En cours au Siège de l'ONU

Troisième Commission: accusations de politisation et alertes sur la détérioration des droits humains autour des résolutions de pays

Soixante-dix-septième session
52e & 53e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4369

Troisième Commission: accusations de politisation et alertes sur la détérioration des droits humains autour des résolutions de pays

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a entériné ce mercredi six projets de résolution, dont cinq portant sur la situation des droits humains dans des pays précis, un examen qui s’est fait au grand dam de plusieurs délégations qui ont dénoncé une politisation de la question des droits humains.  À l’inverse, d’autres États Membres ont saisi cette occasion pour alerter sur la détérioration de ces droits dans ces différentes régions du monde, notamment en République Islamique d’Iran ou au Myanmar.  

Ainsi, le Royaume-Uni a estimé que le projet de résolution sur la situation en République islamique d’Iran, adopté par 79 voix pour, 28 voix contre et 68 abstentions, arrivait à point nommé, compte tenu de la détérioration des droits humains dans le pays.  En vertu de ce texte, l’Assemblée générale se déclarerait gravement préoccupée par le fait que l’application effective de la loi relative au hijab et à la vertu que la police des mœurs iranienne s’emploie à faire respecter avec violence, porte fondamentalement atteinte aux droits humains des femmes et des filles.  En outre, elle engagerait vivement le pays à cesser de faire un usage excessif de la force, y compris la force létale, pour faire appliquer toute politique contraire aux droits humains des femmes et des filles et d’y recourir contre des manifestants pacifiques, « comme cela a été le cas après l’arrestation arbitraire de Mahsa Amini et sa mort en détention ». 

« Les femmes et les filles sont bien éduquées, dévouées, patriotes et conscientes de leurs droits », a rétorqué la délégation iranienne rejetant catégoriquement cette « soi-disant résolution », de la part de pays « hypocrites ».  Plusieurs délégations, telles que la Fédération de Russie ou la Chine, ont, elles aussi, dénoncé des résolutions politisées et une ingérence dans les affaires internes. 

Des critiques similaires ont également été soulevées lors de l’examen du projet sur la situation des droits humains en République arabe syrienne.  Il est ironique que les États-Unis présentent ce texte alors que « leur administration viole la Charte et se montre hostile envers la population syrienne, bombardant le pays », a dénoncé avec vigueur la délégation syrienne, qui a demandé un vote enregistré, tandis que le Brésil, à l’instar du Bélarus, a regretté l’opacité autour des négociations de ce texte.  

En vertu de ce projet, adopté par 90 voix pour, 14 contre, et 68 abstentions, l’Assemblée générale se déclarerait notamment inquiète de ce que la résolution relative à l’aide transfrontière ne prévoie qu’une prorogation de six mois, ce qui est considéré comme insoutenable et insuffisant, et engagerait instamment le Conseil de sécurité à renouveler le mécanisme transfrontalier d’ici à janvier 2023 et d’autoriser de nouveau l’accès par les points de passage de Bab el-Salam et Yaaroubiyé durant au moins 12 mois.  

Autre projet de résolution qui a partagé les délégations, le texte « Situation relative aux droits humains dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées », qui a été adopté par 78 voix pour, 14 voix contre et 79 abstentions, demande instamment à la Fédération de Russie de mettre fin à la conscription et à la mobilisation illégales des résidents de la Crimée dans les forces armées russes, ainsi qu’aux transferts forcés et à la déportation d’enfants ukrainiens vers la Fédération de Russie.  Ce projet de résolution constitue une tentative de l’Ukraine de « changer le cours des événements », a réagi la Fédération de Russie qui en a profité pour dénoncer la guerre économique que lui mènent 70 pays. 

Autre sujet de divisions, le projet sur la « Situation relative aux droits humains en République populaire démocratique de Corée » a cependant été adoptée par consensus.  En vertu de ce texte, l’Assemblée générale condamnerait les disparitions forcées de personnes, y compris de ressortissants d’autres pays, qui sont pratiquées à grande échelle et à titre de politique d’État et engagerait vivement le Gouvernement de la RPDC à nouer un dialogue constructif avec les parties concernées afin de régler d’urgence ces problèmes.  Elle engagerait également le pays à donner suite aux propositions d’assistance pour faire en sorte que les vaccins contre la COVID-19 soient rapidement acheminés et équitablement distribués en quantité suffisante.

Si la RPDC n’a pas demandé de vote, la délégation a abondamment critiqué le texte, dénonçant une « hostilité inutile » qui promeut l’ingérence sous couvert de la promotion des droits humains.  De nombreuses délégations, dont le Mouvement des pays non alignés, par la voix de l’Azerbaïdjan, ont d’ailleurs appelé à examiner la question des droits humains seulement dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme.  À l’inverse, la République de Corée s’est réjouie du consensus, accusant la RPDC de détourner des ressources à des fins de fabrication d’armes. 

Également adopté par consensus, le projet de résolution « Situation relative aux droits humains des musulmans rohingya et des autres minorités au Myanmar » a été appuyé par la délégation du Myanmar qui a cependant regretté que rien ne soit dit sur un embargo sur la vente d’armes, à l’image des États-Unis ou du Royaume-Uni.  Avec ce projet de résolution, l’Assemblée générale, exprimant sa profonde inquiétude quant au fait qu’il n’y a pas de véritables progrès dans la mise en œuvre du consensus en cinq points de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, condamnerait avec la plus grande fermeté toutes les violations des droits humains et atteintes à ces droits contre des civils, dont les musulmans rohingya et d’autres minorités au Myanmar, notamment celles commises avant et après la déclaration injustifiée de l’état d’urgence, le 1er février 2021, et sa prorogation ultérieure. 

Enfin, la Troisième Commission a adopté par consensus un projet de résolution par lequel elle se dit vivement préoccupée par l’insuffisance chronique du financement de l’aide humanitaire aux réfugiés et aux déplacés en Afrique.  

La Troisième Commission poursuivra l’examen de ses projets de résolution demain, jeudi 17 novembre à partir de 10 heures. 

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION

Déclaration générale

S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, Mme LEYLA NOVRUZ (Azerbaïdjan) a dénoncé la prolifération de résolutions spécifiques à certains pays à la Troisième Commission et au Conseil des droits de l’homme.  Ces résolutions exploitent les droits humains à des fins politiques et enfreignent les principes d’universalité, d’impartialité, d’objectivité et de non-sélectivité, a-t-elle affirmé.  À cette aune, la représentante a appelé à plus de cohérence et de complémentarité dans les travaux de la Troisième Commission et du Conseil des droits de l’homme, notamment en évitant les doublons et les chevauchements.  Elle a soutenu à cet égard que l’Examen périodique universel (EPU) est le principal mécanisme permettant d’évaluer les dossiers concernant les droits humains dans tous les pays.  Elle a rejeté la pratique actuelle du Conseil de sécurité qui consiste à traiter des questions des droits humains à la lumière de certains objectifs politiques.  Enfin, après avoir souligné l’importance de la tenue régulière de l’EPU au sein du Conseil des droits de l’homme, la déléguée a insisté sur la nécessité de traiter de ces questions de manière non politisée, sans confrontation, en s’appuyant sur le dialogue et en respectant la souveraineté nationale et la non-ingérence dans les affaires des États. 

Situations relatives aux droits humains et rapports des rapporteurs et représentants spéciaux

Aux termes du projet de résolution intitulé « Situation relative aux droits humains en République populaire démocratique de Corée » (A/C.3/77/L.32), présenté par la République tchèque au nom de l’Union européenne et adopté sans vote, l’Assemblée générale condamnerait dans les termes les plus vigoureux les violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits humains commises depuis longtemps et encore aujourd’hui en République populaire démocratique de Corée et par la République populaire démocratique de Corée. 

Le texte cite notamment les conditions inhumaines de détention; la violence sexuelle et fondée sur le genre; les exécutions sommaires et arbitraires; l’imposition de la peine de mort pour des motifs politiques et religieux; l’existence d’un vaste système de camps de prisonniers politiques; la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile expulsés ou refoulés vers la République populaire démocratique de Corée; ainsi que les restrictions généralisées et draconiennes, durcies encore par les mesures de lutte contre la COVID-19, imposées en ligne et hors ligne aux libertés de pensée, d’expression et de réunion, entre autres. 

Dans ce contexte, l’Assemblée générale se déclarerait très gravement préoccupée par le refus constant du Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée d’adresser une invitation au Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée et de coopérer avec lui. 

Par ailleurs, elle condamnerait les disparitions forcées de personnes, y compris de ressortissants d’autres pays, qui sont pratiquées à grande échelle et à titre de politique d’État et, à cet égard, engagerait vivement le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à nouer un dialogue constructif avec les parties concernées afin de régler d’urgence, avec bonne foi et de manière transparente, ces problèmes. 

L’Assemblée générale se déclarerait en outre très profondément préoccupée par la prévalence d’une malnutrition chronique et aiguë, en particulier parmi les personnes les plus vulnérables et exhorterait le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à coopérer avec les organismes donateurs internationaux et les organismes humanitaires et à les autoriser à se rendre auprès des personnes vulnérables afin d’appliquer des programmes d’aide humanitaire.  De même, elle engagerait vivement le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à donner suite aux propositions d’assistance pour faire en sorte que des vaccins contre la COVID-19 soient rapidement acheminés et équitablement distribués en quantité suffisante. 

Elle exhorterait aussi le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée à appliquer sans délai les recommandations de la Commission d’enquête, du Groupe d’experts indépendants et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. 

Déclarations et explications de position

Avant l’adoption du projet de résolution, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a condamné et réfuté catégoriquement ce texte « politisé », le qualifiant de « caricature » répétée chaque année et orchestrée par l’Union européenne.  La RPDC a déploré l’hostilité permanente à son égard, le projet de résolution ne représentant pas, selon elle, la réalité d’un pays qui s’emploie à respecter les libertés de son peuple.  Ce type de projet de résolution a provoqué beaucoup de souffrances au niveau international, notamment en promouvant l’ingérence sous couvert d’une promotion des droits humains, a dénoncé la délégation.  Des accusations de violation des droits humains ne peuvent justifier cette ingérence, a poursuivi la RPDC, qui a rejeté le projet de résolution au nom des principes dont se réclament les Nations Unies.  « Nous voulons participer aux efforts internationaux visant à protéger les droits humains dans le monde, mais nous n’acceptons pas que soit diffamé notre système social », a conclu la délégation en déplorant une « hostilité inutile ». 

Au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, le Venezuela a réaffirmé que l’examen de résolutions spécifiques à un pays, sans le consentement de l’État concerné, va à l’encontre des principes d’impartialité, d’objectivité, de transparence, de non-sélectivité, de non-politisation et de non- confrontation, mais aussi de l’esprit de la Charte des Nations Unies.  Une telle pratique compromet le développement de relations amicales entre les nations et la réalisation de la coopération internationale dans le domaine des droits humains, a-t-il fait valoir.  Dénonçant la prolifération de mécanismes unilatéraux qui prétendent faire une évaluation impartiale de la situation des droits humains dans certains États, la délégation a également rejeté la pratique actuelle du Conseil de sécurité qui consiste à aborder des questions dépassant son mandat, y compris les questions relatives aux droits humains, en vue de poursuivre les objectifs politiques de quelques États.  Convaincue que la « meilleure et unique façon » de garantir la réalisation du pilier « droits humains » de l’ONU est de renforcer le multilatéralisme, elle a estimé que l’Examen périodique universel (EPU), les organes de traité et les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme sont des plateformes qui offrent des opportunités importantes pour avancer vers cet objectif. 

Nombre de pays ont souhaité se dissocier du consensus sur ce texte, fustigeant un projet de résolution « contreproductif » et appelant à examiner la question des droits humains dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme.  Défendant cette position, Singapour a toutefois fait valoir que tout pays à l’obligation de promouvoir les droits humains et les libertés fondamentales.  L’Inde s’est, pour sa part, prononcée contre la mise en place d’un mécanisme ciblé, sans l’aval du pays concerné.  Elle a également déploré que l’accent soit mis sur certains enjeux des droits humains, ce qui, selon elle, va à l’encontre du mandat de la Troisième Commission, qui entend traiter tous les droits humains.  La Chine s’est dite hostile aux projets de résolution favorisant les divisions, arguant à son tour qu’on ne peut mettre en place des mécanismes de ce type sans l’aval du pays concerné, lequel a le droit de se développer comme il l’entend.  Regrettant en outre que le texte ignore les progrès réalisés par la RPDC dans le domaine des droits humains, elle a condamné les sanctions qui font souffrir le peuple de la RPDC.  Le Zimbabwe s’est associé à cette contestation du projet de résolution, tout en affirmant être déterminé à promouvoir les droits fondamentaux et le rôle crucial des Nations Unies via le Conseil des droits de l’homme. 

De son côté, la Fédération de Russie a dénoncé tout ingérence dans les affaires intérieures d’un État, affirmant partager la position de la RPDC sur ce « document politisé ».  Pour le Nicaragua, le projet de résolution ne fait écho ni aux préoccupations des autorités de la RPDC ni à celles de son peuple, qui essaie pourtant de se relever de la pandémie.  L’heure devrait plutôt être à la solidarité, a plaidé la délégation.  Plus généralement, la République islamique d’Iran a déploré « l’exploitation de la Troisième Commission à des fins politiques », avant de dénoncer les mesures coercitives unilatérales prises par les États-Unis contre la RPDC et de décrire l’EPU comme le seul mécanisme idoine d’examen des droits humains, rejointe sur ces points par l’Érythrée.  Ce projet de résolution méprise le principe de non-sélectivité, a renchéri le Bélarus, tandis que la République arabe syrienne avertissait qu’un tel texte, contraire à l’esprit de la Charte des Nations Unies, ne mènerait qu’à plus de confrontation.  Le Japon a quant à lui soutenu le projet de résolution, en se félicitant que la question des ressortissants japonais enlevés en RPDC y soit mentionnée.  Elle a appelé la RPDC à entendre cet appel de la communauté internationale. 

Après l’adoption, Cuba a dit se dissocier du consensus car elle n’appuie aucune résolution ne bénéficiant pas du soutien du pays concerné.  Dans le cas de la RPDC, c’est la « voie de la punition » qui a été choisie, a-t-elle dénoncé, estimant que cette résolution risque d’entraîner une « dangereuse ingérence » du Conseil de sécurité dans des questions pour lesquelles il n’a pas voix au chapitre.  La délégation a d’autre part réaffirmé son soutien à l’EPU au motif qu’aucun pays n’est à l’abri de violations des droits humains. 

Ce mécanisme permet d’engager une coopération respectueuse avec les pays concernés, a fait valoir le Viet Nam, avant d’exprimer sa compassion avec les familles concernées par des enlèvements et d’appeler toutes les parties à un dialogue constructif.  Coauteur du projet de résolution, le Royaume-Uni a affirmé que le texte vise à envoyer un message à la RPDC afin qu’elle fasse cesser les violations systématiques des droits humains sur son territoire.  Engageant la RDPC à discuter de manière constructive avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits humains dans le pays, la délégation a souligné que les mesures de restriction contre la COVID-19 ne sauraient être utilisées pour museler plus encore la population. 

La République de Corée s’est félicitée que le consensus sur ce texte démontre le soutien des Nations Unies à la question des droits humains en RPDC.  Elle a exhorté la RPDC à arrêter de fermer les yeux sur la détérioration des droits humains sur son sol, laquelle a empiré avec la pandémie.  Elle a par ailleurs accusé la RPDC de détourner des ressources à des fins de fabrication d’armes.  Enfin, les Philippines se sont dissociées du paragraphe 12 du dispositif de ce projet de résolution, qui fait référence à la Cour pénale internationale (CPI).  Rappelant que son pays s’est retiré du Statut de Rome en 2019, la délégation a cependant réaffirmé sa détermination à lutter contre l’impunité pour les crimes internes.

Situation relative aux droits humains des musulmans rohingya et des autres minorités au Myanmar

Par son projet de résolution intitulé « Situation relative aux droits humains des musulmans rohingya et des autres minorités au Myanmar » (A/C.3/77/L.33/Rev.1), présenté par l’Arabie saoudite, au nom de l’Organisation de la coopération islamique et de l’Union européenne, et adopté par consensus, l’Assemblée générale, exprimant sa profonde inquiétude quant au fait qu’il n’y a pas de véritables progrès dans la mise en œuvre du consensus en cinq points de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, condamnerait avec la plus grande fermeté toutes les violations des droits humains et atteintes à ces droits contre des civils, dont les musulmans rohingya et d’autres minorités au Myanmar, notamment celles commises avant et après la déclaration injustifiée de l’état d’urgence, le 1er février 2021, et sa prorogation ultérieure. 

Par ailleurs, l’Assemblée générale soulignerait qu’il importe de convenir d’un cessez-le-feu durable dans l’État rakhine et de le faire respecter, en demandant également à toutes les parties au conflit de coopérer davantage avec l’Organisation des Nations Unies et la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés.  En outre, elle se déclarerait profondément préoccupée par le fait que, malgré les mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de Justice le 23 janvier 2020, les musulmans rohingya du Myanmar, y compris des femmes et des enfants, continuent d’être victimes d’assassinats ciblés et d’actes de violence aveugle et de subir des blessures graves causées notamment par des tirs frappant sans discrimination, des bombardements, des mines terrestres ou des munitions non explosées. 

Avec cette résolution, l’Assemblée générale engagerait de nouveau le Myanmar ou l’armée du Myanmar, s’il y a lieu, à prendre des mesures urgentes telles que: mettre fin immédiatement à toutes les violences et à toutes les violations du droit international commises au Myanmar; assurer, par des mesures concrètes, le retour et la réintégration volontaires et durables, en toute sécurité et dans la dignité, des musulmans rohingya au Myanmar; coopérer avec l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, notamment en facilitant des visites au Myanmar sans qu’elles soient assorties de conditions; autoriser la reprise des visites des familles, accorder un accès immédiat, sans restrictions injustifiées, aux organismes internationaux compétents et des services médicaux aux détenus et dans les lieux de détention. 

Par ailleurs, elle estimerait que la crise multiforme persistante qui s’est déclenchée à la suite de la déclaration de l’état d’urgence le 1er février 2021, notamment les déplacements transfrontières et les retards prolongés enregistrés s’agissant du rapatriement des Rohingya, nuit gravement à la paix et à la stabilité de la région.  Elle engagerait la communauté internationale, agissant dans un véritable esprit d’interdépendance et de partage équitable des charges et des responsabilités, à aider le Bangladesh à apporter une assistance humanitaire aux réfugiés rohingya et aux personnes déplacées de force, et à aider à fournir une assistance au Myanmar, à toutes les personnes touchées appartenant à une communauté déplacée à l’intérieur du pays.

Explications de position

Avant l’adoption du projet de résolution, le Myanmar, tout en se félicitant de l’accent que met le texte sur les Rohingya, a estimé que le projet de résolution aurait pu mieux refléter la situation des droits humains « extrêmement douloureuse » qui ne cesse de se détériorer pour tous les habitants du Myanmar depuis le coup d’État militaire.  Il faut appeler la junte à rendre des comptes au sujet des atrocités commises, a souligné la délégation.  Elle a également relevé que le projet de résolution n’exige pas non plus un embargo sur la vente d’armes, et ceci alors que la junte continue de bombarder des écoles et des lieux publics.  Appelant à adopter une vision d’ensemble, elle a souligné que les résolutions de l’Assemblée générale, y compris de la Troisième Commission, peuvent jouer un rôle crucial.  Mais hélas, nous avons une fois de plus laissé passer cette occasion considérable, a-t-elle déploré.

La Tchéquie, au nom de l’Union européenne, a noté que le texte porte sur les atrocités commises pendant de trop nombreuses années contre les Rohingya et autres minorités, ainsi que sur les atrocités commises contre l’ensemble de la population depuis le coup d’État militaire.  Appelant urgemment à l’action, la délégation a condamné les exécutions à mort ayant visé quatre militants prodémocratie.  Enfin, elle a exhorté à la pleine mise en œuvre du consensus en cinq points de l’ASEAN. 

Les États-Unis ont dénoncé une « véritable catastrophe au Myanmar » depuis le coup d’État, appelant à des actions coordonnées, notamment sous la forme d’un embargo sur les armes.  Nous nous associons à toute proposition de texte qui condamne les ventes d’armes à ce régime, a indiqué la délégation. 

Le Canada, au nom d’un groupe de pays, a dénoncé une recrudescence de violence depuis le coup d’État, appelant la communauté internationale à faire cesser l’impunité qui prévaut pour la junte militaire.  La délégation a elle aussi appelé à cesser la vente de biens à double-usage et d’armes et a appelé la junte à nouer des contacts fructueux avec l’ASEAN. 

L’Indonésie, qui présidera l’ASEAN en 2023, a indiqué qu’elle continuera à faire son possible en faveur d’une solution durable, rappelant que pour l’ASEAN, le consensus en cinq points reste une référence.  La délégation a appelé à déployer des efforts pour permettre le retour des réfugiés rohingya au Myanmar, à fournir de l’aide humanitaire sans discriminations et a estimé indispensable la participation pleine et effective des femmes au renforcement institutionnel. 

La République islamique d’Iran a appelé le Myanmar à s’attaquer aux origines de la crise et à veiller au retour des réfugiés rohingya.  La situation au Myanmar rappelle que l’extrémisme est un terrain fertile pour les pires atrocités, a-t-elle estimé, se disant favorable au consensus autour de cette résolution. 

Le Royaume-Uni a déploré les souffrances indicibles de la population depuis le coup d’État militaire.  La délégation a indiqué qu’elle aurait souhaité que soit davantage mis en avant la question de la vente d’armes, ajoutant que le Royaume-Uni a imposé un embargo total à ce sujet. 

La Nouvelle-Zélande, dénonçant les récentes exécutions dans le pays, a appelé à favoriser les mesures qui permettrait à la Cour internationale de Justice d’être saisie de la situation au Myanmar. 

Suite à l’adoption du texte, Singapour a appelé le Myanmar à coopérer avec les agences des Nations Unies pour permettre le retour des réfugiés dans le pays.  Indiquant avoir apporté une aide humanitaire aux réfugiés avec l’ASEAN, la délégation a plaidé en faveur de la stabilité politique au Myanmar.  Ce n’est qu’ainsi qu’on pourra garantir la stabilité dans l’État rakhine, a insisté la délégation qui a déploré que le consensus en cinq points ne soit pas appliqué pleinement. 

La Thaïlande a estimé indispensable de ne pas perdre de vue les objectifs initiaux poursuivis par cette résolution, appelant à appliquer pleinement le consensus en cinq points. 

Les Philippines se sont dissociées de l’alinéa 23 du préambule et du paragraphe 2 du dispositif, ainsi que des paragraphes d’autres résolutions faisant référence à la Cour pénale internationale. 

Le Bélarus a estimé que les résolutions par pays vont à l’encontre du dialogue.  Cette résolution est un exercice futile qui n’aboutit pas au résultat escompté, a affirmé la délégation, appelant à trouver une approche plus constructive et indiquant se dissocier du texte. 

La Fédération de Russie, tout en estimant que la situation des Rohingya mérite l’attention de la communauté internationale, a jugé que la pression exercée sur la junte est futile.  Il faut une approche dépolitisée, a insisté la délégation, se dissociant ainsi du consensus. 

Le Bangladesh a rappelé que 1,2 million de réfugiés rohingya vivent sur le sol bangladais, un pays qui connaît déjà une très forte densité de population et qui est particulièrement vulnérable aux changements climatiques.  Cette situation est intenable, a alerté la délégation, plaidant en faveur d’un retour « d’une façon ou d’une autre ».  Rappelant qu’en cinq ans, aucun réfugié n’a pu rentrer, la délégation s’est félicitée que cette résolution continue de mettre l’accent sur les causes du conflit. 

La Malaisie s’est réjouie de l’adoption de cette résolution, saluant la reconnaissance du rôle crucial de l’ASEAN.  Les efforts de l’ASEAN devraient s’accompagner de mesures concrètes, notamment du Conseil de sécurité, a estimé la délégation.  Elle a regretté que certains de ses membres ne semblent pas partager ce même sentiment d’urgence pour régler le conflit au Myanmar.  Cela revient à fermer les yeux sur les atrocités, a fait valoir la délégation qui a appelé à mettre en œuvre le consensus en cinq points de l’ASEAN. 

La Chine a appelé la communauté internationale à respecter la souveraineté et l’indépendance politique du Myanmar, en promouvant le dialogue.  Elle a affirmé avoir fait tout son possible pour promouvoir des pourparlers de paix et a dit appuyer l’ASEAN sur ce dossier, tout en se dissociant du consensus.

Le Myanmar a indiqué appuyer le projet de résolution, appelant à garantir une assistance humanitaire à tous.  Mais il importe de noter que tous les efforts pour protéger les habitants du Myanmar seront en vain si on ne se penche pas sur les racines du problème et si les coupables –les militaires– ne rendent pas des comptes, a insisté la délégation.  Elle a appelé à compléter le texte par un autre projet tenant compte des atrocités commises.  Ce texte devrait également présenter les exigences de la communauté internationale, a-t-elle estimé, appelant les États Membres et l’ONU à prendre des mesures décisives pour mettre un terme à la dictature au Myanmar. 

Situation relative aux droits humains en République islamique d’Iran

Par le projet de résolution intitulé « Situation relative aux droits humains en République islamique d’Iran » (A/C.3/77/L.34), présenté par le Canada et adopté par 79 voix pour, 28 voix contre et 68 abstentions, l’Assemblée générale se déclarerait vivement préoccupée par la fréquence alarmante de l’imposition de la peine de mort et de l’augmentation notable du nombre d’exécutions de la peine de mort par la République islamique d’Iran, ainsi que par son application persistante aux mineurs et prierait instamment la République islamique d’Iran d’y mettre fin.  De même, elle exhorterait la République islamique d’Iran à mettre fin au recours généralisé et systématique aux arrestations et à la détention arbitraires, notamment au recours fréquent à cette pratique contre des personnes ayant une double nationalité ou des ressortissants étrangers, ainsi qu’à la pratique des disparitions forcées et de la détention au secret. 

En outre, elle demanderait à la République islamique d’Iran de remédier aux mauvaises conditions de détention, étant consciente des risques particuliers auxquels sont exposés les détenus durant la pandémie de COVID-19. 

Par ce texte, l’Assemblée générale engagerait vivement la République islamique d’Iran à éliminer, en droit et dans la pratique, toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles et autres violations de leurs droits humains.  Elle se déclarerait gravement préoccupée par le fait que l’application effective de la loi relative au hijab et à la vertu que la police des mœurs iranienne s’emploie à faire respecter avec violence, porte fondamentalement atteinte aux droits humains des femmes et des filles, y compris le droit à la liberté d’expression et d’opinion.  Elle engagerait vivement la République islamique d’Iran à cesser de faire un usage excessif de la force, y compris la force létale, pour faire appliquer toute politique contraire aux droits humains des femmes et des filles, ainsi que de recourir à la force, y compris la force létale entraînant la mort, contre des manifestants pacifiques, comme cela a été le cas après l’arrestation arbitraire de Mahsa Amini et sa mort en détention.  Elle réaffirmerait qu’il importe de diligenter des enquêtes approfondies, indépendantes, impartiales et transparentes dans tous ces cas afin que les responsables rendent des comptes. 

L’Assemblée générale exprimerait son inquiétude à l’égard du projet de loi du Gouvernement de la République islamique d’Iran concernant l’utilisation d’armes à feu lors de manifestations et demanderait son retrait.  Elle exhorterait aussi les autorités iraniennes à protéger les droits humains des personnes qui participent à des manifestations pacifiques, à envisager de revenir sur les peines excessivement sévères, y compris les peines capitales et les assignations à résidence de longue durée, et à mettre fin aux représailles contre les défenseurs des droits humains, y compris les défenseuses des droits humains. 

De même, elle demanderait instamment à la République islamique d’Iran de mettre fin aux violations du droit à la liberté d’expression et d’opinion, en ligne et hors ligne, notamment par le recours à des pratiques consistant à perturber l’accès à Internet, ou à des mesures visant à faire bloquer ou retirer illicitement ou arbitrairement des sites Web de médias et des réseaux sociaux.  Elle exhorterait aussi la République islamique d’Iran à retirer le projet de loi relatif à la protection des droits des utilisateurs du cyberespace, dans la mesure où son adoption porterait atteinte aux droits des individus en ligne. 

Déclarations et explications de vote

Avant le vote, la République islamique d’Iran a rejeté catégoriquement et condamné fermement la « soi-disant résolution » sur la situation des droits humains en Iran dans son intégralité car « rédigée sur la base du rapport biaisé du Rapporteur spécial ».  Ceux qui prétendent promouvoir les droits humains avec ce texte sont « hypocrites », dans la mesure où ils utilisent le système de « deux poids, deux mesures » pour leurs propres intérêts, a-t-elle dénoncé.  Aucun d’eux ne peut moralement prêcher pour les droits humains étant donné l’inadéquation de leurs actions avec leurs propos, a ajouté la délégation, non sans renvoyer à leurs propres crimes ces pays « aux visages de Janus », en particulier le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël et l’Allemagne.  Ces pays ont en commun « l’insensibilité, le génocide, l’arbitraire de leurs actions et le nettoyage ethnique », a-t-elle renchéri, les accusant en outre de diffuser de fausses informations sur l’Iran, d’inciter l’opinion publique au soulèvement, de soutenir des actions subversives et d’appuyer, y compris financièrement, des groupes terroristes, et ce en prétendant défendre les droits humains.  En Iran, a ajouté la délégation, les femmes et les filles sont bien éduquées, dévouées, patriotes et conscientes de leurs droits.  Elles savent aussi discuter avec le Gouvernement pour faire avancer leurs demandes.  Enfin, après avoir assuré que son pays reste attaché aux efforts internationaux pour promouvoir et protéger les droits humains, elle a demandé un vote sur ce texte et a appelé les États Membres à se prononcer contre. 

Le Venezuela a réitéré son adhésion à la déclaration du Mouvement des pays non alignés qui condamne la création de mécanismes et de mandats du Conseil des droits de l’homme sur la situation des droits humains dans des pays spécifiques.  Ces mécanismes et mandats créent, selon lui, des espaces de confrontation et ne contribuent pas à un dialogue constructif avec les États, ce qui est contraire à l’esprit dans lequel les Nations Unies ont été créées.  Il faut que cesse cet exercice mené contre l’Iran, a martelé Cuba en s’élevant contre la manipulation des dossiers relatifs aux droits humains, qui vise à faire avancer des intérêts politiques, discréditer des gouvernements légitimes ou justifier des actions de déstabilisation.  Appelant à un dialogue respectueux et constructif sur ces questions, elle a indiqué qu’elle votera contre ce projet de résolution.  Une position soutenue par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) qui a rejeté toute accusation politique de nature à faire tomber le gouvernement légitime de pays ciblés. 

Abondant dans le même sens, la Fédération de Russie a déploré, une fois de plus, le caractère contre-productif des résolutions politisées de pays.  Ces projets de texte n’ont rien à voir avec la protection des droits humains, a-t-elle affirmé, estimant que le fait de cataloguer des pays pour des raisons politiques, discrédite les organes des Nations Unies.  Qualifiant le document présenté de « compilation de mensonges, de fabrications et de désinformation », la délégation a fait remarquer que l’Iran fournit en temps voulu des informations exhaustives sur les mesures prises pour promouvoir et protéger les droits humains.  Les coparrains d’un tel « opus » devraient se concentrer sur la correction de leurs propres violations des droits humains, a-t-elle ajouté, pointant notamment le Canada, « auteur de ce grand chef-d’œuvre », qu’elle a accusé de se livrer à une discrimination systémique à l’égard des populations autochtones.  Sur cette même ligne, la République arabe syrienne a rappelé sa position inchangée s’agissant des résolutions de pays.  Ces textes politisés prétendent servir les droits humains mais sont en réalité dirigés contre certains pays, dans une approche de confrontation qui vise à les isoler, a-t-elle dénoncé.  L’Iran, a défendu la délégation, s’emploie à promouvoir les droits humains et a réaffirmé à maintes reprises sa coopération avec les mécanismes des droits humains des Nations Unies. 

Annonçant qu’elle votera contre ce texte, la Chine a rappelé qu’elle s’oppose à la politisation des enjeux liés aux droits humains ainsi qu’aux mécanismes visant certains pays en particulier sans leur aval.  À cette aune, elle a appelé à cesser d’interférer dans les affaires internes de ce pays.  Pour la délégation, la situation en Iran doit être analysée de façon impartiale et dans le respect du choix souverain du peuple iranien.  Il importe donc de lever sans plus attendre les mesures coercitives qui ont un impact direct et quotidien sur les droits humains des Iraniens, a-t-elle plaidé, regrettant que l’on ferme les yeux sur les violations des droits humains commis par les coauteurs du projet de résolution.  À son tour, le Pakistan a regretté que certains pays soient ciblés de manière sélective pour poursuivre des objectifs économiques ou stratégiques sous couvert des droits humains.  Une position appuyée par le Nicaragua, qui s’est dit opposé à toute politisation des enjeux des droits humains. 

Au contraire, cette résolution tombe à point nommé compte tenu de la détérioration des droits humains en Iran, a fait valoir le Royaume-Uni, qui a recommandé à tous les États Membres de voter en faveur de ce projet de texte.  De fait, depuis l’adoption l’an dernier de la résolution sur ce pays, la situation des droits humains n’a fait qu’empirer, ont constaté les États-Unis, appelant à des enquêtes impartiales et transparentes sur les actes imputables au Gouvernement iranien.  Pour sa part, la Nouvelle-Zélande a rappelé que son pays et l’Iran ont établi un dialogue bilatéral sur les droits humains en 2018 et ont tenu une première session en 2021.  Elle a toutefois indiqué que, l’évolution de la situation en Iran ces derniers mois, en particulier celle des femmes et des filles, ne lui a laissé d’autre choix que de réévaluer cette approche.  La délégation a précisé que son pays a depuis suspendu son dialogue bilatéral pour une durée indéterminée et qu’il coparraine à nouveau ce projet de résolution annuel.  Elle a d’autre part demandé instamment à l’Iran d’accélérer l’accès du Rapporteur spécial à son territoire.  À sa suite, l’Australie, coauteure du texte, a dit soutenir les femmes et les jeunes filles iraniennes dans leur lutte pour l’égalité et l’autonomisation, faisant part de sa préoccupation sur les circonstances entourant la mort de Mahsa Amini.  Elle a également condamné l’usage disproportionné de la force contre les manifestants suite à la mort de la jeune femme. 

Après le vote, l’Union européenne a exprimé sa profonde inquiétude et sa tristesse à la suite du décès de nombreux jeunes et manifestants, dont Mahsa Amini, qui a été maltraitée et est morte en détention aux mains de la police des mœurs.  La délégation a, en outre, déploré qu’en dépit des appels répétés à la retenue, la réponse des forces de sécurité et de police iraniennes aux manifestations ait été disproportionnée et ait entraîné la perte de vies humaines.  L’UE a demandé une nouvelle fois à l’Iran d’autoriser une enquête impartiale, transparente et approfondie sur le recours à la violence par les forces de sécurité iraniennes en réaction aux récentes manifestations.  Elle a aussi engagé les autorités iraniennes à respecter strictement les principes énoncés dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel l’Iran est partie.  Enfin, elle s’est déclarée gravement préoccupée par l’augmentation notable des exécutions en Iran.  La France a, elle, réaffirmé son soutien au travail du Rapporteur spécial.  Ce projet de résolution décrit de manière factuelle les récentes violations et détentions arbitraires à l’égard des manifestations, a souligné la délégation, qui s’est alarmée de l’aggravation d’une situation « déjà préoccupante ».  L’Allemagne, elle aussi coauteure de ce texte, a ensuite annoncé que, la semaine prochaine, elle présentera avec l’Irlande devant le Conseil des droits de l’homme un projet de résolution qui met l’accent sur le droit de manifester librement et demande la mise sur pied d’une mission d’établissement des faits en Iran.  Il faut que l’Iran respecte les droits humains des femmes, a quant à elle martelé la Norvège

Le Mexique, qui a voté en faveur du texte, a salué le fait que le projet de résolution cherche à équilibrer les progrès accomplis en Iran, tout en reconnaissant les défis qui persistent ou qui sont exacerbés.  Dans le même temps, la délégation a appelé à examiner sans partialité d’autres situations relatives aux droits humains dans les forums pertinents, dès lors que les violations documentées sont évidentes.  Le Panama a, lui, simplement indiqué qu’il a voté pour le projet de résolution.  L’Arabie saoudite l’a imité en se disant convaincue de son importance.  Elle a cependant signalé que certains paragraphes ne doivent pas être interprétés comme étant contraires à la charia, en particulier les paragraphes 15 et 24 du dispositif.  La délégation a fait valoir, à cet égard, que des millions de femmes portent volontairement le hijab et que cela fait partie de leur conviction.  De même, s’agissant du paragraphe 9 du dispositif, elle a réitéré que tout État a le droit souverain d’appliquer la peine capitale. 

Rebondissant sur cette question, Singapour a rappelé que la Troisième Commission a adopté, la semaine dernière et avec un nombre record de voix, un amendement au projet de résolution relatif au moratoire sur l’application de la peine de mort, qui réaffirme le droit souverain de tous les États de déterminer leur propre système juridique, y compris les sanctions à appliquer dans le cadre du droit international.  La délégation a, par conséquent, estimé qu’il n’est « ni utile ni propice » de rouvrir la question du moratoire à chaque fois que l’on évoque des points en Troisième Commission.  Par ailleurs, elle a indiqué s’être abstenue, comme à l’accoutumée, sur le projet de résolution concernant la situation des droits humains en Iran.  Le Nigéria, qui s’est également abstenu, en raison de la sélectivité du texte, a néanmoins dénoncé l’usage excessif de la force en Iran, demandant aux autorités de ce pays de faire en sorte que les auteurs de ces actes violents rendent des comptes.  De son côté, le Bélarus a jugé inacceptable l’adoption de résolutions spécifiques à des pays sans que ces derniers aient donné leur aval.  Dénonçant à son tour cette ingérence flagrante dans les affaires de ces pays, elle a estimé que la question des droits humains ne pourra progresser que si l’on privilégie le dialogue. 

Situation relative aux droits humains dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées

Par le projet de résolution « Situation relative aux droits humains dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées » (A/C.3/77/L.35), présenté par l’Ukraine et adoptée par 78 voix pour, 14 voix contre et 79 abstentions, l’Assemblée générale exigerait que la Fédération de Russie cesse immédiatement son agression contre l’Ukraine et retire sans condition toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues du pays. 

En outre, elle demanderait instamment à la Fédération de Russie de mettre immédiatement fin à toutes les violations des droits humains et du droit international humanitaire et atteintes à ces droits commises contre les résidents de la Crimée temporairement occupée; de mettre fin à la conscription et à la mobilisation illégales des résidents de la Crimée dans les forces armées de la Fédération de Russie, et de cesser d’exercer des pressions visant à astreindre les résidents de la Crimée à servir dans les forces armées ou auxiliaires de la Fédération de Russie. 

De même, elle demanderait instamment à la Fédération de Russie de revenir immédiatement et sans condition sur sa décision relative à la simplification de la procédure d’obtention de la citoyenneté russe pour les orphelins ukrainiens et les enfants ukrainiens privés de protection parentale; de mettre fin aux transferts forcés et à la déportation d’enfants ukrainiens vers la Fédération de Russie et de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de leur retour en toute sécurité et du regroupement familial, conformément au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et au droit international. 

Elle condamnerait également toutes les démarches faites par la Fédération de Russie pour essayer de légitimer ou de normaliser sa tentative d’annexion illégale de la Crimée et d’autres territoires ukrainiens, notamment l’imposition automatique de la citoyenneté de la Fédération de Russie, les campagnes électorales et les scrutins illégaux, le recensement de la population, la modification forcée de la structure démographique et la privation de l’identité nationale. 

Enfin, l’Assemblée générale déciderait d’inscrire à son ordre du jour la question intitulée « La situation dans les territoires ukrainiens temporairement occupés » jusqu’à ce que la suite qu’il convient, soit donnée aux violations résultant de l’occupation et du contrôle d’une partie du territoire ukrainien par une puissance étrangère et que l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues soit entièrement rétablie. 

Déclarations et explications de vote

Avant le vote, la Tchéquie, s’exprimant au nom de l’Union européenne, a dénoncé les violations des droits humains commises par la Russie en Crimée et dans les autres territoires occupés en Ukraine.  Elle a aussi condamné l’interdiction faite aux enquêteurs internationaux chargés des droits humains d’accéder au territoire de la Crimée et appelé à voter en faveur de la résolution. 

L’Iran a rejeté les résolutions sur la situation des droits humains dans des pays précis et appelé à voter contre le projet de résolution. 

Le Royaume-Uni a dénoncé les violations des droits humains commises par la Russie en Crimée, notamment contre la minorité des Tatars, ainsi que la conscription forcée de citoyens ukrainiens dans les forces armées russes. 

Appelant à voter pour le projet de résolution, la Géorgie s’est dite alarmée par les discriminations, tortures, enlèvements et conscription illégale dont sont victimes les habitants de Crimée. 

S’opposant au projet de résolution, le Venezuela a rejeté les mandats sur les situations relatives aux droits humains dans des pays spécifiques et a estimé qu’elles devaient être effectuées exclusivement dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU). 

Dans une déclaration générale, l’Azerbaïdjan a appelé à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine en vertu de la Charte des Nations Unies et des résolutions pertinentes. 

Rejetant le projet de résolution, la République populaire démocratique de Corée a dénoncé le « deux poids, deux mesures » et la politisation qui le sous-tendrait. 

La Fédération de Russie a estimé que le projet de résolution n’avait rien à voir avec les droits humains et constituait une tentative de l’Ukraine de « changer le cours des événements ».  Elle a affirmé que, ce texte avait par le passé renforcé le sentiment d’impunité de Kiev qui promouvait des politiques de haine contre sa propre population.  Elle a souligné que, les territoires concernés étaient russes et dénoncé la guerre économique que lui mènent 70 pays. 

Les États-Unis ont dénoncé des tentatives de « russification forcée » en Crimée comme dans d’autres territoires ukrainiens.  La Crimée c’est l’Ukraine, a martelé la délégation, s’inquiétant notamment du sort des Tatars. 

À l’issue du vote, le Qatar a expliqué avoir voté en faveur du projet de résolution car il se base sur la Charte des Nations Unies et sur le droit international, le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire. 

Expliquant pourquoi il avait voté contre, le Kazakhstan a estimé que le projet de résolution n’était pas propice au dialogue ni à la résolution de la crise et qu’en parlant d’annexion, elle allait au-delà des compétences de la Commission. 

Rappelant sa position de principe concernant les résolutions dédiées à des situations spécifiques, Singapour a expliqué s’être abstenue concernant ce projet de résolution.  Cela ne présume pas de notre position sur le conflit, a indiqué la délégation qui a rappelé avoir voté pour toutes les résolutions de la session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale. 

La Syrie a dénoncé une attaque contre la Russie et une instrumentalisation des droits humains à des fins politiques.  Ce projet de résolution avait fait perdre du temps et des ressources à l’ONU, a estimé la délégation qui a précisé avoir voté contre le texte.

S’opposant au « deux poids, deux mesures » et à la confrontation, la Chine a expliqué avoir voté contre le projet de résolution.  Elle a demandé que les mécanismes des droits humains soient utilisés en collaboration avec le pays concerné. 

Situation des droits humains en République arabe syrienne

Par le projet de résolution intitulé « Situation des droits humains en République arabe syrienne » (A/C.3/77/L.36/Rev.1), présenté par les États-Unis et adopté par 90 voix pour, 14 voix contre et 68 abstentions, l’Assemblée générale condamnerait fermement les violations systématiques, généralisées et flagrantes du droit international des droits de l’homme, les atteintes à ce droit et les violations du droit international humanitaire commises en République arabe syrienne. 

Elle exhorterait tous les États Membres à créer les conditions propices à la poursuite des négociations en vue d’un règlement politique du conflit dans le pays sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies, et demanderait instamment à toutes les parties de collaborer véritablement aux travaux de la Commission constitutionnelle. 

Par ce texte, l’Assemblée générale condamnerait vigoureusement l’emploi d’armes chimiques en République arabe syrienne, et exigerait du régime syrien qu’il s’acquitte pleinement de ses obligations internationales, y compris celle de déclarer l’intégralité de son programme d’armes chimiques.  En outre, elle condamnerait dans les termes les plus énergiques les atteintes flagrantes et systématiques aux droits des femmes et des enfants commises par les groupes terroristes et armés, y compris l’EIIL (également appelé Daech). 

Elle déplorerait par ailleurs que les points de passage de Bab el-Salam et Yaaroubiyé restent fermés à l’acheminement transfrontalier de l’aide humanitaire, se déclarerait inquiète de ce que la résolution relative à l’aide transfrontière ne prévoit qu’une prorogation de six mois, ce qui est considéré comme insoutenable et insuffisant, et engagerait instamment le Conseil de sécurité à renouveler le mécanisme transfrontières d’ici à janvier 2023 et d’autoriser de nouveau l’accès par ces points de passage frontaliers durant au moins 12 mois. 

En outre, l’Assemblée générale condamnerait fermement le recours constant et généralisé à la violence et aux atteintes et à l’exploitation sexuelles et fondées sur le genre, notamment dans les centres de détention de l’État.  De même, elle se déclarerait profondément préoccupée par le fait que, d’après les conclusions récentes de la Commission d’enquête, les forces du régime syrien continuent délibérément de garder le silence sur le sort des personnes disparues, 

Enfin, elle condamnerait vigoureusement toutes les attaques contre les personnes blessées ou malades et contre les membres du personnel médical, sanitaire et humanitaire, les installations et les moyens de transport et le matériel, ainsi que les attaques indiscriminées et disproportionnées contre les civils, les biens de caractère civil, les écoles et les points de ravitaillement en eau, qui sont perpétrées en République arabe syrienne et peuvent être constitutives de crimes de guerre, ainsi que le refus délibéré de l’apport d’une aide humanitaire aux civils.  Elle exigerait du régime syrien qu’il s’acquitte de sa responsabilité de protéger la population syrienne. 

Déclarations et explications de vote

Avant l’adoption du projet de résolution, la République islamique d’Iran a annoncé son intention de voter contre ce texte, déplorant que les États-Unis et d’autres pays utilisent les mécanismes des droits humains des Nations Unies pour servir leurs propres intérêts géostratégiques.  Pour la délégation, le contenu du texte est non seulement « partial » mais va au-delà du mandat de la Troisième Commission.  De plus, a-t-elle encore regretté, la coopération de la Syrie avec les Nations Unies et sa lutte acharnée contre le terrorisme, en dépit des mesures coercitives unilatérales et des frappes de pays expansionnistes, ne sont nullement mentionnées dans le projet de résolution. 

Le Royaume-Uni a jugé essentiel que les Syriens concernés obtiennent du « régime » des réponses quant à leurs proches portés disparus.  Il a d’autre part déploré la dégradation de la situation des droits humains en Syrie ces derniers mois, comme le confirme les nombreux cas signalés de détention arbitraire, de torture et de violence sexiste et sexuelle.   La délégation a également souligné que les résolutions de pays ne sont présentées que pour ceux qui commettent les violations les plus graves.  En adoptant le texte sur la situation des droits de l’homme en Syrie, la communauté internationale peut demander des comptes au « régime syrien » et exiger qu’il respecte ses obligations, a-t-elle soutenu.  Une position partagée par le Canada, selon lequel ce texte vient rappeler au « régime syrien » que le monde regarde ses agissements, tout en exprimant sa solidarité au peuple syrien éprouvé.  La délégation canadienne s’est d’autre part inquiétée du sort des personnes portées disparues en Syrie et a salué la déclaration faite à ce sujet par le Secrétaire général en août dernier. 

Le Venezuela a, pour sa part, indiqué qu’il votera contre ce projet de résolution, étant opposé à la politisation des droits humains et à la création de mécanismes et de mandats sans le consentement des États concernés.  Le pays a appelé à poursuivre les efforts entrepris par le Conseil des droits de l’homme pour la paix en Syrie et a salué le rôle de l’EPU à cet égard.  Sur la même ligne, la Chine a fait observer que les pays occidentaux ne sont « pas étrangers aux souffrances syriennes », mentionnant les interventions armées, les mesures coercitives unilatérales et le contrôle des ressources pétrolifères et gazières auxquels se livrent les États-Unis en Syrie.  Les interférences étrangères et les sanctions ne font qu’aggraver la crise syrienne, a dénoncé la délégation, selon laquelle un règlement politique est la seule issue possible au conflit, à condition qu’il se fasse dans le respect de la souveraineté de la Syrie.  De son côté, Cuba a trouvé préoccupant que ce type de résolution ne concerne que des pays en développement.  Selon elle, ce texte ne contribuera pas à un règlement politique du conflit, pas plus qu’il n’empêchera la violation de l’intégrité territoriale de la Syrie.  Si l’on veut la paix, il faut en finir avec les procédures politisées telles que celle du présent projet de résolution, a préconisé la délégation, rejointe dans son argumentation par la République populaire démocratique de Corée, qui a salué les efforts du Gouvernement syrien face aux ingérences étrangères. 

Pour la Fédération de Russie, le projet de résolution s’appuie sur des mensonges proférés par des opposants au Gouvernement syrien.  De surcroît, ce texte est « cynique », car son principal auteur, les États-Unis, s’est rendu coupable d’une agression militaire en Syrie sous couvert de l’article 51 de la Charte des Nations Unies, pille les ressources naturelles de territoires qu’il occupe et a mis en place des sanctions qui asphyxient les zones non occupées.  Déplorant la situation humanitaire, l’Arabie saoudite a, elle, indiqué qu’elle votera en faveur du texte, au nom de la « solution politique » et sur la base de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et du processus constitutionnel mené à Genève. 

Prenant à son tour la parole, la République arabe syrienne a trouvé ironique que les États-Unis présentent un projet de résolution sur les droits humains en Syrie, alors que leur administration viole la Charte des Nations Unies et se montre hostile envers la population syrienne, comme en attestent les bombardements opérés sur le pays, et notamment sur la province de Raqqa.  Elle a aussi regretté de n’avoir pu accéder au contenu du projet en ligne que tardivement, le texte ayant, selon elle, été rédigé « en catimini ».  La délégation a dénoncé les mensonges, l’instrumentalisation des instances des Nations Unies, l’intimidation et le chantage sur lesquels est fondé le projet de résolution.  Celui-ci, en outre, entrave gravement sur les prérogatives d’autres organes de l’ONU, a-t-elle dénoncé.  « Profondément politisé », ce texte omet tout ce que le Gouvernement syrien a accompli contre le terrorisme, ainsi que les impacts délétères des mesures coercitives unilatérales sur la population civile.  Ce projet de résolution entend « redorer le blason » des terroristes recrutés dans le monde entier et ensuite qualifiés d’« opposition  », a poursuivi la délégation.  De plus, le texte est le même que celui de l’an dernier, « même les chiffres sur le nombre de morts dans le conflit n’ont pas été changés », a-t-elle relevé.  Au nom des principes de non-sélectivité et d’objectivité, elle a déclaré rejeter catégoriquement ce projet de résolution et a demandé un vote. 

Après le vote, l’Union européenne s’est alarmée de l’augmentation de la violence en Syrie, comme cela a été rapporté la semaine dernière.  Réaffirmant que toute solution durable au conflit passe par une véritable transition politique, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, elle a réitéré son appel pressant au « régime syrien », à ses « parrains » et à toutes les parties pour qu’ils s’engagent pleinement et de bonne foi dans le processus politique mené par la Syrie.  Cette crise, dans laquelle une multitude d’acteurs étatiques et non étatiques sont impliqués, continue d’avoir de profondes répercussions sur la stabilité globale de la région, a averti la délégation, tout en condamnant les violations graves du droit international, notamment par le « régime syrien » et ses alliés, mais aussi par d’autres parties au conflit, qui peuvent s’apparenter, à ses yeux, à des crimes de guerre et à des crimes contre l’humanité.  « Nous sommes gravement préoccupés par les informations faisant état d’une ingénierie sociale et démographique et de vagues massives de déplacements, commises par toutes les parties au conflit, y compris dans certaines parties du Nord-Ouest et du Nord-Est »», a-t-elle dénoncé.  Pour finir, la délégation a exigé de toutes les parties au conflit, en particulier du « régime syrien », qu’elles autorisent un accès sûr, complet, rapide, sans entrave et durable, tant au niveau transfrontalier que transnational. 

Il importe de soutenir les efforts visant à obliger les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité à rendre des comptes, a ensuite pressé le Royaume-Uni en réaffirmant son soutien à cette résolution qui expose les « préoccupations communes » de la communauté internationale et exhorte la Syrie à améliorer son « effroyable bilan » en matière de droits humains.  Dans une déclaration d’ordre général, le Japon, coauteur du texte, s’est quant à lui inquiété du sort des personnes disparues en Syrie.  Il a salué les recommandations du Rapporteur spécial sur cette question, avant d’appeler la communauté internationale à appuyer les recherches des personnes disparues et le soutien apporté aux victimes.  Une approche également défendue par l’Argentine et le Brésil, ce dernier se félicitant de l’ajout d’un paragraphe sur la situation des personnes disparues dans le projet de résolution.  En revanche, la délégation brésilienne a regretté l’opacité qui a, selon elle, entouré la négociation du texte.  Un reproche repris par le Bélarus, qui a dénoncé un document « inacceptable », préparé par « on ne sait qui » et qui ne fait que renforcer la confrontation. 

Conformément à sa position de principe sur les résolutions de pays, Singapour a dit s’être abstenu sur ce texte, au motif qu’il est « motivé politiquement ».  Quant à la Türkiye, elle a indiqué s’être prononcée en faveur de ce projet de résolution qui, selon elle, traite d’une « question essentielle » pour ce qui est de la protection des droits humains.  La délégation s’est par ailleurs inquiétée de la situation sécuritaire dans le Nord de la Syrie, où le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) mène une centaine d’attaques terroristes par mois.  Selon la délégation, le récent attentat qui a fait six morts et plusieurs dizaines de blessés à Istanbul est un autre exemple des menaces que fait peser le PKK pour l’intégrité territoriale de la Syrie et de la Türkiye. 

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, la République islamique d’Iran a regretté la politisation du débat et a qualifié le texte la concernant de « charade » élaborée par des coauteurs qui prétendent défendre les droits humains.  Les États-Unis, seul pays qui n’est pas parti de la Convention relative aux droits de l’enfant, qui n’a pas ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, et qui n’est pas parti au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, n’ont pas à nous donner des leçons sur cette question, a estimé la délégation.

De même, le Canada, « défenseur de l’apartheid et du nettoyage ethnique dans les écoles », ne peut se permettre de lancer une campagne visant à entacher l’Iran.  Certes nous ne sommes pas parfaits, a reconnu la délégation, mais nous ne reconnaissons pas la perfection que ces pays prônent.  La délégation a également tancé le Royaume-Uni et l’Arabie saoudite, invitant cette dernière à se comporter de manière plus responsable.  Pour finir, l’Iran a qualifié le projet de résolution d’arnaque « pure et simple ».

Le représentant du Canada a souhaité répondre aux allégations de violations continues des droits humains des peuples autochtones qui sont portées contre son pays.  Parlant d’une « cicatrice », il a assuré que le Canada s’emploie à régler ces problèmes.  Le Premier Ministre du Canada a reconnu ces faits à de nombreuses reprises et le Gouvernement s’est engagé à transformer ses liens avec les peuples autochtones sur la base de la reconnaissance, du respect, de la coopération et du partenariat, a-t-il précisé, ajoutant qu’en 2008, le Parlement canadien a exprimé des excuses historiques pour les actes haineux commis contre ces populations.  Nous sommes prêts à ouvrir une enquête avec une commission vérité et réconciliation, notamment sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées, en mettant les victimes au centre de ces efforts, a déclaré le délégué, selon lequel le Canada se présente devant le Conseil économique et social (ECOSOC), la Troisième Commission et le Conseil des droits de l’homme sans vouloir contourner la question.  Nous ne refusons pas l’entrée au Canada des titulaires de mandat et nous ne suggérons pas qu’il y a partialité, sélectivité ou politisation, a-t-il ajouté.  Nous essayons de répondre à des questions difficiles sans passer par la pratique des fausses accusations, s’est encore justifié le représentant, tout en indiquant que ces défis n’empêchent pas son pays de tenir les autres États Membres responsables des obligations qu’ils ont souscrites volontairement.  

Rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, questions relatives aux réfugiés, aux rapatriés et aux déplacés et questions humanitaires

Selon les termes du projet de résolution « Aide aux réfugiés, aux rapatriés et aux déplacés d’Afrique » (A/C.3/77/L.55), présenté par la Libye, au nom du Groupe des États d’Afrique, et adopté par consensus, l’Assemblée générale demanderait aux États d’Afrique qui n’ont pas encore signé ou ratifié la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique d’envisager de le faire dès que possible, afin qu’elle puisse être appliquée à plus grande échelle. 

Elle noterait avec une grande inquiétude que, malgré l’action entreprise à ce jour par l’Organisation des Nations Unies, l’Union africaine et d’autres, la situation des réfugiés et des déplacés demeure précaire en Afrique et le nombre de ces personnes a augmenté dans des proportions considérables.  Sachant que les conflits armés sont l’une des principales causes des déplacements forcés sur le continent, elle demanderait aux États et aux autres parties à des conflits armés d’observer scrupuleusement la lettre et l’esprit du droit international humanitaire, de respecter et de faire respecter celui-ci. 

Elle considérerait que la pandémie de COVID-19 appelle à une action mondiale visant à garantir à tous les États, en particulier les États en développement, y compris les pays d’accueil des réfugiés ainsi que les pays d’origine, un accès universel, rapide, effectif, de qualité et équitable à des moyens de diagnostic, des traitements, des médicaments, des vaccins et des fournitures et du matériel médicaux sûrs et efficaces, et demanderait aux États et aux autres partenaires de contribuer d’urgence au financement et de réfléchir plus avant à des mécanismes de financement novateurs qui permettraient d’assurer l’accès aux vaccins contre la COVID-19 à tous, y compris les personnes relevant de la compétence du Haut-Commissariat pour les réfugiés et les populations d’accueil. 

Par ce texte, l’Assemblée générale condamnerait tous les actes qui, comme le refoulement, les expulsions illégales et les violences, risquent de porter atteinte à la sécurité personnelle et au bien-être des réfugiés et des demandeurs d’asile.  Elle demanderait instamment à la communauté internationale de répondre favorablement, dans un esprit de solidarité et de partage des charges et des responsabilités, aux besoins des réfugiés africains se réinstallant dans un pays tiers.  Par ailleurs, elle se dirait vivement préoccupée par l’insuffisance chronique du financement de l’aide humanitaire aux réfugiés et aux déplacés en Afrique. 

Explication de position

Suite à l’adoption du texte, la Hongrie s’et dissociée du paragraphe 4 du projet de résolution qui contient des références au pacte mondial sur les réfugiés qu’elle ne reconnaît pas. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité débat de la crise que connaît le G5 Sahel et des moyens d’y remédier dans un environnement de sécurité difficile

9194e séance - matin
CS/15108

Le Conseil de sécurité débat de la crise que connaît le G5 Sahel et des moyens d’y remédier dans un environnement de sécurité difficile

Le Conseil de sécurité a débattu, ce matin, de la « crise » que connaît le G5 Sahel, selon l’expression de la France, dans un contexte de détérioration constante de la situation sécuritaire dans la région.  Le retrait du Mali du G5 Sahel et de sa Force conjointe, en mai dernier, et le manque de ressources financières ont été évoqués par les intervenants, qui ont proposé des pistes pour y remédier.  Les délégations ont ainsi dit attendre avec impatience les recommandations du Groupe de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel dirigé par l’ancien Président du Niger, M. Mahamadou Issoufou.

Première intervenante à s’exprimer, la Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de la consolidation de la paix, et des opérations de paix, Mme Martha Ama Akyaa Pobee, a jugé regrettable que la Force conjointe du G5 Sahel, en plus de ses difficultés financières, ait été fragilisée par le retrait du Mali.  Elle a ajouté que le deuxième coup d’État au Burkina Faso en septembre avait également eu une incidence négative sur la capacité opérationnelle de la Force et a sapé la cohésion régionale. 

L’élaboration d’un nouveau concept d’opérations de la Force, qui prendrait en compte la situation humanitaire et sécuritaire, le retrait du Mali, ainsi que les opérations bilatérales menées par les États voisins, est envisagée, a ajouté la Sous-Secrétaire générale, qui a plaidé pour « une approche collective repensée » allant au-delà des efforts existants, en appelant les acteurs de la région à resserrer leur coopération, comme l’ont récemment fait le Mali et le Burkina Faso.

Le Secrétaire exécutif du G5 Sahel, M. Éric Tiaré, a souligné que le retrait du Mali avait plongé l’organisation sous-régionale dans une crise institutionnelle marquée aussi par la suspension du soutien de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) aux opérations de la Force conjointe et l’impossibilité de réaliser des opérations communes.

M. Tiaré a insisté sur l’urgence d’accorder le plus grand soutien au G5 Sahel, « parce qu’il est impensable d’imaginer une lutte contre le terrorisme qui ne partirait pas du Sahel central pour éviter, voire limiter son expansion vers les pays du golfe de Guinée ».  À ses yeux, la réalité indique que l’heure est grave et qu’en l’absence de réaction rapide et urgente, il faut craindre une plus grande menace sur la paix et la sécurité internationales. 

La résilience des groupes armés terroristes et l’absence de moyens rend la lutte contre le terrorisme « irréaliste et insoutenable », a, de son côté, déclaré M. Zakaria Ousman Ramadan, représentant de la société civile.  M. Ramadan a en outre souligné la faiblesse institutionnelle et le rôle « partiellement dysfonctionnel » des Forces de sécurité nationales.  La fin de l’opération Barkhane notamment impose de revoir le dispositif opérationnel de la Force conjointe, a-t-il estimé, en ajoutant que l’arrivée de la Russie sur le théâtre des opérations, notamment au Mali via le groupe militaire privé Wagner, complique la coopération.

Face à cette situation, les délégations ont misé sur les recommandations du Groupe de haut niveau pour proposer des « voies innovantes » aux défis sécuritaire, de développement et de gouvernance de la région, selon l’expression de Mme Pobee.  Le Royaume-Uni a dit attendre avec impatience les résultats de l’évaluation stratégique du Groupe, ainsi que les discussions à venir sur l’Initiative d’Accra, qui aideront à identifier la meilleure façon de travailler pour soutenir la sécurité régionale.  La France a jugé cette évaluation nécessaire pour faire le bilan des efforts menés jusqu’ici et proposer des solutions innovantes.  « Le but n’est pas de réinventer la roue, ou d’introduire une nouvelle stratégie pour le Sahel, mais de faire fond sur ce qui existe déjà: le G5 Sahel, l’Initiative d’Accra, le Processus de Nouakchott ou encore les efforts de la CEDEAO », a estimé la Norvège.

La Fédération de Russie a estimé que les problèmes de sécurité actuels du Sahel étaient la conséquence de nombreuses années de problèmes non résolus et de tentatives visant à transformer le Sahel en un autre champ de confrontation géopolitique.  Elle a déclaré que l’aide internationale aux États du Sahel devait être fondée sur le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures, le respect de la souveraineté et le principe de « solutions africaines aux problèmes africains ». 

La France a rappelé la nécessité de financements durables et prévisibles des opérations africaines de paix, « y compris sur contributions obligatoires des Nations Unies, ou dans le cadre d’un mécanisme innovant qui les associerait à des contributions bilatérales ».  Au nom des A3, le Ghana a, lui aussi, exhorté le Conseil à doter la Force conjointe du G5 Sahel de ressources suffisantes et à créer un bureau d’appui des Nations Unies.

Enfin, certaines délégations, dont la France et les États-Unis, ont dénoncé la présence du Groupe Wagner dans la région.  « Les exactions de ce groupe mais aussi le pillage des ressources naturelles ne font qu’entretenir une spirale dangereuse de violence », a affirmé le délégué français.  Contrairement à ses collègues occidentaux, la Russie offre une assistance militaro-technique à Bamako sans aucune politique de conditionnalité, a rétorqué la représentante de ce pays. 

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE. S/2022/838

Déclarations

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE, Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de consolidation de la paix, et des opérations de paix, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la force conjointe du G5 Sahel.  « Depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité sur le Sahel, la situation sécuritaire dans la région continue de se détériorer. »  L’utilisation aveugle de la violence par des groupes terroristes signifie que des milliers de civils innocents souffrent, tandis que des millions d’autres sont forcés de quitter leurs foyers, a-t-elle déploré, ajoutant: « L’insécurité exacerbe une situation humanitaire déjà catastrophique. »

La Sous-Secrétaire générale a estimé que, dans un tel contexte, la Force conjointe demeure une composante régionale importante de la réponse à l’insécurité au Sahel.  Elle a donc jugé « regrettable que la Force conjointe, en plus de ses difficultés financières, ait été fragilisée par le retrait du Mali en mai ».  Elle a précisé que le deuxième coup d’État au Burkina Faso, le 30 septembre, avait, lui aussi, eu une incidence négative sur la capacité opérationnelle de la Force et a sapé la cohésion régionale.  Malgré ces défis, la Force continue de mener des opérations militaires, sept au total depuis mai.  L’élaboration d’un nouveau concept d’opérations de la Force, prenant en compte la situation humanitaire et sécuritaire, le retrait du Mali, ainsi que les opérations bilatérales menées par les États voisins, est envisagée, a ajouté Mme Pobee.

La Sous-Secrétaire générale a rappelé que la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) continue d’appuyer la Force conjointe.  La Mission travaille avec des contractants pour apporter des biens de première nécessité aux quatre contingents de la Force hors du Mali.  Mme Pobee n’a néanmoins pas fait mystère des difficultés techniques et opérationnelles qui demeurent, en sus de l’insécurité et du manque d’infrastructures.  Les divergences entre les membres du G5 Sahel, qui ont culminé avec le retrait du Mali, rendent plus difficiles encore l’appui de la MINUSMA à la Force, a-t-elle déploré.

Mme Pobee a souligné l’importance que la Force intègre les droits humains et le droit international humanitaire dans son concept d’opérations, sous peine de faire le lit des groupes extrémistes.  De même, au niveau national, les pays du G5 Sahel doivent s’assurer que leurs stratégies militaires antiterroristes mettent l’accent sur la protection des droits humains et des populations.  Face à l’extrémisme violent, la Sous-Secrétaire générale a plaidé pour « une approche collective repensée », allant au-delà des efforts existants.  Les parties prenantes doivent poursuivre leur coopération en vue d’atteindre les objectifs sécuritaires communs, a-t-elle dit, en se félicitant du resserrement de la coopération entre le Mali et le Burkina Faso.  Elle a aussi noté la volonté internationale d’appuyer les pays du golfe de Guinée et de l’Afrique de l’Ouest, qui pourraient être gagnés par l’insécurité.

L’ONU, l’Union africaine et le G5 Sahel appuient le travail du Groupe de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel emmené par l’ancien Président du Niger, M. Mahamadou Issoufou, a assuré Mme Pobee.  Le but du Groupe, a-t-elle rappelé, est de mobiliser les ressources aux niveaux national, régional et international et de proposer des voies innovantes pour remédier aux défis sécuritaires, de développement et de gouvernance dans la région.  En attendant les recommandations de ce Groupe indépendant, nous comptons sur la poursuite du soutien de ce Conseil en vue d’un Sahel stable, sûr et prospère, a conclu Mme Pobee.

M. YEMDAOGO ÉRIC TIARÉ, Secrétaire exécutif du G5 Sahel, a souligné que le retrait, le 15 mai 2022, du Mali de tous les organes du G5 Sahel y compris de sa Force conjointe, a plongé l’organisation sous-régionale dans une crise institutionnelle marquée aussi par la délocalisation du quartier général de la Force conjointe de Bamako à N’Djaména, la suspension du soutien de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) aux opérations de la Force conjointe et l’impossibilité de réaliser des opérations conjointes.  Comme le G5 doit continuer sa mission avec les quatre pays restants -Burkina Faso, Mauritanie, Niger et Tchad-, le processus de réflexion stratégique pour une nouvelle reconfiguration de la Force a commencé.  Cependant, en raison des événements survenus au Burkina Faso et au Tchad, les réunions des experts militaires et des ministres n’ont pu se tenir, a déploré M. Tiaré.  En attendant, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a été saisi aux fins d’une prolongation du mandat 2021-2022 de la Force conjointe, endossée par le Conseil de sécurité.  Malgré les nombreuses difficultés, la Force a pu mener des opérations dans les différents fuseaux qui ont contribué à l’amélioration de l’environnement sécuritaire dans les zones d’opérations.  Des groupes armés terroristes ont été neutralisés, des centaines d’armes, des milliers de munitions et d’importantes quantités de drogues saisies.

M. Tiaré a souligné que le mandat prévoit que la Force dispose de compétences prévôtales et de police judiciaire susceptibles d’accompagner l’action militaire.  La judiciarisation du champ des opérations de la Force conjointe s’est ainsi traduite par plus de 100 personnes appréhendées.  Toutefois, ces opérations ont enregistré des résultats mitigés au regard de l’ampleur de la menace.  Dans le souci de renforcer la protection des civils, le Secrétariat exécutif a initié un projet d’appui à la Force conjointe dans le cadre de la mise en œuvre du Cadre de conformité. 

Mais aujourd’hui, il est évident que la situation est encore beaucoup plus préoccupante qu’elle ne l’était en 2017, a constaté M. Tiaré, qui a parlé de « triste réalité ».  Les actions de développement du G5 ne peuvent pas être menées.  Les populations sahéliennes sont en train de céder à la colère à l’encontre des autorités publiques et de certains partenaires internationaux.  C’est de plus une raison avancée par les militaires pour justifier les changements anticonstitutionnels de régime, a-t-il énuméré.

M. Tiaré a salué l’initiative du Secrétaire général de faire une évaluation stratégique conjointe -Nations Unies, Union africaine, CEDEAO, G5 Sahel- sur la sécurité et le développement au Sahel et a souhaité que cette initiative reçoive le soutien de la communauté internationale pour la mise en œuvre de mesures fortes.  Il a insisté sur l’urgence d’accorder le plus grand soutien au G5 Sahel, parce qu’il est impensable d’imaginer une lutte contre le terrorisme qui ne partirait pas du Sahel central pour éviter, voire limiter son expansion vers les pays du golfe de Guinée.  La réalité indique que l’heure est grave et qu’en l’absence de réaction rapide et urgente, il faut craindre une plus grande menace sur la paix et la sécurité internationales, a-t-il conclu. 

M. ZAKARIA OUSMAN RAMADAN a rappelé le contexte de la création du G5 Sahel et son importance comme outil de coopération sécuritaire.  Il est également revenu sur les objectifs, la mission et l’organisation de la Force conjointe du G5 Sahel.  « À ce jour, le bilan obtenu est mitigé, voire maigre. »  Il a regretté que la Force conjointe n’ait pas obtenu un mandat du Conseil de sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.  L’action de ses soldats est en outre fortement limitée par le manque et la vétusté des moyens de transports logistiques aériens et terrestres ainsi que l’inefficacité du renseignement des États du G5 Sahel, a-t-il ajouté. 

L’insécurité budgétaire permanente de la Force conjointe soulève des questions quant à la durabilité des efforts et la capacité des États à assurer eux-mêmes leur propre sécurité, a poursuivi l’intervenant.  Face à « l’hybridation » de la menace et à la résilience des groupes armés terroristes, l’absence de moyens rend selon lui la lutte contre le terrorisme « irréaliste et insoutenable ».  M. Ramadan a en outre souligné la faiblesse institutionnelle et le rôle « partiellement dysfonctionnel » des forces de sécurité nationales.  La fin de l’opération Barkhane notamment impose de revoir le dispositif opérationnel de la Force conjointe, a-t-il estimé.  De plus, l’arrivée de la Russie sur le théâtre des opérations, notamment au Mali, complique la coopération et la synergie des acteurs non régionaux.

Face à cette situation, l’intervenant a émis un certain nombre de recommandations.  Il a, enfin, attiré l’attention sur l’instabilité politique dans certains pays du G5 Sahel et appelé à mettre l’accent sur la prévention.  « Il faut reconstruire l’État et lui adjuger les capacités nécessaires », a-t-il déclaré.  À cette fin, il a rappelé le rôle des jeunes, des femmes et des organisations de la société civile.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a noté que le G5 Sahel est en crise, sur les plans institutionnel, politique et sécuritaire, en raison, entre autres, de la décision du Mali de quitter le Groupe, des situations politiques nationales marquées par des transitions au Mali, au Burkina Faso et au Tchad et de l’extension de la menace terroriste hors du Sahel, qui gagne maintenant le nord de certains États côtiers.  La région connaît aussi une crise humanitaire aggravée par la guerre menée par la Russie en Ukraine, tout ceci sur fond de défis structurels de développement et d’adaptation aux changements climatiques, a analysé le représentant. 

Dans ce contexte, la communauté internationale doit continuer à se mobiliser massivement en soutien au Sahel et ne pas oublier tout ce qui a été fait, a plaidé M. de Rivière.  Elle doit renouveler son approche, notamment avec l’Alliance pour le Sahel, composé de 17 partenaires, avec 1 200 projets dans le développement rural, l’énergie, l’éducation, pour un montant global de plus de 26 milliards d’euros en rapport avec les priorités identifiées par le G5 Sahel et ses États membres.  Il faut poursuivre ce soutien résolu pour prévenir un retour en arrière, a-t-il dit. 

Le représentant a ensuite salué la décision du Secrétaire général et du Président de la Commission de l’Union africaine de demander à l’ancien Président du Niger, M. Mahamadou Issoufou, de diriger une évaluation indépendante sur le soutien international au Sahel.  Il a jugé cette évaluation nécessaire pour faire le bilan des efforts menés jusqu’ici et proposer des solutions innovantes.  Et en la matière, il a, une fois de plus, appelé à mettre en place un financement durable et prévisible des opérations africaines de paix, « y compris sur contributions obligatoires des Nations Unies, ou dans le cadre d’un mécanisme innovant qui les associerait à des contributions bilatérales ».

Le représentant a également plaidé pour l’identification d’un bon format qui, au vu des évolutions de la menace terroriste, ne doit plus se limiter aux pays fondateurs du G5.  Pour M. de Rivière, il faut considérer également les autres initiatives régionales, comme l’Initiative d’Accra, et tous les moyens de renforcer la coopération entre les pays sahéliens et les pays côtiers.  Il faut par ailleurs s’opposer à toute initiative qui ferait reculer les libertés fondamentales sous prétexte de lutte contre le terrorisme.  C’est l’approche que propose la société militaire privée Wagner, dont les exactions mais aussi le pillage des ressources naturelles ne font qu’entretenir une spirale dangereuse de violence, a affirmé M. de Rivière, qui a conclu en rappelant que renforcer l’état de droit, c’est aussi donner toute leur place à la société civile, y compris aux femmes et aux jeunes. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a mis l’accent sur l’intensification des activités des groupes extrémistes qui engendre des défis liés au déplacement et à l’accroissement des besoins humanitaires.  La situation au Burkina Faso montre aussi un recul dans la région, a-t-il pointé.  En outre, l’extrémisme violent prolifère lorsque les institutions étatiques sont absentes ou fragilisées, la prestation des services est faible, et la justice inaccessible, alors que les effets des changements climatiques aggravent la concurrence autour des ressources.  Il a souligné que les femmes sont les premières à être touchées.  Il a signalé que l’instabilité de plusieurs pays du Sahel a également des conséquences sur le soutien des partenaires internationaux.  Il a encouragé le Mali à fixer la date des élections et à s’y tenir.  Préoccupé par le fait que le Tchad ait décidé de prolonger sa transition, s’écartant ainsi des directives de la CEDEAO, le représentant américain a insisté sur un processus inclusif de préparation des élections pour revenir à un ordre civil et à un gouvernement démocratique.  Le retrait du Mali de la CEDEAO est regrettable, ce qui affaiblit la réponse régionale dans la lutte contre le fléau du terrorisme, a-t-il ajouté. 

Inquiet également des partenariats « à courte vue » avec des organisations qui sapent la sécurité, le représentant a notamment souligné l’exploitation des ressources naturelles par le Groupe Wagner, qui cible également les populations marginalisées.  Ses campagnes de propagande attisent le mécontentement et la violence à l’encontre de l’ONU et font obstacle aux opérations militaires au Mali, alors que celles-ci se font sous un mandat du Conseil de sécurité en vue d’un retour à l’ordre démocratique.  Les restrictions des mouvements des agences des Nations Unies sont tout aussi déplorables, a-t-il encore déclaré, en espérant que de nouvelles solutions seront envisagées pour une sortie des difficultés au Sahel, en attendant avec intérêt l’évaluation stratégique.

Mme CÁIT MORAN (Irlande) a déclaré que le leadership régional et la coopération sont des éléments cruciaux de toute solution.  La représentante a déploré les divergences politiques entre les États membres du G5 Sahel qui affectent négativement l’opérationnalisation de la Force conjointe.  Elle a appelé à une plus grande coordination entre les différentes initiatives dans la région, notamment l’Initiative d’Accra et le Processus de Nouakchott.  Préoccupée par la présence du Groupe Wagner dans la Région, la déléguée a rappelé les obligations des États de prévenir, d’enquêter et de punir les violations et abus commis par des mercenaires et des sociétés militaires privées.  « Ces violations et abus ne servent qu’à favoriser la radicalisation et à contribuer à la croissance du terrorisme et de l’extrémisme violent. »  L’exploitation par les groupes terroristes des fragilités existantes, de l’instabilité politique et du manque d’opportunités sociales et économiques montre qu’une réponse holistique est nécessaire.  La déléguée a exhorté les autorités de transition du Burkina Faso, du Mali et du Tchad à progresser dans leurs transitions politiques, à respecter les délais convenus et à organiser rapidement des élections crédibles, inclusives et transparentes aboutissant à une passation pacifique du pouvoir.  Les femmes, les jeunes et la société civile doivent être au cœur de ces processus.  L’Irlande, a ajouté la déléguée, soutient les efforts de la CEDEAO et de l’Union africaine pour un retour à l’ordre constitutionnel dirigé par des civils dans la région. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a estimé que les défis aigus auxquels sont confrontés les pays du Sahel sont le résultat de nombreuses années de problèmes non résolus dans le domaine de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme, les difficultés socioéconomiques et humanitaires.  Un nouveau facteur de déstabilisation a été les tentatives de transformer le Sahel en un autre champ de confrontation géopolitique, contre les intérêts nationaux des États et des peuples de la région, a-t-elle poursuivi, arguant que les divisions internes au G5 Sahel, à bien des égards, ont été provoquées de l’extérieur, ce qui a contraint le Mali à s’en retirer le 15 mai dernier. 

Pour la déléguée, il est important de coordonner les efforts entrepris par l’Union africaine, la CEDEAO et d’autres organisations régionales de lutte contre le terrorisme au Sahel.  Elle a déclaré que l’aide internationale fournie aux États du Sahel doit être fondée sur le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures, le respect de la souveraineté et le principe de « solutions africaines aux problèmes africains ».  De ce fait, elle a indiqué que le retour à l’ordre constitutionnel des États de la région doit se faire sans tentatives d’imposer des recettes venues de l’étranger et en tenant compte des évaluations sobres et réalistes de la situation sur le terrain.  C’est pourquoi la Fédération de Russie apporte une aide bilatérale à ceux qui en ont besoin.  Elle a expliqué que c’est le cas au Mali, où les autorités de transition sont convaincues que libérer des terroristes des territoires maliens est une priorité pour mener à bien la période de transition et organiser des élections générales.  Contrairement à ses collègues occidentaux, la Russie offre une assistance militaro-technique à Bamako sans aucune politique de conditionnalités, a-t-elle déclaré. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a estimé que la coopération entre les pays de la région, en particulier le long des frontières, est un outil essentiel pour remédier à la violence au Sahel.  Il a déclaré que les progrès réalisés dans l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel sont désormais remis en cause, compte tenu de la décision du Mali de se retirer de cette alliance.  Sans le Mali, le G5 Sahel perd sa continuité géographique, s’affaiblit politiquement et encontre de plus grandes difficultés pour lutter efficacement contre le terrorisme.  Il a salué les efforts diplomatiques des pays de la région en vue d’une réintégration du Mali dans le G5 Sahel.  Face à l’incertitude sur l’avenir du G5 Sahel, nous réitérons notre appel à intensifier la coopération bilatérale, a dit le délégué.  Il a mentionné les autres défis que sont les changements récents dans l’architecture de sécurité régionale, la fin de l’opération Barkhane et l’annonce récente par certains pays du retrait de leurs contingents de la MINUSMA.  Néanmoins, il existe une opportunité pour développer une nouvelle stratégie de sécurité pour le Sahel qui réponde mieux aux intérêts des pays de cette région, a conclu le délégué.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a estimé que le tableau régional du Sahel est désolant.  Les pays sont confrontés à des défis sans précédent avec une escalade de la violence, des besoins humanitaires croissants et des conditions proches de la famine.  Comme toujours, ce sont les gens ordinaires qui souffrent le plus, a déploré le représentant.  Il a fait part de sa détermination à aider les populations du Sahel et a rappelé que le Royaume-Uni a versé 355 millions de dollars à la région l’année passée.  Il a estimé que la volonté politique est fondamentale pour faire progresser une gouvernance responsable, l’état de droit et la justice.  Trois pays de la région étant actuellement en pleine transition politique, un engagement continu avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine (UA) est vital, a-t-il insisté.  Il a exhorté les autorités burkinabé, tchadiennes et maliennes à préparer les élections dans le cadre d’un dialogue ouvert avec la société civile, y compris les femmes et les jeunes. 

Par ailleurs, une lutte efficace contre le terrorisme et le respect des droits humains doivent aller main dans la main, a insisté le représentant.  Sinon, cela risque d’aggraver les griefs, de miner la confiance avec les communautés locales et de favoriser le recrutement par les groupes terroristes.  L’impact négatif des opérations du Groupe Wagner sur les civils au Mali et ailleurs sur le continent est bien établi aujourd’hui, a accusé le représentant.  C’est pourquoi le Groupe Wagner ne réussira pas au Mali, ni dans aucun autre pays de la région, a-t-il assuré. 

Le représentant a salué les efforts de l’ONU pour renforcer les capacités de la Force conjointe du G5 Sahel en matière de respect des droits humains.  Toutefois, il a demandé instamment à la Force de mettre en œuvre les mesures d’atténuation identifiées en matière de droits humains, comme condition du soutien de la MINUSMA.  Il a en outre dit attendre avec impatience les résultats de l’évaluation stratégique du Groupe indépendant de haut niveau sur le Sahel, ainsi que les discussions à venir sur l’Initiative d’Accra, qui aideront à identifier la meilleure façon de travailler pour soutenir la sécurité régionale. 

M. GENG SHUANG (Chine) a noté que les défis sécuritaires, de développement et humanitaires au Sahel sont de taille.  Il a insisté sur l’importance fondamentale du dialogue et de la coopération en respectant les préoccupations et les intérêts des uns et des autres.  Il faut œuvrer dans un esprit de solidarité et restaurer les opérations actuelles de la Force conjointe, a-t-il déclaré.  Il a appuyé l’évaluation conjointe de la situation par l’Union africaine et l’ONU. 

Le représentant a jugé nécessaire de consolider les bases de l’action de lutte contre le terrorisme, notant que les États du Sahel connaissent des difficultés.  La Force conjointe reste un acteur important dont il faut tenir compte et qu’il faut aider en raison des difficultés matérielles et financières auxquelles elle fait face, a-t-il ajouté, invitant les partenaires de la région et la MINUSMA à continuer de jouer leur rôle.  Il a, enfin, estimé que la communauté internationale doit revoir à la hausse l’aide au développement pour « venir à bout des conditions favorisant les forces terroristes et extrémistes ».  À ce titre, il a mentionné l’assistance apportée par la Chine aux pays de la région.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé que le G5 Sahel s’est avéré être un mécanisme résilient.  Non seulement le G5 continue de fonctionner, mais il a également réussi à tenir son premier comité de défense et de sécurité depuis 2021.  La Force conjointe a en outre pu mener des opérations militaires, bien qu’elle ait dû faire face au transfert de son quartier général et à des ajustements après le départ du Mali et de l’opération Barkhane.  Le délégué a toutefois estimé que le G5 Sahel et la Force conjointe pourraient faire plus « si les bonnes circonstances politiques étaient en place ».  Selon lui, la réponse à ces problèmes dépend de la coopération continue entre les pays du Sahel, ainsi qu’avec les pays d’Afrique de l’Ouest, les organisations régionales et la communauté internationale.  Pour cette raison, il s’est dit encouragé par l’annonce, faite début juillet, d’un accord entre le Mali et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur un calendrier pour le retour à l’ordre constitutionnel et la tenue d’élections.  Ce sont là des signes que la diplomatie régionale et le dialogue peuvent aboutir à des résultats concrets. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a dit être préoccupé par les changements anticonstitutionnels de gouvernement dans la région.  Au Burkina Faso, le deuxième coup d’état militaire de cette année n’a pas amélioré la situation, et les groupes armés continuent de gagner du terrain à travers le pays.  Le représentant a exhorté les autorités à développer une vision concrète pour améliorer la situation et combler les vides sécuritaires.  Au Tchad, la prolongation de la période de transition et l’escalade de la violence sont profondément préoccupantes.  Il a condamné le recours à la violence par les forces de sécurité contre les civils et les arrestations arbitraires de manifestants.  Le représentant a demandé que tous les abus et les violations fassent l’objet d’une enquête.  Le délégué a regretté la décision du Mali de se retirer du G5 Sahel à un moment où la coopération régionale pour lutter contre le terrorisme est plus que jamais nécessaire.  Selon lui, le Burkina Faso, le Tchad et le Mali doivent intensifier leurs efforts pour assurer le retour à l’ordre constitutionnel et à un gouvernement civil.

Le représentant a appelé les États de la région à intensifier leur collaboration dans le cadre de l’Initiative d’Accra, pour empêcher le débordement de violences et renforcer leur coopération transfrontalière.  La Force conjointe demeure une importante composante au niveau régional pour répondre au terrorisme et à l’extrémisme violent au Sahel et au-delà.  À cet égard, M. Spasse a demandé de respecter les droits humains et humanitaires pendant les opérations militaires.  Il a estimé qu’une approche multidimensionnelle est essentielle pour s’attaquer aux causes profondes des défis sécuritaires, avant d’appeler les membres du G5 Sahel à lutter contre l’insécurité et le terrorisme et à renforcer leur action collective.

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a déclaré qu’en dépit des défis complexes, la région du Sahel devrait être en mesure de surmonter ses difficultés et de bâtir un avenir plus stable et prospère, sa population comptant plus de 60% de jeunes, qui méritent d’avoir l’occasion de contribuer à l’édification de leurs sociétés.  Le rôle que joue le G5 Sahel et la Force conjointe est à améliorer, en persévérant dans les efforts diplomatiques déployés par les pays de la région.  La représentante a appuyé, d’autre part, le dialogue et la coopération entre la CEDEAO et l’Union africaine, mais surtout avec les pays concernés.  Sachant que les difficultés actuelles sont dues aux activités des groupes terroristes, le chemin à parcourir reste très long, a-t-elle reconnu.  Selon elle, le Groupe indépendant de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel, sous la houlette de l’ancien Président du Niger, M. Mahamadou Issoufou, apportera des solutions efficaces à la résolution de la crise dans la région.  La déléguée a ensuite appelé à favoriser l’investissement dans le capital humain pour que les États du Sahel puissent fournir les services de base nécessaires, tout en veillant à donner aux femmes la possibilité de contribuer au développement politique et économique de la région.  Elle a aussi évoqué la concurrence autour des ressources naturelles limitées, avec le déclin, entre autres, du niveau des nappes phréatiques et de l’assèchement du Lac Tchad. 

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a indiqué que le terrorisme au Sahel et en Afrique de l’Ouest n’est plus un problème régional, mais plutôt une menace pour la sécurité mondiale, qui doit être traitée par des mesures antiterroristes efficaces à tous les niveaux.  Cependant, les efforts actuels ne permettent pas de lutter efficacement contre le terrorisme dans la région.  Le délégué a déploré le fait que le rythme opérationnel du G5 Sahel ait considérablement diminué à la suite du retrait du Mali de la Force conjointe en mai de cette année, et du départ des forces de sécurité internationales du Sahel.  Selon lui, une approche de tolérance zéro pourrait éliminer ce fléau dans la région et au-delà.  Il a souligné le rôle des initiatives de sécurité régionale, telles que la Force conjointe du G5 Sahel, et indiqué que la collaboration et la confiance entre les pays du G5 Sahel demeurent primordiales pour le succès des opérations de contre-terrorisme.  Pour le délégué, il est important que le maintien de la paix traditionnel soit complété par des opérations régionales de neutralisation de groupes et d’entités terroristes.  Il a appelé à fournir un soutien durable et prévisible à la Force conjointe, y compris par le biais des contributions mises en recouvrement par l’ONU.  Soulignant que la paix au Mali est une condition préalable à la paix au Sahel, il a défendu un processus appartenant au Mali et dirigé par le Mali.

Mme MONA JUUL (Norvège) a regretté que le manque de ressources ait entravé l’efficacité du G5 Sahel, avant de mentionner les conséquences du retrait du Mali et la présence du Groupe Wagner.  Elle a espéré que le G5 Sahel pourrait encore devenir un modèle de coopération régionale, à condition d’être doté des ressources politiques et financières suffisantes.  La protection des civils au Sahel, en particulier des enfants, doit être la priorité, a déclaré la déléguée.  Elle a appuyé le Groupe de haut niveau sur la sécurité et le développement au Sahel emmené par l’ancien Président du Niger, M. Mahamadou Issoufou.  Nous espérons que ce Groupe fera des propositions innovantes, pratiques et réalistes, a-t-elle dit.  « Le but n’est pas de réinventer la roue, ou d’introduire une nouvelle stratégie pour le Sahel, mais de faire fond sur ce qui existe déjà: le G5 Sahel, l’Initiative d’Accra, le Processus de Nouakchott ou encore les efforts de la CEDEAO. »

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), au nom des A3 (Gabon, Kenya et Ghana), a estimé que l’instabilité de la situation au Sahel, avec notamment le retrait de l’opération Barkhane du Mali, la fin de l’adhésion du Mali à la Force conjointe du G5 Sahel, ainsi que les attaques des groupes terroristes, continuent d’avoir un impact sur les opérations de la Force.  Toutefois, le représentant a estimé que la Force conjointe peut continuer à être un acteur important dans le Sahel et a encouragé le Mali à réintégrer l’organisation.  Au-delà, le financement et les autres formes d’assistance logistique de la communauté internationale et des partenaires donateurs continuent d’être nécessaires.  Pour les A3, le Conseil de sécurité devrait garantir que la Force dispose de ressources suffisantes et la création d’un bureau d’appui des Nations Unies pour aider la Force est essentielle à la réalisation d’une paix durable au Sahel.  La Commission de consolidation de la paix peut, quant à elle, faire la différence pour soutenir la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.  Il est important de voir comment l’aide de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) aux activités de la Force conjointe du G5 Sahel peut être recalibrée. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission adopte par consensus 11 textes malgré des réserves autour de libellés liés au genre, et à la santé sexuelle et génésique

Soixante-dix-septième session
50e & 51e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4368

La Troisième Commission adopte par consensus 11 textes malgré des réserves autour de libellés liés au genre, et à la santé sexuelle et génésique

La Troisième Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a poursuivi l’adoption de ses projets de résolution en adoptant par consensus les 11 textes examinés aujourd’hui et qui portaient sur les droits des femmes et des enfants, le développement social ainsi que la prévention du crime et la justice pénale.

Tout en réaffirmant leur attachement à l’esprit qui gouverne ces textes, de nombreuses délégations, à l’instar du Guatemala, ont exprimé des réserves au sujet du maintien de certains libellés « non consensuels » relatifs notamment au genre, à la santé sexuelle et génésique, et aux formes multiples et croisées de discrimination.  Ce sont là des termes « non agrées », a fait valoir le Sénégal appuyé par de nombreuses délégations dont celle du Nigéria.

Les débats se sont notamment cristallisés au tour d’un texte portant sur les mariages précoces et mariages forcés, de nombreuses délégations se distançant des concepts jugés « polémiques » qu’il contiendrait.  Saluée par l’Argentine, cette résolution au « résultat louable », comme souligné par l’Union européenne, méritait au contraire de contenir des « termes plus forts », a défendu la Nouvelle-Zélande. 

Au titre de ce projet de résolution, l’Assemblée générale exhorterait notamment les États à supprimer toutes les dispositions qui permettent aux auteurs de viol et d’actes d’exploitation d’échapper aux poursuites et aux sanctions en épousant leur victime, et qui permettent, justifient ou entraînent les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés.  Elle demanderait également aux États de surveiller les effets de la crise de la COVID-19 sur la prévalence de ces mariages.

L’annonce durant la séance des incidences budgétaires de l’ordre de 73 300 dollars de ce texte, ont provoqué l’ire des États-Unis et du Japon qui a décidé de se retirer en tant que co-auteur de ce projet, exprimant sa « déception » face à la manière « opportuniste » dont cette question budgétaire a été gérée.

Toujours au titre de la promotion des droits de l’enfant, la Commission a adopté un texte sur la lutte contre les brimades, qui appelle notamment les États Membres à adopter des lois pour prévenir le cyberharcèlement et la diffusion non consentie d’images intimes, et à en protéger les enfants.

Par son texte relatif à la traite des femmes et des filles, la Troisième Commission invite par ailleurs les gouvernements à établir des pare-feux entre les contrôles d’immigration et les inspections du travail de manière à ne pas mettre les victimes potentielles de la traite des personnes en situation de craindre les autorités ou les infractions aux lois relatives à l’immigration.  Elle les engage aussi à assurer la participation « pleine, égale et effective » des femmes à l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation des lois, politiques et programmes relatifs à la lutte contre la traite.

La Troisième Commission a également appelé à l’intensification de l’action mondiale visant à éliminer les mutilations génitales féminines en adoptant un texte qui exhorte les États à garantir une protection et un soutien aux femmes et aux filles qui subissent ou risquent de subir des mutilations génitales transfrontières et transnationales.  À cet égard, elle engage notamment les États à harmoniser la législation et les politiques entre les États où se produisent des mutilations génitales féminines transfrontières et transnationales et d’introduire des systèmes de surveillance transfrontières améliorés des cas de mutilations génitales féminines.  

La Commission aussi fait sienne un projet sur la lutte contre la fistule obstétricale, le Japon et le Mexique regrettant toutefois qu’elle se soit contentée de procéder à un renouvèlement technique du texte, jugeant urgent de renforcer le libellé sur une question qui continue d’avoir une lourde incidence sur la vie des femmes. 

Ces trois projets de résolution ont eux aussi fait l’objet de divergences entre les délégations sur l’utilisation de terminologies « non consensuels », tout comme le texte sur le « Développement sans exclusion pour et avec les personnes handicapées », qui exhorte les États Membres à garantir aux personnes handicapées l’accès à Internet à un prix abordable et les encourage par ailleurs à faire en sorte que les services de soutien pour une vie autonome soient pensés et fournis de manière à favoriser l’inclusion des personnes handicapées dans la société.

Un projet de résolution sur les droits humains dans l’administration de la justice a lui aussi été adopté sans vote, de même qu’un texte sur les droits humains et l’extrême pauvreté́ qui engage les États Membres à garantir que leur cadre juridique n’établit aucune distinction fondée sur le statut socioéconomique, et à prendre des mesures pour effectivement lever les obstacles auxquels les personnes pauvres se heurtent dans des domaines tels que le logement, l’emploi, l’éducation, la santé et d’autres services sociaux.  

Le texte sur la lutte contre la corruption  appelle pour sa part les États à combattre la corruption dans le sport et à adopter ou renforcer, selon qu’il conviendra, les mesures de lutte contre la corruption nécessaire au respect des lois et règlements applicables par le secteur privé.

Le consensus a également prévalu sur les projets de textes portant sur le renforcement de la coopération internationale pour prévenir et combattre la traite des personnes à des fins de prélèvement d’organes et de trafic d’organes humains, ainsi que sur la prévention du crime et la justice pénale.

La Troisième Commission reprendra ses travaux mercredi 16 novembre, à partir de 10 heures. 

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION

Déclaration liminaire du Guatemala   

Avant l’examen des points 26 (promotion des femmes) et 64 (promotion et protection des droits de l’enfant) de l’ordre du jour, le Guatemala a pris la parole pour exposer sa position, s’agissant des projets de résolution intitulés « Traite des femmes et des filles » (A/C.3/77/L.6/Rev.1),  « Intensifier l’action engagée pour en finir avec la fistule obstétricale » (A/C.3/77/L.22) et «  Mariages d’enfants, mariages précoces et mariages forcés » (A/C.3/77/L.19/Rev.1).  Tout en réaffirmant son attachement à l’esprit qui gouverne ces textes, la délégation a exprimé des réserves au sujet de la référence faite aux droits reproductifs.  Elle a dit craindre que ce concept ne soit interprété de façon erronée, sachant que sa législation nationale ne porte que sur la santé sexuelle et procréative et non pas sur les droits reproductifs.  Cela peut être interprété comme un droit à l’avortement, ce qui contrevient à notre législation, a-t-elle fait valoir.

Développement social, y compris les questions relatives à la situation sociale dans le monde et aux jeunes, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille

En vertu du projet de résolution intitulé « Développement sans exclusion pour et avec les personnes handicapées » (A/C.3/77/L.9/Rev.1), présenté par les Philippines et adopté sans vote, l’Assemblée générale exhorterait les États Membres, les organismes des Nations Unies, les organisations régionales et internationales, les organisations d’intégration régionale et les institutions financières à agir de concert pour faire une place aux personnes handicapées et à intégrer les principes de non-discrimination, d’accessibilité et d’inclusion dans les mesures prises pour suivre et évaluer la réalisation des objectifs de développement durable. 

Elle exhorterait les États Membres, les organismes des Nations Unies et les autres parties prenantes à concevoir et à mettre en œuvre des politiques et programmes permettant aux femmes et aux filles handicapées de jouir pleinement de leurs droits.  Elle demanderait aussi aux États de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir aux enfants handicapés la pleine jouissance de tous les droits humains et de toutes les libertés fondamentales, sur un pied d’égalité avec les autres enfants. 

L’Assemblée générale exhorterait également les États Membres à veiller à ce que les personnes handicapées et leur famille aient accès à divers services d’appui (…) et reçoivent une formation sur les moyens de prévenir, de détecter et de signaler les cas d’exploitation, de violence et de maltraitance.  De plus, elle exhorterait les États Membres à garantir aux personnes handicapées l’accès à Internet à un prix abordable et à les associer, de même que les organisations qui les représentent, à chaque étape du développement des technologies de l’information et des communications, notamment en ce qui concerne la télésanté, l’apprentissage à distance et le télétravail. 

Elle demanderait d’autre part aux États Membres et aux autres parties prenantes d’inclure les personnes handicapées à tous les stades de l’élaboration des politiques et de la prise de décisions relatives à la lutte contre la COVID-19 et à la relance, et d’éliminer les obstacles et la discrimination auxquels se heurtent les personnes handicapées. 

De surcroît, l’Assemblée générale exhorterait les États Membres à veiller à ce que les personnes handicapées aient accès à des services de rééducation et de soutien pour une vie autonome (…) et, à cet égard, les encouragerait à faire en sorte que les services de soutien pour une vie autonome soient pensés et fournis de manière à favoriser l’inclusion des personnes handicapées dans la société. 

Déclarations et explications de position

Avant l’adoption du projet de résolution, El Salvador s’est dit fier d’avoir coparrainé ce texte, tout en regrettant que, lors des négociations, certaines délégations se soient opposées au fait qu’on ait besoin de collecter des données de qualité en temps utile et d’autres données pertinentes dans les contextes nationaux. 

Pour sa part, le Brésil a salué un texte équilibré et a annoncé se joindre au consensus. 

Sur cette même ligne, le Qatar a rappelé qu’il s’est porté coauteur du projet de résolution. 

De son côté, le Sénégal a indiqué qu’il n’a pas coparrainé ce texte cette année en raison de l’inclusion de certains termes tels que « formes multiples, aggravées et conjuguées de discrimination ». 

Le Mali, qui est coauteur du texte, a cependant fait valoir que certains termes ne peuvent être considérés que dans leur contexte originel, bien connu et partagé. 

Après l’adoption, la Malaisie s’est dissociée du libellé « formes multiples et imbriquées de discrimination », jugeant qu’il n’est pas en adéquation avec sa position nationale. 

Abondant dans le même sens, l’Indonésie a émis des réserves sur certaines mentions qui ne recueillent pas le soutien universel des États Membres. 

La République islamique d’Iran a souhaité que ce projet de résolution « important » soit le reflet de la position de tous les États Membres.  À ce titre, elle a insisté sur le fait que l’application de ce texte se fera en fonction du droit interne iranien.  À cette aune, la délégation s’est dissociée de tous les libellés « polémiques et non consensuels », notamment l’alinéa 13 du préambule. 

Le Saint-Siège a salué des ajouts positifs, notamment l’appel visant à permettre aux enfants handicapés de pleinement jouir de la totalité des droits humains et des libertés fondamentales.  Il a cependant regretté que plusieurs questions essentielles n’apparaissent pas dans la version définitive en raison de désaccords entre les délégations, en particulier que, conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, tout être humain a le droit inhérent à la vie et que toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour garantir la pleine jouissance des droits des personnes handicapées sur un pied d’égalité avec les autres personnes.  De même, la délégation a déploré le retrait d’un paragraphe traitant de l’importance de faire en sorte que les personnes handicapées aient accès à plusieurs services de soutien communautaire à la maison pour éviter l’isolement, ainsi que l’inclusion d’un libellé « ambigu et contradictoire » sur la discrimination.  Elle a enfin réaffirmé que, selon elle, le terme « genre » se fonde sur la différence biologique entre hommes et femmes. 

Au nom d’un groupe de pays, les États-Unis ont quant à eux estimé que le texte de cette année reste une contribution essentielle pour les droits des personnes handicapées.  Ils ont toutefois regretté l’absence d’accord sur l’inclusion de certains libellés, notamment sur l’accès à des services de santé sexuelle et procréative.  C’est d’autant plus décevant qu’un libellé consensuel sur cette question avait été adopté en 2017, a relevé la délégation. 

Promotion des femmes

Par le projet de résolution intitulé « Traite des femmes et des filles » (A/C.3/77/L.6/Rev.1), présenté par les Philippines et adopté sans vote, l’Assemblée générale engagerait instamment les États Membres, l’ONU et les autres organisations internationales, régionales et sous-régionales, ainsi que la société civile à appliquer pleinement et effectivement les dispositions pertinentes du Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes. 

L’Assemblée générale demanderait aux gouvernements de redoubler d’efforts pour prévenir et combattre la demande qui est à l’origine de la traite des femmes et des filles, et de prendre les mesures préventives voulues pour remédier aux causes profondes ainsi qu’aux facteurs de risque qui accroissent la vulnérabilité face à la traite des êtres humains.  En outre, elle exhorterait les gouvernements à renforcer les mesures destinées à éliminer par tous les moyens préventifs possibles la demande, d’enfants en particulier, liée au tourisme sexuel.

De même, elle engagerait instamment les gouvernements à assurer la participation pleine, égale et effective des femmes à l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation des lois, politiques et programmes relatifs à la lutte contre la traite. 

Par ce texte, il serait demandé aux États Membres de tenir compte des difficultés que soulèvent les nouvelles méthodes de recrutement des victimes de la traite des êtres humains, telles que l’utilisation abusive d’Internet par les trafiquants, et de prendre des mesures pour mettre au point des campagnes de sensibilisation ciblées. 

L’Assemblée générale engagerait instamment les gouvernements à adopter toutes les mesures voulues pour assurer l’accès à la justice et la protection des victimes de la traite, et pour faire en sorte que les victimes de la traite des êtres humains soient à l’abri de toutes poursuites ou sanctions liées à des actes qu’elles ont été obligées de commettre en conséquence directe du fait qu’elles ont fait l’objet de cette traite.  Les gouvernements seraient, d’autre part, appelés à affecter des ressources à des programmes propres à assurer le rétablissement physique et psychologique et la réinsertion sociale des victimes de la traite des êtres humains, notamment à des services de soins de santé sexuelle et procréative. 

Elle exhorterait en outre les gouvernements à assurer ou à améliorer la formation des agents de la force publique, des membres de l’appareil judiciaire, des agents des services d’immigration et des autres fonctionnaires intervenant dans l’action destinée à prévenir ou à combattre la traite des êtres humains, y compris l’exploitation sexuelle des femmes et des filles, notamment dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  À cet égard, elle inviterait les gouvernements à établir des pares-feux entre les contrôles d’immigration et les inspections du travail, ou de veiller à ce que les inspections du travail soient menées de manière à ne pas mettre les victimes potentielles de la traite des personnes en situation de craindre les autorités ou les infractions aux lois relatives à l’immigration. 

Déclarations et explications de position

Avant l’adoption du projet de résolution, le Sénégal s’est dissocié de l’emploi du terme « formes multiples et conjuguées de discrimination ».  La délégation considère d’autre part que le concept de genre et ses termes associés ne se réfèrent qu’aux rapports sociaux entre les femmes et les hommes. 

L’Australie a indiqué s’être engagée à prendre des mesures pour éradiquer l’esclavage et la traite des personnes, précisant que sa démarche tient compte du genre et est axée sur les rescapés.  Elle a formé le vœu que, comme le texte de cette année, les moutures futures continueront de tenir compte de la question des genres. 

Après l’adoption, le Bélarus a estimé qu’en dépit de la baisse du nombre de victimes de la traite entre 2018 et 2021, la communauté internationale devrait faire davantage pour lutter contre ce fléau dont quatre victimes sur dix sont des femmes et deux sur dix des filles.  Saluant le consensus autour de ce projet de résolution, la délégation a exhorté tous les États Membres à prendre des mesures afin de lutter contre la criminalité liée à la traite. 

La Hongrie a tenu à rappeler que, même si elle s’est jointe au consensus sur ce texte, elle n’est pas partie au Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, pourtant mentionné dans le préambule.  La politique migratoire reste la prérogative des États, a-t-elle fait valoir. 

L’Italie, évoquant les alinéas 9 et 10 du préambule de ce projet de résolution, a, elle aussi, affirmé que le fait de se rallier au consensus sur ce texte ne change rien à sa position sur le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. 

Au nom d’un groupe de pays, l’Arabie saoudite a dit s’être ralliée au consensus mais a exprimé des réserves quant à l’utilisation du terme « santé sexuelle et reproductive ». 

Le Yémen a fait part de ses préoccupations liées à ce projet de résolution, en soulignant notamment que les violences sexuelles et sexistes sont des violences faites aux femmes et aux filles, mais aussi aux hommes et aux garçons.  Il s’est également dissocié de tout concept ne faisant pas l’objet d’un consensus international, en particulier le terme « formes multiples et conjuguées de discrimination ». 

L’Indonésie a déploré à son tour l’utilisation de libellés qui ne recueillent pas un accord universel au sein de l’ONU, rejetant en particulier l’expression « formes multiples et conjuguées de discrimination ». 

La Malaisie a jugé essentiel que la Troisième Commission tienne compte des préoccupations de l’ensemble des États Membres.  À ce titre, elle a exprimé des réserves sur les alinéas 20 et 32 du préambule et s’est dissociée de l’expression « formes multiples et conjuguées de discriminations ». 

La République islamique d’Iran a appelé à éviter la prolifération de libellés qui ne recueillent pas le consensus des États Membres.  Elle s’est ainsi dissociée des alinéas 20 et 32 du préambule. 

L’Algérie a souhaité que soient prises en considération les spécificités culturelles et religieuses de chaque pays.  Formulant des réserves quant à certaines notions, elle s’est dissociée du terme « formes multiples et conjuguées de discrimination ».  Elle a d’autre part estimé que la santé sexuelle et reproductive ne relève que de la santé publique et a dit comprendre le terme « violence basée sur le genre » comme des violences basées sur le sexe féminin ou masculin. 

Le Saint-Siège a salué le renforcement du libellé concernant les causes profondes qui mènent à toutes les formes d’exploitation des femmes et des filles dans le contexte de la traite.  La délégation par ailleurs a déploré le caractère « polémique et ambigu » du libellé sur les discriminations et a estimé que l’accès à l’avortement ne tombe pas sous la coupe du terme « soins de santé sexuelle et reproductive ». 

Mutilations génitales féminines

Par le projet de résolution sur l’« Intensification de l’action mondiale visant à éliminer les mutilations génitales féminines » (A/C.3/77/L.18/Rev.1), présenté par le Burkina Faso au nom du Groupe des États d’Afrique et adopté sans vote, l’Assemblée générale condamnerait les mutilations génitales féminines, et exhorterait les États à adopter toutes les mesures nécessaires, notamment des lois et des politiques, pour interdire les mutilations génitales féminines et protéger les femmes et les filles, y compris dans les communautés transfrontalières et autres communautés touchées. 

Elle exhorterait aussi les États à assortir les mesures punitives d’activités informatives et éducatives conçues pour promouvoir un consensus en vue de l’élimination des mutilations génitales féminines; à fournir protection et assistance aux femmes et aux filles qui ont subi, ou risquent de subir, des mutilations génitales; et à condamner les mutilations génitales féminines, qu’elles aient lieu ou non dans un centre médical. 

Par ce texte, l’Assemblée générale exhorterait en outre les États à garantir une protection et un soutien aux femmes et aux filles qui subissent ou risquent de subir des mutilations génitales, y compris des mutilations génitales transfrontières et transnationales, et à s’attaquer aux facteurs systémiques et structurels sous-jacents à l’origine de cette pratique préjudiciable.  À cet égard, elle engagerait les États à mettre en place des mécanismes régionaux de coopération et de coordination pour prévenir et éliminer les mutilations génitales féminines transfrontières et transnationales et à assurer la viabilité́ et l’efficacité́ de ces mécanismes en les dotant de ressources financières et de capacités suffisantes. 

Enfin, l’Assemblée générale engagerait les États à harmoniser la législation et les politiques entre les États où se produisent des mutilations génitales féminines transfrontières et transnationales, en plus de soutenir l’application de lois érigeant en infraction les mutilations génitales féminines, d’accroître la coopération entre les États et la société civile aux postes frontières terrestres et dans les aéroports, de mener des campagnes médiatiques de promotion de la prévention transfrontière auprès des communautés frontalières vulnérables et d’introduire des systèmes de surveillance transfrontières améliorés des cas de mutilations génitales féminines. 

Explications de position 

Après l’adoption du projet de résolution, l’Arabie saoudite, qui s’exprimait aussi au nom de Bahreïn, du Qatar, d’Oman et du Koweït, a dit s’être ralliée au consensus, tout en indiquant que les droits de santé sexuelle et reproductive, tels que mentionnés dans les paragraphes 1 et 7 du dispositif, seront interprétés selon les spécificités culturelles et religieuses des pays concernés. 

Le Mexique a émis plusieurs réserves, parmi lesquelles la non-reconnaissance par le texte du fait que les mutilations génitales féminines constituent une violence sexiste fondée sur le genre.  En 2022, a-t-il relevé, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime à 200 000 le nombre de femmes et de filles qui en ont été victimes.  Il a d’autre part déploré que le texte ne présente pas assez les mutilations génitales féminines comme une forme de torture, et ne reconnaisse pas que celles-ci s’imbriquent dans des formes multiples de discrimination, lesquelles peuvent reléguer femmes et filles dans les groupes les plus marginalisés de la société.  De même, a poursuivi la délégation, le texte ne fait pas mention de concepts tels que l’éducation sexuelle et reproductive, l’intégrité physique des femmes et les effets de la pandémie sur les mutilations génitales féminines. Le Mexique, a-t-il déclaré, s’emploiera à renforcer le libellé de ce projet de résolution lors de sa prochaine présentation. 

Le Saint-Siège a, lui aussi, appuyé le texte tout en exprimant plusieurs réserves, estimant notamment que les soins de santé sexuelle et reproductive s’appliquent à un « concept holistique » qui exclut l’avortement.  De plus, a ajouté l’Observateur permanent, la distinction de genre concerne uniquement la différence biologique entre hommes et femmes. 

Fistule obstétricale

Par le projet de résolution intitulé « Intensifier l’action engagée pour en finir avec la fistule obstétricale » (A/C.3/77/L.22), présenté par le Sénégal, au nom du Groupe des États d’Afrique et adopté par consensus, l’Assemblée générale demanderait aux États d’assurer un accès équitable à des soins prénatals et périnatals de qualité pour prévenir la fistule obstétricale.  Elle demanderait également aux États de garantir un accès équitable et rapide à des services de traitement de la fistule obstétricale et de planification familiale, qui ne soit pas limité par des facteurs d’ordre financier, géographique ou culturel. 

De surcroît, elle prierait instamment la communauté internationale d’apporter et de renforcer les ressources et capacités nécessaires pour traiter les cas de fistule obstétricale par une intervention chirurgicale; et exhorterait les donateurs multilatéraux, les institutions financières internationales et les banques régionales de développement des secteurs public et privé à étudier et à mettre en œuvre des politiques destinées à aider les pays à éliminer la fistule obstétricale en renforçant notamment leurs capacités institutionnelles. 

De même, l’Assemblée générale exhorterait la communauté internationale à remédier à la pénurie et à la répartition inéquitable de médecins, de chirurgiens et de chirurgiennes, de maïeuticiens et de sage-femmes, d’infirmiers et d’infirmières, ainsi qu’au manque de locaux et de moyens, qui limitent les capacités de la plupart des centres de traitement de la fistule.  Elle engagerait en outre les États et les fonds, programmes, institutions spécialisées et organes compétents des Nations Unies, les institutions financières internationales et tous les acteurs intéressés de la société civile à éradiquer la fistule obstétricale en l’espace d’une décennie. 

Enfin, elle prierait la Campagne mondiale pour éliminer les fistules, d’élaborer une feuille de route en vue d’accélérer l’action visant à éliminer la fistule en l’espace d’une décennie, dans le cadre de la réalisation du Programme 2030. 

Explications de position

Avant l’adoption, le Japon a indiqué qu’il ne s’est pas porté coauteur cette année, expliquant cette position par le renouvellement technique du texte et formant le vœu de voir le projet révisé pour refléter l’importance de cette problématique. 

La République de Corée a appelé à des investissements, à la sensibilisation et à un appui technique et financier de la communauté internationale.  La délégation a aussi indiqué avoir prêté assistance à la Côte d’Ivoire, à travers la formation de 1 000 professionnels de la santé et l’aide à plus de 300 000 patientes. 

La République islamique d’Iran, qui s’est ralliée au consensus, a regretté que certains termes non consensuels aient été intégrés dans le texte. 

Après l’adoption, au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l’Arabie saoudite a indiqué que ce projet de résolution sera traité conformément à « notre culture, normes et législation ». 

Le Mexique a regretté que, cette année le libellé n’ait pas été consolidé sur une question qui continue d’avoir une lourde incidence sur la vie des femmes.  Rappelant qu’en 2020, il a été procédé uniquement à un renouvellement technique du texte, il a jugé urgent de renforcer ce libellé. 

Quant à la Malaisie, elle s’est dissociée du paragraphe 13 du préambule « formes multiples et croisées de discrimination », qui est non convenu et non consensuel. 

Promotion et protection des droits de l’enfant

Par le projet de résolution intitulé « Protection des enfants contre les brimades » (A/C.3/77/L.17/Rev.1), présenté par le Mexique et adopté par consensus, l’Assemblée générale demanderait aux États Membres de continuer de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour prévenir toute forme de violence et en protéger les enfants, y compris à l’école ou hors de l’école, en présentiel et en ligne, telles que les brimades et le cyberharcèlement.  Elle leur demanderait également d’investir dans la culture numérique et dans des réglementations qui garantissent le respect de la vie privée des enfants, la protection des données et la sécurité en ligne, et de protéger les enfants contre l’exploitation et les atteintes sexuelles en ligne. 

Les États Membres seraient également appelés à adopter des lois pour prévenir les brimades, y compris le cyberharcèlement et la diffusion non consentie d’images intimes, et en protéger les enfants; et de renforcer les capacités des écoles pour leur permettre de détecter rapidement les brimades, y compris en ligne. 

De même, elle encouragerait les acteurs privés du secteur des technologies qui fournissent ou assurent des services dans plusieurs juridictions nationales à adhérer, dès la conception, aux normes internationales les plus strictes et aux meilleures pratiques disponibles en matière de sécurité, de respect de la vie privée et de sécurité, en tenant compte des besoins particuliers des enfants et des jeunes, et à continuer de participer aux efforts internationaux multipartites visant à prévenir et à combattre le cyberharcèlement. 

Explications de position

Avant l’adoption du texte, le Sénégal a voulu se dissocier des termes non consensuels présents dans le projet de résolution, de même que la Libye qui a exprimé des réserves après l’adoption quant à l’emploi du terme « formes multiples et conjuguées de discrimination ». 

Israël a mis en garde contre le danger du cyberharcèlement, rappelant sa résolution à cet égard. 

Le Nigéria a lui aussi déploré l’ajout du terme « formes multiples et conjuguées de discrimination ».  Rappelant en outre qu’il n’y a pas d’accord international sur le droit de l’enfant à sa vie privé, la délégation a estimé qu’il s’agissait d’une question délicate, car les enfants sont sous la protection et la garde des parents.  Le droit à la vie privée des enfants est donc lié à la vie privée de leur famille, a-t-elle estimé.  Enfin, la délégation a exprimé son désaccord sur le fait que les enfants doivent avoir des informations en lien avec la sexualité et la reproduction. 

Le Yémen s’est dissocié du terme « formes multiples et conjuguées de discriminations », cela englobant des catégories qui ne font pas l’objet du consensus international.  En outre, il ne faut pas interpréter le droit de l’enfant à la vie privée comme une restriction du droit des parents à élever leurs enfants, a mis en garde la délégation, notant qu’aucun concept international reconnu porte sur le droit à la vie privée des enfants. 

L’Iraq s’est dissocié du terme « formes multiples et conjuguées de discrimination », de même que l’Indonésie, et la Malaisie qui a relevé que ces libellés polémiques ne figuraient pas dans les textes des années précédentes.  L’Algérie a également émis des réserves au sujet de ces termes, appelant par ailleurs à ne pas interpréter le droit de l’enfant comme limitant le droit des parents à élever leurs enfants et notant en outre n’y a pas d’accord international sur le droit à la vie privé des enfants. 

À son tour, la République islamique d’Iran s’est dissociée de l’alinéa 13 de même que la Gambie qui s’est dissociée des alinéas 13 et 15 du préambule et du paragraphe 2 du dispositif, soulignant elle aussi que le droit des enfants ne peut pas être dissocié du contrôle parental.  Le Mali s’est aussi dissocié de l’expression « formes multiples et conjuguées de discrimination », précisant que tous les termes controversés seront interprétés selon la législation malienne. 

Le Saint-Siège a pris note des éléments positifs du texte mais regretté les terminologies polémiques concernant la violence et les discriminations.  Un certain temps est consacré aux débats de sujets dont on sait qu’ils sont controversés, a fait remarquer la délégation, espérant se concentrer à l’avenir sur les domaines consensuels.  Elle a aussi exprimé des réserves sur le terme « genre », rappelant que la distinction se fonde sur l’élément biologique. 

Questions relatives aux droits humains, y compris les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif des droits humains et des libertés fondamentales

Par le projet de résolution sur « Les droits humains dans l’administration de la justice » (A/C.3/77/L.31/Rev.1), présenté par l’Autriche et adopté sans vote, l’Assemblée générale réaffirmerait qu’il importe de prendre en compte les questions de genre dans le système de justice pénale en encourageant l’adoption de mesures qui soient adaptées aux besoins propres à chaque genre, pour les délinquants comme pour les victimes, et qui permettent notamment de protéger les femmes et les filles contre une nouvelle victimisation au cours des procédures pénales. 

Elle exhorterait les États à assurer la pleine, égale et véritable participation des femmes à tous les niveaux, et à garantir leur accès plein et égal à la justice sans discrimination, y compris en prenant des mesures législatives et pratiques pour supprimer les obstacles, démonter les stéréotypes liés au genre, assurer l’égalité des femmes et des filles dans l’administration de la justice et offrir aux femmes et aux filles privées de liberté une protection maximale contre toutes les formes de violence. 

De même, l’Assemblée générale soulignerait que les États doivent exercer une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques en matière d’entretien et sur les dispositions concernant la garde et le traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées (…), compte tenu, selon qu’il convient, des Principes relatifs aux entretiens efficaces dans le cadre d’enquêtes et de collecte d’informations (Principes de Méndez). 

En outre, l’Assemblée générale exhorterait tous les États à envisager de créer, de maintenir, ou de les améliorer s’ils existent déjà, des mécanismes nationaux indépendants ayant pour mission de contrôler tous les lieux de détention; et leur demanderait en outre de prêter dûment attention aux violences sexuelles et fondées sur le genre dans le contexte de la détention.  Par ailleurs, elle exhorterait les États à s’efforcer de réduire, s’il y a lieu, le recours à la détention provisoire, qui devrait être une mesure de dernier recours d’une durée aussi brève que possible.  L’Assemblée générale exhorterait également les États à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris en lien avec l’utilisation des technologies numériques pour prévenir et éliminer, en droit et dans la pratique, la discrimination à l’égard des personnes vulnérables ou marginalisées dans l’administration de la justice. 

Par ailleurs, l’Assemblée générale exhorterait les États à envisager de tenir compte, selon qu’il conviendra, des Stratégies et mesures concrètes types des Nations Unies relatives à l’élimination de la violence à l’encontre des enfants dans le contexte de la prévention du crime et de la justice pénale , à l’occasion de l’élaboration, de l’exécution, du suivi et de l’évaluation des textes, politiques, programmes, budgets et mécanismes visant à éliminer la violence contre les enfants dans ce contexte. 

Enfin, elle demanderait aux États de veiller à ce que les personnes handicapées aient un accès effectif à la justice lorsqu’ils mènent des enquêtes, engagent des poursuites et punissent les personnes jugées coupables d’avoir violé les droits humains de ces personnes. 

Explications de position

Après l’adoption du projet de résolution, les États-Unis se sont dit préoccupés par le fait que le texte appelle les États à appliquer des dispositions au titre de traités auxquels ils ne sont pas parties, y compris la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention relative aux droits de l’enfant.  Par ailleurs, la délégation a contesté la référence faite aux principes de nécessité et de proportionnalité, rappelant que de telles considérations ne sont pas reconnues de manière universelle ou internationale. Le droit international a laissé ces questions à l’appréciation des organes judiciaires et des tribunaux au sein de chaque État, a-t-elle fait valoir.  La délégation a également jugé que l’appel à créer des mécanismes indépendants pour la surveillance des lieux privés de liberté n’est pas conforme aux normes américaines.  Elle s’est par ailleurs déclarée déçue de voir que nombre de références importantes au genre ont été « diluées ou éliminées ».  S’agissant de l’âge de la responsabilité pénale, elle a signalé qu’il est variable dans les différentes juridictions des États-Unis.  Enfin, elle a exprimé des réserves quant aux libellés sur les droits de l’enfant. 

Le Saint-Siège a estimé que les enfants ayant commis des infractions ne peuvent être considérés comme des adultes au regard de la justice.  Il a ensuite fait part de ses préoccupations quant à l’usage du terme « rescapées », qu’il a qualifié d’« ambigu et controversé », lui préférant celui de « victimes ».  L’Observateur permanent a ensuite émis ses réserves quant à l’emploi du terme « genre » et de ses « dérivés », arguant que le genre ne repose que sur la différence biologique entre hommes et femmes. 

Droits humains et extrême pauvreté

Aux termes de son projet de résolution « Droits humains et extrême pauvreté » (A/C.3/77/L.46), présenté par le Pérou et adopté sans vote, l’Assemblée générale soulignerait que l’extrême  pauvreté est un problème fondamental auquel doivent s’attaquer les gouvernements, le système des Nations Unies et les institutions financières internationales, le secteur privé, y compris les entreprises, ainsi que la  société civile et les organisations communautaires à vocation sociale. 

Elle considérerait qu’une réglementation adaptée, y compris par la voie de la législation nationale, des sociétés transnationales et autres entreprises, ainsi que le fonctionnement responsable de ces sociétés et entreprises peuvent aider à mettre les retombées bénéfiques des entreprises au service de la jouissance des droits humains et des libertés fondamentales. 

L’Assemblée générale soulignerait, en outre, que les activités de développement de l’Organisation des Nations Unies doivent donner l’importance et la priorité voulues à l’élimination de la pauvreté et qu’il est essentiel de s’attaquer aux causes de la pauvreté et aux problèmes systémiques qui y sont associés en adoptant des stratégies intégrées, coordonnées et cohérentes aux niveaux national, intergouvernemental et interinstitutionnel. 

De surcroît, elle demanderait aux États Membres de concevoir des stratégies de relance fondées sur des politiques de financement durables et tenant compte des risques, soutenues par des cadres de financement nationaux intégrés conformément au Programme d’action d’Addis-Abeba issu de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement, afin d’appliquer les politiques nécessaires pour faire face à la crise économique et à la dépression découlant de la pandémie de COVID-19, amorcer le relèvement économique et réduire au minimum les effets négatifs de la pandémie sur les moyens de subsistance. 

Par ailleurs, elle demanderait aux États de mettre en œuvre des politiques de protection sociale tenant compte des questions de genre, ainsi que des politiques budgétaires contribuant à promouvoir l’égalité des genres et l’autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles. 

Enfin, l’Assemblée générale engagerait les États Membres, dans leurs efforts pour éliminer la discrimination, à garantir que leur cadre juridique, le cas échéant, n’établit aucune distinction fondée sur le statut socioéconomique, et à prendre des mesures pour effectivement lever les obstacles auxquels les personnes pauvres se heurtent dans des domaines tels que le logement, l’emploi, l’éducation, la santé et d’autres services sociaux. 

Explication de position

Après l’adoption du projet de résolution, les États-Unis ont regretté que le texte ne comporte pas d’éléments sur la manière dont les conflits peuvent mener à une pauvreté extrême.  La délégation a cité, à cet égard, le Secrétaire général de l’ONU, selon lequel 1,7 milliard de personnes, soit un cinquième de la population mondiale, pourraient tomber dans l’extrême pauvreté en raison des retombées du conflit en Ukraine.  Par ailleurs, la délégation a relevé que certains éléments du texte ne font pas l’objet d’un consensus au niveau international ou font référence à des textes négociés au sein de l’Assemblée générale sans liens avec les obligations et engagements des États-Unis, au regard notamment du commerce international.  Elle a renvoyé à sa déclaration générale qui sera mise en ligne sur le portail de la mission américaine. 

Prévention du crime et justice pénale

Par le projet de résolution intitulé « Action préventive et lutte contre la corruption et le transfert du produit de la corruption, facilitation du recouvrement des avoirs et restitution de ces avoirs à leurs propriétaires légitimes, notamment aux pays d’origine, conformément à la Convention des Nations Unies contre la corruption » (A/C.3/77/L.7/Rev.1), présenté par la Colombie et adopté par consensus, l’Assemblée générale exhorterait les États Membres à combattre et à réprimer la corruption sous toutes ses formes ainsi que le blanchiment du produit de la corruption, à empêcher l’acquisition, le transfert et le blanchiment du produit de la corruption et à œuvrer pour que ces avoirs soient promptement recouvrés et restitués.  De même, elle inviterait à nouveau la Conférence des États parties à la Convention à recenser les lacunes et problèmes touchant l’application de la Convention en ayant à l’esprit les résultats du Mécanisme d’examen de l’application. 

L’Assemblée générale prierait instamment les États parties à la Convention de lever les obstacles au recouvrement des avoirs et les encouragerait à limiter les immunités juridiques internes.  De plus, elle les exhorterait à s’assurer que les procédures de coopération internationale prévoient la saisie ou l’immobilisation des avoirs pendant une durée suffisante pour que ces avoirs soient pleinement préservés dans l’attente de l’ouverture d’une procédure de confiscation dans un autre État. 

Elle exhorterait en outre les États parties à la Convention à faire en sorte que les services de répression et autres organismes compétents disposent d’informations fiables, exactes et actualisées sur la propriété effective des entreprises et d’autres personnes morales, facilitant ainsi les procédures d’enquête et l’exécution des demandes. 

De même, elle prierait instamment les États parties à la Convention d’examiner rapidement les demandes d’entraide judiciaire aux fins de l’identification, du gel, de la localisation ou du recouvrement du produit de la corruption, et d’appliquer effectivement toutes les résolutions et décisions de la Conférence des États parties, dont la résolution 7/8 sur la corruption dans le sport et la résolution 8/4 sur la protection du sport contre la corruption. 

Par ce texte, l’Assemblée générale demanderait en outre aux États parties d’adopter ou de renforcer, selon qu’il conviendra, les mesures de lutte contre la corruption nécessaires au respect des lois et règlements applicables par le secteur privé, ainsi que d’appuyer et de promouvoir les initiatives propres à donner aux entités du secteur privé les moyens d’exercer leurs activités en toute intégrité et transparence, en particulier pour ce qui est de leurs relations avec le secteur public et d’autres parties prenantes.  Elle prierait enfin l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, dans le cadre de l’Initiative pour le recouvrement des avoirs volés, de développer les connaissances et la collecte de données au niveau mondial concernant le recouvrement et la restitution d’avoirs. 

Explications de position

À l’issue de l’adoption du texte, les États-Unis ont exprimé leur préoccupation devant le fait que le groupe n’a pas pu se mettre d’accord sur plusieurs demandes de révision, ce qui aurait pu corriger la mauvaise interprétation de la Convention contre la corruption. 

L’Arabie saoudite a souligné l’importance particulière de ce projet de résolution, estimant toutefois que les dispositions figurant au paragraphe 21 du dispositif, et conformément à l’article 5 de la Convention contre la corruption, ne constituent pas une base juridique valable et a annoncé ainsi s’en dissocier. 

Promotion et protection des droits de l’enfant

Par le projet de résolution sur les « Mariages d’enfants, mariages précoces et mariages forcés » (A/C.3/77/L.19/Rev.1), présenté par la Zambie et adopté sans vote, l’Assemblée générale exhorterait les États à abroger ou modifier les lois et à supprimer toutes les dispositions qui permettent aux auteurs de viol et d’actes d’exploitation et d’atteintes sexuelles ou d’enlèvement d’échapper aux poursuites et aux sanctions en épousant leur victime, et qui permettent, justifient ou entraînent les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, et d’engager, notamment les chefs traditionnels et religieux, à éliminer les pratiques traditionnelles qui résolvent les cas de violence sexuelle par le mariage. 

De plus, elle exhorterait les États Membres à assurer l’accès aux services et à l’enseignement pour les femmes qui ont été mariées quand elles étaient enfants et pour les filles qui sont mariées, enceintes ou mères.  Elle encouragerait aussi les États à atténuer les effets des fermetures d’écoles passées et présentes, en particulier pour les apprenants qui comptent parmi les plus pauvres, les plus marginalisés et les plus vulnérables, notamment les filles. 

Par ailleurs, elle exhorterait les États à respecter tous les droits humains et toutes les libertés fondamentales des femmes et des filles en situation de handicap, en reconnaissant que le handicap peut accroître le risque de mariage d’enfants, de mariage précoce et de mariage forcé, et l’importance de veiller à ce que les services et les programmes conçus pour prévenir et éliminer les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés incluent les femmes et les filles handicapées et leur soient accessibles. 

Elle demanderait en outre aux États de surveiller les effets de la crise de la COVID-19 sur la prévalence des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés eu égard à l’évolution de la dynamique et des normes de genre, au non-retour à l’école, aux entraves à l’accès aux services, aux taux de grossesses non désirées ou non planifiées et à la situation économique des familles. 

Enfin, l’Assemblée générale exhorterait les États à reconnaître et faire savoir que les changements climatiques, la dégradation de l’environnement et les catastrophes ont des effets distincts et disproportionnés sur les femmes et les filles, en particulier celles qui sont exposées à la violence, à la discrimination et au déplacement, à des pratiques néfastes, y compris les mariages d’enfants, les mariages précoces, et à l’insécurité foncière, économique et alimentaire et veiller à ce que les politiques et les programmes tiennent compte de ces effets. 

Incidences budgétaires

Le Secrétaire de la Commission a indiqué que ce projet de résolution, s’il est adopté par l’Assemblée générale, aura des incidences sur le budget-programme de 2024.  Il a ainsi précisé que, conformément à la demande contenue au paragraphe 43 du dispositif, par lequel l’Assemblée générale prierait le Secrétaire général de lui présenter, avant la fin de sa soixante-dix-huitième session, un rapport d’ensemble fondé sur l’observation des faits concernant les progrès accomplis à l’échelle mondiale en vue de l’élimination des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés, les préparatifs du rapport évoqué nécessiteraient des ressources uniques supplémentaires d’un montant de 73 300 dollars en 2024. 

Déclarations et explications de position

Avant l’adoption du projet de résolution, le Japon a réagi à l’annonce du Secrétaire de la Commission en affirmant découvrir que ce projet de résolution aura des incidences budgétaires.  Conséquemment, il a fait part de sa décision de se retirer de la liste des coauteurs du texte.  Il a exprimé sa déception quant à la « manière opportuniste » dont cette question a été gérée par les Nations Unies, tout en déclarant de ne pas vouloir briser le consensus pour autant.

Dans le droit fil de l’intervention du Japon, les États-Unis se sont interrogés sur cette « incidence de dernière minute », dont même les coauteurs n’étaient pas informés. La délégation a souhaité obtenir des précisions, tout en indiquant être en contact avec la Cinquième Commission.

En réponse, le Secrétaire de la Commission a indiqué que cette question a été préparée par le Bureau du budget, en concertation avec les bureaux pertinents du Secrétariat, et qu’il a été décidé que ces ressources seraient nécessaires.

El Salvador, coauteur du projet de résolution, s’est pour sa part félicité de son contenu, et notamment que l’éducation de la petite enfance soit présentée comme un élément essentiel de prévention et de riposte aux mariages des enfants, aux mariages précoces et aux mariage forcés. 

Après l’adoption, le Canada, coauteur lui aussi, s’est félicité du contenu du projet de résolution.  Il s’est également réjoui que ce texte fasse consensus, tout en disant comprendre la position exprimée par le Japon. 

L’Argentine a salué le fait que le projet de résolution mette l’accent sur l’éducation comme outil de prévention des mariages des enfants, des mariages précoces et des mariage forcés.  Elle s’est également félicitée des références faites aux discriminations multiples et intersectionnelles, ainsi qu’aux besoins spécifiques des filles.   

La Nouvelle-Zélande, qui parlait aussi au nom de l’Australie, du Liechtenstein, de l’Islande, de la Norvège et de la Suisse, s’est réjouie que le texte mentionne les formes multiples et croisées de discrimination.  Elle a toutefois regretté l’absence de termes « plus forts » quant à l’accès à la santé sexuelle et reproductive, et à l’éducation sexuelle.  De son côté, la République tchèque, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a salué l’accent mis sur les plus marginalisés.  Pour la délégation, l’adoption par consensus de ce projet de résolution et le nombre important de coauteurs sont autant de signes de sa réussite. 

Tout en saluant le texte dans son ensemble, un nombre important de pays a émis des réserves concernant des libellés jugés non consensuels, notamment les formes multiples et croisées de discrimination, le concept de violence sexiste fondée sur le genre ou encore l’accès à la santé sexuelle et reproductive.  Le Sénégal s’est ainsi dissocié des paragraphes « controversés » en arguant que le genre se base sur les rapports sociaux entre hommes et femmes.  La Libye a exprimé des réserves au sujet des paragraphes 20 du préambule et 24 du dispositif, au motif qu’elle ne peut accepter le principe de l’avortement, qui est en contradiction avec le principe du droit à la vie de tous les enfants.  À son tour, l’Iraq a déclaré que le concept des formes multiples et croisées de discrimination et concepts mentionnés dans paragraphe 13 du préambule et 25 du dispositif ne peuvent faire l’objet d’un consensus international.  Bien que coauteure du texte, l’Algérie s’est, elle aussi, dissociée des « concepts controversés », soulignant l’importance du rôle de la famille et des communautés locales dans l’élimination des pratiques nocives.  Quant à la santé sexuelle et reproductive, elle se limite à ce qui est défini dans le Programme d’action adopté en 1994 par la Conférence internationale sur la population et le développement, a ajouté la délégation, selon laquelle les violences fondées sur le genre correspondent à des violences sexistes contre les hommes, les femmes ou les enfants. 

Le Nicaragua a axé ses réserves sur la question des droits sexuels et reproductifs, qui ne peuvent promouvoir l’avortement comme moyen de contrôle des naissances.  À sa suite, l’Indonésie a également regretté les références ne faisant pas l’objet d’un consensus universel.  L’Arabie saoudite, prenant la parole au nom du Conseil de coopération du Golfe, a émis des réserves quant à la compatibilité des soins et services de santé sexuelle avec les traditions sociétales des pays qu’elle représente.  La République islamique d’Iran a formé le vœu qu’un texte équilibré, prenant en compte les particularités culturelles des États Membres, puisse un jour être élaboré.  Elle a regretté notamment le libellé non consensuel du paragraphe 20 du préambule, à l’instar du Yémen, qui s’est également dissocié des concepts de violence fondée sur le genre et de formes multiples et croisées de discrimination.  La Malaisie a, elle aussi, pris ses distances avec ce dernier concept, regrettant son ajout cette année malgré une opposition assez large d’États Membres.  L’Égypte s’est quant à elle félicitée des lois votées par son pays en vue de faire reculer les mariages des enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, affirmant se conformer aux dispositions qui font internationalement consensus. 

La République arabe syrienne s’est dissociée des paragraphes « controversés » et a souscrit à l’intervention de l’Algérie, tout comme la Jordanie, qui a précisé que les droits sexuels et génésiques et la santé reproductive sont des questions examinées conformément aux engagements nationaux.  Une position partagée par le Nigéria, pour qui ces questions doivent être traitées par les autorités compétentes des États, de même qu’il importe de respecter le droit des parents de choisir la manière dont ils éduquent leurs enfants.  Le Mali s’est, lui, dissocié des références faites aux formes multiples et croisées de discrimination, les jugeant non conformes aux normes du pays.  Dans le même ordre d’idées, la Fédération de Russie a regretté l’apparition de concepts non acceptés par tous, tels que les formes multiples et croisées de discrimination, l’approche fondée sur le genre et l’acception des adolescents comme une catégorie juridique distincte. 

L’Uruguay a, pour sa part, déclaré soutenir le texte, tout en estimant que la question soulevée devrait être abordée sous le point 26 de l’ordre du jour relatif à la promotion de la femme.  Pour cette raison, la délégation a indiqué n’avoir pu se porter coauteure du projet de résolution.  Enfin, le Saint-Siège a regretté plusieurs libellés « polémiques », comme ceux concernant l’accès aux soins de santé reproductifs, et a espéré que, lors des prochaines éditions du texte, l’accent sera mis sur des questions plus consensuelles.  La délégation a fait valoir que, selon elle, le concept de santé sexuelle et génésique est lié à une notion holistique de la santé qui exclut l’avortement.  Elle a également insisté sur le droit des parents à choisir l’éducation de leurs enfants, conformément à la Déclaration sur les droits de l’enfant. 

Prévention du crime et justice pénale

Aux termes du projet de résolution intitulé « Adoption de mesures efficaces et renforcement et promotion de la coopération internationale concernant le don et la transplantation d’organes pour prévenir et combattre la traite des personnes à des fins de prélèvement d’organes et de trafic d’organes humains » (A/C.3/77/L.8/Rev.1), présenté par le Guatemala et adopté par consensus, l’Assemblée générale demanderait aux États d’ériger en infraction pénale la traite des personnes aux fins du prélèvement d’organes, de prévenir et de combattre cette forme spécifique de traite, de protéger et d’aider les personnes qui en sont victimes et de promouvoir la coopération. 

Elle prierait instamment les États Membres d’adopter les mesures législatives voulues pour garantir que le don d’organes est soumis à des critères cliniques et à des normes déontologiques, qu’il repose sur le consentement libre et éclairé du donneur et qu’il constitue un acte altruiste sans contrepartie financière.  Elle les prierait aussi de garantir un accès équitable et sans discrimination à la transplantation d’organes humains, de faire plus largement connaître et comprendre l’intérêt des dons volontaires et non rémunérés d’organes prélevés sur des personnes vivantes ou décédées, et de mettre en place un régime réglementaire de surveillance des installations médicales et des professionnels de la santé qui s’occupent du prélèvement et de la transplantation d’organes humains. 

Dans ce cadre, l’Assemblée générale exhorterait vivement les États Membres à identifier et poursuivre tous les acteurs qui se livrent sciemment à la traite des personnes en vue du prélèvement d’organes et à établir des cadres permettant aux professionnels de la santé de signaler aux autorités compétentes tout cas avéré ou suspecté de traite de personnes à des fins de prélèvement d’organes et de trafic d’organes humains. 

Elle exhorterait également les États Membres à veiller à ce que les autorités sanitaires et/ou les compagnies d’assurance ne remboursent pas les coûts des procédures de transplantation qui ont eu lieu dans le contexte de la traite des personnes.  Enfin, elle les exhorterait à continuer de définir des moyens de protéger les victimes de la traite des personnes à des fins de prélèvement d’organes et de rendre les personnes qui vendent leurs organes moins vulnérables. 

Explications de position

Avant l’adoption du texte, l’Espagne a plaidé en faveur d’un modèle de transplantation fondé sur les principes de l’OMS et l’inclusion de ces principes dans les politiques sanitaires.  La délégation s’est dite convaincue qu’un système solide de transplantation est la meilleure manière de prévenir la traite des êtres humains à des fins de trafic d’organes, et a déploré être le seul État à avoir approuvé le programme sur les transplantations de l’OMS. 

Suite à l’adoption du texte, le Bélarus s’est félicité de l’adoption par consensus de ce projet de résolution qui contribue à l’harmonisation des régimes juridiques, soulignant le rôle essentiel des travailleurs dans le secteur sanitaire.  Un des éléments importants du texte est l’appel à la poursuite du soutien technique apporté aux États Membres par différentes instances dont l’OMS et l’ONUDC, a noté la délégation.

Les États-Unis se sont dit préoccupés face à l’augmentation du marché noir d’organes approvisionnés par des personnes forcées de prélever des organes ou de voir leurs organes prélevés.  Les situations de crise telles que les conflits ne doivent pas être exclues des facteurs exacerbant la situation, a estimé la délégation. 

Renforcement du programme des Nations Unies

Aux termes du projet de résolution « Renforcement du programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, surtout de ses capacités de coopération technique » (A/C.3/77/L.12/Rev.1), présenté par l’Italie et adopté par consensus, l’Assemblée générale prierait tous les États Membres de prendre en compte la Déclaration de Kyoto visant à faire progresser la prévention de la criminalité, la justice pénale et l’état de droit vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, adoptée lors du débat de haut niveau du quatorzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, tenu à Kyoto (Japon) du 7 au 12 mars 2021, dans l’élaboration de leur législation et de leurs directives.  De plus, elle engagerait les États Membres, agissant conformément à leur droit interne, à renforcer les capacités de leur système respectif de justice pénale de façon à ce qu’il soit mieux à même d’enquêter sur toutes les formes de criminalité, d’en poursuivre les auteurs et de les punir. 

Elle encouragerait les États à continuer de faire fond sur les résultats engrangés dans d’importantes enceintes comme le débat de haut niveau qu’elle a tenu le 6 juin 2022 sur le thème « Renforcer la place des jeunes dans les politiques de prévention du crime ».  Elle inviterait également son président à tenir durant la soixante-dix-septième session un débat de haut niveau sur le thème « Égal accès de tous à la justice: faire avancer les réformes pour promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques, justes et inclusives ». 

Par ce texte, doté d’un dispositif de 85 paragraphes, l’Assemblée générale demanderait également aux États Membres de mettre en place une législation nationale ou de modifier celle qui existe de manière à ce que les crimes portant atteinte à l’environnement qui relèvent du champ d’application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée soient considérés comme des infractions principales (…) et puissent donner lieu à une action en justice sous le régime de la législation nationale relative au produit du crime.  De même, elle encouragerait les États parties à s’accorder mutuellement l’assistance la plus large possible, y compris l’entraide judiciaire, afin de prévenir les crimes transnationaux organisés qui portent atteinte à l’environnement (…), de mener des enquêtes et d’engager des poursuites à leur sujet. 

Par ailleurs, elle prierait l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime d’intensifier ses efforts pour fournir une assistance technique aux États Membres qui en font la demande en vue de leur donner plus de moyens en matière d’élaboration et de mise en œuvre de programmes d’assistance et de soutien aux victimes du terrorisme, y compris les victimes de violences sexuelles et fondées sur le genre commises par des terroristes. 

Explication de position

À l’issue de l’adoption du texte, l’Australie, au nom d’un groupe de pays, a estimé que le renforcement de la prévention du crime et du système de justice pénale nécessite une coopération solide entre les pays.  Elle a salué l’adoption par consensus de ce texte qui fait mention de la cybercriminalité, expliquant que le libellé alternatif présenté dans le cadre des négociations n’a jamais obtenu le consensus.  Elle a estimé que le Comité ad hoc intergouvernemental chargé à l’élaboration d’une convention internationale sur la lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) à des fins criminelles est le lieu idoine pour discuter des questions de terminologies, considérant que ce n’est pas à la Troisième Commission d’établir un précédent.  Enfin, elle a regretté qu’il n’ait pas été possible d’utiliser le libellé « connaissant l’effet de la pandémie s’agissant des risques de violences sexistes pour les femmes », déplorant une occasion ratée.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale procède à une série d’élections et de nominations aux sièges devenus vacants dans divers organes subsidiaires

Soixante-dix-septième session,
34e séance plénière – matin
AG/12471

L’Assemblée générale procède à une série d’élections et de nominations aux sièges devenus vacants dans divers organes subsidiaires

L’Assemblée générale a procédé ce matin à l’élection et à la nomination des membres de certains de ses organes subsidiaires.  Il a fallu un second tour de scrutin pour désigner les juges au Tribunal d’appel des Nations Unies et au Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies.  Elle a également entériné des nominations effectuées par la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, dont celle du Président de la Commission de la fonction publique internationale.

Tout d’abord, l’Assemblée générale a déclaré les États désignés par le Conseil économique et social, à savoir l’Argentine, la Chine, le Libéria, le Maroc, les Philippines, la République de Corée et la Tunisie, élus au Comité du programme et de la coordination pour un mandat de trois ans à compter du 1er janvier 2023.  Conformément à la résolution 2008 (LX) du Conseil économique et social, et à la décision 42/450 de l’Assemblée générale, les candidatures aux sièges devenus vacants au Comité du programme et de la coordination sont présentées par le Conseil, et les membres sont élus par l’Assemblée.

L’Assemblée a ensuite pris note du fait qu’après consultation des présidents des Groupes des États d’Afrique, des États d’Asie-Pacifique et des États d’Europe occidentale et autres États, le Président de l’Assemblée générale a nommé l’Autriche, la Chine, Djibouti, l’Égypte, les États-Unis d’Amérique et le Japon au Comité des conférences pour une période de trois ans à compter du 1er janvier 2023.  Il reste à nommer un membre du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes pour un mandat de trois ans prenant effet le 1er janvier 2023.  Le même groupe d’États devra proposer également trois membres, dont un pour un mandat commençant à la date de nomination et expirant le 31 décembre 2023, et deux pour un mandat prenant effet à la date de nomination et expirant le 31 décembre 2024. 

Les mandats de quatre juges du Tribunal d’appel des Nations Unies venant à expiration le 30 juin 2023, l’Assemblée générale a procédé à l’élection des quatre juges devant les remplacer pour un mandat de sept ans à compter du 1er juillet 2023.  Ainsi, au premier tour du scrutin, l’Assemblée a élu Nassib Ziadé (Liban/Chili) avec 108 voix, Abdelmohsen Ahmed Sheha (Égypte) avec 101 voix et Katharine Savage (Afrique du Sud) avec 100 voix.  L’Assemblée générale a dû procéder à un second tour de scrutin pour désigner le dernier juge.  Conformément à l’article 94 du Règlement intérieur de l’Assemblée générale, les deux candidats ayant obtenu le plus de voix au premier tour, mais n’ayant pas eu la majorité requise de 94 voix ont été sélectionnés.  Au deuxième tour, Leslie Formine Forbang (Cameroun) a obtenu 99 voix, surplantant ainsi Thomas Pastor (Allemagne) qui a reçu 89 voix.

En outre, un poste de magistrat au Tribunal d’appel est actuellement vacant à la suite de la démission du juge Jean-François Neven (Belgique) depuis le 10 janvier 2022.  Son mandat expirant le 30 juin 2026, l’Assemblée a élu Gao Xiaoli (Chine) avec 109 voix.  Il a devancé Jacqueline Cornelius (Barbade) qui a obtenu 79 voix.

Étant donné qu’au 30 juin 2023, le mandat de trois juges du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies expirera, le Conseil de justice interne a recommandé à l’Assemblée trois candidats pour le poste à temps plein de Genève, quatre candidats pour le poste à temps plein de Nairobi et deux candidats pour le poste vacant à mi-temps.  L’Assemblée générale a ainsi élu Xiangzhuang Sun (Chine) avec 99 voix comme juge à plein temps basé à Genève, tandis que Solomon Waktolla (Éthiopie) a obtenu 97 voix pour le poste de juge à mi-temps qui siégerait pendant six mois chaque année dans un ou plusieurs des trois greffes du Tribunal du contentieux administratif, sur décision de la Présidente du Tribunal, pour un mandat de sept ans à compter du 1er juillet 2023. 

Pour le dernier poste de juge à plein temps basé à Nairobi, c’est au second tour du scrutin que Sean Daniel Wallace (États-Unis d’Amérique) est passé avec 96 voix, devançant Deepthi Amaratunga (Sri Lanka) qui n’a obtenu que 84 voix.  Pour rappel, les juges du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies sont nommés par l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de justice interne, conformément à la résolution 62/228 de l’Assemblée.  Il est proscrit d’avoir deux juges de la même nationalité, et les États votants doivent dûment tenir compte de la répartition géographique et de l’équilibre entre les sexes.

Rapports de la Cinquième Commission

Par ailleurs, l’Assemblée générale s’est penchée sur des rapports de la Cinquième Commission, entérinant toutes les recommandations de la Commission.  Elle a d’abord confirmé la nomination des membres du Comité consultatif sur les questions administratives et budgétaires (CCQAB).  Ainsi, pour un mandat de trois ans prenant effet le 1er janvier 2023, l’Assemblée a nommé: Udo Fenchel (Allemagne); Olivio Fermin (République dominicaine); Carlo Jacobucci (Italie); Ji Haojun (Chine); Ji-sun Jun (République de Corée); et Matsuda Yukiko (Japon).  De même, elle a confirmé la nomination de Stephani Scheer (États-Unis d’Amérique) et Surendra Kumar Adhana (Inde) pour un mandat prenant effet le 15 novembre 2022 et se terminant le 31 décembre 2023.

L’Assemblée générale a ensuite nommé ou renommé les personnes suivantes en tant que membres du Comité des contributions pour un mandat de trois ans commençant le 1er janvier 2023: Cheikh Tidiane Dème (Sénégal); Gordon Eckersley (Australie); Helena Concepción Felip Salazar (Paraguay); Bernardo Greiver del Hoyo (Uruguay); Marcel Jullier (Suisse); et Joseph Masila (Kenya).  Elle a également confirmé la nomination par le Secrétaire général de Jens Fricke (Allemagne), Michael Klein (États-Unis d’Amérique) et Luciane Ribeiro (Brésil) en tant que membres réguliers du Comité des placements, pour un mandat de trois ans à compter du 1er janvier 2023.  L’Assemblée a aussi confirmé la reconduction par le Secrétaire général de Simon Jiang (Chine) en tant que membre régulier du Comité des placements pour un mandat d’un an prenant effet le 1er janvier 2023, avant de confirmer celle de Macky Tall (Mali) en tant que membre ad hoc du même Comité, et pour une durée d’un an à compter du 1er janvier 2023.

À la Commission de la fonction publique internationale, l’Assemblée générale a entériné les choix de la Cinquième Commission en nommant ou renommant Andrew Gbebay Bangali (Sierra Leone); Xavier Bellmont Roldán (Espagne); Ali Kurer (Libye); João Vargas (Brésil); et Boguslaw Winid (Pologne) en tant que membres, pour un mandat de quatre ans à compter du 1er janvier 2023.  De même, l’Assemblée a désigné Larbi Djacta (Algérie) comme président, pour une période de quatre ans à compter du 1er janvier 2023, sous réserve d’une prolongation de son mandat de membre de la Commission de la fonction publique internationale.

Par ailleurs, l’Assemblée générale a nommé Anton Kosyanenko (Fédération de Russie) et Suresh Raj Sharma (Népal) en tant que membres de Comité consultatif indépendant pour les questions d’audit, pour un mandat de trois ans à compter du 1er janvier 2023.  Elle a encore suivi la recommandation de sa Cinquième Commission en nommant Yamada Jun (Japon) en tant que membre du Comité des pensions du personnel de l’Organisation des Nations Unies, pour un mandat prenant effet le 15 novembre 2022 et se terminant le 31 décembre 2024. 

Enfin, le Président du Corps commun d’inspection ayant informé le Chef de cabinet du Secrétaire général de la démission de l’inspectrice Kamioka Keiko (Japon), avec effet au 31 décembre 2022, le Président de l’Assemblée générale a procédé aux consultations nécessaires avant de communiquer à l’Assemblée les informations reçues du Président du Groupe des États d’Asie-Pacifique qui a désigné le Japon pour proposer un candidat pour le poste vacant.  Le Président de l’Assemblée générale devra donc soumettre le nom du candidat que le pays lui enverra, afin que celui-ci soit formellement nommé au Corps commun d’inspection pour remplacer l’inspectrice qui était membre depuis le 1er janvier 2018, et dont le mandat aurait dû expirer le 31 décembre 2024.  Conformément à l’article 4, paragraphe 2, du Statut du Corps commun d’inspection, si une vacance intervient à moins de trois ans de la fin d’un mandat, alors la personne nommée aura droit à un mandat de cinq ans.  Eu égard à cette disposition, le remplaçant devrait siéger au sein de cette instance du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Cinquième Commission demande au Bureau des affaires juridiques un avis sur des amendements au statut de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI)

Soixante-dix-septième session,
15e séance plénière - matin
AG/AB/4403

La Cinquième Commission demande au Bureau des affaires juridiques un avis sur des amendements au statut de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI)

Pour régler la question de la coexistence à Genève de deux coefficients pour calculer l’adaptation des salaires des fonctionnaires de l’ONU au coût de la vie, la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a demandé aujourd’hui l’avis du Bureau des affaires juridiques sur les amendements qu’elle recommande à l’Assemblée générale d’apporter au statut de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI). 

Attendant cet avis le 18 novembre au plus tard, la Cinquième Commission propose d’amender l’article 10 b) du statut de la CFPI, qui stipule que cette dernière fait à l’Assemblée générale des recommandations touchant le barème des traitements pour les fonctionnaires de la catégorie des administrateurs et des catégories supérieures.  Mais la Cinquième Commission propose après le mot « traitement », la suppression de « et des ajustements (indemnités de poste ou déduction ».  Quant à l’article 11 c) qui dit que la CFPI fixe l’indemnité de poste applicable à chaque lieu d’affection, la Cinquième Commission veut faire supprimer la partie qui suit: « le classement des lieux d’affectation aux fins de l’application des ajustements (indemnités de poste ou déductions) ». 

Elle demande donc au Bureau des affaires juridiques si, ce faisant, elle préserve bien le mode de fonctionnement actuel, sans modifier les pouvoirs de l’Assemblée générale ni ceux de la Commission.  Il est à craindre, s’explique-t-elle, que les amendements n’élargissent les pouvoirs de la Commission sur les questions ayant trait aux coefficients d’ajustement, par exemple, en l’habilitant à fixer leur valeur ou à déterminer si l’indemnité de poste fait partie de l’ensemble des prestations.  

Quel est l’avis du Bureau juridique sur la manière dont ce transfert éventuel et non intentionnel de pouvoirs pourrait être limité et sur la question de savoir si l’ajout des libellés « La structure de rémunération et » ou « Le régime des traitements » à l’article 10 b) ou le remplacement de « L’indemnité de poste » par « Le coefficient d’ajustement » à l’article 11 c) préserverait le mode de fonctionnement actuel?  Au cas où les formulations envisagées auraient une incidence sur d’autres pouvoirs de l’Assemblée générale ou de la Commission, le Bureau des affaires juridiques peut-il donner son avis sur les moyens de régler ce problème?  Les amendements posent-ils d’autres problèmes juridiques?  Répondent-ils suffisamment aux préoccupations soulevées dans les décisions du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Travail?  

Saisi par des fonctionnaires de cinq organisations du régime commun des Nations Unies, basées à Genève, ce Tribunal a annulé en 2017, la décision de la CFPI sur un nouveau coefficient d’ajustement de poste, arguant qu’elle a dépassé son mandat.  Un avis contraire est venu du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies auquel le Tribunal d’appel a donné raison et après lui, l’Assemblée générale.  En conséquence, les cinq organisations n’appliquent toujours pas le coefficient de la CFPI qui, inférieur au précédent, s’est traduit par une réduction de la rémunération des fonctionnaires de la catégorie des administrateurs et des catégories supérieures.   

La Cinquième Commission, qui a aussi examiné aujourd’hui d’autres recommandations de la CFPI et le cours des projets de réfection des bureaux de l’ONU à Bangkok, Genève et Nairobi, a prévu une autre séance publique jeudi 17 novembre, à partir de 10 heures, pour examiner le rapport du Comité des commissaires aux comptes. 

PROJET DE BUDGET-PROGRAMME POUR 2023

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur le projet de mise aux normes parasismiques et de remplacement des équipements en fin de vie au siège de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique, à Bangkok (A/77/7/Add.12) 

Pour l’établissement de son rapport, le Comité consultatif a examiné celui du Secrétaire général (A/77/330).  Il sait gré au pays hôte de l’appui qu’il continue d’apporter à la CESAP et compte que le Secrétaire général continuera de collaborer avec lui et les États Membres pour mener à terme ce projet en temps voulu.  Il encourage le Secrétaire général à poursuivre ses efforts pour mobiliser des contributions volontaires et des contributions en nature.  Le Comité note que le total des dépenses prévues pour 2023 s’élève à 14 694 100 dollars, le Secrétaire général indiquant que le solde non utilisé prévu, au 31 juillet, de 3 791 700 dollars à la fin de 2022 sera reporté pour compenser une partie des ressources nécessaires pour 2023.  Le montant net des ressources demandées pour 2023 s’établira donc à 10 902 400 dollars. 

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’état d’avancement du remplacement des bâtiments A à J de l’Office des Nations Unies à Nairobi (A/77/7/Add.14) 

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif a examiné une version préliminaire du rapport du Secrétaire général (A/77/349 et A/77/349/Corr.1) qui indique que les trois composantes du projet devraient être achevées d’ici à la fin de 2024, dans le respect du calendrier global approuvé, et que les activités de clôture du projet devraient être terminées d’ici à la fin de 2025.  Il précise également que, compte tenu du solde de 11 456 500 dollars qui devait rester inutilisé à la fin de l’année 2022, le montant net des ressources nécessaires au projet pour 2023 s’élève à 13 196 200 dollars. 

Le Comité consultatif recommande à l’Assemblée d’approuver l’ouverture de ce crédit, la réaffectation d’un poste d’ingénieur administrateur recruté(e) sur le plan national, qui deviendrait un poste de fonctionnaire d’administration sur le plan national à l’Office des Nations Unies à Nairobi; et le maintien d’un emploi d’agent responsable de la sûreté et de la sécurité (P-3) de janvier 2023 jusqu’à l’achèvement du projet. 

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur le plan stratégique patrimonial de l’Office des Nations Unies à Genève (A/77/7/Add.13) 

Le Comité consultatif, qui a examiné le rapport du Secrétaire général (A/77/492), se félicite des progrès accomplis, notamment en ce qui concerne la rénovation des bâtiments historiques des années 1930 et 1950 et l’utilisation des technologies les plus modernes pour faciliter la participation à distance à des conférences multilingues, et compte que le Secrétaire général fera le point à l’Assemblée générale, notamment sur la finalisation du contrat relatif au bâtiment E. 

Le Comité consultatif prend note de la possibilité que tous les éléments du cahier des charges initial ne soient pas exécutés dans les limites du budget approuvé et compte que des efforts continueront d’être faits pour remplir le cahier des charge prévu et approuvé et respecter le coût global approuvé.  Il prend note du retard et des prochaines étapes du calendrier du projet, et compte que tout sera mis en œuvre pour assurer l’achèvement du projet dans les délais approuvés. 

La totalité du montant de 125,1 millions de francs suisses provenant du prêt à taux zéro consenti par le pays hôte a été dépensée pour le nouveau bâtiment H et le remboursement sur 50 ans du prêt a commencé en décembre 2021.  Le remboursement de la partie du prêt destinée à la rénovation devrait commencer à la fin du mois de décembre 2025, c’est-à-dire l’année durant laquelle les travaux de rénovation du bâtiment E devraient être achevés. 

Au fait de ces informations, le Comité consultatif recommande à l’Assemblée générale de prendre note du rapport dans lequel elle est invitée à arrêter les modalités d’ouverture des crédits et de mise en recouvrement des contributions et à décider de la monnaie à utiliser dans le calcul des crédits et des contributions; et à approuver la création d’un compte spécial pluriannuel pour le projet et les prévisions de dépenses concernant les activités de conseil relatives à la mise à jour de la stratégie de valorisation, d’un montant de 75 000 dollars pour 2023, ainsi que la réduction correspondante du montant total des prévisions de recettes à ramener de 22 352 200 dollars à 22 277 200 dollars. 

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. JIBRAN KHAN DURRANI (Pakistan) a souligné l’importance de terminer dans les temps impartis le projet à Bangkok.  Il a estimé que les consultations entre la CESAP et les parties prenantes ont atténué le risque d’autres modifications tardives susceptibles d’entraîner des coûts supplémentaires.  Il a souligné l’importance de la gouvernance, du contrôle, du rapport coût-efficacité, de la transparence et de la responsabilité pour rester dans les limites du budget et du calendrier approuvés.  S’agissant de l’Office des Nations Unies à Nairobi (ONUN), le représentant s’est dit préoccupé par les retards dans deux composantes et a encouragé le Secrétaire général à déployer tous les efforts pour éviter les retards.  Il a aussi insisté sur une supervision et une coordination efficaces pour pouvoir terminer le projet dans les délais. 

En ce qui concerne le plan stratégique patrimonial de l’Office des Nations Unies à Genève, le représentant a demandé un suivi étroit, une gestion rigoureuse, un contrôle efficace et des mesures complètes d’atténuation des risques pour assurer l’avancement et l’achèvement du projet dans le cadre, le calendrier et le budget approuvés.  Il a dit être préoccupé par l’absence de décision sur la mise en recouvrement des contributions, compte tenu de l’ampleur et de la complexité du projet.  Il a enfin dit craindre la possible baisse des revenus issus de la stratégie de valorisation avec le retrait de la proposition de bail du site des Feuillantines. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Mme HO (Singapour) a souligné que la CESAP est la plus grande des commissions régionales des Nations Unies, qui permettent la mise en œuvre régionale des objectifs de développement convenus au niveau international.  Après avoir soutenu les efforts continus du pays hôte, elle s’est félicitée d’une économie de 10,9 millions de dollars et du fait que l’utilisation des locaux transitoires ait permis au personnel d’adopter des méthodes de travail souples et innovantes.  Elle a aussi salué le recours à l’expertise locale.  Enfin, elle a soutenu les autres projets de construction de l’ONU. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MEDARD AINOMUHISHA (Ouganda) a commenté le rapport sur les travaux de remplacement des bâtiments A à J de l’Office des Nations Unies à Nairobi.  Il a salué les progrès réalisés et s’agissant de la gestion des risques, il a de nouveau appelé le Secrétariat à continuer d’adopter des mesures d’atténuation desdits risques afin que les coûts et les calendriers prévisionnels ne soient pas affectés.  Il a souligné la nécessité de faire appel à une main d’œuvre et à des matériaux locaux, avant de se féliciter des progrès accomplis à cet égard.  Enfin, le délégué a appuyé la rénovation de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) et de l’Africa Hall au sein de la Commission économique pour l’Afrique (CEA). 

Mme DUANGKAMON KIATBUMRUNG (Thaïlande) a salué le fait que dans la mise en œuvre du projet de la CESAP, l’on recourt à l’expertise et aux connaissances techniques locales.  En dépit de nombreux défis, dont la pandémie de COVID-19, le projet est resté dans les limites du budget et du calendrier approuvés.  S’agissant de la gestion des risques, elle a jugé nécessaire de faire appel au Service de la politique de gestion mondiale des biens et de veiller à la pleine mise en œuvre des recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI).  Elle a demandé à la CESAP de poursuivre son engagement à intensifier l’utilisation des connaissances, de l’expertise et des fournitures locales pour le reste du projet.   Elle a annoncé que le Ministère thaïlandais des affaires étrangères, en collaboration avec la CESAP et la Division des achats de l’ONU, prévoit d’organiser un autre séminaire sur les opportunités commerciales avec l’ONU, au début de l’année prochaine.  Le séminaire sera l’occasion de promouvoir les fournisseurs thaïlandais et étrangers. 

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a estimé que l’investissement dans le Plan stratégique patrimonial permettra d’accroître la productivité, le bien-être et l’efficacité du personnel, des délégués et des visiteurs, grâce à la modernisation des infrastructures et l’amélioration de l’accessibilité pour les personnes vivant avec un handicap.  Le nouveau bâtiment H, a-t-elle dit, est un exemple remarquable d’un environnement de travail moderne, durable et pérenne.  Saluant la conclusion du processus d’appel d’offres pour le bâtiment E, la représentante a exprimé sa vive reconnaissance à l’équipe de gestion du projet qui a identifié les mesures permettant de minimiser les coûts supplémentaires et optimisé le calendrier afin de terminer le projet dans les délais.  De plus, elle a apprécié les efforts d’intégration des recommandations du Comité des commissaires aux comptes dans la gestion des projets. 

La représentante a salué la proposition d’une stratégie de valorisation et a souligné l’importance de prendre en compte à la fois les revenus potentiels d’une utilisation et les coûts de la sous-utilisation.  Pour libérer le potentiel financier de la valorisation, il faut commencer dès maintenant les travaux analytiques et préparatoires nécessaires, a-t-elle déclaré.  En tant que pays hôte, la Suisse, a-t-elle souligné, reste fortement engagée à soutenir le Plan, y compris avec un prêt à taux zéro d’un montant total de 400 millions de francs suisses. 

RÉGIME COMMUN DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur les incidences administratives et incidences sur le budget-programme des recommandations et décisions de la Commission de la fonction publique internationale pour 2022 (A/77/7/Add.11

Pour l’établissement de ce rapport, le Comité consultatif a examiné l’état présenté par le Secrétaire général (A/C.5/77/4) qui indique que la Commission a formulé des recommandations qui appellent des décisions de la part de l’Assemblée générale.  Elles concernent l’examen du régime des engagements; le barème des traitements de base minima; et les indemnités pour enfant à charge et pour personne indirectement à charge.  Elles concernent aussi la prime de sujétion; et l’élément incitation à la mobilité.  La CFPI a également décidé de remplacer les dispositions régissant actuellement les congés de maternité, de paternité et d’adoption par une disposition prévoyant l’octroi de 16 semaines de congé parental à tous les parents et d’offrir une période de congé supplémentaire de 10 semaines aux mères biologiques. 

Si l’Assemblée générale approuve les recommandations de la Commission, le montant estimatif de leurs incidences budgétaires sur le projet de budget-programme pour 2023 se porterait à 4 071 800 dollars.  Pour les opérations de maintien de la paix, ce montant estimatif se chiffrerait à 1 744 200 dollars pour l’exercice 2022/23 et à 3 488 400 dollars pour l’exercice 2023/24. 

Déclarations

Mme GUO ZHIQI (Chine) a salué les efforts considérables de la Commission de la fonction publique internationale (CFPI) pour préserver l’unité et la cohésion du régime commun des Nations Unies.  Des efforts doivent encore être consentis pour améliorer l’efficacité dudit régime et promouvoir une gestion scientifique des ressources humaines.  La bonne représentation des pays en développement doit être assurée, a ajouté le délégué qui a insisté sur l’importance de régler aussi vite que possible la question de l’indemnité de poste à Genève afin de préserver la cohérence et l’unité du régime.  Enfin, s’agissant de l’accroissement des prestations au bénéfice du personnel, le délégué a rappelé la nécessité de prendre compte d’une manière holistique des facteurs tels que le développement socioéconomique et la capacité de paiement des États Membres ou bien encore la nature incitative des changements apportés. 

M. KAWASAKI YUTA (Japon) a dit être gravement préoccupé par l’application de deux différents coefficients d’ajustement de poste à Genève, qui compromettent la cohérence et la stabilité du régime commun.  L’Assemblée générale devrait se pencher sur cette question, a encouragé le représentant qui a promis de participer de manière constructive au débat et à l’examen des solutions proposées pour maintenir la stabilité du régime.  Il a noté que les recommandations de la CFPI concernant les révisions des traitements et indemnités de base, y compris les allocations pour enfants à charge et pour personnes indirectement à charge, nécessiteront d’importantes ressources.  Étant donné que la rémunération du personnel de l’ONU est financée par les États Membres, le représentant a dit attendre avec impatience d’examiner les fondements et les justifications de ces propositions. 

M. DANIIL A. DEVYATKIN (Fédération de Russie) a réaffirmé son engagement à préserver l’intégrité et l’unité du régime commun des Nations Unies comme socle de réglementation et de coordination des conditions de service.  Les avantages tirés d’un régime cohérent et unifié ne doivent pas être tenus pour acquis par certains fonds, programmes et agences, a-t-il prévenu.  C’est un privilège qui doit être traité avec le plus grand respect.  Le représentant a conclu en appelant la Cinquième Commission à se prononcer enfin sur la question des primes. 

Mme OLGA ROMANOVA (États-Unis) a dit que son pays a toujours veillé à ce que le personnel de l’ONU bénéficie de compensations adéquates et demandé la mise en œuvre des réformes clefs entreprises dans ce domaine.  La réflexion sur la rémunération doit notamment prendre en compte les tendances économiques mondiales, a dit la déléguée.  Pour un contrat P2, la prestation pour crèche d’un enfant à charge ne permet de tenir que deux mois à New York.  Il faut prendre en compte la situation des employés qui gagnent moins, a conclu la déléguée. 

Après avoir estimé que les recommandations de la CFPI ont des retombées positives pour les fonctionnaires des Nation Unies, le représentant de Cuba a appelé la Cinquième Commission à régler le problème de double coefficient d’ajustement de poste à Genève.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité reconduit, pour 48 heures, son régime de sanctions concernant la Somalie

9193e séance – matin
CS/15107

Le Conseil de sécurité reconduit, pour 48 heures, son régime de sanctions concernant la Somalie

Le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé de 48 heures, jusqu’au 17 novembre 2022, son régime de sanctions relatif à la Somalie, en adoptant à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 2661 (2022).

Texte du projet de résolution (S/2022/855)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures et les déclarations de sa présidence sur la situation en Somalie,

1.    Décide de proroger la résolution 2607 (2021) jusqu’au 17 novembre 2022;

2.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: le Chef de la MANUL demande au Conseil de sécurité de faire pression sur les « obstructionnistes » qui bloquent la tenue d’élections

9192e séance – matin
CS/15106

Libye: le Chef de la MANUL demande au Conseil de sécurité de faire pression sur les « obstructionnistes » qui bloquent la tenue d’élections

Intervenant de nouveau devant le Conseil de sécurité trois semaines seulement après son tout premier exposé, le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Abdoulaye Bathily, a présenté aujourd’hui ses activités les plus récentes à l’occasion d’une séance demandée par la Fédération de Russie dont l’opportunité a été mise en doute par plusieurs autres membres, de même que par le représentant libyen.  Le Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) a demandé au Conseil d’adresser un message clair aux « obstructionnistes » qui bloquent le processus de tenue des élections en Libye.

M. Bathily a justifié sa demande par le fait qu’il existe, selon lui, un « large consensus » parmi les acteurs libyens, régionaux et internationaux qu’il a rencontrés depuis sa prise de fonctions mi-octobre, y compris les membres du Conseil présidentiel, ceux du Haut Conseil d’État et d’autres acteurs clefs dans les domaines politique, économique et de la sécurité libyens, ainsi que de hauts responsables de la Ligue des États arabes.  Pour lui, les institutions libyennes sont confrontées à des défis, en particulier les entraves posées par certains acteurs institutionnels pour bloquer les progrès vers les élections.  Celles-ci, prévues initialement le 24 décembre 2021, ont été reportées sine die au dernier moment, faute de base constitutionnelle. 

Or, prolonger davantage la période intérimaire rendra le pays encore plus vulnérable à l’instabilité politique, économique et sécuritaire, et pourrait l’exposer à un risque de partition, a mis en garde le Représentant spécial.  Dans ce contexte, il a appelé la communauté internationale, et en particulier le Conseil de sécurité, à parler d’une seule voix en envoyant un message clair et sans équivoque aux obstructionnistes, à savoir que leurs actions ne resteront pas sans conséquences. 

Plusieurs membres du Conseil sont convenus avec le Représentant spécial de la nécessité d’organiser des élections au plus vite.  C’est un impératif urgent, a ainsi souligné l’Inde.  De ce fait, les parties libyennes ont été invitées à parvenir rapidement à un accord sur un cadre constitutionnel favorisant la tenue d’élections législatives et présidentielles libres, équitables et inclusives afin de mettre fin à cette longue période de transition, former un gouvernement libyen unifié et ramener le pays sur la voie de la stabilité.  Les acteurs qui font obstacle doivent être tenus responsables, ont plaidé plusieurs délégations, dont l’Irlande, la Norvège, l’Albanie, la France ou les États-Unis

Plusieurs membres ont dénoncé les « agissements » d’acteurs internationaux qui utilisent des alliances opportunistes avec certains acteurs nationaux pour promouvoir leurs intérêts géostratégiques.  La Fédération de Russie a condamné la politique « irréfléchie » des pays occidentaux, accusés de vouloir convertir la Libye en une station de pompage d’hydrocarbures, y voyant la cause principale de la crise en Libye.  Chine, Brésil ou encore Mexique ont également dénoncé la présence sur le sol libyen de milices et combattants étrangers.  Leur présence continue est en violation directe des résolutions du Conseil de sécurité, a notamment fait observer le Ghana au nom des A3, qui exigent leur retrait immédiat.  La Fédération de Russie aussi s’est dite favorable au retrait des forces étrangères, mais en préconisant un « départ progressif et équilibré ». 

C’est aussi ce qu’a demandé le représentant libyen, qui a estimé que les élections ne constituaient pas une solution en soi, mais un moyen pour en trouver une, laquelle passera par quatre éléments: la fin des interventions étrangères dans les affaires intérieures du pays; la fin de toute présence étrangère; un soutien aux efforts nationaux pour sortir du cycle actuel et parvenir à une réconciliation réelle et globale; et la non-répétition des erreurs du passé. 

Les élections ne pouvant être réalisées que sur une base constitutionnelle solide, il faut appuyer un consensus entre les parties, ont convenu les A3 ou encore le Mexique, pour qui il faut encourager la poursuite du dialogue entre l’ensemble des composantes de la société libyenne, les aider à se coordonner afin de parvenir à lever tous les obstacles à la tenue d’élections libres. 

« Les Libyens sont las de toutes ces réunions et déclarations sans résultat », a en outre déclaré le représentant libyen.  S’il s’est félicité des différentes visites du Représentant spécial pour nouer un dialogue avec différentes parties dans le pays et s’il a émis le vœu que M. Bathily agisse promptement pour faciliter une sortie de l’impasse politique et parvenir à assurer la stabilité, il a aussi fait observer que trois semaines seulement s’étaient écoulées depuis le dernier examen de la situation en Libye par le Conseil de sécurité, sans compter la séance d’information tenue entre-temps avec le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI). 

L’utilité de la séance a du reste été contestée par plusieurs membres du Conseil, d’autant que la résolution 2656 (2022) adoptée le 28 octobre a modifié la fréquence des rapports demandés au Secrétaire général, passée de 30 à 60 jours.  Le Brésil a noté que la multiplication des séances sur un même sujet n’était pas forcément utile.  Quant aux A3, qui avaient réclamé pendant des mois la nomination d’un Africain à la tête de la MANUL, ils ont estimé qu’il serait plus judicieux de laisser suffisamment d’espace au Représentant spécial pour qu’il s’engage en profondeur dans le processus de paix et facilite une sortie de l’impasse politique.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

M. ABDOULAYE BATHILY, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a indiqué qu’il avait, depuis son dernier exposé au Conseil de sécurité le 24 octobre, poursuivi les consultations qu’il avait entamées dès son arrivée à Tripoli mi-octobre, avec les parties prenantes libyennes de toutes les régions du pays.  Il s’est ainsi entretenu à plusieurs reprises, avec des membres du Conseil présidentiel, du Haut Conseil d’État et d’autres acteurs clefs dans les domaines politique, économique et de la sécurité.  Il leur a rappelé leur responsabilité morale et politique de travailler activement pour amener le pays au retour à la paix et à la stabilité.  Il les a encouragés au dialogue afin d’envoyer un message clair à la population libyenne et à la communauté internationale quant à leur volonté de résoudre leurs différends.  Il a précisé que l’ONU et la MANUL étaient prêtes à offrir leurs bons offices et soutenir activement leurs réunions. 

M. Bathily a aussi indiqué avoir, toujours depuis son dernier exposé, commencé à dialoguer avec des représentants de la communauté internationale, pour entendre leurs points de vue et leurs préoccupations sur la voie à suivre en Libye.  À Tripoli, il a consulté un large éventail de représentants régionaux et internationaux pour échanger des points de vue.  En marge du Sommet de la Ligue des États arabes qui s’est tenu à Alger du 31 octobre au 1er novembre, il a eu l’occasion de rencontrer plusieurs hauts responsables.  Dans son document final, le Sommet a appelé à mettre fin à la crise libyenne grâce à une solution dirigée par la Libye qui réalise dès que possible l’aspiration populaire à des élections.  Au cours des prochains jours, j’ai l’intention d’enchaîner avec des visites à certains des principaux acteurs externes, a-t-il dit.

De toutes ces rencontres, M. Bathily a dit avoir perçu un large consensus sur le fait que les institutions libyennes sont confrontées à une grave crise de légitimité et que la restauration de cette légitimité à tous les niveaux est d’une importance capitale.  Il existe également un consensus autour de la nécessité de coordonner les initiatives diplomatiques bilatérales et multilatérales et de se rallier aux efforts de l’ONU.  De plus, l’aspiration populaire à la paix, à la stabilité et aux institutions légitimes ressort clairement, autant qu’il est de plus en plus reconnu que certains acteurs institutionnels entravent activement les progrès vers les élections. 

Or, prolonger davantage la période intérimaire rendra le pays encore plus vulnérable à l’instabilité politique, économique et sécuritaire, et pourrait exposer le pays à un risque de partition, a mis en garde le Représentant spécial.  Il a donc appelé à unir les efforts pour encourager les dirigeants libyens à œuvrer résolument à la tenue d’élections dans les plus brefs délais.  J’exhorte ce Conseil de sécurité à envoyer un message sans équivoque aux obstructionnistes que leurs actions ne resteront pas sans conséquences, a-t-il ajouté.

Sur un autre plan, le Représentant spécial a signalé certains progrès sur la voie de la sécurité, avec la remise sur les rails de la Commission militaire conjointe 5+5.  Cette dernière, qui a tenu sa première réunion conjointe depuis de nombreux mois, a convenu de créer un sous-comité pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des groupes armés, qui devrait se concentrer sur la cartographie et la classification des groupes armés en Libye, en tant que pré-étape de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  Par ailleurs, le cessez-le-feu continue de tenir, malgré l’utilisation continue de la rhétorique de l’escalade et le renforcement des forces des deux côtés. 

Pour autant, M. Bathily s’est dit préoccupé par l’absence de progrès dans la mise en œuvre du plan d’action de la Commission militaire conjointe 5+5 sur le retrait des mercenaires, des combattants étrangers et des forces étrangères.  Il est nécessaire que les parties libyennes se concentrent à nouveau sur le lancement du processus de retrait, conformément au plan d’action. 

M. Bathily a indiqué que dans les prochaines semaines et prochains mois, la MANUL s’efforcera de faciliter le dialogue entre les principaux acteurs institutionnels libyens afin de surmonter leurs divergences et d’avancer vers l’organisation d’élections libres et équitables.  L’appui et les pressions du Conseil en particulier, et de la communauté internationale dans son ensemble, parlant d’une seule voix, sous la coordination de l’ONU, donneront probablement des résultats positifs, a-t-il espéré.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a assuré le Représentant spécial de l’appui de son pays à ses efforts de médiation.  Il a constaté que la situation est tendue en Libye et qu’il n’y existe aucune perspective d’unification des institutions de l’État ou d’amélioration de la sécurité.  L’objectif prioritaire pour la Libye doit être la préservation du régime de cessez-le-feu et la recherche d’un compromis entre les différentes forces libyennes présentes sur l’échiquier politique.  Le représentant a appelé les dirigeants à la retenue et à éviter l’escalade.  Il a préconisé un départ progressif et équilibré des forces étrangères.  La communauté internationale devrait quant à elle aider les libyens à se coordonner et la MANUL à s’acquitter correctement de son mandat. 

La principale cause de cette crise, a affirmé M. Polyanskiy, est la politique irréfléchie des pays occidentaux, qui se servent de la situation en Libye pour leurs propres intérêts.  Le représentant a évoqué à cet égard l’appétit des occidentaux pour les hydrocarbures libyens, dont le coût est plus bas que d’autres pays producteurs.  Pour lui,  il n’est guère surprenant que l’on veuille convertir la Libye en une station de pompage, ce que l’on a vu dès 2011 lorsque les Occidentaux ont traité ce pays au prisme de leur désir.  Il n’a pas exclu qu’il existe également des accords secrets avec des pays tiers pour profiter de la manne pétrolière, « l’essentiel étant de chasser la Russie » des marchés mondiaux.  Il a rappelé que la compagnie pétrolière libyenne estimait la production nationale à 1,2 million de barils par jour, et qu’elle avait l’intention de porter ce chiffre à 2 millions.  Il a ajouté que l’instabilité politique était entretenue volontairement et que les principaux protagonistes politiques libyens étaient dressés les uns contre les autres par des acteurs étrangers. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a réitéré son soutien aux efforts du Représentant du Secrétaire général afin de revigorer le processus politique libyen.  « La stabilité en Libye ne peut être atteinte qu’au travers d’un processus facilité par les Nations Unies, dirigé et piloté par les Libyens », a-t-elle déclarée.  La représentante s’est par ailleurs inquiétée des rapports indiquant que des groupes armés ont empêché le Haut Conseil d’État libyen de se réunir hier, jugeant cette obstruction « inacceptable ».

Mme MONA JUUL (Norvège) a jugé crucial que les parties parviennent à un accord dès que possible sur un cadre constitutionnel favorisant la tenue d’élections libres et équitables.  « Réaliser la volonté du peuple libyen est plus important que de s’assurer des positions et des privilèges personnels », a-t-elle noté.  Elle a réitéré sa profonde préoccupation face à la détérioration des droits humains en Libye, estimant que les représentants de la société civile et les défenseurs des droits doivent être protégés.  De même, les rapports faisant état de violations du droit international, y compris de violences sexuelles, de détentions arbitraires, de torture et d’enlèvements, sont inquiétants.  Dans ce contexte, la représentante a exhorté tous les acteurs à s’engager de manière constructive dans le processus politique avec le Représentant spécial du Secrétaire général.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a renouvelé ses appels aux dirigeants libyens pour qu’ils se réunissent et conviennent d’une base constitutionnelle pour la tenue d’élections libres, équitables et inclusives et ce, dès que possible.  L’objectif ultime devrait être la mise en place d’un gouvernement libyen unifié, qui serve tous les Libyens et mette fin à cette longue période de transition.  À cet égard, le représentant s’est dit encouragé par l’engagement du Représentant spécial en faveur d’une approche inclusive. 

M. Mythen s’est aussi félicité de l’adoption le mois dernier, à l’unanimité, de la résolution prolongeant d’un an le mandat de la MANUL.  Selon lui, il s’agissait d’une étape cruciale pour permettre au Représentant spécial de remplir son mandat avec prévisibilité et stabilité. 

Le représentant a déclaré que les Libyens méritent le soutien collectif des membres du Conseil de sécurité et de la communauté internationale dans son ensemble.  Il a encouragé tous les acteurs à user de leur influence et de leurs bons offices pour éviter une aggravation des tensions entre les parties libyennes et pour donner la priorité aux Libyens.  La nomination du Représentant spécial Bathily, associée à l’importante reconduction du mandat de la MANUL, devrait nous donner l’occasion et l’élan nécessaires pour y parvenir, a-t-il conclu.

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a appelé les dirigeants libyens à participer à un processus menant à des élections libres et équitables.  Il s’est félicité des progrès qui continuent d’être enregistrés dans l’application du cessez-le-feu de 2020, regrettant néanmoins la résurgence des violences.  Il a également apporté son soutien à la mise en place d’un mécanisme permettant de suivre les dépenses du Gouvernement libyen, estimant qu’il serait dans l’intérêt de tous les Libyens.  Le représentant a, enfin, condamné les propos du représentant russe.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a estimé que la multiplication des séances du Conseil de sécurité sur un sujet donné n’était pas forcément utile, pour ajouter aussitôt qu’il importait que le Conseil poursuive de très près l’examen de la situation en Libye, compte tenu en particulier des événements survenus la veille.  Il ne faudrait pas non plus négliger d’autres dossiers nécessitant l’attention du Conseil.  Le représentant a rappelé le rôle fondamental que la Commission de consolidation de la paix serait susceptible de jouer et a préconisé une démarche stratégique et coordonnée prenant en considération les aspirations de tous les Libyens, mais aussi la situation au niveau régional, y compris au Sahel. 

Cependant, le comportement des acteurs internationaux n’est pas à la hauteur des responsabilités, a déploré M. de Almeida Filho, en citant les « agissements étrangers » en Libye.  Cela vaut particulièrement pour l’impasse politique, qui exige un accord autour d’un calendrier précis pour la tenue d’élections et un dialogue exempt d’influence étrangère, a ajouté le représentant.  Il s’est aussi fait l’écho des préoccupations relatives à l’efficacité de l’embargo sur les armes et au gel des avoirs à l’étranger qui, selon le Brésil, va tout à fait à l’encontre des intérêts libyens.  Il a conclu en mettant l’accent sur l’appropriation libyenne. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé que le principal objectif de la France pour la Libye est la formation d’un gouvernement unifié, à même d’organiser des élections présidentielles et législatives sur l’ensemble du territoire.  « Les Libyens ont le droit à la sécurité et à leur souveraineté », a-t-il noté, en ajoutant que l’accord de cessez-le-feu doit être appliqué dans son intégralité.   La France continuera à appuyer le dialogue entre les acteurs sécuritaires de l’Est et de l’Ouest du pays en vue de former une armée libyenne unifiée, et d’exiger le respect de l’embargo sur les armes ainsi que le retrait des forces et des combattants étrangers du territoire libyen.  Face aux divisions entretenues par les ingérences étrangères, une nouvelle feuille de route politique crédible devant mener à la tenue d’élections présidentielle et parlementaires est primordiale, a estimé le représentant.  Il a appelé à une redistribution équitable et transparente des revenus, au profit de la population.  De même, l’impunité des trafiquants d’êtres humains et des miliciens doit cesser, a encore dit M. de Rivière, en appelant à une coopération accrue entre les autorités libyennes et la Cour pénale internationale (CPI). 

M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est dit préoccupé par la polarisation des acteurs libyens.  Il a appelé les parties à faire preuve de retenue et s’engager en faveur de la médiation sous l’égide de l’ONU.  « Il est temps de rétablir la légitimité démocratique par le biais d’élections », a-t-il affirmé.  Le représentant a estimé que les acteurs qui font obstacle au processus politique doivent en être tenus responsables.  Il a également appelé au retrait des forces étrangères et des mercenaires présents dans le pays.  Il a, enfin, regretté les campagnes de harcèlement contre la société civile.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est inquiété de l’absence d’accord entre les parties sur la base constitutionnelle de l’organisation d’élections, mettant en garde contre le danger que représente une telle situation pour les acquis réalisés en Libye depuis 2020.  « La tenue, le plus vite possible, d’élections libres, justes et inclusives est un impératif urgent », a estimé le représentant.  Il a également dénoncé dans la présence de combattants étrangers une violation des résolutions du Conseil de sécurité et de l’accord de cessez-le-feu de 2020.  Il a pris note de l’accord militaire signé par la Türkiye et demandé au Représentant spécial de déterminer si cet accord viole la résolution du Conseil de sécurité.  Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à faire face au terrorisme international en provenance de Libye, soulignant ses effets dans la région du Sahel.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a appuyé le mandat du Représentant spécial ainsi que de la MANUL pour parvenir à une paix durable en Libye.  Il a encouragé à une démarche unifiée de la communauté internationale qui devrait sérieusement envisager de revisiter les acquis antérieurs, notamment ceux de la Conférence de Berlin.  Cela signifie que le Conseil doive discuter de ce dossier au même titre que des questions abordées dans la résolution 2656 (2022) pour que le Secrétaire général puisse pleinement exercer ses bons offices.  Au sujet de la tenue potentielle des élections législatives et présidentielle, il s’est félicité des efforts récents du Représentant spécial ayant abouti à la réunion de la Commission militaire conjointe 5+5 à Syrte.  Il a toutefois souhaité que des mesures concrètes soient prises en vue d’assurer le retrait des forces et des combattants étrangers du territoire libyen, de manière à prévenir une résurgence des hostilités armées. 

M. XING JISHENG (Chine) a déclaré qu’alors que la situation sécuritaire reste préoccupante en Libye, toutes les parties doivent se garder de toute escalade et maintenir le cessez-le-feu.  La Commission militaire conjointe 5+5 joue un rôle central en la matière.  Il a ensuite relevé le consensus autour du fait que la transition doit s’achever le plus rapidement possible.  Nous espérons, a-t-il dit, que la volonté des acteurs politiques libyens se transformera en actions concrètes, notamment pour la tenue d’élections le plus rapidement possible.  Le représentant a également dit appuyer le travail des organisations sous-régionales pour sortir la Libye de sa crise.  L’ingérence extérieure dans les affaires de la Libye doit cesser et les mercenaires être rapatriés afin de laisser les Libyens trouver des solutions intralibyennes, a-t-il plaidé. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a estimé que, compte tenu de l’absence de progrès sur les questions en suspens en Libye, notamment le report des élections, le Conseil de sécurité doit réexaminer les moyens de contribuer à la pacification du pays.  Malgré le vaste éventail de mesures mises en place par le Conseil, y compris des sanctions, un embargo sur les armes, des autorisations pour lutter contre le trafic de migrants et les transferts illicites d’armes, les armes et les combattants étrangers continuent d’alimenter la violence, s’est alarmé le représentant.  Des responsables de l’obstruction du processus politique ont en outre réussi à consolider leurs positions au point de devenir des interlocuteurs validés par la communauté internationale, a-t-il constaté à regret.  « Nous sommes ainsi pris dans un paradoxe: pour sortir de l’impasse politique actuelle, nous dépendons, dans une large mesure, de la volonté des acteurs qui bénéficient le plus du statu quo », a-t-il relevé.  Le délégué a dénoncé l’ingérence de certains pays dans les affaires libyennes, qui utilisent des alliances opportunistes avec certains acteurs politiques nationaux pour promouvoir leurs intérêts géostratégiques, accentuant d’autant la fragmentation du pays.  Pour mettre un terme à cette situation, M. de la Fuente Ramírez a appelé à conclure des accords permettant la tenue d’élections dans les meilleurs délais, avec la participation de l’ensemble des composantes de la société libyenne. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Kenya et Ghana), a déclaré continuer de croire qu’il serait plus judicieux de laisser suffisamment d’espace au Représentant spécial pour s’engager en profondeur dans le processus de paix, dans ce contexte où le Conseil de sécurité s’est déjà réuni sur la situation en Libye le 24 octobre dernier.  Une séance d’information sur le processus qu’il aura mené aiderait par la suite à tenir des discussions plus percutantes sur le dossier, a ajouté le représentant.

M. Agyeman a aussi indiqué que les A3 sont préoccupés par les flambées récurrentes de violence entre les groupes armés rivaux à Tripoli et dans les environs, qui continuent de faire des morts et de nombreux blessés.  Selon eux, les forces et combattants étrangers ainsi que les mercenaires en Libye sont des contributeurs clefs à l’affrontement entre les milices armées.  Leur présence continue en Libye est en violation directe des résolutions du Conseil de sécurité, y compris la résolution 2656 (2022).  Par conséquent, les A3 exigent leur retrait immédiat. 

Par ailleurs, les A3 soutiennent la mise en œuvre intégrale de l’accord de cessez-le-feu et du plan d’action de la Commission militaire conjointe 5+5.  Ils encouragent aussi la poursuite du dialogue pour aider à lever tous les obstacles à la tenue d’élections libres, justes et transparentes, comme le souhaitent les Libyens, afin d’avoir un gouvernement unifié crédible, dûment élu par le peuple.  De telles élections ne peuvent être réalisées que sur une base constitutionnelle solide.  Les A3 exhortent donc l’ONU, et d’autres partenaires internationaux par l’intermédiaire de l’ONU, à apporter leur soutien technique à l’élaboration du cadre constitutionnel.

Sur un autre plan, les A3 encouragent des efforts similaires dans le développement économique de la Libye à travers la réunification des institutions économiques.  À cet égard, ils demandent qu’une plus grande attention soit accordée à la protection du secteur pétrolier, en tant que pilier économique de la Libye, contre toute ingérence politique et étrangère indue.

Enfin, alors que l’on assiste à une augmentation constante du nombre de migrants africains confrontés à des atrocités indicibles tout en traversant la Méditerranée vers l’Europe, les A3 réitèrent leur demande visant à ce que les réfugiés, les migrants et les demandeurs d’asile soient traités avec dignité en tant qu’exigence fondamentale du droit international et conformément aux appels dans toutes les autres situations de conflit dans le monde, a conclu le représentant. 

M. TAHER M. T. ELSONNI (Libye) s’est félicité des différentes visites du Représentant spécial pour nouer un dialogue avec différentes parties dans le pays.  Il a néanmoins fait remarquer que trois semaines seulement se sont écoulées depuis que le Conseil a examiné la situation en Libye et, qu’il y a eu voilà seulement quelques jours, une séance d’information avec le Procureur de la Cour pénale internationale.  Depuis, a-t-il déclaré, il n’y a pas grand-chose de nouveau qui soit digne d’être mentionné. 

Les Libyens sont las de toutes ces réunions et déclarations sans résultat, que d’aucuns décrivent comme des bulletins d’information lesquels, au lieu de rapprocher d’une solution viable, n’arrivent toujours pas à identifier la situation, a poursuivi le représentant.  Il a émis le vœu que le Représentant spécial agisse promptement pour faciliter une sortie de l’impasse politique et parvenir à assurer la stabilité.  Pour le représentant libyen, la solution en Libye nécessite d’agir sur les quatre éléments suivants: mettre fin aux interventions étrangères, certains États imposant des solutions taillées à leur guise et sur mesure pour eux; faire cesser toute présence étrangère, y compris celle des milices hors-la-loi, le monopole des armes devant exclusivement revenir à l’État; soutenir les efforts nationaux pour sortir du cycle actuel et parvenir à une réconciliation réelle et globale après avoir rétabli la confiance entre toutes les composantes libyennes; et ne pas répéter les erreurs du passé en espérant un résultat différent.  Pour le représentant, les élections ne sont pas une solution en soi mais un moyen d’y parvenir.  Il faut donc obtenir et appuyer un consensus sur une base constitutionnelle pour la loi électorale et organiser ensuite les élections générales, le plus tôt possible.  Il n’existe aucune solution militaire à la crise libyenne et tout devra passer par le soutien aux décisions des Libyens, a conclu le représentant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale recommande la création d’un registre international des dommages causés à l’Ukraine par la Fédération de Russie

Onzième session extraordinaire d’urgence (reprise)    
15e et 16e séances plénières – matin et après-midi
AG/12470

L’Assemblée générale recommande la création d’un registre international des dommages causés à l’Ukraine par la Fédération de Russie

Réunie en session extraordinaire d’urgence, l’Assemblée générale a recommandé, aujourd’hui, la création d’un registre international des dommages « qui servira à recenser, documents à l’appui, les éléments tendant à établir les dommages, pertes ou préjudice causés à toute personne physique et morale concernée et à l’État ukrainien par les faits internationalement illicites commis par la Fédération de Russie en Ukraine ou contre l’Ukraine ».

La résolution, intitulée « Agression contre l’Ukraine: recours et réparation », a été adoptée par 94 voix pour, 14 voix contre et 73 abstentions, dans le cadre de la quinzième reprise de la onzième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée convoquée en mars dernier.  Par ce texte, l’Assemblée considère que la Fédération de Russie doit répondre de l’agression commise contre l’Ukraine en violation de la Charte des Nations Unies, assumer les conséquences juridiques de tous ses faits internationalement illicites et réparer le préjudice causé.

L’Assemblée considère également qu’en plus du registre, il faut établir un mécanisme international « aux fins de la réparation des dommages, pertes ou préjudice résultant des faits internationalement illicites commis par la Fédération de Russie en Ukraine ou contre l’Ukraine ».  En outre, elle exige de nouveau de la Russie qu’elle retire « immédiatement, complètement et sans condition » toutes ses forces militaires du territoire ukrainien. 

« L’Ukraine fait face au défi titanesque de se reconstruire après cette guerre: il est l’heure de demander des comptes », a plaidé le représentant ukrainien, en présentant le projet de résolution.  « Nous ne vous demandons en aucun cas de prendre parti », a-t-il précisé, se disant confiant dans le fait que les États Membres se placeraient du côté la Charte des Nations Unies.  Estimant qu’aujourd’hui la Russie faisait tout pour échapper à ses responsabilités, le représentant a prédit qu’elle échouerait comme elle échouait sur le terrain militaire.  Il a appelé tous les États à soutenir la création d’un mécanisme qui travaillerait en toute indépendance sous l’œil de la communauté internationale.

Aujourd’hui, plus de trois millions d’Ukrainiens doivent vivre sans eau ni électricité, sans assainissement ni chauffage, a souligné la Lettonie, au nom des pays nordiques et baltes. 

À l’instar de plusieurs délégations, dont l’Érythrée, qui s’exprimait au nom d’un groupe de pays « partageant des positions similaires », la Fédération de Russie a rétorqué que le projet de résolution transformait indûment l’Assemblée générale en organe judiciaire.  Son représentant a dénoncé la « tentative supplémentaire d’un groupe d’États de légaliser ce qui est illégal en vertu du droit international actuel ».  D’après lui, les rouages du mécanisme de réparation international ainsi créés seront maîtrisés par les États auteurs du projet, et ce, en dehors du cadre de l’ONU.  « Il est proposé que l’Assemblée générale donne carte blanche à la création d’une sorte d’organe dont la plupart des gens ici n’ont pas la moindre idée du fonctionnement », s’est-il indigné.

Le projet de résolution a des lacunes, notamment en voulant prendre l’Assemblée générale pour une instance judiciaire qui va déterminer les responsabilités des parties, a renchéri la Chine.  Elle a rappelé que de nombreux pays dans le monde ont été victimes de faits internationalement illicites et qu’ils auraient également le droit de demander des réparations.  Dans cet esprit, la Syrie et Cuba ont demandé qui allait les dédommager pour les préjudices causés par la coalition internationale pour l’une, et par l’embargo imposé par les États-Unis pour l’autre.  De son côté, l’Afrique du Sud a relevé que, par le passé, les États Membres n’avaient pas pu trouver d’accord sur les réparations à accorder aux victimes de l’esclavage, du colonialisme ou de l’apartheid en raison de l’opposition des pays coauteurs de la résolution examinée. 

A contrario, les États-Unis ont estimé que l’Assemblée était bel et bien habilitée à adopter ce type de résolution, en vertu du Chapitre IV de la Charte des Nations Unies qui lui permet de se pencher sur un large éventail de questions.  Pour l’Australie, un registre des dommages et un mécanisme de réparation seraient des éléments importants pour élaborer un cadre « équitable, impartial et juste » en vue d’assurer une paix durable le moment venu.  L’Union européenne a fait observer que la résolution elle-même n’établissait aucun mécanisme, mais recommandait simplement leur création ultérieure par les États Membres.  Plutôt que de confier aux systèmes juridiques de l’Ukraine et d’autres États un nombre très élevé de litiges individuels, un système centralisé et spécialisé serait plus efficace et offrirait plus de sécurité juridique et d’équité procédurale, a-t-elle affirmé. 

Même s’ils ont reconnu que la Russie doit assumer les conséquences juridiques de ses actes illicites, les Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), ont fait observer que « les États Membres sont invités à agir dans le contexte d’une guerre en cours, sans qu’il ne soit possible de prédire ses développements ». 

Comme l’Iran, la République populaire démocratique de Corée, le Venezuela, la Chine ou la Russie, Sri Lanka a alerté sur le risque de créer un « dangereux précédent » en laissant la possibilité à n’importe quel groupe de pays de saisir des actifs souverains d’un État.  Nulle part dans ce bref texte il n’est fait mention de la confiscation de biens souverains, a assuré le Canada.  Cette résolution, a-t-il dit, ne cherche nullement à outrepasser les compétences de l’Assemblée générale.  Il s’agit d’une première étape pour obtenir justice et ce processus doit commencer maintenant, a demandé le Royaume-Uni.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale aura lieu mardi 15 novembre, à partir de 10 heures.

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES: PROJET DE RÉSOLUTION A/ES-11/L.6 

Débat sur la question et décision sur le projet de résolution

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine), introduisant le projet de résolution intitulé « Agression contre l’Ukraine: recours et réparation », a cité le « camarade » Viatcheslav Molotov, ancien Ministre des affaires étrangères de l’Union soviétique: « des pans entiers de notre territoire ont été occupés par l’ennemi qui a détruit des villes et des villages entiers, qui a réduit en cendre des entreprises, des centrales, des réseaux ferroviaires, voilà pourquoi nous estimons que les pays soumis à l’occupation ont le droit à la réparation ».  Soulignant le parallèle avec la situation actuelle en Ukraine, il a rappelé que l’Union soviétique avait reçu des réparations il y a 77 ans.  Estimant qu’aujourd’hui la Russie avait commis des crimes et faisait tout pour échapper à sa responsabilité, le représentant a prédit qu’elle échouerait comme elle échouait sur le terrain militaire.  Il a rappelé qu’il y a 32 ans, elle avait voté pour une résolution du Conseil de sécurité en faveur de réparations à la suite de l’invasion du Koweït par l’Iraq.  « Nous avons tous vu des images de Boutcha, d’Irpin, de Marioupol et d’Izoum », a-t-il martelé, ajoutant que la moitié des centrales et du réseau électriques ukrainiens avait été détruite au cours du mois écoulé.  Il a encore dénoncé les assassinats, les viols et les pillages commis dans les territoires occupés par les Forces russes, ainsi que le déplacement forcé de millions de personnes.  « L’Ukraine fait face au défi titanesque de se reconstruire après cette guerre: il est l’heure de demander des comptes. » 

M. Kyslytsya a rappelé que l’Assemblée générale avait adopté par consensus une résolution stipulant qu’un État responsable pour fait internationalement illicite était tenu de réparer les dommages causés.  Or, a-t-il prévenu, la Russie préfère l’immunité à la reddition de comptes, elle va affirmer que l’Assemblée générale n’est pas compétente et tenter d’entraver ses travaux.  La Russie va essayer de faire croire qu’on essaie de diviser le monde en blocs, comme au temps de la guerre froide.  « Nous ne vous demandons en aucun cas de prendre parti », s’est exclamé le représentant, se disant confiant dans le fait que les États Membres se placeraient du côté la Charte des Nations Unies.  Estimant que c’était la Russie qui agressait des États Membres et divisait l’Assemblée, il a appelé tous les États qui voulaient défendre la Charte à soutenir la création d’un mécanisme qui travaillerait en toute indépendance sous l’œil de la communauté internationale.  Le représentant a rappelé les conditions sine qua non demandées par le Président Zelenski pour des négociations de paix: le rétablissement de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, des compensations pour les dommages provoqués par la guerre et des poursuites judiciaires contre tous les criminels de guerre.  « La résolution présentée aujourd’hui est un pas dans cette direction. » 

M. BUCARO FLORES, Ministre des affaires étrangères du Guatemala, s’est dit convaincu que cette initiative « est un pas en avant » pour parvenir à réconcilier les parties et contient des exigences « raisonnables » pour le redressement après le conflit, y compris par la création d’un registre international des dommages.  Il a estimé que l’Assemblée générale a le mandat nécessaire pour approuver cette résolution conformément au Chapitre IV de la Charte des Nations Unies.  Le Ministre a également saisi l’occasion de sa présence au podium pour plaider en faveur d’une réforme rapide et adaptée à la réforme du Conseil de sécurité, notant que l’Assemblée générale ne peut « rester les bras ballants » face à cette crise ainsi qu’à d’autres.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que le projet de résolution est basé sur une idée fausse, selon laquelle l’Assemblée générale serait un organe judiciaire.  Il a dénoncé la « tentative supplémentaire d’un groupe d’États de légaliser ce qui est illégal en vertu du droit international actuel ».  D’après le délégué, les rouages du mécanisme de réparation international ainsi créés seront maîtrisés par le groupe d’États auteurs du projet, et ce, en dehors du cadre de l’ONU.  « Il est proposé que l’Assemblée générale donne carte blanche à la création d’une sorte d’organe, dont la plupart des gens ici n’ont pas la moindre idée de la fonctionnalité. »  Et, la grande majorité des États Membres n’auront absolument aucune voix ni aucun contrôle dans la mise en place du mécanisme ou pendant son fonctionnement, a encore prédit le délégué.  De plus, a-t-il poursuivi, les fonds destinés aux dites réparations proviennent d’actifs souverains gelés et « volés » à la Fédération de Russie.  Des fonds qui, a-t-il dit, sont en réalité utilisés pour augmenter les livraisons d’armes occidentales à Kiev.  Une décision de l’Assemblée générale en faveur du projet donnerait ainsi un blanc-seing à l’Occident dans sa poursuite du conflit.  « Les États du monde en développement veulent-ils avoir quelque chose en commun avec une telle initiative? », a interrogé le délégué, arguant que les Occidentaux, en volant les actifs d’États souverains, se rendent aussi coupables de l’asservissement d’une partie du monde.  Il a dénoncé l’esclavage, le colonialisme, les sanctions et autres actions unilatérales.  En dépit de ces crimes, les pays occidentaux n’ont jamais considéré les « réparations » comme un « moyen d’expier leurs propres péchés » et ont bloqué toute discussion sur ce sujet au sein de la Sixième Commission de l’Assemblée générale, a déploré le délégué.  Si une telle résolution est adoptée, elle aura des conséquences systémiques sur le travail de l’ONU, a-t-il conclu.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a rappelé que, le 2 mars 2022, l’Assemblée générale, à une majorité écrasante, avait confirmé que la Fédération de Russie avait commis une agression contre l’Ukraine en violation de l’Article 2 alinéa 4 de la Charte des Nations Unies.  Dénonçant un « acte internationalement illicite » qui touche au cœur du système des Nations Unies, il a déploré la mort de civils innocents résultant d’un ciblage délibéré, la destruction quotidienne d’infrastructures, d’hôpitaux, d’écoles et de maisons.  « Les dommages infligés à l’Ukraine sont énormes », a-t-il constaté.  Le délégué a rappelé qu’en vertu du droit international, un État responsable pour fait internationalement illicite avait l’obligation de réparer intégralement le préjudice causé.  Il a estimé qu’afin de préparer un processus ordonné, ces dommages doivent d’abord être correctement enregistrés.  « La question n’est pas de savoir si la Russie doit payer, mais plutôt de savoir quand elle le fera ». 

M. Skoog a ensuite expliqué que la résolution recommandait la création par les États Membres et l’Ukraine d’un registre des dommages qui servirait au dépôt de preuves et rappelé qu’il existait des précédents en la matière.  Il a précisé que la résolution reconnaissait également la nécessité d’établir, dans un deuxième temps, un mécanisme international de réclamation pour la réparation des dommages.  Plutôt que de confier au système juridique national de l’Ukraine et d’autres États un nombre potentiellement très élevé de litiges individuels, un système centralisé et spécialisé serait plus approprié, a-t-il affirmé, ajoutant qu’un mécanisme international de réclamation offrirait une sécurité juridique et une équité procédurale.  Selon lui, la Russie doit être tenue pour responsable de ses actes illicites et de ses destructions gratuites afin de maintenir un ordre international fondé sur des règles.  La résolution elle-même n’établit pas de registre des dommages et ne crée pas de mécanisme de réparation, mais elle recommande que ces instruments soient ultérieurement créés par les États Membres, en coopération avec l’Ukraine, a encore souligné le délégué.  Elle n’entraîne aucun coût pour le système des Nations Unies, ni pour quiconque à part la Russie, a-t-il ajouté, en appelant tous les États Membres à voter en faveur de ladite résolution. 

Mme SOPHIA TESFAMARIAM (Érythrée), s’exprimant au nom d’un groupe de pays partageant des positions similaires, a souligné que « l’Assemblée générale n’est pas un organe judiciaire » et que les projets de résolution doivent être présentés conformément à l’Article 13 de la Charte des Nations Unies, en vue notamment de développer la coopération internationale et d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification.  Dès lors, a fait valoir la représentante, les résolutions adoptées par l’Assemblée sont le « miroir de la volonté politique » des États et ne peuvent en aucun cas servir de base juridique pour définir des faits internationalement illicites, car une telle action dépasserait son mandat et ses responsabilités.  C’est pourquoi le projet de résolution dont l’Assemblée est saisie n’a pas, à son avis, de fondement juridique suffisant et n’est pas conforme à sa pratique établie.  De plus, il ne ferait qu’attiser les divisions au sein de cet organe, a-t-elle averti.

S’il est adopté, ce projet de résolution créerait un « précédent dangereux » qui conduirait l’Assemblée générale à donner sa « bénédiction » à un mécanisme de recours et de réparation qui ne sera pas géré par l’organe qui l’a créé et ne lui rendra aucun compte, a encore mis en garde la représentante.  Dans ce contexte, elle a tenu à rappeler que les puissances coloniales ont infligé d’énormes dégâts et souffrances aux peuples des pays en développement, que ce soit en Asie, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes.  Les États qui ont pâti de l’ingérence étrangère et du colonialisme, de l’esclavage, de mesures coercitives unilatérales et de blocus illégaux méritent également, à ses yeux, le droit à la réparation et à la justice, qui devrait être recherché dans le cadre de processus juridiques.  Pour ce qui est du conflit en Ukraine, la représentante a estimé que les États souverains ne devraient pas être forcés à prendre parti, appelant, en conclusion, à « respecter leur position s’ils optent pour l’impartialité ».

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie), s’exprimant au nom des pays nordiques et baltes (Danemark, Estonie, Finlande, Islande, Lituanie, Norvège, Suède et Lettonie), a rappelé qu’aujourd’hui, plus de trois millions d’Ukrainiens doivent vivre sans eau ni électricité, sans assainissement ni chauffage.  Les Forces armées russes ont délibérément attaqué des infrastructures civiles critiques, y compris des réseaux électriques et des usines de traitement des eaux usées, a—t-il déploré.  Pour le délégué, le texte intitulé « Agression contre l’Ukraine: recours et réparation » offre les États Membres un moyen de soutenir l’Ukraine.  Il a estimé important de recueillir et de conserver des preuves de l’agression brutale de la Russie contre l’Ukraine, parce que la Russie doit être tenue pour responsable de ses actes internationalement illicites contre l’Ukraine et les Ukrainiens.  Il y a quelques heures à peine, a poursuivi le délégué, le Président Volodymyr Zelenskyy a déclaré aux journalistes que les enquêteurs avaient découvert plus de 400 crimes de guerre dans les zones de Kherson abandonnées par les Forces russes.  Il ne doit pas y avoir d’impunité pour ces crimes, et leurs auteurs doivent être tenus responsables.  À cette fin, a-t-il encore averti, les preuves doivent être correctement stockées, sinon elles pourraient être potentiellement perdues ou endommagées.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a déclaré que la Russie doit assumer les conséquences de toutes les violations, y compris la réparation du préjudice et des dommages causés par une violation aussi flagrante et à grande échelle de ses obligations internationales.  Il a indiqué soutenir la création d’un registre international des dommages causés par l’agression injustifiée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.  Tous les dommages doivent toujours être indemnisés de manière appropriée, a-t-il affirmé, ajoutant qu’il ne suffit pas que les auteurs reconnaissent leurs torts.  Les gestes moraux ne sont jamais suffisants, a-t-il insisté.  Le représentant a estimé que le registre est fondamental pour l’avenir de l’Ukraine car il aidera non seulement l’Ukraine à se reconstruire après la guerre dévastatrice, mais rendra justice aux victimes d’actes barbares russes, notamment des meurtres à grande échelle, des actes de torture, des violences sexuelles ou encore des expulsions forcées.  Le délégué a également déploré la destruction de sites culturels en Ukraine par la Russie.  La communauté internationale n’ayant pu empêcher l’agression russe en cours, il est de notre devoir de plaider pour que les responsables des atrocités commises contre l’Ukraine rendent des comptes, a-t-il estimé.

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé qu’à ce stade, justifier la saisie des biens étatiques d’une partie par le truchement d’une résolution de l’Assemblée générale est erronée et déplacée, déplorant une « gymnastique jurisprudentielle chorégraphiée par des séquences incomprises ».  Une telle mésaventure peut terriblement mal tourner, a-t-il averti.

Il a souligné qu’un tel mécanisme n’a jamais été envisagé par la Charte des Nations Unies, s’inquiétant en outre du risque de créer un précédent sur lequel l’Assemblée générale n’a pas compétence pour se prononcer.  Quels sont les paramètres d’un tel mécanisme?  S’appliquera-t-il également à d’autres conflits qui perdurent depuis bien plus longtemps?  Les tentatives de mettre fin au conflit par un règlement pacifique du différend tel qu’envisagé par les dispositions de la Charte ont-elles été épuisées?

Le représentant a de plus rappelé que l’Assemblée générale est un organe politique de délibération chargé de faire des recommandations politiques à ses Membres.  Par conséquent, elle ne peut pas déterminer la responsabilité d’un État, ni usurper l’immunité souveraine de la propriété étatique.  Il a alerté du risque de créer un dangereux précédent laissant la possibilité à n’importe quel groupe de pays, sur la base de la dynamique de pouvoir existante, de jeter les bases d’une saisie d’actifs souverains sans aucun fondement en droit international, aggravant ainsi la méfiance et la suspicion.  Cette initiative risque non seulement d’exacerber le conflit mais aussi de pousser les parties à utiliser des moyens encore plus létaux pour le poursuivre, a-t-il prévenu.  Exhortant à ne pas atteindre ce point de non-retour, il a plaidé pour la poursuite des efforts diplomatiques.

M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite), s’exprimant au nom du Conseil de coopération du Golfe (CCG), a assuré des relations amicales entretenues par les États du CCG avec toutes les parties au conflit.  Il a invité ces dernières à mettre un terme à la violence via des moyens diplomatiques, et à faire montre de retenue.  Pour le délégué, tout mécanisme qui serait créé devrait reposer sur des procédures et normes acceptées par tous sur le plan international, a ajouté le délégué.  Il a appuyé toute initiative politique et humanitaire allant dans le sens d’une résolution pacifique du conflit en Ukraine.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a estimé que l’invasion illégale et non provoquée de l’Ukraine par la Fédération de Russie, y compris ses attaques contre les civils, les écoles, les hôpitaux et le réseau électrique, continuent de causer des dommages et des pertes à l’Ukraine.  Il faudra un vaste effort international pour aider à la reconstruction de l’Ukraine, a-t-elle affirmé.  La Russie étant seule responsable des dommages causés à l’Ukraine, il est juste qu’elle paie pour ces dommages, comme le prévoit la résolution visant à favoriser le recours et la réparation dans le cadre de l’agression contre l’Ukraine.  La représentante a soutenu l’établissement d’un registre international des dommages afin de garantir que les preuves des destructions causées par la Russie soient documentées et préservées.  Il s’agit d’une première étape pour obtenir justice et ce processus doit commencer maintenant, a-t-elle déclaré.  « Nous restons fermes dans notre soutien à l’Ukraine, à la justice et à la compensation pour les dommages causés par la Russie. »

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a condamné l’agression russe et les dommages considérables infligés à l’Ukraine.  Il a rappelé que les attaques indiscriminées contre les populations civiles innocentes constituent un crime de guerre.  Cette résolution devrait contribuer à la réparation des violations graves des principes de la Charte des Nations Unies, a estimé le représentant, qui a invité la Russie à mettre fin à sa guerre d’agression.

Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande) a estimé que les processus de reddition de compte et de réparation sont importants pour éviter et prévenir d’autres graves atrocités.  Elle a fait part de son ferme soutien aux mécanismes internationaux qui cherchent à assurer la reddition de compte pour les violations du droit international commises par la Russie.  Ceux qui sont responsables d’avoir causé des dommages et des préjudices doivent reconstruire et indemniser l’Ukraine, a argué la déléguée.  C’est fort de ces raisons que la Nouvelle-Zélande est l’un des parrains de ce texte qui reconnaît la nécessité manifeste de mettre sur pied un mécanisme de réparation des dommages, pertes et préjudices résultant d’actes illicites de la Russie contre l’Ukraine.

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) a estimé que la priorité immédiate doit être la cessation immédiate des hostilités, le rétablissement de la paix et la protection de la sécurité des civils et des institutions civiles en Ukraine.  Nous comprenons parfaitement qu’il est de la plus haute importance de résoudre l’héritage de la guerre pour la reconstruction, le maintien de la paix, la stabilité et la prospérité pour la population, a-t-il indiqué.  Le représentant a par ailleurs estimé que, dans tous les conflits, il est crucial que les parties concernées et les partenaires internationaux déploient tous les efforts possibles pour remédier aux destructions provoquées par la guerre, conformément au droit international.  Il a ainsi estimé que, dans l’attente d’une solution définitive à la situation en Ukraine, la tâche immédiate est de répondre de manière adéquate aux besoins humanitaires urgents.  À cette fin, il a appelé à créer un environnement propice et axé sur les personnes et à s’abstenir de toute action susceptible d’éloigner les parties et de retarder les perspectives de règlement.

M. MITCH FIFIELD (Australie) a averti que, lorsque cette guerre illégale sera terminée, l’Ukraine devra faire face à la tâche monumentale de reconstruire tout ce qui a été détruit par la Russie.  « Les préjudices subis par l’Ukraine exigent une réparation intégrale de la part de la Russie. »  Le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite prévoit que l’État responsable est tenu de réparer intégralement le préjudice causé, a noté le délégué.  La résolution d’aujourd’hui reconnaît que la Russie doit être tenue pour responsable de son invasion illégale et immorale de l’Ukraine.  D’après le délégué, le texte n’empiète pas sur les pouvoirs de l’Assemblée générale mais reconnaît simplement les principes fondamentaux du droit international auxquels la Russie doit se conformer.  Un registre des dommages et un mécanisme de réparation seraient des éléments importants pour élaborer un cadre équitable, impartial et juste, afin d’assurer une paix durable.  Le délégué a encouragé les États Membres à soutenir la résolution et à tout mettre en œuvre pour garantir que la Russie respecte ses obligations en vertu du droit international.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé l’ampleur des destructions provoquées par la Russie en Ukraine, précisant que 1 270 écoles et près d’un millier de centres sanitaires avaient été endommagés ou détruits, ainsi qu’un tiers de l’infrastructure des transports.  Il a ajouté que les entreprises avaient subi des dommages s’élevant à 10 milliards de dollars.  Estimant que le droit international est très clair et que ces destructions devaient donner lieu à des réparations, il a appelé les États Membres à voter en faveur de la résolution.  

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a souligné que la résolution ne traite pas de la confiscation des moyens, ni de la destruction du pouvoir d’États souverains.  Il n’est fait nulle part mention dans cette brève résolution de confiscation de biens souverains, a-t-il noté, accusant les pays qui profèrent de telles allégations de ne pas vouloir « reconnaître ce que dit » la résolution.  Le texte se contente de dire l’importance de créer, en coopération avec l’Ukraine, un mécanisme international aux fins de la réparation de pertes ou préjudices.  C’est dans cet esprit, a-t-il poursuivi, qu’elle recommande la « création d’un registre international qui servira à recenser, documents à l’appui, les éléments tendant à établir les dommages, pertes ou préjudices subis par toute personne physique ou morale concernée ».  Voilà ce que disent les deux paragraphes du dispositif, a martelé le représentant, regrettant que certaines délégations qui se sont exprimées aient parlé de « tout autre chose ».

Le représentant a également assuré que cette résolution ne cherche nullement à outrepasser les compétences de l’Assemblée générale, expliquant que la seule raison pour laquelle cet organe est saisi de la situation en Ukraine est que la Fédération de Russie a posé son droit de veto à chaque tentative du Conseil de sécurité de se saisir de cette crise.  Il s’agit, a réitéré le délégué, de permettre la création d’un registre pour rendre compte des destructions et dommages causés et non, a-t-il insisté, d’entraver de quelque manière que ce soit, la souveraineté d’un État, et encore moins de confisquer des biens.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a estimé que la résolution constitue une étape importance pour la reddition de comptes de la Russie pour son attaque contre l’Ukraine.  Il a rappelé qu’en droit international, l’État responsable d’un acte internationalement illicite doit cesser l’acte illicite, garantir sa non-répétition et assurer sa réparation.  L’Assemblée générale a déjà confirmé que l’agression russe constitue une violation de la Charte des Nations Unies, a-t-il noté.  Le représentant a appelé les délégations à se mettre à la place de l’Ukraine.  Face aux dommages considérables causés, « ne voudriez-vous pas que la communauté internationale reconnaisse que l’État agresseur doit être tenu responsable et a l’obligation d’accorder une réparation intégrale », a-t-il demandé.  « Je crois que la réponse serait positive », a-t-il ajouté, invitant les États à voter en faveur de la résolution.

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a dénoncé les actions russes qui continuent de causer des souffrances et des destructions à grande échelle.  « La Russie doit rendre des comptes », a-t-il déclaré, notant que la guerre d’agression russe a délibérément visé des cibles civiles.  Le représentant a souligné que la présente résolution n’établit pas un mécanisme de réparation ou de compensation sous l’égide de l’ONU, mais recommande la création d’un registre international des dommages.  Celui-ci permettra de coordonner et d’organiser les efforts de collecte de preuves, y compris dans le cadre des diverses enquêtes menées par des organes de l’ONU, a-t-il ajouté.  Selon le représentant, la réparation au titre des réclamations civiles et des actes internationalement illicites russes est non seulement une obligation fondamentale, mais également une étape essentielle pour la paix, la réintégration de l’agresseur dans la « communauté des États pacifiques » et la reconstruction de l’Ukraine.

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) condamnant l’invasion russe de l’Ukraine et appelant la Russie à choisir le chemin de la diplomatie, a déploré, entre autres, la destruction d’environ 40% de la capacité d’approvisionnement en électricité de l’Ukraine, les disparitions forcées, ainsi que les violences multiples subies par les Ukrainiens.  Ces actes internationalement illicites de la Russie entraînent des conséquences juridiques, a souligné le délégué.  Il a estimé que la création d’un registre des dommages, représenterait un premier pas vers la responsabilisation.  Cela concerne tant les préjudices matériels que moraux, et permettra de faire lumière sur les atrocités commises contre la population ukrainienne.  Sa création marquera également le début du processus débouchant sur le versement de réparations, conformément au droit international.  Ces réparations atténueront les conséquences physiques et financières dévastatrices pesant sur les Ukrainiens à long terme, a espéré le délégué, exhortant tous les États Membres à voter pour le projet de résolution.

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a estimé que les pays occidentaux veulent semer des divisions au sein de l’ONU et des États.  La résolution dont l’Assemblée générale est saisie est provocatrice, partielle et non équilibrée, elle est imposée par les États-Unis et leurs partenaires occidentaux afin de s’en prendre à la Russie, a-t-il dénoncé.  C’est une résolution hostile qui s’empare d’actifs russes gelés, a-t-il ajouté.  Le délégué a estimé que cela constituerait un précédent, en créant un mécanisme illégitime de réparation qui ne relève pas des prérogatives de l’Assemblée générale.  Par ailleurs, il a affirmé que le véritable objectif est de faire payer pour compenser tous les achats d’armes de l’Ukraine auprès des pays occidentaux.  En imposant un mécanisme illégitime, l’Assemblée générale manipule ainsi le règlement de l’ONU, a-t-il accusé, déplorant par ailleurs une politique de deux poids, deux mesures de la part des pays occidentaux.  En effet, le projet de résolution est un exemple éclatant de l’hypocrisie inédite que nous observons aujourd’hui, a lancé le délégué.  « Dès lors, je m’interroge: qui va verser des compensations et des réparations à mon pays pour les destructions d’infrastructures syriennes par la prétendue coalition internationale menée par les États-Unis?  Qui va fournir des réparations pour le peuple syrien dont les richesses ont été ainsi pillées? »

M. JASSER JIMÉNEZ (Nicaragua) a dénoncé la présentation d’une résolution qui n’apporte rien au multilatéralisme, ni à l’inclusion et qui a pour but de manipuler et de politiser l’ONU en créant un mécanisme de réparation qui ne serait pas sous le contrôle par l’organe qui l’aurait créé.  Il a déploré que tout en cherchant à créer un mécanisme pour un cas précis, les pays occidentaux ignorent la demande de réparation des peuples et pays qui ont subi l’impérialisme et le colonialisme.  Il a aussi rappelé que la CIJ a ordonné, en 1986, aux États-Unis, d’indemniser le Nicaragua à hauteur de 17 millions de dollars en raison de ses activités militaires et paramilitaires. 

Cette résolution qui sème la division, n’est pas propice au règlement diplomatique du conflit.  Elle aura des retombées négatives inimaginables pour la paix, et ne contribue en rien au règlement du conflit en Ukraine, a estimé le représentant.  

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a estimé que la résolution est une étape supplémentaire vers la reddition de comptes pour les violations flagrantes du droit international commises par la Fédération de Russie en Ukraine.  Il a expliqué que ses dispositions visent à compléter les efforts internationaux existants relatifs à la responsabilité pénale individuelle, en ajoutant la dimension manquante: celle de la responsabilité d’un État pour ses faits internationalement illicites.  Si l’agresseur n’est pas sanctionné, cela pourrait mener à une érosion irréversible de l’ordre international bâti au lendemain de guerres mondiales dévastatrices, a-t-il souligné.  Il a ajouté que ce pas supplémentaire était un pas en avant modeste et de principe et ne portait pas création de nouveaux instruments.   

M. SONG KIM (République populaire démocratique de Corée) a estimé que les racines de la crise ukrainienne reposent sur la politique hégémonique des États-Unis et de l’Ouest.  La résolution, a-t-il déclaré, « n’est rien de plus qu’un document politiquement motivé visant à transférer l’entière responsabilité de la crise en Ukraine vers la Fédération de Russie ».  Le représentant a souligné que « l’Assemblée générale n’est pas un organe judiciaire » et n’a aucun mandat pour juger les actes internationalement illicites ou pour fournir un fondement juridique aux recours et réparations en faveur de certains États.  Il s’est également inquiété des possibilités d’abus du projet de résolution afin de fournir un fondement juridique pour saisir les biens et actifs d’un État souverain.  À cet égard, il a attiré l’attention sur la résolution relative à la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens. 

M. GENG SHUANG (Chine) a dit comprendre la souffrance des victimes de conflits, car la Chine a, elle-même, été victime de plusieurs agressions dans l’histoire récente.  Pour le délégué, le projet de résolution a des lacunes, notamment en voulant prendre l’Assemblée générale pour une instance judiciaire qui va déterminer les responsabilités des parties.  Ensuite, le texte évoque la reddition de comptes en évoquant des recherches de la Commission du droit international (CDI) et qui ne sont que des articles et pas des traités internationaux.  Il n’est donc pas approprié, a estimé le délégué, d’invoquer lesdits articles.  Le projet de résolution entend également créer un registre et un mécanisme qui échappent au contrôle de l’ONU et qui ne lui feraient aucun rapport.  Pourtant, s’est-il étonné, on demande à l’Assemblée générale de procéder à la création de telles instances.  Le délégué a en outre rappelé que de nombreux pays dans le monde ont été victimes de faits internationalement illicites comme la colonisation et les blocus commerciaux.  De ce fait, ils auraient également droit de demander des réparations.  Au vu de ces explications, le délégué a appelé à préserver l’image impartiale de l’ONU qui doit traiter tous ses Membres sur un pied d’égalité.  Du reste, un tel projet de résolution aurait gagné à passer par des négociations et consultations afin de parvenir à un consensus.  Malheureusement, les auteurs ont cru bon de ne pas répondre aux préoccupations des délégations, et la Chine entend de ce fait voter contre le texte, a justifié le délégué. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé l’engagement résolu de son pays aux côtés de l’Ukraine et du peuple ukrainien pour que justice soit rendue à toutes les victimes de cette guerre injustifiable.  « C’est en honorant le droit des victimes ukrainiennes à un recours à la justice et à la réparation que la communauté internationale réaffirmera fermement et sans ambiguïté les principes juridiques internationaux de responsabilité, de justice et de primauté du droit. »  La France soutient activement les autorités judiciaires et la justice ukrainiennes dans le cadre des actions judiciaires qu’elles ont entreprises, a indiqué la déléguée, rappelant que la France et 43 autres États ont saisi la Cour pénale internationale (CPI).  « Nous la soutenons financièrement et politiquement dans le cadre des enquêtes qu’elle mène en Ukraine », a-t-elle précisé, affirmant que son pays sera présent aux côtés de l’Ukraine pour défendre sa souveraineté et son intégrité devant la Cour internationale de Justice (CIJ).  La France soutient ainsi la collecte de preuves menée par les mécanismes d’enquêtes ainsi que par les juridictions nationales et internationales, a ajouté la représentante, notant que la Commission d’enquête internationale et indépendante chargée de collecter et d’analyser des éléments de preuve, créée en mars dernier par le Conseil des droits de l’homme, a conclu notamment que des crimes de guerre ont été commis en Ukraine.  C’est pour cette raison que la France a parrainé le projet de résolution énonçant le principe de la création d’un registre qui permettra de répertorier les informations et les preuves sur les réclamations concernant les dommages, les pertes ou les préjudices subis par toutes les victimes ukrainiennes de la guerre provoquée par la Russie.

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a appelé à la cessation des hostilités et à la création d’un processus diplomatique pour mettre fin à la guerre en Ukraine.  Elle a rappelé que l’Article premier de la Charte précise que le but des Nations Unies est de maintenir la paix et la sécurité et a déploré que, dans le cadre de la guerre en Ukraine, le Conseil de sécurité n’honore pas son mandat.  En outre, l’Assemblée générale devrait se concentrer sur des résolutions contenant des propositions concrètes et mettre en place les conditions propices au dialogue, seule façon d’arriver à un règlement pacifique du conflit, a-t-elle estimé, affirmant en outre que le projet de résolution ne va pas dans le sens de l’Article premier de la Charte des Nations Unies.

Poursuivant, la déléguée a relevé que, par le passé, les États Membres n’ont pas pu trouver d’accord sur les réparations à accorder aux victimes de l’esclavage, du colonialisme ou de l’apartheid en raison de l’opposition des mêmes délégations qui sont coauteurs de la résolution dont l’Assemblée générales est saisie aujourd’hui.  Elle a alerté que l’adoption de la résolution enverrait un message d’exception, laissant entendre que certaines réparations comptent plus que d’autres et que l’Organisation est partisane.  L’Afrique du Sud ne peut appuyer ce processus et s’abstiendra, a-t-elle fait savoir.  

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a évoqué les principes du droit international qui stipulent que l’agresseur doit réparer les dommages causés.  Elle a jugé nécessaire de recenser et d’enregistrer les preuves des dommages causés à l’Ukraine par la Russie, afin que l’on sache à quoi s’en tenir quand viendra le moment des réparations.  Relevant que l’Assemblée générale avait déjà créé de tels registres par le passé, la déléguée a estimé que cela relève de ses prérogatives et qu’elle est fondée à le faire de nouveau. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) s’est opposé au projet de résolution en dénonçant une absence d’inclusion et de transparence de la part des États occidentaux.  Rappelant les efforts de médiation de son pays, il a reproché aux États occidentaux et à l’Ukraine d’avoir refusé de mettre en œuvre les Accords de Minsk.  D’après le délégué, le projet de résolution n’est qu’une tentative de « légaliser le vol d’avoirs étrangers ».  Ledit projet n’envisage pas de réparations pour le colonialisme occidental ou pour la trentaine de conflits armés ayant actuellement cours dans le monde, a-t-il noté.  Or, même si le conflit en Ukraine est grave, il ne doit pas faire exception.

M. PEDRO LUIS PEDROSO CUESTA (Cuba) a plaidé en faveur d’une solution diplomatique sérieuse à la crise actuelle en Ukraine par des moyens pacifiques, tout en s’opposant au « deux poids, deux mesures », à la partialité, la sélectivité et l’opportunisme que l’on cherche à imposer à l’Assemblée générale.  Le projet de résolution soumis, aujourd’hui, en est pour lui « l’illustration même ».  Dans le monde, a-t-il rappelé, une multitude de revendications légitimes et de demandes de réparations ont été présentées par des États Membres mais sont restées ignorées.  Ceux-là même qui s’opposent catégoriquement à examiner de telles situations se sont portés coauteurs de ce projet, a ironisé le délégué.  Selon lui, il faudrait commencer par examiner les demandes historiques accumulées, l’exploitation inhumaine de trois continents qui a contraint des millions de personnes à subir le sous-développement.  L’Assemblée générale n’a jamais créé de mécanismes de réparation pour les pays qui pâtissent des conséquences des mesures coercitives unilatérales, s’est-il emporté.  « Est-ce que Cuba obtiendrait réparation pour les dommages accumulés pendant 60 ans des suites du blocus imposé par les États-Unis? »  « Ou des indemnisations pour son occupation illégale de Guantanamo? »  Le délégué a, entre autres, accusé la communauté internationale de faire la sourde oreille s’agissant des revendications légitimes des populations des Îles du Pacifique victimes des essais nucléaires depuis 1947.  Accélérer la création d’un mécanisme de réparation dans un conflit donné alors que l’on continue de faire fi de tant d’autres revendications historiques avérées est injuste et amoral.  Cela cause également un « immense dommage » à la crédibilité de l’Assemblée générale, a fait valoir le délégué.

M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a estimé que le projet de résolution contient des dispositions qui sortent du cadre de la compétence de l’Assemblée générale.  Conformément à l’Article 39 de la Charte, celle-ci n’a pas l’autorité pour déterminer l’existence d’un acte d’agression, a-t-il affirmé, fustigeant l’abus de l’Assemblée générale pour la poursuite des intérêts étroits d’un certain groupe d’États.  Le mécanisme, s’il est accepté, n’apportera aucune contribution à la résolution pacifique du conflit, a-t-il ajouté.  Le représentant a en outre relevé que les coparrains de la résolution appliquent des critères différents pour les autres conflits dans le monde.  Si un mécanisme doit être établi pour enquêter sur les violations du droit international, il devrait disposer d’un large mandat capable de traiter toutes les situations d’illicéité et de réparation, a-t-il estimé.  Le délégué a souligné l’inviolabilité et les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens et a objecté à tout mécanisme qui pourrait saper ce principe établi du droit international.  Il a de plus affirmé que tous les actes ou décisions qui pourraient découler du mécanisme visé aux paragraphes 3 et 4 du projet de résolution n’auront aucun statut juridique et seront donc nuls et non avenus.

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a retenu, parmi les arguments invoqués par ses collègues, un élément fondamental: la communauté internationale doit demander des comptes à la Russie pour ses enfreintes à la souveraineté territoriale de l’Ukraine.  Le projet de résolution constituerait une « étape cruciale vers la responsabilisation », d’autant plus que les responsabilités russes sont immenses, a justifié le délégué.  Il a déploré, outre le bilan matériel, le nombre croissant de personnes disparues, les cas documentés de torture, le bombardement de maternités de quartiers résidentiels, ou d’infrastructures énergétiques à l’approche de l’hiver.  L’Assemblée générale est habilitée à adopter ce type de projet de résolution, a argué le délégué, invoquant le Chapitre IV de la Charte des Nations Unies, qui donne autorité à l’Assemblée sur une « vaste palette de questions ».  Le texte est animé par l’esprit de justice, et aucunement par des motivations de nature géopolitique, a assuré le délégué.  Il a prédit qu’en l’adoptant, l’Assemblée enverrait un message dissuasif à tous les agresseurs potentiels sur la scène internationale, montrant que la violation des principes du droit international entraîne des conséquences.  Les États Membres ne sauraient rester les bras croisés alors même que les principes pour lesquels il se sont engagés au titre de la Charte sont bafoués, a conclu le délégué.

Mme SILVA LEANDER, de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale, a estimé que, pour reconstruire son économie, l’Ukraine aura besoin de soutien de longue durée de la communauté internationale mais également d’aide pour renforcer ses institutions démocratiques.  Cela est essentiel afin de lutter contre la corruption et pour parvenir aux résultats ambitieux d’un plan de reconstruction, a-t-elle étayé.  Elle a accusé ensuite la Russie de s’en être pris notamment aux institutions civiles et politiques d’acteurs locaux, dont le militantisme en Ukraine a été vu comme une menace par la Russie.  N’oublions pas que ce conflit ne porte pas seulement sur la souveraineté mais aussi sur la démocratie, a-t-elle lancé, soulignant que cette guerre d’agression est une attaque contre le système politique ukrainien, à savoir la démocratie.  En outre, elle a estimé que le processus de reconstruction devra voir en son cœur la démocratie, appelant à allouer des ressources en faveur de la reconstruction et l’amélioration des instances démocratiques en Ukraine. 

Explications de vote ou de position avant le vote

Le représentant des Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a rappelé que l’action militaire de la Russie en Ukraine constitue une violation flagrante des principes de la Charte des Nations Unies.  Il a noté que, lorsqu’un tort est commis, la victime a droit à une réparation appropriée.  À ce titre, il a estimé que la charge de la compensation des dommages causés en Ukraine doit peser sur la Russie.  Le représentant a néanmoins regretté que cette résolution demande à l’Assemblée générale d’approuver « un processus sur lequel elle n’aura aucun contrôle » et repose sur la confiance des États Membres.  La résolution, a-t-il indiqué, ne fournit aucun principe directeur quant aux modalités de fonctionnement d’un futur mécanisme ou quant aux modalités de création et de gestion du registre des dommages.  « Les États Membres sont en outre invités à agir dans le contexte d’une guerre en cours, sans qu’il ne soit possible de prédire ses développements ».  Il n’existe, en l’état, aucun fondement juridictionnel établi pour le mécanisme proposé ou pour le registre des dommages, a estimé le représentant, qui a souligné que cette initiative ne relève pas des pouvoirs de l’Assemblée générale.  Pour cette raison, il a indiqué que la CARICOM s’abstiendra lors du vote sur la résolution.  La CARICOM reconnaît néanmoins que la Fédération de Russie doit assumer les conséquences juridiques de ses actes illicites, a-t-il estimé.

Le représentant du Mexique a estimé que la réparation des dommages est une obligation du droit international, et que les procédures judiciaires en cours pourront aboutir à la punition des responsables.  Si l’étape des réparations est encore loin, le projet de résolution se limite justement à recommander la création d’un registre des dommages, ce pourquoi le pays votera en faveur du texte.

Le représentant du Venezuela a regretté que ce projet de résolution soit imposé aux États Membres alors qu’aucun effort n’a été fait pour prendre en compte les vues et les préoccupations de tous les États sur une question qui continue de polariser la communauté internationale.  Sur le fond, il a déploré que les promoteurs du texte s’acharnent à vouloir instrumentaliser l’Assemblée générale, en enracinant une « mentalité de nouvelle guerre froide » afin de faire avancer leurs agendas nationaux et leurs intérêts de domination géostratégique, au détriment de la paix, de la sécurité et de la stabilité mondiales.  Dénonçant le « deux poids, deux mesures » du projet de résolution, il a constaté que la confiscation de biens, d’avoirs et de ressources qu’il implique s’ajoute à une série de mesures coercitives unilatérales qui violent le droit international et les principes de la Charte des Nations Unies.  De plus, a-t-il poursuivi, il est demandé que ledit mécanisme soit établi par l’Assemblée générale, sans pour autant qu’il ait à rendre compte à cet organe.  Le représentant a également noté que, tout en réclamant des réparations pour des citoyens européens, les auteurs du texte ignorent les justes revendications des peuples d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes, qui exigent des réparations appropriées pour les crimes commis par les puissances coloniales et pour leurs aventures militaires plus récentes.  À cette aune, il a estimé que le projet de résolution ne contribuera aucunement à l’objectif d’une paix durable et a appelé les « membres responsables » de la communauté internationale à voter contre. 

Explications de vote ou position après le vote

Le représentant de l’Égypte a expliqué que son pays s’est abstenu sur le projet de résolution qui constitue, selon lui, un « précédent dangereux » car il est demandé à l’Assemblée générale de créer un registre et un mécanisme qui « sortent du cadre du fonctionnement de l’ONU ».  De plus, le délégué a rappelé que la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite fait l’objet d’un projet d’articles de la Commission du droit international (CDI), régulièrement discuté au sein de la Sixième Commission qui n’a pas encore atteint un consensus sur la question.  Pour le délégué, il aurait été préférable que l’Assemblée générale reste à l’écart de cette question.  En outre, certains États sont très engagés en faveur de ce texte alors même qu’ils s’abstiennent de voter pour des situations similaires, a-t-il déploré, en parlant de « duplicité ».  Enfin, le délégué a estimé que le plus important est de fédérer tous les efforts pour trouver une solution pacifique au conflit. 

Le représentant du Brésil a justifié l’abstention de son pays par le fait que la résolution adoptée ne favorise pas un dialogue constructif et ne reconnaît pas le rôle central de l’ONU dans le processus visant à désamorcer le conflit en Ukraine.  Il a ainsi regretté la grande incertitude concernant les paramètres juridiques du registre international des dommages, prévu par la résolution, qui serait créé en dehors du cadre de l’ONU et sans sa tutelle.  En recommandant la création d’un tel mécanisme, sans même en préciser la portée, l’Assemblée générale encourage la fragmentation de notre responsabilité collective dans la promotion de la paix, a-t-il dénoncé.  Selon lui, cette décision ignore les efforts déjà déployés par le Conseil des droits de l’homme et la Cour pénale internationale, par exemple, et risque d’avoir des conséquences à long terme.  Compte tenu de l’impasse du Conseil de sécurité sur la question à l’ordre du jour, il a déploré que cette session spéciale d’urgence n’ait pas été en mesure d’agir de manière plus transparente et démocratique.  Il a enfin réaffirmé que le Brésil continue de croire en une solution négociée au conflit et au rôle fondamental de l’ONU pour rapprocher les parties, y compris pour discuter en temps opportun des questions liées aux réparations.

Le représentant du Chili a indiqué que son pays s’est prononcé en faveur du projet de résolution, en cohérence avec son respect des droits humains et son refus de l’impunité.  À cet égard, il a rappelé que le « Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite », approuvé par la Commission du droit international en 2001, reste depuis lors en suspens.  Aucun progrès n’a été enregistré à la Sixième Commission parce que certaines délégations n’entendent pas négocier une convention multilatérale qui offre un cadre juridique contraignant pour faire respecter la responsabilité internationale des États, a-t-il constaté.  Il a donc appelé ces délégations à modifier leur position de manière à la rendre compatible avec le vote d’aujourd’hui.  Rappelant par ailleurs que les résolutions de l’Assemblée générale ont un caractère non contraignant, y compris la reconnaissance de mécanismes qui n’ont d’effet qu’entre les États participants et ne sont pas opposables aux États tiers, il a invité la communauté internationale à garder à l’esprit les principes généraux qui régissent les mécanismes de règlement pacifique des différends.  Il a, d’autre part, jugé essentiel que les victimes de violences sexuelles et sexistes aient accès à une réparation globale dans les situations de conflit et post-conflit.  À cette aune, il a plaidé pour la création de fonds de réparations d’État pour les victimes de féminicide et autres morts violentes de femmes. 

Le représentant de l’Indonésie a regretté l’adoption d’une résolution qui « sème la discorde sur une question où l’unité est nécessaire ».  Il a estimé que le message sous-jacent aurait dû être que les conflits doivent cesser et que l’intégrité territoriale doit être respectée.  À cet égard, il a invité les parties engagées à cesser les combats et à revenir à la table des négociations.  Afin de garantir une réparation juste, il est important que les mécanismes construits le soient sur la base du procès équitable, a poursuivi le représentant.  Il a regretté le caractère « prématuré » de la résolution, d’autant plus que les termes du mécanisme seront négociés en dehors de l’Assemblée.  Il s’est, à ce titre, interrogé sur le besoin d’une telle résolution et a estimé qu’il s’agissait d’un « précédent dangereux ».  Pour ces raisons, l’Indonésie s’est abstenue lors du vote.

La représentante de l’Inde a rappelé qu’il n’y a pas d’alternative au dialogue pour régler les différends même si la tâche peut paraître « dantesque ».  Il est malheureux qu’au fil du déroulement du conflit en Ukraine, tous les pays du Sud aient souffert de ses conséquences, a-t-elle déploré.  Elle a jugé essentiel d’écouter la voix de ces pays, et évoqué la flambée des prix des denrées alimentaires, du carburant ou encore des engrais.  « Nous devons nous demander objectivement si un processus de réparation via un vote à l’Assemblée générale contribuera aux efforts pour régler ce conflit », a poursuivi la déléguée.  Selon elle, la validité juridique d’un tel processus est « peu claire ».  « Nous devons nous garder de créer des mécanismes sans vérification plus ample sur le plan juridique », a-t-elle insisté, appelant à éviter de mettre en péril les possibilités de dialogue et de négociation.  C’est pour cette raison que nous avons décidé de nous abstenir, a-t-elle ainsi indiqué.

Le représentant de Singapour a expliqué avoir voté en faveur de la résolution conformément à sa position de principe contre l’invasion de l’Ukraine par la Russie et contre les violations de la Charte des Nations Unies et du droit international.  « Un monde où la force a raison et où l’agression n’entraîne pas de conséquences est inacceptable ».  Singapour a soutenu cette résolution, a nuancé le délégué, étant entendu qu’elle ne cherche pas à compromettre ou préjuger les résultats des processus judiciaires et d’enquête en cours liés à la guerre en Ukraine.  L’ouverture de processus parallèles ne contribue pas nécessairement à ces délibérations de manière constructive, et peut même soulever de graves questions de procédure, a-t-il averti.  De même, l’approche adoptée dans cette résolution n’est pas automatiquement applicable à d’autres conflits, et chaque situation doit être examinée au cas par cas, en tenant compte des principes de la Charte des Nations Unies et du droit international, a recommandé le délégué.

Le représentant du Pakistan a affirmé que si sa délégation est pleinement favorable à la création sous les auspices des Nations Unies d’une commission ayant pour mission un plan complet pour la paix en Ukraine, ce mécanisme devrait être fondé sur une base juridique.  Il a regretté que nombre de coauteurs dudit projet de résolution n’aient cessé de s’opposer à un mécanisme international de dédommagement dans le cadre du colonialisme et de l’esclavage.  Les approches à géométrie variable sont contreproductives, a-t-il affirmé.  La délégation a par ailleurs estimé qu’un mécanisme de redressement, qui ne serait pas géré par les Nations Unies, et n’aurait de compte à rendre à aucun de ses organes, pas même l’Assemblée générale, serait sans précédent.

Le représentant du Kenya a indiqué avoir voté en faveur de la résolution, soulignant que l’Ukraine a le droit de réclamer des réparations face aux dommages qu’elle a subis.  Le représentant a espéré que cette résolution ouvrira la voie à d’autres résolutions sur la question des réparations, notamment pour l’esclavage et le colonialisme pour lesquels, a-t-il estimé, il faudrait envisager de créer un registre international complet et inclusif des dommages causés.  

La représentante du Brunéi Darussalam a réaffirmé l’importance de faire respecter un cadre basé sur le respect du droit international.  Concernant la création d’un mécanisme comme le registre international des dommages aux fins de leur réparation, elle a reconnu que des mécanismes semblables ont été créés sous l’égide de l’ONU « à la suite de consultations ».  Tout mécanisme de ce type devrait donc être créé conformément à la procédure régulière, a déclaré la déléguée.  Elle a appelé à respecter la diplomatie et prié toutes les parties directement impliquées de régler leurs différends par les moyens pacifiques, sans recourir à la menace.

La représentante de l’Argentine a relevé que tout dommage lié au conflit en Ukraine doit faire l’objet de réparation.  L’Argentine a voté en faveur du texte et la déléguée a rappelé que la reddition de comptes après des actes internationalement illicites est un principe de base du droit international.

Le représentant du Qatar a indiqué avoir voté ainsi en faveur de la résolution, un vote conforme à sa position constante concernant la protection des civils et le versement de réparations.  Cependant, a-t-il fait valoir, les réparations et le mécanisme chargé de leur mise en œuvre doit respecter les principes du droit international et des précédents internationaux. 

Le représentant des Émirats arabes unis a estimé que le texte de la résolution est peu clair et imprécis.  La délégation a souligné que, lorsque des mécanismes similaires ont été développés dans le passé, leurs modalités avaient été définies en amont, ce qui n’est pas le cas de la présente résolution.  Celle-ci ne doit pas être vue comme permettant les actions unilatérales, y compris la saisie d’actifs aux fins de réparation, a-t-elle souligné.

Le représentant du Nigéria, qui s’est abstenu, a appelé toutes les parties au conflit à envisager de toute urgence des négociations pour parvenir à une fin durable du conflit et à s’abstenir de toute action qui pourrait aggraver le conflit en Ukraine.

La délégation du Bahreïn a souligné que tout mécanisme de réparation doit fonctionner sur la base des règles des Nations Unies, conformément aux normes du droit international.  La délégation a appelé la communauté internationale à travailler à une résolution pacifique du conflit qui réponde aux besoins de toutes les parties.

La délégation de Sierra Leone a expliqué s’être abstenue car l’Assemblée générale n’est pas un organe judiciaire qui serait amené à prononcer une décision de justice.  La délégation a de plus estimé que les réparations devraient concerner le passé et le présent, y compris les questions de l’esclavage et du colonialisme. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

République centrafricaine: Le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINUSCA en adoptant un texte critiqué par plusieurs de ses membres

9190e séance - après-midi
CS/15104

République centrafricaine: Le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINUSCA en adoptant un texte critiqué par plusieurs de ses membres

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, prorogé le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), plusieurs membres critiquant la délégation porte-plume, la France, pour le déroulement des négociations et le libellé du texte adopté. 

C’est le cas des trois abstentionnistes -Gabon, Chine et Fédération de Russie–, la résolution 2659 (2022) ayant été adoptée par 12 voix pour, certains membres du Conseil ayant voté en faveur la jugeant « non satisfaisante », parce qu’elle n’intègre pas les points de vue de tous, pas plus qu’elle ne répond aux attentes de la République centrafricaine, ni aux impératifs d’une opération de maintien de la paix « qui doit gagner en efficacité ».   

La Ministre des affaires étrangères de la République centrafricaine a estimé que ce texte est la preuve d’une volonté d’entretenir le conflit pour maintenir son pays dans une dépendance voulue et un souci de préservation des termes du traité de Berlin .  La crise qui secoue son pays ne se résoudra pas par des « querelles stériles », ni par des textes produits « dans de confortables tour d’ivoire » et « en déconnexion totale de la réalité du terrain », a fustigé Mme Sylvie Baïpo-Temon.

Le Kenya a déploré que des considérations géopolitiques aient fini par déterminer la position de certaines délégations, réduisant ainsi à néant tout espoir de consensus.  Cette délégation a dit n’avoir voté en faveur du texte que pour donner suffisamment de temps à la nouvelle Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République centrafricaine.  Mais dans le fond, elle a regretté que les propositions des trois pays africains membres du Conseil de sécurité -Gabon, Ghana et Kenya– pour améliorer le mandat de la MINUSCA aient aussi été rejetées, notamment celles relatives à l’extension de l’autorité de l’État et à la préservation de l’intégrité territoriale. 

Le Ghana non plus n’a pas été « pleinement satisfait » de la manière dont les négociations sur ce texte se sont déroulées.  La France, a-t-il dit, aurait pu associer tous les membres du Conseil, qui auraient souhaité un libellé plus vigoureux pour condamner les activités des groupes armés. 

Le Royaume-Uni, qui a également voté en faveur, s’est dit « déçu » que le libellé sur la responsabilité de protéger n’ait pas été retenu, alors que le contexte politique et sécuritaire reste difficile en République centrafricaine, tandis que les États-Unis ont regretté que la résolution, bien qu’elle condamne les activités des groupes armés, ne nomme pas spécifiquement le groupe Wagner, alors que des informations montrent que des forces armées déployées par la Fédération de Russie font obstacle à la mise en œuvre du mandat de la MINUSCA et se livrent à des exactions. 

Le Gabon, la Chine et la Fédération de Russie ont estimé que la France n’avait pas tenu compte des préoccupations de tous les membres du Conseil, pas plus que des priorités et aspirations de la République centrafricaine elle-même, relatives notamment à un élément indiscutable de stabilisation: le renforcement de l’autorité de l’État et l’activité des groupes armés.

La délégation française n’a accepté qu’un seul élément demandé par le pays hôte, a tranché la Fédération de Russie, ajoutant ne pas comprendre pourquoi les questions relatives aux engins explosifs ayant été utilisés pour attaquer des Casques bleus n’ont pas été intégrées.  Le Conseil de sécurité doit savoir comment ces engins et leurs composants sont arrivés en République centrafricaine, a-t-elle déclaré.

La France, soutenue par la Norvège, l’Irlande et l’Albanie, a au contraire assuré avoir été à l’écoute des positions de chaque membre du Conseil et de la République centrafricaine, comme le montre l’adoption de la résolution qui, malgré tout, concilie les positions, parfois divergentes, de chacun. 

Longue de 25 pages, la résolution 2655 (2022) décide de proroger le mandat de la MINUSCA jusqu’au 15 novembre 2023 et de maintenir son effectif maximal à 14 400 militaires, dont 580 observateurs militaires et officiers d’état-major, et 3 020 policiers, dont 600 policiers hors unités constituées et 2 420 membres d’unités de police constituées, ainsi que 108 agents pénitentiaires.

La résolution exhorte également les autorités centrafricaines et demande aux États de la région d’assurer la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation de l’ensemble du personnel de la Mission, de son matériel, de ses vivres, des fournitures et autres biens avec accès immédiat et sans entrave ni retard, à tout le territoire de la République centrafricaine, y compris par voie aérienne et de nuit, conformément à l’Accord sur le statut des forces de la Mission. 

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Texte du projet de résolution S/2022/845

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures, les déclarations de sa présidence et les déclarations à la presse sur la situation en République centrafricaine,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République centrafricaine, et rappelant l’importance des principes de non-ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale,

Réaffirmant également les principes fondamentaux du maintien de la paix que sont le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat, considérant que le mandat de chaque mission de maintien de la paix est adapté aux besoins et à la situation du pays concerné, soulignant que les mandats qu’il autorise sont conformes à ces principes fondamentaux, réaffirmant qu’il escompte l’exécution intégrale des mandats qu’il autorise, et rappelant à cet égard sa résolution 2436 (2018),

Rappelant qu’il incombe au premier chef aux autorités centrafricaines de protéger toutes les populations du pays, y compris contre les crimes internationaux, conscient que la persistance des problèmes de sécurité constitue une menace pour les civils, et soulignant l’importance des efforts déployés à l’échelle nationale pour rétablir l’autorité de l’État dans tout le pays et ainsi surmonter les menaces que représentent les groupes armés,

Insistant sur le fait que tout règlement durable de la crise en République centrafricaine, y compris le processus politique, doit être aux mains de la République centrafricaine et accorder la priorité à la réconciliation du peuple centrafricain, dans le cadre d’un processus inclusif associant les hommes et les femmes, y compris les personnes qui ont été déplacées du fait de la crise, quelle que soit leur origine sociale, économique, politique, religieuse et ethnique,

Rappelant la signature, à Bangui le 6 février 2019, de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine par les autorités centrafricaines et 14 groupes armés (l’« APPR »), à l’issue des pourparlers de paix qui se sont tenus à Khartoum dans le cadre de l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation et sous les auspices de l’Union africaine, et soulignant le rôle central dudit instrument et la nécessité de progresser davantage dans sa mise en œuvre,

Réaffirmant que l’APPR demeure le seul mécanisme permettant de réaliser une paix et une stabilité durables en République centrafricaine et reste le seul cadre de dialogue avec les groupes armés ayant renoncé à la violence,

Condamnant avec la plus grande fermeté les violations de l’APPR et les violences commises par toutes les parties au conflit, en particulier les groupes armés, dans tout le pays, notamment celles commises par l’emploi de plus en plus fréquent d’engins explosifs, les violences visant à faire obstacle aux opérations électorales, les incitations à la violence et à la haine spécifiquement dirigées contre des membres de communautés ethniques et religieuses, qui ont fait des morts et des blessés et entraîné des déplacements, les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, notamment celles commises contre les enfants et les actes de violence sexuelle commis en période de conflit,

Prenant acte du rapport annuel conjointement établi à son intention par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, sur les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits ainsi que les violations du droit international humanitaire commises en République centrafricaine, notant avec préoccupation que toutes les parties au conflit, y compris les groupes armés, ont commis des exactions et violations, se félicitant de la réponse présentée par les autorités centrafricaines tendant à examiner les conclusions du rapport, et se déclarant favorable à la mise en œuvre des mesures préventives et correctives proposées par le Gouvernement,

Soulignant qu’il est impératif de mettre fin de toute urgence à l’impunité en République centrafricaine, prenant note des travaux qu’accomplit la Commission spéciale d’enquête, et demandant aux autorités centrafricaines d’ouvrir sans tarder des enquêtes et de traduire en justice les auteurs de violations du droit international humanitaire et d’atteintes aux droits de l’homme et de violations de ces droits,

Notant qu’une solution durable à la crise qui sévit en République centrafricaine et l’élimination de la menace représentée par les groupes armés doivent passer par une stratégie régionale intégrée et un engagement politique fort de la part des autorités de la République centrafricaine et des pays de la région, et notant également qu’il importe de s’attaquer aux causes profondes du conflit, y compris l’exploitation et le commerce illicites des ressources naturelles, et de mettre fin aux cycles récurrents de la violence, comme indiqué dans l’APPR,

Se félicitant de la réunion d’examen stratégique organisée le 4 juin 2022 par le Président Faustin-Archange Touadéra avec les partenaires régionaux et internationaux du processus de paix, dans le sillage de la feuille de route adoptée par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs à Luanda le 16 septembre 2021 sous la direction de l’Angola et du Rwanda (la « feuille de route »), prenant note des efforts que le Gouvernement déploie sous la conduite du Premier Ministre Félix Moloua pour coordonner la mise en œuvre de l’APPR par le biais de la feuille de route de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (le « processus de paix »), se félicitant de l’appropriation du processus de paix par le pays, exhortant toutes les parties au conflit présentes en République centrafricaine à respecter le cessez-le-feu annoncé le 15 octobre 2021, se déclarant inquiet que certains signataires de l’APPR ne respectent toujours pas leurs engagements, soulignant que les États voisins, les organisations régionales et tous les partenaires internationaux doivent soutenir l’application de l’APPR par le biais de la feuille de route et continuer à coordonner leur action avec celle du Gouvernement centrafricain en vue de l’instauration d’une paix et d’une stabilité durables en République centrafricaine,

Soulignant qu’il demeure crucial de soutenir les efforts déployés au niveau national pour étendre l’autorité de l’État, réformer le secteur de la sécurité et renforcer les capacités des institutions chargées de la sécurité en République centrafricaine pour les mettre en état d’assumer l’entière responsabilité de la sécurité du pays,

Soulignant que l’instauration d’une paix et d’une sécurité durables en République centrafricaine passe nécessairement par des efforts conjugués sur le plan politique et dans les domaines de la sécurité, du maintien de la paix et du développement durable, au profit de toutes les régions du pays, ainsi que par la mise en œuvre intégrale, effective et inclusive de l’APPR et par la participation pleine, égale et véritable des femmes et des jeunes,

Saluant le travail accompli par la MINUSCA, la Mission d’observation de l’Union africaine en République centrafricaine (MOUACA), la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM-RCA), la mission de conseil de l’Union européenne en République centrafricaine (EUAM‑RCA) et l’assistance apportée par d’autres partenaires internationaux et régionaux de la République centrafricaine, dont les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France et la République populaire de Chine et la République du Rwanda, en vue de former les forces de défense et de sécurité de la République centrafricaine et de renforcer leurs capacités, et encourageant une coordination effective de l’appui international à la République centrafricaine, dans la cohérence et la transparence,

Condamnant les activités criminelles transfrontières menées par toutes les parties, y compris les groupes armés, telles que le trafic d’armes, le commerce illicite, l’exploitation illégale et le trafic de ressources naturelles, notamment de l’or, des diamants, du bois d’œuvre et des espèces sauvages, ainsi que le transfert illicite, l’accumulation déstabilisatrice et le détournement d’armes légères et de petit calibre, qui menacent la paix et la stabilité de la République centrafricaine, condamnant également l’utilisation de mercenaires et les violations du droit international humanitaire et les atteintes aux droits de l’homme commises par ces derniers, encourageant le Gouvernement centrafricain à travailler avec les pays voisins pour sécuriser ses frontières et les autres points d’entrée et empêcher ainsi l’entrée sur son territoire de combattants armés, d’armes et de minerais provenant de zones de conflit, soulignant qu’il importe que les autorités centrafricaines finalisent et mettent en œuvre, en coopération avec les partenaires concernés, une stratégie de lutte contre l’exploitation illégale et le trafic des ressources naturelles, et encourageant le Gouvernement de la République centrafricaine et les pays voisins à travailler ensemble pour sécuriser leurs frontières,

Prenant note du Dialogue républicain organisé en mars 2022 et appelant le Gouvernement centrafricain et tous les acteurs politiques à prendre de nouvelles mesures pour mettre en œuvre les recommandations issues de ce dialogue, régler toute question susceptible de se poser et parachever le processus électoral par l’organisation d’élections locales,

Prenant note également de la tenue prochaine, en 2023, d’élections locales, soulignant qu’il incombe au premier chef aux autorités centrafricaines de les organiser, rappelant qu’il est nécessaire que les opérations électorales se déroulent dans le respect de la Constitution, soulignant que seules des élections inclusives, libres, régulières, transparentes, crédibles et pacifiques, se déroulant dans le respect des délais et exemptes de toute désinformation ou autre forme de manipulation de l’information, pourront apporter une stabilité durable à la République centrafricaine, notamment au moyen de la participation pleine, égale et véritable, en toute sécurité, des femmes, réaffirmant l’importance de la participation des jeunes, encourageant les autorités centrafricaines à promouvoir, avec le concours des partenaires concernés, la participation des déplacés et des réfugiés conformément à la Constitution centrafricaine, conscient des difficultés que l’organisation de ce scrutin posent aux autorités centrafricaines, et encourageant les partenaires internationaux à les soutenir dans cette entreprise, notamment par un appui financier et technique,

Rappelant ses résolutions sur la protection des civils en période de conflit armé, sur les femmes et la paix et la sécurité, sur les jeunes et la paix et la sécurité, ainsi que sur les enfants et les conflits armés, se félicitant de l’élaboration par le Gouvernement des plans interministériels à l’appui de la mise en œuvre du Code de protection de l’enfance, prenant note du rapport du Secrétaire général en date du 15 octobre 2021 sur les enfants et les conflits armés en République centrafricaine (S/2021/882), demeurant préoccupé par la flambée des violations du droit international humanitaire et des violations des droits de l’homme commises contre les enfants, demandant à toutes les parties en République centrafricaine de coopérer avec la Représentante spéciale pour la question des enfants et des conflits armés et la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, saluant la décision prise par le Gouvernement centrafricain de mettre en place un comité stratégique chargé de prévenir et de combattre les violences fondées sur le genre liées au conflit, et exhortant le Gouvernement et les autres signataires de l’APPR à collaborer avec l’Organisation des Nations Unies afin d’élaborer une stratégie nationale qui permette de prévenir et d’éliminer les six violations graves contre les enfants reconnues par la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés,

Se déclarant profondément préoccupé par la gravité et la détérioration de la situation humanitaire en République centrafricaine, ainsi que par les conséquences de l’insécurité sur l’accès humanitaire, condamnant avec la plus grande fermeté l’augmentation du nombre d’attaques menées par les groupes armés contre le personnel humanitaire et médical et les entraves à l’accès humanitaire, appelant l’attention sur les besoins humanitaires actuels de plus de la moitié de la population du pays, y compris les civils menacés de violences, et sur la situation alarmante des déplacés et des réfugiés, conscient de la menace résultant de l’utilisation d’engins explosifs par les groupes armés et de ses conséquences sur les civils, y compris les enfants, ainsi que sur les soldats de la paix, les agents humanitaires et les forces de défense et de sécurité de la République centrafricaine, et se félicitant de la collaboration entre la MINUSCA, les organismes des Nations Unies, l’Union africaine, la Banque mondiale, les partenaires techniques et financiers de la République centrafricaine et les organisations non gouvernementales, qui appuient le développement et l’action humanitaire dans le pays et ont su s’adapter à la situation provoquée par la pandémie de COVID-19, qui a aggravé les vulnérabilités existantes,

Rappelant les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence,

Rappelant sa résolution 2532 (2020), par laquelle il a exigé la cessation générale et immédiate des hostilités dans toutes les situations dont il était saisi et demandé à toutes les parties à des conflits armés de prendre part immédiatement à une pause humanitaire durable, de façon à permettre l’acheminement sûr, rapide, sans entrave et durable de l’aide humanitaire, conformément aux principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance,

Conscient des effets néfastes que les changements climatiques, les changements écologiques et les catastrophes naturelles, entre autres facteurs, ont sur la stabilité de la région de l’Afrique centrale, notamment la sécheresse, la désertification, la dégradation des terres, l’insécurité alimentaire et le manque d’accès à l’énergie, et soulignant qu’il importe que l’Organisation des Nations Unies procède à une évaluation complète des risques relatifs à ces facteurs et que les gouvernements de la région de l’Afrique centrale et l’Organisation adoptent des stratégies de long terme visant à appuyer la stabilisation et à renforcer la résilience,

Condamnant dans les termes les plus vifs toutes les attaques, provocations et incitations à la haine et à la violence visant la MINUSCA et d’autres forces internationales, qui sont notamment le fait de groupes armés, en particulier les violations de l’Accord sur le statut des forces, y compris l’interdiction des vols de nuit, que les autorités centrafricaines doivent strictement respecter, ainsi que les campagnes de désinformation, y compris celles menées sur les réseaux sociaux, rendant hommage aux membres du personnel de la MINUSCA qui ont sacrifié leur vie au service de la paix, soulignant que les attaques visant les forces de maintien de la paix peuvent constituer des crimes de guerre, rappelant à toutes les parties leurs obligations au regard du droit international humanitaire, et demandant instamment aux autorités centrafricaines de collaborer avec la MINUSCA afin de renforcer la sûreté et la sécurité du personnel de la Mission, et de prendre toutes les mesures possibles pour garantir que les auteurs de ces actes seront arrêtés et traduits en justice, notamment conformément aux résolutions 2518 (2020) et 2589 (2021),

Conscient de l’importance d’une communication stratégique efficace pour la bonne exécution du mandat de la MINUSCA, en particulier la protection des civils et l’appui au processus de paix, et pour la sûreté et la sécurité de son personnel, et soulignant la nécessité de continuer à renforcer les capacités de la Mission dans ce domaine,

Se félicitant du rapport sur l’examen stratégique indépendant sur les réponses mises en œuvre par les opérations de maintien de la paix des Nations Unies face aux engins explosifs (S/2021/1042), et notant que les recommandations qui y figurent pourraient offrir des orientations utiles aux pays qui fournissent des contingents ou du personnel de police à la MINUSCA,

Rappelant les dispositions relatives à la performance des opérations de maintien de la paix énoncées dans les résolutions 2378 (2017) et 2436 (2018),

Prenant note du rapport du Secrétaire général en date du 13 octobre 2022 (S/2022/762),

Constatant que la situation en République centrafricaine continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Processus politique, y compris la mise en œuvre de l’Accord politique et l’extension de l’autorité de l’État

1.   Encourage le Président Faustin-Archange Touadéra et son gouvernement à continuer de s’employer à promouvoir une paix et une stabilité durables en République centrafricaine dans le cadre d’un processus politique et de paix global et revitalisé, qui passe par le respect du cessez-le-feu, un dialogue républicain inclusif et l’application de l’APPR;

2.   Exhorte toutes les parties au conflit en République centrafricaine à respecter le cessez-le-feu, et demande aux autorités centrafricaines et aux groupes armés signataires de mettre pleinement en œuvre l’APPR de bonne foi et sans délai, afin de répondre aux aspirations de paix, de sécurité, de justice, de réconciliation, d’inclusion et de développement du peuple centrafricain, et à régler leurs différends par des voies pacifiques, notamment au moyen des mécanismes de suivi et de règlement des différends prévus dans l’APPR, et à assurer la participation pleine, égale et véritable des femmes à ces mécanismes et aux mécanismes établis au titre de l’APPR pour en appuyer et surveiller la mise en œuvre, ainsi que dans la mise en œuvre  des recommandations issues du Dialogue républicain;

3.   Demande qu’il soit immédiatement mis un terme à toutes formes de violence contre les civils, le personnel de maintien de la paix des Nations Unies et le personnel humanitaire, ainsi qu’aux activités déstabilisatrices, aux incitations à la haine, à la violence, aux campagnes de désinformation menées, notamment, sur les réseaux sociaux, aux entraves à la liberté de circulation et à l’obstruction aux opérations électorales, et que les groupes armés déposent les armes et se démobilisent définitivement, conformément aux engagements pris dans le cadre de l’APPR;

4.   Condamne fermement toutes les violations du droit international humanitaire commises en République centrafricaine, y compris les attaques dirigées contre la population civile, les soldats de la paix de la MINUSCA et les acteurs humanitaires, ainsi que les violations des droits de l’homme et les violences fondées sur le genre, rappelle que les personnes et entités qui compromettent la paix et la stabilité en République centrafricaine pourraient faire l’objet de mesures ciblées au titre de la résolution 2648 (2022), et se déclare prêt à envisager la prise de telles mesures à l’égard des personnes ou entités qui violent le cessez-le-feu;

5.   Se félicite que la région demeure résolue à appuyer le processus de paix, notamment dans le cadre de la feuille de route, demande aux États voisins, aux organisations régionales et à tous les partenaires internationaux d’apporter leur appui au processus de paix, y compris à la mise en œuvre de l’APPR par le biais de la feuille de route, de manière cohérente et coordonnée, avec les bons offices de la MINUSCA, y compris au moyen d’un soutien financier et de partenariats renforcés, souligne le rôle important joué par les garants et les facilitateurs de l’APPR, notamment l’Union africaine, la CEEAC et les États voisins, en usant de leur influence pour que les groupes armés respectent davantage leurs engagements, demande également aux États voisins d’appuyer les autorités centrafricaines dans les efforts qu’elles entreprennent pour rendre possible la participation des réfugiés aux opérations électorales, et souligne en outre qu’il importe d’établir et de mettre en œuvre les mesures, y compris les sanctions, et les dispositifs qui pourraient être appliqués contre les parties qui ne respectent pas leurs engagements, conformément à l’article 35 de l’APPR;

6.   Demande aux autorités centrafricaines et aux autorités des pays voisins de coopérer au niveau régional en vue d’enquêter sur les réseaux criminels et les groupes armés transnationaux impliqués dans le trafic d’armes et l’exploitation illicite des ressources naturelles et de les combattre, et demande que les commissions mixtes bilatérales associant la République centrafricaine et les pays voisins reprennent leurs travaux et assurent un suivi régulier en vue de remédier aux problèmes transfrontaliers, y compris ceux relatifs au trafic d’armes, et prennent les prochaines mesures convenues pour sécuriser les frontières communes;

7.   Encourage les autorités centrafricaines à consolider et à renforcer l’appropriation nationale du processus de paix et à le faire mieux connaître, y compris au moyen de campagnes de sensibilisation, rappelle à cet égard que les partis politiques, y compris ceux de l’opposition, la société civile et les organisations confessionnelles jouent un rôle crucial dans le processus de paix et de réconciliation et que leur participation à la mise en œuvre de l’APPR et au processus politique global doit être dûment promue par les autorités centrafricaines, et encourage en outre la participation pleine, égale et véritable des femmes et des jeunes à ce processus;

8.   Exhorte les autorités centrafricaines à mener d’urgence une entreprise de réconciliation véritablement inclusive dans le pays, notamment en s’attachant à répondre aux causes profondes du conflit, y compris la marginalisation des civils de certaines communautés, les questions d’identité nationale, les revendications locales de toutes les composantes de la société sur l’ensemble du territoire de la République centrafricaine, et les questions relatives à la transhumance et l’exploitation illégale des ressources naturelles, y compris à travers l’organisation de processus électoraux nationaux et locaux et la mise en œuvre des réformes politiques prévues dans le cadre de l’APPR, l’application de politiques nationales sur le développement économique et le recrutement dans la fonction publique, à soutenir la mise en œuvre du mandat de la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation, et à promouvoir les initiatives de réconciliation aux niveaux régional, national, préfectoral et local;

9.   Exhorte également les autorités centrafricaines et toutes les parties prenantes nationales à préparer les élections locales de 2023 en veillant à ce qu’elles soient inclusives, libres, régulières, transparentes, crédibles et pacifiques et se déroulent dans les délais fixés, dans le respect de la Constitution de la République centrafricaine et des décisions de la Cour constitutionnelle, et à ce que la participation pleine, égale et véritable, en toute sécurité, des femmes, tant comme électrices que comme candidates, soit assurée, notamment par l’application d’un quota de 35 pour cent au moins de femmes, comme l’exige la législation centrafricaine, combattant les risques de préjudice, y compris les menaces, les violences et les discours de haine, et en assurant la protection nécessaire des femmes électrices ou candidates, encourage la participation des jeunes, exhorte les autorités centrafricaines à appuyer le cadre législatif qui permette de financer durablement un gouvernement décentralisé et instaure les infrastructures requises pour encadrer les responsables nouvellement élus, demande à toutes les parties de s’abstenir de toutes incitations à la haine et à la violence, y compris sur les réseaux sociaux, et d’engager le dialogue, y compris dans le cadre du Dialogue républicain, afin de régler toutes les questions en suspens relatives au cadre électoral, demande également aux autorités centrafricaines de garantir un espace politique dans lequel les partis politiques légalement constitués, y compris les partis d’opposition, peuvent s’exprimer et exercer leurs droits et responsabilités, ainsi que d’instaurer des conditions de sécurité propices au bon déroulement du scrutin et d’assurer l’accès sans restriction aux bureaux de vote, y compris en coopérant avec la MINUSCA, compte tenu du rôle de la mission en ce qui concerne la protection des civils, et encourage la communauté internationale à apporter un appui adapté, y compris un appui technique et financier, aux prochaines élections;

10. Demande à toutes les parties de respecter la nature civile et humanitaire des camps et des installations dressés pour accueillir les déplacés et les réfugiés, et invite à ce titre les autorités centrafricaines à faire en sorte que la loi et les politiques nationales protègent dûment les droits de l’homme de toutes les personnes en situation de déplacement, y compris la liberté de circulation, à créer, en connaissance de cause, les conditions nécessaires pour que des solutions durables puissent être apportées aux déplacés et aux réfugiés, y compris en permettant à ceux qui le souhaitent de rentrer chez eux, de s’intégrer sur place ou de se réinstaller durablement, en toute sécurité et dans la dignité, et à assurer la participation de ces personnes aux élections;

11. Prie instamment les autorités centrafricaines de lutter contre la présence et l’activité des groupes armés en République centrafricaine en ayant recours à une stratégie globale qui privilégie le dialogue, conformément à l’APPR par le biais de la feuille de route, et l’application rapide d’un processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration inclusif et efficace, tenant compte des questions de genre et assorti d’un volet rapatriement pour les combattants étrangers, y compris les enfants précédemment associés à des forces et groupes armés, tout en poursuivant l’exécution des projets de réduction de la violence communautaire, et exhorte les autorités centrafricaines et les groupes armés signataires d’accélérer la mise en œuvre des arrangements sécuritaires transitoires prévus dans l’APPR, en vue de favoriser la confiance entre les parties signataires et le déploiement de l’autorité de l’État, en complément du processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement et des activités de réforme du secteur de la sécurité; se déclare préoccupé par le recrutement parallèle de combattants désarmés par les forces de défense et de sécurité pour des opérations de combat contre des groupes armés, ce qui compromet le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, exhorte les autorités centrafricaines à assurer de manière appropriée la sécurité de tous les combattants démobilisés, y compris les femmes et les jeunes, tout au long du processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, et à régulariser le statut des combattants qui ont déposé les armes en dehors du programme national;

12. Demande aux autorités centrafricaines de mettre en œuvre la politique nationale de sécurité, la stratégie nationale pour la réforme du secteur de la sécurité et le plan national de défense, y compris avec l’appui de la communauté internationale, afin de se doter de forces nationales de défense et de sécurité professionnelles, ethniquement représentatives et régionalement équilibrées, formées et équipées de façon appropriée, en tenant compte de la nécessité de recruter des femmes, notamment grâce à l’adoption et à l’application de procédures appropriées de vérification des antécédents, en particulier concernant le respect des droits de l’homme, pour tout le personnel de défense et de sécurité, ainsi que de mesures permettant d’intégrer des éléments désarmés et démobilisés des groupes armés qui répondent à des critères rigoureux de sélection et de vérification;

13. Prie les autorités centrafricaines de veiller à ce que le redéploiement des forces de défense et de sécurité s’inscrive dans la durée, ne compromette pas la stabilisation du pays, la sécurité des civils ou la recherche d’une solution politique, et exhorte les autorités centrafricaines à accélérer les efforts visant à rattacher tous les éléments des forces armées de la République centrafricaine sous une unique chaîne de commandement unifiée, de manière à assurer l’efficacité de la supervision, du commandement et du contrôle, y compris des systèmes nationaux de vérification des antécédents et d’entraînement pertinents, et à garantir l’appui budgétaire requis et continuer à mettre en œuvre une stratégie de sécurité nationale intégrée conforme au processus de paix, y compris l’APPR;

14. Exprime sa grave préoccupation devant les allégations répétées de violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire par les forces de défense et de sécurité de la République centrafricaine, accueille positivement les mesures annoncées par le Gouvernement centrafricain pour amener les auteurs à répondre de leurs actes, et engage les partenaires internationaux à insister sur le fait que le respect du droit international des droits de l’homme, du droit international humanitaire et du droit des réfugiés ainsi que du principe de responsabilité est une condition nécessaire à tout partenariat avec les forces de défense et de sécurité de la République centrafricaine;

15. Prie les autorités centrafricaines de veiller à ce que tous les acteurs de la sécurité présents dans le pays à l’invitation du Gouvernement assurent la déconfliction entre leurs activités opérationnelles et leurs activités d’entraînement;

16. Demande aux autorités centrafricaines de continuer de s’employer, à titre prioritaire, à renforcer les institutions judiciaires aux niveaux national et local, dans le cadre de l’extension de l’autorité de l’État, afin de lutter contre l’impunité et de contribuer à la stabilisation et à la réconciliation, notamment par le rétablissement de l’administration de l’appareil judiciaire, du système de justice pénale et du système pénitentiaire dans tout le pays, la démilitarisation des prisons, l’instauration de mécanismes de justice transitionnelle axés sur les victimes, y compris la pleine opérationnalisation de la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation, qui doit pouvoir travailler en toute neutralité, impartialité, transparence et indépendance, en tenant compte des recommandations formulées par la commission inclusive prévue par l’APPR, afin que ceux qui se sont rendus coupables de crimes par le passé répondent de leurs actes et que les victimes puissent obtenir réparation, et en veillant à ce que toutes et tous puissent accéder à une justice impartiale et équitable, conformément aux conclusions du Forum de Bangui sur la réconciliation nationale tenu en mai 2015, accueille positivement l’achèvement du premier procès devant la Cour pénale spéciale, et encourage le Gouvernement centrafricain à veiller au renouvellement du mandat de cette juridiction;

17. Encourage les autorités centrafricaines de continuer à s’employer à rétablir l’autorité effective de l’État sur l’ensemble du territoire, notamment en redéployant et en renforçant l’administration de l’État et en assurant la fourniture des services de base dans les provinces, en garantissant le versement sans retard des traitements des fonctionnaires et des salaires des forces de défense et de sécurité, et en établissant et promulguant sans tarder le règlement d’application de la loi sur la décentralisation, l’objectif étant d’assurer une gouvernance stable, responsable, inclusive et transparente;

18. Souligne à cet égard que la Commission de consolidation de la paix joue un rôle précieux en apportant des conseils stratégiques, en portant à l’attention du Conseil de sécurité des observations et en favorisant une concertation, une coordination et une intégration accrues des efforts déployés à l’échelle internationale en matière de consolidation de la paix, se félicite du rôle actif joué par le Royaume du Maroc, et encourage la poursuite de la coopération avec la Commission de consolidation de la paix et les autres organisations et institutions internationales compétentes en vue de répondre aux besoins de consolidation de la paix de la République centrafricaine à long terme, y compris à l’appui du processus de paix, conformément à l’APPR;

Relèvement économique et développement

19. Encourage les autorités centrafricaines, agissant avec le concours de la communauté internationale, en particulier avec les institutions financières internationales qui pilotent l’action internationale, et compte tenu des objectifs cruciaux de consolidation de la paix et d’édification de l’État, à améliorer les mécanismes de gestion des finances publiques et de responsabilité financière d’une façon qui, d’une part, leur permette de faire face aux dépenses de fonctionnement de l’État, de mettre en œuvre des plans de relèvement rapide et de relancer l’économie, et qui, d’autre part, favorise l’appropriation nationale, et insiste sur l’importance de l’appui international, sur les plans financier et technique et sous la forme de dons en nature, pour lutter contre la COVID-19 en République centrafricaine;

20. Engage les États Membres et les organisations internationales et régionales à verser les contributions annoncées à la Conférence internationale, tenue à Bruxelles le 17 novembre 2016, pour faciliter la mise en œuvre des objectifs prioritaires du pays en matière de consolidation de la paix et favoriser son développement socioéconomique et à envisager de verser des fonds supplémentaires et d’apporter des compétences techniques et un appui en nature au Plan national de relèvement et de consolidation de la paix (RCPCA) et conformément au Cadre d’engagement mutuel;

21. Encourage les autorités centrafricaines à accélérer la mise en œuvre effective du RCPCA et les partenaires concernés à appuyer les efforts déployés par les autorités centrafricaines, par l’intermédiaire du secrétariat du RCPCA, pour poser les assises d’une paix durable en République centrafricaine et d’un développement durable de toutes les régions du pays, pour faire bénéficier rapidement la population des dividendes de la paix et pour mettre l’accent sur les projets de développement, y compris les investissements essentiels dans les infrastructures, qui permettraient de relever les défis logistiques qui se posent dans le pays et renforceraient la mobilité des autorités centrafricaines et de la MINUSCA et leur capacité d’assurer la sécurité et la protection des civils, de lutter contre la pauvreté et d’aider la population de la République centrafricaine à se doter de moyens de subsistance durables;

Droits de l’homme, y compris la protection de l’enfance et les violences sexuelles commises en période de conflit

22. Réaffirme qu’il est impératif de traduire en justice de toute urgence tous les responsables de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, quel que soit leur statut ou leur appartenance politique, redit que certains de ces actes peuvent être constitutifs des crimes visés dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, dont la République centrafricaine est un État partie, et rappelle que le fait de se livrer à des actes d’incitation à la violence, en particulier à motivation ethnique ou religieuse, et ainsi de perpétrer ou d’appuyer des actes qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité en République centrafricaine pourrait constituer un fondement pour des désignations aux fins de sanctions conformément à la résolution 2648 (2022);

23. Rappelle que la Procureure de la Cour pénale internationale a pris, le 24 septembre 2014, la décision d’ouvrir, comme suite à une demande des autorités nationales, une enquête sur les crimes qui auraient été commis depuis 2012, et que les autorités centrafricaines continuent d’apporter leur coopération à cet égard;

24. Demande aux autorités centrafricaines de donner suite aux recommandations formulées dans le rapport sur le projet d’inventaire des violations graves du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire et des atteintes portées à ces droits commises sur le territoire de la République centrafricaine entre janvier 2003 et décembre 2015;

25. Condamne fermement toutes les attaques dirigées contre des écoles, centres médicaux, locaux humanitaires et autres infrastructures civiles et l’utilisation à des fins militaires de ces infrastructures, en violation du droit international, ainsi que la réquisition de biens appartenant aux Nations Unies ou à des acteurs humanitaires;

26. Exhorte toutes les parties au conflit armé en République centrafricaine, en particulier les groupes armés, à mettre fin à toutes les violations et exactions commises contre des enfants en violation du droit international applicable, y compris le recrutement et l’utilisation d’enfants, les viols et les violences sexuelles, les meurtres et les mutilations, les enlèvements et les attaques dirigées contre des écoles et des hôpitaux, demande aux autorités centrafricaines de respecter les obligations qui leur incombent au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, qu’elles ont ratifié le 21 septembre 2017, et à considérer principalement comme victimes les enfants qui sont associés aux forces et groupes armés ou qui ont été libérés ou autrement séparés des forces et groupes armés, en application des Principes de Paris auxquels a souscrit la République centrafricaine, se félicite de l’adoption du code de protection de l’enfant, soulignant l’importance de sa pleine mise en œuvre, demande aux autorités centrafricaines d’ouvrir sans tarder des enquêtes sur les violations et exactions qui auraient été commises, afin de lutter contre l’impunité des auteurs de tels actes, de faire en sorte que ceux-ci soient exclus du secteur de la sécurité et que toutes les victimes aient accès à la justice et aux services médicaux et aux services d’accompagnement, y compris aux services de santé mentale et de soutien psychosocial, demande l’application pleine et immédiate des plans d’action signés par certains groupes armés et appelle les autres groupes armés à signer de tels plans, exige de nouveau de toutes les parties qu’elles protègent et considèrent comme victimes les enfants libérés ou autrement séparés des forces et groupes armés, en particulier en mettant en place des instructions permanentes sur le transfert rapide de ces enfants à des acteurs civils de la protection de l’enfance, rappelle que l’APPR contient plusieurs dispositions visant à protéger les enfants et exhorte les parties signataires à redoubler d’efforts pour appliquer ces dispositions, et souligne qu’il faut accorder une attention particulière à la protection, à la libération et à la réintégration de tous les enfants associés à des forces et groupes armés, rappelant les conclusions de 2020 de son Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés concernant les enfants et le conflit armé en République centrafricaine (S/AC.51/2020/3) et appelant à leur mise en œuvre intégrale et rapide;

27. Demande à toutes les parties au conflit armé en République centrafricaine, y compris les groupes armés, de mettre fin aux actes de violence sexuelle et fondée sur le genre, demande aux autorités centrafricaines d’ouvrir sans tarder des enquêtes sur les actes de violence qui auraient été commis et d’en poursuivre les auteurs afin de lutter contre l’impunité des personnes responsables de tels actes, de prendre des mesures concrètes, spécifiques, dans des délais prescrits, en vue de mettre en œuvre le communiqué conjoint de l’ONU et du Gouvernement centrafricain tendant à prévenir et combattre les violences sexuelles en période de conflit, à veiller à ce que les responsables de tels crimes soient exclus du secteur de la sécurité et soient poursuivis et à permettre à toutes les personnes ayant survécu à des violences sexuelles d’accéder immédiatement aux services disponibles, y compris à des services de santé mentale et de soutien psychosocial, et demande également aux autorités centrafricaines et aux partenaires internationaux de fournir l’appui voulu à l’Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants;

Mandat de la MINUSCA

28. Exprime son fort soutien à la Représentante spéciale du Secrétaire général, Valentine Rugwabiza;

29. Décide de proroger le mandat de la MINUSCA jusqu’au 15 novembre 2023;

30. Décide que l’effectif maximal autorisé de la MINUSCA reste fixé à 14 400 militaires, dont 580 observateurs militaires et officiers d’état-major, et 3 020 policiers, dont 600 policiers hors unités constituées et 2 420 membres d’unités de police constituées, ainsi que 108 agents pénitentiaires, et rappelle qu’il compte réexaminer ce chiffre en permanence;

31. Décide également que le mandat de la MINUSCA est conçu pour mettre en œuvre une vision stratégique pluriannuelle visant à créer les conditions politiques, les conditions de sécurité et les conditions institutionnelles qui permettent d’engager une réconciliation nationale et d’instaurer une paix durable par la mise en œuvre de l’APPR et l’élimination de la menace que représentent les groupes armés en adoptant une approche globale et une posture proactive et robuste, sans préjudice des principes fondamentaux du maintien de la paix;

32. Demande à la MINUSCA d’améliorer sa communication afin de faciliter la mise en œuvre de son mandat, d’améliorer sa protection et de faire connaître sa mission et son rôle, ainsi que pour souligner le rôle et les responsabilités des autorités centrafricaines concernant la protection des civils et la mise en œuvre de l’APPR;

33. Rappelle que le mandat de la MINUSCA devrait être exécuté sur la base d’une priorisation des tâches énoncées aux paragraphes 34 à 36 de la présente résolution et, le cas échéant, par étapes, et prie en outre le Secrétaire général de refléter cette priorisation des tâches dans le déploiement de la mission et d’aligner les ressources budgétaires, tout en veillant à affecter des ressources suffisantes à l’exécution du mandat;

34. Autorise la MINUSCA à user de tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat dans les limites de ses capacités et de ses zones de déploiement;

Tâches prioritaires

35. Décide que le mandat de la MINUSCA comportera les tâches prioritaires suivantes:

a) Protection des civils

i)   Protéger, conformément à la déclaration de sa présidence en date du 21 septembre 2018 (S/PRST/2018/18) et sans préjudice de la responsabilité première des autorités centrafricaines et des principes fondamentaux du maintien de la paix, la population civile qui se trouve sous la menace de violences physiques;

ii) Appliquer pleinement sa stratégie de protection des civils en coordination avec les autorités centrafricaines, l’équipe de pays des Nations Unies, les organismes d’aide humanitaire et de défense des droits de l’homme et les autres partenaires intéressés;

iii) Prendre des mesures actives, en appui aux autorités centrafricaines, pour anticiper, écarter et contrer efficacement toute menace grave ou crédible visant la population civile selon une approche globale et intégrée, et à cet égard:

–Assurer une protection efficace et dynamique des civils se trouvant sous la menace de violences physiques selon une démarche globale et intégrée, notamment en anticipant, dissuadant et faisant cesser toutes les menaces de violences dirigées contre la population, en consultation avec les communautés locales, et en appuyant ou engageant des initiatives de médiation locale pour empêcher l’intensification de la violence, conformément aux principes fondamentaux du maintien de la paix, et les flambées de violence entre groupes ethniques ou religieux rivaux;

–Améliorer ses relations avec la population civile, renforcer ses mécanismes d’alerte rapide, redoubler d’efforts pour détecter et constater les violations du droit international humanitaire, les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, et renforcer la participation et l’autonomisation des communautés locales;

–Maintenir un déploiement préventif et une présence mobile, flexible et robuste, y compris en organisant des patrouilles actives, en particulier dans les zones à haut risque;

–Atténuer les risques auxquels sont exposés les civils avant, pendant et après toute opération militaire ou policière, notamment en surveillant, en prévenant et en limitant au minimum les dommages que peuvent causer aux civils les opérations, la présence et les activités de la Mission et en y remédiant, y compris en ce qui concerne les opérations menées en appui aux forces nationales de sécurité;

–Collaborer avec les autorités centrafricaines pour recenser et signaler les menaces et les attaques dirigées contre des civils, mettre en œuvre les plans de prévention et d’intervention existants et renforcer la coopération civilo-militaire, y compris la planification conjointe;

–Aider les autorités centrafricaines à prévenir, atténuer et combattre la menace que représentent les engins explosifs;

iv) Apporter une protection et une aide spécifiques aux femmes et aux enfants touchés par le conflit armé, notamment en déployant des conseillers pour les questions de protection, des conseillers pour la protection de l’enfance, des conseillers pour la protection des femmes et des conseillers civils et en tenue et des points de contact pour les questions de genre, ainsi qu’en mettant sur pied des consultations avec des organisations de femmes, et en adoptant à cet égard une démarche qui tienne compte des questions de genre et soit axée sur les personnes rescapées, en particulier pour aider au mieux celles ayant réchappé de violences sexuelles, et appuyer la participation des femmes aux mécanismes d’alerte rapide;

v)   Prendre des mesures concrètes pour atténuer et éviter, selon le cas, l’utilisation des écoles par les forces armées, pour dissuader les parties au conflit d’utiliser les écoles, et pour faciliter la continuité de l’éducation dans les situations de conflit armé;

vi) Appuyer la mise en œuvre du communiqué conjoint de l’Organisation des Nations Unies et du Gouvernement centrafricain tendant à prévenir et combattre les violences sexuelles en période de conflit et tenir compte de ces préoccupations spécifiques dans toutes les activités des composantes de la Mission, conformément à la politique des Nations Unies pour les missions sur le terrain sur la prévention de la violence sexuelle liée aux conflits et les moyens de la combattre, et veiller, en coopération avec la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, à ce que le risque de violences sexuelles en période de conflit soit pris en compte dans les systèmes de collecte de données, d’analyse des menaces et d’alerte rapide de la Mission;

b) Bons offices et appui au processus de paix, y compris à la mise en œuvre du cessez-le-feu et de l’APPR

i)   Poursuivre son rôle à l’appui du processus de paix, notamment par un soutien politique, technique et opérationnel à l’application et au suivi du cessez-le-feu et de l’APPR, et prendre des mesures actives pour appuyer les autorités centrafricaines dans la création de conditions propices à la pleine mise en œuvre de l’APPR par le biais de la feuille de route et du chronogramme d’exécution;

ii) Continuer de coordonner l’appui et l’assistance fournis au processus de paix à l’échelle régionale et internationale, en consultation et en coordination avec le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale ainsi que les organisations régionales telles que la Communauté économique des États de l’Afrique centrale et la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, soulignant l’importance à cet égard de la mise en œuvre de l’APPR par le biais de la feuille de route suivant le chronogramme établi par le Gouvernement;

iii) Veiller à ce que les stratégies politiques et les stratégies de sécurité de la Mission favorisent un processus de paix cohérent, en particulier à l’appui de l’APPR, qui articule les efforts faits en faveur de la paix aux niveaux local et national avec ceux qui sont faits pour surveiller le respect du cessez-le-feu, promouvoir le désarmement, la démobilisation, le rapatriement et la réintégration ainsi que la réforme du secteur de la sécurité, appuyer la lutte contre l’impunité et rétablir l’autorité de l’État, et promouvoir la participation des femmes et l’égalité des genres;

iv) Accompagner les efforts déployés par les autorités centrafricaines, aux niveaux national et local, pour faire participer davantage les partis politiques, la société civile, les femmes, les personnes ayant survécu à des violences sexuelles, les jeunes, les organisations confessionnelles et, dans la mesure du possible, les personnes déplacées et les réfugiés au processus de paix, notamment à l’APPR;

v)   Offrir ses bons offices et ses conseils techniques à l’appui des efforts de lutte contre les causes profondes du conflit, y compris celles énoncées au paragraphe 8 de la présente résolution, en particulier pour faire avancer la réconciliation nationale et le règlement des conflits locaux, en coopération avec les organismes régionaux et locaux compétents et les chefs religieux, tout en assurant la participation pleine, égale et véritable des femmes, y compris des rescapées de violences sexuelles, conformément au plan d’action national de la République centrafricaine pour les femmes et la paix et la sécurité, notamment en favorisant le dialogue local et la mobilisation de la population;

vi) Appuyer les efforts déployés par les autorités centrafricaines pour inscrire la justice transitionnelle dans le processus de paix et de réconciliation, lutter contre la marginalisation et répondre aux revendications locales, notamment par l’établissement d’un dialogue avec les groupes armés et les dirigeants de la société civile, y compris les femmes et les représentants des jeunes, ainsi que les personnes ayant survécu à des violences sexuelles, et en aidant les autorités locales, nationales et préfectorales à promouvoir la confiance entre les communautés;

vii) Fournir une expertise technique aux autorités centrafricaines, en dialoguant avec les pays voisins, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et l’Union africaine, agissant en consultation et en coordination avec le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale, afin de trouver des solutions aux problématiques d’intérêt commun et bilatéral et de les encourager à continuer d’apporter un appui sans réserve et sans faille à l’APPR;

viii)   Recourir de façon plus proactive à une communication stratégique pour appuyer sa stratégie de protection des civils, en coordination avec les autorités centrafricaines, pour aider la population locale à mieux comprendre son mandat, ses activités, l’APPR et le processus électoral, et pour instaurer des relations de confiance avec les citoyens de la République centrafricaine, les parties au conflit, les acteurs régionaux et d’autres acteurs internationaux et les partenaires sur le terrain;

c) Aide à l’acheminement immédiat, complet, en toute sécurité et sans entrave de l’aide humanitaire

Resserrer la collaboration avec tous les acteurs humanitaires, y compris les organismes des Nations Unies, et aider, dans le respect des dispositions applicables du droit international et conformément aux principes humanitaires, à la mise en place des conditions de sécurité favorables à l’acheminement immédiat, complet, en toute sécurité et sans entrave, sous la direction de civils, de l’aide humanitaire et au retour volontaire et durable, en toute sécurité et dans la dignité, des déplacés et des réfugiés, à leur intégration sur place ou à leur réinstallation, en étroite coopération avec les acteurs humanitaires, tout en contribuant à atténuer les conséquences de la pandémie de COVID-19, comme demandé dans la résolution 2532 (2020);

d) Protection du personnel et des biens des Nations Unies

Protéger le personnel, les installations, le matériel et les biens des Nations Unies et assurer la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé;

Autres tâches

36. Autorise par ailleurs la MINUSCA à entreprendre, en concertation étroite avec l’équipe de pays des Nations Unies, les activités suivantes relevant de son mandat, sachant que ces tâches ainsi que celles énoncées au paragraphe 34 ci-dessus se renforcent mutuellement:

a) Appui à l’extension de l’autorité de l’État, au déploiement des forces
de sécurité et au maintien de l’intégrité territoriale

i)   Continuer à aider les autorités centrafricaines à préserver les institutions de l’État et à mettre en œuvre leur stratégie d’extension de l’autorité de l’État, notamment en appliquant les dispositions pertinentes de l’APPR, aux fins de la mise en place, sous leur supervision, de dispositifs de sécurité et d’arrangements d’ordre administratif provisoires acceptables pour la population grâce à une répartition hiérarchisée des tâches entre l’équipe de pays des Nations Unies et les partenaires concernés, et à lutter contre le commerce transfrontalier illicite des ressources naturelles;

ii) Promouvoir et soutenir l’extension rapide de l’autorité de l’État sur tout le territoire de la République centrafricaine, notamment en appuyant le déploiement dans les zones prioritaires de membres des forces nationales de sécurité agréés et formés, notamment en faisant en sorte qu’ils partagent les mêmes locaux et en leur fournissant des conseils, un encadrement et un suivi, en coordination avec d’autres partenaires, dans le cadre du déploiement de l’administration territoriale et d’autres autorités chargées de l’état de droit;

iii) Fournir, à la demande des autorités centrafricaines, un appui technique et une aide à la planification renforcés et un appui logistique au redéploiement progressif de membres agréés des forces armées centrafricaines ou des forces de sécurité intérieure, avec qui la MINUSCA conduit des opérations conjointes, notamment des activités de planification conjointe et de coopération tactique, à l’appui des tâches qui lui sont actuellement confiées, entre autres la protection des civils et l’appui aux autorités nationales en matière de rétablissement et de maintien de la sécurité publique et de l’état de droit, conformément à son mandat et aux paragraphes 13 et 14 de la présente résolution et dans le strict respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme, à condition que la MINUSCA s’assure que les destinataires respectent l’Accord sur le statut des forces de la MINUSCA, les droits de l’homme et le droit international humanitaire, sans que cela n’exacerbe les risques pour la stabilisation du pays, les civils, le processus politique ou les soldats de la paix ni pour son impartialité, veiller à ce que cet appui fasse dûment l’objet d’un contrôle, et évaluer cet appui logistique dans un an pour s’assurer de sa conformité aux objectifs énoncés dans la lettre adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général le 15 mai 2018 (S/2018/463);

iv) Appuyer le transfert progressif des responsabilités relatives à la sécurité des hauts responsables et celui des fonctions de garde statique des institutions nationales aux forces de sécurité centrafricaines, en coordination avec les autorités centrafricaines, en tenant compte des risques sur le terrain et du contexte électoral;

b) Promotion et protection des droits de l’homme

i)   Suivre la situation en ce qui concerne les violations du droit international humanitaire et les violations des droits de l’homme commises sur l’ensemble du territoire de la République centrafricaine et les atteintes à ces droits, lui rendre compte chaque année, concourir aux enquêtes y relatives et assurer leur suivi;

ii) Suivre la situation en ce qui concerne les violations et exactions commises contre des enfants et des femmes, notamment les viols et autres formes de violence sexuelle perpétrés en temps de conflit armé, veiller à les signaler et concourir aux enquêtes y relatives, en collaboration avec l’Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants;

iii) Aider les autorités centrafricaines à protéger et promouvoir les droits de l’homme et à prévenir les violations et les atteintes, et à renforcer les capacités des organisations de la société civile;

c) Dialogue républicain et élections de 2023

Aider les autorités centrafricaines à assurer le suivi du Dialogue républicain de manière pleinement inclusive et à préparer et organiser des élections locales pacifiques en 2023, comme énoncé dans le préambule et au paragraphe 9 de la présente résolution, en leur offrant ses bons offices, y compris en favorisant le dialogue entre tous les acteurs politiques, de façon inclusive, afin d’apaiser les tensions durant la période électorale, ainsi qu’en leur fournissant un appui en matière de sécurité et un soutien opérationnel, logistique et, le cas échéant, technique, en particulier de manière à faciliter l’accès aux zones reculées, et en coordonnant l’assistance électorale internationale avec le Programme des Nations Unies pour le développement;

d) Réforme du secteur de la sécurité

i)   Fournir des conseils stratégiques et techniques aux autorités centrafricaines pour mettre en œuvre la stratégie nationale de réforme du secteur de la sécurité et le plan national de défense, en étroite coordination avec l’EUTM-RCA, l’EUAM-RCA, la Mission d’observation de l’Union africaine en République centrafricaine (MOUACA) et d’autres partenaires internationaux de la République centrafricaine, dont les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France, la République populaire de Chine et la République du Rwanda, l’objectif étant de veiller à la cohérence de la réforme, notamment moyennant une répartition claire des responsabilités entre les forces armées centrafricaines, les forces de sécurité intérieure et autres corps habillés, et moyennant le contrôle démocratique des forces de défense comme des forces de sécurité intérieure;

ii) Continuer d’aider les autorités centrafricaines à élaborer une méthode pour la vérification des antécédents des éléments des forces de défense et de sécurité qui priorise les vérifications concernant le respect des droits de l’homme, en particulier pour lutter contre l’impunité pour les violations du droit international et du droit national, au moment d’envisager l’intégration d’éléments des groupes armés démobilisés dans les institutions du secteur de la sécurité;

iii) Jouer un rôle de premier plan dans l’appui fourni aux autorités centrafricaines pour le renforcement des capacités des forces de sécurité intérieure, en particulier en ce qui concerne les structures de commandement et de contrôle et les mécanismes de supervision, et coordonner la fourniture de l’assistance technique et les activités de formation entre les partenaires internationaux présents en République centrafricaine, en particulier avec l’EUTM-RCA et l’EUAM-RCA, afin d’assurer une répartition claire des tâches dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité;

iv) Continuer d’aider les autorités centrafricaines à former les forces de police et de gendarmerie et à assurer la sélection, le recrutement et la vérification des antécédents de policiers et de gendarmes, avec l’appui de donateurs et de l’équipe de pays des Nations Unies, en tenant compte de la nécessité de recruter des femmes à tous les niveaux et dans le plein respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme;

e) Désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement

i)   Aider les autorités centrafricaines à mettre en œuvre un programme inclusif, tenant compte des questions de genre et progressif pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des membres des groupes armés et, dans le cas des combattants étrangers, pour leur rapatriement, et, le cas échéant et en consultation et en coordination avec les partenaires internationaux, soutenir d’éventuels sites temporaires de cantonnement volontaire à l’appui d’une réintégration socioéconomique dans la collectivité, y compris en aidant le Gouvernement à assurer la sécurité des ex-combattants démobilisés et à leur fournir une protection appropriée, conformément aux Principes de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement et d’intégration dans les corps en uniforme, signés lors du Forum de Bangui en mai 2015 et compte tenu des Normes intégrées de désarmement, démobilisation et réintégration, telles que révisées en 2019, en accordant une attention particulière aux besoins des enfants associés aux forces et groupes armés et aux combattantes, et à la nécessité de séparer les enfants de ces forces et groupes et d’éviter de nouveaux enrôlements, notamment par la mise en œuvre de programmes tenant compte des questions de genre;

ii) Aider les autorités centrafricaines et les organisations de la société civile concernées à élaborer et à mettre en œuvre des programmes de réduction de la violence communautaire, y compris des programmes tenant compte des questions de genre, à l’intention des membres des groupes armés, dont ceux qui ne sont pas admis à participer au programme national de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement, en coopération avec les partenaires de développement et en collaboration avec les communautés d’accueil conformément aux priorités énoncées dans le Plan national de relèvement et de consolidation de la paix;

iii) Fournir une assistance technique aux autorités centrafricaines pour l’exécution d’un plan national d’intégration visant à intégrer dans les forces de défense et de sécurité les membres démobilisés des groupes armés qui remplissent les conditions requises, dans le droit fil du processus général de réforme du secteur de la sécurité, compte tenu de la nécessité de mettre en place des forces nationales de défense et de sécurité professionnelles, ethniquement représentatives et géographiquement équilibrées, et offrir des conseils techniques aux autorités centrafricaines pour accélérer la mise en œuvre des arrangements sécuritaires transitoires prévus par l’APPR, après vérification des antécédents, désarmement, démobilisation et formation de leurs membres;

iv) Coordonner l’appui fourni par les partenaires multilatéraux et bilatéraux, y compris la Banque mondiale et la Commission de consolidation de la paix, aux activités que mènent les autorités centrafricaines dans le cadre des programmes de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement pour aider les membres des groupes armés qui remplissent les conditions requises et dont les antécédents ont été vérifiés à revenir à une vie civile paisible et contribuer à garantir que ces activités aboutiront à une réinsertion socioéconomique durable;

f) Action en faveur de la justice nationale et internationale, de la lutte contre l’impunité et de l’état de droit

i)   Concourir à renforcer l’indépendance de la justice et à renforcer les capacités et l’efficacité de l’appareil judiciaire ainsi que l’efficacité et la responsabilité du système pénitentiaire, notamment en fournissant une assistance technique aux autorités centrafricaines pour ce qui est d’identifier les responsables de crimes constituant des violations du droit international humanitaire et des violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits commis sur l’ensemble du territoire de la République centrafricaine, de mener des enquêtes et d’engager des poursuites;

ii) Concourir à renforcer les capacités de l’institution nationale de défense des droits de l’homme, en coordonnant son action avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, selon qu’il conviendra;

Mesures temporaires d’urgence:

iii) Adopter d’urgence et activement, sur demande formelle des autorités centrafricaines et dans les limites de ses capacités et de ses zones de déploiement, à titre exceptionnel et sans constituer de précédent ni remettre en cause les principes convenus régissant les opérations de maintien de la paix, dans des zones où les forces nationales de sécurité ne sont pas présentes ou ne sont pas opérationnelles, des mesures temporaires d’urgence de portée limitée, assorties de délais et compatibles avec les objectifs énoncés aux paragraphes 34 et 35 f), pour procéder à des arrestations et à des mises en détention en vue de maintenir l’état de droit et l’ordre public fondamental et de lutter contre l’impunité, et accorder à cet égard une attention particulière aux personnes qui se livrent ou apportent un appui à des actes qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité en République centrafricaine, y compris aux personnes qui violent le cessez-le-feu ou l’APPR;

Cour pénale spéciale:

iv) Apporter, en association avec d’autres partenaires internationaux et l’équipe de pays des Nations Unies, une assistance technique aux autorités centrafricaines et renforcer leurs capacités en vue de faciliter l’opérationnalisation et le bon fonctionnement de la Cour pénale spéciale, dans l’attente du renouvellement de son mandat, en particulier dans les domaines des enquêtes, des arrestations, de la détention, de l’analyse criminelle et scientifique, de la collecte et de la conservation d’éléments de preuve, du recrutement et de la sélection du personnel, de la gestion de la Cour, de la stratégie en matière de poursuites et de la constitution des dossiers, et de l’établissement d’un système d’assistance juridique, le cas échéant, ainsi que renforcer la sécurité des magistrats, notamment dans les locaux et durant les activités de la Cour, et prendre des mesures visant à assurer la protection des victimes et des témoins, dans le respect des obligations mises à la charge de la République centrafricaine par le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme;

v)   Faciliter la coordination et la mobilisation d’un appui bilatéral et multilatéral accru en faveur du bon fonctionnement de la Cour pénale spéciale;

État de droit:

vi) Appuyer et coordonner, avec l’appui de l’équipe de pays des Nations Unies, l’assistance internationale fournie pour renforcer les capacités et l’efficacité du système de justice pénale, dans le cadre du rôle dévolu au Coordonnateur des Nations Unies pour les questions relatives à l’état de droit, ainsi que l’efficacité et la responsabilité de la police et du système pénitentiaire;

vii) Concourir, sans préjudice de la responsabilité principale des autorités centrafricaines, au rétablissement et au maintien de la sécurité publique et de l’état de droit, notamment en arrêtant et en remettant aux autorités centrafricaines, conformément au droit international, les personnes responsables dans le pays de crimes constituant de graves violations des droits de l’homme et des atteintes à ces droits et de graves violations du droit international humanitaire, y compris des actes de violence sexuelle en temps de conflit, afin de les faire traduire en justice, et en coopérant avec les États de la région et avec la Cour pénale internationale dans les cas de crimes relevant de sa compétence, à la suite de la décision prise par la Procureure de la Cour pénale internationale, le 24 septembre 2014, d’ouvrir une enquête, comme suite à une demande des autorités nationales, sur les crimes qui auraient été commis depuis 2012;

Tâches additionnelles

37. Autorise également la MINUSCA à mener les tâches additionnelles ci‑après:

a)   Assister le Comité créé par le paragraphe 57 de la résolution 2127 (2013) et le Groupe d’experts créé par la même résolution;

b)   Suivre l’application des mesures reconduites et modifiées par le paragraphe 1 de la résolution 2648 (2022), en coopération avec le Groupe d’experts créé par la résolution 2127 (2013), notamment en inspectant, si elle le juge nécessaire et le cas échéant sans préavis, tous armements et matériels connexes, où qu’ils se trouvent, et tenir les autorités centrafricaines informées des efforts déployés pour empêcher les groupes armés d’exploiter les ressources naturelles;

c)   Aider le Groupe d’experts créé par la résolution 2127 (2013) à collecter des informations sur les actes d’incitation à la violence, en particulier à motivation ethnique ou religieuse, qui compromettent la paix, la stabilité ou la sécurité en République centrafricaine, conformément au paragraphe 32 g) de la résolution 2399 (2018) prorogé par le paragraphe 6 de la résolution 2648 (2022);

d)   Veiller, avec tous les organismes compétents des Nations Unies, à la sécurité du Groupe d’experts, et lui accorder un accès sans entrave, en particulier aux personnes, aux documents et aux sites relevant du contrôle de la Mission et des organismes concernés, afin que le Groupe puisse s’acquitter de son mandat;

e)   Fournir aux autorités compétentes de la République centrafricaine des moyens de transport, s’il y a lieu, au cas par cas et lorsque la situation le permet, afin de promouvoir et de soutenir l’extension de l’autorité de l’État sur tout le territoire;

Efficacité de la MINUSCA

38. Prie le Secrétaire général de déployer et d’affecter le personnel et les compétences disponibles au sein de la MINUSCA de façon que les priorités définies aux paragraphes 34 à 36 de la présente résolution soient prises en compte, et d’adapter constamment ce déploiement en fonction des progrès accomplis dans l’exécution du mandat;

39. Rappelle qu’il a décidé, dans sa résolution 2566 (2021), d’augmenter de 2 750 personnes l’effectif autorisé de la composante militaire de la MINUSCA et d’augmenter de 940 personnes l’effectif autorisé de la composante Police de la Mission, se félicite du déploiement d’une partie des renforts ainsi décidé, souligne que le déploiement du reste de ces renforts doit s’effectuer le plus rapidement possible, en particulier celui des forces d’intervention rapide, et par phases, et rappelle l’importance que revêt la coopération entre la MINUSCA et les autorités centrafricaines, conformément au mandat de la Mission;

40. Constate une fois de plus avec inquiétude que la MINUSCA ne dispose toujours pas de certaines capacités essentielles et rappelle qu’il est nécessaire de remédier à cette situation et qu’il importe que les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police actuels et à venir fournissent des effectifs ayant les capacités, le matériel et la formation préalable au déploiement nécessaires, y compris en ce qui concerne les moyens en matière de génie et l’atténuation de la menace que représentent les engins explosifs, pour accroître la mobilité de la MINUSCA et sa capacité à bien fonctionner dans des conditions de sécurité de plus en plus complexes;

41. Constate que l’exécution effective des mandats de maintien de la paix relève de la responsabilité de toutes les parties prenantes et qu’elle dépend de plusieurs facteurs essentiels, notamment de l’existence de mandats bien définis, réalistes et réalisables, de la volonté politique, du bon encadrement, d’une communication stratégique, de l’efficacité et de la responsabilité à tous les niveaux, de l’intégration entre composantes, de ressources suffisantes, de l’existence d’orientations, d’une planification et de directives opérationnelles appropriées, et de la formation et de l’équipement, engage vivement les États Membres à faire en sorte que les contingents et les effectifs de police qu’ils fournissent aient les dispositions mentales et les capacités nécessaires, notamment pour ce qui est des capacités linguistiques, des formations préalables au déploiement et, le cas échéant, des formations in situ et du matériel, y compris les capacités facilitatrices, et que ces capacités soient adaptées au contexte opérationnel, demande aux pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police d’appliquer les dispositions pertinentes de la résolution 2538 (2020), note les effets néfastes que pourraient avoir sur l’exécution du mandat les restrictions nationales qui n’ont pas été déclarées et acceptées par le Secrétaire général préalablement au déploiement, souligne que l’absence d’un commandement efficace, le refus d’obéir aux ordres, l’inaction face aux attaques perpétrées contre des civils et le refus de participer à des patrouilles ou de mener de telles patrouilles risquent de compromettre l’exécution efficace du mandat dont chacun partage la responsabilité, et demande aux États Membres de déclarer toutes les restrictions nationales, avant le déploiement des contingents, et, lorsqu’ils fournissent des contingents ou du personnel de police, de limiter les restrictions déclarées, et d’appliquer pleinement et effectivement les dispositions du mémorandum d’accord signé avec l’Organisation des Nations Unies;

42. Prie le Secrétaire général, les États Membres et les autorités centrafricaines de continuer à prendre toutes les mesures appropriées pour garantir la sûreté, la sécurité et la liberté de circulation du personnel de la MINUSCA en lui assurant un accès immédiat et sans entrave à l’ensemble du territoire centrafricain, conformément à la résolution 2518 (2020), y compris en autorisant les vols de nuit, note avec préoccupation les risques graves que les violations de l’Accord sur le statut des forces peuvent représenter pour la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies affecté à des opérations de maintien de la paix, et prie le Secrétaire général d’appliquer les dispositions de la résolution 2589 (2021), aux fins de l’établissement des responsabilités en ce qui concerne les crimes commis contre les soldats de la paix;

43. Prie le Secrétaire général de mettre pleinement en œuvre les capacités et obligations suivantes dans la planification et la conduite des opérations de la MINUSCA:

–Renforcer l’application, à l’échelle de la Mission, d’une stratégie d’alerte et de réponse rapides coordonnant la collecte, la localisation et l’analyse des faits survenus, le suivi, la vérification, la notification immédiate et la diffusion des informations et les mécanismes de réaction, notamment pour riposter à des menaces ou à des attaques contre les civils qui peuvent donner lieu à des violations des droits de l’homme, à des exactions ou à des violations du droit international humanitaire, ainsi que pour parer à l’éventualité d’attaques futures contre le personnel et les installations des Nations Unies, et veiller à ce que l’analyse des conflits tenant compte des questions de genre soit intégrée dans tous les mécanismes d’alerte précoce et de prévention des conflits;

–Encourager le recours au renforcement des capacités, à la facilitation, à la médiation, au dialogue avec les populations locales et à la communication stratégique afin d’appuyer les activités de protection, de collecte d’informations et d’appréciation de la situation menées par la Mission;

–Donner la priorité au renforcement de la mobilité et aux patrouilles actives, notamment en procédant à la constitution du matériel nécessaire et en engageant les États Membres à fournir les capacités nécessaires, en particulier les moyens aériens, afin de permettre à la Mission de mieux exécuter son mandat dans les zones où apparaissent de nouveaux risques et de nouvelles menaces, y compris dans les lieux isolés, et donner la priorité au déploiement de forces dotées de moyens aériens, terrestres et maritimes adaptés, afin d’appuyer les activités de protection, de collecte d’informations et d’appréciation de la situation menées par la Mission;

–Renforcer les capacités de la Mission en matière de renseignement et d’analyse, y compris ses moyens de surveillance et d’observation, ses processus de collecte de renseignements aux fins de la neutralisation des explosifs et des munitions et ses capacités d’analyse scientifique et technique dans ce domaine, dans les limites de son mandat;

–Vérifier que les contingents ont la formation et l’équipement requis pour lutter contre les engins explosifs conformément aux normes de l’ONU, qui sont actualisées et spécifiques à chaque mission, veiller à ce que des mesures correctives soient prises si nécessaire, notamment en assurant la formation appropriée, en tirant les enseignements de l’expérience et en exigeant que les contingents déploient le matériel nécessaire pour répondre aux besoins actuels de la Force;

–Améliorer les procédures d’évacuation sanitaire primaire et secondaire, y compris l’instruction permanente sur l’évacuation sanitaire primaire décentralisée, y compris en revoyant l’existante, et déployer davantage de capacités d’évacuation sanitaire secondaire;

–Prendre des mesures énergiques et efficaces pour améliorer la planification et le fonctionnement des installations et des dispositifs de sûreté et de sécurité de la MINUSCA;

–Prévoir des plans de renouvellement des capacités essentielles sur le long terme et réfléchir à des options novatrices pour promouvoir les partenariats entre les pays fournisseurs de matériel, de contingents ou de personnel de police;

–Veiller à ce que tout appui fourni à des forces de sécurité non onusiennes soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme, en assurant notamment un suivi sur la manière dont cet appui est utilisé et sur la mise en œuvre de mesures d’atténuation, et en communiquant des informations à ce sujet;

–Donner la priorité aux activités de protection prévues dans le mandat de la Mission dans les décisions concernant l’utilisation des capacités et ressources disponibles de cette dernière, conformément à la résolution 1894 (2009);

–Renforcer ses activités de prévention de la violence sexuelle et fondée sur le genre et de lutte contre celle-ci, conformément à la résolution 2467 (2019), notamment en aidant les parties à mener des activités conformes à la résolution 2467 (2019), et en veillant à ce que les risques de violence sexuelle et fondée sur le genre soient pris en compte dans les systèmes de collecte de données, d’analyse des menaces et d’alerte rapide de la Mission, en entamant une collaboration éthique avec des survivants et des victimes de ce type de violence, ainsi que des organisations de femmes;

–Mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) et toutes les résolutions sur les femmes et la paix et la sécurité, notamment en cherchant à augmenter le nombre de femmes au sein de la MINUSCA, conformément à la résolution 2538 (2020), ainsi qu’en veillant à la participation pleine, égale et véritable de ces dernières à tous les aspects des opérations, notamment en garantissant aux femmes un environnement de travail sûr, favorable et qui tienne compte des questions de genre dans le cadre des opérations de maintien de la paix, en tenant pleinement compte, dans toutes les activités inscrites au mandat de la Mission, de la question transversale du genre, et en réaffirmant l’importance des conseillers civils et en tenue pour les questions de genre, des points de contact pour les questions d’égalité des sexes dans toutes les composantes de la Mission, des compétences en matière de genre et du renforcement des capacités s’agissant d’exécuter le mandat de la Mission en tenant compte des questions de genre;

–Tenir pleinement compte de la question transversale de la protection de l’enfance;

–Mettre en œuvre le programme relatif aux jeunes et à la paix et à la sécurité prévu dans les résolutions 2250 (2015), 2419 (2018) et 2535 (2020);

–Assurer les prestations de maintien de la paix prévues au titre des résolutions 2378 (2017) et 2436 (2018);

–Mettre en œuvre la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard des fautes graves, de l’exploitation et des atteintes sexuelles et du harcèlement sexuel, ainsi que toutes les actions prévues par la résolution 2272 (2016), et lui faire rapport si de tels faits se produisent;

44. Prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de continuer à prendre les mesures appropriées afin de prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles, notamment en vérifiant les antécédents de tous les membres du personnel, en organisant une formation de sensibilisation avant et pendant le déploiement, et en veillant à ce que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes aient à en répondre pleinement, y compris en faisant en sorte que des enquêtes soient promptement ouvertes pour toutes allégations d’actes d’exploitation ou d’atteintes sexuelles que des pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police auraient commis, de faire répondre les auteurs de leurs actes et de rapatrier leurs unités lorsqu’il existe des preuves crédibles qu’elles ont commis des actes d’exploitation et des atteintes sexuelles de manière généralisée ou systémique, et d’informer pleinement et promptement l’Organisation des Nations Unies des actions engagées;

45. Prie la MINUSCA d’être sensible aux effets qu’ont sur l’environnement les activités qu’elle mène en exécution des tâches qui lui sont confiées, et de maîtriser ces effets, selon qu’il convient et conformément aux résolutions de l’Assemblée générale et aux règles et règlements applicables de l’Organisation;

46. Prend note de la stratégie environnementale pour les opérations de paix du Département de l’appui opérationnel (phase II), qui met l’accent sur une bonne gestion des ressources et un héritage positif de la Mission, et fixe pour objectif une utilisation accrue des énergies renouvelables dans les missions afin de renforcer la sûreté et la sécurité, de réaliser des économies, d’offrir des gains d’efficacité et de profiter à la Mission;

47. Encourage le Secrétaire général à appliquer et à mettre à jour en permanence le cadre stratégique intégré définissant la vision globale et les priorités communes des organismes des Nations Unies ainsi que la répartition des tâches entre eux pour pérenniser la paix en République centrafricaine, y compris par une coordination accrue avec les donateurs, prie le Secrétaire général de veiller à une répartition efficace des tâches et à la complémentarité des efforts de la MINUSMA et des entités qui composent l’équipe de pays des Nations Unies, en tenant compte de leur mandat et de leurs avantages comparatifs relatifs, et d’adapter constamment le déploiement des moyens en fonction des progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la Mission, en soulignant qu’il importe que l’équipe de pays des Nations Unies dispose de ressources et de moyens adaptés, insiste sur la nécessité critique de renforcer la présence et les activités de l’équipe de pays des Nations Unies en République centrafricaine pour faciliter l’intégration entre les entités des Nations Unies et la consolidation de la paix à long terme, demande que ce cadre comprenne également une planification précoce, inclusive et intégrée des transitions, conformément à la résolution 2594 (2021), et demande aux États Membres et aux organisations compétentes d’envisager de fournir les fonds nécessaires à cette fin au moyen de contributions volontaires;

Protection de l’enfance

48. Prie la MINUSCA de tenir pleinement compte, dans tous les aspects de son mandat, de la question transversale que constitue la protection de l’enfance et d’aider les autorités centrafricaines à garantir que la protection des droits de l’enfant soit prise en compte, notamment dans les opérations de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement et dans la réforme du secteur de la sécurité, y compris au moyen d’une éducation de qualité dispensée dans un environnement sûr en zones de conflit, afin de mettre un terme aux violations et exactions commises contre des enfants, et de les prévenir;

Questions de genre

49. Prie la MINUSCA de tenir pleinement compte des questions de genre dans tous les aspects de son mandat et d’aider les autorités centrafricaines à garantir la participation, la contribution et la représentation pleines, égales et véritables des femmes, y compris les rescapées de violences sexuelles, dans tous les domaines et à tous les niveaux, y compris dans le processus politique et de réconciliation et dans les mécanismes établis aux fins de la mise en œuvre de l’APPR, les activités de stabilisation, la justice transitionnelle, les travaux de la Cour pénale spéciale et de la Commission vérité, justice, réparation et réconciliation, la réforme du secteur de la sécurité et les activités de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement, et les préparatifs et la tenue des élections locales, notamment en mettant à disposition des conseillers pour les questions de genre, et demande aux pays fournisseurs de contingents et d’effectifs de police d’appliquer les dispositions de la résolution 2538 (2020) et de toutes les résolutions pertinentes relatives à la réduction des obstacles à la participation des femmes à tous les niveaux et à tous les postes dans les opérations de maintien de la paix et à l’accroissement de cette participation, notamment en garantissant aux femmes un environnement de travail sûr, favorable et qui tienne compte des questions de genre dans le cadre des opérations de maintien de la paix;

Gestion des armes et des munitions

50. Prie la MINUSCA de saisir, d’enregistrer, d’éliminer et de détruire activement, selon qu’il conviendra, les armes et munitions des combattants désarmés et des groupes armés qui refusent de déposer les armes ou qui ne l’ont pas encore fait et qui représentent une menace imminente pour les civils ou la stabilité de l’État, dans le cadre de son action visant à saisir et collecter les armes et le matériel connexe dont la fourniture, la vente ou le transfert constituent une violation des mesures imposées au paragraphe 1 de la résolution 2648 (2022);

51. Prie la MINUSCA de fournir aux autorités centrafricaines un appui dans les efforts qu’elles déploient pour réaliser les objectifs de référence définis aux fins du réexamen des mesures d’embargo sur les armes, qui ont été exposés dans la déclaration de son président datée du 9 avril 2019 (S/PRST/2019/3) (les « objectifs de référence »), et appelle les autres partenaires régionaux et internationaux de la République centrafricaine à appuyer de manière coordonnée les efforts déployés par les autorités centrafricaines à ces fins, conformément aux résolutions 2616 (2021) et 2648 (2022);

Liberté de circulation de la MINUSCA

52. Exhorte toutes les parties en République centrafricaine à coopérer pleinement avec la MINUSCA dans le cadre de son déploiement et de ses activités, notamment en assurant sa sûreté, sa sécurité et sa liberté de circulation, avec accès immédiat et sans entrave à tout le territoire de la République centrafricaine, y compris par voie aérienne et la nuit, conformément à l’Accord sur le statut des forces de la Mission, pour lui permettre de s’acquitter de l’intégralité de son mandat dans un environnement complexe;

53. Demande aux États Membres, en particulier à ceux de la région, de garantir la libre circulation, sans entrave ni retard, à destination et en provenance de la République centrafricaine, de l’ensemble du personnel, du matériel, des vivres, des fournitures et autres biens, y compris des véhicules et des pièces détachées, destinés à l’usage exclusif et officiel de la MINUSCA;

Accès et appel humanitaires

54. Enjoint à toutes les parties, dans le respect des dispositions applicables du droit international et conformément aux principes humanitaires, d’autoriser et de faciliter l’acheminement rapide, en toute sécurité et sans entrave, de l’intégralité de l’aide humanitaire destinée aux personnes qui en ont besoin, en particulier aux déplacés;

55. Enjoint également à toutes les parties de garantir le respect et la protection de l’ensemble du personnel médical et des agents humanitaires dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, de leurs moyens de transport et de leur matériel, ainsi que des hôpitaux et des autres installations médicales;

56. Condamne fermement les attaques et les menaces d’attaques qui continuent de viser, en violation du droit international humanitaire, les écoles et les civils liés aux écoles, notamment les enfants et les enseignants, et exhorte toutes les parties à un conflit armé à mettre fin immédiatement à de telles attaques et menaces d’attaque et à s’abstenir de toute action qui entrave l’accès à l’éducation;

57. Demande aux États Membres et aux organisations internationales et régionales de répondre rapidement aux besoins humanitaires définis dans le plan de réponse humanitaire en augmentant leurs contributions et en veillant à ce que tous les engagements pris soient pleinement honorés dans les délais prescrits;

Rapports du Secrétaire général

58. Prie le Secrétaire général de lui fournir des analyses reposant sur les faits et les données, des évaluations stratégiques et des conseils francs, en utilisant les données recueillies et analysées au moyen du système complet de planification et d’évaluation de la performance et d’autres outils de planification stratégique et de mesure des performances, afin de déterminer l’impact de la mission, pour faciliter, selon que de besoin, la réévaluation de la composition et du mandat de la mission en se fondant sur la réalité sur le terrain, et prie également le Secrétaire général d’examiner régulièrement les conditions requises pour la transition, la réduction et le retrait de l’opération des Nations Unies et de rendre compte périodiquement à ce sujet, d’une manière qui ne porte pas préjudice à l’ensemble des efforts déployés à l’appui des objectifs à long terme de paix et de stabilité;

a)   Prie le Secrétaire général de lui faire rapport le 15 février 2023, le 15 juin 2023 et le 13 octobre 2023, notamment sur:

–La situation en République centrafricaine, y compris la situation en matière de sécurité, le respect du cessez-le-feu par toutes les parties, le processus politique, la mise en œuvre de l’APPR, y compris les efforts déployés par la MINUSCA pour appuyer le cessez-le-feu et le désarmement, la démobilisation, la réintégration et le rapatriement, les progrès accomplis concernant les mécanismes et les moyens de promouvoir la gouvernance et la gestion budgétaire et l’évolution de la situation des droits de l’homme et du droit international humanitaire, la promotion et la protection de ces droits et la protection des civils;

–Les violations de l’Accord sur le statut des forces et le suivi des efforts faits pour amener les auteurs à répondre de leurs actes, notamment dans le cadre d’enquêtes conjointes, ainsi que les attaques, provocations et incitations à la haine et à la violence et les campagnes de désinformation visant la MINUSCA;

–L’état de la mise en œuvre des tâches confiées à la MINUSCA, y compris les cas où celle-ci n’a pas pu atteindre des civils à la suite d’alertes en matière de protection des civils;

–La génération et le déploiement de tous les éléments constitutifs de la Mission et les progrès réalisés dans la mise en œuvre des mesures prises pour améliorer la performance de la MINUSCA, y compris celles qui visent à assurer l’efficacité de la force, comme indiqué aux paragraphes 37 à 45, ainsi que des informations sur la mise en œuvre de la politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles, telle qu’énoncée aux paragraphes 42 et 43;

–La performance globale, y compris la mise en œuvre du plan d’adaptation, la mise en place du cadre intégré de responsabilité et de gestion de la performance dans les missions de maintien de la paix et du Système complet de planification et d’évaluation de la performance, y compris des informations sur les restrictions non déclarées en ce qui concerne le dispositif d’évacuation sanitaire primaire, le refus de participer à des patrouilles ou de mener des patrouilles et leurs incidences sur la Mission, et sur les mesures prises en cas de signalement de résultats insuffisants;

–La mise en place, la performance et la nécessité avant chaque phase de renforts, comme décidé dans la résolution 2566 (2021) et rappelé dans la présente résolution;

–Les mesures visant à améliorer la communication stratégique de la MINUSCA et à lutter contre la désinformation et la mésinformation ciblant la Mission;

b)   Prie également le Secrétaire général de lui communiquer:

–Une évaluation, au plus tard en mai 2023, de l’appui logistique apporté aux forces de défense et de sécurité de la République centrafricaine conformément au paragraphe 35 de la présente résolution, notamment en fournissant les données financières appropriées;

–Un rapport à mi-parcours, d’ici à juin 2023, sur l’efficacité globale et la configuration de la MINUSCA, à l’aune d’indicateurs de performance qualitatifs, pour recenser les lacunes dans la concrétisation des objectifs, des moyens et des résultats, en vue d’une meilleure réalisation de son mandat;

c)   Exprime son intention de faire procéder à un examen stratégique indépendant de la MINUSCA, conformément aux bonnes pratiques, afin d’évaluer les menaces contre la paix et la sécurité en République centrafricaine, y compris l’imposition de contraintes aux opérations de la Mission, et de formuler des recommandations détaillées sur la pertinence de toutes les tâches prescrites, les priorités et les ressources connexes, sur des objectifs et des indicateurs réalistes, pertinents et clairement mesurables visant à évaluer les progrès accomplis dans la réalisation de la vision stratégique pluriannuelle de la Mission, ainsi que des options pour adapter la configuration des composantes civile, policière et militaire de la Mission, sur la base de larges consultations, y compris, sans s’y limiter, auprès des organes publics compétents, des représentants de la société civile, des acteurs de l’action humanitaire et du développement ainsi que des partenaires internationaux, une fois que sera effective l’augmentation des effectifs autorisés de la composante militaire et de la composante Police de la Mission, décidée au paragraphe 1 de la résolution 2566 (2021);

59. Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France), en tant que porte-plume de la résolution, s’est félicitée du renouvellement du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), rappelant l’environnement difficile dans lequel évolue la mission.  La situation dans le pays demeure fragile et il a encore besoin de la MINUSCA, a-t-elle dit.  La représentante a également assuré avoir été à l’écoute des positions de chaque membre du Conseil et de la République centrafricaine.  La résolution a été adaptée en conséquence, afin de favoriser le consensus et concilier les positions parfois divergentes des membres de ce Conseil, tout en veillant à préserver le mandat de la MINUSCA.  Dans ce contexte, elle a dit regretté les abstentions, alors que la MINUSCA a besoin d’un soutien unanime.

Mme Broadhurst Estival a alors a rappelé le contenu de la résolution, affirmant qu’elle contient deux principaux messages, dont un qui encourage les autorités centrafricaines à poursuivre leurs efforts pour mettre en œuvre la Feuille de route de Luanda, avec l’appui des organisations régionales et des pays de la région.  Le second message de cette résolution est un appel du Conseil de sécurité en direction des autorités centrafricaines à lever l’interdiction des vols de nuit en République centrafricaine, compte tenu que ces restrictions portent atteinte à la liberté de mouvement de la MINUSCA et à son efficacité opérationnelle.

Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a déclaré que cette résolution ne répond pas aux aspirations de la République centrafricaine, avant de juger nécessaire un dialogue entre le Conseil et le pays hôte.  Un mandat efficace est un mandat équilibré et inclusif, a-t-elle tranché.  Elle a regretté le rejet de propositions des A3 en vue notamment d’un engagement fort en faveur du renforcement de l’autorité de l’État, lequel est un élément indiscutable de stabilisation.  En outre, cette résolution ne prend pas en compte les efforts des Forces armées centrafricaines dans l’exécution de leurs tâches régaliennes, ni les mesures prises par les autorités dans un contexte économique austère, a regretté la déléguée.

M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a voté en faveur de la reconduction du mandat de la MINUSCA afin de lui permettre de continuer de protéger les civils et d’appuyer le processus de paix en République centrafricaine.  La MINUSCA a réalisé des progrès notables face à la menace que représentent les engins explosifs et la désinformation, a-t-il noté.  La résolution représente en outre un appui sans équivoque, selon lui, à l’accord sur le statut des forces et à la levée de l’interdiction des vols de nuit.  Il a toutefois trouvé difficile de comprendre comment certains membres du Conseil de sécurité qui prétendent défendre la sécurité des Casques bleus peuvent s’opposer aux vols de nuit dans le cadre de ce mandat.  Le représentant a déploré le fait que, bien que le mandat condamne les activités des groupes armés, il ne nomme pas spécifiquement le groupe Wagner, alors que des informations montrent que des forces armées envoyées par la Fédération de Russie font obstacle à la mise en œuvre du mandat de la MINUSCA et se livrent à des exactions.  Le délégué a encore souligné qu’il incombe au premier Chef à la République centrafricaine de protéger sa population.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a dit avoir voté en faveur de cette résolution pour refléter l’équilibre trouvé entre l’amélioration de la mise en œuvre par la MINUSCA de son mandat et la nécessité d’améliorer les éléments qui figurent dans ce texte afin que cette mise en œuvre soit encore plus efficace.  Il faut donner suffisamment de temps à la nouvelle Représentante spéciale pour qu’elle puisse faire fond sur les avancées déjà réalisées, a-t-elle estimé, en appelant aussi le Gouvernement et la Mission à jouer leurs rôles respectifs et à travailler en bonne coopération.  Elle a regretté que certaines propositions faites pour améliorer le mandat de la MINUSCA par les A3 aient été rejetées.  Elle a notamment parlé de la tâche relative à l’extension de l’autorité de l’État et à la préservation de l’intégrité territoriale, en soulignant qu’il s’agit là de la raison d’être de toute opération de maintien de la paix et que cela devrait figurer parmi les taches prioritaires.  Concernant la conduite des négociations de manière générale, elle a déploré que des considérations géopolitiques aient déterminé la position de certaines délégations, réduisant ainsi à néant tout espoir de consensus.  Les populations civiles en République centrafricaine subissent les conséquences des rivalités entre certains pays, a regretté la représentante.

M. VEBJOERN HEINES (Norvège) a dit avoir voté en faveur de la résolution en raison du rôle important que joue la Mission pour la stabilisation de la République centrafricaine.  Insistant sur la contribution des Casques bleus dans cette stabilisation et sur les dangers qu’ils affrontent, le Représentant a jugé essentiel que ce personnel puisse être évacué de jour comme de nuit, en cas de nécessité.

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déploré les restrictions de mouvements dont souffre le personnel de la MINUSCA, notamment en ce qui concerne les vols de nuit.  Il a appelé le Gouvernement centrafricain à mettre en application l’accord sur le statut des forces de la MINUSCA et autoriser lesdits vols de nuit.  Enfin, il a estimé que la France, délégation porte-plume, a réussi à concilier des avis divergents en vue de l’adoption de cette importante résolution.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est félicité de la reconduction du mandat de la MINUSCA, tout en se disant déçu que le libellé sur la responsabilité de protéger n’ait pas été retenu, bien qu’il incombe au Chef à la République centrafricaine de protéger sa population.  Cette reconduction intervient dans un contexte politique et sécuritaire difficile, a-t-il noté, alors que les interdictions imposées aux vols de nuit continuent d’entraver la liberté de mouvement du personnel de la MINUSCA et la faculté de la Mission de mettre en œuvre son mandat.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a regretté qu’en dépit des nombreux compromis, cette résolution n’ait pas obtenu un soutien unanime.  Il est revenu sur le libellé relatif aux vols de nuit, une question de longue date qui n’a pas trouvé de solution entre la MINUSCA et la RCA.  Il a souligné qu’une mission forte et bien équipée est la meilleure garantie pour qu’elle puisse s’acquitter au mieux de son mandat.

M. XING JISHENG (Chine) a indiqué que la situation sécuritaire progresse depuis le début de l’année en République centrafricaine, tout comme le processus de paix, malgré certaines incertitudes, ce qui fait que la MINUSCA joue encore un rôle vital.  En tant que principal fournisseur de contingents, la Chine a été toujours favorable à la pleine mise en œuvre des dispositions sur le statut des forces, a-t-elle ajouté, soulignant que l’imposition de pressions n’aidera en rien à résoudre les problèmes persistants, a estimé la Chine, en déplorant que certaines priorités du Gouvernement centrafricain, comme la question des groupes armées, n’aient pas été retenues dans le projet de résolution, raison pour laquelle la Chine a décidé de s’abstenir.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a expliqué l’abstention de sa délégation par le refus de la France d’intégrer les points de vue des autres délégations, y compris celui de la République centrafricaine elle-même.  La France n’a accepté qu’un seul élément demandé par le pays hôte.  La résolution n’est donc pas un texte de consensus, a affirmé la représentante russe.  Elle a également dit ne pas comprendre pourquoi la délégation française n’a pas pris en compte les questions concernant les engins explosifs ayant été utilisés pour attaquer des soldats de la paix.  Cette attaque a fait trois blessés, a rappelé la déléguée.  Le Conseil de sécurité doit savoir comment ces engins explosifs et les composants ayant permis de les fabriquer sont arrivés en République centrafricaine, a-t-elle déclaré.  Il ne s’agit pas de désigner de coupable, mais de savoir comment ils sont arrivés sur place, a insisté la représentante.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a déclaré ne pas être pleinement satisfait de la manière dont les négociations sur ce texte se sont déroulées, considérant que celles-ci auraient pu être davantage inclusives et associer tous les membres du Conseil.  Il a indiqué que la situation est mouvante en République centrafricaine et exige en conséquence une adaptation du mandat de la MINUSCA.  Nous aurions aimé que le Conseil adresse un message plus ferme au sujet des activités des groupes armés, a déclaré le délégué, avant de rappeler la nécessité d’entendre tous les points de vue afin de parvenir à un consensus.  Enfin, il a insisté sur l’importance de la coopération des autorités centrafricaines pour la bonne exécution du mandat de la MINUSCA.

Mme SYLVIE VALÉRIE BAÏPO-TEMON, Ministre des affaires étrangères de la République centrafricaine, a considéré que le texte qui vient d’être adopté comme « non satisfaisant », car il ne prend pas en compte les attentes de la RCA ainsi que les impératifs d’une opération de maintien de la paix « qui doit gagner en efficacité ».  Elle a dénoncé « des missions avec des Casques bleus dépourvus de moyens et équipements adéquats face à des groupes armés surarmés, dépourvus de proactivité avec des modalités d’engagements sur le terrain trop lourdes où l’on voit des interventions de contingents arrivés après les exactions ou des religieuses se faire carboniser dans leur voiture par des groupes armés sous le regard de contingents impuissants ».  Le cas de l’incident de Kaga-Bandoro est éloquent, selon elle: bien qu’appelé au secours par la population, le contingent de la MINUSCA présent dans la localité ne s’est déplacé que le lendemain c’est-à-dire juste pour constater les morts brûlés vifs, les compter pour les besoins du communiqué de condamnation ferme des atrocités des groupes armés, a lancé la Ministre, en indiquant qu’il pouvait poursuivre la liste des incohérences des décisions prises par les puissants « que vous êtes, membres permanents » avec le soutien appuyé d’États « choisis à la carte ».  En outre, a-t-elle ajouté, le vote à majorité ici obtenue s’explique aussi par le fait que beaucoup d’États Membres ici présents sont « juges et parties », car pays contributeurs aux opérations de maintien de la paix, en République centrafricaine ou ailleurs.

La crise centrafricaine ne se résoudra pas par les appels à la barre de l’État agressé que l’on accuse de ne pas avoir la capacité de faire respecter les droits humains, ni par des sanctions pour camoufler que la nature a horreur du vide et que les « querelles stériles » ne sont pas acceptables lorsqu’un État est « en mode survie »; ni par des textes produits « dans de confortables tour d’ivoire » et « en déconnexion totale de la réalité du terrain », a fustigé la cheffe de la diplomatie centrafricaine.  Selon Mme Baïpo-Temon, le projet de texte listant les bons offices de la MINUSCA jusque sur des domaines de souveraineté est « preuve d’une volonté non pas de résoudre le conflit centrafricain, mais de l’entretenir, car nous savons aussi que l’accord de siège imposé et signé en 2014 en période d’extrême vulnérabilité maintient le pays dans une dépendance voulue à la communauté internationale dans son souci de préservation des termes du traité de Berlin ».

La RCA voudrait appeler le Conseil à faire preuve de lucidité en apportant un soutien adéquat à la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en RCA afin qu’au bout de 10 ans, la MINUSCA puisse escompter les lueurs d’une sortie de crise.  Pour cela, la Représentante spéciale doit pouvoir avoir la latitude d’utiliser la robustesse de sa mission et la force armée face à une rébellion qui ne cesse de se revigorer et met en lumière les limites d’une opération de maintien de la paix qui n’a pas vocation ou mandat à agir sur la cause du problème: les groupes armés.  Une nouvelle rébellion marquera un échec de cette résolution votée aujourd’hui ou donnera raison à la population inquiète d’une non-proactivité face à des milices armées, a mis en garde la Ministre.  Elle a ensuite dénoncé les crimes et violations inacceptables constatés depuis 2013 par les Casque bleus, qu’elle a accusés de trafics illicites d’armes ou de ressources naturelles ou de viols de mineurs.  Des crimes et violations restés sans réaction, la division des droits de l’homme de la MINUSCA et le Haut Conseil des droits de l’homme étant « restés aphones jusqu’en 2021 », date à laquelle la cause des victimes centrafricaines est devenue d’actualité du fait de l’enjeu géopolitique du moment.

Il est ici important de saluer les efforts collectifs menés et qui ont permis d’atteindre des acquis significatifs et inattendus tenant compte du chaos dans lequel se trouvait la RCA en 2013, au moment où fut déployée la MINUSCA.  « Il est donc important de ne pas oublier cette agression sanglante perpétrée de maisons en maisons, ayant laissé des milliers d’orphelins et de familles désœuvrées et déplacées.  Sachant que les auteurs restent libres et prompts à des velléités du fait d’un message ambigu que le Conseil de sécurité et la communauté internationale leur adressent, en faisant fi volontairement de les nommer explicitement, rendant ainsi flou le message au détriment des victimes, « du fait aussi d’opérations de maintien de la paix non dissuasives, manquant d’efficacité effective sur le terrain et d’actions concrètes pour accompagner les efforts de la lutte contre l’impunité menés par le Gouvernement ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), jusqu’au 15 novembre 2023

9191e séance, après-midi
CS/15105

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), jusqu’au 15 novembre 2023

Le Conseil de sécurité a adopté, cet après-midi, une résolution par laquelle il décide de proroger, jusqu’au 15 novembre 2023, le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies (FISNUA), ainsi que les tâches qui lui sont confiées, définies au paragraphe 3 de la résolution 1990 (2011), qui l’autorisent à protéger le personnel onusien et les civils dans la zone d’Abyei.

En adoptant à l’unanimité la résolution 2660 (2022) présentée par les États-Unis, le Conseil décide en outre que la Force doit continuer de s’acquitter de ce mandat et des tâches qui en découlent et de maintenir les effectifs militaires et policiers maximums actuellement autorisés, soit un maximum de 3 250 militaires et de 640 policiers, dont 148 policiers hors unités constituées et trois unités de police constituées.

Par ce texte, le Conseil demande instamment aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais d’apporter un appui sans réserve à la Force de sorte qu’elle puisse s’acquitter de sa mission et déployer ses effectifs, y compris faciliter le bon fonctionnement de toutes les bases d’opérations de la FISNUA et du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière. 

Il réaffirme également que la zone d’Abyei doit être démilitarisée, toutes les forces autres que celles de la FISNUA et du Service de police d’Abyei, une fois celui-ci mis sur pied, devant s’en retirer, ainsi que les éléments armés des populations locales.  Le Conseil demande instamment aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais et aux populations locales de prendre toutes les mesures nécessaires à cet égard. 

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Texte du projet de résolution S/2022/839

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures et toutes les déclarations de sa présidence concernant la situation à Abyei et le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud, et soulignant qu’il importe de s’y conformer et de les appliquer pleinement,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale du Soudan et du Soudan du Sud,

Constatant que la situation actuelle à Abyei et le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud continue de menacer la paix et la sécurité internationales,

1.    Décide de proroger jusqu’au 15 novembre 2023 le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei énoncé au paragraphe 2 de la résolution 1990 (2011) et, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, décide également de proroger jusqu’au 15 novembre 2023 les tâches confiées à la Force définies au paragraphe 3 de la résolution 1990 (2011), et décide en outre que la Force doit continuer de s’acquitter de ce mandat et des tâches qui en découlent, conformément aux résolutions 2630 (2022) et 2609 (2021);

2.    Décide de proroger jusqu’au 15 novembre 2023 le mandat de la FISNUA modifié par sa résolution 2024 (2011) et le paragraphe 1 de sa résolution 2075 (2012), qui prévoit que la Force fournisse un appui au Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, et décide également que la Force et le Secrétaire général doivent continuer de s’acquitter de ce mandat et des tâches qui en découlent, conformément aux résolutions 2630 (2022) et 2609 (2021);

3.    Maintient les effectifs militaires et policiers maximums actuellement autorisés, tels qu’ils sont fixés aux paragraphes 4 et 5 de la résolution 2609 (2021) et exprime son intention de rester saisi des recommandations que le Secrétaire général a formulées dans sa lettre du 17 septembre 2021 (S/2021/805);

4.    Demande instamment aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais d’apporter un appui sans réserve à la Force de sorte qu’elle puisse s’acquitter de sa mission et déployer ses effectifs, y compris de faciliter le bon fonctionnement de toutes les bases d’opérations de la FISNUA et du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, conformément à leur responsabilité première en tant qu’États hôtes et aux accords sur le statut des forces, et réaffirme que la zone d’Abyei doit être démilitarisée, toutes les forces autres que celles de la FISNUA et du Service de police d’Abyei, une fois celui-ci mis sur pied, devant s’en retirer, ainsi que les éléments armés des populations locales, et demande instamment aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais et aux populations locales de prendre toutes les mesures nécessaires à cet égard;

5.    Prie le Secrétaire général de continuer de l’informer des progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la FISNUA tel qu’il est défini au paragraphe 34 de la résolution 2609 (2021), ainsi que des avancées réalisées sur les questions énoncées au paragraphe 5 de la résolution 2630 (2022), et de lui présenter des rapports écrits le 1er mai 2023 et le 15 octobre 2023;

6.    Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.