En cours au Siège de l'ONU

Aide au développement: la Deuxième Commission se penche sur les résultats du système des Nations Unies et les bienfaits de la coopération Sud-Sud

Soixante-dix-huitième session,
18e séance plénière, après-midi
AG/EF/3591

Aide au développement: la Deuxième Commission se penche sur les résultats du système des Nations Unies et les bienfaits de la coopération Sud-Sud

Les investissements réalisés pour repositionner le « système des Nations Unies pour le développement » donnent des résultats, a fait savoir M. Neil Pierre, du Département des affaires économiques et sociales, en présentant cet après-midi à la Deuxième Commission le rapport du Secrétaire général sur l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies.

Les réformes de ce système et notamment la refonte du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents ont aidé les pays bénéficiant du soutien de l’ONU à renforcer leurs politiques transformatrices et à réaliser des progrès plus rapides vers le développement durable et inclusif.  Le système démontre une « efficacité indéniable », selon les termes du représentant du Ministère de l’économie du Burkina Faso.

En effet, le système onusien a apporté un appui crucial aux pays en développement en matière d’élimination de la pauvreté, d’égalité entre les sexes, d’éducation, de science, de technologie et d’innovation afin de les aider à remplir la promesse de « ne laisser personne de côté ».  Toutefois, les ressources restent insuffisantes, comme l’on soulevé de nombreuses délégations, raison pour laquelle le Secrétaire général demande de relancer la dynamique en faveur d’un pacte de financement et invite les États Membres à réexaminer les modèles de financement.

De fait, seulement 8% des dépenses totales pour les activités opérationnelles en 2021 ont été ciblées sur l’élimination de la pauvreté, malgré les engagements pris par les Nations Unies, a noté la Fédération de Russie qui a insisté sur la nécessité d’accroître l’aide aux pays en développement dans ce domaine.  La priorité absolue demeure l’élimination de la pauvreté sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions, ont insisté le Groupe des pays en développement sans littoral (PDSL) et le Groupe des 77 et de la Chine pour qui « plus les financements sont prévisibles, plus ils sont efficaces ».

Outre la prévisibilité, la diversification des sources de financement a été réclamée à plusieurs reprises, puisque la base de financement demeure encore très dépendante de contributions extrabudgétaires et de quelques grands donateurs.  Ce sont plus de « ressources de base » que les délégations ont demandé pour équilibrer les sources et les budgets.  Cela affecte d’ailleurs le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents qui souffre d’un déficit budgétaire, un problème qui a suscité une vive inquiétude parmi les délégations.

Pour sa part, le Bélarus a regretté la politisation de l’attribution des ressources et, constatant que les pays à faible revenu reçoivent la majorité des ressources opérationnelles, il a appelé à mieux soutenir les pays à revenu intermédiaire, qui constituent environ les deux tiers des membres de l’ONU.  Il a ainsi suggéré la création d’un document stratégique pour guider la coopération des Nations Unies avec ce groupe.

Si de nombreux délégués ont exprimé leur appui à la réforme du système, la Thaïlande et la Chine ont toutefois insisté sur la nécessaire « appropriation nationale » des activités de développement menées par les Nations Unies, qui doivent tenir compte des besoins et des priorités nationales.  Pour cela, et comme l’a souligné la Communauté des Caraïbes (CARICOM), les équipes de pays de l’ONU doivent disposer des compétences et de l’expérience nécessaires pour que les plans d’action soient adaptés aux priorités nationales et régionales.  Le groupe des pays les moins avancés (PMA) a pour sa part demandé une meilleure intégration du Programme d’action de Doha dans les mandats opérationnels et l’établissement d’unités spécifiques pour les PMA.

Au cours de cette séance, les délégations de la Deuxième Commission étaient également invitées à se pencher sur la coopération Sud-Sud.  Elle est très importante, mais doit compléter et non se substituer à la coopération Nord-Sud et à l’aide publique au développement (APD), ont souligné plusieurs intervenants, à l’instar de la Guinée, qui a évoqué les travaux en cours pour créer un institut international de développement de la coopération Sud-Sud et triangulaire, qui serait basé à Conakry.

La coopération Sud-Sud a notamment été essentielle dans la distribution des vaccins contre la COVID-19, a remarqué le Congo, qui œuvre par ailleurs à la mise en place de mécanismes de financement innovants pour soutenir des projets structurants dans le Sud.  La délégation congolaise a cité notamment le mécanisme d’échanges d’étudiants et d’enseignants-chercheurs, similaire au programme ERASMUS en Europe.

De son côté, le groupe des PMA s’est réjoui du potentiel de la nouvelle plateforme Galaxy Sud-Sud, qui connecte 500 organisations et offre un répertoire numérique de plus de 900 solutions de développement.  L’Inde s’est pour sa part félicitée de la mise en place du Fonds de partenariat Inde-ONU, géré par le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud, qui mène 66 projets de développement dans 51 pays, avec un budget de 52 millions de dollars.

En début de séance, la Deuxième Commission a terminé son débat entamé hier sur l’élimination de la pauvreté ainsi que sur le développement agricole, la sécurité alimentaire et la nutrition.  L’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) a souligné que son agence contribue aux efforts des pays pour éliminer la pauvreté et assurer la sécurité alimentaire, en soutenant une industrialisation durable et inclusive.  Les programmes de l’ONUDI aident en effet les pays à mettre en place des politiques industrielles modernes et intégrées et à accroître les investissements publics et privés dans l’industrie durable, y compris l’agroindustrie.

La Deuxième Commission poursuivra ses travaux lundi 16 octobre, à partir de 10 heures.

ÉLIMINATION DE LA PAUVRETÉ ET AUTRES QUESTIONS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT 

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE, SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET NUTRITION 

Fin de la Discussion générale conjointe

Mme MARTINS (Timor-Leste) a reconnu que son pays vit une pénurie alimentaire.  Près de 40% de la consommation alimentaire est importée.  Plus de 66% des ménages dépendent de l’agriculture pour leur revenu primaire.  En outre, les catastrophes environnementales et la vulnérabilité du système de production alimentaire local, associées au manque de capacités logistiques et infrastructurelles, sont devenues des préoccupations majeures pour la transformation d’une chaîne de valeur résiliente, durable, inclusive et axée sur la nutrition.  Pour relever ces défis, a dit la représentante, le Gouvernement a élaboré le Plan stratégique 2021-2025 qui renferme quatre objectifs stratégiques.

Le premier objectif est d’accroître durablement la production et la productivité des sous-secteurs des cultures vivrières, de l’élevage, de la pêche, de la foresterie et des cultures industrielles.  Le plan vise à améliorer la valeur ajoutée et l’accès aux marchés intérieurs et extérieurs.  À travers ce plan, l’exécutif veut améliorer la gestion, l’utilisation et la conservation durables des ressources naturelles.  Il entend enfin améliorer la bonne gouvernance et la gestion institutionnelle dans l’ensemble du secteur agricole.  La représentante n’a pas manqué de rappeler l’importance de la coopération internationale, du partenariat, de l’aide publique au développement, du financement climatique et de l’assistance technique, conformément au Programme d’action d’Addis-Abeba et à l’Accord de Paris.

M. ASSANE DIOUM (Sénégal) a exposé trois urgences majeures face aux crises interconnectées. La première tient à la diversification de la production et au soutien aux initiatives régionales et nationales. Par exemple, un Plan africain d’urgence pour la production alimentaire d’un montant d’environ 1,5 milliard de dollars a été lancé, en mai 2022, à l’initiative de la Banque africaine de développement pour renforcer la sécurité alimentaire, la nutrition et la résilience sur le continent. La deuxième urgence est de renforcer la protection sociale.  Ainsi, le Gouvernement sénégalais a lancé un programme national de transfert monétaire visant à soulager près de 400 000 ménages.  Quant à la troisième urgence, il s’agit du financement et de l’assurance agricole.  C’est ce qui permet aux petits producteurs et exploitants agricoles d’améliorer leur production, malgré des capacités techniques limitées et les aléas climatiques.

Msg GABRIELE CACCIA, du Saint-Siège, a estimé que la véritable ampleur de la pauvreté ne devient évidente que lorsqu’on la mesure avec des critères qui vont au-delà du revenu et qui incluent des indicateurs non monétaires.  L’expérience et les données nous disent qu’un niveau élevé de croissance économique et une pauvreté généralisée peuvent coexister.  Nous devons, une nouvelle fois, reconnaître de nouvelles formes de pauvreté, a poursuivi l’archevêque, en citant le pape François.  Dans toutes ses manifestions, la pauvreté est un affront à la dignité humaine offerte par Dieu.  Il faut donc une approche intégrée conjuguant mesures monétaires et politiques globales pour s’attaquer aux privations non monétaires aux niveaux éducatif, social, culturel et spirituel.  À cet égard, l’éducation est un antidote efficace contre la pauvreté tout comme l’est une bonne protection sociale.  Les politiques sociales visant à améliorer la répartition des richesses dépendent d’une véritable promotion des pauvres qui aille au-delà de la simple mentalité de l’aide.

Nous vivons, a poursuivi l’archevêque, dans un monde de paradoxe où l’on produit suffisamment de nourriture pour toute la planète mais où la faim demeure la réalité d’un trop grand nombre.  S’il faut lutter contre le gaspillage et la surconsommation, il faut aussi assurer une production durable et une juste distribution.  Il faut, ici, aussi une nouvelle mentalité.  Seules des mesures concrètes feront que l’inclusion des exclus, la promotion des moindres et l’intérêt de centaines de millions de gens privés des biens de première nécessité mèneront à l’éradication de la pauvreté et au développement humain.

Mme MILJKOVICOVA, de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), a souligné que son agence contribue aux efforts des pays pour éliminer la pauvreté et assurer la sécurité alimentaire, grâce à une industrialisation durable et inclusive.  L’histoire a montré qu’une industrialisation durable est la clef de la création d’emplois, de la lutte contre la pauvreté et d’une croissance économique soutenue.  Très peu d’États ont atteint le statut de pays en développement sans traverser un processus robuste d’industrialisation.  Les capacités de production locales se sont aussi avérées vitales pour la résilience socioéconomique aux chocs extérieurs et c’est particulièrement important aujourd’hui comme demain.  Grâce à ses conseils politiques et à ses projets techniques, l’ONUDI aide les pays en développement à renforcer leurs capacités, à participer aux chaînes de valeur régionales et mondiales et à pénétrer de nouveaux marchés.  Les programmes de l’ONUDI aident les pays à mettre en place des politiques industrielles modernes et intégrées et à accroître les investissements publics et privés dans l’industrie durable, y compris l’agro-industrie.  L’ONUDI travaille étroitement avec ses partenaires et le secteur privé pour améliorer les connaissances et les technologies et trouver ainsi des solutions novatrices à la mise en œuvre des objectifs de développement durable.

ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES DE DÉVELOPPEMENT

Présentation des rapports 

M. NEIL PIERRE, Directeur par intérim du Bureau de l’appui aux mécanismes intergouvernementaux et de la coordination au service du développement durable au sein du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a présenté les rapports du Secrétaire général sur l’« Application de la résolution 75/233 de l’Assemblée générale sur l’examen quadriennal complet des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies » (A/78/72 et A/78/72/Add.1).

Cette année, le rapport (A/78/72) montre comment les réformes du système des Nations Unies pour le développement et la refonte du système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents en 2019 ont aidé les pays à renforcer leurs politiques transformatrices et à réaliser des progrès plus rapides vers le développement durable et inclusif.  Toutes les données vont dans le même sens, a fait observer M. Pierre: les investissements réalisés pour repositionner le système de développement des Nations Unies donnent des résultats.  Ainsi, plus de 88% des pays hôtes ont indiqué que les coordonnatrices et coordonnateurs résidents exerçaient un leadership efficace pour ce qui était de l’appui stratégique apporté aux priorités et plans nationaux.

En outre, les plateformes de collaboration régionale fournissent une meilleure expertise aux équipes de pays et les aident à trouver des solutions aux questions de développement transfrontalier.  Le système des Nations Unies pour le développement a appuyé les pays en matière d’élimination de la pauvreté, d’égalité entre les genres, d’éducation, de science, de technologie et d’innovation afin de les aider à remplir la promesse de ne laisser personne de côté.

Grâce au repositionnement du système, la coopération entre les activités de développement, l’action humanitaire et les activités de consolidation de la paix a été renforcée, de même que leur cohérence.  L’appui doit encore être renforcé pour élargir l’accès à des financements abordables à long terme en vue d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD).  Davantage de progrès sont également nécessaires à l’échelle du système pour intégrer des approches sensibles au climat et respectueuses de l’environnement dans les programmes et plans stratégiques, pour généraliser l’inclusion du handicap et des personnes autochtones, ainsi que pour parvenir à l’égalité de genre à tous les niveaux.

Pour preuve de transparence, le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents publie cette année pour la première fois ses résultats, en annexe du rapport (A/78/72/Add.1).  Le financement total du système des Nations Unies pour le développement s’est élevé à 46,5 milliards de dollars en 2021, ce qui représente une augmentation de 8% par rapport à 2020.  Les contributions alimentant les ressources de base ont représenté 21% de ce montant et les contributions pour les autres ressources, 79%.  Les contributions de base ont augmenté mais le système reste très dépendant d’un petit nombre de contributeurs, et le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents présente un déficit, ce qui est particulièrement préoccupant puisqu’il apporte un appui à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Aussi, le Secrétaire général demande de relancer la dynamique en faveur du futur pacte de financement et invite les États Membres à réexaminer les modèles de financement.

En venant au sujet de la coopération, Mme XIAOJUN GRACE WANG, Directrice du Fonds fiduciaire au Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud, a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’« état de la coopération Sud-Sud » (A/78/290).  Il met en lumière les défis mondiaux et les nouvelles problématiques et tendances dans le domaine de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire. 

Il fournit également une évaluation des progrès réalisés dans l’application des recommandations du document de Buenos Aires issu de la deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud, en particulier les nombreuses initiatives engagées en 2022 par le système des Nations Unies pour le développement à l’appui de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire pour réaliser le Programme 2030.  Les modalités d’action dictées par la demande permettent aux pays en développement d’accélérer les progrès grâce à l’échange de connaissances, au développement et au transfert de technologies ainsi qu’à des financements.

Le rapport présente également une analyse des progrès réalisés dans la mise en œuvre de la Stratégie de coopération Sud-Sud et de coopération triangulaire au service du développement durable applicable à l’échelle du système des Nations Unies (2020-2024).  Il ressort du rapport que la solidarité mondiale et la coopération internationale sont essentielles à la sécurité humaine et à la construction d’un monde inclusif, équitable et pacifique, en particulier pour aider les pays les plus pauvres et les plus vulnérables.

Le « rapport du Comité de haut niveau pour la coopération Sud-Sud » sur les travaux de sa vingt et unième session (A/78/39) a également été mis à la disposition des délégations. 

Discussion générale conjointe

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. ADIEL GUEVARA RODRÍGUEZ (Cuba) a constaté que, malgré les progrès enregistrés, les activités opérationnelles de développement n’ont pas reçu suffisamment d’attention et de ressources de la part de la communauté internationale.  L’objectif principal demeure l’élimination de la pauvreté sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions, a-t-il voulu rappeler.  Le Groupe a réitéré son appel à aider les pays à leur demande pour accélérer les ODD, répétant que plus les financements sont prévisibles, plus ils sont efficaces.  Il s’est dit préoccupé par la baisse des contributions de base du système et a appelé à inverser cette tendance, ce qui permettrait aux entités du système des Nations Unies d’atteindre leurs objectifs en matière de développement. 

Disant apprécier les efforts de repositionnement du système des coordonnateurs résidents, le représentant s’est dit toutefois préoccupé par les lacunes et leurs conséquences sur le terrain.  Un financement prévisible et adéquat est indispensable et le Groupe est prêt à y participer de façon constructive, a-t-il assuré.

Quant à la coopération Sud-Sud, le représentant a insisté sur le fait qu’elle vient en complément mais ne doit pas se substituer à la coopération Nord-Sud. Il a aussi estimé que le développement doit être en son cœur.  Le Groupe a mis l’accent sur les résultats du sommet qui a eu lieu à La Havane en septembre dernier sur la science, la technologie et l’innovation, qui a contribué à renforcer la collaboration entre les pays du Sud et à tirer parti de leur potentiel.

Au nom du Groupe des pays les moins avancés (PMA), M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal), après avoir noté que 50,5% des dépenses pour les activités opérationnelles de développement ont été allouées aux PMA en 2022, a critiqué la répartition inégale de ces fonds, soulignant que seulement 13% des fonds de base ont été dirigés vers les pays de son groupe.  Il a ensuite déterminé les trois domaines d’action urgents pour les PMA, comme proposés par le Secrétaire général: l’allégement de la dette, l’augmentation du financement à long terme et l’expansion du financement d’urgence. 

Selon le délégué, 33 des PMA ont commencé à élaborer un cadre de financement national intégré avec l’ONU.  Il s’est toutefois inquiété de la diminution de 75% du Fonds commun pour les ODD, soulignant que malgré ce sous-financement, le Fonds a catalysé environ 2,3 milliards de dollars depuis sa création en 2019.  Il a appelé à une collaboration formelle entre les équipes de pays de l’ONU et les institutions financières internationales, comme le FMI et la Banque mondiale, pour un soutien coordonné aux PMA. 

Il a aussi mis en exergue le rôle complémentaire de la coopération Sud-Sud, se réjouissant du potentiel de la nouvelle plateforme Galaxy Sud-Sud qui connecte 500 organisations et offre un répertoire numérique de plus de 900 solutions de développement.  Pour conclure, le représentant a rappelé que malgré la reconnaissance par toutes les organisations du système de développement de l’ONU de la catégorie des PMA, peu d’entre elles ont des cibles budgétaires spécifiques pour ces pays. Il a instamment demandé une meilleure intégration du Programme d’action de Doha dans les mandats opérationnels et l’établissement d’unités spécifiques pour les PMA, insistant sur le fait que les PMA comptent sur l’ONU pour soutenir leur développement durable de diverses manières.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque) a estimé que la réponse des Nations Unies aux multiples crises et défis auxquels sont confrontés les pays en développement est essentielle pour sauver des vies et pour remettre les pays vulnérables comme ceux des Caraïbes sur la voie d’une croissance soutenue et résiliente et sur celle de la réalisation des ODD.  Le représentant s’est félicité du repositionnement du système des Nations Unies pour le développement et de la refonte du système des coordonnateurs résidents, qui sont en mesure d’appuyer les programmes nationaux.

Toutefois, au vu du manque de progrès pour réaliser le Programme 2030, la CARICOM est d’avis que le temps est venu de changer de vitesse pour passer de la politique à la mise en œuvre et, plus important encore, à l’action au niveau des pays.  Alors que la communauté internationale prépare la quatrième Conférence internationale sur les petits États insulaires en développement (PEID), qui aura lieu à Antigua-et-Barbuda l’année prochaine, la CARICOM insiste sur l’importance du rôle que pourrait jouer le système des Nations Unies pour le développement pour trouver, de manière concertée, des solutions aux problèmes existants et à venir. Il est important que les équipes de pays puissent s’appuyer sur le leadership et les capacités du système dans son ensemble pour encourager des partenariats solides et durables.

La CARICOM est également d’avis que les équipes de pays doivent disposer des compétences et de l’expérience nécessaires et elle espère que les plans soient adaptés aux priorités nationales et régionales.  Sur ce point, les lacunes en matière de données et de statistiques devraient être comblées, a-t-elle averti.

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a salué l’approche globale du système des Nations Unies pour le développement et a encouragé les partenaires à assurer un financement adéquat, prévisible et durable du système des coordonnateurs résidents.  Témoignant de l’engagement constructif de l’ASEAN dans le processus de négociation de l’examen quadriennal complet en 2024, il a relevé les progrès dans la mise en œuvre du Plan d’action commun entre l’ASEAN et l’ONU (2021-2025).  Il a aussi mis en lumière l’Initiative de complémentarité, une collaboration entre l’ASEAN et la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), visant à harmoniser les objectifs de l’ASEAN 2025.

Concernant les efforts régionaux spécifiques, le délégué a évoqué le dialogue de haut niveau sur la complémentarité et le Sommet sur les ODD le mois dernier à New York, coprésidé par le Premier Ministre thaïlandais.  Il a noté que des idées concrètes et des approches alternatives, y compris l’économie bio-circulaire-verte, continuent d’être explorées.  Et il a également réaffirmé le soutien continu de l’ASEAN au centre d’études et d’échange de l’ASEAN sur le développement durable pour renforcer la coopération et appuyer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Enfin, il a mis en avant l’expansion des partenariats de son groupe, accueillant les Pays-Bas et le Maroc en tant que partenaires de développement et de dialogue sectoriel, respectivement.

Mme LORATO MOTSUMI (Botswana), s’exprimant au nom du Groupe des pays en développement sans littoral (PDSL), a souligné l’importance de l’année 2024 pour les pays de son groupe, marquée par le début d’un nouveau cycle d’examen quadriennal complet, et par l’adoption d’un nouveau programme d’action lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur les PDSL devant se tenir à Kigali.  Reconnaissant que le système des Nations Unies pour le développement joue un rôle crucial dans le soutien aux PDSL, elle a néanmoins insisté sur la nécessité d’un suivi continu, aussi bien des bonnes pratiques que des lacunes.

La représentante a énuméré cinq éléments clefs: faire de l’élimination de la pauvreté la priorité absolue; garder une approche axée sur le développement, adaptée aux besoins spécifiques des pays; reconnaître l’importance du leadership national dans la restructuration du système de développement de l’ONU; développer des nouveaux cadres de coopération, en pleine consultation avec les gouvernements des pays d’accueil; offrir plus de ressources, de données et d’expertise afin de faciliter la conclusion des stratégies nationales de développement.

La déléguée a également exprimé sa préoccupation face au manque de financement, notamment les coupes majeures dans les contributions aux ressources de base des agences de développement de l’ONU. Elle a souligné le besoin d’un financement adéquat et durable du système du coordonnateur résident et a appelé à renforcer la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ  (El Salvador) a souligné l’impact notable sur les actions de terrain d’un système revitalisé de coordonnateur résident, notamment en matière de cohérence et de collaboration entre les différentes équipes nationales. Elle a salué la création de plans de réponses adaptés aux multiples crises et a fait savoir que des progrès significatifs ont été réalisés dans le renforcement des capacités statistiques nationales, ainsi que dans la désignation des besoins des populations vulnérables.  Cependant, elle a alerté sur la nécessité d’un financement stable et durable.  Elle a par ailleurs insisté sur l’importance de la révision de l’examen quadriennal complet.
 

Concernant la coopération Sud-Sud, la déléguée a mis en avant son rôle catalyseur pour augmenter la solidarité globale.  El Salvador a augmenté sa participation dans des initiatives de coopération Sud-Sud, a‑t‑elle fait valoir, saluant pour conclure le rôle du Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud et exprimant l’espoir d’un soutien accru de la part des partenaires pour avancer dans de tels projets.

Mme CARMEN ROBLEDO LÓPEZ (Mexique) a fait valoir que les opérations menées par l’ONU sur le terrain constituent l’une des activités les plus importantes de l’Organisation.  Par conséquent, le rôle des coordonnateurs résidents et des équipes de pays des Nations Unies doivent être continuellement actualisés et renforcés.  La représentante a vu dans l’examen quadriennal complet des activités opérationnelles de développement du système de l’ONU, qui aura lieu en 2024, l’occasion de réaffirmer notre engagement en faveur du repositionnement de ce système.  Au cours de cet exercice, elle a proposé d’identifier les domaines dans lesquels des efforts supplémentaires sont nécessaires, notamment en matière d’égalité des sexes, des changements climatiques, de prévention des risques de catastrophe ou encore d’abus sexuels.

Si les priorités de chaque pays dépendent des défis nationaux qui leur sont propres, les demandes dépassent souvent la capacité de réponse et les ressources disponibles, a-t-elle poursuivi.  La représentante a exprimé sa vive préoccupation face au déficit budgétaire auquel est confronté le système des coordonnateurs résidents, en particulier la réduction progressive du financement de base.  Elle a donc jugé urgent de mettre en place un système de financement suffisant, prévisible et durable, à même de fournir aux coordonnateurs les ressources nécessaires pour s’acquitter pleinement de leur mandat.  Elle a par ailleurs salué les progrès réalisés dans l’intégration de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire aux plans stratégiques de nombreuses entités du système onusien.  Dans ce contexte, elle entend continuer de plaider en faveur du renforcement du lien entre le développement, l’action humanitaire et la consolidation de la paix, avec la participation de l’ensemble des parties prenantes.

M. JOSEPH ETOUNDI AYISSI (Cameroun) a plaidé en faveur du relèvement de l’allocation de ressources ordinaires destinées au financement du développement. Il a souligné à cet égard la nécessité de respecter les engagements pris dans le cadre du pacte pour le financement, lequel prévoit que des ressources adéquates soient mobilisées afin de répondre aux priorités nationales et que 30% des contributions allouées au financement soient destinées aux ressources de base.  Selon le représentant, la volonté politique et le renforcement du partenariat mondial permettront de doter le système de développement de l’ONU des ressources nécessaires pour qu’il soit en mesure de s’acquitter de son mandat.

M. PETER MOHAN MAITHRI PEIRIS (Sri Lanka), constatant l’incapacité à réduire la pauvreté du fait de limitations budgétaires, notamment sur les dépenses sociales, a noté que les pays en développement, contrairement aux pays développés, ont dû faire face à une contraction de leur espace fiscal et à des investissements fragiles après la pandémie de COVID-19.  Il a donc insisté sur la nécessité d’une solidarité et d’une coopération internationales sans précédent.  Réitérant l’appel à intensifier la coopération tant Sud-Sud que triangulaire, le délégué a précisé que ces mécanismes ne sont pas des substituts, mais des compléments à la coopération Nord-Sud.  Il a aussi souligné la pertinence du principe de « responsabilités communes, mais différenciées » dans le financement du développement.

Le représentant a ensuite détaillé 10 mesures innovantes pour le développement de la coopération Sud-Sud: partenariats public-privé, transformation numérique, solutions énergétiques durables, promotion touristique et culturelle, innovation en agroalimentaire, développement des compétences, infrastructure verte, inclusion financière, collaboration en recherche et développement, et réformes politiques.  Il a affirmé que la mise en œuvre de ces mesures stimulerait la croissance économique et améliorerait le bien-être de la population régionale.  Enfin le délégué a loué le développement d’un cadre conceptuel volontaire pour la mesure de la coopération Sud-Sud et a salué les efforts de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) dans ce domaine.

M. SWABRI ALI ABBAS (Kenya) a souligné la nécessité pour les activités des Nations Unies d’être adéquatement financées afin de relever efficacement les défis auxquels font face les États Membres en matière de paix, de développement et de droits de l’homme humains.  « Sinon, nos débats techniques détaillés sur la transparence et la responsabilité ne seront rien de plus qu’une mort lente pour l’un des piliers de l’ONU », a-t-il prévenu.  Rappelant que le Kenya et les États-Unis avaient coorganisé une table ronde pour mobiliser des fonds pour le système de coordonnateurs résidents, il a ajouté que le Kenya avait contribué au fonds d’affectation spéciale à des fins déterminées, et il a exhorté les autres États Membres à éviter les coupes budgétaires dans les agences de développement.

Il a également souligné l’importance de la coopération Sud-Sud dans la résolution des défis de développement, appelant à un engagement plus cohérent.  Il a salué le cadre stratégique 2022-2025 du Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud et s’est enorgueilli de l’accueil par le Kenya du Sommet du climat en Afrique, dont les résultats contribueront à la COP28, a-t-il précisé.  Il a conclu en rappelant que le Kenya, par ses initiatives, manifeste son engagement envers la coopération Sud-Sud et le multilatéralisme.

M. PISAREVICH (Bélarus) a fustigé les mesures coercitives unilatérales prises par certains États, identifiées comme des obstacles à la réalisation des ODD, et devant être levées sans plus tarder.  Il a reconnu le rôle capital de l’ONU dans le développement durable, notamment à travers ses activités opérationnelles et l’examen quadriennal complet.  Le délégué a témoigné son soutien aux efforts du Secrétaire général et a apprécié l’efficacité du coordonnateur résident, en place depuis cinq ans dans son pays.  Il a insisté sur le fait que les activités opérationnelles devraient être « pleinement axées sur l’aide aux États Membres ». 

Concernant le financement du Programme 2030, il a salué les contributions quantitatives des organisations de l’ONU, mais a critiqué la qualité de ces efforts.  « La part des ressources essentielles n’a pas augmenté », a-t-il relevé, indiquant que cette tendance limite la capacité de l’ONU à aider efficacement les pays dans leur développement durable.  Il a regretté la politisation de l’attribution des ressources et, constatant que les pays à faible revenu reçoivent la majorité des ressources opérationnelles, il a appelé à soutenir les États à revenu intermédiaire, qui constituent environ les deux tiers des membres de l’ONU.  Il a ainsi suggéré la création d’un document stratégique pour guider la coopération des Nations Unies avec ce groupe.

M. MAHAMADOU BOKOUM (Burkina Faso) a souligné que le système des Nations Unies pour le développement démontre une efficacité indéniable.  Les pays hôtes expriment en effet de plus en plus leur satisfaction à l’égard de ce système, notamment en ce qui concerne l’alignement de l’appui du système sur leurs besoins et leurs priorités.  En outre, a-t-il ajouté, le système est devenu le partenaire privilégié des pays pour des conseils politiques intégrés et fondés sur des données probantes.  À cet égard, il a mis en lumière la relation constructive qui existe entre le système des Nations Unies et le Burkina Faso.

En dépit des progrès encourageants, a—t-il poursuivi, des actions supplémentaires sont nécessaires dans plusieurs domaines, telles que la diversification des sources de financement, puisque la base de financement demeure fortement dépendante de contributions extrabudgétaires et de quelques grands donateurs.  Le déficit de financement du système des coordonnateurs résidents est tout aussi préoccupant.  Par ailleurs, des partenariats innovants avec les autorités locales, la société civile et le secteur privé sont nécessaires pour relever les défis actuels, a assuré le représentant.

M. NGUYEN HOANG (Viet Nama assuré que l’ONU reste le partenaire privilégié du Viet Nam dans ses efforts de développement, disant apprécier son expertise, ses recommandations politiques et son assistance technique, qui l’aident à avancer vers le développement durable.  Pour améliorer le système des Nations Unies pour le développement, le représentant a suggéré quelques points.  D’abord, lui fournir un financement adéquat et prévisible, en particulier pour ce qui concerne les ressources de base.  Sur le terrain, son travail devrait être adapté à la situation propre à chaque pays et contribuer à élaborer un cadre national de développement durable correspondant à ses priorités et à ses besoins.  Enfin, le représentant a plaidé pour un appui supplémentaire du système dans de nouveaux domaines tels que la numérisation, la transition énergétique verte et juste, l’économie circulaire, et l’utilisation de la science, de la technologie et de l’innovation dans la réalisation des ODD.

Mme EL OUATIKI (Maroc) a réitéré son soutien au repositionnement du système des Nations Unies pour le développement en tant que socle destiné à soutenir les programmes de pays dans leurs efforts pour réaliser le Programme 2030.  Elle a rappelé les investissements réalisés dans le repositionnement de ce système, avec pour centre le système des coordonnateurs résidents, notant que ce système est aujourd’hui un partenaire des pays du développement pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable.  Toutefois, a-t-elle prévenu, le système des coordonnateurs résidents exige un financement adéquat et prévisible.

La représentante a aussi fait savoir que la coopération Sud-Sud constitue un pilier de la politique étrangère du Maroc, qui continue de mener des projets, des initiatives et des partenariats afin promouvoir la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire dans différents domaines.  Une telle coopération constitue selon elle un moyen de parvenir à un avenir résilient et durable.  Elle doit donc être intégrée dans la préparation des rapports nationaux volontaires, a-t-elle recommandé.

Mme PETAL GAHLOT (Inde) a déclaré qu’aujourd’hui plus que jamais, les pays du Sud ont besoin du système des Nations Unies pour afin de réaliser les ODD, lesquels sont « très loin d’être sur la bonne voie ».  Elle s’est félicitée de la mise en place du Fonds de partenariat Inde-ONU, géré par le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud, qui compte aujourd’hui quelque 66 projets de développement dans 51 pays, avec un budget de 52 millions de dollars.  Le système des Nations Unies doit maintenant se concentrer sur les tâches pour lesquelles il est qualifié, à l’aide de ressources adéquates et flexibles, a souhaité la représentante.

La coopération Sud-Sud est une priorité pour l’Inde, a poursuivi la représentante en précisant que c’est une priorité de sa présidence du G20, laquelle a débuté en janvier de cette année avec le sommet « La voix des pays du Sud ».  La représentante a salué l’inclusion, à cette occasion, de l’Union africaine en tant que membre permanent du G20, une décision qui amplifie selon elle la « voix du Sud ».  Guidée par les priorités de ses partenaires, la coopération au développement de l’Inde s’étend désormais au commerce, à la culture, à l’énergie, à la santé ainsi qu’aux infrastructures, a-t-elle informé.  Elle a ajouté qu’en mettant l’accent sur la coopération Sud-Sud, l’Inde s’efforce de résoudre les problèmes des pays en développement de manière transparente, tout en favorisant la croissance économique.

M. EMERY GABI (Congo) a rappelé à quel point la coopération Sud-Sud avait été essentielle dans la distribution des vaccins contre la COVID-19, contribuant à la mise en place de centres de vaccination dans les pays en développement.  Il a appelé à étendre cette coopération à la reprise économique post-COVID.  Le délégué a annoncé que son pays œuvrait à la mise en place de mécanismes de financement innovants pour soutenir des projets structurants dans le Sud, notamment un mécanisme d’échanges d’étudiants et d’enseignants-chercheurs, similaire au programme ERASMUS en Europe, car « le développement des pays du Sud ne pourra pas se réaliser sans des ressources humaines de qualité ».

Soulignant que les secteurs comme l’éducation, la défense et les finances disposent déjà, au Congo, d’instruments juridiques favorisant la coopération Sud-Sud, il a mentionné le projet de pont route-rail sur le fleuve Congo, reliant Brazzaville à Kinshasa, avant de parler aussi de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.  Il a également indiqué que le Congo participe à la consolidation de la paix et à l’intégration régionale en Afrique centrale.

M. SHAREEF (Pakistana salué l’intervention « cruciale » du système des Nations Unies dans son pays après les inondations de l’année dernière.  Il a fait savoir que le soutien continu de l’ONU était essentiel pour mettre en œuvre les plans nationaux de relance post-COVID-19, et s’est dit préoccupé quant au système des Nations Unies pour le développement.  Remarquant que la part du financement total provenant de contributions de base est passée de 28% en 2011 à seulement 21% aujourd’hui, il a souligné un déficit de financement de 85 millions de dollars pour le système des coordinateurs résidents.

Le délégué a réaffirmé les principes clefs qui devraient sous-tendre le système de l’ONU en matière de développement: l’éradication de la pauvreté doit demeurer l’objectif primordial, et l’appropriation nationale est cruciale pour l’obtention de résultats efficaces.  Enfin, il a salué le rôle de la coopération Sud-Sud en tant que complément, et non pas substitut, à la coopération Nord-Sud.  Le représentant a conclu en appelant les Nations Unies à continuer de prendre des mesures concrètes pour renforcer le soutien à la coopération Sud-Sud et triangulaire.

M. MUHAMMAD ZULASRI BIN ROSDI (Malaisie) a salué les efforts « louables » réalisés par le Coordonnateur résident et l’équipe de pays en Malaisie pour répondre aux besoins particuliers du pays afin de préparer un avenir durable et résilient.  Reconnaissant les préoccupations entourant le financement du système des coordonnateurs résidents, il a exprimé son optimisme et sa confiance en la capacité de parvenir à une solution durable.

D’autre part, la Malaisie reconnaît l’immense potentiel de la coopération triangulaire pour améliorer l’expertise, les ressources et les perspectives des pays du Sud comme du Nord, a poursuivi le délégué.  Il a fait valoir que quand les pays du Nord sont impliqués, un ensemble de connaissances, de capacités techniques et de solutions novatrices peuvent être partagées, ce qui améliore les résultats en matière de développement.

M. BORIS A.  MESCHCHANOV (Fédération de Russie) a noté que, malgré les engagements pris par l’ONU, seulement 8% des dépenses totales des activités opérationnelles en 2021 ont été allouées à l’éradication de la pauvreté.  Soulignant l’écart entre ces chiffres et les priorités fixées par l’examen quadriennal complet, il a insisté sur la nécessité d’accroître l’aide aux pays en développement dans ce domaine.  Le représentant a remarqué qu’il existe une demande croissante pour un soutien dans l’industrialisation et l’accès à une énergie abordable et fiable, jugeant que l’ONU devait répondre à ces besoins.  En outre, il a exhorté les pays développés à respecter leurs engagements en matière d’APD, fixés à 0,7% du PIB national, et de financement climatique, estimé à 100 milliards de dollars par an.  Il a indiqué que le volume de l’aide russe en 2022 avait dépassé le milliard de dollars.

Sur la question de la réforme de l’ONU, le délégué a avancé que la nouvelle structure de coordonnateurs résidents devrait être « compacte, flexible et économique », critiquant toute expansion du personnel au-delà des paramètres initialement convenus.  Il a également insisté sur l’importance d’un rapport de qualité démontrant la « valeur ajoutée » des coordonnateurs résidents, plutôt qu’une simple compilation des réalisations des agences de l’ONU dans les pays concernés. Enfin, le représentant a souligné que la Russie partage les principaux principes de la coopération Sud-Sud, notamment le respect de la souveraineté nationale et de la non-ingérence dans les affaires internes.  Il a conclu en notant l’implication continue de la Russie dans des projets de coopération trilatérale, contribuant financièrement et en expertise pour renforcer les capacités de ses partenaires, y compris dans la région de la CEI.

M. NATTHAKITH THAPHANYA (République démocratique populaire lao) a dit apprécier le rôle essentiel du système des Nations Unies pour le développement et les efforts sans relâche des équipes de pays dans leur appui aux plans et activités de développement socioéconomique des États Membres.  Il s’est félicité de la hausse de 14% des financements au bénéfice des pays en situation particulière.  Le représentant a fortement encouragé le système à mener ses activités de développement au niveau des pays conformément aux priorités nationales. En ce sens, des mécanismes de suivi et d’évaluation sont indispensables, a-t-il ajouté.

Le représentant a encouragé les partenaires de développement à s’engager à fournir des ressources suffisantes, mais également prévisibles et durables, en soutien des activités de développement des pays qui en ont besoin. Ces partenaires devraient également se concentrer, avec le système des Nations Unies pour le développement, sur l’élargissement des capacités nationales et sur l’appropriation nationale des programmes visant à éliminer la pauvreté et à faire face à de multiples autres défis.

M. BULELANI MANDLA (Afrique du Sud) a considéré essentiel son partenariat avec les pays du Sud pour faire progresser les intérêts de l’Afrique et des pays en développement.  Le rapport du Secrétaire général sur la coopération Sud-Sud indique que de nombreux pays en développement sont confrontés aux conséquences sanitaires et socioéconomiques de la pandémie de COVID-19, lesquelles sont caractérisées par une reprise inégale, a‑t‑il noté.  Le représentant a craint que les inégalités croissantes entre les États menacent la réalisation des ODD nécessaire à la création d’un monde plus inclusif.  À cet égard, il a jugé essentiel que les pays développés respectent les engagements pris dans le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement afin de stimuler la croissance économique.  Qui plus est, la solidarité internationale, en particulier avec les plus pauvres et les personnes vulnérables, est essentielle à la réalisation du Programme 2030, a‑t‑il rappelé.

Le représentant a réaffirmé que la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire sont complémentaires de la coopération Nord-Sud et ne sauraient s’y substituer.  Compte tenu des divergences dans les niveaux de développement, l’aide publique au développement (APD) reste vitale pour les pays en développement, a‑t‑il ajouté, un rôle que le secteur privé est appelé à compléter.

M. DWI WISNU BUDI PRABOWO (Indonésie) a considéré que le système de développement et le système des coordonnateurs résidents des Nations Unies continuent de jouer un rôle important dans l’aide apportée aux États afin de réaliser les ODD.  Nous devons mettre en place des programmes ciblés pour renforcer la résilience, malgré les contraintes auxquelles sont confrontés de nombreux pays, a‑t‑il recommandé.  Le représentant a cité en exemple l’appui aux petites et moyennes entreprises, la création d’emploi et la lutte contre les inégalités.  Il a appelé à cet égard à la poursuite des discussions afin de renforcer le système des coordonnateurs résidents, tout en mettant l’accent sur un financement durable et prévisible.  Il a appelé à soutenir la coopération Sud-Sud et triangulaire, qui est fondamentale pour aider les pays en développement à parvenir à une croissance et à un développement durables, avec l’appui du système de développement de l’ONU.

M. RABIU DAGARI (Nigéria) a loué le système des coordonnateurs résidents, tout en réclamant un financement adéquat et durable.  « En 2021, les dépenses consacrées aux activités de développement ont atteint pour la première fois 20 milliards de dollars, mais il faut aller plus loin pour répondre aux attentes élevées de la communauté internationale », a-t-il affirmé.  Il a insisté sur l’importance de la coopération Sud-Sud pour l’Afrique, un continent riche en ressources mais confronté à de multiples défis de développement, et a mis en exergue l’Agenda 2063 de l’Union africaine, aligné sur le Programme 2030.  Il a appelé plus de pays à contribuer financièrement à l’aide destinée aux pays africains.

En ce qui concerne le rôle du Nigéria dans la coopération Sud-Sud, le délégué a mis en lumière les initiatives nationales comme le Corps d’aide technique et la Direction de la coopération technique en Afrique, des programmes ayant déployé plus de 30 000 professionnels qualifiés dans 38 pays depuis 1987.  Il a souligné que son pays promeut, dans cette aide, le respect des principes de souveraineté nationale, d’appropriation nationale et de bénéfice mutuel.  Enfin, il a exhorté à améliorer la transparence et la responsabilité dans le système des Nations Unies pour le développement, notant que seulement 26% des pays considèrent comme « bonne » la qualité des rapports sur les résultats obtenus avec les ressources de base.

M. DAI BING (Chinea assuré que la Chine soutient les efforts de la communauté internationale afin de parvenir au relèvement des pays en développement.  Des efforts plus ciblés sont toutefois nécessaires, a poursuivi le représentant.  Il a ainsi recommandé de créer un contexte propice au développement durable, dans le multilatéralisme et avec un esprit d’ouverture.  Il a demandé de se concentrer sur le renforcement des capacités pour le développement et a recommandé aux agences des Nations Unies de trouver un meilleur équilibre entre les financements à long terme et les secours d’urgence.

Pour la Chine, le système financier international doit refléter les préoccupations de tous, notamment des pays en développement.  Elle soutient l’appropriation nationale des programmes de développement, qui doivent tenir compte des besoins et des priorités nationales.  Le délégué a en outre dit que son pays soutient fermement la coopération Sud-Sud et fait de son mieux pour aider les pays en développement.  À cet égard, il a signalé que la Chine avait mis en place l’Initiative de coopération Sud-Sud, qui a permis de donner un nouvel élan.

M. SUWANTRA (Thaïlande), après avoir salué les efforts en cours concernant l’examen quadriennal complet visant à repositionner le système de développement des Nations Unies, a insisté sur la nécessaire prise en main nationale des activités de développement de l’ONU.  Il a ainsi fait savoir que la Thaïlande avait intégré sa propre « philosophie de l’économie de suffisance » dans le Cadre de coopération pour le développement durable des Nations Unies pour 2022-2026.  Cette intégration, a-t-il expliqué, a facilité une coopération efficace entre le Gouvernement thaïlandais et les équipes de l’ONU.

Le délégué a également mis en exergue l’importance de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire, précisant qu’elles ne visent pas à remplacer la coopération Nord-Sud, et mentionnant trois projets lancés par la Thaïlande et le système des Nations Unies pour le développement, centrés sur: le commerce des produits agricoles biologiques; les soins de santé maternelle, les sages-femmes et la grossesse chez les adolescentes; la diplomatie sanitaire mondiale.  Il a conclu en annonçant que la Thaïlande allait coorganiser le cinquième Forum des directeurs généraux pour la coopération Sud-Sud et triangulaire en Asie-Pacifique les 27 et 28 novembre 2023 à Bangkok.

Mme LISANDRA MARINA GUTIÉRREZ TÓRREZ (Nicaragua) a d’abord souligné que la coopération Sud-Sud est complète, mais ne remplace pas la coopération Nord-Sud.  Reconnaissant l’importance de l’action de l’ONU pour les pays en développement, la déléguée a estimé que l’élimination de la pauvreté restait l’objectif numéro un.  Selon elle, des mesures collectives sont nécessaires pour améliorer l’efficacité de la coopération Sud-Sud et il faut prôner à cette occasion l’unité, la solidarité et la collaboration, particulièrement dans les domaines du commerce et du développement économique. 

La coopération doit permettre le partage de connaissances et de ressources technologiques, tout en respectant la souveraineté et les politiques sociales des États concernés, a‑t‑elle martelé.  La déléguée a par ailleurs reproché aux pays développés de manquer à leurs engagements en matière d’aide au développement, et elle a averti que la solidarité Sud-Sud ne devait pas servir d’excuse pour ces manquements.  Elle a enfin fustigé les mesures coercitives unilatérales imposées à plus de 30 pays, affectant plus de deux milliards de personnes, exigeant leur levée immédiate.

Mme PAULINA FELICIANO FRANCISCO ABDALA) (Mozambique) a souligné l’importance cruciale de la coopération Sud-Sud dans le développement et l’atteinte des ODD pour les pays en développement.  Elle a notamment relevé le rôle vital de la solidarité des pays du Sud pendant la pandémie de COVID-19, permettant l’acquisition de vaccins, de médicaments et d’équipements de protection.  Des dirigeants du Sud se sont réunis à La Havane le mois dernier pour renforcer la solidarité mondiale, a fait savoir la déléguée.  Parmi les secteurs les plus bénéficiaires de cette coopération se trouve l’agriculture, qui représente environ 24% du PIB national et emploie plus de 70% de la population mozambicaine, a‑t‑elle signalé.

À cet égard, la représentante a évoqué la création d’un centre de démonstration et de technologies agricoles, financé par la Chine et visant à soutenir les agriculteurs locaux.  Elle a exhorté les Nations Unies à soutenir les initiatives de coopération Sud-Sud et triangulaire, sans toutefois qu’elles remplacent les initiatives Nord-Sud, afin d’accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Enfin, elle a exprimé son enthousiasme quant au troisième Sommet Sud-Sud prévu pour l’année prochaine à Kampala.

M. PAUL GOA ZOUMANIGUI (Guinée), après avoir insisté sur l’importance de la coopération Sud-Sud, qui doit être un complément et non un substitut à la coopération Nord-Sud et à l’APD, a porté à la connaissance de la Commission l’existence de plusieurs études commandées par son pays afin d’optimiser les opportunités offertes par ce type de coopération Sud-Sud.  Ces travaux ont mené à la proposition de création d’un institut international de développement de la coopération Sud-Sud et triangulaire, qui serait basé à Conakry. Le but de cet institut, a-t-il précisé, serait de renforcer les capacités en matière de recherche et de formation, la Banque islamique de développement (BID) ainsi que le PNUD ayant déjà fourni une assistance technique pour son développement, a-t-il précisé.

Le délégué a sollicité le soutien des États Membres et des partenaires bilatéraux et multilatéraux pour la concrétisation de ce projet, ajoutant que la Guinée était prête à offrir un espace approprié et toutes les commodités nécessaires pour le bon fonctionnement de l’institut, y compris l’immunité diplomatique et les avantages financiers.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: demandes de rationalisation des méthodes de travail et examen du budget-programme consacré au désarmement

Soixante-dix-huitième session,
10e séance plénière - après-midi
AG/DSI/3717

Première Commission: demandes de rationalisation des méthodes de travail et examen du budget-programme consacré au désarmement

La Première Commission, chargée des questions de désarmement et de sécurité internationale, a débattu, cet après-midi, de la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale et de la planification des programmes.  Elle a ainsi entendu une douzaine de délégations qui ont, pour l’essentiel, demandé une plus grande rationalisation des méthodes de travail de la Commission.  Des groupes de pays ont en outre présenté des positions divergentes quant au bien-fondé de la tenue à la Première Commission, d’une discussion sur le budget-programme de l’Assemblée générale.   

Les délégations qui ont pris la parole ont unanimement regretté que le Comité du programme et de la coordination (CPC) ne parvienne pas, depuis 2017, à dégager de consensus sur nombre des 28 programmes dont il est saisi, y compris le programme numéro 3 consacré au désarmement et qui concerne donc directement la Première Commission.   

Les représentants des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de l’Australie -au nom également des délégations du Canada et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ)-, de la Suisse et du Japon ont jugé que, même si le CPC échoue à transmettre des recommandations sur le budget-programme, la Première Commission ne doit pas pour autant s’engager dans une discussion qui relève du mandat de la Cinquième Commission, chargée des questions budgétaires et où sont approuvés les différents programmes des commissions techniques de l’Assemblée générale.  Aussi ces délégations ont-elles demandé au Président de la Commission de demander à son homologue de la Cinquième Commission d’adopter le programme numéro 3 sans modification.   

Pour autant, ces mêmes pays ont entendu les remarques formulées par plusieurs délégations d’Amérique latine et des Caraïbes, l’Uruguay, Cuba, El Salvador, le Mexique, le Costa Rica, le Chili et la Colombie, en ce qui concerne les méthodes de travail de la Première Commission.  En substance, ces pays demandent au secrétariat de la Commission qu’il soit tenu compte de la taille modeste de certaines délégations ne disposant pas de ressources humaines suffisantes pour assister à plusieurs sessions de délibérations sur les projets de résolution et de décision à l’examen pendant les sessions.   

La représentante du Costa Rica est allée jusqu’à proposer que les travaux de la Commission commencent par une semaine de discussion à huis-clos sur le programme des délibérations des États Membres avant que ne débute le débat général.  Ces différents pays ont également préconisé que les délégations concurrentes évitent de soumettre à délibération et adoption des projets de résolution et de décision eux-mêmes rivaux, une telle situation entraînant la multiplication –par ailleurs coûteuse- des processus de négociation.   

Toujours aux fins de rationalisation et d’efficacité des travaux de la Commission, a‑t‑il été dit, les textes ayant été uniquement amendés techniquement devraient être présentés tous les deux ou trois ans et les temps de paroles des délégués devraient être strictement respectés, voire réduits pour permettre à toutes celles et ceux qui le souhaitent de s’exprimer en plénière.   

Sur ce dernier point, le Costa Rica a plaidé pour une féminisation franche des délégations qui interviennent en séance mais aussi dans les processus de négociation.  Pour la représentante costaricienne, faire avancer la prise en compte de nouveaux projets de résolution et de négociation, y compris sur le genre, permettrait la transmission à l’Assemblée générale d’une nouvelle orientation programmatique de la Première Commission.   

De son côté, la Fédération de Russie a demandé que les organisations et observateurs autorisés à assister et participer à des réunions intergouvernementales de la Commission, et dont les contributions écrites sont publiées, s’expriment de manière politiquement neutre dès lors qu’ils ne représentent aucun gouvernement.  Par ailleurs, le représentant russe a accusé les États-Unis, pays hôte, de graves violations de l’Accord de Siège, certains de ses collègues n’ayant pu obtenir de visas alors qu’ils ne demandaient qu’à assister à d’importantes réunions sur le désarmement nucléaire.   

Par ailleurs, la France a appuyé les demandes de l’Uruguay et du Mexique relatives au multilinguisme, réclamant que tous les États Membres intervenant durant toute la durée des débats puissent compter sur l’interprétation simultanée de leurs déclarations dans les six langues officielles de l’ONU, ainsi que sur la traduction, dans des délais raisonnables et dans ces mêmes langues, de l’ensemble des documents officiels.   

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 13 octobre, à 15 heures.  Elle entamera la deuxième partie de son travail avec les différents débats thématiques, en commençant par celui consacré aux armes nucléaires.   

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission adopte un texte ambitieux sur l’assistance à la lutte antimines, face à une menace qui continue de faire des milliers de victimes

Soixante-dix-huitième session,
10e séance plénière - matin
CPSD/783

La Quatrième Commission adopte un texte ambitieux sur l’assistance à la lutte antimines, face à une menace qui continue de faire des milliers de victimes

Il faut réduire le coût humain des mines antipersonnel, des engins explosifs improvisés et des restes explosifs de guerre.  Voilà le constat sans équivoque qui a émergé, ce matin, du débat de la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation) sur l’assistance à la lutte antimines, un point de son ordre du jour examiné biannuellement.  Ces engins sont toujours responsables d’un nombre inacceptable de victimes - plus de 9 000 rien qu’en 2022, dont plus de 75% de civils. 

Le soutien exprimé à l’action antimines, en particulier celle menée sous l’égide de l’ONU, s’est traduit aujourd’hui par l’adoption sans vote de la résolution périodique sur l’Assistance à la lutte antimines, dont le langage a, cette année, été enrichi, comme s’en sont félicitées entre autres la Pologne, qui a facilité les consultations autour de ce texte, et l’Union européenne (UE). 

Plusieurs nouveautés cette année.  Tout d’abord, une référence à l’impact de la dissémination d’engins explosifs sur l’agriculture et la résilience locale a été incorporée au texte, de même qu’une autre sur le rôle crucial de la lutte antimines dans la réduction du coût humain des armes et sur l’importance d’inclure la lutte antimines dans les discussions qui seront menées au sujet du « Nouvel Agenda pour la paix », présenté par le Secrétaire général en juillet 2023. 

En outre, la formulation relative à la prise en compte des besoins des personnes handicapées a été renforcée par un nouveau paragraphe sur la mise en place d’un « mandataire mondial des Nations Unies pour les personnes handicapées dans les situations de conflit ou de consolidation de la paix », afin de garantir que les voix de ces personnes, y compris des victimes d’engins explosifs, soient entendues, ce qui a été expressément salué par l’UE.  La résolution aborde aussi l’impact négatif des phénomènes météorologiques extrêmes et des changements climatiques sur la protection des civils contre les menaces posées par les munitions explosives, alors que les mines enterrées refont surface lors d’inondations par exemple, comme l’a relevé le Soudan.   

Enfin, le texte encourage l’intégration d’activités tenant compte du climat et de la sécurité alimentaire dans les programmes de déminage, un point salué par l’Ukraine notamment.  Parmi les pays les plus concernés au monde par les mines, elle a accusé la Russie de se servir de la faim comme arme de guerre, en affirmant que les agriculteurs ukrainiens sont touchés de plein fouet par l’infestation de leurs terres cultivables par des engins explosifs.   

À l’avenir, l’UE souhaiterait que la résolution aille encore plus loin pour aborder notamment l’impact des mines et des restes explosifs de guerre sur l’exercice des droits humains et qu’elle tienne compte des préoccupations relatives à la présence de ces armes dans les zones peuplées où elles représentent un risque d’autant plus important pour les civils et les opérations humanitaires.   

Les pays directement concernés par les mines et restes explosifs de guerre comme la République démocratique populaire lao, le Myanmar, ou encore le Soudan ont mis l’accent sur l’importance de l’assistance qui leur est apportée par l’ONU en matière de déminage, mais également dans le cadre des coopérations bilatérale et Sud-Sud.  Outre le renforcement des capacités nationales de déminage, ils ont mis en exergue l’importance des campagnes de sensibilisation nationales aux risques posés par les engins explosifs, notamment en signalant les zones touchées pour éviter de nouveaux incidents.  Comme en a témoigné l’Angola, il s’agit d’un processus long, coûteux et nécessitant des ressources humaines bien formées et des équipements modernes de pointe.  « Après 21 ans de paix effective », le pays continue de retirer de ses sols les mines terrestres qui y ont été disséminées pendant les 27 ans de conflit interne qui ont précédé.   

Pour la Norvège, tous ces efforts doivent s’appuyer sur la mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et celle de la Convention sur les armes à sous-munitions, qui passe par l’universalisation de ces traités et le renforcement des normes internationales.  Partageant ce point de vue, le Japon a d’ailleurs annoncé aujourd’hui sa candidature à la présidence en 2025 de la Conférence d’examen des États parties à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel. 

Le rapport du Secrétaire général sur l’Assistance à la lutte antimines a été présenté par le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, M. Alexandre Zouev. 

La Commission se réunira à nouveau demain, 13 octobre, à 10 heures pour entamer l’examen du point relatif aux rayonnements ionisants.   

ASSISTANCE À LA LUTTE ANTIMINES 

Déclarations 

Au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie) a salué le vingt-cinquième anniversaire de l’adoption de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, dont les membres du groupe CANZ sont signataires, avant d’inviter les délégations qui ne l’ont pas encore fait à signer cet instrument.  Le représentant a appelé à la mise en œuvre de la Déclaration politique internationale sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, adoptée l’an dernier.  Les dispositions concernant les victimes des mines de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) ont déjà été signées par 186 États parties.  Malgré ces avancées, les engins explosifs continuent de menacer les civils et entravent leur circulation ainsi que la jouissance de leurs droits humains.  En outre, a-t-il ajouté, les phénomènes climatiques compliquent les activités de protection relatives aux mines.  En Ukraine, des pans entiers du territoire ont été minés et sont désormais impropres aux activités agricoles.  Le groupe CANZ reconnaît donc les avantages de la lutte antimines et souhaite qu’ils soient reflétés dans les discussions concernant le Nouvel Agenda pour la paix. 

M. NATSARAN JERANOKOSOL (Thaïlande) s’est alarmé de la létalité des armes explosives, relevant qu’elles provoquent plus d’une victime dans le monde à chaque heure qui passe.  À ce propos, il a souhaité mettre en exergue trois points importants.  En premier lieu, il a appelé à renouveler l’engagement en faveur du déminage et de la destruction des stocks de ces armes.  Il a réitéré le soutien de son pays à l’universalisation de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, encourageant tous les États Membres à y devenir parties.  Il a également préconisé le partage des pratiques optimales et des ressources, et à privilégier les transferts technologiques pour appuyer les efforts nationaux.  Il a aussi souhaité que soient octroyées des ressources suffisantes au Service de la lutte antimines de l’ONU et aux opérations de paix. 

Rappelant que la Thaïlande est un État partie à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel depuis 1997, le représentant a affirmé que son pays s’approchait de la dernière étape de ses opérations de déminage, avec moins de 22 km² de zones contaminées restantes.  La Thaïlande s’engage à devenir exempte de mines d’ici à 2026, a-t-il assuré.  Partisan d’une approche fondée sur la collaboration avec les communautés locales, il a cité en exemple le travail du Centre thaïlandais de lutte antimines.  Enfin, le représentant a préconisé une assistance aux victimes centrée sur la personne et ses besoins, inclusive et non discriminatoire.  La Thaïlande, a-t-il expliqué, intègre son aide aux victimes dans le cadre plus large des programmes destinés aux personnes handicapées, conformément aux orientations du Plan d’action d’Oslo, et assure un accès abordable aux soins avec sa couverture sanitaire universelle. 

M. TOUFIQ ISLAM SHATIL (Bangladesh) a rappelé que son pays a été l’un des premiers pays d’Asie du Sud à adhérer au Traité d’interdiction des mines antipersonnel et qu’il a rempli ses obligations en détruisant ses stocks dans les délais impartis.  Notant que les civils représentent 73% des victimes des engins explosifs improvisés en 2022, il a appelé à l’universalisation et à la mise en œuvre des instruments juridiques relatifs aux actions de lutte antimines, y compris dans le contexte du Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.  Il faut réduire le coût humain des armes, a insisté le représentant et, pour cela, il est important de parvenir à l’universalité des traités interdisant les armes inhumaines et aveugles.  Le délégué a également insisté sur l’intégration de la lutte antimines dans l’aide humanitaire, le développement durable et les initiatives en faveur de la paix et de la sécurité.  Il a mis l’accent sur l’assistance technique et le soutien au renforcement des capacités nationales dans le cadre des activités de lutte antimines, ainsi que sur l’intégration de l’action antimines dans les priorités de la consolidation de la paix lorsque cela est nécessaire et/ou possible.  En outre, le représentant a exigé que les soldats de la paix soient correctement formés et équipés pour assurer leur sécurité et améliorer la situation du pays hôte. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a appelé à atténuer les menaces causées par les guerres et les agressions que constituent les mines antipersonnel, lesquelles continuent de tuer des innocents longtemps après la fin des conflits.  La menace des mines terrestres et des restes explosifs de guerre constitue de graves menaces pour les civils, et notamment les enfants qui résident dans les zones déchirées par les conflits.  En 2021, 5 500 vies ont été fauchées tragiquement et d’innombrables autres personnes ont été blessées par ces engins.  Si la sensibilisation peut mobiliser l’action en faveur de la lutte antimines, la communauté internationale doit travailler de manière concertée pour trouver des solutions à ces problèmes et mobiliser les ressources nécessaires pour s’y attaquer, a fait valoir le représentant.  Pour ce faire, il est à ses yeux essentiel de disposer d’un programme intégré et inclusif d’action antimines.  Le Sri Lanka a adhéré à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et s’est engagé à ne pas produire ni stocker de tels engins.  Dans le cadre de son action antimines à la suite du conflit civil qui s’est terminé en 2009, le Sri Lanka a entrepris de nettoyer une vaste zone minée et entend poursuivre ses efforts dans d’autres zones peuplées.  Or, a ajouté le délégué, ces engins explosifs se trouvent souvent enfouis dans la jungle où opéraient les groupes armés, ce qui complique les activités de déminage.  Une tâche qui tire à sa fin, bien qu’une enquête non technique ait identifié des zones minées auparavant inconnues, a expliqué le représentant.   

Mme SARAH AHMED AHMED AL-MASHEHARI (Yémen) a commencé par rappeler que son pays est signataire de la Convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel depuis 1997 et qu’il s’est débarrassé de ses stocks.  Toutefois, la milice houthiste aurait disséminé environ deux millions de mines et autres engins explosifs improvisés dans plusieurs zones du pays, a‑t‑elle dénoncé, relevant que ces actions, outre leurs répercussions humanitaires, entravent également le trafic maritime international.  Dans près de 13 provinces du Yémen, des zones sont devenues inhabitables et plus d’un demi-million de personnes seraient touchées, a‑t‑elle poursuivi, ajoutant que cette situation prive les enfants d’une vie normale et fait obstacle à leur éducation.   

Les effets des changements climatiques aggravent ces risques, a‑t‑elle observé, avec notamment les inondations saisonnières qui déplacent les mines.  Bien que des opérations de déminage soient en cours, elles sont difficiles, a‑t‑elle déploré.  Elle a appelé la communauté internationale et les organisations compétentes à épauler les actions de son gouvernement, car si le soutien extérieur devait s’interrompre, cela mettrait un coup d’arrêt au travail des 66 équipes déployées dans le pays.  À ce titre, la déléguée a remercié l’Arabie saoudite, les États-Unis, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Norvège, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et toutes les ONG qui appuient les efforts du Yémen face à ce qu’elle a qualifié de « catastrophe humanitaire ».   

Mme HEDDA SAMSON, de l’Union européenne (UE), a mis en avant l’unité de l’UE dans son engagement en faveur d’un monde sans mines antipersonnel puisque ses 27 États membres sont États parties à la Convention d’Ottawa et, qu’aujourd’hui, ils coparrainent tous la résolution de l’Assemblée générale sur l’assistance à la lutte antimines.  L’UE continuera à soutenir les actions humanitaires de lutte antimines dans le monde entier, y compris face à l’agression de la Russie en Ukraine, a‑t‑elle assuré.  La déléguée est d’avis que la résolution de cette année constitue une avancée positive puisque sa nouvelle formulation reconnaît des éléments importants du sujet complexe de l’action antimines, conformément aux priorités humanitaires des Nations Unies.  Le texte encourage désormais les organismes compétents à inclure la lutte antimines dans leurs programmes sur le climat et la sécurité alimentaire, et reconnaît également que les mines constituent un obstacle à l’agriculture et à la résilience locale, ainsi qu’à la consolidation de la paix, a‑t‑elle noté.  Les États Membres ont également convenu de noter le rôle de la lutte antimines dans la réduction du coût humain des armes et la nécessité d’inclure cette lutte dans les discussions qu’ils auront sur le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, s’est-elle félicitée.  Heureuse de constater la mise en place d’un défenseur mondial des Nations Unies pour les personnes handicapées dans les situations de conflit et de consolidation de la paix, la représentante y a vu un progrès significatif pour la prise en compte d’une perspective « intégrant le handicap » dans les programmes d’action antimines.   

À l’avenir, l’UE espère que la résolution pourra refléter certains points supplémentaires qui ont été discutés au cours des consultations, a‑t‑elle toutefois signalé.  En particulier, l’UE souhaiterait que l’on parle de l’impact des mines et des restes explosifs de guerre sur la jouissance des droits humains.  Il serait également souhaitable que les préoccupations pertinentes concernant les armes explosives dans les zones peuplées soient prises en compte, car leur utilisation représente un risque sérieux pour les civils et les opérations humanitaires, a précisé la représentante. 

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a fait valoir que la lutte antimine est essentielle pour garantir l’acheminement de l’aide humanitaire et faire en sorte que les communautés affectées puissent retrouver une vie sûre et digne.  Toutefois, il a estimé que le texte du projet de résolution sur la lutte antimine de cette année aurait gagné à être renforcé.  S’il exprime une profonde préoccupation face aux conséquences humanitaires et de développement des mines et des restes explosifs de guerre dans les pays touchés, ce texte contient également une référence au rôle crucial de l’action antimine dans la réduction du coût humain des armes et, dans ce contexte, de l’importance d’en faire état dans les discussions concernant le Nouvel Agenda pour la paix.  Parmi les autres éléments inclus dans ce projet de résolution, le représentant a relevé la contribution de la lutte contre les mines à la réalisation de solutions durables pour les réfugiés et les personnes déplacées, la réponse aux besoins spécifiques des personnes handicapées ainsi que l’impact négatif des événements climatiques extrêmes sur la protection des civils contre les menaces liées aux munitions explosives.   

M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a rappelé d’emblée que son pays fait partie des pays les plus touchés par les mines terrestres, et que son gouvernement a fait de la lutte antimines une priorité nationale.  Il a salué la coopération du Service de la lutte antimines de l’ONU à cet égard, avant d’annoncer que les États de l’est du pays ont été déclarés « nettoyés et dépollués », tout comme certaines parties du Darfour ou du Kordofan du Sud qui ont été déminées.  Khartoum a noué des partenariats avec des organisations internationales pour sensibiliser plus de quatre millions de personnes à ce jour aux risques et menaces posés par les mines et les restes explosifs de guerre, a précisé le représentant.  Le défi du financement reste cependant de taille compte tenu de l’ampleur du problème, a concédé le représentant.  Il a également parlé des problèmes relatifs aux déplacements non contrôlés des tribus, de la difficulté d’accès de certaines zones qui ont besoin d’être déminées et de l’impact des inondations sur l’action antimines.   

M. SAHRAEI (République islamique d’Iran) a déclaré que la tragédie des mines terrestres et des restes explosifs de guerre laissés par les conflits « imposés » constitue un problème important au Moyen-Orient.  Il s’est inquiété de l’impact délétère de la présence de tels engins sur la situation humanitaire et le développement durable des populations civiles dans des pays tels que l’Iraq, l’Azerbaïdjan, l’Afghanistan, ou encore le Yémen et la Syrie, de même que dans son propre pays.  Après avoir salué le travail accompli dans la région par le Service de la lutte antimines de l’ONU, le représentant a exprimé la volonté de son pays de s’engager activement dans des programmes pertinents et de partager l’expérience et les connaissances qu’elle a acquises dans ce domaine, qu’il s’agisse du déminage des zones infestées ou de la sensibilisation des civils.  Le représentant a demandé que soit désormais intégré dans les rapports annuels du Secrétariat l’examen des implications des exclusions et limitations rencontrées par les populations et les gouvernements des territoires concernés.  En outre, a-t-il ajouté, les États sont légalement et moralement responsables de la dissémination de mines terrestres et d’autres engins explosifs dans d’autres pays, et, à ce titre, ils doivent assumer la responsabilité de fournir l’assistance et le soutien nécessaires aux pays touchés.  Enfin, le représentant a réaffirmé l’importance de prendre en compte les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales qui affectent l’accès aux équipements de déminage, ainsi que le transfert de technologies et de ressources financières nécessaires. 

M. AL-SAED (Iraq) a relevé le coût particulièrement élevé et la difficulté des opérations de déminage, entravées par le manque de cartes.  Les statistiques, a-t-il poursuivi, montrent que près de 6 500 km² du territoire national sont contaminés par les mines, dont plus de 2 000 km² considérés comme particulièrement dangereux, en raison notamment de la densité de la population.  Les victimes seraient nombreuses dans les territoires autrefois contrôlés par Daech, a-t-il ajouté.  Outre les conséquences physiques et psychologiques, les victimes voient également leur productivité affectée, ce qui rend difficile la mission de réintégration dans la vie active que s’est fixée le gouvernement. 

L’Iraq, a-t-il assuré, travaille à la mise en œuvre de l’article 5 de la Convention d’Ottawa, présente depuis 2028 des rapports réguliers pour informer de la situation et facilite le travail des organisations qui contribuent au déminage.  Son pays consent aussi de vastes efforts de sensibilisation, notamment à travers les médias locaux, a-t-il poursuivi, ajoutant que le Gouvernement forme des cadres à fournir soins médicaux et prothèses aux victimes.  Il a appelé les agences spécialisées à appuyer le Gouvernement iraquien, lequel a besoin de technologies de pointe pour continuer ses opérations, exhortant la communauté internationale et les bailleurs de fonds à poursuivre leur soutien. 

M. MATEUS PEDRO LUEMBA (Angola) a estimé que l’assistance à la lutte antimines devrait mériter une plus grande attention de la part des États Membres pour faire en sorte que nos efforts collectifs aboutissent à l’élimination totale de l’utilisation des mines terrestres.  La réalisation de notre aspiration commune à un monde sans mines nécessite selon lui un engagement renforcé des États et la mise en œuvre de mesures concrètes.  Après 21 ans de paix, précédés de 27 ans de conflit interne, l’Angola continue de lutter pour libérer son sol des mines terrestres.  Or, il s’agit d’un processus coûteux, nécessitant des ressources humaines bien formées et des équipements modernes de pointe.  Le Gouvernement angolais, avec le soutien de partenaires internationaux, s’affaire à réaliser un programme de déminage exhaustif afin d’être exempt de mines terrestres d’ici à 2025.  En tant que signataire de la Convention d’Ottawa, l’Angola doit toujours déminer plus de 70 millions de mètres carrés de son territoire, a‑t‑il noté, en expliquant que le processus de déminage peut être plus coûteux encore que la production d’armes.  Le Gouvernement angolais a également mis en place des campagnes nationales de sensibilisation aux risques posés par les engins explosifs, notamment en signalant les zones touchées pour éviter de nouveaux accidents, et mis en place une agence nationale de lutte contre les mines ainsi qu’un hôpital spécialisé.   

M. ONO SHO(Japon) a déploré que les mines terrestres continuent de menacer la vie des civils, malgré les progrès significatifs accomplis ces deux dernières décennies.  Aujourd’hui, a-t-il relevé, nous sommes confrontés à de nouvelles difficultés avec les engins explosifs improvisés, qui provoquent un nombre croissant de victimes, et les événements météorologiques extrêmes, qui entraînent le déplacement des mines.  Le projet de résolution sur l’assistance à la lutte antimines, dont le Japon est coauteur, prend en compte ces menaces émergentes, a-t-il poursuivi, appelant à son adoption. 

Le Japon, a-t-il expliqué, concentre son action sur trois domaines: l’assistance aux activités de déminage, la promotion de la coopération régionale Sud-Sud et l’aide aux victimes.  En 2022, son pays a fourni une aide totale d’un montant de plus de 52 millions de dollars, répartie entre 22 nations, notamment par l’intermédiaire du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Service de la lutte antimines de l’ONU.  Il a cité un programme conjoint du Japon et du Cambodge en vue d’appuyer les opérations de déminage en Ukraine, qui a accès en plus à un système d’imagerie des mines terrestres.  Enfin, il a annoncé la candidature de son pays à la présidence de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel en 2025. 

Mme EGRISELDA GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a regretté de constater que l’utilisation d’armes à sous-munitions et de mines antipersonnel s’est poursuivie au cours des deux dernières années, en mettant en avant la menace constante que cela représente pour les populations civiles et les personnels humanitaires.  Rien qu’en 2022, ces armes ont fait plus de 9 000 victimes dans le monde, dont 73% de civils, s’est indignée la représentante, en exigeant le respect des traités internationaux pertinents.  Après avoir confirmé le soutien d’El Salvador aux activités de lutte antimines de l’ONU, la déléguée a salué l’impact du soutien extérieur sur le renforcement des capacités nationales, en souhaitant une hausse de ces services compte tenu du nombre de conflits en cours.  Elle a également insisté sur l’impératif de sécuriser le personnel de maintien de la paix déployé dans des environnements particulièrement dangereux, avant d’appeler à miser sur la formation et la parité femmes-hommes au sein des activités antimines de l’ONU.   

Mme MARAH MUSTAFA (République arabe syrienne) a déclaré que son pays accorde une attention particulière à la lutte antimines, ces engins ayant été utilisés à grande échelle sur son territoire par les organisations terroristes.  Les activités liées au déminage constituent la clef de voûte pour parvenir à un environnement sûr pour les civils et au retour des réfugiés syriens dans leur pays.  Malgré des moyens limités, l’armée syrienne consent des efforts inlassables et sacrifie des vies afin de dépolluer plus de 7,3 millions de mètres carrés de terre de ces engins explosifs du pays.  À cette fin, un comité national a été créé l’an dernier, lequel a mis en place des normes techniques permettant de régir l’ensemble des activités de déminage.  Le Gouvernement syrien a signé en 2018 un Mémorandum d’entente avec le Service de la lutte antimines de l’ONU afin de soutenir ses efforts antimines dans les zones autrefois contrôlées par des groupes terroristes, a indiqué la représentante.  Face à l’étendue des zones affectées par les mines, elle a souligné l’importance de renforcer la coopération et la coordination dans la lutte antimine et d’allouer les ressources nécessaires, sans politiser cette question humanitaire en imposant des restrictions unilatérales touchant les équipements, le financement et les ressources nécessaires.  Toutefois, le principal obstacle auquel est confronté le Gouvernement pour mener à bien ces efforts est le déficit de financement.   

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) s’est félicité de l’inclusion de la lutte antimines dans les programmes de sécurité alimentaire, ainsi que de la reconnaissance du fait qu’elles constituent un obstacle à l’agriculture.  L’invasion par la Russie a fait de l’Ukraine l’un des pays les plus infestés au monde par les mines, a‑t‑il affirmé, en précisant que 174 000 kilomètres carrés de terres seraient concernés – soit 30% du territoire national.  Dans le pays, plus de six millions de personnes vivraient dans des zones à risque, a‑t‑il poursuivi, en fustigeant la Russie pour avoir disséminé des mines à proximité d’écoles, d’hôpitaux et de zones résidentielles.  À ce jour, 250 personnes auraient été tuées par les mines et plus de 40 autres blessées.   

Le représentant a accusé la Russie de se servir de la faim comme arme de guerre, relevant que les agriculteurs ukrainiens sont touchés par la contamination de leurs terres agricoles.  Un total de 470 hectares de terres fertiles seraient affectés, a‑t‑il continué.  Il a ensuite mentionné la collaboration de l’Ukraine avec des partenaires internationaux en vue d’élaborer une stratégie de déminage.  Le projet, a‑t‑il expliqué, repose sur trois piliers: rétablir le potentiel des terres, protéger les victimes et créer une meilleure architecture du déminage.  Le délégué a enfin salué la réponse favorable de l’ONU aux appels lancés par son pays, notamment pour fournir des équipements et des capacités en matière de déminage, remerciant tous les États Membres ayant par ailleurs contribué aux efforts.   

M. SO INXAY SOULIYONG (République démocratique populaire lao) a commencé par remercier les partenaires de son pays dans la lutte antimines, les agences des Nations Unies et les organisations internationales qui contribuent à renforcer les capacités nationales en la matière.  Toutefois, il reste encore beaucoup à faire, a‑t‑il concédé, en rappelant que son pays est l’un des plus lourdement touchés de la planète.  Les restes d’armes à sous-munitions larguées sur son sol il y a plus de 40 ans constituent toujours une menace majeure pour les civils, notamment les femmes et les enfants, a‑t‑il expliqué, et des accidents se produisent chaque année.  Au cours de la dernière décennie, ces munitions non explosées ont tragiquement coûté la vie de 25 à 60 personnes par an, la plupart étant des victimes civiles – des enfants et des agriculteurs vivant dans les zones rurales.  Par conséquent, l’élimination de ces engins non explosés n’est pas seulement une nécessité économique, mais aussi une obligation morale, a argué le représentant.  Avec environ 80 millions de sous-munitions non explosées, la contamination couvre encore un tiers du territoire du pays, a‑t‑il déploré.  Son gouvernement continue donc à faire tout son possible pour assurer la sécurité de ses citoyens et améliorer le bien-être social et économique des populations affectées.  Il a en conclusion fait valoir que les actions de déminage ont permis de mener à bien des projets de développement, notamment la construction d’infrastructures de transport telles que la première ligne ferroviaire à grande vitesse du pays.   

Mme UNNI RAMBØLL (Norvège) a lancé un appel à la communauté internationale pour se mettre d’accord sur des normes communes et la règlementation des armes, en s’appuyant notamment sur la Convention sur les armes à sous-munitions et la Convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel, « qui sont les pierres angulaires » dans le domaine de la lutte antimines.  Ces quatre dernières années, des progrès ont été possibles en termes de décontamination, a‑t‑elle reconnu, et cela malgré la pandémie, mais les mines antipersonnel et les engins explosifs improvisés restent une menace sérieuse dans de nombreux pays du monde, notamment ceux frappés par un conflit et là où opèrent des groupes armés non étatiques.  Pour la déléguée, il serait judicieux que les engins explosifs improvisés soient couverts par la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, ce qui n’est pas encore le cas.  En outre, elle a exhorté les États parties à cette Convention à maintenir, voire accroitre, leurs financements de la lutte antimines.  La Norvège, qui est un partenaire important des activités antimines, persiste à plaider pour l’universalisation des conventions internationales dans ce domaine, a‑t‑elle souligné, et plus largement des instruments internationaux en matière de désarmement.  La déléguée a donc appelé tous les États à y souscrire.   

M. HONGBO WANG (Chine) a déclaré que les efforts collectifs de lutte antimines déployés au cours des dernières années, notamment par l’ONU, ont permis de réaliser des progrès notables qui se sont traduits par une réduction des risques.  Cependant, de nombreux facteurs aggravent la situation dans de nombreux cas aux prises avec des problèmes de contamination.  Le représentant a plaidé en faveur du respect des principes directeurs en matière de déminage, arguant que les circonstances particulières des pays concernés doivent être prises en compte pour que les luttes antimines soient adaptées au contexte.  Pour assurer la pérennité de ces actions, nous devons permettre aux États d’assurer la transition entre l’aide extérieure et l’autonomie.  En 1998, la Chine a mis en place un plan de déminage qui s’inscrit dans la durée, y compris des sessions de formation et des visites sur le terrain, fournissant une assistance, notamment financière, à plus de 40 pays dans plusieurs régions du monde.  En tant que coprésident, avec le Cambodge, du groupe d’experts de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur la question, la Chine a organisé une opération conjointe de déminage.   

M. AHIDJO (Cameroun) a commencé par saluer le rapport du Secrétaire général de l’ONU sur l’assistance à la lutte antimines, relevant qu’il met en relief la nécessaire mise en œuvre d’instruments juridiques internationaux, ainsi que les progrès accomplis dans la mise en place de mécanismes d’intervention rapide.  Malgré les millions de stocks détruits au cours des 20 dernières années, les mines continuent de tuer, de mutiler et de fragiliser les efforts de reconstruction ou de consolidation de la paix, a-t-il déploré.  Elles hypothèquent la fourniture d’une assistance humanitaire aux victimes de conflit et perpétuent la précarité, a-t-il dénoncé, estimant que ces conséquences justifient largement les efforts consentis par la communauté internationale.  Il a affirmé que la diversification des engins explosifs contraint à un changement d’approche.  À ce titre, il a préconisé des mesures urgentes contre les engins explosifs improvisés, principale cause de l’augmentation du nombre de victimes.  Alors que son pays est touché par les mines et autres engins explosifs laissés par Boko Haram, il a appelé à des efforts de sensibilisation ainsi qu’à la mobilisation des ressources – notant que la plus grande partie d’entre elles émanent de contributions volontaires. 

Pour M. KYAW MOE TUN (Myanmar), la contamination par des engins explosifs met constamment en péril la vie des civils, les empêche de se déplacer en toute sécurité et restreint leur accès aux services et à la fourniture de l’aide humanitaire.  Elle pose également de graves problèmes sociaux et économiques aux populations civiles touchées.  Par conséquent, l’action antimines est essentielle à la reconstruction, expliqué le représentant, et joue un rôle significatif dans la réalisation des objectifs de développement durable, y compris en termes de réduction de la pauvreté, d’accès à l’éducation, de sécurité alimentaire et d’égalité des sexes.  Il a dénoncé l’implication de longue date de l’armée du Myanmar dans la dissémination des mines terrestres depuis 1969, notant également que depuis le coup d’État militaire illégal de février 2021, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a signalé que la population du Myanmar a été victime d’actes de terreur spécifiques aux mains de l’armée: l’augmentation des frappes aériennes contre la population civile, les massacres brutaux lors d’opérations terrestres et l’incendie généralisé et systémique des maisons et des propriétés civiles.  En outre, la junte a déployé de plus en plus de mines terrestres antipersonnel et d’armes à sous-munitions, a affirmé le délégué qui a également accusé cette junte d’utiliser les civils comme boucliers humains et comme démineurs.  Cette tragédie terrible et indicible au Myanmar exige, selon lui, une attention et une intervention internationales immédiates pour faire face à l’aggravation des souffrances humaines et à la catastrophe humanitaire.  Il a donc demandé à la communauté internationale d’offrir un financement souple et direct aux organisations humanitaires locales, afin de renforcer leur capacité à fournir une aide et des services vitaux aux nécessiteux, y compris aux victimes des mines.  En guise de conclusion, le représentant a déclaré que « la seule façon d’éradiquer de telles atrocités est de mettre fin à la dictature militaire, de restaurer la démocratie et de construire une union fédérale démocratique ». 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a indiqué que la question du déminage est historiquement importante pour son pays, en particulier dans le contexte de la résolution des crises régionales et de la lutte contre le terrorisme.  De nombreux États touchés par des conflits ont besoin d’une assistance en matière de déminage afin d’assurer la transition vers la restauration des infrastructures et la reprise des activités de développement.  Le Service de la lutte antimines de l’ONU joue un rôle important dans les efforts internationaux de lutte contre les mines, entre autres dans le cadre des opérations de maintien de la paix et des missions politiques, en renforçant les capacités des États.  La Fédération de Russie a participé aux travaux de déminage en Syrie afin de permettre un accès sûr à des zones agricoles et le retour sûr des réfugiés syriens dans leur pays d’origine.  La représentante a expliqué que son pays accorde une attention particulière au développement de la coopération internationale dans ce domaine, par le biais d’échanges d’expériences et de renforcement des capacités techniques et opérationnelles avec d’autres pays.   

M. ABAALALA (Arabie saoudite) s’est félicité des efforts déployés par l’ONU en matière de déminage, avant de plaider pour que le déminage soit mentionné spécifiquement dans les traités de cessez-le-feu et à l’issue des conflits.  Il a rappelé qu’en 2018, son pays avait lancé le projet de déminage Masam au Yémen, qui se heurte à de grandes difficultés, a‑t‑il déploré, en raison de l’absence de cartes et de la dissémination arbitraire des mines autour des maisons, sur des terres agricoles ou des pâturages.  En 2023, Masam a permis de mettre hors d’état de nuire plus de 2 900 engins non explosés et de décontaminer plus de 18 000 kilomètres carrés de territoire, s’est-il félicité.  Il a rendu hommage à 33 collaborateurs tués depuis le début du projet au Yémen, saluant leur sacrifice ultime.  Outre le déminage, a‑t‑il poursuivi, son pays offre également des soins et des services de réinsertion aux blessés.  Le représentant a conclu en appelant à ce que les responsables de la dissémination des mines soient tenus comptables de leurs actes, et contraints de fournir des services antimines et des cartes.   

DÉCISION SUR LE PROJET DE TEXTE CONCERNANT L’ASSISTANCE À LA LUTTE ANTIMINES 

En adoptant le projet de résolution sur l’Assistance à la lutte antimines, sans vote, l’Assemblée générale demanderait aux États Membres de s’acquitter de leurs obligations internationales respectives en matière de lutte antimines et de poursuivre leur action, notamment au moyen de la coopération Sud-Sud et de la coopération régionale et sous-régionale, étant entendu qu’ils doivent avoir la maîtrise des programmes, avec, selon qu’il conviendra et s’ils en font la demande, l’assistance de l’ONU et des organisations compétentes en matière de lutte antimines et en coordination avec le pays touché, pour encourager la mise en place et le développement de capacités nationales de lutte antimines dans les pays où les mines et les restes explosifs de guerre font peser une grave menace sur la sécurité, la santé et la vie des populations civiles locales, empêchent la culture des terres et la résilience à l’échelle locale ou compromettent l’acheminement de l’aide humanitaire et l’action de développement socioéconomique et de consolidation de la paix aux échelons national et local.   

L’Assemblée générale  prierait en outre instamment tous les États Membres, en particulier ceux qui sont le mieux à même de le faire, ainsi que les organismes des Nations Unies et les autres organisations et institutions compétentes en matière de lutte antimines, d’aider les États touchés par les mines et les restes explosifs de guerre en leur fournissant une assistance pour leur permettre de créer ou de développer leurs propres capacités de lutte antimines, et notamment de s’acquitter de leurs obligations internationales en la matière et d’appliquer des stratégies et des plans de lutte antimines à l’échelon national, ainsi qu’un soutien aux programmes nationaux et locaux et des contributions régulières et prévisibles en temps voulu, à l’appui des activités de lutte antimines.  L’Assemblée générale encouragerait enfin les efforts visant à faire en sorte que toutes les activités de lutte antimines soient menées conformément aux Normes internationales de la lutte antimines ou à des normes nationales compatibles avec celles de la communauté internationale. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: plaidoyer pour un renforcement de la coopération ONU-Union africaine et le financement par l’ONU des opérations de paix pilotées par l’UA

9435e séance – matin
CS/15438

Conseil de sécurité: plaidoyer pour un renforcement de la coopération ONU-Union africaine et le financement par l’ONU des opérations de paix pilotées par l’UA

Une semaine après la tenue à Addis-Abeba de sa dix-septième réunion consultative conjointe annuelle avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA), le Conseil de sécurité a entendu ce matin de nouveaux plaidoyers en faveur du renforcement de la coopération entre l’ONU et l’UA aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales, y compris au-delà du Chapitre VIII de la Charte, relatif aux accords régionaux. 

Une fois encore, des appels ont été lancés pour que le Conseil adopte une résolution sur le financement par l’ONU des opérations de paix conduites par l’UA.  Plusieurs délégations, y compris parmi les membres permanents du Conseil, se sont dites prêtes à soutenir une telle initiative.

Parmi les intervenants, le Représentant spécial du Secrétaire général auprès de l’UA et Chef du Bureau de l’ONU à Addis-Abeba, M. Parfait Onanga-Anyanga, s’est voulu le porte-voix de cette revendication.  Après avoir souligné que le communiqué final de la réunion, publié le 6 octobre, avait mis en avant la volonté du Conseil de sécurité et du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine de travailler ensemble pour résoudre les problèmes de paix et de sécurité du continent, il a insisté sur la dimension complémentaire des deux organes: leur partenariat stratégique repose, a-t-il dit, sur le double principe de la complémentarité et des avantages relatifs. 

Mais, au vu des défis que connaît le continent, des efforts renouvelés sont nécessaires, si l’on veut parvenir aux objectifs de paix et de sécurité collective, conformément aux recommandations du Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, a fait observer M. Onanga-Anyanga.  Pour lui, il faut mettre l’accent sur les systèmes de prévention au niveau régional en améliorant la diplomatie préventive, tout en renforçant les opérations de paix. 

Cette approche ne sera toutefois réussie et efficace que si elle est soutenue par des financements suffisants, souples, prévisibles et pérennes des opérations de paix pilotées par l’UA, a insisté le Représentant spécial.  En outre, en donnant l’initiative à ces opérations africaines, le Conseil de sécurité, dans les faits, s’autonomisera lui-même, en renforçant ses fonctions telles que décrites à l’Article 24 de la Charte des Nations Unies, a-t-il assuré. 

L’Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies n’a pas dit autre chose. Elle a rappelé qu’il existe, depuis 2017, un cadre commun pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité entre l’ONU et l’UA.  Ce qu’il faut maintenant, c’est se débarrasser de la lourdeur administrative et mettre en commun les ressources des deux organisations pour réagir rapidement et de manière décisive aux crises, a-t-elle plaidé.  C’est pourquoi le Conseil de sécurité devrait adopter une résolution sur le financement par le budget ordinaire de l’ONU, des opérations de paix dirigées par l’UA. 

Le Directeur de Amani Africa, un groupe de réflexion panafricain travaillant sur les processus politiques multilatéraux, M. Solomon Ayele Dersso, s’est voulu encore plus incisif: approfondir ce partenariat n’est pas une question de choix mais une condition préalable à la réalisation des objectifs de paix, de sécurité et de développement.  Renvoyant les membres du Conseil de sécurité au rapport du Secrétaire général « Notre Programme commun », il a assuré que les organisations régionales comblent une lacune critique dans l’architecture mondiale de paix et de sécurité, avant de plaider à son tour en faveur d’un nécessaire arrangement systématique, inclusif et institutionnalisé pour cadrer cette coopération.  Il a en particulier appuyé la proposition du Secrétaire général visant une nouvelle génération d’opérations de paix sur le continent.  Dirigées par l’UA et appuyées par l’ONU, celles-ci combineraient les forces respectives des deux organisations, en donnant la priorité aux solutions politiques. 

Ces analyses, qualifiées de « pertinentes », ont été appuyées par nombre de délégations, en premier lieu par les trois pays africains membres du Conseil.  Par la voix du Mozambique, les A3 ont repris à leur compte les appels du Secrétaire général et du Communiqué conjoint d’Addis-Abeba: il faut un accès d’urgence au Fonds des contributions statutaires de l’ONU pour les opérations d’appui à la paix de l’UA.

D’autres délégations, comme celles du Brésil ou de l’Albanie, ont appuyé cette demande.  Compte tenu que l’UA est un outil formidable, capable de mettre fin aux souffrances immenses endurées par les civils dans tout le continent, ses opérations de maintien de la paix doivent s’appuyer sur un financement prévisible, durable et flexible, a, de même, estimé la Suisse. 

Pour le représentant de la France aussi, il y a besoin d’approfondir cette coopération, dans le contexte où les efforts déployés par l’UA ont effectivement eu des résultats, en particulier au Soudan, en République démocratique du Congo ou pour lutter contre les Chabab en Somalie.  Pour cette raison, la délégation française est prête à soutenir l’adoption d’une résolution sur le financement durable des opérations africaines de paix. 

Le Royaume-Uni a indiqué son « impatience » à travailler à cette résolution-cadre, et la Fédération de Russie, pour qui le potentiel de coopération de l’ONU avec l’Union africaine n’a pas encore été pleinement exploité, s’est dite prête à réfléchir à un modèle de financement viable.  Malte a appelé à un consensus autour de la question, tandis que le Japon a dit soutenir « en principe » la création d’un tel mécanisme de financement, en partie et au cas par cas.  Sans se positionner, les États-Unis ont estimé que l’ONU et ses partenaires régionaux doivent travailler ensemble autour des priorités identifiées par le Secrétaire général dans son rapport. 

La Chine a, quant à elle, insisté sur la nécessité pour l’ONU de traiter d’égal à égal avec l’UA dans le respect et la compréhension mutuels.  Il n’y a pas de hiérarchie, et de ce fait, il ne faut pas imposer de règles à l’Union africaine, a-t-elle insisté. 

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Union africaine (S/2023/629)

Déclarations

M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, Représentant spécial du Secrétaire général auprès de l’Union africaine et Chef du Bureau des Nations Unies auprès de l’Union africaine (UA), a commencé par remercier les membres du Conseil de sécurité qui ont visité la semaine dernière le siège de l’Union africaine à Addis-Abeba.  Vos échanges avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, ainsi que le communiqué final qui a sanctionné vos discussions démontrent de votre volonté de travailler ensemble pour résoudre les problèmes de paix et de sécurité du continent, dans un esprit de coopération, de respect mutuel et de solidarité, a-t-il dit.  Il a ensuite estimé que le partenariat stratégique ONU-UA repose sur le double principe de la complémentarité et des avantages relatifs, en tirant parti des forces de chaque organisation pour atteindre plus efficacement les objectifs communs de paix et de stabilité.  Il a mis l’accent sur la diplomatie préventive et la médiation.

Le Représentant spécial a également déclaré que le Conseil avait visité le continent au moment même où le continent est confronté à des crises liées à la logique de guerre, au terrorisme, aux coups d’État et aux effets des changements climatiques. Tout ceci risque de mettre à mal les maigres gains des années pré-COVID-19, alors même que les efforts de relance postpandémie peinent à produire les effets escomptés, laissant les pays africains dans un état de stress fiscal et d’endettement.  Ici apparaît, dans sa complexité, le lien entre développement, paix et sécurité, a-t-il fait observer; d’où, les injonctions du Secrétaire général visant à adopter une approche holistique aux efforts de prévention des conflits, en particulier en Afrique. 

M. Onanga-Anyanga s’est ensuite attardé sur les défis que connaît le continent, notamment les changements climatiques, l’enracinement des inégalités, les confits, les actes de terrorisme et d’extrémisme violent, les changements anticonstitutionnels de gouvernance ou les crises humanitaires et sécuritaires, comme au Soudan ou en République démocratique du Congo.  Pour cette raison, il faut des efforts renouvelés pour que la sécurité collective devienne plus efficace, conformément aux recommandations figurant dans la note politique du Secrétaire général, dans le Nouvel Agenda pour la paix de juillet 2023, a-t-il plaidé.  Il faut mettre l’accent sur les systèmes de prévention au niveau régional en améliorant la diplomatie préventive, tout en renforçant les opérations de paix.  Et en la matière, l’Union africaine a réalisé des efforts louables, a-t-il assuré.

Mais cette approche ne sera réussie et efficace que si elle est soutenue par des financements suffisants, souples, prévisibles et pérennes des opérations de paix pilotées par l’Union africaine, a poursuivi le Représentant spécial, appelant, une fois de plus, le Conseil de sécurité à réfléchir à cette question.  En donnant l’initiative à ces opérations africaines, le Conseil de sécurité, dans les faits, s’autonomisera lui-même, en renforçant ses fonctions telles que décrites dans l’Article 24 de la Charte des Nations Unies, a-t-il assuré.  Il a alors appelé le Conseil de sécurité à consulter des experts et expertes, avant que des décisions importantes ne soient prises.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies, a exhorté à unir les efforts pour gérer les crises en cours et prévenir les conflits futurs.  Il faut approfondir le multilatéralisme, la solidarité et la coopération pour promouvoir la paix et la sécurité internationales, a-t-elle déclaré. Mme Mohammed a demandé plus d’équité, d’inclusivité et d’efficacité au sein du Conseil de sécurité face aux crises de longue date ou émergeantes.  L’Union africaine, a-t-elle ajouté, demeure extrêmement préoccupée par l’éclatement de conflits dans de nombreuses régions du monde y compris les changements anticonstitutionnels de gouvernement, le terrorisme, les changements climatiques et les défis socioéconomiques difficiles.

Depuis la signature du Cadre commun Organisation des Nations Unies (ONU)-Union africaine (UA) pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité en 2017, il faut renforcer et améliorer la collaboration dans la prévention des conflits, la gestion des crises et le renforcement de l’État, a poursuivi Mme Mohammed.  De la Libye au Sahel, en passant par la Corne de l’Afrique, l’Afrique centrale et les Grands Lacs, il faut empêcher que les parties au conflit se jouent de l’une ou de l’autre des deux organisations pour faire avancer leurs propres intérêts. L’Union africaine et l’ONU doivent restaurer la confiance et renforcer la transparence qui sont essentielles pour résoudre les conflits. 

L’Observatrice permanente a invité à mettre en commun les ressources des deux organisations en cette période de crise économique et à se débarrasser de la lourdeur administrative pour réagir rapidement et de manière décisive aux crises. Elle a donc appuyé la demande du Gouvernement fédéral somalien d’une pause technique dans le retrait de la Mission de l’Union africaine pendant trois mois et des ressources pour préserver les gains durement acquis en Somalie.  Elle a aussi prié le Conseil de sécurité d’adopter une résolution sur le financement des opérations de paix dirigées par l’UA par le biais du budget ordinaire de l’ONU. 

Mme Mohammed a encouragé à faire preuve d’innovation en matière de rétablissement de la paix.  Elle a ainsi estimé qu’alors que plusieurs missions de maintien de la paix de l’ONU se retirent, leurs moyens logistiques devraient être attribués aux mécanismes régionaux pour gérer les conflits à travers le continent.  La réaffectation de ces outils peut renforcer les efforts régionaux dans le règlement des conflits, a-t-elle ajouté. 

Mme Mohammed a également exhorté à s’attaquer à « la crise de l’État » sur le continent africain.  Il faut aider les États à devenir plus viables et capables de répondre aux besoins fondamentaux de leurs citoyens en matière de sécurité humaine, a estimé l’Observatrice permanente.  Les causes profondes des conflits découlent souvent de l’échec ou de l’incapacité d’assurer une gouvernance inclusive et la fourniture de biens et services essentiels. Par conséquent, il faut investir plus de temps, d’efforts et de ressources dans le renforcement de la résilience et des capacités des États et améliorer leur gouvernance et leur potentiel de développement.  Mme Mohammed a appelé les partenaires à adhérer à la Facilité africaine pour les transitions inclusives (AFSIT) visant à renforcer l’appui aux États qui traversent des transitions politiques difficiles. 

Enfin, Mme Mohammed a réitéré la détermination de l’Union africaine s’agissant de la réforme du Conseil de sécurité, afin d’assurer une meilleure représentation du continent africain, une plus grande inclusivité et une plus grande équité. 

M. SOLOMON AYELE DERSSO, Directeur de Amani Africa, a présenté ce groupe de réflexion panafricain sur la recherche, la formation et le conseil en politiques, qui travaille sur les processus politiques multilatéraux intéressant l’Afrique.  À ce titre, il constitue la principale source d’information et d’analyse sur les questions de l’UA en général et de son Conseil de paix et de sécurité en particulier, y compris le partenariat stratégique de l’UA avec l’ONU.  En ce moment historique, a poursuivi M. Dersso, approfondir ce partenariat n’est pas une question de choix mais bien une condition préalable à la réalisation des objectifs de paix, de sécurité et de développement de la Charte des Nations Unies.  Mais pour que la présence de l’ONU et de l’UA dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales en Afrique reste pertinente, il faut que ces organes conjuguent leurs avantages comparatifs et coordonnent systématiquement leurs actions dans tous les dossiers, a-t-il recommandé.  Il a renvoyé à cet égard au rapport du Secrétaire général « Notre Programme commun » et au fait que les organisations régionales « comblent une lacune critique dans notre architecture mondiale de paix et de sécurité ». 

Cependant, comme l’a souligné M. Dersso, l’état du partenariat entre les deux organisations est loin d’être suffisant pour que l’UA puisse combler efficacement cette « lacune critique ».  Il a regretté que les réponses aux conflits et nouvelles menaces adoptent une approche « ad hoc et au cas par cas » pour mettre en place des opérations d’appui à la paix.  Il a plutôt conseillé d’établir « un arrangement systématique et institutionnalisé » pour cadrer cette coopération, en prônant l’inclusion des outils de paix et de sécurité de l’UA dans la boîte à outils du système mondial de sécurité collective.  Il a appuyé par ailleurs la proposition du Secrétaire général tendant à ce que le Conseil innove avec « une nouvelle génération d’opérations de paix sur le continent africain dirigées par l’UA et appuyées par l’ONU », qui combineraient les forces respectives des deux organisations en donnant la priorité aux solutions politiques et qui maximiseraient l’impact des capacités en uniforme et civiles.  En outre, il a appuyé l’idée de changer d’approche concernant les contributions financières de l’ONU à ces opérations: on passerait de l’utilisation « exceptionnelle » des contributions de l’ONU pour les opérations d’appui à la paix de l’UA à une approche devant être « considérée de manière plus systématique ». 

Pour Amani, l’aggravation de la polarisation dans le monde, en particulier entre les grandes puissances, est l’une des principales raisons de la fracture croissante du système multilatéral.  L’UA, dont les États membres représentent 28% des Membres de l’ONU, dispose d’un « réservoir unique de potentiel » pour jouer un rôle de modération face à une telle polarisation, a-t-il estimé.  Il a conclu en recommandant d’exploiter ce rôle modérateur de l’UA, de même que la position de l’Afrique en tant qu’avenir du multilatéralisme, à travers le partenariat ONU-UA.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a salué le rapprochement du Conseil de sécurité de l’ONU avec le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, soulignant que la complexité des crises en matière de sécurité en Afrique nécessite une amélioration de la coopération entre ces deux organes.  Sur ce point, le représentant a suggéré de trouver des solutions innovantes à un moment où le modèle dominant des opérations de maintien de la paix est sévèrement critiqué.  Le rôle croissant de l’UA et des organisations sous-régionales doit être soutenu de manière adéquate, a-t-il ajouté, assurant que le Brésil est prêt à s’engager activement dans les discussions sur la manière de garantir les ressources nécessaires aux opérations de paix dirigées par l’UA.  Ainsi a-t-il soutenu les accords qui maximisent l’expertise dont l’ONU et l’UA ont fait preuve dans plusieurs domaines.

Le rôle renforcé de l’UA ne devrait toutefois pas se traduire par un affaiblissement de la présence de l’ONU sur le terrain, a recommandé le représentant. « L’assistance fournie par les agences et bureaux régionaux des Nations Unies demeure en effet essentielle sur de nombreux fronts. »  Le délégué a notamment préconisé de renforcer le rôle de la Commission de consolidation de la paix dans la promotion de la prévention des conflits, de la médiation, du renforcement des capacités, du soutien électoral et de l’aide humanitaire. Ce rôle doit être accentué au Mali et en République démocratique du Congo dans la perspective du retrait de la MINUSMA et de la MONUSCO, a-t-il dit. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a rappelé que c’est depuis l’adoption du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, que les deux organisations ont développé un partenariat unique, fondé sur des objectifs partagés, le respect mutuel et l’appropriation africaine. Pour les A3, ce partenariat est devenu « un pilier du multilatéralisme moderne », a poursuivi le représentant, qui a souligné que c’est dans ce contexte que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine et le Conseil de sécurité des Nations Unies viennent de conclure avec succès, à Addis-Abeba, leur dix-septième réunion consultative conjointe annuelle. 

Le représentant a salué le Communiqué conjoint d’Addis-Abeba, publié le 6 octobre 2023, qui réitère le rôle pivot des deux organisations dans le maintien de la paix et la sécurité en Afrique, fondé sur les principes de complémentarité, de subsidiarité et de partage du fardeau et des responsabilités face à la complexité des menaces et défis à la paix et la sécurité internationales.  Il a ensuite repris à son compte l’appel lancé dans le Communiqué conjoint en appui à celui du Secrétaire général pour donner un accès, d’urgence, au Fonds des contributions statutaires de l’ONU pour les opérations d’appui à la paix de l’Union africaine dans la recherche du maintien de la paix et la sécurité régionales et continentales. 

Les A3 ont reçu pour mission de l’Union africaine de discuter avec les États Membres de l’ONU et du Conseil de sécurité de la question du financement des opérations de paix de l’UA, a rappelé le représentant.  Une violation de la paix, où qu’elle ait lieu, est une menace pour la paix mondiale, a-t-il insisté.  Partant, la proposition du Secrétaire général est pertinente, a-t-il réitéré, soulignant que le dialogue ONU-UA couvre une multitude de questions clefs pour la paix et la sécurité mondiales.  La paix et la sécurité constituent un bien mondial qui ne saurait être bilatéralisé ou fragmenté, ni être autonome dans l’un ou l’autre coin du monde, a insisté le représentant.  Réitérant également le principe des solutions africaines aux problèmes africains, il a appuyé la réforme du Conseil de sécurité, en souffrance depuis longue date. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré que le traitement des causes profondes des conflits va de pair avec la nécessité d’un développement durable, guidé par le Programme 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  Il a estimé que la coopération de l’ONU avec l’Union africaine et avec les organisations régionales peut jouer un rôle essentiel dans la prévention des conflits.  Le soutien continu de l’ONU à l’initiative Faire taire les armes reste crucial pour renforcer les efforts de médiation et de désarmement, ainsi que pour appuyer l’autonomisation des femmes et des jeunes et l’éducation à la paix.  Le délégué a énuméré des exemples positifs obtenus avec l’appui de l’ONU, notamment l’accord de 2022 pour la cessation permanente des hostilités en Éthiopie, la poursuite de l’engagement avec la Somalie en matière de consolidation de la paix et d’édification de l’État, la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, ainsi que des processus de Nairobi et de Luanda.  Il a également souligné les progrès accomplis pour assurer des ressources prévisibles, durables et flexibles aux opérations de soutien de la paix dirigées par l’UA, notamment par l’intermédiaire du Fonds pour la paix. L’UA est un outil formidable, capable de mettre fin aux souffrances immenses endurées par les civils dans tout le continent, a-t-il affirmé.

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que les approches conjointes de l’ONU et de l’Union africaine (UA) dans la médiation et l’identification précoce des conflits sont indispensables.  C’est pourquoi il a soutenu le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité, qui mobilise la collaboration dès les premiers signes d’un conflit potentiel. 

Le délégué a salué que le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité aient mené, la semaine passée, pour la première fois, un débat sur le rôle des jeunes en faveur de la paix et la sécurité.  Les deux Conseils doivent continuer à faciliter la mise en œuvre du programme relatif aux jeunes et à la paix et à la sécurité, a-t-il déclaré. Il a évoqué les échanges qu’il a eus à Addis-Abeba avec deux jeunes activistes éthiopiennes qui organisent des conférences afin de rapprocher l’UA des jeunes.  Elles ont fait prendre conscience que la jeunesse africaine est le véritable moteur du développement du continent, a-t-il affirmé. 

Par ailleurs, le délégué a estimé que pour remplir leurs mandats, les opérations de maintien de la paix doivent s’appuyer sur un financement prévisible, durable et flexible. Cela vaut également pour les missions régionales autorisées par ce Conseil, a-t-il ajouté, notant en outre que le rôle de l’UA dans la gestion des défis actuels et émergents du continent en matière de sécurité est essentiel.  Il a ensuite salué l’initiative des A3 en faveur d’une décision du Conseil visant un financement des opérations de paix menées par l’Afrique. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que « nous sommes collectivement plus forts et plus pertinents lorsque nous capitalisons sur la valeur ajoutée de nos deux organisations ».  Il a donné comme exemples les efforts déployés par l’UA au Soudan afin de contribuer à la résolution du conflit ; la tenue de la réunion quadripartite sur la coordination des différentes initiatives régionales concernant la RDC ; ou encore la coopération entre l’UA et l’ONU en Somalie pour lutter contre les Chabab.  Il a recommandé d’approfondir cette coopération en matière de prévention des conflits, indiquant au passage que la France a été attentive aux décisions prises par l’UA en réponse aux changements anticonstitutionnels de gouvernement intervenus récemment.  « Le Sommet de l’UA à Malabo en mai 2022 a marqué la ferme désapprobation des chefs d’État africains face à ces initiatives qui menacent la paix et la sécurité du continent. » 

Le délégué a soulevé l’enjeu du sous-financement des économies africaines, notamment pour faire face aux changements climatiques.  Il a fait valoir la forte implication de la France dans ce domaine, en parlant du Sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial tenu en juin dernier.  Il s’est félicité des progrès réalisés pour placer, auprès d’organisations régionales, des experts climat et sécurité qui renforcent les capacités d’alerte précoce dans les zones à risque.  Il a aussi soutenu l’adoption d’une résolution sur le financement durable des opérations africaines de paix, confirmant son soutien au principe d’un financement sur contributions obligatoires.  « La France est donc prête à s’engager, dès à présent, avec les pays africains dans la négociation d’un texte », a-t-il déclaré en y voyant une occasion d’affirmer la valeur ajoutée des opérations africaines de paix conduites par les soldats africains et de renforcer l’appropriation de ces opérations par le continent au travers d’une contribution financière.  Enfin, le délégué a salué le travail « considérable » accompli par l’UA au cours des derniers mois, qui a notamment permis d’adopter le cadre de conformité en matière de droits de l’homme, avec le soutien de l’ONU et grâce aux financements de l’Union européenne. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a souligné qu’une coordination fructueuse entre l’UA, l’ONU, les organisations sous-régionales et les partenaires internationaux est essentielle pour mettre fin aux conflits et promouvoir la stabilité. C’est en ce sens que le Royaume-Uni soutient depuis longtemps une représentation africaine permanente au Conseil de sécurité, et « c’est pourquoi nous sommes impatients de travailler ensemble à une résolution-cadre sur le financement par l’ONU des missions dirigées par l’UA », a-t-elle ajouté.  La déléguée a réitéré la préoccupation de son pays quant au risque de propagation du terrorisme au Sahel et aux États côtiers d’Afrique de l’Ouest.  Elle s’est ainsi posée en soutien résolu aux efforts visant à résoudre ce problème, en particulier ceux menés au niveau régional dans le cadre de « ce véritable forum sécuritaire qu’est l’Initiative d’Accra ». 

Par ailleurs, la représentante a attiré l’attention sur le fait que la collaboration ONU-UA est nécessaire pour relever les défis humanitaires sur le continent, en premier lieu l’insécurité alimentaire, sachant que plus de 160 millions de personnes en Afrique se trouvent dans une situation de vulnérabilité extrême.  Elle a annoncé que, le mois prochain, le Royaume-Uni s’associe à la Somalie et aux Émirats arabes unis pour organiser un sommet mondial sur la sécurité alimentaire, qui réunira des experts internationaux en vue de galvaniser l’action visant à prévenir l’insécurité alimentaire, la malnutrition et, tout simplement, sauver des vies. 

M. ZHANG JUN (Chine) a déclaré que les récentes adhésions de l’Union africaine au G20 et de l’Éthiopie et de l’Égypte au groupe des BRICS démontrent la montée en puissance du continent au plan mondial.  Cela implique dès lors que des partenariats solides, d’égal à égal, avec un respect et une compréhension mutuels soient développés avec l’Union africaine et ses États membres.  Et à la lumière des défis mondiaux, le Conseil de sécurité devrait continuer de renforcer cette coopération.  Par exemple, les missions de paix de l’ONU devraient être informées des pratiques utiles de l’Union africaine, a-t-il dit.  Le représentant a également déclaré que l’ONU et l’UA sont deux organisations au même pied d’égalité.  Il n’y a pas de hiérarchie, et de ce fait, il ne faut pas imposer de règles à l’Union africaine, a-t-il souligné.

Poursuivant, le représentant a appelé à mettre un terme à l’ingérence dans les affaires intérieures. Certains pays industrialisés devraient également assumer leur responsabilité afin de rembourser leurs dettes historiques, au lieu de faire porter le chapeau à d’autres ou de rester les bras ballants, a-t-il dit.  Il a ainsi appelé à répondre favorablement aux demandes de l’UA pour le financement de ses missions de paix et du développement.  En ce qui la concerne, la Chine est active aux cotés de ses partenaires africains, sur un pied d’égalité, a dit le représentant, citant des projets à caractère économique et social lancés au Nigéria, en République démocratique du Congo, au Ghana, à Djibouti et en Éthiopie. 

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a estimé que le potentiel de coopération de l’ONU avec l’Union africaine n’avait pas encore été pleinement exploité et a soutenu la volonté de l’Union africaine d’établir un dialogue plus concret en ce qui concerne les problèmes du continent.  Notant que la situation dans de nombreuses régions d’Afrique demeure très instable, la représentante a estimé que la situation était aggravée par les mesures coercitives unilatérales illégales visant plusieurs États africains et leurs populations.  Elle a salué l’accord de cessez-le-feu dans le nord de l’Éthiopie et s’est félicitée de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine en Somalie. Elle a déploré que la Libye ne fasse pas l’objet de davantage de considération. 

S’agissant du financement des opérations de paix de l’Union africaine, la Fédération de Russie est prête à réfléchir à un modèle de financement viable dans le cadre d’une résolution du Conseil de sécurité.  La représentante a également plaidé pour des solutions politiques africaines aux problèmes africains, notamment par le biais des organisations régionales africaines.  Elle a ajouté que seule l’indépendance en matière de ressources des États africains permettra aux pays africains de véritablement avoir suffisamment de marge de manœuvre pour trouver des solutions politiques.  L’Afrique doit surmonter les conséquences du passé colonial et du néocolonialisme, a-t-elle ajouté. 

La Russie, a assuré la représentante, a toujours soutenu les efforts africains en matière de maintien de la paix sur le continent sur une base bilatérale.  Elle a réaffirmé la disposition de son gouvernement à poursuivre une coopération d’égal à égal avec ses partenaires africains, l’objectif étant de renforcer leur potentiel. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé que la coopération ONU-UA doit aller au-delà du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.  Elle reste indispensable pour l’appui aux trois piliers fondamentaux de l’ONU, a-t-il ajouté.  Il a témoigné qu’à l’occasion de la mission récente du Conseil de sécurité à Addis-Abeba, il avait pu se rendre compte que le Conseil de sécurité et celui pour la paix et la sécurité le Conseil de paix et de sécurité avaient renforcé leur alliance stratégique face aux défis en Afrique.  Ces deux organes déploient des efforts soutenus pour améliorer leur coordination et l’échanges d’information pour parvenir aux buts communs, a-t-il constaté. 

Le représentant a mis l’accent par ailleurs sur l’importance de la mise en œuvre du Cadre continental de la jeunesse, la paix et la sécurité de l’Union africaine.  Il a salué à cet égard la nomination d’une envoyée de la jeunesse et de cinq jeunes ambassadeurs de la paix (un pour chaque région du continent) ainsi que le programme jeunesse pour la paix en Afrique.  Le représentant a également salué l’institutionnalisation de la participation des jeunes dans les processus de prise de décisions de l’UA par le truchement d’un conseil consultatif jouissant d’un budget et d’un mandat définis. Il a encouragé à la diffusion de ce genre de bonnes pratiques dans le souci de transversaliser l’agenda « jeunesse, paix et sécurité » partout dans le monde.

M. JOHN KELLEY (États-Unis) a dit faire la recommandation du Secrétaire général de l’ONU en faveur d’une évolution des institutions financières internationales afin qu’elles soient en mesure de contribuer réellement à l’éradication de la pauvreté et à la promotion de la prospérité partagée en Afrique.  Le Président Biden a fait beaucoup pour accroître les ressources des pays en développement afin qu’ils puissent réaliser les objectifs de développement durable dans le contexte des changements climatiques, a ajouté le représentant.

Pour les États-Unis, l’ONU et ses partenaires régionaux, à commencer par l’Union africaine, doivent travailler ensemble autour des priorités identifiées par le Secrétaire général dans son rapport, et ce, dans le cadre d’une coopération inclusive accrue.  Le représentant a assuré que les États-Unis souhaitent de travailler de concert avec les dirigeants locaux, la société civile et les communautés locales pour renforcer les institutions démocratiques en Afrique et aider à y restaurer, le cas échéant, comme au Niger, l’état de droit.

Concernant la situation au Mali, le représentant a rappelé la responsabilité qu’a le Gouvernement malien de se coordonner avec l’ONU pour assurer un retrait souple de la MINUSMA, et éviter que des armes légères et de petit calibre ne finissent entre les mains d’acteurs non étatiques.  Au Soudan, l’accès humanitaire aux populations dans le besoin doit être assuré et sans entrave, a-t-il aussi dit, appelant les autorités en place à coopérer de près avec l’ONU et l’Union africaine à cette fin.  Enfin, le représentant a souligné la nécessité que les opérations de l’Union africaine dont le déploiement est autorisé par l’ONU puissent s’appuyer sur un financement prévisible.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a rappelé que les deux organisations ont approfondi leur collaboration en vue d’un retour rapide à la gouvernance constitutionnelle dans les échéances fixées par la CEDEAO.  Elle a salué les activités de l’UA sur la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité en Afrique, notant que les missions de solidarité des dirigeantes africaines de la région des Grands Lacs « dans le contexte du Soudan », ainsi que la création d’une « salle de situation des femmes » pour surveiller la participation politique des femmes aux élections au Kenya, sont des exemples pertinents de solidarité interrégionale. Elle a également appuyé la Plateforme africaine pour les enfants touchés par les conflits armés, se félicitant en outre de l’élaboration d’un programme de protection de l’enfance au sein du Département de la paix et de la sécurité de l’UA, avec l’appui de l’ONU. 

S’agissant du Plan stratégique triennal pour l’intégration de la protection de l’enfance, elle a dit attendre avec intérêt la mise en œuvre de la politique sur la protection de l’enfance dans les opérations de soutien de la paix dirigées par l’UA, ainsi que celle sur l’intégration de la protection de l’enfance dans l’architecture africaine de paix et de sécurité.  La représentante a ensuite encouragé à forger un consensus autour de la question du financement prévisible, durable et flexible des opérations de soutien à la paix de l’UA.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a appelé à faire fond sur les succès engrangés par les organisations régionales ces 20 dernières années en particulier la volonté politique africaine de régler les conflits par le biais de la diplomatie et celle de l’Union africaine d’assumer un rôle plus important au niveau régional.  Les points de vue et les voies régionales sont fondamentaux pour maintenir la paix et la sécurité internationales.  Le représentant a pris l’exemple de la Somalie pour illustrer son propos, saluant la poursuite du dialogue avec le Gouvernement fédéral.  Il a ensuite plaidé pour le renforcement de la coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA à travers un dialogue permanent sur des questions de sécurité et thématiques. Les organisations sous-régionales sont aussi de véritables partenaires, notamment en matière de partage d’informations et d’évaluation.  Le Conseil de sécurité devrait renforcer le financement des opérations de paix de l’UA, a exhorté le représentant qui a également invité les deux Conseils à travailler ensemble pour promouvoir les valeurs de tolérance et de coexistence pacifique.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a rappelé que les dossiers africains pèsent lourd dans les travaux du Conseil de sécurité.  L’adoption rapide du Communiqué conjoint entre le Conseil de sécurité des Nations Unies et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine suite à la consultation annuelle conjointe des deux organes est une illustration de notre compréhension commune d’un même ensemble d’objectifs, a-t-elle estimé.

La demande d’un partenariat solide entre l’ONU et l’Union africaine (UA) ne cesse de croître afin de relever plus efficacement les défis de l’Afrique, avec une coordination étroite entre les deux organes ainsi que l’accent mis sur les efforts de prévention, comme le propose le Nouvel Agenda pour la paix, a également noté la représentante.  Elle s’est félicitée des contacts techniques réguliers entre les deux secrétariats sur les dossiers nationaux et thématiques, y compris un exercice d’analyse de l’horizon pour la prévention des conflits.

La représentante a rappelé que son pays avait, lors de la réunion d’Addis-Abeba, souligné l’importance d’un financement prévisible, durable et souple des opération de paix menées par l’Union africaine grâce à des contributions de l’Union africaine et des Nations Unies.  Le Japon soutient en principe la création d’un mécanisme par lequel de telles opérations autorisées par le Conseil de sécurité en vertu du Chapitre VIII de la Charte pourraient être en partie financées par des contributions de l’ONU, au cas par cas, a affirmé la représentante, qui a ajouté que son pays reste déterminé à poursuivre les consultations avec toutes les parties prenantes à cet égard.

L’Afrique continue de souffrir de crises de sécurité humaine causées par de multiples facteurs, a encore déclaré la représentante, qui a rappelé que le Japon joue son rôle en soutenant les efforts internationaux et régionaux en faveur de la paix et de la sécurité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Clôturant un débat général avec des interventions sur le Sahara occidental ou les îles Falklands (Malvinas), la Quatrième Commission adopte plusieurs résolutions

Soixante-dix-huitième session,
9e séance – matin
CPSD/782

Clôturant un débat général avec des interventions sur le Sahara occidental ou les îles Falklands (Malvinas), la Quatrième Commission adopte plusieurs résolutions

Dernières délégations à s’être exprimées dans le cadre du débat général sur la décolonisation de la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation), le Maroc et l’Algérie ont présenté, ce matin, des visions diamétralement opposées de la nature comme du destin du Sahara occidental, inscrit depuis 1963 sur la liste des territoires non autonomes du Comité spécial de la décolonisation.  La Commission a également adopté une série de résolutions concernant l’ensemble des points à son ordre du jour relatifs à la décolonisation. 

Le Maroc a rappelé que c’est lui qui a demandé, il y a 60 ans, l’inscription de la question du « Sahara espagnol » à l’ordre du jour du Comité spécial de la décolonisation, afin de « récupérer » ses provinces sahariennes.  À l’ONU, l’histoire aurait pu s’arrêter en 1975, lors de la Marche verte et de la signature des accords de Madrid, entérinés la même année par l’Assemblée générale, si ce n’était l’adversité de l’Algérie qui a créé, financé et hébergé le groupe séparatiste POLISARIO.  Il a accusé son voisin de persister sur cette voie en présentant une « avalanche de falsifications » historiques et de distorsions du droit international. 

L’Algérie a rejeté ces accusations, en rappelant que le Sahara occidental, « dernière colonie d’Afrique » est en fait un territoire et une population qui ont été cyniquement dépecés et partagés en 1976 par deux pays voisins, le Maroc et la Mauritanie.  Après le retrait volontaire de cette dernière, trois ans plus tard, le Maroc a occupé la quasi-totalité du territoire, comme un fait accompli.  L’Algérie a noté que l’histoire récente du Sahara occidental n’est qu’une succession de faits accomplis, d’engagements marocains formels suivis de reniements à répétition de la parole donnée, faisant référence aux changements de position de la « puissance occupante ». Dans un premier temps, le Maroc était pour un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui pour en arriver aujourd’hui à ne même plus vouloir en entendre parler. 

Le Maroc l’a d’ailleurs confirmé quand il a martelé aujourd’hui que le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui est « mort et enterré »: « le Sahara marocain est définitivement et de façon irréversible ancré dans son Maroc, et le Maroc définitivement enraciné dans son Sahara ».  La question de la décolonisation est désormais « close », conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, celles-là même qui recommandent une solution politique durable et mutuellement acceptable pour le règlement de ce conflit « artificiel ».  Le Maroc a reproché à l’Algérie d’ignorer ces résolutions, depuis que le Secrétaire général a, en 2001, déclaré l’inapplicabilité du plan de règlement au Sahara et « l’obsolescence » d’un référendum d’autodétermination. 

L’Algérie a opposé à ces propos son attachement indéfectible au droit à l’autodétermination des peuples, arguant que la raison pour laquelle la « puissance occupante » ne veut plus entendre parler de ce référendum, c’est que, même après un demi-siècle « d’occupation », le Maroc n’a toujours pas été en mesure de gagner le cœur du peuple sahraoui, qui reste attaché à son droit à l’émancipation.  Au lieu de cela, la « puissance occupante » propose magnanimement l’octroi d’une autonomie limitée sous souveraineté marocaine.  Personne n’y croit, et surtout pas le peuple sahraoui ». 

La Commission a ensuite entériné 21 projets de résolution portant sur l’ensemble des points de son programme relatif à la décolonisation.  Les délégations ont d’abord adopté, par 135 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 2 abstentions (France, Royaume-Uni), un projet de texte portant sur les renseignements relatifs aux territoires non autonomes, par lequel l’Assemblée générale prierait les puissances administrantes de respecter les obligations qui leur incombent s’agissant de chaque territoire figurant à l’ordre du jour du Comité spécial de la décolonisation. 

Par le projet de résolution II sur les activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes, adopté par une proportion identique, l’Assemblée générale réaffirmerait qu’il incombe aux puissances administrantes d’assurer le progrès politique, économique et social des peuples des territoires non autonomes, de même que leurs droits légitimes sur leurs ressources naturelles. 

Les États-Unis, Puissance administrante, se sont opposés à ces projets de résolution au motif qu’ils accordent une importance disproportionnée à l’indépendance en tant que seule avenue pour les territoires non autonomes, aux dépens du principe de libre association.  En outre, la délégation a jugé « simpliste » la notion voulant qu’une présence militaire nuise nécessairement à un territoire. 

Autre Puissance administrante, le Royaume-Uni a fait valoir que la question de savoir si un territoire non autonome atteint ou non un niveau d’autonomie suffisant incombe au Gouvernement du territoire et à la Puissance administrante concernés, et non à l’Assemblée générale. 

La Commission poursuivra ses travaux demain, le jeudi 12 octobre 2023, à compter de 10 heures.  

DÉBAT GÉNÉRAL PORTANT SUR LES POINTS RELATIFS À LA DÉCOLONISATION (SUITE ET FIN) 

Déclarations 

M. KADIM OUSSEIN (Comores) a souligné que la décolonisation est un principe sacro-saint qui repose sur l’idée fondamentale que tous les peuples ont le droit à la liberté, à l’indépendance et à l’autodétermination.  Toutefois il faut également respecter le principe d’intégrité territoriale dans ce contexte tout en garantissant les droits fondamentaux d’un peuple, a‑t‑il fait valoir, en appelant à veiller à ce que ce principe ne soit pas détourné.  Sur le Sahara occidental, il a soutenu les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura, saluant ses récentes visites dans la région avant d’apporter le plein soutien des Comores au format des tables rondes, avec la participation des parties prenantes, à savoir le Maroc, l’Algérie, le Front POLISARIO et la Mauritanie.  Le représentant a réaffirmé le soutien de son pays à l’initiative marocaine d’autonomie et précisé que son pays a d’ores et déjà ouvert un consulat à Laayoune.  La stabilité de la région est primordiale, a‑t‑il martelé, avant de s’inquiéter des conditions de vie dans les camps de Tindouf et de demander un recensement de leur population sous supervision internationale.  Il a conclu en lançant un appel à une solution durable à ce conflit au nom de la stabilité et de la paix, « qui ont un prix ».   

M. ZÉNON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a réaffirmé son soutien au processus politique visant à parvenir à une solution politique, réaliste et durable au différend régional sur le Sahara marocain, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité depuis 2007.  Il s’est félicité de la tenue de deux tables rondes à Genève, avec la participation de l’Algérie, du Maroc, de la Mauritanie et du Front POLISARIO, qu’il a encouragés à faire preuve de réalisme et à adopter un esprit de compromis afin de favoriser le succès du processus politique.  Le représentant a salué à cet égard les efforts du Secrétaire général et de son Envoyé personnel pour faciliter les négociations en vue de parvenir à un règlement de la question.  Selon lui, les parties devraient reprendre les négociations sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des faits nouveaux survenus depuis 2006.  Le délégué s’est félicité du développement socioéconomique du Sahara marocain grâce aux investissements et aux projets réalisés dans le cadre du nouveau modèle de développement, lancé par le Maroc en 2015.  À ses yeux, une solution politique à ce différend de longue date et une coopération renforcée entre les États membres de l’Union du Maghreb arabe contribueraient à la stabilité et à la sécurité dans la région du Sahel.   

Mme LIA BERTHIANA BOUANGA AYOUNE (Gabon) a fait valoir que le processus d’autonomisation des peuples doit aller de pair avec la libération de leur territoire.  S’agissant du Sahara, elle a salué les efforts déployés par l’Envoyé personnel du Secrétaire général et les visites qu’il a effectuées l’an dernier au Maroc, en Algérie et en Mauritanie.  Elle y a vu un élan diplomatique encourageant en vue de la reprise des tables rondes regroupant l’ensemble des parties prenantes.  La déléguée a exhorté ces pays à s’engager en faveur de ce processus dans un esprit de compromis en vue de parvenir à une solution politique au différend régional, tel que recommandé par le Conseil de sécurité.  À cette fin, elle a réitéré son appui à l’initiative marocaine d’autonomie, susceptible selon elle de mener à une solution politique acceptable, ainsi qu’au nouveau modèle de développement lancé en 2015.  La déléguée s’est dite encouragée par la dynamique positive sur le terrain, avec la participation des représentants du Sahara aux séminaires régionaux du Comité spécial de la décolonisation.   

M. GLENTIS THOMAS (Antigua-et-Barbuda) a expliqué que son pays est un État indépendant relativement jeune.  Il a été d’avis que les Îles Vierges britanniques ont la capacité de s’autogérer et de gérer leur économie depuis de nombreuses années avec le soutien de leur Puissance administrante.  Il a fait sien l’appel lancé par les chefs de gouvernement de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) lors de leur quarante-cinquième sommet ordinaire en juillet 2023: « Le colonialisme n’a pas sa place dans la gouvernance démocratique moderne des Caraïbes et nous encourageons toutes les parties concernées à convenir d’une voie claire et responsable pour que le peuple des Îles Vierges britanniques parvienne à l’autonomie conformément aux options approuvées par l’ONU dont disposent les territoires non autonomes en vertu du droit international. »  Antigua-et-Barbuda reste un partenaire du Royaume-Uni, a souligné le délégué, et reconnaît les efforts importants déployés par ce dernier en partenariat avec le gouvernement élu des Îles Vierges britanniques pour renforcer les institutions et systèmes de gouvernement dans le territoire afin de l’aider à se mettre en position d’atteindre un degré complet d’autonomie.  Néanmoins le représentant a tenu à souligner le droit inaliénable du peuple des Îles Vierges britanniques à l’autodétermination, inscrit dans la Charte des Nations Unies. 

S’agissant du Sahara occidental, il a appelé au dialogue entre les parties avant de soutenir l’initiative d’autonomie proposée par le Maroc qui constitue, selon le représentant, la solution de compromis à ce différend régional et est conforme au droit international, à la Charte des Nations Unies et aux résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale.   

M. AMAR BENDJAMA (Algérie) a déclaré que le Sahara occidental demeure la dernière colonie en Afrique, son territoire et sa population ayant été cyniquement dépecés et partagés en 1976 par deux pays voisins, le Maroc et la Mauritanie.  Son histoire récente est une succession de faits accomplis, d’engagements marocains formels suivis de reniements à répétition de la parole donnée, a-t-il accusé.  En effet, le Maroc s’est engagé, à plusieurs reprises, et au plus haut niveau, à permettre la consultation du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’un référendum d’autodétermination, a-t-il rappelé.  Le délégué a également indiqué que le plan de règlement adopté par le Conseil de sécurité, et qui prévoyait le déploiement de la MINURSO, a été accepté par les deux parties - le Maroc et le Front POLISARIO.  

  Enfermé dans le déni de l’historique de la question du Sahara occidental, le Maroc ne veut plus entendre, ni prononcer les termes d’autodétermination, de référendum, de consultation démocratique, d’observation onusienne des droits de l’homme, a affirmé le délégué.  Au lieu de quoi la « puissance occupante » propose magnanimement l’octroi d’une autonomie limitée sous souveraineté marocaine.  « Personne n’y croit.  Et surtout pas le peuple sahraoui », a-t-il tranché, avant de poser la question de savoir pourquoi le Maroc refuse la consultation libre du peuple du Sahara occidental sur son avenir.  Pour le délégué, il est clair que cela s’explique par le fait que, malgré un demi-siècle d’occupation, le Maroc n’a pas été en mesure de gagner le cœur des Sahraouis, qui restent attachés à leur droit imprescriptible à l’émancipation.  

  Le délégué a également reproché à la partie marocaine de ne plus parler désormais que du « Sahara marocain ».  Mais la communauté internationale ne laissera pas faire, a-t-il prévenu, et elle s’appuiera à la fois sur le dernier rapport du Secrétaire général, qui affirme que « le Conseil de sécurité examine le Sahara occidental comme une question de paix et de sécurité, appelant à une solution juste, durable et mutuellement acceptable qui assurera l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.  La Quatrième Commission de l’Assemblé générale et le Comité spécial de la décolonisation l’abordent comme une question de décolonisation ».  Le représentant a également invoqué l’avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice (CIJ) en 1975, cette dernière ayant déclaré ne pas avoir « trouvé de lien juridique de nature à affecter l’application de la résolution 1514 sur la décolonisation du Sahara occidental et en particulier du principe de l’autodétermination par l’expression libre et authentique de la volonté du peuple du territoire ».    

En guise de conclusion, le représentant a demandé à la Quatrième Commission de rester vigilante face ces manœuvres du Maroc et de faire en sorte que justice soit enfin rendue au peuple du Sahara occidental. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a rappelé qu’il y a 60 ans, son pays a demandé l’inscription de la question du Sahara espagnol à l’ordre du jour du Comité spécial de la décolonisation afin de récupérer ses provinces sahariennes.  Selon lui, la décolonisation de ce territoire s’est définitivement achevée en 1975 lors de la Marche verte et de l’Accord de Madrid, entériné la même année par l’Assemblée générale.  L’histoire onusienne du Sahara marocain aurait pu s’arrêter là, si ce n’était l’adversité de l’Algérie qui a créé, financé et hébergé le groupe séparatiste Front POLISARIO.  Ce pays voisin persiste sur cette voie en présentant selon lui une « avalanche de falsifications de l’histoire » et de distorsions du droit international.  Depuis près d’un demi-siècle, l’Algérie ressasse les « sept mensonges fondateurs » du programme séparatiste de ce pays au Sahara marocain, à commencer par sa défense du droit à l’autodétermination, véritable « paravent » destiné à assurer la réalisation de ses visées hégémoniques.  Pourtant, Alger ne s’est jamais prononcé sur les autres questions de décolonisation portées devant la Commission, et a même proclamé une république fantoche, une pratique contraire à l’autodétermination.  L’Algérie, a-t-il ajouté, s’est intéressée aux résolutions du Conseil de sécurité jusqu’en 2001, lorsque que le Secrétaire général a déclaré l’inapplicabilité du plan de règlement et ainsi, l’obsolescence du référendum.   

Depuis 2002, a poursuivi le représentant, Alger ignore les résolutions du Conseil de sécurité pour la seule raison qu’il recommande désormais une solution politique durable et mutuellement acceptable pour le règlement de ce différend.  Qui plus est, ce pays prétend être un simple observateur sur la question du Sahara, mais malgré ses dénégations, il constitue la partie principale à ce différend régional depuis son déclenchement.  Le représentant a rejeté toute notion « d’occupation » du Sahara marocain, qui ne s’applique selon lui qu’aux États existants dans le cadre d’un conflit armé international.  « Or, le Sahara n’a jamais été un État et ne le sera jamais », il a toujours fait partie intégrante du Maroc en vertu des liens juridiques d’allégeance de ses populations au Sultan marocain, tel que reconnu par la Cour internationale de Justice (CIJ) dans son avis consultatif.  Qui plus est, le référendum est selon lui « mort et enterré ».  L’Algérie n’est pas le pays hôte des camps de réfugiés de Tindouf, mais bien le « geôlier » des populations qui s’y trouvent, a fait valoir le représentant, et qui dépendent de l’aide humanitaire internationale.   

Par ailleurs, le représentant a réaffirmé le soutien ferme de son pays à l’intégrité territoriale des Émirats arabes unis et sa souveraineté sur les îles de la Grande-Tounb, de la Petite-Tounb et d’Abou Moussa, de même que son rejet de leur occupation par l’Iran.   

Droits de réponse 

Le représentant de l’Algérie a relevé que le Maroc a cité plus de 40 fois le nom de son pays lors de son intervention, sans prononcer une seule fois celui de « Sahara occidental », qui figure pourtant à l’ordre du jour de la Commission, une performance qui devrait selon lui figurer au « palmarès de la mauvaise foi ».  Pour sa part, l’Algérie n’a pas parlé du Maroc mais de la situation humanitaire au Sahara occidental, dont le peuple attend toujours de pouvoir exercer son droit à l’autodétermination.  Pendant ce temps le Maroc déverse diverses drogues sur le territoire algérien et espionne son voisin à l’aide du logiciel Pegasus, a accusé la délégation.  La question du Sahara occidental doit demeurer une affaire de décolonisation d’un territoire occupé illégalement par le Maroc, a‑t‑il conclu.   

En réponse, le Maroc s’est dit déçu que l’Algérie n’ait pas parlé des mythes qu’elle a construits sur une prétendue question de décolonisation et du non-enregistrement par le CICR de la population des camps de réfugiés situés dans ce pays.  Le Sahara marocain est définitivement et de façon irréversible « ancrée dans son Maroc, et le Maroc est définitivement enraciné dans son Sahara ».  La question de la décolonisation, a insisté son représentant, est donc close, dans le respect des résolutions du Conseil de sécurité et de la Charte des Nations Unies.  Le Maroc sera toujours là pour exposer devant l’ONU la responsabilité de l’Algérie dans la poursuite de ce conflit « artificiel », a ajouté la délégation.   

L’Iran a réagi aux propos du Maroc sur les îles de la Grande-Tounb, de la Petite-Tounb et d’Abou Moussa, en les qualifiant de « sans fondement ».  Il s’agit aux yeux de la délégation d’une ingérence flagrante dans les affaires internes de l’Iran, qui a réaffirmé sa souveraineté sur ces trois îles.   

Le Royaume-Uni a répondu à l’Argentine pour réaffirmer n’avoir aucun doute quant à sa souveraineté sur les Îles Falkland, affirmant soutenir le droit à l’autodétermination de leurs habitants. 

L’Algérie a dénoncé le scandale qui a éclaté à Bruxelles et aurait démontré la corruption de membres du Parlement européen par des diplomates marocains.  Pourquoi corruption?  À cause du Sahara occidental, a tranché la délégation.  Elle a regretté que le représentant du Maroc ait « osé » qualifier les juges de la Cour internationale de Justice de « déviation ».  La CIJ est un organe principal des Nations Unies, qui n’a pas trouvé de lien juridique de nature à affecter l’application de la résolution 1514 sur la décolonisation du Sahara occidental et en particulier du principe d’autodétermination, a insisté la délégation.   

Les Émirats arabes unis ont réagi aux allégations infondées du représentant de l’Iran, qui continue de nier les faits établis par l’histoire, à savoir que les îles de la Grande-Tounb, de la Petite-Tounb et d’Abou Moussa dans le golfe Persique font partie intégrante des Émirats arabes unis.  La délégation a invité ce pays à répondre aux efforts sincères de son pays pour aboutir à une solution pacifique à ce différend par le biais de négociations ou par l’entremise de la CIJ.   

L’Argentine a répondu au Royaume-Uni en affirmant que les Îles Malvinas, qui font intégralement partie de l’Argentine, sont illégalement occupée par le Royaume-Uni, les résolutions pertinentes des Nations Unies reconnaissant qu’il existe un différend de souveraineté qui doit être réglé par des négociations directes entre les deux parties en vue de parvenir à un règlement pacifique.  L’Argentine a réaffirmé que le principe d’autodétermination des peuples ne s’applique pas à ce différend, conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et du Comité spécial de la décolonisation.   

Reprenant la parole, le Maroc a reproché à l’Algérie de chercher à camoufler sa responsabilité dans ce dossier, et son rôle déstabilisateur dans la région, en créant ce conflit artificiel qui a pratiquement plombé l’Union du Maghreb arabe.  Il a précisé que la Cour internationale de Justice (CIJ) a répondu à une question qui ne lui a pas été posée et c’est là où il y a diversion et la raison pour laquelle il n’y avait pas de consensus au sein des membres de la Cour.   

Quant au principe de l’autodétermination, le représentant a noté que la résolution 1514 (XV) parle dans son paragraphe 6 de l’intégrité territoriale « qui est sacrée pour les pays qui ont une longue histoire » et ne peut être comprise par les pays nés dans les années 60.  Il a rappelé à son homologue algérien que l’Envoyé personnel du Secrétaire général a invité l’Algérie à participer à la prochaine table ronde en vue d’y expliquer sa position.   

Reprenant la parole, l’Iran a rappelé aux Émirats arabes unis que les trois îles de la Grande-Tounb, de la Petite-Tounb et d'Abou Moussa font partie intégrante de l’Iran depuis des milliers d’années et bien avant la naissance des Émirats arabes unis.  Le représentant a réfuté les allégations des Émirats et les a appelés à respecter les relations de bon voisinage et la souveraineté des États.  Il a également souligné que le terme « golfe Persique » est la seule appellation consacrée et acceptée par le système des Nations Unies sur la base de preuves historiques et factuelles.   

Le Royaume-Uni, reprenant également la parole, a noté que l’Argentine fait régulièrement référence aux résolutions de l’ONU et au soutien régional à ses revendications de souveraineté, en notant que cela ne modifie en rien l’obligation de tous les pays de respecter les principes juridiquement contraignant de l’autodétermination.   

Les Émirats arabes unis ont rétorqué à l’Iran que les trois îles de la Grande-Tounb, de la Petite-Tounb et d'Abou Moussa dans le « golfe Arabique » font partie intégrante du territoire des Émirats arabes unis et que leur souveraineté se fonde sur des faits historiques clairs qui ne sont pas contestés.  Elle a réitéré l’appel à l’Iran pour régler ce différend pacifiquement conformément au droit international, soit par des négociations bilatérales, soit en passant par la CIJ.   

L’Argentine a répondu à l’intervention du Royaume-Uni en notant que ce dernier semble estimer que les résolutions de l’Assemblée générale sur la décolonisation ne sont pas juridiquement contraignantes.  Le représentant lui a opposé l’avis consultatif de la CIJ sur les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice quant au rôle qui incombe à l’Assemblée générale s’agissant de superviser l’exécution des obligations faites à la Puissance administrante, et sur la valeur normative de la résolution 1514 et des principes qui y sont consacrés, y compris celui de l’intégrité territoriale qui figure dans son paragraphe 6.  La Cour rappelle par ailleurs que le droit à l’autodétermination ne s’applique pas aux peuples qui ne sont pas titulaires de ces droits.  Il a conclu en rappelant l’obligation qui incombe à tous les États Membres de trouver des solutions pacifiques.  

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE TEXTE CONCERNANT LES POINTS RELATIFS À LA DÉCOLONISATION 

Rapport du Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux sur ses travaux de 2023(A/78/23

En adoptant le projet de résolution I, intitulé « Renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies », par 135 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 2 abstentions (France et Royaume-Uni), l’Assemblée générale prierait les puissances administrantes de respecter les obligations qui leur incombent pour ce qui est de chaque territoire figurant à l’ordre du jour du Comité spécial de la décolonisation et de communiquer régulièrement au Secrétaire général des renseignements techniques relatifs à la situation socioéconomique ainsi qu’à l’évolution politique et constitutionnelle des territoires dont elles sont responsables.   

Explication de position  

Les États-Unis ont demandé un vote enregistré sur cinq projets de résolution de ce groupe contre lesquels ils ont l’intention de voter, à savoir les textes relatifs à l’« Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies » ; aux « Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes  », à l’« Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » , aux « Questions relatives à l’information », et aux « Renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’alinéa e de l’article 73e de la Charte des Nations Unies ».  La délégation américaine est fière d’appuyer le droit à l’autodétermination des peuples, a affirmé son représentant, mais ces résolutions accordent trop d’importance à l’indépendance comme seule option pour les territoires non autonomes, aux dépens du principe de libre association.  En outre, il a jugé simpliste de partir du principe qu’une présence militaire nuit nécessairement à un territoire.   

S’agissant de la question de Guam, il est revenu sur les critiques faites par le Tribunal fédéral par rapport au plébiscite, en ajoutant que les États-Unis continueront d’appuyer le droit à l’autodétermination du peuple de Guam, mais qu’il doit s’appliquer à toute la population et pas seulement à l’une de ses parties.   

Explication de vote  

Le Royaume-Uni s’est abstenu comme par le passé de voter sur la Résolution I.  La délégation part du principe que la décision de savoir si un territoire non autonome a atteint un niveau d’autonomie suffisant revient au Gouvernement du territoire et à la puissance administrante concernée, et non pas à l’Assemblée générale. 

Aux termes du projet de résolution II, intitulé « Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes », adopté par 135 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 2 abstentions (France et Royaume-Uni), l’Assemblée générale réaffirmerait qu’il incombe aux puissances administrantes d’assurer le progrès politique, économique et social ainsi que le développement de l’instruction dans les territoires non autonomes, de même que les droits légitimes des peuples de ces territoires sur leurs ressources naturelles.   

Explication de vote 

L’Argentine a estimé que le droit à l’autodétermination, pour être exercé, exige un sujet actif, soit un peuple sous le joug d’une occupation étrangère, ce qui n’est pas le cas aux Îles Malvinas, tel que reconnu par toutes les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale ainsi que celles adoptées par le Comité spécial de la décolonisation.  Il convient donc de parvenir à une solution négociée entre les parties, ce qui exclue le droit à l’autodétermination.  Ce projet de résolution ne s’applique donc pas aux Îles Malvinas.   

Par le projet de résolution III, intitulé « Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies », adopté par 92 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 46 abstentions, l’Assemblée générale recommanderait aux États d’intensifier leurs efforts, dans le cadre des institutions spécialisées des Nations Unies, afin de garantir l’application de la Déclaration et des autres résolutions pertinentes de l’Organisation.  Elle prierait les institutions spécialisées de l’ONU ainsi que les organisations internationales et régionales d’examiner la situation dans chaque territoire afin de prendre des mesures susceptibles d’accélérer les progrès socioéconomiques.  L’Assemblée les prierait également de fournir des informations sur les problèmes environnementaux auxquels se heurtent les territoires non autonomes, les effets des catastrophes naturelles, la lutte contre le trafic de stupéfiants, le blanchiment d’argent et d’autres activités criminelles, ainsi que l’exploitation illégale de leurs ressources, y compris la nécessité d’utiliser ces ressources au profit de la population de ces territoires.   

Explications de vote 

L’Argentine a déclaré que ce texte doit s’appliquer conformément aux résolutions pertinentes de l’ONU et du Comité spécial de la décolonisation. 

Le Royaume-Uni a réaffirmé son soutien aux institutions spécialisées afin d’offrir une assistance aux populations des territoires non autonomes, en précisant que le statut de ces institutions doit être respecté.   

Dispositifs offerts par les États Membres aux habitants des territoires non autonomes en matière d’études et de formation (A/C.4/78/L.2) 

Aux termes de ce projet de résolution, l’Assemblée générale exprimerait sa gratitude aux États Membres qui ont mis des bourses d’études à la disposition des habitants des territoires non autonomes, tout en invitant les États à offrir ou à continuer d’offrir aux habitants de telles aides pour leurs études et leur formation.  Elle prierait instamment les puissances administrantes de prendre des mesures efficaces pour que l’information à ce sujet soit diffusée largement dans les territoires.   

Question du Sahara occidental (A/C.4/78/L.4

En vertu de ce projet de résolution, l’Assemblée générale appuierait le processus de négociation lancé par la résolution 1754 (2007) et d’autres résolutions du Conseil de sécurité en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable permettant l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, et louerait à cet égard les efforts déployés par le Secrétaire général et son Envoyé personnel pour le Sahara occidental.  Elle se féliciterait de l’engagement des parties à continuer de faire preuve de volonté politique et à travailler dans une atmosphère propice au dialogue afin d’entrer dans une phase de négociation plus intensive.  L’Assemblée inviterait en outre les parties à coopérer avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et à s’acquitter de leurs obligations au regard du droit international humanitaire.  Enfin, elle prierait le Comité spécial de la décolonisation de continuer de suivre la situation au Sahara occidental et de lui présenter un rapport sur la question à sa prochaine session.   

Explication de position 

La représentante de l’Union européenne (UE)a dit attendre avec intérêt l’adoption par consensus de la résolution relative à la situation concernant le Sahara occidental.  Elle a salué les efforts déployés par le Secrétaire général pour parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux principes et aux buts de la Charte des Nations Unies, avant d’encourager les parties à œuvrer en faveur d’une telle solution.  Soutenant également pleinement le travail de M. Staffan de Mistura pour relancer les négociations, ainsi que la coopération étroite qu’il entretient avec l’UE, la déléguée s’est félicitée de sa dernière visite au Sahara occidental en septembre 2023.  Il a encouragé toutes les parties à s’engager en faveur d’une solution conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et aux principes et objectifs de la Charte des Nations Unies.  L’adoption de la résolution 2654 (2022) du Conseil, qui exprime un soutien total au Secrétaire général et à sa proposition de relancer le processus politique, et réitère l’appel lancé à toutes les parties pour qu’elles coopèrent pleinement avec la MINURSO a été très bien accueillie, a relevé la représentante, et l’UE attend maintenant avec impatience sa prorogation.  Elle a également insisté sur la participation significative des femmes et des jeunes au processus politique.   

En adoptant le projet de résolution IV concernant la question des Samoa américaines, l’Assemblée rappellerait que les Samoa américaines devraient demeurer sur la liste des territoires non autonomes et continuer de relever du Comité spécial en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux jusqu’à ce que la population ait exercé son droit à l’autodétermination. 

Le Royaume-Uni a appuyé les résolutions relatives à ses huit territoires d’outre-mer, ce qui reflète son appui au droit à l’autodétermination.  Toutefois, le Comité spécial de la décolonisation doit reconnaître que le lien entre le Royaume-Uni et ses territoires a été modernisé de façon à refléter les circonstances particulières de ces territoires. 

Aux termes du projet de résolution V portant sur la question d’Anguilla, l’Assemblée générale souhaiterait vivement que la réforme constitutionnelle entreprise avec la Puissance administrante ainsi que les consultations publiques aboutissent le plus rapidement possible.  Elle demanderait en outre à celle-ci de veiller à ce que le Comité spécial envoie une mission de visite, si tel est le souhait du Gouvernement du territoire. 

En ce qui concerne le projet de résolution VI sur la question des Bermudes, l’Assemblée générale soulignerait l’importance du rapport de la Commission pour l’indépendance des Bermudes de 2005 tout en regrettant que les plans concernant l’organisation de réunions publiques et la présentation de propositions politiques en faveur de l’indépendance des Bermudes ne se soient pas encore concrétisés. 

En vertu du projet de résolution VII consacré à la question des Îles Vierges britanniques, l’Assemblée noterait que la Commission d’examen de la Constitution a été mise en place en 2022 afin de procéder à un examen complet de la Constitution de 2007 de ce territoire.  Elle soulignerait l’importance de poursuivre les débats sur les questions d’ordre constitutionnel afin d’accorder au Gouvernement du territoire de plus grandes responsabilités à cet égard. 

Si l’Assemblée générale venait à adopter le projet de résolution VIII portant sur la question des Îles Caïmanes, elle se féliciterait de la participation active du territoire aux travaux de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), et soulignerait que celui-ci devrait continuer de participer aux activités du Comité spécial, notamment aux séminaires régionaux.  Elle soulignerait en outre qu’il importe que le Comité spécial comprenne mieux la nature des arrangements politiques et constitutionnels existants. 

En adoptant le projet de résolution IX sur la question de la Polynésie française, l’Assemblée générale rappellerait les demandes antérieures visant à ce que ce territoire soit retiré de la liste des territoires non autonomes, et prendrait note de la déclaration de juin 2023 de la représentante du Président du territoire, dans laquelle elle a déclaré que le Gouvernement du territoire soutenait pleinement un véritable processus de décolonisation et d’autodétermination, sous le contrôle de l’ONU. 

En ce qui concerne la question de Guam, l’Assemblée générale se féliciterait des travaux de la Commission guamienne de décolonisation pour l’application et l’exercice de l’autodétermination du peuple chamorro et inviterait une fois de plus la Puissance administrante à tenir compte de la volonté exprimée par celui-ci, soutenue par les électeurs guamiens lors du référendum de 1987 et inscrite dans le droit guamien, et encouragerait la Puissance administrante et le Gouvernement du territoire à entamer des négociations sur cette question.   

Aux termes de la résolution relative à la question de Montserrat, l’Assemblée rappellerait la Constitution de 2010 et se féliciterait de la participation du territoire aux travaux de l’Organisation des États des Caraïbes orientales (OECO)et de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).   

S’agissant de la question de la Nouvelle-Calédonie, l’Assemblée générale noterait que le Comité des signataires de l’Accord de Nouméa a demandé un audit de la décolonisation.  Elle prendrait note de la tenue, le 12 décembre 2021, du troisième référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie, ainsi que des préoccupations exprimées quant à son résultat.  Elle prendrait également note de l’engagement des parties et de la Puissance administrante à tenir un dialogue sur le statut futur du territoire, y compris lors des réunions organisées à Paris le 28 octobre 2022 et du 11 au 14 avril 2023, ainsi que lors des visites ministérielles effectuées en Nouvelle-Calédonie du 12 au 15 septembre et du 28 novembre au 4 décembre 2022, puis du 2 au 8 mars et du 1er au 5 juin 2023.   

Par ce texte, l’Assemblée se féliciterait du dialogue politique de haut niveau mené par les parties à l’Accord de Nouméa et de leur engagement à trouver une voie qui permette au territoire de s’administrer pleinement lui-même.  Elle se féliciterait par ailleurs que la Puissance administrante ait de nouveau fait part au Comité spécial de sa volonté de faciliter l’organisation d’une autre mission de visite en Nouvelle-Calédonie, et prendrait note du rapport du 1er juin 2023, présenté par la Puissance administrante sur ses activités au titre de l’audit demandé par le Comité des signataires de l’Accord sur la décolonisation.   

S’agissant de la décolonisation de Pitcairn, le projet de résolution réaffirmerait que le principe d’autodétermination est incontournable et qu’en fin de compte, c’est au peuple de Pitcairn lui-même qu’il appartient de déterminer librement son futur statut politique; de même qu’il incomberait à la Puissance administrante de promouvoir le développement économique et social du territoire et de préserver son identité culturelle. 

Le projet de résolution relatif à la question de Sainte-Hélène, en cas d’adoption par l’Assemblée générale, prierait le territoire et la Puissance administrante de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l’environnement du territoire et le préserver de toute dégradation, et demanderait de nouveau aux institutions spécialisées compétentes de continuer à surveiller l’état de l’environnement dans le territoire. 

En adoptant le projet de résolution portant sur la question des Tokélaou, l’Assemblée générale, notant avec satisfaction que la Nouvelle-Zélande, Puissance administrante, continue de faire preuve d’une coopération exemplaire dans le cadre des travaux du Comité spécial, constaterait que ce pays continue de s’efforcer sans relâche de répondre aux besoins socioéconomiques du peuple des Tokélaou, notamment par la mise en place de nouveaux équipements de transport. 

L’Assemblée générale, en adoptant le projet de texte sur les Îles Turques et Caïques, exigerait d’aborder les formules d’autodétermination de façon souple et demanderait de nouveau à la Puissance administrante, entre autres, de fournir au territoire toute l’assistance nécessaire, de soutenir ses efforts de relèvement et de reconstruction et de renforcer ses capacités en matière de préparation aux situations d’urgence et de réduction des risques, en particulier à la suite du passage des ouragans Irma et Maria qui ont ravagé le territoire en 2017. 

Enfin, l’Assemblée, en adoptant le projet de résolution consacré aux Îles Vierges américaines, se féliciterait qu’un projet de constitution émanant du territoire ait été présenté en 2009.  Il prierait en outre la Puissance administrante de faciliter le processus d’approbation dudit projet et son application, une fois approuvé dans le territoire. 

Par le projet de résolution relatif à la « Diffusion d’informations sur la décolonisation », adopté par 136 voix pour, 3 voix contre (États-Unis, Royaume-Uni et Israël) et une abstention (France), l’Assemblée générale approuverait les activités exécutées par le Département de la communication globale (DCG) et par le Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix du Secrétariat dans le domaine de la diffusion d’informations sur la décolonisation.  Elle estimerait important de poursuivre et d’accroître ses efforts pour diffuser le plus largement possible ces informations, en mettant l’accent sur les différentes possibilités qui s’offrent aux peuples des territoires non autonomes en matière d’autodétermination, et, à cette fin, prierait le Département de la communication globale, agissant par l’intermédiaire des centres d’information des Nations Unies dans les régions concernées, de participer activement à la recherche de moyens nouveaux et novateurs de diffuser des documents dans les territoires non autonomes.  L’Assemblée générale prierait en outre le DCG de continuer de mettre à jour les informations affichées sur le site Web concernant les programmes d’aide destinés aux territoires non autonomes. 

Explications de vote 

Le Royaume-Uni a expliqué avoir voté contre ce texte en raison du fardeau que représente la diffusion de ces informations pour le Secrétariat, qui est injustifiée compte tenu de ses ressources limitées. 

L’Argentine a dit appuyer le droit à l’autodétermination des peuples, mais ce texte doit être interprété et appliqué conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et du Comité spécial des Vingt-Quatre.  La délégation a rappelé que les résolutions relatives aux Îles Malvinas ont reconnu qu’il s’agissait d’un différend de souveraineté qui doit être réglé par la reprise des négociations bilatérales entre les deux parties concernées. 

S’agissant du projet de résolution intitulée Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, adopté par 103 voix pour, 3 voix contre (Israël, États-Unis et Royaume-Uni) et 39 abstentions,  l’Assemblée générale prierait le Comité spécial de continuer à chercher les moyens appropriés d’assurer la mise en œuvre immédiate et intégrale de la Déclaration et d’appliquer, dans tous les territoires qui n’ont pas encore exercé leur droit à l’autodétermination, les mesures qu’elle a approuvées touchant les Décennies internationales de l’élimination du colonialisme.   

Explications de vote: 

Le Royaume-Uni, qui a voté contre ce texte, a été d’avis que certains éléments sont inacceptables.  Pour sa part, il continue de moderniser ses relations avec ses territoires tout en tenant compte des positions de leurs peuples, a assuré la délégation britannique. 

En tant qu’ardent défenseur du droit à l’autodétermination des peuples, l’Australie s’est néanmoins abstenue de voter sur ce texte en raison de ses réserves sur le paragraphe 14 de son dispositif.  Elle a argué que certaines raisons justifient la présence militaire des puissances administrantes dans certains territoires, dans l’intérêt commun. 

L’Argentine a tenu à rappeler que les missions de visite sont menées uniquement dans les territoires non autonomes pour lesquels l’ONU a déterminé que la doctrine de l’autodétermination s’applique, et non pas dans ceux qui font l’objet d’un différend de souveraineté.  Il a plaidé en faveur d’une approche au cas par cas avant de souligner que chacune de ces missions de visite doit être approuvée par l’Assemblée générale.

(à suivre)

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À la Sixième Commission, les délégations en quête d’une approche constructive pour trouver un consensus sur la question des crimes contre l’humanité

Soixante-dix-huitième session,
9e séance plénière - matin
AG/J/3690

À la Sixième Commission, les délégations en quête d’une approche constructive pour trouver un consensus sur la question des crimes contre l’humanité

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé ce matin son débat sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies, entamé hier. C’est le représentant d’Haïti, où pas moins d’une dizaine de missions de l’ONU sont intervenues en trois décennies, qui a clos les discussions sur ce point, soulignant les cas d’atteinte aux droits humains commis pendant le mandat de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Pour « restaurer la confiance », le renforcement des mécanismes de lutte contre de telles infractions ne doit pas être « simplement théorique », a ainsi déclaré le délégué, en écho aux appels de nombre de ses collègues contre l’impunité. 

La Sixième Commission a ensuite abordé la question de l’administration de la justice au sein de l’ONU.  Les conflits au travail sont une « réalité quotidienne » et « l’humain » devrait être au cœur des procédures de résolution de ces conflits, a noté le représentant du Mozambique.  Presque tous les délégués ont prôné le recours aux méthodes informelles de résolution des différends sur le lieu de travail, en insistant sur les avantages de la médiation en termes de coût, de rapidité et d’efficacité dans le traitement des dossiers. 

Certaines délégations ont, à l’instar des Pays-Bas, du Mexique ou du Canada, insisté pour que le personnel non permanent puisse avoir accès à la médiation au même titre que les fonctionnaires.  Cette catégorie de personnel est souvent réticente à soulever ses problèmes professionnels en raison de la « précarité » des contrats, a expliqué la Suisse.  Plusieurs délégations ont aussi appelé à poursuivre les efforts dans la lutte contre le racisme ou le harcèlement des femmes. 

Enfin, les délégués ont entamé leur examen des crimes contre l’humanité.  En avril dernier, la Sixième Commission avait repris ses travaux de fond à ce sujet, notamment sur la possibilité d’élaborer une convention universelle sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, suivant la recommandation de la Commission du droit international (CDI) faite en 2019.

Comme l’a rappelé la représentante de la Nouvelle-Zélande, au nom également de l’Australie et du Canada, ces crimes menacent par leur nature même les trois piliers de la Charte des Nations Unies et si certains, comme la Gambie, ont jugé « constructif » le dialogue sur cette question et salué les convergences de points de vue sur plusieurs projets d’articles, d’autres ont rappelé tout le chemin qui restait à faire pour aboutir à une convention. 

La lacune du droit sur cette question est aujourd’hui « indéfendable », a tranché la représentante de l’Union européenne.  Elle a été suivie en ce sens par de nombreuses délégations, dont la Lettonie, au nom des pays baltes, qui ont souligné l’urgence de trouver un consensus pour garantir un cadre juridique clair et internationalement reconnu donnant la priorité à la protection des droits des victimes et leur accès à la justice.  Une nouvelle convention serait la « touche finale » du système international des traités, a renchéri l’Allemagne.  Toutefois, cela n’interviendra pas avant d’avoir clarifié « ce qui peut être consensuel et ce qui peut créer des divisions », a nuancé le Brésil.

La Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 12 octobre, à partir de 10 heures.

RESPONSABILITÉ PÉNALE DES FONCTIONNAIRES ET DES EXPERTS EN MISSION DES NATIONS UNIES (A/78/275, A/78/248)

Suite et fin du débat général

M. AL-HASANI (Iraq) a déclaré que sa délégation soutient les initiatives de l’ONU qui contribuent à préserver sa réputation et a remercié tous ceux qui contribuent à cette mission. 

Mme GLORIA DAKWAK (Nigéria) a rappelé que le personnel onusien déployé sur le terrain doit se comporter de manière professionnelle et plaidé pour la prise de mesures afin que les fonctionnaires et experts en mission puissent répondre de leurs actes.  Les infractions doivent être punies afin que cela ait un effet dissuasif, a dit la déléguée.  Elle a insisté sur l’importance de la bonne formation du personnel.  Les auteurs d’infractions, en particulier d’exploitation et d’atteintes sexuelles, doivent être « renvoyés » auprès de leur État d’origine afin d’être jugés, a conclu la déléguée. 

Mme EDITH NGUNGU (Kenya) a rappelé que les fonctionnaires et experts des Nations Unies en mission sont censés agir selon les normes d’intégrité et de professionnalisme les plus élevées et respecter les lois, la culture et les valeurs des pays d’accueil.  Selon la représentante, le recrutement doit inclure un contrôle et une vérification des antécédents, et la formation jouer un rôle crucial pour l’apprentissage et la compréhension des traditions, valeurs et cultures d’un peuple avant le déploiement.  Elle a par ailleurs souligné que les États Membres devaient demeurer responsables des actes commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants, ce qui implique de renforcer les capacités en matière de compétence, d’enquête et de poursuites. La représentante a encouragé à cet égard la coopération, mais aussi le partage de bonnes pratiques entre les États, ainsi que l’assistance technique de l’ONU.  Elle a en outre noté que les États devaient s’efforcer de fournir « le meilleur soutien possible aux victimes » de tout comportement délictueux de la part de fonctionnaires et d’experts en mission de l’ONU.

Mme THI NGOC HA NGUYEN (Viet Nam) a dit sa conviction que le personnel de l’ONU et les Casques bleus doivent agir conformément aux accords avec d’autres pays et soutenu la politique de tolérance zéro du Secrétaire général, notamment pour ce qui a trait à l’exploitation et aux abus sexuels. Les allégations et les informations reçues par des États constituent une étape importante, a-t-elle estimé, mais tous les États doivent prendre des mesures dans leur juridiction pour que les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies ne soient plus en mesure de commettre des infractions pénales en toute impunité.  La prévention, la formation préalable et la sensibilisation du personnel sont des éléments tout aussi importants, a conclu la déléguée.

M. NICAISE SERVAIS DOUCKAGA NZENGUI (Congo) a indiqué qu’aucune infraction ne doit rester impunie.  Tout auteur doit être sanctionné.  Il a précisé qu’une enquête a été ouverte par son pays contre des militaires congolais déployés sous pavillon onusien.  Tout candidat à une mission doit être formé afin d’éviter les « dérapages », a ajouté le délégué.  Il a demandé que toute poursuite respecte le principe d’un accès équitable à la justice afin d’éviter « les procès d’intention ».

M. CAMARA (Guinée) a jugé nécessaire d’intensifier les efforts pour dispenser des formations préalables au déploiement du personnel onusien. « Mon pays fournit, au niveau africain, une certaine contribution afin de représenter dignement la communauté internationale », s’est-il félicité.  Appelant à lutter contre les dérives, il a dit qu’il ne fallait pas consacrer l’impunité.  Il faut néanmoins éviter les deux poids, deux mesures, a-t-il estimé, en renforçant les lois nationales pour éviter que certains membres du personnel de l’ONU n’entachent l’image de marque de l’Organisation et celle de ceux qui sont à son service, parfois au péril de leur vie. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a fait part du soutien de sa délégation à la lutte contre la discrimination et le harcèlement, y compris le harcèlement sexuel, applicable à l’échelle du Secrétariat.  Il s’est félicité de la nomination, dans plusieurs services, d’un coordinateur ou d’une coordinatrice pour les questions de déontologie et de discipline.  Le délégué a suggéré qu’un « pouvoir plus marqué » soit donné aux organes subsidiaires en matière de mesures disciplinaires, qui ont « l’avantage de la proximité du terrain ».  Ces organes, a-t-il précisé, devraient pouvoir prendre des mesures conservatoires pour soulager le moral des victimes, sachant que les procédures appropriées peuvent pâtir de lourdeurs bureaucratiques.  S’agissant de la question de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes, il a indiqué qu’un environnement professionnel serein dépendait d’une approche alliant la pédagogie mais aussi la répression « quand les faits sont avérés ».  S’agissant des questions de gouvernance, le délégué a indiqué que sa délégation insistait sur le strict respect des privilèges et immunités, qui obligent un renvoi aux autorités nationales, et qu’il était donc de la responsabilité de ces États de légiférer en la matière.  Tous les membres du personnel doivent faire preuve des plus hautes qualités et doivent donc être pleinement informés du cahier des charges, a-t-il conclu, en encourageant les pays contributeurs de troupes à se focaliser sur la formation des fonctionnaires qu’ils envoient aux Nations Unies.

Mme BETELIHEM TAYE (Éthiopie) a rappelé que son pays est l’un des principaux contributeurs de troupes aux missions de maintien de la paix de l’ONU et qu’il occupe un siège à la Commission économique de l’Afrique de l’Est et dans plusieurs autres organisations régionales et agences de l’ONU. De ce fait, a-t-elle souligné, l’Éthiopie assume une double responsabilité en matière de redevabilité des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies.  L’Éthiopie accueille, elle-même, et dépêche dans d’autres pays un grand nombre de fonctionnaires bénéficiant de privilèges et immunités, a précisé la déléguée, en mettant l’accent sur la stricte adhésion à la politique de tolérance zéro.  Elle a toutefois souligné qu’il est urgent que l’ONU renforce ses mécanismes de prévention et de suivi contre le favoritisme, la mauvaise appropriation des ressources, l’utilisation des fonctions à des fins politiques, la violation flagrante de l’obligation de neutralité et d’impartialité, les déclarations politiques indues, l’usage non éthique des médias conventionnels et sociaux, l’interférence dans les affaires intérieures des États, l’exploitation et les abus sexuels, ainsi que d’autres formes de transgression. 

M. WISNIQUE PANIER (Haïti) a souligné les implications des infractions pénales commises par le personnel onusien pour la réputation et le fonctionnement de l’ONU.  S’il a approuvé la démarche multipartite reconnaissant l’importance de la coopération entre les États Membres et l’ONU, il a également attiré l’attention sur le vide juridique dans les lois nationales.  En Haïti, nous n’avons pas de lois permettant de poursuivre un ressortissant qui commet une infraction en dehors de notre territoire, a-t-il indiqué, affirmant qu’une convention internationale serait pertinente.  Le délégué a ensuite expliqué que son pays a accueilli une dizaine de missions onusiennes au cours des trois dernières décennies, faisant d’Haïti le témoin des avantages et des problèmes de telles missions.  À ce titre, il a donné la priorité à la protection des victimes et des témoins, à leur bien-être et à leurs droits, pour encourager la dénonciation des délits. Les nombreuses allégations et infractions pénales qui figurent à l’Annexe 1 du rapport du Secrétaire général posent des questions sérieuses sur les mécanismes actuels d’investigation et de poursuite, a regretté le délégué, mentionnant les cas graves d’atteinte aux droits humains pendant la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Ces actes sapent la confiance du peuple haïtien envers l’ONU, tout comme l’absence de poursuites et le manque de compensations qui aggravent le sentiment d’injustice, a-t-il déploré.  Il a également regretté l’absence quasi totale d’informations sur les enquêtes et les poursuites, et parfois sur l’abandon des poursuites, qui semble être un problème systémique au sein des missions.  Il est impératif de prendre des mesures plus robustes pour mener des enquêtes complètes, a exhorté le délégué.  Les mécanismes de lutte contre ces crimes et la responsabilité pénale ne doivent pas être simplement théoriques, ils doivent permettre de restaurer et de maintenir la confiance, a-t-il insisté, appelant au renforcement des mécanismes de suivi et de transparence au sein des missions. 

ADMINISTRATION DE LA JUSTICE

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda), au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé que la résolution des conflits dans un contexte informel était cruciale, notamment pour son coût moindre par rapport à un cadre de justice plus formel.  Notant que, pendant la pandémie de COVID-19, les dossiers s’étaient accumulés, il s’est néanmoins félicité du rôle des différents tribunaux et de la diminution du nombre d’affaires encore en suspens.  Le délégué s’est dit préoccupé par le fait que le personnel de terrain était surreprésenté dans ces dossiers, notant que ce type de personnel était « confronté à un stress et des difficultés en raison de son statut contractuel ».  Il s’est dit favorable aux mesures prises par le Secrétaire général en vue de renforcer le Bureau d’aide juridique au personnel, en particulier pour ce type de personnel. 

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, a regretté l’écart entre la théorie et la pratique, attirant l’attention sur les retards dans le traitement des dossiers et sur la protection des témoins contre les représailles, et encourageant la révision du socle formel de l’administration de la justice à l’ONU.  Afin d’accélérer ces efforts, a-t-elle poursuivi, il faut augmenter le recours au service informel de médiation pour les différends au travail, saluant le projet pilote mis en place.  La protection des victimes et des témoins doit également être améliorée, a estimé la déléguée, encourageant la mise en place d’un système permettant au Tribunal du contentieux administratif et au Tribunal d’appel de conserver l’anonymat des individus en cas de besoin.  Elle a également salué le nouveau portail sur la jurisprudence permettant une accessibilité et une transparence du système. 

Si l’approche informelle du système interne d’administration de la justice est plus efficace et moins coûteuse que les options formelles, l’accès aux services informels et d’ombudsman reste inégal en fonction de la catégorie à laquelle les membres du personnel appartiennent, a constaté la déléguée. Alors qu’une augmentation des cas provenant du personnel non permanent est notable, le personnel permanent reste la principale catégorie à utiliser les services informels, a-t-elle fait remarquer.  Afin de réduire cette inégalité, elle a appelé à pérenniser le projet pilote.  La déléguée a également salué les campagnes de prévention des conflits visant à instaurer la dignité pour tous et à lutter contre le racisme, et le maintien du multilinguisme qui rend l’administration de la justice plus efficace.  Enfin, elle a rappelé l’importance de l’inclusion des questions de genre afin d’assurer un accès équitable à la justice. 

M. KEVIN TIMOTHY MEAD (Canada), au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a mis en exergue l’importance d’un système de justice interne transparent, impartial, indépendant et efficace au sein de l’ONU depuis les débuts du système d’administration de la justice en 2009. Il a souligné qu’un tel système, doté de ressources adéquates et ancré dans les principes d’une procédure régulière et de l’accès à la justice, est essentiel pour que l’Organisation soit en mesure d’atteindre ses objectifs, ajoutant que les rapports soumis constituent une ressource précieuse pour les États Membres. 

Saluant la productivité du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies et du Tribunal d’appel des Nations Unies pour les efforts fructueux qu’ils déploient afin de continuer à réduire l’arriéré des affaires en suspens, le délégué a également reconnu les efforts déployés par les tribunaux pour former de nouveaux juges et renforcer leurs compétences.  Il s’est réjoui d’autre part de l’engagement continu en faveur du multilinguisme et de l’augmentation de la diversité géographique des tribunaux au cours de la période examinée, ainsi que des préparatifs pour le lancement du portail de jurisprudence qui favorisera la cohérence et la transparence dans le travail des tribunaux.  Il a également salué l’identification, par le Bureau des services d’ombudsman et de médiation, des problèmes systémiques qui sous- tendent les conflits sur le lieu de travail.  Enfin, le délégué s’est félicité que l’ONU prenne au sérieux les questions liées à la santé mentale et aux besoins personnels des non-fonctionnaires.

Mme DOROTHY PATTON (États-Unis) a souligné l’amélioration constante de l’ambiance de travail à l’ONU, avant de saluer les activités du Bureau des services d’ombudsman et de médiation.  Elle a dit sa satisfaction devant l’avancement des travaux du Tribunal du contentieux administratif et du Tribunal d’appel des Nations Unies.  La médiation pourrait réduire encore les délais dans le traitement des affaires, a-t-elle estimé.  Enfin, la déléguée a jugé capitale la transparence du système interne d’administration de la justice à l’ONU.

Mme FANNY RATHE (Suisse) a souligné que le principe d’un accès à la justice en toute équité, transparence, efficacité et sans discrimination était fondamental pour son pays.  Elle a insisté sur deux aspects de cette question: le règlement des conflits impliquant des non-fonctionnaires et le recours à la médiation.  Jugeant essentiel d’assurer une protection et des voies de recours utiles à toutes les catégories de personnel de l’ONU sans distinction, elle a salué la réflexion menée pour améliorer l’accès à la justice du personnel non-fonctionnaire en relevant notamment que cette catégorie était souvent réticente à aborder ses problèmes professionnels en raison de la « précarité » de ses contrats et de sa « crainte de représailles ».  La médiation restant trop peu utilisée dans le cadre de la résolution des conflits, la déléguée a ensuite fait part du souhait de la Suisse de promouvoir davantage le recours à la médiation pour toutes les catégories de personnel, y compris les non-fonctionnaires.  En conclusion, elle a espéré que le prochain rapport du Secrétaire général contiendra des réflexions plus concrètes concernant l’accès des non-fonctionnaires à des mécanismes judiciaires équitables et efficaces pour régler des problèmes d’ordre professionnel. 

Mme ANGELIQUE VAN DER MADE (Pays-Bas) a noté que le retour sur le lieu de travail après la pandémie de Covid-19 demande des lieux de travail plaisants pour le personnel de l’ONU.  À cette fin, il est nécessaire de préserver les normes essentielles d’intégrité, a-t-elle rappelé.  Toutefois, si des conflits émergent, il faut éviter l’escalade en utilisant en priorité les services informels et d’ombudsman, a-t-elle estimé.  Saluant la réduction du retard dans le traitement des cas par le Tribunal du contentieux administratif, la déléguée a encouragé à continuer dans cette voie.  Selon elle, les services offerts par l’ONU pour la gestion des conflits en interne permettent aux membres du personnel d’aborder les problèmes de manière sûre.  Toutefois, ces services devraient être utilisés davantage, a-t-elle avancé, recommandant la poursuite du projet pilote pour offrir ces services au personnel non-permanent qui contribue de manière significative au travail de l’ONU.  À cet égard, elle a également souhaité que l’ONU fournisse des informations sur la poursuite des travaux des tribunaux. 

Mme NATALIA JIMÉNEZ ALEGRÍA (Mexique) a relevé le rôle important du système de justice informel et reconnu les efforts tendant à son renforcement, notamment pour élargir les services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies. En dépit d’une amélioration dans l’utilisation de ces services de sorte qu’il a été possible de retourner au niveau antérieur à la pandémie de COVID-19, il n’en reste pas moins que la médiation reste sous-utilisée compte tenu de son potentiel pour éviter des litiges évitables.  La déléguée a donc suggéré de poursuivre les programmes de diffusion et de sensibilisation, et insisté pour que le personnel non permanent puisse avoir accès aux services de médiation.  Le projet pilote étant fondamental à ce propos, il gagnerait, selon elle, à être régularisé.  La déléguée a ensuite fait remarquer que les services d’ombudsman et de médiation ont surtout été utilisés par des femmes et que la mise à disponibilité d’un espace sûr constitue une raison de plus pour veiller au renforcement de tels services.

Mme MA YANBO (Chine) a rappelé l’importance de préserver les droits légitimes du personnel de l’ONU, avant de faire quelques suggestions. Elle a, tout d’abord, estimé nécessaire d’accroître l’efficacité des procédures internes.  Ensuite, elle a salué l’existence de règles pour les preuves et la prescription, qui sont essentielles et doivent être maintenues. Par ailleurs, la déléguée a rappelé l’importance de l’approche informelle pour régler les contentieux. Enfin, elle a demandé que l’ONU se penche sur les causes de ces contentieux, dont certains semblent récurrents. En conclusion, elle a salué l’élection, pour la première fois, de juges chinois au sein des tribunaux de l’ONU. 

M. AMANUEL GIORGIO (Érythrée) a déclaré qu’un fonctionnaire international est supposé répondre aux aspirations les plus élevées des populations du monde et qu’un système de justice interne doit donc répondre, en toute équité, aux problèmes qui se posent sur le lieu de travail.  Une approche indépendante, professionnelle et apolitique doit primer au sein de l’ONU, a-t-il fait valoir.  L’assistance juridique joue également un rôle important dans l’orientation du personnel dans le cadre de l’administration de la justice en lui fournissant toutes les informations nécessaires pour soumettre son dossier, le défendre et parvenir à un résultat positif et équitable.  La recommandation 8 du Conseil de justice interne devrait être mieux appliquée, a commenté le délégué, avant d’appuyer la recommandation 7 qui vise à renforcer la justice au sein de tout le système onusien.  Enfin, il a pointé le problème du racisme sur le lieu de travail comme étant très préoccupant pour les États Membres et la nécessité d’y remédier sans délai.

Mme ARIANNA CARRAL CASTELO (Cuba) a salué les avancées enregistrées s’agissant de l’administration de la justice à l’ONU.  Elle a appelé à un équilibre entre le respect des intérêts de l’Organisation et de ceux du personnel.  Le système interne d’administration de la justice doit être efficace, transparent et cohérent avec les normes du droit.  La déléguée a appelé à protéger les droits des membres du personnel, tout en rappelant leurs obligations, ces dernier devant rendre des comptes le cas échéant.  Elle a salué le travail du Bureau de l’aide juridique au personnel, avant de demander que le système d’administration de la justice soit doté des ressources nécessaires.

M. DUNKAN LAKI MUHUMUZA (Ouganda) a indiqué que la résolution efficace des conflits par une approche formelle et informelle est fondamentale pour l’ONU. Il a salué la nomination des juges en novembre 2022 qui permet une meilleure représentation géographique ainsi que le multilinguisme au sein des tribunaux des Nations Unies, incarnant le principe d’équité.  C’est l’individu qui doit être au cœur de cette approche et non pas l’ONU en tant qu’institution, a- t- il voulu, en exhortant d’autre part à la lutte contre le racisme dans le cadre de la Décennie de lutte contre le racisme et la discrimination raciale.  Le délégué a fait observer que dans les tribunaux nationaux ayant des services de médiation, près de 70% des affaires sont résolues en peu de temps.  Le processus de médiation doit rester confidentiel et consensuel, a- t-il demandé.  Il a regretté que la médiation demeure sous utilisée, notant que le système de justice international continue d’accuser du retard à cet égard. 

M. INÁCIO VIRGÍLIO CHICO DOMINGOS (Mozambique) a insisté sur l’importance de l’indépendance, de l’impartialité et de l’efficacité de la justice à l’ONU.  Si les conflits au travail sont une « réalité quotidienne », l’humain et les individus doivent être au cœur des procédures pour résoudre les conflits dans le respect de la dignité de chaque individu, a-t-il plaidé.  Le délégué a reconnu l’efficacité du processus de médiation, une pratique moins coûteuse, selon lui, et utile pour alléger le travail du Tribunal d’appel des Nations Unies.  S’agissant des dossiers en suspens, il s’est dit encouragé par la diminution de leur nombre, mais a insisté sur la nécessaire qualité des arrêts rendus.  Il a salué, à cet égard, le lancement du portail de jurisprudence, qui est très régulièrement consulté, a-t-il noté, en appelant à son renforcement.  L’accès à la justice signifie non seulement d’être entendu par un tribunal, mais aussi de doter toutes les parties des ressources qui leur permettent d’avoir accès à la jurisprudence.  En conclusion, le délégué s’est félicité de l’accent mis par le Secrétaire général sur le multilinguisme, et des efforts relatifs à la résolution des conflits pour le personnel non permanent, à la protection contre les représailles, à la lutte contre le racisme ou le harcèlement des femmes. 

Mme MELINA LITO (Royaume-Uni) s’est dite favorable à la proposition d’imposer des mesures disciplinaires, souhaitant un consensus sur cette question. Sa délégation soutient également la révision des règles de procédure, appelant toutefois à plus de clarté sur la cohésion entre les nouvelles règles et les règles existantes, ainsi que sur le mode d’adoption de ces règles.  Si l’anonymisation des noms est une piste à suivre pour assurer la protection des individus, il faudra néanmoins veiller à maintenir la transparence de la justice, surtout dans les cas d’atteinte et d’exploitation sexuelles, a-t-elle mis en garde. 

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a estimé qu’il est fondamental que le Bureau des services d’ombudsman et de médiation des Nations Unies soit connu et qu’il ait meilleure presse auprès du personnel et de la direction.  Il a noté avec satisfaction qu’en 2022, le Bureau a ouvert au total 1 560 dossiers, et qu’au cours des deux premiers trimestres de 2023, le Bureau a enregistré une augmentation significative du nombre de demandes de services.  « Cette augmentation du nombre de médiations menées, suggère du point de vue de ma délégation le renforcement des ressources financières et humaines affectées aux bureaux d’ombudsman. »  Le représentant a jugé intéressant d’esquisser des procédures et normes harmonisées pour régir la pratique de la profession d’ombudsman dans les organisations, afin que les disparités ne sèment pas davantage de troubles et ne renforcent la suspicion contre ces bureaux qui sont en fait des soupapes de sûreté des organisations.  « Ma délégation est pour la professionnalisation et la responsabilisation des ombudsmans tout comme elle est favorable à l’évaluation de leur performance. »  Le représentant a ensuite noté avec satisfaction la baisse du nombre de demandes en 2022, par rapport à l’année précédente, notamment au Tribunal du contentieux administratif dont la configuration actuelle a permis d’affecter plus facilement les ressources judiciaires là où elles étaient nécessaires. S’agissant du pouvoir du Secrétaire général dans la prise des mesures disciplinaires, il a appelé au respect strict du cadre réglementaire établi par l’Assemblée générale.  Il a enfin encouragé le Secrétaire général à poursuivre ses efforts inlassables pour endiguer le harcèlement de femmes à l’ONU.

CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ

Débat général 

M. AMADOU JAITEH (Gambie), s’exprimant au nom d’un groupe interrégional d’États Membres, a fait remarquer que les crimes de génocide et les crimes de guerre sont encadrés par leurs conventions respectives, alors que les crimes contre l’humanité n’ont pas de statut propre, malgré une reconnaissance de plusieurs décennies.  Les crimes contre l’humanité subissent donc un vide juridique qu’une convention internationale permettrait de combler, a-t-il déclaré.  Selon sa délégation, une telle convention permettrait de renforcer la prévention de ces crimes haineux au niveau national et la coopération entre les États en matière d’entraide judiciaire et d’extradition.  Le délégué a souligné l’expérience « constructive » qu’a constitué le débat de la Sixième Commission sur ce thème en avril dernier, espérant un nouveau débat de ce type en avril 2024.  Nous ne pourrons progresser sur ce problème qu’en adoptant un dialogue structuré et en coopérant, a-t-il averti, réaffirmant la volonté de ce groupe d’États Membres de travailler de manière constructive afin d’aboutir à une décision sur ce point lors de la prochaine Assemblée générale. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda), au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné la volonté de la communauté internationale de prévenir et de punir les crimes contre l’humanité.  Il a souhaité aboutir à un consensus international sur la réponse à tels crimes. Nous devons agir en tant que communauté internationale dans le respect des spécificités politiques et culturelles et des attentes de toutes les parties, a demandé le délégué.  Il a noté la légitimité des préoccupations de certaines délégations devant le travail de la Commission du droit international (CDI). « Ces préoccupations ne doivent pas être ignorées. »  Le délégué a enfin rappelé les injustices de l’esclavage et ses graves conséquences pour l’Afrique.  Nous demandons que l’esclavage fasse partie de la liste des crimes contre l’humanité, ce qui pour l’instant n’est pas le cas, a-t-il conclu.

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, a souligné que les crimes contre l’humanité font partie des crimes les plus graves, reconnus par le Tribunal de Nuremberg et par d’autres tribunaux internationaux parmi lesquels ceux de l’ex- Yougoslavie et du Rwanda.  Il semble clair que la majorité écrasante des délégations ne remet plus en question la nécessité d’une convention sur cette question et qu’il importe de poursuivre la discussion pour comprendre les points divergents, a-t-elle déclaré, disant qu’il lui tarde de reprendre les débats en avril prochain. 

Mme JULIA FIELDING (Suède), au nom des pays nordiques, a vu dans l’absence de convention internationale sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité une « lacune majeure ».  Une telle convention, a-t-elle argué, donnerait un nouvel élan à la prévention des crimes contre l’humanité.  Selon sa délégation, le projet d’articles de la CDI, qui constitue une base solide de négociation, renforcerait les lois nationales et la juridiction pénale et promouvrait la coopération pour les enquêtes, les poursuites et la répression de ces crimes.  Saluant les débats constructifs tenus en avril dernier, la représentante s’est dite satisfaite de la convergence des opinions à plusieurs égards et a espéré parvenir à un consensus autour du projet de convention d’ici à la prochaine session de l’Assemblée générale. 

Mme ZOE RUSSELL (Nouvelle-Zélande), s’exprimant au nom de l’Australie, du Canada et de la Nouvelle-Zélande, a salué le projet d’articles de la CDI et appuyé l’idée d’une convention pour la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Il n’existe actuellement aucune convention universelle pour lutter contre les crimes contre l’humanité et cela reste une « lacune importante » dans le cadre international, a jugé la déléguée.  Elle a donc appelé à combler cette lacune, avant de souligner la certitude qu’apporte un traité.  Elle a appelé à un renforcement des capacités nationales pour prévenir et punir ces crimes. Le projet d’articles est une bonne base pour le développement d’une convention, a tranché la déléguée. « La force de ce projet est qu’il s’enracine dans le droit existant. » Elle a également souhaité qu’un projet de convention intègre la notion d’égalité entre les genres afin de punir les crimes de nature sexuelle.  Enfin, notant l’engagement élevé des délégations autour dudit projet, elle s’est dit confiante en une convergence des points de vue.

Mme ELVIRA CUPIKA-MAVRINA (Lettonie), au nom des pays baltes, a déploré la multiplication des allégations de crimes contre l’humanité et l’absence d’une convention spécifique, contrairement au crime de génocide et aux crimes de guerre. Elle a estimé que cette lacune juridique empêchait les victimes de recevoir la justice qu’elles méritent. Notant que ces actes comprennent la déportation ou le transfert forcé de populations, l’esclavage, la torture ou encore les disparitions forcées, la représentante a souligné qu’ils remettaient en question les principes sur lesquels l’ONU a été fondée.  Jugeant qu’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité fournirait un cadre juridique clair et internationalement reconnu, elle a aussi expliqué qu’elle donnerait la priorité à la protection des droits des victimes et à leur accès à la justice. La représentante a rappelé que l’expulsion et le transfert forcés d’enfants d’Ukraine par la Fédération de Russie, vers les zones occupées par elle et vers le territoire russe, pourraient constituer un crime contre l’humanité.  Elle a conclu qu’une telle convention enverrait un message clair sur l’impunité dans le monde entier. 

M. NATHANIEL KHNG (Singapour) a informé que son pays soumettra des observations, par écrit, à la fin de cette année.  Les discussions montrent que la problématique est complexe, exigeant de travailler avec sérieux pour rapprocher les opinions des différents États Membres, a-t-il commenté, assurant soutenir une approche consensuelle de sorte à garantir une large acceptation.  Le délégué a cité comme exemple le problème des conflits juridictionnels potentiels qui exigent davantage de discussions.  Il a noté que, dans le projet d’article 7 de la CDI sur l’établissement de la compétence nationale, de nombreux États ont émis le désir d’exercer leur juridiction nationale s’agissant d’un crime particulier, ajoutant que l’article ne spécifie pas la façon dont ces conflits juridictionnels pourraient être résolus. 

Mme MERHABA HASLER (Liechtenstein) a rappelé qu’il n’existe actuellement aucune convention universelle pour lutter contre les crimes contre l’humanité. Elle a appuyé l’idée d’une convention sur le sujet et salué les mesures concrètes prises l’an dernier par la CDI à cette fin.  Elle a souhaité la tenue « à court-terme » de discussions au sein d’une conférence axée sur l’élaboration d’une telle convention, permettant aux délégations de faire part de leur avis détaillé.  La déléguée a noté les éléments de langage dans le projet d’articles de la CDI en ce qui concerne la coopération internationale pour combattre l’impunité pour les crimes les plus graves, avant de saluer l’adoption de la Convention de Ljubljana- La Haye sur l’entraide judiciaire.

M. VICTOR SILVEIRA BRAOIOS (Brésil) a souligné qu’il existait une lacune importante à combler dans le droit international s’agissant de la prévention et de la répression des crimes contre l’humanité.  Il a noté que si certains aspects du projet d’articles de la CDI pouvaient être améliorés, ils constituaient néanmoins « un bon point de départ » pour des négociations.  Il a déploré que les discussions sur ce sujet soient restées au point mort pendant plus de trois ans, tout en se félicitant des progrès de la session d’avril qui a permis, selon lui, « de clarifier ce qui peut être consensuel et ce qui peut créer des divisions ».  Sur le projet d’articles lui-même, le délégué a relevé plusieurs points, qu’il s’agisse du préambule et de la possibilité d’une référence à l’interdiction du recours à la force et à la non- intervention dans les affaires intérieures des États, de la définition des crimes contre l’humanité, ou encore de l’ajout de garanties pour empêcher « tout abus du principe d’universalité » ou pour s’assurer que le futur traité n’impose pas d’obligation d’extrader aux États Membres.  En conclusion, il a rappelé que pour les crimes les plus graves, les responsabilités individuelles et étatiques sont souvent complémentaires et qu’il faut en tenir compte pour lutter contre l’impunité.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a rappelé que son pays soutient la poursuite des auteurs des crimes contre l’humanité, une position qui reste inchangée depuis le procès de Nuremberg.  Néanmoins, a-t-il poursuivi, il n’y a toujours pas de convention internationale sur ces crimes plus de 75 ans après le procès de Nuremberg. Pour sa délégation, le projet d’articles de la CDI constitue donc un grand pas en avant.  Le représentant a salué la reprise de session de la Sixième Commission sur ce point, en avril dernier, estimant qu’elle a permis un « échange de vues tonique, sans préjuger des décisions qui reviendraient à la Sixième Commission à l’automne » et se réjouissant de la reprise d’une session en avril prochain.  Les États-Unis continuent d’adopter des mesures nationales pour que ces crimes ne restent pas impunis, a-t-il ensuite affirmé.  Il a évoqué la récente décision de l’Administration Biden ayant trait à l’examen de ces crimes par le Congrès lorsqu’ils relèvent du droit pénal américain.  À ce titre, il a déclaré que les récentes attaques du Hamas doivent être condamnées, les États-Unis réitérant leur soutien à Israël. 

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a salué le fait que la question des crimes contre l’humanité est abordée, pour la quatrième fois, par la Commission car il s’agit de faits condamnables et leur interdiction doit devenir un impératif pour la communauté internationale.  Elle a reconnu, dans ce contexte, le caractère complémentaire du travail du système international des droits humains et de celui du droit international en vue de la prévention de tels crimes qui menacent la paix, la sécurité et le bien-être de tous.  En tant qu’État partie au Statut de Rome, le Guatemala a vivement appuyé la Cour pénale internationale (CPI) dont les travaux se trouvent au cœur d’un système de justice internationale jouissant d’un impact global.  S’agissant de la responsabilité de protéger, la représentante a rappelé que le Guatemala fait partie du groupe de pays ayant présenté la résolution adoptée par l’Assemblée générale, le 17 mai 2021, intitulée « La responsabilité de protéger et la prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et de crimes contre l’humanité ».

M. MAXIMILIAN GORKE (Autriche) a souhaité la convocation d’une conférence diplomatique en vue de l’élaboration d’une convention sur la base du projet d’articles de la CDI sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité. Il a invité toutes les délégations à participer de manière constructive aux discussions, comme cela a été le cas lors de la reprise de session au printemps, en vue de progresser vers cet objectif d’une convention.  Il a ajouté que cette conférence pourrait se tenir à Vienne.  Nous devons tout faire pour réduire la possibilité que des crimes contre l’humanité ne soient commis, a conclu le délégué.

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a déclaré que les crimes contre l’humanité faisaient partie des crimes les plus graves et indiqué que, si le concept était « largement accepté », des lacunes restaient à combler en dehors du cadre de la Cour pénale internationale (CPI), comme la question de la prévention ou de la poursuite de tels crimes, ou encore du principe de complémentarité. Une nouvelle convention serait la « touche finale » du système international des traités, a déclaré le représentant.  Saluant l’esprit constructif des échanges sur ce sujet, il a dit rester convaincu que, grâce à la mise en place d’un comité ad hoc, une convention pourrait voir le jour et limiter le nombre de ces crimes atroces.

Mme GRANDJEAN (Belgique) a réaffirmé que les crimes contre l’humanité ont toujours été une priorité pour son pays, soutenant une convention internationale qui viendrait combler les lacunes existantes en droit international conventionnel.  Elle a salué le format inédit de la reprise de session de la Sixième Commission, en avril 2023, sur ce sujet, qui a permis de reprendre les discussions, soulignant la volonté de la Belgique de poursuivre dans cette voie en avril prochain. En outre, la représentante a jugé important de veiller à la cohérence avec d’autres instruments internationaux existants, comme la Convention de Ljubljana-La Haye, adoptée en mai 2023, pour la coopération internationale en matière d’enquête et de poursuite du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et autres crimes internationaux.  Elle a encouragé les parties prenantes à signer cet instrument, en février 2024, afin qu’il puisse être ratifié et entrer en vigueur dans les plus brefs délais.

Mme MELINDA VITTAY (Hongrie) a fait part de plusieurs points s’agissant des divergences exprimées lors de la reprise de session sur l’existence ou non d’une lacune dans le cadre juridique international sur la question.  Elle a noté que l’interdiction des crimes contre l’humanité a été inscrite par la CDI dans la liste des normes impératives du droit international général, qui doivent être respectées en toutes circonstances, alors même qu’elles n’ont pas encore été codifiées dans un traité spécifique de droit international.  La représentante a en outre souligné que le projet d’articles de la CDI imposait directement aux États l’obligation d’agir dans le cadre de leurs juridictions nationales respectives et contenait aussi une obligation de prévention, essentielle pour protéger les personnes contre ces crimes.  Elle a ensuite indiqué que le caractère coutumier de l’interdiction des crimes contre l’humanité n’était pas acquis, les définitions selon les systèmes juridiques et les États n’étant pas uniformes, rendant une définition juridique au niveau international « souhaitable », selon elle. Pour finir, elle a rappelé à toutes fins utiles l’existence de la Convention de Ljubljana- La Haye, adoptée récemment, qui doit permettre aux pays de coopérer au niveau international dans les enquêtes et les poursuites contre les crimes internationaux les plus graves, y compris le crime d’agression. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour la Colombie juge « de bon augure » le cessez-le-feu entre le Gouvernement et le groupe EMC FARC-EP

9434e séance – après-midi      
CS/15437

Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour la Colombie juge « de bon augure » le cessez-le-feu entre le Gouvernement et le groupe EMC FARC-EP

Le Gouvernement du Président colombien Gustavo Petro et le groupe autodénommé « État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire » (EMC FARC-EP) ont annoncé, le week-end dernier, que le cessez-le-feu bilatéral entrera en vigueur à partir du 16 octobre, a déclaré cet après-midi devant le Conseil de sécurité le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie en présentant son rapport trimestriel sur la situation dans ce pays. 

M. Carlos Ruiz Massieu a ajouté que les deux parties ont convenu de créer une « table de dialogue de paix » dès l’entrée en vigueur du cessez-le-feu bilatéral, ce qui est, selon lui, « de bon augure » à deux semaines des élections départementales et municipales du 29 octobre prochain.  Ces avancées, a-t-il dit, s’ajoutent à celles enregistrées dans les négociations avec le groupe Armée de libération nationale (ELN), qui ont débouché en août sur un cessez-le-feu de six mois. 

Le Représentant spécial a noté que l’appui du Conseil de sécurité a permis à la Mission de l’ONU de contribuer à ce processus à travers sa participation au Mécanisme de vérification et de suivi de l’Accord final, portant sur les cessez-le-feu, la cessation des hostilités bilatérales et le dépôt des armes.  Il a ajouté que sur les 68 observateurs internationaux affectés à ce mécanisme, 31 viennent d’arriver en Colombie. 

Faisant le point de la situation, sept ans après la signature de l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable, conclu en novembre 2016, et à mi-chemin des 15 années prévues dans le calendrier de mise en œuvre, M. Riuz Massieu a relevé d’autres progrès notables, en particulier l’instauration de la commission nationale sur la participation, chargée de concevoir une méthodologie pour faire participer la société au processus de paix. 

Après avoir reconnu la lenteur initiale de la réforme agraire, mesure phare de l’Accord final après avoir été l’une des causes premières du conflit, le Chef de la Mission de vérification a salué les efforts du Gouvernement pour la mettre en place, via des allocations budgétaires substantielles et une priorisation dans le plan national de développement.  Dans ce cadre, il a applaudi l’intensification du dialogue avec les organisations paysannes et les propriétaires terriens, ainsi que l’établissement du système national de réforme agraire et la désignation de quatre régions prioritaires pour des interventions globales de développement rural. 

Invité par le Conseil, le Ministre des affaires étrangères de la Colombie s’est, pour sa part, employé à clarifier le mandat de la Juridiction spéciale pour la paix, composante judiciaire du système intégral pour la vérité, la justice, la réparation et la non-répétition, établi par l’Accord final.  Affirmant craindre que cette institution modèle « dévie » de sa trajectoire initiale, M. Alvaro Leyva Duran a souhaité que ses tâches soit réexaminées pour améliorer son fonctionnement.

De son côté, le représentant du Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP) s’est réjoui de la décision du Secrétaire général permettant à la Colombie d’avoir accès au Fonds de consolidation de la paix pour une période de cinq ans supplémentaires.  M. Hrvoje Ćurić Hrvatinić a d’autre part encouragé le Gouvernement colombien à progresser dans ses programmes en vue de rétablir le bureau présidentiel chargé de la mise en œuvre de l’Accord final.  À l’approche des deuxième élections départementales et municipales à se tenir depuis la signature de l’Accord final, il a aussi mis l’accent sur la garantie de la participation des ex-combattants. 

À ce sujet, M. Riuz Massieu a exigé des mesures urgentes et concrètes de la part des autorités pour la protection des ex-combattants, ainsi que des chefs de file sociaux et des défenseurs des droits de l’homme.  Il s’est toutefois félicité de la récente adoption par la commission nationale sur les garanties de sécurité d’une politique publique relative au démantèlement des groupes armés illégaux et des organisations criminelles, politique résultant de négociations entre le Gouvernement et la société civile. 

Les mesures budgétaires et les ajustements institutionnels et législatifs visant à l’accélération de la réforme rurale intégrale ont été largement soutenus par les membres du Conseil de sécurité.  La Fédération de Russie a cependant appelé à des efforts supplémentaires en matière de substitution des cultures illégales, celles-ci restant l’une des principales sources de revenu des groupes armés illégaux. 

Dans un plaidoyer pour les ressources naturelles et l’environnement, le Directeur général de la Fondation pour la conservation et le développement a ainsi prévenu qu’à la frontière avec l’Équateur, le trafic de drogue gagne en ampleur, tandis qu’à celle avec le Pérou, l’exploitation minière illégale progresse, parallèlement au recrutement de jeunes autochtones et à l’installation de cultures industrielles de coca.  De plus, a poursuivi M. Rodrigo Botero Garcia, dans la zone frontalière avec le Venezuela, divers groupes illégaux à la recherche d’or impactent les territoires protégés de l’Orénoque, la frontière avec le Panama connaissant quant à elle la « plus grande migration d’Amérique latine », sous le contrôle d’éléments armés. 

Autre jalon essentiel aux yeux des membres du Conseil, l’intensification du dialogue entre le Gouvernement colombien et les groupes armés opérant dans le pays a également été saluée.  S’agissant des pourparlers avec le groupe EMC FARC-EP, composé pour l’essentiel de dissidents des Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée du peuple (FARC-EP), le Brésil a émis l’espoir que le Conseil de sécurité autorisera la Mission de l’ONU à vérifier la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu bilatéral une fois que le Gouvernement Petro en aura fait la demande. 

La plupart des délégations se sont alarmées de la persistance de la violence à l’encontre des ex-combattants des FARC-EP, dont pas moins de 400 ont été assassinés depuis la signature de l’Accord final, la France déplorant que les garanties de sécurité́ demeurent aujourd’hui insuffisantes.  Plusieurs pays ont aussi appelé à la mise en œuvre concrète du chapitre ethnique de l’Accord final, d’une importance capitale selon Malte, compte tenu des violences disproportionnées endurées par les communautés ethniques et du recrutement d’enfants par des acteurs armés illégaux.  Pour les membres africains du Conseil (A3), il est impératif que les droits des peuples autochtones soient réaffirmés et respectés, et que des réparations pour les dommages causés soient rapidement accordées. 

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53) S/2023/701

Déclarations

M. CARLOS RUIZ MASSIEU, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a signalé que cette séance se tient alors que l’on approche de jalons importants du processus de paix, à savoir le septième anniversaire de la signature de l’Accord final et la moitié des 15 années prévues pour sa mise en œuvre effective. Il a relevé que ceux qui ont analysé de manière approfondie le conflit armé en Colombie pointent, comme principales causes, la distribution inégales des terres et l’échec de l’application des réformes rurales pourtant nécessaires, raison pour laquelle les parties à l’Accord final ont mis la réforme rurale intégrale au centre de ce document, au point d’en faire le premier chapitre et le domaine nécessitant le plus d’investissements à long terme.  Il n’a donc pas trouvé étonnant que la lenteur des progrès dans ce domaine, lors des années initiales de mise en œuvre, ait limité les transformations escomptées dans l’Accord final dans les zones rurales marginalisées et affectées par le conflit. 

M. Riuz Massieu a salué l’engagement particulier du Gouvernement du Président Petro en faveur de cette section de l’Accord final, notamment les allocations budgétaires substantielles à la réforme rurale et sa priorisation dans le plan national de développement, l’intensification du dialogue avec les organisations paysannes et les propriétaires terriens, l’établissement du système national de réforme agraire et la désignation de quatre régions prioritaires pour des interventions de développement rural.  Il a noté que cet engagement s’est matérialisé à San Juan de Arama, dans le département de la Meta, où le Gouvernement a acheté des terres pour les livrer à quelque 500 bénéficiaires, parmi lesquels des ex-combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP), des paysans et des membres de communautés autochtones qui s’y étaient réinstallés. Le Chef de la Mission de vérification, qui a visité l’ancienne zone territoriale de formation et de réinsertion de Carrizal, dans le département d’Antioquia, il y a quelques semaines, a pu observer qu’une cinquantaine d’ex-combattants des FARC-EP et leurs familles y vivent aux côtés de la communauté locale. 

S’agissant de la réinsertion, M. Riuz Massieu a réitéré son appel aux autorités pour qu’elle se fasse dans des conditions de vie digne et de sûreté pour les communautés.  Il a ensuite condamné, dans les termes les plus fermes, le meurtre de deux ex-combattants depuis le dernier rapport du Secrétaire général, ce qui porte à 400 le nombre des ex-combattants des FARC-EP assassinés depuis la signature de l’Accord final en 2016.  « C’est tout bonnement inacceptable », a-t-il martelé, exigeant des mesures urgentes et concrètes de la part des autorités pour leur protection et celle des chefs de file sociaux et des défenseurs des droits humains.  Il s’est réjoui à cet égard de la récente adoption par la Commission nationale sur les garanties de sécurité d’une politique publique, longuement attendue, sur le démantèlement des groupes armés illégaux et des organisations criminelles. 

Le Représentant spécial a d’autre part évoqué les progrès enregistrés dans les négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), et plus particulièrement le cessez-le-feu qui a réduit l’intensité du conflit entre les parties.  Les multiples expressions de violence qui persistent dans plusieurs régions de la Colombie ne doivent en aucun cas perturber sa mise en œuvre, a-t-il plaidé en renvoyant aux initiatives de dialogue avec les acteurs armés.  Cet effort est selon lui indispensable pour désactiver les menaces et inverser leur impact sur les communautés en favorisant l’exécution des engagements de l’Accord final encore en suspens.  Selon le Chef de la Mission de vérification, cela est particulièrement crucial pour les territoires autochtones et afro-colombiens des régions comme le Pacifique, où les actions des groupes armés et la mise en œuvre limitée du chapitre ethnique de l’Accord final maintiennent les communautés à des niveaux de violence et de manque d’opportunités « intolérables ».   

Dans ce contexte, M. Riuz Massieu a souligné l’importance de l’appui du Conseil de sécurité, qui a permis à la Mission de contribuer à ce processus à travers sa participation au Mécanisme de vérification et de suivi, auquel ont été affectés 68 observateurs internationaux, dont 31 viennent d’arriver sur place.  Il s’est enfin félicité que le Gouvernement et le groupe armé se faisant appeler « État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP) » aient annoncé le week-end dernier un cessez-le-feu bilatéral à partir du 16 octobre et aient immédiatement entamé des dialogues de paix, ce qui est « de bon augure à deux semaines des élections ». 

M. HRVOJE ĆURIĆ HRVATINIĆ, s’exprimant au nom du Président de la Commission de la consolidation de la paix (CCP), a salué les mesures concrètes prises par le Gouvernement du Président Petro au cours de sa première année de mandat en matière de consolidation de la paix.  Il a également encouragé toutes les parties concernées à redoubler d’efforts pour accélérer la pleine mise en œuvre de l’Accord final de 2016. Tout en se félicitant des progrès enregistrés pour l’instant, il a reconnu que d’importants défis subsistent alors que la Colombie s’approche du septième anniversaire de l’Accord final, invitant le Conseil de sécurité à soutenir le Gouvernement pour que les « dividendes de la paix » bénéficient à tous, notamment par le biais de la réforme rurale intégrale, nécessaire pour renforcer la présence de l’État.  Il importe également d’offrir des opportunités de développement et des services publics dans les zones touchées par le conflit et les régions marginalisées, a ajouté M. Hrvatinić, y voyant un moyen de s’attaquer aux causes sous-jacentes du conflit.

Il a d’autre part appelé à un soutien international continu pour la mise en œuvre complète de l’Accord final et des autres initiatives de paix endossées par le Gouvernement.  À cet égard, il a applaudi le soutien fourni par la Mission de vérification et l’équipe de pays, ainsi que la décision du Secrétaire général permettant à la Colombie d’avoir accès au Fonds de consolidation de la paix pour une période de cinq ans supplémentaires.  Dans ce contexte, il a encouragé le Gouvernement colombien à progresser dans ses programmes en vue de rétablir le bureau présidentiel chargé de la mise en œuvre de l’Accord final.

M. Hrvatinić s’est par ailleurs félicité des efforts déployés par le Gouvernement pour rechercher une paix plus large par le dialogue dans le cadre de la politique de paix totale, en particulier les négociations de paix avec l’Armée de libération nationale (ELN).  À ce sujet, il a salué la décision du Conseil de sécurité de fournir un mandat de vérification du cessez-le-feu entre les deux parties, avant de réitérer son appel à tous les groupes armés pour qu’ils mettent fin à la violence contre les civils, s’engagent de bonne foi dans des initiatives de paix et recherchent la désescalade.  Sur ce point, il s’est dit vivement préoccupé par la violence continue à laquelle sont confrontés les ex-combattants et les dirigeants sociaux ainsi que les populations autochtones et afro-colombiennes.  Il a enfin souligné l’importance de la tenue en toute sécurité des élections régionales et locales prévues le 29 octobre, insistant sur la garantie de la participation des ex-combattants à ce scrutin, conformément à la législation nationale. 

M. RODRIGO BOTERO GARCÍA, Directeur général de la Fondation pour la conservation et le développement durable, a souhaité attitrer l’attention des membres du Conseil de sécurité sur trois sujets: la nature du conflit armé en Colombie et son impact environnemental; l’opportunité d’une politique de paix centrée sur l’environnement; et l’action internationale nécessaire pour empêcher l’expansion du conflit.  Il a rappelé que l’échec de la mise en œuvre de l’Accord final de 2016, et en particulier l’absence de restauration de l’autorité de l’État dans les territoires auparavant contrôlés par les Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP), a abouti à la récente occupation des territoires par différents groupes armés.  Cette multiplication des groupes est également liée à l’existence de ressources que l’on trouve généralement dans les zones communautaires locales ou dans les zones de conservation.  De fait, depuis la signature de l’Accord final, près d’un million d’hectares ont été déboisés dans l’une des zones les plus riches en biodiversité de la planète, environ un quart de la taille des Pays-Bas, a-t-il précisé. 

D’après l’intervenant, la dégradation de l’environnement est également associée à des activités dites « légales », qui dans certains domaines, sont en synergie avec ces formes de cooptation territoriale et témoignent de nouvelles alliances de groupes armés, d’hommes politiques régionaux, d’investisseurs privés et de marchés internationaux.  Le chevauchement des activités agricoles, pétrolières ou minières à grande échelle, avec des zones d’économie illégales n’est pas une coïncidence et nous permet de voir la complexité du conflit, a-t-il poursuivi, ajoutant que ce qui a été documenté au Brésil et en Bolivie par le groupe scientifique pour l’Amazonie montre des tendances régionales.  Ce qui précède laisse entrevoir un scénario très difficile pour les défenseurs de l’environnement, a témoigné M. Botero García.  La Colombie présente l’un des taux les plus élevés de décès de défenseurs de l’environnement et de menaces à leur encontre, malgré les efforts du Gouvernement pour faire avancer la ratification et la mise en œuvre de l’Accord d’Escazú.

M. Botero Garica a par ailleurs souligné l’approche de la politique de paix du Gouvernement colombien qui place la question environnementale au centre des discussions.  Pour la première fois dans l’histoire des pourparlers de paix avec l’Armée de libération nationale (ELN), a-t-il relevé, l’environnement a été intégré comme un droit collectif.  L’environnement est considéré comme une victime, mais aussi comme un élément de transformation pour un avenir durable.  Il est admis que l’État, le secteur privé et les groupes armés ont généré des impacts environnementaux qui doivent être reconnus et réparés.  C’est quelque chose d’inédit dans le monde, s’est réjoui M. Botero García.  Il a espéré voir d’autres groupes armés illégaux -comme l’EMC FARC-EP- directement associés aux activités de déforestation en Amazonie, rejoindre cette démarche. 

Pourtant, « des signaux d’alarme apparaissent aux frontières de la Colombie », a averti l’intervenant.  À la frontière avec l’Équateur, le trafic de drogue s’établit avec une violence inhabituelle.  À la frontière avec le Pérou, l’exploitation minière illégale progresse, parallèlement au recrutement de jeunes autochtones et à l’installation de cultures industrielles de coca.  À la frontière avec le Venezuela, divers groupes illégaux à la recherche d’or impactent les territoires protégés de l’Orénoque.  À la frontière avec le Panama se produit la plus grande migration de l’Amérique, contrôlée par des groupes armés.  Autrement dit, la paix en Colombie affecte le continent et le monde, a-t-il résumé, avant de lancer un appel au Conseil pour qu’il poursuive sa contribution pour inverser les effets des changements climatiques et la perte de la biodiversité, dans le cadre d’un processus de consolidation de la paix à long terme. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a salué les récents progrès en matière de réforme rurale et de restitution des terres aux communautés autochtones en Colombie, insistant sur la mise en œuvre intégrale de l’Accord final de 2016.  La représentante a dit soutenir l’appel du Secrétaire général en faveur de la création d’un bureau dédié au sein de la présidence colombienne, afin d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord final. Elle a par ailleurs fermement condamné les violences commises contre les signataires de l’Accord final, les anciens-combattants des FARC-EP, les défenseurs des droits humains, les femmes dirigeantes et les membres des communautés autochtones et afro-colombiennes. 

La Mission de vérification des Nations Unies en Colombie a vérifié 393 meurtres d’anciens combattants des FARC depuis la signature de l’Accord final, dont 18 depuis la dernière réunion du Conseil de sécurité, a déploré la représentante, avant de saluer l’adoption par le Gouvernement colombien d’une politique publique visant à démanteler les groupes criminels organisés. De même, elle s’est félicitée de l’approche participative adoptée par le Gouvernement colombien, soulignant à cet égard l’importance d’une prise en compte de l’expérience de toutes les femmes, ainsi que des groupes ethniques et LGBTQ+.  Avant de conclure, elle a encouragé la poursuite du dialogue et du cessez-le-feu entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN), qui constituent à ses yeux des étapes cruciales vers la paix en Colombie. Elle a dit attendre de l’ELN qu’elle aborde ses engagements de bonne foi et qu’elle respecte le droit international. 

Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. PEDRO COMISSARÍO AFONSO (Mozambique) s’est félicité des progrès continus réalisés dans les négociations entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale, avec la tenue du quatrième cycle de négociations de paix au Venezuela.  Il a par ailleurs noté avec une grande satisfaction le dialogue en cours avec l’EMC FARC-EP, essentiel pour favoriser la compréhension, la confiance et, à terme, une paix durable en Colombie.  Les A3, a-t-il dit, considèrent la question foncière comme un élément crucial du processus de paix du pays, saluant donc les efforts continus du Gouvernement pour promouvoir les réformes institutionnelles et l’allocation des fonds nécessaires à une réforme rurale globale.  Aussi ont-ils encouragé le Gouvernement à intensifier ses efforts en matière d’attribution de terres et à associer cette action à des appuis techniques et financiers, afin de promouvoir l’autonomie des bénéficiaires. 

Les A3 ont cependant regretté le manque de progrès substantiels dans la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’Accord final, jugeant inquiétant de constater que la plupart des efforts visant à faire progresser les dispositions en la matière en soient encore à la phase de planification, y compris les consultations avec les Afro-Colombiens et les Afro-autochtones.  Ils sont également préoccupés, a poursuivi le délégué, par le manque d’informations claires et à jour sur l’état de la mise en œuvre du chapitre ethnique par les entités responsables, ainsi que par le manque d’exécution des projets spécifiquement conçus par le programme de développement territorial au profit des communautés ethniques.  À la lumière de ces considérations, les A3 sont d’avis que le Gouvernement devrait redoubler d’efforts pour accélérer la mise en œuvre de cet élément essentiel de l’Accord final.  « Il est impératif que les droits des peuples autochtones, qui ont enduré les conséquences du conflit, soient réaffirmés et respectés, et que réparations et justice pour les dommages causés soient rapidement accordées.  Il est crucial de s’attaquer à ces problèmes pour permettre aux communautés marginalisées de bénéficier efficacement des avantages escomptés », a insisté le représentant.

M. GENG SHUANG (Chine) a espéré voir toutes les parties colombiennes travailler à l’édification d’une paix pérenne.  Il a salué les efforts du Gouvernement colombien pour entretenir le dialogue avec les groupes armés, résoudre les causes profondes du conflit, intégrer les anciens combattants et lutter contre les cultures illégales via des cultures de substitution.  Selon le représentant, le processus de paix en Colombie est un exemple de résolution des conflits et des différends par le biais de dialogue et de la coopération. Il a espéré que les parties progresseront encore lors du cinquième cycle de négociations de paix prévu en novembre au Mexique, et qu’elles parviendront notamment à s’entendre sur les arrangements relatifs au cessez-le-feu.  S’agissant du renouvellement du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, sur lequel le Conseil doit se prononcer ce mois-ci, le représentant a déclaré qu’il faudra sans doute réfléchir à un élargissement du mandat, lorsque les conditions le permettront. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a déclaré que les prochaines élections départementales et municipales seront l’occasion pour la Colombie de valider les réalisations émanant de son engagement envers la paix.  Elle a souligné que ces élections doivent se dérouler dans un environnement libre de violence, insistant sur l’importance du leadership du Gouvernement et la coopération de la population.  La représentante a ensuite indiqué que les accords de cessez-le-feu doivent être appuyés par des actions concrètes, déplorant que plusieurs accords aient été brisés dans le passé.  Une approche fondée sur les institutions est un moyen de garantir la pérennité des accords de cessez-le-feu, et le « Comité national de participation » pourrait faire partie d’un tel mécanisme, a-t-elle estimé.  Des mesures et des cadres assurant la protection des femmes et des jeunes et qui appuient leur participation active aux efforts de consolidation de la paix sont également essentiels.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a reconnu les actions déployées par la Colombie pour parvenir à une paix durable, même si les efforts pour clore ce chapitre douloureux de son histoire n’ont pas encore porté leurs fruits.  À cet égard, il a salué les progrès remarquables et les évolutions positives obtenues dans la mise en œuvre de l’Accord final, encourageant le Gouvernement à maintenir le cap et appelant tous les acteurs à redoubler d’efforts à cette fin.  Le représentant s’est dit conscient des obstacles auxquels est confronté ce processus, notamment dans le domaine de l’état de droit.  Il a salué les progrès réalisés dans les négociations avec l’Armée de libération nationale (ELN) qui prouvent à ses yeux la volonté des deux parties à mettre fin à des décennies de conflit.  Le représentant s’est cependant dit préoccupé par la persistance de la violence à l’encontre des ex-combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP), des défenseurs de l’environnement et des représentants de la société civile. 

M. ROBERT WOOD (États-Unis) a rappelé que son pays est un des partenaires les plus importants de la Colombie et appuie l’Accord final qui, a-t-il dit, permettra de renforcer la stabilité et de lutter contre le trafic de drogue, tout en contribuant à la pacification de toutes les régions colombiennes.  Les États-Unis sont fermement engagés en faveur d’une paix durable pour les populations autochtones et restent déterminés à appuyer la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a-t-il ajouté, avant d’exhorter les groupes armés à se joindre au processus.  Le représentant a expliqué que son pays reste en contact avec le Représentant spécial pour soutenir l’accord de cessez-le-feu entre le Gouvernement et l’ELN, mais a exprimé son inquiétude quant au fait que 40% des membres de ce groupe refusent de déposer les armes. 

Par ailleurs, s’agissant de l’élargissement du cessez-le-feu entre le Gouvernement et le groupe État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP) pour une période de dix mois, il a souhaité avoir davantage d’informations à ce sujet car, a-t-il relevé, il existe encore des organisations considérées comme terroristes en vertu de la législation américaine.  « Nous devons apprendre des erreurs commises par le passé », a-t-il fait valoir.  Plusieurs garants internationaux se sont engagés à soutenir le processus avec l’ELN, « mais nous n’avons pas atteint le même niveau de maturité » pour ce qui est des négociations avec l’EMC FARC-EP, a ajouté le représentant. 

Mme MYAN MEDHAT ANWAR TANTAWY (Émirats arabes unis) a estimé qu’il faut maintenir l’élan pris pour mettre pleinement en œuvre l’Accord final. C’est fondamental, à mi-parcours du processus, a-t-elle insisté, qualifiant de primordiale la bonne prise en compte de la question des ex-combattants.  Alors qu’ils ont honoré leurs engagements et pris le chemin de la paix, ces hommes et ces femmes continuent de subir des violences, a déploré la représentante, selon laquelle la préservation d’un contexte propice à la réconciliation est en jeu.  Elle a aussi estimé que le bon fonctionnement du système intégré pour la vérité, la justice, la réparation et les garanties de non-répétition sont des conditions essentielles pour le rétablissement de la confiance et de la justice en Colombie. La déléguée s’est félicitée à cet égard du travail effectué par la juridiction spéciale pour la paix, qui a placé les victimes au centre de son activité.  Enfin, défendre le cessez-le-feu est une autre priorité que le Gouvernement doit défendre, a-t-elle plaidé, jugeant que la mise en œuvre de l’accord signé avec l’Armée de libération nationale (ELN) ouvrira une nouvelle ère de confiance en Colombie. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a salué les avancées encourageantes dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) qui est un instrument fondamental pour favoriser la participation active des femmes aux processus de consolidation et de construction de la paix.  De même, il s’est félicité du travail accompli par la Commission Vérité, coexistence et non-répétition.  Évoquant l’état d’avancement des affaires dont la Juridiction spéciale pour la paix est saisie, le représentant a estimé que l’ouverture de l’affaire no 11, concernant la violence sexuelle et fondée sur le genre, est un autre élément qui milite en faveur de ces avancées.  Alors que la Juridiction s’apprête à prononcer les premières peines restauratives, le représentant a pressé le Gouvernement colombien de créer les conditions appropriées pour qu’elles soient exécutées et bénéficient du soutien de la société colombienne.  Pour finir, il a appelé tous les groupes armés à mettre fin à la violence contre les civils, à participer de bonne foi aux initiatives de paix et à montrer leur volonté de travailler pour la paix.

Mme CLARISSE PAOLINI (France) a salué l’annonce d’un cessez- le-feu et de pourparlers de paix entre le Gouvernement colombien et le groupe EMC-FARC-EP à compter du 16 octobre, émettant l’espoir que cette annonce se traduira par un cessez-le-feu durable et un accord de paix.  Elle a également salué la poursuite des négociations entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN) depuis le cessez-le-feu annoncé le 3 août, avec l’appui de la Mission des Nations Unies en Colombie. Ces développements sont encourageants, et doivent permettre aux communautés touchées de pouvoir enfin vivre en paix, avec de meilleures perspectives de développement socioéconomique.

La représentante a toutefois déploré que les garanties de sécurité demeurent aujourd’hui insuffisantes pour les anciens combattants, les défenseurs des droits de l’homme et les représentants de la société civile, face aux violences dont ils sont les cibles ainsi que pour les enfants et adolescents qui continuent à être recrutés par les groupes armés illégaux.  Elle a appelé à la tenue dans les meilleures conditions des élections locales prévues à la fin du mois, jugeant essentiel de prévenir tout risque de violences et de de garantir la sécurité des candidats et des électeurs, sur l’ensemble du territoire colombien.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que depuis de nombreuses années, l’Accord final, bien que validé par le Conseil de sécurité, a connu des écueils dans son application, notamment par les anciennes autorités colombiennes.  Il s’est toutefois réjoui que les deux parties à l’Accord final maintiennent leur volonté de le mettre en œuvre.  Mais, a-t-il poursuivi, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour la protection des anciens combattants et des activistes, et pour la substitution des cultures illégales.  « Sans garanties de sécurité pour les ex- combattants, il ne sera pas possible de parler de paix », a prévenu le représentant, ajoutant que ces derniers doivent pouvoir participer aux élections.  Aucune mesure ne doit venir entraver la mise en œuvre de cet accord, a-t-il encore dit. 

Le représentant a cependant estimé que la mise en application de l’Accord final doit s’adapter selon l’évolution de la situation.  Une question se pose quant à l’avenir des juridictions spéciales crées lors de la période de transition, a-t-il indiqué.  S’agissant du cessez-le-feu, il a espéré que tous les accords signés permettront une vraie trêve.  S’il a dit suivre de près le processus de négociation avec le groupe EMC FARC-EP, il s’est encore inquiété de la persistance des actes de violence perpétrés par ce groupe armé illégal.  Assurant que sa délégation continuera d’appuyer les efforts déployés pour la paix en Colombie, le représentant a annoncé qu’il appuiera, ce mois-ci, la prolongation du mandat de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) s’est félicitée de la mise en œuvre, depuis le mois d’août, d’un cessez-le-feu de six mois entre le Gouvernement et l’ELN.  Elle a toutefois regretté que la persistance de la violence entrave la réalisation du plein potentiel de l’Accord final, se préoccupant notamment du meurtre et des menaces à l’encontre des candidats aux élections, des anciens combattants, des défenseurs des droits humains et des dirigeants autochtones ou afro-colombiens. Elle a exhorté le Gouvernement à redoubler d’efforts pour assurer une présence efficace de l’État dans les zones les plus touchées par le conflit, et créer des conditions propices aux retours et à la réintégration.  Une attention et des ressources soutenues doivent également être accordées à la recherche des personnes portées disparues.  La représentante a ensuite souligné que la mise en œuvre du chapitre ethnique de l’Accord final est d’une importance capitale, faisant part de sa profonde inquiétude au sujet des violences disproportionnées endurées par les communautés ethniques et du recrutement d’enfants par des acteurs armés illégaux.  La priorité doit également être donnée à la dimension du genre de l’Accord final, la participation pleine et équitable des femmes étant essentielles à sa mise en œuvre.

Mme ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a noté que l’annonce de la suspension de toutes les opérations offensives entre le Gouvernement colombien et le groupe autoproclamé État-major central des Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (EMC FARC-EP) constitue un premier pas vers l’ouverture de négociations de paix officielles et la signature d’un accord de cessez-le-feu bilatéral.  Elle a demandé au Gouvernement colombien d’assurer la sécurité et la protection des anciens combattants et des anciennes combattantes, appelant en outre à lutter contre l’impunité et à apporter une plus grande attention à la mise en œuvre des garanties de non-répétition.  Dans la perspective des prochaines élections, elle a également engagé les autorités colombiennes à renforcer les mesures de prévention et de sécurité afin d’atténuer l’impact de cette violence. 

Par ailleurs, le rôle des femmes à la construction de la paix par leurs connaissances, leur expérience et leur leadership offre un potentiel qu’il convient de renforcer, a poursuivi la représentante qui a félicité le Gouvernement colombien pour l’élaboration de son premier plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité.  Le large processus participatif organisé aux niveaux national, régional et thématique, et avec le soutien de la communauté internationale, permettra d’établir une norme exemplaire pour sa mise en œuvre future, a-t-elle prédit avant de lancer, en espagnol, « sin las mujeres no hay paz ».

M. SERGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a salué le fait que la Colombie continue de démontrer son attachement à la pleine mise en œuvre de l’Accord final ainsi qu’à la consolidation de la paix sur son territoire.  Il s’est notamment réjoui que le dialogue avec d’autres groupes armés se poursuive dans le cadre de la stratégie de paix totale du Gouvernement du Président Petro.  S’agissant de l’Accord final lui-même, le représentant a rappelé qu’il est à mi-parcours de sa mise en œuvre formelle, ayant été signé voilà près de sept ans et établi sur un calendrier de 15 ans.  Dans ce cadre, des réformes profondes sont nécessaires, a-t-il ajouté, notant que des progrès significatifs ont déjà été réalisés, en particulier l’allocation budgétaire et les ajustements juridiques et institutionnels visant à accélérer la mise en œuvre d’une réforme rurale globale.  Une avancée, selon lui, essentielle pour que l’État puisse étendre sa présence dans toutes les régions du pays, notamment dans les zones touchées par le conflit. 

Le délégué s’est ensuite félicité des progrès enregistrés dans le dialogue entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN). En tant que garant, le Brésil peut attester de la volonté des deux parties de mettre fin à des décennies de conflit, a-t-il dit, avant de saluer le bon fonctionnement du comité national de participation et la validité du cessez-le-feu bilatéral, national et temporaire, contrôlé par le Mécanisme de surveillance et de vérification.  Le représentant a également salué les efforts du Représentant spécial et de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie dans la mise en place des organes nationaux, régionaux et locaux du mécanisme.  Il a, par ailleurs, souhaité que le Conseil de sécurité autorisera la Mission à vérifier la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu avec le groupe armé EMC FARC-EP dès que le Gouvernement colombien le lui demandera.  Enfin, alors que la violence des groupes armés illégaux et des organisations criminelles continue d’affecter la vie des civils et des anciens combattants, il a réaffirmé l’appui du Brésil à la société et au Gouvernement colombiens dans leur détermination politique à surmonter les défis pour parvenir à la paix. 

M. ALVARO LEYVA DURAN, Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a déclaré que la paix est « quelque chose qui se construit tous les jours » et qui suppose des efforts permanents de la part des artisans de la paix.  Après avoir rendu hommage à l’un d’eux, le sculpteur colombien Fernando Botero, décédé il y a peu, le Ministre est revenu sur la décision prise en 2016 par son pays de soumettre l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable au Conseil de sécurité, expliquant que cela avait été fait dans un souci d’inviolabilité de ce qui avait été convenu. Sept ans plus tard, il s’est inquiété que l’institution modèle qu’est la Juridiction spéciale pour la paix soit aujourd’hui en train de « dévier » de son mandat. Selon lui, il conviendrait de réexaminer ses tâches pour améliorer son fonctionnement.  S’attardant sur les compétences précises de cette juridiction, il a précisé que le régime de conditionnalité ne concerne que la remise d’armes et non les paramilitaires. 

S’agissant de la réintégration de membres de groupes armés illégaux, le Ministre a renvoyé à l’accord de Santa Fe de Ralito de 2003, par lequel les chefs paramilitaires s’étaient engagés à un désarmement par étape jusqu’en décembre 2005.  Il a ajouté que la compétence personnelle de la Juridiction spéciale pour la paix s’applique à ces ex-combattants.  M. Leyva Duran a défini par ailleurs les agents de l’État comme « toute personne qui, lors de la commission de faits, faisait partie d’un organisme ou d’un corps étatique ».  Il a conclu que la Juridiction spéciale, partie intégrante du système intégral de vérité, justice, réparation et non-répétition, est une juridiction exceptionnelle et qu’en conséquence, son action ne saurait être restreinte par des tribunaux locaux. 

De l’avis du Ministre, il est clair que l’ensemble de l’Accord final de 2016 constitue un mandat impératif pour la juridiction spéciale. M. Leyva Duran a annoncé à cet égard que, prochainement, le Président Gustavo Petro confirmera le mandat de ladite Juridiction spéciale, ce que nul ne pourra remettre en question. Son travail, a-t-il ajouté, devra être coordonné avec toutes les autres institutions étatiques. 

Le pari ambitieux en faveur de la « paix totale », avec les difficultés qui en découlent en matière de conception d’un cadre institutionnel à cet effet, est parfois difficile à comprendre, mais « une paix totale est possible », a affirmé le Chef de la diplomatie colombienne, ajoutant que son pays, de par son expérience, se veut une « puissance mondiale de la vie ». 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission achève son débat général avec un accent sur la dimension humanitaire du désarmement

Soixante-dix-huitième session,
9e séance plénière - après-midi
​AG/DSI/3716

La Première Commission achève son débat général avec un accent sur la dimension humanitaire du désarmement

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a achevé aujourd’hui son débat général après avoir entendu, au fil de huit séances, 149 États, groupes régionaux et observateurs, ainsi que la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, Mme Izumi Nakamitsu, et le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis.  Avec l’intervention du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), un fort accent a été mis aujourd’hui sur les aspects humanitaires et juridiques du désarmement et plus encore des nouveaux armements.   

« Il est douteux que les armes nucléaires puissent jamais être utilisées en conformité avec le droit international humanitaire », a ainsi estimé le délégué du CICR en soulignant les conséquences humaines nécessairement catastrophiques qui découleraient de leur emploi.  Une position partagée par l’observateur de l’État de Palestine, selon qui la possession comme l’utilisation des armes nucléaires contreviennent à une pleine adhésion à la Charte des Nations Unies et aux dispositions du droit international humanitaire.   

C’est également dans une perspective humanitaire que le délégué du CICR a dénoncé les risques liés aux systèmes d’armes létaux autonomes (SALA).  « Le ciblage autonome des humains par des machines est une ligne morale que nous ne devons pas franchir », a-t-il déclaré.  À cet égard, il a rappelé l’appel conjoint lancé le 5 octobre par le CICR et le Secrétaire général de l’ONU, qui souligne la nécessité d’adopter au plus vite des règles pour préserver le contrôle humain sur l’usage de la force et les effets des armes.  L’initiative a été saluée par l’observateur de l’État de Palestine.   

Les autres interventions du jour ont été dans la tonalité générale des séances précédentes, marquées par l’inquiétude croissante face au retour de la menace nucléaire, la prolifération d’armes classiques -et notamment des armes légères et de petit calibre (ALPC) parfois présentées comme les véritables armes de destruction massive dans les pays en conflits ou ceux où la société connaît de grandes violences-, et les craintes face à la militarisation du cyberespace et de l’espace extra-atmosphérique ou encore le recours à de nouvelles technologies, y compris l’intelligence artificielle.  Les tensions géopolitiques croissantes se sont aussi reflétées dans les plusieurs dizaines de droits de réponse qui ont émaillé le débat.   

Face aux crises humanitaires actuelles, le Paraguay s’est interrogé sur l’augmentation des budgets militaires globaux, la jugeant inacceptable.  Une position partagée par le Koweït et le Gabon, pour lesquels il y a urgence à réduire les dépenses militaires afin d’octroyer les ressources nécessaires face aux défis climatiques, sanitaires et humanitaires.  Le représentant du Paraguay a également mis en garde contre les répercussions humanitaires des cyberattaques, tout particulièrement quand elles visent des infrastructures vitales.   

Le rôle des zones exemptes d’armes nucléaires (ZEAN) dans l’architecture de désarmement nucléaire a été une fois de plus souligné.  Plusieurs pays africains ont affirmé leur fierté d’avoir adhéré au Traité de Pelindaba, qui a fait du continent une telle zone.  Estimant que l’Afrique avait montré le bon exemple au reste du monde, le Gabon a encouragé les autres régions à suivre la même direction.  Le Kirghizistan a rappelé son rôle dans l’établissement d’une ZEAN en Asie centrale; le délégué de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL) a rappelé le rôle de l’organisation dans la mise en œuvre du Traité de Tlatelolco et la représentante de Cabo Verde a rappelé qu’en avril 2023, son pays avait pris la présidence de la zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud (ZPCAS), établie en 1986 par l’Assemblée générale et composée de 24 pays.   

Les ZEAN ont également fait l’unanimité chez les représentants du monde arabe –Bahreïn, Koweït, État de Palestine et Ligue des États arabes- qui ont tous appelé à la création d’une telle zone au Moyen-Orient.  Bahreïn a notamment estimé que cette création représentait un moyen de mettre en œuvre les décisions de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) de 1995.  La Ligue des États arabes a, à cet égard, dénoncé l’absence de politique des États dotés, tandis que l’État de Palestine fustigeait le refus israélien de participer à la Conférence visant à la création de cette zone.   

Demain, la Première Commission se réunira à 15 heures pour un débat sur ses méthodes de travail.   

DÉBAT GÉNÉRAL SUR TOUS LES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR TOUCHANT LE DÉSARMEMENT ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE  (SUITE ET FIN)

Déclarations 

Mme SOPHIA TESFAMARIAM (Érythrée) a rappelé que la paix et le développement apparaissent de plus en plus distants.  Il n’y a pas de solution unique, il faut désamorcer les tensions politiques, restaurer la confiance et nouer un dialogue sur le désarmement nucléaire, a déclaré la représentante.  Elle a estimé que certains pays avaient tenté d’imposer un ordre unique, poussant du même coup la communauté internationale vers un précipice, alors que d’autres utilisent la menace du recours à la force, ce qui est un comportement hégémonique, d’autant que l’utilisation de la menace de recours à l’arme nucléaire est immorale.  Pour l’Érythrée, il faut universaliser le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN), éléments essentiels de la non-prolifération.   

Tous les États ont le droit de développer l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, a en outre rappelé la représentante, pour qui le transfert de technologies dans ce but doit être respecté sans entrave et avec l’aide de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).   

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a indiqué que son pays continue d’observer les effets dévastateurs des armes classiques dans les sociétés touchées par des conflits, comme les mines terrestres et les armes à sous-munitions, ainsi que ceux des restes explosifs de guerre.  Ces armes ont un coût élevé pour les civils pendant les hostilités et même plusieurs décennies après la fin du conflit, a souligné le représentant.  À ses yeux, la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, la Convention sur les armes à sous-munitions et le Protocole relatif aux restes explosifs de guerre à la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination (Protocole V) ont contribué de manière significative à sauver des vies, à prévenir les mutilations et à préserver les moyens de subsistance.  C’est pourquoi le représentant a exhorté tous les États qui ne sont pas encore parties à ces instruments à y adhérer sans délai.   

Par ailleurs, condamnant toute entreprise de militarisation du cyberespace et de l’espace extra-atmosphérique, le représentant a souhaité l’adoption d’instruments juridiques contraignants comblant les lacunes juridiques existantes dans ces deux espaces.   

M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a rappelé à quel point le travail de la Première Commission est crucial pour parvenir à un consensus sur la paix et la sécurité internationales.  Il a réitéré l’attachement de son pays au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), insistant notamment sur le droit des États à utiliser l’énergie atomique à des fins pacifiques et affirmant qu’elle contribue à la réalisation des objectifs de développement durable.   

Le représentant a réitéré son soutien à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, rappelant qu’il s’agissait d’un moyen de mettre en œuvre les décisions de la Conférence d’examen du TNP de 1995.  À ce titre, il a exprimé son espoir de voir de nombreuses délégations participer à la quatrième session de la Conférence chargée de créer une telle zone.  Toujours à propos des problèmes de sécurité régionale, il a appelé l’Iran à coopérer pleinement avec l’AIEA.  Il a également prévenu contre l’utilisation des drones par des groupes terroristes.   

Le monde est confronté à l’évolution rapide des technologies de l’information et des communications (TIC), lesquelles doivent être utilisées à des fins pacifiques pour servir les intérêts de l’humanité, a déclaré le représentant.  Affirmant prêter la plus haute importance à ce thème, il a mentionné la création récente par son pays d’un centre national de cybersécurité pour prévenir les cyberattaques, et appelé au respect des principes des Nations Unies dans le cyberespace.   

M. MEDER UTEBAEV (Kirghizistan) a notamment déclaré que son pays, en tant que candidat au siège de membre non permanent du Conseil de sécurité pour la période 2027-2028, est déterminé à maintenir la paix et à prévenir la prolifération des armes de destruction massive.  À cet égard, le Kirghizistan a prévu de faire de la promotion et de la sensibilisation à ces sujets l’une de ses priorités s’il devait être élu au Conseil.  Il a également rappelé le rôle de son pays dans l’adoption du Traité portant création d’une zone exempte d’armes nucléaires (ZEAN) en Asie centrale.   

D’ores et déjà, le Kirghizistan s’engage à promouvoir les questions de sensibilisation au désarmement et à la non-prolifération dans le cadre de la Journée internationale de sensibilisation au désarmement et à la non-prolifération, promulguée par la résolution 77/51 de l’Assemblée générale que nous avons portée et qui aura lieu le 5 mars de chaque année, a fait valoir le représentant.  Il a ajouté que son pays continuerait également de plaider en faveur de la création d’une association internationale des villes et villages possédant d’anciens sites de production d’uranium, laquelle pourrait devenir un mécanisme d’interaction permanente sur les questions de développement socioéconomique et environnemental à ce niveau local.   

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a déclaré que, dans le cadre du Traité sur le commerce des armes (TCA), son pays défend la nécessité d’un respect rigoureux des normes de marquage, d’enregistrement et de traçabilité des armes légères et de petit calibre (ALPC), y compris une gestion efficace des stocks et de leurs munitions, afin de réduire la menace que ces armes représentent pour les populations civiles innocentes.  Le Mozambique réaffirme également l’importance du Traité de Pelindaba ayant porté création d’une ZEAN en Afrique, et qui interdit la recherche, le développement, la fabrication, l’acquisition, les essais, la possession, le contrôle ou le stockage d’armes nucléaires, ainsi que le déversement de déchets radioactifs sur le continent africain.  En conclusion, le représentant a assuré que son pays demeure pleinement déterminé à mettre en œuvre tous les traités et conventions de désarmement et de non-prolifération.   

Mme AURÉLIE FLORE KOUMBA PAMBO (Gabon) a estimé qu’il faut poursuivre les efforts en faveur du désarmement, en mettant l’accent sur les instruments bilatéraux et multilatéraux tels que le TICE et le TNP, qui sont la pierre angulaire de l’architecture multilatérale du désarmement.  La paix et la sécurité internationales passent par le dialogue et la restauration de la confiance mutuelle entre les nations, a rappelé la représentante, qui a estimé que l’Afrique avait montré le bon exemple en adoptant le Traité de Pelindaba, qui fait du continent une ZEAN.  Elle a encouragé d’autres régions à suivre cette direction.  Les événements qui ont cours depuis quelques jours dans le Moyen-Orient nous rappellent l’extrême fragilité et volatilité de notre sécurité collective, a‑t‑elle ajouté.   

La représentante a déploré l’incapacité des États parties au TNP à adopter un document à l’issue de la dixième Conférence d’examen du Traité et les échecs essuyés par les résolutions appelant à la réduction substantielle des arsenaux nucléaires.  S’agissant du désarmement nucléaire, elle a regretté le manque de volonté de certains États qui continuent de poursuivre le perfectionnement de leurs arsenaux en violation du TNP.  Pour le Gabon, il y a urgence à réduire les dépenses militaires afin d’octroyer les ressources nécessaires pour faire face aux défis climatiques, sanitaires et humanitaires, ainsi qu’aux objectifs de développement durable.   

La représentante a appelé au renforcement des procédures de marquages des ALPC et des munitions, qui alimentent de nombreux groupes terroristes, des gangs ainsi que l’escalade de la violence dans plusieurs régions du monde.  Enfin, elle a estimé que la protection de l’espace extra-atmosphérique, devenu vital pour la communication, la surveillance et les activités militaires, est non seulement dans l’intérêt de chaque nation, mais aussi de toute l’humanité.   

Mme MADELIN ESTHER LUNA (République dominicaine) a commencé par condamner l’attaque du Hamas contre Israël, saluant les propos du Secrétaire général de l’ONU pour mettre fin au cycle de violence.  De multiples menaces entravent la marche vers la paix internationale, a ensuite déploré la représentante, s’inscrivant en faux contre ceux qui pensent que la réponse au problème réside dans l’augmentation des budgets militaires ou le renforcement des arsenaux nucléaires.  Elle a demandé une mise en œuvre des trois piliers du TNP sans condition, rappelant les obligations de l’article VI sur l’élimination des arsenaux existants.  Elle a également appelé au respect des Conférences d’examen du TNP et exigé que les États dotés garantissent la non-utilisation des armes nucléaires contre les États non dotés.  La seule assurance contre l’emploi des armes nucléaires reste leur élimination, a‑t‑elle poursuivi, exhortant les États Membres à adhérer au TIAN et se félicitant en outre de l’adoption l’an passé du Plan d’action de Vienne.   

Le trafic des ALPC et de leurs munitions contribue aux tensions, à l’instabilité et à la violence dans les conflits, a déclaré la représentante, qui a appelé de ses vœux un renforcement de la coopération internationale pour éradiquer le trafic des ALPC et de leurs munitions.  Elle a accueilli favorablement les résultats du Groupe de travail à composition non limitée sur les munitions classiques, tout en estimant que le cadre de régulation global sur la gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie adopté par le Groupe aurait dû l’être depuis longtemps.   

Enfin, la représentante a estimé indispensable d’assister les pays en développement pour leur permettre de se prémunir des risques liés aux TIC.  À ce titre, elle s’est félicitée du travail du Groupe de travail à composition non limitée sur la sécurité des TIC et de l’adoption d’un document final comportant un rapport d’étape.   

M. FAHAD MOHAMMAD F M F ALAJMI (Koweït) a jugé important d’allouer les ressources humaines et financières réservées à la course aux armements à des fins pacifiques et de développement.  Le représentant a également appelé à l’universalisation des différents traités et conventions de désarmement et de non-prolifération, à commencer par le TNP et le TICE.  Il a en outre plaidé en faveur de l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Le processus de la Conférence, dont nous avons présidé la deuxième session, a déjà permis de se mettre d’accord sur son règlement et ses méthodes de travail ou encore de créer un comité de travail chargé de poursuivre des consultations intersessions, a‑t‑il ajouté, soulignant en outre que ce processus de négociation ne devait pas être politisé et devait recueillir la participation de tous les acteurs de la région.   

M. FRANCISCO JOSE DA CRUZ (Angola) a estimé que, vu la menace croissante que les armes nucléaires représentent pour l’humanité et l’environnement, les États ne devraient pas accroître leurs arsenaux nucléaires.  Il a défendu le principe d’un désarmement nucléaire complet comme condition préalable au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La réalisation de cet objectif dépend de l’engagement de tous les États dotés à démanteler leurs arsenaux d’armes, a relevé le représentant.  Il a souligné que l’AIEA doit continuer à jouer son rôle en maximisant l’utilisation de la science et de la technologie pour le développement socioéconomique.   

Le représentant a rappelé que son pays a ratifié le Traité de Pelindaba et le TNP, deux instruments fondamentaux pour aborder le désarmement.  Le renforcement des ZEAN existantes et la création d’autres zones sont essentiels pour parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires, a‑t‑il ajouté.   

Tout en reconnaissant l’utilisation d’ALPC en tant que droit souverain des États pour assurer leur autodéfense et leur sécurité nationale, le représentant a souligné que le commerce illicite des armes classiques et des munitions a de profonds effets déstabilisateurs, en particulier en Afrique.  Il a réitéré son attachement à la mise en œuvre du Programme d’action des Nations Unies visant à prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des ALPC sous tous ses aspects.  Le représentant a également souligné que l’Union africaine avait nommé, en mai 2022, le Président de l’Angola João Manuel Gonçalves Lourenço, champion de l’Union africaine pour la paix et la réconciliation.   

Mme TANIA SERAFIM YVONNE ROMUALDO (Cabo Verde) a estimé que le désarmement dépendra toujours des quelques pays qui possèdent 90% des armes nucléaires dans le monde.  Bien qu’État non doté, Cabo Verde est partie aux principaux traités de désarmement, à savoir le TNP, le TICE, le TIAN et le Traité de Pelindaba.  Pour la représentante, l’abolition des armes nucléaires est le meilleur moyen de garantir qu’elles ne seront pas utilisées et de parvenir à la paix et la sécurité internationales.   

Cabo Verde s’est engagé dans des efforts de coopération avec les Nations Unies et l’Union africaine pour défendre les principes fondamentaux inscrits dans la Charte, a rappelé la représentante, qui a lancé un appel pour que tous les États ratifient le TICE afin d’en assurer l’entrée en vigueur.  Elle a appelé les États à ratifier le TIAN pour parvenir à son universalisation.   

La représentante a rappelé qu’en avril 2023, son pays avait pris la présidence de la zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud (ZPCAS), établie en 1986 par la résolution 41/11 de l’Assemblée générale, et composée de 24 pays.  Elle a souligné que son pays avait promu l’opportunité d’adhérer au TIAN lors de la huitième Réunion ministérielle de la ZPACAS qui a eu lieu à Cabo Verde.  S’agissant du désarmement, elle a mis en avant l’engagement de l’organisation à consolider l’Atlantique Sud en tant que zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive et a appelé à la création d’autres zones de paix et de coopération également exemptes d’armes nucléaires.   

M. JOSÉ EDUARDO PEREIRA SOSA (Paraguay) a estimé que le contexte mondial exige de travailler en direction d’un désarmement complet et, à ce titre, s’est associé à une majorité de pays qui souhaitent emprunter la voie de la diplomatie.  Pour le représentant, l’augmentation des budgets militaires est inacceptable face aux crises humanitaires.  Il s’est dit préoccupé par le modèle stratégique de la dissuasion nucléaire, ajoutant que, plutôt qu’une sécurité accrue, cette approche représente un risque latent pour la plus grande partie de la population.  La seule façon d’éviter l’emploi des armes nucléaires, c’est de les interdire et de les éliminer, a‑t‑il poursuivi.   

Le représentant a rappelé la signature du Traité de Tlatelolco par son pays, instaurant dans sa région une ZEAN.  Il a exhorté à renforcer le régime du TNP avec le TIAN et le TICE.  Regrettant que ce dernier ne soit pas encore entré en application, il a appelé les pays figurant à l’annexe 2 du Traité à y adhérer.   

Le représentant a dénoncé la menace que la criminalité transnationale organisée fait peser sur la paix internationale et le fonctionnement des institutions.  Ce fléau, a‑t‑il poursuivi, est alimenté par le trafic des ALPC et de leurs munitions.  Il a préconisé un respect des engagements de la communauté internationale sur les armes classiques et a salué l’activité du Groupe de travail à composition non limitée pour élaborer un cadre mondial à même de gérer les munitions tout au long de leur cycle de vie.   

Le représentant s’est également fait l’écho de plusieurs pays du Sud global en ce qui concerne le besoin d’assistance, de coopération et de transferts de technologies pour assurer la sécurité dans le secteur des TIC.  Le droit international et le droit humanitaire s’appliquent aussi au cyberespace, a‑t‑il rappelé, avertissant contre toute attaque contre les infrastructures vitales.  Enfin, il a fait part de ses préoccupations concernant la militarisation de l’espace, considérant qu’elle est une source d’instabilité dans les relations internationales et augmente le risque de confrontation militaire.   

M. GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a déclaré qu’un monde exempt d’armes nucléaires nécessite non seulement un réexamen des doctrines de sécurité des États dotés et des mesures de vérification adéquates, mais également la fourniture d’une assistance à ceux qui ont souffert des conséquences du développement, de la production et des essais d’armes nucléaires, ainsi que la réhabilitation des environnements contaminés par ces activités.  À cet égard, le Saint-Siège accueille favorablement le projet de résolution coparrainé par le Kazakhstan et Kiribati sur ces questions.  Il a dit espérer que tous les États –en particulier ceux qui s’appuient sur la dissuasion nucléaire– s’engageront de manière constructive dans la réparation des injustices engendrées par les armes nucléaires.   

M. QAIS Z. F. KASABRI, observateur de l’État de Palestine, a estimé que tant la possession que l’utilisation des armes nucléaires contreviennent à une pleine adhésion à la Charte des Nations Unies et aux dispositions du droit international humanitaire.  Il a appelé à la destruction de toutes les armes de destruction massive, soulignant la responsabilité particulière des États dotés.  Réaffirmant sa confiance dans l’approche multilatérale, il s’est dit préoccupé par l’échec de la dernière Conférence d’examen du TNP, prônant transparence et bonne volonté pour assurer le succès de la prochaine session.   

L’observateur a préconisé la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, affirmant travailler à l’établissement d’un consensus entre tous les pays de la région.  À ce titre, il a dénoncé la non-participation d’Israël au processus, avant d’accuser ce pays de violer les résolutions, normes et réglementations du droit international, citant également le refus israélien de soumettre ses infrastructures nucléaires au système de garanties de l’AIEA.   

Rappelant que l’État de Palestine est signataire du TNP et du TIAN, l’observateur a exhorté les pays non signataires du second à y adhérer.  Il s’est également réjoui de l’acceptation du vote à la Conférence générale de l’AIEA, présenté par l’Égypte au nom de la Palestine, pour que cette dernière soit désormais présentée comme « État de Palestine » –un changement de dénomination qui lui confère des privilèges et des droits.   

L’observateur a dénoncé l’usage des armes classiques par Israël pour commettre, selon lui, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, prônant un traçage plus efficace.  Enfin, il a partagé ses préoccupations quant aux déploiements des Systèmes d’armes létaux autonomes, les qualifiant d’inacceptables tant sur le plan juridique que moral.  Il a appelé de ses vœux, dans la ligne du Secrétaire général de l’ONU et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), la négociation sur le plan international d’un instrument contraignant pour les interdire.   

M. LAURENT GISEL, du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général présente une vue très réaliste de la situation mondiale actuelle, avant de rappeler que le CICR constate tous les jours sur le terrain combien l’évolution des conflits aggrave les souffrances des victimes.  Il a ensuite présenté son point de vue en tant que gardien du droit international humanitaire.   

Le délégué a rappelé qu’en raison de leurs conséquences humanitaires catastrophiques, il est fort douteux que les armes nucléaires puissent jamais être utilisées en conformité avec le droit international humanitaire, avant de juger extrêmement préoccupante l’érosion actuelle des tabous concernant une telle utilisation.  S’alarmant de voir le risque d’utilisation des armes nucléaires au plus haut depuis les heures les plus sombres de la guerre froide, il a appelé tous les États à démontrer leur engagement en faveur d’un monde libéré des armes nucléaires en adhérant sans délai au TIAN et à tous les autres traités de désarmement nucléaire.   

M. Gisel a ensuite dénoncé les risques humanitaires, éthiques et juridiques inacceptables que font courir le développement et l’utilisation sans contrainte de SALA, et a rappelé l’appel conjoint lancé le 5 octobre par le CICR et le Secrétaire général de l’ONU, qui souligne la nécessité d’adopter au plus vite des règles pour préserver le contrôle humain sur l’usage de la force et les effets des armes.  Le délégué s’est félicité de la prise de conscience actuelle et a appelé à aller au-delà des cadres juridiques existants pour adopter un cadre juridique contraignant qui établisse clairement des lignes rouges.  Pour le CICR, « le ciblage autonome des humains par des machines est une ligne morale que nous ne devons pas franchir ».   

Les conflits armés en cours ont montré l’importance croissante des « menaces numériques et cyber » et le potentiel de l’intelligence artificielle, a poursuivi le délégué, qui a aussi mis en garde contre l’engagement croissant d’entreprises, de groupes de hackers et autres acteurs civils dans de telles opérations.  Il a annoncé la publication la semaine prochaine par le CICR de principes directeurs et de recommandations.   

Le délégué a par ailleurs réaffirmé l’importance d’une pleine application du droit international humanitaire dans l’espace extra-atmosphérique et a recommandé que les États étudient et discutent plus avant la manière dont le droit international s’applique dans l’espace, suggérant diverses mesures pratiques.   

M. Gisel a appelé toutes les parties à des conflits armés à cesser immédiatement d’utiliser des mines antipersonnel et des armes à sous-munitions. Il a demandé aux États de faire plus attention aux risques liés aux exportations d’armes et de munitions.  Enfin, face à l’utilisation massive d’armes à fort potentiel explosif dans des zones densément peuplées, il a rappelé la Déclaration politique adoptée à Dublin le 18 novembre 2022, estimant que l’engagement de déjà 83 pays représentait un changement important d’état d’esprit qui doit toutefois être mis en pratique.   

Avec une priorité donnée au désarmement, les valeurs humanitaires partagées fournissent la base nécessaire pour agir et traiter des défis mis en exergue dans le Nouvel Agenda pour la paix, a conclu le délégué.   

M. MAGED ABDELFATTAH ABDELAZIZ, Observateur permanent de la Ligue des États arabes auprès de l’Organisation des Nations Unies, a fait remarquer les antagonismes croissants entre les doctrines militaires des États nucléaires de l’Est et de l’Ouest.  Il a noté les nombreuses alliances militaires, stratégiques et économiques à travers lesquelles chaque partie élargit ses frontières dans le but de dissuader l’autre, et aussi pour repositionner ses armes nucléaires et de destruction massive.  Cette situation tendue coïncide avec les échecs de mise en œuvre du TNP, a‑t‑il déploré, blâmant les États dotés, accusés d’ignorer leurs obligations.  Une telle attitude limite la marge de manœuvre de la communauté internationale, a estimé l’Observateur permanent, d’autant plus que les États officiellement dotés sont ceux-là mêmes qui disposent d’un statut de membre permanent du Conseil de sécurité.  Dans ce cadre, il a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU, estimant qu’il montre la voie vers un désarmement qui répond aux aspirations de toutes les nations.   

L’Observateur permanent a appelé la Première Commission à œuvrer pour réduire les tensions, tout particulièrement entre grandes puissances nucléaires.  Il a estimé que la ratification du TNP ne dispense pas de travailler à l’universalité du Traité, pas plus qu’à l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Cette dernière n’a pas encore vu le jour, a‑t‑il déploré, citant notamment pour cause l’absence de volonté politique des États dotés.   

L’Observateur permanent a souligné combien il est important d’appliquer le programme des Nations Unies visant à prévenir le commerce illicite des ALPC, tout en ajoutant que cela ne devait pas se faire au préjudice du droit des pays à obtenir des armes classiques pour répondre à leurs besoins de sécurité.  Dans ce cadre, il s’est félicité de l’adoption du document final de la huitième Réunion biennale du Programme d’action, déclarant attendre avec intérêt sa mise en œuvre en vue de la tenue de la quatrième Conférence d’examen.  Il a par ailleurs insisté sur le besoin de coopération internationale dans le domaine de la cybersécurité, appelant les Nations Unies à endosser un rôle central dans l’élaboration de normes internationales et préconisant un renforcement de l’aide aux pays en développement pour faire face aux cyberattaques.  Enfin, il a souligné que l’espace extra-atmosphérique est un patrimoine commun à toute l’humanité.   

M. FLÁVIO DAMICO, de l’Organisme pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), a déploré que le refus du compromis caractérise trop souvent la sécurité internationale de nos jours.  Pour lui, le jeu à somme nulle auquel se livrent nombre d’États revient à renier les buts et principes de la Charte des Nations Unies, laquelle appelle au respect de la justice et du droit international ainsi qu’au règlement des différends de manière pacifique.   

Les traités portant création de ZEAN et la norme du TICE sont, eux, exemplaires d’un respect strict de ces principes, a poursuivi le représentant.  Il a en outre indiqué que les États membres de ces zones œuvrent année après année au développement du droit international par le biais d’une diplomatie résolument multilatérale, qui trouve à s’exprimer dans les projets de résolution soumis à la Commission.  Le dialogue que mène l’OPANAL dans les instances internationales pour inciter les États dotés à honorer leurs engagements en matière d’élimination de leurs arsenaux nucléaires y contribue également.   

Droits de réponse 

Le représentant de la République islamique d’Iran a estimé qu’il serait bénéfique qu’une délégation qui a pris la parole (mais non nommée) respecte la souveraineté des États en matière de politique étrangère.   

La représentante d’Israël a dit réagir à la déclaration d’une délégation disant être ici pour promouvoir le respect des traités en matière de désarmement.  Quelles valeurs incarnent ces traités si certains intervenants stockent des armes nucléaires alors qu’ils prétendent adhérer aux traités de désarmement? s’est-elle demandé.  Les mots comptent dans la foi juive.  Lorsque les délégations ne peuvent condamner le Hamas et ne peuvent faire preuve d’empathie envers 1 200 personnes tuées, que vaut leur parole sur les traités? Que valent vos signatures si vous ne pouvez condamner les attaques terroristes? On ne peut pas donner ce que l’on n’a pas, a-t-elle conclu en citant un proverbe arabe.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Deuxième Commission débat des moyens efficaces, comme l’agriculture durable, pour éliminer la pauvreté et garantir la sécurité alimentaire

Soixante-dix-huitième session,
16e & 17e séances plénières – matin & après-midi
AG/EF/3590

La Deuxième Commission débat des moyens efficaces, comme l’agriculture durable, pour éliminer la pauvreté et garantir la sécurité alimentaire

La Deuxième Commission de l’Assemblée générale, consacrée aux questions économiques et financières, s’est concentrée aujourd’hui sur deux thématiques inextricablement liées: l’éradication de la pauvreté d’un côté, le développement agricole, la sécurité alimentaire et la nutrition de l’autre.  Selon les estimations, rappelées par John Wilmoth du Département des affaires économiques et sociales (DESA), environ 670 millions de personnes vivent dans l’extrême pauvreté.  Et plus de 80% d’entre elles se trouvent dans les régions rurales, où les taux de pauvreté sont presque trois fois plus élevés que dans les zones urbaines, comme l’a précisé Benjamin Davis, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Cela représente plus de 1,3 milliard de personnes qui, malgré le rôle qu’elles jouent dans la production alimentaire mondiale, n’ont pas les moyens d’acheter de la nourriture et d’autres produits de première nécessité, a-t-il dénoncé.

Particulièrement vulnérables à la surexploitation des ressources et aux bouleversements climatiques, ces populations rurales ont vu leurs conditions, déjà précaires avant la pandémie de COVID-19, s’aggraver sensiblement à la suite de celle-ci.  En effet, après plus de deux décennies de progrès soutenus —notamment en raison d’un transfert massif de main d’œuvre du secteur agricole faiblement productif vers l’industrie et les services, comme en Chine, qui a dit avoir éliminé la pauvreté extrême chez elle—, la tendance s’est récemment inversée.  Aujourd’hui, comme l’a rappelé le Mexique, presque 1 personne sur 10 dans le monde (9,2% de la population exactement) est ainsi confrontée à la faim chronique, soit 122 millions de personnes de plus qu’en 2019.

Or, si l’on ne parvient pas à faire reculer plus rapidement et de manière soutenue la pauvreté rurale, il ne sera pas possible de réaliser la plupart des autres objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030, prévient le rapport du Secrétaire général sur cette question.  C’est une des clefs de voûte.  Par ailleurs, a expliqué M. Davis, tandis que les populations rurales vivant dans la pauvreté sont celles qui contribuent le moins aux changements climatiques, ce sont elles qui sont les plus exposées à ses conséquences et qui disposent des ressources les plus limitées pour s’y adapter.  Il y a là une injustice criante à corriger.

Pour remédier à cette situation, les stratégies ne manquent pas, mais leur mise en œuvre n’est pas toujours aisée, comme l’a rappelé la soixantaine de délégations qui ont pris la parole.  Le Groupe des 77 et la Chine en ont d’abord énuméré quelques-unes, qui se jouent au niveau international: rendre les structures commerciales existantes plus équitables; cesser l’exploitation des ressources naturelles des pays en développement; leur fournir une assistance financière, notamment par une meilleure gestion de la dette et plus de droits de tirage spéciaux (DTS); ou encore lever les mesures coercitives unilatérales.

Concernant cette dernière demande, récurrente lors des débats de la Deuxième Commission, le Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, par la voix du Venezuela, a évoqué une véritable « pandémie d’unilatéralisme » qui affaiblirait le Programme de développement durable à l’horizon 2030. De son côté, le Groupe des pays les moins avancés (PMA) a demandé à ce que le mécanisme de « stockage alimentaire », prévu par le Programme d’action de Doha en faveur des PMA, devienne pleinement opérationnel, tout en exhortant à donner aux petits exploitants agricoles de ces pays un accès aux nouvelles technologies et aux énergies renouvelables via des transferts de technologies.  Bahreïn a d’ailleurs témoigné avoir profité de nouvelles technologies qui lui ont permis d’accroître son utilisation des serres pour protéger les cultures contre les conditions climatiques extrêmes.

« Pour ne laisser personne de côté », la mise en place de programmes de protection sociale doit être une priorité, a défendu la Communauté des Caraïbes (CARICOM), citant plusieurs pays de sa région en exemple.  La Thaïlande a détaillé pour sa part sa « philosophie de l’économie de suffisance », qui pousse les communautés locales à relever par elles-mêmes leur niveau de vie.  Au niveau local, justement, soutenir l’agriculture familiale est fondamental, a assuré Marcela Villarreal de la FAO, précisant que 77 pays avaient déjà adopté des plans d’action à cet effet.  Le Brésil a relancé son programme d’achat alimentaire bénéficiant aux petits exploitants, ainsi qu’un programme de transfert monétaire en espèces qui a permis à 3,4 millions de personnes de se tirer de la pauvreté extrême.  Le Brésil a par ailleurs annoncé qu’en tant que président du prochain G20, il voulait créer une agence mondiale contre la faim et la pauvreté.

Pour tenir leur rôle dans la réalisation des ODD, résume le rapport sur « l’avenir de l’alimentation et de l’agriculture », les systèmes agroalimentaires devront tout à la fois être en mesure de répondre à l’augmentation de la demande, exercer une pression moindre sur les ressources naturelles, produire moins d’émissions de gaz à effet de serre et de déchets alimentaires, associer les différents secteurs et parties prenantes (y compris les peuples autochtones, les jeunes et le secteur privé) et offrir des moyens de subsistance décents, équitables et tenant compte des questions de genre.  Une somme de défis d’autant plus grands que les systèmes financiers sont affaiblis et que la marge de manœuvre budgétaire est limitée. Mais le statu quo n’est plus tenable, ont tranché la plupart des délégations, convaincues de la nécessité d’un changement en profondeur.

La prochaine séance de la Deuxième Commission aura lieu demain, jeudi 12 octobre, à 15 heures.  Elle sera consacrée aux activités opérationnelles de développement.

ÉLIMINATION DE LA PAUVRETÉ ET AUTRES QUESTIONS LIÉES AU DÉVELOPPEMENT 

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE, SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET NUTRITION 

Présentation des rapports

M. JOHN WILMOTH, Directeur par intérim de la Division du développement social inclusif du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a présenté le rapport du Secrétaire général sur les « activités relatives à la troisième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (2018-2027) » (A/78/239), qui fait le point sur les progrès accomplis et les problèmes rencontrés dans ce cadre, dans un contexte marqué par une série de crises graves se renforçant mutuellement (COVID-19, guerre en Ukraine, crises alimentaire et énergétique, inflation croissante et changements climatiques). 

Le rapport constate que la pauvreté a augmenté pour la première fois depuis plus de 20 ans.  Selon les estimations, environ 670 millions de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté en 2022, soit une hausse de 70 millions par rapport aux projections antérieures à la pandémie.  Si ces tendances perdurent, a averti M. Wilmoth, 575 millions de personnes vivront toujours dans une pauvreté extrême en 2030.  De plus, entre 690 et 783 millions de personnes souffraient de la faim en 2022, soit 122 millions de plus qu’avant la pandémie.

Le rapport note également que les pays les plus pauvres ont dépensé des milliards au service de la dette, ce qui les a empêchés d’investir dans le développement durable. Par exemple, les pays les moins développés (PMA) consacrent 14% de leurs recettes publiques au service de la dette, contre 3,5% pour les pays développés.

M. BENJAMIN DAVIS, Directeur de la Division de la transformation rurale inclusive et de l’égalité des sexes à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a présenté, en visioconférence, deux rapports du Secrétaire général.  Le premier se concentre sur « l’élimination de la pauvreté en milieu rural en vue de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 » (A/78/238); le deuxième aborde « l’avenir de l’alimentation et de l’agriculture: moteurs et déclencheurs de systèmes agroalimentaires durables » (A/78/218).  Révélant que plus de 80% des personnes extrêmement pauvres vivent en milieu rural, où les taux de pauvreté sont presque trois fois plus élevés que dans les zones urbaines, le rapport note que les progrès dans la réduction de cette pauvreté ont ralenti, avant même l’éclatement de la pandémie de COVID-19. Et alors que les populations rurales vivant dans la pauvreté sont celles qui contribuent le moins aux changements climatiques, ce sont elles qui sont les plus exposées à ses conséquences, et qui disposent des ressources les plus limitées pour s’y adapter.

Pour remédier à cette situation, le rapporteur a appelé à des stratégies de développement rural inclusives et durables.  Il a encouragé des investissements accrus dans les services sociaux et les systèmes de protection sociale, sans oublier de renforcer les droits des peuples autochtones sur les terres et territoires communaux, afin qu’ils puissent prendre part aux décisions sur les questions qui les concernent.  Il a ensuite attiré l’attention sur la sécurité alimentaire et la nutrition, notant que près de 29,6% de la population mondiale, soit 2,4 milliards de personnes, étaient en situation d’insécurité alimentaire en 2022. Après avoir évoqué les écarts de genre dans la productivité agricole et l’emploi salarié, il a exprimé ses inquiétudes quant à la durabilité environnementale, insistant sur la nécessité d’adopter une approche holistique, à long terme, qui combine sciences modernes et connaissances locales.  Il a enfin mentionné le rôle des fibres naturelles comme alternative aux fibres synthétiques, soulignant leur contribution à l’atténuation et à l’adaptation aux changements climatiques.

Mme MARCELA VILLARREAL, Directrice de la Division des partenariats et de la collaboration avec les Nations Unies de la FAO, a présenté le rapport de la FAO et du Fonds international de développement agricole (FIDA) portant sur la « mise en œuvre des activités relatives à la Décennie des Nations Unies pour l’agriculture familiale (2019-2028) », contenu dans une note du Secrétaire général (A/78/233).  Soutenir l’agriculture familiale est fondamental pour réaliser les objectifs de développement durable, a-t-elle rappelé en notant que les résultats depuis le lancement de la Décennie sont encourageants.  Mme Villarreal a précisé qu’au moins 77 pays ont déjà fait évoluer leur politique en ce sens et adopté des plans d’action.

Elle a fait valoir que de nombreuses opérations et activités ont favorisé la participation dynamique des femmes et des jeunes ruraux dans l’agriculture familiale et les économies rurales, leur accès aux ressources et services productifs et leur participation aux processus de dialogue politique.  En 2023 et en 2024, la bonne mise en œuvre de la Décennie devrait être encouragée au moyen de ressources financières accrues ainsi que grâce à un engagement politique renouvelé, recommande le rapport. 

Discussion générale conjointe

M. ADIEL GUEVARA RODRÍGUEZ (Cuba), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a déclaré que l’élimination de la pauvreté et de la malnutrition sous toutes leurs formes est le défi le plus important à relever sur le plan international, recommandant, pour ce faire, une coopération accrue.  Or, en dépit des engagements pris à cette fin, le monde ne suit pas la bonne voie pour réaliser le premier objectif du Programme 2030, a déploré le représentant.  Il a regretté que, « selon des estimations crédibles », il y avait 650 millions de personnes vivant dans la pauvreté extrême en 2021, soit 1,4% de la population mondiale.  Cela représente 70 millions de personnes de plus par rapport aux prévisions prépandémiques, a-t-il précisé.  Si la tendance se poursuit, il y aura en 2030, a-t-il prévenu, 500 à 600 millions de personnes qui continueront de vivre dans la pauvreté extrême, et seulement un tiers des pays auront réduit leur niveau de pauvreté nationale de moitié.

Le représentant a également relevé que si la pauvreté règne partout, la grande majorité des pauvres vivent dans les pays du tiers-monde.  Ils ne peuvent pas se permettre d’acheter des aliments et de satisfaire à d’autres besoins fondamentaux.  Il a relevé que 1% d’augmentation des prix des produits alimentaires pousse des millions de gens dans pauvreté, « comme on l’a vu dans le contexte de l’inflation sur les prix des produits alimentaires durant la pandémie de COVID-19 ».  Le représentant a déploré que dans ce contexte, les pays en développement n’aient pas suffisamment été aidés, reconnaissant toutefois que si le montant de l’aide publique au développement (APD) a augmenté, cette hausse résulte des aides apportées aux réfugiés. 

Rappelant que l’éradication de la pauvreté est le premier ODD, le délégué a recommandé de s’attaquer aux causes et origines systémiques, tant sur le plan national que sur le plan international.  Ainsi, a-t-il énuméré, les structures commerciales existantes doivent être rendues plus équitables; l’exploitation des ressources naturelles des pays en développement, y compris transfrontalières, doit cesser; les pays en développement doivent recevoir les ressources financières nécessaires, y compris par une bonne gestion de la dette et des droits de tirage spéciaux (DTS); et les mesures coercitives unilatérales doivent être levées.

Au nom du Groupe des pays les moins avancés (PMA), M. LOK BAHADUR THAPA (Népal) a relevé que bien que l’agriculture soit le secteur le plus important de l’économie des PMA, ces derniers sont également des pays importateurs nets de denrées alimentaires.  Cela s’explique par un contexte de risques et d’incertitudes perpétuels.  Les conflits et les tensions géopolitiques ont non seulement augmenté le coût des intrants agricoles, mais ont également entraîné des pénuries d’engrais.  Par conséquent, a développé l’oratrice, environ deux tiers des personnes confrontées à l’extrême pauvreté dans le monde sont des travailleurs et des familles du secteur agricole.  Le Groupe a donc demandé instamment aux partenaires de développement et au système des Nations Unies de concrétiser leur engagement de financer davantage l’élaboration de solutions novatrices pour les PMA dans les domaines de l’agriculture et de la production alimentaire.  La création d’un système agroalimentaire plus équitable, plus durable et plus résistant est la clef pour mettre fin à l’instabilité alimentaire dans les PMA, tout comme l’augmentation des investissements dans l’agriculture pour garantir la sécurité alimentaire et l’élimination de la faim. 

La modernisation et l’industrialisation de l’agriculture dans les PMA sont une nécessité urgente, a-t-elle aussi pointé en insistant sur la nécessité de transformer les systèmes alimentaires, et plaidant pour l’adaptation aux changements climatiques et la mobilisation des ressources nécessaires pour renforcer la résilience des PMA.  Cet effort doit inclure un investissement accru dans les systèmes d’alerte précoce, l’identification des zones susceptibles d’aggraver l’insécurité alimentaire et des mesures de protection sociale ciblées.  En outre, la mise en œuvre d’un mécanisme de stockage alimentaire adapté aux PMA contribuerait à réduire l’insécurité alimentaire et l’instabilité dans ces pays, a-t-elle reconnu en demandant instamment que le mécanisme de stockage alimentaire pour les PMA prévu par le Programme d’action de Doha devienne opérationnel.  Enfin, la représentante a exhorté à donner aux petits exploitants agricoles des PMA un accès aux nouvelles technologies et aux énergies renouvelables, aux marchés, à la diversification des cultures et à des infrastructures résilientes, entre autres.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque) a dit être très préoccupé par la situation en Haïti où la moitié de la population souffre d’une sécurité alimentaire chronique.  Pour éliminer la pauvreté et la faim, il faut avoir des plans suffisamment financés et investir dans l’agriculture, a-t-il prôné tout en rappelant que les pays de la région des Caraïbes subissent les conséquences des changements climatiques qui freinent les progrès.  Le délégué a donc recommandé des pratiques agricoles résilientes pour accroître la production.  Il a demandé d’harmoniser le débat sur la pauvreté avec celui sur la sécurité alimentaire, arguant qu’ils sont liés.  La CARICOM, a-t-il poursuivi, concentre ses efforts dans les zones rurales où l’agriculture est la principale source de subsistance.  La pauvreté extrême ne saurait être éliminée sans les investissements mondiaux pour atténuer les défis que rencontre le secteur agricole dans le monde en développement, a plaidé le représentant.

Il a notamment demandé des subventions aux agriculteurs et de prendre en compte la dégradation de l’environnement.  Il a parlé de la politique agricole commune de la CARICOM, qui comprend des initiatives telles que l’agriculture intelligente face au climat et des projets pour renforcer l’entrepreneuriat rural et agricole.  En outre, comme les pays de la CARICOM importent 75% de leurs aliments, ses membres ont adopté la Vision 2025 qui a pour objectif de réduire la facture d’importation d’aliments de 25% dans la région.  Ils ont aussi élaboré une stratégie alimentaire pour améliorer la résilience face aux secousses sociales et alimentaires.  La mise en place des programmes de protection sociale a été accélérée dans tous les pays des Caraïbes, a encore indiqué le délégué qui a toutefois conclu que les progrès réels ne seront possibles que si la communauté internationale surmonte les problèmes géopolitiques et met un terme aux conflits, sans oublier un meilleur accès aux financements et un allégement de la dette. 

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. DANG HOANG JIANG (Viet Nam) a fait observer que l’agriculture est un secteur clef en Asie du Sud-Est, fournissant du travail à 32% de la population et représentant 22% du PIB, et qu’elle contribue aux efforts régionaux en vue d’alléger la pauvreté, d’éliminer la faim et en faveur du développement durable.  L’ASEAN s’est engagée à redoubler d’efforts en faveur de la sécurité alimentaire en renforçant la productivité agricole et les chaînes d’approvisionnement alimentaires, notamment par le biais de pratiques agricoles durables, a indiqué le délégué. 

Le représentant a souligné quelques-uns des progrès déjà engrangés en la matière, saluant notamment les efforts visant à parvenir à une économie verte et à exploiter le potentiel de l’économie bleue.  Rappelant que la région est très vulnérable aux changements climatiques et à leurs répercussions, il a réitéré l’engagement de l’ASEAN à mettre en œuvre l’Accord de Paris, en particulier selon le principe des responsabilités communes mais différenciées et en fonction des capacités nationales.

Parlant au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, Mme ASBINA MARIN SEVILLA (Venezuela) est revenue sur les conséquences durables de la pandémie de COVID-19, tout en affirmant qu’une autre pandémie affaiblissait le Programme de développement durable à l’horizon 2030: la « pandémie d’unilatéralisme », marquée par la mise en œuvre de mesures coercitives unilatérales qui violent les principes de la Charte des Nations Unies.  Selon la représentante, ces mesures exacerbent non seulement la crise humanitaire, mais affectent également l’économie mondiale et contribuent à la hausse des prix alimentaires.  Elle a ainsi exhorté à la levée, sans plus tarder, des restrictions sur la production et l’exportation de nourriture et d’engrais, pour promouvoir une agriculture plus durable et résiliente.

La déléguée a poursuivi en mettant en lumière le besoin de réformer la gouvernance alimentaire et agricole mondiale, et en appelant à inclure les pays en développement dans les processus de prise de décisions.  « C’est notre responsabilité morale envers les générations actuelles et futures de corriger la trajectoire », a-t-elle conclu, en plaidant pour une plus grande solidarité et coopération internationale.

Mme GLADYS MOKHAWA (Botswana), au nom du Groupe des pays en développement sans littoral (PDSL), a déclaré qu’en raison de leurs vulnérabilités, les PDSL sont parmi les plus durement touchés par les chocs complexes du marché international et par la loi de l’offre et de la demande.  Elle a noté en outre que la fragile reprise post-COVID-19 a été freinée par les conditions macroéconomiques mondiales difficiles. Bien que la croissance montre quelques signes d’amélioration, étant passée de 1,43% en 2020 à 3,54% en 2022, celle des PDSL n’a pas suffisamment rebondi pour retrouver les taux d’avant la pandémie (4,26% en 2019), a-t-elle fait remarquer, en s’inquiétant de la lenteur des progrès de ces pays en matière de réduction de la pauvreté par rapport à d’autres pays.  La hausse de l’inflation reste d’ailleurs un défi majeur pour bon nombre de ces économies.

Cette situation exerce une forte pression sur les budgets des familles et plonge encore davantage de nombreux ménages dans la pauvreté, a poursuivi la représentante, citant les chiffres de la FAO, qui affirment que l’insécurité alimentaire est passée de 43,4% en 2015 à 57,9% en 2022 dans ces pays.  La récente flambée des prix alimentaires mondiaux a également imposé des coûts élevés à de nombreux PDSL, rendant leurs produits alimentaires de base inabordables.  Or, sans progrès plus rapides et durables dans la lutte contre la pauvreté, il ne sera pas possible d’atteindre la plupart des ODD d’ici à 2030, a-t-elle prédit.

C’est pour cette raison, et en tenant compte de leurs difficultés particulières, que les pays en développement sans littoral ont besoin d’interventions ciblées pour parvenir à un développement durable et éliminer la pauvreté, a rappelé la représentante, dressant une liste de ce que cela requiert: intégrer les PDSL dans le commerce mondial; soutenir leurs efforts visant à renforcer leur capacité productive; améliorer l’efficacité du transport de marchandises pour faire face aux coûts commerciaux élevés; ou encore soutenir leurs efforts pour parvenir à une transformation structurelle et faire face à l’impact des changements climatiques.

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), M. ISAIA LAUTASI (Samoa) est revenu sur les défis spécifiques des membres de l’Alliance. Les petits États insulaires en développement (PEID) dépendent largement des importations de denrées alimentaires plutôt que de la production locale, avec plus de 60% des denrées alimentaires importées dans les pays des Caraïbes et du Pacifique (la moitié d’entre eux en importent même plus de 80%).  Des solutions existent, certaines étant inscrites dans le rapport du Secrétaire général sur les ODD, a rappelé le délégué en indiquant que l’AOSIS en soutient plusieurs, en particulier la nécessité pour les gouvernements de s’engager de nouveau à augmenter la cadence pour tenir la promesse des ODD. L’Alliance juge aussi important que les gouvernements mettent en place des politiques et des actions concrètes, intégrées et ciblées pour éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités.

Il s’agit là de propositions judicieuses, mais la question du financement demeure, a poursuivi le représentant.  L’accent mis uniquement sur le revenu national brut (RNB) pour déterminer l’accès aux financements concessionnels compromet la capacité de nombreux PEID à accéder à des financements suffisants et adéquats.  Le représentant a rappelé le cercle vicieux, connu de tous: marge de manœuvre budgétaire limitée, endettement croissant et choix difficiles. Ajoutons à cela les effets des changements climatiques, et il devient évident pour le délégué que l’incapacité d’accéder à des financements à long terme et à faible coût empêche les PEID de mettre fin à la pauvreté et de garantir la sécurité alimentaire et la nutrition.  Il a donc demandé aux partenaires de développement de respecter leurs engagements, d’accroître leur soutien, ainsi que de mettre en œuvre le Programme d’action d’Addis-Abeba, afin de mobiliser les ressources et les investissements nécessaires.  L’architecture financière internationale doit en outre être réformée, a-t-il ajouté.

Le délégué a enfin souligné le paradoxe selon lequel les pays produisant la majeure partie des denrées alimentaires dans le monde et dépendant principalement de l’agriculture pour leur subsistance comptent parmi les plus pauvres de la planète. Les vagues de chaleur extrême, la sécheresse et les inondations ont touché des millions de personnes et coûté des milliards de dollars, affectant les systèmes alimentaires mondiaux et ruinant les récoltes, s’est-il désolé.  Dans ce contexte, le délégué a assuré que l’AOSIS continuerait de réclamer la tenue de l’engagement des pays développés de verser annuellement 100 milliards de dollars pour renforcer la résilience des pays en développement.

M. AL-KHAYAREEN (Qatar) a rappelé la contribution financière de 60 millions de dollars de son gouvernement pour appuyer la mise en œuvre du Programme d’action de Doha en faveur des PMA.  Cette aide joue un rôle essentiel dans l’élimination de la pauvreté et le renforcement des capacités, s’est-il enorgueilli, en faisant remarquer que le Programme d’action permet d’accélérer la mise en œuvre du Programme 2030. Il a ajouté que son pays accorde une grande importance sur le plan national à l’agriculture et à la sécurité alimentaire.  Le pays s’est doté d’une stratégie visant à réaliser l’autosuffisance alimentaire au niveau local en utilisant des technologies modernes.

Poursuivant, le délégué a informé que le Qatar, qui préside actuellement le Conseil exécutif de l’Organisation islamique pour la sécurité alimentaire, a organisé le 1er octobre la neuvième Conférence ministérielle sur le développement agricole pour réaliser les ODD dans ses États membres.  Cette conférence a adopté la Déclaration de Doha sur le développement agricole.  En outre, avec la Fondation Bill Gates, le Qatar s’est engagé à dépenser 20 millions de dollars pour appuyer le secteur agricole en Afrique subsaharienne, a déclaré le délégué avant d’indiquer que son pays a fourni 90 millions de dollars au Programme alimentaire mondial (PAM) pour répondre aux besoins alimentaires au Yémen.

Mme ANDREA ALEJANDRA BARAHONA FIGUEROA (El Salvador) a mis en avant les efforts de son pays pour promouvoir le bien-être social et une croissance économique soutenue, tout en protégeant l’environnement et surtout en défendant la paix et l’harmonie dans les communautés.  Elle a considéré que les mesures de progrès doivent être révisées et aller au-delà du PIB, afin de mesurer le développement durable des pays et de prendre les bonnes décisions en matière d’accès aux financements, qu’ils soient concessionnels ou pas.  La représentante a aussi témoigné des mesures prises par son pays pour progresser en termes de sécurité alimentaire et nutritionnelle, par le biais de pratiques agricoles durables et par la modernisation des technologies et des infrastructures rurales. Elle a mentionné également la création récente du Centre de développement du commerce agricole.

Mme MARKOVA CONCEPCIÓN JAMARILLO (Panama) a souligné le rôle crucial des femmes dans la lutte contre la pauvreté et la faim, expliquant pourquoi le Panama avait mis en œuvre des initiatives comme « Réseaux familiaux » et « L’Agenda économique des femmes rurales » pour autonomiser et améliorer la qualité de vie de ces dernières.  Elle a alerté sur la crise migratoire sans précédent, exacerbée par le chômage et l’insécurité, notant que celle-ci a « des implications dévastatrices pour notre environnement et nos ressources naturelles » et que la réaffectation de ressources importantes en direction du secours humanitaire est économiquement insoutenable.

Enfin, la représentante a insisté sur l’engagement du Gouvernement panaméen à éliminer « la sixième frontière », celle de la pauvreté.  Elle a évoqué la stratégie nationale de Panama pour le développement intégral et durable, ou « Plan Colmena », qui donne la priorité aux 300 communautés les plus défavorisées du pays, notamment les « comarcas indigenas » où vivent les populations autochtones.  Y ont été identifiées, grâce à l’indice de pauvreté multidimensionnelle, des privations multiples, maintenues de génération en génération, et contre lesquelles son pays entend lutter en priorité.

Mme CHARLENE ARAVEJO BERIANA (Philippinesa souligné l’importance de la lutte contre la pauvreté en se référant au Plan de développement philippin 2023-2028, qui ambitionne à son terme de faire baisser l’incidence de la pauvreté dans le pays à 9%.  Après avoir partagé une définition élargie de la pauvreté comme « état de privation », elle a mis en avant plusieurs politiques de son pays pour la réduire: programme de transferts conditionnels en espèces, accès universel à un enseignement tertiaire de qualité, et loi sur les soins de santé universels.

D’autres programmes ont été évoqués, comme le Programme de développement rural philippin et le Programme spécial pour le développement agricole, qui cherchent à augmenter les revenus ruraux et à améliorer la productivité.  Enfin, en ce qui concerne la sécurité alimentaire, elle a mentionné la Voie de transformation alimentaire nationale et le Plan de modernisation et d’industrialisation de l’agriculture et de la pêche 2021-2030.

Mme TAHEREH JALILI (République islamique d’Iran) a déclaré l’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes et manifestations est le défi le plus important de la communauté internationale, dans le contexte où, 600 millions, soit 8% de la population mondiale vit dans la pauvreté extrême et que les chiffres augmentent dans la région du Moyen Orient.  Les causes de la pauvreté sont complexes et diverses, a dit la représentante, citant, le chômage ou les mesures coercitives unilatérales.  En ce qui la concerne la République islamique d’Iran s’est engagée à l’éliminer, a-t-elle aussi assuré, citant de nombreux programmes gouvernementaux visant la création d’emploi, l’aide aux familles, y compris rurales, la diversification de l’économie iranienne, afin qu’elle ne dépende pas que du pétrole, ou encore l’inclusion des femmes dans la sphère politique. Elle a de nouveau insisté sur le poids des mesures coercitives unilatérales dans les origines de la pauvreté, appelant à mettre un terme à ce phénomène, par le biais de la coopération internationale.

M. VÁSQUEZ SOLANO (Mexique) a jugé inquiétant de constater les maigres progrès dans l’éradication de la pauvreté, qui est le premier ODD et bien que nous soyons à plus de la moitié du délai fixé pour réaliser le Programme 2030.  Des millions de personnes vivent encore dans la pauvreté, la faim et la malnutrition augmentent, tandis que les effets des changements climatiques deviennent plus évidents.  Cela creuse les inégalités et nécessite de renforcer les mécanismes multilatéraux pour faire face efficacement et collectivement à ces crises, a plaidé le représentant.  Selon lui, la nécessité d’un nouveau paradigme de développement visant à redistribuer le pouvoir et la richesse et à réduire l’écart entre les pays en développement et les pays avancés est évidente.  Une transformation de cette nature est possible.  Pour preuve, le Mexique a réussi à sortir 5,1 millions de personnes de la pauvreté au cours des quatre dernières années, a-t-il avancé.

Le représentant a également jugé alarmant de constater qu’en 2022, environ 9,2% de la population mondiale était confrontée à la faim chronique, soit 122 millions de personnes de plus qu’en 2019.  Si des mesures concrètes ne sont pas prises, cette tendance continuera de s’accentuer, a-t-il mis en garde, appelant à l’adoption d’actions coordonnées et de réglementations efficaces pour lutter contre les inégalités, réformer les systèmes alimentaires et promouvoir des pratiques agricoles durables.  Au Mexique, entre 2018 et 2022, la population mexicaine en situation d’insécurité alimentaire a diminué de cinq millions, notamment par la mise en œuvre des politiques publiques visant à promouvoir l’accès aux aliments nutritifs de base, a-t-il vanté.  Concluant, il a préconisé de mettre l’accent sur la sécurité alimentaire comme facteur contribuant à la paix.  Il a aussi condamné l’interruption des chaînes d’approvisionnement, des intrants et des aliments de base.  Cela s’apparente à une forme de coercition, a-t-il dit.

M. ETOUNDI AYISSI (Cameroun) a relevé que malgré le rythme soutenu des progrès réalisés par son pays, l’ampleur des défis sécuritaires, notamment la lutte contre le terrorisme et les externalités liées à un environnement international « où les intérêts particuliers prennent parfois le pas sur l’intérêt général », de même qu’une conjoncture internationale marquée par des crises, des tensions, des instabilités de toutes sortes, ne permettent pas toujours au Cameroun d’aller aussi vite et aussi loin que le souhaiterait son gouvernement.

Le délégué a aussi noté que l’on ne saurait aborder de bonne foi la question de l’éradication de la pauvreté sans des solutions durables aux problématiques majeures, relatives au poids écrasant du service de la dette, aux flux financiers illicites, au protectionnisme et à la détérioration de l’accès au marché des capitaux à des coûts abordables, entre autres.  Il a réclamé, pour relever ces défis, une action collective et une ambition internationale renouvelée.

M. MATEUS PEDRO LUEMBA (Angola) a déclaré que près de deux millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire dans son pays.  Le Gouvernement a répondu à ce défi en développant des programmes structurels visant à rendre les communautés rurales plus résilientes.  Ainsi, a donné en exemple le représentant, des infrastructures de transport et de stockage de l’eau ont été installées afin d’atténuer les effets de la sécheresse dans les zones peuplées ainsi que dans les zones agricoles et d’élevage.  Le projet permettra d’abreuver 250 000 animaux et d’irriguer 5 000 hectares de champs agricoles.

Le délégué a aussi indiqué que l’exécutif avait mis en œuvre un programme d’assistance sociale appelé « Kwenda » qui organise l’envoi d’une aide sous forme d’espèces aux familles les plus vulnérables.  Il a aussi parlé d’une réserve alimentaire qui a été créée pour réagir aux conséquences des catastrophes naturelles sur le plan social.  L’Angola entend devenir un pays exportateur de produits agricoles sur le continent africain, a annoncé le représentant avant de signaler que le Gouvernement a lancé un dialogue national sur les systèmes alimentaires et mené des consultations publiques sur la deuxième stratégie nationale pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle.  Cette stratégie permettra une mise en œuvre plus efficace des mesures prises, un suivi et une évaluation efficaces des différents plans et programmes de tous les départements ministériels.

M. KANTAPON SANGKHAPREECHA (Thaïlande) a fait observer que plus personne ne vit en-dessous du seuil international de pauvreté en Thaïlande depuis 2016, mais que la lutte contre les inégalités reste l’une de ses priorités.  Pour ne laisser personne de côté, la Thaïlande applique une « philosophie de l’économie de suffisance » afin de pousser les communautés locales à relever leur niveau de vie.  Elle cherche aussi à améliorer la qualité de vie des plus vulnérables, notamment grâce à la couverture sanitaire universelle et à une éducation de qualité.

Estimant que l’insécurité alimentaire dans les pays en développement est souvent le principal obstacle à l’élimination de la pauvreté, le représentant a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour aider ces pays à élargir leurs capacités agricoles.

M. VOLODYMYR LESCHENKO (Ukraine) a assuré que l’Ukraine ne renoncera pas à son rôle de garant de la sécurité alimentaire mondiale, même dans les circonstances extraordinaires actuelles.  Elle est prête à poursuivre ses exportations de denrées alimentaires vers les marchés mondiaux, a déclaré le représentant.

Il a rappelé que depuis le début de la guerre à grande échelle, les ports ukrainiens de la mer Noire et de la mer d’Azov sont bloqués par la Russie, voire attaqués. Pourtant, l’Initiative sur le transport sécurisé de céréales et de denrées alimentaires depuis les ports ukrainiens « Initiative de la mer Noire » a permis à l’Ukraine d’exporter quelque 33 millions de tonnes vers 45 pays, dont 60% en Afrique et en Asie. Le délégué a rappelé que si Moscou a quitté cette Initiative, des voies temporaires de transport ont été ouvertes en août 2023 pour continuer à exporter des céréales.  La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine est l’une des causes principales de la crise alimentaire mondiale, a martelé le représentant, alertant sur les conséquences sociales, économiques et politiques qui peuvent en découler dans de nombreux pays.

M. JO TONG HYON (République populaire démocratique de Corée) a d’abord insisté sur la nécessité de renforcer la coopération internationale pour augmenter la capacité de production agricole des pays en développement, appelant à l’intensification de la coopération matérielle et technique, à davantage d’investissements financiers et de transferts de technologie, et au développement de systèmes d’irrigation.  Il a toutefois critiqué la politisation de cette coopération.

Le délégué a ensuite regretté l’existence de facteurs « artificiels » aggravant la crise alimentaire mondiale, tels que l’imposition de sanctions, le stockage excessif de nourriture pour des intérêts personnels et la production de biocarburants à partir de produits agricoles.  Ces actions freinent le développement agricole et perpétuent le cycle de la faim, a-t-il averti.  Enfin, le représentant a mis en avant les efforts de son pays pour résoudre les problèmes alimentaires à l’intérieur de ses frontières, telles que la production de semences à haut rendement, l’introduction de systèmes agricoles scientifiques, l’expansion des investissements d’État dans l’agriculture ou la fourniture de logements modernes et gratuits aux agriculteurs.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a jugé préoccupant de constater que d’ici à 2030, 30% de la population d’Afrique subsaharienne vivra encore dans une extrême pauvreté.  Selon la Banque mondiale, l’éradication de l’extrême pauvreté dans la sous-région nécessiterait dans chaque pays un taux de 9% à partir de cette année, ce qui constitue un défi, puisque cette croissance s’est située à seulement 1,2%, au cours de la décennie avant la pandémie de COVID-19.  L’héritage du colonialisme et de l’apartheid, qui a perpétué une extraction soutenue des ressources nationales, se manifestent encore dans les indicateurs socioéconomiques du continent africain.

La Namibie, a poursuivi le représentant, a réalisé des progrès significatifs dans la réduction de la pauvreté, même si les résultats restent inégaux.  Le Gouvernement a mis en place des initiatives telles que des banques alimentaires et un système de protection sociale, avec l’idée de réorienter les investissements vers les enfants, qui sont touchés de manière disproportionnée par la pauvreté multidimensionnelle: 51,3%, contre 37,4% chez les adultes, a chiffré le représentant.  Par ailleurs, avec le soutien de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les agriculteurs de 5 des 14 régions de la Namibie utilisent désormais une combinaison de techniques nucléaires et d’irrigation économe pour arroser leurs champs.  Ceci est particulièrement utile pour les petits exploitants dont la production ne dépendait jusqu’ici que des précipitations.

M. CARLOS IVAN ZAMBRANA FLORES (Bolivie) a commencé par exprimer sa préoccupation face à l’élimination systématique des principes de la Conférence de Rio, en particulier le principe d’équité, non seulement dans les débats de la Deuxième Commission, mais également dans les différents rapports publiés par l’ONU. Il a aussi estimé que concernant l’action climatique mondiale, les faits confirment qu’il ne suffit plus de prendre des mesures d’atténuation et d’adaptation.  Il faut aussi parler des pertes et dommages que subissent déjà les pays en développement.  L’examen global qui sera réalisé cette année doit, a-t-il dit, encourager l’examen des engagements non tenus et restructurer les mécanismes financiers, en fonction des besoins des pays en développement.  Concernant la biodiversité, le représentant a dit que le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal reste le pilier de la mise en œuvre de la Convention sur la diversité biologique.  Notre travail futur doit être cohérent avec le reste de nos accords, a-t-il insisté, ajoutant que la mise en œuvre dudit Cadre doit également inclure des actions axées sur la Terre nourricière, c’est-à-dire garantir la non-commercialisation des fonctions environnementales de notre Terre.

Mme NASHWA (Maldives) a axé son intervention sur l’acidification des fonds marins, qui impacte le secteur de la pêche, lequel est primordial pour la santé économique des Maldives.  Elle a dénoncé la surpêche et la pêche non autorisée, notamment du thon, une activité que son gouvernement souhaite rendre illégale.  Elle a aussi réclamé des investissements dans des systèmes alimentaires résilients et félicité le Secrétaire général pour ses initiatives en ce sens.  La déléguée a enfin demandé que les obstacles à l’accès aux nouvelles technologies soient levés et qu’une réforme de l’architecture financière internationale soit rapidement lancée.

Mme CHRISTINE NZUMBU (Kenya) a estimé qu’il est de moins que l’on triomphe de la pauvreté d’ici à 2030, compte tenu des chocs successifs, tels que l’inflation et l’augmentation constante des prix des matières premières et des engrais.  Sans une intervention massive, ces problèmes pourraient gravement compromettre l’avenir en Afrique.  Dans mon pays, a-t-elle indiqué, le secteur agricole représente 20% du PIB et emploie 40% de la population.  C’est la raison pour laquelle le Kenya travaille actuellement à un programme de transformation agricole nommé « Beta » et dans le cadre de sa stratégie de développement agricole, il s’investit dans une agriculture résiliente et dans l’autonomisation des femmes en milieu rural.  Mais, a conclu la représentante, nous continuons de réclamer des financements adéquats pour le renforcement des capacités, la recherche et les systèmes d’informations fiables.

M. PISAREVICH (Bélarus) a commencé par saluer le leadership de la Fédération de Russie dans l’acheminement de dizaines de millions de tonnes de céréales vers les pays africains.  Il a aussi remercié la Chine pour son aide aux pays en développement, y compris dans le domaine de la sécurité alimentaire.  Le délégué a ensuite réclamé la suppression des mesures coercitives unilatérales imposées par les pays occidentaux contre son pays et la Fédération de Russie, et ce, sans mandat de l'ONU.  Ces mesures, a-t-il dénoncé, ont causé des difficultés dans la distribution des engrais et de céréales et elles sont à l’origine de la crise alimentaire actuelle dont pâtissent des millions de personnes dans les pays en développement.

Le Bélarus, a protesté le représentant, qui est un des plus grands producteurs d’engrais à base de potassium au monde, a vu ses exportations diminuer dès 2021, compte tenu des sanctions illégales imposées par les pays occidentaux.   Aujourd’hui, le Bélarus ne représente plus que 9% de ce marché.  Nous vivons dans un monde, a poursuivi le représentant, où la production agricole ne suffit plus et où les gens ordinaires souffrent de la faim, en particulier en Afrique.  La crise alimentaire actuelle ne peut être réglée sans un accès aux engrais russe et bélarussiens.  Le représentant a demandé aux États qui ont imposé des mesures illégales de renoncer à leur politique néfaste. 

Après avoir énuméré les plans nationaux de développement dont le Plan d’action pour la stabilisation et le développement (PA-SD) 2023-2025, M. MAHAMADOU BOKOUM (Burkina Faso) a dit qu’en dépit des efforts fournis dans la réduction de la pauvreté, 4 personnes sur 10 vivaient en 2018 en dessous du seuil de pauvreté national.  Le Gouvernement a mis en place des mécanismes de protection sociale et pour ne laisser personne sur le côté, a, avec partenaires, pris des mesures en faveur des groupes vulnérables et de leurs droits fondamentaux.  S’agissant des femmes, les interventions portent notamment sur des subsides aux semences améliorées et aux équipements agricoles, et sur l’imposition d’un quota laissant aux concernées 30% au moins des terres agricoles aménagées.  En faveur des personnes âgées, le Gouvernement a construit deux centres gériatriques à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso et adopté un Plan stratégique multisectoriel de prise en charge 2021-2025 d’un coût global de 46 millions de dollars.  Enfin pour les personnes déplacées, un Plan de réponse humanitaire a été mis sur pied, grâce au soutien des partenaires.  En conclusion, le représentant a sollicité l’appui de la communauté internationale pour vaincre l’hydre terroriste au profit d’un développement inclusif.

Pour Mme CAO LIWEN (Chine), la communauté internationale doit déployer des efforts concertés et adopter des politiques intégrées pour accélérer la mise en œuvre des premier et deuxième objectifs de développement durable.   Il faut aider les pays en développement, notamment les pays les moins avancés (PMA), à triompher de la pauvreté.  Il faut aussi assurer un ordre économique mondial « raisonnable ».  Comme les pays ne peuvent totalement dépendre de l’aide, il faut les aider à améliorer leur productivité agricole et la qualité de l’enseignement pour que les zones rurales puissent se développer de façon indépendante.  La Chine s’enorgueillit d’avoir éliminé la pauvreté extrême et établi des mécanismes à long terme pour consolider et pérenniser ces résultats, a avoué la représentante.

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a rappelé que son pays a accueilli le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires à Rome, en juillet 2023, consciente de l’urgence d’inverser la tendance à la hausse de la faim dans le monde. Elle a salué le nouvel appel à l’action pour transformer ces systèmes alimentaires qu’a lancé le Secrétaire général à cette occasion.  Pour sa part, le Gouvernement italien vient d’allouer une somme supplémentaire de 2 millions au volet alimentaire du Fonds commun visant à faciliter l’application du Programme 2030.  En concluant, le représentant a voulu mettre l’accent sur la question migratoire qui est l’un des résultats de l’insécurité alimentaire.  Nous travaillons avec nos partenaires pour nous attaquer aux causes profondes de ce phénomène.

M. AHMED (Émirats arabes unis) a noté que son pays avait consacré 1,4 milliard de dollars à la lutte contre l’insécurité depuis cinq ans.  Dans moins de deux mois, a-t-il rappelé, les Émirats accueilleront la COP28 qui encouragera notamment les gouvernements et les entreprises à réduire l’insécurité alimentaire et, plus spécifiquement, les gaspillages alimentaires de moitié.  Il a aussi rappelé qu’en mai 2023, les Émirats avaient annoncé leur participation à un programme d’innovation agricole pour un montant de 4 milliards de dollars, conjointement avec les États-Unis.  Le délégué a cité en outre une initiative menée avec le Royaume-Uni afin de créer une agriculture résiliente et durable face aux changements climatiques.  De plus, en mars 2023, les Émirats se sont joints à la France qui coordonne le programme « Unite Life » pour autonomiser les femmes et lutter contre la malnutrition, a ajouté le délégué, avant de réaffirmer que son gouvernement continuera à soutenir toutes les actions visant à aider la communauté internationale à parvenir à la sécurité alimentaire au niveau mondial.

Mme PETAL GAHLOT (Inde) a rappelé, citant le rapport du Secrétaire général, que son pays a sorti environ 415 millions de personnes de la pauvreté multidimensionnelle sur une période de 15 ans, contribuant ainsi à la baisse des niveaux de pauvreté en Asie du Sud.  Un élément important des efforts de réduction de la pauvreté a été l’accent mis sur la lutte contre la pauvreté rurale, grâce à des interventions politiques ciblées, notamment dans le développement du secteur agricole, étant donné que plus de 70% des ménages ruraux indiens dépendent de l’agriculture comme principale source de subsistance, a-t-elle expliqué.  De plus, avec une production de céréales alimentaires passant de 50 millions de tonnes en 1950-51, à près de 300 millions de tonnes en 2019-20, l’Inde est devenu un pays exportateur net de produits alimentaires, classé au neuvième rang mondial.  Cela a également permit à l’Inde de constituer des stocks alimentaires résilients, capables d’assurer la sécurité alimentaire de plus de 800 millions d’Indiens au cours des trois dernières années de défis sanitaires et géopolitiques, s’est réjoui la représentante.

M. NGUYEN (Viet Nam) a misé sur la sécurité alimentaire pour réduire la pauvreté et éradiquer la faim, tout en appelant à modifier le comportement des consommateurs afin de réduire le gaspillage alimentaire.  Il a jugé par ailleurs impératif de transformer les systèmes alimentaires pour qu’ils soient davantage durables et résilients et ainsi mieux capables de résister aux multiples crises, telles que l’insécurité alimentaire, la malnutrition, les urgences sanitaires, les changements climatiques, la perte de biodiversité, les conflits ainsi que la volatilité des marchés, entre autres.

Le représentant a également plaidé pour des emplois décents, en tant que priorité pour assurer la protection sociale.  Pour cette raison, il a salué une initiative du Secrétaire général, à savoir l’Accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale et des transitions justes, ainsi que la Coalition mondiale pour la justice sociale, lancée par l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Il a dit attendre avec impatience leur mise en œuvre, espérant que cela contribue en outre aux préparatifs en vue du Sommet social mondial de 2025.  Le délégué a, en conclusion, assuré que son pays n’avait ménagé aucun effort pour réduire la pauvreté multidimensionnelle, étant passé à un taux de 4,3% en 2022, soit une réduction de 0,1 point par rapport à 2021.  Cela s’est fait par la mise en œuvre de diverses politiques de soutien aux ménages vivant dans la pauvreté, en particulier ceux des zones reculées et rurales, a-t-il dit.

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a fustigé le niveau d’inégalités entre pays ainsi que l’augmentation du prix des aliments et les effets des changements climatiques: ces derniers pourraient provoquer le déplacement de plus de 200 millions de personnes d’ici à 2050. Elle a appelé à dépasser les anciens modèles éculés et à lutter contre ces phénomènes de manière intégrée, grâce à l’adoption de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle et d’indicateurs de genre, entre autres. 

Le Costa Rica a atteint l’objectif « zéro déforestation nette », a indiqué la représentante avant de se vanter des 719 fermes du pays qui sont reconnues dans le programme « Pavillon bleu écologique » pour leur gestion durable des ressources naturelles.  Elle a aussi indiqué que le pays avance dans la mise en œuvre de programmes d’action nationaux dans les domaines suivants: l’atténuation des effets des changements climatiques, le café, les musacées, le bétail, la canne à sucre, la réduction des émissions et la promotion de pratiques durables qui n’affectent toutefois pas la production.

Mme TAHMINA HASANOVA (Tadjikistan) a expliqué que son pays faisait face à la dégradation de ses terres.  Face à cela, la priorité de son gouvernement est de renforcer les capacités et la protection des populations les plus vulnérables, comme les enfants, les femmes allaitantes et les élèves de l’enseignement primaire.  Un des objectifs est que toutes les personnes vulnérables du pays aient suffisamment pour se nourrir d’ici à 2024, a-t-elle notamment précisé.  Les systèmes alimentaires mondiaux doivent être mis à jour, a plaidé la représentante en misant sur la science, l’innovation et les nouvelles technologies pour sortir les États Membres de l’ornière.

Mme LINOUSE VILMENAY JOSEPH (Haïti) a expliqué que les engagements de la communauté internationale pour les PMA en matière de nutrition, de santé, de logement et d’éducation nécessitaient une assistance technique accrue à ces pays et une réforme de l’architecture financière internationale.  La Conférence de Doha, l’an dernier, a montré des avancées encourageantes, notamment en matière de commerce, a-t-elle noté.  La déléguée a d’ailleurs appelé à intégrer les petits producteurs locaux dans les chaînes de valeur agroalimentaires, « dans des conditions équitables », et dans les circuits commerciaux internationaux.

Elle a aussi demandé d’élargir leurs possibilités d’emploi productif et de travail décent, agricole ou non agricole.  Face à des défis majeurs rencontrés par son pays, notamment sécuritaires, la représentante a appelé à un engagement majeur de la part de sa société civile pour sortir de l’ornière.  Elle a enfin plaidé pour un transfert de technologies de l’information et des communications au service du développement durable vers les PMA.

M. MAITAFSIR (Nigéria) a reconnu le rôle de la biodiversité pour une agriculture résiliente ainsi que la nécessité de protéger les écosystèmes pour conserver les ressources.  Pour éliminer la pauvreté, l’Afrique ne peut faire face seule, sans partenariats avec le secteur privé, a prévenu le représentant.  Il a aussi fait valoir que le continent ne peut pas s’en sortir sans politiques ciblées pour lutter contre les inégalités économiques.  Le délégué a défendu un système commercial multilatéral universel, réglementé, ouvert, transparent, prévisible, inclusif, non discriminatoire et équitable sous l’égide de l’OMC.

M. MATETE PAUL NENA (Lesotho) a déclaré que le Gouvernement lesothan encourage les agriculteurs à utiliser des méthodes agricoles modernes et plus productives afin d’accroître leur production. La production agricole et alimentaire bénéficie de la plus grande partie du budget national pour l’exercice 2023-2024, a-t-il ajouté.  Le représentant a aussi indiqué que les propriétaires terriens qui n’ont pas les moyens d’assumer la production agricole sont fédérés au sein du « Block Farming », dans lequel le Gouvernement assume la totalité des coûts de production et donne 20% de la production aux membres.  Ce programme a fait augmenter la production au cours de la dernière campagne agricole, s’est-il félicité.

Le délégué a ensuite expliqué qu’après la pandémie de COVID-19, le Lesotho a transformé ses systèmes alimentaires et agricoles grâce à la science, à la technologie et à l’innovation en utilisant des serres pour protéger les cultures contre les conditions climatiques extrêmes.  Le représentant a conclu en insistant sur l’importance de poursuivre les investissements dans le secteur agricole.

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a dit que son gouvernement promeut l’agriculture durable et investit dans des technologies agricoles innovantes.  Le Gouvernement a aussi mis en œuvre des projets de résilience aux changements climatiques qui contribuent à l’amélioration de la sécurité alimentaire et à l’état nutritionnel de 60 communautés du « couloir sec » dans le nord-est du Guatemala.  La coopération internationale est essentielle pour relever les défis de la sécurité alimentaire.  Il faut, a précisé la représentante, davantage de partage des connaissances, des ressources et des meilleures pratiques.  Elle a également souligné l’importance du commerce équitable et durable, d’un cadre réglementaire solide et de financements durables.  Le Président du Guatemala, a-t-elle indiqué, a lancé la « Grande croisade nationale pour la nutrition » qui profite aux enfants et à leurs familles. La représentante a encouragé les partenaires internationaux à se servir du Plan stratégique pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle du Guatemala dans leurs interventions dans le pays.

M. GIRMAY (Éthiopie) a plaidé pour un plus grand soutien aux petits agriculteurs et aux femmes des zones rurales.  Pour sa part, l’Éthiopie se concentre sur l’amélioration des conditions de vie de la population, dont une bonne partie vit en zone rurale.  Le Gouvernement travaille notamment à une amélioration de l’accès aux soins de santé, à l’eau potable, aux transports et autres services.  Le représentant s’est réjoui des progrès remarquables enregistrés, puisque le taux de pauvreté est passé de 42% en 2000 à 19% en 2020.

Depuis 2005, le Gouvernement a mis en place des filets de sécurité sociale pour protéger les segments les plus vulnérables de la population et a lancé des programmes spécifiques pour les zones rurales, en mettant l’accent sur l’agriculture à grande échelle, qui a permis de parvenir à l’autosuffisance alimentaire.  La bonne mise en œuvre du Programme 2030 dépend de l’amélioration de la situation dans les zones rurales, a conclu le représentant, rappelant les engagements pris de ne laisser personne de côté.

Mme IRINA ALEXANDRA BARBA BUSTOS (Équateur) a estimé que la pauvreté va au-delà du manque de ressources monétaires, car elle englobe aussi toutes les privations dans l’exercice des droits des personnes.  L’Équateur est donc favorable aux indicateurs de pauvreté multidimensionnelle, avec des données ventilées, a dit la déléguée.  Elle a invité les institutions financières à en tenir compte pour accroître la disponibilité des ressources financières et le développement des capacités des pays en développement.

En collaboration avec la FAO, l’Équateur travaille à la transformation de ses systèmes agroalimentaires afin qu’ils soient durables, efficients, résilients et inclusifs, à faible impact environnemental et couplés à des mesures d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques.  Grâce à ses politiques publiques, l’Équateur a réussi à faire reculer la malnutrition chronique infantile de 3,5%, s’est félicitée la représentante, soulignant le rôle important de l’agriculture familiale pour garantir la sécurité alimentaire.

Pour M. ROYSTON ALKINS (Guyana), la pauvreté gêne la mise en œuvre de tous les ODD, et la pandémie n’est pas seule en cause.  Le prix des produits agricoles demeure très élevé, compte tenu des changements climatiques et des conflits géopolitiques.  Le Guyana, a-t-il indiqué, se concentre sur la sécurité alimentaire, sur l’offre d’un régime sain et sur la protection de ses zones forestières, agricoles et côtières. 

Mme ALMEZYAD (Koweït) a témoigné des efforts de son pays pour lutter contre la pauvreté, notamment chez les personnes âgées, les gens dans le besoin et les personnes handicapées.  Des aides et des prestations sociales leur sont versées tous les mois, et au niveau international, le Koweït a tendu la main aux PMA par des canaux formels et informels.  La déléguée a mis en avant la profondeur historique de l’engagement du Koweït dans l’action humanitaire et a encouragé la coopération internationale.

Mme MARY BETH LEONARD (États-Unisa dit que depuis le 1er janvier 2021, le Gouvernement américain finance de nombreux programmes du PAM qui ont permis de nourrir des populations dans 120 pays et territoires.  Le monde comptera 10 milliards de personnes d’ici à 2050, a rappelé la représentante, en soulignant qu’il faudra en conséquence augmenter de 50% la nourriture disponible.  Les États-Unis travaillent ainsi à la mise en place de systèmes agricoles beaucoup plus résilients, capables de résister aux effets des changements climatiques, a indiqué la représentante.  Elle a ajouté que son gouvernement a lancé, avec la FAO, des programmes visant à accroître les récoltes, notamment en Afrique.

Elle a ensuite indiqué que les États-Unis et les Émirats arabes unis ont lancé une initiative qui a pour but d’accélérer l’innovation agricole grâce à des investissements plus importants dans la recherche et le développement.  Pour la représentante, c’est notamment par des meilleures solutions scientifiques que le monde pourra s’adapter aux changements climatiques à court terme.  Elle a insisté sur le fait que l’invasion à très grande échelle de l’Ukraine par la Russie menace la production de céréales de l’Ukraine, demandant à la Russie de revenir à l’Initiative de la mer Noire.  « On ne peut pas parvenir à la sécurité alimentaire sans que la Russie arrête sa guerre de choix contre l’Ukraine », a-t-elle conclu. 

M. EMERY GABI (Congo) a estimé qu’une action urgente est nécessaire pour inverser la tendance à l’augmentation de la pauvreté et de la faim et pour accélérer les progrès, en particulier dans les zones rurales. L’approche qu’il a recommandée est la connectivité progressive entre les zones urbaines, périurbaines et rurales au moyen d’investissements dans les infrastructures, les biens publics et le renforcement des capacités.

Pour sa part, la République du Congo a mis en place des plans nationaux de développement afin de faciliter la réalisation des ODD en restructurant, industrialisant et diversifiant son économie.  L’accent mis sur une croissance économique plus inclusive et diversifiée vise à atténuer la pauvreté et les inégalités en milieu rural, a-t-il expliqué.

M. ALAN EBUN GEORGE (Sierra Leonea relevé que la hausse des inégalités et le fardeau de la pauvreté poussent des milliers de jeunes à traverser la Méditerranée à gagner l’Europe en quête d’un avenir meilleur. Cette migration aboutit à une fuite des cerveaux et fait baisser la production agricole dans les pays d’origine, ce qui nuit à l’économie des pays en développement, a fait remarquer le représentant.  Pour éliminer la pauvreté, il a estimé que les prêts et les dons des organisations internationales, ainsi que les investissements publics et privés, doivent aller vers la création d’emplois décents, en plaçant les femmes au centre des projets, ainsi que vers l’économie verte, l’agriculture, la protection sociale et la numérisation, afin de stimuler la croissance des pays en développement.

Misant sur le développement du capital humain, la Sierra Leone a décidé de consacrer 21% de son budget national à l’éducation, a ensuite indiqué le délégué.  Mais la première de ses priorités est de stimuler la production agricole, afin de garantir la sécurité alimentaire à la population.

M. ALSINDI (Bahreïn) a expliqué que la superficie arable limitée de son pays nécessite un développement rapide des nouvelles technologies agricoles. Face aux famines et à la faim, son pays a déployé des efforts pour garantir le développement agricole, dans le cadre de sa stratégie nationale de sécurité alimentaire, en coopération avec la FAO.  Cette stratégie mise sur l’innovation pour augmenter la production agricole au niveau local.  Plusieurs projets ont été entrepris pour développer les nouvelles technologies agricoles à Bahreïn, y compris en milieu aquatique, dans le domaine halieutique.  Plus de 900 agriculteurs ont été formés dans l’augmentation de la production agricole, a ajouté le délégué.  Dans le domaine des ressources halieutiques, Bahreïn compte parvenir à la création de 20 millions d’alevins d’ici à 2025.

M. LUIZ FELIPE ROSA DOS SANTOS (Brésila reconnu que le chemin vers un avenir durable passe par l’élimination de la pauvreté. Il a regretté un recul en la matière depuis 2015.  Le fossé financier fait que les pays en développement sont incapables de se relever de la pandémie, d’autant que des mesures protectionnistes prises par des pays développés -sous prétexte de préservation de l’environnement– sont à déplorer.  Il a réclamé des discussions immédiates dans le domaine du commerce international.

Sur le plan national, un programme de transfert monétaire en espèces a été lancé par le Gouvernement brésilien pour garantir un revenu de base, ce qui a permis à 3,4 millions de personnes de se tirer de la pauvreté extrême, a-t-il fait valoir. En juillet, le Brésil a relancé son programme d’achat alimentaire bénéficiant aux petits exploitants. L’engagement du Gouvernement à faire cesser la faim passe aussi par le niveau régional via le renforcement de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire ainsi que par la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) pour mettre en œuvre un grand plan d’alimentation scolaire.  Enfin, le Brésil profitera de son prochain statut de président du G20 pour créer une agence mondiale contre la faim et la pauvreté, a annoncé le représentant.

M. MANDLAPER (Afrique du Suda lancé un appel pour résoudre les problèmes fondamentaux de développement et les inégalités qui pèsent de manière disproportionnée sur les pays en développement.  Le représentant a souligné l’importance des investissements, du transfert de technologies et du renforcement des capacités pour la mise en œuvre des ODD.  Il a réitéré la nécessité d’un appui financier prévisible et pérenne, y compris par le respect de tous les engagements pris en matière d’aide publique au développement (APD), par des politiques commerciales favorables, ainsi que par le transfert de compétences et de technologies aux pays en développement. Il faut en outre prendre des mesures urgentes et efficaces à l’ONU pour lutter contre les flux financiers illicites et pour mieux réglementer la fiscalité, a demandé le représentant souhaitant que les pays en développement puissent mobiliser au niveau national les ressources nécessaires pour réaliser les ODD.  Le délégué a condamné les mesures protectionnistes unilatérales prises par certains pays qui entravent les efforts de réduction de la pauvreté.

M. ANDRÉS NAPURÍ PITA (Pérou) a souligné les disparités entre les milieux rural et urbain s’agissant des emplois informels, ces derniers étant plus fréquents dans le secteur agricole qui domine largement le marché du travail en milieu rural.  Rappelant que des milliards de personnes travaillent dans le secteur agroalimentaire, il a appelé à un système plus durable, plus inclusif et plus équitable. Les petits exploitants agricoles rendent un service à l’humanité, a-t-il affirmé, soulignant le rôle essentiel de l’agriculture pour la conservation des ressources, la nutrition et l’économie. La pomme de terre étant un des aliments les plus consommés, il a encouragé une culture durable et la protection des variétés en voie de disparition.  Dans cet objectif, il est revenu sur la proposition de son pays de proclamer le 30 mai, journée mondiale de la pomme de terre afin de sensibiliser le monde à l’importance de ce tubercule pour la biodiversité et la chaîne alimentaire.

M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh) a regretté que 2,4 milliards de personnes, principalement des femmes et des enfants, aient encore été confrontées à l’insécurité alimentaire en 2022, rappelant que l’objectif « Faim zéro » est un ODD important pour atteindre les autres ODD, tels que l’élimination de la pauvreté et l’égalité des sexes.  Il a indiqué que son pays a transformé son agriculture, par une gestion prudente des terres arables.  Mais, a-t-il avoué, il nous faut des financements et un accès élargi aux engrais. Le Bangladesh est d’ailleurs prêt à partager ses bonnes pratiques d’agriculture durable.  Les crises externes, a poursuivi le représentant, ne sont pas sans répercussion sur le système agroalimentaire et les pays en développement, les PMA et les PEID étant souvent touchés de manière disproportionnée. Il est donc important de promouvoir de toute urgence des banques alimentaires régionales, de lever les restrictions aux exportations et de corriger les distorsions dans les chaînes d’approvisionnement.  Appelant à la coordination des efforts financiers et agricoles, au niveau international, il a souhaité que la communauté internationale revoie la manière dont les produits agricoles sont fabriqués, consommés et gaspillés.

Mme HAFIZA HUMAIRA JAVAID (Pakistan) a expliqué que son pays a connu de graves inondations l’année dernière, qui ont recouvert un tiers du pays et plongé des millions de personnes dans la pauvreté.  Selon la représentante, la lutte contre la pauvreté et la faim impose un commerce équitable, une réforme de l’architecture financière internationale et des politiques viables de commerce agricole.  Les pays en développement doivent pouvoir se relever après les crises et faire face aux changements climatiques.  Quant aux pays développés, ils doivent respecter leurs engagements financiers.

Mme İLKNUR DEMİR (Türkiye) a relevé que tous les pays du monde sont préoccupés par la sécurité alimentaire, ce qui est « tout simplement inacceptable ».  Aujourd’hui plus que jamais, la solidarité internationale est indispensable pour construire des systèmes alimentaires plus résilients.  En Türkiye, les séismes du mois de février dernier ont gravement touché 11 provinces, ce qui a eu de graves conséquences pour la production agricole, l’industrie alimentaire et les moyens de subsistance des agriculteurs. Forte de cette expérience, la représentante a tenu à souligner la nécessité d’intégrer la réduction des risques de catastrophe dans les politiques sur l’agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition.  La science, les technologies et l’innovation ont un rôle à jouer pour renforcer les capacités des pays vulnérables, a fait observer la représentante, en invitant les PMA à recourir à la Banque de technologies des Nations Unies pour la transformation de leur système alimentaire.

M. MUHAMMAD ZULASRI BIN ROSDI (Malaisie) a affirmé que pour la seule année en cours, le Gouvernement malaisien a dépensé plus de 215 millions de dollars pour accélérer les programmes d’élimination de la pauvreté, ce qui a permis d’augmenter les revenus de plus de 50 000 ménages extrêmement pauvres qui ont pu bénéficier d’une formation appropriée dans l’agriculture, le marketing et la numérisation, ainsi que d’un capital de départ.  La Malaisie a remodelé son économie et élevé le niveau de vie de la population, en passant d’une économie à faible revenu à une économie à revenu intermédiaire supérieure en une seule génération.  La Malaisie poursuit également ses efforts pour résoudre les problèmes de sécurité alimentaire via son plan d’action agroalimentaire.  Les politiques nationales, conformes aux quatre piliers définis par la FAO, à savoir la disponibilité, l’accès, l’utilisation et la stabilité, portent leurs fruits.

Le délégué s’est toutefois dit conscient de la nécessité d’assurer l’autosuffisance pour les denrées alimentaires de base, étant donné que les prix deviennent plus volatiles en raison de l’impact des changements climatiques, de la COVID-19 et de l’augmentation du coût des engrais.  Dans le cadre d’un effort collectif régional, les nations de l’ASEAN viennent d’ailleurs d’accepter de s’entraider pour surmonter les pénuries de riz et d’autres problèmes alimentaires.

Mme RENATA CHIVUNDU (Malawi) a soutenu que l’agriculture se situait au cœur de l’économie du Malawi, représentant environ un quart du PIB.  Le secteur contribue de manière significative à l’emploi, à la croissance économique, aux recettes d’exportation, à la réduction de la pauvreté, à la sécurité alimentaire et à la nutrition. Toutefois, à l’heure actuelle, l’agriculture malawienne n’est pas encore entièrement mécanisée.  De nombreux agriculteurs utilisent des méthodes traditionnelles, dépendant de la pluie pour leurs cultures.  Des mesures d’investissement ont donc été mises en place pour développer l’irrigation.  Les produits horticoles, tels que les légumes, les fleurs, les fruits et le riz, peuvent désormais être cultivés à l’aide de systèmes d’irrigation par gravité, par pompage, par dérivation de rivière ou par aspersion.

Actuellement, a poursuivi la déléguée, le Gouvernement s’efforce de lutter contre la pauvreté et la faim en mettant en place des politiques volontaristes. Depuis trois ans, le Malawi met en œuvre un programme d’intrants abordables -notamment des engrais et des semences- dans le cadre d’une stratégie de lutte globale contre l’insécurité alimentaire, la pauvreté, les inégalités et les vulnérabilités.  Par l’intermédiaire du Ministère de l’agriculture, le pays essaye de relever les défis de la pauvreté et de la faim grâce à des « mégafermes », financées en partie par le secteur privé. Cette année, le Malawi en a lancé deux: la « Katunga-Maseya Mega Farm », dans le district de Chikwawa, et la « Linga Mega Farm », dans la baie de Nkhata.  Ces deux initiatives contribueront à créer des richesses, s’est réjouie la déléguée.

M. SAŠA MART (Serbie) a dit que la mise en place de systèmes alimentaires durables est l’une des priorités du Gouvernement serbe.  Le cadre mis en place pour le développement du système agricole et alimentaire vise une plus grande compétitivité agricole, la gestion durable des ressources, la protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité de vie dans les zones rurales avec une réduction de la pauvreté.  En Serbie, les secteurs de l’agriculture et de l’industrie alimentaire représentent 15% du secteur de l’emploi et 7% de la valeur ajoutée totale, a indiqué le délégué qui a aussi signalé que la moitié des entreprises du secteur agricole peuvent être qualifiées d’innovantes. Le Gouvernement continuera d’augmenter les fonds alloués à la recherche et au développement dans le domaine de l’agriculture, afin de rapprocher la Serbie du niveau des pays de l’Union européenne, a-t-il assuré.

L’exécutif, a poursuivi le représentant, encourage l’association des petits producteurs agricoles ainsi que le développement de circuits courts d’approvisionnement alimentaire et de marchés alimentaires locaux afin de renforcer la résilience et la durabilité agricoles.  Des systèmes d’irrigation, des systèmes de protection contre la grêle, des entrepôts et des centres de collecte avec des équipements de réfrigération pour emmagasiner fruits et légumes sont en cours de construction, a-t-il encore cité parmi les mesures prises.  Il a conclu en rappelant que la résilience climatique nécessite des financements pour l’adaptation au climat.

M. DWI WISNU BUDI PRABOWO (Indonésie) a regretté les prévisions selon lesquelles près de 10% de la population mondiale aura encore faim en 2030.  Il faut casser le cycle de la pauvreté en faisant de l’élimination de la faim une priorité, a-t-il exhorté.  Le représentant a indiqué que l’agriculture est la colonne vertébrale de nombreux pays, surtout dans les pays en développement. Il a donc appelé à aider ces pays en œuvrant pour une agriculture résiliente, qui tienne compte de leurs spécificités.  Cette transformation exige, néanmoins, des actions concertées aux niveaux national, régional et international, a-t-il mis en garde, prônant des politiques d’appui pour les petits agriculteurs.  Le délégué a ensuite signalé que l’Indonésie aide actuellement ses gouvernements locaux à réagir à la croissance démographique car celle-ci augmente la dépendance aux produits agricoles.  Enfin, il a fait observer que la lutte contre la pauvreté est essentielle pour relever le défi d’une transformation durable.

M. BAKHSH (Arabie saouditea plaidé en faveur de la coopération internationale pour parvenir à l’élimination de la pauvreté, faisant remarquer qu’il s’agit d’un objectif commun.  Pour sa part, l’Arabie saoudite s’efforce de donner l’accès à l’eau propre à tous et de réduire les impacts des crises géopolitiques sur la sécurité alimentaire, a indiqué le représentant.  Il a ajouté que son pays avait fait d’énormes contributions, environ 3 millions de dollars, pour l’assistance à la sécurité alimentaire dans le monde.  L’Arabie saoudite a aussi essayé d’unir les efforts de différents fonds au niveau régional, a fait valoir le représentant, constatant toutefois que, malgré les progrès réalisés à différents niveaux, parvenir aux ODD no 1 et no 2 reste difficile.  Les Nations Unies et ses différentes agences jouent un rôle important pour éliminer la pauvreté et parvenir à la sécurité alimentaire et au développement durable, a-t-il conclu.

M. MUNGANDI (Zambie) a expliqué l’arrêt des progrès en matière de lutte contre la pauvreté par les conséquences de l’inflation, des chocs climatiques et de la pandémie de COVID-19.  Une tendance qui touche particulièrement les zones rurales d’Afrique subsaharienne, a relevé le délégué, qui a appelé à placer ces populations au centre des politiques de développement.  La Zambie est aux prises avec la pauvreté, qui est élevée, avec un taux de plus de 60% en 2022, a-t-il signalé.  En outre, les enquêtes menées par le Gouvernement montrent que la pauvreté augmente plus en milieu urbain qu’en milieu rural.

Le représentant a détaillé les principales priorités du plan quinquennal national en cours, qui passent par l’amélioration de la protection sociale via des transferts en espèces et par des programmes alimentaires, notamment en milieu scolaire. Un programme d’appui pour parvenir à une transformation agricole totale est aussi en place, avec des programmes de mécanisation et d’augmentation de la production, a-t-il encore indiqué.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a présenté l’agriculture comme étant l’épine dorsale de son pays.  Dans les zones rurales, l’agriculture est le secteur qui fournit le plus d’emplois, a-t-il poursuivi.  Des chocs touchant un seul système altèrent d’autres secteurs, a-t-il ensuite déclaré, attirant l’attention sur la tentative de coup militaire au Myanmar et les terres brûlées qui ont considérablement mis en danger la sécurité alimentaire.  Le pays fait face à des actes de terreur de la part de la junte militaire, a-t-il expliqué, tels que des frappes aériennes contre les infrastructures civiles et des logements civils incendiés, entre autres.

Le représentant a aussi signalé que la junte militaire met en place des législations arbitraires qui rendent la vie des populations difficile, soulignant que près de 30% des foyers sont touchés par une insécurité alimentaire modérée ou grave et qu’un million d’enfants n’ont pas reçu les vaccinations de base.  Les organisations de résistance et d’autres partenaires s’efforcent de fournir une assistance alimentaire et sanitaire mais nous avons besoin du soutien de la communauté internationale, a prévenu le délégué en appelant les États à fournir un appui robuste et efficace pour restaurer la démocratie dans son pays.  « Ne laissez pas le Myanmar seul dans ce monde qui tente de mettre un terme à la pauvreté », a-t-il exhorté en conclusion.

Mme LISANDRA MARINA GUTIÉRREZ TÓRREZ (Nicaragua) a appelé à un nouvel ordre mondial multipolaire et à des politiques monétaires justes pour éviter une crise prolongée de la dette publique dans les pays en développement.  Les systèmes financiers internationaux doivent permettre un accès équitable et inclusif aux financements, et les pays développés doivent honorer leurs engagements en la matière, a-t-elle pointé.  Elle a dénoncé les politiques financières actuelles, qui découlent d’un système capitaliste inique, ainsi que les mesures coercitives unilatérales néfastes, qui grèvent le développement du Nicaragua.

La déléguée a en revanche loué l’initiative mondiale de développement lancée par la Chine et son réseau de coopération, initiative dotée d’une vision équitable et équilibrée.  Elle a aussi fait valoir que le Gouvernement du Nicaragua a lancé un plan antipauvreté permettant de tracer un chemin vers la croissance économique pour le pays. Il se base sur un modèle de développement social, économique et culturel, a-t-elle précisé en mentionnant au passage l’existence de la Commission nationale d’économie créative. Ce modèle de développement permet aux familles nicaraguayennes d’entreprendre et de prospérer, a assuré la représentante.

M. HUSSEIN ATHMAN KATTANGA (République-Unie de Tanzanie) a fait remarquer que l’économie tanzanienne ne fonctionne pas de manière isolée et qu’elle subit donc tous les chocs mondiaux récents.  Le secteur agricole du pays contribue à hauteur de 26% au PIB et emploie plus de 75% de la population, a-t-il chiffré avant de signaler que la Présidente veut faire de la République-Unie de Tanzanie un centre de l’approvisionnement alimentaire du continent africain.  À cet effet, elle a pris des mesures politiques en matière de propriété foncière et a augmenté le budget de l’agriculture de 29% entre 2020 et 2024, a indiqué le représentant qui a aussi parlé des subventions décidées pour les engrais et les semences.  La Présidente tanzanienne fait tout pour attirer les jeunes dans ce secteur, s’est-il réjoui.

Poursuivant, il a indiqué que la Présidente compte améliorer les infrastructures routières pour relier les régions, les districts et les villages ainsi que pour améliorer la circulation des denrées alimentaires.  Certaines de ces mesures ont déjà été prises faisant en sorte que le taux d’inflation du pays est le plus faible de la région (environ 3,8%), s’est vanté le délégué.  Il a ensuite indiqué que la République-Unie de Tanzanie avait accueilli en septembre le forum des systèmes alimentaires pour l’Afrique, qui a permis d’avoir une plateforme pour une action coordonnée à grande échelle.

M. MOHAMED-ESSEGHIR LATROUS (Algérie) a demandé une réponse rapide face à la crise alimentaire mondiale.  D’abord, il faut coordonner les efforts pour venir en aide aux populations les plus touchées par la famine, a-t-il recommandé en demandant de veiller à ce qu’il y ait suffisamment d’aliments disponibles.  Le représentant a souligné l’importance de la mise en œuvre des recommandations du Sommet sur les systèmes alimentaires, notamment en Afrique.  Il a encouragé à faire fond sur les opportunités créées par la Zone de libre-échange continentale africaine.

Le délégué a exigé le retrait des barrières qui entravent les investissements dans ce domaine et appelé à tirer parti des investissements privés et publics.  Les chaînes d’approvisionnement doivent rester ouvertes y compris pour les matières premières, a-t-il souhaité.  Le représentant a aussi dissuadé les interdictions à l’importation de certaines matières premières, avant de demander de respecter les règles de l’OMC.  Le Gouvernement algérien encourage en outre l’innovation scientifique et l’utilisation des nouvelles technologies pour appuyer le secteur agricole, a fait savoir le représentant.

M. MAURA (Mozambique) a estimé que des mesures ambitieuses sont nécessaires pour éliminer la malnutrition et la pauvreté d’ici à 2030. Soulignant que les besoins primaires relèvent des droits humains, il a affirmé que le développement agricole est un pilier de la politique de développement de son pays.  Il a attiré l’attention sur deux initiatives, l’une visant la réduction de la malnutrition et l’autre, une gestion intégrée de l’agriculture et des ressources naturelles afin d’améliorer les chaînes de valeur de la production.  Mon gouvernement a cinq priorités, a-t-il poursuivi, à savoir la sécurité alimentaire, les revenus des familles, l’emploi, l’intégration sociale et la production et la productivité.  Pour accélérer l’intégration socioéconomique, il est nécessaire de jeter les bases d’une agriculture durable, a-t-il estimé, soulignant que son pays a enregistré des progrès significatifs s’agissant de la diminution du nombre de personnes en insécurité alimentaire.  Enfin, il a exhorté les partenaires bilatéraux et multilatéraux à honorer leurs engagements.

M. ABDULRAHMAN HASAN YAHYA AL-BARATI (Yémen) a rappelé que la pauvreté multidimensionnelle est bien trop élevée, notamment dans les PMA.  Quelque 80% de la population yéménite vit dans la pauvreté. De plus, 24 millions d’habitants ont besoin d’aide humanitaire et 20 millions risquent la famine, a-t-il déploré.  Il a également fait état des taux élevés de malnutrition et du manque de soins médicaux, notamment pour les enfants en bas âge et les femmes enceintes.  Le Gouvernement résiste à la guerre mais l’économie décline, a-t-il mis en garde.  Nous devons œuvrer de concert pour prévenir, via des mesures efficaces, les crises d’acheminement et d’approvisionnement des denrées alimentaires liées aux conflits ou aux changements climatiques, a-t-il exhorté, appelant la communauté internationale à financer intégralement le Plan de réponse humanitaire pour le Yémen.  Il a ensuite jugé que la FAO, aux côtés des gouvernements, peut aider considérablement les petits exploitants agricoles, limiter la dépendance à l’aide humanitaire et faciliter la coexistence pacifique.  Enfin, reconnaissant la nécessité de la participation des femmes à la production agricole, il a appelé à la levée des restrictions imposées aux femmes dans les régions contrôlées par les milices houthistes.

M. KANISSON COULIBALY (Mali) s’est inquiété des défis auxquels son pays est confronté et qui sapent ses efforts de réalisation des ODD.  Il a cité l’insécurité liée au terrorisme, les conséquences des changements climatiques, l’insécurité alimentaire et la crise sanitaire.  À ces crises s’ajoutent les sanctions économiques et financières injustes, totalement illégales et clairement inhumaines que la CEDEAO et l’UEMOA ont imposées en janvier 2022.  En application des dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le Gouvernement s’attelle à fournir des dividendes de la paix aux populations à travers l’élaboration et la mise en œuvre, depuis décembre 2015, du Cadre stratégique pour la relance économique et le développement durable (CREED), qui vise à promouvoir le développement inclusif et durable en vue de la réduction de la pauvreté et des inégalités dans un Mali « uni et apaisé ».

M. MOUSSA MAMAN SANI(Niger) a fait observer que le secteur agricole occupe près de 80% de la population active de son pays et représente en moyenne 40% du PIB.  Pour capitaliser sur ses atouts, le Niger a mis en place l’Initiative 3N (les Nigériens Nourrissent les Nigériens), une stratégie nationale de sécurité alimentaire et de développement agricole durable.  Cette politique de modernisation et de transformation du monde rural vise en particulier à améliorer la productivité et à faire émerger une économie rurale basée sur le développement des petites et moyennes entreprises agricoles, surtout pour les femmes et les jeunes.  Le représentant a condamné les « organisations communautaires » qui deviennent des « instruments de menace existentielle et du gangstérisme économique », à travers « des sanctions inhumaines, illégales et illégitimes d’une rare cruauté » qu’elles imposent au peuple nigérien.

Mme TANIA SERAFIM YVONNE ROMUALDO (Cabo Verdea salué la réduction substantielle de l’extrême pauvreté dans son pays, de 23,7% en 2015 à 13,1% en 2020.  Ces progrès, dus à la croissance économique, soulignent la volonté du pays d’obtenir des résultats positifs en matière de développement.  Toutefois, le pays demeure aux prises avec les effets combinés de la pandémie de COVID-19 et des changements climatiques.  Les indicateurs socioéconomiques révèlent une baisse de 14,8% de la croissance économique en 2020, une diminution de 9% de l’emploi et des pertes de revenus généralisées parmi les ménages.  Ces problèmes, associés à la baisse des recettes et à la réduction des investissements dans la protection sociale, contribuent à l’augmentation du ratio dette/PIB, limitant la marge de manœuvre budgétaire du Gouvernement caboverdien.

D’autre part, a souligné la déléguée, les inégalités entre les sexes persistent, la pauvreté touchant de manière disproportionnée les ménages dirigés par des femmes, et les effets des changements climatiques sont déjà évidents, comme en attestent par exemple les pénuries d’eau.  Investir dans des solutions basées sur la nature et dans l’énergie verte est un impératif pour en atténuer l’impact, a relevé l’oratrice. Tirant parti de sa position d’État du centre du littoral atlantique et de chef de file de la coopération Sud-Sud, Cabo Verde recherche des solutions résilientes, par le biais de l’intégration régionale et du commerce, en particulier entre les PEID.  La collaboration avec les partenaires nationaux et le soutien continu des agences de l’ONU sont essentiels pour naviguer dans les eaux complexes du développement, a souligné la représentante.

M. DMITRY S. ARISTOV (Fédération de Russie) a estimé que l’analyse présentée dans les rapports de ce matin ne donne pas un tableau objectif de la sécurité alimentaire dans le monde.  Le problème ne peut pas se concentrer uniquement sur les événements en Ukraine, a plaidé le représentant.  Il a rappelé que les États Membres et les programmes des Nations Unies basés à Rome jouent un rôle dans ce domaine.  Il a aussi souligné que la Russie prend en compte les intérêts et les besoins des partenaires des pays en développement en versant plus de 120 millions de dollars à la FAO.  Le représentant a cru avoir repéré des « thèses dangereuses », présentées par le Secrétariat, s’agissant de ce qu’il appelle « la crise du coût de la vie ».  Le délégué a rejeté toute accusation à l’égard de son pays à ce sujet.  La Fédération de Russie est un des grands producteurs d’engrais et de céréales dans le monde, a-t-il dit, en assurant qu’il n’y a pas de déficit ou d’insuffisance de production agricole dans le monde.

La raison de la crise, a argumenté le délégué, est que les chaînes de production et de distribution ont été cassées.  Il a aussi dénoncé les mesures illégales qui ont été prises par les pays occidentaux, y compris l’imposition de la transition énergétique et le protectionnisme commercial.  Le représentant a proposé de s’attaquer aux sanctions imposées par les pays occidentaux sur les populations des pays qui en souffrent.  Il a dit être « déçu » du fait que le Secrétaire général de l’ONU ne reconnaisse pas ce problème comme étant un des principaux facteurs de la régression dans le développement social et économique.  Le représentant a mis sur le dos des spéculateurs les problèmes de la sécurité alimentaire mondiale.  Entre 2021 et 2022, les entreprises ont gagné 14 milliards de dollars grâce à la spéculation, mais qui profite de cet argent? a demandé le délégué.

Mme DEBATABA (Togo) a expliqué que sans son pays, l’agriculture concerne 65% de sa population active, et occupe 60% de la superficie globale du pays.  Le Gouvernement a consenti à des efforts notables pour améliorer l’accès aux financements pour développer ce secteur, via la mécanisation, l’utilisation d’engrais, le développement des chaînes de valeur agricoles et l’auto-entrepreneuriat. Un mécanisme incitatif de financement agricole a été lancé en 2018 pour faciliter l’accès des agriculteurs au crédit. Toutefois, l’agriculture demeure soutenue par le secteur bancaire et, à cet égard, le Gouvernement togolais aimerait réduire les taux d’intérêts, dans le but de doper la production.  En outre, pour accompagner les agriculteurs les plus vulnérables, environ 2 milliards de francs CFA ont été débloqués pour l’acquisition d’engrais.  Le taux de couverture alimentaire a été amélioré et la faim réduite, entre autres, grâce à des projets de cantine scolaire.  Malgré ces avancées, toutes les cibles de l’ODD no 2 ne sont pas atteintes, a avoué la déléguée.  Sur le plan interne, il faudrait surmonter certaines difficultés internes, comme la faiblesse des financements et un contexte sécuritaire marqué par les attaques terroristes au nord du pays.  Sur le plan international, elle a cité comme obstacles la COVID, l’inflation, la crise énergétique et la dette extérieure.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: le Président de l’Assemblée générale appelle à tirer parti des droits humains pour atteindre les objectifs de développement durable

Soixante-dix-huitième session,
17e séance plénière – matin
AG/SHC/4381

Troisième Commission: le Président de l’Assemblée générale appelle à tirer parti des droits humains pour atteindre les objectifs de développement durable

Venu souligner l’importance du travail de la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, en ces « temps difficiles », le Président de l’Assemblée générale a appelé, ce matin, à tirer parti des droits humains pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) y voyant « les deux faces d’une même médaille ». 

M. Dennis Francis s’est notamment alarmé de la situation « très préoccupante » de la question du genre, notant que les pratiques néfastes et la discrimination fondée sur le sexe ont doublé et que 54% des pays n’ont toujours pas de lois dans tous les domaines clefs de l’égalité des sexes.  Cet écart en matière de pouvoir et de leadership est visible à tous les niveaux, y compris à l’Assemblée générale, a déploré le dignitaire qui a fait part de son intention de rétablir le Conseil consultatif pour l’égalité des genres de la présidence de l’Assemblée générale. 

Les délégations ont ensuite dialogué avec trois titulaires de mandat, dont la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille qui a regretté la faiblesse de la réponse des États Membres aux recommandations qu’elle a formulées durant ses six années d’exercice.  Elle s’est notamment inquiétée de la prévalence de la discrimination, relevant que dans le monde, une centaine de lois en place discriminent activement les malades, qui n’ont accès ni à la justice, ni à aucune fonction publique, et sont discriminés jusque dans les services publics. 

Elle s’est également inquiétée de l’absence de technologie médicale pour assurer la guérison des malades, ainsi que du manque de données sur la lèpre.  En outre, bien des gouvernements n’ont pas conscience des enjeux, voire de l’existence même de cette maladie dont « tout le monde a tendance à penser qu’elle n’existe plus », a déploré la Rapporteuse spéciale qui a appelé à inscrire la lèpre dans le Programme 2030.

Au préalable, la Présidente du Comité des droits économiques, sociaux et culturels a alerté que le manque de ressources entrave l’examen des rapports des États parties dans le temps imparti, précisant que 32 rapports sont actuellement en souffrance, en partie en raison du report intervenu pendant la pandémie de COVID-19.  Se disant très préoccupée par la situation, elle a ajouté que le Comité restait confronté à des absences de présentation ou à des présentations tardives de rapports, certains ayant plus de 10 ans de retard, regrettant en outre que certains États n’aient toujours pas présenté leurs rapports initiaux, depuis 25 ans pour certains. 

Lui faisant écho, la Présidente du Comité des droits de l’homme a indiqué que le nombre de dossiers en souffrance était passé de 1 178 à la fin de 2019 à 1 200 à la fin de 2022, et que les ressources humaines mises à disposition n’avaient pas suivi le rythme de cette charge de travail croissante.  La situation actuelle nuit à la crédibilité du Comité et une fatigue professionnelle gagne le personnel qui est « de plus en plus malade », a-t-elle alerté.  « Le Comité a atteint ses limites, et il faut en tenir compte lors de l’évaluation budgétaire », a plaidé la Présidente qui a dit attendre un plus grand engagement de la part des États parties pour garantir le financement adéquat du système des organes conventionnels sur la base du budget ordinaire de l’ONU. 

Avant de lever la séance, la Troisième Commission a achevé sa discussion générale sur les droits des peuples autochtones.  À cette occasion, le Venezuela, qui s’est enorgueilli d’abriter 44 peuples autochtones parlant plus de 36 langues, toutes officiellement reconnues, a appelé les États Membres à s’unir pour défendre les peuples autochtones historiquement exclus.  La colonisation a laissé un héritage de douleur qui doit être racheté par une conscience historique et planétaire, honorant les peuples autochtones pour leur résistance courageuse et déterminée, a-t-il martelé, estimant que les demandes de réparation devraient être entendues par des puissances coloniales qui « tentent d’oublier et d’échapper à leurs dettes sous couvert d’anachronisme ». 

La Troisième Commission poursuivra son examen de la promotion et de la protection des droits humains demain, jeudi 12 octobre, à partir de 10 heures.

ALLOCUTION DU PRÉSIDENT DE LA SOIXANTE-DIX-HUITIÈME SESSION DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

M. DENNIS FRANCIS, Président de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale, a souligné l’importance du travail de la Troisième Commission en ces « temps difficiles », marqués par les inégalités croissantes, les catastrophes dévastatrices et les tragédies de la guerre.  Ces questions, a-t-il souligné, sont intrinsèquement liées aux principes fondamentaux des droits humains, qui sont au cœur même de l’Organisation des Nations Unies et de tout ce qu’elle représente.  M. Francis a saisi l’occasion de cette allocution pour rappeler la célébration, cette année, du soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du trentième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne, annonçant qu’il remettra, le 15 décembre, le Prix des Nations Unies pour la cause des droits de l’homme. Décerné à des individus et des organisations en reconnaissance de leurs accomplissements exceptionnels, ce prix honorifique représente, à ses yeux, un message important adressé aux défenseurs des droits humains du monde entier, qui doivent pouvoir mener leur travail sans crainte, représailles ou intimidation. 

Après avoir réaffirmé « notre engagement personnel et institutionnel » envers les principes de la Déclaration universelle adoptée voilà 75 ans, le Président de l’Assemblée générale a rappelé que, le mois dernier, les chefs d’État et de gouvernement ont renouvelé leur engagement à atteindre les objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.  Dans ce cadre, il a appelé à tirer parti des droits humains pour atteindre les ODD car, a-t-il dit, ils représentent « les deux faces d’une même médaille ».

Alertant sur la situation « très préoccupante » de la question du genre, M. Francis a relevé qu’aucun des indicateurs de l’ODD no 5 sur l’égalité des sexes n’est près d’être atteint.  Les pratiques néfastes et la discrimination fondée sur le sexe ont doublé et 54% des pays n’ont toujours pas de lois dans tous les domaines clefs de l’égalité des sexes, a-t-il déploré.  Cet écart en matière de pouvoir et de leadership est visible à tous les niveaux, y compris à l’Assemblée générale, a constaté M. Francis.  Se présentant comme un « champion du genre », il a dit avoir convoqué la deuxième réunion annuelle de la Plateforme des dirigeantes à l’Assemblée générale pour souligner l’importance et le rôle du leadership des femmes dans la réalisation des ODD.  Il a ajouté que son Envoyé spécial fera également office de Conseiller spécial sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, et qu’il rétablira et convoquera prochainement le Conseil consultatif pour l’égalité des genres de la présidence de l’Assemblée générale.

Sur le plan humanitaire, M. Francis s’est alarmé du nombre record de personnes, estimé à quelque 350 millions, touchées par les multiples crises qui secouent le monde, accentuées par le récent tremblement de terre dévastateur en Afghanistan et la détérioration de la situation au Moyen-Orient.  Ces crises soulignent l’ampleur et la complexité des défis auxquels le système humanitaire mondial doit faire face au quotidien, a-t-il observé, attirant l’attention sur les entraves posées aux opérations humanitaires en raison des contraintes de ressources. 

À cet égard, le Président de l’Assemblée générale a rappelé qu’il manque encore 70% des fonds requis dans le cadre de l’appel humanitaire mondial pour répondre à ces besoins urgents.  De plus, les travailleurs humanitaires sont menacés par des attaques lancées contre eux et contre les infrastructures civiles, en violation du droit international humanitaire, a-t-il dénoncé, implorant les États Membres à respecter les principes humanitaires dans tous les conflits. 

Enfin, après avoir engagé la Troisième Commission à partager ses conclusions avec la Cinquième Commission le plus rapidement possible pour qu’elle puisse prendre en compte ses contributions, il a félicité la Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles pour avoir réservé un large espace aux jeunes. Un compliment apprécié par le Président de la Commission, qui l’a assuré de sa volonté d’ouvrir cette instance à la voix de la jeunesse.  Concluant cet échange, M. Alexander Marschik, de l’Autriche, a fait tinter sa « cloche des Alpes » pour saluer la visite du Président de l’Assemblée générale.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS HUMAINS (A/78/198)

Déclaration liminaire de la Présidente du Comité des droits l’homme

Mme TATIANA ABDO ROCHOLL, Présidente du Comité des droits l’homme, a présenté le rapport annuel de l’organe (A/78/40) par visioconférence depuis Genève.

Elle a fait savoir que dans le cadre de la procédure de présentation de rapports, le Comité a dialogué avec 18 États parties et procédé à l’examen de 25 rapports, soit 10 de plus que l’an dernier.  En outre, le Comité a adopté 11 listes de points à traiter concernant les rapports initiaux ou périodiques et 3 listes de points à traiter avant le rapport dans le cadre de la procédure simplifiée de présentation des rapports. 

Elle a rappelé que depuis 2019, le Comité s’est engagé dans la voie d’un cycle d’examen prévisible de huit ans, l’objectif étant d’améliorer la prévisibilité et d’assurer la présentation régulière de rapports par tous les États parties.  Bien que la mise en œuvre de ce nouveau calendrier ait été retardée par la pandémie de COVID-19, elle s’est félicitée du nombre élevé de rapports soumis par les États parties, dont certains après plusieurs années de retard, synonyme selon elle d’un engagement à mettre en œuvre les droits consacrés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  À ce jour, 33 rapports sont en attente d’examen par le Comité qui a par ailleurs adopté 181 décisions au cours de la période considérée. 

La Présidente a ensuite signalé que le nombre de dossiers en souffrance augmente, passant de 1 178 à la fin de 2019 à 1 200 à la fin de 2022.  Le Comité recevant le plus grand nombre de plaintes individuelles de l’ensemble du système des organes conventionnels, il s’efforce donc, avec l’aide de la section des pétitions, d’ajuster et d’améliorer ses méthodes de travail.  Notant, cependant, que les ressources humaines mises à la disposition de cette entité n’ont pas suivi le rythme de la charge de travail croissante du Comité, elle a plaidé en faveur d’une augmentation des capacités humaines de la section des pétitions.  La situation actuelle nuit à la crédibilité du Comité en tant que forum capable d’offrir des solutions rapides aux victimes de violations des droits humains, a-t-elle signalé.  Également préoccupée par la fragilité de la situation financière, elle a dit attendre un plus grand engagement de la part des États parties pour garantir le financement adéquat du système des organes conventionnels sur la base du budget ordinaire de l’ONU.

Dialogue interactif

Donnant le coup d’envoi à cet échange, le Mexique s’est intéressé aux mesures innovantes que les États peuvent prendre pour rendre les droits civils et politiques effectifs.  Le Paraguay a voulu savoir comment le Comité pourrait collaborer avec les États parties pour rendre ses travaux encore plus efficaces.  Les États-Unis ont demandé à la Présidente des précisions sur les mesures mises en place pour résorber le retard dans le traitement des communications, s’inquiétant par ailleurs d’un service d’interprétation trop cher. 

L’arriéré dans le traitement des rapports des États parties a également préoccupé le Cameroun, qui a souhaité connaître les avantages de la pratique des points focaux mise en place récemment, de même que le Costa Rica, qui a noté que l’accumulation des communications en attente est passée de 746 en 2018 à plus de 1 200 aujourd’hui.  Il a aussi voulu savoir comment le Comité comptait renforcer sa coopération avec les mécanismes régionaux des droits humains. 

Prenant note des demandes de financement supplémentaires, la Fédération de Russie a incité la Présidente à se concentrer sur son mandat et à ne pas l’outrepasser, marquant son opposition à toute tentative de politisation des organes conventionnels.  Comment assurer la participation pleine et entière de tous les États Membres? a questionné ensuite l’Union européenne, qui a aussi voulu connaître les mesures concrètes mises en œuvre pour numériser les travaux, notamment en ce qui concerne les communications. 

Répondant aux questions soulevées par les délégations, la Présidente du Comité des droits de l’homme a indiqué que la plateforme numérique mise à disposition par le Comité permet aux États parties d’élaborer des indicateurs, et d’établir un diagnostic objectif en matière de promotion des droits humains. Elle a également rappelé que le calendrier établi sur huit ans permet aux États de se préparer comme il se doit, notamment en ce qui concerne leur dialogue avec la société civile.  Elle a aussi assuré que le Comité fait tout ce qui est en son pouvoir pour régler les problèmes liés au multilinguisme. 

Soulignant de nouveau que les affaires augmentent alors que les ressources humaines, elles, n’augmentent pas, elle a alerté qu’une fatigue professionnelle gagne le personnel, et que cette situation affecte sa santé.  « Tenez-en compte », a-t-elle plaidé, notant que le Comité a besoin d’appui en termes de numérisation, laquelle permettra une utilisation optimale du talent humain disponible.  Mais en attendant, le personnel est de plus en plus malade, et je n’exagère pas, a-t-elle lancé.  Le Comité a atteint ses limites, et il faut en tenir compte lors de l’évaluation budgétaire.

Déclaration liminaire de la Présidente du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Mme LAURA CRACIUNEAN-TATU, Présidente du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, venue présenter le rapport annuel du Comité pour 2022 (E/2023/22), a indiqué que le rapport 2023 serait adopté à la fin de cette semaine et soumis au Conseil économique et social (ECOSOC) en 2024.  Elle s’est plainte d’un manque de ressources, qui entrave l’examen des rapports des États parties dans le temps imparti et empêche le Comité de fournir une liste de questions préalables à tous les États désireux de choisir la procédure simplifiée d’établissement des rapports.

Actuellement, 32 rapports d’États parties sont en attente d’examen, ce qui s’explique en partie par le report intervenu pendant la pandémie de COVID-19, a-t-elle indiqué.  Se disant très préoccupée par la situation, elle a ajouté que le Comité restait confronté à des absences de présentation ou à des présentations tardives des rapports de la part des États, certains ayant plus de 10 ans de retard.  Elle a regretté que certains États n’aient toujours pas présenté leurs rapports initiaux, depuis 25 ans pour certains, et proposé l’aide des équipes de pays des Nations Unies et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) en vue d’y parvenir.  Elle a demandé des ressources supplémentaires pour traiter les communications individuelles, ajoutant que sur les 171 États parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, seuls 27 avaient reconnu la compétence du Comité pour recevoir des communications individuelles.  Notant la stagnation du nombre de ratifications, elle a appelé les États parties à ratifier le Protocole facultatif. 

Afin de réformer le travail des organes conventionnels, un document de travail a été soumis par le HCDH avant la trente-cinquième Réunion annuelle des présidents des organes conventionnels en mai 2023, a-t-elle rappelé, indiquant qu’il avait été qualifié « d’étape importante » en vue de fournir des éléments pour la prochaine résolution biennale de l’Assemblée générale sur le système des organes conventionnels relatifs aux droits de l’homme en décembre 2024. 

Elle a ensuite souligné l’importance de la déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme et des droits économiques, sociaux et culturels, adoptée par le Comité en 2016, à l’heure où ils affrontent des défis de plus en plus sévères. 

Dialogue interactif

Préoccupée par le sort des femmes et des filles migrantes et les personnes LGBTQI+, la Macédoine du Nord a souhaité savoir ce que fait le Comité face au rejet des droits des personnes appartenant à ces catégories.  De son côté, l’Union européenne a demandé à la Présidente quelles mesures avaient été prises de concert avec les autres organes conventionnels pour éviter les chevauchements, s’intéressant en outre au rôle de la numérisation dans l’appui au mandat. 

El Salvador a souhaité savoir quelles stratégies le Comité recommande en situation de crise et d’urgence pour fournir une réponse plus inclusive et équitable qui tienne compte des catégories les plus vulnérables.  Et qu’en est-il des mesures prises par le Comité pour appuyer les États dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD)? a ajouté le Cameroun, suivi de la Chine qui a assuré qu’elle participera avec le Comité à la promotion des droits humains dans le monde. 

Relevant que d’ici à 2030, 84 millions d’enfants ne seront pas scolarisés, et 300 millions ne finiront pas leur enseignement primaire, l’Algérie a demandé à la Présidente comment elle comptait répondre à cette situation alarmante.  La délégation a également souhaité savoir si les cinq domaines clefs qui fondent la vision du Comité s’accompagnent d’indicateurs pour évaluer les progrès. 

Préoccupée par le nombre de rapports en souffrance, la Malaisie a souhaité savoir combien de temps serait nécessaire pour résorber ce retard, avant de s’enquérir de la manière dont le Comité prévoit d’élargir la participation au Pacte.  Envisagez-vous d’introduire une procédure d’examen simplifiée? a demandé l’Union européenne.  La Fédération de Russie a affirmé, pour sa part, que les mesures unilatérales coercitives violent la jouissance des droits économiques et culturels et a appelé le Comité à se saisir de cette problématique.  Enfin, le Portugal s’est intéressé aux moyens d’édifier une économie mondiale fondée sur les droits humains. 

En réponse aux questions et observations des États Membres, la Présidente du Comité des droits économiques, sociaux et culturels a mis en avant l’intérêt des observations générales issues de l’examen des rapports des États parties.  Celles-ci sont très utiles, car elles permettent une compréhension cohérente et concertée des travaux du Comité, a-t-elle fait valoir. Actuellement, le Comité travaille sur trois observations, dont une qui a trait au Pacte et au développement durable, assurant qu’une fois adoptée, cette observation fournira des réponses à de nombreuses questions qui se posent « à nous tous aujourd’hui ».  La deuxième observation est encore à l’état d’examen.  Quant à la troisième, elle se penche sur les droits économiques et sociaux dans les contextes de conflit armé.

S’agissant des procédures simplifiées dans la présentation des rapports, la Présidente a expliqué que le Comité compte l’élargir à tous les États parties qui le souhaitent, signalant toutefois que le manque de ressources entrave sa mise en œuvre consistante.  Elle a ensuite exhorté les États qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier le Protocole facultatif, afin d’établir une jurisprudence générale en ce qui concerne les droits inscrits dans le Pacte. 

Déclaration liminaire de la Rapporteuse spéciale sur l'élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille

Mme ALICE CRUZ, Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille, est revenue sur ses six années d’exercice en tant que première titulaire de ce mandat, constatant avec regret que la réponse des États Membres à ses recommandations n’a été que « faible », malgré leur engagement à ne laisser personne de côté d’ici à 2030.  Se disant consciente des défis structurels auxquels sont confrontés les pays à revenu faible ou intermédiaire, où la lèpre (également connue sous le nom de maladie de Hansen) est répandue, elle a affirmé quitter ses fonctions avec le sentiment que « ceux qui n’ont aucun pouvoir de négociation, parce qu’ils ont été activement invisibilisés par des pratiques médicales autoritaires liées au colonialisme, sont facilement considérés comme non prioritaires ».

M. Cruz a indiqué qu’au cours des années écoulées, elle s’est employée à présenter des preuves de l’omniprésence de la discrimination formelle et substantielle à l’encontre de ce groupe de personnes, notamment le déni systémique de leur droit à accéder aux opportunités sur un pied d’égalité avec les autres dans des domaines tels que la santé, l’éducation, le travail, la protection sociale et l’accès à la justice.  Elle a aussi fourni des preuves de la violence physique, psychologique et sexuelle, en particulier contre les femmes et les enfants touchés par la lèpre, et de la façon dont les stéréotypes néfastes sur la maladie peuvent menacer les droits et libertés fondamentaux. 

Au fil des ans, elle a dit avoir identifié une lacune majeure dans l’offre de recours et de réparations pour les violations actuelles et passées des droits de l’homme à l’encontre des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille, à savoir le simple respect des obligations des États de ne pas discriminer les personnes touchées par la maladie de Hansen et les membres de leur famille, qui reste « insuffisant pour remédier correctement aux violations des droits humains que subit ce groupe de personnes extrêmement marginalisées et historiquement ostracisées ». 

Abordant le volet des solutions, la Rapporteuse spéciale a recommandé aux États concernés d’élaborer et d’adopter des cadres juridiques antidiscriminatoires, pour lesquels son rapport fournit des orientations sur des questions clefs, telles que le droit à la participation et une approche intersectionnelle des motifs protégés.  Elle a rappelé à cet égard que la non-discrimination est un principe fondamental du droit international des droits de l’homme. 

Pour autant, a-t-elle poursuivi, il ne suffit pas que les États se contentent de ne pas discriminer ce groupe de personnes: ils doivent aussi prendre toutes les mesures nécessaires pour que le principe de non-discrimination soit mis en œuvre et garanti par tous.  Les États ont donc « l’obligation positive » de lutter contre la discrimination dans les différents domaines de la vie, y compris les pratiques coutumières fondées sur les religions locales, a plaidé Mme Cruz.

La Rapporteuse spéciale a précisé que son rapport identifie les cadres juridiques des 23 pays prioritaires identifiés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour l’action contre la lèpre.  Il en ressort selon elle des lacunes considérables dans la législation antidiscriminatoire générale et dans la législation spécifique à la maladie de Hansen. Si les 23 pays disposent tous de dispositions constitutionnelles concernant le droit à l’égalité et à la non-discrimination, très peu traduisent ces dispositions en droit national, a-t-elle déploré. 

Mme Cruz s’est néanmoins réjouie que les personnes touchées par la maladie de Hansen et les organisations qui les représentent s’approprient de plus en plus ce récit, ainsi que les activités visant à faire valoir leurs droits, en particulier aux niveaux infranational et national.  Il est essentiel d’assurer la continuité de l’intégration de la question de cette maladie dans les mécanismes pertinents des droits de l’homme, ainsi que dans le développement et le renforcement de la capacité des organisations de personnes touchées à interagir avec ces mécanismes, a ajouté la Rapporteuse spéciale.  À ses yeux, il faut aussi veiller à ce que les États concernés coopèrent plus étroitement à l’examen de leurs cadres et politiques juridiques et à l’évaluation de leurs lacunes. 

Regrettant enfin qu’un certain nombre de pays n’aient pas encore répondu positivement à sa demande de visite depuis des années, la Rapporteuse spéciale leur a demandé en conclusion d’inviter sans délai son successeur. 

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, l’Union européenne a noté avec satisfaction que 23 États ont été qualifiés de prioritaires par le rapport de l’OMS et a appelé à collecter plus de données.  Elle s’est interrogée sur les moyens d’aider les États à mieux intégrer les personnes affectées par la lèpre et la famine aux processus de prise de décisions afin de réduire la stigmatisation.  Le Brésil a rappelé qu’il avait adopté une loi antidiscrimination et listé une série d’actions entreprises visant à limiter la marginalisation des personnes atteintes de maladies socialement stigmatisées.  Le Japon a ensuite voulu connaître les bonnes pratiques afin d’aider les États à adopter l’approche fondée sur la personne que prône la Rapporteuse spéciale.  La Chine a indiqué qu’elle avait introduit un diagnostic et une prise en charge gratuite pour la lèpre et des mesures pour préserver les droits à l’éducation et au travail.  Elle s’est dite prête à partager son expérience, notamment en ce qui concerne la prévention. 

Le Portugal a, pour sa part, demandé si des améliorations avait été observées en matière de lutte contre les discriminations dans les États les plus affectés par la lèpre.  Il a aussi voulu savoir si elle affectait la réalisation des ODD.  De son côté, l’Ordre souverain de Malte a détaillé son dispositif de lutte contre la lèpre, qui se traduit notamment par la fourniture de traitements à 33 000 personnes par an.  Il a également fait part de l’ouverture d’un établissement en Angola et de recherches sur la maladie à Malte. 

Répondant aux questions soulevées par les délégations, la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille a tout d’abord fait remarquer à la Chine que la discrimination concerne aussi la production de médicaments contre la maladie de Hansen.  En effet, a-t-elle expliqué, nous ne disposons toujours pas de technologie médicale pour assurer la guérison aux malades.  Elle a ensuite tenu à féliciter le Japon et Brésil, seuls États à avoir mis en place des mesures contre la ségrégation dont souffrent les personnes atteintes de la lèpre.

Répondant à une problématique abordée par l’Union européenne, Mme Cruz a rappelé le manque de données disponibles au sujet de la maladie de Hansen.  De fait, une cartographie de la discrimination découlant de cette maladie continue de faire défaut, a-t-elle déploré.  Elle a également déclaré avoir constaté au cours de ses déplacements que bien des gouvernements n’ont pas conscience des enjeux, voire de l’existence même de cette maladie.  « Tout le monde a tendance à penser que cette maladie n’existe plus », a insisté la Rapporteuse spéciale, pour qui il est urgent de l’inscrire dans la catégorie des maladies qui doivent être surveillées par les mécanismes de suivi.

Mme Cruz a ensuite appelé de ses vœux une sensibilisation sur cette question, de la société civile jusqu’à l’ensemble des échelons décisionnels, avant de s’émouvoir du fait que les enfants atteints par la maladie de Hansen sont parfois abandonnés par leurs propres familles, relégués dans des léproseries où ils sont soumis à toutes formes de violences, y compris sexuelles.  Dans le monde, a-t-elle ajouté, une centaine de lois en place discriminent activement les malades, qui n’ont accès ni à la justice, ni à aucune fonction publique, et sont discriminés jusque dans les services publics.  « Les fonctionnaires comme les agents de la santé ne veulent même pas les rencontrer car ils ont peur. »

Alors que personne ne veut ou ne sait diagnostiquer cette maladie puisque l’on suppute qu’elle n’existe plus, les malades se retrouve « déshumanisés » car totalement oubliés par les États, a poursuivi la Rapporteuse spéciale, selon laquelle la maladie de Hansen n’est pas seulement une question de santé mais aussi une préoccupation liée aux droits humains.  « Inscrivons cette maladie dans le Programme 2030 et rappelons l’intersection qui existe entre les discriminations de genre, contre les enfants et les handicapés, et celles que subissent les personnes atteintes de la maladie de Hansen, a-t-elle exhorté. 

Avant de conclure, Mme Cruz a noté que, trop souvent, les pays en développement n’appréhendent le développement que sous le prisme de la seule croissance économique. Or celle-ci n’atteint pas nécessairement les plus vulnérables, d’où l’urgence absolue d’inclure les droits humains dans le développement, a-t-elle plaidé.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Suite de la discussion générale

Mme BLANDINA RUTH VIDITHA ADELEIDE PELLA (Indonésie) a réitéré la volonté de son pays de sauvegarder les traditions et les cultures des communautés autochtones.  À ce sujet, elle a souhaité lever les « ambiguïtés » du rapport concernant les différends fonciers et les questions potentielles de droits humains en Indonésie, invitant le Rapporteur spécial à produire des rapports « plus objectifs et impartiaux ». 

L’Indonésie s’enracine dans un « principe d’unité dans la diversité », a précisé la représentante, selon laquelle le Gouvernement indonésien favorise un environnement où les communautés peuvent maintenir leur mode de vie.  Cette volonté s’illustre notamment à travers la reconnaissance de croyances traditionnelles et l’encouragement à pratiquer le droit coutumier, a-t-elle expliqué, ajoutant que le Ministère du développement humain et de la culture, établi en 2021, vise à renforcer les pratiques traditionnelles, sans discrimination. 

Après avoir évoqué la constitution d’une équipe de coordination composée de 23 ministères et institutions pour combler le fossé entre les autorités et les communautés autochtones, la déléguée a rappelé l’intérêt porté par son gouvernement à l’éducation aux coutumes locales, faisant état d’une initiative menée dans neuf provinces à l’intention des jeunes et des universitaires.  En conclusion, elle a jugé important de respecter la diversité qui existe « en notre sein », toutes les cultures et identités ayant « une place spécifique dans la mosaïque de l’humanité ». 

Mme CELIA KAFUREKA NABETA (Ouganda) a indiqué que les populations autochtones sont protégées par la Constitution ougandaise de 1995.  Elle a ajouté qu’une loi sur la terre reconnaît les droits de propriété coutumière et que la législation nationale sur l’environnement exige que les droits et les intérêts des peuples autochtones soient pris en compte.  La déléguée a rappelé que, lors de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones de 2014, les États Membres se sont engagés à élaborer des plans d’action nationaux, des stratégies ou d’autres mesures dans le prolongement de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Cet engagement, a-t-elle dit, a permis à l’Ouganda de réaliser des progrès en la matière, notamment la mise en place en 2019 d’un comité national de référence des peuples autochtones. 

L’Ouganda a par ailleurs entrepris plus de 12 consultations régionales afin de recueillir l’avis des communautés autochtones sur leurs besoins et leurs priorités, a poursuivi la représentante, selon laquelle ce travail s’est traduit par le lancement d’un plan prévoyant, entre autres mesures, le renforcement du partenariat entre le Gouvernement et les communautés autochtones.  La déléguée a cependant reconnu qu’en dépit de ces efforts, la plupart des populations autochtones de l’Ouganda vivent toujours dans la pauvreté, avec des niveaux élevés d’analphabétisme, des soins de santé limités et une insécurité résultant de l’accaparement des terres par les éleveurs. 

M. ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela) a affirmé que la commémoration de la Journée de la résistance autochtone, qui sera célébrée demain, jeudi 12 octobre, au Venezuela, était un hommage aux peuples autochtones du pays qui se sont opposés à la colonisation, rappelant au passage que ce phénomène perdurait aujourd’hui. Il a qualifié la défense des droits des peuples autochtones de lutte permanente après un processus de colonisation territoriale, religieuse et culturelle ayant entraîné le génocide le plus atroce de l’histoire de l’humanité.  Le délégué a rappelé que la Constitution vénézuélienne consacre le caractère pluriculturel et multiethnique de son pays, qui abrite 44 peuples autochtones parlant plus de 36 langues, toutes officiellement reconnues.  Les politiques publiques du Venezuela accordent une reconnaissance spéciale à leur culture et à leur patrimoine, mettant l’accent sur la préservation de leur diversité et de leurs particularités et sur leur participation à la prise de décisions.  Il a regretté que les peuples autochtones soient également victimes de l’imposition de mesures coercitives unilatérales qui entravent leur accès aux programmes économiques et sociaux. 

Face à la crise systémique d’un modèle économique fondé sur l’exploitation, aux ravages de la pandémie de COVID-19 et aux tentatives d’établir une hégémonie, il a appelé les États Membres à s’unir pour défendre les peuples autochtones historiquement exclus. La colonisation a laissé un héritage de douleur qui doit être racheté par une conscience historique et planétaire, honorant les peuples autochtones pour leur résistance courageuse et déterminée, a-t-il martelé, estimant que les demandes de réparation devraient être entendues par des puissances coloniales qui « tentent d’oublier et d’échapper à leurs dettes sous couvert d’anachronisme ». 

Mme AVITAL MIMRAN ROSENBERG (Israël) a commencé par rappeler qu’au deuxième étage du bâtiment de l’ONU à New York est exposée une pierre provenant d’une synagogue de la Galilée occidentale, un présent offert par l’État d’Israël il y a 25 ans pour marquer le cinquantième anniversaire de son admission aux Nations Unies.  Cette pierre, qui date de la fin de la période romaine et du début de l’ère byzantine, il y a environ 2 000 ans, n’est pas l’objet archéologique le plus ancien qui montre le lien historique du peuple juif avec la terre d’Israël, a-t-elle expliqué.  Ce vestige a, en revanche, une signification particulière, à ses yeux, en ces temps de célébrations de Soukkot, fête religieuse de sept jours qui vient de se transformer en un « véritable cauchemar » pour son pays.

De fait, a-t-elle relaté, des milliers de bombes sont tombées de manière indiscriminée sur les villes israéliennes, infiltrées par des centaines de terroristes du Hamas qui ont déclenché un « pogrom sauvage » d’une ampleur sans précédent, assassinant et tuant à bout portant des familles entières. 

Les atrocités se sont multipliées et plus de 150 Israéliens, enfants, femmes et personnes âgées, dont des survivants de l’Holocauste, ont été enlevés et sont aujourd’hui détenus à Gaza, a poursuivi la représentante. 

Tous ces actes inhumains, diffusés dans les médias sociaux, démontrent la haine profonde du Hamas, une « organisation terroriste génocidaire », semblable à Daech ou Al-Qaida, qui ne poursuit qu’un seul objectif: l’annihilation de l’État juif, a conclu la déléguée, pour qui cette affirmation « n’est pas une hypothèse mais le contenu de la charte du Hamas ». 

Mme MARISSA DEL ROSARIO BLACKETT, de l’Ordre souverain de Malte, a rappelé que les communautés autochtones ont subi des discriminations systématiques et ont été dépossédées de leurs maisons et de leurs ressources ancestrales.  Elle a d’autre part relevé que leurs connaissances et pratiques traditionnelles ont fait d’elles les gardiennes essentielles d’un savoir écologique précieux, contribuant à la gestion durable des ressources, à la préservation de la biodiversité et à l’atténuation des changements climatiques.  Soulignant leur vulnérabilité accrue à cause de la pandémie de COVID-19, elle a appelé à mettre en œuvre des politiques ciblées pour remédier aux inégalités existantes en matière d’accès à la santé, à l’éducation et aux opportunités économiques. 

La représentante a ensuite indiqué que, depuis 2014, la division d’aide humanitaire « Malteser International Americas » a travaillé sans relâche avec le peuple autochtone Wayuu, dans le nord de la Colombie, dont les terres ancestrales s’étendent à la fois sur la Colombie et le Venezuela.  Pendant la pandémie, des formations sur l’eau, l’assainissement et l’hygiène ont été dispensées et des réservoirs d’eau réparés, a-t-elle expliqué, ajoutant que des actions contre la malnutrition infantile et la santé mentale ont également été menées.  « Le bien-être des peuples autochtones est intrinsèquement lié au bien-être de notre planète », a-t-elle ajouté, estimant qu’il importe non seulement de reconnaître leur bonne gestion de l’environnement, mais aussi de faire progresser leurs droits humains. 

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