9327e séance – matin & après-midi  
CS/15292

Le Conseil de sécurité réfléchit à la meilleure façon de lutter contre l’insécurité alimentaire des civils pendant les conflits armés

« Garantir la sécurité et la dignité des civils dans les conflits: agir contre l’insécurité alimentaire et protéger les services essentiels », tel a été le thème du débat public de haut niveau sur la protection des civils en période de conflit armé organisé aujourd’hui au Conseil de sécurité par le Président de la Confédération suisse, et auquel ont participé plus de 80 délégations.  Les conflits armés sont un facteur déterminant de l’insécurité alimentaire dans le monde, a expliqué le Secrétaire général de l’ONU, appuyé par la Présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). 

L’an dernier, plus de 117 millions de personnes ont souffert de faim aiguë, principalement en raison de la guerre et de l’insécurité, une « aberration », a déclaré le Secrétaire général à l’ouverture du débat.  M. António Guterres a rappelé que moins de six semaines se sont écoulées depuis que la guerre a éclaté au Soudan.  Durant cette période, des centaines de civils ont été tués, y compris des membres du personnel des Nations Unies; 250 000 personnes ont dû fuir le pays, des hôpitaux ont été occupés et attaqués, le prix des marchandises a quadruplé dans certaines régions du pays et des entrepôts d’aide humanitaire ont été pillés.  « Aussi terrible soit-elle, cette réalité est loin d’être unique en son genre », a-t-il relevé, renvoyant à son rapport sur la protection des civils en période de conflit armé. 

M. Guterres a souligné que les dommages causés aux infrastructures critiques entravent la production alimentaire, empêchent l’acheminement des denrées et privent les populations d’eau salubre.  Il a évoqué l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, qui a contribué à la hausse des prix des denrées alimentaires, de l’énergie et des engrais dans le monde entier, aux dépens des populations les plus pauvres.  Dans tous les conflits armés, il faut impérativement renforcer la protection des civils et, à cette fin, consolider le respect du droit international humanitaire (DIH) et du droit international des droits de l’homme, conclut le Secrétaire général, rejoint par la majorité des intervenants. « Cela exige la mobilisation d’une volonté politique beaucoup plus forte de la part de toutes les parties à un conflit armé et de tous les États et autres parties prenantes concernées. » Le Président de la Confédération Suisse, M. Alain Berset, a appelé à son tour au respect du DIH, une priorité de longue date pour la Suisse, dépositaire des Conventions de Genève et siège du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

La Présidente du CICR, Mme Mirjana Spoljaric Egger, a informé que le nombre de conflits armés non internationaux a plus que triplé au cours des 20 dernières années, passant de moins de 30 à plus de 90.  Ces conflits ont tendance à se prolonger, entraînant des souffrances incessantes, aggravées par les chocs climatiques, l’insécurité alimentaire et les difficultés économiques.  Dans les villes du Soudan, de la Syrie, de l’Ukraine et du Yémen, le CICR a observé des dommages à grande échelle.  Mme Egger a donc lancé un appel urgent pour protéger les civils et les infrastructures essentielles dans les zones urbaines, étant donné que la destruction généralisée, « souvent aveugle », des habitations et des infrastructures essentielles augmente de manière disproportionnée le coût humain de la guerre. 

Le rôle des femmes dans la lutte contre l’insécurité alimentaire a été incarné aujourd’hui par la Présidente du Réseau des organisations de femmes du bassin du lac Tchad, Mme Aïchatou Mounkaila, qui a témoigné du lien entre conflit et crise humanitaire dans son pays d’origine, le Niger, hier en sécurité et aujourd’hui menacé par les attaques du groupe armé Boko Haram.  Dans le bassin du lac Tchad, la crise humanitaire, qu’elle soit climatique ou sécuritaire, a un « visage féminin », a-t-elle dit, car plus de 80% des personnes vivant dans la pauvreté sont des femmes et des enfants.  Plusieurs pays ont par ailleurs condamné l’interdiction faite aux femmes de travailler dans le secteur de l’aide humanitaire en Afghanistan. 

Le Président du Mozambique, M. Filipe Jacinto a informé le Conseil des efforts de son gouvernement pour garantir la sécurité alimentaire et la fourniture de services essentiels, tout en luttant contre le terrorisme dans la province de Cabo Delgado. Dans toutes les crises complexes, la protection des civils, ainsi qu’un accès et un soutien humanitaires soutenus, doivent être garantis par ce Conseil, a martelé le Président de Malte, M. George Vella, pour qui les obstacles arbitraires, discriminatoires et bureaucratiques qui entravent la livraison rapide de l’aide humanitaire sont inacceptables.  Notant à cet égard que les sanctions, à moins qu’elles ne soient ciblées, peuvent avoir des conséquences humanitaires néfastes et imprévues sur des populations civiles innocentes, il s’est félicité comme beaucoup de délégations, dont les Émirats arabes unis, de l’adoption récente de la résolution 2664 (2022) qui prévoit une exemption humanitaire pour tous les régimes de sanctions de l’ONU. 

L’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie et la prolongation récente de l’Initiative de la mer Noire sur l’exportation de céréales et d’engrais ont marqué le débat, les deux pays comptant parmi les principaux fournisseurs mondiaux de denrées alimentaires dont de nombreux pays, notamment en développement, dépendent. La République de Corée a proposé au Conseil d’introduire un mécanisme de surveillance et de communication sur les violations graves, lequel existe déjà dans le contexte des enfants et des conflits armés. 

Appuyant la France qui a reproché à la Russie d’intégrer sciemment à sa stratégie militaire des violations du DIH, l’Ukraine a accusé ce pays de priver sa population d’un accès adéquat à l’eau et à la nourriture et d’utiliser la faim comme un instrument de torture contre les prisonniers ukrainiens incarcérés dans les territoires occupés.  L’Ukraine a également évoqué l’usage immodéré par la Russie de mines qui détruisent les terres arables.  Des accusations niées en bloc par la Russie, qui a déplacé la discussion sur le terrain de l’emploi de mesures coercitives unilatérales par les pays occidentaux.  Selon elle, l’Initiative de la mer Noire a jusqu’à présent surtout profité aux pays riches au détriment des pays les moins avancés. 

Alors que les belligérants se reprochaient l’un l’autre de saper ladite Initiative, le Secrétaire général en a lui évoqué les points positifs: stabilisation des marchés, baisse des prix et atténuation de la crise alimentaire.  L’Ukraine a pu exporter plus de 30 millions de tonnes de denrées, permettant au Programme alimentaire mondial (PAM) d’acheminer des céréales vitales en Afghanistan, en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Yémen, a-t-il précisé. 

PROTECTION DES CIVILS EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ: RENFORCER LA CONFIANCE POUR ÉTABLIR UNE PAIX DURABLE S/2023/307S/2023/345

Déclarations liminaires

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a tout d’abord rappelé que moins de six semaines se sont écoulées depuis que la guerre a éclaté au Soudan.  Durant cette période, des centaines de civils ont été tués, y compris des membres du personnel des Nations Unies; 250 000 personnes ont dû fuir le pays, des hôpitaux ont été occupés et attaqués, le prix des marchandises a quadruplé dans certaines régions du pays et des entrepôts d’aide humanitaire ont été pillés. « Aussi terrible soit-elle, cette réalité est loin d’être unique en son genre », a-t-il relevé, renvoyant à son rapport sur la protection des civils en période de conflit armé en 2022. Après avoir constaté que les armes explosives continuent de faire des ravages, notamment dans les villes, le Chef de l’ONU a indiqué que, l’an dernier, 94% des victimes qu’elles ont faites dans des zones peuplées étaient des civils.  En tout, le nombre de personnes contraintes de quitter leur foyer en raison des conflits, de la violence, des violations des droits humains et des persécutions a atteint 100 millions, a-t-il déploré.  Des établissements de santé et d’enseignement ont été dévastés, leurs personnels blessés, enlevés ou tués, et des travailleurs humanitaires sont régulièrement menacés.  Il s’est également indigné de l’interdiction faite aux femmes de travailler dans le secteur de l’aide humanitaire en Afghanistan, mettant en danger la vie des femmes et des filles. 

Les conflits armés sont aussi un facteur déterminant de l’insécurité alimentaire dans le monde, a poursuivi le Secrétaire général.  L’an dernier, plus de 117 millions de personnes ont souffert de faim aiguë, principalement en raison de la guerre et de l’insécurité, une « aberration » selon lui.  M. Guterres a rappelé que les dommages causés aux infrastructures critiques entravent la production alimentaire, empêchent l’acheminement des denrées et privent les populations d’eau salubre.  Il a cité le cas de la Syrie, où les ressources en eau potable sont aujourd’hui 40% moins importantes qu’au début du conflit, où les marchés ne peuvent plus fonctionner et les prix s’envolent.  Il a également évoqué l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a contribué à la hausse des prix des denrées alimentaires, de l’énergie et des engrais dans le monde entier, aux dépens des populations les plus pauvres. Et lorsque les conflits s’ajoutent à la crise climatique, les récoltes diminuent et les populations ont faim, a-t-il ajouté, déclarant en avoir été le témoin lors de sa récente visite en Somalie, où après des années de guerre, la population fait face à la pire sécheresse depuis des décennies. 

M. Guterres a toutefois noté qu’au cours de l’année passée, des mesures ont été prises pour atténuer les effets des conflits sur les civils. Certaines parties ont œuvré pour protéger les enfants et permettre aux intervenants humanitaires d’avoir accès aux populations démunies, s’est-il félicité, indiquant à cet égard que la Coordonnatrice de la réponse et de la prévention de la famine, qu’il a récemment nommée, pilote l’action du système des Nations Unies face à la montée de l’insécurité alimentaire, tandis que le Programme d’action sur les déplacements internes vise à apporter des solutions au nombre record de personnes déplacées. Le Secrétaire général a aussi fait mention de l’Initiative de la mer Noire et du protocole d’accord sur les produits alimentaires et les engrais russes, qui ont contribué à stabiliser les marchés, à faire baisser les prix et à atténuer la crise alimentaire. L’Ukraine a pu exporter plus de 30 millions de tonnes de denrées alimentaires, permettant au Programme alimentaire mondial (PAM) d’acheminer des céréales vitales en Afghanistan, en Éthiopie, au Kenya, en Somalie et au Yémen, a-t-il applaudi.  La Fédération de Russie ayant confirmé qu’elle continuerait à participer à l’Initiative de la mer Noire pendant 60 jours supplémentaires, il a assuré que les questions en suspens continueront d’être abordées par les représentants de la Russie, de l’Ukraine, de la Türkiye et de l’ONU.

Le Secrétaire général a ensuite rappelé qu’en novembre dernier, les États ont adopté une déclaration politique qui vise à protéger les civils en limitant l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées ou en s’abstenant d’en faire usage.  Exhortant tous les États à se rallier à cette déclaration et à la traduire en actes concrets, il les a également appelés à appliquer la résolution 2664 (2022), adoptée en décembre dernier et destinée à empêcher que les sanctions de l’ONU nuisent aux civils et entravent l’action humanitaire.  M. Guterres a également demandé aux États d’exclure les activités humanitaires et médicales du champ d’application de leurs sanctions et de leurs mesures de lutte antiterroriste.  Si ces quelques mesures sont les bienvenues, « la triste vérité est que le monde ne respecte pas ses engagements en matière de protection des civils, pourtant consacrés par le droit international humanitaire ». Qualifiant les Conventions de Genève de 1949 et les Protocoles additionnels s’y rapportant de « pierre angulaire de ce cadre juridique », il a salué le travail du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), « gardien de ces traités ». 

Appelant à redoubler d’efforts pour prévenir les conflits, protéger les civils, préserver la paix et trouver des solutions politiques à la guerre, M. Guterres a indiqué que, dans les semaines à venir, il publiera une note d’orientation sur le Nouvel Agenda pour la paix en vue du Sommet de l’avenir de l’an prochain.  « Les États Membres pourront ainsi s’appuyer sur une méthode globale, adaptée à l’époque, pour aborder les questions de paix et de sécurité dans un monde en mutation », a-t-il expliqué, avant d’inviter les États à transposer le droit international humanitaire (DIH) dans leur droit interne et à l’intégrer dans la formation et les règles militaires.  Selon lui, le Conseil de sécurité a un rôle particulier à jouer en exhortant les États à respecter les règles de la guerre.  De plus, les États qui exercent une influence sur les parties aux conflits devraient entamer un dialogue politique et former leurs forces à la protection des civils, a-t-il encore plaidé, demandant également aux pays exportateurs d’armes de refuser de commercer avec toute partie qui bafoue le DIH.  Enfin, après avoir enjoint aux États d’enquêter sur les allégations de crimes de guerre et de poursuivre leurs auteurs, le Secrétaire général a souhaité que tout soit fait pour mettre fin au « cycle mortel des conflits armés et de la faim », en renforçant les économies des pays vulnérables, en honorant les engagements pris en faveur des pays qui sont en première ligne de la crise climatique et en augmentant les contributions aux opérations humanitaires, qui sont financées à moins de 15%, « ce qui est une honte ». 

Mme MIRJANA SPOLJARIC EGGER, Présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a informé que le nombre de conflits armés non internationaux a plus que triplé au cours des 20 dernières années, passant de moins de 30 à plus de 90.  Nombre de ces conflits se prolongent, entraînant des souffrances incessantes, aggravées par les chocs climatiques, l’insécurité alimentaire et les difficultés économiques.  Dans ce contexte, les populations civiles sont rendues vulnérables par une accumulation incessante d’attaques, de menaces, de destructions et d’impasses politiques, a pointé Mme Egger.  La Présidente du CICR a donc lancé un appel urgent pour protéger les civils et les infrastructures essentielles dans les zones urbaines, étant donné que la destruction généralisée, « souvent aveugle », des habitations et des infrastructures essentielles augmente de manière disproportionnée le coût humain de la guerre. 

Dans les villes du Soudan, de la Syrie, de l’Ukraine et du Yémen, le CICR a observé des schémas de dommages à grande échelle.  Mme Egger a rappelé au Conseil qu’en adoptant sa résolution 2573 (2021), il avait exigé des parties aux conflits armés qu’elles fassent davantage pour protéger les civils.  Dans cet esprit, le CICR a demandé instamment aux parties engagées dans une guerre urbaine de veiller à ce que la protection des civils soit une priorité; de respecter le droit international humanitaire (DIH) et notamment les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution; d’appliquer la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées; de veiller à ce que la protection des services essentiels englobe les infrastructures, les personnes et les biens de consommation permettant aux hôpitaux, à l’eau et à l’électricité de fonctionner; et, enfin, de faciliter un acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire.

Ensuite, a poursuivi la Présidente du CICR, les États doivent prendre des mesures pour prévenir et atténuer l’insécurité alimentaire dans les zones touchées par les conflits.  La sécheresse, le manque d’investissement dans l’adaptation au climat dans les zones de conflit et les répercussions du conflit armé international entre la Fédération de Russie et l’Ukraine s’aggravent pour les populations touchées dans le monde entier.  Mme Egger a appelé à investir dans des solutions pratiques et des mesures d’adaptation pour atténuer les effets des changements climatiques dans les régions touchées par les conflits. 

Enfin, elle a insisté pour que soit permis un accès humanitaire neutre et impartial dans toute zone de conflit, notamment pour venir en aide aux communautés assiégées, ainsi qu’aux centres de détention surpeuplés, où le Comité observe des « tendances inquiétantes » en matière de mauvais traitements et de torture.  « La protection des civils signifie la protection de tous », a conclu Mme Egger, exhortant tous les États à faire respecter le DIH, y compris par l’influence qu’ils exercent sur d’autres États.  À une époque où les tendances mondiales et les tensions géopolitiques s’aggravent, le respect du DIH doit devenir une priorité politique.

Mme AÏCHATOU MOUNKAILA, Présidente du Réseau des organisations de femmes du bassin du lac Tchad, a expliqué qu’elle était originaire de la ville de Diffa au Niger, première zone de production et de commercialisation du paprika au monde et première zone de production de pétrole du pays. « Nous n’étions pas développés, il y avait des défis, mais nous avions l’essentiel et la base de tout développement, à savoir notre sécurité. »  Or depuis 2015, Diffa et toute la région du bassin du lac Tchad font face à une crise humanitaire provoquée par les attaques de Boko Haram et d’autres groupes armés, a-t-elle témoigné.  En seulement deux ans, de 2020 à 2022, 7 millions de personnes supplémentaires ont été identifiées comme ayant besoin d’aide humanitaire et de protection, portant à près de 34 millions le nombre total de nécessiteux dans les sept pays du bassin du lac Tchad et du G5 Sahel, a relevé Mme Mounkaila.

Parallèlement à ces conflits armés, la crise climatique prend de l’ampleur, a poursuivi l’intervenante.  En 2022, les fortes pluies et inondations ont eu un impact énorme dans le bassin du lac Tchad, affectant 5,5 millions de personnes, tuant près d’un millier de personnes et rendant inutilisable 1 million d’hectares, dont 70% de terres agricoles.  Dans le bassin du lac Tchad, la crise humanitaire, qu’elle soit climatique ou sécuritaire, a un « visage féminin », a dit Mme Mounkaila, car plus de 80% des personnes vivant dans la pauvreté sont des femmes et des enfants.  Les combats entre les groupes armés et diverses forces de l’ordre font que des milliers d’écoles et des centaines de structures de santé restent fermées, tandis que les possibilités d’emploi et moyens de subsistance dignes se font de plus en plus rares, s’est-elle désolée.  Face à ce sombre tableau, les femmes se battent nuit et jour pour donner de l’espoir à leurs familles.  D’autres, comme elles, se sont organisées et mobilisées pour tenter de briser ce cercle vicieux. 

En 2021, des organisations dirigées par des femmes en provenance de quatre pays du bassin de lac Tchad ont créé le réseau qu’elle dirige pour relever les défis auxquels elles étaient toutes confrontées.  L’intervenante a demandé au Conseil de sécurité d’encourager la communauté des bailleurs de fonds à appuyer les moyens de subsistance dans lesquels les femmes jouent un rôle primordial, comme l’agriculture durable, de même que les opportunités économiques et l’accès aux services financiers pour les survivantes de violences, notamment sexuelles.  Par ailleurs, seules des réponses inclusives et des solutions durables axées sur les savoir-faire des communautés, devraient être privilégiées. Mme Mounkaila a insisté sur l’importance de la participation pleine et égale et du leadership des femmes et des filles dans les réponses humanitaires, tout comme dans les dialogues communautaires et les processus de négociation de paix à tous les niveaux. 

L’intervenante a en outre demandé que l’on soutienne les appels en faveur de programmes d’adaptation aux changements climatiques dans le secteur agricole, où plus de 80% des femmes évoluent, pour assurer la sécurité des semences du pays, mais aussi appuyer la transition vers une économie « verte ».  Elle a prié les membres du Conseil de sécurité de veiller à ce que chacune de ses interventions comprenne une analyse intersectionnelle assortie de données précisant le sexe, l’âge, le handicap et autres caractéristiques nécessaires selon le contexte, en particulier dans le cadre de la mise en œuvre la résolution 2417 (2018).

Déclarations

M. ALAIN BERSET, Président de la Confédération suisse, a rappelé que le manque de biens et de services essentiels lors des conflits coûtait plus de vies civiles que l’impact direct des hostilités, notant que les groupes vulnérables, comme les enfants et les personnes en situation de handicap, en faisaient les frais.  Il a appelé au respect du droit international humanitaire, une priorité de longue date pour la Suisse, dépositaire des Conventions de Genève et siège du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), et l’une de ses priorités au Conseil de sécurité.  « Le travail du CICR est d’une valeur inestimable pour la protection des civils », a-t-il ajouté, s’inquiétant des récentes attaques sur l’impartialité de l’organisation.  Le Président a relaté ses récentes visites au Mozambique, saluant au passage le démantèlement du dernier camp de rebelles, et en République démocratique du Congo (RDC). Il a évoqué ses rencontres avec des civils ayant souffert d’assassinats de membres de leurs familles, de viols ou de pillages et salué leur résilience, avant de rappeler les États à leurs obligations internationales dans les situations de conflit. 

« Les conflits armés sont les principaux facteurs de famine », a insisté le Président: 258 millions de personnes souffrent de malnutrition aigüe dans le monde, dont les deux tiers vivent dans des zones de conflit.  S’il a déploré les conséquences de l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine, notamment la hausse massive des prix dans le monde entier, il a toutefois salué la prolongation de l’Initiative de la mer Noire et affirmé que la Suisse se tient prête à apporter son soutien.  Il a rappelé le vote par le Conseil de sécurité de la résolution 2417 (2018), qui reconnaît le lien entre les conflits et l’insécurité alimentaire, et réaffirmé que son pays, conformément à la résolution 2573 (2021), condamnait fermement l’utilisation de la famine comme méthode de guerre, le refus de l’accès humanitaire et le fait de priver les civils des biens indispensables à leur survie. M. Berset a appelé à mieux mettre en œuvre lesdites résolutions qui protègent les civils en temps de guerre, en réduisant notamment les conséquences humanitaires de l’utilisation d’armes explosives dans les zones densément peuplées, comme l’exige la Déclaration de Dublin signée par son pays l’année dernière.  Il a également appelé à ce que les parties qui utilisent la famine contre les civils soient tenues pour responsables de ce crime de guerre, rappelant qu’en 2019, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) avait été amendé à l’initiative de la Suisse pour que ce crime soit également poursuivi dans les situations de conflits internes, et encourageant tous les États parties à ratifier cet amendement.  Enfin, le Président a jugé primordial que les opérations de paix de l’ONU continuent à jouer un rôle clé dans la protection des civils, même en phase de transition.  Il s’est félicité de la récente adoption par ce Conseil de la résolution 2664 (2022) sur les exemptions humanitaires pour les régimes de sanctions, y voyant « une preuve des progrès réalisables ». 

M. FILIPE JACINTO NYUSI, Président du Mozambique, a informé le Conseil des efforts de son gouvernement pour garantir la sécurité alimentaire et la fourniture de services essentiels, tout en luttant contre le terrorisme.  Depuis qu’en octobre 2017, des groupes terroristes ont mené des attaques armées dans la province de Cabo Delgado qui ont fait plus de 2 000 morts et de nombreux blessés parmi les civils et causé des traumatismes psychologiques, la séparation des familles, des enlèvements et de la violence contre les femmes et les enfants, le Gouvernement, a dit le Président, a mené une politique de protection de la vie et de la dignité des civils, y compris par la réinsertion sociale des terroristes capturés ou qui fuient les rangs des groupes armés.  Il s’est félicité que sur un total de 800 000 personnes, environ 300 000 sont déjà retournées dans leurs lieux d’origine en raison de l’amélioration de la situation sécuritaire au cours des derniers mois. 

M. Nyusi a informé que durant sa visite dans la province de Cabo Delgado, le Président suisse, Alain Berset, a pu constater de visu les efforts du Mozambique pour protéger les civils et fournir des services essentiels.  Le Président Nyusi a expliqué qu’au Mozambique, les mesures de protection des civils font l’objet d’un débat ouvert, partagé et concerté au sein d’une commission multisectorielle composée de membres du Gouvernement et d’institutions du système des Nations Unies ainsi que de la Croix-Rouge et d’autres ONG internationales et nationales. Il a aussi indiqué que les forces de défense et de sécurité mozambicaines ont donné la priorité à la protection et à la socialisation avec les populations civiles par la participation conjointe aux activités productives et de reconstruction, aux dons, aux activités culturelles et sportives, entre autres, et au respect des règles du droit international humanitaire.  Le Président a fait valoir l’approche multidimensionnelle qui est suivie pour la protection des civils dans les situations de conflit, qui prend en compte plusieurs de ses dimensions clefs et qui se décline en programmes de développement socioéconomique dans les communautés axés sur les jeunes; programmes d’aide humanitaire; formation des forces de défense et de sécurité pour assurer la protection durable des populations et la défense de l’intégrité territoriale nationale.  Dans la province de Cabo Delgado, ont été créés plus de 50 centres de réinstallation pour accueillir les civils déplacés qui ne peuvent pas être logés dans les ménages de leur famille, a-t-il précisé. 

Enfin, le Président a fait valoir ce qui est fait pour atténuer l’insécurité alimentaire: outre la relance de l’agriculture, le Gouvernement a mis en œuvre un programme de reconstruction des infrastructures détruites et vandalisées par les terroristes à Cabo Delgado et rétabli les services publics essentiels. Il a néanmoins demandé un appui international, vu l’ampleur des destructions et des souffrances endurées par les populations civiles dans la région de Cabo Delgado, avant de lancer un appel au Conseil de sécurité pour faire cesser les hostilités dans tous les conflits qui font des victimes humaines dans le monde.  Il a exhorté les États à canaliser toutes les ressources scientifiques, technologiques, humaines et financières pour contrer tous les types de menaces telles que les guerres, les pandémies, la faim et les effets dévastateurs des catastrophes naturelles. 

M. GEORGE VELLA, Président de Malte, a constaté que la vie de millions de civils dans le monde continue d’être compromise par une multitude de crises, notamment la faim induite par les conflits, la violence ciblée, les déplacements et les changements climatiques.  De la République centrafricaine à l’Afghanistan, au Myanmar et à l’Éthiopie, la corrélation entre les conflits et la faim est évidente, a-t-il souligné, avant d’évoquer le sort des populations civiles au Soudan, pays que 700 000 personnes ont fui dans la peur depuis le 15 avril, mais aussi en Haïti, où la violence extrême des gangs a aggravé les crises sous-jacentes existantes, en Syrie, où le conflit prolongé a réduit en ruines les infrastructures de base,  et dans les territoires palestiniens, où les démolitions, expulsions et autres incidents violents continuent d’exacerber les tensions.  Parallèlement, la guerre en Ukraine continue d’affecter gravement la population civile, tant en Ukraine qu’au-delà, et aggrave l’insécurité alimentaire mondiale déjà existante, a déploré le chef d’État, selon lequel une nouvelle période de violence se fait jour dans le pays et risque d’entraîner « encore plus de morts et de destructions à l’échelle industrielle ». 

Dans toutes ces crises complexes, la protection des civils, ainsi qu’un accès et un soutien humanitaires soutenus, doivent être garantis par ce Conseil, a estimé le Président maltais, pour qui les obstacles arbitraires, discriminatoires et bureaucratiques qui entravent la livraison rapide de l’aide humanitaire sont inacceptables.  Notant à cet égard que les sanctions, à moins qu’elles ne soient ciblées, peuvent avoir des conséquences humanitaires néfastes et imprévues sur des populations civiles innocentes, il s’est félicité l’adoption récente de la résolution 2664 (2022) qui prévoit une exemption humanitaire pour tous les régimes de sanctions des Nations Unies.  Il est de notre responsabilité collective de garantir que les civils ne paient pas par inadvertance le prix des actions des personnes sanctionnées, a-t-il fait valoir. Après s’être indigné des restrictions imposées aux femmes afghanes et des discriminations dont souffrent les travailleuses humanitaires yéménites, le dirigeant a répété que, dans toutes les situations de crise, les civils ne doivent pas être des cibles, et qu’il ne va de même pour ceux qui leur viennent en aide.  Il s’est cependant réjoui de l’accord conclu par les parties au conflit ukrainien prévoyant le renouvellement de l’Initiative de la mer Noire pour une nouvelle période de deux mois, tout en déplorant les l’impact causé par la perturbation des exportations agricoles de cette région sur des marchés vulnérables très éloignés de la Corne de l’Afrique et du Levant. « La faim ne devrait jamais être brandie comme une arme, dans aucun conflit », a-t-il martelé. 

En ce qui concerne l’avenir, a poursuivi le Président, le Conseil de sécurité se doit de faire rendre des comptes à ceux qui ont violé le droit international, et en particulier ceux qui ont ordonné ou participé à la destruction, ou empêché le fonctionnement d’infrastructures civiles essentielles à la production et à la disponibilité de nourriture.  « Nous devons arrêter la faim induite par les conflits avant qu’il ne soit trop tard », a-t-il dit, appelant également le Conseil à travailler plus étroitement avec les parties belligérantes pour assurer la déconfliction des infrastructures indispensables à la survie de la population civile.  Il importe aussi d’intensifier tout à la fois l’aide alimentaire d’urgence et la protection de la production agricole dans les situations de crise pour le plus grand bénéfice des populations, a-t-il plaidé, avant d’exhorter la communauté internationale à augmenter le financement des réponses humanitaires de l’ONU, lesquelles peinent à récolter des fonds alors que les dépenses militaires mondiales ont atteint un niveau record de 2 240 milliards de dollars en 2022. 

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a noté que bon nombre des pays touchés par les conflits sont importateurs de denrées alimentaires et que l’aggravation des hostilités aggravent encore cette vulnérabilité.  Dans ce contexte, il a estimé que la trêve et la facilitation d’exportations vers le Yémen ou l’ouverture de nouveaux couloirs humanitaires en Syrie sont des exemples éloquents de la manière dont les solutions politiques peuvent apporter des avantages significatifs à la sécurité alimentaire -et même à la survie- des populations touchées.  Le représentant a toutefois rappelé que l’acheminement de l’aide humanitaire en nature pouvait potentiellement nuire aux pays disposant encore de capacités de production en faussant les prix, au détriment des producteurs locaux, tandis qu’une aide sous forme de transferts monétaires permet aux populations de répondre à leurs besoins essentiels tout en aidant les producteurs locaux à prospérer. 

Se félicitant du renouvellement de l’Initiative de la mer Noire, étape clef selon lui pour limiter les incertitudes concernant l’approvisionnement mondial en céréales et en engrais, le délégué a ensuite critiqué l’emploi de mesures coercitives unilatérales, ainsi que la fourniture de subventions agricoles, qui « faussent le marché », ainsi que « d’autres formes de protectionnisme » qui entravent la capacité des pays en développement à mettre en place des systèmes agroalimentaires résistants et à participer pleinement aux marchés internationaux.  « Si l’on ne s’attaque pas à ces pratiques omniprésentes, ces pays continueront à faire les frais des inégalités mondiales », a-t-il déclaré. 

Mme MARIAM AL MHEIRI, Ministre du changement climatique et de l’environnement des Émirats arabes unis, a déclaré que l’une des principales raisons pour lesquelles les civils continuent de souffrir de l’insécurité alimentaire provoquée par les conflits est l’absence de mise en œuvre de règles clairement énoncées.  Or, pour lutter contre l’insécurité alimentaire, a-t-elle dit, il faut commencer par relever le défi existentiel de notre époque, à savoir les changements climatiques.  Lors de la COP28, qui se tiendra dans son pays cette année, les questions des systèmes d’alimentation et d’approvisionnement en eau, ainsi que l’impact des changements climatiques sur la capacité des nations à se remettre des catastrophes, figureront en bonne place à l’ordre du jour, a annoncé la Ministre.

Quelles que soient leurs motivations, les sanctions ne peuvent être autorisées à exacerber l’insécurité alimentaire dans les situations de conflit armé, a poursuivi Mme Al Mheiri, en mettant l’accent sur l’acheminement des denrées alimentaires et des intrants agricoles ou le maintien des services essentiels.  À cet égard, la résolution 2664 (2022) a fait date en établissant une dérogation aux sanctions de l’ONU afin de préserver la fourniture de l’aide humanitaire pour répondre aux besoins fondamentaux, a-t-elle rappelé en demandant à tous les États de la mettre pleinement en œuvre.  Enfin, les organisations humanitaires nationales et leur personnel féminin doivent être davantage soutenus, a considéré la Ministre, et tous les acteurs doivent veiller à ce que les femmes puissent effectuer leur travail sans entrave.  C’est pourquoi, le mois dernier, nous avons fait la demande d’un accès total, rapide, sûr et sans entrave pour les acteurs humanitaires en Afghanistan: « les Émirats arabes unis restent déterminés à soutenir le travail vital effectué par les travailleuses humanitaires afghanes », a-t-elle conclu. 

M. AMBROSE DERY, Ministre de l’intérieur du Ghana, a rappelé que 70% des populations souffrant de la faim dans le monde vivaient dans des pays affectés par des conflits.  Il a souligné le lien de causalité entre conflit et famine, notamment dans les pays africains et a appelé à briser ce « lien de causalité destructeur » en s’assurant que des systèmes alimentaires suffisamment solides soient des facteurs de paix.  Il a exhorté la communauté internationale à mettre en œuvre des mesures d’urgence, tout en garantissant des investissements de long terme dans le développement, afin de briser le cercle vicieux de la faim et des conflits.  Au chapitre des mesures d’urgence, il a appelé à agir pour les populations du Burkina Faso, de la République centrafricaine, de la République démocratique du Congo (RDC), du Mali, du Soudan, du Soudan du Sud, de la Somalie et d’Haïti.  Il a exhorté à renforcer les centres humanitaires mondiaux tels que la Cité humanitaire internationale de Dubaï ainsi que les centres régionaux, comme celui d’Accra, afin que les denrées puissent être acheminées rapidement là où se trouvent les besoins.  Il a également appelé les principaux donateurs à adopter une approche intégrée évitant que les fonds soient concentrés sur les distributions de denrées au détriment de la reconstruction des systèmes alimentaires. 

Appelant à soutenir les initiatives africaines dans ce domaine, telles que la position africaine commune sur des systèmes alimentaires durables, il a aussi souhaité la mise en œuvre pleine et entière de la facilité africaine de production alimentaire d’urgence de la Banque africaine de développement (BAD) doté de 1,5 milliard de dollars.  Le Ministre a aussi appelé à la mise en place rapide de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et à lier les objectifs de maintien de la paix avec l’établissement de systèmes alimentaires solides. 

M. TARIQ AHMAD DE WIMBLEDON, Ministre d’État pour l’Asie du Sud, le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et les Nations Unies du Royaume-Uni au Bureau des affaires étrangères et du Commonwealth, et Représentant spécial du Premier Ministre pour la prévention de la violence sexuelle dans les conflits, a rappelé que plus de 20 conflits font rage à travers le monde.  Il a constaté que la destruction des infrastructures, des hôpitaux, des économies et de la production alimentaire provoque des souffrances indicibles et qu’un quart de milliard de personnes connaissent des niveaux de faim aigus, causés en grande partie par les conflits.  Premières victimes des conflits, les femmes et les filles sont également exposées à des niveaux élevés de violence sexiste, y compris la violence sexuelle, a dénoncé le Ministre.  Évoquant par ailleurs les retombées mondiales de l’invasion de l’Ukraine par Vladimir Putin, il a exhorté la Russie à mettre fin à son occupation et à permettre aux exportations ukrainiennes vitales de se poursuivre à l’avenir.  À ses yeux, mieux protéger les civils en situation de conflit armé implique d’améliorer le respect du droit international humanitaire.  Pour cela, les parties au conflit doivent être tenues pour responsables, a-t-il souligné, saluant les initiatives prises par des pays comme la Somalie, où le Gouvernement prévoit désormais une formation au droit humanitaire avant de déployer ses troupes.  Il s’est aussi félicité qu’au Soudan, les parties au conflit aient reconnu leurs responsabilités en vertu du droit international et se soient engagées à autoriser et à faciliter l’aide humanitaire. 

Le Ministre a d’autre part plaidé pour une meilleure utilisation des systèmes d’alerte, conformément à la résolution 2417 (2018), pour la faim induite par les conflits.  Selon lui, le Conseil de sécurité doit agir plus rapidement sur la base des informations qui lui sont fournies afin de sauver des vies.  Il a également appelé à plus de cohérence et de coordination entre les initiatives diplomatiques, humanitaires, de développement et de paix, soulignant à cet égard l’engagement de son pays à aider les pays en situation de post conflit, à l’image de la conférence sur le relèvement de l’Ukraine qu’il organisera le mois prochain à Londres.  Nous nous engageons aussi à soutenir ceux qui sont confrontés à la convergence brutale des changements climatiques et des conflits, a-t-il ajouté, avant d’indiquer que le Royaume-Uni se joindra demain aux États-Unis, à l’Italie, au Qatar et au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour attirer l’attention sur la crise dans la Corne de l’Afrique et lever des fonds humanitaires d’urgence.  Mais au-delà, il faut aussi investir dans des solutions à long terme pour renforcer la résilience, a conclu le Ministre, souhaitant que les « paroles bien intentionnées » prononcées aujourd’hui soient suivies d’actions rapides. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a assuré que la protection des civils en période de conflit armé est une priorité du Gouvernement américain.  Elle a rappelé l’immense responsabilité du Conseil de sécurité pour protéger les personnes en danger.  Citant le rapport du Secrétaire général, la représentante a dit craindre que ces chiffres n’augmentent en 2023 du fait de l’agression de l’Ukraine par la Russie et du conflit au Soudan.  Elle a appelé à ne jamais oublier la violence déclenchée par le Président Putin en Ukraine.  Ce conflit a plongé des millions de personnes dans la famine parce que la Russie utilise les vivres comme armes de guerre, a-t-elle insisté, avant de saluer l’Initiative de la mer Noire grâce à laquelle plus de 15 millions de tonnes de céréales ont été exportées en 2022. 

La représentante a par ailleurs attiré l’attention sur les problèmes du retour de 100 millions de déplacés dans leurs foyers à travers le monde.  Les combats au Soudan pourraient déplacer plus d’un million de personnes supplémentaires cette année, a-t-elle prévenu avant d’appeler les parties soudanaises à respecter le cessez-le-feu de sept jours et l’accès humanitaire, en supprimant les obstacles bureaucratiques. Rappelant que la résolution 2417 (2018) est la réponse du Conseil à l’augmentation de la faim due aux conflits, la représentante a déploré l’absence d’informations sur sa mise en œuvre. Elle a souhaité recevoir, deux fois par an, les livres blancs du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Elle a appelé à faire davantage pour éliminer la faim et sauver des vies, en suivant l’exemple des États-Unis qui assurent la moitié des contributions reçues par le Programme alimentaire mondial (PAM).  La représentante a annoncé sa participation à une réunion qui doit se tenir demain sur la situation dans la Corne de l’Afrique.  Notant que 250 travailleurs humanitaires ont été tués en 2022, elle a encouragé les acteurs régionaux à participer à la consolidation de la paix, demandé la mise en œuvre des résolutions 2471 (2018) et 2573 (2021) et que soient traduits en justice les responsables des conflits armés. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a rappelé le lien évident entre conflit et sécurité alimentaire, et souligné que les parties à un conflit avaient l’obligation de protéger les biens de production, de stockage et d’approvisionnement en eau.  Le Conseil de sécurité doit garantir la résolution 2573 (2021) sur la protection des biens essentiels, a-t-il dit, soulignant qu’il était interdit d’attaquer ou de détruire des biens agricoles.  De même, il a condamné l’utilisation de la famine comme tactique de guerre, ainsi que le blocus de l’acheminement de l’aide humanitaire. 

Le représentant a rappelé que lors d’une conférence de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) en 2022 à Quito, son Directeur général a mis en garde contre la faim et l’insécurité alimentaire dans la région de l’Amérique latine et des Caraïbes.  Il a exhorté le Conseil de sécurité à redoubler d’efforts en Haïti. La péninsule était autosuffisante, et même exportatrice de fruits et d’autres denrées, jusque dans les années 80.  Or, les catastrophes naturelles et la crise climatique ont réduit ses capacités, sans parler des gangs qui se sont emparés de larges portions de l’Artibonite, grenier à blé d’Haïti.  Le blocus et le vol de marchandises entravent la sécurité alimentaire de la péninsule, sans parler des violences commises contre les femmes qui vendent les denrées et travaillent la terre.  La moitié de la population haïtienne se trouve en état d’insécurité alimentaire aiguë, sans accès aux services essentiels.  Si une force spécialisée d’appui aux forces de police haïtiennes n’est pas mise sur pied par le Conseil de sécurité, les répercussions seront sans précédent dans toute la région, y compris en termes de déplacements de population, a prévenu le délégué équatorien. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a déclaré que les belligérants de chaque conflit doivent s’abstenir de toute entrave à l’assistance humanitaire, conformément aux conventions de Genève.  Il a également appelé les États à prendre des mesures concrètes pour protéger le personnel médical, notamment en veillant à ce que les règles d’engagement militaire respectent le droit international humanitaire.  Le Conseil de sécurité a pris un certain nombre d’engagements importants en faveur de la protection des civils dans les conflits armés dans ses résolutions 2417 (2018), 1265 (1999) et 1296 (2000), a rappelé le représentant.  Nous devons nous assurer du strict respect de ces engagements parmi lesquels figurent les faits de permettre au personnel humanitaire d’avoir davantage accès aux civils ayant besoin d’assistance; d’améliorer la sécurité et la sûreté de ces personnels; d’améliorer les mesures visant à répondre aux besoins des réfugiés et personnes déplacées sur le plan sécuritaire; et de veiller à répondre pleinement aux besoins spécifiques des enfants dans les conflits armés.  Les acteurs étatiques peuvent agir en levant les obstacles administratifs qui obèrent l’action humanitaire, a estimé le délégué.  Il les a également encouragés à infléchir les tendances spéculatives des opérateurs économiques qui tentent de profiter des crises pour faire de plus gros profits à travers l’inflation sur les denrées alimentaires.  Par ailleurs, les organisations régionales ont un important rôle à jouer dans les efforts déployés pour renforcer la protection des civils, a encore dit le représentant gabonais. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a affirmé que les flambées de violence, où qu’elles se produisent, rappellent l’absence généralisée de progrès dans le respect des engagements pris en matière de protection des civils dans les conflits armés.  Citant l’Ukraine, le Soudan, le Sahel, la République démocratique du Congo (RDC), le Yémen, le Myanmar et Haïti, il a déploré la « privatisation de la guerre », le rôle croissant joué par des milices privées de mercenaires qui rendent encore plus difficile la protection des civils.  Si le Conseil de sécurité a considérablement fait progresser le cadre normatif de la protection des civils, a constaté le représentant, ses résolutions ne sont toutefois « que des bouts de papier » si elles ne sont pas appliquées.  Elles n’ont guère de valeur quand un membre permanent utilise des missiles et des drones kamikazes pour frapper des zones résidentielles, détruire des écoles, raser des jardins d’enfants, démolir des installations électriques, et ce en toute impunité depuis plus de 16 mois.  « Cette situation érode la confiance dans le multilatéralisme et conduit à une perte de légitimité. »  Le représentant s’est félicité de l’adoption de la résolution 2601 (2021) sur la protection des écoles, regrettant que celles-ci soient systématiquement détruites lors des conflits.  Il a également déploré que la résolution 2286 (2016) exigeant la fin de l’impunité pour les attaques contre des centres de santé ne soit pas appliquée, rappelant qu’en Ukraine, plus de 800 attaques contre des infrastructures médicales et des personnels de santé ont été signalées depuis le début de l’invasion russe, soit près de 70% de toutes les attaques de ce type dans le monde en 2022. Il s’est aussi inquiété de l’augmentation des cyberattaques contre les établissements médicaux, même dans les pays en paix.  Concernant la question de l’insécurité alimentaire provoquée par les conflits, le représentant a réaffirmé l’importance de poursuivre les exportations de céréales ukrainiennes, en particulier vers les pays et régions vulnérables.  Afin qu’une protection efficace des civils puisse être assurée en temps de conflit, il a aussi insisté sur l’importance de ne jamais tolérer l’impunité en cas de violation de leurs droits.

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a souligné que l’insécurité alimentaire et les conflits armés sont étroitement liés, notant que selon le Global Report on Food Crises, près d’un tiers des pays en situation d’insécurité alimentaire aiguë ont été touchés par des conflits.  Il a appelé à la mise en œuvre des résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021) du Conseil avant de faire le point sur l’aide fournie par le Japon pour répondre à ce problème de sécurité humaine.  Le Gouvernement a récemment donné 8 millions de dollars au PAM pour une aide alimentaire d’urgence dans l’est de la République démocratique du Congo qui compte le plus grand nombre de personnes en insécurité alimentaire aiguë élevée dans le monde.  Le représentant s’est également inquiété de l’impact de la guerre en Ukraine qui a aggravé l’insécurité alimentaire dans le monde et s’est félicité de la prorogation de l’Initiative de la mer Noire.  Il a ensuite indiqué que le Japon fournit, par l’intermédiaire de l’UNICEF et du PAM, un appui aux programmes de repas scolaires dans les zones de conflit pour lutter contre l’insécurité alimentaire et aider les enfants à aller à l’école afin de leur permettre de contribuer au développement et à l’édification de la paix dans leur pays.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé que l’insécurité alimentaire a des causes multiples, parmi lesquelles figurent les conflits armés et les sanctions unilatérales des pays occidentaux.  Rien ne justifie l’utilisation de la famine comme méthode de guerre, a-t-il dit, notant que cette règle a été consacrée dans le premier Protocole additionnel aux Conventions de Genève pour la protection des civils en temps de guerre.  Le représentant a toutefois rappelé que l’apparition de cette norme a été une conséquence directe du blocus de Léningrad par les troupes nazies et finlandaises.  Plus de 600 000 de ses habitants sont morts en raison de l’utilisation de la famine comme instrument de guerre, a-t-il rappelé, avant de s’alarmer de la menace que représentent aujourd’hui « les groupes terroristes et extrémistes qui font la guerre sans règles ».  À ses yeux, la montée continue de la menace terroriste dans la région saharo-sahélienne, ainsi que l’essor du groupe EIIL-Khorasan en Afghanistan sont particulièrement préoccupants.  Par ailleurs, si la situation se stabilise au Yémen, la crise humanitaire continue d’y faire rage et les populations manquent toujours de nourriture et de fournitures médicales, a observé le représentant.  En Syrie, les principaux problèmes sont, selon lui, dus à l’ingérence illégale dans les affaires intérieures et à l’occupation du pays. Il a dénoncé les frappes aériennes de la soi-disant « coalition étrangère » et les actions des groupes terroristes qui sévissent dans les territoires non contrôlés par Damas, ajoutant que la population civile continue de souffrir dans les territoires syriens occupés par les États-Unis et les forces contrôlées par ces derniers, notamment dans les camps de Roukban, Hol et Roj.  Appelant le Secrétaire général à continuer de suivre de près cette situation alarmante, le représentant a imputé la détérioration de la situation humanitaire en Syrie au fait que les États-Unis et l’Union européenne (UE)continuent d’appliquer des sanctions unilatérales illégales qui ont des conséquences désastreuses pour la population civile syrienne. 

Pour le représentant, la faim est aussi une « méthode de guerre économique » menée par l’Occident à travers le monde, l’un des exemples les plus clairs de cette tactique étant, selon lui, la situation entourant l’Initiative de la mer Noire.  En effet, a-t-il précisé, les pays les moins avancés reçoivent moins de 3% de tous les approvisionnements dans le cadre de l’Initiative.  De plus, en 10 mois de fonctionnement, dans le cadre des opérations humanitaires du PAM, seulement 600 000 tonnes de denrées alimentaires ont été exportées des ports ukrainiens, sur un volume total de plus de 30 millions de tonnes, soit « un maigre 2% ».  Le représentant a également attiré l’attention sur l’approvisionnement en ammoniaque, prévu dans les accords d’Istanbul. Ces livraisons pourraient assurer la fourniture de 2,5 millions de tonnes de matières premières, suffisantes pour produire sept millions de tonnes d’engrais, a-t-il fait valoir, assurant que cette quantité permettrait de produire de la nourriture pour 200 millions de personnes.  Or, alors que ces approvisionnements devaient commencer en même temps que l’exportation de nourriture ukrainienne, il n’en est rien, et à ce jour, le manque d’ammoniaque sur les marchés mondiaux est déjà de 70%, s’est-il indigné, non sans juger « surprenant » que peu de voix s’élèvent pour dénoncer cette situation et désigner les coupables.  Quant au protocole d’accord Russie-ONU sur l’exportation de produits alimentaires russes, sa mise en œuvre n’a toujours pas commencé, a déploré le représentant, avant de s’élever également contre le refus de l’UE et des États-Unis de débloquer l’accès de la Rosselkhozbank au système SWIFT et contre les autres problèmes logistiques causés par les sanctions.  Ainsi, a-t-il pointé, « Kiev et ses soutiens occidentaux bloquent l’accès à la nourriture tout en en accusant les autres ».  Malgré cela, la Fédération de Russie continue de contribuer à la sécurité alimentaire internationale, principalement pour les pays en développement.  Notre pays, qui est l’un des principaux fournisseurs de produits agricoles dans le monde, s’est imposé comme un partenaire fiable et prévisible, et il entend le rester, a-t-il conclu. 

M. ZHANG JUN (Chine) a lancé un appel au respect du droit international humanitaire en rappelant que les crises alimentaires aggravaient les souffrances des civils, et que parmi les quelque 250 millions de personnes souffrant d’insécurité alimentaire, deux tiers d’entre elles vivent dans des zones de conflit.  Selon le délégué, la communauté internationale doit agir de manière coordonnée, en promouvant un règlement politique des crises et en garantissant l’acheminement sûr et sans entrave de l’aide humanitaire, en vertu des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Jugeant impératif de persévérer dans les moyens pacifiques de résolution des conflits et la médiation, le délégué a appelé à renforcer l’aide d’urgence, et à ce que les bailleurs de fonds traditionnels augmentent leur aide financière et alimentaire, sans que celle-ci ne soit délivrée pour engranger des gains politiques futurs.  Accusant les États-Unis d’avoir aggravé la crise humanitaire en Afghanistan du fait de mesures unilatérales, il les a intimés de restituer aux Afghans les biens qui sont les leurs.

Se félicitant de la prorogation de l’Initiative de la mer Noire, le délégué a demandé que soit mis fin aux difficultés rencontrées par la Russie pour exporter ses denrées alimentaires et ses engrais.  Critiquant l’adoption par « certains pays » d’une politique monétaire extraordinaire, il a demandé que cessent ces « distorsions » dont souffrent les pays en développement.  Il faut selon lui créer des conditions propices pour que ces pays règlent leurs problèmes alimentaires.  Victimes du colonialisme, ils ont des économies dépendantes de quelques produits, les empêchant de parvenir à l’autosuffisance.  Critiquant les subventions agricoles des pays développés comme « perturbatrices des marchés », le délégué a appelé à ce que les grandes entreprises du secteur mettent fin à certains monopoles, notamment celui des semences.  Enfin, les pays historiquement responsables des changements climatiques doivent selon lui aider de toute urgence les pays vulnérables. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a dénoncé le fait que, dans certains conflits armés, des États et groupes armés intègrent sciemment à leur stratégie militaire des violations du droit international humanitaire, telles que les attaques contre les civils et les infrastructures civiles et l’utilisation de la faim comme arme de guerre.  « Celles commises par la Russie dans sa guerre d’agression contre l’Ukraine en constituent une inacceptable illustration, de même que celles commises par le groupe Wagner, notamment en République centrafricaine et au Mali, où le massacre perpétré à Moura en mars 2022 pourrait être constitutif de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité », a accusé le représentant, pour qui « la promesse de sécurité » faite par Wagner « n’est que pure propagande ». 

La France, a-t-il dit, est également préoccupée par les attaques commises contre le personnel humanitaire et les restrictions qui lui sont imposées, comme au Yémen ou en Afghanistan, où les Taliban ont interdit aux Afghanes de travailler pour les ONG et pour l’ONU.  Pour le délégué, ce qui fait obstacle à l’efficacité de la protection des populations civiles, ce ne sont pas les normes juridiques, mais l’absence de volonté politique pour les appliquer.  Il a par ailleurs indiqué que son pays a souscrit à la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées.  Le représentant a non seulement invité les autres États Membres à rejoindre cette déclaration politique en vue de son universalisation, mais aussi à adhérer à l’Appel à l’action humanitaire, lancé par la France et l’Allemagne en 2019, et qui regroupe à ce jour 53 signataires. 

M. VAHE GEVORGYAN, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a affirmé que l’Azerbaïdjan impose un blocus au Haut-Karabakh depuis le 12 décembre 2022, en violation flagrante du droit international humanitaire et de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020.  Depuis six mois, 120 000 personnes, dont 30 000 enfants, souffrent d’une grave pénurie de nourriture et de fournitures médicales, n’ayant reçu que 7,5% de l’approvisionnement habituel en biens essentiels, a-t-il déclaré.  Leur situation humanitaire est aggravée par une coupure totale du gaz et de l’électricité, et des tirs réguliers visent des civils lors de leurs activités agricoles, dans le but de créer des conditions de vie « insupportables ».  Au lieu d’adhérer à l’ordonnance juridiquement contraignante de la Cour internationale de Justice (CIJ) émise le 22 février 2023, demandant de « prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la libre circulation des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Lachin dans les deux sens », le Vice-Ministre a ajouté que les autorités azerbaïdjanaises ont installé un point de contrôle dans le corridor le 23 avril 2023, assumant ouvertement leur responsabilité dans le blocus de la région.  Selon lui, elles ne cessent d’entraver les activités du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et des forces de maintien de la paix de la Fédération de Russie pour répondre aux besoins vitaux de la population touchée par le conflit.  Déplorant qu’il ne soit toujours pas possible d’assurer la présence des agences des Nations Unies sur le terrain, il a regretté que la promesse collective de ne laisser personne de côté soit restée lettre morte. 

Pour le Vice-Ministre, « ces actions illégales », accompagnées d’une politique appelant à la haine anti-arménienne depuis des décennies, indiquent clairement « l’intention génocidaire de l’Azerbaïdjan, avec pour objectif final le nettoyage ethnique total de la population autochtone du Haut-Karabakh ».  Après sa réunion de décembre dernier, il a appelé le Conseil de sécurité à continuer à suivre la question de la situation humanitaire dans le Haut-Karabakh et à protéger ses habitants, en accord avec le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme.

Au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège, et Suède), Mme JOHANNA SUMUVUORI, Secrétaire d’État auprès du Ministre des affaires étrangères de Finlande, a déploré que cinq ans après l’adoption de la résolution 2417 (2018), les conflits armés continuent d’être le principal moteur des besoins humanitaires et de l’insécurité alimentaire dans le monde, s’inquiétant en outre des conséquences dévastatrices de la guerre d’agression de la Russie sur la sécurité alimentaire mondiale.  Elle a également noté que la lutte contre l’insécurité alimentaire et la protection des services essentiels sont particulièrement importantes dans les situations de conflits prolongés, où les besoins ne cessent d’augmenter et sont aggravés par les changements climatiques. 

L’intervenant a souligné que les femmes jouent un rôle essentiel pour assurer la sécurité alimentaire et a estimé qu’elles doivent participer à la conception et l’acheminement de l’aide humanitaire.  La communauté internationale doit aussi appuyer davantage les groupes de femmes qui sont les premiers à réagir aux conflits.  Elle a par ailleurs relevé que l’accès à l’eau est une condition préalable à la protection des civils et à la sécurité alimentaire, ainsi qu’à la fourniture de services essentiels.  Or, les guerres modernes ont un impact sur les ressources hydriques en raison, notamment, de la destruction des infrastructures essentielles et de la dégradation de l’environnement.  Notant en outre que l’eau joue un rôle croissant dans les stratégies géopolitiques, elle a indiqué que la coopération dans le domaine des eaux transfrontières peut servir de levier pour ramener la paix.  L’oratrice a également demandé aux gouvernements d’investir dans la fourniture et l’accès à l’eau dans les zones marginalisées et sujettes aux conflits.  Elle a aussi appelé à investir dans les services de base et l’adaptation au climat dans ces régions. 

M. PETER MACDOUGALL, Ministre délégué aux affaires mondiales du Canada, a observé que, si de nombreux États respectent leurs obligations en matière de droit international humanitaire (DIH) afin de protéger les personnes vulnérables en temps de conflit armé, d’autres font semblant d’utiliser le DIH pour « couvrir des tactiques vengeresses visant à détruire le tissu de la vie civile de leur ennemi ».  Ainsi, des villes autrefois prospères telles que Marioupol, Alep et Sanaa sont aujourd’hui devenues des amas inhabitables de béton, d’acier et de poussière, a-t-il dénoncé, s’indignant également de l’utilisation de la faim et de la violence sexuelle comme armes de guerre.  Estimant que le succès du droit international se mesure à la manière dont les violations sont traitées collectivement par les États, le Ministre s’est félicité que, face aux violations graves, les États répondent par des sanctions ciblées et efficaces, ainsi que par l’isolement diplomatique et économique des parties coupables.  Il a aussi salué, dans ce contexte, la revitalisation d’institutions judiciaires internationales indépendantes, notamment la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Le Canada est soucieux de travailler avec les parties à un conflit armé pour renforcer leurs mécanismes de conformité au DIH, a assuré le Ministre, avant de rappeler qu’en 2018, son pays a poussé les ministres des affaires étrangères du G7 à s’engager dans ce sens auprès de partenaires étatiques et non étatiques.  Il s’agissait de les aider à incorporer le DIH dans leurs lois, leur éducation, leur formation sur le terrain et leurs règles d’engagement, tout en les encourageant à traiter efficacement leurs propres violations, le cas échéant, a-t-il expliqué, indiquant que le Canada a mis cette approche en pratique dans ses relations avec les parties aux conflits armés en Iraq et en Ukraine.  Selon lui, l’insécurité alimentaire dans les conflits armés et la destruction d’infrastructures civiles essentielles trouvent leur origine dans le non-respect de ce droit.  Il a donc exhorté les États Membres à redoubler d’efforts pour s’assurer que le DIH est systématiquement intégré dans la pratique opérationnelle des parties à un conflit armé, afin de protéger les plus vulnérables. 

PMMMMMMMMMMMMMMMM

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a jugé scandaleux que 117 millions de personnes dans le monde soient réduites à la famine à cause d’un conflit.  Il a vu dans la guerre russe contre son pays un exemple des pratiques inhumaines de Moscou dans sa tentative d’utiliser la faim comme arme de guerre, alors que l’Ukraine commémore cette année le 90e anniversaire de la grande famine des années 30 orchestrée par le régime de Staline. Selon le délégué, on peut tirer plusieurs leçons de la situation vécue aujourd’hui par l’Ukraine.  Il a dénoncé avant tout l’usage de la faim par la Fédération de Russie comme un moyen parmi d’autres de faire la guerre.  Depuis le début de son invasion, ce pays organise des blocus humanitaires et des restrictions de mouvement à l’encontre de la population, la privant d’un accès adéquat à l’eau et à la nourriture.  La Russie utilise aussi la faim comme instrument de torture contre les prisonniers ukrainiens incarcérés dans les territoires occupés. 

L’agresseur, a poursuivi le délégué, tente de récupérer les inquiétudes mondiales relatives au manque de nourriture pour créer un « sentiment de rancune » contre le pays victime de l’agression, afin de le discréditer et de promouvoir une vision prorusse du conflit.  Selon lui, la Russie tente de saper les initiatives multilatérales menées pour faire face à la crise, telles que l’Initiative de la mer Noire, par un « chantage » visant à entraver la contribution de l’Ukraine à l’approvisionnement mondial en nourriture.  Le délégué a aussi dénoncé l’usage par la Russie de mines qui détruisent et contaminent les terres arables, et détruisent des infrastructures critiques.  L’Ukraine est désormais devenu l’un des pays les plus infestés de mines et d’autres engins explosifs, ceux-ci ayant déjà condamné plus de 4 700 kilomètres carrés de terres arables.  Soulignant le rôle indispensable de médiateur joué par l’ONU, avec la Türkiye, dans l’Initiative de la mer Noire, ainsi que son aide humanitaire aux populations civiles ukrainiennes dans des conditions dangereuses, le délégué a estimé qu’une solution d’ensemble ne pourrait être trouvée que dans cadre de la Charte des Nations Unies.  Ce n’est qu’en traduisant en justice les auteurs de crimes d’agression que les conflits armés et les souffrances qu’ils entraînent pour les civils, seront évités à l’avenir.

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a jugé particulièrement inquiétant que l’agression de la Russie contre l’Ukraine ait provoqué une crise alimentaire au long cours avec des implications mondiales.  Il a donc jugé essentiel de garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave, sans aucune condition, pour répondre aux besoins impératifs de pénuries alimentaires dans les régions touchées par les conflits. Dans cette optique, a-t-il préconisé, les missions de maintien de la paix de l’ONU doivent se montrer plus proactives dans la sauvegarde de l’espace humanitaire et le renforcement de la coordination et de la coopération avec les acteurs humanitaires sur le terrain, par le biais d’un partage opportun de l’information.  Selon le délégué, le Conseil de sécurité devrait envisager d’introduire un mécanisme de surveillance et de communication de l’information sur les violations graves, lequel existe déjà dans le contexte des enfants et des conflits armés.  Ce mécanisme permettrait de fournir une image plus claire de toutes les violations relatives à l’insécurité alimentaire induite par les conflits et aux dommages causés aux services essentiels, a-t-il expliqué.  Enfin, les parties à un conflit armé devraient agir de manière à éviter, ou du moins à minimiser, l’impact de leurs opérations sur les services essentiels, et envisager de coopérer à cette fin.

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) s’est inquiétée des proportions alarmantes atteintes par l’insécurité alimentaire avec un doublement probable des personnes atteintes cette année par rapport à 2020.  Elle a affirmé que les conflits en cours dans de nombreuses régions du monde, y compris en Ukraine et en Afghanistan, avaient exacerbé une crise affectant de manière disproportionnée les pays du Sud, faisant dérailler leurs efforts pour assurer la sécurité alimentaire et éradiquer la pauvreté d’ici à 2030.  Elle a apporté son soutien aux efforts déployés par le Secrétaire général pour trouver des moyens de relever le défi de l’insécurité alimentaire mondiale et s’est félicitée de la prolongation de l’Initiative de la mer Noire.  En tant que président du G20 cette année, elle a affirmé que son pays travaille à renforcer la sécurité alimentaire et énergétique et à veiller à ce que les besoins humanitaires des communautés vulnérables soient satisfaits sans délai.  La déléguée a rappelé que l’Inde avait fourni de l’assistance humanitaire à l’Ukraine, à l’Afghanistan, au Yémen et au Myanmar.  Elle a jugé impératif de maintenir les céréales à un prix abordable, estimant que l’ouverture des marchés ne devait pas devenir un argument pour perpétuer l’inégalité et discriminer les pays du Sud.

M. TAREQ ALBANAI (Koweït), qui s’exprimait au nom du Groupe des amis de la protection des civils dans les conflits armés, a souligné que, selon le rapport du Secrétaire général sur les conflits et la faim note qu’en 2022, plus de 250 millions de personnes étaient confrontées à une faim aiguë dans 58 pays et territoires, en demandant des efforts pour prévenir et atténuer la faim dans les conflits armés.  Il a dès lors appelé à protéger les sources alimentaires, les biens et le personnel humanitaire.  L’utilisation de la faim contre les civils est interdite, a insisté le représentant demandant aux parties à un conflit armé de s’acquitter de leurs obligations découlant du droit international humanitaire, y compris la protection des outils de production et de distribution des denrées alimentaires tels que les fermes, les marchés, les systèmes d’approvisionnement en eau, les moulins, les sites de transformation et de stockage des aliments, ainsi que les centres et moyens de transport des aliments.  Le délégué a aussi rappelé que les parties doivent abstenir d’attaquer, de détruire ou d’enlever les objets indispensables à la survie de la population civile.

Le représentant a demandé la publication rapide et à temps des rapports sur les situations d’insécurité alimentaire et nutritionnelle et de famine pour que le Conseil puisse réagir par une action rapide et décisive.  Il a pris note de l’adoption récente de la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans des zones peuplées, à Dublin, le 18 novembre 2022.  La protection des civils doit également être renforcée à son avis par la protection des infrastructures civiles essentielles à la fourniture de services de base.  Il a aussi exigé un accès humanitaire complet, sûr, rapide et sans entrave, ainsi que la sûreté et la sécurité de tout le personnel humanitaire.  Il a salué l’adoption de la résolution 2664 (2022) qui crée une exemption humanitaire aux régimes de sanctions du Conseil.  Il a aussi misé sur les efforts visant à prévenir la séparation des familles et les disparitions, à rechercher et à identifier les disparus et les victimes, et à répondre aux besoins des familles touchées.  Il est crucial d’agir rapidement dès le début d’un conflit armé, a encore suggéré l’orateur avant de plaider pour l’utilisation des nouvelles technologies pour rendre plus efficientes les opérations humanitaires et la protection des civils tout en attirant l’attention sur l’utilisation à mauvais escient des réseaux sociaux. 

M. ANTONIO M. LAGDAMEO (Philippines) a réitéré l’appui de son pays aux efforts visant à protéger les civils touchés par les conflits armés.  Cet engagement s’inscrit dans le respect du droit international humanitaire (DIH) et la conviction que le droit international des droits de l’homme s’applique également dans les situations de conflits armés, a-t-il souligné.  Notant à cet égard que les acteurs non étatiques armés ont une propension plus élevée à violer le DIH, en raison d’un manque manifeste de compréhension ou d’un refus à s’y conformer, le représentant s’est élevé contre la prise pour cible d’objectifs civils par ces acteurs, mais aussi par des États, avant de saluer l’obligation faite à tous de tenir pour responsables les auteurs de violations du DIH.  Il a ensuite estimé que le succès des opérations de maintien de la paix doit être mesuré à l’aune de la protection des civils, laquelle est une priorité de son pays, comme l’illustrent ses lois sur le génocide et autres crimes contre l’humanité, et sur la protection spéciale des enfants dans les situations de conflit armé.  Le délégué a ajouté que, l’an prochain, les Philippines prévoient de renforcer encore leur action dans ce domaine en augmentant le nombre des Casques bleus philippins sur le terrain.  À cet égard, il a réaffirmé son soutien à la Convention sur les armes à sous-munitions, faisant valoir que l’interdiction de ces armes protège les civils et les infrastructures civiles, en particulier dans les zones de conflit urbain. 

M. MACIEJ POPOWSKI, Directeur général de la protection civile européenne et des opérations d’aide humanitaire de la Commission européenne, a exprimé sa profonde préoccupation face au nombre et à l’ampleur des conflits dans le monde, notamment la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine et la crise au Soudan, qui ont des retombées sur la vie de millions de civils. Notant leur impact sur la sécurité alimentaire, même dans les pays qui ne sont pas touchés par la violence, il a appelé à la protection des infrastructures civiles pour assurer la production et la distribution de nourriture, l’approvisionnement en eau, l’assainissement, la fourniture d’énergie et les soins de santé.  Le représentant de l’exécutif européen s’est aussi alarmé des conséquences humanitaires résultant de l’utilisation d’armes explosives dans des zones peuplées, avant de se féliciter de l’adoption par les États Membres de la Déclaration politique relative à cette question.  Assurant que l’Union européenne (UE) reste déterminée à maintenir le DIH au cœur de son action extérieure, il a réaffirmé son engagement à poursuivre son financement en réponse à la crise alimentaire mondiale.  Après avoir invité le secteur privé et les institutions financières internationales à davantage contribuer à cet effort, il a plaidé pour une plus grande complémentarité entre les actions humanitaires, de développement et de paix afin de protéger les ressources essentielles, traiter les causes profondes et prévenir l’apparition de crises humanitaires. 

Dans l’environnement opérationnel complexe d’aujourd’hui, il importe d’aider les humanitaires à rester et à intervenir de manière efficace, a poursuivi le représentant de la Commission européenne, en s’indignant des restrictions imposées aux travailleuses humanitaires en Afghanistan et au Yémen. L’accès humanitaire est une priorité pour l’UE, a-t-il insisté, saluant l’action menée par l’ONU pour coordonner les secours d’urgence et garantir l’accès à la fourniture rapide de l’aide d’urgence, notamment par le biais de négociations avec toutes les parties concernées.  Il a d’autre part attiré l’attention sur le sort des enfants, qui restent touchés de manière disproportionnée par les conflits armés, s’inquiétant en particulier de l’augmentation alarmante des violences sexuelles contre les enfants liées aux conflits, de la multiplication des attaques contre les écoles et des impacts négatifs des conflits sur les femmes et les filles.  Dans ce contexte, l’UE reste déterminée à fournir une aide humanitaire fondée sur des principes à ceux qui en ont le plus besoin et à faire en sorte que la voix de toutes les populations touchées soit entendue, a-t-il conclu, jugeant que ce n’est qu’ainsi que l’aide pourra être efficiente et efficace

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a condamné le recours aveugle aux armes explosives, qui ont un impact sur les infrastructures civiles, contaminent les terres agricoles, détruisent les récoltes et affectent gravement la distribution des denrées alimentaires.  À cet égard, la résolution 2573 (2021) reconnaît que l’interconnectivité peut être impactée par les dommages causés aux infrastructures et, par conséquent, affecter la fourniture de services de base, a noté le délégué.  D’où l’appel répété à respecter les obligations du droit international humanitaire en matière de protection de la population civile, un appel qui reste valable et doit être renforcé par un engagement politique renouvelé, a-t-il dit. Aussi le Mexique se félicite-t-il de l’adoption de la déclaration politique portant sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, aux négociations de laquelle il a activement participé.

Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a relevé que l’insécurité alimentaire restait un facteur majeur dans de nombreuses crises à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, prenant en exemple le Soudan où 15 millions de personnes souffraient déjà de la faim avant le déclenchement du conflit.  Elle a condamné l’assassinat de membres du Programme alimentaire mondial (PAM) ainsi que les attaques illégales contre les civils et les infrastructures civiles, notamment le pillage et la destruction de bureaux, de véhicules et d’entrepôts où est stockée l’aide humanitaire.  La déléguée a joint la voix de son pays aux nombreux appels à un cessez-le-feu durable et au respect du droit international humanitaire au Soudan.  Évoquant le Yémen, elle s’est inquiétée de niveaux de famine sans précédent et a exhorté les parties à saisir l’opportunité de paix qui s’est présentée ces derniers mois.  À la suite de l’agression contre l’Ukraine, a-t-elle poursuivi, 6 millions de personnes luttent pour accéder à l’eau potable dans ce pays, et l’insécurité alimentaire a augmenté de façon alarmante dans le monde entier. Saluant la prolongation de l’Initiative de la mer Noire, elle y a vu une démonstration de la pertinence de la diplomatie, même dans les conflits les plus graves et malgré la paralysie du Conseil de sécurité.  La déléguée a remercié la Suisse d’avoir pris l’initiative d’un amendement au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) visant à inclure comme crime de guerre le fait d’affamer intentionnellement des civils dans des conflits armés non internationaux, et a encouragé tous les États à ratifier cet amendement.  Elle a également encouragé le Conseil à garantir une perspective crédible de reddition de comptes pour les violations du droit international humanitaire résultant d’opérations cybernétiques, renvoyant au rapport sur l’application du Statut de Rome à la cyberguerre que son pays à contribué à élaborer. 

Au nom du Groupe des Amis de l’action sur les conflits et la faim, M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a proposé que le Conseil prenne des mesures décisives sur le sujet à l’ordre du jour, qui soient éclairées par le Livre blanc du Bureau de la coordination des affaires humanitaires et par les rapports du PAM et de la FAO.  Il a aussi appelé à poursuivre l’Initiative de la mer Noire pour atténuer les impacts négatifs de l’agression non provoquée de l’Ukraine par la Russie sur l’approvisionnement en céréales des marchés du monde.  De plus, il a demandé que des mesures soient prises pour garantir la reddition de comptes pour les attaques contre des cibles civiles, citant en exemple les cas en Haïti, au Burkina Faso et au Soudan. 

En sa capacité nationale, le représentant de l’Irlande a rappelé l’obligation des parties de protéger les civils des armes et explosifs dans les zones peuplées.  Il faut aussi protéger les infrastructures civiles dont la destruction peut entraîner de graves conséquences sur la vie des générations futures, ainsi que sur leur perspective de paix et de reconstruction.  Il a rappelé la Déclaration politique sur les conséquences humanitaires de l’utilisation des armes explosives dans des zones peuplées, adoptée en novembre 2022 à l’initiative de sa délégation, en réponse à l’appel du Secrétaire général.  Rappelant en outre les dévastations des conflits au Soudan, en Haïti, en Somalie, en Éthiopie, au Soudan du Sud, au Yémen et en Syrie, il a demandé de briser le cycle pervers de l’insécurité alimentaire provoqué par les conflits. Selon lui, la résolution 2417 (2018) donne les outils à cet égard.  « Ce dont nous avons besoin maintenant, c’est la volonté politique collective de les utiliser. »  Il faut veiller à ce que les erreurs du passé ne se poursuivent plus et ne hantent pas notre avenir, a prié le représentant. 

M. JOCHEN HANS-JOACHIM ALMOSLECHNER (Autriche) a rappelé que c’est sous la présidence autrichienne du Conseil de sécurité en novembre 2009 que la résolution 1894 (2009) avait été adoptée.  Le délégué a dénoncé l’utilisation d’explosifs dans des zones densément peuplées.  Il a appelé tous les États Membres à protéger les civils et les services essentiels en temps de conflit.  Se félicitant que les mécanismes d’alerte précoce soient de plus en plus utilisés, il a appelé le Secrétaire général de l’ONU à s’en servir davantage.  Pour éviter que l’insécurité alimentaire n’augmente du fait de la guerre en Ukraine, le délégué a salué l’Initiative céréalière de la mer Noire qui a été prolongée le mois dernier.  Si le Conseil de sécurité n’est pas le forum idoine selon lui pour discuter de la question des changements climatiques, il a toutefois reconnu qu’il doit en débattre au nom de la protection des civils. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie), au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, a fait état d’une érosion généralisée du respect de la vie des civils et un mépris épouvantable dans certaines régions pour les normes et les lois que les États ont pourtant établi pour éviter les effets des conflits armés et protéger leurs populations contre les atrocités criminelles. Il a dénoncé la militarisation de l’accès à l’eau potable et à la nourriture dans de nombreuses situations de conflit.  De plus, il y a de plus en plus de preuves que des États et autres parties aux conflits entravent l’accès humanitaire, y compris en bloquant le passage ou en ciblant les travailleurs humanitaires et médicaux, a dénoncé le représentant qui appelé à faciliter l’accès rapide et sans entrave de l’aide humanitaire aux populations dans le besoin. 

Le représentant a ensuite appelé la communauté internationale à exhorter les États où les civils sont confrontés à la faim induite par les conflits à utiliser leurs ressources pour répondre aux besoins de la population.  De même, la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour anticiper et prévenir l’augmentation des besoins et réduire les fragilités.  Il s’est inquiété de la pénurie des ressources et des menaces pesant sur les opérations humanitaires, avant d’inviter les États à répondre de toute urgence aux appels humanitaires de l’ONU et d’augmenter de manière prévisible et souple leur financement.  De plus, les droits des femmes et des filles doivent être respectés et protégés, y compris dans la direction et la fourniture de l’aide humanitaire. 

M. AHMED MOHAMED EZZAT AHMED ELSHANDAWILY (Égypte) a souligné l’existence d’un lien étroit entre insécurité alimentaire et conflits armés, en particulier dans les pays déjà confrontés à divers défis, ce qui confirme la nécessité d’efforts internationaux concertés pour atteindre rapidement le deuxième objectif du développement durable lié à l’élimination de la faim.  Par conséquent, il a souligné l’importance de s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire dans le cadre d’une perspective globale qui prévoit un soutien accru aux pays en développement, en particulier ceux qui importent des produits alimentaires.  Le représentant a également noté les dangers des pénuries d’eau dans plusieurs régions, en particulier l’Afrique du Nord, et son impact direct sur les activités agricoles et la réalisation de la sécurité alimentaire.  Cela exige de promouvoir une coopération transfrontalière efficace dans le domaine de l’eau, a-t-il souligné.  Enfin, la multiplication des conflits nécessite pour le délégué de renforcer les investissements dans les institutions nationales des pays touchés afin d’y renforcer le respect du droit international. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a estimé que la clef pour assurer la paix et la stabilité dans sa région réside dans un règlement juste et pacifique de la question du Jammu-et-Cachemire, conformément aux dispositions des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a dénoncé les privations et la faim imposées au peuple cachemiri par une armée d’occupation de 900 000 hommes, ainsi que les violations massives de leurs droits humains et la confiscation progressive de leurs biens et moyens de subsistance.  Le délégué a ensuite relevé que les conséquences d’un conflit de 40 ans sont importantes en Afghanistan où près de 95% de la population vit dans l’extrême pauvreté.  En cherchant à garantir les droits des femmes et mettre fin au terrorisme en Afghanistan, n’oublions pas que nous devons aussi éviter de condamner le peuple afghan à la pauvreté, a-t-il lancé.  Il a plaidé pour le financement des besoins humanitaires de ce pays et pour la relancer rapide de son économique, grâce par exemple au déblocage de ses avoirs à l’étranger.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a appelé à une mise en œuvre plus systématique des cadres et instruments de protection des civils.  Le Conseil doit évaluer ces mécanismes, combler les lacunes et proposer des solutions pratiques qui répondent aux différentes situations de conflit, a estimé le représentant qui a aussi évoqué la promotion du dialogue et le partage des meilleures pratiques.  Il a insisté sur l’importance d’assurer la neutralité de l’aide humanitaire et son accès sans entraves aux zones de conflit.  Il faut aussi prévoir un écosystème solide et cohérent d’approvisionnement et de distribution de la nourriture et des éléments essentiels à la survie, a-t-il ajouté.  Le délégué a plaidé pour la pleine participation des femmes à la lutte contre l’insécurité alimentaire et la protection des services essentiels.  Il a également exhorté le système des Nations Unies, la Croix-Rouge, les organisations régionales, les ONG et les États Membres à renforcer leurs partenariats et accroître la coordination pour lutter contre l’insécurité alimentaire et protéger les services essentiels. 

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a rappelé que les attaques visant des civils et des biens indispensables à la survie des civils constituent des crimes de guerre.  Il a appelé à tenir les auteurs de tels actes pour responsables et a invité la communauté internationale à adopter une position ferme sur cette question.  À cette aune, le représentant a souhaité que les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021) du Conseil de sécurité soient pleinement mises en œuvre afin de limiter le risque de famine et d’insécurité alimentaire induites par les conflits, d’assurer une meilleure protection des infrastructures civiles et de permettre la mise en place de pauses humanitaires durables.  Il a souligné l’importance d’investir dans des infrastructures résilientes pour garantir le bien-être et la sécurité de la population civile confrontée à des conflits armés.  À cet égard, il a jugé vital de remettre le Programme 2030 sur les rails, notamment en ce qui concerne la sécurité alimentaire et l’accès aux services essentiels.  Le représentant a d’autre part rappelé que la responsabilité de faire respecter la Charte des Nations Unies et le droit international incombe aux membres permanents du Conseil de sécurité, avant de dénoncer le « mépris absolu du droit international humanitaire » dont fait preuve l’un d’eux.  L’agression de la Russie contre l’Ukraine est selon lui un exemple de « militarisation de la nourriture et de la production alimentaire ».  Tout en saluant la prolongation de l’Initiative de la mer Noire, il a répété que seuls la fin de l’agression russe et le déblocage de tous les ports ukrainiens permettront de garantir l’exportation de céréales d’Ukraine et de rétablir l’équilibre du marché alimentaire mondial. Enfin, il a indiqué que la Pologne continuera de soutenir l’Ukraine et de mener des projets humanitaires au Moyen-Orient, notamment dans les pays touchés par la crise des réfugiés induite par le conflit en Syrie. 

M. NACIM GAOUAOUI (Algérie) s’est alarmé de la montée de la famine et de l’insécurité alimentaire à travers le monde.  Il a appelé au renforcement de la coopération et de la solidarité internationales pour faire face à ces phénomènes et en cibler les causes. Entraver le travail des humanitaires ou prendre ces derniers pour cible est inacceptable, a-t-il déclaré.  Le délégué a appelé le Conseil de sécurité à s’assurer que ses résolutions pertinentes sont mises en œuvre, notamment les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021).  De même, la responsabilité étant la clef du respect du droit international humanitaire, il a appelé à la pleine mise en œuvre des cadres juridiques existants, afin que quiconque commet des violations soit traduit en justice et que la politique de tolérance zéro prévale.  Dans le cadre de l’assistance humanitaire, il a souligné l’importance de la coordination avec le pays hôte et avec les organisations régionales et sous-régionales. 

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d´Iran) a noté que selon le rapport du Secrétaire général (S/2023/345), les conflits armés ont causé, en 2022, près de 17 000 morts civiles dans 12 conflits, soit une augmentation de 53% par rapport à l’année précédente.  Évoquant la situation au Moyen-Orient, elle a condamné les pratiques continues d’oppression, d’expansion et d’apartheid du régime israélien en territoire palestinien occupé, violant systématiquement les droits humains des Palestiniens et provoquant le plus grand nombre de morts civiles en Cisjordanie depuis 2005.  Elle a aussi dénoncé la situation à Gaza, « plus grande prison du monde » dans laquelle la destruction d’infrastructures vitales aggrave une situation humanitaire déjà désastreuse.  Condamnant la persistance des sanctions unilatérales imposées par les États-Unis et l’Union européenne contre la République arabe syrienne, elle a également déploré le pillage de ses ressources naturelles par les « forces étrangères illégales » et les attaques israéliennes contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, qui atteignent des infrastructures civiles.  Elle a appelé à assurer une aide non politisée au peuple afghan et à lui restituer ses avoirs gelés intégralement et sans condition, tout en appelant les autorités de facto à remplir leurs engagements, notamment concernent les droits des femmes et des filles.  La représentante a ensuite dénoncé les conséquences des mesures coercitives unilatérales sur l’insécurité alimentaire, les systèmes de santé et les organisations humanitaires.

Mme CEREN HANDE ÖZGÜR (Türkiye) a appelé la communauté internationale à prendre des mesures urgentes pour briser le cercle vicieux entre les conflits armés et l’insécurité alimentaire.  Elle a rappelé que l’Initiative de la mer Noire avait permis l’exportation de plus de 30 millions de tonnes métriques de céréales en provenance d’Ukraine, préservant la sécurité alimentaire de millions de personnes en réduisant les prix des denrées alimentaires au niveau mondial.  Évoquant les tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé la Türkiye et la Syrie en février dernier, elle s’est inquiétée de leur impact sur la situation humanitaire en Syrie, en particulier dans le nord-ouest du pays. Affirmant que l’acheminement ininterrompu de l’aide humanitaire transfrontalière vers la Syrie était plus critique que jamais, elle a assuré vouloir continuer à travailler avec toutes les parties afin de prolonger le dispositif avec l’aval du Conseil de sécurité en juillet prochain.  La représentante a également souligné la nécessité impérative pour les Nations Unies de protéger les civils palestiniens, s’inquiétant du risque de suspension des opérations du PAM en Palestine faute de financement.

Mme ANTJE LEENDERTSE (Allemagne) a rappelé qu’en 2018, l’adoption la résolution 2417 sur les conflits et la faim avait suscité de grands espoirs. Cinq ans plus tard, il y a peu de raisons de se réjouir, a-t-elle dit en citant les chiffres de l’insécurité alimentaire aiguë qui a atteint un niveau sans précédent.  Les effets de la guerre d’agression dévastatrice de la Russie contre l’Ukraine sur les prix des denrées alimentaires et des engrais, les crises du climat et de la biodiversité et d’autres défis en font un cocktail dangereux, a prévenu la représentante disant que pour protéger les civils et garantir leur accès aux biens et services essentiels, il faut premièrement des instruments solides pour garantir la reddition de comptes des auteurs des violations du DIH.  Cela signifie des mécanismes internationaux de justice et une action politique à travers le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale.  L’appel à l’action pour renforcer le respect du DIH et de l’action humanitaire fondée sur le droit et les principes, initiée par l’Allemagne et la France en 2019, est devenu un document de référence solide pour nos efforts visant à promouvoir l’adhésion universelle au DIH, a fait valoir la déléguée en signalant qu’à ce jour, l’appel à l’action a été signé par 52 États. 

La déléguée a par ailleurs souhaité que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, les missions de maintien de la paix et les ONG surveillent en permanence et signalent les abus.  Elle a exhorté les États Membres à se joindre à la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées et son processus de suivi.  La représentante a enfin appelé à accroître la résilience et la durabilité des systèmes agricoles et alimentaires, prônant une réforme structurelle des systèmes alimentaires mondiaux ainsi que l’architecture financière qui les soutient. Au sein du G7, nous soutenons le développement de mesures qui peuvent rendre les systèmes agricoles et alimentaires plus résilients et durables, a-t-elle fait valoir avant d’indiquer que son pays encourage activement les approches soucieuses de l’égalité des sexes.

M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a fait valoir que le DIH complète les normes des droits de l’homme sur le droit à une alimentation adéquate en interdisant certains comportements afin de prévenir le manque de nourriture ou le refus d’accès à la nourriture dans les situations de conflit armé. Malheureusement, a-t-il dit, « nous avons été témoins d’un mépris total du DIH par la Russie lors de sa guerre d’agression contre l’Ukraine ».  Cette guerre non provoquée et injustifiée tue de nombreux civils et fait en outre grimper les prix des denrées alimentaires et des engrais dans le monde entier, et ce alors que près de 30% de la population mondiale n’ont pas accès à une alimentation adéquate, a-t-il dénoncé.  Tout en se félicitant de la prolongation de deux mois de l’Initiative de la mer Noire, le représentant a dit craindre que la Russie ne l’utilise, « comme à son habitude », pour faire pression sur la communauté internationale. 

Le délégué a ensuite indiqué que, à la suite de l’agression militaire à grande échelle de la Russie en août 2008, son gouvernement reste empêché d’étendre sa protection à la population résidant dans les régions occupées d’Abkhazie et de Tskhinvali, lesquelles sont privées de garanties minimales pour leur sécurité et continuent de souffrir de violations des droits humains.  Faisant état d’assassinats, d’enlèvements, de détentions arbitraires, de cas de torture, d’atteintes au droit de propriété et au droit à la santé, de restrictions dans l’éducation des langues et de discrimination ethnique, il a jugé que cette occupation illégale sape les principes fondamentaux du droit international et constitue une grave menace pour la paix et la sécurité dans la région et au-delà. 

M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a estimé que l’agression russe contre l’Ukraine confirme le lien entre conflit, sécurité alimentaire et destruction des infrastructures civiles essentielles.  Il s’est dit horrifié par les informations du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur l’exécution possible de plus de 500 000 civils par les troupes maliennes et les troupes étrangères en mars 2022.  De nombreuses informations, a-t-il dit, pointent le doigt sur l’implication du groupe russe Wagner dans les crimes commis au Mali, en République centrafricaine et dans d’autres pays.  Des crimes, a souligné le représentant, qui rappellent le comportement inhumain de ces mercenaires en Syrie et en Ukraine.  Ces crimes doivent faire l’objet d’enquêtes et leurs responsables doivent répondre de leurs actes. 

Dès le premier jour de la guerre en Ukraine, nous avons, a affirmé le représentant, alloué rapidement des fonds pour le traitement physique et émotionnel des victimes, en particulier les filles et les femmes ayant subi la violence sexuelle aux mains des soldats russes.  Le représentant, qui a salué le travail des agences humanitaires en Ukraine, s’est aussi inquiété du sort des travailleuses humanitaires en Afghanistan et au Yémen.  Il a dûment condamné les attaques contre le personnel et les biens humanitaires, exigeant ici aussi que les responsables répondent de leurs actes.

M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) a appelé toutes les parties aux conflits armés à respecter les résolutions du Conseil de sécurité sur la protection des biens indispensables à la survie de la population civile.  Elles assument en effet la responsabilité principale de la sauvegarde des civils et des biens de caractère civil placés sous leur autorité, a-t-il insisté.  L’ONU, dans son ensemble, devrait encourager et faciliter une coordination plus étroite entre les États Membres, les organisations internationales ainsi que les partenaires humanitaires et de développement dans la résolution des conflits et la consolidation de la paix après les conflits afin de soutenir le relèvement et de renforcer la résilience des populations locales, a argué le délégué. Il a aussi estimé que la meilleure façon de protéger les civils est encore de prévenir les conflits et de s’attaquer à leurs causes profondes. 

M. AMARA S. SOWA (Sierra Leone) s’est inquiété d’une crise alimentaire mondiale sans précédent frappant notamment les pays touchés par les conflits.  Soulignant le cercle vicieux formé par l’insécurité alimentaire et la violence armée, il a constaté que l’Afrique était particulièrement affectée.  Le représentant a jugé urgent de planifier des changements structurels des systèmes alimentaires mondiaux, en les ancrant notamment dans des pratiques agricoles durables.  Il a plaidé en faveur de l’augmentation de la production alimentaire, de la réduction de la consommation d’énergie et d’un accès facilité à l’accès aux financements pour les pays en développement. 

M. HARI PRABOWO (Indonésie) a déclaré que la famine ne doit jamais être utilisée comme arme de guerre, appelant le Conseil à promouvoir et veiller à la mise en œuvre par les parties aux conflits des normes visant à assurer la sécurité alimentaire.  Ces normes pourraient prévenir des situations dans de nombreuses zones de conflit où les secteurs agricoles ont été intentionnellement endommagés afin de pousser les populations à quitter leurs terres et anéantir tout espoir de paix, a jugé le représentant. 

Pour le représentant, la lutte contre l’insécurité alimentaire dans les situations de conflit exige une approche globale reposant sur le respect des droits humains, l’accès à la nourriture, la résolution pacifique des conflits, et l’investissement dans l’agriculture et des systèmes alimentaires durables dans le cadre des efforts de consolidation de la paix.  De même, il importe de prévenir les répercussions en cascade des conflits sur la sécurité alimentaire mondiale, a préconisé le représentant qui salué l’Initiative de la mer Noire et la mise en œuvre du mémorandum d’accord sur la facilitation du commerce. 

Mme MONA JUUL (Norvège), au nom de l’Alliance mondiale pour les personnes disparues, s’est félicitée que le rapport du Secrétaire général sur la protection des civils recommande la mise en place de cadres institutionnels, juridiques et politiques qui garantissent la recherche et l’identification des personnes disparues.  Toutefois, a-t-elle relevé, le nombre toujours croissant des personnes disparues dépasse les efforts déployés pour traiter cette question.  Certaines familles attendent des nouvelles d’un ou de proches disparus depuis des décennies, a expliqué la déléguée, avant d’appeler à davantage de volonté politique et à un accès accru à l’information, y compris aux archives. 

À cet égard, elle a rappelé que la résolution 2474 (2019) du Conseil de sécurité esquisse des mesures pour prévenir le problème des personnes disparues et réaffirme les obligations des États en vertu du droit international humanitaire (DIH), des Conventions de Genève de 1949 et du Protocole additionnel de 1977.  Malgré ces efforts, le destin des personnes disparues et les besoins des familles ne sont pas pris en compte, ce qui a des conséquences à long terme pour la quête d’une paix durable, a-t-elle prévenu.  Appelant la communauté internationale à progresser sur ce point, la représentante a aussi souhaité qu’un lien soit établi entre les personnes disparues et les processus de paix.  Traiter de ce problème est essentiel pour le DIH, a-t-elle souligné.

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a plaidé pour que des mesures soient prises pour limiter l’impact des conflits sur les moyens de subsistance, la production agricole et les infrastructures connexes.  Il a souligné le caractère interconnecté de l’économie qui fait qu’un conflit dans une région a des conséquences importantes sur la sécurité alimentaire dans d’autres.  Le représentant a estimé qu’il faut lier règlement pacifique des conflits et promotion du développement durable, y compris la sécurité alimentaire.  Il a aussi milité pour un programme urgent visant l’accélération de la réalisation des objectifs de développement durable, avec un accent particulier sur la sécurité alimentaire.  Voilà des éléments qui devraient être au cœur du prochain Sommet sur ces objectifs prévu en septembre 2023.

Mme GABRIELA GONZÁLEZ (Uruguay) a jugé impératif de promouvoir une application systématique des cadres et instruments juridiques existants pour faire face à l’insécurité alimentaire provoquée par les conflits.  À ce titre, la résolution 2417 du Conseil de sécurité offre aux agences, fonds et programmes de l’ONU ainsi qu’aux États un nouveau cadre à utiliser pour déterminer efficacement si les civils bénéficient de l’assistance dont ils ont besoin pendant les conflits.  D’autre part, a poursuivi la représentante, nous devons aborder la question de la sécurité alimentaire dans une perspective de genre non seulement en raison de l’impact disproportionné des conflits sur les femmes et les filles, mais aussi parce que l’égalité des sexes et l’autonomisation de toutes les femmes et les filles peuvent accroître la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et rendre les systèmes alimentaires plus inclusifs, résilients et durables, en temps de paix comme en 

M. CORNEL FERUȚA (Roumanie) a appelé à un accès humanitaire sans entrave dans les zones de conflit.  Il s’est félicité de la prolongation de l’Initiative de la mer Noire, notant qu’une certaine prévisibilité est nécessaire pour garantir le flux des denrées alimentaires dans le monde.  Rappelant qu’en 2022, son pays avait facilité le transit de plus de 16 millions de tonnes de céréales en provenance de l’Ukraine, soit l’équivalent de la moitié du transit via l’Initiative de la mer Noire, il a voulu que les routes restent ouvertes pour éviter des crises alimentaires.  Il s’est inquiété des dernières informations du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) sur la montée en flèche des niveaux de malnutrition aiguë chez 2,3 millions d’enfants en Afghanistan.  Il a salué la recommandation du Secrétaire général d’enquêter sur les allégations de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocide, d’assurer réparation aux victimes, de donner des garanties de non-répétition et de renforcer les capacités des États en la matière.

M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a déclaré que pour permettre aux acteurs humanitaires d’opérer dans des contextes de plus en plus difficiles, « il faut innover ».  C’est pourquoi, a-t-il indiqué, le Luxembourg a lancé cette année, en partenariat avec le Programme alimentaire mondial, un accélérateur de l’innovation humanitaire qui soutient le développement de nouvelles solutions en matière d’accès aux services.  Le représentant a noté que la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a exacerbé l’insécurité alimentaire dans le monde.  Dans ce contexte, il a salué les efforts visant à assurer la continuité de l’Initiative de la mer Noire.  Il a également salué les enquêtes menées par les autorités judiciaires ukrainiennes et la Cour pénale internationale sur les attaques massives dirigées par la Russie contre des infrastructures civiles en Ukraine.

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a jugé consternant que les dispositions du droit international humanitaire continuent d’être bafouées, comme l’illustre le dernier rapport du Secrétaire général sur la protection de civils.  La résolution 2417 (2018) du Conseil de sécurité est pourtant claire, a souligné le représentant, rappelant que ce texte appelle à la protection des populations et des infrastructures civiles ainsi qu’au respect des mesures garantissant un accès humanitaire sans entrave.  Il a souhaité à ce propos que ceux qui utilisent la famine comme méthode de guerre répondent de leurs actes.  Le délégué a d’autre part attiré l’attention sur la protection de l’environnement naturel en temps de conflit et sur toute pollution qui pourrait être lourde de conséquence à long terme. 

Selon lui, la protection des installations hydriques devrait être prise en compte dans le règlement des conflits et dans les efforts de consolidation de la paix.  Il a également mis en garde contre les effets délétères de la dissémination des mines antipersonnel, rappelant que ces armes menacent non seulement les populations mais entravent aussi la production agricole.  Constatant comme d’autres que les conflits armés sont une des causes majeures de l’insécurité alimentaire, il a estimé qu’il serait utile de discuter des liens entre paix, sécurité et effets des changements climatiques ici même au Conseil de sécurité.  Après avoir salué la prolongation de l’Initiative de la mer Noire, il a indiqué que son pays a augmenté son aide financière au renforcement de la résilience de pays confrontés à l’insécurité alimentaire. 

M. PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) a déclaré que, pour mettre en œuvre la protection des civils, il est essentiel de promouvoir l’état de droit et le principe de responsabilité, et de respecter pleinement les droits humains, le droit international et le droit international humanitaire.  Après avoir salué la création par l’Assemblée générale d’un registre international des dommages, le représentant a estimé que davantage de pays doivent reconnaître la compétence de la Cour pénale internationale (CPI). Il est par ailleurs essentiel que le Conseil de sécurité soit attentif aux risques émergents dans les conflits, qui affectent à la fois la sécurité alimentaire et la protection des services essentiels, a-t-il dit.  Les changements climatiques exacerbent ainsi le risque de violence causée par l’insécurité alimentaire, ainsi que les crises économiques et la migration, a indiqué le représentant.  De même, les conflits armés provoquent des déplacements forcés de population et de réfugiés sans précédent, qui peuvent perturber la production alimentaire.  Un autre élément à prendre en considération selon lui est l’utilisation, par des groupes armés et criminels, du contrôle de la production et de la distribution de vivres, dans le cadre de leurs tactiques de guerre.  Le Conseil et les institutions spécialisées doivent œuvrer ensemble pour que la nourriture parvienne aux nécessiteux, a-t-il recommandé.

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) a déclaré que le plein respect du droit international humanitaire reste essentiel et toutes les parties à un conflit armé doivent se conformer aux principes humanitaires.  Il convient également de prêter attention aux opérations de déminage, afin que les terres arables soient sûres pour les activités agricoles et veiller à ce que les infrastructures civiles ne soient pas prises pour cible.  Si les technologies numériques et l’intelligence artificielle peuvent jouer un rôle constructif, il faut toutefois rester vigilants afin que cet outil ne soit pas utilisé au détriment des civils, par la diffusion de fausses informations ou même par le lancement de cyberattaques qui peuvent menacer des infrastructures civiles vitales.  En outre, a recommandé le délégué, nous devons agir de manière préventive, en renforçant les liens entre alerte et action précoce dans les crises alimentaires provoquées par des conflits.  Dans cette optique, chaque gouvernement devrait mener des politiques préventives et adopter des mesures d’urgence pour assurer la sécurité alimentaire de sa population, a estimé le représentant.  Pour lui, si un gouvernement n’a pas la capacité de prévenir ou d’atténuer une crise alimentaire, il doit faciliter les opérations de secours, conformément au droit humanitaire. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a relevé qu’en 2022, plus de 250 millions de personnes ont souffert de malnutrition aigüe dans 58 pays et territoires, dont un grand nombre en situation de conflit armé.  Il a rappelé que ces conflits et l’insécurité alimentaire s’entretenaient mutuellement.  Il a également appelé à la reddition de comptes en cas de violation du droit international humanitaire, rappelant le rôle fondamental de la Cour pénale internationale dans la lutte contre l’impunité.  Il a appelé à établir une « cartographie des victimes » de ces violations avec le concours des organisations internationales en vue de prévenir la commission de nouveaux crimes massifs contre les civils. Regrettant le faible niveau d’application des normes juridiques du droit international humanitaire dans la pratique, il a appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à se doter d’outils plus robustes en vue de les mettre en œuvre. 

Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a constaté que la situation générale reste très préoccupante, vu l’augmentation de 53% des victimes civiles depuis 2021, dont la moitié résulte de la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine. Les États portent la responsabilité de cette situation et doivent pas conséquence veiller à la protection et au respecter des droits à l’alimentation, à l’eau potable et à l’assainissement.  Elle a également appelé à redoubler d’efforts pour appliquer les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021). 

La représentante a en outre préconisé d’assurer la coordination entre le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l’homme et ses procédures spéciales, ainsi que les synergies avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, le Comité international de la Croix-Rouge et la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et des Croissants Rouges.  De même, il importe d’aligner les efforts dans les domaines de la paix, du développement et de l’aide humanitaire afin de s’attaquer aux causes profondes, tout en gardant à l’esprit les impacts des changements climatiques.  La représentante a par ailleurs appelé à une meilleure coordination des secours d’urgence et de la protection des travailleurs humanitaires.  Les régimes de sanctions doivent prévoir des exemptions humanitaires, conformément à la résolution 2664 (2022), a-t-elle conseillé. 

Mme MURIELLE MARCHAND (Belgique) a constaté que deux milliards de personnes, soit un quart de l’humanité, vivent désormais dans une zone touchée par la violence et que le nombre de personnes déplacées a atteint de nouveaux sommets en raison des conflits armés.  Elle a observé que la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine a encore exacerbé ces tendances, provoquant des déplacements massifs et une insécurité alimentaire accrue pour des millions de personnes à travers le monde.  Ces défis appellent à des actions fortes de la part de la communauté internationale, a-t-elle plaidé.  À cette fin, le Conseil de sécurité doit, selon elle, utiliser toute la gamme des outils à sa disposition pour répondre aux crises humanitaires liées aux conflits, notamment les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021) qui réaffirment que l’utilisation de la famine des civils, y compris des enfants, comme une méthode de guerre est interdite. 

La représentante a d’autre part estimé que lorsque les juridictions nationales ne prennent pas de mesures en cas de violations du DIH liées à l’utilisation de la faim comme arme de guerre, le Conseil dispose des outils nécessaires pour déclencher une série de mécanismes internationaux d’enquête et de responsabilisation, tels que des missions d’établissement des faits.  Elle s’est félicitée à cet égard de l’amendement au Statut de Rome visant à inclure parmi les crimes de guerre le fait d’affamer intentionnellement des civils, y compris dans le cadre de conflits armés non internationaux.  Pour la déléguée, la Conseil devrait également continuer à sanctionner les personnes ou entités qui entravent l’accès à l’aide humanitaire.  Enfin, elle a souhaité que le Conseil fasse un meilleur usage des fonctions d’alerte précoce et de prévention de la résolution 2417 (2018) et demande des informations régulières sur les contextes où les conflits sont l’un des principaux moteurs de la faim. 

Mme SOPHEA EAT (Cambodge) a affirmé que les parties à tout conflit doivent être invitées à assumer une responsabilité égale en facilitant l’accès en toute sécurité et en toute impartialité aux organisations humanitaires. De plus, les États Membres doivent accorder la priorité à la résolution des conflits, en exhortant les parties concernées à trouver un terrain d’entente sur les causes profondes de leurs différends, afin qu’ils puissent être efficacement résolus.  « C’est plus facile à dire qu’à faire », a-t-elle cependant reconnu.  La représentante a également plaidé pour que les infrastructures civiles et les services essentiels soient préservés, y compris la production alimentaire et les chaînes d’approvisionnement, conformément au droit international humanitaire.  Les lois établies ne manquent pas et encore moins les normes, a-t-elle noté, arguant que c’est plutôt l’engagement de les honorer qui fait défaut. 

Après avoir souligné la nécessité de briser l’engrenage entre les conflits et la faim, Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a estimé que la résolution 2417 (2018) permet de prendre les devants dans les situations d’insécurité alimentaire aiguë, mais qu’il faut en faire davantage pour renforcer son application.  Aussi a-t-elle suggéré de demander au Secrétaire général de faire rapport au Conseil de sécurité lorsqu’un conflit peut mener à une grave crise alimentaire.  Davantage de rapports devraient être présentés, pour mener à des actions plus rapides de la part du Conseil, a-t-elle notamment estimé.  Tout le potentiel de la résolution doit donc être réalisé et il nous faut agir de concert afin de briser le cercle pervers entre les conflits et la faim, a insisté la représentante en conclusion. 

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) s’est dit gravement préoccupé par la situation des civils, notamment en Afghanistan, en Somalie, au Soudan, en Syrie et en Ukraine.  Il a appelé à ce que les responsables des attaques contre des civils rendent pleinement compte de leurs actes, appelant le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale à soutenir les procédures dans les cas déjà soumis à la Cour pénale internationale (CPI).  Il a affirmé que la Fédération de Russie avait tué, torturé, violé et délibérément bombardé des civils et des infrastructures civiles, et procédé à des déplacements forcés, y compris d’enfants, conduisant à l’inscription de Vladimir Poutine sur la liste des personnes les plus recherchées par la CPI. Il a appelé à ce que la Russie figure dans les annexes du prochain rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés, en tant que partie commettant de graves violations à l’encontre des enfants. 

Se félicitant de la prorogation de l’Initiative de la mer Noire, il a appelé la Russie à mettre fin à sa guerre, condition nécessaire, selon lui, pour que le commerce agricole mondial reprenne son cours normal et que la sécurité alimentaire mondiale soit réellement améliorée.  Il a accusé la Russie de bloquer l’accès de l’aide humanitaire aux territoires temporairement occupés en Ukraine.  Il l’a aussi dénoncée comme responsable du plus grand nombre de décès parmi les personnels médicaux, et d’ignorer délibérément les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021) du Conseil de sécurité.  Relevant par ailleurs que sur les 25 journalistes tués au cours d’un conflit, 10 l’ont été en Ukraine, il a regretté que la résolution du Conseil de sécurité sur la protection des journalistes n’ait toujours pas été mise en œuvre.  Il a rappelé que depuis février 2022, l’Estonie avait ouvert ses frontières à plus de 70 000 réfugiés ukrainiens, ce qui représente plus de 5% de sa population.  En outre, 35 permis de résidence sont octroyés chaque année à des professionnels des médias afin de protéger le journalisme libre et indépendant dans le monde entier. 

M. RYTIS PAULAUSKAS (Lituanie) a estimé que l’agression de la Russie contre l’Ukraine a provoqué la moitié du nombre des victimes des guerres dans le monde en 2022.  Le représentant a ajouté que plus de 5,7 millions d’enfants ukrainiens ne peuvent plus suivre une éducation normale et que 1,5 million d’autres souffrent de problèmes de santé mentale.  Il y a eu également des tentatives de grandes envergures de la Russie de transférer des enfants ukrainiens en Russie, a dénoncé le représentant.  Il a dit approuver le mandat d’arrêt de la CPI délivré contre M. Putin et Maria Alekseyevna Lvova-Belova pour crimes de guerre et transfert d’enfants d’une zone occupée d’Ukraine. 

Le délégué a exhorté à résister aux tentatives de la Russie d’instrumentaliser le système des Nations Unies et de rejeter ses fautes et crimes graves sur d’autres.  La résolution 2417 (2018) condamne le recours à la famine en tant que tactique de guerre et l’obstruction de l’aide humanitaire pour y faire face, a-t-il rappelé. Saluant le prolongement de l’Initiative de la mer Noire, le représentant a dit que la Russie doit arrêter de confondre alimentation et armes et doit respecter l’accord.  Il a par ailleurs exhorté les pays en développement à augmenter leurs capacités de production en engrais pour pouvoir jouer leur rôle sur les marchés mondiaux.  Les auteurs de crimes de guerre et de génocides doivent verser des réparations aux victimes, a enfin demandé le délégué qui a souhaité que la CPI exerce sa compétence sur la question. 

M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a estimé que, bien que la responsabilité première de la protection des civils et des biens à caractère civil incombe aux parties étatiques et non étatiques au conflit, l’ONU et les agences humanitaires compétentes, en particulier le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), jouent un rôle important dans la mise en œuvre d’une telle protection. S’agissant de l’ONU, il est essentiel que la protection des civils soit au centre de ses mécanismes de règlement des conflits, y compris les processus de paix dans lesquelles elle est impliquée, a souligné le représentant, pour qui il importe également que les organes onusiens, notamment le Conseil de sécurité, garantissent que les évacuations du personnel de l’Organisation en réponse à des hostilités ne s’effectuent pas d’une manière qui compromette la protection et le bien-être des civils. 

Sur le plan juridique, a-t-il poursuivi, il est de notre intérêt commun, en tant que communauté internationale, de faire respecter les règles du droit international humanitaire (DIH) relatives à la protection des civils.  Toutefois, a soutenu le délégué, il est aussi du devoir des parties au conflit, y compris des groupes armés, de respecter les règles du DIH qui s’appliquent à la protection des civils ainsi qu’à l’environnement.  Dans ce contexte, le représentant a condamné les politiques et actions illégales d’Israël contre la population civile, les infrastructures civiles essentielles et l’environnement dans le Territoire palestinien occupé. Le Conseil de sécurité a l’autorité et la responsabilité d’agir dans les situations où la protection des civils et des biens à caractère civil est compromise, a-t-il insisté, appelant à envisager cette protection d’une manière holistique, qui maximise l’efficacité des mécanismes actuels tout en tenant compte de leurs lacunes. 

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a marqué sa préoccupation face à l’impact négatif des conflits armés non seulement sur la sécurité alimentaire, mais aussi sur la nutrition affectant principalement les plus vulnérables. Il a rappelé que l’interdiction d’accès de l’aide humanitaire aux civils est une violation du droit international et du droit international humanitaire.  Il a encouragé les agences humanitaires à coopérer et à travailler en étroite collaboration avec les pays hôtes et à respecter la réglementation des pays d’accueil.  Dans ce contexte, il a salué les efforts continus des missions de maintien de la paix des Nations Unies qui ont pour mandat d’assurer la protection des civils. Il a tout de même rappelé que la responsabilité première d’assurer la protection des civils et de promouvoir les droits humains revient à l’État hôte. 

Mme KRASSIMIRA TZONEVA BESHKOVA (Bulgarie) a déclaré que les parties aux conflits doivent garantir un accès humanitaire rapide et sans entrave aux populations dans le besoin et faciliter le travail des personnels sur le terrain.  Il est tout aussi important que ce Conseil se montre à la hauteur des attentes placées en lui pour apporter un soutien plus large à l’action humanitaire, a souligné la représentante.  Pour elle, les efforts visant à garantir le respect du droit humanitaire international devraient aller de pair avec des mesures visant à renforcer la responsabilité pour toutes les violations des droits humains et à garantir une approche centrée sur les survivants et sensible à la dimension de genre.  Les mesures prises au niveau national devraient être complétées par des mécanismes internationaux, a poursuivi la déléguée, qui a salué la contribution de la Cour pénale internationale à cet égard au Darfour, au Soudan, en République centrafricaine et au Mali et, depuis mars, en Ukraine.  Elle a également soutenu la création d’un registre des dommages causés par l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. 

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a déclaré que la lutte contre la faim est aussi essentielle pour prévenir les conflits.  Pour ce faire, elle a mis l’accent sur la nécessaire élimination de la pauvreté sous toutes ses dimensions, appelant en outre à combattre les inégalités grâce au renforcement des capacités de production des minorités, notamment les femmes, les peuples autochtones ou les personnes d’ascendance africaine.  Elle a mis en avant l’accord de paix conclu par le Gouvernement colombien avec la Force alternative révolutionnaire du peuple (FARC), qui a grandement renforcé la sécurité alimentaire en Colombie. 

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a axé son intervention sur l’adoption des résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021) et sur leur nécessaire application.  Elle a aussi appelé à respecter strictement les dispositions du droit international humanitaire y compris l’interdiction d’affamer les civils ou de s’attaquer aux infrastructures fondamentales telles que l’approvisionnement en eau ou en énergie.  La politique étrangère du Qatar est basée sur le traitement pacifique des conflits et le renforcement du secteur de l’éducation.  Au Soudan, elle a appelé les parties à la plus grande retenue, afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, auquel le Qatar a grandement contribué. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a indiqué que 21 millions de Yéménites ont besoin d’aide humanitaire en raison de la guerre, de l’insécurité et de la détérioration des services de base.  Il a accusé les houthistes d’affamer les civils dans les zones qu’ils contrôlent, et d’accaparer une bonne partie de l’aide notamment en excluant les femmes de la distribution.  L’économie yéménite ne peut pas répondre aux besoins, a reconnu le délégué, mais le Gouvernement compte améliorer les moyens de subsistances et la production alimentaire.  Notant en outre que le Yémen est très sensible aux chocs internationaux, il a salué l’Initiative de la mer Noire.  Affirmant que les houthistes obstruent l’acheminement de l’aide, il a appelé à faire pression sur ce groupe pour qu’il accepte la trêve et participe aux efforts pour mettre un terme à la crise.  Il a également expliqué que l’aide humanitaire est importante pour la stabilité économique du Yémen. 

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a lancé un appel urgent pour que la lutte contre la crise alimentaire devienne une priorité de l’agenda international.  Elle a voulu que la coopération internationale ait une approche préventive et pas réactive.  Elle doit s’attaquer aux causes profondes de la faim, dans une perspective globale. Réitérant son soutien aux recommandations de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) visant à maintenir ouvert le commerce des denrées alimentaires et des produits agricoles, le représentant a estimé qu’il faut accorder la priorité à la production locale et au transfert des technologies. 

Mme ANA JIMENEZ DE LA HOZ (Espagne) a salué le renouvellement pour deux mois de l’Initiative de la mer Noire, félicitant le Secrétariat de l’ONU pour ses efforts de médiation.  Jugeant inacceptables les faits mentionnés dans le rapport du Secrétaire général, la représentante a appelé au respect de la résolution 2286 et plaidé pour la participation des femmes aux processus de prise de décisions, y compris en ce qui concerne la réponse humanitaire dans les conflits armés.  Elle a attiré l’attention sur la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et indiqué que son pays vient d’approuver sa première stratégie pour la diplomatie humanitaire couvrant la période 2023-2026.  Le document aborde tous les problèmes liés aux conflits, qu’il s’agisse de la faim, de la lutte contre l’impunité, de la question des réfugiés et des déplacés ou de la protection des personnes handicapées dans les conflits armés.  Elle a rappelé que son pays assumera la présidence du Conseil européen à partir du mois de juillet et promis que les questions humanitaires seront au cœur de l’agenda.

Mme CARLA MARIA CARLSON (République dominicaine) a rappelé qu’en 2020, sous la présidence de son pays, le Conseil de sécurité avait adopté une déclaration présidentielle donnant un nouvel élan à la question de l’action humanitaire en temps de conflit armé.  Le texte mettait l’accent sur les systèmes d’alerte précoce en tant que moyen de faciliter une action opportune du Conseil de sécurité.  Cependant, la réalité montre qu’il reste encore un long chemin à parcourir, a-t-elle constaté, soulignant que le Conseil a parfois été empêché de prendre les mesures nécessaires pour garantir la protection des civils contre la faim et la misère.  De ce fait, la faim est toujours utilisée comme arme de guerre aux dépens des populations vulnérables.

Selon la déléguée, il faut investir dans la prévention, dans le plein respect du droit international humanitaire et de la consolidation de la paix, afin d’éviter que les crises humanitaires ne se transforment en catastrophes.  Les conflits et la violence étant les principales causes de la faim, il faut rompre avec ce cercle vicieux et trouver des solutions politiques aux conflits, soutenir les économies des pays vulnérables et sauvegarder les moyens de subsistance, tout en renforçant le soutien aux opérations humanitaires.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a regretté que, quelques années après l’adoption de la résolution 2573 (2021), les infrastructures indispensables, notamment sanitaires, continuent d’être lourdement endommagées par les conflits armés.  Elle a déploré que s’estompe le principe de distinction du droit international humanitaire, avant de reconnaître le lien direct entre les conflits armés et l’insécurité alimentaire.  La représentante s’est indignée de voir que, dans les contextes des conflits armés, l’accès à l’assistance humanitaire soit souvent entravé du fait d’attaques commises contre des biens ou des travailleurs humanitaires, une situation aggravée par les effets dévastateurs des changements climatiques et des phénomènes météorologiques extrêmes.  Il est clair que nous devons aller encore plus loin pour protéger la population pour prévenir la faim dans les conflits, a insisté la représentante. 

M. NJAMBI KINYUNGU (Kenya) a fait plusieurs recommandations et d’abord que les bons offices du Secrétaire général soient respectés par tous les États. Ces bons offices, a-t-il dit, doivent être tirés par un leadership compétent, qualifié et courageux. Plaidant ensuite pour l’accès humanitaire, le représentant a jugé crucial de jeter des ponts entre aide humanitaire, développement et consolidation de la paix.  Il a aussi jugé utile que les institutions financières internationales s’efforcent d’atténuer les risques liés aux investissements dans les régions postconflit.  Il faut aussi, a-t-il poursuivi, prévenir l’escalade des conflits qui, à la longue, conduise à des guerres par procuration, au détriment des civils.  Nous devons collectivement, a estimé le représentant, exiger des grandes puissances qu’elles fassent preuve de responsabilité et qu’elles embrassent un monde multipolaire stable et équilibré.  Ces grandes puissances doivent militer pour un multilatéralisme robuste dont les lois et les accords limitent l’abus de pouvoir et ne laissent pas laisser libre cours à une impunité digne d’un système darwinien brutal.

Mme INDIRA GOHIWAR ARYAL (Népal) a souligné que les pays en développement sont touchés de plein fouet par la crise alimentaire.  Elle a appelé au respect du droit international humanitaire et des résolutions du Conseil de sécurité.  Il faut veiller, a-t-elle martelé, à ce que les responsables répondent de leurs actes lorsqu’ils foulent au pied ces textes.  C’est à l’État, a-t-elle reconnu, auquel revient la responsabilité de protéger les civils et à cet égard, la diplomatie préventive doit toujours être privilégiée tout comme la mise en place de systèmes alimentaires résilients.  En tant que deuxième plus grand contributeur de contingents aux opérations de paix des Nations Unies, le Népal, a conclu la représentante, veut que la protection des civils aille de pair avec la mise à disposition des ressources financières et technologiques.

M. BRETT JONATHAN MILLER (Israël) a souligné que son pays subit des menaces sécuritaires incessantes depuis sa création.  Attaché aux principes de l’aide humanitaire, Israël, a dit le représentant, souhaite que la protection des civils soit au cœur de tous les efforts. Plus de 4 500 roquettes, a-t-il indiqué, ont été tirées par le jihad islamique, une organisation terroriste, contre Israël, sans compter les actes du Hezbollah qui viole les résolutions du Conseil de sécurité.  Quand nous essayons de protéger les civils, d’autres en font, comme au Liban, des boucliers humains.  Les roquettes ont tué des enfants palestiniens parce que c’est le résultat des attaques terroristes qui se poursuivent quand la communauté internationale garde le silence.

Le représentant a vanté les mérites de la créativité et de la technologie qui ont permis à son pays d’intercepter plus de 370 roquettes alors que le Hamas, le Jihad islamique, le Hezbollah et d’autres marionnettes du régime iranien poursuivent leurs attaques meurtrières afin de faire obstruction à l’aide humanitaire aux dépens des Palestiniens, comme on l’a vu, il y a deux semaines.  Israël fait tout pour protéger les civils alors que les terroristes utilisent leurs enfants pour protéger leurs missiles, a conclu le représentant. 

M. DAMIANO BELEFFI (Saint Marin) a appelé au respect des résolutions 2417 et 2573 du Conseil de sécurité.  Il s’est félicité de la Déclaration politique sur la protection des civils contre les armes explosives et s’est inquiété des conditions de vie des groupes vulnérables, en particulier les enfants, dans les conflits armés.  Il a réitéré l’importance du droit international humanitaire et a appuyé tous les efforts visant l’établissement des responsabilités.  Ce n’est que par la volonté politique que l’on pourra protéger les civils en temps de conflit armé, a martelé le représentant.

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a réitéré son appel à tous les États Membres, en particulier ceux du Conseil de sécurité, à honorer leur engagement à appuyer l’appel que le Secrétaire général a lancé en 2020 pour un cessez-le-feu mondial. Il a estimé que les opérations de paix des Nations Unies sont un outil indispensable pour la protection des civils dans les conflits armés.  Parfois, a-t-il dit, les Casques bleus participent même aux projets visant à renforcer la sécurité alimentaire des communautés locales.  Ainsi, les soldats de la paix malaisiens de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) ont participé à des projets à impact rapide, distribuant matériel et équipements pour aider les communautés locales à mettre en place des infrastructures agricoles.  Le représentant a souligné les obligations des États, en vertu du droit international humanitaire.  Nous devons tous, a-t-il martelé, assurer un accès rapide, sûr et sans entrave aux agences humanitaires et accorder, ce faisant, la priorité aux groupes vulnérables dont les enfants, les femmes, les personnes âgées et les personnes handicapées.  Nous lançons, une nouvelle fois, un appel à toutes les parties au conflit pour qu’elles appliquent le droit international humanitaire, les droits humains et les résolutions des Nations Unies.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a rappelé la contribution de son pays aux opérations de maintien de la paix à travers le monde et l’asile offert à un million de Rohingya fuyant les atrocités au Myanmar voisin.  Il a appelé le Conseil de sécurité à lutter contre l’insécurité alimentaire due aux conflits et à faire respecter les résolutions 2417 (2018) et 2573 (2021).  Appelant également à un accès humanitaire sans restriction pour les personnes ayant besoin d’assistance, il s’est inquiété des difficultés d’accès que subissent les Rohingya musulmans au Myanmar au lendemain du cyclone Mocha, qui pourraient les pousser à l’exil.  Le représentant a également appelé le Conseil de sécurité à octroyer davantage de moyens aux missions de maintien de la paix afin qu’elles puissent assurer pleinement leur mandat de protection des civils.   

Mme DAKWAK (Nigéria) a souligné l’impact des rébellions, du terrorisme et de la prolifération des armes légères dans les conflits armés qui affectent notamment l’Afrique, ajoutant que ces facteurs avaient entraîné le déplacement de centaines de milliers de civils.  Elle a déploré que les violences généralisées entravent la distribution de l’aide humanitaire et que les violations du droit humanitaire international soit devenu monnaie courante.  Elle s’est également inquiétée du fait que 70% de la population mondiale souffrant de malnutrition aigüe vive dans des zones affectées par des conflits, soulignant le lien entre ces phénomènes.  Elle a relevé les conséquences négatives de la guerre en Ukraine sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire en Afrique, exacerbant encore l’insécurité alimentaire existante.  Elle a rappelé qu’un récent rapport des Nations Unies prévoit que l’Afrique atteindrait 3,8 milliards d’habitants d’ici à 2100 et dénoncé l’accaparation de ses ressources via un système commercial international injuste ainsi que la corruption.  La représentante a par ailleurs souligné le fait que si les femmes sont rarement à l’origine des conflits armés, elles en subissent souvent les pires conséquences, appelant à redoubler d’efforts pour remédier à cette situation. 

M. GIANLUCA GRECO (Italie) s’est félicité d’un débat sur des questions plus urgentes et plus alarmantes que jamais depuis l’agression militaire illégale et brutale de la Russie contre l’Ukraine et ses conséquences indirectes sur la sécurité alimentaire mondiale.  Une telle situation rend le respect du droit international humanitaire encore plus indispensable mais aussi des résolutions 2417 et 2573 du Conseil de sécurité.  Hôte de quatre agences des Nations Unies chargées des questions alimentaires, l’Italie, a dit son représentant, considère que l’Initiative de la mer Noire demeure un rayon d’espoir.  Il a tout de mème appelé la Russie à augmenter le nombre des inspections à Istanbul. 

Dès demain, a annoncé le représentant, l’Italie accueille avec l’OCHA, les États-Unis, le Royaume-Uni et le Qatar, la Conférence humanitaire d’annonce des contributions pour la Corne de l’Afrique.  En tant que Présidente du segment humanitaire du Conseil économique et social (ECOSOC), elle a fait de l’insécurité alimentaire le thème central de cette session.  Avec le Kenya, elle entend faire adopter une résolution plus ambitieuse sur la sécurité alimentaire.  L’Italie, a conclu son représentant, est également honorée d’accueillir, au mois de juillet, le prochain Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires qui évaluera les solutions novatrices et inclusives aux défis complexes de la sécurité alimentaire. 

M. KHALID LAHSAINI (Maroc) a rappelé que, selon le rapport mondial sur les crises alimentaires, 139 millions de personnes ont plongé dans l’insécurité alimentaire en 2020, soit une augmentation de 40 millions par rapport à l’année précédente. En 2023, a-t-il indiqué, alors que les effets des changements climatiques, de la pandémie et des tensions géopolitiques se font ressentir dans le monde, l’inflation et la dette ont une incidence notoire sur la productivité alimentaire de nombreux pays. Notant à cet égard que, dans 30 ans, l’Afrique aura deux fois plus de bouches à nourrir, le représentant a observé que le continent continue d’importer plus de 43 milliards de dollars de denrée alimentaires par an et est donc tributaire de ces importations pour son alimentation.  Cette situation, a-t-il averti, a des conséquences sur la stabilité des pays vulnérables, la pénurie de ressources et l’augmentation des prix attisant les troubles sociaux.  Dans ce contexte, il a jugé essentiel d’atténuer les effets des conflits armés sur la sécurité alimentaire en évitant la destruction des cultures et des infrastructures critiques, faute de quoi, a-t-il constaté, la faim devient un défi pour les populations civiles.  Pour cela, la coopération internationale doit selon lui permettre de préparer des plans d’intervention rapide et de coordonner des ripostes pour renforcer les points faibles dans les zones de conflit.  Les partenariats entre les acteurs locaux et les organisations humanitaires internationales sont à cet égard cruciaux pour connaître les défis que rencontrent les civils, a-t-il fait valoir.   

Pour le représentant, le changement durable du système agricole et alimentaire mondial est également nécessaire si nous voulons nourrir les 800 millions de personnes qui ont faim aujourd’hui et les deux milliards supplémentaires qui seront sous-alimentés d’ici à 2050. Relevant que son pays a toujours investi dans l’agriculture et les engrais, notamment dans le cadre de la coopération Sud-Sud en Afrique, il a assuré que la sécurité alimentaire est au cœur de son modèle de développement.  Il a ajouté que son pays appuie pleinement la zone de libre-échange africaine, estimant qu’elle peut stimuler les échanges de produits agricoles tout en améliorant les revenus des agriculteurs et en promouvant l’agro-alimentaire.  Enfin après avoir appelé à renforcer la résilience en investissant dans des systèmes alimentaires durables, il a jugé essentiel d’encourager la protection des civils grâce au renforcement des capacités des pays, dans le respect de la bonne gouvernance et des droits humains, et en mettant en place des systèmes d’alerte précoce.   

Mme JEANNE MRAD (Liban) a rappelé qu’elle vient d’un pays dont les citoyens ont connu les ravages des conflits armés, à commencer par des guerres civiles qui ont déchiré son peuple, épuisé son économie, et provoqué le déplacement de sa population.  La représentante a dit parler au nom d’un pays où des civils non armés ont perdu la vie dans le bombardement du bataillon fidjien de la FINUL au Sud-Liban en 1996. Lorsque nous parlons de protéger les citoyens en période de conflits armés, y compris d’assurer leur sécurité alimentaire, cela exige que la communauté internationale exerce la pression nécessaire pour que soit acheminée auprès des populations assiégées l’aide dont elles ont besoin par l’entremise des ports, des routes et des tunnels aériens et terrestres.  Le moment est peut-être venu de changer d’approche et de revoir les priorités, en se penchant sur les causes profondes des conflits et les raisons de leur exacerbation, comme les trafics d’armes et les conflits internationaux menés par procuration, a estimé la déléguée.   

M. YASHAR ALIYEN (Azerbaïdjan) a fait observer que pendant les 30 années de l’agression contre son pays, l’Arménie a commis de multiples crimes de guerre qui ont causé la mort de dizaines de milliers de civils, sans compter le nettoyage ethnique, les destructions et l’effacement culturel.  L’ampleur des brutalités est illustrée par les près de 4 000 azéris portés disparus et les cas de torture. Pourtant, les responsables demeurent impunis et l’Arménie refuse de communiquer des informations sur les milliers de mines qu’elle a implantées.  Après avoir décrit les atrocités commises, le représentant a voulu répondre à la déclaration du Vice-Ministre arménien des affaires étrangères.   

L’Azerbaïdjan, a-t-il dit, n’a jamais créé d’obstacles à la liberté de mouvement ni à l’accès à la nourriture, aux médicaments et encore moins à l’aide humanitaire.  Les informations montrent que ce sont des allégations sans fondement.  La mise en place de postes frontières, a expliqué le représentant, est le droit souverain de tous les pays du monde et fondé sur les principes d’intégrité territoriale et le devoir d’un pays de garantir la sécurité de la circulation des biens et des personnes.  Le Conseil de sécurité, a-t-il martelé, n’a cessé de dire que les frontières sont une prérogative souveraine des États Membres.  Il est temps, a conclu le représentant, que l’Arménie comprenne que la mésinformation et la désinformation sont contraires aux objectifs de paix, de stabilité et de réconciliation. 

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a lié l’augmentation des taux d’insécurité alimentaire aux conflits, avant de pointer aussi la hausse des prix alimentaires dus aux changements climatiques.  Pour prévenir les conflits, son gouvernement promeut une approche globale, coordonnée, prenant en compte le caractère humanitaire et le développement, ainsi qu’un engagement à mettre en œuvre les résolutions idoines du Conseil de sécurité.  Louant la prorogation de l’Initiative de la mer Noire à l’initiative des Nations Unies et de la Türkiye, il a aussi plaidé pour un plein acheminement de l’aide humanitaire au Soudan.  La communauté internationale doit selon lui soutenir les pays affectés par les conflits afin qu’ils se dotent de la souplesse nécessaire pour faire face à leurs défis, travailler à réduire les tensions, faire respecter le droit international humanitaire et garantir que les acteurs humanitaires bénéficient d’un accès sûr et durable aux zones de conflits.   

M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a voulu que l’on reconnaisse les conflits comme l’un des facteurs contributeurs de l’insécurité alimentaire, dont souffrent particulièrement le continent africain et d’autres pays en développement. Accélérer la croissance économique et le développement durable, tout en relevant les défis du secteur agricole est donc extrêmement crucial.  Il est important, a insisté le représentant, d’appuyer les programmes nationaux de production et de productivité agricoles, tout en assurant la stabilité macroéconomique, l’allègement de la dette voire son annulation et en traitant des goulets d’étranglement des investissements.  Il faut aussi assurer la fourniture de l’aide humanitaire mais en gardant à l’esprit la nécessité de renforcer la coopération internationale même si les États ont la responsabilité première d’assurer cette aide.  Pour qu’elle soit efficace, l’aide humanitaire doit respecter les principes d’humanité, de neutralité et d’indépendance et être respectueuse des lois et de la souveraineté des pays concernés. L’aide humanitaire ne saurait être politisée et utilisée comme moyen d’influence pour des gains politiques. Il faut avoir le même souci devant tous ceux qui font face à des catastrophes humanitaires afin d’éviter toute discrimination.   

Respecter les engagements pris dans le domaine des changements climatiques est important pour fournir aux pays en développement, en particulier en Afrique, les ressources nécessaires à l’adaptation et à l’atténuation, a poursuivi le représentant.  Les effets dévastateurs de ces changements sur les ressources en eau, la couverture forestière ou la fertilité des sols est un problème existentiel pour des populations qui n’ont contribué en rien au réchauffement de la planète.  Le représentant a appelé les États à honorer leurs obligations et à investir dans la résilience et l’adaptation.  La primauté des politiques dans le règlement des conflits et la neutralité des opérations humanitaires doivent être respectées en tout temps, a-t-il conclu.   

Dans une reprise de parole, M. DINESH SETIA (Inde) a dénoncé le Pakistan qui a manipulé la réunion afin de diffuser une propagande fallacieuse contre l’Inde.  Le territoire du Jammu-et-Cachemire sera indien et sera toujours une partie inaliénable de l’Inde, a-t-il affirmé.  Il a souligné que le Pakistan n’a pas le droit de s’ingérer dans les affaires intérieures de l’Inde, fustigeant l’occupation forcée de territoires indiens par le Pakistan.  Le désir de paix et de progrès sur le sous-continent indien est réel et pourrait se concrétiser lorsque le terrorisme transfrontalier prendra fin, a-t-il dit. 

Le Jammu-et-Cachemire ne fait pas partie de l’Inde, a rétorqué Mme RABIA IJAZ (Pakistan).  Cela fait près de 70 ans que l’Inde empêche les Cachemiris de jouir de leur droit à l’autodétermination, en faisant du Jammu-et-Cachemire la zone la plus militarisée au monde afin d’empêcher la réalisation des aspirations de la population.  La représentante du Pakistan a appelé la communauté internationale à inviter l’Inde à mettre un terme à ces atrocités et à respecter les résolutions du Conseil de sécurité.

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