Session de 2022,
11e séance - matin
ECOSOC/7077

L’ECOSOC examine les progrès de la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, dans un monde qui compte 1,8 milliard de sans-abris

Comment loger 1,8 milliard de sans-abris dans un monde qui compte d’innombrables grands immeubles résidentiels d’une valeur de 2 100 milliards de dollars?  Le Conseil économique et social (ECOSOC) devait apporter une réponse à cette question ce matin à sa réunion d’examen du rapport quadriennal du Secrétaire général sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Les discussions d’aujourd’hui alimenteront les débats de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le même sujet, la semaine prochaine.

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, le Président de l’Assemblée générale et le Président de l’ECOSOC ont tous insisté sur le fait que le Nouveau Programme pour les villes a des liens évidents avec la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Mais ces derniers mois, la pandémie de COVID-19 a aggravé les inégalités existantes, a noté Mme Amina J. Mohammed rappelant que le Nouveau Programme est là pour promouvoir des mesures visant à sécuriser les lois foncières, à promouvoir les logements abordables, à créer des espaces publics, à améliorer la mobilité et à fournir des services de base accessibles à tous. 

Le développement durable dépendra de la gestion de l’urbanisation, a déclaré M. Collen V. Kepapile, Président de l’ECOSOC, en faisant remarquer que la plupart des objectifs de développement durable (ODD) ont des cibles qui dépendent des actions prises au niveau local.  Pour la Présidente de l’Assemblée du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), l’urbanisation est l’une des forces transformatrices de notre époque.  Mme Martha Delgado a souligné la nécessité de mener des actions conjointes pour développer une planète meilleure et permettre la subsistance de l’espèce humaine: il est temps de migrer vers l’ère des villes intelligentes, a-t-elle appelé de ses vœux.

La Directrice exécutive d’ONU-Habitat, qui a présenté le rapport du Secrétaire général, a annoncé que 30 pays seulement ont envoyé leurs données pour y être inclus.  Il faut redoubler d’efforts pour aider les États Membres à intégrer l’urbanisation durable dans leurs politiques de développement, a-t-elle conseillé, parce que les principes généraux du Nouveau Programme pour les villes sont des outils concrets, pour les pays, pour atteindre les ODD et protéger les écosystèmes.

Dans la première table ronde sur la mise en œuvre de ce programme, les délégations et leurs invités devaient aborder la « question qui fâche » de son financement, selon le Secrétaire principal du Ministère du logement du Kenya.  Alors que certains intervenants, comme El Salvador, réclamaient l’intervention financière des banques privées, le maire de la ville mexicaine de Quateraro a mis en garde contre les spéculations immobilières sur les propriétés foncières et l’espace urbain.  La Directrice mondiale de The Shift, un institut urbain canadien, a dénoncé le fait que le monde compte encore 1,8 milliard de sans-abris aux côtés des grands immeubles résidentiels des grandes villes dont elle a estimé la valeur à 2 100 milliards de dollars.  Cela a fait dire à la responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC, organisation indienne, qu’il est « cher d’être pauvre ».  D’où l’importance vitale d’adopter des politiques foncières pour les pauvres et les démunis, a-t-elle plaidé.

« La stratégie à l’échelle du système des Nations Unies pour aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes », thème de la deuxième table ronde, a vu défiler plusieurs organismes onusiens qui ont décliné ce qu’ils font sur la question.  ONU-Habitat a rappelé que la stratégie lancée en 2019 invite les entités de l’ONU à travailler avec lui pour intégrer les questions urbaines dans leurs stratégies respectives.  Elle vise aussi à améliorer l’exécution de leurs mandats dans un monde qui s’urbanise.  Pour que le Nouveau Programme pour les villes réussisse, la santé des populations des villes doit être au centre des préoccupations, a plaidé pour sa part la représentante de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). 

Enfin, ancrant leur déclaration dans l’actualité, l’Union européenne et la Pologne ont dénoncé la destruction des villes et des patrimoines de l’Ukraine où la guerre a déplacé 12 millions de personnes.  Il faut dès à présent réfléchir à la reconstruction des villes détruites par la guerre, a exhorté la Pologne.  

« URBANISATION DURABLE ET APPLICATION DU NOUVEAU PROGRAMME POUR LES VILLES »

Déclarations liminaires

M. COLLEN V. KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a dit que la question de l’urbanisation durable est centrale dans un monde où plus de la moitié de la population vit dans les villes et où la majorité de la croissance démographique se retrouvera dans les villes à l’avenir, soit en raison de la croissance naturelle, soit en raison des migrations.  Le développement durable dépendra de la gestion de l’urbanisation, a déclaré le Président pour qui cette réunion est une occasion d’examiner l’urbanisation durable à travers le prisme des inégalités et le soutien apporté par le système de développement des Nations Unies à la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  Les discussions d’aujourd’hui doivent s’inscrire dans le contexte de la réponse et du relèvement après la COVID-19 et d’autres défis mondiaux tels que les changements climatiques, la perte de biodiversité et la pollution. 

Dans les pays du Sud, les 1,2 milliard de personnes vivant dans des établissements informels et des bidonvilles ont eu du mal à mettre en œuvre les mesures préventives de transmission de la maladie, a-t-il indiqué en parlant ensuite des pays du Nord où tout le monde n’a pas pu s’adapter au travail à distance et où les travailleurs faiblement rémunérés ont été exposés à des risques plus élevés.  La dépendance à l’égard de l’aide sociale et de la protection sociale, lorsqu’elle était disponible, s’est multipliée, a-t-il aussi relevé en soulignant que beaucoup sont entrés dans les rangs des sans-abris.  En réponse, les gouvernements et les villes ont fourni des services dans des zones mal desservies, des loisirs et des moyens de subsistance.  Certains ont offert un abri aux sans-abris.  Poursuivant, le Président a ajouté que de nouveaux modèles urbains à l’échelle humaine ont émergé accordant l’attention aux piétons et à l’utilisation des propriétés foncières.  Il faut tirer les leçons de ces expériences et trouver des moyens novateurs de s’attaquer aux causes des inégalités, a-t-il exhorté.

Le Président a rappelé que la réunion examinera aussi l’appui apporté par le système des Nations Unies pour le développement aux pays dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Dans l’ensemble, l’ONU s’est avérée mieux préparée à aider les pays à surmonter la crise, à apporter une réponse sanitaire et humanitaire solide et à soutenir la mise en œuvre du Programme 2030 dans le cadre des efforts de relèvement, a-t-il indiqué.  Il a aussi dit que les impacts des changements climatiques sur les villes et les infrastructures essentielles ne peuvent être ignorées.  Il a exhorté ONU-Habitat à travailler avec les parties prenantes concernées pour explorer le rôle des données, de la science, de la technologie et de l’innovation dans l’atténuation et l’adaptation afin de construire des villes résilientes.  Cette réunion est également une occasion d’apprendre davantage sur la mise en œuvre de la stratégie à l’échelle du système des Nations Unies sur le développement urbain durable et sur la façon dont elle permet à l’ONU d’aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes.

M. ABDULLAH SHAHID, Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, a déclaré que la discussion d’aujourd’hui sur les inégalités et le soutien du système des Nations Unies au Nouveau Programme pour les villes s’aligne sur le mandat de l’ECOSOC en tant que coordonnateur, organisateur et organe spécialisé pour les dialogues politiques sur le développement.  « Grâce à ce mandat, l’ECOSOC joue un rôle important en nous aidant à atteindre les objectifs de développement durable », a insisté M. Shahid avant de souhaiter que le Nouveau Programme pour les villes guide les efforts de tous pour lutter contre les inégalités en matière d’urbanisation, tant dans les pays en développement que dans les pays développés.

Le Président de l’Assemblée générale a estimé que l’universalité de ce programme découle de ses liens non seulement avec l’objectif de développement durable (ODD) no 11 relatif aux « villes et communautés durables », mais aussi avec l’ensemble des ODD.  Il a dit que la réalisation des objectifs du Programme accélérera les progrès en matière de bien-être et de sécurité humaine à l’échelle mondiale et en matière de climat.  Il a remercié le Président de l’ECOSOC pour sa participation aux travaux du comité consultatif sur l’urbanisation durable qui sont au cœur des préparatifs de la réunion de haut niveau.  Enfin, il a estimé que la réalisation des objectifs du Nouveau Programme pour les villes nécessitera un effort global pour mobiliser des millions de professionnels de l’urbanisation du monde entier - ingénieurs, architectes, urbanistes et géomètres, entre autres.  « En travaillant à leurs côtés, les États Membres et les parties prenantes devraient forger les partenariats nécessaires pour répondre efficacement à nos aspirations », a conclu M. Shahid avant d’espérer que les délibérations d’aujourd’hui et de la semaine prochaine permettront de tirer parti des systèmes des Nations Unies aux niveaux local, régional et mondial, pour y parvenir.

Selon Mme AMINA J MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) est étroitement liée à l’urbanisation.  Le Nouveau Programme pour les villes, a-t-elle rappelé, comprend des mesures visant à sécuriser les lois foncières, à promouvoir les logements abordables, à créer des espaces publics, à améliorer la mobilité et à fournir des services accessibles à tous.  Notant que la pandémie de COVID-19 a aggravé les inégalités existantes, Mme Mohammed a ajouté que la pandémie a créé de nouvelles vulnérabilités dans les villes, d’où l’importance du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a fait remarquer que ce document a mis le partenariat et l’intégration au cœur de tous les efforts visant à accélérer la mise en œuvre des réformes.  Le Nouveau Programme appelle à des pratiques qui offrent aux équipes de pays des Nations Unies la possibilité d’établir de nouvelles méthodes de travail.  Il souligne l’importance d’une approche systémique qui rassemble différents secteurs et acteurs, a-t-elle indiqué.  

Elle a rappelé que la Coalition Local2030 pour la Décennie d’action cherche à mobiliser le soutien des gouvernements, du secteur privé, des autorités locales et des ONG ainsi que celui du système des Nations Unies pour coordonner l’action au niveau local afin d’accélérer la réalisation des ODD.  La Coalition repose sur le principe que les personnes les plus proches des défis du développement durable sont les mieux placées pour les résoudre et que des partenariats à plusieurs niveaux et multipartites sont essentiels pour garantir des résultats, a rappelé la Vice-Secrétaire générale.  Le niveau local est l’espace le plus approprié pour relier tous les points, a-t-elle aussi noté en soulignant que les villes peuvent être le fer de lance d’innovations pour combler les inégalités, mener des actions climatiques et assurer une reprise verte et inclusive après la COVID-19.  La Vice-Secrétaire générale a, pour conclure, exhorté à soutenir la Coalition et à faire du Nouveau Programme pour les villes une réalité. 

Mme MARTHA DELGADO, Présidente de l’Assemblée du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a jugé essentiel de revitaliser la résilience économique des villes.  Les politiques publiques urbaines sont la clef pour faire face aux défis tels que les pandémies ou les crises futures et, par conséquent, pour savoir que nous pouvons répondre dans ces cas par des actions institutionnelles durables, a-t-elle relevé.  Rappelant que l’urbanisation est l’une des forces transformatrices de notre époque, elle a souligné l’importance d’un multilatéralisme capable de mener des actions conjointes pour développer une planète meilleure et permettre la subsistance de l’espèce humaine.  « Il est temps de migrer vers l’ère des Smart Cities », a-t-elle scandé en appelant à promouvoir des « enveloppes architecturales autosuffisantes, équitables, égalitaires et inclusives ».  

Mme Delgado a invité à concevoir les nouveaux centres urbains en prenant compte des défis liés aux changements climatiques, au surpeuplement et à l’exploitation des ressources.  Elle a conclu que les actions que nous menons maintenant doivent conduire à une nouvelle intégration sociale, fondée sur les principes de prospérité, de transformation, d’adaptation, d’équité et de respect des droits de l’homme.   

Mme MAIMUNAH MOHD SHARIF, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a présenté le rapport quadriennal du Secrétaire général sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes pour la période allant de 2018 à 2021 dans lequel 30 pays seulement ont soumis leurs données.  Le Secrétariat doit redoubler d’efforts pour aider les États Membres à intégrer l’urbanisation durable dans leurs politiques de développement.  Le rapport exhorte à utiliser les principes généraux du Nouveau Programme pour les villes comme des outils concrets pour permettre aux pays d’atteindre les ODD et pour protéger les écosystèmes.  

S’agissant des impacts de la COVID-19 sur les villes, la Directrice exécutive a dit que la pandémie a entraîné une coopération plus étroite entre les gouvernements nationaux et locaux qui ont demandé plus d’espaces publics inclusifs et respectueux de l’environnement.  Le relèvement est une opportunité pour accélérer la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, a-t-elle estimé en appelant à tirer parti des innovations, à fournir des services de base de manière plus équitable, à réduire les déplacements par le télétravail et à réduire les émissions de carbone grâce à une utilisation prudente de l’énergie.  Grâce à une planification et une gestion urbaines efficaces, les villes et les communautés ont été en mesure de créer des environnements urbains plus sains, peut-on lire dans le rapport.  Les élus municipaux réalisent maintenant l’importance des biens publics, d’investir dans les institutions publiques, de l’autonomie fiscale et de la transparence dans la gestion des finances locales.  

Le rapport insiste sur le fait que la modernisation des bidonvilles et la hausse des prix du logement restent la priorité absolue des États Membres parce que plus d’un milliard de personnes vivent encore dans des bidonvilles dans le monde.  Le déficit mondial de logements sera de 440 millions de logements d’ici à 2025.  Tout au long de la pandémie, le sans-abrisme a augmenté.  Les outils financiers pour soutenir un meilleur accès au logement n’atteignent pas suffisamment les populations nécessiteuses pour avoir un impact positif.  Beaucoup risquent d’être laissés sur le côté, a alerté la Directrice exécutive.  Pour ce qui est du rôle des villes dans le développement de solutions aux changements climatiques, le rapport dit que les villes sont la forme la plus durable d’établissements humains.  Il réitère en revanche le fait que les populations à risque nécessitent une attention particulière dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Pour y arriver, il faut investir dans la planification et le développement urbains.  Un financement urbain efficace dépend d’approches plus nuancées de la décentralisation fiscale et une plus grande transparence pour convaincre les citoyens et les contribuables.

Table ronde 1

Mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes sur la base du rapport quadriennal du Secrétaire général, notamment les moyens de faire face à l’augmentation des inégalités

Déclarations liminaires

Mme INES SANCHEZ DE MARADIAGA, professeure de planification urbaine à l’université polytechnique de Madrid et Directrice de la Chaire de l’UNESCO relative aux genres, a demandé d’aider ONU-Habitat à intégrer la perspective sur le genre et la participation de la société civile dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a encouragé à mettre à jour les cadres juridiques, réglementaires et politiques pour qu’ils prennent en compte la perspective hommes/femmes, celle-ci devant aussi être intégrée dans les travaux institutionnels et les recherches de financement pour le développement des villes.

M. LUIS NAVA GUERRERO, maire de Queretaro (Mexique), a informé que sa ville d’un million d’habitants a intégré les besoins sociaux résultant de la COVID-19 dans les services municipaux.  La municipalité a établi un plan de développement jusqu’en 2050 qui vise à réduire les écarts sociaux, notamment la fracture numérique.  Elle a pris en charge la santé physique et émotionnelle des femmes nécessiteuses et prévu de créer une université pour les femmes qui verra le jour sous peu.  La ville vient en aide aux personnes vivant dans les rues en offrant un soutien psychologique qui vise leur réinsertion dans le monde du travail.  Durant la pandémie, la municipalité a offert des soins à domicile, a encore décrit le maire qui a terminé en annonçant la création prochaine d’un centre technologique et d’un parc de 60 hectares si les ressources techniques et financières sont réunies.

Deux mille cent milliards de dollars: c’est la valeur des immeubles résidentiels dans les grandes villes du monde, a enchaîné Mme LEILANI FARHA, Directrice mondiale de The Shift, Canada, se désolant qu’à côté de cela, la planète compte 1,8 milliard de personnes sans abri.  Le logement est un facteur d’inégalités dans les villes, a—t-elle rappelé en demandant aux gouvernements de remettre en cause les avantages offerts aux spéculateurs immobiliers.  Elle a exhorté les villes à adopter des stratégies de logement humain afin de régler le problème du sans-abrisme. 

Dans un même ordre d’idées, Mme SMURTI JUKUR, responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC et de Slum Dwellers International-SDI (Inde), a dénoncé la manipulation du foncier par les politiques au détriment des couches populaires.  Il est cher d’être pauvre, a ironisé la « représentante des pauvres » qui a exigé une politique de propriété foncière pour les pauvres et les plus démunis. 

M. CHARLES HINGA MWAURA, Secrétaire principal au Ministère du logement et du développement urbain du Kenya, a révélé que la nouvelle politique urbaine de son pays dispose de volets logement et urbanisation.  La Vision 2030 du Président Uhuru Kenyatta englobe les six régions métropolitaines dans le cadre d’un processus de développement des régions.  La Vision prévoit aussi la création de logements de masses avec la participation du secteur privé.  Le coût financier de l’opération est de 1,2 milliard de dollars, a précisé M. Mwaura avant de citer également un programme d’amélioration des habitats informels bénéficiant à 1,3 million de personnes.  Le Secrétaire principal a posé « la question qui fâche »: comment financer le Nouveau Programme pour les villes? 

Débat interactif

Les délégations qui ont participé à cette première table ronde ont répondu à cette question du Kenya, à commencer par El Salvador qui a appelé les banques à soutenir financièrement les politiques de développement urbain.  La Fédération de Russie a dit qu’elle est prête à partager avec les États Membres l’expérience russe de développement urbain.  Où trouver les ressources financières et technologiques nécessaires pour améliorer la gestion des villes et des centres urbains, a aussi demandé l’Équateur

L’Union européenne, dénonçant les ravages des villes et des patrimoines de l’Ukraine à cause de l’agression de la Fédération de Russie, a exhorté les villes du monde à joindre la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie et ses trois piliers à savoir l’accès à l’énergie durable, le soutien aux projets d’infrastructures urbaines et les partenariats entre les villes et les échanges de connaissances.  L’Organisation pour la coopération et le développement en Europe (OCDE) a encouragé à explorer la boîte à outils qu’elle a conçue pour le développement local dans le cadre d’une approche territoriale visant une croissance inclusive. 

L’Inde a partagé l’ambition de son gouvernement d’atteindre d’ici à 2030 une contribution des villes indiennes de 70% au PIB.  L’exécutif prévoit en outre de construire 100 villes intelligentes et 6 millions de logements en milieu urbain pour les pauvres.  Il veut aussi renforcer les droits fonciers des femmes.  Pour Madagascar, tous les programmes de développement des villes doivent viser les plus vulnérables et répondre aux problèmes des sans-abris.  La représentante a exhorté les États Membres à conclure un contrat social sur le logement abordable.  Le Consortium pour une urbanisation durable a annoncé qu’il est favorable à une urbanisation globale tenant compte de la diversité.  

Comment aider les zones rurales qui ont montré leur résilience durant la pandémie de COVID-19? a demandé la Bolivie.  L’Afrique du Sud a voulu savoir comment faire pour que les populations et le secteur privé contribuent au développement humain.  En réponse à la Bolivie, la professeure de planification urbaine de l’université polytechnique de Madrid a dit que la question est plutôt de savoir comment répondre aux attentes des zones périphériques et des banlieues.  Elle a insisté sur l’importance de la planification et du financement pour réduire les inégalités, ainsi que sur la nécessité de renforcer le rôle des femmes dans les villes et la façon de satisfaire leurs attentes.  Elle a souligné l’importance de la mobilité avant d’exhorter à passer de la parole aux actes dans l’application du Nouveau Programme pour les villes.  

Le maire de Quaretaro a réitéré l’importance de planifier à long terme, par exemple d’ici à 2050, pour répondre à la croissance urbaine.  Il faut en outre adopter des politiques de logement pour anticiper les migrations urbaines et protéger les villes.  Il a mis en garde contre les spéculations sur les propriétés foncières et l’espace urbain.  Il faut empêcher les intérêts particuliers à prendre le dessus sur le reste.  La Directrice mondiale de The Shift a mis l’accent sur l’importance du droit au logement et sur le financement de l’ODD no 11 « les villes et les communautés durables ».  Elle a aussi mis en garde contre le recours aux prêts bancaires par les institutions publiques en demandant que ces prêts respectent les droits humains.  La responsable de Society for the Promotion of Area Resource Centre-SPARC et de Slum Dwellers International-SDI a, elle, demandé aux gouvernements d’avoir le courage de vraiment aider les sans-abris.  Réimaginons l’avenir, investissons dans nos populations et offrons des perspectives, a conclu le Secrétaire principal du Ministère du logement du Kenya

Table ronde 2

La stratégie d’urbanisation durable à l’échelle du système des Nations Unies pour aider les États Membres à mettre en œuvre le Nouveau Programme pour les villes

Déclarations liminaires

Mme MAIMUNAH MOHD SHARIF, Directrice exécutive d’ONU-Habitat, a rappelé que la stratégie à l’échelle du système des Nations Unies sur le développement urbain durable lancée en 2019 demande aux entités des Nations Unies de travailler avec ONU-Habitat pour intégrer les questions urbaines dans leurs stratégies et améliorer la façon dont elles poursuivent leurs mandats respectifs dans un monde qui s’urbanise.  Elle a cité par exemple la collaboration entre l’UNICEF et ONU-Habitat pour promouvoir des « villes amies des enfants » et ventiler les données rurales/urbaines et les données intra-urbaines.  « Avec le PNUD, nous travaillons sur la résilience climatique pour les pauvres en milieu urbain et la gouvernance à plusieurs niveaux », a-t-elle ajouté avant de citer également la création, par le Secrétaire général, d’une équipe spéciale consacrée à l’avenir des villes composée de représentants de 20 entités des Nations Unies.  Elle a expliqué que cette équipe fonctionne en étroite collaboration avec le Groupe de travail mondial sur les gouvernements locaux et régionaux.  Tout en notant que les questions urbaines sont de plus en plus intégrées dans les analyses de pays, elle a jugé que plus devait être fait.  Elle a ainsi encouragé les équipes de pays des Nations Unies à intégrer l’urbanisation durable dans les cadres de coopération au développement.

Alors que 70% de la population mondiale vivra dans les villes d’ici à 2050, Mme ZSUZSANNA JAKAB, Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a jugé prioritaire d’aborder le développement des villes à travers le prisme de la santé urbaine.  Elle a précisé que l’OMS considère les villes comme un atout pour assurer la santé et le bien-être des citoyens en prenant en compte un large éventail de domaines, comme les logements, les transports, la violence, l’insalubrité et à la gestion des déchets.

« Pour que le Nouveau Programme pour les villes réussisse, la santé des populations des villes doit être au centre des préoccupations », a insisté la représentante de l’OMS avant de citer en exemple des initiatives telles que les Villes-santé et les villes-amies des aînés (VADA) et des actions dans des domaines comme la pollution de l’air, les transports, la préparation aux urgences sanitaires dans les villes et milieux urbains.  Elle a dit que construire des villes saines et vivables est l’une des priorités du Manifeste de l’OMS pour une reprise saine et verte après la pandémie, publié en mai 2020.  « Intégrer santé et bien-être dans l’aménagement urbain est une étape fondamentale dans cette direction », a-t-elle insisté avant de saluer la publication conjointe OMS/ONU-Habitat d’une réflexion sur « l’intégration de la santé dans la planification urbaine et territoriale » pour appuyer la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes.  Elle a expliqué que cette démarche vise à aider les gouvernements, les autorités locales et les professionnels de la planification à intégrer les considérations de santé dans la planification urbaine.  L’OMS renforcera son appui technique pour la mise en œuvre de réponses régionales et nationales à la santé urbaine, a-t-elle assuré.

Mme GILLIAN TRIGGS, Secrétaire générale adjointe et Haute-Commissaire adjointe chargée de la protection au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), a mis l’accent sur le potentiel des villes qui offrent aux réfugiés la possibilité de faire partie des communautés.  Néanmoins, il a noté que la plupart des réfugiés vivent dans des zones urbaines marginalisées, avant de préciser que les nouveaux arrivants dans la ville font face à des barrières linguistiques et culturelles qui sont aggravées par la discrimination, la xénophobie et l’exclusion sociale.  Ils manquent souvent de statut légal ou de documents, ce qui les oblige à vivre dans la discrétion et à éviter tout contact avec les autorités, a regretté la haute fonctionnaire.  Elle a dit que cette réalité oblige les maires, les administrations municipales et les dirigeants locaux à adapter leurs politiques aux besoins des réfugiés et à promouvoir leur inclusion économique.

En outre, elle a rappelé que le pacte mondial sur les réfugiés reconnaît la participation vitale des villes, celles-ci ayant d’ailleurs démontré leur engagement lors du premier Forum mondial sur les réfugiés en décembre 2019.  Des promesses de cohésion sociale et d’amélioration de l’accès aux services ont été faites par les villes de Bristol, Milan, Durban et São Paulo, s’est félicitée Mme Gillian Triggs, avant de noter que Arua et Koboko, en Ouganda, Kakuma, au Kenya, et Gabiley, en Somalie, ont rejoint les villes qui s’engagent à mettre en œuvre le pacte mondial sur les réfugiés en prenant de nouveaux engagements en 2021.  Elle a précisé que l’urbanisation des déplacements forcés modifie la manière dont le HCR fournit protection et solutions.  Elle a estimé que le principe d’égalité d’« accès pour tous » aux services essentiels du Nouveau programme pour les villes peut constituer une base solide pour soutenir l’inclusion des réfugiés dans la planification urbaine.

Mme OLGA ALGAYEROVA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies, a dit que les commissions régionales de l’ONU travaillent avec des mécanismes de coordination, des coordonnateurs résidents, le PNUD et ONU-Habitat pour mettre en œuvre le Nouveau programme pour les villes et les dimensions des établissements urbains et humains du Programme 2030 dans les cinq régions.  Nous travaillons étroitement avec les autorités municipales et locales à cette fin, a-t-elle ajouté avant de citer l’inclusion de la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes dans les cinq fora régionaux sur le développement durable, que les commissions régionales réunissent chaque année pour alimenter les réflexions du forum politique de haut niveau pour le développement durable.  « Nous devons construire des ponts entre la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes et la mise en œuvre des ODD », a-t-elle insisté avant de juger déterminant d’être à l’écoute des villes et de planifier avec elles et de manière systématique l’inclusion des communautés dans la prise de décision. 

Parmi les cadres utilisés par la Commission régionale pour l’Europe en matière de logement et d’établissements, Mme Algayerova a cité la Charte des Nations Unies de Genève sur le logement durable, approuvée par la Commission économique pour l’Europe le 16 avril 2015, un plan d’action régional 2030 intitulé « Lieu et vie dans la CEE » adopté en 2021, des lignes directrices pour la formalisation des constructions informelles et le Plan d’action pour le redressement des établissements informels après la pandémie.  Enfin, elle a indiqué que sa commission a produit la #Housing2030 Study en collaboration avec Housing Europe et ONU-Habitat et que le deuxième Forum des maires sur la question a réuni en avril 2022 les maires et maires adjoints de 44 villes ainsi que 500 représentants de villes et d’États Membres, avec des partenaires des Nations Unies, des ONG et des universités.

M. ROBERT PIPER, Sous-Secrétaire général pour la coordination des activités de développement et Directeur du Bureau de la coordination des activités de développement, a souligné le travail des 130 coordonnateurs résidents des Nations Unies qui recueillent des données pour comprendre les tendances en matière de vulnérabilité exacerbées dans les zones urbaines dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Il a mis l’accent sur la responsabilité partagée de tous les acteurs de développement, des gouvernements aux collectivités locales en passant par le secteur privé et la société civile, pour mettre en œuvre le Nouveau programme pour les villes.  Il a indiqué que son bureau, en coopération avec ONU-Habitat, dispensera, ces prochains mois, plusieurs formations en amont du prochain Forum mondial sur les villes et de la prochaine COP prévue en Égypte.

M. BASIM BIN YACOB AL HAMER, Ministre du logement du Bahreïn, a vanté son programme d’accès à un logement décent dans des quartiers sûrs et attrayants qui a bénéficié à 150 000 personnes ces quatre dernières années.  Il a expliqué que ce programme de logement est renforcé par des investissements soutenus dans les espaces publics et les espaces verts pour créer des zones urbaines plus inclusives, durables et résilientes.  L’approvisionnement universel en eau et en assainissement a contribué à améliorer les conditions de vie et à renforcer la résilience aux changements climatiques, a ajouté le Ministre avant de saluer le soutien fourni par les Nations Unies et ONU-Habitat, à la fois au niveau mondial et au Bahreïn en particulier.

Débat interactif

Le représentant de la Pologne a présenté les efforts de son gouvernement pour relever les défis de l’étalement des villes, de la disponibilité de logements et des changements climatiques tels qu’inscrits dans la nouvelle stratégie polonaise 2015 pour des villes durables.  Il a indiqué que la Pologne accueillera dans les prochains mois une table ronde ministérielle de l’Union européenne (UE) sur rôle des politiques urbaines pour une Europe plus verte et pour l’abandon progressif des combustibles fossiles.  Alors que la guerre en Ukraine a fait 12 millions de déplacés, le représentant a appelé à penser dès maintenant à la reconstruction des villes détruites par la guerre. 

Le représentant de la Malaisie a, de son côté, salué le rôle de premier plan d’ONU-Habitat en regrettant que le Nouveau Programme pour les villes n’ait pas bénéficié de la part des États Membres du même intérêt que d’autres programmes.  Notant que la pandémie de COVID-19 a démontré l’importance des villes résilientes pour faire face aux chocs, il a espéré que la réunion de haut niveau de la semaine prochaine encouragera les États Membres à promouvoir tous les objectifs de développement durable en corrélation avec celui des villes durables.  Pour ce faire, il plaidé pour des indicateurs favorisant la résilience de villes durables. 

Le représentant d’ONUSIDA a souligné l’importance de villes garantissant des services sociaux aux personnes vivant avec le VIH/sida avant d’appeler à accélérer la riposte des villes pour permettre d’atteindre l’objectif d’éradiquer le VIH/Sida d’ici à 2030.  

Enfin, le représentant de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) a cité une initiative des services météorologique pour promouvoir des services urbains intégrés dotée de meilleures données et prévisions météorologiques.  Il s’agit notamment d’améliorer l’adaptation aux catastrophes naturelles, à la pollution atmosphérique ou aux inondations éclairs, a-t-il précisé.  

Remarques de clôture 

M. COLLEN V. KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé que le suivi du Nouveau programme pour les villes doit avoir des liens efficaces avec le suivi du Programme 2030.  Notant que la plupart des ODD ont des cibles qui dépendent des actions prises au niveau local et que les villes ont été à l’avant-garde de l’action climatique en matière d’adaptation et d’atténuation, il s’est dit inspiré par les efforts continus des États Membres et du système des Nations Unies pour accélérer la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  Il a appelé à s’appuyer sur les bonnes pratiques et les enseignements tirés de la réponse que les villes ont apporté non seulement à la pandémie mais aussi aux changements climatiques.  Il s’est dit persuadé que les gouvernements locaux, avec le soutien des autorités nationales, ont les moyens de réduire la pauvreté et les inégalités par une planification urbaine inclusive et la fourniture de logements et services de base abordables.  Il a appelé l’ONU et les États Membres à consacrer à ONU-Habitat les moyens de faciliter la mise en œuvre de la stratégie à l’échelle du système pour une urbanisation durable aux niveaux mondial, régional et national, pour aider à la mise en œuvre du Nouveau programme pour les villes.  En conclusion, M. Kelapile a indiqué qu’il présenterait les messages clefs de cette réunion spéciale de l’ECOSOC à la prochaine réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le Nouveau Programme pour les villes prévue le 28 avril prochain et qu’il s’engageait à mobiliser tous les dispositifs de l’ECOSOC pour accélérer la mise en œuvre de ce programme de concert avec le Programme 2030.  

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