En cours au Siège de l'ONU

L’Assemblée générale adopte l’ordre du jour de sa soixante-dix-septième session et accorde au Président ukrainien la possibilité d’intervenir par vidéo au débat général

Soixante-dix-septieme session
3e séance - après-midi
AG/12445

L’Assemblée générale adopte l’ordre du jour de sa soixante-dix-septième session et accorde au Président ukrainien la possibilité d’intervenir par vidéo au débat général

L’Assemblée générale a adopté, ce matin, l’ordre du jour de sa soixante-dix-septième session, et a entériné par la même occasion les programmes de travail de chacune de ses six grandes commissions sur la base des recommandations contenues dans le rapport de son Bureau.   

Elle a également adopté un projet de décision autorisant le Président ukrainien à prendre part à son débat général par message vidéo et non pas en présentiel, tout en sachant que cette année, l’Assemblée générale exige le retour « à la normale » de la période pré-COVID-19, où seules les interventions en personne sont permises.   Le Bélarus a opposé un amendement à ce projet de texte qui n’a pas été retenu, également à la suite d’un vote.  

Présentant le projet de décision, le représentant ukrainien a fait valoir que selon la Constitution du pays, le Président qui est le commandant en chef des forces armées, a l’obligation de faire face à ses devoirs cruciaux et de rester proche de son armée depuis le début de l’invasion de la Fédération de Russie le 24 février 2022.  

Ainsi, en adoptant le projet de décision par 101 voix pour, 7 contre (Bélarus, Cuba, Érythrée, Fédération de Russie, Nicaragua, République populaire démocratique de Corée et Syrie) et 19 abstentions, l’Assemblée générale, « notant avec préoccupation les situations dans lesquelles des dirigeants d’États souverains épris de paix, Membres de l’Organisation des Nations Unies, ne peuvent participer en personne à ses réunions pour des raisons indépendantes de leur volonté en raison d’une invasion étrangère, d’une agression ou d’hostilités militaires en cours qui les empêchent de quitter leur pays et d’y retourner en toute sécurité, ou de la nécessité d’assurer leur défense nationale et de s’acquitter des fonctions de sécurité », a décidé que l’Ukraine peut présenter une déclaration préenregistrée de son chef d’État, qui sera diffusée dans la salle de l’Assemblée générale lors du débat général de sa soixante-dix-septième session. 

Le texte précise que cette décision ne crée pas de précédent pour les futurs débats généraux et réunions de haut niveau convoqués par l’Assemblée générale. 

Auparavant, l’Assemblée a rejeté par 67 voix contre, 23 pour, et 27 abstentions, un projet d’amendement présenté par le Bélarus.  Cette délégation a mis en avant l’impératif du strict respect par tous du règlement intérieur de l’ONU en défendant l’idée qu’au lieu de permettre à titre exceptionnel à certains États de participer virtuellement au débat de l’Assemblée générale, ce droit devrait être accordé à tous les États Membres pour éviter « l’exceptionnalisme ».  Il aurait été plus correct, selon elle, d’adopter ce projet d’amendement « qui est dans l’intérêt de tous les États Membres ».   

Ces deux textes ont suscité des vifs échanges entre les partisans du projet de l’Ukraine et ceux qui s’y sont opposés, y voyant une tentative de politiser le travail de l’Assemblée générale, comme l’ont avancé, entre autres, la Fédération de Russie et l’Afrique du Sud.  

D’autres, dont le Nicaragua et Cuba, ont opposé le principe de l’égalité souveraine de tous les États de l’ONU à cette tendance à l’exceptionnalisme, voire même à « l’unilatéralisme » comme l’a décrit le Venezuela.  Le Chili a estimé que les chefs d’État et de gouvernement dans des situations similaires à celle de l’Ukraine devraient pouvoir bénéficier des mêmes avantages, un point de vue partagé par Cuba.  

Pour sa part, le représentant de la Fédération de Russie a reproché à ses « collègues occidentaux » d’avoir politisé le travail du Conseil de sécurité, où ils ont permis à trois reprises au Président Zelenskyy d’intervenir par visioconférence.  C’est une entorse au règlement intérieur qui a de plus toujours été refusée à des pays africains, a-t-il indiqué, déplorant qu’aujourd’hui, l’Assemblée générale suit la même voie.  L’Iran a, pour sa part, rappelé que la participation d’un État au débat général peut se faire au niveau ministériel.  

Exhortant à rejeter l’amendement « hostile » du Bélarus, le Canada a argué de son côté que la situation spécifique de l’Ukraine mérite qu’on lui accorde cette exception.  La délégation canadienne a également reproché au Bélarus d’avoir présenté un texte visant à éliminer toute référence, dans le projet de décision, à l’invasion russe de l’Ukraine.  Pourtant, s’est indignée la représentante du Royaume-Uni, toute cette discussion n’aurait pas lieu si la Fédération de Russie n’avait pas envahi l’Ukraine. 

Tout en reconnaissant que certaines circonstances extraordinaires peuvent empêcher des chefs d’État de se rendre à New York, et que l’Ukraine connaît une telle situation, le Mexique a déploré le manque de consultation entre les parties et la célérité avec laquelle l’Assemblée générale a dû se prononcer sur la question.  La délégation a donc suggéré de discuter de la question de la participation à distance des chefs d’État et de gouvernement au sein du Groupe de travail spécial sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale.  

Sur recommandation de son Bureau, l’Assemblée générale a par ailleurs approuvé la participation du Saint-Siège et de l’État de Palestine en qualité d’États observateurs et celle de l’Union européenne en qualité d’observateur aux travaux de sa soixante-dix-septième session. 

La prochaine réunion de l’Assemblée générale, dont le débat général commence le mardi 20 septembre à 9 heures, sera annoncée dans le Journal des Nations Unies

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des ONG clôt sa session 2022 et recommande le statut consultatif spécial à 173 organisations

Session ordinaire de 2022,
28e séance plénière – matin
ONG/946

Le Comité des ONG clôt sa session 2022 et recommande le statut consultatif spécial à 173 organisations

Le Comité chargé des organisations non gouvernementales a clos, ce matin, sa reprise de session 2022, commencée le 7 septembre dernier.  En adoptant son rapport, le Comité a recommandé au Conseil économique et social (ECOSOC) l’octroi du statut consultatif spécial à 173 ONG sur les 564 demandes qu’il a examinées.  Il a reporté 319 demandes pour un examen plus approfondi à sa session ordinaire en 2023, a précisé la Vice-Présidente du Comité, Mme Mine Ozgul Bilman, de la Türkiye, faisant lecture du rapport. 

Le Comité a également pris note de sept demandes de changement de nom et de 308 des 403 rapports quadriennaux nouveaux ou reportés des sessions précédentes des ONG dotées de statut consultatif.  Cinquante-neuf demandes de statut consultatif ont été clôturées sans préjudice, les ONG en question n’ayant pas répondu aux questions malgré trois rappels au cours de deux sessions consécutives du Comité.  Le rapport contient en tout sept projets de décisions sur des questions appelant l’action de l’ECOSOC. 

Au cours de cette séance, le Mexique, membre sortant du Comité, a salué le travail effectué durant cette session avant de demander une plus grande participation des ONG aux Nations Unies. 

Le Comité, qui est composé de 19 États membres, peut recommander trois différents statuts consultatifs.  Le premier, le statut consultatif général est attribué aux grandes ONG internationales, dont les domaines d’action et de travail couvrent la majorité des points contenus dans l’agenda de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  Ces ONG sont habilitées à soumettre au Conseil des communications écrites et des pétitions, et à proposer l’inscription de points à l’ordre du jour. 

Le statut consultatif spécial est réservé aux ONG qui travaillent dans un domaine spécifique et les autorise à soumettre des communications écrites et des pétitions à l’ECOSOC.  Enfin, la Liste va aux ONG qui travaillent d’une manière plus technique et/ou restreinte.  Elles ne peuvent soumettre au Conseil économique et social que des communications écrites. 

Si l’ECOSOC suit la recommandation de son organe subsidiaire, le Comité des ONG devrait tenir sa prochaine session ordinaire du 23 janvier et au 1er février 2023. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: Le Directeur exécutif du PAM alerte que la crise alimentaire mondiale risque « d’échapper à tout contrôle »

9133e séance - après-midi
CS/15032

Conseil de sécurité: Le Directeur exécutif du PAM alerte que la crise alimentaire mondiale risque « d’échapper à tout contrôle »

Le Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM) a alerté le Conseil de sécurité, cet après-midi, que la crise alimentaire mondiale risque « d’échapper à tout contrôle », rejoignant dans son analyse le Coordonnateur des secours d'urgence qui a indiqué que selon la note blanche du Bureau de la coordination des affaires humanitaire (OCHA), des centaines de millions de personnes dans le monde sont confrontées à des niveaux d’insécurité alimentaire catastrophiques, une situation aggravée par les conflits armés et la violence.    

Ainsi, au Yémen, quelque 19 millions de personnes, soit 60% de la population, sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë.  Au Soudan du Sud, 7,7 millions de personnes devraient se trouver en situation de crise ou d’insécurité alimentaire aiguë pendant la haute saison, tandis qu’en Éthiopie, plus de 13 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire.  Et dans le nord-est du Nigéria, 4,1 millions de personnes sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë en raison des violences, a détaillé M. Martin Griffiths qui a signalé que l'insécurité alimentaire atteint également des niveaux « alarmants » en Afghanistan et en Somalie.    

L’Économiste en chef de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), M. Maximo Torero, a quant à lui indiqué que la mise à jour semestrielle du rapport mondial sur les crises alimentaires, publiée lundi, prévoit que d’ici à la fin de 2022, 205 millions de personnes seront confrontées aux trois phases les plus élevées de crise alimentaire aiguë, soit le niveau le plus élevé depuis qu’est publié ce rapport.    

« Cette souffrance généralisée s'explique par l'impact direct et indirect des conflits et de la violence, ainsi que par le comportement des parties en présence », s’est insurgé le Coordonnateur des secours d'urgence qui a appelé, entre autres, à intensifier les moyens de résoudre de façon pacifique et négociée les conflits, s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire aiguë et maintenir un financement humanitaire permettant de résoudre ces crises.  

« Combler le déficit de financement humanitaire ou soutenir la production agricole sont des mesures indispensables, mais elles ne porteront pas leurs fruits si les routes continuent de rester bloquées et si les gens sont incapables de travailler la terre », a souligné pour sa part le Brésil.  À ses yeux, la trêve au Yémen, ou même l’Initiative céréalière de la mer Noire, montrent que même de « petits pas » en faveur de la paix et de la stabilisation peuvent entraîner des répercussions positives sur la sécurité alimentaire.   

Le Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM) a de son côté alerté que la guerre en Ukraine est venue aggraver une situation extrêmement difficile, en précisant que l’explosion des prix des denrées, de l’essence et des engrais depuis le début du conflit a poussé 70 millions de personnes supplémentaires au bord de la famine.  Ce qui était une « vague de famine » dans le monde est devenu un « tsunami », s’est alarmé M. David Beasley qui a appelé à pleinement mettre en œuvre la résolution 2417 (2018), alertant que la crise alimentaire mondiale risque « d’échapper à tout contrôle ». 

À ce propos, la délégation des États-Unis a relevé que l’utilisation de la nourriture comme arme de guerre a eu des effets de contagion multiples qui ont grandement aggravé l’insécurité alimentaire, notant qu’avant la guerre, la Russie et l’Ukraine exportaient près du quart des céréales dans le monde, alors qu’aujourd'hui, « les champs de blé ukrainiens sont des champs de bataille ».   

En imputant l’insécurité alimentaire au conflit en Ukraine, on ignore la politique monétaire irresponsable des pays occidentaux, s’est défendue la Fédération de Russie, notant que l’augmentation du cours du dollar et des taux d’intérêt constitue une nouvelle menace pour les pays endettés.   Quant à l’accord d’Istanbul, il est largement entravé par les sanctions de ces mêmes pays qui empêchent notamment les navires russes chargés de céréales et d’engrais d’arriver dans les ports européens, a décrié la délégation russe, rejointe par la Chine qui s’est élevée contre l’augmentation artificielle des prix des denrées.  Ainsi, dans le cadre de l’Initiative céréalière de la mer Noire, des cargaisons de grains sont expédiées mais de nombreux conteneurs restent bloqués pour des raisons financières et bancaires, s’est indignée la délégation chinoise.  

Affirmant qu’aucune sanction ne vise le secteur alimentaire, la France a dit lutter pour que les produits agricoles ne deviennent en aucun cas une arme de guerre pour servir des buts géopolitiques.  La délégation a également signalé que les corridors de solidarité mis en place par l’Union européenne ont permis la sortie de plus de 10 millions de tonnes de céréales d’Ukraine depuis mars dernier, contribuant ainsi à faire baisser les prix et éviter une crise d’anticipation.  L’Italie a insisté pour sa part sur l’importance de mettre en œuvre une « diplomatie alimentaire ». 

Notant par ailleurs que les organes appropriés pour promouvoir les solutions axées sur le développement ne disposent pas de l’expertise technique et politique nécessaire en ce qui concerne les zones touchées par les conflits, le Brésil a estimé que la Commission de consolidation de la paix est particulièrement bien placée pour aider à combler cette lacune en jouant son rôle de passerelle entre les efforts de paix et de sécurité et les solutions de développement, ainsi qu’en mobilisant un soutien international, en coopération avec les agences basées à Rome. 

PROTECTION DES CIVILS EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ

Déclarations

M. Martin Griffiths, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours durgence, a rappelé que le Conseil a établi, il y a quatre ans, un lien entre sa responsabilité de maintenir la paix et la sécurité et son engagement à lutter contre l’insécurité alimentaire et la faim induites par les conflits.  Tel qu’indiqué le mois dernier dans une note blanche, le risque de famine et d’insécurité alimentaire généralisée du fait de conflits est désormais présent en Éthiopie, au nord-est du Nigéria, au Soudan du Sud et au Yémen.  L’insécurité alimentaire atteint également des niveaux alarmants en Afghanistan et en Somalie, où plus de 200 000 personnes sont déjà menacées par la famine, un chiffre qui devrait atteindre 300 000 d’ici à novembre.  Dans les quatre contextes qui précèdent, des évaluations récentes ont identifié des centaines de milliers de personnes confrontées à des niveaux de faim catastrophiques, ou phase 5 du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire, qui surveille l’insécurité alimentaire dans le monde, a indiqué M. Griffiths, en précisant que la phase 5 est la plus dévastatrice.   

Il a indiqué que cette souffrance généralisée s’explique par l’impact direct et indirect des conflits et de la violence, ainsi que par le comportement des parties en présence.  Ainsi, des civils sont tués et blessés, des familles sont déplacées de force de la terre dont elles dépendent pour leur subsistance, puis des restes explosifs de guerre perturbent l’accès des populations aux marchés et à la production agricole.  Ensuite, les infrastructures civiles essentielles à la sécurité alimentaire des populations sont endommagées ou détruites et les stocks de nourriture sont pillés, a expliqué M. Griffiths.  Le déclin économique et la hausse des prix qui s’ensuivent mettent la nourriture hors de portée des plus vulnérables.  Enfin, « la faim est utilisée comme une tactique de guerre ».   

Les organisations humanitaires qui apportent des secours aux populations dans ces crises sont par ailleurs confrontées à des interférences, du harcèlement et des attaques contre leur personnel, ainsi qu’au pillage ou au détournement de leurs biens.  D’autres facteurs de la faim, notamment la sécheresse, les changements climatiques, les effets de la pandémie de COVID-19 et la hausse des prix mondiaux des produits de base aggravent encore l’insécurité alimentaire.  À ces facteurs s’ajoutent les effets de la guerre en Ukraine, qui augmente les prix des aliments, des engrais et de l’énergie, a-t-il noté.   

Poursuivant, M. Griffiths a précisé qu’au Yémen, après sept ans de conflit armé, quelque 19 millions de personnes, soit 60% de la population, sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë.  On estime que 160 000 personnes sont menacées de catastrophe et que 538 000 enfants souffrent de malnutrition sévère.  Au Soudan du Sud, 63% de la population, soit 7,7 millions de personnes, devraient se trouver en situation de crise ou d’insécurité alimentaire aiguë pendant la haute saison de cette année.  Ce pays est en outre l’un des plus dangereux pour les travailleurs humanitaires, avec 319 attaques visant le personnel l’an dernier.   

En Éthiopie, a-t-il enchaîné, plus de 13 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire vitale dans les régions d’Afar, Amhara et au Tigré, où 87% de la population se trouve en situation d’insécurité alimentaire, dont plus de la moitié dans une situation grave.  Enfin, dans le nord-est du Nigéria, 4,1 millions de personnes sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë dans les États d’Adamawa, Borno et Yobe en raison de conflits.   

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a ensuite énuméré les recommandations contenues dans la note blanche afin de répondre aux besoins de ces pays, à savoir: intensifier les moyens de résoudre de façon pacifique et négociée les conflits et la violence, encourager les États et les groupes armés à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits humains, soutenir une réponse intégrée permettant de s’attaquer aux facteurs sous-jacents de l’insécurité alimentaire aiguë et, enfin, maintenir le financement humanitaire nécessaire pour venir à bout des crises, alors que moins de la moitié des sommes requises sont disponibles.

M. MAXIMO TORERO, Économiste en chef de lOrganisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a indiqué que la mise à jour semestrielle du rapport mondial sur les crises alimentaires, publiée lundi, prévoit que d’ici à la fin de cette année, 205 millions de personnes seront confrontées aux trois phases les plus élevées de crise alimentaire aiguë.  C’est le niveau le plus élevé depuis qu’est publié le rapport mondial et cela représente une augmentation par rapport aux 193 millions de personnes signalées dans l’édition 2022, a-t-il souligné, avertissant que sans aide humanitaire urgente, un nombre record de 970 000 personnes devraient faire face à des conditions de famine dans cinq pays.  De plus, les impacts directs et indirects de la guerre en Ukraine sur ces pays risquent de s’aggraver au second semestre 2022 et début 2023.   

M. Torero a souhaité informer le Conseil sur la situation en Somalie, bien qu’elle ne figure pas dans la note blanche de l’OCHA.  Il y a deux semaines, a-t-il dit, le Comité d’examen des situations de famine du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire a conclu que les populations agropastorales de deux districts et les populations déplacées de la ville de Baidoa, dans la région de Bay, seront confrontées à la famine entre octobre et décembre 2022, sans aide humanitaire significative.  Ces conditions devraient persister jusqu’en mars 2023 au moins, et 300 000 personnes devraient être au niveau 5 de l’échelle du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire entre octobre et décembre, a-t-il expliqué. 

En Afghanistan, a-t-il poursuivi, quelque 19 millions de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë élevée, et la flambée des prix des aliments, du carburant et des engrais découlant de la guerre en Ukraine ne fait qu’aggraver une situation déjà brutale, a constaté le haut fonctionnaire, avant de saluer la résilience du secteur agricole, dont dépendent 80% des moyens de subsistance des Afghans.   

Actuellement, a encore indiqué M. Torero, il n’y a pas de données actualisées sur la sécurité alimentaire en Éthiopie, mais il est fort probable que la situation se soit considérablement aggravée en 2022.  Parallèlement à la sécheresse, qui touche les régions du sud, la reprise des hostilités dans le Tigré menace directement la récolte Meher d’octobre.  Au Soudan du Sud, en proie à des violences intercommunautaires accrues et à de graves inondations, on estime que près des deux tiers de la population totale sont confrontés au niveau 5 de l’échelle du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire entre octobre et décembre, soit la pire insécurité alimentaire aiguë pendant la période de soudure.  Dans le comté de Leer, où la phase 5 a été signalée, les affrontements armés ont continué de provoquer des déplacements en 2022, a-t-il ajouté.   

De même, dans le nord du Nigéria, avec la fin de la saisons des pluies en septembre, la violence risque de connaître un saut saisonnier, ce qui aura pour effet de perturber les systèmes alimentaires, de limiter l’accès aux marchés et de provoquer de nouveaux déplacements, a-t-il prévenu, ajoutant qu’environ 4,14 millions de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë dans les États du nord-est d’Adamawa, Borno et Yobe, pour l’essentiel inaccessibles à l’aide humanitaire.  En revanche au Yémen, les perspectives d’insécurité alimentaire devraient être meilleures que prévues, a observé l’Économiste en chef, selon lequel les effets d’entraînement supposés de la guerre en Ukraine sur les marchés internationaux ne se sont pas encore manifestés.  En outre, le financement de l’aide alimentaire s’est légèrement amélioré et d’importantes réductions du nombre de bénéficiaires ont été évitées, tandis que le conflit s’est considérablement atténué après la trêve conclue en avril.  Dans ce contexte, la prévention des conflits reste le moyen le plus efficace de prévenir la famine, a-t-il conclu, ajoutant que « quand le Conseil parle, le monde écoute ».   

M. DAVID BEASLEY, Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM), a indiqué que la guerre en Ukraine est venue aggraver une situation extrêmement difficile.  Il a précisé que depuis le début du conflit, l’envolée des prix des denrées, de l’essence et des engrais ont poussé 70 millions de personnes supplémentaires au bord de la famine.  Ce qui était une « vague de famine » dans le monde est devenu un « tsunami », a déclaré M. Beasley qui a ajouté que, dans les 82 pays où le PAM opère, 345 millions de personnes souffrent d’une insécurité alimentaire aiguë, c’est-à-dire qu’ils s’approchent d’une situation de famine.  C’est un chiffre sans précédent, puisque c’est 2,5 fois plus de personnes qu’avant le début de la pandémie, s’est-il alarmé.  Et près de 50 millions de personnes sont dans une situation encore plus grave puisqu’elles sont au bord de la famine.  Il a averti du risque de multiples famines cette année et en 2023 si la crise des prix des denrées venait à se transformer en crise d’approvisionnement.  

M. Beasley a exhorté les membres du Conseil à user de leur influence pour garantir le respect du droit international humanitaire (DIH), assurer un accès humanitaire et élaborer les solutions politiques négociées pour mettre fin aux conflits.  Il a notamment alerté que la reprise des combats dans le nord de l’Éthiopie risque de pousser de nombreuses familles dans une grave insécurité alimentaire, alors que le PAM avait réussi, pendant la trêve, à apporter une aide à près de 5 millions de personnes dans le Tigré.  Nous devons acheminer des denrées dans le nord de l’Éthiopie maintenant, a-t-il insisté.  Il a ensuite détaillé la situation critique au Nigéria et celle au Soudan du Sud, où la recrudescence de la violence vient se combiner aux effets des inondations dans 7 des 10 États du pays.  Près de 7,7 millions de personnes, soit plus de 60% de la population sud-soudanaise, fait face à une insécurité alimentaire critique.   

Exhortant les membres du Conseil à faire montre du leadership humanitaire dont le monde a besoin, le Directeur exécutif du PAM a appelé à pleinement mettre en œuvre la résolution 2417 (2018) et à briser le cercle vicieux entre faim et conflit qui engendre la crise alimentaire mondiale, laquelle risque « d’échapper à tout contrôle ».  

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a constaté que l’état de l’insécurité alimentaire mondiale, en particulier dans les pays impliqués dans des conflits, est plus alarmant que jamais.  Selon le dernier rapport mondial en date sur les crises alimentaires, nous assistons au plus grand nombre de personnes en situation de crise, ou pire, depuis la première publication du rapport.  Ce chiffre –205 millions de personnes– est presque équivalent à la population totale du Brésil, a fait remarquer le représentant.  Selon toutes les mesures et tous les paramètres, un tel niveau d’insécurité alimentaire est inacceptable.   

Le conflit en Ukraine, associé aux effets des sanctions unilatérales appliquées par certains pays, a aggravé cette situation, a poursuivi le représentant.  De manière générale, les conflits armés et l’insécurité alimentaire forment un cycle pervers qui enferme les populations et les pays dans une spirale de détérioration des conditions de vie.  En effet, les conflits provoquent des déplacements forcés, la destruction d’infrastructures essentielles et la dégradation de sols autrement viables.  Et l’insécurité alimentaire intensifie la rivalité pour les ressources et entrave toute autre forme de développement humain qui pourrait conduire aux conditions de stabilisation nécessaires à une paix durable.  « Nous devons briser ce cycle et, pour ce faire, nous avons besoin d’actions concrètes dans le cadre des trois piliers de l’ONU », a expliqué M. Costa Filho. 

Sur le plan humanitaire, l’assistance humanitaire est menacée par deux facteurs simultanés, à savoir la hausse des prix des denrées alimentaires et du nombre de personnes souffrant d’insécurité alimentaire aiguë, a poursuivi le représentant.  Ces deux caractéristiques mettent le système sous pression et creusent le déficit de financement.  Les pays donateurs et tous ceux qui sont en mesure de le faire doivent redoubler d’efforts, a insisté M. Costa Filho.   

Le représentant a ensuite souligné le rôle clef du développement durable dans l’atténuation de l’insécurité alimentaire et la promotion de solutions durables dans les pays touchés par des conflits.  Les actions visant à générer ou à reconstruire les capacités de production, telles que la livraison de semences et l’amélioration de la production agricole, sont essentielles pour empêcher producteurs et consommateurs de tomber dans le déplacement interne et l’insécurité alimentaire grave.  Les investissements dans ces solutions durables peuvent également être des moyens concrets de prévenir les conflits, lorsqu’ils sont accompagnés de systèmes d’alerte précoce efficaces, ainsi que de promouvoir la stabilisation à long terme dans les scénarios postconflit.   

« Le Brésil dispose d’un vaste savoir-faire en matière de production accrue avec moins d’intrants et de maximisation des rendements agricoles, même dans des conditions défavorables, d’une grande expérience de la coopération Sud-Sud et de partenariats de longue date avec le PAM et la FAO », a expliqué le représentant.  Il a appelé tous les États Membres à redoubler d’efforts non seulement pour fournir une aide humanitaire, mais aussi des capacités techniques et des transferts de technologies, afin que les pays touchés par des conflits puissent être en mesure de réaliser leurs objectifs. 

Un grand nombre de ces mesures, sinon toutes, ne sont pas du ressort du Conseil de sécurité, a reconnu M. Costa Fihlo.  Toutefois, il arrive souvent que les organes appropriés pour promouvoir les solutions axées sur le développement ne disposent pas de l’expertise technique et politique nécessaire en ce qui concerne les zones touchées par les conflits.  À cet égard, le Brésil estime que la Commission de consolidation de la paix est particulièrement bien placée pour aider à combler cette lacune en jouant son rôle de passerelle entre les efforts de paix et de sécurité et les solutions de développement, ainsi qu’en mobilisant le soutien international, en coopération avec les agences basées à Rome et l’ensemble du système des Nations Unies, tout en préservant son approche axée sur la demande et son alignement sur les priorités de consolidation de la paix du pays en question. 

Enfin, et surtout, il y a l’aspect de la paix et de la sécurité, a relevé le représentant.  Combler le déficit de financement humanitaire ou soutenir la production agricole sont des mesures indispensables, mais elles ne porteront pas leurs fruits si les routes continuent de rester bloquées et si les gens sont incapables de travailler la terre.  La trêve au Yémen, ou même l’Initiative céréalière de la mer Noire, montrent que même de petits pas en faveur de la paix et de la stabilisation peuvent entraîner des répercussions positives sur la sécurité alimentaire.  Nous devons préserver et mettre à profit ces avancées progressives, a plaidé le représentant.  Le Conseil, qui dispose d’un cadre pour y parvenir, doit devenir la colonne vertébrale de notre action en matière de sécurité alimentaire et de conflits, a-t-il ajouté. 

M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) a souligné la responsabilité collective du Conseil de sécurité d’agir envers ceux qui meurent de faim en raison de conflits non résolus et de l’insécurité.  Les recommandations contenues dans la note blanche montrent le lien qui existe entre la faim et les conflits, a-t-il relevé, phénomène « intrinsèquement lié à notre responsabilité de maintenir la paix et la sécurité internationales ».  Selon lui, il est indéniable que les conflits « exacerbent, alimentent et prolongent la faim et la famine ».  « Notre incapacité à relever le Défi Faim zéro procède en grande partie des conflits armés », a noté le représentant, en ajoutant que les besoins concernant l’aide humanitaire dépassent maintenant notre capacité d’y répondre.  Cette crise mondiale de l’insécurité alimentaire est exacerbée par l’invasion russe de l’Ukraine et les changements climatiques, notamment la sécheresse dans la Corne de l’Afrique.   

Le représentant a dénoncé l’utilisation par certains de la faim comme une arme de guerre, notamment au Yémen et au Nigéria.  De même, des travailleurs humanitaires ont été pris pour cible, enlevés et même tués au Soudan du Sud, au Tigré et ailleurs.  L’Irlande condamne ces actes dans les termes les plus forts et considère que ces violations du droit international humanitaire ne doivent pas rester impunies.   

Toutefois, la solution à la faim induite par les conflits n’est pas l’aide humanitaire mais bien la paix, a poursuivi le représentant.  Pour y parvenir, il incombe aux membres du Conseil de sécurité de faire pression sur les parties belligérantes pour assurer la protection des civils, a-t-il conclu.  

M. DAI BING (Chine) a rappelé que la sécurité alimentaire est un élément clef de la paix pérenne et un enjeu de longue date pour la communauté internationale.  Nous devons éliminer la faim, a-t-il plaidé, appelant à promouvoir le règlement politique des conflits qui détruisent les productions et les infrastructures agricoles et entraînent des déplacements forcés, avec pour effet d’aggraver l’insécurité alimentaire.  Il est donc crucial que la communauté internationale s’emploie à appuyer les processus politiques dans les foyers de tension. 

Il convient également de veiller à ce que les chaînes d’approvisionnement ne soient pas perturbées, a ajouté le représentant.  Il y a suffisamment de nourriture pour tous, mais la répartition et la distribution laissent à désirer, a-t-il souligné, avant de s’élever contre l’augmentation artificielle des prix des denrées.  Ainsi, dans le cadre de l’Initiative céréalière de la mer Noire, des cargaisons de grains sont expédiées mais de nombreux conteneurs restent bloqués pour des raisons financières et bancaires, s’est-il indigné, appelant à « libérer ces livraisons ».  

Le représentant a ensuite constaté que 50 pays dans le monde sont aujourd’hui en situation d’insécurité alimentaire et que nombre d’entre eux sont situés en Afrique.  Réitérant l’appel de l’ONU à ne laisser personne sur le bord de la route, il a préconisé une intensification de l’aide publique au développement des pays développés, laquelle devrait s’élever à 0,7% du revenu national brut.  Il a d’autre part appelé à un renforcement des capacités de production alimentaire des pays en développement, prônant pour cela un rééquilibrage avec le monde développé.  Ces efforts doivent selon lui s’accompagner d’investissements accrus dans l’agriculture et de transferts de technologies.  

En tant que pays le plus peuplé au monde, la Chine nourrit un cinquième de la population mondiale avec moins de 5% des terres arables de la planète, a fait observer le représentant.  En outre, elle apporte davantage de financements dans le cadre de la coopération Sud-Sud que n’importe quel autre pays en développement.  Enfin, elle coopère avec plus de 140 pays en la matière et fournit des techniques agricoles qui bénéficient à 1,5 million d’exploitants agricoles, a-t-il fait valoir. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a insisté sur l’ampleur « biblique » de la crise alimentaire actuelle.  Au Yémen, les houthistes doivent éviter toute violation de la trêve humanitaire, a dit la déléguée, avant de relever que la situation dans la Corne de l’Afrique est aggravée par les conflits.  Elle a jugé essentielle une trêve humanitaire indéfinie en Éthiopie.  Au niveau international, la déléguée a appelé les parties belligérantes à assurer un accès humanitaire pour lutter contre l’insécurité alimentaire mondiale, laquelle a été aggravée par la guerre en Ukraine.  Elle a aussi souligné l’importance que les engrais russes accèdent aux marchés mondiaux.  Changements climatiques et insécurité alimentaire sont intimement liés, a par ailleurs souligné la déléguée. 

M. JUAN GOMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) s’est dit reconnaissant au Secrétaire général et à la Türkiye pour l’accord conclu qui a permis d’exporter des céréales depuis l’Ukraine, constatant toutefois que le fait de mettre davantage de céréales sur les marchés ne s’était pas traduit par une réduction de la famine dans plusieurs régions du monde.  En ce sens, il est tout aussi important que les engrais et les produits alimentaires russes puissent atteindre les marchés mondiaux, a-t-il observé.  Mettre fin à la faim et à la malnutrition, faire face aux crises humanitaires, prévenir et résoudre les conflits ne sont pas des tâches distinctes, ce sont différents aspects d’un même défi, a-t-il insisté.  Ce n’est pas une coïncidence si les cinq pays identifiés par le PAM comme étant les plus menacés par la famine –l’Afghanistan, l’Éthiopie, la Somalie, le Soudan du Sud et le Yémen– sont tous en situation de conflit.   

Pour le représentant, l’insécurité alimentaire et la famine doivent être traitées de manière différenciée.  Pour s’attaquer aux causes structurelles des risques de famine, il a appelé à appuyer la recherche de solutions politiques pacifiques et négociées aux conflits armés et à la violence.  Et pour lutter directement contre l’insécurité alimentaire, il faut encourager la hausse de la production locale, réduire le gaspillage alimentaire, rendre les engrais abordables, améliorer les systèmes de protection sociale pour les personnes vulnérables et accroître la fonctionnalité des chaînes d’approvisionnement en engrais et en semences.   

Enfin, des ressources doivent être mobilisées pour assurer un financement adéquat du PAM, a ajouté le délégué qui a jugé « honteux » que le PAM ne dispose que d’un tiers du budget nécessaire pour pouvoir répondre de manière adéquate aux risques de famine.  Il est tout aussi « inacceptable » que, dans un monde d’abondance matérielle, des millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire ou soient confrontées à la famine.   

Mme MONA JUUL (Norvège) a dit avoir pris connaissance avec inquiétude des données de l’OCHA sur l’insécurité alimentaire en Éthiopie, dans le nord-est du Nigéria, au Soudan du Sud et au Yémen.  Elle s’est également alarmée des niveaux d’insécurité alimentaire en Somalie et en Afghanistan, jugeant évident que, conformément à la résolution 2417 (2018), le Conseil de sécurité ait un rôle préventif à jouer pour briser le cycle des conflits armés et de la faim.  Pour la représentante, le conflit en cours dans la Corne de l’Afrique nécessite l’attention immédiate du Conseil.  En effet, a-t-elle souligné, depuis plusieurs années, les civils de cette région ont connu une insécurité alimentaire généralisée en raison du conflit et des violences, et la reprise des combats au Tigré a de graves conséquences pour la région.  Le Conseil devrait d’urgence encourager et soutenir les « bons offices » de l’Union africaine et de l’ONU afin d’obtenir un cessez-le-feu et le début de pourparlers, a plaidé la représentante.

Saluant les recommandations spécifiques contenues dans la note blanche de l’OCHA, la représentante a mis l’accent sur l’impact sexospécifique de l’insécurité alimentaire induite par les conflits, notamment pour les femmes et les enfants.  Elle a par conséquent souhaité voir les femmes jouer un rôle actif dans la prévention de l’insécurité alimentaire et des conflits ainsi que dans la conception et la mise en œuvre des efforts de consolidation de la paix et les réponses humanitaires.

Mme Juul a par ailleurs rappelé que l’insécurité alimentaire mondiale a été exacerbée par la guerre illégale de la Russie contre l’Ukraine.  Après avoir à nouveau félicité le Secrétaire général pour ses efforts en faveur de l’Initiative céréalière de la mer Noire, la représentante a invité la communauté internationale à augmenter ses financements et à intensifier ses investissements dans la production alimentaire et la résilience, et ce, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des zones de conflit.  C’est ce qu’a fait la Norvège, dont la nouvelle stratégie de sécurité alimentaire se concentre sur les petits producteurs et la résilience climatique, a-t-elle fait valoir, avant d’appeler de ses vœux un renforcement des partenariats avec l’Union africaine et d’autres organisations régionales en tant qu’éléments essentiels de prévention des conflits et de l’insécurité alimentaire.

M. MADHU SUDAN RAVINDRAN (Inde) a dit que, pour gérer la sécurité alimentaire nationale et répondre aux besoins des pays voisins et d’autres pays en développement vulnérables, le Gouvernement indien a mis en place certaines mesures concernant les exportations de céréales.  Ces mesures permettent l’exportation vers des pays qui en font la demande pour répondre à leurs besoins en matière de sécurité alimentaire.   

Le représentant a salué les efforts déployés par le Secrétaire général pour créer un groupe d’intervention en cas de crise mondiale sur l’alimentation, l’énergie et les finances pour permettre les exportations de céréales d’Ukraine via la mer Noire et pour faciliter les exportations de produits alimentaires et d’engrais russes.  Un accès humanitaire rapide aux personnes dans le besoin dans toutes les zones touchées par les conflits et la violence est essentiel, a insisté le représentant, qui a rappelé l’importance des principes relatifs à l’aide humanitaire, notamment l’humanité, la neutralité, l’impartialité et l’indépendance.  L’aide humanitaire ne doit jamais être politisée, a plaidé le représentant.  Il faut aussi éviter de lier l’aide humanitaire et l’aide au développement aux progrès des processus politiques.  Il a dit être inquiet des tendances au pillage de l’aide humanitaire, y compris celui des carburants, qui sont indispensables au Programme alimentaire mondial.   

Selon le représentant, les pénuries croissantes de céréales ne peuvent être résolues qu’en allant au-delà des contraintes actuelles.  À cet égard, il faut lever les limites imposées aux exportations de produits alimentaires.  L’appui au renforcement des capacités des pays confrontés à la famine, dans la conception, la mise en œuvre et le suivi des politiques et programmes liés à l’alimentation est nécessaire.  Au cours des trois derniers mois seulement, l’Inde a exporté plus de 1,8 million de tonnes de blé vers ses partenaires les plus proches, notamment l’Afghanistan, le Myanmar, le Yémen et le Soudan.  L’Inde continuera de joindre le geste à la parole lorsqu’il s’agira d’aider ses partenaires dans le besoin, a conclu le représentant.   

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a commencé par regretter que les pays concernés par l’insécurité alimentaire ne soient pas présents lors de la séance du Conseil de sécurité pour témoigner de leur situation.  Il a ensuite relevé que le contexte actuel était compliqué par une crise alimentaire et énergétique mondiale dont les causes s’étendent bien au-delà des situations nationales et dépendent de facteurs géopolitiques, économiques et climatiques. 

Estimant que les organisations humanitaires devraient être soutenues dans leurs appels à financements et à un accès sans entrave, le représentant a cependant jugé crucial de ne pas se concentrer exclusivement sur les réponses d’urgence.  Nous savons en effet que, dans la plupart des pays et des régions touchés par des conflits violents, les causes de l’insécurité alimentaire incluent les changements climatiques, les lacunes de développement et la pauvreté qui en résulte, a-t-il fait valoir.  Il a donc exhorté les États, les organismes régionaux et les entités des Nations Unies à renouveler leur engagement en faveur de l’objectif de développement durable « Faim zéro » d’ici à 2030. 

Le représentant a d’autre part estimé que le moment est venu pour le Conseil de sécurité de renouer avec son mandat préventif, notamment au regard de la crise climatique au Sahel et dans la Corne de l’Afrique.  Il existe suffisamment de preuves que le dérèglement climatique aggrave les conflits et peut même être un moteur direct, a-t-il souligné, avant de prier le Conseil de tenir compte de l’appel lancé par les pays de la région pour une action liant action climatique et missions de maintien de la paix et politiques de l’ONU.  

Pour M. Kimani, le Conseil doit maintenir son soutien à l’action humanitaire tout en progressant dans son mandat de protection des civils dans les situations de menaces pour la paix et à la sécurité internationales.  Pour ce faire, le Conseil doit redoubler d’efforts pour encourager, faciliter et faire appliquer les règlements politiques qui débouchent sur des cessez-le-feu, le dialogue, la réconciliation et la reconstruction postconflit.  Quant aux situations où il n’y a pas de paix à maintenir mais où des groupes terroristes représentent une menace dévastatrice pour les civils, le Conseil devrait reconsidérer sa réticence persistante à appuyer le soutien financier des Nations Unies aux efforts d’exécution, a ajouté le représentant, appelant à davantage tenir compte des recommandations de la Commission de consolidation de la paix. 

Mme ANNETTE ANDRÉE ONANGA (Gabon) a appelé à redoubler d’efforts pour mettre fin aux conflits partout où ils éclatent et désamorcer les tensions, afin de donner une chance à la paix et aux programmes de développement.  « Il est primordial de renforcer nos efforts pour apaiser les conflits et de façon concomitante, accroître l’assistance humanitaire d’urgence à la mesure des besoins alimentaires et de la détresse des populations affectées », a-t-elle affirmé.  L’effet conjugué de conflits ravageurs, d’une assistance humanitaire limitée et de populations prises au piège des conséquences des changements climatiques est une source de préoccupation qui fait redouter une catastrophe humanitaire de grande ampleur, a averti la représentante, en évoquant la situation sans précédent dans la région de la Corne de l’Afrique.  

La représentante a appelé à remédier aux causes profondes des déficiences structurelles auxquelles plusieurs pays sont confrontés, « qu’il s’agisse des carences en matière de gouvernance sur le plan national et international, ou des limites avérées dans la mise en œuvre des engagements en matière de développement durable, ou encore, de façon plus spécifique, de la prise en charge de la crise climatique ». 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a jugé nécessaire de se demander si, à l’écoute des défis auxquels sont confrontés le PAM, l’OCHA et la FAO pour fournir une aide alimentaire aux nécessiteux en raison des conflits, de nouvelles notes blanches permettraient de faciliter une action plus rapide du Conseil de sécurité à cet égard.  En outre, a-t-il poursuivi, quelles autres actions pourraient être entreprises pour renforcer la capacité d’anticipation du Conseil?  Et quelle serait la meilleure façon de garantir l’obligation de rendre compte des cas de faim induite par les conflits en violation du droit international humanitaire? s’est encore demandé le représentant.  Il a estimé que l’action humanitaire et le respect du droit international humanitaire ne peuvent qu’atténuer les conséquences d’un conflit sur les systèmes alimentaires.  Il a donc jugé urgent de trouver des solutions politiques pacifiques et négociées aux conflits armés et à la violence.  Le représentant a aussi plaidé pour une alerte et une action précoces, qui mènent à la prévention.  Il a fait remarquer que la prévention de la faim induite par les conflits passe par le respect du droit international humanitaire par les parties au conflit, pour éviter que la faim soit utilisée comme méthode de guerre.  Il est également urgent pour le délégué de donner aux populations les moyens de sécuriser leur accès à la nourriture et de garantir leur participation aux processus d’élaboration des politiques et de prise de décisions.  Il a prôné une réponse intégrée pour s’attaquer aux moteurs de l’insécurité alimentaire aiguë et soutenir le financement des réponses aux crises humanitaires.  Il a aussi appelé à tenir pour responsables ceux qui violent le droit international humanitaire et à mener des enquêtes indépendantes, impartiales sur les allégations de violations graves et d’abus des droits humains et du droit international humanitaire. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a fait état d’une obligation morale et juridique d’agir face à l’insécurité alimentaire découlant des conflits armés.  Au-delà des exposés et des chiffres, il s’agit d’humanité pure et d’êtres humains, de vie et de mort.  Or, depuis l’adoption de la résolution 2417 (2018), la crise de l’insécurité alimentaire n’a fait qu’empirer, sa principale cause restant les conflits.  S’agissant de la « guerre russe » en Ukraine, l’utilisation de la nourriture comme arme de guerre a eu des effets de contagion multiples qui ont grandement aggravé l’insécurité alimentaire, a-t-elle relevé.  Avant la guerre, la Fédération de Russie et l’Ukraine représentaient près du quart des exportations de céréales dans le monde, alors qu’aujourd’hui, les champs de blé ukrainiens sont des champs de bataille.  « Mettez fin à la guerre » afin de résoudre partiellement ce problème, a réagi la représentante face aux critiques de la délégation russe.   

S’agissant de la crise alimentaire en Éthiopie, notamment au Tigré, elle a noté que 20 millions de personnes se trouvent en situation d’insécurité alimentaire, tandis que les chaînes d’approvisionnement sont grandement perturbées.  L’aide humanitaire ne devrait pas être utilisée à des fins militaires, mais plutôt afin de sauver des vies, a plaidé la représentante.  Dans le nord-est du Nigéria, les attaques répétées contre les agriculteurs réduisent d’autant les récoltes et les aires cultivées.  La déléguée a ensuite appelé le Gouvernement du Soudan du Sud à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, notant par ailleurs que selon le PAM, près de 50 millions de personnes dans 45 pays risquent de sombrer dans le gouffre sans aide humanitaire.  Elle s’est ensuite félicitée du fait que 103 pays participent à l’élaboration d’une feuille de route pour la sécurité alimentaire mondiale.   

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a suggéré que relever les défis de l’insécurité alimentaire, le règlement pacifique des conflits armés et de la violence reste le moyen le plus sûr de garantir la sûreté et la sécurité des civils et d’éviter les risques de famine qui accompagnent les conflits.  Il faut donner la priorité aux pauses humanitaires et aux trêves qui peuvent offrir l’occasion de centrer les besoins de protection des populations civiles, a plaidé le représentant.   

Il faut ensuite respecter le droit international humanitaire et renouveler l’engagement des États et des acteurs non étatiques en faveur de la préservation et de la protection de l’action humanitaire.  Cela nécessite des mesures visant à prévenir l’utilisation de la famine comme arme de guerre contre les populations civiles, le ciblage délibéré de leurs moyens de subsistance.  Les auteurs de violations flagrantes des lois sur les conflits armés doivent répondre de leurs actes.   

Pour le Ghana, les parties aux conflits doivent rendre des comptes si elles ciblent les travailleurs humanitaires et entravent l’acheminement de l’aide humanitaire.  À cet égard, les risques que représentent pour les civils et les travailleurs humanitaires la désinformation, la mésinformation et le discours de haine pendant les conflits armés doivent être combattus.  Le représentant a souligné la nécessité pour le Conseil d’améliorer les arrangements de suivi, d’analyse et de communication de l’information en réponse aux violences sexuelles dans les conflits armés.   

M.  Agyeman a encouragé le renforcement de l’appui aux arrangements régionaux pour aider à soutenir les efforts de protection des civils.  Certaines organisations régionales disposent également d’une architecture de sécurité alimentaire qui pourrait être exploitée pour mieux gérer l’insécurité alimentaire pendant les conflits, a fait remarquer le représentant.   

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dit attendre avec intérêt que le Secrétaire général continue de tirer la sonnette d’alarme sur l’impact des conflits et de la faim, ajoutant que tous les États Membres devraient le soutenir dans cette démarche.  Le représentant a appelé les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire, y compris la protection des travailleurs humanitaires.  Elles doivent faciliter un accès humanitaire rapide et sans entraves, notamment en supprimant les obstacles bureaucratiques à l’aide.  Le représentant a dit être préoccupé par le fait que l’acheminement de l’aide à la région du Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, n’a pas été possible depuis la reprise du conflit à la fin du mois d’août.  Il a donc appelé à un accès immédiat au carburant, à l’argent et à la nourriture.   

Il faut également une action concertée pour protéger les systèmes alimentaires et promouvoir la résilience, a plaidé le représentant.  Les populations doivent pouvoir cultiver leurs terres en toute sécurité afin que les familles puissent nourrir les 1,74 million d’enfants qui souffrent maintenant de malnutrition aiguë.  Il faut aussi veiller à ce que les marchés alimentaires mondiaux soient ouverts afin que le coût de l’alimentation n’augmente pas.   

À cet égard, le représentant a réaffirmé l’importance de poursuivre la mise en œuvre de l’accord sur les céréales de la mer Noire, qui a contribué à une baisse de 5,1% des prix mondiaux du blé.  Quelque 23 000 tonnes de blé ukrainien sont arrivées à Djibouti le mois dernier, dont une partie a déjà atteint l’Éthiopie.  Le Programme alimentaire mondial (PAM) a déclaré que c’était suffisant pour nourrir 1,5 million de personnes avec des rations complètes pendant un mois.   

Il est urgent de mettre fin aux conflits et d’investir dans une paix durable, a répété le représentant, qui a dit la fierté du Royaume-Uni d’être l’un des principaux donateurs des appels humanitaires de l’ONU en fournissant une aide humanitaire de 3,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années.   

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est dit préoccupé par les problèmes de sous-nutrition liés aux conflits qui sont observés dans une vingtaine de pays, dont cinq font face à un risque de famine.  Hélas, a-t-il dit, ce sujet grave est exploité par certains de façon éhontée comme moyen de pression géopolitique.  Selon lui, cette situation a commencé bien avant l’opération militaire spéciale en Ukraine, même si les pays occidentaux voient dans le rappel de ce fait de la désinformation et de la propagande.  En mai de cette année, a poursuivi le représentant, le monde s’est souvenu que les céréales représentent une source d’exportations importante depuis l’Ukraine.  Il a également été rappelé que 30% du blé mondial est exporté depuis la région de la mer Noire, sans préciser que la plus grande partie vient de Russie.  On a aussi dit que si le port d’Odessa était bloqué par la Russie, des millions de personnes mourraient.  Or, a-t-il martelé, la Russie n’a pas bloqué l’exportation de céréales, comme l’atteste le couloir humanitaire prévu à cet effet.  Les vraies raisons du blocage des exportations ukrainiennes sont tout autres, a affirmé le délégué, avant de rappeler qu’avant même la conclusion de l’accord d’Istanbul, les prix du blé avaient baissé, revenant à leur niveau de 2021.  Malgré cela, trois millions de tonnes de céréales ont ensuite pu être exportées, ce qui aurait dû entraîner une baisse des prix.  Celle-ci ne s’est pourtant pas concrétisée dans les pays du Sud, a-t-il constaté.  En effet, la moitié de toutes les cargaisons sont destinées à des pays à revenu supérieur, contre 3% seulement aux pays les plus pauvres.  Ce que l’on voit, c’est que la plupart des cargaisons vont vers l’Union européenne (UE), laquelle affirme qu’une partie du blé qui arrive chez elle est réexportée vers des pays dans le besoin.  Cette tâche est pourtant déjà effectuée par nos partenaires turcs, a signalé le représentant, ajoutant ne pas savoir grand-chose du retraitement opéré par l’UE.   

Dans ces conditions, comment peut-on continuer de croire que cette situation bénéficie aux pays les plus pauvres, s’est interrogé le représentant.  En imputant l’insécurité alimentaire au conflit en Ukraine, on ignore la politique monétaire irresponsable des pays occidentaux, a-t-il tonné, notant que l’augmentation du cours du dollar et des taux d’intérêt constitue une nouvelle menace pour les pays endettés.  Quant à l’accord d’Istanbul, il est largement entravé par les sanctions de ces mêmes pays, qui empêchent notamment les navires russes chargés de céréales et d’engrais d’arriver dans les ports européens.  Dénonçant l’hypocrisie des responsables de l’UE qui vont jusqu’à interdire aux transporteurs européens de véhiculer les cargaisons russes et de les acheminer vers des pays tiers, il a estimé que les marchés ont été déstabilisés par cette situation portuaire.  Nos producteurs sont pourtant prêts à les expédier à titre gracieux vers les pays qui en ont besoin, a-t-il assuré, ajoutant que, selon la CNUCED, si les agriculteurs de ces pays n’obtiennent pas les engrais d’ici à novembre, les prix vont encore augmenter, ce qui aggravera d’autant l’insécurité alimentaire.  Invitant l’ONU à contribuer aux efforts visant à empêcher que cette situation ne s’aggrave, il a déploré qu’en raison des restrictions bancaires, la Russie ne peut même pas venir en aide au PAM.  Elle cherche néanmoins des possibilités pour contribuer à la sécurité alimentaire mondiale, comme le prouve l’envoi de 6,6 millions de tonnes de céréales cette année, le total devant atteindre 50 millions à terme.  Pour cela, il est impératif selon lui que l’accord d’Istanbul soit pleinement mis en œuvre, sans sélectivité.  Avant de conclure, le représentant a souhaité attirer l’attention du Conseil sur la situation en Syrie, où l’insécurité alimentaire est la conséquence des actions occidentales, et sur les répercussions du gel à l’étranger des avoirs de l’Afghanistan, dont la population est au bord de la famine.   

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que l’année 2022 marquerait un sombre record s’agissant du nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire, en raison des conflits, de la pandémie de COVID-19 et des changements climatiques.  La guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine aggrave l’insécurité alimentaire et accroît le risque de famine dans le monde.  En 2022-2023, ce sont jusqu’à 13 millions de personnes supplémentaires qui pourraient faire face à la sous-alimentation du fait de cette guerre, a insisté la représentante.  Selon elle, aucune sanction ne vise le secteur alimentaire et la France lutte pour que les produits agricoles ne deviennent en aucun cas une arme de guerre pour servir des buts géopolitiques.   

Seule une approche multilatérale, coordonnée et inclusive permettra de contrer le risque de famine et de prévenir les effets désastreux de la guerre menée par la Russie en Ukraine, a ajouté Mme Broadhurst Estival, qui a dit soutenir l’initiative lancée par le Secrétaire général, en réponse à la crise mondiale sur l’alimentation, l’énergie et les finances.  Les pays les plus exposés doivent recevoir les denrées qui leur sont nécessaires.  À ce titre, les accords conclus à Istanbul le 22 juillet dernier doivent être mis en œuvre afin que les céréales parviennent à ceux qui en ont besoin le plus urgemment.  Ce mécanisme doit être reconduit au-delà de sa durée initiale de quatre mois.  Les corridors de solidarité mis en place par l’Union européenne ont par ailleurs permis la sortie de plus de 10 millions de tonnes de céréales d’Ukraine depuis mars dernier, contribuant ainsi à faire baisser les prix et éviter une crise d’anticipation.   

Pour sa part, la France, avec l’Union européenne, a lancé l’initiative « Food & Agriculture Resilience Mission » (FARM) qui vise à soutenir les pays les plus touchés par la crise alimentaire mondiale, en améliorant la transparence des marchés agricoles, en favorisant un accès équitable aux denrées et produits agricoles à un prix raisonnable et en renforçant la production locale durable pour réduire les dépendances.  La représentante a appelé tous les acteurs à contribuer à ces efforts internationaux, y compris le secteur privé.   

La France, a indiqué Mme Broadhurst Estival, a augmenté sa contribution financière pour la sécurité alimentaire et la nutrition, qui devrait dépasser 706 millions d’euros cette année.  Elle soutient les projets portés par la société civile.  La représentante a également mentionné le doublement de l’appui financier de la France au PAM cette année et le financement du secrétariat établi par le Fonds international de développement agricole (FIDA).   

Prévenir la famine et les crises alimentaires implique également que toutes les parties aux conflits respectent leurs obligations dans le cadre du droit international humanitaire y compris les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021), a poursuivi la représentante.  La protection des civils et des infrastructures civiles est un impératif absolu.  L’accès humanitaire doit être garanti.  À plus long terme, la réponse à l’insécurité alimentaire passe nécessairement par une transformation des systèmes alimentaires, qui doivent devenir durables et résilients pour répondre aux effets des changements climatiques, à l’érosion de la biodiversité et à l’enjeu de l’accroissement de la population humaine.   

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a souligné la situation dramatique qui prévaut dans la région de la Corne de l’Afrique.  Il a fait savoir qu’avec les États-Unis, le Qatar et le Royaume-Uni, sa délégation organisera, durant la semaine du débat général, un évènement sur la situation humanitaire dans cette région en espérant sensibiliser le plus grand nombre.  Il a précisé que la sécurité alimentaire a toujours été une priorité de l’Italie et mentionné le soutien financier, politique et technique accru apporté à l’ONU, par l’entremise notamment des agences onusiennes basées à Rome.  Il a appelé tous les États Membres à augmenter leur appui.  Pour éviter le scénario du pire, un changement profond dans les attitudes et engagements est nécessaire, a souligné le délégué, en insistant sur l’importance cruciale d’une « diplomatie alimentaire » pour atténuer les effets de la crise alimentaire mondiale.   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale rend hommage à Sa Majesté la Reine Elizabeth II, « un pilier sans égal sur la scène mondiale pendant plus de soixante-dix ans »

Soixante-dix-septième session,
2e séance plénière – matin
AG/12444

L’Assemblée générale rend hommage à Sa Majesté la Reine Elizabeth II, « un pilier sans égal sur la scène mondiale pendant plus de soixante-dix ans »

L’Assemblée générale s’est réunie ce matin afin de rendre hommage à la mémoire de Sa Majesté la Reine Elizabeth II du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, décédée le 8 septembre.  Les orateurs ont évoqué son très long règne et son leadership au service de son peuple, du Commonwealth et du multilatéralisme. 

Le Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi, a rappelé que lors de sa dernière visite à l’ONU, en 2010, la reine avait exprimé son admiration pour l’Organisation et avait espéré que, lorsque l’ONU sera jugée par les générations futures, « notre sincérité, notre volonté de prendre les devants et notre détermination à bien faire résisteront à l’épreuve du temps ».  Il a salué la mémoire d’une souveraine qui a consacré sa vie au service public et à l’amélioration de la vie des gens.

Après que l’Assemblée a observé une minute de silence en hommage à la défunte Reine, le Secrétaire général de l’ONU a déclaré que « le soleil s’est couché sur un règne absolument extraordinaire ».  M. António Guterres a salué la mémoire d’un « pilier sans égal sur la scène mondiale pendant plus de soixante-dix ans », rappelant que la Reine était montée sur le trône à l’époque de Churchill, Truman, Staline, Mao et de Gaulle.  Il a évoqué une présence « rassurante et inspirante » d’une souveraine qui était une ancre de stabilité à travers des décennies d’histoire souvent mouvementée.  Le Secrétaire général a également salué la mémoire d’une diplomate accomplie qui avait pris la parole devant l’Assemblée générale, lorsque l’ONU et elle-même étaient encore toutes jeunes, pour appeler les dirigeants du monde à démontrer leur dévotion aux idéaux de la Charte des Nations Unies.  Selon lui, son héritage est un exemple inspirant de leadership qui est au service.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, le représentant de Maurice a rappelé qu’Elizabeth II avait un lien fort avec l’Afrique et qu’elle avait accompagné plusieurs pays du continent vers l’indépendance.  Malgré le lot d’atrocités de la colonisation, a-t-il rappelé, elle a continué à jeter des ponts entre les peuples, visitant une vingtaine de pays d’Afrique durant son règne.  Pour les Philippines, qui parlaient au nom du Groupe des États d’Asie et du Pacifique, elle laisse une empreinte indélébile, car ses idées ont inspiré des générations.  « Elle fut d’ailleurs mécène de nombreuses organisations caritatives et des arts. »  En sa capacité nationale, le délégué des Philippines a estimé qu’Elizabeth II fut le symbole durable de la tradition royale, de la coopération internationale et de notre confiance dans l’état de droit.

Au nom des États d’Amérique latine et des Caraïbes, le Suriname a évoqué une souveraine qui a réussi à adapter la monarchie à un monde en mutation et à une perception publique changeante de l’institution, tout en maintenant les traditions associées à la couronne.  S’exprimant au nom des États d’Europe occidentale et autres États, la Grèce a salué « une dirigeante qui nous a inspirés » et qui était un fervent soutien des Nations Unies et du multilatéralisme.  Ce fut une amie chère des États-Unis qui a rencontré 14 présidents américains, a déclaré la déléguée de ce pays qui a aussi salué ce chantre du multilatéralisme.  Elle a également rappelé le soutien apporté par la Reine à la cause de la liberté et de la justice dans tout le Commonwealth.

« Avec ce décès se termine un règne extraordinaire et nous n’oublierons jamais la main tendue à notre pays dans des moments difficiles », comme des catastrophes naturelles, a témoigné l’Australie, avant que la Papouasie-Nouvelle-Guinée ne rappelle qu’elle était très appréciée et aimée dans le pays.  Au nom des membres du Forum des Îles du Pacifique, les Fidji ont rappelé « cette connexion personnelle qui restera dans les mémoires le plus affectueusement ».  Et son intérêt pour le Pacifique a été réciproque, a souligné la délégation.  Son leadership s’est étendu au-delà du Royaume-Uni et du Commonwealth, a renchéri Antigua-et-Barbuda en voyant Elizabeth II comme « une bonne amie des Nations Unies qui croyait aux principes consacrés dans la Charte ».  Le Belize a estimé que le succès du Commonwealth était dû au leadership de la Reine Elizabeth II.

Au nom d’un groupe de pays (Bahamas, Belize, Saint-Kitts-et-Nevis, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Sainte-Lucie), la Jamaïque a évoqué une reine qui est restée une constante au milieu des moments décisifs de l’histoire, y compris la fin de la guerre froide, l’évolution du Commonwealth et, plus récemment, l’apparition de la COVID-19.  La délégation a rappelé que lors de son vingt et unième anniversaire, près de quatre ans avant qu’elle ne devienne reine, la Reine avait prédit qu’elle consacrerait toute sa vie à servir.  Son règne record de soixante-dix ans de service est un témoignage de son engagement envers nous tous, a confirmé la Nouvelle-Zélande qui a salué une souveraine admirée et chérie.

En tant que Président du Commonwealth, le Rwanda a dit garder le souvenir d’une personne dédiée à la cause de cette organisation dont la modernisation est son héritage.  La République tchèque, au nom de l’Union européenne, a salué son caractère, ses valeurs et sa personnalité qui ont contribué à favoriser la réconciliation entre les pays d’Europe, notamment après l’horreur de la Deuxième Guerre mondiale et à la suite de la guerre froide.  Les Samoa, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, ont salué le leadership incroyable d’Elizabeth II, une dirigeante forte et engagée.  Le Pacifique se souvient d’elle comme de l’incarnation du sens du service et de la grâce, même sous pression. 

Au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l’Arabie saoudite s’est souvenue de son rôle pour renforcer les liens d’amitié et de partenariat entre le Royaume-Uni et le CCG.  Au nom du Groupe des États arabes, la Tunisie a salué une personnalité internationale exceptionnelle qui fut le symbole de l’unité de son pays.  Le Canada a voulu saluer « son incroyable force de caractère, son humilité et sa gentillesse ».  Elle était dédiée aux causes de la démocratie, du développement durable et des Nations Unies, a-t-il reconnu en se remémorant aussi ses 23 visites officielles au Canada.  Il a parlé d’une reine qui avait trouvé sa propre liberté en se mettant au service de Dieu et de son peuple. 

Au-delà de son peuple, la représentante du Royaume-Uni a rappelé le rayonnement d’une reine qui s’est rendue dans plus de 100 pays, nouant des liens et laissant la marque de ses passages.  Elle était le meilleur diplomate du pays, a dit la déléguée qui a parlé d’une « vie consacrée à l’amitié entre les peuples », avec les Nations Unies comme maillon central de ses actions.  La Reine avait d’ailleurs pris part à la première réunion des Nations Unies tenue à Londres à la fin de la guerre, a-t-elle souligné en faisant le parallèle entre la durée extraordinaire de son règne et l’histoire des Nations Unies.  « Cette disparition marque la fin d’une époque dans tout le Royaume-Uni et le Commonwealth. »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité se saisit du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan après des combats meurtriers le long de la frontière entre les deux pays

9132e séance – matin
CS/15031

Le Conseil de sécurité se saisit du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan après des combats meurtriers le long de la frontière entre les deux pays

À la demande de la France, qui préside ce mois-ci ses travaux, le Conseil de sécurité s’est réuni ce matin pour examiner les incidents meurtriers survenus il y a trois jours entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, les plus violents depuis la signature, le 9 novembre 2020, d’un accord de cessez-le-feu sur le Haut-Karabakh, territoire revendiqué par les deux pays.

Selon le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, M. Miroslav Jenča, des affrontements meurtriers ont eu lieu le 12 septembre le long de la frontière commune entre les deux anciennes républiques soviétiques, avant l’annonce d’un cessez-le-feu conclu le 14.

L’Arménie a fait état de 105 combattants tués et de 6 civils blessés, l’Azerbaïdjan de 71 soldats tués et 2 civils blessés, a précisé M. Jenča.  Alors que l’Arménie a évoqué une « attaque délibérée », l’Azerbaïdjan a rétorqué qu’il s’agissait de représailles aux « provocations » arméniennes.  Les deux pays ont dénoncé auprès du Secrétaire général et du Conseil de sécurité des violations du cessez-le-feu négocié par la Russie en 2020 après un conflit de 44 jours, et de leur intégrité territoriale respective, des allégations que l’ONU n’est pas en mesure de vérifier, a ajouté M. Jenča.

Les combats de cette semaine, « les plus importants d’une série d’incidents survenus depuis 2020 », révèlent que le processus de normalisation des relations entre les deux pays continue de se heurter à de sérieux obstacles, a reconnu le Sous-Secrétaire général.  Cette escalade souligne l’urgente nécessité pour eux de faire progresser le processus en cours de délimitation et démarcation de leur frontière commune, a-t-il ajouté en exhortant les parties à s’appuyer sur cet important mécanisme, qui constitue une étape essentielle vers l’atténuation des tensions, susceptibles de déstabiliser la région.

À cette fin, la Fédération de Russie a annoncé qu’elle était prête à prêter son concours, « en fournissant notamment des éléments cartographiques », et que des militaires russes sont présents sur place pour obtenir le respect du cessez-le-feu et un retour des forces azerbaïdjanaises et arméniennes à leurs positions antérieures; un redéploiement également demandé par la France.  « Nous sommes au début d’un chemin tortueux vers la réconciliation », a estimé la délégation russe.

À la suite du Sous-Secrétaire général, tous les membres du Conseil ont convenu que seul un règlement politique et négocié de la crise est envisageable et se sont félicités de la cessation des hostilités conclue hier.  Pour l’Inde, l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 négocié par la Russie, ainsi que les processus de paix menés dans le cadre de la médiation du Groupe de Minsk créé par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’Union européenne fournissent des mécanismes utiles pour résoudre tous les problèmes en suspens.

Les membres du Conseil ont également relayé les craintes de M. Jenča que les incidents meurtriers de ces derniers jours, qui ont éclaté à l’extérieur du Haut-Karabakh, ne se propagent dans la région, alors que « la sécurité européenne est déjà menacée par le conflit en Ukraine », comme l’a rappelé avec inquiétude l’Albanie.  Une nouvelle guerre entraînerait des conséquences au-delà des frontières européennes, a averti le représentant de ce pays.

Le Sous-Secrétaire général a exhorté les parties à prendre des mesures en faveur de la signature d’un traité de paix durable, plaidant aussi pour que le Conseil de sécurité présente un front uni sur ce dossier, afin que l’Arménie et l’Azerbaïdjan se sentent encouragés à privilégier une solution diplomatique.

Après les interventions des membres du Conseil, les représentants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan ont longuement pris la parole pour s’accuser mutuellement.  L’Arménie a dénoncé la « conduite hostile », la « rhétorique non contrôlée » et la « violence disproportionnée » de l’Azerbaïdjan, accusé de « mépris total » pour le droit international et même de « crimes de guerre », s’agissant en particulier des bombardements de la station balnéaire de Djermouk et du réservoir d’eau de Kechut, qui ne peuvent être considérés comme des objectifs militaires.

L’Azerbaïdjan a rejeté les allégations « dénuées de fondement » de l’Arménie, à l’origine selon lui de la récente escalade, « fomentée » pour « torpiller » les différents accords signés, « avec l’aide de certains membres de ce Conseil ».  Il est ironique de voir l’Arménie, qui a occupé des territoires azerbaïdjanais pendant 30 ans et pratiqué le nettoyage ethnique, se réclamer aujourd’hui de principes qu’elle ne cesse de violer et faire appel à ce Conseil alors qu’elle n’en applique pas les résolutions, a déclaré le représentant de ce pays. 

LETTRE DATÉE DU 13 SEPTEMBRE 2022, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’ARMÉNIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2022/688)

Déclaration liminaire

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, a indiqué que, dans la soirée du 12 septembre, les autorités d’Arménie et d’Azerbaïdjan avaient fait état d’affrontements nourris sur leur frontière internationale.  Des tirs d’artillerie soutenus auraient été échangés, de même que des armes de gros calibre jusqu’au 14 septembre, avant qu’un cessez-le-feu ne soit annoncé dans la soirée.  Plus tôt dans la semaine, le Ministère arménien de la défense avait déclaré que la partie azerbaïdjanaise prenait pour cible des positions militaires arméniennes, ainsi que des infrastructures civiles, dans les régions de Gegharkounik, de Vayots Dzor et de Siounik.  L’Arménie a signalé que 105 de ses combattants ont été tués et six civils blessés la nuit dernière.  Alors que l’Arménie a qualifié ces événements d’attaque délibérée, l’Azerbaïdjan a rétorqué qu’il s’agissait de mesures de représailles en réponse aux provocations de l’Arménie et a fait état pour sa part de la perte de 71 combattants tués et de deux civils blessés.  Les deux pays ont écrit au Secrétaire général et au Conseil de sécurité pour dénoncer des violations du cessez-le-feu négocié par la Russie en 2020 et de leur intégrité territoriale respective, des allégations que l’ONU n’est pas en mesure de vérifier ou de confirmer, a précisé M. Jenča. 

Les équipes de pays des Nations Unies en Arménie et en Azerbaïdjan sont en contact permanent avec les autorités et prêtes à répondre aux besoins humanitaires émergents, si la demande en est faite et les conditions le permettent, a poursuivi le Sous-Secrétaire général. 

Les combats de cette semaine sont les derniers et les plus importants d’une série d’incidents survenus depuis 2020, a rappelé M. Jenča.  Ils soulignent que le processus de normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan continue de se heurter à de sérieux obstacles.  Cette escalade souligne également le besoin urgent pour les parties de faire progresser le processus en cours de délimitation et de démarcation dans le cadre de la reconnaissance mutuelle de leur intégrité territoriale et de leur souveraineté, a souligné le Sous-Secrétaire général, en exhortant les parties à s’appuyer sur cet important mécanisme, qui constitue une étape essentielle vers l’apaisement des tensions à la frontière.

Les événements de cette semaine sont également un rappel « brutal » que les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont le potentiel de déstabiliser la région, a mis en garde le Sous-Secrétaire général.  Ils soulignent la nécessité pour tous les acteurs, dans la région et au-delà, d’agir de manière constructive et de faire pression sur les parties pour qu’elles œuvrent à un règlement pacifique de la situation.  À cet égard, un certain nombre d’efforts de médiation ont été déployés dans la région, notamment par la Fédération de Russie et l’Union européenne, que l’ONU soutient pleinement, dans la mesure où ils peuvent jeter les bases qui permettront aux parties de reprendre le dialogue en vue d’une paix durable.  L’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), à la demande de l’Arménie, déploiera une mission en Arménie pour évaluer la situation à la frontière, et fera rapport à ses États membres. 

M. Jenča a déclaré que, lors d’une visite récente dans la région, il avait pu évaluer directement les défis à relever pour résoudre ce conflit de longue date.  Il s’est dit convaincu que, si des différences et une méfiance persistent entre les parties, elles sont surmontables.  La communauté internationale doit rester pleinement engagée en faveur d’un règlement pacifique entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et n’épargner aucun effort pour atténuer les tensions actuelles, ramener les parties à la table des négociations et les aider à réaliser la paix et la stabilité dans la région, a insisté le Sous-Secrétaire général.  Dans l’immédiat, les parties doivent s’acquitter de leurs obligations de mettre pleinement en œuvre la déclaration trilatérale sur le cessez-le-feu du 9 novembre 2020.  M. Jenča les a exhortées à retourner à la table des négociations et à prendre des mesures en faveur de la signature d’un traité de paix durable.  Il sera important qu’un message d’unité similaire soit adressé aux parties par le Conseil de sécurité, afin qu’elles se concentrent sur une solution diplomatique, a préconisé le Sous-Secrétaire général.

Déclarations

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que la résurgence des affrontements entre les forces de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan ravive le triste souvenir du conflit de 2020, qui a fait des milliers de morts.  Déplorant les pertes en vies humaines de part et d’autre, il a condamné le recours à la force armée avant de réaffirmer qu’aucune solution militaire n’est viable.  Pour le représentant, toute escalade de la violence ne fera que sédimenter les rancœurs et les tensions dans une situation dont la complexité requiert un engagement de l’ensemble des partenaires qui ont de l’influence auprès des parties. 

Face au risque d’embrasement, la communauté internationale doit se mobiliser pour éviter l’escalade, a poursuivi le représentant.  Les nombreuses initiatives sous-régionales, régionales et internationales visant à ramener les parties à la table des négociations doivent également être soutenues.  De même, il est fondamental de maintenir le cessez-le-feu dans le Haut-Karabakh et le long de la frontière entre les deux pays, tout en réactivant l’éventail des canaux diplomatiques, a ajouté le représentant, avant d’exhorter les parties à faire preuve de retenue et d’encourager le Conseil à parler d’une même voix pour permettre un retour à la paix. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) s’est déclarée profondément préoccupée par les informations récentes faisant état d’attaques le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, notamment le ciblage d’habitations et d’infrastructures civiles.  Appelant l’agresseur à cesser immédiatement les hostilités et à faire preuve de retenue, elle a jugé que ces agissements constituent une menace grave pour la paix et la stabilité dans la région. 

Le Conseil de sécurité ne peut tout simplement pas se permettre de rester silencieux et de laisser la situation se détériorer davantage, a fait valoir la représentante, selon laquelle le cessez-le-feu du 9 novembre 2020 négocié par la Russie, ainsi que les processus de paix sous médiation du Groupe de Minsk, créé par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), et de l’Union européenne fournissent des mécanismes utiles pour résoudre tous les problèmes en suspens.  L’Inde a toujours soutenu que de tels différends doivent être réglés par la diplomatie et le dialogue, a rappelé Mme Kamboj, ajoutant qu’il ne peut y avoir de solution militaire ou violente à tout conflit.  La représentante a donc encouragé les deux parties à privilégier les voies diplomatiques pour parvenir à une solution durable et pacifique, avant de réaffirmer que l’ordre mondial est ancré dans le droit international, la Charte des Nations Unies et le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des États.

Mme MONA JUUL (Norvège) a exprimé sa profonde préoccupation devant la montée des tensions et des hostilités militaires le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, notamment les frappes d’artillerie qui toucheraient des civils et des infrastructures civiles en Arménie.  « Le recours à la force pour régler des différends est inacceptable », a déclaré la représentante, en soulignant qu’il s’agit des pires combats depuis la guerre de 2020 concernant le Haut-Karabakh.  Les acteurs humanitaires s’inquiètent de l’impact humanitaire des actions militaires en cours, qui affectent la sécurité des populations vivant dans la zone frontalière et l’accès aux infrastructures essentielles. 

La représentante s’est toutefois dite encouragée par la conclusion d’un accord sur la cessation des hostilités.  Elle a appelé les parties à faire preuve d’un maximum de retenue et à prendre des mesures immédiates pour faire baisser les tensions.  La Norvège, a-t-elle rappelé, reconnaît la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan à l’intérieur de leurs frontières internationalement reconnues.  Elle entend continuer de soutenir le dialogue entre les deux pays afin d’assurer la mise en œuvre l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020.

Mme CÁIT MORAN (Irlande) s’est dite « profondément préoccupée » par les graves combats qui ont éclaté ces derniers jours le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, notamment par les informations faisant état d’attaques contre des infrastructures civiles essentielles en Arménie.  Elle a appelé à une cessation immédiate des hostilités, et demandé aux parties de faire preuve de la plus grande retenue et de s’abstenir de toute nouvelle escalade de la violence.  Les violations de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États ne sont jamais acceptables, a dénoncé la déléguée, en exhortant les parties à s’engager sans délai à un cessez-le-feu et à respecter les accords existants.  Seuls le dialogue et la diplomatie peuvent mener à une résolution durable du conflit, notamment avec la participation des femmes, a-t-elle relevé.  Pour sa part, l’Irlande, en collaboration avec ses partenaires de l’Union européenne, continue de soutenir les efforts en vue d’un règlement négocié, global et durable du conflit, y compris en ce qui concerne le statut du Haut-Karabakh.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) s’est dite préoccupée par la reprise des combats et par les frappes contre les civils et les infrastructures civiles.  « Tout doit être mis en œuvre pour éviter un nouveau cycle de violences », a-t-elle ajouté.  Elle a exhorté les parties à faire montre de la plus grande retenue et à respecter les dispositions de l’accord de cessez-le-feu de 2020, avant de souligner le rôle important de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Enfin, elle a appelé à la reprise des négociations en vue d’une paix durable et d’une normalisation des relations des deux pays dans le respect de leur intégrité territoriale.  Le dialogue est l’option à choisir, a conclu la représentante. 

M. GENG SHUANG (Chine) s’est dit préoccupé par le récent conflit armé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, soulignant que le maintien de la paix est dans l’intérêt des deux pays, qui doivent faire preuve de retenue et privilégier le dialogue politique.  Le représentant s’est félicité que les deux parties soient parvenues rapidement à un accord de cessez-le-feu, espérant qu’elles le respecteront.  Il a également souhaité qu’elles puissent continuer d’interagir de manière positive sur la question de la démarcation de leur frontière commune.  La normalisation de leurs relations est indissociable du règlement du conflit au Haut-Karabakh, a rappelé le représentant, en précisant que la Chine a toujours été attachée à un règlement politique de cette crise.  Il a également apporté son soutien à la Déclaration trilatérale conclue sous l’égide de la Fédération de Russie.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a fait part de sa profonde préoccupation face aux affrontements qui ont eu lieu à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et leur impact sur la population civile.  Il a appelé les parties à cesser immédiatement les hostilités et à respecter le cessez-le-feu en vigueur.  Le conflit entre les deux pays, en 2020, a fait payer un lourd tribut à la population civile et aux infrastructures de base, a-t-il rappelé.  La communauté internationale doit tout faire pour empêcher que la situation ne se répète. 

Le représentant a demandé instamment aux acteurs internationaux qui en ont le pouvoir d’inciter les parties à revenir à la table des négociations, estimant que seul le dialogue peut mener à une paix durable.  Il a exprimé en terminant son appui aux efforts de médiation en cours dans la région, notamment les efforts déployés par la Fédération de Russie et l’Union européenne pour mettre fin aux hostilités et reprendre la voie de la diplomatie. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a souhaité qu’une solution pérenne soit apportée à ce conflit de longue date, en regrettant la reprise des hostilités cette semaine.  Une escalade pourrait avoir de grandes conséquences dans la région et au-delà, a-t-il estimé, ajoutant que le recours à la violence ne pouvait régler la situation.  Il a souligné la nécessité de préserver la trêve observée.  Il est crucial de retourner à la table des négociations en vue d’un règlement se fondant sur les principes du droit international, a poursuivi le représentant en soulignant l’importance des efforts de médiation.  La volonté des parties de consentir des sacrifices est au cœur de toute solution, a-t-il conclu.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé que les affrontements récents entre les forces armées de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan vont à l’encontre de la lettre et de l’esprit de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, ainsi que de celles du 11 janvier et du 26 novembre 2021.  Il existe un risque que ces combats sapent la confiance nécessaire et mettent à mal les progrès réalisés dans le cadre de ce processus, a-t-il averti, appelant les parties à respecter le droit international et la Charte des Nations Unies et à régler leur différend par le dialogue et la diplomatie.

S’associant aux autres membres du Conseil favorables à une solution diplomatique pérenne dans le cadre des efforts visant à délimiter la frontière entre les deux pays, le représentant s’est félicité des médiations effectuées par les pays de la région aux fins de prévenir la violence.  Ces efforts sont extrêmement pertinents et encourageants, a-t-il dit. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a salué l’accord de cessez-le-feu signé par les deux parties hier et les efforts de médiation y ayant abouti.  Les deux parties doivent faire montre de la plus grande retenue et parvenir à une paix durable.  Toute escalade dans ce monde de crises répétées doit être évitée, a déclaré la déléguée, en appelant à un retour des parties à la table des négociations.  Elle a également appelé les parties à parvenir à un accord de paix durable et souligné la nécessité de préserver le cessez-le-feu.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a exprimé son inquiétude face aux affrontements qui ont éclaté ces derniers jours le long de la frontière entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.  Il s’est toutefois félicité des faits nouveaux qui ont marqué les relations entre les deux pays, y compris la réunion de Bruxelles, en août, sous les auspices du Conseil européen et s’est voulu optimiste. 

Toutefois, dans ce conflit, il est difficile de s’appuyer sur des faits vérifiés de façon indépendante, a noté le représentant, qui a mis en garde contre tout acte qui pourrait contribuer à nourrir la défiance entre les parties, notamment un renforcement militaire le long de la frontière qui entraînerait une reprise des hostilités voire un conflit ouvert. 

Alors que les derniers actes de violence ont lieu à l’extérieur du Haut-Karabakh, il est urgent de tout faire pour empêcher que le conflit ne se propage, a poursuivi le représentant.  La sécurité européenne est déjà menacée par le conflit en Ukraine, s’est-il inquiété.  Une nouvelle guerre aurait des conséquences au-delà des frontières européennes, a-t-il ajouté.  Il s’est en revanche félicité de la conclusion du cessez-le-feu et a invité les parties à le respecter pleinement. 

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) s’est félicité de l’annonce d’un cessez-le-feu négocié le soir du 14 septembre, mais s’est dit préoccupé par les nombreuses informations faisant état de victimes civiles causées par l’action militaire lancée plus tôt cette semaine.  Rappelant la position de longue date de son pays, selon laquelle il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, le représentant a jugé qu’une paix durable ne pourra être atteinte que par la diplomatie et le dialogue, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies.  Cela a été démontré par plusieurs développements encourageants intervenus ces dernières semaines, a-t-il relevé, faisant notamment référence à la libération de prisonniers de guerre par l’Azerbaïdjan et aux réunions trilatérales tenues à Bruxelles. 

Le Royaume-Uni exhorte les dirigeants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan à se réengager de bonne foi dans ce dialogue avec le soutien de la communauté internationale et à reprendre des négociations de fond pour régler toutes les questions en suspens entre eux.  Avant de conclure, le représentant a assuré que le Royaume-Uni continuerait de soutenir les efforts diplomatiques des partenaires internationaux à Vienne et à Bruxelles en vue d’obtenir la stabilité et la sécurité indispensables aux populations de la région.

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a exprimé sa profonde préoccupation concernant les actions militaires menées le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et les informations faisant état de civils blessés à l’intérieur de l’Arménie.  « Toutes les parties doivent respecter pleinement leurs obligations en vertu du droit humanitaire international, y compris celles liées à la protection des civils », a-t-il exhorté. 

Le représentant s’est toutefois félicité de la cessation de toutes les hostilités, encourageant les deux parties à continuer à faire preuve de retenue.  Les forces militaires devraient se désengager pour permettre de résoudre toutes les questions en suspens, a-t-il préconisé, ajoutant qu’il était urgent de reprendre les pourparlers en vue d’une résolution durable et pacifique du conflit et de la normalisation des relations entre les deux pays. 

M. Mills a en outre encouragé les deux gouvernements à s’engager à nouveau dans un processus diplomatique.  Un règlement négocié et global de toutes les questions en suspens entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est nécessaire et la communauté internationale doit continuer à s’engager diplomatiquement pour aider à négocier une paix durable, a-t-il insisté.  À cette fin, les États-Unis sont prêts à faciliter le dialogue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan au niveau bilatéral, par l’intermédiaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et en coordination avec les partenaires, afin de parvenir à un règlement politique à long terme du conflit, conformément au droit international, y compris la Charte des Nations Unies, ainsi qu’à l’Acte final d’Helsinki.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déploré la grave escalade qui a eu lieu à la frontière de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan.  Le recours à la force est inacceptable, a-t-il déclaré, avant de souhaiter la mise en œuvre des accords négociés avec l’aide de la Russie en vue d’un cessez-le-feu pérenne.  La Russie est en contacts étroits avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan, a rappelé le représentant, qui a souligné les efforts des militaires russes présents sur place pour obtenir le respect du cessez-le-feu et un retour des forces azerbaïdjanaises et arméniennes sur leurs positions respectives. 

M. Nebenzia a déclaré que toute question litigieuse entre les deux parties devait être réglée diplomatiquement, notamment s’agissant de la démarcation des frontières.  « La Russie est prête à apporter son concours, en fournissant notamment des éléments cartographiques », a-t-il ajouté, assurant que la Russie faisait tout ce qui est en son pouvoir pour favoriser une normalisation des relations entre les deux pays.  Les deux parties ont confirmé avoir besoin des bons offices de la Russie, a noté le représentant, qui a demandé l’application de tous les accords existants entre les deux parties.  « Nous sommes au début d’un chemin tortueux vers la réconciliation », a-t-il estimé.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) s’est dit gravement préoccupé par les actions militaires menées à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, qui ont fait des victimes civiles et touché des infrastructures civiles.  Face à cette escalade, la France s’efforce de favoriser le respect du cessez-le-feu en vigueur.  Le Président de la République, Emmanuel Macron, s’est entretenu à cet effet avec ses homologues arménien et azerbaïdjanais, a indiqué le représentant, pour qui la « priorité absolue » doit être le strict respect du cessez-le-feu conclu le 9 novembre 2020.  Il a appelé l’Azerbaïdjan à maintenir ses forces sur ses positions initiales, à l’intérieur de ses frontières, estimant que la délimitation de la frontière entre les deux pays devait s’opérer exclusivement par la négociation.  Les parties doivent en outre intensifier le dialogue pour régler l’ensemble des questions en suspens, notamment la délimitation et la démarcation de leur frontière commune et l’adoption de mesures de distanciation des forces.

Les parties sont tenues de respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, a rappelé M. de Rivière et ce, notamment en autorisant l’acheminement sûr et sans entrave de l’aide humanitaire aux populations affectées par les hostilités.  Pour sa part, la France, en sa qualité de Coprésidente du Groupe de Minsk et membre de l’Union européenne, entend continuer d’appuyer les efforts visant à mettre en place une paix durable dans la région.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a tout d’abord remercié la présidence française d’avoir convoqué cette séance d’urgence, suite à la demande contenue dans la lettre du Ministre des affaires étrangères de l’Arménie.  Cette réunion, a-t-il dit, intervient alors que des « actes d’agression criminels » ont été perpétrés contre l’intégrité territoriale de la République d’Arménie, en violation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies.  « L’auteur est connu, il s’agit de l’Azerbaïdjan », a pointé le représentant, rappelant que ce pays voisin est plusieurs fois plus grand en territoire, en population et en ressources que l’Arménie. 

Pour le représentant, l’Azerbaïdjan, par sa conduite hostile, sa rhétorique non contrôlée et sa violence disproportionnée, fait preuve d’un mépris total pour chaque principe et norme du droit international et révèle une intention claire de provoquer des guerres, des destructions et de l’instabilité dans la région.  M. XXX a ensuite affirmé que, le 13 septembre à l’aube, l’Azerbaïdjan avait lancé une offensive militaire majeure ciblant les régions de l’est et du sud-est de l’Arménie en utilisant un large éventail d’armes, y compris de l’artillerie et des drones de combat.  L’offensive a coûté la vie à 105 personnes, fait des dizaines de blessés, des dizaines de disparus et infligé d’importants dommages matériels, notamment à des infrastructures civiles, a-t-il précisé. 

Selon le représentant, plusieurs villes densément peuplées d’Arménie, en particulier Goris, Djermouk, Vardenis, Kapan et Sotk, ont été pendant plusieurs jours la cible de tirs nourris.  L’offensive aurait ainsi entraîné le déplacement d’au moins 2 750 personnes dans les provinces de Gegharkounik, Vayots Dzor et Siounik, a-t-il indiqué, ajoutant que le bombardement de la station balnéaire de Djermouk, qui ne peut être considérée comme un objectif militaire, « n’est rien de moins qu’un crime de guerre », de même que les frappes contre le réservoir d’eau de Kechut.  De plus, au moins sept prisonniers de guerre ont été capturés en violation flagrante des Conventions de Genève et du droit international humanitaire, tandis que des journalistes locaux et étrangers ont été ciblés par des tirs, a-t-il encore accusé. 

Au cours de l’année écoulée, a poursuivi le représentant, l’Arménie a plusieurs fois averti le Conseil de sécurité que l’Azerbaïdjan se livrait à l’acquisition de territoires par la force.  Par des courriers en date du 14 mai, du 29 juillet et du 16 novembre 2021, elle a alerté les membres du Conseil sur des violations persistantes par l’Azerbaïdjan des principes du droit international et des dispositions de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020 sur l’établissement du cessez-le-feu et la cessation des hostilités, suite à la guerre de 44 jours de 2020.  Les derniers événements démontrent qu’en l’absence de mesures appropriées de responsabilisation, des politiques d’agression sont susceptibles de se poursuivre et même d’augmenter en portée et en ampleur, a-t-il souligné, affirmant qu’au cours des derniers jours, l’Azerbaïdjan avait procédé à l’occupation de plus de 10 kilomètres carrés de territoire de l’Arménie, cette attaque faisant suite à celles de mai et novembre 2021, qui avaient vu les forces azerbaïdjanaises s’emparer de 45 kilomètres carrés de terres arméniennes.  Autant d’actions qui, à ses yeux, constituent une violation des buts et principes de la Charte des Nations Unies et de l’Acte final d’Helsinki de l’OSCE, et qui vont à l’encontre de la lettre et de l’esprit des déclarations trilatérales du 9 novembre 2020 et du 26 novembre 2021. 

Rappelant que la dernière attaque s’est produite alors que des négociations de paix sont menées dans différentes enceintes et facilitées par différents acteurs dans le but de stabiliser la situation dans le Caucase du Sud, le représentant a prévenu que le cessez-le-feu reste fragile.  Des informations crédibles indiquent que l’Azerbaïdjan envisagerait une nouvelle offensive militaire en vue d’établir un « couloir extraterritorial » à travers le territoire de l’Arménie, a-t-il dit, balayant par avance les justifications de l’Azerbaïdjan quant à son « droit à l’autodéfense » en réponse aux supposées « provocations » de l’Arménie.  La vérité est qu’aucune véritable attaque armée n’a été initiée par l’Arménie, a insisté le représentant, pour qui les nouveaux actes d’agression révèlent la volonté de l’Azerbaïdjan de se retirer des négociations sur le Karabakh et d’opter pour une solution militaire au conflit. 

Dans ce contexte, le représentant a appelé le Conseil à assumer ses responsabilités et, en premier lieu, à condamner l’agression non provoquée de l’Azerbaïdjan contre le territoire souverain de la République d’Arménie.  Il lui a également demandé d’exiger le retrait immédiat et inconditionnel des forces azerbaïdjanaises et de sommer Bakou de s’abstenir de tout acte d’agression futur contre le territoire arménien.  Le Conseil doit en outre exiger de l’Azerbaïdjan qu’il s’engage pacifiquement dans le processus de négociations, y compris sur les questions liées au conflit du Karabakh, et qu’il libère et rapatrie tous les prisonniers de guerre arméniens, conformément au droit international humanitaire, a conclu le représentant. 

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a souligné la gravité de la récente escalade, « fomentée par l’Arménie » pour « torpiller » les différents accords signés avec l’aide notamment de membres de ce Conseil.  Pour lui, la déclaration du représentant de l’Arménie montre que ce pays entend toujours se soustraire à l’application des accords signés.  Il a rejeté les allégations du délégué arménien comme étant dénuées de tout fondement, affirmant que « l’Arménie ne respecte pas ses obligations internationales ».  Il est ironique de voir que ce pays, qui a agressé l’Azerbaïdjan, occupé des territoires pendant 30 ans et pratiqué le nettoyage ethnique, se réclame aujourd’hui de principes qu’elle ne cesse de violer et fait appel à ce Conseil alors qu’elle n’en applique pas les résolutions, a asséné le représentant de l’Azerbaïdjan.

M. Aliyev a précisé que c’est cette occupation arménienne de 30 ans qui a empêché la démarcation de la frontière entre les deux pays.  L’Arménie est coupable de violations du droit international, a-t-il répété, en dénonçant les revendications territoriales de l’Arménie.  Le représentant est revenu ensuite sur « la provocation militaire arménienne » qui a eu lieu dans la nuit du 12 au 13 septembre.  Les mesures prises par mon pays pour répondre à ladite provocation ont été limitées et ciblées et aucune victime civile n’a été à déplorer, contrairement à ce qu’affirme l’Arménie, a-t-il assuré.  Il a noté que l’Arménie avait placé ses forces dans des zones densément peuplées le long de la frontière, en violation du droit international, avant de souligner la retenue des forces azerbaïdjanaises, qui ont ciblé les seules installations militaires arméniennes.  Les soldats arméniens capturés sont traités dans le respect du droit international humanitaire, a-t-il ajouté. 

Nous espérons que le bon sens l’emportera et que les tentatives militaires irresponsables de l’Arménie cesseront, a poursuivi le représentant.  Il a dénoncé l’utilisation aveugle de mines par l’Arménie, laquelle fait peser une grave menace sur les civils azerbaïdjanais, avant de détailler les efforts de reconstruction menés dans les territoires précédemment occupés.  « Nous ne voulons pas d’activités militaires dans ces zones car elles menacent les efforts de reconstruction et de réhabilitation », a conclu le représentant, en mettant en garde contre de nouvelles « provocations » arméniennes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Iraq: Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de l’UNITAD

9131e séance – matin
CS/15030

Iraq: Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de l’UNITAD

Le Conseil de sécurité a prorogé, ce matin, jusqu’au 17 septembre 2023, le mandat du Conseiller spécial et de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes (UNITAD).

En adoptant à l’unanimité la résolution 2651 (2022), il prie par ailleurs le Conseiller spécial de continuer à lui présenter tous les 180 jours un rapport sur les activités de l’Équipe. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Texte du projet de résolution (S/2022/693)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant ses résolutions 1265 (1999), 1325 (2000), 1368 (2001), 1373 (2001), 1624 (2005), 1894 (2009), 2106 (2013), 2150 (2014), 2170 (2014), 2178 (2014), 2199 (2015), 2242 (2015), 2249 (2015), 2253 (2015), 2322 (2016), 2331 (2016), 2341 (2017), 2347 (2017), 2354 (2017), 2367 (2017), 2368 (2017), 2370 (2017), 2490 (2019), 2544 (2020) et 2597 (2021) et les déclarations de sa présidence sur la question,

Réaffirmant son respect pour la souveraineté, l’intégrité territoriale, l’indépendance et l’unité de l’Iraq, conformément aux buts et principes consacrés dans la Charte des Nations Unies,

Rappelant la menace mondiale que représente pour la paix et la sécurité internationales l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech) par ses actes de terrorisme, son idéologie extrémiste violente, les attaques flagrantes, systématiques et généralisées qu’il continue de mener contre des civils, ses violations du droit international humanitaire et ses atteintes aux droits humains, en particulier celles commises contre des femmes et des enfants, y compris celles motivées par des motifs religieux et ethniques, et son recrutement de combattants terroristes étrangers, dont il assure la formation et qui font peser une menace sur toutes les régions et tous les États Membres,

Condamnant les actes de violence dont se rend coupable l’EIIL (Daech), en commettant notamment des meurtres, des enlèvements, des prises d’otages, des attentats-suicides, et en se livrant à la réduction en esclavage, à la vente ou à d’autres pratiques aux fins du mariage forcé, à la traite des êtres humains, au viol, à l’esclavage sexuel et à d’autres formes de violence sexuelle, à l’enrôlement et à l’utilisation d’enfants, à des attaques visant des infrastructures critiques, ainsi qu’à la destruction du patrimoine culturel, y compris les sites archéologiques, et au trafic de biens culturels,

Conscient que la commission de tels actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide fait partie intégrante de l’idéologie et des objectifs stratégiques de l’EIIL (Daech) et est utilisée par l’EIIL (Daech) comme une tactique terroriste, et qu’amener à répondre de leurs actes les membres de l’EIIL (Daech), en particulier ceux qui portent la responsabilité la plus lourde, notamment ceux qui dirigent les opérations, qui peuvent inclure des chefs régionaux ou chefs de rang intermédiaire, et ceux qui commandent et commettent des crimes, contribuera à exposer la situation et pourrait faciliter la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent qui peut mener au terrorisme, notamment en endiguant le financement du groupe terroriste EIIL (Daech) et l’afflux ininterrompu de recrues venues du monde entier rejoindre ses rangs,

Saluant les efforts considérables que déploie le Gouvernement iraquien pour vaincre l’EIIL (Daech), et rappelant la lettre que celui-ci lui a adressée, ainsi qu’au Secrétaire général, le 9 août 2017, dans laquelle il demandait l’aide de la communauté internationale pour s’assurer que les membres de l’EIIL (Daech) répondent des crimes qu’ils avaient commis en Iraq, y compris lorsque ces crimes étaient susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité (S/2017/710),

Soulignant qu’il importe de communiquer en temps voulu aux autorités iraquiennes compétentes les éléments de preuve recueillis par l’Équipe d’enquêteurs créée par la résolution 2379 (2017), de sorte qu’ils puissent être utilisés dans le cadre de procédures pénales justes et indépendantes, conformément au droit international applicable et au mandat de l’Équipe d’enquêteurs,

1.    Réaffirme sa résolution 2379 (2017), par laquelle a été créée l’Équipe d’enquêteurs, dirigée par un Conseiller spécial, et rappelle le mandat qu’il a approuvé (S/2018/119);

2.    Prend note de la demande formulée par le Gouvernement iraquien dans sa lettre datée du 12 septembre 2022 (S/2022/687) et décide de proroger jusqu’au 17 septembre 2023 le mandat du Conseiller spécial et de l’Équipe, toute nouvelle prorogation devant être décidée à la demande du Gouvernement iraquien ou de tout autre gouvernement qui prierait l’Équipe de recueillir des éléments de preuve concernant des actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide commis par l’EIIL (Daech) sur son territoire, conformément à sa résolution 2379 (2017);

3.    Prie le Conseiller spécial de continuer à lui présenter tous les 180 jours un rapport sur les activités de l’Équipe;

4.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: malgré l’impasse politique, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie veut croire à un « terrain d’entente » pour « sauver le pays »

9130e séance – matin
CS/15028

Conseil de sécurité: malgré l’impasse politique, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie veut croire à un « terrain d’entente » pour « sauver le pays »

Entendue ce matin par le Conseil de sécurité, l’Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie a confirmé que le processus politique reste au point mort, la Commission constitutionnelle syrienne n’ayant pas repris ses travaux depuis mai dernier.  Mme Najat Rochdi a souligné la nécessité d’un cessez-le-feu national pour créer un environnement propice à des négociations constructives entre le Gouvernement syrien et l’opposition, en se disant convaincue qu’un « terrain d’entente » reste possible pour « sauver le pays ».  Un vœu partagé par la plupart des membres du Conseil, tandis que la République arabe syrienne, appuyée par la Russie, la Chine, l’Inde et l’Iran, dénonçait des violations de sa souveraineté et de son intégrité territoriale. 

Assurant qu’elle et l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Geir Pedersen, feront en sorte que la Commission constitutionnelle se réunisse à nouveau sans délai, Mme Rochdi n’a pas caché son inquiétude face aux dernières tensions en date, notamment les frappes israéliennes qui, la semaine dernière, ont entraîné la fermeture de l’aéroport d’Alep, dans le nord de la Syrie.  Après avoir répété que la situation politique ne pourra progresser tant que perdurera la violence, elle a rappelé que la résolution 2254 (2015), considérée comme une feuille de route pour la transition, établit un lien entre le cessez-le-feu et le processus politique parallèle.  Malgré tous les défis qu’implique une désescalade, notamment en raison de la présence en Syrie de groupes terroristes inscrits sur les listes de l’ONU, le cessez-le-feu doit demeurer l’objectif essentiel, a-t-elle plaidé.   

Soucieuse du rétablissement de la confiance entre les parties, Mme Rochdi a réaffirmé l’importance d’apporter des réponses sur le sort des personnes détenues et disparues en Syrie.  Préoccupée par les informations faisant état de détentions arbitraires et de libérations contre rançon, elle s’est félicitée que la voix de ces personnes soit prise en compte dans le rapport du Secrétaire général demandant le soutien du Conseil de sécurité à la création d’un mécanisme international chargé de cette question.  La recommandation du Chef de l’ONU a été saluée par le Directeur général du Centre des médias de Syrie, M. Mazen Darwish, qui a invité le Conseil à faciliter sa mise en œuvre sans délai.

De son côté, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires a lui aussi déploré les pertes civiles provoquées par les frappes aériennes et les pilonnages des dernières semaines.  M. Martin Griffiths s’est par ailleurs inquiété de l’annonce d’une épidémie de choléra dans le nord du pays, alors que le système de santé syrien est dévasté par 11 années de conflit.  Le Coordonnateur des secours d’urgence a informé le Conseil que le Plan de réponse humanitaire pour la Syrie, d’un montant de 4,4 milliards de dollars, n’est pour l’heure financé qu’à 25%.  Il a donc appelé les donateurs à honorer leurs promesses, tout en précisant que le total de l’aide nécessaire s’élève à 10,5 milliards de dollars.         

M. Griffiths a également fait état de perturbations dans les acheminements d’aide par pont aérien à la suite des frappes de la semaine dernière.  Assurant que l’ONU fait tout son possible pour étendre les opérations transfrontières dans toute la Syrie, il a préconisé l’envoi de convois à travers les lignes de front pour atteindre les populations du nord-ouest.  Il s’est d’autre part déclaré déterminé à poursuivre une mission transfrontière à Ras el-Aïn, dans le nord-est, dès que les conditions de sécurité le permettront.

Moins positive quant au déploiement de l’aide, la République arabe syrienne a affirmé que les efforts de son gouvernement, de l’ONU et des organisations humanitaires se heurtent à la « politisation » des donateurs occidentaux et aux mesures coercitives unilatérales « illégitimes » imposées à son pays par les États-Unis et l’Union européenne.  Ces mêmes puissances fournissent un « parapluie de protection » à Israël, dont les « forces d’occupation » ciblent des infrastructures civiles, telles que l’aéroport d’Alep, a-t-elle accusé, reprochant en outre aux États-Unis d’utiliser l’Article 51 de la Charte sur la légitime défense pour justifier les frappes de la « soi-disant coalition internationale ».

Pour le délégué, les activités liées à la présence illégale des forces américaines sur le sol syrien relèvent du « crime d’agression ».  En tant que « puissance occupante », les États-Unis doivent également fermer le camp de Roukban, à la frontière avec la Jordanie, où des ruptures d’alimentation en eau ont été causées par des tirs de missiles par des groupes terroristes soutenus par la Türkiye, a-t-il poursuivi, avant de fustiger la « campagne » orchestrée selon lui par des pays occidentaux dans le but de lancer un mécanisme international « biaisé » sur le sort des personnes disparues en Syrie.

En écho, la Fédération de Russie a estimé que la menace d’une autre opération militaire dans le nord du pays, le nombre croissant d’attaques israéliennes, ainsi que la présence militaire illégale des États-Unis et de leurs alliés à l’est de l’Euphrate « aggravent une situation déjà explosive ».  L’ONU, a-t-elle renchéri, ignore les avertissements de Damas quant aux violations de la Charte des Nations Unies et du droit international humanitaire, s’agissant notamment de l’occupation étrangère de la Syrie et du pillage de ses ressources naturelles.  Rejointe par l’Iran, la délégation russe a cependant souhaité une reprise des travaux de la Commission constitutionnelle pour un dialogue intrasyrien direct, sans référence à un lieu précis.

La Chine et l’Inde ont, pour leur part, exhorté les parties à travailler de concert avec l’ONU afin de régler les divergences relatives à l’organe restreint de la Commission constitutionnelle, tout en enjoignant la communauté internationale à lutter contre toutes les forces terroristes présentes en Syrie et à garantir la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations liminaires

Mme NAJAT ROCHDI, Envoyée spéciale adjointe pour la Syrie, a tout d’abord mis l’accent sur les défis importants que doit relever la Commission constitutionnelle et assuré qu’elle et l’Envoyé spécial feront tout pour que ladite Commission se réunisse à nouveau au plus vite.  Plaidant pour un rétablissement urgent de la confiance entre les différentes parties prenantes, elle a estimé que les principales questions au cœur du processus politique sont la sécurité des civils, la consolidation du cessez-le-feu, l’effondrement économique du pays, le sort des personnes détenues et disparues, et la participation des femmes au règlement du conflit.  Il y a deux semaines, a-t-elle rappelé, l’Envoyé spécial a réclamé de la retenue aux parties au conflit.  Or, des civils continuent d’être tués, blessés, mutilés et déplacés en Syrie, tandis que des moyens de subsistance sont détruits, a-t-elle dénoncé, faisant état de tirs de roquettes et d’artillerie lourde dans plusieurs régions, mais aussi d’attaques de drones dans le Nord, de frappes aériennes israéliennes ayant entraîné l’arrêt des activités à l’aéroport d’Alep et d’opérations terroristes à Hol.  Répétant que la situation politique ne pourra progresser de manière décisive tant que perdurera la violence, Mme Rochdi a rappelé que la résolution 2254 (2015) établit un lien entre le cessez-le-feu et le processus politique parallèle.  Elle s’est dite consciente de la kyrielle de défis liés à la désescalade et la présence de groupes terroristes inscrits sur les listes de l’ONU.  Mais, à ses yeux, le cessez-le-feu doit demeurer l’objectif essentiel, dans le respect du droit international humanitaire et des droits humains. 

Évoquant ensuite la situation humanitaire, l’Envoyée spéciale adjointe a noté que les accès à l’aide restent limités.  Appelant à l’application de la résolution 2642 (2022) par tous les moyens possibles, à travers les lignes de front ou de manière transfrontalière, elle a souhaité que tout soit fait pour que les besoins diminuent, ce qui dépend en premier lieu d’une désescalade de la violence.  Elle s’est également prononcée pour le retour digne, sûr et volontaire des personnes déplacées, qui lui aussi sera tributaire d’un environnement neutre et apaisé.  Pour Mme Rochdi, stabiliser le conflit et avancer sur la voie d’un règlement politique durable est le seul moyen qu’a le pays de se relever.  Mais, entre-temps, les populations doivent se nourrir et se chauffer, a-t-elle relevé, avant d’énumérer les facteurs qui ont contribué à maintenir l’économie syrienne dans une situation inextricable. 

L’Envoyée spéciale adjointe a ensuite insisté sur la nécessité d’apporter des réponses quant au sort des personnes détenues et disparues.  En tentant de trouver de telles réponses, leurs proches sont souvent victimes d’actes d’extorsion et de pots de vin, s’est-elle indignée, avant de se dire préoccupée par les informations faisant état de détentions arbitraires et de libérations contre rançon.  Elle a assuré s’y consacrer, aux côtés d’organisations de la société civile et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, et s’est félicitée que la voix des personnes détenues et disparues soit prise en compte dans le rapport du Secrétaire général demandant le soutien du Conseil de sécurité à la création d’un nouvel organe international chargé de ces questions.  Elle a, d’autre part, réaffirmé l’importance de la participation effective des femmes au processus politique, précisant avoir rencontré avec l’Envoyé spécial, les membres du Conseil consultatif des femmes il y a deux semaines à Genève.  Ces discussions, a-t-elle indiqué, nous ont permis de mieux comprendre la situation des femmes et des filles dans ce conflit, mais aussi le danger lié à l’exode des jeunes, les exactions dont sont victimes les réfugiés et les personnes déplacées internes, et le peu d’accès des enfants à l’éducation et à la santé.  Ce dialogue avec la société civile, qui a lieu dans le cadre des efforts de facilitation du Bureau de l’Envoyé spécial, nous aide à faire avancer le processus politique, s’est félicitée la haute fonctionnaire, selon laquelle, en dépit des divergences observées, un terrain d’entente reste possible entre Syriens.  Ils peuvent se réunir pour sauver leur pays, a-t-elle conclu.    

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a relevé qu’au cours des dernières semaines, des frappes aériennes et des bombardements le long des lignes de front ont provoqué des pertes civiles, fait de nombreux blessés et interrompu les moyens de subsistance.  Il a parlé de l’attentat du 12 septembre au cours duquel trois enfants auraient été tués et quatre personnes blessées lorsqu’un engin explosif improvisé, attaché à une moto, a explosé à proximité du camp de Tweineh près de la ville de Hassaké.  Il a dit être particulièrement préoccupé par l’annonce d’une épidémie de choléra dans le nord de la Syrie.  L’épidémie est un rappel brutal de l’importance de notre soutien continu au peuple syrien, d’autant plus que le système de santé est déjà dévasté par des années de conflit, a-t-il relevé.  Dans le nord-est, en plus de l’épidémie de choléra, des pénuries d’eau critiques sont signalées dans la province de Hassaké.

Abordant la question des efforts de relèvement rapide, M. Griffiths a indiqué qu’avec le soutien des donateurs, et conformément à l’approche humanitaire globale de relèvement précoce, plus de 4 millions de Syriens ont bénéficié de projets pour contribuer au relèvement rapide et à la résilience depuis le début de cette année.  Nous avons besoin de l’engagement et du soutien des donateurs, a-t-il souligné, en précisant que le plan de réponse humanitaire pour la Syrie fait partie des appels les plus importants au monde en 2022, d’un montant de 4,4 milliards de dollars.  En outre, dans la région, le plan de résilience a besoin d’environ 6,1 milliards de dollars pour répondre aux besoins des réfugiés syriens, portant le total de l’aide nécessaire à 10,5 milliards.  Un montant qui reflète la gravité des besoins humanitaires en Syrie et dans la région après plus de 11 années de crise, a-t-il justifié.  Lors de la sixième conférence de Bruxelles en mai 2022, les donateurs ont promis 4,3 milliards de dollars pour la Syrie et la région, a-t-il rappelé.  À ce jour, seulement environ un quart de la réponse humanitaire est financée, ce qui est très faible par rapport à d’autres crises majeures, s’est-il désolé.

Le Coordonnateur des secours d’urgence a indiqué que 14,6 millions de personnes en Syrie, dont plus de la moitié sont des enfants, ont besoin d’assistance humanitaire.  De même, 12 millions de personnes font face à une insécurité alimentaire aiguë à un moment où les familles se préparent à faire face à un autre hiver rigoureux.  Je remercie les donateurs ayant honoré leurs promesses, mais nous avons besoin que toutes soient tenues, a plaidé M. Griffiths.  Le financement des programmes de relèvement rapide et de moyens de subsistance doit également être accru, parallèlement à une assistance vitale, a-t-il ajouté.

En ce qui concerne l’accès humanitaire, le Secrétaire général adjoint a relevé que les frappes aériennes depuis la dernière réunion du Conseil ont perturbé les opérations d’assistance humanitaire par voie aérienne à l’aéroport d’Alep.  Toutes les activités humanitaires doivent reprendre dès que possible dans le camp de Hol, a-t-il dit, assurant que l’ONU continue de faire tout son possible pour étendre les opérations transfrontières dans toutes les parties de la Syrie.  Dans le nord-ouest, l’Organisation a finalisé un plan révisé pour assurer un meilleur accès aux personnes ayant besoin d’assistance.  Pour que cela se produise, nous devons effectuer plusieurs convois à travers les lignes de front sans entrave, avec un nombre accru de camions dans chaque convoi, a-t-il expliqué.  Pour mettre en œuvre le plan complet, nous aurons besoin de l’entière coopération des parties concernées, a souligné le Coordonnateur des secours d’urgence.  Nous restons déterminés à poursuivre une mission transfrontière à Ras al-Aïn dès que les conditions de sécurité le permettront, a-t-il ajouté.

Le haut fonctionnaire a terminé en évoquant l’histoire de Rasha, mère de quatre enfants et leader communautaire à Edleb.  Rasha vit dans un camp de personnes déplacées avec 1 200 autres familles, dont beaucoup ont des besoins spéciaux, sont atteintes de handicaps et affligées par des blessures de guerre.  Rasha a elle-même a eu la colonne vertébrale gravement endommagée en 2019, après avoir été pratiquement enterrée vivante sous les décombres lors d’un attentat à la bombe.  Cette dame qui vit désormais en fauteuil roulant a reçu un soutien financier pour créer un jardin d’enfants et un centre de physiothérapie dans le camp.  Rasha, qui a dit que le centre avait maintenant besoin d’un soutien supplémentaire, est restée optimiste et déclaré que « rien n’est impossible quand il y a de la volonté et de l’action ».  C’est justement ce dont nous avons besoin de la part des parties au conflit, de ce Conseil et de tous les États Membres, a résumé en conclusion le Secrétaire général adjoint.

M. MAZEN DARWISH, Directeur général du Centre des médias de Syrie, a demandé aux responsables syriens et aux membres du Conseil de cesser de faire de la Syrie un champ de bataille pour régler leurs comptes par procuration et de forger des partenariats concrets avec le peuple syrien.  Il a souligné l’importance de respecter la souveraineté et l’indépendance de son pays ainsi que son intégrité territoriale.  Tant que la Syrie ne retrouvera pas la démocratie et sa souveraineté, elle ne pourra pas régler les problèmes, notamment celui posé par les mercenaires.  Après avoir rappelé le nombre de victimes civiles et la catastrophe humanitaire dans le pays, M. Darwish a dénoncé le racisme dont sont victimes les réfugiés syriens dans certains pays d’accueil.  Évoquant le droit au retour de ces mêmes réfugiés, l’intervenant a demandé que cela se fasse conformément au droit international en offrant de la protection aux déplacés qui souhaitent rentrer en Syrie.

L’intervenant a salué la création d’un mécanisme international indépendant chargé de faire la lumière sur le sort des disparus.  Il a ensuite appelé tous les membres du Conseil à entériner les recommandations du Secrétaire général et à faciliter immédiatement leur mise en œuvre.  Il n’y a plus lieu de discuter, a insisté l’intervenant, qui a rejeté tout délai supplémentaire dans l’activation de ce mécanisme.  Selon lui, la majorité des Syriens rêvent du jour où un règlement pacifique se concrétisera sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et du Communiqué de Genève.  Pour qu’un règlement du conflit soit pérenne, celui-ci devrait aussi se fonder sur la justice transitionnelle, a-t-il ajouté, en rappelant l’initiative du Mexique et de la France et le code de conduite qui avait été proposé par la Suisse appelant à abroger le droit de veto dans le cas où seraient perpétrées des atrocités de masse.  Le seul objectif en Syrie doit être la paix, a conclu M. Darwish. 

Déclarations

Intervenant au nom des porte-plumes du dossier humanitaire sur la Syrie (Irlande et Norvège), Mme MONA JUUL (Norvège) s’est préoccupée de l’impact sexospécifique du conflit, notamment du risque de mariage précoce pour les filles et du recrutement de garçons par des groupes armés.  Elle a appelé à une réponse humanitaire holistique et élargie et suffisamment financée, y compris pour protéger contre la violence sexuelle et sexiste.  La représentante s’est également inquiétée du fait que 2,4 millions d’enfants sont déscolarisés en Syrie où une école sur trois n’est plus utilisée à des fins éducatives, exhortant notamment les parties à s’abstenir d’utiliser les écoles à des fins militaires.

Après avoir insisté sur l’importance d’identifier les personnes disparues, la déléguée a attiré l’attention sur la flambée de choléra en Syrie qui souligne, à ses yeux, l’importance d’assurer l’accès sûr, rapide et sans entraves des fournitures médicales.  En tant que porte-plumes, nous n’avons eu de cesse d’appuyer toutes les modalités de livraison de l’aide humanitaire, à la fois transfrontalière et par-delà les lignes de front, a-t-elle indiqué.  Elle a estimé que l’ONU et ses partenaires doivent être autorisés à utiliser ces deux modalités, tout en appelant à progresser davantage pour ce qui est des livraisons humanitaires par-delà les lignes de front.  Mais il va également sans dire que le mécanisme transfrontalier est une ligne de vie essentielle pour des millions de personnes dans le nord-ouest du pays.  À l’approche de l’hiver, le Conseil doit assumer ses responsabilités et veiller à son maintien, a-t-elle insisté.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a dit que la nouvelle flambée de choléra en Syrie représente une grave menace, une crise supplémentaire pour la population déjà accablée par 11 ans de conflit.  Elle a rappelé qu’en raison de son soutien fervent à la population syrienne, sa délégation s’était prononcée en faveur d’une prorogation d’un an du mécanisme d’aide transfrontalière, plaidant pour que ce soit le cas en janvier.  La représentante a rappelé que les États-Unis avaient promis 800 millions de dollars d’assistance humanitaire pour la Syrie lors de la Conférence de Bruxelles, annonçant une contribution supplémentaire d’un montant de 756 millions, pour notamment lutter contre l’insécurité alimentaire et financer les programmes de relèvement précoce dans les 14 provinces du pays.  Mais nous ne pouvons pas être seuls à répondre à ces besoins et invitons les autres pays à faire davantage, a-t-elle plaidé. 

En outre, la représentante a rappelé que seule une solution politique pourrait permettre au peuple syrien de connaître la paix.  Le retard dans le processus de la Commission constitutionnelle a un coût humanitaire, a-t-elle noté, avant d’appeler le régime d’Assad à œuvrer pour que les 30 000 disparus et détenus soient retrouvés.  Il est frustrant de tenir les mêmes réunions mois après mois et de constater que rien ne bouge, a-t-elle dit.  Il est plus que temps que le régime d’Assad et la Fédération de Russie prennent leurs responsabilités et répondent aux appels du peuple syrien, a-t-elle conclu. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a constaté que la situation ne s’est pas améliorée en Syrie, comme en atteste le « sombre festival d’horreurs » décrit par les intervenants.  Sur le terrain, a-t-il relevé, les hostilités se poursuivent, avec des frappes et des pilonnages qui font des victimes parmi les civils.  Le conflit demeure donc intense et fait courir de graves risques d’escalade, a averti le représentant, avant d’évoquer la grave situation humanitaire qui en découle.  Plaidant pour que l’aide soit acheminée à tous, où que ce soit en Syrie, il a demandé la pleine application de la résolution 2642 (2022) afin que les livraisons aient lieu par tous les moyens possibles, y compris via le mécanisme transfrontalier qui demeure un instrument vital pour la population.  À cet égard, le représentant a appelé à une prorogation de 12 mois dudit mécanisme.  Sur le plan politique, il s’est dit déçu par le peu de résultat des travaux de la Commission constitutionnelle quand celle-ci parvient à se réunir.  Se disant favorable à l’approche progressive défendue par l’ONU, il a toutefois estimé que l’Envoyé spécial ne peut agir seul.  Dans ce contexte d’« agonie » de la Syrie, le délégué a salué l’implication de la société civile dans la recherche de solution.  Il a par ailleurs rappelé qu’après 11 années de conflit et de souffrances, la Syrie est aujourd’hui le pays qui compte le plus grand nombre de détenus et de disparus.  Appelant à la création d’un organisme indépendant sur le sort des disparus, il a qualifié cette question de prioritaire pour appuyer les familles à récréer la confiance.  Il s’est enfin alarmé de la situation sécuritaire et humaine dans le camp de Hol, où des violences, notamment sexuelles, sont rapportées.  À ses yeux, la reddition de comptes est essentielle pour assurer une paix pérenne, conformément à la résolution 2254 (2015). 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a rappelé que l’avenue la plus viable pour une paix et une stabilité durables est un processus politique dirigé par les Syriens eux-mêmes, avec le soutien de la communauté internationale, en particulier l’ONU.  Le représentant a exhorté les parties et les acteurs concernés à insuffler un nouveau souffle au fragile processus politique, notamment par le biais des trois éléments suivants.  Tout d’abord, un retour à la neuvième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle.  Ensuite, un accord entre les parties sur les modalités de la reprise des pourparlers dès que possible, afin de contribuer à jeter les bases de la reprise du processus politique tant attendu.  Enfin, un engagement en faveur de mesures de confiance, notamment le règlement de la situation des détenus, la facilitation de la libération des personnes vulnérables détenues, telles que les personnes âgées, les femmes et les enfants, et la clarification du statut des personnes disparues.  Des progrès dans ces domaines contribueraient également de manière positive à l’approche graduelle de l’Envoyé spécial, conformément au droit international humanitaire, a précisé le représentant. 

M. Agyeman a par ailleurs cité le renforcement du rôle des acteurs régionaux et de la communauté internationale dans le soutien au processus politique, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité.  Les A3 se sont ensuite dits alarmés de la poursuite des frappes aériennes aveugles, des bombardements mutuels et des attaques à la roquette ainsi que par l’utilisation d’engins explosifs sur les lignes de front.  Il est impératif que les parties s’engagent à protéger les civils, les travailleurs humanitaires et les infrastructures civiles conformément au droit international humanitaire et aux résolutions pertinentes des Nations Unies, car il est de plus en plus clair, comme l’a déclaré à plusieurs reprises l’Envoyé spécial, que les options militaires ne mettront pas fin à la guerre, a ajouté le délégué.  En outre, les A3 soulignent la nécessité d’actions collectives décisives pour combattre les groupes figurant sur la liste du Conseil de sécurité, tels que Daech et Hay’at Tahrir el-Cham (HTS). 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a jugé décevant que la Fédération de Russie continue de bloquer le travail de la Commission constitutionnelle.  Pour elle, Genève est le lieu convenu des pourparlers de la Commission, dont les travaux doivent être menés et dirigés par les Syriens.  Elle a invité les parties à laisser de côté le débat relatif au lieu des pourparlers pour se focaliser sur les questions de fond.  La représentante a salué la publication aujourd’hui du rapport de la Commission d’enquête qui met en lumière l’impact disproportionné du conflit sur les femmes et les filles.  L’aide doit parvenir aux 14,6 millions de Syriens qui en ont le plus besoin, a-t-elle dit, avant de souligner que rien ne remplace la portée et l’ampleur de l’opération transfrontière mandatée par le Conseil de sécurité.  Nous espérons que le Conseil s’unira pour sauver des vies et éviter toute interruption de l’opération transfrontalière dont dépendent des millions de civils, a conclu la déléguée. 

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a dit être préoccupée par la poursuite des affrontements en Syrie, condamnant les attaques lancées contre l’aéroport d’Alep au début du mois et les mouvements de troupes dans la frontière nord.  Elle a appelé au respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la Syrie.  La représentante a souligné l’importance de redoubler d’efforts en faveur d’un cessez-le-feu national.  Elle a regretté qu’à ce jour, il n’ait pas été possible de convoquer la neuvième session de l’organe restreint de la Commission constitutionnelle.  La déléguée a encouragé à travailler sur des mesures de confiance, telles que la question des personnes détenues et disparues et l’obligation de rendre des comptes.  Prenant note du rapport du Secrétaire général, la représentante a insisté sur l’importance de clarifier le statut des personnes disparues, d’identifier les restes et d’offrir un appui complet aux victimes et aux familles des personnes disparues et détenues arbitrairement. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a estimé que la Commission constitutionnelle demeure un volet essentiel du processus de règlement politique en Syrie et doit reprendre ses travaux.  Elle a ensuite réitéré son opposition à toute ingérence étrangère, avant d’exprimer sa préoccupation face à la multiplication des attaques terroristes dans le pays.  Cette tendance reflète selon elle la menace qui pèse sur la Syrie sur le plan sécuritaire et rappelle l’importance cruciale de la lutte contre Daech.  La représentante s’est par ailleurs inquiétée de la situation humanitaire, constatant qu’un nombre croissant de Syriens n’ont plus accès aux services essentiels.  Elle s’est particulièrement alarmée de la situation dans le camp de Hol, qui exige l’appui continu de la communauté internationale.  Avertissant que Daech y diffuse son idéologie terroriste, elle a également attiré l’attention du Conseil sur le fait que 75% des assassinats dans le camp ont visé des femmes, lesquelles sont aussi victimes de violences sexuelles.  La déléguée a aussi évoqué le danger des mines et des engins non explosés, qui menacent un Syrien sur deux, saluant les efforts engagés pour les éliminer, notamment ceux du Service de la lutte antimines de l’ONU.  Pour finir, elle a souhaité que tout soit mis en œuvre pour améliorer les conditions de vie des Syriens, à commencer par l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire. 

M. FERGAL TOMAS MYTHEN (Irlande) s’est concentré sur le volet politique de la crise syrienne.  Il a déclaré appuyer les efforts de l’Envoyé spécial visant à donner un nouvel élan au processus politique.  Après avoir renouvelé son appel à la pleine mise en œuvre de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, il a demandé à Damas de s’engager pleinement et de manière significative en faveur de la Commission constitutionnelle.  Le représentant a par ailleurs salué les échanges en cours avec le Conseil consultatif des femmes et la société civile.  À ses yeux, la nouvelle Constitution et le processus politique connexe doivent être inclusifs et doivent bénéficier de la pleine participation des femmes.  Le délégué s’est d’autre part félicité de l’étude du Secrétaire général sur les personnes portées disparues en Syrie.  Il a dit croire que le mécanisme proposé et le soutien aux familles des disparus pourra apporter des éléments de réponse sur le sort de leurs proches.  Dans l’immédiat, il a appelé les autorités syriennes à plus de transparence sur la libération de personnes détenues arbitrairement et sur la mise en œuvre du décret d’amnistie annoncé en avril dernier.

M. GENG SHUANG (Chine) a dit qu’un processus politique dirigé et contrôlé par les Syriens eux-mêmes est le seul à même de régler la crise syrienne.  Il a donc exhorté les parties à travailler de manière constructive avec l’ONU afin de régler les divergences relatives à l’organe restreint de la Commission constitutionnelle afin de lui permettre de se réunir le plus tôt possible.  S’agissant des problèmes sécuritaires en Syrie, la communauté internationale devra adopter une position unique sur la base du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité pour lutter contre toutes les forces terroristes présentes sur le terrain, a déclaré le représentant, en souhaitant la mise en œuvre du principe de tolérance zéro contre tous les soutiens des forces terroristes.  La souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie doivent être respectées, a insisté le représentant, pour qui la création, sans le consentement du Gouvernement syrien, de bases militaires dans le pays constitue une grave violation de sa souveraineté et de son intégrité territoriale.  Le représentant a enfin demandé d’améliorer et d’accélérer l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie avec un calendrier fixe. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a jugé que l’impasse du processus politique est « intenable », l’organe restreint de la Commission constitutionnelle ne s’étant plus réuni depuis mai dernier.  Bien que l’Envoyé spécial s’efforce de poursuivre le dialogue avec les parties, nous ne voyons aucun résultat positif, a-t-elle déploré, regrettant que les participants aux pourparlers ne fassent pas montre de compromis.  La représentante a toutefois réitéré son appui à la résolution 2254 (2015), avant d’appeler le Conseil à soutenir les efforts de l’Envoyé spécial, en particulier son approche progressive.  Elle s’est par ailleurs déclarée rassurée par la poursuite de la normalisation des relations entre la Syrie et ses voisins, tout en s’inquiétant des agissements d’acteurs externes qui compromettent sa souveraineté et son intégrité territoriale.  Selon elle, l’urgence est de s’efforcer de parvenir à un cessez-le-feu national mais aussi d’obtenir le retrait des troupes étrangères.  Il convient aussi de répondre à la menace des groupes terroristes qui se renforcent dans le pays, a-t-elle ajouté, considérant que la lutte collective contre ce fléau ne pourra être renforcée qu’en assurant la reddition des comptes.  S’agissant de l’aide humanitaire, la déléguée a reconnu que les opérations d’acheminement transfrontières sont « importantes » sans pour autant être « éternelles ».  Il importe par conséquent de lever les obstacles aux livraisons à travers les lignes de front, a-t-elle préconisé, plaidant pour que le processus d’aide ne soit pas « politisé ».  Enfin, face aux graves pénuries de carburants et d’électricité que connaît le pays, elle a souhaité que la communauté internationale offre des débouchés économiques au peuple syrien. 

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a appelé toutes les parties à respecter le droit international humanitaire, y compris l’interdiction de commettre des attaques sans discrimination et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter de nuire aux civils et aux infrastructures civiles.  Il a jugé très préoccupante la situation dans le camp de Hol.  Il a félicité le Gouvernement iraquien de ses efforts de rapatriement de ses ressortissants et appelé les autres gouvernements à faire pareil.  Le délégué a dit espérer que la Commission constitutionnelle sera bientôt en mesure de se réunir à nouveau, peut-être avec de nouvelles idées et une volonté politique renouvelée. 

Le Brésil appuie la mise en œuvre de la résolution 2642 (2022) dans tous ses aspects, a-t-il indiqué, ajoutant que l’aide humanitaire doit continuer à parvenir à tous ceux qui en ont besoin via toutes les modalités, transfrontalières et au travers les lignes de front.  Il a jugé inquiétant que le financement global de la réponse humanitaire en Syrie ne représente actuellement qu’environ 25% du montant demandé.  Les progrès en matière de relèvement rapide doivent se poursuivre, mais sans financement adéquat, nous aurons bientôt un nouvel afflux de mauvaises nouvelles sur le terrain, d’autant plus que les mois d’hiver sont déjà proches, a-t-il mis en garde.  Nous rappelons également que les effets humanitaires des sanctions ne doivent pas être négligés, a déclaré le délégué. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit qu’il n’y a pas d’autres solutions que le règlement politique de la crise en Syrie, un processus mené et dirigé par les Syriens avec l’aide de l’ONU.  Il a souligné l’importance de la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle comme format pour un dialogue intra-syrien direct, sans référence à un lieu précis.  Dans le cadre du processus d’Astana, la Fédération de Russie contribue à la réalisation de la normalisation à long terme de la situation en Syrie, a affirmé le représentant, en notant les tensions sur le terrain.  La menace persistante d’une autre opération militaire dans le nord du pays, le nombre croissant d’attaques arbitraires lancées par l’armée de l’air israélienne, ainsi que la présence militaire étrangère illégale continue des États-Unis et de leurs alliés à l’est de l’Euphrate aggravent une situation déjà explosive, a-t-il accusé.  L’ONU, a-t-il dénoncé, ignore les nombreux appels de Damas quant aux violations de la Charte des Nations Unies et du droit international humanitaire, en particulier l’occupation américaine des régions de la Syrie et le pillage américain des ressources naturelles syriennes.  Selon le Ministère syrien du pétrole et des ressources naturelles, les pertes du secteur énergétique depuis 2011 à cause des actions des États-Unis et de l’administration kurde se sont élevées à plus de 107 milliards de dollars.

Le représentant a demandé aux pays occidentaux de renoncer à leur politique d’isolement international de la Syrie et de cesser d’entraver le processus de son retour dans la famille arabe.  Cela contribuerait à accroître l’efficacité de la lutte contre le terrorisme et à accélérer le processus de retour des réfugiés syriens dans leur pays d’origine, a-t-il estimé.  Il a regretté en outre que l’aide humanitaire soit selon lui utilisée pour consolider les divisions territoriales de la Syrie et saper la souveraineté de Damas.  Selon lui, les États-Unis et leurs alliés étranglent les Syriens à l’aide de sanctions unilatérales illégales, tout en faisant preuve d’indulgence dans les zones non contrôlées par Damas.  La volonté de maintenir à tout prix les réfugiés syriens dans les pays d’accueil est également révélatrice, ainsi que la présence des camps de Hol et de Roukban.  Le représentant a réitéré que la responsabilité de ce qui se passe dans l’Euphrate, ainsi que dans la zone de Tanf, incombe entièrement aux États-Unis.  Selon lui, la résolution 2642 (2022) du Conseil de sécurité doit être mise en œuvre de manière urgente pour dépolitiser et étendre l’aide humanitaire internationale à la Syrie, a rappelé le délégué. 

Intervenant en sa capacité nationale, Mme MONA JUUL (Norvège) a déclaré que la question des détentions arbitraires et des personnes disparues revêt de la plus grande importance, notant que tout progrès à ce propos est essentiel pour le processus politique et la réconciliation.  Elle a salué l’amnistie annoncée par les autorités syriennes en avril, regrettant toutefois le peu de progrès réalisé pour assurer sa mise en œuvre.  De même, elle a déploré l’impasse dans laquelle se trouve la Commission constitutionnelle, exhortant les parties à y contribuer de manière constructive et de bonne foi.  La représentante a par ailleurs souligné que l’escalade de la violence dans le nord de la Syrie appelle à l’établissement d’un cessez-le-feu national.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a souligné qu’il n’y aura pas de paix durable en Syrie sans processus politique, déplorant que celui-ci soit au point mort.  Il a relevé que la Commission constitutionnelle ne se réunit plus, et que le « régime » n’a consenti à partager aucune information s’agissant de la mise en œuvre du dernier décret d’amnistie.  Alors que le nombre de personnes disparues en Syrie est estimé à plus de 100 000, le régime refuse toujours de publier des listes de prisonniers ou de délivrer des certificats de décès, a également décrié le représentant qui a souligné qu’en l’absence de tout progrès du processus politique, les positions françaises, comme européennes, sur la levée des sanctions, la normalisation et la reconstruction demeurent inchangées.

Le délégué a ensuite indiqué que le renouvellement pour six mois seulement du mécanisme humanitaire transfrontalier a créé des difficultés opérationnelles sur le terrain, évoquant notamment une augmentation des coûts liée tant à l’inflation qu’à la durée réduite du renouvellement du mécanisme.  Les progrès en matière d’accès « crossline » doivent bien sûr se poursuivre mais ne pourraient se substituer aux opérations transfrontalières qui représentent en moyenne 800 camions d’aide qui franchissent chaque mois la frontière turque.  Il a jugé impératif que le mécanisme transfrontalier d’aide humanitaire soit renouvelé en janvier prochain, pour au moins un an.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a commencé par dénoncer la multiplication des « agressions » israéliennes contre son pays, alors que le Gouvernement syrien s’efforce de rétablir la sécurité et la stabilité.  Il a accusé les « forces d’occupation israéliennes » de cibler systématiquement des installations civiles, comme cela a été le cas la semaine dernière avec des attaques aux missiles contre l’aéroport d’Alep, qui a dû être fermé.  Le représentant a donc renouvelé son appel au Conseil de sécurité pour qu’il condamne ces attaques qui menacent la paix et la sécurité régionales et internationales.  Il a ensuite déploré que les États-Unis et leurs alliés occidentaux fournissent un « parapluie de protection » à Israël au sein du Conseil.  Selon lui, ces pays doivent cesser de pratiquer une politique du « deux poids, deux mesures » et réaliser que, faute d’une réaction de l’ONU, ces attaques risquent de créer des risques qu’il sera difficile de contenir à l’avenir.  De surcroît, s’est-il indigné, des forces militaires américaines continuent d’être illégalement présentes en Syrie et, par leur soutien continu aux milices séparatistes et aux groupes terroristes, procèdent au pillage du pétrole et d’autres ressources naturelles du peuple syrien, en plus d’imposer au pays des mesures coercitives « inhumaines ».  Le délégué a également condamné l’utilisation « sans fondement » de l’Article 51 de la Charte par les membres de la « soi-disant coalition internationale ».  Il a rappelé à cet égard qu’il a adressé un courrier au Conseil, le 6 septembre, en réponse à la justification par les États-Unis du recours à la légitime défense dans le cadre de leur intervention.  À cette occasion, a-t-il dit, j’ai souligné que les activités liées à la présence illégale des forces américaines constituent un « crime d’agression ». 

Le représentant a d’autre part noté que les efforts de son gouvernement, de l’ONU et des organisations humanitaires destinés à améliorer les conditions de vie des Syriens se heurtent à de grandes difficultés, en partie dues à la « politisation » du travail humanitaire par les donateurs occidentaux et aux mesures coercitives unilatérales illégitimes imposées par les États-Unis et l’Union européenne.  À ses yeux, seule la pleine mise en œuvre de la résolution 2642 (2022), y compris l’avancement des projets de relèvement rapide, permettra d’avancer dans la bonne direction.  Mais les entraves à l’accès de l’aide et la réticence des pays donateurs à remplir leurs obligations de financement du plan de réponse humanitaire en Syrie « n’augurent rien de bon ».  Il a dit attendre avec intérêt le dialogue interactif informel prévu à la fin du mois qui permettra de vérifier les progrès accomplis dans l’application de cette résolution, d’identifier les lacunes et d’évaluer les moyens de les surmonter. 

Poursuivant, le délégué a évoqué les souffrances dues aux ruptures d’alimentation en eau dans le nord-est du pays.  Ces coupures sont la conséquence de tirs de missile sur une station par des groupes terroristes soutenus par la Türkiye, laquelle a déjà réduit le débit d’eau vers l’Euphrate et le Tigre, a accusé le délégué, regrettant là encore l’absence de condamnation de ces faits. 

Il s’est également alarmé de la souffrance humaine dans le camp de Roukban, estimant que la Puissance occupante, à savoir les États-Unis, en porte la responsabilité.  Pour le représentant, ce camp doit être fermé, tout comme doit l’être aussi celui de Hol, situé dans le « nord-est séparatiste ».  Selon lui, les États-Unis doivent procéder à ces fermetures après avoir facilité le retour des ressortissants de pays tiers détenus vers leurs pays d’origine.  La Syrie, a-t-il assuré, facilitera la poursuite de cet objectif. 

 Enfin, il s’est élevé contre la « campagne » organisée par des pays occidentaux dans le but de lancer un mécanisme international sur le sort des personnes disparues en Syrie.  Le véritable objet de cette initiative n’est pas de connaître le sort des personnes aux mains des groupes terroristes comme Hay’at Tahrir el-Cham, ni de révéler la brutalité barbare des actions de la coalition internationale, a-t-il relevé.  Il s’agit de lancer un nouveau mécanisme « biaisé » pour accentuer les pressions sur la Syrie et son peuple.  Dans ce contexte, a-t-il conclu, le rétablissement de la paix et de la stabilité en Syrie dépend de la volonté des pays occidentaux de mettre fin à leur embargo économique, de cesser de soutenir le terrorisme et de retirer les forces étrangères du territoire syrien. 

Pour M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran), il n’y a pas de solution militaire en Syrie.  La lutte contre le terrorisme ne doit pas être exploitée pour saper la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il demandé, en exigeant la fin à la présence illégale de forces étrangères dans certaines parties de la Syrie.  Il a fustigé les frappes aériennes militaires menées dans le nord-est de la Syrie par des forces étrangères illégales.  La libre circulation des groupes terroristes sur le territoire syrien, où des forces étrangères sont illégalement présentes, met en danger la paix et la sécurité régionales et internationales, a martelé le représentant.  Il a également condamné le « régime israélien » pour son attaque contre l’aéroport international d’Alep le 31 août, demandant au Conseil de sécurité de le tenir responsable de ces actes. 

En ce qui concerne le processus politique, le délégué a dit appuyer la convocation de la prochaine réunion de la Commission constitutionnelle pour parvenir à une solution politique.  Elle doit travailler dans le strict respect de son mandat et de son règlement, sans influence ou pression extérieure, et sans imposer de délais artificiels, a-t-il prévenu.  Et le processus doit être dirigé et contrôlé par les Syriens, le rôle de l’ONU se limitant à la facilitation, a-t-il ajouté.  S’agissant de la crise humanitaire désastreuse, le représentant a déclaré que la fourniture d’une aide humanitaire est essentielle et les circonstances politiques ne doivent pas empêcher celle-ci d’atteindre les nécessiteux.  Selon lui, les sanctions unilatérales illégales contre le peuple syrien entraînent des conséquences désastreuses pour le peuple syrien, demandant qu’il y soit mis fin.  Le Conseil de sécurité doit veiller à ce que la résolution 2642 (2022) soit appliquée de manière équilibrée et efficace, en particulier en ce qui concerne les projets de relèvement rapide et l’amélioration de l’acheminement transfrontière de l’aide humanitaire.  Il a enfin condamné le vol des ressources naturelles du peuple syrien, en particulier des produits pétroliers, dans les zones occupées par des forces étrangères. 

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Türkiye) a dit que le mécanisme d’aide transfrontalière reste important pour les besoins du peuple syrien, souhaitant qu’il soit prorogé pour une période de 12 mois en janvier prochain.  Il a indiqué que l’acheminement à travers les lignes de front doit se poursuivre, mais que cela ne peut pas être la seule approche.  De même, a estimé le représentant, il ne faut pas se focaliser sur le nord-ouest de la Syrie et regarder ce qui se passe ailleurs.  Il a dit que les violations du cessez-le-feu à Edleb, de la part du régime syrien, reste une grande préoccupation.  Il a appelé à la prudence par rapport à des « plans irréalistes qui seraient élaborés sans la contribution des parties présentes sur le terrain ». 

Le délégué a ensuite accusé les Unités de protection du peuple, branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan de perturber sciemment l’approvisionnement en eau.  Il a dit de ne pas s’attaquer aux problèmes syriens sans aborder la question des causes du conflit qui est la répression de la population par le régime.  Il a rappelé que la résolution 2254 (2015) prévoyait des élections libres dans le pays, rappelant que la Türkiye soutient toute solution politique au conflit.  Par ailleurs, le sort de milliers de disparus et détenus touche presque toutes les familles syriennes, a rappelé le représentant, avant de dire que les forces démocratiques syriennes ne sont rien d’autres que des membres du groupe terroriste des Unités de protection du peuple, présent dans le nord-ouest de la Syrie.  Il a accusé ce groupe de réprimer la population, estimant que la Türkiye ne peut rester les bras croisés alors qu’il attaque les forces armées de son pays et les populations des deux côtés de la frontière.  Le délégué a enfin rappelé que son pays abrite plus de 4 millions de réfugiés syriens.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Face aux défis du monde, le nouveau Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi, parie sur « des solutions fondées sur la solidarité, la durabilité et la science »

Soixante-dix-septième session
1re séance - après-midi
AG/12442

Face aux défis du monde, le nouveau Président de l’Assemblée générale, M. Csaba Kőrösi, parie sur « des solutions fondées sur la solidarité, la durabilité et la science »

À l’ouverture, cet après-midi, des travaux de la soixante-dix-septième session ordinaire de l’Assemblée générale, son Président, M. Csaba Kőrösi (Hongrie), élu le 7 juin dernier, a promis de faire face aux défis du monde en convoquant « des solutions fondées sur la solidarité, la durabilité et la science ». 

Cette devise « inspirante » a été saluée par le Secrétaire général qui a souligné que ces trois « ingrédients » sont essentiels alors que nous faisons face à des défis communs et développons des solutions pour un avenir meilleur et plus pacifique. 

Impatient de travailler avec les États Membres pour continuer à concrétiser la vision de Notre Programme commun, le nouveau Président de l’Assemblée générale s’est présenté comme un défenseur du multilatéralisme, du multiculturalisme et du multilinguisme, et a dit vouloir renforcer le rôle de la science dans la prise de décisions, citant notamment la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.

M. Kőrösi a relevé qu’à l’entame de cette soixante-dix-septième session, le monde est caractérisé par des divisions géopolitiques croissantes et des incertitudes, évoquant notamment la pandémie de COVID-19 qui continue de faire des ravages dans le monde entier.  Il a également parlé de l’insécurité alimentaire aiguë, la flambée du prix de l’énergie et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement mondiale, « alors que l’inflation record menace de secouer nos sociétés ».  De même, la crise de l’eau est imminente et pourrait devenir notre prochaine plus grande menace.   

Il a aussi mentionné le conflit en Ukraine, soulignant que si la communauté internationale n’est pas vigilante, « une méthode appelée guerre » pourrait réapparaître plus fréquemment dans la boîte à outils de la vie internationale.  Nous devons faire tout notre possible pour défendre et protéger les valeurs et les principes de la Charte des Nations Unies, a insisté M. Kőrösi qui a plaidé pour une approche préventive pour juguler les conflits et crises avant qu’ils ne surviennent.

Relevant par ailleurs que jamais, au cours des 40 dernières années, le risque d’utiliser des armes nucléaires n’a été aussi grand qu’il ne l’est aujourd’hui, il a exhorté les États Membres à s’unir autour de la question du désarmement, y compris pour les armes légères et de petit calibre, dont la prolifération représente un obstacle majeur au développement.  

Nous ne pouvons tout simplement pas revenir à notre mode de fonctionnement d’avant la pandémie.  La seule façon d’obtenir de meilleurs résultats est de se transformer, a insisté le Président qui s’est engagé à poursuivre les réformes clefs menées par le Secrétaire général afin de rendre l’Assemblée générale et l’ONU aptes à remplir leur mission.  Constatant en outre que les gouvernements n’ont pas le monopole des bonnes idées, il a promis d’être à l’écoute des partenaires de la société civile, du monde académique, du secteur privé, et de permettre aux chercheurs de mettre en œuvre des solutions basées sur des faits et la science.

Nous devons également tendre la main activement aux jeunes, a-t-il ajouté en promettant que sa porte sera également ouverte aux organisations confessionnelles dont nombre d’idéaux sont les mêmes que ceux des Nations Unies.  Répondre aux défis les plus urgents de l’humanité exige que nous travaillions ensemble et que nous revigorions un multilatéralisme inclusif, en réseau et efficace, en nous concentrons sur ce qui nous unit, a-t-il conclu.

Alertant pour sa part que la communauté internationale est confrontée à un « monde en péril », situation qu’il a imputée aux conflits et aux effets des changements climatiques, mais aussi à un système financier mondial « en panne », qui ne tient pas compte des pays en développement, le Secrétaire général a souligné que relever ces défis communs nécessitera une solidarité continue qui exploite le potentiel de l’ONU, rappelant que l’Assemblée générale représente « le cœur battant de la coopération mondiale ».   

Le débat, la délibération et la diplomatie, ces « outils éternels », représentent « le meilleur chemin vers un monde meilleur et plus pacifique », a soutenu M. António Guterres qui a appelé à faire de la soixante-dix-septième session un « moment de transformation », pour les personnes comme pour la planète.

L’Assemblée générale a par ailleurs pris note de la lettre du Secrétaire général concernant quatre États Membres en retard dans le paiement de leurs contributions financières à l’ONU au sens de l’Article 19 de la Charte (A/77/334).  De ce fait, les Comores, Sao Tomé-et-Principe, la Somalie et le Venezuela perdent leur droit de vote, puisque tout membre des Nations Unies en retard dans le paiement de sa contribution aux dépenses de l’Organisation ne peut participer au vote à l’Assemblée générale si le montant de ses arriérés est égal ou supérieur à la contribution due par lui pour les deux années complètes écoulées.  Il est à noter que l’Assemblée générale peut néanmoins autoriser ce membre à participer au vote si elle constate que le manquement est dû à des circonstances indépendantes de sa volonté.

L’Assemblée générale a en outre élu l’Angola, l’Autriche, la Chine, les États-Unis, le Guyana, la Fédération de Russie, les Maldives, l’Uruguay et la Zambie à la Commission de vérification des pouvoirs.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: Le Représentant spécial pour le Soudan exhorte les parties à rétablir un gouvernement civil crédible

9129e séance – matin
CS/15027

Conseil de sécurité: Le Représentant spécial pour le Soudan exhorte les parties à rétablir un gouvernement civil crédible

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan a exhorté, ce matin, devant le Conseil de sécurité, les parties soudanaises à parvenir à une solution politique pour rétablir un gouvernement civil crédible, alertant que plus la paralysie politique s’éternisera, plus il deviendra difficile de revenir à la transition que la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS) a pour mandat d’aider. 

La situation continuera de s’aggraver à moins qu’une solution politique ne soit trouvée pour rétablir un gouvernement civil crédible et la présence de l’État à travers le pays, ainsi que pour créer les conditions d’une reprise du soutien financier international, y compris l’allégement de la dette, a sensibilisé le Chef de la MINUATS pour qui il est possible de parvenir à un nouvel accord politique pour une période de transition « plus durable » capable de mettre le pays sur la voie d’une gouvernance démocratique dirigée par des civils. 

Dans son intervention, M. Volker Perthes a rappelé que le 4 juillet, à la suite des violences perpétrées lors des manifestations anti-régime du 30 juin, le Président du Conseil souverain a annoncé l’intention de l’armée de se retirer de la politique, un engagement ensuite réitéré par le Chef des Forces d’appui rapide. 

Si ces déclarations n’ont pas encore été mises en œuvre, elles ont insufflé un élan aux forces civiles pour parvenir à une vision commune de la transition, a constaté le Représentant spécial.  Outre la nécessité d’un chef d’État civil et d’un cabinet composé d’experts ou de technocrates, presque tous s’accordent à dire que l’armée devrait voir son rôle limité à la politique de défense, et souhaitent voir le mécanisme trilatéral de la MINUATS, l’Union africaine (UA) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) jouer un rôle.  Mais des différends existent pour ce qui est du partage des pouvoirs et de la délimitation des responsabilités et des compétences, a constaté le Représentant spécial qui a exhorté les forces militaires et civiles soudanaises à saisir de toute urgence l’occasion de mettre fin à la crise politique que traverse le Soudan.

La priorité des priorités est un gouvernement civil qui remédie à la situation économique et à la pénurie de services de base, a plaidé pour sa part le Président de la Sudan Social Development Organization (SUDO), M. Ibrahim Mudawi, représentant de la société civile soudanaise. 

À l’instar du Royaume-Uni, de nombreuses délégations ont elles aussi exhorté la composante militaire du pouvoir à s’engager de manière constructive dans le processus politique et à honorer son engagement de retrait de la scène politique.  Seul un gouvernement pleinement opérationnel dirigé par des civils, doté d’un calendrier électoral clair et réaliste pourra régler la crise politique et ouvrir la voie à une pleine reprise des partenariats internationaux avec le Soudan, a insisté la Norvège. 

Alertant que l’impasse politique pourrait annihiler les acquis de la révolution de 2019, le Gabon, au nom des A3, (Ghana, Kenya et Gabon), a invité les autorités soudanaises, ainsi que toutes les parties prenantes, civiles et militaires, à s’engager pleinement dans le processus de concertation, avec une participation significative des femmes et des jeunes. 

L’urgence d’assurer la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, s’agissant notamment de la justice transitionnelle, a également été soulignée à plusieurs reprises, notamment par les États-Unis, le Brésil et l’Inde qui s’est félicitée de l’intégration de 2 000 membres de mouvements armés dans la Force conjointe de maintien de la sécurité.

À ce propos, le délégué soudanais a affirmé l’engagement du Gouvernement actuel à mettre en œuvre les dispositions dudit Accord, en particulier celles liées aux questions de sécurité, et de n’épargner aucun effort pour négocier avec d’autres factions qui n’ont pas encore rejoint le processus de paix. 

Estimant cependant que la mise en œuvre du système de sécurité approprié au Darfour a échoué en raison du manque de soutien financier international, il a appelé la communauté internationale à mobiliser des fonds pour achever la mise en œuvre de tous les termes de l’Accord de Djouba.  De même, il a appelé à la reprise des programmes de coopération et d’aide au développement des partenaires bilatéraux pour permettre aux réformes économiques engagées par le Gouvernement de transition d’atteindre les objectifs souhaités.

Tout en se préoccupant de l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations facilitées par le mécanisme tripartite, la Fédération de Russie a fustigé l’ingérence extérieure dans les affaires du Soudan ainsi que les « schémas douteux » de démocratisation de type occidental, rejetant en outre l’idée de qualifier de « coup d’État » les événements du 25 octobre 2021.  Elle a aussi jugé inacceptable le lien établi dans le rapport de la MINUATS entre la reprise de l’aide internationale au développement et le transfert du pouvoir à un gouvernement civil. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD S/2022/667

Déclarations liminaires

M. VOLKER PERTHES, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan et Chef de la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), a déclaré que la situation au Soudan est marquée par de nouvelles dynamiques politiques et une détérioration continue de la situation socioéconomique.  De même, l’insécurité touchant des civils s’est multipliée, tandis que les besoins humanitaires et socioéconomiques augmentent de façon exponentielle.  Il a alerté que la situation continuera de s’aggraver à moins qu’une solution politique ne soit trouvée pour rétablir un gouvernement civil crédible et la présence de l’État à travers le pays, ainsi que pour créer les conditions d’une reprise du soutien financier international, y compris l’allégement de la dette.  Il a également jugé possible de parvenir à un nouvel accord politique pour une période de transition « plus durable » capable de mettre le pays sur la voie d’une gouvernance démocratique dirigée par des civils. 

Le mois prochain, le 25 octobre, le coup d’État militaire au Soudan aura un an, a rappelé le Représentant spécial énumérant les manifestations régulières contre le putsch et un bilan faisant état de 117 personnes tuées et de milliers blessées.  Pour autant, les efforts pour atteindre les objectifs de la révolution de décembre se sont poursuivis, a-t-il indiqué, évoquant notamment la création récente d’un nouveau syndicat de journalistes indépendants.  Dans le même temps, des membres de l’ancien régime reviennent progressivement sur la scène politique, l’administration et l’espace public.  Et le 4 juillet, à la suite des violences perpétrées lors des manifestations anti-régime du 30 juin, le Président du Conseil souverain, le général Abdelfattah Burhan, a annoncé l’intention de l’armée de se retirer de la politique.  Le même engagement a ensuite été réitéré par le général Mohammed Hamdan Daglo, Chef des Forces d’appui rapide. 

M. Perthes a constaté que si ces déclarations n’ont pas encore été mises en œuvre, elles ont insufflé un élan aux forces civiles pour parvenir à une vision commune de la transition.  Il a indiqué que la plupart des initiatives souhaitent voir le mécanisme trilatéral de la MINUATS, l’UA et l’IGAD jouer un rôle et s’accordent en outre sur la nécessité d’un chef d’État civil et d’un cabinet composé d’experts ou de technocrates, ainsi que d’un ensemble limité de tâches pour un nouveau gouvernement de transition.  Presque tous s’accordent aussi à dire que l’armée devrait voir son rôle limité à la politique de défense.  En venant aux différends, le Représentant spécial a cité la question du partage des pouvoirs et de la délimitation des responsabilités et des compétences.  Les questions de responsabilité et de justice transitionnelle doivent également être prioritaires.  L’occasion de mettre fin à cette crise politique existe et les forces militaires et civiles doivent la saisir de toute urgence, a encouragé le Représentant spécial assurant le soutien de la MINUATS, de l’UA et de l’IGAD prêtes à réunir les parties autour d’un seul texte afin de combler les divergences qui subsistent.  Il a également encouragé la participation significative des femmes. 

En venant à la situation des droits humains, M. Perthes a informé que depuis mai 2022, 20 manifestants ont été tués et au moins 1 700 blessés par les forces de sécurité.  La crise politique à Khartoum contribue également à l’instabilité dans le reste du pays, a-t-il indiqué.  Les pourparlers de paix entre le Gouvernement et le Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (MPLS-N) n’ont pas repris.  Et la flambée de violence au Darfour et dans le Nil Bleu est inquiétante.  La MINUATS a documenté 40 incidents de violence ayant entraîné la mort de 338 civils.  Les autorités ont tenté de négocier des accords de réconciliation et de cessation des hostilités mais leur impact durable reste incertain en l’absence d’une autorité étatique efficace, a-t-il déploré. 

Alertant que l’absence de mise en œuvre de l’Accord de Djouba pour la paix au Soudan contribue elle aussi à l’instabilité, le Chef de la MINUATS a indiqué qu’une étape positive avait toutefois été franchie suite à l’intégration, le 3 juillet, du premier lot de 2 000 combattants à la Force conjointe de maintien de la sécurité.  Il a cependant regretté que le contingent des soldats des forces régulières n’ait pas encore été déployé.  Il a également signalé que les besoins humanitaires ont atteint des records, 11,7 millions de personnes étant confrontées à une faim aiguë alors que le Plan de réponse humanitaire 2022 n’est financé qu’à hauteur de 32%.

Le Représentant spécial a ensuite passé en revue l’action de la MINUATS, insistant sur la nécessité de la doter de suffisamment de ressources pour assurer l’efficacité de ses efforts.  Le temps presse, a observé M. Perthes qui a souligné que plus la paralysie politique s’éternise, plus il deviendra difficile de revenir à la « transition » que la MINUATS a pour mandat d’aider.  Il a exhorté tous les acteurs à saisir cette occasion et à parvenir à un accord crédible sur une solution jouissant de légitimité aux yeux des Soudanais. 

M. IBRAHIM MUDAWI, Président de la Sudan Social Development Organization (SUDO), a rappelé que la transition politique en cours au Soudan depuis la chute du gouvernement précédent avait été brutalement interrompue par un coup d’État militaire le 25 octobre et que depuis, la situation n’avait eu de cesse de se détériorer dans le pays.  La situation dans les différentes régions soudanaises est marquée par des affrontements, une insécurité croissante, notamment au Darfour, où la protection des civils pose un réel problème, sans parler de ceux liés à la pénurie de denrées alimentaires.  Le peuple soudanais exige un gouvernement dirigé et formé par des civils, a tranché l’intervenant, qui a rappelé que les candidats désignés par l’armée avaient été rejetés.  Pour le moment, a-t-il précisé, il n’a pas été possible de tomber d’accord sur les candidats malgré les efforts déployés par la société civile pour constituer un gouvernement civil, loin de l’interférence des différentes factions signataires de l’Accord de Djouba, qui « doivent être renvoyées dans leurs casernes ».  À défaut, des affrontements entre factions rivales pourraient donner lieu à une guerre civile, en particulier au Darfour, s’est-il inquiété.  En outre, nous sommes témoins de nombreuses grèves de professionnels, notamment de fonctionnaires, qui réclament des hausses de salaire. 

M. Mudawi a ensuite plaidé en faveur d’un modèle de justice transitionnelle permettant de s’attaquer aux violations commises sous le « régime islamiste ».  Mais la priorité des priorités, c’est un gouvernement civil qui soit à même de remédier à la situation économique et à la pénurie de services de base, notamment s’agissant des écoles et du secteur de la santé, a souligné l’orateur qui a par ailleurs estimé à des centaines de milliers le nombre de jeunes sans-abri.  Il faut également une réforme de l’administration publique et une amélioration de la situation des femmes et des enfants.  Le Président de la SUDO a de plus constaté que ce qui a été proposé comme mécanisme pour la protection des civils au titre de l’Accord de paix de Djouba ne fonctionne pas dans la réalité, car les différentes forces sont composées de différentes ethnies.  En cas de conflit, chacun se rallie à sa propre ethnie, comme cela a été observé dans le nord du Darfour et dans le Darfour occidental, a indiqué l’intervenant qui a plaidé pour la création d’un nouveau mécanisme de protection des civils.

Déclarations

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a regretté le peu de progrès concernant la situation politique au Soudan depuis la dernière séance d’information en mai.  Prenant note de l’optimisme prudent du Représentant spécial aujourd’hui, il a espéré que la recherche d’un résultat négocié portera ses fruits.  Il a ensuite condamné l’usage excessif de la force par les forces de sécurité soudanaises, estimant à 116 le nombre de manifestants tués depuis le coup d’État d’octobre 2021.  Le représentant a demandé aux autorités soudanaises de cesser ces violences et de faire rendre des comptes aux auteurs de violations des droits humains.  Il a par ailleurs exhorté la composante militaire du pouvoir à s’engager de manière constructive dans le processus politique et à honorer son engagement de retrait de la scène politique.  Seul un gouvernement de transition dirigé par des civils peut mettre le pays sur la voie de la reprise et permettre la relance du soutien international, y compris les efforts d’allégement de la dette, a-t-il insisté.

Le délégué s’est également déclaré préoccupé par l’augmentation de la violence dans l’État du Darfour occidental et dans la région du Nil-Bleu, avant d’appeler à mettre en œuvre de toute urgence les arrangements de sécurité de l’Accord de Djouba pour la paix aux Soudan et d’aborder les causes profondes du conflit.  Enfin, après avoir réitéré son plein soutien aux efforts déployés par la MINUATS, aux côtés de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), pour aider au règlement de la crise politique, il a appelé les acteurs soudanais à se rassembler de bonne foi et dans un esprit de compromis afin de répondre aux demandes de liberté, de paix et de justice de la population. 

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a constaté que les conséquences profondément néfastes du coup d’État militaire de l’an dernier se manifestent désormais clairement dans tout le pays, se disant alarmé par la militarisation croissante de la vie soudanaise.  Et aujourd’hui, au Soudan, la faim est une réalité imminente pour des millions de personnes, a-t-il souligné, en expliquant qu’il s’agissait d’un revirement dans un pays qui a traditionnellement été un leader mondial dans les domaines de la production agricole.  Dans ce contexte, seule une politique véritablement inclusive peut servir de base pour relever les graves défis auxquels le Soudan est confronté, a estimé le représentant. 

Celui-ci s’est félicité de l’annonce par l’armée de son retrait du processus politique pour laisser la place à un véritable dialogue, « à condition toutefois que la rhétorique s’accompagne d’actions ».  Cependant, le délégué irlandais s’est dit profondément préoccupé par les rapports continus d’utilisation excessive de la force contre des manifestants pacifiques par les autorités militaires et les groupes armés associés, à travers tout le pays.  Les militaires doivent résister à la tentation de s’accrocher à un pouvoir illégitime et toutes les parties prenantes soudanaises se réunir afin de trouver un moyen de sortir de l’impasse politique.  Les enjeux sont trop élevés pour le peuple soudanais et les risques sont trop grands pour la stabilité de la région s’ils ne le font pas, a alerté le représentant qui a jugé qu’il est temps de rétablir la transition démocratique du Soudan dans l’intérêt de tous ses habitants.

Mme MONA JUUL (Norvège) a martelé que seul un gouvernement pleinement opérationnel dirigé par des civils dotés d’un calendrier électoral clair et réaliste pourra régler la crise politique et ouvrir la voie à une pleine reprise des partenariats internationaux avec le Soudan.  La représentante a dit attendre la concrétisation de l’annonce des forces militaires de se retirer de la scène politique, ajoutant que la formation d’un gouvernement civil en serait un signe concret  La représentante a averti qu’il ne saurait y avoir de retour à un gouvernement autoritaire au Soudan.  Elle a salué la publication du projet de cadre constitutionnel de transition du barreau soudanais.  Ces efforts menés par les Soudanais eux-mêmes montrent qu’il est possible de sortir de l’impasse actuelle, a estimé la déléguée qui a exhorté toutes les parties à soutenir cet élan et à veiller à ce que les femmes et les jeunes soient associés au processus. 

Elle s’est dite préoccupée par les informations faisant état d’une montée de la violence dans certaines régions du Soudan, y compris des violences sexuelles et fondées sur le sexe et des violences contre les enfants.  Le Gouvernement, a-t-elle insisté, doit protéger les civils et faciliter l’accès humanitaire.  Les obstacles bureaucratiques doivent être levés sans tarder et les signataires de l’Accord de Djouba pour la paix et autres doivent aussi respecter le droit international humanitaire.  Quant à la crise économique, la représentante a jugé nécessaire l’accroissement de l’aide humanitaire pour répondre aux nouveaux besoins, l’année prochaine. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a espéré que l’annonce du retrait de la composante militaire des négociations parrainées par le mécanisme trilatéral aidera les forces politiques à parvenir à un accord sur la formation d’un gouvernement de technocrates.  Elle a insisté sur l’appropriation soudanaise du processus politique, arguant qu’elle est vitale pour le succès du processus de transition.

Au sujet de la situation économique difficile et de la situation humanitaire aggravée par les inondations et la grave insécurité alimentaire, la représentante a jugé important que les donateurs internationaux envisagent de réviser leurs dernières décisions pour empêcher l’effondrement de l’économie soudanaise et contribuer à son relèvement.  La communauté internationale, a-t-elle poursuivi, doit également intensifier son soutien au Soudan pour alléger les souffrances de ceux qui sont touchés par les changements climatiques.  La représentante a rappelé que son pays continue de porter assistance grâce à un pont aérien qui vient d’être lancé au Soudan.  Concluant sur la situation sécuritaire, Mme AlHefeiti a estimé que les progrès du Soudan dépendent des efforts renforcés de la communauté internationale et de son soutien technique et financier, y compris pour assurer la stabilité dans tout le Darfour.

M. RICHARD MILLS (États-Unis) a appuyé la coopération entre la MINUATS, l’Autorité gouvernementale pour le développement (IGAD) et l’Union africain pour aboutir à la formation d’un gouvernement pleinement fonctionnel dirigé par les civils et à la tenue des élections.  Le respect des libertés fondamentales, dont la liberté de manifester, est capital, a dit le délégué, en déplorant les violations des droits de l’homme.  Il a aussi condamné la violence au Darfour et jugé urgente la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, s’agissant notamment de la justice transitionnelle.  Enfin, le délégué s’est dit préoccupé par les dernières inondations au Soudan et par les conséquences pour le pays du dérèglement climatique.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est tout d’abord déclaré préoccupé par la violence qui sévit au Darfour et dans la région du Nil Bleu.  Appelant les autorités soudanaises à accroître leurs efforts pour protéger les civils dans ces zones, il leur a également demandé de prévoir des conditions propices au retour en toute sécurité des personnes déplacées.  Pour le représentant, la mise en œuvre de l’Accord de Djouba pour la paix aux Soudan est essentielle pour s’attaquer aux causes profondes du conflit au Darfour, dans le Kordofan méridional et dans la région du Nil Bleu.  Tout en félicitant les autorités soudanaises pour les progrès accomplis dans la mise en place de la Force conjointe de maintien de la sécurité au Darfour, il a souhaité que l’Accord de Djouba soit appliqué plus rapidement et de manière plus audacieuse, faute de quoi il perdra de sa crédibilité aux yeux des civils soudanais. 

À ce propos, le délégué a estimé que la transition vers la démocratie est une autre pierre angulaire pour s’attaquer aux causes profondes du conflit.  Félicitant l’Association du barreau soudanais pour son projet de constitution pour la transition, il a salué la participation active au processus de rédaction de représentants de la société civile.  Il a également applaudi les efforts de facilitation déployés par la MINUATS, appuyée par l’Union africaine et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), avant de réitérer son soutien à un dialogue politique inclusif ouvrant la voie à une transition démocratique au Soudan.

Au Soudan, a dit M. DAI BING (Chine), même si les difficultés persistent, les parties ont tracé la voie du dialogue pour remettre en place un gouvernement dirigé par des civils et une transition politique.  Le représentant a pris note de l’annonce de l’armée soudanaise de se retirer du dialogue.  Les problèmes soudanais ne seront réglés que si une solution respectant l’intérêt du peuple est trouvée, a-t-il prévenu.  Il a ajouté qu’en réponse aux affrontements intercommunautaires au Darfour, le Gouvernement a rapidement assuré la protection des civils.  Des progrès ont été enregistrés dans la mise en œuvre de l’Accord de Djouba et le Comité du cessez-le-feu permanent continue de jouer son rôle, alors que des centaines de membres des mouvements armés ont été intégrés dans les forces de sécurité.  Ce sont des acquis, s’est réjoui le représentant, qui méritent le soutien technique et financier de la communauté internationale. 

Il a ainsi dénoncé les sanctions imposées par le Conseil de sécurité, lesquelles entravent la faculté des autorités nationales d’assurer la stabilité et la protection des civils.  Ces mesures devraient être adaptées à l’évolution de la situation jusqu’à leur levée, a milité le délégué, regrettant que le Conseil n’ait pas pu établir des critères en ce sens, alors que les moyens de subsistance des Soudanais et leur économie pâtissent de cette situation.  Il faut également, a conclu le représentant, régler une situation humanitaire très difficile, d’autant plus que la suspension de l’aide économique et le non-allègement de la dette ne font que l’aggraver.  Au moment où le Soudan traverse une phase difficile, les organisations internationales devraient privilégier une politique responsable d’aide, a martelé le représentant.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a constaté que le processus de transition politique entamé il y a trois ans au Soudan continue de se heurter à des obstacles sur le terrain.  Elle a réaffirmé que le dialogue politique inclusif et crédible, mené par les Soudanais eux-mêmes, demeure essentiel pour trouver une solution durable à l’impasse actuelle.  Elle a pris note du plaidoyer du mécanisme trilatéral UA-IGAD-MINUATS pour la création de conditions propices qui pourraient permettre des négociations entre militaires et civils.  La représentante a ensuite souligné l’importance de la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, se félicitant notamment de l’intégration de 2 000 membres de mouvements armés dans la Force conjointe de maintien de la sécurité et de la signature de la législation relative à l’administration autochtone. 

Quant aux délibérations en cours du Conseil sur l’élaboration de critères de sanctions applicables au Soudan, elles doivent tenir compte de l’interaction complexe des facteurs locaux en jeu, sans recourir à une approche « ouvertement normative », a recommandé la déléguée.  Elle a ensuite observé que la suspension d’une partie importante de l’aide des donateurs internationaux, ainsi que la pause dans l’engagement des institutions financières internationales, ont gravement affecté les flux d’aide au développement à l’étranger.  Les déficits de financement ont également un impact sur les activités des acteurs humanitaires et leur capacité à répondre aux besoins croissants, a-t-elle relevé. 

Au nom des A3 (Ghana, Kenya et Gabon), M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a indiqué que l’impasse politique, notamment dans la mise en place d’un cadre de concertation viable en vue d’une transition démocratique, pourrait annihiler les acquis de la révolution de 2019.  Il a salué la publication récente du projet de cadre constitutionnel, lequel constitue une étape importante dans le processus de stabilisation du Soudan.  À cet égard, il a invité les autorités soudanaises, ainsi que toutes les parties prenantes, civiles et militaires, à s’engager pleinement dans le processus de concertation qu’il a souhaité inclusif et constructif, avec une participation significative des femmes et des jeunes. 

Le délégué a ensuite jugé essentiel que les États de la région privilégient constamment le règlement pacifique des différends.  Il s’est dit profondément préoccupé par la récurrence des affrontements intercommunautaires dans plusieurs régions du pays, notamment au Darfour occidental et dans la région du Nil Bleu.  Il a salué les mesures prises par les autorités soudanaises pour mettre fin à ces violences par la signature d’accords de cessation des hostilités entre les membres des communautés en conflit.  Il a invité le Gouvernement à prendre des mesures supplémentaires pour s’attaquer aux causes profondes de ces conflits.  Selon lui, cela exige la pleine participation au processus de paix des communautés locales, de la société civile et des personnes déplacées. 

Le représentant a en outre évoqué, avec une profonde inquiétude, l’impact des changements climatiques sur la vie, les moyens de subsistance et la sécurité des personnes.  Face à l’immensité des besoins humanitaires, les A3, a-t-il dit, se joignent à l’appel du Secrétaire général à la mobilisation de la communauté internationale pour le financement des opérations humanitaires.  En outre, le délégué a exhorté les autorités soudanaises à faciliter un accès humanitaire sans entrave, y compris dans les zones de conflit.  Il a enfin exhorté la MINUATS à continuer de travailler en étroite collaboration avec les autorités soudanaises pour faciliter la mise en œuvre rapide des plans et programmes de développement. 

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a souligné l’urgence de rétablir un gouvernement civil fonctionnel au Soudan.  Le peuple soudanais n’accepte pas l’usurpation du pouvoir par la force, a déclaré le délégué, en demandant que la transition démocratique soit dirigée par des civils.  Il a appelé les autorités à créer un environnement propice à la poursuite du dialogue, avant de souhaiter une accélération des enquêtes sur les éventuelles violations des droits humains commises dans le cadre des manifestations.  « Les résultats de ces enquêtes devraient être rendus publics. »  Il a souligné l’importance de la volonté politique pour progresser dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba.  Enfin, le délégué s’est dit profondément préoccupé par la montée de la violence dans les régions du Nil Bleu, du Darfour et du Kordofan méridional depuis le coup d’État. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est alarmée à son tour de la situation humanitaire au Soudan, aggravée par les dernières pluies torrentielles et les graves inondations.  Estimant à 14,3 millions le nombre de personnes ayant besoin d’une aide urgente au Soudan et à 11,3 millions celui des gens exposés à l’insécurité alimentaire, elle a exhorté les autorités nationales à garantir un accès humanitaire sans entrave.  Elle a également appelé à l’arrêt de la violence intercommunautaire, en particulier dans la région du Nil Bleu, considérant comme essentielle la tolérance et la coexistence pacifique.  À cet égard, la représentante a exprimé son soutien aux efforts de la MINUATS, de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) en vue de permettre des négociations entre militaires et civils.  De même, elle a invité les acteurs politiques et les personnalités militaires de premier plan qui se sont retirés de ces pourparlers à y revenir et à s’engager dans le processus politique.  Elle a par ailleurs enjoint les autorités soudanaises à accélérer la formation et le déploiement d’une force de maintien de la sécurité pleinement intégrée afin de protéger efficacement les populations civiles. 

La déléguée a ensuite regretté qu’aucun progrès majeur n’ait été réalisé dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba à la suite du coup d’État militaire du 25 octobre 2021.  Se disant préoccupée par la détérioration de la situation sécuritaire au Darfour et par les flambées de violence dans la capitale et dans tout le pays, elle a condamné l’usage généralisé de la violence par les forces de sécurité contre les manifestants, avant d’appeler à des enquêtes indépendantes et impartiales sur les allégations de violations des droits humains, notamment celles imputées à des membres de ces forces de sécurité.  Enfin, après avoir salué la publication par l’Association du barreau soudanais d’un projet de document-cadre constitutionnel pour le Soudan, elle a souhaité que la société civile et les femmes, en particulier, puissent participer de manière significative au processus démocratique. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) s’est dite préoccupée par l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations facilitées par le mécanisme tripartite de l’ONU, de l’Union africaine et de l’IGAD.  Elle s’est cependant félicitée des mesures importantes du Gouvernement soudanais et de sa volonté manifeste de parvenir à un compromis.  Ainsi, a-t-elle cité, l’annonce faite par le Président du Conseil souverain, le 4 juillet dernier, sur le retrait des dirigeants militaires du processus politique intra-soudanais, afin de permettre aux responsables civils de s’accorder sur le nouveau gouvernement de transition.  La représentante a aussi salué la volonté des militaires de dissoudre le Conseil souverain, en se réservant la responsabilité de la défense et de la sécurité nationales.

L’ingérence extérieure dans les affaires du Soudan, un pays souverain, est inacceptable, a martelé la représentante.  Fustigeant les « schémas douteux » de démocratisation de type occidental, elle a également rejeté l’idée de qualifier de « coup d’État » les événements du 25 octobre 2021.  Elle a aussi jugé inacceptable le lien établi dans le rapport de la MINUATS entre la reprise de l’aide internationale au développement et le transfert du pouvoir à un gouvernement civil. 

Elle a enjoint le Chef de la MINUATS, M. Pertes, de rester dans le cadre strict de son mandat, dont chaque composante mérite une attention égale, au risque de perdre la confiance des autorités soudanaises.  La représentante a en outre estimé que l’embargo sur les armes imposé au Soudan il y a 17 ans ne correspond plus à la situation réelle au Darfour et entrave le développement socioéconomique de la région.  À cet égard, elle s’est dite déçue de la décision des « superviseurs américains » du régime de sanctions d’interrompre le travail sur le document du Conseil de sécurité relatif aux « critères » de la levée de l’embargo.  C’est, a conclu la représentante, une approche « irresponsable », qui montre que le Conseil de sécurité a, pour la deuxième année consécutive, « saboté » son propre processus de paix. 

Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a regretté l’impasse politique qui perdure depuis le coup d’État du 25 octobre 2021, appelant de nouveau toutes les parties à progresser vers la formation d’un gouvernement civil crédible.  Elle a exhorté les militaires à ne prendre aucune mesure qui entérinerait la situation de blocage actuelle, prenant ensuite note de la levée de l’état d’urgence et de la libération de nombreux détenus politiques.  Elle a également salué l’ouverture d’enquêtes contre les auteurs de violations des droits humains et du droit international humanitaire, ajoutant qu’il reste nécessaire de mettre fin aux violences contre les manifestants.  À cet égard, elle s’est dite préoccupée par le maintien des pouvoirs de police étendus mis en place au cours de l’état d’urgence et a appelé à la levée de l’immunité des forces de sécurité et au respect des droits de la défense des personnes qui restent détenues. 

La représentante a ensuite constaté que l’absence d’autorités légitimes et de perspective de paix aggravent la situation sécuritaire au Darfour et dans la région du Nil Bleu, confrontée à d’importants affrontements depuis juillet.  Dans ce contexte, elle a jugé urgent que les autorités soudanaises accélèrent le déploiement de la force conjointe et la réintégration des combattants.  Elle s’est aussi inquiétée de l’aggravation de l’insécurité alimentaire causée par l’agression russe en Ukraine.  Pour y répondre, l’UE a alloué 41 millions d’euros au Soudan et portera ce montant à 189 millions d’euros d’ici à la fin de l’année, a-t-elle indiqué.  La représentante a par ailleurs encouragé le Soudan à continuer de faire preuve de retenue concernant le différend frontalier avec l’Éthiopie, dans le triangle d’El-Fashaga, et à poursuivre le rôle qu’il joue en accompagnement de la transition au Tchad et de la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé au Soudan du Sud.

M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a d’abord répondu à son compatriote, le Président de la SUDO, lui indiquant que la paix n’est pas aisée et cela s’apparente à « faire pousser du blé sur du béton ».  Il a affirmé que les forces politiques soudanaises sont conscientes que l’impasse actuelle est une situation exceptionnelle, et que le pays a besoin d’un consensus politique qui mène à la formation d’un gouvernement de transition capable de préparer le pays aux élections générales au cours desquelles le peuple choisira librement ses dirigeants.  Il a rappelé qu’il y a environ deux mois, le Président du Conseil souverain a déclaré que les militaires allaient se retirer de la scène politique afin que les forces politiques puissent former un gouvernement de transition.  Dès que ce gouvernement sera mis en place, les dirigeants du Conseil souverain s’attèleront uniquement aux tâches de défense nationale, a-t-il assuré.  Le délégué a également affirmé l’engagement du Gouvernement actuel à mettre en œuvre les dispositions de l’Accord de paix de Djouba, en particulier celles liées aux questions de sécurité.  Les dirigeants actuels entendent n’épargner aucun effort pour négocier avec d’autres factions qui n’ont pas encore rejoint le processus de paix, et sont déterminés à renforcer la protection des civils au Darfour, en particulier les femmes et les enfants, d’une manière qui garantisse la dignité humaine et sauvegarde les droits que le pays s’est engagé à défendre et protéger en adhérant aux instruments internationaux pertinents. 

Poursuivant, le représentant a relevé que la situation au Darfour s’améliore progressivement, malgré quelques écueils ici et là en raison des conditions économiques et sociales complexes.  Il a aussi évoqué les effets des changements climatiques sur la région dans son ensemble, et la rareté du soutien financier international pour l’application des dispositions de l’Accord de Djouba.  Il a indiqué que 2 000 membres des mouvements armés vont former le noyau d’une force de 12 000 hommes qui seront répartis équitablement entre les forces gouvernementales et les groupes armés.  Il a ensuite expliqué que la mise en œuvre du système de sécurité approprié au Darfour a échoué en raison du manque de soutien financier international, avant d’appeler la communauté internationale à fournir un soutien financier pour achever la mise en œuvre de tous les termes de l’Accord de Djouba.  La mise en œuvre de l’Accord a en effet été assez lente.  Qu’a fait la MINUATS pour jouer son rôle de soutien? a lancé le délégué. 

Sur le plan économique, le Gouvernement de transition a pris différentes mesures, notamment la libéralisation du taux de change et la levée des subventions sur les produits de base.  Des efforts ont également été déployés pour régler la dette extérieure accumulée du Soudan, augmenter la production et créer des conditions favorables pour attirer les investissements.  Pour que ces réformes économiques atteignent les objectifs souhaités, il a notamment appelé à la reprise des programmes de coopération et d’aide au développement des partenaires bilatéraux. 

Le représentant a ensuite déploré que le dernier rapport du Secrétaire général ne mentionne pas les efforts du Soudan pour protéger les droits humains, citant notamment le renforcement de la coopération avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et la Cour pénale internationale (CPI).  Il a dénoncé le fait que le rapport mentionne des cas de viols et de harcèlements sexuels sur la base du bouche-à-oreille et sans aucune base factuelle.  Le rapport devrait se fonder sur des informations provenant du parquet et de la police et le document ne cite même pas ses sources.  Du reste, des aspects importants du mandat de la MINUATS sont passés sous silence, a ajouté le délégué qui a regretté que la Mission n’a rien fait dans le cadre de l’appui logistique et matériel à la mise en œuvre du plan national de protection des civils.  Nous ne voyons aucun progrès dans la mobilisation des ressources économiques et de développement et la coordination de l’aide humanitaire, a-t-il aussi souligné.

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Conseil de sécurité: le Président du Comité 1591 rappelle que les sanctions contre le Soudan ne visent pas à « punir » le pays mais à promouvoir la stabilité au Darfour

9128e séance – matin
CS/15026

Conseil de sécurité: le Président du Comité 1591 rappelle que les sanctions contre le Soudan ne visent pas à « punir » le pays mais à promouvoir la stabilité au Darfour

Dans une très brève intervention, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Président du Comité créé en application de la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan, M. Harold Adlai Agyeman, a déclaré que les sanctions contre le Soudan ne visent pas à « punir » le pays mais à promouvoir la stabilité au Darfour et à favoriser l’application de l’Accord de paix de Djouba. 

Les sanctions ne reflètent plus la réalité sur le terrain au Darfour et doivent être levées, a, de son côté, affirmé le délégué du Soudan, en rappelant que ces sanctions ont été élaborées il y a plus de 15 ans, en 2005.  Il a indiqué que les autorités de son pays œuvrent à promouvoir la stabilité au Darfour et à appliquer l’Accord précité, alors que le Soudan dispose de ressources limitées.  Il a d’ailleurs estimé que la communauté internationale n’a pas apporté l’appui escompté dans cette entreprise. 

Les réunions de réconciliation intercommunautaire qui se sont récemment tenues au Darfour ont été couronnées de succès, a déclaré le délégué, tout en reconnaissant que les dispositions sécuritaires de l’Accord de Djouba n’ont pas pu être pleinement appliquées faute de moyens suffisants.  Enfin, le délégué a réitéré son appel à la levée des sanctions afin de renforcer les capacités au Darfour et de promouvoir la stabilité.  Nous sommes prêts à coopérer pour l’établissement de critères réalistes en vue de leur levée, a-t-il assuré.

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