En cours au Siège de l'ONU

SOIXANTE-DEUXIÈME SESSION,
10E ET 11E SÉANCES PLÉNIÈRES, MATIN ET APRÈS-MIDI
SOC/4917

Commission du développement social: les délégations voient dans la justice sociale l’antidote à la pauvreté et le moteur d’un développement inclusif

Évoquant à plusieurs reprises le thème prioritaire de la présente session de la Commission du développement social, à savoir la promotion du développement social et de la justice sociale afin d’accélérer la réalisation du Programme 2030 et l’élimination de la pauvreté, la soixantaine d’États Membres et d’organisations internationales qui se sont exprimés aujourd’hui à l’occasion du débat général ont fait de la justice sociale l’antidote à la pauvreté et le moteur d’un développement inclusif, misant en particulier sur les potentiel du numérique.

La persistance des écarts de revenus et de richesses, au sein des pays comme entre eux, inflige selon le Brésil de « profondes blessures » à nos sociétés, blessures que perpétue notre inaction.  Comme plusieurs délégations, il s’est félicité de la tenue prochaine du Sommet mondial pour le développement social afin d’examiner les questions urgentes de la fracture numérique, du manque de revenus et de possibilités d’avancement, en particulier chez les jeunes et les femmes.  « Si nous devions résumer ces défis en un seul mot, ce serait celui d’"inégalité" », a résumé son représentant. 

La justice sociale repose en effet sur le principe des droits égaux, d’un traitement égal et des chances égales pour tous, a rappelé Malte, mettant l’égalité de genre et l’autonomisation des filles et des femmes au premier plan.  Face au défi commun de l’accès à l’emploi pour celles-ci ainsi que pour les jeunes et les personnes vulnérables, l’Espagne a prôné l’adoption de mesures telles que la coresponsabilité, la rationalisation des horaires ou encore l’accès universel à l’éducation dès la petite enfance. 

Malgré une baisse de 40% des nouvelles infections au VIH/sida en Afrique subsaharienne, la Vice-Ministre de la fonction publique, du travail et de la protection sociale du Zimbabwe s’est alarmée que 80% de ces nouvelles infections concernent des filles, une préoccupation majeure qui nécessite selon elle la mobilisation de ressources non affectées et régulières afin de permettre à ONU-Femmes d’apporter des réponses adaptées sur le terrain.

En ce qui concerne le vieillissement de la population, source d’inquiétude pour un nombre grandissant d’États Membres, l’Espagne s’est félicitée des travaux menés par le Groupe de travail sur le vieillissement de la Commission économique pour l’Europe (CEE) concernant l’adaptation de la stratégie régionale de mise en œuvre du Plan d’action international de Madrid sur le vieillissement. 

« Question nouvelle » à l’ordre du jour de la Commission, la fracture numérique a été soulevée par nombre de délégations en quête d’une plus grande justice sociale.  Comme le Viet Nam, le Nigéria a vu dans le transfert des compétences numériques des pays développés vers les pays en développement le moyen de parvenir à un développement « égalitaire », fondé sur une collaboration significative entre les États, les partenaires et les parties prenantes. 

Le Malawi, qui s’efforce de renforcer la protection sociale par le biais du numérique, est passé au mode électronique pour les transferts en espèces, et utilise des tablettes électroniques dans les écoles primaires ainsi que pour combattre la violence de genre et celle touchant les enfants.  Pour poursuivre dans cette voie, il a lancé un appel au secteur privé et au monde universitaire pour qu’ils fournissent un appui financier et technique à ces efforts. 

Résorber la fracture numérique constitue un objectif transversal crucial pour l’inclusion sociale et professionnelle, a confirmé la Hongrie, qui s’affaire pour sa part à renforcer les compétences numériques des Roms et des personnes marginalisées afin de les aider à intégrer le marché du travail.  La Tchéquie a plaidé en faveur d’une numérisation accrue des services publics afin d’offrir une assistance plus efficace, à l’image de son plan stratégique de numérisation d’ici 2030. 

Le manque d’accès à des services de santé abordables, à une éducation de qualité et à des systèmes de protection sociale universels constituent pour le Luxembourg un « engrenage de la pauvreté » qui s’aggrave de génération en génération.  Qui plus est, a constaté l’Iran, rejoint par El Salvador, le manque de moyens pour promouvoir le développement social a pour effet de creuser l’écart entre pays développés et en développement.  « Nous avons le devoir de lutter contre la corruption afin de protéger les ressources des plus pauvres », a encore dit l’Arabie saoudite. 

Face à la hausse du prix des denrées alimentaires, qui pèse sur les personnes en situation précaire comme les familles monoparentales ou les personnes âgées, la Suède a fait valoir que les services sociaux doivent s’adapter au contexte local, notamment en temps de crise migratoire. « Îlot de stabilité » au sein d’une région volatile, Djibouti s’est inquiété à son tour des répercussions sur ses programmes sociaux de l’afflux de réfugiés et de migrants sur son territoire. 

Dans de trop nombreux pays, cependant, les entraves au développement social et à la justice sociale sont exacerbées par les effets multiplicateurs des conflits et des crises humanitaires qui affligent les populations civiles.  Après avoir dressé le bilan des progrès qu’elle a réalisés aux cours des dernières années, la Géorgie a reconnu que l’occupation illégale de l’Abkhazie et de Tskhinvali par la Fédération de Russie demeurait le principal obstacle à la fourniture de services sociaux au-delà de la ligne d’occupation, où la population continue d’être victime de « graves problèmes humanitaires » et de violations de ses droits. 

Même son de cloche au Yémen où, malgré les souffrances infligées à la population civile par les houtistes, les autorités du pays s’efforcent de réduire la pauvreté en rétablissant les rouages de l’État, en soutenant l’économie et en favorisant la croissance économique, en s’appuyant notamment sur la vitalité des petites et moyennes entreprises.  La délégation haïtienne a reconnu quant à elle que la crise multidimensionnelle que traverse le pays ne favorise en rien l’instauration d’un environnement propice au développement social de son peuple. 

Frappé de plein fouet par les effets du terrorisme, de la criminalité transnationale organisée et des changements climatiques qui affectent plusieurs pays du Sahel, le Burkina Faso a déploré, comme le Mali, la hausse drastique des besoins en matière d’éducation, de santé, d’hygiène et de protection, causée par les déplacements massifs de populations, une situation qui vient encore fragiliser la protection sociale et le développement des communautés. 

Quant au Gouvernement ukrainien, à l’approche du deuxième anniversaire de l’invasion russe, il s’efforce de réformer son système social en élaborant des services axés sur la santé mentale et l’adaptation aux crises.  La mise en place d’un système d’accompagnement des personnes handicapées, des enfants orphelins de même que la numérisation des systèmes d’aide sociale et d’aide humanitaire figurent parmi ses priorités. 

C’est justement pour surmonter ces défis multiformes que le Japon a jugé crucial de garantir un accès effectif à l’éducation des enfants en situation de conflit, en s’engageant dans la reconstruction d’écoles, la fourniture de repas scolaires et l’accès à des outils pédagogiques numériques, en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Programme d’action mondial (PAM).  La moitié des 1,2 milliard de personnes vivant dans la pauvreté multidimensionnelle étant des enfants, l’ONG Save the Children a préconisé un revenu minimum, sous la forme de transferts monétaires directs aux familles. 

Néanmoins, les États-Unis ont fait remarquer que le mandat de la Commission du développement social est tellement vaste qu’il chevauche ceux d’autres entités onusiennes, réduisant d’autant sa capacité à avoir un effet propre sur la dimension sociale du développement. 

En début de séance, la Commission a proposé la nomination de cinq des dix membres du Conseil d’administration de l’Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social.  Après avoir endossé la candidature de M. Godwin Murunga pour un mandat supplémentaire de deux ans, elle a proposé la nomination de quatre nouveaux membres, soit Mme Leila Patel (Afrique du Sud), M. Diego Sánchez-Ancochea (Espagne), Mme Dzodzi Tsikata (Ghana) et M. Timo Voipio (Finlande), dont le mandat de quatre ans prendra effet à la date de confirmation de leur nomination par le Conseil économique et social (ECOSOC). 

Enfin, le Directeur par intérim de la Division du développement social inclusif du Département des affaires économiques et sociales (DESA) a indiqué que le budget 2025 sera finalisé lors du premier semestre de 2024. 

La Commission du développement social reprendra ses travaux mercredi 14 février, à compter de 10 heures.

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