Le Conseil de sécurité examine la performance et les attentes des composantes Police des opérations de maintien de la paix des Nations Unies
À l’occasion de la réunion annuelle du Conseil de sécurité avec les composantes Police des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales, tenue ce matin, le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a plaidé, en faveur d’un travail collectif afin que la police des Nations Unies soit pleinement préparée, équipée et dotée des ressources nécessaires pour réaliser son mandat.
Cela est d’autant plus indispensable qu’on assiste actuellement, à l’échelle mondiale, à une expansion de la criminalité transnationale organisée et de l’extrémisme violent, à des risques climatiques accrus et à l’insécurité électronique, qui exigent de fortes ripostes dans les pays hôtes des missions par le renforcement des capacités nationales institutionnelles et une réforme de la police, a-t-il déclaré en substance, avant de détailler les actions entreprises dans le cadre de la mise en œuvre des priorités énoncées dans l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) du Secrétaire général. L’objectif principal de cette initiative est l’appui aux États hôtes pour qu’ils développent des services de police représentatifs, sensibles aux besoins et redevables, qui servent et protègent la population.
La question de la performance des unités de police a été abordée tant par les chefs de police présents que par les membres du Conseil. Du côté des grands fournisseurs de contingents, l’Inde, qui a déployé quelque 3 000 policiers dans 24 opérations de paix des Nations Unies, y compris la première unité de police constituée entièrement de femmes au Libéria en 2007, a appelé à l’élaboration de protocoles de formation et de fonctionnement conjoints avec les pays fournisseurs de contingents.
L’évaluation de la performance de la police des Nations Unies se mesure à l’aune de son engagement dans les activités de renforcement des capacités nationales où des contributions majeures sont perceptibles, a déclaré le Chef de la composante Police de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). M. Mody Berethe s’est notamment enorgueilli des résultats remarquables atteints en termes de prévention et de répression des crimes, grâce à une stratégie de communication qui a permis, en 2022, de répondre à 223 570 appels de la population, menant à 17 696 interventions policières, dont 4 535 arrestations.
De même, au Soudan du Sud, la police des Nations Unies travaille avec la chaîne judicaire au sein de la MINUSS, a déclaré la Cheffe de la police civile de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud, Mme Christine Fossen. Elle a aussi confirmé qu’une bonne relation avec le pays hôte demeure essentielle, ainsi qu’une formation adéquate des policiers sur le lien avec l’environnement où la mission est déployée, notamment de la part des pays contributeurs de troupes.
Ces derniers récoltent d’ailleurs les fruits de leur participation aux opérations de maintien de la paix en termes de « démocratisation » du secteur de la sécurité dans leurs propres pays, a fait remarquer Mme Emma Birikorang, du Centre international Kofi Annan de formation au maintien de la paix. Elle a rappelé que plusieurs pays fournisseurs de contingents sont des démocraties récentes, ou sur la voie de la démocratie, et donc encore en butte à leurs propres défis. Elle a illustré son propos par l’exemple du Ghana qui, après sa participation à des missions de paix, a mis sur pied une unité de police qui sert de plus en plus dans son propre pays pour la surveillance d’infrastructures critiques.
À l’instar de M. Lacroix, l’Irlande a évoqué le rôle central de la police des Nations Unies dans les contextes de transition grâce à un soutien et une formation aux gouvernements hôtes, à la société civile et aux acteurs de la police et du secteur de la sécurité. La Norvège a souhaité que cette police contribue à renforcer les institutions judiciaires des États hôtes et les processus de transition, notamment au moyen de l’appropriation nationale. Aux yeux de la Fédération de Russie, c’est ce principe de responsabilité nationale ou appropriation nationale qui est la clef du succès. Selon la délégation russe, les possibilités de l’ONU n’étant pas « illimitées », celle-ci ne peut se substituer, en permanence, aux efforts des polices locales.
En RDC, M. Berethe a assuré que son service déploie ainsi tous les efforts possibles pour faire en sorte que la police congolaise soit en mesure d’assumer ses responsabilités sécuritaires, alors que le troisième plan quinquennal de renforcement des capacités de la police congolaise est en cours, tout en reconnaissant « l’humilité » dont doit faire preuve la police de la MONUSCO. Le Secrétaire général adjoint a salué l’avancement de la réforme conjointe de la police nationale dans ce pays en misant dessus pour une transition réussie, au même titre que les progrès en matière de droits humains et de lutte contre l’impunité.
La police des Nations Unies est souvent la première et la dernière entité en contact avec la population, a pour sa part noté le Royaume-Uni qui l’a perçue comme idéale pour la mise en place d’un espace de médiation et de dialogue avec les communautés. La Chine a préconisé une réflexion du Conseil sur cette question après avoir rappelé que plus de 10 000 policiers, issus de 120 pays, sont à présent actifs dans 18 missions de maintien de la paix. La sécurité de ce nombreux personnel de police a particulièrement interpelé les délégations, la Chine demandant à cet égard au Conseil de renforcer les mécanismes d’alerte précoce et de fournir aux personnels de la paix des matériels adaptés à leurs mandats.
Enfin, la plupart des intervenants ont souligné l’importance cruciale de la participation pleine et sur un pied d’égalité des femmes policières aux opérations de maintien de la paix, en plaidant pour davantage de femmes aux postes de commandement et de direction. L’accession de la kényane, Mme Violet Lusala, au poste de Commissaire de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), a été l’occasion pour le Kenya d’encourager à s’inspirer de ce modèle dans d’autres missions de la paix.
OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES: CHEFS DE LA POLICE
Déclarations
M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a déclaré que cette réunion annuelle est l’occasion de réaffirmer le rôle essentiel que les contingents de la police de l’ONU jouent dans l’ensemble du spectre de la prévention des conflits, depuis celui du maintien de la paix à celui de la consolidation de la paix. Elle constitue aussi un forum de discussion pour faire le point sur les acquis des dernières années et les priorités stratégiques des prochains mois. Au chapitre des défis mondiaux actuels en termes de paix, sécurité et développement, M. Lacroix a mis l’accent sur la survenue, de plus en plus fréquente, de conflits dans des zones à forte densité, comme les zones urbaines, et il a mis l’accent sur l’importance de la protection des civils, notamment dans les camps de déplacés. Il a aussi averti de l’expansion de la criminalité transnationale organisée et de l’extrémisme violent; des risques climatiques accrus et de l’insécurité électronique, qui exigeront de fortes ripostes par le renforcement des capacités nationales institutionnelles et une réforme de la police. Le Secrétaire général adjoint a indiqué que cela implique un travail collectif pour veiller à ce que la police de l’ONU soit dûment préparée, équipée et dotée des ressources nécessaires.
M. Lacroix s’est ensuite employé à détailler les mesures entreprises dans le cadre des grandes priorités d’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) afin d’aider les États à préparer des services de police représentatifs, sensibles aux besoins et redevables, qui servent et protègent la population. S’agissant de la première priorité A4P+ (la cohérence des stratégies politiques), il a souligné que les entités du système onusien apportent plusieurs ressources et offrent des possibilités pour appuyer et influencer la trajectoire politique du pays. À ce titre, il a expliqué qu’en République démocratique du Congo (RDC), la police de la MONUSCO œuvre de concert avec les partenaires de l’ONU, la Police nationale congolaise et le Ministère de l’intérieur pour faire avancer la réforme conjointe de la Police nationale, consolider les droits humains et lutter contre l’impunité, qui sont autant d’ingrédients pour une transition réussie. Pour la deuxième priorité (l’intégration stratégique et opérationnelle entre les composantes de la mission), il a cité un exemple au Mali où les agents de planification de la police des Nations Unies travaillent avec leurs homologues civils et militaires pour renforcer les liens entre la planification stratégique à long terme et la prise de décision opérationnelle. Il a aussi mentionné, en Somalie, les efforts de la police de la MANUSOM qui collabore avec la Mission de transition multidimensionnelle de l’Union africaine en Somalie, le Gouvernement fédéral de la Somalie, l’Union africaine, l’Union européenne, l’équipe de pays des Nations Unies et d’autres partenaires, dans le but de transférer les responsabilités en matière de sécurité à leurs homologues somaliens d’ici à la fin de 2024.
M. Lacroix a également donné des exemples de ce qui est fait pour réaliser la troisième priorité (aligner la formation de la police des contingents avec la politique des États Membres) et la quatrième (reddition de comptes du personnel de la police), qui a mené des évaluations des performances lors de missions et des visites sur place dans différents pays. D’autre part, la police s’efforce de créer un climat propice au renforcement des réseaux de femmes et favorable à la participation des femmes dans les contingents. M. Lacroix a aussi mis en exergue l’examen du comportement lié à la façon dont les missions gèrent les empreintes climatiques. Passant à la priorité liée à l’amplification de la visibilité et de la prévention par la stratégie de communications, il a évoqué des mesures de lutte contre la désinformation et a souligné le rôle de la police de l’ONU spécialisée dans les communications stratégiques.
La police continue par ailleurs à améliorer la coopération avec les pays hôtes comme au Soudan du Sud dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, a-t-il poursuivi. Les différents besoins en termes de sécurité sont aussi pris en compte grâce à des points focaux et à l’amélioration de la présence féminine, les femmes dirigeant maintenant cinq composantes Police des opérations de maintien de la paix. Il a notamment mis en avant le fait que la police de l’ONU poursuit la politique tolérance zéro pour les abus et l’exploitation sexuelle à travers une formation pré-déploiement et durant la mission. Des efforts sont également déployés en vue d’une évaluation régulière de la performance, de la reconnaissance de la bonne performance et de l’amélioration de la reddition de comptes. Le troisième Sommet de la police de l’ONU a montré qu’il y a davantage de demandes, ce qui requiert une assistance accrue, a plaidé M. Lacroix. Le Secrétaire général adjoint a enfin réitéré sa reconnaissance aux États pour l’appui et le dévouement constant dont ils font preuve dans la mise en œuvre de leurs engagements respectifs en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi dit toute sa satisfaction que la prochaine réunion de la police se tiendra au Ghana, qui assure la présidence du Conseil ce mois-ci.
Mme CHRISTINE FOSSEN, Cheffe de la police civile de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a présenté la contribution de la police des Nations Unies au mandat de la MINUSS, qui inclue la protection des civils au Soudan du Sud, le renforcement des capacités de la police locale, le suivi et signalement des violations des droits humains ou encore la création des conditions propices à l’acheminement de l’aide humanitaire. De plus, depuis que la MINUSS est entrée dans une phase de soutien politique à la mise en œuvre complète de la feuille de route de transition, la police des Nations Unies redouble d’efforts dans le cadre d’une stratégie politique définie dans la vision stratégique de la Mission (2021-2024).
La police des Nations Unies participe ainsi aux efforts de l’ensemble de la Mission pour favoriser la protection des civils, le dialogue, l’engagement et le soutien aux solutions politiques aux conflits. En collaboration avec la Police nationale du Soudan du Sud, elle mène des activités de sensibilisation pour aider à améliorer les relations entre les forces de l’ordre et les personnes qu’elles servent, en particulier les femmes et les enfants, les jeunes et les dirigeants communautaires. Pas moins de 185 comités de relations police-communautés ont été créés, notamment à l’intérieur et à l’extérieur du camp de personnes déplacées de Bentiu, Koch, Pariang et Leer. Ces comités œuvrent notamment à lutter contre la violence sexiste et sexuelle liée aux conflits et à la prévention du crime en général.
Sur un autre plan, a poursuivi Mme Fossen, la police des Nations Unies a étendu sa présence physique, en participant davantage aux patrouilles intégrées civilo-militaire-policière et aux déploiements dans des bases d’opérations temporaires. Elle fournit par ailleurs un mentorat individuel, des conseils et une assistance aux agents de la Police nationale et contribue à un environnement protecteur, en soutenant les institutions chargées de l’état de droit qui promeuvent la responsabilité et l’accès à la justice. La police des Nations Unies a également contribué au lancement du réseau de femmes policières sud-soudanaises, a ajouté Mme Fossen qui a salué, à cet égard, le déploiement d’un plus grand nombre de femmes soldats de la paix pour soutenir tous les aspects de l’agenda « les femmes et la paix et la sécurité ». La MINUSS est fière d’être une championne de la parité des sexes, ayant déjà dépassé ses objectifs en la matière dans les personnels en uniforme: les femmes représentent désormais 37,5% des policiers individuels et 25% des unités de police constituées, s’est félicitée Mme Fossen.
Concluant, la cheffe de la police a insisté sur la nécessité de créer de meilleures conditions favorables à la participation des femmes au maintien de la paix. Conformément aux directives de l’Initiative Elsie pour la participation des femmes aux opérations de paix, la MINUSS a adopté des spécifications de conception et des orientations sur les installations et les infrastructures pour améliorer les conditions de vie des femmes policières. Mais nous avons besoin d’un soutien continu en ressources pour mettre en œuvre ces objectifs dans un environnement où les coûts sont élevés, les délais d’approvisionnement longs et les défis logistiques nombreux. La mission apprécierait également une capacité supplémentaire pour soutenir la planification conjointe et intégrée, y compris pour continuer à mettre en œuvre le système global d’évaluation des performances (CPAS), dans le cadre de l’initiative Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+), a-t-elle lancé aux membres du Conseil de sécurité.
M. MODY BERETHE, Chef de la composante Police de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a fait le point sur certains éléments contribuant à la bonne performance de la composante. Il a dit qu’il s’agit notamment de la gestion des ressources humaines et de l’amélioration des performances à travers la formation interne, l’engagement opérationnel ainsi que l’assistance dans le renforcement des capacités nationales d’investigations par des formations spécifiques, des investigations conjointes et des activités de mentorat, de conseil et de suivi. En ce qui concerne les ressources humaines, UNPOL représente 384 policiers individuels présents sur un total de 591 autorisés et 1223 éléments d’unités de police constituées, réparties dans cinq secteurs et deux sous-secteurs, a-t-il dit. Il a rappelé qu’une communication soutenue avec les 31 pays contributeurs de police est essentielle. Il a également précisé que l’appui du Canada, de la Suède et de la République-Unie de Tanzanie a permis l’obtention d’équipes de police spécialisées (SPT) dans la lutte contre les violences sexuelles basées sur le genre, qui ont pu très vite gagner la confiance de la police locale et de la population.
M. Berethe a précisé que la composante Police a mis en place un mécanisme de suivi et d’évaluation qui consiste à collecter systématiquement les informations concernant la mise en œuvre du plan de travail annuel, pour ensuite procéder à l’évaluation qui se base sur des indicateurs présélectionnés et permet de mesurer. L’évaluation trimestrielle des performances des policiers hors unités constituées et de ceux des unités de police constituée est effectuée selon des critères objectifs, non seulement pour identifier les lacunes, mais surtout pour cibler les compétences nécessaires et les mesures correctives efficaces, a indiqué M. Berethe. Il a insisté sur l’importance de la dimension genre, en rappelant que la Police de la MONUSCO a tenu en 2022 deux séminaires sur les violences sexuelles basées sur le genre et liées au conflit.
Sur le plan opérationnel, l’évaluation de la performance d’UNPOL se mesure à l’aune de son engagement dans les activités de renforcement des capacités nationales où des contributions majeures sont perceptibles notamment dans le domaine des activités de la stratégie opérationnelle intégrée de lutte contre l’insécurité. Il a précisé que cette stratégie est l’outil permettant la mesure des performances dans la lutte contre la criminalité dans les zones urbaines et qu’est également un modèle de pratique des méthodes de police de proximité et d’utilisation de statistiques pour la mesure des performances policières. « Des résultats remarquables ont été enregistrés en termes de prévention et de répression des crimes, et en 2022 la stratégie a permis une réponse à 223 570 appels de la population, menant à 17 696 interventions policières dont 4 535 arrestations.
Enfin, il a indiqué que l’UNPOL contribue à la mobilisation des acteurs pour assumer leur responsabilité dans les enquêtes sur les crimes graves commis à l’encontre des soldats de la paix et participe à l’effort commun avec les autres entités de la Mission, dans le cadre du travail de la chaîne de justice pénale. La composante Police de la MONUSCO, consciente de l’ampleur des défis actuels à relever dans le contexte sécuritaire spécifique de la RDC, s’engage à œuvrer pour améliorer d’avantage ses performances dans le cadre d’une meilleure opérationnalisation de ses actions, a conclu M. Berethe.
Mme EMMA BIRIKORANG, du Centre international Kofi Annan de formation au maintien de la paix, a déclaré que la formation et le renforcement des capacités pré-déploiement des Casques bleus et de la police des Nations Unies sont des éléments importants de l’Action pour le maintien de la paix Plus. Après avoir énuméré les six priorités de l’Action pour le maintien de la paix Plus, Mme Birikorang a souligné l’impact des opérations de maintien de la paix sur la « démocratisation » du secteur de la sécurité, alors que nombre de pays fournisseurs de contingents sont des démocraties récentes ou sur la voie de la démocratie qui font face à leurs propres défis à cet égard. Il s’agit donc d’une relation mutuellement bénéfique permettant aux troupes des pays fournisseurs d’atteindre le plus haut degré de professionnalisme lors de leur déploiement et de s’acquitter de tâches nouvelles, qui ne leur incombent pas dans le cadre normal de leurs fonctions.
La participation aux opérations de maintien de la paix permet en outre de renforcer la légitimité des mesures de sécurité domestiques, en mettant l’accent sur les relations avec la société civile et d’autres acteurs de milieux variés, a fait valoir Mme Birikorang. Elle a cité l’exemple du Ghana qui, après avoir pris part à de nombreuses missions de paix à l’étranger, a établi une unité de police constituée, appelée de plus en plus souvent à servir dans son propre pays, notamment pour assurer la surveillance d’infrastructures critiques. Cette unité reçoit des formations régulières sur les droits humains, le maintien de l’ordre et la protection des civils et des groupes vulnérables, augmentant d’autant son professionnalisme et sa capacité opérationnelle.
Mme Birikorang s’est en outre félicitée des résolutions de l’ONU portant sur les femmes, la paix et la sécurité, estimant qu’elles ont un effet multiplicateur en faveur de la participation pleine et égale des femmes à la paix et aux processus politiques, tant pour les pays fournisseurs de contingents que pour les États hôtes. L’action des femmes se fait particulièrement sentir dans les efforts de désarmement, de démobilisation et de réintégration. La contribution de la police des Nations Unies à l’Action pour le maintien de la paix, au moyen de stratégies innovantes permettant de renforcer aussi bien les États hôtes que les pays fournisseurs, est critique, a assuré Mme Birikorang.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a assuré du soutien de son pays à la police des Nations Unies et à son travail, notamment pour mettre en place des services de police efficaces, efficients, réactifs et responsables qui servent et protègent la population dans les pays hôtes d’opérations de paix. Une police des Nations Unies centrée sur les personnes, agile, flexible, fondée sur les droits et axée sur les normes, dont la mission principale est d’assurer la protection des civils, ce qui est une priorité absolue du Conseil, aide le pays hôte à maintenir l’ordre et la sécurité publics dans le respect de l’état de droit et le respect du droit international des droits humains, a-t-il fait valoir. Regrettant que la communauté internationale passe encore beaucoup de temps à réagir aux conflits pour les gérer plutôt que sur la prévention, le représentant a souligné que la prévention nécessite de renforcer les capacités locales pour la paix en renforçant les institutions nationales politiques, de sécurité, de justice, d’état de droit et socioéconomiques et en rendant les sociétés plus résilientes aux conflits violents.
La police des Nations Unies est bien placée pour jouer un rôle essentiel à cet égard, a-t-il estimé, mais pour réussir, toutes les parties prenantes doivent s’acquitter de leurs responsabilités en travaillant avec des partenaires clefs, des organisations régionales, des États Membres et des agences des Nations Unies dans le cadre d’une stratégie commune. M. Hoxha a notamment insisté sur le fait que la police dans les opérations de paix doit devenir un élément clef de l’analyse des conflits, de l’alerte précoce et des efforts de prévention. Par sa présence sur le terrain, elle dispose d’informations de première main et sait comment interagir et communiquer avec les membres des communautés locales, ce qui permet de mieux comprendre les moteurs locaux et nationaux du conflit, à identifier pourquoi certaines communautés sont plus exposées aux tensions et à contribuer ainsi aux mécanismes d’alerte précoce, a souligné le représentant, en appelant à pleinement exploiter ce potentiel. Notant que les femmes se sont avérées extrêmement efficaces pour accéder aux communautés et créer des relations de confiance avec les populations locales, il a encouragé le recrutement et la fidélisation de la composante policière féminine en vue de parvenir à la parité au sein de la composante Police des opérations de paix. Pour l’Albanie, la relation avec le pays hôte exige des méthodes innovantes, multidimensionnelles et inclusives et avec une approche holistique qui englobe la paix et la sécurité, l’engagement politique et la justice, les droits humains et le développement, en vue de garantir la voie à suivre vers le maintien de la paix.
M. GENG SHUANG (Chine) a rendu un « vif hommage » aux hommes et femmes policiers servant dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Aujourd’hui, il y a plus de 10 000 policiers, issus de 120 pays et actifs dans 18 missions de maintien de la paix. Mais alors que la situation internationale évolue, que les environnements sont de plus en plus complexes, la communauté internationale et le Conseil de sécurité en particulier doivent réfléchir aux questions importantes liées aux attentes des populations locales.
Ainsi, a proposé le représentant, les opérations de maintien de la paix doivent tirer profit des avantages comparatifs et se coordonner davantage avec les institutions spécialisées des Nations Unies. Il faut également renforcer les capacités des policiers et s’assurer que chaque membre de la police des Nations Unies dispose des compétences nécessaires à l’accomplissement de son mandat. Il faut en outre pleinement employer les femmes et utiliser leurs capacités dans le domaine du maintien de la paix.
Sur d’autres plans, le Conseil de sécurité doit garantir la sécurité de policier sur le terrain, en mettant notamment en œuvre la résolution 2518 (2020). Il doit aussi renforcer les mécanismes d’alerte précoce et fournir aux personnels de la paix des matériels adaptés à leurs mandats, a suggéré le délégué, assurant du soutien continu de son pays à la police des Nations Unies.
M. MICHAEL KIBOINO (Kenya) a rendu un vibrant hommage aux hommes et aux femmes membres de la police des Nations Unies et plaidé pour un investissement permettant de mieux les équiper en matière d’expertise et de compétences. Il a salué à cet égard les équipes de police spécialisées mises en place par le Département des opérations de paix avec une approche orientée vers le renforcement des capacités. Ces compétences ne sont qu’une partie de l’investissement, a-t-il indiqué, en appelant au renforcement des partenariats et des comportements. Le Kenya reste attaché à tous les efforts visant à garantir aux femmes un rôle de chefs de file et aux postes de direction, a poursuivi le représentant. Il a estimé à cet égard que la nomination de la Commissaire de la FISNUA, une kényane, Mme Violet Lusala, représente un modèle pour tous.
Dans le cadre de la mise en œuvre de l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+), il a plaidé pour que la police devienne un acteur à part entière dans toutes les phases de planification et d’exécution des opérations de paix et des missions de politiques spéciales, ce qui aidera à ce que les activités soient à la fois appropriées et réalistes. Il a en outre jugé vital de suivre une approche privilégiant l’état de droit, y compris au sein des services correctionnels. Il a également appelé à une coopération étroite et à une bonne intégration des différents éléments et composantes des missions de maintien de la paix et des missions de politique spéciales en vue de plus d’efforts de synergies et d’unité. Le délégué a également défendu la protection de tous les policiers de la police de l’ONU et appelé à une collaboration et une coordination accrues avec les communautés d’accueil et les services de sécurité, ce qui exige une communication constante sur les mandats et les tâches. Dans le même esprit, il a estimé que les policiers se doivent également faire montre des normes de discipline les plus élevées, de dévouement et de respect des personnes qu’ils servent.
Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a appelé à la mise en œuvre du programme pour “les femmes et la paix et la sécurité” et souhaité davantage de policières au sein des missions de paix. Le renforcement de leur participation dépendra de la capacité de l’ONU à leur assurer un environnement de travail satisfaisant, a-t-elle rappelé. Elle a insisté sur l’importance de la technologie, en mentionnant l’outil de simulation d’attaques terroristes développé par son pays. Elle a rappelé que les missions de paix n’ont pas vocation à être permanentes, en rappelant l’importance d’une appropriation nationale des efforts de paix. Enfin, la déléguée a rappelé que son pays a accueilli, en août 2022, la première réunion de la composante Police des opérations de paix de l’ONU qui n’avait pas pu se tenir à New York.
Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a rendu hommage au travail de la composante Police des opération de paix dont le rôle d’appui aux services des polices nationales, de promotion de l’état de droit, de consolidation de la paix et de développement, contribue fortement au relèvement des États en situation de conflit, de postconflit et de crise. À travers leurs activités de proximité, les composantes de police sont très souvent la connexion directe entre les OMP et les populations locales, a-t-elle fait valoir, et constituent à cet égard un atout majeur notamment dans l’élaboration des mandats des opérations de paix ou des missions politiques, pour qu’elles soient plus adaptées aux besoins des pays hôtes. La formation et le renforcement des capacités de la composante Police sont à ce titre un enjeu crucial. Pour qu’elle soit plus efficace, la doctrine de formation des « Bérets bleus » doit tenir compte aussi bien de la nature changeante des menaces que des réalités spécifiques du terrain. La représentante a mis en avant le rôle des femmes au sein de la composante Police. Elles sont indispensables notamment dans le cadre des activités de proximité, dans les processus de paix et de consolidation de la paix, parce que leur présence encourage les femmes à s’impliquer davantage, a souligné la déléguée, en ajoutant que dans la plupart des cas de violences sexuelles ou dans le cadre de la lutte contre la criminalité, les communautés locales sont plus ouvertes à interagir avec des femmes policières. Elle a donc souhaité que l’on accroisse le nombre des femmes en uniforme au sein de la composante Police parce qu’elles apportent une plus-value dont on ne peut se passer, selon elle. À cet égard, Mme Ndong a rappelé que le soutien du Gabon à l’initiative Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+), qui fait de la mise en œuvre accélérée du programme pour les femmes et la paix et la sécurité une préoccupation majeure, est sans équivoque.
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a souligné la contribution de son pays à la police des Nations Unies par le biais d’officiers de police, de contributions financières et d’équipes de police spécialisées. Toutefois, la police des Nations Unies doit maintenant moderniser ses activités de renforcement des capacités afin de refléter les méthodes de police contemporaines et de répondre aux nouvelles menaces, a-t-elle argué, en se félicitant à cet égard de l’initiative Action pour le maintien de la paix et de la stratégie de mise en œuvre Action pour le maintien de la paix Plus. Elle a également salué les efforts déployés par la police des Nations Unies pour atteindre les cibles de la stratégie du Secrétaire général relatif à la parité hommes-femmes en uniforme, en insistant sur l’importance de créer un environnement de travail sûr pour tous, avec une politique de tolérance zéro pour la discrimination sexuelle, le harcèlement sexuel et les abus. Pour renforcer sa contribution à la paix, la représentante a proposé que la police des Nations Unies intensifie les partenariats avec la société civile, le secteur privé et d’autres organisations internationales, qu’elle consulte davantage les États Membres, et qu’elle renforce les institutions judiciaires des États hôtes et les processus de transition, notamment au moyen de l’appropriation nationale.
MmeME CAÍT MORAN (Irlande) a estimé que, alors que les opérations de maintien de la paix évoluent dans des environnements politiques et sécuritaires de plus en plus complexes, l’initiative A4P+ devrait continuer à fournir le cadre pour aider la police des Nations Unies à développer des capacités de maintien de l’ordre, faire avancer l’agenda femmes, paix et sécurité le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et améliorer la responsabilité et la performance. Elle a aussi estimé que la police des Nations Unies peut jouer un rôle central dans les contextes de transition. Selon, elle, il est important que ses composantes offrent un soutien et une formation aux gouvernements hôtes, à la société civile et aux acteurs de la police et du secteur de la sécurité. Cela permet le développement de mécanismes qui engagent, soutiennent et protègent les communautés locales, dans le but de construire une paix durable.
La représentante a aussi jugé que les opérations de maintien de la paix doivent disposer des bonnes capacités, « au bon endroit et au bon moment », et de personnels plus adaptables et capables. Cela doit inclure la suppression des obstacles à la participation pleine, égale et significative des femmes policières dans tous les rôles, à tous les niveaux, a plaidé l’oratrice. Elle a en outre plaidé pour des efforts visant à enquêter et poursuivre les crimes contre les Casques bleus. Les dispositions de la résolution 2589 (2021) doivent être pleinement mises en œuvre pour soutenir ceux qui mettent leur vie en jeu, a-t-elle dit.
Se tournant vers les chefs de police, la représentante irlandaise a demandé des mises à jour sur le nouveau cours en ligne obligatoire qui soutiendra la formation de l’état d’esprit requis parmi le personnel de police des Nations Unies. Elle a également voulu savoir quelles réformes, y compris législatives, les États peuvent mettre en place pour améliorer l’accès du personnel féminin de la police aux opportunités nationales et internationales de maintien de l’ordre. Elle a en outre été curieuse de connaître leurs vues sur les capacités et formations supplémentaires que les États Mmembres peuvent fournir pour aider la police des Nations Unies à mieux répondre aux environnements de plus en plus dangereux.
M. CÍCERO TOBIAS DE OLIVEIRA FREITAS (Brésil) a déclaré que face à la complexité de la situation sécuritaire internationale actuelle et des risques encourus tant par les populations affectées par un conflit que par les Casques bleus, le rôle de la composante Police au sein des missions de maintien de la paix s’avère plus important qu’auparavant du fait même que les missions sont déployées dans des régions où les institutions étatiques sont soit absentes, soit fragilisées. Il a mis l’accent sur le rôle important des contingents de police non seulement durant le conflit, mais pendant la période de transition pendant laquelle ils veillent à ce que les institutions locales soient en mesure de maintenir la stabilité et de prévenir un recul des acquis si durement obtenus par les missions et les pays hôtes.
Le représentant a invité à explorer les voies et moyens de renforcer la contribution de la police des Nations Unies dans la réalisation des priorités de l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+). Il a dégagé trois éléments fondamentaux: la sûreté et la sécurité des Casques bleus; les communications stratégiques; et la mise en œuvre du volet « les femmes et la paix et la sécurité ». Au sujet de ce dernier élément, il a mis en exergue le fait que les policières sont les mieux à même de protéger les groupes vulnérables comme les femmes et les enfants, ainsi que de promouvoir la participation des femmes et le renforcement de l’engagement de la communauté. Il a également souligné qu’il est nécessaire non seulement de compter des policières mais aussi des femmes à des postes de commandement et de leadership. S’agissant de la formation, le représentant a expliqué qu’en sus des exigences spécifiques pour le personnel de police brésilien déployé au sein des missions de l’ONU, les membres de la police des Nations Unies doivent également suivre une formation supplémentaire au Centre de formation conjointe Sérgio Vieira de Mello des opérations de paix dirigé par les Forces armées brésiliennes.
M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a salué le dévouement de la composante Police des missions de l’ONU, avant de rappeler le soutien constant apporté par son pays auxdites missions. Il a souligné l’importance de la formation pour mieux préparer les contingents de police, ceux-ci étant de fait mieux préparés. Il a plaidé pour une bonne application du cadre de performance et d’établissement des responsabilités, avant d’appuyer la politique de tolérance zéro pour les atteintes et l’exploitation sexuelles commises par les Casques bleus. Il a souligné le rôle clef des femmes policières dans l’amélioration de la réponse onusienne, les femmes étant à même de nouer des relations de confiance avec les communautés. Il a toutefois estimé qu’il faut encore en faire plus. Le représentant a ensuite dénoncé les campagnes de désinformation visant les missions, avant de poser les deux questions suivantes au Chef de la composante Police de la MONUSCO: « Comment jugez-vous les incidences des changements climatiques sur vos missions? Comment luttez-vous contre la désinformation et comment le Conseil peut-il vous aider? »
M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a estimé nécessaire d’adapter les programmes de formation de la police des Nations Unies aux défis sécuritaires de plus en plus complexes qui se posent dans le cadre de missions de maintien de la paix. Ces formations, a-t-il insisté, doivent comporter des outils permettant d’aborder la santé mentale du personnel avant, pendant et après leur déploiement. Il a également vu les composantes policières des missions de paix comme essentielles au développement des capacités des institutions nationales, car elles contribuent à mettre en place un cadre de gouvernance démocratique indispensable à une paix durable. Prenant l’exemple d’Haïti, M. Ochoa Martínez a rappelé l’importance de tenir compte du renforcement des capacités de la police dans les processus de transition des missions de paix. Comme en RDC, la communication stratégique peut également s’avérer un élément essentiel du mandat des missions de paix en sensibilisant le public à leur portée et à leurs limites, a-t-il encore cité. Le représentant a souligné l’importance de la reddition de comptes, y compris l’évaluation des performances du personnel et la mise en œuvre de la politique de tolérance zéro en matière d’exploitation sexuelle. À cet égard, il a réaffirmé l’importance de la participation pleine, égale et significative des femmes policières aux opérations de maintien de la paix
Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a rappelé d’emblée que son pays a déployé près de 3 000 policiers dans environ 24 opérations de paix des Nations Unies, y compris la première unité de police constituée entièrement de femmes au Libéria en 2007. Environ 170 policiers indiens servent actuellement au sein de la FISNUA, de la MINUSS et de la MONUSCO. La déléguée a ensuite formulé quelques observations. Tout d’abord, le rôle principal de la police dans les missions de l’ONU est de former et de renforcer les capacités du pays hôte pour lui permettre d’acquérir une expertise et des compétences suffisantes en matière de maintien de l’ordre, ce qui est une tâche importante dans l’application et le maintien de l’état de droit. Bien qu’un déploiement rapide d’unités de police constituées puisse être nécessaire dans certains contextes, un tel déploiement devrait être basé sur des mandats clairs et réalisables soutenus par des ressources adéquates, a souhaité la représentante.
Par ailleurs, elle a remarqué que les groupes armés, les terroristes et la criminalité transnationale organisée travaillent main dans la main dans les environnements de conflits contemporains. Par conséquent, il est essentiel que la police et les contingents militaires de l’ONU commencent à travailler ensemble et avec d’autres agences. Pour cela il faut élaborer des protocoles de formation et de fonctionnement conjoints, a estimé la représentante. Elle a notamment demandé que les pays fournisseurs de contingents soient systématiquement impliqués à tous les niveaux de prise de décisions sur le déploiement de la police, la planification ainsi que les stratégies de transition et de sortie. La déléguée a insisté sur l’importance d’une coordination plus étroite entre la pPolice des Nations Unies, les mécanismes d’application des lois du gouvernement hôte et la population civile pour améliorer l’efficacité du maintien de l’ordre dans le cadre d’une mission, en estimant à cet égard que la police communautaire devrait être la norme et non l’exception. Elle est revenue aussi sur le rôle indispensable joué par les femmes policières et Casques bleus, jugeant par ailleurs indispensable essentiel d’équiper les composantes de police de technologies de pointe notamment pour la lutte contre les émeutes et le contrôle des foules.
MmeME ANNA EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a rappelé que si l’une des tâches de la composante Ppolice est d’aider à réformer les institutions chargées de l’application des lois et à renforcer les capacités nationales des États hôtes, il ne faut pas oublier que les possibilités de l’ONU ne sont pas illimitées et que l’Organisation ne peut se substituer, en permanence, aux efforts des polices locales. À cet égard, il est important que des policiers des Nations Unies bien formés et bien équipés assurent le transfert d’expérience, le développement et la formation les plus efficaces du personnel local. Cela permettra aux forces nationales de prendre pleinement en charge le maintien de l’ordre public et d’assurer de manière indépendante la protection des civils. C’est le principe de responsabilité nationale ou appropriation nationale qui est la clefé du succès. Il n’est guère possible de parler d’efficacité du soutien international si la présence à long terme des missions ne fera finalement que remplacer les efforts de la police locale par l’ONU.
Mme Evstigneeva a aussi estimé que, selon les caractéristiques nationales, culturelles et religieuses des communautés vivant dans la zone de la mission, les femmes soldats de la paix peuvent jouer un rôle particulier en établissant une interaction avec elles. Elle s’est également dite convaincue que l’accent ne doit pas être mis sur la recherche d’indicateurs quantitatifs de genre, mais sur l’expérience, le professionnalisme, la compétence des officiers, ainsi que sur le respect du principe d’une large représentation géographique, y compris dans les postes de direction.
Du point de vue de la représentante, les missions doivent améliorer la planification et la gestion, éviter les dépenses inutiles et la duplication des efforts. Dans le cadre de ces processus, il est important que le Secrétariat examine attentivement les points de vue et les recommandations des pays fournisseurs de forces de police. Les tentatives de promouvoir divers types d’initiatives et de concepts de tiers qui n’ont pas reçu le soutien de tous les États mMembres du Comité spécial de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le maintien de la paix Comité spécial des opérations de maintien de la paix sont contre-productives, a-t-elle mis en garde, préconisant un dialogue permanent entre le Conseil de sécurité et les pays fournisseurs de contingents et les États hôtes sur tous les aspects des activités des opérations de maintien de la paix, y compris au stade de leur planification et de l’élaboration des mandats.
M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a rappelé l’importance des approches non armées en matière de prévention et de protection des civils. Les Casques bleus doivent non seulement protéger les civils des actes de violence, mais également assurer la mise en place d’un espace de médiation et de dialogue. La police des Nations Unies, souvent la première et la dernière entité à rencontrer la population locale en temps de crise, est particulièrement bien placée pour remplir cette mission, a-t-il noté. M. Kariuki s’est notamment félicité de la mise en œuvre du cadre intégré de performance et de responsabilité en matière de maintien de la paix pour assurer le suivi ainsi que les progrès réalisés dans l’exécution de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). À ses yeux, la police des Nations Unies doit être en mesure de couvrir la gamme complète des fonctions de police qui lui sont confiées, y compris le renforcement des capacités de police de l’État hôte, ainsi que des institutions judiciaires et pénitentiaires nationales.
Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a rappelé que le Système Intégré de Planification et d’Évaluation de la Performance (CPAS) du personnel de la police des Nations Unies a été mis en service dans 10 missions de maintien de la paix et que, dans certaines missions, des policiers planificateurs sont présents au sein de l’Unité intégrée de planification stratégique. Elle a apprécié que cela permette de mieux articuler les objectifs de planification opérationnelle de court terme avec ceux pour le long terme, pour mieux préparer les phases de transition. S’agissant de la protection, elle a expliqué qu’au Soudan du Sud, la police des Nations Unies se coordonne avec la Police nationale pour conduire des patrouilles préventives et des opérations d’interpellation de suspects, le but étant de lutter contre les crimes commis à l’intérieur des sites de protection des civils et des camps de personnes déplacées, en particulier les agressions sexuelles. En République centrafricaine, les efforts portés depuis plusieurs années sur le quartier PK5 à Bangui ont permis de créer un lien avec la population, en la rassurant et en l’informant, a-t-elle encore commenté.
Dans le domaine du renforcement des capacités des forces de sécurité intérieures des États hôtes, elle a souligné que cela se fait en synergie avec les autres entités des Nations Unies, dans le respect des exigences de la politique de diligence voulue par l’ONU en matière de droits humains et en veillant à promouvoir la place des femmes. Elle a aussi signalé que la police des Nations Unies s’apprête à ouvrir un nouveau chapitre de son action au service de la paix, avec la nomination, le 31 octobre dernier, de l’Inspecteur général de police Faisal Shahkar, du Pakistan. Enfin, selon la représentante, si la Conférence ministérielle de Séoul de décembre 2021 a ouvert de nouvelles perspectives en matière capacitaire pour la police des Nations Unies, la complexité des missions qui lui sont confiées nécessite de plus en plus de moyens spécialisés de police prenant parfaitement en compte les défis identifiés dans la stratégie de transformation numérique du maintien de la paix.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a précisé que son pays occupe le septième rang dans la liste des plus grands pays contributeurs de troupe. Il a salué les efforts déployés en vue d’un meilleur établissement des responsabilités pour les violations commises contre les Casques bleus, avant de souligner l’importance à cette fin d’une bonne coopération avec le pays hôte, que ce soit le Mali, la République centrafricaine ou bien la RDC. Il a plaidé pour des solutions technologiques innovantes en appui de la mise en œuvre des mandats. Le délégué s’est aussi inquiété de l’acuité de la menace de la désinformation pour les missions. Il a par ailleurs appelé à la mise en œuvre du programme pour “les femmes et la paix et la sécurité,” en vue d’une pleine participation des femmes aux processus de paix. Enfin, M. Agyeman a appuyé la politique de tolérance zéro pour les atteintes sexuelles commises par les personnels des missions de maintien de la paix.
Reprenant la parole, M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, a remercié les membres du Conseil pour leurs expressions de soutien à la police des Nations Unies. Il a noté l’intérêt accordé au rôle de celle-ci dans le renforcement des capacités nationales en matière d’institutions d’état de droit. Il a également noté l’importance de l’intégration, c’est-à-dire du travail de la composante Ppolice en étroite coordination avec les composantes civiles et militaires des opérations de paix et les partenaires humanitaires, en signalant la mise en place de cellules intégrées dans plusieurs missions. M. Lacroix a également relevé l’accent mis sur le rôle des femmes au sein de la composante Ppolice pour mieux mettre en œuvre les mandats, en particulier en termes de protection des civils.
Sur la question de la Norvège au sujet du renforcement du rôle de la police des Nations Unies en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, qui sont des facteurs d’aggravation des conflits, il a souligné le rôle de la composante Ppolice pour renforcer les capacités nationales et mieux connaîitre et anticiper les menaces, citant dans ce contexte l’initiative UNITE-AWARE pour la transformation digitale du maintien de la paix. Il a misé sur l’optimisation de la collaboration entre le Département des opérations de paix et l’ONUDC pour mieux articuler leurs actions et gérer l’efficacité de l’action de la composante Ppolice sur ces deux aspects. Le Secrétaire général adjoint a également évoqué la coopération étroite avec les autres organisations internationales et régionales qui ont des compétences en la matière, notamment avec INTERPOL. Avant de conclure, il a tenu à mettre en avant le rôle de la police des Nations Unies en matière de désinformation et de mésinformation, « des menaces qui tuent des civils et nos collègues », et a rendu hommage aux officiers de police qui ont perdu la vie dans le cadre d’attaques contre les membres de la MONUSCO.
Mme CHRISTINE FOSSEN, Cheffe de la police civile de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), répondant à la question de la Norvège sur le renforcement de la responsabilisation judiciaire, a déclaré que cela exige beaucoup de travail. Elle a assuré que la police des Nations Unies au Soudan du Sud travaille avec la chaîne judicaire au sein de la MINUSS. Répondant à la question de l’Irlande sur les moyens de renforcer la protection des personnels de police, Mme Fossen a dit qu’une bonne relation avec le pays hôte est essentiel pour cela. Les policiers doivent également avoir une bonne formation en lien avec l’environnement où la mission est déployée, qui doit être dispensée notamment par les pays contributeurs de troupes qui les déploient. Il est essentiel qu’ils comprennent le contexte et les mesures de sécurité à prendre, a insisté Mme Fossen. Répondant aux États-Unis et notamment à la question portant sur la désinformation, la cheffe de la police a expliqué les difficultés rencontrées pour lutter contre la désinformation et obtenir de bonnes informations: Internet fait défaut et le niveau d’illettrisme est important, ce qui rend la collecte d’informations très difficile.
M. MODY BERETHE, Chef de la composante Police de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), répondant à une question de la Norvège concernant le renforcement des capacités, a déclaré que la police des Nations Unies doit faire preuve « d’humilité » en RDC, dans un contexte marqué par la présence massive de forces de sécurité nationales sur le terrain. Le troisième plan quinquennal de renforcement des capacités policières de la police congolaise est actuellement en cours, dans un contexte de transition, a-t-il précisé. À cet effet, M. Berethe a assuré que son service déploie tous les efforts possibles pour faire en sorte que la police congolaise soit en mesure d’assumer ses responsabilités sécuritaires, tandis que s’intensifie l’intégration entre les opérations de maintien de la paix et les autres entités de l’ONU. La Représentante spéciale du Secrétaire général a ainsi demandé à la MONUSCO de mettre en place un programme conjoint de renforcement des capacités de la police, avec la collaboration d’entités des Nations Unies présentes dans le pays, afin de s’attaquer aux causes profondes du conflit. L’Union européenne, les États-Unis, la France, la République de Corée, le Japon et les Émirats arabes unis collaborent également à ces efforts.
S’agissant de l’état d’esprit de la population, M. Berethe a fait état d’un contexte de « défiance généralisée » envers la présence de la MONUSCO, associée par la population aux problèmes sécuritaires persistants. Les stratégies opérationnelles policières sont maintenant axées sur la police de proximité, a-t-il relevé, notamment au moyen de la mise en place d’un numéro vert pour joindre la police des Nations Unies. Les équipes de lutte contre la violence sexuelle vont maintenant au contact de la population et mènent des activités de sensibilisation, a-t-il ajouté. Toutefois, il a prévenu que la MONUSCO fait toujours l’objet d’attaques, notamment du fait qu’elle est le « bouc émissaire » des problèmes sécuritaires alors que la population attend de la Mission qu’elle se substitue à l’État congolais.
Aux questions de l’Irlande et des États-Unis concernant la désinformation, M. Berethe a fait observer que la police des Nations Unies sert largement de système d’alerte précoce pour la MONUSCO, en transmettant des informations et en proposant des solutions aux problèmes qu’elle constate sur le terrain. Les outils que la police des Nations Unies fournit à la Police nationale sert également à prévenir et à déceler les manœuvres de désinformation. La police congolaise a d’ailleurs demandé à la MONUSCO de renforcer ses capacités à cet égard, a-t-il ajouté. Enfin, il a souligné que la gestion des catastrophes et de l’impact des changements climatiques fait également partie des activités de renforcement des capacités offertes par la police des Nations Unies à la Police nationale congolaise.
Mme EMMA BIRIKORANG, du Kofi Annan International Peacekeeping Training Centre, a répondu à une question de l’Irlande sur l’adaptation des missions de la paix aux spécificités des pays. Elle a reconnu la complexité des tâches des agents du maintien de la paix, ces derniers pouvant parfois être appelés à « sortir des sentiers battus ». L’application des règles doit se faire de manière souple, a-t-elle dit, en soulignant l’importance de liens de confiance avec les communautés hôtes. Elle a insisté sur la nécessaire adaptation des formations aux réalités du terrain. L’insécurité climatique est une réelle menace, a-t-elle aussi reconnu.