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Le Conseil de sécurité poursuit son débat sur le « cercle vicieux » des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et des conflits

Reprise de la 9547e séance - après-midi
CS/15591

Le Conseil de sécurité poursuit son débat sur le « cercle vicieux » des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et des conflits

Les répercussions interconnectées des problèmes climatiques, des conflits et des menaces à la sécurité alimentaire ont continué de mobiliser l’attention des États Membres venus participer, cet après-midi, à la suite du débat public lancé hier au Conseil de sécurité, en la présence du Président du Guyana et du Secrétaire général de l’ONU. 

Aujourd’hui, les discussions ont été marquées par l’intervention de l’Observatrice permanente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) qui a déploré une action climatique « particulièrement faible » dans les situations de conflit, rappelant en outre que le droit international humanitaire interdit d’exploiter la famine des civils comme méthode de guerre. 

Se faisant l’écho de ces mêmes préoccupations au nom du Groupe des Amis de l’action sur les conflits et la faim, qu’elle copréside avec l’Équateur, l’Irlande a appelé tous les États Membres et parties à un conflit à prévenir la faim provoquée par les conflits. 

Les Émirats arabes unis ont relevé que les problématiques sécuritaires, alimentaires et climatiques se chevauchent fréquemment.  « Ce sont souvent les mêmes personnes qui se heurtent à la faim et aux conflits et qui font face à la crise climatique », a souligné la délégation émirienne.  Relevant que les conflits durent communément plusieurs années, elle a considéré qu’on ne pouvait pas attendre leur résolution avant de prendre à bras-le-corps les problèmes liés au climat ou à la sécurité alimentaire. 

Pour répondre efficacement à ces trois problématiques connexes, les délégués ont été nombreux à souhaiter davantage d’intégration entre les agences de l’ONU.  Soulignant le rôle déstabilisateur des changements climatiques, le Panama a exhorté le Conseil de sécurité à agir en collaboration avec le Conseil économique et social (ECOSOC).  Un appel relayé par le Suriname et Maurice, qui a préconisé une approche « holistique ».  Quant au Vietnam, il a espéré voir se renforcer la coopération entre les divers organes de l’ONU et ceux plus spécifiquement responsables de la sécurité alimentaire, dont le Programme alimentaire mondial (PAM) ou l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). 

Toujours en vue d’une meilleure intégration de ces problématiques connexes, de nombreuses délégations, dont la Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’Irlande, les Palaos, les Tonga et Nauru, ont demandé la création d’un poste de représentant spécial du Secrétaire général pour le climat et la sécurité.  Nauru, qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis du climat et de la sécurité, a considéré qu’une telle mesure serait à même d’améliorer la coordination entre les entités pertinentes de l’ONU.  Sa délégation a en outre estimé nécessaire d’intégrer systématiquement les risques climatiques et de catastrophe naturelle dans toutes les opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales. Dans le même esprit, le Paraguay a préconisé l’intégration d’indicateurs sur la sécurité alimentaire au sein des opérations de paix. 

Le Brésil a en revanche estimé que le Conseil de sécurité n’avait ni le mandat ni les outils pour traiter la question des changements climatiques, qualifiant de « fragile » leur corrélation avec la question des conflits. Par contre, a-t-il relevé, le lien entre les changements climatiques et la faim est établi.  À ce titre, il a demandé au Conseil de sécurité de renoncer à l’usage de sanctions et d’intégrer la question de la sécurité alimentaire. 

D’autres délégations ont insisté sur l’importance des systèmes d’alerte précoce en matière climatique, notant que leur déploiement mondial peut efficacement appuyer les efforts de consolidation de la paix.  Dans le même esprit, le Panama a appelé de ses vœux une meilleure coordination entre systèmes d’alerte et opérations de maintien de la paix, estimant ce point crucial pour pouvoir travailler de manière préventive avec les communautés concernées.  

Les petits États insulaires en développement (PEID) ont attiré l’attention sur leur vulnérabilité particulière, les Maldives alertant des répercussions « catastrophiques » des changements climatiques pour ces États. Outre le déplacement de populations côtières, la montée des eaux contamine les nappes phréatiques et compromet l’irrigation des cultures traditionnelles, tandis que le réchauffement des eaux éloigne de la région de nombreuses espèces de poissons essentielles à la subsistance des populations, ont expliqué les Palaos. 

« Nos terres seront inhabitables avant d’être submergées », ont averti les Tonga.  Préoccupée par le risque de troubles sociaux, de tensions entre communautés et de déplacements de population, la délégation a appelé à mettre à disposition des financements abordables et accessibles pour renforcer la résilience des PEID en termes halieutiques, d’agriculture et d’énergies renouvelables. 

Alertant de son côté que 4,9 millions d’Haïtiens, soit près de la moitié de la population du pays, ont besoin d’une aide alimentaire d’urgence, la délégation haïtienne a indiqué qu’il est clairement établi que l’insécurité alimentaire est la cause de la violence armée qui frappe l’île, qui a son tour entraîne l’insécurité alimentaire.  Pour contrer cette situation, elle a appelé à une action urgente et coordonnée de la communauté internationale pour agir sur les causes structurelles de la crise alimentaire et continuer à fournir le soutien nécessaire aux agriculteurs. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Lors d’un débat ministériel, le Conseil de sécurité se penche sur le « cercle vicieux » des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et des conflits

9547e séance - matin et après-midi
CS/15589

Lors d’un débat ministériel, le Conseil de sécurité se penche sur le « cercle vicieux » des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et des conflits

Dans un monde où les foyers de conflit se multiplient et où les changements climatiques ne connaissent aucune frontière, « les ventres vides nourrissent les troubles ».  C’est par ces mots que le Secrétaire général de l’ONU a résumé, aujourd’hui, les conséquences du réchauffement planétaire et de l’insécurité alimentaire sur la paix et la sécurité internationales.  Dès lors, rien de plus normal, pour M. António Guterres, que le Conseil de sécurité se saisisse de ces menaces graves et interdépendantes, à l’occasion d’un débat public pour lequel étaient inscrits près de 90 participants, dont plusieurs ministres, sous la présidence de M. Mohamed Irfaan Ali, le dirigeant du Guyana. 

« En Syrie, près de 13 millions de personnes se couchent chaque soir le ventre vide après une décennie de guerre et un terrible séisme.  Au Myanmar, le conflit et l’instabilité politique ont fait reculer les progrès vers l’élimination de la faim.  Et à Gaza, personne n’a à manger en quantité suffisante », a déploré le chef de l’Organisation, qui a rappelé que 80% des 700 000 personnes « les plus affamées au monde » vivent dans ce « minuscule » territoire où Israël est en guerre avec le Hamas.  Une situation qui a conduit plusieurs intervenants, dont le Ministre algérien de l’agriculture, à s’indigner du sort réservé au peuple palestinien par la Puissance occupante.

La Directrice générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a donné d’autres chiffres alarmants: sur les 258 millions de personnes confrontées à l’insécurité alimentaire aiguë, 174 millions le sont à cause du climat et des conflits; 70% des pays les plus vulnérables aux changements climatiques figurent également parmi les plus fragiles politiquement et économiquement; et 10% de la superficie actuellement propice aux principales cultures et à l’élevage pourrait se retrouver inadaptée au climat d’ici au milieu du siècle.  Une situation dont petits agriculteurs, éleveurs, forestiers et pêcheurs pâtiront, a mis en garde Mme Beth Bechdol.  Raréfaction des ressources hydriques, destruction des pâturages et ruine des petites exploitations agricoles sur fond d’instabilité politique: voilà pour le Secrétaire général et le Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, M. Simon Stiell, un cocktail explosif, qui exige une action concertée.

Pourtant, le Conseil de sécurité a fait preuve de « réticences » pour se mobiliser sur ces questions, laissant un « vide important », a regretté la Directrice des initiatives mondiales à l’Institut international pour la paix, Mme Jimena Levia Roesch.  Elle en a souligné les conséquences pour les petits États insulaires qui ne font pas partie spécifiquement de l’ordre du jour du Conseil alors qu’ils sont confrontés à la menace existentielle des changements climatiques. Aussi a-t-elle invité ses membres à créer un organisme d’enquête provisoire pour mieux comprendre les liens entre climat, sécurité alimentaire et conflits. 

Face à ce « cercle vicieux d’instabilité et de besoins », le Président du Guyana, M. Mohamed Irfaan Ali, a proposé quatre domaines d’action, à commencer par l’adoption par le Conseil de sécurité d’une approche globale des conflits, qui accorde une plus grande attention aux facteurs de conflit « non traditionnels ».  Dans le cadre de cette approche, le Conseil devrait renforcer sa collaboration avec les entités compétentes, en particulier la FAO ou encore le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Fonds international de développement agricole (FIDA). S’agissant de la crise climatique, le dirigeant guyanais a appelé le Conseil à ne pas se montrer « réactionnaire », les preuves du réchauffement planétaire étant selon lui indéniablement établies. 

La Fédération de Russie, qui avait exercé son droit de veto en décembre 2021 contre un projet de résolution par lequel le Conseil aurait privilégié des « stratégies globales » sur ces questions, ne l’a pas entendu de cette oreille. Elle a réitéré aujourd’hui sa position selon laquelle il n’existe pas de corrélation entre les questions climatiques et socioéconomiques, d’une part, et le mandat du Conseil, l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, d’autre part.  Le problème alimentaire mondial, a-t-il analysé, est avant tout lié à une répartition inégale, la faute aux pays occidentaux.  Autres facteurs aggravants: les sanctions unilatérales, qui constituent une sérieuse menace à la sécurité alimentaire mondiale, et les « conditions politiques préalables » imposées par les pays occidentaux pour l’aide à la Syrie ou le financement de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). 

« Accablés par la crise du coût de la vie et des niveaux d’endettement insoutenables, de nombreux pays en développement ne peuvent tout simplement pas investir dans l’action climatique, des systèmes alimentaires résilients ou d’autres priorités de développement durable », a expliqué le Secrétaire général.  Après avoir rappelé sa proposition d’un plan de relance des objectifs de développement durable (ODD) –à hauteur de 500 milliards de dollars par an–, dans le cadre duquel des mesures urgentes doivent être prises pour soulager certains pays de la dette, M. Guterres a proposé de recapitaliser les banques multilatérales de développement et de changer leurs modèles économiques afin de leur permettre de mobiliser davantage de financements privés à un coût raisonnable pour ces mêmes pays. 

La France a quant à elle engagé le Conseil à renforcer les mandats des missions de l’ONU pour venir en appui aux pays les plus vulnérables en matière d’évaluation des risques et d’actions concrètes.  Une proposition pas si éloignée de celle de la Suisse, pour qui les opérations de paix doivent analyser les risques liés à l’impact sécuritaire des changements climatiques. 

La Commission de consolidation de la paix (CCP) a été encouragée par la République de Corée à des synergies avec les opérations de paix et agences des Nations Unies, le mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies et les banques multilatérales de développement.  En partageant leurs analyses respectives et leurs pratiques optimales, ces différentes entités pourraient rationaliser et compléter leurs activités respectives, a-t-il détaillé, ajoutant que les résultats pourraient être ensuite transmis au Conseil. 

Le Conseil de sécurité achèvera son débat public demain, mercredi 14 février, à partir de 15 heures.

 

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Les effets des changements climatiques et l’insécurité alimentaire (S/2024/146)

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a jugé « normal » que le Conseil de sécurité « se saisisse » des menaces graves et croissantes pour la paix et la sécurité mondiales que constituent le « chaos climatique » et les crises alimentaires, puisque « les ventres vides nourrissent les troubles ».  Au Portugal, a-t-il dit, nous avons un dicton: « Dans une maison sans pain, tout le monde se dispute et personne n’a raison. »  Le chef de l’Organisation s’est dit consterné de constater que le monde regorge aujourd’hui d’exemples des liens dévastateurs entre faim et conflits.  « En Syrie, près de 13 millions de personnes se couchent chaque soir le ventre vide après une décennie de guerre et un terrible séisme.  Au Myanmar, le conflit et l’instabilité politique ont fait reculer les progrès vers l’élimination de la faim.  Et à Gaza, personne n’a à manger à sa faim, a déploré M. Guterres: parmi les 700 000 personnes « les plus affamées au monde », 4 sur 5 habitent ce minuscule territoire.  Dans de nombreux endroits, les catastrophes climatiques ajoutent une autre dimension.  Chacun des 14 pays les plus menacés par les changements climatiques est en proie à un conflit, et 13 d’entre eux sont confrontés à une crise humanitaire, comme c’est le cas en Haïti ou en Éthiopie ou encore au Sahel, où la hausse des températures exacerbe les tensions.  Raréfaction des ressources hydriques, destruction des pâturages et ruine des petites exploitations agricoles sur fond d’instabilité politique forment pour le Secrétaire général un cocktail explosif, qui exige une action concertée pour briser ce cercle vicieux.

Il a commencé par exhorter toutes les parties aux conflits à respecter le droit international humanitaire, en s’appuyant notamment sur la résolution 2417 (2018) du Conseil de sécurité relative à la protection des civils dans les conflits armés.  Par ailleurs, M. Guterres a souligné l’absolue nécessité de financer dans leur intégralité les opérations humanitaires qui, l’an dernier, l’ont été à moins de 40%.  Poursuivant, il a proposé de créer les conditions nécessaires pour résoudre les conflits et préserver la paix, au sein des pays et entre les pays, en commençant par accélérer la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), dont celui de « faim zéro », qui suppose des investissements massifs dans des systèmes alimentaires sains, équitables et durables.

Nous devons en outre maîtriser la crise climatique pour maintenir la hausse des températures mondiales en-dessous de 1,5 degré Celsius, a préconisé le Secrétaire général, qui a à nouveau plaidé en faveur d’investissements massifs à l’appui du Programme 2030.  « Aujourd’hui, accablés par la crise du coût de la vie et des niveaux d’endettement insoutenables, de nombreux pays en développement ne peuvent tout simplement pas investir dans l’action climatique, des systèmes alimentaires résilients ou d’autres priorités de développement durable », a expliqué le Secrétaire général.  Il a rappelé sa proposition d’un plan de relance des ODD –à hauteur de 500 milliards de dollars par an–, dans le cadre duquel des mesures urgentes doivent être prises pour soulager certains pays de la dette au cours des trois prochaines années.  Il faut également recapitaliser les banques multilatérales de développement et changer leurs modèles économiques afin de leur permettre de mobiliser bien plus de financements privés à un coût raisonnable pour les pays en développement, a encore souligné le Secrétaire général. 

Simultanément, les pays en développement doivent donner la priorité aux dépenses relatives à la réalisation du Programme 2030.  Raison pour laquelle le Secrétaire général a trouvé « affligeant » que certains gouvernements dépensent sans compter dans l’armement, tout en réduisant à une « peau de chagrin » les budgets consacrés à la sécurité alimentaire, à l’action climatique et au développement durable en général.  Enfin, pour le chef de l’Organisation, nous devons cibler les points de convergence entre insécurité alimentaire, climat et conflits et créer des partenariats, des politiques publiques et des programmes de nature à répondre à ces enjeux de façon concomitante.  Par exemple, en prenant en compte les risques climatiques et la sécurité alimentaire dans la consolidation de la paix, ou en investissant dans des programmes d’adaptation qui aident les populations à mieux gérer les ressources partagées.  Le Mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies a été conçu pour prendre en compte les liens entre climat, paix et sécurité dans notre travail.  Et l’initiative Convergence a été lancée l’an dernier pour aider les États Membres à associer l’action climatique et la transformation des systèmes alimentaires. Nous devons également veiller à ce que le financement de l’action climatique produise des résultats concrets pour les populations et les lieux en proie à des conflits, a-t-il encore demandé. Le Fonds pour la consolidation de la paix peut servir de catalyseur afin de mobiliser d’autres partenaires et faire de cette ambition une réalité, a ajouté le Secrétaire général.

M. SIMON STIELL, Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), a rappelé combien les changements climatiques contribuent à l’insécurité alimentaire et aux conflits.  Si le réchauffement se poursuit, la production alimentaire va décliner dans de nombreux pays, a-t-il averti, avant d’insister sur le lien bien établi entre faim et conflits.  « La combinaison changements climatiques, faim, guerre est dévastatrice. »  Rappelant que les questions de paix et de sécurité n’entrent pas dans le mandat de la Convention-cadre, il a estimé que le Conseil a un rôle à jouer.  Il a ainsi invité le Conseil à solliciter régulièrement des informations sur les risques découlant des changements climatiques, en insistant sur l’apport de la Convention-cadre à ce titre.  Mais, au bout du compte, le Conseil doit connaître en temps réel les moteurs d’un conflit aux fins d’une meilleure prise de décisions, a-t-il indiqué.  Selon lui, la programmation des fonds verticaux qui tient déjà compte les conflits, devrait également prendre en compte les enjeux climatiques.  Les plans nationaux d’adaptation, le financement climatique et de nouvelles contributions déterminées au niveau national peuvent réduire notre vulnérabilité et contribuer à prévenir la faim et les conflits, a-t-il ajouté.

L’intervenant a ensuite rappelé la nette insuffisance des ressources au profit de l’action climatique, notant que les besoins financiers d’adaptation aux changements climatiques sont au moins 10 fois supérieurs aux ressources actuelles.  Les pays en développement, à l’exception de la Chine, ont besoin de 2,4 mille milliards de dollars par an pour bâtir une économie d’énergies propres et s’adapter aux changements climatiques, a-t-il indiqué.  Il a souligné que le financement climatique est un investissement pour des économies florissantes et pour la prévention des conflits.  Il a rappelé l’importance des plans d’action nationaux et de leur cohérence avec l’Accord de Paris, en souhaitant que ces plans incluent des mesures de protection de la sécurité alimentaire.  Enfin, il a espéré que ces plans, qui doivent être rendus en début d’année prochaine, soient ambitieux afin de limiter la hausse des températures à 1,5 °C. 

Mme BETH BECHDOL, Directrice générale adjointe de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a souligné la nécessité d’une action urgente dans la lutte contre l’insécurité alimentaire nourrie par le climat et les conflits.  La crise climatique n’épargne personne, mais elle n’affecte pas tout le monde de la même manière, a prévenu Mme Bechdol disant que la FAO voit comment les conflits conduisent à la faim et à la malnutrition.  Sur les 258 millions de personnes confrontées à l’insécurité alimentaire aiguë, 174 millions le sont à cause du climat et des conflits; 70% des pays les plus vulnérables aux changements climatiques sont également parmi les plus fragiles politiquement et économiquement; et 10% de la superficie actuellement propice aux principales cultures et à l’élevage pourrait se retrouver inadaptée au climat d’ici au milieu du siècle.  Les petits agriculteurs, les éleveurs, les forestiers et les pêcheurs en pâtiront en raison de leur dépendance au sol, à l’eau et à la terre. 

La Directrice générale adjointe a pris le cas notamment de l’Afghanistan où les conflits ont notamment comme conséquence de réduire la capacité des communautés à produire et à accéder à la nourriture.  La FAO a donné aux agriculteurs et aux communautés les moyens de se préparer, d’y répondre et de renforcer leur résilience.  Grâce à ces efforts, on commence à voir un déclin significatif de la population confrontée à la faim aiguë, s’est réjouie la Directrice générale adjointe en ajoutant que la FAO envisage de mettre à l’échelle ces approches qui fonctionnent.  Le Fonds pour la consolidation de la paix a répondu efficacement à la nécessité de s’attaquer à l’intersection des changements climatiques et des conflits ainsi qu’aux effets de l’intensification de la concurrence pour les ressources naturelles, a-t-elle aussi salué.  Elle a assuré que la FAO restait déterminée à soutenir ce type de projets et à renforcer la collaboration avec ses partenaires.

En Afrique de l’Ouest et du Centre, notamment au Burkina Faso, au Mali et au Niger, la FAO et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) travaillent ensemble pour réduire les conflits violents liés à la transhumance au moyen d’un système d’alerte et des mécanismes de gestion des conflits, a poursuivi la responsable.  Elle a aussi noté que les changements climatiques et les conflits affectent la production agricole, la pêche et la sylviculture, créant des pressions supplémentaires sur l’accès aux ressources naturelles.  Au Yémen, la FAO a mis en œuvre un projet, appelé « L’eau pour la paix », qui a contribué à atténuer les conflits liés à l’eau, en utilisant les femmes comme agents de règlement des conflits.  De plus, grâce au programme « Argent contre travail », les communautés ont protégé les zones inondables pendant la saison des pluies et réhabilité les canaux d’irrigation. 

Pour assurer une gestion pacifique et durable des ressources partagées, Mme Bechdol a recommandé cinq mesures, à commencer par des investissements dans systèmes agroalimentaires résilients aux changements climatiques et des approches locales de maintien de la paix en s’appuyant sur l’adaptation, la réduction des risques de catastrophe et les approches communautaires; des analyses régulières des risques liés aux changements climatiques et le partage des données et de l’information; la coordination stratégique entre les mécanismes existants, tels que le Mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies et le Mécanisme de coordination de la sécurité climatique de l’IGAD; la création de postes de conseiller spécialisé sur le climat, la paix et la sécurité dans les missions des Nations Unies, en particulier celles qui sont exposées aux changements climatiques; et la mise en place des pôles régionaux pour le climat, la paix et la sécurité, comme l’a fait le Bureau de l’Envoyé spécial pour la Corne de l’Afrique. 

Mme JIMENA LEVIA ROESCH, Directrice des initiatives mondiales et responsable des questions liées au climat, à la paix et au développement durable à l’Institut international pour la paix, a rappelé que du Tchad au Niger, du Mozambique aux États de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), de nombreux pays frappent à la porte du Conseil de sécurité pour que les changements climatiques soient pris au sérieux.  À ses yeux, les réticences du Conseil en matière climatique ont laissé un vide important, en particulier pour les petits États insulaires qui n’ont pas de mandat spécifique à l’ordre du jour de cet organe et qui sont pourtant confrontés à cette menace existentielle.  Le rôle du Conseil n’est pas de remplacer la CCNUCC mais d’examiner comment le climat amplifie les réalités existantes, a-t-elle fait valoir, invitant ses membres à créer un organisme d’enquête provisoire pour mieux comprendre les liens entre le climat, la sécurité alimentaire et les conflits au niveau actuel de réchauffement de 1,48 degrés Celsius.  Cela enverrait un message en direction des petites nations en butte aux effets délétères du réchauffement planétaire, a estimé l’intervenante, pour qui toutes les institutions créées en 1945 ont besoin de mandats élargis pour répondre à ces défis.  À cet égard, elle a souhaité que le Conseil se montre « à la hauteur » dans le domaine des systèmes alimentaires, que la récente COP28 a contribué à intégrer dans les politiques émergentes en matière de changements climatiques.  Le climat est un défi qui exige que toutes les composantes de l’ONU soient saisies, a-t-elle insisté, affirmant croire en une résolution de ce problème par le biais de la coopération, de l’innovation et d’un profond engagement envers notre avenir commun. 

M. MOHAMED IRFAAN ALI, Président du Guyana, a déploré le « cercle vicieux d’instabilité et de besoins » qui trouve son origine dans les changements climatiques et les conflits, principaux facteurs d’insécurité alimentaire dans le monde.  Aux coûts économiques considérables de la guerre s’ajoutent aujourd’hui les événements climatiques tels que les sécheresses et les inondations qui dévastent les réserves alimentaires et dégradent l’environnement.  En retour, a-t-il ajouté, la dynamique des conflits est affectée par la hausse des températures mondiales et son impact sur la production et le rendement agricoles, les moyens de subsistance et les ressources naturelles. 

À la lumière de ce qui précède, le Président a proposé quatre domaines d’action, à commencer par l’adoption par le Conseil de sécurité d’une approche globale des conflits, en accordant une plus grande attention aux facteurs de conflit non traditionnels.  Lors de son examen des conflits, le Conseil devrait encore renforcer la collaboration avec les entités compétentes, en particulier celles possédant une expertise technique spécifique à chaque zone de conflit, par exemple, s’agissant de l’insécurité alimentaire, la FAO ou encore le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Fonds international de développement agricole (FIDA).  En ce qui concerne la crise climatique, le Président a appelé le Conseil à ne pas se placer dans une position « réactionnaire », les preuves de ce phénomène étant selon lui étayées par les expériences de personnes à travers le monde.  Poursuivant, il a estimé que le Conseil devait élaborer une réponse collective pour faire face aux menaces croissantes posées par les changements climatiques et l’insécurité alimentaire, en tenant compte des impacts sexospécifiques du lien entre le climat, l’insécurité alimentaire et les conflits, les femmes étant affectées de manière disproportionnée. 

M. YOUCEF CHERFA, Ministre de l’agriculture et du développement rural de l’Algérie, a déclaré que son pays a redoublé d’efforts pour mettre en place toutes les conditions favorables au développement et à la durabilité des systèmes alimentaires et du secteur agricole, notamment grâce au recours aux énergies renouvelables.  Nous luttons également contre la désertification et la prévention des tempêtes de sable, a-t-il dit.  Pour le Ministre, il convient de renforcer la coopération autour des stratégies d’adaptation aux changements climatiques et de créer des mécanismes permettant d’aider les pays en développement, en particulier par une aide financière adéquate. Il faut, a ajouté M. Cherfa, promouvoir l’innovation, la recherche scientifique, et le développement agricole, s’agissant notamment de l’alerte précoce.

Le Ministre a ensuite appelé au respect du droit international, rejetant le deux poids, deux mesures.  À cet égard, il a dénoncé la situation tragique que la population de Gaza subit depuis plus de cinq mois, à cause des actions de la Puissance occupante et ses violations flagrantes, devant laquelle la communauté internationale reste les « bras ballants ».  Aujourd’hui, l’une des agences humanitaires les plus importantes de l’ONU fait l’objet d’une campagne de diffamation dont l’objectif est de tarir ses sources de financement, a dénoncé le Ministre.  M. Cherfa a donc demandé à la communauté internationale et en particulier au Conseil de sécurité, d’assumer ses responsabilités et de mettre fin immédiatement aux souffrances du peuple palestinien, tout en veillant à garantir l’acheminement immédiat d’une aide humanitaire suffisante. 

M. MICHAEL S. REGAN, Administrateur de l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis, a indiqué que la Corne de l’Afrique a connu, l’an dernier, la pire sécheresse de son histoire, un exemple parmi d’autres des conséquences des changements climatiques.  Il a précisé que 36% des ménages vivant sous le seuil de pauvreté dans son pays sont en insécurité alimentaire.  Il a détaillé l’action des États-Unis, en rappelant notamment le lancement récent de la stratégie nationale contre le gaspillage.  Mon pays, a-t-il ajouté, finance plus d’un tiers du budget du Programme alimentaire mondial (PAM).  Il a aussi pointé les graves conséquences de l’acidification croissante des océans pour la production alimentaire et estimé que « chacun dans cette salle » a un rôle à jouer dans la réponse aux changements climatiques et à l’insécurité alimentaire.

Mme SANJA STIGLIC, Vice-Ministre des affaires étrangères et européennes de la Slovénie, s’est dite préoccupée que des millions de personnes dans la Corne de l’Afrique soient exposées à une insécurité alimentaire aiguë à cause des changements climatiques.  La guerre au Soudan a détruit les récoltes et vidé les marchés.  Celle à Gaza a dévasté les infrastructures d’approvisionnement en eau et l’environnement naturel, ajoutant aux souffrances d’une population civile déjà confrontée à de graves pénuries alimentaires.  La Vice-Ministre n’a pas oublié la guerre en Ukraine et ses conséquences à long terme sur les chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiales. 

Le système des Nations Unies, a-t-elle estimé, doit utiliser tous les outils à sa disposition, y compris la participation pleine, égale et significative des femmes, dans la lutte contre les changements climatiques et l’insécurité alimentaire pour stimuler un développement inclusif et durable et renforcer la résilience des sociétés touchées.  L’aide humanitaire et la coopération au développement, y compris dans le domaine de l’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de leurs effets, doivent être complétées par des efforts en faveur de la paix et de la sécurité. Tous les points inscrits à l’ordre du jour du Conseil de sécurité doivent être examinés sous l’angle du climat. Le mécanisme de sécurité climatique et son réseau de conseillers peuvent apporter une contribution déterminante. Il faut également exploiter les nouvelles technologies, dont les systèmes d’alerte précoce et les images satellites, sans oublier l’intelligence artificielle afin d’identifier les facteurs des conflits potentiels.  La clef, c’est la prévention, a martelé la Vice-Ministre. 

Mme ALEXANDRA BAUMANN, Secrétaire d’État de la Suisse, a estimé que, face à des défis de plus en plus interconnectés, de nouveaux moyens sont nécessaires pour consolider la paix.  Selon elle, le Nouvel Agenda pour la paix indique la voie à suivre, qui est celle de la prévention.  À cette fin, il convient de s’assurer que les divers systèmes d’alerte précoce développés pour l’insécurité alimentaire, les conflits et les urgences climatiques puissent opérer ensemble, a-t-elle souligné, notant que les défis connexes exigent des systèmes en réseau permettant de relier les données.  Une meilleure intégration entre les différents acteurs est également indispensable, a ajouté la responsable, avant de saluer la collaboration entre le Conseil de sécurité et l’ensemble du système onusien, mais également avec les organisations régionales comme l’Union africaine, les organisations régionales économiques, les acteurs locaux et la science. 

Pour parvenir à des réponses adaptées aux contextes, le Conseil doit prendre en compte l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité, par exemple en chargeant les missions onusiennes d’analyser les risques liés à ce phénomène, a-t-elle recommandé avant de prôner aussi l’adoption par le Conseil d’un cadre stratégique en vue d’une action cohérente et responsable dans ce domaine.  À ses yeux, les outils pour renforcer la prévention existent mais ils réclament une volonté politique.  « C’est notre devoir face au triple fléau des conflits, de la faim et des changements climatiques », a-t-elle affirmé, formant le vœu que le Sommet de l’avenir soit l’occasion de faire progresser cette priorité politique. 

M. YASUSHI HOSAKA, Vice-Ministre parlementaire des affaires étrangères du Japon, a rappelé que le problème des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et des conflits n’est pas seulement critique pour les PEID et les pays vulnérables et en développement, mais il affecte également la paix et la sécurité internationales.  Il est donc important que le Conseil relève ces défis en abordant de front les risques émergents.  À ce titre, il a préconisé une approche globale, comprenant entre autres le renforcement de la résilience et la pérennisation de la paix.  Le Conseil de sécurité pourrait en outre faire un meilleur usage de la Commission de consolidation de la paix, laquelle devrait, selon lui, continuer d’élargir son champ d’action pour couvrir les questions susceptibles d’avoir une incidence sur les conflits. 

S’appuyant sur la publication, l’an dernier, du Plan d’action d’Hiroshima pour une sécurité alimentaire mondiale résiliente, le Vice-Ministre a souligné que des approches globales seraient plus efficaces pour freiner l’augmentation des risques liés aux changements climatiques et briser les cercles vicieux qui en découlent. Dans cette perspective, il a réaffirmé le soutien de son pays aux efforts des États Membres en faveur d’un développement à faibles émissions et résilient, tout en aidant les pays en développement en matière d’atténuation et d’adaptation.  Pour sa part, le Japon s’est engagé à mobiliser quelque 70 milliards de dollars de financement climatique auprès des secteurs public et privé jusqu’en 2025 pour aider les pays en développement à lutter contre ce phénomène. 

Le représentant du Mozambique a invité à comprendre qu’il fallait mieux coordonner les réponses et les solutions pour changer les perceptions relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales à l’échelle mondiale, « afin que nos peuples et leurs droits soient respectés et protégés contre les situations induites par les liens entre climat et conflit ».  Aussi a-t-il salué la récente décision de la COP28 qui a souligné l’importance pour la communauté internationale de fournir un soutien financier et technique aux nations les plus vulnérables. 

Le représentant a incité à la coopération entre les différents organes, agences et programmes des Nations Unies, y compris le Conseil de sécurité, y voyant un moyen de renforcer la capacité collective à lutter contre les changements climatiques et l’insécurité alimentaire.  Il a fait remarquer que la lutte contre les risques sécuritaires liés au climat exige une approche globale et intégrée prenant en compte les dimensions environnementales, économiques, sociales et politiques.  En reconnaissant l’interdépendance des défis qui se posent, nous pouvons œuvrer à la recherche de solutions durables qui favorisent la résilience, l’équité et la stabilité à l’échelle mondiale, a affirmé le représentant. 

La représentante du Royaume-Uni a appelé à faire fond sur l’élan généré par la COP28 et à augmenter le financement climatique au profit des pays fragiles et touchés par un conflit.  Le Royaume-Uni a promis 100 millions de livres sterling pour aider les pays vulnérables à faire face aux changements climatiques, y compris en vue du développement de systèmes d’alerte précoce, a-t-elle indiqué.  Elle a demandé que les avancées scientifiques puissent profiter à tous, y compris les petits exploitants agricoles.  Enfin, elle a appelé les acteurs humanitaires, du développement et du maintien de la paix à adopter une approche holistique englobant résilience, développement, sécurité et changements climatiques.  Les conséquences des changements climatiques devraient être pleinement intégrées dans les évaluations de risques de conflit, a-t-elle estimé.

Le représentant de la Sierre Leone a réitéré l’importance d’aborder les changements climatiques et l’insécurité alimentaire en tant que menace émergente pour la paix et la sécurité internationales, évoquant notamment la situation dans la Corne de l’Afrique, au Sahel et au Soudan.  Il a appelé à intégrer le climat et la sécurité alimentaire à la prévention des conflits.  Cela peut se faire suite à une évaluation des risques afin d’identifier les régions vulnérables aux conflits climatiques, comme le Sahel.  Il a également appelé à soutenir les efforts de médiation et de résolution des conflits dans les régions touchées par les changements climatiques. 

D’autres parts, a ajouté le délégué, il faut investir dans des mécanismes de résolution des conflits et des initiatives de consolidation de la paix; encourager la coopération régionale et l’action collective en matière de climat et de sécurité alimentaire; et investir dans des pratiques agricoles résilientes au climat. En outre, les États Membres devraient soutenir la mise en place de systèmes d’alerte précoce pour les phénomènes météorologiques extrêmes.  De son côté, la Sierra Leone a lancé le programme « Feed Salone » qui vise à augmenter la productivité agricole, créer des emplois et construire un système alimentaire résilient.

La représentante de la France a estimé que le Conseil de sécurité doit être informé de manière détaillée sur l’impact des crises climatique et alimentaire dans les régions les plus vulnérables.  Elle a donc appelé les représentants spéciaux à lui transmettre des informations précises et à présenter des recommandations d’actions ciblées, en particulier pour l’Afrique.  Elle a également engagé le Conseil à mettre davantage l’accent sur la prévention des risques, estimant que les mandats des missions de l’ONU doivent être renforcés afin qu’elles puissent venir en appui des pays les plus vulnérables en matière d’évaluation des risques et proposer des actions concrètes.  Il faut aussi continuer à appuyer le travail sur le terrain des Nations Unies, a-t-elle ajouté, saluant le rôle particulièrement utile des conseillers climat, paix et sécurité auprès des missions des Nations Unies. La représentante a ensuite appelé les États Membres à adhérer au mécanisme interagences « climat, paix et sécurité » des Nations Unies, insistant sur l’urgence à agir.

Le représentant de la Fédération de Russie a réitéré la position de son pays selon laquelle il n’existe pas de lien direct entre les questions climatiques et socioéconomiques, d’une part, et le mandat du Conseil, d’autre part.  Le problème alimentaire mondial, a-t-il analysé, est avant tout lié à une répartition inégale; les réserves excédentaires s’accumulant en Occident et les pénuries, dans les pays en développement.  Les quatre plus grandes entreprises occidentales, qui représentent 75 à 90% du chiffre d’affaires du commerce international des produits agricoles, sont les principales bénéficiaires de la hausse des prix alimentaires.  Il est donc ironique que l’Occident passe ce fait sous silence, préférant accuser aveuglément la Russie d’être responsable de la crise alimentaire mondiale.  De surcroît, a ajouté le représentant, le volume de l’aide fournie par les États-Unis et leurs alliés aux pays du Sud ne peut être comparé aux quelque 200 milliards d’euros qu’ils ont consacrés à leur « guerre par procuration » en Ukraine, alors que sur les 55,2 milliards de dollars réclamés par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour 2023, seulement 22,4 milliards de dollars ont été déboursés. 

Le représentant a également condamné les « conditions politiques préalables » imposées par les pays occidentaux pour l’aide à la Syrie ou le financement de l’UNRWA, ainsi que les sanctions unilatérales qui constituent une grave menace à la sécurité alimentaire mondiale.  De fait, a-t-il souligné, pour chaque dollar dépensé soi-disant pour l’aide, les anciens colonisateurs exigent une renonciation à la souveraineté et à l’indépendance politique, comme l’ont expérimenté de nombreux États africains. La Russie continue quant à elle à aider gratuitement ceux qui en ont besoin partout dans le monde, a affirmé le représentant, faisant état de fournitures de vivres dans 30 pays, ces cinq dernières années, avec le concours du PAM.  Il a enfin indiqué qu’en dépit des sanctions à son encontre, la Russie reste un fournisseur de céréales responsable, offrant à ses partenaires des produits de haute qualité à des prix attractifs. 

Le représentant de la Chine a estimé que comme certains conflits sont sans lien avec les changements climatiques, chaque situation doit faire l’objet d’un examen spécifique pour en déterminer les causes et les possibilités d’intervention idoines.  Néanmoins, le représentant a jugé indispensable de renforcer la résilience climatique et la sécurité alimentaire afin de briser le cercle vicieux du climat, de la faim et des conflits.  Il a plaidé pour le renforcement de l’aide humanitaire afin d’assurer le respect du droit fondamental à l’alimentation.  À cette fin, il a demandé aux pays industrialisés d’augmenter leur aide alimentaire et financière aux pays en développement.  Toutefois, a-t-il prévenu, l’aide humanitaire ne doit pas être utilisée pour exercer des pressions comme c’est le cas en Afghanistan et à Gaza, une « réalité tragique inacceptable ». 

Le représentant a donc demandé aux pays concernés de donner suite à l’appel à la justice et d’agir de manière responsable pour éviter une catastrophe humanitaire plus grande encore.  Il a conclu en plaidant en faveur d’une gouvernance alimentaire mondiale plus équitable, estimant que la FAO et les institutions financières internationales doivent privilégier les pays en développement dans la coordination de l’aide humanitaire et de l’aide à la production agricole. 

Le représentant de la République de Corée a reconnu la nécessité de s’interroger sur les liens entre changements climatiques, insécurité alimentaire et paix et sécurité dans les situations inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, citant les exemples du Myanmar, de l’Afghanistan, ou encore du Soudan du Sud.  Les solutions nécessitent une approche et un partenariat à long terme, avec des systèmes d’alerte précoce intégrant des données climatiques et environnementales, a préconisé le représentant. 

Il a encouragé la Commission de consolidation de la paix (CCP) à organiser des réunions spécifiques à un pays ou à une région axées sur le climat, avec la participation des missions et agences des Nations Unies, du mécanisme de sécurité climatique des Nations Unies et des banques multilatérales de développement.  En partageant leurs analyses respectives et leurs meilleures pratiques sur la gestion des liens climat-alimentation-paix dans ce contexte spécifique, ces différentes entités pourraient rationaliser et compléter leurs activités, et les mécanismes de financement identifier les besoins en ressources, a-t-il détaillé, ajoutant que les résultats pourraient être transmis au Conseil de sécurité.  Il a ensuite présenté l’initiative « K-Ricebelt », un projet innovant qui vise à aider 10 pays d’Afrique subsaharienne à localiser et à améliorer leurs capacités de production de riz en mettant en commun des variétés à haut rendement et des technologies agricoles. 

La représentante de Malte a noté qu’en tant que multiplicateurs de menaces, les changements climatiques ont accru les conflits liés aux ressources dans plusieurs régions du monde, exacerbant l’instabilité et mettant à l’épreuve la résilience des populations vulnérables.  De plus, les zones touchées par un conflit sont souvent confrontées à une insécurité alimentaire et hydrique aiguë.  Compte tenu que les femmes et les filles représentent 70% des personnes souffrant de la faim dans le monde, la crise climatique vient encore aggraver les inégalités existantes entre les sexes.  « Ces chiffres parlent d’eux-mêmes », a ajouté la représentante.  Les phénomènes climatiques mettent également en péril les systèmes agroalimentaires, alimentant la concurrence au sujet des ressources naturelles et entraînant des déplacements de population, notamment au Sahel.  Dans ce contexte, la représentante a appelé à une approche holistique et intégrée au sein du système de l’ONU, y compris au Conseil de sécurité. Toute action de la communauté internationale à cet égard doit impliquer les acteurs locaux, a-t-elle prévenu, et le financement climatique englober les organisations de femmes dédiées aux efforts locaux d’adaptation et d’atténuation, ainsi que les chefs traditionnels et religieux. 

Le représentant de l’Équateur a appelé au respect de la résolution 2573 (2021) sur la protection des biens essentiels et condamné toute tactique de guerre consistant à affamer la population.  Il a détaillé les effets dévastateurs de la détérioration sécuritaire en Haïti et ses répercussions sur la sécurité alimentaire.  L’incidence des conflits sur la sécurité alimentaire est exacerbée par la crise climatique, qui agit comme un véritable « multiplicateur de menaces », a-t-il reconnu.  Le délégué a par ailleurs souligné l’importance du financement climatique.  Une action climatique robuste de la part des pays en développement ne sera possible que si les pays développés fournissent des ressources au titre du financement climatique, conformément au principe de responsabilités communes mais différenciées, a tranché le délégué.  Enfin, il a appelé à l’opérationnalisation du fonds pour les pertes et les préjudices.

M. LUIS ABINADER CORONA, Président de la République dominicaine, a demandé un examen approfondi des menaces à la paix et à la sécurité mondiales, y compris les changements climatiques et l’insécurité alimentaire.  Il a indiqué que son gouvernement a créé un système national de sécurité alimentaire et nutritionnelle et promu une alliance stratégique avec le Guyana pour garantir l’autonomie des deux pays dans les domaines alimentaire et énergétique.  La République dominicaine, a annoncé le Président, participera à la quatrième Conférence sur les petits États insulaires en développement, qui se tiendra à Antigua-et-Barbuda au mois de mai.  Ce sera une occasion d’exiger que les principaux responsables des changements climatiques prennent des mesures urgentes face à la crise et renforcent la sécurité alimentaire dans le monde.  M. Abinader Corona a ajouté que la fonte plus rapide que prévu des glaciers de l’Arctique implique une élévation d’un mètre du niveau de l’océan dans les Caraïbes. 

Le Président n’a pas manqué de dénoncer l’utilisation de la faim comme arme de guerre et de demander au Conseil d’intensifier son action sur la question. Parlant d’Haïti, il a déploré le fait que la résolution du Conseil sur la création d’une mission multinationale d’appui à la sécurité soit restée lettre morte.  La communauté internationale ne doit pas laisser la catastrophe que vit le peuple haïtien continuer un jour de plus.  Pour faire face à ce type de conflits internes et à l’insécurité alimentaire exacerbée par les changements climatiques, le Président a appelé à des outils d’information, d’analyse et d’action concertée.  Le Conseil de sécurité, a-t-il insisté, doit redoubler d’efforts pour mettre en place de tels outils et un système d’alerte précoce qui permette d’agir à temps, avant que les situations ne deviennent des crises plus difficiles à régler. 

M. GIORGOS GERAPETRITIS, Ministre des affaires étrangères de la Grèce, a constaté que la crise climatique menace non seulement la sécurité alimentaire mais aussi la stabilité et la cohésion sociale, et ce, partout dans le monde.  À ses yeux, la mer Méditerranée, « carrefour de trois continents », offre un bon exemple de l’interaction et des retombées de ces phénomènes.  Notant que la température annuelle de cette mer est supérieure de 1,54 °C aux niveaux d’avant 1990 et d’environ 0,4 °C au réchauffement moyen de la planète, il a rappelé que le bassin méditerranéen est devenu ces dernières années le « point chaud » de la crise climatique, avec de vastes incendies de forêt et des inondations catastrophiques, sans oublier l’élévation du niveau de la mer, qui met en danger la quantité et la qualité de la pêche, et par conséquent la santé et les moyens de subsistance des populations. 

À ce propos, le Ministre a indiqué que le réchauffement climatique, l’économie verte et la réduction de la pollution par les microplastiques seront à l’ordre du jour de la neuvième Conférence « Notre océan », que son pays organisera les 16 et 17 avril prochains.  Cette conférence constituera un pont entre la COP28 et la Conférence des Nations Unies sur les océans de 2025, a-t-il affirmé, ajoutant que la Grèce portera ces questions dans sa candidature à un siège non permanent au Conseil de sécurité pour la période 2025-26.  Dans l’immédiat, il faut un état d’esprit différent en matière de protection de l’environnement et de sécurité alimentaire, a poursuivi le Ministre, avant d’appeler à une alliance universelle pour la durabilité et à la nomination d’un envoyé spécial des Nations Unies pour un avenir durable. 

M. SIHASAK PHUANGKETKEOW, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Thaïlande, a déploré que des décennies de progrès en matière de développement aient été annulées du fait des inégalités, des tensions géopolitiques croissantes et des effets des phénomènes météorologiques dévastateurs sur la sécurité alimentaire.  Pour remédier à cette situation, il a appelé à veiller à ce que les institutions et les politiques publiques correspondent aux besoins et aux attentes de la population. En tant que multiplicateur de menaces qui ne respecte aucune frontière, en particulier pour les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID), la lutte contre les changements climatiques doit s’appuyer, selon lui, sur la solidarité internationale.  Les pays en développement ont besoin d’un soutien accru pour renforcer leur capacité d’adaptation et de résilience face aux effets néfastes des changements climatiques, a-t-il insisté. 

M. Phuangketkeow a donc appelé les pays développés à respecter leurs engagements de fournir 100 milliards de dollars par an aux pays en développement et de doubler le financement de l’adaptation.  « Il s’agit non seulement d’un investissement dans l’avenir de la planète, mais également dans la sécurité humaine », a-t-il ajouté. Ces défis étant interconnectés, il a prôné des approches centrées sur les personnes et sur la planète.  Le multilatéralisme et la coopération internationale sont les solutions les plus viables pour relever ces défis, a-t-il dit. 

Mme BJØRG SANDKJÆR, Secrétaire d’État au développement international de la Norvège, a estimé que les défis mondiaux de la sécurité alimentaire, des changements climatiques et des conflits ne peuvent être traités que par des actions spécifiques multilatérales, ce qui en fait un sujet très pertinent pour le Conseil de sécurité.  Citant la résolution 2417 (2018), elle a rappelé l’obligation de ne pas attaquer les civils ou les biens civils nécessaires à la production alimentaire. La responsabilité principale du Conseil de sécurité est de faire respecter la paix et la sécurité, a-t-elle rappelé, ce qui veut dire que la prévention des conflits doit être au centre de ses efforts.  De leur côté, les pays doivent individuellement redoubler d’efforts pour parer aux effets négatifs des changements climatiques ainsi que pour prévenir et résoudre les conflits, en vue de réduire les risques d’insécurité alimentaire. 

Parmi les mesures préventives nécessaires, la Secrétaire d’État a demandé d’utiliser les moyens d’atténuation et d’adaptation, tout en renforçant l’alerte rapide et l’action précoce.  Elle a soutenu à cet égard l’initiative « Alertes précoces pour tous » du Secrétaire général et l’appel à un accès universel aux systèmes d’information sur le climat.  Elle a ensuite appelé à accélérer le développement agricole résilient aux changements climatiques et à renforcer les chaînes de valeur du secteur alimentaire local.  Il faut augmenter le financement climatique pour développer l’agriculture durable et renforcer la sécurité alimentaire aux niveau national et mondial, a encore recommandé la Secrétaire d’État en se félicitant de la tenue prochaine, à Nairobi en mai, du Sommet africain sur les engrais et la santé des sols.  Enfin, elle a mis l’accent sur l’importance cruciale de l’autonomisation des femmes dans l’instauration de la sécurité alimentaire, avant de recommander de mieux intégrer l’aide humanitaire et l’aide au développement à long terme pour stopper les tendances négatives de la faim et la pauvreté.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), le représentant de la Jamaïque a rappelé l’importance de limiter la hausse des températures à 1,5 °C. L’augmentation du financement climatique est une autre mesure concrète permettant d’aider les pays vulnérables à s’adapter aux changements climatiques, a-t-il dit.  Il a pris l’exemple d’Haïti pour illustrer les liens entre changements climatiques, insécurité alimentaire et conflit.  Ce pays est en proie à une crise multidimensionnelle qui a abouti à un niveau d’insécurité alimentaire parmi les plus élevés au monde.  Il ne peut pas y avoir de paix quand les gens ont faim, a-t-il dit, en demandant l’inclusion des risques climatiques dans les mandats des opérations de paix onusiennes et souhaité la nomination en leur sein de conseillers climat, paix et sécurité.

En sa capacité nationale, le représentant a indiqué que son pays a recours aux technologies pour augmenter la productivité agricole.  Il a détaillé la stratégie nationale, intitulée « le nouveau visage des denrées alimentaires », qui vise notamment à renforcer la sécurité alimentaire, à promouvoir le développement agroalimentaire, à s’adapter aux changements climatiques et à accroître les exportations.  Il a expliqué que cette stratégie a été élaborée en réponse à la grave insécurité alimentaire qui a sévi dans les Caraïbes au moment de la pandémie de COVID-19.  Entre 2021 et 2923, 2,8 millions de personnes sur les 3,7 que comptent les Caraïbes anglophones étaient en insécurité alimentaire, a-t-il rappelé.  Enfin, il a souligné l’importance d’une bonne cohérence entre la riposte aux changements climatiques, la prévention des conflits et le maintien de la paix.

Pour le représentant de l’Égypte, la crise de l’insécurité alimentaire est le résultat de notre incapacité à réaliser le deuxième objectif de développement durable. Cette crise doit être abordée dans une approche globale et holistique utilisant les différentes plateformes et organes des Nations Unies, notamment l’Assemblée générale, le Conseil économique et social (ECOSOC), la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris sur le climat.  Ce faisant, il faut donner la priorité aux pays en situation de conflit et aux pays en développement importateurs nets de produits alimentaires.  Les Nations Unies doivent contribuer à la création de capacités d’alerte rapide pour surveiller les régions les plus vulnérables à une famine causée par un conflit. Les financements concessionnels doivent aussi avoir rang de priorité.

L’Égypte, a rappelé le représentant, est le pays au monde le plus densément peuplé et le plus pauvre en eau.  Il a plaidé pour une coopération transfrontalière dans les domaines de l’accès à l’eau et de l’agriculture, avant d’indiquer que la présidence égyptienne de la COP27 a lancé deux initiatives: l’une pour une transformation durable de l’alimentation et de l’agriculture et l’autre pour des réponses climatiques en faveur de la pérennisation de la paix.  Ces initiatives ont pour objectif de faire face aux multiples dimensions des effets des changements climatiques tout en mettant l’accent sur la sécurité alimentaire et le maintien de la paix.

La représentante de l’Ukraine a dit avoir toujours promu les mesures concertées pour faire face aux changements climatiques et atténuer leurs effets sur les conflits.  Elle a rappelé qu’en décembre 2021, l’Ukraine avait fait partie des 113 États Membres coauteurs d’un projet de résolution thématique du Conseil de sécurité sur les incidences sécuritaires des changements climatiques, regrettant que ce texte n’ait pu être adopté à cause du veto de la Russie.  En tant que membre du Groupe des Amis du climat et de la sécurité, elle a dit que son pays comprend très bien la nécessité de renforcer le multilatéralisme pour promouvoir les liens entre climat, paix et sécurité.  La sécurité alimentaire est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-elle insisté. 

Ces dernières années, a-t-elle poursuivi, l’Ukraine a été un important contributeur à la sécurité alimentaire du monde.  Après le retrait de la Russie de l’Initiative de la mer Noire en juillet 2023, l’Ukraine a créé des itinéraires alternatifs temporaires pour les navires civils vers les ports ukrainiens de la mer Noire, créant ainsi un nouveau couloir humanitaire de céréales par lequel 700 vaisseaux ont pu passer, avec des cargaisons composées à 70% de produits agricoles ukrainiens.  La fin de la guerre renforcerait le transport des biens ukrainiens vers le marché du monde, a-t-elle fait valoir tout en déplorant l’attitude agressive et coloniale de la Russie qui a mis à mal la capacité collective à faire face aux menaces mondiales.  Elle a conclu en appuyant les initiatives visant à gérer les effets des changements climatiques, notamment au sein du Conseil de sécurité, de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC.

Le représentant de la Jordanie a appelé le Conseil de sécurité à adopter une démarche globale pour rompre le cycle liant l’insécurité alimentaire, les changements climatiques et la paix et la sécurité internationales.  Ce cercle vicieux aggrave les tensions sociales et alimente les conflits internes, a-t-il constaté, ajoutant que les groupes terroristes profitent de l’incapacité des États à contrôler leur territoire pour propager leur propagande extrémiste et menacer la paix et la sécurité.  Pour permettre le règlement des conflits et la consolidation de la paix, le Conseil doit selon lui adapter l’action climatique à son mandat. 

Rappelant que les conflits, l’insécurité alimentaire et les changements climatiques sont les principaux facteurs de migration dans le monde et au Moyen-Orient, le représentant a signalé le fait qu’un tiers de la population de son pays est composé de réfugiés.  La Jordanie fait tout son possible pour leur permettre de mener une vie digne malgré le niveau sans précédent des besoins, a-t-il assuré, avant d’exhorter la communauté internationale à assumer ses responsabilités à l’égard de ces populations et des communautés hôtes.  Les changements climatiques ont aussi des conséquences négatives sur l’accès à l’eau et à la nourriture, a ajouté le représentant, dénonçant le contrôle par Israël des ressources en eau dans les territoires palestiniens occupés et la politique de famine menée à Gaza depuis le 7 octobre dernier.  À cet égard, il a invité les États Membres qui ont suspendu leurs contributions à l’UNRWA à les reprendre de toute urgence. 

Le représentant de Singapour, notant que l’insécurité alimentaire est une source de tensions et de conflits, a demandé une action urgente et collective pour relever ces défis à commencer par la tenue des engagements climatiques.  Il a prôné des mesures décisives pour maintenir l’objectif de 1,5 °C et atténuer le risque croissant d’insécurité climatique, invitant aussi à mener une transition juste et inclusive par le biais de solutions à faible émission de carbone et des financements climatiques. Le délégué a appelé à garder les chaînes d’approvisionnement mondiales libres et ouvertes, ce qui est essentiel au maintien de la sécurité alimentaire.  Le système commercial multilatéral doit être fondé sur des règles, a-t-il rappelé en promouvant la libre circulation des denrées alimentaires et des produits agricoles et en demandant de s’abstenir d’imposer des interdictions ou des restrictions à l’exportation d’une manière incompatible avec les dispositions pertinentes de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il ne faut pas politiser ou instrumentaliser la sécurité alimentaire, a ajouté le représentant. 

Le délégué a aussi demandé le renforcement de la résilience climatique et alimentaire mondiale grâce à la collaboration internationale, au partage des connaissances et à l’apprentissage mutuel, la technologie et l’innovation.  Il a jugé essentiel de renforcer les capacités mondiales en matière de technologie agricole, de production alimentaire urbaine et d’aliments du futur pour renforcer la résilience.  Singapour, a indiqué le délégué, développe l’agriculture verticale à climat contrôlé afin d’atténuer les défis de la production alimentaire pour les pays où les terres sont rares.  Le mois dernier, le Centre de recherches sur le climat de Singapour a publié des projections à haute résolution des changements climatiques pour l’Asie du Sud-Est qui sont utiles pour la planification de l’adaptation, ainsi que pour la sécurité alimentaire. 

La représentante du Portugal a souligné les conséquences négatives de l’invasion russe de l’Ukraine pour les marchés mondiaux, au détriment des pays les moins développés.  Elle a encouragé le Conseil à jouer un rôle proactif et à inclure dans les mandats des opérations onusiennes une évaluation des risques sécuritaires liés au climat. Elle a également plaidé pour une coopération plus étroite entre le Conseil, la Commission de consolidation de la paix et le Conseil économique et social (ECOSOC).  Enfin, elle a appelé à profiter du prochain Sommet de l’avenir pour renouveler l’engagement collectif en faveur du multilatéralisme et de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Le représentant du Canada, intervenant au nom du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti du Conseil économique et social, a indiqué que les catastrophes naturelles associées aux effets néfastes des changements climatiques risquent d’exacerber l’insécurité alimentaire, la pénurie d’eau et les instabilités existantes en Haïti.  Il a jugé urgent de renforcer la résilience en Haïti, appelant à intensifier les efforts pour soutenir le Plan de réponse humanitaire 2024 pour Haïti.  Il a également souligné que le pays a besoin d’investissements et de financements pour améliorer la production alimentaire locale et renforcer la résilience des systèmes agroalimentaires aux chocs liés au climat, à l’agronomie, à l’économie et aux conflits.

De même, le représentant a plaidé en faveur de mesures de préparation, de réduction des risques de catastrophe et d’adaptation au climat afin d’accroître la résilience d’Haïti aux effets perturbateurs des catastrophes et des changements climatiques. Haïti a aussi besoin d’un soutien urgent pour rétablir la sécurité, notamment par le biais de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS).  Une stratégie globale et durable à long terme, dirigée et contrôlée par Haïti, est également nécessaire pour lutter contre les facteurs de violence.

Le représentant du Maroc a déclaré que résoudre la crise alimentaire est un impératif de sécurité en particulier pour les pays en développement et les pays touchés par les conflits.  Le représentant a demandé au Conseil de sécurité de prendre en compte les effets grandissants des changements climatiques dans ses travaux.  Il a appelé à protéger les ressources en eau, les sols et les terres arables.  L’action climatique nécessite des financements, a martelé le délégué insistant sur l’importance de financer le fonds pour les pertes et les préjudices. Le Maroc, a informé le représentant, apporte son soutien technique en Afrique notamment dans le bassin du Congo. Il déploie un programme d’aide à la petite agriculture africaine dont le financement attire de plus en plus de sponsors. Le délégué a conclu en plaidant pour le renforcement de la coopération internationale pour combattre la faim dans le monde. 

Le représentant du Mexique a fait remarquer que le mois de janvier 2024 a été le plus chaud depuis que des mesures sont relevées.  La hausse des températures mondiales et du niveau de la mer entraîne davantage de sécheresses, d’inondations, de cyclones et d’incendies, compte tenu des changements climatiques qui font pression sur les systèmes alimentaires.  Ces phénomènes, a-t-il dit, alimentent les conflits là où les institutions sont faibles et où des groupes rivaux se disputent des ressources de plus en plus rares. De fait, a souligné le représentant, les missions de maintien et de consolidation de la paix doivent tenir compte de ces circonstances afin de briser le cercle vicieux des pénuries, des problèmes de gouvernance et des conflits. 

Dans cet esprit, il a exhorté le Conseil de sécurité à rechercher un consensus pour élaborer des réponses ayant un impact tangible et immédiat, au-delà de la rhétorique. Il a jugé essentiel de procéder à des analyses complètes des risques, souhaitant que ces instruments soient intégrés en permanence aux mandats des missions de paix et des bureaux régionaux. Ces outils contribuent à identifier des objectifs concrets d’atténuation et d’adaptation pour progresser vers une paix stable, a-t-il insisté, avant d’inviter le Conseil à veiller à ce que les mandats qu’il confère prévoient les capacités nécessaires pour anticiper, atténuer et traiter le nexus complexe entre conflits, effets négatifs des changements climatiques et crise alimentaire. 

Le représentant de la République arabe syrienne a rappelé le tremblement de terre qui avait frappé son pays il y a un an et qui avait fait des milliers de victimes et détruit des infrastructures, en assurant que son gouvernement avait fourni secours et soutien aux sinistrés.  Il avait en outre donné l’autorisation d’utiliser trois points de passage transfrontaliers pour que l’aide humanitaire parvienne aux civils.  Mais, a-t-il déploré, les mesures coercitives unilatérales imposées au peuple syrien par les États-Unis et l’Union européenne ont empêché de fournir les machines et équipements médicaux.  Poursuivant, il a expliqué comment la Syrie fait face aux conséquences des changements climatiques, avec une baisse des précipitations, une sécheresse et des tempêtes de poussière. 

Le délégué a dénoncé la « guerre terroriste » menée contre son pays ces dernières années, qui a des effets délétères sur le plan environnemental, avec notamment des puits de pétrole bombardés et des terres agricoles brûlées.  Il a aussi dénoncé les agissements de la Türkiye qui a fait baisser le cours de l’Euphrate et donc son débit, ayant un impact sur plus de 5 millions de Syriens.  En outre, a-t-il ajouté, la poursuite de l’occupation israélienne, du Golan notamment, a un impact sur l’environnement, des arbres fruitiers étant abattus par exemple. Le représentant a plaidé pour que les États développés assument leurs obligations en matière d’atténuation des effets néfastes des changements climatiques, et mettent en place des mécanismes de financement concessionnel ainsi que des réseaux d’alerte précoce, entre autres.  Il a insisté sur la levée des mesures coercitives unilatérales qui empêchent d’utiliser des appuis techniques et des subventions octroyées aux pays en développement.

Le représentant de l’Afrique du Sud a indiqué que la famine devient une réalité en raison de l’expansion des opérations militaires.  Il a en effet mentionné la poursuite de l’offensive israélienne à Rafah, en dépit de la récente décision de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Les belligérants ont l’obligation de respecter le droit international humanitaire, a martelé le délégué, en condamnant le fait de faire de l’affamement une tactique de guerre.  Il a insisté sur la vulnérabilité de l’Afrique face aux changements climatiques et appelé à une réponse collective.  Enfin, il a invité le Conseil à participer à la sensibilisation de l’opinion sur les enjeux climatiques, tout en réfutant l’existence d’un lien direct entre changements climatiques et conflits.

Le représentant de la Tchéquie a souligné le lien « indéniable » qui existe entre les changements climatiques et la paix et la sécurité internationales. La hausse des températures et du niveau de la mer, la désertification, la pénurie d’eau, la perte de biodiversité et la pollution de l’environnement ne sont pas seulement des problèmes environnementaux, a-t-il noté, mais constituent également des menaces qui peuvent mener à des déplacements, des troubles sociaux et l’insécurité.  Bien que le lien entre les changements climatiques et la sécurité soit complexe et mal compris, nous devons selon lui écouter la voix de ceux qui sont les plus touchés.  La dégradation de l’environnement affecte déjà la sécurité alimentaire en réduisant les rendements des principales cultures et en augmentant le risque de mauvaises récoltes dans les principaux pays producteurs, a observé le délégué.  Qui plus est, a-t-il relevé, l’insécurité alimentaire est plus aiguë dans les pays touchés par des conflits et des catastrophes. 

Garantir la sécurité alimentaire mondiale exige donc une approche fondée sur le triple lien entre les activités humanitaires, de développement et de paix.  En tant que membre de la Coalition mondiale contre la faim et les conflits, la Tchéquie concentre ses activités sur la production alimentaire résiliente et la réhabilitation des terres agricoles, a fait savoir le représentant.  À ce titre, l’adaptation au climat et la réduction des risques de catastrophe sont une priorité à long terme de l’aide humanitaire et de l’aide au développement du pays. 

Le représentant de l’Indonésie s’est interrogé sur la capacité du Conseil à régler les crises alimentaires, les conflits et les guerres vu qu’il est paralysé face à l’utilisation de l’insécurité alimentaire comme arme de guerre, notamment à Gaza.  Il a appelé à réformer le Conseil à commencer par ses méthodes de travail afin de le rendre capable de travailler efficacement.  Il a réclamé des ressources et des mandats plus adaptés pour les opérations de maintien de la paix pour aider les communautés locales des pays hôtes à s’adapter aux effets des changements climatiques et de l’insécurité alimentaire sur la sécurité. 

Le délégué a ensuite appelé à forger des partenariats plus solides avec les organisations régionales et adopter une approche plus régionale pour aborder le lien entre le climat, l’alimentation et la paix et la sécurité.  Il est également essentiel de renforcer le rôle de la Commission de consolidation de la paix dans le renforcement de la résilience climatique et des capacités d’adaptation.

Le représentant de la Belgique, intervenant au nom des pays du Benelux, a déclaré que les liens entre changements climatiques, sécurité alimentaire et maintien de la paix et de la sécurité internationales sont « évidents ». Notant que l’intégration d’une approche de paix et de sécurité tenant compte du climat est devenue une nécessité, il a appuyé l’inclusion d’un libellé sur les changements climatiques dans les produits et mandats du Conseil de sécurité.  Il a également appelé à la publication régulière de rapports complets du Secrétaire général sur les questions liées au climat, à la paix et la sécurité, et à la sécurité alimentaire.  Cela permettrait au Conseil de sécurité de se concentrer sur les pays et les régions les plus touchés et d’agir.  Il a espéré qu’un consensus pourra être obtenu sur les suggestions présentées dans la note d’orientation du Secrétaire général sur le Nouvel Agenda pour la paix.

Le représentant du Liechtenstein a encouragé la communauté internationale, et en particulier le Conseil de sécurité, à aborder les liens entre le climat, les conflits et la faim dans la perspective de la sécurité humaine, qui reconnaît que la paix et la sécurité concernent les personnes, leur survie, leurs moyens de subsistance et leur dignité.  Nous pouvons commencer par répondre aux besoins immédiats des personnes touchées par la dégradation de l’environnement, les chocs climatiques et l’insécurité alimentaire dans le monde, notamment en augmentant le financement de l’aide d’urgence et de la gestion des risques climatiques.  Mais, afin de briser le cycle des conflits violents et de l’insécurité alimentaire, il faut aussi exhorter les parties aux conflits armés à protéger les systèmes alimentaires et à s’abstenir d’utiliser la nourriture comme arme de guerre, a-t-il ajouté, avertissant que si aucune mesure urgente n’est prise maintenant, le nombre annuel de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire en raison de la crise climatique risque de doubler d’ici à 2050.  Il a enfin indiqué que son pays est en train de finaliser sa demande d’avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les effets des changements climatiques, se disant convaincus que la CIJ fournira des orientations claires sur les questions relevant du droit international.

Le représentant de la Pologne a déclaré que les changements climatiques aggravent les risques de conflit et a appelé le Conseil de sécurité à analyser ces liens de manière systémique.  Il est regrettable qu’une poignée de pays continue d’entraver le consensus à cet égard, a-t-il ajouté.  Il a appelé à accorder la plus haute attention à l’insécurité alimentaire engendrée par le climat.  Les gouvernements et les organisations internationales doivent continuer de renforcer les systèmes alimentaires pour leur permettre de mieux résister aux événements météorologiques extrêmes et à la variabilité climatique.

La représentante du Guatemala a jugé urgent de lutter contre les « dangereux multiplicateurs de risques » que sont les changements climatiques et l’insécurité alimentaire.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à intégrer des évaluations de la sécurité climatique dans toutes les situations inscrites à son ordre du jour faisant l’objet de rapports.  Les systèmes d’alerte précoce, a-t-elle relevé, représentent une opportunité de fournir aux gouvernements et aux acteurs humanitaires des informations opportunes, fiables, exactes et vérifiables pour prévenir et atténuer les effets d’une crise alimentaire dans le contexte d’un conflit armé.  De leur côté, il est important que les gouvernements, en collaboration avec la société civile, développent et renforcent les compétences nécessaires pour établir et mettre en œuvre des stratégies nationales efficaces et coordonnées en matière de changements climatiques, a poursuivi la déléguée.  La mise en œuvre d’un vaste programme visant à renforcer les capacités institutionnelles d’adaptation aux changements climatiques serait souhaitable à cet égard, a-t-elle ajouté. 

Le représentant du Chili a souligné l’importance de la coopération multilatérale pour apporter des réponses coordonnées aux graves crises alimentaire, climatique et humanitaire entraînées par les conflits.  Il a jugé essentiel pour la communauté internationale d’accélérer les innovations, de renforcer la production d’aliments dans les zones en proie aux changements climatiques, et de disposer d’informations ventilées par sexe et par âge dans les rapports d’analyse de la situation par pays où il existe un risque de famine et d’insécurité alimentaire dans les contextes de conflit armé.  Il a également insisté sur l’importance des financements climatiques pour les pays en développement.  Il a aussi dénoncé la fermeture des marchés, l’imposition de barrières injustifiées ou de mesures coercitives unilatérales sur le commerce des denrées alimentaires.

La représentante de la Bulgarie a relevé que les changements climatiques affectent la concurrence pour les ressources naturelles, en particulier pour l’eau et les terres agricoles, avec le potentiel de déclencher ou d’exacerber des conflits.  À cet égard, l’agriculture constitue à ses yeux le carrefour où les changements climatiques, l’insécurité alimentaire et les conflits violents se rencontrent et s’influencent mutuellement.  Il incombe, selon elle, au Conseil de sécurité de se montrer à la hauteur de sa tâche et s’y attaquer de manière globale.  Alors que la liste des « points chauds de la faim » continue de s’allonger, nous devons nous rappeler que ceux-ci provoquent la faim et affectent les moyens de subsistance de millions de personnes dans le monde. La protection des personnes les plus vulnérables à l’insécurité alimentaire doit donc être une priorité de la communauté internationale, a noté la représentante, avant de demander la mise en œuvre de la résolution 2417 (2018) du Conseil et le respect du droit international humanitaire.

Le représentant des Philippines a expliqué que, dans son pays, la résilience climatique et la sécurité alimentaire sont des priorités du développement.  Rien qu’en 2023, les Philippines ont annulé des prêts de plus d’un milliard de dollars pour plus de 600 000 petits agriculteurs, conformément aux efforts visant à démocratiser l’accès à la terre et l’agriculture.  En outre, un plan d’action national sur les changements climatiques a été adopté, lequel accorde la priorité, entre autres, à la sécurité alimentaire, à l’autosuffisance en eau et à la stabilité écologique et environnementale, jusqu’en 2028. Dans le cadre de son processus de paix dans la région autonome de Bangsamoro, dans le Mindanao musulman, le Gouvernement philippin a lancé des programmes socioéconomiques pour répondre aux besoins des Forces armées islamiques de Bangsamoro, des personnes déplacées et des communautés frappées par la pauvreté.  Enfin, le délégué a attiré l’attention sur le programme municipal « Des armes aux fermes », qui utilise l’agriculture biologique comme outil pour réintégrer les anciens combattants du Front Moro islamique de libération. 

Le représentant de l’Italie a noté que les changements climatiques, l’insécurité alimentaire, la paix et la sécurité sont de plus en plus interconnectés, et a estimé que le Conseil a toute compétence pour traiter de ces interconnexions croissantes.  Il a relevé que si le Conseil de sécurité se montre divisé sur la manière d’aborder le lien entre changements climatiques et sécurité, il est plus uni sur la nécessité de briser le cercle vicieux entre conflit armé et insécurité alimentaire. Il a donc appelé le Conseil de sécurité à s’attaquer rapidement aux trop nombreux cas inacceptables de « militarisation de la sécurité alimentaire ».

La représentante de l’Espagne a mis en avant la stratégie de diplomatie humanitaire de son pays, qui préconise notamment d’inclure les considérations climatiques dans les mécanismes d’alerte précoce.  Elle a également rappelé l’engagement de l’Espagne à soutenir le suivi et l’application de la résolution 2417 (2018) du Conseil de sécurité, avant d’encourager les mandats des opérations et missions de paix et de sécurité à intégrer une approche climatique.  Notant à cet égard que le Conseil a inclus des considérations climatiques dans ses résolutions depuis 2017, elle a plaidé pour une approche plus systématique, comme celle proposée par la résolution infructueuse sur les conséquences sécuritaires des changements climatiques en 2021. L’Espagne était l’un des 113 États Membres qui ont coparrainé ce projet et ont été déçus par le veto d’un des membres permanents, a-t-elle indiqué.  À ses yeux, il importe de faire davantage que de livrer de l’aide humanitaire, en s’attaquant aux causes profondes des conflits pour mieux les prévenir. À cette fin, elle a appelé à la nomination d’un envoyé spécial pour le climat, la paix et la sécurité, et à la mise en œuvre de systèmes d’alerte précoce. 

Le représentant du Pakistan a rappelé que son pays est bien placé pour parler des conséquences des changements climatiques, après les inondations dévastatrices de 2022 qui ont provoqué des dégâts évalués à plus de 13 milliards de dollars.  Il est donc urgent d’agir pour préserver les glaciers himalayens et de s’adapter aux effets du réchauffement de la planète.  Le délégué a annoncé l’intention de son gouvernement de revitaliser le bassin du fleuve Indus, dont dépend la sécurité alimentaire de plus de 225 millions de personnes.  Il a demandé que les financements déjà insuffisants pour l’action climatique et environnementale ne soient pas réaffectés aux questions sécuritaires. Pour le représentant, la pénurie alimentaire est la mère de la plupart des conflits et le meilleur moyen de les prévenir, c’est de réaliser le développement durable.

Le représentant du Vanuatu, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a souligné les conséquences « cruelles » des changements climatiques pour ces pays.  Le lien entre les changements climatiques et la sécurité collective ne peut plus être ignoré, a-t-il dit, en appelant le Conseil à évaluer les incidences sécuritaires des changements climatiques.  Il a réclamé la nomination d’un représentant spécial pour le climat, la paix et la sécurité afin de renforcer la coordination face aux risques sécuritaires liés au climat.  Ces risques ne peuvent plus être ignorés ou minimisés, a conclu le délégué, en demandant une réponse « rapide et approfondie » du Conseil.

Le représentant du Kazakhstan a appelé le système des Nations Unies, les gouvernements, les organisations internationales et régionales, les institutions financières internationales et les banques multilatérales à rechercher de nouvelles approches proactives pour assurer une production alimentaire suffisante et résiliente.  Pendant les conflits, il faut en outre empêcher la rupture des chaînes d’approvisionnement, la flambée des dépenses alimentaires, l’occupation et la contamination des terres agricoles et des sources d’eau, ou leur coupure délibérée, ainsi que la destruction et le vol des récoltes et du bétail.

Poursuivant, le délégué a mis en avant la capacité de la recherche, de l’analyse des données et des nouvelles technologies à rendre les systèmes alimentaires et les cultures plus durables, efficaces et résilients au climat.  Il a également insisté sur l’importance de la coopération Sud-Sud, Nord-Sud et triangulaire dans la collecte de fonds pour le renforcement des capacités, entre autres.  L’agenda climatique ne doit pas être utilisé pour introduire des mesures restreignant la coopération en matière de commerce et d’investissement, a-t-il ajouté.  Il a ensuite souligné que la sécurité hydrique en Asie centrale ne peut être assurée que grâce à une coopération étroite et à des mesures conjointes efficaces.

Au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), le représentant de la Mauritanie a souligné les liens bien établis entre changements climatiques et insécurité alimentaire.  L’OCI, a-t-il dit, partage évidemment les objectifs de cette réunion. Il a demandé une meilleure coordination entre l’ONU et les organisations régionales et indiqué que l’atténuation des effets des changements climatiques est une priorité de l’OCI.  Le représentant a détaillé l’action de son organisation face à l’insécurité alimentaire, avant de saluer celle de l’ONU pour la préservation des écosystèmes dans le monde.  Il a conclu en saluant la création récente du fonds pour les pertes et les préjudices et en soulignant la gravité du stress hydrique pour de nombreux pays de l’OCI.

La représentante du Cambodge a rappelé que son pays compte parmi les plus vulnérables aux effets délétères des changements climatiques.  Cette année, alors que la température devrait être plus élevée que les années précédentes, le Gouvernement a déconseillé aux agriculteurs de planter du riz pendant la saison sèche pour éviter d’épuiser les ressources en eau.  Ce n’est qu’avec une forte volonté politique que nous pourrons prévenir l’effet domino désastreux des changements climatiques et l’impact de l’insécurité alimentaire sur la paix et la sécurité internationales, a-t-elle estimé.  À cet égard, la représentante a considéré que chaque nation doit assumer sa juste part de responsabilité.  C’est la raison pour laquelle le Cambodge s’est fixé l’objectif ambitieux de réduire de 41,7% les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030.  Pour y parvenir cependant, a-t-elle prévenu, notre pays aura besoin de financements innovants et d’une coopération et de partenariats internationaux renforcés, notamment avec le secteur privé.  L’ONU, et en particulier le Conseil de sécurité, peut utiliser son immense pouvoir de mobilisation pour briser le cercle vicieux des changements climatiques, de l’insécurité alimentaire et de la paix et de la sécurité internationales, a encouragé la déléguée en conclusion.

Le représentant de l’Union européenne (UE) a noté que les risques posés par les changements climatiques et la dégradation de l’environnement pour le développement, la stabilité sociale ainsi que la paix et la sécurité internationales sont clairs.  Chacun sait qu’ils alimentent un « cercle vicieux », l’instabilité et les conflits entraînant davantage d’insécurité alimentaire et de faim. Identifier le problème ne constitue toutefois qu’une partie de la solution, a-t-il dit, mettant en exergue la mobilisation de l’UE sur ces questions, avec une intensification de son aide humanitaire et alimentaire immédiate aux populations en situation vulnérable à l’échelle mondiale, pour un montant de 5 milliards d’euros entre 2021 et 2024.  Mais s’il importe d’augmenter les financements pour répondre aux besoins croissants, cela ne suffira pas.  Nous avons besoin de passer d’approches réactives à des approches proactives, a souligné le représentant.

Invitant la communauté internationale à se concentrer sur des régions particulièrement exposées, comme le Sahel et la Corne de l’Afrique, il a également souligné l’importance d’un soutien financier pour l’adaptation et la résilience climatiques, en particulier dans les contextes fragiles et déchirés par la guerre. L’UE a déjà établi un partenariat avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) sur l’analyse et les actions préventives visant à faire face aux risques de conflit et de fragilité dans des pays pilotes tels que le Népal et le Soudan, a relevé le représentant.  Il a ajouté que, parallèlement, des projets sont déployés en Afrique, en Asie centrale et en Amérique latine, dans le cadre de l’initiative européenne « Global Gateway », afin de réduire les écarts mondiaux en matière de développement vert, numérique, humain et social.

Le représentant de l’Autriche a constaté que l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité constitue l’un des risques sécuritaires les plus graves. Il est donc évident que le Conseil de sécurité se penche sur le lien entre climat et sécurité.  Alors que la science montre clairement que les catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes sont la conséquence des changements climatiques et qu’elles aggravent l’insécurité alimentaire, il a averti que la survie humaine est en jeu.  Il faut agir rapidement, d’autant plus que ces phénomènes nuisent à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et entravent les opérations de paix de l’ONU.  Appelant au renforcement des capacités des Nations Unies sur ces questions, le représentant a notamment estimé que les missions onusiennes devraient avoir les ressources nécessaires pour mener à bien le mandat climatique. 

Il a d’autre part relevé que le renforcement des capacités d’analyse et des systèmes d’alerte précoce dans toutes les régions du monde est important non seulement pour le travail du Conseil mais aussi pour les efforts de consolidation de la paix. Après s’être prononcé pour la nomination d’un envoyé spécial pour le climat et la sécurité, il a souhaité que la communauté internationale se penche sur les aspects juridiques, en particulier pour s’assurer du respect des obligations des États concernant la protection du système environnemental et climatique.  Il a enfin souhaité que les changements climatiques soient traités aux niveaux international, transnational et interrégional, et que l’ONU renforce ses partenariats avec les organisations régionales pour mieux traiter de ces questions. 

Le représentant de l’Allemagne a rappelé que le Conseil a reconnu la nécessité de « briser le cercle vicieux entre les conflits armés et l’insécurité alimentaire » avec la résolution 2417 (2018).  Il a signalé que la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a provoqué une grave flambée de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition dans diverses régions du monde, avant de proposer une stratégie globale dans le domaine du climat et de la sécurité alimentaire.  D’abord, a-t-il détaillé, il faut rendre l’agriculture et les systèmes alimentaires plus durables et plus résilients. 

Deuxièmement, a poursuivi le représentant, il faut recourir de manière plus systématique aux systèmes d’alerte précoce et à des analyses de risques complètes et intersectorielles pour mieux anticiper et prévenir.  Pour ce faire, le partage des données et l’interopérabilité des systèmes de collecte de données sont essentiels.  Enfin, il faut investir dans l’action anticipative afin de réduire les besoins humanitaires à moyen et long terme jusqu’à 70%.  Après avoir indiqué que le Gouvernement fédéral allemand continuera d’investir au moins 5% de son budget humanitaire dans l’action anticipative, le représentant a dit être favorable à un échange approfondi entre le Conseil et la Commission de consolidation de la paix et d’autres organes compétents du système des Nations Unies sur ce thème. 

La représentante de l’Inde a dit que son pays est un ardent partisan de la justice climatique.  Mon pays, a-t-elle tout de même tenu à dire, n’est pas convaincu de l’opportunité de discuter de cette question en dehors de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.  Elle a appelé au renforcement des capacités des pays en développement pour les aider à faire face à l’insécurité alimentaire.  Elle a détaillé les efforts de l’Inde au sein du G20 pour renforcer la sécurité alimentaire dans le monde.  La présidence indienne du G20, a-t-elle précisé, a élaboré un pacte vert pour un avenir plus durable, une transition environnementale juste et un bon financement de l’action climatique.  Enfin, elle a mentionné l’aide alimentaire apportée par son pays à l’Afghanistan, au Myanmar et à la Palestine parce que « le monde est une grande famille ».

Le représentant de la Türkiye a souligné l’importance de la coopération pour faire face aux défis de l’insécurité alimentaire provoquée par les changements climatiques.  Le délégué a plaidé pour que les pays qui ne sont pas responsables des changements climatiques reçoivent l’aide qui leur est nécessaire.  De leur côté, les pays développés doivent accepter la clause de responsabilité commune et partagée, a-t-il ajouté.  Le représentant a fait remarquer que les défis climatiques ne sont pas les seules causes de conflit, avant d’annoncer que son pays était candidat à l’organisation de la COP de 2026.  Pour résoudre le problème de l’insécurité alimentaire, il faut des chaînes d’approvisionnement solides, a-t-il prôné rappelant le rôle de son gouvernement dans l’élaboration de l’Initiative de la mer Noire. 

Le représentant a condamné l’utilisation de la famine comme arme de guerre comme à Gaza, au Yémen ou en Afrique.  Il a attiré l’attention sur la situation en Syrie où des millions de personnes ont reçu l’aide de la Türkiye.  Il a aussi déploré que certains donateurs aient suspendu leur financement de l’UNRWA. Le représentant a souligné l’importance de la coopération entre les pays en amont pour aider les pays en aval souffrant de déficit hydrique.  Revenant sur la guerre à Gaza, il a attiré l’attention sur les risques de famine. Le Conseil doit écouter le cri du cœur de la communauté internationale face à la situation à Gaza où il doit garantir un cessez-le-feu et prévenir les déplacement forcés de populations, a-t-il exhorté. 

Le représentant des États fédérés de Micronésie a témoigné de l’impact désastreux et immédiat que subissent les îles du fait des changements climatiques, notamment l’inondation des côtes, un phénomène devenu la nouvelle norme pour les États insulaires. En raison de l’intrusion de l’eau salée, les aquifères deviennent inutilisables, ce qui menace notre sécurité alimentaire, a-t-il expliqué.  Notant d’autre part que l’une des principales ressources alimentaires de la Micronésie provient de sa pêche, il a rappelé qu’en 2021, les dirigeants du Forum des îles du Pacifique ont déclaré que les droits liés aux zones maritimes micronésiennes continueront de s’appliquer, même en cas de changements découlant de l’élévation du niveau de la mer. 

Tout en saluant cette clarification juridique, il a reconnu que cela n’aura que peu d’effet si les stocks de poissons disparaissent à cause du réchauffement des océans.  En plus d’appeler à l’aide les pays développés, le représentant a souhaité que le Conseil de sécurité prenne en compte la manière dont les changements climatiques provoquent une insécurité alimentaire, qui à son tour menace de compromettre la sécurité en général.  Selon lui, il conviendrait de mettre en place un ensemble de solutions axées sur l’adaptation, l’atténuation et les réponses durables.  Il a ajouté que sa délégation continue de plaider en faveur de la nomination d’un représentant spécial pour le climat, la paix et la sécurité, y voyant un outil approprié. 

La représentante de Qatar a dénoncé l’agression israélienne à Gaza qui équivaut à un châtiment collectif et demandé un cessez-le-feu humanitaire immédiat. Elle a détaillé les efforts d’adaptation de son pays face aux changements climatiques, avant de mentionner l’appui du Qatar aux pays les moins avancés.  Le Qatar va apporter 100 millions de dollars pour aider les petits États insulaires en développement du Pacifique à s’adapter à de tels changements, a-t-elle précisé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’inventaire des accords de Minsk, demandé par la Fédération de Russie, polarise le Conseil de sécurité

9546e séance - matin
CS/15588

L’inventaire des accords de Minsk, demandé par la Fédération de Russie, polarise le Conseil de sécurité

À l’approche du deuxième anniversaire du début de la guerre d’Ukraine, le Conseil de sécurité s’est penché ce matin, à la demande de la Fédération de Russie, sur les accords de Minsk, signés en 2015, et entérinés la même année par la résolution 2202 (2015), adoptée à l’unanimité par le Conseil de sécurité.  La Russie y voit toujours la seule solution pour le règlement du conflit, alors que l’Ukraine et ses soutiens occidentaux les considèrent comme caducs. 

Se disant préoccupé par la trajectoire d’escalade de la guerre, le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a rappelé que les Nations Unies n’avaient participé officiellement à aucun mécanisme lié au processus de paix en Ukraine, tel que le format Normandie, réunissant l’Ukraine, la Russie, l’Allemagne et la France, qui a porté les accords de Minsk sur les fonts baptismaux. 

Invité par la Russie, un journaliste et activiste politique, s’exprimant depuis Donetsk, a déploré l’échec d’accords qui auraient dû ramener la paix, mais que la France et l’Allemagne, a affirmé M. Steve Sweeney, « n’avaient aucune intention de faire respecter ». 

Ces dernières ont répondu en affirmant que c’est la Russie qui avait, de 2015 à 2022, entravé leur mise en œuvre avant de « choisir d’y mettre fin, de façon unilatérale et par la force », selon les propos de la France, en reconnaissant l’indépendance des Républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk, et en envahissant l’Ukraine.  Sur la même ligne, l’Équateur a estimé que l’invasion russe avait « enterré » les accords de Minsk, le Japon déplorant pour sa part une tentative de la Russie de « justifier l’injustifiable ». 

De son côté, la Russie a dénoncé « le refus de Kiev » de mettre en œuvre les accords de Minsk, qui constituaient « la seule chance de ramener la paix en Ukraine ».  Accusant l’Ukraine d’imposer par la force sa volonté aux habitants du Donbass, la délégation russe a expliqué que les bombardements de civils obligeant 7 millions de personnes à trouver refuge en Russie avaient poussé Moscou à lancer une opération militaire spéciale en conformité avec l’Article 51 de la Charte des Nations Unies. 

Les États-Unis et le Royaume-Uni ont fustigé une tentative de réécrire l’histoire, les premiers affirmant que la Russie ne pouvait, malgré tous ses efforts, dissimuler le simple fait qu’elle était l’agresseur.  « Cette guerre est une tragédie dont la Russie est seule responsable », ont-ils martelé, ajoutant qu’elle avait envahi la Crimée et l’est de l’Ukraine en 2014. 

Estimant que les autres signataires des accords de Minsk essayaient de les appliquer en toute bonne foi, ils ont dénoncé une « obstruction systématique » de la Mission d’observation spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) de la part de la Russie qui, a accusé le Royaume-Uni, a systématiquement manqué à ses obligations dans le cadre des accords. 

« La décision de Putin de lancer son invasion illégale et barbare en février 2022 nous montre clairement qu’il n’a jamais été intéressé par la paix », a encore déploré la délégation britannique, un argument partagé par les États-Unis. 

À l’instar de plusieurs délégations, la France a appelé la Russie à entendre les appels répétés de l’Assemblée générale et ceux du 16 mars 2022 de la Cour internationale de Justice (CIJ).  L’Allemagne a également rappelé la décision de la CIJ du 2 février 2024, confirmant ses mesures conservatoires de mars 2022, imposant à la Russie l’obligation de suspendre immédiatement sa soi-disant opération militaire spéciale. 

Se référant elle aussi aux décisions de la CIJ, la Russie a affirmé que la Cour avait écarté les accusations de « Kiev » quant à un financement russe du terrorisme dans le Donbass.  La délégation a également déclaré que la CIJ n’avait pas fait droit à l’Ukraine dans le procès intenté contre la Russie sur l’utilisation abusive de la Convention sur le génocide pour justifier l’opération militaire spéciale.  C’est l’Ukraine qui siège sur le banc des accusés et qui doit prouver qu’elle n’a pas commis de génocide dans le Donbass, a-t-elle déclaré. L’Ukraine s’est opposée point par point à la présentation des décisions de la CIJ par la Russie, affirmant notamment que l’affaire liée à la Convention sur le génocide de 1948 progressait. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a estimé que l’anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, n’était pas seulement l’occasion d’évoquer les horreurs de ces deux dernières années, mais aussi de rappeler que le conflit armé dans l’est du pays avait commencé en 2014.  Assurant que les Nations Unies resteraient pleinement engagées en faveur de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, il a toutefois rappelé qu’elles n’avaient participé officiellement à aucun mécanisme lié au processus de paix en Ukraine, tel que le format Normandie. 

Le Sous-Secrétaire général a indiqué que l’ONU avait apporté son expertise à la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE) sur des questions spécifiques, notamment les femmes et la paix et la sécurité, et la surveillance du cessez-le-feu.  Se disant préoccupé par la trajectoire d’escalade de cette guerre, il a affirmé que les accords de paix ne suffisaient pas à mettre fin à la violence, et qu’ils devaient s’accompagner d’une action pour s’attaquer aux causes profondes du conflit. 

M. STEVE SWEENEY, journaliste et activiste politique, a indiqué qu’il s’exprime depuis la ville de Donetsk, d’où il peut entendre les tirs d’artillerie et les déflagrations, souvent celles « de missiles livrés par l’Occident ».  « Nous entendons ces bruits en raison des échecs des accords de Minsk. »  Ces accords auraient dû ramener la paix, a-t-il dit, en indiquant qu’ils avaient été difficiles « à vendre » à la population locale, mais que celle-ci les avait acceptés.  Il a déclaré que la France et l’Allemagne n’avaient aucune intention de faire respecter lesdits accords.  « Mais l’échec de Minsk est aussi votre échec », a-t-il lancé à l’adresse des membres du Conseil.  « Des nations désunies et un Conseil qui n’apporte aucune sécurité. »  Il a rappelé que, pour la population du Donbass, le conflit n’a pas commencé en février 2022 mais en 2014, lorsque le Gouvernement ukrainien a lancé des frappes aériennes contre son propre peuple à Lougansk et lorsque des « milices néo-nazies se sont mises à tuer en toute impunité ». 

Le journaliste a rappelé le lourd bilan des frappes aériennes, notamment l’attaque ayant frappé un marché il y a quelques semaines dans la région de Donetsk. Il a dit s’attendre à entendre les mêmes platitudes, selon lesquelles « la Russie est responsable des pertes, qu’elle est l’agresseur ».  Il a déclaré que si les morts n’ont plus de voix, les vivants oui.  « Les vivants n’ont pas peur de la Russie, en laquelle ils voient un protecteur contre un génocide potentiel, celui-là même que vous n’arrivez pas à stopper à Gaza. »  Ils ont peur de vous, les membres autour de cette table, qui continuez de livrer des armes à l’Ukraine, a-t-il estimé.  Enfin, il a longuement détaillé la situation critique dans la région et les graves conséquences des attaques ukrainiennes.  « Chaque arme que vous livrez nous éloigne davantage d’une solution pacifique à un conflit que vous ne pouvez tout simplement pas gagner. » 

Le représentant de la Fédération de Russie a tout d’abord jugé la déclaration de M. Miroslav Jenča truffée de lieux communs et creuse.  Il a ensuite expliqué que cette réunion a été convoquée pour dénoncer le refus de Kiev du règlement de la crise ukrainienne et des accords de Minsk.  Rappelant les 13 points de la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité du 6 juin 2018, le délégué a accusé l’Ukraine de ne pas avoir voulu mettre en œuvre les accords de Minsk, y compris la formule Steinmeier.  Aucun des sponsors occidentaux de Kiev ne l’a condamné pour ce refus.  Or, les accords de Minsk étaient la seule chance de ramener la paix en Ukraine, a-t-il relevé, en ajoutant qu’il faut aussi un dialogue entre Donetsk, Lougansk et Kiev.  Il a accusé Kiev d’imposer sa volonté aux habitants du Donbass, y compris par la force et la violence, alors que ceux-ci ne veulent que vivre en paix.  Le représentant a réitéré que les autorités de Kiev ne voulaient pas la mise en œuvre des accords de Minsk, rappelant leurs discours peu avant le début de l’opération militaire spéciale.  Ces déclarations ont été suivies des bombardements de civils dans le Donbass obligeant 7 millions de personnes à trouver refuge en Russie, a-t-il déclaré avant d’expliquer ainsi pourquoi, face à cette situation, la Russie avait décidé de lancer une opération militaire spéciale en conformité avec l’Article 51 de la Charte des Nations Unies. 

Poursuivant, le délégué a insisté sur le fait que la mise en œuvre des accords de Minsk est la seule et la meilleure solution pour le règlement du conflit ukrainien.  Par ailleurs, il a constaté l’échec du Conseil de sécurité en Ukraine, accusant les pays occidentaux d’être complices de la tragédie et responsables des conséquences du refus de l’Ukraine de ces accords.  Il a critiqué la procédure entamée par Kiev devant la Cour internationale de Justice (CIJ) contre la Russie sur le financement du terrorisme dans le Donbass, la discrimination des Tatars de Crimée et des Ukrainiens en Crimée, en rappelant la décision qui a écarté les accusations de terrorisme.  En outre, il a déclaré que la CIJ n’a pas reconnu la responsabilité de la Russie dans la destruction du vol MH-17, et qu’elle n’a pas fait droit à l’Ukraine dans le procès intenté contre la Russie sur l’utilisation abusive de la Convention sur le génocide pour justifier l’opération militaire spéciale.  Pour le représentant, c’est l’Ukraine qui siège sur le banc des accusés et qui devrait prouver qu’elle n’a pas commis de génocide dans le Donbass.

Le représentant des États-Unis a estimé que la Fédération de Russie essayait de réécrire l’histoire, et qu’elle ne pouvait, malgré tous ses efforts, dissimuler le simple fait qu’elle était l’agresseur.  « Cette guerre est une tragédie dont la Russie est seule responsable », a-t-il martelé, ajoutant qu’elle avait envahi la Crimée et l’est de l’Ukraine. Il a affirmé qu’elle avait participé directement aux négociations des accords de Minsk et les avait signés, avant que le Conseil de sécurité ne vote à l’unanimité leur mise en œuvre en 2015. Estimant que la Russie s’était livrée à une obstruction systématique de la mission d’observation spéciale de l’OSCE, il a ajouté que les autres signataires des accords de Minsk essayaient de les appliquer en toute bonne foi, leur objectif fondamental étant de restaurer l’intégrité territoriale de l’Ukraine. 

Il a rappelé que la Russie s’était ensuite livrée à une invasion à grande échelle de l’Ukraine en 2022, afin de la soumettre et de nier son identité, une agression condamnée de manière répétée par l’Assemblée générale.  « La paix n’intéresse pas la Russie et elle ne veut pas non plus respecter le droit international », a-t-il résumé.  Il l’a encore accusée d’avoir convoqué cette réunion pour pleurer les violences qu’elle avait elle-même lancées.  Le représentant a jugé que la Russie avait rendu les accords de Minsk caducs en envahissant l’Ukraine et en reconnaissant l’autonomie de territoires de l’est du pays.  Le délégué l’a appelé à retirer ses forces du territoire ukrainien et à mettre fin à cette « guerre brutale ».

Le représentant de l’Équateur a appelé au strict respect de la Charte des Nations Unies, en rejetant tout recours à la force contre la souveraineté d’un État.  Il a déclaré que l’invasion russe a « enterré » les accords de Minsk.  Il a regretté la tenue de cette réunion sur ces accords alors que la guerre se poursuit et que la situation humanitaire en Ukraine est critique.  Le délégué a demandé le respect du droit international humanitaire et encouragé les parties à renouer avec l’esprit de dialogue qui a présidé à l’élaboration des accords.  L’invasion de l’Ukraine doit cesser, a-t-il insisté. 

Le représentant de la Chine a dit que les accords de Minsk devraient être mis en œuvre par toutes les parties, exhortant celles-ci à répondre à l’appel à la paix lancé par la communauté internationale.  Il faut reprendre le dialogue et parvenir à la paix, a-t-il martelé.  Le délégué a encouragé à créer les conditions favorables à la résolution de la crise, notamment en cessant de jeter de l’huile sur le feu.  Il faut arrêter de saboter les efforts de règlement de ce conflit et prendre en compte, en les préservant, les intérêts de tous les pays, a exigé le délégué, qui a aussi insisté sur l’importance du dialogue.  Il a enfin appelé à prendre la bonne voie, respecter la Charte des Nations Unies, rétablir la confiance et éviter les lignes rouges idéologiques.

Le représentant de Malte a fustigé la « propagande cynique » de la Fédération de Russie qui, a-t-il dit, présente un récit qui ne reflète pas la réalité.  Il a rappelé que le 17 février 2022, la Russie, alors présidente du Conseil de sécurité, avait confirmé que l’ensemble des mesures de mise en œuvre des accords de Minsk constituait la seule base juridique internationale pour le règlement du conflit en Ukraine.  Il a ensuite dénoncé son invasion à grande échelle du pays et l’organisation de prétendus référendums, considérés comme illégaux par l’Assemblée générale, dans quatre régions ukrainiennes pour en justifier l’annexion. 

Le représentant a aussi rappelé que les accords de Minsk constituaient le seul format reconnu par tous pour trouver des solutions mutuellement acceptables, regrettant que l’agression de la Russie ait sapé les perspectives de résolution des différends par la voie diplomatique.  Il a également rappelé que selon le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), plus de 14 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire en Ukraine, soit 40% de la population, et que 6 millions d’Ukrainiens sont aujourd’hui réfugiés.  Il s’est inquiété des conséquences de la guerre pour des milliers d’enfants ukrainiens déplacés, déportés et privés de leur droit à la santé et à l’éducation en raison des attaques généralisées contre les écoles et les hôpitaux.  Il a appelé la Russie à mettre fin à son agression et à retirer ses forces militaires d’Ukraine, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. 

Le représentant de l’Algérie a rappelé l’importance de la résolution 2202 (2015) qui entérinaient la mise en œuvre des accords de Minsk, regrettant l’absence de perspectives en vue d’un dialogue complet et inclusif.  Invitant les membres du Conseil de sécurité à s’inspirer de l’esprit de ces accords, il a appelé à une intensification des efforts diplomatiques en vue d’une paix juste et durable, dans le respect de la Charte des Nations Unies et des préoccupations de sécurité légitimes de toutes les parties. 

La représentante du Japon a déclaré que la Fédération de Russie a tenté aujourd’hui de justifier l’injustifiable.  La Russie a parlé de violations des accords de Minsk alors qu’elle-même commet une violation de la Charte des Nations Unies, s’est-elle indignée, estimant qu’un tel pays ne peut pas critiquer un autre pays pour ne pas avoir mis en œuvre un accord international.  Quelle que soit l’affirmation de la Russie sur les accords de Minsk, son agression contre l’Ukraine ne pourra jamais être justifiée, car il s’agit d’un acte qui ébranle les fondements mêmes de l’ordre international et constitue une violation flagrante de la Charte des Nations Unies, a souligné la représentante.  Personne ne peut cacher ce fait d’autant que l’écrasante majorité de l’Assemblée générale a déjà clairement exprimé sa position, a-t-elle ajouté.

« C’est l’agression de la Russie qui a tué le processus de Minsk », a déclaré le représentant du Royaume-Uni, soulignant que la Russie avait systématiquement manqué à ses obligations dans le cadre des accords de Minsk, que le Conseil avait entérinés à l’unanimité dans la résolution 2202 (2015).  Il a rappelé qu’il y a deux ans, Vladimir Putin avait signé un décret reconnaissant Donetsk et Louhansk comme des entités soi-disant indépendantes et que trois jours plus tard, il envahissait l’Ukraine.  « La décision de Putin de lancer son invasion illégale et barbare en février 2022 nous montre clairement qu’il n’a jamais été intéressé par la paix », a-t-il martelé, ajoutant que la Russie était entièrement responsable du déclenchement de cette guerre.

La représentante de la Slovénie a affirmé qu’en raison de l’invasion russe, « on ne saura jamais si les accords de Minsk auraient pu être couronnés de succès ».  Rebâtir la confiance sera une tâche gigantesque et il reviendra à la Russie de démonter qu’elle est digne de confiance, a indiqué la déléguée, notant que c’est la Russie qui a lancé une invasion à grande échelle.  Elle a estimé que ce sera à l’Ukraine de décider la date et le format de négociations de paix, avant de rappeler la nécessité de clarifier les termes de tout futur cessez-le-feu.  Selon elle, la nature abstraite et l’ambiguïté des accords de Minsk ont permis des interprétations partisanes, fournissant un « alibi » à des violations.

Le représentant du Mozambique a regretté que la mise en œuvre des accords de Minsk se soit heurtée à des revers importants, alors que la lettre et l’esprit de ces accords devraient être utilisés comme source d’inspiration pour défendre le principe du règlement pacifique des différends.  Le moment est venu pour les parties d’engager un dialogue de paix, a-t-il déclaré en les appelant à tirer les leçons des négociations complexes ayant abouti aux accords de Minsk pour le règlement pacifique du conflit.  Il a insisté pour que les parties se souviennent du caractère contraignant de ces accords, avant d’inviter également le Conseil à prendre ces accords comme guide des efforts visant un règlement négocié du conflit entre l’Ukraine et la Russie. 

Les points clefs des accords -tels que l’appel à un cessez-le-feu immédiat, le retrait des armes, la surveillance du cessez-le-feu, l’ouverture d’un dialogue et les réformes politiques- restent pertinents, a estimé le représentant.  Il a jugé essentiel de poursuivre les négociations pour résoudre ce conflit, dans le contexte d’une impasse sanglante sur les lignes de front, de l’augmentation du nombre de victimes civiles, de la diminution du soutien politique à une guerre sans fin et de la baisse de confiance dans les organisations multilatérales. 

La représentante de la France a rappelé que les accords de Minsk étaient tout à la fois des accords de cessez-le-feu et des accords politiques, dont le principal objectif était la réintégration de certaines régions de Donetsk et de Louhansk sous pleine souveraineté ukrainienne en échange d’un statut d’autonomie spécial accordé à ces régions.  « La Russie a choisi d’y mettre fin, de façon unilatérale et par la force », en reconnaissant unilatéralement l’indépendance des Républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk, et en envahissant l’Ukraine. 

Affirmant que ces accords avaient permis « une réduction significative du niveau de violence », la déléguée a ajouté qu’aucun des observateurs internationaux présents sur le terrain n’aveint fait état de crimes de masse contre les habitants des régions de Donetsk et de Louhansk de la part des forces ukrainiennes.  A contrario, elle a rappelé les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par la Russie depuis le lancement de son agression à grande échelle en 2022, qui sont documentés par l’ONU et par l’OSCE.  Elle a également constaté que le niveau de violence depuis le lancement de la guerre d’agression russe contre l’Ukraine le 24 février 2022 est sans commune mesure avec la situation qui prévalait auparavant. 

La représentante a affirmé que la France et l’Allemagne avaient tenté sans relâche, de 2015 à 2022, dans le cadre du format Normandie, de permettre l’application des accords.  Pendant ce temps, la Russie a attisé les tensions dans le Donbass, a-t-elle affirmé, notamment en se retirant du mécanisme de vérification du cessez-le-feu dès 2016 et en distribuant des passeports russes aux habitants de certaines régions de Donetsk et de Louhansk.  Affirmant que son objectif était, depuis le début, la déstabilisation interne de l’Ukraine, elle a appelé la Russie à prendre conscience de l’impasse que constitue le recours à la force en Ukraine et à entendre les appels répétés de l’Assemblée générale et ceux de la CIJ du 16 mars 2022.

Le représentant de la Sierra Leone a jugé raisonnable de penser que si les accords de Minsk avaient atteint leurs objectifs, la situation actuelle en Ukraine aurait pu être évitée.  Il a néanmoins appelé à tirer les leçons de cet échec, en soulignant la nécessité de remédier aux causes profondes du conflit.  Il a misé sur les efforts diplomatiques visant à réduire les tensions et à encourager le dialogue.  Sur la base de l’expérience de son propre pays, il a estimé que les parties doivent remédier aux questions pressantes sans préjudice de ce qui a pu arriver par le passé.  Enfin, il a appelé au respect de la souveraineté de l’Ukraine, en ajoutant que les préoccupations légitimes de toutes les parties doivent être dûment prises en compte.

Le représentant de la Suisse a rappelé que Moscou a brutalement mis fin aux accords de Minsk il y a presque deux ans, en reconnaissant l’indépendance des « républiques populaires » de Louhansk et de Donetsk et en lançant son agression militaire contre l’Ukraine.  Il a rejeté les tentatives de justifier cette violation du droit international et a encouragé au dialogue dans le cadre du processus de Minsk de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), rappelant que pendant des années, l’OSCE et les accords de Minsk ont contribué à la désescalade et à l’envoi d’aide humanitaire au profit des populations affectées dans l’est de l’Ukraine. Le délégué a également souligné que l’OSCE contribue à l’établissement des faits par le biais du mécanisme de Moscou, avant d’évoquer son programme de soutien extrabudgétaire à l’Ukraine.  Il a également dit soutenir pleinement les efforts visant à maintenir l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine au centre de l’attention de l’OSCE. 

Le représentant de la République de Corée a estimé que les accords de Minsk avaient échoué en raison de l’invasion russe de l’Ukraine.  Il a souligné les efforts gigantesques consentis pour sauver ces accords, dont ceux de l’OSCE, avant de condamner l’invasion de l’Ukraine. Il faut renouer avec l’esprit de ces accords pour restaurer une paix durable, a plaidé le délégué, en appelant au respect de la souveraineté de l’Ukraine.  Enfin, il a exhorté la Russie à mettre un terme à cette guerre brutale.

La représentante du Guyana a appelé à ne pas se résigner face aux souffrances en Ukraine, malgré l’échec des accords de Minsk.  Elle a demandé un cessez-le-feu immédiat et un retour à la table des négociations.  Elle a jugé impératif de respecter le droit international et la Charte des Nations Unies, avant d’appeler à tirer les leçons de l’échec desdits accords « plutôt que de promouvoir des narratifs contre-productifs ».  Certains, en effet, pourraient pointer cet échec de la diplomatie et questionner l’utilité du dialogue, a-t-elle dit, en souhaitant que « ce cynisme dangereux » soit évité.  « Le défi de la négociation est toujours préférable à la calamité de la guerre. »  Enfin, la déléguée a demandé le respect de la souveraineté de l’Ukraine. 

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a dit être frappé par les « masques de ses collègues occidentaux » et la pratique du « deux poids, deux mesures », les accusant d’ignorer des faits qui ne les arrangent pas, aussi évidents soient-ils.  Il a noté que le Royaume-Uni avait essayé de mettre l’accent sur les mesures temporaires décidées par la CIJ, qui sont devenues encore plus complexes vu la décision procédurale adoptée récemment.  La Cour, dans le fond, n’a répondu à aucune requête de l’Ukraine vis-à-vis de la Russie, a fait remarquer le délégué russe.  Il a rappelé qu’elle avait jugé la République du Donbass comme n’étant pas une organisation terroriste, même s’il faudra attendre la décision finale.  Tout ce qu’a entrepris Kiev depuis 2014, en ayant déclenché une guerre contre cette république sous prétexte de lutte anti-terroriste, était absolument infondé en droit, a martelé le représentant.  « Je vous prie de le reconnaître enfin.  Arrêtez de faire les autruches et cessez de protéger votre client à Kiev. »  Le délégué a encore dénoncé la déformation des faits s’agissant de la déclaration de la Russie selon laquelle les accords de Minsk seraient enterrés.  « Nous n’avons dit ça qu’une fois que vous-même avez anéanti ces accords », a-t-il expliqué. 

Le représentant de l’Ukraine a dit que cette réunion, convoquée par la Fédération de Russie pour discuter des accords de Minsk qu’elle a elle-même tués, est un exemple de gaspillage de temps et de ressources.  Il a accusé la Russie d’avoir tué les accords internationaux de Minsk comme elle a tué, vendredi dernier à Kharkiv, sept civils innocents.  Le délégué a démonté les manipulations de la Russie concernant deux arrêts de la CIJ rendus les 31 janvier et 2 février, en commençant par rappeler que la Cour avait établi que la Russie avait violé le droit international.  La décision du 31 janvier l’a démontré à trois reprises, a-t-il dit en énonçant la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999, la Convention internationale de 1969 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ainsi que l’ordonnance de la Cour sur les mesures provisoires du 19 avril 2017.  L’affirmation de la Russie selon laquelle la CIJ aurait refusé de qualifier la Russie d’État agresseur est fausse, a encore déclaré le représentant en expliquant que l’Ukraine n’a pas demandé à la Cour de se prononcer sur l’agression de la Russie dans cette affaire.  La CIJ n’a pas non plus examiné la demande de l’Ukraine sur la responsabilité de la Russie dans l’attentat contre le vol MH17. 

Concernant les accusations de discrimination à l’encontre des Ukrainiens en Crimée, la CIJ a conclu que la Russie avait ciblé les Tatars de Crimée en raison de leur opposition politique à la conduite de la Fédération de Russie en Crimée. De l’avis de la Cour, a interprété le délégué, la reconnaissance par la Russie des Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk sape la confiance et rend difficile le règlement du différend. Pour ces raisons, la Cour a conclu que la Fédération de Russie a violé son obligation de s’abstenir de toute action devant la Cour susceptible d’aggraver ou de prolonger le différend.  Venant à l’arrêt de la CIJ du 2 février, il a relevé que l’affaire de l’Ukraine contre la Russie fondée sur la Convention sur le génocide de 1948 progresse et que l’usage de la force par la Russie contre l’Ukraine reste un élément de cette affaire.  Il est aussi revenu sur l’ordonnance du 16 mars 2022 sur les mesures provisoires, par laquelle la Cour avait exigé de la Russie qu’elle suspende immédiatement ses opérations militaires.  Cette décision reste valable et contraignante pour la Russie, a conclu le délégué.

La représentante de l’Allemagne a affirmé que les accords de Minsk ont été essentiels pour stopper l’agression initiale de la Russie contre l’Ukraine en 2014, après l’occupation de la Crimée et de territoires de l’est de l’Ukraine par des forces de procuration et des forces régulières russes.  Insistant sur les efforts consentis par la France et l’Allemagne dans le cadre du format Normandie pour aboutir aux accords de Minsk, elle a rappelé qu’ils avaient initialement contribué à réduire considérablement le niveau de violence, et qu’une mission spéciale de l’OSCE avait supervisé leur mise en œuvre sur le terrain.

La déléguée s’est souvenue qu’après de premiers développements positifs, la Russie avait commencé à perturber le processus, notamment en violant le cessez-le-feu de manière continue, en délivrant des passeports russes, en organisant des élections pour la Douma en 2021 dans des territoires occupés.  « C’est la Russie qui a entravé la mise en œuvre des accords de Minsk et c’est la Russie qui a décidé de se lancer dans un agenda de conquête impérialiste », a-t-elle martelé, ajoutant qu’il était devenu évident que la Russie n’était pas intéressée par une solution pacifique. 

Indiquant que l’Allemagne continuerait à soutenir l’Ukraine dans sa lutte pour sa survie, la déléguée a affirmé qu’elle appuierait également tout effort vers une paix juste et durable, sur la base de la résolution de l’Assemblée générale de 2023 et la formule de paix présentée par le Président ukrainien.  Elle a rappelé la décision de la CIJ du 2 février 2024, confirmant ses mesures conservatoires de mars 2022, imposant à la Russie l’obligation de suspendre immédiatement sa soi-disant opération militaire spéciale.  Concluant son propos, elle a affirmé que l’Ukraine ne constituait pas une menace pour la Russie et qu’elle voulait la paix, qui pouvait être obtenue si la Russie mettait fin à son agression et retirait ses troupes du sol ukrainien.

Reprenant à nouveau la parole, le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé les déclarations mensongères de l’Ukraine et redit sa détermination à défendre une interprétation juste des décisions de la CIJ.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Commission du développement social: les délégations voient dans la justice sociale l’antidote à la pauvreté et le moteur d’un développement inclusif

SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION,
10E ET 11E SÉANCES PLÉNIÈRES, MATIN ET APRÈS-MIDI
SOC/4917

Commission du développement social: les délégations voient dans la justice sociale l’antidote à la pauvreté et le moteur d’un développement inclusif

Évoquant à plusieurs reprises le thème prioritaire de la présente session de la Commission du développement social, à savoir la promotion du développement social et de la justice sociale afin d’accélérer la réalisation du Programme 2030 et l’élimination de la pauvreté, la soixantaine d’États Membres et d’organisations internationales qui se sont exprimés aujourd’hui à l’occasion du débat général ont fait de la justice sociale l’antidote à la pauvreté et le moteur d’un développement inclusif, misant en particulier sur les potentiel du numérique.

La persistance des écarts de revenus et de richesses, au sein des pays comme entre eux, inflige selon le Brésil de « profondes blessures » à nos sociétés, blessures que perpétue notre inaction.  Comme plusieurs délégations, il s’est félicité de la tenue prochaine du Sommet mondial pour le développement social afin d’examiner les questions urgentes de la fracture numérique, du manque de revenus et de possibilités d’avancement, en particulier chez les jeunes et les femmes.  « Si nous devions résumer ces défis en un seul mot, ce serait celui d’"inégalité" », a résumé son représentant. 

La justice sociale repose en effet sur le principe des droits égaux, d’un traitement égal et des chances égales pour tous, a rappelé Malte, mettant l’égalité de genre et l’autonomisation des filles et des femmes au premier plan.  Face au défi commun de l’accès à l’emploi pour celles-ci ainsi que pour les jeunes et les personnes vulnérables, l’Espagne a prôné l’adoption de mesures telles que la coresponsabilité, la rationalisation des horaires ou encore l’accès universel à l’éducation dès la petite enfance. 

Malgré une baisse de 40% des nouvelles infections au VIH/sida en Afrique subsaharienne, la Vice-Ministre de la fonction publique, du travail et de la protection sociale du Zimbabwe s’est alarmée que 80% de ces nouvelles infections concernent des filles, une préoccupation majeure qui nécessite selon elle la mobilisation de ressources non affectées et régulières afin de permettre à ONU-Femmes d’apporter des réponses adaptées sur le terrain.

En ce qui concerne le vieillissement de la population, source d’inquiétude pour un nombre grandissant d’États Membres, l’Espagne s’est félicitée des travaux menés par le Groupe de travail sur le vieillissement de la Commission économique pour l’Europe (CEE) concernant l’adaptation de la stratégie régionale de mise en œuvre du Plan d’action international de Madrid sur le vieillissement. 

« Question nouvelle » à l’ordre du jour de la Commission, la fracture numérique a été soulevée par nombre de délégations en quête d’une plus grande justice sociale.  Comme le Viet Nam, le Nigéria a vu dans le transfert des compétences numériques des pays développés vers les pays en développement le moyen de parvenir à un développement « égalitaire », fondé sur une collaboration significative entre les États, les partenaires et les parties prenantes. 

Le Malawi, qui s’efforce de renforcer la protection sociale par le biais du numérique, est passé au mode électronique pour les transferts en espèces, et utilise des tablettes électroniques dans les écoles primaires ainsi que pour combattre la violence de genre et celle touchant les enfants.  Pour poursuivre dans cette voie, il a lancé un appel au secteur privé et au monde universitaire pour qu’ils fournissent un appui financier et technique à ces efforts. 

Résorber la fracture numérique constitue un objectif transversal crucial pour l’inclusion sociale et professionnelle, a confirmé la Hongrie, qui s’affaire pour sa part à renforcer les compétences numériques des Roms et des personnes marginalisées afin de les aider à intégrer le marché du travail.  La Tchéquie a plaidé en faveur d’une numérisation accrue des services publics afin d’offrir une assistance plus efficace, à l’image de son plan stratégique de numérisation d’ici 2030. 

Le manque d’accès à des services de santé abordables, à une éducation de qualité et à des systèmes de protection sociale universels constituent pour le Luxembourg un « engrenage de la pauvreté » qui s’aggrave de génération en génération.  Qui plus est, a constaté l’Iran, rejoint par El Salvador, le manque de moyens pour promouvoir le développement social a pour effet de creuser l’écart entre pays développés et en développement.  « Nous avons le devoir de lutter contre la corruption afin de protéger les ressources des plus pauvres », a encore dit l’Arabie saoudite. 

Face à la hausse du prix des denrées alimentaires, qui pèse sur les personnes en situation précaire comme les familles monoparentales ou les personnes âgées, la Suède a fait valoir que les services sociaux doivent s’adapter au contexte local, notamment en temps de crise migratoire. « Îlot de stabilité » au sein d’une région volatile, Djibouti s’est inquiété à son tour des répercussions sur ses programmes sociaux de l’afflux de réfugiés et de migrants sur son territoire. 

Dans de trop nombreux pays, cependant, les entraves au développement social et à la justice sociale sont exacerbées par les effets multiplicateurs des conflits et des crises humanitaires qui affligent les populations civiles.  Après avoir dressé le bilan des progrès qu’elle a réalisés aux cours des dernières années, la Géorgie a reconnu que l’occupation illégale de l’Abkhazie et de Tskhinvali par la Fédération de Russie demeurait le principal obstacle à la fourniture de services sociaux au-delà de la ligne d’occupation, où la population continue d’être victime de « graves problèmes humanitaires » et de violations de ses droits. 

Même son de cloche au Yémen où, malgré les souffrances infligées à la population civile par les houtistes, les autorités du pays s’efforcent de réduire la pauvreté en rétablissant les rouages de l’État, en soutenant l’économie et en favorisant la croissance économique, en s’appuyant notamment sur la vitalité des petites et moyennes entreprises.  La délégation haïtienne a reconnu quant à elle que la crise multidimensionnelle que traverse le pays ne favorise en rien l’instauration d’un environnement propice au développement social de son peuple. 

Frappé de plein fouet par les effets du terrorisme, de la criminalité transnationale organisée et des changements climatiques qui affectent plusieurs pays du Sahel, le Burkina Faso a déploré, comme le Mali, la hausse drastique des besoins en matière d’éducation, de santé, d’hygiène et de protection, causée par les déplacements massifs de populations, une situation qui vient encore fragiliser la protection sociale et le développement des communautés. 

Quant au Gouvernement ukrainien, à l’approche du deuxième anniversaire de l’invasion russe, il s’efforce de réformer son système social en élaborant des services axés sur la santé mentale et l’adaptation aux crises.  La mise en place d’un système d’accompagnement des personnes handicapées, des enfants orphelins de même que la numérisation des systèmes d’aide sociale et d’aide humanitaire figurent parmi ses priorités. 

C’est justement pour surmonter ces défis multiformes que le Japon a jugé crucial de garantir un accès effectif à l’éducation des enfants en situation de conflit, en s’engageant dans la reconstruction d’écoles, la fourniture de repas scolaires et l’accès à des outils pédagogiques numériques, en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Programme d’action mondial (PAM).  La moitié des 1,2 milliard de personnes vivant dans la pauvreté multidimensionnelle étant des enfants, l’ONG Save the Children a préconisé un revenu minimum, sous la forme de transferts monétaires directs aux familles. 

Néanmoins, les États-Unis ont fait remarquer que le mandat de la Commission du développement social est tellement vaste qu’il chevauche ceux d’autres entités onusiennes, réduisant d’autant sa capacité à avoir un effet propre sur la dimension sociale du développement. 

En début de séance, la Commission a proposé la nomination de cinq des dix membres du Conseil d’administration de l’Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social.  Après avoir endossé la candidature de M. Godwin Murunga pour un mandat supplémentaire de deux ans, elle a proposé la nomination de quatre nouveaux membres, soit Mme Leila Patel (Afrique du Sud), M. Diego Sánchez-Ancochea (Espagne), Mme Dzodzi Tsikata (Ghana) et M. Timo Voipio (Finlande), dont le mandat de quatre ans prendra effet à la date de confirmation de leur nomination par le Conseil économique et social (ECOSOC). 

Enfin, le Directeur par intérim de la Division du développement social inclusif du Département des affaires économiques et sociales (DESA) a indiqué que le budget 2025 sera finalisé lors du premier semestre de 2024. 

La Commission du développement social reprendra ses travaux mercredi 14 février, à compter de 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des ONG adopte le rapport de la première partie de sa session de 2024

Session de 2024,
16e séance plénière – matin
ONG/972

Le Comité des ONG adopte le rapport de la première partie de sa session de 2024

Le Comité chargé des organisations non gouvernementales a adopté, ce matin, le rapport* de la première partie de sa session de 2024 dans lequel il recommande l’octroi du statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social (ECOSOC) pour 132 ONG. 

Au cours de cette première partie de session qui a débuté le 22 janvier, le Comité a également pris note des rapports quadriennaux de 734 organisations et clôturé la demande de statut consultatif de 30 ONG qui n’ont pas répondu aux questions des membres du Comité dans les délais de deux jours ouvrables. 

En tout, le Comité des ONG a examiné 508 nouvelles demandes de statut consultatif auprès de l’ECOSOC et 870 rapports quadriennaux d’ONG déjà dotés de statut consultatif.  Les membres du Comité ont reporté l’examen des demandes de 376 ONG et de 136 rapports quadriennaux à la suite de questions adressées à ces ONG. 

Par ailleurs, le Comité a autorisé sa Présidente, Mme Zebib Gebrekidan (Érythrée), de proposer au Président de l’ECOSOC une prolongation exceptionnelle du délai de réception des nouvelles demandes de statut consultatif, en raison des fortes contraintes de ressources endurées par le Service des organisations non gouvernementales. Si cette requête est acceptée, les ONG auront jusqu’au 14 juin 2024 pour déposer leurs demandes au lieu du 1er juin 2024. 

Composé de 19 membres, le Comité des ONG peut recommander trois différents statuts consultatifs.  Le statut consultatif général est attribué aux grandes ONG internationales, dont les domaines d’action et de travail couvrent la majorité des points contenus dans l’agenda de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  Ces ONG sont habilitées à soumettre au Conseil des communications écrites et des pétitions, et à proposer l’inscription de points à l’ordre du jour. 

Le statut consultatif spécial est réservé aux ONG qui travaillent dans un domaine spécifique et les autorise à soumettre des communications écrites et des pétitions à l’ECOSOC. 

Le Comité peut aussi recommander « la Liste » aux ONG qui travaillent d’une manière plus technique et/ou restreinte. Elles ne peuvent soumettre au Conseil économique et social que des communications écrites. 

La deuxième partie de la session de 2024 du Comité des ONG se déroulera du 28 mai au 5 juin ainsi que le 14 juin. 

*E/C.2/2024/CRP.52/Rev.1

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission du développement social débat de la dimension sociale des cadres de développement et des moyens de promouvoir la justice sociale

SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION,
8E ET 9E SÉANCES PLÉNIÈRES, MATIN ET APRÈS-MIDI
SOC/4916

La Commission du développement social débat de la dimension sociale des cadres de développement et des moyens de promouvoir la justice sociale

À l’occasion de deux dialogues sur son thème prioritaire, l’un avec de hauts responsables du système des Nations Unies, l’autre avec différentes parties prenantes, la Commission du développement social s’est intéressée, aujourd’hui, aux moyens susceptibles de mieux intégrer les considérations sociales dans des cadres de développement plus larges et aux bonnes pratiques et solutions innovantes permettant de promouvoir la justice sociale. 

Centré sur les politiques connexes aux dispositifs sociaux, le premier dialogue a été marqué par l’avertissement lancé par le Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT) face au sous-investissement des États dans le renforcement des compétences et l’adaptation du marché du travail.  Il a appelé à corriger cette situation non seulement pour progresser vers l’éradication de la pauvreté, mais également pour aborder les trois grandes transitions de ce siècle, générées par la technologie numérique et l’intelligence artificielle, les changements climatiques et les défis démographiques.   

Alors que le monde souffre d’un taux de chômage de plus de 5% en moyenne, mais aussi d’un sous-emploi généralisé, qui affecte 435 millions de personnes, le Directeur général de l’OIT a estimé que la transition climatique pourrait être un créateur net d’emplois, moyennant des redéploiements.  La perte d’environ 6 millions d’emplois serait ainsi compensée par la création de 24 millions de nouveaux à l’échelle mondiale, a-t-il affirmé, reconnaissant toutefois des disparités selon les régions. 

Les régions, justement, ont fait entendre leur voix.  La Secrétaire exécutive de la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (CEE-ONU) a alerté sur les risques que fait peser le vieillissement des populations sur les systèmes de retraite et de soins de santé, singulièrement en Europe et en Amérique du Nord, appelant à intégrer davantage cette problématique dans les programmes politiques nationaux et internationaux.  Reconnaissant des retards inquiétants dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) dans sa région, son homologue de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP) a, elle, exhorté les gouvernements à se concentrer sur la protection sociale des personnes handicapées, des seniors et des travailleurs informels. 

Tout aussi pragmatique, le représentant de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a recommandé aux États africains de mieux gérer leur dette, d’accélérer leur transformation numérique et d’étendre la protection sociale de leurs populations, tout en appelant à des investissements plus durables pour créer des emplois et promouvoir une croissance inclusive.  Dans le même ordre d’idées, le représentant de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) a estimé qu’une augmentation annuelle moyenne de 0,1% du PIB allouée aux transferts de revenus de protection sociale non contributifs permettrait à la quasi-totalité de la population régionale de vivre au-dessus du seuil d’extrême pauvreté en 2030.     

Le second dialogue du jour a pris la forme d’un forum multipartite consacré aux solutions innovantes pour promouvoir le développement social et la justice sociale.  Mettant l’accent sur le sans-abrisme des femmes africaines, la Coordonnatrice nationale de l’ONG WorldWIDE Nigeria a estimé que garantir à ces dernières un accès à la terre, en révisant les lois coutumières qui les privent de droit à l’héritage et au logement, aiderait à réduire ce phénomène et permettrait aux habitants des établissements informels de régulariser leur statut.  De manière connexe, la Vice-Présidente de la Confédération syndicale internationale s’est prononcée pour la régularisation d’un milliard de travailleurs représentant la moitié de l’économie informelle mondiale. 

La justice sociale nécessite une mobilisation plus équitable des ressources nationales, via un impôt progressif, des stratégies de financement innovantes, des allégements de la dette et une augmentation de l’aide publique au développement, a plaidé, pour sa part, le Président du Club de Madrid.  De son côté, le Président et Directeur général de l’organisation National Cooperative Business Council CLUSA International a appelé à favoriser le développement des coopératives, qui contribuent à la justice sociale tout en aidant les États à réaliser les ODD. 

La Commission du développement social poursuivra ses travaux lundi 12 février, à partir de 10 heures. 

 

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Thème prioritaire: Promouvoir le développement social et la justice sociale au moyen de politiques sociales, afin de faire progresser plus rapidement la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’atteindre l’objectif primordial de l’élimination de la pauvreté - (E/CN.5/2024/3/Corr.1)

Dialogue interactif sur le thème prioritaire avec de hauts responsables du système des Nations Unies

M. GILBERT HOUNGBO, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a regretté que la plupart des pays et des agences de développement internationales n’aient pas suffisamment investi dans des domaines politiques et institutionnels cruciaux pour la justice sociale.  Il a appelé à corriger cette situation non seulement pour permettre à l’humanité d’atteindre l’objectif d’éradication de la pauvreté, mais également pour aborder les trois grandes transitions de ce siècle, en lien avec la technologie numérique et l’intelligence artificielle, les changements climatiques et les défis démographiques.  Chacune de ces transformations menace nos sociétés d’une forte augmentation des perturbations et des dislocations et, par extension, d’une expansion des inégalités, a-t-il alerté, exhortant les gouvernements à ajuster d’urgence leur modèle de croissance économique et de développement en vue d’augmenter la participation sociale. 

En ce qui concerne l’intelligence artificielle, le Directeur général de l’OIT a relevé qu’environ 10% à 20% de l’emploi total est exposé soit à l’automatisation, les femmes étant deux fois plus concernées que les hommes.  Face au risque que cela implique pour le marché du travail, il a invité les gouvernements à augmenter considérablement leurs investissements dans les compétences et les politiques actives liées à l’emploi.  À cet égard, M. Houngbo a indiqué que la transition climatique pourrait être un créateur net d’emplois important, moyennant un redéploiement des personnes sur le marché du travail.  Quelque 6 millions d’emplois seraient perdus et 24 millions de nouveaux créés dans le monde, a-t-il précisé, non sans reconnaître que certaines régions pourraient subir une perte nette.  Outre le chômage, qui atteint un peu plus de 5% globalement, le monde souffre aujourd’hui d’un sous-emploi généralisé, dont le taux dépasse 11%, soit 435 millions de personnes, a poursuivi l’intervenant, ajoutant que plus de la moitié de la population mondiale n’a même pas accès à l’un des sept domaines fondamentaux de protection sociale autres que les soins de santé. 

De fait, a-t-il dit, il ne suffit pas de se concentrer sur l’augmentation quantitative du PIB, il faut accorder la même importance aux politiques et institutions qui améliorent la qualité sociale de la croissance.  À cette fin, a-t-il signalé, l’OIT travaille avec le Fonds monétaire international (FMI) dans plusieurs pays pour renforcer le financement des systèmes de protection sociale, via des planchers de dépenses sociales, et a récemment approuvé la création d’une Coalition mondiale multipartite pour la justice sociale à laquelle plus de 100 gouvernements et organisations ont accepté de se joindre. 

Mme TATIANA MOLCÉAN, Secrétaire exécutive de la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (CEE-ONU), a rappelé que le vieillissement de la population est l’une des grandes tendances contemporaines et que l’Europe et l’Amérique du Nord comptent la proportion la plus élevée de personnes âgées.  Si la longévité est un triomphe du développement humain, à mesure que la proportion de personnes âgées dans une société augmente, les systèmes de retraite sont de plus en plus remis en question, les secteurs de la santé confrontés à une demande et à des coûts accrus et les systèmes de soins de longue durée doivent répondre aux besoins croissants.  Le Plan d’action international de Madrid sur le vieillissement, adopté en 2002, reste notre principale boussole en la matière, a mentionné Mme Molcéan.  Depuis son adoption, de nombreux pays ont élaboré des politiques visant à améliorer la situation des personnes âgées et procédé aux ajustements nécessaires dans les domaines des retraites, de la santé et des soins de longue durée, de la formation tout au long de la vie et de l’accès aux marchés du travail. 

Ainsi, le système des Nations Unies et les gouvernements européens ont réalisé de nombreux progrès dans l’institutionnalisation de la perspective de genre, s’est félicitée la Secrétaire exécutive.  Nous avons élaboré des orientations visant à promouvoir l’intégration du vieillissement dans tous les domaines politiques concernés et à tous les niveaux de gouvernement.  Mais comment améliorer encore davantage l’intégration dans nos programmes politiques nationaux et internationaux? s’est demandé l’experte.  Elle a commencé par souligner l’importance de l’engagement politique, en démontrant non seulement les avantages de l’action, mais également les conséquences de l’inaction, comme dans le domaine des changements climatiques.  Nous avons en outre besoin de davantage d’investissements dans la collecte et la diffusion de données, a poursuivi la haute fonctionnaire. 

La Secrétaire exécutive a ensuite plaidé pour une meilleure coordination entre gouvernements et parties prenantes et un renforcement des capacités d’intégration, auquel contribuent les lignes directrices de la Commission économique sur l’intégration du vieillissement.  Aussi la CEE-ONU a-t-elle développé une gamme de ressources pour soutenir l’intégration du vieillissement, notamment sous la forme de conseils techniques, de recommandations politiques adaptées, d’échange de pratiques optimales et d’apprentissage entre pairs. 

Mme ARMIDA SALSIAH ALISJAHBANA, Secrétaire générale adjointe et Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a reconnu des retards inquiétants dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) dans sa région. Selon une évaluation réalisée en 2023, à mi-parcours du Programme 2030, seulement 17% des objectifs mesurables ont été atteints et l’absence de progrès est particulièrement alarmante pour les ODD 1 (éliminer la pauvreté) et 2 (faim zéro).  De plus, a-t-elle relevé, la région enregistre un recul en matière d’égalité des sexes et fait face à des crises climatique, environnementale et sanitaire qui mettent à mal le tissu social. 

Constatant que les inégalités et les écarts existants en matière d’accès aux services de base tels que l’énergie, l’alimentation et la connectivité numérique sont souvent négligés, Mme Alisjahbana a appelé les gouvernements de la région à donner la priorité aux stratégies de développement inclusif, en se concentrant sur les programmes de protection sociale.  Elle a cependant fait état de tendances positives depuis la récente pandémie, comme la création en Indonésie et aux Maldives de régimes contributifs liés aux allocations de chômage, qui couvrent désormais des populations auparavant non éligibles, y compris les travailleurs informels.  Elle s’est également réjouie qu’au Bangladesh, les paiements numériques liés aux systèmes d’alerte précoce contre les inondations aient amélioré la sécurité alimentaire et réduit le risque d’endettement des ménages. 

Mais plus de la moitié de la population de la région reste sans protection, a déploré la Secrétaire exécutive de la CESAP, selon laquelle cette exclusion systématique affecte de manière disproportionnée les groupes vulnérables, notamment les personnes handicapées, les personnes âgées et les travailleurs migrants.  Combler ces écarts de couverture nécessite de répondre aux besoins de la population en âge de travailler, en particulier des 1,3 milliard de personnes qui exercent un emploi informel, a-t-elle préconisé, plaidant pour la mise en place d’un socle de protection sociale défini au niveau national, combinant des mécanismes non contributifs et contributifs pour garantir une sécurité sociale de base pour tous.  Une telle approche soutiendrait également les efforts d’adaptation et d’atténuation des changements climatiques, a estimé Mme Alisjahbana, avant de souligner l’importance de la collaboration régionale sur ces sujets, à l’image du Plan d’action adopté en 2020 par la CESAP pour renforcer la protection sociale en Asie-Pacifique. 

« Comment mieux intégrer les considérations sociales dans les cadres de développement? » s’est demandé Mme MEHRINAZ EL AWADY, Directrice et Chef de groupe, Justice de genre, population et développement inclusif à la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie occidentale (CESAO), qui s’exprimait au nom de la Secrétaire exécutive de cet organe.  Elle a pris pour exemple le monde arabe, secoué par des crises multiples ces dernières années.  La haute fonctionnaire a commenté le cercle vicieux constitué par les « polycrises » et les inégalités.  Le seul domaine dans lequel les conflits n’aggravent pas le risque de crises est celui des changements climatiques, mais le réchauffement planétaire accroît les risques de conflits en intensifiant la concurrence pour des ressources naturelles limitées, a fait observer Mme El Awady. 

Pour répondre à cette situation, des outils politiques innovants sont nécessaires, a-t-elle préconisé, en citant le Social Expenditure Monitor (SEM), conçu pour fournir une cartographie complète des dépenses sociales publiques afin d’ajuster les réformes budgétaires.  La Directrice a également mentionné un outil d’assistance à l’indice de pauvreté multidimensionnelle (MAT), qui permet aux décideurs politiques de développer plusieurs scénarios pour leurs propres indices « en quelques minutes », ainsi que le Policy Gap Assessment Tool (PGAT), pour analyser dans quelle mesure les principes de justice sociale sont intégrés aux politiques publiques et aux programmes de développement.  L’intervenante a souligné l’importance pour les pays concernés d’investir dans les programmes de réforme de la protection sociale, qui ont des retombées positives sur le développement économique national, en privilégiant la cohérence des politiques mises en œuvre. 

Les pays africains sont confrontés au double défi de mobiliser davantage de ressources et de les aligner sur leurs priorités de développement durable, a diagnostiqué M. SAURABH SINHA, Chef de la Section de la politique sociale de la Division du genre, de la pauvreté et de la politique sociale de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), qui s’exprimait au nom du Secrétaire exécutif de la CEA.  Pour y parvenir, il a recommandé une meilleure gestion de la dette par ces États, une mesure d’autant plus urgente que la pandémie de COVID-19 et d’autres crises ont annulé des décennies de progrès en matière de développement sur le continent.  Confrontés au surendettement, plusieurs pays africains ont dû se résigner à contacter le Fonds monétaire international (FMI).  Les droits de tirage spéciaux (DTS) constituent cependant un moyen efficace de leur fournir des ressources supplémentaires, a relevé M. Sinha. Lancée au lendemain de la pandémie, l’Initiative de suspension du service de la dette a permis de suspendre 12,9 milliards de dollars de paiements au titre du service de la dette, libérant ainsi des ressources vitales pour les dépenses sociales et sanitaires.  En 2022, a-t-il noté, la dette publique de l’Afrique s’élevait à 66% du PIB et les paiements d’intérêts à 3,2% du PIB, contre 1,5% du PIB dans les pays développés. 

Bien qu’elle ait le moins contribué au réchauffement climatique, l’Afrique est le continent le plus vulnérable à ses impacts, a poursuivi M. Sinha.  Les « dommages collatéraux exponentiels » de ce phénomène posent des risques systémiques à son économie et à ses investissements dans les infrastructures, l’alimentation, la santé publique, l’agriculture et les moyens de subsistance de la population.  Or, l’analyse des contributions déterminées au niveau national (CDN) indique que les besoins de financement de l’adaptation du continent s’élèveront à près de 580 milliards de dollars entre 2020 et 2030, qui viendront exacerber les problèmes d’endettement. 

Pour créer des emplois et promouvoir une croissance inclusive, les pays africains ont donc besoin d’investissements plus durables, a encore dit M. Sinha.  Il faut revoir les chaînes de valeur pour faire en sorte que le continent devienne plus compétitif à l’échelle mondiale.  Cela passe par le renforcement de ses capacités de production à travers les chaînes de valeur régionales et le développement de la production sur la base des ressources primaires.  À cette fin, le haut fonctionnaire a plaidé en faveur d’une réforme des politiques fiscales, commerciales et industrielles, tout en évitant la réglementation excessive. Selon lui, la transformation numérique, l’amélioration des compétences et une protection sociale étendue, en particulier à l’intention des personnes vulnérables, sont autant de moyens de remédier à la situation. 

Au nom du Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), M. RODRIGO MARTINEZ, Chargé principal des affaires sociales de la Division du développement social de la CEPALC, a expliqué que la Commission contribue aux processus décisionnels des États de la région en matière de politique sociale, par le biais de la coopération technique dans la conception de politiques et de programmes sociaux, ainsi qu’au renforcement de leurs capacités institutionnelles.  Elle concentre son activité sur la pauvreté, les inégalités et la protection sociale, en particulier dans les domaines de l’éducation, la santé, les retraites, l’inclusion au travail et les institutions sociales.  Ces dernières années, la CEPALC a mené des projets de recherche et de coopération technique avec diverses organisations de coopération régionale et internationale, notamment concernant la stratification et les classes sociales, les investissements et les dépenses sociales, le travail des enfants, la sécurité alimentaire, l’inclusion numérique et la cohésion sociale. 

La Conférence régionale sur le développement social de l’Amérique latine et des Caraïbes s’est intéressée en particulier à la matrice des inégalités sociales, a continué M. Martinez, en analysant les axes économiques, sociaux et culturels qui structurent et reproduisent les inégalités dans la région.  Face aux catastrophes et aux inégalités, M. Martinez a souligné la nécessité d’évoluer vers des systèmes de protection sociale universels et résilients, en lien étroit avec les systèmes d’atténuation des risques de catastrophe.  Selon lui, une augmentation annuelle moyenne de 0,1% du PIB allouée aux dépenses publiques consacrées aux transferts de revenus de protection sociale non contributifs permettrait à la quasi-totalité de la population régionale d’atteindre un niveau de revenu égal ou supérieur au seuil d’extrême pauvreté en 2030.  Au cours des prochains années, la Commission compte contribuer aux politiques sociales de la région en travaillant de concert avec les États pour préparer une feuille de route en vue du Sommet social mondial de 2025 et en élargissant la vision du développement social inclusif, tout en intensifiant la coopération régionale, sous-régionale et Sud-Sud pour promouvoir des politiques sociales de qualité. 

Dialogue interactif 

L’Égypte a donné le coup d’envoi d’une brève discussion interactive, soulignant l’importance des politiques fiscales pour mobiliser davantage de ressources au niveau national.  Certaines des causes profondes peuvent être communes à de nombreux pays, mais la contextualisation doit jouer un rôle, compte tenu des besoins spécifiques de chacun, ce qui, selon la délégation égyptienne, disqualifie par principe la notion de solution unique. 

La représentante de la République islamique d’Iran a pour sa part dénoncé l’imposition de mesures coercitives unilatérales à l’encontre de certains pays, dont le sien, qui vont totalement à l’encore du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, et compromettent le développement social des nations et la capacités des États à éliminer la pauvreté.  Son homologue de l’Union européenne a estimé que la priorité doit être accordée à la justice sociale, qui doit figurer au cœur de la réalisation des ODD. À cette fin, a-t-elle dit, l’UE promeut de manière coopérative la justice sociale dans le cadre du socle européen des droits sociaux et de son plan d’action, un ensemble de principes et de droits essentiels pour doter l’Europe du XXIe siècle de marchés du travail et de systèmes de protection sociale équitables et qui fonctionnent bien.  L’ONG Congrégation de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur s’est, elle aussi, prononcée en faveur de mesures sociales plus vigoureuses.

Forum multipartite sur le thème prioritaire: Bonnes pratiques et solutions innovantes pour promouvoir le développement social et la justice sociale. 

En mettant en lumière les obstacles systémiques et les préjugés sociétaux, la justice sociale favorise l’inclusion au sein de nos sociétés, a assuré la modératrice et Présidente du Comité des ONG sur le développement social, Mme JEAN QUINN, en donnant le coup d’envoi à la discussion. 

Pour ne laisser personne de côté, la Vice-Présidente de la Confédération syndicale internationale, Mme CATHY FEINGOLD, a jugé urgent que les gouvernements s’orientent vers un nouveau contrat social fondé sur les droits, l’égalité et le travail décent.  Cette nouvelle entente devrait selon elle s’appuyer sur six piliers, à savoir l’emploi, les droits, le salaire minimum vital, la protection sociale, l’égalité et l’inclusion.  Elle a attiré l’attention sur l’économie informelle, notant qu’un taux élevé d’informalité est un facteur majeur d’inégalités qui affecte de nombreux migrants et travailleurs domestiques, ainsi que les femmes.  Pour améliorer leurs conditions de travail et de vie de ces travailleurs, il est à ses yeux essentiel de combler les lacunes réglementaires.  C’est pourquoi les syndicats réclament qu’un milliard de travailleurs informels, représentant la moitié de l’économie informelle mondiale, soient formalisés d’ici à 2030.  Il a été démontré que les augmentations du salaire minimum légal ont un effet positif sur les moyens de subsistance des travailleurs informels, en plus d’accroître l’attractivité du marché du travail formel.  Des mécanismes transparents de reconnaissance des qualifications dans les pays d’origine et de destination sont également nécessaires pour favoriser l’accès des migrants aux emplois formels.  Pour être équitable, le financement de la protection sociale doit reposer sur une fiscalité progressive, a conclu Mme Feingold. 

Ces considérations se trouvent au centre des préoccupations du Club de Madrid, a expliqué son Président et ancien Président de la Slovénie, M. DANILO TÜRK.  Regroupement d’anciens présidents et premiers ministres démocrates du monde entiers, le Club aspire à une « société partagée », caractérisée par la cohésion sociale et l’égalité des chances.  Dans cette optique, il a souligné qu’aucun progrès ne sera possible en matière de développement social si nous n’évoluons pas d’abord vers l’égalité des sexes et la pleine conscience des considérations environnementales.  À l’issue du Dialogue politique 2023 du Club de Madrid, consacré au réexamen du développement social pour les personnes et la planète dans le cadre d’un contrat écosocial, ses membres ont appelé les gouvernements et institutions multilatérales à favoriser un environnement propice au « changement de système », fondé sur des stratégies de croissance de la main-d’œuvre et de renforcement des capacités.  Il a également préconisé de rendre la mobilisation des ressources nationales plus équitable, en donnant la priorité à l’impôt progressif sur les personnes morales et physiques, et d’établir des pactes fiscaux et financiers mondiaux équitables, par le biais notamment de l’allégement de la dette et d’une augmentation de l’aide publique au développement.  L’amélioration des stratégies de financement, la conclusion de partenariats mondiaux, le renforcement des institutions et l’inclusion de tous les acteurs sociaux doivent également être pris en compte. 

En tant qu’entités démocratiques permettant aux communautés de prendre en main leurs propres processus décisionnels, les coopératives favorisent le développement social inclusif et la justice sociale tout en aidant les États à réaliser les ODD, a fait valoir M. DOUG O’BRIEN, Président et Directeur général du National Cooperative Business Council CLUSA International (NCBA CLUSA).  Depuis longtemps, les femmes ont recours aux coopératives pour s’émanciper de la pauvreté et obtenir davantage de pouvoir au sein de leurs communautés et entreprises locales, a-t-il noté.  Ainsi, la Cooperatíva Café Timor (CCT) est devenue, depuis sa création en 1994, la plus grande coopérative du Timor oriental, établissant quelque 32 cliniques de santé rurales, ce qui en fait le plus important prestataire de soins de santé privé du pays.  Or, pour que les coopératives puissent faire progresser les ODD, elles doivent évoluer dans un environnement politique et des cadres juridiques favorables.  Grâce au financement de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), NCBA CLUSA s’efforce d’améliorer l’environnement politique avec les parties prenantes et les gouvernements du monde entier, notamment en aidant les États à actualiser leur législation en la matière. 

Si le sans-abrisme, qui concerne 216 millions de personnes dans le monde, n’est pas explicitement mentionné dans les ODD, Mme IFEYINWA OFONG, Coordonnatrice nationale des femmes dans le développement et l’environnement au sein de WorldWIDE Network Nigeria, a vu dans ce phénomène une violation des droits humains et un indicateur d’extrême pauvreté et d’exclusion sociale.  Moins visibles en raison des barrières culturelles existantes, la réalité des femmes africaines sans-abri doit néanmoins être considérée à l’intersection d’autres facteurs, à commencer par les lois et normes coutumières délétères. En Afrique subsaharienne, la pauvreté élevée entrave par exemple la capacité des femmes à louer un logement ou encore à obtenir des prêts pour lancer des petites entreprises.  À ces facteurs s’ajoutent l’insécurité, les conflits et la mauvaise gouvernance, lesquels poussent des millions d’Africains dans le sans-abrisme, a poursuivi Mme Ofong.  Pour parvenir à un avenir socialement juste, elle a prôné la mise en place de politiques de logement social inclusives et de garanties d’accès des femmes à la terre, en dépit des normes coutumières en vigueur.  Réduire la pauvreté des femmes et augmenter leurs revenus implique en outre de mettre en œuvre des politiques d’autonomisation économique inclusives, sur la base de données fiables. 

Mme SHEA GOPAUL, Représentante spéciale de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), a souligné l’importance de créer un environnement propice à l’épanouissement des petites et moyennes entreprises (PME), lesquelles constituent l’épine dorsale des économies mondiales.  Loin de se limiter aux multinationales, le secteur privé est composé à 90% de PME, qui comptent pour 70% des emplois à travers le monde.  Ces dernières sont donc essentielles pour assurer la croissance de l’emploi et l’essor du travail décent, a insisté Mme Gopaul.  Or, l’un des plus grands problèmes auxquels se heurtent les PME, c’est la bureaucratie, ce qui conduit la plupart d’entre elles à demeurer cantonnées dans l’économie informelle.  Par ailleurs, les compétences techniques risquant de devenir obsolètes dans un délai moyen de trois ans, il est indispensable de les renouveler.  Considérant qu’un multilatéralisme inclusif est essentiel pour permettre le développement à l’international de ces PME, l’experte a indiqué que toutes les parties prenantes doivent être incluses dans les négociations, les fédérations d’employeurs comme les organisations syndicales.  Mme Gopaul a d’ailleurs annoncé que l’organisation qu’elle représentante a rejoint un forum de partenariats pour permettre aux fédérations d’employeurs et aux coordinateurs résidents de l’ONU de coopérer au niveau local. 

Dialogue interactif 

En réponse à une question de l’Institut pour une synthèse planétaire, la Vice-Présidente de la Confédération syndicale internationale a insisté sur l’importance de disposer de données qualitatives et quantitatives exhaustives permettant d’élaborer des programmes sociaux porteurs de changement. Pour ce faire, la Représentante spéciale de l’OIE a insisté sur l’importance de collecter ces données au niveau local, avant de mener des analyses spécifiques à chaque pays, un projet auquel le secteur privé est attaché. 

Pour le Président du Club de Madrid, le Sommet social mondial de 2025 sera l’occasion de partager des solutions innovantes concernant le développement social, avec la participation de l’ensemble des parties prenantes.  À cet égard, le Président et Directeur général de NCBA CLUSA a fait valoir que les entreprises qui sont contrôlées et qui bénéficient aux personnes qui les utilisent plutôt qu’à des investisseurs externes constituent un exemple de bonne gouvernance.  En définitive, a conclu la Coordonnatrice nationale de WorldWIDE Network Nigeria, dès que nous aurons compris que « la pauvreté a un visage de femme », cette question saura trouver sa réponse.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les membres du Conseil de sécurité s’inquiètent de la décision unilatérale du Kosovo d’imposer l’usage de l’euro

9545e séance – après-midi
CS/15582

Les membres du Conseil de sécurité s’inquiètent de la décision unilatérale du Kosovo d’imposer l’usage de l’euro

Le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, pour une séance consacrée à la situation au Kosovo, à la demande de la Serbie et en la présence de son Président Aleksandar Vučić, avec en outre la participation de M. Albin Kurti, qui dirige le Kosovo.  Soutenue par la Fédération de Russie, la Serbie souhaitait débattre des tensions croissantes au Kosovo, qui font suite à une décision monétaire de Pristina potentiellement lourde de conséquences pour la stabilité du pays et la poursuite du dialogue Belgrade-Pristina initié en mars 2011 et facilité par l’Union européenne (UE). 

Le 27 décembre dernier, a relaté dans son exposé la Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Mme Caroline Ziadeh, la Banque centrale du Kosovo a annoncé une nouvelle politique visant à contrôler la quantité d’espèces en circulation sur son sol.  Conséquence de cette politique entrée en vigueur le 1er février: l’euro est devenu la seule monnaie valable pour les transactions en espèces au Kosovo.  « Les explications au public ont été très limitées », a-t-elle pointé.  Or, depuis 1999, le dinar serbe était de facto la principale monnaie pour les transactions dans les zones à majorité serbe. 

Du fait de cette décision, « des dizaines de milliers de personnes sont touchées, tout comme l’économie, qui dépend de leur pouvoir d’achat », a rapporté la Représentante spéciale.  Le nouveau règlement prive de facto de salaire de nombreux Serbes du Kosovo, et pourrait asphyxier plusieurs pans du service public financé par la Serbie en dinars, tels que le fonctionnement des écoles.  « Quels que soient le camp qui les adopte et les justifications avancées, et en l’absence de communications publiques sans ambiguïté, de telles actions augmentent, comme on pouvait s’y attendre, un environnement d’insécurité et de méfiance », a déploré Mme Ziadeh, soulignant, « comme de nombreux partenaires internationaux », que ces questions relevaient des accords de Bruxelles de 2013 et 2015, et « devraient donc faire l’objet de négociations plutôt que d’une action unilatérale ».  La Cheffe de la MINUK a aussi rapporté des faits de violences commis contre la minorité serbe.

S’exprimant après elle, le Président Vučić, qui a déclaré ne pas reconnaître l’indépendance du Kosovo, a accusé les autorités de Pristina d’avoir créé des conditions de vie insupportables pour les Serbes du Kosovo et de se livrer à des persécutions. La Serbie payait 60 946 salaires et pensions de retraites en dinars, ainsi que 2 430 bourses d’études, et finançait des soupes populaires pour environ 2 000 citoyens. La décision de la « soi-disant Banque centrale du Kosovo » est « une attaque » contre la population serbe, s’est emporté le Président, qui a aussi fait remarquer que l’UE n’a jamais donné son accord préalable à la décision des autorités de Pristina.  Évoquant en outre de nombreux faits de violences à l’encontre de la minorité serbe du Kosovo, il a accusé Pristina de « nettoyage ethnique ».

« Mensonges », a rétorqué Alban Kurti face à ces graves accusations, arguant que sur le plan politique, les minorités du Kosovo, qui ne représentent que 4% de la population, occupent néanmoins 20 sièges parlementaires sur 120.  De plus, un quart des municipalités sont dirigées par des Serbes, dont la langue est une langue officielle du Kosovo, avec l’albanais. Les transferts de fonds depuis la Serbie sont toujours possibles, a-t-il assuré, mettant l’accent sur la volonté de « protéger les citoyens du Kosovo, y compris les Serbes, contre le blanchiment d’argent et la criminalité organisée ».  Il a accusé au passage Belgrade de financer des « terroristes » au Kosovo. 

Parmi les membres du Conseil qui reconnaissent le Kosovo comme nation souveraine, plusieurs se sont ouvertement inquiétés de la décision de la Banque centrale.  Ainsi, si le Japon a dit pouvoir entendre les motivations derrière la mesure (lutte contre la fausse monnaie et le blanchiment, transparence des flux monétaires), son caractère discriminatoire l’a rebuté, à l’instar de la République de Corée et du Guyana, inquiets de son impact sur la vie et le bien-être de la minorité serbe du Kosovo.  Pour Malte, la décision de la Banque centrale kosovare déstabilise la situation, sape le dialogue Belgrade-Pristina et augmente le risque de violences dans la région.  Le Royaume-Uni a enjoint le Kosovo de respecter son caractère multiethnique consacré dans sa Constitution et les États-Unis lui ont recommandé de reporter l’application de la décision. 

« Au nom de la paix et de la stabilité », la Chine a, elle, demandé tout simplement d’abroger la nouvelle réglementation, invoquant son caractère néfaste pour les Serbes du Kosovo.  La Fédération de Russie est allée plus loin, en affirmant que la décision n’était pas monétaire, mais politique.  Pour la délégation russe, les mesures adoptées s’assimilent à des persécutions anti-Serbes, voire à du nettoyage ethnique. 

La Slovénie voisine, anciennement partie de la Yougoslavie, a estimé que « la Serbie et le Kosovo ont tous deux leur place dans l’Union européenne », mais que la normalisation des relations est essentielle s’ils aspirent toujours à y adhérer.  Préoccupée de l’impact potentiel de cette décision, elle a conseillé au Gouvernement du Kosovo d’informer et de consulter les Serbes du Kosovo à l’avenir avant de prendre de telles décisions affectant leur quotidien.  Enfin, pour l’Équateur, les parties doivent respecter leurs engagements, y compris celui de créer une association de municipalités à majorité serbe.

 

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ (S/2024/134)

Déclarations

S’exprimant par visioconférence, Mme CAROLINE ZIADEH, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a d’abord dressé un tableau de la situation politique sur le territoire.  Des accords convenus à Bruxelles entre la Serbie et le Kosovo au début de 2023 ont ouvert la voie à des négociations et à un engagement mutuel, mais, faute d’entente sur le calendrier de mise en œuvre, les progrès ont été bloqués.  La Représentante spéciale a fait état de la tenue d’élections partielles dans quatre municipalités du nord du Kosovo où à peine 3,47% des électeurs éligibles ont voté, ainsi que d’affrontements autour des bâtiments de ces municipalités, le 29 mai, ayant fait d’importants blessés parmi les civils ainsi que parmi les 93 membres de la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR).  En outre, un « grave incident » survenu à Banjska/Banjskë le 24 septembre a « entraîné des morts » et fait toujours l’objet d’une enquête. 

Malgré une certaine dynamique positive –des progrès en matière d’immatriculation des véhicules et de la feuille de route énergétique, entre autres-, les actions unilatérales sur des questions relevant clairement du processus de dialogue politique sont très préoccupantes: « quels que soient le camp qui les adopte et les justifications avancées, et en l’absence de communications publiques sans ambiguïté, de telles actions augmentent, comme on pouvait s’y attendre, un environnement d’insécurité et de méfiance », a-t-elle formulé.

Résumant les faits, Mme Ziadeh a expliqué que le 27 décembre 2023, la Banque centrale du Kosovo avait annoncé qu’à compter du 1er février 2024, la seule monnaie autorisée pour les transactions en espèces au Kosovo serait l’euro.  Les explications au public ont été très limitées, a-t-elle noté.  Or, depuis 1999, le dinar serbe était de facto la principale monnaie pour les transactions en espèces et commerciales dans les zones du Kosovo à majorité serbe.  Conséquence: des dizaines de milliers de personnes sont touchées par cette décision, tout comme l’économie, qui dépend de leur pouvoir d’achat.  Plus précisément, le nouveau règlement de la Banque centrale bloque le paiement des personnes employées par les institutions financées par la Serbie, de certaines subventions agricoles et sociales, ainsi que celui de bénéficiaires de pensions serbes et yougoslaves.  Les petites et moyennes entreprises, les services de santé et d’éducation, y compris les services de garde d’enfants, seront également gravement touchés, car ils reçoivent eux aussi depuis longtemps leurs fonds de la Serbie. 

En réponse à ces préoccupations évidentes, les autorités du Kosovo ont annoncé le 6 février une période transitoire d’un mois, accompagnée d’une campagne de communication, a indiqué Mme Ziadeh.  Cependant, a-t-elle pointé, toutes les inquiétudes ne semblent pas être résolues concernant les flux de trésorerie en dinars, puisqu’un camion de transfert d’argent s’est vu empêcher d’entrer au Kosovo le 7 février, tandis que quelque 4 millions de dinars ont été confisqués par la police du Kosovo le 3 février dans la municipalité de Pejë/Peć.

Mme Ziadeh a souligné, « comme de nombreux partenaires internationaux », que ces questions relèvent des accords de Bruxelles de 2013 et 2015 et « devraient donc faire l’objet de négociations plutôt que d’une action unilatérale ». 

La Cheffe de la MINUK a également évoqué des événements survenus les 26 janvier et 2 février: la police du Kosovo a mené des opérations visant les installations utilisées par la communauté serbe non majoritaire dans plusieurs municipalités.  La police du Kosovo a annoncé la saisie de divers documents; des bâtiments ont été scellés; du personnel arrêté pour interrogatoire, puis relâché.  Lors d’une précédente opération de police le 2 janvier, une équipe de journalistes de Radio Goraždevac, seul média serbe du Kosovo dans la région, a déclaré avoir été interpellée et fouillée alors qu’elle avait présenté des accréditations de presse valides.  La MINUK accorde la plus haute importance à garantir la liberté d’expression, a souligné sa Cheffe en prévenant que ni la nouvelle réglementation de la Banque centrale du Kosovo ni ces récentes opérations de police ne contribueront à une baisse des tensions.

Mme Ziadeh a de nouveau appelé Pristina et Belgrade à s’engager activement et de bonne foi dans le dialogue facilité par l’Union européenne (UE).  Des efforts continus pour instaurer et augmenter la confiance et le respect mutuels constituent la seule voie viable vers la stabilité, la prospérité et la sécurité, a conclu la Représentante spéciale. 

M. ALEKSANDAR VUČIĆ, Président de la République de Serbie, a indiqué avoir demandé la convocation de cette réunion à cause de la situation sur le territoire du Kosovo-Metohija, qui est « contraire à la Charte des Nations Unies et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité ».  Il a en effet accusé les institutions provisoires d’administration autonome de Pristina d’avoir créé sur le territoire concerné des conditions de vie insupportables pour les Serbes et de se livrer à des attaques systématiques généralisées et à des persécutions contre les civils serbes. Une telle situation, en l’absence de réaction appropriée, pourrait entraîner des dommages irréparables pour le peuple serbe au Kosovo-Metohija. 

Ce qui l’a poussé à demander cette réunion, c’est la décision récente de la « soi-disant Banque centrale du Kosovo » d’interdire les transactions de paiement en dinars serbes sur le territoire du Kosovo-Metohija à compter du 1er février, a-t-il rappelé.  Arguant que la survie des Serbes du Kosovo-Metohija dépend dans une large mesure directement et indirectement des avoirs en dinars, qui proviennent en premier lieu du budget de la Serbie, M. Vučić a précisé que son gouvernement payait 60 946 salaires et pensions, en dinars, ainsi que 2 430 bourses d’études, et qu’il finançait des soupes populaires pour environ 2 000 citoyens.  Dès lors, il a jugé que le récente décision est « une attaque » avant tout contre la population serbe, qui rend la situation difficile sur le territoire du Kosovo-Metohija.  Cette décision prive directement un grand nombre de personnes de leurs moyens de subsistance, s’est inquiété le Président en constatant que le « régime d’Albin Kurti » empêche ainsi le fonctionnement de toutes les institutions médicales, éducatives, sociales, culturelles et autres.  C’est pourtant précisément sur ces institutions que repose la création de la Communauté des municipalités serbes, dont les compétences et la structure sont clairement définies dans l’accord sur les principes généraux, signé en 2015, a-t-il rappelé.

Le Président serbe a invité à ne pas oublier que les « soi-disant dirigeants albanais du Kosovo » utilisent le terme « état de droit » uniquement pour nuire aux Serbes et à l’Église orthodoxe serbe.  Il a passé en revue une série d’incidents et d’attaques à caractère ethnique y compris contre l’Église orthodoxe serbe et au sein du système judiciaire.  Il a accusé le « régime de Pristina » de créer des conditions invivables pour la population serbe dans le but ultime de chasser cette communauté du Kosovo-Metohija.  Pour lui, l’euro a été introduit sur le territoire du Kosovo-Metohija en tant que seule monnaie légale « de manière manifestement illégale », puisque cela a été fait par une décision unilatérale des dirigeants politiques de Pristina.  « C’est incontestable » parce que le dinar est la monnaie légale en République de Serbie, et qu’il ne peut donc pas être interdit au Kosovo-Metohija, en tant que partie du territoire de la République de Serbie, qui est placé sous administration internationale par la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité de l’ONU, a-t-il argumenté.  Il a aussi fait remarquer que l’euro est la monnaie de l’UE et que celle-ci n’a pas donné son accord préalablement à la décision des autorités de Pristina. 

Le Président a également fait état d’une détérioration drastique de la situation dans quatre provinces du nord du Kosovo depuis les élections municipales d’avril dernier que les Serbes ont boycottées.  Avec une participation d’à peine 3% des électeurs, les élections se sont déroulées dans des conditions totalement antidémocratiques et les « maires » albanais illégitimes ont occupé par la force les gouvernements locaux autonomes avec l’aide de personnel lourdement armé de la prétendue police spéciale, a expliqué M. Vučić.

Bien que la communauté internationale ait désigné Pristina comme le seul coupable de cette escalade, les autorités de Pristina n’ont pas eu à subir de conséquences graves pour leurs actions, a-t-il déploré.  Il a affirmé que Pristina utilise de plus en plus ouvertement et inconsidérément des formations armées pour persécuter les Serbes.  Ces formations sont composées presque exclusivement d’Albanais du Kosovo et leur existence sur le territoire du Kosovo-Metohija est indéniablement illégale et contraire à la résolution 1244 (1999), a-t-il fait valoir.  « La violence et la persécution que Pristina exerce aujourd’hui ouvertement contre les Serbes font naturellement partie de l’attaque systématique et généralisée à long terme contre la population civile serbe dans l’ensemble du Kosovo-Metohija. »  En conséquence, au cours de la seule année écoulée, plus de 14% des Serbes ont quitté le Kosovo-Metohija, a dénombré le Président.  Il a trouvé cela d’autant plus tragique que Pristina mène ce genre d’actions alors que Belgrade et Pristina mènent depuis de nombreuses années un dialogue avec la médiation de l’UE.  Pour sa part, la Serbie s’oppose à tous les facteurs d’instabilité et s’efforce d’être un solide pilier de stabilité dans la région des Balkans occidentaux, a-t-il assuré. 

Le Président Vučić a espéré qu’après la réunion d’aujourd’hui, même les membres du Conseil de sécurité qui ont reconnu « l’indépendance illégale déclarée unilatéralement par la province du sud de la Serbie » comprendront que les dernières mesures prises par Pristina ne sont pas seulement une tentative de « consolider quelque chose » qu’une grande majorité des membres des Nations Unies, y compris la Serbie, ne reconnaissent pas comme un État, mais qu’elles mettent aussi en danger la paix.  Le Président a conclu en réitérant sa dénonciation de cette nouvelle série d’actes de persécution et de cette attaque systématique et généralisée contre la population serbe, « en un mot, un crime contre l’humanité ».

M. ALBIN KURTI, du Kosovo, a dit avoir du mal à répondre aux allégations de la Serbie, un pays qui a commis un génocide, il y a deux décennies.  Fier d’un Kosovo démocratique, multiethnique, respectueux des droits humains et indépendant depuis 16 ans, le Chef du Gouvernement a vanté les performances économiques, dont le taux de croissance de 6,2% et les 21 places gagnées dans l’indice sur la corruption.  Sur le plan politique, les minorités occupent 20 sièges sur 120 au Parlement alors qu’elles ne représentent que 4% de la population.  Vingt-cinq pour cent des municipalités sont dirigées par des Serbes dont la langue est une langue officielle du Kosovo avec l’albanais.  L’accusation de nettoyage ethnique est donc un mensonge.  C’est la Serbie qui a rayé de ses registres administratifs plus 400 000 albanais, y compris de la liste électorale.  Elle est aussi le seul pays européen à n’avoir pas condamné la guerre d’agression de Vladimir Putin contre l’Ukraine. 

La décision de la Banque centrale du Kosovo d’abolir le dinar n’empêche en rien le Gouvernement serbe d’apporter une aide financière aux Serbes du Kosovo, a affirmé le Chef du Gouvernement.  La Banque centrale a d’ailleurs fait à sa consœur de la Serbie une proposition d’accord sur le transfert de fonds.  Sa décision, a-t-il expliqué, vise tout simplement à protéger les citoyens du Kosovo, y compris les Serbes, contre le blanchiment d’argent et la criminalité organisée. L’on ne saurait en effet laisser Belgrade financer indéfiniment les terroristes au Kosovo.  Insistant sur le fait que la décision de la Banque centrale va stopper le transfert illégal de « sacs d’argent » à ces terroristes, il a mis au défi le Président de la Serbie de signer « ici et maintenant » l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina. 

Le représentant de la Fédération de Russie a accusé les autorités du Kosovo d’agir de manière « monstrueuse » contre les « Serbes de souche ». Dans le but d’établir un contrôle total sur le nord de la région et de se débarrasser de la population non albanaise, les autorités de Pristina ont lancé une véritable « terreur anti-Serbes », afin de forcer les Serbes du Kosovo à quitter pour toujours leurs lieux ancestraux.  Américains et Européens flattent Pristina, a tancé le délégué, alors même que les politiques menées au Kosovo-Metohija évoquent un « nettoyage ethnique » et que les « défenseurs autoproclamés » des droits de l’homme ferment les yeux.  Plus de 14% des Serbes ont quitté la région, au cours de l’année écoulée, a affirmé le représentant. 

La décision de Pristina d’interdire le dinar serbe est « illégale, criminelle et perfide », puisqu’environ 100 000 non-Albanais pourraient se retrouver sans pension de retraite ni salaire.  La décision relève d’une mesure politique et discriminatoire qui torpille tous les efforts de la communauté internationale pour trouver un compromis et des solutions durables dans le dialogue entre Belgrade et Pristina.  Le plus choquant, a-t-il estimé, est la volonté de Pristina de saboter la mise en œuvre de son propre engagement à former au Kosovo-Metohija une communauté de municipalités dans laquelle la population serbe serait majoritaire.  Pourtant, il s’agit d’un mécanisme inscrit dans les accords de Bruxelles. L’anarchie règne dans la région, a affirmé le représentant, accusant l’UE et les États-Unis d’en être responsables. La seule façon d’établir la paix serait de développer une solution juridique internationale durable et mutuellement acceptable pour Belgrade et Pristina, sur la base de la résolution 1244. Un tel dénouement doit être approuvé par le Conseil de sécurité.

Le représentant de Malte a souligné que les actions unilatérales mises en œuvre sans notification, ni consultation en bonne et due forme, en particulier celles qui touchent directement les minorités ethniques, ne font que déstabiliser la situation et augmenter le risque de violence dans la région.  Il s’est félicité du fait que depuis l’annonce de la Banque centrale, le Gouvernement du Kosovo a pris en compte les préoccupations soulevées et s’est engagé en faveur d’une période de transition et d’une campagne de communication concernant l’impact de la réglementation.  Il est important que ce délai soit suffisamment long pour permettre à toutes les personnes concernées d’accéder à des modes de paiement alternatifs, a-t-il estimé.

Le délégué a ensuite souligné que la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie reste le seul moyen de garantir la sécurité et la stabilité dans la région, en appelant au dialogue et à la collaboration.  Toute action ayant potentiellement des conséquences doit être dûment discutée de manière transparente avec toutes les parties prenantes et négociée de manière appropriée dans le cadre du dialogue facilité par l’UE, a-t-il affirmé.

La représentante des États-Unis a exhorté la Serbie et le Kosovo à éviter les mesures unilatérales susceptibles d’aggraver les tensions.  Les deux parties doivent poursuivre le dialogue, sous la houlette de l’Union européenne, et non au Conseil de sécurité.  Quant à la décision de la Banque centrale du Kosovo, elle a estimé qu’elle a été prise sans préparation ni consultations adéquates avec la population locale.  Il faut donc reporter sa mise en œuvre, en attendant que des conditions favorables soient réunies.  La représentante s’est également dite préoccupée par des mesures unilatérales du Gouvernement du Kosovo comme les opérations de maintien de l’ordre, dans les municipalités serbes, ce qui constitue une violation des engagements de coopération pris sous la houlette de l’Union européenne. 

Le Conseil de sécurité, a-t-elle insisté, n’est pas le lieu idoine pour régler ces problèmes. Elle a en revanche d’attiré l’attention de ses homologues sur les menaces à la paix et la sécurité provenant de l’extérieur du Kosovo.  Elle a ainsi condamné les attaques coordonnées de paramilitaires serbes à la frontière, le 24 septembre, dont l’auteur est toujours libre en Serbie, au lieu d’être traduit en justice.  La Serbie, a-t-elle conseillé, doit travailler avec la KFOR afin de prévenir toute autre attaque de ce type.  Elle a conclu, en soulignant que le dialogue entre Belgrade et Pristina, sous la houlette de l’Union européenne, est le meilleur mécanisme de règlement de toutes les questions en suspens.  Il est temps de mettre en œuvre les accords juridiquement contraignants, a-t-elle conclu. 

Le représentant du Royaume-Uni a salué les progrès accomplis par le Kosovo en tant qu’État souverain, mais a déploré les tensions actuelles.  Les deux parties, a-t-il dit, doivent honorer leurs engagements sous les auspices de l’Union européenne, et le Royaume-Uni continuera d’épauler ces objectifs.  Le Kosovo et la Serbie doivent éviter toute action unilatérale sapant la poursuite du dialogue.  Dans ce cadre, il revient au Kosovo d’exercer ses compétences souveraines, dans le respect de sa nature multiethnique consacrée par sa Constitution.  Or, a pointé le représentant, la Banque centrale n’a pas tenu compte des effets de ses mesures sur les minorités.  Il est important que tous les Serbes du Kosovo continuent d’être rémunérés, dans l’attente d’une solution pérenne.  Enfin, le délégué a appelé la Serbie à assumer les responsabilités liées à l’attaque du 24 septembre, dont les auteurs doivent être traduits en justice.

Notant la décision de la Banque centrale du Kosovo, le représentant de la Chine a souligné que l’escalade des tensions, y compris interethniques, menacent la paix et la stabilité des Balkans, ce qui n’est dans l’intérêt de personne.  Au nom de cette paix et de cette stabilité, il a demandé aux institutions provisoires d’administration autonome d’abroger la décision de la Banque centrale, compte tenu de son caractère néfaste pour les Serbes du Kosovo.  Les mesures unilatérales ne sauraient contribuer à l’apaisement, a dit le représentant, avant de souligner que son pays appuiera toujours ceux qui s’efforcent de trouver une solution politique mutuellement acceptable par la voie du dialogue et dans le cadre de la résolution 1244 (1999). 

Pour la représentante de la Slovénie, les deux parties doivent maintenir leur engagement en faveur du dialogue facilité par l’UE et de la normalisation de leurs relations sous son égide.  « La Serbie et le Kosovo ont tous deux leur place dans l’Union européenne », a déclaré la déléguée slovène, en ajoutant cependant que la normalisation des relations était essentielle s’ils aspiraient toujours à y adhérer.

S’agissant de la décision de la Banque centrale du Kosovo, elle a bien noté qu’elle visait à renforcer la transparence financière et à lutter contre le blanchiment d’argent. Elle a toutefois exprimé sa préoccupation quant à l’impact potentiel de cette décision sur le soutien financier apporté aux Serbes du Kosovo.  Elle a donc conseillé au Gouvernement du Kosovo d’informer et de consulter les Serbes du Kosovo avant de prendre de telles décisions affectant leur quotidien: le Kosovo devrait fournir toutes les informations et le soutien nécessaires pour assurer une transition en douceur.  La représentante a aussi appelé les deux parties à s’abstenir de toute action unilatérale susceptible d’entraver les efforts en cours vers la normalisation des relations.

Enfin, certaines inquiétudes demeurent quant à la lenteur de l’avancement du rapport sur l’attaque de Banjska survenue en septembre dernier.  Les auteurs doivent être tenus responsables, a-t-elle souligné, ajoutant que la violence contre le personnel de la KFOR était « inacceptable » et que le renforcement de l’indépendance du système judiciaire et des institutions chargées de garantir l’état de droit était crucial pour garantir l’établissement des responsabilités.

Le représentant de l’Algérie s’est dit préoccupé par la décision unilatérale qu’a prise le Kosovo sans consulter préalablement les autorités Serbes.  Livrant trois messages, il a d’abord estimé qu’il est urgent d’éviter l’escalade et toute mesure susceptible de provoquer des tensions ethniques.  Les Serbes doivent pouvoir recevoir des fonds sans retard ni obstacle.  Le représentant a ensuite appelé au rétablissement de la confiance entre les deux parties et à une représentation effective des Serbes dans les institutions locales.  Les autorités du Kosovo, a-t-il conseillé, doivent prendre les mesures nécessaires pour établir une communauté de municipalités serbes, comme le prévoient les accords de Bruxelles de 2013.  Saluant les efforts de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour stabiliser la situation, le délégué a conclu, en encourageant le dialogue, sous l’égide de l’Union européenne, pour faire avancer le processus politique de façon pacifique, conformément au principe de subsidiarité entre les nations unies et les organisations régionales. 

Le représentant de la France a exprimé sa préoccupation quant aux actions récentes du Kosovo sur la monnaie et les opérations de la police kosovare aboutissant à la fermeture de structures parallèles serbes dans le sud et dans l’est du Kosovo.  Ces décisions auront des conséquences négatives sur la vie quotidienne de la communauté serbe au Kosovo, notamment sur l’accès aux services sociaux, a-t-il noté, avant d’appeler à la suspension immédiate de la décision de la Banque centrale du Kosovo afin d’assurer une période de transition suffisante. 

Il a salué la déclaration hier du « Premier Ministre Kurti » qui a reconnu qu’une période de transition était nécessaire.  Elle doit maintenant être suivie d’effets sur le terrain, a-t-il souligné.  Il a également rappelé que le statut des structures parallèles serbes doit être résolu exclusivement à travers la création de l’association des municipalités à majorité serbe.

Le représentant a ensuite réaffirmé son soutien à la perspective d’intégration européenne de la Serbie et du Kosovo.  Il n’y a pas d’alternative, ni pour la Serbie ni pour le Kosovo, que de parvenir à un accord qui règle de manière durable le différend entre les deux pays.  Et c’est exclusivement dans le cadre du dialogue facilité par l’UE que les problèmes qui surviennent doivent être résolus, a-t-il souligné.

Le représentant du Mozambique s’est positionné contre toute action, de quelque acteur que ce soit, susceptible de priver les populations des besoins fondamentaux et des ressources nécessaires à leur survie.  À cet égard, il a exhorté les parties à mesurer l’impact de leurs décisions, et à s’abstenir de toute action contraire à l’esprit de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, ainsi qu’à la Charte des Nations Unies.  La promotion de la paix et de la réconciliation au Kosovo et dans la région revêtant une importance capitale, le représentant a appelé les parties à tout mettre en œuvre pour trouver des solutions par des moyens politiques et diplomatiques.

Dans l’intérêt des populations de la région, le représentant du Japon a encouragé les parties à éviter toute action susceptible de conduire à une nouvelle escalade.  Prenant note de la récente réglementation de la Banque centrale du Kosovo sur les opérations en espèces, il a dit comprendre que cette mesure a été mise en œuvre dans le cadre de la lutte contre la fausse monnaie et le blanchiment d’argent, afin de garantir la transparence des flux monétaires.  Ceci étant, le représentant s’est dit préoccupé par l’impact de cette réglementation sur la vie quotidienne des nombreux Serbes du Kosovo qui utilisent le dinar et qui pourraient donc être désavantagés.  S’il a dit comprendre que le Kosovo, en tant que nation souveraine, nécessite de telles mesures, le représentant a néanmoins estimé que les politiques qui affectent directement la vie des citoyens ne doivent pas être prises dans la précipitation mais soutenues par une communication claire et transparente.  Par conséquent, il s’est associé aux ambassades du Quint –États-Unis et Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni, ainsi qu’à d’autres membres de la communauté internationale qui demandent au Kosovo de procéder avec prudence, d’éviter d’accroître les tensions et de s’attaquer à l’impact de la réglementation. Le délégué a réaffirmé que le dialogue entre Belgrade et Pristina, facilité par l’Union européenne, contribuera à la paix et à la stabilité dans les Balkans occidentaux. 

Le représentant de la Suisse a rappelé à la Serbie et au Kosovo leur responsabilité de s’abstenir de mesures et d’actions susceptibles d’aggraver la situation. Les pistes pour édifier la confiance existent, a-t-il souligné en parlant du dialogue facilité par l’Union européenne qui, selon la délégation, est le cadre dans lequel les deux parties peuvent et doivent aborder les questions litigieuses.  Cela comprend la mise en œuvre du nouveau règlement introduit par la Banque centrale du Kosovo.  La Suisse reconnaît la légitimité des objectifs poursuivis par ce règlement, notamment la transparence des flux financiers et la lutte contre la contrefaçon et le blanchiment d’argent.  Elle partage toutefois les préoccupations quant à la communication sur la décision de la Banque et surtout sa mise en œuvre à court terme, a expliqué son représentant. 

Les actions non concertées avec les populations concernées, perçues comme une mesure délibérément restrictive à l’égard d’un groupe ethnique en particulier, peuvent miner la confiance, a-t-il mis en garde, avant de saluer l’annonce du Gouvernement et de la Banque centrale du Kosovo selon laquelle une période transitoire est prévue, tout comme une communication renforcée.  Le délégué a appelé les autorités du Kosovo à mettre en œuvre ces engagements et à renforcer le dialogue avec la population serbe du Kosovo, directement concernée par ce règlement.  Des efforts accrus du Kosovo et de la Serbie, et notamment de leurs dirigeants, sont nécessaires pour trouver des compromis, a-t-il insisté en leur rappelant que la construction de relations de bon voisinage exige surtout que les deux parties mettent en œuvre leurs engagements au titre de l’accord de Bruxelles et l’accord d’Ohrid de 2023. 

Le représentant de la République de Corée a regretté que l’accord sur la négociation d’un règlement visant à normaliser les relations entre le Kosovo et la Serbie sur la base de la proposition de l’UE, de février 2023, n’ait pas conduit à un règlement du conflit.  Au contraire, a-t-il relevé, la situation dans le nord du Kosovo, où vivent plus de 100 000 personnes d’origine serbe, s’est aggravée à cause d’incidents sporadiques.  Il s’est également inquiété de la récente réglementation de la Banque centrale du Kosovo sur les transactions monétaires.  Tout en concédant que celle-ci vise à renforcer la stabilité financière et la transparence au Kosovo, il a noté que de nombreux résidents serbes du Kosovo reçoivent encore un soutien financier, sous forme de salaires et de pensions, de la part de la Serbie.  Cette mesure pourrait donc avoir un impact négatif direct sur la capacité de la Serbie à leur fournir des services financiers et sur leur accès aux services sociaux de base.  Il a salué la décision du Kosovo de suspendre la mise en œuvre de cette réglementation. De telles questions devraient faire l’objet d’un débat approfondi dans le cadre du dialogue facilité par l’UE, a-t-il estimé.

Le représentant de la Sierra Leone a appelé les dirigeants politiques du Kosovo et de la Serbie à engager un dialogue constructif pour garantir la réalisation de réformes institutionnelles cruciales favorables à la paix et une vie normale pour tous les habitants du Kosovo.  Il a appelé les autorités du Kosovo à suspendre la décision de supprimer progressivement le dinar serbe afin de favoriser le dialogue et désamorcer les tensions dans l’objectif de favoriser la réconciliation nationale. Il a exhorté les dirigeants politiques des deux parties à s’engager en faveur de la mise en œuvre de l’accord de Bruxelles de 2013 et de la proposition du 27 février 2023 négociée par l’UE, qui trace la voie à suivre vers la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo.

Le représentant de l’Équateur a relevé que la récente mesure éliminant l’utilisation du dinar serbe dans les zones du Kosovo habitées majoritairement par des Serbes risque d’avoir un impact sur les services publics, notamment les écoles et les hôpitaux, ainsi que sur les droits fondamentaux des communautés concernées. 

Dans ce contexte, le délégué a souligné l’importance de répondre aux préoccupations humanitaires et sécuritaires touchant les populations de la région, conformément aux principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et à la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité.  Jugeant essentiel d’éviter les actions ou les discours susceptibles d’exacerber les tensions ou de contribuer à l’instabilité dans la région, il a encouragé la résolution des questions en suspens dans le cadre du dialogue facilité par l’UE.  Les parties doivent respecter leurs engagements, y compris celui de créer une association de municipalités à majorité serbe. 

La représentante du Guyana s’est inquiétée des répercussions négatives des récents événements au Kosovo sur la vie et le bien-être de la minorité serbe.  Elle a souligné l’importance de promouvoir des politiques qui répondent aux besoins et aux préoccupations de toutes les personnes, y compris les minorités ethniques.  À cet égard, la déléguée a salué les efforts déployés par l’UE pour faciliter le dialogue en cours entre les parties, y voyant un moyen essentiel pour parvenir à un règlement final qui permettrait à tous les habitants du Kosovo et de la Serbie de vivre côte à côte dans la paix et la prospérité.  La déléguée a dit être préoccupée par l’impasse actuelle et par la possibilité d’un recul dans la mise en œuvre des dispositions convenues dans le cadre de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie.  Elle a plaidé pour un engagement renouvelé en faveur du dialogue Belgrade-Pristina mené par l’UE avant d’appeler le Kosovo à appliquer les principes de démocratie, à protéger les droits humains de l’ensemble de sa population et à respecter l’état de droit.

Dans une reprise de parole, le Président de la Serbie a refusé de répondre aux attaques et autres insultes personnelles entendues aujourd’hui.  S’agissant des accusations de contrefaçon et de blanchiment d’argent, il a déclaré que les « sacs d’argent » qui passent la frontière sont transportés par Henderson, une entreprise britannique légalement enregistrée. En réponse à la Sierra Leone et à la République de Corée, le Président a précisé que la mise en œuvre de la décision de la Banque centrale du Kosovo n’a jamais été suspendue.  La Serbie, a-t-il souligné, est un pays démocratique qui a dûment condamné les événements du 24 septembre.  En revanche, le Président a accusé Pristina de persécuter les Serbes qui ont vécu toute leur vie au Kosovo.  Il a remercié les 109 États Membres qui n’ont pas reconnu l’indépendance du Kosovo et souligné que la Serbie n’est pas un pays satellite aux mains de la Fédération de Russie.  Nous ne sommes la marionnette de personne, ni des États-Unis ni de la Fédération de Russie ni de quiconque, et ce sera toujours le cas. 

Reprenant la parole, M. Kurti, du Kosovo, a précisé que le dinar n’a pas été interdit au Kosovo et que les Serbes sont libres d’en posséder, mais que l’euro est désormais la seule monnaie valide pour effectuer des paiements. Les subventions et programmes sociaux sont déjà versés en euros dans les localités à majorité serbe du Kosovo.  Le Monténégro voisin, où le quart de la population se définit comme serbe, utilise également l’euro, a-t-il noté.  « Les Serbes ordinaires ne détestent pas l’euro. »  M. Kurti a indiqué son intention de s’adresser aux Serbes dans leur langue afin qu’ils comprennent le sens de cette décision, exprimant aussi son désir de collaborer avec eux.  Si les différences ethniques ne mènent pas au conflit, elles peuvent en revanche être instrumentalisées à des fins politiques, a-t-il prévenu.  « L’intervention de l’OTAN nous a sauvés » d’une catastrophe humanitaire en 1999, a-t-il rappelé, et la Cour internationale de Justice (CIJ) a confirmé que l’indépendance du Kosovo n’était pas contraire au droit international.  « La Serbie doit cesser d’imaginer que nous allons nous venger », a-t-il ajouté. « Nous ne voulons que la justice. » 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À l’Assemblée générale, le Secrétaire général présente ses priorités en 2024: paix, réforme du Conseil de sécurité, financement du développement

Soixante-dix-huitième session,
54e & 55e séances, matin et après-midi
AG/12582

À l’Assemblée générale, le Secrétaire général présente ses priorités en 2024: paix, réforme du Conseil de sécurité, financement du développement

C’est un Secrétaire général très déterminé qui a présenté, ce matin, devant l’Assemblée générale, ses priorités pour l’année 2024 pour les Nations Unies.  M. António Guterres a placé la paix au cœur de son action.  Il y a greffé la réforme du Conseil de sécurité, le financement du développement et de la lutte contre les effets des changements climatiques. Le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis, arborait lui-même sur sa veste un pin’s bleu avec la mention « 1,5 °C ».  L’Assemblée générale a en outre rendu hommage au Président de la Namibie, Hage Gottfried Geingob, décédé dimanche 4 février, avant d’adopter deux projets de décision et d’entendre une trentaine d’États Membres commenter les priorités énoncées. 

La paix est la raison d’être des Nations Unies, a déclamé son Secrétaire général en présentant le rapport d’activité de l’Organisation et ses priorités de l’année 2024. Pour un monde traversé par des divisions géopolitiques croissantes, dépendant de combustibles fossiles qui menacent la paix et la nature, subissant des guerres des mots, de territoires et des guerres culturelles, M. Guterres a estimé avoir trouvé dans la paix le moyen de sortir de ces crises « à condition d’agir ensemble ». 

Avant d’énumérer ses priorités, le Chef de l’ONU a dit avoir des raisons d’espérer, s’appuyant notamment sur le plan de relance des objectifs de développement durable (ODD), sur les appels à réformer l’architecture financière internationale, sur l’accord sur un traité concernant la haute mer, sur les progrès en matière de justice climatique et sur le Fonds pour les pertes et les préjudices. 

Dans l’immédiat, a pressé M. Guterres, il faut instaurer un cessez-le-feu humanitaire et libérer tous les otages à Gaza.  En Ukraine, il faut une paix juste et durable.  Au Sahel, il a demandé de ne pas relâcher le soutien aux populations, tandis que pour la Corne de l’Afrique, il a recommandé une action collective pour consolider les acquis durement acquis contre les Chabab.  Les combats doivent cesser au Soudan, a encore plaidé le chef de l’ONU avant de s’inquiéter aussi pour le peuple libyen qui mérite une paix et une stabilité durables. 

Poursuivant ses appels à la paix, il a sommé les groupes armés dans l’est de la République démocratique du Congo de déposer les armes.  S’agissant du Yémen, M. Guterres a appelé les parties à se concentrer sur la voie de la paix et à désamorcer les tensions en mer Rouge. Pour ce qui est du Myanmar, il a demandé de toute urgence de tracer la voie vers une transition démocratique et un retour à un régime civil.  Haïti, a-t-il ajouté, doit voir déployer sans délai la Mission multinationale d’appui à la sécurité.  Quant aux Balkans occidentaux, il a recommandé des mesures en faveur de la réconciliation, de la stabilité et de la prospérité économique. 

Puis M. Guterres a demandé aux États Membres de respecter la Charte des Nations Unies qui garantit le droit de chaque individu de vivre dans la paix et la dignité.  Le Nouvel Agenda pour la paix a été élaboré en vue du renouvellement des cadres mondiaux de paix et de sécurité, a insisté le Secrétaire général trouvant inacceptable que le continent africain attende toujours un siège permanent au Conseil de sécurité. Le monde a grand besoin d’une réforme du Conseil de sécurité, a-t-il fait valoir. 

Nous avons besoin de paix, de justice et de nouvelles perspectives économiques, a persisté le Secrétaire général pour qui la réalisation des ODD nécessite 500 milliards de dollars par an pour les pays en développement.  Il a aussi rappelé ses appels à un « nouveau Bretton Woods », aboutissant à une architecture financière internationale capable de répondre aux besoins de tous les pays. 

Les autres outils qu’il a demandé d’utiliser pour construire des économies et des sociétés inclusives, vertes et durables sont la technologie, notamment l’intelligence artificielle, et les énergies renouvelables. Il a exhorté les pays à s’engager d’ici à 2025 à mettre en place de nouveaux plans climatiques nationaux alignés sur la limite de 1,5 °C.  Il a rappelé les besoins financiers pour y parvenir et sollicité à cet égard les pays du G20, qui devraient accélérer l’élimination des combustibles fossiles et clarifier le versement de leurs engagements de 100 milliards de dollars. 

Parmi les obstacles dans ces voies, plusieurs délégations ont soulevé les problèmes de liquidités de l’ONU, comme Cuba qui a demandé de clouer au pilori les États Membres qui ne paient pas leurs contributions statutaires au budget ordinaire de l’ONU.  L’Afrique du Sud s’est inquiétée de l’impact de la crise de liquidités sur la capacité de l’ONU à honorer ses mandats.  La délégation a exhorté l’ensemble des États Membres à s’acquitter pleinement de leurs obligations financières envers l’Organisation, dans les délais et sans conditions. 

En tant que Président de la Commission de consolidation de la paix, le Brésil a également plaidé en faveur d’un financement durable et prévisible des efforts dans ce domaine.  La Croatie a vu dans l’obtention des contributions statutaires pour le Fonds pour la consolidation de la paix des raisons d’être « prudemment optimiste ». 

L’Assemblée générale a également cet après-midi rendu un hommage solennel au Président de la Namibie, Hage Gottfried Geingob, décédé le 4 février, « un homme dont le leadership était admiré partout sur le continent africain », a rappelé le Président de l’Assemblée.  « C’était un homme qui en imposait, tout en arrivant à nouer des liens avec toutes les personnes », a appuyé le Secrétaire général qui a insisté sur son rôle éminent dans la lutte contre l’apartheid. 

Par ailleurs, l’Assemblée générale a autorisé le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes à conclure avec la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties à l’Accord de Paris, un mémorandum d’accord sur l’hébergement du secrétariat du Réseau de Santiago.  Dans une deuxième décision, elle a autorisé la participation d’organisations non gouvernementales, d’organisations de la société civile, d’établissements universitaires et du secteur privé à la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral, qui se tiendra à Kigali, au Rwanda, du 18 au 21 juin.

 

RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR L’ACTIVITÉ DE L’ORGANISATION - (A/78/1)

Exposé du Secrétaire général sur ses priorités pour 2024

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a observé que la paix, qui est la raison d’être des Nations Unies, manque dramatiquement dans un monde traversé par des divisions géopolitiques croissantes.  Pointant la dépendance aux combustibles fossiles qui menace la paix et la nature, il a déploré en particulier les guerres terribles qui tuent et mutilent des civils en nombre sans précédent: « guerre des mots, guerres de territoires et guerres culturelles ».  La paix est le moyen de sortir de ces crises, a réitéré le Secrétaire général en appelant à agir ensemble. 

Il a rappelé que lors du Sommet sur le développement durable, les dirigeants du monde avaient approuvé un plan de relance des objectifs de développement durable (ODD) et reconnu la nécessité de réformer en profondeur l’architecture financière internationale. Les pays sont également parvenus l’an dernier à un accord sur un traité concernant la haute mer, a-t-il salué avant de mentionner aussi des progrès en matière de justice climatique et de miser sur le Fonds pour les pertes et les préjudices.  En outre, le Conseil de sécurité a entendu l’appel pour soutenir les opérations d’imposition de la paix et de lutte contre le terrorisme menées par des partenaires régionaux, notamment l’Union africaine, avec le soutien financier des contributions obligatoires.  Le Secrétaire général a ajouté à cette liste de progrès le nouvel organe consultatif de haut niveau sur l’intelligence artificielle. 

Évoquant le Sommet de l’avenir de septembre prochain, M. Guterres a espéré qu’il permettra de façonner le multilatéralisme pour les années à venir, car le monde a grand besoin d’une réforme du Conseil de sécurité, de la réforme du système financier international, de la participation des jeunes dans la prise de décisions, d’un pacte numérique mondial et d’une réponse internationale aux chocs mondiaux complexes.  Les États Membres sont au centre de cet effort essentiel et la paix, a rappelé le Secrétaire général. 

« Les millions de personnes victimes des conflits qui réclament la paix attendent une action. »  Dans l’immédiat, il faut instaurer un cessez-le-feu humanitaire et libérer tous les otages à Gaza, a prié M. Guterres en espérant que cela conduise à des actions irréversibles en faveur d’une solution à deux États.  « En Ukraine, il faut une paix juste et durable. »  Passant au Sahel, il a demandé de ne pas relâcher le soutien aux populations, tandis que pour la Corne de l’Afrique, il a recommandé une action collective pour consolider les acquis durement obtenus contre les Chabab et préserver le principe de l’intégrité territoriale.  Les combats doivent cesser au Soudan avant qu’ils ne détruisent encore plus de vies et ne se propagent, a encore plaidé le Chef de l’ONU. 

Le peuple libyen, a-t-il poursuivi, mérite une paix et une stabilité durables, à commencer par un engagement en faveur d’élections libres et équitables.  Dans l’est de la République démocratique du Congo, les groupes armés doivent déposer les armes et les dirigeants régionaux doivent dialoguer.  Au Yémen, M. Guterres a appelé les parties à se concentrer sur la voie de la paix et à désamorcer les tensions en mer Rouge.  Venant à la situation au Myanmar, il a demandé de toute urgence de tracer la voie vers une transition démocratique et un retour à un régime civil.  En Haïti, la Mission multinationale d’appui à la sécurité doit être déployée sans délai avec le soutien financier nécessaire des États Membres.  Dans les Balkans occidentaux, des mesures en faveur de la réconciliation, de la stabilité et de la prospérité économique dans toute la région sont nécessaires. 

Pour M. Guterres, le respect par les États Membres de la Charte des Nations Unies garantit le droit de chaque individu de vivre dans la paix et la dignité.  Regrettant l’impasse au Conseil de sécurité, il a dénoncé la reprise des rivalités entre États pour améliorer leurs arsenaux nucléaires alors que les besoins humanitaires mondiaux n’ont jamais été aussi élevés, que le financement fait défaut et que les travailleurs humanitaires continuent leur tâche au prix de leurs vies.  Le Secrétaire général a rendu hommage au personnel humanitaire à Gaza. 

Le Nouvel Agenda pour la paix a été élaboré en vue du renouvèlement des cadres mondiaux de paix et de sécurité, a insisté M. Guterres estimant inacceptable que le continent africain attende toujours un siège permanent au Conseil de sécurité.  Il a détaillé les objectifs de cet agenda qui vise notamment à atténuer l’impact de la concurrence géopolitique.  Le Secrétaire général a plaidé pour que les missions de maintien de la paix soient dotées de mandats réalistes et de stratégies de transition et de sortie bien définies.  Le Nouvel Agenda pour la paix exhorte à la réglementation de l’utilisation des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle dans le domaine militaire, a-t-il aussi rappelé. 

M. Guterres a dénoncé la propagation des désinformations et de la haine à l’ère numérique, en soulignant les efforts de l’ONU pour décupler les investissements en faveur de la cohésion sociale et de la sécurité des personnes.  Il faut renouveler le contrat social, fondé sur la confiance, la justice et l’inclusion, et ancré dans les droits humains et la participation des femmes.  Estimant que les entreprises technologiques doivent cesser de tirer profit de la propagation de la désinformation, il a parlé du Code de conduite pour l’intégrité de l’information sur les plateformes numériques, qui sera publié avant le Sommet de l’avenir. 

Au-delà des tensions dans le monde, nous avons besoin de paix, de justice et de nouvelles perspectives économiques, a persisté le Secrétaire général pour qui la réalisation des ODD demande des avancées dans deux domaines, à commencer par la finance: 500 milliards de dollars par an sont nécessaires pour un financement à long terme pour les pays en développement.  Il faut accroître considérablement et immédiatement le capital et la capacité des banques multilatérales de développement et aider les économies en développement à se remettre sur les rails, a-t-il pressé. 

Le deuxième domaine est le « nouveau Bretton Woods »: il faut une architecture financière internationale capable de répondre aux besoins de tous les pays.  Le Sommet de l’avenir se penchera sur la nécessité de rendre les institutions et les cadres financiers véritablement universels et inclusifs. Nous devons exploiter le pouvoir de la technologie pour faire progresser les ODD, a dit M. Guterres en misant aussi sur l’intelligence artificielle pour construire des économies et des sociétés inclusives, vertes et durables. 

« Il faut aussi faire la paix avec la planète. »  M. Guterres a misé sur les avantages des énergies renouvelables et espéré que les pays s’engageront d’ici à 2025 à mettre en place de nouveaux plans climatiques nationaux alignés sur la limite de 1,5 °C, avec l’aide de l’ONU.  Les pays en développement devraient créer des plans climatiques nationaux de transition et des plans nationaux d’investissement afin d’attirer des capitaux et des investissements.  Pour les pays du G20, ils devraient faire accélérer l’élimination des combustibles fossiles. Il a demandé aux pays développés de clarifier le versement de leurs engagements de 100 milliards de dollars et d’expliquer comment ils vont doubler le financement de l’adaptation, pour atteindre au moins 40 milliards de dollars par an, d’ici à 2025.  Le Fonds pour les pertes et les préjudices doit être opérationnel le plus rapidement possible. 

Concluant la présentation de ses priorités, le Secrétaire général a rappelé que la construction de la paix est « la plus grande responsabilité de l’humanité » et qu’elle appartient à tous.  « Je peux vous garantir que je n’abandonnerai jamais la lutte pour la paix », a-t-il dit en conclusion.

Débat sur la question

Au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, la représentante du Guatemala s’est dite convaincue que la prévention des atrocités et la mise en œuvre efficace du principe de la responsabilité de protéger contribuent à la réalisation de Notre Programme commun et du Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.  Les rapports thématiques annuels de ce dernier sur la responsabilité de protéger ont été extrêmement importants pour améliorer la compréhension commune de ce principe, a poursuivi la déléguée.  La communauté internationale gagnerait à recevoir des informations de l’ONU sur les tendances actuelles des risques de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de nettoyage ethnique, ainsi que sur la prévention.  Pour cette raison, le Groupe estime aussi que ces informations devraient figurer dans les recommandations faites aux niveaux national, régional et mondial.  Le représentant a d’ailleurs jugé qu’il faut suivre de manière plus régulière et systématique ces recommandations et en faire état des conclusions, pourquoi pas, dans une annexe aux rapports annuels.  Elle a conclu en disant attendre avec impatience la nomination d’un conseiller spécial sur la responsabilité de protéger. 

En tant que Président de la Commission de consolidation de la paix, le représentant du Brésil est revenu sur les travaux et les progrès réalisés en 2023 par la Commission, dont le rapport souligne l’élargissement de sa portée géographique et de son inclusion.  En 2023, des réunions ont eu lieu à la demande du Canada, du Honduras, du Népal, de la Norvège et du Mozambique.  La Commission s’est engagée à soutenir des contextes spécifiques à chaque pays et région, ainsi qu’à améliorer la rapidité et la précision de ses avis au Conseil de sécurité.  Elle a également renforcé ses liens avec les organisations régionales, en particulier l’Union africaine, a assuré le Président. 

Il a également expliqué ce qui est fait pour renforcer l’universalité de la consolidation de la paix et élargir sa portée et les thèmes qui en relèvent: la Commission s’est engagée à la fois avec les pays développés et ceux en développement pour discuter, entre autres, de justice transitionnelle, des défis de développement et des questions autochtones.  Elle a également plaidé en faveur d’un financement durable et prévisible des efforts de consolidation de la paix.  Le Président a fait remarquer que tout ce travail témoigne de la pertinence croissante de la Commission dans l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU, ainsi que de l’importance que les États Membres lui accordent. 

Espérant que son renforcement perdure en 2024, le Président de la Commission a estimé que cela nécessite l’établissement de liens plus solides entre la Commission et le Fonds pour la consolidation de la paix. 

La représentante du Costa Rica a indiqué que tous les enfants doivent pouvoir « sourire et rêver », avant d’appeler l’ONU à œuvrer pour ne laisser personne de côté.  La protection des civils, le respect des principes de précaution, de distinction et de proportionnalité dans les opérations militaires et l’interdiction de méthodes de guerre aveugles doivent être au centre des efforts de l’Organisation. Dans ce droit fil, elle a salué la centralité du droit dans les efforts de promotion de la paix du Secrétaire général. Elle a également insisté sur l’importance du partenariat entre l’ONU et les organisations de la société civile « à tous les niveaux ».  La paix et la sécurité humaine doivent demeurer les priorités fondamentales, « notre boussole dans ces eaux agitées », a conclu la déléguée. 

Le représentant de l’Indonésie a partagé les préoccupations du Secrétaire général quant à la fragmentation de la communauté internationale et quant au fait que le droit international soit moins respecté, comme l’illustre ce qui se passe actuellement à Gaza.  Le délégué a appelé à « rétablir la confiance », en rétablissant l’état de droit et en garantissant une meilleure représentation à l’ONU.  Il a aussi évoqué le Sommet de l’avenir, qui sera une bonne occasion de refaçonner le système multilatéral.  Les méthodes de travail, la déontologie doivent aussi être renforcés, tout comme il faut allouer les ressources nécessaires au règlement des conflits à Gaza, au Myanmar et dans d’autres parties du monde, selon le délégué.  Le temps presse: il ne nous reste que six ans pour accomplir les ODD, s’est-il impatienté. 

Le représentant de l’Arménie a indiqué que l’ONU n’a pas pu toujours protéger les populations vulnérables.  Il a dénoncé le blocus imposé par l’Azerbaïdjan dans le Nagorno-Karabakh et le déplacement forcé des Arméniens.  L’ONU n’a pas pu réagir face à de telles violations et il faut espérer, a dit le représentant, qu’elle finira par en prendre conscience et réfléchira aux raisons de son échec.  Il a rappelé les décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le corridor de Latchine et réclamé leur respect.  Il a aussi indiqué que l’Arménie vient d’adhérer au Statut de Rome.

Au nom du Groupe des États arabes, le représentant de la Tunisie a pris note du rapport d’activité du Secrétaire général en 2023.  Il a salué l’appel au cessez-le-feu humanitaire à Gaza de M. Guterres et son appel à l’aide pour l’UNRWA.  Le Groupe souhaite aussi un cessez-le-feu immédiat à Gaza, a déclaré le délégué. Il a aussi exigé que la Puissance occupante cesse l’occupation du Territoire palestinien occupé et qu’elle y retire ses troupes.  Il faut protéger les civils et laisser entrer l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, a-t-il encore demandé.  Les Palestiniens doivent pouvoir se déplacer librement à Gaza, a exhorté le délégué.

Le représentant du Venezuela, au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, a déploré la « défiance » qui prévaut au sein de la communauté internationale.  Il a fustigé ces pays qui veulent préserver un ordre unipolaire et imposer leurs propres règles, sapant celles de l’ONU.  Il a aussi appelé à des efforts accrus pour revitaliser l’architecture sécuritaire internationale, qui est en voie d’effondrement. Celle-ci doit être juste et fiable et s’articuler autour d’un concept protégeant la sécurité de tous, a-t-il souhaité.  Enfin, il a demandé la levée des sanctions qui visent les pays en développement et le respect de la souveraineté des pays.  Le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays doit rester premier, a-t-il souligné. 

La représentante du Bélarus a affirmé que la communauté mondiale traversait la crise la plus profonde de l’histoire des relations internationales, crise provoquée par un niveau sans précédent de confrontation géopolitique, de méfiance et de concurrence hostile. Saluant les mesures rapides prises par l’ONU dans les domaines sanitaire, humanitaire et socioéconomique, ainsi que ses efforts pour mobiliser 500 milliards de dollars d’investissements en réponse à la crise financière mondiale, elle a en revanche critiqué l’ONU pour son travail insuffisant s’agissant de contrer les mesures coercitives unilatérales illégales appliquées par certains pays, y compris dans le contexte d’une concurrence déloyale. 

Elle a estimé important de préserver la « valeur exceptionnelle de l’ONU » en tant que plateforme d’échange de vues, de meilleures pratiques et de préparation de recommandations sur des sujets juridiques cruciaux contribuant à la codification du droit international.  La déléguée a enfin noté les efforts déployés par l’Organisation dans le cadre des négociations multilatérales visant à parvenir à un désarmement général et complet.  Les travaux visant à renforcer les normes mondiales interdisant l’emploi d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive, ainsi qu’à promouvoir la réglementation et la limitation des armes classiques, restent parmi les principaux objectifs de l’Organisation, a-t-elle estimé.

Pour le représentant du Pakistan, les menaces à la paix et à la sécurité émanent de violations de la Charte des Nations Unies et des rivalités entre grandes puissances.  L’instabilité sécuritaire est exacerbée par la pauvreté croissante, les changements climatiques, l’injustice, les inégalités, la haine, l’intolérance, la xénophobie et l’islamophobie.  Ces défis ne peuvent être résolus que par le biais de la coopération multilatérale dans le cadre des Nations Unies.  Le délégué a prié l’ONU de résoudre le conflit dans le Jammu-et-Cachemire avec les pouvoirs conférés au Secrétaire général par l’Article 99 de la Charte des Nations Unies.  Il a aussi souhaité que le Conseil de sécurité joue davantage son rôle pour résoudre les nombreux conflits dans le monde.  Pour cela, il doit être plus représentatif, plus démocratique, plus transparent, plus efficace et plus responsable.

Le représentant de l’Afrique du Sud a distingué, parmi les défis sans précédent lancés au système international, ce que la Cour internationale de Justice (CIJ) qualifie d’actes plausibles de génocide en cours à Gaza.  Il s’est dit préoccupé par l’incapacité persistante du Conseil de sécurité à agir pour promouvoir la paix, et permettre que l’aide soit acheminée à ceux qui souffrent de ces attaques incessantes contre leur existence. 

Il a estimé que la capacité de l’ONU à répondre aux menaces que représentent les changements climatiques, les armes nucléaires et les pandémies dépend du respect des engagements passés, mais aussi de l’ambition de la vision et des actions requises pour un monde meilleur.  Il a également appelé à s’inspirer du Nouvel Agenda pour la paix pour appuyer la prévention des conflits et la consolidation de la paix, en définissant un rôle clair pour les Nations Unies, les bons offices du Secrétaire général, ainsi que les organisations régionales, comme l’Union africaine.  Nous devons également réaffirmer notre engagement à créer des synergies entre les priorités de l’Agenda 2063 de l’Afrique et le Programme 2030, a-t-il ajouté. 

Poursuivant, le délégué s’est inquiété de l’impact de la crise de liquidité sur la capacité de l’ONU à honorer ses mandats, avant d’exhorter l’ensemble des États Membres à s’acquitter pleinement de leurs obligations financières envers l’Organisation, dans les délais et sans conditions.  Il a par ailleurs appelé à redoubler d’efforts pour renforcer la participation pleine, égale et significative des femmes à la prise de décisions, en particulier dans les processus de paix et politiques.  En outre, il reste encore beaucoup à faire pour rendre le financement de la consolidation de la paix plus durable et plus prévisible. 

Le représentant de la Malaisie a plaidé pour l’édification d’un État palestinien indépendant et salué le rôle indispensable joué par la Cour internationale de Justice (CIJ).  Il a salué la récente décision rendue par cette dernière dans l’affaire portée devant elle par l’Afrique du Sud contre Israël.  Il a insisté sur la nécessité de réformer le Conseil de sécurité et de revitaliser le travail de l’Assemblée.  Le Secrétariat de l’ONU doit se voir accorder les ressources adéquates, a-t-il dit, en rappelant que son pays est à jour de ses contributions au budget de l’Organisation. Enfin, évoquant le Sommet de l’avenir, il a appelé à revitaliser le multilatéralisme et à renforcer la gouvernance mondiale. 

Le représentant de Cuba a regretté que le rapport du Secrétaire général ne traite pas de la guerre à Gaza où Israël commet un génocide tuant plus de 26 000 Palestiniens et du personnel de l’ONU. Les Nations Unies doivent exiger la redevabilité d’Israël dans ce conflit si elles veulent préserver leur crédibilité.  Il a appelé à renforcer le rôle de l’Assemblée générale dans le cadre de la réforme du système des Nations Unies.  Il a ensuite regretté l’absence de la question des droits humains dans le rapport d’activité de l’ONU, accusant certains pays de sélectivité contre certains pays du Sud.  Il faut par ailleurs clouer au pilori les délégations qui ne paient pas leurs obligations statutaires au budget ordinaire de l’ONU, a exigé le délégué.

Le représentant de l’Angola a jugé nécessaire pour l’ONU de continuer à travailler avec les partenaires régionaux, notamment l’Union africaine, insistant en outre sur l’importance de mobiliser des investissements afin d’atténuer les conditions difficiles d’accès aux marchés pour les pays en développement. Il a préconisé une approche plus inclusive et complémentaire des principales questions qui seront l’objet du prochain Sommet de l’avenir.  Le pacte numérique mondial devrait quant à lui prioriser le développement, et contribuer à la réalisation rapide des ODD, en tenant compte des priorités et besoins des pays en développement s’agissant des nouvelles technologies.  Le délégué angolais a aussi appelé à une réforme en profondeur du système des Nations Unies et de son Conseil de sécurité, réclamant l’octroi d’un siège de membre permanent à l’Afrique. 

Le représentant du Myanmar a rappelé que le coup d’État militaire de février 2020 a plongé dans la pauvreté la moitié de la population.  Il a dénoncé la violence de la junte militaire qui, a-t-il ajouté, n’a pas réussi à réconcilier les populations.  Il faut sauver ces populations, mettre un terme au joug des militaires et créer une union démocratique et fédérale du Myanmar, a-t-il plaidé.  Le délégué a espéré que les activités de l’équipe de pays des Nations Unies au Myanmar figureront dans le prochain rapport d’activité de l’ONU.

Alors que s’annonce une année 2024 « complexe », le représentant de la Croatie a estimé que le succès de l’obtention des contributions statutaires pour le Fonds pour la consolidation de la paix donne des raisons d’être « prudemment optimiste ». 

Il a souligné que seuls un « multilatéralisme en réseau » et la solidarité permettront d’obtenir des résultats justes et tangibles pour tous.  Le délégué a également invité la Commission de consolidation de la paix à mettre davantage l’accent sur la prévention des conflits; à se concentrer sur l’universalité de la paix, en la reliant aux stratégies nationales de prévention; ainsi qu’à s’engager dans des activités de prévention opérationnelle, par le biais de missions à faible empreinte de carbone visant à faciliter la transition du maintien de la paix à la consolidation de la paix.

HOMMAGE À LA MÉMOIRE DE SON EXCELLENCE HAGE GOTTFRIED GEINGOB, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DE NAMIBIE

L’Assemblée a rendu un hommage solennel au Président de la Namibie, Hage Gottfried Geingob, décédé le 4 février, « un homme dont le leadership était admiré partout sur le continent africain », comme l’a rappelé le Président de l’Assemblée.  Ce dernier a salué la profonde croyance de Hage Geingob dans les vertus du dialogue, de la justice et du multilatéralisme. 

« C’était un homme qui en imposait, tout en arrivant à nouer des liens avec toutes les personnes qu’il rencontrait », a appuyé le Secrétaire général, en rappelant l’image de Hage Geingob baisant le sol à son retour en Namibie après des années d’exil.  Il a insisté sur son rôle éminent dans la lutte contre l’apartheid et pour l’élaboration de la Constitution de son pays.  « C’est une icône de la libération. »  

Honorons les valeurs qu’il défendait en combattant le racisme et l’injustice, a déclaré le Secrétaire général.  Le Botswana, au nom du Groupe des États d’Afrique, a souligné la richesse du legs laissé par Hage Geingob qui a incarné la Namibie, « le pays des courageux ». Nous devons honorer sa mémoire en défendant le multilatéralisme, a dit la délégation, appuyée par les Émirats arabes unis qui, au nom du Groupe Asie-Pacifique, a loué son empreinte indélébile sur la scène internationale. 

Son rôle dans la libération de son pays « des chaînes du colonialisme et de l’apartheid » a également été salué par les États-Unis, intervenant en tant que pays hôte de l’ONU. « C’était un combattant de la liberté et une icône africaine. » Enfin, la délégation de la Namibie a rappelé les idéaux portés par Hage Geingob, troisième Président de son pays.  Il s’est toujours battu pour la reconnaissance du peuple namibien, a dit la délégation, en soulignant son engagement pour la justice et l’unité de la Namibie. 

DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE DÉCISION (A/78/L.36/REV.1 ET A/78/L.40)

Le projet de décision A/78/L.36/Rev.1, intitulé « Accord au Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes d’une autorisation concernant l’hébergement du secrétariat du Réseau de Santiago pour la prévention, la réduction et la prise en compte des pertes et préjudices liés aux effets néfastes des changements climatiques » a été adopté par consensus. 

Avec cette décision, l’Assemblée générale autorise le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes à conclure, avec la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties à l’Accord de Paris, un mémorandum d’accord sur l’hébergement du secrétariat du Réseau de Santiago susmentionné. 

Le projet de décision A/78/L.40, intitulé « Participation d’organisations non gouvernementales, d’organisations de la société civile, d’établissements universitaires et du secteur privé à la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral », a lui aussi été adopté par consensus. 

Par ce texte, l’Assemblée générale a décidé d’approuver la participation à cette conférence, ainsi qu’à ses travaux préparatoires, des organisations non gouvernementales, des organisations de la société civile, des établissements universitaires et des entités du secteur privé, au nombre de 51, dont la liste est annexée à la décision. 

La troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral se tiendra dans la capitale du Rwanda, Kigali, du 18 au 21 juin 2024. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission du développement social s’intéresse au rôle de la famille et de la transformation numérique dans la réalisation du Programme 2030

SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION,
6E ET 7E SÉANCES PLÉNIÈRES, MATIN ET APRÈS-MIDI
SOC/4915

La Commission du développement social s’intéresse au rôle de la famille et de la transformation numérique dans la réalisation du Programme 2030

Au troisième jour des travaux de sa soixante-deuxième session, la Commission du développement social s’est réunie pour la tenue de deux événements interactifs, avant la reprise de sa discussion générale lundi: une réunion-débat de haut niveau sur le trentième anniversaire de l’Année internationale de la famille, suivie d’une table ronde sur l’influence de la transformation numérique sur la croissance et le développement inclusifs, envisagée comme « voie menant à la réalisation de la justice sociale ». 

Observée en matinée, le trentième anniversaire de l’Année internationale de la famille a été l’occasion pour les panélistes de rappeler à quel point la famille peut être agente de développement et contribuer à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Sous réserve toutefois que les États Membres se dotent de politiques et programmes axés sur son épanouissement et son renforcement, dans le respect de l’égalité entre les sexes en matière d’accès à l’éducation, aux opportunités professionnelles et aux soins de santé, ont noté plusieurs intervenants. 

La table ronde de l’après-midi a permis de faire le point sur les avancées technologiques prodigieuses de nature à accélérer les progrès en vue d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD), même s’il a été souligné, aussi bien par les experts que les délégations, les dangers posés par une facture numérique qui laisse de côté un certain nombre de pays et populations.  Les risques inhérents aux mauvais usages de l’intelligence artificielle ont également été source de préoccupations.

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, jeudi 8 février, à partir de 10 heures.

 

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Réunion-débat de haut niveau sur le trentième anniversaire de l’Année internationale de la famille 

Cette réunion-débat, modérée par M. JOHN WILMOTH, responsable de la Division du développement social inclusif au sein du Département des affaires économiques et sociales (DESA), a été marquée par de nombreux appels à la création de politiques et de programmes axés sur la famille pour appuyer une mise en œuvre holistique du Programme 2030. 

L’allocution d’ouverture a été prononcée par Mme MARIA-FRANCESCA SPATOLISANO, Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, qui a attiré l’attention sur l’impact sur les familles de quatre « mégatendances », à commencer par l’intensification des défis auxquels sont confrontées les familles vulnérables en raison de l’augmentation de la fracture numérique.  Ces lacunes dans l’accès aux connaissances exacerbent les écarts et les disparités existants en matière de revenus, d’éducation, d’emploi et d’accès au logement et aux services de santé, a observé la haute fonctionnaire. 

Par ailleurs, le rapprochement familial étant une composante importante de la migration globale, l’analyse des politiques migratoires doit intégrer une perspective familiale, a poursuivi Mme Spatolisano.  Les familles devraient être considérées comme essentielles à l’intégration des migrants dans les nouvelles sociétés, ce qui rend les politiques visant à faciliter le regroupement familial et la protection sociale des migrants essentielles à une intégration réussie. 

La migration, à son tour, nourrit une urbanisation rapide. Et lorsque les villes sont bien planifiées et gérées de manière compétente, elles peuvent sortir les familles de la pauvreté et contribuer à la cohésion sociale.  Toutes les familles ont besoin d’un logement adéquat et abordable, une aspiration de plus en plus inatteignable pour nombre d’entre elles. 

En outre, à mesure que les sociétés évoluent, les transformations démographiques doivent être reconnues et reflétées par des politiques fondées sur la solidarité et le soutien intergénérationnels, a poursuivi la Sous-Secrétaire générale.  Alors que le vieillissement rapide des populations constitue un défi pour des soins de longue durée équitables, une approche centrée sur l’humain pour la fourniture de soins impliquant les gouvernements, les entreprises, la société civile, les communautés et les ménages est nécessaire et devrait aborder toutes les formes de soins, y compris ceux, informels, fournis par des membres de la famille. 

M. LINTON MCHUNU, Directeur général par intérim du Département du développement social d’Afrique du Sud, a indiqué que la population de son pays a doublé depuis la fin de l’apartheid, malgré une baisse marquée du taux de fécondité et une croissance correspondante du nombre de personnes âgées de 60 ans et plus.  Conséquence des perturbations liées à l’urbanisation lors de la période de l’apartheid, le pays est confronté à la désintégration des familles, notamment en milieu rural, ainsi qu’à des problèmes de communication au sein des familles.  Les migrations internes peuvent cependant mener à un meilleur accès à une éducation de qualité, à des emplois mieux rémunérés ainsi qu’à des soins de santé de qualité. 

L’institution de la famille a donc connu un grand changement dans sa structure et dans la distribution des rôles, a ajouté M. Mchunu, la pauvreté, la criminalité, la violence fondée sur le genre, les grossesses des adolescentes et l’absence répandue des pères venant exacerber les défis déjà présents.  La pauvreté empêche en outre les familles de répondre aux besoins essentiels de leur membres et constitue un fardeau psychologique.  Les femmes s’occupent avant tout de la famille et des enfants, ce qui les empêche de participer pleinement au marché du travail, phénomène exacerbé par les soins à domicile, compte tenu notamment de la prévalence du VIH/sida.  La violence sexuelle demeure également élevée, tout comme la violence familiale. 

Face à ces défis, le Gouvernement sud-africain a accru l’accès des ménages aux services, au logement, à l’eau et à l’électricité, avec l’appui du secteur privé.  Des coopératives ont été installées dans certaines zones rurales pour fournir de la nourriture aux familles, et un système de protection sociale ciblé permet aujourd’hui d’atteindre 7 millions de personnes. 

Mme BAHIRA TRASK, professeure de développement humain et des sciences de la famille à l’Université du Delaware, a rappelé la corrélation entre migration et pauvreté, une situation qui pousse les migrants à s’établir en marge des villes, les excluant de la vie économique sociale et politique. Nous avons besoin de politiques et de stratégies qui reconnaissent le fait que les opportunités auxquelles ont accès les migrants nouvellement arrivés sont très différentes de celles qui s’offrent aux populations déjà établies en milieu urbain. 

En outre, l’accès à un logement accessible abordable est essentiel pour une vie familiale stable et un développement positif des enfants. Or, la construction non autorisée de bidonvilles contribue à marginaliser les migrants dans les zones périphériques, a noté la panéliste.  Près d’un milliard de personnes dans le monde sont touchées par le manque d’accès au logement, et vivent dans des conditions de promiscuité dans des quartiers dangereux avec un impact sur leur santé en particulier pour les enfants.  C’est notamment le cas dans les mégalopoles, qui sont plus à risque d’être touchées par les changements climatiques, a ajouté Mme Trask. 

Mme ZITHA MOKOMANE, Cheffe du Département de sociologie à l’Université de Pretoria, Afrique du Sud, a rappelé qu’en novembre 2022, la population mondiale a atteint 8 milliards d’individus, un « jalon dans le développement humain », conséquence des progrès en matière de santé.  De fait, a-t-elle observé, les tendances en matière de fécondité, de mortalité, mais aussi de migration sont au cœur des politiques liées à la famille.

Elle a noté que les niveaux de fécondité peuvent entraîner des avantages ou des inconvénients pour la société.  Une fécondité élevée peut ainsi avoir un impact négatif sur le budget des familles.  Inversement, les familles ayant peu d’enfants ont plus de ressources pour investir dans le capital humain, permettant aux femmes de participer davantage au marché du travail et sortir de la pauvreté.

Dans les sociétés sans système de protection sociale, une fécondité élevée peut, en revanche, devenir une forme de filet de sécurité sociale, avec pour conséquence déplorable la prise en charge des personnes âgées par les enfants.  En outre, la mort d’un membre de la famille provoque une restructuration des relations et renforce parfois les inégalités de genre, les femmes devant assumer un rôle plus important au sein du ménage, voire se remarier pour retrouver leur statut socioéconomique et protéger leurs enfants. 

La panéliste a ensuite précisé qu’il faut 2,1 enfants par femme en moyenne pour que la population se régénère.  Or, en 2021, trois régions étaient en dessous de ce seuil: l’Asie du Sud-Est, l’Europe et l’Amérique du Nord, a-t-elle noté, appelant à mettre en place des politiques innovantes, telles que des congés parentaux, des subventions pour la garde d’enfants et des programmes d’aide aux familles.  Elle a également invité les États à s’attaquer aux facteurs à l’origine des niveaux élevés de fécondité des adolescentes et à investir dans la recherche pour mieux comprendre l’impact des tendances démographiques actuelles et des changements climatiques sur les familles, entre autres. 

Alors que nous entrons dans la « phase tertiaire de l’ère de l’information », Mme SUSAN WALKER, professeure associée émérite au Département des sciences sociales de la famille de l’Université du Minnesota, a constaté que les technologies de l’information et des communications (TIC) offrent des outils supplémentaires pour la communication et l’apprentissage, favorisant ainsi la vie familiale et le développement humain.  Néanmoins, les recherches actuelles montrent que les TIC peuvent également constituer des atteintes à la sécurité et à la vie privée.  Face à ces menaces, Mme Walker a prôné l’adoption de politiques ciblées permettant d’assurer une utilisation et un accès équitables, sûrs et efficaces aux TIC. 

Dans ce domaine, l’équité est déterminée notamment par l’accès et les habiletés techniques, ainsi que par les différences générationnelles et géographiques, a fait valoir Mme Walker.  Si les jeunes sont nés avec ces technologies, les personnes âgées sont pour leur part des « migrants numériques ». Au sein des familles, les TIC participent au développement humain et cognitif de tous les groupes d’âge. Mme Walker a toutefois exprimé sa préoccupation devant l’impact des TIC sur le sommeil, l’apprentissage, la socialisation et l’obésité.  Elles peuvent en outre être la cause de conflits et affecter la cohésion familiale. Afin d’assurer le bien-être numérique et l’atteinte des ODD, elle a souligné l’importance d’impliquer activement les entreprises technologiques dans la protection des enfants et d’élaborer des cadres réglementaires adéquats.

Dialogue interactif 

La Türkiye a indiqué qu’elle fournit une aide en espèces aux familles et des services d’assistance sociale dans le cadre d’un programme qui a déjà bénéficié à plus de 1,7 million de ménages turcs au cours des trois dernières années.  De son côté, la République islamique d’Iran, suivie sur ce point par l’Iraq, a déclaré que la famille, est le pilier le plus important des sociétés musulmanes.  Nous avons adopté, a indiqué la déléguée iranienne, plusieurs mesures fondamentales pour renforcer cette cellule, notamment une loi pour la protection de la jeunesse et de la famille. 

Pour le Guyana, il est très important de prêter attention à tous les membres de la famille, y compris les personnes âgées de plus de 65 ans, et de prendre en compte la diversité des sensibilités culturelles et de la notion de « famille élargie » dans les programmes spécifiques. Les traditions et cultures de chaque pays doivent être prises en compte dans le cadre des perspectives de développement social, a souligné Cuba

L’Égypte a rappelé elle aussi que la famille est l’unité principale de la société et joue un rôle fondamental dans le développement social des nations, à condition de tenir compte des contextes culturels, nationaux, et religieux spécifiques pour répondre aux besoins réels des familles. Conscient de la nécessité d’offrir un environnement sûr aux enfants, aux jeunes et aux personnes âgées, le Gouvernement égyptien s’est doté d’un plan ambitieux, avec un volet en cours d’élaboration sur la numérisation des données familiales.  Quant à elle, la Malaisie a indiqué avoir mis sur pied une politique nationale pour rassembler les parties prenantes et intégrer une perspective familiale dans toutes les politiques, initiatives et programmes, notamment dans le domaine éducatif. 

De son côté, l’Union européenne a rappelé que la Charte des droits fondamentaux de l’UE stipule que chacun a le droit au respect de sa vie privée et familiale, quelle que soit la forme prise par la famille.

Réunion-débat sur les questions nouvelles: « L’influence de la transformation numérique sur la croissance et le développement inclusifs: une voie menant à la réalisation de la justice sociale » (E/CN.5/2024/4)

À l’occasion de cette discussion modérée par Mme CYNTHIA SAMUEL-OLONJUWON, Représentante spéciale de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et Directrice du Bureau de l’OIT à New York, les intervenants ont unanimement reconnu que la transformation numérique est essentielle pour la justice sociale, dans la mesure où elle offre un cadre pour réduire la fracture numérique et garantir un accès équitable à la technologie.  Ils ont toutefois averti que, pour parvenir à la justice sociale, il convient de garantir que la transition vers une économie numérique soit équitable et inclusive, ce qui implique de créer des voies permettant à tous de s’adapter aux nouvelles technologies, de sauvegarder les droits et d’offrir des opportunités de perfectionnement. 

Premier panéliste à s’exprimer, M. GABRIEL BASTOS, Secrétaire d’État à la sécurité sociale au Ministère du travail, de la solidarité et de la sécurité sociale du Portugal, s’est appuyé sur l’expérience de son pays, lequel considère la transformation numérique comme un outil favorisant l’efficacité de la sécurité sociale et de la protection des plus vulnérables au sein des sociétés.  Élément central de toute stratégie de développement inclusif, la sécurité sociale est un pilier fondamental des politiques publiques destinées à assurer le bien-être des personnes et des communautés, de même que la cohésion sociale.  Et les technologies émergentes constituent, selon lui, un véritable moteur pour le renforcement de la protection sociale.   

Pour illustrer son propos, M. Bastos a pris l’exemple de la pandémie de COVID-19, qui a forcé la sécurité sociale de son pays à s’adapter de façon structurelle à des demandes critiques immédiates.  La numérisation de l’économie s’est alors accélérée, les secteurs privé comme public étant forcés d’en tirer tout le potentiel.  La transformation numérique profonde de la sécurité sociale a ainsi servi de véritable catalyseur pour la prestation des services publics aux citoyens et aux entreprises, a-t-il expliqué.  Le Secrétaire d’État a ajouté que, ces prochains mois, les mécanismes d’allocations aux enfants seront automatisés et les sommes versées immédiatement, de même que les pensions, autant de mesures proactives permettant un meilleur accès des citoyens à la protection sociale.  Si l’avènement de l’État-providence s’est construit au Portugal sur les principes de la solidarité, d’égalité, d’inclusion sociale et de cohésion intergénérationnelle, la volonté d’offrir des services numériques et novateurs en fait aujourd’hui un instrument robuste, avec le potentiel de transformer les vies et d’en finir avec les cycles de pauvreté, a-t-il conclu. 

Mme HEBA HAGRASS, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, a centré son propos sur la transformation numérique et son potentiel pour les personnes handicapées, à savoir l’innovation et la disponibilité d’appareils d’assistance, l’éducation inclusive, l’accès à l’emploi et aux soins de santé, les systèmes de soutien personnalisé et l’accès à l’information et aux outils de communication.  Pour que ce potentiel devienne réalité, a-t-elle souligné, les décideurs politiques doivent garantir que la transformation numérique inclut le handicap, ce qui suppose en premier lieu des investissements ciblés dans les infrastructures publiques et dans la réduction de la fracture numérique en matière de handicap.  Il faut ensuite que les personnes handicapées, actuellement surreprésentées dans la population hors ligne, soient directement incluses et consultées afin que les effets de la transformation numérique sur leur vie soient bien compris et intégrés lors de la conception des politiques et des réglementations. 

De l’avis de la Rapporteuse spéciale, l’intelligence artificielle change le paysage des personnes handicapées en créant des outils plus adaptés et plus réactifs à leurs besoins, comme par exemple les technologies de sous-titrage automatique, de suivi oculaire et de reconnaissance vocale. Pour qu’elles profitent de ces opportunités et bénéficient d’un accès égal au marché du travail, les personnes handicapées doivent avoir accès à des formations et qualifications pertinentes afin d’être sur un pied d’égalité avec les autres, a fait valoir Mme Hagrass. En revanche, si elles trouvent la technologie numérique inaccessible et inabordable, ou si elles ne possèdent pas les compétences requises, elles seront exclues des opportunités d’emploi et le risque d’être encore plus laissées pour compte augmentera, a-t-elle averti, avant d’alerter sur d’autres risques en lien avec l’intelligence artificielle, notamment les pratiques discriminatoires dans les processus de recrutement. 

La transformation numérique peut accélérer les progrès vers les ODD et permettre une transformation intersectorielle de nos sociétés à condition que soit garantie la connectivité numérique pour tous, a appuyé Mme URSULA WYNHOVEN, Cheffe de la Division des affaires de l’ONU de l’Union internationale des télécommunications (UIT).  En termes de croissance, a-t-elle précisé, de nouvelles études de l’UIT font apparaître qu’une augmentation de 10% de la pénétration du haut débit mobile augmenterait le produit intérieur brut (PIB) d’un peu plus de 2% en moyenne, et de 2,5% pour l’Afrique.  Or, si 5,6 milliards de personnes sont aujourd’hui connectées, 2,6 milliards d’autres personnes n’ont jamais fait l’expérience du monde numérique et bien d’autres encore ne disposent pas d’une connectivité significative pour des raisons matérielles, financières ou culturelles, a constaté Mme Wynhoven. 

Soulignant la relation étroite existant entre la connectivité et le développement humain, elle a assuré que les bénéfices de la connectivité pour la société dépassent les seuls avantages économiques.  Pour les personnes marginalisées et vulnérables, la connectivité peut être une bouée de sauvetage.  Elle permet aussi aux réfugiés de rester en contact avec leur famille et leur communauté et leur fournit des services en ligne, notamment en matière d’éducation, d’emploi et de soutien financier.  Pour les femmes et les filles, elle peut être un puissant moteur d’autonomisation sociale et économique, a-t-elle encore fait valoir. Mais étendre la connectivité ne suffit pas, a prévenu l’intervenante, pour qui chaque personne doit avoir accès aux appareils et aux compétences nécessaires pour utiliser les nouvelles technologies.  Face au creusement de la fracture numérique, qui exacerbe les inégalités sociales et économiques, et face à la prolifération de la désinformation et des cybermenaces, il importe en outre de donner la priorité aux considérations éthiques et aux droits humains afin de garantir un avenir numérique inclusif, juste et respectueux de la dignité de tous, a-t-elle affirmé.

Mme AIDA OPOKU-MENSAH, Directrice générale de Centric Digital Ltd., société privée basée au Ghana qui fournit des services innovants pour promouvoir l’économie numérique du pays, a parlé de « quatrième révolution industrielle » pour caractériser la transformation des sociétés et des industries grâce à l’intelligence artificielle, la robotique, l’Internet des objets, la biotechnologie et l’impression 3D.  Elle s’est intéressée à la situation de l’Afrique, où subsiste une importante fracture numérique malgré les avancées technologiques de ces dernières années.  Des problèmes tels que le manque de compétences, les cadres réglementaires et les lacunes en matière d’infrastructures restent des obstacles majeurs à la réalisation du plein potentiel de ces technologies sur le continent.  Il est essentiel d’y remédier car des technologies telles que les services bancaires mobiles, le commerce électronique et les soins de santé numériques ont le potentiel de dépasser les infrastructures traditionnelles, de stimuler la croissance économique et d’améliorer les moyens de subsistance via la transformation agricole, a-t-elle souligné. 

Si cette révolution peut sortir des millions d’Africains de la pauvreté, elle présente aussi des risques en matière de justice sociale, a relevé Mme Opoku-Mensah.  Ceux qui n’ont pas accès à une connectivité Internet fiable, à des smartphones ou à des compétences numériques peuvent être encore plus marginalisés dans l’économie numérique, élargissant ainsi la fracture numérique et perpétuant les disparités socioéconomiques, a-t-elle expliqué, mettant également en garde contre de possibles suppressions d’emplois dans des secteurs tels que l’industrie manufacturière, l’agriculture et les services, avec à la clef une exacerbation de la pauvreté et de l’instabilité sociale. 

Mme JULIA STOYANOVICH, professeure associée de sciences informatiques et d’ingénierie et Directrice du Center for Responsible AI à la New York University, s’est demandé à quoi peut ressembler une intelligence artificielle responsable.  Elle en a voulu pour exemple l’imagerie médicale, même si les laboratoires radiologiques assument la responsabilité finale des diagnostics et des traitements et que l’intelligence artificielle ne doit être pour eux qu’un auxiliaire.  L’experte a déconseillé le recours à cette technologie pour ce qui est du recrutement, dans la mesure notamment où elle peut conduire à des décisions discriminatoires dans la sélection des candidats à des entretiens d’embauche, en raison notamment du manque de familiarité des personnels avec ce nouvel outil: ils n’ont pas encore la préparation technique ou les moyens d’une évaluation minutieuse, a-t-elle fait observer.  Il en va de même de l’utilisation de l’intelligence artificielle pour la prédiction des crimes, contre laquelle nous avait déjà mis en garde il y a 22 ans le film de Steven Spielberg « Minority Report », a rappelé l’intervenante.  Mme Stoyanovich a également prévenu des risques posés par l’intelligence artificielle dans l’automatisation des véhicules, qui peuvent ne pas détecter la présence d’une personne en chaise roulante traversant un passage piéton par exemple, ou des armes létales autonomes qui ne font aucune distinction entre combattants et non-combattants. 

Dialogue interactif 

Le Ministre adjoint de la famille et des services sociaux de la Türkiye a estimé que l’accélération de la numérisation des services sociaux depuis la pandémie a permis de relever un grand nombre de défis, évoquant notamment les avantages d’une plateforme numérique qui permet de traiter les dossiers sociaux en quelques minutes, contre plusieurs jours auparavant, ce qui favorise selon lui l’État)providence et la justice sociale pour tous. 

Préoccupée par la présence alarmante de la désinformation, la déléguée de la jeunesse de la Suisse a invité les États et les acteurs privés à investir dans des infrastructures numériques permettant de produire des ressources sûres et vérifiées.  La déléguée a également alerté sur la surcharge d’informations qui entraîne chez les jeunes des troubles mentaux voire des suicides.  Face à ces risques, il faut donner la priorité à la protection des jeunes contre de possibles traumatismes directs ou indirects et à garantir un accès sans entrave à des soins de santé mentale, a-t-elle plaidé. 

Compte tenu du rôle prépondérant que jouent les sites Internet, notamment pour le marché du travail, la Pologne a souhaité savoir comment en améliorer l’accès aux groupes vulnérables exposés à l’exclusion numérique dans une optique de justice sociale et de croissance inclusive. 

Au lieu de faire le lien entre la liberté d’expression et les technologies numériques, pourquoi n’en avoir pas plutôt établi un avec le droit au développement, a demandé République islamique d’Iran qui a par ailleurs voulu savoir si le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) s’accompagnera d’une véritable transition vers la justice sociale sur le continent africain.  À sa suite, la Directrice générale de Centric Digital Ltd. a expliqué que la quatrième révolution industrielle doit laisser une grande place à la liberté d’expression afin notamment de permettre aux syndicats de travailleurs de s’exprimer.  Elle a également dénoncé les coupures totales d’Internet qui vont à l’encontre de l’emploi et de l’entrepreneuriat.

De son côté, Cuba a insisté sur l’urgence des transferts de technologie et des financements en direction des pays en développement, avant de faire remarquer que l’imposition de mesures coercitives unilatérales constitue un obstacle pour la transformation numérique des pays. 

Après le Mexique qui s’est préoccupé des dangers liés aux mauvaises utilisations des nouvelles technologies, le Fonds mondial pour les veuves et les veufs a plaidé pour que l’on incorpore davantage de femmes dans toutes les strates de la société afin qu’elles soient mieux formées au numérique, surtout dans le contexte rural.  Notant pour sa part que la technologie crée des emplois mais en vole aussi aux plus pauvres, l’Institut pour la synthèse planétaire a proposé de créer un marché numérique parallèle consacré uniquement aux produits de l’économie informelle. 

Réagissant à ces remarques et questions, la Directrice du Center for Responsible AI à la New York University a estimé que les gouvernements et l’ONU devraient réfléchir à des investissements en matière de sensibilisation à la question de l’accessibilité de l’éducation technologique. À son tour, la Cheffe de la Division des affaires de l’ONU de l’UIT a relevé que la question des normes d’accessibilité peut changer la donne en matière de développement social.  Lorsque les États acquièrent des technologies, ils doivent s’assurer qu’elles respectent les normes destinées à les rendre accessibles, a-t-elle insisté.  Elle a d’autre part applaudi l’initiative Giga, qui vise à connecter toutes les écoles du monde à Internet, alors que plus d’un milliard d’enfants dans le monde n’y ont pas accès actuellement. 

« La question de la transformation numérique est avant tout une question de droits humains », a affirmé la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées, suivie du Secrétaire d’État portugais à la sécurité sociale qui a indiqué que son pays accueillera en mai à Porto une réunion de l’Association internationale de sécurité sociale sur la même thématique.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le forum ministériel de la Commission du développement social se penche sur l’intégration des considérations sociales aux cadres de développement

SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION,
4E ET 5E SÉANCES PLÉNIÈRES, MATIN ET APRÈS-MIDI
SOC/4914

Le forum ministériel de la Commission du développement social se penche sur l’intégration des considérations sociales aux cadres de développement

Les ministres réunis ce matin à l’occasion du forum ministériel de la Commission du développement social, consacré à l’intégration des considérations sociales dans les cadres de développement, ont vu dans les programmes de protection sociale, l’investissement social et la solidarité mondiale les moyens d’endiguer la pauvreté aux niveaux national et international. 

« En matière sociale, le coût de l’inaction est supérieur à celui de l’action », a prévenu le Ministre fédéral des affaires sociales, de la santé, des soins et de la protection des consommateurs de l’Autriche.  Confrontées à une poussée inflationniste sans précédent, les autorités autrichiennes ont fait le choix d’investir dans les services sociaux plutôt que de laisser s’installer la pauvreté, a-t-il expliqué, en mobilisant les ressources pour freiner la hausse des prix de l’électricité et en venant en aide aux citoyens en situation précaire. 

Le Ministre du développement et de l’aide sociale du Brésil a illustré l’importance de telles politiques publiques en rappelant que la faim avait resurgi dans son pays dès que les programmes sociaux qui avaient permis de réaliser des progrès avant 2014 ont été « déformés, détériorés ou interrompus » par un « projet politique destructeur ».  Fort de plus de sept décennies de programmes de réduction de la pauvreté et de sécurité alimentaire, auxquels s’ajoutent les objectifs de développement durable (ODD), seules les inégalités entravent « encore une fois » leur mise en œuvre, a-t-il noté, les pays vulnérables ne disposant pas des ressources ou des capacités techniques nécessaires pour y parvenir. 

La protection sociale étant un « outil stratégique » permettant de réduire la pauvreté et la vulnérabilité tout en favorisant une croissance durable et inclusive, la Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda a expliqué que son pays n’a pas hésité à faire appel aux subventions et aux prêts émanant des institutions et programmes multilatéraux internationaux afin de renforcer son économie.  Une coopération qui englobe les organisations communautaires et les groupes d’entraide informels qui ont recours à des approches d’autonomisation sociale.  Le développement durable n’est pas l’apanage de l’État, a renchéri le Vice-Ministre des affaires étrangères du Costa Rica, mais doit plutôt inclure une multitude d’acteurs, en tirant avantage de l’innovation des entreprises pour le financement de projets. 

Ces défis exigent, selon la Vice-Ministre de la protection sociale de Chypre, davantage de solidarité et de coopération pour rompre les cycles intergénérationnels de pauvreté et produire des effets systémiques dans la durée.  Considérant, comme la Ministre du travail, de la solidarité et de la sécurité sociale du Portugal, que l’investissement social peut nous aider à en finir avec ces cycles de pauvreté, le Vice-Ministre des affaires étrangères du Costa Rica a fait valoir qu’à cet égard, « le plus grand défi est celui de la coopération internationale ». 

Lors de la reprise, dans l’après-midi, du débat de haut niveau sur le thème prioritaire, soit la promotion du développement social et de la justice sociale afin d’accélérer la réalisation du Programme 2030 et l’élimination de la pauvreté, la Ministre du genre, des enfants et de la protection sociale du Ghana s’est inquiétée, comme les Philippines, de la persistance des inégalités et de la pauvreté en dépit d’une croissance économique globale considérable.  Ce constat a amené le Pérou à adopter une politique nationale de développement et d’inclusion sociale pour 2030 fondée sur une approche différenciée de la pauvreté rurale et urbaine.

« Nous devons comprendre les défis permanents auxquels les populations du monde entier sont confrontées en raison de la pauvreté », a insisté la Libye, et collaborer pour nous attaquer à ses causes profondes.  L’annulation de la dette, l’accès aux marchés, l’éducation, le transfert de technologie et l’assistance technique sont autant d’éléments susceptibles de renforcer l’aide internationale au développement. 

Le Vice-Ministre des affaires étrangères pour l’Amérique du Nord du Venezuela a soutenu pour sa part que l’imposition « criminelle » de mesures coercitives unilatérales à l’encontre du tiers de l’humanité constitue l’une des plus grandes attaques contre le développement social des peuples, particulièrement les groupes les plus vulnérables. 

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, le mercredi 7 février, à 10 heures. 

 

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Forum ministériel sur le thème prioritaire: Comment améliorer l’intégration des considérations sociales dans les cadres de développement? 

En matière sociale, le coût de l’inaction est supérieur à celui de l’action, a constaté M. JOHANNES RAUCH, Ministre fédéral des affaires sociales, de la santé, des soins et de la protection des consommateurs de l’Autriche, en ouvrant la discussion.  Confrontées à un taux d’inflation historique de 10% qui a poussé des personnes qui n’avaient jamais eu besoin d’aide dans des situations précaires, voire dans la pauvreté, les autorités autrichiennes ont su surmonter ces difficultés en intégrant des considérations sociales aux programmes publics nationaux.  La mobilisation des ressources afin d’endiguer la hausse des prix de l’électricité et de venir en aide aux personnes, notamment âgées, a ainsi permis d’investir dans les services sociaux plutôt que de laisser s’installer la pauvreté, s’est-il félicité.  La société autrichienne vieillissant rapidement, le Gouvernement fédéral autrichien a pris acte du fait que les services sociaux sont devenus critiques en adoptant deux réformes des soins de santé à long terme à l’intention de personnes âgées, a expliqué M. Rauch. 

Dans une vidéo préenregistrée, le Ministre du développement et de l’aide sociale du Brésil, M. WELLINGTON DIAS, a illustré l’importance de mettre en œuvre des politiques publiques contre la pauvreté en rappelant que « la faim est revenue » dans son pays dès lors que les programmes qui avaient permis de réaliser des progrès avant 2014 ont été « déformés, détériorés ou interrompus » par un « projet politique destructeur ».  Pour mettre fin à ces fléaux, nous disposons déjà, en plus des objectifs de développement durable (ODD), de plus de sept décennies de programmes de réduction de la pauvreté et de sécurité alimentaire qui nous ont permis d’identifier les politiques les plus efficaces.  Or, « encore une fois », les inégalités sont venues entraver la mise en œuvre de ces mesures, de nombreux pays animés de la volonté d’appliquer des politiques sociales porteuses manquant des ressources ou des capacités techniques pour le faire, a-t-il constaté.  En outre, lorsqu’elles existent, ces sources demeurent trop souvent fragmentées, incohérentes et difficilement applicables à grande échelle dans les pays les plus vulnérables.  C’est la raison pour laquelle le Président brésilien a annoncé, lors d’une réunion du Groupe des Vingt (G20), la création d’un groupe de travail spécial chargé de forger une alliance mondiale contre la faim et la pauvreté, en collectant ressources et connaissances là où elles sont le plus abondantes pour les canaliser là où elles sont le plus nécessaires. 

De son côté, Mme BETTY AMONGI, Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda a vu dans la protection sociale un outil stratégique permettant de réduire la pauvreté et la vulnérabilité, d’améliorer la résistance des ménages aux chocs et de soutenir le développement du capital humain en vue d’une croissance durable et inclusive.  Les politiques sociales de l’Ouganda reposent notamment sur l’accès à la sécurité sociale grâce à des régimes contributifs, le soutien aux personnes vulnérables, le renforcement institutionnel et la protection contre les chocs, le tout en tenant compte des questions de genre.  Pour ce faire, a expliqué la Ministre, le pays n’a pas hésité à faire appel aux institutions et programmes multilatéraux internationaux tels que la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI), la Banque africaine de développement (BAD) ou encore les institutions spécialisées de l’ONU, par l’entremise de subventions et de prêts destinés à renforcer l’économie et le bien-être des citoyens.  Cette coopération englobe également les organisations communautaires et les groupes d’entraide informels qui ont recours à des approches d’autonomisation sociale.

Au cœur de la stratégie des objectifs nationaux des ODD du Costa Rica se trouve l’idée que le développement durable n’est pas l’apanage de l’État, mais qu’il doit faire appel à la participation d’une multitude d’acteurs pour assurer l’adaptation des objectifs aux priorités du pays, a expliqué à son tour M. ALEJANDRO SOLANO ORTIZ, Vice-Ministre des affaires étrangères du Costa Rica.  À cet égard, la mobilisation des efforts multilatéraux est fondamentale pour promouvoir l’inclusion et la participation à l’économie de l’avenir, y compris en matière d’emploi, de protection sociale et de santé. Il incombe donc, selon lui, aux États d’encourager les partenariats public-privé afin d’atteindre les ODD, en tirant davantage de l’innovation et de l’efficacité des entreprises, notamment en matière de financement des projets.  La coopération internationale peut soutenir ces efforts en libérant des flux financiers pour l’investissement social.  En prévision du Sommet de l’avenir, nous devons intégrer ce bagage à nos discussions pour renforcer la solidarité internationale et raffiner l’architecture internationale du financement du développement. 

L’investissement social a en effet le potentiel de nous aider à en finir avec les cycles de pauvreté, a reconnu la Ministre du travail, de la solidarité et de la sécurité sociale du Portugal, Mme ANA MENDES GODINHO.  Alors que les acquis des dernières années sont menacés et que l’extrême pauvreté est en progression pour la première fois depuis des décennies, elle a jugé urgent de mobiliser des financements pour l’action sociale à l’échelle locale, nationale et internationale à l’aide de politiques de renforcement de la résilience face aux inégalités.  L’intégration sociale dans tous les domaines politiques doit être une priorité commune et le moteur du progrès, a-t-elle insisté.  La Ministre a expliqué que la stratégie sociale de son pays repose sur cinq piliers, à savoir l’investissement dans l’enfance, des programmes de travail décent visant à augmenter les salaires de 20% d’ici à 2026, la formation ainsi qu’un modèle social inclusif garantissant l’égalité des droits, indépendamment de l’origine et du sexe. 

Débat interactif 

Ces exposés démontrent, selon le Vice-Ministre de la famille et des services sociaux de la Türkiye, que l’intégration sociale dans le cadre du développement nécessite une démarche multidimensionnelle, notamment en ce qui concerne l’aide aux personnes âgées et en situation de handicap.  Considérant que notre monde a besoin de davantage de solidarité et de coopération pour tenir les engagements en faveur des ODD, la Vice-Ministre de la protection sociale de Chypre a souligné l’importance de rompre les cycles intergénérationnels de pauvreté afin de produire des effets systémiques à long terme. 

En réponse à une question du Kenya concernant la mobilisation des recettes nationales fiscales pour investir dans l’aide aux démunis, la Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda a reconnu que les impôts nécessaires pour briser les cycles de pauvreté sont trop souvent mal gérés du fait de la corruption endémique dans certains pays.  Pour y mettre fin, elle a prôné une réforme du régime fiscal permettant de le rendre plus efficace, à l’image de celle menée dans son pays. 

Pour le Vice-Ministre des affaires étrangères du Costa Rica, cependant, « le plus grand défi est celui de la coopération internationale ».  Le PIB ne doit pas être le seul indicateur macroéconomique pour déterminer si un pays est considéré à revenu intermédiaire ou non. Comme la Ministre des services sociaux et de la sécurité sociale du Guyana, il a demandé à la communauté internationale de reconnaître le caractère pluridimensionnel de l’indice de vulnérabilité pour évaluer les pays et leur permettre de réaliser leurs programmes nationaux de développement. 

Discussion générale

Mme DONNA COX, Ministre du développement social et des services à la famille de la Trinité-et-Tobago, a présenté la stratégie nationale de développement de son pays destinée à ancrer la société dans les principes de justice sociale.  Le Gouvernement examine l’impact des programmes sociaux nationaux sur la réduction de la pauvreté multidimensionnelle et de la vulnérabilité, afin de garantir l’inclusion sociale et l’accessibilité aux services essentiels pour tous les citoyens, notamment en établissant un registre national des personnes vulnérables.  L’éradication de la pauvreté étant l’un des principaux objectifs de son gouvernement, la Ministre a indiqué avoir travaillé en tandem avec des organisations de la société civile et d’autres partenaires pour mettre en œuvre des initiatives en ce sens, dans le cadre du système de protection sociale.

Mme HAJIA LARIBA ZUWEIRA ABUDU, Ministre du genre, des enfants et de la protection sociale du Ghana, a indiqué que dans son pays, les inégalités et la pauvreté persistent malgré une croissance économique considérable.  C’est pourquoi le Gouvernement met en œuvre des politiques de transformation pour assurer un développement social équitable.  Alors que la Constitution nationale consacre les droits du travail et promeut la protection et l’inclusion sociales, des politiques telles que l’Education Capitation Grant et la gratuité des lycées ont catalysé l’accès à une éducation de qualité, favorisant la réduction de la pauvreté à long terme, s’est-elle enorgueillie.  Le Ghana a également mis sur pied un registre national des ménages qui collecte des données socioéconomiques pour cibler l’aide là où elle est le plus nécessaire. Sur cette base, le programme Livelihood Empowerment Against Poverty permet de fournir un soutien financier indexé à plus de 1,5 million de Ghanéens, a-t-elle précisé, faisant également état d’un programme d’alimentation scolaire, qui contribue à nourrir près de 4 millions d’élèves, tout en créant des emplois et des marchés pour les agriculteurs locaux. 

La Ministre a d’autre part évoqué le régime national d’assurance maladie, qui couvre plus de 11,7 millions de citoyens, y compris les plus vulnérables.  Saluant l’aide fournie par des partenaires tels que la Banque mondiale et l’UNICEF, elle a assuré que son pays entend faire de la protection sociale, de la participation économique et de la justice une réalité pour tous ses citoyens.  Pour ce faire, le Ghana encourage les investissements, notamment dans des pratiques agricoles modernes et durables qui garantissent la sécurité alimentaire et l’autonomisation économique au niveau national et régional, a-t-elle précisé. 

M. ALEJANDRO SOLANO, Vice-Ministre des affaires multilatérales du Costa Rica, a indiqué que, face aux problèmes liés à la pandémie, au vieillissement de sa population et à la migration, son pays a opté pour des politiques et des stratégies qui répondent à ces défis de manière intégrée.  Le Costa Rica a ainsi lancé voilà 10 ans le système d’information sociale Sinirube, assorti d’une couverture nationale, qui facilite l’identification des ménages vulnérables.  Il a également adopté une loi créant le système national de soins, avec pour objectif d’universaliser les services d’accompagnement et de soins dont ont besoin les personnes âgées en situation de dépendance.  Il a d’autre part lancé un programme de localisation des ODD afin d’avoir des impacts plus durables au niveau local grâce à des alliances multiacteurs et multiniveaux.  De l’avis de l’intervenant, la coopération internationale peut soutenir ce type d’initiatives en générant des marges budgétaires pour l’investissement social et en libérant de nouvelles ressources pour parvenir à la sécurité humaine.  À cet égard, il s’est dit convaincu que le Sommet de l’avenir aidera à jeter les bases d’un nouveau contrat social entre « nous, le peuple des Nations Unies », complété par un Sommet social mondial qui approfondira ces leçons. 

Mme MARILENA EVANGELOU SERDARI, Vice-Ministre de la protection sociale de Chypre, a passé en revue les politiques de protection sociale à l’œuvre dans son pays, telles que le revenu minimum garanti et le renforcement du programme d’intervention sociale dont l’objectif est d’accroître les chances d’accès à l’emploi grâce à des programmes d’éducation et de renforcement des compétences.  L’éducation est également très importante pour parvenir à un avenir durable.  Elle a précisé que la fréquentation scolaire à Chypre est presque universelle, garantissant l’égalité des chances à tous les enfants, sans discrimination.  Chypre est pleinement déterminée à ne laisser personne de côté et c’est pourquoi, au travers de la stratégie nationale en faveur des personnes handicapées 2018-2028, son gouvernement ambitionne de mettre fin à l’exclusion sociale de cette catégorie de la population, en l’aidant à parvenir à une participation pleine et effective dans tous les secteurs de la société. 

Mme MARÍA ALEJANDRA MENALDO, Vice-Ministre des politiques, de la planification et de l’évaluation au Ministère du développement social du Guatemala, a déclaré que, grâce à un accord ministériel, tous les programmes sociaux nationaux ont été harmonisés, en pariant sur l’interopérabilité des données collectées en amont pour accroître l’efficacité des différentes mesures.  Cette stratégie se fait dans le respect des droits humains des populations, a-t-elle ajouté, en rappelant les engagements pris par son gouvernement pour tendre vers une société plus inclusive et égalitaire. 

M. NHEK VANARA, Secrétaire d’État au Ministère des affaires sociales, des anciens combattants et de la réinsertion de la jeunesse du Cambodge, a déclaré que son gouvernement accorde une forte priorité à l’inclusion sociale, reflétée par le cadre politique national de protection sociale 2016-2025 et la stratégie pour la croissance, l’emploi, l’équité, l’efficacité et la durabilité.  Le pays s’est également doté du cadre politique pour l’économie et la société numériques 2021-2035, de la politique numérique 2022-2035 et du cadre politique national de protection sociale qui abordent la protection sociale comme un investissement en matière de capital humain et d’équité sociale.  La vision à long terme, a expliqué l’intervenant, consiste à bâtir un système de protection sociale inclusif, efficace et financièrement viable; à améliorer le développement des ressources humaines; et à stimuler la croissance économique.  Le suivi et le financement de tous les programmes d’assistance sociale sont également consolidés dans le cadre d’un paquet familial afin d’améliorer l’efficacité opérationnelle des programmes, a encore précisé le Secrétaire d’État. 

Mme FANNY MONTELLANOS, Vice-Ministre des politiques sociales et de l’évaluation du Pérou, a convenu qu’en dépit de ses richesses, son pays fait face à de grands défis, l’un des principaux étant la pauvreté, aggravée par la pandémie de COVID-19, qui est passée de 20% en 2019 à 27,5% en 2022.  Elle a ajouté que 72% de la population en situation de pauvreté ou de vulnérabilité réside dans des zones urbaines.  En réponse à ce phénomène, l’État péruvien reconnaît la nécessité de lutter contre les fortes inégalités existantes, a-t-elle affirmé, évoquant l’adoption en 2022 de la politique nationale de développement et d’inclusion sociale pour 2030. Alignée sur les objectifs du Programme 2030, cette politique propose une vision et une approche différenciées de la pauvreté rurale et urbaine, et donne la priorité à la pauvreté multidimensionnelle. Le Pérou a d’autre part engagé différentes actions qui appuient une vision globale du développement social, parmi lesquelles la consolidation du registre social, qui permet d’avoir une vision complète des ménages vulnérables et de les accompagner.  Le Gouvernement péruvien prévoit d’autre part de réaliser la première mesure de la pauvreté multidimensionnelle, ce qui permettra de compléter la mesure actuelle de la pauvreté monétaire et ainsi de suivre les engagements de réduction de la pauvreté au niveau national.  Rappelant enfin que le Pérou est confronté à un grave problème de migration, la Vice-Ministre a indiqué que, fin 2023, pas moins de 1,6 million de réfugiés vivaient sur le sol péruvien, dont un million dans la capitale Lima, beaucoup étant entrés dans le pays de manière irrégulière.  Pour y faire face, a-t-elle précisé, l’État péruvien a renforcé ses stratégies d’identification des étrangers afin d’évaluer leur situation de vulnérabilité en raison de leur condition socioéconomique. 

M. CARLOS RON, Vice-Ministre des affaires étrangères pour l’Amérique du Nord du Venezuela, a déclaré que l’ensemble des politiques publiques nationales de son pays visent à l’éradication définitive de la pauvreté, en plaçant l’être humain « au centre du développement et au-dessus du profit ».  Les inégalités d’accès à l’alimentation, l’éducation, la santé, la protection sociale ainsi qu’à des services décents génèrent, à ses yeux, une rupture des liens sociaux essentiels, au sein d’un système économique « prédateur et exclusif ». Selon le Ministre, l’imposition « criminelle » de mesures coercitives unilatérales à l’encontre du tiers de l’humanité, dont le Venezuela, constitue l’une des plus grandes attaques contre le développement social des peuples, particulièrement les groupes les plus vulnérables.  En dépit de « l’agression continue » menée contre son pays, l’investissement social au Venezuela représente plus de 77% du budget national, s’est-il enorgueilli. Les efforts multilatéraux visant à garantir le financement de la protection sociale universelle doivent être une priorité de l’ONU, dans le cadre d’un multilatéralisme authentique et inclusif, fondé sur la Charte des Nations Unies, a-t-il affirmé. 

Le représentant de l’Inde a déclaré que la justice sociale est au cœur des politiques entreprises par son pays pour réaliser les ODD.  L’Inde, a-t-il affirmé, connaît à cet égard un changement de paradigme, après être passée du développement des femmes aux « femmes du développement », pour que celles-ci ne soient pas simplement les bénéficiaires des programmes d’aide prévus par le Gouvernement.  Pour promouvoir l’entreprenariat des femmes, des prêts sans intérêt leur sont fournis, a indiqué le représentant, en expliquant qu’un certain nombre d’entre elles sont des vendeuses dans les rues ou des maraichères.  Le délégué a également fait valoir le nombre d’élues au sein des gouvernements locaux, avant d’énumérer les réussites indiennes en matière de recul de la pauvreté et de baisse de la mortalité infantile.

Le représentant des Philippines a déploré que la persistance de la pauvreté dans son pays a pour effet de priver de ses droits une partie importante de la population, les plus vulnérables au premier chef.  Compte tenu des disparités socioéconomiques existantes, la réalisation des ODD nécessite selon lui des interventions ciblées et des politiques inclusives. Parmi celles-ci, le représentant a mentionné l’apport de la transformation numérique afin de combler les écarts socioéconomiques, notamment les programmes d’alphabétisation numérique et les services administratifs en ligne.  Les Philippines mettent en outre l’accent sur le renforcement des programmes de protection sociale en tant que filet de sécurité à l’intention des groupes vulnérables.  Le plan de protection sociale national vise également à doter le pays d’un système social transformateur.  Dans le cadre du trentième anniversaire de l’Année internationale de la famille, le Gouvernement philippin poursuit ses efforts pour renforcer les valeurs familiales, promouvoir l’équilibre entre la vie professionnelle et familiale et fournir des systèmes de soutien social.

Le représentant du Paraguay, a indiqué que pour remédier à la pauvreté, aux inégalités et à l’exclusion sociale, le Gouvernement paraguayen a adopté un plan national de développement 2030 qui converge à 92% avec les ODD.  Dans le cadre de ce plan, axé sur le développement social et la croissance économique inclusive, le Paraguay s’engage à améliorer la qualité de vie des personnes en situation de pauvreté, la situation économique des personnes actives, ainsi que la cohésion sociale dans les territoires et les communautés. Pour ce faire, il suit des politiques et des programmes qui prennent le respect des droits humains comme principes directeurs, a précisé le délégué, avant de mettre l’accent sur le plan national de réduction de la pauvreté, obligatoire pour le secteur public et indicatif pour le secteur privé.  Ce dispositif, actualisé grâce à la contribution des agriculteurs, des peuples autochtones et des personnes handicapées, vise à lutter contre la pauvreté monétaire et multidimensionnelle, a-t-il indiqué.  Il s’est également félicité que l’augmentation de 25% de la valeur des transferts monétaires ait permis de réduire les disparités dans les conditions de vie de la population paraguayenne.  Ces types d’initiatives d’inclusion monétaire sont des exemples concrets de la manière dont les pays, en collaboration avec l’ONU, peuvent progresser vers des objectifs communs de développement durable, a souligné le responsable, se disant convaincu que la transformation numérique est essentielle pour progresser vers la justice sociale. 

La représentante de la Suisse a indiqué que le système éducatif suisse offre des parcours professionnels et académiques, ainsi qu’une grande flexibilité entre ces deux types de parcours. Cela permet de disposer d’une main d’œuvre suffisamment qualifiée tout au long de la chaîne d’innovation et de création de valeur, a-t-elle expliqué, assurant que ce système contribue à la cohésion sociale en offrant un large éventail de possibilités de formation et d’emploi à des personnes ayant des inclinations et des intérêts différents. Elle a expliqué que le contenu de la formation et les procédures de qualification au niveau national sont définis par les associations professionnelles ou les organisations sectorielles, ce qui permet de répondre aux besoins spécifiques du marché du travail.  Elle a ajouté que les réglementations du marché du travail suisse combinent flexibilité et sécurité, encourageant notamment la réintégration rapide des chômeurs. Selon elle, le progrès social peut devenir partout une réalité à condition de créer des environnements favorables dans lesquels les entreprises et les sociétés peuvent prospérer sur la base du respect des droits humains, de mettre en œuvre des systèmes fiscaux progressifs, et de développer un système d’assurance sociale efficace tout au long du cycle de vie.  Elle a également cité le renforcement du dialogue social, via des mécanismes de consultation multipartite, et la proposition d’emplois décents.  À cet égard, la représentante a salué le lancement par l’Organisation internationale du Travail (OIT) d’une coalition mondiale pour la justice sociale afin de s’assurer que toutes les mesures et actions sociales nécessaires à tous les niveaux de l’élaboration des politiques soient intégrées. 

M. MARK KAMPERHOFF, Ministère fédéral de la famille, des personnes âgées, des femmes et de la jeunesse de l’Allemagne, a tout d’abord estimé que la justice sociale va de pair avec la réduction des inégalités et l’éradication réussie de la pauvreté multidimensionnelle.  À cette aune, il a jugé essentiel d’examiner l’ensemble du parcours de vie des personnes et d’adopter une perspective intersectionnelle, ce qui implique notamment de placer les enfants et les jeunes au premier plan des politiques et des prises de décision, de soutenir les familles, de garantir de bonnes conditions de vie aux personnes âgées, de promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles et de garantir à tous une vie sans violence.  Il a affirmé que les politiques axées sur la famille contribuent à mettre fin à la pauvreté et à la faim et à promouvoir le bien-être de toutes les générations.  Revenant au thème prioritaire de cette session, il a préconisé des politiques sociales globales et fondées sur les droits humains pour accélérer les progrès dans la mise en œuvre de tous les objectifs du Programme 2030, en particulier celui de l’éradication de la pauvreté. 

Le Ministre a cédé la parole à deux délégués de la jeunesse de l’Allemagne, qui ont regretté que la mise en œuvre des mesures décidées par l’ONU pour favoriser un développement social inclusif et la justice sociale pour tous exclue souvent ceux qui sont le plus touchés. Témoignant de la situation des jeunes Allemands, ils ont déploré que, pour la plupart d’entre eux, en particulier ceux en situation précaire, la participation aux travaux de l’ONU reste impossible en raison des obstacles financiers et structurels auxquels ils continuent de se heurter.  Selon eux, créer des opportunités pour l’engagement inclusif des jeunes doit être une priorité pour les Nations Unies et leur objectif de ne laisser personne de côté.  Plaidant pour des conseils de jeunesse ou des comités consultatifs dédiés, incluant des jeunes de différentes zones géographiques ou milieux sociaux, ils ont aussi appelé à réduire la fracture numérique afin de garantir que toutes les voix soient entendues.  Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons garantir que les politiques sociales profitent à tous, ont-ils déclaré. 

Le représentant du Qatar a déclaré que son pays est à l’avant-garde de ceux qui œuvrent à réaliser les ODD, notamment en matière d’éradication de la pauvreté, grâce à son soutien à l’ONU, « étant le plus grand donateur du monde arabe ».  Le pays a obtenu des succès considérables en matière de stabilité sociale, grâce à de nombreux projets visant à favoriser une « culture de production », afin d’améliorer l’efficacité des familles et de garantir les droits des enfants.  Ainsi, le programme Qatar Charity s’appuie sur des projets d’autonomisation économique pour lutter contre la pauvreté.  Le nombre de projets mis en œuvre au cours de l’année 2020-2021 dans ce cadre a dépassé les 10 000, bénéficiant à plus de 62 000 personnes, s’est enorgueilli le représentant.  Notre pays, a-t-il ajouté, a parcouru un long chemin dans le domaine des droits des personnes handicapées, grâce à de nombreuses initiatives, notamment sa stratégie nationale pour les droits des personnes handicapées (2021-2025), qui se concentre sur l’égalité des chances, la pleine intégration et la lutte contre la discrimination à leur égard.

Le représentant du Mexique a souligné que la pauvreté est un obstacle majeur au développement.  Il a expliqué que les programmes nationaux de son pays promeuvent la justice, le développement et le bien-être social, à travers des objectifs tels que la garantie des droits humains, et la réduction des inégalités socioéconomiques auxquelles sont confrontés les groupes de population historiquement exclus, de même que l’assurance de revenus suffisants, la promotion de l’autosuffisance alimentaire, l’inclusion productive des agriculteurs et la promotion d’une culture de paix.  Ces programmes promeuvent aussi l’égalité des sexes et s’attaquent aux obstacles à l’inclusion sociale. 

Il a également fait état d’une réforme de la Constitution, qui transforme l’octroi d’une pension non contributive à tous les adultes de plus de 68 ans en un droit du citoyen et une obligation de l’État. Dans le cas des peuples autochtones et afro-mexicains, cette prestation est accordée à partir de 65 ans, a-t-il précisé, ajoutant que le droit et l’ordre de priorité selon lesquels l’État mexicain est tenu de fournir un soutien économique aux personnes handicapées permanentes ont également été établis.  Il a par ailleurs rappelé qu’en octobre dernier, la première chambre de la Cour suprême de justice du Mexique a déterminé que toute personne a le droit humain de recevoir des soins, d’être soignée et de prendre soin d’elle-même, et que l’État a un rôle prioritaire dans ce domaine.  De même, a-t-il poursuivi, il a été acté que le droit aux soins implique également le droit des personnes à ne pas être forcées de le faire en raison de mandats liés au genre, ce qui contribue à lutter contre les conditions de pauvreté différenciées dont souffrent de nombreuses femmes.

La représentante de la Zambie a indiqué que son pays procède à une évaluation pour établir les niveaux de pauvreté au niveau national et s’est doté d’un plan de développement qui mise sur l’investissement dans le capital humain pour renforcer la vision nationale. La Zambie cherche notamment à renforcer son système de protection sociale afin qu’il puisse répondre aux chocs grâce à un cadre institutionnel robuste.  Parmi les domaines visés, elle a cité la promotion de l’emploi décent, le renforcement de l’éducation de qualité et des compétences, ainsi que l’accès aux soins de base, à l’eau potable et à l’assainissement.  La Zambie compte également continuer d’investir dans le renforcement des capacités des travailleurs sociaux et finance ses efforts à l’aide de ses recettes fiscales.  La numérisation des services est une autre grande priorité.  Alors que 60% de la population du pays demeure dans la pauvreté, la Zambie va continuer d’investir dans la protection sociale, a-t-elle assuré.

La représentante de la Thaïlande a mis en avant certains des efforts déployés par son pays pour réduire la pauvreté et remédier aux vulnérabilités des individus et de leurs familles.  Elle a notamment fait mention de la plateforme de cartographie et d’analyse des personnes thaïlandaises, utilisée par son gouvernement pour identifier les ménages à faible revenu et leur fournir des services sur mesure.  Depuis 2021, plus de 900 000 ménages vulnérables ont été enregistrés dans le système, a-t-il précisé.  Elle a d’autre part évoqué les actions entreprises pour garantir que les personnes vulnérables, en particulier les enfants, les personnes handicapées et les seniors, soient véritablement intégrées dans le développement social. La représentante a ainsi rappelé que, depuis 2015, une aide financière est versée aux familles pauvres avec des nouveau-nés afin de réduire l’écart de pauvreté dans la société thaïlandaise. En 2023, plus de 2,3 millions de familles ont bénéficié de ce programme, pour un montant d’environ 8,7 milliards de bahts thaïlandais, a-t-elle détaillé, ajoutant que plus de 2,2 millions de personnes handicapées doivent recevoir cette année une allocation d’invalidité ainsi que d’autres aides et services, notamment en matière d’emploi et de formation numérique.  Elle a enfin souligné l’attachement de son gouvernement au renforcement de la famille, « unité centrale de la société », afin de soutenir une société intergénérationnelle fondée sur l’équité, le respect des droits humains, la justice sociale et la non-discrimination. 

Le délégué de la jeunesse de la Croatie, a appelé à mettre le développement social et la justice sociale au premier plan des efforts collectifs, car ils constituent le fondement sur lequel prospère le développement durable.  Considérant à cet égard que l’éradication de la pauvreté « n’est pas un rêve lointain mais un appel urgent à l’action », il a relevé qu’il existe de nombreux exemples de l’impact positif de politiques ciblées qui autonomisent les communautés marginalisées, leur permettant de briser les chaînes de la pauvreté et de contribuer de manière significative à la société.  Pour y parvenir, a-t-il plaidé, nous devons lutter contre les causes profondes de l’inégalité, de la discrimination et de l’exclusion, en favorisant une société dans laquelle chaque individu, quelle que soit son origine, peut s’épanouir.  Dans ce cadre, l’inclusion des jeunes n’est pas négociable, a-t-il souligné, assurant que l’énergie, la créativité et la détermination des jeunes sont de puissants catalyseurs de changement.  Le délégué a donc invité les gouvernements et les parties prenantes à s’engager auprès des jeunes, en exploitant leurs perspectives, idées et innovations pour façonner des politiques qui trouvent un écho auprès de la jeune génération.

Le représentant de l’Afrique du Sud a indiqué que le système de protection sociale de son pays est basé sur un modèle hybride conçu pour couvrir l’ensemble du cycle de vie, protéger les personnes vulnérables et à risque, renforcer les capacités et assurer l’inclusion économique.  Près de 14 milliards de dollars sont consacrés chaque année à la sécurité et à l’assistance sociales, ce qui permet d’atteindre 27 millions de personnes et de ménages vulnérables.  Le Gouvernement investit dans le développement de la petite enfance, l’éducation est gratuite et un programme de travaux publics a été mis sur pied dans l’objectif de renforcer les capacités et de créer une passerelle entre les emplois à court et long termes.  Ces services et d’autres représentent 60% des dépenses annuelles du Gouvernement.

Mme NAIDA NISIC, Ministre du travail et de la protection sociale du Monténégro, a indiqué qu’en seulement trois mois, le nouveau Gouvernement du pays a augmenté la pension minimale, démontrant ainsi son engagement à améliorer les normes de sécurité sociale pour 74 000 de ses concitoyens.  Il prévoit également d’entreprendre des réformes globales du système de protection sociale et de l’enfance ainsi que du système de protection des personnes handicapées, conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations Unies.  L’emploi et l’autonomisation des jeunes constituent aussi une priorité, a ajouté l’intervenante, en vantant des réformes structurelles qui visent à accroître la flexibilité du marché du travail, à éliminer l’emploi informel et à renforcer la stabilité sociale.  Le Monténégro, a-t-elle ajouté, s’engage activement dans des réformes systémiques globales, en mettant l’accent sur l’amélioration de la disponibilité et de la qualité de la protection sociale et de la protection de l’enfance.  Enfin, afin de créer une administration publique plus efficace, transparente et ouverte, accessible à tous les citoyens sur un pied d’égalité, le Gouvernement monténégrin continuera à promouvoir le respect des droits humains et l’égalité entre les sexes et à contribuer à la suppression de toutes les formes de discrimination, en particulier celle à l’égard des femmes, a précisé la Ministre du travail.

Le représentant de la Pologne a déclaré que son pays prend l’éradication de la pauvreté et le soutien aux familles très au sérieux, en mettant en place des mesures visant à les combiner par le biais de nombreux programmes.  Le programme national de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale 2021-2027 comprend des mesures de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, ainsi que l’itinérance, de même que des services d’aide aux personnes handicapées, aux personnes âgées et à l’intégration des étrangers.  Si, en Pologne, la solidarité revêt une signification historique particulière, elle désigne aujourd’hui la volonté de partager son histoire de transformation pacifique avec ses partenaires, a expliqué le représentant.  La mise en place d’institutions fortes, fondées sur les principes de bonne gouvernance et de protection des droits humains, doit être au cœur du développement durable, a-t-il insisté.  Selon le représentant, les États Membres doivent écouter les voix de la société civile et des organisations qui en découlent pour trouver les solutions les plus adaptées. 

Le délégué de la jeunesse de la Bulgarie a fait état d’une enquête menée auprès des jeunes de son pays.  Les quelque 1 800 réponses reçues révèlent que la santé est l’une des trois principales préoccupations des jeunes, a-t-il indiqué, appelant à reconnaître le rôle vital des soins de santé des jeunes dans la construction de l’avenir de nos sociétés.  Selon lui, l’un des problèmes les plus urgents auxquels sont confrontés les jeunes est la disparité en matière d’accès et de prix des soins. Nous devons élargir l’accès aux services de santé essentiels et garantir une qualité égale de soins de santé pour tous, a-t-il plaidé, avant de souligner que, pour les communautés mal desservies et rurales, les investissements dans les soins de santé ainsi que la collaboration entre les agences gouvernementales et les organisations non gouvernementales sont essentiels pour réduire les inégalités. Il a ensuite cédé la parole à un autre délégué de la jeunesse de la Bulgarie, qui a mis l’accent sur la santé mentale des jeunes.  Estimant que l’éducation en la matière doit demeurer une priorité si l’on veut que les prochaines générations exploitent pleinement leur potentiel, il a rappelé que le Conseil des droits de l’homme a reconnu la nécessité d’intégrer la santé mentale dans les soins primaires en soulignant l’importance des approches communautaires pour protéger les droits individuels et faire progresser la santé mentale en tant que droit humain. 

Le représentant de la Chine a indiqué que le développement est une priorité de son gouvernement, comme le fait de placer l’être humain au cœur de ses programmes.  En témoignent des politiques macroéconomiques qui favorisent la création d’emplois, y compris pour les segments vieillissants de la population. Le Gouvernement chinois accorde beaucoup d’importance à la réalisation du Programme 2030, a ajouté le représentant, qui a expliqué qu’étant donné le nombre de bénéficiaires, Beijing met en œuvre les plus importants programmes au monde de sécurité sociale, d’éducation et de soins de santé.  La Chine s’est par ailleurs engagée à l’international, pour aider les pays qui aspirent à leur développement dans le respect de leur indépendance, tout en partageant une même vision d’un avenir commun. 

Le représentant de la Libye a déploré que le monde s’évertue à répéter ses promesses « vides de sens » d’élimination de la pauvreté, tandis que des milliards de personnes demeurent piégées dans un cycle de pauvreté.  Nous devons comprendre les défis permanents auxquels les populations du monde entier sont confrontées en raison de la pauvreté, et collaborer pour nous attaquer à ses causes profondes, a-t-il insisté.  L’annulation de la dette, l’accès aux marchés, l’éducation, les transferts de technologie et l’assistance technique sont autant d’éléments essentiels de nos efforts collectifs visant à renforcer l’aide internationale au développement.  Compte tenu que la pauvreté touche certains groupes de manière disproportionnée, le représentant a souligné l’importance de mettre en œuvre des politiques sociales ciblées.  Le Gouvernement libyen s’efforce pour sa part de développer des systèmes complets de protection sociale à l’intention de ceux qui en ont besoin, afin d’assurer l’accès aux nécessités de base telles que la nourriture, les soins de santé, l’éducation, l’électricité et l’eau.  Il s’est également engagé en faveur de l’autonomisation des femmes et des jeunes. S’agissant du conflit en cours à Gaza, le représentant a déclaré que « parler de pauvreté devient un luxe face à un siège, des massacres et des destructions systématiques qui annihilent tous les aspects de l’existence ». 

Le représentant du Pakistan a constaté que si la tendance actuelle se confirme, quelque 765 millions de personnes risquent de vivre dans la pauvreté extrême en 2030.  Face à ces défis, la stratégie du Pakistan porte sur l’alimentation, le logement, les soins gratuits, l’autonomisation des jeunes et le renforcement de leur employabilité, a précisé le représentant.  Rappelant que la Déclaration de Copenhague stipule que le développement social ne peut devenir une réalité à travers des initiative parcellaires, il a appelé à promouvoir le progrès social, formant le vœu que le Sommet social mondial de 2025 sera un jalon important à cet égard. Il a appelé à lutter contre les inégalités d’accès aux services fondamentaux, jugeant en outre essentiel d’aider les pays en développement à lutter contre la pauvreté et à réaliser les ODD.  Pour cela, 4 500 milliards de dollars doivent être mobilisés chaque année à partir de l’aide publique au développement, des droits de tirages non utilisés et d’autres mécanismes de financement concessionnel, a plaidé le représentant. 

Il a d’autre part appelé à faire de la promotion de la couverture sanitaire universelle, de l’accès à l’éducation de qualité et au renforcement des compétences des priorités.  De même, a-t-il ajouté, une approche fondée sur les moyens de subsistance et une augmentation des capacités en termes d’adaptation aux effets des changements climatiques sont nécessaires pour lutter efficacement contre la pauvreté. Enfin, alors que les 54 pays les plus pauvres dépensent plus en remboursement de la dette qu’en soins de santé, il a jugé urgent de réformer l’architecture financière internationale pour atteindre les ODD et éliminer la pauvreté.   

La représentante de l’Indonésie a constaté que les défis du développement social ont pour effet de creuser les inégalités numériques, de genre et d’accès à la santé et l’éducation.  La pauvreté constitue selon elle le défi le plus important, et l’ONU se doit de fixer des priorités pour y remédier.  Nous devons en outre mettre les personnes les plus vulnérables au cœur du développement, en misant sur une volonté politique forte.  Les inégalités continuent de se creuser entre pays développés et pays en développement, a noté la représentante, avant d’appeler à renforcer la voix de ces derniers au sein des institutions économiques et financières multilatérales.  La mise en place de partenariats inclusifs avec le monde universitaire et le secteur privé permet également de faire fond sur de nouvelles sources de croissance en appui au développement social. 

Dans une vidéo préenregistrée, la représentante de la République dominicaine a déclaré que son pays s’est efforcé de promouvoir les accélérateurs du Programme 2030 tels que la création d’emplois de qualité, un cadre institutionnel inclusif, une plus grande résilience des populations face aux chocs dus aux changements climatiques, ainsi qu’une production et une consommation durables.  Le programme de lutte contre la pauvreté superate a redéfini la portée du programme de transfert de fonds monétaires qui bénéficie aujourd’hui à 40% des ménages vulnérables du pays.  Le Gouvernement dominicain a également élargi la portée de la protection sociale et de l’assurance maladie, a-t-elle noté.  Des investissements ont en outre été effectués dans le logement et l’eau potable. Qui plus est, le niveau de pauvreté a chuté à 24,4% depuis la pandémie du fait des politiques de protection sociales ciblées et de la résilience du secteur agricole. 

Le représentant de l’Italie a déclaré que la promotion de l’inclusion sociale, économique et intergénérationnelle figure au premier plan des initiatives prises par son gouvernement à l’égard de ses citoyens et qu’à cet égard le dialogue et les échanges entre femmes et jeunes sont très importants.  Il est essentiel, a-t-il dit, de donner à ces deux catégories de la population les moyens d’agir et de promouvoir leur participation pleine et significative à la société, grâce à l’accès à l’éducation, au marché du travail, et à la prise de décisions.  Face aux multiples défis qui se posent à la communauté internationale, le délégué a plaidé en faveur d’un contrat social renouvelé enraciné dans le respect des droits humains, qui se manifesterait par un logement adéquat, une éducation, un apprentissage tout au long de la vie et un travail décent pour tous.  La réalisation de ces objectifs ne sera possible que grâce à des efforts conjoints et à la coopération entre les États et les institutions internationales, a-t-il assuré.

Le représentant du Bélarus a indiqué que son pays a réussi à bâtir un modèle de développement social qui offre à chaque citoyen des garanties sociales et des opportunités.  La politique du Gouvernement repose sur le principe de la justice sociale, qui constitue la pierre angulaire de l’idéologie de l’État, a-t-il affirmé.  Ainsi, le concept de sécurité nationale définit la sécurité sociale comme un état de protection de l’individu contre les menaces sociales, garantissant la préservation de la vie, de la santé et du bien-être des citoyens, ainsi que leurs valeurs spirituelles et morales.  Notre pays, a poursuivi le délégué, a réalisé plus tôt que prévu l’objectif du millénaire pour le développement visant à éliminer l’extrême pauvreté et prend constamment des mesures pour réduire le niveau de pauvreté de sa population.  Le Bélarus se caractérise en outre par un faible taux de chômage et des systèmes de retraite fiables, ainsi qu’une qualité de vie correspondant à bien des égards à celle des pays économiquement développés, a encore précisé le représentant.

Le représentant de la Grèce a présenté quelques initiatives entreprises par son pays pour promouvoir le développement social et la justice.  Il s’est tout d’abord concentré sur la famille, « colonne vertébrale de la société », précisant que la Grèce a récemment créé un Ministère dédié à la cohésion sociale et à la famille, assorti d’un plan démographique national actuellement en cours.  Parmi les mesures mises en place pour permettre aux parents de gérer l’équilibre entre travail et vie privée, tout en allégeant le fardeau des frais de logement et d’éducation des enfants, le représentant a cité un projet qui propose aux jeunes couples des prêts à des taux d’intérêt bas, ce qui facilite leur parcours vers la parentalité et leur accession à la propriété.  Il a également fait état de l’initiative « Nounous du quartier », qui vise à promouvoir l’égalité entre les sexes et à faciliter l’accès des femmes à l’emploi en réduisant le travail non déclaré des nourrices.  Dans le même esprit, le Ministère de la cohésion sociale et de la famille aide les entreprises à financer des unités de garde d’enfants au bénéfice de leur personnel.  Convaincue par ailleurs du rôle crucial de l’éducation pour briser le cycle de la pauvreté, la Grèce a lancé un projet de repas scolaires nutritifs, a encore indiqué le représentant.

Le représentant de Cuba a déclaré que « les Cubains ne s’avouent jamais vaincus »: en dépit du blocus économique imposé par les États-Unis à son pays, celui-ci continue de mettre en œuvre des programmes sociaux multidimensionnels destinés à fournir une protection sociale à sa population, l’accent étant mis sur les catégories les plus vulnérables.  Le programme pour le renforcement de la sécurité sociale permet notamment de parvenir à cet objectif, s’est enorgueilli le représentant, qui a indiqué que Cuba a par exemple augmenté la durée des congés maternités, lesquels peuvent désormais atteindre jusqu’à 15 mois.  Nous disposons en outre d’un programme de prise en charge des jeunes et des adolescents et le Gouvernement s’efforce de rendre leurs droits transversaux, « car nous savons que ce sont des acteurs de développement ». 

La représentante du Kirghizistan a jugé impératif de respecter les engagements figurant dans la Déclaration de Copenhague.  Qualifiant de priorité absolue l’élimination de la pauvreté et la recherche du plein emploi et de la justice sociale, elle a appelé à faciliter la création d’emplois pour atteindre les objectifs du Programme 2030.  Le Kirghizistan, a-t-elle indiqué, a intégré les ODD dans sa politique et les principes du développement social dans son cadre stratégique à l’horizon 2026.  Il s’est aussi doté d’un cadre juridique robuste pour garantir des conditions de travail équitable et ainsi lutter contre la pauvreté. 

Le Gouvernement kirghize a par ailleurs pris des mesures pour renforcer la protection sociale, y compris une nette augmentation des prestations pour les familles vulnérables.  Alors que le taux de chômage ne dépasse pas 5%, la récente augmentation de 50% des salaires des fonctionnaires et le doublement des subventions maternité montrent que nous voulons améliorer le bien-être social de nos citoyens, a souligné la représentante, faisant également état d’efforts pour aider les familles à faible revenu dans les secteurs de l’agriculture et des services et pour promouvoir une migration sûre, via des accords bilatéraux.  Enfin, après avoir rappelé que le Kirghizistan a promu le 20 février comme Journée mondiale de la justice sociale, elle a invité les États Membres à la manifestation organisée le 20 février prochain par sa délégation et l’OIT au Siège de l’ONU. 

Le représentant de la Mongolie a indiqué qu’au cours des trois dernières décennies, son pays a développé une politique globale de protection sociale comme stratégie visant à améliorer le niveau de vie et à assurer le développement socioéconomique.  Ce faisant, a-t-il expliqué, la Mongolie a progressé dans la mise en œuvre des ODD, même si ce processus reste confronté à des difficultés liées aux retombées de la pandémie et des tensions géopolitiques, notamment s’agissant de l’accès à l’éducation et à la santé, des transports, de la logistique, des prix et de l’approvisionnement en carburant et en énergie.  Ces facteurs, auxquels s’ajoutent les effets des changements climatiques, continuent d’avoir un impact négatif sur le développement social du pays et sur les moyens de subsistance de la population, a déploré le représentant.  Malgré ces obstacles, le système national de protection sociale permet aux deux tiers de la population de recevoir des pensions, des prestations et des allocations en espèces, s’est-il enorgueilli.  

Le délégué a toutefois déclaré s’attendre à ce que les dépenses publiques d’assurance sociale augmentent en raison du vieillissement rapide de la population et de l’augmentation de l’espérance de vie.  En outre, la plupart des éleveurs et des travailleurs indépendants ne cotisent pas au système d’assurance retraite, ce qui posera des problèmes pour assurer leur protection sociale et augmentera les dépenses publiques consacrées aux prestations non contributives, a-t-il ajouté, jugeant crucial d’étendre la couverture d’assurance sociale à ces groupes.  Il a enfin reconnu que, tout en avançant dans la réalisation de la plupart des ODD, la Mongolie peine à réduire la pauvreté au sein de sa population, principalement en raison de la crise économique et des inégalités persistantes.  Une partie de la solution réside selon lui dans la numérisation des services de protection sociale, qui progresse favorablement en Mongolie. 

Le représentant du Népal a constaté que les pays les moins avancé (PMA), les pays en développement sans littoral (PDSL) et les petits États insulaires en développement (PEID) demeurent confrontés à une plus grande vulnérabilité aux catastrophes, d’où le nombre élevé de personnes vivant dans une extrême pauvreté.  Les progrès en matière d’éradication de la pauvreté, de plein emploi et d’intégration sociale sont toutefois lents et inégaux.  Bien que les États Membres aient mobilisé des ressources nationales pour les services sociaux par le biais d’une fiscalité progressive, d’une redéfinition des priorités des dépenses publiques et du renforcement des efforts internationaux visant à créer un espace budgétaire pour le développement social, le représentant a considéré ces mesures insuffisantes.  Pour compléter ces efforts, les partenaires de développement, y compris l’ONU, devraient selon lui répondre aux préoccupations des pays en développement par le biais du financement, du transfert de technologie et du renforcement des capacités. 

Pour sa part, le Népal a adopté des programmes fondés sur les droits et axés sur la justice sociale afin de réduire la pauvreté et de créer des emplois.  Ces mesures, a-t-il précisé, ont notamment permis d’atteindre la parité entre les sexes pour la scolarisation primaire et secondaire, et d’établir un système de retraite basé sur les cotisations afin de briser le cercle vicieux de la pauvreté. 

Le représentant de Sri Lanka a indiqué que l’approche de son pays s’articule autour d’un cadre intégré englobant éducation, soins de santé, protection sociale et autonomisation économique.  Nous reconnaissons, a-t-il dit, le lien inextricable entre santé et développement social, et nos efforts visent non seulement à traiter les maladies, mais également à les prévenir grâce à des programmes complets de santé publique.  En outre, les mécanismes de protection sociale jouent un rôle central dans notre stratégie de lutte contre la pauvreté, a souligné le représentant, en précisant que son gouvernement a établi un filet de sécurité sociale résilient qui protège les populations vulnérables des chocs liés aux incertitudes économiques.  Reste que Sri Lanka a été durement touchée par un ralentissement économique induit par la pandémie, a-t-il reconnu.  Son industrie touristique a été gravement touchée, même s’il est réconfortant d’assister à une résurgence rapide de cette industrie, a encore relevé le délégué. 

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