En cours au Siège de l'ONU

La Cinquième Commission ouvre l’enveloppe de 102,8 millions de dollars demandée pour la nouvelle Mission des Nations Unies en Somalie en 2025

Soixante-dix-neuvième session
18e séance – matin
AG/AB/4482

La Cinquième Commission ouvre l’enveloppe de 102,8 millions de dollars demandée pour la nouvelle Mission des Nations Unies en Somalie en 2025

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a examiné ce matin le projet de budget présenté par le Secrétaire général, pour la nouvelle Mission d’assistance transitoire des Nations Unies en Somalie (MATNUSOM), d’un montant exact de 102 803 100 dollars, en 2025.  

Dans sa résolution 2753 (2024), le Conseil de sécurité a décidé que la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM) s’appellerait désormais Mission d’assistance transitoire des Nations Unies en Somalie (MANUTSOM) chargée de commencer à transférer officiellement ses fonctions au Gouvernement fédéral de Somalie, à l’équipe de pays des Nations Unies et aux autres parties prenantes à partir du 1er novembre 2024.  Le Conseil a exprimé son intention de clore le mandat de la MATNUSOM d’ici au 31 octobre 2026, au terme d’une transition en deux phases, selon la situation sur le terrain. 

M. Kelvin Ong, Directeur de la Division des finances des opérations sur le terrain du Bureau de la planification des programmes, des finances et du budget, qui a présenté le rapport du Secrétaire général (A/79/6(Sect.3)/Add.9), a déclaré que le budget révisé de la MATNUSOM de 102,8 millions de dollars représente une augmentation de 1,7 million de dollars (1,7%) par rapport au crédit de 101,1 millions de dollars ouvert pour l’ancienne Mission (MANUSOM) en 2024.  

Ce budget révisé, a expliqué le Directeur, tient compte, entre autres, de la suppression progressive de 24 postes civils, de la nationalisation de 6 postes et de la suppression de 3 postes fournis par le Gouvernement somalien et de 2 postes de personnel de la police des Nations Unies, conformément au calendrier de transition décidé dans la résolution 2753 (2024) du Conseil de sécurité.  

M. Ong a noté l’inclusion d’un nouveau crédit de 4,6 millions de dollars pour le remboursement du dispositif d’appui logistique fourni par le Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS), conformément à la résolution 2741 (2024) du Conseil de sécurité.  

Dans son rapport (A/79/7/Add.26), le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) constate que sur les crédits alloués, de 87,1 millions de dollars, un montant de 11,5 millions de dollars restait disponible au 31 octobre 2024.  Il espère que ce montant sera géré avec efficience au cours des deux derniers mois de l’exercice budgétaire 2024 et que les futures demandes de crédits pour la MATNUSOM seront fondées sur des hypothèses budgétaires réalistes.  

Le Comité consultatif recommande d’approuver les ressources demandées pour les militaires et le personnel de police, ainsi que pour le personnel civil, et de réduire de 2 197 400 dollars celles pour les dépenses de fonctionnement, soit au titre des consultants et services de consultants, des voyages officiels, des installations et infrastructures, des communications et de l’informatique ainsi que des fournitures et services divers.  

C’est donc une enveloppe de 100 605 700 dollars qu’il propose à la Cinquième Commission, donc une ouverture de crédits de 4 615 100 dollars. 

La Somalie a insisté sur l’importance de soutenir les initiatives de développement à long terme lancées par son gouvernement et d’accorder la priorité à la nationalisation des postes pour renforcer les capacités.  

La Cinquième Commission a prévu une autre séance publique demain, vendredi 13 décembre à partir de 10 heures, pour examiner les incidences financières des résolutions et décisions prises par la Première Commission chargée des questions de désarmement et de la sécurité internationale.  

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Yémen: devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial pour ce pays appelle à des négociations intra-yéménites guidées par le principe « tous pour tous »

9806e séance - matin
CS/15929

Yémen: devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial pour ce pays appelle à des négociations intra-yéménites guidées par le principe « tous pour tous »

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Sur fond des développements dramatiques survenus ces dernières semaines au Moyen-Orient, le Conseil de sécurité a tenu, ce matin, sa réunion mensuelle sur Yémen.  Venu faire le point sur la situation dans le pays et sur ses efforts de médiation, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Hans Grundberg, a appelé les parties au conflit à travailler de bonne foi avec son bureau en vue de négociations guidées par le principe « tous pour tous » convenu dans les accords passés.  Cette séance a également permis d’entendre le nouveau Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, Thomas Fletcher, dont c’était la première intervention devant le Conseil, ainsi qu’un représentant de la société civile yéménite. 

Pour l’Envoyé spécial, le Gouvernement yéménite et les houthistes se trouvent aujourd’hui devant un choix critique: « soit continuer sur la voie catastrophique d’un conflit non résolu et d’une militarisation de l’économie où tout le monde est perdant, soit collaborer sur les questions économiques pour ouvrir la voie à la croissance et à d’autres dividendes possibles de la paix ».  M. Hans Grundberg a ainsi indiqué que son bureau explore des solutions pratiques pour rétablir la stabilité économique et ainsi permettre le paiement des salaires des fonctionnaires et la relance des exportations de pétrole et de gaz. Un effort qui, a-t-il expliqué, vise à transformer les engagements pris par les parties en juillet dernier « en actions qui profitent à tous les Yéménites ». 

Ne pas « manquer l’occasion » de progresser vers la paix

Soucieux de ramener les houthistes à la table des négociations, M. Grundberg a estimé que cela passera par le respect par toutes les parties de l’Accord de Stockholm conclu en 2018 et par un travail commun mené avec son bureau. Rappelant les « mesures positives » intervenues ces dernières années, de l’accord de trêve de 2022 aux engagements pris en 2023 pour faire avancer les efforts de paix dans le cadre d’une feuille de route sous les auspices de l’ONU, il a jugé essentiel que les parties, la région et la communauté internationale « tirent parti de ces moments » afin de ne pas « manquer l’occasion » de progresser vers la paix.   

Affirmant poursuivre ses dialogues avec les composantes politiques yéménites afin d’explorer les paramètres d’un règlement, l’Envoyé spécial a fait état d’un consensus entre les parties sur la nécessité d’un processus mené par les Yéménites, centré sur les besoins de la population, la réconciliation et la possibilité d’un redressement durable.  Il a cependant reconnu que ses efforts de médiation pâtissent de l’insécurité en mer Rouge, conséquence des attaques houthistes contre des navires et contre Israël, ainsi que des frappes aériennes menées en réponse par Israël, les États-Unis et le Royaume-Uni.  Il a encouragé toutes les parties concernées à créer un environnement propice à la résolution du conflit, non sans rappeler que la situation reste fragile en plusieurs points du pays, notamment autour de Taëz, où des bombardements ont récemment atteint des quartiers civils. 

M. Grundberg a également rappelé que, depuis six mois, Ansar Allah, la branche politique des houthistes, détient arbitrairement plus de 50 membres d’organisations internationales et nationales, de missions diplomatiques, de la société civile et d’entités du secteur privé.  Si trois détenus ont été libérés, des dizaines d’autres -dont un membre de son équipe- demeurent captifs.  Il a exigé leur libération immédiate et inconditionnelle, soutenu dans cet appel par le récit de M. Hisham Al-Omeisy, Conseiller principal pour le Yémen à l’Institut européen pour la paix, qui a décrit le martyre des civils et des humanitaires au Yémen.

Expliquant avoir lui-même été enlevé et détenu pendant plus de cinq mois par les houthistes, M. Al-Omeisy a décrit des conditions d’isolement inhumaines, des gardes impitoyables et des séances d’interrogatoire vicieuses, qui l’ont parfois poussé au bord du suicide.  Selon lui, c’est l’ampleur de la campagne de pressions exercées contre les houthistes qui les a incités à le laisser partir.  Il a ajouté que plus d’un millier d’autres personnes sont détenues arbitrairement par les houthistes dans le cadre d’une campagne systématique visant à terroriser les habitants et à faire taire la dissidence dans les zones sous leur contrôle. 

Des besoins humanitaires toujours croissants

Ces violations du droit international ont également été dénoncées par le nouveau Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence.  M. Fletcher a par ailleurs insisté sur la dimension économique du conflit, avertissant sur le fait que les attaques depuis et contre le Yémen menacent d’endommager les infrastructures portuaires et de mettre en danger le flux de denrées alimentaires, de carburant et d’autres importations essentielles dont dépendent des millions de Yéménites.  Dans ce contexte de crise généralisée, a-t-il ajouté, la réponse humanitaire continue de faire face à de graves contraintes puisque les coupes budgétaires ont entraîné la fermeture de programmes, tandis que le nombre total de personnes dans le besoin est passé de 18,2 à 19,5 millions depuis le début de l’année. 

Malgré les difficultés, les humanitaires ont pu apporter une réponse à environ 7,8 millions de personnes en 2024, a salué le Secrétaire général adjoint, précisant que cette assistance a contribué à contenir l’épidémie de choléra, à freiner la propagation de l’insécurité alimentaire et à identifier des solutions durables de gestion de l’eau.  Pour continuer ce travail vital, M. Fletcher a exhorté le Conseil à veiller à ce que les ports yéménites de la mer Rouge restent opérationnels et disponibles pour les importations, car ils sont vitaux pour des millions de personnes.  Il a également rappelé que l’ONU et ses partenaires humanitaires ont urgemment besoin d’environ 2,5 milliards de dollars pour venir en aide à 10,5 millions de personnes au Yémen. 

Les membres du Conseil ont unanimement convenu de la gravité de la situation, tout en réclamant la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement par les houthistes, y compris les membres de l’équipage du Galaxy Leader retenu depuis plus d’un an.  Au nom des A3+ (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone), la Sierra Leone a appelé les pays donateurs à augmenter considérablement leurs contributions au Plan de réponse humanitaire de l’ONU pour le Yémen.  Elle a aussi exprimé sa vive inquiétude face aux attaques continues des houthistes contre les navires empruntant la mer Rouge, avant de s’alarmer de l’escalade des tensions créées sur le territoire yéménite par des acteurs extérieurs. 

Inquiétudes sur la situation régionale et les « effets domino » 

Elle aussi inquiète pour la stabilité régionale, la France a sommé l’Iran de cesser son soutien aux actions déstabilisatrices au Moyen-Orient.  Elle a également indiqué qu’elle poursuivra son engagement dans le cadre de l’opération défensive européenne ASPIDES pour protéger la sûreté maritime et la liberté de navigation, en lien avec ses partenaires. Saluant, à cet égard, le lancement de la stratégie des garde-côtes du Yémen, le Royaume-Uni a plaidé pour un strict respect de l’embargo sur les armes, tel que prévu par la résolution 2216 (2015) du Conseil, et a invité les États Membres à accroître le financement du renforcement du Mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies. 

Sur la même ligne, les États-Unis se sont engagés à continuer de travailler avec les garde-côtes yéménites pour endiguer les activités illicites en mer Rouge.  Ils ont en outre appelé à un contrôle plus efficace de l’afflux d’armes en provenance d’Iran, avant de s’élever contre l’attitude de « certains membres du Conseil », qui empêchent l’organe de parler à l’unisson sur la question du Yémen. Après avoir accusé nommément la Fédération de Russie de partager des « intérêts politiques » avec les houthistes, la délégation américaine a déclaré être en possession d’informations selon lesquelles plusieurs centaines de Yéménites auraient été recrutés pour participer avec les forces russes à la guerre en Ukraine.

Sans répondre à ces accusations, la Fédération de Russie a réclamé la fin des attaques en mer Rouge ainsi que l’arrêt des bombardements menés au Yémen par les États-Unis et leurs alliés.  Se disant favorable à des négociations avec Ansar Allah plutôt qu’à des menaces contreproductives à son encontre, elle a souhaité que des pourparlers de paix intrayéménites aient lieu rapidement, en dépit de la situation régionale, « car la fenêtre d’opportunités ne restera pas éternellement ouverte ».  Un point de vue largement partagé par la Chine, pour qui il importe de créer les conditions d’une reprise du dialogue dans le cadre d’un processus dirigé par les Yéménites eux-mêmes.  La délégation chinoise a toutefois rappelé que, 14 mois après le début du conflit à Gaza, « les effets domino ne font que s’intensifier ».  Elle a donc demandé que tout soit mis en œuvre pour parvenir à un cessez-le-feu permanent afin d’enclencher une désescalade dans la région. 

De son côté, le Yémen a répété qu’aucune paix ne pourra être instaurée « sans un véritable partenaire qui renonce à la guerre, croit en l’égalité entre Yéménites, rejette la violence et place les intérêts du peuple au-dessus de toute autre considération ».  Il a accusé les « milices houthistes terroristes appuyées par le régime iranien » de refuser tous les efforts régionaux et internationaux visant à mettre fin à la crise. Par leurs actions déstabilisatrices dans la région, les houthistes sapent les efforts de désescalade et minent le processus politique, a déploré la délégation, avant de demander à l’Iran de « se tenir à l’écart et permettre aux Yéménites de bâtir leur État ». 

La délégation yéménite a également invité la communauté internationale à lui fournir un appui économique et une aide au développement, rappelant que son gouvernement est privé des revenus de ses exportations pétrolières depuis deux ans en raison des attaques houthistes.  Elle a également dit attendre avec impatience la tenue d’une conférence des bailleurs de fonds afin de financer le Plan de réponse humanitaire pour 2025 et palier le fossé actuel.  Elle a enfin recommandé à l’ONU et aux ONG humanitaires de déplacer le siège de leurs activités à Aden, capitale provisoire du pays, pour assurer la sécurité de leur personnel. 

 

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LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Exposés

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a estimé que, compte tenu des événements dramatiques survenus ces derniers mois au Liban et en Syrie, l’ensemble du Moyen-Orient a un besoin urgent de stabilisation.  Cela inclut le Yémen, a-t-il souligné, avant de rappeler les mesures positives prises par ce pays ces dernières années: un accord de trêve en 2022, un échange à grande échelle de détenus liés au conflit en 2020 et 2023, et des engagements de toutes les parties en 2023 pour faire avancer les efforts de paix dans le cadre d’une feuille de route sous les auspices de l’ONU.  « Il est essentiel que les parties, la région et la communauté internationale tirent parti de ces moments afin de ne pas manquer l’occasion de prendre des mesures claires en faveur de la paix », a-t-il insisté.

M. Grundberg a également rappelé que, depuis six mois, Ansar Allah, la branche politique des houthistes, a lancé une campagne de détentions arbitraires visant le personnel d’organisations internationales et nationales, de missions diplomatiques, de la société civile et d’entités du secteur privé. Si trois détenus ont été libérés, des dizaines d’autres –dont un membre de son équipe– restent détenus arbitrairement, a-t-il dénoncé, y voyant une violation flagrante des droits humains fondamentaux.  Il a appelé à leur libération immédiate et inconditionnelle, tout en sollicitant le soutien sans équivoque du Conseil sur ce dossier.  Il a par ailleurs exhorté toutes les parties impliquées à respecter leurs engagements au titre de l’Accord de Stockholm et à continuer de travailler de bonne foi avec son bureau.  Les négociations devraient être guidées par le principe convenu dans les accords: « tous pour tous », a-t-il soutenu.

Pour l’Envoyé spécial, les parties se trouvent devant un choix critique: « soit continuer sur la voie catastrophique d’un conflit non résolu et d’une militarisation de l’économie où tout le monde est perdant, soit collaborer sur les questions économiques pour ouvrir la voie à la croissance et à d’autres dividendes possibles de la paix ».  Il a indiqué que son bureau explore des solutions pratiques et tangibles pour rétablir la stabilité économique, notamment le paiement des salaires et la relance des exportations de pétrole et de gaz dans l’intérêt de la population.  « Cet effort vise à transformer les engagements pris par les parties en juillet de cette année en actions qui profitent à tous les Yéménites », a-t-il souligné. 

Évoquant ensuite l’insécurité dans la mer Rouge, conséquence des actions d’Ansar Allah ainsi que des attaques contre Israël et des frappes aériennes des États-Unis et du Royaume-Uni en réponse, M. Grundberg a expliqué que ces évolutions ont réduit l’espace dont il disposait pour mener ses efforts de médiation.  Il a encouragé toutes les parties concernées à créer un environnement propice à la résolution du conflit au Yémen, non sans rappeler que la situation reste fragile en plusieurs points du pays.  Des hostilités se sont ainsi récemment intensifiées dans l’est de Taëz, avec des bombardements à proximité de quartiers civils.  De tels incidents soulignent la nécessité urgente d’un accord de cessez-le-feu, a-t-il affirmé, précisant que son bureau continue de collaborer avec les responsables militaires et de sécurité des deux parties pour favoriser la désescalade. 

L’Envoyé spécial a d’autre part indiqué que son bureau poursuit ses dialogues avec les partis et composantes politiques yéménites afin d’explorer les paramètres d’un règlement politique.  De ces échanges il ressort un consensus sur la nécessité d’un processus mené par les Yéménites, qui place les besoins de la population au cœur des préoccupations, favorise la réconciliation et jette les bases d’un redressement durable, a-t-il rapporté. 

Selon M. Grundberg, il est également largement reconnu que tout futur règlement doit être inclusif.  Assurant que le programme pour les femmes et la paix et la sécurité reste au cœur de ses efforts, il a rappelé que son bureau a récemment coparrainé le septième Sommet féministe à Aden avec plusieurs organisations internationales. Il a toutefois regretté que ces espaces de dialogue essentiels soient de plus en plus menacés par des intérêts partisans.  Restreindre le travail de la société civile et perpétuer un climat de peur sape les fondements nécessaires à un processus de paix intrayéménite, a-t-il averti. 

Sur le plan international, M. Grundberg a dit porter partout le même message: « une résolution pacifique au Yémen est possible et la poursuite de l’unité et du soutien internationaux pour atteindre cet objectif est essentielle ».  Ce n’est qu’en s’engageant ensemble que nous pourrons créer les conditions d’une médiation efficace et réaliser la paix durable, inclusive et juste, a-t-il conclu, appelant de ses vœux un soutien unifié du Conseil. 

M. TOM FLETCHER, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, dont c’était la première intervention devant le Conseil de sécurité à ces nouvelles fonctions, a commencé par faire un point général de la situation humanitaire mondiale.  Plus de 300 millions de personnes souffrent des conséquences dévastatrices des conflits, des changements climatiques et des inégalités, a-t-il rappelé, avant de souligner le travail remarquable qu’accomplit la communauté humanitaire pour venir en aide aux personnes dans le besoin: « 116 millions jusqu’à présent cette année ».  Mais ces travailleurs humanitaires sont surchargés, sous-financés et attaqués, a-t-il ajouté, estimant que le Conseil a un rôle essentiel à jouer pour leur permettre de sauver des vies. 

Revenant à la question du Yémen, M. Fletcher a évoqué une année « extrêmement difficile », le pays restant sujet à un conflit interne, auquel s’ajoutent une nouvelle escalade régionale des tensions, une aggravation de la crise économique et des menaces accrues pour la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies et humanitaire.  Les attaques depuis et contre le Yémen menacent d’endommager les infrastructures portuaires vitales et de mettre en danger le flux de denrées alimentaires, de carburant et d’autres importations essentielles dont dépendent des millions de Yéménites.  Elles ont aussi menacé de provoquer une marée noire sans précédent, a fait observer M. Fletcher, qui a par ailleurs fait état d’une nouvelle contraction de 1% du PIB du pays en 2024, en plus de la baisse de 54% du PIB réel par habitant depuis 2015. 

Alors que, dans les zones contrôlées par le Gouvernement yéménite, le rial a chuté à des niveaux toujours plus bas tout au long de l’année et que les exportations de pétrole et de gaz restent entravées, le coût des denrées alimentaires a augmenté de 28% par rapport à 2023, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.  Dans ce contexte, les familles se tournent de plus en plus vers des moyens alternatifs pour survivre, notamment le mariage des enfants. 

De surcroît, une épidémie de choléra s’est propagée dans tout le pays et des inondations ont déplacé plus d’un demi-million de personnes au cours d’une saison des pluies particulièrement intense, exacerbée par la crise climatique. Dans le même temps, la réponse humanitaire continue de faire face à de graves contraintes: les coupes budgétaires ont forcé la fermeture de programmes vitaux, tandis que nombre total de personnes dans le besoin est passé de 18,2 à 19,5 millions depuis le début de l’année.

M. Fletcher a également rappelé que, depuis plus de six mois, plus de 50 personnes travaillant pour l’ONU, des ONG, la société civile et des missions diplomatiques sont détenues arbitrairement par les autorités houthistes de facto.  Bien qu’un membre du personnel de l’ONU et deux membres du personnel d’ONG aient récemment été libérés, cette détention prolongée est inacceptable et constitue une violation du droit international, a-t-il dénoncé. 

Malgré les difficultés, les humanitaires sont restés sur place et ont apporté une réponse à environ 7,8 millions de personnes en 2024, a rappelé le Secrétaire général adjoint.  Cette assistance a contribué à contenir l’épidémie de choléra, à freiner la propagation de l’insécurité alimentaire et à identifier des solutions durables de gestion de l’eau, a-t-il précisé, ajoutant que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) avait élargi ses programmes d’aide financière pour atteindre plus de 580 000 personnes. 

Pour continuer ce travail vital, M. Fletcher a appelé le Conseil à veiller à ce que les infrastructures indispensables à la survie de la population du Yémen soient épargnées.  Les ports yéménites de la mer Rouge doivent rester opérationnels et disponibles pour les importations, car ils sont vitaux pour des millions de personnes, a-t-il insisté. Il a également demandé d’appuyer les efforts de l’ONU pour obtenir la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les personnes détenues arbitrairement par les autorités de facto et assurer la sécurité du personnel de l’ONU et des organisations humanitaires. 

Enfin, après avoir rappelé que les partenaires humanitaires ont besoin d’environ 2,5 milliards de dollars pour venir en aide à 10,5 millions de personnes au Yémen, M. Fletcher a enjoint au Conseil de soutenir l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour garantir une résolution durable du conflit dans le pays et mettre fin à un cycle de souffrances humanitaires qui dure depuis 10 ans. 

M. HISHAM AL-OMEISY, Conseiller principal pour le Yémen à l’Institut européen pour la paix (European Institute of Peace), a décrit le martyre des civils et des humanitaires au Yémen.  Il a expliqué avoir lui-même été enlevé et détenu pendant plus de cinq mois par les houthistes.  Enlevé dans la rue sous la menace d’une arme en plein jour, il a fait mention de son expérience, entre l’isolement, les gardes impitoyables et les séances d’interrogatoire vicieuses, au point où il envisageait de se suicider.  Selon lui, c’est l’ampleur de la campagne de pressions continues exercée sur les houthistes qui les a finalement incités à le laisser partir.

M. Al-Omeisy a rappelé que les houthistes continuent de détenir illégalement des membres du personnel humanitaire, des Nations Unies et des ambassades, en plus de milliers d’autres, dans le cadre d’une campagne systématique qui vise à terroriser les habitants locaux pour les soumettre et faire taire la dissidence.  Il a appelé le Conseil de sécurité à dénoncer les procédures et les procès théâtraux des houthistes, qu’il a qualifiés « d’imposture ».

L’intervenant a ensuite plaidé en faveur d’un effort concerté pour promouvoir le dialogue et un accord inclusif qui fonctionne pour toutes les parties de la société yéménite, y compris les houthistes.  Il a souligné que l’une des causes de la situation actuelle au Yémen est l’incapacité à traiter les racines du conflit, notamment l’érosion presque systématique et délibérée des institutions de l’État et l’affaiblissement de la légitimité du Gouvernement. 

« Les Chemins de la réconciliation », un processus initié par l’Institut européen pour la paix et dirigé par des équipes locales, représente l’effort le plus vaste et le plus inclusif de l’histoire récente de consultation des Yéménites sur leurs besoins, leurs perspectives et leurs droits, dans la perspective d’une paix durable, a ensuite affirmé M. Al-Omeisy.  Pour lui, un engagement en faveur de la paix n’est possible que par une participation authentique de la société. En effet, a-t-il expliqué, la probabilité d’obtenir un règlement légitime et durable dépend largement du degré d’inclusion d’acteurs au-delà des voix des élites et des puissants.

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Haïti: le Conseil de sécurité fait le point sur l’application, plus nécessaire que jamais, des sanctions

9808e séance - après-midi
CS/15931

Haïti: le Conseil de sécurité fait le point sur l’application, plus nécessaire que jamais, des sanctions

Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, un exposé de Mme Carolyn Rodrigues-Birkett (Guyana), Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2653 (2022) sur les sanctions concernant Haïti.  Invité à cette séance, le représentant haïtien a confirmé le caractère indispensable de ces sanctions (embargo sur les armes, interdictions de voyage et gel des avoirs) pour faire baisser l’insécurité dans le pays, « à condition d’être strictement appliquées ».  Il a dénoncé les flux d’armes illicites et les complicités locales et internationales pour contourner l’embargo, avant d’appeler à renforcer les sanctions ciblées pour inclure dans la chaîne criminelle tous les acteurs impliqués.

Faisant le point sur les travaux du Comité 2653 entre le 12 décembre 2023 et aujourd’hui, sa présidente a mentionné la tenue de trois réunions dans le cadre de consultations informelles et de deux séances d’information à l’intention des États Membres pendant lesquelles le coordonnateur du Groupe d’experts a présenté les conclusions et recommandations de son rapport intérimaire (S/2024/253), puis de son rapport final (S/2024/704).  Ces rapports ont été discutés en présence de représentants de la Mission permanente d’Haïti auprès des Nations Unies, d’États de la région et d’autres États Membres.   

En plus de ces rapports, le Groupe d’experts du Comité a soumis à celui-ci deux mises à jour périodiques confidentielles, qui ont fourni des informations extrêmement utiles sur la situation en Haïti, y compris sur plusieurs individus qui pourraient être responsables ou complices, ou s’être engagés, directement ou indirectement, dans des actions menaçant la paix, la sécurité ou la stabilité du pays.  Comme prévu par la résolution 2752 (2024) du Conseil de sécurité, qui a renouvelé les sanctions contre Haïti pour une période d’un an et prorogé le mandat du Groupe jusqu’au 17 novembre 2025, le Comité a donc procédé à une mise à jour de la liste des personnes et entités qui y sont désignées en inscrivant, le 27 septembre, deux personnes nouvelles sur cette liste qui en compte désormais sept. 

Venant apporter un éclairage concret de la situation sur le terrain en Haïti, son représentant a fait cas d’un « énième cas » de violence collective de gangs armés qui « sèment le deuil et la désolation dans la population haïtienne ».  Il est ainsi revenu sur l’attaque de la Cité-Soleil à Port-au-Prince, le week-end dernier, qui a fait plus de 180 morts.  Une attaque menée par des hommes du chef de gang dénommé Micanor, a-t-il précisé. Cette tragédie traduit l’urgence absolue de rétablir la sécurité et la stabilité en Haïti pour protéger les civils, a insisté son représentant.

Alors que le pays est aux prises avec une crise multidimensionnelle « sans précédent » -sécuritaire, humanitaire, institutionnelle et économique- qui le paralyse, le représentant haïtien a mis l’accent sur le rôle des bandes armées violentes qui opèrent « sans crainte, ni retenue ». Il en a voulu pour preuve qu’au moins 5 000 personnes ont été tuées depuis janvier 2024 par ces gangs, un chiffre avancé par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  L’insécurité ne fait qu’aggraver une situation humanitaire déjà difficile, a-t-il expliqué. 

Le dernier massacre de la Cité-Soleil illustre cruellement, selon lui, la nécessité pour la communauté internationale de renforcer son appui à Haïti en appliquant strictement les sanctions contre ceux qui alimentent ces crimes et en soutenant une intervention robuste pour restaurer la sécurité et l’état de droit dans le pays.  Il a également plaidé pour un soutien massif aux forces de l’ordre haïtiennes en leur fournissant des équipements, des formations et un appui logistique.

Il ne fait aucun doute que la prolifération d’armes et de munitions en Haïti constitue l’un des principaux moteurs de cette spirale de violence, a argué le représentant, en notant que tout cela se passe en dépit de l’embargo sur les armes décidé par le Conseil de sécurité.

À titre de rappel, le régime de sanctions a été mis en place par la résolution 2653 (2022), adoptée le 21 octobre 2022, et renouvelé en 2023, puis cette année encore pour un an de plus.

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Le Conseil de sécurité examine le dernier rapport d’activité du Comité 1591 concernant le Soudan

9807e séance - après-midi
CS/15930

Le Conseil de sécurité examine le dernier rapport d’activité du Comité 1591 concernant le Soudan

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Le Conseil de sécurité a entendu, cet après-midi, un exposé sur le dernier rapport d’activité du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan (Comité 1591).  Le Président du Comité 1591, M. Joonkook Hwang, Représentant permanent de la République de Corée, a précisé que le rapport présenté couvre la période allant du 12 septembre 2024 à ce jour. 

Il a indiqué qu’en septembre un responsable du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) avait fait un exposé sur la livraison de l’aide humanitaire au Darfour.  Ce responsable n’a pas fait état de détournement de l’aide au profit de groupes armés.  Une telle possibilité ne peut néanmoins être exclue, a dit le Président. 

M. Hwang a ensuite précisé que, le 8 novembre, deux individus ont été inscrits sur la liste des sanctions pour leur participation à des actes menaçant la paix au Darfour.  Le 18 novembre, le groupe d’experts a présenté son dernier rapport en date.  Le but du régime de sanctions est de ramener la paix au Darfour, a rappelé le Président, en insistant sur la détermination de son comité à atteindre cet objectif. 

Le Guyana, au nom du groupe des A3+ (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone), a souligné l’urgence d’une solution immédiate au conflit au Darfour et au Soudan.  Vivement préoccupée par les violations des droits humains, cette délégation a exhorté les parties à respecter le droit international humanitaire.  Les acteurs extérieurs doivent cesser d’alimenter le conflit et rendre des comptes, a insisté la déléguée en appelant les parties prenantes à œuvrer dans l’intérêt du peuple soudanais. 

« Réaliser la paix au Darfour ou au Soudan dans son ensemble exigera plus que de simples réunions périodiques du Conseil », a réagi de son côté le représentant du Soudan.  Il a dénoncé ces États qui violent de manière délibérée le régime de sanctions et se livrent à des agissements agressifs contre le Soudan et son peuple. 

Le représentant soudanais a notamment accusé les Émirats arabes unis d’être la cause directe de l’instabilité, non seulement au Darfour mais dans toutes les régions du Soudan, en parrainant de manière flagrante la « milice de soutien rapide » qui commet des crimes de manière systématique et à grande échelle contre les civils. 

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Gaza: face à la paralysie du Conseil de sécurité, l’Assemblée générale adopte deux résolutions exigeant un cessez-le-feu immédiat et la sauvegarde du mandat de l’UNRWA

Dixième session extraordinaire d’urgence (reprise),
58e & 59e séances -matin & après-midi
AG/12667

Gaza: face à la paralysie du Conseil de sécurité, l’Assemblée générale adopte deux résolutions exigeant un cessez-le-feu immédiat et la sauvegarde du mandat de l’UNRWA

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

L’Assemblée générale, qui poursuivait aujourd’hui sa dixième session extraordinaire d’urgence sur les mesures illégales prises par les autorités israéliennes à Jérusalem-Est occupée ainsi que dans le reste du Territoire palestinien occupé, et son débat sur le dernier veto américain au Conseil de sécurité, a adopté dans ce cadre deux résolutions majeures.  La première, élaborée en vue de surmonter les blocages au Conseil, exige notamment l’instauration d’un cessez-le-feu à Gaza et la libération des otages.  La seconde demande à la communauté internationale de soutenir l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et exige qu’Israël respecte le mandat de l’Office.

Plus de 60 délégations ont participé aux discussions qui avaient commencé le 4 décembre et se sont terminées cet après-midi.  De multiples voix se sont de nouveau élevées pour dénoncer l’opposition des États-Unis, le 20 novembre dernier, au projet de résolution porté par les membres élus du Conseil de sécurité en faveur d’un cessez-le-feu à Gaza.  En outre, de nombreuses délégations ont lancé de vives accusations contre Israël et, notamment, contre les lois visant l’UNRWA adoptées par la Knesset le 28 octobre.

La résolution intitulée « Demande impérative de cessez-le-feu à Gaza » (A/ES-10/L.33), présentée par l’Indonésie, a été adoptée par 158 voix pour, 9 contre (Argentine, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Israël, Nauru, Palaos, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay et Tonga) et 13 abstentions.  Par ce texte, l’Assemblée générale exige de toutes les parties un cessez-le-feu « immédiat, inconditionnel et permanent », ainsi que la libération « immédiate et inconditionnelle » de tous les otages et le respect des obligations que leur impose le droit international à l’égard des personnes qu’elles détiennent.  Elle demande également un accès immédiat aux services de base et à l’aide humanitaire pour les civils de Gaza, et prie le Secrétaire général de présenter un rapport sur l’application de la présente résolution dans un délai de trois semaines.

À ce sujet, la Türkiye a souligné que l’inaction du Conseil de sécurité contraste fortement avec la réponse de l’Assemblée générale.  L’Assemblée, reflétant la volonté collective de la communauté internationale, a appelé à un cessez-le-feu, à une aide humanitaire sans entrave et à la fin de l’occupation des terres palestiniennes par Israël, conformément à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ), a résumé la déléguée. 

Aujourd’hui, une fois de plus, l’Assemblée assume la responsabilité des tâches laissées en suspens par le Conseil, a-t-elle noté, comme un grand nombre de délégations.

Le Guyana, ayant lui-même coordonné la rédaction du fameux projet de résolution avec les neuf autres membres élus du Conseil, a déploré que le droit de veto l’ait mis en échec, « malgré une volonté politique manifeste de protéger les civils et de répondre aux atrocités en cours ».

Lors du débat, l’Arabie saoudite a fustigé l’usage « irresponsable » du droit de veto, estimant qu’il a empêché le Conseil de jouer son rôle, tandis que la Thaïlande a rappelé que le veto « n’est pas un privilège, mais une responsabilité ».

Comme d’autres délégations, la Malaisie et la République islamique d’Iran ont jugé que le veto américain a enhardi Israël, la seconde allant jusqu’à déclarer qu’il lui avait donné un feu vert pour perpétuer son « carnage ».  Dans la même veine, la Fédération de Russie a considéré que les États-Unis ont donné « carte blanche » aux opérations militaires israéliennes, que ce soit en Palestine, au Liban ou en Syrie.  Ils transforment ainsi les obligations internationales en « coquille vide », a dénoncé le représentant russe, rappelant que les États-Unis ont opposé leur veto aux six projets de résolution soumis au Conseil pour exiger un cessez-le-feu à Gaza - y compris une proposition du Brésil qui condamnait sans équivoque les attaques du 7 octobre.

À l’instar de la Russie, les délégations ont été nombreuses à s’inquiéter des conséquences du veto américain sur la crédibilité du droit international.  L’Arabie saoudite a ainsi dénoncé une action qui remet en question l’ordre international, notamment à travers l’application sélective du droit international humanitaire, tandis que le Yémen a estimé qu’en paralysant le Conseil de sécurité, les abus du droit de veto menacent la stabilité régionale et mondiale et pourraient même contribuer à « l’effondrement » du droit international.  Pour sa part, la Chine a regretté l’application sélective des normes internationales et la pratique du deux poids, deux mesures qui sapent la crédibilité de l’ONU.  Elle a insisté sur la nécessité de rétablir l’autorité du droit international pour empêcher le retour à la « loi de la jungle ».

Dans cet esprit, d’autres délégations ont appelé une fois de plus à une réforme du Conseil de sécurité.  La Mauritanie a ainsi estimé qu’il ne s’agit pas seulement de prévenir les usages « irresponsables » du droit de veto, mais aussi de revoir le système de valeur qui régit les processus de décision de l’organe.  « Sinon, comment expliquer l’échec du Conseil de sécurité pour instaurer un cessez-le-feu, alors que des milliers de civils sans défense meurent, bombardés et malades, à l’approche de l’hiver? » s’est ému le représentant.

Avant la mise aux voix, les États-Unis ont annoncé leur opposition aux projets de résolution.  « L’un récompense le Hamas et réduit l’importance de la libération des otages, l’autre dénigre Israël sans permettre d’augmenter l’assistance humanitaire aux civils palestiniens », a ainsi justifié le délégué américain.  D’après lui, le texte sur un cessez-le-feu à Gaza risquerait d’envoyer un « message dangereux » au Hamas, à savoir qu’il n’est pas nécessaire de négocier ou de libérer les otages.  L’Assemblée ferait mieux d’accroître la pression sur le Hamas pour accepter l’accord qui est sur la table, a-t-il dit.

Israël a justifié sa position en des termes comparables, déclarant qu’exiger un cessez-le-feu sans demander en même temps la libération des otages équivaut à « capituler devant la terreur ».  Ces projets de résolution, s’est indigné le délégué israélien, « défient toute notion de moralité ».

La seconde résolution, intitulée « Appui au mandat de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient » (A/ES-10/L.32), présentée par l’Irlande, a été adoptée par 159 voix pour, 9 voix contre (Argentine, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Israël, Nauru, Palaos, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay et Tonga) et 11 abstentions.  Par ce texte, l’Assemblée générale affirme son plein appui au mandat de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) dans toutes ses zones d’opérations, à savoir la Jordanie, le Liban, la République arabe syrienne et le Territoire palestinien occupé.  L’Assemblée demande au Gouvernement israélien de satisfaire à ses obligations internationales, de respecter les privilèges et immunités de l’Office et d’assumer la responsabilité qui lui incombe de permettre et de faciliter une assistance humanitaire « complète, rapide, sûre et sans entrave » dans toute la bande de Gaza.  Elle met en garde contre toute tentative de démanteler ou de réduire les opérations et le mandat de l’Office, « sachant que toute interruption ou suspension de ses activités aurait non seulement de graves conséquences humanitaires pour les millions de réfugiés de Palestine qui dépendent de ses services, mais aussi des répercussions sur toute la région ».

Nombre de délégations ont salué le rôle essentiel de l’UNRWA — « colonne vertébrale » de l’aide humanitaire dans les territoires palestiniens selon l’Iraq.  Il n’y a pas d’alternative à l’UNRWA, a insisté la Thaïlande.  Les Émirats arabes unis ont, pour leur part, estimé que le mandat de l’UNRWA doit demeurer valide tant qu’il n’y aura pas de solution juste, permanente et globale à la question de Palestine, y compris sur la question des réfugiés et la création d’un État palestinien indépendant.

S’alarmant de la récente décision du Parlement israélien d’interdire les activités de l’UNRWA, la Türkiye a rappelé que l’Office a reçu son mandat de l’Assemblée générale, et exhorté les États Membres à le préserver.  Quant à l’Algérie, reprenant l’expression « épine dorsale » des interventions humanitaires menées à Gaza -consacrée dans la résolution- elle a précisé que la suppression de son mandat nécessiterait un règlement définitif de la crise, conformément à la résolution 194 adoptée par l’Assemblée générale en 1948.  De son côté, la Mauritanie a dénoncé une interdiction irresponsable qui sape les droits des réfugiés palestiniens et l’autorité de l’ONU.  Israël mène, selon elle, une campagne de désinformation « malveillante » contre l’Organisation et l’UNRWA en particulier. 

Plusieurs délégations occidentales ont partagé ces préoccupations.  La Norvège, notamment, a estimé que la mise en œuvre de la législation israélienne violerait le droit international, appelant les parties à respecter les principes d’humanité, de neutralité et d’indépendance.  Le Royaume-Uni a annoncé une contribution supplémentaire de 16,5 millions de dollars pour soutenir les services vitaux fournis par l’UNRWA, qui est seul capable de répondre aux besoins des réfugiés palestiniens. 

Le Royaume-Uni a toutefois abordé le problème de la neutralité de l’UNRWA, qu’il s’est engagé à renforcer en collaboration avec l’Office.  Une inquiétude relevée par la Tchéquie, qui a ainsi justifié son abstention lors du vote, estimant nécessaire de renforcer la supervision de l’Office.  La Bulgarie, l’Autriche et la Hongrie ont également critiqué le texte pour son manque de garanties sur la responsabilité de l’UNRWA, expliquant à leur tour leur abstention.  L’Autriche a toutefois rappelé son soutien humanitaire de 53 millions d’euros depuis 2023, dont 3,4 millions pour l’Office.

Critiquant le texte, Israël a jugé que l’UNRWA n’est pas un acteur neutre, mais une entité « infiltrée par le Hamas à tous les niveaux ».  Son délégué a estimé que la résolution ne protégeait pas les valeurs humanitaires, mais soutenait une organisation devenue un « sanctuaire de la terreur ».  Il a fustigé l’inaction de l’UNRWA au fil des ans face aux communications d’Israël à ce sujet.  

Quant aux États-Unis, ils ont jugé que le texte n’est pas dénué de défauts, même si l’UNWRA est une planche de salut critique pour le peuple palestinien.  Il ne parle pas de l’attaque du 7 octobre et « ne permet pas le rétablissement de la confiance entre Israël et l’UNRWA » malgré tous les efforts déployés, a conclu le délégué américain.  « Personne ne profitera de l’incapacité de l’ONU à déterminer si des employés de l’Office ont violé sa politique de neutralité », a-t-il poursuivi.  À ce titre, il a accusé les auteurs de la résolution de chercher à marquer des points politiquement. 

S’exprimant en fin de séance, l’Observateur permanent de l’État de Palestine a salué l’adoption « massive, presque unanime » des deux résolutions, vues comme un « témoignage fort de la volonté et de la détermination de la communauté internationale ».  Avec ces résolutions plus fortes que celles adoptées l’an dernier, « l’Assemblée générale frappe ainsi à la porte du Conseil de sécurité », a apprécié la Palestine, et il est temps pour celui-ci d’y « prêter une oreille attentive ».

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À l’occasion de son débat annuel sur le droit de la mer, l’Assemblée générale se fait l’écho d’inquiétudes sur le différend territorial en mer de Chine méridionale

Soixante-dix-neuvième session
51e séance plénière – matin
AG/12666

À l’occasion de son débat annuel sur le droit de la mer, l’Assemblée générale se fait l’écho d’inquiétudes sur le différend territorial en mer de Chine méridionale

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

L’Assemblée générale a, ce matin, entendu une vingtaine de délégations s’exprimer sur le droit de la mer qui ont apporté leur soutien aux deux jalons juridiques que sont l’Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (Accord « BBNJ ») et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, dans le contexte du trentième anniversaire de son adoption.  Certains États Membres ont aussi manifesté leurs inquiétudes face aux « revendications territoriales excessives » de la Chine en mer de Chine méridionale, accusation rejetée par cette délégation qui a blâmé une ingérence extérieure pour semer la division. 

« Historique », « prometteur », « un tournant », une « réalisation fondamentale du système international fondé sur des règles »: les délégations n’ont pas manqué de qualificatifs pour caractériser l’Accord « BBNJ » qui, après huit ans de négociations, soutient directement la mise en œuvre des objectifs mondiaux pour la biodiversité dans l’espace marin. Au point qu’il pourra aider à la mise en œuvre du Traité international pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine, s’est félicité le Canada.  Cette délégation s’est engagée aujourd’hui à conserver et gérer efficacement 30% de ses terres et de ses eaux d’ici à 2030, ayant déjà réussi à le faire pour plus de 15%. 

L’Accord « BBNJ » règlemente la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Ses dispositions permettront notamment d’assurer une gouvernance inclusive de l’océan, de promouvoir la recherche scientifique, de garantir une répartition équitable des bénéfices issus des activités relatives à l’utilisation des ressources génétiques marines, et d’accroître la création d’outils de gestion par zone, y compris d’aires marines protégées en haute mer, se sont réjouis le Royaume-Uni et Monaco. 

L’Union européenne (UE), de même que les Tonga, qui s’exprimaient au nom des 18 États membres du Forum des îles du Pacifique, « gardiens de près de 20% de la surface de la planète », ont encouragé ceux qui ne l’ont pas encore fait à ratifier à l’Accord « BBNJ » au plus vite.  Une fois l’Accord entré en vigueur, des décisions importantes devront être prises lors de la première Conférence des États parties, a alors espéré la délégation tongane.  La décision de l’Assemblée générale de convoquer, du 14 au 25 avril et du 18 au 29 août 2025, les première et deuxième sessions de la Commission préparatoire pour l’entrée en vigueur de l’Accord « BBNJ » contribueront au succès attendu, s’est réjouie la délégation européenne. 

L’Accord « BBNJ », un instrument juridiquement contraignant adopté par l’Assemblée générale le 19 juin 2023, est ouvert à signature depuis le 20 septembre de la même année.  À ce jour, 105 États l’ont signé et 15 l’ont ratifié, marquant ainsi une « dynamique positive » qu’il s’agit maintenant d’encourager afin de parvenir aux 60 ratifications supplémentaires nécessaires pour son entrée en vigueur effective et donc sa pleine mise en œuvre. 

La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a également été célébrée par les États Membres ayant pris la parole aujourd’hui, qui l’ont décrite comme la « Constitution des océans ».  C’est ce « document central » qui doit permettre que toutes les revendications maritimes soient réglées, sans contraintes, ni harcèlement, a rappelé l’Australie.  Cette délégation en a profité pour dénoncer le « comportement agressif » de « certains États » en mer de Chine méridionale.  Toute revendication fournie au-delà des droits consacrés par la Convention est nulle et non avenue, ont martelé les Philippines, rejointes par le Japon, qui se sont alarmées de ces prétentions. 

Les États-Unis ont pointé du doigt la Chine, dont les « revendications territoriales excessives » ne sont pas fondées.  Les lignes de bases déposées par la Chine auprès du Secrétaire général constituent une violation de la Convention, ont accusé les Philippines, refusant toutefois que la mer de Chine méridionale devienne l’objet de rivalités géostratégiques entre grandes puissances, au mépris de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux.  Réagissant à ce qu’elle a qualifié d’« arguments fallacieux », la délégation chinoise a retorqué que la Convention n’était pas la seule source du droit maritime.  D’autres traités, de même que le droit international coutumier, devaient être pris en compte, notamment pour déterminer l’étendue des zones maritimes et encadrer les activités en mer. 

Alors que le sentence arbitrale « définitive » du Tribunal international du droit de la mer en date du 12 juillet 2016 sur la mer de Chine méridionale a été invoquée par certains États Membres, la délégation chinoise a estimé que cette sentence arbitrale « viole le principe de consentement des parties », ce qui la rend « arbitraire, nulle et non avenue ».  En outre, l’Assemblée générale n’est pas l’enceinte idoine pour aborder ces questions, a soutenu la Chine, pour qui ce différend ne doit pas être instrumentalisé pour semer la division.  Cette question sera réglée par le dialogue et la concertation, a affirmé la délégation.  La Commission des limites du plateau continental ne devrait pas intervenir tant que ce différend ne sera pas réglé, comme le rappelle l’Annexe I de son règlement intérieur, a considéré le Pakistan. 

Les délégations ont également évoqué la dégradation de la santé des océans, les liens entre changements climatiques, perte de biodiversité, pollution et réchauffement des océans.  Défis auxquels s’ajoutent la surpêche, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (PNN), la pollution par les plastiques et les microplastiques, les nutriments excessifs et les bruits sous-marins d’origine anthropique.  Il est impératif de les relever, a suggéré l’UE, dans le cadre des efforts plus vastes pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, en particulier l’Objectif de conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable (ODD no 14).  Cette délégation s’est félicitée de la tenue en juin 2015 de la troisième Conférence sur les océans, qui sera organisée conjointement par la France et le Costa Rica.  « Nous devons nous efforcer d’obtenir des résultats concrets. Le bien-être des générations futures en dépend », a-t-elle conclu. 

L’Assemblée générale achèvera son débat sur le droit de la mer le jeudi 12 décembre à 10 heures. 

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Mécanisme résiduel: appel à achever les dernières affaires relatives au traitement des crimes contre l’humanité en ex-Yougoslavie et au Rwanda

9805e séance - matin
CS/15927

Mécanisme résiduel: appel à achever les dernières affaires relatives au traitement des crimes contre l’humanité en ex-Yougoslavie et au Rwanda

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (MIFRTP) a sollicité, ce matin, devant le Conseil de sécurité, l’appui des États Membres dans l’achèvement des dernières affaires relatives au traitement des crimes contre l’humanité et des crimes les plus graves en ex-Yougoslavie et au Rwanda.  Si les fonctions résiduelles du Mécanisme concernent principalement des affaires déjà achevées, le Procureur du Mécanisme a rappelé de son côté que le processus d’établissement des responsabilités incombe désormais aux États Membres afin de rendre justice au plus grand nombre, tout en assurant que le Bureau continuera d’aider les États à enquêter sur les crimes graves internationaux commis au Rwanda et en ex-Yougoslavie et à en poursuivre les auteurs.

Le Mécanisme, créé en 2010 par le Conseil de sécurité pour continuer à exercer les fonctions essentielles du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), fermés en 2015 et 2017 respectivement, a vu son mandat prorogé jusqu’au 30 juin 2026 par la résolution 2740 (2024).  Depuis six mois, le Mécanisme est entré dans une nouvelle phase où sa structure organisationnelle et ses coûts opérationnels se sont vus réduits afin d’en faire une institution véritablement résiduelle telle que prévu par le Conseil de sécurité qui souhaite une « petite institution efficace et temporaire », a rappelé la juge Graciela Gatti Santana, Présidente du Mécanisme.

À l’entame de son propos, la Présidente a insisté sur l’importance des révisions de jugement définitif, consacrées dans le Statut du Mécanisme, afin de garantir qu’aucune erreur judiciaire n’ait été commise.  Reconnaissant également l’importance des révisions de jugement, le Procureur du Mécanisme, M. Serge Brammertz, a néanmoins mis en garde contre leur utilisation à des fins de réécriture de l’histoire, certaines personnes condamnées ayant cherché à effacer leurs crimes en fabriquant des éléments de preuve ou en exerçant des pressions sur les témoins pour qu’ils rétractent leur déposition. 

Réduction de l’empreinte opérationnelle du Mécanisme

Revenant sur le mandat du Mécanisme, la Présidente a assuré que des efforts sont menés pour réduire le coût opérationnel du Mécanisme afin de le réduire à ses fonctions résiduelles.  Malgré la rationalisation budgétaire, le Mécanisme reste « le mieux placé » pour achever les processus en cours et s’assurer de l’exécution des peines prononcées qui concernent actuellement 41 personnes dans 11 pays.  Le Mécanisme continue également d’apporter une assistance essentielle aux juridictions nationales qui cherchent à mettre fin à l’impunité en rendant la justice sur leur territoire, a-t-elle poursuivi.  Le Procureur du Mécanisme a abondé en ce sens, indiquant que le Mécanisme reste largement sollicité par les États partenaires qui souhaitent poursuivre le processus de justice, notamment en matière d’enquête, de recherche de personnes disparues et de transferts de prisonniers. 

Les efforts du Mécanisme pour réduire son empreinte opérationnelle ont été salués par une majorité des délégations qui ont réitéré son rôle indispensable dans les affaires en cours.  Le Mécanisme rappelle « avec force » que la communauté internationale peut lutter contre l’impunité lorsqu’elle fait preuve de « détermination collective », a estimé Malte qui a salué son assistance aux juridictions nationales en matière de poursuites.  L’Algérie a estimé pour sa part que le Mécanisme doit prendre en considération les préoccupations des États afin de faciliter la confiance entre les parties.  Pour la Chine, ce sont d’ailleurs les juridictions nationales qui sont les mieux à même d’assurer la justice, en complémentarité avec le Mécanisme. 

Si les réductions financières et de personnel sont « des pas dans la bonne direction », elles ne représentent toutefois qu’une « goutte d’eau dans l’océan », a estimé de son côté la Fédération de Russie qui a relevé que, bien que submergée de procès et de demandes d’avis consultatifs, la Cour internationale de Justice (CIJ) fonctionne avec un budget deux fois moindre que celui du Mécanisme, qui s’élève à plus de 60 millions de dollars. 

Selon elle, certaines fonctions, comme l’assistance technique aux enquêteurs nationaux, pourraient être absorbées par les unités concernées du système des Nations Unies.  Elle a en revanche jugé irréalisable la mise en place d’une sorte de « mécanisme résiduel omnibus » pour tous les tribunaux ad hoc, rappelant que les prescriptions du Conseil impliquent la fermeture du Mécanisme « et non son remplacement par de nouvelles structures ».  Elle s’est ainsi opposée au transfert des fonctions du Mécanisme à la « soi-disant Cour pénale internationale (CPI) », structure qui est, selon elle, « politisée et gangrenée par la corruption ». 

L’affaire Jojić et Radeta – un dossier toujours pendant

Dans cette phase finale de l’existence du Mécanisme, sa Présidente s’est par ailleurs dite résolue à trouver des solutions durables pour poursuivre le cycle de la justice au Rwanda et en ex-Yougoslavie, notamment en ce qui concerne les points d’accroche persistants tels que la réinstallation des personnes acquittées ou libérées dans le respect de leurs droits et le transfert des accusés. Selon le Procureur, beaucoup reste à faire au-delà de l’existence des fonctions résiduelles du Mécanisme puisque plus d’un millier de fugitifs génocidaires doivent encore être retrouvés au Rwanda et que plusieurs milliers de suspects doivent encore faire l’objet d’enquêtes et, le cas échéant, de poursuites en ex-Yougoslavie.  Après la clôture du Mécanisme, les États devront poursuivre le processus de justice au sein de leurs juridictions nationales, a-t-il rappelé, précisant néanmoins que le Bureau s’emploie à aider les procureurs et les autorités nationales à améliorer la coopération internationale pour l’identification et l’arrestation des fugitifs. 

À ce propos, la Présidente du Mécanisme a signalé que l’affaire Jojić et Radeta est pendante depuis près d’une décennie en raison de l’absence de coopération de la Serbie en vue de l’arrestation et du transfert des accusés. Cette situation est particulièrement regrettable, a-t-elle déploré.

La Ministre de la justice de la Serbie, Mme Maja Popović, s’est longuement exprimée sur cette affaire, affirmant que son traitement par Belgrade ne constitue pas une « violation de ses obligations internationales, comme l’a suggéré la Présidente ». 

Affirmant que la décision de ne pas transférer l’affaire Jojić et Radeta à la Serbie repose sur des conclusions infondées, elle a demandé au Mécanisme de la transférer de la même manière qu’il l’a fait dans l’affaire Šešelj, assurant que son pays est prêt à collaborer avec le Mécanisme et à exécuter les peines d’emprisonnement des personnes condamnées. 

Le Royaume-Uni a enjoint pour sa part la Serbie à collaborer de manière constructive avec le mécanisme pour assurer l’arrestation et le transfert des deux recherchés.  Un appel relayé par la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, qui ont estimé que c’est bel et bien l’absence de coopération de la Serbie en vue de l’arrestation et du transfert des accusés qui empêche tout développement. 

Ces deux pays ont également déploré l’absence de coopération avec la Serbie pour déterminer le sort des personnes disparues et retrouver leurs dépouilles, y voyant le « principal obstacle » au règlement des affaires. « Déterminer le sort des 1 788 citoyens croates disparus est notre priorité de longue date », a rappelé la délégation croate, dénonçant le manque de volonté politique en Serbie pour partager les informations et permettre l’accès aux archives. « Les familles sont humiliées par le déni des crimes de génocide et la glorification des criminels.  Ce que l’on tue par le déni est inestimable », a asséné la Bosnie-Herzégovine, en faisant référence à la réconciliation. 

Si la Slovénie et la République de Corée, appuyées par quelques autres délégations dont celle des États-Unis, ont également dit être préoccupées par le déni des crimes et la glorification des génocidaires et des criminels de guerre, la Ministre serbe a estimé que la « vérité » n’est pas toujours reflétée dans les jugements du TPIY et du Mécanisme.  « De nombreux faits, tant en ce qui concerne la nature du conflit en ex-Yougoslavie que d’autres questions juridiques et pénales internationales, restent contestés », a-t-elle affirmé. 

Se rangeant du côté de la Serbie, la Fédération de Russie s’est déclarée de son côté extrêmement préoccupée par l’état de santé du général serbe Ratko Mladić, qui est détenu au centre de détention des Nations Unies à La Haye.  Décrivant son état comme « proche de la mort », elle a qualifié de « franchement inhumaine » la décision prise le 10 mai par le Président du Mécanisme de rejeter sa demande de libération anticipée pour raisons humanitaires. 

Le dossier rwandais

Saluant le travail du Mécanisme, le Rwanda s’est voulu davantage optimiste en mettant l’accent sur la réhabilitation et la réinsertion des prisonniers acquittés ou ayant purgé leur peine.  « Des milliers de génocidaires vivent dorénavant en paix côte à côte avec les victimes, ce qui atteste du succès de leur réinsertion », a-t-il estimé. 

La France a salué pour sa part l’arrestation, il y a un an et demi, de Fulgence Kayishema, grâce à la collaboration entre le Bureau du Procureur, les autorités d’Afrique du Sud et celles d’autres pays, y voyant un exemple de coopération internationale efficace et effective dans la lutte contre l’impunité.  Toujours sur le dossier rwandais, le Royaume-Uni s’est félicité pour sa part de l’achèvement des dernières recherches des noms des personnes disparues et du transfert sans heurts des fonctions aux autorités rwandaises après la récente fermeture du bureau extérieur de Kigali. 

Préserver l’héritage du Mécanisme

Afin de mener à bien la mission de lutte contre l’impunité, la préservation des archives par le Mécanisme constitue un autre aspect essentiel de ses fonctions résiduelles afin de lutter contre le « révisionnisme historique », a rappelé la Présidente, appuyée par la Suisse.  « En tant qu’État hôte », la Suisse s’est dite soucieuse de créer un « cadre commun » afin de réfléchir à la préservation future des archives des tribunaux ad hoc.  Dans cette optique, un grand nombre de délégations ont appelé à planifier le futur du travail mémoriel et des procédures en cours afin de conserver l’héritage du Mécanisme après sa dissolution. 

 

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MÉCANISME INTERNATIONAL APPELÉ À EXERCER LES FONCTIONS RÉSIDUELLES DES TRIBUNAUX PÉNAUX (S/2024/570)

Exposés

Mme GRACIELA GATTI SANTANA, Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (MIFRTP), a rappelé que le Mécanisme a suivi une « ligne claire » et ses fonctions résiduelles se poursuivent conformément à ses obligations légales, avec efficacité et dans l’optique d’achever ses travaux. 

La possibilité de demander une révision d’un jugement définitif est consacrée dans notre Statut par le Conseil de sécurité, a-t-elle poursuivi, mentionnant le procès en révision ordonné dans l’affaire Gérard Ntakirutimana.  Elle a expliqué que la Chambre d’appel a rejeté à l’unanimité la demande en révision de l’arrêt présentée par Gérard Ntakirutimana, et les déclarations de culpabilité prononcées contre lui sont demeurées inchangées.  Ce procès, essentiel pour le cycle de la justice, a permis de garantir qu’aucune erreur judiciaire n’avait été commise, s’est-elle félicitée.  Il a également illustré l’attachement de l’institution à voir les procédures en salle d’audience menées rapidement et de façon économique. 

D’autres progrès ont été accomplis dans le cadre de procédures pour outrage, a-t-elle développé. Notre compétence continue en matière d’outrage reste essentielle pour veiller à la protection des témoins et à l’intégrité de nos procédures.  Toutefois, le Statut du Mécanisme exige d’envisager de renvoyer les affaires d’outrage aux juridictions nationales.  Cette année, des juges uniques ont renvoyé deux affaires d’outrage à des autorités nationales, évitant ainsi des procédures en salle d’audience nécessitant de nombreuses ressources, s’est-elle félicitée.  Une décision relative à l’opportunité d’engager une autre procédure d’outrage est pendante et si celle-ci est autorisée, un juge unique devra d’abord déterminer s’il convient de renvoyer l’affaire devant une juridiction nationale.

La Présidente a également affirmé que les juges veillent à ce que le Mécanisme puisse continuer de réduire la taille de sa structure et l’ampleur de ses opérations, conformément à la vision du Conseil de sécurité.  Néanmoins, les activités résiduelles restantes continuent de nécessiter du temps et des ressources.  À court terme, le Mécanisme est le mieux placé pour les exécuter et pour identifier des solutions viables pour leur achèvement, a-t-elle estimé.  Actuellement, le Mécanisme contrôle l’exécution des peines prononcées contre 41 personnes, dans 11 pays et sur 2 continents.  Trois autres condamnés se trouvent au quartier pénitentiaire des Nations Unies à La Haye dans l’attente de leur transfert vers l’État dans lequel ils purgeront leur peine, tandis que trois autres bénéficient d’une libération anticipée conditionnelle.  La fonction de contrôle du Mécanisme est essentielle pour mener à bien le cycle de la justice, a assuré la Présidente. 

Par ailleurs, le Mécanisme continue d’apporter une assistance vitale aux juridictions nationales qui cherchent à mettre fin à l’impunité en rendant la justice sur leur territoire, a-t-elle poursuivi.  Au cours des dernières années, les juges du Mécanisme ont fait droit à plus de 80% des demandes de modification des mesures de protection accordées à des témoins présentées dans le cadre de poursuites engagées au niveau national.  Le Mécanisme demeure également chargé de conserver et de gérer les archives des tribunaux ad hoc et du Mécanisme, ainsi que d’en faciliter la consultation, un processus qui permet de lutter contre le « révisionnisme historique ». 

La Présidente a ensuite appelé à la coopération continue des États dans la résolution d’importantes difficultés persistantes.  Elle a notamment indiqué qu’il reste très difficile de trouver une solution durable pour les six personnes acquittées ou libérées et réinstallées au Niger.  Ces personnes vivent dans l’incertitude, privées des droits qui leur avaient été promis lorsqu’elles ont accepté d’être réinstallées dans ce pays.  L’intervention des États, que ce soit pour aider à normaliser la situation de ces personnes au Niger ou pour faciliter leur réinstallation ailleurs, sera déterminante dans la résolution de ce problème. 

Elle s’est également inquiétée de la transformation effective du quartier pénitentiaire des Nations Unies en une prison, situation résultant de l’incapacité de certains États à continuer à exécuter les peines.  Le quartier pénitentiaire n’a jamais eu vocation à héberger des condamnés de cette manière.  Or, trois d’entre eux s’y trouvent encore actuellement à la suite du prononcé de leur jugement définitif et d’autres pourraient y être renvoyés. 

Enfin, l’affaire Jojić et Radeta est pendante depuis près d’une décennie en raison de l’absence de coopération de la Serbie en vue de l’arrestation et du transfert des accusés, a-t-elle indiqué, déplorant une situation particulièrement regrettable.

La Présidente a par ailleurs indiqué qu’entre janvier 2020 et la fin de cette année, le Mécanisme aura réduit ses effectifs de près de 60% et son budget de plus de 30%. De même, il a sensiblement réduit son empreinte opérationnelle à la suite de la fermeture réussie de l’antenne de Kigali, qui a cessé ses opérations à la fin du mois d’août.  Ce faisant, le Mécanisme a exercé un contrôle judiciaire et s’est assuré que des centaines de victimes et de témoins vulnérables qui avaient bénéficié d’une assistance médicale et psychosociale dispensée par cette antenne continueraient de la recevoir de la part du Gouvernement du Rwanda.  Cet exemple illustre clairement la volonté et la capacité du Mécanisme de trouver des solutions de transfert innovantes et de réduire les coûts de manière responsable, s’est-elle félicitée.

M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a informé le Conseil de sécurité des activités de son Bureau ces six derniers mois.  Il a indiqué que, si la plupart des fonctions résiduelles du Mécanisme concernent les affaires déjà achevées, son Bureau s’attache à présent à soutenir les États Membres à mesure qu’ils poursuivent le processus d’établissement des responsabilités.  Le Bureau a ainsi participé à la procédure en révision dans l’affaire Ntakirutimana. Pour rappel, Gérard Ntakirutimana a été déclaré coupable de génocide et de crimes contre l’humanité et a été condamné à 25 ans d’emprisonnement.  Toutefois, près de 10 ans après avoir bénéficié d’une libération anticipée et 19 ans après avoir été condamné, il a déposé une demande en révision le 14 décembre 2023, faisant valoir qu’un témoin était revenu sur la déposition qu’il avait faite contre lui.  Dans l’enquête qui a suivi cette demande, le Bureau a mis au jour des éléments de preuve crédibles et fiables montrant que cette rétractation était la conséquence de pressions exercées sur le témoin, notamment au moyen d’incitations financières, a expliqué le Procureur.  La Chambre d’appel a confirmé en conséquence les déclarations de culpabilité prononcées contre Gérard Ntakirutimana par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). 

M. Brammertz a précisé que, ces dernières années, deux procédures en révision de déclarations de culpabilité prononcées par le TPIR ont été engagées, la première l’ayant été dans l’affaire Ngirabatware.  Dans les deux cas, des témoins sont revenus sur les dépositions qu’ils avaient faites dans des procès antérieurs.  Et dans les deux cas, il existait des preuves solides que ces rétractations étaient la conséquence d’incitations financières.  Selon le Procureur, « les procédures en révision ne peuvent devenir un moyen pour les personnes condamnées de réécrire l’histoire et d’effacer les crimes qu’ils ont commis en fabriquant des éléments de preuve ». 

Le Bureau a également continué de participer à trois autres affaires qui devraient bientôt s’achever.  Elles concernent Fulgence Kayishema, qui est toujours en Afrique du Sud, où il conteste son transfèrement au Mécanisme à Arusha puis au Rwanda afin d’y être jugé; Félicien Kabuga, qui est toujours détenu par le Mécanisme à La Haye et dont le Bureau entend obtenir le transfèrement au Rwanda, son pays d’origine, pour clôturer l’affaire; et Vojislav Šešelj, dont l’affaire doit être renvoyée devant les juridictions serbes dans un avenir proche afin qu’il puisse être jugé en Serbie. 

S’agissant des démarches entreprises pour soutenir la recherche des personnes disparues lors des conflits en ex-Yougoslavie, le Procureur a précisé que, sur les quelque 42 000 personnes concernées, 30 000 ont été retrouvées et identifiées. Il a affirmé que son Bureau a terminé ses dernières recherches tendant à retrouver le nom de personnes disparues, conformément à l’accord passé en 2018 avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  Après lui avoir fourni environ 500 000 pages d’éléments de preuve ainsi qu’une grande quantité de photographies et de documents audiovisuels, le Bureau continuera d’apporter son soutien au CICR dans les démarches qu’il entreprend pour retrouver les personnes disparues en répondant aux demandes supplémentaires d’assistance, a-t-il assuré.  Le Bureau apporte aussi une assistance importante en matière d’enquête ainsi qu’un soutien opérationnel aux autorités nationales dans la recherche de personnes disparues.

M. Brammertz a ajouté que, si les travaux menés par le TPIR et le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) touchent à leur fin, tel n’est pas le cas pour le processus d’établissement des responsabilités.  Au contraire, a-t-il dit, il incombe désormais aux États Membres de rendre justice pour un plus grand nombre.  C’est pourquoi le Bureau continuera d’avoir pour activité principale d’aider ses partenaires nationaux à enquêter sur les crimes graves internationaux commis au Rwanda et en ex-Yougoslavie et à en poursuivre les auteurs.  En 2024, a souligné M. Brammertz, le Bureau aura reçu plus de 400 demandes d’assistance, soit un des plus grands nombres jamais reçus en une année. Elles lui ont été adressées par 14 États Membres, dont le Rwanda et les pays de l’ex-Yougoslavie, qui s’en remettent à ses compétences en matière d’enquête, d’analyse et de droit. 

Pour illustrer cet aspect essentiel de la stratégie d’achèvement des travaux du Mécanisme, il a cité la demande d’assistance des procureurs rwandais, qui a permis à ces derniers de confirmer la participation d’un suspect au meurtre de plus d’un millier de réfugiés tutsis.  Il a également évoqué la demande faite par le Monténégro pour que le Bureau l’aide à enquêter sur des crimes de guerre et à en poursuivre les auteurs. 

Selon M. Brammertz, beaucoup reste à faire puisque plus d’un millier de fugitifs génocidaires doivent encore être retrouvés au Rwanda et qu’en ex-Yougoslavie, plusieurs milliers de suspects doivent encore faire l’objet d’enquêtes, et le cas échéant, de poursuites.  À la demande des États partenaires, le Bureau s’emploie à aider les autorités nationales à débusquer et identifier les fugitifs et à améliorer la coopération internationale, a expliqué le Procureur, avant de rappeler qu’après la clôture du Mécanisme prévue par la résolution 2740 (2024), les États Membres poursuivront le processus de justice au sein de leurs juridictions nationales. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte des recommandations pour que l’aide humanitaire soit mieux coordonnée et plus efficace, en particulier pour le peuple palestinien

Soixante-dix-neuvième session,
49e & 50e séances plénières - matin & après-midi
AG/12665

L’Assemblée générale adopte des recommandations pour que l’aide humanitaire soit mieux coordonnée et plus efficace, en particulier pour le peuple palestinien

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui par consensus quatre résolutions axées sur l’amélioration de l’aide humanitaire.  En présentant celle sur le « Renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies », la déléguée de la Suède a signalé que, en 2025, on s’attend à un « nombre effarant de 305 millions personnes dans le monde ayant besoin d’une assistance humanitaire d’urgence et de protection ».

Les résolutions intitulées « Coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles » et « Assistance au peuple palestinien » ont complété la liste des recommandations lancées par l’Assemblée générale pour aboutir à une aide humanitaire efficace, en particulier en pleine crise au Moyen-Orient.

Le texte « Sûreté et sécurité du personnel humanitaire et protection du personnel des Nations Unies » a été adopté également par consensus, dans le contexte du « triste record » de 2023 pour ce qui est des décès d’intervenants humanitaires dans le monde, mais après deux votes qui ont écarté des propositions d’amendement russes - seulement 9 voix pour (Bélarus, Chine, Cuba, Érythrée, Éthiopie, Fédération de Russie, Israël, Nicaragua et République populaire démocratique de Corée) et 33 abstentions.

La Fédération de Russie souhaitait en effet supprimer toute mention du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) dans le texte au motif que le Statut de Rome a été miné par les échecs de la CPI, un « pseudo-tribunal » devenu un « instrument de pression politique ».  Selon elle, il n’est nul besoin de faire mention de la CPI, le texte reflétant déjà la responsabilité, en vertu du droit international humanitaire, de protéger le personnel humanitaire et le personnel des Nations Unies.

En début de journée, l’Assemblée générale a lancé un processus d’élection à bulletin secret d’un membre du Conseil économique et social (ECOSOC) pour un siège réservé aux pays d’Europe orientale.  Toutefois, ni la Fédération de Russie (106 voix) ni la Macédoine du Nord (77 voix) n’ayant atteint la majorité requise de 122 voix, l’élection a été suspendue jusqu’à un prochain scrutin qui sera convoqué pour départager les deux candidats.

Renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies

L’Assemblée générale, qui a débattu sur le thème ci-dessus, était saisie de trois rapports du Secrétaire général.  Dans celui sur la « sûreté et sécurité du personnel humanitaire et protection du personnel des Nations Unies », M. António Guterres s’inquiète de voir que « les conflits ont atteint des niveaux jamais vus depuis 1945, touchant près de 308,5 millions de personnes » qui ont besoin d’une aide humanitaire et d’une protection solides.  Il note aussi que ces conflits mettent à rude épreuve les institutions publiques, tout en soulignant que la criminalité transnationale et l’extrémisme violent, ainsi que l’élargissement de la sphère d’influence des groupes armés non étatiques, pourraient influer sur le comportement électoral des 2 milliards de personnes se rendant aux urnes en 2024.

En plus des conflits, le Chef de l’ONU relève que « la sécurité du personnel des Nations Unies est compromise par les crises environnementales » qui renforcent l’instabilité, provoquent une augmentation des déplacements et exacerbent les dangers pesant sur le personnel, le matériel et les biens.  Il mise donc sur une bonne gestion des risques de sécurité pour que l’Organisation puisse réaliser les principes et les objectifs énoncés dans la Charte des Nations Unies, les Conventions de Genève du 12 août 1949, la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Le débat du jour a également porté sur le sous-financement de l’aide humanitaire, comme le relève le rapport sur le Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF): en 2023, sur les 667,9 millions de dollars destinés à financer des activités humanitaires vitales dans 40 pays, 558,5 millions ont été reçus par le Fonds.

Pourtant, en 2024, l’aide humanitaire de la France a atteint plus de 700 millions d’euros, a indiqué la délégation en rappelant que Paris a mobilisé la communauté internationale pour répondre aux conséquences humanitaires des conflits en Ukraine, à Gaza, au Soudan et au Liban.  L’Union européenne (UE), elle, a alloué cette année plus de 9 milliards de dollars d’aide humanitaire dans le monde entier, en recommandant de surcroît à ses États membres de consacrer 0,07% de leur revenu national brut à l’action humanitaire, seuil que certains ont dépassé.  Pour la Chine, il est important parallèlement de renforcer la coopération au développement sous l’égide de l’ONU, car cela atténue les crises et leurs conséquences humanitaires.  La Chine déboursera 500 millions de dollars à cette fin.

Mais c’est la prolifération des conflits armés, associée à des interprétations de plus en plus permissives du droit international humanitaire (DIH), qui a un coût particulièrement inacceptable, a tranché le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en constatant les besoins humanitaires toujours croissants avec ces conflits.  « Le DIH n’est pas une justification à la destruction et aux massacres, c’est le dernier moyen de survie de l’humanité dans le chaos de la guerre. »  Le respect des règles de la guerre est possible, à condition qu’il y ait une volonté politique de mettre en pratique ce qui est énoncé dans les Conventions de Genève, a souligné le CICR.  « En sécurisant mieux l’espace humanitaire, en interprétant correctement le DIH et en répondant aux nouvelles menaces dans les conflits armés, nous avons la possibilité d’améliorer la vie de millions de personnes. »

Outre la volonté politique, c’est d’unité et de confiance dont nous avons besoin dans ce domaine.  C’est ce qu’a exprimé l’UE en faisant valoir que l’ampleur des défis humanitaires exige une réponse unie.  Selon l’UE, la protection de l’espace humanitaire ne se limite pas à garantir l’accès physique, mais nécessite également de maintenir la confiance des communautés locales dans les humanitaires.  À cet égard, elle a appelé à lutter contre la manipulation de l’information, l’incitation à la violence et les discours de haine visant les travailleurs humanitaires. 

L’UE a par ailleurs jugé essentiel de s’attaquer au lien entre les changements climatiques, les conflits et l’insécurité alimentaire.  D’autres, comme l’Inde et la Suède, ont mis l’accent sur l’importance de l’accès à Internet et à l’intelligence artificielle, qui recèlent un potentiel important d’amélioration de l’action humanitaire.

« L’aide humanitaire est vitale pour nous qui faisons face à l’invasion de la Fédération de Russie », a déclaré l’Ukraine disant que 40% de sa population est dans le besoin.  La délégation, qui a souligné le lien étroit existant entre la coordination de l’aide humanitaire et la sécurité alimentaire, s’est enorgueillie d’être un pays contributeur essentiel: depuis le 16 août 2023, nous avons expédié plus de 83,5 millions de tonnes de marchandises dont 55,6 millions de tonnes de produits agricoles ukrainiens envoyés à 46 pays.  Le programme « Céréales d’Ukraine » de 286 000 tonnes de produits agricoles a sauvé de la faim plus de 20 millions d’individus.  Les participants au troisième sommet international « Céréales d’Ukraine » ont promis 44 millions de dollars de soutien supplémentaire au programme.

En résumé sur ce débat, il a été conseillé de mettre l’accent sur la coordination, la diplomatie humanitaire, la protection, la réponse pour les déplacés, le financement de qualité et la perspective de genre.  Présidente du groupe de donateurs pour l’appui au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), la Norvège a promis de donner la priorité à ces domaines et l’Arabie saoudite a mis l’accent sur les besoins humanitaires des femmes touchées par les conflits armés.

Assistance au peuple palestinien

Saisie également du rapport du Secrétaire général sur l’assistance au peuple palestinien, l’Assemblée générale a appris qu’au 31 mars 2024, 3,3 millions de Palestiniens dans le Territoire palestinien occupé avaient besoin d’une assistance humanitaire.  Les opérations humanitaires y ont continué d’être entravées par des obstacles physiques et administratifs érigés par Israël, tandis que les organismes des Nations Unies ont continué, après octobre 2023, de coordonner et de fournir au Territoire une aide humanitaire et une aide au développement.

L’ONU a d’ailleurs considérablement augmenté le volume d’aide vitale fournie à Gaza après cette date avec pour but d’atteindre 2,7 millions de personnes, malgré de sévères restrictions d’accès.  Dans la même ligne, le Secrétaire général appelle à répondre à l’appel éclair en faveur du Territoire pour la période d’avril à décembre 2024 afin de réunir les 2,8 milliards de dollars promis.

« Renforcer la coordination de l’aide humanitaire, c’est respecter le droit international humanitaire, en parole et en acte », a plaidé l’État de Palestine.  De l’avis de la délégation, la communauté internationale doit veiller également à la protection de ceux qui consacrent leur vie à sauver les autres.  Et, a enchaîné l’Observateur permanent, il faut mettre fin à l’impunité d’Israël.  On ne peut pas continuer à offrir des solutions temporaires sous forme d’aide humanitaire et ignorer la cause profonde du problème, a-t-il argumenté.  « L’aide au peuple palestinien restera insuffisante tant que l’occupation israélienne et les violations flagrantes du droit international persisteront. »

Le Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, par la voix du Venezuela, a appelé à lever toutes mesures unilatérales ou multilatérales qui entravent la fourniture d’une aide humanitaire.  L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) a exprimé son appui à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et au renforcement de l’aide à Gaza avant de s’appesantir sur la priorité du groupe, à savoir « la gestion des catastrophes. » 

La conférence organisée le 2 décembre par l’Égypte pour soutenir la bande de Gaza a permis de mobiliser plus de 187 millions de dollars, s’est enorgueillie la délégation égyptienne avant de plaider en faveur d’un cessez-le-feu et du bon acheminement de l’aide humanitaire.  Le Conseil de sécurité doit demander à Israël d’ouvrir tous les points de passage et de faciliter l’acheminement de l’aide dans l’enclave, a-t-elle insisté.

Israël a rétorqué que « l’État israélien a facilité l’entrée de 1,6 million de tonnes de denrées, de fioul, de combustible de cuisson et d’articles médicaux ».  Selon la délégation, les goulots d’étranglement dans l’acheminement sont provoqués par les attaques de convois par le Hamas.  Elle a accusé le Hamas d’avoir infiltré toutes les opérations de l’UNRWA qui, à son avis, ne mérite pas de faire partie du système des Nations Unies.  En conclusion, la délégation a invité l’ONU à veiller à la coordination de l’aide avec « les organisations compétentes » et à mentionner dans ses débats le « crime de guerre flagrant » que constitue la détention d’otages à Gaza.

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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: la RDC et le Rwanda se rejettent la responsabilité des crises sécuritaire et humanitaire dans les provinces congolaises orientales

9804e séance - matin
CS/15926

Conseil de sécurité: la RDC et le Rwanda se rejettent la responsabilité des crises sécuritaire et humanitaire dans les provinces congolaises orientales

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

La situation au cours du mois écoulé en République démocratique du Congo (RDC) a continué d’être marquée par des tensions politiques et une insécurité persistante dans l’est de son territoire, a indiqué la Représentante spéciale du Secrétaire général pour ce pays, venue s’exprimer ce matin au Conseil de sécurité, à une semaine du renouvellement du mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO), qu’elle dirige.

Mme Bintou Keita a salué les efforts du Gouvernement congolais qui, un an après les élections, a engagé des réformes de gouvernance en vue d’améliorer le pouvoir d’achat et de renforcer l’accès aux services sociaux de base et les appareils sécuritaires et de défense, tout en consolidant le système judiciaire et en promouvant une gestion saine des deniers publics et des ressources naturelles abondantes.  Elle s’est dite toutefois inquiète des tensions suscitées par une possible révision de la Constitution congolaise, appelant les parties prenantes à faire preuve de coopération.

Dégradation de la situation sécuritaire en Ituri et au Nord-Kivu

La haute fonctionnaire s’est surtout attardée sur la crise sécuritaire qui secoue les provinces orientales de l’Ituri et du Nord Kivu, où le groupe rebelle armé M23, non signataire de l’accord de cessez-le-feu, a étendu son occupation civile et militaire.  « Aujourd’hui, il contrôle un espace deux fois plus grand que celui occupé en 2012 », a constaté Mme Keita.  Toutefois, ce sont les Forces démocratiques alliées (ADF) qui restent le groupe armé le plus meurtrier, a-t-elle dit, avec des centaines de civils tués à leur actif ces derniers mois.  Et en Ituri, même si le nombre d’attaques visant les civils lancées par la CODECO et le groupe Zaïre ont diminué, la protection des civils reste le défi prioritaire auquel fait face le pays.

Mme Passy Mubalama, la fondatrice d’Action et initiatives de développement pour la protection de la femme et de l’enfant (AIDPROFEN), a confirmé « l’horreur quotidienne » que vivent les populations, en particulier les femmes et les enfants déplacés de guerre.  Si elle a mis en cause l’appui logistique, financier et militaire extérieur, en particulier de la part du Rwanda, dont bénéficie le M23, elle a cependant jugé que la MONUSCO a démontré ses limites.  « Si pendant plus de 20 ans, elle n’a pu contribuer à l’instauration de la paix et à la protection des populations civiles en RDC, que pouvons-nous encore en attendre? » s’est demandé l’activiste.

La Mission protège à l’heure actuelle près de 100 000 personnes déplacées, a fait valoir la Représentante spéciale, mais pour qu’elle puisse mieux s’acquitter de ses obligations, ses Casques bleus doivent bénéficier d’une liberté de mouvement totale et tous les acteurs sécuritaires coopérer avec elle.  « Au Nord-Kivu, les activités de “spoofing” et de brouillage GPS doivent cesser immédiatement », a tranché la haute fonctionnaire, suivie sur ce point par plusieurs membres du Conseil, notamment la Slovénie et la Suisse, laquelle s’est également émue des campagnes de désinformation visant la MONUSCO.  Au nom des A3+ (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), la Sierra Leone a exhorté toutes les parties à ne pas interférer avec le mandat de la Mission, blâmant l’appui apporté par les acteurs extérieurs aux groupes armés.

Pour la Ministre congolaise des affaires étrangères, cette situation résulte de la présence illégale sur le territoire de son pays de plus de 4 000 membres des Forces de défense rwandaises (RDF), qui mènent des offensives avec le soutien du M23.  Au-delà des attaques meurtrières, Mme Thérèse Kayikwamba Wagner a dénoncé les déplacements prémédités de populations qui, combinés à la « nomination illégitime » d’autorités coutumières et territoriales imposées par le M23, traduisent, selon elle, une volonté claire de redessiner la composition démographique des territoires sous leur contrôle.  « Ces pratiques, qui s’apparentent à une épuration ethnique, visent à établir un contrôle durable, tout en sapant les structures sociales et culturelles existantes et en exacerbant les tensions locales », a expliqué Mme Wagner.

Relance du processus de Luanda

La relance du processus de Luanda, une médiation engagée sous l’égide du Président de l’Angola, M. João Lourenço, mandaté par l’Union africaine pour aider à résoudre la crise diplomatique entre la RDC et le Rwanda, a été saluée à plusieurs reprises ce matin, notamment par la délégation angolaise qui a annoncé la tenue, le 15 décembre, d’un sommet tripartite Angola-Rwanda-RDC dans le but d’accélérer les efforts de stabilisation pour la paix dans l’est de la RDC.  De son côté, Mme Keita a rappelé que le 5 novembre, le mécanisme de vérification ad hoc renforcé, mandaté pour surveiller le cessez-le-feu entré en vigueur le 4 août, avait été opérationnalisé à Goma.  Composé de 18 experts angolais et de 3 experts congolais et rwandais, respectivement, ce mécanisme représentait une étape clef dans la concrétisation des engagements pris, a reconnu Mme Wagner.  « Or, depuis sa création, les experts rwandais n’ont jamais assumé leurs fonctions.  Cela fait donc 34 jours que le fonctionnement de ce mécanisme est entravé, ce qui met en doute la volonté du Rwanda de respecter ses engagements », a-t-elle déploré.

« Dépassons les discours simplistes et traitons des causes profondes », a rétorqué le représentant rwandais, qui a contesté que le M23 serait la cause majeure du conflit.  Le problème de fond, a-t-il avancé, c’est la marginalisation de certaines minorités, notamment les Congolais tutsis, visés par des « discours de haine ». Jugeant erronée l’analyse de certains membres du Conseil, qui encourageraient ce faisant l’« intransigeance » du Gouvernement congolais, le délégué a déclaré que le rapport du Secrétaire général passe sous silence le fait que la paix prévaudrait davantage dans les zones sous contrôle du M23. Les FDLR, une milice composée d’anciens responsables du génocide des Tutsis au Rwanda, sont une préoccupation sécuritaire légitime pour le Rwanda, a-t-il souligné.

La question des ressources naturelles

« Le Rwanda n’est pas et ne sera jamais le gendarme de la région des Grands Lacs », a rétorqué Mme Wagner, en accusant les forces rwandaises d’avoir perpétré des massacres et des attaques visant les forces de la MONUSCO et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et de se livrer au pillage des ressources naturelles de son pays, des faits documentés dans les rapports des Nations Unies.  « Je le dis avec force, l’appréciation du Rwanda sur nos défis internes ne lui donne aucun droit d’intervenir en RDC. » 

À l’argument qui voudrait que le M23 représente des communautés marginalisées, la Ministre congolaise a répondu par une question « simple »: depuis quand des massacres, des déplacements forcés et la réorganisation démographique de territoires sont-ils des moyens légitimes de répondre à des revendications ethniques ou sociales?  La vérité, c’est que le M23 ne défend aucune cause, ni minorité, a-t-elle balayé, il cherche à contrôler les ressources de la RDC et à affaiblir sa souveraineté.

Trop souvent encore, « la carte des violences s’aligne sur celle des ressources naturelles », a d’ailleurs fait observer la Représentante spéciale, qui a signalé qu’au Nord-Kivu, à la suite de son offensive vers Pinga fin octobre, le M23 a pris le contrôle du gisement aurifère de Lubira.  Aussi a-t-elle encouragé les pays de la région des Grands Lacs à coordonner leur lutte contre l’exploitation illicite des ressources naturelles et à renforcer les mécanismes de traçabilité pour affaiblir les groupes armés.

Affirmant que son pays recèle lui aussi de nombreux minerais, le représentant rwandais a dénoncé pour sa part les « récits trompeurs de l’exploitation minérale », qui ne serviraient qu’à détourner l’attention de la communauté internationale des causes réelles du conflit.

Le renouvellement du mandat de la MONUSCO

Tandis que les États-Unis ont demandé au Rwanda de retirer ses troupes du territoire congolais et de cesser son appui au M23, la France a estimé qu’il revient désormais aux parties de parachever la mise en œuvre de leurs engagements: « la neutralisation des FDLR pour la République démocratique du Congo, et le retrait de ses forces hors du territoire congolais pour le Rwanda ». Dans ce contexte sous haute tension entre les deux pays frontaliers, le Conseil de sécurité devra examiner dans les prochains jours la prorogation du mandat de la MONUSCO, dans la perspective aussi de son « retrait progressif, responsable et durable » à la fin de 2024, a ajouté la délégation. 

Les membres du Conseil se sont tous dits conscients des enjeux, la Fédération de Russie jugeant inacceptable qu’un tel retrait soit « précipité », sous peine de créer un « vide sécuritaire », une inquiétude partagée par la Chine.  Pour les États-Unis, désireux eux aussi d’éviter une telle situation, les autorités congolaises doivent transmettre tous les éléments d’information quant au rythme du retrait de la Mission.  « La confusion et l’ambiguïté engendrent la désinformation, semant ainsi les graines de la discorde populaire, voire de la violence à l’encontre des soldats de la paix », a mis en garde la représentante américaine.

 

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LA SITUATION CONCERNANT LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Rapport du Secrétaire général sur la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (S/2024/863

Exposés

Mme BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo (RDC), a noté que la période à l’examen a été marquée par des tensions politiques autour des appels à la révision de la Constitution, et par une insécurité persistante et croissante au Nord-Kivu et en Ituri, notamment en raison des activités des Forces démocratiques alliées (ADF), du M23, de la CODECO et du groupe Zaïre.

Près d’un an après les élections de 2023, et conformément à son programme d’action, le Gouvernement congolais a engagé des réformes de gouvernance pour améliorer le pouvoir d’achat, renforcer l’accès aux services sociaux de base et les appareils sécuritaires et de défense, consolider le système judiciaire et promouvoir une gestion saine des fonds publics et des ressources naturelles. Reste que la situation sécuritaire en Ituri et au Nord-Kivu est préoccupante.  Le M23, non signataire de l’accord de cessez-le-feu, a consolidé son occupation civile et militaire au Nord-Kivu.  Aujourd’hui, il contrôle un espace deux fois plus grand que celui occupé en 2012.  Mais les ADF restent le groupe armé le plus meurtrier, avec des centaines de civils tués, ces derniers mois.  En Ituri, même si le nombre d’attaques de la CODECO et des Zaïre, visant les civils, ont diminué ces trois derniers mois, la protection des civils reste un défi et une priorité absolue, a reconnu Mme Keita.

Dans cet environnement complexe, la MONUSCO protège environ 100 000 déplacés, mais afin de pouvoir mieux faire son travail, ses Casques bleus doivent avoir une pleine liberté de mouvement et tous les acteurs sécuritaires maintenir une coordination constructive avec la Mission.  « Au Nord-Kivu, pour la sûreté et la sécurité des civils et des Casques bleus, les activités de ‘spoofing’ et de brouillage GPS doivent cesser immédiatement », a tranché la Représentante spéciale.  Trop souvent encore, a-t-elle observé, « la carte des violences s’aligne avec celle des ressources naturelles ».  Ainsi, au Nord-Kivu, à la suite de son offensive vers Pinga, fin octobre, le M23 a pris le contrôle du gisement aurifère de Lubira. Aussi la Représentante spéciale a-t-elle encouragé les pays de la région des Grands Lacs à coordonner leur lutte contre l’exploitation illicite des ressources naturelles, et à renforcer les mécanismes de traçabilité pour affaiblir les groupes armés.

Signalant que l’insécurité continue d’aggraver de manière alarmante la situation humanitaire, elle a indiqué que selon l’OCHA, près de 6,4 millions de personnes sont actuellement déplacées en raison de conflits armés et de catastrophes naturelles dans le pays.  Elle a toutefois fait valoir un point positif: début décembre, le Plan de réponse humanitaire de 2024 était financé à hauteur de 50,2%, avec 1,28 milliard de dollars décaissés sur 2,6 milliards, soit une amélioration significative par rapport au financement total de 940 millions reçu en 2023. Nos partenaires humanitaires ont donc été en mesure de fournir une assistance vitale à 5,8 millions de personnes entre janvier et octobre 2024, s’est-elle félicitée.  Mais les chiffres concernant les violences sexistes et l’exploitation sexuelle restent « effroyables », a reconnu Mme Keita, avec plus de 90 000 cas recensés depuis le début de l’année, dont 39 000 dans le seul Nord-Kivu.

Le Conseil de sécurité, a poursuivi Mme Keita, se prépare à formuler le nouveau mandat de la MONUSCO, lequel donne actuellement la priorité au soutien à la protection des civils ainsi qu’aux processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) et de réforme du secteur de la sécurité (RSS). S’appuyant sur les leçons tirées du Sud-Kivu, le Gouvernement congolais et la MONUSCO travaillent conjointement sur une approche de désengagement adaptée à la dynamique de sécurité territoriale et aux besoins de protection des civils.

Encouragée par l’engagement du Gouvernement congolais à fournir 30 millions de dollars sur les 57 millions nécessaires à la mise en œuvre de la première année du plan de transition au Sud-Kivu, la Représentante spéciale a cependant exhorté la RDC et ses partenaires à éviter les déficits de financement et à accélérer le renforcement des institutions.  Enfin, a-t-elle constaté, la signature la semaine dernière du nouveau Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable pour la période 2025-2029 contribuera également à la reconfiguration de la présence de l’ONU en RDC, dans le contexte du désengagement de la MONUSCO.  Mme Keita a encouragé les États Membres à apporter leur plein soutien à sa mise en œuvre.

Mme PASSY MUBALAMA, fondatrice d’Action et initiatives de développement pour la protection de la femme et de l’enfant (AIDPROFEN), a dit prendre la parole, non seulement comme directrice d’une organisation et d’une radio qui donne la voix aux femmes en RDC, mais aussi comme témoin direct de l’horreur quotidienne que vivent les populations, en particulier les femmes et les enfants déplacés de guerre.  Elle a notamment raconté l’histoire de Zawadi, une maman de neuf enfants, mais qui ne connaît pas le père de son huitième enfant.  « Elle a été violée, pendant qu’elle fuyait les affrontements lors de la guerre du M23 dans le territoire de Rutshuru. »  Une autre femme déplacée dans le camp de Lushagala a, elle, été violée par des hommes armés, qui ont pointé une arme sur la tête de son mari, devant sa famille, son mari et ses enfants.

Le M23, bien que présenté comme un groupe rebelle local, bénéficie d’un appui logistique, financier et militaire extérieur, en particulier de la part du Rwanda, a-t-elle affirmé.  Elle a rappelé que les 4 000 membres des Forces armées rwandaises se trouvant sur le sol congolais justifient leur présence par la traque des éléments des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR).  « Mais comment justifier une aussi forte présence militaire dans un autre pays membre de l’ONU? »

Elle a par ailleurs jugé évident que la MONUSCO a démontré ses limites dans le rétablissement de la paix en RDC.  « Si pendant plus de 20 ans, elle n’a pas pu contribuer à l’instauration de la paix et à la protection des populations civiles en RDC, que pouvons-nous encore attendre de cette force? »  Le maintien actuellement de cette force au Nord-Kivu avec son mandat actuel ne répond pas efficacement à la menace qui pèse sur les populations civiles de cette zone, a estimé Mme Mubalama.

Enfin, elle a appelé à lutter contre l’impunité, notamment en soutenant les enquêtes internationales sur les violations des droits humains et les crimes de guerre commis par le M23, et à exercer une pression diplomatique sur le Rwanda pour qu’il cesse tout soutien à ce groupe et s’engage sincèrement dans les efforts de paix.

Ce que nous vivons dans l’est du Congo est une blessure ouverte sur la conscience du monde, a-t-elle affirmé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité décide que les exemptions humanitaires relatives aux sanctions continueront de s’appliquer à celles visant Daech et Al-Qaida

9802e séance - matin
CS/15924

Le Conseil de sécurité décide que les exemptions humanitaires relatives aux sanctions continueront de s’appliquer à celles visant Daech et Al-Qaida

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, que les exemptions humanitaires relatives aux régimes de sanctions, instaurées de manière historique il y a près de deux ans, continueront de s’appliquer aux sanctions concernant Daech, Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés, telles que prévues par les résolutions pertinentes sur la question, y compris la 1267 (1999).

Le paragraphe 1 de la résolution 2664 (2022) du 9 décembre 2022 a prévu en effet une exemption aux obligations de sanctions afin de répondre aux besoins de l’aide humanitaire.  Le Conseil avait ainsi décidé que, sans préjudice des obligations imposées aux États Membres de geler les fonds (…) des personnes, groupes, entreprises et entités désignés par lui ou ses comités des sanctions, « la fourniture, le traitement ou le versement de fonds, d’autres avoirs financiers ou ressources économiques, ou la fourniture de biens et de services nécessaires à l’acheminement en temps voulu de l’aide humanitaire sont autorisés ».  Ces actions ne constituent pas, dans un tel cas, une violation des mesures de gel des avoirs imposées par lui ou ses comités des sanctions.

En vertu de la résolution 2761 (2024), présentée aujourd’hui conjointement par la Suisse et les États-Unis et adoptée à l’unanimité, le Conseil rappelle que les prestataires humanitaires doivent s’assurer que les entités sanctionnées ne tirent pas avantage de ces exemptions.

La déléguée de la Suisse a rappelé que la résolution 2664, adoptée il y a deux ans, avait marqué « une avancée historique » pour protéger l’action humanitaire et atténuer les conséquences involontaires des sanctions des Nations Unies.  La résolution a apporté une clarté juridique au secteur privé et aux acteurs humanitaires, s’est-elle réjouie, notant qu’elle a facilité le transfert de fonds, l’approvisionnement en biens essentiels et le financement nécessaires aux opérations humanitaires.  Pour la Suisse, l’application de cette exemption aux sanctions prévues par le régime de 1267 à l’encontre de Daech, Al-Qaida et leurs affiliés est « particulièrement pertinente », car plus de 100 millions de personnes vivant dans les contextes concernés dépendent toujours de l’aide humanitaire.

Les États-Unis se sont dits fiers de ce vote historique, rappelant que des centaines d’acteurs humanitaires sont présents dans plus de 30 pays dans lesquels écument des groupes terroristes.  « Leur travail est une question de vie ou de mort pour les populations. »   Selon le délégué américain, la résolution envoie un message clair sur le fait que l’ONU demeure déterminée à faire appliquer les sanctions, à aider les populations dans le besoin (où qu’elles vivent et peu importe qui contrôle leur territoire) et à aider ces héros qui travaillent pour le bien de l’humanité.

La Fédération de Russie a estimé gratifiant que le texte adopté ait tenu compte des éléments qu’elle a proposés.  Elle a néanmoins regretté que la résolution fasse l’impasse sur la question des restrictions unilatérales « secondaires » qui sont mises en place en plus des sanctions du Conseil de sécurité.  La délégation a rappelé que les sanctions décidées par le Conseil de sécurité de l’ONU sont les seuls régimes légaux.  Les mesures coercitives unilatérales prises par certains États entravent les prérogatives du Conseil et constituent une atteinte aux normes multilatérales et au droit international, a-t-elle ajouté.

Même son de cloche du côté de la Chine, qui a relevé que les sanctions unilatérales ont des conséquences plus marquées sur les actions humanitaires.  « Il faut que les pays concernés y mettent fin. »  La Sierra Leone a également salué un texte important adopté après des « négociations transparentes et constructives ».

Dans la résolution adoptée, le Conseil réaffirme son souci « de surveiller l’application de ces dispositions ».  Il demande à tous les États de coopérer pleinement avec le comité des sanctions créé en 1999 et avec l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée en 2004.  Les États Membres sont invités à fournir notamment tous les renseignements demandés par le Comité pouvant aider ces deux organes à s’acquitter de leurs tâches. 

 

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QUESTIONS D’ORDRE GÉNÉRAL RELATIVES AUX SANCTIONS

Texte du projet de résolution (S/2024/879)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant la résolution 2664 (2022) et ses résolutions antérieures relatives au régime de sanctions prévu par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech) et Al-Qaida,

Réaffirmant ses décisions antérieures concernant les menaces contre la paix et la sécurité internationales, qui ont motivé l’imposition des sanctions dans les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015),

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide que les dispositions introduites par le paragraphe 1 de la résolution 2664 (2022) continueront de s’appliquer au régime de sanctions prévu par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech) et Al-Qaida et réaffirme qu’il importe de surveiller l’application de ces dispositions conformément à la résolution 2664 (2022);

2.    Rappelle le rôle joué par le Comité du Conseil de sécurité faisant suite aux résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015) concernant l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés pour ce qui est de surveiller l’application du paragraphe 1 de la présente résolution conformément au paragraphe 6 de la résolution 2664 (2022), demande à tous les États de coopérer pleinement avec ledit comité et l’Équipe d’appui analytique et de surveillance des sanctions créée par la résolution 1526 (2004) pour les aider à s’acquitter de leurs tâches, notamment de leur fournir tous les renseignements demandés par le Comité à cet égard; 

3.    Affirme qu’il doit lui-même examiner tous les renseignements communiqués, y compris, mais sans s’y limiter, ceux fournis par le Comité ou l’Équipe d’appui analytique, concernant l’application des mesures imposées dans la résolution 1267 (1999) et les autres résolutions pertinentes, notamment les éventuelles violations commises, en tenant compte des cas signalés d’utilisation à des fins illégales, par l’EIIL (Daech), Al-Qaida et les éléments qui leur sont affiliés ou pour leur compte, d’organisations à but non lucratif comme sociétés écrans pour lever, déplacer ou transférer des fonds, ainsi que les exposés communiqués périodiquement par le Coordonnateur des secours d’urgence, conformément au paragraphe 5 de la résolution 2664 (2022), y compris sur les conséquences pour les bénéficiaires des activités humanitaires;

4.    Rappelle qu’il est demandé que les prestataires qui s’appuient sur le paragraphe 1 de la résolution 2664 (2022) fassent des efforts raisonnables pour que les avantages interdits par les sanctions que pourraient tirer des personnes ou entités désignées par lui ou le Comité, que ce soit à la suite d’une fourniture directe ou indirecte de l’aide ou d’un détournement, soient supprimés ou en tout état de cause réduits au maximum, notamment en renforçant les stratégies et les processus concernés, notamment dans le domaine de la gestion des risques;

5.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.