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Colombie: Le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat de la Mission de vérification

9169e séance - matin
CS/15082

Colombie: Le Conseil de sécurité proroge jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat de la Mission de vérification

Le Conseil de sécurité a décidé ce matin à l’unanimité, en adoptant la résolution 2655 (2022), de reconduire pour un an, jusqu’au 31 octobre 2023, le mandat de la Mission de vérification en Colombie.

Le Conseil, qui réaffirme son « attachement sans réserve » au processus de paix en République de Colombie et salue les progrès accomplis par le pays sur la voie de la paix, prend acte d’une demande formulée le 17 octobre conjointement par le Gouvernement colombien et le parti des anciennes FARC-EP -les signataires de l’Accord final de paix- qui le prient d’envisager de charger la Mission de contrôler la mise en application de deux points précis de l’accord de paix, portant sur la réforme rurale intégrale et les questions ethniques.

Le Conseil prie le Secrétaire général de lui présenter des recommandations détaillées sur la façon dont ces tâches supplémentaires seraient exécutées et de lui faire savoir dans un délai de 45 jours si celles-ci auraient une quelconque incidence sur la configuration de la Mission.  Le Conseil ajoute qu’il « entend examiner rapidement ces recommandations ».  Le préambule de la résolution rappelle que le Conseil, dans sa résolution 2574 (2021), a élargi une première fois le mandat de la Mission de vérification pour y ajouter la vérification du respect et de l’application des peines qui seront prononcées par la Juridiction spéciale pour la paix.

Après le vote, le Royaume-Uni, coauteur du projet de résolution, s’est félicité de ce nouvel élan en faveur de la paix en Colombie.  Le Mexique, nouveau coauteur, a salué l’adoption à l’unanimité, estimant, en outre, qu’à la lumière de son expérience, la participation des membres élus du Conseil à l’élaboration des résolutions était quelque chose d’extrêmement positif et une pratique intéressante à maintenir.

Sur le fond, le Mexique s’est félicité des dispositions du texte qui permettent de vérifier que la feuille de route du processus de paix est respectée, notamment le chapitre ethnique.  Ce point a été également abordé par le Kenya, qui a dénoncé les effets disproportionnés des violences et de la marginalisation sur les populations autochtones et afro-colombiennes, avant de remercier le coauteur du texte d’avoir accepté le libellé proposé par les membres africains du Conseil pour reconnaître le rôle des organismes onusiens dans la vérification de cet aspect de l’Accord de paix.  Il a aussi noté avec satisfaction que la Colombie a désormais pris à bras-le-corps cette question.

Les États-Unis ont dit apprécier la volonté manifestée par les nouvelles autorités colombiennes de parvenir à la paix, ajoutant qu’ils appuieraient leurs efforts.  Rappelant que la tâche du Conseil en Colombie est de répondre aux besoins exprimés par le Gouvernement de ce pays, le Brésil s’est félicité que cette volonté soit parfaitement respectée dans la résolution adoptée.

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53) - S/2022/715

Texte du projet de résolution S/2022/804

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant son attachement sans réserve au processus de paix en République de Colombie,

Rappelant toutes ses résolutions et toutes les déclarations de sa présidence et ses déclarations à la presse concernant le processus de paix en Colombie,

Saluant les progrès accomplis sur la voie de la paix en Colombie depuis l’adoption de l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable (l’Accord final), exhortant les parties, avec le soutien des institutions publiques et des forces de sécurité compétentes ainsi que de la société civile, à unir leurs efforts afin de continuer de faire fond sur les progrès accomplis et de résoudre les problèmes actuels, notamment la poursuite des violences dans les zones touchées par le conflit, en mettant en œuvre intégralement l’Accord final, notamment la réforme rurale, la participation politique inclusive, ses dispositions relatives aux questions ethniques et aux questions de genre, ainsi que la lutte contre les drogues illicites, y compris au moyen de programmes de substitution de cultures, et rappelant les répercussions disproportionnées du conflit sur les femmes et ses effets sur les personnes appartenant à des communautés autochtones et afro-colombiennes,

Prenant note de la concertation de la Commission de consolidation de la paix avec le Gouvernement colombien et appelant de ses vœux la poursuite de la coopération, notamment avec les organismes compétents des Nations Unies, afin de veiller à ce que l’Accord final soit intégralement mis en œuvre selon une approche intégrée et cohérente,

Rappelant en particulier sa résolution 2366 (2017), par laquelle il a mis en place la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie (la Mission de vérification) chargée de contrôler la mise en application, par le Gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP), des clauses 3.2 et 3.4 de l’Accord final, comme le prévoit la clause 6.3.3 de celui-ci, et rappelant le rôle constructif joué par la Mission de vérification à cet égard,

Rappelant également sa résolution 2574 (2021), par laquelle il a élargi le mandat de la Mission de vérification pour y inclure la tâche supplémentaire de vérifier le respect et l’application des peines qui seront prononcées par la Juridiction spéciale pour la paix, et se félicitant des préparatifs en cours effectués par la Mission de vérification, en collaboration avec la Juridiction spéciale pour la paix, à cet égard,

Notant que, selon l’Accord final, les peines prononcées par la Juridiction spéciale pour la paix auront pour objectif global de faire respecter les droits des victimes et de consolider la paix, et devront avoir la plus grande fonction de restauration et de réparation au regard du préjudice causé,

Conscient de la contribution que la Mission de vérification pourrait apporter pour renforcer la confiance dans le Système intégré pour la vérité, la justice, la réparation et la non-répétition établi en vertu de l’Accord final, indispensable à l’aboutissement du processus de paix et à la réalisation des droits des victimes du conflit,

Prenant acte de la lettre en date du 17 octobre (S/2022/787), par laquelle le Ministre colombien des affaires étrangères a demandé une reconduction du mandat de la Mission de vérification et a prié le Conseil d’envisager de charger la Mission de contrôler la mise en application de la clause 1, sur la réforme rurale intégrale, et de la clause 6.2, sur le chapitre consacré aux questions ethniques, de l’Accord final, demande commune faite par le Gouvernement colombien et le parti des anciennes FARC-EP,

1.    Décide de reconduire jusqu’au 31 octobre 2023 le mandat de la Mission de vérification ;

2.    Prie le Secrétaire général de lui présenter des recommandations détaillées sur la façon dont les tâches supplémentaires concernant le contrôle de la mise application de la clause 1 et de la clause 6.2 de l’Accord final, demandée dans la lettre du 17 octobre adressée par le Ministre colombien des affaires étrangères seraient exécutées et de lui faire savoir si celles-ci auraient une quelconque incidence sur la configuration de la Mission, dans un délai de 45 jours à compter de l’adoption de la présente résolution, et entend examiner rapidement ces recommandations ;

3.    Se déclare disposé à coopérer avec le Gouvernement colombien en vue de la nouvelle reconduction du mandat de la Mission de vérification par voie d’accord entre les parties.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission examine le projet de principes de la CDI sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés

Soixante-dix-septième session,
23e & 24e séances plénières, Matin & après-midi
AG/J/3670

La Sixième Commission examine le projet de principes de la CDI sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a repris aujourd’hui ses discussions, entamées hier, sur le premier groupe de chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI).  Les délégations se sont principalement concentrées sur le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) et sur le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

La question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés est « cruciale » compte tenu de la gravité des problèmes environnementaux mondiaux, tels que les changements climatiques et la perte de biodiversité, a déclaré la représentante du Pérou.  La Micronésie a abondé en ce sens, citant en exemple les nombreuses épaves datant de la Seconde Guerre mondiale qui jonchent ses eaux et menacent les milieux naturels fragiles.  La plupart des représentants ont salué le travail de la CDI en la matière, le Portugal estimant qu’elle avait trouvé un « équilibre louable » entre les préoccupations militaires, humanitaires et environnementales. 

Le Royaume-Uni a néanmoins rappelé que le projet de principes n’a pas vocation à modifier ou à créer de nouvelles règles du droit international humanitaire.  Dans le même sens, certaines délégations, à l’instar de la République de Corée et Israël, se sont inquiétées que le projet mélange des règles de lex lata et de lex ferenda.  Il convient de « ne pas flouter les frontières entre des régimes juridiques distincts », a dit la déléguée israélienne.  L’Espagne a, pour sa part, constaté l’« intensité normative variable » des principes, regrettant un manque de clarté sur ce point.

Le projet constitue « un outil puissant afin de protéger des zones d’importance environnementale », a loué la déléguée suisse, rejoignant sur ce point son homologue péruvien.  La Sierra Leone a pris note de l’utilisation d’instruments normatifs africains, notamment la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala).  Avec l’Afrique du Sud, qui a rappelé la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, la Sierra Leone a estimé que les principes auraient dû être étendus à d’autres acteurs.  Sur ce point, Chypre a noté qu’en raison de la nature transfrontalière des problèmes environnementaux, il peut être difficile de se limiter aux parties à un conflit.

La Micronésie a souligné l’importance de considérer plusieurs phases temporelles — avant, pendant et après le conflit armé.  Au contraire, le Cameroun a noté que ces périodes avant et après le conflit ne sont pas régies par le droit international humanitaire, mais par le régime commun du droit international de l’environnement.  Le représentant russe a, pour sa part, estimé que le projet de la CDI élargit de façon excessive le champ d’application de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  D’après lui, ces questions sont suffisamment prises en compte par le droit existant, y compris le droit international humanitaire. 

Par ailleurs, certaines difficultés liées au projet de conclusions relatif aux normes impératives du droit international, déjà soulevées hier par d’autres délégations, ont refait surface aujourd’hui.  C’est notamment le cas de la liste non exhaustive des normes impératives annexée au projet.  Certains États s’en sont félicités, comme le Pérou, la Thaïlande ou le Portugal, qui a même estimé que « la CDI aurait pu se montrer plus ambitieuse en incluant par exemple l’obligation de protection de l’environnement ».  D’autres intervenants ont en revanche fait part de positions plus contrastées.  L’Irlande s’est ainsi inquiétée qu’une telle liste puisse être « interprétée à tort comme exhaustive ».  Le Cameroun, le Viet Nam, l’Espagne, le Royaume-Uni ou encore la Russie ont exprimé leurs réserves quant à l’inclusion d’une telle liste dans le projet.

La Russie, le Cameroun et Israël ont en outre fait part de leurs préoccupations sur la question des obligations erga omnes.  La Russie a estimé que, sur ce point, la CDI a outrepassé son mandat tandis qu’Israël a souligné une tendance à confondre les termes erga omnes et jus cogens.  Le Chili a, de son côté, plaidé pour une meilleure définition de l’expression « valeurs fondamentales de la communauté internationale ». 

Les aspects relatifs aux fondements des normes de jus cogens ou encore à leurs effets, notamment sur les actes des organisations internationales, ont également fait l’objet d’échanges de vues.  Ainsi l’Afrique du Sud s’est-elle félicitée de l’assujettissement des résolutions du Conseil de sécurité aux normes impératives tandis que le Royaume-Uni, le Maroc et la Russie ont noté l’absence de pratique sur ce point.

Le débat de la Sixième Commission sur ce point à l’ordre du jour reprendra demain, jeudi 27 octobre, à partir de 15 heures. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-TREIZIÈME SESSION - A/77/10

Suite du débat général sur le module 1: chapitres introductifs I à III, chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission), chapitre IV (Normes impératives du droit international général (jus cogens) et chapitre V Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés)

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) s’est félicité de l’inclusion de la prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer dans le programme de travail de la CDI.  Il a souligné l’immense apport des Nations Unies à la codification du droit international, avant de noter que cette codification connaît un certain déclin.  Si les produits de la CDI ont différents formats, dans certains cas la CDI recommande l’adoption d’une convention sur la base d’un projet d’articles.  Cependant, a regretté le délégué, la Commission ne prend pas de décision en donnant la priorité au consensus, même si seul un petit nombre d’États s’y oppose.  Si le consensus doit toujours être recherché, le consensus est un objectif, non pas un dogme, a-t-il tranché.  « Le consensus oblige à négocier de bonne foi mais il ne doit pas être usé comme un droit de veto. »  Si cette question n’est pas traitée, a-t-il averti, l’apport de la CDI et de la Sixième Commission sera gravement affaibli, dans un contexte où le besoin de davantage de droit est nécessaire pour réguler les relations internationales.

Le délégué a salué le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il s’est félicité que le jus cogens régional ait été omis de ce projet.  S’il a salué la liste non exhaustive de telles normes, il a déclaré que « la CDI aurait pu se montrer plus ambitieuse en incluant par exemple l’obligation de protection de l’environnement. »  Il a salué le travail accompli et espéré que l’Assemblée sera prête à prendre note de ce projet de conclusions et de son annexe.

Le délégué a ensuite évoqué le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il s’est dit en faveur d’un droit humain à l’environnement, lequel est lié à la jouissance d’autres droits humains.  Le Portugal reconnaît qu’une protection absolue de l’environnement n’est pas possible, a dit le délégué, en insistant sur la nécessité d’une protection conditionnelle pour trouver un équilibre entre préoccupations militaires, humanitaires et environnementales.  « Nous pensons qu’un équilibre louable a été atteint. »  En conclusion, le délégué a espéré que l’Assemblée prendra note dudit projet et le recommandera à l’attention des États et des organisations internationales.

M. MIK (Pologne) a estimé que les normes impératives du droit international général (jus cogens) sont d’une importance fondamentale pour l’ordre juridique international.  « Parce que nous avons été les témoins directs de violations graves et continues en Europe de l’Est depuis 2014 d’une obligation découlant des normes impératives du droit international général, nous étions et sommes toujours d’avis que des normes plus détaillées à cet égard doivent être élaborées. » Le délégué a regretté que les conclusions de la CDI se contentent de reproduire les dispositions pertinentes des articles de la CDI de 2001 sur la responsabilité des États, sans autre précision.  Malheureusement, a-t-il également estimé, la Commission a manqué l’occasion d’expliquer comment l’obligation d’un État devrait être mise en œuvre, notamment en ce qui concerne son comportement au sein des organisations internationales.  Le délégué a ajouté que les règles coutumières contenues dans le projet de conclusion 19 (Conséquences particulières des violations graves des normes impératives du droit international général) sont encore très larges.  Malgré cela, il est clair que le fait de fournir des armes à un État qui viole l’interdiction d’agression contrevient à l’obligation internationale coutumière décrite dans cette conclusion, a-t-il déclaré, saluant la mention dans le commentaire des pratiques actuelles des États, y compris l’agression russe en Ukraine. 

Par ailleurs, concernant les méthodes de travail de la Commission, le délégué a jugé nécessaire de donner des indications plus claires sur les progrès réalisés.  Une analyse attentive des travaux de la Commission indique qu’une règle ou une norme peut passer par plusieurs phases quasi-législatives qui ne sont pas toujours clairement discernables, a-t-il fait remarquer, notant que pour un même sujet, il est courant que différentes dispositions se trouvent à des stades différents du processus.  Ainsi a-t-il proposé d’insérer dans le rapport un tableau pour chaque sujet, donnant une image globale de leur état d’avancement. 

M. SMYTH (Irlande), saluant le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), a relevé que peu de modifications ont été apportées au projet depuis son adoption préliminaire.  Il n’est pas clair pour sa délégation si le terme « la communauté internationale des États dans son ensemble » qui apparaît dans la conclusion 2 et le terme « la communauté internationale » dans la conclusion 3 sont synonymes.  Si oui, pourquoi ne pas homogénéiser la terminologie, et si non, quelle est la différence?  Plus important encore, a-t-il continué, nous avons du mal à comprendre le concept de modification d’une norme impérative lorsque cette norme est une norme à laquelle, par définition, aucune dérogation n’est possible.  Il est difficile de voir comment une norme impérative peut être modifiée étant donné qu’une telle modification entraînerait nécessairement une dérogation à la norme originale, a-t-il estimé.  En outre, il s’est également demandé si, comme indiqué dans la conclusion 6 (Acceptation et reconnaissance), les traités et principes généraux du droit servent effectivement de base aux normes impératives.  Pour la délégation, un traité doit avoir codifié le droit coutumier préexistant qui est la base authentique des normes impératives.  Par ailleurs, le délégué s’est félicité de la clarté avec laquelle les conclusions exposent, dans la conclusion 19, les conséquences particulières des violations graves du jus cogens.  Il a ensuite rappelé ses réserves à l’égard de la liste non exhaustive, qui risque d’être « interprétée à tort comme exhaustive ». 

Sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le délégué a jugé que les projets de principes et les commentaires constituent une contribution précieuse à la compréhension de la manière dont le droit international humanitaire et d’autres domaines du droit international s’appliquent dans ce contexte.  Au sujet des projets de principes applicables en dehors des situations de conflit armé et d’occupation, exprimés en tant que règles contraignantes du droit international, il a estimé que les commentaires sur les projets de principes 7 (Opérations de paix) et 26 (Restes de guerre) ne démontrent pas de manière adéquate les bases juridiques de ces textes en tant que règles contraignantes.  La délégation a également exprimé des réserves sur le projet de principe 5 (Protection de l’environnement des peuples autochtones) indiquant qu’elle examinerait plus amplement les autres projets de principe à caractère de recommandation. 

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a estimé que les travaux de la Commission constituent une évolution majeure pour le droit international.  Il a salué l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), un « développement important » mené à bien, a-t-il souligné, sous l’égide d’un juriste africain.  Le délégué a notamment apprécié le compromis atteint sur la conclusion 2 (Nature des normes impératives du droit international général).  Lesdites normes, a-t-il reconnu, reflètent et protègent les valeurs fondamentales de la communauté internationale; elles sont universellement applicables et supérieures aux autres règles du droit international. 

Sur la question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, il a pris note de l’utilisation d’instruments normatifs africains, notamment la Convention de l’Union africaine de 2009 pour la protection et l’assistance des personnes déplacées en Afrique (la Convention de Kampala).  À propos du projet de principe 9 (Responsabilité des États), le représentant a estimé qu’il aurait été utile que la CDI se prononce sur les règles relatives à la responsabilité des groupes armés non étatiques, au vu de leur importance.  À propos du projet de principe 13 (Protection générale de l’environnement pendant un conflit armé), il a dit que ne pas ajouter des principes traitant de l’environnement dans les conflits armés hypothéquerait l’interdiction existante.

Le représentant a évoqué la question d’une représentation géographique équitable dans les travaux de la CDI pour relever que seul un membre africain était rapporteur spécial, et un autre coprésident d’un groupe d’étude.  Il a appelé la Commission à envisager une approche équilibrée.  Il a également regretté que le sujet de la juridiction pénale universelle reste dans le programme à long terme de la Commission malgré le large soutien exprimé par les États Membres pour qu’il soit ajouté au programme actuel.  Il en est de même pour le sujet de la juridiction extraterritoriale.

M. ANDRÉS NAPURÍ PITA (Pérou) a plaidé pour un renforcement des liens entre la Sixième Commission et la CDI en vue d’une codification accrue du droit international.  Il a salué le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a souligné la prééminence de ces normes sur les autres règles du droit international comme le rappelle la conclusion 2 (Nature des normes impératives du droit international général).  Il n’est pas nécessaire que ces normes soient reconnues par l’ensemble des États, mais par une majorité large et représentative des États, a déclaré le délégué, en commentant la conclusion 7 (Communauté internationale des États dans son ensemble).  Il a salué l’inclusion en annexe d’une liste non exhaustive des normes.

Le délégué a salué le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  « Cette question est cruciale compte tenu de la gravité des problèmes environnementaux mondiaux, tels que les changements climatiques et la perte de biodiversité, et du fait que les conflits armés peuvent exacerber ces problèmes. »  Il a notamment souligné l’importance des principes 13 et 18 relatifs à la protection générale de l’environnement pendant un conflit armé et aux zones protégées, en considérant à l’intérieur de celles-ci les zones d’importance environnementale désignées par accord et les zones d’importance culturelle.  En conclusion, il a redit combien il est nécessaire de préserver le multilinguisme dans les travaux de la CDI.

Mme RATHE (Suisse) s’est réjouie de l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général, en particulier le projet de conclusion 23 et la liste non exhaustive de normes de jus cogens dans l’annexe.  La Suisse a développé dans sa pratique une compréhension plus large de ce qui constitue le noyau dur du jus cogens que celle ressortant de la liste indicative, a-t-elle précisé.  Elle a donc salué le fait que cette liste est « sans préjudice de l’existence ou de l’émergence ultérieure d’autres normes de jus cogens ».  Cependant, la représentante a regretté l’incohérence qui subsiste entre la version française qui évoque « les règles fondamentales du droit international humanitaire » et la version anglaise qui utilise l’expression « the basic rules of international humanitarian law », préférant la formulation « the fundamental rules ». 

La représentante s’est dite certaine que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés et les commentaires y relatifs seront d’une grande utilité pour tous les acteurs concernés.  En particulier, « la Suisse souligne l’importance de mieux protéger l’environnement dans les conflits armés contemporains ».  La représentante s’est félicitée de la clarification apportée au sujet du champ d’application temporel et elle a salué le projet de principe sur les zones protégées, lesquelles peuvent constituer « un outil puissant afin de protéger des zones d’importance environnementale ».  Pour conclure, elle a noté avec satisfaction l’inscription au programme de travail du sujet intitulé « Les accords internationaux juridiquement non contraignants ».  Elle a estimé que la discussion sur la manière de traiter ces instruments de droit souple est importante, tant du point de vue de l’état de droit que de la démocratie. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a suggéré que les 23 projets de conclusions et l’annexe deviennent un guide méthodologique pour identifier l’émergence de normes impératives du droit international général et leurs conséquences juridiques.  Il a exprimé ses réserves sur le principe d’une liste non exhaustive des normes de jus cogens.  Il a également attiré l’attention sur la relation entre les normes erga omnes et les normes de jus cogens, appelant sur ce point à faire preuve de prudence.  Il a soutenu le projet de conclusion 16 sur l’absence d’effet contraignant d’un acte d’une organisation internationale contraire au jus cogens afin que ces actes puissent « demeurer en phase avec les normes qui protègent l’humanité  ».  Le représentant a également jugé « douteuse » la mise en œuvre de l’obligation de coopérer du projet de conclusion 19.  Il s’est également interrogé sur la cohérence entre les conclusions 5 et 19, notant qu’il n’est pas possible d’invoquer un conflit entre la coutume et le jus cogens si le premier est le fondement du second.

Le représentant a relevé que les conflits armés sont source de catastrophes majeures pour l’environnement et a salué le travail de la CDI en la matière.  Il s’est dit perplexe face à l’extension du projet de principes avant et après le conflit armé, là où s’applique le régime commun du droit de l’environnement.  Une précision s’impose quant au calendrier des mesures à prendre, a-t-il également indiqué, appelant à « tenir compte des contingences qu’impose la guerre ».  Il a plaidé pour renforcer la protection de la relation particulière entre les peuples autochtones et leur environnement, reconnue et protégée par différents instruments internationaux.  Il a en outre proposé de refondre en un seul principe les principes 6 et 7 et de joindre les principes 10 et 16.  Le délégué a exprimé sa réserve quant à l’adjonction de la clause Martens au principe 12, craignant la généralité et le caractère globalisant de cet énoncé.

Le représentant a abordé le régime juridique des accords internationaux juridiquement non contraignants, préférant la qualification « actes juridiques internationaux concertés non conventionnels ».  Il a noté l’abondance de la pratique contemporaine et appelé à une vision globale de leurs effets juridiques.  « Le fondement du caractère obligatoire de ces accords réside à l’instar de tout autre engagement, quelle que soit sa forme, sur la bona fides », a-t-il estimé.  Il a, en ce sens, proposé des critères permettant d’identifier la volonté normatrice de l’État.

M. MINHVU NGUYEN (Viet Nam) a réitéré ses préoccupations quant à l’annexe au projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), qui contient une liste non exhaustive des normes impératives.  Il a estimé que la CDI a pour mandat d’élaborer des critères permettant d’identifier de telles normes et non d’en dresser la liste.  Les principes codifiés par la Charte des Nations Unies et la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies devraient du reste être inclus dans la liste, a-t-il estimé.  Le délégué a indiqué que le projet de conclusion 2 (Nature des normes impératives du droit international général) ne doit pas avoir pour effet d’ajouter des critères en sus des critères du projet de conclusion 4 (Critères pour la détermination d’une norme impérative du droit international général).  Il a en outre souhaité que le concept « dans son ensemble » constitue une « majorité large et représentative ».  Si le point de vue des acteurs non étatiques peut contribuer à la détermination de l’acceptation et de la reconnaissance des normes impératives, le représentant a rappelé que c’est bien « la reconnaissance et l’acceptation des États qui devraient être considérées comme pertinentes ».

Par ailleurs, le délégué s’est dit conscient des conséquences à long terme de conflits sur l’environnement, soulignant que ce sujet constitue « une question centrale ».  Toute entité responsable de dégâts environnementaux doit garantir les réparations, retirer les restes de guerre, fournir une assistance et dédommager les victimes, a-t-il estimé.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a exprimé le soutien de l’Afrique du Sud au projet de conclusions dans le cadre du chapitre IV.  La description de la nature distincte des normes sera selon elle un outil utile pour mieux comprendre les normes impératives du droit international général, ce que font les tribunaux sud-africains.  En revanche, elle a estimé que le paragraphe 2 du projet de conclusion 5 sur les dispositions conventionnelles était ambigu.  Au sujet du projet de conclusion 16 (Obligations créées par des résolutions, décisions ou autres actes d’organisations internationales en conflit avec une norme impérative du droit international général), elle a salué la position de la CDI confirmant que les résolutions, décisions et autres actes du Conseil de sécurité adoptés au titre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies soient sujets à des normes impératives du droit international.

En venant au chapitre V du rapport, Mme Joyini a voulu rappeler la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement adoptée en 1992, qui reconnaît les conséquences de la guerre sur l’environnement et appelle les États à respecter le droit international en protégeant l’environnement dans un conflit armé.  Elle s’est félicitée que la CDI élabore un cadre juridique visant à élargir cette protection durant et après les conflits armés.  Elle aurait souhaité que les principes ne s’appliquent pas seulement aux États, mais à toutes les parties aux conflits.  Elle s’est également félicitée que sa proposition d’inclure l’impact des flux de réfugiés et des déplacements de population sur l’environnement ait été traitée dans le projet de principe 8 (Déplacements de population).  À cet égard, la Convention de l’Union africaine de 2009 pour la protection et l’assistance des personnes déplacées en Afrique est un instrument pertinent.  Par ailleurs, la déléguée s’est félicitée que la CDI ait nommé pour la première fois deux membres africains comme rapporteurs spéciaux, ce qui est un pas vers une représentation équitable.

Mme LANGRISH (Royaume-Uni) a estimé que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) et l’annexe devraient être d’une certaine utilité pour permettre aux États et aux tribunaux de faire preuve de rigueur lorsqu’ils sont confrontés à des questions de jus cogens.  « Mais ils ne reflètent pas à tous les égards le droit ou la pratique actuels. »  La déléguée a jugé essentiel que le projet de conclusions soit pris en compte parallèlement aux points de vue des États et que les tribunaux en soient clairement informés lorsqu’ils examinent le statut juridique du projet de conclusions.  En outre, l’objection persistante de certains États à une règle de droit international coutumier, alors que cette règle est en cours de formation, est pertinente pour savoir s’il est possible de conclure qu’elle a été acceptée et reconnue par la communauté internationale comme ayant un caractère impératif.  Nous continuons aussi de douter qu’il existe une pratique étatique suffisante pour étayer la proposition du paragraphe 3 du projet de conclusion no 14 (Règles de droit international coutumier en conflit avec une norme impérative du droit international général) selon laquelle la règle de l’objecteur persistant ne s’applique pas aux normes impératives du droit international général, a poursuivi la déléguée.  Sur le projet de conclusion no 21, elle a jugé que la pratique est insuffisante pour étayer la position selon laquelle un État peut refuser de se conformer à une résolution contraignante du Conseil de sécurité des Nations Unies au motif qu’elle est contraire à une norme de jus cogens.  La déléguée a réitéré qu’il serait préférable de ne pas inclure une « liste non exhaustive » de normes ayant le statut de normes impératives.  Le Royaume-Uni est particulièrement préoccupé par le fait que la CDI n’a pas appliqué la méthodologie exposée dans son propre projet de conclusions pour l’identification de telles normes.  « Nous avons déjà indiqué que nous ne considérons pas que toutes les normes énumérées remplissent clairement les critères pertinents. »

Ensuite, sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, la déléguée a noté que le champ d’application du projet de principes et leurs commentaires est très large.  Elle a dit comprendre qu’ils ne modifient pas -et ne doivent pas être considérés comme modifiant de quelque manière que ce soit– le droit international humanitaire (DIH), ni n’affectent les limitations et réserves se rapportant au DIH.  À cet égard, a-t-elle apprécié, lorsque la terminologie des projets de principes ne s’aligne pas sur le DIH, comme l’utilisation du terme « environnement » plutôt que « environnement naturel », l’intention n’est pas de modifier la portée du DIH. 

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) s’est félicité de l’inclusion de la prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer dans le programme de travail de la CDI.  Il a commenté le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  « Les commentaires de nombreuses délégations n’ont pas été prises en compte », a déploré le délégué.  Il a émis des doutes quant à l’expression « communauté internationale des États dans son ensemble ».  Le délégué a en outre exprimé le désaccord de son pays sur la conclusion relative aux résolutions du Conseil de sécurité, en estimant que celle-ci ne reflète pas la pratique des États.  Il a estimé que la CDI a outrepassé son mandat sur un « sujet brûlant » en évoquant la conclusion 17 relative aux normes impératives en tant qu’obligations dues à la communauté internationale dans son ensemble (obligations erga omnes).  Commentant la conclusion 19 sur les conséquences particulières des violations graves des normes impératives, il a dénoncé « ces pays qui ont décidé de poursuivre leur campagne contre la Russie ».  L’inclusion en annexe d’une liste non exhaustive de normes impératives n’est pas appropriée, a déclaré le délégué, en s’interrogeant sur la méthodologie suivie par la CDI.  Il a estimé que cette liste pourrait « saper » la valeur de ses travaux sur le sujet.

Le délégué a ensuite évoqué le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il a estimé que les questions relatives à la protection de l’environnement sont suffisamment prises en compte par le droit existant, y compris par le droit international humanitaire.  Malgré certains changements majeurs, ce projet élargit de façon excessive le champ d’application de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés a indiqué le délégué, en renvoyant aux commentaires faits par son pays en 2019.

Mme MARÍA CECILIA CÁCERES (Chili) a considéré, au sujet de la nature des normes impératives du droit international général, qu’il est nécessaire de définir ce que l’on entend par « valeurs fondamentales de la communauté internationale » afin d’être plus clair sur ce point et de pouvoir distinguer ces normes des autres.  Quant aux critères d’identification d’une norme de jus cogens, la déléguée a estimé qu’un tel caractère ne peut être déterminé que sur la base de son acceptation et de sa reconnaissance par les États, de manière généralisée et transversale dans les différentes régions.  Le processus d’identification doit permettre d’identifier des normes vraiment universelles, autrement dit il doit être représentatif de tous les systèmes juridiques, a-t-elle insisté.  Les systèmes régionaux, des droits de l’homme par exemple, peuvent servir d’outil important pour identifier ce type de normes.  Plus généralement, Mme Cáceres a estimé que la liste de normes proposées par la CDI, en annexe du projet de conclusion 23, aurait dû faire l’objet d’une analyse plus approfondie.

M. SONGCHAI CHAIPATIYUT (Thaïlande), prenant note de la liste non exhaustive des normes impératives du droit international général, a souligné que la liste pourrait être utilisée comme point de référence lorsqu’il s’agit de déterminer si une certaine norme est universellement acceptée et reconnue.  Il s’est réjoui du paragraphe 1 du projet de conclusion 14 selon lequel « une règle de droit international coutumier ne prend pas naissance si elle entre en conflit avec une norme impérative existante du droit international général (jus cogens) », tout en reconnaissant également la possibilité qu’une norme de jus cogens actuelle soit modifiée par une norme de jus cogens ultérieure. 

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a reconnu le rôle crucial que les acteurs concernés, y compris les organisations internationales, peuvent jouer en matière d’évaluation environnementale après un conflit armé.  Étant donné leur expérience et leur expertise, la coopération avec ces organisations internationales permet de mieux comprendre comment identifier et traiter les conséquences environnementales des conflits armés, a-t-il estimé.  Par ailleurs, « il incombe à l’humanité de protéger l’environnement, tant en temps de conflit qu’en temps de paix », a-t-il rappelé. 

Le représentant a ensuite pris note de la décision de la CDI d’inclure de nouveaux sujets dans son programme de travail.  Il serait très utile d’un point de vue pratique que la Commission entame ses travaux sur des sujets qui apporteront une plus grande clarté sur les principes de droit international utilisés dans les accords d’investissement internationaux, en particulier le principe du traitement juste et équitable.  Pour le délégué, ces travaux importants apporteront une sécurité juridique et empêcheront la fragmentation du droit international de l’investissement.  Enfin, il a souhaité que les travaux de la CDI reflètent et prennent en compte toutes les voix, tous les besoins et toutes les préoccupations des États Membres. 

M. LEFEBER (Pays-Bas) a recommandé de limiter le nombre de sujets à l’ordre du jour de la CDI afin de faciliter leur étude détaillée par les États Membres de l’ONU.  Il s’est félicité de l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a pris note de la reconnaissance, dans un commentaire, du fait que les traités et principes généraux de droit ne peuvent servir de base au jus cogens que de manière limitée.  Il a indiqué que les Pays-Bas appuieraient une résolution de l’Assemblée générale prenant note du projet de conclusions, sans inscrire ce point à l’ordre du jour de l’Assemblée. 

Le représentant a également salué l’adoption du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il a toutefois noté que le texte n’a repris qu’une partie des commentaires et observations écrites soumis par son pays.  Ainsi la délégation estime-t-elle que le principe 7 (Opérations de paix) ne reflète pas le droit international coutumier.  Là encore, les Pays-Bas appuieraient une résolution de l’Assemblée générale prenant note du projet de principes, sans inscrire ce point à l’ordre du jour de l’Assemblée.  Par ailleurs, le représentant a plaidé pour que soient discutées les implications en droit international de l’incapacité de renoncer à une seconde nationalité.  Estimant que la CDI serait la mieux équipée pour examiner cette question, y compris la portée du droit à la nationalité, il a proposé d’inclure ce sujet à son programme de travail

M. ZHA HYOUNG RHEE (République de Corée) a souligné que le jus cogens existe, aujourd’hui, au sein de la communauté internationale et de tous les systèmes juridiques nationaux.  Partant, il a estimé que la portée de ce sujet devrait être étendue pour couvrir non seulement le droit des traités mais aussi la responsabilité étatique, le lien entre les sources du droit international et d’autres domaines du droit international.  Par ailleurs, il a attiré l’attention sur quelques parties du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général qu’il a jugées trop vagues pour une mise en œuvre et sujettes à interprétation, comme le terme « violation grave » dans le projet de conclusion no 19 (Conséquences particulières des violations graves des normes impératives du droit international général).

Passant au projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le délégué a noté que les commentaires reçus des organisations internationales et de groupes civiques ont gagné en importance dans la révision, alors que les avis des gouvernements ne sont pas toujours convergents.  Relevant que le terme « naturel » a été supprimé après « environnement », il a maintenu sa position selon laquelle le terme « environnement naturel » est plus pertinent par rapport au droit international humanitaire existant.  En supprimant le terme « naturel », le délégué s’est dit convaincu que les principes de lex lata sont devenus lex ferenda.

M. SARVARIAN (Arménie) a souligné l’utilité du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a estimé qu’il n’y a rien d’anormal à ce que la CDI prenne son temps pour étudier un sujet aussi complexe et sensible que les normes impératives.  Il a déclaré que les conclusions 6, 7 et 8 et leurs commentaires fournissent peu d’explications sur la manière dont une norme impérative est censée être acceptée et reconnue par la communauté internationale des États.  Il a aussi pointé les difficultés méthodologiques posées par la liste non exhaustive desdites normes.  Le droit à l’autodétermination a été inclus dans cette liste alors qu’un petit nombre d’États conteste son rang de normes impératives.

Le délégué a ensuite évoqué le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il a jugé nécessaire que la CDI poursuive son travail sur ce projet afin d’en modifier le format, a-t-il poursuivi.  Il a souligné la nécessité qu’il soit fait usage de ce projet comme d’une plateforme en vue de l’élaboration de propositions concrètes aux fins de codification.  Le délégué a aussi estimé que les principes 9 et 12 sur, respectivement, la responsabilité de l’État et la clause de Martens, sont redondants par rapport à des règles bien établies en droit international.  Il a invité la CDI à préciser la définition de l’obligation de protéger l’environnement contre les « dommages étendus, durables et graves » visés par les principes 13 et 19.  Enfin, le délégué a salué l’inclusion du règlement des différends internationaux auxquels des organisations internationales sont parties dans le programme de travail de la CDI, un sujet qui revêt une grande importance pratique.

M. SANTIAGO RIPOL CARULLA (Espagne) a estimé, malgré les doutes exprimés par quelques États, que les travaux de la CDI sont une preuve définitive de la reconnaissance de l’existence en droit international de normes qui « reflètent et protègent les valeurs fondamentales de la communauté internationale » et sont « universellement applicables et hiérarchiquement supérieures aux autres règles du droit international ».  À propos de la conclusion 21 (Procédure recommandée) du projet de conclusions, l’Espagne comprend qu’il est recommandé de porter un différend devant la Cour internationale de Justice (CIJ), mais, comme la CIJ l’a elle-même rappelé, la violation d’une norme impérative ne constitue pas en soi une base pour établir sa compétence.  Le délégué a par ailleurs réitéré ses réserves sur la valeur ajoutée de la liste non exhaustive de normes impératives figurant en annexe. 

Abordant le chapitre V du rapport, M. Ripol Carulla a souligné que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés constitue un apport décisif à la codification et au développement progressif du droit international.  « L’un des principaux mérites de ce projet est de vouloir intégrer les normes du droit des conflits armés et les normes du droit international existant dans d’autres secteurs, comme le droit international des droits de l’homme et le droit international de l’environnement. »  Selon le délégué, les principes présentent « une intensité normative variable », puisque certains relèvent clairement du domaine des normes obligatoires, tandis que d’autres se rapprochent plutôt de la catégorie des normes recommandées, ou « soft law ».  À cet égard, il a regretté que le texte et le commentaire des principes manquent de clarté sur le point de savoir quand un principe a un caractère obligatoire ou constitue une recommandation non contraignante.

M. JEEM S. LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a déclaré que les espaces terrestre et maritime de son pays ont été « transformés en instruments de guerre par des puissances étrangères » et qu’ils ont subi des dommages considérables et parfois durables.  Le délégué a mentionné les nombreuses épaves de navires et d’aéronefs datant de de la Seconde Guerre mondiale qui jonchent les eaux et menacent les milieux naturels fragiles.  De plus, il n’a pas écarté « la possibilité d’un autre conflit majeur dans cette partie du Pacifique ».  Il s’est donc réjoui de l’adoption du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il a dit l’importance de considérer plusieurs phases temporelles − avant, pendant et après un conflit armé.  Il a également salué la reconnaissance spécifique de l’obligation des États de prendre des mesures pour corriger les effets négatifs des conflits armés sur les terres et territoires que les peuples autochtones habitent ou utilisent traditionnellement.  Il est important d’incorporer des dispositions sur la protection de l’environnement dans les accords relatifs à la présence de forces militaires, a-t-il encore recommandé, rappelant la récente adoption par l’Assemblée générale de la résolution 76/300 qui consacre « le droit humain à un environnement propre, sain et durable ».  Il s’est également félicité des projets de principes 26 (Restes de guerre) et 27 (Restes de guerre immergés en mer) qu’il a jugés conformes à la reconnaissance par la CDI que l’obligation d’interdire la « pollution massive » des mers est une norme impérative du droit international général.  Estimant que le projet de principes et leurs commentaires constituent une contribution majeure au droit international, il a appelé les parties concernées, y compris les États ayant une histoire de conflit armé dans le Pacifique, à les mettre en œuvre dans leur intégralité. 

Enfin, le délégué a pris note de la décision de la CDI d’inscrire le sujet des « accords internationaux non juridiquement contraignants » à son programme de travail à long terme.  Il a appuyé la recommandation selon laquelle la Commission ne devrait pas aborder la question de l’effet des dispositions non contraignantes des traités.  Il s’est également dit favorable à ce que la Commission examine l’effet ou la nature juridique des décisions et autres actes adoptés par les conférences des États parties aux traités. 

Mme YARDEN RUBINSHTEIN (Israël) a regretté que la Commission n’ait pas répondu de manière adéquate aux inquiétudes d’Israël concernant le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), notamment en intégrant des propositions de développement progressif.  Elle a regretté que le rapporteur spécial se soit appuyé sur la théorie et la doctrine plutôt que sur la pratique étatique, qui aurait dû être l’objectif principal.  Le seuil élevé pour l’identification des normes de jus cogens conformément à l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités n’est pas convenablement inclus dans le projet de conclusions, a-t-elle estimé.  La représentante a par ailleurs douté de l’existence de conséquences supplémentaires en plus de celles prévues par la Convention de Vienne en cas de violation des normes de jus cogens, notamment l’obligation de coopérer et l’interdiction de la reconnaissance ou de l’assistance dans une situation créée en violation d’une norme impérative.  La représentante a également souligné une tendance à confondre les termes erga omnes et jus cogens.  Elle s’est aussi inquiétée de l’inclusion d’une liste non exhaustive des normes impératives, citant des problèmes liés aux modalités de son élaboration.

Ensuite, Mme Rubinshtein a regretté certains choix méthodologiques relatifs au projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Elle a notamment évoqué des confusions entre règles d’origine différentes, appelant à « ne pas flouter les frontières entre des régimes juridiques distincts ».  L’abandon de la distinction entre conflit international et non international n’est pas suffisamment étayé, a-t-elle ajouté.  Elle a également souligné des confusions entre les obligations juridiques, les suggestions de mise en œuvre, le développement progressif et les normes non contraignantes.  En conséquence, la représentante a déclaré que ce projet de principes ne saurait servir de base à un traité et qu’il devrait uniquement constituer des lignes directrices.

M. HARIS CHRYSOSTOMOU (Chypre) a pris note de l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a notamment approuvé le projet de conclusion 19, commentaire 5, selon lequel le principe d’autodétermination est une norme de jus cogens.  Le principe d’autodétermination est devenu un principe de droit international au cours du mouvement de décolonisation, et il a toujours été appliqué aux situations de domination coloniale ou d’occupation étrangère, a-t-il rappelé, mentionnant notamment l’Acte final d’Helsinki.  L’intégrité de toutes les frontières a été renforcée par l’élaboration de la règle selon laquelle elles ne peuvent être modifiées par la force.  Sur le projet de conclusion 14, paragraphe 3 sur la non-applicabilité du principe dit de l’objecteur persistant au jus cogens, le délégué s’est dit d’accord avec le commentaire qui stipule qu’un tel principe ne s’applique pas aux normes impératives du droit international général.  Lorsqu’il s’agit de normes de jus cogens, qui sont considérées comme hiérarchiquement supérieures aux autres règles du droit international, l’argument selon lequel le concept d’objecteur persistant ne devrait pas s’appliquer à elles est encore plus convaincant, a-t-il insisté.

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, et en particulier des principes applicables pendant les conflits armés, le délégué a noté que le langage actuel fait référence au patrimoine culturel matériel et immatériel et il a suggéré d’inclure également le patrimoine naturel.  Sur les principes applicables dans les situations d’occupation, il a proposé la formulation supplémentaire suivante : « la puissance occupante ne doit pas s’engager dans une activité d’exploration ou d’extraction des zones terrestres et maritimes occupées ».  En outre, le délégué a souligné que l’expression « droit international applicable » fait référence au droit des conflits armés mais aussi au droit international de l’environnement et au droit international des droits humains.  En ce qui concerne l’application du droit international de l’environnement, il a invité à se référer à l’avis consultatif de 1996 de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur la licéité de l’emploi ou de la menace d’emploi d’armes nucléaires.  Dans la mesure où les accords multilatéraux sur l’environnement traitent de problèmes environnementaux qui ont une nature transfrontalière ou une portée mondiale, et où les traités ont été largement ratifiés, il peut être difficile de se limiter aux parties à un conflit.  Enfin, sur les principes applicables après la conclusion d’un conflit armé, en particulier le principe 25, le délégué a encouragé la CDI à élaborer des lignes directrices plus claires pour promouvoir le principe de secours et d’assistance.  Il a recommandé de prendre en compte les dommages environnementaux causés par une occupation continue et de faire des mesures de réparation, dont le partage des informations et des ressources naturelles, une obligation de la puissance occupante. 

M. LASRI (Maroc) a indiqué que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) devrait recueillir davantage d’observations en vue de son amélioration.  Il a dit s’aligner sur la définition contenue à l’article 53 (Traités en conflit avec une norme impérative du droit international général) de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.  Il a également soutenu le principe de l’unanimité relatif à l’acceptation d’une norme de jus cogens.  À ce titre, il a estimé que la « large majorité » reconnue dans la conclusion 7 (Communauté internationale des États dans son ensemble) est trop large, altère l’esprit authentique de l’article 53 de la Convention de Vienne et contredit d’autres principes du projet.  Le délégué a souligné le poids et la fonction de la détermination par la Cour internationale de Justice (CIJ) des normes et s’est opposé au rôle des comités d’experts autres que la CDI sur ce point.  Il s’est en outre interrogé sur le bien-fondé de la hiérarchisation dans le cadre du projet de conclusion 9 (Moyens auxiliaires de détermination des normes du droit international général) qui place les experts en première position.  L’inclusion des travaux des organes d’experts dans l’identification des normes de jus cogens risque de confier à ces derniers un rôle qui dépasse leur mandat, a-t-il mis en garde.  Le délégué a également noté l’absence de précédent sur l’incompatibilité d’une résolution du Conseil de sécurité avec une norme impérative.  Quant à la liste non exhaustive annexée au projet, il s’est interrogé sur sa pertinence ainsi que sur les critères retenus pour l’élaborer.  Selon lui, certaines normes contenues dans cette liste suscitent des observations et des incertitudes quant à leur caractère de norme impérative.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: vives dénonciations des procédures spéciales lors de l’examen des droits humains au Myanmar, en RPDC, en Afghanistan, au Bélarus, en Iran et en Syrie

Soixante-dix-septième session
33e & 34e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4359

Troisième Commission: vives dénonciations des procédures spéciales lors de l’examen des droits humains au Myanmar, en RPDC, en Afghanistan, au Bélarus, en Iran et en Syrie

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a été aujourd’hui le théâtre de débats houleux à l’entame de l’examen de la situation des droits humains dans six pays, un large groupe de délégations, appuyé par le Mouvement des pays non alignés, rappelant leur position de principe sur ces mandats, jugés politisés, sélectifs, et irrespectueux de la souveraineté des États, estimant que ces questions devraient être traitées au Conseil des droits de l’homme, dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU). 

Ces contestations ont visé les cinq Rapporteurs spéciaux sur la situation des droits humains au Myanmar, en République populaire démocratique de Corée (RPDC), en Afghanistan, au Bélarus, en République Islamique d’Iran ainsi que le Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne.  Les exposés de ces six titulaires de mandat, souvent confrontés au refus d’accès dans le pays, ont néanmoins permis de constater l’étendue du chemin restant à parcourir. 

« L’Afghanistan reste très certainement le pire pays au monde où être une femme ou une fille », s’est alarmé le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans ce pays qui a indiqué que les femmes, dont les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels sont bafoués, ont été effacées de la vie publique.  M. Richard Bennett, a également rappelé que les écoles secondaires de filles étaient fermées depuis 401 jours.  La réouverture des écoles secondaires pour filles est le premier test du respect par les autorités de facto de leurs obligations internationales en matière de droits humains, a-t-il dit. 

Les violations du droit fondamental des femmes ont également été largement débattues lors du dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits humains en République islamique d’Iran qui a appelé à la mise en place d’un mécanisme d’enquête indépendant sur les violations des droits humains qui ont précédé et suivi la mort en détention de Mahsa Amini, trois jours après avoir été arrêtée par la police des mœurs pour avoir porté son hijab de manière inappropriée.  Évoquant les manifestations qui se sont produites depuis dans tout le pays, M. Javaid Rehman a estimé que la barrière de la peur avait été franchie, les conditions ayant conduit à la mort de Mahsa Amini et la violation du droit fondamental des femmes à parler et à s’habiller librement ne pouvant plus être tolérées.  De manière prévisible, les autorités ont répondu à ces revendications par une répression brutale des manifestants pacifiques et une coupure des connexions Internet dans le but d’étouffer la liberté d’expression et d’association de la population iranienne, a-t-il déploré. 

Sur le registre de la reddition de comptes, le bilan est lourd, ont également constaté les titulaires de mandat, à l’instar du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar qui a affirmé que « les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre sont le fonds de commerce de la junte militaire », évoquant la mort d’au moins 50 spectateurs assistant à un concert dans une frappe aérienne de la junte dans l’État kachin.  Dans ce contexte, le peuple du Myanmar attend depuis 18 mois une action que les Nations Unies ont prise en seulement quatre jours s’agissant de l’Ukraine, a fait observer M. Thomas Andrews, qui a relevé que les Rohingya, eux, « attendent depuis plus longtemps encore ». 

Outre la détention de 1 300 prisonniers politiques au Bélarus, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans ce pays a indiqué que des centaines de milliers de personnes ont été forcées de s’exiler en raison de violations des droits humains, citant en premier lieu l’intimidation et la violation des droits sur le lieu de travail, notamment la privation de licence pour les avocats, d’accréditation pour les journalistes et d’enregistrement pour les organisations de la société civile.  De plus, au moins 600 organisations ont été contraintes de se dissoudre ou d’interrompre leurs activités, dont la quasi-totalité des groupes de défense des droits humains du pays.  Mme Anaïs Marin s’est également inquiétée du durcissement de la législation contre l’extrémisme et le terrorisme, qui est instrumentalisée pour étouffer et punir toute forme de dissidence dans le pays.  Tout aussi préoccupants, deux projets de loi en cours d’examen envisagent de priver de la citoyenneté ceux qui participent à des « activités extrémistes », en plus de restrictions à la sortie du pays pour des raisons de « sécurité nationale ». 

De son côté, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) a signalé que ce pays est plus isolé que jamais en raison des restrictions qu’il s’est imposées en janvier 2020 en raison de la pandémie.  Elle s’est particulièrement préoccupée de l’accès limité de la population à la nourriture et de l’accès insuffisant aux soins de santé compte tenu de la fragilité du système sanitaire du pays.  Cette situation souligne l’importance de rouvrir le pays à l’aide humanitaire, a estimé Mme Elizabeth Salmón qui ambitionne de garantir la vérité et la justice pour les victimes, notamment en recourant à la juridiction universelle et aux tribunaux nationaux. 

Sur le front syrien où une grave épidémie de choléra s’est déclarée dans 14 provinces du pays, le Président de la Commission d’enquête s’est préoccupé du sort inconnu des dizaines de milliers de personnes disparues, « l’une des plus grandes tragédies de la guerre syrienne », ainsi que de la situation des 58 000 personnes, dont 37 000 enfants, qui restent illégalement privées de liberté dans les camps de Hol et de Raouj.  Dans ces conditions, la nécessité des rapatriements est plus urgente que jamais, a souligné M. Sergio Pinheiro. 

À l’exception du Bélarus et de la RPDC qui n’ont pas pris la parole lors de la présentation des rapports les concernant, les représentants du Myanmar et de l’Afghanistan auprès de l’ONU, ont, eux, soutenu les titulaires de mandat tandis leurs homologues de la Syrie et de l’Iran ont vigoureusement dénoncé le rapport qui les visait. 

La Troisième Commission reprendra ses travaux demain, jeudi 27 octobre, à partir de 10 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclaration liminaire

Au nom du Mouvement des pays non alignés, la représentante de l’Azerbaïdjan a exprimé sa profonde inquiétude face à la poursuite et à la prolifération de la pratique d’adoption sélective de résolutions spécifiques à un pays en Troisième Commission, ainsi qu’au Conseil des droits de l’homme (CDH), dénonçant un outil qui exploite les droits humains à des fins politiques.  Elle a également réaffirmé la nécessité de promouvoir une plus grande cohérence et complémentarité entre les travaux de la Troisième Commission et du CDH et d’éviter les doubles emplois et les chevauchements inutiles dans leurs activités. 

La représentante a par ailleurs fait valoir que l’Examen périodique universel (EPU) est le principal mécanisme intergouvernemental de coopération pour examiner les questions relatives aux droits de l’homme au niveau national dans tous les pays sans distinction, avec la pleine participation du pays concerné et en tenant compte de ses besoins en matière de renforcement des capacités.  À cette aune, a-t-elle ajouté, le Mouvement des pays non alignés rejette la pratique actuelle du Conseil de sécurité consistant à traiter les questions relatives aux droits de l’homme en fonction des objectifs politiques de certains États. 

Enfin, a conclu la déléguée, le Mouvement des pays non alignés réaffirme l’importance d’assurer la mise en œuvre de l’EPU en tant que mécanisme coopératif orienté vers l’action, fondé sur des informations objectives et fiables et sur un dialogue interactif avec la pleine participation des pays à l’examen, et mené de manière impartiale, transparente, non sélective, constructive, non conflictuelle et non politisée.

Déclarations suivies de dialogues interactifs

Exposé

M. THOMAS H. ANDREWS, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, a présenté un exposé comprenant trois parties, « le meilleur, le pire et l’incompréhensible ».  D’emblée, il a déclaré que si la junte militaire au pouvoir pensait que ses crimes contre l’humanité et ses crimes de guerre paralyseraient les défenseurs des droits humains au Myanmar, elle a fait une « grave erreur de calcul ».  Le « meilleur », a-t-il expliqué, ce sont les défenseurs des droits humains et les journalistes qui risquent leur vie pour documenter les atrocités, les avocats qui risquent leur vie et leur carrière pour représenter des prisonniers politiques, les médecins qui lancent des cliniques mobiles et les enseignants qui mettent en place des systèmes éducatifs alternatifs.  À ses yeux, ces « héros » représentent « le meilleur du Myanmar et le meilleur de l’humanité ».  Ils ont besoin et méritent « votre attention, votre respect et, surtout, votre soutien », a-t-il lancé aux États Membres. 

Pour illustrer le « pire », M. Andrews a rappelé que, quelques jours avant la présentation de son rapport devant le Conseil des droits de l’homme, un hélicoptère de combat de l’armée du Myanmar s’est abattu sur une école dans la région de Sagaing et les soldats ont ouvert le feu.  Treize personnes, dont de jeunes enfants, ont été tuées, a-t-il précisé.  Plus récemment, au moins 50 spectateurs assistant à un concert ont trouvé la mort dans une frappe aérienne de la junte dans l’État kachin.  « Les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre sont le fonds de commerce de la junte militaire », a dénoncé le Rapporteur spécial. 

Citant ensuite les propos d’adolescents qu’il a interrogés sur leur vie depuis le coup d’État de février 2021 et sur leurs attentes, M. Andrews a dit qu’une jeune fille de 14 ans lui avait confié que son plus grand espoir était d’avoir enfin « une bonne nuit de sommeil ».  Elle a lui décrit comment elle et sa famille étaient régulièrement réveillées par le bruit des tirs et des bombardements.  Chaque nuit, elle était terrifiée, a-t-il rapporté, avant d’évoquer « l’incompréhensible », le fait que le peuple du Myanmar soit déçu et troublé par l’incapacité des États Membres à contribuer à résoudre cette crise de manière juste, responsable et humaine.  Les gens du Myanmar comprennent que l’attention se porte ailleurs, notamment sur l’Ukraine.  Ceux avec qui il a parlé soutiennent le peuple ukrainien et ont de l’empathie pour lui, a-t-il affirmé, établissant un lien entre les armes utilisées pour attaquer ces deux peuples.  Elles proviennent de la même source: la Russie, a-t-il constaté. 

Dans ce contexte, le peuple du Myanmar attend depuis 18 mois une action que les Nations Unies ont prise en seulement quatre jours s’agissant de l’Ukraine, a fait observer le Rapporteur spécial, qui a relevé que les Rohingya, eux, « attendent depuis plus longtemps encore ».  En bref, le peuple du Myanmar a besoin d’aide, a-t-il résumé, regrettant à cet égard que certains États aggravent la situation en continuant de fournir à la junte des armes pour attaquer les civils.  Pire, des États ont même fait part de leur volonté d’aider et d’encourager la junte à organiser des élections fictives l’an prochain, pendant que d’autres, voisins du Myanmar, détiennent ou repoussent les personnes fuyant les violences de la junte dans les zones de conflit.  M. Andrews a pointé du doigt la Malaisie, qui, au cours des dernières semaines, a expulsé plus de 100 ressortissants du Myanmar, dont des déserteurs de l’armée qui seront probablement torturés et risquent la peine de mort. 
Il s’agit là d’une violation flagrante du droit international, a-t-il condamné. 

Le Rapporteur spécial a rappelé qu’au cours de l’année écoulée, il a recommandé qu’une coalition de nations lance une initiative coordonnée visant à priver la junte des armes, des finances et de la légitimité dont elle a besoin pour poursuivre ses attaques, tout en augmentant l’aide humanitaire au peuple du Myanmar.  Pour M. Andrews, l’approche non coordonnée et non stratégique qui est actuellement employée est inadéquate et coûte un nombre incalculable de vies.  Or, a-t-il déploré, aucun changement dans l’approche du statu quo n’est en cours ni même envisagé. 

Avant de conclure, le Rapporteur spécial a interpellé les États Membres en demandant combien d’entre eux reconnaissent que la réponse internationale à cette crise est « grossièrement inadéquate » et soutiennent une « correction immédiate de la trajectoire ».  Y a-t-il des membres du Conseil de sécurité prêts à présenter une résolution audacieuse et à insister pour qu’elle soit transmise à l’Assemblée générale en cas de veto?  Et combien sont prêts à augmenter l’aide humanitaire à la population du Myanmar?  Appelant les États Membres à adopter une nouvelle approche coordonnée et stratégique « qui ait une chance de réussir », il s’est dit convaincu que le modèle d’une action efficace existe.  « Ce qu’il faut, maintenant, c’est la volonté politique de l’engager ». 

Dialogue interactif

À l’issue de cette présentation, le Myanmar a estimé que le rapport reflète clairement la situation des droits humains dans le pays.  En écho à une recommandation du Rapporteur spécial, il a demandé au Conseil de sécurité d’adopter une résolution prévoyant un embargo sur les armes.  Il a également demandé la convocation d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité pour lancer une initiative coordonnée privant la junte militaire d’armes, de financement et de légitimité.  Depuis le coup militaire de février 2021, la situation se dégrade chaque jour, a averti la délégation, rappelant que près de 16 000 personnes sont détenues de façon arbitraire par la junte au pouvoir.  Plus d’un million de personnes ont été déplacées et plus de 14 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire, a-t-elle ajouté, voyant dans ces faits la preuve que la junte viole les droits fondamentaux du peuple du Myanmar.  Le Mécanisme indépendant d’enquête des Nations Unies a fait état de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, a rappelé la délégation, selon laquelle la junte a, en outre, exécuté quatre prisonniers politiques, un fait sans précédent au Myanmar depuis trois décennies. 

Le régime a massacré des innocents dans tout le pays, lancé des attaques aériennes et utilisé des armes lourdes dans des zones civiles, a encore dénoncé la délégation du Myanmar, avant de mentionner, entre autres exemples des atrocités commises par les militaires, le raid aérien mené en septembre contre une école, qui a fait 13 morts, en majorité des enfants, et plus récemment, l’attaque aérienne qui a tué une centaine de civils réunis dans le cadre d’un concert dans l’État kachin.  Malgré ces violences, a-t-elle prévenu, le peuple du Myanmar ne se soumettra pas et est plus déterminé que jamais à faire face au régime illégal des militaires.  Pour finir, elle a indiqué que le Gouvernement d’unité nationale, à la tête de la résistance, a accepté la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) et compte coopérer avec elle pour rompre ce cycle de violence.

Prenant à son tour la parole, l’Indonésie, qui assurera prochainement la présidence de l’ASEAN, a réaffirmé son engagement à mettre en œuvre le Consensus en cinq points agrées par tous les membres de l’Association, y compris le Myanmar, qui reste, selon elle, la seule feuille de route susceptible de faire progresser la situation.  À sa suite, l’Australie a enjoint le régime à dialoguer constructivement avec l’ASEAN, lui demandant également de libérer les détenus, notamment un professeur australien. 

En tant que voisins du Myanmar, la Thaïlande, le Japon et la République de Corée ont, eux aussi, appelé à la mise en œuvre du Consensus en cinq points de l’ASEAN, voyant dans ce dispositif le meilleur moyen d’obtenir un règlement pacifique négocié.  Se présentant comme « voisine et amie » du Myanmar, la Chine a prôné un dialogue constructif et s’est déclarée opposé aux « deux poids, deux mesures » et aux solutions qui ont pour conséquence les affrontements.

Pour leur part, la Fédération de Russie et le Bélarus ont réaffirmé leur position de principe concernant l’inacceptabilité de la pratique de l’adoption de résolutions sélectives et unilatérales sur des situations spécifiques de pays.  La délégation russe, qui a recommandé au Rapporteur spécial de ne s’occuper que du Myanmar et non de l’Ukraine, l’a en outre jugé « trop émotif », l’invitant à revoir la fiabilité de ses sources.  Les États-Unis ont quant à eux salué le Rapporteur spécial pour son professionnalisme, avant de lui demander ce que peut faire la communauté internationale pour accroître la pression sur l’armée en vue d’un arrêt des violences.  Comment peut-on agir collectivement pour faire pression sur les États qui fournissent des armes à la junte, a enchaîné le Royaume Uni, selon lequel un projet de résolution sur le Myanmar circule actuellement au sein du Conseil de sécurité.

L’Union européenne s’est, elle, enquise de la coopération du Rapporteur spécial avec le Mécanisme indépendant d’enquête pour le Myanmar, tandis que la République tchèque se demandait jusqu’où est prête à aller la junte dans ses actions criminelles.  Quels sont les instruments les plus efficaces dont dispose la communauté internationale pour faire en sorte que ceux qui ont commis des atrocités à l’encontre des enfants et des autres personnes les plus vulnérables au Myanmar soient tenus pour responsables, a voulu savoir la Finlande.  Il faut que la CPI ait accès au Myanmar, a plaidé le Canada.  En attendant, la Norvège a souhaité savoir comment protéger le mieux possible les enfants en ces temps de crise.  Et comment améliorer la participation de la société civile à la fourniture de l’aide humanitaire et à la préparation d’un avenir libre et démocratique pour le Myanmar, se sont interrogés le Luxembourg et la Suisse, rejoints par le Liechtenstein.

Devant le refus du Myanmar d’ouvrir ses portes au Rapporteur spécial, le Bangladesh a souhaité savoir si des solutions existent pour permettre à l’ONU et à d’autres organisations d’avoir accès aux camps de réfugiés.  La Malaisie, qui accueille également des milliers de réfugiés du Myanmar, a reconnu ne pas disposer des moyens nécessaires pour en abriter davantage.  De son côté, l’Arabie saoudite a rappelé que, pour venir en aide aux réfugiés rohingya, elle a débloqué une enveloppe de 25 millions de dollars, avec l’aide d’organisations internationales telles que les Nations Unies, l’UNICEF, l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et la Banque islamique pour le développement. 

En réponse aux questions et observations des délégations, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar a tout d’abord invité les États Membres à consulter ses précédents rapports relatifs notamment aux sources d’armes arrivant au Myanmar et à l’impact de ce conflit sur la vie des enfants.  Il a dit vouloir poursuivre son dialogue avec le peuple du Myanmar, la société civile et de nombreuses autres entités pour transmettre la vérité sur ce pays.  M. Andrews a ajouté qu’il continuera également à interagir avec le Gouvernement d’unité nationale ainsi qu’avec des organisations de résistance ethniques et autres qui sont sur le front de cette crise.  Il s’est en outre dit prêt à parler avec les activistes et défenseurs des droits humains, où qu’ils se trouvent dans le monde, pour que « nous puissions faire ce qui est juste ».

Quant à savoir ce que peut faire la communauté internationale, le Rapporteur spécial a identifié sept mesures, exhortant d’abord, le Conseil de sécurité à exercer ses pouvoirs en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies pour faire voter une résolution imposant un embargo sur les armes et des sanctions économiques ciblées, tout en renvoyant la situation du Myanmar devant la Cour pénale internationale (CPI).  Anticipant un « inévitable » veto au sein du Conseil de sécurité, il a recommandé de passer par l’Assemblée générale.  Il faut instituer un débat ouvert afin d’aboutir à une coalition qui mette en œuvre une stratégie coordonnée privant la junte d’armes, de financement et de légitimité, a plaidé M. Andrews. 

Le Rapporteur spécial a d’autre part appelé les États Membres et les donateurs à augmenter considérablement l’assistance humanitaire au Myanmar, pressant aussi les États voisins à veiller à ce que le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) ait accès aux réfugiés et œuvre à leur réinstallation.  Il a cependant insisté sur le fait que les réfugiés ne doivent pas être obligés à retourner au Myanmar.  Il a également exhorté la communauté internationale à appuyer les pays, à commencer par le Bangladesh, qui accueillent les populations fuyant le Myanmar, en particulier les Rohingya.  Il a enfin réclamé que la responsabilité de la junte soit établie, suggérant à cet égard que, si le Conseil de sécurité ne renvoyait pas le Myanmar devant la CPI, les États Membres puissent s’appuyer sur les cadres de juridiction universelle existants. 

Exposé

Mme Elizabeth SALMÓN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui présentait son premier rapport en tant que nouvelle titulaire du mandat, a indiqué s’être fixée trois objectifs: obtenir la coopération de la RPDC, renforcer les possibilités de reddition des comptes, et sensibiliser à la gravité de la situation, notamment en permettant à de nouveaux acteurs de se joindre à ces efforts.  Elle a indiqué que la coopération limitée du Gouvernement de la RPDC avec les précédents titulaires de mandat depuis 2004 a rendu plus difficile l’évaluation précise de la situation des droits humains dans le pays.  De même, il est difficile d’identifier quelles réformes permettraient de répondre à la gravité de la situation des droits de la personne.

Détaillant les objectifs qu’elle s’est fixée, la Rapporteuse a expliqué qu’elle compte examiner par quels moyens engager la RPDC à faire progresser la mise en œuvre des recommandations formulées par les organes des Nations Unies chargés des droits humains, et ouvrir des canaux de dialogue avec Pyongyang, notamment au sujet de groupes spécifiques, comme celui des femmes et des filles.  Le second volet ambitionne de développer de nouveaux moyens de garantir la vérité et la justice pour les victimes dans un contexte marqué par l’absence de reddition de comptes, notamment en recourant à la juridiction universelle et aux tribunaux nationaux.  Elle a également indiqué qu’elle plaidera pour le renvoi, par le Conseil de sécurité, de la situation des droits humains en RPDC à la Cour pénale internationale, ainsi que pour l’établissement par l’Assemblée générale d’un tribunal ad hoc ou autre mécanisme comparable.

En troisièmement lieu, elle a expliqué qu’elle compte élargir la sensibilisation à la situation actuelle des droits humains dans ce pays, que la COVID-19 a encore plus détériorée.  La RPDC est plus isolée que jamais depuis que le pays s’est imposé des restrictions liées à la pandémie en janvier 2020, aussi, il est actuellement impossible de vérifier le nombre de décès causés par ou liés à la COVID-19, s’est alarmée la Rapporteuse.  Elle s’est particulièrement préoccupée de l’accès limité de la population à la nourriture en raison des restrictions liées à la COVID-19 et de l’accès insuffisant aux soins de santé compte tenu de la fragilité du système sanitaire du pays.  Cette situation souligne l’importance de rouvrir le pays à l’aide humanitaire, a-t-elle estimé, appelant aussi à une feuille de route claire pour le retour du personnel des Nations Unies. 

Dialogue interactif

Réagissant à cet exposé, le Pérou a rappelé à la RPDC ses obligations internationales en termes de droits humains.  Les États-Unis se sont inquiétés de l’aggravation des violations des droits humains dans le contexte de la pandémie et ont appelé à prendre des mesures immédiates pour laisser les instances de surveillance des droits humains entrer sur le territoire. 

Cuba a déploré les effets des mesures coercitives unilatérales sur la population du nord de la péninsule et, à l’instar du Venezuela et du Nicaragua, a critiqué le rôle de tout mandat qui n’aurait pas été approuvé par le pays concerné et qui viole, selon ces délégations, les principes de non-sélectivité et de non-ingérence.  La Guinée équatoriale a elle aussi appelé à respecter le principe de non-sélectivité, estimant en outre que, seul un dialogue constructif avec la RPDC permettra de trouver un terrain d’entente. 

À ce sujet, l’Union Européenne a voulu savoir comment les États Membres et les pays de la région peuvent aider à instaurer un dialogue avec le gouvernement de la RPDC. 

Le Japon a jugé regrettable que la RPDC développe son programme nucléaire aux dépens du bien-être de sa population., tandis que la République de Corée a déploré les incidents survenus en mer Jaune en 2020 contre des ressortissants sud-coréens non-armés et a exhorté la communauté internationale à ne pas oublier les citoyens sud-coréens détenus en RPDC.  Il ne faut ménager aucun effort pour concrétiser la dénucléarisation de la RPDC, a-t-elle par ailleurs insisté. 

La Suisse a demandé à la Rapporteuse spéciale comment elle compte traiter la situation du droit des femmes et filles en l’absence de toute information claire à ce sujet, la Norvège a voulu savoir comment la communauté internationale peut collaborer avec la RPDC pour améliorer la situation des droits humains de la population, tandis que la République tchèque s’est intéressée aux mesures qui permettraient d’instaurer des approches créatives et novatrices capables de désamorcer la crise actuelle. 

Le Viet Nam a appelé à un dialogue constructif prenant en compte les conditions particulières de chaque pays, insistant sur l’importance du principe de non-sélectivité.  Le Bélarus s’est dressé contre l’instrumentalisation des droits humains, déplorant la présentation de rapports qui reprennent les même clichés chaque année.  Le chemin sera long avant que la Rapporteuse ne gagne la confiance du peuple de la RPDC, a prévenu la Fédération de Russie, l’exhortant à ne pas baser ses rapports sur des informations fournies par des ONG occidentales, de « pures inventions relayées par l’Occident depuis 1950 ».  La RPDC peut se targuer de réalisations que pourraient jalouser les pays occidentaux, telles une alphabétisation totale ou l’éradication du chômage, a ajouté la délégation russe.

Le Nigéria s’est opposé à la politisation contre-productive des droits humains et a souligné que l’Examen périodique universel est le seul mécanisme universel à même d’aborder la question des droits humains de chaque pays de façon constructive, un point de vue partagé par la République islamique d’Iran et l’Érythrée

À son tour, l’Australie a voulu savoir comment la Rapporteuse comptait remédier au fait que la RPDC lui refuse l’accès à son territoire, tandis que l’Allemagne a exhorté la RPDC à autoriser l’acheminement de l’aide, demandant en outre à la Rapporteuse comment elle appréhende la lutte contre l’insécurité alimentaire dans le pays. 

La Chine a exhorté les pays concernés à lever toutes les mesures coercitives unilatérales pesant sur la population du nord de la péninsule.  Les pays occidentaux sont obsédés par les rapports sur les droits humains, mais ne ciblent que des pays en développement, a par ailleurs déploré la délégation.  Pourquoi ne créez-vous pas de mécanismes pour vos propres pays?  Le dialogue devrait être l’étape préliminaire à tout travail avec la RPDC, a estimé la République arabe syrienne, un vœu formulé aussi par la République populaire démocratique lao.  Enfin, le Royaume-Uni a demandé ce qui pouvait être entrepris pour que les réfugiés nord-coréens ne soient pas rapatriés et jetés en prison quand ils franchissent les frontières nord-coréennes dans l’espoir de fuir leur pays. 

Répondant à ces observations, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique a argumenté sa volonté d’axer son mandat sur la situation des femmes et des enfants, invoquant une base juridique suffisamment solide pour avancer sur ce dossier.  La RDPC, a-t-expliqué, a adhéré à cinq instruments des droits humains en vertu desquels elle a présenté plusieurs rapports, et parmi 162 recommandations formulées notamment dans le cadre de l’EPU, la RPDC en a accepté 132, dont une grande proportion porte sur les femmes et les enfants. 

Cet effort devra inclure de nouveaux acteurs pour discuter des questions qui touchent les femmes, a ajouté la Rapporteuse, notant qu’outre la discrimination, la marginalisation sur le marché du travail et des violences en tout genre, les femmes qui essaient de quitter la RPDC sont exposées à la traite des êtres humains.  Ces femmes appellent à la solidarité internationale, nous nous devons d’y répondre, s’est émue la Rapporteuse.  Parmi les mesures qui devraient être prises, elle a estimé que le Secrétaire général pourrait instaurer de nouveaux contacts avec les autorités, et que le Conseil de sécurité gagnerait à rouvrir un débat public à ce sujet. 

Répondant ensuite aux multiples accusations de politisation, la Rapporteuse a assuré de l’indépendance de son mandat.  Elle a reconnu que si la RPDC n’a certes apporté son concours à aucun de ses prédécesseurs, certaines avancées dans le pays ces dernière années, permettent de présager une plus grande collaboration avec Pyongyang.  On en sait davantage sur ce qui se passe aujourd’hui, qu’il y a 18 ans, a-t-elle noté. 

Exposé

M. RICHARD BENNETT, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan, a expliqué avoir mis à jour son rapport initial, rédigé sur la base d’une visite du pays en mai, grâce aux informations recueillies lors de sa visite en Afghanistan la semaine dernière.  Il a indiqué que les autorités de facto talibanes avaient jugé le rapport initial trop critique et affirmé avoir fait des progrès depuis, avançant notamment que le taux de suicide et d’assassinat extrajudiciaire de femmes, d’enlèvement et de torture dans les prisons serait tombé à zéro.  Si quelques évolutions prometteuses sont à noter, on est encore loin de la réalité, a commenté le Rapporteur, notant toutefois que les autorités de facto continuent de souhaiter un engagement. 

M. Bennett a estimé que la situation des droits humains n’avait pas sensiblement changé depuis sa première visite en mai, et que les quelques signes de changement positif étaient contrebalancés par des régressions dans d’autres domaines.  Les femmes ont été effacées de la vie publique et leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels ont été bafoués, a-t-il dénoncé, expliquant que les femmes et les filles qu’il avait rencontrées avaient exprimé leur colère, leur angoisse, leur peur et leur désespoir.  Il a rappelé que les écoles secondaires de filles étaient fermées depuis 401 jours, insistant sur le fait qu’il n’y avait aucune justification religieuse à cela.  La réouverture des écoles secondaires pour filles est le premier test du respect par les autorités de facto de leurs obligations internationales en matière de droits humains, a-t-il dit.  Une autre priorité exprimée par les femmes est le rétablissement de leurs moyens de subsistance, a-t-il ajouté, appelant la communauté internationale à soutenir dans un premier temps les initiatives en cours des propriétaires d’entreprises et des marchés féminins.

Le Rapporteur spécial a alerté que la situation des minorités ethniques et religieuses restait « profondément préoccupante », s’inquiétant notamment des attaques violentes contre les minorités religieuses hazara, chiite, sikh et soufie.  Il a évoqué l’attaque du 30 septembre contre le centre éducatif de Kaaj qui a tué 54 personnes dont 51 jeunes femmes hazaras.  Il a constaté que ces attaques, qui durent depuis des années, semblaient systématiques, portaient la marque de crimes internationaux graves et devaient faire l’objet d’une enquête approfondie.  Il a appelé les Taliban à prendre toutes les mesures possibles pour protéger ces communautés et traduire en justice les auteurs et les instigateurs de ces attaques. 

Rappelant que les affrontements se poursuivaient entre les forces de sécurité talibanes et les groupes d’opposition armés au Panjchir et dans d’autres provinces du nord - Baghlan, Kapisa, Takhar et Badakhshan, M. Bennet a par ailleurs fait état « d’informations crédibles » sur de nombreuses exécutions extrajudiciaires de combattants capturés.  Les civils considérés par les Taliban comme étant associés au Front national de résistance font l’objet de fouilles, de détentions arbitraires, d’exécutions extrajudiciaires, de tortures et de déplacements, ce qui pourrait s’apparenter à une punition collective, a-t-il ajouté, appelant la encore à une enquête indépendante complète.  Il a également dit être très préoccupé par les assassinats ciblés d’anciens membres des forces sécurité afghanes par les Taliban, en contradiction avec l’amnistie déclarée en 2021, appelant à la mise en place d’un processus complet de justice transitionnelle. 

M. Bennett a déploré que la liberté de la presse se soit détériorée depuis sa dernière visite indiquant qu’il n’y avait pas d’espace pour la critique des autorités et que les reportages d’investigation ou la couverture des zones touchées par le conflit étaient strictement interdits.  L’espace de la société civile s’est lui aussi réduit.  Les femmes ont disparu de l’espace public, les représailles visant les opposants se multiplient, la répression des libertés d’expression et de réunion se sont intensifiées, et l’accès à la justice est en déroute, a-t-il détaillé, ajoutant que les ONG internationales et les journalistes internationaux subissaient de plus en plus de pressions pour se conformer à des ordres qui compromettent leurs principes. 

Le Rapporteur spécial a également indiqué que l’isolement de la Banque centrale d’Afghanistan du système bancaire international, qui la prive d’accès aux réserves en devises étrangères du pays, et la réduction du soutien international, avaient sérieusement affecté l’économie afghane.  La fourniture des services sociaux de base, notamment de santé, s’en est trouvée considérablement affectée, a-t-il expliqué.  Il a rappelé que près de la moitié de la population était en situation d’insécurité alimentaire, dont 6,6 millions de personnes en situation d’urgence, le nombre le plus élevé au monde parmi les pays menacés de famine.  Constatant que l’impasse actuelle entre les autorités de facto et la communauté internationale nuisait d’abord aux Afghans, il a estimé important de se placer dans une perspective à long terme et d’identifier les domaines qui pourraient constituer des points d’entrée pour un changement positif. 

M. Bennett a aussi évoqué quelques « poches d’espoir », notant que des sites du patrimoine culturel et religieux, dont des sites bouddhistes, avaient été restaurés, que plusieurs ministères avaient pris des initiatives institutionnelles en vue de protéger les droits humains et qu’un décret interdisant le mariage forcé avait été publié en décembre 2021.  Cependant, l’Afghanistan reste presque certainement le pire pays au monde pour être une femme ou une fille, a-t-il déploré. 

Dialogue interactif

Prenant la parole, l’Afghanistan, qui a estimé que le mandat du Rapporteur spécial était indispensable, a voulu savoir s’il avait rencontré le Chef suprême des Taliban et si une date avait été fixée pour rouvrir les écoles secondaires aux filles.  Il lui a aussi demandé s’il avait recueilli des informations qui permettraient d’ouvrir une enquête pour un possible génocide contre les Hazaras.  Le représentant afghan a également voulu savoir si le Rapporteur avait pu se rendre sur les lieux d’un possible crime de guerre au Panjchir, où des prisonniers avaient été exécutés sommairement par les Taliban.  Comment un mécanisme d’enquête international indépendant pourrait contribuer à la reddition de comptes en Afghanistan, a demandé la Suisse, tandis que le Portugal s’est intéressé à la possibilité de mettre en place des mécanismes d’enquête internationaux.  Le Luxembourg a pour sa part demandé comment la communauté internationale pouvait soutenir les défenseurs et défenseuses des droits de l’homme dans le pays. 

Le Pakistan s’est inquiété de l’effondrement économique du pays et a encouragé un engagement non politisé pour éviter une plus grande catastrophe.  Après les États-Unis et l’Indonésie qui ont appelé les Taliban à rouvrir les écoles pour toutes les filles, l’Union européenne a appelé à aider les défenseurs des droits humains ainsi que les femmes en Afghanistan, tandis que le Canada, appuyé par les Pays-Bas, la Pologne, le Royaume-Uni et l’Australie, a insisté sur l’importance de la reddition de comptes pour les violations des droits humains, en particulier des femmes et des filles, question qui a notamment préoccupé l’Autriche et le Chili.  Le Qatar a demandé à la communauté internationale de poursuivre son aide en direction du peuple afghan, suivi de la Malaisie qui s’est demandé comment s’assurer que l’aide humanitaire arrive à bonne destination alors que la moitié de la population était en insécurité alimentaire. 

L’Iran s’est inquiété des violations contre les minorités ethniques et religieuses, estimant par ailleurs que le gel des avoirs afghans ne devait pas être politisé.  L’Irlande a demandé comment l’ONU pouvait protéger les personnes LGBTQI en Afghanistan.  Le Lichtenstein a demandé comment les ONG et les défenseurs des droits humains pouvaient faire leur travail alors que l’économie s’était effondrée.  Que faire pour protéger les femmes notamment lorsqu’elles manifestent pour défendre leurs droits, a ajouté l’Albanie, tandis que la Norvège a suggéré que les États Membres puisse discuter directement avec les autorités de facto sur les questions liées aux droits humains. 

La Fédération de Russie a regretté que le rapport taise les crimes commis par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie dans le pays.  La France a salué le courage des Afghanes qui se battaient pour leur liberté et exhorté, de même que la Finlande, les Taliban à respecter leurs engagements en la matière.  Le Mexique a voulu savoir où en était le projet de réouverture du Ministère des affaires féminines annoncés par les Taliban en janvier 2022 à Oslo.  La Chine a estimé qu’il fallait fournir une assistance pour soulager le pays et enjoint les États-Unis à rendre les avoirs gelés de la banque centrale afghane. 

Suite à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan a indiqué, en réponse à la question du représentant de l’Afghanistan, qu’il ne s’était pas entretenu avec le Chef suprême mais avec le Vice Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères.  Répondant au Mexique, il a affirmé que rien ne laissait présager que le Ministère des affaires féminines allait rouvrir, notant cependant qu’un département spécialisé avait été ouvert au sein du Ministère des affaires étrangères et qu’un comité interministériel dédié avait été mis en place. 

Répondant aux questions récurrentes de la possibilité d’ouvrir des enquêtes et de la reddition de comptes, il a estimé qu’il fallait d’abord faire le bilan des mécanismes existants et voir s’il convenait d’en créer d’autres.  Si oui, il a estimé que le Conseil des droits de l’homme pourrait alors déterminer le modus operandi d’éventuels nouveaux mécanismes.  Il a également fait savoir que la Cour pénale internationale avait annoncé qu’elle ouvrirait une enquête sur la situation en Afghanistan. 

Exposé

Mme ANAÏS MARIN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, a présenté son rapport centré cette année sur les ressortissants du Bélarus contraints à l’exil en raison de la situation des droits de l’homme dans leur pays.  Si des chiffres différents et difficiles à recouper circulent à leur propos, il n’en demeure pas moins, selon elle, que des centaines de milliers de personnes ont été forcées de s’exiler en raison de violations des droits humains.  Pour son rapport, Mme Marin a dit avoir rencontré des dizaines de victimes qui ont fui le pays, le plus souvent dans la hâte et la peur.  Les informations de première main qu’elles ont fournies sont au cœur de ce document, a-t-elle souligné, précisant toutefois que, compte tenu du risque de représailles, il a été décidé de préserver leur anonymat.  La Rapporteuse spéciale a également rappelé que, si les élections au Bélarus ont été des moments critiques par le passé, la dernière élection présidentielle, organisée en 2020 et contestée, n’a pas dérogé à la règle: elle a déclenché une nouvelle vague de protestations pacifiques, accueillies par une répression plus brutale que jamais, qui a entraîné un exil de masse. 

Leur décision résulte d’une combinaison complexe de raisons, a analysé Mme Marin, citant en premier lieu l’intimidation et la violation des droits sur le lieu de travail, notamment la privation de licence pour les avocats, d’accréditation pour les journalistes et d’enregistrement pour les organisations de la société civile.  Le licenciement et la résiliation des contrats de travail pour les artistes, les travailleurs culturels et d’autres professionnels tels que les médecins, les enseignants, les universitaires et les athlètes ont représenté d’autres moyens de pression, a-t-elle détaillé.  Le choix du pays de relocalisation dépend également de nombreux facteurs, dont les moyens financiers, les réseaux personnels, les exigences en matière de visa et les possibilités de régulariser leur statut, a expliqué la Rapporteuse spéciale, rappelant que l’Ukraine était la première destination de nombreux Bélarusses après 2020.  À la suite de l’invasion de ce pays par la Fédération de Russie, la plupart d’entre eux ont dû se réinstaller à nouveau.  Depuis, a-t-elle ajouté, des informations font état d’une nouvelle vague d’émigration du Bélarus en raison de l’étouffement des expressions antiguerre, ou par crainte d’être appelé à combattre dans ce conflit. 

Mme Marin a constaté que la répression de la société civile, des médias et de l’opposition politique se poursuit pour la troisième année consécutive au Bélarus.  Le nombre de personnes détenues pour des motifs politiques s’élève désormais à plus de 1 300 et au moins 600 organisations ont été contraintes de se dissoudre ou d’interrompre leurs activités, dont la quasi-totalité des groupes de défense des droits humains du pays.  Le mouvement syndical indépendant a lui aussi été démantelé récemment, a-t-elle précisé, avant de signaler une intensification des intimidations à l’encontre des personnes ayant participé à des marches et des manifestations pacifiques en 2020.  Selon la Rapporteuse spéciale, la période à l’examen dans son rapport a été marquée par un durcissement de la législation contre l’extrémisme et le terrorisme, qui est instrumentalisée pour étouffer et punir toute forme de dissidence dans le pays.  Les perquisitions de domiciles et de bureaux privés, les arrestations et les poursuites arbitraires pour des motifs politiques étant devenues systématiques, de nombreuses personnes ont conclu qu’elles ne pouvaient plus être en sécurité au Bélarus.  Et même après s’être réinstallées à l’étranger, beaucoup avouent vivre dans l’insécurité et la peur, a-t-elle souligné. 

De son point de vue, l’utilisation délibérée de la législation, des politiques et des institutions nationales pour forcer les ressortissants bélarusses à s’exiler est particulièrement préoccupante.  Outre le KGB, des institutions publiques telles que le ministère de l’intérieur, la police fiscale et les organes chargés de lutter contre le crime organisé sont utilisées de manière concertée pour éradiquer toute dissidence dans le pays, a relevé Mme Marin. 

Ceux qui ont courageusement décidé de rester au Bélarus et de lutter pour leurs droits sont maintenant derrière les barreaux, a-t-elle déploré, estimant que les longues peines de prison prononcées pour des motifs politiques et la détention provisoire sans inculpation sont « emblématiques de l’utilisation abusive du système judiciaire et de l’impunité avec laquelle les autorités agissent ».  La Rapporteuse spéciale a cité le cas de M. Ales Bialiatski, colauréat du prix Nobel de la paix 2022, qui n’est qu’un des nombreux défenseurs des droits humains visés par la répression.  Bientôt, a-t-elle averti, les ressortissants en exil pourraient être jugés par contumace, la législation pénale ayant été modifiée en juillet dernier afin de permettre la tenue de tels procès contre des émigrés soupçonnés d’être impliqués dans des actes de terrorisme, de trahison, de sabotage, d’extrémisme ou d’appel à des sanctions vaguement définis. 

Tout aussi préoccupants, deux projets de loi en cours d’examen envisagent de priver de la citoyenneté ceux qui participent à des « activités extrémistes », en plus de restrictions à la sortie du pays pour des raisons de « sécurité nationale ».  L’absence de système judiciaire indépendant et d’institutions chargées de faire respecter la loi implique que la possibilité d’un retour en toute sécurité reste hors de portée pour de nombreux Bélarusses, a poursuivi Mme Marin.  En dehors de leur pays, les Bélarusses sont toujours confrontés à des difficultés et peuvent se retrouver en situation de vulnérabilité, et donc avoir besoin de la protection du cadre international des droits humains, a-t-elle alerté, regrettant que, malgré ses efforts destinés à dialoguer de façon constructive avec le Gouvernement du Bélarus, celui-ci ait maintenu sa politique de non-reconnaissance et de non-coopération avec son mandat.  Elle a aussi dénoncé la politique de la « chaise vide » appliquée par le Bélarus dans les dialogues interactifs, une pratique qui, selon elle, devient la nouvelle norme. 

Le Gouvernement du Bélarus, a-t-elle noté, semble aussi vouloir fermer une voie cruciale pour faire respecter le droit à la considération internationale et éventuellement à la réparation des violations des droits humains, à savoir le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  Mme Marin a donc demandé instamment aux autorités bélarusses de reconsidérer la signature du projet de loi sur la dénonciation de ce protocole.  Enfin, elle a réitéré son appel à la communauté internationale pour qu’elle redouble d’efforts afin que les auteurs de violations des droits humains au Bélarus répondent de leurs actes. 

Dialogue interactif

Réagissant à l’exposé de Mme Marin, les États-Unis ont condamné l’usage de la peine de mort utilisée par le Bélarus « pour éliminer des opposants politiques ».  La délégation américaine a également appelé à la libération des quelque 1 300 prisonniers politiques détenus dans ce pays, avant de s’interroger, à l’instar de l’Australie, sur ce que peut faire la communauté internationale pour que le Bélarus réponde de ses actes quand il viole les droits humains.  À son tour, la Suisse a condamné les violations des droits humains commises par le Bélarus et exigé la libération des prisonniers politiques, imitée par l’ensemble des autres délégations européennes.  La délégation suisse a aussi demandé à la Rapporteuse spéciale comment elle collabore avec les autres institutions des droits humains actives au Bélarus, tels que le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme, et si des progrès ont été observés en la matière.

L’Union européenne (UE)a ensuite dénoncé le soutien logistique et politique apporté par le Bélarus à l’invasion russe de l’Ukraine, mettant en garde le régime de M. Loukachenko contre toute participation « plus aboutie » à cette guerre.  L’UE a ensuite demandé comment mieux soutenir les représentants de la société civile et les journalistes bélarusses en exil malgré la répression qui les menace, une question également posée par l’Autriche, puis par la Croatie.  La Pologne s’est quant à elle émue du sort des minorités catholiques du Bélarus et des attaques dont les communautés d’origine polonaise font l’objet.  Elle a par ailleurs demandé à la Rapporteuse spéciale des détails sur les mécanismes internationaux permettant aux Bélarusses qui ne peuvent pas rentrer chez eux de bénéficier d’un statut juridique.  Comment peut-on aider les Bélarusses contraints à l’exil et les activistes qui sont restés au Bélarus, a voulu savoir la Lituanie, qui s’exprimait au nom des pays nordiques et des pays baltes

Le Liechtenstein a, pour sa part, demandé des détails sur l’impact de la guerre en Ukraine sur les droits humains au Bélarus, tandis que la République tchèque s’interrogeait sur la situation des médias indépendants au Bélarus.  Assurant de son côté que le peuple du Bélarus n’a aucun désir de participer à la « guerre illégale de la Russie » en Ukraine, le Royaume-Uni a souhaité savoir quelles mesures la communauté internationale pourrait entreprendre pour permettre aux activistes en exil de poursuivre leurs activités.  L’Allemagne a, elle, demandé comment améliorer la situation des droits humains au Bélarus. 

En réponse à ces questions et observations, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus a tout d’abord réaffirmé qu’aucune évolution positive ne s’est faite jour depuis 2020 au Bélarus sur le front des droits humains.  Au contraire, elle a déploré la multiplication des décisions de justice arbitraires, telles que des peines de détention allant jusqu’à 25 ans.  Aucun remède miracle ne peut rendre le Gouvernement bélarusse responsable de ses actes, a ensuite estimé la Rapporteuse spéciale, qui a cependant appelé à appuyer tout mécanisme international permettant une reddition des comptes.  Elle a cité à ce sujet un projet lancé en mars 2021, qui vise à donner mandat au Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme d’identifier les auteurs de crimes. 

Il convient aussi, a poursuivi Mme Marin, de collaborer avec tous les tribunaux nationaux qui ont reconnu le principe de responsabilité universelle pour les crimes les plus graves.  En outre, a-t-elle fait valoir, les gouvernements nationaux peuvent aussi appuyer les recherches de victimes de violations des droits humains ou aider leurs tribunaux à rechercher et poursuivre les auteurs de crimes dans d’autres pays que le Bélarus.

La Rapporteuse spéciale a d’autre part exhorté les États à répondre aux besoins immédiats des exilés bélarusses, en leur octroyant par exemple des visas humanitaires.  Toutefois, comme ces visas arrivent à échéance au bout d’un an, il faudrait aussi octroyer des visas de résidence permanents quand c’est possible afin que les personnes concernées puissent reconstruire leur vie, a-t-elle plaidé.  Mme Marin a signalé à cet égard que les exilés bélarusses dont le passeport est périmé craignent de se rendre dans les consulats bélarusses de leur pays de résidence, où ils courent le risque de se voir déchoir de leur nationalité.

Il importe aussi d’encourager la transmission culturelle de la langue bélarusse aux communautés exilées et de récompenser tous les journalistes qui cherchent à susciter une prise de conscience au sujet de la situation au Bélarus, en octroyant des bourses et autres prix, a exhorté la Rapporteuse spéciale.  Si la société civile du Bélarus a été décapitée, quelques activistes survivent dans la clandestinité, a-t-elle noté en conclusion, appelant la communauté internationale à les soutenir. 

Exposé

M. JAVAID REHMAN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, a regretté que depuis son précédent rapport à l’Assemblée générale sur l’application de la peine de mort, aucune mesure n’ait été prise: ni pour modifier le Code pénal afin de réduire le recours à cette peine, ni pour modifier des processus judiciaires profondément dysfonctionnels.  Il a déploré une forte augmentation du nombre d’exécutions en 2022, notant que plus de 400 avaient été recensées entre janvier et septembre, soit le nombre le plus important en cinq ans.  Il a ajouté que 40% des exécutions étaient liées à la drogue en 2021 et que les minorités ethniques étaient touchées de manière disproportionnée par les exécutions. 

M. Rehman a aussi déploré que la privation arbitraire de la vie résultant d’un usage excessif de la force ait continué de représenter la réponse des autorités à l’exercice du droit de réunion pacifique, ajoutant qu’elle s’étendait aussi aux lieux de détention, notamment en raison du refus d’accès à un traitement médical urgent et du recours généralisé à la torture contre les détenus.  Il regretté qu’aucune mesure n’ait été prise pour renforcer le cadre de la reddition de comptes, et qu’a contrario, les informations disponibles évoquaient des pratiques de dissimulation intentionnelle.  Les victimes de violations des droits humains et leurs proches, notamment ceux des personnes tuées lors des manifestations de novembre 2019, ont fait face à une augmentation des menaces, des arrestations et des condamnations, a-t-il constaté. 

Le Rapporteur spécial a regretté la réduction de l’espace de la société civile évoquant le cas emblématique de la condamnation d’un groupe d’avocats et de défenseurs des droits humains en juin 2022 pour avoir simplement planifié un procès contre les autorités pour mauvaise gestion de la pandémie de COVID-19.  Il a souligné que les autorités continuaient d’abuser de la législation sur la sécurité nationale, qui a une portée excessive.  En mai 2022, la Société de secours des étudiants populaires de l’Imam Al, la plus grande ONG du pays, a été dissoute, à la suite d’une procédure engagée contre elle par le Ministère de l’intérieur, a-t-il rappelé.  Il a aussi dénoncé la répression des manifestations des mouvements des enseignants, des syndicats et des défenseurs des droits humains au cours de l’année dernière, soulignant que les autorités empêchaient l’accès à l’information en perturbant Internet.  Il s’est aussi inquiété de la persécution des minorités religieuses, en particulier de la foi baha’i. 

Abordant les événements ayant suivi la mort de Mahsa Amini, M. Rehman a rappelé qu’elle avait perdu la vie en détention le 16 septembre, trois jours après avoir été arrêtée par la police des mœurs pour avoir porté son hijab de manière inappropriée.  Évoquant les manifestations dans tout le pays et toutes les couches sociales, il a estimé que la barrière de la peur avait été franchie, les conditions ayant conduit à la mort de Mahsa Amini et la violation du droit fondamental des femmes à parler et à s’habiller librement ne pouvant plus être tolérées.  De manière prévisible, les autorités ont répondu à ces revendications par une répression brutale des manifestants pacifiques et une coupure des connexions internet dans le but d’étouffer la liberté d’expression et d’association de la population iranienne, a-t-il indiqué.  

M. Rehman a rappelé que le 22 septembre, avec sept titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, il exhorté les autorités iraniennes à cesser immédiatement de recourir à la force meurtrière pour maintenir l’ordre lors de rassemblements pacifiques, à mener rapidement une enquête indépendante sur la mort de Mahsa Amini, à rendre publiques les conclusions de cette enquête et à demander des comptes à tous les responsables.  Il a noté que des appels similaires avaient été lancés dans le monde entier mais qu’ils étaient restés lettre morte et que les plus hautes autorités de l’État avaient clairement ordonné aux forces de sécurité de réprimer les manifestants.  Il a précisé que la réponse des forces de sécurité, en particulier des gardiens de la révolution et des forces paramilitaires Basij, avait déjà entraîné la mort d’au moins 215 personnes, y compris des dizaines d’enfants dont certains avaient été tués par balles ou battus à mort.  Comme l’a récemment rapporté le Comité des droits de l’enfant, de nombreuses familles ont subi des pressions pour disculper les forces de sécurité en déclarant que leurs enfants s’étaient suicidés, a-t-il décrié. 

Au cours des cinq dernières semaines, des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants ont été arrêtés et emprisonnés, parmi lesquels des dizaines de défenseurs des droits humains, 170 étudiants, 16 avocats, 590 militants de la société civile et au moins 38 journalistes, dont celui qui a publié l’un des premiers reportages sur la mort de Mahsa Amini, a-t-il continué.  Et le 11 octobre, le Ministre de l’éducation a confirmé qu’un nombre non spécifié d’enfants avaient été envoyés dans des « centres psychologiques » après avoir été arrêtés prétendument pour avoir participé à des « manifestations contre l’État ».  Il a ensuite appelé à la mise en place rapide d’un mécanisme d’enquête indépendant sur les violations des droits humains qui ont précédé et suivi la mort de Mahsa Amini.

Dialogue interactif

Prenant la parole, l’Iran a regretté que la Troisième Commission soit instrumentalisée pour cibler certains États Membres et a réfuté les allégations fallacieuses figurant dans le rapport.  Il a estimé que le Rapporteur refusait de reconnaitre les efforts consentis par le pays, qu’il dénigrait ses traditions et appuyait son rapport sur de fausses informations, parfois obtenues auprès de groupes terroristes.  La délégation s’est aussi insurgée contre le fait que le rapport n’ait pas pris en compte les répercussions des sanction unilatérales des États-Unis, ni les attentats terroristes commis par des groupes accueillis dans l’Union européenne.  Le Canada a réfuté les attaques lancées contre le Rapporteur spécial, tandis que Cuba a estimé que les rapports sur des pays spécifiques servaient l’hégémonie de certains États et constituaient des mesures punitives.  Le Venezuela a rejeté la création de tout outil sans l’assentiment de l’État concerné, considérant une telle démarche comme politisée, le Nicaragua rejetant pour sa part l’instrumentalisation des droits humains pour s’ingérer dans les affaires internes d’un État souverain. 

Israël a dénoncé l’oppression des femmes iraniennes et demandé ce que faisait l’Iran à la Commission de la condition de la femme alors qu’il violait leurs droits.  Le Lichtenstein a demandé au Rapporteur s’il avait observé un lien entre les manifestations récentes et une augmentation du nombre des exécutions.  L’Australie s’est préoccupée du sort des personnes LGBTQI+ en Iran, demandant comment la communauté internationale pouvait soutenir les femmes et les enfants iraniens soumis à une oppression systémique, une situation qui a également préoccupé le Japon

La République populaire et démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les mandats spécifiques et s’est inquiétée des effets des sanctions unilatérales sur les droits humains des Iraniens.  Les États-Unis ont demandé ce que pouvait faire la communauté internationale pour la reddition de comptes concernant la mort de Mahsa Amini en l’absence d’autorités crédibles et indépendantes en Iran.  Les Pays-Bas ont appelé à une enquête transparente sur la mort de Mahsa Amini et des manifestants.  Le Luxembourg, appuyé par la Tchéquie et l’Islande, a demandé quels mécanismes pouvaient être mis en œuvre pour assurer la reddition de compte en Iran, tandis que le Sri Lanka a appelé toutes les parties à respecter les principes de non-sélectivité et d’impartialité dans la promotion des droits humains. 

L’Espagne s’est opposée à la condamnation iranienne des travaux du Rapporteur spécial.  L’Union européenne a estimé que la loi sur les jeunes avait fait reculer l’égalité entre les hommes et les femmes et demandé au Rapporteur comment empêcher d’autres reculs du même type.  Elle a aussi demandé ce que la communauté internationale devrait faire pour limiter l’usage de la peine capitale pour des condamnations ne constituant pas des crimes sérieux, concernant les affaires de drogue et contre des personnes appartenant à des minorités ethniques, religieuses ou des personnes LGBTIQ+.  Le Pakistan a estimé que le Conseil des droits de l’homme était instrumentalisé par certains pays qui politisaient les droits humains, relevant que malgré les sanctions, l’Iran se montrait ouvert au dialogue.  S’exprimant au nom des 33 membres de la coalition « liberté en ligne », la Norvège a appelé l’Iran à lever toutes les restrictions d’accès à Internet, le Royaume-Uni l’exhortant pour sa part à tendre l’oreille, à cesser la répression et à condamner les tirs à balles réelles. 

Après la Syrie qui a réitéré son opposition aux rapports sur des pays spécifiques, l’Albanie s’est intéressé aux moyens d’améliorer les systèmes de signalement et de suivi des personnes victimes de détentions arbitraires, notamment les femmes et les défenseurs et défenseuses des droits humains.  Le problème principal n’était pas le respect des droits humains par l’Iran mais les sanctions imposées par les États-Unis, a estimé la Fédération de Russie, suivie au Bélarus qui a dénoncé le rapport. 

Estimant que les manifestations étaient une conséquence de la violation des droits humains par l’Iran, l’Allemagne a demandé comment faire pour assurer la reddition de comptes.  La Suisse a plaidé en faveur d’une enquête indépendante sur la mort de Mahsa Amini et l’incendie à la prison d’Evin.  La Chine s’est opposée à l’imposition d’un mécanisme spécifique en l’absence d’accord du pays concerné, condamnant dans la foulée les sanctions unilatérales étatsuniennes.  L’Érythrée s’est opposée au mandat du Rapporteur sur l’Iran et souligné que ce type de mandat visaient souvent les pays en développement, dénonçant leur sélectivité.  À son tour, la France a appelé l’Iran à cesser toute exécution, notamment concernant des mineurs et à respecter ses engagements internationaux en matière de libertés d’expression, de réunion, de religion et de conviction. 

Reprenant la parole, l’Iran a affirmé que le Royaume-Uni, l’Union européenne, les États-Unis et le Canada persistaient dans leurs fausses accusations, qu’ils s’ingéraient dans les affaires internes de l’Iran alors que les discriminations persistaient sur leurs propres territoires.  Il a aussi souligné que le « régime de l’apartheid » dans la région parlait des droits humains alors qu’une journaliste avait été tuée suite à l’occupation qu’il menait. 

Répondant aux accusations de certaines délégations, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran a notamment encouragé l’Iran à dialoguer sur le fond du rapport et sur ses recommandations et a demandé l’accès au pays.  Il a affirmé que son rapport tenait compte des sanctions et de leurs effets sur le système de santé notamment, soulignant toutefois que leur existence ne devait servir d’excuse pour justifier des violations des droits humains.  Il a réaffirmé sa préoccupation quant à l’augmentation du nombre d’exécutions, et a demandé la libération immédiate de toutes les personnes détenues de manière arbitraire, la fin des violations de la liberté d’expression et des entraves au travail des journalistes.  Il a insisté sur l’importance de défendre les droits des femmes et filles souffrant depuis des décennies de la loi sur le hijab qui insulte leur liberté de choix et leur dignité.  Il a demandé à l’Iran de rejoindre la Convention contre la torture et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, appelant ensuite la communauté internationale à mettre place un mécanisme d’enquête sur la violation des droits humains en Iran. 

Exposé

M. PAULO SERGIO PINHEIRO, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne, a dressé le bilan d’une Syrie ravagée par 12 ans de guerre, où 90% de la population vit dans la pauvreté.  En outre, 14,6 millions de Syriens dépendent désormais de l’aide humanitaire, alors que celle-ci demeure terriblement insuffisante et politisée, a-t-il déploré, signalant en outre une grave épidémie de choléra dans 14 provinces du pays.  Cette crise humanitaire, sanitaire et économique est aggravée par l’intensification des combats, et ceux-ci sont le fait tant des forces pro-gouvernementales que rebelles, ou menées par les Forces démocratiques syriennes (FDS), a expliqué M. Pinheiro. 

Dans tout ce chaos, les voix qui appellent au retour des réfugiés syriens se font de plus en plus entendre, a indiqué le Président de la Commission d’enquête, selon lequel les pays voisins qui ont accueilli des millions de Syriens affirment aujourd’hui qu’ils vont commencer à les renvoyer chez eux.  Il a cependant insisté sur le fait que tout retour doit se faire volontairement, en toute sécurité et dans la dignité.  Notant à cet égard que le nombre de réfugiés retournant volontairement en Syrie est « minuscule » et inférieur au nombre de ceux qui fuient, il a estimé que la tragédie des plus de 70 réfugiés syriens noyés dans le naufrage de leur embarcation de fortune est une leçon à retenir. 

Par ailleurs, la confiscation par les parties au conflit des biens des personnes déplacées et des réfugiés continue d’empêcher des retours dignes dans tout le pays, a dénoncé M. Pinheiro.  Il a cité l’exemple des femmes dont le mari a disparu ou est porté disparu et qui sont confrontées à des difficultés supplémentaires lorsqu’elles tentent d’obtenir la propriété de leur maison. 

Évoquant le sujet de la torture, le Président de la Commission d’enquête a indiqué que cette pratique, qui comprend les violences sexuelles, est également perpétrée par des groupes armés.  Il a par ailleurs mentionné l’attaque de la prison d’al-Sina, dans la ville d’Hassaké, dans le nord-est de la Syrie, le 20 janvier, y voyant un rappel brutal de la menace que représente toujours Daech dans la région et de la vulnérabilité des civils qui y vivent.  Cette attaque a mis en lumière le sort de centaines de garçons en pleine adolescence, détenus dans des conditions insupportables depuis près de quatre ans, a-t-il alerté.  Il a également évoqué la situation de leurs mères et jeunes frères et sœurs qui font partie des quelque 58 000 personnes, dont 37 000 enfants, qui restent illégalement privées de liberté dans les camps de Hol et de Raouj.  Dans ces conditions, la nécessité des rapatriements est plus urgente que jamais, a souligné M. Pinheiro en notant que l’élan en ce sens se renforce enfin.  Saluant les pays qui ont déjà rapatrié leurs ressortissants, il a cependant averti qu’au rythme actuel, « il faudrait peut-être des décennies pour vider les camps ». 

Le Président de la Commission d’enquête s’est ensuite attardé sur le sort inconnu des dizaines de milliers de personnes disparues ou forcées à disparaître, selon lui « l’une des plus grandes tragédies de la guerre syrienne ».  Tout en se félicitant de la recommandation du Secrétaire général en faveur de la création d’un mécanisme international chargé de clarifier leur sort et de soutenir les familles, il a estimé que les discussions ne devraient plus porter sur la nécessité ou non de créer un tel mécanisme.  M. Pinheiro a indiqué que la Commission d’enquête est prête à partager la masse considérable d’informations collectées pendant 11 ans, exhortant les États Membres à agir de même.  Enfin, a-t-il rappelé, « nous ne devons pas oublier les premiers responsables de cette situation, lesquels peuvent agir rapidement pour la résoudre ».  Il a ainsi appelé les autorités syriennes et les autres parties au conflit à commencer à autoriser l’accès immédiat d’observateurs indépendants tels que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à tous les lieux de détention. 

Dialogue interactif

À la suite de l’exposé M. Pinheiro, la République arabe syrienne a dénoncé d’emblée le fait que la Commission d’enquête ait été créée sans vote et sans l’assentiment du pays concerné.  Après avoir qualifié le travail de cette instance de « campagne de désinformation » contre son pays, elle a condamné les frappes opérées par Israël sur Damas le 10 juin dernier, regrettant que l’identité des criminels n’ait pas été assez clairement précisée par la Commission d’enquête.  Celle-ci accuse en outre sans fondement les autorités syriennes de crimes de guerre, de torture et autres traitements inhumains, alors qu’elle utilise le conditionnel au sujet des exactions qui « auraient » été commises par le groupe État islamique et d’autres entités rebelles.  La délégation a ensuite dénoncé l’ingérence militaire de la Türkiye, laquelle, a-t-elle rappelé, n’est autorisée à intervenir en Syrie par aucun document des Nations Unies.  Elle a par ailleurs démenti des accusations de torture commises par des représentants de l’État syrien sur des enfants, et a regretté que la Commission d’enquête omette de présenter l’occupation du territoire syrien par des forces étrangères comme la principale cause empêchant les réfugiés syriens de revenir dans leur pays. 

La France a, pour sa part, exprimé son soutien à la Commission d’enquête, avant de déplorer la plus grave crise humanitaire depuis le début du conflit syrien.  À l’instar des Pays-Bas, la délégation française a appelé Damas à se conformer à la résolution 2254 (2015) du Conseil de Sécurité « sans laquelle la paix ne peut advenir ».  Elle a enfin demandé si la Commission d’enquête a des éléments d’information concernant les violences dont font l’objet les réfugiés lors de leur retour en Syrie.  Comment le régime syrien peut-il être tenu pour responsable de la sécurité de ceux qui souhaitent rentrer chez eux, s’est interrogée à son tour l’Union Européenne, notant que le rapport de la Commission d’enquête fait état de multiples cas d’arrestation et de détention parmi les Syriens déplacés rentrés dans leur pays.  Comment la Commission d’enquête peut-elle s’assurer que des comptes seront rendus au sujet des atrocités commises dans le Nord-Est de la Syrie, a voulu savoir l’Australie.

Réaffirmant son soutien au Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie, l’Allemagne a souhaité savoir comment toutes les parties prenantes peuvent s’acquitter de leur tâche dans ce cadre.  Sur la même ligne, le Luxembourg a demandé ce qui pourrait être entrepris pour faciliter la création d’un mécanisme international chargé du suivi des personnes disparues, tant au niveau des États Membres qu’au niveau de l’ONU.  Toujours à ce sujet, la Suisse a voulu savoir comment la Commission d’enquête envisage de collaborer avec un éventuel mécanisme chargé de rechercher et d’identifier de manière efficace et effective les personnes disparues.

De son côté, l’Ordre Souverain de Malte est revenu sur l’aide qu’il apporte à des milliers de réfugiés syriens, notant le poids qui repose sur le Liban et appelant la communauté internationale à épauler les pays faisant face à l’afflux de populations syriennes.  À sa suite, le Royaume-Uni s’est enquis des recommandations de la Commission d’enquête en matière de soutien aux familles des personnes disparues, tandis que le Liechtenstein s’interrogeait sur la collaboration de la Commission d’enquête avec d’autres mécanismes des Nations Unies sur le dossier syrien.

La Fédération de Russie a quant à elle dénoncé les sanctions unilatérales des pays occidentaux à l’encontre du peuple syrien ainsi que l’occupation de larges pans du territoire syrien par des puissances étrangères, notamment les Etats-Unis.  Cuba a, elle, estimé que la « politisation » de la Commission d’enquête accroît la méfiance et la logique d’affrontement.  La communauté internationale doit respecter la souveraineté territoriale de la Syrie et encourager une coopération avec les autorités du pays, a réclamé la délégation cubaine, selon laquelle prôner les droits humains en Syrie est incompatible avec l’application de mesures coercitives unilatérales.  Une position partagée par le Nicaragua, qui a formulé des accusations similaires envers la Commission d’enquête, tandis que le Venezuela condamnait tout instrument, rapport ou résolution ciblant un pays spécifique sans son consentement.  La République populaire démocratique de Corée (RPDC) s’est, elle aussi, dressée contre l’ensemble des mandats et mécanismes « politisés », soutenant les efforts du Gouvernement syrien pour lutter contre l’occupation étrangère. 

L’Érythrée s’est jointe aux États dénonçant une approche politisée qui ne vise que des pays en développement, le Bélarus estimant quant à lui qu’en dix ans, la Commission d’enquête n’a obtenu aucun résultat tangible en Syrie, alors que l’Examen périodique universel (EPU) assure efficacement la promotion des droits humains dans le monde.  La Chine a, elle, jugé que le cas syrien prouve que les mesures coercitives unilatérales et autres interférences ou pressions extérieures ne portent jamais leurs fruits.  La République islamique d’Iran a également dénoncé les mesures coercitives unilatérales, ainsi que les violations du droit international commises par Israël en Syrie.  Enfin, la Turquie a estimé que l’intégrité territoriale de la Syrie est violée par des organisations terroristes telles que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). 

Répondant aux questions et remarques des délégations, M. HANNY MEGALLY, membre de la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne, s’est tout d’abord adressé à la République arabe syrienne, à laquelle il a rappelé qu’il n’avait pas eu souvent de réponses détaillées à ses rapports, malgré les demandes répétées.  Évoquant les accusations de politisation de son mandat, il a appelé à plutôt se concentrer sur la situation en Syrie et sur ce qui peut être fait pour améliorer le sort de la population.  Douze millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire, il faut donc se concentrer sur cet aspect en priorité, a-t-il dit.  Il s’est d’autre part prononcé pour un cessez-le- feu général, avant de se dire très préoccupé par le fait que toutes les parties au conflit ont du sang sur les mains, comme l’atteste l’examen de leur conduite. 

Il s’est ensuite penché sur la question du retour des réfugiés, exprimant ses craintes quant au retour de ces personnes compte tenu des risques encourus.  Il a aussi attiré l’attention sur les personnes qui n’ont pas de documents officiels, une question qui, a-t-il indiqué, fera l’objet de futurs rapports.  Par ailleurs, il a alerté sur les conditions de détention en Syrie, rappelant ses recommandations en faveur de la libération des femmes, des enfants, des personnes âgées et des malades.  Concluant son propos sur la question des personnes disparues, il a souhaité que l’Assemblée générale et la Troisième Commission s’inspirent des recommandations du Secrétaire général et adoptent une résolution mettant en place un mécanisme pour le suivi des personnes disparues et le soutien de leurs familles. 

Reprenant la parole, le représentant de la République arabe syrienne s’est déclaré « attristé » par les déclarations de M. Megally et par le rapport de la Commission d’enquête auquel, a-t-elle répété, son pays ne souscrit pas. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité se réunit après la demande faite par certains membres au Secrétariat d’enquêter sur le transfert présumé de drones iraniens à la Russie

9167e séance - après-midi
CS/15079

Le Conseil de sécurité se réunit après la demande faite par certains membres au Secrétariat d’enquêter sur le transfert présumé de drones iraniens à la Russie

Le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, à la demande de la Fédération de Russie, au motif que certains États Membres s’emploieraient à « donner des instructions » au Secrétariat de l’ONU en violation de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies, comme en témoigne selon cette délégation une lettre* adressée par l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni à l’Organisation le 21 octobre 2022.  Des accusations catégoriquement rejetées par les pays concernés et plusieurs autres membres du Conseil, qui ont taxé la Fédération de Russie de « cynisme ».

Dans la lettre incriminée par le représentant russe, les délégations allemande, britannique et française se disent « profondément préoccupées » par l’acheminement depuis la République islamique d’Iran de drones aériens en Russie, en violation de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité.  Moscou y est accusée d’utiliser ces engins dans sa « guerre d’agression » contre l’Ukraine pour attaquer des infrastructures civiles et des villes dans tout le pays.  Dès lors, « il serait bon » que l’équipe du Secrétariat de l’ONU chargée de surveiller l’application de ladite résolution diligente une « enquête technique impartiale », explique la lettre.

Le 19 octobre, lors de consultations au Conseil, relate le représentant russe dans sa propre lettre**, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, s’est, « à notre grand regret », « ostensiblement rangée » du côté de plusieurs délégations occidentales.  Or, d’après la position russe, il apparaît clairement que le Secrétariat de l’ONU n’est « habilité en rien » à mener, ou à entreprendre sous quelque forme que ce soit, une quelconque « enquête » sur des allégations de « présumés manquements » à la résolution 2231.

Pour le délégué russe, les actions des Occidentaux pourraient créer un précédent « exceptionnellement dangereux » pour l’ONU, puisqu’elles visent à étendre « artificiellement » les compétences du Secrétariat en lui confiant des fonctions inhabituelles qui empiètent, selon lui, sur les prérogatives du Conseil de sécurité.  Si des questions de fond et politiques relèvent de la seule responsabilité du Secrétariat, sur « ordre » d’États Membres individuels, alors à quoi servent des organes collégiaux comme le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale? s’est-il interrogé.

Sollicité pour donner son avis sur la question, le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, M. Miguel de Serpa Soares a estimé « naturel », pour les États Membres, de souhaiter exercer, « autant que possible », une influence sur les activités de l’Organisation, y compris le Secrétariat.  Ainsi, il est courant qu’ils prennent contact avec le Secrétaire général et autres hauts fonctionnaires, dont lui, pour les informer de la position de leurs gouvernements respectifs et chercher à les convaincre de leur bien fondé, a noté le Conseiller juridique de l’ONU.

Tout État Membre peut s’adresser au Secrétaire général, y compris la Fédération de Russie, qui par le passé lui a demandé d’enquêter sur des meurtres présumés commis dans une prison dans l’est de l’Ukraine, demande en réponse à laquelle une mission d’établissement des faits a été créée, ont observé les États-Unis.  Cette délégation a constaté que ces demandes sont en effet courantes et ne constituent en rien des violations de l’Article 100 de la Charte.  Le Royaume-Uni a quant à lui rappelé que le Secrétariat contribue à la mise en œuvre de la résolution 2231 et qu’il a déjà mené de nombreuses enquêtes de ce type, plus récemment en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, ce qu’a confirmé cette dernière délégation, en indiquant que l’investigation en question portait sur des débris d’armes à la suite d’un attentat terroriste perpétré dans le pays.

Pour la France, comme pour la Norvège ou l’Irlande, c’est à une inversion des termes que l’on assiste, puisque c’est bien la Russie qui n’a cessé de violer la Charte et de « fouler aux pieds » ses principes en envahissant son voisin.  Et c’est bien la Russie qui a voté, « dans l’isolement le plus complet », contre une résolution de l’Assemblée générale soutenue par 143 pays et intitulée « défendre les principes de la Charte des Nations Unies », a rappelé la délégation française.  « Si la Russie n’a rien à cacher et respecte le droit international, alors il serait dans l’intérêt de la vérité qu’elle facilite une enquête plutôt que de menacer le Secrétariat », a suggéré de son côté l’Albanie.

Les faits, susceptibles de constituer des crimes de guerre, sont très clairs et « solidement documentés », a tranché le représentant français: « L’Iran a fourni des drones à la Russie, qui les a mis au service de sa guerre d’agression dans le cadre de bombardements aveugles contre des cibles civiles. »  Outre une cessation immédiate de toute forme de soutien de la part de l’Iran à la guerre d’agression russe, la France a souhaité que le Secrétariat de l’ONU enquête sur ces violations de la mise en œuvre de la résolution 2231, comme il l’a déjà fait à plusieurs reprises par le passé.

Le Kenya, pour qui les États les plus puissants, y compris certains membres de ce Conseil, jouent un rôle disproportionné dans la « tendance malheureuse » du Secrétariat à la partialité, a fait trois propositions pour renforcer son action à l’avenir.  Tout d’abord, redéfinir son impartialité et protéger son indépendance: « Si l’Article 100 de la Charte protège le Secrétaire général et le personnel de toute influence ou instruction extérieure, ce n’est pas seulement pour servir d’arbitre neutre.  C’est pour leur permettre de dire la vérité aux pouvoirs en défendant la lettre et l’esprit de la Charte. »

Il incombe ensuite au Secrétaire général, qui doit être totalement partisan de la Charte, d’appliquer l’Article 99 sans se soucier de l’avis d’un État, peu importe son influence.  Cet article permet au Chef de l’ONU d’attirer l’attention du Conseil sur toute affaire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Ensuite, les capacités du Secrétaire général doivent être utilisées pour établir les faits dans l’esprit de la résolution 46/59 (1991), raison pour laquelle la déléguée kényane a mis au défi les parties en conflit d’accepter l’établissement des faits et leur vérification par l’ONU, plutôt que d’argumenter ici au Conseil, où « la plupart des membres n’ont aucun moyen indépendant de s’assurer de leur véracité ».

*S/2022/781
**S/2022/783 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, a apporté des éclaircissements au sujet de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies et traité du contexte dans lequel la demande d’explication a été soumise, en clarifiant la nature du travail du Secrétaire général et du Secrétariat au titre de la résolution 2231 (2015).  Il a expliqué que l’Article mentionné a été souvent décrit comme le fondement même de l’idée que le Secrétariat était un service civil international, à savoir que, dans l’accomplissement de leurs devoirs, le Secrétaire général et le personnel ne doivent solliciter ni accepter d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation.  « Ils s’abstiendront de tout acte incompatible avec leur situation de fonctionnaires internationaux et ne sont responsables qu’envers l’Organisation », dispose l’alinéa 1.  Dans le souci de respecter le caractère international et l’indépendance du Secrétariat, l’Assemblée générale a énoncé des normes de conduite détaillées pour les membres du personnel, et ce, sur la base directe de l’alinéa 1 de l’Article 100 de la Charte, a-t-il précisé.

M. de Serpa Soares a également mentionné le Règlement provisoire des fonctionnaires de l’ONU, adopté en 1951 par l’Assemblée générale, qui repose sur quatre idées principales: les membres du Secrétariat sont des fonctionnaires internationaux; leurs responsabilités ne sont pas nationales mais exclusivement internationales; ils doivent exercer leurs fonctions et régler leur conduite en ayant à l’esprit les seuls intérêts des Nations Unies; et ils ne doivent pas requérir ou accepter d’instructions concernant leur travail d’aucun gouvernement ou autre source extérieure à l’Organisation.

Le Conseiller juridique a poursuivi son explication en citant l’alinéa 2 de l’Article 100 qui établit deux obligations correspondantes pour les États Membres: « Chaque État Membre de l’Organisation s’engage à respecter le caractère exclusivement international des fonctions du Secrétaire général et du personnel et à ne pas chercher à les influencer dans l’exécution de leur tâche. »  M. de Serpa Soares a néanmoins souligné que l’Assemblée générale n’a adopté aucune décision particulière afférente à cet alinéa, à même de faciliter son interprétation, et ne l’a mentionné que dans des appels à tous les États Membres en vue du respect des privilèges et immunités des fonctionnaires de l’ONU et pour permettre au Secrétaire général d’exercer le droit de l’Organisation à la protection de membres du personnel arrêtés ou en détention.  L’Assemblée générale n’a donc fourni aucune orientation particulière quant à l’application de cet alinéa.

Poursuivant, le Secrétaire général adjoint a estimé naturel, pour les États Membres, de souhaiter exercer, autant que possible, une influence sur les activités de l’Organisation, y compris le Secrétariat.  Ainsi, il est courant que les Représentants permanents prennent contact avec le Secrétaire général et autres hauts fonctionnaires pour les informer de la position de leur gouvernement et cherchent à les convaincre de leur bien fondé, a-t-il noté, ajoutant qu’il avait, lui-même, reçu des visites d’ambassadeurs qui ont cherché à le convaincre de la justesse de leur opinion juridique sur un point particulier ou à faire cesser une action ou une autre du Secrétariat.  Il a confié qu’au cours de son mandat, il avait eu des échanges de ce genre avec tous les ambassadeurs des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, ce à quoi il fallait s’attendre, a-t-il commenté.  M. de Serpa Soares a reconnu qu’il ne pensait pas que quiconque soutiendrait que de telles activités sont contraires à l’alinéa 2 de l’Article 100 de la Charte.  Il a rappelé, en paraphrasant un de ses prédécesseurs, que le Secrétaire général est pleinement conscient que son efficacité, dans la plupart des situations, dépend largement de la coopération des gouvernements, et que celle-ci, et son degré, dépend de la manière dont ses vues coïncident avec les positions de ces gouvernements.  Toutefois, a-t-il ajouté, le Secrétaire général doit insister sur son devoir, en vertu de la Charte, qui exige qu’il établisse une limite entre coopération et pression.

Au sujet du travail effectué par le Secrétaire général et le Secrétariat au titre de la résolution 2231, il a souligné que ce dernier, sans dévier des normes énoncées dans l’Article 100, prend note de toutes les informations portées à son attention par les États Membres en vue d’évaluer leur pertinence par rapport au mandat assigné par la résolution.  C’est dans cet esprit, et en aucun autre, a-t-il insisté, que Mme Rosemary DiCarlo a noté, dans ses remarques au cours des consultations officieuses du 19 octobre, que le Secrétariat était prêt à fournir des informations à la demande des États Membres.  Cela fut également le cas du porte-parole du Secrétaire général dans ses remarques du 20 octobre, a assuré M. de Serpa Soares.

Le Secrétaire général adjoint a ensuite expliqué qu’à l’issue de l’adoption de la résolution 2231, le Président du Conseil de sécurité avait émis une Note datée du 16 janvier 2016 (S/2016/44) relative aux modalités et procédures pratiques pour la mise en œuvre de ce texte, et plus particulièrement s’agissant des dispositions figurant aux paragraphes 2 et 7 de l’Annexe B.  Dans les paragraphes 6 et 7 de la Note, il est demandé au Secrétaire général de nommer la Division des affaires du Conseil de sécurité -aujourd’hui Département des affaires politiques et de consolidation de la paix- d’agir comme point de contact et d’appui des travaux du Conseil et comme son facilitateur, et, comme envisagé dans l’Annexe B, de préparer tous les six mois un rapport incluant les conclusions et recommandations, en demandant aussi que le Conseil de sécurité se réunisse de façon informelle avant la publication du rapport.  Le Secrétaire général s’est exécuté et a préparé des rapports (S/2016/589 et suivants), le plus récent et le treizième ayant été publié le 23 juin 2022 (S/2022/490).

M. de Serpa Soares a déclaré que la structure et les sujets abordés dans ces rapports sont bien connus du Conseil.  Le Secrétariat a fait rapport, de manière suivie, sur la mise en œuvre des mesures restrictives énoncées dans l’Annexe B en vigueur durant la période du rapport, y compris les informations dont il a été saisi par les États Membres et de façon volontaire par écrit, ou lors de réunions au Siège ou dans les capitales.  Y sont également reflétées les positions des États Membres intéressés par ces informations.  Le Secrétaire général est en mesure d’exprimer ses points de vue sur les événements pertinents durant la période du rapport et d’attirer l’attention sur des sujets de préoccupation, a conclu le Secrétaire général adjoint, ajoutant que le Secrétaire général n’avait reçu aucune demande relative au paragraphe 6 (g) de la Note.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a expliqué que, compte tenu de la volonté des « confrères occidentaux de parler de fausses nouvelles concernant des drones que l’Iran aurait fournis à la Russie », sa délégation a convoqué cette réunion pour discuter de la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité.  Il a expliqué que cette question concerne les risques posés par les actions des membres individuels du Conseil à l’intégrité de la Charte des Nations Unies et la capacité du Conseil de sécurité à s’acquitter de sa fonction essentielle de maintien de la paix et la sécurité internationales.  Il a évoqué des tentatives avérées des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et de l’Allemagne qui ont envoyé une lettre au Secrétariat des Nations Unies pour donner une instruction directe individuelle, en violation de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies.  En effet, a-t-il indiqué, dans une lettre (S/2022/781) diffusée au Conseil de sécurité de l’ONU le 21 octobre, les représentants de ces pays ont déclaré qu’ils souhaiteraient que l’équipe du Secrétariat de l’ONU chargée de surveiller l’application de la résolution 2231 (2015) diligente une enquête, se disant prêts à aider le travail du Secrétariat dans cette enquête technique et indépendante.  Les États-Unis ont, eux aussi, exigé que le Secrétariat de l’ONU mène une telle enquête dans la lettre S/2022/782.

Ce n’est pas de la « propagande russe », comme aiment le dire les collègues occidentaux, mais bien des faits, a-t-il souligné, affirmant que ces lettres sont des preuves documentaires que les délégations susmentionnées violent le paragraphe 2 de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies.  Le délégué a expliqué que les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne ont en fait encouragé le Secrétariat à commettre une double violation: premièrement, la violation du paragraphe 1 de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies, selon lequel le Secrétariat ne doit recevoir d’instructions d’aucun gouvernement.  Deuxièmement, cette lettre viole également le mandat du Secrétariat dans le contexte de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité.

Le représentant a noté que des délégations occidentales estiment que le Secrétariat aurait pour mandat de surveiller la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015).  Ces déclarations ne correspondent pas à la réalité, a-t-il argué, expliquant que la note du Président du Conseil de sécurité S/2016/44 stipule expressément que le contrôle de la mise en œuvre de la résolution se fait après que le Conseil de sécurité a reçu des informations au cours de réunions informelles au niveau des experts.  De ce fait, il est évident que toute information provenant des États Membres devrait être examinée par les membres du Conseil de sécurité en réunion informelle.  Il a également souligné que cette note ne contient pas une seule mention du rôle du Secrétariat dans ce processus.

En outre, a-t-il ajouté, conformément au paragraphe 5 de ladite note, le Conseil de sécurité doit s’efforcer de prendre des décisions concernant l’exercice de ses fonctions dans le cadre de la résolution 2231 (2015) par consensus.  De même, a-t-il poursuivi, sur le point 6 de la note du Président qui donne une liste exhaustive des fonctions du Secrétariat de l’ONU en rapport avec la résolution 2231 (2015), il est dit que ce dernier « assiste le coordonnateur dans la conduite de réunions informelles du Conseil », entre autres.  La liste des prérogatives du Secrétariat ne contient pas un mot sur la possibilité de mener d’éventuelles enquêtes, a souligné le représentant, pour qui les actions des délégations occidentales appelant le Secrétariat à mener une enquête sur la question des drones pourrait créer un précédent exceptionnellement dangereux pour le travail de l'ONU.

D’un point de vue juridique, ils recherchent une expansion artificielle des compétences du Secrétariat en lui confiant des fonctions inhabituelles, en permettant des intrusions dans les prérogatives du Conseil de sécurité, a-t-il expliqué.  Il a relevé que cette approche ne respecte pas les principes de base du fonctionnement de l’Organisation, y compris la division des compétences entre ses organes principaux.  De même, cette approche contredit la logique élémentaire, puisque si des questions de fond et politiques relèvent de la seule responsabilité du Secrétariat, sur « ordre » des États Membres individuels, pourquoi alors avons-nous au sein de l’ONU des organes collégiaux comme le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale? a-t-il demandé.

Dans le contexte de la résolution 2231 (2015), le Secrétariat est uniquement le point de contact, a résumé le délégué.  Par conséquent, il a estimé que la seule chose qu’il peut faire, ayant reçu des lettres de ces États, est de les remettre au coordonnateur de la résolution 2231 pour distribution aux membres du Conseil de sécurité.  Le représentant a accusé ces délégations occidentales de pratiquer la politique des deux poids, deux mesures en prétextant défendre la Charte, alors même qu’eux-mêmes sont prêts à la violer ouvertement et à encourager le Secrétariat de l’ONU à faire de même.  Il a également rappelé que les États-Unis violent la résolution 2231 (2015) depuis quatre ans, puisque le pays s’est retiré unilatéralement du Plan d’action global commun en 2018.

Nous avons entendu, a-t-il poursuivi, des déclarations de représentants officiels du Secrétaire général de l’ONU sur l’analyse de toute information reçue des États Membres à leur demande.  Ces propos vont à l’encontre de la lettre et de l’esprit de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies, a-t-il affirmé, avertissant que tout cela pose de graves risques pour l’intégrité de la Charte des Nations Unies, l’efficacité des travaux du Conseil de sécurité et de l’Organisation dans son ensemble.  Enfin, le représentant a demandé au Conseiller juridique de préciser si la requête présentée par les États en question viole bien l’Article 100 de la Charte, notant que la mise en œuvre de leur demande de la part du Secrétariat de l’ONU serait également une infraction.

M. ROBERT WOOD (États-Unis) a dénoncé la tentative de la Fédération de Russie de vouloir empêcher le Secrétariat de mener une enquête sur la violation de la résolution 2231 (2015), soulignant que la demande des États-Unis et d’autres Membres n’était pas des instructions.  Elle s’ajoute à celles faites par de nombreux États Membres au Secrétaire général, y compris la Russie qui a demandé au Secrétaire général de mener une enquête sur des meurtres dans une prison dans l’est de l’Ukraine, suite à quoi le Secrétaire général a décidé de mettre sur pied une mission d’établissement des faits.  De telles demandes d’enquêtes sont courantes, appropriées et nullement contraires à l’Article 100 de la Charte des Nations Unies, a-t-il souligné, évoquant le libellé unique de la résolution 2231 (2015).

Dans le cas qui nous préoccupe, l’Iran et la Russie ont fait équipe pour violer la résolution 2331 (2015), a poursuivi le représentant, accusant l’Iran d’avoir fourni des drones à la Russie et ce pays de se les être procurés.

Notant que le Conseil de sécurité a, lui-même, demandé au Secrétaire général de jouer un rôle primordial dans les signalements des violations de la résolution 2231, il a jugé qu’il est donc de la prérogative de ce dernier de mener une enquête sur les violations par l’Iran et la Russie de la résolution 2231, assortie d’un rapport tous les six mois sur l’application de ladite résolution.  Ces dernières années, le Secrétaire général a présenté au Conseil de sécurité 13 rapports résumant des enquêtes et leurs conclusions sur le non-respect, a informé le représentant, citant entre autres exemples, un rapport sur une enquête sur les allégations que des missiles balistiques iraniens auraient été utilisés par des houtistes dans des attaques contre l’Arabie saoudite.  Dans tous ces cas, le Secrétariat a lancé ses propres enquêtes pour évaluer ces allégations afin de pouvoir rendre compte de la mesure dans laquelle les violations alléguées ont eu un impact sur la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015).

Le représentant a ensuite souligné que la requête des États-Unis et d’autres que le Secrétaire général enquête sur les dernières violations commises par la Russie et l’Iran est appropriée et urgente.  Céder aux menaces de la Russie donnerait à tous les pays un blanc-seing pour violer les résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il averti.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a souligné que, dans le contexte actuel, le paragraphe 7 de la note 44 de 2016 du Président du Conseil demande clairement au Secrétaire général de faire rapport au Conseil de sécurité, tous les six mois, sur la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015).  Il a espéré que le Secrétariat continuerait à fonctionner de façon objective sur ces questions, et à agir conformément au mandat fourni par le Conseil.  Le respect des dispositions de la Charte des Nations Unies est une nécessité absolue, a-t-il insisté.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré qu’impartialité ne veut pas dire détachement à la réalité et indifférence, avant de saluer le travail du Secrétariat.  Il a appelé que les États Membres doivent s’acquitter de leurs obligations en vertu de la résolution 2231 (2015), sous peine de créer un précédent dangereux.  Selon lui, le nœud du problème est le déni de la Russie s’agissant de l’utilisation de drones iraniens en Ukraine.  Si la Russie n’a rien à cacher et respecte le droit international, alors il serait dans l’intérêt de la vérité qu’elle facilite une enquête pour établir la vérité plutôt que de menacer le Secrétariat, a-t-il estimé.  Le délégué a indiqué qu’il existe des éléments de preuve attestant de l’usage de drones iraniens pour cibler des civils en Ukraine.  Enfin, il a invité le Secrétariat à faire son travail, son mandat étant des plus clairs avec la conduite de visites de site et la rédaction de rapports.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a profondément regretté le cynisme dont fait preuve la Russie en convoquant une réunion sur l’intégrité de la Charte des Nations Unies, car, a-t-il affirmé, c’est bien la Russie qui n’a cessé de violer la Charte et de fouler aux pieds ses principes en envahissant son voisin.

Il a souligné que la fourniture de drones par l’Iran à la Russie, sans approbation préalable du Conseil, représente une violation du paragraphe 4 de l’annexe B de la résolution 2231 (2015) qui avait été adoptée à l’unanimité.  Il a souhaité que le Secrétariat enquête et informe les membres du Conseil afin que le Secrétaire général puisse rendre compte fidèlement de la mise en œuvre de ladite résolution.  Il a également reproché à la Russie le non-respect de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies et de l’indépendance du Secrétariat.  C’est la Russie qui exerce un chantage en menaçant de rompre les liens avec les Nations Unies si le Secrétariat ne se plie pas à sa volonté, a-t-il accusé.

Mme CAÍT MORAN (Irlande), dans une courte déclaration, a affirmé que c’est la Fédération de Russie qui, malheureusement, tente d’influencer le Secrétariat et ses fonctionnaires en violation de l’Article 100 de la Charte.  Il a dit espérer que la délégation russe change d’attitude et accepte cette enquête.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a dit appuyer pleinement les objectifs de la résolution 2231, en demandant instamment que ses dispositions soient pleinement respectées.  Elle a appuyé les enquêtes sur toute violation de ce texte, par les voies appropriées.  Elle a voulu ensuite recentrer le débat sur l’agression continue de la Russie contre l’Ukraine, s’inquiétant des attaques ciblées contre des civils et la destruction délibérée d’infrastructures civiles.  La représentante a réitéré son appel à la Fédération de Russie pour qu’elle retire immédiatement et sans condition ses troupes des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine et mette fin à la guerre qui a non seulement touché l’Ukraine et son peuple, mais a également précipité des défis socioéconomiques, en particulier pour les pays en développement comme le Ghana.  La déléguée s’est aussi dite préoccupée par les combats intenses et une rhétorique accrue concernant l’emploi ou la menace de l’emploi de diverses formes d’armes de destruction massive.  « Nous sommes également préoccupés par le fait que les exigences en matière de sûreté et de sécurité nucléaires à Zaporijia n’ont pas encore été mises en œuvre. »  La déléguée a appelé à la retenue et la prudence contre l’utilisation d’une telle rhétorique pour justifier toute utilisation tactique d’armes nucléaires.  Elle a conclu en soulignant l’urgence d’intensifier les efforts diplomatiques pour mettre fin aux hostilités et aider davantage les parties sur la voie d’un règlement pacifique du conflit par le dialogue.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a déclaré qu’en vertu du paragraphe 7 de la Note 44 de 2016, le Secrétaire général est tenu de procéder à un rapport devant le Conseil de sécurité, tous les six mois, relatif à la mise en œuvre de la résolution 2231.  Toute autre mesure doit être débattue par le Conseil de sécurité, y compris pour répondre aux informations concernant des allégations d’agissements incompatibles avec la résolution, a-t-il analysé.  Il a néanmoins cité des cas où, par le passé, le Secrétaire général a voyagé, suite à l’invitation d’un État Membre concerné, afin d’examiner et requérir des informations nécessaires à l’établissement des rapports réguliers, comme décrit dans le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution 2231.  Le Brésil espère que le Secrétariat continuera de s’acquitter de son mandat dans le strict respect de la Note 44 et de l’Article 100 de la Charte, en respectant son caractère exclusivement international, a dit le délégué.  Il a rappelé par ailleurs que le Plan d’action global commun prévoit un dialogue entre les parties concernées.  Le Brésil compte sur l’engagement des participants initiaux à ce plan pour qu’ils respectent leurs obligations à ce titre, conformément à la résolution 2231, vis à vis du Conseil de sécurité.

Mme MONA JUUL (Norvège) a jugé très préoccupant le transfert de drones de l’Iran à la Russie, en rappelant que ces engins sont utilisés pour cibler des civils et des infrastructures civiles.  Un tel usage contrevient au DIH et pourrait constituer un crime de guerre, a-t-elle prévenu.  De notre point de vue, il n’y a rien dans la conduite du Secrétariat en lien avec la requête contenue dans la lettre de l’Ukraine qui soit de nature à corroborer les allégations d’inconduite avancées par la Russie, a tranché la déléguée.  Elle a rappelé que l’Article 100 de la Charte exige de chaque État Membre de respecter l’impartialité du Secrétariat et de son personnel.  La représentante a regretté que la Russie, en accusant d’autres de violer ce principe, foule en réalité aux pieds l’esprit dudit article, y voyant « une tentative désespérée » visant à détourner l’attention de la guerre illégale de la Russie.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a souligné la distinction établie par le droit international humanitaire entre combattants et civils.  C’est à ce titre que nous avons condamné les attaques par drones contre des civils en Ukraine, a déclaré le délégué mexicain, en ajoutant que de telles attaques sont injustifiables.  Il a estimé que la requête de l’Ukraine est conforme à la résolution 2231 (2015) et ne contrevient pas à l’Article 100 de la Charte.  Le délégué a invité le Conseil à trouver une solution diplomatique et à établir des mécanismes de médiation en appui aux efforts du Secrétariat en vue de mettre un terme à la guerre en Ukraine et de protéger les civils.

M. GENG SHUANG (Chine), relisant les dispositions de l’Article 100 de la Charte, imposant au Secrétariat et à ses fonctionnaires de ne pas recevoir d’ordre de quelque gouvernement que ce soit, a jugé important de respecter la Charte.  Compte tenu des divergences existant sur ce sujet, les membres du Conseil de sécurité devraient poursuivre les discussions afin de parvenir à une solution, a suggéré le représentant.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a évoqué la préservation de l’Article 100 de la Charte qui affirme l’indépendance du Secrétariat.  Le corollaire de cet Article est d’ailleurs dans l’intérêt commun des États Membres, a-t-elle fait remarquer, arguant que l’égalité entre eux ne peut exister sans cette disposition.  Sans cet Article, les petits États subiraient une injustice, selon elle, et ils sont conscients du risque qu’ils courraient si chacun pouvait donner des instructions au Secrétariat.  Le non-respect de la résolution 2231 est problématique, a tranché la déléguée.  Elle a informé qu’une équipe du Secrétariat a été accueillie aux Émirats arabes unis pour analyser des restes d’armes, y compris récemment, suite à un attentat terroriste dans le pays.  La discussion d’aujourd’hui rappelle à quel point la clarté des textes adoptés est indispensable, a déclaré la représentante.  « En tant que membres du Conseil, nous nous efforçons de donner des mandats clairs dans les résolutions que nous négocions », a-t-elle rappelé, en reconnaissant que tout texte entraînant différentes interprétations ou une ambiguïté peut rendre la mise en œuvre des mandats plus difficile.  La clarté est la pierre angulaire du système multilatéral, a-t-elle conclu.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a apporté son appui à une enquête impartiale des experts du Secrétariat conformément au mandat relevant de la résolution 2231 (2015) pour tirer cette affaire au clair et pour établir les faits.  Il a ajouté que le Secrétariat contribue à la mise en œuvre de ladite résolution et a déjà mené de nombreuses enquêtes de ce type plus récemment en Arabie saoudite et dans les Émirats arabes unis.  Ce genre d’enquête correspond à la pratique établie, selon le représentant qui a par ailleurs démenti les allégations de la Russie accusant les autres membres d’influencer le Secrétariat, les jugeant « hypocrites et absurdes ».  Selon lui, c’est la Russie qui appuie une campagne de désinformation et qui est la première à attaquer le Secrétaire général.  « Aujourd’hui, elle s’attaque à l’ensemble du Secrétariat qui ne fait que son travail. »  Le délégué a ajouté que c’est la Russie qui a menacé de cesser toute coopération avec l’ONU si le Secrétariat ne fait pas ce qu’elle veut.  Ce n’est pas le comportement d’un pays qui n’a rien à cacher, en a déduit le représentant, y voyant plutôt le comportement d’un tyran.

Selon lui, aujourd’hui, la Russie essaye de bloquer la mise en œuvre de la résolution et, ce faisant, de bloquer le Conseil de sécurité.  Le représentant a indiqué que l’Iran a l’intention de transférer d’autres drones et peut-être même des missiles balistiques à la Russie.  Tout transfert de ce type pourrait constituer de nouvelles violations de la résolution 2231 et causer une escalade significative, a-t-il prévenu.  En utilisant des drones iraniens pour attaquer des civils dans le cadre de sa guerre contre l’Ukraine, la Russie viole la Charte des Nations Unies ainsi que les résolutions du Conseil de sécurité, a tranché le représentant.  Il l’a aussi accusée de commettre probablement des crimes de guerre.  Ces tentatives désespérées pour détourner l’attention et pour saper le système international doivent nous amener à agir, a exhorté le représentant.

Mme CATHERINE NYABOKE NYAKOE (Kenya) a dit, concernant la guerre en Ukraine à l’origine de la réunion d’aujourd’hui, que les bons offices du Secrétaire général ont été déterminants pour la réalisation de l’importante Initiative céréalière de la mer Noire, mais n’ont pas été engagés dans les négociations pour mettre fin à la guerre.  L’une des raisons, selon elle, est l’impact d’années de remise en question de l’impartialité du Secrétariat par les États Membres et l’érosion de son indépendance.  Les États les plus puissants, y compris certains membres de ce Conseil, ont joué un rôle disproportionné dans cette « tendance malheureuse », a-t-elle estimé.  Les exemples les plus marquants de cette impartialité compromise remontent, selon elle, au moment où le Secrétariat a produit un rapport sur le désarmement, la prolifération et les armes interdites en Syrie.  Il semble, selon elle, qu’il existe désormais une opinion bien ancrée selon laquelle l’impartialité du Secrétariat équivaut à « se tenir à mi-chemin entre les parties en conflit ».  Or, ce n’est pas ce que la Charte entend par impartialité.  La seule loyauté du Secrétariat de l’ONU est de « faire respecter et de défendre la Charte », a-t-elle insisté.

La déléguée kényane a émis trois propositions pour renforcer l’action du Secrétariat.  D’abord, redéfinir son impartialité et protéger son indépendance: « si l’Article 100 protège le Secrétaire général et le personnel de toute influence ou instruction extérieure, ce n’est pas seulement pour servir d’arbitre neutre.  C’est pour leur permettre de dire la vérité aux pouvoirs en défendant la lettre et l’esprit de la Charte », a-t-elle formulé.  Le Secrétaire général doit être totalement partisan de la Charte.  Il lui incombe d’appliquer l’Article 99 sans se soucier de l’avis de quelconque État, peu importe son influence dans le monde, a-t-elle précisé, en commentant les dispositions qui permettent au Chef de l’ONU d’attirer l’attention du Conseil sur toute affaire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Deuxièmement, elle a conseillé d’utiliser les capacités du Secrétaire général à établir les faits dans l’esprit de la résolution 46/59 (1991), qui reconnaît la nécessité pour le Conseil d’avoir connaissance de tout fait pertinent, et reconnaît également les capacités du Secrétaire général à établir les faits.

Concernant l’Ukraine, plutôt que d’argumenter sur les faits sur le terrain ici au Conseil, où « la plupart des membres n’ont aucun moyen indépendant de s’assurer de leur véracité », la déléguée a mis au défi les parties en conflit d’accepter l’établissement des faits et leur vérification par l’ONU.  Dernier point, Mme Nyakoe a insisté sur la nécessité de renforcer sans relâche les bureaux régionaux, dont le rôle est de plus en plus crucial dans la prévention de l’escalade des conflits.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a estimé que les explications du Conseilleur juridique de l’ONU sont assez détaillées et drapées du manteau de l’impartialité du Secrétariat.  Il a insisté sur l’importance de la Charte qui est le socle des indispensables négociations par lesquelles on doit mettre fin à la guerre en Ukraine.

M. NEBENZIA (Fédération de Russie), reprenant la parole pour une seconde intervention, a dit sa surprise de voir les États-Unis demander une enquête sur la base de la résolution 2231 (2015) alors que ce sont eux qui violent ladite résolution.  Le Secrétariat et le Secrétaire général n’ont pas un tel mandat, a redit le représentant, indiquant que son pays s’est toujours opposé à cette pratique.  Pour lui, la question qui se pose n’est pas de savoir si la Fédération de Russie a quelque chose à cacher ou non, mais plutôt celle de la légitimité d’une telle démarche, dans le contexte où elle n’est pas permise par la Charte.  Il est déplorable que les collègues occidentaux aient une telle méconnaissance de la Charte ou fassent preuve d’un nihilisme juridique, a déclaré M. Nebenzia.  S’adressant ensuite directement à M. de Serpa Soares, il lui a demandé de dire clairement si la Charte autorise le Secrétaire général à mener une enquête lorsque seuls quelques membres le lui demandent et non le Conseil de sécurité dans son ensemble.

Reprenant la parole en fin de séance, M. DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique de l’ONU, a déclaré ne pas avoir de commentaires aux remarques des intervenants.  Il a expliqué à la Fédération de Russie qu’il n’a rien à ajouter à son intervention initiale.  Quant à la dernière question de ce pays, il a estimé que celle-ci étant « hypothétique », il n’avait pas à y répondre.

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a dit que cette réunion est une nouvelle tentative de la Russie visant à détourner l’attention des crimes de guerre qu’elle commet en Ukraine.  Elle a qualifié de cyniques les appels de la Russie à faire respecter la Charte.  L’utilisation à mauvais escient des articles de la Charte en vue d’entraver une enquête revient à faire pression sur le Secrétariat et à l’empêcher de s’acquitter de ses responsabilités, a-t-elle analysé.  Elle a dit que son pays a informé le Conseil de l’utilisation de drones iraniens, en violation de la résolution 2231 (2015).  Les drones iraniens sont fabriqués par des entreprises soumises à sanction, a-t-elle fait remarquer.  En utilisant ces drones iraniens pour cibler les civils et les infrastructures civiles, la Russie viole le droit international humanitaire, a tranché la déléguée.  Enfin, elle a souligné la nécessité que la communauté internationale soit informée des résultats de l’enquête onusienne sur les débris de drones iraniens.  « Cette enquête devrait commencer immédiatement. »

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a d’abord annoncé que son pays avait été ciblé par une « attaque terroriste » à Shiraz ayant fait 15 morts.  Il a dit s’attendre à ce que le Conseil de sécurité condamne ce crime odieux dans les termes les plus forts.  Passant à la résolution 2231, qui concerne directement son pays, il s’est fermement défendu face aux allégations proférées accusant l’Iran de la violer.  Les États-Unis essaient, selon lui, « dans un effort désespéré », de « maintenir un lien artificiel » entre la résolution 2231 et l’utilisation de drones en Ukraine.  Il a jugé ces informations « infondées », « fallacieuses ».  L’orateur a appelé à ne pas interpréter de façon fallacieuse la résolution 2231.

D’autre part, comme indiqué dans des lettres au Conseil de sécurité en octobre, le délégué a assuré que l’Iran n’a jamais fabriqué ni fourni d’armes nucléaires et n’a pas l’intention de le faire.  Pour lui, la résolution n’a aucune base juridique applicable à une enquête du Secrétariat à ce sujet.  Le délégué a invoqué le paragraphe 7 de la Note 44 de 2016 pour déclarer que le mandat du Secrétariat est seulement un soutien administratif.  Depuis le début du conflit en Ukraine, l’Iran a souligné que tous les États Membres devaient respecter les buts et principes de la Charte ainsi que le droit international, y compris la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale des États Membres, a rappelé le représentant en conclusion.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: les délégations cherchent les meilleurs moyens de préserver l’espace extra-atmosphérique de toute course aux armements

Soixante-dix-septième session,
22e séance plénière – après-midi
AG/DSI/3698

Première Commission: les délégations cherchent les meilleurs moyens de préserver l’espace extra-atmosphérique de toute course aux armements

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entendu, cet après-midi, les délégations avancer leurs propositions pour empêcher la militarisation de l’espace extra-atmosphérique afin d’en réserver l’exploitation des ressources à des fins pacifiques. 

Pour la trentaine de délégations ayant pris la parole sur la question, des mesures doivent être prises pour éviter que des conflits armés ne s’y étendent ou n’y surviennent, ce qui aurait de graves conséquences pour la sécurité internationale ainsi que pour l’exploration et l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques.  À cet égard, l’adoption de doctrines militaires considérant l’espace comme un lieu d’affrontements militaires a suscité l’inquiétude de pays appelant à la retenue et à la poursuite des efforts onusiens sur la pacification de l’espace. 

C’est ainsi de manière unanime que les pays ont apporté leur soutien aux travaux du Groupe à composition non limitée sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace créé par l’Assemblée générale.  Ce dispositif a été présenté comme un moyen d’ouvrir la voie à la négociation dès que possible, au sein d’une Conférence du désarmement revitalisée, d’un traité juridiquement contraignant couvrant tous les aspects de cette question. 

Les États-Unis d’un côté, la Fédération de Russie et la Chine de l’autre ont expliqué les mesures qu’ils voudraient voir adopter par l’Assemblée générale.  Pour les États-Unis, la plus urgente des menaces spatiales à supprimer est celle de la destruction de satellites depuis la Terre et vers l’espace, qui dégrade l’environnement spatial et réduit les bienfaits qu’on peut tirer de l’espace.  Les États-Unis ont confirmé leur engagement de ne pas mener de destruction de satellites à partir de la Terre et leur représentant a précisé que sa délégation présentera un projet de résolution dont le but est de ne pas engendrer de nouveaux débris spatiaux. 

La Fédération de Russie et la Chine ont, elles, dénoncé le comportement des États-Unis dans l’espace.  Pour le délégué russe, les États-Unis font une utilisation provocatrice des satellites civils, y compris en Ukraine, tandis que la Chine a condamné leurs velléités de domination militaire spatiale.  Le représentant russe a souligné que son pays continue de proposer de ne pas utiliser d’objets spatiaux comme armes contre des cibles sur Terre, dans les airs ou dans l’espace extra-atmosphérique, et de ne pas construire, tester, déployer ou utiliser des armes spatiales pour la défense antimissile.  Il a également annoncé que, cette année encore, sa délégation présentera un projet de résolution sur le non-déploiement en premier d’armes dans l’espace.  Commentant ce texte dont elle est coauteur, la Chine l’a qualifié de texte « très ambitieux, au contraire d’autres beaucoup plus étroits, qui demande notamment aux pays de s’engager à ne pas utiliser la force contre des objets spatiaux ». 

Plusieurs délégations ont toutefois fait observer que, si le projet de traité russo-chinois présenté à la Conférence du désarmement peut constituer une bonne base de discussion en vue d’un traité contraignant, les blocages actuels au sein de ladite conférence, qui durent depuis des années, rendaient utile le projet plus limité d’établissement de normes de comportements responsables présenté par les pays occidentaux.  Comme l’a dit notamment l’Algérie, des mesures globales de transparence et de confiance peuvent représenter d’importantes mesures complémentaires dans les activités spatiales dès lors qu’elles ne se substituent pas à l’objectif final d’un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.

En toute fin de séance, la Première Commission a commencé d’examiner le volet du débat thématique consacré au mécanisme de désarmement.  Les trois interventions de groupes régionaux faites, consacrées notamment à la nécessité pour la Conférence du désarmement de reprendre ses travaux de fond bloqués depuis deux décennies, seront, par souci de cohérence, rattachées au reste du débat sur le sujet, qui aura lieu demain, jeudi 27 octobre, à partir de 15 heures. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Espace extra-atmosphérique (aspects du désarmement) (suite)

M. BRUCE I. TURNER (États-Unis) a rappelé les différentes applications pratiques de l’espace pour les États Membres.  Pour le représentant, la plus urgente des menaces est celle de la destruction de satellites depuis la Terre et vers l’espace, qui dégrade l’environnement spatial et réduit les bienfaits qu’on peut tirer de l’espace.  Les États-Unis ont annoncé leur engagement de ne pas mener de destruction de satellites à partir de la Terre.  Le représentant a rappelé le projet de résolution A/C.1/77/L.62 proposé par son pays, dont le but est de ne pas engendrer de nouveaux débris spatiaux.  Il a émis l’espoir que tous les États se joindront à eux pour adopter le texte.  Le représentant a encouragé tous les pays à reconnaître que les essais destructifs sont inacceptables.  « Ce projet de résolution illustre notre volonté d’avoir une approche plus large pour assurer sécurité », a-t-il déclaré. 

Le représentant a rappelé qu’un socle non contraignant de mesures pouvait aboutir à un instrument contraignant plus tard.  Les États-Unis continuent de soutenir le Groupe de travail à composition non limitée sur le régime applicable à l’espace extra atmosphérique.  En revanche, ils n’appuient pas l’idée de constituer un groupe d’experts gouvernementaux car une de ses conséquences est que de nombreux États n’auraient pas voix au chapitre.  Il est temps de mettre en place des normes conjointes, a-t-il conclu. 

Mme ERIN MORRISS (Nouvelle-Zélande) a estimé que les pays ont tout intérêt à garantir une utilisation sûre, responsable et pacifique de l’espace.  Les activités qui y sont menées fournissent des services essentiels et l’accès à l’espace joue également un rôle dans la réalisation des objectifs de développement durable à l’horizon 2030.  Il est donc dans notre intérêt collectif, en tant qu’États Membres, de garantir un accès et une utilisation sûrs et sécurisés de l’espace, ainsi qu’un environnement spatial durable, pacifique et exempt de conflits, a déclaré la représentante. 

La représentante a salué le travail en cours au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable, créé par la résolution 76/231.  La représentante a estimé que la création délibérée de débris spatiaux est un acte irresponsable qui met en danger à la fois l’accès à l’espace et les objets dans l’espace.  De tels essais peuvent également être perçus comme une menace susceptible d’entraîner des tensions accrues, créant ainsi un climat de méfiance, a-t-elle noté. 

C’est pourquoi la Nouvelle-Zélande a coparrainé la résolution sur les essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe.  En tant qu’État de lancement il est de notre intérêt de préserver l’accès à l’espace, il est également dans notre intérêt collectif, que les États aient ou non une capacité de lancement, de veiller à ce qu’un tel comportement irresponsable n’affecte pas le fonctionnement continu de l’infrastructure spatiale sur laquelle nous comptons tous, a poursuivi Mme Morriss.  La représentante a appelé tous les États à soutenir cette résolution.  Il ne s’agit pas d’une étape finale, mais plutôt d’une contribution modeste et pratique à l’élaboration d’un ensemble de règles et de normes visant à garantir la sûreté et la sécurité permanentes de l’espace, a-t-elle conclu. 

M. ROBERT IN DEN BOSCH (Pays-Bas) a jugé qu’un espace sûr, sécurisé et durable était d’une importance vitale et constituait une responsabilité pour nous tous pour permettre à tous les États de bénéficier des opportunités économiques et sociétales inhérentes au domaine spatial.  Le représentant a rappelé que la gouvernance de l’espace repose actuellement sur cinq traités des Nations Unies, dont le Traité sur l’espace extra-atmosphérique, entré en vigueur voici 55 ans et qui est devenu « le document constitutionnel pour les activités humaines dans l’espace ».  Le représentant a également salué les travaux du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique et les lignes directrices sur la durabilité à long terme.  Il a toutefois observé que la gouvernance de la sécurité spatiale « prend du retard par rapport aux développements dans d’autres domaines ».  Les Pays-Bas estiment donc qu’un bond en avant s’impose pour améliorer cette gouvernance et réduire les risques d’escalade involontaire. 

Pour les Pays-Bas, cette amélioration peut se faire par une approche progressive fondée sur un comportement responsable, en vue d’un éventuel instrument juridiquement contraignant à l’avenir.  Le représentant a estimé que, pour être viables, les accords contraignants doivent s’appuyer sur des capacités de surveillance et des mesures de vérification adéquates. 

Le représentant a déploré les conséquences néfastes de la militarisation de l’espace, qui peuvent affecter l’utilisation pacifique de celui-ci.  En outre, a-t-il fait remarquer, ces activités militaires ne sont pas viables car elles augmentent la probabilité de perdre l’accès à l’espace. 

Pour le représentant, une difficulté tient au double usage et à la double finalité inhérents aux objets spatiaux, qui peuvent, tous, être utilisés comme des armes spatiales.  Dès lors, a-t-il estimé, les approches qui se concentrent uniquement sur les capacités sont irréalisables.  C’est pourquoi les Pays-Bas prônent l’approche visant à s’attaquer aux comportements irresponsables, estimant qu’ainsi « on s’attaquera automatiquement aux capacités ».  Le représentant a donc apporté son soutien au Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales, en tant que forum pour discuter de cette question. 

En revanche, les Pays-Bas, qui notent la décision de la Conférence du désarmement de créer un organe subsidiaire sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, jugent « prématuré d’engager maintenant d’autres processus parallèles ». 

Une des conditions préalables à un espace extra-atmosphérique sûr, sécurisé et durable étant de minimiser la création de débris spatiaux, les Pays-Bas coparraineront le projet de résolution des États-Unis appelant les pays à ne pas procéder à des essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe.  Ils y voient une première étape pragmatique pour inscrire des engagements volontaires dans un futur instrument juridiquement contraignant, qui pourrait d’ailleurs aller au-delà de la question de ces essais. 

M. TANCREDI FRANCESE (Italie) a souligné que la sécurité dans l’espace n’apparaît plus comme une question purement militaire et nationale, mais plutôt comme une question multisectorielle et mondiale qui doit être traitée au niveau international avec l’engagement le plus large de tous les États Membres de l’ONU, des organisations internationales, acteurs commerciaux et représentants de la société civile.  À cet égard, le représentant a noté la nécessité d’assurer l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique et de faire mieux face aux dynamiques d’escalade potentielles et aux menaces à la sécurité qu’elles peuvent poser. 

M. Francese a par conséquent estimé que des normes, des règles et des principes de comportement responsable doivent être élaborés et mis en place afin de promouvoir la sécurité, la sûreté et la durabilité dans l’espace extra-atmosphérique et de préserver l’utilisation à long terme de l’environnement spatial à des fins pacifiques.  L’Italie soutient pleinement les activités du Groupe de travail à composition non limitée visant à parvenir à une compréhension commune de la meilleure façon d’agir pour réduire les menaces pesant sur les systèmes spatiaux et maintenir l’espace extra-atmosphérique en tant qu’environnement pacifique, sûr, stable et durable, exempt de course aux armements et de conflits, « pour le bénéfice de tous ».  L’Italie estime que le Groupe peut ouvrir la voie à une résolution constructive de ces problèmes grâce à l’adoption de normes, de règles et de principes de comportement responsable, a ajouté M. Francese. 

M. MUHAMMAD ZAYYANU BANDIYA (Nigéria) a déclaré qu’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention de la militarisation de l’espace est une condition nécessaire à la promotion de la coopération internationale dans l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques.  Il est donc indispensable.  Après avoir réaffirmé le soutien de sa délégation aux interdictions de placement de toute arme dans l’espace extra-atmosphérique à des fins offensives ou défensives, le représentant a en outre rappelé que tous les États, en particulier ceux qui disposent d’importantes capacités spatiales, ont la responsabilité particulière de contribuer activement à l’objectif de l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique et de la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Pour le Nigéria, ces pays devraient également s’abstenir d’actions contraires à cet objectif et aux traités existants « dans l’intérêt du maintien de la paix et de la sécurité internationales et de la promotion de la coopération internationale ».  Il a appelé à la tenue de négociations de fond, à la Conférence du désarmement, sur l’instrument juridiquement contraignant que le Nigeria appelle de ses vœux. 

Pour Mme DIANE SHAYNE DELA FUENTE LIPANA (Philippines), l’espace extra-atmosphérique est non seulement un patrimoine commun, mais aussi l’héritage de l’humanité.  Chaque nation peut donc l’utiliser de manière pacifique et il doit être protégé et exempt d’armes et d’armement.  La représentante s’est dite favorable à des instruments juridiquement contraignants relatifs à la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, y compris la prévention du déploiement d’armes et la menace ou l’utilisation de la force contre des objets spatiaux.  Pour l’heure, l’absence de normes convenues augmente le risque et les menaces à la sécurité de l’espace extra-atmosphérique.  C’est dans ce contexte, a poursuivi la représentante, que le Président Marcos a appelé l’Assemblée générale, le mois dernier, à définir les normes d’un comportement responsable dans l’espace extra-atmosphérique.

Comme beaucoup de pays en développement, les Philippines dépendent de plus en plus d’infrastructures spatiales et voient l’accès à l’espace extra-atmosphérique comme un droit inaliénable des pays en développement.  La représentante a souligné que les discussions sur la sécurité de l’espace extra-atmosphérique doivent aller au-delà du paradigme stratégique traditionnel.  Elle s’est inquiétée des doctrines sécuritaires qui voient l’espace extra-atmosphérique comme un champ de bataille stratégique.  Elle a exhorté les États Membres à adhérer au Code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques.

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) a déclaré que Moscou est en train de créer un nouveau système de défense antimissile avec une composante antisatellite, ajoutant que son pays est convaincu que les actions de la Fédération de Russie contredisent les valeurs internationales dans le domaine de l’exploration spatiale pacifique.  L’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique a toujours eu pour objectif de sauver la vie et la santé des personnes, a poursuivi le représentant.  Or, la stratégie et les actions de la Russie constituent une menace existentielle pour la paix et la sécurité internationales, posent des défis sans précédent et à long terme à la stabilité mondiale et nécessitent donc une réponse immédiate.  Le représentant a annoncé que sa délégation appuie la résolution portée par les États-Unis sur les essais de missiles antisatellite à ascension directe. 

M. HUGO EMMANUEL GUERRA (Argentine) a indiqué que, pour son pays, le Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, de 1967, est la pierre angulaire du régime juridique international de l’espace.  L’Argentine réaffirme le rôle fondamental que joue cet instrument dans le maintien de l’espace extra-atmosphérique utilisé à des fins pacifiques.  En ce sens, a ajouté le représentant, l’Argentine réitère son respect des principes et accords qui doivent régir les activités des États dans l’exploration et l’utilisation de l’espace, y compris celui de la non-militarisation et de son utilisation stricte pour l’amélioration de conditions de vie et de paix entre les peuples qui habitent notre planète. 

En outre, le représentant a appuyé la négociation, dans le cadre de la Conférence du désarmement, d’un traité interdisant le placement d’armes dans l’espace.  En attendant, il est impératif de continuer à renforcer la transparence et les mesures de confiance dans les activités spatiales, et nous nous félicitons de toutes les initiatives en ce sens, y compris celles reposant sur les contributions du secteur privé et du milieu académique, a conclu le représentant.

M. ADOLF BRUCKLER (Autriche) a déclaré que le potentiel hautement perturbateur des opérations spatiales malveillantes, qu’elles soient interorbitales ou sol-orbite, entraîne des répercussions importantes sur les civils sur terre, en affectant les soins de santé, les transports, les communications ou l’énergie.  Il a fait part de sa préoccupation concernant les conséquences humanitaires possibles d’un conflit dans l’espace et a souligné que le droit international humanitaire s’applique pleinement à l’espace, en particulier ses principes de distinction, de proportionnalité et de précaution. 

Le représentant a regretté que les efforts multilatéraux déployés pour prévenir une course aux armements dans l’espace, que ce soit à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), à la Conférence sur le désarmement ou au sein des Groupes d’experts gouvernementaux sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, n’aient pas donné de résultats substantiels.  Toutefois, il a salué la convocation de négociations conjointes avec la Quatrième Commission.  Le représentant a encouragé les nations spatiales à améliorer le partage d’informations sur les opérations et sur leurs politiques nationales, à accroître les capacités et la coopération en matière de la situation spatiale et à respecter les dispositions pertinentes du Code de conduite de La Haye. 

Le représentant a fait part de sa préoccupation concernant le développement des capacités cinétiques antisatellites.  À cet égard, il a salué l’engagement des États-Unis à déclarer un moratoire sur les essais de missiles antisatellites à ascension directe.  Soulignant qu’il est difficile d’établir les responsabilités des attaques non cinétiques et de cyberguerre sur des systèmes spatiaux, le représentant s’est dit très préoccupé par les effets réverbérants que toute destruction d’infrastructure dans l’espace pourrait avoir sur les sociétés, les économies ainsi que sur la vie humaine.  L’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique doivent se faire au profit et dans l’intérêt de tous les pays, comme le prévoit le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967, a-t-il conclu.

M. MOHAMMAD OMAR (Pakistan) a noté les transformations sans précédent de l’espace extra-atmosphérique ces dernières décennies et le développement de normes pour qu’il reste un bien commun pour tous les peuples.  Il a déploré les menaces, notamment la course aux armements et les risques de déploiement d’armes dans l’espace, qui sont complexes pour la stabilité stratégique à l’échelle mondiale. 

Les acteurs non-gouvernementaux eux-mêmes ne se limitent plus à l’exploitation pacifique de l’espace, a noté le représentant.  Ces risques de plus en plus grands deviendront des risques mondiaux si rien n’est fait, a-t-il poursuivi, soulignant qu’il fallait donc renforcer l’architecture juridique en la matière.  Malheureusement, la Conférence du désarmement n’a pas pu lancer de négociations à ce sujet en raison de l’opposition de quelques États qui continuent de faire obstruction, a déploré le représentant.  Les principes fondamentaux d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, de garantie de la sécurité et de comportements responsables doivent rester au cœur de nos efforts, a-t-il encore lancé.

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) s’est inquiété d’une tendance extrêmement dangereuse qui est apparue lors des derniers développements en Ukraine, à savoir, « l’utilisation par les États-Unis et leurs alliés des éléments d’infrastructure civile, y compris commerciale, dans l’espace extra-atmosphérique lors de conflits militaires ».  Selon lui, les actions occidentales mettent inutilement en péril la pérennité des activités spatiales pacifiques, ainsi que de nombreux processus sociaux et économiques sur Terre qui affectent le bien-être des personnes, en premier lieu les populations des pays en développement. 

Le représentant a ajouté que cette utilisation provocatrice de satellites civils est discutable au regard du Traité sur l’espace extra-atmosphérique et doit être fermement condamnée par la communauté internationale.  Il a indiqué que son pays continue de proposer de ne pas utiliser d’objets spatiaux comme armes contre des cibles sur Terre, dans les airs ou dans l’espace extra-atmosphérique, et de ne pas construire, tester, déployer ou utiliser des armes spatiales pour la défense antimissile.  Le représentant a ensuite présenté les trois projets de résolution que la Russie présentera concernant respectivement le non-déploiement en premier d’armes dans l’espace, des mesures de confiance et de transparence régissant les activités spatiales et d’autres mesures pratiques pour la prévention d’une course aux armements dans l’espace. 

M. LI SONG (Chine) a notamment rejeté les velléités de domination spatiale des États-Unis, qui continuent de considérer l’espace comme un domaine d’expansion militaire.  Les États-Unis disposent de capacités antisatellites très puissantes, si bien qu’ils n’ont plus besoin de procéder à des essais en la matière, a ajouté le représentant, assurant que son pays partage les priorités du Mouvement des pays non alignés en matière de prévention d’une course aux armements dans l’espace et de maintien de son statut pacifique. 

Le représentant a en outre indiqué que, cette année encore, son pays et la Russie présenteront un projet de résolution sur le non-déploiement en premier d’armes dans l’espace, « un texte très ambitieux, au contraire d’autres beaucoup plus étroits, qui demande notamment aux pays de s’engager à ne pas utiliser la force contre des objets spatiaux ».  

M. MD RAFIQUL ALAM MOLLA (Bangladesh) a estimé que l’accès à l’espace extra-atmosphérique est un droit inaliénable de tous les États et que son utilisation devrait être exclusivement pacifique.  C’est sur ces convictions que le Bangladesh est devenu membre du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), a déclaré le représentant.  Celui-ci a fait part de sa préoccupation concernant les conséquences catastrophiques de conflits militaires dans l’espace, qui mettraient en péril la paix et la sécurité internationales.  En tant qu’État partie au Traité sur l’espace extra-atmosphérique, le Bangladesh réaffirme l’importance vitale de prévenir la course aux armements dans l’espace. 

Le représentant a jugé urgent d’entamer des négociations de fond au sein de la Conférence du désarmement sur un instrument juridiquement contraignant et multilatéralement vérifiable sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace dans tous ses aspects.  Il a appelé à une meilleure coordination entre les travaux de la Première Commission et des autres organes pertinents des Nations Unies, notamment le COPUOS, la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement. 

Le représentant a pris note de la première réunion du Groupe de travail à composition non limitée pour examiner les menaces qui pèsent sur l’espace et recommander des normes, des règles et des principes de comportement responsable dans l’espace, ainsi que la manière dont ils contribueraient à des instruments juridiquement contraignants dans ce domaine.  « Avec le lancement dans l’espace de notre premier satellite de communication Bangabandhu-I, notre intérêt pour un espace sécurisé et pacifique est plus grand que jamais », a-t-il rappelé.  Il a souligné que les activités dans l’espace ne doivent pas rester la chasse gardée d’un petit groupe d’États.  Il a estimé que, si les mesures de confiance peuvent être utiles pour prévenir l’armement de l’espace, on ne peut nier l’importance de conclure un instrument international juridiquement contraignant à cet effet. 

M. FLAVIO DAMICO (Brésil) a insisté sur le rôle croissant de l’espace extra-atmosphérique dans le développement, citant les satellites indispensables à presque toutes les infrastructures essentielles, ainsi qu’aux communications, au suivi des changements climatiques et à la sécurité nationale.  Cette dépendance accrue a augmenté les préoccupations quant à la menace de transformation de l’espace extra-atmosphérique en champ de bataille, en particulier en raison du développement de capacités spatiales offensives par plusieurs États. 

De l’avis du Brésil, les débats sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace s’expliquent par le fait que le régime international existant sur la sécurité spatiale est insuffisant pour faire face aux menaces et aux risques actuels et qu’il est urgent de le faire évoluer rapidement.  En ce sens, le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 est un socle important de principes généraux pour la stabilité et la durabilité dans l’utilisation de l’espace.  Sur le front de la sécurité, certains progrès ont été enregistrées grâce à l’adoption de recommandations par l’Assemblée générale en 2013.  Mais la Conférence du désarmement n’a pas réussi à aboutir à la négociation d’un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace en raison de l’érosion de la confiance entre les principales puissances spatiales, a rappelé le représentant. 

Dans ce contexte, le Brésil a décidé de soutenir une approche ascendante avec l’élaboration progressive de normes, règles et principes volontaires qui renforceront le socle d’une discussion plus approfondie sur des éléments normatifs, a expliqué le représentant.  L’une des initiatives les plus urgentes sur ce front est l’interdiction de tous les tests d’armes de destruction de satellites, qui constituent l’un des plus graves menaces à la sécurité de l’espace extra-atmosphérique, a estimé le représentant.

M. HEIDAR ALI BALOUJI (Iran) a appelé à la prise de mesures de confiance et de transparence, premiers pas selon lui vers l’établissement, à la Conférence du désarmement et dès que possible, d’un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Les États-Unis, pour qui tout comportement responsable est une abstraction, constituent une armée spatiale, une entreprise dangereuse qui doit être empêchée par la création et l’entrée en vigueur d’un tel instrument, a-t-il en outre estimé. 

M. NADER LOUAFI (Algérie) a affirmé que l’espace extra-atmosphérique est le patrimoine commun de l’humanité et qu’il doit être exploré et à des fins pacifiques dans un esprit de coopération pour le bénéfice de toute l’humanité.  Compte tenu des conséquences désastreuses de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique ou de l’éclatement de tout conflit militaire dans cet espace, empêcher une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique est une nécessité absolue, a déclaré le représentant.  À cet égard, il est essentiel que tous les États Membres, en particulier ceux qui disposent d’importantes capacités dans le domaine spatial, contribuent à la prévention d’une course aux armements dans l’espace, ceci pour encourager et renforcer la coopération internationale dans l’exploration et l’utilisation des espaces à des fins pacifiques. 

Le représentant a souligné que des préoccupations subsistent quant à l’incapacité du système juridique existant relatif à l’utilisation de l’espace à empêcher sa militarisation.  Il faut renforcer ce régime et cela passe par l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant, dont la négociation doit être prioritaire, a-t-il ajouté.  Toutefois, a-t-il reconnu, des mesures globales de transparence et de confiance peuvent constituer d’importantes mesures complémentaires dans les activités spatiales.  Mais ces mesures volontaires ne peuvent se substituer à la conclusion d’un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.

Mme KIRRI HENDRIKSEN (Royaume-Uni) s’est inquiétée de la concurrence systématique dans l’espace extra-atmosphérique, qui pousse à développer des systèmes cinétiques et à multiplier les systèmes de brouillage.  Les États Membres reconnaissent largement que le droit international s’applique aux activités dans l’espace extra-atmosphérique ainsi qu’à l’utilisation des systèmes spatiaux, a assuré la représentante.  Elle a rappelé que, l’an dernier, 163 États Membres avaient voté pour la création du Groupe de travail à composition non limitée chargé de faire l’inventaire des cadres juridiques internationaux concernant les menaces liées aux comportements des États vis-à-vis de l’espace, lequel permettra de négocier les règles et comportements qui doivent s’appliquer dans l’espace.  Elle a jugé nécessaire une combinaison de normes juridiques contraignantes et de normes non contraignantes pour assurer la sécurité et prévenir une course aux armements dans l’espace.

M. PAHALA RALLAGE SANATHANA SUGEESHWARA GUNARATNA (Sri Lanka) a rappelé qu’il existe un ensemble substantiel de lois traitant de divers aspects de l’utilisation et de l’exploration de l’espace extra-atmosphérique.  Le Sri Lanka rejette toute doctrine visant à classer l’espace comme un « domaine de guerre » ou « le prochain champ de bataille » car, fondées sur le seul désir de dominer et d’exploiter, elles ignorent que « nous ne sommes tous que de simples créatures sur la planète Terre, un corps céleste minuscule, par rapport à la vaste étendue de l’univers ».  Le représentant a rappelé que les technologies spatiales procurent des services d’une portée et d’une fiabilité considérables utilisées bien au-delà des seuls États qui ont la capacité d’utiliser l’espace.  De ce fait, les conflits dans l’espace ne touchent pas seulement les nations spatiales, mais tout le monde, et doivent être évités, sans quoi leurs conséquences catastrophiques nous atteindrons tous. 

Le représentant a rappelé que son pays avait traditionnellement parrainé une résolution sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, et le fera encore cette année.  Il a rappelé le désir de nombreux pays de voir adopté un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace et souligné à nouveau la nécessité urgente d’entamer des travaux de fond sur le sujet à la Conférence du désarmement.  Il a estimé que le projet de traité présenté conjointement par la Russie et la Chine à la Conférence du désarmement en 2008 et actualisé en 2014 devait être pris en compte, de même que les discussions du Groupe d’experts gouvernementaux établi conformément à la résolution 72/250 de l’Assemblée générale.  Il a regretté que le consensus sur le projet de rapport final du Groupe d’experts gouvernementaux ait été « bloqué par un État partie ».  Pour le représentant, « une guerre dans l’espace ne peut être gagnée et ne doit pas être menée » et le seul moyen d’empêcher une course aux armements dans l’espace est d’élaborer des réglementations contraignantes globales, qui doivent faire fond sur le cadre juridique existant, qui reste applicable. 

Préoccupé par les conséquences de la poursuite du développement et du déploiement de systèmes de défense contre les missiles balistiques et par la question des débris spatiaux, le Sri Lanka considère l’élaboration de normes et principes de comportement responsable dans l’espace comme « une mesure utile » mais qui doivent aboutir à terme à la mise en place d’instruments juridiques internationaux et à l’établissement de limites contraignantes à le militarisation potentielle de l’espace.  Le Sri Lanka, qui soutient toute initiative visant à promouvoir l’utilisation pacifique et sûre de l’espace, se félicite de l’engagement récent de plusieurs États à ne pas procéder à des essais de missiles antisatellites à ascension directe, y voyant un premier pas positif dans la bonne direction. 

M. LUC JOTTERAND (Suisse) a jugé que des mesures doivent être prises pour éviter que des conflits armés ne s’étendent à l’espace ou n’y surviennent, ce qui aurait de graves conséquences pour la sécurité internationale ainsi que pour l’exploration et l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques.  Dans ce contexte, la Suisse est particulièrement préoccupée par un certain nombre de défis liés à la sécurité affectant la stabilité de l’espace.  Le représentant a mentionné le placement d’armes dans l’espace, qui augmente le risque de faire de ce dernier un théâtre d’affrontements militaires et d’avoir un impact négatif sur son utilisation pacifique.  En outre, l’adoption de doctrines militaires considérant l’espace comme un théâtre d’affrontements militaires suscite également des inquiétudes et peut contribuer à accroître les tensions, a estimé le représentant, pour qui la retenue dans ce domaine est une nécessité. 

Le représentant s’est ensuite félicité des annonces faites par un certain nombre d’États, dont la Suisse, de ne pas effectuer d’essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe dans l’espace.  Nous espérons que de tels engagements contribueront à l’adoption de nouvelles mesures visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et de normes internationales contraignantes appropriées, a-t-il dit.  Il a salué à son tour le lancement réussi des travaux du Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable, notant qu’une meilleure compréhension de l’application du cadre normatif international existant en matière de sécurité spatiale est particulièrement importante et permet d’identifier les lacunes ainsi que les domaines qui doivent potentiellement être renforcés.

M. IGNACIO SANCHEZ DE LERIN (Espagne) a rappelé que l’espace est un bien commun, dont l’utilisation relève de la responsabilité de l’ensemble de l’humanité, mais a constaté qu’il est « encombré, contesté et compétitif » et que les risques et les menaces s’y multiplient.  Il faut accélérer et intensifier les efforts pour parvenir à un environnement spatial qui soit pacifique, sûr, stable et durable pour tous, a déclaré le représentant.  Des actions telles que les essais de missiles antisatellites doivent être condamnés avec la plus grande fermeté, a-t-il affirmé.  Il s’est félicité de l’engagement pris par un nombre croissant d’États de ne pas procéder à des essais destructeurs de missiles antisatellites à ascension directe.

Le représentant a salué la résolution présentée par les États-Unis et a émis l’espoir qu’elle pourra avancer grâce au soutien d’une majorité d’États, y compris ceux qui souhaitent poursuivre les discussions jusqu’à l’obtention d’un instrument juridiquement contraignant.  Il a soutenu les travaux du Groupe de travail à composition non limitée créé par la résolution 76/231 de l’Assemblée générale, sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable.  Les travaux du groupe ont été l’occasion d’examiner le cadre juridique existant, de réfléchir à ses lacunes et à ses possibilités de développement, et de réaffirmer l’applicabilité du droit international à l’espace, notamment la Charte des Nations Unies et les principaux traités relatifs à l’espace, a rappelé le représentant.  Pour lui, le groupe offre un cadre de dialogue et de confiance dans lequel les États peuvent partager leurs préoccupations et leurs priorités dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique, qui évolue rapidement. 

Par ailleurs, au niveau national, le représentant a annoncé la création immédiate de l’Agence spatiale espagnole, qui mettra en œuvre la politique spatiale de l’Espagne conformément à ces principes.

M. AZRIL BIN ABD AZIZ (Malaisie) a apporté le soutien de sa délégation à toutes les résolutions déposées sur la question de la prévention de la militarisation de l’espace extra-atmosphérique.  Le représentant a réitéré la nécessité de prendre des mesures de confiance accrues.  Il a appuyé les travaux du Groupe à composition non limitée, un dispositif à même d’ouvrir la voie à l’élaboration d’un traité juridiquement contraignant contre la course aux armements dans l’espace. 

Pour M. BAE JONGIN (République de Corée), si les États Membres partagent tous l’objectif de maintenir la paix dans l’espace extra-atmosphérique, il ne faut pas fermer les yeux sur la réalité qu’il existe des points de vue divergents sur la façon d’atteindre cet objectif commun et sur les priorités urgentes dans ces domaines.  Un sentiment persistant de méfiance et un manque de communication entre les États ont contribué à l’aggravation du sentiment de division, a déploré le représentant.  En outre, a-t-il fait valoir, compte tenu de la nature transversale de la technologie spatiale, il n’est pas facile pour les États d’être clairs sur leurs intentions en matière d’activités spatiales, ce qui peut entraîner une escalade des tensions et même une course aux armements.

Nation spatiale, la République de Corée s’investit dans les groupes de travail visant à trouver un consensus sur les menaces relevant du domaine spatial et à rédiger des recommandations sur un comportement responsable, a expliqué le représentant.  Pour lui, l’objectif reste de conclure un traité juridiquement contraignant et vérifiable sur la sécurité spatiale, sachant que ne pas se préoccuper du manque de normes, principes et règlements pourrait entraîner des conséquences irréversibles.  À cet égard, la République de Corée est fière d’avoir été l’un des premiers pays à s’engager à ne pas conduire des essais de missiles antisatellites à ascension directe. 

Mme ANEL BAKYTBEKKYZY (Kazakhstan) a déclaré que sa délégation souscrit pleinement au projet de traité sur la prévention du déploiement d’armes dans l’espace, présenté par la Chine et la Russie à la Conférence du désarmement en 2008 et 2014.  Cependant, les obstacles politiques et l’impasse de la Conférence du désarmement ont jusqu’à présent entravé toutes les tentatives visant à avancer sur la voie d’un accord international juridiquement contraignant, a noté la représentante.  Elle a jugé qu’en raison de ces blocages persistants, il est essentiel d’avoir de nouvelles discussions sur la question de la Prévention d’une course aux armements dans l’espace impliquant d’autres instances internationales. 

Par ailleurs, la représentante a jugé intéressante la proposition des États-Unis sur la prévention des essais de missiles antisatellites à ascension directe.  Elle a néanmoins suggéré que cette proposition pourrait bénéficier d’une discussion plus détaillée sur le plan technique avec toutes les parties prenantes intéressées.  Le Kazakhstan appuie toutes les initiatives visant à promouvoir les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique tant qu’elles ne sont pas politisées ou ne visent pas à singulariser ou à exclure un État ou un groupe d’États en particulier.

M. ICHIRO OGASAWARA (Japon) a annoncé l’engagement de son pays à ne pas effectuer d’essais de missiles antisatellites à ascension directe (ASAT).  Le représentant a ajouté que le Japon considère les travaux du Groupe de travail à composition non limitée comme un moyen pratique de faire avancer la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Le Japon se tient prêt à apporter des contributions constructives au débat pour faire de l’espace extra-atmosphérique un environnement sûr, sécurisé, stable et durable.  Par ailleurs, le représentant a jugé essentiel d’avancer dans l’élaboration de mesures de confiance et de transparence pour réduire les menaces pesant sur les systèmes spatiaux.  À cet égard, il a appelé la Commission du désarmement à se pencher sur ces questions en vue de fournir des recommandations à l’Assemblée générale. 

M. CHRISTIAN PADILLA (Cuba) a affirmé que le désarment devrait être la priorité de tous.  Il a plaidé pour un document contraignant et universel, « un instrument qui interdirait les matières fissiles pour la fabrication d’armes ».  Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est le premier instrument juridiquement contraignant portant sur ce genre d’armes, a-t-il rappelé, avant d’appeler à « progresser vers un monde exempt d’armes nucléaires », tout en déplorant que la Conférence d’examen du TNP n’ait pu aboutir à un document final, « ce qui nous éloigne de l’idéal du désarmement ».  Le représentant s’est dit fier de faire partie d’une région exempte d’armes nucléaires.  Il a en outre condamné les mesures coercitives qui entravent les enquêtes de l’AIEA et empêchent l’utilisation du nucléaire à des fins pacifiques. 

M. JOSÉ EDUARDO PEREIRA SOSA (Paraguay) s’est engagé en faveur de l’utilisation durable et pacifique de l’espace, sans tenir compte du degré de développement socioéconomique des États.  Nous avançons dans les domaines de l’ingénierie spatiale et de l’observation de la Terre en mettant l’accent sur le renforcement des capacités afin de mettre en œuvre un programme spatial autochtone et durable, a expliqué le représentant.  Le principe de l’utilisation pacifique de l’espace contenu dans le Traité de 1967 est désormais intégré dans le droit national et dans la politique spatiale nationale du Paraguay en vigueur depuis 2019, a-t-il précisé. 

Pour le Paraguay, un conflit armé dans l’espace constituerait une violation du droit international et de la Charte des Nations Unies.  Le représentant a prôné la conclusion d’un instrument juridiquement contraignant à même de garantir les aspirations des membres de la communauté internationale et de prévenir une course aux armements dans l’espace.  Le premier satellite du Paraguay, récemment lancé, est inscrit au registre des Nations Unies, a fait observer le représentant en particulier. 

M. JORGE VIDAL (Chili) a plaidé en faveur de normes, règles et principes de comportement responsable par rapport aux menaces des États contre les systèmes spatiaux, voire de la négociation d’instruments juridiquement contraignants visant à prévenir la course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Selon le représentant, il faut prendre en considération les menaces actuelles et futures.  Il s’est dit conscient des perceptions différentes des menaces liées à la nature et au risque de dommages environnementaux de l’espace extra-atmosphérique, comme ceux qui peuvent résulter de la destruction de satellites. 

Pour le représentant, la principale menace dans l’espace est le déploiement d’armes.  Ce risque doit absolument être évité, étant donné que l’espace extra-atmosphérique ne peut se transformer en plateforme pour lancer des actes d’agression et de guerre, ou en un lieu permettant de s’assurer une supériorité, voire une suprématie.  Il a plaidé pour la négociation urgente d’un instrument international juridiquement contraignant.

M. SIARHEI MAKAREVICH (Bélarus) a considéré que la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique est une priorité dans le domaine de la sécurité internationale.  Il a confirmé son soutien au respect « à la lettre » et à l’universalisation des instruments du droit international existants qui régissent les activités spatiales des États, en soulignant l’initiative de non-déploiement en premier d’armes dans l’espace extra-atmosphérique.  Le soutien universel à cette initiative permettrait en effet de garantir qu’il n’y aurait pas de second déploiement non plus, a-t-il noté. 

Le représentant a appelé à coordonner les travaux entre les instances existantes des Nations Unies, y compris la Première Commission, afin d’éviter les doublons et d’alléger l’ordre du jour de ses organes.  Il est à ses yeux nécessaire d’intensifier les efforts en vue d’un traité interdisant la militarisation de l’espace, notamment sur la base du projet russo-chinois de prévention du déploiement d’armes dans l’espace extra-atmosphérique. 

Mme NOHRA MARIA QUINTERO CORREA (Colombie) a estimé que l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique peut présenter des risques.  Pour que les États aient accès aux technologies spatiales, un cadre est nécessaire, a déclaré la représentante, même si les mesures de confiance sont aussi importantes.  Il faut redoubler d’efforts pour préserver l’espace pour les générations à venir, pour augmenter la confiance et l’échange d’informations entre États.  À cet égard, les mesures de confiance ainsi que les normes et principes pour des comportements responsables doivent être encouragés.  La représentante a dit accorder beaucoup d’importance aux travaux du Groupe de travail à composition non limitée.  En outre, des échanges sur le traité de 1967 et sur les accords qui ont suivi ont eu lieu au niveau multilatéral, mais il reste un vide juridique, a-t-elle estimé. 

M. CONLETH BRADY (Irlande) a fait savoir que l’Irlande est fermement attachée à la préservation d’un environnement spatial sûr et durable ainsi qu’à l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique sur une base équitable pour tous, raison pour laquelle elle participe au groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, règles et principes de comportement responsable.  L’espace est un patrimoine commun et les activités spatiales doivent être menées conformément au droit international, a insisté le représentant. 

Les systèmes spatiaux, en particulier les satellites de navigation et de communication, sont essentiels au fonctionnement des infrastructures civiles ainsi que pour lutter contre les changements climatiques et atteindre les objectifs de développement durable, a rappelé le représentant.  Des comportements irresponsables avec ces systèmes pourraient donc entraîner des conséquences humanitaires graves et menacer les acquis de développement, a-t-il souligné, avant de relever que les acteurs non étatiques sont également capables de menacer les systèmes spatiaux. 

L’Irlande reste préoccupée par la prolifération d’armes antisatellites, qui risquent de produire des débris à longue durée de vie.  À cet égard, elle condamne l’essai par la Fédération de Russie d’une arme antisatellite kinétique à ascension directe contre l’un de ses satellites, estimant que tous les États devraient s’abstenir de lancer de telles armes.  Par ailleurs, elle s’inquiète des cyberattaques, des brouillages et autres interférences électromagnétiques, qu’elle juge irresponsables et menaçant la sécurité des personnes et des biens. 

Mgr GIUSEPPE QUIRIGHETTI, Observateur permanent adjoint du Saint-Siège, a estimé que chaque État a le devoir de sauvegarder l’espace extra-atmosphérique de manière responsable en tant que gardien pour les générations présentes et futures.  Il a souligné qu’il est essentiel que l’espace extra-atmosphérique reste définitivement non militarisé et soit préservé à des fins pacifiques, au bénéfice de tous.  Le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 interdit aux États de stationner dans l’espace extra-atmosphérique ou sur des corps célestes ou de placer en orbite autour de la Terre des armes nucléaires ou toute autre arme de destruction massive, a-t-il rappelé.  Néanmoins, bien que l’espace soit formellement à l’ordre du jour de la Conférence du désarmement depuis 1985, la communauté internationale n’a pas encore réussi à négocier un accord sur l’interdiction de tous les types d’armes dans l’espace, a-t-il déploré. 

L’Observateur permanent adjoint a constaté avec inquiétude que divers États ont consacré des ressources aux essais d’armes orbitales et spatiales, ce qui risque de provoquer une course aux armements dans l’espace.  Le Saint-Siège note également avec préoccupation que plusieurs États ont lancé des essais d’armes antisatellites qui ont créé des nuages de débris, mettant en danger les objets spatiaux.  Il est donc bienvenu que la Première Commission envisage l’adoption d’une résolution introduisant un moratoire sur ces essais.  L’Observateur permanent a estimé qu’un accord multilatéral pour ne pas lancer de tests d’armes des destructions par ascension directe doit être renforcé par d’autres mesures de transparence et de confiance.  L’élaboration de ces mesures de confiance jette les bases d’un accord juridiquement contraignant interdisant l’armement de l’espace et les armes qui menacent les objets spatiaux, a-t-il conclu. 

Mécanisme pour le désarmement

Afin d’assurer la cohérence des communiqués de presse, les résumés des interventions faites en fin de journée au titre de ce volet du débat thématique seront inclus dans le communiqué de presse de la Première Commission du jeudi 27 octobre après-midi.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Grands Lacs: l’Envoyé spécial du Secrétaire général sollicite un appui du Conseil de sécurité aux efforts régionaux de paix et de stabilité

9165e séance - matin
CS/15078

Grands Lacs: l’Envoyé spécial du Secrétaire général sollicite un appui du Conseil de sécurité aux efforts régionaux de paix et de stabilité

Venu présenter ce matin le rapport sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région (« Accord-cadre d’Addis-Abeba »), l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs a demandé le soutien du Conseil de sécurité, et de la communauté internationale dans son ensemble, aux efforts régionaux entrepris pour cette mise en œuvre, ce qui n’a pas empêché la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda de continuer, devant les membres du Conseil de sécurité, à s’accuser mutuellement de soutenir des groupes armés.

Présentant les initiatives régionales, qu’il demande au Conseil de sécurité de soutenir, l’Envoyé spécial Huang Xia a expliqué que ces efforts comprennent, outre le processus de paix de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) sur la situation dans l’est de la RDC, dit « processus de Nairobi », des efforts de médiation entre le Rwanda et la RDC conduits par le Président de l’Angola et le Président en exercice de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).  Le mécanisme de consultation entre le processus de Luanda et le processus de Nairobi a aussi été mentionné parmi les efforts régionaux du volet politique.

Les États de la région se sont en outre lancés dans la coopération bilatérale dans les domaines sécuritaires et économiques.  La RDC a signé des accords sécuritaires avec la République du Congo voisine et avec le Burundi, permettant ainsi le déploiement de militaires burundais dans l’est de la RDC, tandis que le Rwanda et l’Ouganda ont continué à se rapprocher.  Sur le plan économique, des accords bilatéraux ont été conclus entre le Burundi, la RDC et la République-Unie de Tanzanie pour la construction d’une ligne de chemin de fer, pendant que l’Ouganda et la Tanzanie se sont mis d’accord sur la construction d’une ligne de transmission électrique de 400 kV allant de Masaka (Ouganda) au port de Mwanza (Tanzanie), comme le décrit le rapport.

Ces développements interviennent dans un contexte où, a poursuivi M. Xia, la situation humanitaire reste préoccupante, avec environ 12 millions de personnes déplacées.  Il a également fait part de son inquiétude face à l’activisme des groupes armés, le M23 et les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) en tête, qui se poursuit, de même que s’intensifient les tensions entre le Rwanda et la RDC.  De fait, les deux pays ont continué, devant le Conseil de sécurité, à s’accuser mutuellement de soutenir les groupes armés actifs dans la région, en particulier les FDLR et le M23.

Pour le Rwanda, « la force génocidaire de 1994 », à savoir les FDLR, est installée avec tolérance en RDC.  Elle continue, en dépit de plusieurs résolutions appelant à son désarmement et à sa dissolution, à recruter et former des combattants pour commettre des meurtres à caractère ethnique au Rwanda, selon le délégué de ce pays.  Ce genre de relation attirera toujours l’attention et la vigilance du Rwanda, a mis en garde le représentant.

Son homologue de la RDC a quant à lui rappelé que le Rwanda, en violation de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, occupe depuis plus de quatre mois la ville de Bunangana, sous couvert du M23.  La RDC, son Président et sa population ne lâcheront aucun centimètre carré de leur sol, a-t-il prévenu, avant d’appeler le Conseil à imposer des sanctions au M23 et au pays qui menacent la paix, la sécurité et la stabilité dans la région des Grands Lacs.  Il a aussi demandé que le Conseil condamne fermement par voie de résolution le Rwanda pour son soutien au groupe armé M23.

Les membres du Conseil de sécurité ont quant à eux entendu diversement les appels lancés au Conseil, tentant de répondre à chacune des demandes.  Plusieurs délégations ont en effet soutenu l’appel de l’Envoyé spécial en faveur du nécessaire soutien aux politiques et initiatives régionales, si l’on veut parvenir à des effets concrets, comme a dit la France.  Pour autant, la paix dans la région ne sera pas atteinte sans mesures de confiance et tant que la méfiance entre la RDC et le Rwanda continuera de jeter de l’huile sur le feu, ont estimé les membres des A3 (Gabon, Ghana et Kenya).  Ce qu’il faut, c’est le retrait du M23 de toutes les localités occupées, le désarmement et la coopération pour mettre un terme à l’action inhumaine des FDLR, ont notamment proposé ces trois membres africains du Conseil, ainsi que la Norvège et la France.

Le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation a été salué en même temps que la création d’une force régionale actée dans le cadre du Processus de Nairobi.  Alors que cette force a besoin d’un soutien politique, technique et financier pour exécuter son mandat, elle doit le faire en étroite et scrupuleuse coordination avec la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), ont notamment réclamé le Burundi, la Norvège, le Royaume-Uni, le Brésil, les États-Unis et la Fédération de Russie.

Si pour cette dernière, Kinshasa doit garder un rôle moteur, il est impératif que ces forces n’aggravent pas une situation déjà tendue, et il faut qu’elles respectent les droits humains, protègent en priorité les civils et s’abstiennent d’activités illicites, telles que l’extraction de ressources naturelles, ont également insisté les États-Unis.  La question des minerais, en particulier les problèmes d’exploitation illégale, de trafic et de commerce, a d’ailleurs été soulevée par les délégations.  De l’avis général, ces problèmes continuent à alimenter le cycle vicieux des affrontements intercommunautaires, des activités des groupes armés ainsi que leur instrumentalisation par les réseaux criminels transfrontaliers.

Il a alors été jugé important, notamment par l’Irlande, l’Inde ou la Chine, de progresser sur les questions de transparence, notamment par le biais du Mécanisme régional de certification de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) ou par la mise en œuvre des recommandations de l’atelier régional de haut niveau de Khartoum, de 2021 sur les ressources naturelles.  Pour concourir à cet effort, l’Envoyé spécial a indiqué avoir effectué une mission conjointe de plaidoyer avec le Secrétaire exécutif de la CIRGL à Paris et à Bruxelles en vue d’un soutien accru à une meilleure gouvernance des ressources naturelles.  Et d’autres visites sont prévues dans certains pays de destination de ces minerais, a-t-il annoncé. 

LA SITUATION DANS LA RÉGION DES GRANDS LACS (S/2022/735)

Mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région

Déclarations

M. HUANG XIA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, a expliqué que sept mois après son dernier passage devant le Conseil de sécurité, les inquiétudes qu’il avait exprimées sur la détérioration du contexte sécuritaire et la montée des tensions dans la région résultant de la résurgence du Mouvement du 23 mars (M23) demeurent d’actualité.  La région des Grands Lacs continue en effet d’être confrontée à l’un de ses plus grands défis: l’instabilité due à l’activisme des groupes armés.  La persistance des activités des Forces démocratiques alliées (ADF), des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), de la Résistance pour un état de droit (RED Tabara) et du M23 alimente l’insécurité dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et ravive la méfiance et les tensions entre les pays de la région, en particulier entre la RDC et le Rwanda.  Cet activisme met en péril les acquis de ces dernières années en matière de coopération bilatérale et régionale, qu’appelle de ses vœux l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, a-t-il mis en garde.

Sur le plan humanitaire, la situation reste également préoccupante, avec, selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés, plus de 4,9 millions de réfugiés et de demandeurs d’asile ayant fui en raison de la violence et de facteurs liés au climat.  En outre, environ 12 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont enregistrées au Burundi, en République centrafricaine, en RDC, au Soudan du Sud et en Ouganda.

Pour faire face à ces défis, et malgré les obstacles, les gouvernements et les peuples de la région sont restés mobilisés, s’est-il réjoui, avant de saluer le rôle du Kenya, de l’Angola, ainsi que du Burundi.  Leurs efforts ont notamment permis une médiation entre la RDC et le Rwanda afin d’établir une feuille de route visant au règlement pacifique du contentieux entre les deux pays.  Le Bureau de l’Envoyé spécial a, de son côté, facilité la première mission de reconnaissance et de contact de la cellule opérationnelle dans la province du Sud-Kivu.  Cette mission avait pour objectif d’engager les acteurs locaux afin d’identifier les opportunités de contact avec les groupes armés, faciliter leur désarmement et leur rapatriement volontaire sans conditions politiques.

À côté de cela, les initiatives bilatérales visant au renforcement de la coopération entre les États de la région dans les domaines de la sécurité, du commerce, de l’énergie ou des transports se sont multipliées: la RDC a adhéré à la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et renforcé sa coopération sécuritaire avec le Burundi.  L’Ouganda et le Rwanda ont de leur côté fait des efforts de rapprochement.  Cet engagement des acteurs régionaux pour rechercher des solutions politiques pour préserver la stabilité, la cohabitation pacifique entre États épouse les principes de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, a apprécié l’Envoyé spécial en notant qu’il atteste de la pertinence de cet instrument tout comme du Pacte de la CIRGL de 2006, comme socles de concertation et de coopération entre les États de la région, pour répondre aux défis communs.  Il a dès lors appelé les pays signataires à intensifier leurs efforts pour la mise en œuvre intégrale de l’Accord-cadre et des autres instruments régionaux.

M. Huang a également estimé que la stabilisation de la région dépend aussi de sa capacité à transformer sa dotation en ressources minérales, stratégiques en un vecteur de développement durable et inclusif, dans le contexte où l’exploitation et le commerce illicites de ces ressources continuent d’alimenter le cycle vicieux des affrontements intercommunautaires, des activités des groupes armés ainsi que leur instrumentalisation par les réseaux criminels transfrontaliers.  Pour y contribuer, son bureau a effectué une mission conjointe de plaidoyer avec le Secrétaire exécutif de la CIRGL à Paris et à Bruxelles en vue d’un soutien accru à une meilleure gouvernance des ressources naturelles.  D’autres visites sont prévues dans certains pays de destination de ces minerais, a-t-il indiqué.

Revenant aux efforts de paix, il a dit avoir entendu, au cours de ses missions dans la région, de fortes attentes pour un soutien politique, technique et financier des Nations Unies.  Pour cette raison, il a sollicité l’appui du Conseil de sécurité et de l’ensemble de la communauté internationale, afin qu’un appui multiforme plus conséquent soit apporté aux initiatives régionales, ainsi qu’au Plan d’action de la Stratégie régionale des Nations Unies pour les Grands Lacs.  La stabilisation de la région et la restauration de la confiance, qui sont un double processus long, exigent une mobilisation soutenue et significative de la communauté internationale.  Seule une action coordonnée, cohérente et harmonieuse permettra d’accompagner les Grands Lacs sur le chemin de la paix et du développement durable, a conclu M. Huang.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a jugé impératif que les initiatives de paix pour la région produisent des résultats concrets.  Elle a appelé tous les groupes armés congolais à participer sans conditions au Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation.  Aux groupes armés étrangers, elle a demandé de déposer immédiatement les armes et de réintégrer dans leur pays d’origine.  Dans la continuité des initiatives régionales pour tenter de rétablir la paix, elle a souhaité que le dialogue soit maintenu entre les États de la région.  Elle a souhaité que les engagements pris, que ce soit dans le cadre de la feuille de route de Luanda ou lors de la réunion organisée, en septembre, à New York sous l’égide du Président de la République française, produisent des résultats concrets, appelant notamment au retrait du M23 de toutes les localités occupées et à la coopération pour mettre un terme à l’action des groupes armés, y compris des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  De même, les consultations intra-congolaises doivent se poursuivre, a recommandé la déléguée.

Pour elle, une paix durable nécessitera de désarmer les anciens combattants, de protéger les plus vulnérables et d’assurer la justice, car les mesures militaires, seules, ne sauront rétablir la paix.  Elle a appelé à créer dans la région des mécanismes robustes pour la reddition de comptes et le rapatriement des anciens membres des groupes armés, demandant aussi d’assurer le retour durable des réfugiés et des personnes déplacées par les conflits.  Le renforcement de la coopération judiciaire doit également se poursuivre, a préconisé la déléguée en misant sur la mise en œuvre de la Déclaration de Kinshasa, adoptée en juin dernier, et en souhaitant que prévale ce même esprit de coopération entre les États de la région pour prévenir et lutter contre le terrorisme.  C’est pourquoi la France apportera, cette année, un soutien financier au Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations Unies afin de renforcer les capacités des États de la région, a-t-elle annoncé.  Enfin, la déléguée a déclaré que la lutte contre le trafic de ressources naturelles doit aller de pair avec un développement durable au service des populations.  Le commerce des ressources doit, de ce fait, être régulé et contrôlé, a-t-elle dit, en recommandant aussi la multiplication des initiatives de développement au service des populations.  Elle a conclu en indiquant que, ce mois-ci, l’Union européenne (UE) a octroyé 25 millions d’euros à la RDC pour faire face à la crise alimentaire.

M. MADHU SUDAN RAVINDRAN (Inde) a observé des progrès dans les dialogues au niveau bilatéral et régional et pris note des consultations entre les processus de Nairobi et Luanda, ainsi que des discussions entre le Gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et les groupes armés.  Il a condamné la violence à laquelle se sont adonnés certains groupes armés, soulignant la nécessité de faire preuve de retenue et d’amorcer un dialogue fructueux.  Il s’est félicité que la RDC mette l’accent sur le renforcement des capacités opérationnelles de ses forces armées.  D’un autre côté, le succès du programme de désarmement et de démobilisation reste fondamental, pour peu qu’il s’accompagne de programmes de développement durable, a fait valoir le délégué.  L’exploitation illégale, le trafic et le commerce des ressources naturelles ont contribué à la violence dans la région, a-t-il affirmé, en invitant au renforcement des normes dans ce contexte.  Il a appuyé l’Initiative régionale sur la lutte contre l’exploitation et le commerce illicites des ressources naturelles, dont les progrès ont été examinés par le Comité régional de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).  Enfin, il a fait remarquer que les groupes armés, comme les Forces démocratiques armées (FDA), profitent des réseaux terroristes.

M. MARTIN KIMANI (Kenya), au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a fait part de sa profonde préoccupation face à la détérioration de la sécurité dans les provinces orientales de la République démocratique du Congo (RDC) et à ses effets sur la stabilité de la région des Grands Lacs.  Parmi les questions urgentes, il a évoqué la menace continue des groupes armés, le renforcement des capacités des dirigeants de la région et l’exploitation illégale des ressources naturelles.  Il a cité, en particulier, la prise de Bunagana dans le Nord-Kivu, et dénoncé l’escalade de la violence à Rutshuru, depuis le 20 octobre, entre les FARDC et les rebelles du M23 qui a fait au moins 10 morts et des dizaines de blessés.  Il a condamné, d’un autre côté, les activités « illégales et inhumaines » des M23, FDA, CODECO, FDLR-FOCA et Red Tabara, groupes qui ont commis des atrocités de masse, et de graves violations des droits de l’homme.  Il a noté que les FDA en particulier entretiennent des liens avec des réseaux terroristes, y compris Daech, ce qui exige une riposte régionale forte.

M. Kimani a ensuite souhaité une mise en œuvre rapide du plan d’action de la Stratégie de l’ONU pour la paix, la consolidation, la prévention et la résolution du conflit dans les Grands Lacs (2021-2023), de même que de l’Accord-cadre de coopération de paix, de sécurité et de coopération pour la RDC et la région des Grands Lacs.  Il a aussi salué la prochaine tenue, du 4 au 13 novembre, du troisième Dialogue intercongolais pour la paix, ainsi que la contribution de l’Angola, du Kenya et du Sénégal au Fonds pour la paix de la Communauté d’Afrique de l’Est, sis à Arusha, et qui appuie le processus politique.  Il a en outre encouragé le Gouvernement congolais au renforcement des capacités des FARDC dans le but de consolider l’autorité de l’État dans les zones de conflit et l’a incité à l’élaboration d’une stratégie en vue d’une réforme ambitieuse de ses forces armées et du secteur de la sécurité pour qu’ils assument pleinement leur responsabilité en matière de protection des civils, et répondent aux besoins de tous les Congolais après le départ de la MONUSCO.

Au sujet du rétablissement de la confiance, M. Kimani a relevé, non sans inquiétude, le degré élevé de méfiance entre la RDC et le Rwanda ce qui, selon lui, ne fait que jeter de l’huile sur le feu dans le contexte des tensions régionales.  Il a aussi vivement condamné le recours au discours de haine ainsi que la désinformation et la mésinformation, qui contribuent au manque de confiance, à la tension et à l’animosité, ce qui incite à plus de violence.  À cet égard, il a exhorté l’Envoyé spécial, de même que le Représentant spécial du Secrétaire général en RDC, à s’engager activement avec les médias sociaux de sorte à les encourager à une action rapide et globale concernant le discours de haine.  Sur la problématique des ressources naturelles, il a encouragé les États de la région à appliquer des règles et des mesures de responsabilisation pour une utilisation durable de celles-ci.  Il a exhorté les États à privilégier la législation et les normes en vigueur aux conflits d’intérêts.  Enfin, il a demandé aux entités mondiales important et exportant des ressources naturelles de sensibiliser sur la question des minéraux des conflits et de mettre sur pied des systèmes de suivi.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a estimé qu’avec la présence de plusieurs groupes armés en République démocratique du Congo (RDC), il est évident qu’une coopération étroite est plus importante que jamais entre les pays de la région.  Elle a précisé que des actions militaires seules ne peuvent conduire à une normalisation sur le long terme en RDC.  Nous avons besoin de dialogue, nous avons besoin de mesures de confiance efficaces ainsi que de consolidation des États régionaux, a-t-elle argué.  La représentante a salué les décisions importantes sur la création de forces régionales prises lors des consultations dans le cadre du Processus de Nairobi.  Il est important que leur mise en œuvre soit soutenue par la communauté internationale, en étroite coordination avec la MONUSCO et avec un rôle moteur de Kinshasa, a-t-elle appelé.  Elle a confirmé la disponibilité de la Fédération de Russie à aider à la stabilisation au sein de la région des Grands Lacs, en encourageant le dialogue et la coopération entre les pays de la région.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a déclaré que la situation humanitaire et sécuritaire dans la région des Grands Lacs demeure très préoccupante, notant que les attaques des groupes armés ont fait plus de 2 000 morts parmi les civils cette année.  Il a appelé les Forces de défense rwandaises à cesser d’appuyer le M23.  Le représentant a ensuite souligné que, la MONUSCO demeure essentielle pour instaurer la paix dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’inquiétant d’une augmentation des discours anti- MONUSCO et des appels à un retrait immédiat de la mission.  Il a exhorté la RDC à travailler avec la MONUSCO pour assurer un retrait progressif, responsable et conditionnel, guidé par les repères du plan de transition conjoint.

Poursuivant, le délégué a noté que les États de la région ont déployé des troupes pour faire face à l’insécurité croissante dans l’est de la RDC, jugeant impératif que celles-ci n’aggravent pas une situation déjà tendue.  À ce titre, il a appelé les dirigeants régionaux à veiller à ce que les forces bilatérales et multilatérales respectent les droits humains, accordent la priorité à la sécurité des civils et s’abstiennent d’activités illicites, telles que l’extraction de ressources naturelles.  Il est également essentiel qu’elles se coordonnent avec les forces armées de la RDC et la MONUSCO, entre autres.  De plus, les États doivent notifier formellement le Comité des sanctions 1533 de cette assistance, y compris les forces burundaises déployées bilatéralement et dans le cadre de la Force régionale la Communauté de l’Afrique de l’Est.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a mis en exergue les incidents sécuritaires alarmants au cours des derniers mois, en soulignant aussi l’augmentation des discours de haine dans la région des Grands Lacs.  Les efforts récents suscitent cependant des espoirs, s’est-elle félicitée, en évoquant ceux relatifs aux ressources naturelles, à l’énergie et à la lutte contre la violence.  Il faut encore renforcer le dialogue et l’appui à l’établissement de la confiance entre les pays de la région, persévérer dans le volet politique grâce au processus de Nairobi et à la feuille de route de Luanda, a-t-elle invité.  Elle a insisté sur le rôle important des organisations internationales et régionales en cette période, ajoutant qu’il convient de renforcer les capacités des pays de la région pour protéger leurs ressources naturelles, dans le respect de leurs programmes en la matière.  Les femmes jouent un rôle actif pour relever les défis actuels et jeter les bases de sociétés solides et prospères, a-t-elle observé, en encourageant à leur faire une place dans la prise de décisions et à respecter leurs droits et libertés fondamentales.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a noté avec préoccupation la montée des tensions entre la RDC et le Rwanda, avant de demander aux deux pays de faire preuve de retenue et de rechercher une solution diplomatique à leurs différends.  La délégation a aussi salué les efforts politiques et diplomatiques déployés dans la région pour relever les défis sécuritaires et promouvoir le dialogue.  Ella a souligné l’importance de la coordination entre le processus de Nairobi, le processus de Luanda et les efforts de l’ONU.  De plus, le déploiement de la force régionale doit être étroitement coordonné avec la MONUSCO, a-t-elle ajouté, en recommandant que les rôles et les responsabilités soient clairement définis.  L’oratrice a aussi exhorté tous les groupes armés, y compris le M23 et les FDA, à déposer les armes.  Elle a, dans ce contexte, salué le déploiement du programme de démobilisation, de désarmement, de relèvement communautaire et de stabilisation.  Cependant, elle a tenu à souligner l’importance d’une compréhension commune dudit programme entre les niveaux national et provincial, ceci afin d’éviter de répéter les erreurs commises lors des précédents cycles de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).

M. JOÃO GENESIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a condamné les attaques et provocations contre la MONUSCO, et lancé un appel à équiper les opérations de maintien de la paix avec les outils de communications stratégiques appropriés pour lutter contre les discours de haine, la désinformation et pour assurer la protection du personnel militaire et civil de l’ONU.  Il a salué le rôle moteur et constructif joué par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et le Mécanisme régional de surveillance du cadre de paix, de sécurité et de coopération pour la RDC, ainsi que les efforts de médiation menés par l’Angola.  Le délégué a indiqué que les processus de Luanda et Nairobi sont le reflet du type de contribution des acteurs régionaux que nous devrions espérer.  Il a jugé impératif d’accélérer la mise en œuvre des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  De même, il est nécessaire de veiller à ce que les anciens combattants, les femmes et les jeunes aient accès aux opportunités économiques qui leur fournissent des outils pour améliorer leurs conditions de vie en cette période post-pandémique, a-t-il recommandé.  Le représentant a enfin appelé tous les États de la région à persévérer dans la voie d’un dialogue politique inclusif.  Il a précisé qu’une solution durable ne peut être trouvée sans une participation significative de toutes les parties prenantes, y compris les femmes.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dit être profondément inquiet de la résurgence, la semaine dernière, de la violence du M23 et a appelé le groupe à se retirer immédiatement de ses positions actuelles.  Il a appelé les pays de la région des Grands Lacs, avec l’appui de l’Envoyé spécial, à poursuivre leur étroite coordination avec le Gouvernement de la RDC et la MONUSCO en vue d’une paix durable.  Les efforts diplomatiques et politiques devraient primer sur la solution militaire pour régler les problèmes régionaux, et il en est de même pour les considérations d’ordre humanitaire, a-t-il estimé.  En conséquence, il a encouragé à la relance des processus de Nairobi et de Luanda, soulignant que l’ONU et le Bureau de l’Envoyé spécial pourraient activement épauler ces efforts et veiller à la coordination avec les efforts existants, comme le programme de démobilisation, désarmement et réinsertion en RDC.

D’autre part, a-t-il enchaîné, les activités militaires dans l’est de la RDC exigent une planification et une coordination scrupuleuse avec la MONUSCO, le respect du droit international et un plan de sortie clair.  La force de la Communauté d’Afrique de l’Est et les Forces armées de la RDC doivent, par ailleurs, s’engager de façon substantielle avec la MONUSCO aux fins d’une déconfliction de sorte à protéger les civils, a-t-il conseillé.  Qualifiant par ailleurs la situation humanitaire de préoccupante, il a souligné que la coordination entre les opérations militaires et humanitaires est vitale, appelant toutes les parties à faciliter l’accès humanitaire.

M. DAI BING (Chine) a déclaré que beaucoup reste à faire pour parvenir à la paix et au développement dans la région des Grands Lacs en dépit des efforts déployés par les pays de la région.  Le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent donc faire davantage pour les aider à parvenir au règlement de leurs problèmes et soutenir leurs efforts.  Il a appelé à coordonner les réponses militaires et non militaires à ces efforts, y compris un soutien financier pour les processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  Sur un autre plan, notamment s’agissant des minerais, la communauté internationale doit travailler sur la base de l’atelier de Khartoum de 2021 sur les minerais afin de couper les financements des réseaux criminels qui alimentent les conflits, a proposé le délégué.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) s’est inquiétée de la fragilité de la situation dans la région des Grands Lacs et a appuyé les processus de Nairobi et de Luanda, ainsi que les efforts pour assurer la bonne coordination et la complémentarité entre eux.  Dans cet ordre d’idées, elle a salué les initiatives de rapprochement, notamment entre la RDC et le Rwanda.  Elle a appelé à ne pas sous-estimer la nécessité d’une intégration régionale, en particulier pour maximiser les profits de la demande accrue de minéraux critiques, tout en poursuivant la diversification économique.  Elle s’est dite encouragée par les efforts continus pour contrer l’exploitation illégale des ressources naturelles, avant de souligner que le volet militaire du processus de Nairobi ne peut pas être la seule solution pour s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Une piste politique beaucoup plus globale est donc nécessaire, a estimé la représentante qui a insisté sur la nécessité d’impliquer les femmes et les jeunes au dialogue en cours et aux initiatives de renforcement de la confiance.  Elle a ensuite salué les déclarations publiques des autorités nationales de la RDC, condamnant la diffusion de discours de haine, appelant par ailleurs à faire progresser la justice transitionnelle.

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique) a constaté que près de 10 ans après son adoption, l’Accord-cadre pour la paix et la sécurité en République démocratique du Congo et la région demeure un socle fondamental dans la démarche visant à surmonter les défis communs.  Elle s’est alarmée des activités croissantes des groupes armés comme le M23 dans l’est de la RDC, aussi bien pour leur impact sur la population civile que pour les tensions régionales qu’elles génèrent, et a fait part de son appui au processus de Nairobi.

Elle a également pris note de la signature récente de l’Accord sur le statut des forces entre la RDC et le Secrétaire général de la Communauté d’Afrique de l’Est, qui jette les bases du déploiement d’une force régionale.  Dans l’objectif de briser le cycle vicieux de la violence, elle a recommandé que la coopération militaire soit accompagnée de stratégies de développement économique.  Elle a aussi mis l’accent sur le caractère indispensable de la mise en œuvre de programmes de désarmement, démobilisation et réhabilitation.  Après avoir salué le rapprochement entre la RDC et le Rwanda, la représentante a appelé à lutter contre le trafic illicite d’armes et le financement illégal des groupes armés.

M. DONAL KENNEALLY (Irlande) a estimé qu’alors que les États de la région des Grands Lacs sont engagés dans un processus de paix, il existe un danger que les progrès de ces initiatives soient entravés par le type de rhétorique publique entendue ces derniers jours.  Il est important de s’abstenir de faire monter la tension dans la région, a-t-il plaidé.  S’agissant de la situation humanitaire, qui plonge 27 millions de personnes dans le besoin en RDC, il a appelé toutes les parties à assurer la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire et donner un accès sans entrave à l’aide humanitaire.  Le représentant a également jugé important de continuer à progresser sur les questions de transparence en matière de minerais, notamment par le biais du Mécanisme régional de certification de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).  De son avis, la mise en œuvre des recommandations de l’atelier régional de haut niveau de Khartoum, de 2021, sur les ressources naturelles peut également avoir un impact important. « Nous appelons tous les États à demander des comptes à tous ceux qui sont complices de ce commerce illicite. »

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a encouragé les dirigeants des pays de la région des Grands Lacs à redoubler d’efforts pour faire face à la violence et aux activités des groupes armés, en les invitant également au plein respect des engagements politiques pris.  Il a espéré que tous ces efforts se complèteront, permettront un rapprochement de tous les acteurs politiques et renforceront la protection des civils.  Il s’est aussi félicité de l’établissement du Réseau des femmes entrepreneurs des Grands Lacs, et mis l’accent sur l’importance des prérogatives féminines dans cette région.  D’autre part, le déploiement de la force conjointe de l’Afrique de l’Est devrait se faire en coordination avec la MONUSCO, a-t-il souligné, en saluant, en conclusion, les bons offices de l’Envoyé spécial.

M. ROBERT KAYINAMURA (Rwanda) a commencé par réitérer la volonté de son pays d’exécuter de bonne foi ses engagements pris dans le cadre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération afin de garantir que la région évolue vers la paix et la stabilité à travers ses frontières.  Il a ensuite dénoncé l’attitude dangereuse qui classe des communautés spécifiques dans l’est de la RDC comme « étrangères » et devant « retourner d’où elles viennent ».  Une telle attitude est le germe d’un conflit sans fin, a-t-il analysé, en arguant qu’elle promeut la haine, la marginalisation et la violence.  Cette rhétorique dangereuse sape les efforts sous-régionaux pour trouver une solution durable, a-t-il mis en garde.

Le représentant s’est aussi exprimé sur un sujet « d’extrême importance » pour son pays et, qui, selon lui, n’a malheureusement pas connu de progrès: la neutralisation de la force génocidaire de 1994, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  C’est l’un des plus anciens groupes armés de RDC, qui s’est installé dans ce pays après avoir commis le génocide de 1994 contre les Tutsis au Rwanda, a-t-il rappelé.  Malgré plusieurs résolutions et déclarations présidentielles appelant à son désarmement et à sa dissolution, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) continuent de recruter et former des combattants pour commettre de graves violations des droits humains, notamment en encourageant et en commettant des meurtres à caractère ethnique au Rwanda et en RDC, selon le représentant.  Si le Gouvernement de la RDC choisit de vaincre militairement les groupes armés, nous n’avons aucun problème avec cela, a-t-il dit, en exprimant sa principale préoccupation: le choix de se ranger du côté des FDLR.  Pour le délégué, ce genre de relation attirera toujours l’attention et la vigilance du Rwanda.

Le représentant a également déclaré qu’en dépit des résolutions et du « Plus jamais ça », le Conseil de sécurité peine toujours à trouver une solution durable aux FDLR.  Au lieu de s’attaquer à la principale cause profonde de l’insécurité dans l’est de la RDC, le Conseil de sécurité a préféré gérer cette insécurité et se concentrer sur les conséquences de la présence des FDLR dans l’est de la RDC, a-t-il relevé.  « Pourquoi le Conseil de sécurité ne peut-il pas assurer le suivi de la mise en œuvre des multiples résolutions qu’il a adoptées et tenir responsable quiconque collabore avec les FDRL?  Pourquoi ce long silence et cette tolérance envers les discours de haine et la xénophobie » ,a-t-il interrogé, affirmant que ces questions sont légitimes, non seulement d’un point de vue rwandais ou régional, mais aussi dans une perspective plus large de maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Il est regrettable que le Conseil passe encore 28 ans à s’occuper des FDLR et de leurs conséquences pour la RDC et la région.  Au-delà de la nécessité absolue de rétablir la paix et la sécurité dans notre région, cette inaction collective fragilise également davantage la mise en œuvre de l’Accord-Cadre, a-t-il mis en garde.

M. ZÉPHYRIN MANIRATANGA (Burundi) a réaffirmé la pertinence du cadre de coopération pour la paix et la sécurité en République démocratique du Congo (RDC) et dans la région des Grands Lacs comme solution aux défis de la stabilité dans la région.  Plus que jamais, la communauté internationale devrait jouer un rôle efficace en tant que garant à la recherche de la paix dans la région, a-t-il plaidé.  Il a jugé important que les membres du Conseil de sécurité dépassent le cadre de présentation des rapports faits à New York pour une visite dans la région afin de pouvoir tirer, à partir de l’est de la RDC, les conclusions qui s’imposent et non pas suivre à distance les foyers de tension qui peuvent avoir des conséquences immenses.

Quand la maison de votre voisin brûle, cela vous interpelle à poser des gestes positifs pour contenir le feu avant d’être atteint par les flammes en provenance du voisinage, a poursuivi le représentant.  Il a indiqué que faisant suite à la décision de la Communauté de l’Afrique de l’Est de déployer une force régionale pour stabiliser la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, le Burundi soutient fermement le processus de Nairobi et a déployé un contingent militaire.  Ce déploiement a besoin d’un soutien politique mais aussi technique et financier pour que la force puisse exécuter efficacement son mandat et pouvoir ainsi répondre aux préoccupations des populations en détresse, a-t-il souligné.  Il a enfin appelé les chefs d’État et de gouvernement dont les pays sont signataires de l’Accord cadre de Nairobi et les garants, de bien vouloir participer activement au Sommet du Mécanisme régional qui aura lieu à Bujumbura, au Burundi, le 24 février 2023.

M. GEORGES NZONGOLA-NTALAJA (République démocratique du Congo (RDC) a indiqué qu’en ce moment, la ville de Bunangana est toujours agressée et occupée par le Rwanda sous couvert du M23 depuis plus de quatre mois.  Le délégué a réagi aux propos du représentant rwandais qui a affirmé que la présence des FDLR en RDC crée l’insécurité au Rwanda.  Il a rappelé que M. James Kabarebe, ancien officier rwandais, avait en charge la sécurité de toute la RDC quand le Président Laurent-Désiré Kabila avait pris le pouvoir, et qu’il avait donc le loisir de se débarrasser des FDLR à cette époque.  De plus, la même occasion s’est présentée quand le Rwanda a pris possession de territoires congolais durant cinq années de suite, a-t-il rappelé, ajoutant que le Rwanda avait reçu l’onction du Président Joseph Kabila pour entrer en RDC et régler le problème des FDLR. « Et là encore, ils ne l’ont pas fait. »  Selon le représentant congolais, le Rwanda utilise les FDLR comme prétexte pour entrer dans le pays et piller les ressources naturelles, comme cela est du reste documenté par plusieurs rapports, y compris du Gouvernement américain.

M. Nzongola-Ntalaja a ensuite rappelé que le Rwanda est un des pays signataires de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba.  Cette situation inacceptable d’agression qui sape les efforts de renforcement de la confiance et la dynamique positive qui commençait à s’installer dans la région des Grands-Lacs doit s’arrêter, a-t-il dit.  Il a appelé le Conseil à demander au Rwanda et « son M23 » de quitter sans délai cette partie du territoire congolais.  Quant aux groupes armés, la RDC poursuit ses efforts à titre individuel et aussi en conjugaison avec tous ses partenaires pour réduire le niveau de menace.  À ce titre, le processus de Nairobi va être pleinement relancé pour la prise en charge de la donne « groupe armé », a annoncé le délégué, qui a souligné que le message du Président Felix-Antoine Tsisekedi Tshilombo est très clair à ce sujet: tous ces groupes armés nationaux doivent déposer les armes et rejoindre le processus PDDDR-CS.  Quant aux groupes armés étrangers, en plus de déposer les armes, ils doivent retourner dans leur pays.

Par ailleurs, du 22 au 24 septembre 2022, la cinquième Réunion des chefs des services de sécurité et de renseignement de la région des Grands Lacs s’est tenue à Kampala, a relaté le représentant en indiquant qu’elle a décidé de déployer à Goma/RDC, à partir du 5 novembre 2022, des membres de la cellule opérationnelle du Groupe de contact et de coordination, lequel aura la charge de l’élaboration et du suivi des mesures non militaires en complément aux opérations militaires en cours.  La cellule opérationnelle va aussi accompagner les efforts ciblant les groupes armés étrangers et leur rapatriement dans leur pays d’origine.  Selon le délégué, pour la réussite de ce volet non militaire, il est crucial que l’Envoyé spécial et le Conseil de sécurité participent encore plus proactivement aux côtés de la RDC dans les efforts de plaidoyer pour un financement conséquent de ce programme qui va contribuer à changer la donne dans la région des Grands Lacs.

Le représentant a rappelé que l’Accord-cadre d’Addis-Abeba prohibe la déstabilisation d’un pays membre de la région à partir d’un autre État.  Il a informé le Conseil du fait que la RDC, son Président et sa population défendront l’intégrité de leur territoire et ne lâcheront aucun centimètre carré de leur sol.  Il a de nouveau réitéré sa demande afin que le Conseil puisse exiger un retrait immédiat et sans conditions des troupes rwandaises et du M23 de la cité de Bunangana, à l’est de la RDC, et que le Conseil condamne fermement par voie de résolution le Rwanda pour son soutien au groupe armé M23.  De même, il a invité le Conseil à imposer des sanctions appropriées et plus sévères aux acteurs du M23 et au pays qui menacent la paix, la sécurité et la stabilité dans la région des Grands Lacs, tout en renforçant les sanctions contre les réseaux maffieux internes et externes qui exploitent illégalement les ressources naturelles de la RDC.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission entame son débat sur les utilisations pacifiques de l’espace par un appel à mettre la technologie spatiale au service du développement

Soixante-dix-septième session,
14e séance plénière – matin
CPSD/760

La Quatrième Commission entame son débat sur les utilisations pacifiques de l’espace par un appel à mettre la technologie spatiale au service du développement

La Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, a entamé ce matin son débat général sur les utilisations pacifiques de l’espace, plusieurs délégations appelant à mettre la technologie spatiale au service du développement. 

Cette année marque le soixante-cinquième anniversaire du lancement dans l’espace de Spoutnik 1, premier satellite terrestre fabriqué par l’homme, et le cinquante-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur du Traité sur l’espace extra-atmosphérique, a rappelé d’emblée le Président du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, M.  Omran Sharaf, en présentant le rapport de la soixante-cinquième session du Comité.  Si ces jalons permettent de mesurer le chemin parcouru, notre dépendance à l’égard des infrastructures satellitaires atteint aujourd’hui un point « critique », caractérisé par l’essor constant des activités spatiales et la diversification des acteurs spatiaux, a-t-il noté. 

Toutefois, avec l’adoption par l’Assemblée générale, en 2021, du Programme « Espace 2030 », les États disposent désormais d’une stratégie « tournée vers l’avenir » et permettant de renforcer la contribution de ces activités et outils spatiaux à la réalisation des programmes mondiaux de développement, s’est félicité le Président du Comité.  Un avis partagé par de nombreuses délégations, dont la Suisse, qui a estimé que ce programme contribuera à renforcer le recours aux technologies spatiales au service du développement durable.  De même, la Plateforme sur l’espace et la santé mondiale, basée à Genève, permettra une plus grande collaboration entre les États Membres, les entités des Nations Unies et les parties prenantes dans le domaine de la santé mondiale. 

« Afin de préserver l’utilisation future des biens spatiaux, nous devons promouvoir la sécurité des opérations spatiales et la durabilité à long terme des activités spatiales », a déclaré à l’ouverture de la séance le Président de la Commission, M. Mohamed Al Hassan.  L’espace extra-atmosphérique est en effet un « patrimoine et une province communs à toute l’humanité », quel que soit le degré de développement économique ou scientifique des États, a renchéri l’Iran.  Pour que la recherche et le développement des sciences et des technologies spatiales continuent de jouer un rôle clef dans la réalisation des objectifs de développement durable sur Terre, les États les plus avancés doivent partager leurs connaissances et contribuer au renforcement des capacités et à l’assistance technique des pays en développement, a fait valoir son représentant. 

Malgré le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967, qui constitue la pierre angulaire du régime juridique international de l’espace, la nature changeante de l’espace extra-atmosphérique exige que la communauté internationale trouve des solutions communes aux défis émergents, a considéré l’Argentine, afin de veiller à ce que tous les pays puissent accéder à la technologie spatiale et à l’espace de manière sûre et durable.  Un cadre réglementaire international actualisé est donc nécessaire, selon la Colombie, afin que tous les États puissent accéder aux avantages de la technologie spatiale. 

À cet égard, le Comité constitue une plateforme unique pour l’élaboration du droit international de l’espace, de normes internationales et d’autres mesures de transparence et de confiance régissant les activités spatiales, a fait valoir l’Union européenne. 

Dans le contexte de l’agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, l’Union européenne a par ailleurs indiqué ne plus être en mesure de soutenir le processus indiqué dans la résolution 76/76 de l’Assemblée générale en vue de l’affiliation aux Nations Unies d’un nouveau centre régional de formation aux sciences et aux technologies spatiales situé en Russie.  La délégation a invité les États Membres à reconsidérer leur position sur cette question et demandé au Bureau des affaires spatiales de s’abstenir d’initier tout projet de coopération avec la Fédération de Russie jusqu’à nouvel ordre.  De son côté, son homologue russe a mis en garde contre la politisation et l’unilatéralisme dans les discussions concernant l’utilisation pacifique de l’espace. 

Demain, jeudi 27 octobre 2022, à 10 heures, la Quatrième Commission poursuivra ses travaux avec la tenue d’une table ronde conjointe avec la Première Commission sur les risques éventuels pour la sécurité et la viabilité des activités spatiales. 

COOPÉRATION INTERNATIONALE TOUCHANT LES UTILISATIONS PACIFIQUES DE L’ESPACE

Déclaration liminaire

Le Président du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, M. OMRAN SHARAF (Émirats arabes unis), venu présenter le rapport de la soixante-cinquième session du Comité, s’est félicité des activités menées par le Bureau des affaires spatiales en tant que Secrétariat du Comité et de ses organes subsidiaires, qui ont notamment permis la mise en œuvre du Programme des Nations Unies pour les applications des techniques spatiales, du Programme des Nations Unies pour l’exploitation de l’information d’origine spatiale aux fins de la gestion des catastrophes et des interventions d’urgence et du Programme « Espace 2030 ».  Cette année marque le soixante-cinquième anniversaire du lancement dans l’espace du premier satellite terrestre fabriqué par l’homme, Spoutnik 1 et le cinquante-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur du Traité sur l’espace extra-atmosphérique, a-t-il noté, en ajoutant que de telles commémorations mettent en avant l’importance de la coopération internationale dans les utilisations pacifiques de l’espace et la contribution des activités spatiales au programme de développement mondial. 

La dépendance de notre monde à l’égard des systèmes spatiaux devient en effet critique, alors que les activités spatiales sont en plein essor et que les acteurs spatiaux se diversifient.  Selon lui, notre dépendance aux infrastructures satellitaires, aux capacités technologiques et aux applications spatiales, mises en évidence lors de la pandémie de COVID-19, doit nous encourager à renforcer la coopération internationale et l’utilisation des technologies spatiales pour le développement socioéconomique.  Avec le Programme « Espace 2030 », adopté l’an dernier par l’Assemblée générale, les États disposent désormais d’une stratégie tournée vers l’avenir pour renforcer la contribution des activités et des outils spatiaux à la réalisation des programmes mondiaux et à la prise en compte du développement durable. 

Parmi les réalisations du Comité et de ses organes subsidiaires, le Président a cité le Groupe de travail sur la viabilité à long terme des activités spatiales du Sous-Comité scientifique et technique et le Groupe de travail sur les aspects juridiques des activités relatives aux ressources spatiales du Sous-Comité juridique, qui ont convenu et adopté leurs méthodes et leurs plans de travail.  Le Groupe de travail sur l’espace et la santé mondiale a terminé son rapport sur ses travaux et a recommandé la création d’un réseau et d’une plateforme sur l’espace et la santé mondiale, en plus d’élaborer le texte du projet de résolution présenté cette année à la Commission.  Par ailleurs, le Groupe d’experts sur la météorologie spatiale a présenté son rapport final. 

Nous devons maintenant poursuivre nos efforts pour renforcer le rôle du Comité en tant que forum multilatéral unique pour favoriser le dialogue et la coopération, a noté M. Sharaf.  De même, le renforcement des partenariats entre les États et les parties prenantes, la promotion du dialogue entre nations spatiales et nations spatiales émergentes, et la participation accrue de tous les pays aux activités spatiales constituent un travail crucial dans notre entreprise spatiale collective pour l’humanité, a conclu le Président du Comité. 

Déclarations

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. FABIÁN ODDONE (Argentine) a réclamé une utilisation universelle de l’espace extra-atmosphérique au profit et dans l’intérêt de tous les pays et de l’humanité tout entière.  L’activité spatiale ne peut se faire de manière unilatérale et nécessite la coopération internationale, a-t-il insisté, avant de dire que la coopération spatiale constitue l’un des axes de travail de la présidence pro tempore de la CELAC.  Au 18 septembre 2021, l’Accord constitutif de l’Agence spatiale latino-américaine et caribéenne, compte déjà 20 États signataires, s’est félicité le représentant.  Cet instrument entrera en vigueur une fois les 11 ratifications atteintes, a-t-il précisé.  L’Agence permettra le renforcement des capacités régionales en matière spatiale, entre autres, par la promotion et le renforcement des liens entre les États Membres, le développement des activités scientifiques et l’échange d’informations et de pratiques optimales, la promotion de la coopération en matière de transfert de technologies, l’utilisation des infrastructures spatiales et terrestres et le développement de sa propre technologie satellitaire.  Le représentant, qui a réaffirmé l’importance de l’utilisation équitable de l’espace extra-atmosphérique, a aussi souligné la nécessité de respecter le droit international dans toutes les activités spatiales.  Pour les pays en développement, il ne s’agit pas seulement d’une question de développement technologique mais d’un besoin de développement durable. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) s’est dit persuadé que l’espace extra-atmosphérique doit uniquement être utilisé à des fins pacifiques, pour le développement scientifique et économique, en respectant le principe de non-appropriation dudit espace.  Persuadé que l’accès aux technologies spatiales doit bénéficier à tous les pays, l’Association préconise de renforcer les capacités des États spatiaux émergents et coopère de son côté via son propre centre spatial avec tous les partenaires pertinents.  L’ASEAN a également lancé un appel pour une mise en œuvre immédiate des orientations du Comité s’agissant notamment de la problématique des débris spatiaux.  L’ASEAN accorde beaucoup d’importance à la réduction des risques de catastrophes.  À ce titre, elle a appelé à renforcer la réponse et la coordination, y compris par l’utilisation de technologies spatiales, pour développer les systèmes d’alertes précoces et sauver davantage de vies. 

M. PATRICK CHATARD MOULIN, de l’Union européenne, a condamné dans les termes les plus vifs de l’agression militaire non provoquée et injustifiée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, qui viole le droit international et sape la sécurité et la stabilité européennes et mondiales.  Dans le contexte de cette agression, l’Union européenne ne peut plus soutenir le processus indiqué dans la résolution 76/76 de l’Assemblée générale en vue de l’affiliation aux Nations Unies d’un nouveau Centre régional de formation aux sciences et aux technologies spatiales en Fédération de Russie.  Le représentant a donc invité tous les États Membres de l’ONU à reconsidérer leur position et demandé au Bureau des affaires spatiales de s’abstenir d’initier tout projet de coopération avec la Fédération de Russie dans le contexte actuel. 

Le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) et ses sous-comités constituent des plateformes internationales uniques pour la coopération internationale dans le domaine des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, a fait valoir le représentant, notamment en ce qui concerne l’élaboration du droit international de l’espace, des normes internationales et d’autres mesures de transparence et de confiance régissant les activités spatiales.  L’Union européenne continue en outre de promouvoir un environnement spatial sûr et durable, en soulignant l’importance de la transparence et des mesures de confiance, et s’affaire à mettre en œuvre les Lignes directrices aux fins de la viabilité à long terme des activités spatiales.  Dans le cadre de son programme spatial, l’Union européenne assure un service de surveillance et de suivi de l’espace et fournit des services opérationnels à une communauté croissante d’utilisateurs, notamment des services d’évitement des collisions pour 300 satellites, a-t-il noté.  Une approche concrète pour la gestion du trafic spatial a été convenue afin d’ouvrir la voie à une éventuelle approche multilatérale de la gestion du trafic spatial dans le cadre de l’ONU. 

Selon le représentant, l’accord sur le Programme « Espace 2030 » en 2021 est une nouvelle preuve que le multilatéralisme dans le secteur spatial produit des résultats.  L’Agence de l’Union européenne pour le programme spatial (EUSPA) et le Bureau des affaires spatiales ont signé un protocole d’accord en mars de cette année en vue de faire progresser la coopération de longue date entre les parties.  Un rapport sur la manière dont les systèmes de navigation par satellite, tels que Galileo, et les technologies d’observation de la Terre peuvent soutenir activement la transition vers un monde de huit milliards d’habitants sera publié d’ici la fin de 2022, a précisé le délégué. 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a insisté sur le fait que l’espace extra-atmosphérique est un bien commun de l’humanité.  Les activités qui y sont menées ne doivent pas relever d’un petit nombre d’États mais être ouvertes à tous les pays, a affirmé le représentant, en dénonçant le principe du « premier arrivé, premier servi » dans l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique.  Aux Philippines, le Gouvernement a créé une Agence spatiale et un cadre gérant les activités spatiales qui se focalisent notamment sur la sécurité, le développement national, la gestion du climat, la recherche, l’éducation, la sensibilisation et la coopération internationale.  Le Président des Philippines a également créé le Conseil spatial national, et le pays est intéressé par la construction de satellites et la coopération régionale, notamment avec le Japon.  Le représentant a réitéré l’importance de renforcer le rôle du COPUOS dans le développement des capacités spatiales, l’échange scientifique et pour combler les lacunes entre pays.  Il a plaidé pour des mesures de renforcement de la confiance dans l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique. 

Selon Mme AL SENANI (Oman), l’espace extra-atmosphérique est riche de potentiel pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, que ce soit pour le suivi des changements climatiques, la gestion et la réponse aux catastrophes, les technologies de l’information et des communications (TIC), et bien d’autres secteurs.  C’est pourquoi il faut se donner les moyens de réguler cet espace pour qu’il soit utilisé à des fins uniquement pacifiques.  Il s’agit aussi de renforcer la coopération, afin que les pays en développement puissent eux aussi réaliser les objectifs de développement durable.  Un Centre spatial a été créé à Oman pour, entre autres, permettre des simulations pour les futurs spationautes.  Oman est convaincu que l’espace extra-atmosphérique est riche en valeur ajoutée pour les économies nationales, et riche de promesses pour les générations futures, a indiqué sa représentante.  C’est pourquoi elle a réitéré que son pays était ouvert à des investissements et à des « partenariats pratiques et tangibles » dans ce domaine. 

M. VAHID GHELICH (Iran) a réaffirmé le principe universellement admis selon lequel l’espace extra-atmosphérique est un « patrimoine et une province communs à toute l’humanité », quel que soit le degré de développement économique ou scientifique des États.  Il doit donc être utilisé exclusivement à des fins pacifiques, dans l’intérêt des générations présentes et futures et conformément au droit international, et dans le plein respect du principe de non-appropriation de toute partie de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes.  Nous devons donc conserver une approche multilatérale à cet égard, en nous abstenant d’adopter des mesures coercitives unilatérales à l’encontre des pays en développement, a fait valoir le représentant, pour qui l’accès aux sciences et aux technologies spatiales et leurs applications devrait être offert à tous les États sans discrimination.  À cette fin, les États les plus avancés doivent partager leurs connaissances et contribuer au renforcement des capacités et à l’assistance technique des pays en développement.  La recherche et le développement dans les sciences et technologies spatiales jouent un rôle clef dans la réalisation du développement durable sur Terre ainsi que dans la protection de l’environnement spatial, a-t-il relevé.  M. Ghelich a exprimé son appui en faveur d’un instrument juridiquement contraignant destiné à prévenir une course aux armements, la militarisation et le placement d’armes dans l’espace.  À ses yeux, les États qui créent des débris spatiaux ont la responsabilité exclusive de leur élimination. 

M. FRANCISCO JAVIER GUTIÉRREZ PLATA (Colombie) a insisté pour que les délibérations sur les normes et principes du Traité de 1967 et des accords ultérieurs sur les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, de la Lune et des activités spatiales, dans le contexte géopolitique actuel, soient menées au niveau multilatéral et dans le cadre du Comité, qui constitue, selon lui, le forum approprié.  Afin de faire face aux risques posés par les activités du secteur privé et l’extraction des ressources spatiales naturelles, nous devons mettre en place un cadre multilatéral inclusif qui reconnaisse et prenne en compte l’intérêt de tous les États.  À cet égard, le représentant a réaffirmé la nécessité d’adopter des mesures permettant d’assurer la viabilité à long terme des activités spatiales et d’éviter une éventuelle course aux armements.  Alors que la technologie spatiale a contribué à transformer le mode de vie de l’humanité grâce à ses applications dans les domaines de la gestion de l’information, des communications, de la navigation et de la recherche scientifique, il a estimé que ces avancées technologiques pourraient affecter la sécurité nationale et mondiale.  Un cadre réglementaire international actualisé est ainsi nécessaire afin que tous les États puissent accéder aux avantages de la technologie spatiale, a estimé le délégué. 

M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée) a dénoncé le fait qu’au XXe siècle, les activités extra-atmosphériques restent l’apanage d’un petit nombre de pays.  Il a exhorté la communauté internationale à s’opposer à la monopolisation et la commercialisation des technologies spatiales.  Le représentant a présenté comme une menace la militarisation de l’espace extra-atmosphérique par les États-Unis, exhortant à renforcer la coopération internationale pour éviter la course aux armements dans l’espace.  LA RPDC est fière d’avoir lancé des satellites, a ajouté le délégué, qui a, à nouveau, dénoncé les États-Unis qu’il a accusés d’empêcher son pays de développer sa propre industrie spatiale en imposant des sanctions unilatérales et en restreignant la coopération internationale.  Mais cela n’arrêtera pas les avancées de la RPDC, a assuré le représentant, en brandissant le droit de son pays d’explorer et d’utiliser l’espace extra-atmosphérique. 

Selon M. NAEEM SABIR KHAN (Pakistan), l’espace extra-atmosphérique doit être utilisé à des fins pacifiques.  Le Programme spatial pakistanais permet au pays de développer son économie, de renforcer ses capacités en matière de réduction des risques et de navigation par satellite, et dans bien d’autres secteurs. 

La politique spatiale pakistanaise insiste beaucoup sur la coopération internationale, a indiqué le représentant, qui a précisé que l’Agence spatiale nationale a procédé à différentes missions de recherche spatiale.  En mars 2022, une réunion à Islamabad a ainsi rassemblé 13 organisations spatiales nationales, dont celles de l’Iran, du Bangladesh, de la Türkiye et de la Jordanie.  Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et notre programme commun reconnaissent tous deux l’importance de l’espace extra-atmosphérique pour l’action climatique entre autres, mais cet espace ne pourra devenir un vrai moteur du développement durable sans combler le fossé technologique entre les nations, a souligné le délégué.  Il faut selon lui développer davantage la coopération, le transfert des technologies et des capacités pour les pays en développement, afin de leur permettre de jouir de leurs droits.  Le représentant a enfin qualifié le principe de responsabilité relative aux débris spatiaux de « responsabilité commune mais différenciée ». 

Pour Mme ARCHINARD (Suisse), alors que la multiplication des acteurs et des activités dans l’espace permet un accès plus large aux technologies satellitaires, la coopération internationale et le dialogue multilatéral sont d’autant plus importants.  Elle s’est félicitée de l’adoption, en 2021, du Programme « Espace 2030 » par l’Assemblée générale, en estimant qu’il contribue à renforcer l’utilisation des technologies spatiales au service du développement durable.  La Suisse appuie en outre la création de la Plateforme sur l’espace et la santé mondiale, basée à Genève, en collaboration avec le Bureau des affaires spatiales et l’Organisation mondiale de la Santé.  Alors que le nombre de satellites opérationnels en orbite a plus que doublé depuis cinq ans, la déléguée a salué les travaux du Comité sur la viabilité à long terme des activités spatiales, y compris l’adoption de ses 21 lignes directrices.  Dans le contexte d’un retour prochain sur la Lune, elle a salué le travail du Comité en vue de développer une compréhension commune des aspects juridiques de l’espace, en tenant compte des aspects scientifiques et techniques ainsi que des intérêts de l’ensemble des parties prenantes, y compris le secteur privé.  Elle a toutefois partagé les inquiétudes de l’Union internationale de l’astronomie et de plusieurs États concernant l’impact des grandes constellations sur les observations astronomiques depuis la Terre. 

Mme DIYANA SHAISTA TAYOB (Afrique du Sud) a rappelé que son pays est une nation « émergente » dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique.  Elle a ensuite insisté sur l’importance de respecter le droit international dans l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique.  Après avoir mis en exergue la place du continent dans ce domaine, la représentante est revenue sur le Programme spatial sud-africain, notamment le lancement de satellites pour soutenir l’industrie maritime et la gestion des catastrophes et la réaction d’urgence.  Ce programme aidera à l’élaboration de données nécessaires à la prévention des catastrophes et au développement socioéconomique.  Le programme spatial se focalise aussi sur le renforcement des capacités nationales en axant le travail sur la viabilité des activités spatiales.  La représentante a exhorté à combler les lacunes entre pays développés et en développement dans le secteur spatial.  Le Gouvernement a élaboré une loi pour l’utilisation des technologies spatiales, a indiqué la représentante, en soulignant à nouveau l’importance de la gouvernance mondiale et de la coopération internationale dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique. 

Selon Mme THARARUT HANLUMYUANG (Thaïlande) l’espace, objet de fascination et de motivation pour toute l’humanité, est un bien commun.  C’est pourquoi l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique doit se faire à des fins pacifiques, dans le respect du droit international et de la non-appropriation.  La Thaïlande a grandement bénéficié de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique pour cartographier son territoire, faire le suivi des cultures du riz pendant la saison de croissance, afin d’améliorer la sécurité alimentaire du pays.  Ce savoir-faire est partagé avec les pays voisins dans un exemple de coopération Sud-Sud, s’est enorgueilli le délégué, pour qui l’espace extra-atmosphérique est aussi utilisé pour promouvoir le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).  En fait, la géolocalisation pourrait doper la réalisation de nombreux objectifs de développement durable, a estimé l’oratrice.  Face au très grand nombre de satellites, chacun doit faire sa part pour mieux gérer l’espace et atténuer les effets délétères des débris spatiaux, a-t-elle ajouté.  Enfin, le renforcement des capacités est essentiel pour que l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique bénéficie à tous les peuples, a insisté la représentante. 

Pour M. MAXIMILIANO JAVIER ALVAREZ (Argentine), alors que le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 constitue la pierre angulaire du régime juridique international de l’espace, la nature évolutive de l’espace extra-atmosphérique exige que la communauté internationale trouve des solutions communes aux défis émergents.  À cet égard, l’Argentine travaille activement dans le domaine du droit de l’espace, en veillant à ce que tous les pays puissent accéder à la technologie spatiale et à l’espace de manière sûre et durable, a indiqué le représentant.  Afin d’éviter que l’espace ne devienne une zone de conflit armé, l’Argentine appuie la négociation, dans le cadre de la Conférence du désarmement, d’un traité juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, a-t-il expliqué.  Elle développe en outre un programme spatial à des fins pacifiques, qui comprend le développement local de satellites et de lanceurs de satellites.  Le délégué s’est par ailleurs félicité que le Comité ait soutenu l’inscription de la question de l’espace et de la santé mondiale à l’ordre du jour du Sous-Comité scientifique et technique à partir de 2023.  L’Argentine, par l’intermédiaire de l’Institut Mario Gulich d’études spatiales avancées, possède une vaste expérience dans les domaines de la télémédecine et de l’épidémiologie paysagère, ainsi que de la formation universitaire, a-t-il relevé.  Elle développe notamment un programme de coopération avec l’Agence spatiale européenne, appelé Tempus pro-Antarctica, qui vise à tester des équipements de télémédecine, a précisé le délégué en conclusion. 

M. YUTA KUSANO (Japon) a déclaré qu’il est essentiel que chaque pays mène les activités spatiales conformément aux normes internationales existantes.  À cet égard, les activités spatiales doivent passer par l’élaboration d’un cadre de gouvernance mondial avec pour principes le respect de l’état de droit dans l’espace et la coopération internationale spatiale pour le bien de tous, a-t-il estimé.  Le Japon a pour sa part contribué à la création de plusieurs modules de la Station spatiale internationale (ISS) et permis à de nombreux États l’accès aux technologies spatiales y compris le Programme Artemis, a rappelé le délégué.  Le Japon a aussi signé un mémorandum d’accord sur la coopération spatiale avec la NASA.  En mai 2022, les deux parties ont convenu de l’inclusion d’astronautes japonais dans une des prochaines missions de la NASA.  En 2024, le Japon prévoit le lancement d’une mission d’exploration et d’études scientifiques, a annoncé le représentant, insistant de nouveau sur le respect de l’état de droit dans l’espace atmosphérique et la réglementation. 

M. KOLESNIKOV (Fédération de Russie) s’est dit favorable au développement pacifique de l’espace extra-atmosphérique sur une base égale et non discriminatoire, ainsi qu’au renforcement du rôle du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS), dont le rôle, unique, est fondé sur la participation égale de tous ses membres aux discussions et aux décisions, sur la base du consensus.  Il a aussi jugé important d’éviter la politisation des discussions sur l’utilisation pacifique de l’espace ainsi que les tentatives, sous quelque prétexte que ce soit, « d’imposer des ambitions individuelles ou de groupe » pour résoudre les problèmes liés aux activités spatiales.  Il s’est dit opposé à l’unilatéralisme sur ces questions.  Le délégué russe a par ailleurs appelé à éviter de faire doublon avec le COPUOS sur des plateformes parallèles, ce qui serait contre-productif. 

Mme HONG NHAT NGUYEN (Viet Nam) a insisté sur l’importance des efforts multilatéraux afin de garantir la paix, la sécurité et le développement dans le cadre de l’exploration et de l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique.  L’utilisation pacifique de l’espace doit également se faire conformément au droit international et aux lignes directrices concernant l’espace extra-atmosphérique, peu importe le niveau de développement des pays, a précisé la représentante.  Des applications utiles sur les plans économique et social continuent d’être développées et devraient contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.  Elle a mis en garde contre une course aux armements et le positionnement d’armes dans l’espace.  Pour sa part, le Viet Nam a adopté l’an dernier un plan de développement de technologies spatiales d’ici à 2030 et joue un rôle actif dans ce domaine au niveau régional, a indiqué la représentante. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission se penche sur les aspects régionaux du désarmement et sur les menaces de militarisation de l’espace extra-atmosphérique

Soixante-dix-septième session,
20e & 21e séances plénières – matin & après-midi
AG/DSI/3697

La Première Commission se penche sur les aspects régionaux du désarmement et sur les menaces de militarisation de l’espace extra-atmosphérique

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a examiné, aujourd’hui, les activités régionales du désarmement onusien et la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive à ce niveau, avant de se pencher sur l’efficacité des mesures pour renforcer la confiance régionale et empêcher la militarisation de l’espace. 

Mme Radha Day, Chef du Service du désarmement régional, de l’information et de la sensibilisation du Bureau des affaires de désarmement, qui coordonne l’activité des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, a noté que l’Afrique continue d’être témoin d’un enchevêtrement de crimes organisés, d’insécurité transfrontalière, de piraterie en haute mer et d’actes de terrorisme, que la région Asie-Pacifique reste la région comptant le plus petit nombre d’États parties au Traité sur le commerce des armes et qu’en Amérique latine et dans les Caraïbes, « le trafic illicite d’armes à feu et de munitions par des réseaux criminels organisés et des gangs reste un obstacle à la sécurité publique et entrave le développement durable ». 

Dans ce contexte, les centres régionaux travaillent main dans la main avec les États, les organisations régionales et d’autres partenaires pour relever ces défis de sécurité, conformément en particulier à la cible 16.4 des objectifs de développement durable sur la réduction des flux d’armes illicites d’ici à 2030, a assuré Mme Day, qui a appelé les États Membres à assurer un financement pérenne des centres régionaux en soutenant les projets de résolution sur cette question qui seront soumis pour adoption la semaine prochaine.  Elle a également signalé que le Bureau des affaires de désarmement à Vienne joue un rôle essentiel depuis que « la guerre en Ukraine a braqué les projecteurs sur les organisations internationales et processus intergouvernementaux basés dans la capitale autrichienne », en fournissant un lien entre ces processus pertinents.

Mme Day a aussi déclaré que l’inclusivité et le renforcement du rôle des femmes et des jeunes dans l’élaboration des politiques de désarmement, de non-prolifération et de maîtrise des armements sont essentiels pour relever durablement les défis susmentionnés.

De nouveau, l’utilité des zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN) a été signalée, que ce soit par des pays représentants de régions dénucléarisées ou par ceux engagés dans le processus d’établissement d’une telle zone au Moyen-Orient.  Le Kazakhstan, partie au Traité de Semipalatinsk ayant établi une ZEAN en Asie centrale, a considéré que la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes de destruction massive serait l’un des moyens les plus efficaces pour prévenir la prolifération et assurer la paix, la stabilité et la confiance dans cette région.  Des pays du Groupe arabe, comme l’Iraq, l’Égypte et la Jordanie, qui ont exhorté Israël à adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et à placer ses installations sous le régime de vérification de l’Agence internationale de l’énergie atomique, ont souhaité que la troisième session de la Conférence pour la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive, qui aura lieu le mois prochain à New York, prolonge les résultats obtenus à l’issue des deux premières sessions. 

D’autre part, des pays en développement, à l’instar du Pakistan, qui présentera un projet de résolution sur la question, ont souligné l’efficacité des mesures de confiance pour mener à bien les activités de contrôle des armes en tenant compte des spécificités locales et régionales.  Ces mesures ne sont pas une fin en soi et ne doivent pas se substituer aux efforts de règlement pacifique des crises et confiance dans les termes de la Charte des Nations Unies, a toutefois fait observer le représentant du Pakistan, qui a appelé les délégations à adopter le projet de résolution que présentera son pays sur la question. 

Sur les aspects du désarmement relatifs à l’espace extra-atmosphérique, La Fédération de Russie, au nom de la Chine notamment, a affirmé la nécessité d’adopter des mesures pratiques pour lancer des négociations sur un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, qui serait assorti de garanties de non-placement d’armes dans l’espace et de non-recours à la force ou à la menace de la force contre des objets spatiaux.  Elle a appelé à l’élaboration d’un tel instrument « pour un espace de paix, qui serait un bienfait pour toute l’humanité ».  Le Mouvement des pays non alignés, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), le Groupe des États africains et celui des États arabes se sont également montrés favorables à un tel instrument international contraignant mis au point dans le cadre de la Conférence du désarmement, où un projet de texte a été déposé. 

En revanche, l’Union européenne et la France se sont montrées très réticentes, estimant que le texte déposé comme les résolutions afférentes présentées en Première Commission comptent de « nombreuses déficiences », ne serait-ce que sur la définition d’une « arme dans l’espace » ou les conditions de vérification.  Pour ces pays, le caractère dual, civil et militaire, de tout objet placé dans l’espace fait qu’il est difficile de dire ce qui pourrait être interdit en raison de ses capacités.  Ces pays préconisent donc une approche relative au comportement des États dans l’espace, qui doit être raisonnable.  C’est à ce titre que l’Union européenne a condamné fermement la conduite par la Fédération de Russie d’un essai d’arme cinétique à ascendance directe contre un de ses propres satellites, ce genre d’opération risquant de multiplier les débris et de présenter un danger pour d’autres activités spatiales et étant donc considéré comme un exemple de comportement « déraisonnable ».

Le Canada a fait remarquer que les deux approches n’étaient « pas nécessairement contradictoires » et que des normes pragmatiques de comportement responsable, une fois largement adoptées, « pourraient devenir des lois internationales juridiquement contraignantes ». 

La Première Commission poursuivra, demain, mercredi 26 octobre, à 10 heures, son débat thématique sur l’espace.

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Exposé

M. BURHAN GAFOOR, Ambassadeur de Singapour et Président du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité du numérique et de son utilisation (2021-2025), a rappelé que les six piliers du Groupe -les menaces existantes et potentielles, les règles, normes et principes de comportement responsable des États, le droit international, les mesures de confiance, le renforcement des capacités et le dialogue institutionnel régulier- faisaient l’objet d’un traitement particulier dans le rapport de mi-mandat adopté par consensus en juillet dernier.  Il a notamment indiqué que la section du document portant sur les menaces note l’augmentation des incidents liés à l’utilisation malveillante des TIC par des acteurs étatiques et non étatiques, ainsi que les implications de l’activité préjudiciable des TIC sur les infrastructures essentielles.  Il est également indiqué que les États membres devraient continuer d’échanger leurs points de vue sur les menaces existantes et potentielles à la sécurité des TIC et sur les mesures de coopération possibles pour y faire face, a-t-il ajouté. 

M. Gafoor a ensuite souligné que dans les sections sur les normes, le droit international, les mesures de confiance, le renforcement des capacités et le dialogue institutionnel régulier figurent diverses propositions concrètes et orientées vers l’action.  Ces propositions nécessiteront de nouvelles discussions approfondies lors des prochaines sessions de fond, a-t-il dit.  En outre, une initiative concrète reflétée dans la section sur les mesures de confiance est l’accord visant à établir un répertoire mondial et intergouvernemental des points de contact, a poursuivi le Président, qui a expliqué à ce propos qu’il a été convenu que les États Membres engageraient de nouvelles discussions ciblées sur l’élaboration d’un tel répertoire lors des quatrième et cinquième session de fond du Groupe.  Le Secrétariat de l’ONU est déjà en train de rassembler les points de vue des États sur ce répertoire, qu’il utilisera comme base pour un document d’information qui sera diffusé en janvier 2023, a-t-il fait savoir. 

Souhaitant que, guidés par ce rapport d’étape annuel, les États Membres continueront à travailler les uns avec les autres de manière constructive pour avancer sur les domaines dans lesquels doit être trouvée « une plus grande convergence », il a appelé ces derniers à adopter par un large consensus le projet de décision porté par Singapour sur le rapport. 

Autres mesures de désarmement et sécurité internationale (suite)

Au nom des États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Mme NOOR QAMAR SULAIMAN (Brunéi Darussalam), a reconnu l’importance des zones exemptes d’armes nucléaires régionales et elle a appuyé les efforts en cours en vue de l’établissement de telles zones, notamment au Moyen-Orient.  Nous soulignons également l’importance d’un dialogue pacifique continu entre toutes les parties concernées pour parvenir à une paix et une stabilité durable dans une péninsule coréenne dénucléarisée, a-t-elle ajouté. 

 Après avoir indiqué que l’ASEAN a également contribué à la sécurité régionale par son travail de promotion de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, le représentant a salué les progrès enregistrés dans la mise en œuvre des accords régionaux entre l’ASEAN et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur la coopération dans les domaines de la science et de la technologie, des applications nucléaires, de la sûreté, de la sécurité et des garanties nucléaires, et qui ont été signés en septembre 2019.  La représentante a réaffirmé l’attachement des États membres de l’ASEAN au respect des obligations découlant des traités de désarmement dont ils sont signataires et à leur participation aux plateformes et dialogues régionaux pour faciliter « la mise en œuvre de nos engagements de manière équilibrée ». 

Au nom du Groupe arabe, M. SARMAD MUWAFAQ MOHAMMED AL-TAIE (Iraq) a estimé que le Moyen-Orient est sans doute l’une des régions du monde qui a le plus besoin de mesures de désarmement afin de rétablir la confiance, de faire baisser les tensions et de mettre en place les conditions propices à la réalisation du développement durable.  Le Groupe arabe souligne l’importance des accords portant sur la création de zones exemptes d’armes nucléaires dans le monde, y compris au Moyen-Orient, ainsi que l’importance d’adopter des mesures efficaces et immédiates, comme le demande sa résolution en ce sens soumise annuellement. 

Le représentant s’est félicité à cet égard de la tenue, en 2019, de la première session de la Conférence pour la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et des autres armes de destruction massive par les Nations Unies.  La deuxième session a permis d’adopter les méthodes de travail de la Conférence et d’établir un comité pour les négociations intersessions, dans l’attente de la troisième session qui se tiendra en novembre de cette année.  Alors que les États arabes se sont acquittés de leurs responsabilités concernant l’établissement de la sécurité et de la stabilité au Moyen-Orient, le représentant a demandé aux autres parties d’en faire autant.  Dans ce contexte, il a exprimé sa vive préoccupation face au refus d’Israël d’adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et de placer ses installations nucléaires dans le système de garanties de l’AIEA. 

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne, a condamné la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine et lui demande instamment de cesser ses attaques aveugles contre les civils et de se retirer immédiatement et sans condition de l’ensemble du territoire ukrainien.  Le représentant a appelé la Russie et le Bélarus à se conformer aux résolutions de l’Assemblée générale sur l’agression russe contre l’Ukraine. 

Le représentant a souligné que la majorité des projets d’assistance régionaux soutenus par l’Union européenne peuvent être considérés comme des projets classiques de contrôle des armes légères et de petit calibre (ALPC).  Ils ont une portée régionale et sont mis en œuvre avec l’aide d’organisations régionales.  Le représentant a ensuite cité les différentes organisations régionales et sous régionales avec lesquelles l’Union européenne travaille en ce sens, en Europe, en Afrique, en Asie du Sud-Est, dans les Caraïbes ou encore avec les États Membres de la Ligue des États arabes. 

D’autres projets de l’Union européenne permettent de renforcer les capacités en matière de contrôle des exportations d’armes, a poursuivi le représentant.  L’Union européenne aide ainsi les États à renforcer leurs systèmes de contrôle des transferts d’armes en vue de mettre en œuvre le traité sur le commerce des armes.  En outre, l’Union européenne a fourni une assistance technique à un grand nombre de pays en Amérique latine, en Afrique, en Asie centrale et du Sud-Est, en Europe de l’Est et dans le Caucase, afin de renforcer leurs systèmes nationaux, conformément aux exigences du Traité. 

Par ailleurs, l’Union européenne considère que le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) des anciens combattants sont essentiels pour la construction d’une paix durable.  Les programmes de DDR font donc partie intégrante de la contribution de l’Union européenne à la non-réapparition de la violence et à une stabilisation plus élargie, puisqu’ils s’attaquent aux risques posés par les groupes armés et soutiennent la transition de la confrontation armée vers la gouvernance inclusive.  Pour relever les défis posés par les groupes armés et maximiser l’impact de ses actions, l’UE a décidé d’actualiser sa politique de DDR, en se servant de la stratégie globale et son approche intégrée face aux conflits extérieurs et aux crises, a expliqué le représentant. 

M. DANURDORO PARNOHADININGRAT (Indonésie) a déclaré que la sécurité régionale est nécessaire pour renforcer la préparation au désarmement au niveau régional.  Elle considère que les zones exemptes d’armes nucléaires sont indispensables pour parvenir à l’objectif ultime de désarmement nucléaire et demande que les États dotés fournissent des garanties quant à la non-utilisation des armes nucléaires pour tous les États d’une zone exempte d’armes nucléaires, quelles que soient les circonstances.  Ces États dotés doivent aussi ratifier les protocoles à tous les traités établissant des zones exemptes d’armes nucléaires. 

L’Indonésie est d’avis que chaque État non doté a un rôle important à jouer pour s’assurer que les territoires et les régions appartenant à une zone exempte d’armes nucléaires ne seront pas utilisés en violant les objectifs de non-prolifération et de désarmement nucléaire.  Le représentant a appelé à la prorogation et à l’élargissement des ZEAN existantes et à la création de nouvelles zones dans les régions où elles n’existent pas encore.  Il a salué la convocation de la troisième session de la Conférence sur la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive en novembre.  Cette réunion devrait créer des engagements supplémentaires par des parties pour qu’elles puissent atteindre les objectifs, a-t-il estimé.  Il a en outre appelé à une dénucléarisation complète et vérifiable de tout le Proche et Moyen-Orient. 

M. MOHAMED KAMAL ALI ELHOMOSANY (Égypte) a estimé que la paix et la sécurité ne peuvent être obtenues au Moyen-Orient par la dissuasion et l’accumulation d’armements, mais au contraire en s’engageant sur la mise en place d’une architecture équitable et efficace pour réaliser la sécurité de tous les États et peuples de la région.  Selon lui, la prise de mesures sérieuses vers la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient aurait déjà pu sauver la région et le monde de guerres et d’horreurs dévastatrices.  Par conséquent, le représentant s’est félicité vivement de la tenue réussie des première et deuxième sessions de la Conférence sur la création d’une telle zone, lesquelles ont permis l’adoption d’une déclaration politique, d’un règlement intérieur et d’un rapport final, et porté création d’un comité de travail informel pour les consultations d’intersessions.  Il a annoncé attendre avec intérêt et optimisme la tenue de la troisième session de la Conférence, qui aura lieu le mois prochain, à New York, sous la présidence du Liban.

Mme CAMILLE PETIT (France) s’est inquiétée des menaces qui pèsent sur l’architecture de sécurité européenne et de l’érosion progressive du régime de maîtrise des armements conventionnels mis en place au cours des années 1990 dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  Selon elle, les trois grands piliers du régime de sécurité européen que sont le Traité sur les forces conventionnelles en Europe, le Document de Vienne et le Traité « Ciel ouvert », déjà « fragilisés », sont aujourd’hui directement affectés par la guerre en Ukraine.  Depuis l’annexion de la Crimée en 2014 et la guerre d’agression menée contre l’Ukraine, avec le soutien du Bélarus, la Fédération de Russie montre son mépris pour les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et les engagements qui régissent les relations entre les États de l’OSCE, a estimé Mme Petit. 

La représentante a par ailleurs encouragé la coopération régionale et sous-régionale en matière de prévention et de lutte contre le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre.  Elle a souligné à cet égard l’appui de la France aux initiatives en cours dans la zone sahélo-saharienne, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ainsi que dans les Balkans occidentaux, en collaboration avec l’Allemagne et l’Union européenne. 

M. BRUCE I. TURNER (États-Unis) a rappelé que son pays a toujours voulu soutenir la coopération, la paix et la sécurité au niveau régional.  Il a cependant déploré que cette année, de plus en plus de menaces sur la paix régionale se sont développées.  La Fédération de Russie a violé ses obligations au titre de la Charte des Nations Unies, a-t-il déclaré.  Il a rappelé qu’avec les Nations Unies, son pays avait voulu empêcher la saisie par la force du territoire de l’Ukraine, avant de dénoncer la saisie par la Russie du personnel de la centrale de Zaporijia et les risques sans précédent que cela fait peser sur le monde. 

Le représentant a rappelé son attachement à la centralité de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) dans la zone indopacifique.  Nous voulons faciliter une participation plus régulière ainsi que des mesures pour réduire les risques nucléaires dans la zone indopacifique, a-t-il déclaré.  Il s’est dit très préoccupé par les velléités de la République populaire de Chine envers Taïwan.  « Le détroit de Taiwan est très important au niveau international », a-t-il rappelé.  Dans ce contexte, il a noté avec préoccupation l’expansion des forces nucléaires de la Chine et demandé à ce pays de fournir plus de transparence quant à ses intentions.

Par ailleurs, le représentant a souligné l’expansion des activités nucléaires de l’Iran, s’inquiétant de mesures qui n’ont pas de justification civile plausible.  À cet égard, il a estimé que l’Iran doit collaborer urgemment avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).  Par ailleurs, le refus de la Syrie d’entendre les appels à la coopération de l’AIEA suscite beaucoup de questions qui demeurent un sujet de préoccupation depuis une décennie.  Le représentant a rappelé que l’offre de négociation avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC) reste sur la table, mais sans précondition.  « Nous continuerons à défendre le Japon et la République de Corée », a-t-il ajouté.  Enfin, les États-Unis sont en faveur d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient dès lors que sa création reposera sera le fruit d’un consensus régional. 

Mme HEATHER MCINTYRE (Australie) après avoir condamné l’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine, a déclaré que son pays collabore avec ses partenaires par le truchement de mesures sécuritaires régionales pertinentes.  Elle a dit être attachée à l’élaboration d’accord sur une région exempte d’armes nucléaires conclue librement entre les États des régions. 

L’Australie est un des grands défenseurs du traité de Rarotonga qui a porté création de la zone exempte d’armes nucléaires dans le Pacifique Sud.  La représentante a soutenu l’engagement de 2019 des dirigeants des îles du Pacifique pour opérationnaliser le Traité.  Elle a salué les efforts entrepris par d’autres régions pour créer des zones exemptes d’armes nucléaires ou pour assurer l’absence totale d’armes nucléaires sur les territoires concernés, en particulier le Traité de Bangkok concernant la ZEAN d’Asie du Sud-Est.  Elle a dit être très préoccupée par les effets déstabilisateurs du développement de missiles balistiques par la RPDC. 

L’Australie est aussi très attachée à l’idée de l’ASEAN et à son architecture, qui constituent une base de la sécurité régionale.  Elle est aussi un partenaire stratégique et holistique dans les secteurs de la sécurité numérique, maritime et la riposte aux catastrophes, a poursuivi la représentante.  L’Australie promeut la diplomatie préventive pour renforcer le désarmement et non-prolifération nucléaire.  L’Australie continue son partenariat sécuritaire avec la famille du Pacifique notamment grâce au Forum des îles du Pacifique, qui est nécessaire à notre sécurité collective, a encore déclaré la représentante. 

M. ALEKSANDER SZEWCZUK (Pologne) a estimé que le 24 février 2022 représente un moment décisif pour l’architecture de sécurité régionale et mondiale fondée sur le droit international, alors que la Fédération de Russie, membre permanent du Conseil de sécurité, a lancé une invasion à grande échelle de l’Ukraine.  Par son agression, la Russie a décidé de lancer une période de « chaos et d’incertitude », après s’être retirée du Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe et du Traité « Ciel ouvert ». 

Dans ce contexte, le représentant a jugé « extrêmement difficile » de maintenir un système efficace de contrôle international des armements.  « Nous sommes à un moment critique », s’est-il alarmé.  La situation sécuritaire dans la région de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) fera l’objet de discussions lors de la réunion de son Conseil ministériel, en décembre, en Pologne.  La responsabilité des actions russes repose également sur le Bélarus, a argué le représentant, qui a activement facilité l’action militaire de la Fédération de Russie en mettant à sa disposition son espace aérien, son territoire et ses infrastructures, et qui doit donc être considéré comme complice de l’agression russe.  Nous devons rester réalistes dans nos évaluations de la situation actuelle, a-t-il assuré, mais nous ne pouvons pas nous permettre de rester passifs dans la défense des valeurs et des engagements auxquels nous avons souscrit.

Mme DIANE SHAYNE DELA FUENTE LIPANA (Philippines) a estimé que le développement de mécanismes et d’institutions pour gérer les architectures de sécurité régionales devraient inspirer le développement de normes internationales.  Les mécanismes mis en place par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) à cet égard ont facilité l’instauration de la confiance et la coopération régionale, a estimé la représentante, qui s’est dite attachée à la coopération régionale dans le cadre de l’ASEAN, notamment dans le domaine de la réponse nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) et de la réduction des risques nucléaires. 

En outre, la représentante a réaffirmé l’importance de l’action contre les mines pour le développement durable et que l’aide à la lutte contre les mines doit être fournie dans le but de développer les capacités nationales indépendantes.  Les Philippines s’engagent à préserver l’Asie du Sud-Est en tant que zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive, a affirmé le représentant.  Il a réaffirmé que les approches mondiales et régionales du désarmement se complètent et qu’elles doivent être poursuivies simultanément pour promouvoir la paix et la sécurité régionale et internationale.  Cette complémentarité est toutefois à double sens, a-t-elle souligné.  Les mesures régionales doivent être complétées par l’adhésion aux normes et cadres mondiaux, sachant que, dans le domaine des armes nucléaires, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires reste la pierre angulaire du régime mondial de désarmement, de non-prolifération et d’utilisation pacifique de l’énergie atomique. 

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) a détaillé par le menu les dévastations de la guerre de la Fédération de Russie sur le territoire de son pays, qui affectent les installations civiles et militaires et qui tuent des civils.  La Russie a même fait du chantage s’agissant de ce qu’elle appelle une « bombe sale », a déclaré le représentant.  Pour lui, incapable de parvenir à ses objectifs militaires sur le terrain, la Russie ne fait que propager des mensonges.  L’Ukraine a, quant à elle, toujours respecté ses obligations découlant du Mémorandum de Budapest, tandis que la Russie n’a cessé de violer ses dispositions. 

C’est la Russie qui a failli déclencher une catastrophe radioactive à la centrale nucléaire de Zaporijia, a accusé le représentant.  C’est la Russie qui utilise des munitions au phosphore, des mines antipersonnel interdites et tout l’arsenal d’armes conventionnelles contre les civils et les infrastructures civiles, a-t-il encore ajouté.  La Russie doit immédiatement arrêter son agression contre l’Ukraine et retirer sans condition toutes ses forces et ses équipements militaires de l’ensemble du territoire de l’Ukraine.  Ce serait la première étape pour rétablir la sécurité et la stabilité en Europe, y compris l’architecture régionale de maîtrise des armements, a-t-il conclu. 

M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a mis l’accent sur la nécessité de respecter les principes d’équilibre des capacités de défense des États et de droit à une sécurité non diminuée pour tous.  Il a ajouté que l’efficacité des mesures de confiance pour mener à bien les activités de contrôle des armes, en tenant compte des spécificités locales et régionales, ne doit pas faire d’elles des substituts aux efforts de règlement pacifique des crises et confiance dans les termes de la Charte des Nations Unies.  Ces mesures, utiles et efficaces, ne sont toutefois pas une fin en soi, a-t-il insisté, appelant les délégations à adopter le projet de résolution que présentera son pays sur le désarmement et les mesures de confiance au plan régional et sous-régional. 

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) a constaté le bouleversement de la sécurité régionale, alors que les alliances militaires continuent de s’étendre et que le principe fondamental de l’indivisibilité de la sécurité est violé de manière flagrante.  Selon le représentant, la raison du déclin de la sécurité militaire en Europe est la politique menée par les États-Unis et l’OTAN en faveur de la confrontation avec la Russie, qui sape les fondements de la sécurité européenne et perturbe le système de maîtrise des armements et des mesures de confiance. 

Les États Membres de l’OTAN continuent en effet de renforcer leur potentiel militaire à proximité des frontières de la Fédération de Russie et d’améliorer leurs capacités opérationnelles en termes de redéploiement des forces vers l’est, a accusé le représentant.  Malgré la politique « agressive » des États-Unis et leur soutien au « régime néo-nazi de Kiev », nous avons tout fait pour trouver une solution diplomatique au conflit, a-t-il assuré.  Selon lui, les actions des États-Unis conduisent à des « hostilités prolongées », et présentent une perspective dangereuse d’affrontement militaire direct entre la Fédération de Russie et l’OTAN, a averti le représentant.  Il a accusé l’Ukraine de « commencer à parler de la nécessité de vaincre la Russie sur le champ de bataille » et « de la démembrer et de la détruire ». 

Les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont travaillé « pendant des décennies » au démantèlement des principaux accords de contrôle des armements et de renforcement de la confiance, a encore accusé le représentant.  Il a cité la dénonciation unilatérale par les États-Unis du traité soviéto-américain sur les missiles antibalistiques et leur refus de proroger le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe.  Dans ce contexte, il a dénoncé les appels visant à actualiser le Document de Vienne et le retrait unilatéral des États-Unis du Traité « Ciel ouvert ». 

Le représentant a appelé à se concentrer sur la mise en œuvre des accords existants, notamment le Document de Vienne, à réduire les activités militaires le long de la frontière entre la Fédération de Russie et les pays de l’OTAN sur une base de réciprocité, et à améliorer les mécanismes de prévention des incidents en mer et dans les airs, tout en maintenant une approche pragmatique dans les travaux de l’OSCE.

M. KIM IN CHOL (République populaire démocratique de Corée - RPDC) a déclaré que le désarmement régional doit être poursuivi pour vivre dans un monde plus sûr et plus stable.  Il a estimé que la péninsule de Corée fait partie des régions qui ont été les plus durement touchées par l’occupation de forces militaires.  Il a dénoncé les menaces ainsi que le chantage qu’exercent les États-Unis et la République de Corée, en pratiquant des exercices nucléaires autour de son pays.  Ainsi, récemment, les États-Unis et la République de Corée ont tenu des exercices nucléaires tout en les maquillant en leur faisant porter des noms différents.  En particulier, en août, ils ont pratiqué des exercices militaires conjoints avec la République de Corée, avec notamment le survol d’un avion portant des armes nucléaires.  Ce sont les États-Unis qui incitent à la haine dans le détroit de Taïwan, a poursuivi le représentant, qui a affirmé que son pays ferait tout pour développer et construire un monde pacifique. 

Mme KATRI LŌHMUS (Estonie) a tancé la Russie pour la poursuite de sa guerre d’agression contre l’Ukraine, malgré la condamnation répétée de ses actions par l’Assemblée générale.  Le vote du 12 octobre est un puissant rappel que l’écrasante majorité des nations défend la Charte des Nations Unies et s’oppose résolument à la guerre de la Russie contre l’Ukraine et son peuple, a estimé la représentante.  L’intégrité territoriale est un pilier central des Nations unies, et le mépris violent de la Russie pour les frontières nationales et la souveraineté de l’Ukraine ne peut être et ne sera pas accepté, a-t-elle ajouté.  Les menaces contre la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de tout État sont une menace pour nous tous. 

La Russie doit retirer immédiatement toutes ses troupes et son équipement militaire de l’ensemble du territoire ukrainien, a exigé Mme Lōhmus qui a déploré la nouvelle campagne russe d’attaques de missiles et de drones visant des civils et des infrastructures civiles dans toute l’Ukraine, en violation du droit international humanitaire.  Ces attaques sont menées à l’aide d’armes iraniennes dont le transfert à la Russie constitue une violation de la résolution 2231 (2015) du Conseil de sécurité, a ajouté la représentante, qui a exhorté les pays à ne pas aider l’agresseur qui commet des crimes de guerre.  Elle a aussi condamné la participation du Bélarus dans l’agression en cours contre l’Ukraine. 

Avant la guerre, la Russie n’a pas fait preuve d’ouverture et de transparence sur ses activités militaires telles qu’elles sont inscrites dans les divers arrangements, y compris à l’OSCE, a encore accusé la représentante.  À ce jour, la Russie est passée d’une mise en œuvre sélective de ses obligations en matière de contrôle des armements à une violation complète de la quasi-totalité d’entre elles, a-t-elle ajouté, avant de demander à la Russie de renouveler son engagement envers ces principes.

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh) a souligné l’importance des mesures de confiance, y compris l’instauration de zones exemptes d’armes nucléaires.  À cet égard, il a apporté le soutien de son pays aux travaux de la Conférence pour la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive, ajoutant que le Bangladesh attache également une haute priorité à des assurances inconditionnelles et juridiquement contraignantes données par les États dotés aux États non dotés d’armes nucléaires contre l’emploi ou la menace d’emploi de telles armes contre eux.  Par ailleurs, M. Hossein a encouragé les trois centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement à s’engager de manière significative auprès des parties prenantes gouvernementales et non gouvernementales pour la promotion du dialogue et des mesures de renforcement de la confiance en Afrique, en Asie et en Amérique latine. 

M. HEIDAR ALI BALOUJI (République islamique d’Iran) s’est inquiété de la multiplication des conflits, dont huit sont en cours au Moyen-Orient, qui est « en feu », alors que la présence de protagonistes externes ne fait qu’exacerber la situation.  Le terrorisme, les budgets militaires excessifs, la consolidation de l’armement importé par plusieurs États rendent cette situation alarmante, a estimé le représentant.  Nous ne devons pas oublier que la puissance militaire d’Israël, source à ses yeux de l’insécurité dans la région et au-delà, dépend des États-Unis, a-t-il noté.  Le régime israélien, seule entité de la région qui a refusé d’adhérer au TNP et au Traité sur les armes chimiques et biologiques, possède des armes de destruction massive et jouit de l’appui des États-Unis malgré ses menaces à la paix et à la sécurité du Moyen-Orient, a poursuivi le représentant.  La création d’une zone exempte d’armes nucléaires basée dur le TNP rencontre toujours les obstacles posés par le régime israélien, a-t-il ajouté. 

S’agissant du Plan d’action global commun, M. Balouji a rappelé que le retrait des États-Unis en 2018 et le refus du Gouvernement actuel de s’y réassocier ont entraîné de nouveaux problèmes de prolifération dans le monde entier.  Il a réitéré l’engagement de son pays, sur la base du Plan d’action global commun et de l’accord sur les garanties, à coopérer pleinement avec l’AIEA.  Le programme nucléaire de l’Iran est purement pacifique, a-t-il répété, en ajoutant que les États-Unis, du fait de leur retrait de nombreux accords, n’ont pas la base morale nécessaire pour s’exprimer comme il le font sur ces questions. 

M. NAZIM KHALDI (Algérie) a rappelé que la région du Sahel est particulièrement touchée par le commerce d’armes légères et de petit calibre (APLC), ce qui exacerbe la situation fragile d’un grand nombre d’États de la région.  Il a appelé à un processus politique multidimensionnel pour lutter contre ce fléau.  Il a rappelé que son pays participe à la lutte contre le terrorisme en Afrique, notamment en accueillant sur son territoire des institutions clefs, dont l’Organisation africaine de coopération policière (AFRIPOL). 

Pour l’Algérie, la création de zones exemptes d’armes nucléaires est une mesure concrète pour arriver à l’élimination de toutes les armes nucléaires, l’Algérie a ainsi été un des premiers signataires du Traité de Pelindaba.  Après avoir soutenu la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, le représentant a appelé tous les pays à participer à la troisième session de la Conférence établie à cette fin.  Enfin, le représentant a expliqué que, conformément à sa politique fondée sur les principes de bon voisinage et de coopération, l’Algérie a proposé un projet de résolution sur le renforcement de la sécurité dans la région de la Méditerranée.  Il a émis l’espoir que ce texte sera adopté par consensus. 

Mme SYLVIA OSOBA (Royaume-Uni) s’est dite préoccupée par la situation en Europe, où la Fédération de Russie mène une attaque non provoquée contre l’Ukraine.  Le Royaume-Uni est notamment profondément préoccupé par la mise en danger inconsidérée par la Russie de la centrale nucléaire de Zaporijia, avec un impact régional potentiellement catastrophique.  La représentante a appelé à soutenir l’Ukraine dans la défense de sa souveraineté et à demander à la Russie de désamorcer la situation, en commençant par cesser son assaut et en retirant immédiatement toutes ses forces d’Ukraine.  Elle a dénoncé le comportement agressif et déstabilisateur de la Russie vis-à-vis de ses voisins, en sus de deux utilisations confirmées de substance chimique de type Novitchok, en Sibérie et à Salisbury.  La Russie doit rendre compte de ces utilisations d’arme chimique.

Au Moyen-Orient, la stabilité régionale est aggravée par le comportement de l’Iran, a ajouté Mme Osoba, qui a cité le développement de missiles balistiques et, la fourniture d’un soutien militaire et financier, y compris la prolifération de la technologie des missiles, dans toute la région.  L’Iran a pris des mesures sans précédent pour accélérer le rythme de son programme nucléaire, produisant de l’uranium enrichi, a accusé la représentante, qui a aussi regretté que l’Iran ait refusé de saisir la récente opportunité diplomatique de conclure le Plan d’action global commun. 

Par ailleurs, la lutte contre l’utilisation d’armes chimiques en Syrie demeure une préoccupation sérieuse et urgente.  S’agissant de la création de zones exemptes d’armes nucléaires, le Royaume-Uni exprime des réserves quant à la crédibilité d’un processus qui n’inclut pas tous les États de la région du Moyen-Orient.  En Asie, Mme Osoba a dit être préoccupée par les programmes illicites de missiles nucléaires et balistiques de la RPDC et a appelé à la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de ce pays.  La RPDC devrait engager un dialogue avec les États-Unis, a suggéré la représentante.  Le Royaume-Uni reste également préoccupé par la possibilité d’une incompréhension entre l’Inde et le Pakistan, a-t-elle indiqué, encourageant les deux parties à engager un dialogue. 

M. AHMED KAMIL RHAIF ALBU-MOHAMMED (Iraq) a appuyé les efforts en cours pour établir au Moyen-Orient une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive, de telles zones constituant à la fois des mesures de confiance et des instruments régionaux efficaces de non-prolifération.  Le représentant a mis en garde contre les atermoiements qui empêchent tout avancée à ce niveau, lesquels ont pour effet de saper le régime instauré par la Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.  C’est pourquoi, il a exhorté Israël à adhérer au TNP et à placer ses installations nucléaires sous le contrôle et la vérification de l’Agence internationale de l’énergie atomique. 

M. AZRIL BIN ABD AZIZ (Malaisie) a déclaré que les zones exemptes d’armes nucléaires jouent un rôle essentiel dans la prévention de la menace ou de l’utilisation de ces « odieux outils de guerre et de destruction ».  Alors que l’architecture mondiale du désarmement et de la non-prolifération est confrontée à de profonds défis, ces zones sont essentielles pour garantir la paix, la sécurité et le développement durable, a-t-il noté.  En Asie du Sud-Est, cette année marque le vingt-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur du Traité de Bangkok et de l’établissement de sa zone exempte d’armes nucléaires.  Ce Traité et les idéaux de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ne pourront être pleinement réalisés tant que le Protocole au Traité n’aura pas été ratifié par les États dotés d’armes nucléaires, a toutefois fait observer le représentant. 

M. ABDOULKADER MOMINE HAMED MOUSTAPHA (Niger) a rappelé que son pays est confronté aux agissements des terroristes et des groupes criminels « qui écument l’espace sahélo-saharien ».  Selon un décompte du Centre d’études stratégiques de l’Afrique, grâce aux armes légères et de petit calibre et aux engins explosifs improvisés, des groupes armés non étatiques font en moyenne 1 500 victimes par an dans la région du Sahel central, a déploré le représentant, si bien que la moitié des victimes du terrorisme dans le monde est enregistrée en Afrique subsaharienne.  Les ALPC entravent la paix, la sécurité et le développement durable, c’est pourquoi la maîtrise de leur prolifération au niveau régional demeure une question primordiale pour la paix et la sécurité au Sahel, a-t-il estimé. 

Ainsi, le Niger a soutenu toutes les initiatives visant à aboutir à un contrôle plus efficace de la circulation illicite des ALPC, que ce soit à travers la surveillance, le marquage et le traçage et de toutes les réglementations internationales en vigueur.  Le Niger a adhéré à la Déclaration de Bamako du 1er décembre 2000 relative à la position commune africaine sur la prolifération, la circulation et le trafic illicite des ALPC ainsi que l’initiative de l’Union Africaine « Faire taire les armes en Afrique ». 

Au niveau sous-régional, le Niger a adhéré à la Convention de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sur les armes légères et de petit calibre, leurs munitions et autres matériels connexes.  Le représentant a en outre fait part d’initiatives mises en place au niveau national et institutionnel, avec notamment la Commission nationale pour la collecte et le contrôle des armes illicites (CNCCAI) qui s’est ensuite transformée en Autorité nationale. 

M. HAMDAN KHALIFA ALMARAR (Émirats arabes unis) a plaidé pour que des négociations soient engagées en vue de parvenir à un traité juridiquement contraignant permettant d’assurer la sécurité régionale et la stabilité internationale.  Il a regretté que la dixième Conférence d’examen du TNP n’ait pas été en mesure d’adopter son document final, en réaffirmant l’importance pour les parties à la prochaine conférence d’examen de parvenir à résultats concrets permettant de mettre en œuvre le plan d’action décidé en 2010, outre l’examen global des trois piliers du Traité.  S’agissant de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, le représentant a estimé que les Émirats arabes unis constituent un modèle en la matière au Moyen-Orient et qu’ils coopèrent pleinement avec l’AIEA sur la base de leurs priorités de développement.  Il a demandé aux États Membres de respecter les normes de l’AIEA et d’adopter des mesures additionnelles afin de renforcer la confiance et la transparence dans leurs activités nucléaires dans la région. 

M. AKAKI DVALI (Géorgie) a déclaré qu’il est évident que de nouvelles réalités sécuritaires et politiques émergent dans la région de la mer Noire.  Dans ce contexte, le représentant a souhaité attirer l’attention sur les actions illégales continues de la Russie à l’égard de la Géorgie.  Aujourd’hui, la Russie continue d’exercer un contrôle effectif sur 20% du territoire géorgien grâce à sa présence militaire illégale dans les régions occupées du pays, en violation du droit international et de la Charte des Nations Unies, a poursuivi le représentant.  Il a également souligné que la guerre de la Russie contre l’Ukraine, la militarisation excessive de la région de la mer Noire et la poursuite de l’occupation illégale des territoires des pays souverains ne sont pas des problèmes qui peuvent être confinés à l’intérieur des frontières régionales, « tant elles ont des implications plus larges sur la sécurité mondiale ».  Par conséquent, il a appelé la communauté internationale a relevé les défis en mer Noire en proposant une réponse stratégique résolue et cohérente. 

M. ABDULRAHMAN ALHASHEM (Koweït) s’est prononcé en faveur des efforts régionaux de désarmement, notamment ceux visant à établir une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient au moyen de la mise en œuvre des résolutions adoptées par la conférence d’examen du TNP de 1995.  De telles zones sont des instruments importants qui constituent des exemples de complémentarité aux accords régionaux et internationaux et qui ajoutent une grande valeur aux efforts collectifs en ce sens, a estimé le représentant.  Il a réaffirmé l’importance de voir Israël accéder au TNP et placer ses installations nucléaires sous le contrôle de l’AIEA. 

Désarmement et sécurité sur le plan régional

Exposé

Mme RADHA DAY, Chef du Service du désarmement régional, de l’information et de la sensibilisation du Bureau des affaires de désarmement, a fait le point sur l’activité des centres régionaux pour la paix et le désarmement coordonnées par le Bureau, en attirant l’attention sur leurs spécificités en fonction des réalités locales en matière de sécurité.  Elle a ainsi noté que l’Afrique continue d’être témoin d’un enchevêtrement de crimes organisés, d’insécurité transfrontalière, de piraterie en haute mer et d’actes de terrorisme, tandis que l’extrémisme violent reste une préoccupation majeure dans les régions sahariennes et sahéliennes.  Le commerce illicite des armes légères et de petit calibre continue de saper la paix et la sécurité aux niveaux national, sous-régional et régional, a-t-elle ajouté, rappelant que la région Asie-Pacifique compte trois zones exemptes d’armes nucléaires et un État exempt d’armes nucléaires, mais que « le spectre de la prolifération nucléaire continue de peser sur la sécurité régionale. »

Mme Day a ensuite indiqué que la prolifération des armes légères constitue une grave menace pour la sécurité et le développement socioéconomique, cela « alors que dans le même temps, l’Asie-Pacifique reste la région comptant le plus petit nombre d’États parties au Traité sur le commerce des armes et de faibles taux de signalement dans le cadre du Programme d’action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre ».  En Amérique latine et dans les Caraïbes, a-t-elle encore dit, le trafic illicite d’armes à feu et de munitions par des réseaux criminels organisés et des gangs reste un obstacle à la sécurité publique et entrave le développement durable. 

Mme Day a ensuite expliqué que, dans ce contexte, les centres régionaux ont travaillé main dans la main avec les États, les organisations régionales et d’autres partenaires pour relever ces défis de sécurité, conformément en particulier à la cible 16.4 des objectifs de développement durable sur la réduction des flux d’armes illicites d’ici à 2030.  Elle a ajouté que l’inclusivité et le renforcement du rôle des femmes et des jeunes dans l’élaboration des politiques de désarmement, de non-prolifération et de maîtrise des armements sont essentiels pour relever durablement les défis auxquels nous sommes confrontés.  Elle a indiqué à cet égard que, grâce au financement de l’Union européenne, les centres régionaux ont continué à mettre en œuvre un projet d’appui à l’intégration du genre dans les politiques, programmes et actions de lutte contre le trafic illicite et l’utilisation abusive des armes légères et de petit calibre.  Par ailleurs, Mme Day a fait observer que les centres régionaux ont également aidé les États Membres à combattre la menace posée par la prolifération des armes de destruction massive, cela en les aidant sur les plans juridique et technique à renforcer la mise en œuvre nationale des traités multilatéraux de non-prolifération, y compris la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité. 

Mme Day a ensuite abordé le travail du Bureau des affaires de désarmement à Vienne, en notant que la guerre en Ukraine avait braqué les projecteurs sur les organisations internationales et processus intergouvernementaux basés dans la capitale autrichienne.  Or, a-t-elle signalé, le Bureau à Vienne joue dans ce contexte un rôle essentiel en fournissant un lien entre ces processus pertinents pour notre travail. 

Enfin, elle a appelé les États Membres à assurer un financement pérenne des centres régionaux. 

Déclarations

Mme INDIRA GOHIWAR ARYAL (Népal) a exprimé son appui aux approches régionales du désarmement, notamment au Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique), situé à Katmandou.  Les centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement offrent en effet aux États Membres une plateforme permanente pour le dialogue et l’échange des meilleures pratiques adaptées à chaque région, ce qui contribue au développement d’une approche régionale commune du désarmement, a estimé la représentante.  Elle a appelé à cet égard à un financement adéquat de ces centres en Afrique, en Asie et en Amérique latine, afin de développer des synergies dans les efforts globaux de désarmement. 

En tant que pays hôte, le Népal continuera à apporter son soutien au Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement afin d’organiser des réunions et des dialogues régionaux dans le cadre du Processus de Katmandou.  Elle a encouragé les États membres de la région à faire des contributions volontaires au Centre pour assurer la mise en œuvre efficace de ses activités mandatées par l’Assemblée générale.  Le Népal par ailleurs déposé un projet de résolution intitulé « Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique ». 

M. DAVIT KNYAZYAN (Arménie) a souligné l’ampleur de l’« agression » contre son pays et ses préparatifs, « tels que les exercices militaires réguliers menés par l’Azerbaïdjan ».  L’Azerbaïdjan a largement utilisé tous les types d’armes lourdes pendant le conflit, y compris les lance-roquettes, de l’artillerie, des missiles, des avions militaires et des armes interdites, telles que les armes à sous-munitions et les armes incendiaires, a accusé le représentant, qui a souligné qu’au lendemain du conflit, « la situation sécuritaire dans notre région reste fragile en raison d’un renforcement militaire incontrôlé de l’agresseur, d’une rhétorique agressive persistante, de violations du cessez-le-feu et de revendications territoriales illégitimes contre l’Arménie ». 

L’Azerbaïdjan nie l’existence même du Haut-Karabakh, a ajouté le représentant, qui a indiqué que, pas plus tard que le 13 septembre 2022, « l’Azerbaïdjan a lancé une agression militaire visant les régions de l’est et du sud-est de l’Arménie, faisant plus de 200 morts, y compris parmi la population civile ».  L’Arménie attache une grande importance aux activités des organisations internationales et régionales visant à mener des missions de surveillance, d’évaluation et d’établissement des faits, dans le cadre de leurs mandats respectifs, afin de prévenir la commission de tels actes d’agression. 

M. ZHANGELDY SYRYMBET (Kazakhstan) a déclaré que la situation au Moyen-Orient devait requérir l’attention immédiate de la Commission, ajoutant à ce sujet que la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive y serait l’un des moyens les plus efficaces pour prévenir la prolifération et assurer la paix, la stabilité et la confiance.  Le Kazakhstan est également fier de défendre la question du renforcement de la coopération entre les zones exemptes d’armes nucléaires existantes et se tient prêt à poursuivre ses efforts dans ce sens, notamment en organisant de nouvelles réunions de représentants des zones exemptes d’armes nucléaires dans un proche avenir. 

Par ailleurs, le représentant a exprimé sa gratitude au Bureau des affaires de désarmement et aux centres régionaux des Nations Unies, pour leur précieuse contribution au désarmement, à la paix et à la sécurité régionaux et mondiaux.  Il a précisé que son pays avait organisé, avec le Bureau et le Centre régional pour l’Asie et le Pacifique, de nombreux ateliers de travail sur les enjeux relatifs aux zones exemptes d’armes nucléaires, à un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires et à la Convention sur les armes biologiques. 

Mme ROSANIS ROMERO LÓPEZ (Cuba) a rappelé que la région de l’Amérique latine et des Caraïbes est devenue la première zone exempte d’armes nucléaires, au moyen du Traité de Tlatelolco.  Elle s’est dite convaincue que de telles zones contribuent au désarmement nucléaire mondial, au renforcement du régime de non-prolifération nucléaire et au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Les puissances nucléaires doivent agir conformément aux obligations qui leur incombent et respecter le statut de ces zones en retirant le plus rapidement possible leurs réserves et leurs interprétation contraires des traités en la matière, a-t-elle insisté.

M. WAJDI HASSAN M. MOHARRAM (Arabie saoudite) a estimé que le refus continu d’Israël d’adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires pourrait compromettre son universalisme.  Le représentant a aussi dénoncé le non-respect des conclusions de l’AIEA par la République islamique d’Iran dans le cadre de son contrôle des activités nucléaires.  Pour l’Arabie saoudite, l’Iran ne respecte pas ses engagements au titre du Plan d’action global commun et cela « représente une menace pour la coopération et la stabilité dans la région ».  Le représentant s’est par ailleurs félicité des résultats des première et deuxième sessions de la Conférence pour la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive, notant en particulier l’adoption du règlement intérieur et la création d’un comité de travail officieux.  Il a dit sa hâte à participer à la troisième session. 

M.KONSTANTINOS CHRISTOGLOU (Grèce) a déclaré que son pays, conscient des défis dans la région de la Méditerranée orientale, cherche constamment à consolider un cadre de sécurité régionale, principalement par le dialogue et la coopération.  À cette fin, nous sommes toujours disposés à encourager et à promouvoir la coopération multilatérale et les actions conjointes dans la région, avec les pays respectueux du droit international, a ajouté le représentant.  La Grèce soutiendra cette année encore le projet de résolution intitulé « Renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région de la Méditerranée », a-t-il annoncé.

M. SULTAN NATHEIR MUSTAFA ALQAISI (Jordanie) s’est vivement inquiété des échecs en matière de désarmement et a dénoncé l’incapacité à universaliser le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  La Jordanie soutient toute initiative commune pour le désarmement, particulièrement la création au Moyen-Orient d’une zone exempte d’armes nucléaires.  Pour le représentant, la création d’une telle zone fait partie du processus d’extension du TNP.  Il a aussi appelé Israël à adhérer au TNP et à placer toutes ses activités sous le régime de garanties de l’AIEA.

M.RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a rappelé que la région de l’Amérique latine et des Caraïbes avait ouvert un nouveau chapitre du désarmement et de la non-prolifération il y a 55 ans en établissant la première zone exempte d’armes nucléaires avec le Traité de Tlatelolco.  En tant que membre de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), le Brésil réitère son attachement à promouvoir le dialogue et la coopération entre les zones exemptes d’armes nucléaires. 

Alors que certains États dotés de l’arme nucléaire ont formulé des déclarations qui vont à l’encontre de l’esprit du Traité de Tlatelolco, le représentant les a invités à retirer ces déclarations et à accepter une certaine diminution de leur niveau de sécurité.  Dans le cas contraire, nous risquons d’entrer en territoire dangereux, a-t-il noté, en appelant à cesser le nivellement de la sécurité par le bas. 

Le Brésil et l’Argentine ont par ailleurs développé un modèle novateur de garanties nucléaires grâce à la création de l’Agence pour la reddition des comptes et le contrôle des matières nucléaires, qui a mené à la signature d’un accord quadripartite avec l’AIEA, lequel permet d’assurer la surveillance des activités nucléaires dans les deux pays sur la base du principe de surveillance entre voisins, a également rappelé le représentant. 

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a rejeté toutes les accusations à son encontre, notamment au sujet de l’Ossétie du sud et de l’Abkhazie.  Il a accusé en retour la Géorgie d’attaques violentes et d’empêcher le droit des peuples à l’autodétermination.  Il a aussi évoqué la préparation par l’Ukraine d’un recours à une arme de destruction massive, composée en partie d’uranium, qu’il a qualifiée de « bombe sale », avec le concours de pays occidentaux.

Le représentant de la Chine a répondu aux accusations des États-Unis au sujet de Taïwan, qu’il a rejetées, les jugeant dépourvues de fondement.  Taïwan appartient à la Chine, et c’est au peuple chinois de résoudre la question taïwanaise, a jouté le représentant, qui a averti que la Chine prendra toutes les mesures qui s’imposent pour une réunification pacifique.  Concernant la politique nucléaire chinoise, elle a pour seul but de dissuader une éventuelle attaque nucléaire contre la Chine, et elle est totalement transparente, a affirmé le représentant. 

Le représentant d’Israël a rappelé que l’on ne pourrait garantir l’architecture de dénucléarisation au Moyen-Orient sans Israël.  Tout cadre de sécurité ne peut être que le résultat d’une volonté multiple, a-t-il affirmé.  Il faut tenir compte de tous les États.  Concernant les déclarations de la République islamique d’Iran, le représentant a estimé que ce pays est la plus grande menace dans la région, du fait d’une idéologie extrémiste. 

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté catégoriquement les déclarations des États-Unis.  La situation dans la péninsule coréenne est due à la politique hostile des États-Unis qui mènent des exercices armés conjoints avec la République de Corée, a-t-il affirmé.  Leur volonté est de faire tomber notre régime et ils souhaitent que nous ne puissions appliquer notre droit à l’autodéfense, a poursuivi le représentant, qui a ajouté que son pays répondrait de manière proportionnée.  La politique haineuse et hostile des États-Unis ne reflète pas la réalité, a-t-il ajouté.  Concernant les propos de l’Australie et du Royaume-Uni, le représentant a estimé qu’ils constituent une grave provocation.  Ces pays suivent aveuglement la politique hostile des États-Unis contre la RPDC, a-t-il déclaré.  Le Royaume-Uni et l’Australie feraient mieux de se regarder dans le miroir au lieu de pointer les autres du doigt, a-t-il conclu

Le représentant de l’Union européenne a répondu à la Fédération de Russie que ses pays membres condamnent les annexions de régions ukrainiennes, « dont nous ne reconnaîtrons jamais le résultat des référendums fantoches ». 

Le représentant de l’Azerbaïdjan a répondu à l’Arménie que plus personne n’est dupe de sa tentative d’occulter les crimes de guerre commis par ce pays contre le sien.  Nous avons répliqué pour défendre notre souveraineté et notre intégrité territoriale, conformément à la Charte des Nations Unies, a ajouté le représentant azerbaïdjanais. 

Le représentant de la République arabe syrienne a rejeté les propos de ses homologues de l’Union européenne et des États-Unis concernant le manque de coopération de son pays avec l’AIEA, en rappelant que la Syrie avait été l’un des premiers pays à rejoindre le TNP et travaille activement à créer une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Pendant ce temps, Israël se fait fournir des armes nucléaires de pointe hors de tout cadre international, ce qui va à l’encontre de la paix et de la sécurité régionales et du TNP, a affirmé le représentant.  Il a dénoncé le langage utilisé par le Royaume-Uni pour désigner son pays.  La Syrie a éliminé toutes ses armes chimiques, a-t-il ajouté, en estimant que l’équipe d’inspecteurs de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques cible la Syrie et ignore le fait qu’elle coopère pleinement avec l’OIAC, laquelle est instrumentalisée à des fins politiques. 

Le représentant de la République de Corée a réfuté les allégations proférées par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) en précisant que c’est ce pays qui a lancé une guerre d’agression contre le sien, et non le contraire.  Après plus de 40 tirs de missiles balistiques cette année, la RPDC s’apprête maintenant à mener son septième essai nucléaire, a dénoncé le représentant.  À ses yeux, les essais nucléaires nord-coréens sont illégaux et sont responsables des tensions dans la péninsule. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a rejeté les accusations infondées d’Israël et du Royaume-Uni, dénonçant des campagnes de désinformation de la part d’Israël pour détourner l’attention de ses brutalités, de ses crimes ainsi que l’occupation illégale de la Palestine et sa politique raciste.  Il a aussi accusé Israël du meurtre d’un scientifique iranien, de sabotage, et d’activités nucléaires clandestines.

Le représentant des États-Unis a répondu à la Russie, étant donné sa menace implicite.  Il a reproché à la Russie d’injustement accuser l’Ukraine de préparer une bombe sale, ce qui est très inquiétant, en même temps qu’un nouvel exemple de ses dangereux bruits de bottes.  Il a recommandé à la Russie de s’abstenir de ce genre de menaces. 

Le représentant de l’Arménie a répondu à l’Azerbaïdjan que cette Commission ne délibère pas du statut juridique de territoires.  Il a en outre condamné les comportements criminels de ce pays en Arménie et lui a demandé de ne pas s’étonner d’entendre dire que leurs auteurs devront être traduits en justice.

Le représentant de l’Arabie saoudite a répondu à l’Iran que son pays respecte l’accord de garanties généralisé de l’Agence internationale de l’énergie atomique qui le lie à cette organisation importante.  Nous appelons l’Iran à respecter ses propres engagements, a ajouté le délégué saoudien. 

Exerçant son second droit de réponse, le représentant de la République populaire démocratique de Corée a estimé qu’il est pathétique de voir la République de Corée s’exprimer au nom des États-Unis.  Elle dépend des États-Unis et importe du matériel militaire venant des États-Unis.  La République de Corée mène des activités conjointes avec les États-Unis.  Nous regarderons de près ces activités et réagirons si nécessaire, a-t-il dit. 

Le représentant de la Fédération de Russie a réagi aux déclarations infondées par les États-Unis et de l’Union européenne concernant l’Ukraine.  « Nous menons une action conforme au droit international », a-t-il affirmé.  Concernant les référendums, ils ont été organisés conformément au droit des peuples conformément à la Charte des Nations Unis et la population concernée a eu la possibilité de s’exprimer librement.  Quant à la « bombe sale », le représentant a mis en garde la communauté internationale, affirmant qu’une agression se préparait.  Cessons de faire tanguer ce navire nucléaire, a-t-il conclu. 

Le représentant de l’Azerbaïdjan a invité l’Arménie à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des États et à cesser de diffuser de fausses informations, de mener une politique de haine et de lancer des revendications territoriales erronées.

Le représentant de l’Arménie a rétorqué que le recours systématique à la force par l’Azerbaïdjan constitue une menace à la paix et à la sécurité régionales et sape le processus de paix entre les deux pays. 

Espace extra-atmosphérique

Au nom du Mouvement des pays non alignés, Mme GRATA WERDANINGTYAS (Indonésie) a rappelé les droits souverains inaliénables et légitimes des États à l’exploration et à l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique à des fins exclusivement pacifiques.  La représentante a souligné que la prévention d’une course aux armements dans l’espace permettrait d’éviter un grave danger pour la paix et la sécurité internationales.  Elle a souligné l’importance de respecter strictement les accords de limitation des armements et de désarmement relatif à l’espace, y compris les accords bilatéraux.  Elle a souligné l’urgente nécessité d’entamer des négociations de fond au sein de la Conférence du désarmement sur un instrument juridiquement contraignant et multilatéralement vérifiable sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects. 

Le Mouvement des pays non alignés rejette la déclaration faites par les États-Unis en 2018, selon laquelle « l’espace est le prochain champ de bataille » et souligne la nécessité d’entamer des travaux de fond à la Conférence du désarmement, notamment sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Prenant acte des progrès substantiels réalisés au cours des discussions du Groupe d’experts gouvernementaux établi conformément à la résolution 72/250 de l’Assemblée générale, tels qu’ils sont reflétés dans le projet de rapport final de ce Groupe, la représentante a exprimé sa forte déception quant au fait que le consensus sur le projet de rapport final du Groupe d’experts gouvernementaux a été bloqué par les États-Unis.  Il aurait pu représenter une bonne base pour la poursuite des négociations en vue de l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant, a-t-elle estimé.

L’abrogation du Traité contre les missiles balistiques -Traité ABM- a entraîné de nouveaux défis pour la paix et la stabilité internationales et la prévention d’une course aux armements dans l’espace, a estimé la représentante, qui s’est dite sérieusement préoccupée par les conséquences négatives sur la sécurité du déploiement des systèmes de défense contre les missiles stratégiques. 

Le Mouvement des pays non alignés salue les résolutions 76/22 et 73/31 de l’Assemblée générale sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, ainsi que la résolution 73/72 sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales.  Il prend acte des discussions sur l’élaboration de recommandations visant à promouvoir la mise en œuvre de mesures pratiques dans les activités spatiales, dans le but de prévenir une course aux armements dans l’espace.  Il est nécessaire d’adopter une démarche universelle sur ces questions, a conclu la représentante. 

Au nom du Groupe africain, M. MUHAMMAD ZAYYANU BANDIYA (Nigéria) a notamment rappelé la création de l’Agence africaine de l’espace extra-atmosphérique et réitéré que l’immense potentiel de la technologie et des applications spatiales devrait également être bénéfique à tous les États Membres.  C’est pourquoi, a-t-il ajouté, le Groupe africain demande à l’ONU de promouvoir un accès égal et non discriminatoire à l’espace extra-atmosphérique pour toutes les nations.  Le représentant a souligné à cet égard que les recommandations du Groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales continuent de représenter une contribution importante à la préservation de l’espace extra-atmosphérique à des fins pacifiques.  Enfin, il a indiqué que le Groupe africain insiste cette année encore sur la nécessité urgente de commencer des négociations de fond au sein de la Conférence du désarmement en vue l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant et multilatéralement vérifiable sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace sous tous ses aspects. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a reconnu l’apport de la technologie spatiale aux secteurs des télécommunications et de la finance.  Les ministres des affaires étrangères de l’ASEAN ont réaffirmé lors de leur dernière réunion que l’accès à l’espace extra-atmosphérique est un droit inaliénable de tous les États et qu’il doit être utilisé à des fins exclusivement pacifiques, pour le bénéfice collectif de l’humanité, a rappelé le représentant.  Il a réaffirmé que les activités spatiales doivent être menées conformément au droit international et au principe de non-appropriation de l’espace, de même que son opposition à toute course aux armements dans l’espace. 

L’ASEAN demeure vivement préoccupée par la menace à la paix et à la sécurité internationales que représente la militarisation potentielle de l’espace ou sa conversion en un domaine de conflit armé.  Dans ce contexte, il est urgent selon le représentant d’entamer des négociations en vue d’un instrument juridiquement contraignant et multilatéralement vérifiable sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Le représentant s’est félicité de la création du groupe de travail sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes spécifiques, conformément à la résolution 76/231 de l’Assemblée générale, en expliquant que le Forum régional de l’ASEAN avait récemment organisé des ateliers sur la sécurité spatiale. 

L’ASEAN reconnaît les progrès significatifs réalisés par le Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS) et le Bureau des affaires spatiales des Nations Unies dans la promotion de la coopération internationale concernant les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, pour l’ASEAN, toute initiative à ce sujet doit tenir compte des préoccupations de sécurité des États et de leur droit à l’utilisation pacifique des technologies spatiales.  Le représentant a par ailleurs renouvelé son appel en faveur de mesures permettant de réduire les débris spatiaux, en soulignant toutefois que les activités spatiales ne doivent pas rester l’apanage d’un petit groupe d’États.  Il a encouragé à cet égard le renforcement des capacités des pays en développement pour faire en sorte que l’espace demeure le patrimoine commun de toute l’humanité. 

Au nom du Groupe des États arabes, M. SARMAD MUWAFAQ MOHAMMED AL-TAIE (Iraq) a réaffirmé que les valeurs du Groupe se fondaient sur le principe selon lequel l’espace extra-atmosphérique est un patrimoine commun de l’humanité et doit à ce titre être réglementé par les Nations Unies, afin de garantir les principes de respect et d’inclusivité, entre autres.  Tout cela doit reposer sur un instrument international juridiquement contraignant pour contenir la course à l’armement extra-atmosphérique, estime le Groupe arabe.  Le représentant a toutefois ajouté que cette situation ne devait pas aboutir sous quelque forme que ce soit à contrevenir au droit inaliénable de chaque État à utiliser l’espace extra-atmosphérique.

L’espace extra-atmosphérique doit demeurer un espace de paix, exempt de tout conflit, a poursuivi le représentant, qui a demandé l’adoption d’un traité juridiquement contraignant pour couvrir le déploiement de tout type d’armement et prévenir toute attaque armée d’objet se situant dans l’espace extra-atmosphérique. 

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie), s’exprimant aussi au nom du Bélarus, de la Chine, du Nicaragua, de la République arabe syrienne, de la République populaire démocratique de Corée et du Venezuela, a considéré que la proposition de prendre l’engagement politique de ne pas procéder à des essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe allait dans la bonne direction.  Toutefois, a ajouté le représentant, elle est insuffisante pour garantir des activités exclusivement pacifiques dans l’espace et s’acquitter des tâches de prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique. 

Le représentant a en effet estimé que l’adoption d’un tel engagement n’implique pas le renoncement à la fabrication desdits systèmes antisatellites, ni à leur utilisation au combat ou aux essais non destructifs de missiles antisatellites.  La destruction des armes de ce type déjà disponibles n’est pas non plus envisagée.  Par conséquent, tant que cette initiative ne serait pas universelle, des avantages pour un certain groupe d’États déjà en possession de tels moyens apparaîtraient, tandis que d’autres, à commencer par les pays en développement, se trouveraient dans une position de discrimination, a-t-il affirmé.  Il a souligné que tout ceci serait exacerbé par l’absence d’une définition des armes antisatellites. 

Le représentant a réaffirmé la nécessité d’adopter des mesures pratiques pour lancer des négociations sur un instrument juridiquement contraignant sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, qui serait assorti de garanties de non-placement d’armes dans l’espace et de non-recours à la force ou à la menace de la force contre des objets spatiaux.  Il a appelé à l’élaboration d’un tel instrument pour un espace de paix, qui serait un bienfait pour toute l’humanité. 

M. MICHAL KARCZMARZ, de l’Union européenne, a affirmé que l’Union européenne était activement engagée dans la préservation d’un environnement spatial sûr et durable et l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique sur une base équitable et mutuellement acceptable pour tous.  Selon le représentant, la prévention d’une course aux armements dans l’espace est essentielle pour renforcer la sécurité et la stabilité internationales et pour préserver la libre utilisation de l’espace à des fins pacifiques. 

L’Union européenne reconnaît en effet que l’espace extra-atmosphérique est un bien commun mondial qui doit être utilisé au profit de l’ensemble de l’humanité.  Plusieurs systèmes et services aujourd’hui essentiels dépendent directement ou indirectement de l’espace, a relevé le représentant, en précisant que le Traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 et les principes directeurs des Nations Unies constituent la pierre angulaire de la gouvernance mondiale de l’espace. 

Afin de maintenir la sécurité spatiale, l’adoption de normes, de règles et de principes de comportement responsable constitue une première étape importante.  Pour l’Union européenne, le Groupe de travail créé en vertu de la résolution 76/231 de l’Assemblée générale se veut un outil utile pour façonner un consensus international sur cette question et instaurer la confiance nécessaire pour prendre des mesures susceptibles de déboucher sur de nouveaux instruments juridiquement contraignants.  Le représentant a réitéré à cet effet son appui au Comité des Nations Unies sur les utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique (COPUOS).

L’environnement spatial devient de plus en plus encombré, contesté et compétitif, a poursuivi le représentant, pour qui la destruction d’objets spatiaux constitue un risque pour les sociétés qui dépendent de plus en plus de ces services.  En outre, la nature à double usage de nombreux objets et systèmes spatiaux pose des problèmes lorsqu’il s’agit de protéger les biens spatiaux et d’identifier les menaces. 

Le représentant s’est inquiété notamment de la mise au point et de la prolifération potentielle d’armes antisatellites, en soulignant l’importance de s’attaquer sans délai à ces évolutions « dangereuses et déstabilisantes ».  Parmi les menaces les plus imminentes figurent selon lui les essais destructeurs antisatellites à ascension directe, qui peuvent entraîner la production de débris spatiaux.  Face au risque d’erreur de calcul et d’escalade involontaire ou incontrôlée, l’Union européenne souhaite que les États s’abstiennent de telles activités et appuie le projet de résolution présenté en ce sens par les États-Unis.  Le représentant a condamné fermement la conduite par la Fédération de Russie d’un essai d’arme cinétique à ascendance directe contre un de ses propres satellites, le COSMOS 1408, en tant que comportement irresponsable dans l’espace.  Une approche fondée sur les comportements est la voie la plus pragmatique et immédiate pour améliorer la sécurité spatiale, a conclu le représentant. 

Mme MACKENZIE CASSELS (Canada) a constaté que la viabilité des opérations spatiales était de plus en plus vulnérable aux menaces naturelles et anthropiques, le risque étant encore aggravé par le nombre croissant d’acteurs spatiaux et l’absence d’un régime plus développé de normes internationales régissant les activités spatiales.  Le Canada, qui est attaché au maintien d’un environnement spatial sûr, sécurisé et durable, appuie fermement la résolution 75/36 de l’Assemblée générale et les initiatives connexes, comme le Groupe de travail à composition non limitée sur la réduction des menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable.  Pour la représentante, ces textes constituent « une étape bienvenue vers une nouvelle approche de la sécurité spatiale » et sont importants pour faire progresser ces questions, étant donné l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement. 

Le Canada veut empêcher une course aux armements dans l’espace mais juge l’impasse actuelle intenable.  C’est pourquoi il prône une « approche pragmatique, vérifiable et comprenant des descriptions objectives d’une conduite responsable ».  La représentante s’est félicitée des engagements constatés lors des deux premières sessions du Groupe de travail.  La représentante s’est félicitée également du récent engagement des États-Unis à ne pas effectuer d’essais destructeurs de missiles antisatellites à ascension directe, y voyant « un exemple prometteur d’une telle norme de comportement ».  L’élimination de ces essais est importante pour réduire les tensions dans l’espace et prévenir la création de débris, qui représentent un danger pour tout le personnel et les engins spatiaux en opération, a fait observer la représentante, qui a rappelé que le Canada avait pris le même engagement en mai dernier.  Le Canada encourage donc d’autres États à suivre la même voie et à adopter la résolution de l’Assemblée générale sur les essais destructifs de missiles antisatellites à ascension directe.

Constatant que, lors des débats, certains États affichent une préférence pour des instruments juridiquement contraignants, la représentante a estimé que les deux approches n’étaient « pas nécessairement contradictoires » et que des normes pragmatiques de comportement responsable, largement adoptées, « pourraient à l’avenir devenir des lois internationales juridiquement contraignantes ».  Elle a préconisé l’adoption à court terme de mesures pratiques favorisant la confiance et la transparence, pour réduire les risques de malentendus ou d’erreurs de calcul et prévenir les hostilités, jusqu’à ce qu’il soit possible de codifier les normes de comportement en droit. 

Pour la représentante, l’approche sur les comportements permet aussi de s’attaquer au large éventail de comportements qui, « sans être illégaux, sont clairement indésirables » et qui pourraient être identifiés comme « irresponsables ».  Encourager les comportements responsables qui sont conformes au droit international existant est la meilleure méthode pour maintenir la paix et la sécurité internationales, a-t-elle plaidé, en rappelant qu’un environnement spatial sûr, sécurisé et durable est dans l’intérêt de l’ensemble de l’humanité.

M. DANURDORO PARNOHADININGRAT (Indonésie) a défendu l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique.  Les menaces grandissantes, il a recommandé que l’espace extra-atmosphérique soit examiné de manière holistique.  Conscient de l’importance des textes existants, y compris le Traité de 1967, il a ajouté que rien, dans ce texte, n’évoquait l’armement dans l’espace extra-atmosphérique.  L’orateur a donc appelé à des instruments supplémentaires pour contenir les menaces.

Le représentant a dit reconnaître l’importance de renforcer la confiance en partageant des informations entre pays, concernant leurs activités dans l’espace extra-atmosphérique, pour éviter d’éventuels conflits.  Mais les règles régissant ce partage d’informations doivent aller plus loin et devenir contraignantes, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Mme CAMILLE PETIT (France) a rappelé l’attachement de la France à la préservation d’un environnement spatial sûr et au respect du droit international, pleinement applicable aux activités spatiales, notamment les dispositions de la Charte des Nations Unies et du traité de l’espace de 1967, telle que la liberté d’accès à l’espace et son utilisation pacifique.  La France, a ajouté la représentante, reste fermement attachée à la prévention d’une course aux armements dans l’espace. 

La France est également attachée à assurer la sécurité et la viabilité à long terme des activités spatiales, afin de prévenir la dégradation des conditions d’exploitation de l’espace et de préserver l’accès des générations futures à l’espace, a poursuivi la représentante.  Elle a rappelé que les bénéfices actuels des applications spatiales peuvent être menacés par des risques d’incidents, d’actes délibérés, voire à cause d’actes hostiles qui peuvent aggraver la prolifération des débris spatiaux et menacer ainsi la sûreté, la stabilité, la sécurité, et la pérennité de l’utilisation de l’espace. 

Pour la France, il faut davantage de transparence et de confiance.  La représentante a expliqué que la France avait choisi d’être très transparente sur sa doctrine et sa politique spatiale, ainsi que sur les capacités qu’elle entend développer dans les années à venir.  Elle a rappelé la Stratégie spatiale de défense française adoptée en 2019, qui prévoit de développer des « capacités de veille stratégique et d’appui aux opérations militaires »; d’étendre ses capacités de connaissance de la situation spatiale (SSA) et de développer une « capacité défensive dans l’espace pour protéger et défendre ses intérêts spatiaux ».  Selon la représentante, cette stratégie défensive « s’inscrit dans le cadre du droit international et notamment de la Charte des Nations Unies ». 

En matière de sûreté spatiale, la France estime que le meilleur moyen consiste à renforcer la confiance entre les acteurs en « distinguant les comportements responsables de ceux de nature à menacer ou fragiliser cette sûreté ».  Elle se félicite donc de la création du groupe de travail à composition non limitée chargé de définir quels pourraient être les principes, règles et normes de comportements responsables dans l’espace, dont elle espace l’enclenchement d’une dynamique positive sur l’élaboration de normes volontaires.  La représentante a estimé que cette approche progressive est la plus à même de produire des résultats engageant tous les États, sans céder à des logiques réductrices ou partiales.  Elle a donc appelé à soutenir le travail du groupe, « qui commence déjà à produire des effets par la richesse même des échanges » suscités.

Pour Mme Petit, ce travail ne fournira toutefois les meilleurs résultats que si tous les États sont en mesure de s’y impliquer pleinement, « sans se disperser dans d’autres enceintes qui pourraient dupliquer ses efforts ».  La représentante a en revanche décrié le projet de traité visant la prévention du déploiement en premier d’armes dans l’espace déposé à la Conférence du désarmement et les résolutions afférentes présentées en Première Commission, y voyant de « nombreuses déficiences ».  Ces textes, a-t-elle rappelé, ne définissent pas ce qu’est une arme dans l’espace, ne traitent pas du défi de la vérification « et pourraient donc avoir pour effet d’augmenter la méfiance et les risques de malentendus sur les activités et intentions des États ».  Elle a également rappelé qu’il est difficile aujourd’hui de distinguer entre capacités militaires et civiles dans l’espace, et que le choix d’en interdire certaines serait donc « malaisé » et « aurait inévitablement un impact sur le développement technologique et économique de toutes les nations, notamment les nations spatiales émergentes ». 

En outre, le projet de traité ne traite pas de toutes les menaces et notamment celles provenant du sol vers l’espace, telles que celles générées par les essais antisatellites destructifs tirés depuis le sol.  Sur ce point, la France soutient le projet de résolution des États-Unis qui appelle à ne pas réaliser de tels essais.  La représentante y a vu « le premier pas vers une norme qui doit devenir universelle » et « un effort prometteur » démontrant qu’il est possible de progresser dans l’objectif de faire de l’espace un domaine sûr pour les activités de tous et libre de conflits, en identifiant ensemble à la fois les comportements irresponsables ou menaçants et des normes « objectives, pragmatiques et concrètes » pour les encadrer. 

M. ABDELRHMAN MOHAMED FARID HEGAZY (Égypte) a rappelé que l’espace extra-atmosphérique est un patrimoine commun de tous les peuples du monde.  Presque tous les aspects des activités humaines sur terre directement ou indirectement, dépendent des technologies de l’espace extra-atmosphérique, a-t-il dit et c’est pourquoi ce dernier ne peut devenir un champ de bataille militaire sans que soit posée une grave menace. 

Pour l’Égypte, il semble évident qu’il faut un nouvel instrument juridique pour compléter ceux qui existent déjà.  Un tel instrument, juridiquement contraignant, devrait avoir un champ d’application qui couvre les armes offensives ou défensives dans l’espace, la menace ou le recours contre des satellites, des brouillages préjudiciables, des essais d’équipement qui ont pour seule vocation d’endommager les objets spatiaux.  Toutes ces interdictions devraient être assorties d’un mécanisme de contrôle et de règlement des différends, complétés par un organisme de transparence, a estimé le représentant.  Pour l’Égypte, les définitions nécessaires, y compris celle concernant les comportements responsables, pourraient être élaborées pour éviter tout entrave.  Le représentant a rappelé les progrès réalisés au sein du Groupe d’experts gouvernementaux au titre de la résolution de l’Assemblée générale 72/250.  Il s’est félicité de la création du Groupe de travail à composition non limitée sur la lutte contre les menaces dans l’espace extra-atmosphérique, par le biais de normes et de règles de comportement responsable. 

Le représentant a rappelé qu’avec le Sri Lanka, son pays avait présenté un projet de résolution intitulé « Prévention d’une course à l’armement dans l’espace extra-atmosphérique ».  Il a émis l’espoir que le consensus perdurera et a dit attendre le soutien des États Membres, afin de créer des terrains d’entente. 

Mme HEATHER MCINTYRE (Australie) a jugé que des instruments responsables pourraient étayer et compléter les traités existants.  L’Australie a cependant émis des réserves quant à un futur traité, du fait notamment de la difficulté à définir une arme et les objets spatiaux à double usage.  Le défi technique pour savoir si un objet spatial est une arme ou non est tangible, a-t-elle fait remarquer. 

Comme lors de la création du Traité en 1967, un instrument juridiquement contraignant devra être élaboré de manière ouverte et inclusive, a-t-elle ajouté. 

La représentante a jugé important l’engagement pris par les États-Unis de s’abstenir d’effectuer des essais de missiles destructifs à ascension directe, car de tels essais pourraient constituer une menace à l’encontre d’engins spatiaux de toutes les nations.  L’Australie s’engagera dans cette même voie, a-t-elle annoncé. 

Droits de réponse

En réponse à l’Union européenne, le représentant de la Fédération de Russie a déclaré que les débris générés par la destruction d’un objet spatial russe non fonctionnel ne représentait aucune menace et que cette opération avait été réalisée conformément au droit international.  Il a appelé à l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant concernant la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, citant notamment le projet russo-chinois sur cette question, qui pourrait comprendre l’interdiction de tout type d’arme dans l’espace.  

Le représentant des États-Unis, réagissant à l’intervention de la Fédération de Russie, a estimé que la concurrence exacerbe le risque de conflits dans l’espace extra-atmosphérique, en ajoutant que la confrontation dans l’espace et la course aux armements ne sont pas inévitables. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission passe au crible plusieurs angles morts des droits humains et se penche sur une refonte des cadres multilatéraux

Soixante-dix-septième session,
31e & 32e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4358

La Troisième Commission passe au crible plusieurs angles morts des droits humains et se penche sur une refonte des cadres multilatéraux

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi son tour d’horizon des droits humains en dialoguant, aujourd’hui, avec six titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, ainsi qu’avec l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar.  Si chacun des sept intervenants a présenté un front distinct de la lutte pour les droits humains, tous ont partagé la conviction que seules les approches intersectionnelles seront suivies de progrès réels.

Présentant le rapport de son prédécesseur, centré sur les populations autochtones, la nouvelle Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction a rappelé la précarité des 476 millions de personnes appartenant à des peuples autochtones : elles ne représentent que 6% de la population mondiale, mais constituent 19% des personnes extrêmement pauvres.  Incomprises dans leur vision du monde, marginalisées et violentées par des acteurs étatiques ou autres, ces personnes sont aussi parmi les plus vulnérables face aux changements climatiques.  Pour les inclure dans les solutions tout en respectant leurs croyances, Mme Nazila Ghanea a recommandé aux États de développer des approches holistiques et fondées sur les droits humains, étant entendu que « lorsque les droits d’une communauté sont compromis, toute la société en souffre ».

Mise en exergue par Mme Ghanea, l’interdépendance des droits humains a été suggérée par le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.  À l’occasion des 40 ans de son mandat, M. Morris Tidball-Binz a inclus dans son rapport une réflexion sur la peine de mort « sous l’angle de l’interdiction absolue de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».  L’impact de la peine de mort sur la dignité humaine oblige plus que jamais à remettre en cause la compatibilité de ce châtiment avec le droit international, a-t-il argué, estimant que l’abolition de cette « pratique barbare » est, de fait, « la seule voie possible » pour protéger les droits humains fondamentaux des personnes condamnées à mort et de leurs familles.  

Sur un autre dossier au sujet duquel les États revendiquent systématiquement leurs prérogatives nationales, la Rapporteuse spéciale sur la  promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste a dressé un constat clair : 20 années d’investissements dans ce combat, sans appui de la société civile, sans contrôle indépendant et sans suivi ni évaluation, n’ont pas servi les États, qui en outre confondent volontiers terrorisme et extrémisme.  Parmi les pistes susceptibles de permettre le rétablissement de la paix et la prévention de la violence, Mme Fionnuala Ní Aoláin a recommandé le soutien à la médiation holistique et à l’observation des négociations de paix, singulièrement dans les contextes complexes, y compris ceux dans lesquels des groupes terroristes désignés par l’ONU sont présents.

La paix et la sécurité ont également sous-tendu le rapport de l’expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable.  M. Livingstone Sewanyana  y aborde les principaux défis liés au maintien de la paix et de la sécurité internationales, et les moyens possibles de les surmonter.  À ses yeux, les conditions sine qua non de la sécurité internationale, rappelées dramatiquement par la guerre en Ukraine, sont le désarmement nucléaire et la réduction des dépenses militaires.   L’Expert a donc instamment demandé à tous les États de ratifier le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et les autres traités relatifs au désarmement.  Il s’est d’autre part prononcé pour une réforme des organes clefs de l’ONU, le Conseil de sécurité en premier chef, mais aussi l’Assemblée générale, dont le rôle devrait être accru pour permettre aux populations de mieux participer aux activités des Nations Unies.  

Repenser les institutions multilatérales fait aussi partie des pistes prônées par l’experte indépendante chargée d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels.  Partant du postulat qu’une fiscalité transparente et juste permettrait de concrétiser les droits humains, Mme Attiya Waris a appelé de ses vœux l’émergence d’une autorité fiscale internationale.   En effet, a-t-elle relevé, les États perdent 483 milliards de dollars de recettes par an en raison des abus fiscaux transfrontaliers des entreprises et des détournements offshore de particuliers fortunés.  Autant de recettes imposables qui pourraient être investies dans la concrétisation des droits humains, a-t-elle souligné.

Les entreprises doivent, elles aussi, œuvrer en faveur des droits humains, a plaidé la Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises.  Soulignant l’influence considérable des activités politiques des entreprises sur la sphère politique et réglementaire en termes de droits humains, Mme Fernanda Hopenhaym a noté que cet impact est positif lorsque les sociétés respectent les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Or, dans les faits, a-t-elle déploré, la privatisation de services publics et l’affaiblissement des réglementations environnementales et sociales fragilisent des droits élémentaires, parmi lesquels celui à la santé.

Cette corrélation entre les activités politiques des entreprises et les processus décisionnels devient particulièrement délétère lorsque la surveillance est faible et que les exigences de transparence sont absentes, a poursuivi la Présidente, exhortant les États à édifier des arsenaux légaux adaptés pour encadrer les acteurs privés, rendre publiques les activités de lobbying et prévenir les conflits d’intérêt.

En écho aux inquiétudes exprimées par les autres intervenants, l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar a dressé un sombre bilan des événements récents dans ce pays en conflit: 13,2 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire et 1,3 million sont déplacées à l’intérieur de leurs frontières.  Face aux exactions de la junte militaire au pouvoir, Mme Noeleen Heyzer a appelé à la fin des bombardements, à la libération des prisonniers politiques, à un moratoire sur les exécutions et à un retour volontaire, sûr, digne et durable des réfugiés Rohingya.  Elle a également dit compter sur une réponse coordonnée de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour relever les défis communs posés par ce conflit.

La Troisième Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 26 octobre, à partir de 10 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS

Déclarations liminaires suivies de dialogues interactifs

Exposé

Mme NAZILA GHANEA, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, qui s’adressait pour la première fois à la Troisième Commission, a présenté le rapport final de son prédécesseur, M. Ahmed Shaheed, consacré aux populations autochtones et au droit à la liberté de religion ou de conviction.  Ce rapport, a-t-elle noté, rappelle la précarité des quelque 476 millions de personnes identifiées comme appartenant à des peuples autochtones, qui, si elles occupent ou gèrent plus d’un quart des terres de la planète, ne bénéficient d’une sécurité d’occupation que sur 10% d’entre elles.  De plus, ces peuples qui ne représentent que 6% de la population mondiale constituent en revanche 19% des personnes extrêmement pauvres, a fait observer Mme Ghanea.

Constatant sur la base de ses travaux que de nombreux peuples autochtones sont victimes de discrimination, d’hostilité et de violence graves et systématiques de la part des États mais aussi d’acteurs non étatiques, M. Shaheed relève dans son rapport que les racines de ces maux se fondent sur une réalité incomprise, celle d’une vision du monde qui s’appuie tant sur la nature que sur la spiritualité.  « Cette vision régit tous les aspects de la vie de ces peuples et maintient ainsi une relation inextricable entre la terre et le sacré, l’histoire et la culture, de sorte que leur restreindre l’accès à leurs terres revient à les priver de leur propre identité », a souligné la Rapporteuse spéciale en reprenant les termes de son prédécesseur.

Le rapport, a poursuivi Mme Ghanea, constate également que les peuples autochtones sont parmi les plus vulnérables face aux changements climatiques, alors que ces « gardiens traditionnels de la nature » pourraient faire partie des solutions.  Pour répondre à ce problème, le rapport appelle à engager un échange productif sur la façon dont les communautés autochtones peuvent s’adapter aux changements climatiques.  Guidé par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, il recommande aux États et aux autres acteurs clefs de développer des solutions holistiques et fondées sur les droits humains, mais dans une approche globale.  « Lorsque les droits de l’homme d’une communauté sont compromis, toute la société en souffre », a mis en garde la Rapporteuse spéciale.

Dans ce contexte, la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction reste souvent un droit mal compris, a déploré Mme Ghanea, avant d’avertir que violer cette liberté « compromet la jouissance de tous les autres droits ».  Elle a ajouté que, sous le prisme de la liberté de croyance, les rapports thématiques de son mandat porteront sur d’autres questions qui n’ont pas reçu suffisamment d’attention jusqu’à présent, tels que la torture et autres peines ou traitements cruels, la jeunesse et la migration.  Il cherchera également à soutenir l’opérationnalisation de ce droit en examinant, par exemple, ce qui peut être fait au niveau local et municipal pour promouvoir et réaliser la liberté de religion ou de conviction pour tous, y compris pour les minorités religieuses et de conviction.

Dialogue interactif

Réagissant à l’exposé de Mme Ghanea, les Pays-Bas ont demandé ce que les États peuvent faire pour renforcer la société civile en vue de permettre des changements positifs et inclusifs pour ceux qui sont persécutés pour leurs convictions.  Rappelant que la diffusion des technologies numériques sert de vecteur à la haine contre certaines minorités, l’Autriche a invité la Rapporteuse spéciale à préciser comment elle compte traiter cette question dans les années à venir.  Au nom d’un groupe de pays, la Norvège a souhaité savoir ce que peuvent faire les États pour renforcer le droit des autochtones à la liberté de conviction et trouver une perspective incluant le genre. 

L’Union européenne a, quant à elle, remercié la Rapporteuse spéciale d’avoir souligné l’importance du droit à la liberté de religion ou de conviction des peuples autochtones, avant de s’interroger sur la manière de mieux protéger ce droit à l’avenir.  Comment mieux promouvoir les valeurs d’inclusion au niveau international, s’est pour sa part enquis le Canada, qui a assuré lutter contre le racisme et les inégalités qui séparent les Premières Nations du reste de la population.  De son côté, la République islamique d’Iran s’est dite vivement préoccupée par la situation des populations autochtones au Canada et aux États-Unis, et a invité la nouvelle Rapporteuse spéciale à s’intéresser à cette question comme l’a fait son prédécesseur.

La Pologne s’est inquiétée du sort des minorités chrétiennes dans le monde, qui sont « surreprésentées » dans les persécutions, 360 millions de chrétiens faisant l’objet de persécutions journalières.  Elle s’est ensuite émue du sort des Tatars de Crimée face à l’occupation russe débutée, en 2014, et aggravée depuis la guerre d’agression contre l’Ukraine, estimant que davantage pourrait être fait pour préserver leurs droits.  Les États-Unis ont, eux, appelé la Chine à mettre fin à ses « atrocités » contre les Ouïghours et à ses persécutions à l’égard des Tibétains, s’inquiétant aussi du sort des minorités en Iran, notamment des femmes qui manifestent contre le port du voile.  La délégation a demandé comment les institutions internationales peuvent protéger les libertés de conviction pour les populations autochtones lorsque les gouvernements cherchent à réduire ces libertés.

Cuba a tenu à rappeler que la liberté de croyance est inscrite dans ses lois nationales.  Elle a par ailleurs dénoncé les « idées xénophobes » que diffusent les États-Unis sous couvert de liberté d’expression, avant de demander à la Rapporteuse spéciale son avis sur les mesures coercitives unilatérales, telles que celles subies par Cuba, et sur les conséquences que lesdites mesures ont sur la démocratie et l’état de droit.  À son tour, la Chine a assuré respecter toutes les croyances, y compris l’islam, fustigeant à ce propos la politique « antimusulmane » des États-Unis dans leur guerre contre le terrorisme.  « Que le Gouvernement américain balaie devant sa porte avant de nous accuser de fausses allégations au sujet du Xinjiang », a martelé la délégation.

Le Pakistan a, lui aussi, axé son intervention sur l’islamophobie, demandant à la Rapporteuse spéciale quelles modalités d’actions elle envisage pour aborder cette problématique au niveau international.  Rappelant que sa population est pluriethnique et plurireligieuse, et qu’elle représente un sixième de l’humanité, l’Inde a, elle, vivement critiqué le précédent Rapporteur spécial au sujet de ses conclusions sur la liberté religieuse dans le pays.  De même, l’Indonésie a qualifié d’inexactes certaines informations contenues dans le rapport de Mme Ghanea sur la liberté de croyance dans le pays.  Une loi, datant de 2017, assure la liberté religieuse en Indonésie, y compris celle des communautés autochtones, a fait valoir la délégation, qui a dit douter de crédibilité du précédent Rapporteur spécial.

Prenant la parole à leur tour, le Maroc, la Grèce et la Hongrie sont largement revenus sur la promotion et la garantie de la liberté de croyance au sein de leurs sociétés.

En réponse à ces questions et observations, la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction a rappelé que, la liberté de croyance est un des droits, parmi tant d’autres, que les populations autochtones voient violés.  Face à cette réalité, elle a dit travailler avec d’autres Rapporteurs spéciaux, titulaires de mandat et autres institutions des Nations Unies dans une approche multidimensionnelle.  Les populations autochtones considèrent la liberté de croyance comme essentielle, alors qu’elle a été longtemps reléguée au second plan, a-t-elle relevé, affirmant que la lutte contre les discours de haine est une des priorités de son mandat.

La liberté de croyance est, en outre, un droit qui en entraîne d’autres, a expliqué Mme Ghanea: quand des populations sont persécutées pour leurs croyances, c’est souvent parce que leurs droits sociaux, économiques, culturels et politiques sont violés, d’autant plus que ces populations ne sont parfois pas reconnues par les États dès leurs naissances.

La Rapporteuse spéciale a salué les inquiétudes exprimées par des États au sujet de populations autochtones en dehors de leurs frontières.  Toutefois, elle a estimé que ces mêmes États devraient commencer par s’intéresser à ce qui se passe chez eux et à « balayer devant leur porte », comme l’ont demandé d’autres délégations.  Elle a par ailleurs invité les États à donner suite aux plaintes dont ils sont saisis pour des violations de la liberté de croyance.  « Je vous en prie, c’est essentiel pour la mise en œuvre de mon mandat », a-t-elle insisté en conclusion.

Exposé

M. MORRIS TIDBALL-BINZ, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a rappelé que, cette année marque le quarantième anniversaire de la création de son mandat, qui est, selon lui, le résultat de la lutte des familles des victimes, et notamment des mères et grands- mères de disparus et victimes d’exécutions extrajudiciaires.  Présentant son rapport annuel, il a dit avoir rencontré, au cours de l’année écoulée, de nombreux représentants d’États, d’organisations internationales et régionales et d’organismes universitaires et professionnels, ainsi que des responsables d’ONG et des proches de victimes, auxquels il a offert ses bons offices, des conseils et une assistance technique, y compris sur les bonnes pratiques médico-légales.  Il a également indiqué avoir émis, seul ou conjointement avec d’autres mandats, un total de 194 communications aux États et aux acteurs non étatiques.

Pour le Rapporteur spécial, la tragique réalité des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires qui ont lieu partout dans le monde, montre tout ce qu’il reste à faire pour prévenir efficacement ces actions, notamment par la mise en œuvre effective des recommandations et des normes élaborées dans le cadre de son mandat pour limiter le recours à la force et enquêter efficacement sur tous les décès potentiellement illégaux.  Le quarantième anniversaire de ce mandat est donc, à ses yeux, une occasion propice pour faire le point sur les acquis et les défis.  À cet égard, M. Tidball-Binz a relevé que son rapport comprend une réflexion sur la peine de mort « sous l’angle de l’interdiction absolue de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

L’impact de la peine de mort sur la dignité et les droits fondamentaux des personnes, dont le droit de ne pas subir la torture, nous oblige aujourd’hui plus que jamais à réfléchir sur cette « pratique barbare », a souligné le Rapporteur spécial.  Il s’est dit convaincu, en tant que médecin et médecin légiste, que l’imposition de cette peine entraîne, à toutes ses étapes, de la condamnation à l’exécution, « des souffrances équivalant à la torture et à des traitements cruels, inhumains et dégradants » et qu’elle a également un « impact dramatique » sur la famille et les proches des condamnés à mort et des personnes exécutées.

Dans son rapport, M. Tidball-Binz appelle à de nouvelles études sur ce constat, qui remet en cause la compatibilité de la peine de mort avec le droit international, afin de protéger la dignité et les droits humains fondamentaux des personnes condamnées à mort et de leurs familles, pour lesquelles l’abolition de ladite pratique est « la seule voie possible ».

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, le Royaume-Uni a voulu savoir quelle assistance technique peut être fournie aux États Membres afin d’éviter les exécutions extrajudiciaires.  Comment renforcer les capacités des États afin de s’assurer que les enquêtes sur de potentielles exécutions extrajudiciaires sont menées de façon professionnelle, a demandé l’Union européenne, tandis que les États-Unis s’interrogeaient sur la façon d’éviter que les dispositions antiterroristes atteignent des personnes ne cherchant qu’à défendre leurs droits.  La délégation américaine a également demandé au Rapporteur spécial comment prévenir les exécutions sommaires et extrajudiciaires par des acteurs étatiques, condamnant à cet égard les exécutions sans jugement pratiquées par les Taliban en Afghanistan, mais aussi par les autorités iraniennes, notamment contre des enfants.  Après avoir dénoncé l’assassinat du général Qassem Soleimani, le qualifiant d’« acte criminel et terroriste », la République islamique d’Iran a invoqué l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui n’interdit pas la peine de mort, et indiqué que le pays l’appliquait « de manière restreinte ».  Elle a par ailleurs dénoncé le recours à des « sources non fiables » dans le rapport présenté.

Rappelant qu’un moratoire sur la peine de mort prévaut sur son sol depuis 40 ans, le Myanmar a dénoncé des exécutions sommaires commises par la junte au pouvoir, en juillet dernier, après des simulacres de procès.  Il a indiqué que 84 personnes attendaient encore l’exécution de leur condamnation à mort, en plus des nombreuses victimes d’exécutions extrajudiciaires et de torture dans les prisons ou lors de raids de l’armée.  Il s’est interrogé sur ce que peut faire la communauté internationale face à cette situation.  L’Arménie a, quant à elle, évoqué l’exécution sommaire d’un groupe de soldats arméniens capturés, qui a entraîné une vague de condamnations internationales et poussé l’État Membre responsable à reconnaître un crime de guerre et à lancer une enquête.  Quel mécanisme peut être mis en place pour s’assurer que les responsables soient jugés, a-t-elle demandé? 

De son côté, le Pakistan a affirmé que les jeunes sont particulièrement ciblés dans le Jammu-et-Cachemire, et que plus de 100 000 civils y ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires sans qu’aucun responsable indien n’ait été traduit en justice.  Dans quelle mesure la reddition de comptes est-elle possible dans ce territoire occupé, s’est-il enquis?  Rappelant que sa Constitution garantit le droit à la vie, l’Inde a accusé le Pakistan de vouloir détourner l’attention de la communauté internationale de la situation sur son propre territoire et de procéder à des exécutions et à des conversions forcées de minorités religieuses. 

Le Mexique a ensuite souhaité connaître les bonnes pratiques en matière d’extradition, notamment dans le cas où un État appliquant la peine de mort sollicite un État abolitionniste.  Considérant que la peine de mort est incompatible avec les principes fondamentaux des droits de l’homme, la Côte d’Ivoire a rappelé que l’abolition de ce châtiment a été inscrite dans sa Constitution, en 2000.  La Chine a, pour sa part, indiqué que le recours à la peine capitale est un choix et qu’elle ne l’applique que dans des cas bien précis.  Elle a, d’autre part, accusé le Canada de se livrer à des exécutions extrajudiciaires d’enfants autochtones, entre autres violations des droits des peuples autochtones.  Rappelant que les États ont le droit souverain de mettre en place leur système judiciaire, l’Égypte a, quant à elle, rejeté catégoriquement le lien établi par le rapport entre la peine de mort et la torture et autres traitements inhumains, cruels ou dégradants. 

Enfin, s’exprimant au nom des pays nordiques, la Suède a rappelé que la Finlande présentera, cette année, une résolution sur l’impact des nouvelles technologies sur les droits humains.  À cet égard, elle a souhaité savoir comment les États Membres peuvent s’assurer que les nouvelles technologies ne mènent pas à des violations des droits humains.

En réponse à ces questions et remarques, le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a appelé toutes les parties prenantes à travailler en commun pour éradiquer les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires.  Il s’est dit disposé à fournir des orientations et des conseils pratiques aux acteurs qui le souhaiteraient.  Il a rappelé que les États ont des obligations quant à la manière de mener des enquêtes en cas de suspicions d’exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires et a rappelé l’existence d’un manuel relatif à ces questions, appelé Protocole du Minnesota. 

Le Rapporteur spécial a indiqué que l’application immédiate des normes existantes est son « cheval de bataille », avec notamment la mise en place de systèmes d’enquête de médecine légale en cas de morts suspectés.  Il a regretté que trop souvent les États n’enquêtent pas sur des cas de suspicions d’exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires.  M. Tidball-Binz a également regretté que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) n’ait pas nommé de point de contact sur les pratiques de médecine légale comme il en existe à la Cour pénale internationale (CPI) ou au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), soulignant que la demande est ancienne et qu’un accueil favorable permettrait d’enregistrer de grands progrès sur ce sujet.

Il a par ailleurs rappelé que la résolution portant sur les exécutions extrajudiciaires met l’accent sur la coopération et l’assistance technique.  En conclusion, il s’est insurgé contre la pratique de la torture et a réaffirmé que menacer de mettre une personne à mort revient à la torturer, ainsi que toute sa famille.

Exposé

Mme FIONNUALA NÍ AOLÁIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a indiqué que son rapport retrace le développement de l’action en faveur de la paix au sein des Nations Unies et son lien avec le travail de promotion de sociétés fondées sur les droits.  À ses yeux, le travail qu’effectue l’ONU en faveur de la paix doit être entrepris dans l’intérêt de ses principaux bénéficiaires, à savoir « le peuple des Nations Unies » et pas seulement les États Membres.  Observant que des défis ont émergé dans des contextes où les États sont engagés dans une optique de terrorisme plutôt que de paix, elle a estimé que cette approche sape non seulement, la capacité à s’engager dans la consolidation de la paix au niveau local, mais aussi le travail des droits de l’homme, qui permet, facilite et sous-tend la médiation et la résolution des conflits locaux et nationaux. 

Avant d’explorer cette « interface » entre la paix, les conflits et le contre-terrorisme, Mme Ní Aoláin a présenté ses activités de l’année écoulée, en particulier ses visites aux Maldives et en Ouzbékistan, ainsi qu’une visite de travail auprès de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  Elle a également indiqué qu’elle compte se rendre en Iraq et au Cameroun, entre décembre 2022 et février 2023, avant de rappeler que son mandat a fourni une assistance technique soutenue aux États, notamment durant le septième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies.  Elle a, d’autre part, relevé que son mandat a donné lieu à des échanges continus sur la difficile question du rapatriement des ressortissants de pays tiers présents dans le nord-est de la Syrie.  Faisant état de « pratiques positives » en la matière, de la part d’un nombre croissant d’États, elle a aussi évoqué la publication de rapports techniques et politiques sur la lutte contre le financement du terrorisme et les sanctions antiterroristes.  Un prochain document de synthèse traitera des drones et de la surveillance dans le contexte de la lutte antiterroriste, a-t-elle précisé.

Revenant au contenu de son rapport, la Rapporteuse spéciale a fait remarquer que 20 ans d’investissements dans la lutte contre le terrorisme, sans appui de la société civile, sans contrôle indépendant et sans suivi ni évaluation, n’ont « pas servi les États ».  Elle a donc invité ces derniers à se demander si les investissements dans cette lutte portent leurs fruits sur le terrain et à élaborer des stratégies de long terme.  Mme Ní Aoláin a par ailleurs noté que, l’empiètement des termes « terrorisme » et « extrémisme », ainsi que l’application de mesures souvent erronées dans des contextes fragiles, « peuvent étouffer et limiter la capacité à s’engager dans le dur travail de rétablissement de la paix et de prévention de la violence ».  Si elle a assuré ne pas préconiser une « réconciliation totale » avec certains groupes terroristes désignés, compte tenu de leur refus d’abandonner la violence et de leur manque de respect pour les normes internationales d’humanité les plus fondamentales, elle a estimé que mettre fin à la violence ou la limiter, peut nécessiter des « négociations partielles ou conditionnelles » avec ces groupes, en particulier lorsqu’il faut négocier l’accès humanitaire, le cessez-le-feu et le traitement des prisonniers. 

Comme point de départ, la Rapporteuse spéciale a recommandé des « cessez-le-feu linguistiques » dans les sociétés fragiles et en conflit, afin de trouver les voies permettant de s’attaquer aux conditions propices au terrorisme et à la violence collective.  À cette fin, son rapport demande à l’ONU et aux États Membres de soutenir la médiation holistique, la négociation et l’observation des négociations de paix dans des contextes complexes, y compris ceux dans lesquels des groupes terroristes désignés par l’ONU sont présents.  Pour finir, Mme Ní Aoláin a annoncé son intention d’entreprendre, cette année, une étude mondiale sur l’impact des mesures antiterroristes sur la société civile et l’espace civique avec le soutien de l’Allemagne et de l’Espagne.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, l’Union européenne a voulu connaître certaines initiatives prometteuses ou meilleures pratiques établies en ce qui concerne le rôle de la société civile dans la lutte antiterroriste.  Comment y associer une participation significative des femmes, a renchéri l’Irlande?  Quelles sont les mesures politiques, financières et pratiques que les États membres doivent prendre pour mieux équilibrer les mesures et l’architecture antiterroristes d’une part, et les engagements pour la consolidation de la paix, les droits de l’homme et le droit international humanitaire d’autre part, se sont interrogés la Suisse, les Pays-Bas et le Costa Rica.  Qu’en est-il du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme, a demandé le Qatar?

La Fédération de Russie a dit voir dans le rapatriement des membres de la famille des combattants terroristes étrangers un élément important des efforts antiterroristes internationaux.  Comment peut-on limiter l’utilisation d’enfants dans la perpétration d’actions terroristes, s’est enquis le Maroc?  Se disant préoccupée par le sort des 39 personnes encore détenues arbitrairement à la base navale de Guantanamo, Cuba a invité la Rapporteuse spéciale à accorder une attention particulière à la situation de ces détenus ainsi qu’à la question de la justice et de la réparation pour toutes les victimes des atrocités commises par les États-Unis dans leur lutte contre le terrorisme.  Une position soutenue par la Chine, qui a pointé du doigt les États-Unis et ses alliés, qui, au nom de la lutte antiterroriste, ont commis des crimes de guerre au Moyen-Orient et ailleurs.  Notre gouvernement agit pour transférer les détenus de Guantanamo et pour clore cette époque, ont répliqué les États-Unis.

S’inquiétant des activités du groupe militaire russe Wagner, le Royaume Uni a voulu savoir que peuvent faire les États pour s’assurer que la lutte antiterroriste se renforce, tout en promouvant et protégeant les droits humains.  Dans quelle mesure les sanctions unilatérales sont-elles liées à la lutte antiterroriste, s’est interrogé le Pakistan, tandis que l’Inde se posait la question de savoir ce que peut faire la communauté internationale pour prévenir l’usage des nouvelles technologies de l’information et de la communication par les terroristes.  Et comment contribuer à atténuer leurs effets, a renchéri la Côte d’Ivoire.

Comment les États peuvent-ils s’assurer que la diligence raisonnable garantit les normes les plus élevées et est appliquée de manière systématique, cohérente et transparente dans l’ensemble du système des Nations Unies, s’est enquis le Mexique, alors que l’Ordre souverain de Malte, rappelant son caractère religieux, soulignait son engagement à promouvoir les droits et libertés humaines tout en luttant contre le terrorisme.

Réagissant aux questions et observations des États Membres, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a mis en avant le rôle de la société civile dans l’approche de lutte contre le terrorisme, saluant à cet égard les bonnes pratiques des Pays-Bas, notamment leur réflexion sur un certain nombre de nouveaux mécanismes impliquant les citoyens.  De même, elle a loué les actions de l’Espagne et Oman destinées à mettre la société civile au cœur des discussions.  Mme Ní Aoláin a également remercié l’Espagne et l’Allemagne pour leur appui dans le travail d’évaluation globale de l’impact de la lutte antiterroriste sur la société civile et l’espace civique qu’elle compte lancer l’année prochaine.  La société civile est en danger dans de nombreuses régions du monde, a-t-elle averti, estimant donc essentiel que son rapport documente cette question et préconise des solutions pour redresser la situation.  Dans l’immédiat, elle a appelé à inclure les femmes et les défenseurs des droits humains dans la conversation.

Une autre question importante traitée par son mandat est la définition du terrorisme car, a-t-elle expliqué, tant que nous n’aurons pas fait en sorte qu’elle soit unifiée, il sera difficile d’améliorer les approches.  S’agissant de la diligence raisonnable, la Rapporteuse spéciale a reconnu que des pratiques existent, mais pas dans la lutte antiterroriste, et cela « nous le payons sur le terrain ».  La plus grande menace dans la lutte antiterroriste est, selon elle, l’augmentation de la violence extrême, couplée aux mauvaises perceptions de ce qui se passe sur le terrain.  À cet égard, elle a préconisé une approche impliquant toute la société.  Elle a d’autre part salué le travail judiciaire accompli par plusieurs États, dont l’Allemagne, notamment les poursuites contre les membres de Daech pour crimes de guerre.

Pour ce qui concerne les enfants, Mme Ní Aoláin a exhorté les États à appliquer la Convention sur les droits de l’enfant dans la lutte antiterroriste, surtout quand les enfants peuvent être victimes de ce fléau.  Évoquant la situation dans le nord-est de la Syrie, elle a recommandé le rapatriement des enfants et le respect de leurs droits et de ceux de leurs familles pour arrêter le cycle des violences.  Quant aux besoins d’exemption humanitaire dans les régimes de sanctions antiterroristes, elle a préconisé un examen des processus de sanctions au niveau des Nations Unies, suggérant le renforcement du rôle de l’ombudsman.  Concluant sur la lutte contre le financement du terrorisme, la Rapporteuse spéciale a annoncé qu’un document analysant les engagements des États en la matière sera publié dans l’après- midi au Siège de l’ONU à New York.

Exposé

M. LIVINGSTONE SEWANYANA, expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable, a rappelé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales est l’un des objectifs premiers des Nations Unies et le fondement d’un ordre international démocratique et équitable.  En raison de la situation actuelle très volatile qui met en péril cet ordre, et à la lumière de plusieurs précédents accablants, il a dit avoir axé son rapport sur les principaux défis liés au maintien de la paix et de la sécurité internationales, et sur les moyens possibles de les surmonter.  Le respect total et inconditionnel du droit international, y compris le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, est « la condition sine qua non de la réalisation d’un ordre international pacifique, prospère, résilient et juste », a-t-il fait valoir.

À cette aune, M. Sewanyana a appelé les États Membres à respecter la Charte des Nations Unies, « épine dorsale du droit international » et à régler leurs différends par des moyens pacifiques.  Il les a aussi exhortés à respecter la Déclaration sur le droit à la paix, le Programme d’action pour une culture de la paix, les résolutions de l’Assemblée générale sur une culture de la paix et toutes les autres résolutions pertinentes des Nations Unies.  Selon lui, les événements tragiques qui se déroulent actuellement en Ukraine rappellent avec force que la paix et la sécurité ne peuvent être garanties sans parvenir au désarmement nucléaire et sans réduire les dépenses militaires au profit du développement durable.  Il a donc demandé instamment à tous les États Membres de ratifier le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et les autres traités relatifs au désarmement, et à les appliquer à la lettre.  Il les a en outre invités à revitaliser la Commission du désarmement et à réduire sensiblement leurs dépenses militaires.

Pour relever ces défis, l’expert indépendant a plaidé pour une réforme de certains organes clés des Nations unies.  Il s’est d’abord prononcé en faveur d’un Conseil de sécurité plus démocratique, plus représentatif, plus efficace, plus transparent et plus responsable, estimant que sa composition actuelle ne reflète pas les réalités géopolitiques actuelles.  Il a ensuite appelé les membres permanents du Conseil de sécurité à s’abstenir d’utiliser leur droit de veto pour bloquer son fonctionnement.  Enfin, il a appelé de ses vœux, des consultations formelles et structurées avec les parties prenantes extérieures, en particulier les organisations de la société civile. 

M. Sewanyana a aussi insisté sur l’importance de revitaliser l’Assemblée générale afin qu’elle exerce un plus grand rôle dans la prise de décision et d’accepter sans réserve la juridiction de la Cour internationale de justice (CIJ).  À ses yeux, il conviendrait également d’inclure plus efficacement et plus directement les populations et de leur permettre de mieux participer aux activités des Nations Unies, conformément à l’engagement pris récemment par les États Membres.  Concluant son propos, l’expert indépendant a dit voir dans le Sommet du futur, convoqué en 2024, une occasion précieuse de discuter des menaces qui pèsent sur la paix et la sécurité mondiales et de réaliser un ordre international démocratique et équitable.

Dialogue interactif

Dans la foulée de cet exposé, l’Azerbaïdjan, qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, a souligné l’importance de la démocratie, ainsi que du droit des peuples à l’autodétermination et du respect de l’intégrité territoriale des États Membres.  À sa suite, le Venezuela a dénoncé la tendance à l’unilatéralisme et à la recherche de l’hégémonie au nom de la domination économique et financière, faisant état d’une résurgence du racisme, du fascisme et du néonazisme.  Il a demandé à l’expert indépendant comment il entend appuyer ses propositions sur le droit à la solidarité internationale en temps de pandémie et sur l’impact des mesures coercitives unilatérales sur les droits de l’homme.  À son tour, Cuba a dénoncé l’existence de mesures coercitives unilatérales, notamment le blocus que les États-Unis lui imposent, avant d’inviter l’expert à étudier l’effet de ces mesures sur un ordre international démocratique et équitable.

L’Algérie a, pour sa part, prôné la mise en place d’un nouvel ordre économique permettant de ne laisser personne de côté.  Elle s’est ensuite interrogée sur les moyens de réformer le système des Nations Unies, demandant à ce propos ce que pourrait faire l’ONU pour encourager un ordre international équitable et démocratique.  De son côté, la Chine a souligné l’importance du multilatéralisme et a accusé les États-Unis et d’autres pays occidentaux de le saper en s’ingérant dans les affaires intérieures d’autres pays et en diffusant de fausses informations sous prétexte de protéger les droits humains.  

Réagissant brièvement à ces questions et remarques, l’expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable, a souligné à nouveau l’importance du multilatéralisme.  En réponse au Venezuela, qui dénonçait une tendance à l’unilatéralisme, il a invité la délégation à utiliser le Sommet du Futur prévu en 2024 pour soulever cette question.  M. Sewanyana a par ailleurs insisté sur la nécessité de réduire les dépenses militaires au profit du développement durable et d’interdire les armes nucléaires pour instaurer une culture de la paix, avant d’estimer, en réponse à l’Algérie, que l’Assemblée générale, en tant qu’organe le plus important de l’ONU, doit pouvoir contrôler le droit de veto des membres permanents du Conseil de sécurité.

Exposé

Mme ATTIYA WARIS, experte indépendante chargée d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a relevé que les États perdent 483 milliards de dollars de recettes par an, en raison des abus fiscaux transfrontaliers des entreprises et des abus fiscaux offshore de particuliers fortunés.  Autant de recettes imposables qui pourraient être investies dans la concrétisation des droits humains et qui représentent un manque à gagner préoccupant à l’aune des crises multiples auxquelles fait face la communauté internationale, a déploré l’experte indépendante, qui a mentionné les changements climatiques et l’insécurité alimentaire.

C’est là, selon elle, le fruit des déficiences fondamentales de l’architecture de gouvernance fiscale internationale, régionale et nationale.  Partant du principe qu’une fiscalité transparente et juste offre aux politiques les moyens de concrétiser les droits humains, l’Experte indépendante a formulé des pistes pour rebâtir cette architecture fiscale.  Premiers acteurs concernés, les États doivent tout d’abord assurer l’égalité et la non-discrimination, ainsi que la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels au maximum des ressources dont ils disposent, a-t-elle préconisé.  Pour les États, il s’agit en somme de remplir leurs obligations financières, conformément aux principes des droits humains, a-t-elle observé.

Relevant, d’autre part, que la lutte contre les flux financiers illicites a été intégrée dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, Mme Waris s’est réjouie qu’un certain nombre de discussions aient déjà eu lieu sur la manière d’aborder la fiscalité mondiale de manière multilatérale.  Car, la question fiscale et des droits humains va, selon elle, au-delà des efforts unilatéraux: elle nécessite une architecture mondiale.

Comment les États peuvent-ils la bâtir?  En premier lieu, en réformant le système fiscal mondial afin de lutter contre les flux financiers illicites, y compris les obligations extraterritoriales, notamment en renforçant la coopération et l’assistance internationales en matière de réglementation, de rapatriement et de taxation des flux en provenance des pays en développement.  Deuxième volet d’action: veiller à ce que la promotion et la réalisation des droits humains soient au cœur de cette réforme, en les intégrant dans la conception, l’élaboration et l’application des règles fiscales internationales.  L’experte indépendante a ensuite évoqué la lutte contre les flux financiers illicites, plaidant pour une plus grande coopération internationale.  La convocation d’une quatrième conférence internationale sur le financement du développement permettrait, entre autres, de discuter d’une convention fiscale des Nations Unies, a-t-elle souligné, avant d’appeler de ses vœux la création d’un organisme fiscal mondial, dont la vocation serait d’étendre son mandat à celui d’une autorité fiscale internationale.

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, Cuba a voulu savoir comment l’experte indépendante évalue les effets sur les droits humains du blocus économique et financier que les États-Unis imposent à son encontre.  L’Algérie a estimé que le rééchelonnement de la dette n’est pas une solution définitive mais plutôt un report de la crise, jugeant le temps venu de revoir l’architecture financière internationale.  Dès lors, a enchaîné le Cameroun, que pense l’experte indépendante à propos des discours sur la compétence exclusive de la Banque mondiale et du Fonds monétaire internationale (FMI) et d’autres entités internationales sur cette question.  La Chine a demandé un allègement de la dette des pays en développement. 

De son côté, la Fédération de Russie a invité l’experte à enquêter sur la pratique illégale des pays occidentaux de geler les réserves d’or et de devises et d’autres avoirs de pays tiers.  Il serait utile d’évaluer comment ces pratiques malhonnêtes affectent les droits de la personne et l’exercice par le gouvernement de ses fonctions sociales.  Le Mali a relevé, pour sa part, que la corruption est un fléau qui mine la promotion des droits humains. 

Réagissant aux questions et observations des États Membres, l’experte indépendante chargée d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels a indiqué qu’en début d’année, elle-même et un groupe d’experts se sont adressés aux États-Unis au sujet du le gel des avoirs bancaires de l’Afghanistan, notant que les pays qui se sont vu imposer des sanctions unilatérales ne pouvaient pas, à la fois, rembourser leurs dettes et payer leurs cotisations de membres, ce qui les écartaient de fait des blocs régionaux.  Elle a également établi une connexion directe entre la perte des réserves et la capacité des pays concernés à maintenir le niveau de vie de leur population.  À cet égard, elle a confié que le Conseil des droits de l’homme lui a demandé de diriger des directives sur le rapatriement des avoirs des États, lesquelles seront présentées en mars prochain. 

L’experte a ensuite expliqué que certaines entités privées contrôlent les informations sur le fonctionnement des avoirs des pays, citant, à titre d’exemple, la Banque des règlements internationaux à laquelle de nombreux pays n’y ont pas accès, ainsi que les agences de notations de crédit.  Elle a questionné la possibilité pour une entité privée de noter un pays.  Et si de telles notations sont utilisées, est ce que cela devrait être la base des décisions quant aux taux d’intérêts imposés aux pays?  Elle a appelé à discuter de cette question de façon transparente, recommandant l’élaboration d’un instrument multilatéral.  Nous n’avons pas besoin de coordination, mais d’espaces de coopération et d’assistance, a-t-elle dit. 

Exposé

Mme FERNANDA HOPENHAYM, Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a indiqué que, son rapport examine les implications des activités politiques des entreprises en termes d’influence sur la sphère politique et réglementaire, à la lumière des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.  Il vise à faire la distinction entre les modes d’engagement politique des entreprises qui sont responsables et respectueux des droits et ceux qui sont susceptibles de conduire ou de permettre des violations des droits humains, a-t-elle précisé, relevant à cet égard que les Principes directeurs constituent une ressource essentielle pour garantir que l’engagement des entreprises dans les processus politiques reste respectueux des droits.

Comme les autres aspects des opérations commerciales, les activités d’engagement politique d’une entreprise ont des impacts sur les droits humains, a souligné Mme Hopenhaym, avant de rappeler que les Principes directeurs demandent justement aux entreprises et aux gouvernements d’identifier les impacts négatifs découlant de leurs décisions, de prévenir et d’atténuer les risques et de trouver des options alternatives plus respectueuses des droits.  Malgré cela, a-t-elle constaté, les atteintes aux droits humains liées à certaines pratiques d’engagement politique sont répandues et se produisent à travers le monde dans diverses industries.  Les impacts négatifs sur les personnes et la planète, par exemple, peuvent résulter d’une privatisation des services publics conduisant à des violations des droits humains, d’un manque d’accès à des voies de recours pour les victimes de violations des droits humains liées aux entreprises, de l’affaiblissement des réglementations protégeant l’environnement et les droits des travailleurs, et du déclin général des institutions et des processus démocratiques.  Parmi les droits impactés figurent les droits à la vie, à une alimentation et un logement adéquats, à la santé et à l’eau.

Le rapport, a poursuivi Mme Hopenhaym, définit l’engagement politique des entreprises, comme incluant plusieurs catégories d’activités destinées à influencer les processus politiques.  Celles-ci comprennent notamment l’influence des entreprises sur les décideurs et les processus politiques, sur le milieu universitaire et les sciences, sur les récits publics autour de questions politiques et sur le pouvoir judiciaire.  Si ces activités peuvent avoir des applications légitimes, elles peuvent aussi conduire à des violations des droits de l’homme liées aux entreprises lorsqu’elles sont menées de manière irresponsable, a averti la Présidente du Groupe de travail, selon laquelle ce risque est particulièrement élevé lorsque la surveillance est faible et que les exigences de transparence sont absentes. 

Pour y remédier, a-t-elle expliqué, le Groupe de travail recommande aux États, d’apprendre aux entreprises la nécessité d’exercer une diligence raisonnable en matière de droits de l’homme, d’adopter une législation obligatoire sur ce point, de prévoir des registres obligatoires du lobbying assortis d’exigences de divulgation, d’assurer des consultations équilibrées lors des processus politiques et de promulguer des lois sur les conflits d’intérêts.  De même, il recommande aux entreprises de s’abstenir de s’engager dans des processus politiques soutenant des objectifs incompatibles avec la responsabilité de respect des droits humains, de mettre en œuvre des processus de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme, de publier des rapports annuels sur l’engagement politique, d’exiger que tout engagement politique soit approuvé par le conseil d’administration de l’entreprise et communiqué en interne et en externe, et d’exercer une surveillance sur la manière dont l’entreprise gère les risques liés aux droits de l’homme en rapport avec ses activités d’engagement politique.

Dialogue interactif

À la suite de cet exposé, l’Union européenne a rappelé que des discussions sont en cours en vue de l’élaboration d’une directive durabilité.  Comment être plus efficace en matière de droits humains tout en maintenant l’équilibre entre les différentes règles s’appliquant dans le domaine des entreprises, s’est-elle ensuite interrogée.  Le Maroc a, lui, voulu savoir quelles sont les meilleures pratiques pour renforcer les capacités des dirigeants d’entreprise et de leurs employés qui n’ont pas forcément connaissance des politiques des droits humains.  Le Luxembourg a indiqué que son parlement a introduit un registre de transparence en décembre 2021 afin de réglementer les pratiques de lobbying et s’est doté de deux codes de déontologie en mars 2022.  Il s’est également réjoui d’accueillir le Groupe de travail à partir du 1er décembre prochain.  De son côté, la Malaisie a indiqué que le secteur de l’huile de palme représente 7% de son produit intérieur brut (PIB) et offre des opportunités d’emploi à plus de trois millions de personnes venues notamment de groupes vulnérables.  Elle a affirmé avoir adopté un plan régulateur pour que le droit du travail et les droits humains soient respectés dans ce secteur, avant d’appelé à faire connaître ces efforts afin de protéger les emplois de millions de personnes. 

La Suisse a demandé si le Groupe de travail prévoit des activités de partage de bonnes pratiques pour s’assurer que l’action politique des entreprises est bien conforme aux Principes directeurs des Nations Unies.  Elle a aussi encouragé les échanges d’informations entre experts des droits humains et de la lutte contre la corruption.  À sa suite, le Portugal s’est félicité des discussions en cours à Genève en vue de l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant concernant les entreprises et les droits humains.  Il a ensuite demandé à la Présidente du Groupe de travail quels conseils elle pourrait donner aux pays qui entament le processus législatif sur le sujet du lobbying pour qu’ils y intègrent une perspective « droits de l’homme ».  Rappelant qu’elle a adopté en 2017 une loi pionnière relative au devoir de vigilance des entreprises, la France a demandé à la Présidente comment ses travaux pouvaient servir les travaux du Groupe de travail intergouvernemental sur les entreprises et les droits humains qui se réunit cette semaine à Genève.  L’Irlande a, pour sa part, encouragé tous les États à développer des plans d’action nationaux.  Elle a demandé des exemples de bonnes pratiques permettant d’assurer une participation et un équilibre entre toutes les parties prenantes. 

Les États-Unis ont demandé comment le Groupe de travail compte défendre les défenseurs des droits de l’homme et les abus de procédure à leur encontre.  La Chine s’est, quant à elle, inquiétée de la situation aux États-Unis, où de nombreuses employées, membres de minorité ou femmes, ont été renvoyées pendant la pandémie.  Elle a aussi affirmé que 100 000 personnes sont soumises au travail forcé dans ce pays, avant de demander au Groupe de travail de se pencher sur cette question.  La Fédération de Russie a ensuite demandé si la destruction de gazoducs valant plusieurs milliards de dollars ne crée pas un avantage pour les concurrents du propriétaire de l’infrastructure.  Elle a par ailleurs souligné que les milieux d’affaires russes reconnaissaient l’importance du développement durable.  Enfin, la République arabe syrienne a affirmé que les sanctions qui lui sont imposées l’empêchent d’avoir des entreprises transnationales. 

Répondant aux questions des délégations, la Présidente du Groupe de travail sur les entreprises et les droits de l’homme s’est félicitée que des « mesures intelligentes » soient prises, parmi lesquelles des plans d’actions nationaux et des mesures obligatoires visant les entreprises.  Elle a également affirmé appuyer les négociations ayant actuellement lieu à Genève en vue d’élaborer un instrument juridiquement contraignant.  Saluant le fait que des lois nationales aient déjà été élaborées sur les entreprises et les droits humains, elle a encouragé tous les États Membres à réfléchir à cette question. 

Mme Hopenhaym a ensuite indiqué que son rapport contient des exemples de bonnes pratiques visant à réglementer le lobbying, limiter les conflits d’intérêts et accroître la transparence.  Elle a appelé à des négociations équilibrées entre toutes les parties prenantes, tenant compte des déséquilibres de puissance, ce qui implique selon elle de protéger les défenseurs des droits humains.  Elle a aussi rappelé qu’en juillet 2021, le Groupe de travail a publié un rapport sur la corruption et ses liens avec les milieux d’affaires et les droits humains. 

La Présidente a annoncé que des visites de travail auront lieu prochainement au Luxembourg, au Libéria et en Argentine.  Elle a par ailleurs rappelé que des forums régionaux ont été organisés récemment avec d’autres agences de l’ONU, notamment en Afrique et en Asie-Pacifique.  Elle a enfin annoncé que le forum annuel du Groupe de travail aura lieu en novembre à Genève et qu’il s’intitule: « titulaires de droits au centre ». 

Mme NOELEEN HEYZER, Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, a fait le point sur les événements récents au Myanmar, constatant que la crise politique, humanitaire et des droits de l’homme dans ce pays continue de faire payer un lourd tribut à la population, avec de graves implications régionales.  Plus de 13,2 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire, environ 40% de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté et 1,3 million de personnes sont déplacées à l’intérieur du pays, a alerté l’Envoyée spéciale, en présentant le rapport du Secrétaire général sur la situation des droits humains au Myanmar.

Dans ce contexte, les opérations militaires se poursuivent avec un usage disproportionné de la force, notamment des bombardements aériens, l’incendie de structures civiles et le meurtre de civils, dont des enfants, a détaillé la haute fonctionnaire, condamnant de récentes frappes aériennes aveugles sur une célébration dans l’État kachin, qui ont tué un grand nombre de civils.  Après avoir déploré que les résistants des Forces de défense populaires prennent également des civils pour cible, Mme Heyzer a évoqué le sort des Rohingya et d’autres communautés déplacées par la force.  Parmi ces personnes, nombreuses sont celles qui cherchent à trouver un refuge au risque de dangereux périples terrestres et maritimes, s’est-elle inquiétée, rappelant que le « prix de l’impunité rappelle avec force que la responsabilisation reste essentielle ».  

Depuis la publication du rapport, a-t-elle poursuivi, les violences entre l’Armée arakanaise et les militaires dans l’État rakhine ont atteint des niveaux jamais enregistrés depuis fin 2020, avec des incursions transfrontalières importantes, qui mettent en danger toutes les communautés, nuisent aux conditions d’un retour durable et prolongent le fardeau du Bangladesh, lequel accueille environ un million de réfugiés rohingya.  Alors que la crise s’aggrave, Mme Heyzer a dit promouvoir une stratégie internationale coordonnée, engageant toutes les parties prenantes à appuyer un processus inclusif mené par le Myanmar pour revenir à la transition démocratique.  Elle a précisé, à cet égard, que sa première visite au Myanmar, en août dernier, où en tant qu’Envoyée spéciale, elle a pu rencontrer le commandant en chef de l’armée, s’inscrivait dans le cadre des efforts plus larges déployés par les Nations Unies en vue de soutenir un retour à un régime civil fondé sur la volonté et les besoins de la population.

Mme Heyzer a dit avoir formulé six demandes au cours de cette visite, à commencer par la fin des bombardements aériens et des incendies d’infrastructures civiles, la fourniture d’une aide humanitaire sans discrimination et la libération de tous les enfants et prisonniers politiques.  Parmi ses autres demandes, elle a cité un moratoire sur les exécutions, le bien-être et la participation de Mme Aung San Suu Kyi, ainsi que la responsabilité du Myanmar dans la création de conditions propices au retour volontaire, sûr, digne et durable des réfugiés rohingya.

L’Envoyée spéciale a rappelé qu’elle s’est ensuite rendue à Dhaka et à Cox’s Bazar, au Bangladesh, à l’occasion du cinquième anniversaire du déplacement massif des Rohingya.  Elle a dit y avoir exprimé la reconnaissance des Nations Unies et entendu les avertissements du Premier Ministre du Bangladesh, M. Sheikh Hasina, selon lesquels la situation actuelle n’est pas tenable.  Les discussions avec des femmes et des jeunes dans les camps de réfugiés m’ont clairement fait comprendre qu’ils devaient participer directement aux discussions et aux décisions concernant leur avenir, a-t-elle ajouté.  Leurs droits et leur protection, en particulier leur citoyenneté, leur liberté de mouvement et leur sécurité, doivent être garantis, en s’inspirant des recommandations de la Commission consultative sur l’État rakhine, a plaidé Mme Heyzer. 

S’engageant poursuivre sa coopération avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et ses échanges avec toutes les parties prenantes, l’Envoyée spéciale a reconnu que, dans la « situation actuelle à somme nulle », il y a « peu de place » pour une désescalade de la violence ou pour des « pourparlers à propos des pourparlers ».  En revanche, il existe, selon elle, des moyens concrets pour réduire les souffrances de la population.  Étant donné que de nombreuses autres personnes seront contraintes de fuir la violence, elle prévoit de continuer à demander à l’ASEAN d’élaborer un cadre régional de protection pour les réfugiés et les personnes déplacées de force.  À ce propos, le récent retour forcé de ressortissants du Myanmar, dont certains ont été détenus à leur arrivée, démontre, à ses yeux, l’urgence d’une réponse coordonnée de l’ASEAN pour relever les défis régionaux communs causés par le conflit.

Mme Heyzer a encore indiqué que les principales organisations ethniques armées et le Gouvernement d’unité nationale, à la tête de la résistance, lui ont demandé de convoquer un forum d’engagement inclusif afin de faciliter la protection et l’aide humanitaire à toutes les personnes dans le besoin, dans le respect du droit humanitaire international.  Elle a aussi fait état du lancement, avec le Ministère des affaires étrangères de l’Indonésie, d’une plateforme sur les femmes, la paix et la sécurité au Myanmar, afin d’amplifier les besoins des femmes affectées par le conflit et leur leadership en tant qu’agents du changement.  Pour conclure, elle a souligné qu’une nouvelle réalité politique se fait jour au Myanmar: « un peuple qui exige le changement et qui n’est plus disposé à accepter le régime militaire ».  Elle a donc appelé tous les gouvernements et autres acteurs clefs à écouter le peuple du Myanmar et à se laisser guider par sa volonté « afin d’éviter une catastrophe au cœur de l’Asie ».

Dialogue interactif

À l’issue de cet exposé, la délégation du Myanmar a accusé les militaires de graves violations des droits humains, les qualifiant de crimes de guerre.  Le délégué a condamné les récents raids aériens lancés par la junte contre une école, faisant 13 morts, en majorité des enfants.  Plus récemment, un avion de combat a attaqué une centaine de civils réunis dans le cadre d’un concert. 

S’agissant des « fausses » élections, il a accusé la junte d’essayer de gagner une certaine légitimité sans assise populaire, indiquant que certains pourraient penser qu’il s’agit là d’une solution à la crise.  Il a mis en garde contre une telle position, pointant notamment l’absence de base juridique des militaires.  Ils gardent en otage des dirigeants politiques élus, ils ont supprimé l’état de droit et anéanti tout espace civique, a-t-il accusé.  Il s’est alarmé à la perspective d’un contrôle militaire permanent du pays avec une impunité totale pour la junte, ajoutant qu’il n’y aura pas de garantie de retour sûr et digne des Rohingya. 

À ce propos, le Bangladesh a demandé à l’Envoyée spéciale comment elle compte assurer des synergies avec l’Envoyé spécial pour le Myanmar de l’ASEAN.  La Chine a estimé que la solution à la question des Rohingya doit reposer sur la négociation à l’amiable entre le Myanmar et Bangladesh.  Comment alors mieux appuyer la mise en œuvre du programme pour les femmes, la paix et la sécurité dans le cadre du Myanmar, s’est enquise la Norvège

La Thaïlande a estimé que l’ASEAN est l’institution la mieux placée pour créer un environnement propice au dialogue dans la perspective d’une réconciliation.  Un avis partagé par l’Indonésie et la Malaisie ainsi que le Japon.  À cet égard, l’Allemagne a souhaité savoir comment appuyer la mise en œuvre du consensus en cinq points de l’ASEAN.  La Türkiye a, pour sa part, voulu savoir comment rompre avec le cycle de la violence. 

Pour leur part, les États-Unis ont voulu savoir quelles autres mesures permettraient de restreindre l’approvisionnement en armes du régime.  À cet égard, le Liechtenstein s’est enquis de la mise en œuvre de la résolution adoptée au lendemain du coup d’État.  L’Union Européenne a voulu en savoir plus sur le résultat de la coopération entre l’Envoyée spéciale et le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, tandis que le Mexique s’est intéressé aux moyens de renforcer son mandat. 

La Fédération de Russie a dénoncé la volonté persistante de certains pays d’utiliser des plateformes multilatérales, principalement l’ONU, pour politiser la nature conflictuelle du Myanmar.  Pour finir, la France a appelé les forces à rétablir l’état de droit et à enclencher un processus démocratique sincère et inclusif. 

Réagissant aux questions et observations des États Membres, l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar a estimé important de trouver les moyens d’appuyer le Bangladesh qui accueille plus d’un million de réfugiés, et de réunir les conditions propices au retour des Rohingya.  Témoignant avoir parlé avec nombre d’entre eux dans les camps, elle a indiqué qu’ils veulent retourner dans leur pays origine, à la condition d’être assurés d’une protection et de la sécurité.  Elle a également jugé important d’examiner certaines des causes à l’origine de ces déplacements. 

Elle a précisé que son mandat a deux directives, à savoir engager toutes les parties prenantes et compléter son travail avec celui de l’Envoyé spécial de l’ASEAN.  Elle a insisté sur l’importance de la médiation et a suggéré que cette question soit intégrée à son mandat.  Elle a reconnu que dans le cadre de sa collaboration étroite avec l’ASEAN, bon nombre de questions ne se trouvent pas encore dans le consensus en cinq points, citant la question des Rohingya, et le rétablissement d’un gouvernement civil basé sur la volonté de la population.  Elle a également insisté sur l’importance du rôle des pays voisins du Myanmar et de l’unité régionale.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: les délégations entendent le Président de la CDI et débattent des normes impératives du droit international

Soixante-dix-septième session,
21e & 22e séances plénières, Matin & après-midi
AG/J/3669

Sixième Commission: les délégations entendent le Président de la CDI et débattent des normes impératives du droit international

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a entendu, ce matin, par visioconférence, le Président de la Commission du droit international (CDI), M. Dire Tladi, présenter le dernier rapport de la CDI adopté à l’issue de sa soixante-treizième session.  Le rapport de la CDI est connu pour sa rigueur et son exhaustivité, a rappelé le Président de la Sixième Commission, M. Pedro Afonso.  Cette présentation coïncide traditionnellement avec la semaine du droit international.

Détaillant ce rapport long de 415 pages chapitre par chapitre, M. Tladi a fait état de progrès substantiels lors de la session, qui s’est tenue à l’Office des Nations Unies à Genève, du 18 avril au 3 juin 2022, pour la première partie, et du 4 juillet au 5 août 2022, pour la seconde partie.

La Commission a ainsi adopté en seconde lecture le projet de conclusions relatif aux normes impératives du droit international général (jus cogens), ainsi que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, s’est félicité le Président, en insistant également sur les progrès accomplis en ce qui concerne la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.

La Sixième Commission a ensuite entamé l’examen d’un premier groupe de chapitres du rapport de la CDI: chapitres introductifs I à III, chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission), chapitre IV (Normes impératives du droit international général (jus cogens) et chapitre V (Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés).

Le projet de conclusions de la CDI sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) a été au cœur des longues interventions de la trentaine de délégations à s’être exprimées aujourd’hui.  Selon le projet, ces normes « reflètent et protègent des valeurs fondamentales de la communauté internationale »; elles sont « universellement applicables » et « hiérarchiquement supérieures » aux autres règles du droit international.

La représentante de la Norvège, au nom des pays nordiques, a analysé le projet en faisant remarquer qu’il a été finalisé « alors que l’invasion russe de l’Ukraine est en cours ».  « Cette grave violation d’une norme impérative du droit international général ne fait que souligner l’importance de ce corpus juridique », a-t-elle d’emblée fait valoir. 

Si les délégations ont été nombreuses à saluer les modifications apportées au projet d’articles, elles n’ont pas hésité à afficher certains désaccords.  Singapour a ainsi noté avec satisfaction que la Commission a incorporé dans le projet de conclusion intitulé « Communauté internationale des États dans son ensemble », l’observation de son pays selon laquelle, pour déterminer s’il existe une « très large majorité » d’États acceptant et reconnaissant le caractère impératif d’une norme, une « majorité large et représentative » d’États est requise. 

« Cette formulation apporte une plus grande incertitude », a au contraire estimé le délégué des États-Unis.  Appuyé par le Brésil, le délégué de la Jordanie a indiqué qu’il s’agit d’une majorité d’États « représentant les différentes régions et traditions juridiques ».  Le critère d’identification des normes de jus cogens dans ce texte devrait être l’acceptation et la reconnaissance par « la communauté internationale des États dans son ensemble », a insisté l’Australie.

Le représentant de la Chine a regretté que le projet prévoie la primauté du jus cogens en cas de violation d’une résolution du Conseil de sécurité.  Aucune pratique n’existe à cet égard, a-t-il noté, et une telle logique ne correspond pas aux buts de la Charte.  Le délégué chinois a donc appelé à faire preuve de prudence, alors que son homologue du Brésil a, au contraire, insisté sur la compatibilité des résolutions du Conseil avec le jus cogens.

Un autre point de désaccord a été l’inclusion en annexe du projet d’une liste non exhaustive de ces normes.  Huit normes sont ainsi identifiées: l’interdiction de l’agression; l’interdiction du génocide; l’interdiction des crimes contre l’humanité; les règles fondamentales du droit international humanitaire; l’interdiction de la discrimination raciale et de l’apartheid; l’interdiction de l’esclavage; l’interdiction de la torture; et le droit à l’autodétermination.

El Salvador, l’Estonie et l’Italie ont accueilli favorablement une telle liste, laquelle, selon la délégation du Mexique, devrait « permettre de relancer plusieurs débats », dont l’utilisation du droit de veto au Conseil de sécurité.  Le Brésil a souhaité l’inclusion dans cette liste de l’accès à la justice.

Les États-Unis et la Chine ont, en revanche, rejeté une telle liste, tandis que l’Iran a mis en garde contre l’identification de normes impératives « spécifiques ».  De son côté, la délégation de Singapour a exprimé deux inquiétudes: que les utilisateurs de ce travail puissent considérer la liste comme définitive; et que la liste n’est pas établie en utilisant la méthodologie que la Commission elle-même a développée. 

« Nous aurions préféré que la Commission aborde dans les commentaires un nombre limité de normes de jus cogens établies en utilisant l’approche méthodologique établie par le projet de conclusions », a tranché l’Australie.  Plus globalement, l’Iran a invité la CDI à clarifier la nature « prescriptive ou descriptive » des projets de conclusions et des lignes directrices qu’elle produit. 

Enfin, le Nigéria, au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné la nécessité pour la CDI de prendre en compte toutes les traditions juridiques, y compris le droit coutumier africain. 

La Commission poursuivra ses travaux demain, mercredi 26 octobre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-TREIZIÈME SESSION - A/77/10

Présentation du rapport

M. DIRE TLADI, Président de la Commission du droit international (CDI), a rappelé que de nombreuses vies ont été bouleversées par la pandémie de COVID-19.  Deux ans plus tard, une myriade de défis posent une menace existentielle pour l’humanité et notre planète.  Dans le même temps, a-t-il dit, il faut garder à l’esprit que la grande majorité de la population de notre planète vit dans la pauvreté.  « Au sein de notre communauté, nous cherchons tous à trouver un sens au langage du droit international et à son riche vocabulaire dans l’espoir de construire une société meilleure et juste. »

Le Président a d’abord présenté une vue d’ensemble du rapport de la CDI à l’examen, en précisant que celle-ci a adopté le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), ainsi que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés. 

La Commission a également fait des progrès substantiels en ce qui concerne la succession d’États en matière de responsabilité de l’État et elle est proche d’achever ses travaux sur ce point.  Sur le sujet « principes généraux du droit », la Commission a reçu le texte consolidé de l’entièreté du projet de conclusions.  Là aussi, elle est proche d’achever ses travaux sur ce point, a poursuivi le Président. 

La CDI a également avancé en ce qui concerne l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international.  Le Président a indiqué que les trois points suivants ont été inclus au programme de travail de la CDI: moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international; prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer; règlement des différends internationaux auxquels des organisations internationales sont parties.

Le sujet « accords internationaux non juridiquement contraignants » a été, quant à lui, inclus dans le programme de travail à long terme de la Commission.  M. Tladi a précisé que la CDI veille à l’amélioration de ses méthodes de travail et a rétabli son groupe de travail sur lesdites méthodes.  « En raison du manque de temps, le groupe de travail n’a pas pu achever son programme et le poursuivra l’année prochaine. »

M. Tladi a redit l’attachement de la CDI à une coopération étroite avec les autres entités telles que la Cour internationale de Justice (CIJ).  La Présidente de la CIJ s’est ainsi exprimée devant la CDI le 1er juin dernier.  La CDI a également eu un échange informel avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) le 21 juillet 2022. 

Le Président a ensuite détaillé chaque chapitre du rapport, en insistant sur les progrès accomplis.  En conclusion, M. Tladi a rappelé l’intérêt partagé de la CDI et de la Sixième Commission à l’avancement du droit international et à sa codification.·

Débat général sur le module 1: chapitres introductifs I à III, chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission), chapitre IV (Normes impératives du droit international général (jus cogens) et chapitre V Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés) 25-27 octobre

M. LUCIO GUSSETTI, de l’Union européenne, a déclaré que la protection de l’environnement doit être prise en compte dans l’établissement des normes applicables aux conflits armés.  Il s’est donc félicité du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés et de son application aux États, organisations internationales et autres acteurs.  Selon le délégué, les États devraient identifier des zones protégées d’importance environnementale.  Il a proposé que, dans des situations de conflit armé, cette désignation se fonde sur des critères « définis et objectifs ».  L’Union européenne, a-t-il indiqué, serait favorable à une protection, la plus large possible, pour tout objet civil qui pourrait nuire à l’environnement.

Mme MIRJAM BIERLING (Norvège), au nom du Groupe des pays nordiques, a salué des progrès substantiels, y compris l’adoption en première lecture de 18 projets d’articles et d’un projet d’annexe sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  La représentante s’est dit consciente des préoccupations de la Commission quant à l’effet des contraintes budgétaires qui lui sont imposées.  Tout en soulignant que les ressources adéquates doivent être fournies par le budget régulier de l’ONU, elle a indiqué être ouverte à l’idée d’envisager la création d’un fonds d’affectation spéciale.

Évoquant le chapitre IV du rapport, la représentante a fait remarquer que la Commission a dû finaliser son travail sur ce sujet « alors que l’invasion russe de l’Ukraine est en cours ».  Cette grave violation d’une norme impérative du droit international général ne fait que souligner l’importance de ce corpus juridique qui a maintenant été systématisé par la Commission dans ces projets de conclusions et de commentaires, a-t-elle fait valoir.  Elle a réitéré la position des pays nordiques, à savoir que le jus cogens est mieux traité par une approche conceptuelle et analytique que par l’élaboration d’un nouveau cadre normatif pour les États.  « Compte tenu de la pratique relativement limitée et variable des États en la matière, la codification n’est peut-être pas la voie la plus prudente à suivre. »  Par ailleurs, la représentante a réaffirmé la nécessité d’une définition claire de l’étendue des acteurs pertinents dans l’identification des normes impératives du droit international général.  Quant à la liste non exhaustive de normes de jus cogens mentionnée dans le projet de conclusion 23 et annexée au projet de conclusions, elle ne doit pas être interprétée comme empêchant l’émergence d’une pratique étatique et d’une opinio juris à l’appui d’autres normes. 

Abordant le chapitre V, la représentante a noté que les conflits armés en cours, comme la guerre d’agression russe en Ukraine, ont mis en lumière les « ravages infligés à l’environnement » par les frappes sur les usines chimiques, les raffineries et les pipelines.  Ainsi, le projet de principes est-il aussi opportun qu’important.  Elle a souligné l’importance de plusieurs projets de principe, tels que le projet de principe 8 sur le déplacement des personnes ou encore le projet de principe 10.  Elle a également mis en avant la nécessité de coopérer, de partager et d’accorder l’accès à l’information pour faciliter les mesures de réparation des dommages causés à l’environnement par un conflit armé, comme le souligne le projet de principe 23.  « Nous sommes d’accord avec l’approche de la Commission, qui laisse la place au développement du droit, sans pour autant porter atteinte aux obligations juridiques internationales existantes », a-t-elle conclu.

Mme DAPHNE HONG (Singapour) a estimé que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) peut encore être amélioré et clarifié.  Elle a noté avec satisfaction que la Commission a incorporé dans le projet de conclusion 7 l’observation de Singapour selon laquelle, pour déterminer s’il existe une « très large majorité » d’États acceptant et reconnaissant le caractère impératif d’une norme, une « majorité large et représentative d’États est requise. » Cela dit, sa délégation continue d’être d’avis que la référence à la communauté internationale « dans son ensemble » comporte des éléments quantitatifs aussi bien que qualitatifs, et que l’expression « pratiquement tous les États » doit avoir le sens quantitatif requis.  Ensuite, la déléguée a jugé « inutile » le projet de conclusion 21 qui envisage la possibilité de recourir à la Cour internationale de Justice (CIJ)ou à une autre procédure entraînant des décisions contraignantes si aucune une solution est trouvée sur l’objection d’un État à ce qu’un autre État invoque une norme impérative du droit international général dans un délai de 12 mois.  Enfin, concernant la liste non exhaustive des normes de jus cogens figurant dans le projet de conclusion 23, elle a exprimé deux inquiétudes: que les utilisateurs de ce travail puissent considérer la liste comme définitive; et que la liste n’est pas établie en utilisant la méthodologie que la Commission elle-même a développée.

Mme Hong a par ailleurs appuyé l’inscription du thème « Les accords internationaux juridiquement non contraignants » au programme de travail à long terme de la CDI.  Elle a noté que l’utilisation courante de mémorandums d’accord ou d’accords juridiquement non contraignants par les États illustre l’importance pratique de ce sujet.  Si ce sujet est transféré au programme de travail de la Commission, elle a espéré que la Commission tiendra compte de la riche pratique des États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur cette question.

M. ALAA NAYEF AL-EDWAN (Jordanie) a estimé que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) ne devrait pas être utilisé pour identifier des normes impératives spécifiques et leurs conséquences juridiques.  Il a rappelé que, selon la pratique, seules les normes coutumières peuvent servir de fondement à une norme impérative, tout en reconnaissant la distinction formulée par la CDI dans sa conclusion 5.  Il a également noté que leur formation ne requiert pas l’unanimité des États, mais uniquement une majorité représentant les différentes régions et traditions juridiques.  La supériorité des normes impératives ne devrait pas être utilisée par les États comme prétexte pour ne pas exécuter les obligations issues des résolutions et décisions obligatoires des organisations internationales, a dit le représentant.  Il a en outre regretté que la procédure prévue dans la conclusion 21 soit « peu pratique ».

Le représentant a apporté son soutien à l’approche retenue par le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, dont l’application est « cruciale pour la protection de l’environnement ».  Il s’est, à cet égard, félicité de l’inclusion des situations d’occupation dans le projet ainsi que la prise en compte des déplacements humains.  Il a néanmoins estimé que la CDI aurait dû régler le problème de l’attribution du dommage environnemental.  Il a, enfin, rappelé que l’occupant devait utiliser les ressources naturelles « au bénéfice de la population protégée ».

M. MCCARTHY (Australie) a apprécié que la Commission étudie les sources de droit identifiées à l’article 38(1) du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a salué l’inclusion du sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et des vols à main armée en mer dans son programme de travail.  « Ces actes constituent une menace permanente pour la sécurité maritime. »  Rappelant que la Convention sur le droit de la mer définit le cadre juridique applicable en la matière, il a estimé que l’examen par la CDI de la pratique des États et la clarification des zones d’incertitude encourageront la coopération internationale. 

Le représentant a jugé essentiel que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) et ses commentaires reflètent fidèlement le droit international et qu’ils soient fondés sur la pratique des États.  Le critère d’identification des normes de jus cogens dans le projet de conclusion no 7 devrait être l’acceptation et la reconnaissance par « la communauté internationale des États dans son ensemble », a-t-il appuyé.  Il a douté de l’utilité de la liste non exhaustive mentionnée dans l’annexe au projet de conclusion no 23.  « Nous aurions préféré que la Commission aborde dans les commentaires un nombre limité de normes de jus cogens établies en utilisant l’approche méthodologique établie par le projet de conclusions. »

Concernant la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a estimé que le respect du droit international humanitaire (DIH) existant peut limiter l’impact que les conflits peuvent avoir sur l’environnement naturel et les populations qui en dépendent.  Il a salué la référence au « droit international applicable » dans le projet de principes adopté par la Commission, qui souligne que ce sujet ne suggère pas d’interprétations nouvelles ou modifiées du DIH existant.   En outre, il a affirmé qu’il existe des différences substantielles dans le droit international humanitaire entre les obligations liées aux conflits internationaux et celles liées aux conflits non internationaux, notant que le projet ne prévoit pas actuellement de différenciation.  En conclusion, il a regretté que « l’équilibre entre les sexes continue d’échapper à la Commission ».

Mme ZINOVIA STAVRIDI (Grèce) a salué l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Elle s’est en particulier félicitée de la conclusion 2 qui précise que lesdites normes reflètent et protègent des valeurs fondamentales de la communauté internationale.  « Nous sommes également d’avis que cette caractéristique capitale du jus cogens constitue également un critère de son identification étant donné qu’une norme, pour être qualifiée d’impérative, doit être acceptée et reconnue par la communauté internationale des États comme reflétant et protégeant de telles valeurs. »  La déléguée a ensuite commenté la conclusion 21 sur la procédure recommandée lorsqu’un État invoque une norme impérative du droit international général comme motif de nullité ou d’extinction d’une règle du droit international.  « Nous notons avec satisfaction que le libellé a été amendé pour souligner le fait que cette procédure n’est pas contraignante pour les États. »

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, Mme Stavridi a salué l’adoption du projet de principes y afférent.  Elle s’est félicitée du libellé du principe 13 qui dispose que l’environnement doit être respecté et protégé conformément au droit international applicable et, en particulier, au droit des conflits armés.  Elle a également salué la clarification s’agissant de l’interdiction du pillage des ressources naturelles visée au principe 16.  Cette interdiction s’applique également aux situations d’occupation, a précisé la déléguée.  Enfin, elle a pleinement appuyé le principe 25 sur le secours et l’assistance apportés lorsque la source des dommages causés à l’environnement en rapport avec un conflit armé n’est pas identifiée ou que la réparation n’est pas envisageable.

M. OMHAMMAD SADEGH TALEBIZADEH SARDARI (République islamique d’Iran) a demandé à la CDI de clarifier la nature « prescriptive ou descriptive » des projets de conclusions et des lignes directrices qu’elle produit.  La Cour internationale de Justice (CIJ) a reconnu qu’une variété de sources peuvent servir de fondement à une norme impérative de droit international général, sans préférence ni priorité, a-t-il noté.  Regrettant une incohérence entre la conclusion 8 du projet de conclusions sur les normes impératives et le projet de conclusions sur l’identification du droit international coutumier, le représentant a appelé la CDI à assurer une meilleure cohérence entre ses travaux.  Il a défendu la « règle de l’objecteur persistent » dans la mesure où ce qui est requis pour établir le jus cogens ne peut pas être en deçà de ce qui est requis pour établir le droit international coutumier.  Il a en outre mis en garde contre l’identification de normes impératives spécifiques.

Le représentant a par ailleurs noté que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés vise au développement progressif du droit international: il ne peut pas créer de nouvelles obligations pour les États.  Il s’est inquiété d’une applicabilité indiscriminée aux conflits armés internationaux et non internationaux.  Le représentant a enfin mis en garde contre toute contradiction entre le travail de la CDI sur la prévention et la répression de la piraterie et du vol armé en mer et les conventions existantes.

Mme TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria), au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné la nécessité pour la CDI de prendre en compte toutes les traditions juridiques, y compris le droit coutumier africain.  Il a salué la coopération nouée entre la CDI et la Commission de l’Union africaine sur le droit international.  Il a insisté sur l’importance de préserver une bonne représentation géographique au sein des différents groupes de travail, en déplorant qu’un seul membre africain ait été nommé rapporteur spécial.  Enfin, le délégué s’est félicité de l’inclusion des deux points suivants au programme de travail de la CDI: moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international et prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer.

M. ZANINI (Italie) a vu, dans l’adoption du projet de conclusions sur l’identification et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), un « jalon important dans la contribution de la CDI à la clarification et au développement du droit international ».  Il a partagé l’avis du Rapporteur spécial quant à la supériorité hiérarchique des normes de jus cogens par rapport aux autres règles ordinaires du droit international.  Ainsi, nous continuons d’attacher la plus grande importance aux catégories autonomes des normes impératives du droit international général et des obligations erga omnes, qui protègent les intérêts fondamentaux de la communauté internationale dans son ensemble, a-t-il affirmé.  Sur le processus d’identification des normes, il a indiqué qu’il aurait préféré des précisions sur le concept de « preuve » et, plus précisément, sur les affirmations individuelles des États selon lesquelles une norme est acceptée et reconnue comme une norme à laquelle aucune dérogation n’est permise.  Évoquant la conclusion no 8 (Preuve de l’acceptation et de la reconnaissance), le représentant a estimé que le commentaire aurait pu faire une référence plus remarquable aux dispositions constitutionnelles telles qu’interprétées et appliquées par la jurisprudence des cours constitutionnelles.  « Cela aurait permis de prendre dûment en considération la pratique des différents systèmes juridiques et les principes fondamentaux inscrits dans la Constitution de diverses nations. ».  En outre, au sujet des conclusions nos 22 et 23, le délégué a dit comprendre, en partie, les raisons ayant motivé la décision d’élaborer une liste non exhaustive, compte tenu de l’évolution possible de la reconnaissance et de l’affirmation des normes de jus cogens.  « Cependant, nous ne sommes pas entièrement convaincus par le choix de la Commission de ne pas aborder l’épineuse question des conséquences juridiques de certaines normes impératives, telles que celles interdisant le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. » 

Au sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a salué l’adoption du projet de principe no 9 (Responsabilité des États).  Selon lui, il faut garantir à la fois le respect du principe de prévention et celui du principe de précaution, qui sont au cœur du droit international de l’environnement.  Par ailleurs, il a estimé qu’aucune attaque dirigée contre un objectif militaire ne doit être considérée comme « proportionnée » lorsqu’elle est destinée à causer -ou dont on peut s’attendre à ce qu’elle cause- des dommages étendus, durables et graves.  Au sujet du projet de principe no 21 (Prévention des dommages transfrontières), le représentant a salué l’élargissement de son champ d’application spatial tout en estimant que la question du dommage transfrontalier environnemental aurait aussi dû être abordée en relation avec des contextes autres que les situations d’occupation.  Enfin, la Commission aurait pu faire une référence plus spécifique à l’application du principe fondamental d’autodétermination des peuples dans l’utilisation des ressources naturelles dans le contexte de l’occupation, a affirmé le représentant, reconnaissant cependant que le commentaire contient des explications précieuses quant à la notion de « population protégée » et à la définition des obligations d’un occupant à l’égard des ressources naturelles situées dans les territoires occupés. 

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a salué l’adoption, en seconde lecture, du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Ce projet respecte l’équilibre entre la pratique des États et les décisions des juridictions, a apprécié la déléguée, en insistant sur l’importance de la pratique dans ce domaine.  Elle a salué l’inclusion en annexe d’une liste non exhaustive de normes impératives.  Elle a commenté le paragraphe 2 de la conclusion no 8 (Preuve de l’acceptation et de la reconnaissance), en indiquant que la notion « organisations internationales » aurait pu être précisée.  La déléguée a ensuite salué l’adoption du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  « Il s’agit d’un travail extraordinaire. »  Elle a rappelé que la Cour interaméricaine des droits de l’homme et l’Assemblée générale de l’ONU ont reconnu un droit à un environnement sain.  Il aurait peut-être été utile de préciser, dans les commentaires, les notions « conflits armés » et « objectifs militaires » visées par ledit projet, a-t-elle estimé en conclusion.

M. GUIDE JIA (Chine) a appelé la CDI à renforcer ses échanges avec les États Membres et à adopter une approche plus ciblée sur la base des besoins « pratiques » de la communauté internationale.  Il a également souligné l’importance d’améliorer les travaux de codification et de développement progressif du droit international et insisté sur la nécessité d’éclaircir les critères de sélection des sujets traités.  Le délégué s’est félicité de l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), un sujet « au cœur » du droit international.  Il a néanmoins regretté que le projet prévoie la primauté du jus cogens en cas de violation par une résolution du Conseil de sécurité.  Aucune pratique n’existe à cet égard, a-t-il noté, et une telle logique ne correspond pas aux buts de la Charte.  Il a donc appelé à faire preuve de prudence.  De même, le délégué a mis en garde contre l’adoption d’une liste des normes impératives, rappelant que la CDI y avait renoncé pour l’élaboration de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  « Il serait préférable de déterminer les critères pertinents pour l’identification des normes du jus cogens », a-t-il précisé.  Enfin, il s’est interrogé sur l’application des normes relatives aux conflits internationaux et aux conflits non internationaux dans le cadre du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

Mme SILEK (Hongrie) a estimé que l’importance des normes impératives du droit international, comme l’interdiction de l’agression ou le droit à l’autodétermination, ne peut pas être surestimée à l’heure actuelle.  Même si la CDI n’a pas pour objectif d’analyser le contenu et les caractéristiques des normes de jus cogens et n’en fournit pas une liste exhaustive, la représentante s’est dite convaincue que l’interprétation large de ces normes par les États peut conduire à l’affaiblissement du concept même de jus cogens.  Ensuite, a-t-elle relevé, si les projets de conclusions traitent des cas de conflit entre les normes de jus cogens et d’autres sources de droit international, ils ne traitent pas des cas de conflit entre les normes de jus cogens elles-mêmes.  Par ailleurs, bien que les normes de jus cogens soient les piliers du système juridique international, il est possible que leur contenu évolue légèrement au fil des décennies.  Or, si les conclusions sont claires sur les étapes de l’identification des normes impératives, il n’y a pas d’orientation sur leur examen, a-t-elle conclu. 

M. VISEK (États-Unis) a voulu rappeler que son pays est favorable à l’élaboration d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, afin de combler une lacune dans l’ordre juridique existant.  Il a salué ensuite l’adoption en seconde lecture du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a indiqué que la Commission a répondu à certaines préoccupations des États-Unis, notamment en ce qui concerne la conclusion 2 (Nature des normes impératives du droit international général).  Le délégué a néanmoins marqué son désaccord en ce qui concerne le libellé de la conclusion 7 (Communauté internationale des États dans son ensemble) selon laquelle l’acceptation et la reconnaissance par une majorité d’États très large et représentative est requise aux fins de la détermination d’une norme impérative du droit international général.  Il a estimé que l’ajout du mot « représentative » apporte une plus grande incertitude.  Le délégué a également rejeté l’inclusion d’une liste non exhaustive de telles normes, en estimant que la CDI n’a pas suivi sur ce point la méthodologie habituelle.

S’agissant du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le délégué s’est étonné que seules les entreprises commerciales soient mentionnées en tant qu’acteurs non étatiques, alors qu’il existe nombre de tels acteurs comme les organisations criminelles.  Enfin, il a souhaité davantage de clarté s’agissant du choix du format à donner aux travaux de la CDI sur différents sujets.

M. KESSEL (Canada) a rappelé qu’en l’absence de pratique étatique et d’opinio juris, les obligations applicables aux conflits armés internationaux ne devraient pas être présentées comme des normes coutumières applicables lors de conflits armés non internationaux.  Il faut, selon lui, éviter de faire cette distinction entre conflits internationaux et non internationaux pour ce qui est de l’applicabilité des projets de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, d’autant plus que cela nuit à la cohérence du texte.  Le délégué a également regretté l’usage de verbes à caractère obligatoire dans plusieurs projets de principes visant à créer de nouvelles normes ou à étendre des normes existantes.  De tels verbes devraient être réservés aux principes qui constituent la lex lata, a-t-il estimé.  Il a en outre rappelé que l’article 1 commun aux Conventions de Genève ne crée pas, pour les États qui ne participent pas à un conflit armé, le devoir de s’assurer que toutes les parties étatiques et non étatiques au conflit respectent ces Conventions.  Au sujet du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), le délégué a souligné que, dans la mesure où les traités ne lient que leurs parties, ils ne peuvent pas fonder l’existence d’une norme impérative.  Selon lui, il faut continuer d’œuvrer pour « peaufiner et clarifier » certains aspects des projets de principes et des commentaires.

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a vu dans l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) un « véritable tournant ».  Cependant, elle a noté avec préoccupation que plusieurs projets de conclusions envisagent la valeur probante des décisions des tribunaux nationaux dans l’identification des normes impératives du droit international général, alors que des acteurs non-étatiques, tels que la société civile, ont saisi des tribunaux pour réparation en invoquant le jus cogens.  La déléguée a en outre estimé que l’évolution du raisonnement des tribunaux nationaux et du jus cogens montre qu’il faut éclaircir le rôle du droit international.  Quant au commentaire afférant à la conclusion 9 (Moyens auxiliaires de détermination des normes du droit international général), il semble suggérer que certaines cours nationales auraient plus de poids que d’autres.  « Il faut réviser ce commentaire. »  Enfin, la déléguée a réitéré ses réserves sur la conclusion 23 (Liste non exhaustive). 

Mme NOOR NADIRA NOORDIN (Malaisie) a salué l’adoption du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Elle a indiqué que ce projet n’a pas vocation à être contraignant, tout en critiquant le libellé obligatoire de certains principes.  La Malaisie suggère que le libellé et la forme de ce projet soient révisés, afin qu’il ne contienne pas de formulations impliquant des obligations contraignantes.  La déléguée a commenté le principe 12 relatif à la clause de Martens en matière de protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, principe qui dispose que l’environnement reste sous la sauvegarde et sous l’empire des principes du droit international, tels qu’ils résultent des usages établis, des principes de l’humanité et des exigences de la conscience publique.  Certains États ne s’accordent pas sur la portée et l’application de ces principes de l’humanité et des exigences de la conscience publique dans le cadre de ladite clause Martens, a fait observer la déléguée.  Elle a donc jugé crucial que la Commission prenne en compte les vues et pratiques des États à ce sujet.  Enfin, elle a salué l’inclusion dans le programme de travail des sujets suivants: moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international et prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer.

M. HELMUT TICHY (Autriche) s’est félicité de la finalisation du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), qui vient encadrer l’une des questions les plus débattues sur la structure du droit international.  Malheureusement, la clarification du terme « représentative » dans la conclusion 7 (Communauté internationale des États dans son ensemble) n’est pas utile dans la mesure où elle n’indique pas si les critères sont cumulatifs ou alternatifs.  Le délégué a également regretté l’utilisation du terme « injuste » dans la conclusion 11 (Divisibilité des dispositions d’un traité en conflit avec une norme impérative du droit international général), qui n’est pas un terme de droit positif.  Il a proposé la formule alternative suivante: « ne serait pas contraire à l’intérêt commun des parties ».  La formulation de la conclusion 13 (Absence d’effet des réserves aux traités sur les normes impératives du droit international général) aurait également pu être clarifiée, a-t-il ajouté.  Le représentant a en outre indiqué qu’il aurait été préférable que la liste non exhaustive des normes impératives mentionne la prohibition du recours à la force et non la prohibition de l’agression.  De même, l’expression « règles fondamentales du droit international humanitaire » n’est pas suffisamment précise, a-t-il estimé.

Le représentant a regretté que le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés ne définisse pas le terme « environnement ».  Il s’est en particulier dit convaincu que les États peuvent désigner des zones protégées autour des centrales nucléaires qui soient respectées par tous les États.  L’urgence à cet égard est illustrée par la situation actuelle de la centrale de Zaporijia, en Ukraine, a-t-il pressé.  Il a également appelé à intégrer au projet de principe 19 (Obligations générales de la Puissance occupante relatives à l’environnement) une recommandation pour l’occupant de coopérer avec les institutions internationales afin de prévenir ou minimiser les dommages à l’environnement.  Le représentant s’est, enfin, félicité des nouveaux sujets ajoutés au programme de travail de la Commission.

Mme SEKHER (Inde) a approuvé la conclusion selon laquelle une norme, pour pouvoir être identifiée comme une norme impérative de droit international général, doit être acceptée et reconnue par les États comme une norme à laquelle on ne saurait déroger.  Dans ce contexte, la déléguée a pris note des projets de conclusions 4 (Critères pour la détermination d’une norme impérative du droit international général) et 5 (Fondements des normes impératives du droit international), ajoutant que lesdites normes doivent être suffisamment développées pour s’appliquer et que différentes sources jouent un rôle important dans la détermination de leur caractère impératif.  Sur les projets de conclusions 6 à 9, la délégation est d’avis que la procédure d’identification des normes devrait prendre compte son acceptation au sein de tous les systèmes juridiques et toutes les cultures.  Étant donné que les normes impératives du droit international général sont hiérarchiquement supérieures aux autres normes du droit international, cette procédure doit être claire et sans ambiguïté.  Évoquant ensuite la liste non exhaustive, la représentante a noté l’absence d’une définition claire.  Enfin, elle s’est félicitée de l’intégration dans le programme de travail de plusieurs points, notamment la prévention et la répression des actes de piraterie et de vols à main armée en mer.  Il serait pertinent de reconnaître le cadre juridique international créé par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-elle conclu. 

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique)a noté que le développement progressif du droit international est une tâche fondamentale.  Elle a reconnu l’importance de disposer d’une liste non exhaustive des normes de jus cogens ainsi que de directives pertinentes en vue d’identifier ces normes et leurs conséquences.  Elle a souligné le lien avec les articles 40 et 41 des articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite adoptés en 2001.  Les normes impératives identifiées permettront de relancer plusieurs débats, selon elle.  La représentante a rappelé la réflexion sur le recours au veto par les membres permanents du Conseil de sécurité en cas d’agression.  Au sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, elle a souligné l’importance de protéger l’environnement en général et d’interdire des méthodes conçues pour poser des dégâts « considérables, durables et graves ».  Elle a, à ce titre, évoqué les armes nucléaires.  La diligence et la responsabilité civile des entreprises causant des dégâts à l’environnement et à la santé constituent également un élément clef.  La représentante a donc déclaré que « le moment est venu de demander des responsabilités aux entreprises pour les effets néfastes causés par leurs actions ». 

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) s’est félicité de l’inclusion de la question de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer dans le programme de travail de la CDI.  Il a salué l’adoption en seconde lecture du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  « Un travail précieux », a dit le délégué, en notant les efforts considérables de la CDI.  Il a ensuite salué l’adoption du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, « un projet de principes très complet ».  Il a apprécié l’accent mis sur la responsabilité de la puissance occupante s’agissant de la protection de l’environnement.  Enfin, le délégué a rappelé que la COP27 -Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques- va démarrer dans quelques jours en Égypte.

Mme VON USLAR-GLEICHEN (Allemagne) s’est félicitée de l’adoption du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens), un sujet qui continue d’être particulièrement important pour l’ordre juridique international.  Estimant toutefois que l’adoption d’une liste de normes impératives spécifiques pourrait mener à des « conclusions erronées » et entraver l’évolution du jus cogens, elle a regretté son maintien en seconde lecture malgré les préoccupations exprimées par les États.  La représentante a par ailleurs craint que la référence aux valeurs fondamentales de la communauté internationale dans le projet de conclusion no 2 (Nature des normes impératives du droit international général) et l’ambiguïté qui subsiste dans le commentaire y afférant ne risquent de donner lieu à de mauvaises interprétations.  Elle a également noté la faible pratique des États pour étayer le projet de conclusion no 16 (Obligations créées par des résolutions, décisions ou autres actes d’organisations internationales en conflit avec une norme impérative du droit international général).  À cet égard, elle a mis en garde contre les abus afin de se soustraire aux résolutions obligatoires du Conseil de sécurité et le danger de saper son autorité.  Enfin, pour l’Allemagne, l’agression russe en Ukraine illustre le rôle important de la CDI sur la question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

M. POPKOV (Bélarus), soulignant l’importance des normes impératives du droit international pour la stabilité internationale, a trouvé judicieux que la définition contenue dans la Convention de Vienne sur le droit des traités serve de point de départ.  La reconnaissance de telles normes requiert un large consensus représentant toutes les catégories de membres de la communauté internationale, a-t-il fait valoir.  Selon lui, il aurait été préférable de mentionner les critères applicables directement dans le texte, plutôt que dans le commentaire afin d’éviter des conflits potentiels.  Il a également souligné le « rôle particulier » des normes contenues dans les traités universels, notamment la Charte des Nations Unies.  Le représentant a déclaré que la liste illustrative mentionnée dans le projet de conclusions aurait pu être élargie en incluant les principes universels du droit international contemporain ainsi que certaines normes relatives à la protection de l’environnement et les régimes juridiques qui s’appliquent aux espaces internationaux.  Il a également noté que les propositions concernant les conséquences juridiques des normes impératives ne reflètent pas toujours la lex lata, notamment le principe de l’objecteur persistent.  Il serait précipité d’élaborer une convention à partir du projet de conclusions, a-t-il conclu, préférant l’adoption de recommandations méthodologiques.  Par ailleurs, le représentant a jugé « équilibré » le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Il a notamment souligné l’importance d’encadrer l’occupation militaire et d’inclure les activités des entités privées.

M. BANDEIRA GALINDO (Brésil) a salué l’adoption en seconde lecture du projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il a commenté la conclusion 7 (Communauté internationale des États dans son ensemble) selon laquelle l’acceptation et la reconnaissance par une majorité d’États très large et représentative est requise aux fins de la détermination d’une norme impérative du droit international général.  Cela signifie que de telles normes doivent être identifiées « à partir de tous les systèmes juridiques dans le monde », a précisé le délégué.  Nous aurions préféré qu’il soit fait expressément mention des résolutions du Conseil de sécurité dans la conclusion 16 (Obligations créées par des résolutions, décisions ou autres actes d’organisations internationales en conflit avec une norme impérative du droit international général), a-t-il continué, avant de se féliciter de leur inclusion dans les commentaires.  Il a insisté sur la nécessaire conformité desdites résolutions aux normes impératives du droit international.  S’agissant de la liste non exhaustive de ces normes, le délégué a souhaité l’inclusion de l’accès à la justice.  Par ailleurs, le délégué a salué le projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, tout en insistant sur son caractère juridiquement non contraignant.  « Ce projet ne doit ni créer de nouvelles normes du droit international ni modifier le droit existant. »

M. MARKO RAKOVEC (Slovénie) a souligné l’importance du sujet des normes impératives du droit international et du besoin d’en déterminer les critères.  Il a soutenu l’inclusion d’une liste non exhaustive des normes impératives en annexe des conclusions.  Ces normes sont « routinièrement identifiées comme ayant un caractère impératif », a-t-il souligné.  Il a rappelé le caractère erga omnes des obligations issues des normes impératives et souligné les conséquences juridiques de leur violation ainsi que l’obligation des États de coopérer pour y mettre fin.  Le représentant a ensuite insisté sur l’importance du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, qui renforce la protection de l’environnement à la fois pour les conflits internationaux et non internationaux.  Il s’est notamment félicité de l’inclusion de dispositions relative aux personnes déplacées et à la protection par les entreprises de l’environnement et de la santé.  « Ces principes visent à dissuader les entreprises de s’attaquer à la population locale et aux ressources naturelles pendant les conflits armés. »

M. MATÚŠ KOŠUTH (Slovaquie) a déclaré que l’agression de la Russie contre l’Ukraine nous rappelle que les valeurs fondamentales contenues dans les normes impératives du droit international général (jus cogens) doivent être fermement établies comme pilier de l’ordre international.  Estimant que le projet de conclusions est un guide utile, il a souligné que leur portée concrète reste du ressort de la communauté internationale des États et de leur pratique future.  S’il a rappelé avoir soutenu à plusieurs reprises l’idée d’une liste non exhaustive, le délégué a toutefois averti qu’elle peut créer une certaine ambiguïté, comme c’est le cas avec la référence « plutôt vague » aux « règles fondamentales du droit humanitaire ».  De même, l’omission du crime de piraterie pourrait susciter des interrogations. 

Concernant la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le délégué a vu dans le projet de principes une « orientation précieuse pour les États et autres acteurs ».  Les conflits armés ont toujours des impacts négatifs sur l’environnement et les ressources naturelles, qui sont souvent de longue durée et parfois irréparables, a-t-il déploré, appréciant ainsi que l’ensemble du projet offre une systématisation complète des règles applicables à la protection de l’environnement dans ce contexte.  En outre, il s’est réjoui de la nature transversale du projet de principes, qui englobe des éléments tirés de divers domaines, tels que le droit international humanitaire, le droit international des droits humains et le droit de l’environnement.  Enfin, le délégué a pris note de l’inclusion de nouveaux sujets dans les travaux de la CDI, notamment le « Règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties ». 

Mme VESKI (Estonie) a jugé nécessaire de clarifier la notion de jus cogens, avant de saluer l’adoption en seconde lecture du projet de conclusions sur ce sujet.  Elle a apprécié que les conclusions et commentaires traitent de la question de l’application du jus cogens sur les obligations d’actes découlant d’organisations internationales.  La déléguée s’est prononcée en faveur d’une liste non exhaustive de telles normes, en insistant sur sa valeur pratique et sa clarté.  Il est néanmoins essentiel d’identifier les normes impératives du droit international sur la base d’un consensus fort et clair de la communauté des États, a-t-elle précisé.  Elle a rejeté les vues exprimées par certaines délégations selon lesquelles une telle liste entraverait l’émergence d’autres normes.  S’agissant du projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, elle a estimé qu’il faut « comprendre son application à toutes les phases d’un conflit: avant, pendant et après ».  Enfin, la déléguée a salué le fait que la CDI ne veuille pas avec ce projet modifier le droit existant des conflits armés.

M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan) a estimé que, malgré le travail considérable accompli par le passé, la CDI est aujourd’hui confrontée à de nouveaux défis, en particulier sur sa composition et ses méthodes de travail.  La Commission doit garder à l’esprit l’objectif de servir les États Membres lorsqu’elle choisit ses sujets et se concentrer sur les questions juridiques dont les États ont un besoin urgent dans la pratique.  En l’absence d’un consensus général, la priorité doit être donnée à la cohérence et à la clarté de la lex lata.  Notant que seulement cinq rapporteurs spéciaux viennent d’Asie et sept d’Afrique, il a jugé nécessaire de rendre la CDI plus représentative.

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), le représentant a salué la méthodologie de la Commission et a approuvé la manière dont lesdites normes sont caractérisées.  Il a apprécié la mention du « droit à l’autodétermination » dans la liste non exhaustive des normes impératives figurant dans le projet de conclusion no 23.  Malheureusement, a-t-il poursuivi, en l’absence d’une définition suffisamment précise et juridiquement fondée du terrorisme, plusieurs États ont en fait abusé des résolutions antiterroristes du Conseil de sécurité pour « criminaliser » certaines activités légitimes couvertes par le droit international, y compris le droit des peuples à l’autodétermination.  Le représentant a, par exemple, cité l’affaire Al Kadi lorsque la Cour européenne de justice a déterminé qu’il existait un conflit potentiel entre une résolution du Conseil de sécurité et les droits fondamentaux du requérant, que la Cour a qualifiés de jus cogens.  Cela montre que des conflits entre les résolutions du Conseil de sécurité et le jus cogens peuvent survenir.  Il a donc espéré que le Conseil de sécurité veillera à ce que ses résolutions sur la lutte contre le terrorisme ne soient pas utilisées à mauvais escient par certains États Membres pour restreindre les libertés fondamentales des personnes, en particulier celles qui subissent une occupation étrangère et une domination étrangère. 

Mme OROSAN (Roumanie) a encouragé la CDI à reprendre l’échange traditionnel d’informations avec les organisations régionales, une tradition qui semble avoir été affectée pendant la pandémie de COVID-19.  Elle a notamment cité le dialogue que la CDI entretient avec le Comité des conseillers juridiques sur le droit international public du Conseil de l’Europe.  La représentante a ensuite salué l’inclusion dans le programme de travail de la Commission des thèmes « Règlement des différends internationaux auxquels des organisations internationales sont parties » et « Prévention et répression de la piraterie et des vols à main armée en mer ».  Par ailleurs, elle a réitéré la proposition de la Roumanie d’inclure dans le programme de travail actuel de la CDI le thème de la compétence universelle, estimant que son expertise aiderait la Sixième Commission dans son évaluation juridique de l’application de ce principe. 

Au sujet des normes impératives du droit international général, elle a affirmé que les projets de conclusions, bien que plutôt théoriques, offrent une aide méthodologique aux États pour déterminer si une norme en particulier a atteint le statut de jus cogens.  Cela dit, la représentante a montré des réserves sur différents sujets, y compris la conclusion 5 (Fondements des normes impératives du droit international général) et la conclusion 21 (Procédure recommandée) qui, malgré les assurances données dans le commentaire qu’elle ne crée pas une base pour la compétence de la Cour internationale de Justice (CIJ), est formulée d’une manière qui ne permet pas d’éviter une telle hypothèse.  Par ailleurs, bien qu’elle ne soit pas opposée à l’inclusion de la liste indicative des normes de jus cogens dans le produit final de la CDI, la déléguée a regretté le « manque d’ambition de la Commission », qui aurait dû s’efforcer d’inclure au moins toutes les normes qu’elle avait précédemment déterminées comme étant impératives. 

Enfin, la déléguée s’est penchée sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  L’adoption du projet de principes n’aurait pas pu être plus opportune, a-t-elle jugée, évoquant les conséquences pour l’environnement de l’agression russe en Ukraine.  De plus, la Roumanie est préoccupée par les dommages graves et durables causés à l’environnement dans le bassin de la mer Noire par le ciblage russe de l’industrie lourde et des installations énergétiques.  Ainsi, l’effort de la CDI pour systématiser le droit dans le domaine de la protection de l’environnement dans le contexte plus large d’un conflit armé reflète largement les réalités de la guerre moderne et sert les intérêts actuels des États, a-t-elle estimé.  La représentante a toutefois estimé que le projet aurait gagné en précision s’il avait inclus des dispositions portant spécifiquement sur les conflits armés non internationaux. 

M. SMOLEK (République tchèque) a jugé que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général permet de mieux comprendre le jus cogens.  Il a salué la méthode et la définition adoptées dans le projet.  Ces normes, a-t-il souligné, sont « le reflet des valeurs fondamentales de la communauté internationale ».  S’il a estimé que des doutes subsistent concernant le projet de conclusion 21 (Procédure recommandée), il a noté qu’il ne s’agit là que d’une pratique recommandée.  La République tchèque n’est pas convaincue par l’inclusion d’une liste des normes, a poursuivi le délégué.  Il a demandé que la CDI mentionne clairement les références aux normes impératives figurant dans ses autres travaux.  À ce titre, il a indiqué que les normes impératives font parfois l’objet de libellés différents et que leur portée n’est pas claire, à l’image de la prohibition de l’agression et du recours à la force.

Le délégué a également souligné la nécessité de renforcer le cadre juridique de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Le projet de principes constitue à cet égard une « contribution majeure ».  Ce projet complète d’autres initiatives dans ce domaine qui renforceront la protection de l’environnement, s’est-il réjoui.  Il a néanmoins regretté l’absence de division claire entre les règles acceptées et les efforts de la CDI visant au développement progressif du droit international.

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) s’est félicitée de l’inclusion de nouveaux sujets dans le programme de travail de la CDI.  Elle a estimé que le projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général est important et permet une systématisation de ce droit.  Elle a noté qu’il vise à résoudre les principaux problèmes du jus cogens et qu’il s’agit en cela d’un point de départ pour l’identification de telles normes.  Elle a en outre salué la liste non exhaustive annexée au projet.  La représentante a jugé qu’il aurait été utile de préciser quels types de résolutions, d’organisations et de conférences peuvent être utilisées comme preuve de l’existence d’une norme impérative.  Elle s’est notamment demandé si les organisations régionales pourraient remplir ces critères. 

Quant au projet de principes sur la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, la représentante a rappelé qu’il contient des dispositions d’une valeur normative différente, certaines ayant une valeur coutumière et d’autres contribuant au développement progressif du droit international.  Ces principes ne peuvent en tout état de cause créer de nouvelles obligations pour les États, a-t-elle affirmé.  Il faut également différencier les conflits armés internationaux et non internationaux.  La représentante a, enfin, appelé à une meilleure coopération entre la CDI et la Sixième Commission.

M. MORA FONSECA (Cuba) s’est dit préoccupé par le fait que la sécurité internationale, l’environnement et le développement durable de la planète sont gravement menacés par la possibilité latente de l’utilisation d’armes de destruction massive.  « Il serait très utile que la Commission se penche sur les effets néfastes du développement, du stockage et de l’utilisation des armes nucléaires sur l’environnement. »  Par ailleurs, le délégué a souligné l’importance d’un régime de responsabilité qui couvre la réparation des dommages, la reconstruction et l’indemnisation.  S’agissant des normes impératives du droit international général, il a appuyé l’étude du sujet par la CDI, estimant qu’il est important d’établir des éléments d’interprétation pour le jus cogens.  Il a toutefois rappelé que les travaux de la CDI devraient tenir compte de la pratique des États en tant qu’élément essentiel pour l’élaboration de ces normes.

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