En cours au Siège de l'ONU

9752e séance - après-midi
CS/15855

Le Conseil de sécurité reconduit pour un an, jusqu’au 18 octobre 2025, et renforce le régime de sanctions en Haïti

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Constatant que la situation en Haïti continue de menacer la paix et la sécurité internationales, le Conseil de sécurité a, cet après-midi, adopté à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 2752 (2024), qui reconduit pour un an le régime de sanctions en vigueur dans ce pays, à savoir l’embargo sur les armes, les interdictions de voyager et le gel des avoirs visant des individus et entités qui y menacent la paix, la sécurité ou la stabilité.

En vertu de ce texte présenté par l’Équateur et les États-Unis, le Conseil décide que tous les États Membres doivent prendre, pour une période d’un an, les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects d’armements et de matériels connexes de tous types à Haïti, « à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires battant leur pavillon ou d’aéronefs immatriculés chez eux ».

La résolution encourage aussi le Gouvernement haïtien à renforcer les capacités de gestion des armes et des munitions de sa Police nationale pour que celle-ci puisse « administrer, marquer, enregistrer, contrôler, entreposer et éliminer » de manière plus sûre et efficace les stocks nationaux d’armes et de munitions ainsi que les armes et munitions saisies, et à intensifier les contrôles frontaliers et douaniers afin de lutter contre le trafic et les détournements.

Aux termes de ce texte, le Conseil décide également de prolonger pour une période de 13 mois le mandat du Groupe d’experts chargé d’assurer l’application du régime de sanctions.  En outre, il prie le Secrétaire général, en étroite consultation avec le Groupe d’experts, de procéder, au plus tard le 1er octobre 2025, à une évaluation des progrès accomplis dans la mise en œuvre de ces mesures.

Prenant la parole après l’adoption, l’Équateur a salué ce texte comme « un outil parmi l’ensemble des instruments à la disposition du Conseil de sécurité pour promouvoir une solution politique en Haïti ».  La délégation a salué, entre autres, l’inclusion de l’exploitation ou du commerce illicite des ressources naturelles comme critères de désignation supplémentaire des individus et des entités sanctionnés.  Pour leur part, les États-Unis ont salué l’engagement du Conseil à soutenir la population haïtienne, exhortant tous les États Membres à mettre en œuvre la résolution.

Un appel similaire a été lancé par la délégation d’Haïti, qui a invité ces derniers à se montrer proactifs contre le commerce illicite des armes.  Son représentant s’est félicité de cette résolution opportune, l’embargo ne s’appliquant plus seulement aux armes légères et aux munitions, mais aussi aux matériels connexes, aux véhicules et aux matériels militaires, ainsi qu’aux équipements paramilitaires et aux pièces détachées.

Pour la Chine, la poursuite de la violence sur le terrain est révélatrice de l’inefficacité de l’embargo sur les armes.  Aussi a-t-elle appelé les États Membres à coopérer à la mise en œuvre de ce nouveau texte, en attirant toutefois l’attention sur le fait que l’appui extérieur ne traite que les symptômes et non les causes.  La priorité, pour la délégation chinoise, c’est que les parties haïtiennes parviennent à un consensus politique dans l’intérêt de la population du pays.  Enfin, s’exprimant au nom des A3+ -Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone–, le Guyana a exhorté la communauté internationale à renforcer les capacités de la Police nationale haïtienne dans la lutte contre le trafic d’armes et le contrôle aux frontières, plaidant aussi en faveur d’un soutien humanitaire et d’un accompagnement dans le redressement économique d’Haïti.

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

Texte du projet de résolution (S/2024/753)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité d’Haïti,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures concernant Haïti, en particulier ses résolutions 2653 (2022), 2743 (2024), 2699 (2023), 2700 (2023) et 2751 (2024),

Constatant avec une vive préoccupation l’extrême violence en bande organisée et d’autres activités criminelles, notamment les enlèvements, la traite de personnes et le trafic de migrants, les homicides et les violences sexuelles et fondées sur le genre, dont les viols et l’esclavage sexuel, ainsi que les violences aveugles commises par les bandes organisées contre des enfants, en particulier les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, les enlèvements et les violences sexuelles sur la personne d’enfants, l’impunité des auteurs de tels actes, la corruption et le recrutement d’enfants par les bandes organisées, et les conséquences de la situation d’Haïti sur la région,

Constatant avec une profonde préoccupation que le trafic et le détournement d’armes et de munitions au profit des bandes armées en Haïti (lesquelles continuent de se livrer à des activités criminelles déstabilisantes) contribuent de porter atteinte à l’état de droit et au respect des droits humains et peuvent entraver l’acheminement de l’aide humanitaire et avoir de nombreuses répercussions sur les plans humanitaire et socioéconomique,

Sachant qu’il faut préserver les garanties d’une procédure régulière et garantir des procédures claires et équitables pour radier des listes relatives aux sanctions des personnes et des entités qui y sont inscrites conformément à la résolution 2653 (2022) et aux résolutions ultérieures, et se félicitant de l’adoption de la résolution 2744 (2024), par laquelle le mandat du Point focal pour les demandes de radiation et la procédure à suivre ont été renforcés, tout en considérant que les sanctions imposées par l’Organisation des Nations Unies contribuent au règlement des conflits et au maintien de la paix et de la sécurité internationales, 

Constatant que la situation en Haïti continue de menacer la paix et la sécurité internationales dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Interdiction de voyager et gel des avoirs

1.  Décide de reconduire pour un an à compter de l’adoption de la présente résolution les mesures imposées par les paragraphes 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 de la résolution 2653 (2022) et précédemment prorogées par la résolution 2700 (2023), réaffirme la résolution 2664 (2022), déclare que les paragraphes 15 et 16 de la résolution 2653 (2022) continuent de s’appliquer et décide que les actes décrits au paragraphe 15 de la résolution 2653 (2022) comprennent notamment le fait de prendre part à des activités de nature à déstabiliser Haïti par l’exploitation ou le commerce illicites de ressources naturelles;

 Embargo sur les armes

2.  Décide que tous les États Membres doivent prendre, pour une période d’un an à compter de l’adoption de la présente résolution, les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à Haïti, à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires battant leur pavillon ou d’aéronefs immatriculés chez eux, d’armements et de matériels connexes de tous types, y compris les armes et les munitions, les véhicules et les matériels militaires, les équipements paramilitaires et les pièces détachées correspondantes, ainsi que toute assistance technique ou formation et toute aide financière ou autre en rapport avec les activités militaires ou la fourniture, l’entretien ou l’utilisation de tous armements et matériels connexes, et décide également que cette mesure ne s’applique pas:

a)  À la fourniture, à la vente ou au transfert d’armements et de matériels connexes, ou à la fourniture de l’assistance, de la formation ou du personnel nécessaires dans ce contexte à l’Organisation des Nations Unies, à toute mission autorisée par l’Organisation ou aux unités de sécurité opérant sous le commandement du Gouvernement haïtien, ou par celles-ci, dès lors qu’ils sont destinés à être utilisés par ces entités ou en coordination avec elles et dans le seul but de promouvoir les objectifs de paix et de stabilité en Haïti;

b)  À la fourniture, à la vente ou au transfert d’armements et de matériels connexes, ou à la fourniture de l’assistance, de la formation ou du personnel nécessaires dans ce contexte à Haïti dès lors qu’ils ont été autorisés au préalable par le Comité créé par la résolution 2653 (2022) afin de favoriser les objectifs de paix et de stabilité en Haïti;

c)  Aux livraisons de matériel militaire non létal destiné exclusivement à un usage humanitaire ou de protection et à l’assistance technique ou à la formation connexes, lorsqu’elles ont pour but de favoriser les objectifs de paix et de stabilité en Haïti;

3.  Décide que les États Membres doivent prendre les mesures voulues pour prévenir le trafic et le détournement d’armements et de matériels connexes en Haïti;

4.  Encourage le Comité et son groupe d’experts, le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et d’autres cadres régionaux à mieux coordonner entre eux l’application des mesures de sanction, notamment les dispositions relatives à l’embargo sur les armes, afin de sensibiliser les pays de la région, les autorités haïtiennes compétentes et la population d’Haïti aux questions liées à l’approvisionnement illicite en armes et en munitions et aux sources et aux itinéraires de ce trafic et de promouvoir l’octroi d’un soutien à Haïti afin de permettre au pays de renforcer les capacités de sa Police nationale et de ses autorités frontalières et douanières, et salue et encourage à cet égard l’organisation par le Comité de séances d’information conjointes régulières avec les organismes concernés à l’intention de l’ensemble des membres de l’ONU en vue de mieux faire connaître le régime de sanctions;

5.  Encourage le Gouvernement haïtien à renforcer les capacités de gestion des armes et des munitions de la Police nationale d’Haïti pour que celle-ci puisse administrer, marquer, enregistrer, contrôler, entreposer et éliminer de manière plus sûre et plus efficace les stocks nationaux d’armes et de munitions ainsi que les armes et les munitions saisies, et à intensifier les contrôles frontaliers et douaniers afin de lutter contre le trafic et les détournements;

6.  Affirme que la dérogation prévue à l’alinéa a) du paragraphe 2 de la présente résolution s’applique notamment aux Nations Unies, au BINUH, à la Mission multinationale d’appui à la sécurité autorisée par la résolution 2699 (2023), dont le mandat a été renouvelé par la résolution 2751 (2024), à la Police nationale d’Haïti et aux Forces armées d’Haïti;

Comité des sanctions et Groupe d’experts 

7.  Décide que le mandat du Comité, tel qu’il résulte du paragraphe 19 de la résolution 2653 (2022), s’applique aux mesures imposées par la présente résolution;

8.  Décide de prolonger pour une période de 13 mois à compter de l’adoption de la présente résolution le mandat du Groupe d’experts, tel qu’il est précisé au paragraphe 21 de la résolution 2653 (2022), et décide en outre que ce mandat s’applique également aux mesures imposées dans la présente résolution;

9.  Charge le Comité d’examiner dans les meilleurs délais la version mise à jour de la liste des personnes et entités visées dans la résolution 2653 (2022), compte tenu des rapports présentés par le Groupe d’experts, et notamment d’y inscrire les personnes et entités qui contreviennent à l’embargo sur les armes imposé par la présente résolution; 

10. Prie le Groupe d’experts de lui présenter, après concertation avec le Comité, un rapport à mi-parcours, le 28 mars 2025 au plus tard, et un rapport final, le 1er octobre 2025 au plus tard, et de lui faire le point périodiquement dans l’intervalle;

11. Encourage tous les États Membres à tenir le Groupe d’experts et le Comité informés des mesures concrètes qu’ils auront prises pour donner effet aux dispositions de la présente résolution afin de faciliter l’établissement des rapports du Groupe d’experts et de promouvoir l’échange de pratiques exemplaires entre les États Membres, et demande au Groupe d’experts de rendre compte de la mise en œuvre de la présente résolution dans les rapports qui lui seront régulièrement présentés;

12. Demande instamment à toutes les parties et à tous les États Membres, ainsi qu’aux organisations internationales, régionales et sous-régionales et à la Mission multinationale d’appui à la sécurité, de coopérer avec le Groupe d’experts, et prie instamment tous les États Membres concernés de s’attacher à garantir la sécurité des membres du Groupe d’experts et de faciliter en particulier leur accès aux personnes, documents et lieux pertinents pour l’exécution de leur mandat;

Réexamen de la situation 

13. Affirme qu’il suivra en permanence la situation en Haïti et se tiendra prêt à examiner l’opportunité des mesures énoncées dans la présente résolution, y compris de leur renforcement, de leur modification, de leur suspension ou de leur levée, à la lumière des progrès accomplis par rapport aux principaux objectifs suivants:

a)  Mise en place par le Gouvernement haïtien des capacités requises dans les domaines judiciaire et de l’état de droit permettant de lutter contre les groupes armés et les activités criminelles;

b)  Réduction progressive des actes de violence commis par les groupes armés et les réseaux criminels, y compris le nombre d’homicides volontaires et d’enlèvements et les cas de violence sexuelle et fondée sur le genre, mesurés annuellement, à compter de la période initiale de 12 mois suivant l’adoption de la présente résolution;

c)  Réduction progressive du nombre de cas de trafic et de détournement d’armes ainsi que des flux financiers illicites qui en découlent, notamment en augmentant le nombre de saisies d’armes et les quantités d’armes saisies;

14. Prie le Secrétaire général à cet égard, en étroite consultation avec le Groupe d’experts, de procéder, au plus tard le 1er octobre 2025, à une évaluation des progrès accomplis concernant les principaux objectifs établis au paragraphe ci‑dessus;

15.   Décide de rester activement saisi de la question.

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