propos virulents ont poussé la Procureure à répondre au Soudan, « pour la première fois en deux ans », « en raison du ton hostile et irrespectueux de la délégation », qui de surcroît la visait personnellement.  Ce manque de respect vis-à-vis du Conseil, de la CPI et des victimes témoigne selon elle d’un mépris de la justice internationale.

L’ironie veut que ce soit au sein même du Conseil de sécurité, qui a renvoyé le dossier du Darfour à la CPI, qu’elle se rapproche le plus d’un dialogue avec le Soudan, a conclu Mme Bensouda, avant d’inviter Khartoum à dialoguer avec son Bureau sur la remise de tous les suspects à la CPI.

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Déclarations

Mme FATOU BENSOUDA, Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), a constaté que 13 ans après le renvoi de la situation au Darfour à la CPI, les victimes de crimes, dont la gravité a poussé le Conseil de sécurité à saisir la Cour, attendent toujours que les auteurs comparaissent en justice.  Pendant combien de temps encore les victimes de ces allégations d’atrocités commises au Darfour devront-elles souffrir en silence ou attendre que leur tourment soit reconnu par des résultats concrets? s’est-elle impatientée.

Elle a indiqué qu’en dépit de la résolution 1593 (2005), le Gouvernement du Soudan refuse non seulement de coopérer avec la Cour, mais la dénonce aussi publiquement en formulant des allégations sans fondement dans le but, a-t-elle déploré, de détourner l’attention des véritables enjeux et de son échec à honorer ses obligations.  Et de telles intransigeances ont même été formulées devant le Conseil de sécurité où les discours respectueux sont censés prévaloir, a-t-elle déploré.

Aujourd’hui, a affirmé Mme Bensouda, « je veux rassurer les victimes au Darfour que mon Bureau ne les a pas oubliées, ni abandonnées ».  Elle a rappelé que les preuves rassemblées avaient permis d’émettre des mandats d’arrêt contre cinq suspects.  Des progrès notables ont été réalisés pour rassembler d’autres éléments de preuve, grâce, notamment, à la coopération d’un certain nombre d’États et au « sacrifice » de nombreuses personnes.

Elle a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des mesures concrètes face à l’échec des États concernés à arrêter et à transférer à la CPI les suspects liés à la situation au Darfour, lorsque ces derniers se trouvent sur leur territoire.  Elle s’est dite encouragée par les efforts déployés par certains de ses membres, y compris des membres permanents, pour trouver une issue à l’impasse, avant de citer les noms des cinq personne qui sont l’objet d’un mandat d’arrêt, à savoir: MM. Omar El-Béchir, Ahmad Harun et Abdel Hussein, tous trois de hauts représentants du Gouvernement, M. Ali Kushayb, un dirigeant militaire, et M. Abdallah Banda, un dirigeant de la rébellion. Ces personnes, a-t-elle rappelé, sont accusées d’avoir commis de multiples crimes contre l’humanité et crimes de guerre.

La Procureure a ensuite indiqué que les enquêtes menées par le Bureau avaient enregistré des avancées notables grâce au témoignage de témoins supplémentaires.  Face au besoin de financement supplémentaire, elle a appelé le Conseil de sécurité à renforcer l’appui financier accordé par l’ONU à son Bureau.  Elle l’a également engagé à faciliter un dialogue entre le Bureau et le Gouvernement du Soudan, notamment pour discuter de l’envoi de missions d’enquête au Darfour.

Poursuivant, Mme Bensouda a fait savoir que la Chambre préliminaire II de la CPI avait initié des procédures en vertu de l’Article 87(7) du Statut de Rome, l’Ouganda et le Tchad n’ayant pas arrêté et transféré M. El-Béchir lors de ses visites officielles dans ces pays en novembre et en décembre 2017, respectivement.  Ces deux pays avaient déjà été renvoyés par la CPI au Conseil de sécurité pour avoir échoué à l’arrêter dans le passé, mais aucune action n’avait été prise.  Cette situation, a-t-elle dénoncé, est « intenable », et le Conseil doit assumer ses responsabilités et prendre des actions appropriées suite à toute notification émanant de la Cour concernant les États qui ne se plient pas à la règle.  Elle a ensuite indiqué que des procédures sont également en cours concernant l’échec de la Jordanie à appréhender M. El-Béchir en mars 2017, rappelant que la Chambre préliminaire avait déjà décidé de renvoyer cette situation au Conseil de sécurité.  Le statut officiel de M. El-Béchir ne justifie en rien l’échec d’un État Partie à arrêter et à transférer un suspect qui est l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la CPI, a-t-elle souligné, avant d’indiquer que des audiences sont prévues les 10, 11, et 12 septembre 2018.  Elle s’est également dite encouragée par le fait que l’Union africaine ait notifié la Chambre préliminaire de son acceptation de l’invitation à soumettre ses observations, d’autant plus que 35 de ses 55 membres sont parties au Statut de Rome.

La Procureure a aussi noté que la question des immunités officielles des personnes qui sont l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI avait été débattue lors du Sommet de l’Union africaine, en janvier 2018, et a salué les efforts déployés par l’Union africaine pour interagir de manière constructive avec la Chambre préliminaire sur cette question.

Mme Bensouda a ensuite salué les efforts continus des parties impliquées dans le processus de paix au Darfour, s’inquiétant toutefois des accrochages intermittents qui continuent d’y être signalés, notamment dans le Jebel Marra.  Elle a souligné que la paix et la stabilité ne pourront être rétablies au Darfour qui si l’on répond aux causes sous-jacentes du conflit, notamment en mettant un terme à l’impunité et en rendant justice aux victimes.  Les efforts collectifs allant dans ce sens se poursuivront, a-t-elle assuré.

Elle a ensuite engagé le Conseil de sécurité à jouer un rôle plus actif, et à appuyer les enquêtes de son Bureau en en facilitant le financement par l’ONU et en l’aidant à obtenir la coopération du Soudan.  Elle l’a aussi appelé à fournir son appui pour assurer l’arrestation et le transfert des suspects du Darfour.

La Procureure a averti que « la persistance du statu quo actuel ne fera que saper davantage la confiance du public envers la justice pénale internationale au Darfour, ainsi qu’envers le Conseil de sécurité ».  Nous devons travailler ensemble, dans le cadre de nos mandats respectifs pour assurer la pleine mise en œuvre de la résolution 1593 (2005), a-t-elle souligné.

Mme SUSAN JANE DICKSON (Royaume-Uni) a dit être encouragée de voir que les tensions ont baissé au Darfour, à l’exception des heurts au Jebel Marra où le Gouvernement du Soudan empêche la MINUAD d’accéder.  Elle a noté que les retours des populations chez elles sont parfois de courte durée du fait des activités de groupes et milices armés.   

Elle a déploré la persistance de la violence sexuelle qui affecte surtout les femmes.  La représente a dit que l’absence de progrès dans le processus de paix est une source de déstabilisation, c’est pourquoi toutes les parties doivent s’engager en faveur de la paix.

En adoptant la résolution 1593 (2005), le Conseil de sécurité s’était engagé à appuyer les actions du Bureau de la Procureure.  C’est pourquoi il faut que tous les États coopèrent avec lui.  Une réunion en formule Arria est d’ailleurs prévue le 6 juillet prochain, convoquée par les Pays-Bas notamment, afin de tabler sur l’appui à apporter à la CPI. 

Pour le Royaume-Uni, le Conseil de sécurité doit aussi envisager d’engager des actions pour faire face aux manquements de certains États Parties au Statut de Rome vis-à-vis de la Cour.  Le Royaume-Uni continue d’exprimer ses frustrations de voir que des fugitifs, comme le Président soudanais Omar El-Béchir, continuent de se rendre dans d’autres pays sans aucune contrainte. 

Elle a rappelé que toutes les Parties au Statut de Rome doivent remplir leur devoir et, à défaut, expliquer les raisons de leur manque de coopération.  Elle a terminé en félicitant le Bureau de la Procureure pour le travail abattu.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a estimé opportun de rappeler que le cap du Conseil de sécurité doit être clair, celui de la lutte contre l’impunité des crimes commis au Darfour.  C’est indispensable pour toute stabilisation à long terme au Darfour et au Soudan, a-t-elle argué.  Elle a noté que l’amélioration globale de la situation sécuritaire ouvre un espace pour une telle stabilisation, ce qui est un développement encourageant.  Il reste néanmoins de nombreux défis à relever, comme le cas du Jebel Marra où les populations continuent de souffrir.  Selon la France, « trop de femmes sont encore victimes de violences sexuelles au Darfour », et il faut également rester attentif au sort des populations déplacées du Darfour, environ deux millions pour lesquelles des solutions durables doivent être trouvées.  Cela nécessite de poursuivre des efforts pour faire cesser les combats et les violences contre les civils, en particulier au Jebel Marra, en parvenant à un accord de cessation des hostilités.

La France rappelle une fois de plus l’importance de l’obligation de coopération avec la Cour, en conformité avec les résolutions adoptées par le Conseil.  Cela vaut pour la mise en œuvre du mandat d’arrêt à l’égard du Président El-Béchir, et à l’égard des quatre autres suspects identifiés par la Cour.  « La France refuse de voir se banaliser le refus de coopération de la part d’États Membres des Nations Unies, à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’États Parties au Statut de Rome. »  Mme Gueguen a souligné que cette obligation incombe au premier chef au Soudan qui doit mettre à exécution les mandats d’arrêt contre ses ressortissants pour des faits commis sur son territoire, et coopérer avec la Cour comme l’exige la résolution 1593 (2005).  Selon elle, la responsabilité de ce Conseil est claire.  « Nous nous devons de donner suite aux demandes, légitimes, de la CPI afin de pouvoir accomplir pleinement son mandat. »  Le Conseil doit rendre effective la coopération avec la CPI et veiller à ce qu’il soit procédé à l’exécution des mandats d’arrêt.  Dans cet état d’esprit, la France réitère sa proposition visant à ce que les États dont la Cour a constaté qu’ils manquent à leur obligation de coopération soient invités à s’exprimer devant le Conseil de sécurité.  « Il reviendra ainsi au Conseil de déterminer, sur la base de cet échange, des suites à donner. »

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a dénoncé le ton employé par la Procureure à l’égard de « l’un des dirigeants les plus respectés » du continent africain.  On peut se douter de l’émoi qui aurait été suscité si elle avait parlé en de tels termes d’un dirigeant d’une autre région du monde.  « En tant qu’Africain, cela m’attriste particulièrement, et nous restons hantés par cette politique de deux poids, deux mesures », a-t-il affirmé.

Le représentant a ensuite appelé à suspendre les procédures en cours contre le Président Omar El-Béchir et a exhorté le Conseil de sécurité à revenir sur le renvoi de cette affaire.

Il a estimé que le dossier est « si faible », que cela ne fait pas sens de vouloir le maintenir.  De plus en plus d’informations se font jour qui viennent renforcer cette conviction, et cela ne fera que porter atteinte à la crédibilité du Conseil, a–t-il dit.  En outre, l’évolution récente vient souligner la nécessité, pour le Conseil, de réexaminer avec sérieux sa position sur cette question.

Le représentant a insisté sur le rôle constructif joué par le Soudan en matière de lutte contre le terrorisme, la traite des êtres humains et la migration illicite, ainsi que pour traiter de tout un éventail de questions affectant la paix et la sécurité régionales.  Il a aussi salué la levée des sanctions imposés au Soudan par les États-Unis, il y a deux décennies.

De plus, a-t-il enchaîné, la situation du Darfour a continué d’être caractérisée par des progrès, en raison notamment de la diminution des hostilités entre le Gouvernement soudanais et les forces rebelles et des violences intercommunautaires, ainsi que de l’amélioration continue de l’accès humanitaire dans l’ensemble de la région.

M. Alemu a appelé à adopter un changement de paradigme pour ce qui est de la situation au Darfour, le Gouvernement du Soudan ayant démontré, selon lui, sa volonté politique à répondre aux défis de la région et du pays dans son ensemble.  Il a reconnu qu’il reste beaucoup à faire pour répondre aux causes sous-jacentes du conflit au Darfour et a engagé le Gouvernement soudanais à redoubler d’efforts en la matière.

De son côté, a-t-il ajouté, la communauté internationale doit faire pression sur les mouvements armés pour les contraindre à négocier avec sérieux afin de mettre un terme aux souffrances de la population.  Au vu du rôle constructif du Gouvernement soudanais, il est plus que temps pour le Conseil de sécurité de réexaminer avec sérieux la question du Soudan et de la CPI, a-t-il insisté.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a plaidé en faveur du retour des déplacés du Darfour dans des conditions sûres et en conformité avec le droit international.  Il a renouvelé son appui à la CPI et au Bureau de la Procureure, en lançant un appel aux États pour qu’ils fassent preuve de la coopération nécessaire, à commencer par les autorités nationales directement concernées.  Il a, à ce propos, rappelé aux autorités soudanaises leur devoir d’exécuter les mandats d’arrêt délivrés par la Cour. 

De plus, le représentant a déploré que certains États Parties au Statut de Rome n’aient pas rempli leurs obligations de coopérer dans les enquêtes et procédures qui relèvent de la compétence de la CPI, en particulier celle de livrer les personnes objet d’un mandat d’arrêt. 

Les cas de non-application des décisions de la Cour sapent tant sa crédibilité que celle du Conseil de sécurité quand celui-ci ne fait rien pour traiter ces situations, a relevé le représentant.  C’est pourquoi, a-t-il ajouté, le Pérou se félicite de l’initiative de la Nouvelle-Zélande, datant de décembre 2016, pour aborder cette problématique.

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a salué l’amélioration de la situation au Darfour, grâce notamment à l’appui de la communauté internationale et du Gouvernement du Soudan.  Il a rappelé par exemple le succès de la campagne de collecte d’armes initiée par le Gouvernement soudanais.  Ces progrès montrent que le Gouvernement est prêt à assumer ses responsabilités, et la Chine espère que la communauté internationale est également disposée à reconnaître le rôle de file du Gouvernement soudanais sur les questions du Darfour, tout en lui apportant le soutien nécessaire.

La position de la Chine sur la CPI reste inchangée.  « La Chine souhaite que la CPI respecte pleinement la souveraineté judiciaire du Soudan et invite le Conseil de sécurité à être attentif aux opinions de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes sur la question du Darfour. » 

« La Chine estime également qu’un chef d’État bénéficie de l’immunité due à son rang. »  Malgré la convocation d’un chef d’État devant la CPI, ce dernier ne perd pas son immunité, a-t-il affirmé.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a fait part de sa frustration compte tenu du fait que l’ensemble des mandats d’arrêt n’ont pas été exécutés et que les suspects sont toujours en liberté.  Elle a appelé le Gouvernement du Soudan à coopérer pleinement avec la Cour, mais aussi à prendre des mesures supplémentaires pour rendre justice aux victimes des crimes odieux commis au Darfour.  Elle a jugé profondément préoccupant que le Président du Soudan puisse continuer d’effecteur des déplacements à l’étranger, y compris dans des États Parties au Statut de Rome qui, a-t-elle souligné, ont le devoir de coopérer avec la CPI.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à débattre des moyens à employer face à un tel manque de coopération.

La représentante s’est ensuite félicitée de la diminution du niveau de violence au Darfour, notant que les accrochages avec l’Armée de libération du Soudan-Abdul Wahid sont limités au Jebel Marra.  Elle s’est toutefois inquiétée des attaques répétées contre des villages et des civils, notant par ailleurs que la violence sexuelle et sexiste demeure un problème sérieux au Darfour.  Elle a appelé à répondre aux causes sous-jacentes du conflit, notamment en luttant contre la pauvreté, l’inégalité entre les sexes, l’accès inéquitable aux services sociaux, les changements climatiques, les problèmes liés à la propriété foncière et les abus des droits de l’homme.  En outre, la création d’institutions d’état de droit demeure critique pour faire face aux défis qui persistent.  La déléguée a ensuite appelé à fournir à la CPI un appui financier adéquat pour lui permettre de s’acquitter de son mandat.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a noté les progrès réalisés dans les enquêtes et en même temps les difficultés que rencontre le Bureau de la Procureure.  Il s’est inquiété de la durée excessive de l’enquête pour une affaire concernant le Darfour, soulignant que cela aboutit à diluer les responsabilités. 

Le délégué a exprimé son soutien à la CPI et a rappelé que le Conseil de sécurité, en la saisissant de la situation au Darfour, lui avait demandé non seulement d’activer sa compétence pour juger les personnes, mais aussi d’appuyer la promotion de l’état de droit, la protection des droits de l’homme et la lutte contre l’impunité.  Il a donc salué le Bureau de la Procureure en ce qu’il continue à informer le Conseil de sécurité sur les travaux de la Cour pour renforcer les institutions judiciaires au Soudan.  Et de saluer aussi la Cour pour ses efforts qui s’ajoutent à ceux de la communauté internationale pour renforcer les processus politiques dans ce pays.

Le développement et l’avenir de la justice pénale internationale sont étroitement liés aux concepts de coopération et de complémentarité des États, a poursuivi M. Llorentty Solíz, en soulignant le caractère complémentaire de la Cour par rapport aux capacités souveraines de chaque État qui sont les premiers à assumer la responsabilité de l’administration de la justice sur leur territoire.

En conclusion, le représentant a demandé au Conseil de sécurité, et aux États Membres de l’ONU en général, d’optimiser le coût que supporte la CPI pour mener ses enquêtes et procédures.  Il ne peut y avoir de dialogue sincère tant que certains pays exigent la rigueur de la justice mais ne remplissent pas eux-mêmes leurs obligations internationales, a-t-il avancé.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a adhéré à la position de l’Union africaine sur « la façon dont la CPI traite de quelques questions africaines, et en particulier la procédure relative au Président du Soudan, M. Omar El-Béchir ».  La Cour, a-t-il insisté, n’est pas compétente pour inculper un président dans le plein exercice de ses fonctions, et il faut respecter le droit international relatif à l’immunité des hauts fonctionnaires des États. 

Ce n’est pas un hasard si plusieurs pays, dont certains sont même parties au Statut de Rome, ne coopèrent pas avec la CPI à ce sujet, a-t-il relevé.  Le fait que tant de temps ait passé depuis le début du processus prouve bien que celui-ci est dénué de fondement.

Par ailleurs, le représentant a salué « les grandes avancées politiques » au Darfour, qui améliorent la sécurité et la stabilité au Soudan.  Ce pays joue selon lui un rôle très actif et positif dans la lutte contre la violence sectaire et le terrorisme.

Il a conclu que la communauté internationale doit appuyer, et non freiner, la dynamique impulsée par le Document de Doha pour la paix au Darfour.   

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a rappelé la résolution adoptée au cours du vingt-deuxième Sommet de la Ligue des États arabes en 2010, en rapport à l’affaire liée au Président soudanais Omar El-Béchir.  Le représentant a ainsi dit que cette résolution rejetait « toute politisation de la justice internationale ou toute tentative de s’en servir dans le but de déstabiliser des États ». 

Il a rappelé que ce Président est encore en exercice et jouit donc de l’immunité due à son rang, et c’est d’ailleurs pourquoi des organisations internationales telles que la Ligue des États arabes, l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et l’Union africaine n’ont pas approuvé la démarche de la CPI.

Le représentant a aussi souligné que la stabilité grandissante au Darfour est un élément positif et que le Conseil de sécurité devrait tenir compte de cette réalité alors qu’elle examine la situation au Darfour.  

Il a enfin rappelé l’importance du respect de la souveraineté des États.

Des centaines de milliers de personnes ont été tuées pendant le conflit au Darfour, a noté M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis).  Des millions de personnes déplacées ne peuvent toujours pas regagner leur foyer et risquent d’être attaquées dans les camps de déplacés.  Il s’est préoccupé du fait que des violences intercommunautaires éclatent aussi en dehors du Jebel Marra, pour ensuite avertir que les mauvaises récoltes et les pénuries de carburant risquent de provoquer une reprise des violences.  Il a appelé le Gouvernement soudanais à faire preuve de modération et à autoriser la MINUAD, les travailleurs humanitaires et les médias à accéder aux zones où les civils sont les plus vulnérables.  De plus, a-t-il poursuivi, il est honteux que la violence sexuelle, notamment commises par le personnel en uniforme, persiste et soit niée par le Gouvernement soudanais en dépit d’éléments de preuves concrets.  « Cette culture d’impunité doit cesser », a-t-il insisté.

Le représentant s’est en revanche félicité des progrès réalisés par le Gouvernement soudanais pour mettre un terme aux bombardements aériens, tout en reconnaissant que des progrès supplémentaires sont nécessaires.  Il a salué l’arrestation, par les autorités soudanaises, de l’ancien commandant janjaouid, s’inquiétant toutefois du manque de transparence de son procès militaire.  Il a dénoncé le fait que les suspects qui sont l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI restent en liberté.  Il s’est notamment dit déçu que le Président El-Béchir continue de se déplacer à l’étranger pour des visites officielles.  Qu’il soit ainsi reçu ne contribue qu’à diminuer l’ampleur des chefs d’accusation qui pèsent contre lui, s’est-il inquiété, notant qu’au Cambodge et en Sierra Leone, les dirigeants accusés d’avoir commis des crimes similaires avaient été contraints de se présenter à la justice.  « Un Soudan qui respecte l’état de droit, les droits de l’homme et qui brise le cycle de l’impunité sera prospère et pacifique », a–t-il affirmé.

Le représentant s’est par ailleurs inquiété des activités de la CPI eu égard à la situation en Afghanistan, notamment en l’absence d’un renvoi par le Conseil de sécurité.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a salué les engagements du Soudan en faveur de la stabilité du Darfour et sa coopération avec l’Union africaine et l’ONU.  Ces résultats n’auraient pu être atteints sans le respect de l’appropriation nationale et de la souveraineté et indépendance du Soudan, a expliqué le délégué. 

Il a invité le Soudan à travailler en bonne intelligence avec la MINUAD et l’équipe de pays des Nations Unies en vue de faire prospérer la paix, faire face aux causes profondes des conflits et parvenir à la paix et la prospérité pour tous les Soudanais.

Pour le Kazakhstan, la seule voie vers une paix durable au Darfour est le Document de Doha pour la paix au Darfour, et c’est pourquoi la CPI doit se joindre aux efforts régionaux et internationaux pour atteindre les résultats visés par ce document, tout en soutenant les capacités du Soudan à promouvoir l’état de droit, faire face à l’impunité et protéger les droits de l’homme. 

Le Kazakhstan invite également la CPI à tenir compte de la position unifiée de l’Union africaine sur la question du Darfour et à établir un dialogue avec le Comité ministériel à composition non limitée des ministres des affaires étrangères de l’Union africaine sur la CPI.

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) s’est dit préoccupé par les rapports faisant état d’affrontements, d’attaques contre des villages et de bombardements aériens dans la zone du Jebel Marra, et par leur impact sur la population civile.  Même si le nombre de personnes déplacées au Darfour a diminué, « le problème est toujours là et requiert toute notre attention », a-t-il souligné.  Compte tenu du manque de soins, d’écoles et d’emplois, il faut empêcher tout retour forcé.

S’inquiétant encore de la situation des droits de l’homme au Darfour, le représentant a recommandé de surveiller de près la violence sexuelle et sexiste, ainsi que les détentions arbitraires.  Le retrait projeté de la MINUAD devrait être compensé par une présence accrue des équipes de pays des Nations Unies et une plus grande coopération avec toutes les parties prenantes.

En conclusion, a assuré M. Lewicki, la Pologne appuie le mandat de la CPI au Darfour. 

M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) a noté avec satisfaction la situation de paix et de stabilité relative que connaît la région du Darfour, après plusieurs années de crise.  La Côte d’Ivoire invite la communauté internationale à œuvrer pour une consolidation de ces progrès et soutient le processus politique en cours.  Elle encourage le Gouvernement soudanais à redoubler d’efforts, en vue de s’attaquer davantage aux causes profondes du conflit.

Fermement attachée au respect des droits de l’homme, la Côte d’Ivoire est d’avis que la lutte contre l’impunité est un aspect important du processus de réconciliation nationale et que la recherche d’une paix durable reste tributaire d’une reddition de comptes pour les personnes coupables de crimes graves et de violation des droits de l’homme. 

À cet égard, le représentant a réitéré l’appréciation de sa délégation des efforts du Bureau de la Procureure qui encourage les autorités soudanaises à faire la lumière sur les allégations de violations des droits de l’homme et de traduire les responsables de ces crimes devant les juridictions compétentes.

Compte tenu des difficultés toujours rencontrées par le Gouvernement soudanais pour mettre en place des institutions garantes de l’état de droit, de la justice et de la sécurité, la Côte d’Ivoire encourage la communauté internationale à apporter son aide à la mise en place d’institutions fortes capables de relever ces défis. 

Elle félicite le Gouvernement soudanais pour les avancées notables enregistrées en termes de sécurité et de stabilité.  Elle salue en outre la prise en compte de ces progrès dans la réorientation de l’action des Nations Unies, à l’exception de la zone du Jebel Marra, vers la consolidation de la paix, le développement et le relèvement.

Réaffirmant son plein soutien à la CPI, M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a regretté que 13 ans après avoir déferré la situation au Darfour devant la Cour, aucun des suspects n’ait été traduit en justice.  Il a rappelé que les charges contre eux vont du génocide aux crimes de guerre et crimes contre l’humanité, en citant notamment le cas d’Abdallah Banda, accusé de l’attaque contre la Mission de l’Union africaine ou Soudan du Nord qui a couté la vie à 12 Casques bleus. 

Sa délégation déplore que le Gouvernement soudanais n’ait pas arrêté tous ces suspects pour les renvoyer devant la CPI, mais également que certains d’entre eux, y compris le Président soudanais Omar El-Béchir, puissent voyager sans entraves dans certains pays.  « Encore plus désolant est le fait que certains États Parties n’ait pas arrêté le Président soudanais lorsqu’il s’y est rendu », a estimé le représentant qui a appelé tous les États Parties à respecter leurs obligations sous la résolution 1593 (2005), à savoir de pleinement coopérer avec la CPI.

Le deuxième point évoqué par M. van Oosterom a trait au principe de responsabilité qui n’est toujours pas respecté au Darfour, rendant hommage au passage aux familles de victimes présentes aujourd’hui dans la salle du Conseil de sécurité.  Constatant la baisse récente de la violence sur place, il s’est dit néanmoins préoccupé par les violations des droits de l’homme et l’impunité qui y sont toujours présentes. 

Pour sa délégation, c’est au Gouvernement soudanais et au Conseil de sécurité de faire respecter ce principe, car « aucune paix ne peut se construire sur l’impunité ».

Pour que la Cour puisse fonctionner, elle doit pouvoir compter sur la coopération des États et des organisations régionales et internationales, a poursuivi le représentant qui a regretté qu’à ce jour cela n’est toujours pas le cas.  « Il est inacceptable que les victimes des crimes internationaux commis au Darfour attendent depuis 13 ans »; « il est inacceptable que les victimes des crimes internationaux commis au Darfour attendent que le Conseil fasse en sorte que ses propres décisions soient correctement appliquées » et « il est inacceptable que les victimes des crimes internationaux commis au Darfour attendent toujours que justice soit faite », s’est indigné le représentant. 

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a noté que le rapport de la Procureure de la CPI n’avait pas beaucoup évolué, celui-ci contenant surtout un inventaire des déplacements à l’étranger effectué par le Président soudanais Omar El-Béchir, ainsi que des citations du Secrétaire général et des comptes rendus de séances du Conseil de sécurité.

Il a relevé que la CPI continuait de s’adresser aux États pour arrêter les suspects contre lesquels elle a émis des mandats d’arrêt, notamment le Président soudanais Omar El-Béchir, et cela dans le respect de la résolution 1593 (2005).  Or, a-t-il fait observer, ce texte stipule que les États qui ne sont pas parties au Statut de Rome ne sont pas requis de répondre à ses appels, une précision réclamée par les États-Unis.

Il a noté que l’immunité des représentants était une des normes les plus importantes du droit international coutumier et que l’immunité personnelle des plus hauts représentants de l’État ne prévoyait pas d’exception eu égard au droit commun.  Il a noté que plusieurs États refusaient d’exécuter le mandat de la CPI, mais n’étant pas partie au Statut de Rome, leurs actions étaient donc en conformité avec la résolution 1593 (2005).  La situation qui en découle est que la confiance en la CPI faiblit inexorablement et que la Cour s’avère être un organe qui ne peut s’acquitter des tâches que lui a conférées le Conseil de sécurité, a-t-il affirmé.

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a dit que son pays n’avait aucun devoir à l’égard de la CPI, puisque celui-ci n’était pas partie au Statut de Rome.  Il a précisé que son pays était du reste engagé pour la lutte contre l’impunité dans l’optique de la stabilité du Darfour, « une région en proie à un confit tirant à sa fin ».  Il a dit que le suspect Abdul Hussein est un nom entendu aujourd’hui pour la première fois par sa délégation. 

Il a aussi rappelé que l’Union africaine avait toujours été engagée dans la lutte contre l’impunité, comme le montre l’adhésion de la majorité de ses membres au Statut de Rome, même si ces États ont toujours critiqué les pratiques de la Cour, notamment celles du Bureau de la CPI. 

Selon le représentant, l’idée de création d’un régime pénal international en 2002 est aujourd’hui mise à mal par la « corruption ambiante ».  « Ce régime juridique récent a fait montre d’une détestable sélectivité. »  L’Union africaine a ainsi réagi en voyant que le Bureau de l’ancien Procureur avait concentré ses poursuites sur des pays africains. 

C’est ainsi que la Cour a essayé de faire interpeller un chef d’État en fonctions, une chose jamais vue auparavant dans le monde, a-t-il dit.  Selon le représentant du Soudan, le travail de la Cour est entaché de politisation et de sélectivité ainsi que l’ont montré des télégrammes de Wikileaks.  « Il a affirmé que l’ancien Procureur Louis Moreno Ocampo est un homme corrompu qui a plongé la CPI dans l’embarras. » 

Le représentant a en outre fait part d’une polémique sur la légalité et la légitimité de l’Article 13 b du Statut de Rome qui prévoit la saisine de la Cour par le Conseil de sécurité.  Il a également rappelé qu’en janvier dernier, le Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine avait demandé un avis juridique à la Cour internationale de Justice (CIJ) au sujet de l’immunité des chefs d’État.

Pour le Soudan, les différents rapports sur le Darfour semblent peu clairs et contiennent des informations erronées, a estimé le délégué soudanais.  Il a par exemple parlé de « mensonges » au sujet de bombardements dans le Jebel Marra ou encore de l’usage d’armes chimiques. 

Il a, du reste, invité le Conseil de sécurité à demander des comptes au Bureau de la Procureure.  L’ingérence de la Cour dans les affaires intérieures soudanaises met en danger la stabilité au Soudan et au Darfour et incite les groupes armés à commettre davantage d’exactions contre les populations civiles, a dit le représentant. 

Le délégué a estimé que le Bureau de la Procureure est sorti de son mandat dans ce rapport censé examiner la question du Darfour.  Le paragraphe 33, par exemple, évoque des manifestations à Khartoum et des arrestations de manifestants à travers le pays. 

 « Il ne faut pas se leurrer, la justice internationale abonde en politiques de deux poids, deux mesures », a insisté le représentant de l’Éthiopie lors d’une reprise de parole.  Mais, a-t-il dit, la position de son pays ne doit pas être interprétée comme cherchant à favoriser l’impunité.  L’Union africaine est d’ailleurs la seule organisation au monde dont la Charte prévoit la possibilité de s’ingérer dans les affaires internes des États membres en cas de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide.

Ayant commis une erreur une fois, le Conseil semble persister à ne pas vouloir rectifier l’erreur commise, alors qu’il ne dispose d’aucun argument valable, a-t-il ensuite regretté.  Il a aussi précisé que les objections formulées à l’encontre de la Procureure étaient en lien avec la forme et le style de sa présentation, pas avec sa substance.  La faute revient au Conseil, pas à la Procureure, a-t-il insisté, avant de réclamer le retrait du renvoi.  Il a par ailleurs appuyé les préoccupations du Soudan au sujet des propos du Sénégal relayés par les Pays-Bas.

À son tour, la Procureure de la CPI, Mme Fatou Bensouda, a noté que « c’est la première fois en deux ans qu’elle répond à l’intervention du Soudan », mais qu’elle s’y voyait contrainte « en raison du ton hostile et irrespectueux de la délégation » qui de surcroît la visait personnellement.  L’ironie veut que ce soit au sein même du Conseil de sécurité, qui a renvoyé l’affaire du Darfour à la CPI, qu’elle se rapproche le plus d’un dialogue avec le Soudan.  Elle a invité ce pays à dialoguer sur la remise de tous les suspects à la CPI.

La CPI et son Bureau sont entièrement indépendants et veillent au respect de procédures équitables, a assuré Mme Bensouda, regrettant notamment les accusations de conspiration sans fondement.  Ce manque de respect vis-à-vis du Conseil, de la CPI et des victimes témoigne également d’un mépris de la justice internationale, a-t-elle déploré.  Elle a espéré que les efforts de la CPI et de son Bureau permettront de rendre justice aux victimes du conflit au Darfour, soulignant que les preuves impliquant le Président soudanais abondent.

Au lieu de proférer les mêmes accusations et insultes, le Soudan devrait transférer les suspects à Cour pour que la vérité puisse être établie, a recommandé la Procureure.  Elle a notamment incité Khartoum à s’inspirer du procès de Radovan Karadžić par le TPIY, appréhendé 16 ans après la livraison du mandat d’arrêt et condamné l’an dernier à la perpétuité.  « Ne vous arrêtez pas dans votre quête pour la justice.  Je n’arrêterai pas ces efforts, et mon Bureau est déterminé à poursuivre sa mission », a-t-elle conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: la stratégie Informatique et communications de l’ONU marquée par des « progrès impressionnants » mais « au mieux inégaux »

Soixante-douzième session,
47e séance – matin
AG/AB/4286

Cinquième Commission: la stratégie Informatique et communications de l’ONU marquée par des « progrès impressionnants » mais « au mieux inégaux »

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a examiné ce matin l’état d’avancement de la stratégie Informatique et communications de l’ONU, marqué par des « progrès impressionnants » mais « au mieux inégaux », deux ans et demi après son lancement.

La stratégie vise à uniformiser la prestation de l’ensemble des services informatiques et des communications de l’ONU, dont 1 300 sites Web, et s’articule autour des axes suivants: transformer en cinq ans l’environnement technologique de l’Organisation; procéder à une modernisation structurée des systèmes d’information et de communication dans tout le Secrétariat; optimiser les ressources; mettre en place des mesures de gouvernance solides; et donner davantage de place à l’innovation dans l’Organisation.

Comme la stratégie s’inscrit désormais dans ses propositions pour réformer la gestion de l’ONU, le Secrétaire général juge nécessaire de créer un bureau de l’informatique et des communications unifié rattachant la Division de l’informatique et des communications du Département de l’appui aux missions à l’actuel Bureau, qui relève du Département de la gestion.  Le nouveau bureau serait une entité tout à fait distincte. 

Deux ans et demi après le lancement de la stratégie, les États-Unis ont salué des « progrès impressionnants » mais, selon le Groupe des 77 et la Chine, « au mieux inégaux ».  Pourquoi, s’est, par exemple, demandé le Groupe, le Secrétariat de l’ONU semble avoir tant de difficultés à fixer des objectifs et à créer des mécanismes de contrôle qui pourraient permettre à l’Organisation de veiller à ce que le « business plan » de chaque département s’aligne avec la stratégie et que la mise en œuvre soit conforme aux résolutions pertinentes?  Relevant, à leur tour, un « manque de cohérence et de conformité », les États-Unis ont appelé le Secrétariat de l’ONU et tout le système des Nations Unies à coopérer davantage pour parvenir à une plus grande efficacité.    

Étant donné que les technologies de l’information et des communications recoupent des fonctions transversales qui sous-tendent les mandats et activités de base de l’Organisation, les États-Unis ont salué la dernière proposition du Secrétaire général, estimant que la création d’une entité unique fondée sur une approche holistique contribuerait à améliorer la qualité des services rendus aux utilisateurs. 

Cette structure unifiée, ont-ils affirmé, permettrait à l’ONU de capitaliser sur les gains déjà réalisés et d’accélérer la mise en œuvre des éléments restants de la stratégie.  Sur les 20 projets de la stratégie, 8 projets sont en effet toujours en cours d’exécution, sans oublier que sur les 37 recommandations faites en 2012 par le Comité des commissaires aux comptes (CCC), 15 n’ont pas encore été complètement intégrées.

Avant de clôturer la séance, le Président de la Cinquième Commission, M. Michel Tommo Monthe, du Cameroun, a rappelé qu’il ne reste plus que 11 jours pour boucler le budget des opérations de maintien de la paix.  « Il faut utiliser ce temps à bon escient sinon c’est le temps qui jouera contre nous », a lancé le représentant en guise « d’encouragement ».

La prochaine réunion de la Cinquième Commission sera annoncée dans le Journal des Nations Unies

PROJET DE BUDGET-PROGRAMME POUR L’EXERCICE BIENNAL 2018-2019

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’état d’avancement de l’application de la stratégie Informatique et communications de l’ONU (A/72/7/Add.51)

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné ceux du Secrétaire général (A/72/755/Rev.1) et du Comité des commissaires aux comptes (CCC) (A/72/151).  Le CCQAB rappelle que dans le cadre de la réforme de la gestion, le Secrétaire général a fait des propositions sur l’établissement d’un bureau de l’informatique et des communications unifié qui auraient pour effet de rattacher la Division de l’informatique et des communications du Département de l’appui aux missions à l’actuel Bureau, qui relève du Département de la gestion.

Le nouveau bureau serait une entité distincte qui ferait rapport au Secrétaire général adjoint chargé du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité et au Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel.  Le Secrétaire général propose également de transférer les fonctions du Bureau qui appuient les opérations à New York à la future division de l’administration du Département de l’appui opérationnel.

Le Comité consultatif s’est félicité de la fusion proposée et a recommandé de conserver, au Bureau de l’informatique et des communications réorganisé, les fonctions d’appui informatique du Siège.  Pour lui, il faut maintenir à l’examen la structure selon laquelle le bureau relèverait à la fois du Secrétaire général adjoint chargé du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité et du Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, car elle pourrait présenter quelques difficultés sur le plan de la gestion.

La stratégie Informatique et communications, rappelle le CCQAB, est exécutée au moyen de 20 projets stratégiques dont 8 projets sont toujours en cours d’exécution.  Le Comité consultatif regrette donc que le rythme d’application de la stratégie se soit ralenti.  Il accueille favorablement la mise en œuvre du plan d’action en 10 points pour le renforcement de la sécurité informatique et l’adoption d’une feuille de route à plus long terme en matière de sécurité informatique destinée à faire face à l’évolution des risques, mais juge préoccupantes la lenteur avec laquelle l’environnement informatique de l’ONU est décloisonné et l’augmentation des risques que le Secrétariat court de ce fait.

Le CCQAB recommande donc à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général: d’établir au Secrétariat un dispositif de contrôle centralisé placé sous l’autorité du Directeur général de l’informatique et des communications et de veiller à ce que les dispositions sur l’organisation du Bureau de l’informatique et des communications soient intégralement appliquées; et d’instituer des mécanismes de délégation de pouvoir et des dispositifs d’application du principe de responsabilité pour tous les aspects de la gestion de la sécurité informatique, y compris en prévoyant des mesures de résultats dans les contrats de mission des hauts fonctionnaires qui aideront à évaluer la performance de ceux-ci au regard de ces activités essentielles.

Le Comité consultatif se dit aussi profondément préoccupé par le fait que le regroupement des moyens informatiques et des moyens de communication n’ait pas progressé.  Il rappelle que la coopération des dirigeants est essentielle à la bonne exécution de la stratégie et compte qu’ils aideront le Directeur de l’informatique et des communications à décloisonner et à regrouper les ressources.  Il espère également que le Secrétaire général usera de son autorité pour faire en sorte que tous les départements et entités du Secrétariat respectent l’appel de l’Assemblée générale visant à ce que toutes les entités du Secrétariat informent le Directeur général de l’informatique et des communications de toutes les questions qui se rapportent aux activités, à la gestion des ressources, aux normes, à la sécurité, à l’architecture, aux politiques et aux orientations touchant l’informatique et les communications.

Le Comité consultatif dit attendre des propositions concernant la stratégie de gestion des applications qui doit s’appuyer sur des directives claires, en ce qui concerne notamment les fonctionnalités et les domaines devant être gérés de manière centralisée par les pôles applications et ceux pouvant être gérés au niveau local.  Le Comité consultatif s’inquiète en effet du grand nombre d’applications, de systèmes et de sites Web anciens qui continuent de présenter des risques pour la sécurité.  Il prend note de la déclaration du Secrétaire général selon laquelle la migration vers des progiciels normalisés, hébergés de façon centralisée et disponibles à l’échelle mondiale, est le principal moyen de diminuer le nombre d’anciennes applications et d’en consolider les fonctionnalités, ce qui permet en outre d’accroître les économies d’échelle et de renforcer la sécurité et la fiabilité.

Le Comité recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de faire figurer dans son prochain rapport un état des lieux détaillé des anciens systèmes encore en place, ainsi qu’un plan visant à accélérer l’uniformisation et la consolidation des anciens systèmes et sites Web.  Il prend note du fait que l’Organisation a adopté, pour ses applications, un modèle d’hébergement dans le nuage.

Dans son rapport, le Secrétaire général indique que le montant total des ressources demandées pour l’exercice 2018-2019 au titre de l’informatique et des communications s’élève à 1 376,4 millions de dollars, dont 392,5 millions financés par le budget ordinaire; 54,5 millions de dollars imputés sur le compte d’appui; 747,9 millions de dollars imputés sur le budget des missions de maintien de la paix; et 181,5 millions financés par les ressources extrabudgétaires.

En outre, le montant total des ressources approuvées pour le projet Umoja pour 2018-2019 s’élève à 77,6 millions de dollars, ce qui représente une diminution d’un montant 21,4 millions par rapport aux ressources prévues en 2016-2017.  Le Comité consultatif recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de continuer à affiner son analyse.

Il se dit convaincu qu’il est nécessaire de procéder à un état des lieux dans le domaine des technologies de l’information et des communications dans l’ensemble du Secrétariat.  Ainsi, il a demandé au Comité des commissaires aux comptes de procéder à un inventaire complet.  En outre, compte tenu de l’ampleur des ressources consacrées chaque année aux technologies de l’information et des communications, le Comité consultatif recommande à l’Assemblée générale de prier le Secrétaire général d’inclure, dans le projet de budget et dans le rapport sur l’exécution du budget de chaque entité du Secrétariat, des informations sur les dépenses dans le domaine des technologies de l’information et des communications.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. MOHAMED FOUAD AHMED (Égypte) a rappelé ses appels à tous les organes des Nations Unies pour mettre en œuvre la « stratégie Informatique et communications » de l’ONU.  Les progrès, a-t-il commenté, ont été, au mieux, inégaux.  Pourquoi les politiques de délégation de pouvoir et de nomination du personnel chargé de l’information et des communications n’ont pas été élaborées?  Pourquoi, a poursuivi le représentant, les indicateurs de performance liés à la mise en œuvre de la stratégie et dûment inclus dans les contrats de mission des hauts fonctionnaires de l’ONU ne sont pas plus spécifiques?  C’est pourtant un domaine, s’est étonné le représentant, où des indicateurs clairs et objectifs peuvent être articulés pour améliorer l’évaluation et la réalisation des objectifs.

Pourquoi, a encore demandé le représentant, les plans de travail annuel des organes du Secrétariat sur l’information et les communications n’ont pas été préparés de manière cohérente dans toute l’Organisation?  Nous avons du mal à comprendre, a avoué le représentant, pourquoi le Secrétariat semble avoir tant de difficultés à fixer des objectifs et à créer des mécanismes de contrôle qui pourraient permettre à l’Organisation de veiller à ce que le « business plan » de chaque département s’aligne avec la stratégie et que la mise en œuvre soit conforme aux résolutions pertinentes.

Le représentant a appelé le Secrétaire général à relever le taux de mise en œuvre, actuellement faible, des recommandations du Comité des commissaires aux comptes (CCC).  Il a aussi dit attendre du Secrétaire général un état des lieux détaillé des anciens systèmes encore en place, ainsi qu’un plan visant à accélérer l’uniformisation et la consolidation des anciens systèmes et sites Web.

S’agissant d’Umoja, le progiciel de gestion intégré, le représentant a dit attendre des informations supplémentaires sur les mesures prises pour assurer la protection et la confidentialité des données.  Enfin, il a voulu des analyses et des comparaisons sur les économies d’échelle qui pourraient être réalisées dans l’achat des équipements et des services effectués dans le cadre des contrats-cadres.

M. BRIAN CONROY (États-Unis) a rappelé que la stratégie Informatique et communications de l’ONU avait été conçue pour moderniser cette fonction importante, optimiser les ressources informatiques du Secrétariat et promouvoir l’innovation.  Après deux ans et demi de mise en œuvre, M. Conroy a souligné que sa délégation continuait de soutenir les efforts du Secrétaire général pour atteindre les objectifs de son plan quinquennal.  Le représentant a noté que l’Organisation avait réalisé des progrès « impressionnants ».  Malgré les progrès accomplis par le Bureau de l’informatique et des communications et les différents bureaux du Secrétariat, le représentant s’est dit préoccupé par le manque de cohérence dans la mise en œuvre de la stratégie dans l’ensemble du Secrétariat.  Il a appelé ce dernier, ainsi que tout le système des Nations Unies, à coopérer davantage pour parvenir à une plus grande efficacité.  M. Conroy a également encouragé le Secrétaire général à affiner ses projections de coûts de mise en œuvre.

Le représentant a rappelé la proposition de ce dernier de créer un bureau de l’informatique et des communications unifié.  Étant donné que les technologies de l’information et des communications recoupent des fonctions transversales qui sous-tendent les mandats et activités de base de l’Organisation, M. Conroy a estimé que la création d’une entité unique, selon une approche exhaustive, contribuerait à améliorer la qualité des services rendus aux utilisateurs.  Cette structure unifiée, a-t-il affirmé, permettrait à l’ONU de capitaliser sur les gains déjà réalisés et d’accélérer la mise en œuvre des éléments restants de la stratégie.  Elle permettrait également, a-t-il ajouté, de placer la technologie et l’innovation au cœur du fonctionnement de l’ONU.  « Ma délégation demeure engagée à faire entrer pleinement les Nations Unies dans le XXIe siècle, à finaliser sa réforme transformationnelle et à parvenir à limiter les coûts », a conclu M. Conroy.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: La session humanitaire se penche sur le sort des enfants en temps de conflit armé et sur les réponses face aux risques de catastrophes naturelles

Session de 2018,
37e & 38e séances plénières – matin & après-midi
ECOSOC/6931

ECOSOC: La session humanitaire se penche sur le sort des enfants en temps de conflit armé et sur les réponses face aux risques de catastrophes naturelles

« Il y a un proverbe africain qui dit qu’un enfant, c’est mon enfant, que les enfants, ce sont nos enfants », a déclaré le Vice-Président de Conseil économique et social (ECOSOC), M. Jerry Matthews Matjila, à l’entame de la deuxième journée de la session 2018 de son segment humanitaire, qui a vu la tenue de deux discussions de haut niveau. 

Lors de la première, intitulée « Remédier aux conséquences des conflits armés sur les enfants: renforcer les actions afin de répondre à leurs besoins », les intervenants ont fait part des mesures qu’ils ont prises en ce sens et présenté des propositions pour répondre aux besoins des quelque 150 millions d’enfants qui vivent actuellement dans une zone de conflit. 

Mme Mari Maklek, réfugiée sud-soudanaise et fondatrice de « Stand for education », a ainsi mis l’accent sur l’importance primordiale de l’éducation, qui est cependant, selon les termes de Mme Yasmine Sherif, Directrice de « Education cannot wait », « le parent pauvre de la réponse humanitaire globale ».  En effet, les investissements dans l’éducation ne représentant que 3% de celle-ci. 

Le Directeur des opérations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour les régions du Proche et Moyen-Orient, M. Robert Mardini, a, lui, réclamé l’application du droit international.  Il a rappelé que les enfants enrôlés dans des groupes armés et qui sont accusés de crimes doivent être traités « comme victimes de violations et pas comme auteurs de violations ». 

« Le CICR fait son possible pour veiller à ce que les enfants ne soient pas séparés de leurs parents », a-t-il déclaré.  Un point de vue partagé par Mme Henrietta Fore, Directrice exécutive de l’UNICEF, qui a évoqué la distribution de bracelets aux enfants du Soudan du Sud qui se retrouvent déplacés et isolés, en vue de les réunir un jour avec leur famille.  « Être séparé de sa famille est une expérience terrifiante pour un enfant », a-t-elle fait valoir. 

La seconde discussion de haut niveau, intitulée « Relever les défis, les risques et les impacts des phénomènes météorologiques extrêmes et des changements climatiques sur les plus vulnérables », a vu, elle, la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, Mme Ursula Mueller, rappeler que 2017 a été l’année la plus chaude et que 19 millions de personnes sont nouvellement déplacées à cause de phénomènes climatiques.

« Les pays doivent apprendre à vivre avec la certitude de l’incertitude, un facteur à incorporer dans les budgets publics et dans les programmes de développement durable », a réagi M. Satyendra Prasad, le représentant des Fidji, pays très vulnérable aux changements climatiques.  Il a en même temps reconnu que cela peut s’avérer difficile pour les pays en développement compte tenu de leurs ressources limitées.

D’où l’intérêt de dégager des ressources pour rendre les pays plus résilients, a renchéri M. Ronald Jackson, Directeur exécutif de l’Agence de gestion d’urgence des catastrophes dans les Caraïbes, en plaidant en faveur d’une forme d’annulation de la dette des pays de sa région.  Il venait notamment apporter la perspective des Caraïbes après les ouragans de 2017.

Autre moyen de mobiliser des ressources, l’assurance climatique, même si elle n’est qu’une réponse en dernier recours pour gérer des évènements à grande échelle peu fréquents.  C’est ce qu’a expliqué M. Mohamed Béavogui, Directeur général de la Capacité africaine de gestion des risques, en précisant que ce genre d’assurance a l’avantage de pouvoir mobiliser des sommes dans de brefs délais, ce qui est difficile actuellement pour le secteur humanitaire.

L’expert a mis l’accent sur le système de solidarité mis en place en général en Afrique depuis 2012, pour faire face à la variabilité climatique sur ce continent.  Comme les phénomènes climatiques ne frappent pas le continent partout et au même moment, la diversification des risques de par le continent africain peut être, à ses yeux, un moyen efficace de faire face à la variabilité climatique. 

L’ECOSOC poursuivra et achèvera les travaux de sa session humanitaire demain, jeudi 21 juin, à partir de 10 heures. 

DISCUSSION DE HAUT NIVEAU « REMÉDIER AUX CONSÉQUENCES DES CONFLITS ARMÉS SUR LES ENFANTS: RENFORCER LES ACTIONS AFIN DE RÉPONDRE À LEURS BESOINS »

« Il y a un proverbe africain qui dit qu’un enfant, c’est mon enfant, les enfants, ce sont nos enfants », a déclaré le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Jerry Matthews Matjila, à l’entame de cette discussion.  « Les enfants au Yémen sont nos enfants.  Les enfants en Syrie sont nos enfants. »

C’est dans cet esprit que les intervenants de cette discussion, animée par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, ont fait part de leurs actions et propositions pour répondre aux besoins des quelque 150 millions d’enfants qui vivent dans une zone de conflit. 

Mme MARI MAKLEK, Réfugiée sud-soudanaise et fondatrice de « Stand for education », a indiqué qu’elle est née au cours de la deuxième guerre civile qu’a connue le Soudan au milieu des années 80.  « J’ai eu une belle vie d’enfant, aux côtés des miens jusqu’à ce que la guerre éclate.  Les choses ont alors changé et nous avons dû faire nos valises parce que notre pays ne voulait plus de nous ».  Elle a détaillé l’odyssée qui l’a conduite, avec sa mère et ses sœurs, en Égypte, où elle a vécu quatre ans, jusqu’à Newark, dans le New Jersey, après que sa famille a gagné une loterie.  À Newark, nous avons dû faire face à des discriminations comme en Égypte certaines personnes nous demandant de rentrer chez nous, a—t-elle dit.  Je suis devenue mannequin en Californie et, dès lors, j’ai voulu braquer les projecteurs sur le sort des réfugiés parce que j’en suis une, a-t-elle déclaré.  « Je ne veux néanmoins pas être perçue comme une victime. »

Mme HENRIETTA FORE, Directrice exécutive de l’UNICEF, a rappelé qu’il y a environ 10 millions d’enfants déplacés dans le monde.  Certains sont mutilés et utilisés comme boucliers humains, tous sont vulnérables, a-t-elle dit.  « Les conflits détruisent l’avenir des enfants. » Dans le Kasaï en République démocratique du Congo (RDC), 850 000 enfants sont déplacés, tandis qu’au Yémen, 1,8 million d’enfants souffrent de malnutrition aigüe, a-t-elle rappelé.  « Nous devons agir maintenant parce qu’une génération d’enfants est en danger. »  Mme Fore a prôné une tolérance zéro s’agissant des violations commises contre les enfants et réclamé un accès humanitaire sans entrave dans les zones de conflit. 

M. ROBERT MARDINI, Directeur des opérations du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour les régions du Proche et Moyen-Orient, a déclaré qu’en 2016 plus de 8 000 enfants ont été tués dans des zones de conflit.  Les enfants ont par ailleurs deux fois plus de risques de mourir avant l’âge de 5 ans, en raison d’un accès insuffisant à des soins, a-t-il dit.  « L’élément positif, c’est qu’il y a un cadre juridique de protection pour les enfants, mais la mauvaise nouvelle c’est qu’il n’est pas assez appliqué. »  Il a dénoncé le fait que les enfants soient souvent pris pour cibles, avant de souligner la gravité des problèmes psychologiques que ces enfants auront plus tard dans leur vie en raison de ces traumatismes.  Leur développement cérébral sera affecté.  Interrogé par M. Lowcock, il a indiqué que le CICR fait son possible pour veiller à ce que les enfants ne soient pas séparés de leurs parents.  « Il est crucial de conserver ces liens. »

Mme YASMINE SHERIF, Directrice de « Education cannot wait », a dit que le premier défi dans la réponse à apporter aux besoins des enfants est la durée des conflits, qui est de sept ans en moyenne.  En Afghanistan, le conflit dure depuis 40 ans et touche plusieurs générations.  Les enfants sont déplacés en moyenne de 10 à 12 ans, et pendant ce temps-là l’accès à l’éducation doit être garanti, a-t-elle dit.  « Seuls 49% d’enfants de réfugiés sont scolarisés en école primaire. »  Un autre défi est l’inapplication du droit international.  Tout conflit armé entraîne une crise de protection et se caractérise par des violations graves de ce droit. 

Elle a insisté sur la nécessité d’investir dans l’éducation, indiquant par exemple qu’une fille au Soudan du Sud a plus de risques de mourir en couches que d’être scolarisée.  « Les investissements dans l’éducation sont les parents pauvres de la réponse humanitaire globale, puisqu’ils ne représentent que 3% de celle-ci », a-t-elle affirmé.  Elle a également déploré l’ampleur du fossé qui existe entre acteurs humanitaires et acteurs du développement dans la réponse aux crises, alors que ceux-ci devraient coopérer étroitement.  Les enfants rohingya qui traversent la frontière avec le Bangladesh doivent être scolarisés immédiatement, a-t-elle intimé, en affichant sa volonté de jeter un pont entre acteurs de l’éducation et acteurs humanitaires. 

Dans un second temps, et à la demande de M. Lowcock, les quatre panélistes ont évoqué les actions qu’ils ont entreprises pour répondre aux besoins des enfants en période de conflit.  Mme Maklek a ainsi indiqué que son organisation a aidé à la construction d’écoles au Soudan du Sud, les classes se tenant souvent sous un arbre.  Ce sont les communautés locales qui ont construit, brique par brique, ces écoles qui sont désormais pour elles une source de fierté.  Elle a aussi mentionné un programme spécifique pour les filles, appelé « Stand up for girls », afin d’aider des filles mariées très tôt au Soudan du Sud à recevoir une éducation. 

Mme Fore a, elle, souligné l’efficacité des mécanismes de réaction rapide onusiens.  En Iraq, 1,3 million d’enfants ont reçu une aide, dont 785 000 au Soudan du Sud.  Grâce à la Banque mondiale, nous avons procédé à des transferts en liquide à des familles au Yémen.  Elle a aussi évoqué la distribution de bracelets aux enfants déplacés isolés au Soudan du Sud afin de les identifier et de les réunir un jour avec leur famille.  « Être séparé de sa famille est une expérience terrifiante pour un enfant. »

M. Mardini a, lui, indiqué que le CICR sensibilise des groupes armés afin qu’ils n’enrôlent pas des enfants.  « Soyons francs, cela marche et parfois cela ne marche pas. »  Le CICR a également appris à des écoliers du Sud-Liban à se protéger en cas d’attaques. 

Mme Sherif a déclaré que son organisation poursuit les objectifs suivants en matière d’éducation des enfants: inspirer des engagements politiques, catalyser les financements, fédérer les acteurs sur le terrain et combler le fossé entre efforts de développement et humanitaires.  Elle a souligné certains éléments positifs comme les 2,9 milliards de dollars promis lors du dernier Sommet du G7 pour l’éducation des enfants, notamment des filles.  L’Union européenne devrait aussi augmenter de 10% son aide pour l’éducation des enfants. 

Évoqué par plusieurs délégations telles que la Suisse, l’Espagne et l’Afrique du Sud dans leurs questions, le respect du droit international, s’agissant notamment des écoles et des hôpitaux, a été au cœur de la discussion interactive qui a suivi les présentations des panélistes. 

M. Mardini a rappelé que les écoles sont protégées par le droit international, en particulier par des résolutions du Conseil de sécurité.  Les enfants sont protégés en toutes circonstances par le droit, a-t-il dit.  Il a en outre rappelé que les enfants enrôlés dans des groupes et qui sont accusés de crimes doivent être traités « comme victimes de violations et pas comme auteurs de violations ».  Leur emprisonnement doit être envisagé en dernier recours.  Il a également déploré le déni des responsabilités par les parties combattantes s’agissant de la protection des enfants et des écoles, alors que le droit en la matière n’a jamais été aussi protecteur. 

« Il est crucial de combler le fossé entre engagements rhétoriques et actions sur le terrain », a rebondi Mme Sherif, en exhortant le Conseil à faire appliquer ses résolutions.  Mme Fore a, elle, insisté sur la protection des hôpitaux, de plus en plus souvent pris pour cibles par les parties belligérantes.  « Les écoles et hôpitaux doivent retrouver leur caractère sacré », a renchéri M. Mardini.

Même son de cloche du côté du Vice-Président Matjila qui a relaté avec émotion son passé de réfugié sollicitant dans les années 70 la protection d’un autre pays que le sien, l’Afrique du Sud, avant de détenir, aujourd’hui, pas moins de six passeports.  « Je suis devenu un combattant de la liberté au sein du parti de Nelson Mandela et j’ai vécu dans la forêt pendant des années. »  Lorsque j’étais combattant, j’avais pour instruction de ne jamais attaquer un enfant blanc, un civil blanc ou une école blanche, a-t-il dit, en déplorant que cela ne soit plus le cas aujourd’hui dans les pratiques de guerre.  Il a enfin rappelé que les enfants réfugiés doivent pouvoir passer un coup de téléphone à leur famille, en particulier leur mère, « que ce soit à la frontière du Bangladesh ou à la frontière du Mexique ». 

COMMENT MIEUX PROFILER LES RISQUES LIÉS AUX CATASTROPHES NATURELLES POUR ANTICIPER LES RÉPONSES À Y APPORTER EN AMONT ET RENFORCER LES CAPACITÉS NATIONALES AU COEUR DES DÉBATS À L’ECOSOC

La deuxième table ronde interactive du segment humanitaire de l’ECOSOC, qui a eu lieu cet après-midi, avait pour thème « Relever les défis, les risques et les impacts des phénomènes météorologiques extrêmes et des changements climatiques sur les plus vulnérables ».

Modérée par Mme URSULA MUELLER, la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, ce débat a été l’occasion d’envisager les moyens dont dispose le système humanitaire pour mieux répondre aux phénomènes météorologiques extrêmes, sur la base des expériences récentes et des leçons tirées de la saison El Niño 2015-2016 et de la saison des ouragans en 2017.  Rappelant que 2017 était l’année la plus chaude et que 19 millions de personnes sont nouvellement déplacées à cause de phénomènes climatiques, elle a affirmé que les impacts climatiques érodent les progrès en termes de développement durable.  Mme Mueller a en même temps relevé que le secteur humanitaire devient de plus en plus performant, prenant pour preuve que l’action humanitaire a permis de sauver de nombreuses vies pendant la saison des ouragans 2017 dans l’Atlantique, même si l’épisode El Niño 2015-2016 a été l’un des plus forts, poussant 23 pays à demander une assistance humanitaire.

Si Mme Mueller a fait valoir que la feuille de route pour l’action du Secrétaire général et les nouvelles procédures normalisées d’alerte précoce avaient permis de changer la donne, elle a estimé qu’il fallait faire davantage encore.  « Une tendance claire se dégage, à savoir que l’architecture actuelle du financement humanitaire ne favorise pas les actions d’alerte précoce et flexibles. »  À la lumière de ce constat, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) travaille sur une démarche plus anticipative, plus participative et plus collective en vue de faciliter l’action rapide, a-t-elle expliqué, ajoutant que le secteur privé peut prendre part à ces efforts en allouant des fonds au Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF). 

La première intervenante, Mme LISA GODDARD, Directrice de l’Institut international de recherche sur le climat et la société de Columbia University, a éclairé les participants sur la notion de « variabilité climatique actuelle », alors même que les risques climatiques ont toujours existé.  Elle a reconnu que les modèles météorologiques ne sont pas parfaits et qu’il y aura toujours de l’incertitude dans les prévisions climatiques.  L’experte a prévenu qu’il faudrait apprendre à gérer sur le long terme la nouvelle donne que représente la variabilité climatique avec laquelle a été aux prises le secteur humanitaire.  Générer des prévisions climatiques de la manière la plus objective possible est essentiel pour pousser les bailleurs de fonds à investir dans les systèmes d’alerte rapide et dans la résilience des infrastructures et structures, a-t-elle ajouté en prônant par conséquent le renforcement des capacités de collecte et de traitements de données climatiques au niveau local. 

Rejoignant cet avis, le représentant de l’Allemagne a constaté la réticence des bailleurs de fonds à investir dans des actions préventives et a regretté la tendance actuelle à attendre que « la catastrophe se matérialise ».  « Il faut saisir la fenêtre d’opportunité qui s’ouvre entre la prévision et la catastrophe », a-t-il martelé.  « Concrètement, au niveau des Nations Unies, c’est là que le CERF doit rentrer en jeu pour financer des actions précoces », a-t-il poursuivi en demandant aussi que le système humanitaire soit amélioré.

M. SATYENDRA PRASAD, Représentant permanent des Fidji auprès des Nations Unies, a décrit l’impact climatique dans son pays.  La nouveauté pour lui est l’élément d’imprévisibilité face à la multiplication des phénomènes climatiques comme les ouragans, les cyclones ou encore les sècheresses qui peuvent désormais arriver à tout moment.  Les pays doivent apprendre à vivre avec « la certitude de l’incertitude », un facteur à incorporer dans les budgets publics et dans les programmes de développement durable, a-t-il conseillé non sans reconnaître que cela peut s’avérer difficile dans les pays en développement compte tenu de leurs ressources limitées.

Pour ce qui est de la capacité de réponse face aux catastrophes naturelles, M. Prasad a regretté une approche trop compartimentée et qui manque de coordination.  Pour un gouvernement comme le sien, les instruments de réponse doivent être bien définis à l’avance pour ne pas avoir à réfléchir à « comment faire une fois que la catastrophe climatique a frappé ».

Apportant la perspective des Caraïbes après la saison 2017 des ouragans, M. RONALD JACKSON, Directeur exécutif de l’Agence de gestion d’urgence des catastrophes dans les Caraïbes, qui intervenait par visioconférence, a partagé avec les membres de l’ECOSOC les enseignements clefs tirés depuis lors.  Il a souligné le niveau d’exposition et de vulnérabilité de la région des Caraïbes et a plaidé pour une forme d’annulation de leur dette en vue de dégager des ressources pour rendre les systèmes et les sociétés des Caraïbes plus résilientes.  Il faut transformer le secteur public et le leadership local, a-t-il plaidé, et coordonner les différentes opportunités de financement pour le relèvement de ces sociétés. 

L’expérience de la région du Sahel a été exposée par M. IBRAHIM LUMUMBA IDI-ISSA, Vice-Secrétaire exécutif du Comité permanent interétats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILLS).  Il a dit que « le CILLS est en soi une réponse de ses 13 États membres sahéliens pour essayer de lutter contre la désertification et l’insécurité alimentaire au Sahel ».  Mis en place il y a 45 ans, cet organisme a répondu à l’exigence d’une réponse fédérée de la région alors même que ces pays n’ont pas les mêmes conditions agro-écologiques.  Ses membres sont passés de 6 à 13 parce que la dégradation écologique s’est élargie au niveau de la région, a-t-il expliqué.  Le CILLS a mené des actions pour atténuer l’impact des grandes catastrophes naturelles et préparer les communautés rurales à faire face à ces phénomènes.

De plus, le Mouvement « Agir », qui existe depuis 2012, cherche à appliquer des normes de mise en œuvre de la résilience au plan local, a encore expliqué M. Lumumba Idi-Issa qui a également mis l’accent sur la nature transfrontalière des mécanismes de concertation pour une meilleure gestion des ressources naturelles et de meilleurs investissements.  Un centre régional spécialisé dans l’insécurité alimentaire a également été mis en place à Niamey.  Ce centre a développé des systèmes d’alerte rapide pour pouvoir prédire « la face que prendra la saison humide » et ajuster la maîtrise de l’eau en fonction.  Ces meilleures pratiques sont disséminées par le biais d’organisations non gouvernementales nationales et locales qui les appliquent au niveau local. 

M. MOHAMED BÉAVOGUI, Directeur général de la Capacité africaine de gestion des risques, est, lui aussi, venu témoigner des leçons tirées en Afrique depuis la mise en place en 2012 de son organisme qui vise à mieux répondre à la variabilité climatique en Afrique.  La diversification des risques de par le continent africain peut être, à ses yeux, un moyen efficace de faire face à la variabilité climatique, « parce que les phénomènes climatiques ne frappent pas le continent partout et au même moment ».  Voilà pourquoi le facteur solidarité est intéressant pour mutualiser les risques notamment par le biais d’un marché d’assurances climatiques qui permettent de transférer les risques des gouvernements vers les marchés.  En 2014, une telle assurance a été mise en place par la Capacité africaine de gestion des risques, grâce à un emprunt à taux zéro de l’Allemagne et du Royaume-Uni pour la capitaliser.  Depuis le lancement de cette activité, huit pays africains ont souscrit à une assurance climatique à hauteur de 56 millions de dollars de prime, dont les risques ont été transférés vers les marchés à hauteur de 400 millions de dollars.  Il y a un désir de plus en plus important du secteur privé et du secteur public de participer à ce marché nouvellement créé, a constaté le paneliste qui reconnaît toutefois que de tels programmes d’assurance nécessitent un cadre pluridisciplinaire et des partenariats. 

Un tel mécanisme peut être durable sur le plan financier, mais le rôle des donateurs est capital au départ, a-t-il souligné.  Il espère que d’autres pays y participeront.  Il a aussi précisé que l’assurance climatique est une réponse en dernier recours qui vise à gérer des évènements à grande échelle peu fréquents.  En outre, elle permet de recevoir des sommes dans de brefs délais, ce qui est difficile actuellement pour le secteur humanitaire.  En effet, la mutualisation des risques permet de réduire les coûts et de diversifier les risques.  Ce type d’assurance doit faire partie d’un tout, a estimé l’intervenant pour lequel il ne s’agit que de l’un des échelons d’un ensemble de mesures de réponse aux catastrophes naturelles comme la protection sociale ou encore le financement des plans de contingence.  De plus, il est conscient du fait que les pays doivent disposer des ressources nécessaires pour pouvoir payer les primes de l’assurance climatique.  L’enseignement majeur reste, à ses yeux, l’importance des partenariats et de la cohérence des actions, ainsi que l’exigence de renforcer les capacités au niveau local. 

La seule certitude de Mme OSNAT LUBRANI, Coordinatrice résidente du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) à Fidji, bureau qui couvre 10 petits États insulaires en développement (PEID) du Pacifique, c’est qu’il y aura une catastrophe au moins une fois par an dans les pays où elle travaille.  Elle a appelé à reconnaître que l’impact des catastrophes climatiques est plus fort sur les PEID que sur les grands pays, citant le cas des Tonga qui a vu 38% de son PIB partir en fumée.  Elle est persuadée que ces pays veulent et doivent désormais intégrer ces risques dans leurs politiques de développement. 

Mme Lubrani, qui copréside également l’équipe humanitaire présente sur le terrain, en collaboration avec sa collègue de l’OCHA, a l’impression que leur travail est désormais plus apprécié par les gouvernements.  Elle a imputé cela au fait que l’ONU y agit de manière très locale.  Le cadre de résilience du Pacifique est un cadre régional, a-t-elle fait remarquer en indiquant vouloir l’opérationnaliser au niveau local, sachant que la reconstruction prend du temps et suppose une coordination entre les différents partenaires au-delà des ressources disponibles.  Pour elle le succès des actions humanitaires passe par le renforcement de la gouvernance et des capacités nationales de manière à être mieux préparés.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient appelle, devant le Conseil de sécurité, à préserver « l’espoir » d’une reprise des négociations

CS/13387

Le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient appelle, devant le Conseil de sécurité, à préserver « l’espoir » d’une reprise des négociations

Le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Nickolay Mladenov, a appelé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, à inverser, « ou tout du moins à contenir l’impact », des tendances négatives sur le terrain, pointant notamment les activités de peuplement illégales et l’incitation à la violence, afin de préserver « l’espoir » d’un retour à la table des négociations.

Ces mesures, a insisté M. Mladenov, sont également nécessaires pour prévenir toute escalade des tensions dans la région.

Venu présenter le sixième rapport sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, qui exige qu’Israël arrête « immédiatement et complètement » toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, le Coordonnateur spécial a indiqué qu’aucune mesure n’avait été prise dans ce sens pendant la période à l’examen allant du 26 mars au 12 juin 2018.

Il a notamment affirmé qu’environ 3 500 unités de logement dans la zone C de Cisjordanie s’étaient développées, dont un tiers, a-t-il précisé, se trouvant situées plus profondément à l’intérieur du territoire.  Des propositions pour 2 300 unités ont atteint l’étape d’approbation et des offres faites pour 900 autres unités.

En revanche, a-t-il poursuivi, aucune progression, approbation ou offre n’ont été signalées à Jérusalem-Est.  Le Bureau central de statistiques d’Israël a en outre publié, aujourd’hui même, un rapport soulignant que le niveau de construction pendant le premier trimestre 2018 dans la zone C est le plus faible de ces six dernières années, les 250 unités concernées étant bien en deçà de la moyenne mensuelle de 410 en 2017 et de 766 en 2016.

M. Mladenov a toutefois fait état d’une augmentation des démolitions dans la zone C, bien qu’elles s’effectuent à un rythme faible, précisant que 84 structures palestiniennes avaient été saisies ou détruites, provoquant le déplacement de 67 personnes et affectant potentiellement la vie de 4 500 autres personnes.  

Il a aussi appelé à annuler la démolition prévue de Khan al-Ahmar – Abu al-Helu, avertissant qu’outre l’impact sur les populations concernées, elle établirait un précédent qui pourrait affecter d’autres communautés bédouines et pastorales.

Au cours de son intervention, M. Mladenov s’est également préoccupé du niveau élevé de violence dans la région, citant notamment les attaques à la roquette lancées depuis la bande de Gaza, ainsi que la mort, depuis le 30 mars, de 135 Palestiniens tués par les forces de sécurité israéliennes au cours d’une série de manifestations à Gaza.

De plus, sous le couvert de ces manifestations, a-t-il poursuivi, le Jihad islamique palestinien et d’autres militants se sont livrés à des actes de violence et de provocation, notamment en lançant des cerfs-volants incendiés par-dessus la clôture et en déposant des engins explosifs improvisés.

Le Coordonnateur spécial a condamné dans les termes les plus forts les actes qui ont provoqué tant de pertes en vies humaines.  Israël, a-t-il souligné, tout en ayant le devoir de protéger ces citoyens, doit faire preuve de retenue dans l’utilisation de balles réelles et de recours à la force meurtrière.

En outre, les actions du Hamas, du Jihad islamique palestinien et d’autres groupes militants à Gaza mettent en péril les aspirations pour un État palestinien et aggravent la crise humanitaire.

M. Mladenov a aussi déploré la recommandation du Conseil national palestinien de suspendre des éléments clefs des Accords d’Oslo, notant que si celle-ci venait à être mise en œuvre, la reprise des négociations en serait d’autant plus difficile.  

Il s’est également inquiété de la dispersion par la force, le 13 juin, à Ramallah, par les forces de sécurité palestiniennes d’une manifestation de plusieurs milliers de Palestiniens qui demandaient la levée des mesures imposées par l’Autorité palestinienne à Gaza et la fin des divisions politiques, entres autres.  Des dizaines de manifestants ont été blessés ou arrêtés, et les médias ont été empêchés de couvrir les événements, a-t-il déploré.  De leur côté, les autorités israéliennes ont traduit en justice plusieurs Palestiniens et Israéliens accusés d’appartenir à des cellules terroristes.

Le Coordonnateur spécial s’est également préoccupé du recours à une rhétorique incendiaire, pointant notamment les propos antisémites prononcés le 30 avril par le Président de l’Autorité palestinienne, M. Mahmoud Abbas, lors de son discours devant le Conseil national palestinien, les incitations à la violence formulées par plusieurs dirigeants du Hamas, et la glorification, par le Fatah, des auteurs d’attaques terroristes.

Du côté israélien, ce sont les appels à l’annexion des colonies de peuplement, le déni du fait que les territoires palestiniens sont occupés et le rejet du droit des Palestiniens à un État qui ont inquiété le Coordonnateur spécial.

Au cours de son intervention, M. Mladenov a par ailleurs annoncé la tenue, le 25 juin, à New York, d’une conférence de promesses de contributions pour l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), avertissant que dans quelques semaines l’Office, qui fait face à un manque de financement sans précèdent de plus de 250 millions de dollars, devra réduire son aide d’urgence, à Gaza notamment.

Adoptée le 23 décembre 2016 par 14 voix et l’abstention des États-Unis, la résolution 2334 (2016) avait été qualifiée à l’époque d’« historique » par plusieurs membres du Conseil de sécurité, étant le premier texte adopté au sujet du conflit israélo-palestinien depuis 2008.

En outre, la réunion d’aujourd’hui marque la première présentation d’une version écrite du rapport trimestriel sur la mise en œuvre de cette résolution, les cinq autres présentations ayant été strictement orales.  

Ce faisant, le Secrétaire général s’est plié à la demande formulée par 10 membres du Conseil de sécurité qui ont souligné, dans une lettre en date du 14 mai 2018, que la pratique usuelle veut que le Conseil de sécurité reçoive des rapports écrits.

Dans cette lettre, ces 10 États se déclarent également profondément préoccupés par les manquements à la résolution 2334 (2016).

L’intégralité du rapport présenté aujourd’hui par M. Mladenov sera disponible prochainement en version électronique sous la cote S/2018/614.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: le Secrétaire général prié de revoir sa copie sur la réforme de la prestation des services à l’ONU

Soixante-douzième session,
46e séance – matin
AG/AB/4285

Cinquième Commission: le Secrétaire général prié de revoir sa copie sur la réforme de la prestation des services à l’ONU

Ce matin, à la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, les propositions du Secrétaire général sur le dispositif de prestation de services centralisée au Secrétariat de l’ONU se sont heurtées à quelques critiques de la part des États qui ont pointé du doigt l’insuffisance des informations sur les gains d’efficacité et les économies attendus, le nombre et le choix des futurs lieux d’implantation des centres de services partagés et les tâches qui relèveront de leur responsabilité.

En mars dernier, M. Guterres avait esquissé les grands traits du nouveau dispositif de prestation de services centralisée à l’ONU, en vertu duquel il proposait de regrouper les fonctions administratives actuellement fragmentées selon le modèle suivant: le Siège des Nations Unies rassemblerait les tâches liées à la stratégie, à l’orientation et au contrôle, cependant que les tâches pouvant être administrées localement, dont la gestion des paiements et des ressources humaines, seraient confiées à des centres régionaux de services partagés.  Dans un additif daté d’avril, M. Guterres a d’abord proposé d’implanter quatre centres de services partagés à Budapest, Nairobi, Kuala Lumpur et Mexico, avant de ramener, dans une version révisée, le nombre des centres à trois, avec pour lieux d’implantation Budapest, Nairobi et Mexico, pour un total de 52,1 millions de dollars pour l’exercice biennal 2018-2019.

La présentation fragmentaire de versions révisées des rapports et les modifications subséquentes ont entraîné un manque de clarté, a estimé le Japon, pour qui le Secrétariat aurait dû soumettre un document consolidé.  Sur le fond, pourquoi réduire le nombre des centres de quatre à trois et écarter ainsi toute une région, s’est interrogé le Japon, appelant le Secrétaire général à prouver que les lieux d’implantation choisis auront un meilleur retour sur investissement.  Compte tenu de la charge de travail, ont renchéri les Philippines, on est en droit de se demander si trois lieux d’implantation sont bien suffisants.  

Et quid des 17,5 à 25 millions de dollars déjà investis dans un bureau de la Division des achats du Secrétariat à Entebbe? s’est enquis l’Ouganda, rappelant que la décision de créer le Centre d’Entebbe s’inscrivait déjà, justement, dans le contexte de la prestation de services centralisée.  Que dit le Secrétaire général de cette décision?

Le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) note que, parmi les 60 tâches qu’il est prévu de confier aux trois centres de services partagés, seules huit doivent être exécutées dans des délais stricts.  Le CCQAB estime donc que deux centres devraient suffire à assurer les fonctions requises.

Pourquoi, en effet, sur les 201 tâches de traitement administratif pouvant être exécutées à distance, n’en confier que 60 aux centres de services partagés? se sont interrogés les États-Unis, appelant le Secrétaire général à se montrer « plus ambitieux » et à placer, dans une future proposition plus détaillée, l’intégralité des 201 tâches sous la responsabilité des centres de services partagés.  « Il est temps de passer de la phase conceptuelle à la mise en œuvre », s’est impatienté le pays, rappelant que l’Assemblée générale avait approuvé l’initiative il y a déjà deux ans.  Or, selon les États-Unis, réalisée correctement, la prestation de services centralisée permettra d’aligner l’ONU avec des « pratiques commerciales modernes », en relocalisant ses fonctions administratives hors des lieux d’affectation à coûts élevés, tels que New York.

Le dispositif de prestation de services centralisée, a ajouté l’Union européenne, constitue aussi un élément clef qui rassemble les différents processus de réforme actuels, crée des synergies et assure une prestation de services meilleure, plus rapide et plus efficace, avec des atouts qui peuvent être démontrés de manière qualitative et quantitative. 

Certes, mais le Secrétaire général doit fournir davantage d’informations sur les gains et économies attendus et sur les moyens d’y parvenir, a nuancé la Chine, reprenant les conclusions du CCQAB.  La proposition actuelle et la manière dont elle a été présentée soulèvent en effet un certain nombre de questions importantes, ont jugé la Suisse et le Liechtenstein, appelant le Secrétaire général à présenter une proposition révisée et à s’assurer que les pays hôtes soient consultés et informés en temps voulu.  Deux de ces pays hôtes potentiels, le Mexique et le Kenya, se sont respectivement félicités du choix de Mexico et de Nairobi comme lieu d’implantation des futurs centres.

La Cinquième Commission poursuivra ses travaux demain mercredi 20 juin, à partir de 10 heures.

RAPPORT DU COMITÉ CONSULTATIF POUR LES QUESTIONS ADMINISTRATIVES ET BUDGÉTAIRES SUR LE DISPOSITIF DE PRESTATION DE SERVICES CENTRALISÉE AU SECRÉTARIAT DE L’ONU (A/72/7/ADD.50)

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a examiné les propositions du Secrétaire général (A/72/801), (A/72/801/Add.1), (A/72/801/Add.1/Rev.1) et (A/72/801/Add.1).  Devant toutes ces versions révisées, le Comité consultatif recommande que le Secrétaire général présente une nouvelle proposition qui tiendra compte de ses observations.

La dernière proposition du Secrétaire général, datée du 1er mai 2018, concerne la création de trois lieux d’implantation: Budapest, Nairobi et Mexico.  Pour y arriver, le Secrétaire général explique que 45 sites existants de l’ONU proposant des services d’appui administratif ont été évalués et que 28 d’entre eux ont fait l’objet d’une évaluation à l’aune des critères de notation qui sont le coût (dépenses de personnel, dépenses opérationnelles et coûts initiaux non renouvelables) (40%); la possibilité de recruter sur place du personnel qualifié (disponibilité, qualité et compétences linguistiques) (40%); et l’adéquation du lieu d’implantation (qualité de vie, risques associés au pays et infrastructures) (20%).

Il est prévu de confier à ces centres, à partir de 2019, 60 des 201 tâches de traitement administratif pouvant être exécutées à distance, à savoir 35 tâches afférentes aux ressources humaines, 21 tâches de nature financière et 4 tâches relevant des services internes.  Il précise que 46 autres tâches pourraient faire l’objet d’une nouvelle évaluation et être transférées quand le dispositif serait étendu, à compter de 2020.  Il reste donc 95 tâches dont il n’est pas prévu à ce stade qu’elles soient confiées aux centres de services partagés.

Le CCQAB note toutefois que, parmi les 60 tâches qu’il est prévu de confier aux centres de services partagés, seules huit doivent être exécutées dans des délais stricts.  Compte tenu du volume de travail et de la nature des tâches qui devraient incomber aux centres, le Comité estime que deux centres devraient suffire.  Si les données concernant le volume de travail ou d’autres facteurs pertinents donnent à penser qu’il faudra couvrir davantage de fuseaux horaires, le Secrétaire général, dit le CCQAB, pourra alors proposer l’installation, dans d’autres endroits, de structures plus petites, telles que des guichets d’appui.  Pour le CCQAB, la nouvelle proposition devrait prévoir l’implantation d’au moins un centre en Afrique.

Le CCQAB note aussi que le montant demandé dans le budget révisé des centres de services partagés est de 52 109 800 dollars pour l’exercice biennal 2018-2019, alors que le montant demandé initialement s’établissait à 48 034 700 dollars.  Il insiste sur le fait que le regroupement des services prévu doit se traduire par des gains d’efficience et des économies, et compte que la nouvelle proposition fera apparaître clairement de nouveaux gains d’efficience et de nouvelles économies.  Le Comité consultatif note que l’effectif proposé de 684 postes est resté inchangé entre la proposition de quatre centres et la nouvelle proposition de trois centres.

Le Secrétaire général propose aussi l’établissement d’une structure de gestion unique pour les services partagés, qui sera placée sous l’autorité du Directeur des services partagés (D-2).  Les centres de services partagés seraient dirigés par un chef (D-1) qui relèverait du Directeur (D-2).  Le Comité consultatif note que le montant demandé au titre de la direction exécutive et l’administration s’élève à 33 505 200 dollars, le montant total demandé pour l’exercice biennal 2018-2019 étant de 52 109 800 dollars.  Le Comité n’est pas convaincu que le dispositif nécessite la mise en place d’une structure de gestion distincte.  Il compte donc que les tableaux d’effectifs seront revus.

Note du Secrétaire général sur le rapport du Corps commun d’inspection intitulé « Services d’appui administratif: le rôle des centres de services dans la refonte des modalités de prestation de services administratifs » (A/72/299).  (A/72/299/Add.1)

Le Secrétaire général affirme que les organismes du système des Nations Unies ont salué le rapport du Corps commun d’inspection (CCI) sur les services administratifs et se sont félicités de l’examen des méthodes en matière de prestations de services d’appui administratif grâce à l’utilisation de services partagés et de centres de services.

Venant aux cinq recommandations du CCI, des organismes ont jugé que certains aspects gagneraient à être analysés et clarifiés davantage.  Les organismes ont aussi noté que l’accent est trop placé sur les coûts au détriment de la prestation de services de meilleure qualité.  Il faut aussi, selon les organismes, un troisième aspect qui est de mettre des talents au service de fonctions à plus forte valeur ajoutée, stratégique ou programmatique.

Certains organismes ont aussi fait remarquer que c’était essentiellement les grandes organisations qui s’étaient dotées de centres de services centralisés, ce qui revenait à dire qu’elles avaient suffisamment d’effet d’échelle interne pour favoriser une telle initiative.  Ils ont donc jugé utile de préciser les choix qui s’offrent aux autres organismes et par exemple, obtenir des grandes organisations qu’elles travaillent avec d’autres de moindre envergure pour atteindre la masse critique nécessaire permettant de créer un centre de services indépendant ou intégrer le centre d’une organisation plus grande.  Les organismes relèvent que dans ce dernier cas, il y aurait des questions à régler, notamment la diversité des progiciels de gestion intégrés, les cadres de contrôle interne (y compris des risques) et la nécessité d’établir des relations de service formelles.

Certains organismes ont également estimé que des informations plus détaillées sur le coût du passage, d’un modèle de service à l’autre, auraient été utiles, regrettant par ailleurs que les études de faisabilité soient essentiellement axées sur les écarts de coût d’implantation et non pas tant sur les gains d’efficacité obtenus.

Certains organismes ont fait aussi observer que le rapport ne tient pas compte de la façon dont les services administratifs sont intégrés dans les cadres de contrôle de l’Organisation, y compris les assurances données sur les services fournis et, dans l’affirmative, par qui et à qui.  Il serait particulièrement important de résoudre ces questions dans les cas où des organisations fourniraient des services à d’autres, ainsi que dans ceux où les organes directeurs solliciteraient l’avis de leurs services de contrôle/d’audit interne sur la gouvernance, la gestion des risques et le cadre de contrôle.

Enfin, certains organismes ont indiqué que les récents faits nouveaux survenus n’ont pas été pleinement intégrés dans le rapport, citant comme exemple la poursuite du déploiement d’Umoja par le Secrétariat de l’ONU.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. MOHAMED FOUAD (Égypte) s’est dit gravement préoccupé par la présentation tardive de la question du dispositif de prestation de services centralisée, près de trois semaines après la clôture officielle des travaux de la Commission.  D’ordinaire, a rappelé M. Fouad, la deuxième reprise de session se centre sur le maintien de la paix et les questions urgentes ayant des implications financières, y compris la révision des taux de remboursement des pays contributeurs de troupes.  Le représentant a donc appelé la Commission à conclure ses discussions sur ces différentes questions d’ici la fin de la semaine. 

Certes, a poursuivi M. Fouad, le Groupe a fait montre de souplesse cette année, mais nous rappelons au Secrétariat et à toutes les parties prenantes que pour maintenir un « semblant de discipline », notamment du point de vue du respect du calendrier, il convient d’avoir les informations et les documents requis en « temps voulu », « dans leurs intégralité » et « sans fausses excuses ».

Au demeurant, M. Fouad a indiqué que son Groupe allait étudier avec attention la proposition du Secrétaire général sur le dispositif de prestation de services centralisée, ainsi que le rapport du CCQAB.  Le Groupe des 77 et la Chine vont analyser dans le détail la façon dont les différents rapports répondent aux demandes et directives exprimées dans les résolutions de l’Assemblée générale.

M. JAN DE PRETER, Union européenne, a déclaré que le dispositif de prestation de services centralisée constituerait un élément essentiel qui rassemble les différents processus de réforme, crée des synergies et assure une prestation de services meilleure, plus rapide et plus efficace avec des atouts qui peuvent être démontrés de manière qualitative et quantitative.  Il est tout aussi clair que ce dispositif et Umoja, le progiciel de gestion intégré, se renforceront mutuellement: Umoja a normalisé et automatisé les processus administratifs alors que le dispositif de prestation de services centralisée consolidera des structures administratives fragmentées au sein et dans tous les lieux d’affectation.  Le dispositif, a dit le représentant, est « la clef » pour exploiter tous les avantages d’Umoja.  L’objectif global de l’exercice est d’améliorer l’efficacité et de faire des économies pour concentrer les ressources sur des activités substantielles et faire de l’Organisation, une entité plus légère et plus efficace.  Il n’améliorera pas seulement la façon dont l’ONU met en œuvre les mandats mais en libérant, en outre, les ressources, il assurera des gains d’efficacité considérables pour l’Organisation et ses États Membres. 

Également au nom du Liechtenstein, Mme ALEXANDRA ELENA BAUMANN (Suisse) a déclaré que la proposition actuelle et la manière dont elle a été présentée, soulèvent un certain nombre de questions importantes.  Étant donné les vastes conséquences que le dispositif de prestation de services centralisée pourrait potentiellement avoir sur l’Organisation, les pays hôtes et le personnel, une solide base de discussion est nécessaire.  Compte tenu des contraintes de temps de la Commission, il sera difficile de discuter de la proposition dans le détail.  Le CCQAB, a rappelé la représentante, recommande que le Secrétaire général présente, durant la partie principale de la prochaine session, une proposition révisée.  Le Secrétaire général devrait donc s’expliquer davantage, en particulier sur le choix des lieux d’implantation et pourquoi il offre le plus d’avantages à l’Organisation.  Le Secrétaire général devra également garantir que les pays hôtes concernés, actuels et potentiels, seront consultés et informés en temps voulu.  

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a déclaré que la mise en œuvre d’un dispositif de prestation de services centralisée était une initiative « importante et opportune », ainsi qu’un « élément essentiel » des différentes réformes de l’Organisation introduites par le Secrétaire général.  Selon elle, l’ONU doit tirer parti de ce nouveau dispositif à l’échelle mondiale pour améliorer la prestation de services aux clients finaux, notamment par la consolidation et la normalisation des fonctions administratives dans des endroits « plus rentables ».

Mme Norman-Chalet a rappelé que l’Assemblée générale avait approuvé l’initiative de prestation de services centralisée il y a de cela deux ans, dans sa résolution 70/248, une initiative rendue possible, selon elle, par le déploiement du progiciel de gestion intégré Umoja.  « Il est temps de passer de la phase conceptuelle à la mise en œuvre », a-t-elle déclaré, ajoutant que, mise en œuvre de façon appropriée, la prestation de services centralisée permettrait d’aligner l’Organisation avec des « pratiques commerciales modernes », en relocalisant certaines fonctions administratives hors des lieux d’affectation à coûts élevés, tels que New York.

Cependant, la représentante a estimé que le rapport du Secrétaire général aurait pu inclure davantage de tâches administratives dans le cadre de la prestation de services centralisée.  En effet, a-t-elle remarqué, le rapport de M. António Guterres identifie 201 tâches de traitement administratif pouvant être exécutées à distance, mais ne prévoit de confier que 60 de ces tâches aux centres de services partagés.  Tout en reconnaissant la nécessité d’avancer progressivement, et en tenant compte des points de vue du CCQAB, la représentante a estimé que le Secrétaire général devrait être « plus ambitieux » et proposer d’inclure des tâches supplémentaires pour les centres de services partagés.

Aux yeux de la représentante, les centres de services partagés doivent également devenir des « centres d’excellence » dans le cadre du dispositif de prestation de services centralisée, pour permettre au personnel de traiter plus efficacement les tâches administratives.  À cet égard, elle a estimé qu’il convenait de réduire les effectifs requis pour exécuter ces tâches.  Enfin, Mme Norman-Chalet a appelé à ce que le Secrétaire général inclue, dans le cadre d’une future proposition détaillée, la migration de toutes tâches de traitement administratif pouvant être exécutées à distance vers des centres de services partagés.  Elle a également appelé M. Guterres à identifier des gains d’efficacité supplémentaires liés à la mise en œuvre du projet.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a souligné que, depuis la publication du premier rapport de M. António Guterres sur la prestation de services centralisée à l’ONU, en mars dernier, un additif, une version révisée et les recommandations du CCQAB ont suivi.  Le représentant a réaffirmé que la création de centres régionaux de services partagés constitue déjà un « pas en avant » dans le processus de décentralisation administrative.  De plus, a-t-il dit, le dispositif de prestation de services centralisée permettra d’améliorer l’efficacité de l’Organisation et la réactivité du Secrétariat, sachant que les centres régionaux, s’ils sont dotés des ressources nécessaires, auront pour fonction d’assouplir la mise en œuvre des mandats des États Membres.  Le dispositif, a-t-il estimé, fait également partie intégrante des autres projets de réforme lancés par le Secrétaire général, s’agissant du développement, de la gestion et du pilier paix et sécurité.

Par ailleurs, le représentant a rappelé que la capitale de son pays, Mexico, avait été sélectionnée pour accueillir l’un des futurs centres de services partagés.  Il a fermement appuyé cette recommandation, arguant des avantages comparatifs qu’offrent de nombreuses villes mexicaines pour accueillir des structures onusiennes, citant entre autres, s’agissant de Mexico, l’accès à « tous les services technologiques modernes » à des « couts extrêmement compétitifs », ce qui permettra à l’Organisation de réaliser des « économies importantes ».

Le représentant a estimé que toute proposition plus détaillée du Secrétaire général concernant la mise en œuvre du dispositif de prestation de services centralisée à l’ONU devrait davantage démontrer les futurs gains d’efficacité et les nouvelles économies que l’Organisation sera en mesure de réaliser.  De ce point de vue, il a estimé que le centre de services partagés de la ville de Mexico serait en mesure de devenir un « centre d’excellence ».

Le représentant a en outre insisté sur la nécessité de promouvoir le multilinguisme dans le travail de l’Organisation.  Il a souligné que l’espagnol est la deuxième langue la plus parlée au monde, en plus d’être l’une des langues officielles des Nations Unies.  Enfin, il a appelé les États Membres à accélérer les négociations en cours pour conclure rapidement les travaux de cette seconde reprise de session.  Nous ne voyons pas pourquoi la Commission ne serait pas en mesure de prendre des décisions d’ici la fin de la semaine sur les questions en suspens, a-t-il conclu.

M. ADONIA AYEBARE (Ouganda) a fait observer que la consolidation des services partagés n’est pas chose nouvelle au Secrétariat qui le fait avec succès depuis 2010, avec la stratégie globale d’appui aux missions mise en œuvre par le Département d’appui aux missions à la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi et au Centre régional de service à Entebbe, en Ouganda.  L’expérience est un tel succès que l’Assemblée générale a demandé qu’elle soit exploitée dans le développement du dispositif de prestation de services centralisée.  Comme, a poursuivi le représentant, la proposition du Secrétaire général se limite à quatre centres de services partagés, nous nous attendions à ce que l’éventail des services englobe toute la gamme des services administratifs ainsi que l’appui logistique et les services d’information et de communication assurés actuellement par la Base de Brindisi et le Centre d’Entebbe.  Le représentant a aussi rappelé la décision de l’Assemblée générale de créer à Entebbe un bureau de la Division des achats du Secrétariat, dans le contexte de la prestation de services centralisée.  Que dit le Secrétaire général de cette décision?

À l’ère du « faire plus avec moins », M. Ayebare s’est étonné de l’enveloppe budgétaire demandée par le Secrétaire général et du nombre de postes, sans pour autant comptabiliser le coût de la résiliation des contrats et des compensations à consentir.  Le Secrétaire général, a-t-il poursuivi, parle de trois centres, mais qu’en est-il des 17,5 à 25 millions de dollars qui ont déjà été investis dans le Centre de services partagés d’Entebbe?

Le représentant a aussi jugé important de minimiser la perturbation des services partagés, en particulier pour le personnel du maintien de la paix, qui constitue la majorité du personnel civil et militaire du Secrétariat de l’ONU.  Il a estimé que dans son rapport, le Secrétaire général ne parle pas de toute la panoplie des services partagés qui vont donner lieu à des problèmes techniques, en particulier pour le personnel du maintien de la paix qui devra solliciter des services à des centres dispersés. 

Tout en appuyant les efforts déployés par le Secrétaire général pour améliorer l’efficacité et la qualité de la prestation de services à l’ONU, Mme XUE (Chine) a appelé M. António Guterres à fournir davantage d’informations sur les gains attendus et les moyens d’y parvenir.  Le Secrétariat, a-t-elle ajouté, devrait également fournir les informations requises en temps voulu, et ce, pour que les États Membres puissent participer au processus.  S’agissant notamment des lieux d’implantation des futurs centres de services partagés, la représentante a insisté pour que la répartition géographique soit l’un des principaux critères de sélection.  Elle a aussi voulu que l’on tienne compte des expériences passées pour veiller à ce que les futurs centres soient à la hauteur des attentes et soient comptables de leurs actes devant les États Membres.

M. KATSUHIKO IMADA (Japon) a dit attendre avec impatience de débattre sur la proposition du Secrétaire général afin de voir le lancement du dispositif dès janvier prochain, « sans aucun retard ».  À l’instar du CCQAB, le représentant a indiqué que la présentation fragmentaire de versions révisées et les modifications subséquentes ont entraîné un manque de clarté.  Par souci de clarté et de facilité de lecture, le Secrétariat aurait dû soumettre un document consolidé révisé ou réédité.  M. Imada s’est interrogé sur la logique du Secrétaire général qui réduit le nombre des centres de services partagés de quatre à trois.  Le Secrétaire général, a-t-il demandé, doit dire aux États Membres, « de manière claire, responsable et transparente », pourquoi il a écarté une région dans la répartition des centres, tout en maintenant l’approche du fuseau horaire.  Le raisonnement doit être cohérent et montrer pourquoi on ne peut se limiter à un centre ou deux.  Le Secrétaire général, a insisté le représentant, doit nous convaincre et nous dire pourquoi les lieux d’implantation des centres qu’il a choisis auront le meilleur retour sur investissement.  

Mme VALLES (Philippines) a noté la proposition de M. António Guterres d’implanter les trois futurs centres de services partagés en Hongrie, au Mexique et au Kenya.  Compte tenu de la charge de travail et de la nature des tâches administratives, la représentante a appelé à une étude pour déterminer si trois lieux d’implantation sont suffisants.  Elle a noté que le rapport du Secrétaire général propose de supprimer, en 2019, 684 postes et emplois de temporaires.  Elle a donc souhaité davantage d’informations sur le sort des Philippins qui occupent les postes qui seraient affectés par cette décision, ainsi que sur le calendrier prévu.  La représentante a en outre appelé M. Guterres à fournir davantage de détails sur les indicateurs de la charge de travail et sur les futurs gains d’efficacité et les nouvelles économies que l’Organisation sera en mesure de réaliser grâce au dispositif de la prestation de services centralisée.

M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a salué le fait que les enseignements tirés des précédentes initiatives de réforme aient été incorporées dans ce processus et qu’ils aient contribué à l’élaboration d’un modèle de services partagés visant à aborder les défis liés à la gestion des ressources et du personnel.  Pour la gestion efficace de l’Organisation, le représentant a estimé que le Secrétariat devait améliorer la prestation de ses services et jouer la transparence.  Notant que la reprise de session de la Cinquième Commission touche à sa fin vendredi prochain, le représentant a regretté que les États Membres n’aient plus que deux jours pour débattre de cette question.  Un effort supplémentaire doit être fait pour examiner cette question importante, a-t-il estimé.  Le délégué a en outre salué le choix de Nairobi comme l’un des trois centres de services partagés.  Le Kenya est disposé à faire les efforts nécessaires pour satisfaire les besoins de l’Organisation, a-t-il promis. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: « Le système humanitaire est au bord de la rupture », avertit Mark Lowcock en ouvrant le débat annuel du segment des affaires humanitaires

Session de 2018,
36e séance plénière - après-midi
ECOSOC/6930

ECOSOC: « Le système humanitaire est au bord de la rupture », avertit Mark Lowcock en ouvrant le débat annuel du segment des affaires humanitaires

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock, a averti, cet après-midi, que « le système humanitaire est au bord de la rupture, puisqu’en 2017 l’écart entre les besoins et les ressources disponibles s’est creusé ».  Il présentait le rapport* de 2017 du Secrétaire général sur le « Renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies » à l’ouverture de la session 2018 du segment humanitaire du Conseil économique et social (ECOSOC).

Le thème de cette session, « Restaurer l’humanité, respecter la dignité humaine et ne laisser personne de côté: travailler ensemble pour réduire les besoins humanitaires, les risques et la vulnérabilité des populations » a fait dire à de nombreux orateurs du débat général, entamé aujourd’hui, qu’il est important de respecter le droit international humanitaire, notamment l’accès sans entrave aux gens dans le besoin.

Le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Jerry Matthews Matjila, de l’Afrique du Sud, a rappelé que ce segment humanitaire est « un forum unique de débat et de compréhension de la nature complexe des besoins humanitaires et des défis opérationnels de l’assistance humanitaire ».  En effet, le segment permet aux États Membres, aux entités des Nations Unies, aux partenaires humanitaires et de développement, au secteur privé et aux communautés affectées de discuter des questions humanitaires émergentes et urgentes.  Outre le débat général, la session de cette année, après celle de Genève en 2017, prévoit trois tables rondes, avant l’adoption de la traditionnelle résolution sur le thème à l’ordre du jour, sans compter 18 évènements parallèles.

Dans le rapport présenté par M. Lowcock, il est noté que les besoins humanitaires n’ont jamais été aussi grands du fait des crises humanitaires engendrées par les conflits et les catastrophes liées aux risques naturels.  Les organisations humanitaires sont venues en aide à 101,2 millions de personnes et ont sauvé des millions de vies, réduit les souffrances et promu la dignité humaine.  Le nombre total de déplacés de force par les conflits et la violence a atteint le niveau record de 65,6 millions à la fin de 2016, dont 40,3 millions de déplacés à l’intérieur de leur propre pays.

En outre, depuis 2008, ce sont chaque année plus de 100 millions de personnes qui sont touchées par des catastrophes liées à des risques naturels, et 25,3 millions en moyenne qui sont déplacées.  En 2017, l’année la plus chaude jamais enregistrée sans la présence d’un phénomène El Niño, toutes les régions ont subi les effets dévastateurs des catastrophes naturelles.

Face à ce sombre tableau et malgré la générosité des donateurs qui ont versé 13,97 milliards de dollars en réponse aux appels interinstitutions, les plans d’aide humanitaire et les appels n’ont été financés qu’à hauteur de 58,9%.  Or, il est primordial qu’ils soient totalement financés, a insisté le Secrétaire général adjoint, car, fin 2017, 135,7 millions de personnes avaient besoin d’une aide humanitaire, et les besoins de financement avaient atteint le montant de 23,5 milliards de dollars.  Cette situation a fait dire à la représentante de la Bulgarie, parlant au nom de l’Union européenne, qu’il faut un système humanitaire plus « proactif », capable d’anticiper les crises et les catastrophes.  

« À long terme, les donateurs traditionnels ne pourront pas assurer les besoins croissants humanitaires », a averti son homologue allemand qui a plaidé pour de nouveaux moyens innovants de financement.  Un avis partagé par l’Égypte, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, qui a appelé à un financement adéquat et prévisible.  Le G77 encourage le système onusien à améliorer ses efforts pour établir des mécanismes de financement anticipé afin de prévoir un soutien humanitaire en temps voulu et s’assurer que l’aide atteigne effectivement les gens dans le besoin.

En attendant, la Norvège a rassuré qu’elle restera l’un des principaux donateurs de l’action humanitaire, tandis que le Japon a décidé de verser plus de 600 millions de dollars à la gestion des crises humanitaires sur le plan multilatéral, ainsi que 14 millions à la Syrie et au Moyen-Orient, y compris pour la lutte contre le terrorisme.  À l’instar d’autres délégations, son représentant a prévenu que les contributions seules ne suffisent pas: elles doivent s’accompagner d’une gestion efficiente et d’une prise en compte des liens entre l’humanitaire et la paix. 

Certains intervenants, dont la Suisse, ont rappelé l’importance de la protection du personnel humanitaire, des installations médicales et des écoles pendant les conflits.  D’autres, comme la Belgique, ont plaidé pour la protection des enfants.  Le représentant d’El Salvador a même appelé l’ECOSOC à se pencher sur la situation des enfants migrants originaires d’Amérique latine, affirmant que « les séparer de leurs parents constitue une violation des droits de l’homme ».  À ce propos, une courte vidéo de M. Nelson Mandela sur l’engagement en faveur des enfants a été diffusée en début de séance, dans le contexte du centenaire de la naissance de l’ancien Président sud-africain.

La représentante de l’Union européenne n’a pas caché sa préoccupation face à la « régression » des discussions sur la santé sexuelle et reproductive dans le contexte humanitaire.  La déléguée du Canada a quant à elle souhaité que toutes les interventions humanitaires adoptent désormais une démarche sexospécifique, soulignant que les ministres des affaires étrangères du G7 ont prévu de s’engager contre la violence sexiste qui se manifeste parfois dans le cadre des interventions humanitaires.

Si plusieurs intervenants ont souligné l’importance de resserrer les liens entre activités humanitaires et de développement, le G77 a considéré pour l’essentiel qu’il ne faut pas brouiller les lignes qui séparent ces deux types d’activités et plaidé « pour que leurs mandats et priorités soient préservés, afin de garder leurs avantages comparatifs dans une approche intégrée et coordonnée ».

Le débat général se poursuivra jeudi après-midi, juste avant la clôture.  La première table ronde, consacrée à l’impact des conflits armés sur les enfants, aura lieu demain matin, à 10 heures.

*A/73/78–E/2018/54

DÉBAT CONSACRÉ AUX AFFAIRES HUMANITAIRES « RESTAURER L’HUMANITÉ, RESPECTER LA DIGNITÉ HUMAINE ET NE LAISSER PERSONNE DE CÔTÉ: AGIR DE CONCERT POUR RÉDUIRE LES BESOINS HUMANITAIRES, LES RISQUES ET LA VULNÉRABILITÉ DES POPULATIONS »

Déclarations

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud), Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a souligné que ce segment humanitaire est « un forum unique de débat et de compréhension de la nature complexe des besoins humanitaires et des défis opérationnels de l’assistance humanitaire ».  Il a noté que les récentes années ont laissé voir la complexité grandissante et la longueur des crises humanitaires, ce qui requiert que nous travaillions ensemble pour trouver des solutions.

M. Matjila a informé que la présente session va donner lieu à trois tables rondes, dont la première, demain matin, sera focalisée sur l’impact des conflits armés sur les enfants.  Les besoins humanitaires et de protection des enfants sont un impératif pour assurer leur bien-être physique et psychosocial et leur offrir un avenir sûr.  La seconde table ronde, demain après-midi, sera consacrée aux défis, risques et impacts des phénomènes météorologiques extrêmes et des changements climatiques sur les plus vulnérables.  Il a rappelé que rien qu’en 2017, 300 catastrophes naturelles ont eu lieu dans 122 pays, produisant des effets dévastateurs sur la vie des gens, aggravant l’insécurité alimentaire, causant des déplacements et sapant les gains du développement dans diverses parties du monde.  La troisième table ronde, jeudi matin, aura pour thème le rôle de l’action humanitaire dans l’optique du renforcement des capacités locales pour des résultats durables et la résilience locale. 

En outre, le Vice-Président a expliqué que la manifestation de ce matin sur le passage de la phase des secours à celle de l’aide au développement, l’un des 18 évènements parallèles de la présente session, sert de lien entre les discussions des divers segments de l’ECOSOC.  Cet évènement met également l’accent sur les voies concrètes de collaboration entre acteurs du développement et les acteurs humanitaires pour répondre de manière plus cohérente aux besoins des gens, aux risques et vulnérabilités auxquels ils sont confrontés.  

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. MARK LOWCOCK, a présenté le rapport (A/73/78-E/2018/54) du Secrétaire général sur le « Renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies ». 

En 2017, les besoins humanitaires n’ont jamais été aussi grands du fait des crises humanitaires engendrées par les conflits et les catastrophes liées aux risques naturels.  À la fin de l’année, 135,7 millions de personnes avaient besoin d’une aide humanitaire et les besoins de financement avaient atteint le montant de 23,5 milliards de dollars.  Les organisations humanitaires sont venues en aide à 101,2 millions de personnes, « un chiffre record ».

L’insécurité alimentaire a été l’une des principales causes des besoins humanitaires en 2017.  L’an dernier, quelque 124 millions de personnes contre 108 millions l’année précédente, dans 51 pays, étaient en situation d’insécurité alimentaire.  Environ 60% des populations souffrant de la faim dans le monde vivent dans des pays en conflit.

Les conflits restent l’une des principales causes des crises humanitaires, a expliqué le Secrétaire général adjoint.  Leur nombre et leur intensité se sont nettement accrus au cours des 10 dernières années.  Le nombre total de déplacés de force par les conflits et la violence a atteint le niveau record de 65,6 millions à la fin de 2016, dont 40,3 millions de déplacés à l’intérieur de leur propre pays.

« Le système humanitaire est au bord de la rupture », a averti M. Lowcock.  En 2017, l’écart entre les besoins et les ressources disponibles s’est creusé.  Même si la générosité des donateurs a augmenté, les plans d’aide humanitaire et les appels n’ont été financés qu’à hauteur de 58,9%.  Or, il est primordial qu’ils soient totalement financés.

« La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour empêcher que ne se reproduisent les catastrophes humanitaires que nous avons connues en 2017, y mettre fin et apporter une solution à leurs causes », a poursuivi le Coordonnateur des secours d’urgence.  Les mesures qui ont été prises pour accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, de l’Accord de Paris, du Cadre de Sendai, du Programme d’Action d’Addis Abeba, des orientations de Samoa et du Nouveau Programme pour les villes, contribueront à atténuer les crises humanitaires et à réduire les souffrances à moyen et à long terme.

L’adoption, en 2018, d’un pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières et d’un pacte mondial sur les réfugiés, devrait ouvrir de grandes perspectives s’agissant de renforcer l’action internationale en matière de migration et de mouvements massifs de réfugiés, et de venir en aide aux réfugiés de longue date.

Les propositions du Secrétaire général concernant le repositionnement du système des Nations Unies pour le développement, les réformes du programme de prévention, de paix et de sécurité de l’ONU, la Stratégie sur la parité des sexes applicable à l’ensemble du système des Nations Unies, la nouvelle stratégie des Nations Unies pour lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles, et les réformes de la gestion de l’ONU viennent compléter et renforcer les travaux du système humanitaire et permettront d’accroître la cohérence, l’efficacité et l’efficience de l’Organisation sur le terrain, a assuré M. Lowcock. 

Selon le Secrétaire général, les États Membres, les groupes armés non étatiques et les organisations humanitaires devraient redoubler d’efforts pour promouvoir et garantir le respect plein et entier des principes d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance.  Les États Membres et les groupes armés non étatiques devraient autoriser et faciliter l’accès rapide et sans entrave des agents humanitaires impartiaux. 

Le Secrétaire général recommande que les États Membres et les groupes armés non étatiques respectent et protègent les agents et les biens humanitaires, notamment en s’abstenant de perpétrer des attaques contre eux et en prenant toutes les précautions possibles pour leur épargner les effets des opérations militaires.  Ils devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir dans leur droit interne le respect et la protection des agents et des biens humanitaires.

Les États Membres et les groupes armés non étatiques devraient respecter le caractère civil des écoles et des autres établissements d’enseignement et s’abstenir de toute action qui risquerait de nuire à la protection de ces établissements contre des attaques directes.  L’ONU et les organisations humanitaires doivent mettre intégralement en œuvre la politique de tolérance zéro de l’Organisation face à l’exploitation et aux atteintes sexuelles et s’assurer que les victimes bénéficient d’une protection et d’une assistance adéquates et de mécanismes fiables de recours à la justice. 

Le Secrétaire général recommande également que les États veillent à ce que les mesures antiterroristes ne fassent pas obstacle à l’action humanitaire.  Les États, l’ONU et les organisations humanitaires devraient apprécier à leur juste valeur les capacités locales et éliminer les obstacles qui entravent la collaboration entre les acteurs aux niveaux international, national, local et régional, en vue de renforcer et non de remplacer les capacités des institutions et des acteurs locaux.

Enfin, les États et les organisations humanitaires devraient faire avancer la réalisation des engagements pris et des initiatives lancées lors du Sommet mondial sur l’action humanitaire et rendre compte spontanément des progrès accomplis et des meilleures pratiques au moyen de la Plateforme pour l’action, les engagements et la transformation.

Déclarations

Mme SHEYAM HAMED ABDELHAMIED ELGARF (Égypte), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77), a rappelé que les dispositions de la résolution 46/182 de l’Assemblée générale portant sur les principes de l’action humanitaire, notamment l’impartialité, la neutralité et l’indépendance, restent de mise pour l’assistance humanitaire dans le monde et pour la promotion du droit international humanitaire.  Le Groupe s’inquiète des mesures unilatérales et coercitives qui ne respectent pas le droit international humanitaire et encore moins la Charte des Nations Unies.  C’est pourquoi le G77 invite tous les États concernés à respecter les dispositions du droit international humanitaire afin de protéger et assister les civils, y compris ceux se trouvant dans les territoires occupés.  De plus, l’action humanitaire doit respecter la souveraineté et l’intégrité territoriales des pays et ne pas interférer dans les affaires internes des États. 

La coopération internationale, technique et financière venant des États et de l’ONU est indispensable certes, mais elle ne doit pas saper les mécanismes locaux, mais plutôt les renforcer, plaide le G77.  Le Groupe rappelle ainsi que la responsabilité première revient aux États auxquels est destinée l’assistance humanitaire, et que le leadership national est crucial pour initier, organiser et coordonner une telle assistance.  Dans le contexte des besoins croissants, il est important qu’il y ait un financement adéquat et prévisible pour les activités humanitaires à travers des moyens innovants et diversifiés de la part des États, des organisations humanitaires et de développement et le secteur privé.  Tout cela viendrait, a expliqué la représentante, soutenir les efforts engagés par les pays en développement dans le but de renforcer leurs capacités et de mobiliser les ressources locales.  Le G77 encourage donc le système onusien à améliorer ses efforts pour établir des mécanismes de financement anticipés afin de prévoir un soutien humanitaire en temps voulu et s’assurer que l’aide atteigne effectivement les gens dans le besoin.  Dans le projet de résolution de la présente session, le G77 se félicite des éléments nouveaux portant sur le rôle des populations affectées et sur certains accords internationaux.

Le Groupe des 77 et la Chine soulignent la nécessité de combler l’insuffisance dans la représentativité géographique et du genre dans la composition des personnels humanitaires des Nations Unies, notamment au niveau professionnel et en ce qui concerne les hauts fonctionnaires.  Il faut donc que les statistiques sur ces personnels soient disponibles et que le Secrétariat communique sur les mesures prises pour résoudre ce problème.  Enfin, « même s’il faut resserrer les liens entre activités humanitaires et de développement, le G77 souligne qu’il ne faut pas brouiller les lignes qui séparent ces deux types d’activités et plaide pour que leurs mandats et priorités soient préservés, afin de garder leurs avantages comparatifs dans une approche intégrée et coordonnée ».

Mme LACHEZARA STOEVA, Union européenne, a prôné un système humanitaire plus « proactif », capable d’anticiper les crises et les catastrophes.  Une autre tâche importante est d’améliorer la cohérence et la coopération tout en respectant les principes humanitaires.  La personne, a poursuivi la représentante, doit être au centre l’action humanitaire.  Il faut aussi améliorer l’efficacité de cette action et mettre en œuvre les recommandations du suivi du Sommet mondial sur l’action humanitaire, dont le pacte relatif au financement de l’action humanitaire.  Avec les piliers que sont la Déclaration de New York et le futur Pacte mondial sur les réfugiés, on peut, a-t-elle estimé, faire baisser la pression sur les pays hôtes, améliorer la résilience des réfugiés, examiner plus avant les solutions impliquant des pays tiers et aider les pays d’origine à assurer aux réfugiés un retour sûr et digne.  Traiter du déplacement interne doit aussi être une de nos priorités, a ajouté la représentante. 

Mme Stoeva s’est félicitée de ce que la résolution de cette année mette davantage l’accent sur les enfants, les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées.  Mais elle a prôné des améliorations aux systèmes d’alerte et d’action rapides et une meilleure prise en compte des déplacés et de l’éducation.  Il faut insister plus encore sur le respect du droit humanitaire international et sur un accès humanitaire total, rapide, constant, sûr et sans entrave.  Il faut aussi tenir compte de l’impact des mesures antiterroristes sur la fourniture d’une aide humanitaire fondée sur des principes.  La représentante n’a pas caché ses préoccupations face à la « régression » des discussions sur la santé sexuelle et reproductive.  L’opérationnalisation des mesures telles que celles prévues dans le Dispositif minimum d’urgence pour la santé reproductive en situation de crise ont un impact direct sur la prévention de la mortalité et la morbidité maternelle, a-t-elle souligné, regrettant que le consensus dégagé n’ait pu être préservé.

Au nom du Mexique, de l’Indonésie, de la République de Corée, de la Turquie et de l’Australie (MIKTA), Mme CATHERINE GILL (Australie) a déclaré que les nombreuses crises humanitaires dans le monde empêchent de parvenir à un monde pacifique et de réaliser le développement durable.  Elle a estimé qu’une action humanitaire rapide est nécessaire pour relever le défi du développement et de la paix.  Pour y parvenir, la coopération internationale est importante.  Les États doivent essayer d’obtenir des résultats communs et faire connaitre les enseignements pratiques.  Les réponses aux priorités humanitaires actuelles sont façonnées par le Programme 2030, le plan d’action du Sommet mondial sur l’action humanitaire et le pacte mondial sur les réfugiés.  Les parties prenantes à ces accords internationaux doivent tenir leur promesse, a exhorté la représentante. 

Les pays du MIKTA se sont engagés à des plaidoyers pour accélérer la mise en œuvre du Cadre de Sendai, a-t-elle indiqué.  Elle a aussi souligné l’importance du partenariat public-privé dans les mesures de préparation aux crises.  Il faut en outre s’attacher à l’égalité des sexes dans les situations de crise, et aider les femmes à faire face aux crises humanitaires, a exhorté la représentante pour qui la réalisation des objectifs de développement durable ne se fera pas sans les filles et les femmes, et sans satisfaire leurs besoins.  De plus, les interventions humanitaires doivent prendre en compte les personnes handicapées.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a dit que la communauté internationale doit travailler de concert pour sauver les vies.  Il faut, à cet effet, qu’elle ait un accès sans entrave aux gens dans le besoin, notamment les civils pris au piège dans les conflits.  L’Arménie a récemment organisé des discussions sur le rôle des médias sociaux et des technologies de l’information et des communications (TIC) dans le contexte des crises humanitaires.  Ce débat a permis de relever que ces outils peuvent permettre aux gens de rester en contact et de rechercher de l’aide.

Le représentant a ensuite condamné toutes les formes d’attaques contre les travailleurs des médias et autres bloggeurs.  Il a aussi plaidé pour que l’ONU s’investisse davantage dans la diplomatie préventive afin d’empêcher la survenance des crises.  La forte prévalence des discours haineux fait partie des signes précurseurs des conflits facilement identifiables, a-t-il souligné.  C’est pour empêcher que les génocides ne se reproduisent que l’Arménie est à la tête d’une campagne internationale contre l’impunité concernant les crimes de génocide et de guerre. 

Selon Mme CRISTINA CARENZA (Italie), une réponse humanitaire durable exige une action précoce et coordonnée.  Elle a défendu le caractère impartial, neutre et indépendant de l’action humanitaire.  En particulier, elle a demandé le respect de la neutralité des écoles et des hôpitaux pendant les crises humanitaires.  Elle a reconnu que l’accès humanitaire est une question délicate. 

La déléguée italienne a également souligné l’importance de traiter la question des migrations à la racine.  Pour cela, il faut travailler avec l’Afrique et accroître les capacités pour en finir avec les crises, et promouvoir la réhabilitation et le développement.  Elle a réitéré l’intention de son gouvernement de respecter les engagements pris à l’issue du Sommet mondial sur l’action humanitaire d’Istanbul: il faut être le plus local possible, il faut aussi encourager l’investissement du secteur privé, la prévention et le rôle des femmes dans la consolidation de la paix. 

M. SUPARK PRONGTHURA (Thaïlande) a plaidé en faveur d’une approche intégrée et globale des crises humanitaires.  Soulignant que l’État qui connaît une crise humanitaire devrait rester le premier responsable de la gestion de la crise sur son sol, il a expliqué que cela devait néanmoins se faire en coopération avec les Nations Unies et d’autres partenaires de développement et dans le respect du droit humanitaire international ainsi que du droit international sur les droits de l’homme.  Il faudrait, à ses yeux, accorder la priorité à la protection des civils et du personnel humanitaire, et veiller à ce que les hôpitaux et les écoles ne soient pas pris pour cible. 

Le représentant a également mis l’accent sur l’importance de renforcer la coordination des actions humanitaires entre organismes concernés, en particulier avec les équipes de pays.  D’après lui, le travail humanitaire des Nations Unies et d’autres organisations ne devait pas remplacer les capacités humanitaires nationales mais plutôt les renforcer et qu’il faut placer les personnes au cœur de toute action humanitaire.  En tant que pays situé au cœur d’une zone souvent frappée par des catastrophes naturelles, la Thaïlande attache une attention particulière à la gestion des catastrophes de manière efficace et rapide.  Elle a misé sur la résilience et la préparation des communautés locales, a expliqué M. Prongthura.  Elle a également été un partenaire humanitaire sérieux, notamment dans le cadre de l’Accord de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur la gestion des catastrophes et les interventions d’urgence, a-t-il assuré. 

Mme LOUISE BLAIS (Canada) a plaidé pour que le plein respect du droit international humanitaire qui est de plus en plus foulé au pied.  Elle a rappelé que les ministres des affaires étrangères des pays du G7, récemment réunis au Canada, ont pris l’engagement de faire respecter le droit international humanitaire, grâce notamment à des partenariats et des programmes de renforcement de capacités des pays en développement. 

La représentante a estimé que les solutions aux déplacements forcés doivent tenir compte des causes profondes des conflits.  Elle a invité la communauté internationale à prendre des mesures pour protéger les jeunes filles et garçons, ainsi que les handicapés qui sont parmi les populations les plus vulnérables en situation de conflit.  Elle a plaidé pour que toutes les interventions humanitaires adoptent désormais une démarche sexospécifique, soulignant que les ministres des affaires étrangères du G7 ont également prévu de s’engager contre la violence sexiste qui a parfois lieu dans le cadre des interventions humanitaires.  « Nous avons la capacité de relever ces défis si nous travaillons ensemble », a-t-elle affirmé.

M. PHILIPPE BESSON (Suisse) a mis l’accent sur la nécessité de préserver l’espace humanitaire, face notamment aux violations « innombrables » du droit international humanitaire et des droits de l’homme, à l’impossibilité d’accéder dans de nombreux cas aux populations dans le besoin, à la mise en œuvre par certains pays de mesures antiterroristes allant à l’encontre des principes humanitaires et à la multiplicité des attaques prenant pour cible le personnel médical.  « Le remède à ces défis est bien connu », a affirmé M. Besson, avant d’ajouter: « Le droit international humanitaire et les droits de l’homme doivent être respectés par toutes les parties au conflit ».

S’agissant tout particulièrement de la protection du personnel médical, le représentant a appelé à mettre pleinement en œuvre la résolution 2286 du Conseil de sécurité.  « Il est intolérable de demeurer indifférent aux attaques contre la mission médicale », a-t-il déclaré, ajoutant que de telles attaques avaient des conséquences désastreuses, non seulement en termes de vies humaines, mais également de destruction des infrastructures de santé de pays entiers.  En outre, a déclaré M. Besson, les mesures de lutte contre le terrorisme ne doivent en aucun cas criminaliser l’assistance médicale.  Par ailleurs, bien que la résolution adoptée le 31 mai 2018 par l’Assemblée générale sur la réforme du système de développement des Nations Unies ne fasse pas directement référence au secteur humanitaire, il a souligné que la réforme aurait des conséquences sur le travail des coordonnateurs humanitaires.  Il a ainsi appelé à renforcer, dans le cadre de sa mise en œuvre, les synergies entre les acteurs humanitaires et ceux de la paix, du développement et des droits de l’homme.

Pour M. CLAUS LINDROOS (Finlande), nous avons la responsabilité d’aider et d’assurer que l’aide soit apportée à ceux qui en ont besoin.  Le premier défi est de trouver les moyens d’aider, a-t-il reconnu.  Mais le défi le plus important est de prévenir les causes des crises humanitaires.  Le représentant s’est dit préoccupé par le nombre croissant de violations des droits fondamentaux dans le monde, en particulier les attaques contre les écoles, les hôpitaux et les institutions publiques.  « Il faut que cela cesse. »  Il faut aussi faire plus pour traiter des cas des personnes handicapées durant les crises humanitaires.  Plus globalement, le représentant a indiqué qu’il attendait les nouvelles directives sur les personnes handicapées des Nations Unies.  La Finlande appuie aussi les efforts en vue de combattre les violences sexistes.  Ces efforts nécessitent un mécanisme de contrôle plus efficace, a-t-il estimé.  Avant de terminer, le représentant a reconnu la nécessité d’un effort collectif important de financement pour répondre aux besoins humanitaires.

M. NAZIFULLAH SALARZAI (Afghanistan) a rappelé que son pays faisait face à des problèmes humanitaires graves.  Il a déploré les actes délibérés à l’encontre de lieux civils comme les écoles et les mosquées qui ne font qu’aggraver la crise humanitaire.  Vient s’ajouter à cela le rapatriement de personnes déplacées, soit deux millions de personnes cette année, ce qui complique encore la situation.  À la mi-avril, la Ministre de l’agriculture a déclaré une sècheresse dans le pays ce qui signifie que les conditions de vie d’environ deux millions de personnes supplémentaires sont menacées, a précisé le représentant.  Les activités humanitaires en Afghanistan ont reçu 120 millions de dollars cette année, ce dont il a remercié les Nations Unies et la communauté internationale, avant de lancer un appel pour que le plan humanitaire pour 2018 soit entièrement financé compte tenu des difficultés évoquées plus haut.  « Aujourd’hui plus que jamais il est clair que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ne sera pas réalisable si on ne tient pas davantage compte de la dimension environnementale », a-t-il conclu.

M. THOMAS ZAHNEISEN (Allemagne) a indiqué qu’en 2016, son pays était devenu le deuxième donateur humanitaire au niveau international.  Il a ajouté qu’il faut renforcer le système humanitaire des Nations Unies et agir à l’unisson pour protéger les agents humanitaires sur le terrain.  « À long terme, les donateurs traditionnels ne pourront pas assurer les besoins croissants humanitaires », a-t-il prévenu.  C’est la raison pour laquelle l’Allemagne encourage le fait de trouver de nouveaux moyens innovants de financement et plaide pour la réforme du système de financement.  Le représentant a ajouté qu’il était favorable à l’approche anticipative évoquée durant le sommet d’Istanbul et a salué l’accent mis sur les violations sexistes.  Il a souhaité que cette session insiste aussi sur la réduction des besoins humanitaires.  C’est une tâche difficile mais nous nous attendons à ce que le système fasse la différence sur le terrain, a-t-il dit.  « Le plus grand défi est la réduction de l’espace de travail pour les acteurs humanitaires. » 

M. CHULL-JOO PARK (République de Corée) a souhaité que l’assistance humanitaire se concentre sur des interventions vitales pour les personnes les plus vulnérables, comme les enfants, les femmes et les filles et les personnes handicapées.  Il s’est dit très préoccupé par les violences sexuelles commises contre les femmes et les filles en situation de conflit.  Jugeant que les crises humanitaires et les défis de développement et sécuritaires ne peuvent être dissociés, le délégué a plaidé pour une cohérence accrue au sein du système onusien en vue d’améliorer la réponse sur le terrain.  Il a ensuite souligné la nécessité de « ressources flexibles et prévisibles » pour financer les efforts humanitaires, avant de mentionner l’augmentation de l’aide humanitaire fournie par son pays.  Enfin, il a rappelé l’importance d’améliorer l’efficacité du système humanitaire et exprimé son soutien, à cette fin, à des transferts en liquide pour renforcer la résilience sociale après une crise.

M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a reconnu la complexité croissante des crises humanitaires dans le monde, à la fois en termes de financement et de populations cibles.  « Une aide en temps voulu s’impose de plus en plus pour faire face aux besoins actuels », a-t-il déclaré. C’est pourquoi le Japon a décidé de verser plus de 600 millions de dollars à la gestion des crises humanitaires sur le plan multilatéral, ainsi que 14 millions à la Syrie et au Moyen-Orient, y compris pour la lutte contre le terrorisme.  Il fournit également une aide technique bilatérale et travaille en collaboration avec des organisations non gouvernementales locales.

Pour le représentant, les contributions seules ne suffisent pas.  Elles doivent s’accompagner d’une gestion efficiente et d’une prise en compte des liens entre l’humanitaire et la paix.  « Il est temps pour la communauté internationale de se concentrer sur la communication des bonnes pratiques au lieu de se concentrer sur des normes et des concepts », a-t-il estimé.  Le Japon encourage en outre un acheminement de l’aide humanitaire grâce aux nouvelles technologies dans un souci d’efficience et de meilleur impact.  En conclusion, il a préconisé de « placer la sécurité humaine au cœur même des actions humanitaires ».

M. JEROEN COOREMAN (Belgique) a dénoncé la situation grave des enfants dans les crises humanitaires.  Le maintien du statu quo n’est plus une option, a-t-il ajouté en rappelant les engagements d’Istanbul.  Pour sa part, le Gouvernement belge a augmenté son budget humanitaire.  Mais en matière de financement, le délégué a préconisé plus de complémentarité et de synergie pour trouver des solutions aux crises prolongées.  Il a souligné l’importance de la coopération avec la société civile et le secteur privé.  Ce type de financement avec une approche sur les besoins à long terme est conçu pour mieux aider la personne affectée.  « La réforme du système des Nations Unies offre enfin une occasion d’améliorer notre action humanitaire », s’est-il félicité. 

M. BJORN HOFMANN (Pays-Bas) s’est félicité de l’adoption de la résolution 2417 (2018) du Conseil de sécurité qui vise à briser le cercle vicieux qui existe entre conflit et famine.  Affamer de manière délibérée une population est un crime qui ne doit pas rester impuni, a-t-il dit.  Il a souligné la nécessité d’éliminer la famine comme méthode de guerre et demandé l’application de la résolution précitée.  Le délégué a plaidé pour un appui psychologique accru aux personnes victimes de traumatismes en raison de conflit ou de catastrophe naturelle.  Cela n’est pas qu’une question de financement, a-t-il déclaré.  « Nous devons nous améliorer dans la manière dont nous utilisons l’expertise et les connaissances qui sont disponibles. »  Enfin, le délégué a indiqué que son pays resterait en première ligne des efforts d’innovation visant à améliorer la réponse apportée aux victimes de conflit et de catastrophe naturelle.

Mme LENI STENSETH (Norvège) a constaté que les appels humanitaires de l’ONU souffrent d’un « sous-financement chronique » et que les violations du droit humanitaire international et des droits de l’homme se multiplient.  La Norvège, qui tient absolument à renforcer l’action humanitaire, publiera une nouvelle stratégie avec un certain nombre de priorités.  Mais pour l’heure, la représentante a insisté sur six points, à commencer par le respect du droit international humanitaire par toutes les parties à un conflit armé qui doivent assurer un accès rapide, total, impartial et sans entrave aux populations dans le besoin. 

Il faut faire plus, a poursuivi la représentante, pour protéger les enfants et les jeunes gens dans les situations de conflit.  Elle a exhorté tous les États à mettre en œuvre la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.  Elle a aussi jugé qu’il faut faire plus pour répondre aux besoins des femmes.  La violence sexuelle dans les conflits étant une réalité, la représentante a estimé qu’assurer un accès sûr et fiable aux services de santé sexuelle et reproductive et aux conseils psychosociaux est crucial pour l’efficacité de l’aide humanitaire.  Le Dispositif minimum d’urgence pour la santé reproductive en situation de crise a un impact immédiat, a souligné la représentante qui a d’ailleurs estimé que la résolution de cette année doit comprendre des dispositions plus fortes sur cette question.

La Norvège, a-t-elle annoncé, restera l’un des principaux donateurs de l’action humanitaire.  Ces cinq dernières années, le pays a augmenté son budget humanitaire de plus de 50%.  Elle soutient les fonds de financement commun et continue d’appeler à plus d’efficacité et à l’innovation, dont un recours plus systématique aux approches impliquant la distribution d’argent liquide et le « pacte relatif au financement de l’action humanitaire ».  La représentante a aussi souligné l’importance de la Plateforme mondiale sur les réfugiés et le Cadre d’action globale pour les réfugiés, estimant que le vingtième anniversaire des Principes directeurs relatifs aux déplacés offre une excellente occasion de mobiliser l’appui international et de lancer un agenda de haut niveau sur la prévention et l’amélioration de la réponse aux déplacements.

M. RUBÉN E. ARMANDO (El Salvador) a rappelé que l’Amérique centrale était frappée de façon récurrente par des phénomènes météorologiques comme El Niño, La Niña et les sécheresses ou pluies torrentielles qui les accompagnent.  Cela l’a amené à inviter l’ECOSOC et la communauté internationale à reconnaître l’impact de ces « petites catastrophes », qui ne font pas la une des journaux, mais s’inscrivent dans la durée.  Les catastrophes naturelles n’étant pas la seule source de crises humanitaires, le représentant a reconnu les conséquences graves des conflits.  À ce titre, il a appuyé le processus de Genève qui vise à créer des mécanismes pour sauvegarder le respect du droit international humanitaire.  El Salvador encourage en outre les organes humanitaires onusiens et autres à faire appel à des entreprises locales comme partenaires de l’action humanitaire. 

Le représentant a également appelé l’ECOSOC à se pencher sur la situation des enfants migrants originaires d’Amérique latine sur leur principale route de migration en insistant sur le fait que « les séparer de leurs parents constitue une violation des droits de l’homme ».

M. NKM SELEKA (Afrique du Sud) a indiqué que la création du cadre politique d’aide humanitaire du Département des relations internationales et de la coopération témoigne du sérieux que l’Afrique du Sud accorde à la « diplomatie humanitaire », précisant que cette politique avait permis de mieux axer et rationaliser l’aide octroyée par son pays.  Il a aussi précisé que lors de sa présidence du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), son pays mettra l’accent sur l’engagement et la coopération humanitaires et proposera d’en faire un élément permanent.  Il a ensuite a encouragé l’Union africaine à finaliser le plan de mise en œuvre décennal de la Position africaine commune.

L’Afrique du Sud a par ailleurs accueilli, du 13 au 16 mars, la deuxième réunion d’experts des États membres de l’Union africaine chargés d’examiner le projet de Protocole sur la nationalité et l’apatridie.  Elle a en outre présidé, en février de cette année, la réunion inaugurale du Groupe de coordination sur les terres arides (DCG).  Le représentant a d’ailleurs vu dans le DCG « un microcosme de la nouvelle manière de travailler pour combler les écarts entre l’humanitaire et le développement » en rassemblant les donateurs sur une plateforme commune afin de mieux saisir les risques et coordonner la réponse.

M. FABIÁN OSWALDO GARCÍA PAZ Y MIÑO (Équateur) a rappelé que les protocoles additionnels aux Conventions de Genève et les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays restent des instruments essentiels pour protéger les populations les plus vulnérables du monde pendant les conflits armés ou d’autres situations d’urgence.  Il a jugé important d’examiner les mesures prises pour améliorer la coordination et l’efficacité des interventions humanitaires en ce qui concerne la famine et le risque de famine et d’insécurité alimentaire grave, les crises liées au climat, les déplacements forcés, le financement et le renforcement de l’action humanitaire à l’ère du Programme 2030 et de la promesse de ne pas faire de laissés pour compte.  Le représentant a réaffirmé l’engagement de l’Équateur à promouvoir des réponses d’urgence plus efficaces en milieu urbain, conformément à la Déclaration de Quito sur les villes et les établissements humains viables pour tous.

Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a rappelé que plusieurs agences de l’ONU avaient averti à diverses reprises de l’incapacité d’atteindre certains des objectifs de développement durable dans les délais prévus, et du fait que le Programme d’Addis-Abeba sur le financement du développement est « tout simplement ignoré » dans des domaines pourtant cruciaux pour les pays les plus défavorisés.  Elle a mentionné les progrès accomplis par Cuba en termes d’alerte précoce, de gestion des urgences et de relèvement, ce qui a permis de sauver la vie de près de deux millions de personnes touchées récemment par les ouragans.  Elle a aussi parlé des activités de coopération internationale menées par son pays, avec l’envoi de milliers de travailleurs humanitaires cubains pour aider dans des situations d’urgence après des catastrophes naturelles ou des épidémies en Amérique latine, dans les Caraïbes, en Afrique et en Asie.

La représentante a ensuite souligné un des plus grands défis dans la conduite d’activités de réponse à des situations d’urgence, qui est de ne pas les utiliser come justification pour transgresser des principes inaliénables du droit international.  Tout progrès pour renforcer les capacités des Nations Unies à répondre à des urgences humanitaires doit être basé sur la reconnaissance expresse de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de la non-ingérence dans les affaires internes d’un État, a-t-elle insisté, avant de plaider en faveur d’un transfert de technologies et de savoir vers les pays en développement.

M. NIKLAS WIBERG (Suède) a prévenu que de grandes parties de « l’agenda du changement » adopté au Sommet mondial sur l’action humanitaire sont désormais ignorées.  Les crises humanitaires exigent des solutions politiques, a souligné le représentant.  La Suède, a-t-il rappelé, est depuis des décennies un des six plus grands donateurs de l’action humanitaire.  Depuis que le pays siège au Conseil de sécurité, il a fait du renforcement de l’action humanitaire une priorité, insistant sur le nexus « développement-action humanitaire ».  L’un des principaux défauts du financement actuel, a estimé le représentant, est le manque de souplesse.  L’attachement de la Suède à cette souplesse se voit d’ailleurs dans son appui « substantiel » au Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF).  La semaine dernière, la Suède a signé un accord avec le CERF prévoyant le versement de 2,7 milliards de couronnes suédoises sur une période de quatre ans.  Cette contribution « souple, prévisible et à long terme » contribuera à assurer une aide vitale aux gens qui en ont le plus besoin. 

L’attitude des donateurs doit changer, a estimé le représentant, indiquant qu’avec d’autres, la Suède travaille à des incitations pour réduire les financements pré-affectés et mettre en place un système de financement pluriannuel.  À son tour, il a, s’agissant de la résolution négociée cette année, dénoncé « la régression dans les discussions sur la santé sexuelle et productive ».  Des mesures telles que le Dispositif minimum d’urgence pour la santé reproductive en situation de crise ont un impact immédiat sur la prévention de la mortalité et la morbidité maternelles, a-t-il argué.

Alors même que les financements humanitaires ont atteint leur plus haut niveau, a noté M. STEPHEN SCOTT (Australie), il n’a été possible de venir en aide qu’à 100 millions de personnes sur les 130 millions qui dépendent de l’aide humanitaire. Il a vu dans le Pacte mondial sur les réfugiés « une occasion unique » pour guider les actions humanitaires et réformer le système humanitaire de manière à mieux satisfaire les besoins croissants dans le monde.

Pour l’Australie toute assistance humanitaire efficace passe par des investissements au niveau local, qu’il s’agisse d’acteurs ou des capacités. Il faut également accorder un intérêt particulier aux femmes, aux personnes handicapées et à la communauté LGBT, notamment par le biais de partenariats.  Pour justifier ce point de vue, le représentant a affirmé que 23% des réfugiés syriens ont une forme d’handicap.  Selon lui, « un financement humanitaire ciblé est au cœur d’un système humanitaire mieux adapté ».  D’où son soutien à des approches pluriannuelles qui permettent plus de flexibilité. 

Mme INA H. KRISHNAMURTHI (Indonésie) a estimé qu’un processus participatif inclusif, dans lequel seraient impliqués l’ensemble des acteurs humanitaires et parties prenantes, est impératif pour répondre à toute crise humanitaire.  Elle a souhaité que le Forum examine plus avant la possibilité de créer une synergie entre l’aide octroyée par l’ONU et les efforts des entités régionales et nationales.  Évoquant les ressources « surexploitées » de l’ONU, elle a jugé nécessaire d’identifier des systèmes de financement novateurs, relevant qu’il existe de plus en plus d’acteurs humanitaires, y compris dans le secteur privé, avec qui il conviendrait d’envisager de collaborer afin, notamment, de combler les écarts de financement.  Il serait également opportun d’intensifier l’alignement stratégique et la cohérence entre l’ECOSOC et le Conseil de sécurité, a-t-elle ajouté.

La représentante a ensuite indiqué que l’Indonésie avait promulgué, en 2010, un décret présidentiel pour venir en aide aux réfugiés et aux demandeurs d’asile sur la base de leurs besoins humanitaires.  Elle a également appelé à répondre aux causes des crises humanitaires en renforçant « l’écosystème de la stabilité mondiale », à commencer par la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme et la radicalisation.

Son pays est l’un de ceux qui sont les plus touchées par les conséquences des changements climatiques, a relevé Mme NGA HOANG (Viet Nam).  Le typhon qui a balayé en 2017 le Viet Nam a fait plus de 300 morts et des millions de sans-abris.  La représentante a plaidé pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris pour faire face aux effets des changements climatiques.  Déjà 34 régions vietnamiennes ont élaboré leurs propres plans d’action de l’Accord, a indiqué la représentante qui a annoncé d’autres mesures.  Il faut, a-t-elle ajouté, des ressources pour le relèvement après les catastrophes et les populations doivent avoir les connaissances et les informations nécessaires pour y répondre.  De même, les personnes handicapées nécessitent une attention particulière et doivent participer aux décisions qui les concernent.  Le Viet Nam a lancé plusieurs initiatives aux Nations Unies sur les changements climatiques, a rappelé la représentante, en soulignant l’importance de la réduction de la vulnérabilité aux risques. 

Mme MARY E. FLORES FLAKE (Honduras) a rappelé que les changements climatiques étaient l’un des défis les plus complexes du XXe siècle.  Or, a-t-elle déploré, les pays en développement comme le Honduras subissent de plein fouet les effets des changements climatiques, en plus de devoir lutter contre la pauvreté et promouvoir le développement économique.  Historiquement, a ajouté la représentante, l’Amérique centrale est régulièrement victime de sécheresses.  Ces dernières sont de plus en plus aggravées par le phénomène climatique El Niño, qui affecte la sécurité alimentaire des populations et la production agricole.  Si nous ne prenons pas les mesures qui s’imposent, a-t-elle mis en garde, les ressources naturelles et la qualité de vie des populations continueront de s’amenuiser.

      La représentante a par conséquent souligné que l’accès au financement climatique était une priorité pour son pays.  Toutefois, a-t-elle insisté, ce dernier ne doit pas se traduire par une diminution des fonds d’aide au développement dans d’autres domaines.  En effet, en tant que pays à revenu intermédiaire, elle a expliqué que le Honduras éprouvait de plus en plus de difficultés d’accès à des financements internationaux.  Elle s’est notamment dite préoccupée par le fait que, dans de nombreux cas, l’allocation de ressources pour lutter contre les changements climatiques soit liée à l’aide publique au développement.

M. BRIAN FLYNN (Irlande) a noté qu’en dépit de la persistance des besoins et des écarts de financement, l’appel à l’action, l’an dernier par le Secrétaire général, pour prévenir la famine au Soudan du Sud, en Somalie, au Nigéria et au Yémen, avait suscité une importante mobilisation de la communauté internationale qui est venue en aide à près de 15 millions de personnes.  Cette mobilisation, s’est-il félicité, démontre la capacité qu’a le système humanitaire de réagir aux alertes précoces.  Il a aussi vu dans la stabilisation de l’irruption d’Ebola en République démocratique du Congo le signe que la communauté internationale réagit plus rapidement et de manière plus effective à de telles crises.

M. Flynn a par ailleurs constaté que les crises nées de conflits prolongés, qui se déroulent de plus en plus souvent dans des contextes urbains, exigent des réponses distinctes.  Il a jugé nécessaire de « dépasser la rhétorique du noyau humanitaire-développement pour privilégier une planification commune, le partage d’analyses et une programmation cohérente sur le terrain ».  Tout en reconnaissant que l’opérationnalisation de ce noyau doit être adaptée au contexte, il a estimé que des cadres mieux définis permettraient aux acteurs humanitaires et de développement au niveau des pays de collaborer, tout en sachant que les lignes rouges ont été identifiées pour assurer la protection de l’espace humanitaire.  Dans cet esprit, l’Irlande, a-t-il précisé, présidera le Groupe de donateurs pour l’appui au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Le représentant a aussi parlé de l’importance du rôle du Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF) et des fonds de financement commun au niveau des pays et s’est inquiété du fait que l’objectif de mobiliser 30% de fonds non réservés et affectés d'une manière non contraignante d’ici à 2020 ne sera pas atteint.

Mme MAKBULE BAŞAK YALÇIN (Turquie) a mis en avant la situation des 65 millions de personnes déplacées dans le monde en remarquant que l’aide humanitaire peut certes atténuer leurs souffrances mais ne saurait y apporter de solution durable.  Pour la Turquie, les deux pactes mondiaux sur les migrants doivent permettre de ne laisser personne de côté en façonnant de nouvelles approches et en développant des modèles de partage des responsabilités équitables.  En effet, comme l’a noté la représentante, « les pays limitrophes des zones de conflit payent aujourd’hui un lourd tribut et la Turquie en fait partie ».

Pour réaliser les objectifs de développement durable, il lui semble impératif de parvenir à la parité et d’autonomiser les jeunes, mais aussi de miser sur l’éducation pour lutter contre les crises.  À cet égard, la Turquie assure actuellement l’éducation des enfants réfugiés syriens, « les syriens de demain », qui se trouvent sur son territoire, a-t-elle affirmé.  Il faut également faire face aux vulnérabilités des migrants, en renforçant les capacités face aux flux de migrants et en forgeant de nouveaux partenariats, a estimé la représentante. 

M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a rappelé que son pays avait subi, le 26 février dernier, une catastrophe humanitaire sans précédent, suite au tremblement de terre de magnitude 7,5 survenu dans cinq provinces de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui ne s’en est toujours pas remis.  Le représentant a estimé à 62 millions de dollars les fonds nécessaires pour rétablir les services de base et porter secours à la population du pays.  À ce jour, la Papouasie-Nouvelle-Guinée a reçu 61,5 millions de dollars de fonds au titre de l'assistance en cas de catastrophe, a-t-il salué.  Dans cette perspective, le représentant a appuyé les efforts de l’ECOSOC en matière humanitaire, comme en témoigne selon lui le projet de résolution sur le « Renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies ».

Il faut des solutions réalistes pour faire face aux défis des crises humanitaires à travers le monde, a déclaré M. TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria).  Il a souligné l’importance d’accélérer la mise en œuvre du Programme 2030.  Au niveau national, a expliqué le délégué, les agissements de Boko Haram ont obligé le Gouvernement à faire face aux déplacements internes de populations et d’autres formes de crises humanitaires.  L’élaboration du deuxième plan d’action national humanitaire a fourni un cadre global et cinq piliers stratégiques pour gérer l’après conflit.  Chaque État fédéré s’est doté de son propre plan d’action.  Nous avons nos propres priorités humanitaires pour faire face aux nouvelles crises, a indiqué le représentant.  Pour respecter les engagements pris, un comité consultatif a été créé.  Le Gouvernement se focalise en particulier sur la prise en charge des jeunes filles victimes d’enlèvement, a fait savoir le représentant qui a aussi dévoilé le plan d’action pour le développement du nord-est qui vise notamment à aider celles-ci à s’intégrer dans la société.  De plus, un plan d’action de déradicalisation des jeunes a reçu l’aide de la société civile sous différentes formes, en partenariat avec plusieurs organisations internationales.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Comité de la décolonisation: les politiques fiscales américaines et britanniques inquiètent Guam, les îles Vierges américaines et les îles Turques et Caïques

Session de 2018,
7e séance plénière – matin
AG/COL/3325

Comité de la décolonisation: les politiques fiscales américaines et britanniques inquiètent Guam, les îles Vierges américaines et les îles Turques et Caïques

Les politiques fiscales imposées à Guam, aux Îles Vierges américaines et aux Turques et Caïques ont été, vivement critiquées aujourd’hui au Comité spécial de la décolonisation qui a entendu des pétitionnaires, avant d’adopter deux projets de résolution sur l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance par les organismes de l’ONU et les activités préjudiciables aux peuples des territoires non autonomes. 

Activités préjudiciables?  Une pétitionnaire a fustigé la politique fiscale du Gouvernement des États-Unis à Guam qui s’est traduite par une perte de 67 millions de dollars de recettes en 2018.  Une réduction de 18% du financement des territoires américains, y compris Guam, est en outre envisagée pour 2019, fragilisant davantage encore les efforts de décolonisation à Guam, a-t-elle averti. 

Même son de cloche du côté d’un pétitionnaire des îles Vierges américaines qui a dénoncé l’imposition fiscale « excessive » décidée par les États-Unis, en violation de la résolution 1514 de l’Assemblée générale et du Traité signé en 1916 entre les États-Unis et le Danemark.  Le pétitionnaire a également accusé les États-Unis de démanteler le système éducatif et le modèle agricole, empêchant les habitants de jouir de leurs ressources naturelles. 

Le Royaume-Uni a également été critiqué par un pétitionnaire des îles Turques et Caïques en raison du décret, adopté hier « unilatéralement », qui exige que les individus et entités divulguent les investissements et les placements qu’ils font dans les îles, au nom d’une prétendue lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et le trafic de stupéfiants.  Le pétitionnaire s’est fermement opposé à la « criminalisation » d’une source essentielle de revenus pour des territoires qui se relèvent à peine des destructions occasionnées par les ouragans de 2017.  « Au lieu de les aider, le Royaume-Uni a décidé de faire un festin des carcasses », s’est-il indigné. 

« L’utilité des investissements économiques étrangers réalisés en collaboration avec les peuples des territoires non autonomes afin d’apporter une contribution valable au développement socioéconomique, en particulier en période de crise économique et financière » devrait être soulignée par l’Assemblée générale, estime le Comité spécial.*  Dans son projet de résolution sur les activités préjudiciables aux intérêts des peuples de ces territoires, le Comité spécial recommande aussi à l’Assemblée de réaffirmer la préoccupation que lui inspirent toutes les activités visant à exploiter les ressources naturelles, de façon à empêcher ces peuples d’exercer leurs droits sur ces ressources.

L’Assemblée devrait aussi prier les institutions spécialisées et les autres organismes des Nations Unies intéressés de fournir des informations sur les effets qu’ont sur les territoires non autonomes, les catastrophes naturelles, telles que les ouragans et les éruptions volcaniques, et d’autres problèmes environnementaux, tels que l’érosion des plages et des côtes et la sécheresse; sur les  moyens d’aider ces territoires à lutter contre le trafic de stupéfiants, le blanchiment d’argent et d’autres activités illégales et criminelles; et sur l’’exploitation illégale des ressources marines et autres ressources naturelles.  Ces dispositions sont énumérées dans le projet de résolution sur l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance par les organismes de l’ONU.**

Par visioconférence, la Porte-parole du Gouverneur de Guam, qui intervenait par visioconférence, a, elle, regretté la nouvelle version du projet de résolution du Comité spécial sur son territoire qui semble remettre en question le fait que Guam est toujours un territoire non autonome dont le peuple revendique son droit à l’autodétermination.

Sans débat, le Comité spécial a également examiné les questions d’Anguilla, des Bermudes, des îles Caïmanes, de Pitcairn, des Samoa américaines et de Sainte-Hélène. 

Le Comité spécial poursuivra ses travaux jeudi 21 juin à 10 heures. 

*A/AC.109/2018/L.6

**A/AC.109/2018/L.9

APPLICATION DE LA DÉCLARATION SUR L’OCTROI DE L’INDÉPENDANCE AUX 10 PETITS TERRITOIRES NON AUTONOMES

Question de Guam

Intervenant par visioconférence, la Porte-parole du Gouverneur de Guam, Mme AMANDA BLAS, a rappelé que l’Assemblée générale a adopté l’an dernier une résolution, qui, à ses yeux, garde toute sa validité et son actualité.  Martelant que Guam est toujours un territoire des États-Unis qui rencontre certaines difficultés, elle a contesté les changements apportés au projet de résolution de cette année, des changements, a-t-elle prévenu, qui risquent d’avoir un impact sur le processus de décolonisation, y compris le libellé sur les dispositions juridiques et la suppression d’un paragraphe.  « Guam est un territoire non autonome dont le peuple revendique son droit à l’autodétermination », a-t-elle réaffirmé.  Elle a jugé qu’il est plus important que jamais que le processus de décolonisation suive son cours, regrettant, une nouvelle fois, que le nouveau projet de résolution ne reflète pas la réalité de Guam.

Malgré l’appui de nombreux pays de l’Assemblée générale, Mme PIM LIMTIACO, Guahan Coalition for Peace and Justice, a rappelé que les États-Unis et leurs alliés ont voté l’année dernière contre la résolution relative à l’exercice du droit à l’autodétermination de Guam.  Elle a blâmé l’Arrêt fédéral américain qui a statué qu’un plébiscite sur l’autodétermination ne peut se limiter aux autochtones.  Or, d’après l’article 33 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, ces derniers ont le droit de décider de leur propre identité ou appartenance conformément à leurs coutumes et traditions, sans préjudice de leur droit d’obtenir, à titre individuel, la citoyenneté de l’État dans lequel ils vivent.  Les peuples autochtones ont aussi « le droit de déterminer les structures de leurs institutions et d’en choisir les membres selon leurs propres procédures ».  La pétitionnaire a recommandé que l’ONU fasse pression pour que les États-Unis s’engagent dans le processus de décolonisation de Guam, conformément au droit international et aux termes de la résolution la plus récente de l’Assemblée générale. 

Mme JULIA FAYE MUNOZ, Indépendant Guahan, a indiqué qu’en raison d’une loi de 2017 sur la création d’emplois et les réductions fiscales le Gouvernement de Guam devrait perdre 67 millions de dollars de recettes fiscales en 2018.  Cette perte significative, qui est de 20 millions de dollars plus élevée que l’estimation initiale qui était de 47,9 millions de dollars, a des conséquences financières importantes.  Les responsables élus ont essayé de les atténuer par des coupes budgétaires, y compris à la Commission de Guam sur la décolonisation.  Chaque équipe spéciale de la Commission a subi une réduction de 60% de son budget pour les campagnes de sensibilisation en 2018.  La faculté de la Commission à sensibiliser la population de Guam à l’importance du droit à l’autodétermination va véritablement être affectée, a-t-elle averti.  Une réduction de 18% du financement des territoires américains, y compris Guam, est aussi proposée pour 2019, ce qui ne ferait que fragiliser davantage encore les efforts de décolonisation de Guam. 

Compte tenu de ce contexte budgétaire, la pétitionnaire a souhaité que le Comité se contente d’une actualisation technique de la résolution de l’année dernière pour refléter fidèlement la situation.  Or, les changements « substantiels » que l’on propose ne reflètent en rien cette situation.  La pétitionnaire a souhaité que le libellé sur la décolonisation, les défis financiers ou les préoccupations face aux décisions de la Cour fédérale sur le plébiscite soit conservé.  Elle a également dénoncé la suppression du paragraphe sur les préoccupations du territoire face à sa présence involontaire dans une zone de tensions régionales.  Les changements proposés pour le projet de résolution de cette année risquent de brouiller la perception de la réalité, sans oublier qu’ils seraient « une insulte » pour le processus de décolonisation. 

Question des îles Turques et Caïques

M. BENJAMIN ROBERTS, Turks and Caicos Forum, a commencé par demander au Comité spécial d’accorder 15 minutes, au lieu des 5 habituels aux pétitionnaires des territoires non autonomes qui viennent souvent de très loin pour plaider leur cause aux Nations unies.  Il a annoncé qu’hier, sans consultation aucune, la Puissance administrante, le Royaume-Uni, a adopté unilatéralement un décret sur ses territoires d’outremer par lequel elle exige la divulgation des intérêts des individus et des entités qui font des investissements et des placements dans ces territoires.  Comme ces individus et entités optent pour ces territoires pour échapper au régime fiscal « sévère » du Royaume-Uni, la Puissance administrante justifie sa décision, en invoquant fallacieusement la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et le trafic de stupéfiants.  Le pétitionnaire s’est fermement opposé à « la criminalisation » d’une source essentielle de revenus pour des territoires qui se relèvent à peine des dégâts après les ouragans de 2017. 

Au lieu de les aider, le Royaume-Uni a décidé de faire « un festin des carcasses » et c’est d’autant plus « discriminatoire et hypocrite » que les îles britanniques de Jersey et de Man, bien connues pour leurs activités bancaires offshore, ne sont pas soumises à la nouvelle réglementation.  Le pétitionnaire a invoqué les Conventions des Nations unies relatives aux obligations et responsabilités des puissances administrantes et plus particulièrement celles stipulant qu’elles doivent favoriser le bien-être des habitants de leurs territoires d’outremer.  Dès lors le Comité spécial doit se saisir de la question et contraindre le Royaume-Uni à revenir sur sa décision.  Il a également dénoncé le fait qu’à ce jour, les îles Turques et Caïques n’ont vu que 2% des fonds promis par la Puissance administrante pour les efforts de reconstruction après les ouragans.

M. ALPHA GIBBS, TC Heritage Communities, a condamné les violations des droits des autochtones perpétrées par la Puissance administrante, qui se départi de ses responsabilités et obligations en vertu de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies relatif aux territoires non autonomes.  À l’heure actuelle, s’est-il plaint, le Gouverneur du territoire est nommé par le Ministère des affaires étrangères et du Commonwealth, à Londres, sans que le Gouvernement localement élu ou le peuple des îles Turques et Caïques n’aient leur mot à dire.  En revanche, ses frais de logement et autres avantages en nature sont à la charge du Trésor public des îles, ce qui n’empêche pas le Gouverneur de se placer au-dessus des lois et de la Constitution des îles. 

M. Gibbs a reproché au Royaume-Uni d’aller à l’encontre des intérêts des habitants des îles.  Chacun sait que les sociétés étrangères embauchent rarement les locaux à des postes de cadre moyen ou supérieur.  De même, il a dénoncé « l’échec lamentable » du Gouverneur à contrôler la migration illégale et à créer les conditions sociales et économiques qui permettraient au territoire de réaliser son indépendance.  Les îles Turques et Caïques supportent par ailleurs depuis neuf ans le financement de l’Équipe spéciale chargée des enquêtes et des poursuites, ce qui détourne des ressources essentielles pour les efforts de reconstruction après le passage des ouragans Irma et Maria en 2017.  En conclusion, il a réclamé une évaluation indépendante et impartiale de la situation dans les îles. 

Question des îles Vierges américaines

M. RUSSEL CHRISTOPHER, OWA-AIVI, a mentionné les « souffrances » des îles Vierges américaines qui découlent du fait que la Puissance administrante continue de violer la résolution 1514 de l’Assemblée générale et le Traité signé en 1916 entre les États-Unis et le Danemark.  Ce Traité, a souligné le pétitionnaire, protège les peuples autochtones d’une imposition fiscale « excessive ».  Il a également parlé d’une corruption répandue et demandé une action forte de l’ONU.  « Si vous voulez priver un peuple de son droit à l’autodétermination, faites comme l’État qui nous contrôle », a-t-il lancé.  M. Christopher a accusé les États-Unis de démanteler le système éducatif et le modèle agricole et d’empêcher les habitants de jouir de leurs ressources naturelles.  Il a donc exigé le respect de toutes les résolutions de l’Assemblée. 

M. CARLYLE CORBIN, du Dependency Studies Project, a rappelé que la participation des territoires non autonomes aux travaux des Nations Unies remonte à 1946, et que leur participation directe aux travaux des Commission régionales en tant que membres associés, à 1992.  Il a salué les études de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CELAC) au cours des 15 dernières années qui ont facilité l’intégration des territoires non autonomes qui sont membres associés de la CELAC et permis de renforcer la capacité de l’ONU de les accompagner dans leur évolution politique et constitutionnelle.  Revenant à l’étude de 2017 de la CELAC, le pétitionnaire a expliqué qu’elle a permis entres autre de cartographier les options stratégiques pour une plus grande intégration de ces territoires.  Il a encouragé le Comité spécial à tenir compte de cette étude dans ses délibérations. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité de la décolonisation appelle l’Assemblée générale à se saisir de la situation de Porto Rico frappée par les ouragans, « Maria, Irma et Plan d’austérité »

Session de 2018,
5e & 6e séances plénières – matin & après-midi
AG/COL/3324

Le Comité de la décolonisation appelle l’Assemblée générale à se saisir de la situation de Porto Rico frappée par les ouragans, « Maria, Irma et Plan d’austérité »

Des infrastructures sociales détruites, un réseau électrique en panne, 4 645 morts, une économie livrée aux « vautours de Wall Street », c’est la situation qu’ont dépeinte aujourd’hui 44 pétitionnaires portoricains, après le passage des ouragans « Maria, Irma et Plan d’austérité ».  En présence de l’ancien « prisonnier politique », Oscar Rivera qui a reçu une ovation debout, le Comité spécial de la décolonisation a répondu à leur appel visant à ce que l’Assemblée générale se saisisse de la question de Porto Rico, « la plus vieille des colonies ».*

La réponse « misérablement inadéquate » des Gouvernements fédéral et central après les ouragans Maria et Irma a provoqué un exode massif où les victimes de cette « tragédie américaine » fuient leur « paradis condamné », emportant avec elles l’opprobre de leur statut de citoyen de deuxième classe déjà confronté au fléau de la « Loi Promesa » qui a incité un « gouvernement éclopé » à privatiser l’ensemble des services, à vendre ce qui reste des terres et à décimer le système éducatif.

Décriée par tous, la « Loi Promesa » de 2016 a donné lieu à la création du Conseil de supervision fiscale, « inféodé aux vautours de Wall Street », qui a imposé un Plan d’austérité prévoyant des compressions budgétaires dans les services publics, les retraites et l’éducation dans le but de rembourser une dette, « non auditée », ont souligné les pétitionnaires, de 74 milliards de dollars.

« Les politiciens courbent l’échine devant les capitalistes et lèchent les bottes des envahisseurs opportunistes », ont ironisé les pétitionnaires, fustigeant « l’arrogance et la cupidité des administrateurs coloniaux » qui ont confié la reconstruction de l’île exclusivement à des entreprises américaines. Littéralement « laissée pour morte », l’île n’est rien de plus qu’une opportunité d’affaires pour « les riches hommes d’affaires blancs ».   

Mais, ont prévenu les pétitionnaires, « alors que le Président Trump nous jetait des rouleaux de sopalin, se moquait de notre misère et nous insultait », le peuple portoricain s’est uni: partis politiques, étudiants, enseignants, syndicats, environnementalistes, religieux, travailleurs et retraités veulent reconstruire « Porto Rico pour les Portoricains ». 

Comme il est difficile d’affronter le « Minotaure du Nord, tant sa force de frappe est grande », le moment est venu de saisir l’Assemblée générale de la situation de Porto Rico, ont plaidé les pétitionnaires.  Le Comité spécial les a entendus et a adopté par consensus une résolution qui prie l’Assemblée générale d’examiner la question de Porto Rico sous tous ses aspects et de manière approfondie, et de se prononcer sur le sujet dès que possible.

Le Comité spécial « note avec inquiétude » que la marge de manœuvre déjà limitée dont dispose « le régime de subordination politique et économique » en place à Porto Rico a encore été réduite.  Il « demande de nouveau » au Gouvernement américain de permettre au peuple portoricain d’exercer pleinement son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance et de prendre des décisions « souveraines » afin de répondre d’urgence à ses besoins économiques et sociaux.

Il prend acte du débat en cours à Porto Rico concernant la mise en œuvre d’un mécanisme qui assurera la pleine participation de représentants de tous les courants d’opinion portoricains, notamment une assemblée constitutionnelle sur la question du statut.  « Independencia para Puerto Rico », ont crié les pétitionnaires à la fin de la réunion.

Le Comité spécial poursuivra ses travaux demain mardi 19 juin à partir de 10 heures.

A/AC.109/2018/L.7

DÉCISION DU COMITÉ SPÉCIAL EN DATE DU 19 JUIN 2017 CONCERNANT PORTO RICO

Rapport établi par le Rapporteur du Comité spécial (A/C.19/2018/L.13)

Porto Rico bénéficie actuellement du statut d’État libre associé aux États-Unis.  Le 11 juin 2017, un nouveau plébiscite a été organisé mais boycotté par 77% des deux millions d’électeurs valablement inscrits, ce qui l’a rendu illégitime.  Les options proposées aux électeurs étaient: le statut d’État fédéré, l’indépendance et la libre association et le statut territorial actuel.  Quatre-vingt-dix-sept pour cent de votants sont favorables à l’option du statut d’État fédéré. 

Les principaux partis politiques de Porto Rico se distinguent essentiellement par leur position au sujet du statut politique définitif, le statu quo ne satisfaisant personne.  Le Partido Popular Democrático (PPD) souhaite un élargissement de l’actuel statut d’État libre associé, qui ne serait ni un territoire dépendant, ni une colonie: l’île ne serait plus soumise à la clause territoriale prévue dans la Constitution américaine.  Les Portoricains conserveraient la nationalité américaine, mais l’île aurait une autonomie accrue pour la gestion de ses affaires intérieures et une plus grande latitude quant à l’établissement de relations régionales et internationales.  Une partie du PPD souhaiterait reconduire l’actuel statut d’État libre associé, qui a été rejeté par la majorité du peuple portoricain à l’occasion du premier volet du plébiscite du 6 novembre 2012. 

Le Partido Nuevo Progresista (PNP) souhaite quant à lui que Porto Rico devienne un État des États-Unis à part entière.  Il bénéficie d’un appui légèrement inférieur à celui du PPD.  Le troisième parti, le Partido Independentista Puertorriqueño, réclame l’indépendance de l’île.  Certains groupes indépendantistes ne participent pas aux élections parce qu’ils considèrent qu’elles s’inscrivent dans une logique colonialiste et ne constituent pas un véritable exercice démocratique, tandis que d’autres ont opté pour une stratégie consistant à voter pour le candidat du PPD au poste de gouverneur afin d’empêcher les partisans du statut d’État fédéré d’accéder au pouvoir. 

Au cours des réunions du Comité spécial, trois questions bien précises ont été soulevées: la présence militaire des États-Unis à Porto Rico, notamment sur l’île de Vieques; l’emprisonnement aux États-Unis de Portoricains indépendantistes, accusés d’atteinte à la sûreté de l’État et de détention d’armes; et l’application de la peine capitale à des Portoricains reconnus coupables d’un crime fédéral.  Depuis quelques années, les persécutions politiques seraient de plus en plus nombreuses.

Audition de pétitionnaires

M. OSCAR LOPEZ RIVERA, Fondation OLR Liberta, a exigé des réponses à plusieurs questions, « car nous nous sentons ignorés par l’Assemblée générale et menacés par ce que le Gouvernement des États-Unis nous a fait et continue de nous faire ».  Pourquoi l’Assemblée n’a-t-elle pas examiné la question de l’éradication du colonialisme à Porto Rico conformément à la résolution 43-47 de 1988?  Est-ce parce que le Gouvernement des États-Unis exerce trop de pouvoir et d’influence sur les membres de l’Assemblée?  M. Rivera a demandé aux membres du Comité spécial d’envisager d’enquêter sur les activités répréhensibles que le Gouvernement des États-Unis mène à Porto Rico depuis 120 ans, comme la dépopulation de l’île et la destruction de son identité nationale.

Le pétitionnaire a souligné le fait que plus de 5 millions de Portoricains sont dans la diaspora alors qu’à peine plus de 3 millions vivent à Porto Rico.  Selon lui, ce processus de dépopulation pose des problèmes pour l’avenir car la majorité des Portoricains qui ont été forcés d’émigrer sont de jeunes professionnels.  Pourquoi tant de Portoricains émigrent-ils? a lancé M. Rivera.  C’est principalement parce que l’économie de Porto Rico est devenue dysfonctionnelle, « à cause des politiques du Gouvernement et de l’industrie bancaire américains ».  Il a dénoncé la dette « odieuse et criminelle » de 74 milliards de dollars qui pèse sur Porto Rico et la supervision fiscale imposé à l’île. 

Or, a-t-il plaidé, les Portoricains ont le droit de savoir où a été dépensé l’argent qui a été pris de leurs poches.  On ne leur dit rien.  Ce qu’ils savent, c’est que plus de 500 écoles publiques ont été fermées et que les frais de scolarité de l’Université de Porto Rico ont augmenté.  L’avenir de l’éducation publique à Porto Rico est gravement menacé, a prévenu M. Rivera.  De plus en plus de Portoricains vont devoir émigrer, remplacés par les fonds spéculatifs, les investisseurs, les promoteurs immobiliers, a-t-il prédit.  « Dans quelques années, Porto Rico va devenir un nouvel Hawaï. »  Mais peut-être pas, s’est-il repris, parce qu’il y a des Portoricains qui n’abandonneront jamais la lutte. 

M. EDGARDO ROMAN-ESPADA, Vice-Président du « Colegio de Abogados y Abogadas de Puerto Rico », a rappelé les nombreuses résolutions adoptées par le Comité spécial et regretté que Porto Rico n’ait toujours pas reçu l’attention qu’elle mérite.  Qualifiant de « subordination politique au Congrès américain » la relation entre son île et les États-Unis, le pétitionnaire n’a pas hésité à dire qu’« à ce jour il n’existe pas de processus de décolonisation et la relation coloniale imposée par le Gouvernent américain est à l’origine de la crise du modèle économique qui prévaut à Porto Rico. »  L’an dernier, la situation économique difficile a été aggravée par le passage des deux ouragans Irma et Maria qui a noyé l’économie.  Le PNB a baissé de 11% entre 2005 et 2016 et les chiffres de l’emploi sont alarmants.  Depuis 2017, à peine 37% de la population est employée et les emplois précaires sont en hausse.  La dette publique a dépassé 70 milliards de dollars, rendant tout remboursement impossible et mettant en danger les services publiques.  Le pétitionnaire a dénoncé la « Loi Promessa » qui a été adoptée l’an dernier et qui a servi à mettre en marche des mesures d’austérité malgré le passage des ouragans qui ont causé la mort de 4 645 morts.

M. ANGEL FUGUEROA, Président de « Union de Trabajadores de la Industria Electrica Y Riego », a dénoncé « le joug colonial » imposé par la « Loi Promessa » qui a entraîné la vente de la société nationale d’électricité.  Il a aussi dénoncé l’avis de la Cour suprême américaine selon laquelle la souveraineté de Porto Rico dépend « exclusivement » du Congrès américain et non pas du peuple portoricain.  Rappelant, à son tour, l’ampleur de la dévastation économique de l’ile après les ouragans qui ont gravement frappé le réseau électrique, il a souligné que l’accès à l’électricité est un droit « fondamental » du peuple portoricain.  Or, la vente de ce « patrimoine social » soumet ce droit aux fluctuations du marché.  « L’électricité est un patrimoine social et le peuple portoricain doit y avoir accès et en avoir le plein contrôle », a-t-il conclu. 

L’indépendantiste, Mme JOCELYN VELAZQUEZ, Frente Socialista de Puerto Rico, a revendiqué le droit à l’autodétermination du peuple portoricain et rejeté la loi adoptée par le Congrès américain « qui a empêché l’ile de se relever ».  Il est indispensable, selon elle, que la communauté internationale entende la voix du peuple portoricain.  Elle a dénoncé la répression de plus en plus forte qu’exerce le Gouvernement local depuis la crise économique.

Mme JUDY SHERIDAN-GONZALEZ, Présidente de la New York State Nurses Association (NYSNA), a décrit l’impact du colonialisme sur la santé du peuple portoricain.  La situation sanitaire et alimentaire intenable qui prévaut dans l’île s’est transformée « en génocide » compte tenu de la réponse « apathique et incompétente » du Gouvernement américain après les dégâts causés par les ouragans, a dénoncé la pétitionnaire.  La désintégration du réseau électrique imposée par l’austérité et la négligence « criminelle » qui a suivi ont directement contribué à la mort de milliers de personnes, a-t-elle poursuivi.  Sans les efforts des Portoricains et la solidarité des autres, le nombre de victimes aurait été plus élevé que les cinq milliers annoncés dans une étude récente.  Mme Sheridan-Gonzales a ajouté que la perte des maisons et des moyens de subsistance, l’exil, le manque de secours, d’aide et d’efforts de réparation de la part du Gouvernement ont entraîné un nombre important de stress post-traumatique, de dépressions et de suicides.  L’austérité imposée par un Comité fiscal non élu pour rembourser les fonds spéculatifs n’a fait qu’empirer les problèmes.  La crise sanitaire à Porto Rico ne pourra être résolue que par l’annulation de la dette, le démantèlement de la jungle fiscale, l’abrogation de la « loi Jones » et des efforts, y compris au nom de la communauté internationale, pour l’autonomie et l’autodétermination de Porto Rico. 

M. JIHAD ABDULMUMIT, National Jericho, s’est présenté comme un « Black Panther », professant sa foi musulmane.  Porto Rico, a-t-il souligné, est « une colonie américaine » soumise au « joug colonialiste ».  Il a accusé la « Puissance occupante » de rester sourde aux « cris » des opprimées et fustigé le mépris du Président Donald Trump à l’égard du Porto Rico.  Il a exhorté le Comité spécial à honorer la résolution 1514 et à améliorer les conditions de vie des Portoricains.  « La répression engendre la résistance », a-t-il prévenu et nous vous demandons de déclarer que Porto Rico doit devenir une nation indépendante, a-t-il conclu, sans oublier d’exiger la libération des prisonniers politiques portoricains. 

Mme NORMAHIRAM PEREZ, A Call to Action on Puerto Rico, a dénoncé le contrôle budgétaire « colonialiste » à Porto Rico et prévenu que la lutte pour l’indépendance est loin d’être achevée.  « Les États-Unis imposent un joug politique et militaire dans notre île », a-t-elle souligné, ajoutant que le « Gouvernement colonial, à la merci des grands intérêts », nie tous les droits constitutionnels.  Elle a exhorté le Comité spécial à lutter contre la répression à Porto Rico et à œuvrer à la libération des prisonniers politiques portoricains.  « Les États-Unis veulent imposer la peine de mort, pourtant interdite par la Constitution de Porto Rico », a-t-elle rappelé, avant de déplorer le fait que le territoire portoricain soit utilisé à des fins militaires et que, du point de vue économique, « Porto Rico consomme ce qu’elle ne produit pas et produit ce qu’elle ne consomme pas ». 

M.RAMON NENADIC, National Sovereign State of Borinken, a dit représenter le Gouvernement provisoire de « l’État souverain national de Borinken », autrefois connu sous le nom de Porto Rico.  « Nous ne sommes pas une organisation mais bien un gouvernement provisoire », a-t-il dit, en réclamant le statut « d’État observateur » à l’Assemblée générale des Nations Unies.  Certains membres de ce Comité, a-t-il estimé, ne comprennent pas la nature de « l’État souverain national de Borinken. »  Il a exhorté le Comité à appuyer son État, sous peine de laisser l’impérialisme de détruire le peuple de Borinken.  Le Gouvernement américain, a-t-il insisté, est responsable des catastrophes qui frappent notre île mais il est difficile d’affronter ce véritable « Minotaure du Nord », tant sa force de frappe est grande. 

Mme MONIKA PONTON ARRINGTON, Indegenous Women Knowledge, a affirmé qu’il y a un génocide en cours contre son peuple, les Tainos, et souligné la différence entre eux et les Portoricains.  Affirmant, à son tour, que c’est la relation coloniale qui empêche l’ile de se relever de sa crise économique et des effets néfastes des deux ouragans, la pétitionnaire a dénoncé le fait que Porto Rico ne soit toujours pas représentée au Congrès américain.  Elle a demandé aux Nations Unies de défendre les droits de son peuple.

Mme MIRIAM MONTES-MOCK, Mesa de Trabajo por Ana Belen Montes en Puerto Rico, a souligné le parallèle entre le courage de la « prisonnière de conscience » Ana Belen Montes et l’urgence pour Porto Rico d’exercer son droit à l’autodétermination.  « Notre peuple est enchainé et la crise économique a servi de prétexte pour assoir le système économique néo-libéral ».  Dans l’esprit de la révolution lancé par Ana Belen à partir d’une prison américaine, la pétitionnaire a lancé à la salle: « allons-nous rester muets face à des mesures qui nous étouffent ou allons-nous passer à la résistance?».  Pour la pétitionnaire il est plus qu’alarmant que le pouvoir économique soit devenu l’objectif suprême des nations. 

M. WALTER ALOMAR, Organization for Culture of Hispanic Origin (OCHO), a rappelé que lors de son intervention devant le Comité spécial l’an dernier, il avait déclaré que « le colonialisme est une forme d’extermination ».  Cela a malheureusement été vérifié, s’est-il alarmé, car les évènements après le passage des ouragans Irma et Maria témoignent d’un manque d’appui « intentionnel » du Gouvernement de États-Unis qui a provoqué le pire désastre de l’histoire du pays.  Le dernier bilan fait état de 4 645 morts, mais soyons réalistes, a dit le pétitionnaire, il est sans doute bien plus élevé.  Il a accusé les États-Unis d’avoir directement provoqué la mort de milliers de personnes.

Il a pointé le fait que le Gouvernement fédéral avait mis quatre mois pour rétablir 10% de l’électricité.  Une situation similaire serait-elle même envisageable si l’État du Connecticut, qui a la même taille que Porto Rico, avait perdu tout son accès à l’électricité?  Neuf mois après le passage des ouragans, on attend toujours que l’électricité soit rétablie dans l’ensemble du territoire.  Cette situation, a constaté le pétitionnaire, est directement liée au fait que Porto Rico est « une colonie » des États-Unis, une île riche en ressources mais habitée par « un tas de gens à la peau brune dont on a que faire ». 

Ceux qui font des demandes de fonds auprès de l’Agence fédérale de la gestion des secours (FEMA) pour reconstruire leur maison se voient leurs dossiers rejetés.  L’argent n’est-il disponible que pour relocaliser les gens mais pas pour reconstruire les maisons? a fait mine de s’interroger le pétitionnaire, voyant surtout une politique de gentrification.  Pour le Gouvernement des États-Unis, les ouragans ont été une aubaine.  La migration, déjà rapide, a été amplifiée et sans fonds pour reconstruire leurs maisons, les gens ne reviendront pas, laissant leur terrain aux « vautours de capitalistes ».

M. Alomar a dit avoir travaillé neuf semaines pour rétablir le réseau électrique de l’île et appris de nombreuses choses « troublantes ».  « Saviez-vous que les hôpitaux ont reçu pour directives de ne pas signaler les morts au Département de la santé?  Saviez-vous que les ingénieurs de l’Armée américaine et la FEMA ont empêché les services publics d’acheter le matériel nécessaire aux réparations?  Saviez-vous que lorsqu’on rétablit l’électricité dans une communauté, les travaux sont mystérieusement modifiés et le courant de nouveau coupé? Cessons de prétendre que tout cela n’est pas intentionnel, s’est impatienté le pétitionnaire qui a appelé l’Assemblée générale et le Congrès américain à admettre que ce qui se passe à Porto Rico est « abusif, intentionnel et scandaleux ».  « Pendant que le Président Trump nous jetait des rouleaux de sopalin, se moquait de notre misère et nous insultait, nous nous sommes unis pour surmonter cette épreuve ».  Porto Rico, a conclu le pétitionnaire, a été littéralement laissé pour mort car elle n’est rien de plus qu’une opportunité d’affaires pour les riches businessmen blancs.  Mais malgré cette négligence intentionnelle, le peuple a su prendre son essor, s’est félicité le pétitionnaire qui a voulu que l’on libère enfin Porto Rico du « joug colonial ».

M. RADHAMES MORALES, de Fuerza de la Revolucion, organisation de Dominicains appuyant la lutte pour l’indépendance de Porto Rico, a dénoncé l’oppression du peuple portoricain « qui est passé des mains d’un colonisateur à un autre ».  Il a appelé à des négociations et à un dialogue pour que Porto Rico puisse se joindre au concert des nations.  Il y va, a-t-il prévenu, de la crédibilité du Comité spécial et de sa capacité d’imposer le respect du droit international dans le « statut colonial » de Porto Rico, « une question qui doit être soulevée à l’Assemblée générale ».

Mme MARIA DE LOURDES SANTIAGIO, Puerto Rico Independance Party, a souligné le renforcement du contrôle budgétaire de l’île par les États-Unis par le biais d’un Comité de sept personnes « non élues ».  Il est insensé de vouloir résoudre les problèmes du colonialisme par plus de colonialisme, a-t-elle dit.  Le Président Trump, a-t-elle accusé à son tour, a eu un « comportement indigne » lors de sa récente visite à Porto Rico.  La situation actuelle n’est pas tenable, a-t-elle prévenu, l’Assemblée générale doit se prononcer « de toute urgence ».

Mme AURORA MURIENTE, Committee for Puerto Rico at the UN, a, elle aussi, dénoncé le Comité de contrôle budgétaire et la décision de la Cour suprême des États-Unis en faveur du Congrès américain.  Elle a exhorté l’Assemblée générale à se prononcer et les États Membres de l’ONU à œuvrer à la décolonisation de Porto Rico.  Elle a remercié Cuba, la Fédération de Russie, la Bolivie, le Venezuela et la Syrie pour avoir parrainé les différentes résolutions sur Porto Rico, lesquelles n’ont pas été mises aux voix. 

Mme WILMA REVERON, National Hostos Movement for the Independance of Puerto Rico, a dit qu’elle attend toujours une recommandation du Groupe de travail du Comité spécial sur la création d’un comité chargé d’établir des relations avec les États-Unis sur la décolonisation.  Notre peuple est plongé dans une profonde crise humanitaire, qui découle de la négligence « criminelle » de l’Administration américaine.  Elle a dénoncé l’arrogance et la cupidité des administrateurs coloniaux, qui ont atteint leur paroxysme après le passage des ouragans Irma et Maria.  La reconstruction de l’île a été confiée exclusivement aux entreprises américaines, permettant aux fonds vautours de fondre sur Porto Rico. 

M. FRANCISCO VELGARA, Coordonnateur du New York Cuba Solidarity Project (NYCSP), a attiré l’attention du Comité sur l’incarcération de Mme Nina Droz Franco et de la « prisonnière de conscience », Mme Ana Belen Montes.  Arrêtée le 1er mai 2017 pour avoir protesté contre le contrôle financier, Mme Franco était accusée sans preuve d’avoir essayé d’incendier le bâtiment de la « Banco Popular ».  Elle a passé plus d’un an en prison et n’a appris que mardi dernier, qu’elle avait écopé d’une peine de 37 mois de prison et de trois ans de contrôle judiciaire.  « Le Gouvernement américain se sert de Nina pour montrer au peuple que toute protestation fera l’objet d’une répression brutale », a dit le pétitionnaire, ajoutant que l’arrestation de Mme Droz témoigne aussi du fait qu’une nouvelle résistance est née contre le dernier plan d’austérité élaboré en vertu de la « Loi Promesa ».

Pour ce qui est de Mme Ana Belen Mondes, incarcérée depuis 16 ans pour avoir donné au Gouvernement cubain des informations qu’elle a collectées pour le Gouvernement américain, le pétitionnaire a fait valoir qu’il s’agissait d’une question de « conscience » face à l’impérialisme américain.  Les « amoureux de la justice » dénoncent les privations qui sont imposées à Mme Mondes, dont l’absence de soins médicaux alors qu’elle lutte contre un cancer du sein.  Le NYCSP est fier d’appartenir à un mouvement fondé pour réclamer la libération de Mme Franco et Mondes, a souligné le pétitionnaire qui a demandé au Comité spécial d’adopter une résolution appelant les États-Unis à respecter les dispositions du droit international liées à la décolonisation.  Il a aussi demandé à l’Assemblée générale de se saisir du cas de Porto Rico. 

Pour M. PEDRO CRUZ AYALA, Movimiento Nin Negron de Porto Rico, la doctrine de la décolonisation exige que le pouvoir soit transféré au peuple vivant sous le joug colonial.  Cela signifie que l’indépendance est l’exercice de son autodétermination.  Par conséquent, toute nouvelle résolution du Comité spécial sur la question de Porto Rico ne devrait faire aucune mention des options d’intégration ou d’annexion.  L’Assemblée générale, a-t-il aussi insisté, doit se saisir de la question de Porto Rico et la communauté internationale doit faire pression pour que les États-Unis respectent enfin la résolution 1514 et le droit international.

M. OSVALDO TOLEDO GARCIA, American Association of Jurists, a affirmé que depuis 120 ans, les États-Unis soumettent Porto Rico à leurs pleins pouvoirs.  En 2016, le Président Obama a signé la « Loi Promesa » qui impose la supervision fiscale du Gouvernement américain sur l’île pour récupérer une dette « illégale et honteuse ».  Il est inacceptable, s’est emporté le pétitionnaire, que les États-Unis se départissent de toute responsabilité s’agissent d’une dette qui « oblige le peuple portoricain à rembourser sans un audit préalable ».  C’est cette loi qui a justifié les mesures d’austérité mais c’est aussi cette loi qui rend encore plus palpable l’absence de démocratie.  Le pétitionnaire a avancé pour preuve les prisonniers politiques, « une situation qui mérite l’attention de l’Assemblée générale ».

M. EDUARDO VILLANUEVA, Comite Pro Derechos Humanos de Puerto Rico, a rappelé les souffrances infligées au peuple portoricain par les ouragans, dont l’absence de médicaments et d’électricité ou encore les dégâts massifs alors que le peuple est passé sous le joug d’un comité « dictatorial » qui impose des politiques néo-libérales pour assurer le remboursement d’une dette non auditée.  Il a qualifié cette dette « d’illégale » et a demandé que les Nations Unies envoient une délégation à Porto Rico pour y documenter la pauvreté et les conditions qui poussent les Portoricains à émigrer.  Dénonçant également l’aggravation des abus des droits de l’homme, le pétitionnaire a déclaré qu’on « avait criminalisé la résistance » au Comité du contrôle financier mis en place par la loi « Promesa », ce qui est une situation « inacceptable ».

Mme JAN SUSLER, National Lawyers Guild, a rappelé que les années 2017 et 2018 représentent un record pour Porto Rico qui a été frappé par trois ouragans, Irma, Maria et Junta et qui s’est vue imposer un Conseil de supervision fiscale.  Le contrôle « illégal et colonial » sur Porto Rico pointe vers la nécessité urgente d’une action de l’Assemblée générale.  Contrairement à la réponse aux ouragans en Floride et au Texas, les efforts à Porto Rico ont été « modestes et lents ».  Sept mois après l’ouragan Maria, l’électricité n’est toujours pas rétablie partout, créant la plus longue coupure électrique aux États-Unis, et la seconde au monde.  Le nombre des morts n’est pas 16 comme l’a dit le Président Trump en octobre dernier.  Une étude de la « Harvard University » parle de 4 645 morts pendant les trois mois qui ont suivi les ouragans, alors que l’ouragan Katrina en Nouvelle-Orléans, en 2005, avait fait 1 833 morts.  La pétitionnaire a aussi parlé des dizaines d’écoles publiques fermées pour forcer la privatisation de l’enseignement.  Tous ces facteurs ont conduit au plus grand exode jamais vu dans l’île et face à la dépopulation, l’administration coloniale encourage les riches entrepreneurs à s’installer à coups d’incitations fiscales. 

Les États-Unis ne peuvent plus faire semblant: « Porto Rico est une colonie » et « l’ouragan Maria a ouvert les yeux des Portoricains » qui sont désormais conscients des inégalités et des iniquités dont ils sont victimes.  Tous les partis politiques de Porto Rico sont désormais unis contre « la junta », tout comme les étudiants, les enseignants, les syndicats, les environnementalistes, les religieux et les milliers de travailleurs et de retraités qui veulent reconstruire « Porto Rico pour les Portoricains ».  Mme Susler a répété l’urgence pour le Comité spécial d’obtenir de l’Assemblée générale qu’elle agisse immédiatement pour que les États-Unis respectent le droit international et le droit du peuple de Porto Rico à l’autodétermination et à l’indépendance. 

Mme DARLENE ELIAS, Présidente du Green Party, a consacré 30 secondes pour honorer la mémoire des victimes de l’ouragan María.  Trente secondes pour des milliers de vies perdues: est-ce trop demander?  Combien de vies de plus devons-nous perdre avant que les Nations Unies et le Gouvernement américain ne se rendent compte que la colonisation est une extermination?  Elle a rappelé qu’elle avait dit au Comité, lors de sa dernière déclaration, que Porto Rico était sur le point de s’effondrer.  Les mauvaises infrastructures, l’échec économique et les relations coloniales ne pouvaient qu’apporter dévastation au peuple.  Porto Rico et ses habitants ne sauraient être traités comme un match de football politique.  « Au lieu de marquer des buts, je demande aux Nations Unies d’agir rapidement et d’exiger des États-Unis qu’ils mettent en place un processus permettant aux Portoricains de prendre leurs décisions de manière souveraine et de répondre à leurs besoins économiques et sociaux urgents, notamment le chômage, la marginalisation, la faillite et la pauvreté », comme l’a si éloquemment déclaré le Comité spécial le 29 juin 2016.

Mme Elias a posé une dernière question au Comité: quelle est la différence entre le « 11 septembre » et ce qui s’était passé après l’ouragan María?  La duplicité des États-Unis qui n’ont pas agi immédiatement après l’ouragan a eu le même effet voire pire, comme en témoigne le nombre des morts, deux fois plus que celui des victimes du « 11 septembre ».  La différence est que les morts après María sont la conséquence directe du colonialisme.  La réalité est que les États-Unis ne permettront jamais à Porto Rico de déterminer son propre statut.  « C’est la raison pour laquelle, j’implore les Nations Unies d’exiger par tous les moyens nécessaires la décolonisation de Porto Rico et d’imposer des sanctions aux États-Unis s’ils ne s’y conforment pas. » 

Mme NINA DIMARIE VALEDON, Alianza patria, a demandé la mise en place d’un processus « officiel » de décolonisation et la création d’un mécanisme obligeant les États-Unis à soumettre des rapports sur la situation à Porto Rico.  Elle a dénoncé l’imposition d’un « joug militaire et politique » par les États-Unis depuis 1898 et les « fausses promesses » de ce pays.  Aujourd’hui, le contrôle budgétaire menace de remettre en question les retraites et la protection des travailleurs, a-t-elle prévenu, en dénonçant la perte du pouvoir budgétaire du Gouverneur de Porto Rico.  L’Assemblée générale doit se saisir de la question de Porto Rico, a-t-elle insisté, à son tour, en accusant les États-Unis de mener une politique de colonisation, y compris lors des catastrophes naturelles. 

Mme LOURDES GUZMAN, Movimiento Union Soberanista (MUS), a réclamé justice pour son pays, Porto Rico, qui reste « la colonie du pays le plus puissant du monde ».  Rien n’a été fait pour respecter la volonté du peuple portoricain telle qu’exprimée dans les résolutions de l’ONU.  Combien de temps devons-nous encore attendre? a-t-elle demandé.  Avec l’arrogance impériale qui les caractérise, les États-Unis ont continué de fouler aux pieds la dignité de notre peuple et de violer notre droit à l’autodétermination, s’est indignée Mme Guzman.  Elle a dénoncé la supervision fiscale qui a pris d’assaut son pays et qui s’approprie ses richesses, le maltraite et l’humilie dans le simple but de recouvrer une dette exorbitante, avec la complicité du Gouvernement actuel de M. Ricardo Rosello. 

Depuis le passage de l’ouragan Maria, Porto Rico fait face à l’une de ses pires crises, a martelé la pétitionnaire.  « Le Gouvernement des États-Unis nous a abandonné à notre sort. »  Porto Rico attend toujours une aide économique du Gouvernement fédéral, alors que l’indice de la pauvreté a augmenté de 53%.  Des milliers de familles sont sans toit, sans électricité et sans travail et des centaines de milliers d’habitants ont quitté le pays, victimes de la négligence « criminelle » des Gouvernements local et fédéral.  « Le nombre de morts n’aurait pas été aussi élevé si on nous avait traité avec un minimum de solidarité », a-t-elle accusé. 

M. MANUEL ENRIQUE MENENDEZ, Comites de la Resistencia Boricua, a affirmé qu’une véritable guerre est livrée contre Porto Rico.  Cette guerre présente plusieurs volets et vise notamment à détruire le droit du travail.  Il a fustigé la création du Comité de contrôle budgétaire qui prend ses décisions sans consulter la population.  « L’objectif est le démantèlement d’une nation. »  Il a dénoncé la révision des manuels scolaires, le pillage des ressources naturelles et la militarisation de l’île à des fins répressives.  Les collectifs de femmes en lutte et les syndicats d’enseignants luttant contre la fermeture des écoles publiques sont en première ligne face à cette guerre menée par le ֤États-Unis.  Le Comité spécial, a conclu le pétitionnaire, doit militer pour l’indépendance de Porto Rico.

Mme MADELIN COLON PEREZ, Puerto Rican coalition against death penalty, a demandé le rejet de l’imposition à Porto Rico de la peine de mort pour des crimes fédéraux.  L’île a aboli la peine de mort en 1929, a-t-elle rappelé, en retraçant la genèse de cette peine aux États-Unis.  Les États-Unis se donnent le droit d’ôter la vie, s’est-elle indignée, dénonçant le fait que les procédures introduites devant la Cour suprême de Porto Rico, soient menées en anglais.  La peine de mort est un autre exemple du « joug législatif » des États-Unis. 

M. KEVIN RIVERA MEDINA, Instituto Puertorriqueno de Relaciones Internacionales, a regretté que malgré les demandes répétées du Comité spécial, l’Assemblée générale ne se soit toujours pas saisie de la question de Porto Rico.  Il espère que cette année, qui marque les 120 ans de l’intervention militaire des États-Unis à Porto Rico, l’Assemblée donnera enfin suite à cette demande.  Pour expliquer le caractère non autonome de Porto Rico, le pétitionnaire a rappelé que les États-Unis, après le jugement d’un tribunal fédéral, ont affirmé que ce territoire est soumis aux pleins pouvoirs américains.  Revenant également sur la « Loi Promesa », adoptée en 2016 grâce au Président Obama, il a expliqué qu’elle impose des mesures d’austérité et facilite le pillage des ressources.  Il a également accusé le Gouvernement américain de ne rien faire pour relancer l’économie de l’île après le passage des ouragans Maria et Irma, en empêchant d’une part l’accès à l’aide internationale et en favorisant les entreprises américaines. 

M. EDWIN PAGAN, Generacion 51, a expliqué que l’organisation citoyenne qu’il représente croit à la décolonisation et à un statut d’État pour Porto Rico, contrairement à « ceux qui ne veulent pas agir affirmativement pour l’autodétermination du peuple de Porto Rico ».  Selon lui, les entités internationales qui s’intéressent à la décolonisation et les entités du système fédéral qui opèrent à Porto Rico perpétuent une situation d’inégalité « honteuse » pour les citoyens américains qui vivent dans l’archipel et qui n’ont pas le droit de vote.  Quelle différence y-a-t-il entre l’apartheid en Afrique du Sud et le système d’inégalité qui prévaut à Porto Rico en 2018? a demandé le pétitionnaire.  Que pense ce Comité de la volonté démocratique du peuple portoricain exprimée en novembre 2012 et en juin 2017?  « L’Ambassadrice des États-Unis, Mme Nikki Haley, a dit publiquement qu’elle ne s’opposerait pas à un débat plénier » sur cette question, a-t-il rappelé.  La résolution du Comité spécial, a dit le pétitionnaire, doit mentionner le droit du peuple portoricain à faire du « statut d’État, le moyen de sonner la fin du processus de décolonisation ». 

M. MANUEL RIVERA, Puertorriquenos Unidos en Accion, a mentionné les dégâts infligés par les trois ouragans qui ont frappé l’île: Irma, Maria et le Conseil de supervision fiscale.  Il a détaillé les conséquences économiques désastreuses des mesures d’austérité décrétées par ce Conseil « inféodé aux vautours de Wall Street ».  Les travailleurs portoricains sont désormais à la merci de leurs employeurs, a-t-il dit, pointant aussi l’augmentation du prix de l’électricité et des impôts.  La situation sur l’île est en violation du droit international, s’est indigné le pétitionnaire qui a demandé l’indépendance et la souveraineté totales de Porto Rico « maintenant ».  Il a rejeté toute solution intermédiaire car « Vive Porto Rico libre ». 

Mme LYDAEL VERGA ORTERO, Colegio de Profesionales del Trabajo Social de Puerto Rico, a regretté que la situation de Porto Rico ne soit toujours pas inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  Elle a, à son tour, attiré l’attention sur l’état de délabrement économique de Porto Rico.  Notre pays paye le prix des décennies de colonialisme, a-t-elle dit, insistant sur l’ampleur des inégalités socioéconomiques.  « Nous sommes au bord d’un génocide culturel », a-t-elle poursuivi, avant de dénoncer le fait que le Conseil de supervision fiscale prône la fermeture de 286 écoles publiques et l’augmentation des frais d’inscription à l’université.  Ce n’est pas un hasard si des milliers de Portoricains ont quitté l’île, provoquer une baisse de 14% de la population entre 2017 et 2019.  « Combien de fois devrons-nous encore venir ici pour que l’Assemblée générale se saisisse de la situation à Porto Rico?  Combien d’autres souffrances devons-nous encore endurer? ».  La pétitionnaire a réclamé aux États-Unis le transfert du pouvoir à Porto Rico, « la plus vielle colonie de la planète », dans le cadre d’un processus de décolonisation fondé sur le droit international. 

M. ANTONIO A. CAMACHO, Latin-X Law Student Association, a déclaré que Porto Rico subit une attaque terroriste, engagée qu’elle est dans une « bataille politique et économique épique ».  Il a dénoncé, à son tour, la création du Conseil de supervision fiscale, dont la Présidente touche un salaire de plus de 500 000 dollars.  C’est de l’argent pris au peuple portoricain pour influencer son Gouvernement.  C’est du « terrorisme économique », a-t-il dénoncé.  Ce Conseil, s’est-il expliqué, a contraint le Gouvernement portoricain à fermer les écoles, à augmenter les impôts et à manipuler le droit.  Il a même intimidé le Gouvernement actuel qui est devenu un instrument de États-Unis et qui ne représente plus le peuple de Porto Rico, s’est-il alarmé, y voyant « un acte terroriste appuyé par un dictateur étranger ».

Brandissant ensuite un rouleau de sopalin, il a appelé le Comité spécial à tenir le « régime Trump » comptable de ses actes dont celui d’avoir jeté des rouleaux de papier absorbant à la face des plus de 4 624 personnes qui ont perdu la vie après le passage de l’ouragan Maria.  C’était là, a-t-il accusé, une manière de déposséder le peuple portoricain de sa terre et de sa culture.  Il faut, a-t-il insisté, tenir le régime américain responsable, car après 120 ans d’occupation pendant lesquels il a servi dans toutes les « guerres américaines » et a vu la nomination d’une personne à la Cour suprême de justice, Porto Rico et son peuple n’existent pas.  Lorsqu’on se voit dépossédé non seulement de ses droits civiques, mais aussi de ses droits de l’homme, doit-on continuer de demander aux Nations Unies et au régime colonial d’admettre ce qui est en train d’être infligé à Porto Rico ou doit-on suivre l’exemple de George Washington et prendre son destin en main?

M. JOHN STUDER, Parti des travailleurs socialistes, a rappelé que depuis sa fondation en 1938, le Parti lutte pour le droit à l’autodétermination et l’indépendance.  Il a appelé les travailleurs et les agriculteurs du monde entier à renforcer leur solidarité avec le peuple de Porto Rico qui cherche à sortir de l’oppression coloniale et de l’exploitation capitaliste.  L’expérience montre que les travailleurs et les agriculteurs américains peuvent s'identifier à la résistance de Porto Rico et aux coupes brutales de la « junte américaine. »  De plus en plus de gens sont convaincus que les travailleurs américains ne seront pas libres tant que Washington maintiendra son « esclavage colonial » à Porto Rico.  « Luttons ensemble, nous pouvons gagner », a exhorté M. Studer pour qui la révolution socialiste cubaine est un exemple vivant de ce que les travailleurs et les agriculteurs peuvent faire quand ils prennent le pouvoir et luttent contre la minorité capitaliste.  « Nous pouvons utiliser le pouvoir de l’État pour élargir la solidarité à ceux qui luttent pour se libérer de la domination impérialiste et de l’exploitation capitaliste », a estimé M. Studer.

M. GERMAN RAMOS SANTIAGO, Consejo Amplio unitario de Solidarid y accion (CAUSA), a expliqué que CAUSA contribue au développement et au renforcement des compétences et des ressources communautaires.  Il a dénoncé le génocide et la violation des droits de l’homme fondamentaux du peuple portoricain, les centres de pouvoir des États-Unis « qui font de nous des parias sur notre propre terre ».  À travers l’Office de contrôle des produits pharmaceutiques et alimentaires (FDA), les États-Unis nous dictent ce que nous devons manger, les médicaments que nous pouvons prendre, s’est-il plaint.  « Ils se sont servis de nous comme d’un laboratoire pour toutes sortes d’expériences, notamment militaires, et comme base d’entrainement pour leurs mercenaires, pour leurs interventions dans d’autres pays, y compris en Amérique latine et dans les Caraïbes. »

Beaucoup de gens ne comprennent pas comment Porto Rico a pu s’endetter à des niveaux intenables, a témoigné le pétitionnaire.  Aujourd’hui, ni le Gouvernement des États-Unis, ni ses intermédiaires à Porto Rico ne veulent procéder à un audit transparent de la dette, mais ils ont imposé une supervision fiscale qui domine totalement notre peuple, « de façon arbitraire et dictatoriale ».  Ils ont réduit les retraites et l’accès aux services de base, s’est lamenté M. Santiago.  Enfin, il a enjoint le Comité spécial à appuyer la pétition de l’État national souverain de Borinken.  

« Nous sommes le pion d’un système capitaliste qui est en train de nous tuer », a déclaré d’emblée Mme MYRNA V. PAGÁN GÓMEZ, Vidas Viequenses Valen.  Elle a rappelé que l’ouragan Maria avait frappé en premier Vieques, « colonie de la colonie », coupant l’île du reste de Porto Rico et du monde.  Elle a expliqué que l’hôpital de l’île a été condamné, privant les malades d’accès de traitements.  Neuf mois après le passage de la tempête, a-t-elle dénoncé, seule une tente digne d’une zone de guerre, montée dans le parking d’un quartier défavorisé fait office de services d’urgence, et selon les estimations, 75 habitants de Vieques ont perdu la vie faute de soins.  Alors que le bilan dans tout Porto Rico s’est aggravé avec 4 695 morts, la pétitionnaire a engagé l’ONU à mener un audit sur l’augmentation du nombre des morts imputées au passage de l’ouragan Maria.

La pétitionnaire a vivement dénoncé la réponse « misérablement inadéquate » des Gouvernements fédéral et central après la catastrophe qui, s’est-elle alarmée, a provoqué un exode où les victimes de cette « tragédie américaine » fuient leur « paradis condamné », emportant avec elles l’opprobre de leur statut de citoyen de deuxième classe.

Qui plus est, a-t-elle poursuivi, le fléau de la « Loi Promesa », auquel s’ajoute le choc de la tempête, a incité notre « Gouvernement éclopé » à privatiser l’ensemble des services, à vendre ce qui reste de nos terres et à décimer le système éducatif.  Nos droits sont bafoués alors que les politiciens courbent l’échine devant les capitalistes et lèchent les bottes des envahisseurs opportunistes pendant que les autochtones luttent pour leur survie.

La pétitionnaire a dénoncé le manque « criminel » de respect des droits des habitants de Vieques par la marine américaine dans le contexte du nettoyage du site « Super Fund ».  Elle a parlé de la contamination provoquée par l’incinération et la détonation à ciel ouvert des engins non explosés, alors que la marine utilise des technologies de pointe sur le continent.  « Le moment est venu de saisir l’Assemblée générale de la situation de Porto Rico », a-t-elle conclu.

Mme ALEXANDRA LUGARO, Junte de Mujeres, a demandé que le Comité spécial s’exprime « franchement ».  Les États-Unis contrôlent-ils l’ONU?  Les traités s’appliquent-ils à tous les pays, sauf les États-Unis?  Dites-nous la vérité, a demandé la pétitionnaire.  Elle a dit ne pas comprendre pourquoi le Comité n’a pas réussi à contraindre les États-Unis à s’engager dans un processus de décolonisation.  Elle a dénoncé « la fausse autonomie » de Porto Rico et les mesures d’austérité du Conseil de supervision fiscale, en particulier la fermeture des écoles publiques.  « Les peuples ignorants sont faciles à contrôler », a-t-elle asséné, en s’insurgeant contre ce Conseil, composé de sept personnes nommées par le Président américain.  Elle a aussi dénoncé l’indifférence sur la question portoricaine, prévenant que les jeunes générations ne veulent plus être vues comme des « mendiants ».  Nous devons pouvoir exprimer notre colère et obtenir de l’Assemblée générale qu’elle applique la résolution 1514 à moins qu’elle n’ait pas le courage de s’opposer aux États-Unis.

Mme MARIANA NOGALES MOLINELLI, Partido de Pueblo Trabajador en Puerto Rico (PPT), a jugé contraire au droit international la création du Conseil de supervision fiscale, en vertu de la « Loi Promesa » adoptée en 2016.  Elle a dénoncé le caractère oligarchique et despotique de ce Conseil, qui ne fait qu’accentuer la situation coloniale dans laquelle vit Porto Rico depuis 120 ans.  « Le Conseil nous enterre ou nous chasse », a tranché Mme Molinelli après avoir déploré les coupes dans le secteur de la santé.  Avec la compression des retraites, l’indice de pauvreté augmente, a-t-elle prévenu.  Comme beaucoup de grands-parents élèvent leurs petits-enfants, on peut prédire une augmentation de la pauvreté infantile, a-t-elle ajouté.  Tout cela pour prétendument rembourser la dette au lieu d’assurer le bien-être minimum des gens.

Les travailleuses et les travailleurs de Porto Rico sont dans une situation d’impuissance totale face aux attaques de l’agenda néolibéral et patronal du Conseil fédéral appuyé par un gouvernement élu par moins de 40% des électeurs et caractérisé par une corruption sans précédent, a continué la pétitionnaire.  Au mois de mai dernier, le taux de chômage atteignait 9,6%, soit deux fois plus que dans les 50 États américains.  Le Conseil de supervision fiscale viole les préceptes fondamentaux de l’Organisation internationale du Travail (OIT) car l’accès au travail dépend de l’accès à l’éducation et la fermeture massive des écoles et l’étranglement financier de l’Université de Porto Rico affectent le potentiel de développement.  

Borinquén est le nom d’origine de Porto Rico et nous ne reconnaissons aucun droit aux envahisseurs espagnols et américains qui ont volé nos terres, a asséné M. JAVIER TORRES, Brigada Guarionex.  « Le colonialisme est interdit », a-t-il insisté.  Comment, au XXIe siècle, peut-on commettre un crime contre notre nation boricua?  On nous impose un Conseil de supervision, un Président étranger et un Congrès que nous ne pouvons pas élire.  « C’est une dictature. »  Aujourd’hui, s’est indigné M. Torres, tout à Porto Rico est contrôlé par les États-Unis.  Pour payer une dette qui ne nous correspond pas, on ferme des écoles, on congédie des instituteurs et on détruit notre pays.

« Nous avons enduré une catastrophe naturelle et nous n’arrivons pas à croire que les navires et les avions qui ont servi à envoyer nos fils à la mort dans tant de guerres, ne servent pas à transporter ce qui est nécessaire pour redresser notre pays », a accusé le pétitionnaire.  Face à ce désastre, les États-Unis ont refusé que des pays nous aident: « c’est un crime contre l’humanité », a-t-il jugé.  Avec une telle aide, on aurait pu éviter bien des morts.  En conclusion, il a prié le Comité spécial d’écarter le gouvernement colonial et illégal de l’État libre associé.    

Déclarations

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. SUAREZ (Venezuela) a réaffirmé le droit du peuple portoricain à l’autodétermination et appelé de ses vœux l’adoption d’une résolution par consensus, comme les années précédentes.  Il a souhaité que l’Assemblée générale se saisisse de cette question et insisté sur l’état de « subordination politique » dans lequel se trouve le peuple de Porto Rico et sur les graves dégâts causés par les deux ouragans.  Le délégué a aussi dénoncé la création du Conseil de supervision fiscale et exhorté les États-Unis à accélérer le processus de décolonisation de Porto Rico.

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador), indiqué que l’appartenance de Porto Rico à l’Amérique latine et aux Caraïbes a été mise en lumière par les États de la CELAC lors du Sommet de Punta Cana, le 25 janvier 2017.  La situation à Porto Rico est une question d’importance pour la CELAC, a insisté le représentant qui a souligné l’engagement de la CELAC à faire de l’Amérique latine et aux Caraïbes une zone débarrassée du colonialisme. 

Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a commencé par saluer la présence ici d’Oscar Lopez Ribera et par lui rendre hommage: « M. Ribera est un symbole de la résistance portoricaine, qui a été incarcéré pendant plus de 35 ans dans les prisons américaines ».  La représentante a rappelé qu’après les ouragans Irma et Maria, son pays a dûment offert sa solidarité.  Mais, a-t-elle affirmé, notre aide a été rejetée par les États-Unis.  La représentante a donc dénoncé « l’autorité totale » qu’exercent les États-Unis sur Porto Rico, « un territoire qui n’a rien d’un État libre ».  Elle en a voulu pour preuve le fait que la Cour suprême américaine ait jugé en 2006, que l’île est soumise aux pleins pouvoirs américains.  « Il s’agit donc bien d’un territoire colonial » et depuis rien n’a changé si ce n’est une « nouvelle manœuvre américaine » en juin 2017, à savoir, un plébiscite auquel n’ont participé que 23% des électeurs.  Face à l’aggravation alarmante de la situation économique et humanitaire de Porto Rico, qui a une dette de plus de 74 milliards de dollars, Cuba ne peut que dénoncer les mesures « draconiennes d’austérité » imposées par le Conseil de supervision fiscale. 

C’est la « soumission politique » qui empêche Porto Rico de prendre ses propres décisions sur la crise et qui entraîne une émigration massive, sapant toute perspective de développement durable de l’île.  La représentante a réaffirmé que les principes fondamentaux de la résolution 1514 s’appliquent à Porto Rico qui est une question latino-américaine. 

Le caractère latino-américain de Porto Rico, a renchéri M. LUIS MAURICIO ARANCIBIA FERNÁNDEZ (Bolivie), ne fait pas de doute.  Le fait que l’île soit toujours « soumise au joug colonial » justifie les appels répétés du Comité spécial, sur la base de la résolution 1514 de l’Assemblée générale, pour que le peuple portoricain puisse exercer son droit à l’autodétermination.  Le représentant a aussi plaidé pour ce peuple puisse reprendre en main les problèmes liés à la dette, à la santé et à l’éducation.  Le Gouvernement américain doit immédiatement rétrocéder au peuple portoricain toutes les terres qu’il occupe illégalement, a exigé le représentant, qui a ajouté que la puissance coloniale doit aussi les dépolluer, en particulier les zones militaires.  Après les ouragans Irma et maria, l’île n’est pas aujourd’hui en mesure d’assurer sa reconstruction.  Elle a besoin du soutien de la communauté internationale. 

M. ZAMBRANO (Équateur) a souligné le caractère inaliénable du droit à l’autodétermination du peuple portoricain et dénoncé le Conseil de supervision fiscale mis en place par les États-Unis.  Les ouragans qui ont frappé l’île ont aggravé les graves défis sociaux que Porto Rico doit relever, a-t-il poursuivi, en pointant notamment l’augmentation du taux de pauvreté.  Il a insisté sur l’identité latino-américaine et caribéenne de Porto Rico et exhorté la Puissance occupante à s’acquitter de ses obligations.  Enfin, le délégué a souhaité l’adoption par consensus de la résolution relative à Porto Rico. 

M. ESCOTO GONZALEZ (Nicaragua) a parlé de l’état « lamentable » dans lequel se trouve l’économie de Porto Rico et expliqué cette situation par la persistance du colonialisme.  Plus de 4 000 morts ont été enregistrées sur l’île en raison du manque de services essentiels, après le passage des deux derniers ouragans.  L’électricité n’est toujours rétablie sur tout le territoire, a-t-il souligné, jugeant que la décolonisation de Porto Rico est une affaire urgente.  Ce Comité doit faire plus pour que cette question soit débattue au sein de l’Assemblée générale, a estimé le représentant qui a, à son tour, souhaité l’adoption par consensus de la résolution relative à Porto Rico. 

M. MOUNZER MOUNZER (Syrie) a milité pour le droit à l’autodétermination du peuple portoricain, soulignant que cette année marque le cent-vingtième anniversaire de l’intervention militaire américaine à Porto Rico.  « Ce droit inaliénable a pourtant été réaffirmé par une série de résolutions du Comité spécial de la décolonisation » a fait observer le représentant qui a espéré que le projet de résolution soumis par Cuba sera adopté par consensus cette année.

M. SONG LI (Chine) a également appuyé le projet de résolution présenté par Cuba et espéré qu’elle sera adoptée par consensus.

 

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