La Commission du désarmement achève sa session 2022 après trois ans d’interruption

Session de fond de 2022,
381e & 382e séances plénières, après-midi
CD/3843

La Commission du désarmement achève sa session 2022 après trois ans d’interruption

Après plus de deux semaines de délibérations, la Commission du désarmement a conclu sa session 2022, la seconde de son cycle triennal, en adoptant aujourd’hui par consensus son rapport amendé oralement et ceux de ses deux Groupes de travail sur le désarmement nucléaire et l’espace extra-atmosphérique, respectivement.

La Commission du désarmement s’était réunie le 4 avril dernier à New York pour sa première session de fond après un hiatus de trois ans dû à la pandémie de COVID-19 et à d’autres questions organisationnelles, comme l’avait expliqué son Président, M. Xolisa Mfundiso Mabhongo, de l’Afrique du Sud.

M. Kurt Davis (Jamaïque), Président du Groupe de travail I, a présenté le rapport de son groupe sur le désarmement et la non-prolifération nucléaires.  Mme Szilvia Balázs (Hongrie), Présidente du Groupe de travail II, a présenté son rapport sur les mesures de confiance à établir pour éviter une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Ces deux rapports ont été présentés « comme deux rapports de procédure ».

Le Président s’est ensuite félicité de la reprise des travaux de fond après ces trois années d’interruption, en insistant sur le rôle critique joué par cette commission dans les efforts de désarmement.  Le Président a noté le caractère universel de la Commission et espéré que l’esprit constructif constaté lors de cette session aboutira à un nouvel élan dans le domaine du désarmement.

L’espace extra-atmosphérique ne saurait être le pré carré des grandes puissances, a indiqué le représentant des Pays-Bas, avant de condamner l’invasion de l’Ukraine par la Russie.  L’Autriche a déploré qu’une délégation « instrumentalise » la règle du consensus, au risque de plonger la Commission dans l’impasse.  La Fédération de Russie essaie d’éliminer systématiquement toute référence à la société civile dans les processus onusiens, a dit le délégué, en déplorant la « vérité alternative » développée par ce pays sur la guerre en Ukraine.

Le délégué de la Fédération de Russie a rappelé que ce hiatus de trois ans s’explique par la non-délivrance de visas à des membres de certaines délégations.  Certains États Membres ont tenté de politiser les discussions « pour détourner l’attention de la Commission des questions qui nous intéressent », a-t-il lancé à ses homologues des Pays-Bas et de l’Autriche.  Il a souligné l’apport de son pays au désarmement nucléaire, en ajoutant que toute décision dans ce domaine doit être prise par consensus.

De son côté, l’Argentine a appelé à remédier à la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, et l’Australie à un comportement « responsable » de la part des États dans ce domaine.  Appuyé par l’Irlande, la déléguée australienne a regretté que le rapport ne prenne pas en compte la voix des organisations non-gouvernementales.

La déléguée de l’État de Palestine a estimé que le Traité de non-prolifération (TNP) est la pierre angulaire du régime de non-prolifération, tandis que l’Iraq et la Syrie ont souligné l’importance de la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  C’est un objectif que l’Égypte s’efforce toujours d’atteindre, a appuyé le délégué de ce pays.

Enfin, la représentante des États-Unis n’a pas fait mystère des difficultés à parvenir à un consensus au sein de la Commission, espérant que la prochaine Conférence d’examen du TNP soit l’occasion de renforcer le régime de non-prolifération.  Répondant au délégué russe, elle a assuré que son pays a toujours délivré des visas aux membres des missions, conformément à ses obligations en vertu de l’Accord de Siège.  Elle a aussi demandé à la Russie de mettre un terme à son agression de l’Ukraine.

Exerçant son droit de réponse, la Russie a répondu aux accusations « injustifiées » ciblant son pays en lien avec l’« opération militaire spéciale » menée par Moscou.  Elle a déjà expliqué les raisons de cette opération, a-t-elle rappelé, en appelant à ne pas politiser les travaux de la Commission: « Concentrons-nous sur les questions nous permettant d’avancer sur la voie du désarmement. »

« Je n’ai pas d’autre choix que de réagir aux remarques de la Russie », a rétorqué le délégué de l’Ukraine.  « Ce n’est pas une opération spéciale, c’est une guerre », a-t-il dit, en ajoutant que son pays ne fait que défendre son territoire.  Il a dénoncé la propagande russe et la commission d’atrocités de masse par les forces russes.  « La guerre n’est pas le choix de l’Ukraine. »  Réagissant, le délégué russe a déclaré que « la Russie n’a déclaré la guerre à personne ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC examine les progrès de la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, dans un monde qui compte 1,8 milliard de sans-abris

Session de 2022,
11e séance - matin
ECOSOC/7077

L’ECOSOC examine les progrès de la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, dans un monde qui compte 1,8 milliard de sans-abris

Comment loger 1,8 milliard de sans-abris dans un monde qui compte d’innombrables grands immeubles résidentiels d’une valeur de 2 100 milliards de dollars?  Le Conseil économique et social (ECOSOC) devait apporter une réponse à cette question ce matin à sa réunion d’examen du rapport quadriennal du Secrétaire général sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Les discussions d’aujourd’hui alimenteront les débats de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le même sujet, la semaine prochaine.

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, le Président de l’Assemblée générale et le Président de l’ECOSOC ont tous insisté sur le fait que le Nouveau Programme pour les villes a des liens évidents avec la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Mais ces derniers mois, la pandémie de COVID-19 a aggravé les inégalités existantes, a noté Mme Amina J. Mohammed rappelant que le Nouveau Programme est là pour promouvoir des mesures visant à sécuriser les lois foncières, à promouvoir les logements abordables, à créer des espaces publics, à améliorer la mobilité et à fournir des services de base accessibles à tous. 

Le développement durable dépendra de la gestion de l’urbanisation, a déclaré M. Collen V. Kepapile, Président de l’ECOSOC, en faisant remarquer que la plupart des objectifs de développement durable (ODD) ont des cibles qui dépendent des actions prises au niveau local.  Pour la Présidente de l’Assemblée du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), l’urbanisation est l’une des forces transformatrices de notre époque.  Mme Martha Delgado a souligné la nécessité de mener des actions conjointes pour développer une planète meilleure et permettre la subsistance de l’espèce humaine: il est temps de migrer vers l’ère des villes intelligentes, a-t-elle appelé de ses vœux.

La Directrice exécutive d’ONU-Habitat, qui a présenté le rapport du Secrétaire général, a annoncé que 30 pays seulement ont envoyé leurs données pour y être inclus.  Il faut redoubler d’efforts pour aider les États Membres à intégrer l’urbanisation durable dans leurs politiques de développement, a-t-elle conseillé, parce que les principes généraux du Nouveau Programme pour les villes sont des outils concrets, pour les pays, pour atteindre les ODD et protéger les écosystèmes.

Dans la première table ronde sur la mise en œuvre de ce programme, les délégations et leurs invités devaient aborder la « question qui fâche » de son financement, selon le Secrétaire principal du Ministère du logement du Kenya.  Alors que certains intervenants, comme El Salvador, réclamaient l’intervention financière des banques privées, le maire de la ville mexicaine de Quateraro a mis en garde contre les spéculations immobilières sur les propriétés foncières et l’espace urbain.  La Directrice mondiale de The Shift, un institut urbain canadien, a dénoncé le fait que le monde compte encore 1,8 milliard de sans-abris aux côtés des grands immeubles résidentiels des grandes villes dont elle a estimé la valeur à 2 100 milliards de dollars.  Cela a fait dire à la responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC, organisation indienne, qu’il est « cher d’être pauvre ».  D’où l’importance vitale d’adopter des politiques foncières pour les pauvres et les démunis, a-t-elle plaidé.

« La stratégie à l’échelle du système des Nations Unies pour aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes », thème de la deuxième table ronde, a vu défiler plusieurs organismes onusiens qui ont décliné ce qu’ils font sur la question.  ONU-Habitat a rappelé que la stratégie lancée en 2019 invite les entités de l’ONU à travailler avec lui pour intégrer les questions urbaines dans leurs stratégies respectives.  Elle vise aussi à améliorer l’exécution de leurs mandats dans un monde qui s’urbanise.  Pour que le Nouveau Programme pour les villes réussisse, la santé des populations des villes doit être au centre des préoccupations, a plaidé pour sa part la représentante de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). 

Enfin, ancrant leur déclaration dans l’actualité, l’Union européenne et la Pologne ont dénoncé la destruction des villes et des patrimoines de l’Ukraine où la guerre a déplacé 12 millions de personnes.  Il faut dès à présent réfléchir à la reconstruction des villes détruites par la guerre, a exhorté la Pologne.  

« URBANISATION DURABLE ET APPLICATION DU NOUVEAU PROGRAMME POUR LES VILLES »

Déclarations liminaires

M. COLLEN V. KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a dit que la question de l’urbanisation durable est centrale dans un monde où plus de la moitié de la population vit dans les villes et où la majorité de la croissance démographique se retrouvera dans les villes à l’avenir, soit en raison de la croissance naturelle, soit en raison des migrations.  Le développement durable dépendra de la gestion de l’urbanisation, a déclaré le Président pour qui cette réunion est une occasion d’examiner l’urbanisation durable à travers le prisme des inégalités et le soutien apporté par le système de développement des Nations Unies à la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  Les discussions d’aujourd’hui doivent s’inscrire dans le contexte de la réponse et du relèvement après la COVID-19 et d’autres défis mondiaux tels que les changements climatiques, la perte de biodiversité et la pollution. 

Dans les pays du Sud, les 1,2 milliard de personnes vivant dans des établissements informels et des bidonvilles ont eu du mal à mettre en œuvre les mesures préventives de transmission de la maladie, a-t-il indiqué en parlant ensuite des pays du Nord où tout le monde n’a pas pu s’adapter au travail à distance et où les travailleurs faiblement rémunérés ont été exposés à des risques plus élevés.  La dépendance à l’égard de l’aide sociale et de la protection sociale, lorsqu’elle était disponible, s’est multipliée, a-t-il aussi relevé en soulignant que beaucoup sont entrés dans les rangs des sans-abris.  En réponse, les gouvernements et les villes ont fourni des services dans des zones mal desservies, des loisirs et des moyens de subsistance.  Certains ont offert un abri aux sans-abris.  Poursuivant, le Président a ajouté que de nouveaux modèles urbains à l’échelle humaine ont émergé accordant l’attention aux piétons et à l’utilisation des propriétés foncières.  Il faut tirer les leçons de ces expériences et trouver des moyens novateurs de s’attaquer aux causes des inégalités, a-t-il exhorté.

Le Président a rappelé que la réunion examinera aussi l’appui apporté par le système des Nations Unies pour le développement aux pays dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Dans l’ensemble, l’ONU s’est avérée mieux préparée à aider les pays à surmonter la crise, à apporter une réponse sanitaire et humanitaire solide et à soutenir la mise en œuvre du Programme 2030 dans le cadre des efforts de relèvement, a-t-il indiqué.  Il a aussi dit que les impacts des changements climatiques sur les villes et les infrastructures essentielles ne peuvent être ignorées.  Il a exhorté ONU-Habitat à travailler avec les parties prenantes concernées pour explorer le rôle des données, de la science, de la technologie et de l’innovation dans l’atténuation et l’adaptation afin de construire des villes résilientes.  Cette réunion est également une occasion d’apprendre davantage sur la mise en œuvre de la stratégie à l’échelle du système des Nations Unies sur le développement urbain durable et sur la façon dont elle permet à l’ONU d’aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes.

M. ABDULLAH SHAHID, Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, a déclaré que la discussion d’aujourd’hui sur les inégalités et le soutien du système des Nations Unies au Nouveau Programme pour les villes s’aligne sur le mandat de l’ECOSOC en tant que coordonnateur, organisateur et organe spécialisé pour les dialogues politiques sur le développement.  « Grâce à ce mandat, l’ECOSOC joue un rôle important en nous aidant à atteindre les objectifs de développement durable », a insisté M. Shahid avant de souhaiter que le Nouveau Programme pour les villes guide les efforts de tous pour lutter contre les inégalités en matière d’urbanisation, tant dans les pays en développement que dans les pays développés.

Le Président de l’Assemblée générale a estimé que l’universalité de ce programme découle de ses liens non seulement avec l’objectif de développement durable (ODD) no 11 relatif aux « villes et communautés durables », mais aussi avec l’ensemble des ODD.  Il a dit que la réalisation des objectifs du Programme accélérera les progrès en matière de bien-être et de sécurité humaine à l’échelle mondiale et en matière de climat.  Il a remercié le Président de l’ECOSOC pour sa participation aux travaux du comité consultatif sur l’urbanisation durable qui sont au cœur des préparatifs de la réunion de haut niveau.  Enfin, il a estimé que la réalisation des objectifs du Nouveau Programme pour les villes nécessitera un effort global pour mobiliser des millions de professionnels de l’urbanisation du monde entier - ingénieurs, architectes, urbanistes et géomètres, entre autres.  « En travaillant à leurs côtés, les États Membres et les parties prenantes devraient forger les partenariats nécessaires pour répondre efficacement à nos aspirations », a conclu M. Shahid avant d’espérer que les délibérations d’aujourd’hui et de la semaine prochaine permettront de tirer parti des systèmes des Nations Unies aux niveaux local, régional et mondial, pour y parvenir.

Selon Mme AMINA J MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) est étroitement liée à l’urbanisation.  Le Nouveau Programme pour les villes, a-t-elle rappelé, comprend des mesures visant à sécuriser les lois foncières, à promouvoir les logements abordables, à créer des espaces publics, à améliorer la mobilité et à fournir des services accessibles à tous.  Notant que la pandémie de COVID-19 a aggravé les inégalités existantes, Mme Mohammed a ajouté que la pandémie a créé de nouvelles vulnérabilités dans les villes, d’où l’importance du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a fait remarquer que ce document a mis le partenariat et l’intégration au cœur de tous les efforts visant à accélérer la mise en œuvre des réformes.  Le Nouveau Programme appelle à des pratiques qui offrent aux équipes de pays des Nations Unies la possibilité d’établir de nouvelles méthodes de travail.  Il souligne l’importance d’une approche systémique qui rassemble différents secteurs et acteurs, a-t-elle indiqué.  

Elle a rappelé que la Coalition Local2030 pour la Décennie d’action cherche à mobiliser le soutien des gouvernements, du secteur privé, des autorités locales et des ONG ainsi que celui du système des Nations Unies pour coordonner l’action au niveau local afin d’accélérer la réalisation des ODD.  La Coalition repose sur le principe que les personnes les plus proches des défis du développement durable sont les mieux placées pour les résoudre et que des partenariats à plusieurs niveaux et multipartites sont essentiels pour garantir des résultats, a rappelé la Vice-Secrétaire générale.  Le niveau local est l’espace le plus approprié pour relier tous les points, a-t-elle aussi noté en soulignant que les villes peuvent être le fer de lance d’innovations pour combler les inégalités, mener des actions climatiques et assurer une reprise verte et inclusive après la COVID-19.  La Vice-Secrétaire générale a, pour conclure, exhorté à soutenir la Coalition et à faire du Nouveau Programme pour les villes une réalité. 

Mme MARTHA DELGADO, Présidente de l’Assemblée du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a jugé essentiel de revitaliser la résilience économique des villes.  Les politiques publiques urbaines sont la clef pour faire face aux défis tels que les pandémies ou les crises futures et, par conséquent, pour savoir que nous pouvons répondre dans ces cas par des actions institutionnelles durables, a-t-elle relevé.  Rappelant que l’urbanisation est l’une des forces transformatrices de notre époque, elle a souligné l’importance d’un multilatéralisme capable de mener des actions conjointes pour développer une planète meilleure et permettre la subsistance de l’espèce humaine.  « Il est temps de migrer vers l’ère des Smart Cities », a-t-elle scandé en appelant à promouvoir des « enveloppes architecturales autosuffisantes, équitables, égalitaires et inclusives ».  

Mme Delgado a invité à concevoir les nouveaux centres urbains en prenant compte des défis liés aux changements climatiques, au surpeuplement et à l’exploitation des ressources.  Elle a conclu que les actions que nous menons maintenant doivent conduire à une nouvelle intégration sociale, fondée sur les principes de prospérité, de transformation, d’adaptation, d’équité et de respect des droits de l’homme.   

Mme MAIMUNAH MOHD SHARIF, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a présenté le rapport quadriennal du Secrétaire général sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes pour la période allant de 2018 à 2021 dans lequel 30 pays seulement ont soumis leurs données.  Le Secrétariat doit redoubler d’efforts pour aider les États Membres à intégrer l’urbanisation durable dans leurs politiques de développement.  Le rapport exhorte à utiliser les principes généraux du Nouveau Programme pour les villes comme des outils concrets pour permettre aux pays d’atteindre les ODD et pour protéger les écosystèmes.  

S’agissant des impacts de la COVID-19 sur les villes, la Directrice exécutive a dit que la pandémie a entraîné une coopération plus étroite entre les gouvernements nationaux et locaux qui ont demandé plus d’espaces publics inclusifs et respectueux de l’environnement.  Le relèvement est une opportunité pour accélérer la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, a-t-elle estimé en appelant à tirer parti des innovations, à fournir des services de base de manière plus équitable, à réduire les déplacements par le télétravail et à réduire les émissions de carbone grâce à une utilisation prudente de l’énergie.  Grâce à une planification et une gestion urbaines efficaces, les villes et les communautés ont été en mesure de créer des environnements urbains plus sains, peut-on lire dans le rapport.  Les élus municipaux réalisent maintenant l’importance des biens publics, d’investir dans les institutions publiques, de l’autonomie fiscale et de la transparence dans la gestion des finances locales.  

Le rapport insiste sur le fait que la modernisation des bidonvilles et la hausse des prix du logement restent la priorité absolue des États Membres parce que plus d’un milliard de personnes vivent encore dans des bidonvilles dans le monde.  Le déficit mondial de logements sera de 440 millions de logements d’ici à 2025.  Tout au long de la pandémie, le sans-abrisme a augmenté.  Les outils financiers pour soutenir un meilleur accès au logement n’atteignent pas suffisamment les populations nécessiteuses pour avoir un impact positif.  Beaucoup risquent d’être laissés sur le côté, a alerté la Directrice exécutive.  Pour ce qui est du rôle des villes dans le développement de solutions aux changements climatiques, le rapport dit que les villes sont la forme la plus durable d’établissements humains.  Il réitère en revanche le fait que les populations à risque nécessitent une attention particulière dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Pour y arriver, il faut investir dans la planification et le développement urbains.  Un financement urbain efficace dépend d’approches plus nuancées de la décentralisation fiscale et une plus grande transparence pour convaincre les citoyens et les contribuables.

Table ronde 1

Mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes sur la base du rapport quadriennal du Secrétaire général, notamment les moyens de faire face à l’augmentation des inégalités

Déclarations liminaires

Mme INES SANCHEZ DE MARADIAGA, professeure de planification urbaine à l’université polytechnique de Madrid et Directrice de la Chaire de l’UNESCO relative aux genres, a demandé d’aider ONU-Habitat à intégrer la perspective sur le genre et la participation de la société civile dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a encouragé à mettre à jour les cadres juridiques, réglementaires et politiques pour qu’ils prennent en compte la perspective hommes/femmes, celle-ci devant aussi être intégrée dans les travaux institutionnels et les recherches de financement pour le développement des villes.

M. LUIS NAVA GUERRERO, maire de Queretaro (Mexique), a informé que sa ville d’un million d’habitants a intégré les besoins sociaux résultant de la COVID-19 dans les services municipaux.  La municipalité a établi un plan de développement jusqu’en 2050 qui vise à réduire les écarts sociaux, notamment la fracture numérique.  Elle a pris en charge la santé physique et émotionnelle des femmes nécessiteuses et prévu de créer une université pour les femmes qui verra le jour sous peu.  La ville vient en aide aux personnes vivant dans les rues en offrant un soutien psychologique qui vise leur réinsertion dans le monde du travail.  Durant la pandémie, la municipalité a offert des soins à domicile, a encore décrit le maire qui a terminé en annonçant la création prochaine d’un centre technologique et d’un parc de 60 hectares si les ressources techniques et financières sont réunies.

Deux mille cent milliards de dollars: c’est la valeur des immeubles résidentiels dans les grandes villes du monde, a enchaîné Mme LEILANI FARHA, Directrice mondiale de The Shift, Canada, se désolant qu’à côté de cela, la planète compte 1,8 milliard de personnes sans abri.  Le logement est un facteur d’inégalités dans les villes, a—t-elle rappelé en demandant aux gouvernements de remettre en cause les avantages offerts aux spéculateurs immobiliers.  Elle a exhorté les villes à adopter des stratégies de logement humain afin de régler le problème du sans-abrisme. 

Dans un même ordre d’idées, Mme SMURTI JUKUR, responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC et de Slum Dwellers International-SDI (Inde), a dénoncé la manipulation du foncier par les politiques au détriment des couches populaires.  Il est cher d’être pauvre, a ironisé la « représentante des pauvres » qui a exigé une politique de propriété foncière pour les pauvres et les plus démunis. 

M. CHARLES HINGA MWAURA, Secrétaire principal au Ministère du logement et du développement urbain du Kenya, a révélé que la nouvelle politique urbaine de son pays dispose de volets logement et urbanisation.  La Vision 2030 du Président Uhuru Kenyatta englobe les six régions métropolitaines dans le cadre d’un processus de développement des régions.  La Vision prévoit aussi la création de logements de masses avec la participation du secteur privé.  Le coût financier de l’opération est de 1,2 milliard de dollars, a précisé M. Mwaura avant de citer également un programme d’amélioration des habitats informels bénéficiant à 1,3 million de personnes.  Le Secrétaire principal a posé « la question qui fâche »: comment financer le Nouveau Programme pour les villes? 

Débat interactif

Les délégations qui ont participé à cette première table ronde ont répondu à cette question du Kenya, à commencer par El Salvador qui a appelé les banques à soutenir financièrement les politiques de développement urbain.  La Fédération de Russie a dit qu’elle est prête à partager avec les États Membres l’expérience russe de développement urbain.  Où trouver les ressources financières et technologiques nécessaires pour améliorer la gestion des villes et des centres urbains, a aussi demandé l’Équateur

L’Union européenne, dénonçant les ravages des villes et des patrimoines de l’Ukraine à cause de l’agression de la Fédération de Russie, a exhorté les villes du monde à joindre la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie et ses trois piliers à savoir l’accès à l’énergie durable, le soutien aux projets d’infrastructures urbaines et les partenariats entre les villes et les échanges de connaissances.  L’Organisation pour la coopération et le développement en Europe (OCDE) a encouragé à explorer la boîte à outils qu’elle a conçue pour le développement local dans le cadre d’une approche territoriale visant une croissance inclusive. 

L’Inde a partagé l’ambition de son gouvernement d’atteindre d’ici à 2030 une contribution des villes indiennes de 70% au PIB.  L’exécutif prévoit en outre de construire 100 villes intelligentes et 6 millions de logements en milieu urbain pour les pauvres.  Il veut aussi renforcer les droits fonciers des femmes.  Pour Madagascar, tous les programmes de développement des villes doivent viser les plus vulnérables et répondre aux problèmes des sans-abris.  La représentante a exhorté les États Membres à conclure un contrat social sur le logement abordable.  Le Consortium pour une urbanisation durable a annoncé qu’il est favorable à une urbanisation globale tenant compte de la diversité.  

Comment aider les zones rurales qui ont montré leur résilience durant la pandémie de COVID-19? a demandé la Bolivie.  L’Afrique du Sud a voulu savoir comment faire pour que les populations et le secteur privé contribuent au développement humain.  En réponse à la Bolivie, la professeure de planification urbaine de l’université polytechnique de Madrid a dit que la question est plutôt de savoir comment répondre aux attentes des zones périphériques et des banlieues.  Elle a insisté sur l’importance de la planification et du financement pour réduire les inégalités, ainsi que sur la nécessité de renforcer le rôle des femmes dans les villes et la façon de satisfaire leurs attentes.  Elle a souligné l’importance de la mobilité avant d’exhorter à passer de la parole aux actes dans l’application du Nouveau Programme pour les villes.  

Le maire de Quaretaro a réitéré l’importance de planifier à long terme, par exemple d’ici à 2050, pour répondre à la croissance urbaine.  Il faut en outre adopter des politiques de logement pour anticiper les migrations urbaines et protéger les villes.  Il a mis en garde contre les spéculations sur les propriétés foncières et l’espace urbain.  Il faut empêcher les intérêts particuliers à prendre le dessus sur le reste.  La Directrice mondiale de The Shift a mis l’accent sur l’importance du droit au logement et sur le financement de l’ODD no 11 « les villes et les communautés durables ».  Elle a aussi mis en garde contre le recours aux prêts bancaires par les institutions publiques en demandant que ces prêts respectent les droits humains.  La responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC et de Slum Dwellers International-SDI a, elle, demandé aux gouvernements d’avoir le courage de vraiment aider les sans-abris.  Réimaginons l’avenir, investissons dans nos populations et offrons des perspectives, a conclu le Secrétaire principal du Ministère du logement du Kenya

Table ronde 2

La stratégie d’urbanisation durable à l’échelle du système des Nations Unies pour aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes

Déclarations liminaires

Mme MAIMUNAH MOHD SHARIF, Directrice exécutive d’ONU-Habitat, a rappelé que la stratégie à l’échelle du système des Nations Unies sur le développement urbain durable lancée en 2019 demande aux entités des Nations Unies de travailler avec ONU-Habitat pour intégrer les questions urbaines dans leurs stratégies et améliorer la façon dont elles poursuivent leurs mandats respectifs dans un monde qui s’urbanise.  Elle a cité par exemple la collaboration entre l’UNICEF et ONU-Habitat pour promouvoir des « villes amies des enfants » et ventiler les données rurales/urbaines et les données intra-urbaines.  « Avec le PNUD, nous travaillons sur la résilience climatique pour les pauvres en milieu urbain et la gouvernance à plusieurs niveaux », a-t-elle ajouté avant de citer également la création, par le Secrétaire général, d’une équipe spéciale consacrée à l’avenir des villes composée de représentants de 20 entités des Nations Unies.  Elle a expliqué que cette équipe fonctionne en étroite collaboration avec le Groupe de travail mondial sur les gouvernements locaux et régionaux.  Tout en notant que les questions urbaines sont de plus en plus intégrées dans les analyses de pays, elle a jugé que plus devait être fait.  Elle a ainsi encouragé les équipes de pays des Nations Unies à intégrer l’urbanisation durable dans les cadres de coopération au développement.

Alors que 70% de la population mondiale vivra dans les villes d’ici à 2050, Mme ZSUZSANNA JAKAB, Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a jugé prioritaire d’aborder le développement des villes à travers le prisme de la santé urbaine.  Elle a précisé que l’OMS considère les villes comme un atout pour assurer la santé et le bien-être des citoyens en prenant en compte un large éventail de domaines, comme les logements, les transports, la violence, l’insalubrité et à la gestion des déchets.

« Pour que le Nouveau Programme pour les villes réussisse, la santé des populations des villes doit être au centre des préoccupations », a insisté la représentante de l’OMS avant de citer en exemple des initiatives telles que les Villes-santé et les villes-amies des aînés (VADA) et des actions dans des domaines comme la pollution de l’air, les transports, la préparation aux urgences sanitaires dans les villes et milieux urbains.  Elle a dit que construire des villes saines et vivables est l’une des priorités du Manifeste de l’OMS pour une reprise saine et verte après la pandémie, publié en mai 2020.  « Intégrer santé et bien-être dans l’aménagement urbain est une étape fondamentale dans cette direction », a-t-elle insisté avant de saluer la publication conjointe OMS/ONU-Habitat d’une réflexion sur « l’intégration de la santé dans la planification urbaine et territoriale » pour appuyer la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a expliqué que cette démarche vise à aider les gouvernements, les autorités locales et les professionnels de la planification à intégrer les considérations de santé dans la planification urbaine.  L’OMS renforcera son appui technique pour la mise en œuvre de réponses régionales et nationales à la santé urbaine, a-t-elle assuré.

Mme GILLIAN TRIGGS, Secrétaire générale adjointe et Haute-Commissaire adjointe chargée de la protection au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), a mis l’accent sur le potentiel des villes qui offrent aux réfugiés la possibilité de faire partie des communautés.  Néanmoins, il a noté que la plupart des réfugiés vivent dans des zones urbaines marginalisées, avant de préciser que les nouveaux arrivants dans la ville font face à des barrières linguistiques et culturelles qui sont aggravées par la discrimination, la xénophobie et l’exclusion sociale.  Ils manquent souvent de statut légal ou de documents, ce qui les oblige à vivre dans la discrétion et à éviter tout contact avec les autorités, a regretté la haute fonctionnaire.  Elle a dit que cette réalité oblige les maires, les administrations municipales et les dirigeants locaux à adapter leurs politiques aux besoins des réfugiés et à promouvoir leur inclusion économique.

En outre, elle a rappelé que le pacte mondial sur les réfugiés reconnaît la participation vitale des villes, celles-ci ayant d’ailleurs démontré leur engagement lors du premier Forum mondial sur les réfugiés en décembre 2019.  Des promesses de cohésion sociale et d’amélioration de l’accès aux services ont été faites par les villes de Bristol, Milan, Durban et São Paulo, s’est félicitée Mme Gillian Triggs, avant de noter que Arua et Koboko, en Ouganda, Kakuma, au Kenya, et Gabiley, en Somalie, ont rejoint les villes qui s’engagent à mettre en œuvre le pacte mondial sur les réfugiés en prenant de nouveaux engagements en 2021.  Elle a précisé que l’urbanisation des déplacements forcés modifie la manière dont le HCR fournit protection et solutions.  Elle a estimé que le principe d’égalité d’« accès pour tous » aux services essentiels du Nouveau programme pour les villes peut constituer une base solide pour soutenir l’inclusion des réfugiés dans la planification urbaine.

Mme OLGA ALGAYEROVA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies, a dit que les commissions régionales de l’ONU travaillent avec des mécanismes de coordination, des coordonnateurs résidents, le PNUD et ONU-Habitat pour mettre en œuvre le Nouveau programme pour les villes et les dimensions des établissements urbains et humains du Programme 2030 dans les cinq régions.  Nous travaillons étroitement avec les autorités municipales et locales à cette fin, a-t-elle ajouté avant de citer l’inclusion de la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes dans les cinq fora régionaux sur le développement durable, que les commissions régionales réunissent chaque année pour alimenter les réflexions du forum politique de haut niveau pour le développement durable.  « Nous devons construire des ponts entre la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes et la mise en œuvre des ODD », a-t-elle insisté avant de juger déterminant d’être à l’écoute des villes et de planifier avec elles et de manière systématique l’inclusion des communautés dans la prise de décision. 

Parmi les cadres utilisés par la Commission régionale pour l’Europe en matière de logement et d’établissements, Mme Algayerova a cité la Charte des Nations Unies de Genève sur le logement durable, approuvée par la Commission économique pour l’Europe le 16 avril 2015, un plan d’action régional 2030 intitulé « Lieu et vie dans la CEE » adopté en 2021, des lignes directrices pour la formalisation des constructions informelles et le Plan d’action pour le redressement des établissements informels après la pandémie.  Enfin, elle a indiqué que sa commission a produit la #Housing2030 Study en collaboration avec Housing Europe et ONU-Habitat et que le deuxième Forum des maires sur la question a réuni en avril 2022 les maires et maires adjoints de 44 villes ainsi que 500 représentants de villes et d’États Membres, avec des partenaires des Nations Unies, des ONG et des universités.

M. ROBERT PIPER, Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement et Directeur du Bureau de la coordination des activités de développement, a souligné le travail des 130 coordonnateurs résidents des Nations Unies qui recueillent des données pour comprendre les tendances en matière de vulnérabilité exacerbées dans les zones urbaines dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Il a mis l’accent sur la responsabilité partagée de tous les acteurs de développement, des gouvernements aux collectivités locales en passant par le secteur privé et la société civile, pour mettre en œuvre le Nouveau programme pour les villes.  Il a indiqué que son bureau, en coopération avec ONU-Habitat, dispensera, ces prochains mois, plusieurs formations en amont du prochain Forum mondial sur les villes et de la prochaine COP prévue en Égypte.

M. BASIM BIN YACOB AL HAMER, Ministre du logement du Bahreïn, a vanté son programme d’accès à un logement décent dans des quartiers sûrs et attrayants qui a bénéficié à 150 000 personnes ces quatre dernières années.  Il a expliqué que ce programme de logement est renforcé par des investissements soutenus dans les espaces publics et les espaces verts pour créer des zones urbaines plus inclusives, durables et résilientes.  L’approvisionnement universel en eau et en assainissement a contribué à améliorer les conditions de vie et à renforcer la résilience aux changements climatiques, a ajouté le Ministre avant de saluer le soutien fourni par les Nations Unies et ONU-Habitat, à la fois au niveau mondial et au Bahreïn en particulier.

Débat interactif

Le représentant de la Pologne a présenté les efforts de son gouvernement pour relever les défis de l’étalement des villes, de la disponibilité de logements et des changements climatiques tels qu’inscrits dans la nouvelle stratégie polonaise 2015 pour des villes durables.  Il a indiqué que la Pologne accueillera dans les prochains mois une table ronde ministérielle de l’Union européenne (UE) sur rôle des politiques urbaines pour une Europe plus verte et pour l’abandon progressif des combustibles fossiles.  Alors que la guerre en Ukraine a fait 12 millions de déplacés, le représentant a appelé à penser dès maintenant à la reconstruction des villes détruites par la guerre. 

Le représentant de la Malaisie a, de son côté, salué le rôle de premier plan d’ONU-Habitat en regrettant que le Nouveau Programme pour les villes n’ait pas bénéficié de la part des États Membres du même intérêt que d’autres programmes.  Notant que la pandémie de COVID-19 a démontré l’importance des villes résilientes pour faire face aux chocs, il a espéré que la réunion de haut niveau de la semaine prochaine encouragera les États Membres à promouvoir tous les objectifs de développement durable en corrélation avec celui des villes durables.  Pour ce faire, il plaidé pour des indicateurs favorisant la résilience de villes durables. 

Le représentant d’ONUSIDA a souligné l’importance de villes garantissant des services sociaux aux personnes vivant avec le VIH/sida avant d’appeler à accélérer la riposte des villes pour permettre d’atteindre l’objectif d’éradiquer le VIH/Sida d’ici à 2030.  

Enfin, le représentant de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) a cité une initiative des services météorologique pour promouvoir des services urbains intégrés dotée de meilleures données et prévisions météorologiques.  Il s’agit notamment d’améliorer l’adaptation aux catastrophes naturelles, à la pollution atmosphérique ou aux inondations éclairs, a-t-il précisé.  

Remarques de clôture 

M. COLLEN V. KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé que le suivi du Nouveau programme pour les villes doit avoir des liens efficaces avec le suivi du Programme 2030.  Notant que la plupart des ODD ont des cibles qui dépendent des actions prises au niveau local et que les villes ont été à l’avant-garde de l’action climatique en matière d’adaptation et d’atténuation, il s’est dit inspiré par les efforts continus des États Membres et du système des Nations Unies pour accélérer la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  Il a appelé à s’appuyer sur les bonnes pratiques et les enseignements tirés de la réponse que les villes ont apporté non seulement à la pandémie mais aussi aux changements climatiques.  Il s’est dit persuadé que les gouvernements locaux, avec le soutien des autorités nationales, ont les moyens de réduire la pauvreté et les inégalités par une planification urbaine inclusive et la fourniture de logements et services de base abordables.  Il a appelé l’ONU et les États Membres à consacrer à ONU-Habitat les moyens de faciliter la mise en œuvre de la stratégie à l’échelle du système pour une urbanisation durable aux niveaux mondial, régional et national, pour aider à la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  En conclusion, M. Kelapile a indiqué qu’il présenterait les messages clefs de cette réunion spéciale de l’ECOSOC à la prochaine réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le Nouveau Programme pour les villes prévue le 28 avril prochain et qu’il s’engageait à mobiliser tous les dispositifs de l’ECOSOC pour accélérer la mise en œuvre de ce programme de concert avec le Programme 2030.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité : à Abyei, l’amélioration des relations entre le Soudan et le Soudan du Sud porteur d’espoir d’un règlement malgré des tensions intercommunautaires

9020e séance – matin
CS/14868

Conseil de sécurité : à Abyei, l’amélioration des relations entre le Soudan et le Soudan du Sud porteur d’espoir d’un règlement malgré des tensions intercommunautaires

Saisi du rapport du Secrétaire général sur les progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), le Conseil a, ce matin, fait le point sur la situation à Abyei à l’approche de l’expiration du mandat de la Mission, qui soutient le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, le 15 mai 2022. 

Aux côtés de la nouvelle Envoyée spéciale du Secrétaire général pour la Corne de l’Afrique, Mme Hanna Serwaa Tetteh, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean Pierre Lacroix, a fait état d’une amélioration des relations bilatérales entre le Soudan et le Soudan du Sud.  Ce dernier a également indiqué que sur le plan sécuritaire, la situation générale dans la zone administrative d’Abyei est restée calme au cours de la période à l’examen, même si le manque de confiance entre les communautés Misseriya et Ngok Dinka reste très préoccupant.

En effet, depuis octobre dernier, on assiste à des incidents de violence intercommunautaire, comme ceux de la semaine dernière, qui ont fait 29 morts, dont 2 femmes, et 30 blessés au sein des deux communautés des zones de Noong/Annam, Kolom, Leul/Al Luo et sur le marché d’Amiet/Faydelzaraf.  Selon M.  Lacroix, ces pertes auraient pu être évitées s’il y avait davantage de confiance intercommunautaire à tous les niveaux, le Soudan du Sud rétorquant que ces attaques sont liées au vide sécuritaire laissé par la FISNUA. 

Pourtant, a assuré M. Lacroix, la mission n’a eu de cesse d’intensifier son appui au dialogue intercommunautaire en travaillant sans relâche avec les Gouvernements soudanais et sud-soudanais, ainsi qu’avec les dirigeants communautaires des deux côtés, pour parvenir à un accord sur les conditions concernant les routes migratoires pendant la saison sèche.  Le commandant par intérim de la Force a encouragé l’utilisation de mécanismes locaux de règlement de conflits impliquant les chefs traditionnels, les jeunes, les femmes et les filles. 

Mais, il appartient avant tout aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais de renouveler leur engagement sur le statut final d’Abyei, a fait valoir le Secrétaire général adjoint, saluant à cet égard la récente demande de soutien des deux parties pour l’organisation de la prochaine réunion du Comité mixte de contrôle d’Abyei.  Comme l’a rappelé l’Inde, le mandat de ce Comité prévoit des réunions mensuelles, ce qui n’est pas arrivé une fois depuis 2017. 

Les défis internes auxquels sont confrontés le Soudan et le Soudan du Sud ne doivent pas faire dérailler les dynamiques qui ont conduit à des relations bilatérales plus amicales ces dernières années, a mis en garde le Brésil, en encourageant les dirigeants soudanais et sud-soudanais à saisir ce moment pour avancer vers un règlement politique d’Abyei, la zone frontalière contestée.   En effet, comme l’a rappelé Mme Tetteh, avec la destitution du Gouvernement civil de Khartoum en octobre 2021, l’élan vers la résolution des questions en suspens a été soudainement stoppé et les deux pays devront reprendre ces efforts.  Lors de sa récente visite à Khartoum, le Président du Conseil souverain et son adjoint l’ont informée que des préparatifs étaient en cours pour traiter de ces questions avec leurs homologues sud-soudanais.  

Pour la haute fonctionnaire, une victime évidente du coup d’État au Soudan a été le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité.  Lors de sa dernière réunion, les 8 et 9 septembre 2021 à Djouba, il avait programmé une réunion pour la deuxième semaine de janvier 2022 à Khartoum qui n’a pas eu lieu.  Quant à l’appel lancé aux deux pays pour qu’ils retirent leurs forces de la zone d’Abyei d’ici au 31 décembre 2021, Mme Tetteh a expliqué que les dirigeants soudanais l’ont assurée qu’ils l’ont fait et qu’ils ont appelé le Soudan du Sud à faire de même pour que soient réactivées les réunions du Comité mixte de contrôle d’Abyei. 

En attendant, en l’absence de progrès significatifs sur le règlement du statut final d’Abyei, M. Lacroix a mis en avant le fait que la FISNUA continue de se heurter à des difficultés dans l’exécution de son mandat, notamment la non-obtention de visas pour trois unités de police constituée, et l’impossibilité d’accès à la piste d’atterrissage d’Athony.  D’autres, comme les États-Unis, ont regretté que la nomination d’un chef de mission adjoint civil n’ait toujours pas eu lieu.  La FISNUA a également toujours du mal à documenter les violations et abus des droits de l’homme, en raison de son manque d’expertise dans ce domaine, a concédé M. Lacroix, de plus, il a constaté l’absence de progrès sur la ré-opérationnalisation de certaines bases du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, après que la FISNUA a été forcée de se réinstaller en 2021. 

Sur une note positive, le Secrétaire général adjoint a expliqué qu’à la suite de l’examen stratégique de la FISNUA, le général de division Benjamin Sawyerr, ainsi que les femmes et les hommes de son équipe de la FISNUA, ont réussi la transition difficile de la Mission en une force multinationale de maintien de la paix des Nations Unies en quelques mois seulement.  La France a d’ailleurs salué les efforts du Secrétariat et des pays contributeurs de troupes pour réussir la reconfiguration de la FISNUA. 

Les membres du Conseil ont pour la plupart fait part de leurs inquiétudes face à la poursuite des violences, non seulement contre les civils mais aussi à l’encontre des Casques bleus de la FISNUA, appelant les parties à mettre en place les mécanismes conjoints nécessaires à la stabilité d’Abyei.  Ils ont été nombreux à appeler le Soudan et le Soudan du Sud à assurer la sécurité et la liberté de mouvement de la FISNUA, conformément à leurs obligations en vertu de l’accord sur le statut de la Force. 

L’Envoyée spéciale, Mme Tetteh, a cependant trouvé encourageant que, alors que chacun des deux pays est aux prises avec un conflit interne, le Soudan et le Soudan du Sud continuent de se compléter dans la recherche de la paix et de tirer parti des progrès réalisés, tout en intensifiant l’aide humanitaire aux communautés déplacées et vulnérables.   Le Soudan a d’ailleurs indiqué avoir fait récemment une proposition sur la création d’administrations conjointes à Abyei et qu’il attend la réponse du Soudan du Sud.   Le climat positif prévalant entre nos deux pays est de nature à favoriser les efforts de recherche d’un statut final à Abyei, a ajouté son représentant. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2022/136)

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a expliqué qu’en matière sécuritaire, la situation générale dans la zone administrative d’Abyei est restée calme, mais le manque de confiance entre les communautés Misseriya et Ngok Dinka reste très préoccupant selon lui. Après que le Conseil de sécurité a demandé, en décembre dernier, que la FISNUA intensifie son appui au dialogue intercommunautaire, la Mission a travaillé sans relâche avec les Gouvernements soudanais et sud-soudanais, a-t-il indiqué, ainsi qu’avec les dirigeants communautaires des deux côtés, pour parvenir à un accord sur les conditions concernant les routes migratoires pendant la saison sèche. Le haut fonctionnaire s’est dit déçu de constater qu’à la dernière minute, les parties n’aient pas réussi à s’entendre sur un certain nombre de points clefs, ce qui a entraîné l’annulation de la manifestation organisée par la FISNUA à Entebbe pour commencer le dialogue intercommunautaire.  Depuis octobre dernier, on assiste à des incidents de violence intercommunautaire, comme celui de la semaine dernière, qui ont fait au total 29 morts, dont 2 femmes et 30 blessés dans les deux communautés. Ces incidents violents se sont produits dans les zones de Noong/Annam, Kolom, Leul/Al Luo et du marché d’Amiet/Faydelzaraf, a précisé M. Lacroix pour lequel ces morts et ces blessés auraient pu être évités s’il y avait eu davantage de confiance intercommunautaire à tous les niveaux.  En réponse à ces incidents, la Mission a poursuivi son travail de sensibilisation des communautés, ainsi que des patrouilles plus fréquentes et de plus longue portée. Le commandant de la Force par intérim a encouragé l’utilisation de mécanismes locaux de règlement de conflits impliquant les chefs traditionnels, les jeunes, les femmes et les filles.  Mais, a souligné M. Lacroix, il appartient avant tout aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais de renouveler leur engagement sur le statut final d’Abyei.  À cet égard, il a salué la récente demande de soutien des deux parties pour l’organisation du prochain comité de contrôle conjoint d’Abyei, les exhortant à tout mettre en œuvre pour profiter de cette réunion afin d’avancer sur la question d’Abyei. 

Sur une note positive, le Secrétaire général adjoint a fait état de progrès significatifs dans l’élaboration du programme conjoint d’Abyei, proposé dans sa lettre au Conseil de sécurité en date du 17 septembre 2021 (S/2021/805).  Une équipe de l’ONU est à un stade avancé des consultations avec les femmes, les jeunes, les anciens et d’autres membres de la communauté pour s’assurer que les services de consolidation de la paix proposés par le biais du programme conjoint d’Abyei bénéficieront aux Misseriya et aux Ngok Dinka d’une manière sensible au conflit et là où les besoins sont les plus grands.  M. Lacroix s’est dit encouragé par le soutien politique apporté par les deux gouvernements à ce programme. 

La FISNUA a continué de se heurter à des difficultés pour documenter les violations et les abus des droits de l’homme, en raison de son manque d’expertise dans le domaine des droits de l’homme, a-t-il concédé, tout en se disant encouragé par le fait qu’une équipe de spécialistes ait obtenu des visas temporaires pour mener une mission d’évaluation à Abyei en mars dernier.  Aucun progrès en revanche n’a été enregistré s’agissant du déploiement des trois unités de police constituées (UPC) conformément au mandat du Conseil de sécurité, a regretté M. Lacroix et cela malgré les efforts continus de la direction de la FISNUA.  Les visas n’ont pas été accordés à ces trois unités, ni aux autres policiers hors unités constituées (IPO). 

Passant à la situation humanitaire dans la région d’Abyei, M. Lacroix a reconnu qu’elle s’était détériorée, comme en témoigne le fait que le nombre de personnes vulnérables soit passé de 103 000 à 240 000 au cours de la période à l’examen.  C’est en grande partie dû à la violence entre les communautés Twic Dinka et Ngok Dinka près d’Agok en février et mars, a précisé M. Lacroix.  Des centaines de travailleurs humanitaires ont été évacués, deux ont été tués, et les habitants de la région sont toujours profondément touchés par la baisse considérable des services médicaux. 

Par ailleurs, il n’y a eu aucun progrès sur la ré-opérationnalisation des bases du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière (JBVMM 11, 12) et de son quartier général du secteur 1 à Gok Machar, après que la FISNUA a été forcée de se réinstaller ailleurs en 2021.  Une nouvelle force JBVMM est présente sur les sites opérationnels, a précisé M. Lacroix, et elle est prête à mettre en œuvre ce volet important de son mandat dans tous les lieux préalablement convenus entre les parties. Pour cela, il est impératif que le Gouvernement du Soudan du Sud poursuive ses efforts pour permettre le retour du JBVMM dans ces zones dans les plus brefs délais, a exigé M. Lacroix. 

Avant de conclure, il a dénoncé certains actes de violence graves qui ont visé des soldats de la paix de la FISNUA, demandant aux autorités compétentes d’enquêter sur ces incidents en priorité.  Après avoir remercié le général de division Benjamin Sawyerr, ainsi que les femmes et les hommes de son équipe de la FISNUA, pour leur travail acharné et continu, notamment pour superviser et soutenir la transition réussie et difficile de la Mission en une force multinationale de maintien de la paix des Nations Unies et cela en quelques mois seulement, le Secrétaire général adjoint a sollicité le soutien du Conseil à la recommandation du Secrétaire général de proroger le mandat de la FISNUA pour une nouvelle période de six mois, jusqu’au 15 octobre 2021. 

Mme HANNA SERWAA TETTEH, Envoyée spéciale du Secrétaire général pour la Corne de l’Afrique, qui s’exprimait par visioconférence pour ce premier exposé au Conseil de sécurité dans le cadre de ses nouvelles fonctions, a noté que cette séance se tient dans un contexte marqué par des incertitudes, à la suite du coup d’État au Soudan du 25 octobre 2021, qui n’a empêché de planifier toutes les réunions des mécanismes conjoints entre le Soudan et le Soudan du Sud prévues pour 2022.  Avec la destitution du gouvernement civil de Khartoum, l’élan vers la résolution des questions en suspens a été soudainement arrêté et les pays devront reprendre ces efforts, a-t-elle indiqué, ajoutant que, lors de sa récente visite au Soudan, le Président du Conseil souverain et son adjoint l’ont informée que des préparatifs étaient en cours pour traiter de ces questions avec leurs homologues sud-soudanais.  À ses yeux, les récentes violences survenues entre les Ngok Dinka et les Misseriya à Abyei viennent rappeler la nécessité de se concentrer sur le règlement du statut définitif d’Abyei. 

Au Soudan du Sud, a précisé l’Envoyée spéciale, le Président Kiir a procédé, le 12 avril, à des nominations au sein de la structure de commandement des Forces unifiées, qui doivent ouvrir la voie au redéploiement des troupes ayant terminé leur formation dans le cadre d’une nouvelle armée nationale.  Cela fait suite à un accord intervenu le 3 avril entre le Président, le premier Vice-Président Riek Machar et le cinquième Vice-Président Abdelbagi, en tant que commandants en chef des partis signataires de l’Accord de paix revitalisé de 2018.  Ce développement a été le fruit des efforts de médiations menés par le Président du Conseil souverain soudanais, a-t-elle relevé, avant de se féliciter que la tension entre le Président Kiir et M. Machar, qui s’était traduite par des combats entre leurs troupes dans les États du Haut-Nil et de l’Unité, se sont depuis dissipées. 

Pour Mme Tetteh, une victime évidente du coup d’État au Soudan a été le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, l’un des rares réunissant les deux pays pour passer en revue les questions politiques et sécuritaires.  Lors de sa dernière réunion, les 8 et 9 septembre 2021 à Djouba, il avait programmé une réunion pour la deuxième semaine de janvier 2022 à Khartoum.  Or, non seulement la réunion n’a pas eu lieu mais aucune suite n’a été donnée aux autres décisions prises lors de la séance de Djouba, a regretté l’Envoyée spéciale.  Quant à l’appel lancé aux deux pays pour qu’ils retirent leurs forces de la zone d’Abyei d’ici au 31 décembre 2021, a-t-elle noté, les dirigeants soudanais assurent qu’ils ont effectivement retiré toutes leurs forces et appelé le Soudan du Sud à faire de même pour que soient réactivées les réunions du Comité mixte de contrôle d’Abyei (AJOC).  La haute fonctionnaire s’est d’autre part déclarée préoccupée par l’absence de progrès sur l’engagement du Soudan du Sud, pris dans le cadre du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, d’effectuer une médiation entre les communautés d’Aweil en vue de la réactivation des trois systèmes de vérification conjointe des frontières.  Aucune nouvelle date n’a été fixée pour la prochaine rencontre du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, a-t-elle déploré, avant de saluer les contacts visant à permettre la tenue d’une réunion de l’AJOC prochainement. 

Mme Tetteh a indiqué que, grâce à l’assouplissement des restrictions imposées par la pandémie de COVID-19, elle a pu se rendre dans les deux pays et y rencontrer les principaux dirigeants.  De ces discussions, il ressort que les relations bilatérales entre le Soudan et le Soudan du Sud sont bonnes, a-t-elle affirmé, se réjouissant que les deux pays aient poursuivi leurs visites de haut niveau.  Bien que la dernière visite du Président Kiir à Khartoum remonte à 2018, les dirigeants soudanais ont continué à se rendre à Djouba.  Les ministres sud-soudanais ont, eux, fait la navette entre Djouba et Khartoum tout au long de la période à l’examen pour faciliter une solution entre les composantes militaires et civiles du Gouvernement de transition et empêcher l’effondrement de l’Accord, a expliqué l’Envoyée spéciale.  Selon elle, bien que le Président Kiir et le général Burhan ne se soient pas attardés sur la question d’Abyei, ils ont convenu de se concentrer sur la coopération le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud, en commençant par une approche de paix prévoyant le développement de champs pétrolifères « unifiés », y compris dans la région d’Abyei.  Elle a émis l’espoir que cette approche soit un point de départ pour s’attaquer aux violences récurrentes dans la zone mais aussi pour progresser vers un règlement du statut définitif d’Abyei. 

Khartoum a également continué de jouer un rôle positif dans la résolution des problèmes intrapartis rencontrés par les partis sud-soudanais, a constaté Mme Tetteh, saluant à ce sujet l’accord signé le 16 janvier entre la faction dissidente du Mouvement populaire de libération du Soudan dans l’opposition et le Mouvement populaire de libération du Soudan (MPLS).  Dans le même esprit, a-t-elle relaté, le Soudan du Sud a poursuivi ses efforts pour convaincre Abdel Wahid Al Nur, chef d’une faction du Mouvement/Armée de libération du Soudan (SLM/A), de rejoindre le processus de paix soudanais.  Ces efforts n’ont pas encore été couronnés de succès, M. Nur refusant de se joindre au processus négocié par Djouba et appelant à une initiative soudanaise pour résoudre de manière globale les multiples problèmes du Soudan. 

Évoquant ensuite les développements dans les régions du Kordofan méridional et du Nil Bleu, Mme Tetteh a noté avec regret que les efforts déployés par le comité de médiation du Soudan du Sud pour faciliter la reprise des négociations entre le Gouvernement soudanais et le MPLS-Nord-faction Abdelaziz Hélou n’ont pas abouti. Dans le même temps, la faction Malek Agar du MPLS-Nord, qui était l’un des signataires de l’Accord de paix de Djouba avec le Gouvernement du Soudan, est resté au sein des institutions de transition malgré l’arrestation, l’emprisonnement et la libération ultérieure de son vice-président, Yassir Aman, par les militaires.  De toute évidence, a observé l’Envoyée spéciale, le coup d’État a eu un effet négatif sur les relations bilatérales que les deux pays avaient commencé à approfondir et qu’ils essaient de redémarrer.  Elle a cependant trouvé encourageant que, alors que chacun d’eux est aux prises avec un conflit interne, le Soudan et le Soudan du Sud continuent de se compléter dans la recherche de la paix et de tirer parti des progrès réalisés, tout en intensifiant l’aide humanitaire aux communautés déplacées et vulnérables.  Tous deux reconnaissent le besoin de paix sur leurs territoires et dans la région, ce qui leur permettra de favoriser la coopération et les relations de bon voisinage, a-t-elle conclu. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a remercié le personnel de la FISNUA, notamment dans un contexte de reconfiguration de la Mission.  Elle a évoqué quelques défis comme un nouvel engagement diplomatique en faveur d’Abyei, ainsi que la lutte contre la violence et la désinformation de la part de la FISNUA qui a en outre besoin d’un accès sans entrave sur le terrain.  Pour la déléguée, il est clair que la solution durable au conflit ne peut qu’être diplomatique.  Elle a ensuite regretté l’absence de réunion du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité.  La représentante a également appelé à la nomination d’un chef de Mission adjoint dont le travail sera focalisé sur les questions politiques, afin de faire avancer ce volet. 

Après les violences de février et mars derniers, Mme Thomas-Greenfield a considéré que les relations de la Mission avec les communautés locales d’Abyei doivent être améliorées en vue de réduire les tensions.  De même, la FISNUA a besoin de renforcer son contingent de police pour faire face à l’insécurité.  Elle a par ailleurs insisté sur la délivrance de visas au personnel onusien, avant d’inviter la Mission à mieux communiquer avec les populations qui semblent ne pas bien saisir la portée du mandat de la FISNUA.  La déléguée a enfin plaidé pour que les troupes de la Mission reviennent sur les sites abandonnés l’an dernier. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon, au nom des A3) a noté avec intérêt le renforcement de la coopération entre le Soudan et le Soudan du Sud, souhaitant un dialogue accru entre ces deux pays sur la mise en place des arrangements à Abyei, pour le bien de la population.  Il a salué les efforts de la FISNUA ayant permis la tenue du dialogue intercommunautaire sur la paix.  Il est temps de définir un statut final pour Abyei, a déclaré le délégué.  Sur le plan sécuritaire, il a regretté la recrudescence des tensions entre les communautés Misseriya et Ngok Dinka.  Le délégué a noté les difficultés sur le plan humanitaire et salué les efforts des équipes pays du Soudan et du Soudan du Sud pour y remédier, s’agissant notamment de l’accès aux services de base.  Il a condamné les attaques contre le personnel de la FISNUA et contre les travailleurs humanitaires.  Le Soudan et le Soudan du Sud doivent respecter l’accord sur le statut des forces, a déclaré le délégué, avant de saluer l’apport du contingent éthiopien qui s’est retiré d’Abyei.  Enfin, le délégué du Gabon a réitéré l’importance d’une solution politique au statut d’Abyei. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a constaté que les développements politiques internes au Soudan et au Soudan du Sud ont pris le pas sur le statut final d’Abyei, avant d’espérer que, dans les mois à venir, les deux parties progresseront dans le processus visant un règlement politique.  Dans ce contexte, il s’est dit d’avis que le Comité de contrôle conjoint d’Abyei soit une priorité, rappelant que ce Comité avait pour mandat de se réunir tous les mois, or il ne l’a pas fait depuis novembre 2017.  L’Inde soutient les efforts continus déployés par l’Union africaine en vue de la reprise de ces réunions, a fait savoir le représentant, qui a également appelé à la mise en œuvre des décisions du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, arguant que des réunions régulières du Comité sont essentielles pour une administration efficace et relever les défis de sécurité à Abyei. 

Également préoccupé par la poursuite des affrontements violents entre les communautés Ngok Dinka et Misseriya, le représentant a salué à cet égard les efforts de la FISNUA pour réunir les anciens des deux communautés et convoquer à nouveau la Conférence de paix conjointe des chefs traditionnels, qui doit maintenant avoir lieu le mois prochain.  Concernant la mise en œuvre du mandat de la FISNUA, le représentant a demandé aux autorités soudanaises et sud-soudanaises de permettre l’opérationnalisation de la piste d’atterrissage d’Athony et de fournir des visas aux unités de police constituées.  Il a en outre exprimé sa préoccupation à la suite des attaques perpétrées contre les forces de la FISNUA et aux violations de leur liberté de mouvement.  Avant de conclure, le représentant a mentionné qu’un contingent indien de 570 Casques bleus rejoindra prochainement la FISNUA, et que son déploiement est déjà en cours. 

M. SUOOD RASHED ALI ALWALI ALMAZROUEI (Émirats arabes unis) a noté que cette séance se tient dans un contexte d’événements alarmants, à commencer par la poursuite de violents heurts intercommunautaires qui nuisent au travail de terrain de la FISNUA.  Ces violences ont aussi des conséquences négatives pour les organisations humanitaires à l’œuvre dans la région, a-t-il déploré, jugeant essentiel de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des travailleurs humanitaires.  Il a également appelé à des efforts accrus pour promouvoir le dialogue et la coexistence pacifique entre les communautés, sans pour autant négliger les enquêtes sur les violences.  Le délégué a par ailleurs souligné l’importance de créer des mécanismes temporaires administratifs et de sécurité afin de s’assurer que ces tensions ne débordent pas.  À cet égard, il a encouragé les membres de la FISNUA à poursuivre leurs contacts avec les communautés locales.  Il importe aussi, selon lui, que la conférence des chefs traditionnels puisse se tenir comme prévu en mai prochain.  Concernant les relations entre le Soudan et le Soudan du Sud, il s’est félicité que les dirigeants des deux pays appuient mutuellement la voix de l’autre pour la paix, ce qui atteste d’un vrai rapprochement.  Il faut faire fonds sur ces progrès afin d’avancer vers un règlement sur le statut définitif d’Abyei.  Enfin, après avoir rendu hommage à l’action que mène la FISNUA dans un environnement qui ne cesse d’évoluer, il a exprimé son soutien à la proposition du Secrétaire général de proroger son mandat. 

Mme SHERAZ GASRI (France) a salué les efforts du Secrétariat et des pays contributeurs de troupes pour réussir la reconfiguration de la FISNUA.  Elle s’est dite inquiète de la poursuite des violences non seulement contre les civils mais aussi à l’encontre des Casques bleus de la FISNUA, appelant les parties à mettre en place les mécanismes conjoints nécessaires à la stabilité d’Abyei.  La déléguée a regretté l’absence de progrès sur le redéploiement de la FISNUA dans les trois sites qu’elle a été contrainte d’évacuer fin 2021.  Elle a appelé le Soudan et le Soudan du Sud à assurer la sécurité et la liberté de mouvement de la FISNUA, conformément à leurs obligations en vertu de l’accord sur le statut de la Force. Elle a précisé qu’il revient au Soudan du Sud d’apaiser les tensions avec les communautés locales pour permettre le rétablissement du soutien de la FISNUA au mécanisme conjoint de vérification et d’observation de la frontière.  À défaut, le Conseil de sécurité devra en tirer les conséquences lors du prochain renouvellement du mandat de cette mission, a-t-elle prévenu.  Enfin, elle a réaffirmé son soutien à l’Envoyé spécial pour la Corne de l’Afrique alors que les crises se multiplient dans la région.  Enfin, elle a jugé urgent de rétablir une transition démocratique au Soudan, avant d’appeler les États de la région à résoudre leurs différends par le dialogue, qu’il s’agisse des questions d’Abyei, du triangle d’El-Fashaga, du barrage de la Renaissance ou du conflit au Tigré. 

M. CÍCERO TOBIAS DE OLIVEIRA FREITAS (Brésil) a évoqué la question du règlement politique à long terme du statut de la zone d’Abyei.  Les processus, les retards et, surtout, les solutions pour parvenir à un terrain d’entente ne progresseront que grâce à des négociations justes et crédibles, a-t-il fait valoir en appelant à soutenir non seulement des pourparlers supplémentaires entre le Soudan du Sud et le Soudan, mais également de nouveaux contacts entre les deux parties à différents niveaux.  Les défis internes de chaque pays ne doivent pas faire dérailler les dynamiques bilatérales qui ont conduit à des relations plus amicales ces dernières années, a mis en garde le représentant en encourageant les dirigeants soudanais et sud-soudanais à saisir cette ouverture bilatérale pour avancer vers un règlement politique sur Abyei. 

Abordant ensuite la dimension régionale de ces négociations, il a rappelé que le Secrétaire général avait encouragé à juste titre l’Union africaine à intensifier ses efforts de médiation.  Si les parties sont disposées à reprendre les consultations du Comité conjoint de contrôle d’Abyei, l’Union africaine a la légitimité pour faciliter et soutenir les aspects politiques et logistiques de celles-ci, a-t-il estimé.  Il a ajouté que si l’appui de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs est disponible, alors la dimension sous-régionale pourrait être renforcée et des voies de négociation supplémentaires créées.  Quant à la situation sur le terrain, il a regretté les cycles fréquents de violence dans la zone d’Abyei qui entravent l’aide humanitaire et la protection des civils. 

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a souhaité que la reconfiguration de la FISNUA soit l’occasion d’un renforcement de son mandat, s’agissant notamment de sa capacité à promouvoir les droits humains à Abyei.  Il a salué l’octroi de visas à deux experts en droits humains à Abyei, avant d’appeler le Soudan et le Soudan du Sud à remédier aux défis qui sapent la capacité opérationnelle de la FISNUA, dont le non-octroi de visas pour des policiers.  Préoccupé par les attaques perpétrées contre la Mission, il a demandé que celles-ci fassent l’objet d’une enquête approfondie.  Il a regretté que le Soudan et le Soudan du Sud n’aient pas progressé au cours des six derniers mois sur le statut final d’Abyei, avant de les inviter à donner la priorité à cette question.  Le délégué a appelé le Soudan du Sud à remédier aux difficultés rencontrées par la FISNUA s’agissant de la démarcation de la frontière.  En conclusion, M. Gallagher a réitéré l’importance d’un accord sur le statut final d’Abyei. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) s’est réjouie que les représentants du Soudan et du Soudan du Sud fassent preuve de davantage de coopération, y compris avec la FISNUA.  Il faut des efforts conjoints des parties dans le cadre d’une coopération mutuellement bénéfique, a-t-elle estimé, en saluant à cet égard la volonté démontrée par les parties dans l’exploitation conjointe des ressources pétrolières.  La Fédération de Russie espère que le dialogue entre Khartoum et Djouba permettra de tomber d’accord sur le statut définitif d’Abyei, a indiqué la représentante.  Tout en saluant le rôle joué par la FISNUA, elle a insisté sur l’impératif pour la Mission de se limiter aux termes de son mandat, notamment en favorisant le dialogue entre les parties et en atténuant les tensions intercommunautaires.  La déléguée a espéré que la Conférence des chefs traditionnels pourra se tenir dans les plus brefs délais.  Les positions du Soudan et du Soudan du Sud doivent être prises en compte, y compris au moment du renouvellement du mandat de la FISNUA, a-t-elle souhaité.  Quant à la transition de la FISNUA en Mission multinationale, elle a appelé à éviter qu’il y ait des problèmes logistiques pendant cette période. 

M. BING DAI (Chine) a jugé encourageant qu’en dépit des conflits communautaires et des activités criminelles qui se poursuivent dans la région, le Soudan et le Soudan du Sud aient continué à faire preuve de retenue dans le territoire contesté d’Abyei.  Saluant l’action cruciale des comités de protection communautaires établis avec l’assistance de la FISNUA, il y a vu une clef pour la stabilisation à long terme.  Dans cet environnement, le représentant a appelé de ses vœux la poursuite du dialogue en vue de parvenir à une coexistence harmonieuse.  Il s’est félicité, à cet égard, que les relations entre le Soudan et le Soudan du Sud aient continué de s’améliorer au cours de la période à l’examen, les deux pays se concentrant sur l’avancement de leurs processus politiques respectifs.  Il les a encouragés à procéder à des échanges d’informations et à faire face aux urgences en temps opportun.  Notant d’autre part que la reconfiguration des composantes militaires de la FISNUA progresse de manière ordonnée, il a salué le rôle des Casques bleus éthiopiens qui, au cours des 11 dernières années, ont accompli leur mandat dans des conditions extrêmement difficiles, en étroite coopération avec le Soudan et le Soudan du Sud.  Il a également indiqué qu’en tant que nouveau pays contributeur de troupes à la FISNUA, la Chine a déployé une unité d’hélicoptères à Abyei et fournira une force de réaction rapide dès que possible.  En attendant le règlement du statut définitif d’Abyei, il a exprimé l’accord de principe de sa délégation au renouvellement du mandat de la FISNUA. 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a estimé que l’amélioration récente des relations entre le Soudan et le Soudan du Sud est une occasion de relancer le processus pour parvenir à un accord sur Abyei.  Il a appelé les parties à assurer le bon fonctionnement du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière.  De même, il a jugé que ce n’est que par la coopération et le travail conjoint dans des forums comme le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité qu’il sera possible d’avancer vers la stabilisation de la région.  Il a regretté que ce dernier ne se soit pas réuni depuis 2017, avant de demander que des ressources soient investies et mobilisées; humaines, politiques et économiques nécessaires à sa réactivation.  Le délégué a appelé les autorités du Soudan et du Soudan du Sud à permettre le déploiement d’experts en droits de l’homme au sein de la FISNUA, conformément au mandat accordé par le Conseil de sécurité.  Il a exhorté la FISNUA à continuer de promouvoir les pourparlers de paix avec la participation pleine et effective des jeunes et des femmes.  Le représentant a également affirmé que la sécurité du personnel de la FISNUA est primordiale, exhortant les autorités à garantir leur sécurité et liberté de mouvement.  De même, et conformément à ses obligations en vertu de l’accord sur le statut des forces, des enquêtes doivent être menées en urgence et les responsables d’attaques contre les forces de la Mission traduits en justice. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a regretté la recrudescence des tensions communautaires à Abyei qui risque de saper les gains enregistrés jusqu’à présent. Il a appelé les parties à faire montre de volonté politique, à prévenir une escalade et à œuvrer à une cessation immédiate des violences.  Il a souligné la nécessité de remédier aux revendications socioéconomiques de la population, en soulignant la défiance persistante entre les communautés.  Il a déploré le « manque total de participation des femmes » à Abyei et jugé impossible de trouver des solutions durables lorsque la moitié de la population est exclue.  Le délégué a exhorté les entités onusiennes et les autres acteurs à mettre l’accent sur l’exécution du programme les femmes et la paix et la sécurité à Abyei.  Il a aussi souhaité que la FISNUA soit dotée d’experts en droits humains, avant de demander au Soudan d’accorder des visas aux policiers de la Mission.  Il est très préoccupant que la Force, qui est la seule entité garante du maintien de l’ordre à Abyei, ne puisse opérer à pleine capacité, a conclu M. Spasse. 

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite préoccupée par le niveau élevé des tensions dans et autour d’Abyei, en appelant les Misseriya et les Ngok Dinka à renoncer aux attaques liées à la saison migratoire.  La Norvège est favorable aux différentes initiatives locales visant à éviter et à régler les conflits, a déclaré la représentante, qui a également salué les efforts en ce sens du Commandant de la FISNUA.  Il est de la plus haute importance que la FISNUA reste pleinement opérationnelle et soit prête à utiliser la force si nécessaire pour protéger les civils exposés à des risques de violences physiques, a estimé la représentante, en précisant que cela signifie le déploiement des unités de police constituée.  Alors qu’Abyei reste une zone contestée, il ne fait aucun doute que la FISNUA joue un rôle inestimable dans la sécurité et la stabilité de la zone.  Il n’y a cependant eu aucun progrès sur la question la plus épineuse, à savoir si Abyei appartiendra au Soudan ou au Soudan du Sud, a regretté la déléguée, en demandant la mise en œuvre des mécanismes conjoints, tel que stipulé dans l’accord de juin 2011.  Cela renforcera la coopération et instaurera la confiance entre les communautés sur le terrain, a-t-elle fait valoir. 

La représentante a exhorté les parties à reprendre les réunions du Comité de contrôle conjoint pour Abyei, à mettre en place des procédures de délivrance de visas efficaces pour assurer un recrutement en temps opportun et remplacer le personnel policier et militaire, et à rendre la piste d’atterrissage d’Athony accessible.  Elle a également encouragé le soutien continu de la FISNUA aux initiatives de paix dirigées par des femmes, en appelant à plus de coopération entre la FISNUA, les agences des Nations Unies, et la société civile à cet égard.  La déléguée a également remarqué que la coopération transfrontalière est et sera la clef du développement et de la sécurité de la zone à l’avenir, ce qui suppose des mesures concrètes de renforcement de la confiance mutuelle entre les parties afin qu’aucune d’entre elles ne considère « la solution définitive » comme un « jeu à somme nulle ». 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a félicité à son tour le Soudan et le Soudan du Sud pour l’amélioration de leurs relations bilatérales, y compris le soutien mutuel exprimé à leur processus de paix respectif.  Il s’est dit encouragé par la dernière session, en octobre, du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et de sécurité et de la Commission frontalière mixte.  Il a cependant jugé regrettable que des développements aussi positifs n’aient conduit à des progrès tangibles pour la population d’Abyei ou à la conclusion d’un accord politique pour la région.  Dans ce contexte, le délégué a exhorté les deux pays à organiser une nouvelle réunion du Comité mixte de contrôle d’Abyei et, en écho aux propos du Secrétaire général, encouragé l’Union africaine à intensifier ses efforts de médiation.  Pour ce qui concerne la FISNUA, il s’est réjoui que la rotation des troupes soit presque terminée et a rendu hommage au dévouement des Casques bleus éthiopiens à Abyei au cours de la dernière décennie.  Il a également exhorté les gouvernements du Soudan et du Soudan du Sud à supprimer les obstacles opérationnels, notamment la restriction de la liberté de mouvement, qui limitent la capacité de la FISNUA à mettre en œuvre son mandat dans son intégralité.  De même, il a souhaité que le Soudan du Sud permette la ré-opérationnalisation du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance des frontières à Gok Macchar. 

Le représentant s’est d’autre part déclaré inquiet après les deux attaques essuyées par les forces de la FISNUA au cours de la période à l’examen. Réaffirmant le caractère vital de la sûreté et de la sécurité des soldats de la paix de l’ONU, il a souhaité que les autorités compétentes enquêtent sur ces incidents et tiennent leurs auteurs comptables de leurs actes.  Enfin, il a exprimé sa profonde préoccupation face à la flambée de violence à Agok, au cours de laquelle deux travailleurs humanitaires ont été tués et les activités sur le terrain suspendues.  Il a exhorté toutes les parties à respecter pleinement le droit international humanitaire et à permettre aux acteurs humanitaires de fournir de l’aide à ceux qui en ont besoin dans toutes les parties d’Abyei. 

M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a constaté que les conditions de sécurité sont fragiles à Abyei, notamment du fait des attaques répétées des Misseriya contre les Ngok Dinka.  Il a estimé que ces attaques sont liées au vide sécuritaire laissé par la Mission.  Le représentant a rappelé que la région devrait être exempte d’armes à feu, en dehors de celles possédées par les forces de la FISNUA.  Si ces attaques se poursuivent, alors la situation sécuritaire continuera de se dégrader, a-t-il averti, demandant au Conseil de sécurité, à l’Union africaine et à l’IGAD de travailler avec les parties pour mettre la dernière main au statut final d’Abyei. 

Sur la question des violences d’Agok, le représentant a affirmé que les autorités sud-soudanaises avaient établi une commission d’enquête.  Il a estimé que le Programme commun pour Abyei jouera un rôle important pour combler les lacunes en services de base, vu que les autorités Sud-Soudanaises ont fait tout leur possible, avec les moyens disponibles, pour apporter les services nécessaires aux populations. 

Enfin, s’exprimant sur la question de la réconciliation, le représentant a fait observer que la région vit toujours au rythme d’attaques perpétuelles, sans que les auteurs ne soient sanctionnés.  De même, il a rappelé que cela fait près de 10 ans que le chef suprême Ngok Dinka a été assassiné de sang-froid, et jusqu’à ce jour, personne n’a été sanctionnée ni aucun rapport rendu public sur l’évènement.  « Quand le Conseil de sécurité parle de réconciliation dans ces conditions, de quoi parle-t-il? » a-t-il lancé. 

M. AMMAR MOHAMMED MAHMOUD MOHAMMED (Soudan) a dit que les relations bilatérales entre le Soudan et le Soudan du Sud ont connu des développements positifs ces derniers mois.  Il a indiqué que son pays a fait récemment une proposition sur la création d’administrations conjointes à Abyei et qu’il attendait la réponse du Soudan du Sud.  Le représentant a estimé que le climat positif prévalant entre les deux pays est de nature à favoriser les efforts de recherche d’un statut final à Abyei.  Il a appelé à profiter de cet élan pour régler les questions de démarcation de la frontière.  Le délégué s’est dit préoccupé par les incidents qui se sont produits ces derniers mois et a présenté ses condoléances aux familles des victimes.  Il a rappelé que la zone d’Abyei doit être exempte de toute présence armée, jugeant regrettable la présence de forces armées sud-soudanaises dans la zone tampon et estimant que cela entraînera des conséquences négatives sur la recherche d’un statut final.  En conclusion, le représentant du Soudan s’est prononcé en faveur d’un renouvellement de six mois du mandat de la FISNUA. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Kosovo plus que jamais dépendant de l’état de son dialogue avec la Serbie, souligne la nouvelle Représentante spéciale

9019e séance – après-midi
CS/14867

Conseil de sécurité: le Kosovo plus que jamais dépendant de l’état de son dialogue avec la Serbie, souligne la nouvelle Représentante spéciale

Au Conseil de sécurité cet après-midi, la nouvelle Représentante spéciale et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Mme Caroline Ziadeh, a averti que, alors que les tensions géopolitiques de la guerre en Ukraine se font ressentir dans les Balkans occidentaux, la stabilité du Kosovo est plus que jamais dépendante du difficile dialogue entre Pristina et Belgrade.  Organisée dans un climat tendu, cette séance a également vu la Serbie et l’Albanie s’opposer sur le principe d’un maintien de la MINUK dans sa configuration actuelle. 

Les développements en Ukraine ont et continueront inévitablement d’exercer une influence sur toutes les questions de sécurité européenne, y compris dans les zones d’opérations de la MINUK, a d’emblée souligné Mme Ziadeh, avant de s’étendre sur les récentes élections générales en Serbie, auxquelles la participation des électeurs du Kosovo n’a cette fois pas été facilitée par Pristina.  Regrettant les « effets clivants  » de cette décision qui, selon elle, a divisé l’opinion publique « sur la base de considérations ethniques », elle a néanmoins salué le fait que plus de 19 000 Serbes du Kosovo aient pu voter dans des bureaux spéciaux établis en Serbie. 

Après avoir souligné l’importance de la résilience des institutions démocratiques dans toute la région des Balkans, Mme Ziadeh a dénoncé les récentes attaques qui ont visé des patrouilles de police dans le nord du Kosovo, avant d’inviter les dirigeants de Pristina et de Belgrade à se montrer « judicieux » dans leurs rhétorique politique et, surtout, à s’engager de manière constructive dans le dialogue facilité par l’Union européenne.  Alors que l’Accord de Bruxelles sur les principes présidant à la normalisation des relations vient d’entrer dans sa dixième année, elle a également enjoint les deux parties à trouver une solution négociée à la question des plaques d’immatriculation des véhicules, mais aussi à celles relatives à la liberté de mouvement et aux accords énergétiques. 

Abordant ensuite la question de son mandat, Mme Ziadeh s’est voulue très claire: la MINUK n’a pas vocation à être un « facteur déterminant » ou à se muer en porte-parole d’intérêts particuliers s’agissant d’un règlement juste et durable entre les parties.  « Ce n’est pas notre rôle », a-t-elle tranché, promettant que sa Mission poursuivra son travail dans les domaines où elle est réellement en mesure de contribuer à promouvoir les objectifs communs des autorités, des collectivités et des institutions du Kosovo, tout en appuyant les progrès dans les discussions politiques de haut niveau. 

Cette déclaration d’intention a été contredite par l’Albanie, pour qui il ne fait aucun doute que le rôle de la MINUK ira en diminuant, compte tenu du progrès global de la situation, de la consolidation des institutions du Kosovo, du renforcement de sa stature internationale et des perspectives d’accord.  Rappelant que la Mission « ne fait pas partie des murs du Kosovo », il a observé qu’elle ne joue un rôle crucial « dans aucune des questions clés pour lesquelles le Kosovo a besoin d’aide ».  Concluant que la MINUK, dans sa configuration actuelle, n’est plus nécessaire, le représentant albanais a invité le Conseil à mettre fin à son mandat pour passer à une présence onusienne « plus efficace et mieux adaptée à son objet ». 

Un avis partagé par Mme Donika Gërvalla-Schwarz, ex-Vice-Première Ministre du Kosovo et actuelle dirigeante du parti Guxo, pour qui la Mission ne joue plus de rôle dans la vie des citoyens du Kosovo.  C’est d’autant plus vrai, à ses yeux, qu’une grande majorité des pays de l’Union européenne et de l’OTAN ont reconnu l’indépendance du Kosovo, à l’instar de la Cour internationale de Justice (CIJ) et soutiennent le principe d’un rapprochement.  « Le Kosovo fait partie de l’Occident, alors que la Serbie est un satellite de la Russie », a-t-elle lancé, comparant la campagne militaire menée par la Serbie en 1999 contre le Kosovo à celle engagée par la Russie en Ukraine.  Elle a aussi déploré que les nationalistes serbes ne se soient jamais excusés pour les crimes de guerre commis au Kosovo et les aient même justifiés.  De fait, a-t-elle renchéri, la Russie et son allié serbe représentent la plus grande menace à la paix dans la région. 

Avant ces prises de position, le Ministre des affaires étrangères de la Serbie avait fait part de son souhait que la MINUK et la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) poursuivent leur mission, « avec une capacité non diminuée ».  De l’avis de M. Nikola Selakovic, l’engagement de la MINUK constitue même un facteur clef du maintien de la paix et de la sécurité dans la « province méridionale du Kosovo et Metohija », compte tenu des violations des droits des Serbes et des non-Albanais commises par Pristina, avec pour objectif, selon lui, de « mettre fin à toute forme de diversité nationale ».   Il a donc appelé le Conseil de sécurité à adresser un message qui souligne la nécessité d’établir la confiance interethnique en ayant des institutions à Pristina qui respectent les accords conclus et respectent les normes internationales relatives à l’état de droit et aux droits de l’homme.  

Affirmant ne pas avoir l’impression que les institutions de Pristina aient la volonté politique d’améliorer la situation, le Ministre serbe en a voulu pour preuve le fait que Pristina affirme ouvertement que la création de la Communauté des municipalités serbes du Kosovo ne sera jamais autorisée, alors même qu’elle est prévue par l’Accord de Bruxelles.   Cela sape non seulement le dialogue entre Belgrade et Pristina, mais humilie aussi directement les acteurs internationaux, principalement l’Union européenne, a-t-il commenté.

Sur la même ligne que Belgrade, la Fédération de Russie a déploré les retards pris dans la création de cette communauté, mesure pourtant essentielle à la réconciliation, selon elle.  Face aux efforts de Pristina pour « éliminer l’identité des Serbe du Kosovo », elle a souhaité à son tour que la MINUK continue d’être dotée des ressources nécessaires pour s’acquitter de son mandat. La délégation s’est également élevée contre le rapprochement du Kosovo avec l’OTAN, évolution « lourde de dangers » à son sens, alors que ni Washington ni Bruxelles « n’ont de prise sur Pristina ».   Enfin, elle a fait mention des 78 jours de bombardement de Belgrade par l’OTAN en 1999 et son cortège de destructions et de pertes civiles, non sans relever que l’Alliance atlantique avait pour alliée, à l’époque, l’Armée de libération du Kosovo (ALK), dont nombre de crimes restent impunis. 

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ (S/2022/313)

Déclarations

Mme CAROLINE ZIADEH, Représentante spéciale et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), nouvellement nommée à ces fonctions, a tout d’abord indiqué que les développements en Ukraine ont et continueront inévitablement d’exercer une influence sur toutes les questions de sécurité européenne, y compris dans les zones d’opérations de la Mission.  Elle a ensuite informé le Conseil sur les suites des élections serbes, organisées le 3 avril.  Bien que les résultats définitifs soient encore attendus, il ressort de ce scrutin que l’actuel parti majoritaire en Serbie conserve un mandat public sûr.  Parallèlement, a-t-elle relevé, la coalition au pouvoir à Pristina jouit également d’une majorité confortable au Parlement, ce qui permet d’espérer des « prises de décision courageuses ».  Dans ce contexte, la haute fonctionnaire a déploré que, dans la perspective des élections générales serbes, aucune solution n’ait permis de répondre à l’appel lancé par la communauté internationale aux autorités de Pristina et de Belgrade pour qu’elles conviennent de modalités facilitant la participation des électeurs au Kosovo.  Elle a regretté les « effets clivants » de cette décision qui, selon elle, a divisé l’opinion publique « sur la base de considérations ethniques ».  Néanmoins, plus de 19 000 électeurs du Kosovo ont pu participer en votant dans des bureaux de vote spéciaux établis en Serbie et, grâce à une logistique facilitée de part et d’autre, le processus électoral s’est déroulé sans heurts et sans incident, a-t-elle salué. 

Soulignant l’importance de la résilience des institutions démocratiques dans toute la région des Balkans, Mme Ziadeh a rappelé qu’elle a rencontré, ce mois-ci, le Président réélu de la Serbie, ainsi que d’autres représentants du Gouvernement serbe à Belgrade, faisant état de « conversations très directes et ouvertes ». Elle s’est cependant dit préoccupée par les récentes attaques qui ont visé des patrouilles de police dans le nord du Kosovo. Bien que le mobile soit encore inconnu, elle a exhorté la population et les responsables de tous bords à condamner ces violences et à fournir toute information qui permettrait d’identifier et de traduire en justice leurs auteurs. Elle a également invité les dirigeants de Pristina et de Belgrade à être très judicieux dans leurs actions et leur rhétorique politique, tout en s’engageant de manière constructive dans le dialogue facilité par l’Union européenne. Tout en précisant ne pas avoir encore eu l’occasion de rencontrer le Premier Ministre ou Président à Pristina, elle a dit s’être entretenu avec la plupart des dirigeants de tout l’éventail politique du Kosovo, y compris les partis de l’opposition et les indépendants, et a promis d’échanger régulièrement avec les chefs d’autres partis du voisinage des Balkans pour entendre leurs perspectives. 

Poursuivant, Mme Ziadeh a rappelé qu’hier marquait le neuvième anniversaire du premier accord de principes sur la normalisation des relations. Saluant les « résultats significatifs » auxquels a conduit ce processus, elle a regretté que, même sur des sujets extrêmement techniques comme celui des plaques d’immatriculation des véhicules, les progrès restent « timides et lents ».  À cette heure, nous ne sommes toujours pas sûrs que Belgrade et Pristina arriveront à se mettre d’accord sur cette question d’ici à la date limite de demain, a-t-elle averti, encourageant les deux parties à rechercher ensemble une solution permanente sur ces licences ainsi que sur d’autres questions concernant la liberté de mouvement et les accords énergétiques. Évoquant ensuite la situation économique du Kosovo et de la région, elle a rappelé que l’inflation, les pénuries, la hausse des taux d’intérêt et l’augmentation de la dette pesaient déjà lourdement avant la pandémie de COVID-19 et le début des événements en Ukraine.  Mais ils se sont depuis aggravés, a-t-elle souligné, avant d’appeler à trouver des modes pratiques de coopération économique entre Belgrade, Pristina et tous les voisins régionaux, notamment en réduisant les restrictions à la circulation des personnes, des marchandises et des capitaux. 

Pour ce qui concerne son mandat, Mme Ziadeh a affirmé que sa responsabilité est de fournir des informations objectives au Secrétaire général et au Conseil de sécurité.  À cet égard, elle a assuré que le contenu des rapports du Secrétaire général ne fait l’objet d’aucune négociation avec les parties. Elle a d’autre part fait valoir que la MINUK n’est pas un « facteur déterminant » -ni le porte-parole d’aucun point de vue particulier- concernant un règlement juste et durable entre les parties.  « Ce n’est pas notre rôle », a-t-elle déclaré, rejetant les « insinuations » selon lesquelles la MINUK constituerait un obstacle ou serait le véhicule des uns ou des autres. Par conséquent, nous poursuivrons notre travail dans les domaines où nous sommes réellement en mesure de contribuer à faire avancer les objectifs communs des autorités, des collectivités et des institutions au Kosovo, a indiqué la Représentante spéciale, avant d’insister sur l’importance de progrès dans les discussions politiques de haut niveau, en particulier le dialogue facilité par l’Union européenne, qui, selon elle, peuvent être soutenues par un travail interpersonnel intensifié sur le terrain. 

Avant de conclure, Mme Ziadeh s’est fixée comme priorités de soutenir la société civile, de promouvoir de nouveaux outils pour aider le Kosovo à renforcer l’état de droit, de contribuer à l’autonomisation des femmes et des jeunes, de fournir une expertise et un soutien aux mécanismes des droits de l’homme. Dans ce cadre, elle a souhaité que le Conseil continue de suive attentivement l’état des relations entre Pristina et Belgrade, tout en se disant consciente que « d’autres situations difficiles » mobilisent son attention.  

M. NIKOLA SELAKOVIĆ, Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a souligné que son pays considère l’engagement de la MINUK comme l’un des facteurs clefs du maintien de la paix et de la sécurité de territoire de « notre province méridionale », le Kosovo et Metohija.  Il a évoqué des violations des droits des Serbes et non Albanais, avec comme objectif de Pristina de voir ces deux communautés quitter le Kosovo-Metohija et mettre fin à toute forme de diversité nationale.  Si nous ne définissons pas clairement les causes des problèmes, ils se reproduiront et deviendront plus complexes, a-t-il constaté.  Il a appelé le Conseil de sécurité à adresser un message qui souligne la nécessité d’établir la confiance interethnique en ayant des institutions à Pristina qui respectent les accords conclus, mettent en œuvre ce qui a été convenu et harmonisent leurs actions avec les normes internationales relatives à l’état de droit et aux droits de l’homme. 

Le Ministre a relevé que le 16 janvier 2022, les institutions provisoires d’administration autonome de Pristina ont interdit l’organisation d’un référendum au Kosovo et Metohija sur la modification de la Constitution de la République de Serbie dans le domaine judiciaire.  Pristina a répété cet acte illégal et rendu impossible l’organisation des élections présidentielle et parlementaires de la Serbie au Kosovo-Metohija le 3 avril.  Il a noté que ce fut la première fois depuis 1999 que des citoyens du Kosovo-Metohija ont été empêchés de participer aux élections de la République de Serbie, ce qui constitue une violation, entre autres, du mandat clairement défini de la Mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). 

M. Selaković a évoqué des exactions de la police locale contre les détenteurs de plaques d’immatriculations issues de Serbie.  Selon lui, la triste réalité est qu’aujourd’hui au Kosovo-Metohija, si vous êtes un Serbe, vous pouvez être condamné à de nombreuses années de prison sur la base de déclarations de témoins non vérifiées ou contradictoires.  Il a évoqué des actes qui créent une atmosphère d’insécurité totale et conduisent à l’exode des Serbes du Kosovo-Metohija.  Il a rappelé les événements survenus dans la municipalité de Strpce le 21 décembre 2021, au cours desquels 11 Serbes ont été arrêtés, dont l’ancien maire et vice-président du parti serbe Bratislav Nikolic qui est toujours en détention dans le cadre de la « prétendue » lutte contre la corruption.  Et les employés de la commune ont été informés qu’ils ne devaient plus travailler, ce qui a remis en cause la subsistance de dizaines de familles serbes.  Le Ministre serbe a souligné que Pristina affirme ouvertement depuis longtemps que la création de la Communauté des municipalités Serbes du Kosovo ne sera jamais autorisée, alors que cela est prévu par l’Accord de Bruxelles.  Cela sape non seulement le dialogue entre Belgrade et Pristina, mais humilie aussi directement les acteurs internationaux, principalement l’Union européenne (UE), a-t-il fait observer. 

Il a ensuite parlé de 63 incidents à caractère ethnique au cours de la période du rapport.  Et ce n’est pas surprenant qu’il y ait encore plus de 200 000 déplacés serbes et autres non-Albanais du Kosovo et Metohija en République de Serbie.  Le chef de la diplomatie serbe a salué l’appel du Secrétaire général de l’ONU à permettre le retour des personnes déplacées.  Il a appelé à des mesures concrètes pour assurer, entre autres, la sécurité des rapatriés et le plein respect des droits de propriété des personnes déplacées.  Nous n’avons pas eu l’impression que les institutions de Pristina avaient la volonté politique d’améliorer la situation, a-t-il dit.  Il a enfin souhaité que la MINUK et la KFOR poursuivent leur mission, avec une capacité non diminuée, compte tenu de ce qui a été dit lors du débat d’aujourd’hui. 

Mme DONIKA GËRVALLA-SCHWARZ, du Kosovo, a indiqué que la Russie est un danger pour la stabilité en Europe.  Elle a déclaré que les agences de l’ONU sont respectées au Kosovo, même si ce n’est pas forcément le cas de la MINUK qui, a-t-elle précisé, ne joue plus de rôle dans la vie de nos citoyens.  Elle a jugé cette situation encourageante.  Elle a souligné les liens noués par le Kosovo avec d’autres pays dans le monde et insisté sur le dynamisme de la démocratie kosovare. La grande majorité des pays de l’UE et de l’OTAN ont reconnu l’indépendance du Kosovo et soutenu son rapprochement avec ces deux organisations, a rappelé l’intervenante.  Elle a assuré que la démocratie kosovare est plus transparente et qu’elle lutte de manière déterminée contre la corruption, en précisant que la croissance économique a été de 10% en 2021.  La population a de grandes attentes de notre Gouvernement, a-t-elle dit, en disant son attachement à l’état de droit. 

« Notre pays est né du génocide perpétré par la Serbie. »  Le Kosovo a survécu à la tentative de la Serbie de l’éliminer, a-t-elle poursuivi.  « Le Kosovo fait partie de l’Occident alors que la Serbie est un satellite de la Russie. »  Elle a comparé la campagne de la Serbie en 1999 contre le Kosovo à celle menée par la Russie en Ukraine.  Elle a déploré que les nationalistes serbes ne se soient jamais excusés pour les crimes de guerre commis au Kosovo et les aient même justifiés.  Ces nationalistes sont le plus grand facteur de déstabilisation des Balkans occidentaux, a-t-elle martelé, en ajoutant que l’ambassadeur russe en Serbie soutient cette propagande nationaliste serbe.  La Serbie et la Russie sont, selon elle, la plus grande menace à la paix dans la région.  Mme Gërvalla-Schwarz a mentionné l’armement russe livré à la Serbie en exhortant le monde à prendre cette menace au sérieux.  Heureusement, face à cette Serbie autocrate, nous avons des alliés, a-t-elle poursuivi, en ajoutant que son pays veut aller de l’avant.  « Mais la Serbie doit reconnaître la réalité. » Elle a ajouté que la Cour internationale de la Justice (CIJ) a reconnu la licéité de l’indépendance du Kosovo. La Serbie doit décider si elle veut faire partie de l’Occident ou rester un satellite de la Russie, a-t-elle tranché, avant de conclure en dénonçant l’invasion russe de l’Ukraine. 

M. ASHISH SHARMA (Inde) a commencé par réitérer la position de principe de son pays en faveur de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la Serbie.  Toutes les questions en suspens doivent être résolues par des moyens pacifiques, a-t-il plaidé, prenant note des réunions tenues entre la Serbie et les autorités de Pristina depuis 2014 sous les auspices de l’Union européenne.  À ses yeux, la mise en œuvre des accords signés, y compris sur la création d’une association des municipalités à majorité serbe, reste essentielle, tout comme la recherche d’un terrain d’entente entre les parties pour surmonter les préoccupations mutuelles, en particulier les questions politiques et ethniques.  À cet égard, il a salué les efforts en cours pour permettre une reprise du dialogue, notamment ceux des membres du Quint (Allemagne, États-Unis, France, Italie et Royaume-Uni) et de l’Union européenne (UE).  Pour le délégué, la question des personnes disparues doit être résolue en priorité.  Il importe également, selon lui, de garantir le retour volontaire et en toute sécurité des personnes déplacées ou parties dans d’autres pays de la région.  La MINUK devrait continuer à encourager les autorités de Pristina à résoudre les problèmes de toutes les communautés, a-t-il souligné. Le représentant a par ailleurs salué l’action de la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo (EULEX) au Kosovo et s’est félicité que, dans le cadre de la coopération internationale, les troupes de la KFOR continuent de remplir leur mandat en vertu de la résolution 1244 (199).  Il a souhaité que ces deux missions respectent leurs mandats respectifs et restent neutres, tout en coopérant étroitement avec les autorités de police de Pristina pour veiller à ce que la sécurité globale soit assurée. 

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a relevé que les deux parties ont la responsabilité de s’abstenir de diviser davantage par leur rhétorique ou leurs actions, et de respecter et de mettre en œuvre, sans délai, les engagements qu’ils ont pris dans le cadre du dialogue.  Il a noté les gains concrets qui ont amélioré le quotidien de toutes les communautés du Kosovo en demandant de ne pas les gaspiller par des actions qui risquent d’aggraver les tensions.  Pour le représentant, une normalisation complète, définitive et juridiquement contraignante est essentielle pour la perspective européenne des deux parties, le Kosovo et la Serbie, et pour une plus grande stabilité dans les Balkans occidentaux. 

M. Gallagher s’est félicité des mesures prises par le Kosovo pour remédier aux violences sexuelles et sexistes, en particulier l’adoption d’une stratégie contre la violence domestique et la violence à l’égard des femmes.  Les femmes du Kosovo ont fait des progrès remarquables en politique au niveau national, a-t-il constaté, tout en espérant voir cela se répliquer au niveau local dans les années à venir.  Il est donc question de lever tous les obstacles et de soutenir financièrement l’engagement politique des femmes au niveau local.  De même, l’inclusion significative de la jeunesse du Kosovo dans les efforts de prévention des conflits et de consolidation de la paix est essentielle pour parvenir à une paix durable, a rappelé M. Gallagher qui a, enfin, appelé à lutter contre l’impunité pour les crimes du passé, afin de prévenir de futures violations.  Il a ainsi jugé vital que les autorités du Kosovo respectent leurs engagements envers les Chambres spécialisées. 

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a dénoncé les discours qui risquent d’exacerber les tensions dans la région et exhorté les parties à la modération.  Elle a plaidé pour un dialogue constructif entre Pristina et Belgrade et regretté que les avancées en la matière aient été « minimales » ces six derniers mois.  Elle a défendu une pleine participation des femmes audit dialogue et dénoncé la violence spécifique visant les femmes, en particulier la violence domestique.  Elle a rappelé que 1620 personnes sont encore portées disparues en raison du conflit et mentionné le grand nombre de personnes déplacées.  Celles-ci doivent pouvoir rentrer dans leurs foyers en toute sécurité, a-t-elle plaidé.  Enfin, la représentante a salué le travail important accompli par la MINUK, s’agissant notamment du rapprochement des communautés. 

M. EMERSON CORAIOLA YINDE KLOSS (Brésil) a salué les efforts déployés par la MINUK pour aider le peuple du Kosovo, conformément aux objectifs définis dans la résolution 1244 (1999).  Il a toutefois estimé que davantage devrait être fait en matière de renforcement de l’état de droit, de lutte contre la corruption et le crime organisé et de respect des droits des minorités, plaidant à cet égard pour la mise en place d’une communauté des municipalités à majorité serbe.  Il a aussi pris note avec satisfaction des initiatives menées par l’Union européenne et les États-Unis pour favoriser le dialogue entre Pristina et Belgrade.  Mais malgré le soutien continu de la communauté internationale, un règlement politique demeure insaisissable, a-t-il déploré, avant de regretter la méfiance et le manque de coopération entre les deux parties, ce qui nuit à la stabilité politique des Balkans occidentaux.  À ses yeux, le débat persistant sur la reconnaissance du Kosovo en tant qu’État indépendant a été préjudiciable au processus politique plus large et a sapé les perspectives d’une coopération régionale significative.  Si une autonomie substantielle du Kosovo a été généralement atteinte, les conditions d’une vie paisible et normale pour toutes les communautés de la région ne sont, selon lui, pas encore réunies.  De ce fait, l’objectif principal de la MINUK n’a toujours pas été atteint et le débat sur un Kosovo indépendant semble « prématuré », a-t-il affirmé. 

Pour le représentant, il est aujourd’hui nécessaire de mettre en place un large dialogue entre les différentes communautés de la région, et ce, dans le strict respect des droits de l’homme, y compris la liberté de religion, l’intégrité des sites religieux et le renforcement de l’état de droit.  De plus, alors que de nombreux observateurs estiment que le statu quo au Kosovo est insoutenable, il importe que Pristina et Belgrade fassent preuve d’un « sentiment d’urgence renouvelé » dans la reprise du processus de négociation, a-t-il souligné, assurant ne pas sous-estimer la complexité des problèmes posés par le futur statut du Kosovo. 

M. BING DAI (Chine) a insisté sur l’importance de la stabilité et de la sécurité du Kosovo.  Il a demandé d’éviter des actions unilatérales, plaidant par exemple pour que les accords sur les plaques d’immatriculations qui expirent bientôt soient reconduits.  Le représentant a appelé à promouvoir le dialogue entre Pristina et Belgrade, sous la houlette de l’Union européenne.  Il a appelé le Kosovo à mettre rapidement en œuvre l’Accord de Bruxelles qui prévoit la création d’une association des municipalités serbes du Kosovo.  Le délégué a, en conclusion, appelé les Nations Unies à poursuivre leur soutien à la MINUK, tandis que le Kosovo devrait faciliter son fonctionnement sur le terrain. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a indiqué que la position de son pays sur le Kosovo reste inchangée.  Elle a rappelé les 78 jours de bombardement de Belgrade par l’OTAN en 1999 et son cortège de destructions et de pertes civiles.  L’OTAN avait pour alliée à l’époque l’Armée de libération du Kosovo, dont nombre de crimes sont encore impunis.  Elle a dénoncé les crimes de guerre commis par cette Armée, celle-ci s’étant aussi livrée à des ventes d’organes humains.  La déléguée a insisté sur les répercussions de cette guerre de l’OTAN, « qui s’est paré du costume de gendarme et a ouvert la boîte de Pandore ». La résolution 1244 (1999) doit demeurer la base du dialogue entre Pristina et Belgrade, a-t-elle déclaré, en accusant le Kosovo d’être un projet occidental. 

Elle a déploré les retards pris dans la création de la communauté des municipalités serbes qui est pourtant essentielle à la réconciliation.  Sans elle, les Serbes du Kosovo sont dans une situation très précaire, a dit Mme Evstigneeva. Les Serbes du sud du Kosovo ont disparu et les efforts d’élimination de l’identité des Serbes du Kosovo se poursuivent, a-t-elle déclaré.  Les chiffres des retours des non-Albanais au Kosovo sont très faibles, a poursuivi la déléguée, en jugeant inacceptable qu’il n’y ait que des Albanais au Kosovo.  Les violations des droits des Serbes du Kosovo doivent cesser.  La déléguée a dénoncé aussi les agissements de Pristina contre le personnel de la MINUK, l’un de ses membres ayant été passé à tabac.  La MINUK doit être dotée des ressources nécessaires pour s’acquitter de son mandat, a défendu la représentante, avant de dénoncer le rapprochement du Kosovo de l’OTAN qui est lourde de dangers, en ajoutant que ni Washington ni Bruxelles n’ont de prise sur Pristina. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a estimé que les élections locales d’octobre dernier ont apporté une nouvelle confirmation de la façon dont le Kosovo a progressé dans la construction d’un État pour ses citoyens.  Le Kosovo est une démocratie à part entière et un acteur important de la stabilité régionale, a-t-il souligné, affirmant que son développement interne et sa politique étrangère et de sécurité contribuent à stabiliser les Balkans occidentaux.  À cet égard, il a salué le positionnement clair du Kosovo sur l’Ukraine et son alignement sur les sanctions, tout en louant la générosité dont il a fait preuve en accueillant des réfugiés afghans et, plus récemment, des déplacés ukrainiens. Il a également remercié tous ceux qui aident le Kosovo à aller de l’avant depuis 1999, à commencer par la MINUK.  À la suite de la déclaration d’indépendance de 2008, dont la légitimité a été confirmée par un avis de la Cour internationale de Justice en 2011, les compétences et les responsabilités de la MINUK ont été progressivement transférées aux autorités kosovares, ce qui était « la bonne chose à faire », a-t-il dit, non sans se féliciter qu’en conséquence, la fréquence des réunions du Conseil consacrées au Kosovo se soit réduit. 

Avec le progrès global et la consolidation des institutions du Kosovo, avec le renforcement de sa dimension internationale et des perspectives d’accord à travers la poursuite du dialogue, il ne fait aucun doute que le rôle de la MINUK va diminuer, a-t-il ajouté, estimant que « c’est dans la nature des choses ». En effet, a souligné le représentant, la MINUK « ne fait pas partie des murs du Kosovo ». Elle a été mandatée pour accomplir une mission qui, sur la base de son mandat initial, a été accomplie. Jugeant, de fait, que la Mission, dans sa configuration actuelle, n’est plus nécessaire, il a constaté qu’elle ne joue un rôle crucial dans aucune des questions clés pour lesquelles le Kosovo a besoin d’aide.  Ainsi, a-t-il noté, le dialogue entre le Kosovo et la Serbie est facilité par l’Union européenne, l’ordre public et la sécurité sont assuré par la police et les forces de sécurité du Kosovo, ainsi que par l’EULEX et la KFOR, les droits des minorités nationales sont inscrits dans la Constitution nationale et le système judiciaire du Kosovo est consolidé.  De plus, a-t-il fait valoir, la situation au Kosovo n’est pas plus une question de paix et de sécurité, au titre du Chapitre VII.  Il convient donc de s’interroger sur la « raison d’être » de la MINUK, alors que son budget d’environ 42 millions de dollars par an et son effectif de 374 personnes appellent à examen global de son rôle et de son efficacité, afin d’éviter les doubles emplois avec d’autres agences qui y opèrent ou tournent dans le vide. Il a donc souhaité que le Conseil mette fin au mandat de la MINUK et aide à passer à une présence onusienne plus efficace et adaptée à son objet. 

Le représentant a ensuite réitéré son soutien au dialogue facilité par l’UE entre le Kosovo et la Serbie et a appelé tous les acteurs concernés à l’accélérer. Si, selon lui, l’image des Balkans comme lieu de troubles et d’instabilité politique est passée, il ne faut pas oublier les personnes disparues et le « cri silencieux » des quelque 20 000 habitants du Kosovo utilisés comme arme de guerre par des Serbes toujours en fuite. Pourtant, l’attention devrait être consacrée à améliorer le présent et à améliorer le futur, ce qui passe par la réconciliation. À ce sujet, il a estimé que la guerre d’agression en Ukraine renvoie aux terribles souvenirs de la dissolution de la Yougoslavie. La responsabilité finit toujours par « frapper à la porte », a-t-il rappelé. « Milosevic est mort derrière les barreaux, Karadzic a été reconnu coupable de génocide et paie pour ses actes.  À bon entendeur salut ! ». 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a déploré le fait que les mouvements diplomatiques et les diverses initiatives visant la reprise d’un dialogue de bonne foi, sur la base des accords existants, n’aient pas été suivis d’effets.  La question de la libre circulation reste un défi majeur, a-t-il relevé, notant qu’il est crucial pour la cohésion du Kosovo que l’ensemble des citoyens puissent jouir de la plénitude de leur droit de circuler, sans crainte pour leur sécurité.  Pour ce faire, une solution durable doit être trouvée en ce qui concerne les plaques d’immatriculation dans la région du nord à majorité serbe.  Selon le délégué, la mise en œuvre de l’Accord de Bruxelles est un pilier important du processus de normalisation et constitue un élément vital pour l’autonomie des communautés serbes.  Retarder sa mise en œuvre ne peut qu’éloigner le Kosovo de la stabilité dont elle a besoin, a-t-il assené. 

Il a ensuite déploré la décision du Parlement kosovar de ne plus permettre la participation des serbes du Kosovo et des Kosovars de Serbie aux processus électoraux.  Il a exhorté les autorités du Kosovo et de la Serbie à trouver un accord mutuellement satisfaisant dans ce domaine.  Le Quintet [France, USA, Italie, Allemagne, Royaume-Uni] a, de toute évidence, un rôle important à jouer à cet effet, a précisé M. Biang.  Pour lui, la discrimination envers les communautés minoritaires doit être combattue avec plus de vigueur et la loi sur la protection contre la discrimination mise en œuvre.  La question des personnes disparues est d’un intérêt déterminant pour l’édification du Kosovo, a-t-il argué.  Plus généralement, il a encouragé une meilleure prise en compte des femmes dans la vie publique. 

Mme MEENA ASIYA SYED (Norvège) a salué la tenue des élections locales au Kosovo, tout en notant le manque de transparence desdits scrutins.  Elle a noté la recrudescence des tensions entre Pristina et Belgrade et souhaité une solution durable à la question des plaques d’immatriculation des voitures: « Ce serait un pas dans la bonne direction. »  Elle a encouragé les parties à renforcer leur dialogue sur la base des Accords de Bruxelles en visant à des compromis mutuellement acceptables.  « Un accord complet entre la Serbie et le Kosovo sur la pleine normalisation de leurs relations est un élément clef pour éviter un conflit gelé. »  Enfin, Mme Syed a souligné le travail important abattu par la MINUK tout en souhaitant un fonctionnement plus efficient. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a souligné l’importance de redoubler d’efforts pour apaiser les tensions et renouer le dialogue entre les groupes ethniques au Kosovo, d’une part, et entre Pristina et Belgrade, d’autre part.  À cet égard, il a jugé impératif de se souvenir de la guerre dévastatrice qui a déchiré la région il y a deux décennies.  Depuis, des progrès tangibles ont été réalisés et il ne faudrait pas qu’ils connaissent une régression en raison des événements récents en Europe, a-t-il affirmé, avant d’encourager le Kosovo et la Serbie à participer de manière active au dialogue facilité par l’Union européenne pour parvenir à un terrain d’entente sur les questions en suspens.  Jugeant essentiel que les tensions actuelles ne sapent pas les efforts engagés pour la paix et la stabilité, il a répété que le dialogue est le seul moyen de régler les différends pacifiquement, ce qui implique pour les parties de retourner à la table des négociations.  Dans ce contexte, le représentant a salué les efforts en cours visant à faire rayonner les valeurs de tolérance et de coexistence pacifique.  Il a également appelé à contrer les discours de haine afin de contribuer à l’instauration de sociétés pacifiques dans la région.  Favorable à une participation accrue des femmes à tous les niveaux des processus politiques, il s’est félicité des progrès accomplis par le Kosovo en la matière.  Il a d’autre part jugé crucial que les accords conclus soient pleinement respectés et qu’ils reflètent pleinement les aspirations des deux communautés.  Dans le cadre de ses efforts, les Nations Unies doivent, selon lui, continuer de jouer un rôle important, via la mise en œuvre de projets soutenant les institutions gouvernementales et permettant de rétablir la confiance. 

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a accusé la Fédération de Russie d’avoir commencé son discours par de la désinformation.  Il a dit que les images en provenance d’Ukraine, comme celles de ces derniers jours à Marioupol, ne confèrent pas à la Fédération de Russie la possibilité de donner des leçons de morale.  Le représentant a appelé Belgrade et Pristina à poursuivre le dialogue engagé sous l’égide de l’UE, afin de parvenir à une reconnaissance mutuelle.  Il leur a également demandé de travailler de concert sur la question des personnes disparues.  Le délégué a estimé qu’une mission de maintien de la paix n’est plus nécessaire au Kosovo, vu que la situation de 1999 n’est pas la même que celle de nos jours. Il a donc demandé que les exposés de la MINUK soient désormais faits au Conseil de sécurité sur une base annuelle.  De même, le Conseil doit consacrer ses ressources à d’autres questions, et il est important d’assurer une transition pour la MINUK, dans l’intérêt de toute la région, a-t-il plaidé. 

M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a appelé les parties à respecter leurs engagements pris dans le cadre du dialogue conduit par l’UE en vue d’une normalisation de leurs relations.  Il a dénoncé les attaques commises contre les agents de police au Kosovo et souligné l’importance de préserver l’état de droit.  Le délégué a appelé à contrer les discours de haine et invité la MINUK à assurer le suivi de tels discours sur les médias sociaux.  Il a souhaité une participation accrue des jeunes et des femmes dans les processus de prise de décision.  Les parties doivent s’engager en faveur d’un dialogue renforcé et œuvrer à une désescalade des tensions, a conclu le délégué du Kenya. 

M. WADID BENAABOU (France) a réaffirmé l’attachement de son pays à la perspective européenne du Kosovo et de la Serbie, laquelle n’est envisageable que si Belgrade et Pristina règlent pacifiquement leurs différends.  L’Union européenne prend toute sa part à ces efforts dans le cadre du dialogue facilité par son Représentant spécial, Miroslav Lajčák, a relevé le délégué, appelant le Kosovo et la Serbie à mettre en œuvre sans restriction les accords précédemment conclus et à s’engager de bonne foi dans la voie du dialogue.  Dans cette perspective, il a exhorté les deux parties à éviter de nourrir les tensions et à agir conformément aux valeurs et principes qui soutiennent l’intégration européenne.  Nous espérons notamment que le groupe de travail sur les plaques d’immatriculation saura trouver sans délai une solution négociée et pérenne de compromis, a-t-il dit, avant d’exprimer son soutien aux efforts de lutte contre la corruption et de lutte contre l’impunité pour les auteurs de crimes graves.  Il a également salué l’adoption en janvier de la stratégie de lutte contre les violences intrafamiliales et les violences faites aux femmes, ainsi que le projet d’accueillir au Kosovo un sommet de haut niveau sur le programme « femmes, paix et sécurité » en 2022. 

Le représentant a par ailleurs apporté l’appui de la France à l’action de la nouvelle Représentante spéciale, à la tête de la MINUK, pour promouvoir la sécurité, la stabilité, le renforcement de l’état de droit et le respect des droits humains au Kosovo et dans la région, et ce, « à un moment où le contexte géopolitique se durcit ».  La MINUK, a-t-il assuré, peut compter sur l’action conjointe de la mission État de droit de l’Union européenne (EULEX), à laquelle la France vient de renforcer sa participation en mettant sur pied, aux côtés du Portugal et de l’Italie, une réserve d’intervention de maintien de l’ordre de la Force de gendarmerie européenne.  La France tout comme l’Union européenne restent engagées pour la stabilisation des Balkans occidentaux et pour la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina, a-t-il conclu.  « Leur avenir européen commun en dépend ». 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a estimé que parvenir à une normalisation de la situation dans la province autonome du Kosovo est nécessaire pour la paix, la sécurité et la prospérité à long terme de la région des Balkans occidentaux et de l’Europe dans son ensemble.  Il a donc encouragé la reprise des négociations constructives entre les représentants de la Serbie et du Kosovo dans le cadre des pourparlers facilités par l’UE.  Le Ghana, a-t-il dit, reste favorable à un processus ouvert, transparent et inclusif de dialogue, impliquant les femmes, les jeunes et tous les secteurs de la société, pour assurer la pérennité des accords conclus.  Le délégué a appelé à remédier rapidement aux tensions croissantes dues à la conduite des récentes élections et à répondre aux questions connexes de libre circulation. Enfin, il a encouragé une approche unifiée du Conseil de sécurité et de la communauté internationale pour trouver une solution durable et globale à la question du Kosovo, conformément aux principes fondamentaux du droit international, de la Charte des Nations Unies et de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué le dialogue accru entre la nouvelle représentante et Pristina et insisté sur le travail important abattu par la MINUL. Il a dénoncé les attaques commises contre les agents de police au Kosovo et salué l’engagement renouvelé du Gouvernement du Kosovo en faveur de la lutte contre la corruption.  Il a relayé les inquiétudes exprimées par la communauté serbe du Kosovo et souhaité que celle-ci soit pleinement intégrée.  Il a mis en garde contre les discours haineux dans la région des Balkans occidentaux, avant de dénoncer l’invasion illicite de l’Ukraine par la Russie.  Le représentant a réitéré la volonté de son pays d’œuvrer à la stabilisation de la situation dans les Balkans occidentaux, appelant les parties à œuvrer à une pleine normalisation de leurs relations. 

Prenant la parole pour la seconde fois, la déléguée de la Fédération de Russie a rappelé que les États-Unis avaient bombardé Belgrade pendant 78 jours dans les années 1990.  Elle a aussi évoqué la Libye, la Syrie, l’Iraq qui sont des pays situés bien loin des États-Unis, mais qui ont subi des bombardements américains alors qu’ils ne constituaient aucune menace pour eux.  « Toutes vos frappes n’ont pas été chirurgicales », a-t-elle ironisé en rappelant que l’ancienne Secrétaire d’État américaine, Madeleine Albright, avait parlé de « dommages collatéraux ».  Les violations des droits de l’homme ne sont condamnées que lorsque vos intérêts ne sont pas engagés, a encore dit la représentante, en relevant que ceux qui sont condamnés sont ceux qui ne sont pas du même bord que les États-Unis.  Vous n’avez pas attendu des enquêtes à Boutcha pour désigner les coupables, a-t-elle lancé à l’endroit de son homologue américain, lui enjoignant d’arrêter avec la politique du deux poids, deux mesures et l’accusant de vouloir imposer la volonté de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) au reste de la communauté internationale. 

Le Ministre des affaires étrangères de la Serbie a souhaité réagir aux propos de Mme Donika Gërvalla-Schwarz.  Au lieu de parler des problèmes véritables sur le terrain concernant le non-respect des droits humains, l’abolition des droits des personnes déplacées, des profanations de lieux saints et des crimes commis sans épilogue judiciaire, elle a préféré mettre en avant ses aspirations politiques et s’en prendre à la MINUK et au Président de la Serbie, « qui est aussi le sien », a-t-il tonné.  Appelant cette responsable politique kosovare albanaise au « respect », il a dit refuser ses « leçons ».  Il a relevé qu’en évoquant les « bouchers des Balkans », Mme Gërvalla-Schwarz a omis de parler de l’ancien Président Hashim Thaçi et de l’ex-chef du parlement kosovar, qui sont aujourd’hui à La Haye et attendent d’être jugés pour crimes de guerre.  La Serbie, a-t-il poursuivi, est un État indépendant souverain et les accusations selon lesquelles elle serait l’agent d’autres États sont de purs mensonges.  En tant que pilier des Balkans, la Serbie s’efforce de renforcer la coopération et la stabilité régionale.  Or, le Président du Kosovo envoie des unités la nuit pour miner le dialogue, a-t-il accusé, avant de rappeler les crimes commis par les terroristes du KLA et les bombardements meurtriers de l’OTAN sur son pays.  Pour le Ministre, les affirmations fallacieuses de Pristina ne servent qu’un objectif politique et mine tout espoir de progrès entre Serbes et Albanais.  Rappelant que 200 000 personnes déplacées du Kosovo vivent en Serbie et ne peuvent rentrer dans leurs foyers ancestraux, il a dit rejeter l’inspiration politique des dirigeants albanais de ce territoire, qui créent des institutions composées uniquement d’Albanais et ne sont même pas en mesure de respecter leur « soi-disant Constitution ».  À ses yeux, Mme Gërvalla-Schwarz ne parle que pour elle et ne représente pas un État Membre des Nations Unies. Le Kosovo continuera de ne pas l’être parce que sa motivation est de privilégier l’Albanie, pas d’obtenir l’indépendance, a-t-il asséné. 

Le délégué du Kosovo a repris la parole pour dire son attachement au dialogue, tout en notant les difficultés de ce dialogue.  Elle a estimé que les Balkans occidentaux sont le théâtre d’une guerre de l’information visant à manipuler l’opinion internationale.  Il est difficile de garder son sérieux devant de telles « fake news », a dit la déléguée.  « Nous savons qui est le boucher des Balkans, c’est Slobodan Milosevic ».  Elle a déploré que la Serbie ne parvienne pas à prendre ses distances avec les crimes commis par ce dernier.  La Russie est agressive sur le dossier du Kosovo, en raison du succès qu’est le Kosovo depuis l’intervention de l’OTAN visant à arrêter un génocide, a dit la déléguée, avant de rendre hommage au courage des soldats ukrainiens.  Elle a accusé le Ministre serbe de falsifier la réalité, avant de démonter l’accusation de vente d’organes visant certains responsables kosovars.  Elle a dénoncé cette longue tradition du mensonge qui vise à réaliser des objectifs politiques.  « Nous savons que la guerre en Ukraine occupe beaucoup de votre temps, mais occupez-vous de ce qui se passe maintenant dans les Balkans. » 

M. FERIT HOXHA (Albanie), répondant à M. Selaković, dit que son pays n’a pas pour objectif de former un « Grand ceci ou cela », mais de construire des Balkans ouverts et non des Balkans « brisés ».  Les leçons tirées des tragédies des années 1990 prouvent le péril d’être entraîné par des erreurs de jugement, et des personnalités et idées extrémistes ne doivent pas dicter l’avenir.  Il n’y a rien de bon à nuire à son voisin, a-t-il déclaré, et le seul objectif de l’Albanie est de rejoindre l’Union européenne. 

Le Ministre serbe a déploré cette idée de manipulation avancée par la déléguée du Kosovo et réitéré l’accusation de trafic d’organes commis par l’Armée de libération du Kosovo.  Il a indiqué que les Serbes ne peuvent rentrer au Kosovo en raison d’une sécurité insuffisante.  Même l’Ukraine qui est, comme la Russie, un pays ami de la Serbie, n’a pas reconnu l’indépendance du Kosovo, a conclu le Ministre. 

Mme Donika Gërvalla-Schwarz a pris une dernière fois la parole pour « rappeler les faits », et notamment que la protection des minorités est assurée au Kosovo.  Notre armée et notre police sont mixtes parce que nous le voulons, a-t-elle affirmé.  De plus, la Constitution du Kosovo prévoit des sièges au Parlement pour les minorités, lesquelles peuvent aussi briguer d’autres sièges que ceux qui leur sont réservés.  Dans les faits, il s’agit donc d’un privilège accordé aux Serbes du Kosovo, a-t-elle fait valoir, faisant remarquer que ces dispositions constitutionnelles ont conduit à ce que son parti n’obtienne pas la majorité au Parlement.  La Constitution impose, en outre, que des membres des minorités siègent au gouvernement, a-t-elle ajouté, avant de souligner que « cela n’existe nulle part ailleurs en Europe ».  L’un de ces membres est serbe, membre du parti de Slobodan Milosevic et ne s’est jamais excusé, a précisé Mme Gërvalla-Schwarz.  Elle a donc sommé le Ministre serbe de cesser ses mensonges et de suivre l’exemple du Kosovo avant de le critiquer.  Nous ne sommes pas seulement un petit pays, nous sommes un pays fier, « c’est dans notre ADN », a-t-elle conclu, estimant que Mme Vjosa Osmani, la Présidente du Kosovo, « montre par son courage ce que peut être l’avenir des Balkans ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: le Forum de la jeunesse porte la voix des jeunes et des décideurs qui veulent « des actions » pour que le monde soit sauvé

Session de 2022,
Forum de la jeunesse - après-midi
ECOSOC/7076

ECOSOC: le Forum de la jeunesse porte la voix des jeunes et des décideurs qui veulent « des actions » pour que le monde soit sauvé

« Nous devons sauver les objectifs mondiaux, nous devons sauver notre monde. »  C’est sur cette supplication que l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse a clos le Forum de la jeunesse de l’ECOSOC, tenu au cours des deux derniers jours de manière virtuelle.  Un rendez-vous -le plus grand rassemblement de jeunes au monde- qui a permis d’entendre des messages clairs et forts des jeunes: des demandes ardentes de changer les systèmes et les structures pour réduire les inégalités ainsi que des idées, visions et solutions pour remettre le monde sur la bonne voie et réaliser les objectifs de développement durable avant l’échéance de 2030.

Mme Jayathma Wickramanayake a voulu « que ce ne soit pas un autre forum où nous applaudissons, nous tapons dans le dos et passons à autre chose ».  Que ce soit « votre moment d’action », « votre moment de réalisation », a-t-elle lancé aux jeunes, qui doivent penser à des stratégies pour demander des comptes, et aux décideurs politiques, qui doivent autonomiser les jeunes et partager le pouvoir avec eux.  Elle a clairement appelé les jeunes à revendiquer leur leadership lorsque ceux qui sont censés les représenter ne font pas bien leur travail. 

Les participants (13 500 jeunes inscrits au Forum) ont été invités à miser sur Notre programme commun, lancé par le Secrétaire général, et sur le Sommet sur l’éducation, qui se tiendra en septembre pour redéfinir les systèmes éducatifs en fonction des réalités du monde d’aujourd’hui.  Ils ont été appelés à renforcer les efforts de l’ONU par la création d’outils et de plateformes. 

Un nouveau Bureau des Nations Unies pour la jeunesse, qui intégrera les activités actuelles du Bureau de l’Envoyée, soutenu par des ressources durables, sera le lieu idoine pour le plaidoyer, la coordination et la responsabilisation de haut niveau dans le système des Nations Unies.  La création du Bureau avait déjà remis l’ONU sur la bonne voie, a relevé la représentante de African Youth Charter Hustler (Maurice), qui est aussi membre de l’Équipe spéciale des jeunes pour Stockholm+50, la conférence de l’ONU ayant pour thème « une planète saine pour la prospérité de tous – notre responsabilité, notre chance » qui se tiendra dans la capitale suédoise début juin.

M. Liu Zhenmin, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a salué la contribution des jeunes à une relance post-COVID-19 « active » à tous les niveaux - national, régional et mondial.  Il a réaffirmé le principe de participation des jeunes afin qu’ils puissent contribuer à une relance qui donne des résultats inclusifs et durables, tout en rappelant que leur participation est nécessaire pour parvenir aux ODD d’ici à 2030.  Les discussions des deux journées écoulées vont alimenter les débats du forum politique de haut niveau pour le développement durable, qui aura lieu en juillet, a-t-il signalé.

M. Collen Vixen Kelapile, Président de l’ECOSOC, a rendu hommage à l’engagement, au dévouement, à l’audace, à l’honnêteté et à la sagesse des jeunes en ce qui concerne les mesures urgentes à prendre après la pandémie.  Il a apprécié que les jeunes aient fait entendre leur voix pour une reconstruction plus verte et plus durable notamment, et qu’ils aient proposé des solutions concrètes et novatrice pour ne pas être laissés pour compte.  Les jeunes peuvent proposer des solutions alternatives, a témoigné à cet égard Mme Sharifah Shakirah, fondatrice et Directrice de Rohingya Women Development Network (RWDN), la première organisation de réfugiés dirigée par une femme en Malaisie.  Elle a mis en évidence que les idées des jeunes peuvent permettre des changements sur le long terme.  En tant que réfugiée rohingya, elle a salué les efforts des jeunes réfugiés qui se sont engagés pour protéger leurs communautés.

La séance plénière de l’après-midi a commencé par le lancement du deuxième rapport d’étape Jeunesse 2030, après le démarrage en septembre 2018 de la Stratégie des Nations Unies pour la jeunesse dont la mission était de transformer le travail des organes du système des Nations Unies « pour » et « avec » les jeunes.  Des ministres de la jeunesse de toutes les régions du monde ainsi que des jeunes et des responsables onusiens ont participé au débat interactif sur le thème du « renforcement de la solidarité avec les jeunes du monde », précédé par une intervention du Secrétaire général, M. António Guterres.

« J’espère que dans les semaines, les mois et les années à venir, vous continuerez à rester engagés et à soutenir la mise en œuvre de ces propositions ambitieuses par des moyens concrets », a lancé aux jeunes et à tous les participants Mme Wickramanayake.

FORUM DE LA JEUNESSE DE 2022

« Relèvement post-COVID-19: la mobilisation de la jeunesse pour un avenir durable »

Jeunesse 2030: Atteindre les ODD avec et pour les jeunes 

« Continuez d’agir, continuez de vous mobiliser et de présenter vos idées, car nous n’avons plus de temps à perdre », a lancé aux jeunes M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, au cours de cette séance de présentation du deuxième rapport d’étape sur la jeunesse 2030, un programme lancé en septembre 2018 autour de cinq priorités et quatre piliers pour l’inclusion des jeunes dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Rappelant que l’éducation est l’une des priorités essentielles de Jeunesse 2030, le Secrétaire général a attiré l’attention sur l’importance de la prochaine conférence mondiale sur l’éducation prévue en septembre prochain. 

Cette dernière séance du Forum, animée par Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a été l’occasion de saluer la qualité de ce deuxième rapport d’étape qui s’appuie sur des contributions de 40 fonds et programmes de l’ONU et 130 bureaux de pays des Nations Unies sur la participation des jeunes à la réalisation du Programme 2030.  L’Envoyée s’est félicitée que 85% des entités onusiennes aient fourni des données à jour sur les jeunes, par le biais de bases de données mondiales et régionales, et que 100% de ces entités aient facilité l’échange de connaissances sur les jeunes. 

Cette séance bilan de ce forum de deux jours a entendu les interventions liminaires de Mme DANIELLA SOLANO, Présidente de la Fondation Gente Positiva du Costa Rica, qui a alerté sur le manque de soutien apporté aux jeunes dans l’exercice de leurs droits de l’homme, en particulier en matière de santé sexuelle et reproductive, d’emploi décent, de démocratie participative et d’éducation de qualité, et de M. NIDAL BENALI, Président du Conseil de la jeunesse du Maroc, qui a prévenu qu’il n’y a pas d’avenir sans la réelle participation des jeunes. 

Parmi les représentants de fonds et programmes de l’ONU, sont intervenus Mme DIENE KEITA, Directrice exécutive adjointe des programmes du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), et Mme CATHERINE RUSSEL, Directrice exécutive de lUNICEF, qui ont notamment annoncé le lancement d’un portail sur les données concernant les adolescents. 

Des ministres de la jeunesse de toutes les régions du monde ainsi que des jeunes ont également participé au débat interactif sur le thème du « renforcement de la solidarité avec les jeunes du monde ».  La Ministre de la jeunesse de lAlbanie a indiqué que son pays vient de mettre en œuvre son premier programme pour les jeunes 2022-2029 élaboré avec la participation de 1 200 jeunes albanais, mais aussi avec la collaboration du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et de l’UNICEF.  Si la Présidente de la Fédération chinoise des jeunes s’est félicitée de la mise en œuvre d’un programme d’autonomisation des jeunes chinois adopté par 90 villes du pays, le Ministre de la jeunesse de la République dominicaine a aussi partagé les efforts de son pays pour mettre les jeunes au centre de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).  Le Directeur général du Conseil national de la jeunesse du Guatemala, pays où les jeunes représentent 36% de la population, a fait valoir les efforts de son pays pour adapter la politique nationale de la jeunesse aux réalités des ODD.  Le Secrétaire dÉtat à la jeunesse du Portugal s’est particulièrement félicité de l’organisation de la « Conférence mondiale des ministres de la jeunesse 2019 et du Forum des jeunes Lisboa+21 », 21 ans après l’adoption de la Déclaration de Lisbonne sur les politiques et programmes en faveur de la jeunesse, qui ont offert aux gouvernements nationaux et aux jeunes femmes et hommes l’occasion de discuter des opportunités d’améliorer les politiques et programmes touchant la jeunesse, dans le contexte du Programme 2030. 

« Nous avons la possibilité de tenir notre parole, de façonner un monde plus vert et plus sain », a conclu l’Envoyée de la jeunesse avant d’appeler à transformer la peur en espoir en associant les jeunes à nos ambitions pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Renforcer la solidarité avec les jeunes du monde entier

Cette dernière table ronde du Forum de la jeunesse 2022 était l’occasion pour les jeunes participants de poser leurs questions via les réseaux sociaux sur Notre Programme commun du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres.  Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a posé la première question sur la perte de confiance des jeunes dans le système international y compris l’ONU.  Mme NANDINI TANYA LALLMON, African Youth Charter Hustler de Maurice et membre de l’Équipe spéciale des jeunes pour Stockholm+50, a estimé que les jeunes doivent être engagés à nouveau au sein du système international pour pouvoir y participer activement.  Ils ont besoin d’avoir une bonne compréhension des processus décisionnels et de comprendre comment ces processus peuvent créer un vrai changement, a-t-elle souligné.  Elle a exigé une culture de transparence et l’application d’un principe de responsabilité pour rétablir la confiance des jeunes.  Elle a estimé que la création du Bureau de l’Envoyée pour la jeunesse a remis l’ONU sur la bonne voie.  « C’est l’engagement plus important de l’ONU envers les jeunes. »  M. ROMAN GOJAYEV, Generation Connect Visionaries Board, a suggéré d’informer les jeunes sur le fonctionnement des Nations Unies et sur les processus de décision à l’ONU y compris au niveau local.  Il faut réajuster nos attentes pour être sûr qu’elles soient à la hauteur des objectifs souhaités, a-t-il ajouté.

Pouvez-vous donner une vision du multilatéralisme en 2050?  À cette question d’une participante du Maroc, Mme ILONA SZABÓ DE CARVALHO, fondatrice et Présidente de l’Institut Igarapé et membre du Groupe consultatif de haut niveau sur le multilateralisme efficace, a dit que le document Notre Programme commun est tourné vers l’avenir afin d’inspirer les jeunes en proposant une approche mondiale et inclusive qui est la clef du changement.  Les jeunes sont les chefs de file du changement et nous avons besoin de leur énergie pour mettre en œuvre le Programme 2030 et l’Accord de Paris sur le climat, a souligné l’oratrice.  C’est aussi un document pratique axé sur les résultats.  Il propose des solutions pour avoir des résultats sur les changements climatiques, la paix et le développement.  Notre Programme commun est un document qui rassemble les États Membres, les jeunes de la société civile, les universités et les minorités, les élus et l’ensemble du système de l’ONU.  

Quelles sont les entraves à la mise en œuvre de l’autonomisation des jeunes à l’ONU? a interrogé une participante du Brésil.  La fondatrice de l’Institut Igarapé s’est réjouie du fait que les jeunes s’invitent eux-mêmes à la table.  Cela a accéléré la mise en œuvre, a-t-elle ajouté.  Il n’en demeure pas moins que de nombreux jeunes du Sud restent exclus.  Il faut retenir ce qui marche et améliorer ce qui ne fonctionne pas.  Il faut également une coordination et un suivi efficaces des différentes politiques y compris la participation des jeunes dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des plans et des programmes.  La représentante de l’Équipe spéciale des jeunes pour Stockholm+50 a encouragé les jeunes à innover et ne pas craindre les approches radicales, dans les domaines climatiques notamment.  Il faut mettre de côté les stratégies qui ne fonctionnent plus, toujours garder le sens de l’urgence et renforcer les liens existants, a-t-elle plaidé. 

Comment les jeunes peuvent avoir leur voix au chapitre dans les questions cruciales du moment, notamment dans le domaine de la technologie? a demandé une jeune de l’Inde.  Le représentant de Generation Connect Visionaries Board a salué l’exigence des jeunes de participer aux processus décisionnels parce que la participation des jeunes a gagné en importance depuis la pandémie de COVID-19.  Ils veulent un monde connecté mais beaucoup d’entre eux n’ont pas accès à Internet alors qu’ils veulent discuter des problèmes qui les concernent, a-t-il noté.  Pour la représentante du Groupe consultatif de haut niveau sur le multilateralisme efficace, il faut trouver des manières d’inclure les jeunes dans la conversation en tant qu’agents actifs.  Leurs besoins et leurs rêves doivent être pris en compte dans l’élaboration des politiques qui ont des implications sur beaucoup d’entre eux, a-t-elle recommandé en ajoutant qu’une implication des jeunes est essentielle pour un multilatéralisme efficace fondé sur les réseaux.  Sans les jeunes, les objectifs ne seront pas atteints, a prévenu l’intervenante.

Comment assurer l’inclusion des jeunes dans les pays où la participation des jeunes n’est pas assurée?  Comment créer un espace de participation pour les jeunes?  Il faut mettre un terme à l’âgisme, a exigé la représentante de l’Équipe spéciale des jeunes pour Stockholm+50.  Elle a encouragé les jeunes à tirer parti de la technologie pour faire entendre leur voix.  Le représentant de Generation Connect Visionaries Board a souligné à son tour l’importance de la participation des jeunes y compris pour les groupes vulnérables.  

Quelle est la première mesure à prendre lorsque l’on travaille sur les ODD?  Pour la fondatrice de l’Institut Ingarapé, il faut travailler ensemble avec les populations qui ont besoin du changement.  Pour le représentant de Generation Connect Visionaries Board, il faut identifier les problèmes et trouver les moyens pour y faire face au sein des communautés et négocier avec les décideurs politiques pour qu’ils prennent des décisions.  La représentante de l’Équipe spéciale des jeunes pour Stockholm+50 a demandé la création d’espaces et l’inclusion de tous les groupes marginalisés lors de l’élaboration des plans.  Il ne peut y avoir de développement durable que lorsque tout le monde est inclus, en particulier les groupes marginalisés, a-t-elle conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission prend acte du rapport procédural de la session de fond 2022 du Comité spécial des opérations de maintien de la paix

Soixante-seizième session,
17e séance plénière - après-midi
CPSD/745

La Quatrième Commission prend acte du rapport procédural de la session de fond 2022 du Comité spécial des opérations de maintien de la paix

Cet après-midi, la Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) a adopté sans mise aux voix une résolution relative à l’Étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects, par laquelle elle a pris acte du rapport du Comité spécial des opérations de maintien de la paix.  Cet organe, aussi appelé C-34, et qui compte aujourd’hui 157 États Membres, a tenu sa session de fond du 14 février au 11 mars 2022. 

En adoptant ce texte, la Commission réaffirme que les États Membres qui fourniront du personnel aux opérations de maintien de la paix de l’ONU dans les années à venir ou qui participeront aux travaux du Comité spécial en qualité d’observateurs pendant trois années consécutives deviendront membres du Comité spécial à la session suivante sur demande adressée par écrit à la présidence du Comité spécial. 

Elle décide aussi que le Comité spécial continuera, conformément à son mandat, de procéder à une étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects, et examinera toute nouvelle proposition concernant le renforcement des moyens dont dispose l’Organisation pour s’acquitter de ses responsabilités dans ce domaine. 

Le rapporteur du Comité spécial, M. Abdullah Attelb (Égypte), a déploré que ce rapport n’ait pu être adopté par consensus, comme le stipulent les méthodes de travail du C-34, du fait du « blocage » opposé par cinq délégations, alors même que les recommandations qui y figuraient avaient eu l’aval des coordonnateurs régionaux et des membres du groupe de travail plénier.  Le Mexique a d’ailleurs soulevé ce principe du consensus en appelant à y réfléchir dans le contexte de l’amélioration des méthodes de travail du C-34. 

À la question de l’Égypte de savoir pourquoi ces délégations s’étaient opposées, une question reprise également par le Guatemala, le Pakistan et le Rwanda ont tour à tour argué qu’à partir du moment où l’on n’est pas d’accord avec ce qu’était le rapport, s’y opposer est un droit fondamental.  Sur le fond, les deux délégations ont soutenu que tous les chapitres avaient la même importance et sont étroitement liés et que la suppression de l’un d’entre eux remettrait en cause toute la structure du document.

Plus précisément, ils ont regretté que le chapitre dédié aux partenariats « qui sont au cœur du maintien de la paix » n’ait pu être intégré, faute d’accord sur son libellé et à la suite du rejet des suggestions formulées par le Mouvement des non-alignés, en particulier pour ce qui est du partenariat entre l’Union africaine et l’ONU.  Comme l’a souligné le Pakistan, « si nous avions accepté le rapport tel quel, nous aurions réglé ce problème de manière temporaire mais pas sur le fond ».  Partageant ce point de vue, le Rwanda a appelé à trouver un terrain d’entente sur cette question avant la prochaine session de fond du Comité spécial, rappelant que les questions géopolitiques ne devraient pas hypothéquer les négociations intergouvernementales. 

Quoique déçu du résultat de cette année, le Canada, qui présidait les travaux du Groupe de travail plénier, a mis en avant les nombreuses innovations apportées aux méthodes de travail du C-34, comme la mise en place d’un dépositoire en ligne des recommandations du Comité et de l’état d’avancement de leur mise en œuvre, ou encore la tenue de sessions hybrides.  Il a insisté sur l’idée que ces améliorations sont un processus en cours et qu’il faut aller encore plus loin. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité : en Ukraine, des allégations d’abus et d’exploitation des réfugiés et déplacés surgissent sur fond de détérioration de la crise humanitaire

9018e séance, après-midi
CS/14865

Conseil de sécurité : en Ukraine, des allégations d’abus et d’exploitation des réfugiés et déplacés surgissent sur fond de détérioration de la crise humanitaire

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, tenu sa quatorzième séance sur la situation en Ukraine depuis le 24 février, et la sixième sur les questions humanitaires relatives à la guerre qui l’oppose à la Fédération de Russie.  Dans un contexte d’intensification du conflit dans le centre et l’est, théâtres d’un « cauchemar humanitaire », selon la Haute-Commissaire adjointe des Nations Unies pour les réfugiés, la plupart des intervenants se sont alarmés d’informations faisant état d’abus et d’exploitation de réfugiés et déplacés, dont 90% sont des femmes et des enfants.

Mme Kelly T. Clements, qui intervenait par visioconférence, a ainsi estimé à 5 millions le nombre d’Ukrainiens contraints de quitter leur pays, en plus des 7 millions de personnes déplacées.  L’ONU estime également que 13 millions de plus se trouvent dans les zones les plus durement touchées par les combats, dont beaucoup sont incapables de se déplacer.  Pour le Directeur général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), un déplacement de population aussi rapide et massif n’a plus été observé en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.  M. Antonio Vitorino a rappelé que la traite des personnes est un phénomène documenté dans la région, où les déplacements de grande ampleur, les séparations familiales et la perturbation de la protection civile et des réseaux communautaires exposent les populations vulnérables à la violence, à l’exploitation et aux abus, en particulier femmes et enfants.

Le Mexique qui, avec la France, avait demandé la tenue de cette séance, a constaté que la situation sur le terrain pose des défis complexes pour la collecte de données, notamment sur l’ampleur du phénomène de la traite humaine.  La délégation mexicaine a appelé à prendre les mesures qui s’imposent, l’OIM précisant qu’elle a remis en état une installation médicale afin de fournir des services de santé essentiels, y compris des soins psychologiques à ces personnes vulnérables.  En partenariat avec l’UNICEF, le Haut-Commissariat a créé des espaces sûrs appelés « points bleus », situés aux principaux points de passage frontaliers, afin de fournir des informations et une aide spécialisée aux mères, aux adolescentes, enfants et autres réfugiés vulnérables. 

Au nom des pays nordiques, la Suède a insisté sur l’importance de tenir compte des besoins spécifiques de toutes les personnes vivant en situation de vulnérabilité, évoquant le cas des femmes ayant décidé de rester en Ukraine et qui sont exposées à des risques de violence sexiste et sexuelle, ou encore les personnes âgées dans l’incapacité de se déplacer.

Alors que la bataille du Donbass fait rage, les forces russes continuent de ne faire aucune distinction entre civils et militaires, a soutenu l’Ukraine en faisant cas de la situation à Marioupol, où des milliers de civils se sont réfugiés dans l’usine Azovstal assiégée par les forces russes.  Il faut les évacuer de toute urgence et les Russes le savent, mais ils s’opposent à l’ouverture de couloirs d’évacuation et continuent de bombarder la ville, s’est indigné le délégué ukrainien.  La Slovaquie a souhaité qu’à l’occasion de la Pâque orthodoxe, les parties puissent tomber d’accord sur l’ouverture de couloirs humanitaires. 

Presque tous les orateurs ont en outre salué la solidarité des pays voisins de l’Ukraine, Mme Clements saisissant l’occasion pour appeler la communauté internationale à faire de même pour les réfugiés du monde.  Cet appel à la solidarité a trouvé un écho auprès des États-Unis, qui ont déclaré que « les réfugiés sont des réfugiés », quel que soit leur parcours, leur race, leur âge, leur nationalité ou leur orientation sexuelle. 

La route de l’exode est souvent plus difficile pour les Africains quittant l’Ukraine, s’est désolé le Gabon, avant que le Kenya ne dresse un parallèle avec ce que subissent chaque année les milliers de malheureux qui cherchent à traverser la Méditerranée vers l’Europe.  L’Estonie a pour sa part rappelé que les pays baltes, au nom desquels elle s’exprimait, accueillent près de 110 000 réfugiés ukrainiens, pour un coût total estimé à 66 millions d’euros.  C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la Pologne a demandé un appui international afin d’alléger les souffrances des pays d’accueil.

Revenant sur les terribles exactions commises à Boutcha, la France a annoncé avoir déployé une équipe technique chargée d’apporter son expertise en matière d’identification et de collecte de preuves.  Par la voix de son Ministre des affaires étrangères et de la défense, M. Simon Coveney, l’Irlande a annoncé une contribution supplémentaire de trois millions d’euros en faveur de la Cour pénale internationale (CPI) dont plusieurs membres du Conseil considèrent qu’elle devrait enquêter: « L’Ukraine est maintenant une scène de crime », a renchéri le Royaume-Uni.

Ceux qui nous reprochent de violer les droits humains oublient les violations commises contre les droits des Ukrainiens russophones, « dont des mineurs », a retorqué le délégué russe.  Il a accusé les pays occidentaux de qualifier l’« opération militaire spéciale » de « guerre » en oubliant leur propre aventurisme militaire en ex-Yougoslavie, en Libye ou bien encore en Syrie.  Le représentant a expliqué que depuis les évènements de Maidan en 2014, 1,7 million d’Ukrainiens ont soit demandé le statut de réfugié à la Russie soit la nationalité russe, un flux qui a augmenté à hauteur de 800 000 nouvelles personnes depuis le 24 février dernier.  Il a en outre accusé les forces ukrainiennes retranchées dans leur bastion de Marioupol de se servir des civils comme boucliers humains.  Il a assuré que l’opération militaire spéciale atteindra ses objectifs en Ukraine, parmi lesquels figurent la dénazification du pays et la « libération » du Donbass.

L’Ukraine a évoqué, quant à elle, des enlèvements qui exigent une réaction de la part de la communauté internationale, évoquant des « camps de filtration et de torture », où seraient maintenus « au moins 20 000 Ukrainiens », dont des enfants, avant d’être envoyés dans des régions « déprimées » de la Russie, où des documents leur sont remis leur interdisant de quitter les lieux pendant deux ans.  « Êtes-vous prêts à reléguer le rôle du Conseil de sécurité à celui de forum de débats? » a ajouté l’Ukraine, jugeant essentiel de « régler la question de la présence douteuse de la Fédération de Russie, qui empêche [cet organe] de s’acquitter de sa responsabilité première ».  

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE

Déclarations

Intervenant par visioconférence, Mme KELLY T. CLEMENTS, Haute-Commissaire adjointe des Nations Unies pour les réfugiés, a dit intervenir depuis la Hongrie, « un pays vers lequel près d’un demi-million d’Ukrainiens ont fui », soit une fraction des presque 5 millions qui ont été contraints de quitter leur pays, en plus des 7 millions de personnes déplacées à l’intérieur de l’Ukraine.  L’ONU estime également que 13 millions de plus se trouvent dans les zones les plus durement touchées par le conflit, dont beaucoup sont incapables de se déplacer.  Mme Clements a relevé avoir été en début de journée en République tchèque, et avant cela en Autriche.  Elle a salué la compassion et la solidarité sans précédent dans ces pays comme dans d’autres.  Elle a émis le vœu fervent que cela s’étendra également à d’autres réfugiés qui se retrouvent en Europe et qui sont dans l’impossibilité de rentrer et ont besoin de la même protection et solidarité internationales. 

Chacun des millions de déplacés sont obligés de prendre des décisions difficiles et déchirantes et ont laissé derrière eux presque tout ce qui leur est cher, a poursuivi Mme Clements.  Grâce à l’engagement des États concernés, les frontières ont été maintenues ouvertes, a-t-elle dit, avant d’appeler à ce que cela se poursuive sans discrimination pour tous les nécessiteux.  Selon elle, cette réponse inspirante n’est surpassée que par la force et le sang-froid des réfugiés eux-mêmes, alors qu’ils sont séparés de leurs familles, craignant que la guerre ne les poursuive. 

La Haute-Commissaire adjointe a indiqué que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) signe actuellement des accords avec trois ministères clefs en Ukraine pour faire avancer leur soutien au Gouvernement.  L’agence onusienne continue à développer son aide vitale aux déplacés dans toute l’Ukraine, en particulier dans le centre et l’est où se déroule un cauchemar humanitaire. Cela exige non seulement des ressources, mais aussi un accès sûr et sans entrave aux personnes dans le besoin, où qu’elles se trouvent dans le pays, a-t-elle plaidé.  Même si la couverture médiatique s’est déplacée vers d’autres aspects du conflit, les gens sont toujours en fuite dans le désespoir et la peur, a noté Mme Clements, précisant que c’est le cas non seulement en Ukraine, mais aussi dans d’autres pays dans le monde –Yémen, Myanmar, Éthiopie, Syrie, Venezuela, République démocratique du Congo- entre autres.  Elle a donc demandé au Conseil de sécurité de continuer à tenir compte des besoins de tous les réfugié, partout dans le monde.  Tous ceux qui sont déracinés de chez eux ont besoin de la même solidarité, la même compassion, et la même protection, a-t-elle dit. 

Elle a relevé qu’en Ukraine, la grande majorité des personnes en déplacement sont des femmes et des enfants, et les risques de violence sexiste, de traite, d’exploitation et d’abus sexuels sont élevés.  Les premiers cas de traite recensés confirment que ces risques se réalisent déjà, a-t-elle déploré.  Le HCR œuvre à prévenir, atténuer et répondre ces risques de traites, y compris avec l’OIM.  En plus des programmes renforcés contre la violence sexiste, le HCR a déployé des experts en prévention de l’exploitation et des abus sexuels pour soutenir les réponses des gouvernements.  Il travaille également en partenariat avec l’UNICEF sur des espaces sûrs appelés « points bleus » aux principaux points de passage frontaliers.  Il s’agit de centres de transit et d’accueil pour fournir des informations et une aide spécialisée aux mères, aux adolescentes, enfants et autres réfugiés vulnérables.  C’est la première fois que nous le faisons si tôt dans une intervention d’urgence et nous nous attendons à ce qu’elle serve de meilleure pratique à l’avenir, a indiqué la Haute-Commissaire adjointe. 

Outre l’aide que l’agence onusienne promet de poursuivre, Mme Clements a argué qu’aucune pile de couvertures, aucune somme d’argent, aucune quantité de médicaments ne pourra arrêter les morts et les destructions.  Ainsi, l’aide seule n’empêchera pas les personnes contraintes par la guerre de fuir, pas plus qu’elle ne leur donnera ce qu’elles veulent et ce dont elles ont vraiment besoin: la paix et la sécurité à la maison, une chance de revenir volontairement, durablement et sans entrave.  Ainsi, même si nous poursuivons notre travail d’acheminement de l’aide, nous avons besoin que ce Conseil effectue également son travail, a-t-elle lancé.  Elle lui a donc demandé de mettre de côté les différences et de trouver un moyen de mettre fin à cette guerre « horrible et insensée ». 

M. ANTÓNIO VITORINO, Directeur général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a tout d’abord indiqué que plus de 12 millions d’Ukrainiens et de ressortissants de pays tiers ont déjà ont été contraints de quitter leur foyer depuis le début de cette guerre, soit « plus d’un quart de la population totale en un peu plus de sept semaines ».  Relevant qu’un déplacement de population aussi rapide et massif n’a plus été observé en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il a précisé que, selon les chiffres du HCR, près de 5 millions de personnes ont fui le pays, la dernière évaluation de l’OIM sur le suivi des déplacements faisant d’autre part état de 7,1 millions de personnes supplémentaires déplacées à l’intérieur de l’Ukraine, ce qui représente une augmentation de 10% par rapport à la première évaluation menée deux semaines plus tôt.  Dans ce contexte, il s’est dit profondément préoccupé par la détérioration continue de la situation humanitaire en Ukraine avant d’appeler les parties au conflit à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire pour protéger les personnes et les infrastructures civiles. 

M. Vitorino a déclaré avoir vu, lors de ses visites en mars dans plusieurs des pays voisins de l’Ukraine, le prix que les civils paient pour ce conflit, en particulier les femmes et les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées.  Sur la base des évaluations de l’OIM et du travail mené avec le HCR et d’autres partenaires, il a dit avoir identifié des risques spécifiques pour les personnes déplacées, les réfugiés et les ressortissants de pays tiers.  Ainsi, a-t-il expliqué, on peut s’attendre à ce que jusqu’à 30% de la population connaisse des impacts psychologiques négatifs, ce qui est une réaction normale en situation de détresse.  Cependant, a ajouté le haut fonctionnaire, à mesure que la guerre se poursuit, les besoins psychosociaux vont sans aucun doute augmenter.  Pour y faire face, des efforts sont déployés en Ukraine et dans les pays voisins pour former des travailleurs de première ligne au secourisme psychologique et renforcer la capacité des permanences téléphoniques afin de fournir un soutien psychosocial. 

Le Directeur général de l’OIM a ensuite rappelé que la traite des personnes est un phénomène connu dans la région et que les déplacements de grande ampleur, les séparations familiales et la perturbation de la protection civile et des réseaux communautaires rendent les populations vulnérables à la violence, à l’exploitation et aux abus.  À cet égard, il a dénoncé les cas de violence sexiste, y compris de violence sexuelle liée aux conflits, soulignant que ces risques sont particulièrement aigus pour les femmes et les enfants en déplacement.  Pour leur venir en aide, l’OIM a remis en état en Ukraine une installation médicale pour fournir des services de santé essentiels, y compris des soins psychologiques.  Alors que plus de la moitié des enfants ukrainiens ont été déplacés et que les enfants non accompagnés ou séparés courent un risque accru de violence, de maltraitance et d’exploitation, M. Vitorino a exhorté tous les pays voisins à assurer immédiatement leur identification et leur enregistrement.  Il a par ailleurs félicité tous les pays voisins pour la solidarité dont ils ont fait preuve, mais s’est déclaré alarmé par les informations faisant état de discrimination, de violence et de xénophobie à l’encontre de ressortissants de pays tiers fuyant l’Ukraine.  Il a donc appelé tous les États à veiller à ce que la protection et l’assistance immédiate soient fournies de manière non discriminatoire, assurant que l’OIM continuera de surveiller leur situation et de leur fournir un soutien via des lignes téléphoniques d’information et un mécanisme d’orientation pour faciliter le contact avec les consulats concernés. 

Du fait de notre expérience et nos outils de collecte et d’analyse de données, a poursuivi M. Vitorino, nous savons que les déplacés ont tendance à se déplacer vers les zones urbaines à la recherche de travail et de services sociaux.  Il est par conséquent urgent d’étendre les services pour répondre aux besoins croissants de ces populations, a-t-il affirmé, signalant qu’entre autres interventions à leur intention, l’OIM a commencé à fournir une aide en espèces en Ukraine et dans certains pays voisins.  L’accord qui existait avec les services postaux ukrainiens avant la crise a permis un déploiement rapide, mais des mesures sont mises en œuvre pour intensifier cette assistance, en étroite coordination avec l’OCHA, le PAM et le HCR afin d’atteindre jusqu’à 500 000 personnes au cours des trois prochains mois. 

L’OIM, a encore souligné son Directeur général, continuera, à travers ses équipes sur le terrain, à s’assurer que des actions ciblées soient prises pour améliorer le bien-être de tous ceux qui sont touchés par la guerre. 

L’Organisation continue également à fournir une aide humanitaire vitale, tout en travaillant avec le Gouvernement et les autorités locales en Ukraine à l’identification de solutions pour les déplacés internes.  Au-delà de l’aide d’urgence, a-t-il ajouté, il importe aussi d’investir dans des politiques d’intégration précoce et des interventions qui facilitent leur insertion sociale dans les pays d’accueil, ce qui rend crucial la planification des déplacements.  À ce sujet, il a salué la décision prise par l’Union européenne d’offrir des protections à ceux qui fuient l’Ukraine, ajoutant que l’OIM se tient prête à aider ceux qui ne bénéficient pas toujours de cette directive européenne, notamment les ressortissants de pays tiers. 

M. SIMON COVENEY, Ministre des affaires étrangères et de la défense de l’Irlande, a indiqué qu’il s’est rendu jeudi dernier à Kiev et que ce qu’il y a vu était « profondément choquant ».  Boutcha, qui était il y a encore deux mois une ville plaisante et dynamique, est maintenant en ruines et remplie de l’odeur de bâtiments brûlés et de cadavres, a-t-il décrit.  « Il n’y a rien de mis en scène dans tout ce que j’ai vu. »  Le Ministre a dit s’être rendu dans une fosse commune, d’où 503 corps de civils et seulement 4 corps de combattants ont été exhumés.  Ces 503 civils, qui n’étaient pas des combattants, a-t-il insisté, semblent avoir été tués délibérément de la plus brutale des façons, a accusé le Ministre, en dénonçant le mépris total des forces russes pour le droit international humanitaire et la protection des civils.  « Il n’est pas possible de déguiser cette réalité. » 

M. Coveney a relayé le souhait des Ukrainiens rencontrés lors de sa visite d’un établissement des responsabilités.  Chaque fois que des crimes de guerre sont commis, des enquêtes crédibles doivent être diligentées dans les plus brefs délais, a exigé le Ministre, en insistant également sur la nécessité de soutenir les victimes.  « C’est pourquoi l’Irlande a annoncé une contribution supplémentaire de trois millions d’euros en faveur de la Cour pénale internationale. »  Le Ministre a assuré que l’Irlande ne restera pas silencieuse devant la poursuite de cette guerre insensée et dévastatrice, alors que l’est de l’Ukraine est le théâtre d’une nouvelle offensive.  Aucun membre de ce Conseil ne doit non plus rester silencieux, a-t-il conclu.  « Je veux m’adresser directement à la Russie: acceptez un cessez-le-feu humanitaire immédiat, retournez à la table des négociations et respectez la Charte. » 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) qui, avec la France, a demandé la tenue de cette réunion du Conseil de sécurité, a constaté l’ampleur des déplacements de personnes en Ukraine et les plus de cinq millions de réfugiés ukrainiens, dont 90% sont des femmes et des enfants qui sont exposés à tous types d’abus.  La situation sur le terrain pose des défis complexes pour la collecte de données, a-t-il relevé, notamment sur l’ampleur du phénomène du trafic d’êtres humains.  Dès lors, le représentant a appelé à prendre les mesures qui s’imposent, tout en saluant le travail du Haut-Commissariat pour les réfugiés (UNHCR) et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), notamment pour l’appui psychosocial qu’ils apportent à ces personnes.  Le représentant a salué la solidarité des pays voisins de l’Ukraine, avant de souligner l’importance de la collaboration de ces pays dans la lutte contre la traite de personnes.  Il a déploré la discrimination frappant des personnes de pays tiers qui ont fui l’Ukraine et a exigé des enquêtes sur toute atteinte aux droits des réfugiés. 

L’un des principaux défis humanitaires reste l’accès, a-t-il regretté en exhortant les parties à l’autoriser et à le faciliter.  Les violations des droits humains ne sauraient restées impunies, s’est indigné le représentant en demandant là encore des enquêtes.  La seule manière de mettre fin à cette grave crise humanitaire, c’est de mettre fin aux hostilités, a-t-il conclu en exigeant le respect des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a noté que plus d’un quart de la population ukrainienne a été contrainte de fuir, dont près de cinq millions de personnes ont dû se réfugier dans les pays voisins.  L’activation de la directive européenne relative à la protection temporaire a permis d’apporter une aide rapide et efficace aux personnes fuyant la guerre, s’est-il cependant félicité.  « L’armée russe tue depuis bientôt deux mois des civils, y compris des enfants, des personnels humanitaires et médicaux, comme des journalistes », a martelé le représentant avant de noter que 1,4 million de personnes n’ont plus accès à l’eau dans l’est de l’Ukraine.  Il a prévenu que ces crimes ne resteront pas impunis et que la France est résolument engagée aux côtés des Ukrainiens et des juridictions internationales, notamment la Cour pénale internationale (CPI), à cette fin.  À la suite des terribles exactions commises à Boutcha, M. De Rivière a indiqué que la France avait déployé une équipe technique chargée d’apporter son expertise en matière d’identification et de collecte de preuves, avant de préciser qu’elle soutient la Commission d’enquête établie par le Conseil des droits de l’Homme pour établir les faits.  Il a aussi appelé la Russie à respecter l’ordonnance rendue par la Cour internationale de Justice (CIJ) et à cesser sa « guerre d’agression » contre l’Ukraine.  Le délégué a appuyé l’appel du Secrétaire général à une pause humanitaire de quatre jours débutant ce jeudi, avant de rappeler que le monde entier est affecté par cette guerre, qui risque de faire basculer jusqu’à 1,7 milliard de personnes, soit plus d’un cinquième de la population mondiale, dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a dit que la route de l’exode est souvent plus difficile pour les Africains quittant l’Ukraine.  Il a rappelé que les pays frontaliers doivent apporter une assistance aux réfugiés africains de la même manière qu’ils le font pour les autres réfugiés.  Le délégué a salué le travail des humanitaires et des pays d’accueil.  Au sujet des informations sur les cas d’exploitation des personnes vulnérables, il a appelé à « tuer dans l’œuf » tous les réseaux de crime organisé qui essayent d’exploiter et d’abuser les réfugiés et déplacés vulnérables.  Il a condamné toute atteinte contre ces personnes, les femmes et les enfants notamment, avant d’appeler à l’ouverture d’enquêtes indépendantes pour établir les faits et les responsabilités.  Il est temps que les armes se taisent et que la diplomatie s’exprime, a-t-il conclu.

Mme MONA JUUL (Norvège) a accusé la Russie d’avoir intentionnellement créé une catastrophe humanitaire en Ukraine.  Elle a signalé qu’alors que se poursuivent les bombardements russes, 12 millions d’Ukrainiens ont déjà fui leurs foyers, s’exposant à un risque accru de violence sexuelle et sexiste, de traite, d’abus, de traumatismes psychologiques et de séparation familiale.  « La Russie est seule responsable de cette situation », a-t-elle martelé, avant de se faire l’écho de l’appel du Secrétaire général de l’ONU en faveur d’une pause humanitaire pour permettre le passage en toute sécurité des civils et l’acheminement d’une aide humanitaire vitale.  Elle s’est félicitée, à cet égard, que l’ONU s’emploie à créer un groupe de contact humanitaire. 

Selon la représentante, la brutalité et l’ampleur de cette crise à évolution rapide exigent des mesures de protection à des niveaux sans précédent.  Tous les pays qui accueillent des personnes déplacées doivent s’assurer de leur identification et de leur enregistrement, a-t-elle plaidé, appelant également à des réponses sexospécifiques et sensibles à l’âge des personnes, sachant que les femmes et les enfants représentent 90% de tous ceux qui ont fui l’Ukraine.  Après avoir rendu hommage à la résilience des Ukrainiens et salué tous ceux qui leur viennent en aide, la représentante a mis l’accent sur les conséquences dévastatrices de cette guerre au niveau mondial, notamment sur le coût des aliments de base, des engrais et de l’énergie, qui accentue la pauvreté, l’insécurité alimentaire et les besoins humanitaires.  La Russie, a-t-elle conclu, peut choisir de mettre fin à son agression contre son voisin, c’est le seul moyen de mettre fin à la catastrophe humanitaire en Ukraine et au-delà. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a rappelé que la Russie se heurte aux conséquences de la détérioration de la situation ukrainienne depuis le mouvement du Maïdan de 2014.  Depuis cette date, 1,7 million de personnes ont soit demandé le statut de réfugié à la Russie soit la nationalité russe.  Ce flux a augmenté à hauteur de 800 000 nouvelles personnes depuis le début de l’opération militaire spéciale, a poursuivi le délégué, en notant la diminution constante de la population ukrainienne depuis 2014.  Ceux qui nous reprochent de violer les droits humains oublient les violations commises contre les droits des Ukrainiens russophones, dont des mineurs, a poursuivi le délégué.  Il a accusé les pays occidentaux de voir dans l’Ukraine un « agneau », en oubliant la guerre menée par ce pays depuis huit ans dans le Donbass.  Il les a aussi accusés de qualifier ladite opération militaire spéciale de guerre en oubliant l’aventurisme militaire occidental en ex-Yougoslavie, en Libye ou bien encore en Syrie.  Il a mentionné une lettre récemment transmise par la Syrie à ce Conseil sur la destruction de Raqqa par les « frappes inhumaines des Américains ».  Vous réécrivez l’histoire dans un sens antirusse, promouvez les mensonges des pays d’Europe orientale et ignorez l’existence du néonazisme en Ukraine, a-t-il dit, en rappelant que la « dénazification de l’Ukraine » est précisément l’un des objectifs poursuivis par ladite opération spéciale. 

Il a aussi estimé que les préoccupations des pays occidentaux vis-à-vis des Ukrainiens sont conjoncturelles et intéressées, ces derniers servant de chair à canon dans la guerre par procuration qu’ils livrent à la Russie.  « Les fabricants d’armes occidentaux se frottent les mains. »  Les pays d’Europe orientale sont ravis car ils peuvent se débarrasser en Ukraine de leur vieux matériel soviétique en le remplaçant par du matériel occidental, a-t-il ironisé.  Le délégué a accusé les Américains de pousser les Européens à adopter des sanctions de plus en plus strictes contre la Russie.  Ainsi, Washington, qui souffre le moins des sanctions, va pouvoir livrer son gaz aux Européens, alors qu’il est beaucoup plus cher que le gaz russe.  Il a aussi déclaré que l’économie russe fait face aux sanctions avec succès en explorant de nouvelles pistes de développement. 

Le seul pays qui est perdant, c’est bel et bien l’Ukraine, a estimé le délégué, en accusant les autorités de Kiev de faire semblant de ne pas le comprendre, à la différence des Ukrainiens.  Les Ukrainiens savent qu’ils ne font pas face à la soi-disant terreur de l’armée russe mais bien à l’extraordinaire violence des néo-nazis et des extrémistes ukrainiens qui essayent de sauver leur peau à tout prix, a asséné le délégué: « Il est impossible de cacher la vérité. »  Il a aussi affirmé que l’armée ukrainienne a fait usage d’armes à sous-munitions, en s’étonnant que ses collègues occidentaux n’aient pas condamné cette atrocité.  Le délégué a en outre accusé les forces ukrainiennes dans leur bastion de Marioupol d’user de civils comme de boucliers humains.  La mission de l’OSCE transmet par ailleurs des données militaires aux autorités ukrainiennes.  L’Ukraine n’est qu’un pion sur l’échiquier de ce combat géopolitique, a-t-il déclaré, en fustigeant les méthodes utilisées par les Occidentaux pour instaurer un ordre international fondé sur des règles qui leur conviennent.  Enfin, le délégué a assuré que l’opération militaire spéciale atteindra nécessairement ses objectifs en Ukraine, parmi lesquels la dénazification du pays et la libération du Donbass. 

M. ZHANG JUN (Chine) a constaté la situation humanitaire aux graves conséquences qui prévaut en Ukraine, en appelant à tout faire pour réduire les dégâts causés aux civils par ce conflit.  Pour cela, le représentant a exigé des parties qu’elles respectent le droit international humanitaire, qu’elles protègent les infrastructures civiles et qu’elles facilitent les évacuations, notamment en créant des couloirs humanitaires.  La question des réfugiés doit être traitée comme il convient, a poursuivi le représentant en saluant la solidarité des pays voisins qui les accueillent et en appelant la communauté internationale à leur fournir plus d’appui dans un souci de « partage des responsabilités ».  Le représentant a noté que, ces derniers jours, de nombreux réfugiés sont revenus en Ukraine.  Il a appelé à traiter tous les réfugiés de la même manière et à prendre des mesures pour lutter contre le trafic de personnes dans le contexte de ce conflit. 

Plaidant pour une voie diplomatique et la négociation en vue du règlement de ce conflit, le représentant a appelé à créer les conditions propices à un cessez-le-feu.  Il a encouragé toutes les parties à s’engager dans cette voie, remarquant au passage que l’envoi d’armes en Ukraine ne s’inscrit pas dans cette logique.  Revenant aussi sur l’impact de cette crise sur les économies du monde en développement, le représentant a appelé la communauté internationale à prendre des mesures pour stabiliser les prix des denrées alimentaires.  Il a également dénoncé les tentatives de « militarisation de l’indépendance économique des pays », en demandant à ce qu’on y renonce sans tarder. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a dit soutenir les négociations en cours entre les parties parce que le dialogue reste le seul moyen de mettre fin durablement à ce conflit.  Il salué la générosité des pays qui accueillent des réfugiés, dont la Pologne et la Roumanie qui ont accueilli 3,4 millions d’Ukrainiens, ainsi que la Moldavie, qui a accueilli plus de 400 000 réfugiés représentant 15% de sa population totale.  Il a aussi félicité l’Union européenne pour son soutien aux États les plus durement touchés par la crise des réfugiés.  Préoccupé par l’augmentation des signalements de traite des êtres humains, M. Abushahab a appelé à mieux contrôler les passages frontaliers pour détecter, prévenir et réprimer l’activité criminelle des trafiquants.  Il a appelé à déployer une réponse humanitaire qui inclue la voix des femmes.  Enfin, le représentant a appelé à s’attaquer d’urgence aux répercussions mondiales du conflit en Ukraine, en s’inquiétant de la forte hausse des prix des denrées alimentaires et des produits de base dans de nombreux pays dont la situation est inscrite à l’ordre du jour du Conseil. 

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a prévenu qu’il y aura beaucoup d’autres réfugiés si le conflit en Ukraine se poursuit.  Il a noté que les toutes les parties ont pour obligation de protéger les civils et les infrastructures civiles.  Il a appelé à l’ouverture de couloirs humanitaires locaux, mais, a—t-il précisé, seul un cessez-le-feu général permettra de combler les besoins d’assistance humanitaire dans le pays.  Le représentant a ensuite relevé que les effets du conflit sur l’agriculture ukrainienne, ainsi que les conséquences des sanctions économiques unilatérales, contribueront à aggraver l’insécurité alimentaire à travers le monde, alors même que les pays en développement faisaient déjà face à une récession économique du fait de la pandémie de COVID-19.  Il a déploré que les besoins humanitaires d’autres régions du monde soient désormais insuffisamment considérés, rappelant que 85% des réfugiés du monde se trouvent dans les pays en développement.  Dans le même temps, les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 30% par rapport à la même période de l’an dernier, tandis que ceux des engrais ont pratiquement doublé. Les autorités brésiliennes ont ouvert le pays aux réfugiés ukrainiens, en droite ligne de ce qui a été auparavant fait en faveur des Haïtiens, des Vénézuéliens ou des Afghans. 

Constatant que la situation humanitaire en Ukraine s’est encore détériorée, M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a déploré que femmes et enfants aient été touchés de manière disproportionnée et constituent la majeure partie des réfugiés et des personnes déplacées.  Compte tenu de cette situation catastrophique, son pays a envoyé et continuera d’envoyer des fournitures humanitaires à l’Ukraine et à ses voisins, notamment des médicaments et d’autres matériels de secours essentiels, a-t-il dit.  L’Inde a assuré le rapatriement en toute sécurité d’environ 22 500 Indiens d’Ukraine grâce à l’opération Ganga, qui compte 90 vols à ce jour: « Nous avons également aidé les ressortissants de 18 autres pays dans le cadre de ce processus », s’est enorgueilli le représentant.  Il a pris note des conclusions de l’Équipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire, qui recommande d’exempter immédiatement les achats de denrées alimentaires par le Programme alimentaire mondial (PAM) des restrictions pesant sur les exportations alimentaires, a dit le délégué.  Le délégué a, à nouveau, souligné l’importance des principes directeurs de l’aide humanitaire des Nations Unies, c’est-à-dire l’humanité, la neutralité, l’impartialité et l’indépendance, qui ne doivent jamais être « politisés ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déploré une tragédie sans fin en Ukraine.  « Les mots manquent. »  Il a accusé la Russie d’avoir franchi délibérément des « lignes rouges morales » et de se montrer impitoyable vis-à-vis de l’Ukraine: « Le tableau est apocalyptique. »  Le représentant a dénoncé la nouvelle offensive de la Russie dans l’est ukrainien, qui montre l’absence de sincérité de la Russie lors des négociations.  Aucun cessez-le-feu n’est en vue, a déploré le délégué, en relayant l’appel d’une pause humanitaire lancé par le Secrétaire général.  Le délégué a ensuite salué la récente visite du Procureur de la CPI en Ukraine pour établir la vérité sur les atrocités commises.  Il a fustigé « l’obsession du Kremlin » selon laquelle l’Ukraine n’existe pas, ainsi que ses efforts visant à modeler la réalité en fonction de ses souhaits.  On ne peut nier l’histoire, sous peine de courir à la catastrophe, a-t-il dit, en rappelant que la tentative de Joseph Staline d’envahir la Finlande s’est soldée par un échec.  « L’Union soviétique a voulu soviétiser l’Europe et elle a échoué. »  Aucun pays ne doit avoir le droit d’en dominer un autre, a conclu le délégué de l’Albanie. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a regretté le nombre élevé de réfugiés et de personnes déplacées du conflit ukrainien tout en saluant la volonté des pays voisins de leur ouvrir leurs frontières et de les accueillir.  L’ONU et les parties prenantes doivent coopérer pour subvenir aux besoins de ces réfugiés, a estimé le représentant avant de dénoncer la discrimination que vivent les ressortissants de pays tiers cherchant à fuir l’Ukraine.  Le représentant a exigé un traitement sur un pied d’égalité de tous les réfugiés.  Il faut des mesures permettant une reddition des comptes, a-t-il martelé, notamment dans les pays de transit et les pays hôtes.  Le représentant a également demandé des enquêtes sur les cas de traite de personnes avant d’appeler de ses vœux l’ouverture de couloirs humanitaires, un accès à l’aide humanitaire pour ceux qui ne peuvent pas quitter l’Ukraine et la protection du personnel humanitaire et médical opérant en Ukraine.  La sortie de crise ukrainienne passe par le dialogue, a-t-il conclu. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a exhorté la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) à mobiliser des fonds pour protéger les pays les plus vulnérables du monde face aux conséquences de la crise en Ukraine, en suggérant notamment de mettre des engrais à la disposition des pays qui souffrent d’insécurité alimentaire chronique.  Par ailleurs, le représentant a cité le calvaire que vivent des milliers d’Africains qui ont fait un voyage terrifiant pour fuir la guerre en Ukraine et trouver refuge en Europe, et qui ont subi des comportements racistes en cours de route.  Il a fait le parallèle avec ce que subissent chaque année les milliers de personnes qui cherchent à traverser la Méditerranée depuis l’Afrique.  Il a rappelé que le racisme et l’ethnocentrisme, surtout lorsqu’ils sont soutenus et claironnés par les politiques officielles, sont les premiers avertissements de guerre catastrophique et d’atrocités. 

Le délégué a rappelé que l’ONU a été créée après que les politiques raciales des nazis aient tué des dizaines de millions d’Européens, d’Asiatiques et d’Africains.  Il a aussi noté que l’esclavage transatlantique et d’autres formes de racisme violent ont coûté la vie à des dizaines de millions de personnes sur les continents américains et européens.  « Pour empêcher une nouvelle ère de guerres destructrices et son corollaire de crises humanitaires, nous devons ancrer l’antiracisme dans les fondements mêmes de l’ordre multilatéral », a insisté le représentant du Kenya avant d’appeler à la réforme du Conseil de sécurité et à faire de l’antiracisme la plus grande action préventive des catastrophes humanitaires. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déploré la mort d’un humanitaire de l’organisation Caritas qui a été tué à Marioupol.  Elle a salué le fait que les pays voisins aient ouvert leurs portes aux réfugiés venant d’Ukraine. Vous avez donné de l’espoir à l’humanité et démontré ce que c’est que d’être un bon voisin, a-t-elle dit.  La représentante a aussi salué les autres pays européens accueillant des Ukrainiens, rappelant que les États-Unis se sont engagés à en recevoir 100 000.  Selon elle, « les réfugiés sont des réfugiés », quel que soit leur parcours, leur race, leur âge, leur nationalité ou leur identité sexuelle.  Et défendre les droits humains de ceux dans le besoin est une priorité du Gouvernement américain. 

Elle a appelé à faire face à la menace du trafic humain qui pèse sur les réfugiés, d’autant plus que 90% de ces derniers sont des femmes et des enfants.  C’est ainsi que la Pologne et la Roumanie ont mis en place des mesures pour lutter contre les trafics humains, et les États-Unis appuient ces efforts dans plusieurs pays de la région, a assuré la représentante.  Elle dit avoir annoncé un don de 50 millions de dollars à Moldova au cours de son récent voyage dans la région.  Chaque jour, on demande si le Conseil de sécurité est à la hauteur de cette crise, a—t-elle noté.  Selon Mme Thomas-Greenfield, soutenir les réfugiés et les pays qui les accueillent est l’un des moyens les plus rapides auxquels l’ONU peut recourir pour démontrer son engagement. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a indiqué que toute discussion sur la situation humanitaire doit être guidée par deux principes fondamentaux: la protection des civils innocents et la poursuite judiciaires pour les crimes de guerre.  Nous avons tous la responsabilité de mettre fin aux souffrances en Ukraine, a ajouté la déléguée, en rappelant la contribution de près de 400 millions de livres sterling de son pays à la réponse humanitaire en Ukraine. Elle a aussi précisé que son pays a garanti le prêt d’un milliard de dollars de la Banque mondiale à l’Ukraine.  Rappelant les centaines de milliers de civils pris au piège à Marioupol en raison du refus par Moscou de leur évacuation en toute sécurité, la déléguée a relayé l’appel du Secrétaire général pour une pause humanitaire dans les zones de conflit les plus touchées.  Elle a dénoncé la brutalité de l’offensive de la Russie, ainsi que « l’obscénité » de l’occupation russe.  La libération de Boutcha, d’Irpin, de Tchernihiv, de Borodyanka et de nombreuses autres villes des forces russes a révélé les atrocités innommables commises par ces dernières: « L’Ukraine est maintenant une scène de crime », a conclu la déléguée, en demandant que justice soit faite. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a commencé par relater le parcours d’un petit garçon de 3 ans, opéré hier à Lviv après avoir été victime avec sa famille des tirs de roquettes russes sur cette ville de l’ouest de l’Ukraine.  Ils avaient quitté Kharkiv pour échapper aux pilonnages russes et seul le garçonnet a survécu aux bombardements qui ont fait sept morts à Lviv, a-t-il indiqué.  « On pourrait se demander dans quelle mesure la tentative d’assassinat d’un enfant pourrait protéger les populations du Donbass des néo-nazis, mais on se heurterait aux mensonges russes visant à justifier l’injustifiable. »  Le représentant a ensuite noté que le Président Putin a accordé hier à la 64e brigade d’infanterie motorisée de l’armée russe le titre honoraire de « brigade de garde », en hommage à son héroïsme, son courage et sa ténacité.  Cette brigade, a-t-il rappelé, devait initialement saisir Kiev avant d’être déployée à Boutcha en mars, mois qui s’est transformé en « mois de la terreur » pour la population locale.  Les soldats de cette brigade, dont plusieurs ont été identifiés, se sont rendus coupables d’atrocités, a accusé le délégué, avant de dénoncer le pillage systématique auquel ces hommes se sont aussi livrés lors de leur retrait, « y compris de toilettes », article dont « un quart des foyers russes ne disposent pas », notamment en zone rurale.  Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, alors que la bataille du Donbass fait rage, les forces russes continuent de ne faire aucune distinction entre les civils et les militaires.  Selon lui, la situation est encore plus grave à Marioupol, où des milliers de civils se sont réfugiés dans l’usine Azovstal assiégée par les forces russes.  Il faut les évacuer de toute urgence et les Russes le savent, mais ils s’opposent à l’ouverture de couloirs d’évacuation et continuent de bombarder la ville, s’est indigné le représentant, non sans dénoncer des « méthodes abjectes ». 

Après avoir appelé le Conseil de sécurité à tout faire pour sauver ces vies, « otages des intentions sanglantes et belliqueuses de Putin », le délégué s’est félicité des efforts déployés sur le terrain par l’ONU, notamment des actions conjointes menées par le PAM et le HCR pour qu’une assistance en espèces soit fournie aux personnes déplacées les plus démunies et aux retraités.  Il a aussi salué l’aide apportée par les agences onusiennes pour délocaliser les productions ukrainiennes et remercié tous les États qui accueillent généreusement des réfugiés.  Il a toutefois souhaité que, compte tenu de l’ampleur de la crise humanitaire, le volume de l’aide progresse plus rapidement pour répondre aux besoins croissants.  Il a d’autre part signalé la présence, dans les territoires contrôlés par les Russes, de « camps de filtration et de torture », où seraient maintenus « au moins 20 000 Ukrainiens », dont des enfants, avant d’être envoyés dans des régions « déprimées » de la Russie, où des documents leur sont remis leur interdisant de quitter les lieux pendant une période de deux ans.  Pour le représentant, de telles actions peuvent être qualifiées d’enlèvements et nécessitent une réaction de la communauté internationale.  Alors que 12 millions d’Ukrainiens ont quitté leurs foyers et que beaucoup n’ont nulle part où aller, il importe, selon lui, que l’ONU garantisse, à terme, le retour sûr des personnes déplacées.  Mais il faut, en premier lieu, que davantage soit fait pour mettre en place des couloirs humanitaires malgré l’obstruction russe, a-t-il réaffirmé, avant de regretter que les réunions à répétition du Conseil de sécurité n’aient aucune incidence, ni sur la ligne de front ni sur la situation humanitaire.  « Êtes-vous prêts à reléguer le rôle du Conseil à celui de forum de débats? » a-t-il demandé, jugeant essentiel de « régler la question de la présence douteuse de la Russie, qui empêche le Conseil de s’acquitter de sa responsabilité première ».  Il n’y aura pas d’évolution rapide de la situation sans réponse à cette question, a-t-il conclu, estimant que la Russie doit être arrêtée « pour la paix et pour les Ukrainiens de par le monde ». 

Mme ANNA KARIN ENESTRÖM (Suède), qui s’exprimait aussi au nom des pays nordiques – Danemark, Norvège, Finlande et Islande, a commencé par saluer le travail « remarquable » du HCR et de l’OIM, en martelant que ceux qui ont pris la décision de mener cette guerre en Ukraine en portent la lourde responsabilité.  Elle a plaidé pour un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave, en particulier s’agissant des zones les plus touchées par le conflit et celles qui risquent d’être encerclées, en citant notamment Marioupol et Kharkiv, où cet accès se négocie toujours au cas par cas.  Regrettant que le principal obstacle à l’acheminement de l’aide sont les frappes russes sur des zones civiles, la déléguée a appelé les deux parties à respecter leurs obligations pour autoriser et faciliter cet accès dans l’est du pays et dans d’autres parties difficiles à toucher, en soulignant à nouveau la responsabilité particulière de la partie qui « envahit ».  Les pays nordiques appuient les efforts du Coordonnateur des secours d’urgence en vue d’un cessez-le-feu humanitaire, a dit Mme Eneström, qui a également insisté sur l’importance de tenir compte des besoins spécifiques de toutes les personnes vulnérables, en évoquant notamment le cas des femmes qui ont décidé de rester en Ukraine et sont exposées à des risques de violence sexiste et sexuelle.  Les personnes âgées qui sont dans l’incapacité de quitter en font également partie, a-t-elle poursuivi.  En dernier lieu, la représentante a exigé le respect du droit international humanitaire, en martelant qu’à aucun moment les civils ne sauraient être pris pour cible et que les infrastructures civiles doivent être protégées.  Elle a également dénoncé la violence sexuelle qui « ne peut être tolérée ».  La représentante a donc exigé l’établissement des responsabilités pour ces crimes graves, arguant que la désinformation et le déni ne permettront pas d’y échapper. 

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a dénoncé les crimes de guerre et violations flagrantes du droit international humanitaire (DIH) observés en Ukraine.  Face à l’ampleur de la crise humanitaire marquée par sept millions de déplacés, le représentant a indiqué que son pays a consacré 20 millions de dollars à la Croix-Rouge (CICR) et à l’appel d’urgence des Nations Unies en faveur de l’Ukraine.  Il a précisé que l’Italie accueille des réfugiés ukrainiens depuis 2014 et que 250 000 Ukrainiens y vivent aujourd’hui.  Il a rappelé que la crise des réfugiés ukrainiens est avant tout une crise de femmes et enfants qui représentent 90% des effectifs fuyant l’Ukraine.  « Les témoignages de violence et de viols par les troupes russes sont particulièrement dérangeants », a indiqué le représentant, avant de souligner que la lutte contre l’impunité doit être garantie.  Il a jugé indispensable une cessation immédiate des combats et un retrait des forces russes de tout le territoire internationalement reconnu de l’Ukraine. 

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a souligné la gravité de la situation humanitaire en Ukraine depuis le début de l’invasion russe.  Il a indiqué que les frontières de son pays sont ouvertes « à tous ceux fuyant les atrocités russes ».  Près de trois millions de personnes, de toutes nationalités, se sont réfugiées en Pologne, a déclaré le délégué, en précisant qu’un tel accueil suppose des efforts conséquents.  S’il a assuré de la solidarité de son pays envers les Ukrainiens, il a demandé un appui international afin d’alléger les souffrances.  « Il faut coordonner nos efforts. »  Il a demandé concrètement l’appui de l’ONU aux efforts de la Pologne pour venir en aide aux Ukrainiens.  Le délégué a ensuite détaillé la lutte menée contre la traite des êtres humains afin de protéger les réfugiés.  La communauté internationale doit en faire davantage pour répondre aux défis de la guerre russe en Ukraine, a-t-il conclu, en annonçant la tenue prochaine d’une conférence des donateurs. 

Au nom des pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie) M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a constaté que la Fédération de Russie mène sa guerre d’agression dans une « indifférence cynique » à l’égard de ses conséquences humanitaires pour l’Ukraine et le reste du monde.  Alors que les forces russes ciblent indistinctement les personnes et les infrastructures civiles, des milliers d’Ukrainiens, dont des centaines d’enfants, sont tués et blessés.  Des civils sont également torturés, victimes de violences sexuelles et sommairement exécutés, s’est-il indigné, estimant que ces faits « font écho aux pires crimes du siècle dernier, que l’ONU est censée prévenir ».  Saluant la solidarité des voisins immédiats de l’Ukraine à l’égard de ceux qui fuient, le délégué a indiqué que les trois pays baltes continuent d’aider les quelque 110 000 réfugiés qui ont atteint leur territoire, parmi lesquels une grande majorité de femmes et d’enfants.  Cette aide combinée, fournie par les États mais aussi par d’innombrables individus, entreprises et organisations de la société civile, s’élève à 66 millions d’euros, a-t-il précisé, avant de rappeler que l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie contribuent à l’appel humanitaire éclair des Nations Unies et sur le plan régional de réponse pour les réfugiés, continuent de soutenir le travail du CICR et s’efforcent de remédier au risque de traite des êtres humains.  Le délégué s’est ainsi dit préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants ukrainiens auraient été déplacés vers des « camps de filtration » puis vers la Russie, souvent sans leurs parents. 

Appelant la Fédération de Russie à accorder immédiatement aux acteurs humanitaires un accès complet, sûr et sans entrave à Marioupol et aux autres villes assiégées, le représentant a également exigé qu’un passage sûr permette aux civils de quitter volontairement et en toute sécurité les zones touchées par le conflit vers la destination de leur choix.  Il a par ailleurs exprimé le soutien des pays baltes aux travaux de la Commission d’enquête des Nations Unies sur l’Ukraine ainsi qu’à ceux menés dans le cadre du Mécanisme de Moscou de l’OSCE, tout en appuyant le Bureau du Procureur de la CPI dans son enquête concernant des allégations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis en Ukraine.  Toutefois, a-t-il dit, nous ne pouvons pas oublier que, pendant que ces enquêtes sont en cours, de nombreux civils continuent d’être pris pour cible par la Russie en Ukraine chaque jour.  L’attaque russe contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières convenues au niveau international doit cesser maintenant, a-t-il martelé en conclusion, affirmant défendre « l’humanité contre la brutalité ». 

M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie) a rappelé les nombreuses séances du Conseil de sécurité tenues depuis le 24 février pour faire face à l’agression russe en Ukraine.  Préoccupé par la dégradation de la situation humanitaire dans ce pays, il a notamment déploré le nombre de civils blessés et tués.  En tant que pays voisin, la Slovaquie est particulièrement inquiète par la crise de réfugiés provoquée par l’agression russe, a dit le représentant en indiquant avoir accueilli 345 000 réfugiés depuis le début de la crise. Il a fait savoir que les enfants ukrainiens y sont même scolarisés.  La Slovaquie reste solidaire de l’Ukraine, a-t-il affirmé en demandant à la Fédération de Russie de mettre immédiatement fin à cette agression.  La Slovaquie appelle à un règlement pacifique de ce conflit, a précisé le représentant en encourageant la voie de la négociation.  Avant de conclure, il a souhaité qu’à l’occasion de la Pâque orthodoxe les parties puissent tomber d’accord sur l’ouverture de couloirs humanitaires. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: Le Forum de la jeunesse s’ouvre sur des appels à agir pour intégrer les jeunes dans les décisions au plus haut niveau et ainsi avancer vers 2030

Session de 2022, Forum de la jeunesse,
Réunion virtuelle - matin
ECOSOC/7075

ECOSOC: Le Forum de la jeunesse s’ouvre sur des appels à agir pour intégrer les jeunes dans les décisions au plus haut niveau et ainsi avancer vers 2030

Alors qu’un « nuage invisible » plane au-dessus des jeunes, comme l’a exprimé la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, il faut agir urgemment pour intégrer concrètement les jeunes dans les prises de décisions en vue de forger un avenir durable, ont plaidé en chœur les participants au Forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme Jayathma Wickramanayake en tête, en sa qualité d’Envoyée spéciale pour la jeunesse.  Le Forum, qui se tient sur deux jours en format virtuel, se concentre sur la reprise après la COVID-19 mais examine aussi les conséquences de la crise climatique, des crises que subissent en particulier les jeunes, notamment en matière d’emploi.

Avec 19 000 participants en 2021, le Forum de la jeunesse attire chaque année plus de monde, s’est réjoui le Président de l’ECOSOC, M. Collen Vixen Kelapile.  Il a rappelé que les fruits de ce rassemblement alimenteront le forum de haut niveau pour le développement durable, en juillet prochain.  Les cinq axes de discussion de ces deux forums sont les « ODD » (objectifs de développement durable) 4 (éducation de qualité), 5 (égalité des sexes), 14 (vie aquatique), 15 (vie terrestre) et 17 (partenariats pour les objectifs).

« J’ai peur que nous répétions les mêmes choses », a toutefois prévenu Mme Amina Mohammed en réitérant qu’il faut passer des paroles à l’action.  Puisqu’il faut agir, M. Kelapile a proposé de donner la priorité à « six actions » pour avancer dans les domaines suivants: des vaccins pour tous contre la COVID-19, des systèmes de santé et de protection sociale plus solides, des outils pour lutter contre l’insécurité alimentaire croissante et la hausse des prix de l’énergie, des investissements dans la technologie, des sociétés pacifiques et inclusives, et enfin des politiques et stratégies transformatrices.  Le tout pour accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la réalisation des ODD, afin d’assurer une reprise durable et inclusive.  

Le Forum de la jeunesse de l’ECOSOC est une occasion unique de rassembler les jeunes pour tirer profit de leurs expériences, a salué le Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, M. Abdulla Shahid.  Il est crucial d’entendre davantage la voix de la jeunesse, a renchéri l’Envoyée de l’Union africaine (UA) pour la jeunesse, Mme Chido Mpemba en vantant les mérites des politiques et mesures prises dans le cadre de la Charte de la jeunesse de l’UA.  Elle a suggéré aux États africains de ratifier ladite charte, de nommer des jeunes dans les organes de gouvernance de l’UA et, au niveau national, de nommer des « conseillers à la jeunesse ».

Les orateurs des deux tables rondes de la matinée ont témoigné de leurs efforts pour faire entendre ces jeunes, notamment dans les instances gouvernementales.  La Présidente du Forum de l’Union interparlementaire de la jeunesse a signalé qu’en Égypte, 20% des élus ont moins de 37 ans.  Mais les jeunes ne constituent encore que 6% à 8% des membres des parlements du monde, a-t-elle dit pour justifier le lancement d’une campagne visant à intégrer plus de jeunes dans les parlements et à faire baisser l’âge de la participation politique.  Justement, l’Autriche a baissé l’âge de la majorité légale à 16 ans et mis en place, il y a 10 ans déjà, un système qui soumet les nouvelles lois à « l’aval » de la jeunesse avant leur promulgation, a signalé la Secrétaire d’État pour la jeunesse de ce pays.  L’Union européenne a consacré 2022 « année de l’inclusion des jeunes », a-t-elle aussi rappelé.

Ce souci d’inclusion et de « ne laisser aucun jeune sur le côté » a été au cœur de toutes les interventions, au premier rang Mme Michele Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui a plaidé en particulier pour que soient protégés les jeunes militants des droits humains qui font face à des attaques et des formes de harcèlement dans plusieurs pays.  Une militante pour la justice climatique, des Philippines, a quant à elle alerté sur le manque de participation des jeunes aux décisions sur le sujet des changements climatiques.  « Je veux un monde où les enfants pourront toujours consommer du poisson frais, où ils pourront bénéficier de l’environnement dont je profite aujourd’hui et où ils pourront jouir des droits fondamentaux dont je jouis aujourd’hui », a-t-elle harangué.

Les autres domaines où l’inclusion et l’autonomisation des jeunes est particulièrement demandée sont l’éducation et les droits sexuels et reproductifs.  On doit donner aux jeunes les moyens de faire entendre leurs préoccupations pour ce qui est de l’autonomie de leurs corps, a réclamé la représentante de Youth Coalition for Sexual and Reproductive Rights, tandis que le responsable de l’Institut mexicain de la jeunesse a signalé une politique mexicaine qui lutte contre les grossesses précoces et qui permet aux jeunes de prendre des décisions librement.

L’Envoyée spéciale Jayathma Wickramanayake a précisé que 500 millions d’enfants et de jeunes du monde n’ont pas, aujourd’hui, accès à l’éducation, soit un étudiant sur huit, a relevé Mme Bachelet.  Plusieurs intervenants ont milité pour améliorer cette situation, dont le Représentant de la jeunesse de Hongrie qui a mis l’accent sur l’importance de l’utilisation de la langue maternelle dans l’éducation primaire.

La matinée a été entrecoupée par un intermède artistique avec la lauréate du concours des jeunes poètes 2020 des États-Unis, Mme Meera Dasgupta, qui a déclamé, en vers, son œuvre intitulé « C’est à nous de sauver la terre ».

Le Forum de la jeunesse se poursuivra demain, mercredi 20 avril, par différents segments informels avant la séance plénière de l’après-midi, à 16 heures.

FORUM DE LA JEUNESSE DE 2022

« Relèvement post-COVID-19: la mobilisation de la jeunesse pour un avenir durable »

Déclarations liminaires

Dans son discours d’ouverture du Forum de la jeunesse 2022, M. COLLEN VIXEN KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a dit que la tâche la plus urgente consiste à remédier aux inégalités à travers le monde, qui ont été clairement exposées par cette pandémie.  Une pandémie qui a également touché de manière disproportionnée les jeunes, à travers des perturbations sans précédent dans l’éducation et le marché du travail.  Avant de citer six actions à entreprendre, le Président de l’ECOSOC a exhorté les jeunes à contribuer aux cinq objectifs de développement durable (ODD) qui seront examinés en profondeur lors du forum politique de haut niveau pour le développement durable, en juillet, à savoir l’ODD 4 (éducation de qualité), l’ODD 5 (égalité des sexes), l’ODD 14 (vie aquatique), l’ODD 15 (vie terrestre) et l’ODD 17 (partenariats pour les objectifs). 

S’agissant des six actions, il a d’abord cité l’urgence de mettre les vaccins contre la COVID-19 à la disposition de tous, partout, en tant que bien public mondial, sans aucune discrimination.  Il s’est inquiété à cet égard des faibles taux de vaccination dans les pays en développement, en particulier en Afrique.  Il a ensuite souligné la nécessité d’avoir des systèmes de santé et de protection sociale plus solides, ainsi que des infrastructures suffisantes pour vaincre la pandémie et renforcer la résilience nécessaire pour prévenir et être en mesure de mieux réagir à de futures pandémies similaires, voire pires.  Le Président de l’ECOSOC a aussi plaidé pour que l’on s’attaque à l’insécurité alimentaire croissante et à la hausse des prix de l’énergie, avant de recommander des investissements dans la technologie afin que les jeunes, en particulier les plus pauvres et les plus vulnérables, puissent profiter des opportunités offertes par la numérisation.  Il a estimé que le Sommet de l’éducation, qui aura lieu en septembre, offre une occasion idéale de discuter de ce défi.  Enfin, il a souligné l’importance de favoriser des sociétés pacifiques, justes et inclusives, exemptes de peur et de violence, et la nécessité de disposer de politiques et de stratégies solides et transformatrices qui accéléreront la mise en œuvre du Programme 2030 et la réalisation des ODD, afin d’assurer une reprise durable et inclusive.  

M. ABDULLA SHAHID, Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, a jugé indispensable d’intégrer les jeunes dans la lutte contre la perte de biodiversité, la lutte contre les changements climatiques, la riposte à la pandémie de COVID-19 et, d’une manière générale, la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a estimé que le Forum de la jeunesse de l’ECOSOC est une occasion unique de rassembler les jeunes pour tirer profit de leurs expériences.    

Le Modérateur du segment d’ouverture, M. SHERWIN BRYCE-PEASE, Chef de Bureau et correspondant aux Nations Unies de South African Broadcasting Corp, parlant depuis un studio au Siège de l’ONU, a rappelé les conséquences dévastatrices de la pandémie sur les jeunes avant de donner la parole à Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, intervenant depuis le même studio.  La Vice-Secrétaire générale a souligné les conséquences des crises actuelles (COVID-19, crise climatique) que subissent en particulier les jeunes, notamment en matière d’emploi.  Un nuage invisible se trouve au-dessus des jeunes, a-t-elle imagé en parlant aussi de leur santé mentale.  « Comment sortir de ces défis? »  Les jeunes doivent être au premier plan de la reconstruction, a recommandé Mme Mohammed en appelant à donner la priorité aux jeunes dans les programmes de reprise.  Elle a aussi conseillé d’inclure les jeunes dans la gestion des objectifs de développement durable (ODD). 

« J’ai peur que nous répétions les mêmes choses, alors nous devons passer des paroles à l’action, agir maintenant. »  Mme Mohammed a ainsi demandé de ne pas se contenter d’inviter les jeunes à la table mais aussi de les inclure dans la conception des programmes, faisant référence à ce que dit le Secrétaire général lui-même.  Mme Mohammed a plaidé pour que les jeunes soient de vrais décideurs politiques.  Combien de jeunes font partie de la bureaucratie? a-t-elle interrogé. Elle a assuré que l’ONU agit en ce sens et s’intéresse aux moyens qu’ont les jeunes de monter les échelons. 

Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a regretté que les jeunes aient trop peu l’occasion d’influer sur les décisions qui les concernent.  Illustrant son propos, elle a noté que seuls 3% des parlementaires dans le monde ont moins de 30 ans, que 500 millions d’enfants et de jeunes n’ont pas accès à l’éducation et que 42% des déplacés de force ont moins de 18 ans.  Elle a estimé que le Forum de la Jeunesse de l’ECOSOC devait être l’occasion de sensibiliser les décideurs sur la nécessité d’intégrer les jeunes à tous les processus de décision.  Répondant à une question sur la création d’emplois pour les jeunes, elle a dit que ces derniers veulent un emploi sain et propre, pas un emploi qui détruise la planète.  Après avoir mis l’accent sur l’importance du secteur privé pour créer les 10 à 12 millions d’emplois nécessaires annuellement pour les jeunes, elle a aussi attiré l’attention sur l’importance des financements accessibles aux jeunes qui souhaitent créer leur propre entreprise.  « Nous ne devons pas reproduire ce qui existe déjà » mais nous concentrer sur l’action, a insisté l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse.  

Mme CHIDO MPEMBA, Envoyée de l’Union africaine pour la jeunesse, a dit qu’avec sa Charte de la jeunesse, l’Union africaine (UA) ne part pas de zéro mais qu’elle a une politique encadrant les mesures prises ou à prendre par ses États membres dans le développement des jeunes.  Il nous faut continuer à la mettre en œuvre, a-t-elle plaidé, en particulier les dispositions stratégiques sur l’emploi sachant que plus de 10 millions de jeunes arrivent sur le marché du travail chaque année en Afrique alors que seulement 3 millions d’emplois sont disponibles.  L’Envoyée pour la jeunesse a aussi mis l’accent sur l’éducation, le développement des capacités, la santé et la sécurité pour les jeunes.  Elle a en revanche regretté le fait que certains États africains n’aient pas ratifié cette charte.  Mme Mpemba a également souligné l’importance de la participation des jeunes au processus de décision sur les questions les concernant.  Il faut, de manière générale, entendre davantage la voix de la jeunesse, a-t-elle recommandé.  Elle a suggéré aux États africains de nommer au niveau national des « conseillers à la jeunesse », de ratifier la Charte africaine de la jeunesse et de nommer des jeunes dans les organes de gouvernance de l’UA. 

Mme MARINEL UBALDO, militante en matière de justice climatique aux Philippines, a rappelé les conclusions du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui soulignent les actions nécessaires et urgentes à mener pour éviter la catastrophe climatique.  Avertissant que la fenêtre de tir est de plus en plus réduite, elle a craint que les membres de sa communauté aux Philippines ne soient plus là en 2050.  « Je veux un monde où les enfants pourront toujours consommer du poisson frais, où ils pourront bénéficier de l’environnement dont je profite aujourd’hui et où ils pourront jouir des droits fondamentaux dont je jouis aujourd’hui », a harangué la militante. 

« Jeter les bases: ne laisser aucun jeune sur le côté »

« Un étudiant sur huit n’a pas accès à l’éducation ou la formation à travers le monde », a regretté Mme MICHELE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (OHCHR), avant de rappeler que les jeunes, qui sont des moteurs de l’espoir, ont besoin d’espace pour pouvoir influer sur les processus de décision.  La Haute-Commissaire a plaidé en particulier pour que soient protégés les jeunes militants des droits humains qui font face à des attaques et des formes de harcèlement dans plusieurs pays. 

Mme SHIVANGI AGRAWAL, représentante de Youth Coalition for Sexual and Reproductive Rights, s’est inquiétée des conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les capacités des jeunes.  Elle a souhaité que l’on donne aux jeunes les moyens de faire entendre leurs préoccupations pour ce qui est de l’autonomie de leurs corps.

« Jeunes et COVID-19: reconstruire en mieux après les crises actuelles et futures » 

Cette première table ronde de la matinée, animée et modérée par M. ZUBAIR JUNJUINIA, Responsable du Global Partnership for Education Young du Royaume-Uni, devait répondre à la question de savoir comment le monde va relever les défis multiples liés à la pandémie de COVID-19 et d’autres crises tout en assurant l’autonomie et la participation des jeunes.   

L’inclusion des jeunes est la clef, a indiqué Mme CLAUDIA PLAKOHLM, Secrétaire d’État pour la jeunesse d’Autriche qui a rappelé que l’Union européenne a consacré 2022 « année de l’inclusion des jeunes ».  En Autriche, a ajouté la Ministre, le Gouvernement a mis en place, il y a déjà 10 ans, un système qui soumet les nouvelles lois du pays à « l’aval » de la jeunesse avant leur promulgation.  En outre, l’âge légal est passé de 18 ans à 16 ans s’agissant de la participation politique, a dit Mme Plakohlm en faisant observer qu’ainsi, les politiques se tournent de plus en plus vers les jeunes.  Le Gouvernement autrichien est prêt à façonner notre avenir avec les jeunes, a-t-elle témoigné.  

Interrogée sur le rôle que peuvent jouer les parlements nationaux pour inclure les jeunes, Mme SAHAL ALBAZAR, Présidente du Forum de l’Union interparlementaire de la jeunesse, a d’abord regretté que les jeunes ne constituent que 6% à 8% des membres des parlements du monde.  Puis elle a annoncé le lancement d’une campagne visant à intégrer plus de jeunes dans les parlements et à sensibiliser sur la nécessité de diminuer l’âge de la participation politique.  En Égypte, a indiqué la Présidente, 20% des élus ont moins de 37 ans.  Le Gouvernement de ce pays consacre 6% du budget national à l’éducation comme recommandé par l’UNICEF, y compris la formation numérique, sans compter les efforts consacrés à améliorer le secteur de l’emploi et l’accès à la sécurité sociale.  L’oratrice a insisté sur le fait que les parlements sont un élément clef dans lesquels les jeunes doivent siéger. 

Que recommandez-vous pour que les jeunes ne soient pas laissés sur le côté? a lancé le modérateur.  M. ALI FAYEZ, cofondateur de « Youth Consensus for Peace », Afghanistan, a d’emblée condamné l’attentat qui a coûté la vie à 20 étudiants afghans aujourd’hui.  Ensuite, il a appelé à l’union et à la solidarité pour faire barrage à la peur et au désespoir.  Un terrain d’entente est plus que jamais nécessaire en lieu et place de l’exclusion, a-t-il conseillé avant de demander à mettre en valeur les jeunes des pays en conflits comme en Afghanistan, en Iraq ou en Syrie.  Le jeune responsable a vivement encouragé à prendre les bonnes décisions pour éviter un chaos mondial, recommandant des actions collectives au niveau mondial pour que le Programme 2030 ait plus d’impact. 

Comment faire pour mobiliser les fonds en faveur de la jeunesse?  À cette question relative aux partenariats (ODD 17), Mme KLAUDIA SZYMUŚ, Attachée de liaison à « Sexual and Reproductive Health and Rights Issues, incl. HIV and AIDS at the International Federation of Medical Students’ Associations (IFMSA) », en Pologne, a dit que son organisation mène des projets auprès des jeunes pour renforcer leur capacité à se mobiliser sur la question de la COVID-19.  Il est également essentiel, à son avis, de prendre des mesures qui tiennent compte de leurs compétences et qui ont des impacts dans les domaines des droits sexuels, de la violence sexiste, de la communication et des changements climatiques.  Les jeunes doivent être en première ligne sur ces questions, a-t-elle avisé.  

Au Mexique, a indiqué à son tour M. GUILLERMO RAFAEL SANTIAGO RODRIGUEZ, Directeur général de l’Institut de la jeunesse, le Gouvernement a augmenté le budget consacré à la réalisation du Programme 2030, en particulier sur l’égalité entre les sexes (ODD 5).  Il a révélé que 56% des programmes pour réaliser les ODD visent l’égalité entre les sexes et l’accompagnement psychosocial dont 76% des bénéficiaires sont des jeunes femmes et des jeunes ruraux.  Le Gouvernement mexicain a également mis en place une politique nationale contre la grossesse précoce sur laquelle tous les jeunes peuvent s’appuyer pour prendre des décisions librement. 

Un intermède artistique était au programme de cette première matinée du Forum de la jeunesse, ce qui a permis aux participants d’entendre Mme MEERA DASGUPTA, lauréate du concours des jeunes poètes 2020, États-Unis, déclamer, en vers, son œuvre intitulé « C’est à nous de sauver la terre ».

« Jeunesse et COVID-19: réaliser le Programme 2030 avec les jeunes, pour les jeunes et par les jeunes »

La modératrice, Mme NAFESHA RICHARDSON, fondatrice de « Spark SVG », Saint-Vincent-et-les Grenadines, a tout d’abord rappelé le retard pris dans la réalisation du Programme 2030 avant de demander à ses invités de partager leurs idées et leurs solutions afin de combler les lacunes dans la mise en œuvre des ODD 14, 15 et 17 respectivement relatifs à « la vie aquatique », « la vie terrestre » et « les partenariats pour la réalisation des ODD ». 

Protégez les récifs coraliens des mers des Caraïbes afin de protéger la vie sur cette planète, a d’abord supplié Mme YURSHELL RODRÍGUEZ, militante du climat de l’ONG Raizal, en Colombie.  Il faut aussi protéger les modes de vies autochtones, a-t-elle plaidé exigeant une représentation équitable des jeunes autochtones et leur participation au processus de décision politique.  Elle a informé que les jeunes de Colombie, en particulier les jeunes autochtones, participent à des programmes de restauration de l’écosystème de l’Amazonie et de l’écosystème marin.  

Que fait l’Égypte pour que les jeunes deviennent le moteur du changement? a ensuite demandé la modératrice à M. ASHRAF SOBHI, Ministre de la jeunesse et des sports de l’Égypte.  Celui-ci a répondu que l’expérience de la jeunesse égyptienne est incorporée dans la Vision 2030 du Président Abdel Fata al-Sissi.  Cette vision est axée notamment sur les ODD 3 et 4 (bonne santé et bien-être; éducation de qualité), a précisé le Ministre encourageant les jeunes à mener une vie saine et à faire du bénévolat.  Il a cité la Stratégie nationale de la jeunesse 2022-2027, qui vient d’être lancée et qui encourage à l’innovation notamment dans l’intelligence artificielle et la participation au marché du travail.  Le sport est un chemin pour parvenir à la paix et à l’harmonie, a aussi fait remarquer le Ministre. 

Nous donnons aux jeunes hongrois la possibilité de participer à des conférences internationales, a déclaré pour sa part Mme ZSÓFIA RÁCZ, Vice-Secrétaire d’État pour la jeunesse de Hongrie avant de donner la parole à M. DOMOKOS KOVÁCS, représentant de la jeunesse de Hongrie auprès des Nations Unies.  Cette pratique donne de la motivation aux jeunes et leur donne l’occasion de présenter leurs visions du monde, a dit le représentant qui a jugé important de montrer l’exemple et de travailler avec eux.  Il a souligné la nécessité de recueillir des données sur les jeunes parce qu’elles aident à trouver des solutions, au niveau local et régional, en matière d’économie circulaire et de soutien aux minorités linguistiques.  Le jeune délégué a, à cet égard, mis l’accent sur l’importance de l’utilisation de la langue maternelle dans l’éducation primaire.

S’agissant toujours des partenariats (ODD 17) et du rôle des associations de jeunes, M. MAX TREJO, Secrétaire général de l’Organisation internationale de la jeunesse ibéro-américaine (OIJ), a réitéré l’importance de placer les jeunes au cœur des solutions visant à combler le retard dans la réalisation du Programme 2030.  Les jeunes sont la solution et nous avons un plan, qui rassemble le continent américain, visant à autonomiser les jeunes en matière de compétences et de droit.  Le plan couvre les domaines de la justice, de l’environnement, de la santé mentale, de la compétence numérique, afin de placer les jeunes du côté de la solution.  Les jeunes doivent être au centre de la transformation écologique et numérique, a-t-il insisté.  

Enfin, Mme SELMA BICHBICH, jeune militante du climat, de l’Algérie, a souligné la nécessité de faire confiance aux idées des jeunes afin de créer un avenir meilleur.  Pour y arriver, elle a préconisé l’autonomisation des jeunes parce que c’est une bon moyen pour orienter les pays vers un avenir meilleur.  Ils ont les idées pour améliorer notre région mais ils ne sont pas pris en compte, a expliqué la militante. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: L’Envoyé spécial salue l’entrée en vigueur d’une trêve au Yémen, véritable « lueur » après sept années de guerre 

9017e séance, matin
CS/14862

Conseil de sécurité: L’Envoyé spécial salue l’entrée en vigueur d’une trêve au Yémen, véritable « lueur » après sept années de guerre 

Le Yémen entrevoit une « lueur » au bout du tunnel, avec la signature début avril d’une trêve renouvelable de deux mois, a déclaré, ce matin, devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial pour le Yémen, M. Hans Grundberg, en précisant que cette trêve pour l’instant « tient ».  Les délégations ont salué ce développement positif, tout en s’inquiétant d’une situation humanitaire qui demeure critique, comme l’a rappelé le Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths. 

À l’entame de son propos, l’Envoyé spécial a précisé qu’il s’agit de la première trêve nationale en six ans et qu’elle vise notamment à améliorer la liberté de mouvement des marchandises et des civils.  Il y a des signes encourageants que l’arrêt des escalades cycliques est possible, s’est-il félicité.  Il a aussi mentionné la diminution de la violence, le fait qu’aucune frappe aérienne n’ait été recensée depuis la signature de la trêve ou bien encore la réouverture de l’aéroport de Sanaa.  

M. Grundberg s’est cependant dit inquiet des informations faisant état d’opérations militaires aux alentours de Mareb et a relayé la crainte de la population yéménite que la trêve ne soit exploitée pour préparer le terrain pour une nouvelle escalade.  Une peur légitime étant donné le manque de confiance, a argué M. Grundberg, qui a encouragé les parties à s’engager sérieusement auprès des mécanismes de coordination de la trêve établis par son bureau.  « La trêve est fragile. » 

L’Envoyé spécial a aussi mentionné les récentes consultations du Conseil de coopération du Golfe (CGC) à Riyad pendant lesquelles la nécessité de renoncer à une solution militaire a été soulignée.  Il a enfin salué le transfert du pouvoir exécutif à un Conseil présidentiel réunissant les principales forces politiques du Yémen.  « Il s’agit d’une étape importante vers la stabilité et un règlement politique inclusif », a affirmé M. Grundberg, en conclusion d’une intervention à la tonalité résolument optimiste. 

Cet optimisme a été partagé par les délégations qui ont salué ces développements aussi positifs « qu’inattendus », selon l’expression du Brésil.  « Les parties yéménites doivent saisir la fenêtre d’opportunité que constitue cette trêve pour arriver à un règlement politique », a déclaré le représentant de l’Inde.  Le Gabon a, lui, appelé à faire fond sur cet élan pour favoriser le processus de réconciliation nationale, tandis que la déléguée du Royaume-Uni a salué « les efforts phénoménaux » déployés par l’Envoyé spécial pour aboutir à cette trêve. 

« Nous espérons que cette étape contribuera à une solution politique », a déclaré le délégué des Émirats arabes unis, avant de se rallier à l’appel lancé par l’Arabie saoudite pour que le Conseil présidentiel entame à cette fin des négociations avec les houthistes sous l’égide de l’ONU.  Le délégué a enjoint ces derniers à « sérieusement » participer aux efforts en cours pour mettre fin à la guerre.  Les parties prenantes régionales et internationales doivent éviter d’exploiter la situation pour servir leurs propres intérêts, sous peine de saper les progrès accomplis, a-t-il averti.  

De son côté, l’Irlande a jugé profondément regrettable qu’aucune femme ne soit incluse parmi les huit membres du Conseil présidentiel, y voyant une nouvelle occasion manquée de garantir aux femmes yéménites la place qui leur revient à la table des négociations.

Nombre de délégations se sont par ailleurs inquiétées de la situation humanitaire qui demeure critique dans le pays.  Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, a en effet rappelé que des millions de personnes au Yémen ont encore un besoin vital d’aide humanitaire, avant d’estimer à 4,3 milliards de dollars la somme nécessaire pour aider 17,3 millions de personnes à travers le pays.  

Il a en revanche jugé extrêmement bienvenu le nouveau dépôt de 2 milliards de dollars à la Banque centrale du Yémen, réparti entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, notant que le rial a récupéré 25% de sa valeur depuis cette annonce, rendant la nourriture et d’autres biens essentiels plus abordables.  M. Griffiths s’est aussi félicité du large soutien dont bénéficie la nouvelle proposition de l’ONU de remplacer le pétrolier SAFER et, entre-temps, de transvaser le pétrole dans un navire temporaire, précisant que ce travail pourra commencer en mai, à condition de réunir les 80 millions de dollars nécessaires.

Dernier orateur à s’exprimer, le délégué du Yémen a indiqué que son gouvernement a fait de nombreuses concessions afin d’atténuer les souffrances humaines et de mettre fin à la guerre imposée par les milices terroristes houthistes.  Il a précisé que le Conseil présidentiel travaillera à la réalisation d’une paix juste et durable, dans le cadre du processus conduit par l’ONU.   C’est un conseil de paix, non de défense, dont l’objectif est de défendre la souveraineté du pays, a précisé le représentant. 

Ce dernier a également appelé le Conseil de sécurité à accentuer sa pression sur ces milices pour qu’elles s’engagent dans le processus de paix mené par l’ONU pour mettre fin à la guerre.  Il a aussi engagé la communauté internationale à maintenir le Yémen en tête de ses priorités humanitaires, en particulier à la lumière de la hausse importante des prix des denrées alimentaires et du carburant.

 

 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial pour le Yémen, a déclaré qu’il y a une « lueur » au bout du tunnel au Yémen, avec l’entrée en vigueur, le 2 avril 2022, d’une trêve de deux mois renouvelable, négociée avec chacune des parties sous l’égide des Nations Unies.  Il s’agit de la première trêve nationale en six ans et elle vise notamment à améliorer la liberté de mouvement des marchandises et des civils.  L’accord tient et offre une pause aux Yéménites, et il y a des signes encourageants que l’arrêt des escalades cycliques est possible, s’est-il félicité.  Il a aussi mentionné la diminution de la violence, le fait qu’aucune frappe aérienne n’ait été recensée depuis la signature de la trêve ou bien encore la réouverture de l’aéroport de Sanaa.  Les informations faisant état d’opérations militaires aux alentours de Mareb sont cependant préoccupantes et doivent être traitées de toute urgence à travers les mécanismes établis par la trêve.  Il a également signalé que de nombreux Yéménites craignent que la trêve ne soit exploitée et utilisée pour préparer le terrain pour une nouvelle escalade.  Une peur légitime étant donné le manque de confiance, a argué M. Grundberg, qui a encouragé les parties à s’engager sérieusement auprès des mécanismes de coordination de la trêve établis par son bureau.

L’Envoyé spécial a ensuite précisé que les pétroliers ont désormais accès au port de Hodeïda et insisté sur la nécessité de reprendre les vols depuis et à destination de l’aéroport de Sanaa, jugeant en outre impératif d’ouvrir des routes à Taëz.  Il a remercié le Gouvernement et Ansar Allah d’avoir fait les compromis nécessaires pour parvenir à cet accord et les a exhortés à mettre en œuvre tous les éléments de la trêve, avant de saluer le rôle fondamental joué par l’Arabie saoudite et Oman pour appuyer les négociations, de même que les acteurs de la société civile.  

Soulignant que la trêve demeure fragile, M. Grundberg a appelé à redoubler d’efforts au cours des prochaines semaines pour éviter qu’elle ne s’effrite.  Il a indiqué que des progrès ont été réalisés pour ce qui est de l’échange des prisonniers et a exhorté les parties à se mettre rapidement d’accord sur les détails de leur libération.  Il a aussi mentionné les récentes consultations du Conseil de coopération du Golfe (CGC) à Riyad pendant lesquelles la nécessité de renoncer à une solution militaire a été soulignée.  De même, M. Grundberg a salué le transfert du pouvoir exécutif à un Conseil présidentiel réunissant les principales forces politiques du Yémen.  Il s’agit d’une étape importante vers la stabilité et un règlement politique inclusif, a-t-il affirmé.

Pour maintenir ce cap, les Yéménites doivent désormais s’approprier le règlement du conflit, a poursuivi l’Envoyé spécial, en assurant qu’il continuera ses consultations après le Ramadan.  Il a aussi appelé à remédier à la question du coût de la vie, ainsi qu’au défi sécuritaire dans le sud du pays.  M. Grundberg a enfin insisté sur la participation forte des femmes aux consultations ayant conduit à la trêve, laquelle offre une rare occasion pour le Yémen d’aller vers la paix.

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a dit son espoir de voir la trêve de deux mois en cours, ouvrir la voie à un avenir meilleur pour les Yéménites après des années de conflits.  Bien que des affrontements limités se poursuivent dans quelques régions, principalement à Mareb et à Taëz, les hostilités ont fortement diminué dans tout le pays, s’est-il félicité après avoir noté l’impact positif de cette trêve sur la situation humanitaire.  Il a observé que les pertes civiles sont tombées à leur niveau le plus bas depuis des mois et que davantage de navires de carburant parviennent à Hodeïda.  Il a précisé que la trêve vise également à faciliter la circulation des personnes, des biens et de l’aide humanitaire en assurant la reprise des vols commerciaux depuis l’aéroport de Sanaa et en travaillant à la réouverture des routes à Taëz et dans d’autres régions.   

Par ailleurs, il a jugé extrêmement bienvenu le programme de soutien économique de 3 milliards de dollars annoncé lors des récentes consultations yéménites convoquées par le Conseil de coopération du Golfe.  Il a précisé que ce montant comprend un soutien au carburant, une aide au développement et, surtout, un nouveau dépôt de 2 milliards de dollars à la Banque centrale du Yémen -réparti entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis- qui contribuera à stabiliser la monnaie.  Il a noté que le rial a récupéré 25% de sa valeur depuis cette annonce, rendant la nourriture et d’autres biens essentiels plus abordables.  En outre, il s’est félicité du large soutien dont bénéficie la nouvelle proposition de l’ONU de remplacer le pétrolier SAFER et, entre-temps, de transvaser le pétrole dans un navire temporaire.  Ce travail peut commencer en mai, si nous pouvons réunir les 80 millions de dollars nécessaires, a-t-il précisé.  Il a également espéré que le Conseil présidentiel permettra de résoudre les problèmes de fragmentation qui ont parfois créé des obstacles pour les agences humanitaires.

Malgré ces espoirs, le Chef de l’OCHA a rappelé que des millions de personnes au Yémen ont encore un besoin urgent d’aide humanitaire pour rester en vie et que les agences d’aide recherchent 4,3 milliards de dollars pour aider 17,3 millions de personnes à travers le pays.  Il a ajouté que la conférence de bailleurs de fonds pour le Yémen du 16 mars a permis de recueillir 1,3 milliard de dollars en promesses de dons, et que 300 millions de dollars du Royaume d’Arabie saoudite ont été annoncés depuis.  Mais il nous faut encore davantage, a-t-il indiqué, avertissant du risque sérieux que des programmes essentiels de distribution de vivres, d’eau et d’appui aux personnes déplacées, ne soient contraints de limiter leur portée. 

Enfin, il a regretté que deux membres du personnel de l’ONU sont toujours détenus par les houthistes cinq mois après leur arrestation à Sanaa, précisant que les efforts se poursuivent également pour obtenir la libération de cinq membres du personnel de l’ONU enlevés par des hommes armés à Abyan en février.  Il a regretté cette tendance dangereuse, exhortant à la libération de ces personnes.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a tout d’abord félicité M. Grundberg pour ses « efforts phénoménaux » qui ont débouché sur cette trêve au Yémen.  Elle s’est aussi réjouie que les parties aient pris des mesures de renforcement de la confiance afin de maintenir cet arrêt des combats.  Il faut maintenant progresser rapidement vers la libre circulation du carburant et des marchandises, la reprise des vols et la tenue de négociations politiques, a-t-elle plaidé.  La représentante a salué les efforts déployés par l’Arabie saoudite, le Conseil de coopération du Golfe et le Gouvernement du Yémen pour engager une réforme politique dans le pays, jugeant à cet égard que la formation du Conseil présidentiel constitue une « étape cruciale ».  Elle a également félicité le Président Hadi pour avoir facilité le transfert pacifique du pouvoir.  Nous espérons que le Conseil présidentiel pourra s’atteler rapidement à des négociations politiques avec les houthistes et nous appelons ces derniers à continuer de dialoguer avec l’Envoyé spécial de l’ONU, a-t-elle ajouté. 

Alors que des progrès se font jour sur le plan politique, il est crucial que la communauté internationale aide à alléger la crise humanitaire, a poursuivi Mme Woodward, non sans regretter que la conférence de l’ONU pour les annonces de contributions n’ait permis de lever qu’un tiers du financement nécessaire.  Elle a donc applaudi le versement par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis d’une aide d’un montant de 3 milliards de dollars, destinée à relancer et soutenir l’économie yéménite.  Saluant également l’apport de 300 millions de dollars du royaume saoudien pour l’assistance humanitaire, elle a appelé tous les donateurs à décaisser rapidement des fonds afin d’éviter que les agences procèdent à de nouvelles coupes dans leurs programmes.  Enfin, la déléguée a souhaité qu’à la faveur de la trêve, la « bombe à retardement » que constitue le pétrolier SAFER puisse être désamorcée.  Elle a apporté son appui aux efforts du Coordonnateur résident, M. David Greasly, et a exhorté la communauté internationale, notamment les partenaires régionaux, à faire de même.    

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a salué la trêve de deux mois négociée par l’ONU, qui offre une occasion précieuse d’alléger les souffrances humanitaires des Yéménites et d’améliorer la stabilité régionale.  Il s’est également félicité de l’engagement pris d’autoriser l’entrée des cargos de carburant dans le port de Hodeïda et de reprendre les vols commerciaux à destination et en provenance de Sanaa, ainsi que d’ouvrir des axes routiers importants dans plusieurs provinces.  Il a exhorté toutes les parties à continuer à respecter pleinement leurs engagements envers la trêve et à s’engager auprès de l’Envoyé spécial et de son processus de consultation. 

Le représentant s’est ensuite félicité de la première réunion, en début de semaine, de l’Envoyé spécial et les houthistes, des pourparlers yéménites organisés par le Conseil de coopération du Golfe qui se sont terminés la semaine dernière, et de la récente décision du Président Hadi de former un nouveau Conseil présidentiel.  Il a espéré que cela donnera une nouvelle orientation aux efforts collectifs visant à trouver une solution véritablement inclusive au conflit et à construire un Yémen pacifique et prospère pour les générations futures.  Le représentant a cependant jugé profondément regrettable qu’aucune femme ne soit incluse dans ce conseil de huit membres, y voyant une autre occasion manquée de garantir aux femmes yéménites la place qui leur revient à la table des négociations.  Il s’est par ailleurs félicité de constater qu’une solution durable et à long terme semble enfin à portée de main pour le pétrolier SAFER. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a salué la trêve de deux mois au Yémen, une première étape importante pour réduire le niveau de violence, alléger les souffrances du peuple yéménite et poser les bases d’une confiance entre les parties.  Le représentant a noté les progrès accomplis depuis le 2 avril, s’agissant notamment de l’allègement des restrictions d’accès au port de Hodeïda et de l’aéroport de Sanaa.  Il a encore salué les efforts du Conseil de coopération du Golfe, et notamment ceux de l’Arabie saoudite, qui ont permis de former un Conseil présidentiel réunissant un grand nombre d’acteurs yéménites.  Il s’agit d’une étape importante vers la restauration d’un État au service de tous les Yéménites et engagé dans le processus politique, a apprécié le délégué avant d’appeler les houthistes à maintenir cette dynamique positive et à contribuer de manière constructive au processus de paix.  

Constatant que les violations graves des droits humains persistent, le délégué s’est aussi inquiété de la menace de famine à grande échelle qui risque de s’aggraver par la perte des approvisionnements en provenance d’Ukraine et l’augmentation des prix qui en résulte.  Il a aussi demandé la libération immédiate des cinq membres du personnel des Nations Unies enlevés récemment dans le sud du Yémen.  La protection des civils, y compris des personnels humanitaires, ainsi que des infrastructures civiles, est une obligation qui s’impose à tous, a-t-il martelé avant de demander un plein accès humanitaire à l’ensemble des personnes dans le besoin.  S’agissant du pétrolier SAFER, le délégué a salué l’élaboration par les Nations Unies d’un plan coordonné de réponse.  La France sera au rendez-vous lors de la conférence des donateurs prévue à ce sujet en mai prochain, a promis le représentant qui a annoncé une contribution à la réponse humanitaire à hauteur de 14,45 millions d’euros pour 2022.  Il a conclu en soulignant que les conditions sont réunies pour transformer la trêve en cessez-le-feu durable, assorti d’un plan de paix, appelant les acteurs yéménites et régionaux à saisir cette opportunité et à coopérer pleinement avec l’Envoyé spécial afin de parvenir à une solution politique inclusive et durable. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a pris note d’une vision plus optimiste de la situation au Yémen marquée par la trêve nationale de deux mois convenue entre les parties.  Il a estimé que ce développement positif offre un répit nécessaire à la guerre exténuante, allège le fardeau humanitaire et crée un environnement propice pour renforcer les processus politiques en vue d’une solution au conflit.  Il a ajouté que le transfert de pouvoir du Président Hadi au Conseil présidentiel nouvellement créé le 7 avril 2022 est un acte positif et important dans la recherche d’une solution politique globale et inclusive qui maintienne ensemble toutes les composantes de la société yéménite.  Cependant, il s’est inquiété que les femmes yéménites n’aient toujours pas la place qui leur revient dans les efforts déployés pour trouver une solution au conflit.  Alors que les femmes sont touchées de manière disproportionnée par le conflit, le représentant a jugé indispensable qu’elles puissent jouer un rôle dans son règlement.  

Le représentant s’est par ailleurs félicité de la réouverture de l’aéroport de Sanaa et du port de Hodeïda pour des vols commerciaux limités, ainsi que pour les importations commerciales et l’aide humanitaire.  Enfin, il s’est félicité de la signature du mémorandum d’accord avec les autorités de Sanaa pour faire face de manière permanente à la menace de pollution du pétrolier SAFER.  Il a notamment salué les dispositions prévoyant de décharger les 1,1 million de barils de pétrole sur un navire temporaire pour une durée de quatre mois, en attendant la recherche d’un navire de remplacement.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a félicité l’Envoyé spécial pour avoir négocié une trêve il y a deux semaines et qui se traduit déjà par une baisse du nombre de victimes.  Il a demandé aux parties de renouveler la trêve et d’en élargir la portée, y compris en rouvrant les routes vers Taëz et en facilitant davantage encore les mouvements des personnes et des biens.  La trêve est aussi l’occasion de renforcer la confiance et d’imprimer un élan vers un cessez-le-feu permanent et une solution politique inclusive, a dit le délégué.  Il a aussi salué la création d’un Conseil présidentiel, ainsi que la récente visite de trois jours effectuée par l’Envoyé spécial à Sanaa.  Il a exhorté les houthistes à observer et étendre la trêve en leur demandant en même temps de s’engager en faveur d’une solution politique.  Estimant que la situation humanitaire demeure critique, M. Costa Filho a appelé à remédier à ses causes profondes.  Il a par ailleurs salué les progrès enregistrés en ce qui concerne le pétrolier SAFER.  Enfin, le délégué a appelé à faire fond sur ces développements positifs et pour la plupart « inattendus » pour progresser sur la voie de la paix au Yémen.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) s’est félicité qu’un « élan positif » permette aujourd’hui de progresser vers la fin la guerre au Yémen.  Il a salué les efforts innombrables déployés pour parvenir à ce point, à commencer par les récentes consultations yéménites tenues sous les auspices du Conseil de coopération du Golfe, qui ont permis de dégager un consensus sur une feuille de route en vue d’une solution politique durable et globale.  Il s’est également réjoui de la décision du Président Hadi de former un Conseil présidentiel pour parachever la mise en œuvre de la phase de transition et lui déléguer entièrement les pouvoirs présidentiels.  Nous espérons que cette étape contribuera à une solution politique durable entre les parties yéménites, a-t-il dit, avant de se rallier à l’appel lancé par l’Arabie saoudite pour que le Conseil présidentiel entame à cette fin des négociations avec les houthistes sous l’égide de l’ONU.  A cet égard, il a renouvelé sa ferme condamnation des attaques terroristes transfrontalières menées par les houthistes contre des infrastructures civiles dans le Royaume.  

Le représentant a enjoint les houthistes à sérieusement participer aux efforts en cours pour mettre fin à la guerre au Yémen, et à cesser toutes leurs violations de la trêve, en particulier leur bombardement continu dans la province de Mareb.  Il a exhorté toutes les parties à travailler avec l’Envoyé spécial pour réaliser de nouveaux progrès dans la mise en œuvre des mesures de confiance, y compris les échanges de prisonniers et la réouverture des routes menant à la ville de Taëz, et à travailler à transformer la trêve temporaire en une cessation permanente des hostilités militaires.  Le représentant a également invité les parties prenantes régionales et internationales à éviter d’exploiter la situation pour servir leurs propres agendas ou des intérêts étroits.  Cela risquerait d’inverser les progrès accomplis, a-t-il averti.  

Sur le plan humanitaire, a poursuivi le délégué, les Émirats arabes unis, aux côtés de l’Arabie saoudite, ont promis 2 milliards de dollars pour soutenir la banque centrale du Yémen, ce qui va contribuer à redresser la valeur de la monnaie locale de manière significative et, par voie de conséquence, à alléger la pression sur les moyens de subsistance.  Avant de conclure, il a réitéré son soutien aux efforts déployés par les Nations Unies pour faire face à la situation du pétrolier SAFER.  Dans ce cadre, il a appelé les houthistes à honorer leurs obligations en vertu du récent accord avec l’ONU qui vise à éviter une grave catastrophe environnementale.  

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis), reconnaissant qu’aujourd’hui marque une chance pour la paix au Yémen, s’est félicitée de la visite de l’Envoyé spécial à Sanaa.  Les parties doivent continuer à négocier de bonne foi la réouverture des axes routiers vers Taëz, ce qui contribuera à réduire les blocages dans le flux de marchandises essentielles.  Elle s’est ensuite félicitée de la formation du Conseil présidentiel, ainsi que des récents pourparlers organisés par le Conseil de coopération du Golfe, qui ont fourni l’occasion d’un dialogue intra-yéménite.  Cette trêve ouvre une fenêtre d’opportunité pour une paix à long terme et durable, une paix dont le peuple yéménite a désespérément besoin, a-t-elle déclaré, exhortant les parties à respecter leurs engagements alors que certaines informations font déjà état d’affrontements.  Bien qu’il y ait lieu d’être optimiste, des millions de Yéménites souffrent des ravages du conflit dans leur pays, mais aussi de la « guerre choisie » par le Président Putin en Ukraine, qui a encore aggravé une situation déjà désastreuse.  En effet, a fait observer Mme Thomas-Greenfield, le Yémen fait partie des pays les plus gravement touchés par la hausse des prix du blé en raison de ce conflit, a-t-elle observé, y voyant un autre exemple des répercussions de l’« agression russe » sur les personnes vulnérables dans le monde.

M. DAI BING (Chine) a dit qu’après sept ans de guerre, l’espoir est à présent permis depuis l’annonce d’une trêve de deux mois.  Il a demandé aux parties yéménites de cesser les hostilités, notant que le cessez-le-feu reste fragile, exhortant à déployer tous les efforts nécessaires pour que la trêve se prolonge dans la durée.  Le conflit doit être réglé par les Yéménites eux-mêmes dans le cadre d’un processus politique sous la houlette du Conseil de coopération du Golfe, a ajouté le délégué.  Il a pris note de la formation d’un Conseil présidentiel et la visite, pour la première fois, de l’Envoyé spécial à Sanaa.  Cela insuffle un nouvel élan au processus politique, s’est-il félicité.  Toutes les parties yéménites devraient saisir cette occasion rare et aller dans la même direction pour que le dialogue puisse se poursuivre.  Le représentant a également prié les pays de la région de soutenir le dialogue et d’aider à alléger la crise humanitaire au Yémen.  Craignant une marée noire à cause de la situation du pétrolier SAFER, le délégué a demandé aux parties de coopérer activement avec les Nations Unies pour mettre en œuvre le plan de sauvetage du navire et éviter ainsi une catastrophe environnementale.  

M. AMARNATH ASOKAN (Inde) a appuyé tous les efforts visant à transformer la nouvelle trêve de deux mois en « cessez-le-feu digne de ce nom » afin, notamment, de faire cesser les attaques transfrontalières.  Il a souligné en effet que l’objectif final de cette trêve est d’arriver à une cessation permanente de tous les combats.  Il a jugé indispensable la participation des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, au processus de paix.  Il a par ailleurs espéré un renforcement de la confiance dans le domaine de l’échanges de prisonniers.

Le délégué a souligné l’importance des consultations entre Yéménites lancées à Riyad sous les auspices du Conseil de coopération du Golfe, qui viennent compléter les consultations lancées par l’Envoyé spécial.  Il a aussi salué le plan opérationnel des Nations Unies pour renflouer le pétrolier SAFER qui, selon lui, « s’appuie sur une démarche pragmatique ».  En conclusion, le représentant de l’Inde a exhorté les parties yéménites à saisir la fenêtre d’opportunité que constitue cette trêve pour arriver à un règlement politique qui permettra de mettre fin à ce conflit.

Mme ALLEGRA PAMELA R. BONGO (Gabon) a relevé que la situation sécuritaire et le climat politique au Yémen ont connu des développements significatifs qui sont de nature à entretenir l’espoir sur le chemin de la paix.  Elle a estimé que la trêve actuelle, entrée en vigueur le 2 avril 2022 pour une durée de deux mois renouvelable, négociée avec chacune des parties sous l’égide des Nations Unies, constitue une bonne étape vers le cessez-le-feu voulu par la communauté internationale et attendu par les populations civiles yéménites.  La levée des restrictions sur le carburant pendant la durée de la trêve constitue une autre étape clef, a déclaré la déléguée. 

Dans ce droit fil, elle a aussi salué l’amélioration du taux de change de 25%, les importantes promesses de dons enregistrées et la réouverture de l’aéroport de Sanaa.  Elle a également jugé encourageant l’accord des parties pour une rencontre sous les auspices de l’Envoyé spécial, afin d’ouvrir des routes à Taëz et dans d’autres provinces du Yémen.  La représentante a donc encouragé l’ensemble des protagonistes à s’appuyer sur cet élan pour asseoir une trêve effective et durable suivie, à terme, d’un cessez-le-feu permanent.  Enfin, elle a salué la signature de l’accord entre les Nations Unies et les houthistes visant à résoudre les menaces environnementale et humanitaire posées par le pétrolier SAFER, tout en demeurant « attentive » quant aux modalités de sa mise en œuvre.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a salué à son tour la trêve conclue au Yémen pour la première fois en six ans.  La situation est fragile mais cette trêve est un pas crucial dans la bonne direction, a-t-elle commenté, avant d’appeler les parties à saisir cette occasion pour instaurer la confiance.  Dans ce contexte, l’aide humanitaire au peuple yéménite touché par la crise est indispensable, a-t-elle souligné.  Elle a salué l’entrée récente de navires de carburant à Hodeïda, espérant que cela atténuera la crise du carburant dans le nord du Yémen.  C’est important pour les Yéménites, mais aussi pour les organisations humanitaires qui travaillent pour eux, a relevé la représentante, appelant également à la réouverture des routes menant à Taëz et la reprise des vols commerciaux à destination et en provenance de Sanaa. 

Réaffirmant qu’un règlement politique est le seul moyen de parvenir à une solution durable, la déléguée a encouragé toutes les parties à s’engager dans les efforts menés par l’ONU pour mettre fin au conflit.  À cet égard, elle a salué la visite effectuée par M. Grundberg à Sanaa, ainsi que les récentes discussions menées sous l’égide du Conseil de coopération du Golfe.  À ses yeux, la démission du Président Hadi marque un tournant dans la politique yéménite et la création du Conseil présidentiel constitue une avancée positive en vue de l’élaboration d’un processus inclusif.  Elle a toutefois regretté qu’il n’y ait pas de femmes dans ce nouvel organe, encourageant les efforts visant à renforcer leur participation directe, complète et significative.  Pour conclure, elle s’est réjouie qu’un nouveau plan ait été mis en place pour faire face à la menace environnementale que représente le pétrolier SAFER.  

M. FERIT HOXHA (Albanie) a observé que « cela fait longtemps que nous n’avons pas eu de bonnes nouvelles du Yémen, au point que le nom même de ce pays était devenu un synonyme de désespoir ».  Il a ensuite réitéré la position de son pays qui plaide pour un cessez-le-feu complet à l’échelle nationale.  Maintenant que les armes se sont tues, a ajouté le représentant, c’est le moment de commencer à penser qu’au Yémen, la paix et le développement peuvent aller de pair, et qu’il est possible d’œuvrer à une solution durable au conflit.  Seulement, les solutions viables aux conflits longs et prolongés exigent un processus politique inclusif, a souligné le délégué qui a réitéré son appel à un engagement total de toutes les parties auprès de l’Envoyé spécial.

Tous ces développements importants au bénéfice du peuple yéménite n’auraient pas été réalisés sans l’engagement audacieux du Conseil de coopération du Golfe d’accueillir les consultations entre les parties, a-t-il salué.  « Nous estimons que l’engagement de ce forum régional devrait être davantage encouragé afin de contribuer aux efforts actuels déployés par les Nations Unies pour mettre fin au conflit », a ajouté M. Hoxha.  Pour lui, il ne faut pas passer sous silence les sérieux défis qui subsistent.  La situation humanitaire est toujours dramatique et l’accès de l’aide aux populations en détresse doit être amélioré, de même que la situation des droits de la personne, a-t-il en particulier souligné.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a salué l’entrée en vigueur de la trêve pour une période de deux mois, qui prévoit, en particulier, la cessation de toutes les hostilités, y compris les frappes aériennes sur le territoire du Yémen et au-delà, ainsi que l’ouverture partielle de l’aéroport international de Sanaa et des ports de Hodeïda.  Il a exhorté les parties à respecter strictement les accords conclus et à abandonner les provocations.  La paix au Yémen n’est possible que sur la base d’un dialogue national fondé sur les intérêts et les préoccupations des principales forces politiques, groupes confessionnels et régionaux de ce pays.  Le délégué a pris note de la création du Conseil présidentiel qui est chargé de gouverner l’État pendant la période de transition dans les domaines politique, économique et militaire, ainsi que dans le domaine de la sécurité.  Les membres du Conseil présidentiel devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour stabiliser la situation au Yémen et ramener le pays à une vie paisible, a-t-il estimé. 

Le représentant a appelé les nouvelles autorités yéménites et les houthistes à s’engager dans un dialogue constructif et à retourner à la table des négociations afin d’établir un processus durable pour un règlement politique global sous les auspices de l’ONU, ainsi que pour normaliser la situation humanitaire au Yémen.  Il a aussi souligné la nécessité de lever complètement les restrictions à l’approvisionnement en médicaments et en biens essentiels dans toutes les régions du pays, sans discrimination.  Le délégué a par ailleurs protesté contre les déclarations de ses « homologues occidentaux » qui imputeraient à la situation en Ukraine l’aggravation de la crise alimentaire dans le monde, y compris au Yémen.  Ce sont les sanctions et les politiques énergétiques de ces pays qui provoquent la hausse des prix de l’énergie et la crise alimentaire dans le monde, a-t-il affirmé.

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a salué les efforts menés par l’Envoyé spécial en faveur de la trêve qui a débuté le 2 avril.  Il a estimé que cette première étape constitue une base importante pour la réconciliation et la pacification du pays.  Il a espéré que la suspension des hostilités pourra se prolonger au-delà de la période du Ramadan et se transformer en un cessez-le-feu national durable.  Tout en se félicitant qu’il n’y ait pas eu de frappes aériennes ou d’attaques transfrontalières depuis plus d’une semaine, il a regretté que des affrontements aient été signalés dans certaines villes telles que Mareb, Hodeïda et Taëz.  Le représentant a exhorté les parties à faire preuve de retenue et à s’abstenir de toute provocation afin de maintenir la trêve.

S’agissant du processus politique, le représentant du Mexique a salué la facilitation du Conseil de coopération du Golfe dans l’organisation des récentes consultations intra-yéménites.  Il a dit prendre note du transfert des pouvoirs et de la formation d’un Conseil présidentiel auquel participent des représentants de diverses factions.  Il a salué la formation d’une équipe du Conseil présidentiel chargée de participer aux négociations de paix avant d’insister sur l’importance pour les parties de continuer à coopérer au processus politique facilité par l’Envoyé spécial.  Rappelant que le conflit armé est l’une des principales causes de la grave crise humanitaire, le représentant a noté qu’il ne reste que peu de ressources pour répondre aux demandes les plus élémentaires des 23 millions de Yéménites.

M. MICHAEL KIBOINO (Kenya) s’est félicité des développements encourageants de ces dernières semaines au Yémen, saluant toutes les parties pour avoir accepté une trêve.  Il les a encouragées à respecter cet engagement.  Toutefois, les parties doivent être conscientes du fait que des décisions et des compromis difficiles sont nécessaires pour réaliser la paix durable tant attendue, a-t-il mis en garde.  Il a ensuite regretté qu’au cours des dernières années, le financement humanitaire destiné aux millions de Yéménites dans le besoin ait progressivement diminué alors que la situation s’est dans le même temps aggravée.  En effet, le manque d’environ 2,7 milliards de dollars dans le cadre de l’appel de fonds humanitaire a pour conséquence d’entraver considérablement certains programmes, a observé le représentant.  À cet égard, il a salué l’intervention de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, qui ont apporté un soutien économique d’un montant de 2 milliards de dollars à la Banque centrale du Yémen, ainsi que de 1 milliard de dollars pour des projets de développement et du carburant.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a assuré que le Gouvernement yéménite a choisi la paix comme moyen de mettre fin au conflit et promouvoir la sécurité, la justice, l’égalité et l’État de droit.  Pour ce faire, il a fait de nombreuses concessions afin d’atténuer les souffrances humaines et mettre fin à la guerre qu’ont imposée les milices terroristes houthistes, a souligné le représentant, selon lequel cette « sagesse » s’est exprimée au travers de la déclaration historique du Président Abd Rabbo Mansour Hadi, le 7 avril, annonçant la formation du nouveau Conseil présidentiel et le transfert de tous les pouvoirs à cet organe exécutif, qui représente un large éventail des composantes politiques du pays.  Ce conseil, a-t-il ajouté, fonctionnera sur la base du dialogue et du consensus et travaillera à la réalisation d’une paix juste et durable, dans le cadre du processus conduit par l’ONU et son Envoyé spécial.  À cette fin, il s’appuiera sur l’initiative du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et son mécanisme de mise en œuvre, ainsi que sur les résultats du dialogue national global et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, en particulier la résolution 2216 (2015).  

Exprimant la gratitude de son gouvernement pour les efforts déployés par le CCG, qui a accueilli les consultations intra-yéménites, le délégué a rappelé qu’à cette occasion, la porte est toujours restée ouverte aux milices houthistes pour qu’elles se joignent aux discussions.  Ces dernières ont cependant rejeté tous les appels au dialogue pour mettre fin à l’effusion de sang et parvenir à la paix, a-t-il déploré.  « Elles ont choisi de poursuivre la guerre pour atteindre leurs objectifs et, ainsi, de rester un outil entre les mains de l’Iran ».  Dans ce contexte, le délégué a précisé que le nouveau Conseil présidentiel agira comme « un conseil de paix et non un conseil de défense », avec pour objectif de défendre la souveraineté du pays et de protéger ses citoyens.       

Il a ensuite salué la trêve annoncée par l’Envoyé spécial, assurant que le Gouvernement yéménite en respecte les termes malgré les violations flagrantes des houthistes dans les provinces de Mareb, Hodeïda, Taëz et Dalea.  Il a dénoncé les attaques perpétrées par ces milices, y compris les tirs de missiles balistiques, poussant davantage de personnes à fuir et compliquant la situation humanitaire.  Selon lui, le Gouvernement a adhéré à toutes les dispositions de la trêve, notamment à l’entrée de pétroliers dans le port de Hodeïda et à la reprise des vols directs à l’aéroport de Sanaa, afin de contribuer à l’ouverture de points de passage et à la levée du siège de Taëz.  Cela étant, il a appelé le Conseil de sécurité à accentuer sa pression sur ces milices pour qu’elles consentent à cesser ce siège et à libérer des prisonniers, et s’engagent dans le processus de paix mené par l’ONU pour mettre fin à la guerre. 

Le représentant a ensuite salué le généreux soutien apporté par les pays « frères et amis », directement ou à travers le plan de réponse humanitaire, pour alléger les souffrances du peuple yéménite.  Il a cependant averti que l’aide ne parvient pas toujours à ceux qui en ont besoin, en raison du manque de financement des projets de secours ou des obstacles imposés par les houthistes qui la détournent.  Renouvelant son appel à la communauté internationale pour qu’elle maintienne le Yémen en tête de ses priorités humanitaires, en particulier à la lumière de la hausse importante des prix des denrées alimentaires et du carburant, il a également exhorté le Conseil à faire cesser la manipulation par les houthistes du dossier humanitaire.  De même, après avoir remercié l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis pour leur aide de 3 milliards de dollars dans les domaines économique et de développement, il a invité la communauté internationale à renforcer cet appui et à aider le Gouvernement à relancer l’économie nationale.  

Enfin, tout en affirmant que le Gouvernement soutient tous les efforts visant à remédier à la situation du pétrolier SAFER afin d’éviter une catastrophe environnementale, il a dénoncé l’attitude des houthistes qui utilisent cette situation comme d’une « carte de chantage politique », et ce, depuis trois ans.  Il importe donc, selon lui, de soutenir le financement du plan des Nations Unies, tout en maintenant la pression sur ces milices.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: des témoins de violences sexuelles liées au conflit en Syrie, Éthiopie et Iraq alimentent le débat sur l’impunité de ces crimes

9016e séance – matin & après-midi
CS/14860

Conseil de sécurité: des témoins de violences sexuelles liées au conflit en Syrie, Éthiopie et Iraq alimentent le débat sur l’impunité de ces crimes

Plus de 70 délégations ont participé aujourd’hui au débat public du Conseil de sécurité sur les violences sexuelles liées aux conflits, tenu sous la présidence du Ministre d’État du Royaume-Uni Tariq Ahmad De Wimbledon, sur le thème de « la responsabilité comme stratégie de prévention ».  La lauréate du prix Nobel de la paix, Mme Nadia Murad, a annoncé à cette occasion la création du « Code Murad » qui servira de directives pour la collecte d’informations et de preuves fournies par les survivantes de ce type de violence. 

La Secrétaire générale adjointe Pramilla Patten, Représentante spéciale chargée de cette question, a présenté le rapport annuel du Secrétaire général qui recense 3 293 cas confirmés de violences sexuelles commises en 2021 dans 18 pays.  Une augmentation de 800 cas par rapport à 2020, s’est-elle alarmée en soulignant l’importance de créer un environnement sûr qui, d’abord, fasse obstacle à la violence sexuelle et, si celle-ci se produit, permette un signalement et une intervention en toute sécurité.  

Que signifient pour les Ukrainiennes, les Afghanes, les Tigréennes et les femmes du Myanmar les 10 résolutions sur les femmes, et la paix et la sécurité, dont 5 portent sur la prévention des violences sexuelles dans les conflits, s’est interrogée Mme Patten.  Le droit international ne doit pas être une promesse vaine, a-t-elle sermonné en évoquant des témoignages terrifiants et des vidéos diffusées à travers le monde, notamment des viols perpétrés avec une arme sur la tempe ou des viols perpétrés en face des membres de la famille, « autant d’appels à agir ».  Elle a donc recommandé aux États Membres, à l’instar de nombreux orateurs de la journée, de mener des enquêtes rapides pour établir la responsabilité des auteurs, « un aspect central de la dissuasion, de la prévention et de la non-répétition de ces actes ». 

Les poursuites judiciaires qui découlent de ces enquêtes sont l’une des formes les plus visibles de la lutte contre l’impunité, a renchéri Mme Murad qui a salué la condamnation par un tribunal allemand d’un membre de Daech pour génocide, au titre de la compétence universelle.  Le moment est venu, selon elle, de traduire Daech en justice pour génocide et violences sexuelles devant la Cour pénale internationale (CPI) ou devant une cour hybride qui serait créée spécialement.   D’autres intervenants ont également été convaincus de la nécessité de saisir la CPI pour de tels cas, tandis que l’Ukraine a demandé des enquêtes transparentes et exhaustives sur tous les crimes commis en Ukraine, dont les crimes à caractère sexuel. 

En amont, Mme Murad a appelé à faire progresser l’égalité entre les sexes et à lutter contre les préjugés et les stéréotypes sexistes.  Cet engagement est à l’origine du « Code Murad », qui a été façonné en consultation avec des survivantes du monde entier et qui vise à promouvoir un plus grand respect, une meilleure compréhension, une transparence et une « guérison ».   Le Ministre d’État du Royaume-Uni a plaidé à ce propos pour que les survivantes soient au centre de tous les efforts de protection.  Cet appel à suivre « une approche fondée sur les survivants » a été relayé par de nombreux intervenants.  Dans le même sens, la Vice-Présidente et Ministre des affaires étrangères de la Colombie, Mme Marta Lucía Ramírez, a signalé une loi colombienne qui garantit aux victimes le droit à des réparations et un modèle de « justice à la porte » pour les femmes rurales.  

Diverses recommandations ont été adressées au Conseil de sécurité, notamment par la lauréate du prix Nobel qui l’a prié de créer un poste d’Envoyé spécial pour mettre fin aux souffrances des Yézidis en Iraq.  De son côté, Mme Patten a demandé au Conseil d’œuvrer en faveur de la prévention et de l’alerte précoce des menaces de violence sexuelle.  Plusieurs délégations ont, dans cet esprit, appelé le Conseil à intégrer la prévention de la violence sexuelle liée aux conflits dans tous les mandats qu’il élabore.  Les Émirats arabes unis, parmi d’autres, se sont dit favorables à ce que le Conseil inclue la violence sexuelle liée aux conflits comme critère de désignation d’individus et d’entités pour les sanctions. 

L’ONU doit aussi prévoir la présence de conseillers pour la protection des femmes dans les budgets des opérations de paix, en particulier pendant les processus de transition, a prescrit l’Irlande.  De plus, Mme Patten a appelé directement les États Membres à financer de manière adéquate le fonds d’affectation multipartite sur les violences sexuelles dans les conflits. 

Deux autres témoins des atrocités commises en termes de violence sexuelle en temps de conflit ont été entendus par le Conseil.  Mme Mariana Karkoutly, enquêtrice indépendante et cofondatrice de l’ONG syrienne « Huquqyat », a affirmé avoir récolté des témoignages de survivants de violences sexuelles, avant de parler aussi des 9 700 femmes arrêtées, détenues ou disparues de manière arbitraire en Syrie.  Mme Hilina Berhanu, de la société civile éthiopienne, a quant à elle témoigné des blessures liées aux violences sexuelles commises au Tigré depuis le début de la guerre dans cet État en novembre 2020.   Elle a dénoncé l’utilisation du viol de façon systématique comme tactique de guerre, pour purifier le « sang tigréen » et pour humilier les survivants et leurs communautés.  Outre l’Ukraine, l’Afghanistan, le Myanmar, la Syrie, l’Éthiopie et l’Iraq, d’autres pays où sont établis des cas de violences sexuelles liées aux conflits ont été cités par les participants à ce débat, notamment la République centrafricaine, la Somalie, la Colombie ou encore le Yémen. 

La lutte contre l’impunité a été au cœur des interventions, selon le thème du débat qui amenait à réfléchir aux moyens de faire porter la responsabilité de ces crimes.  Les États-Unis ont souligné la nécessité d’utiliser tous les outils diplomatiques pour que les responsables de ces violences ne jouissent d’aucune impunité.   La Norvège a appelé à renforcer les capacités des forces de l’ordre, de la sécurité et du secteur militaire, tant dans les opérations de paix des Nations Unies que dans les institutions nationales.  Le Kenya a proposé de placer la barre plus haut s’agissant de la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité.   Il faut des mesures dissuasives pour faire payer plus cher les actes de violence sexuelle liés à un conflit, a suggéré la délégation prônant en outre une coopération transfrontalière plus efficace entre le personnel de sécurité aux frontières, les mécanismes d’alerte précoce, les conseillers nationaux et régionaux pour la protection des femmes, afin de réduire au minimum les lacunes en matière de prévention et de signalement. 

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ.

La responsabilité comme stratégie de prévention.  Mettre fin aux cycles de violences sexuelles commises en période de conflit (S/2022/293)

Déclarations

Que signifient pour les Ukrainiennes, les Afghanes, les Tigréennes et pour les femmes au Myanmar les 10 résolutions sur les femmes, et la paix et la sécurité, a demandé d’emblée Mme PRAMILA PATTEN, Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, aux membres du Conseil de sécurité.  Cinq de ces résolutions portent sur les préventions des violences sexuelles dans les conflits, a précisé la Secrétaire générale adjointe avant de demander au Conseil de se laisser guider par les témoignages des rescapés pour trouver des solutions.  Mme Patten a regretté que deux ans après la pandémie, on assiste à une épidémie de coups d’État, avec des représailles contre la société civile, les militants des droits de la personne, les activistes et les journalistes qui militent contre les violences sexuelles et sexistes. 

Mme Patten a averti des effets en cascade des horreurs en Ukraine sur la stabilité du monde et sur l’économie internationale.   e droit international ne doit pas être une promesse vaine, a-t-elle ajouté.  Préoccupée des nombreuses allégations de violences sexuelles, elle a appelé à des enquêtes rapides pour établir la responsabilité des auteurs qui est un aspect central de la dissuasion, de la prévention et de la non-répétition de ces actes.  L’incapacité à reconnaître ou à enquêter sur ces atrocités est une garantie que ces violences vont se poursuivre, a dit en d’autres termes Mme Patten.  Selon elle, alors que tous les signaux d’alarme sont au rouge, les services de soins sexuels et génésiques ne sont plus disponibles.  Les témoignages terrifiants et les vidéos diffusées à travers le monde, notamment les viols perpétrés avec une arme sur la tempe ou les viols perpétrés en face des membres de la famille, sont autant d’appels à agir, a insisté la Secrétaire générale adjointe.

Présentant son rapport, elle a fait état de témoignages terribles qui sont autant d’appels à la justice comme en Éthiopie où 27 soldats ont violé et contaminé une jeune femme au VIH; en République centrafricaine où la violence sexuelle a doublé en une année; à Cox’s Bazar où 900 000 réfugiés rohingya vivent dans une crise au sein d’une crise; ou encore en Somalie, en Colombie, en Afghanistan, en Iraq, en Syrie et au Yémen.  Dans toutes ces situations, l’impunité est plus que flagrante, a dénoncé la Représentante spéciale regrettant le gouffre qui existe, et qui s’élargit, entre engagements et respect des résolutions. Les violences sexuelles sont utilisées comme tactique de guerre, de torture, de terrorisme et de répression politique.  Le rapport qui traite des situations dans 18 pays, recense 3 293 cas confirmés de violences sexuelles commises dans les conflits en 2021 soit 800 nouveaux cas par rapport à 2020.  Le principal message du rapport est la nécessité de favoriser un environnement sûr qui empêche la violence sexuelle en premier lieu et permet un signalement et une intervention sûrs.  Pour Mme Patten, le temps est venu de rendre inévitable le principe de responsabilité et de respecter les droits des personnes rescapées. 

Encouragée par des développements positifs en matière de justice transitionnelle au Guatemala, en Iraq, en Colombie et en Syrie en 2021, la Secrétaire générale adjointe a rappelé le lancement en juin de l’année dernière d’un modèle de lois portant sur les directives applicables aux enquêtes et aux poursuites contre les violences sexuelles et sexistes commises contre dans les cas de conflit.  L’objectif est de s’assurer que les législations nationales sanctionnent toutes les formes de violences sexuelles et protègent les individus à risque.  Il a aussi parlé des directives pour la mise en œuvre de la résolution 2467 (2019) qui appelle les États Membres à renforcer leur législation et à procéder à des enquêtes et des poursuites sur les violences sexuelles afin de garantir une justice accessible et axée sur les rescapées.  Mme Patten a également précisé que le principe de responsabilité, bien qu’important et indispensable, ne peut se substituer aux normes internationales.  Le rapport liste 49 parties suspectées de commettre ou d’être responsables de violence sexuelle dont 70% sont des auteurs de violence systématique inscrits à la liste depuis cinq ans.  L’inscription à la liste de sanctions devrait améliorer le respect du droit international, a insisté la Secrétaire générale adjointe. 

En conclusion, elle a recommandé des mesures pour renforcer la prévention et l’alerte précoce des menaces de violence sexuelle, ainsi que pour endiguer le flux d’armes légères et de petit calibre, garantir la réforme de la justice et du secteur de la sécurité, et faire entendre les voix des rescapés et des communautés touchées.  Il faut en outre renforcer la mise en œuvre de le résolution 1888 (2009), notamment ses dispositions sur l’Équipe d’experts sur l’état de droit et les violences sexuelles commises dans les conflits, l’action des Nations Unies contre les violences sexuelles dans les conflits ou encore les conseillers pour la protection des femmes.  Le fonds d’affectation multipartite sur les violences sexuelles dans les conflits devrait être financé de manière adéquate, a ajouté Mme Patten.  D’autres recommandations sont disponibles dans le rapport spécial sur les femmes et les conflits qui ont subi des grossesses en raison de violences sexuelles dans les conflits et sur les enfants nés de ces violences sexuelles qui a été distribué en janvier, a-t-elle aussi signalé. 

Mme NADIA MURAD, prix Nobel de la paix et ambassadrice de bonne volonté de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a constaté que chaque fois qu’un conflit armé éclate n’importe où dans le monde, « viols et brutalités s’ensuivent », comme c’est actuellement le cas en Ukraine.  La violence sexuelle n’est pas un effet secondaire du conflit, c’est une tactique de guerre aussi vieille que le monde lui-même, a-t-elle souligné.  Des organisations comme Daech ont compris l’effet déstabilisateur de la violence sexiste et nous devons en faire autant, a préconisé Mme Murad, qui a rappelé que la communauté yézidie à laquelle elle appartient a été prise pour cible par ce groupe en 2014. 

Elle a souligné que les poursuites judiciaires sont l’une des formes les plus visibles de la lutte contre l’impunité, a-t-elle rappelé, en se félicitant que, l’an dernier, un tribunal allemand ait condamné pour la première fois au monde un membre de Daech pour génocide.  Jugeant le moment venu de traduire Daech en justice pour génocide et violences sexuelles, elle a appelé à renvoyer l’affaire à la Cour pénale internationale ou à établir une cour hybride par traité pour poursuivre les crimes commis par ce groupe.  En attendant, d’autres nations devraient suivre l’exemple de l’Allemagne et utiliser le principe de la compétence universelle pour juger les criminels de guerre pour les atrocités qu’ils commettent, y compris la violence sexuelle.  Ces procès doivent se dérouler dans la transparence pour les survivants, qui méritent d’être entendus par les tribunaux, a plaidé la prix Nobel de la paix.  

Considérant que réparations et reconnaissance font partie intégrante de la justice, Mme Murad a rappelé qu’elle avait cofondé Global Survivors avec le docteur Mukwege, afin de fournir des réparations provisoires aux survivantes de violences sexuelles commises en période de conflit.  Elle a estimé que le Conseil de sécurité devrait créer un poste d’envoyé spécial pour mettre fin aux souffrances des Yézidis en Iraq, en vertu de la responsabilité morale de ne pas abandonner les rescapés du génocide.  Mais, a-t-elle ajouté, il ne suffit pas de parler de responsabilité et de prévention en temps de crise.  Des engagements à long terme sont nécessaires pour faire progresser l’égalité entre les sexes dans le monde, cruciale pour la démocratie.  À ses yeux, cela signifie lutter contre les préjugés et les stéréotypes sexistes partout où ils se manifestent: dans les foyers et les familles ainsi que dans les systèmes éducatifs.  Et cela signifie reconnaître que ce qui est vrai en temps de conflit est vrai en temps de paix: si nous voulons des communautés fortes et stables, nous devons écouter les femmes. 

C’est pourquoi Mme Murad a dit avoir hâte de rejoindre Lord Ahmad demain pour rendre officiellement public le Code Murad, un ensemble de directives visant à changer les normes relatives à la façon dont les journalistes, les enquêteurs et toute personne chargée de documenter et d’enquêter sur les violences sexuelles liées aux conflits interagissent avec les survivantes.  Ces directives, a-t-elle précisé, ont été façonnées en consultation avec des survivantes du monde entier et visent à promouvoir un plus grand respect, une meilleure compréhension, la transparence et la « guérison ».  La responsabilité peut être un élément crucial de la prévention - mais seulement si elle inclut une justice significative, des services, un soutien dont les survivantes ont besoin et l’objectif ultime de faire progresser l’égalité entre les sexes dans le monde. 

Mme MARIANA KARKOUTLY, cofondatrice de l’ONG Huquqyat, composée d’avocates et de juristes qui luttent pour la responsabilisation des auteurs de crimes en Syrie, a rappelé que ses concitoyens et concitoyennes vivent dans une situation de dictature depuis plus de 10 ans.  Une situation qui a engendré la mort de plus de 350 000 personnes, la détention arbitraire ou la disparition forcée d’une dizaine de milliers de personnes, le déplacement de près de 13 millions de personnes, en plus des 14 millions qui ont besoin d’aide humanitaire.  Les forces du Gouvernement syrien et les groupes armés continuent de mener une politique d’assassinat, de torture et de violences sexuelles et basée sur le genre contre la population civile, a-t-elle témoigné, regrettant que le Conseil de sécurité n’ait pas pris de mesures pour que les auteurs soient incriminés.  Elle a aussi déploré que des membres du Conseil aient empêché des actions urgentes en Syrie, déchargé le régime syrien de sa responsabilité et exercé à 16 reprises leur droit de veto contre les résolutions pour l’aide humanitaire et l’enquête sur l’utilisation d’armes chimiques contre la population civile. 

Rappelant que des violences sexuelles et basées sur le genre contre la population civile sont perpétrées à travers la Syrie depuis 2011, Mme Karkoutly y a vu un « élément dévastateur et omniprésent » du conflit syrien et des attaques systématiques contre les civils, « ce qui revient à des crimes contre l’humanité ». En tant qu’enquêtrice indépendante depuis 2020, elle a dit travailler avec le soutien du Centre syrien pour la justice et la responsabilité sur la constitution de dossiers contre les membres du « régime d’Assad » responsables des crimes contre la population civile.  À ce jour, a-t-elle indiqué, nous avons récolté 54 témoignages, notamment ceux de survivantes et survivants de violences sexuelles.  Selon elle, on estime qu’au cours des 10 dernières années, plus de 150 000 personnes ont été arrêtées, détenues ou ont disparu de manière arbitraire en Syrie et que pas moins de 9 700 femmes le sont encore.  Ces femmes - avocates, journalistes, activistes et autres - ont été détenues pour s’être opposées au régime, mais aussi souvent pour punir ou menacer les hommes dissidents de leurs familles, a expliqué la cofondatrice de Huquqyat.  Dans les centres de détention, les femmes ont fait face à toute sorte de violences sexuelles, y compris le viol, la torture, le harcèlement, les chocs électriques sur les parties génitales, les fouilles corporelles, les avortements forcés et la nudité, a-t-elle détaillé, avant de préciser que nombre des survivant(e)s de viols et de violences sexuelles en détention, estimé(e)s à plusieurs milliers, n’ont pas pu porter plainte contre ces crimes par peur d’être marginalisé(e)s ou puni(e)s encore plus sévèrement. 

La discrimination et la violence faite aux femmes et aux filles qui ont été détenues ont engendré l’abandon, le divorce, les soi-disant « crimes d’honneur » et le suicide, a poursuivi Mme Karkoutly, accusant le régime syrien d’avoir utilisé l’arrestation et la détention des femmes ainsi que la non-transmission d’information auprès de leur famille comme un « instrument clef dans la répression de l’opposition » depuis 2011.  De fait, a-t-elle souligné, le « régime » mène une politique où la violence basée sur le genre est utilisée comme « arme de guerre ». Ses exactions ont pu avoir lieu grâce à un système législatif corrompu et une discrimination contre les femmes et les filles omniprésente en Syrie, qui limite leur accès à l’immobilier, à l’achat de terrain, aux droits de propriété, à la garde de leurs enfants et à leur sécurité.  Par ailleurs, la violence faite aux femmes n’a pas seulement lieu en Syrie, mais aussi dans les camps, les sites et les villes dans toute la région.  Par exemple, a-t-elle noté, 80% des 60 000 personnes vivant dans le camp de Hol, dans le nord-est de la Syrie, sont des femmes et des enfants qui subissent une violence continue.  

Consciente que la responsabilisation domestique est impossible tant que le « régime d’Assad » est au pouvoir, Mme Karkoutly a exhorté tous les États Membres de l’ONU à poursuivre les responsables dans le cadre de la compétence universelle, comme ont commencé à le faire plusieurs pays européens.  Elle a également demandé au Conseil d’appeler le Gouvernement syrien à respecter le droit international, à mettre fin aux attaques contre les civils et les infrastructures civiles, à garantir un cessez-le-feu national permanent, à mettre fin immédiatement à la torture et à la violence sexuelle, et à libérer toutes les personnes détenues arbitrairement.  Elle a, enfin, appelé le Conseil à saisir la Cour pénale internationale (CPI), à adopter une résolution sur la situation des détenu(e)s et des personnes disparues qui démontre l’obligation du Gouvernement syrien, en droit international, à enquêter et engager des poursuites sur tous les coupables de violences sexuelles, ainsi qu’à garantir la participation entière, égale et significative des femmes dans tous les processus politiques, de paix et de réconciliation, et à s’assurer que la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles dans les situations de conflit l’informe régulièrement sur la pratique des violences sexuelles dont sont victimes les femmes et les filles en Syrie. 

Mme HILINA BERHANU, représentante de la société civile éthiopienne, s’est adressée au Conseil en tant que témoin des blessures liées aux violences sexuelles commises au Tigré, en tant que femme « qui porte la culpabilité de la survie et du silence ».  Aujourd’hui, a-t-elle dit, j’espère rendre justice aux millions de femmes éthiopiennes qui souffrent depuis le début (novembre 2020) de la guerre au Tigré et étendue aux régions voisines de l’Amhara et de l’Afar. 

Mme Berhanu a mis l’accent sur six points étayés par d’effrayants témoignages.  Premièrement, a-t-elle souligné, le viol a été perpétré systématiquement et utilisé comme tactique de guerre, étant conçu comme un moyen de représailles et utilisé comme un outil de liaison pour les membres des forces militaires alliées.  Elle a cité les cas de Blen, une serveuse de 21 ans de Badme, et d’une trentaine d’autres femmes tigréennes, qui ont été détenues contre leur gré et soumises à l’esclavage sexuel, à la famine et au viol collectif par un groupe de soldats érythréens et éthiopiens. 

Deuxièmement, la violence sexuelle est ethniquement motivée, a poursuivi l’intervenante en relevant des cas de viol avec des allégations de purification du « sang tigréen » et de mutilation de femmes pour empêcher la naissance de plusieurs générations de Tigréens, qui ont été couverts par différents rapports sur les droits humains.  Troisièmement, a dénoncé Mme Berhanu, la violence sexuelle est utilisée pour humilier les survivants et leurs communautés, étant souvent perpétrée devant des membres de la famille.  « Une femme amhara a été battue et violée en présence de son mari et de son enfant par deux membres des forces tigréennes.  Elle et son enfant ont vu son mari se faire tuer alors qu’il tentait d’arrêter l’agression. »  Des hommes et des garçons ont également été agressés sexuellement, a-t-elle encore ajouté. 

Quatrièmement, les femmes handicapées et d’autres communautés vulnérables ont été particulièrement exposées au cours de ce conflit, a témoigné la représentante de la société civile.  De nombreuses femmes handicapées ont été spécifiquement ciblées dans la région du Tigré pour avoir combattu lors de la guerre précédente.  Mme Berhanu a expliqué que le manque d’accès sur place a rendu difficile l’établissement des preuves des conséquences du conflit sur les communautés qui vivent dans des zones contestées à la frontière érythréenne, comme l’Irob et le Kunama au Tigré.  Cinquièmement, a-t-elle continué, le conflit dans le nord de l’Éthiopie et le siège effectif de la région du Tigré, en particulier, ont porté atteinte aux droits des femmes, y compris l’accès aux soins de santé génésique et au soutien psychosocial, amplifiant les effets de la violence sexuelle.  Mme Berhanu a raconté l’histoire de Kadija, une femme enceinte de neuf mois originaire de l’Afar, qui a fui la ville d’Aba’ala bombardée par les forces de défense tigréennes, avec ses cinq enfants et sa mère âgée.  «  Elle a accouché sous un arbre après avoir marché neuf jours. » 

Enfin, Mme Berhanu a attiré l’attention de la communauté internationale sur le sort des femmes d’autres communautés à travers l’Éthiopie, en particulier celles des Oromo, des Gumuz, des Konso, des Kimant, des Somali et de l’Ogaden, qui continuent de subir des violences sexuelles liées au conflit, y compris par les forces de l’État.  « Utilisez votre plateforme pour exiger que les efforts de documentation, d’enquête et de prévention des violences sexuelles dans les conflits soient centrés sur les survivants et menés de manière digne, sûre et confidentielle », a lancé en conclusion Mme Berhanu aux membres du Conseil de sécurité, « y compris les trois pays africains ».  Elle leur a demandé de défendre les travaux de la Commission internationale d’experts des droits de l’homme sur l’Éthiopie. 

Lord TARIQ AHMAD DE WIMBLEDON, Ministre dÉtat du Royaume-Uni pour l’Asie du Sud et centrale, l’Afrique du Nord, l’ONU et le Commonwealth, a salué le lancement du Code Murad, fruit de l’initiative de Nadia Murad et de « The Institute for International Criminal Investigations. »  Le Code Murad est un code international de conduite pour la collecte d’informations et de preuves fournies par les survivantes de violences sexuelles en temps de conflit, a-t-il déclaré, en appelant à suivre ce Code.  Il a ensuite plaidé pour que les survivantes soient au centre de tous les efforts de protection. Il a indiqué que son pays explore toutes les pistes pour un renforcement de l’action internationale dans ce domaine, y compris une nouvelle convention internationale.  Il a évoqué l’alarmante situation en Éthiopie et les allégations de violence sexuelle à grande échelle commise dans le Tigré notamment.  Le Gouvernement britannique a apporté une contribution de plus de 7 millions de livres sterling pour soutenir les survivantes dans le Nord de l’Éthiopie et améliorer l’établissement des responsabilités.  Il a salué la première condamnation prononcée à Coblence pour des faits de violence sexuelle commis en Syrie, avant d’apporter son soutien aux femmes afghanes qui font face à un niveau de violence parmi les plus élevés au monde.  « L’Islam est clair s’agissant de l’égalité des filles et des droits des femmes : nous continuerons de presser les Taliban sur cette question. »  M. Ahmad s’est enfin dit choqué par les « épouvantables témoignages » venus d’Ukraine.  Les allégations de viols et de violence sexuelle commis par les forces russes doivent faire l’objet d’une enquête approfondie, a-t-il dit, en souhaitant le renvoi de la situation en Ukraine à la CPI. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) s’est particulièrement inquiétée que les violences sexuelles continuent d’être utilisées comme tactiques de guerre visant à déstabiliser et briser des communautés partout dans le monde.  Elle a appelé les gouvernements à ne pas se contenter de dénoncer ces crimes mais de poursuivre en justice sans relâche tous les auteurs de violences sexuelles.  Les gouvernements au lieu de nier ces crimes doivent les reconnaître pour y faire face, a encore dit la représentante avant d’appeler à cesser d’intimider les victimes et de les réduire au silence.  Elle a aussi dit la nécessité d’utiliser tous les outils diplomatiques pour que les responsables de ces violences ne jouissent d’aucune impunité.  La poursuite et la condamnation des auteurs de ces violences sexuelles est le meilleur moyen de décourager les futurs crimes en renforçant l’état de droit, a-t-elle souligné. La représentante a aussi appelé à autonomiser les rescapées, les écouter et répondre à leurs besoins en leur fournissant les outils et appuis nécessaires, notant que la garantie de justice est le meilleur moyen de faire en sorte que les rescapées deviennent des vecteurs de la paix.  Enfin, elle a aussi dit la nécessité d’établir des systèmes d’alerte précoce et de ripostes sexospécifiques dans le cadre d’une approche centrée sur les rescapées. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a dit qu’elle est préoccupée par les rapports troublants de violences sexuelles commises contre les civils par les forces russes en Ukraine.  Alors que le Conseil discute encore de ce que signifie une approche globale, fondée sur les droits humains et centrée sur les survivants, il doit passer à la mise en œuvre effective, a exhorté la représentante qui a appelé à reconnaître les causes profondes des violences sexuelles et suggérer des mesures concrètes.  Elle a appelé à renforcer les capacités des forces de l’ordre, de la sécurité et du secteur militaire, tant dans les opérations de paix des Nations Unies que dans les institutions nationales, pour aider à renforcer les structures de responsabilité.  Il faut en outre s’attaquer aux inégalités structurelles et veiller à ce que les politiques et les plans d’action soient réellement utilisés. 

La représentante a aussi recommandé d’investir dans l’accès aux services de santé et juridiques, ainsi qu’à l’information louant les centres établis par le Fonds des Nations Unies pour la population notamment à Mossoul, en Iraq.  Elle a préconisé de placer les besoins des survivantes au centre des efforts afin de leur permettre de définir et concevoir ce qu’elles jugent être des mesures nécessaires pour la prévention, la protection et la responsabilité.  Elle a également insisté sur l’importance du financement et des ressources, dénonçant ensuite le manque de volonté politique, « l’éléphant dans la salle ».  Les États ont l’obligation d’agir conformément aux décisions du Conseil, a rappelé la déléguée insistant sur l’importance de la participation pleine, égale et significative des femmes comme une condition préalable à la paix et à la stabilité. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a considéré que le Conseil de sécurité doit faire davantage pour prévenir les violences dans les situations de conflit. Aussi sa délégation se félicite-t-elle de l’accent mis sur la prévention structurelle, le renforcement de la résilience et l’établissement des responsabilités dans le rapport du Secrétaire général de cette année.  La représentante a formulé plusieurs recommandations, la première étant de privilégier la réponse la plus efficace à la violence sexuelle et sexiste, à savoir la prévention, en s’attaquant aux causes profondes, notamment l’inégalité structurelle entre les sexes et les normes sociales préjudiciables.  Elle a aussi invité à poursuivre les auteurs pour qu’ils rendent des comptes dans le respect de l’état de droit, en renforçant la capacité des institutions nationales compétentes à cette fin dans les périodes post-conflit.  À la communauté internationale, elle a recommandé de tenir les groupes armés non étatiques responsables des violences sexuelles qu’ils ont perpétrées dans le cadre des conflits.  Les violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme exigent que justice soit rendue, a-t-elle insisté. Un outil puissant pour le Conseil de sécurité pour y parvenir est d’inclure la violence sexuelle liée aux conflits comme critère de désignation autonome pour les sanctions et de designer les individus et les entités chaque fois qu’ils sont responsables de la commission de tels actes, a fait valoir la représentante. 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) s’est alarmé de la persistance de la violence sexuelle, de même qu’une culture d’impunité, utilisée comme « tactique de guerre ».  Il a appelé les gouvernements nationaux à poursuivre la violence sexuelle en tant que crime à part entière.  À cette fin, l’ONU doit aider les autorités nationales à développer des capacités pour renforcer leurs cadres juridiques nationaux et structures d’enquête, particulièrement dans les situations post-conflit, a-t-il recommandé. Il a également estimé que les États Membres devraient adopter une approche centrée sur la prévention et la réponse à la violence sexuelle, conformément à la résolution 2467 (2019) qui vise à renforcer la justice et la responsabilisation. 

Poursuivant, le représentant a exhorté à briser les liens entre le terrorisme, la traite des personnes et la violence sexuelle dans les conflits armés.  De plus, le Conseil doit, selon lui, renforcer les régimes de sanctions et autres mesures ciblées pour utiliser pleinement son potentiel de dissuasion contre les auteurs de violences sexuelles dans les conflits armés.  Il a aussi invité les États Membres à prévoir un cadre propice à la participation et à l’inclusion des femmes dans la vie politique et les processus de prise de décision, faisant valoir à cet égard que l’Inde est passée de la féminisation du développement au développement dirigé par des femmes.  Nous préconisons ce principe pour atteindre une paix durable dans notre voisinage, y compris en Afghanistan, conformément avec la résolution 2593 (2021), a-t-il indiqué. 

M. LUIS GUILHERME PARGA CINTRA (Brésil) a jugé primordial de s’attaquer à la culture dominante de l’impunité en ce qui concerne les violences sexuelles commises en période de conflit en poursuivant les auteurs de tels crimes.  C’est aussi, comme le montre l’expérience, un outil important pour prévenir les scénarios horribles décrits dans les rapports à l’étude et de nombreux autres récits, a-t-il noté.  Pour le représentant, tous les signaux d’alerte sont au rouge.  Préoccupé par les allégations de violences sexuelles dans le conflit en Ukraine, il a réitéré ses appels à des enquêtes indépendantes urgentes et salué la participation d’experts d’ONU-Femmes qualifiés et expérimentés pour enquêter sur la violence, les abus et l’exploitation sexuels dans le cadre de la commission créée par le Conseil des droits de l’homme. 

Le Conseil de sécurité, a fait valoir le représentant, devrait répondre de manière appropriée à toutes les allégations de violences sexuelles dans les conflits inscrits à son ordre du jour.  Il s’agit de reconnaître le problème et de renforcer, le cas échéant, le mandat des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales afin de promouvoir « de véritables changements sur le terrain ».  Le délégué a cité en exemple la situation au Soudan du Sud où la violence sexuelle est utilisée comme arme de guerre.  Il a souhaité que le Conseil remédie de toute urgence au manque de financement qui l’empêche d’apporter une réponse satisfaisante et déployer suffisamment de conseillers pour la protection des femmes sur le terrain. 

Pour éliminer la cause des violences contre les femmes, il faut, a souligné M. BING DAI (Chine), régler les conflits par tous les instruments disponibles. Le représentant a insisté, à cet égard, sur l’importance de la lutte contre les groupes terroristes et de l’autonomisation des femmes, y compris leur participation pleine et entière aux efforts de maintien et de consolidation de la paix. Il a insisté  sur la souveraineté des pays en conflit, avant de saluer le courage de Mme Murad, rescapée de la violence sexuelle, et  d’évoquer le sort des femmes de réconfort en Asie de l’Est au siècle passé. Des milliers de femmes, d’origine chinoise, ont été réduites en esclavage sexuel par le Japon, a-t-il déclaré, déplorant les efforts de ce pays pour passer sous silence cette histoire tragique. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a appelé à donner la priorité à la prévention, invitant notamment le Conseil de sécurité à inclure celle-ci et la réponse aux violences sexuelles liées aux conflits dans la conception et le renouvellement des mandats des opérations de paix.  À cet égard, il a estimé que le déploiement de conseillers pour la protection des femmes s’est avéré très efficace pour garantir des informations rapides, précises et fiables sur ces violences.  M. Hoxha a ensuite appelé à améliorer la responsabilisation et à mettre fin à l’impunité par le biais d’institutions solides chargées de l’état de droit au niveau national.  Il a salué à ce propos le travail de l’équipe d’experts des Nations Unies sur l’état de droit et la violence sexuelle dans les conflits ainsi que les dispositions législatives types et les orientations sur l’enquête et la poursuite des violences sexuelles liées aux conflits, lancées par le Bureau du Représentant spécial chargé de ces questions.  Il a encouragé une approche plus coordonnée entre les États pour lutter contre l’impunité avant d’inviter le Conseil à intégrer la violence sexuelle comme critère spécifique des sanctions ciblées. 

Le représentant a plaidé pour la participation effective et sûre de la société civile, en particulier des organisations de femmes, dans les efforts de lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits, et ce à toutes les étapes, y compris la réparation et la réhabilitation.  Il a souligné le rôle crucial de ces organisations pour documenter les cas et appelé à protéger les femmes militantes, y compris les femmes défenseurs des droits humains, journalistes et artisans de la paix et celles qui travaillent directement sur ces violences.  En conclusion, il a exhorté les États Membres à être concrets dans toute la chaîne des étapes (prévention, protection, justice et réparation).  « Le cadre juridique ne vaut que s’il est mis en œuvre », a insisté M. Hoxha avant d’appeler à s’appuyer sur les récents récits de victimes de violences sexuelles en Ukraine comme un signal d’alarme.  « Aucun auteur ne doit rester impuni, ni en Ukraine, ni au Yémen, ni en RCA, ni au Kosovo. »

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a déploré les cas choquants en Éthiopie qui ne sont pourtant qu’un échantillon du recours généralisé et systémique à la violence sexuelle.  L’année prochaine, a-t-il prévenu, nous risquons de discuter des témoignages similaires en Ukraine, où des informations crédibles parlent d’une violence sexuelle généralisée.  Rappelant les résolutions du Conseil de sécurité, le représentant a estimé que la véritable lacune réside dans la mise en œuvre de ces textes sur des actes qui pourraient constituer un crime de guerre et un crime contre l’humanité.  Il a réclamé l’intégration de la prévention de la violence sexuelle liée aux conflits dans tous les mandats élaborés par le Conseil et celle des conseillers à la protection des femmes dans les budgets des opérations de paix, en particulier pendant les processus de transition.  Le recours à des sanctions ciblées  est également un outil important mais sous-utilisé dont dispose le Conseil, a dit le délégué, avant d’insister sur une approche qui place les victimes au centre.  De nombreux facteurs exacerbent la violence sexuelle liée aux conflits mais la cause fondamentale, a martelé le représentant, ce sont les inégalités entre les sexes. 

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a relevé que la multiplicité des conflits et des crises multiformes exacerbe l’horrible phénomène des violences sexuelles dont les femmes sont les premières victimes.  Ce constat aberrant exige des membres du Conseil de sécurité qu’ils se mobilisent pour mettre un point final au cycle des violences sexuelles liées au conflit.  Elle a appelé à l’établissement des responsabilités pour les auteurs de violences sexuelles en période de conflit, ainsi qu’à l’inclusion, la participation et le renforcement de la résilience des femmes.  En effet, leur engagement soutenu aux processus de prévention et de résolution des conflits et de relèvement post-conflit permettent non seulement de parvenir à une paix plus durable, mais aussi de rendre des décisions en matière de justice transitionnelle plus justes et adaptées aux préjudices subis par les victimes.  De même, il est fondamental de faciliter l’accès à la réparation, qui est un élément clef dans la restauration de la dignité des victimes.  La représentante a également préconisé une approche préventive globale adaptée aux situations sur le terrain en utilisant les moyens et mécanismes existants tels que le renforcement des capacités institutionnelles des États, la réforme du secteur de la sécurité et la sensibilisation des populations concernées. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a constaté que les abus sexuels et le viol sont utilisés, avec une fréquence sans précédent, comme une « arme de guerre », notamment en RDC et en Éthiopie, mais aussi en Afghanistan, au Myanmar, au Soudan et au Yémen, où des violences sexuelles ont été perpétrées contre des militants politiques.  Il a regretté qu’en dépit du cadre réglementaire existant, l’impunité continue d’être la norme et l’accès des victimes à la justice reste exceptionnel.  Pour y remédier, le représentant a recommandé de renforcer les mécanismes de responsabilisation et de former les policiers et les experts pour qu’ils enquêtent avec une approche de genre. Il a également appelé à garantir l’accès à la justice des victimes de violences sexuelles grâce à des mécanismes de plainte fiables et des mesures de réparation.  Il faut aussi saisir les instances internationales, dont la CPI, des cas que les autorités nationales ne sont pas en mesure de traiter et adopter des mesures globales axées sur le genre, l’intersectionnalité et les droits humains, centrées sur les survivants et conçues avec leur participation.  Il convient, en outre, de répondre aux besoins des hommes, des garçons, et des personnes LGBTI+ victimes de violences sexuelles dans les conflits, tout en reconnaissant les femmes cheffes de file de la société civile comme des alliées dans la prévention et le traitement des violences sexuelles.  Le délégué a aussi demandé davantage de conseillers pour la protection des femmes dans les opérations de paix ainsi que dans les bureaux des coordonnateurs résidents et des affaires humanitaires des Nations Unies. 

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a indiqué que les travaux de prévention et de lutte contre les violences sexuelles à toutes les étapes des conflits armés relèvent avant tout de la compétence des États.  Il s’est dit préoccupé par la situation en Syrie « occupée par les forces des États-Unis », où des personnes sont victimes de viols et de traitements cruels.  Dans les camps de déplacés, a-t-il insisté, la prostitution et la criminalité prospèrent ainsi que les mariages forcés.  Il s’est par ailleurs indigné des accusations infondées sur les soldats russes s’acquittant de leur mandat dans le cadre de l’opération militaire spéciale en Ukraine, fustigeant « la guerre de l’information irraisonnée » menée contre la Russie par l’Ukraine et ses protecteurs occidentaux.  Les soldats russes sont soumis à des règles strictes, a-t-il défendu. 

Le délégué a ensuite dénoncé les violences sexuelles perpétrées par les « radicaux ukrainiens » qui, a-t-il affirmé, suivent à la lettre les tactiques des terroristes de Daech, notamment dans le Donbass.  Déplorant la déferlante de meurtres commis contre la population ukrainienne suspectée de ne pas être loyale au régime, il a pointé les exactions des  « Nazis du bataillon Azov » dans la ville de Marioupol ou encore les punitions corporelles infligées par les nationalistes qui s’en prennent à ceux qui fuient l’est de l’Ukraine.  Il a aussi averti que le conflit en Ukraine facilite l’industrie de la traite de réfugiés ukrainiens en Europe.  Enfin, le délégué a appelé le Conseil à ne pas taire ces tendances préoccupantes ni les crimes de nature sexuelle commis par les soldats ukrainiens.

Toutes les sociétés doivent vaincre la culture de l’impunité si elles veulent alléger les souffrances des victimes de violence sexuelle, a dit M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana).  Il a jugé important de sensibiliser les consciences sur l’acuité de la menace de cette violence et insisté sur la peur des représailles et l’aide insuffisante aux victimes.  Il a demandé des mesures ciblées contre les auteurs de violence sexuelle et souhaité que les États érigent en infraction pénale la violence sexuelle en temps de conflit.  Il a réclamé des ressources financières pour le déploiement au sein des missions onusiennes de conseillers sur l’égalité des sexes.  L’indifférence est la pire ennemie de ce Conseil s’agissant de ce dossier, a conclu le délégué. 

Mme NATAHLAIE BROADHURST ESTIVAL (France) a salué le témoignage de Mme Murad et du docteur Mukwege, avant de dire sa fierté de voir la France contribuer à hauteur de 6,2 millions d’euros au Fonds mondial pour les survivants et de siéger dans son Conseil d’administration.  Elle a ensuite soutenu la mise en place de projets pilotes en Iraq, en République centrafricaine, au Soudan du Sud et au Nigéria, où un projet soutiendra le retour à l’école ou la formation de filles enlevées par Boko Haram.  Ces différentes initiatives s’appuient sur des partenaires locaux pour fournir un accès à des réparations médicales, physiques et psychologiques ou encore financières. 

En dépit des avancées, la représentante a condamné la persistance d’une culture de l’impunité et dénoncé les représailles contre les défenseurs des droits de l’homme.  Si le cadre normatif est robuste, la mise en œuvre est insuffisante, a tranché la représentant, en notant que 49 parties sont encore listées dans l’annexe du rapport du Secrétaire général.  Elle s’est enorgueillie de l’action de son pays et la Suède pour créer une équipe d’enquête sur les crimes commis contre les Yézidis, en Syrie et en Iraq.  À cet égard, elle a souligné le rôle indispensable de la Cour pénale internationale (CPI) et exhorté le Conseil à utiliser tous les outils à sa disposition, notamment les sanctions, qui représentent une mesure de dissuasion insuffisamment appliquée. 

La représentante a attiré l’attention sur le lancement du Pacte femmes, paix et sécurité et action humanitaire lors du Forum Génération Égalité.  Au niveau national, c’est le sens de l’adoption du troisième Plan d’action sur le programme femmes, paix et sécurité.  Elle a aussi mis l’accent sur la conférence que compte organiser l’Union européenne sur le rôle des femmes dans les processus de médiation. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a proposé d’intensifier les efforts des États Membres pour prévenir les violences sexuelles liées aux conflits et mener des enquêtes. Il a appelé à lutter efficacement contre la stigmatisation, les lois discriminatoires et les autres obstacles culturels qui entravent le signalement et le principe de responsabilité. Le représentant a plaidé en outre pour un secteur de la sécurité sensible au genre et inclusif et pour des réformes juridiques, avant de recommander de faciliter l’accès à la justice et aux soins médicaux et psychosociaux pour les victimes.  Il a aussi demandé de placer la barre plus haut s’agissant de la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité.  Il a d’ailleurs demandé à celui-ci de prendre des mesures spécifiques et des mesures dissuasives pour faire payer plus cher les actes de violence sexuelle liés à un  conflit.  Il a suggéré à cette fin d’intégrer et d’investir davantage dans les programmes de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  Il a aussi prôné une coopération transfrontalière plus efficace entre le personnel de sécurité aux frontières, les mécanismes d’alerte précoce, les conseillers nationaux et régionaux pour la protection des femmes et les acteurs humanitaires, afin de réduire au minimum les lacunes en matière de prévention et de signalement.  Enfin, il a appuyé les stratégies visant à intégrer les postes des conseillers pour la protection des femmes dans les budgets des opérations de paix de l’ONU, en particulier pendant les processus de transition, conformément à la résolution 2594 (2021). 

Mme  MARTA LUCÍA RAMÍREZ, Vice-Présidente et Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a indiqué que son pays a, conformément aux recommandations du Secrétaire général, mis l’accent sur le genre dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Aussi 59% des 51 indicateurs de genre du plan-cadre de mise en œuvre, ont-ils été finalisés ou sont très avancés.  Ces trois dernières années, l’accès des femmes rurales au crédit a augmenté de 28%, pour atteindre plus de 176  000 en 2021.  Quelque 37% des projets productifs financés dans les municipalités du Programme de développement avec une approche territoriale (PDET) sont dirigés par des femmes.  En ce qui concerne l’accès à la justice, la Colombie dispose d’une législation qui garantit aux victimes des violences sexuelles liées au conflit le droit aux réparations.  Sous ma direction, a indiqué la Vice-Présidente, nous avons mis en place un modèle de « justice à la porte » pour les femmes rurales qui doit continuer à être renforcé.  Elle a plaidé pour l’égalité des sexes dans le secteur de la défense, mentionnant une politique qui a renforcé les protocoles visant à prévenir et à combattre toute forme de violence à l’égard des femmes, y compris la violence sexuelle.  Ces protocoles sont déjà mis en œuvre aux niveaux national et régional.  De même, le Gouvernement a augmenté de 38% la participation des femmes aux Forces de sécurité. 

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a estimé que la formation, l’intégration des politiques, le renforcement du suivi, les mécanismes de signalement et la sensibilisation sont des éléments cruciaux de toute stratégie réussie de lutte contre les violences sexuelles, notamment pour les missions de paix.  Le délégué a ajouté que, malgré ses faibles ressources, la Jordanie, pays d’accueil de millions de réfugiés, a mené de nombreuses activités de sensibilisation qui ont pour objectif de changer les normes sociales et promouvoir l’égalité des genres avec un accent particulier sur la prévention des mariages d’enfants et de la violence sexuelle et sexiste.  À ses yeux, il convient de veiller à ce que les mécanismes onusiens, internationaux et nationaux existants pour lutter contre la violence sexuelle soient soutenus et reçoivent les ressources nécessaires pour fournir un appui aux survivants et prévenir de futures tragédies.  Le représentant également plaidé pour que les États harmonisent leur législation pénale afin de supprimer tout obstacle procédural à la poursuite des crimes sexuels.  En effet, a-t-il souligné, la mise en œuvre effective de la responsabilité pénale est un important moyen de dissuasion contre la commission de tels crimes.  Enfin, il a souhaité que soit garantie l’égalité d’accès aux soins médicaux et au soutien psychologique pour toutes les victimes de violences sexuelles en temps de conflit et dans les situations post-conflit. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) s’est alarmée de l’accumulation des signalements de viols en Ukraine.  Plusieurs femmes et filles ont raconté les violences et abus sexuels qu’elles ont subis aux mains des soldats russes.  « Ce que nous entendons est horrible.  Nous ne pouvons pas rester silencieux face à de telles atrocités ».  Il ne faut pas non plus oublier ce qui s’est passé et continue de se passer dans d’autres parties du monde, en Syrie, au Yémen, au Soudan du Sud, au Nigéria, en RDC, en Afghanistan, en Iraq, en Éthiopie, au Myanmar et ailleurs, a plaidé le délégué.  Elle s’est préoccupée du fait que les enfants, en particulier les filles, sont vulnérables à la violence sexuelle à l’école ou sur le chemin de l’école.  Il a également noté que la violence sexuelle liée aux conflits est tout aussi traumatisante pour les femmes, les filles, les hommes, les garçons et les personnes ayant une orientation sexuelle, une identité ou une expression de genre et des caractéristiques sexuelles diverses.  La justice et la responsabilité devant être des éléments cruciaux de la réponse, une plus grande sensibilisation est nécessaire à cette fin, et les survivants doivent rester au centre de nos efforts.   Selon lui, les victimes doivent avoir accès à des ressources pour lutter contre les formes de discrimination multiples et croisées auxquelles elles sont confrontées, tandis qu’un soutien psychologique et médical plus sexospécifique doit être assuré. 

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a déploré les violations systématiques du droit international commises en Ukraine du fait de l’agression russe et a demandé des enquêtes rapides de la CPI sur les allégations de violence sexuelle.  La déléguée a aussi appelé à ce que la violence sexuelle soit incluse dans les critères d’inscription sur les listes des sanctions.  Elle a évoqué la Syrie et loué le travail du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011.  Après avoir relevé que les conflits et les déplacements augmentent les risques de traite sexuelle, la déléguée a souligné l’importance du secteur financier pour l’autonomisation des femmes, en insistant sur l’appui du secteur aux réfugiés ukrainiens dans son pays. 

Mettant l’accent sur l’établissement des responsabilités, M ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a expliqué que son pays soutient financièrement depuis 2014 les activités du Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence sexuelle liée aux conflits.  Il a indiqué que son pays est devenu membre du Conseil d’administration du Fonds mondial pour les survivants de violences sexuelles, avant d’annoncer une nouvelle contribution de deux millions de dollars qui s’ajoutera aux quatre millions déjà donnés pour garantir des réparations aux survivants.  Depuis 2014, le Japon, a-t-il dit, soutient le Fonds au profit des victimes de la Cour pénale internationale (CPI).  Le représentant a appelé à une coopération internationale renforcée pour promouvoir l’accès à la justice et l’assistance à toutes les victimes de violences sexuelles dans les situations de conflit, post-conflit et autres situations de vulnérabilité, y compris les situations postcatastrophe et postpandémie.  Très préoccupé par le nombre croissant de rapports alarmants sur la violence sexuelle, le représentant a réclamé à tous les États membres des mesures efficaces pour protéger et répondre aux besoins des victimes. 

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) qui s’exprimait au nom de 64 États membres du Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité, a dit être préoccupé par le recours persistant et généralisé à la violence sexuelle en toute impunité par des acteurs étatiques et non étatiques dans de nombreux conflits dans le monde, notamment en Ukraine où elle frappe de manière « horrible » les femmes et les enfants.  Il a demandé l’ouverture immédiate d’une enquête indépendante sur ces allégations.  Il a exhorté à traduire en justice les responsables de violences sexuelles liées aux conflits, par la justice nationale ou, le cas échéant, internationale.  Les États Membres doivent lutter contre l’impunité en renforçant l’état de droit, la protection, les enquêtes et les poursuites engagées par des systèmes judiciaires indépendants et sensibles au genre, a-t-il ajouté.  Le délégué a encouragé le Conseil de sécurité à incorporer et à appliquer la violence sexuelle comme critère de désignation dans les régimes de sanctions de l’ONU.  Il faut aussi démanteler tous les obstacles structurels et institutionnels, y compris les inégalités, la stigmatisation, la discrimination, l’intimidation et la crainte de représailles qui empêchent les survivantes de dénoncer en toute sécurité ces violences.  Les victimes doivent avoir accès aux services de santé sexuelle et reproductive, a-t-il ajouté. 

Le représentant a appelé toutes les parties à garantir un environnement sûr et propice à la société civile, y compris les femmes bâtisseuses de la paix et les défenseuses des droits humains, afin qu’elles accomplissent leur important travail, sans intimidation, violence ou représailles.  La prévention commence par un engagement en faveur de l’égalité des sexes, de l’autonomisation des femmes et des filles dans diverses situations et conditions, de la protection et de la promotion des droits de l’homme, a déclaré le délégué en exhortant le Conseil à mettre l’accent sur la prévention de ladite violence et à renforcer les systèmes d’alerte rapide en déployant des conseillers pour la protection des femmes dans toutes les situations préoccupantes, ainsi qu’à fournir une assistance aux survivantes.  Les rescapés doivent demeurer au cœur de tous les efforts visant à prévenir et à répondre à ces violences, conformément à la résolution 2467 (2019) et au droit international, a conclu le représentant en mettant l’accent sur leurs besoins, leurs perspectives, leurs droits et leur dignité. 

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a appelé à renforcer l’établissement des responsabilités en matière de violences sexuelles dans les conflits, soulignant que le leadership des survivantes est un élément essentiel de la réponse à la violence sexuelle et une condition préalable pour améliorer l’accès à la justice.  De plus, il faut continuer à investir dans la société civile en tant qu’acteur clef de la démocratie et de l’État de droit, a recommandé la représentante qui a appelé à mettre en œuvre les recommandations des défenseuses des droits humains sur la manière dont les missions diplomatiques peuvent les protéger et leur garantir l’accès à un financement flexible.  Enfin, il faut renforcer les mécanismes permettant de demander des comptes aux auteurs de violences sexuelles, tant au niveau national qu’international. La déléguée a donc appelé les autorités nationales à renforcer l’État de droit pour poursuivre les auteurs de violences sexuelles et sexistes.  Trop souvent, ces crimes sont traités par des mécanismes de médiation locaux, qui manquent d’outils et de capacités appropriés pour traiter ces cas et fournir une orientation axée sur les survivantes , a-t-elle observé. 

M. BOSTJAN MALOVRH (Slovénie) a regretté le climat d’impunité qui continue d’entourer les crimes sexuels dans le monde et a souhaité que davantage soit fait pour combler le fossé entre l’état normatif et l’état des lieux sur le terrain. Rappelant qu’il incombe à tous les États de prévenir les violences sexuelles liées aux conflits et d’assurer la responsabilité de tels actes, il a plaidé pour une meilleure administration de la justice et une meilleure assistance aux victimes de telles violences liées aux conflits, ce qui, selon lui, passe par un renforcement des connaissances sur la question avant même que le conflit armé éclate. Il a également jugé qu’une approche centrée sur les survivantes pour prévenir et répondre aux violences sexuelles liées aux conflits est essentielle, de même qu’un accès aux services de santé sexuelle et reproductive et au soutien psychosocial et économique pour les victimes et les survivantes.  À cet égard, il a plaidé pour le déploiement de conseillers pour la protection des femmes dans les opérations de paix de l’ONU.  Après avoir souligné la forte implication de son pays dans la prévention et la réponse à la violence sexiste, notamment au Liban et en RDC, le délégué a conclu sur une condamnation des violences sexuelles liées au conflit en Ukraine, parlant à leur sujet de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. 

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a indiqué que la Russie commet des crimes de guerre en Ukraine, notant que les femmes sont les premières touchées.  Les soldats russes semblent utiliser le viol comme arme de guerre, a-t-il précisé.  Relevant que des mineurs auraient été aussi violés, il a avoué son « horreur ».  Il a observé que les violences de l’armée russe ont pour but de détruire le moral et la résistance des Ukrainiens.  La Russie doit rendre des comptes, a réclamé le délégué en appuyant le travail du Procureur de la CPI.  Il a, enfin, déploré que l’impunité soit toujours d’actualité, que ce soit en Ukraine, en Syrie, au Myanmar et ailleurs, et appelé à y remédier. 

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a déclaré que la Nouvelle-Zélande faisait partie des 13 signataires d'une déclaration commune de novembre 2021, qui condamne le recours à la violence sexuelle et au viol comme arme de guerre, en faisant une « ligne rouge », semblable à l’utilisation des armes chimiques.  Tenir les auteurs responsables, qu’ils soient des États, des acteurs non étatiques ou des individus, doit être une priorité, tout comme le soutien aux survivants, a insisté la représentante. Elle a jugé troublant que ces crimes soient devenus quotidiens dans certains pays, notamment l’Éthiopie, l’Afghanistan, le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo, l’Iraq et l’Ukraine.  Elle a appelé à renforcer les réponses internationales et nationales en soutien à l’architecture de la responsabilité juridique, y compris l’initiative du Royaume-Uni pour une nouvelle convention sur la violence sexuelle liée aux conflits.  La prévalence de la violence sexuelle dans les conflits se poursuivra si la culture de l'impunité n'est pas combattue, a-t-elle prévenu avant d’exhorter les États Membres à adopter des politiques pour combattre cette impunité en poursuivant les auteurs de ces crimes. 

M. ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) s’est dit consterné par les informations faisant état de violences sexuelles et sexistes contre des femmes et des enfants en Ukraine, commises par les forces armées russes et des mercenaires.  « Les images et les récits de Boutcha sont choquants; des crimes graves ont été commis. »  L’Allemagne, a assuré le délégué, est solidaire de tous les Ukrainiens, y compris les femmes et les filles, dans toute leur diversité, touchés par la guerre d’agression non provoquée de la Russie en Ukraine.  En Afghanistan, a-t-il poursuivi, des femmes et des jeunes filles sont quotidiennement victimes de mariages forcés et de violences sexuelles et sexistes; au Myanmar, une violence généralisée et systématique est apparue depuis le coup d’État militaire, avec une force excessive, y compris des violences sexuelles et sexistes, contre des manifestants, des journalistes, des militants, des femmes artisanes de la paix et des femmes dirigeantes.  Les nombreuses femmes et filles déplacées de Syrie sont aussi confrontées à des risques accrus de violence sexuelle et sexiste ainsi que de mariage forcé et précoce.  Enfin, le délégué a mentionné les cas de violences sexuelles contre des femmes, des enfants et des hommes yéménites que le Groupe d’éminents experts à Genève a documentés dans ses rapports.  Une approche centrée sur les survivants est essentielle pour prévenir et répondre à ces violences, a-t-il conclu.  En 2021, l’Allemagne a financé 26 projets humanitaires avec des composantes essentielles de violence sexiste, pour un montant total de plus de 80 millions de dollars, ce qui a fait d’elle le plus grand donateur de la Conférence des donateurs d’Oslo, a signalé le représentant avant de mentionner aussi que son pays est le plus grand donateur pour l’appel spécial du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). 

M. TIYANI RAYMOND SITHOLE (Afrique du Sud) a jugé urgent de rediriger l’attention sur les lacunes constatées dans la mise en œuvre complète et efficace de toutes les résolutions du Conseil de sécurité relatives aux femmes, et à la paix et à la sécurité et visant à lutter contre la violence sexuelle liée aux conflits.  Il a appelé à concentrer les efforts sur les mesures préventives aux niveaux national, régional et international en prenant des mesures urgentes et concrètes, politiques et opérationnelles, pour renforcer les mécanismes d’atténuation des risques.  Il a également fait remarquer que les réformes politiques et sociales permettent de créer des environnements sûrs, propices au signalement des incidents de violence sexuelle. En outre, il est important de s’attaquer aux moteurs du conflit, aux barrières structurelles et systémiques, aux stéréotypes discriminatoires, à la pauvreté et à l’inégalité afin de traiter de manière holistique la violence sexuelle dans les situations de conflit, a-t-il ajouté.  À cet égard, le délégué a jugé indispensable d’améliorer les systèmes d’alerte et de réponse précoces, y compris dans les périodes d’instabilité politique, de montée de l’extrémisme violent, de déplacements forcés et d’escalade des conflits armés, afin d'élaborer des réponses plus adaptées pour contrer les actes de violence sexuelle dans les situations de conflit. 

M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a observé qu’en dépit des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité depuis 2008, la violence sexuelle continue d’être utilisée comme arme de guerre, notamment en Ukraine, au Myanmar, en Syrie, en Éthiopie et au Soudan du Sud, et ce, dans un climat d’impunité presque totale. Notant que le viol et d’autres formes de violence sexuelle peuvent constituer un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou un élément constitutif du crime de génocide, il a détaillé l’engagement de son pays sur ces questions, en particulier en RDC, où il participe à la prise en charge des victimes au Sud-Kivu, et en Iraq, où il aide une ONG qui aide les victimes yézidies de Daech.  Pour le délégué, il faut renforcer les cadres juridiques existants, promouvoir l’égalité des sexes et appuyer le travail de documentation des crimes commis par le biais des mécanismes d’enquête.  Pour mettre fin à l’impunité des auteurs de crimes et ainsi rendre justice aux survivantes, il a souligné le rôle clef de la CPI.  Un accès sans entrave à la justice et aux soins de santé et psychosociaux doit être assuré aux victimes, sans qu’elles aient à craindre des représailles.  Le représentant a encouragé le Conseil de sécurité à poursuivre ses efforts pour ajouter la violence sexuelle aux critères de désignation dans les régimes de sanctions. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a souligné la résilience et l’humanité dans les efforts entrepris à tous les niveaux pour mettre fin aux cycles de violences sexuelles commises en période de conflit.  Le Conseil de sécurité et l’ONU doivent continuer de jouer leur rôle dans ce domaine, a-t-il dit.  L’Estonie s’est concentrée sur cette question pendant son mandat au Conseil, a rappelé le délégué, en assurant qu’elle poursuit aujourd’hui son travail.  Il a condamné la façon dont la Fédération de Russie mène la guerre en Ukraine et l’idéologie qui consiste à traiter les Ukrainiens comme des « sous-humains ».  Il faut agir maintenant pour mettre un terme aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité commis dans ce pays, a martelé le délégué.  À cet égard, l’Estonie soutient les efforts du Procureur de la CPI et des experts de la commission d’enquête.  Le pays a lui-même lancé des poursuites pénales dans le cadre de la compétence universelle et demandé la mise en place de services de santé sexuelle pour les rescapées des violences sexuelles.  Enfin, le délégué a insisté sur la désignation de la violence sexuelle comme critère distinct pour déclencher des sanctions ciblées.  Le Conseil de sécurité dans son ensemble doit commencer à percevoir ce fléau comme faisant partie intégrante de son travail, a-t-il conclu. 

M. OMAR KADIRI (Maroc) a dénoncé les groupes armés non-étatiques qui pratiquent ouvertement l’esclavage de femmes et de filles.  L’indignation ne suffit plus, a dit le délégué, en invitant à l’action.  Il faut, a-t-il martelé, remédier aux causes profondes des conflits et traduire en justice les auteurs de violations. Les femmes doivent participer aux efforts de paix dès le lendemain d’un conflit, a-t-il ajouté, avant de souligner le rôle des dignitaires religieux dans le signalement précoce d’actes de violence sexuelle dont les victimes doivent pouvoir échapper à la stigmatisation.  Répondant à son homologue sud-africain, il a souligné qu’au Sahara marocain, les droits des femmes sont respectés contrairement à l’Afrique du Sud où les violences contre les femmes sont des plus élevées. 

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a jugé indispensable que des enquêtes soient menées sur les allégations de violences sexuelles dans toutes les situations de conflit, y voyant un aspect essentiel de la dissuasion et de la prévention de ces crimes odieux.  Les auteurs de tels actes doivent être tenus responsables par les autorités nationales et, le cas échéant, par la justice internationale pertinente, a-t-elle insisté.  Dans ce contexte, elle a exhorté tous les États à adopter des engagements spécifiques pour prévenir et traiter les violences sexuelles liées aux conflits, protéger les survivants et traduire les auteurs en justice.  Il faut aussi protéger les acteurs de la société civile et en particulier les femmes défenseuses des droits humains, y compris les femmes journalistes, qui sont confrontées à des défis et des menaces croissants. 

La représentante a appelé à une approche centrée sur les survivants pour guider les efforts de paix, en mettant l’accent sur l’octroi de réparations justes, la garantie d’une assistance multisectorielle et l’accès à des services psychologiques et juridiques, entre autres.  Elle a ensuite indiqué que la Grèce a récemment rejoint le Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité et que son premier plan national sur les femmes et la paix et la sécurité, qui sera adopté prochainement, accorde la priorité à la prévention de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste liées aux conflits, ainsi qu’à l’aide aux femmes et filles survivantes. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a déclaré que les causes profondes de la violence sexuelle liée aux conflits ne peuvent être véritablement résolues que si la participation, l’autonomie et les droits des femmes sont garantis.  Il faut également lutter contre l’impunité aux niveaux local, national et global.  Il a appelé le Conseil à inclure des critères de désignation axés sur la violence sexuelle dans les régimes de sanctions, tout en se félicitant de leur utilisation croissante.  Il a ensuite indiqué par l’intermédiaire de la société civile, la Suisse aide les survivantes à faire valoir leurs droits en recueillant des preuves.  La Suisse a par exemple aidé des femmes rohingya à déposer des requêtes auprès de la CPI au nom de centaines de survivantes de violences basées sur le genre.  Enfin, a-t-il dit, les droits et besoins des survivantes et survivants, surtout leur santé et leurs droits sexuels et reproductifs, doivent figurer au cœur de nos actions.  Il a appelé à fournir des financements adéquats aux efforts de prévention et de réponse, y inclus les réseaux de solidarité communautaire, relevant en outre que les femmes défenseuses des droits humains sont en première ligne de la lutte contre la violence sexuelle. 

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, s’est dit horrifié par les témoignages et les informations faisant état de cas de violences sexuelles et de viols perpétrés par des soldats russes en Ukraine.  Dénonçant aussi les attaques répétées des forces russes contre des personnes et des infrastructures civiles, il a assuré que ces crimes ne resteront pas impunis.  L’Union européenne, a dit le représentant, apporte son soutien aux enquêtes indépendantes et mais aussi victimes de violences sexuelles.  Il a appelé à l’action plutôt qu’aux débats et préconisé, en premier lieu, que toutes les parties étatiques et non étatiques à un conflit adoptent des engagements spécifiques pour prévenir et lutter contre ces violences.  Il faut aussi mettre un terme aux menaces contre les femmes artisans de la paix, médiateurs, journalistes, politiques, travailleurs humanitaires, dirigeants de la société civile et défenseurs des droits humains. 

L’Union européenne, a-t-il indiqué, mène actuellement des programmes pour soutenir les militantes en danger et les survivantes de violences sexuelles en Afghanistan, en Colombie, en Équateur, en Éthiopie, en Iraq, en Jordanie, au Soudan du Sud, au Soudan, en Syrie, en Turquie, en Ouganda, au Yémen et au Venezuela.  M. Skoog a salué les initiatives visant à renforcer les procédures judiciaires aux niveaux national, régional et international, notamment à travers la CPI, avant de réitérer son soutien à la décision du Conseil de sécurité de faire de la violence fondée sur le sexe un critère de désignation dans les régimes de sanctions de l’ONU. I l a milité pour une approche centrée sur les survivants et mis l’accent sur une assistance multisectorielle de qualité et accessible, psychologique, juridique et relative à la santé sexuelle et reproductive. La participation pleine, égale, effective et significative des femmes à toutes les étapes des processus de maintien et de consolidation de la paix doit être assurée, a conclu le représentant. 

Le représentant de la Fédération de Russie a réagi aux propos du délégué de l’Union européenne en indiquant que l’armée russe n’a pas commis les crimes dont elle est accusée.  Je m’attendais à ce que la Lituanie ou l’Estonie dise que les soldats russes violent des femmes et des enfants mais je ne m’attendais pas cela de vous, a déclaré le délégué russe. 

Le représentant de l’Union européenne a répondu qu’il n’y a de la part de sa délégation aucune russophobie ni sentiment négatif à l’égard de la population russe.  Mais, a-t-il ajouté, nous rejetons avec force l’agression commise par la Fédération de Russie à l’encontre de l’Ukraine. 

Mme GRBA (Turquie) a reconnu que le système de l’ONU a progressé dans la lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits, même si elle a noté un écart entre les intentions et l’action comme le révèle le dernier rapport du Secrétaire général sur la question. Ces crimes, a-t-elle mis en garde, conduisent à des déplacements internes et transfrontaliers et à une « re-victimisation » en cas de traite des personnes. Selon la déléguée, il est essentiel de renforcer le soutien apporté aux victimes, et notamment de leur permettre de prolonger leur séjour dans le pays ou elles ont trouvé refuge.  Il faut, a-t-elle insisté, assurer la reddition de la justice, la reconnaissance et des réparations aux rescapées de ces crimes horribles. L’impunité reste la norme et la justice reste beaucoup trop lente, a-t-elle répété. Appelant à recueillir des preuves pendant les conflits, elle a souligné que tous les acteurs, du Gouvernement à la société civile, ont un rôle important à jouer à cet égard. La déléguée a aussi demandé de déployer les ressources humaines et financières nécessaires pour envoyer des experts de ces questions dans les missions de paix. L’enjeu est de protéger la vie, les droits et la dignité des femmes, notamment des Ukrainiennes victimes des violences menées par les forces russes, a-t-elle conclu. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie) a demandé aux États qui ne l’ont pas encore fait d’harmoniser leur législation pénale avec le droit international en ce qui concerne la violence sexuelle et à rejoindre le Statut de Rome de la CPI.  Il a signalé que les rescapés de violences sexuelles commises pendant la guerre en Croatie ont droit à un dédommagement, même si les responsables n’ont pas été appréhendés.  Enfin, le délégué de la Croatie a plaidé pour que soit menée une action plus forte dans la lutte contre l’impunité dans les cas de crimes sexuels. 

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a dit que la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects de la vie publique et des processus de paix est une condition fondamentale pour mettre fin aux violences sexuelles liées aux conflits. Il a expliqué que l’inclusion des femmes permet de garantir une approche centrée sur les victimes, y compris la réhabilitation des femmes survivantes, l’octroi de réparations et la responsabilisation après un conflit, ainsi que la mise en place de mécanismes de vérification excluant les auteurs de violences sexuelles des forces de sécurité.  Il s’est inquiété des témoignages de plus en plus nombreux faisant état de recours délibéré à la violence sexuelle comme tactique de guerre par les soldats russes en Ukraine.  Il a souligné que les déplacements massifs causés par la guerre ont accru les risques de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste, pour exhorter ensuite la communauté internationale à veiller à ce que tous les auteurs, y compris les dirigeants, soient traduits en justice.  Le représentant a par ailleurs noté qu’une grande majorité des survivants ne signalent pas de tels actes par crainte de discrimination et de stigmatisation.  Il a également indiqué que son pays était parmi les premiers à avoir déféré la situation en Ukraine à la CPI. 

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a appelé les États à utiliser tous les instruments à leur disposition pour assurer la mise en œuvre du cadre global de lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits.  À cet égard, le représentant a appuyé l’idée de faire de ces violences un critère de désignation dans tous les régimes de sanctions pertinents des Nations Unies.  Ce régime doit veiller à ce que tous les auteurs de violences soient traduits en justice et la justice pénale internationale, agir selon une approche intégrée et coordonnée pour collecter les preuves et suivre les procédures jusqu’à leur terme.  Mais, a estimé le représentant, il est plus important de prévenir la violence sexuelle que d’assurer la responsabilité des auteurs.  Aussi, l’investissement dans l’éducation et la formation aux droits de l’homme, dans l’autonomisation de toutes les personnes et dans la participation et le leadership pleins, égaux et significatifs des femmes à tous les niveaux décisionnels est déterminant pour assurer cette prévention, a affirmé le délégué. 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a estimé que prévenir et combattre la violence sexuelle pendant les conflits nécessite un effort collectif, lequel ne pourra être couronné de succès que si les causes profondes des conflits sont recherchées.  Nous pensons que mettre un terme à tous les conflits armés est le moyen le plus efficace de prévenir de tels crimes, a-t-elle ajouté, reconnaissant toutefois que tant que le terrorisme, l’extrémisme violent, l’occupation et les ingérences étrangères persisteront, une telle solution restera impossible, notamment dans la région instable du Moyen-Orient.  Pour la représentante, il est également essentiel de lutter contre l’impunité, de juger les auteurs de ces crimes et de garantir l’accès des victimes à la justice.  À cet égard, elle a constaté que la situation actuelle en Afghanistan a de graves répercussions sur les droits des femmes et des filles afghanes qui, selon un récent rapport de l’ONU, sont l’objet de violences systématiques et généralisées, dans le cadre d’une action concertée pour limiter leur participation à la vie publique et politique.  Les femmes afghanes doivent notamment pouvoir jouir de leur droit à l'éducation, au travail et à la participation politique, a plaidé la déléguée, avant de souligner l’importance de l’autonomisation des femmes et de leur participation à la prévention et au règlement des conflits.  Elle a par ailleurs estimé que les questions concernant les femmes et les filles doivent être traitées par l’Assemblée générale et des organes de l’ONU autres que le Conseil de sécurité.  Celui-ci, a-t-elle fait valoir, ne devrait aborder ces questions que lorsqu’elles concernent directement la paix et la sécurité internationales. 

Le représentant d’Italie a rappelé que la protection des droits des femmes et des filles en période de conflit est un engagement ancien pour son pays.  Il s’est toutefois dit préoccupé par le nombre accru de viols comme arme de guerre enregistrés dans le rapport du Secrétaire général.  Le délégué a condamné l’agression injustifié de l’Ukraine par la Fédération de Russie et soutenu le peuple ukrainien dans son ensemble ainsi que les victimes des violences perpétrées par les forces armées russes.  Il faut, a-t-il insisté, n’épargner aucun effort pour aider les survivants.  De façon générale, a dit le représentant, la prévention des violences sexuelles commence en temps de paix.  S’il existe un cadre international qui doit être mis en œuvre, il faut aussi un changement de paradigme pour promouvoir l’égalité des sexes et la participation accrue des femmes.  Les opérations de maintien de la paix jouent également un rôle important. L’Italie, a rappelé le représentant, a déployé des contingents formés à ces questions et promu une forte présence des femmes dans ses rangs.  Il a également jugé important d’aider les pays qui traversent des conflits à réformer leur système de justice et à renforcer l’état de droit. 

M. KARL LAGATIE (Belgique) s’est dit consterné par les allégations de violences sexuelles commises par la Russie en Ukraine.  Il a cité quelques lueurs d’espoir dans un panorama d’ensemble très sombre, en louant la volonté des autorités de la République démocratique du Congo (RDC) de combattre l’impunité.  Il a rappelé que les États sont les premiers responsables dans la lutte contre la violence sexuelle, avant d’appuyer le travail de la CPI et des tribunaux hybrides.  Il a souhaité que la violence sexuelle devienne un critère autonome d’établissement des sanctions par le Conseil.  Il a aussi plaidé pour que les survivantes puissent avoir accès à des soins obstétriques et reçoivent un soutien sur les plans juridique et psychologique.  Enfin, il a souligné l’importance de l’égalité entre les genres et de la participation des femmes pour faire reculer la violence qui les vise. 

Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) s’est dit choquée par les témoignages de plus en plus nombreux d’abus sexuels, y compris des viols, perpétrés par les soldats russes, et par les informations « épouvantables » de violences sexuelles quotidiennes.  En tant que Vice-Présidente du Groupes des Amis des enfants et des objectifs de développement durable, la Bulgarie, a-t-elle avoué, est consternée par le fait que des mineurs soient soumis à la violence sexuelle en Ukraine.  Elle a réclamé des enquêtes indépendantes et souligné la nécessité d’une approche axée sur les survivants qui garantisse l’accès à la santé sexuelle et reproductive.  Elle a aussi réclamé des mesures pour protéger les représentants de la société civile de toute forme de représailles et renforcer l’établissement des responsabilités.  La représentante a également appuyé l’idée que les violences sexuelles liée aux conflits deviennent un critère distinct pour justifier l’imposition de sanctions. 

Mme RAWA ZOGHBI (Liban) a rappelé les souffrances inimaginables des femmes et des filles yézidies, qui ont été soumises par Daech à des actes barbares et à des traitements inhumains, y compris le viol, la violence sexuelle, l’esclavage sexuel et la torture.  Malheureusement, de telles atrocités persistent, a-t-elle constaté, avant d’appeler à ce que les victimes de violences sexuelles dans les conflits soient protégées et que les auteurs de ces crimes soient traduits en justice.  À cet égard, la représentante s’est félicitée que, sous l’impulsion de la Sierra Leone et du Japon, l’Assemblée générale ait adopté une résolution sur la coopération pour l'accès à la justice, les recours et l'assistance des survivants de violences sexuelles.  Si les femmes et les filles sont les premières victimes de telles violences dans les conflits, nous ne devons pas exclure les violences sexuelles perpétrées contre les hommes et les garçons, a-t-elle fait valoir, ajoutant que, dans leur cas, la stigmatisation et la honte sont beaucoup plus intenses et de nombreuses victimes et survivants choisissent de rester silencieux. Selon la déléguée, une attention particulière devrait également être accordée aux femmes militantes, artisanes de la paix, défenseuses des droits humains et journalistes, qui sont souvent spécifiquement ciblées, y compris par la violence et le harcèlement sexuels.  Enfin, elle a estimé que la mesure la plus importante à prendre est de faire taire les armes, mettre fin aux conflits et déployer tous les efforts pour empêcher qu’ils éclatent. « Le corps des femmes ne peut plus être utilisé comme arme de guerre et ne peut plus être transformé en champs de bataille », a-t-elle martelé. 

M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a déploré les effets dévastateurs et disproportionnés des opérations militaires et des conflits sur les femmes et les filles et constaté que les architectes féminines de la paix sont de plus en plus prises pour cibles et harcelées.  Il faut s’assurer, a-t-il plaidé, qu’elles aient accès à un soutien adéquat, aux services de santé sexuelle et reproductive et à une prise en charge psychosociale.  Pour sa part, l’Australie travaille notamment avec la Fédération internationale du planning familial, le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et le Conseil des réfugiés danois pour fournir ce type de prise en charge.  Le programme national 2021-2031 sur les femmes, la paix et la sécurité met l’accent sur le sort des victimes de violences sexuelles et fondées sur le sexe.  L’impunité reste la norme et la justice reste lente, a encore regretté le délégué.  Selon lui, pour avancer, il faut prévoir des spécialistes des questions sexospécifiques dans la planification des opérations de paix de l’ONU.  D’ailleurs l’Australie forme et déploie des conseillers militaires et civils et promeut la représentation équitable des femmes en uniforme. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a constaté que l’inégalité entre les genres est une cause profonde de la violence sexuelle.  Il a appelé les États à aborder la question de la violence sexuelle de manière globale, demandant notamment que les abus sexuels visant des hommes, des garçons et des personnes de la communauté LGBT soient inclus dans cette discussion.  Il a souhaité que la communauté internationale renvoie à la CPI les cas de violence sexuelle liée à un conflit lorsque les États concernés ne veulent pas ou ne peuvent pas s’en saisir. Il a détaillé l’initiative Justice Rapid Response , dont l’Argentine fait partie, qui a permis, avec l’appui d’ONU-Femmes, de mettre au point un fichier d’experts dans la collecte d’éléments de preuve. Le délégué a enfin appelé à appuyer la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, qui compte déjà 114 signatures. 

M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a fustigé le recours aux violences sexuelles comme tactique de guerre et a estimé que les premières allégations concernant les forces russes en Ukraine sont la source d’une grande préoccupation.  Les pays nordiques, a-t-il prévenu, n’accepteront aucune impunité.  Le représentant a soutenu l’idée d’intégrer la violence sexuelle comme critère spécifique des sanctions ciblées. S’inquiétant que 70% des parties désignées dans le rapport du Secrétaire général soient recherchés depuis plusieurs années pour des plusieurs crimes, le représentant a estimé que le rôle des États n’attire pas l’attention suffisante. Il a exhorté les Nations Unies à s’y pencher mais aussi sur le rôle des acteurs privés.  Il faut, a-t-il dit, assurer la participation des victimes aux procédures judiciaires et nommé un plus grand nombre de conseillers des droits des femmes et des enfants dans les opérations de paix parce qu’ils jouent un rôle clef dans la prévention des violences sexuelles. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) s’est dit préoccupé par tous les cas de violence fondée sur le sexe dans les situations de conflit armé, en particulier en Ukraine.  Il a dénoncé une agression russe caractérisée par des violences contre les civils.  Tous les auteurs de ces actes doivent faire l’objet de poursuites judiciaires, car la lutte contre l’impunité est un facteur de prévention des violences sexuelles, a rappelé le représentant. 

Recourir à la violence sexuelle comme une arme pour terroriser des populations vulnérables et violer leur dignité et leurs droits les plus élémentaires est tout simplement scandaleux, s’est indignée Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives).  Elle a rappelé, à cet égard, que la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité oblige toutes les parties au conflit, y compris les parties non étatiques, à prendre des mesures pour protéger les femmes et les filles contre la violence fondée sur le sexe.  Quel que soit leur camp, les auteurs de cette violence doivent répondre de leurs actes devant la justice, a souligné la représentante, avant de réclamer des enquêtes et des poursuites judiciaires axées sur les victimes.  Les Maldives, « nation éprise de paix », a-t-elle dit, appliquent une politique de tolérance zéro contre toutes les formes de violences fondé sur le sexe.  Mon pays, s’est-elle félicitée, a promulgué une loi contre le harcèlement et les abus sexuels, et une autre sur la prévention de la violence domestique, lesquelles s’ajoutent à la législation sur la protection sociale qui vise à sensibiliser et créer les conditions nécessaires à la protection de toutes les femmes et de toutes les filles. 

M. ANDRES EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a condamné tous les actes d’agression armée et d’occupation qui sont des « terreaux fertiles » pour les violences sexuelles, comme on l’a vu en Iraq, en Syrie ou plus récemment en Ukraine.  Il est absurde de se considérer comme civilisés tout en continuant d’utiliser des tactiques barbares comme le viol comme arme de guerre, a-t-il affirmé.  Le délégué a préconisé d’appliquer une politique de tolérance zéro et de lutter contre l’impunité.  Pour cela, a-t-il ajouté, il faut appliquer des mesures judiciaires et non judiciaires interdépendantes et coordonnées avec les processus de paix.  À titre d’exemple, le délégué a cité les efforts de la Colombie pour mettre en œuvre l’accord de paix. Il convient également de prendre en charge les victimes de violences en leur fournissant des services juridiques et de santé. 

M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a appelé à adopter une approche globale dans la lutte contre la violence sexuelle en temps de conflit, en mettant l’accent sur la prévention de ce fléau et sur le respect des droits des victimes.  Les États doivent renforcer leurs lois et les harmoniser avec le droit international pour un meilleur établissement des responsabilités, a-t-il notamment recommandé.  Il a plaidé pour une meilleure coopération dans ce domaine entre le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l’homme.  Il convient de mettre un terme au harcèlement des femmes participant à des processus de paix, a ajouté le délégué. Il a, enfin, invité le Conseil à œuvrer pour renforcer la protection des civils en temps de conflit armé. 

Mme MARÍA BASSOLS DELGADO (Espagne) a jugé urgent de trouver les solutions pour lutter contre le recours aux violences sexuelles comme tactique de guerre, appelant notamment à faire de la violence sexuelle un critère spécifique de sanctions ciblées.  Elle a dit l’importance de nommer des conseillers de protection et d’alerte précoce dans toutes les opérations de paix.  Constatant qu’en raison de leurs faiblesses institutionnelles, les pays en conflit ou sortant de conflit sont souvent incapables de recueillir des plaintes et de protéger les victimes, la représentant a jugé crucial de fournir un soutien approprié aux entités de la société civile, notamment les organisations féminines, pour les aider à protéger les femmes et recueillir des témoignages des rescapées.  Elle a particulièrement condamné les crimes commis à Boutcha, en Ukraine, et tous les cas de violences sexuelles commis par les soldats russes en Ukraine, avant d’appeler à créer des environnements sûrs dans les pays de transit et de destination des réfugiés pour prévenir les risques de traite des êtres humains. 

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a indiqué que son pays, en tant que coprésident du Groupe des amis de la réforme du secteur de la sécurité (RSS), souhaite rappeler la résolution 2151 (2014) du Conseil de sécurité, qui souligne l’importance d’une participation des femmes et de leur plein engagement dans le secteur de la sécurité afin de mettre en place des institutions inclusives, responsables et légitimes qui protègent plus efficacement les populations et favorisent une paix et un développement durables.  Le représentant a ensuite soutenu l’approche du Secrétaire général fondée sur la priorité accordée aux droits et à la dignité des survivantes.  Les États Membres doivent donc continuer à travailler en étroite coopération avec l’ONU afin de lutter contre l’impunité de tous les crimes sexuels, a-t-il recommandé en demandant par ailleurs au Conseil de sécurité d’examiner attentivement la possibilité de saisir la CPI lorsque des crimes sexistes et des violences sexuelles sont commis.  La responsabilité première de la poursuite de ces crimes incombe toutefois aux États, qui devraient adopter des législations pénales suffisamment robustes, a-t-il rappelé, y voyant un des meilleurs moyens de prévention. 

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a déclaré que le monde a désormais connaissance des crimes perpétrés par Daech contre le peuple iraquien et en particulier contre ses femmes et ses filles.  Évoquant les cas de décapitation, d’esclavage sexuel, de mariage forcé, d’atteintes aux droits humains et de mépris de la dignité humaine imputés au groupe terroriste, il a indiqué que ces crimes peuvent être constitutifs de crime de génocide et de crimes contre l’humanité.  En dépit de ces calamités, a souligné le représentant, l’Iraq ne ménage aucun effort pour maintenir la paix  et assurer la justice pour les survivants et survivantes.  Le Parlement a ainsi adopté en mars dernier une loi sur les rescapés yézidis, qui est la première du genre.  Cette législation prévoit notamment la recherche des personnes enlevées et la création d’un directorat pour les victimes, a-t-il précisé, ajoutant qu’aucune amnistie ne peut être accordée aux auteurs des crimes d’enlèvement.  Afin de garantir la confidentialité des demandes des rescapés, une plateforme en ligne a également été mise en place pour les recevoir.  Le délégué s’est félicité que des éléments de Daech comparaissent à présent devant des tribunaux nationaux, ce qui s’inscrit dans l’engagement pris par l’Iraq d’assurer la responsabilisation et de rendre la justice pour les victimes.  Dans le même temps, a-t-il encore indiqué, le pays renforce son système judiciaire et s’apprête à recevoir les éléments de preuve de l’UNITAD pour les utiliser dans un tribunal spécialisé. 

M. GVARAM KHANDAMISHVILI (Géorgie) a réaffirmé sa solidarité pleine et entière avec l’Ukraine, condamnant l’agression militaire « non provoquée, injustifiée et de grade ampleur » de la Fédération de Russie contre son voisin.  Dénonçant les attaques contre les civils et les infrastructures civiles et les cas de violences sexuelles perpétrées par des forces russes, il a jugé urgent de mener une enquête impartiale et de demander la reddition de comptes.  C’est essentiel pour les rescapés et pour la dissuasion.  Pour sa part, a poursuivi le délégué, la Géorgie a appliqué un plan d’action national pour promouvoir les droits des femmes et l’égalité entre les sexes, et pour lutter contre la violence sexuelle et sexiste. De plus, le pays forme à ces questions son personnel de maintien de la paix en phase de pré-déploiement.  Enfin, le délégué a rappelé que l’occupation illégale de régions géorgiennes par la Russie reste un obstacle pour la mise en œuvre des droits des femmes et des filles qui se voient souvent privées de leurs libertés fondamentales, comme le droit de se déplacer. 

Mgr ROBERT DAVID MURPHY (Saint-Siège) a dénoncé l’utilisation de la violence sexuelle comme tactique de guerre et déploré que cette violence soit souvent passée sous silence. Il a appelé à documenter l’ampleur de ce « crime caché » afin que les victimes reçoivent un soutien nécessaire, appelant à « briser le silence. »  Il a demandé que la douleur et la force des rescapées soient pleinement reconnues.  Enfin, il a invité le Conseil à combattre la violence sexuelle commise par le personnel onusien sur le terrain et demandé un meilleur établissement des responsabilités pour les actes de violence sexuelle. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a considéré que, pour mettre fin à l’impunité, tous les acteurs étatiques et non étatiques impliqués dans la commission d’atrocités doivent être tenus pour responsables de leurs actes.  Ce travail commence par l’adoption d’une législation solide, le renforcement des systèmes judiciaires et la garantie pour les victimes et les survivants d’un accès à une justice rapide et équitable et du droit à des réparations complètes.  La représentante a appelé à promouvoir le caractère progressif du Statut de Rome de la CPI en adoptant une approche intersectionnelle dans toutes les procédures impliquant des violences sexuelles dans les conflits armés.  Elle a également jugé importante de modifier la vision réductrice et binaire avec laquelle la violence sexuelle dans les conflits armés a été abordée.  Pendant trop longtemps, les garçons, les hommes et les personnes LGBTQ ont été relégués dans les discussions sur cette question, a relevé la représentante qui a demandé au Conseil d’élargir la conversation afin que toutes les victimes soient prises en compte. Une approche centrée sur les victimes et une perspective transversale de genre sont essentielles pour garantir une responsabilisation plus inclusive et efficace, a insisté la déléguée tout en notant que l’invisibilisation perpétue l’injustice et sous-tend l’impunité. 

M. MICHAL MIARKA, Chef du Bureau de liaison de l’Organisation du Traité de lAtlantique Nord (OTAN) auprès des Nations Unies, a expliqué que l’OTAN n’a cessé depuis l’adoption de la déclaration du Sommet de Chicago en 2012 de démontrer son engagement à prévenir et à répondre aux violences sexuelles liées aux conflits.  En 2015, l’OTAN a élaboré des directives militaires spécifiques, actuellement en cours de révision, sur la prévention et la réponse à ce type de violence.  Les directives visent à fournir une orientation stratégique et améliorer la réactivité.  Le personnel de l’OTAN est tenu d’empêcher la violence sexuelle liée aux conflits dans les zones il opère et des outils analytiques sont disponibles pour comprendre le niveau de risque, collecter et communiquer les informations.  Il s’agit aussi de coopérer avec les acteurs locaux et internationaux, y compris l’ONU.  Les Alliés ont également approuvé en 2021 la première politique de l’OTAN sur les violences liées aux conflits.  Cette politique décrit les actions de prévention et de riposte de l’OTAN dans toutes les opérations, missions et activités, a expliqué le représentant. 

M. ANDREAS HADJICHRYSANTHOU (Chypre) a considéré que prioriser la prévention exige une stratégie multidimensionnelle pour s’attaquer aux causes profondes du conflit lui-même.  Investir dans le renforcement de l’État de droit et des institutions de l’État, dans la stabilité économique, les infrastructures et le développement social, ainsi que s'attaquer aux inégalités profondément enracinées et garantir la participation des femmes dans tous les domaines, sont au cœur d’une telle approche. 

Soulignant ensuite l’importance de donner la primauté aux survivantes, le représentant a indiqué qu’elles doivent devenir les architectes des stratégies de lutte contre la violence sexuelle dans les conflits.  Les situations post-conflit sont aussi l’occasion de transformer les structures sociétales de manière à garantir une meilleure jouissance des droits fondamentaux des femmes.  Pourtant, a-t-il déploré, les femmes continuent d'être exclues des efforts de prévention des conflits, de la transition post-conflit et des processus de reconstruction.  Les sociétés post-conflit se rétablissent plus efficacement lorsque les femmes participent aux efforts de reconstruction et que leur expérience est prise en compte, a rappelé le représentant, pour qui la réponse doit inclure les femmes dans l’élaboration de solutions. 

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a rappelé que son pays a connu une guerre civile sanglante au cours de laquelle la violence sexuelle, y compris le viol, le viol collectif, l’esclavage sexuel et le mariage forcé ont été utilisés comme tactiques de guerre par les factions belligérantes.  La Sierra Leone est donc pleinement consciente de l’impact horrible de ces crimes sur la vie et les moyens de subsistance des femmes et des filles, et n’épargne aucun effort pour combattre ce fléau, a-t-il assuré.  Il a ainsi indiqué qu’entre autres mesures, son pays a modifié la loi sur la violence sexuelle, créé un tribunal spécial sur le viol et mis en place des centres à guichet unique offrant des services aux victimes d’abus sexuels.  Sur cette base, a-t-il poursuivi, le Président de la Sierra Leone a lancé en septembre 2021 un appel à la solidarité mondiale sur l’accès à la justice des victimes de violences sexuelles. 

Le délégué a émis l’espoir que le projet de résolution reprenant cet appel sera adopté par l’Assemblée générale.  Ce texte, a-t-il souligné, vise non seulement à souligner la gravité de la violence sexuelle, mais aussi à la dénoncer comme une menace à la paix et à la sécurité internationales.  Il vise aussi à rappeler que les survivants méritent dignité et justice.  Il reste beaucoup à faire aux niveaux national, sous-régional, régional et mondial pour mettre pleinement en œuvre les résolutions historiques 1325 (2000) et 1820 (2008), et contrer ainsi la violence sexuelle sous toutes ses formes et manifestations, a-t-il professé. 

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a réclamé la mise en place d’un système judiciaire fiable au niveau national pour lutter contre l’impunité, par souci d’appropriation.  Le Gouvernement indonésien a d’ailleurs promulgué une loi sur la protection des femmes et des filles contre la violence sexuelle, suivie d’un décret ministériel d’application.  Le représentant a aussi défendu une approche qui inclut la participation pleine et égale des femmes dans tous les processus décisionnels, y compris dans les opérations de paix de l’ONU.  Il a en effet regretté la faible représentation des femmes Casques bleus et conseillé au Conseil de sécurité de prendre en considération le lien existant entre les soldates de la paix et le nombre des cas de violence sexuelle.  Il a souligné l’importance de la coopération internationale pour renforcer les capacités des États de lutter contre l’impunité et de garantir la justice pour les crimes de violence sexuelle. 

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh) a rappelé que deux millions de femmes dans son pays ont été violées lors de la guerre d’indépendance.  Il a dénoncé les crimes commis contre les femmes rohingya et estimé que l’établissement des responsabilités est crucial pour le retour des Rohingya dans l’État rakhine.  Il a aussi indiqué que son pays a augmenté le nombre de femmes déployées sous bannière onusienne.  Le délégué a insisté sur l’importance de système d’alerte précoce pour lutter contre la violence sexuelle et de permettre aux femmes de participer davantage aux processus de paix.  Enfin, il a noté que la Commission de consolidation de la paix a un rôle clef à jouer s’agissant de la promotion de l’égalité entre les genres. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a décrit la reconnaissance par le Conseil de la violence sexuelle en tant que tactique de guerre comme une étape importante dans la reconnaissance de l’impact des conflits sur les femmes.  Afin de mieux répondre à ce problème aujourd’hui, la communauté mondiale doit faire un effort concerté pour faire passer la violence sexuelle liée aux conflits sur le premier plan. Tous les États Membres ont besoin d’une formation, d’une recherche et d’un partage d’informations adéquats, visant à rendre les techniques d’intervention mieux comprises et accessibles, a-t-il fait valoir.  Le représentant a dénoncé certaines pratiques qui encouragent les abus sexuels par le biais d’une camaraderie mal placée, celle-ci aidant à protéger la réputation du délinquant mais entraînant la stigmatisation et l’ostracisme du plaignant.  Il a recommandé que le personnel chargé d’enquêter sur de tels crimes soit formé pour acquérir des compétences pointues et le souci de l’intégrité.  Enfin, il a appelé à ne pas se limiter aux infractions sexuelles mais à étendre la réponse collective aux auteurs de violence domestique et de harcèlement moral. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a dénoncé les violences infligées aux femmes par l’Arabie saoudite dans le cadre du conflit armé qui sévit dans son pays depuis 2014.  Son gouvernement a pour sa part établi une stratégie pour accroître la participation des femmes à la prévention de l’extrémisme et de la violence au niveau national, et œuvré à la sensibilisation des cadres de la police et de l'armée pour prévenir la violence sexiste.  Le Yémen s’efforce aussi de fournir des services de soutien sanitaire, psychologique et juridique aux femmes et aux filles victimes de violations et de violences, a poursuivi le représentant, qui a indiqué que son pays a également soutenu les efforts d’un comité national chargé d’enquêter sur les allégations de violations des droits humains perpétrées sur l'ensemble du territoire yéménite, y compris les violations contre les femmes. 

M.  ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a condamné dans les termes les plus forts les atrocités et les graves violations du droit international commises par la Fédération de Russie en Ukraine.  Les attaques des forces russes, permises par le Bélarus, contre des personnes et des infrastructures civiles ont horrifié le monde, a souligné le représentant, selon lequel les récits et témoignages recueillis à Boutcha confirment l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre par la Russie.  Ces faits, a-t-il insisté, pourraient être constitutifs de crime de génocide et de crimes contre l’humanité.  C’est pourquoi la Lettonie a lancé une procédure pénale pour tenir les auteurs de ces crimes comme responsables et a versé 100 000 euros supplémentaires à la CPI pour l’aider dans la mise en place de ses instructions sur l’Ukraine. 

Pour le délégué, le Conseil de sécurité a la responsabilité d’agir rapidement pour protéger les civils en prévenant les atrocités.  Or, en pratique, ses délibérations ne créent pas de solution, en particulier lorsque les atrocités ont déjà été commises, a-t-il constaté.  Le représentant a appelé à maximiser l’efficacité du Conseil afin qu’il permette la responsabilisation et la poursuite des crimes les plus graves.  Il a aussi appelé à un renforcement des synergies entre le Conseil et la Commission de consolidation de la paix (CCP) ainsi qu’à la mise en œuvre effective de la résolution 1325 (2000) et des résolutions de suivi pour lutter plus efficacement contre la violence sexuelle liée aux conflits. 

M. JOCHEN HANS-JOACHIM ALMOSLECHNER (Autriche) a estimé que la CPI est l'instrument international le plus efficace et le plus pertinent pour aider les États Membres à établir la responsabilité des auteurs de violences sexuelles et mettre fin à l'impunité. Dans ce contexte, il a salué la première condamnation internationale pour grossesse forcée, rendue en février 2021.  Le délégué a exhorté le Conseil de sécurité à traiter les violences sexuelles liées aux conflits dans toutes les situations spécifiques à chaque pays et à appliquer le régime de sanctions aux auteurs de telles violences.  Il a également relevé que ces crimes n'affectent pas seulement les femmes et les filles. Les hommes et les garçons, et les personnes ayant une orientation sexuelle et une identité de genre diverses, font également partie des nombreuses victimes, a rappelé le délégué qui a appelé la communauté internationale à ne pas oublier le sort de ces victimes. Le délégué a ensuite invité les délégations à participer, le 9 mai à New York, à la publication d’une étude de l'Institut Ludwig Boltzmann et de l'Université de Princeton sur le lien entre la violence sexuelle liée aux conflits contre les hommes, les garçons, et les personnes LGBTI+ et la traite des êtres humains. 

M.  AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a dit que les violences sexuelles liées au conflit sont impardonnables.  Leurs auteurs doivent être tenus responsables.  L’État est le premier responsable de prévention de la violence à l’égard des femmes.  Pour les États dont la capacité est limitée, le soutien international pour s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits et de protéger les femmes et les filles est nécessaire.  Ils doivent veiller à leur inclusion dans l’appareil de l’État et la prise de décisions en matière de prévention et de résolution des conflits.  Le Népal, qui s’est engagé à accroître le nombre de femmes soldats de la paix, est attaché à une politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles.  Le Gouvernement s’efforce de maintenir l’objectif d’un scénario zéro cas de violences sexuelles dans ses contingents. 

Pays qui est sorti d’un conflit, le Népal est le premier pays d’Asie du Sud et le deuxième d’Asie à adopter le Plan d’action national pour la mise en œuvre des résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008).  Le deuxième plan est en cours de finalisation et comprend des mesures visant à répondre aux préoccupations des victimes de violences sexuelles et des enfants nés de viols en temps de guerre.  Le Népal s’est engagé à résoudre les cas de violence sexuelle liée au conflit afin d’assurer la justice pour les victimes grâce à un processus dirigé par deux commissions de justice transitionnelle: la Commission Vérité et réconciliation et la Commission d’enquête sur les personnes disparues. 

Mme NATALIIA MUDRENKO (Ukraine) a fustigé la cruauté inhumaine des envahisseurs russes qui ont transformé les vies de milliers de femmes et de filles en immenses cauchemars.  Alors que les autorités ukrainiennes parlent de centaines de cas de viols, la représentante s’est inquiétée des menaces auxquelles font face les victimes qui ont besoin de soins d’urgence et d’empathie.  « Malheureusement, beaucoup de femmes ont été tuées par des soldats russes qui ont essayé de cacher leurs crimes », a-t-elle dit en regrettant qu’aucune enquête n’ait été diligentée par la partie russe malgré la multiplication des témoignages. Elle a demandé des enquêtes transparentes et exhaustives sur tous les crimes commis en Ukraine, dont les crimes à caractère sexuel.  Elle a salué l’initiative du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général sur les violences sexuelles en conflits armés pour collaborer avec le Gouvernement ukrainien pour prévenir et riposter contre ces types de violence et renforcer les démarches axées sur les rescapées. Elle a dit l’importance d’une coopération avec les ONG en matière de suivi psychologique des victimes avant d’assurer que tous les auteurs seront poursuivis. 

M. JORGE VIDAL (Chili) a considéré que la violence sexuelle dans les conflits représente un obstacle supplémentaire à la fin des cycles de violence, où les survivantes et leurs familles doivent souvent surmonter le stress post-traumatique et stigmatisation sociale sans garantie d’accès à la justice ou de réparations.  Pour cette raison, il est du devoir de la communauté internationale de garantir l’accès des survivants – et en particulier des femmes et des filles – à la justice et à des services juridiques complets avec des mécanismes accessibles et confidentiels afin que les victimes puissent signaler les incidents de violence. En outre, il est essentiel de garantir l’accès à des services spécialisés complets, y compris des services psychosociaux, des soins, des services de santé sexuelle et reproductive, et des moyens de subsistance adaptés à leurs besoins et fournis sans discrimination, a encore préconisé le délégué. 

M.  MOHAMMED ABDULAZIZ H. ALATEEK (Arabie saoudite) a appelé la communauté internationale à se montrer plus solidaire pour donner aux victimes de violences sexuelles une protection et des voies de recours.  Il a également jugé essentiel de prendre en compte la situation des femmes dans les communautés vulnérables afin d’évaluer leurs besoins humanitaires.  Face aux conflits, qui s’ajoutent à la crise économique mondiale et à la pandémie de COVID-19, il apparaît urgent, selon lui, de mettre en place une stratégie globale afin de renforcer le rôle des femmes et leur offrir l’appui qu’elles méritent, en particulier celles qui tentent de construire leur société et d’assurer plus de résilience.  Le représentant a indiqué que le Centre du roi Salman pour les secours humanitaires contribue à des projets de cet ordre dans des zones de catastrophe et de conflit armé.  À ce jour, il a mis en œuvre 788 projets dans près de 80 régions du monde, venant en aide à quelque 109 millions de femmes pour un investissement total de 520 millions de dollars, a-t-il détaillé.  Outre l’autonomisation et le renforcement des capacités dans le domaine de l’éducation, le Centre fournit des services psychosociaux aux femmes victimes de violence, notamment les réfugiées.  Le délégué a ensuite dénoncé les violations commises par les milices houthistes, lesquelles ont fait un grand nombre de victimes, à commencer par les femmes et les filles du Yémen.  Cela impose de prendre des mesures pour lutter contre la violence sexuelle dans les conflits et de responsabiliser les auteurs de ces crimes, a-t-il souligné en invitant la communauté internationale, et notamment les bailleurs de fonds, à renforcer ces efforts. 

M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a mis l’accent sur les défis auxquels son pays a été confronté depuis l'attaque « traître » contre sa Force de défense nationale, le 4 novembre 2020.  D’après lui, des femmes et des enfants ont été victimes de violences « atroces », « systématiquement perpétrées par le Front populaire de libération du Tigré (TPLF) ».  Le Gouvernement éthiopien prend au sérieux toutes les allégations de violations des droits humains et fait preuve d’un haut niveau de responsabilité et de diligence, a assuré le délégué. Outre ses propres enquêtes, a-t-il précisé, la Commission éthiopienne des droits de l'homme a, le 24 mars 2021, conclu un accord avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pour mener des enquêtes conjointes.  Soulignant que les gouvernements ont la responsabilité première d’assurer le respect des droits de l’homme, il a appelé à aborder « avec soin » les violations des droits humains liées aux conflits.  Nous avons vu que les droits de la personne sont politisés et instrumentalisés contre des pays comme le mien, a-t-il signalé. 

Mme  ANNA KARIN ENESTRÖM (Suède), s’exprimant au nom du Groupe restreint LGBTI, a souligné la nécessité de répondre aux besoins des rescapés LGBTI de violences sexuelles, y compris en ce qui concerne l’accès à la justice.  Elle a demandé une pleine participation de ces rescapés aux processus de prise des décisions qui les affectent, y compris celles relatives à la justice de transition.  Elle a souligné la nécessité de combattre les discriminations sur la base de l’orientation sexuelle ou bien encore de l’identité de genre.  Les États Membres doivent reconnaître que tous les rescapés, y compris les personnes LGBTI, sont des individus uniques.  Ils doivent prendre en compte l’intersectionnalité des vulnérabilités, a conclu la déléguée. 

M. JONGIN BAE (République de Corée) a dit l’importance de privilégier une approche centrée sur les victimes de violences sexuelles liées aux conflits et de veiller à ce qu’elles bénéficient d'un accès non discriminatoire à tous les services dont elles ont besoin.  Pour mettre fin à la culture de l’impunité, le représentant a appelé à protéger les survivants et témoins de représailles dans le cadre d’un mécanisme efficace de responsabilisation.  Il a également appelé à intensifier les efforts pour s’attaquer aux causes profondes des violences sexuelles, jugeant impératif de surmonter les inégalités structurelles entre les sexes et d'assurer l'égalité des opportunités pour les femmes et les filles.  

Après avoir souligné que la participation des femmes au maintien de la paix est essentielle pour garantir des environnements sûrs, propices et sensibles au genre, le représentant a vanté l’importance de la Conférence ministérielle des Nations Unies sur le maintien de la paix que la République de Corée a accueilli en 2021.  Il a assuré que son pays continuera d’augmenter le nombre d'observatrices militaires et de femmes officiers d'état-major servant dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour atteindre le taux de 25 % d’ici à 2028.  

Mme ZAKIA IGHIL (Algérie) a souligné que la Constitution de son pays, appuyée par un dispositif législatif complet, vise à prévenir toute forme de violence contre les femmes dans les sphères publique et privée.  En outre, un plan national d’action recense les priorités en matière de promotion des femmes de l’Algérie qui, dans le cadre de la Ligue des États arabes, a dirigé les efforts qui ont abouti à la mise en place d’un comité d’urgence pour les femmes arabes.  Les femmes étant les principales victimes des crises en Afrique, son pays a exigé leur participation aux travaux de l’Union africaine et aux processus de consolidation de la paix. Pour garantir la fin de la violence sexuelle conformément au droit international, il est nécessaire de mettre un terme à l’impunité et de promouvoir la responsabilisation et la justice.  À cette fin, a-t-elle ajouté, les efforts devraient se fonder sur les droits humains des victimes, être larges dans leur portée, et sans discrimination.  Il faut balayer les obstacles pour que les femmes leaders des communautés puissent être artisanes de la paix.   La déléguée de l’Algérie a par ailleurs renvoyé le Conseil aux violences sexuelles - documentées - utilisées par le Maroc au Sahara occidental, évoquant le cas particulier de Mme Sultana Khaya. 

M. OMAR CASTAÑEDA SOLARES (Guatemala) a déploré l’utilisation des violences sexuelles comme tactique de guerre pour instiller la terreur.  Il a redit l’importance d’éradiquer totalement ce phénomène, y compris la traite et l’esclavage sexuel pratiqués pour compenser les combattants des groupes extrémistes.  Il a constaté que malgré les condamnations répétées et les appels lancés à l’intention des parties aux conflits armés, de telles violations continuent de se produire.   Elles sont devenues endémiques dans certaines situations, atteignant des degrés de brutalité sans précédent, y compris contre des enfants, à qui il faut garantir à ces derniers une assistance médicosociale. Le délégué a souligné le rôle important que les femmes doivent jouer dans la consolidation de la paix.  La communauté internationale doit balayer les obstacles qui entravent leur représentation à tous les niveaux de prise de décision.  Il a recommandé que les questions liées à la problématique du genre soient prises en compte dans toutes les délibérations du Conseil de sécurité.  Enfin il a vu dans la CPI « le cadre international le plus progressiste en ce qui concerne les crimes de guerre ». 

M.  TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a dénoncé les activités terroristes de Boko Haram qui a commis des violences contre les femmes et les filles.  Le Gouvernement nigérian, qui s’est toujours efforcé de garantir la liberté de religion, coopère avec l’ONU et d’autres partenaires internationaux pour améliorer la protection des populations contre ces atrocités.  Insistant sur la détermination de son pays de traduire en justice les auteurs des violences, le représentant a ajouté que le Nigéria s’efforce de prendre en charge les victimes des violences sexuelles, des viols, des enlèvements, des mariages forcés, de l’esclavage sexuel et autres violations commises par Boko Haram.  Des mesures juridiques et médicales ont été prises en ce sens et le Nigéria s’engage en outre à promouvoir la participation des femmes aux processus décisionnels et à prendre en compte leur point de vue sur la sécurité.  La libération de toutes les filles enlevées demeure au centre des préoccupations du Gouvernement, a affirmé le représentant. 

Le représentant du Maroc a repris la parole pour accuser la délégation algérienne de vouloir induire la communauté internationale en erreur par des informations sans fondement et des falsifications. Le représentant a nié à Sultana Khaya tout statut de défenseuse des droits humains. Cette personne, a-t-il affirmé, n’a rien à voir avec ces droits.  Elle travaille pour l’Algérie et son groupe séparatiste, le Front Polisario, pour instrumentaliser la question du Sahara marocain, en se présentant comme une victime de violations. En réalité, a poursuivi le représentant, Sultana Khaya prône la lutte armée pour laquelle elle a suivi une formation dispensée par l’armée algérienne et les « mercenaires » du Polisario. Le représentant a brandi une photographie de Sultana Khaya munie d’une mitrailleuse et vêtue d’un treillis.  Contrairement à ce qu’affirme l’Algérie, cette personne n’est nullement soumise à des abus sexuels ou à un harcèlement de la part du Maroc.  Mme Mary Lawlor, Rapporteure spéciale sur les défenseurs des droits, s’est d’ailleurs définitivement dessaisi du cas de Sultana Khaya car elle manipule les droits à des fins politiques, a dit le représentant.  Rappelant enfin que le chef du Polisario est poursuivi en Espagne pour crimes contre l’humanité, il a jugé que l’Algérie est « mal placée » pour parler de la question des droits de l’homme au Sahara marocain. 

À son tour, la représentante de l’Algérie a dénoncé les «  mensonges  » du Maroc au sujet des enfants soldats dans les camps, y voyant une tentative désespérée visant à diffamer les habitants du Sahara occidental.  Elle a indiqué que nombre d’enfants au Maroc souffrent de la pauvreté et sont en situation de décrochage scolaire.  «  Le délégué Maroc ignore la réalité dans son propre pays. » 

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