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Sixième Commission: certaines délégations « peinent à comprendre » le travail de la CDI sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties

Soixante-dix-huitième session,
29e & 30e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3702

Sixième Commission: certaines délégations « peinent à comprendre » le travail de la CDI sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties

La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a conclu aujourd’hui son examen des chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI) consacrés au règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties et à la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, deux points inscrits à son programme de travail en 2022.  Les délégations ont concentré leurs critiques sur la définition d’une organisation internationale proposée par la CDI.

Dans son projet de directive 1 sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, la CDI avance la définition suivante: une organisation internationale est une « entité possédant sa propre personnalité juridique internationale, instituée par un traité ou un autre instrument de droit international, qui peut comprendre parmi ses membres, outre des États, d’autres entités et qui est dotée au moins d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres. »

Cette définition se distingue de celle de l’organisation internationale retenue dans les précédents travaux de la CDI, en particulier celle figurant dans le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales de 2011, s’est étonnée la déléguée de la France.  Elle a précisé que ce projet antérieur ne fait pas mention de « l’existence d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres ».  Nous peinons à comprendre ce qui a justifié l’ajout de cette condition dans la définition proposée, a-t-elle dit, en soulignant son caractère tautologique. 

Pour assurer la cohérence et la continuité de ses travaux, il paraît hautement préférable que la CDI retienne une définition commune des grands concepts de droit international qu’elle mobilise, a tranché la délégation française. Même son de cloche du côté de l’Allemagne, de Cuba, du Brésil ou encore de Singapour, qui a jugé que la définition de 2011 était « suffisante ».

« Nous n’avons aucune certitude sur ce qu’est la volonté d’une organisation internationale, à qui elle s’applique et comment elle se forme », a déclaré le délégué du Brésil.  Il a estimé que ce critère ne pourrait s’appliquer à une organisation dont la prise de décision est encadrée par les instructions que les représentants des États Membres reçoivent de leur gouvernement.  La CDI devrait revenir à la définition de 2011 pour éviter « toute confusion », a abondé la Colombie, tandis que les États-Unis ont invité la CDI à ne pas « réécrire des règles et principes qui ont déjà cours. » 

De son côté, le délégué de la République islamique d’Iran a appelé à définir les organisations internationales à la lumière de leurs caractéristiques propres, en remarquant qu’elles sont souvent définies comme des organisations intergouvernementales dans les traités.  Les ONG et les entreprises étant exclues, il a proposé de supprimer « autres entités » dans la définition proposée par la CDI.  Celle-ci a en revanche reçu l’appui de quelques délégations dont celle de la Malaisie ou du Portugal. 

« Être doté d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres, est capital pour distinguer une organisation internationale d’autres entités ou plateformes de coopération internationale, qui, bien qu’établies par un traité, ne possèdent pas une personnalité juridique propre », a déclaré le Portugal.  L’Autriche a, elle, dit son accord avec la notion d’organisation internationale créée sur la base d’un traité ou d’un autre instrument, même si celui-ci ne doit pas être nécessairement « juridiquement contraignant ».

Les critiques ont été bien moindres en ce qui concerne le projet d’articles de la CDI sur la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer. « La piraterie est le prototype même de crime international », a estimé la Roumanie, qui a trouvé surprenant, vu l’ancienneté de ce fléau, l’absence d’un instrument international spécifique. Les délégations ont été unanimes pour saluer la définition de la piraterie contenue dans ledit projet, qui renvoie à celle de l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

« Il est important de préserver l’intégrité de cette définition, qui reflète le droit international coutumier », a déclaré la Roumanie, appuyée par l’Italie, l’Irlande ou bien encore l’Allemagne, qui a jugé capital d’éviter toute « fragmentation » dans cette définition.  « Cette définition n’a pas besoin d’être actualisée et reflète le droit coutumier établi de longue date », a déclaré Portugal.  Le Sénégal a remarqué que cette définition est également reflétée dans la Charte africaine sur la sûreté et la sécurité maritime et le développement en Afrique.  À l’instar d’autres délégations, les Philippines ont pris note de la nature évolutive de la « piraterie moderne », et suggéré à la CDI de procéder avec prudence pour la définition de ce terme. 

Certaines délégations ont néanmoins souhaité que la CDI se montre plus explicite s’agissant de la définition du vol à main armée en mer, qui, selon la France, semble exclure les actes commis dans la zone contiguë et la zone économique exclusive d’un État.  Djibouti s’est dite favorable à la proposition d’étendre la portée géographique du crime de piraterie aux zones économiques exclusives.  Comme l’Afrique du Sud et l’Érythrée, ce pays a par ailleurs relevé l’importance de s’attaquer à la pauvreté et à l’instabilité qui créent des conditions propices à la piraterie. 

En fin d’après-midi, la Sixième Commission a entamé son débat général sur le troisième et dernier groupe thématique du rapport de la CDI: chapitre VII (Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international) et chapitre IX (Succession d’États en matière de responsabilité de l’État). 

Elle poursuivra ses travaux demain, mercredi 1er novembre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SES SOIXANTE-TREIZIÈME ET SOIXANTE-QUATORZIÈME SESSIONS - A/78/10

Suite et fin du débat général sur le module 2: chapitre V (Règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties) et chapitre VI (Prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer)

M. BERNARDES (Brésil) a, s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, salué l’inclusion dans le projet de directive 2 du fait qu’une organisation internationale possède sa propre personnalité juridique internationale.  « C’est l’un des éléments les plus importants. » En revanche, il ne s’est pas dit convaincu par l’idée selon laquelle une telle organisation est dotée d’au moins un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres.  « Nous n’avons aucune certitude sur ce qu’est la volonté d’une organisation internationale, à qui elle s’applique, et comment elle se forme », a-t-il déclaré.  Le délégué a estimé que cela ne s’appliquerait pas par exemple à une organisation dont le processus de prise de décisions est encadré par les instructions que les représentants des États Membres reçoivent de leur gouvernement.  Il a préféré que la CDI garde la définition d’une organisation internationale contenue dans son projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales adopté en 2011. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué a salué les trois projets d’articles.  Il a néanmoins encouragé la CDI à appuyer ses efforts de codification sur les normes existantes, sur la base de la pratique des États. Un projet de directives nous paraîtrait plus adapté, a-t-il conclu.

Mme NICOLE THORNTON (États-Unis) a salué le travail de la CDI et l’approche adoptée pour élaborer un projet de directives sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Ce projet se concentrera sur la disponibilité et la pertinence des moyens de règlement de différends, « sans réécrire des règles et principes qui ont déjà cours », a-t-elle apprécié. 

Concernant la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la représentante a souligné que son pays a fourni des informations à la CDI sur la législation américaine, la pratique nationale et l’appui fourni à d’autres pays et régions.  Elle s’est félicitée de la vaste enquête réalisée sur les pratiques des États à propos de ce qui ne constitue pas un crime international de piraterie, et de l’inclusion de l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Cet article est bien accepté depuis 1958 et reste pertinent pour déterminer les actes criminels tombant sous la juridiction universelle et ceux pour lesquels ce n’est pas le cas, a-t-elle estimé.  À ce titre, la représentante s’est demandé si le projet d’articles est le moyen le plus approprié pour traiter du sujet.  Elle a indiqué qu’elle continuerait de suivre avec intérêt les travaux de la CDI sur les pratiques internes des États et leurs cadres juridiques nationaux.

M. KONRAD BÜHLER (Autriche) a, s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, indiqué que le sujet était « d’une grande valeur pratique pour son pays », État hôte d’organisations internationales fréquemment confronté à des litiges de droit privé portés devant les tribunaux nationaux.  Il s’est félicité de l’approche de la CDI dont le libellé fait désormais référence aux « différends » plutôt que « différends internationaux ».  En tant que pays hôte, les obligations de l’Autriche sont souvent contradictoires: tenue de respecter l’immunité juridictionnelle des organisations internationales, elle doit aussi accorder l’accès à ses tribunaux quand des individus revendiquent des droits civils.  Suite à l’arrêt Waite c.  Kennedy de la Cour européenne des droits de l’homme, l’Autriche a fait en sorte d’offrir aux organisations internationales des alternatives en matière de règlement des litiges, a expliqué le représentant.  Il s’est donc félicité de la « clarté conceptuelle » des projets de directives 1 et 2.  Il a par ailleurs dit son accord avec la notion d’organisation internationale créée sur la base d’un traité ou d’un autre instrument régi par le droit international, même si celui-ci ne doit pas nécessairement, selon lui, « être un instrument juridiquement contraignant ». Il a enfin fait part de son intérêt pour la question du rôle potentiel de la Cour internationale de Justice (CIJ) en ce qui concerne le règlement des différends entre organisations internationales et États, notamment par le biais d’avis consultatifs. 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le représentant a noté « la distinction fondamentale » faite dans le projet d’article 1 entre la piraterie et le vol à main armée tout en rappelant que la législation autrichienne englobe les deux crimes dans un seul terme, celui de « vol maritime », qui est non limité géographiquement.  Dans le projet d’article 2, il s’est interrogé sur la limitation de la définition aux navires et aéronefs privés, la piraterie pouvant aussi être commise par les équipages de navires gouvernementaux « en cas de mutinerie ». S’il a jugé « sans doute justifié » le renoncement à la référence à la terre comme point de départ de la piraterie, il a toutefois demandé des éclaircissements sur la question du « lieu ne relevant de la juridiction d’aucun État », la lutte contre la piraterie s’appliquant également aux zones économiques exclusives.  En ce qui concerne enfin le projet d’article 3 sur la définition du vol à main armée en mer, le représentant s’est demandé si la référence aux actes de violence comprenait tous les actes commis illégalement et intentionnellement, ou seulement certains de ceux énumérés à l’article 3 de la Convention pour la répression des actes illicites de violence contre la sécurité de la navigation maritime.  Il a suggéré la possibilité d’inclure les autres crimes énumérés à cet article dans la définition du vol en mer, citant comme exemples le fait de s’emparer d’un navire, d’en exercer le contrôle par la force, ou encore de le détruire.

M. WALTER FERRARA (Italie) a souligné que certaines conditions minimales sont nécessaires pour qu’une organisation puisse prouver sa personnalité juridique internationale, notamment la caractéristique d’un organe capable d’exprimer la volonté propre de l’entité, distincte de celle de ses membres.  De l’avis du délégué, certaines différences majeures entre les organisations internationales en tant que sujets autonomes de l’ordre juridique international et plusieurs initiatives multilatérales de coopération intergouvernementale dans l’intérêt public, mais non dotées de la personnalité juridique internationale, méritent d’être approfondies.  Quant au règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, il a proposé d’accorder une attention particulière aux défis que peut poser le recours à un mécanisme interne, ou alternatif, en cas de différends de caractère privé. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué s’est félicité de la référence à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer mais il a invité à être plus explicite, au projet d’article 2, sur l’ampleur des crimes perpétrés dans les zones économiques exclusives d’un État côtier qui peuvent entrer dans la définition de la piraterie.  L’Italie est d’avis qu’une distinction claire doit être faite entre le crime de piraterie et celui de vol à main armée en mer, afin de « limiter la référence à la juridiction internationale aux seuls crimes en haute mer ». 

Mme THIERY (France) s’est interrogée sur la définition des organisations internationales retenue dans le projet de directive 1 sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Cette définition, a-t-elle noté, se distingue de celle de l’organisation internationale retenue dans les précédents travaux de la CDI, en particulier celle figurant dans les projets d’articles sur la responsabilité des organisations internationales de 2011.  Lorsqu’il définit l’organisation internationale, l’article 2 ne fait pas mention de « l’existence d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres », a-t-elle rappelé.  La déléguée a dit avoir peine à comprendre ce qui a justifié l’ajout de cette condition dans la définition proposée dans l’actuel projet de directives, qui risque de présenter un caractère tautologique.  En effet, sa délégation s’interroge sur le critère de l’existence d’organes dotés d’une « volonté distincte de celle de ses membres », car ce critère découle nécessairement de la personnalité juridique internationale.  Pour assurer la cohérence et la continuité des travaux de la Commission, il paraît hautement préférable que celle-ci retienne, dans ses travaux sur différentes thématiques, « une définition commune des grands concepts de droit international qu’elle mobilise », a-t-elle tranché. 

Enfin, au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a estimé que la définition du vol à main armée en mer inscrite au projet d’article 3, revêt un caractère « très restrictif ».  Elle semble exclure du champ du vol à main armée en mer les actes commis dans la zone contigüe et, surtout, la zone économique exclusive d’un État.  Cette exclusion paraît d’autant plus difficile à comprendre que le paragraphe 2 du commentaire sous le projet d’article 3 indique que le vol à main armée en mer peut concerner les « eaux placées sous la juridiction de l’État côtier », a conclu la déléguée.

M. FRASER JANECZKO (Royaume-Uni) a salué la pertinence des définitions des « organisations internationales », dont les critères sont bien choisis, et des « différends », qui peuvent couvrir de nombreux sujets.  La piraterie continue d’avoir un impact mondial en raison de son entrave au commerce et à la circulation des personnes en mer, a-t-il ensuite constaté, prônant le développement de cadres juridiques pour faciliter la répression et renforcer la connaissance du domaine maritime et des capacités des garde-côtes.  Si sa délégation est d’accord avec la CDI que le terme « répression » doit s’étendre au-delà des crimes pénalement répressibles, la définition de la piraterie a, quant à elle, des conséquences sur les mesures appliquées et sur le recours à la compétence universelle, a-t-il analysé, saluant l’alignement de la définition proposée par la CDI sur celle de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Selon le représentant, il faut encore préciser le sens de l’expression « tout acte illicite de violence ou de détention ou toute déprédation ».  Il s’est interrogé sur les pratiques sur lesquelles la CDI s’est appuyée pour inclure la violence psychologique.  Le représentant a salué l’inclusion des actes d’incitation et de facilitation, y compris via le financement, dans la définition de la piraterie.  En outre, la qualification d’un acte en tant que « vol à main armée en mer » n’élargit, ni ne limite, la juridiction de l’État côtier dans les eaux duquel l’acte se produit.  Cette compétence s’étend à une catégorie de comportements plus large que celle couverte par la définition, y compris les actes effectués par voie aérienne, a-t-il conclu, appelant à ce que ce point soit souligné comme commentaire. 

M. SCOTT TAN (Singapour) a, s’agissant du règlement des différends auxquels les organisations internationales sont parties, rappelé que son pays était est un lieu d’accueil et de règlement des différends internationaux sous l’égide de diverses organisations intergouvernementales comme la Cour permanente d’arbitrage, le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements ou encore le Tribunal international du droit de la mer.  Sur la définition d’une organisation internationale dans le projet de directive 2 a) de la CDI, il a jugé que la définition de 2011 était suffisante et qu’une mise à jour n’était pas nécessaire, car la principale caractéristique d’une organisation internationale est d’être une entité dotée d’une personnalité juridique internationale établie par un traité ou un autre instrument régi par le droit international.  Par ailleurs, sur la définition du « différend », le représentant a noté que la disposition en l’état « pourrait conduire à l’interprétation qu’un désaccord de fait peut, à lui seul, donner lieu à un litige », une interprétation qu’il a jugée « trompeuse », en suggérant de s’en référer plutôt à la formulation de l’Article 36 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ). 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le représentant a appuyé l’approche « souple » de la CDI et s’est félicité qu’elle ait, sur le projet d’article 2, clarifié le champ d’application pour inclure les drones, véhicules aériens sans pilote et véhicules maritimes autonomes.  Sur le projet d’article 3 et l’utilisation par la Commission de l’expression « vol à main armée en mer », il a noté avec intérêt que cette définition figurait dans l’Accord de coopération régionale sur la lutte contre la piraterie et les vols à main armée contre les navires en Asie.

Mme KATARZYNA MARIA PADLO-PEKALA (Pologne) a appelé à la prudence au sujet du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, estimant que la CDI « va au-delà de son mandat ».  Elle a pris note des projets d’articles relatifs aux définitions de la piraterie et du vol à main armée en mer, qui ne sont en principe pas controversés et bénéficient d’un large soutien de la part des États.  La déléguée a néanmoins trouvé surprenant que le Comité de rédaction ait jugé prématuré à ce stade de faire une recommandation sur le type d’instrument juridique en cours d’élaboration.  De l’avis de la Pologne, cette question est d’une importance fondamentale.  Pour des raisons de transparence, elle a estimé que l’absence de décision à cet égard devrait être clairement exprimée dans le rapport de la CDI, puisque le choix de « projet d’articles » suggère qu’il s’agit d’un processus de préparation d’un traité plutôt que de directives.  Déjà en 2019, le rapporteur spécial avait attiré l’attention sur le vaste corpus de droit international, régional et national consacré à la prévention et à la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer.  Dans ce contexte, les travaux de la CDI sur le sujet pourraient avoir une valeur pratique pour les États, a conclu la déléguée, grâce à son interprétation des règles internationales fondamentales et à l’élaboration de directives sur les modalités de leur mise en œuvre.

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a salué le travail de la CDI sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Il a invité la CDI à garder à l’esprit son travail antérieur sur les organisations internationales afin d’éviter « tout malentendu et incompréhension » sur le droit applicable. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué a salué l’adoption de trois projets d’articles.  Il s’est félicité du fait que la Commission ne se soit pas uniquement concentrée sur la répression, en incluant la prévention.  Enfin, il s’est réjoui que la CDI ait basé sa définition de la piraterie sur la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, évitant ainsi toute « fragmentation » dans ladite définition. 

Mme KRISTEL KAEVAL (Estonie) a remarqué que les conflits non résolus entraînent un déséquilibre entre les puissances, en particulier lorsque des mécanismes de règlement des différends n’existent pas au niveau international.  Néanmoins, chaque organisation est distincte dans ses droits et obligations, a-t-elle rappelé, invitant la CDI à prendre en compte cette hétérogénéité dans les projets de directives.  Selon elle, ces derniers devraient constituer une orientation générale pour une communication efficace sur les exigences minimales à appliquer aux mécanismes de règlement des différends, « sans pour autant servir de base pour une convention  ». 

Concernant la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a salué le caractère complet du rapport de la CDI qui fait état des pratiques nationales, ainsi que des raisons historiques et économiques expliquant la diversité des approches législatives.  Si elle a félicité la Commission de ne pas avoir dupliqué les cadres existants, et de les utiliser pour aller plus loin, elle a cependant fait remarquer que la définition de la piraterie est identique à celle de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer alors que certaines nouveautés liées à la « piraterie moderne », comme l’utilisation de drones et les cyberattaques en mer, ne sont mentionnées que dans les commentaires.  Par ailleurs, les actes de piraterie pouvant également être commis dans la zone économique exclusive, les commentaires doivent se pencher sur la manière dont le libellé de l’article 58 2) de ladite Convention s’appliquerait à la piraterie, a estimé la déléguée.  Les commentaires doivent aussi préciser les limites de l’article 101 sur la définition de la piraterie et le respect du droit des États côtiers dans la zone économique exclusive.  Enfin, le terme de « mutinerie » doit être précisé pour déterminer les situations potentiellement couvertes, y compris avec les États du pavillon. 

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili) a salué le titre retenu pour le sujet « Règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties », qui exclut le terme « international », étant donné que la plupart des litiges impliquant des organisations internationales concernent des parties privées, notamment sur des questions de droit du travail avec des employés locaux de ces organisations.  Le délégué a ainsi appuyé le commentaire du rapport de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur ce sujet, notant que ce type de différend n’aurait pas le caractère d’un différend international.  Il a noté que ce sujet soulevait de nombreuses questions de droit international, telles que l’immunité de juridiction ou l’obligation de prévoir des modes de règlement appropriés en vertu de traités pouvant avoir un impact sur les droits de l’homme.  Selon le délégué, les travaux de la CDI devraient se concentrer sur la réaffirmation des pratiques existantes des organisations internationales en matière de règlement des différends.  Il s’agit plutôt de formuler des lignes directrices et de développer un ensemble de clauses types qui pourraient être incluses dans les traités ou autres instruments régis par le droit international et par le droit national. 

M. ERIK LAURSEN (Danemark), au nom des pays nordiques, a estimé qu’un ensemble de directives est un format pertinent pour la question du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties et a encouragé la CDI à travailler à des solutions pratiques. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, les pays nordiques rappellent l’intérêt de protéger la liberté de navigation et la sécurité maritime, sachant que 80% du commerce mondial emprunte des voies maritimes et qu’une grande partie de l’énergie mondiale est extraite ou transportée en mer. À cet égard, a estimé le délégué, une analyse approfondie de la définition et de la portée de la « piraterie », y compris les critères objectifs permettant de qualifier un « navirepirate », ainsi qu’une analyse de la définition et de la portée du « vol à main armée en mer », et de la délimitation entre ce crime et la piraterie, seraient les bienvenues et présenteraient un intérêt pratique.  Le délégué a prié la CDI de prendre également en compte les pratiques et les recommandations pertinentes fournies par l’Organisation maritime internationale (OMI) et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il a aussi exhorté les États Membres, en particulier dans les régions où la piraterie et le vol à main armée en mer sont fréquents, de pénaliser ces crimes dans leur législation interne, et de poursuivre leurs auteurs ainsi que ceux qui incitent, financent ou facilitent ces crimes.

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a estimé que le travail de la CDI sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties constitue une première approche équilibrée sur le sujet.  Il a salué la décision de la CDI de ne pas accoler le terme « internationaux » à celui de « différends ».  Tous les types de différends, y compris les litiges de droit privé, auxquels les organisations internationales peuvent être parties, ont vocation à être couverts par ce projet, a dit le délégué.  Il a ensuite salué l’inclusion de l’élément selon lequel l’organisation doit être doté « d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres ».  Cet élément est capital selon lui pour distinguer une organisation internationale d’autres entités ou plateformes de coopération internationale, lesquelles bien qu’établies par un traité, ne possèdent par leur propre personnalité juridique internationale. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué s’est félicité que la CDI ait calqué sa définition de la piraterie sur celle proposée par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Cette définition n’a pas besoin d’être actualisée et reflète le droit coutumier établi de longue date, a-t-il conclu.

M. XINMIN MA (Chine) a, sur la question du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, estimé qu’actuellement le rapport concernait tous les différends auxquels des organisations sont parties, tout en indiquant que l’objet du différend sur cette question devait « se limiter aux organisations internationales et concerner des désaccords sur l’interprétation du droit international ».  Il a jugé que ces différends ne devaient pas concerner, par exemple, des organisation non gouvernementales ou des entités « régies par le droit interne ».  

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué a souligné que le travail de la Commission devrait permettre d’intensifier la lutte contre la piraterie et d’assurer la sécurité des passagers.  Pour ce qui est du projet d’article 1, il s’est dit favorable à l’élargissement de la définition pour réprimer « tout acte violent en mer ».  Sur le projet d’article 2, il a indiqué que la violence devait être « largement appréciée », pour englober les violences psychologiques, par exemple.  La Chine est favorable à la définition du lieu de la piraterie « en haute mer uniquement », et ne relevant pas de la juridiction d’un État où s’appliquent des droits et obligations différents.  Concernant la lutte contre la piraterie dans la zone économique exclusive, le délégué a estimé que les États devraient renforcer leur coopération « sans préjudice des droits souverains sur cette zone ». 

M. PABLO ADRIÁN ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) a jugé particulièrement important de réfléchir à la question des différends « non internationaux » auxquels des organisations internationales sont parties.  Cette question est, de l’avis du Mexique, étroitement liée à celle de l’administration de la justice à l’ONU et à la nécessité de garantir l’accès à des mécanismes effectifs de règlement des différends pour le personnel non statutaire de l’ONU, pour lequel un programme pilote a été mis en place ces dernières années et qui, a espéré le délégué, pourra être pérennisé. 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué a fait observer que le droit mexicain ne fait pas de distinction entre les deux comportements délictuels.  Il a exprimé son accord avec les projets d’articles qui font une distinction en fonction du lieu où ces actes sont commis, plaçant la piraterie sous juridiction universelle.

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a salué la décision de la CDI d’inclure les différends non-internationaux dans son travail sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Elle a salué la flexibilité du Rapporteur spécial et son choix de directives. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la représentante a fait remarquer qu’il s’agit d’une des préoccupations les plus anciennes de l’humanité.  « La piraterie est le prototype du crime international. »  Il est ainsi surprenant que vu l’ancienneté de ce fléau, il n’y ait pas d’instrument international spécifique, a-t-elle dit, en estimant qu’un tel instrument renforcerait la capacité des États.  La représentante s’est félicitée que la CDI ait repris la définition de la piraterie contenue dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  « Il est important de préserver l’intégrité de cette définition, qui reflète le droit international coutumier. »

M. PETER KLANDUCH (Slovaquie) a salué l’approche efficace et rigoureuse adoptée dans le chapitre sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, leur rôle accru appelant le traitement de ce sujet.  Il a jugé pertinent de couvrir les différends non internationaux, tels que l’accès à la justice ou l’immunité.  Ces différends ayant trait au droit international, leur exclusion limiterait selon lui la portée globale des travaux.  Néanmoins, les projets de directives doivent préciser à quel type de différends elles ont trait, a estimé le représentant.  La définition proposée ajoute la capacité pour une organisation d’exprimer une volonté distincte de ses membres, a-t-il remarqué, permettant ainsi de déterminer la personnalité juridique d’une organisation.  Toutefois, sa délégation ne trouve pas opportun de modifier la définition utilisée dans le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales.  Par ailleurs, le refus d’une requête doit-il être considéré comme un élément constitutif d’un différend?  Le représentant a invité la CDI à se pencher sur le caractère explicite ou implicite du refus.  Des clauses types fourniraient aux États, en complément des directives, des orientations utiles dans leurs relations avec les organisations internationales, a-t-il estimé. 

Concernant la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le représentant a salué les efforts entrepris pour compiler les pratiques nationales, rappelant que la nature coutumière de la définition de piraterie contenue dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est largement acceptée.  Il s’est félicité de la distinction entre piraterie et vol à main armée en mer, ce dernier étant associé à des zones en dehors de la juridiction nationale ou de la haute mer. Toutefois, s’il a estimé qu’un acte de violence maritime ne relevant pas de l’autorité publique peut être qualifié de violence à des fins privées, il s’est souvenu qu’un acte privé entraînant un profit peut être rattaché dans la pratique à des motivations politiques ou idéologiques. 

M. MAREK ZUKAL (République tchèque) a dit attendre des travaux de la CDI une clarification des aspects tant théoriques que pratiques du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties. La Tchéquie est également favorable à l’élaboration d’un ensemble de clauses types pouvant être utilisées dans les traités, les contrats ou autres instruments de droit national.  S’agissant de la définition des « organisations internationales », le délégué a bien noté le commentaire sur les caractéristiques d’une organisation internationale au projet de directive 2 mais observé que la référence à d’« autres entités » pourrait donner l’impression qu’elles sont des membres ordinaires d’organisations internationales.  Il s’est également demandé si le projet de définition couvre tous les aspects des organisations ou institutions internationales spécialisées, comme la Cour pénale internationale (CPI) ou d’autres tribunaux internationaux, qui présentent les caractéristiques de base d’une organisation internationale mais qui ont des particularités, par exemple l’absence de « membres » proprement dits.  Le délégué a également plaidé pour une définition plus concrète des « différends ».

De même, la République tchèque attend des clarifications sur plusieurs aspects juridiques de la lutte contre la piraterie et le vol à main armée en mer. Le délégué a estimé, comme la CDI, que le travail sur ce sujet ne devrait ni faire doublon ni modifier les cadres juridiques existants, mais plutôt viser à identifier de nouvelles questions d’intérêt commun.  À cet égard, il a salué l’engagement de la Commission à respecter l’intégrité de la définition de la piraterie contenue dans l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

M. MAMADOU SOULE GUEYE (Sénégal) a salué le travail « remarquable » de la CDI sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, il a noté l’importance de cette question pour le Sénégal, au regard des enjeux de sûreté et de sécurité maritimes dans le Golfe de Guinée.  « C’est pourquoi ma délégation a pris bonne note du lien établi entre le projet d’article 2 sur la définition de la piraterie et l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. »  Cette définition est également reflétée dans la Charte africaine sur la sûreté et la sécurité maritime et le développement en Afrique, communément appelée Charte de Lomé, a fait observer le délégué.  En conclusion, il a exhorté la CDI à continuer de se nourrir de la diversité des conceptions doctrinales et des cultures juridiques. 

M. MIHA ŠINIGOJ (Slovénie) a salué les projets de directives sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties qui couvrent l’étendue et l’utilisation des termes définis.  La reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales reflète leur rôle et responsabilité changeants sur la scène internationale, a-t-il remarqué.  Néanmoins, la distinction entre différends internationaux et non internationaux n’est pas toujours claire, a-t-il souligné.  Sa délégation estime que la personnalité juridique des organisations internationales peut découler de différentes sources, telles que des instruments constitutifs et des accords internationaux. 

Concernant la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le représentant a salué la compilation des pratiques nationales, rappelant qu’il s’agit d’un défi en matière de sécurité maritime.  Il a souligné que l’apparition de nouvelles technologies fait apparaître des lacunes dans le cadre juridique, entravant la capacité internationale à lutter contre la « piraterie moderne ».  À ce titre, certains éléments tirés de la définition de l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer exigent des éclaircissements. 

M. JAMES KIRK (Irlande) a, sur la question du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, noté que la définition du terme « différend » semblait combiner diverses interprétations du terme « différend », par la Cour internationale de Justice (CIJ) d’un part, et par la Cour qui l’a précédée, la Cour permanente de justice internationale, d’autre part.  Il s’est dès lors demandé si le projet de définition était « suffisamment large » pour englober les cas dans lesquels l’une des parties à un différend ne répond pas en tout ou en partie aux affirmations de l’autre partie, comme dans l’arrêt récent de la CIJ dans l’affaire Gambie c.  Myanmar. Il a fait part de l’intérêt de sa délégation pour les futurs débats sur ce sujet. 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le représentant a souhaité obtenir davantage d’informations sur « l’objectif » des projets d’articles de la CDI.  Si l’intention est de présenter des projets d’articles aux États en vue de négocier une convention, a-t-il expliqué, la piraterie est « déjà définie » dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  L’Irlande considère que ladite Convention définit le cadre juridique « dans lequel toutes les activités dans les océans et les mers doivent être menées », ce qui inclut, a-t-il précisé, la lutte contre la piraterie et le vol à main armée en mer.  S’il a reconnu que le projet d’article 2 définissait la piraterie en s’inspirant directement de cet instrument, le représentant a toutefois mis en garde contre la possibilité d’une incertitude juridique et le risque de saper l’autorité de la Convention, considérée comme « la Constitution des océans ».  Rappelant qu’en tant qu’État insulaire, l’Irlande était particulièrement sensible à l’importance de la sécurité maritime, il a proposé que le projet d’article soit limité à la définition et au traitement du « vol à main armée en mer », que la Convention ne définit pas.  À ce titre, il s’est félicité de la définition proposée dans le projet d’article 3, qui s’inspire de la définition adoptée par l’Organisation maritime internationale (OMI) dans son Code de pratique pour la conduite des enquêtes sur les crimes de piraterie et les vols à main armée à l’encontre des navires.

Mme LIGIA LORENA FLORES SOTO (El Salvador) a considéré que la définition de l’expression « organisation internationale » proposée par la CDI mériterait d’être revue, en élimant la référence à la condition d’être dotée au moins d’un organe capable d’exprimer une volonté distincte de celle de ses membres.  En tant qu’État partie à plusieurs organisations régionales et internationales, El Salvador estime que l’une des caractéristiques qui définissent le mieux la nature d’une organisation internationale est l’exercice de l’attribution partielle de compétences souveraines définie dans le traité constitutif ou l’instrument de droit international correspondant.  En outre, s’est inquiétée la déléguée, le principe de supranationalité ne peut s’appliquer lorsque les membres de l’organisation comptent des entités distinctes des États.  Aussi a-t-elle suggéré à la CDI de réviser la définition proposée, de façon à pouvoir déterminer lorsque le principe de supranationalité s’applique ou non.

Mme KEKE MANTSHO ANNASTACIA MOTSEPE (Afrique du Sud) a exprimé son accord avec l’approche de la CDI visant à élaborer des projets de directives, et non des projets d’articles, sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Elle a voulu souligner que le travail de la CDI doit rester concentré avant tout sur le droit international, l’appelant à la prudence lorsqu’elle s’engage dans la voie de l’élaboration de clauses types pour des différends de nature contractuelle ou découlant de l’application de lois nationales.

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la représentante a noté que le projet d’article 3 relatif à la définition du vol à main armée en mer correspond à l’amendement de Djeddah au Code de conduite de Djibouti de 2017 et au Code de bonnes pratiques pour la conduite des enquêtes sur les délits de piraterie et de vol à main armée à l’encontre des navires de l’Organisation maritime internationale (OMI).  L’Afrique du Sud estime qu’une approche holistique est indispensable pour « s’attaquer à la pauvreté et à l’instabilité qui créent les conditions propices à la piraterie ».  Au niveau régional, a indiqué la représentante, l’Union africaine a adopté plusieurs stratégies ainsi qu’une résolution, en juin 2022, qui appelle les pays de la région à adopter des lois, à pénaliser les actes de piraterie et à enquêter, poursuivre et extrader les auteurs de piraterie. 

Mme NAOMI MASON (Australie) a rappelé la menace mondiale que représentait la piraterie et les vols à main armée en mer, qu’il s’agisse du bien-être des marins, de la navigation internationale ou encore de la sécurité maritime, vitale pour les économies et le commerce.  « Il est bien connu que des milliards de dollars sont perdus chaque année à cause de la piraterie », a-t-elle précisé.  Selon elle, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer définit le cadre juridique général sur cette question, et reconnaît notamment la nécessité d’une coopération internationale pour lutter contre la piraterie. Au niveau régional, la représentante a indiqué que l’Australie était membre de l’Accord de coopération régionale sur la lutte contre la piraterie et les vols à main armée à l’encontre des navires en Asie.  Elle a salué la prise en compte par la Commission de la pratique des États, qui permet au travail de la CDI de rester cohérent et complémentaire avec les cadres et obligations existants en vertu de la Convention. 

S’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, la représentante a rappelé que l’examen de ce sujet avait été « quelque peu fragmentaire » par le passé.  Elle a donc salué l’examen approfondi des travaux « historiques » réalisés par le rapporteur sur cette question, qui aideront les États et les organisations internationales à traiter les différends qui les opposent « avec plus de confiance ».  Si elle s’est dite favorable aux projets de directives et de commentaires qui offrent des éclaircissements utiles aux États et aux organisations internationales, la représentante a jugé qu’il serait utile pour la CDI de préciser quels éléments dans ces projets représentent la codification du droit international existant et quels éléments représentent le développement progressif du droit international. 

Mme WALKER (Cuba) a salué le format de directives retenu par la CDI s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Elle a souhaité que la définition soit celle approuvée en 2011 dans le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée s’est réjouie que la CDI ait renvoyé, dans son projet d’articles, à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer s’agissant de la définition de la piraterie.  Le droit pénal cubain punit la plupart des crimes visés par le projet d’articles, a-t-elle précisé.

M. FALLAH-ASSADI (République islamique d’Iran) a, s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, établi qu’il sera difficile de délimiter la portée des travaux de la CDI sans avoir cerné les problèmes.  Il a appelé à une compilation plus précise des pratiques des États et des organisations internationales.  Ensuite, il convient de définir les organisations internationales à la lumière de leurs caractéristiques, sachant qu’elles sont souvent définies comme des organisations intergouvernementales dans les traités.  Cette caractéristique excluant les ONG et les entreprises, le délégué a proposé de supprimer « et autres entités » dans la définition donnée dans le rapport.  Les différends doivent être traités au regard de l’immunité juridictionnelle que les organisations peuvent invoquer sans dérogation ou en l’absence de moyens appropriés de règlement des différends, a-t-il poursuivi.  De plus, les différends comprennent des désaccords juridiques et « politiques », cette deuxième catégorie n’étant pas couverte dans le rapport et ne pouvant être réglée que via les canaux diplomatiques. Par ailleurs, la nature et la portée des différends internationaux doivent être précisées, tout comme pour les différends privés qui devraient faire l’objet de « bons offices », a-t-il estimé. 

Ensuite, sur la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, le délégué a souhaité que l’élément de « menace » présent dans le projet d’article 3.1 a) sur le vol à main armée en mer soit repris dans le projet d’article 2.1 a) sur la piraterie.  Après avoir exposé quelques particularités de la législation de son pays, il a noté que les crimes perpétrés dans les eaux territoriales sont jugés selon les lois iraniennes, l’État côtier étant responsable de l’exercice de sa compétence.  Le délégué a évoqué les défis liés au recrutement de personnel privé armé à bord de navires marchands pour assurer une protection contre la piraterie, encourageant la CDI à étudier des notions comme la responsabilité et le « droit de passage innocent » au regard de la sécurité et du droit.  D’après lui, la CDI devrait aussi se pencher sur l’entrée par coercition des forces armées d’un État à bord de navires commerciaux à pavillon étranger pour des raisons illicites.  Il a cité les « actes de terrorisme étatique » tels que la récente saisie de chargements de carburants iraniens par les États-Unis.  Le délégué a rappelé, à ce titre, que l’application extraterritoriale du droit interne et les mesures coercitives unilatérales ne sont pas légales au regard du droit international, la piraterie étant le seul crime pour lequel la compétence universelle peut être appliquée. 

Mme JANTARASOMBAT (Thaïlande) a considéré que les travaux de la CDI devraient être aussi pratiques que possible.  La question du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties étant fondamentale, la déléguée a suggéré d’examiner différentes méthodes de règlement.  Elle a apprécié que le règlement des différends à caractère privé ne soit pas exclu des travaux, car aucun règlement ne peut être isolé du droit national.  Quant à la définition des organisations internationales, elle l’a trouvée souple et attentive à la pratique des États, sachant que la personnalité juridique des organisations internationales peut différer d’un pays à l’autre.  Par exemple, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a été créée par une déclaration politique en 1967 avant de devenir une organisation internationale 40 ans plus tard. 

Sur le chapitre de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a fait savoir que la Thaïlande a adopté une loi sur la prévention de la piraterie en 1991.  Elle aimerait que la CDI puisse identifier de nouvelles questions d’intérêt commun qui n’ont pas encore été traitées dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ou d’autres instruments internationaux.  Elle a suggéré d’examiner ces questions à la lumière des législations existantes, par exemple en ce qui concerne les droits des victimes. 

Mme ELENA MELIKBEKYAN (Fédération de Russie), abordant la question du règlement des différends auxquels les organisations internationales sont parties, s’est interrogée sur la définition du terme « différend », dont l’élargissement n’est pas utile puisque, comme dans l’affaire des concessions Mavrommatis, « la définition n’est pas liée à de simples différends politiques ».  Estimant que la CDI pouvait répondre à plusieurs questions de fond non encore tranchées, la représentante a suggéré plusieurs pistes de réflexion s’agissant notamment du statut des organisations internationales qui sont parties à des différends.  À cet égard, elle a posé la question du statut de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), notant que sa délégation attendait du rapporteur spécial qu’il s’en tienne à une « démarche correcte » pour définir le statut de cette organisation. 

Concernant la piraterie en haute mer, la représentante a fait part du désaccord de la Fédération de Russie avec l’élargissement « sans justification » de la piraterie, le texte de la CDI ne tenant pas compte de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Le point de vue selon lequel certains actes commis par des États pourraient être considérés comme des actes de piraterie n’a pas été suffisamment justifié, a-t-elle critiqué. Elle s’est également dite surprise par la distinction faite entre les vaisseaux navigants et les drones, jugeant en outre « prématurée » la mention des technologies de l’information et de la communication dans le projet d’articles.  S’agissant de la référence à la piraterie commise depuis la terre ou depuis des plateformes maritimes, elle a indiqué que pour sa délégation, cette approche était par trop imprécise et estimé que sur de tels sujets, la question de la juridiction des États continuait d’avoir son importance.

Mme KAJAL BHAT (Inde) a estimé qu’il est pertinent de définir le terme « organisation internationale ».  À cet égard, elle a appelé la CDI à indiquer, dans la définition, les formes adéquates de règlement de différends, estimant que ceux-ci ne concernent actuellement que les organisations intergouvernementales, et non des ONG ou d’autres entités commerciales.  Compte tenu de la diversité des organisations internationales et des relations juridiques qu’elles entretiennent avec d’autres entités, elle a émis des réserves sur une définition unique, appelant la CDI à considérer des recommandations pour le règlement des différends qui tiennent compte des organisations internationales sensu largo.

Concernant la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a rappelé que ces crimes nuisent aux intérêts de tous les États et des entreprises maritimes.  Face à l’augmentation de 17% de ces crimes en Asie, un accord régional de gouvernement à gouvernement a vu le jour afin de promouvoir la prévention contre la piraterie, a-t-elle expliqué.  Sa délégation souhaite que la piraterie fasse l’objet d’un examen dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  En ce qui concerne le vol à main armée en mer, il existe une législation internationale applicable, des approches régionales et des pratiques nationales, a indiqué la déléguée.  À ce titre, la CDI pourrait bénéficier des apports de l’Organisation maritime internationale (OMI) qui coordonne les organisations régionales et sous-régionales. Enfin, elle attiré l’attention sur la prolifération des actes de piraterie dans les mers intérieures et les zones territoriales des États côtiers.  RAS

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a salué le travail de la CDI s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Elle a approuvé la suppression du terme « internationaux » après celui de différends.  Elle a indiqué que la définition proposée par la CDI d’une organisation internationale est différente de celle approuvée en 2011 dans le projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales.  « Cela peut être une source de confusion », a-t-elle dit, en souhaitant que la CDI revienne à la définition de 2011. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a invité la CDI à dire plus clairement quel est l’objet poursuivi avec ce projet d’articles.

Mme NUR AZURA ABD KARIM (Malaisie) a salué le travail de la CDI s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties. Elle a souligné la clarté apportée par le projet de directives, notamment la définition faite d’une organisation internationale.  Elle a néanmoins estimé que ce travail restait encore perfectible. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a souhaité qu’une clarification soit apportée sur « la direction qu’entend suivre le projet d’articles de la CDI. »  Les aspects principaux de ces sujets ont été d’ores et déjà codifiés, en particulier par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a dit la déléguée, en appelant à la prudence quant à l’élaboration d’une autre convention.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a souhaité le remplacement, dans la formulation « différends auxquels des organisations internationales sont parties », du mot « des » par « les » afin d’y soumettre toutes les organisations internationales.  Ensuite, il a estimé nécessaire d’énumérer les moyens juridictionnels et non juridictionnels de règlement des différends afin de mieux traduire la diversité des méthodes.  Par ailleurs, les organisations internationales mobilisent parfois le régime dérogatoire au droit commun qui leur est appliqué pour se soustraire à certains de leurs engagements, a-t-il regretté, « ce qui porte un coup à l’état de droit ».  Si le différend avec un membre du personnel ne peut être réglé au niveau de l’organisation, le recours au droit national du pays hôte doit être possible pour le personnel ressortissant qui pourra se pourvoir auprès des tribunaux de droit commun. Il faut, selon le représentant, éviter tout abus en établissant des régimes juridiques clairs pour les membres du personnel qui ne sont pas des fonctionnaires internationaux.  À cet égard, il a encouragé l’élaboration de clauses types qui pourront être utilisées dans des contrats de droit international et national.

Par ailleurs, le régime juridique du vol à main armée en mer est discutable, a déclaré le représentant.  La définition y afférant établit qu’il s’agit d’un crime commis dans un espace ou l’État exerce sa juridiction.  De même, il a pointé du doigt l’expression « acte de piraterie » qui peut laisser croire que le vol à main armée constitue de la piraterie, contredisant de ce fait la distinction établie.  Par ailleurs, il a attiré l’attention sur le vol à main armée, une infraction maritime qui trouble la paix dans le golfe de Guinée, expliquant que les actions des États Membres contre les activités maritimes illicites sont guidées par le Code de conduite de Yaoundé.  À l’heure de l’intelligence artificielle, il devient difficile de distinguer les activités illicites privées de celles portées par des acteurs publics, a fait remarquer le représentant, appelant la CDI à se pencher sur cette question.  Enfin, tout acte de violence commis par des drones, les cyberattaques contre des plateformes pétrolières et les actes commis avec des motivations politiques et idéologiques non avouées devraient rentrer dans le champ d’application du projet d’articles. 

M. ANDY ARON (Indonésie) a souligné qu’il est évident que la CDI n’a « pas de mandat explicite » pour se prononcer sur le règlement de différends spécifiques.  L’absence d’une obligation dans le projet de directives sert de limite pour qu’il n’y ait pas d’erreur dans ses intentions, a-t-il estimé.  Toutefois, il est important d’avoir une bonne compréhension du sujet, a-t-il ajouté, saluant la clarté du projet de directive 2 c) qui reste « tout à fait précis et sans ambiguïté, tout en empêchant une extension non justifiée de sa portée et de son intention. »  De façon générale, le délégué a salué les travaux de la CDI pour préciser les normes juridiques internationales et harmoniser les réponses face à l’insécurité maritime. 

M. MOUSSA MOHAMED MOUSSA (Djibouti) a centré son intervention sur la prévention et la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer. Il a invité la CDI à tenir davantage compte des causes socioculturelles et des spécificités géographiques locales qui ont contribué à l’émergence et à la persistance de ces phénomènes.  Le représentant a souligné le fort engagement de son pays en vue du rétablissement de la sécurité maritime dans la mer Rouge et le golfe d’Aden.  En conformité avec la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Djibouti a contribué à l’adoption du Code de conduite de Djibouti en 2009, instrument clef dans la lutte contre la piraterie.  Le représentant a salué le libellé du projet d’article 1, avant de juger sage que le projet d’article 2 conserve la définition de l’article 101 de la Convention précitée.  Enfin, il s’est dit favorable à la proposition d’étendre la portée géographique du crime de piraterie aux zones économiques exclusives et appelé à compléter le projet d’article 2.

M. EDGAR DANIEL LEAL MATTA (Guatemala) a reconnu, au sujet du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, la difficulté d’établir une distinction entre les différends au niveau international et ceux au niveau national.  Saluant le choix de proposer des directives plutôt que des normes contraignantes rigides, il a exprimé son accord avec les projets de textes de la CDI à ce stade.

Le délégué a relevé la pertinence des travaux consacrés à la prévention et à la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer.  Il a estimé que la question de la piraterie devait être abordée principalement dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, en prenant en considération le droit international applicable, les approches régionales, la pratique des États, la pratique législative et judiciaire dans le contexte des systèmes juridiques nationaux, en particulier en ce qui concerne le vol à main armée en mer qui n’est pas abordé par la Convention.

Mme MERON HABTE ESSAIAS (Érythrée) a rappelé l’importance pour la CDI de prendre en compte une « perspective africaine » dans ses travaux.  Elle a salué le travail de la Commission au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer. Elle a souligné la nécessité d’examiner les causes profondes de ces phénomènes, en appelant à une coopération internationale renforcée.  Enfin, la déléguée a demandé que la position des États qui n’ont pas rejoint la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer soit dûment prise en compte.

M. MICHAEL STELLAKATOS LOVERDOS (Grèce) a souligné la pertinence du projet de directives sur le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Les différends peuvent revêtir des aspects internationaux, notamment pour le personnel et les droits humains, a-t-il rappelé, ce qui nécessite des modes particuliers de règlement des différends.  Le délégué a précisé qu’il est nécessaire de s’accorder sur une définition des organisations internationales, saluant la référence à la personnalité juridique propre et le nouvel élément sur la possibilité pour ces organisations d’exprimer un avis qui diverge de celui de leurs États membres. En outre, a-t-il ajouté, il est important d’énoncer clairement qu’il ne peut s’agir que d’entités établies conformément au droit international. 

Le délégué a ensuite expliqué que la Grèce a participé à plusieurs initiatives sur la lutte contre la piraterie et les crimes maritimes.  Tout examen de cette question doit se faire en conformité avec la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-il fait valoir.  À ce titre, il s’est dit préoccupé par l’inclusion de la phrase « tout acte illicite de violence ou de détention ou toute déprédation, ou menace de déprédation, autre qu’un acte de piraterie » et par la référence au droit international dans le projet d’article 1 sur la portée des pratiques exécutives des États et de leurs entités régionales et sous-régionales. 

Mme ÇAĞLA TANSU-SECKIN (Türkiye) a, sur la question du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, estimé qu’il n’est parfois pas possible de distinguer les différends internationaux des différends qui ne sont pas internationaux.  Elle s’est donc félicitée du nouvel intitulé du sujet qui, selon elle, garantit que les différends de droit privé et tout autre différend « non international » entrent dans le champ d’application des travaux de la CDI.  Dans le projet de directive 2, la déléguée a noté que le terme « différend » s’inspirait de la définition de l’arrêt Mavrommatis de la Cour permanente de justice internationale, reprise par la Cour internationale de Justice (CIJ) dans de nombreuses affaires, qui tient compte de l’exigence développée par la CIJ d’une « opposition positive ». S’agissant du format du projet, elle a noté que le choix de la CDI penchait vers des directives mais s’est interrogée sur leur validité pour les litiges de nature privée, en se demandant si les personnes privées pouvaient en faire un meilleur usage dans leurs litiges avec les organisations internationales.  La déléguée a en outre appelé la CDI à la prudence, jugeant qu’elle pourrait se heurter à des difficultés dans l’élaboration de clauses types, étant donné la diversité des types de contrats et des législations nationales que ces clauses sont censées inspirer. 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a souligné, pour illustrer la gravité de la menace de la piraterie, que 33 000 navires transitaient chaque année par le golfe d’Aden. La Türkiye, a-t-elle rappelé, est un membre fondateur du Groupe de contact sur la piraterie au large de la Somalie, créé dans le cadre de la résolution 1851 (2008) du Conseil de sécurité pour lutter efficacement contre la piraterie.  Elle est présente dans la mer d’Arabie et dans les régions adjacentes avec une frégate placée sous le commandement de la Combined Task Force-151 établie au sein des Forces navales unies, et ce depuis le 17 février 2009.

M. NAGANO SHUNSUKE (Japon) a indiqué que la question de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer est particulièrement importante pour le Japon, qui dépend du transport maritime pour ses importations d’énergie, et donc de la sécurité des voies de navigation.  Le délégué a voulu souligner que son pays déploie déjà des efforts considérables pour lutter contre la piraterie, notamment en envoyant des navires d’escorte des Forces d’autodéfense japonaises au large des côtes somaliennes et dans le golfe d’Aden.  Afin de préserver la stabilité juridique, le Japon soutient l’approche de la CDI de conserver les normes sur la piraterie établies par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et de traiter en commentaires les questions relatives à la définition actuelle des actes de piraterie et de vol à main armée en mer.

Mme YOUNG JU LEE (République de Corée) a salué le travail de la CDI s’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Elle a noté que la suppression du terme « internationaux » après le mot « différends » risque d’aboutir à une extension considérable des différends soumis à l’application du projet de directives.  Elle a donc invité la CDI à clarifier sa portée. 

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a déclaré que la CDI est appelée à parvenir à un équilibre délicat.  D’un côté, elle doit s’appuyer sur la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, de l’autre, elle doit intégrer les développements postérieurs à 1982 afin d’actualiser le cadre juridique sur la piraterie prévu par la Convention et répondre aux besoins contemporains.  À ce titre, elle a estimé que les discussions approfondies contenues dans les commentaires au projet d’article 2 sont de nature à aider la communauté internationale dans l’adaptation dudit cadre juridique.

M. KEVIN TIMOTHY MEAD (Canada) a, au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, apporté son soutien à la décision de maintenir l’intégrité de la définition de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, notant que cette définition reflétait le droit international coutumier et constituait la base de la définition de la piraterie dans de nombreuses juridictions.  Il a rappelé que le Code pénal canadien définissait la piraterie en se référant au « droit des gens » en référence à la définition de la piraterie de la Convention.  S’agissant de la décision de la CDI de ne pas inclure une définition du terme « navire » dans le projet d’articles, le délégué a rappelé que l’évolution des pratiques des pirates et les nouvelles technologies obligeaient les États à « ajuster leur compréhension » de ce qui constitue un navire aux fins de la piraterie.  Il a donné l’exemple de la définition « très large » d’un navire dans la Loi sur les océans du Canada et suggéré d’adopter une définition tout aussi large pour le projet d’articles.  En ce qui concerne la définition du vol à main armée en mer, le délégué a proposé de s’en remettre à la législation nationale de l’État côtier souverain et encouragé la CDI à examiner la manière dont le vol à main armée en mer est traité par la Convention de 1988 pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime. 

M. SARVARIAN (Arménie) a recommandé, s’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, que la CDI continue ses délibérations pour trouver d’éventuels amendements aux articles 100 et 105 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Il a considéré que ces questions relevaient du droit coutumier international, par exemple s’agissant de la définition de la piraterie.  Les références à de nouvelles manifestations de la piraterie, telles que les cyberattaques et les drones, exigent de la CDI qu’elle prenne son temps pour réfléchir à ces problèmes afin de leur apporter des solutions, a-t-il noté. 

S’agissant du règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, le délégué a suggéré que les projets de directives soient reportés jusqu’à ce qu’une « discussion complète » puisse avoir lieu, par exemple sur la question de la codification.  Il a proposé la publication d’un exposé détaillé des pratiques et des solutions avancées, qui pourrait servir aux cours et tribunaux dans leurs décisions. 

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a apporté son soutien à l’approche proposée par la CDI qui consiste à inclure les différends avec des parties privées dans le champ d’application du projet de directives concernant le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties.  Les différends de ce type peuvent en effet poser d’importantes questions de droit international, comme celles qui sont liées à la personnalité juridique ou encore à l’immunité de juridiction, a relevé le délégué.  Il s’est inquiété en particulier des cas où une personne privée ne dispose d’aucun mécanisme de recours pour obtenir réparation, ce qui revient à un « déni d’accès à la justice ».  À propos de la définition de l’expression « organisation internationale », le délégué a estimé que l’ajout du terme « autres entités » mérite une analyse plus approfondie, la rédaction actuelle étant sujette à interprétation.

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a abordé le thème du règlement des différends auxquels les organisations internationales sont parties, en prenant note du fait que la CDI avait opté pour un projet de directives destiné à orienter les États, les organisations internationales et les autres utilisateurs vers des réponses « cohérentes avec la pratique contemporaine ».  Elle a apprécié l’exclusion de l’adjectif « internationaux » après le terme « différends », car nombre de différends impliquant des organisations internationales relèvent du droit privé.  La déléguée a par ailleurs informé que la Cour suprême des Philippines a rendu deux décisions reconnaissant la personnalité juridique internationale d’une organisation internationale. 

S’agissant de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, la déléguée a expliqué que la piraterie était punie par le Code pénal des Philippines qui couvre les actes commis en haute mer, et par la Loi sur la piraterie et le vol à main armée de 1974 qui réprime les actes de piraterie commis dans les eaux philippines, ces actes pouvant être commis à des fins privées ou politiques, a-t-elle précisé.  Elle a fait part du soutien de sa délégation à la préservation de l’intégrité de la définition de la piraterie contenue dans l’article 101 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  La déléguée a aussi pris note de la rédaction du projet d’article sur la zone économique exclusive, qui vise à ne pas porter préjudice aux États non parties à ladite Convention.  Il y est reconnu que zone économique exclusive et haute mer sont deux espaces maritimes distincts, avec des droits et des obligations différents, a-t-elle ajouté.  Prenant note de la nature évolutive de la « piraterie moderne », elle a conclu son intervention en suggérant à la CDI de procéder avec prudence pour la définition de ce terme. 

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a remarqué la complexité des différends auxquels des organisations internationales de plus en plus diverses sont parties, encourageant la CDI à enrichir son étude en coopérant avec les États et d’autres commissions juridiques régionales, telles que la Commission de l’Union africaine.  La Côte d’Ivoire et sa région, particulièrement le golfe de Guinée, ont été victimes à maintes reprises d’actes de piraterie, a-t-il rappelé.  En tenant compte de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, le nouveau code maritime adopté en 2017 reprend les éléments de définition de la Convention.  Le Gouvernement ivoirien a également contribué à la stratégie intégrée de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et au Code de conduite de Yaoundé, a expliqué le délégué, soulignant que ce dernier a permis de réduire la criminalité maritime dans cette zone.  Toutefois, cet instrument régional doit encore être renforcé, a-t-il estimé, appelant les États parties à redoubler d’efforts en incriminant les actes de piraterie et de vol à main armée en mer, et en établissant leur compétence pour la répression de ces crimes.  En conclusion, il a déclaré que les travaux de la CDI permettent de faire la lumière sur les pratiques nationales. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a estimé que des définitions claires et précises sont nécessaires pour garantir l’application des directives et l’efficacité des mécanismes de règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties. Il a salué l’approche de la CDI consistant à fonder ses recommandations sur la pratique existante des organisations internationales, qui est le meilleur moyen de parvenir à un consensus. En revanche, il s’est inquiété des termes incorrects utilisés pour caractériser le Saint-Siège au paragraphe 8 des commentaires du projet de directive 2.  En effet, a rappelé l’Observateur permanent, le Saint-Siège a une personnalité juridique autonome depuis le Haut Moyen-Âge et il est membre de la communauté internationale « sur un pied d’égalité avec les autres États ».  Donc, le Saint-Siège est reconnu comme un État, et non comme un « sujet du droit international sui generis ». L’Observateur permanent a demandé à la CDI de publier une correction à cette partie de son rapport.

Au sujet de la prévention et de la répression de la piraterie et du vol à main armée en mer, l’Observateur permanent a salué les efforts de la CDI visant à clarifier et à développer les normes existantes, en s’inspirant de la pratique des États et du droit international, et en fournissant des éléments de lex ferenda.  Il a salué en particulier la proposition d’inclure dans le champ d’application du projet d’articles des actes qui ne sont actuellement pas couverts par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, tels que le vol à main armée dans les eaux intérieures, les eaux archipélagiques ou la mer territoriale d’un État.  Il a également attiré l’attention de la Commission sur d’autres problèmes contemporains, tels que l’utilisation sans autorisation du pavillon d’un État pour commettre des actes illicites.

Débat général sur le module 3: chapitre VII (Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international) et chapitre IX (Succession d’États en matière de responsabilité de l’État)

M. THOMAS RAMOPOULOS, représentant de l’Union européenne, en sa qualité d’observateur, conformément à la résolution 65/276, a approuvé le rôle des moyens auxiliaires pour déterminer l’existence et le contenu des règles de droit international.  Le droit international est basé sur la volonté et le consentement des sujets du droit international qui peuvent être exprimés de manière claire ou tacite, a-t-il rappelé, le rôle des moyens auxiliaires étant d’aider à l’interprétation, à l’application et au développement de cette volonté et de ce consentement.  À cet égard, l’Union européenne (UE) invite la CDI à développer les commentaires sur les liens entre les différentes règles de droit international.  Par ailleurs, certains critères devraient permettre de distinguer entre les cours et les tribunaux, a-t-il poursuivi, évoquant également la question de la hiérarchie des décisions et des arrêts.  L’observateur a invité la CDI à fournir des directives sur les critères relatifs aux moyens auxiliaires.  L’UE, en tant qu’organisation internationale, contribue à la formation du droit coutumier international reconnu par la CDI dans son travail sur cette question et continuera à y contribuer activement, a-t-il assuré.

M. SEBASTIAN BYTH-VISHOLM (Danemark), au nom des pays nordiques, s’est félicité de l’attention portée aux moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international et de l’approche visant à établir un ensemble de projets de conclusion.  Il a salué la volonté d’apporter une clarté conceptuelle et de la cohérence dans l’application du terme « source de droit », étant donné qu’il n’existe pas de définition opérationnelle unique dans la pratique ou la théorie juridique internationale.  À cet égard, les pays nordiques soulignent l’importance de faire la distinction entre l’analyse lex lata et les évaluations théoriques des effets pratiques des décisions et des enseignements dans une perspective sociologique ou anthropologique. Les causes du droit, c’est-à-dire les facteurs susceptibles d’influencer le développement du droit international, ne doivent pas être confondues avec les sources formelles du droit, a argué le représentant, relevant la forte influence de la pratique de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans le développement du droit international.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, les pays nordiques prennent note des recommandations du Groupe de travail, estimant qu’il est utile de faire une pause pour réfléchir à la voie à suivre dans ce domaine.  La succession d’États est rare et les pratiques sont limitées, a relevé le délégué, encourageant la CDI à conserver une approche prudente.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Réfugiés: le HCR a urgemment besoin de 600 millions de dollars d’ici à la fin de l’année, déclare M. Filippo Grandi devant le Conseil de sécurité

9465e séance – matin
CS/15477

Réfugiés: le HCR a urgemment besoin de 600 millions de dollars d’ici à la fin de l’année, déclare M. Filippo Grandi devant le Conseil de sécurité

Alors que le nombre de réfugiés dans le monde bat de « tristes records » et que les perspectives pour l’année prochaine sont « sombres », le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a besoin de 600 millions de dollars d’ici à la fin de l’année, a déclaré ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M. Filippo Grandi.

Le HCR n’est pas seul dans cette situation, a-t-il en outre informé, en signalant que l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), le Programme alimentaire mondial (PAM), l’UNICEF et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) sont tous confrontés à la même crise financière.  Ces agences ont été obligées de supprimer des rations, des abris, du personnel, dans l’espoir de maintenir une bouée de sauvetage pour ceux qui en ont besoin. « Mais la bouée de sauvetage s’amincit de jour en jour. »

Ces besoins en financement urgent s’expliquent par plusieurs facteurs, notamment le nombre croissant de réfugiés dans le monde, 114 millions selon les derniers chiffres. Ils s’expliquent aussi par la réduction du nombre de grands donateurs et de l’aide qu’ils apportent; par le nombre de donateurs qui pourraient aider, mais ne s’engagent pas dans un soutien multilatéral; par le « désordre extrême » qui règne dans le monde aujourd’hui; et par le non-respect des règles fondamentales de la guerre.  Cette tendance devient même la norme et non plus l’exception, a déploré M. Grandi.

Pour illustrer ses propos, le haut fonctionnaire onusien a pris les exemples de l’Italie où affluent des migrants fuyant leurs pays; du Liban où une personne sur quatre est un réfugié palestinien ou syrien; de la République démocratique du Congo (RDC) où la violence horrible contre les femmes est répandue comme outil de guerre; de l’Arménie où 100 000 réfugiés ont fui le Karabakh en quelques jours; ou encore de l’Ukraine où plus de 11 millions de personnes ont été forcées de quitter leurs maisons après l’invasion russe.  Quant à Gaza, ce sont plus de deux millions de personnes, dont la moitié sont des enfants, qui vivent « l’enfer sur terre ».

Le Haut-Commissaire a déploré, dans ce contexte, que l’on demande aux humanitaires de recoller les morceaux et d’aider davantage de personnes, dans davantage d’endroits, sans qu’ils ne disposent des fonds nécessaires.  Il a appelé le Conseil de sécurité à ne pas sous-estimer la gravité du moment, à surmonter ses divisions et à exercer son autorité dans la situation de Gaza.  « Les choix que vous faites ou que vous ne parvenez pas à faire nous marqueront tous, ainsi que les générations à venir », a-t-il prévenu.

Cet appel à l’action a été retenu par nombre de membres du Conseil, estimant, comme la Suisse, qu’on ne peut rester indifférent face à la réalité de ces personnes qui ont dû fuir la guerre, la violence ou encore les catastrophes naturelles.  Les donateurs ont été appelés à augmenter leur soutien financier au HCR, d’autant que le déblocage de seulement 32% sur les 10,8 milliards de dollars qui lui étaient promis pour 2023 est insuffisant, a mesuré le Ghana.

La France assume sa part de responsabilité, a assuré son représentant: elle a augmenté sa contribution au HCR en 2022 et fera de même cette année, ayant déjà versé près de 95 millions d’euros.  Les États-Unis ont déclaré avoir contribué à l’UNRWA à hauteur d’un milliard de dollars depuis 2021, en plus des centaines de millions de dollars versés au HCR.  Le Japon a également fait valoir qu’il reste un grand contributeur du HCR, tandis que le Royaume-Uni a annoncé un soutien humanitaire supplémentaire de 5,5 millions de dollars en faveur des réfugiés Rohingya.  Le Gabon, lui, va contribuer à hauteur de 2 millions de dollars au HCR en soutien aux conséquences de la crise au Soudan dans les pays voisins comme le Tchad et la République centrafricaine.

Au-delà du soutien financier à apporter à l’action humanitaire, des délégations ont aussi plaidé pour des approches innovantes, d’autant, a relevé l’Équateur, que les conditions qui conduisent au déplacement sont présentes dans toutes les régions du monde.  « Nous ne pouvons plus dépendre des solutions du XXe siècle », ont estimé les États-Unis, disant attendre que le deuxième Forum global sur les réfugiés, qui se tiendra en décembre à Genève, ouvre la voie à une nouvelle coalition rassemblant le secteur privé et d’autres acteurs.  L’Albanie a d’ores et déjà lancé, en septembre dernier, une alliance entre les secteurs privé et humanitaire, qui devrait servir de plateforme pour mobiliser les ressources dès les premières heures des crises humanitaires, a indiqué sa délégation.

Dans toute approche à la question des réfugiés, l’importance du respect des principes d’égalité, de non-discrimination et de non-refoulement a été rappelée, notamment par le Brésil et la Chine.  La Fédération de Russie a dénoncé à ce propos le fait que les pays côtiers de l’Union européenne, au lieu de porter assistance aux personnes en détresse en mer, les poussent délibérément hors de leur juridiction, les condamnant à la mort, et ce, afin de préserver leur « jardin fleuri » des « invités de la jungle ».

Concernant la situation spécifique de Gaza, où plus de 60% des civils ont été déplacés, des membres du Conseil ont aussi appelé à une action plus ciblée d’Israël et du Conseil de sécurité.  Le premier doit entendre l’appel de la résolution de l’Assemble générale et renoncer à son ordre d’évacuer la bande de Gaza.  Le second doit faire tout son possible pour parvenir à un cessez-le-feu humanitaire et soutenir financièrement et de manière durable l’UNRWA, ont demandé Malte, la Chine, les Émirats arabes unis et le Brésil.  Un cessez-le-feu humanitaire peut au moins arrêter cette spirale de mort.  « Le monde attend que vous le fassiez », a conclu M. Grandi.

EXPOSÉ DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS

Déclarations

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a donné les derniers chiffres sur les personnes déplacées et réfugiées dans le monde: elles seraient 114 millions.  Il y a vu un symptôme tangible, mais parfois négligé, du désordre extrême qui règne dans le monde aujourd’hui, ainsi que du non-respect des règles fondamentales de la guerre.  Ce non-respect devient de plus en plus la norme et non plus l’exception, a-t-il déploré. Faisant référence au conflit en cours à Gaza, il a estimé que plus de deux millions de Gazaouis, dont la moitié sont des enfants, vivent « l’enfer sur terre ». Or, un cessez-le-feu humanitaire peut au moins arrêter cette spirale de mort, a-t-il dit, ajoutant espérer que le Conseil de sécurité surmontera ses divisions et exercera son autorité.  « Le monde attend que vous le fassiez. »

M. Grandi a ensuite déclaré qu’au cours de ses nombreuses années d’expérience, y compris à la tête de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), il a observé que le règlement du conflit israélo-palestinien était toujours décrit comme « infaisable ». Il a assuré que ce n’est pas le cas, expliquant que ce conflit a tout simplement été négligé à plusieurs reprises et délibérément mis de côté, presque ridiculisé, comme quelque chose de non nécessaire.  Aujourd’hui, au milieu des horreurs de la guerre, nous pouvons au moins voir à quel point cette erreur de calcul a été grave, a déclaré le haut fonctionnaire, ajoutant qu’il n’y aura pas de paix dans la région et dans le monde sans une solution juste au conflit israélo-palestinien.  Cela inclue la fin de l’occupation israélienne, a-t-il précisé. Il a espéré que les remarques du Secrétaire général formulées au Conseil la semaine dernière aideront tout le monde à réfléchir à la nécessité de tourner cette sombre page.

Le Haut-Commissaire a également pris exemple sur d’autres pays, où la situation des réfugiés exige également une attention, notamment l’Italie où afflue des migrants fuyant leurs pays; le Liban, ébranlé par l’effondrement économique dans un pays où une personne sur quatre est un réfugié palestinien ou syrien; la région du Sahel central, où la violence brutale qui terrorise les civils depuis des années augmente à nouveau; la République démocratique du Congo (RDC), où la violence horrible contre les femmes est répandue comme outil de guerre; l’Arménie, où 100 000 réfugiés ont fui le Karabakh en quelques jours; ou encore l’Ukraine, où plus de 11 millions de personnes ont été forcées de quitter leur maison après l’invasion russe.

Il a relevé qu’on demande aux humanitaires de recoller les morceaux et d’aider davantage de personnes, dans davantage d’endroits, alors qu’ils ne disposent pas des fonds nécessaires.  Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés (HCR) à lui seul a un besoin urgent de 600 millions de dollars d’ici à la fin de l’année, a-t-il informé. Il a prévenu que les perspectives pour l’année prochaine sont sombres, avec de grands donateurs qui réduisent l’aide et d’autres qui pourrait aider, mais ne s’engagent pas dans un soutien multilatéral.  Il a rappelé que l’UNRWA, dont le rôle crucial est désormais clair pour tout cela, a été chroniquement sous-financé.  Le Programme alimentaire mondial (PAM), l’UNICEF et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) sont tous confrontés à la même crise financière dans le cadre de leurs activités humanitaires et ils ont été obligés de supprimer des rations, des abris, du personnel, dans l’espoir de maintenir une bouée de sauvetage pour ceux qui en ont besoin.  Mais la bouée de sauvetage s’amincit de jour en jour, a mis en garde M. Grandi.  Il a averti en conclusion que la gravité de ce moment ne peut être sous-estimée. « Les choix que vous faites ou que vous ne parvenez pas à faire nous marqueront tous, ainsi que les générations à venir. »

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a dit que face aux nombreux défis dans le monde, le Conseil de sécurité doit faire la différence au moins à Gaza où il doit garantir la fourniture de l’aide humanitaire.  Le Conseil doit protéger les civils gazaouis et répondre à leurs besoins, a-t-elle insisté.  La représentante a demandé une protection pour les 42 millions d’enfants déplacés dans le monde ainsi que pour les millions de femmes déplacées qui font face aux violences sexuelles et sexistes.  Elle a déploré la marginalisation des personnes LGBTQ dans leurs propres pays qui les poussent à chercher l’exil.  Saluant la nouvelle approche du HCR, la déléguée a appelé à surmonter les obstacles à l’acheminement de l’aide dans de nombreux pays.

La déléguée a outre attiré l’attention sur la crise des migrants en Méditerranée en demandant la protection de leurs droits humains d’abord et en gérant la crise par le biais de partenariats ensuite.  Elle a rappelé que la guerre de la Russie en Ukraine a poussé des millions de personnes au déplacement et que celles-ci ont besoin d’aide.  En conclusion, la représentante a prié le Conseil de trouver des solutions aux causes des multiples crises notamment les changements climatiques et la gouvernance.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a dit s’engager en faveur des mécanismes multilatéraux pour faire face à la situation des réfugiés, y compris la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967.  Tout aussi important, les États Membres doivent respecter leurs obligations au titre du Pacte mondial sur les réfugiés et du Pacte mondial sur les migrations, car ils offrent des conseils sur la manière de soutenir efficacement les réfugiés et les communautés d’accueil.  Il a aussi encouragé l’approfondissement de la coopération entre les cadres multilatéraux et les mécanismes régionaux afin d’apporter des réponses rapides et durables à leur situation.  À cet égard, le délégué a appelé à accorder davantage d’attention au renforcement des mécanismes régionaux d’alerte précoce, tels que les systèmes d’alerte précoce de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine (UA), afin de garantir une action rapide et d’éviter la détérioration de telles situations.  Il a aussi jugé important de mobiliser un soutien pour remédier aux déficits de gouvernance et de développement à l’origine de nombreux conflits et d’instabilité politique.  D’autres facteurs aggravants tels que les changements climatiques doivent aussi être surveillés de près, les données disponibles suggérant qu’environ 70% des réfugiés et 80% des personnes déplacées en raison d’un conflit proviennent de pays également très vulnérables au dérèglement climatique.  Enfin, le délégué a réitéré son appel aux États Membres et aux partenaires donateurs pour qu’ils augmentent leur soutien financier au HCR, afin qu’il puisse répondre aux besoins humanitaires croissants résultant des déplacements à l’échelle mondiale.  Débloquer seulement 32% de la somme globale des 10,8 milliards de dollars promis pour 2023 demeure insuffisant, a-t-il souligné.

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a souligné que 110 millions de personnes sont actuellement déplacées dans le monde, un « triste record ».  Il a demandé de ne pas rester indifférent face à la réalité de ces personnes qui ont dû fuir la guerre, la violence ou encore les catastrophes naturelles.  Il a aussi relevé que si les besoins humanitaires ne cessent d’augmenter, ce n’est pas le cas des ressources financières.  En ce qui concerne l’accès humanitaire, il a appelé les parties concernées à veiller à ce qu’il soit rapide, sûr et sans entrave, conformément au droit international humanitaire.

L’aide humanitaire doit aller de pair avec la résolution des conflits et, surtout, avec des efforts de prévention, a fait valoir le délégué qui a appelé à rompre le cercle vicieux des conflits et des déplacements pour initier un cercle vertueux fondé sur le principe de responsabilité et de prévention, en luttant contre l’impunité.  À cet effet, il a souhaité que le Conseil et les missions de maintien de la paix de l’ONU examinent le lien entre les changements climatiques, la paix et la sécurité.  Pour améliorer la prévention et la résolution des cas de séparation et de disparition, la Suisse, en collaboration avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a établi l’Alliance mondiale pour les personnes disparues, a-t-il rappelé. Il s’est en outre félicité de la participation de réfugiés au Forum mondial sur les réfugiés, qui se tiendra en décembre, à Genève.

Mme MARIA ZABOLOTSKAYA (Fédération de Russie) a déclaré que parmi les raisons expliquant l’exode des populations hors de leurs pays, il y a des phénomènes négatifs, comme l’ingérence dans les affaires intérieures des États, dictée par la pensée néocoloniale.  Évoquant le cas des Syriens, elle a dit attacher une grande importance à la poursuite des travaux visant à faciliter leur retour volontaire, disant souhaiter que le nombre de retours augmente régulièrement.  Promouvoir la création de conditions favorables au retour des réfugiés et des personnes déplacées vers leurs lieux de résidence permanente est une étape importante vers la réalisation de stabilisation à long terme en Syrie, a-t-elle dit, appelant le HCR à soutenir la mise en œuvre de l’initiative de retour volontaire des réfugiés syriens dans leur pays.

Elle a également déclaré que depuis l’arrivée au pouvoir de nationalistes ultraradicaux en 2014, des centaines de milliers de Russes et d’habitants russophones d’Ukraine se sont précipités vers La Russie.  Depuis février 2022, plus de 5 millions d’entre eux se sont installés en Russie, qui s’efforce de les accueillir, de les héberger et de leur fournir une assistance complète.  Elle a ensuite attiré l’attention sur la situation tragique des réfugiés d’Afrique, contraints de quitter leurs pays en proie à un conflit ou détruits à la suite de « l’intervention irresponsable des États occidentaux ».

Au lieu de porter assistance aux personnes en détresse en mer, les pays côtiers de l’Union européenne (UE) les poussent délibérément hors de leur juridiction, les condamnant à la mort, a encore dénoncé la représentante.  Certains pays de l’UE interdisent même aux organisations humanitaires de venir en aide aux réfugiés, s’est-elle offusquée.  Ils font tout pour protéger leur « jardin fleuri » des « invités de la jungle », a-t-elle affirmé, disant reprendre les mots de M. Josep Borrell, le Haut-Représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de l’Union européenne.

M. YAMANAKA OSAMU (Japon) a d’abord rappelé le statut de son pays comme grand contributeur du HCR, avant de condamner, une nouvelle fois et sans équivoque, l’attaque d’une terreur brutale menée par le Hamas contre Israël ainsi que l’enlèvement de civils.  Les otages doivent être libérés immédiatement et sans condition et la communauté internationale ne devrait jamais tolérer de tels actes de haine.  Commentant la situation « catastrophique » à Gaza, le représentant a jugé important de renforcer les efforts diplomatiques pour désamorcer les tensions et les empêcher de se propager dans la région. Face à un monde qui enregistre plus de 110 millions de déplacés, il a estimé qu’il faut surtout se concentrer sur des initiatives de développement durable qui non seulement répondent aux besoins immédiats mais aussi jettent les bases d’une stabilité durable.  De telles stratégies doivent être appliquées au même rythme que les efforts de consolidation de la paix car cette approche à deux piliers peut non seulement traiter des symptômes des déplacements mais aussi de leurs causes sous-jacentes, offrant, ce faisant, des solutions durables.

En intégrant les efforts humanitaires, de développement et de consolidation de la paix, l’on peut ouvrir la voie d’un avenir où les réfugiés et les communautés d’accueil peuvent jouir d’une sécurité humaine et d’une autosuffisance renforcée.  Le Japon, a dit le représentant, a initié un programme sur le nexus humanitaire-développement-paix en prévision du deuxième Forum mondial sur les réfugiés, prévu pour le mois de décembre.  Il est impératif, a-t-il insisté, d’embrasser une approche globale et inclusive, en amplifiant les synergies entre les secteurs public et privé.  Propriétaire de la marque « Uniqlo », Fast Retailing a un partenariat de 12 ans avec le HCR et a, à ce titre, offert un programme de formation coupe-couture au Bangladesh.  De telles initiatives illustrent l’impact positif de la coopération sur la question des réfugiés.  Nous appelons, a conclu le représentant, les autres États à forger des partenariats similaires, lesquels sont significatifs pour les réfugiés.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a mentionné la « catastrophe humanitaire » à Gaza, où l’aide humanitaire ne rentre qu’au compte-gouttes, après l’attaque du 7 octobre dernier.  Les effets dans la région sont réels, en particulier au Liban qui accueille déjà des centaines de milliers de réfugiés syriens et palestiniens, dans un contexte de crise politique et économique.  Le représentant a appelé à la mobilisation pour partager le fardeau avec le Liban et la Jordanie.  L’année 2023 était déjà marquée par un triste record, avec près de 110 millions de personnes déplacées de force dans le monde.  Dans ce contexte, le représentant a rappelé que le mandat du HCR demeure plus que jamais fondamental et doit répondre à des crises nouvelles, comme le conflit au Soudan, qui a contraint près de six millions de personnes à fuir leur foyer, ou encore le déplacement de plus de 100 000 personnes, soit la totalité de la population du Haut-Karabagh, suite à l’opération de l’Azerbaïdjan.

Déterminée à rester mobilisée pour répondre aux urgences humanitaires, la France, a-t-il dit, a significativement augmenté sa contribution au HCR en 2022 et poursuivra cette hausse cette année, ayant déjà versé près de 95 millions d’euros et assumant sa part de responsabilité par l’accueil et la réinstallation de réfugiés sur son territoire.  Le délégué a enfin prévenu qu’il ne transigera pas avec les principes fondamentaux du droit au retour des réfugiés.  En Syrie, où « le régime poursuit sa politique d’ingénierie démographique soigneusement mise à l’œuvre depuis le début du conflit », les conditions d’un retour digne, sûr et volontaire ne sont pas encore réunies. Seul le régime syrien peut lever les obstacles au retour et il est essentiel que le HCR puisse assurer un suivi effectif des réfugiés syriens rapatriés, a souligné le délégué français.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a exprimé sa préoccupation quant au sort des Palestiniens qui vivent au quotidien sous le joug du Hamas, plusieurs étant aujourd'hui déplacés bien qu’ils ne soient pas responsables de la situation actuelle.  Les États-Unis mettent tout en œuvre pour remédier à la situation humanitaire urgente à Gaza, a assuré le représentant, en rappelant que son pays a contribué à l’UNRWA à hauteur d’un milliard de dollars depuis 2021.  Qui plus est, le Gouvernement américain verse des centaines de millions de dollars au HCR, et lui apporte un soutien sans faille, a-t-il ajouté.  Le deuxième Forum global sur les réfugiés qui se tiendra en décembre à Genève sera l’occasion pour les États Membres de s’engager à accroître leur aide aux réfugiés. Pour y parvenir, le représentant a estimé que le Forum doit aller au-delà des modes de financement traditionnels afin d’ouvrir la voie à une nouvelle coalition rassemblant le secteur privé et d’autres acteurs.  De plus, les réfugiés doivent être associés étroitement à ces efforts et aux solutions. « Nous ne pouvons plus dépendre des solutions du XXe siècle, car les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont des problèmes du XXIe siècle », a déclaré le représentant, en appelant à des approches innovantes pour résoudre les crises prolongées.

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a déclaré que les chiffres entendus aujourd’hui devraient alarmer et pousser à une action concertée.  En tant que Conseil de sécurité, il y une obligation morale qui s’impose et qui exige des solutions durables pour répondre à la problématique des déplacements forcés, tout en venant en aide aux communautés d’accueil.  Cela exige un appui financier, a dit le représentant, ajoutant que le secteur privé à un rôle important à jouer en la matière.  Il peut apporter, appui, financements et technologies, y compris de pointe, pour aider les acteurs humanitaires à effectuer leur travail. Consciente de cela, l’Albanie, a indiqué le représentant, a lancé au mois de septembre dernier, une alliance entre les secteurs privé et humanitaire, qui devrait servir de plateforme pour mobiliser les ressources dès les premières heures des crises humanitaires. Cette plateforme devrait également faciliter la coordination des efforts humanitaires, en suivant les principes pertinents des Nations Unies.

M. EUFRÁSIO JOSÉ MARIA IRACHANDE GOUVEIA (Mozambique) a dénoncé l’accueil hostile et la diabolisation des réfugiés dont le traitement diffère selon leur origine dans certaines destinations.  Le Mozambique accueille plus de 28 000 demandeurs d’asile et des millions de déplacés, a informé le représentant assurant que le Gouvernement mozambicain assume son devoir de générosité à leur égard.  Il a salué le travail du HCR et entendu le message du Haut-Commissaire.  Il a promis d’en faire l’écho notamment au deuxième Forum mondial sur les réfugiés qui aura lieu en décembre de cette année.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a d’abord appelé à mettre en lumière les crises négligées.  Ainsi, en 2017, plus de 740 000 Rohingya ont fui « l’horrible nettoyage ethnique » au Myanmar et ont cherché refuge au Bangladesh. Ils restent vulnérables et tributaires d’une aide qui va en diminuant.  C’est pourquoi, ce mois-ci, le Royaume-Uni, le HCR et les États-Unis ont organisé conjointement un événement de haut niveau sur les réfugiés rohingya, au cours duquel le Royaume-Uni a annoncé un soutien humanitaire supplémentaire de 5,5 millions de dollars en leur faveur.

Le délégué a aussi appelé à créer des conditions permettant aux réfugiés de rentrer chez eux de manière sûre, volontaire et digne.  Concernant la Syrie, par exemple, de nombreux réfugiés de la région souhaitent rentrer chez eux, mais déclarent ne pas se sentir en sécurité pour ce faire, a-t-il relevé.  Le Conseil, ainsi que toutes les délégations ayant de l’influence, doivent insister pour que ces conditions soient réunies.  Outre les conflits, les changements climatiques entraînent également des déplacements de population.  En conséquence, le Royaume-Uni s’associera aux Émirats arabes unis lors de la COP28 pour accroître l’accès au financement climatique pour les plus vulnérables, y compris les personnes déplacées, afin de contribuer à réduire les déplacements et l’instabilité liés au climat.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a incité la communauté internationale à déployer des efforts urgents pour soutenir les personnes déplacées et les réfugiés.  Il est crucial de faire en sorte que ces personnes aient accès aux services de base, notamment aux soins de santé, à la nourriture et à l’eau potable.  Pour ce faire, il faut renforcer la coordination entre l’ONU, les organisations humanitaires et les pays d’accueil.  Même avant la présente guerre à Gaza, qui a entraîné le déplacement de plus de 60% des civils, les deux tiers de la population étaient des réfugiés qui vivaient déjà dans des conditions difficiles.  La situation s’est considérablement détériorée depuis les frappes aériennes aveugles et l’imposition d’un siège qui a coupé l’accès à l’électricité, à l’eau et au carburant.  Actuellement, a poursuivi la représentante, l’aide autorisée à entrer à Gaza représente moins de 4% du volume d’avant-guerre.  Dans ces circonstances, il faut réclamer un accès humanitaire sûr et durable.

En outre, les réfugiés doivent être protégés contre toutes les formes de violence, y compris la violence sexuelle et sexiste, au moyen de programmes de prévention.  Il est tout aussi urgent de protéger les civils des bombardements israéliens, qui ont touché 42% des installations de l’UNRWA.  À cet égard, la représentante a rejeté les tentatives de déplacer par la force les Palestiniens et appelé Israël à annuler son ordre sur l’évacuation de plus d’un million de personnes du nord vers le sud de Gaza.

M. GENG SHUANG (Chine) a reconnu que le nombre de réfugiés dans le monde a atteint des records au moment même où les organisations humanitaires manquent de fonds. Pour répondre à ce double défi, il faut, a dit le représentant, un investissement dans le multilatéralisme, la solidarité, la mobilisation des ressources et l’appui aux pays qui accueillent les réfugiés.  Le Conseil de sécurité doit assumer ses responsabilités et répondre aux causes premières des déplacements, que sont les conflits, par la promotion des accords politiques et des garanties d’un retour sûr et ordonné des réfugiés chez eux.  La protection des réfugiés devrait en outre obéir aux règles de neutralité et de non-politisation et les sanctions qui pèsent sur la faculté des États à répondre à la problématique des réfugiés doivent être levées.

Évoquant la situation à Gaza, le représentant a déclaré que la communauté internationale doit faire tout son possible pour parvenir à une désescalade, obtenir un cessez-le-feu humanitaire et soutenir financièrement et de manière durable l’UNRWA. Israël doit entendre l’appel de la résolution de l’Assemble générale et renoncer à son ordre d’évacuer la bande de Gaza.  Par ailleurs, en tant que continent qui abrite le plus de réfugiés au monde, l’Afrique doit recevoir un appui de la communauté internationale et du HCR, a conclu le représentant.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a mis l’accent sur le sort des personnes déplacées par la force et la violence.  Rappelant qu’en 2022, plus de la moitié des demandeurs d’asile venaient de Syrie, d’Ukraine et d’Afghanistan, le représentant a dit craindre que cette tendance se poursuive cette année, puisque la violence liée au conflit, les situations humanitaires critiques, la pauvreté et l’absence de garanties persistent. Les conditions qui conduisent au déplacement sont présentes dans toutes les régions du monde et se sont détériorées à la fin de l’année 2023.  Le représentant a rappelé la réunion de sensibilisation organisée au mois de janvier dernier pour les membres élus du Conseil sur les causes et les conséquences des déplacements et de l’asile dans les conflits.  L’Équateur, a-t-il fait observer, est le pays d’Amérique latine et des Caraïbes qui compte le plus grand nombre de personnes officiellement reconnues comme réfugiées.

Il est donc essentiel de consolider les alliances aux niveaux national, régional et mondial pour promouvoir des migrations sûres, ordonnées, régulières et responsables, qui garantissent les droits des personnes concernées.  Il faut des actions coordonnées pour lutter contre les réseaux transnationaux de la criminalité organisée qui s’adonnent au trafic illicite de migrants et à la traite des personnes.  Le représentant, qui a souligné l’importance du principe de non-refoulement, a demandé que toute initiative de retour des réfugiés respecte les conditions d’un retour digne, sûr et volontaire.  Il faut combler le déficit du HCR et soutenir les personnes déplacées, a-t-il aussi estimé.

M. CHRISTOPHE NANGA (Gabon) a relevé que les dernières données statistiques du HCR, déjà « effrayantes », ne prenaient pas en compte les conséquences désastreuses de la situation à Gaza depuis le 7 octobre.

En vue d’exprimer sa solidarité et d’assurer sa part de responsabilité dans la nécessaire réponse internationale envers les réfugiés, le Gabon a décidé de donner une contribution de 2 millions de dollars au HCR en soutien aux conséquences de la crise au Soudan dans les pays voisins comme le Tchad et la République centrafricaine (RCA).  Le délégué gabonais s’est dit convaincu que c’est au travers d’une plus grande solidarité et au moyen de la coopération, dans l’esprit du Pacte mondial sur les réfugiés, que la communauté internationale pourra faire face au défi posé par les déplacements forcés.

Le soutien aux pays d’accueil des réfugiés est décisif dans la réponse globale de l’ONU, a poursuivi le représentant.  Une attention particulière est nécessaire concernant les camps de réfugiés qui constituent « des viviers pour le recrutement, l’endoctrinement et la pratique de toutes sortes d’activités criminelles incluant les groupes terroristes », selon le délégué.  Il a enfin appelé à une coopération plus engagée et à davantage d’investissements dans la prévention des conflits, notamment en direction des jeunes, à travers l’éducation, et s’est réjoui de la tenue au Gabon, en décembre prochain, du Forum mondial sur les réfugiés.

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a demandé un soutien durable et prévisible de la part de la communauté internationale pour les pays à revenus faibles ou intermédiaires, lesquels accueillent environ 90% des personnes déplacées.  Loin de constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales, ces personnes paient le prix fort de l’incapacité du Conseil de sécurité à assurer la paix, a-t-il fait valoir.  Il a aussi plaidé pour que les États Membres respectent les principes d’égalité, de non-discrimination et de non-refoulement à l’égard des réfugiés.

Pour sa part, le Brésil accorde des visas humanitaires aux personnes touchées par les crises en Afghanistan, en Syrie, en Haïti et en Ukraine, a fait savoir le représentant.  Il a aussi indiqué que son pays a mis en place un programme destiné à faciliter l’accueil et l’intégration des Vénézuéliens arrivés sur son territoire par la frontière nord.  À ses yeux, le Pacte mondial sur les réfugiés témoigne du fait qu’il n’existe pas de solution durable pour ceux-ci sans coopération internationale.  S’agissant de la situation à Gaza, le délégué a appelé à la levée de toute mesure concernant le déplacement forcé de la population civile incompatible avec le droit international.

Le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, reprenant la parole, a dit que le HCR n’a pas de mandat pour agir à Gaza où la priorité est de garantir de l’acheminent de l’aide et un cessez-le-feu humanitaire. M. Grandi a attiré l’attention sur le risque de débordement que cette situation présente notamment au Liban qui accueille plus de deux millions de réfugiés syriens.  S’agissant précisément du retour en Syrie de ces réfugiés, le Haut-Commissaire a déclaré qu’il est en discussion avec le Gouvernement sur cette question.  Il faut garantir le respect de leurs droits humains et un accès aux services publics. M. Grandi a souligné le rôle de la communauté internationale à ce sujet.  En Méditerranée, le HCR continue d’observer les tendances actuelles, a-t-il indiqué, avant d’exhorter à trouver des solutions à la situation des personnes déplacées dans leur propre pays qui sont au nombre de 114 millions dans le monde.  Le Haut-Commissaire a, pour finir, rappelé qu’il manque 600 millions de dollars dans l’escarcelle du HCR pour exécuter son mandat, à deux mois de la fin de l’année.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Malgré ses divisions, la Première Commission adopte les cinq projets de résolution sur les aspects du désarmement de l’espace extra-atmosphérique

Soixante-dix-huitième session,
27e séance – matin
AG/DSI/3730​

Malgré ses divisions, la Première Commission adopte les cinq projets de résolution sur les aspects du désarmement de l’espace extra-atmosphérique

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a adopté aujourd’hui les cinq projets de résolution relatifs au désarmement de l’espace extra-atmosphérique dont elle était saisie. Seuls deux des textes ont pu être adoptés sans vote, alors qu’à l’occasion de la mise aux voix des trois autres, trois blocs sont apparus. 

Le premier, composé notamment de la Fédération de Russie et la Chine, appuyés par l’Iran et la Syrie, préconise l’élaboration rapide d’instruments juridiquement contraignants.  Le deuxième, principalement occidental, plaide en faveur de la promotion de règles et de principes de comportement responsable. Enfin, de nombreux pays non alignés ont appuyé les deux textes dans l’intérêt de la prévention d’une course aux armements dans l’espace, tout en s’inquiétant des conséquences de deux démarches parallèles, surtout pour les petites délégations. 

L’approche du premier bloc était principalement incarnée par deux projets de résolution russes sur le « Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier » et sur de « Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace ».  Le premier est identique en substance à larésolution 77/42 de l’Assemblée générale.  Le second actualise la résolution 77/250 en prévoyant notamment, de constituer pour la période 2024-2028 un groupe de travail à composition non limitée dont les travaux s’inscriront dans le prolongement de ceux du Groupe d’experts gouvernementaux créé en 2023.  Le groupe de travail serait « chargé d’examiner les éléments fondamentaux d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace, et entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace, et de formuler des recommandations dans le cadre d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une telle course aux armements ».  L’idée est d’aller au plus vite vers un tel instrument. 

Pour la Fédération de Russie, la mise à jour de son projet de résolution sur les « nouvelles mesures » permet la mise en place d’un instrument juridiquement contraignant d’une manière inclusive, puisque le groupe de travail sera plus ouvert qu’un groupe d’experts.  La Chine a estimé que le texte pourrait créer les synergies à même de faire converger les efforts internationaux, tout en accusant les délégations occidentales de semer la division. 

C’est notamment ce dernier point qu’ont réfuté plusieurs pays opposés aux projets de résolution russes.  Le Japon a jugé problématique de créer un groupe de travail à composition non limitée alors même que le Groupe d’experts gouvernementaux décidé l’an dernier n’a pas encore commencé son travail.  La Suisse a fait observer qu’il existe déjà un autre Groupe de travail doté d’un mandat assez souple pour couvrir tous les aspects du désarmement dans l’espace.  La Nouvelle-Zélande a considéré que l’instauration d’un nouveau groupe de travail sèmerait le trouble en instaurant des instances concurrentes et risque d’épuiser les capacités de travail réduites des petits États.  Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ont fait valoir un autre contre-argument au projet russe, estimant que, pas plus que dans ses moutures précédentes, le texte ne définit de manière adéquate la notion « d’armes dans l’espace ».  Un point aussi relevé par l’Australie, selon qui on ne peut répondre aux menaces qu’en établissement clairement ce que constitue un armement spatial. 

Les deux textes ont finalement été adoptés, tous deux après plusieurs votes séparés, avec des scores très proches: 122 voix pour, 49 contre et 7 abstentions pour les « nouvelles mesures concrètes »; 127 voix pour, 50 contre et 4 abstentions pour le « non-déploiement d’armes dans l’espace en premier ». 

Proposé par le Royaume-Uni, le projet concurrent, intitulé « Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable » et qui a fait l’unanimité parmi les délégations occidentales, actualise pour sa part la résolution 76/231, laquelle avait elle aussi établi un Groupe de travail à composition non limitée, pour la période 2022-2023.  Le texte prévoit la constitution d’un nouveau groupe de travail pour la période 2024-2025, pour succéder au précédent et bâtir sur les acquis. 

Plaidant pour son texte, le Royaume-Uni a estimé que la notion de comportement responsable repose sur le droit international en vigueur, mais aussi sur le Programme commun du Secrétaire général de l’ONU et les considérations actuelles de la société civile.  À ce titre, il l’a jugée plus efficace que l’instauration de nouvelles interdictions. 

La Fédération de Russie a réitéré son opposition à la notion de « comportement responsable », relevant qu’elle n’a rien d’évident sur le plan conceptuel.  Elle a vu dans le projet du Royaume-Uni avant tout une tentative de détourner les efforts des États Membres vers des débats secondaires. La Chine a, de son côté, dénoncé un texte incapable d’objectiver la notion de comportement responsable, s’inquiétant que cette ambiguïté ouvre la voie à sa manipulation. 

Après 11 votes séparés, le projet du Royaume-Uni a finalement été adopté par 166 voix pour, 9 contre –dont la Chine et la Fédération de Russie– et 5 abstentions. 

La polarisation très marquée du débat n’a pas empêché un troisième et large groupe de délégations de soutenir aussi bien les projets russes que le projet du Royaume-Uni, l’essentiel pour elles étant d’éviter la militarisation de l’espace.  Le Mexique a jugé les deux initiatives complémentaires et les Philippines ont estimé qu’il finirait par y avoir harmonisation entre les deux processus. La plupart des membres de ce groupe qui ont expliqué leur vote ont toutefois déploré avec l’Argentine que les projets engendrent des doublons et épuisent les capacités de travail des petites délégations. 

En toute fin de séance, la Première Commission a entamé l’examen des projets de résolution et de décision sur le chapitre des armes classiques, sur lesquelles elle se prononcera, demain mercredi 1er novembre, à partir de 10 heures.

DÉCISION SUR TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION DÉPOSÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE (SUITE)

Groupe thématique 3 – Espace extra-atmosphérique (aspects de désarmement)

Déclarations générales

Le représentant du Royaume-Uni a présenté le projet de résolution L.15/Rev.1 « Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable », en soulignant l’urgence de sortir de l’impasse où se trouve la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Notre initiative met l’accent sur toutes les menaces qui pèsent sur l’espace, a‑t‑il ajouté, affirmant que la notion de comportement responsable, qui se nourrit du droit international en vigueur applicable, de Notre programme commun du Secrétaire général de l’ONU mais aussi des vues actuelles de la société civile, est plus efficace que l’instauration de nouvelles interdictions. 

Le représentant de la Chine a présenté les trois projets de résolution concurrents de l’initiative britannique, L.53, L.54 et L.55, tous ces textes proposant, a‑t‑il dit, de négocier un instrument juridiquement contraignant pour prévenir une course aux armements dans l’espace.  Notre Commission a besoin de synergie pour faire converger les efforts internationaux plutôt que de demandes qui divisent les délégations, à l’instar des demandes de votes séparés sur le projet de résolution L.55 -« Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace »-, a-t-il ajouté. 

Le représentant de la Fédération de Russie a observé que, dans le monde moderne, la prospérité dépend de plus en plus du domaine spatial.  Dans ce cadre, il a considéré que la préservation de son utilisation pacifique est une priorité.  Il a appelé de ses vœux le développement d’approches collectives pour lutter contre la militarisation de l’espace et garantir l’accès pour tous aux bienfaits des technologies spatiales.  Pour ce faire, il a préconisé l’élaboration d’un outil juridiquement contraignant à même de prévenir le déploiement d’armes et la menace du recours à l’emploi de la force dans l’espace.  Dans ce cadre, il a estimé que le projet de résolution L.55 « Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace » représente une approche cohérente et inclusive, notamment en prévoyant la création d’un groupe de travail à composition non limitée qui travaillerait sur la base du consensus, ainsi que d’autres mécanismes pour créer des outils juridiquement contraignants.  Poursuivant, il a également salué les projets de résolution L.54 -« Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales »- et L.53 -« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier ». 

Le représentant s’est dit perplexe face à la position des pays occidentaux, qui estiment impossible de développer un instrument juridiquement contraignant, les accusant de bloquer les négociations.  Selon lui, cette attitude est principalement liée au fait que les États-Unis et leurs alliés comptent utiliser l’espace pour se livrer à des opérations militaires.  Leur idée de comportement responsable est utilisée à des fins de propagande, a‑t‑il poursuivi, jugeant que cette approche contredit leurs déclarations selon lesquelles ils seraient prêts à adopter des approches collectives. 

La représentante de Cuba a rappelé qu’elle est coautrice des projets de résolution L.3 -Prévention d’une course aux armements dans l’espace »-, L.53, L.54 et L.55.  Elle a plaidé en faveur du droit légitime de tous les États à avoir accès à l’espace bien commun de l’humanité, pour des activités pacifiques.  Elle a soutenu l’adoption d’un traité international juridiquement contraignant, y compris sur l’interdiction du déploiement d’armes dans l’espace.  Rappelant que le Groupe d’experts gouvernementaux, établi conformément à la résolution 77/250, a pour objectif de préparer un tel instrument, elle a également préconisé la création d’un groupe de travail à composition non limitée pour permettre la participation de tous les États – comme demandé par le projet de résolution L.55.  Elle a également soutenu les mesures volontaires de renforcement de transparence et de confiance, jugeant toutefois qu’elles ne peuvent remplacer un instrument juridiquement contraignant. 

Explications de vote avant le vote

Le représentant de la République islamique d’Iran a expliqué son vote contre le projet de résolution L.15 révisé -«  Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable ».  Il a estimé que l’espace est le patrimoine commun de l’humanité et qu’il existe une menace d’armement de l’espace extra-atmosphérique qu’il faut éviter.  Il faut en outre partager les compétences en la matière en transférant de l’équipement, des mesures de transparence et de confiance.  Le représentant a estimé qu’une poigné de pays possède un monopole des technologies qu’il faut rejeter. 

Le représentant des États-Unis, s’exprimant au nom de son pays, de la France et du Royaume-Uni, a expliqué son vote contre le projet de résolution L. 55 -« Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace ».  Ces trois pays ont toujours collaboré avec les États Membres pour éviter une course aux armements dans l’espace.  Il faut travailler ensemble pour éviter les comportements dangereux, a insisté le représentant.  Il faut donc réduire les menaces ou ce qui est perçu comme des menaces concernant les activités extra-atmosphériques.  C’est pour cette raison que ces pays ont soutenu le projet de résolution L.15, révisé, qui propose la création d’un groupe de travail à composition non limitée. Le représentant a plaidé pour des comportements responsables, accusant la Fédération de Russie d’avoir procédé à un essai de tir antisatellite qui a créé plus de 1 000 débris.  Le projet de résolution L.55 n’est pas la réponse adéquate. 

Le représentant de l’Espagne, au nom de l’Union européenne, a expliqué son vote contre le projet de résolution L.55 en insistant sur le besoin de davantage de mesures concrètes et sur le respect du Traité sur l'espace extra-atmosphérique.  Le projet de résolution L.55 est ambigu sur ce qui constitue une arme dans l’espace, a‑t‑il estimé, ce qui peut réduire le sentiment de sécurité. Le groupe de travail à composition non limitée proposé dans le projet L.55 a des lacunes et ne fait que répéter le travail du Groupe d’experts gouvernementaux sur la prévention de la course aux armements dans l’espace.  Quant au projet de résolution L.53 -« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier »- contre lequel les membres de l’Union européenne ont voté, le représentant a estimé que cette initiative ne répond pas à la question de savoir ce qu’est une arme dans l’espace, ajoutant que ce défaut pourrait donner lieu à des erreurs de calcul et d’interprétation.  Le représentant a fait part de sa préoccupation face au risque de voir la Fédération de Russie abattre des satellites commerciaux. 

Le représentant de l’Australie a indiqué que sa délégation voterait contre les projets de résolution L.53 et L.55, ces textes échouant à définir clairement ce qu’est un armement dans l’espace et, partant, à répondre aux menaces identifiées par la communauté internationale pesant sur les systèmes spatiaux.  Nous ne sommes pas favorables à la création d’un processus parallèle au Groupe de travail spécial sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, lequel apporte déjà des contributions fondamentales sur cette question d’intérêt commun, a‑t‑il ajouté. 

Le représentant de la Malaisie a expliqué que sa délégation voterait en faveur des deux projets de résolution parallèles et selon lui non concurrents sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, soit le projet de résolution britannique L.15/Rev.1 et le projet de résolution présenté par la Chine sur le non-placement en premier d’arme dans l’espace (L.53).  Il a toutefois invité les deux parties à conjuguer leurs efforts en vue d’aboutir à un processus délibératif unique sur cette question à l’examen à l’ONU. 

Le représentant de la Fédération de Russie a indiqué que son pays voterait contre le projet de résolution L.15/Rev.1, la notion de comportement responsable n’ayant rien d’évident sur le plan conceptuel.  Le traitement thématique de questions comme celle de sureté des activités spatiales relève de la compétence avérée du Comité des utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique, a‑t‑il ajouté.  Ainsi a‑t‑il considéré l’initiative du Royaume-Uni comme une tentative pour détourner les efforts des États Membres de l’ONU vers des débats secondaires.  Il est temps de passer à des obligations pour empêcher le placement d’armes dans l’espace afin d’en pacifier l’exploitation au bénéfice de tous, a‑t‑il encore dit. 

La représentante de la Nouvelle-Zélande s’est déclarée préoccupée par le projet de résolution L.53 -« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier »-, estimant qu’il risque de formuler un accord tacite pour un placement d’armes en second.  De même, elle a déploré que ne soient pas prises en compte les réalités physiques de l’environnement spatial et le double usage potentiel de nombreuses technologies spatiales dans les mécanismes de vérification. Elle a évoqué le vote de son pays contre le projet de résolution L.55, l’année dernière, rappelant que si l’objectif du projet était alors de générer des débats sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique avant d’établir un groupe d’experts gouvernementaux, il propose maintenant de créer un groupe de travail à composition non limitée sur quatre ans avant même que commence le travail du groupe d’experts gouvernementaux.  Cette approche sème le trouble et risque d’épuiser les capacités de travail réduites des petits États, a‑t‑elle estimé. 

Le représentant du Canada a annoncé un vote négatif sur les projets de résolution L.53 -« Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier »- et L.55 -« Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace »- pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment par l’Union européenne. 

Décisions sur les projets de résolution

La Première Commission a adopté, sans vote,  un projet de résolution intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace » (A/C.1/78/L.3)

Aux termes de ce texte, identique dans son dispositif à la résolution 77/40 adoptée le 7 décembre 2022, l’Assemblée générale, se félicitant que la Commission du désarmement ait adopté par consensus en 2023 des recommandations visant à promouvoir l’application des mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales aux fins de la prévention d’une course aux armements dans l’espace, réaffirmerait qu’il est important et urgent de prévenir une course aux armements dans l’espace. 

L’Assemblée générale constaterait une fois encore que le régime juridique applicable à l’espace ne suffit pas, à lui seul, à garantir la prévention d’une course aux armements dans ce milieu.  Elle demanderait à tous les États, en particulier aux États dotés de capacités spatiales importantes, de contribuer activement à la réalisation de l’objectif qui consiste à utiliser l’espace à des fins pacifiques et à prévenir la course aux armements dans l’espace, et de s’abstenir d’actes incompatibles avec cet objectif et avec les traités en vigueur en la matière.  Elle inviterait la Conférence du désarmement à créer aussi tôt que possible un groupe de travail au titre du point de son ordre du jour intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace ». 

La Première commission a adopté, par 166 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée) et 5 abstentions (Inde, Niger, Pakistan, Sri Lanka et Tadjikistan),  un projet de résolution intitulé «  Réduire les menaces spatiales au moyen de normes, de règles et de principes de comportement responsable » (A/C.1/78/L.15/Rev.1). 

Aux termes de ce texte, qui actualise la résolution 76/231 adoptée le 24 décembre 2021, l’Assemblée générale déciderait de convoquer, à Genève, un nouveau groupe de travail à composition non limitée, dont les travaux s’inscriront dans le prolongement de ceux accomplis par son prédécesseur en 2022 et 2023 et par d’autres organismes compétents, dont le Groupe d’experts gouvernementaux créé par sa résolution 77/250.  Se basant sur le cadre juridique international en vigueur, y compris les principes du droit international, le nouveau groupe de travail serait chargé, entre autres, de développer le concept et de formuler des recommandations sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace par l’élaboration de normes, de règles et de principes de comportement dans différents domaines, notamment la détérioration et la destruction volontaires de moyens spatiaux, les menaces qui pèsent sur le fonctionnement sûr des objets spatiaux, les opérations de rendez-vous et opérations de proximité susceptibles d’augmenter le risque de malentendus et d’erreurs d’appréciation et la protection des services spatiaux essentiels fournis aux civils et des services appuyant les opérations humanitaires. 

L’Assemblée générale déciderait que le groupe de travail à composition non limitée lui soumettra un rapport à sa quatre-vingt-unième session et qu’il adoptera ses conclusions et recommandations finales par consensus. Elle déciderait également que le groupe de travail tiendra une session d’organisation de deux jours et deux sessions de fond de cinq jours chacune en 2025 ainsi que deux sessions de fond de cinq jours chacune en 2026, et que la présidence du groupe de travail pourra tenir entre les sessions des réunions consultatives avec des parties intéressées afin d’échanger des vues sur les questions relevant du mandat du groupe. 

Votes séparés

Alinéa 8 du préambule: 150 voix pour, 8 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua,  République arabe syrienne et République islamique d’Iran), 5 abstentions (Guinée, Inde, Kazakhstan, Niger et Sri Lanka). 

Alinéa 13 du préambule: 146 voix pour, 10 contre, 7 abstentions (Arabie saoudite, Inde, Kazakhstan, Niger, Nigéria, Sénégal et Soudan). 

Alinéa 15 du préambule: 146 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 7 abstentions (Arabie saoudite, Inde, Kazakhstan, Niger, Sénégal, Soudan et Tchad). 

Paragraphe 2 du dispositif: 151 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 3 abstentions (Inde, Niger et Sri Lanka). 

Paragraphe 4 du dispositif: 140 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran et République populaire démocratique de Corée), 12 abstentions. 

Paragraphe 5 du dispositif: 144 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 9 abstentions (Brunéi Darussalam, Inde, Mexique, Niger, République démocratique populaire lao, Sénégal, Soudan, Sri Lanka et Togo). 

Paragraphe 6 du dispositif: 144 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 8 abstentions (Brunéi Darussalam, Inde, Niger, République démocratique populaire lao, Sénégal, Sri Lanka, Soudan et Togo). 

Paragraphe 7 du dispositif: 123 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, et République islamique d’Iran et République populaire démocratique de Corée), 30 abstentions. 

Paragraphe 8 du dispositif: 119 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 32 abstentions. 

Paragraphe 9 du dispositif: 147 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran, et République populaire démocratique de Corée), 6 abstentions (Brunéi Darussalam, République démocratique populaire lao, Soudan, Sri Lanka, Tchad et Togo). 

Paragraphe 10 du dispositif: 149 voix pour, 9 contre (Bélarus, Chine, Cuba, Fédération de Russie, Mali, Nicaragua, République arabe syrienne, République islamique d’Iran et République populaire démocratique de Corée), 3 abstentions (Inde, Niger et Sri Lanka). 

La Première commission a adopté, par 127 voix pour, 50 voix contre et 4 abstentions (Côte d’Ivoire, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Suisse et Türkiye) un projet de résolution intitulé « Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier » (A/C.1/78/L.53). 

Aux termes de ce texte, identique en substance à la résolution 77/42 adoptée le 7 décembre 2022, l’Assemblée générale, gravement préoccupée par la possibilité d’une course aux armements dans l’espace et l’éventualité que celui-ci devienne le théâtre d’affrontements militaires, et ayant à l’esprit l’importance des articles III et IV du Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, soulignerait qu’il importe au plus haut point de respecter strictement le régime juridique en vigueur, applicable à l’utilisation de l’espace à des fins pacifiques. 

L’Assemblée générale demanderait instamment que des travaux de fond débutent au plus tôt, sur la base du projet révisé de traité relatif à la prévention du déploiement d’armes dans l’espace et de la menace ou de l’emploi de la force contre des objets spatiaux, présenté par la Chine et la Fédération de Russie à la Conférence du désarmement en 2008, au titre du point de l’ordre du jour intitulé « Prévention d’une course aux armements dans l’espace ». 

Votes séparés

Alinéa 5 du préambule: 118 voix pour, 49 contre, 5 abstentions (Côte d’Ivoire, Haïti, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Suisse et Türkiye). 

Alinéa 9 du préambule: 116 voix pour, 49 contre, 5 abstentions (Côte d’Ivoire, Maurice, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Suisse et Türkiye). 

Alinéa 11 du préambule: 118 voix pour, 47 contre, 5 abstentions (Côte d’Ivoire, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République de Corée, Suisse et Türkiye). 

La Première Commission a adopté, sans vote, un projet de résolution intitulé « Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales » (A/C.1/78/L.54). 

Aux termes de ce texte, qui actualise la résolution 77/251 adoptée le 30 décembre 2022, l’Assemblée générale ferait sien le texte intitulé « Recommandations visant à promouvoir l’application des mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales aux fins de la prévention d’une course aux armements dans l’espace, conformément aux recommandations figurant dans le rapport du Groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales », que la Commission du désarmement a adopté par consensus. 

L’Assemblée générale déciderait d’organiser une table ronde commune d’une demi-journée de la Commission des questions de désarmement et de la sécurité internationale (Première Commission) et de la Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) pour examiner les risques éventuels pour la sécurité et la viabilité des activités spatiales. 

La Première Commission a adopté, par 122 voix pour, 49 voix contre et 7 abstentions (Chili, Fidji, Géorgie, Guatemala, Honduras, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Suisse) un projet de résolution intitulé « Nouvelles mesures concrètes de prévention d’une course aux armements dans l’espace » (A/C.1/78/L.55). 

Aux termes de ce texte, actualisé sur la base de la résolution 77/250 adoptée le 30 décembre 2022, l’Assemblée générale se féliciterait de la création en 2023 du Groupe d’experts gouvernementaux chargé d’examiner les éléments fondamentaux d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et, entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace, et de formuler des recommandations à ce sujet. 

L’Assemblée générale déciderait, afin d’assurer la continuité et la cohérence de l’examen des questions relatives à la prévention d’une course aux armements dans l’espace, dès la cessation des activités du Groupe d’experts gouvernementaux susmentionné, de constituer pour la période 2024-2028 un groupe de travail à composition non limitée dont les travaux s’inscriraient dans le prolongement de ceux du Groupe d’experts gouvernementaux et qui serait chargé d’examiner les éléments fondamentaux d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et, entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace, et de formuler des recommandations à ce sujet, ainsi que d’examiner divers aspects de la prévention d’une course aux armements dans l’espace dans le cadre d’un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace. 

L’Assemblée générale déciderait que le nouveau groupe de travail à composition non limitée travaillerait sur la base du consensus, sans préjudice des positions respectives que chaque État adoptera dans le cadre de futures négociations, et tiendrait à Genève sa session d’organisation de deux jours en 2024, ainsi que huit sessions, à savoir deux sessions par an de 10 et 5 jours chacune, en 2025, 2026, 2027 et 2028.  Elle prierait le Secrétaire général de prêter toute l’aide nécessaire au groupe de travail à composition non limitée et à sa présidence et de lui transmettre le rapport du groupe à sa quatre-vingt-troisième session, ainsi qu’à la Conférence du désarmement et à la Commission du désarmement. 

L’Assemblée générale déciderait que, si la Conférence du désarmement adopte et met en œuvre un programme de travail équilibré et global, prévoyant notamment des négociations sur un instrument international juridiquement contraignant visant à prévenir une course aux armements dans l’espace et, entre autres, le déploiement d’armes dans l’espace, le nouveau groupe de travail à composition non limitée mettra fin à ses travaux et en présenterait le résultat au Secrétaire général pour transmission à la Conférence du désarmement. 

Votes séparés

Alinéa 5 du préambule: 113 voix pour, 49 contre, 6 abstentions (Chili, Fidji, Géorgie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Suisse et Soudan du Sud). 

Paragraphe 8 du dispositif: 98 voix pour, 49 contre, 18 abstentions.

Paragraphe 9 du dispositif: 97 voix pour, 49 contre, 19 abstentions.

Paragraphe 10 du dispositif: 99 voix pour, 49 contre, 17 abstentions.

Paragraphe 11 du dispositif: 100 voix pour, 49 contre, 16 abstentions. 

Le représentant de la Suisse a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.53 -«  Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier ».  S’il a concédé qu’un instrument juridiquement contraignant dans ce domaine est important, il a toutefois émis des doutes concernant le libellé.  Il a en outre expliqué son vote contre plusieurs paragraphes du projet de résolution L.55 par le fait qu’il existe déjà un Groupe de travail à composition non limitée doté d’un mandat assez souple pour couvrir tous les aspects de la question.  En outre, le groupe de travail prévu par le projet de résolution L.55 n’est pas suffisamment inclusif. 

Le représentant du Pakistan a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.15/Rev.1 par le fait que la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique doit être la boussole ultime.  Nous avons toujours plaidé pour un instrument juridiquement contraignant, même si les deux approches sont complémentaires, a‑t‑il déclaré.  Les discussions du premier Groupe de travail à composition non limitée ont permis de comprendre les divergences conceptuelles.  La dernière ébauche du projet L.15 a apporté des progrès, mais insuffisants, a‑t‑il déclaré, demandant une approche équilibrée sur les comportements et les capacités.  Il y a des initiatives concurrentes concernant ces projets de résolution, ce qui va diviser les délégations, et rendre la tâche difficile pour les petites délégations, a encore fait observer le représentant, qui s’est dit prêt à participer à tout groupe de travail à composition non limitée sur cette question. 

La représentante de l’Indonésie a expliqué son vote en faveur des deux projets de résolution L.15/Rev.1 et L.55 en se disant convaincue que l’établissement d’un instrument juridiquement contraignant devrait être une priorité absolue. La présence de ces deux textes reflète la défiance, le manque de dialogue et nous ne devons pas laisser ces facteurs nuire à notre travail, a ajouté la représentante.  L’Indonésie prend note que les deux propositions de groupe de travail à composition non limitée se concentrent sur des thématiques proches et complémentaires.  Tous ces processus in fine ont pour objectif de rendre l’espace extra-atmosphérique plus sûr.  C’est pourquoi l’Indonésie a voté en faveur des deux, y compris lors de tous les votes séparés. 

La représentante de Singapour a indiqué avoir voté en faveur des deux projets de résolution L.15 et L.55, appelant les auteurs de ces initiatives à s’entendre pour que soit établi un mécanisme intergouvernemental unique de délibérations en matière de prévention d’une course aux armements dans l’espace. 

Le représentant de Sri Lanka a indiqué s’être abstenu sur le projet de résolution L.15, les dédoublements du processus délibératif dans le domaine de la prévention d’une course aux armements dans l’espace risquant de poser des problèmes insolubles de participation aux plus petites délégations. 

Le représentant des États-Unis, au nom également de la France et du Royaume-Uni, a indiqué que ces délégations avaient voté contre le projet de résolution L.53 car, comme par le passé, le texte ne définit pas comme il se doit la notion d’arme dans l’espace.  Sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace, eu égard au contexte actuel, il convient en premier lieu d’envisager dans un cadre dédié des mesures de confiance qui s’appuient sur le droit international applicable à l’espace et des normes reposant sur la notion de comportement responsable des États, a‑t‑il dit. 

Le représentant de l’Argentine a expliqué son vote en faveur des projets de résolution concurrents L.15 et L.55, réaffirmant son soutien à l’instauration d’un groupe d’experts gouvernementaux et d’un groupe de travail à composition non limitée pour la lutte contre la course aux armements dans l’espace.  Il a toutefois averti qu’il fallait éviter les doublons, notamment parce qu’ils rendent difficile la participation des délégations. 

La représentante des Philippines a expliqué son vote en faveur des projets de résolution L.15 et L.55, rappelant qu’elles participent au Groupe d’experts gouvernementaux sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Ce double vote souligne la volonté de son pays de contribuer à la stabilité et à la sécurité dans l’espace.  Reconnaissant qu’il est délicat de soutenir la mise en place de deux groupes de travail, la représentante a toutefois estimé qu’il y aurait harmonisation si les deux propositions venaient à être mises en œuvre.  Elle a toutefois souligné le risque que ces propositions séparées fassent peser un fardeau sur les plus petites délégations.  Enfin, elle a réaffirmé le soutien de son pays au principe de comportement responsable dans l’espace, estimant qu’il implique la considération des intérêts d’autrui, quand bien même il n’est pas absolu. 

Le représentant du Mexique a dit avoir voté en faveur des projets de résolution L.15 et L.55, estimant qu’il s’agit d’approches complémentaires.  Il s’est dit également en faveur de l’élaboration d’instruments juridiquement contraignants pour prévenir une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique.  Il a cependant expliqué son abstention sur certains paragraphes du dispositif de ces projets, notamment dans le L.55, en ce qui concerne la création d’un groupe de travail à composition non limitée avant même que le groupe d’experts intergouvernementaux ait commencé son travail.  Enfin, concernant le vote de son pays en faveur du projet de résolution L.53 visant à prévenir une course à l’armement dans l’espace, il a rappelé que son soutien ne doit pas être interprété comme une approbation tacite d’un supposé droit à déployer des armes dans l’espace en second. 

Le représentant de la République islamique d’Iran a expliqué son vote pour les projets de résolution L.53 «  Non-déploiement d’armes dans l’espace en premier » et L.54 «Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales ». Toutefois, il a estimé que s’il s’est joint au consensus, cela ne correspond pas pourtant à son appui au groupe de travail à composition non limitée. 

Le représentant de l’Inde a expliqué son abstention sur le projet de résolution L.15 révisé.  Il a déclaré être attaché à un espace extra-atmosphérique pacifique, qui est la nouvelle frontière de l’humanité.  Il s’est dit favorable à un instrument juridiquement contraignant pour la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique car la notion de menaces dans l’espace extra-atmosphérique pacifique préoccupe l’Inde. Mais, a‑t‑il ajouté, il faut à cet égard des définitions consensuelles.  S’agissant du projet de résolution L.53, le représentant a dit soutenir l’objectif de prévenir sans restriction la militarisation de l’espace extra-atmosphérique car il faut éviter une course dans l’espace. 

Le représentant du Japon a expliqué son vote contre le projet de résolution L.55.  S’il s’est dit en accord avec la prévention d’une course aux armements dans l’espace extra-atmosphérique, il a estimé que le texte contient des sujets problématiques, notamment le fait qu’il prévoit la création pour l’avenir d’un groupe de travail à composition non limitée alors même que le Groupe d’experts gouvernementaux déjà décidé n’a pas encore commencé sa session de travail.  Il n’y a pas d’urgence à la création d’un tel groupe de travail à composition non limitée, a estimé le représentant. 

Le représentant de la Chine a indiqué avoir voté contre le projet de résolution L.15, qualifié de texte subjectif qui ne permet pas d’objectiver la notion de comportement responsable, ce qui ouvre la voie à sa manipulation. Le nouveau groupe de travail envisagé au titre de ce texte constituerait un processus parallèle dédié, ayant également pour finalité potentielle la négociation d’un instrument juridiquement contraignant, ce qui est source de confusion, a‑t‑il ajouté.  Pour le représentant, la négociation d’un tel instrument est une priorité urgente qui doit engager tous les efforts de la communauté internationale dès à présent. 

Le représentant du Brésil a indiqué que son pays avait voté pour les projets L.15, L.53 et L.55 pour des raisons similaires à celles invoquées par Singapour précédemment.  À son tour, il a appelé les auteurs de ces initiatives à se rapprocher autour de points de convergence afin qu’à terme, émerge un seul processus délibératif sur la prévention d’une course aux armements dans l’espace.  Faute de quoi, cet éparpillement continu des ressources rendra impossible aux petites délégations d’apporter leur contribution à la paix, a‑t‑il averti. 

Le représentant de l’Égypte a expliqué que sa délégation avait elle aussi appuyé les projets de résolutions L.15, L.53 et L.55, en donnant les mêmes explications que celles de son homologue du Brésil. 

Le représentant de l’Égypte a expliqué son soutien aux projets de résolution L.15 et L.55, conformément à sa position de principe qui vise à favoriser toutes les initiatives pour élaborer un outil juridiquement contraignant et prévenir la course à l’armement dans l’espace.  Il a toutefois voulu expliquer son abstention concernant le paragraphe 4 du dispositif du projet L.15 et le paragraphe 8 du projet L.55, soulignant les conséquences négatives de ce qu’il a estimé être deux processus rivaux. Cette situation risque de polariser les efforts, a‑t‑il averti, exprimant son espoir d’une harmonisation future. 

Le représentant de la Türkiye a expliqué son vote contre le projet de résolution L.55, estimant qu’il faut avant tout distinguer objectifs civils et militaires, mais aussi augmenter la transparence et la confiance.  Dans la situation internationale actuelle, la formation prochaine d’une base juridique commune est peu probable, a‑t‑il jugé, considérant que cela n’empêche pas de travailler en vue de l’introduction d’instruments juridiquement contraignants à l’avenir.  Dans ce but, il a estimé que la promotion de normes de comportements responsables représente la meilleure voie. 

La représentante du Costa Rica a notamment expliqué les raisons de son vote en faveur des projets de résolution L.15 et L.55.  Si elle a salué la mise en place d’un groupe de travail à composition non limitée, elle a toutefois estimé qu’il aurait été préférable de ne créer qu’un seul groupe, regrettant que les coauteurs des deux projets n’aient pu se mettre d’accord.  À l’avenir, elle a préconisé un unique groupe de travail à composition non limitée, estimant la situation actuelle peu idéale en termes de charge de travail.  Elle a lancé un appel pour que le travail soit abordé de manière constructive dans les deux groupes. 

La représentante de Cuba a expliqué son vote contre le projet de résolution L.15 révisé par le fait que ce texte créé des doublons concernant les activités dans l’espace extra-atmosphérique.  Pour Cuba, le déploiement d’armes et la modernisation des armes dans l’espace sont les principales menaces.  Or, ce texte a pour objectif de donner de la légitimité à des objectifs spatiaux qui sont définis par des libellés ambigus, a estimé la représentante.  En outre, le projet de résolution a pour objectif de créer la possibilité d’élaborer de nouvelles normes, mais ces mesures ne peuvent pas remplacer un instrument juridiquement contraignant pour parvenir à une militarisation de l’espace.  Pour Cuba, il faut mettre un terme à l’absence d’interdiction au déploiement d’armes dans l’espace.  La représentante a en outre fait part de ses réserves concernant la notion de comportement responsable des États, qu’elle a opposée à l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant, objectif de long terme mais qui mérite qu’on s’y attarde. 

La représentante d’El Salvador a expliqué son vote en faveur des projets de résolution L.15/Rev.1 et L.55, tout en se disant consciente qu’ils aboutissent à la création de deux projets parallèles, ce qui pose problème pour les petites délégations.  Il y a un manque de souplesse, de capacité à transcender nos différences, a‑t‑elle déploré, ce qui rend impossible de travailler dans des conditions équitables. 

Le représentant d’Israël a expliqué s’être associé au consensus sur les projets de résolution L.3 -« Prévention d’une course aux armements dans l’espace »- et L.54 -« Mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales »- tout en ajoutant que son pays avait des réserves, qu’il n’a pas expliquées. 

Groupe thématique 4 – Armes classiques

Déclarations générales

Le représentant de l’Autriche a présenté le projet de résolution L.56 sur les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA), première du genre à la Commission. Il a ajouté que ce texte est neutre et équilibré, à même de permettre à la communauté internationale d’aider à relever les défis vis-à-vis de ce nouveau type d’armes.

La représentante du Japon a présenté le projet de résolution L.40 sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC) sous tous ses aspects, rappelant que la prévention de ce dernier et du détournement des ALPC implique que la communauté internationale relève ensemble ces défis.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité fait le bilan de la situation humanitaire en Ukraine à l’approche de l’hiver

9464e séance – matin
CS/15476

Le Conseil de sécurité fait le bilan de la situation humanitaire en Ukraine à l’approche de l’hiver

Réuni à la demande de l’Équateur et de la France pour examiner la situation humanitaire en Ukraine, 21 mois après l’invasion menée par la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité a entendu ce matin un exposé du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) mettant l’accent sur les effets dévastateurs de la destruction d’infrastructures essentielles pour les civils ukrainiens.  Les membres du Conseil se sont inquiétés de ces dégradations, en particulier à l’approche de l’hiver qui pourrait avoir, comme l’an dernier, des conséquences désastreuses.

M. Ramesh Rajasingham, Directeur du Bureau de la coordination de l’OCHA, a d’abord relayé un message du Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, pour qui les graves événements en cours au Moyen-Orient ne devraient pas faire perdre de vue d’autres crises aux conséquences aussi graves que celle imposée à l’Ukraine où le conflit continue d’infliger des souffrances inimaginables. Partout en Ukraine, les frappes aériennes, les tirs d’artillerie et les combats au sol se poursuivent au quotidien, a-t-il ensuite informé, en soulignant les risques supplémentaires subis par les populations proches des lignes de front en raison des mines antipersonnel.  En termes de pertes humaines, selon le décompte du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, plus de 9 900 civils ont été tués depuis le début de l’invasion, soit 16 civils par jour, le bilan réel étant certainement plus élevé.

Le haut fonctionnaire a également détaillé les graves conséquences pour la population des destructions d’infrastructures essentielles, en termes d’accès à l’électricité, au chauffage, à l’eau et aux télécommunications, ce qui suscite une préoccupation particulière à l’approche de l’hiver et des températures qui commencent à chuter vers -20 degrés Celsius. 

Devant cet état des lieux, plusieurs délégations, dont la France, le Japon et le Gabon, ont fait valoir l’importance cruciale de l’acheminement de l’assistance humanitaire, notamment pour les quatre millions de personnes qui en sont privées dans les zones contrôlées par la Russie dans l’est de l’Ukraine.  L’OCHA a d’ailleurs rendu hommage aux plus de 500 organisations humanitaires, dont 400 locales, qui ont fourni une aide vitale à neuf millions de personnes au cours des neuf premiers mois de 2023.

L’OCHA a également saisi cette occasion pour saluer les contributions substantielles des donateurs au Plan de réponse humanitaire pour l’Ukraine de 2023: plus de 2 milliards de dollars reçus sur 3,9 milliards.  Le Ghana et l’Équateur ont en outre pris note de la mise en place d’un plan d’intervention hivernale ciblant 900 000 personnes vulnérables, déplacées et touchées par la guerre, entre septembre de cette année et février 2024.

L’Ukraine a confirmé les craintes pour sa population en renvoyant aux images terrifiantes de l’hiver dernier du pilonnage continu des infrastructures énergétiques ukrainiennes.  Le délégué a fondé ses craintes sur le stockage de missiles de la Russie, en prévision selon lui d’une campagne de bombardement hivernale.  Il a réclamé des systèmes de défense aérienne pour protéger les infrastructures de son pays, rappelant qu’environ cinq millions de ses concitoyens sont considérés comme déplacés et que ceux qui habitent près des lignes de front ne disposent que d’un accès limité aux soins.

Malte, la Suisse et l’Albanie, parmi d’autres, ont mentionné les conclusions de la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine qui a révélé de nouvelles preuves d’actes pouvant constituer des crimes de guerre commis par la Russie, notamment des meurtres, des actes de torture, des viols, ainsi que des expulsions d’enfants vers ce pays.  L’Albanie a d’ailleurs prévenu qu’une telle situation risque d’empirer, le Ministère russe de la défense ayant révélé qu’il recrutait des prisonniers pour combattre en Ukraine, comme l’a fait auparavant le groupe Wagner.

La France a décrié la décision unilatérale de la Russie de mettre un terme à la mise en œuvre de l’Initiative de la mer Noire, qui montre qu’elle continue d’instrumentaliser les produits alimentaires.  Les attaques contre les ports et les infrastructures céréalières de l’Ukraine ont détruit plus de 280 000 tonnes de céréales en un mois, une quantité suffisante pour nourrir plus d’un million de personnes pendant un an, s’est érigé à son tour le Royaume-Uni.  L’Union européenne a soutenu tous les efforts visant à faciliter les exportations de céréales et d’autres produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient.

À l’occasion de cette réunion sur la question humanitaire, les membres du Conseil ont réitéré leurs appels à la cessation immédiate des hostilités pour privilégier le dialogue et une « diplomatie agissante », ainsi qu’au retrait des troupes russes et de tout son équipement militaire du territoire ukrainien.  Une lueur d’espoir est apparue avec la réunion, à Malte les 28 et 29 octobre, des conseillers à la sécurité nationale d’une cinquantaine de pays (sans la Russie), axée sur la formule de paix proposée par le Président Zelenskyy.

Le délégué de la Fédération de Russie a estimé que les membres occidentaux du Conseil « rivalisent d’ingéniosité pour dénoncer les problèmes humanitaires », mais que dans d’autres cas, comme dans le conflit israélo-palestinien, ils relèguent ces mêmes problèmes à l’ombre, « pour des raisons politiques ». Son homologue des Émirats arabes unis a souligné à cet égard le prix à payer lorsqu’on laisse les conflits s’envenimer, citant elle aussi le cas du Moyen-Orient où un « nouveau chapitre sanglant » du conflit israélo-palestinien est en train de s’écrire, avec des conséquences horribles et disproportionnées sur les civils.  Elle a fait appel au devoir et à la responsabilité du Conseil de sécurité de mettre un terme à ces conflits, au lieu de se contenter de les gérer.

Le Brésil, qui achève aujourd’hui sa présidence du Conseil, a encouragé à faire usage de l’Article 33 de la Charte des Nations Unies relatif au règlement pacifique des différends, afin de parvenir à une paix juste, globale et durable, en misant sur les négociations diplomatiques et le respect du droit international.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE

Déclarations

Intervenant par visioconférence, M. RAMESH RAJASINGHAM, Directeur du Bureau de la coordination du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a déclaré, au nom du Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, que les graves événements au Moyen-Orient ne devraient pas faire perdre de vue d’autres crises, aux conséquences aussi graves que celle imposée à l’Ukraine, où le conflit continue d’infliger des souffrances inimaginables.  Dans tout le pays, les frappes aériennes, les tirs d’artillerie et les combats au sol se poursuivent quotidiennement, la vie étant dominée par le son constant des sirènes de raids aériens, alors que les frappes aériennes incessantes pleuvent et détruisent des biens civils: « un jour, un bureau de poste, un autre jour, un petit café, un autre encore, une épicerie ».  Près des lignes de front, les habitants ont maintenant la routine quotidienne de se frayer un chemin sur les terres contaminées par les mines, a-t-il encore décrit. 

M. Rajasingham a indiqué que, selon le dernier décompte, plus de 9 900 civils ont été tués depuis le début de l’invasion, soit 16 civils par jour, sachant que le bilan réel est certainement plus élevé.  Les dommages importants et la destruction d’infrastructures essentielles continuent d’avoir de graves répercussions sur l’accès de la population civile à l’électricité, au chauffage, à l’eau et aux télécommunications, ce qui suscite une préoccupation particulière à l’approche de l’hiver et des températures qui commencent à chuter vers -20 degrés Celsius.

Le Directeur a souligné que, depuis le début de l’invasion, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a également vérifié plus de 1 300 attaques contre les structures sanitaires, ce qui équivaut à plus de 55% de l’ensemble des attaques contre ce type d’installations dans le monde au cours de la même période.  Ainsi, 111 travailleurs de la santé et patients ont été tués et bien plus d’autres blessés.  Depuis le début de septembre, 13 centres de santé ont été touchés par des attaques, or les dégâts infligés à l’infrastructure sanitaire coïncident avec une période où l’on en a le plus besoin, a affirmé M. Rajasingham, qui a ajouté que dans certaines régions de l’est et du sud, les services ont été décimés. 

Les organisations humanitaires n’ont pas été épargnées et l’environnement opérationnel est devenu de plus en plus dangereux à mesure que la guerre en Ukraine se poursuit, a-t-il témoigné.  Le nombre de travailleurs humanitaires tués a plus que triplé, passant de 4 en 2022 à 14 jusqu’à présent en 2023.  Les attaques contre les installations humanitaires ont également augmenté, notamment la destruction ou l’endommagement d’installations de stockage d’aide et de fournitures de secours.  Les attaques aveugles sont strictement interdites au titre du droit international humanitaire, a martelé M. Rajasingham. 

Les frappes russes se sont également poursuivies sur les infrastructures portuaires de la mer Noire et du Danube, ayant des répercussions sur les exportations de céréales et d’autres denrées alimentaires.  Le Directeur a ajouté que l’Ukraine a néanmoins signalé un nombre croissant de navires entrant et sortant de ses ports de la mer Noire à travers un couloir temporaire annoncé en août, à la suite du retrait de la Fédération de Russie de l’Initiative de la mer Noire. 

Il a jugé impératif que toutes les sources d’approvisionnement alimentaire soient reliées de manière sûre et durable aux chaînes d’approvisionnement mondiales, précisant que le fonctionnement des ports ukrainiens et la capacité des cargos à traverser la mer Noire de manière sûre et prévisible ont une incidence directe sur les prix mondiaux des denrées alimentaires et, par extension, sur la sécurité alimentaire mondiale.  Toute escalade plus large de la situation en mer Noire pourrait avoir des conséquences mondiales considérables, a-t-il prévenu en renouvelant son appel au Conseil pour qu’il fasse tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher cela. 

Rappelant les besoins, il a précisé qu’à l’heure actuelle, quelque 18 millions de personnes, soit plus de 40,4% de l’ensemble de la population ukrainienne, ont besoin d’une forme d’aide humanitaire, alors que 10 millions de personnes sont également toujours déplacées, soit à l’intérieur du pays, soit en tant que réfugiées dans d’autres pays.  Déplorant que la guerre prive les enfants ukrainiens de l’éducation, de la stabilité et de la sécurité dont ils ont besoin, il a craint que leurs blessures mentales de la guerre ne les affectent jusqu’à l’âge adulte.  Malgré les risques, a-t-il encore dit, plus de 500 organisations humanitaires, dont 400 locales, ont fourni une aide vitale à neuf millions de personnes au cours des neuf premiers mois de 2023, ce qui a été rendu possible grâce aux contributions substantielles des donateurs au Plan de réponse humanitaire pour l’Ukraine de 2023: plus de 2 milliards de dollars ont été reçus sur 3,9 milliards de dollars pour cette année. 

M. Rajasingham a enfin rappelé que l’un des défis les plus importants reste le manque d’accès humanitaire aux parties des oblasts de Donetsk, Kherson, Luhansk et Zaporizhzhia sous le contrôle militaire temporaire de la Fédération de Russie.  « Nous sommes extrêmement préoccupés par le sort des civils dans ces territoires que les agences humanitaires ne sont pas en mesure d’atteindre de manière adéquate. »  Les conséquences de l’absence d’assistance aux quelque quatre millions de personnes dans le besoin dans ces régions sont désastreuses, en particulier à l’approche des mois d’hiver, a-t-il estimé, plaidant à nouveau auprès de toutes les parties en faveur d’un passage sans entrave pour l’aide humanitaire. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a insisté sur la nécessité que les parties au conflit respectent strictement leurs obligations découlant du droit international humanitaire, y compris les principes d’humanité, de distinction, de proportionnalité et de prudence.  Elles doivent aussi protéger les travailleurs humanitaires, a-t-il ajouté, exhortant en particulier la Fédération de Russie à faciliter un accès humanitaire sûr dans les zones sous son occupation temporaire, d’autant plus que l’hiver approche et que la population souffre du manque d’accès aux services de base, y compris les services d’eau, d’assainissement et de santé.  Le délégué a également appelé les parties à s’abstenir d’utiliser des explosifs dans des zones peuplées, en raison de leurs conséquences humanitaires désastreuses. 

Le représentant a ensuite exprimé sa préoccupation quant à la situation de tous les déplacés et réfugiés qui ont fui la guerre, à commencer par les enfants.  « Quelles générations d’enfants survivants aurons-nous en Ukraine et dans le reste du monde? » s’est-il interrogé, disant rejoindre l’avis exprimé par la Directrice exécutive de l’UNICEF, Mme Catherine Russell, pour qui « toute guerre est, en fin de compte, une guerre contre l’enfance ».  Concluant, le délégué a appelé à changer de dynamique et à fournir au Secrétaire général les mécanismes nécessaires à l’approfondissement des efforts humanitaires et politiques pour parvenir à une paix juste et durable. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a constaté que la Russie entreprend à nouveau de cibler les infrastructures civiles alors que l’hiver approche.  Il a rappelé que le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile constitue un crime de guerre. Citant des chiffres selon lesquels l’agression russe a déjà fait au moins 23 000 victimes civiles, dont plus de 1 000 enfants, il a exhorté la Russie à se conformer au droit international humanitaire, en permettant l’accès des acteurs humanitaires aux populations civiles qui se trouvent dans les territoires qu’elle occupe.

La guerre d’agression russe contre l’Ukraine a également entraîné des répercussions négatives sur le reste du monde, dont la Russie porte seule l’entière responsabilité, a ajouté le représentant.  La décision unilatérale de la Russie de mettre un terme à la mise en œuvre de l’Initiative céréalière de la mer Noire montre qu’elle continue d’instrumentaliser les produits alimentaires, ce qui entraîne « une crise alimentaire mondiale sans précédent » et « un renchérissement inouï du coût de la vie ».  La France demeure quant à elle engagée pour permettre l’exportation des céréales et produits agricoles ukrainiens avec ses partenaires européens, à travers la mise en œuvre de « voies de solidarité » ayant permis l’exportation par voies fluviales et terrestres d’au moins 53 millions de tonnes de céréales et autres produits alimentaires, a affirmé le délégué.  Dans ce contexte, la Russie « ne peut compter sur notre lassitude », a-t-il dit, estimant que la conférence de Londres, qui se tiendra en novembre en préparation de l’hiver, constituera une nouvelle occasion de le démontrer. 

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a décrié la poursuite des attaques russes contre les infrastructures civiles de l’Ukraine notant qu’en septembre dernier, la Russie a lancé 44 missiles et plus de 100 frappes aériennes contre ces biens publics.  Le représentant a rappelé que la capacité de production d’électricité de l’Ukraine a diminué de moitié depuis le début de la guerre.  Plus de 300 000 tonnes de céréales ont été détruites par les attaques russes.  La Russie poursuit également ses attaques des points de distributions de l’aide, s’est indigné le représentant dénonçant un pays qui fait de l’hiver une arme de guerre. Il a appelé la communauté internationale à aider à rétablir le réseau énergétique de l’Ukraine.

Le délégué a également rappelé que Washington a octroyé 2,8 milliards de dollars d’aide humanitaire à l’Ukraine depuis 2022.  Il faut aujourd’hui renforcer les efforts pour faire face à l’hiver, a-t-il plaidé, appelant à réparer les abris et à envoyer plus d’aide alimentaire et de vêtements.  Il a insisté sur le soutien nécessaire pour protéger les groupes les plus vulnérables. « M. Putin se trompe, car notre soutien à l’Ukraine restera fort », a-t-il déclaré pour conclure.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a fait observer qu’en dépit des événements dramatiques qui se déroulent au Moyen-Orient, l’agression militaire injustifiée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine n’a pas cessé.  La guerre ininterrompue qui dure depuis 23 mois a causé des dégâts civils extrêmes et fait près de 23 000 victimes, a-t-il rappelé, constatant que la Russie continue de cibler les infrastructures vitales, les zones résidentielles, les écoles et les hôpitaux de l’Ukraine.  De plus, cette invasion « brutale » a plongé des millions de personnes dans la pauvreté et a gravement affecté l’économie ukrainienne, a relevé le représentant, pour qui la situation humanitaire devrait encore se détériorer au cours de l’hiver, exposant les civils à des risques supplémentaires. 

Dans ce contexte, le représentant a fait valoir que la protection des infrastructures critiques et de la population civile sont des tâches prioritaires.  Vendredi dernier, a-t-il rappelé, la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a informé le Conseil des actes de torture, des meurtres, des séquestrations et d’autres crimes graves commis par les troupes russes sur le territoire ukrainien.  Or, a poursuivi le délégué, cette situation pourrait empirer, le Ministère russe de la défense ayant révélé qu’il recrutait des prisonniers pour combattre en Ukraine, comme l’avait fait auparavant le groupe Wagner. Malgré ces défis, il a estimé que l’Ukraine a fermement construit son avenir économique, culturel et politique avec l’Europe, ce que la Russie a tenté d’empêcher pendant des années. Alors que cette guerre d’agression entre dans son deuxième hiver complet, nous devons reconnaître que son issue déterminera de manière significative la manière dont notre monde sera ordonné, « par le droit ou par la violence brute », a-t-il conclu. 

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a fait valoir que la fin de la guerre serait la meilleure garantie contre l’héritage de mort, de souffrance, de destruction et de déplacement que ce conflit est en train de créer.  Depuis le début du conflit en février 2022, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a répertorié 9 806 morts et 17 962 blessés, a-t-elle noté en prenant note de la mise en place d’un plan d’intervention hivernale ciblant 900 000 personnes vulnérables, déplacées et touchées par la guerre entre septembre de cette année et février 2024.  Elle a dit attendre avec impatience d’autres rapports sur sa mise en œuvre. 

La déléguée a relevé plusieurs allégations de violences sexuelles et sexistes commises à l’encontre des femmes et des filles et réitéré son appel à traiter ces violations et à poursuivre les autres crimes de guerre.  Rejetant toute impunité en Ukraine, elle a appuyé une approche holistique de l’obligation de rendre des comptes, qui consiste à mettre délibérément l’accent sur la justice et le soutien aux victimes.  La représentante a enfin réitéré l’appel à la cessation immédiate des hostilités et misé sur la diplomatie et le dialogue plutôt que sur les contestations militaires.  Elle a espéré ainsi un règlement pacifique, juste et global du conflit, aligné sur les principes du droit international et les valeurs et buts de la Charte des Nations Unies. 

M. EUFRÁSIO JOSÉ MARIA IRACHANDE GOUVEIA (Mozambique) a reconnu que la crise humanitaire en Ukraine est complexe et multiforme.  Il a par conséquent appelé à des actions et des efforts concertés de la part de toutes les parties, pour mieux s’attaquer aux causes profondes de cette crise. L’impératif humanitaire n’est pas une option, a-t-il dit.  Le représentant a jugé regrettable que les conflits restent le principal moteur des crises humanitaires et que la grande majorité des victimes des conflits soient des civils.  Selon lui, seules les solutions politiques peuvent résoudre ces crises.  L’aide humanitaire ne peut apporter qu’un soulagement temporaire, pas s’attaquer à la cause profonde du problème, a-t-il insisté. 

Une solution politique basée sur une approche de coopération plutôt que sur la concurrence est donc nécessaire, a poursuivi le délégué, jugeant essentiel de trouver des moyens de résoudre les différends de manière pacifique.  Les initiatives de paix peuvent contribuer à réduire les tensions entre les nations et à promouvoir la compréhension mutuelle et la coopération, a-t-il encore fait valoir, admettant qu’il ne s’agit pas là d’une tâche facile, mais qu’elle mérite d’être poursuivie dans l’intérêt d’un avenir meilleur pour tous. 

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a souligné, l’hiver approchant, la nécessité pour les civils d’avoir accès à l’électricité et au chauffage. Le mois dernier, des attaques contre les infrastructures énergétiques ukrainiennes ont eu un impact sur l’approvisionnement en électricité de près d’un tiers des régions ukrainiennes, a-t-elle signalé, rappelant que les parties à un conflit armé doivent s’abstenir d’attaquer, de détruire et de rendre inutiles les biens indispensables à la survie des populations civiles.  La loi est également claire sur la nécessité impérative de protéger les civils et le personnel humanitaire et médical, a-t-elle poursuivi, avant d’adresser ses condoléances aux familles et aux proches des six travailleurs humanitaires tués en Ukraine le mois dernier. 

Appelant à un règlement juste de cette guerre, la déléguée émirienne a répété un nouvelle fois qu’il n’existe pas de solution militaire au conflit et que seules des négociations directes permettraient d’instaurer une paix durable entre la Russie et l’Ukraine.  Cette position demeure inchangée, a-t-elle insisté, réaffirmant la volonté des Émirats arabes unis de soutenir tout effort crédible dans ce sens.  Elle s’est déclarée parfaitement consciente du prix à payer lorsqu’on laisse les conflits s’envenimer.  Dans sa propre région, un « nouveau chapitre sanglant » du conflit israélo-palestinien est en train de s’écrire, avec des conséquences horribles et disproportionnées sur les civils.  Selon elle, se réunir ne suffit pas: le Conseil de sécurité a le devoir et la responsabilité de mettre un terme à ces conflits, au lieu de se contenter de les gérer, a-t-elle conclu. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a relevé que des millions d’Ukrainiens sont confrontés à de graves situations à cause de l’invasion brutale, illégale et à grande échelle de la Russie avec plus de 5 millions d’Ukrainiens déplacés et plus de 17 millions ayant besoin d’une aide humanitaire.  Elle a noté que la Russie refuse toujours l’accès humanitaire aux territoires temporairement sous son contrôle, où des millions d’Ukrainiens font face à des pénuries de nourriture, de carburant et d’eau. Elle a appelé la Russie à permettre aux humanitaires de travailler en toute sécurité dans ces territoires, notant que les organisations ukrainiennes et les réseaux de volontaires restent les principaux intervenants humanitaires dans ces régions les plus dangereuses de l’Ukraine. 

La déléguée a appelé la Russie à respecter le droit international humanitaire et à cesser d’utiliser la nourriture comme arme de guerre.  Elle a noté que ses attaques contre les ports et les infrastructures céréalières de l’Ukraine ont détruit plus de 280 000 tonnes de céréales en un mois, une quantité suffisante pour nourrir plus d’un million de personnes pendant un an.  Elle a donc exigé que la Russie mette fin à son invasion illégale de l’Ukraine qui est l’unique manière de protéger les marchés alimentaires mondiaux et de mettre fin aux souffrances du peuple ukrainien.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Maltea condamné les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme perpétrées par la Fédération de Russie depuis le début de sa guerre d’agression en Ukraine.  La semaine dernière, la Russie a bombardé un terminal postal dans la région de Kharkiv, un site strictement civil, tuant six civils innocents, a-t-elle cité en exemple. La déléguée s’est inquiétée de l’impact de ce conflit sur la santé mentale et physique des populations, ainsi que sur leurs moyens de subsistance et leur accès à l’éducation et aux soins de santé.  De plus, l’arrivée de l’hiver apportera une nouvelle dimension à la grave crise humanitaire qui affecte près de 18 millions de personnes, soit la moitié de la population du pays.  Une aide humanitaire durable et prévisible sera donc essentielle pendant la saison froide, a-t-elle noté. 

Le 19 octobre dernier, a poursuivi la déléguée, la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a dévoilé de nouvelles preuves montrant que les autorités russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine, notamment des meurtres, des actes de torture, des viols, ainsi que des expulsions d’enfants vers la Fédération de Russie.  Elle a condamné ces actes « déplorables », qui peuvent constituer des crimes de guerre.  La représentante a exprimé sa détermination à faire en sorte que Moscou soit tenue pleinement responsable de ses crimes. 

M. GENG SHUANG (Chine) a regretté la gravité de la situation humanitaire en Ukraine, surtout à l’approche de l’hiver, la population étant exposée tant aux flammes de la guerre qu’à la rigueur du froid.  En outre, a-t-il dit, la crise a affecté la sécurité alimentaire mondiale, ralenti la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et l’économie mondiale.  Le représentant a appelé en conséquence à réduire les effets de cette crise.  La position de la Chine depuis le début du conflit reste la même, a-t-il réaffirmé: elle plaide pour la cessation immédiate des hostilités, le renforcement du dialogue et, sur la base du consensus, l’instauration d’un climat général et des conditions propices à la reprise des pourparlers entre les belligérants.  La Chine continue à œuvrer dans cet objectif, a-t-il conclu. 

M. CHRISTOPHE NANGA (Gabon) a rappelé aux parties au conflit qu’elles doivent s’en tenir à leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, notamment à celle de protéger les personnes qui ne participent pas aux combats et les infrastructures civiles.  Il leur a aussi demandé de garantir un accès sans entraves ni discrimination de l’aide humanitaire aux zones où les besoins se font sentir.  Le représentant a par ailleurs appelé les belligérants à ne pas recourir à des armes de destruction massive aux effets indiscriminés, telles que les mines, les armes à sous-munitions ou autres armes téléguidées. Il a enfin appelé, une fois de plus, au dialogue, saluant à cet égard le « Sommet pour la paix » qui s’est tenu les 28 et 29 octobre dernier à Malte.  La délégation du Gabon encourage toute initiative allant dans le sens de la recherche de solutions politiques pour mettre fin à ce conflit, a conclu le représentant.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse), réclamant des actions pour protéger les civils, a paraphrasé la Coordonnatrice résidente de l’ONU en Ukraine, selon laquelle « le seul moyen de changer la situation est d’arrêter la guerre ».  Elle a ensuite réitéré son appel à la Russie pour qu’elle cesse toutes ses opérations de combat et retire ses troupes sans condition. Rappelant que la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a sommé la Russie de mettre fin à ses violences contre des civils, la déléguée suisse a appelé à prendre toutes les précautions possibles pour protéger les infrastructures civiles, dont une grande partie a été endommagée lors des attaques massives de l’hiver dernier.

Les règles du droit international humanitaire, y compris les principes fondamentaux relatifs à la conduite des hostilités, sont obligatoires, a-t-elle martelé.  L’hiver approchant, la grave crise humanitaire en Ukraine prend une nouvelle dimension, a-t-elle constaté, avant de louer le travail inlassable des organisations humanitaires locales, nationales et internationales, plus de neuf millions de personnes affectées par la guerre ayant reçu de l’aide depuis le début de l’année.  Jugeant consternant qu’au cours du seul mois de septembre, six travailleurs humanitaires aient été tués en Ukraine, elle a réclamé que l’accès rapide et sans entrave de l’aide humanitaire soit garanti, y compris dans les régions sous occupation russe. 

La représentante a conclu son propos en rappelant les lourdes implications régionales et internationales du conflit pour la sécurité alimentaire mondiale.  Elle a salué les efforts continus de l’ONU pour faciliter les exportations de denrées alimentaires et d’engrais de l’Ukraine et de la Russie vers les marchés mondiaux, afin de réduire la pression sur les plus vulnérables du monde entier.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a déploré la grave crise humanitaire engendrée par la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine.  Il s’est félicité à cet égard que la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine examine les preuves de crimes de guerre commis par les forces russes.  Le représentant a rappelé à la Russie les obligations qui lui incombent, notamment de mettre fin immédiatement aux attaques contre les civils et les infrastructures civiles, de rendre des comptes pour les crimes de guerre commis et de respecter le patrimoine culturel ukrainien.  La Russie doit également garantir un accès humanitaire durable et sans entrave et assurer la sécurité de la navigation en mer Noire, a-t-il ajouté, appelant une nouvelle fois au retrait immédiat et sans conditions des troupes russes du territoire ukrainien. 

Le représentant a informé le Conseil que son gouvernement a fourni 7,6 milliards de dollars d’aide humanitaire à l’Ukraine, dont deux transformateurs pour renforcer la production d’électricité et couvrir le besoin d’un demi-million de personnes en hiver.  Le Japon apporte aussi son aide dans la lutte antimines, le relèvement des moyens de subsistance, l’amélioration des services publics et le renforcement de la démocratie et de la gouvernance, a-t-il signalé, ajoutant que son pays prête assistance aux voisins de l’Ukraine qui accueillent des réfugiés ukrainiens. Enfin, après avoir demandé à l’ONU d’assurer la protection de la navigation en mer Noire et un approvisionnement mondial stable en produits alimentaire et de première nécessité, il a assuré que le soutien du Japon à l’Ukraine et son peuple est inébranlable. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est tout d’abord indigné que le Conseil de sécurité tienne en octobre sa deuxième séance sur la situation humanitaire en Ukraine dans le contexte d’un conflit israélo-palestinien « féroce », au sujet duquel les États-Unis et leurs alliés n’ont convoqué aucune réunion.  Lors de certaines réunions, les membres occidentaux du Conseil « rivalisent d’ingéniosité pour dénoncer les problèmes humanitaires », mais dans d’autres, ils relèguent ces mêmes problèmes dans l’ombre, « pour des raisons politiques », a-t-il commenté.

Sans vouloir minimiser « l’ampleur de la tragédie » de la population ukrainienne, qu’il a qualifiée de « multiforme », le représentant a néanmoins affirmé que son origine est le « coup d’État d’inspiration occidentale » de 2014, aggravé par la volonté du « régime de Kiev » de servir à tout prix les intérêts géopolitiques occidentaux pour affaiblir la Russie.  Il a signalé qu’à plus d’une occasion, la « clique ukrainienne » aurait pu faire taire les armes, en particulier pour faire cesser la guerre contre la population civile du Donbass, qui a commencé il y a plus de neuf ans, et s’abstenir de glorifier les « collaborateurs nazis » responsables de la mort de centaines de milliers de Juifs, Roms, Polonais, Russes et Ukrainiens.  Au lieu de cela, le régime ukrainien aurait dû, selon lui, accorder à l’ensemble de la population du pays, sans exclusion ni discrimination, les droits dont jouissent les résidents de la grande majorité des autres États, y compris au sein de l’Union européenne que l’Ukraine « cherche désespérément à rejoindre ». 

Kiev a besoin de « tragédies très médiatisées » pour que le public occidental s’émeuve, a soutenu le représentant, dénonçant le fait que les missiles de défense aérienne ukrainiens qui tombent sur des infrastructures civiles soient présentés comme des frappes russes.  Selon lui, des tragédies odieuses comme celles de Boutcha, Kramatorsk ou Konstantinovka sont manipulées et leurs auteurs et organisateurs « ne sont pas gênés par les réfutations ».  L’essentiel est pour eux de lancer aux masses un autre mensonge sur la Russie et de mendier de nouvelles armes, a-t-il assené. 

Parallèlement, il a dénoncé les diverses « structures biaisées » créées en Occident pour produire des rapports et des données poursuivant le même but.  Il a ainsi accusé Kiev, Washington, Londres et Bruxelles de diffuser de la propagande et des récits russophobes, qui occultent délibérément les informations sur les victimes et les destructions sur le territoire du Donbass et dans la région de la mer d’Azov.  Pour rectifier ces narratifs, il a indiqué qu’entre février 2022 et septembre 2023, le territoire de la « République du Donetsk » a été soumis plus de 25 000 fois à des frappes d’artillerie et de missiles par les forces armées ukrainiennes.  Au cours de cette période, 4 712 civils ont été tués sur le territoire de cette république, dont 139 enfants.  De plus, 5 289 personnes, dont 356 enfants, ont été blessées, a-t-il affirmé, ajoutant que des mines antipersonnel PFM-1 Lepestok ont causé la mort de 136 civils, dont 11 enfants.  Il a en outre dénoncé les attaques ukrainiennes contre 1 500 infrastructures civiles, dont 1 100 installations électriques, assurant que la Russie, elle, ne vise « que des cibles militaires ».  Il a enfin renvoyé au « rasage complet » de la bande de Gaza par Israël, comparable selon lui à ce qu’ont déjà fait les États-Unis à Fallouja et Raqqa. 

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) s’est inquiété des difficultés auxquelles la population ukrainienne sera soumise dans les mois à venir, aggravant sa situation déjà désastreuse avec la baisse attendue des températures dans la région. Il a rappelé aux parties leurs obligations en droit international et en droit international humanitaire.  Il a souligné que c’est la quatrième réunion publique du Conseil sur la crise ukrainienne depuis le début du mois sous présidence brésilienne, avant de rappeler que son pays défend la cessation des hostilités et la reprise du dialogue entre les parties. 

Le représentant a aussi rappelé que l’Article 33 de la Charte des Nations Unies (règlement pacifique des différends) fournit les moyens de parvenir à une paix juste, globale et durable, misant donc sur les négociations diplomatiques et le strict respect du droit international.  Il a souligné à cet égard le rôle important de la communauté internationale qui peut exercer son influence auprès des parties pour trouver une issue à la crise. Le représentant a alors salué les efforts des autres acteurs internationaux.  Il a dit que son pays reste disposé à contribuer aux initiatives visant à un règlement pacifique de cette crise, dès que les parties seront prêtes à engager des négociations. 

M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a rappelé que près de cinq millions de ses concitoyens sont considérés comme déplacés et que ceux qui habitent près des lignes de front n’ont qu’un accès limité aux soins.  Alors que la saison froide approche, il a évoqué « les images terrifiantes de l’hiver dernier », quand la Russie pilonnait sans relâche les infrastructures énergétiques ukrainiennes.  Alarmé par les renseignements dont il dispose faisant état d’un stockage de missiles par la Russie, en prévision d’une campagne de bombardement hivernale, le représentant a réclamé des systèmes de défense aérienne pour protéger les infrastructures de son pays.  Dénonçant les dégâts environnementaux causés par l’agression russe, ainsi que la prolifération des mines, il s’est attardé sur la région de Kharkiv, la plus attaquée ce mois-ci, ainsi que sur les prétextes mensongers utilisés par la Russie pour frapper.  Après avoir cité un rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, selon lequel les forces armées russes pilonnent délibérément des cibles civiles à l’aide de missiles balistiques Iskander, il a jugé « particulièrement absurde » que la Russie brandisse encore l’excuse du nazisme alors que sévit sur son territoire « une véritable hystérie antisémite » à l’heure actuelle.

Le délégué a comparé le Hamas palestinien aux forces russes, les deux utilisant la terreur comme moyen d’action.  « La Russie prétend libérer le Donbass; en fait, elle libère le Donbass de tout ce qui y vit », a-t-il martelé, faisant état de villes réduites en cendres, de viols, de tortures et d’intimidations d’une incroyable cruauté, avant d’évoquer le sort d’une famille de région de Donetsk, exterminée, « car elle avait refusé de laisser son foyer aux troupes russes ».

Qualifiant d’« espoir idéaliste » la perspective d’un cessez-le-feu sans libération des territoires occupés, le représentant a prévenu que les crimes russes ne demeureront pas impunis.  Il a réclamé une attention constante de l’ONU, qui doit condamner « de manière plus audible et plus forte » les crimes de l’agresseur.  Il a par ailleurs signalé que le projet de résolution annuelle présenté à l’Assemblée générale sur la situation des droits humains en Ukraine a été élargi pour englober tous les territoires occupés temporairement.  Soulignant l’importance « vitale » que revêt ce texte, il a invité tous les États Membres à s’en porter coauteurs.  Le délégué a ensuite dénoncé la propagande russe « déshumanisante » et « meurtrière », qui met tout en œuvre pour que les populations russes considèrent ce « génocide » comme acceptable.  Il a dressé un parallèle avec la vague d’antisémitisme en cours en Russie, évoquant des « pogroms » ainsi que des manifestations nostalgiques de l’Allemagne nazie.  Jugeant ridicule l’hypothèse lancée par la Russie selon laquelle l’Ukraine dirigerait ces manifestations en sous-main, il a assuré que son pays n’aspire qu’à la paix et au respect de la Charte des Nations Unies.

M. OLOF SKOOG, Chef de la délégation de l’Union européenne (UE), a exigé que la Russie cesse ses frappes aériennes systématiques contre des biens civils essentiels en Ukraine, notant qu’elles ne font que priver les Ukrainiens d’électricité, de chauffage, de nourriture, de soins médicaux, d’eau et de capacités d’exportation de céréales de l’Ukraine.  Y voyant d’autres preuves de crimes de guerre des dirigeants russes, il a rappelé qu’il y a aussi quatre millions de personnes vivant dans des zones contrôlées par l’armée russe, sans aide humanitaire.  Il a exhorté la Russie à garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave à toutes les zones sous son contrôle temporaire, regrettant qu’aucun convoi humanitaire interinstitutions n’ait pu passer des zones contrôlées par le Gouvernement ukrainien aux zones hors de son contrôle. Il a également dénoncé les mines terrestres et restes de guerre russes, qui non seulement entravent les efforts de secours et d’acheminement de l’aide, mais présentent également une grave menace pour la vie des civils.

L’approche de l’hiver a fait craindre au délégué européen que la Russie continuerait de cibler les infrastructures essentielles en Ukraine rappelant que ces attaques sont déjà menées ces dernières semaines, contre la centrale nucléaire de Khmelnytskyi.  Il a annoncé que l’UE allait fournir des groupes électrogènes, des transformateurs de puissance, des stations de chauffage mobiles et des équipements à haute tension et d’éclairage.  Le délégué a ensuite rappelé que l’UE soutient en outre tous les efforts visant à faciliter les exportations de céréales et d’autres produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient.  Entre mai 2022 et août 2023, les voies de solidarité à travers l’UE ont permis à l’Ukraine d’exporter plus de 53 millions de tonnes de produits agricoles.  Il a conclu en demandant à nouveau à la Russie de retirer ses troupes et tous ses équipements militaires de l’Ukraine.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an, jusqu’au 31 octobre 2024, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM)

9463e séance – matin
CS/15475

Le Conseil de sécurité proroge d’un an, jusqu’au 31 octobre 2024, le mandat de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM)

Le Conseil de sécurité a, ce matin, prorogé jusqu’au 31 octobre 2024 le mandat et les tâches confiés à la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), qui devra continuer de maintenir et renforcer sa présence dans l’ensemble du pays.

En adoptant à l’unanimité la résolution 2705 (2023), le Conseil encourage la Mission à accompagner les efforts du Gouvernement fédéral somalien et des États membres de la fédération pour faire progresser l’édification de l’État, notamment l’élaboration d’un régime fédéral et le processus de révision de la Constitution, et tenir des élections libres et régulières, au moyen de processus inclusifs et transparents aux niveaux national et local.

La MANUSOM aura également pour tâches d’aider à appuyer l’extension de l’autorité de l’État et accélérer l’application de la Stratégie nationale de stabilisation et des plans de stabilisation des États.  Aux termes de cette résolution, la Mission sera également chargée d’appuyer la consolidation de la paix, notamment au travers de la mise en place d’une gouvernance locale, de la prestation de services et de processus démocratiques, en particulier la formation de conseils de district.

Le Conseil l’encourage également à appuyer la Somalie pour veiller à l’instauration et à l’exécution de plans visant à protéger les civils et les populations dans les secteurs qui sont le théâtre d’opérations militaires et veiller à fournir un appui opportun et équilibré à toutes les zones, y compris aux zones nouvellement ou récemment reprises aux Chabab et dans les zones fragiles.

Le représentant de la Somalie a estimé que, 10 ans après la création de la MANUSOM, son mandat devrait refléter la Somalie d’aujourd’hui « plutôt que celle de 2013 ».  Aussi s’est-il félicité de l’initiative prise par le Conseil de la transition pour que la présence des Nations Unies s’aligne sur les priorités de développement à long terme de son gouvernement.  Selon le délégué, cette présence, en particulier la MANUSOM, doit répondre « sans ambiguïté » aux attentes du Gouvernement, « y compris s’agissant du plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Somalie ». 

Un sentiment auquel a fait écho la Chine, ainsi que la Fédération de Russie, pour laquelle toute interférence dans les travaux législatifs du Parlement somalien serait « inadmissible ».  Le Ghana, qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a déclaré défendre la levée de l’embargo sur les armes en Somalie, qui permettrait aux autorités d’acquérir des armes essentielles pour lutter contre des groupes islamistes armés comme les Chabab.

LA SITUATION EN SOMALIE (S/2023/758

Texte du projet de résolution (S/2023/807)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions et toutes les déclarations de sa présidence sur la situation en Somalie, 

Réaffirmant son attachement à la souveraineté, à l’intégrité territoriale, à l’indépendance politique et à l’unité de la Somalie,

Insistant sur l’importance de consolider les acquis obtenus sur le plan de la paix et de la sécurité en Somalie,

Saluant le soutien apporté par l’Union africaine, l’Union européenne et les donateurs, par l’intermédiaire de la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie (ATMIS); par l’ONU, par l’intermédiaire de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), du Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS) et de ses organismes, fonds et programmes; par le Groupe d’experts sur la Somalie, à la Somalie mais aussi au Comité 751, et par les partenaires bilatéraux de la Somalie, 

Soulignant que son objectif fondamental est de maintenir la paix et la stabilité en Somalie, en accompagnant l’édification de l’État et la consolidation de la paix et en faisant avancer les priorités nationales,

Déclarant qu’il importe que le système des Nations Unies et la communauté internationale apportent un soutien efficace et intégré en vue d’une paix à long terme, notamment par le renforcement des capacités du Gouvernement fédéral somalien pour parvenir à la paix, à la stabilité et à la prospérité et pour appuyer la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et des objectifs de développement durable et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, 

Réaffirmant l’importance des processus de dialogue inclusif et de réconciliation locale pour la stabilité en Somalie, et soulignant que la participation pleine, égale et véritable des femmes contribuera à faire progresser les priorités nationales et à appuyer la réconciliation, la sécurité et le transfert de l’appui international en matière de sécurité, conformément au Plan de transition de la Somalie et au dispositif national de sécurité, 

Se déclarant favorable à la reprise du dialogue entre le Gouvernement fédéral somalien et le « Somaliland » pour instaurer la confiance, renforcer la coordination politique et faire avancer l’édification de l’État,

Se déclarant préoccupé par la situation à Laascaanood, située dans la région de Sool, dans le nord de la Somalie, et dans les environs, exhortant toutes les parties à continuer de faire preuve de retenue, encourageant le règlement pacifique des différends et rappelant sa déclaration à la presse du 7 juin 2023 dans laquelle elle a salué les efforts et les initiatives du Gouvernement fédéral somalien, de l’Éthiopie et des chefs de clans,

Encourageant le Gouvernement fédéral somalien à continuer de se concerter avec la Commission de consolidation de la paix en vue d’améliorer l’appui international aux objectifs de consolidation de la paix en Somalie, notant que la coopération et le soutien internationaux pourraient faire avancer la consolidation de la paix et la reconstruction et le développement après le conflit en Somalie, s’ils étaient fournis selon les priorités définies par le Gouvernement fédéral somalien, et prenant note à cet égard de la politique de l’Union africaine en matière de reconstruction et de développement post-conflit et du Centre de l’Union africaine pour la reconstruction et le développement post-conflit établi au Caire,

Se déclarant vivement préoccupé par la menace que les Chabab continuent de faire peser sur la paix, la sécurité et la stabilité de la Somalie et de la région, condamnant dans les termes les plus énergiques les attaques terroristes commises en Somalie et dans les États voisins, constatant avec une vive inquiétude les victimes civiles que provoquent ces attaques, réaffirmant qu’il est résolu à appuyer les vastes efforts visant à dissiper la menace que représentent les Chabab, et se déclarant inquiet de la persistance de la présence en Somalie de groupes affiliés à l’EIIL (Daech),

Insistant sur l’importance de mener une démarche globale à l’échelle de l’ensemble de l’administration et de la société, notamment sur la pleine participation des femmes, pour combattre le terrorisme et l’extrémisme violent conduisant au terrorisme, dans le respect des dispositions applicables du droit international, ainsi que de mesures tenant compte des aspects du problème liés à la gouvernance, à la sécurité, aux droits humains et au développement ou ayant trait aux dimensions humanitaires et socioéconomiques, comme l’emploi des jeunes et l’élimination de la pauvreté, et soulignant l’importance de la coopération régionale et internationale pour lutter contre le terrorisme, désorganiser le financement du terrorisme et les flux financiers illicites et mettre un terme au trafic d’armes,

Se déclarant vivement préoccupé par la situation humanitaire en Somalie, encourageant les États à apporter un plus grand soutien humanitaire à la Somalie, et demandant à toutes les parties au conflit d’autoriser et de faciliter, conformément aux dispositions pertinentes du droit international, notamment du droit international humanitaire applicable, et aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire d’urgence (résolution 46/182 de l’Assemblée générale), notamment les principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, l’acheminement rapide et sans entrave de l’aide humanitaire nécessaire pour prêter secours aux personnes dans le besoin en Somalie,

Condamnant fermement le fait de prendre délibérément pour cible des civils, y compris des membres du personnel humanitaire, et toute attaque illégale visant des biens de caractère civil dans des situations de conflit, ainsi que l’utilisation indiscriminée d’armes, en particulier dans des zones densément peuplées, et leurs conséquences pour la population civile, demandant à toutes les parties au conflit de s’abstenir de telles pratiques, conformément aux obligations que leur impose le droit international, notamment le droit international humanitaire, 

Se déclarant vivement préoccupé par la grave menace que représentent les engins explosifs improvisés, les restes explosifs de guerre et la prolifération des armes et des munitions pour la population civile somalienne, le personnel des Nations Unies, les contingents de l’Union africaine et les forces nationales de sécurité, qui ont des conséquences sociales et économiques lourdes et persistantes, entravent le développement durable et freinent l’action d’édification et de stabilisation de l’État,

Encourageant l’établissement d’une coordination entre le Gouvernement fédéral somalien, les États membres de la fédération en Somalie, les donateurs et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, selon qu’il convient, pour veiller à ce que la distribution de l’aide humanitaire, y compris en nature, tienne compte des questions de genre et d’âge et puisse répondre aux différents besoins de la population et atteindre, comme il convient, les personnes se trouvant dans une situation vulnérable, qui peuvent se heurter à des obstacles spécifiques pour accéder à l’assistance et à la protection, 

Saluant l’élaboration par le Gouvernement fédéral somalien de son plan-cadre national d’adaptation, constatant les effets néfastes des changements climatiques, de la dégradation de l’environnement, d’autres changements écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, sur la situation humanitaire et la stabilité en Somalie, notamment par les inondations, la sécheresse, la désertification, l’insécurité alimentaire et la dégradation des terres, et rappelant la déclaration de son président (S/PRST/2011/15),

Rappelant sa résolution 2417 (2018) et la déclaration de sa présidente (S/PRST/2023/4) et le lien entre les conflits armés, l’insécurité alimentaire qu’ils engendrent et le risque de famine,

Notant l’importance d’une communication efficace et stratégique pour l’application du mandat de la MANUSOM, et soulignant la nécessité de continuer de renforcer les capacités de la Mission à cet égard, notamment en ce qui concerne la consolidation de la paix, l’édification de l’État, la réconciliation, la prévention des conflits, la lutte contre l’extrémisme violent conduisant au terrorisme, l’éducation civique, l’inclusion des femmes dans les processus politiques, la protection des droits humains et le programme relatif aux jeunes et à la paix et à la sécurité,

Se félicitant de la coopération en cours entre la MANUSOM, le BANUS, l’équipe de pays des Nations Unies et l’ATMIS, soulignant l’importance de la collaboration entre l’Organisation des Nations Unies, l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement, d’autres partenaires multilatéraux et bilatéraux et la Somalie, et encourageant toutes les entités à continuer de renforcer les relations à tous les niveaux, notamment par l’entremise du Forum de coordination des hauts responsables,

1.    Décide de proroger jusqu’au 31 octobre 2024 le mandat et les tâches confiés à la MANUSOM en Somalie, tels que définis dans la résolution 2158 (2014) et la résolution 2592 (2021);

2.    Demande à la MANUSOM de continuer de maintenir et de renforcer sa présence dans l’ensemble de la Somalie, en consultation avec le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération et de continuer de renforcer sa coopération avec la Somalie et l’Union africaine, dans le respect des normes de sécurité fixées par l’Organisation et si les conditions de sécurité le permettent, et est conscient que le contexte politique et les conditions de sécurité en Somalie influeront sur la capacité de la MANUSOM de s’acquitter de son mandat;

3.    Encourage la MANUSOM à continuer de coordonner l’action de l’Organisation, à maximiser les démarches et les programmes conjoints dans les domaines pertinents, en coopération totale avec le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération, pour accompagner leurs efforts visant à:

a)    adopter une démarche progressive et réaliste afin de faire progresser l’édification de l’État, notamment l’élaboration d’un régime fédéral et le processus de révision de la Constitution, et veiller à la participation et à l’inclusion de toutes les parties prenantes, y compris les femmes, les jeunes et la société civile;

b)    tenir des élections libres et régulières, au moyen de processus inclusifs et transparents aux niveaux national et local, selon le calendrier convenu;

c)    faire avancer le Programme de développement à l’horizon 2030, en travaillant étroitement avec l’équipe de pays des Nations Unies, fournir des conseils stratégiques au renforcement des capacités institutionnelles, conformément au Plan de développement national de la Somalie et au Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable, collaborer avec les institutions financières internationales afin d’appuyer la mobilisation de l’aide économique et au développement, garantir une coopération effective et intégrée entre les organismes, fonds et programmes des Nations Unies et promouvoir la coopération avec les partenaires concernés, de sorte que le meilleur parti soit tiré du financement du développement en Somalie, notamment face aux changements climatiques, aux inondations, à la sécheresse et aux criquets pèlerins;

et, dans le cadre des opérations militaires en cours contre les Chabab, épauler le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération comme suit:

d)    appuyer l’extension de l’autorité de l’État et étendre son rôle de coordination sur le plan de la stabilisation, en rassemblant l’appui des donateurs pour aider les autorités à fournir des services de base et à réconcilier les populations, y compris dans les zones nouvellement ou récemment reprises aux Chabab et dans les zones fragiles, en tenant compte des besoins spécifiques des personnes vulnérables et de la dynamique sociale locale;

e)    accélérer l’application de la Stratégie nationale de stabilisation et des plans de stabilisation des États;

f)    appuyer la consolidation de la paix, notamment:

i)    la mise en place d’une gouvernance locale, de la prestation de services et de processus démocratiques, notamment la formation de conseils de district;

ii)   l’établissement d’arrangements de sécurité, conformément au dispositif national de sécurité et à l’état de droit;

iii)  l’appui à la Somalie pour veiller à l’instauration et à l’exécution de plans visant à:

1.    protéger les civils et les populations dans les secteurs qui sont le théâtre d’opérations militaires avant, durant et après des engagements militaires;

2.    veiller à fournir un appui opportun et équilibré à toutes les zones, y compris aux zones nouvellement ou récemment reprises aux Chabab et dans les zones fragiles;

4.    Rappelle sa déclaration à la presse du 7 juin 2023 et le paragraphe 6 b) de la résolution 2592 (2021) et demande instamment à la MANUSOM de continuer de fournir un appui à l’action menée par le Gouvernement fédéral somalien pour parvenir à une réconciliation entre les clans et en leur sein aux niveaux local, régional et national, en vue du règlement pacifique du différend à Laascaanood et alentour, notamment en mobilisant toutes les parties, le cas échéant; 

5.    Prend note de la stratégie environnementale du Département de l’appui opérationnel (phase II), qui met l’accent sur une bonne gestion des ressources et les effets positifs de la mission, et fixe pour objectif une plus grande utilisation des énergies renouvelables dans les missions afin de renforcer la sûreté et la sécurité, de réaliser des économies, d’offrir des gains d’efficacité et de profiter à la mission; 

6.    Encourage le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération à renforcer la coopération et la collaboration à tous les niveaux, afin de:

a)    progresser en vue de mener à bien la révision de la constitution, notamment les lois nécessaires, conformément aux obligations de la Somalie au regard du droit international;

b)    préparer la tenue d’élections nationales et locales;

c)    mettre en œuvre le dispositif national de sécurité et le modèle de justice, aux niveaux fédéral, étatique et local, mener à bien le Plan de transition de la Somalie; 

d)    promouvoir la réconciliation politique, nationale et locale; 

e)    créer un climat politique et des conditions de sécurité propices à des processus démocratiques plus inclusifs dans l’ensemble de la Somalie afin de favoriser le pluralisme politique et d’inclure les partis politiques légalement constitués, y compris les partis d’opposition; 

f)    rappeler la résolution 1325 (2000) et toutes les résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité:

i)    faire progresser l’autonomisation des femmes sur les plans politique, social et économique;

ii)   garantir la participation pleine, égale et véritable des femmes ainsi que leur représentation à tous les niveaux des prises de décisions, notamment dans le cadre de la consolidation de la paix, de la réconciliation et de la réforme du secteur de la sécurité; 

iii)  respecter ses engagements, dans le cadre des élections et comme le prévoit la Charte des femmes somaliennes, et veiller à ce que les femmes occupent au moins 30% des sièges dans les deux chambres du Parlement; 

iv)   appuyer les droits des femmes, y compris leurs droits sociaux, culturels et économiques, au moyen de l’élimination de la pauvreté, et offrir des perspectives sur les plans de l’éducation, de l’emploi et du développement;

g)    promouvoir la participation et l’inclusion des personnes appartenant à des clans minoritaires, des jeunes et des personnes en situation de handicap; 

h)    respecter les droits à la liberté d’expression, d’association, de réunion pacifique et de circulation, y compris la possibilité pour les journalistes de travailler sans entraves, et condamner les discours haineux et les incitations à la violence; 

i)    renforcer le contrôle civil exercé sur les forces de sécurité, pour:

i)    continuer d’adopter et d’appliquer des procédures appropriées de vérification des antécédents de l’ensemble des membres du personnel de défense et de sécurité, en particulier concernant le respect des droits humains; 

ii)   enquêter sur les violations du droit international, notamment le droit international humanitaire et le droit international des droits humains, ainsi que sur les violences sexuelles et fondées sur le genre dans les situations de conflit et d’après conflit et poursuivre les personnes responsables de ces actes selon qu’il convient et, dans ce cadre, rappelle l’importance de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme instituée par le Secrétaire général et de son application concernant l’appui fourni par l’Organisation aux forces et aux institutions de sécurité somaliennes et à l’ATMIS;

7.    Se déclare préoccupé par toutes les violations du droit international humanitaire ainsi que par les violations des droits humains et les atteintes à ces droits, y compris celles associées aux violences sexuelles et fondées sur le genre en période de conflit:

a)    demande à toutes les parties de respecter les obligations que leur imposent les dispositions applicables du droit international, y compris le droit international humanitaire, notamment pour ce qui est de la protection des civils et des biens de caractère civil;

b)    réaffirme qu’il est urgent et impératif de traduire en justice tous les responsables des violations du droit international humanitaire et des violations des droits humains et des atteintes à ces droits;

c)    souligne qu’il importe de protéger et de promouvoir le droit à la liberté d’expression et de protéger les journalistes, les autres professionnels des médias et le personnel associé;

8.    Se félicite des progrès récents accomplis sur la législation nationale en Somalie concernant la justice pour mineurs et les droits des enfants, exprime sa vive inquiétude au sujet du nombre élevé de cas confirmés ayant trait aux « six violations graves » commises contre des enfants, recensés dans le rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés (S/2023/363), y compris le nombre élevé de violations graves attribuées aux Chabab; 

a)    exige que toutes les parties au conflit prennent des mesures appropriées pour:

i)    faire cesser et prévenir les violations et les atteintes dont sont victimes les enfants, y compris les « six violations graves », conformément aux obligations applicables que leur impose le droit international; 

ii)   identifier les responsables de ces violations et atteintes et les amener à répondre de leurs actes; 

iii)  considérer principalement comme victimes les enfants associés aux forces et groupes armés ou qui ont été libérés ou autrement séparés de ces forces ou de ces groupes, conformément aux Principes de Paris auxquels a souscrit le Gouvernement fédéral somalien, et les transférer aux acteurs civils de la protection de l’enfance; 

iv)   cesser, lorsque la pratique contrevient au droit international, de détenir des enfants pour atteinte à la sécurité nationale;

b)    invite le Gouvernement fédéral somalien à appliquer intégralement:

i)    la Convention relative aux droits de l’enfant (1989); 

ii)   les deux plans d’action visant à arrêter et à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants ainsi que le meurtre d’enfants et les atteintes à leur intégrité physique, signés par le Gouvernement fédéral somalien en 2012; 

iii)  la feuille de route de 2019, signée par le Gouvernement fédéral somalien pour accélérer l’application des plans d’action de 2012, notamment au niveau local;

iv)   les règles générales de 2014 concernant la remise des enfants qui auraient été associés à des groupes armés;

v)    les directives relatives à l’évaluation de l’âge et la liste de contrôle standardisée approuvées par le Gouvernement fédéral somalien en juillet 2023;

9.    Condamne fermement tout détournement de l’aide humanitaire et toute entrave à cette aide en violation du droit international, notamment les attaques visant les membres du personnel humanitaire et médical, leurs moyens de transport et leur matériel, ainsi que les hôpitaux et autres installations médicales:

a)    enjoint à toutes les parties d’autoriser et, conformément aux dispositions applicables du droit international, de faciliter pleinement l’acheminement, rapide, sûr et sans entrave de l’aide destinée aux personnes dans le besoin en Somalie, conformément aux principes humanitaires, par:

i)    le démantèlement des points de contrôle illégaux; 

ii)   la levée des obstacles administratifs et bureaucratiques; 

iii)  la protection des acteurs humanitaires et des populations contre toute mesure punitive ou de représailles pour avoir négocié un accès avec les parties au conflit ou fourni une assistance humanitaire ou médicale, conformément au droit humanitaire international;

b)    souligne l’importance de la transparence et du principe de responsabilité dans la fourniture de l’aide humanitaire; 

c)    est conscient du rôle que peuvent jouer les chefs locaux, religieux ou de clan pour faciliter et négocier l’accès humanitaire dans toute la Somalie, recommande que les acteurs humanitaires internationaux et nationaux et les responsables locaux bénéficient d’un soutien constant et soient protégés contre toute forme de représailles pour avoir cherché à accéder à des zones non contrôlées par le Gouvernement à des fins humanitaires; 

10.   Demande au Gouvernement fédéral somalien, aux États membres de la fédération et à tous les acteurs concernés de faciliter, de soutenir et, le cas échéant, d’appliquer des solutions durables au problème des personnes déplacées, y compris des solutions passant par l’intégration locale ou la réinstallation, et de créer des conditions propices à un retour volontaire, sûr, digne et durable des réfugiés et des déplacés, en consultation avec eux et conformément aux cadres nationaux et aux obligations internationales applicables, avec l’appui de la communauté internationale;

11.   Rappelle que le Gouvernement fédéral somalien doit continuer d’établir et de mettre en place la Commission nationale des droits de l’homme, la Cour constitutionnelle et le Conseil supérieur de la magistrature, conformément à la Constitution provisoire et aux obligations qu’imposent à la Somalie le droit international et la législation applicable et demande au Gouvernement fédéral somalien ce qui suit:

a)    promouvoir et protéger les droits des personnes en situation de handicap et des personnes appartenant à des groupes minoritaires;

b)    appliquer les lois visant à protéger les droits humains et rechercher et poursuivre les auteurs de violations des droits humains ou d’atteintes à ces droits et de violations du droit international humanitaire, y compris de violences sexuelles et fondées sur le genre dans les situations de conflit et d’après conflit;

c)    veiller à ce que la loi soit conforme aux obligations que lui imposent le droit international et les engagements pris en faveur de la protection des enfants et des femmes;

d)    donner effet le plus rapidement possible au Communiqué conjoint, avec le concours de l’Organisation des Nations Unies, et adopter et appliquer le nouveau plan d’action national pour les femmes et la paix et la sécurité;

e)    promouvoir et protéger les droits humains en Somalie, par l’intermédiaire du Ministère des femmes et du développement des droits humains, notamment la protection contre les violences sexuelles et fondées sur le genre;

12.   Souligne que l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la fédération doivent prendre en compte les conséquences néfastes des changements climatiques, de la dégradation de l’environnement, d’autres changements écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, dans leurs programmes en Somalie, notamment en procédant à des évaluations globales des risques qui tiennent compte des questions de genre et en élaborant des stratégies de gestion des risques liés à ces facteurs, en tenant compte de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris;

13.   Rappelle les recommandations formulées dans l’examen stratégique de la MANUSOM (S/2022/716), qu’il a approuvées par la suite et demande qu’elles soient rapidement appliquées, notamment pour ce qui est de planifier l’élaboration d’une feuille de route en vue de l’éventuelle transition de la MANUSOM à l’équipe de pays des Nations Unies, de mener à bien l’examen des effectifs et de la configuration de la Mission, en vue d’une appréciation commune de la situation opérationnelle attendue en fin de mission;

14.   Demande les rapports suivants au Secrétaire général:

a)    un point régulier sur la situation en Somalie et l’exécution du mandat de la MANUSOM, y compris une mise à jour des indicateurs cités dans l’examen stratégique, sous forme d’exposés et au moyen de trois rapports écrits au moins, le premier devant lui être présenté le 1er février 2024 au plus tard et les autres tous les 120 jours par la suite; 

b)    un point des progrès réalisés dans l’application des recommandations formulées dans l’examen stratégique (S/2022/716), au plus tard le 1er septembre 2024;

15.   Déclare qu’il continuera de suivre la situation en Somalie et se tiendra prêt à examiner les mesures énoncées dans la présente résolution, à tout moment selon les besoins, à la lumière de l’évolution de la situation politique et de la situation dans le pays;

16.   Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: dans un paysage géopolitique fragmenté, les opérations de paix doivent miser sur l’efficacité opérationnelle et l’adaptabilité

Soixante-dix-huitième session,
18e séance plénière - après-midi
CPSD/791

Quatrième Commission: dans un paysage géopolitique fragmenté, les opérations de paix doivent miser sur l’efficacité opérationnelle et l’adaptabilité

Constatant que le maintien de la paix est confronté à des défis multiformes et que la force collective des États Membres s’effrite au milieu des divisions politiques, le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité a encouragé les États à mettre l’accent sur l’amélioration de l’efficacité et l’adaptabilité des opérations de paix, cet après-midi, à l’ouverture du débat général de la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation) consacré à l’étude d’ensemble des opérations de maintien de la paix. 

Alors que nous célébrons cette année leur soixante-quinzième anniversaire, M.  Alexandre Zouev s’est inquiété de la fragmentation du paysage géopolitique, caractérisé par le passage d’une « action multilatérale cohésive à la rivalité et la polarisation ».  Aggravées par les changements climatiques et la criminalité transnationale organisée, notamment le terrorisme, les conflits d’aujourd’hui sont souvent liés à des dynamiques régionales complexes, a-t-il relevé, comme l’illustre la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) ou encore au Mali.  Le ciblage des Casques bleus au moyen d’engins explosifs improvisés et les campagnes de désinformation visant à saper la crédibilité des missions sont également les symptômes d’une volatilité croissante.  « De tels défis exigent une réponse », a estimé M. Zouev. 

À cet égard, cinq ans après le début de l’Action pour le maintien de la paix (A4P), bientôt complétée par l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+), la Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix de l’ONU témoigne selon lui de l’ambition collective de renforcer les opérations de paix en vue d’une exécution plus efficace des mandats, tout en améliorant la sécurité des soldats de la paix et la responsabilité de leurs actions. Quelle que soit leur forme, M. Zouev a fait valoir que les missions doivent se fonder sur un mandat clair et réaliste, ancré dans une stratégie politique et doté de ressources appropriées, a fait valoir le haut fonctionnaire.  Le soutien des pays hôtes et un véritable engagement des parties au conflit en faveur de la paix sont également essentiels.

À cette fin, le Département des opérations de la paix (DPO) continue d’adapter la formation et les déploiements aux besoins des missions, a ajouté M. Zouev, en mettant en œuvre les recommandations de l’examen stratégique indépendant de la réponse aux menaces liées aux munitions explosives.  Le plan d’action pour améliorer la sécurité des soldats de la paix a en outre favorisé des progrès dans des domaines tels que la protection des forces, la défense intégrée des bases et la lutte contre les engins explosifs improvisés. 

Au cours des dernières années, le Département de l’appui opérationnel (DOS) s’est efforcé d’intégrer des méthodologies de prospective à ses plans stratégiques, ce qui permet de formuler des priorités clefs, d’anticiper les tendances et de définir les réponses à celles-ci sur un horizon de cinq ans, a expliqué le Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, M. Atul Khare.  Nous devons encore faire en sorte que les capacités des unités déployées soient pleinement alignées sur les tâches qui leur sont confiées.  À ce jour, plus de 14 000 personnes ont reçu une formation en ingénierie, en médecine, en commandement ou encore en communications et en reconnaissance dispensée par le Programme de partenariat triangulaire. 

S’agissant de la responsabilité à l’égard des Casques bleus, M. Khare a jugé essentiel d’améliorer l’accès des soldats de la paix aux installations et au soutien médicaux, y compris aux services de santé mentale.  Afin d’améliorer les soins d’urgence, toutes les missions disposent désormais d’une procédure opérationnelle d’évacuation sanitaire (EVASAN) primaire actualisée.  En collaboration avec l’Initiative Elsie, le haut fonctionnaire a indiqué que le DOS examine les besoins des femmes afin d’élaborer des normes dans ce domaine.  Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), l’Indonésie a appuyé ces efforts, en arguant que la participation des femmes aux opérations de paix améliorait la performance générale de celles-ci. 

Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité a par ailleurs fait état de progrès notables afin de traduire en justice les responsables de crimes commis contre des soldats de la paix depuis 2019, 72 personnes ayant été condamnées en République centrafricaine, en RDC, au Liban et au Mali pour les meurtres de Casques bleus.  Au Mali, où 18 soldats de la paix ont perdu la vie l’an dernier, il a prévenu que la détérioration de la situation sécuritaire mettait en danger la vie des personnels en uniforme et des civils. 

Lorsque l’imposition de la paix devient nécessaire, les organisations régionales telles que l’Union africaine (UA) peuvent être les mieux placées pour répondre aux défis sécuritaires urgents dans leur région, avec le soutien de l’ONU, a rappelé M. Zouev, soutenu par Djibouti, pour le Groupe des ambassadeurs francophones.  Pour le Maroc, qui s’exprimait au nom du Mouvement des non-alignés, une coopération accrue avec l’UA n’est possible que si celle-ci dispose d’un financement prévisible et durable.  Le Togo d’ailleurs a exhorté l’ONU à associer davantage les organisations régionales et sous-régionales à l’élaboration des missions de paix, lesquelles prennent davantage en compte les réalités du pays bénéficiaire.  Un avis partagé par le Pakistan, qui a appelé à établir une distinction nette entre maintien de la paix et imposition de la paix, les organisations régionales ayant un rôle crucial à jouer dans cette dernière. 

La Conférence ministérielle sur le maintien de la paix 2023, qui se tiendra en décembre au Ghana, sera selon M. Zouev l’occasion de générer des promesses de capacités, de combler les lacunes et de forger des partenariats en matière de renforcement des capacités, de formation et d’équipement.

La Commission poursuivra son débat sur les opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects demain, le mardi 31 octobre 2023, à partir de 15 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS

Déclarations

Alors que nous célébrons le soixante-quinzième anniversaire des opérations de maintien de la paix, M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, a fait valoir que celles-ci demeurent encore aujourd’hui un extraordinaire exercice du multilatéralisme.  La Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix se veut l’illustration de notre engagement à améliorer les performances du maintien de la paix et à garantir des opérations plus efficaces, a-t-il ajouté, notamment depuis le lancement de l’Action pour le maintien de la paix (A4P).  Au cours des dernières années, le Département de l’appui opérationnel (DOS) s’est efforcé de rationaliser sa fonction de planification stratégique en intégrant des méthodologies de prospective à ses plans stratégiques, ce qui permet de formuler des priorités clefs, d’anticiper les tendances et de définir les réponses à celles-ci sur un horizon de cinq ans.  Ces priorités, poursuivi M. Khare, s’inscrivent dans trois domaines, à savoir un soutien holistique, un appui ciblé et l’amélioration des services.  Dans ces domaines prioritaires, le DOS assure également la gestion des connaissances et une approche cohérente en matière de planification budgétaire.

Le Secrétaire général adjoint a ensuite décrit les efforts déployés pour assurer la mise en œuvre des trois priorités de l’Action pour le maintien de la paix Plus (A4P+) les plus pertinentes pour le DOS.  S’agissant, premièrement, des capacités et de l’état d’esprit, M. Khare s’est dit déterminé à faire en sorte que les capacités des unités déployées soient pleinement alignées sur les tâches qui leur sont confiées.  Le suivi et les rapports trimestriels sur les mesures de performance permettent d’identifier les lacunes dans le matériel appartenant aux contingents déployés et de demander aux pays fournisseurs de contingents et de personnel de police d’y remédier.  À cet égard, le Programme de partenariat triangulaire permet de fournir des formations en ingénierie, en médecine ainsi qu’en commandement, communications, surveillance et reconnaissance.  À ce jour, plus de 14 000 personnes ont reçu une formation dans les différents domaines couverts par le Programme.  Alors que le rôle des missions dirigées par l’Union africaine gagne en vitalité, le Secrétaire général adjoint a expliqué que la portée du Programme sera élargie pour mieux les soutenir.  Il a noté que la réunion triennale du Groupe de travail sur le matériel appartenant aux contingents a mené cette année à une augmentation nette de 1,5% des taux standards de remboursement. 

S’agissant de la responsabilité à l’égard des Casques bleus, M. Khare a jugé essentiel d’améliorer l’accès des soldats de la paix aux installations et au soutien médicaux, y compris aux services de santé mentale.  Afin d’améliorer les soins d’urgence, toutes les missions disposent désormais d’une procédure opérationnelle d’évacuation sanitaire primaire (EVASAN) actualisée.  Le Département a également mis en œuvre des normes de qualité des soins de santé et de sécurité des patients, et créé un groupe de travail transversal sur les bases d’opérations temporaires.  En collaboration avec l’Initiative Elsie, le haut fonctionnaire a indiqué que le DOS examine les besoins des femmes afin de configurer des normes dans ce domaine. 

Enfin, en ce qui concerne la responsabilité des Casques bleus, M. Khare a fait état de progrès tangibles dans des domaines clefs, de la réduction des risques liés aux eaux usées à l’efficacité énergétique.  Au terme d’un processus de consultation mené avec les missions sur le terrain et les États Membres, une voie à suivre pour la stratégie environnementale a été définie jusqu’en 2030, en mettant l’accent sur trois thèmes principaux, soit la responsabilité, l’ambition et la transmission des acquis.  La Stratégie pour la transformation numérique du maintien de la paix des Nations Unies continue en outre de créer les outils nécessaires à la mise en œuvre de la transformation sur la base de trois axes de travail prioritaires, soit tirer parti de la technologie, la connaissance de la situation et lutter contre la désinformation.  La Conférence ministérielle sur le maintien de la paix 2023, qui se tiendra en décembre au Ghana, sera selon lui l’occasion de générer des promesses de capacités, de combler les lacunes et de forger des partenariats en matière de renforcement des capacités, de formation et d’équipement. 

Au nom du Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. JEAN-PIERRE LACROIX, le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, M. ALEXANDRE ZOUEV, a déclaré qu’au cours des 75 dernières années, les opérations de maintien de la paix ont aidé des millions de personnes à échapper aux conflits.  Or, a-t-il continué, nous nous trouvons aujourd’hui à un moment critique, alors que le maintien de la paix est confronté à des défis multiformes et que la force collective des États Membres s’effrite au milieu des divisions politiques. Aggravés par les changements climatiques, les tensions géopolitiques et la criminalité transnationale organisée, notamment le terrorisme, les conflits sont souvent liés à des dynamiques régionales complexes, a-t-il relevé, comme l’illustre la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).  Le ciblage des soldats de la paix au moyen d’engins explosifs improvisés et les campagnes de désinformation visant à saper la crédibilité des missions sont également les signes d’une volatilité croissante.  Avec le départ de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), le Mali constitue un exemple poignant des défis posés par un paysage géopolitique fragmenté et le passage d’une action multilatérale cohésive à la rivalité et la polarisation. « De tels défis exigent une réponse », a considéré M. Zouev. 

À cet égard, cinq ans après le début de l’Action pour l’A4P, la Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix des Nations Unies témoigne selon le Sous-Secrétaire général d’une ambition collective de renforcer ces opérations en vue d’une exécution plus efficace des mandats, tout en améliorant la sécurité et la responsabilité des Casques bleus.  L’A4P+ se concentre sur les catalyseurs essentiels à la réalisation des objectifs d’A4P.  Si la priorité numéro 1 du DPO est de soutenir des solutions politiques aux conflits, le maintien de la paix est plus efficace lorsqu’il est utilisé comme un outil politique pour promouvoir une paix durable, a-t-il noté. 

Le Département continue d’adapter la formation et les déploiements aux besoins des missions, a poursuivi le haut fonctionnaire, par exemple en mettant en œuvre les recommandations de l’examen stratégique indépendant de la réponse aux menaces liées aux munitions explosives.  À cette fin, il a exhorté les États Membres à combler leurs lacunes en matière de capacités.  Le Plan d’action pour améliorer la sécurité des soldats de la paix a favorisé des progrès dans des domaines tels que la protection des forces, la défense intégrée des bases et la lutte contre les engins explosifs improvisés.  Des mesures ont également été prises pour intégrer le renseignement sur le maintien de la paix et la gestion de crise.  Constatant que très peu de responsables de crimes commis contre des soldats de la paix ont été traduits en justice, M. Zouev a fait état de progrès notables depuis 2019, 72 personnes ayant été condamnées en République centrafricaine, en RDC, au Liban et au Mali pour les meurtres de Casques bleus.  Au Mali, où 18 soldats de la paix ont perdu la vie l’an dernier, il a prévenu que la détérioration de la situation sécuritaire mettait en danger la vie du personnel en uniforme et des civils.

Poursuivant, le Sous-Secrétaire général a déclaré que la responsabilité des Casques bleus pour leurs actions dans les pays hôtes souligne les efforts collectifs déployés pour assurer un maintien de la paix performant, en mettant l’accent sur une conduite irréprochable et sur une empreinte environnementale réduite, à l’aide d’outils d’évaluation des performances actualisés. Avec la collaboration des États Membres, il s’est dit déterminé à mettre en œuvre des mesures préventives, à maintenir une tolérance zéro et à garantir les droits des victimes. 

La dernière priorité d’A4P+, la coopération avec les pays hôtes, repose sur la confiance et la transparence, a rappelé M. Zouev, en notant qu’un engagement proactif au niveau des pays a produit des résultats positifs.  La stratégie pour la transformation numérique du maintien de la paix permettra par ailleurs aux soldats de la paix de mieux analyser et s’adapter aux différents conflits.  Le haut fonctionnaire a encouragé les États Membres à mettre l’accent sur l’amélioration de l’efficacité opérationnelle, de l’adaptabilité et de l’agilité des opérations de maintien de la paix.  Toutefois, lorsque l’imposition de la paix devient nécessaire, les organisations régionales telles que l’Union africaine (UA) peuvent être les mieux placées pour faire face aux défis sécuritaires urgents dans leur région, avec le soutien de l’ONU.  Quelle que soit leur forme, les missions doivent se fonder sur un mandat clair et réaliste ancré dans une stratégie politique et recevoir des ressources appropriées, a fait valoir le haut fonctionnaire.  Au-delà de mandats bien définis et d’une allocation adéquate de ressources, le soutien des pays hôtes et un véritable engagement des parties au conflit en faveur de la paix restent essentiels, a-t-il dit en conclusion.

Mme ARUNA THANA-BALA-SINGH-AM, Directrice de la Division du droit administratif, qui s’exprimait au nom de la Secrétaire générale adjointe chargée du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité (DMSPC), Mme CATHERINE POLLARD, a mis en exergue certaines des mesures prises par ce Département pour soutenir le maintien de la paix à travers les priorités d’Action pour le maintien de la paix plus (A4P+) et de ses éléments transversaux les plus pertinents: la responsabilité des soldats de la paix; les femmes, la paix et la sécurité; et le maintien de la paix fondé sur les données et la technologie. 

À l’heure où les opérations de paix sont confrontées à des défis immenses et complexes et où le monde entier a les yeux rivés sur elles, il faut redoubler d’efforts pour nous tenir les uns les autres et tenir les soldats de la paix responsables du respect des valeurs fondamentales et des normes de conduite des Nations Unies, a‑t‑elle insisté.  Même si la grande majorité des soldats de la paix servent avec honneur, les actions d’une poignée d’entre eux peuvent néanmoins causer d’énormes préjudices aux victimes et gravement nuire à l’image et à la crédibilité de l’ensemble des Nations Unies, a‑t‑elle fait valoir.  Le Secrétariat de l’ONU reste déterminé à mettre fin à l’exploitation et aux abus sexuels, notamment en assurant la prévention.  Concrètement, le DMSPC a mis sur pied un Groupe de travail interdépartemental de haut niveau pour parvenir à un règlement équitable des demandes de paternité et de pension alimentaire.  Il est chargé d’élaborer une stratégie orientée vers l’action afin de renforcer le partenariat de l’ONU avec les États Membres et d’identifier les actions tangibles nécessaires pour régler correctement ces demandes.  Le DMSPC continue également d’assurer la gestion du fonds d’affectation spéciale en faveur des victimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles, a rappelé la haute fonctionnaire qui en a profité pour relancer un appel à contributions pour lever 3 millions de dollars d’ici à mars 2024 auprès des États Membres, notant que 24 d’entre eux y ont donné suite à ce jour.  En outre, la boîte à outils existante pour la gestion des risques de mauvaise conduite fait l’objet d’une révision en ce moment même en tirant les enseignements des cinq années écoulées depuis sa mise en œuvre, a indiqué Mme Thana-Bala-Singh-Am. 

En ce qui concerne la gestion financière, le DMSPC continue d’aider les missions à élaborer des propositions budgétaires responsables, conformément aux mandats pertinents et aux orientations politiques des organes législatifs.  Le Département s’efforce d’améliorer les méthodes budgétaires et de renforcer la discipline budgétaire et la transparence, a‑t‑elle expliqué.  Afin de mieux présenter la valeur et les résultats des missions de la paix aux États Membres, le Département travaille en étroite collaboration avec elles pour s’assurer que tous les éléments des cadres de budgétisation axés sur les résultats sont alignés sur les mandats des missions et clairement en phase avec le niveau des ressources demandées. 

S’agissant du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, Mme Thana-Bala-Singh-Am a réaffirmé l’attachement du Secrétariat à parvenir à une participation significative des femmes aux opérations de paix, concédant toutefois que si les initiatives solides mises en place pour cela ont permis de faire passer leur représentation de 29% en 2019 à 33% en octobre 2023, des problèmes persistent.  Les progrès ont été lents et inégaux, a reconnu la haute responsable, parce qu’il est compliqué d’attirer des femmes dans des rôles traditionnellement dominés par les hommes et dans des lieux d’affectation difficiles.  Les efforts actuels de l’ONU visent à accélérer les progrès et à combler les lacunes persistantes, notamment en améliorant les conditions de travail sur le terrain pour les femmes.  Le contrat de mission du haut fonctionnaire de 2023 comprend justement des objectifs liés à la parité et à la promotion du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, a‑t‑elle rappelé.  Conformément à ce pacte, les cadres sont désormais tenus responsables du suivi et de la réalisation des objectifs paritaires, y compris dans le domaine du maintien de la paix. 

Pour ce qui est de l’amélioration de la sécurité du personnel de maintien de la paix, la haute fonctionnaire a expliqué que le Bureau de l'informatique et des communications (OICT) soutient activement les efforts du Département des opérations de paix dans le cadre d’une stratégie de transformation numérique de ces opérations.  Les priorités technologiques contribueront à faciliter la réalisation des mandats, ce qui profitera grandement aux missions, a‑t‑elle souhaité.

Avant de conclure, Mme Thana-Bala-Singh-Am a souligné l’importance d’une collaboration active de toutes les parties prenantes du maintien de la paix pour faire progresser les priorités d’Action pour le maintien de la paix plus qui guident tous ces efforts. 

Mme OUAZZANI CHAHDI (Maroc), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a souligné les défis sans précédent auxquels les OMP sont confrontées, parmi lesquels l’érosion du consentement des États hôtes.  Elle a mis l’accent sur le rôle clef du Comité des 34 pour fournir des recommandations stratégiques et des orientations claires, ajoutant que l’amélioration de l’efficacité du maintien de la paix nécessite l’engagement continu de toutes les parties prenantes, en plus d’une coopération triangulaire efficace entre les pays fournisseurs de contingents, le Secrétariat général et le Conseil de sécurité.  À cet effet, la déléguée a suggéré la tenue régulière de réunions triangulaires, et l’élaboration par le Conseil de sécurité de mandats clairs, ciblés, séquentiels, réalistes et réalisables.

Elle a rappelé la pertinence des principes de base du maintien de la paix (le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense et de défense du mandat), soulignant l’importance de gérer de façon adéquate les attentes de toutes les parties prenantes, ainsi que de soutenir les opérations par un processus de paix global.  En ce qui concerne la question financière, la représentante a exhorté tous les États Membres à s’acquitter de leurs contributions en totalité, à temps et sans conditions.  Elle a par ailleurs signalé l’importance de la prochaine Conférence ministérielle sur le maintien de la paix de l’ONU à Accra, au Ghana, qui se tiendra en décembre, comme une occasion opportune pour les États Membres de s’engager plus concrètement.

Concernant les défis sécuritaires, la déléguée a condamné sans équivoque la multiplication du nombre d’attaques contre les Casques bleus et appelé à des mesures de protection adéquates, ainsi qu’à une lutte contre l’impunité.  Elle a réitéré le soutien de son groupe à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général en matière d’exploitation et d’abus sexuels, affirmant que « la lutte contre ces abus est une responsabilité collective ».  Elle s’est par ailleurs émue de l’état de certaines installations dans les bases d’opérations temporaires, faisant un lien entre les conditions de vie et les actes d’indiscipline.

Abordant la protection des civils, la déléguée a réaffirmé que le Conseil de sécurité en assume la responsabilité principale, tout en insistant sur le rôle clef des dispositifs régionaux, notamment la coopération entre l’ONU et l’Union africaine (UA), à la condition que cette dernière puisse bénéficier d’un financement prévisible et durable.  Pour ce qui est de la participation féminine aux OMP, la représentante a appelé toutes les parties prenantes à accroître celle-ci.  Pour conclure, elle a exhorté à une réduction de l’empreinte environnementale des OMP.

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. NASIR (Indonésie) a déclaré que les opérations de maintien de la paix constituent un élément fondamental de la coopération des pays qui en sont membres, lesquels déploient collectivement 5 000 soldats de la paix dans le monde.  Il a exprimé son appui aux efforts pour faire en sorte que les opérations de maintien de la paix s’adaptent aux défis actuels, comme le prévoit le Nouvel Agenda pour la paix.  Il a donc salué la convocation de la prochaine conférence ministérielle sur le maintien de la paix prévue en décembre, au Ghana.  De plus, l’ASEAN a récemment réaffirmé son engagement en vue d’améliorer l’efficacité de sa participation aux missions de paix l’ONU. 

Afin d’assurer de meilleurs efforts, le représentant a dit accorder une grande importance à la mise en œuvre efficace des opérations de maintien de la paix, notamment s’agissant du renforcement des capacités et de la formation des Casques bleus, par le biais du Programme de partenariat triangulaire. Il est également essentiel à ses yeux de resserrer la coopération entre l’ONU, les organisations régionales et les pays hôtes dans le domaine du maintien de la paix.  Le délégué a salué les interactions entre l’ASEAN et l’ONU afin de mettre en œuvre le Plan d’action visant à réaliser la Déclaration conjointe de partenariat 2021-2025.  Enfin, l’ASEAN appuie pleinement les efforts en vue d’assurer une participation plus large des femmes aux opérations de paix, celles-ci améliorant la performance générale de ces opérations. 

M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie), prenant la parole au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (Groupe CANZ), a rendu hommage aux Casques bleus tout en s’inquiétant du nombre croissant de défis auxquels les OMP font face, comme les récents événements au Mali en ont fourni l’exemple.  Il a déclaré que, pour leur part, les pays de son Groupe aspirent à être des partenaires en qui « l’on peut avoir confiance ».

Sur le plan sécuritaire, le délégué a averti que 23 années de progrès pourraient être anéanties si l’on ne prête pas attention aux leçons tirées des conflits en Afghanistan, au Soudan ou en République démocratique du Congo.  Sur la question du renforcement de la participation des femmes, il a jugé les progrès trop lents.  Le pouvoir fédérateur des femmes est essentiel pour protéger contre les représailles, a-t-il souligné, appelant à accroître les efforts de parité, surtout dans les postes à haute responsabilité.  Pour ce qui est des ressources financières, il a insisté sur l’importance de doter suffisamment les opérations de paix.

Évoquant les défis liés à la technologie et aux environnements de plus en plus hostiles dans lesquels opèrent les Casques bleus, il a déclaré qu’en la matière, « nos actions comptent plus que nos discours ». Aussi a-t-il plaidé pour une meilleure utilisation de l’innovation dans les OMP.  En conclusion, le délégué a souligné que le maintien de la paix doit s’adapter aux nouvelles réalités tout en restant axé sur « les objectifs de réconciliation ».

Pour M. ANTONIO GAETANO COPPOLA, de l’Union européenne, le maintien de la paix de l’ONU reste un outil essentiel pour assurer la paix et la sécurité dans le monde.  Il a rappelé à cet égard que l’UE couvre un quart de son budget et qu’il existe un partenariat stratégique entre les missions de l’Union et celles de l’ONU sur le terrain.  Le délégué a salué le nouvel outil du Secrétaire général pour une réflexion sur les limites et l’avenir des opérations de paix, à savoir le Nouvel Agenda pour la paix, en appuyant les discussions en cours sur les mises en recouvrement des opérations déployées en Afrique avec l’accord du Conseil de sécurité. Le Sommet de l’avenir offre une bonne occasion pour approfondir les discussions sur l’Action pour le maintien de la paix plus (A4P+), a estimé le délégué.  Il a fait part des préoccupations des membres de l’UE face aux attaques visant des soldats de la paix et le recours aux mercenaires, avant de demander que les opérations de paix disposent de ressources suffisantes pour s’acquitter correctement de leurs mandats.  Le représentant a également reconnu l’importance d’une participation plus élevée des femmes aux opérations de paix de l’ONU à tous les niveaux, avant de demander que le personnel soit mieux formé, y compris à la lutte contre la désinformation et la mésinformation.  Le délégué a dit en outre apprécier le rôle du mécanisme sécurité-climat. 

Au nom du Groupe des ambassadeurs francophones, M. ABDILLAHI (Djibouti) a salué la réflexion en cours afin d’améliorer le maintien de la paix à la lumière des évolutions et des défis sur le terrain.  La note d’orientation sur le Nouvel Agenda pour la paix explore à cet égard des pistes innovantes, mettant en exergue le rôle des organisations régionales.  Toutefois, ce programme gagnerait selon lui à souligner l’importance du multilinguisme dans la revitalisation du multilatéralisme au service de la paix et de la sécurité internationales, afin de tenir compte de la diversité linguistique et culturelle de l’Organisation.  À ses yeux, les opérations de paix ne peuvent être pleinement efficaces sans tenir compte du contexte local, en faisant coïncider les compétences, notamment linguistiques, avec les zones d’intervention.  Il a donc réitéré son appel au DPO et au Département de l’appui opérationnel (DOS) à poursuivre leurs actions en faveur d’une pleine intégration du multilinguisme au maintien de la paix. 

Étant donné le caractère multidimensionnel des opérations de paix, le représentant a jugé essentiel de pouvoir interagir dans la langue des autorités et des populations locales, notamment s’agissant des femmes.  De même, la langue et la culture juridique qui y est associée facilitent le transfert de compétences vers les institutions nationales de l’État hôte et renforce la sécurité du personnel déployé.  Il en va de même à ses yeux de la traduction des manuels de formation et de la documentation.  Selon lui, les ressources financières limitées ne doivent pas entraver les impératifs d’égalité entre les langues de l’Organisation.  Le représentant s’est félicité des solutions proposées par les États membres du Groupe et le Secrétariat de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en vue de parvenir à une meilleure intégration du multilinguisme à l’ONU. 

M. CRAIG BARRINGTON DOUGLAS (Jamaïque), qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a mis l’accent sur l’impératif de garantir la sécurité des soldats de la paix, rappelant qu’en tout, 48 déployés par des pays de la Communauté ont trouvé la mort dans l’exercice de leurs fonctions. Saluant l’initiative Action pour le maintien de la paix plus (A4P+), le représentant a insisté sur l’importance de mesurer et d’améliorer la performance du personnel en uniforme et la responsabilité dans les opérations de maintien de la paix.  Leur succès dépend fortement de l’adhésion à l’A4P+ de toutes les parties prenantes, a-t-il argué, y compris les États Membres, l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, les bailleurs de fonds, les pays fournisseurs de contingents et de forces de police, les pays d’accueil, les organisations intergouvernementales, et les organisations régionales.  Il a réaffirmé le soutien de la CARICOM à la participation active des femmes au maintien et à la consolidation de la paix ainsi qu’à tous les efforts visant à promouvoir la paix et la sécurité au sein des nations et entre elles.  Dès lors, le représentant a salué les progrès accomplis dans l’intégration de la dimension de genre dans tous les bureaux du Département des opérations de paix (DPO), tout en invitant ce dernier à continuer de renforcer les efforts visant à accroître le nombre d’officiers féminins dans les missions de maintien de la paix. 

Pleinement conscients des effets déstabilisants que les troubles sociaux et politiques peuvent engendrer dans n’importe quel pays, et en particulier les plus vulnérables, les États membres de la CARICOM s’intéressent vivement aux travaux en cours dans ce domaine, en particulier en ce qui concerne Haïti, a précisé le délégué.  Il a salué le rapport du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) présenté au Secrétaire général le 16 octobre, avant d’exhorter la communauté internationale à accroître le niveau de son soutien et à rester activement engagée dans un partenariat efficace avec le Gouvernement et le peuple haïtiens. 

Mme THARARUT HANLUMYUANG (Thaïlande) a d’abord déploré que les opérations de maintien de la paix soient déployées dans des théâtres de conflit de plus en plus difficiles, la sécurité des Casques bleus étant menacée par le recours à des engins explosifs, la désinformation et un arrière-plan géopolitique international de plus en plus fragmenté.  Ces menaces pèsent aussi sur la protection des civils, alors que le nombre de victimes faites par les conflits dans le monde a atteint l’an dernier son plus haut niveau depuis 20 ans.  Pour relever ces défis, la déléguée a prôné des mandats clairs, des ressources suffisantes et une formation adéquate pour les troupes.  La déléguée a souhaité que les États Membres puissent se mettre d’accord sur des mesures supplémentaires pour satisfaire aux exigences d’un maintien de la paix efficace, lors de la prochaine Conférence ministérielle des Nations Unies sur le sujet, qui se tiendra à Accra en décembre.

L’importance d’une communication stratégique —pour contrer la désinformation et protéger les civils— et d’un engagement accru auprès des parties prenantes a également été mise en avant par la représentante.  Plus spécifiquement, elle a souligné l’importance des consultations et des communications inclusives entre le Conseil de sécurité, les pays hôtes, les pays fournisseurs de contingents et de forces de police, et les autres parties prenantes concernées.  En ce qui concerne le comportement des Casques bleus, la déléguée a insisté sur le fait que l’exploitation et les atteintes sexuelles ne doivent en aucun cas être tolérées dans les opérations de maintien de la paix. Celles-ci ont par ailleurs un rôle à jouer dans la facilitation du développement durable et l’amélioration des conditions de vie des populations locales, a-t-elle ajouté.  La déléguée a enfin réaffirmé l’engagement de son pays à coopérer avec la communauté internationale pour renforcer les capacités des forces de maintien de la paix dans le cadre du projet de partenariat triangulaire.

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a exprimé sa préoccupation face aux menaces sans précédent contre la sécurité des Casques bleus, en particulier du fait des engins explosifs improvisés.  Il a appelé à ce que les auteurs des attaques menées contre les soldats de la paix soient tenus responsables.  Le délégué s’est également inquiété de la désinformation croissante à l’encontre des missions de maintien de la paix et des Casques bleus.  Il a dit apprécier les efforts déployés par le Secrétaire général pour remplir les obligations financières de l’Organisation à l’égard des pays fournisseurs de contingents, tout en exhortant les États Membres à verser l’intégralité de leur contribution financière dans les délais prévus.  Ces pays ne devraient pas supporter de charges financières indues du fait du retard ou du non-paiement de leur contribution par certains États, a‑t‑il noté. 

Le représentant a fait sien l’appel lancé par le Secrétaire général, dans sa note d’orientation sur le Nouvel Agenda pour la paix, en faveur d’une réflexion approfondie sur l’avenir du maintien de la paix et la nécessité d’évoluer vers des modèles agiles et adaptables dotés de moyens appropriés. Les missions de maintien de la paix doivent en effet faire partie d’une stratégie politique globale destinée à s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits.  Les missions de paix doivent en outre bénéficier de la pleine coopération et du consentement des pays hôtes.  De plus, a poursuivi le représentant, les mandats des missions de paix adoptés par le Conseil de sécurité doivent être adaptés et être « réalistes et réalisables », en plus de disposer des ressources financières, humaines et matérielles nécessaires.  Enfin, le délégué a appelé à établir une distinction nette entre maintien de la paix et imposition de la paix, les organisations régionales ayant un rôle crucial à jouer dans cette dernière. 

M. EDEM KODZOVI MEDZINYUIE (Togo) a noté que face à la multiplication des crises, des conflits armés et du terrorisme en Afrique, il n’est pas étonnant que ce continent soit celui qui a accueilli le plus grand nombre d’opérations de maintien de la paix dans l’histoire. Sur les 12 missions en cours dans le monde à l’heure actuelle, 7 se déroulent en Afrique.  Dans ce contexte, le délégué s’est félicité de l’intérêt de l’ONU pour la situation sociopolitique des pays africains et de son engagement pour une Afrique « pacifiée ».  Ces opérations, a‑t‑il noté, aident les pays du continent en situation de conflit ou postconflit à restaurer la paix, la sécurité et l’état de droit, ainsi qu’à faciliter le processus politique, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants. Il est donc essentiel à ses yeux que les missions de paix disposent de la pleine coopération des pays hôtes et s’effectuent dans le respect de leur souveraineté.  Pour sa part, le Togo figure parmi les 20 premiers pays contributeurs de troupes, avec 1 107 militaires déployés dans sept opérations de maintien de la paix par le monde, principalement en Afrique. 

Le représentant a plaidé en faveur de l’accélération de la mise en œuvre de toutes les initiatives visant à rendre les missions de la paix plus efficaces et légitimes, telles que la Déclaration d’engagements communs concernant les opérations de maintien de la paix et l’A4P+. Il a exhorté l’ONU à associer davantage les organisations régionales et sous-régionales à l’élaboration des missions de maintien de la paix, lesquelles prennent davantage en compte les réalités du pays bénéficiaire. 

M. WAEL MAHMOUD ABDELAZIZ ELDAHSHAN (Égypte) a souligné le sacrifice ultime des Casques bleus et la multiplication des difficultés auxquelles ils font face.  Il a ainsi appelé à adopter des réformes équilibrées qui se renforcent mutuellement, faisant écho à la feuille de route du Caire.  Il convient en priorité d’améliorer la sécurité des soldats de la paix, a insisté le délégué, soulignant l’importance d’un financement adéquat, ainsi que la lutte contre les engins explosifs improvisés et la désinformation. 

En ce qui concerne la gouvernance, il a appelé à un partage des responsabilités. Il a aussi mis en avant l’interdépendance entre le maintien de la paix et les mandats, proposant de s’attaquer aux causes profondes des conflits par des approches politiques réalistes.  Les résultats doivent être mesurés en fonction de la nécessité d’objectifs et de ressources réalisables, a‑t‑il déclaré. Le renforcement des partenariats entre l’ONU et les organisations régionales, notamment l’Union africaine (UA), a également été jugé crucial. 

S’agissant de la diversité et de l’inclusion, le délégué a défendu la présence des femmes dans les zones de conflit.  En conclusion, il a évoqué la Conférence ministérielle prévue à Accra, au Ghana, en décembre 2023 pour aborder les défis opérationnels.

M. JOSÉ DE JESÚS CISNEROS CHÁVEZ (Mexique) a déclaré que son pays a récemment renforcé sa présence en déployant des observateurs et participé à ses premières opérations de maintien de la paix.  Il a jugé essentiel de disposer d’évaluations concernant les défis qui se font jour à ce sujet.  Il est selon lui crucial de reconnaître que les opérations de maintien de la paix multidimensionnelles traversent une crise de légitimité.  La Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) ont récemment été la cible de frustrations de la part des populations locales devant la lenteur des progrès, alimentées notamment par des campagnes de désinformation. Qui plus est, nous avons affaire à des acteurs non étatiques dont les priorités sont incompatibles avec les processus politiques.  Dans ce contexte, il convient selon lui de se concentrer sur des objectifs « réalistes et réalisables », bénéficiant de l’engagement politique des États touchés.  Le représentant a donc appelé à une meilleure coordination avec les organisations régionales et sous-régionales, souvent mieux à même de réagir à ces crises sécuritaires. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a d’abord mis en avant l’engagement profond de son pays vis-à-vis des OMP depuis 60 ans.  Aujourd’hui, a-t-il précisé, ce sont plus de 300 soldats, un contingent de l’aviation et deux hôpitaux qui ont été déployés sur différents théâtres d’opérations, au Soudan du Sud, au Liban, au Mali, ou en République centrafricaine.

Le représentant a ensuite exprimé ses vives préoccupations quant à l’aggravation de la violence contre les Casques bleus, et insisté sur le rôle joué par son pays pour promouvoir un règlement pacifique des conflits. L’apprentissage poussé des règlements des Nations Unies, enseignés dans les académies militaires du Sri Lanka, ont beaucoup facilité le déploiement des troupes de son pays, a précisé le délégué. 

Il s’est par ailleurs inquiété des défis logistiques et financiers de plus en plus sérieux auxquels sont confrontées les OMP, défis qui entravent selon lui leur efficacité.  Enfin, il a rendu hommage aux plus de 2 000 soldats dans le monde qui ont payé le sacrifice ultime dans ces opérations.

M. JORGE SAIN SÁNCHEZ FUENTES (Cuba) a exprimé de sérieuses réserves quant à l’élargissement et à la complexification croissantes des mandats des opérations de maintien de la paix, s’alertant d’une dérive susceptible de contredire les principes fondateurs du maintien de la paix.  Il a ainsi mis en garde contre l’utilisation de ces opérations pour des tâches telles que la lutte contre le terrorisme ou la criminalité transnationale organisée, soulignant que cela ne ferait qu’augmenter les menaces envers le personnel impliqué.  Le délégué a rappelé que le respect intégral des principes d’impartialité et de consentement des parties était primordial, et réitéré que les opérations de maintien de la paix ne peuvent être une fin en soi, mais qu’elles doivent servir à établir un cadre sécuritaire propice à des stratégies de développement à long terme. 

Selon le représentant, la responsabilité principale de la protection des civils dans ces opérations incombe aux États.  Et la manipulation politique de cette question est inacceptable, a‑t‑il insisté.  S’il a reconnu que les nouvelles technologies peuvent parfois améliorer la sécurité du personnel de maintien de la paix, le délégué s’est inquiété de l’utilisation de drones, estimant que leur recours doit être évalué au cas par cas, et conformément aux principes de la Charte des Nations Unies.  Enfin, il a souligné l’importance d’une coopération triangulaire accrue, plaidant pour des mandats plus réalistes et mieux définis, ainsi que pour une dotation en ressources suffisantes pour les opérations.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: appels au renouvellement de la Décennie des personnes d’ascendance africaine et au respect du droit des peuples à l’autodétermination

Soixante-dix-huitième session,
42e et 43e séances plénières – matin & après-midi
AG/SHC/4394

Troisième Commission: appels au renouvellement de la Décennie des personnes d’ascendance africaine et au respect du droit des peuples à l’autodétermination

Poursuivant son examen de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et du droit des peuples à l’autodétermination, la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a dialogué aujourd’hui avec la Présidente de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine et deux titulaires de mandat.  Elle a ensuite repris et achevé sa discussion générale sur ces deux points de son ordre du jour. 

Ces échanges ont mis en évidence la persistance de pratiques discriminatoires profondément enracinées à l’égard des afro-descendants, mais aussi la reproduction d’inégalités par le biais d’algorithmes engendrés par l’intelligence artificielle, comme l’a signalé la Présidente de l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine.  Face à cet état de fait, Mme Epsy Campbell Barr a appelé à aller plus loin que les quelques mesures positives déjà prises et à envisager des réparations. Elle a notamment plaidé pour la création d’une commission d’enquête internationale indépendante sur la justice réparatrice pour les personnes d’ascendance africaine et pour la proclamation d’une deuxième décennie internationale dédiée à ces personnes, la première devant prendre fin l’an prochain. 

Ses préconisations ont trouvé un écho auprès de la Chine, pour qui le colonialisme, l’esclavage et la traite des esclaves transatlantique représentent « la période la plus sombre de l’histoire humaine ».  De son côté, la Fédération de Russie a soutenu l’initiative de l’Instance permanente visant à créer un fonds international pour la restitution des biens et artefacts culturels pris à l’Afrique.  Le Brésil a pour sa part appuyé le renouvellement de la Décennie internationale, y voyant l’occasion pour les pays occidentaux de prendre des mesures énergiques pour rendre justice aux victimes. 

Elle aussi favorable à cette prorogation, la Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine a attiré l’attention de la Commission sur l’un de ses rapports, consacré à l’émancipation économique des Afro-descendants.  Dans ce document, a précisé Mme Barbara G. Reynolds, le Groupe de travail analyse la manière dont les structures, les systèmes, les politiques et les pratiques postcoloniales continuent d’imiter les intentions et les objectifs définis lors de l’esclavage et de la colonisation, soumettant les personnes d’ascendance africaine à une troisième vague de privation et à des difficultés économiques.  Cette « dette noire », qui a favorisé la précarité des communautés afro-descendantes, constitue un fardeau aux niveaux national, communautaire et individuel, a-t-elle souligné, exhortant les États Membres à mettre en place des mécanismes pour éliminer les préjugés et les discriminations structurelles et systémiques. 

Lors de ses visites techniques en Uruguay et au Mexique, le Groupe de travail a aussi constaté la réticence de nombreuses personnes afro-descendantes à se revendiquer comme telles par crainte de discriminations héritées de siècles de mesures anti-noirs. Face à cette situation, Mme Reynolds a appelé les États Membres et l’ONU à intégrer pleinement l’antiracisme, le racisme anti-noirs et l’afrophobie dans leurs programmes, leurs budgets et leurs mesures de suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. 

Les débats ont également porté sur le droit des peuples à l’autodétermination, l’occasion pour l’une des cinq membres du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes d’alerter la Commission sur le manque d’engagement des États Membres.  Pourtant, en plus de prolonger les conflits armés ou de saper les processus de paix, l’utilisation des mercenaires exacerbe la commission de graves violations des droits humains, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, a soutenu Mme Sorcha MacLeod.  Si des cadres juridiques internationaux et régionaux existent et sont potentiellement efficaces face à ce grave problème, la définition du mercenariat reste restrictive dans le droit international et est donc aisément contournable par les sociétés privées et les États, a déploré l’experte indépendante. Appelant ces derniers à ne pas recourir à de telles pratiques, elle leur a également enjoint de garantir des voies de recours effectives pour les victimes, de responsabiliser juridiquement les entreprises et de traiter les causes structurelles profondes du mercenariat. 

Du côté des délégations, l’Afrique du Sud a souligné le caractère sacré du droit à l’autodétermination et regretté qu’il ne s’applique toujours pas dans 17 territoires non autonomes, mentionnant notamment la Palestine et le Sahara occidental.  De manière connexe, l’Algérie a relevé que le peuple sahraoui attend encore la décolonisation de son territoire, une affirmation réfutée par le Maroc, qui a sommé l’Algérie de s’exprimer sur l’indépendance de la Kabylie.  Mettant en avant sa longue quête de l’autodétermination, Israël, quant à lui, a estimé que le peuple juif a pu réaliser ce droit voilà 75 ans après 2 000 ans d’errance. Pour la délégation israélienne, les attaques terroristes du Hamas, les manifestations appelant à « nettoyer le monde des Juifs » et la montée des discours et actes antisémites témoignent de l’importance de ce droit. 

Rappelant qu’elle fournit des services de base à 90% des réfugiés palestiniens, la Jordanie a préféré signaler que 59 employés de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) ont été tués dans la bande de Gaza en trois semaines.  Comme de nombreuses autres délégations, elle a regretté des bombardements aveugles et la privation collective de nourriture, d’eau et de carburant avant de mettre en garde quant aux risques accrus d’exposition des plus vulnérables à la discrimination raciale et à la violence xénophobe.  La Türkiye a, elle, appelé à se ranger derrière la dénonciation des discours de haine formulée par le Secrétaire général, tandis que la Bolivie insistait sur la nécessité de trouver une solution à la crise humanitaire à Gaza, tout en réaffirmant sa solidarité avec tous les peuples qui luttent contre le colonialisme et pour leur droit à l’autodétermination. 

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE ET DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION (A/78/261A/78/535)

Déclarations liminaires des titulaires de mandat au titre d’une procédure spéciale et d’autres experts, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

Mme BARBARA G. REYNOLDS, Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, a commencé par réitérer l’appel de son organe en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et d’une réponse de la communauté internationale fondée sur le droit international concernant la situation à Gaza. Évoquant ensuite les activités du Groupe de travail, elle a fait état de quatre publications au cours de l’année écoulée: un rapport sur les 20 années de travail du mandat intitulé « Faciliter le passage de la rhétorique à la réalité », un rapport thématique sur l’émancipation économique des personnes d’ascendance africaine et deux rapports sur les visites officielles effectuées en Australie et au Royaume-Uni.  S’agissant du premier rapport, Mme Reynolds s’est réjouie que les renouvellements du mandat aient permis de reconnaître et élargir les capacités du Groupe de travail en veillant à ce que ses travaux englobent la promotion, la protection et la pleine réalisation des droits des personnes d’ascendance africaine. 

Pour ce qui est du rapport consacré à l’autonomisation économique des personnes d’ascendance africaine, la Présidente a indiqué que le Groupe de travail y analyse la manière dont les structures, les systèmes, les politiques et les pratiques postcoloniales continuent d’imiter les intentions et les objectifs définis lors de l’esclavage et de la colonisation, soumettant les personnes d’ascendance africaine à une troisième vague de privations et à des difficultés économiques.  Le Groupe de travail reconnaît la « dette noire », c’est-à-dire les systèmes et politiques qui ont favorisé la précarité des individus et des communautés d’ascendance africaine, constituant un fardeau aux niveaux national, communautaire et individuel, a-t-elle souligné, avant d’exhorter tous les États Membres à mettre en place des mécanismes visant à éliminer les préjugés et les discriminations structurelles et systémiques. 

Dans le cadre de ses travaux, le Groupe de travail a examiné, avec le Conseil œcuménique des églises, le rôle des organisations religieuses dans les siècles de privation économique, a ajouté Mme Reynolds, non sans se féliciter de cette prise de conscience croissante.  Elle a, d’autre part, indiqué que le Groupe de travail s’est intéressé à l’impact de l’intelligence artificielle et à l’utilisation des algorithmes dans la vie quotidienne, concluant qu’il est impératif d’accorder une attention urgente aux dimensions éthiques de ces technologies qui affectent les personnes d’ascendance africaine. 

Abordant les visites du Groupe de travail, la Présidente a mentionné celles effectuées en Australie et au Royaume-Uni, pays dont elle a salué les bonnes pratiques et les mesures positives.  Le Groupe de travail a néanmoins noté la persistance de la discrimination raciale dans les services, les écoles, les lieux de travail et les espaces publics fréquentés par la communauté noire.  Elle a également relevé la persistante de préjugés raciaux dans les systèmes de justice pénale de ces pays.  Le Groupe de travail a, par ailleurs, évoqué des visites techniques en Uruguay et au Mexique, qui ont mis en évidence la réticence de nombreuses personnes afro-descendantes à revendiquer leur ascendance par crainte de discriminations héritées de siècles de mesures anti-noirs. 

Après avoir détaillé les 14 communications adressées aux Gouvernements du Brésil, de la France, de la Grèce, de la Guyane, du Royaume-Uni, des États-Unis, du Panama, du Costa Rica, de la Colombie, de la République dominicaine et de la Tunisie, concernant des violations graves, la Présidente a déploré un manque d’attention aux questions soulevées dans ces lettres et a demandé que des mesures soient prises pour répondre aux préoccupations qui y sont exprimées.  En vue du Sommet de l’avenir en 2024, elle a souligné la nécessité pour les États Membres et les entités de l’ONU d’intégrer pleinement l’antiracisme, le racisme anti-noirs et l’afrophobie dans leurs programmes, leurs budgets et leurs mesures de suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Enfin, face au manque de mise en œuvre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, elle a réitéré l’appel du Groupe de travail à l’Assemblée générale pour qu’elle promulgue une nouvelle décennie, qui soit l’occasion d’investir financièrement et techniquement dans cette cause mais aussi pour fournir un environnement favorable aux personnes d’ascendance africaine. 

Dialogue interactif

Première délégation à s’exprimer à la suite de cet exposé, l’Union européenne a détaillé les efforts qu’elle déploie pour améliorer l’égalité des chances indépendamment de l’origine ethnique ou autre.  Elle a dit s’appuyer pour cela sur deux instruments clefs que sont la directive relative à l’égalité de l’emploi et la directive sur l’égalité raciale, laquelle exige un traitement égal pour toutes les personnes dans tous les secteurs d’activité.  Insistant sur l’incidence de la fracture numérique sur les personnes d’ascendance africaine au niveau mondial, la délégation s’est enquise des moyens d’y remédier.  Le Brésil a, pour sa part, appelé tous les États Membres à s’engager en faveur d’une deuxième Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, tandis que la Colombie plaidait pour des réparations en faveur de ces personnes pour atténuer les « dégâts historiques » du colonialisme. Après avoir souligné la nécessité des données ventilées, la délégation a demandé des exemples de pratiques optimales permettant d’améliorer l’accès des personnes d’ascendance africaine à la terre. À sa suite, la Chine a déploré la pauvreté et les inégalités auxquelles sont assujetties les personnes d’ascendance africaine dans les pays occidentaux, appelant certains d’entre eux à faire preuve de volonté politique afin de mettre effectivement en pratique le Programme d’action de Durban.  Les États-Unis ont fait part de leurs efforts pour lutter contre le racisme systémique à l’encontre des personnes d’ascendance africaine.  Ils ont signalé la création par la présidence Biden du premier Conseil consultatif sur la diaspora africaine, qui vise à faire avancer l’égalité raciale aux États-Unis et partout dans le monde.  La délégation a souhaité savoir quelles mesures supplémentaires les États peuvent entreprendre pour bâtir une participation inclusive des personnes d’ascendance africaine aux affaires qui les concernent. 

De son côté, la Fédération de Russie a appuyé les travaux du Groupe de travail d’experts, notamment sa reconnaissance du caractère systémique et structurel du racisme à l’encontre des personnes d’ascendance africaine. Ces travaux montrent que les barrières principales à la réalisation des possibilités de ces personnes sont le profilage et les préjugés qui dominent dans de nombreux secteurs comme l’emploi, l’éducation, la santé et le logement, a relevé la délégation, pour qui ces problèmes sont particulièrement aigus dans l’Union européenne.  Selon elle, cette discrimination remonte au colonialisme, à l’esclavage et au pillage des richesses et des ressources de l’Afrique. Sur cette même ligne, le Cameroun a estimé que le colonialisme a largement contribué à la prospérité de pays dans lesquels vivent aujourd’hui des populations d’ascendance africaine, une prospérité dont elles ne peuvent, hélas, bénéficier au même titre que les autres. Estimant que les questions de l’éducation, du devoir de mémoire et des réparations sont centrales pour promouvoir l’autonomisation économique de ces personnes, la délégation s’est félicitée qu’elles soient traitées dans le rapport de Mme Reynolds.  Elle a ensuite demandé comment la perspective du droit au développement peut être pris en compte dans la préparation du projet de déclaration sur les personnes d’ascendance africaine. 

En réponse aux questions et remarques des délégations, la Présidente du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine s’est tout d’abord adressée à l’Union européenne, confirmant l’effet cumulatif et multiplicateur de la numérisation et de l’intelligence artificielle sur les personnes d’ascendance africaine, de génération en génération.  S’il y a des disparités maintenant, ceux qui sont en retard seront laissés de côté et ceux qui sont en avance accroîtront leurs avantages, a-t-elle averti, avant d’appeler à renforcer les capacités des enseignants, à intégrer les personnes d’ascendance africaines dans les activités numériques et à mettre en place des systèmes de surveillance nationale sur ce sujet.  Répondant ensuite à la Colombie, Mme Reynolds a jugé essentiel de rassembler, analyser et diffuser des données ventilées reconnaissant que la race et le racisme sont des questions importantes.  La première chose à faire est de voir où il y a une concentration de ces problèmes et comment les personnes d’ascendance africaine sont affectées, a-t-elle expliqué, saluant les mesures positives prises à cet égard par certains pays. Elle a notamment applaudi le fait que l’Uruguay ait décidé de réserver des emplois aux personnes d’ascendance africaine au sein de ses services gouvernementaux. 

S’agissant de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, la Présidente du Groupe de travail d’experts a estimé que des occasions ont été manquées pour progresser réellement.  Elle a réitéré la nécessité de promouvoir une deuxième décennie, saluant les efforts consentis dans ce sens par le Canada, qui a appelé à investir dans la société civile et des initiatives gouvernementales afin de renforcer les capacités et revoir les lois et les politiques qui désavantagent les personnes d’ascendance africaine.  Dans ce contexte, Mme Reynolds a souligné l’importance d’un environnement exempt de représailles pour les défenseurs des droits humains des personnes d’ascendance africaine.  Elle a par ailleurs approuvé l’intervention de la Fédération de Russie, considérant elle aussi qu’il existe un « mensonge global » sur la situation des personnes d’ascendance africaine.  Cela étant, elle a tenu à rappeler que, comme tous les autres groupes, les personnes d’ascendance africaine sont diverses, mais ont en commun la discrimination basée sur la couleur et les origines ethniques. Défendre leurs droits ne profite pas seulement à ces personnes, mais à tout le monde, a-t-elle conclu. 

Exposé

Mme EPSY CAMPBELL BARR, Présidente de l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine, a présenté le premier rapport annuel de l’Instance permanente qui s’est réunie pour la première fois en décembre 2022 à Genève pour aborder des questions telles que le racisme systémique, la justice climatique, la justice réparatrice et l’égalité pour toutes les personnes d’ascendance africaine, y compris les femmes, les personnes LGBTIQ+, les jeunes, les personnes âgées, les personnes handicapées et les migrants.

La deuxième session de l’Instance permanente s’est ensuite tenue cette année à New York, sous le thème central « Réaliser le rêve: une déclaration des Nations Unies sur la promotion, la protection et le plein respect des droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine ».  Avec plus de 1 600 participants et plus d’une centaine d’événements parallèles, l’Instance permanente a suscité un vif intérêt dans le monde entier, s’est félicité la Présidente.  Elle a précisé que l’Instance permanente a réaffirmé l’importance de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et souligné la nécessité de formuler une déclaration des Nations Unies sur la promotion, la protection et le plein respect des droits humains des personnes d’ascendance africaine.

Malgré les mesures positives qui ont été mises en œuvre, le défi que représente la lutte contre des pratiques discriminatoires profondément enracinées reste d’une grande ampleur, a déploré la Présidente qui a appelé à la proclamation d’une deuxième Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine.  La réparation est la pierre angulaire de la justice et sans elle, il ne peut y avoir de programme efficace de développement durable.  Elle a notamment appelé à la création d’une commission d’enquête internationale indépendante sur la justice réparatrice pour Haïti, à la justice réparatrice pour les personnes d’ascendance africaine, et à la création d’un fonds pour le développement des personnes d’ascendance africaine.  Elle a également jugé urgent de collecter des données ventilées sur les personnes d’ascendance africaine pour rendre compte de la situation de leurs droits humains.

La Présidente de l’Instance permanente s’est ensuite inquiétée de la reproduction des inégalités par l’intelligence artificielle, en particulier à travers les biais algorithmiques.  Elle a également déploré l’invisibilité des personnes d’ascendance africaine, en particulier des femmes, dans les processus d’élaboration des politiques.  De même, elle s’est inquiétée de la santé physique et mentale des personnes d’ascendance africaine, notamment des droits sexuels et reproductifs des femmes d’ascendance africaine.  À ce titre, l’Instance permanente recommande l’adoption de politiques capables d’assurer une couverture sanitaire universelle, y compris des services de santé mentale pour les personnes d’ascendance africaine. 

Dialogue interactif

Quelles sont les pratiques et mesures optimales pour lutter contre la discrimination systémique sous toutes ses formes, a demandé le Mexique. Le Canada s’est inquiété des persécutions subies par les personnes d’ascendance africaines LGBTQI+ et a voulu savoir comment les contrer. 

L’Union européenne a recommandé à l’Instance permanente d’organiser ses sessions juste après celles du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine pour permettre le plus de synergie possible dans la méthodologie de travail. 

Le Brésil a estimé qu’un renouvellement de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine serait l’occasion de réaliser des progrès tangibles vers l’égalité raciale.  Ce serait l’occasion pour les pays occidentaux de prendre des mesures énergiques pour rendre justice aux victimes, a appuyé la Chine selon qui le colonialisme, l’esclavage et la traite des esclaves transatlantique représentent la période la plus sombre de l’histoire humaine. 

De son côté, la Fédération de Russie a appuyé l’initiative de l’Instance permanente visant à créer un fond international pour la restitution des biens et artefacts culturels pris à l’Afrique.  De manière connexe, la Colombie a appuyé l’initiative visant à élaborer une déclaration de l’ONU sur la promotion et le plein respect des droits des personnes d’ascendance africaine.  Cet instrument devrait comprendre la reconnaissance universelle des droits économiques, sociaux, politiques et culturels et des outils pour combattre les pratiques coloniales contemporaines, a estimé la délégation. 

Reprenant la parole, la Présidente de l’Instance permanente pour les personnes d’ascendance africaine a appelé les États à promouvoir des lois plus claires et inclusives concernant la qualité de vie des personnes d’ascendance africaine.  Elle a également recommandé la création d’observatoires dédiés à l’égalité dans l’application des lois ainsi que l’adoption de mesures pour lutter contre le racisme et la discrimination raciale.  L’organisation d’événements internationaux d’échanges de bonnes pratiques peut également être envisagé.  De même, elle a conseillé l’organisation d’actions de discrimination positive grâce à la mise en place de systèmes dotés de ressources financières. Elle a par ailleurs appelé à faire du portugais l’une des langues de l’Instance permanente, notant que le Brésil, pays lusophone, abrite la plus grande population afro-descendante après l’Afrique.  Elle a également insisté sur la nécessité d’organiser une seconde Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.   

Exposé

Mme SORCHA MACLEOD, membre du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a indiqué qu’au cours de l’année écoulée, le Groupe a effectué des visites en Grèce et en Arménie et a fait des communications aux États et aux acteurs concernés, au nom d’individus et de groupes exposés à des violations résultant des activités de mercenaires et de sociétés de sécurité privées.  Présentant le rapport thématique annuel du Groupe, consacré à l’environnement juridique dans lequel opèrent les mercenaires, elle a précisé qu’il aborde des tendances émergentes concernant l’utilisation contemporaine de mercenaires et les violations des droits humains et du droit humanitaire international, ainsi qu’une vue d’ensemble des cadres juridiques internationaux et régionaux réglementant le recrutement, le financement, la formation et l’utilisation de mercenaires. 

Selon la membre du Groupe de travail, les conclusions du rapport confirment que l’utilisation de mercenaires est un problème « systémique et croissant » qui touche de nombreuses régions et divers types de conflit.  Leur utilisation prolonge les conflits armés, sape les processus de paix, déstabilise les régions et, fait plus préoccupant, entraîne et exacerbe la commission de graves violations des droits humains, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité à l’encontre des populations civiles, a-t-elle souligné.  Bien qu’il existe des cadres juridiques internationaux et régionaux potentiellement efficaces pour limiter l’activité des mercenaires, les États Membres manquent « cruellement » d’engagement pour les mettre en œuvre, a déploré Mme MacLeod.  Dans ce contexte, elle a appelé à s’attaquer aux causes profondes du mercenariat, qui se recoupent souvent avec les causes structurelles de l’exclusion, de la pauvreté et de l’inégalité. 

Abordant la question des sociétés militaires et de sécurité privées, elle s’est félicitée de l’élaboration continue d’initiatives réglementaires multipartites telles que le Document de Montreux, le Code de conduite international des prestataires privés de services de sécurité et les Principes volontaires sur la sécurité et les droits de l’homme, regrettant toutefois que le nombre d’États s’étant engagés à les respecter reste insuffisant.  Tout en se félicitant du récent renouvellement du mandat du Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée chargé d’élaborer le contenu d’un cadre réglementaire international, sans préjuger de la nature de celui-ci, relatif aux activités des sociétés militaires et de sécurité privées, elle a regretté que les États n’aient pas encore trouvé de terrain d’entente sur la forme, le champ d’application et le contenu de ce mandat.  Elle a exhorté les États à s’engager vivement dans l’élaboration d’un instrument juridique applicable à l’échelle mondiale sur cette question.

Avant de conclure, Mme MacLeod a invité les États à s’abstenir de recruter, d’utiliser, de financer et d’entraîner des mercenaires et à interdire de telles pratiques dans leur droit national.  Elle a ajouté que les États doivent garantir des voies de recours effectives pour les victimes et prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la responsabilité juridique des entreprises fournissant des services de sécurité ou des services militaires basées ou gérées à partir du territoire national en ce qui concerne les violations des droits humains du fait de leurs activités. 

Dialogue interactif

À la suite de cette présentation, l’Union européenne a rappelé que la notion de mercenaire est clairement définie par le droit international et que, par conséquent, les activités de mercenariat ne devraient pas être confondues avec celles de militaires et d’entreprises de sécurité privées.  Elle a donc exhorté le Groupe de travail à se concentrer plus clairement sur les mercenaires, avant de dénoncer les violations des droits humains commises par le groupe de mercenaires Wagner.  De son côté, Cuba s’est déclarée préoccupée par le fait que des pays comme les États-Unis stimulent le recours à des mercenaires à l’encontre de pays en développement, et ce, afin de protéger leurs activités d’exploitation dans l’hémisphère Sud.  L’Iraq s’est ensuite félicité d’avoir promulgué une loi qui empêche les entreprises de violer les droits humains, avant de demander si le Groupe de travail juge nécessaire d’adopter un instrument juridiquement contraignant pour lutter contre le recours aux mercenaires. Enfin, l’Arménie a estimé que, grâce à la révision de son Code pénal, elle peut jouer un rôle de pionnier dans le Caucase pour défendre la reddition de comptes, l’accès à la justice et les réparations pour les victimes de violations perpétrées par des mercenaires et des sociétés militaires privées. 

Reprenant la parole, la membre du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a souligné la nécessité d’un instrument juridiquement contraignant, pointant les lacunes dans le cadre existant -Document de Montreux et Code de conduite international des prestataires privés de services de sécurité- notamment en ce qui concerne la prise en compte des droits des victimes.  Elle a précisé que le nombre de mercenaires et de sociétés militaires privées a augmenté considérablement, représentant aujourd’hui des dizaines de milliers de personnes.  Mme MacLeod a aussi noté que la définition des mercenaires en droit international est restrictive, ce qui permet aux sociétés privées et aux États de la contourner.  Des États peuvent ainsi faire appel à des mercenaires pour les intégrer à leurs forces armées, tandis que d’autres évoquent des fonctions de formateurs et/ou d’instructeurs pour recruter des mercenaires.  Considérant enfin que la dichotomie entre mercenaires et sociétés militaires et/ou de sécurité privées est inopérante, elle a exhorté les États à devenir partie à la Convention internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’instruction de mercenaires. 

Suite et fin de la discussion générale

M. ARAM HAKOBYAN (Arménie) a signalé que les Arméniens sont depuis longtemps la cible d’une propagande de haine et de xénophobie documentée.  Il a rappelé qu’en 2021, l’Arménie a lancé des poursuites devant la Cour internationale de Justice (CIJ) contre l’Azerbaïdjan.  Sur la base des demandes faites, la Cour a publié des ordonnances indiquant, entre autres, que l’Azerbaïdjan doit adopter les mesures nécessaires pour prévenir l’incitation à la promotion de la haine raciale contre les personnes de nationalité ou d’origine arménienne, y compris dans les institutions publiques. 

Se disant fermement engagé en faveur de l’élimination du racisme, il a souligné l’importance de respecter les recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.  Toute tentative visant à réprimer les aspirations des peuples de vivre dans la liberté et la dignité doit être considérée comme une violation flagrante des droits humains et être fermement rejetée par la communauté internationale, a-t-il estimé. 

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a noté que la doctrine de la supériorité raciale a justifié trois siècles d’esclavage, et que les Afro-descendants en paient encore le prix.  Les propriétaires d’esclaves ont été indemnisés après l’abolition de l’esclavage, mais l’Afrique ne s’est jamais vu offrir de réparation, a-t-elle dénoncé. Pourquoi un tel dédain au sujet des discussions sur le racisme? s’est interrogée la délégation selon laquelle le devoir de mémoire doit être toujours maintenu afin qu’une telle tragédie ne se reproduise jamais.

M. LANG (États-Unis) a appelé à une lutte mondiale coordonnée contre le racisme systémique, affirmant que son pays abordait cette tâche avec « humilité », reconnaissant le travail qu’il lui restait à accomplir sur son propre territoire.  Il a regretté l’exclusion systématique de certains groupes au sein des sociétés, notamment les personnes d’ascendance africaine, notant que cela les empêche d’accéder à une vie sociale, civile et politique complète.  Il a également relevé que ces groupes étaient souvent les plus vulnérables et exclus des discussions les concernant. 

Rappelant que les États-Unis avaient créé le prix des champions des défenseurs des droits humains, pour récompenser ceux qui combattent le racisme structurel frappant leurs communautés, il a fait savoir que les lauréats venaient cette année du Pérou, d’Israël, de la République de Moldova, de la Tunisie, du Népal et du Bangladesh.  Il a aussi indiqué que les membres d’un conseil consultatif pour renforcer le dialogue avec la diaspora africaine avaient été désignés, avant de se féliciter du lancement de la première stratégie nationale pour contrer l’antisémitisme, ainsi que de l’inauguration d’un centre pour les Américains asiatiques.  La volonté de reconnaître ses propres défauts est un pas en vue d’une meilleure cohésion sociale, a-t-il souligné.  

M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a insisté sur le caractère sacré du droit à l’autodétermination, regrettant que certains en soient toujours privés, comme s’il s’agissait d’un « luxe suprême ».  Pourquoi le peuple palestinien est-il privé de ce droit, s’est dit-il indigné, fustigeant également la violation de leurs droits fondamentaux.  Dénonçant le « régime le plus barbare de l’humanité », il a mis en cause Israël qui occupe les hauteurs du Golan depuis 1967. Le peuple syrien a le droit de se libérer de cette occupation, a-t-il insisté. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a livré un plaidoyer en faveur de l’inclusion des personnes afro-descendantes, notant que le Costa Rica a consacré le caractère pluriethnique de sa démocratie dans sa Constitution.  Selon le dernier recensement national, 8% des habitants se reconnaissent comme des afro-descendants, a précisé le représentant qui a appuyé l’appel en faveur d’une seconde Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine.

Mme MARISKA DWIANTI DHANUTIRTO (Indonésie) s’est inquiétée de la montée des discours de haine racistes en ligne et de l’augmentation de l’islamophobie avec les autodafés du Coran.  Elle a estimé essentiel de trouver l’équilibre entre la liberté d’expression, principe crucial des sociétés démocratiques, et la protection des droits et de la sensibilité des minorités religieuses et raciales.  S’inquiétant du fait que certains médias, ainsi que les réseaux sociaux, puissent propager l’hostilité et la haine, elle a appelé les États à adopter des mesures pour assurer une coexistence harmonieuse.  Elle a également condamné fermement toute manifestation d’intolérance religieuse ou d’incitation à la violence contre telle ou telle communauté pour quelque motif que ce soit. 

Abordant la situation en Palestine, la représentante a rappelé le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et appelé à restaurer le processus de paix en vue d’une solution à deux États, malgré les efforts de la « Puissance occupante » qui menacent cet objectif.  Elle a appelé à ne pas se retrouver dans une situation où « il n’y aura plus rien à négocier », ni plus personne pour le faire. L’histoire montrait que la répression du droit à l’autodétermination était vouée à l’échec, a-t-elle affirmé. Dénonçant les conditions terribles à Gaza, elle a appelé à faire entendre la voix de ces personnes invisibles, affirmant qu’il ne pouvait y avoir de deux poids, deux mesures dans le respect des droits humains et du droit international. 

M. ALEJANDRO GONZÁLEZ BEHMARAS (Cuba) a insisté sur la nécessité de poursuivre les engagements de la Déclaration de Durban.  Mettant en cause les États-Unis, il a jugé inconcevable qu’un pays aussi riche ne puisse s’attaquer aux discriminations systémiques. Les cas de Georges Floyd ou de Breonna Taylor sont quelques exemples de la brutalité policière cotre les afro-descendants, a-t-il rappelé.  Il a appelé à lutter contre le racisme en s’attaquant à la pauvreté, au sous-développement, et aux séquelles du colonialisme, exhortant en outre à promouvoir une culture de tolérance et de respect.  Le représentant s’est ensuite félicité du fait que 45,8% des membres du Parlement cubain soient des personnes noires et métisses.  De même, en 2019 un programme national de lutte contre le racisme a permis de mettre sur pied une commission nationale visant à éliminer définitivement les vestiges du racisme. 

Poursuivant, le représentant a déploré que le droit à l’autodétermination demeure hors de portée pour le peuple palestinien.  Décriant des décennies de pratiques israéliennes et la complicité des États-Unis, il a considéré que la situation actuelle est constitutive de crimes de « lèse humanité » et de crimes de guerre. Il a ensuite dénoncé les mesures coercitives unilatérales imposées par les États-Unis en violation de la Charte des Nations Unies, affirmant qu’il s’agit du principal obstacle au développement de Cuba. 

Mme ELEANE YAOSKA PICHARDO URBINA (Nicaragua) a dénoncé le racisme comme un fléau terrible ayant détruit des civilisations entières et a appelé à lutter contre ses causes profondes.  Elle s’est inquiétée des attaques ayant eu lieu en Europe contre les symboles sacrés de certaines croyances, informant ensuite que son pays avait pris des dispositions légales pour lutter contre le racisme et rejoint les instruments internationaux sur la question.  Elle a par ailleurs rappelé le droit inaliénable des peuples à l’autodétermination, insistant en outre sur l’importance de lutter contre le colonialisme, le néocolonialisme et l’impérialisme. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a rappelé que des millions de personnes continuent, en 2023, d’être victimes de racisme, de discrimination raciale, d’inégalité́ ou d’exclusion, considérant que ces phénomènes ont un impact négatif sur le tissu social et déstabilise les valeurs communes. Exprimant sa solidarité avec ceux qui luttent contre ces fléaux, le représentant a rappelé que le Gabon est partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et souscrit aux nombreuses résolutions adoptées par l’Assemblée générale visant à l’éradication totale de ce phénomène.  Il a ajouté que son pays traduit en actes les recommandations contenues dans le document final de la Conférence d’examen de Durban de 2001.  Il a enfin insisté sur la nécessité de promouvoir les cultures du dialogue, de la paix et de l’acceptation d’autrui, lesquelles sont au cœur des préoccupations de la politique du Gouvernement gabonais et concourent à endiguer les actes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée. 

M. TIÉMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a décrit le racisme comme une menace pour l’ensemble de la communauté internationale.  À cette aune, il a estimé que le fossé grandissant entre les pays développés et les pays en développement renforce dangereusement les sentiments d’hégémonie culturelle.  La communauté nationale a néanmoins enregistré quelques progrès, a nuancé le représentant, mentionnant notamment la réaffirmation du droit des peuples à l’autodétermination ou encore le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Parce que pluriethnique, son pays est conscient de la dangerosité des phénomènes racistes, a-t-il affirmé, avant de revenir sur plusieurs politiques nationales mises en place en faveur du vivre-ensemble, notamment via les programmes scolaires.

Mme EKATERINE LORTKIPANIDZE (Géorgie) a indiqué que la promotion de l’égalité et l’absence de discrimination constituent les grandes priorités de la deuxième stratégie nationale 2022-2030 de son pays en matière de droits humains, laquelle prévoit notamment l’amélioration continue de la législation, la prise en compte des besoins des groupes minoritaires et une réponse pour les victimes.  La représentante a expliqué qu’un système de données statistiques sur les crimes commis pour des motifs d’intolérance a été mis en place en 2020, permettant aux acteurs gouvernementaux de partager rapidement les informations.  De plus, des campagnes de sensibilisation sont menées dans tout le pays, tant au niveau central que local, a-t-elle ajouté, avant d’alerter la Troisième Commission sur la situation des régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali sous occupation russe.  Elle a dénoncé les violations des droits humains dont souffrent les populations de ces régions, notamment des discriminations fondées sur des motifs ethniques et l’interdiction de l’enseignement dans la langue maternelle géorgienne.

M. STEPAN Y. KUZMENKOV (Fédération de Russie) a indiqué que la lutte contre le racisme est l’une des priorités de son pays dans le domaine des droits humains. Il a également réitéré l’attachement sans réserve de la Fédération de Russie à la Déclaration et au Programme d’action de Durban.  Déplorant la persistance du racisme, particulièrement à l’égard des personnes d’origine africaine, il a estimé que ses racines profondes se trouvent dans un « passé colonial honteux ».  Après avoir regretté que les efforts de la communauté internationale pour lutter contre ce fléau ne soient pas couronnés de succès, il a rappelé que son pays soumet chaque année à l’Assemblée générale un projet de résolution sur la « lutte contre la glorification du nazisme, du néonazisme et d’autres pratiques qui contribuent à alimenter les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée », afin de prévenir les « horreurs » qu’engendre cette idéologie et pratique criminelle.  

Le représentant a ajouté que la Fédération de Russie est un des États les plus multiethniques au monde.  Elle compte, en effet, en son sein plus de 190 peuples, dont la majorité bénéficient d’entités territoriales, a-t-il relevé.  Vantant le modèle fédératif russe, il a noté que tous les citoyens du pays sont considérés comme égaux et que le principe de l’autodétermination est garanti grâce à l’autonomie territoriale. 

M. BRUNO BERNARDO SERAGE (Mozambique) a regretté que la communauté internationale continue d’être témoin de la lutte que mènent des peuples pour faire reconnaître leur droit à l’autodétermination.  Rappelant que son pays a dû subir le joug colonial pendant des siècles, le représentant a estimé que le Sahara occidental, en tant que territoire non autonome, devrait bénéficier de tout le soutien nécessaire pour parvenir à une situation politique juste, durable et mutuellement acceptable, par le biais d’un processus de négociation libre et transparent pour parvenir à l’autodétermination de son peuple.  Dans la même veine, il a réitéré le soutien du Mozambique à toute initiative permettant de promouvoir une solution politique sur la question de Palestine. À cet égard, le délégué a fermement condamné les violences commises contre des civils en Israël et dans les territoires palestiniens, avant d’engager les parties à s’engager dans un dialogue véritable, en vue d’aboutir à une formule politique pérenne s’appuyant sur la solution des deux États.

Mme KATHERINE ANAS AHMAD AL-HALIQUE (Jordanie) a souligné l’obligation pour tous les États de protéger les droits humains indépendamment du statut des individus.  Elle a rappelé que 90% des réfugiés palestiniens se trouvent en Jordanie, se félicitant notamment des progrès accomplis pour leur garantir un accès équitable à la justice.  Les enfants réfugiés disposent également des mêmes droits que les enfants jordaniens en matière d’accès à l’éducation.  Toutefois près de la moitié des écoles jordaniennes se trouvent ainsi surpeuplées, s’est-elle inquiétée. 

En outre, 95% des réfugiés palestiniens se trouvant dans les camps ont accès aux services de base.  Ceux-ci sont censés être fournis par l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui ne peut cependant en couvrir qu’une infime partie en raison de ses contraintes budgétaires. Au cours des trois dernières semaines, 59 employés de l’UNRWA ont été tués à Gaza, a regretté la représentante qui a alerté que les bombardements aveugles et la privation collective de nourriture, d’eau et de carburant exposaient davantage les plus vulnérables à Gaza à la discrimination raciale et à la violence xénophobe. 

Mme FIORELLA CALDERA GUTIÉRREZ (Bolivie) a vanté le caractère multiculturel de son pays, avant d’exprimer sa préoccupation quant au sort des peuples afro-descendants et autochtones dans le monde.  Sur le plan national, elle a indiqué qu’une loi contre le racisme a été mise en place, de même qu’un plan multisectoriel de lutte contre les discriminations.  À l’échelon international, la représentante a rappelé que son pays s’engage sur ces questions en tant que Vice-Président du Conseil des droits de l’homme.  Elle a, d’autre part, réaffirmé la solidarité de la Bolivie envers le peuple palestinien et son droit à l’autodétermination, internationalement reconnu et protégé dans la Charte des Nations Unies. Appelant la communauté internationale à trouver une solution à la crise humanitaire à Gaza, elle a conclu son propos en réaffirmant le soutien de la Bolivie à tous les peuples qui luttent contre le colonialisme et pour leur droit à l’autodétermination. 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé que l’éducation et la sensibilisation sont essentielles pour s’attaquer au racisme et à ses causes profondes.  Il a également souligné l’importance de la législation pour garantir l’égalité des droits et la protection de tous les individus, encourageant les gouvernements à promulguer et appliquer des lois qui interdisent la discrimination et prévoient des mécanismes permettant aux victimes de demander justice.  Des efforts doivent aussi être faits pour promouvoir la diversité et l’inclusion dans tous les aspects de la société, y compris l’emploi, le logement et les services publics, a plaidé le représentant, pour qui les médias et les plateformes de communication ont une responsabilité particulière dans la promotion des représentations positives des diverses communautés et la lutte contre les stéréotypes nuisibles. 

Appelant à passer en revue les résultats obtenus jusqu’à présent dans les efforts visant à l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, le délégué a estimé que la Déclaration de Durban ne peut être considérée que comme « un début et non une fin ».  Elle reste néanmoins essentielle pour répondre aux espoirs et aux aspirations de ceux qui continuent à souffrir de discrimination dans le monde entier, a-t-il ajouté, réaffirmant l’opposition de son pays à toutes les formes de racisme. 

M. BILLEL HASSANI (Algérie) a indiqué que la non-discrimination est inscrite dans la Constitution algérienne.  Il a dit être préoccupé par la montée du populisme, avant de déclarer que la Déclaration de Durban est un moyen de relever les défis du racisme et de la discrimination raciale.  Il a ensuite affirmé que l’Algérie est aux côtés de tous ceux qui vivent sous occupation étrangère.  À ce titre, il a réitéré sa ferme condamnation des attaques contre les Palestiniens sans défense à Gaza, lesquelles constituent à ses yeux de graves violations du droit international commises par la force d’occupation.  Le représentant a par ailleurs rappelé que le peuple du Sahara occidental attend encore la décolonisation de son territoire.

M. İSMAIL AYDIL (Türkiye) a rappelé que la Constitution de son pays affirmait l’égalité de tous devant la loi sans discrimination aucune, ajoutant qu’elle était partie à tous les instruments internationaux pertinents aux niveaux mondial et régional.  Il s’est inquiété d’une montée des discriminations ethniques et religieuses, de l’utilisation du racisme en politique, et de l’islamophobie.  Il a affirmé que les actes contre les musulmans ne pouvaient être tolérés sous le couvert de la liberté d’expression « qui a des limites », ajoutant que le personnel politique et médiatique avait la responsabilité de s’y opposer.  Il a demandé aux États Membres d’interdire les incitations à la haine et la violence. 

Évoquant la situation à Gaza, il a appelé à se ranger derrière les déclarations du Secrétaire général qui s’oppose aux discours de haine.  Il a salué l’adoption de la résolution 53/1 du Conseil des droits de l’homme qui condamne la haine religieuse, notamment les récentes profanations du Coran.  Il a estimé que l’Alliance des civilisations constituée par la Türkiye et l’Espagne était un outil utile pour encourager la compréhension entre les cultures. 

Mme AVITAL MIMRAN ROSENBERG (Israël) a dénoncé avec la plus grande fermeté le massacre perpétré par le Hamas sur le sol israélien, le qualifiant d’acte terroriste mené par une « organisation terroriste génocidaire » qui ne reconnaît pas Israël et veut sa destruction.  La représentante a confirmé à ce propos la mort à Gaza de la jeune ressortissante germano-israélienne Shani Louk, capturée par le Hamas lors de son raid meurtrier sur une rave-party.  Assurant qu’Israël reconnaît le droit à l’autodétermination, elle a rappelé que le peuple juif a fait valoir ce droit après avoir erré pendant plus de 2 000 ans.  « Il y a 75 ans, notre rêve est devenu réalité et nous sommes rentrés chez nous », a-t-elle déclaré. 

La déléguée a ensuite rappelé la diversité de la population israélienne, qui comprend des juifs, des musulmans et des chrétiens.  Elle a souligné la volonté de son pays de vivre en paix avec ses voisins, tout en évoquant les menaces existentielles auxquelles Israël doit faire face.  Après avoir constaté la montée de l’antisémitisme et la multiplication des tentatives de délégitimation d’Israël, elle a fait état d’attaques contre les Juifs dans le monde entier, notamment contre des synagogues et des écoles.  Cet antisémitisme a aussi été relevé dans les manifestations au cours desquelles des pancartes appelaient à « nettoyer le monde des Juifs », s’est-elle indignée, mentionnant également des slogans réclamant un État palestinien « pour remplacer Israël ».  Selon elle, les événements du 7 octobre et ceux qui s’en sont suivis témoignent de l’importance du droit des Juifs à l’autodétermination.  « En tant que peuple, nous sommes forts, mais dans le monde entier et même dans cette salle, nous continuons de faire l’objet de propos haineux », a déploré la représentante, appelant à faire davantage pour combattre l’antisémitisme et les idéologies qui menacent la « patrie des Israéliens ». 

M. AMARA SHEIKH MOHAMMED SOWA (Sierra Leone) a déploré la montée des multiples formes de racisme, notamment celle du suprématisme blanc, appelant tous les États à promouvoir la compréhension entre les peuples, entre autres. Éliminer les systèmes racistes implique de comprendre les causes qui les sous-tendent et d’investir dans l’éducation, a-t-il indiqué.  Il a insisté sur l’importance des compensations, y voyant une question de justice, avant de se féliciter des étapes franchies dans le cadre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. 

Mme HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte) a exprimé sa profonde inquiétude face à la montée des manifestations de racisme et de xénophobie, évoquant notamment les autodafés du Coran commis en Europe sous prétexte de la liberté d’expression. Ces actes et tous les actes similaires devraient être interdits par la loi, car ils prônent la haine nationale, raciale ou religieuse.  Elle s’est inquiétée de l’utilisation des médias sociaux pour diffuser des discours de haine, relevant l’absence de cadre juridique à cet égard et soulignant la responsabilité de l’État de protéger les droits humains dans ce domaine.  Elle a appelé à élaborer des normes complémentaires à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale afin de criminaliser les actes racistes et xénophobes alimentés par la haine religieuse, y compris contre l’islam et ses adeptes. 

Passant au droit à l’autodétermination, elle a déclaré que l’attaque actuelle d’Israël, Puissance occupante, contre les civils de Gaza est la pire d’une série d’agressions militaires, déplorant des milliers de morts.  Le bombardement d’hôpitaux et d’écoles, le refus d’accès à l’aide humanitaire et le déplacement forcé de civils palestiniens sont tous contraires au droit international, a-t-elle souligné, notant que l’histoire rappelle que la déshumanisation des peuples est un prélude au génocide.  La déshumanisation de longue date du peuple palestinien a permis le nettoyage ethnique actuel par Israël, tandis que les grandes puissances mondiales ferment les yeux, complices de crimes contre l’humanité.  La seule solution est la réalisation du droit à l’autodétermination du peuple palestinien par la création d’un État indépendant dans les frontières de 1967, a-t-elle déclaré. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint Siège, a indiqué que le racisme est un mal qui perdure malgré des avancées apparentes et des changements significatifs dans la législation.  Tous les membres de la famille humaine partagent les mêmes droits et devoirs fondamentaux, car ils possèdent la même dignité donnée par Dieu, a considéré le représentant.  Il s’est inquiété des restrictions et des persécutions auxquels les individus sont confrontés pour avoir professé leur foi, tant en privé que dans la sphère publique, et a rappelé que les gouvernements ont le devoir de protéger ce droit de leurs citoyens.  C’est l’une des exigences minimales absolues nécessaires pour vivre dans la dignité. 

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a indiqué que la Constitution de son pays interdit toute discrimination fondée sur la race, le sexe ou d’autres motifs. Il a estimé que le racisme est la pire forme de violation des droits humains.  La discrimination raciale contre les minorités rohingya au Myanmar a conduit à leur nettoyage ethnique et leurs déplacements forcés.  La discrimination systémique, y compris les discours de haine parrainés par l’État, a contribué à la poursuite des violences et des hostilités contre les Rohingya lors de leurs exodes récurrents vers d’autres pays, principalement le Bangladesh, a-t-il ajouté.  Il a relevé que le fléau de la discrimination raciale continue de prévaloir dans de nombreuses régions du monde, rappelant la montée alarmante de la haine contre les minorités pendant la pandémie de COVID-19.

M. ALI MABKHOT SALEM BALOBAID (Yémen) a condamné l’agression brutale d’Israël sur Gaza, notamment la destruction d’infrastructures, le ciblage aveugle de civils sans défense et l’interruption de l’approvisionnement en nourriture et en eau, qui, ensemble, a-t-il affirmé, constituent un crime de guerre, un crime contre l’humanité et une violation flagrante du droit international.  En outre, le conflit ne se limitera pas à la Palestine et aux territoires occupés, car ses conséquences s’étendront à d’autres pays et régions du monde, s’est inquiété le représentant.  Le droit international ne donne-t-il pas aux Palestiniens le droit à l’autodéfense et le droit à l’autodétermination, a interrogé la délégation.  Une paix juste et globale est le seul moyen de mettre fin à ce conflit, a-t-il déclaré, soulignant que sans un retour aux frontières de 1967, il n’y aura pas de paix dans la région.

Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a souligné que le principe d’autodétermination avait évolué depuis 1960 et que la résolution 1514 de l’Assemblée générale, fondatrice en la matière, était le produit du contexte particulier des indépendances des années 50 et 60.  Elle a relevé que cette résolution avait été suivie de la résolution 1541, qui stipule que ce principe ne s’appliquait nullement à une région d’un État Membre, et la résolution 2625 qui rend toute tentative de détruire totalement ou partiellement l’unité nationale ou l’intégrité territoriale incompatible avec la Charte des Nations Unies.  Elle a plaidé en faveur de l’autonomie qui implique la démocratie locale, la participation économique, et la promotion des identités linguistiques et culturelles.  Elle a affirmé que « n’en déplaise à la délégation algérienne et ses nostalgies des doctrines de la guerre froide », le Sahara marocain avait définitivement réintégré sa mère patrie, le Maroc, en 1975, et n’était pas une affaire de décolonisation mais de parachèvement de l’intégrité territoriale du Maroc, principe scellé et reconnu par l’Accord de Madrid de 1975.  Elle a dénoncé la création d’un mouvement séparatiste par l’Algérie pour mener une guerre par procuration contre le Maroc, et lui a demandé d’accorder le droit à l’autodétermination au « peuple vaillant de la Kabylie » qui le réclame depuis longtemps. 

M. JONATHAN DAVID PASSMOOR (Afrique du Sud) a jugé scandaleux qu’il y ait encore 17 territoires non autonomes dont la quête d’autodétermination prend beaucoup trop de temps.  La situation persistante qui consiste à refuser ce droit au peuple du Sahara occidental n’est pas viable, a fait savoir le représentant, qui a appelé les États Membres à intensifier leur soutien à la poursuite de l’indépendance du Sahara occidental, appelant également à la reprise du dialogue entre les parties. 

Par ailleurs, estimant assister à un nouveau chapitre terrible de la lutte actuelle du peuple palestinien, il a condamné le meurtre odieux de civils, tant par les actions du Hamas que par les représailles excessives d’Israël.  Cette horrible série d’événements ne résulte pas d’une flambée spontanée de violence, mais s’inscrit dans le contexte de la lutte menée depuis 75 ans par le peuple palestinien pour l’autodétermination et le déni de ce droit par Israël, a estimé le représentant.  Il a appelé les États Membres à amplifier leur soutien à la cause palestinienne et appelé à la création de l’État de Palestine selon les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. 

S’exprimant au nom de la Ligue des États arabes, Mme AMINA MOHAMED ABDALLAH a affirmé que, malheureusement pour les Palestiniens soumis à l’occupation israélienne, le droit à l’autodétermination n’existe qu’en théorie, ajoutant qu’au cours des sept dernières décennies, l’occupation israélienne a continué à violer ce droit par la force.  Dénonçant une Puissance occupante ayant délibérément violé les droits humains universellement reconnus, ainsi que le droit international, le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme, elle a souligné qu’elle poursuivait ses activités de colonisation en violation des résolutions du Conseil de sécurité et du caractère sacré des lieux saints musulmans et chrétiens.  Elle a également condamné les violations flagrantes commises à l’encontre des civils de la bande de Gaza, qui s’apparentent à des crimes de guerre brutaux et à un génocide perpétré au vu et au su du monde. 

« Israël tente aujourd’hui d’expulser la population de Gaza occupée vers le sud avant de la déplacer vers les pays voisins », a-t-elle affirmé, dénonçant une violation flagrante du droit international humanitaire et de ses obligations en tant que Puissance occupante.  Elle a appelé la communauté internationale à déployer de réels efforts pour mettre fin à ces violations et garantir aux Palestiniens la jouissance de tous les droits humains inaliénables, notamment leur droit à l’autodétermination et à la création d’un État indépendant dans les frontières de 1967.  Affirmant que la Ligue ne négligerait aucun effort pour obtenir les droits légitimes des Palestiniens par des moyens diplomatiques et juridiques pacifiques, elle a ajouté qu’elle rejetait toute forme de racisme et de discrimination raciale. 

Mme ZEBIB GEBREKIDAN (Érythrée) a vu dans l’adhésion de son pays à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale le prolongement des idéaux du Front populaire de libération de l’Érythrée. Exprimant son inquiétude face à la résurgence du racisme dans certaines parties du monde, perpétuant les cycles de pauvreté et de violence, elle a noté avec inquiétude que le racisme en ligne cible les migrants et les minorités culturelles, forçant l’assimilation au détriment d’une véritable intégration, selon elle.  Ce phénomène alimente les idéologies suprémacistes et empêche les minorités et les réfugiés de parler leur langue et de pratiquer leurs coutumes, a regretté la représentante.  De surcroît, les algorithmes véhiculent des préjugés et ont des conséquences négatives sur les droits des réfugiés.  Invitant à faire preuve d’une volonté politique plus forte et à une action réparatrice urgente, y compris une éducation appropriée sur le racisme, elle a souligné l’importance de traiter les répercussions de l’esclavage et du colonialisme chez les personnes d’ascendance africaine.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, l’Azerbaïdjan a affirmé que des stéréotypes anti-azerbaïdjanais sont enseignés dans les écoles d’Arménie où selon une opinion largement acceptée les Azerbaïdjanais seraient ethniquement incompatibles avec les Arméniens.  Les organes compétents de l’ONU et d’autres organisations internationales ont exprimé à plusieurs reprises leur inquiétude face à l’esprit d’intolérance qui prévaut en Arménie, a affirmé la délégation selon qui la réalisation d’une paix et d’une stabilité durables ne peut être atteinte par des revendications territoriales, des accusations infondées et l’animosité envers les États et les peuples voisins.

L’Algérie a déclaré que le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination est consacré par la Charte des Nations Unies et que dans son avis consultatif, rendu le 16 octobre 1975, la Cour internationale de Justice (CIJ) n’établissait l’existence d’aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara occidental et le Maroc.  La Puissance occupante a toujours entravé la tenue d’un référendum sur l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, a affirmé la délégation.

À son tour, le Maroc a affirmé que l’Algérie appuie « le peuple du Sahara marocain » uniquement pour détourner l’attention de la situation désastreuse dans le camp de Tindouf où elle continuerait d’entraver les activités de recensement par peur que le monde découvre que moins de 30 000 personnes y vivent.  Cela conduirait à moins d’aide humanitaire que seul le Front POLISARIO utilise, a affirmé la délégation marocaine avant d’appeler l’Algérie à s’asseoir à la table des négociations.

Exerçant son deuxième droit de réponse, l’Algérie a souligné que c’est l’occupation marocaine qui a contraint le peuple du Sahara occidental à quitter ses terres.  Elle a relevé que le plan de paix nécessite un recensement des camps et du « territoire occupé » du Sahara occidental.  En 2018, le Haut-Commissariat pour les réfugiés estimait à 170 000 la population des camps, mais cela fait huit ans qu’il se voit interdit d’accès au « Sahara occidental occupé », a-t-elle déploré.

Le Maroc a affirmé avoir la preuve que des enfants sont recrutés dans les camps de Tindouf.  En outre, a-t-elle ajouté, deux rapports récents du Haut-Commissariat aux droits de l’homme font état d’une aggravation de la situation des droits humains en Algérie où la liberté d’expression et la liberté de réunion sont prises pour cible et où la force est utilisée de manière disproportionnée contre des manifestants pacifiques.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: les délégations entendent le Président de la CPI et affichent leur plein soutien à la Cour face aux attaques qui la visent

Soixante-dix-huitième session,
21e & 22e séances, matin & après-midi
AG/12549

Assemblée générale: les délégations entendent le Président de la CPI et affichent leur plein soutien à la Cour face aux attaques qui la visent

Les délégations ont été quasi unanimes, aujourd’hui, à l’Assemblée générale, à afficher leur soutien à la Cour pénale internationale (CPI) pour son travail dans la lutte contre l’impunité pour les crimes les plus graves, mais aussi pour défendre cet organe face aux attaques et menaces dont elle a fait l’objet pendant l’année écoulée. La charge de travail importante de la Cour, le nombre d’affaires jugées et en cours, ou encore le nombre de pays qui ratifient son texte fondateur, le Statut de Rome, démontrent combien la Cour incarne « la quête de justice et les plus hautes aspirations de l’humanité », a déclaré à l’ouverture du débat le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis. 

L’Assemblée a d’abord entendu le Président de la CPI, M. Piotr Homanski, présenter son dernier rapport.  Il a dénoncé d’emblée les menaces « inacceptables » des autorités de la Fédération de Russie qui ont engagé des poursuites contre six juges et le Procureur de la Cour en réaction aux mandats d’arrêt émis à l’encontre du Président Vladimir Putin et de Mme Maria Lvova-Belova, qui sont accusés des crimes de guerre de déportation et de transfert illégal d’enfants depuis les zones occupées de l’Ukraine vers la Russie.

Évoquant une cyberattaque récente ainsi qu’une tentative d’infiltration « presque réussie » d’un agent du renseignement, M. Homanski a également parlé d’attaques « sans précédent » contre l’indépendance judiciaire au niveau international.  Dénonçant des intimidations qui compromettent le fonctionnement de la Cour et posent des risques pour la sécurité du personnel, la Mongolie, notamment, a appelé les États parties au Statut de Rome à allouer des ressources pour permettre à la Cour de continuer à travailler normalement. 

La Cour a été saisie de 16 situations cette année dans plusieurs régions du monde, a noté son Président, en soulignant les décisions importantes dans l’affaire Dominic Ongwen en Ouganda, ou sur la situation en Ukraine. Seize personnes font aujourd’hui l’objet de mandats d’arrêt de la CPI dans huit situations différentes, a-t-il précisé, tout en rappelant l’importance cruciale de la coopération des États pour mener à bien les arrestations et transferts des personnes recherchées.  M. Homanski a par ailleurs insisté sur le rôle complémentaire de la Cour par rapport aux juridictions nationales, donnant plusieurs exemples de pays où, comme en Guinée, la Cour a encouragé et assisté les autorités dans leur quête de justice pour les atrocités criminelles commises sur leur territoire. 

La réparation aux victimes a été un sujet de satisfaction partagé par de nombreuses délégations qui, comme l’Argentine ou le Mali, ont jugé satisfaisant cet aspect du travail de la Cour ou fait part, à l’instar de la France, la Belgique ou le Canada, de leur intérêt, voire d’un soutien financier conséquent, au Fonds au profit des victimes.  Le Fonds a été décrit par le Président de la CPI comme un outil « transformateur » avec un impact réel sur le terrain, comme en République centrafricaine ou en République démocratique du Congo. 

La Cour n’a cependant pas échappé aux critiques, certaines délégations, dont la Chine, mettant en garde la CPI contre le risque de partialité dans le cas où elle n’enquêterait pas sur des situations comme celle concernant l’État de Palestine, pour laquelle le Procureur a été autorisé à enquêter dès 2014.  L’absence de volonté sincère d’enquêter sur des crimes de guerre en Cisjordanie ou en Afghanistan et d’en poursuivre les auteurs, « hypothèque la crédibilité » du système pénal international, a tempêté le représentant de la République islamique d’Iran.  Les Philippines ont pour leur part, accusé la CPI d’exercer « une domination déraisonnable sur le droit primaire d’un État d’enquêter et de poursuivre les crimes graves », en invoquant le non-respect du principe de complémentarité dans la reprise de l’enquête de la Cour sur la campagne menée par ce pays contre le trafic de drogue.

Plusieurs délégations ont enfin souligné que, pour atteindre ses objectifs d’universalité et d’impartialité, la Cour devait continuer à diversifier son recrutement.  Le délégué de la Corée a ainsi rappelé que tout en étant l’un des grands contributeurs au budget de la Cour, son pays était désormais « non représenté » au sein du personnel de la Cour.  Un sujet dont se sont faits l’écho la Nouvelle-Zélande, qui a dit attendre beaucoup de l’élection prochaine de six nouveaux juges, dont un engagement fort en faveur de la parité hommes-femmes, ou le Brésil et l’Ouganda qui ont demandé une meilleure représentation géographique. 

En début de séance, après une motion d’ordre présentée par la Fédération de Russie, qui, appuyée par la république arabe syrienne, a demandé avec insistance un vote immédiat sur le projet de résolution relatif au rapport de la CPI, le Président a décidé que la réunion se tiendrait conformément à la pratique établie et que la décision sur ledit projet serait prise à l’issue du débat.  Introduisant ce texte, les Pays-Bas ont rappelé que la résolution sur la CPI a toujours été adoptée de manière consensuelle.

L’Assemblée générale poursuivra ses travaux sur la question mercredi 1er novembre. 

RAPPORT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE (A/78/4)

Rapport du Secrétaire général (A/78/322) - Rapports du Secrétaire général (A/78/320, A/78/321)

M. DENNIS FRANCIS, Président de l’Assemblée générale, a rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) est un pilier essentiel de l’ordre juridique international.  « Elle incarne la quête de justice et les plus hautes aspirations de l’humanité », a déclaré le Président.  « Les auteurs des crimes les plus odieux seront invariablement traduits en justice. »  Il a rappelé que la responsabilité ne connaît pas d’exception pour ces crimes. 

La Cour est le symbole de nos efforts visant à faire triompher la justice, a indiqué le Président, avant de noter les difficultés auxquelles s’est heurtée la CPI cette année.  Il a appelé à reconnaître que la Cour évolue dans un panorama contrasté, la dualité de saisine de la Cour illustrant la nécessité de la coopération internationale. De plus en plus de pays se rallient à la CPI, a noté M. Francis en exhortant à se rappeler des voix et des souffrances des victimes.  Le Président a souligné la nécessité de ressources financières prévisibles en faveur de la Cour afin qu’elle puisse s’acquitter de son mandat.  Les États doivent également coopérer avec elle, a conclu le Président.

M. PIOTR HOFMAŃSKI, Président de la Cour pénale internationale, a rappelé que cette année marquait les 25 ans de l’adoption du traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI), le Statut de Rome.  Il a rappelé que la Cour faisait partie intégrante du système multilatéral, mais souligné aussi que l’expansion et le développement de son travail s’accompagnait de nombreux défis. 

Le Président a notamment cité des menaces et attaques « inacceptables » de la part de la Fédération de Russie dont les autorités, a-t-il rappelé, ont engagé des poursuites pénales contre six juges et le Procureur de la CPI, en réaction aux deux mandats d’arrêt délivrés par la Cour dans le cadre de la situation en Ukraine.  Il a parlé d’attaque « sans précédent » contre l’indépendance judiciaire au niveau international.  À cet égard, M. Hofmanski s’est dit « très reconnaissant » du soutien reçu des États parties et d’autres pays face à ces mesures.  Il a rappelé que la CPI était compétente pour juger les crimes commis en Ukraine, quels que soient les auteurs présumés et leur nationalité, et que le consentement de l’État de nationalité n’était « pas requis ». 

Le Président a également indiqué que la Cour avait récemment été victime d’une cyberattaque à l’origine non encore identifiée qui constitue une « tentative sérieuse de saper le mandat de la Cour ».  Il a fait part de sa gratitude à l’État hôte de la CPI, les Pays-Bas, pour son soutien à cette occasion et a rappelé que cet État avait par ailleurs empêché, l’année dernière, une tentative « presque réussie » d’infiltration d’un agent de renseignement hostile au sein de la Cour. 

S’agissant de l’exercice de son mandat, le Président de la CPI a expliqué que ces 12 derniers mois, la Cour avait été saisie de pas moins de 16 situations, parmi lesquelles l’affaire Dominic Ongwen, commandant de brigade dans l’Armée de résistance du Seigneur en Ouganda, ou encore la situation en Ukraine, dans laquelle deux mandats d’arrêt ont été émis pour des allégations de déportation illégale de population et de transfert illégal d’enfants de l’Ukraine vers la Fédération de Russie.  M. Hofmanski a rappelé qu’au total, 16 personnes faisaient aujourd’hui l’objet de mandats d’arrêt de la CPI annoncés publiquement dans huit situations différentes, et il a invité tous les États à coopérer avec la Cour pour l’arrestation et le transfert des personnes faisant l’objet de ces mandats d’arrêt. S’agissant des procès en cours, il a indiqué que deux d’entre eux concernaient la République centrafricaine et un autre, le Darfour, au Soudan.  Il a par ailleurs fait état des situations en Afghanistan, aux Philippines et au Venezuela, où le Bureau du Procureur a repris ses enquêtes. 

Le Président a ensuite évoqué les réparations accordées aux victimes, qui occupent une place importante dans les travaux de la Cour et a annoncé l’achèvement de la mise en œuvre des réparations ordonnées par la Cour dans l’affaire Katanga, en République démocratique du Congo en 2003.  Il a souligné que plusieurs centaines de victimes dans cette affaire avaient bénéficié des réparations accordées par le Fonds au profit des victimes.  Les victimes de trois autres affaires ont, elles aussi, participé aux programmes de réparation, a-t-il expliqué en indiquant avoir pu apprécier en personne, l’impact des activités de la Cour et du Fonds sur le terrain en se rendant en novembre dernier à Bangui en République centrafricaine, une visité qu’il a jugée « enrichissante », notamment pour constater l’effet transformateur des projets dudit Fonds. 

Le Président a enfin souligné que la CPI était une cour « complémentaire », qui n’intervient que s’il n’y a pas d’autre voie de justice possible, rappelant que dans certains cas, la Cour coopérait avec les autorités, comme en Guinée ou en Colombie, où des synergies et collaborations entre juridictions s’étaient mises en place.  Rappelant que la compétence de la CPI était limitée aux crimes commis sur le territoire ou par un ressortissant des États parties au Statut de Rome, ou d’un État qui a accepté la compétence de la Cour, elle n’était pas en mesure d’offrir la même protection à toutes les personnes.  M. Hofmanski a donc encouragé tous les États à adhérer au Statut de Rome, en soulignant toutes les bonnes raisons d’adhérer au système du Statut de Rome, par exemple pour participer aux décisions relatives au financement de la CPI, ou à l’élection de ses plus hauts responsables, ou encore pour bénéficier d’une protection juridique supplémentaire contre les atrocités de masse les plus graves.

Présentation du projet de résolution (A/78/L.6)

Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a présenté le projet de résolution sur le rapport de la Cour pénale internationale (CPI) porté par son pays. Elle a, tout d’abord, rappelé que le Statut de Rome, qui fête son vingt-cinquième anniversaire, a entraîné des réformes pénales sur bien des continents et a permis de lutter contre l’impunité pour les crimes graves au niveau international.  Le Statut de Rome doit encore être renforcé et devrait devenir universel, a-t-elle poursuivi. 

« Alors que les normes juridiques fondamentales sont foulées au pied, il nous incombe de renforcer le Statut de Rome », a déclaré la déléguée, réitérant que les autorités nationales sont les premières instances responsables des mécanismes de poursuite des crimes internationaux.  À ce titre, elle a attiré l’attention sur la Convention de Ljubljana-La Haye, signée il y a quelques mois en Slovénie, qui permettra la coopération des États en matière d’enquêtes et de poursuites pénales pour le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et les autres crimes de droit international, estimant important qu’un maximum d’États adhèrent à cette Convention.  Outre le renforcement de la coopération entre les États, il est primordial de consolider la coopération avec la CPI, a-t-elle ajouté, notamment dans l’application des mandats d’arrêt, en participant à la relocalisation des témoins ou encore en partageant les preuves.  En outre, la déléguée a condamné toute attaque contre l’indépendance de la CPI, de ses représentants élus et de ses fonctionnaires. « Les Pays-Bas condamnent l’émission de mandats d’arrêt par la Fédération de Russie contre des représentants de la CPI - il s’agit de tentatives visant à torpiller le bon fonctionnement de la Cour. »  Enfin, elle a précisé que le projet de résolution A/78/L.6 contient principalement une mise à jour technique, appelant la communauté internationale à appuyer cette résolution qui fait consensus depuis sa première adoption en 1998. Le nombre de coauteurs témoigne de l’importance du débat et de la confiance accordée aux travaux de la CPI, a-t-elle conclu.

Débat sur la question

M. STEPHAN MARQUARDT, de l’Union européenne (UE), a rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) complète les efforts nationaux et régionaux pour lutter contre l’impunité pour les crimes les plus graves depuis 25 ans. Le mandat de la CPI est crucial pour faire avancer la paix et la sécurité internationales, a-t-il rappelé, comme en témoignent les enquêtes dans un nombre croissant de régions du monde. Le représentant a déclaré que les attaques, y compris les cyberattaques, envers la CPI, ses représentants et son personnel sont « inacceptables ». 

Par ailleurs, l’UE et ses États membres s’engagent à protéger l’indépendance et l’impartialité de la Cour et continueront de lutter contre les campagnes visant à propager de fausses informations et à délégitimer ses actions.  Le représentant a incité le Conseil de sécurité à utiliser son droit de saisine, à imposer des mesures de coopération entre les États et la CPI et à se pencher sur le manque de coopération lorsque des enquêtes et des poursuites sont en cours, encourageant l’Assemblée générale à fournir des aides pour couvrir les dépenses liées aux saisines.  En outre, il a appelé la CPI, à renforcer ses efforts concernant les persécutions basées sur le genre, rappelant que les inégalités et les violences de genre affectent les femmes de manière disproportionnée. Enfin, il a jugé nécessaire de mieux protéger les rescapés et de punir les auteurs, insistant sur la ratification universelle du Statut de Rome et félicitant la CPI pour le renforcement du Fonds au profit des victimes.

M. ALAIN GERMEAUX (Luxembourg) a rappelé que son pays restait un fervent défenseur de la lutte contre l’impunité et soutenait donc « sans équivoque » le travail de la Cour pénale internationale (CPI).  Il a noté que les enquêtes menées par la Cour portaient sur un nombre croissant de situations et que l’une d’entre elle portait sur des crimes possiblement commis depuis le 13 juin 2014 à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.  Le représentant a rappelé le caractère complémentaire du travail de la Cour par rapport aux systèmes judiciaires nationaux auxquels « elle ne vise pas à se substituer ».  Notant que l’ordre international fondé sur la règle de droit était « plus que jamais sous pression », il a appelé les États à la coopération, tout en se disant opposé à toute tentative de discréditer la Cour et d’entraver son travail. Il a, à ce titre, condamné les mesures visant son Président, le Procureur et les juges de la Cour impliqués dans les enquêtes concernant l’Ukraine.  « Plus les efforts de la Cour pour faire avancer la justice sont importants, plus les menaces qui pèsent sur elle sont élevées. »  Encourageant les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome, le représentant a salué la récente décision de l’Arménie en ce sens, en soulignant que chaque adhésion au Statut de Rome accroissait la « force collective » du système international fondé sur le respect de la règle de droit.  Il a par ailleurs, appelé à la ratification de tous les amendements au Statut de Rome, dont les amendements de Kampala sur le crime d’agression, « l’agression de la Russie contre l’Ukraine » ayant démontré la nécessité d’aligner la compétence de la Cour pour le crime d’agression sur les autres crimes qui figurent dans le Statut.  Il a conclu son intervention en appelant au soutien au Fonds au profit des victimes et en saluant l’action de la société civile dans la défense du mandat de la Cour. 

Mme ZINOVIA STAVRIDI, Cheffe du Département juridique du Ministère des affaires étrangères de la Grèce, a réitéré le soutien indéfectible de son pays au travail de la Cour pénale internationale (CPI) et souligné son rôle essentiel dans le renforcement du système de justice pénale internationale. Elle a noté avec satisfaction l’évolution notable des activités de la Cour et l’a félicitée de ses efforts pour améliorer son efficacité, y compris par l’adoption d’une stratégie sur l’égalité des genres et la culture sur le lieu de travail lancée en décembre 2022. L’intervenante a par ailleurs mis en avant la nécessité d’un dialogue renforcé entre la CPI et le Conseil de sécurité et d’un suivi actif des renvois du Conseil de sécurité afin d’assurer, entre autres, la coopération avec la Cour pour l’arrestation et la remise des personnes qu’elle recherche.  La Cour doit devenir véritablement universelle pour répondre aux attentes des victimes de crimes atroces dans le monde entier, a-t-elle conclu, appelant tous les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome et l’Accord sur les privilèges et immunités de la CPI ou à y adhérer.

M. PETER KLANDUCH (Slovaquie) a rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) est un pilier du droit international, appelant à la ratification universelle du Statut de Rome.  Préoccupé par les attaques envers la CPI, ses responsables et son personnel, le délégué a rappelé que ces menaces ne doivent pas affecter les activités de la CPI, son impartialité ou sa neutralité.  Par ailleurs, il a remarqué que la charge de travail élevée à laquelle la CPI fait face actuellement montre sa résilience et appelle à un appui financier pérenne, y compris dans le domaine de la cybersécurité.  L’élection prochaine de six nouveaux juges jouera un rôle essentiel pour que la CPI puisse s’acquitter de ses fonctions dans le futur, a-t-il estimé, demandant néanmoins à l’ONU de jouer un rôle plus actif, notamment via le système de saisine du Conseil de sécurité.  Le délégué a par ailleurs félicité l’UNESCO dans la mise en œuvre des décisions collectives pour la restauration du patrimoine.  Il a, en outre, pris note du nombre élevé de mandats d’arrêt non appliqués par les États Membres, encourageant la communauté internationale à respecter ces mandats et à soutenir la reddition de comptes pour les crimes graves au niveau international.  Enfin, il a espéré que la résolution sera adoptée par consensus.

Mme ALINA OROSAN, Directrice générale des affaires juridiques au Ministère des affaires étrangères de la Roumanie, a condamné les menaces visant le Procureur et les juges enquêtant sur les crimes commis dans le cadre de la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, jugeant « inacceptables » ces atteintes portées à l’indépendance de la Cour pénale internationale (CPI).  Aux côtés de tous ceux qui coopèrent avec la Cour, elle a encouragé à examiner les moyens potentiels de renforcer le Statut de Rome de l’intérieur.  La Roumanie est ainsi disposée à travailler sur les moyens de consolider la compétence de la Cour concernant le crime d’agression et de l’aligner sur sa compétence en matière de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.  Au regard de l’augmentation significative des activités de la Cour, l’intervenante a appuyé un soutien financier et logistique, rappelant que l’année dernière, son pays a contribué au Fonds au profit des victimes ainsi qu’au fonds d’affectation spéciale.  Cette année, la Roumanie a détaché un expert national auprès du Bureau du Procureur de la CPI, a-t-elle informé.  Pour finir, elle a annoncé que son pays a présenté la candidature de la juge Iulia Motoc en prévision des élections de décembre 2023. 

M. ERDENEBALSUREN DAMDIN, juge à la Cour suprême de la Mongolie, a souligné le rôle transformateur de la Cour pénale internationale (CPI) dans le développement du droit pénal international, en rappelant que le principe de complémentarité était un élément clef de l’équilibre entre souveraineté nationale et justice internationale.  Il a par ailleurs encouragé la promotion des partenariats et de l’assistance technique entre les États, la CPI, les organisations internationales et la société civile pour renforcer les capacités internes des États en matière d’enquête et de poursuite des crimes internationaux.  Le juge a rappelé que son pays était favorable à une participation des victimes aux procédures de la Cour et salué l’existence du Fonds au profit des victimes, en appelant les États Membres à « diversifier les mécanismes de financement » et à envisager des partenariats de collaboration pour alimenter ce fonds.  Il a par ailleurs insisté sur l’importance de la diversité et de la représentation régionale parmi les juges et le Secrétariat de la CPI, et condamné les attaques et intimidation dont a récemment fait l’objet la Cour, des actes qui, selon lui, compromettent non seulement son fonctionnement mais posent également des risques pour la sécurité de son personnel et de ses systèmes.  En réponse, le juge a suggéré que les États allouent les ressources nécessaires pour atténuer ces menaces et permettre à la Cour de fonctionner efficacement. 

M. XINMIN MA (Chine) a noté que la Cour pénale internationale (CPI) a une responsabilité particulière dans la réponse pénale à apporter aux crimes les plus graves.  Il a exhorté la CPI à s’acquitter de son mandat « dans le respect du principe de complémentarité, en toute indépendance et impartialité ». Cela est d’autant plus important que les affaires renvoyées à la Cour sont toujours plus nombreuses, en raison de l’instabilité de la situation internationale.  Rappelant que le Procureur a été autorisé à enquêter en Palestine, il a espéré que ce dernier s’acquitte de ce travail.  La Cour doit appliquer strictement le droit et éviter toute approche de deux poids, deux mesures, a tranché le délégué, en rappelant que son traitement de la question de l’immunité des représentants de l’État est « controversé ».  Les chefs d’État des pays qui ne sont pas parties au Statut de Rome jouissent d’une immunité absolue, a-t-il rappelé.  Enfin, le délégué a invité la CPI à « réfléchir à sa propre évolution » afin de bénéficier de l’appui de toute la communauté internationale.

M. JAMES WAWERU (Kenya) a rappelé le rôle joué par son pays dans la négociation du Statut de Rome, convaincu de l’importance de la justice et de l’obligation redditionnelle pour les crimes les plus graves.  Il a plaidé pour davantage d’efforts afin d’améliorer l’efficacité de la Cour pénale internationale (CPI), en particulier en matière d’indépendance et d’impartialité.  Il faut veiller à ce que la Cour soit structurellement et opérationnellement solide, et qu’elle demeure une instance de dernier recours, comme cela était prévu, a souligné le représentant, précisant que son travail doit être fondé sur le principe de complémentarité.  Il faut pour cela renforcer les capacités nationales des États afin qu’ils soient en mesure d’offrir le premier recours fiable en matière de responsabilité pour les crimes les plus graves.  Et pour que la Cour jouisse d’une confiance universelle, sa représentation doit également être universelle, a continué le représentant, notant que « la question de la représentation régionale n’a pas encore trouvé de réponse ».  Sur le plan opérationnel, le Kenya a prié la CPI de réorganiser ses priorités et d’appliquer les mesures de réduction des coûts correspondantes afin de rester dans les limites de son mandat « sans imposer un fardeau financier inutile » aux membres.

M. SEYED ALI MOUSAVI (République islamique d’Iran) s’est opposé à toute mesure visant à influencer l’indépendance judiciaire de la Cour via des pressions ou des manipulations politiques, les qualifiant de « violations de l’état de droit ».  Aujourd’hui, a-t-il déploré, le monde est témoin d’une crise humanitaire dans les territoires palestiniens occupés.  Il a dénoncé une situation marquée par des violations graves du droit international humanitaire, citant les meurtres, les déplacements forcés, les destructions d’infrastructures civiles, le recours disproportionné à la force, les bombardements de zones densément peuplées, d’hôpitaux et d’écoles, en plus du recours à la famine en tant que tactique de guerre.  Ces actions constituent l’un des crimes parmi les plus graves qui relèvent de la compétence de la Cour, a-t-il tranché.  C’est pourquoi le délégué a exhorté la CPI à agir rapidement.  Il a rappelé l’enquête entamée en 2014 sur les crimes commis au titre du Statut de Rome à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Sa délégation espère que la Cour donnera la priorité à cette enquête, « au vu de la situation humanitaire catastrophique et des massacres quotidiens perpétrés dans la bande de Gaza ».  S’agissant de l’Afghanistan et des « crimes commis depuis le 1er juillet 2002 dans ce pays », le délégué a exigé que les forces militaires qui se sont rendues coupables de crimes de guerre rendent des comptes et soient sanctionnées.  Pour finir, il a estimé que l’absence de volonté sincère d’enquêter sur des crimes de guerre et d’en poursuivre les auteurs « hypothèque la crédibilité » du système pénal international, soulignant qu’en tant que signataire du Statut de Rome, l’Iran suit de très près les activités de la CPI. 

M. REIN TAMMSAAR (Estonie), au nom des États baltes, a rappelé que ces États ont offert un soutien financier et opérationnel supplémentaire à la Cour pénale internationale (CPI) et au Bureau du Procureur pour faire face à la charge de travail exceptionnellement élevée de la Cour. Évoquant la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, le représentant s’est félicité de la rapidité avec laquelle la CPI a procédé et émis des mandats d’arrêt contre Vladimir Putin et Maria Lvova-Belova pour la déportation présumée d’enfants des zones occupées vers la Russie.  Par ailleurs, il a fermement condamné les récentes cyberattaques contre la CPI et les mesures restrictives annoncées par la Russie à l’encontre du Procureur, du Président et de plusieurs juges de la CPI.  Ces mesures constituent, à ses yeux, une tentative d’entraver les enquêtes de la CPI et une attaque directe contre l’indépendance et l’impartialité de la Cour. 

Concernant les 16 mandats d’arrêt émis contre des personnes ayant violé le Statut de Rome, le représentant a appelé tous les États à coopérer avec la CPI et à les remettre à la Cour.  S’agissant des 3 mandats d’arrêt relatifs aux crimes présumés lors du conflit de 2008 entre la Russie et la Géorgie, en attente d’exécution, il s’est dit heureux que le Procureur ait déjà conclu le processus d’enquête et concentré ses efforts sur la préparation du procès en relation avec les mandats d’arrêt existants.  Pour finir, le représentant a réitéré son appel au Conseil de sécurité pour qu’il s’abstienne d’utiliser le droit de veto dans les cas d’atrocités massives et utilise son droit de déférer à la CPI les situations dans lesquelles un ou plusieurs crimes, y compris le crime d’agression, semblent avoir été commis.

Mme ELINA KALKKU (Finlande) a, au nom des pays nordiques, rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) était la seule cour pénale internationale « permanente dotée d’un mandat mondial avec plus de 120 États parties, et s’est félicitée de la récente décision de l’Arménie de ratifier le Statut de Rome.  Elle a noté la « relation particulière » que la Cour entretenait avec l’ONU en raison notamment du pouvoir du Conseil de sécurité de déférer des situations à la Cour.  La représentante a encouragé le Conseil à utiliser plus souvent ce pouvoir et ses membres à s’abstenir d’utiliser leur droit de veto dans les situations où il existe des indications claires et crédibles de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou d’agression.

Les pays nordiques condamnent les poursuites pénales engagées par les autorités de la Fédération de Russie contre le Procureur, le Président et les autres juges de la Cour, a déclaré la représentante, ainsi que la cyberattaque dont la Cour a récemment fait l’objet, menaces qu’elle a jugées « inacceptables ».  Elle a en outre indiqué que la protection du personnel de la CPI s’étendait aux personnes qui coopèrent avec elle et lui fournissent des preuves et des informations. Si la CPI ne remplace pas les systèmes juridiques nationaux, elle « les renforce et les complète ». La coopération de tous les États avec la CPI est essentielle, a-t-elle encore expliqué, et prend des formes aussi diverses que le partage d’informations, l’exécution de mandats d’arrêt ou la réinstallation des témoins et l’exécution des peines.  La représentante a conclu son intervention en rappelant le rôle central des victimes au sein de la Cour, ces victimes ayant le droit de participer à la procédure devant la CPI au-delà de leurs seuls témoignages, et de recevoir assistance et réparation pour le préjudice qu’elles ont subi. Elle a, à cet égard, réitéré le soutien des pays nordiques au Fonds au profit des victimes. 

M. DUNKAN LAKI MUHUMUZA (Ouganda), au nom des États d’Afrique parties au Statut de Rome, a réaffirmé leur soutien sans faille à la Cour pénale internationale (CPI), en tant qu’institution judiciaire indépendante et impartiale, et leur engagement à lutter contre l’impunité pour les crimes les plus graves. Il a souligné l’importance de veiller à ce que la justice soit rendue de manière égale dans toutes les situations examinées par la Cour, y compris dans l’allocation des ressources à chaque affaire. « Toutes les victimes, quelle que soit leur origine, méritent un accès égal à une justice impartiale », a insisté la délégation, saluant le travail du Fonds au profit des victimes. Les États africains parties restent convaincus que la justice pour tous est possible, et que la lutte pour l’état de droit et contre l’impunité représente une mission universelle, dont la responsabilité incombe à la communauté internationale.  Le représentant a rappelé que les États d’Afrique ont joué un rôle clef dans la création de la CPI et participent activement à son travail, notamment par le biais de la coopération. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a dit que son pays continuera d’être un partenaire stratégique de la Cour pénale internationale (CPI), en jugeant la lutte contre l’impunité plus essentielle que jamais.  Le Président du Costa Rica a rendu visite à la CPI cette année, a informé la déléguée.  Elle a jugé vital que la CPI continue de s’acquitter de son mandat afin que la lutte contre l’impunité échappe à l’incohérence, à la sélectivité et à la complaisance.  « Le droit international est universel et doit s’appliquer en tant que tel », a-t-elle dit, avant de souligner l’importance d’une cour efficiente, indépendante et efficace.  Elle a espéré que la confirmation de culpabilité dans l’affaire Ongwen enverra aux auteurs de crimes graves le signal sans équivoque que la justice internationale est à l’œuvre.  En outre, la déléguée s’est dite préoccupée par les actions visant à saper la Cour, telles les attaques ou menaces contre ses juges ou bien encore des actes de cyber espionnage.  « Nous réaffirmons notre totale confiance envers la Cour. »

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a estimé que la pertinence du travail de la Cour pénale internationale (CPI) est plus évidente que jamais.  Elle a souligné que le Bureau du Procureur vient de clore son examen préliminaire s’agissant de la situation en Colombie, en rappelant qu’il s’agit de l’examen préliminaire le plus long de l’histoire de la Cour puisqu’il a duré 17 ans. Elle a indiqué que l’accord de coopération signé par son pays et la CPI a permis de nombreuses avancées dans la mise en place de mécanismes de justice transitionnelle mais aussi ordinaire.  « Il s’agit d’un partenariat innovant et complémentaire », a dit la déléguée, en estimant que d’autres pays pourraient s’en inspirer.  Enfin, elle a assuré que son pays demeurera un « allié stratégique » de la Cour.

Mme CARLA MARIA RODRÍGUEZ MANCIA (Guatemala) a réaffirmé le soutien sans faille du Guatemala à la Cour pénale internationale (CPI).  Elle a salué la coopération entre la Cour et l’ONU mais a plaidé pour une amélioration de la coopération entre la Cour et le Conseil de sécurité.  La déléguée a voulu insister sur le principe de complémentarité et sur le nécessaire renforcement des systèmes juridiques nationaux, qui ont la responsabilité d’enquêter et de poursuivre en premier recours.  Les États parties et Membres de l’ONU doivent s’efforcer de renforcer leur coopération et réaffirmer sans relâche la pertinence et l’importance de la justice pénale internationale pour garantir l’état de droit, la paix et la sécurité internationales, a-t-elle ajouté.  Par ailleurs, a poursuivi la déléguée, la lutte contre l’impunité doit aller de pair avec l’engagement de fournir à la Cour les ressources dont elle a besoin pour accomplir sa mission, et ce afin de protéger son intégrité et son indépendance.  Enfin, elle s’est dite consternée par les récentes cyberattaques contre les systèmes de la CPI, dont les auteurs doivent être traduits en justice.

M. VÍCTOR GARCÍA TOMA (Pérou) a réaffirmé l’engagement sans faille de son pays envers la CPI et le droit international.  Il a salué le Fonds au profit des victimes qui a bénéficié à près de 17 000 victimes.  Il a ensuite pris note de l’état actuel des enquêtes menées en Ukraine et en Palestine. Il faut donner à la CPI les moyens nécessaires pour qu’elle puisse s’acquitter de son mandat, a-t-il plaidé, rappelant que sa délégation soutient un ordre international fondé sur des règles et appuie toute initiative visant à la reddition de comptes pour les crimes graves, a-t-il affirmé.  Les relations entre la CPI et le Conseil de sécurité sont également essentielles pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il dit en citant le droit de saisine du Conseil.  En conclusion, le représentant a appelé à renforcer la capacité et la « visibilité » du Fonds au profit des victimes qui finance des programmes permettant de rétablir les droits des victimes et de leur offrir des traitements médicaux et psychologiques. 

Mme DIARRA DIME-LABILLE (France) a tout d’abord souligné l’importance du multilinguisme et de l’équilibre des traditions juridiques, « gages de légitimité et d’efficacité », a-t-elle noté, en insistant sur l’importance de cette diversité dans toutes les situations, qu’il s’agisse d’enquêtes, de procédures préliminaires, de procès, d’appels ou de réparations.  S’agissant de la « guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine », la représentante a expliqué comment la France avait, dès le début du conflit, mis à disposition du Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) des personnels des ministères de la justice et de l’intérieur, pour l’aider à faire face à l’accroissement de ses activités.  Elle a par ailleurs indiqué qu’elle soutenait l’ensemble des enquêtes et activités dans les autres situations, mais aussi le Fonds au profit des victimes, notamment aux victimes de violences sexuelles.  La représentante a ensuite insisté sur l’importance de la coopération et de l’appui des États, qu’ils soient parties ou non au Statut de Rome, pour que la Cour puisse s’acquitter de ses missions, se félicitant à ce titre de l’entrée en vigueur, en juillet 2023, de l’accord conclu avec la CPI sur l’exécution des peines prononcées.  La France a versé cette année plus de 300 000 euros de contributions volontaires au budget de la CPI, dont une contribution de 150 000 euros pour le Fonds au profit des victimes.  La représentante a condamné les tentatives d’ingérence et les attaques contre la Cour ainsi que les poursuites pénales engagées en Fédération de Russie contre le personnel et les responsables de la Cour.  Elle a enfin salué l’adoption des quatre plans stratégiques de la Cour, du Bureau du Procureur, du Greffe et du Fonds au profit des victimes pour la période 2023-2025, qui selon elle contribuera aux synergies et à l’efficacité des missions de la CPI à l’avenir. 

Mme PAULA NARVÁEZ OJEDA (Chili) a apporté son plein soutien à la Cour pénale internationale (CPI) et souligné l’importance d’un appui permanent des parties au Statut de Rome à la Cour.  Les États doivent coopérer aux enquêtes de la CPI, a dit la déléguée, en rappelant que les résultats de ces enquêtes en dépendent.  Elle a toutefois noté que cette coopération demeure « problématique », des mandats d’arrêt n’étant pas exécutés.  Or la Cour contribue au maintien de la paix et de la sécurité internationales, a fait valoir la déléguée.  Elle a indiqué que son pays a ratifié l’amendement relatif au crime d’agression et qu’un projet de loi en vue de sa transposition dans le droit chilien est en cours d’examen.  Enfin, elle a dénoncé les menaces proférées contre les organisations de la société civile coopérant avec la Cour.

M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a rappelé que son pays a été victime de crimes de guerre et de génocide en 1971.  Depuis, son gouvernement n’a eu de cesse de préserver l’intégrité des principes établis dans le Statut de Rome, ainsi que l’indépendance de la Cour pénale internationale (CPI), a-t-il affirmé.  « La CPI est une lueur d’espoir pour les victimes » et le restera pour les victimes en Palestine, a-t-il estimé, saluant la déclaration récente du Procureur d’enquêter sur les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza en tant que crime de guerre.  « La déshumanisation vieille de plusieurs décennies envers la population palestinienne doit cesser », a-t-il exhorté.  Le représentant a pris note des enquêtes en cours sur la question de la déportation forcée des minorités rohingya du Myanmar vers le Bangladesh, rappelant que son pays accorde la plus haute importance à ces enquêtes et appelant le Myanmar à coopérer également avec la CPI afin que les auteurs de crimes rendent des comptes. Reconnaissant l’importance du Fonds au profit des victimes, il a salué les plans stratégiques de la Cour pour 2023-2025.  Enfin, il a souligné la nécessité de soutenir l’équilibre des genres et de la représentation géographique dans les structures de la CPI, regrettant que le Bangladesh reste sous-représenté malgré sa contribution significative. 

M. PABLO AGUSTÍN ESCOBAR ULLAURI (Équateur) a rejeté les actes d’intimidation et les tentatives visant à porter atteinte au mandat de la Cour pénale internationale (CPI), se disant également préoccupé par la récente cyberattaque contre la Cour.  À cet égard, il a félicité le Secrétaire de la Cour, M. Oswaldo Zavala Giler, pour les mesures immédiates prises pour atténuer ses effets, évaluer l’impact des dommages causés et adopter des mesures de redressement.  Évoquant les préparatifs de la célébration de la vingt-deuxième Assemblée des États parties en décembre prochain, le représentant a appelé à saisir cette occasion pour réfléchir aux défis auxquels la Cour est confrontée, notamment sur le plan financier.  Parmi les autres défis, il a cité la complémentarité, exhortant les États parties à adopter des lois afin de mettre en œuvre les dispositions du Statut de Rome dans leurs systèmes nationaux.  Enfin, en tant qu’État partie au Statut de Rome, l’Équateur réitère son soutien à la CPI et au rôle essentiel qu’elle joue pour garantir que les auteurs des crimes les plus graves touchant l’humanité soient tenus pour responsables.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a déclaré que si la Cour pénale internationale (CPI) était la seule cour pénale internationale permanente au monde, sa portée restait limitée, notamment en raison de l’impasse politique dans laquelle se trouve le Conseil de sécurité.  Rappelant que le Conseil n’avait saisi la Cour d’aucune situation « depuis plus d’une décennie », il s’est toutefois dit encouragé par le nombre des États qui continuaient à adhérer au Statut de Rome.  La compétence de la Cour s’applique à une grande variété de situations dans le monde, y compris pour juger les crimes internationaux « commis sur le territoire de l’État de Palestine » et ceux « commis par des ressortissants palestiniens », a-t-il noté.  Selon le représentant, le Procureur général devrait tenir compte de la paralysie du Conseil de sécurité et de la réticence des États pour poursuivre les crimes relevant de son statut, comme il l’a fait avec « l’agression contre l’Ukraine ».  Il a appelé à une coopération adéquate de l’ONU et de la société civile avec la Cour, mais aussi et surtout des États parties à la CPI dans les enquêtes et les poursuites et dans leur soutien, qu’il soit politique, diplomatique ou financier.  Le représentant a par ailleurs noté la portée juridictionnelle très limitée de la Cour en ce qui concerne le crime d’agression, rappelant que certains États doutaient de la pertinence de l’inclusion de ce crime lors de l’adoption du Statut de Rome.  Or le terme d’« agression » fait désormais partie intégrante des discours, des résolutions et des mécanismes de responsabilité des organes de l’ONU , a-t-il indiqué, et la compétence de la Cour sur le crime d’agression devrait donc être alignée sur celle des autres crimes principaux, car ce crime reste « l’une des atteintes les plus fondamentales à l’ordre international et la source de nombreux autres crimes commis » au cours de conflits armés internationaux. 

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a dénoncé l’agression, sans précédent, perpétrée par la Russie contre l’Ukraine, avant de qualifier de « tournant », les mandats d’arrêt délivrés contre Vladimir Putin et Maria Lvova-Belova .  « C’est la preuve que la CPI a la volonté et la capacité d’agir contre l’injustice. »  Le représentant a également condamné les cyberattaques visant le système informatique de la Cour et les procédures lancées par la Russie contre le Président et le Procureur de la Cour notamment.  Ces actions sont « inacceptables » et en tant qu’États parties nous devons fermement les condamner, a-t-il dit.  Il a souhaité que la Cour soit compétente pour le crime d’agression, en demandant donc la levée des « restrictions spéciales » qui s’appliquent aujourd’hui.  Enfin, il s’est dit très satisfait par la décision de l’Arménie de rejoindre le Statut de Rome.

M. ADAM KUYMIZAKIS (Malte) a réitéré le soutien de Malte à la Cour pénale internationale (CPI) et pris note des progrès que la Cour a enregistrés concernant des crimes commis dans le nord de l’Ouganda, au Mali, au Darfour, en République centrafricaine et en Ukraine.  Le rôle de la CPI est plus essentiel que jamais, a-t-il souligné, saluant à cet égard les enquêtes du Procureur, notamment sur la situation en Ukraine.  Si Malte salue la coopération entre la Cour et l’ONU sur plusieurs questions, le délégué a estimé que la relation de la CPI avec le Conseil de sécurité demande des améliorations.  Le Statut de Rome autorise le Conseil à saisir la Cour, mais il ne l’a fait qu’à deux reprises -pour le Darfour et la Libye- jusqu’à présent, a-t-il relevé, plaidant pour davantage de cohérence et d’objectivité en la matière et rappelant que le Conseil doit assurer un suivi et appeler les États concernés à coopérer avec la Cour.  Le délégué a également rappelé la déclaration politique sur la suspension du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse initiée par la France et le Mexique, que Malte a signée avec 103 autres États Membres.  « Un veto ne devrait pas empêcher le Conseil d’agir lorsqu’un crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et des crimes d’agression sont commis. » 

M. MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a qualifié le Statut de Rome de « phare contre l’impunité » ayant permis la promotion d’un système de justice pénale internationale dont la responsabilité et la coopération sont les principes directeurs.  Il a noté que la Cour pénale internationale (CPI) avait dû faire face à des défis internes et externes, raison pour laquelle les États parties avaient lancé une évaluation complète du fonctionnement de la Cour pour identifier les aspects à améliorer. L’indépendance de la Cour et sa capacité à remplir son mandat sont souvent menacées par des pressions extérieures, a reconnu le délégué, et les États parties doivent apporter à la Cour un soutien pour garantir son indépendance.  L’universalité de la Cour est aussi essentielle pour surmonter les perceptions de sélectivité dans l’application de la justice pénale internationale, a-t-il ajouté, en soulignant que l’augmentation du nombre de ratifications du Statut de Rome était cruciale.  Le délégué a expliqué que la coopération des États parties à chaque étape des enquêtes et des procès est tout aussi importante, y compris conformément au principe de complémentarité, et a suggéré aux États d’inclure les principes du Statut de Rome dans leurs législations nationales.  Rappelant l’adoption en mai dernier de la Convention de Ljubljana- La Haye sur la coopération internationale en matière d’enquêtes et de poursuites du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et autres crimes internationaux, il a jugé que ce texte représentait une contribution substantielle pour renforcer le principe de complémentarité.  En raison de sa propre histoire, l’Argentine est consciente de la nécessité de rendre justice aux victimes et convaincue de l’importance d’un soutien ferme au travail de la Cour.

M. JOSÉ EDUARDO PEREIRA SOSA (Paraguay) a fait état de la charge de travail importante assumée par la Cour pénale internationale (CPI) avec la participation de plus de 15 000 victimes dans les affaires devant la Cour, la tenue de plus de 200 audiences ou encore le rôle du Fonds au profit des victimes, dont bénéficient près de 17 000 personnes.  Le délégué a salué l’élaboration des plans stratégiques de la Cour, du Bureau du Procureur, du Greffe, du Fonds au profit des victimes pour 2023-2025 et espéré que des synergies en résulteront pour renforcer l’efficacité du travail de la Cour. Soulignant l’importance du rôle de la CPI dans les enquêtes et poursuites des auteurs des crimes les plus graves, il a souhaité que l’exercice du mandat de la Cour s’effectue selon des normes élevées de professionnalisme, d’indépendance et d’impartialité.  La lutte contre l’impunité pour ces crimes doit aller de pair avec une indemnisation adéquate des victimes, a-t-il encore insisté, avant de conclure son intervention en se félicitant de la contribution des organisations non gouvernementales, des organisations de la société civile et des universitaires aux travaux de la CPI. 

Mme KAFKOVA (République tchèque) a évoqué la relation « complexe » entre la Cour pénale internationale (CPI) et le Conseil de sécurité, voyant dans la prérogative de ce dernier de renvoyer une situation à la Cour, un moyen potentiel de promouvoir la responsabilité dans les cas où la Cour n’a pas compétence.  Dans cette perspective, la déléguée a préconisé le renforcement du dialogue entre le Conseil et la CPI, estimant que ce pouvoir de renvoi devrait aller de pair avec un suivi efficace des activités de la Cour.  Elle a souligné que son pays contribue depuis 2011 au Fonds au profit des victimes, un outil supplémentaire pour aider la Cour à remplir son mandat.  Pour finir, elle a rappelé que la Tchéquie a présenté un candidat en prévision des élections de juges à la CPI en décembre prochain. 

M. TAEEUN CHOI (République de Corée) a rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) a contribué significativement à faire avancer les trois piliers de l’ONU, à savoir la paix et la sécurité, le développement et les droits humains, regrettant les défis engendrés par les retraits du Statut de Rome, la sélectivité des cas et les menaces récentes à la sécurité.  Le délégué s’est en outre inquiété de la répartition géographique « inéquitable » au sein de la Cour et de son personnel, attirant l’attention sur la sous-représentation du Groupe Asie-Pacifique. Mon pays est passé de l’un des moins représentés l’année dernière, à totalement non représenté cette année, alors qu’il est le septième plus grand contributeur, a-t-il ainsi déploré.  Il a appelé la CPI à embaucher davantage de Coréens afin de ne pas compromettre la diversité des perspectives, la culture du travail de la Cour, ainsi que les perceptions concernant son indépendance, son impartialité, son universalité et sa coopération avec la communauté internationale. 

M. KARL LAGATIE (Belgique) a souligné le rôle de la Cour pénale internationale (CPI) en tant que pilier central de l’ordre mondial et de la lutte contre l’impunité pour des crimes qui touchent la communauté internationale.  Il est essentiel que les populations touchées par les conflits ne perdent pas confiance en la justice et que les auteurs des crimes les plus graves répondent pénalement de leurs actes, a-t-il estimé, rappelant que les États ont la responsabilité première de poursuivre et de juger au sein de leurs juridictions nationales les auteurs de ces crimes, en complémentarité avec la CPI.  Le représentant a ensuite rappelé que la Belgique est dépositaire de la Convention de Ljubljana-La Haye.  Afin que la Cour puisse remplir correctement sa mission, les États doivent coopérer, garantir l’impartialité et l’indépendance de la Cour, ainsi que payer les contributions obligatoires, a-t-il rappelé.  À ce titre, sa délégation réaffirme l’utilité du Fonds au profit des victimes qui fournit un soutien psychologique et matériel aux victimes.  Cette année, la Belgique y a contribué à hauteur de 530 000 euros, en sus d’un accord bilatéral de coopération renforcée avec le Greffe de la Cour qui porte sur l’accueil de personnes libérées au terme de leur peine sur le territoire belge et de plusieurs protocoles d’accord pour permettre le détachement au sein du Bureau du Procureur d’experts nationaux de la Police fédérale et de la Défense. 

M. JUSTIN PETER FEPULEAI (Nouvelle-Zélande) a dit attendre avec impatience l’élection de six nouveaux juges cette année, qui sera le reflet, a-t-il espéré, de l’engagement en faveur de la parité hommes-femmes et de la diversité géographique. Il a encouragé les États parties et tous les États à fournir la coopération et l’assistance nécessaires pour contribuer à mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes les plus graves qui préoccupent la communauté internationale en facilitant leur arrestation et leur remise à la Cour pénale internationale (CPI).  La Nouvelle-Zélande s’est attachée, pour sa part, à garantir que la Cour dispose des ressources dont elle a besoin pour mener ses enquêtes et ses poursuites de manière indépendante, impartiale et sécurisée. Cela est particulièrement important à une époque où la Cour est confrontée à un certain nombre de menaces directes, a soutenu le délégué, estimant « inacceptable » que des mandats d’arrêt aient été émis contre des élus et du personnel de la Cour et que des acteurs compromettent la sécurité de ses systèmes d’information.  Malgré cela, il s’est dit convaincu que la Cour ne se laissera pas dissuader de poursuivre son mandat vital.  Enfin, le délégué a rappelé que la Cour complète, plutôt qu’elle ne remplace, les tribunaux nationaux en tant que tribunal indépendant de dernier ressort, insistant sur le fait que la responsabilité première incombe aux États.

M. ALESSANDRO DE REZENDE PINTO (Brésil) a souligné les réalisations de la Cour pénale internationale (CPI), tout comme ses défaillances.  Il a noté que le Statut de Rome n’est pas universel, moins des deux tiers des États Membres de l’ONU étant partie.  Il est important de répondre à la sélectivité et à toute approche de deux poids, deux mesures, a ajouté le délégué, en estimant que les parties et le Bureau du Procureur ont, à cet égard, un rôle clef à jouer.  « Toutes les victimes des crimes les plus graves doivent être traitées sur un pied d’égalité. »  Il a souligné l’importance de la bonne coopération des États, avant d’encourager les juges de la CPI à s’engager dans un dialogue constructif avec la Cour internationale de Justice (CIJ).  Enfin, il a pointé la sous-représentation des États d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie au sein du personnel du Bureau de l’Assemblée des parties.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a pris note des activités de la Cour pénale internationale (CPI) et a exprimé sa préoccupation au sujet des mesures prises à l’encontre de fonctionnaires de la Cour, et en particulier contre le Procureur et plusieurs juges.  « Tout acte d’intimidation contre un tribunal de justice est inacceptable », a asséné la déléguée.  Jugeant indispensable la coopération avec l’ONU, notamment avec le Conseil de sécurité, elle a rejeté l’exercice du droit de veto pour empêcher le renvoi de situations devant la Cour, qui représente un obstacle à la justice et favorise l’impunité. À ce propos, la déléguée a rappelé l’initiative franco-mexicaine de restriction du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse, qui compte déjà 106 signataires, invitant les États Membres qui ne l’ont pas encore fait, et en particulier ceux du Conseil, à rejoindre cette initiative.  S’agissant du projet de résolution, elle a estimé que l’adopter sans vote aurait permis d’envoyer un message politique fort de soutien à la Cour et en faveur de l’obligation redditionnelle en général.  Elle a regretté qu’un vote ait été demandé et que l’Assemblée générale « ne parle pas d’une seule voix ». 

M. CALVIN SMYRE (États-Unis) a salué les progrès significatifs de la Cour pénale internationale (CPI) pour rendre justice aux victimes de l’Armée de résistance du Seigneur; dans l’affaire « Al Hassan » s’agissant des crimes de guerre commis au Mali; ainsi que pour le premier procès d’un haut-dirigeant, Ali Kushayb pour les crimes commis par le régime d’Omar al-Bashir au Darfour.  Il a applaudi les enquêtes conduites sur les événements au Darfour, au Venezuela et en Ukraine.  Si son pays reconnaît le rôle essentiel de la CPI pour rendre justice dans le monde, le délégué s’est néanmoins inquiété du grand nombre de mandats d’arrêt, appelant à des procès justes, crédibles et indépendants.  En outre, il a encouragé les autorités du Soudan à transférer les suspects devant la Cour pour qu’ils répondent de leurs actes.  Il s’est ensuite alarmé des cyberattaques sans précédent lancées contre la Cour et des mandats d’arrêt émis par la Fédération de Russie à l’encontre de membres du personnel de la CPI, qui, a-t-il apprécié, reste fidèle à son mandat.  Même si les États-Unis ne sont pas parties au Statut de Rome, ils apportent un soutien à la CPI à divers niveaux, a-t-il assuré, disant attendre avec intérêt la poursuite des discussions et la participation de son pays en tant qu’État observateur lors de la prochaine assemblée de la CPI. 

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a réitéré le soutien de son pays à la Cour pénale internationale (CPI), estimant que le monde est à un « tournant » du droit international.  Soulignant que le cas de l’Ukraine pousse la communauté internationale à réévaluer les crimes et la juridiction de la CPI, il a jugé nécessaire de combler les lacunes dans le Statut de Rome qui empêchent la reddition de comptes.  À ce titre, l’Allemagne réfléchit à des idées et des options avec un groupe d’États amis.  Enfin, le délégué a attiré l’attention sur la juge fédérale Ute Hohoff qui est candidate aux prochaines élections de la CPI, soulignant ses travaux sur la justice transitionnelle et contre les violences basées sur le genre. 

M. JAMES KIRK (Irlande) a estimé que l’augmentation de la charge de travail de la Cour pénale internationale (CPI) est le signe de son importance croissante.  Il est crucial que la Cour dispose des ressources nécessaires pour fonctionner efficacement, a dit le délégué.  Il a condamné la cyberattaque dont la Cour a été victime récemment, ainsi que les procédures lancées par la Russie contre le Président et le Procureur de la CPI.  « Ces agissements sont un affront fait à l’état de droit. »  Ceux et celles qui servent la justice ne doivent jamais faire l’objet d’intimidations, a-t-il déclaré.  Estimant que la procédure de renvoi d’une situation à la CPI par le Conseil de sécurité n’a pas montré tout son potentiel, le délégué a encouragé le Conseil à faire montre d’une approche plus consistante dans ce domaine.  Enfin, il a encouragé les membres à voter pour le projet de résolution.

M. MYKOLA PRYTULA (Ukraine) a rappelé que la Fédération de Russie commet des crimes de guerre en Ukraine depuis 2014, regrettant que la communauté internationale n’ait pas réagi suffisamment et que personne n’ait été traduit en justice.  De l’avis de l’Ukraine, c’est aussi l’une des raisons de cette agression sanglante.  « Ils comprennent que, pour l’instant, il n’y a pas de responsabilité. »  L’agression russe non provoquée a sapé l’ordre international fondé sur des règles, a poursuivi le délégué, indiquant que l’Ukraine coopère étroitement avec la Cour pénale internationale (CPI) depuis 2014 pour faire en sorte que les dirigeants russes soient punis.  Pour l’Ukraine, les mandats d’arrêt délivrés contre le Président Vladimir Putin et Maria Alekseïevna Lvova-Belova, accusés de crimes de guerre, sont est un « signal clair que personne n’est intouchable » et que chacun doit être jugé pour ses actes.  La délégation y voit un « exemple exceptionnel de complémentarité », puisque les autorités ukrainiennes sont paralysées dans leurs enquêtes et dans la poursuite de M. Putin en raison de son immunité.  L’Ukraine estime que ces mandats d’arrêt joueront également un rôle préventif.  L’invasion brutale et à grande échelle de la Russie et ses actes de guerre sur tout le territoire de l’Ukraine continuent de défier tout le système du droit et de l’ordre international, a conclu le délégué.  Il a espéré que d’autres crimes de guerre atroces, crimes contre l’humanité et crime de génocide commis par des fonctionnaires et du personnel militaire russes continueront d’être relevés et de faire l’objet de poursuites par la Cour.

M. OUMAROU GANOU (Burkina Faso) a noté la recrudescence des conflits aux quatre coins du monde, où d’innocentes populations sont victimes de violations de leurs droits les plus élémentaires, citant les exactions des groupes armés terroristes et extrémistes dans son pays.  Pour faire face à ces crimes, a-t-il dit, les juridictions nationales ont la responsabilité première d’engager les enquêtes et les poursuites.  C’est pourquoi depuis son adhésion au Statut de Rome, en 2004, le Burkina Faso a entrepris les démarches juridiques nécessaires pour intégrer le Statut dans son droit positif.  Afin de lutter contre l’impunité, le représentant a plaidé pour une justice pénale internationale forte et respectueuse des principes fondamentaux du droit international, notamment l’égalité souveraine des États, la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et l’immunité des chefs d’État en exercice.  Sa délégation appelle donc la Cour pénale internationale (CPI) à mener une « profonde introspection » en vue de renforcer l’impartialité et la non-sélectivité dans la prise en compte et le traitement des graves violations des droits humains, quels que soient le pays et le continent où elles surviennent.  « Ce n’est que débarrassée des oripeaux de la suspicion que la CPI gagnera en crédibilité et atteindra l’universalité et la pleine application du Statut de Rome. » Enfin, le Burkina Faso a soumis la candidature de Mme Adélaïde Dembele au poste de juge à la CPI pour les prochaines élections. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a salué l’adoption, le 26 mai de cette année, de la Convention de Ljubljana-La Haye, un traité historique conçu pour renforcer la coopération juridique internationale en appuyant les capacités nationales, qui est venue combler une lacune juridique importante. À cet égard, il a invité tous les États à signer la Convention à La Haye en février prochain.  Par ailleurs, relevant que les activités de la Cour pénale internationale (CPI) et du Conseil de sécurité sont étroitement liées, le représentant a exhorté ce dernier à jouer un rôle plus actif à travers l’utilisation des outils de responsabilisation, tels que les renvois à la CPI, le suivi des cas de non-coopération et l’adoption de mesures visant à promouvoir la coopération des États.  Pour finir, il a rejoint les appels lancés à l’Assemblée générale pour qu’elle envisage de financer les coûts associés aux renvois du Conseil de sécurité, dans la mesure où le Conseil agit au nom de la communauté internationale. 

Mme FUMIE TOKUNAGA (Japon) a fait part du soutien de son pays à la Cour pénale internationale (CPI) qui, a-t-elle déclaré, fait partie intégrante de l’architecture multilatérale de défense de l’état de droit.  À cet égard, elle a indiqué que son pays avait endossé, avec la Suisse, le rôle de facilitateur de la collaboration entre le Conseil de sécurité et la CPI, dans le cadre d’initiatives prises selon la formule Arria et qui ont permis d’échanger des points de vue entre les États Membres. La lutte contre l’impunité et pour la promotion de l’état de droit seront mieux réalisées si un plus grand nombre d’États adhèrent à la CPI, a-t-elle analysé, en se félicitant de la récente ratification du Statut de Rome par l’Arménie.  La représentante a fait part du soutien de son pays aux efforts de l’Ukraine pour ratifier le Statut de Rome, ce pays ayant accepté la compétence de la Cour par une déclaration déposée auprès du greffe de la CPI.  Elle a jugé que l’universalité du Statut de Rome restait un objectif important.  En référence à la déclaration de l’Assemblée des États parties du 10 octobre dernier, elle a réitéré l’engagement à préserver l’intégrité de la Cour face aux menaces ou mesures prises à son encontre.  Enfin, elle a réaffirmé l’engagement inébranlable du Japon envers la Cour, « en tant que premier contributeur financier et seul pays d’Asie à avoir saisi la Cour de la situation en Ukraine ».

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a noté avec inquiétude les menaces et les poursuites pénales engagées par un État Membre contre le Procureur et certains juges de la Cour pénale internationale (CPI).  Il s’est également dit préoccupé par les récentes cyberattaques qui ont gravement perturbé le fonctionnement de la Cour.  Jugeant ces menaces et attaques « inacceptables », et quelle qu’en soit la source, le délégué a assuré que son pays continuera à faire son possible pour défendre l’intégrité et l’indépendance de la Cour.  Poursuivant, il a pointé les graves difficultés auxquelles la Cour continue de faire face s’agissant de ses demandes de coopération, notamment pour l’exécution des mandats d’arrêt en cours.  À cette fin, il a exhorté les États parties à respecter leurs obligations au titre du Statut de Rome.  L’Italie suit également avec une grande attention le processus de réforme en cours, qui offre une occasion importante d’améliorer l’administration de la justice par la Cour, tout en garantissant le plein respect des principes consacrés dans le Statut de Rome.  Enfin, le délégué a salué la participation d’environ 17 000 victimes à des affaires portées devant la Cour, estimant que « l’attention portée aux victimes est un élément essentiel de la justice pénale internationale ».  C’est pour cette raison que son pays entend continuer à contribuer au Fonds au profit des victimes, a-t-il assuré.

Mme WALKER (Cuba) a estimé qu’il est plus nécessaire que jamais de pouvoir compter sur une institution judiciaire indépendante.  Cependant, Cuba considère que la Cour pénale internationale (CPI) est « loin d’être indépendante », étant donné les énormes pouvoirs que les articles 13 et 16 du Statut de Rome, accordent au Conseil de sécurité par rapport au travail de la Cour.  La prérogative du Conseil de déférer des situations à la Cour, confirme une tendance négative à une politique sélective à l’égard des pays en développement, au nom d’une prétendue « lutte contre l’impunité », a critiqué la déléguée.  Elle a donc réitéré la position de Cuba en faveur de la mise en place d’une juridiction pénale internationale impartiale, non sélective, efficace, juste, complémentaire des systèmes judiciaires nationaux, et exempte de subordination à des intérêts politiques.  Les décisions de la Cour de lancer des procédures judiciaires contre des ressortissants de pays non parties au Statut de Rome créent en outre un précédent inquiétant, de l’avis de Cuba.  Par ailleurs, la déléguée s’est inquiétée de l’escalade de la violence au Moyen-Orient, « due à 75 ans de pratiques israéliennes d’occupation illégale et de colonisation, en violation flagrante des droits inaliénables du peuple palestinien sur son territoire ».

M. THEODOULOS PITTAKIS (Chypre) a salué le Fonds au profit des victimes, appelant les États à y contribuer et à adhérer au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).  Il a noté que 45 États ont à ce jour ratifié l’amendement de Kampala, qui a pour objectif d’élargir le champ d’application des crimes d’agression.  Concernant la situation en Ukraine, il a affirmé que sa délégation suit de près l’évolution de la situation et fera en sorte qu’aucun crime de guerre ou crime contre l’humanité ne reste impuni. 

M. CHEIKH NIANG (Sénégal) a souligné la « parfaite convergence » entre les buts du Statut de Rome et les idéaux de la Charte des Nations Unies, qui ont en commun la volonté d’œuvrer pour le respect de la dignité humaine. Le nombre croissant d’audiences tenues, de décisions rendues et de victimes ayant pris part aux procédures témoigne de l’importante charge de travail, marquée par la recrudescence des conflits armés, de nombreuses violations du droit international et des tensions géopolitiques qui justifient le renforcement du rôle de la Cour pénale internationale (CPI) afin de lutter contre l’impunité et préserver la paix.  Le représentant a rappelé l’importance de la justice réparatrice pour atténuer les souffrances des victimes en leur permettant de retrouver une vie socioéconomique normale, et salué à cet égard les réalisations du Fonds au profit des victimes.  En outre, il a réaffirmé l’importance pour la CPI de « rester au-dessus des intérêts géopolitiques des États parties », ainsi que de préserver son indépendance, son intégrité et son impartialité.  Il a également appelé le Conseil de sécurité à jouer pleinement son rôle dans la prévention des crimes graves via son droit de saisine.  Estimant que la Cour joue un rôle complémentaire par rapport aux tribunaux pénaux nationaux, qui ont la responsabilité première d’enquêter et de poursuivre les crimes graves, le représentant a appelé au renforcement des systèmes judiciaires nationaux et de la coopération judiciaire entre les États parties. À ce titre, l’entrée en vigueur de la Convention de Ljubljana-La Haye et la ratification universelle du Statut de Rome permettraient de mieux lutter contre les atrocités et l’impunité. 

Mme RICCARDA CHRISTIANA CHANDA (Suisse) a condamné la cyberattaque dont la Cour pénale internationale (CPI) a été victime récemment.  « La Suisse réitère ici son soutien inébranlable à la Cour en tant qu’institution judiciaire indépendante et au travail important qu’elle entreprend. »  La déléguée a appelé au plein soutien des États à cet égard, particulièrement lorsque la Cour est soumise à des pressions externes importantes.  Elle a rappelé que la coopération des États est fondamentale pour le déploiement des activités de la CPI, celle-ci ne disposant pas de moyens d’exécution qui lui sont propres.  La Suisse invite dès lors tous les États à respecter les obligations de coopération prévues par le Statut de Rome, notamment en donnant suite aux demandes d’entraide et aux mandats d’arrêt ordonnés par la Cour.  Enfin, la déléguée a invité tous les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Statut de Rome, avant de souhaiter son renforcement. Il lui apparaît nécessaire d’harmoniser les règles de compétence de la CPI, afin que le crime d’agression puisse être poursuivi aux mêmes conditions que les autres crimes du Statut de Rome.

M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) a conclu en 2022 son enquête sur la situation en Géorgie.  Des mandats d’arrêt ont été délivrés contre plusieurs individus pour des crimes de guerre commis pendant l’agression russe de la Géorgie en 2008, a-t-il souligné.  La Cour a confirmé la responsabilité de la Russie pour des violations flagrantes des droits de Géorgiens dans un contexte d’occupation, telles que la torture, des actes inhumains et des prises d’otages, a déclaré le délégué.  Il a aussi rappelé l’arrêt historique rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en janvier 2021, par lequel la Cour a confirmé la responsabilité russe dans les crimes commis pendant la guerre de 2008 et l’occupation actuelle. Enfin, il a apporté le soutien sans faille de son pays à la CPI.

Mme DEVITA ABRAHAM (Trinité-et-Tobago) a salué le travail de la Cour pénale internationale (CPI) dont le rôle est mis en évidence dans le contexte difficile et évolutif des relations internationales.  La délégation a prié tous les États, qui ne l’ont pas encore fait, de ratifier le Statut de Rome et de coopérer avec la CPI à toutes les étapes des enquêtes et des procédures, notamment pour délivrer des mandats d’arrêt et pour transférer les personnes mises en cause afin qu’elles soient jugées par la Cour.  Trinité-et-Tobago reconnaît que le Fonds au profit des victimes joue un rôle indispensable pour aider les victimes à retrouver une vie digne. 

M. JAMES MARTIN LARSEN (Australie) a condamné la cyberattaque dont la Cour pénale internationale (CPI) a été victime récemment.  Les efforts visant à entraver le travail de la CPI ne saperont pas l’engagement de la communauté internationale en faveur de la justice et de la reddition de comptes, a assuré le délégué.  Il a rappelé que plus de 15 000 victimes ont participé au travail de la Cour l’année dernière dans le cadre des affaires qui lui sont soumises.  Le représentant a exhorté le Conseil de sécurité à faire davantage pour appuyer le mandat de la Cour en ce qui concerne les renvois de situations.  Rappelant que la résolution présentée aujourd’hui a toujours été adoptée de manière consensuelle, il a espéré que le consensus prévaudra cette année encore.  Enfin, il a exhorté les pays qui ne l’ont pas encore fait à rejoindre le Statut de Rome.

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines), au sujet de la situation aux Philippines mentionnée dans le rapport de la Cour pénale internationale (CPI), a regretté que la Chambre d’appel ait confirmé la décision de la Chambre préliminaire autorisant le Bureau du Procureur à reprendre ses activités d’enquête, et refusant de reconnaître le droit souverain de son gouvernement de mener des enquêtes sur des crimes graves, dérogeant ainsi au principe de complémentarité essentiel au travail du système de justice pénale internationale dont la CPI fait partie.  Longtemps après avoir cessé d’être un État partie au Statut de Rome, les Philippines ont choisi de soumettre des données au Bureau du Procureur, puis à la Chambre préliminaire, a précisé le délégué.  « La Cour ne peut pas étendre sa juridiction et exercer une domination déraisonnable sur le droit primaire d’un État d’enquêter et de poursuivre les crimes graves. »  En l’occurrence, a-t-il rappelé, les Philippines avaient ouvertement reconnu leur responsabilité d’enquêter et de poursuivre des crimes commis en lien avec la campagne de lutte contre les drogues illicites et s’étaient engagées auprès de la Cour.  Malgré leur retrait du Statut de Rome, dû à une « position de principe contre ceux qui politisent les droits de l’homme », les Philippines se sont engagées à lutter contre l’impunité pour les crimes atroces, a fait valoir le délégué, ajoutant que son pays dispose d’une législation et d’un système de justice pénale qui fonctionnent. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a rappelé que le Myanmar a reconnu la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) sur son territoire pour les crimes commis depuis le 1er juillet 2022.  Le peuple du Myanmar a besoin que justice soit faite pour les graves crimes commis par la junte militaire, qui a lancé une campagne brutale contre l’ensemble de la population depuis le coup d’État de février 2021, a expliqué le représentant. L’armée commet des atrocités depuis des décennies, notamment contre les Rohingya, a-t-il insisté.  Il a précisé que l’armée a tué plus de 4 100 civils depuis le coup d’État, qu’environ 1,7 million de personnes ont dû fuir et que le nombre de déplacés internes approche les 2 millions.  L’état de droit et le système judiciaire national ont été détruits par le coup d’État militaire, a-t-il continué.  Quant au Mécanisme d’enquête indépendant des Nations Unies pour le Myanmar, il reçoit presque chaque jour des rapports sur des allégations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Il recueille des preuves pour la justice et « la balle est clairement dans le camp de la CPI », a lancé le représentant, appelant à une action décisive pour sauver des vies et mettre un terme à l’impunité au Myanmar.  Une fois de plus, il a appelé le Conseil de sécurité à déférer la junte militaire devant la Cour.  S’il a reconnu les progrès de la CPI pour rendre la justice, il a regretté que ce ne soit malheureusement pas le cas pour le peuple du Myanmar, qui a droit, lui aussi, à une protection juridique internationale et à être préservé des atrocités.  Pour conclure, le représentant a assuré que le Gouvernement d’unité nationale du Myanmar reste déterminé à faire la lumière sur les crimes graves commis par la junte militaire et à traduire leurs auteurs en justice.

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a indiqué que le Gouvernement du Mali a engagé une coopération étroite avec la Cour pénale internationale (CPI), à laquelle il fournit une assistance en matière d’enquêtes, de poursuites et de protection des témoins. Dans ce cadre, le Gouvernement a saisi la Cour de deux affaires de destruction de monuments historiques et culturels, dont le mausolée de Tombouctou.  La CPI a ouvert une enquête pour crimes de guerre, qui a abouti à une condamnation, que le délégué a qualifiée de « sentence exemplaire », et poursuit ses enquêtes dans la seconde affaire.  Le délégué a voulu saluer l’engagement du Fonds au profit des victimes, qui a accordé des dédommagements à 1 400 victimes, et la collaboration entre le Fonds et l’UNESCO pour restaurer le patrimoine de Tombouctou.  En ce sens, il a remercié les partenaires, en particulier le Canada et la Norvège, pour leur accompagnement, et il a invité tous les États parties à soutenir davantage le Fonds, dont le rôle est unique et central dans le développement de la justice réparatrice. 

M. ZENON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a indiqué que les procédures dans les affaires en relation avec la situation dans son pays portées devant la Cour pénale internationale (CPI) sont presque toutes entrées dans leur phase exécutoire.  Elles se conjuguent désormais en termes de réparations en faveur des victimes.  « Toutefois, alors qu’on espérait que ces procédures seraient les dernières du genre, mon pays expérimente encore pour la nième fois, la triste réalité d’une agression armée barbare conduite par les forces armées rwandaises et leurs supplétifs du groupe terroriste dénommé « M 23 », qui sèment la mort et la désolation dans la province congolaise du Nord-Kivu, foulant aux pieds les initiatives de paix décidées par les dirigeants de la région dans le cadre des processus de paix de Luanda et de Nairobi. »  Le représentant a indiqué que c’est le sens du deuxième renvoi que son gouvernement a soumis au Procureur de la CPI le 18 mai 2023, concernant des crimes visés dans le Statut qui sont commis dans la province du Nord-Kivu, depuis le 1er janvier 2022.  Enfin, il a demandé au Bureau du Procureur de procéder de toute urgence à l’ouverture d’une nouvelle enquête afin de mettre hors d’état de nuire « ces criminels impénitents et notoirement récidivistes. »

M. ROBERT RAE (Canada) a regretté que la Cour pénale internationale (CPI) et son Président fassent l’objet de menaces et de cyberattaques.  Les États, qu’ils soient ou non parties au Statut de Rome, doivent respecter la Cour et son mandat consistant à amener les criminels devant la justice, a-t-il exhorté.  Il a salué le travail effectué sur l’égalité des genres qui doit maintenant être traduit en actions.  Les progrès sur l’affaire Ali Kushaybn contrastent avec les atrocités en cours au Soudan, a-t-il remarqué, mentionnant la semaine de haut niveau durant laquelle des panelistes ont mis l’accent sur les violences fondées sur le sexe.  Concernant la situation en Ukraine, le délégué a salué le mandat d’arrêt émis contre le Président Putin pour la déportation d’enfants. Par ailleurs, il a encouragé le soutien au Fonds au profit des victimes.  Saluant la coopération de l’ONU avec la CPI et l’ouverture de bureaux dans d’autres pays, il a reconnu qu’une coopération accrue avec le Conseil de sécurité permettrait de renforcer l’efficacité de la justice pénale internationale, bien que l’existence du droit de veto complique les choses. 

M. JONATHAN SAMUEL HOLLIS (Royaume-Uni) a félicité la Cour pénale internationale (CPI) pour sa résilience et sa détermination à s’acquitter de son mandat cette année, en dépit de cyberattaques et des tentatives d’intimidation de la Russie à l’encontre du Président et du personnel de la Cour.  Il a appuyé les autres États parties dans le rejet de ces tentatives « inacceptables » visant à interférer avec l’indépendance et l’impartialité de la Cour et à saper son rôle vital dans la garantie des responsabilités pour les crimes les plus graves.  Poursuivant, le délégué a réaffirmé le soutien de son pays à la CPI, comme en témoigne son appui pratique, notamment en matière de protection des témoins, de détachement de personnel, d’exécution des peines et d’officiers de liaison avec la police pour chacune des situations sur lesquelles la Cour enquête.  Il a salué, pour finir, le travail des États parties et de la Cour dans l’évaluation des recommandations et pour mettre en œuvre certains des changements fondamentaux requis.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Gaza: après la résolution de l’Assemblée générale, beaucoup attendent du Conseil de sécurité une résolution enjoignant à protéger les civils

9462e séance – après-midi             
CS/15473

Gaza: après la résolution de l’Assemblée générale, beaucoup attendent du Conseil de sécurité une résolution enjoignant à protéger les civils

Réuni cet après-midi sur la situation dans la bande de Gaza, à la demande de la Chine et des Émirats arabes unis, le Conseil de sécurité a entendu des appels impatients à l’action axés sur la protection de la population civile. Il lui a notamment été demandé de répondre, par l’adoption d’une résolution, à la volonté claire de la majorité des États Membres exprimée vendredi dernier à l’Assemblée générale en faveur d’une « trêve humanitaire immédiate, durable et soutenue ». 

Cette « résolution morale » de l’Assemblée doit aussi être adoptée par l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales pour mettre fin à ce bain de sang, a plaidé l’Observateur permanent de l’État de Palestine.  Si le Conseil ferme les yeux sur la volonté claire de la majorité des États du monde, cela pourrait être la goutte d’eau qui fait déborder le vase, a mis en garde la représentante des Émirats arabes unis.

Les trois hauts responsables de l’ONU venus informer le Conseil, dont le Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), M. Philippe Lazzarini, ont décrit une situation « horrible » dans la bande de Gaza, où « une population entière est déshumanisée » depuis le début de l’offensive israélienne. 

Non sans émotion, M. Lazzarini a détaillé un niveau de destructions sans précédent.  En l’espace de trois semaines, un million de personnes, soit la moitié de la population de la bande de Gaza, a été poussé du Nord vers le Sud de la bande.  Or, « aucun endroit n’est sûr à Gaza » et avec ces « déplacements forcés », c’est aujourd’hui plus de 670 000 personnes déplacées qui s’abritent dans des bâtiments surpeuplés de l’UNRWA.  Ils vivent dans des conditions épouvantables et insalubres, avec peu de nourriture et d’eau, dormant à même le sol, à l’intérieur ou même à l’extérieur de ces bâtiments. 

De plus, 64 employés de l’Office ont été tués.  C’est le plus grand nombre de travailleurs humanitaires de l’ONU tués dans un conflit en si peu de temps, a-t-il déploré, insistant sur le travail sans relâche que font ces enseignants, médecins, travailleurs sociaux, ingénieurs et personnels de soutien pour gérer les 150 abris de l’UNRWA ou maintenir ouverts les centres de santé et les sanitaires mobiles.  Mais aujourd’hui, ils manquent de carburant, d’eau, de nourriture et de médicaments. 

Le système de santé est en lambeaux, les patients gisent à même le sol et dans les couloirs, les chirurgiens opèrent sans anesthésie alors que 5 500 femmes enceintes doivent accoucher dans les 30 prochains jours et que la vie de 1 000 patients sous dialyse et de 130 prématurés en couveuse ne tient qu’à un fil.  C’est ce dont a témoigné pour sa part la Directrice de la Division du financement humanitaire et de la mobilisation des ressources du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  Mme Lisa Doughten a de plus averti que la situation actuelle n’est peut-être que le pâle reflet de ce qui nous attend.

D’autres chiffres alarmants, près de 70% des tués à Gaza sont des femmes et des enfants et, selon le Ministère palestinien de la santé, plus de 3 400 enfants palestiniens y ont été tués et plus de 6 300 autres blessés, soit une moyenne de 420 tués ou blessés chaque jour dans la bande.  Ce nombre dépasse le nombre d’enfants tués chaque année dans les zones de conflit du monde depuis 2019.  « Ces chiffres devraient nous émouvoir » a abondé, elle aussi émue, la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme Catherine Russell, disant craindre les traumatismes à vie des enfants israéliens et palestiniens. 

Les trois orateurs ont alors demandé au Conseil de sécurité de prendre des mesures urgentes, notamment de soutien aux travailleurs humanitaires de l’UNRWA et, surtout, l’adoption immédiate d’une résolution qui obligerait les parties à respecter le droit international, appellerait à un cessez-le-feu et autoriserait un accès humanitaire sûr et sans entrave.  Un texte qui exige aussi la libération immédiate et sûre de tous les enfants enlevés. 

De nombreuses délégations ont appuyé et relayé cet appel, faisant écho à la résolution de l’Assemblée générale, qui montre, selon le Groupe des États arabes, que la communauté internationale reste aux côtés des innocents.  Mais en dépit du message clair qu’elle contient, Israël fait la sourde oreille et choisit de renforcer son action militaire à Gaza, provoquant une situation catastrophique, a déploré la Chine.

Le délégué israélien a justifié ses actions en rappelant les atrocités du 7 octobre et en déclarant que le Hamas s’est engagé à exterminer les Juifs et Israël.  Le Hamas est contrôlé par un « régime nazi moderne », « le régime terroriste d’Iran » qui soutient les terroristes du monde, a-t-il dit.  Il a déploré que le monde reste silencieux comme au moment de la montée du nazisme dans les années 30, « un silence assourdissant ».

Le délégué s’en est pris notamment au Secrétaire général de l’ONU qui aurait « déroulé le tapis rouge devant le Ministre des affaires étrangères iranien nazi, la semaine dernière ». Il a ensuite annoncé aux membres du Conseil qu’à partir d’aujourd’hui, en le regardant, ils se souviendraient de ce qui se passe quand on reste silencieux: en se levant, il a épinglé une étoile jaune sur sa veste, comme les membres de sa délégation.  Un signe qu’ils entendent porter jusqu’à ce que le Conseil condamne les atrocités du Hamas et exige la libération immédiate des otages. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. PHILIPPE LAZZARINI, Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), a déclaré que les trois dernières semaines ont été « horribles ».  Presque tout le monde en Israël, dans les territoires palestiniens occupés et dans la région au sens large, est en deuil.  Les horribles attaques perpétrées par le Hamas en Israël le 7 octobre ont été choquantes, tout comme les bombardements incessants des forces israéliennes sur la bande de Gaza sont choquants.  Le niveau de destruction est sans précédent et la tragédie humaine qui se déroule est insupportable, a encore décrit le haut fonctionnaire en signalant qu’en l’espace de trois semaines, un million de personnes, soit la moitié de la population de la bande de Gaza, a été poussé du nord vers le sud de la bande.  Or, « aucun endroit n’est sûr à Gaza », a-t-il relevé.

Il a aussi déclaré qu’aujourd’hui, les civils restés dans le nord reçoivent des avis d’évacuation des forces israéliennes qui les exhortent à aller recevoir une aide humanitaire limitée dans le sud. Mais beaucoup, notamment les femmes enceintes, les personnes handicapées, les malades et les blessés, ne peuvent pas bouger, a-t-il déploré.  Il a tout simplement constaté des « déplacements forcés », dénombrant aujourd’hui plus de 670 000 personnes déplacées qui s’abritent dans des écoles et des bâtiments surpeuplés de l’UNRWA.  Ils vivent dans des conditions épouvantables et insalubres, avec peu de nourriture et d’eau, dormant à même le sol, à l’intérieur ou même à l’extérieur de ces bâtiments.  La faim et le désespoir se transforment en colère contre la communauté internationale, a prévenu M. Lazzarini en soulignant qu’à Gaza, la communauté internationale est mieux connue sous le nom d’UNRWA.

Le Commissaire général a ensuite indiqué que près de 70% des personnes tuées à Gaza sont des femmes et des enfants. L’organisation non gouvernementale Save the Children a rapporté hier que près de 3 200 enfants avaient été tués à Gaza en seulement trois semaines.  Cela dépasse le nombre d’enfants tués chaque année dans les zones de conflit du monde depuis 2019, a-t-il comparé, estimant qu’il ne peut pas s’agir de « dommages collatéraux ».  De plus, les églises, mosquées, hôpitaux et installations de l’UNRWA, y compris celles abritant des personnes déplacées, n’ont pas été épargnés.  Trop de personnes ont été tuées ou blessées alors qu’elles cherchaient refuge dans des lieux protégés par le droit international humanitaire.  Le siège actuel imposé à Gaza est une punition collective, a-t-il affirmé.

M. Lazzarini a fait remarquer que l’UNRWA est la dernière bouée de sauvetage pour le peuple palestinien à Gaza.  Il a alors lancé un appel aux membres du Conseil, demandant leur soutien, dans le contexte où, 64 employés de l’Office ont été tués en un peu plus de trois semaines.  C’est le plus grand nombre de travailleurs humanitaires de l’ONU tués dans un conflit en si peu de temps, a-t-il aussi insisté.  Aucun mot, à son avis, ne peut rendre justice aux milliers d’employés de l’UNRWA qui continuent de travailler sans relâche pour soutenir leur communauté.  Il s’agit d’enseignants, de médecins, de travailleurs sociaux, d’ingénieurs et de personnel de soutien.  Ils gèrent 150 abris de l’UNRWA, maintiennent ouvert un tiers des centres de santé et gèrent 80 équipes sanitaires mobiles.  Mais aujourd’hui, ils manquent de carburant, d’eau, de nourriture et de médicaments.

Concluant son exposé, M. Lazzarini a déclaré qu’une population entière est déshumanisée.  Les atrocités du Hamas ne dispensent pas Israël de ses obligations en vertu du droit international humanitaire, a-t-il lancé.  « Chaque guerre a ses règles, et celle-ci ne fait pas exception. »  Plus que jamais, les habitants de Gaza méritent notre empathie, a-t-il confié, en prévenant que son absence aggravera la polarisation dans la région et éloignera encore davantage toute perspective de paix.

Mme CATHERINE RUSSELL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a dit que le véritable coût de cette escalade se mesurera en nombre d’enfants tués et ceux dont la vie sera à jamais changée.  Selon le Ministère palestinien de la santé, a énuméré l’intervenante, plus de 3 400 enfants palestiniens ont été tués à Gaza et plus de 6 300 enfants blessés, avec quelque 420 enfants qui sont tués ou blessés chaque jour à Gaza. « Ces chiffres devraient nous émouvoir. »  En Cisjordanie, au moins 37 enfants auraient été tués, a ajouté Mme Russell avant de signaler aussi que plus de 30 enfants israéliens auraient été tués, tandis qu’au moins 20 sont toujours en otage dans la bande de Gaza, dont le sort est inconnu. 

Mme Russell a dénombré au moins 221 écoles endommagées ou détruites.  Les enfants israéliens et palestiniens vivent de terribles traumatismes dont les conséquences pourraient durer toute une vie, a-t-elle craint: la violence et les bouleversements peuvent induire un stress toxique chez les enfants handicapant leur développement physique et cognitif.  Cela peut causer des problèmes de santé mentale à court et à long terme. L’UNICEF, a déclaré la Directrice exécutive, fait de son mieux pour venir en aide à tous les enfants dans le besoin mais elle a indiqué que certains membres de son personnel ont perdu des enfants.  En outre, a-t-elle ajouté, la coupure des télécommunications il y a deux jours a rendu encore plus difficile la fourniture de l’aide aux enfants.

La Directrice exécutive a assuré que l’UNICEF et ses partenaires sont déterminés à rester sur le terrain pour venir en aide aux enfants.  Mais si les hostilités ne cessent pas d’urgence, leur sort est en danger, a-t-elle mis en garde en sollicitant l’aide du Conseil pour sortir de cette spirale de violence.  Le Conseil doit adopter immédiatement une résolution qui oblige les parties à respecter le droit international et qui appelle à un cessez-le-feu et à autoriser un accès humanitaire sûr et sans entrave, a-t-elle recommandé.  Le Conseil devra exiger la libération immédiate et en toute sécurité de tous les enfants enlevés, demander aux parties d’accorder aux enfants la protection spéciale à laquelle ils ont droit, et donner la priorité à la « crise des déplacements », avec 1,4 million de personnes déplacées à Gaza, dont la majorité sont des enfants, a aussi demandé la haute responsable. 

Toutes les parties, a insisté Mme Russell, doivent empêcher toute violation grave commise à l’encontre des enfants.  L’UNICEF défend les droits de chaque enfant, a-t-elle martelé avant d’appeler le Conseil à faire mieux pour les jeunes qui veulent participer à un festival de musique ou pour les enfants qui vaquent à leurs occupations quotidiennes à Gaza.  « Ils méritent tous la paix. »  Elle a fait valoir que les enfants ne déclenchent pas de conflits et qu’ils sont impuissants à les arrêter.  Il faut placer leur sécurité au premier plan de nos efforts et imaginer un avenir où tous les enfants seront en bonne santé, en sécurité et éduqués, a-t-elle demandé en conclusion. 

Mme LISA DOUGHTEN, Directrice de la Division du financement humanitaire et de la mobilisation des ressources du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), a indiqué qu’elle s’exprimait au nom du Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, qui est le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires actuellement en mission en Israël et dans les territoires palestiniens occupés.  Qualifiant de « dévastateurs et déchirants » les événements survenus depuis le 7 octobre, elle a affirmé ne pas oublier les 1 400 personnes tuées et les milliers d’autres blessées et emportées dans la brutale attaque du Hamas, ainsi que les tirs de roquettes aveugles qui se poursuivent depuis Gaza sur les zones peuplées d’Israël.  Elle a déploré que 230 personnes soient toujours retenues en otage à Gaza, appelant à leur libération immédiate et sans condition et exigeant que, dans l’intervalle, elle soient traitées humainement et puissent recevoir la visite du Comité international de la Croix-Rouge (CIRC).

Dénonçant la situation catastrophique à laquelle sont actuellement confrontés les plus de deux millions d’habitants de Gaza, elle a rappelé qu’ils subissent un siège depuis 23 jours, sous des bombardements continus.  Citant le Ministère de la santé de Gaza, elle a indiqué que plus de 8 000 personnes auraient été tuées, dont 66% de femmes et d’enfants, et des dizaines de milliers d’autres blessées.  « Il est difficile d’exprimer l’ampleur de l’horreur que vivent les habitants de Gaza », a-t-elle affirmé, ajoutant que les habitants sont de plus en plus désespérés, car cherchant de la nourriture, de l’eau et un abri au milieu de bombardements incessants qui anéantissent des familles et des quartiers entiers.  Elle a précisé que poussés par le désespoir, certains s’étaient introduits dans les entrepôts des Nations Unies à la recherche de nourriture et d’eau, la déshydratation et la propagation de maladies devenant des risques croissants. 

La Directrice a affirmé que plus de 1,4 million de personnes sont déplacées à l’intérieur de la bande de Gaza, décrivant « des centaines, des milliers » d’enfants, de femmes et d’hommes entassés dans des abris et des hôpitaux surpeuplés.  Cependant, aucune zone de ce territoire, même le sud, n’est sûre, a-t-elle indiqué, ajoutant que les agences de l’ONU n’avaient pas assez de fournitures essentielles pour faire face à un déplacement de population de cette ampleur.  Elle a décrit un système de santé en lambeaux où les patients gisent sur le sol et dans les couloirs, où les chirurgiens opèrent sans anesthésie, où 5 500 femmes enceintes doivent accoucher dans les 30 prochains jours, où la vie de 1 000 patients sous dialyse et de 130 prématurés en couveuse ne tient qu’à un fil, où 9 000 patients atteints de cancer ne reçoivent pas de soins adéquats. 

Se disant profondément préoccupée par les allégations d’installations militaires à proximité des hôpitaux et par la demande des autorités israéliennes de les évacuer -notamment Al Qods et Shifa–, elle a affirmé qu’il n’y avait aucun endroit sûr pour les patients, et que pour ceux sous assistance respiratoire et les bébés en couveuse, le déplacement serait presque certainement une condamnation à mort.  Pleurant la perte de 64 collègues de l’UNRWA et d’autres membres du personnel humanitaire, elle a présenté ses plus sincères condoléances à leurs familles et à leurs collègues.

Se félicitant de l’accord qui a permis à l’OCHA d’acheminer une partie de l’aide à Gaza via le poste frontière de Rafah, elle a souligné que ces livraisons ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan par rapport à l’ampleur des besoins.  « Il est impératif que nous puissions acheminer de l’aide humanitaire de manière sûre, fiable, sans entrave et dans les quantités requise », a-t-elle martelé, insistant notamment sur le besoin de reconstituer les réserves de carburant, indispensables pour alimenter les hôpitaux, les usines de dessalement de l’eau de mer, et de transporter l’aide.  Elle a précisé que le point de passage de Kerem Shalom, entre Israël et Gaza, était le seul équipé pour gérer rapidement un nombre suffisamment important de camions.

Mme Doughten s’est aussi inquiétée des dizaines de civils tués et des incidents liés à la violence des colons qui se sont multipliés en Cisjordanie, entraînant le déplacement de centaines de personnes. « La situation actuelle n’est peut-être qu’un pâle reflet de ce qui nous attend », a-t-elle averti, évoquant le risque réel que cette guerre s’aggrave et se propage à l’ensemble de la région.  Elle a appelé à prendre des mesures urgentes pour empêcher cela. 

Appelant à une trêve humanitaire, elle a estimé que cela permettrait d’assurer le calme et la sécurité nécessaires à la libération des otages, que cela permettrait à l’ONU de se réapprovisionner, de soulager le personnel épuisé et de reprendre l’assistance dans toute la bande de Gaza pour des civils confrontés à des traumatismes inimaginables.  Elle a aussi appelé les parties à respecter le droit international humanitaire, ce qui implique de permettre aux secours d’entrer et de veiller à épargner les civils et les infrastructures civiles, ainsi que le personnel humanitaire et médical.  « Nous comptons sur la responsabilité de chaque État Membre pour user de toute son influence afin que les règles de la guerre soient respectées et que, dans la mesure du possible, les civils soient épargnés de nouvelles souffrances », a-t-elle affirmé en concluant son intervention. 

M. MAURO VIERA, Ministre des affaires étrangères du Brésil, a jugé essentiel de garder à l’esprit « le visage humain » des deux parties à un conflit gelé qui serait resté gelé, sans les attaques terroristes du Hamas.  Il a appelé à la libération de tous les otages et qualifié la situation à Gaza d’« absolument abjecte »: un nombre intolérable d’enfants sont punis pour des crimes qu’ils n’ont pas commis et, pendant ce temps, le Conseil de sécurité tient des séances sans être capable de mettre un terme aux souffrances des civils.  Nous échouons toujours et encore, et c’est une honte, s’est impatienté le Ministre.  Il a dénoncé des antagonismes obsolètes, et les pays qui utilisent le Conseil de sécurité pour atteindre leurs propres objectifs.  Si nous n’agissons pas aujourd’hui, quand le ferons-nous? s’est-il demandé, avant de condamner tout agissement qui ne fait pas la distinction entre civils et combattants. 

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a commencé par rendre hommage au personnel de l’UNRWA, dont beaucoup de membres ont perdu la vie depuis le début de l’offensive israélienne dans la bande de Gaza.  Elle a ensuite rappelé que vendredi dernier, 121 pays, soit la grande majorité de la communauté internationale, ont envoyé un message sans équivoque, exigé une trêve humanitaire pérenne à Gaza et défendu les droits humains, le droit international humanitaire et surtout la vérité claire selon laquelle la vie des Palestiniens est précieuse et égale à celle des autres, et mérite la pleine protection.  Mais au-delà des mots, il faut agir.  La représentante a rappelé que les plus de 8 000 personnes tuées à Gaza, dont 70% sont des femmes et des enfants, ne font pas partie du Hamas.  Plus d’un millier d’enfants manquent à l’appel, s’est-elle désolée, les imaginant sous les décombres en train de se demander si quelqu’un va venir les aider. 

La déléguée a aussi relevé que le nombre d’enfants tués depuis le 7 octobre dépasse celui de tous les conflits armés dans le monde, ces quatre dernières années.  Un tel fait devrait ébranler notre conscience morale mais le Conseil de sécurité continuer de fermer les yeux sur la volonté claire de la majorité des États.  Nous sommes peut-être, a-t-elle prévenu, devant la goutte d’eau qui fait déborder le vase.  Il faut donc assurer dès aujourd’hui, sans plus attendre, un accès humanitaire sans entrave à la bande de Gaza et, faisant référence à l’ordre d’évacuation lancé par Israël, elle a rappelé que les hôpitaux et autres sites gérés par l’UNRWA et d’autres organisations humanitaires sont protégés par le droit international.  Demander aux civils de partir est aussi insensé que l’inaction du Conseil de sécurité, a-t-elle conclu. 

M. ZHANG JUN (Chine) a rappelé l’adoption, la semaine dernière, par l’Assemblée générale d’une résolution appelant à une pause humanitaire immédiate et durable pour parvenir à une cessation des hostilités.  Malheureusement, Israël a fait la sourde oreille et choisi de renforcer son action militaire à Gaza, provoquant une situation catastrophique.  Les parties au conflit doivent cesser toute hostilité et ne ménager aucun effort pour éviter que la situation ne dégénère davantage. Le représentant a appelé Israël à lever le siège contre Gaza et à revenir immédiatement sur son ordre d’évacuation.  Israël doit plutôt rétablir la fourniture des services essentiels, a dit le représentant, avant d’appeler à des efforts diplomatiques pour libérer les otages et ouvrir un espace de dialogue pour un règlement politique du conflit.

Le châtiment collectif ne conduit jamais à une sécurité absolue, a prévenu le représentant.  Les parties doivent rompre le cercle vicieux de la violence et promouvoir un cessez-le-feu à Gaza.  Sans un tel cessez-le-feu, l’aide humanitaire ne sera qu’une goutte d’eau dans l’océan, car la population gazaouie a besoin de mesures concrètes pour rétablir la paix, garantir l’état de droit et sauver les vies.  L’Assemblée générale, a rappelé le délégué, a indiqué la marche à suivre au Conseil de sécurité.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a salué le travail héroïque du personnel humanitaire à Gaza, pleurant la mort de plus de 60 membres du personnel de l’ONU tués depuis le début du conflit, alors que leur vie devait être protégée, tout comme celle des journalistes et de tous les civils.  Elle a affirmé que le Hamas avait tué plus de 1 400 civils innocents et pris plus de 200 personnes en otage, il y a trois semaines, alors que les roquettes continuent à frapper Israël et que la crise humanitaire à Gaza s’aggrave.  Elle a appelé à s’unir pour exiger la libération immédiate et sans condition de tous les otages, traiter les besoins humanitaires immenses des civils à Gaza, rappeler le droit d’Israël à se défendre du terrorisme et rappeler à toutes les parties que le droit international humanitaire doit être respecté, ce qui signifie que le Hamas ne peut utiliser les Palestiniens comme boucliers humains et qu’Israël doit prendre toutes les mesures pour éviter de nuire aux civils.  Hier, a-t-elle ajouté, le Président Biden a rappelé que le droit à se défendre d’Israël doit s’exercer dans le cadre du droit international humanitaire, et que même si le Hamas agit depuis des zones civiles, Israël doit établir un distinguo entre terroristes et civils innocents.

La représentante s’est dite vivement préoccupée par la recrudescence de violence à l’encontre de civils palestiniens en Cisjordanie, condamnant les meurtres de civils palestiniens et exhortant Israël à éviter de telles attaques en travaillant avec les autorités palestiniennes. Elle s’est aussi préoccupée de la coupure des communications à Gaza et indiqué que le Gouvernement Biden l’avait clairement fait savoir au Gouvernement israélien, car elle met en péril la vie des civils, du personnel de l’ONU, du personnel humanitaire.  Les États-Unis sont le principal bailleur de fonds pour le peuple palestinien, ayant fourni 1 milliard de dollars à l’UNRWA depuis 2021, avec 100 millions de dollars d’aide supplémentaire annoncés récemment par le Président Biden, a fait remarquer la déléguée. Son pays, a-t-elle indiqué, continue à travailler avec Israël, l’Égypte, l’ONU et d’autres partenaires pour assurer un approvisionnement rapide et continu en aide humanitaire. L’approvisionnement en eau, denrées alimentaires, médicaments et carburant doit être rétabli, a-t-elle exigé. Soulignant que le nombre de camions entrants continue d’augmenter, elle a reconnu que la quantité reste dérisoire et qu’il faut la revoir à la hausse de toute urgence.  Elle a rappelé que le Président Biden soutient l’idée de pauses humanitaires pour permettre la libération des otages, la distribution de l’aide et la possibilité pour les civils de se rendre dans des lieux plus sûrs. 

Mme Thomas-Greenfield a réitéré le message fort du Secrétaire d’État Anthony Blinken à tout acteur, étatique ou non, envisageant d’ouvrir un nouveau front contre Israël.  Elle a regretté les veto de la Russie et de la Chine contre la résolution « équilibrée » présentée par les États-Unis, la semaine dernière, et qualifié la résolution votée ensuite par l’Assemblée générale de « subjective », avec l’omission des mots « otages » et « Hamas ». Elle s’est dite « scandalisée et effarée » par les délégations qui ont apporté un soutien implicite aux violences du Hamas lors de la session extraordinaire, estimant inimaginable que les agissements du Hamas ne soient pas condamnés par une résolution de l’Assemblée générale.  Elle a plaidé en faveur de la solution des deux États, un avenir dont ne veut pas le Hamas mais auquel tous les États doivent œuvrer. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a qualifié de « désespérée » la situation à Gaza et a rappelé que l’obligation des pays à protéger leurs populations doit être honorée dans le strict respect du droit international et du droit international humanitaire.  Il a jugé essentiel que le Conseil de sécurité fasse entendre sa voix et essaye de parvenir à un accord entre ceux qui ont le pouvoir d’empêcher, par leur seule volonté, l’adoption d’une résolution. Cette Organisation doit garder à l’esprit qu’elle est née pour défendre la dignité et la valeur de la personne humaine. Il est de notre devoir d’être toujours à la hauteur de cette mission, a conclu le représentant. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a déclaré que la priorité du Conseil doit être l’application du droit international humanitaire et des droits humains, notamment la protection des civils.  Il faut donc impérativement protéger les civils et les personnes qui ne participent plus aux hostilités.  Pour ce faire, il convient que le Conseil exerce son influence sur les parties au conflit afin de faire respecter le droit international humanitaire, de stopper la spirale de violence actuelle et d’empêcher qu’elle ne gagne la région, a-t-elle dit.  Elle a aussi indiqué que son pays s’était engagé au sein du Conseil et à l’Assemblée générale pour la mise en place de mesures telles que des trêves humanitaires pour garantir l’accès de l’aide. 

De telles mesures, accompagnées de garanties sécuritaires, sont nécessaires pour permettre au personnel des organisations humanitaires impartiales de travailler de manière efficace dans le but de répondre aux besoins de la population et d’atténuer l’aggravation de la crise sanitaire à Gaza.  Une action unifiée du Conseil est donc plus que jamais nécessaire pour mettre fin aux violences, faire respecter le droit international et œuvrer à la paix, a-t-elle insisté.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souligné qu’il est plus que temps que le bain de sang cesse.  Les populations civiles ne doivent être ni une monnaie d’échange, ni des boucliers humains, ni l’objet de punition collective.  Les otages doivent être libérés sans condition et le droit à la légitime défense d’Israël doit s’exercer dans le respect du droit international humanitaire et des principes de proportionnalité, de précaution et de distinction, a rappelé le représentant.  Le Conseil doit transcender les alliances politiques et géopolitiques, les clivages et les rivalités pour exiger l’arrêt immédiat des hostilités et un accès sans entrave de l’aide humanitaire aux populations dans le besoin à Gaza.

Le délégué a demandé la mise en œuvre de la résolution adoptée par l’Assemblée générale ce 26 octobre 2023.  Il a appelé à la retenue et encouragé tous les États qui exercent une influence sur les parties à redoubler d’efforts pour les amener à choisir la paix et à préserver les vies humaines.  Le Conseil doit éviter un embrasement qui risque de mener vers l’inconnu.  Les récents bombardements de l’armée israélienne contre des cibles sur la frontière avec la Syrie en réponse à des tirs, tout comme les derniers échanges de tirs entre Israël et le Hezbollah dans le sud du Liban sont extrêmement préoccupants.  La diplomatie, le dialogue et la négociation, avec un rôle central des Nations Unies, sont et demeurent les canaux incontournables pour parvenir à une solution durable à cette crise meurtrière.  Le représentant a, en conclusion, réitéré son attachement à la solution des deux États. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a présenté ses condoléances pour la perte tragique du personnel de l’UNRWA au cours de ces dernières semaines et a déclaré que son pays est gravement préoccupé par la situation désespérée à Gaza.  De telles opérations militaires auront sans aucun doute un impact dévastateur sur les plus de deux millions de civils piégés dans l’enclave, a-t-elle déclaré, ajoutant que les tirs de roquettes du Hamas sur le territoire israélien est totalement inacceptable.  Nous rejetons et condamnons sans équivoque ces attaques barbares, notamment l’attentat du 7 octobre et la prise d’otages, a-t-elle précisé, se disant aussi totalement dévastée par les effets du conflit sur les enfants palestiniens et israéliens.  Tout plan de paix durable au Moyen-Orient doit être fondé sur une solution à deux États, a-t-elle conclu.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) s’est alarmé d’une situation humanitaire dramatique à Gaza, appelant à une augmentation des convois humanitaires.  Il a rappelé avoir lancé un appel en faveur d’une trêve humanitaire, estimant que les civils souhaitant sortir de Gaza devaient pouvoir le faire sans en être empêchés.  Toutes les vies se valent, a ajouté le représentant avant de déclarer qu’Israël a le droit de se défendre et le devoir de le faire dans le respect du droit international humanitaire, en préservant les populations civiles.  Il a réitéré sa condamnation dans les termes les plus forts des attaques terroristes du Hamas, tout comme sa demande que les otages soient libérés, immédiatement et sans condition.

Le délégué a aussi fermement condamné les violences perpétrées par des colons à l’encontre de la population palestinienne, qui se multiplient en Cisjordanie, réitérant sa demande aux autorités israéliennes de les faire cesser.  Abordant le risque d’un embrasement régional, le représentant s’est inquiété d’un tir d’obus ayant touché la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) dans son quartier général situé dans le sud du Liban, le 28 octobre. « Nous connaissons tous les conditions de cette paix durable », a poursuivi le délégué en rappelant que ce sont: des garanties indispensables apportées à Israël pour sa sécurité, et un État pour les Palestiniens.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a déploré la perte de plus de 60 membres du personnel de l’ONU morts sur le terrain. Le 7 octobre marquera les annales de l’histoire du Moyen-Orient, a-t-il déclaré, en mettant en garde contre l’effet ricochet dans la région.  Une guerre sur un territoire aussi petit que Gaza exige de prendre de très grandes précautions pour que les populations civiles ne se retrouvent pas entre le marteau et l’enclume dans un endroit où il n’y pas moyen d’échapper, a-t-il observé.  Il a aussi exhorté à la remise en liberté des otages israéliens.  Le Gouvernement israélien a assuré que l’assistance arriverait, a poursuivi le représentant, qui a pressé pour que cela se fasse au plus tôt, pour que les civils ne meurent pas de faim.

« Nous avons peur pour toutes les personnes des deux côtés, déchirées par l’insécurité et la guerre, et nous avons peur pour les Palestiniens qui voient leurs espoirs régulièrement tués dans l’œuf », a-t-il affirmé.  Au-delà de la tragédie des deux côtés, l’ampleur de la violence ciblée émeut le monde entier, a-t-il relevé, jugeant inacceptable de tuer des gens sur la base de leur appartenance ethnique, comme cela fut le cas au Daghestan (où une foule a attaqué hier les passagers d’un vol en provenance d’Israël à l’aéroport de Makhatchkala).  Les attaques sur la frontière nord sont chaque fois plus menaçantes et doivent cesser pour éviter un effet domino, a encore mis en garde le représentant, en encourageant à donner aux Palestiniens une perspective d’avenir sans le Hamas, qui leur a apporté la guerre et la mort.

M. MARTINS MARIANO KUMANGA (Mozambique) a dit être scandalisé par les souffrances et les morts à Gaza.  Il a demandé un cessez-le-feu humanitaire immédiat et inconditionnel.  Le droit de la guerre doit être respecté, a souligné le représentant, en condamnant les attaques du Hamas.  Le monde attend, a-t-il prévenu, que le Conseil de sécurité réagisse rapidement. Il a rappelé l’Article 24 de la Charte des Nations Unies qui stipule que, « afin d’assurer une action rapide et efficace de l’Organisation des Nations Unies, ses Membres confèrent au Conseil de sécurité la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité internationales ».  Il nous faut une résolution du conflit israélo-palestinien qui est « la clef » d’une paix durable au Moyen-Orient, a insisté le représentant.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est dit alarmé par la situation sur le terrain dans les territoires palestiniens occupés, où une catastrophe humanitaire d’ampleur biblique se déroule. L’ampleur des pertes subies par l’ONU est aussi choquante, a-t-il déploré, tandis que le blocus imposé par Israël sème la panique parmi la population civile et fragilise les secours médicaux.  Le représentant a condamné l’impossibilité de faire passer l’aide humanitaire par le point de passage de Rafah alors que les coupures d’électricité et d’eau touchent l’enclave qui essuie simultanément des bombardements.  Avec les offensives militaires israéliennes qui ont débuté le 28 octobre à Gaza contre l’avis de l’Assemblée générale, « Jérusalem-Ouest » a entamé son projet de nettoyage de Gaza, a fustigé le délégué. Israël réfute l’appel à un cessez-le-feu et ignore l’opinion d’un grand nombre de pays occidentaux exigeant la cessation des hostilités.  Cette situation terrible est le résultat de la position des États-Unis au Conseil, qui n’est pas parvenu à se mettre d’accord sur un cessez-le-feu à deux reprises, a-t-il rappelé.

Le projet de Washington et de « Jérusalem-Ouest » est de pilonner les populations de Gaza et de les expulser, selon le délégué, qui a pointé la montée des tensions à la frontière entre la Syrie et Israël, provoquée par la présence militaire illégale des États-Unis dans le nord-est de la Syrie.  Le 26 octobre, les forces américaines y ont mené des bombardements qu’elles ont qualifiés de légitime défense, « à l’américaine ».  Ces agissements constituent une violation grave de la souveraineté de la Syrie et du droit international et peuvent provoquer une escalade armée de grande ampleur.  Il faut mettre fin à ce bain de sang, réduire les souffrances infligées aux populations civiles et reprendre les négociations politiques entre Israéliens et Palestiniens afin de concrétiser la solution des deux États.  Pourquoi les États-Unis s’opposent-ils à un cessez-le-feu? a demandé le représentant à son homologue américaine.  La Russie, a-t-il dit, condamne tout acte terroriste, mais on ne peut pas violer le droit international en ciblant les infrastructures civiles.  Il a dénoncé le torpillage par les États-Unis du travail du Quatuor pour le Moyen-Orient alors qu’il faut intégrer les acteurs régionaux au processus de négociation. Les autorités russes ont assumé leurs responsabilités après l’incident survenu dans un aéroport du Daghestan, a assuré le représentant.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a rendu hommage à l’engagement et au sacrifice des employés de l’ONU et des travailleurs humanitaires à Gaza, en particulier les 103 travailleurs humanitaires tués au cours de ces 22 jours, y compris le personnel de l’UNRWA.  La représentante a insisté sur le droit à la légitime défense contre le terrorisme, ajoutant néanmoins que cela doit se faire conformément au droit international humanitaire.  Nos efforts, a-t-elle indiqué, ont été axés sur la protection des civils, la sécurisation et l’élargissement de l’accès humanitaire et la libération des otages.  C’est le Hamas, a-t-elle tranché, qui porte seul la responsabilité du déclenchement de ce conflit.  Insistant sur le respect du droit international humanitaire, a voulu que l’on coopère de toute urgence pour accroître l’aide à Gaza et veiller à ce qu’un nombre suffisant de points d’accès soient ouverts, ce qui suppose un climat plus sûr et des pauses humanitaires. 

Depuis la dernière escalade à Gaza, a-t-elle annoncé, le Royaume-Uni s’est engagé à verser plus de 36 millions de dollars d’aide supplémentaire dans le Territoire palestinien occupé.  Un vol de la RAF est arrivé en Égypte, le 25 octobre, avec à son bord 21 tonnes d’aide pour Gaza.  Afin de prévenir que le conflit ne s’étende, elle a appelé tous les pays de la région à prévenir une telle situation qui ne peut, en aucun cas, être exploitée par les acteurs non étatiques.  La représentante a en outre estimé que l’Autorité palestinienne a un rôle clef à jouer en tant que représentante légitime du peuple palestinien. Elle a conseillé à Israël et aux autres États de la soutenir, avant de lancer un appel aux autorités israéliennes pour qu’elles remédient au nombre croissant d’attaques et de meurtres perpétrés par les colons en Cisjordanie occupée, en rappelant qu’il est de leur responsabilité de protéger les civils palestiniens.

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a relevé avec une grande préoccupation que depuis le 7 octobre, des milliers de personnes ont été tuées et blessées, et que la séquence tragique des événements ne montre aucun signe d’apaisement.  Il a condamné les attentats terroristes du Hamas et exigé la libération immédiate et inconditionnelle des otages.  Chaque État Membre a le droit de se défendre et de défendre son peuple conformément au droit international, a rappelé le délégué.  Dans le même temps, toutes les parties doivent agir sur la base du droit international, a-t-il ajouté en déplorant la détérioration de la situation humanitaire à Gaza.  Il a réclamé que soit autorisé un accès humanitaire complet, rapide, sûr et sans entrave afin d’atténuer la situation humanitaire. 

Il faut immédiatement des pauses humanitaires, a aussi exhorté le représentant appelant à la mise en place de couloirs humanitaires.  Il a demandé le rétablissement des réseaux de communication pour assurer l’acheminement de l’aide humanitaire et la sécurité des travailleurs humanitaires.  Il a encouragé les parties de la région à éviter d’exacerber le conflit.  La communauté internationale doit éviter que l’instabilité ne s’étende à la région et doit tout faire pour calmer la situation, a-t-il encore recommandé.  Le représentant a exhorté les membres du Conseil à trouver un terrain d’entente afin de transmettre un message significatif à toutes les parties.  Il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États et les parties doivent fournir des efforts dans ce sens, a-t-il lancé en conclusion.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a déclaré que, compte tenu de ce que l’Assemblée a dit, le Conseil devrait tirer parti de la convergence de vues sur cette crise pour aider le Secrétaire général, les agences et le personnel des Nations Unies, y compris l’UNRWA, à fournir des soins intensifs et des services de soutien aux populations les plus touchées. Le Conseil doit également utiliser le poids de la décision de l’Assemblée pour encourager vigoureusement les efforts des dirigeants de la région, en particulier du Qatar, pour obtenir la libération de tous les otages israéliens et étrangers et convaincre le Hamas.  Ne pas déployer davantage d’efforts pour mettre un terme aux combats serait véritablement tragique, a mis en garde le représentant, disant espérer que, dans le cadre de la responsabilité historique de ce Conseil, les membres pourront trouver un consensus pour mettre fin à ce conflit.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a réagi à la déclaration de la Fédération de Russie, dans laquelle son pays était accusé d’être responsable de la crise à Gaza.  Il a rejeté ces accusations affirmant qu’aucun pays ne travaille autant que les États-Unis pour alléger cette crise.  La Fédération de Russie ne se préoccupe pas des situations humanitaires dans le monde, il n’y a qu’à voir ce qu’elle fait en Ukraine, a, à son tour, accusé le représentant.

Reprenant lui aussi la parole, M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a vu la réaction de la délégation des États-Unis comme une reconnaissance de la véracité de ses précédents propos.  Il a alors posé une question « rhétorique n’appelant pas de réponse » au représentant américain: Combien de fois les États-Unis ont-ils initié de réunion sur la situation humanitaire à Gaza, avant la crise actuelle?

M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a rendu un vibrant hommage au Secrétaire général qui est allé sur place pour sauver des vies.  Paraphrasant un autre Secrétaire général, Dag Hammarskjold, il a déclaré que les Nations Unies n’ont pas été créées pour nous emmener au paradis mais pour nous sauver de l’enfer.  Il a dit ce que les Palestiniens veulent: un cessez-le-feu humanitaire immédiat, et des convois humanitaires d’au moins 600 camions par jour.  La population gazaouie est constituée de réfugiés, soit plus de 2,3 millions de Palestiniens qui vivent « un enfer », l’objectif ultime étant de vider la bande de Gaza et de les jeter dans le désert du Sinaï.  Illustrant l’ampleur de cette tragédie provoquée par l’homme, M. Mansour a avancé plusieurs chiffres, et tancé les membres du Conseil pour qu’ils assument enfin leur responsabilité.  Combien de jours encore attendrez-vous pour reconnaître qu’il s’agit d’une guerre contre nos enfants.  Nos enfants. Des enfants de lumière qui sont, comme les vôtres, des enfants de Dieu.

L’Assemblée générale, mue par l’humanité, a adopté une résolution demandant une trêve humanitaire immédiate et souligné que l’accès à l’aide humanitaire ne peut être retardé ou entravé davantage.  L’Assemblée générale et le Secrétaire général, a poursuivi M. Mansour, ont agi.  L’armée des héros de l’ONU agit tandis qu’un organe, le Conseil de sécurité, ne fait rien. Cette résolution morale à laquelle 11 membres du Conseil ont voté pour, doit aussi être adoptée par l’organe de l’ONU chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales pour mettre fin à ce bain de sang, tache indélébile qui constitue un crime de guerre et un crime contre l’humanité.

Étant donné que 11 membres du Conseil ont voté en faveur de la résolution, que trois membres se sont abstenus et qu’un État s’y est opposé, il est clair que le texte bénéficie d’un large soutien et qu’il doit servir de base à une position claire et sans équivoque du Conseil. Ayez un peu de compassion à l’égard des Gazaouis.  Réveillez-vous!  Nous sommes aussi des êtres humains!  Laissez au moins les Gazaouis extirper des décombres quelque 2 000 personnes. M. Mansour a aussi plaidé pour que cessent les meurtres par les colons en Cisjordanie.  Chaque minute compte.  Chaque minute fait la différence entre la vie et la mort.  Nous avons le droit à la protection et à être défendus, a-t-il réclamé, en fustigeant les États qui ne parlent que du droit de légitime défense d’Israël.  Aujourd’hui, les membres du Conseil assistent à la destruction de la solution des deux États. Chaque minute compte pour les Palestiniens à Gaza.

M. GILAD MENASHE ERDAN (Israël) a entamé son discours en parlant de son grand-père qui était agriculteur en Transilvanie, dans un village qui a cessé d’exister en 1944, ses habitants ayant été assassinés dans les chambres à gaz.  Il a dit qu’il pensait que cette histoire appartenait à une époque révolue, une époque dont on parlait avec les mots « plus jamais ça ».  Or, ces mots reviennent, a-t-il constaté, en pointant du doigt les assassins qui, cette fois, sont les « nazis du Hamas »: des villages et des familles réduits en cendres, comme la famille et le village de son grand-père.  Le représentant a évoqué la brutalité de ces « nazis » qui ont en commun une idéologie qui n’est pas la solution des deux États.  Les terroristes du Hamas se sont engagés à exterminer les Juifs et Israël, a-t-il affirmé, en les accusant de se livrer à des violences inhumaines et à ne pas chercher une solution, ni le dialogue.  La seule solution est « la solution finale », l’annihilation du peuple juif, a-t-il analysé. 

Le délégué a fait remarquer que « ce sont eux qui dirigent Gaza », en affirmant que leur dirigeant n’est autre que le Chef suprême iranien, l’Ayatollah Ali Khamenei, « assoiffé de sang ». Il a comparé le troisième Reich d’Hitler au régime de Khamenei qui tend à une hégémonie radicale chiite se propageant dans la région et au-delà.  C’est « le régime nazi moderne », selon lui, avec des escadrons de la mort: le Hamas, le djihad islamique palestinien, le Hezbollah, les houthistes, la garde révolutionnaire et autres djihadistes barbares qui appellent à la mort d’Israël, de l’Amérique et du Royaume-Uni.

Le régime de l’Ayatollah sème mort et destruction où qu’il aille, a encore accusé le représentant, « de même que les Français sous le régime de Vichy, les Italiens sous le régime de Mussolini ».  Il a constaté que « le régime terroriste d’Iran soutient les terroristes du monde et œuvre à la destruction de toute valeur de notre monde civilisé ».  Or, le monde reste silencieux à l’instar de la montée du nazisme, « un silence assourdissant », selon lui.

Il est revenu sur les évènements d’il y a trois semaines, citant les exactions des « nazis du Hamas » qui ont exterminé des civils par centaines, comme un fœtus poignardé sous les yeux de sa mère. Il a aussi parlé des 250 000 civils Israéliens innocents qui ont été déplacés depuis le début de la guerre, et des millions de civils israéliens qui vivent au quotidien sous une pluie de roquettes lancées par le Hamas et le Hezbollah notamment.  « Est-ce que le Conseil de sécurité n’a rien à dire sur ces questions? »  Lorsque mon grand-père a été envoyé à Auschwitz, le monde est resté silencieux, a comparé le délégué.

« À partir d’aujourd’hui, quand vous me regarderez », vous vous souviendrez de ce qui se passe quand on reste silencieux, a-t-il annoncé.  « À partir de maintenant, mon équipe et moi-même allons porter des étoiles jaunes », a-t-il dit, en se levant et en en épinglant une sur sa veste, comme les membres de sa délégation.  Il a indiqué vouloir les porter jusqu’à ce que le Conseil condamne les atrocités du Hamas et exige la libération immédiate des otages. 

Il a cité ce qui se passe à Londres, dans des aéroports, au Daghestan, parlant notamment de tentatives de lynchage des Juifs. Comme à l’époque, le monde est resté silencieux, s’est-il emporté, en constatant que la haine génocidaire n’a pas pris fin, mais que la différence est qu’aujourd’hui les Juifs ont un État et une armée puissante.  « Nous nous défendrons contre ceux qui ont choisi de nous annihiler. » 

Le représentant s’en est ensuite pris au Secrétaire général de l’ONU, qui a « déroulé le tapis rouge devant le Ministre des affaires étrangères iranien nazi, la semaine dernière, en serrant sa main entachée de sang ».  Il a regretté que le Secrétaire général n’ait pas exigé une seule fois que les terroristes du Hamas et de Daech permettent à la Croix Rouge de vérifier que les otages restaient en vie.

Les nazis du Hamas ont passé les 16 dernières années à diriger Gaza, a-t-il déclaré en rappelant qu’ils ont assassiné des centaines de Palestiniens et les ont utilisés comme boucliers humains. Le délégué a aussi avancé que le Hamas détient un demi-million de litres de carburant à côté du point de passage de Rafah, en assurant que cela peut être vérifié.  Il a ainsi expliqué qu’Israël refuse de fournir une aide au Hamas.  Il a dit que les intentions du Hamas sont connues, et que si on leur donnait une autre chance, il commettrait les mêmes atrocités.  Nos opérations ne sont pas un acte de riposte au 7 octobre mais un acte de légitime défense pour préserver notre avenir, a tenté d’expliquer le représentant en concluant qu’« Israël l’emportera, si Dieu le veut ».

Au nom du Groupe des États arabes, M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a indiqué que la résolution adoptée par l’Assemblée générale, à la fin de la semaine dernière, est claire et montre que la communauté internationale reste aux côtés des innocents.  En faveur de la justice, de l’humanité et des droits, cette résolution appelle à mettre fin à la destruction des écoles, des hôpitaux et des lieux de culte.  Elle appelle à une trêve humanitaire, tout en exigeant des parties le respect du droit international humanitaire, la fourniture d’une assistance à tous les civils qui en ont besoin à Gaza et la libération de tous les civils captifs de façon illégale. 

Le Conseil doit faire pression sur Israël pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.  Il a mis en garde contre le débordement régional du conflit, alertant sur le pilonnage des installations de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  Protégé et couvert, Israël peut éluder ses responsabilités, a tranché le représentant. Il a réclamé le réveil de la conscience humaine et demandé au Conseil d’entendre les hurlements du peuple gazaoui. Ce silence assourdissant doit cesser. Le Conseil est à un moment charnière et il sait que pour résoudre ce conflit, il faut revenir à la solution des deux États.

M. ZHANG (Chine) a, lui aussi, réagi à la déclaration des États-Unis, jugeant totalement déraisonnables leurs propos.  Selon lui, les États-Unis veulent faire porter la responsabilité de la situation de Gaza à la Chine, ce qui n’est pas le cas, a-t-il assuré.  Or, a-t-il poursuivi, la représentante des États-Unis sait clairement ce que son pays fait au Moyen-Orient.  C’est son pays qui a opposé son veto au projet de résolution proposé par le Brésil, texte qui appelait à un cessez-le-feu, ce qui a conduit au blocage actuel, a-t-il rappelé.  La Chine, au contraire, est dans la droite ligne de ce que souhaite la communauté internationale, à savoir la cessation des hostilités, la fourniture de l’aide humanitaire et la protection des civils, a insisté le représentant, ajoutant espérer que le Conseil de sécurité parvienne à un consensus sur ces questions.

Dans une troisième prise de parole, M. WOOD (États-Unis) a déclaré que le bilan de son pays parle de lui-même.  Le représentant a ajouté que les faits sont clairs: la Chine ne s’est pas exprimée le 25 octobre sur le projet de résolution proposé par les États-Unis.  C’est un fait, a-t-il dit.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sahara occidental: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINURSO jusqu’au 31 octobre 2024

9460e séance – après-midi
CS/15471

Sahara occidental: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINURSO jusqu’au 31 octobre 2024

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, prorogé jusqu’au 31 octobre 2024 le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) et fait part de son plein appui aux efforts que font le Secrétaire général et son Envoyé personnel pour faciliter les négociations afin de parvenir à une solution à la question du Sahara occidental.

En adoptant par 13 voix pour et 2 abstentions (Fédération de Russie et Mozambique)la résolution 2703 (2023), le Conseil de sécurité se félicite des efforts faits par l’actuel Envoyé personnel, M. Staffan de Mistura, qui a notamment convoqué des consultations du 27 au 31 mars 2023, et encourage vivement le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à s’engager auprès de l’Envoyé personnel pendant toute la durée du processus, dans un esprit de réalisme et de compromis, en vue de le faire aboutir.

Ce texte, présenté par les États-Unis, demande en outre aux parties de reprendre les négociations sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts consentis depuis 2006 et des faits nouveaux survenus depuis, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies.

Tout en regrettant l’absence d’unanimité, les États-Unis ont observé qu’en votant ce texte, le Conseil a montré qu’il y avait urgence pour qu’émerge une solution politique durable concernant le Sahara occidental.  Les Émirats arabes unis et le Gabon ont parlé d’une résolution « équilibrée », tenant compte, selon ce dernier, des attentes de toutes les parties, et devant être capitalisée par une reprise des tables rondes. L’initiative marocaine d’autonomie a été qualifiée de « sérieuse et réaliste » par le rédacteur américain.

La France et le Gabon ont eux aussi soutenu ladite initiative, « seule solution si l’on veut parvenir à une sortie acceptable », ont remarqué les Émirats arabes unis.  La Chine s’est dite ravie des progrès accomplis par la Mission, réitérant sa position de soutien ferme à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable sur la base des résolutions du Conseil.  La France a cependant fait état de sa préoccupation s’agissant de la violation de l’accord de cessez-le-feu, en appelant les responsables à le mettre en pratique.

Tout en se disant prêt à participer au processus de négociations de bonne foi, le Mozambique a estimé que dans sa forme actuelle, la résolution ne viendra pas en aide aux parties: le texte s’éloigne du mandat de la Mission, « remettant à plus tard des questions clefs qui doivent pourtant être prises à bras-le-corps ».  La position mozambicaine se base sur la Charte des Nations Unies, selon laquelle les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes, a précisé la délégation.

La Fédération de Russie a indiqué s’être abstenue d’une part, car aucune de ses notes n’a été prise en considération par le rédacteur, d’autre part, parce que la résolution ne « donnera pas satisfaction », à savoir une reprise de négociations directes entre le Maroc et le Front POLISARIO.  Certains ajouts ont en outre un effet négatif sur le caractère impartial du texte, avec des formulations « douteuses », émises par des délégations n’étant pas partie au dossier.  La Russie a déclaré mener de son côté un travail de front avec toutes les parties, qu’elle a appelées à s’abstenir d’actions pouvant nuire à la reprise des négociations.

Les États-Unis se sont par ailleurs félicités des progrès en matière de ravitaillement des équipes de la MINURSO sur le terrain; les Émirats arabes unis ajoutant qu’ils étaient en faveur d’un ravitaillement « durable » et non « ad hoc » de la Mission.

LA SITUATION CONCERNANT LE SAHARA OCCIDENTAL

Texte du projet de résolution (S/2023/802)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant et réaffirmant toutes ses résolutions antérieures sur le Sahara occidental,

Réaffirmant son ferme appui aux efforts que le Secrétaire général et son Envoyé personnel font pour mettre en application ses résolutions 1754 (2007), 1783 (2007), 1813 (2008), 1871 (2009), 1920 (2010), 1979 (2011), 2044 (2012), 2099 (2013), 2152 (2014), 2218 (2015), 2285 (2016), 2351 (2017), 2414 (2018), 2440 (2018), 2468 (2019), 2494 (2019), 2548 (2020), 2602 (2021) et 2654 (2022),

Exprimant son plein soutien à Staffan de Mistura, l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, et à ses efforts pour faire avancer le processus politique, sur la base des progrès accomplis par l’ancien Envoyé personnel et conformément aux précédents pertinents et se félicitant des visites effectuées par l’Envoyé personnel dans la région à cet égard,

Se félicitant de l’élan impulsé par la première table ronde tenue les 5 et 6 décembre 2018 et la deuxième table ronde tenue les 21 et 22 mars 2019, et du fait que le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie soient engagés, d’une manière sérieuse et respectueuse, dans le processus politique initié par l’Organisation des Nations Unies sur le Sahara occidental afin de trouver des terrains d’entente, rappelant les contributions importantes de l’ancien Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental dans la conduite du processus des tables rondes, et se félicitant également de la convocation, par l’actuel Envoyé personnel, de consultations avec le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie ainsi qu’avec l’Espagne, les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au Siège de l’ONU du 27 au 31 mars 2023,

Encourageant la poursuite des consultations entre l’Envoyé personnel et le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à cet égard pour faire fond sur les progrès accomplis,

Réaffirmant sa volonté d’aider les parties à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, basée sur le compromis, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et notant le rôle et les responsabilités dévolus aux parties à cet égard,

Demandant de nouveau au Maroc, au Front POLISARIO, à l’Algérie et à la Mauritanie de coopérer plus intensément les uns avec les autres, notamment en renforçant davantage la confiance, et avec l’Organisation des Nations Unies, ainsi que de participer davantage au processus politique et de progresser sur la voie d’une solution politique,

Considérant que la solution politique de ce différend de longue date et le renforcement de la coopération entre les États membres de l’Union du Maghreb arabe contribueraient à la stabilité et à la sécurité dans la région du Sahel, ce qui créerait des emplois et favoriserait la croissance ainsi que des possibilités pour tous les habitants de la région,

Se félicitant des efforts que fait le Secrétaire général pour suivre de près toutes les opérations de maintien de la paix, y compris la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), et soulignant que le Conseil doit adopter une approche rigoureuse et stratégique en matière de déploiement au service du maintien de la paix et de gestion efficace des ressources,

Rappelant sa résolution 2378 (2017), dans laquelle il avait prié le Secrétaire général de veiller à ce que les données relatives à l’efficacité des opérations de maintien de la paix, y compris celles portant sur l’exécution de ces opérations, soient utilisées pour améliorer l’analyse et l’évaluation des opérations des missions sur la base de critères précis et bien définis, et rappelant également sa résolution 2436 (2018), dans laquelle il avait prié le Secrétaire général de veiller à ce que soient prises sur la base de mesures objectives de la performance les décisions visant à reconnaître l’excellence des performances ou à inciter à l’excellence et les décisions ayant trait aux déploiements, à la remédiation, à la formation, au gel des remboursements et au rapatriement de personnel en tenue ou au renvoi de personnel civil,

Rappelant ses résolutions 2242 (2015) et 2538 (2020), dans lesquelles il avait émis le souhait que les femmes soient plus nombreuses dans les contingents militaires et les effectifs de police des opérations de maintien de la paix des Nations Unies,

Considérant le rôle important joué par la MINURSO sur le terrain et sachant qu’il est nécessaire qu’elle assure le réapprovisionnement sûr et régulier de ses bases d’opérations, qu’elle effectue des patrouilles dans toute sa zone de responsabilité et qu’elle s’acquitte pleinement de son mandat, y compris son rôle de soutien à l’Envoyé personnel pour parvenir à une solution politique mutuellement acceptable et se félicitant des progrès accomplis par la MINURSO sur le plan du réapprovisionnement de ses bases d’opérations afin de maintenir ces opérations cruciales,

Constatant avec une profonde inquiétude la rupture du cessez-le-feu,

Se déclarant préoccupé par les violations des accords conclus avec les Nations Unies, réaffirmant l’importance du respect plein et renouvelé des dispositions de ces accords, et prenant note des engagements souscrits par le Front POLISARIO auprès de l’ancien Envoyé personnel,

Prenant note de la proposition marocaine présentée au Secrétaire général le 11 avril 2007 et se félicitant des efforts sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller de l’avant vers un règlement, et prenant note également de la proposition du Front POLISARIO présentée au Secrétaire général le 10 avril 2007,

Encourageant les parties, dans ce contexte, à faire preuve d’une plus grande volonté politique de parvenir à une solution, notamment en examinant de façon plus approfondie leurs propositions respectives et en renouvelant leur engagement en faveur de l’action menée par les Nations Unies en faisant preuve de réalisme et d’un esprit de compromis, encourageant en outre les pays voisins à contribuer au processus politique, et soulignant l’importance que toutes les parties concernées élaborent leurs positions afin de progresser vers une solution,

Encourageant les parties à poursuivre leur coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de définir et d’appliquer des mesures de confiance susceptibles de susciter la confiance nécessaire à la réussite du processus politique,

Soulignant l’importance d’améliorer la situation des droits humains au Sahara occidental et dans les camps de Tindouf, et encourageant les parties à collaborer avec la communauté internationale pour élaborer et appliquer des mesures indépendantes et crédibles qui garantissent le plein respect des droits humains, en gardant à l’esprit leurs obligations découlant du droit international,

Encourageant les parties à persévérer dans les efforts qu’elles mènent chacune pour renforcer la promotion et la protection des droits humains au Sahara occidental et dans les camps de réfugiés de Tindouf, y compris les libertés d’expression et d’association, et à donner la priorité à ces efforts,

Se félicitant à cet égard des mesures et initiatives prises par le Maroc, du rôle joué par les commissions du Conseil national des droits de l’homme à Dakhla et à Laayoune et de l’interaction entre le Maroc et les mécanismes relevant des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies,

Exhortant au renforcement de la coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, y compris par la facilitation des visites dans la région,

Prenant note avec une vive préoccupation des souffrances persistantes endurées par les réfugiés sahraouis, de leur dépendance à l’égard de l’aide humanitaire extérieure et des conséquences de la pandémie de maladie à coronavirus (COVID‑19), et notant également avec une vive préoccupation l’insuffisance des fonds alloués aux personnes qui vivent dans les camps de réfugiés de Tindouf et des risques associés à la diminution de l’aide alimentaire, et encourageant vivement les donateurs à verser des fonds supplémentaires compte tenu de la détérioration de la situation humanitaire et les organismes d’aide à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire conformément aux meilleures pratiques des Nations Unies,

Demandant à nouveau instamment que les réfugiés des camps de Tindouf soient dûment enregistrés, et soulignant qu’il importe que toutes les mesures nécessaires soient prises à cette fin,

Rappelant ses résolutions 1325 (2000) et 2250 (2015) et ses résolutions connexes, soulignant l’importance de l’engagement pris par les parties de poursuivre les négociations dans le cadre des pourparlers tenus sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies et encourageant une participation pleine, égale et effective des femmes ainsi qu’une participation réelle et active des jeunes à ces pourparlers,

Considérant que le statu quo n’est pas acceptable, et notant en outre qu’il est essentiel que les négociations progressent pour que la qualité de vie des habitants du Sahara occidental s’améliore dans tous les domaines,

Affirmant son plein appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour le Sahara occidental et Chef de la MINURSO, Alexander Ivanko,

Ayant examiné le rapport du Secrétaire général en date du 2 octobre 2023 (S/2023/729),

1.    Décide de proroger le mandat de la MINURSO jusqu’au 31 octobre 2024;

2.    Souligne qu’il convient de parvenir à une solution politique réaliste, pragmatique, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental, qui repose sur le compromis, et qu’il importe d’adapter l’action stratégique de la MINURSO et d’affecter les ressources des Nations Unies à cette fin;

3.    Appuie pleinement les efforts que font le Secrétaire général et son Envoyé personnel pour faciliter les négociations afin de parvenir à une solution à la question du Sahara occidental, sur la base des progrès accomplis et du cadre établi par l’ancien Envoyé personnel, et se félicite vivement des efforts faits par l’actuel Envoyé personnel, qui a notamment convoqué à cette fin des consultations du 27 au 31 mars 2023, et encourage vivement le Maroc, le Front POLISARIO, l’Algérie et la Mauritanie à s’engager auprès de l’Envoyé personnel pendant toute la durée du processus, dans un esprit de réalisme et de compromis, en vue de le faire aboutir;

4.    Demande aux parties de reprendre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, en tenant compte des efforts consentis depuis 2006 et des faits nouveaux survenus depuis, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et prend note du rôle et des responsabilités dévolus aux parties à cet égard;

5.    Invite les États Membres à apporter l’aide et le soutien appropriés à ces pourparlers et aux efforts de l’Envoyé personnel;

6.    Réaffirme que les accords militaires conclus avec la MINURSO concernant le cessez-le-feu doivent être pleinement respectés et exhorte les parties à s’y conformer pleinement, à honorer les engagements qu’elles ont pris auprès de l’ancien Envoyé personnel et à s’abstenir de toute action qui pourrait compromettre les négociations facilitées par l’ONU ou déstabiliser la situation au Sahara occidental;

7.    Demande de nouveau à toutes les parties de coopérer pleinement avec la MINURSO, y compris en ce qui concerne sa liberté d’interagir avec tous ses interlocuteurs, et de prendre les mesures voulues pour garantir la sécurité, ainsi qu’une totale liberté de circulation et un accès immédiat au personnel des Nations Unies et au personnel associé dans l’exécution de leur mandat, conformément aux accords conclus avec les Nations Unies;

8.    Demande le réapprovisionnement sûr et régulier des bases d’opérations de la MINURSO afin de garantir la viabilité de la présence de la Mission;

9.    Souligne l’importance que les parties s’engagent à nouveau à faire avancer le processus politique dans la perspective de nouvelles négociations, rappelle qu’il fait sienne la recommandation formulée dans le rapport daté du 14 avril 2008 (S/2008/251), selon laquelle il est indispensable que les parties fassent preuve de réalisme et d’un esprit de compromis pour aller de l’avant dans les négociations, encourage les pays voisins à apporter une contribution importante et active à ce processus, et souligne l’importance que toutes les parties concernées élaborent leurs positions afin de progresser vers une solution;

10.   Demande aux parties de faire preuve de volonté politique et de travailler dans une atmosphère propice au dialogue afin de faire avancer les négociations et de garantir ainsi l’application de ses résolutions 1754 (2007), 1783 (2007), 1813 (2008), 1871 (2009), 1920 (2010), 1979 (2011), 2044 (2012), 2099 (2013), 2152 (2014), 2218 (2015), 2285 (2016), 2351 (2017), 2414 (2018), 2440 (2018), 2468 (2019), 2494 (2019), 2548 (2020), 2602 (2021) et 2654 (2022) et le succès des négociations;

11.   Prie le Secrétaire général de lui faire régulièrement, à chaque fois qu’il le jugera utile au cours de la période du mandat, et d’inclure dans les six mois avant le renouvellement du présent mandat et avant son expiration, des exposés sur l’état d’avancement des négociations tenues sous ses auspices, l’application de la présente résolution, l’évaluation des opérations de la MINURSO et les mesures prises pour surmonter les difficultés rencontrées, déclare son intention de se réunir pour entendre ces exposés et les examiner et, à cet égard, prie également le Secrétaire général de lui présenter un rapport sur la situation au Sahara occidental bien avant la fin du mandat de la Mission;

12.   Se félicite des initiatives lancées par le Secrétaire général pour instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, et se déclare de nouveau favorable à l’élaboration d’un dispositif de gestion de la performance complet et intégré qui définisse des normes de performance claires pour l’évaluation de l’ensemble du personnel civil et en tenue des Nations Unies qui travaille dans les opérations de maintien de la paix ou les appuie, qui permette la bonne et pleine exécution des mandats et qui prévoie des méthodes complètes et objectives fondées sur des critères précis et bien définis pour sanctionner les résultats insuffisants et récompenser ou reconnaître les résultats exceptionnels, et demande au Secrétaire général d’appliquer ce dispositif à la MINURSO comme indiqué dans la résolution 2436 (2018), prie le Secrétaire général de s’employer à augmenter le nombre de femmes à la Mission et de veiller à ce que ces dernières participent pleinement, véritablement et sur un pied d’égalité à tous les aspects des opérations;

13.   Exhorte les parties et les États voisins à collaborer de manière productive avec la MINURSO afin de considérer la manière dont les nouvelles technologies peuvent servir à réduire les risques, à améliorer la protection de la force et à l’aider à mieux s’acquitter de son mandat;

14.   Encourage les parties à coopérer avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés afin que des mesures de confiance soient prises et appliquées et notamment à encourager la participation des femmes et des jeunes, et encourage les États voisins à contribuer à ces efforts;

15.   Exhorte instamment les États Membres à verser des contributions volontaires ou à les augmenter pour financer les programmes alimentaires, afin de s’assurer que les besoins humanitaires des réfugiés soient dûment pris en compte et d’éviter des réductions dans les rations alimentaires, et exhorte les organismes d’aide à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire conformément aux meilleures pratiques des Nations Unies;

16.   Prie le Secrétaire général de continuer à prendre les mesures qui s’imposent pour s’assurer que tout le personnel de la MINURSO respecte pleinement la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de le tenir pleinement informé des progrès faits par la Mission à cet égard dans ses rapports, et prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de continuer de prendre des mesures de prévention appropriées, notamment la vérification des antécédents de tous les membres du personnel et l’organisation d’une formation de sensibilisation avant et pendant le déploiement, et de faire en sorte que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes aient à en répondre pleinement en ouvrant rapidement des enquêtes conjointement avec la Mission, selon qu’il conviendra;

17.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.